témben de Po É pr Sp mire Sd ne ÆEx Libres de. CS SIR WILLIAM CROOKES, D.Sc. FRS. Revue générale HA Sciences putes et appliquées a TOME VINGTIÈME \ Q ÉD Je OX HU ‘trad % 1 | Ag i ï LS , x 2 Ce Û i , [EI os * Z Cu l'E IR r >= , de . « … A x EN t A { " “ { 1 4 ! " : UE MR AT Te OST PONS NT UNE CO MN NET va si pe Re, { Char Cu! A \ # ‘ L k ï L'ehP ( LAS us \ Revue générale Des SCiences pures el appliquées PARAISSANT LE 15 ET LE 30 DE CHAQUE MOIS Direcreur : Louis OLIVIER, Docreur Ès Sciences TOME VINGTIÈME 1909 AVEC NOMBREUSES FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE Prbrätrie Armand Colin 5, rue de Mézières, Paris SITARRT < rl 20 4 4 (2: A4 4 EEE DE Pb) GT el dr 27 20° ANNÉE N° 15 JANVIER 19098 Revue générale des HCiences pures ef appliquées 4 FR + . Dirscreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. 4 LE = s es Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, T8 rue Chanveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction £es œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dansMtous les yays étrangers, y compris 1—n Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Election à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 28 Décembre, l'Académie des Sciences de Paris a procédé à l'élection d'un membre dans sa Section de Physique en remplace- ment du regretté E. Mascart. La Section avait présenté en première ligne M. P. Villard et en deuxième ligne MM. D. Berthelot, E. Branly, André Broca, A. Cotton, H. Pellat et A. Pérot. Au premier tour de scrutin, M. Villard à obtenu 3% voix contre 18 données à M. Branly. En conséquence, M. Villard a été déclaré élu. Le nouvel académicien a débuté dans la science par une importante série de recherches sur la dissolution des gaz dans l’eau et sur les propriétés des hydrates de gaz, puis sur les gaz liquéfiés et les phénomènes critiques. Mais son activité s'est surtout portée sur le domaine des nouvelles radiations : rayons cathodiques, rayons de Roentgen, rayons du radium et des corps radio-actifs ont été tour à tour l'objet de fructueux travaux, qui ont contribué pour une part importante aux progrès de cette branche de la Physique. On lui doit notamment la découverte des rayons magnéto-catho- diques. La Revue, à laquelle M. Villard à quelques fois collaboré, est heureuse de le féliciter de la haute sanction que ses belles recherches viennent de recevoir. $ 2. — Nécrologie E.-T. Hamy.— Avec le Professeur Hamy, disparait l’une des figures importantes du monde scientifique. Quarante années durant, il à travaillé avec acharne- ment à augmenter nos connaissances dans les do- maines les plus variés Anatomie, Anthropologie, Ethnographie, Géographie, Archéologie, Histoire des Sciences et des Arts; et, dans tous ces domaines, il a déployé un talent profond et mis à profit une érudition des plus riches. Né à Boulogne-sur-Mer, le 22 juin 1842, Théodore- Jules-Ernest Hamy manifesta, encore collégien, un goût prononcé pour les études archéologiques et histo- riques; mais, suivant la volonté de ses parents, il alla à Paris étudier la Médecine. L'époque à laquelle il commença ses études médicales, qu'il poursuivit avec REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. succès jusqu'en 1868 où il prit le diplôme de docteur, était particulièrement favorable à l'éclosion des voca- tions anthropologiques. Sous la puissante impulsion donnée par P. Broca, la jeune Société d’Anthropologie était alors le centre où l’on discutait avec ardeur les questions les plus passionnantes se rapportant aux théories transformistes, à l'ancienneté et à l'orisine de l'Homme, à la place de l'Homme parmi les êtres or- ganisés, etc. Aussi, sous l'influence de Broca, qui l’at- tacha plus tard à son laboratoire d’Anthropologie à l'Ecole des Hautes Etudes, Hamy inaugura la série de ses travaux scientiliques par une modeste Communiea- tion à la Société d’'Anthropologie (1865) sur les silex taillés trouvés aux environs de sa ville natale. En reli- sant cette Communication, on peut y trouver, comme en germe, les qualités maîtresses du génie scientifique de Hamy: précision dans les détails, scrupule de la vérité scientifique, préoccupation constante d'évoquer le té- moignage de l'Histoire et de l'Ethnographie pour éclaircir les questions anthropologiques et préhisto- riques. Bientôt, le domaine de ses recherches s’élargit. Il entreprend des travaux sur les particularités anato- miques qui rapprochent ou éloignent l'Homme des autres animaux : sa thèse sur la signification de l'inter- maxillaire de l'Homme (1868), ses communications à la Société d’Anthropologie sur l’épine nasale dans l’or- dre des Primates, sur la longueur de l’avant-bras, re- lativement plus considérable chez le nègre que chez le blanc, et tant d'autres ont fourni des faits et des conclu- sions, dont plusieurs gardent encore toute leur valeur. Ayant eu l'occasion de faire un voyage en Egypte. Hamy établit scientifiquement, dès 1869, l'existence de l'Homme paléolithique en Egypte, existence conlirmée depuis par les fouilles de Flinders Petrie, de Morgan, de Schweinfurth et de tant d’autres savants. Un an après, il publie son Précis de Paléontologie humaine, modèle d’un résumé de l’état des connaissances à cette époque, ouvrage que, aujourd'hui encore, on consulte avec fruit. Nommé en 1872 aide-naturaliste au Muséum, Hamy entreprend, avec son maître A. de Quatrefages, un tra- vail colossal qui ne fut achevé que dix ans plus tard : le grand volume des Crania Elhnica, mine inépuisable de documents craniologiques sur les peuples du monde 1 "« a CARE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE entier, depuis les temps quaternaires jusqu'à nos jours. Toute une génération d’anthropologistes français et étrangers à vécu, s'appuyant sur les données puisées chez les savants auteurs des Crania Ethniea. Dans ce grand Ouvrage, comme dans les nombreuses Notes sur les crânes des populations préhistoriques ou encore existantes à la surface du Globe, Hamy se préoccupait moins de la valeur des caractères morphologiques au point de vue général, que de la recherche des carac- tères qui puisseut établir la parenté ou la diversité des races humaines. Mais d'autres préoccupations hantaient aussi l'esprit actif de Hamy. Chargé d'organiser à l'Exposition Uni- verselle de 1878 la Section anthropologique et ethno- graphique, il se passionne pour l'Ethnographie pure, et, à peine l'Exposition passée, il profite de l’occasion pour réunir les objets offerts gracieusement à l'Etat par nombre d'exposants et créer le noyau d'un Musée ethnographique, qu'il cherche ensuite à caser dans un bâtiment quelconque. Heureusement, le Trocadéro est là, inoccupé pour le moment. Il fait démarche sur démarche, et obtient la création du premier Musée ethnographique en France. En 1882, il en fut nommé directeur. Il arrange alors en quelques mois la belle salerie américaine, que tout le monde connaît et dont il a décrit les pièces les plus remarquables dans un beau volume publié en 1897. Le travail muséologique mène Hamy à un nouveau champ de recherches qui se révèle aussi fertile que les autres par lui cultivés. Il se passionne pour | « Améri- canisme », et, non content de publier de nombreux Mémoires (Décades américaines), etc., ayant trait aux populations précolombiennes et actuelles de l'Amé- rique, il provoque, grâce au concours généreux de Mécènes comme L. Augrand et le duc de Louba, la création : d'une « Société des Amréricanistes », d'un prix spécial pour récompenser les meilleurs ouvrages sur l'Ethnographie américaine, enfin d'une chaire d'Américanisme au Collège de France. Au retour d’une exploration ethnographique dans le Sud de la Tunisie, Hamy avait été élu en 1890 membre libre de l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, et, deux ans après, il avait succédé à de Quatrefages à la Chaire d’Anthropologie du Muséum. Dans ses leçons, très brillantes, il savait toujours donner cette nuance ethnographique qui faisait la nouveauté et le charme de son enseignement. Tout en continuant cet enseignement, Hamy revint petit à petit aux études favorites de sa jeunesse, à l’his- toire de la science. Il avait d'abord entrepris d'écrire l'Histoire du Muséum, et les fragments de cette Histoire qui ont paru montrent sur quelle vaste échelle il a établi le plan de son œuvre. Malheureusement, sa mort laisse cette œuvre inachevée. En même temps, il s'était fait historiographe d’un grand nombre de savants et surtout des artistes et des voyageurs scientifiques. Bien préparé par ses nombreuses recherches dans le domaine de la Géographie, il a écrit, dans ses dernières années, plusieurs volumes qui mettent en relief les figures de Geoffroy Saint-Hilaire, de Humboldt, de Bom- pard, de Dombey et de tant d’autres voyageurs-natu- ralistes. D'ailleurs, ce n’est pas seulement au point de vue ré- trospectif que Hamy s'est occupé des explorateurs. Il n’a cessé d'ètre en relation avec un grand nombre de nos voyageurs, depuis l'époque, déjà lointaine, où, grâce à son initiative, Désiré Charnay et Alphonse Pinart nous révélaient les premiers aspects de l'Ethnographie amé- ricaine, jusqu'à ces derniers jours où 1l classait les riches collections ethnographiques rapportées par Des- plagnes de l'Afrique et par le D' Rivet de l'Equateur. Dans ses nombreuses fonctions, au Muséum comme au Trocadéro, dans les Commissions du Ministère comme aux Sociétés d'Anthropologie et de Géographie, dans les Congrès nationaux ou internationaux qu'il à si souvent présidés, partout Hamy a su conquérir l'es- time et l'affection de ceux qui l'approchaient, Grâce à sa force de travail et à son énergie opiniâtre, il a su lrcréer, avec des ressources minimes, comme il n'arrive que trop souvent malheureusement dans notre pays, des institutions scientifiques de premier ordre; et, non content de faire des recherches personnelles, il a su provoquer des voyages scientifiques d’une réelle valeur. J. Deniker, Bibliothécaire au Muséum national d'Histoire naturelle, $ 3. — Astronomie La variation des latitudes. — La connaissance du mouvement du pôle terrestre à la surface de notre: Globe se précise de plus en plus, et l’on parvient main- tenant à reconnaître les variations systématiques dues. aux erreurs d'observation dans la réduction des obser- vations internationales. La hauteur du pôle en un point est donnée par l'angle formé par la ligne horizontale tracée en ce point avec la direction de l'axe de rotation de la Terre, en sup- ‘posant que cet axe de rotation est invariable. Cette hauteur du pôle au-dessus de l'horizon définit la lati- tude géographique du lieu. On détermine généralement cette hauteur polaire en mesurant, aussi rigoureu- sement que possible, la distance au zénith de certaines. étoiles tixes dont on connaît exactement la distance polaire dans le ciel. La connaissance de la latitude géo- graphique dépend done de trois éléments : 4° de Ja direction de la ligne verticale au point d'observation; c’est elle qui donne la position exacte du zénith; 2 des positions des étoiles observées sur la sphère céleste; 3° de la position de l'axe de rotation dans le globe ter- restre. Vers le milieu du xvan: siècle, Euler, dans sa « Théorie de la rotation de corps solides autour d'un axe mobile », montra qu'il devait se présenter à la surface de la Terre des variations de hauteur polaire ou de latitude, dues à une sorte de «tremblement » du pôle dont une révo- lution entière devait s’accomplir en dix mois. Les obser- vations de latitude fureut examinées avec le plus grand soin par les astronomes de l’époque. Mais le résultat fut négatif. Le pôle paraissait immobile, et la question semblait même si bien résolue que M. Chandler, trou- vant un mouvement apparent du pôle dans ses obser- vations faites en 1885 avec un instrument de son inven- tion, l'Almucantar, crut à une erreur d'observation et ne continua pas ses recherches. Peu après, cependant, le Dr Küstner, de Berlin, publiait ses propres observations, faites presque à la même époque et indiquant aussi un léger mouvement du pôle. L'attention du monde savant se trouvait ainsi appelée sur la question; en 1889, la Commission inter- nationale de Géodésie prit l'initiative d'organiser une action combinée des observatoires de Berlin, Potsdam, Prague et Strasbourg. Cette Commission mit en évi- dence une variation périodique des latitudes géogra- phiques. Entre temps, le D' Chandler reprenait la même étude en compulsant les observations déjà faites et en déter- minant ainsi le mouvement du pôle. Ses recherches devaient être couronnées de succès. Mais, tandis qu'Euler, se basant sur la rigidité absolue de la Terre, avait admis une période de dix mois, Chandler trouvait une période de quatorze mois d’après les mesures expérimentales. Il s'ensuivit une ardente polémique, au cours de laquelle le D° Chandler dut soutenir seul son opinion contre les mathématiciens. Ces derniers continuèrent à se ranger du côté d'Euler, dont les calculs étaient exacts, et Chandler continua à croire l'expérience, les sources d'erreur d'observation ayant été rigoureuse- ment contrôlées. C'est au Professeur Newcomb que revient l'honneur d'avoir su mettre d'accord l'observation et le calcul. Les théoriciens assimilaient la Terre à un corps rigide, ce qui explique les divergences dans les résultats. Les observations récentes de l'Association géodésique inter- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nationale montrent que la courbure moyenne de la tra jectoire du pôle est de 305° par an. Le pôle terrestre, de ce fait, accomplit donc une révolution complète en : quatre cent trente-deux jours, valeur très voisine de celle de Chandler, qui admettait quatre cent vingt-sept jours. La différence entre le temps de révolution constaté et celui d'Euler — obtenu au moyen du ecaleul — est de cent vingt-sept jours, et M. Newcomb à montré que cette différence s'explique si l'on ne tient pas compte d'une certaine élasticité du géoïde terrestre. Les tra- vaux de Hough et de certains autres physiciens ont amené aux mêmes conclusions. Ces variations du pôle sont, d'ailleurs, très irrégu- lières et ne suivent aucune règle fixe, du moins en apparence. On à tenté plusieurs explications qui, pour la plupart, ont probablement un fond de vérité. Qu'il nous soit permis, en terminant, de dire notre opinion à ce sujet : Le phénomène est dû en grande partie aux dépôts de condensation : pluie, masses d’eau, neiges, etc., autour de la calotte polaire. Or, cette con- densation irrégulière est probablement liée au pouvoir caloritique du Soleil qui change à chaque instant. Une étude de la radiation solaire, dont l'inconstance est maintenant hors de doute, peut donc seule nous donner la clef du mystère et nous permettre peut-être la pré- vision des points d'inflexion de la courbe, qui est liée, on le sait depuis les travaux de Milne, aux grands tremblements de terre. Abbé Th. Moreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. $ 4. — Art de l’Ingénieur Les navires à propulsion électrique. — La propulsion électrique n'est employée que très rarement à bord des navires : à part certaines embarcations uti- lisées pour le service des ports militaires, on ne la trouve guère que sur les sous marins, où le moteur électrique alimenté par des accumulateurs est jusqu'ici le seul dont on puisse se servir pour la marche en plongée. Mais jusqu'ici on n'avait pas envisagé l'emploi de l'électricité pour la marche de bâtiments de com- merce tels que les cargo-boats, pour lesquels l’éco- nomie de fonctionnement est une des qualités les plus nécessaires. C'est l'extension des turbines qui a amené à cette conception. On sait que des expériences comparatives, faites entre des navires semblables munis, les uns de turbines, les autres de machines alternatives, ont fait constater en faveur des premières une économie de combustible pouvant aller jusqu'à 10 °/, pour une mème vitesse — à condition seulement que le nombre de tours de la turbine soit grand et qu'elle fonctionne à une puissance voisine de son maximum. Comme, d'autre part, l'économie de poids et d'encombrement est également très sensible, et qu'enfin, la turbine exigeant moins de surveillance, l'adoption de ce mode de propulsion permet de réduire le personnel méca- nicien, on comprend que la généralisation de son emploi ait été si rapide pour tous les paquebots à grande vitesse et bâtiments des marines militaires. Mais, pour les navires à faible vitesse, il y a un fac- teur très important dont il faut tenir compte : c’est le rendement de l'hélice; ce rendement diminue très vite quand la vitesse de rotation augmente; aussi les navires de charge peu rapides ne s'accommodent-ils pas des grandes vitesses-de rotalion. Il ne saurait donc être question de les faire mouvoir par des turbines, si l'on ne s'était avisé de tourner la difficulté de la ma- nière suivante : la turbine actionne une dynamo géné- ratrice dont le courant commande une dÿnamo récep- trice placée sur l'arbre porte-hélice. Cette combinaison paraît à première vue inutilement compliquée et dispendieuse : si l’on admet pour cha- cune des dynamos le rendement moyen de 0,94, le ren- dement de l’ensemble ne sera que de 6,88, c'est-à-dire é que la perte, du seul fait de l'emploi de l'électricité, est de 12 °/, de l'énergie fournie par la machine à vapeur. Mais celte dernière peut être une turbine à très grande vitesse (1.500 à 2.000 tours), tandis que la dynamo réceptrice actionnant lhélice tournerait à T0 à 80 tours; par rapport à une machine alternative qui commanderait directement son hélice à une vitesse de 300 tours par exemple, on peut avoir un gain de 10 °/, du fait du très grand nombre de tours de la tur- bine, et un autre de 10 °/, dü au meilleur rendement de l'hélice à faible vitesse; le total dépasse légèrement la perte provenant des moteurs électriques. Il faut dire, en outre, que l’économie de consommation de vapeur permettra de réduire dans la même proportion la puis- sance des chaudières, d’où un bénéfice très important sur le poids et l'encombrement des appareils moteurs. Enfin, une telle combinaison aurait encore l'avantage que le bâtiment qui en serait muni pourrait marcher presque instantanément en arrière à toute puissance, ce qui estimpossible avec les turbines, qui ne sont pas réversibles : les navires munis de turbines sont obligés jusqu'ici d'avoir pour la marche en arrière une ma- chine spéciale, que naturellement on fait moins puis- sante, par économie; ily a tout à avantage à s'affranchir de cette complication. En définitive, la propulsion électrique, malgré les apparences et grâce aux nouveaux moteurs à vapeur, apparait comme utilisable et avantageuse pour la classe la plus nombreuse des bâtiments. Des essais sont en cours pour vérifier les chiffres cités plus haut, et, si l'expérience est favorable, on peut s'attendre à des applications immédiates en grand nombre. $ 5. — Physique Sur les gaz formés dans les tubes à dé- charge.— Dans des expériences récentes, M. R. von Hirsch! constatait entre la tension p du gaz et le poten- tiel explosif V, dans la production des rayons catho- diques au sein des tubes à décharge employant comme source de courant une machine à influence, l'existence d'une relation ?V—const., dans le cas où le tube est rempli d'un gaz pur et non pas d’un mélange de gaz. D'autre part, il a remarqué que les électrodes d'aluminium ordinaire renfermant du sodium dégagent, sous l'effet de la décharge, un gaz caractérisé par une valeur bien définie de Z?V et qui, par conséquent, sem- blait devoir ètre considéré comme gaz pur. Dans un travail ultérieur *, l'auteur s’est posé la tâche d'établir la nature de ce gaz; comme les expériences antérieures lui permettaient de supposer quil s'agit d'une modification de l'hydrogène, il soumet le gaz à l’action de l’oxyde de cuivre incandescent. Le filament d'une lampe à tantale ayant été remplacé par un fil de cuivre mince, la lampe ainsi modifiée est reliée au tube à décharge, après quoi les résidus de gaz restant après l'établissement du vide sont chassés par l’échauffement. Le fil de cuivre est enfin oxydé à sa surface par l'incandescence au sein de l'air atmosphé- rique. Cette lampe consomme entièrement (ou plutôt à environ un millième de mm. de mercure près) l'hydro- gène introduit au rouge sombre et en présence de P*0*°. Ces expériences donnent comme résultat que les électrodes en aluminium, à traces de sodium, renfer- ment, non pas de l'hydrogène pur, mais un mélange remarquable à parties égales d'acide carbonique et d'hydrogène. Ce mélange, qui présente de grandes analogies avec le point eutectique des mélanges fon- dants ou bouillants, se forme spontanément sous l'action des décharges, tout excès de CO? ou de H? disparaissant par l'établissement spontané du vide, suivant que la teneur en H* est inférieure ou supérieure à 50 2/0. ‘ Phys. Zeitschr., t. VII, p. 461, 1907. 2 Phys. Zeilschr., &. IX, p. 603, 1908. = CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE L'actinium C, nouveau produit éphémère de l’actiniumr. — Au cours de leurs recherches rela- lives aux rayons $ de l’actinium, M. O. Hahn et Mit L. Meitner! observèrent que la décroissance d'activité du dépôt actif se fait d'abord plus lentement qu'il ne fau- drait s’y attendre sur la base des périodes de décompo- sition connues de l’actinium A et de l’actinium B. En répétant leurs expériences sur des feuilles métalliques induites à poses variables (examinées au point de vue de la variation temporaire de leur activité, simultanément dans un électroscope « et un électroscope £), ils ont constaté, surtout dans le cas d'une pose courte, que la variation de l'activité & se comporte d'une facon essen- tiellement différente de celle de l'activité x. Aussi l’idée s'est-elle présentée que ces déviations seraient dues à un produit Jusqu'ici inconnu, de durée courte par rap- port à celle de l’actinium A. Les expériences systématiques faites pour séparer cette substance hypothétique ont permis de démontrer que le dépôt actif de l’actinium se compose, en effet, non pas de deux produits, suivant les idées générale- ment acceptées, mais de trois composantes bien carac- térisées, à désagrégation rapide, à savoir l’actinium À, l'actinium B et l’actinium C. La période de désagrégation du nouveau produit, dit actinium C, qu'on sépare de différentes facons de l’ac- tinium A, s'est trouvée être de 5,10 minutes. Tout en émettant les rayons £( + y) jusqu'ici attribués à l'acti- nium B, ce produit n'émet point de rayons «. Les rayons x du dépôt actif ne sont dus qu'à l'acti- nium B. Les auteurs déterminent de nouveau, et par des mesures directes, la désagrégation de ce produit préparé indépendamment de l'actinium A. La période de désagrégation se trouve être de 2,5 minutes, ce qui concorde parfaitement avec la valeur caleulée par Bronson. L'ordre des produits est déterminé à l’aide des courbes ascendantes d’actinium B originellement exempt d'actinium C. Le dépôt actif de l’actinium se compose par consé- quent des produits suivants : PÉBIODES PRODUITS RAYONS 36 minutes, 2 min. 5. 5 min. 10. (très absorbables) BH ») Actinium A — B — (0; La courbe théorique ascendante de l’actinium B, ori- ginellement exempt d’actinium C, aussi bien que les courbes d'équilibre des activités « et 8 du dépôt actif, concordent parfaitement avec les courbes données par l'expérience. $ 6. — Électricité industrielle L'emploi de l'électricité pour le dégel de la neige. — Pour débarrasser les rues de nos villes des masses souvent considérables de neige qui les encombrent, l'on s'est borné jusqu'ici à rassembler la neige à l’aide de balais ou de balayeuses mécaniques, puis à la transporter à un dépôt situé en dehors de la ville ou à la déverser dans les rivières et canaux. Ce procédé est primitif et peu hygiénique. Les quelques tentatives jusqu'ici faites en vue d’un dégel artificiel de la neige des rues n’ont guère été heureuses : les dispositifs de dégel à vapeur, en dehors du danger d'explosion et du bruit gènant produit par leur fonctionnement, ont donné des résultats très peu satisfaisants, M. Heïne, à Berlin, vient de faire des essais très satisfaisants avec un dégeleur de neige électrique, dans la disposition duquel les derniers progrès faits par la technique américaine dans la construction des radia- 1 Phys. Zeitschrift, n° 20, 1908, teurs électriques ont été utilisés. Ce dispositif, basé sur une expérience très étendue, s'adapte parfaitement à la nature de la substance qu'il s'agit de faire fondre ; il se compose de matières d’une grande conductivité. D'une hauteur relativement petite, il se prête particu- lièrement à l'emploi dans les rues très fréquentées, et il présente une superficie chauffante aussi considé- rable que possible par rapport à une couche de neige de faible épaisseur. Des boites de contact, communiquant avec la canali- sation électrique, seront disposées, pour alimenter les dégeleurs de l'énergie électrique dont ils ont besoin, aux poteaux télégraphiques, aux avertisseurs d'in- cendie, aux réverbères, aux murs, aux caves, etc.; ces boites pourront être utilisées en même temps pour l'actionnement d'autres machines, telles que les pompes à incendie électriques, jusqu'ici opérées par des aceu- mulateurs. Ces dispositifs seront installés aussi près que possible de la canalisation municipale, pouvant recevoir directement l’eau de dégel. La boue produite en même temps (lorsqu'elle ne pourra pas être intro- duite directement dans les {uyaux de canalisation) sera enlevée par des voitures ou des automobiles. D'après les expériences déjà faites, le coût total, par mètre cube, dans les conditions locales, se monterait à 1 franc-1 fr. 60, tandis que le coùt du système actuel est de 3 fr. 75. Le surcroit de rapidité et d'efficacité de ce procédé, joint à la sécurité absolue de l'appareil (manié sans le moindre apprentissage spécial), et sa facilité de transport sont cependant des avantages bien plus considérables que cette économie, déjà importante en elle-même. La consommation de courant est con- trôlée à tout moment par un compteur disposé sur la paroi antérieure de l'appareil. Un autre procédé, indiqué par M. Heine pour enlever les masses de neige accumulées dans les rues, procédé particulièrement utile dans le cas des fortes chutes, consiste à employer une automobile collectrice à ser- vice mixte (comportant une dynamo entraînée par un moteur à essence, qui fournit l'énergie électrique nécessaire pour actionner le moteur de la voiture), pourvue d'un gratteur mécanique et d’une bande de transport destinée à enlever la neige et à l'introduire dans un réservoir disposé sur le châssis. La dynamo à essence produit aussi le courant néces- saire pour actionner le moteur de la bande de trans- port, dont le fonctionnement ressemble beaucoup à celui d’une drague. Les dégeleurs électriques employés dans ce cas sont introduits dans le sol sur les grandes places publiques ou à d'autres endroits convenables, de façon à communiquer avec les conduites de canali- sation, dont les entonnoirs recevront le contenu du réservoir collecteur, pourvu d'un fond incliné. Ces. mêmes automobiles seraient utilisées en été pour le nettoyage des rues, d'autant plus que leur énergie électrique pourrait servir à actionner les nettoyeurs à vide, effectuant l'enlèvement très rapide de la boue et de la poussière. L'emploi du dégeleur électrique sera rendu, dans certains cas, particulièrement avantageux en faisant concourir la chaleur de l’eau résiduelle des tuyaux àe canalisation au dégel de la neige. On retirera des profits encore plus considérables d’un projet consistant à introduire les dégeleurs dans les tubes à eau de con- densation des grandes usines, tubes qui sont toujours à une température bien plus élevée. Pour certaines d'entre les rues principales, on se servirait enfin d'automobiles collectrices dont le réser- voir serait remplacé par un dégeleur disposé au-dessus d'un récipient de 0,5 mètre cube, destiné à recevoir l'eau de dégel d'environ 4 mètres cubes en neige, ce qui dispenserait de la nécessité de décharger le contenu du réservoir à neige dans la bouche de canalisation la plus proche. La dynamo à essence fournirait son cou- rant au dégeleur électrique, pendant les arrêts ou la marche à petite vitesse, A. Gradenwitz. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE pi S 7. — Chimie physique Les effets photographiques des métaux. — On sait que M.J. W. Russell, qui, le premier, à cons- taté l'action photographique de certains métaux et de substances organiques oxydables, la rapporte aux elfets exercés par les vapeurs de peroxyde d'hydrogène, tandis que d'autres auteurs l'attribuent soit à un rayonnement spécial, le rayonnement « métallique », soit aux rayons ultra-violets. D'autre part, les phéno- mènes photographiques que présentent des corps traités par l'ozone! sont également attribués par M. Dony-Hénault à l’action du peroxyde d'hydrogène. Quant à la nature de cette action, les opinions oscillent entre l'hypothèse d'une réaction chimique ordinaire (Russell) et celle d’un rayonnement particulier ou d'une radio-activité. Dans un travail récent, M. S. Saeland® étudie la question de savoir si ces effets photographiques impliquent ou non l'existence d’un rayonnement spon- tané spécial des métaux et d'autres corps et quelle serait la nature de ce rayonnement tant de fois pos- tulé. L'auteur constate, au sein de l'air, mais non dans le vide, une diminution graduelle de l’activité d'un métal usé à l’'émeri. Un éclairage préliminaire du métal semble être sans le moindre effet sur le phénomène étudié. L'activité métallique n'est pas non plus détruite par un échauffement intense sans éclairage subséquent: Enfin, dans les limites des expériences de l’auteur, les effets seraient indépendants des champs électriques. Une expérience faite à une température très basse n'a pas permis de constater le moindre effet après une pose de cinq heures. Toutes choses étant, d’ailleurs, égales, on renforce beaucoup le noircissement de la plaque en ne faisant pas le développement immédiate- ment après la pose. Ces phénomènes (qui se constatent également dans le cas où la plaque exposée est chauffée pendant un certain temps avant d'être développée) pré- sentent une différence essentielle avec les effets, sur la plaque photographique, de la lumière et des rayonne- ments connus. La décomposition du bromure d'argent, on le voit, se continue après l'élimination de la source apparente des effets. Il semble que, grâce à la pose, une substance active s'accumule sur la plaque; les réactions photochimiques, relativement lentes aux températures ordinaires, sont fortement accélérées, comme la plupart des réactions chimiques, par les accroissements de la température. Les expériences faites au sein de l'air raréfié ou dans le vide font voir que les effets y diminuent beaucoup d'intensité, sans qu'en général ils disparaissent com- plètement. Ce n’est que dans des cas exceptionnels (où un vide fort avancé est produit très rapidement) que l’auteur réussit à détruire entièrement l'effet photo- graphique des métaux étudiés. Il résulte de ces expériences que l'effet photographique ne se produit que si la formation de H? O* est possible, et qu'il décroit fortement à mesure que diminue cette possibilité. Les amalgames, qui, suivant les expériences de Schônbein, donnent lieu à la formation de peroxyde d'hydrogène, se distinguent par des effets photographiques particu- lièrement intenses. Bién que les recherches de M. Russell aient rendu extrêmement invraisemblable l'existence d’une propa- gation rectiligne des effets photographiques, l’auteur croit utile de constater, par des expériences spéciales, sur des métaux séparés de la plaque par une feuille d'étain intermédiaire, que la propagation des effets se comporte parfaitement comme une diffusion gazeuse. Or, des résultats identiques ont été trouvés par plu- 4 Voir l'article de M. P. ViLLaRp : p. 215, 1902. ? Annalen der Physik, n° 10, 1908. Revue gén. d. Sc., n° 4, sieurs auteurs! pour les effets photographiques dus aux solutions de peroxyde d'hydrogène. Une observation frappante faite par l'auteur, c’est que les effets photographiques des métaux, aussi bien que ceux du peroxyde d'hydrogène, sont détruits par certains métaux, notamment le cuivre et le laiton. Cette observation s’expliquerait en admettant que les vapeurs de H°0? se rendent, de la proximité immédiate du métal ou de la solution, vers la plaque photogra- phique, perdant leur activité photographique dans le cas où elles seraient décomposées en chemin. M. Saeland constate une activité très prononcée qui s'exerce à travers des feuilles d'aluminium ordi- naires exemptes de trous, disposées entre la plaque et le métal en essai, en couches de dix feuilles d'une épaisseur totale de 0,0046 mm., imperméables à la lumière, mais perméables à la diffusion de l'hydro- gène. D'autre part, les effets photographiques sont détruits complètement par l'action d'un courant d'air aspirant d'une vitesse même modérée. De l'ensemble de ces phénomènes, l'auteur tire la conclusion qu'il s’agit, dans le cas de ces actions pho- tographiques, d'effets purement chimiques, identiques pour les métaux et les solutions de peroxyde d'hydro- oène. Aussi recommande-t-il plus de prudence dans les cas analogues, où la constatation d'un effet photo- graphique à fait immédiatement songer à l'existence de rayonnements nouveaux. $ 8. — Chimie industrielle Le rendement des procédés de fabrication de la chaux azotée. — Nous recevons de M. Paul Janet la communication suivante : « Cher Monsieur, « Je recois de M. Ph. A. Guye, professeur à l'Univer- sité de Genève, la lettre suivante : « Monsieur et honoré collègue, « En parcourant votre très intéressant compte rendu « du Congrès de Marseille, publié par la Zevue géné- « rale des Sciences, vous citez (page 903) un désaccord « entre mes calculs et ceux de M. Gall. « Permettez-moi donc de vous signaler qu'en indi- « quant le rendement de 400 kilogs d'azote fixé par « kilowatt-an à l’état de chaux azotée, j'ai expressé- « ment indiqué qu'il s'agissait d'azote et non pas « d'acide azotique (voir ma conférence de mai 1906 à « la Société des Industries chimiques à Londres). Gette « quantité d'azote correspond à 1.600 kilogs environ « d'acide azotique à 100 °/, AzO‘H, nombre qui nest pas « très éloigné de celui indiqué par M. Gall (2.000 kilogs), « lequel tient sans doute compte des progrès réalisés « dans l’industrie de la chaux azotée de 1905 à 1908. « Nos deux évaluations concordent donc. » « Je vous prie de vouluir bien insérer, dans un pro- chain numéro de la /tevue, les observations qui pré- cèdent, observations d'autant plus importantes à mettre en lumière, que dans l'un des Rapports présentés au Congrès de Marseille, Rapport auquel j'avais emprunté le chiffre cité plus haut, il est dit que, d'après les calculs de M. Gaye, 1 kilowatt-an est capable de fixer la quantité d'azote contenue dans 400 kilogs d'acide azotique HAZ0%. On voit, d'après la lettre que M. Guye a bien voulu m'adresser, qu'il convient de multiplier ce nombre par 4 : la correction est considérable. « Veuillez, ete. « P. Janet: » $ 9. — Géographie et Colonisation La Mission forestière Aug. Chevalier en Afrique occidentale. — Depuis l'époque où M. Au- guste Chevalier, docteur ès sciences, fit partie, en 1898- 1899, de la Mission d’études organisée par le général { Annalen der Physik, t. XNI, p. 651 et S95, 1905. 6 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de Trentinian dans les régions du moyen Niger, il n’a pas cessé d'explorer, au point de vue scientifique, l'Afrique occidentale, et il s’est signalé surtout par sa belle exploration du bassin du Chari et du lac Tchad, de 1902 à 1904'. Chargé en 1906, par M. Roume, alors gouverneur général de l'Afrique occidentale, d'une Mission d'études botaniques dans cette colonie pour une durée de dix années, il a accompli une première campagne dont il est possible aujourd'hui d'apprécier les résultats, qui ont été très fructueux, et il est reparti, le 25 novembre 1908, pour continuer sa mission. M. Chevalier a consacré la plus grande partie de sa campagne de 1906-1907, à l'étude forestière de la Côte d'Ivoire. La forèt vierge de cette partie de l'Afrique occupe une large bande littorale qui remonte, dans les bassins du Cavally et du Comoé, jusque vers 8° de lat. N., mais qui, dans le bassin du Bandama, ne va pas au delà de 69, laissant entre ce fleuve et son affluent, le Nzi, une vaste trouée, qui est le Baoulé; dans l’en- semble. elle mesure environ 120.000 kilomètres carrés d'étendue*?. C'est précisément l'existence de cette forèt qui.a retardé l'exploration de la contrée; mais cette forêt est d'une richesse considérable, et il importait de faire l'inventaire des produits qu'elle renferme et de déterminer la meilleure manière d'en tirer parti. M. Chevalier n'a pas étudié seulement la forêt de la Côte d'Ivoire au point de vue botanique; il a rapporté sur les divers bois des renseignements économiques et des indications précises et pratiques dont l'industrie n'a plus qu'à profiter. La mise en valeur en est d'autant plus désirable que la France importe annuellement pour 200 millions de francs de bois, que ses colonies d'Afrique occidentale pourraient lui fournir, et que, d'autre part, les réserves des pays de forêts, Hongrie, Suède, Norvège, Etats-Unis, sont notablement diminuées par une exploitation intensive. M. Chevalier, accompagné de M. Fleury, préparateur, a étudié la forêt dans les divers bassins côtiers de la Côte d'Ivoire. Il a commencé son étude dans la vallée de l'Agnéby, en profitant des travaux de défrichement qui s'y font pour la construction du chemin de fer. C'est surtout sur les rives de cette rivière qu'opèrent les coupeurs de billes d’acajou; beaucoup de troncs abattus restent sur place, où ils pourrissent, l'irrégu- larité des crues ne permettant pas toujours de les évacuer. Revenu à Bingerville, M. Chevalier gagna le Comoé, qu'il remonta, visitant successivement l’Atlié, le Bettié, lIndénié et le Sanwi. Dans l’Attié, on voit la forèt vierge dans toute sa splendeur; entre Memni et Alépé, on rencontre de véritables futaies d'arbres de haute taille, où l'on circule facilement. Dans l'Indénié, le Funtumia elastica est très abondant. S'étant rendu par mer à Sassandra, à l'embouchure du fleuve de ce nom, M. Chevalier remonta la vallée et gagna par la brousse Guideko, où il resta près de deux mois, étudiant la faune et la flore de ce pays neuf. Jusque vers Daloa au nord, la forêt est très épaisse et riche en ÆFuntumia. On y trouve d’autres lianes à caoutchouc, dont quatre ou cinq espèces nouvelles. M. Chevalier entreprit ensuite l'exploration de la région comprise entre la Sassandra et le Cavally, un peu au sud de 6°, en compagnie du capitaine Schiffer, qui commandait le poste de Guideko. Ce territoire était complètement inconnu. Les voyageurs traversèrent un pays presque partout inondé, où ils durent s'ouvrir une route à travers la forêt. Ils trouvèrent de nom- breuses pistes d'éléphants et découvrirent une dizaine d'espèces de singes. Dans les bourbiers de cette contrée vit le petit hippopotame de Libéria (Hippopotamus liberiensis). On ne voit dans cette zone inhabitée ni palmier à huile, ni Æuntumia. Le capitaine Schiffer 1 Revue générale des Sriences du 30 juin 190%, p. 578. ? AuGusTE CnevALIER : La fo êt vierge de la Côte d'Ivoire. La Géographie, 15 mars 1908, p. 201. releva topographiquement tout l'itinéraire, soit environ 300 kilomètres nouveaux, en comprenant le voyage de retour qu'il effectua aussi en pays inexploré. Laissant le capitaine Schiffer au Cavally, M. Chevalier descendit la vallée du fleuve. Les arbres à caoutchouc réapparaissent et sont communs jusqu'au nouveau poste de Fort-Binger, situé sur la rivière Hana, affluent du Cavally. M. Chevalier fit la première ascension du mont Niénokoué, masse granitique située aux environs de Fort-Binger, et que les indigènes avaient empèché le capitaine d’'Ollone de visiter sous prétexte que c’est une montagne fétiche; le mont Niénokoué s'élève à plus de 400 mètres au-dessus du pays environnant. M. Chevalier acheva ce voyage par une tournée au Fouta-Djallon. Il employa l’année qu'il passa en France à classer les collections rapportées de cette première campagne et à continuer la publication de ses travaux sur l'Afrique occidentale. Dans le local qui lui a été affecté au Muséum, M. Che- valier à installé : d’une part, l'herbier considérable comprenant toutes les plantes recueillies par lui, non seulement au cours de son voyage de 1906-1907, mais encore durant tous ceux qu'il a accomplis depuis 1898, en y comprenant sa grande mission Chari-Tchad; d'autre part, la collection des bois de la Côte d'Ivoire constituée en 1906-1907. L'herbier ne comprend pas moins de 6 à 8.000 es- pèces. Ce sont les documents qui serviront à M. Che- valier à publier par la suite une flore de l'Afrique occidentale. Mais, dès à présent et pour prendre date, il a commencé à faire paraître la description des espèces nouvelles *. Ce sont aussi les collections botaniques réunies par M. Chevalier qui lui ont permis de commencer son importante publication sur les végétaux utiles de l'Afrique tropicale française, à laquelle ont collaboré MM. Em. Perrot et Lefèvre, et dont il a écrit le dernier fascicule paru, relatif au cacaoyer®. Les collections de bois de la Côte d'Ivoire comptent actuellement environ 200 espèces, mais elles sont loin d'ètre complètes encore. M. Chevalier estime que l'on peut trouver à la Côte d'Ivoire de 1.500 à 2.000 espèces botaniques (Phanérogames). Sur ce nombre, il y a environ 300 à 400 espèces de grands arbres, de 20 à 50 mètres de hauteur, et autant d’arbustes et de petits arbres, de 5 à 15 mètres de hauteur, puis de 100 à 120 espèces de grandes lianes ligneuses. les principaux produits de la forêt sont le palmier Æ/æ1s, dont on tire l'huile de palme et qui fournit à l'exportation de 5 à 6.000 tonnes par an, le caoutchouc, tiré surtout du Funtumia elastica, la noix de kola, et enfin les bois. M. Chevalier s'est attaché à rechercher principalement les essences qui peuvent présenter un intérêt écono- mique, et il les a fait examiner par les industriels com- pétents. Pour chaque espèce, il a constitué un dossier où sont réunis tous les renseignements concernant. leur utilisation. Environ 40 espèces sont immédiate- ment utilisables. Les bois ont été classés en plusieurs séries. L'une des plus importantes comprend les bois d'ébénisterie, et parmi ceux-ci les bois d’acajou. Actuellement, l'Afrique occidentale exporte par an 75.000 tonnes de ces bois, ce qui représente la moitié de l’acajou consommé dans le monde chaque année, et la Côte d'Ivoire, à elle seule, en fournit 15.000 tonnes. L'acajou de cette co- lonie est produit par des arbres de la famille des Mé- ! Mission scientifique Chari-Lac Tchad (1902-1904) et Mis- sion permanente du Gouvernement. Novitates floræ afri- canæ. Plantes nouvelles de l'Afrique tropicale française, décrites d'après les collections de M. Aug. Chevalier. Fasc. 1, 1907; fase. 2, 1908 (Extraits du Bulletin de la Société bota- nique de France). ? A. CHEvaLIER : Les Végétaux utiles de l'Afrique tropicale française. Etudes scientifiques et agronomiques, publiées sous le patronage de MM. Edmond Perrier el E. Roume: 1905-1908, 4 fasc. parus. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE liacées, principalement par le Xhaya ivorensis À. Chev. (nomraé Doukouma par les indigènes) et aussi, mais en moindre quantité, par des espèces du genre Æntendo- phragma. Dans cette série rentrent aussi des bois qui rappellent le palissandre et de jolies espèces colorées, les unes jaunes, les autres marquées d'ondulations rougeàtres. Une autre série comprend les bois de menuiserie et de charpente, et ceux qui peuvent être utilisés dans la carrosserie et pour les traverses de chemin de fer. Enfin, il y a des bois très légers pouvant servir à la fabrica- tion de la pâte à papier. M. Em. Perrot, professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie à Paris, a essayé de dégager, de l'examen microscopique de ces divers bois, des caractères suffi: samment nets et simples à reconnaître, devant faci- liter le diagnostic des échantillons commerciaux et, par exemple, pouvant permettre d'établir si deux bois d'origine géographique différente proviennent d'arbres botaniquement identiques’. Il a obtenu, à cet égard, de très intéressants résultats pouvant être pratique- ment utilisés. Mais de nombreuses améliorations doivent être apportées dans l'exploitation des bois, pour la rendre plus méthodique et plus fructueuse et aussi pour assurer la conservation et le renouvellement de cette richesse naturelle. M. Chevalier a indiqué quelques- unes de ces améliorations ?. Il faut n’abattre des arbres que là où l'on est sûr de pouvoir évacuer les billes et se limiter aux espèces dont le placement est assuré en Europe. Il faut éviter de faire l'abatage en toute saison; pour beaucoup d'essences, il serait utile d'arrêter la circulation de la sève en enlevant, quelques semaines avant Pabatage, un anneau complet d'écorce. Il con- viendrait de transformer l'outillage pour la coupe des arbres et d'améliorer les procédés de traction et d'em- barquement des billes. Enfin, il est désirable que l'in- dustrie soit renseignée, par une propagande active, sur la valeur de nos bois coloniaux, qui n’est pas inférieure à celle des bois que nous achetons à l'étranger. Au cours de la campagne qu'il vient d'entreprendre, M. Chevalier se rendra dans le Fouta-Djallon, rejoindra la haute Sassandra par Kissidoudou et Beyla et viendra faire un séjour à Bingerville. Il remontera ensuite vers le Soudan et, par le Mossi et le Gourma, gagnera le Dahomey. Gustave Regelsperger. $ 10. — Enseignement A propos d'une candidature au Collège de France. — M. A. lTurpain nous communique la lettre ouverte suivante, qu'il vient d'adresser à M. le Ministre de l’Instruction publique. Bien que, en raison des ter- mes de la rédaction, nous croyons devoir supprimer quelques passages de cette lettre, nous tenons à indi- quer que, si l'impartialité fait à là Æevue un devoir d'accueillir les autres, elle en laisse, du moins, à l’au- teur la pleine responsabilité. « Monsieur le Ministre, « Confiant dans les principes d'égalité inscrits sur tous les murs officiels de mon pays, j'ai, comme tout citoÿen français en a le droit, posé ma candidature à la chaire de Physique expérimentale actuellement vacante au Collège de France. Aucune condition d'âge, 4 Es. Perror et G. G£rarD : Recherches sur les bois de différentes espèces de Légumineuses africaines (Les Végé- taux utiles de l'Afrique tropicale française, fase. II, 1907). ? Conférence de M. Chevalier à l'Office colonial, le 5 no- vembre 1908. | | | | de grades ou même de sexe n'est imposée pour un telle candidature. Apparemment j'estime (bien que je sois évidemment mauvais Juge en la matière) que mes travaux, mes publications el mes expériences peuvent me créer des titres sérieux à l'occupation de celte chaire. C'est la raison qui me fait solliciter les suffrages de l’Assemblée des Professeurs du Collège de France, qui doit vous soumettre une liste de deux candidats. « J'ai donc consciencieusement réuni tous les tirages à part de mes travaux et des exemplaires de mes divers ouvrages, dont j'ai adressé la liste et le dossier en un colis postal recommandé de près de 10 kilo- grammes à M. l'Administrateur du Collège de France, à qui j'écrivis, avec toutes les formules usuelles de res- pect et de politesse, mon désir d'être compris parmi les candidats à la chaire vacante. Cette correspondance ‘late du 10 décembre 1908. Le délai d’un mois accordé aux candidats pour produire leurs titres expirant le 17 courant, et ne recevant aucun accusé de réception de l'Administration du Collège, je crus utile, craignant une omission du service des Messageries et des Postes, de prier M. l'Administrateur du Collège de France, et cela avec les formules de la plus entière politesse et du plus profond respect, de bien vouloir m’accuser récep- tion de mes envois et de me donner acte de ma candi- dature. « Quel ne fut pas mon étonnement de recevoir le mot suivant, écrit, sans date, sur un petit torchon de PAPIER EE EME M ace he « COLLÈGE DE FRANCE (sans date.) « L'Administrateur me prie de vous faire savoir qu'il a recu votre lettre et vos livres. « Avec tous mes compliments, « FRANÇOIS PIGAVET. » «€ « Administrativement, cette pièce est sans valeur. Sans date, elle n'accuse, d’ailleurs pas, réception d’une déclaration de candidature et d'un dossier de travaux. « J'ai consulté l’article du budget de l’nstruction publique concernant le Collège de France et j'y ai vu qu'on y prévoyait des sommes assez rondelettes pour traitements, entretiens et frais de bureau de toute une administration comprenant à sa tête un Administra- teur et un Secrétaire. « Le Collège de France comporte à l'heure actuelle quarante-quatre chaires, qui de temps à autre devien- nent vacantes. Il est inadmissible que cette belle, sécu- laire et d’ailleurs glorieuse Institution ne possède pas, SMART dar SRE ., des formules toutes imprimées accusant réception en des termes courtois d'une candidature et indiquant que les titres produits seront soumis à l'assemblée des Professeurs. « L'Académie des Sciences, vieille personne aussi respectable, je crois, que le Collège de France, possède pour sa correspondance de semblables formules, où les apparences sont sauvées et où le mépris ne perce point. « En dehors de la nullité administrative de l'écrit de François Picavet qui me fait m'adresser directement et publiquement à vous (le délai d'inscription des can- didatures se trouvant écoulé depuis hier 18 décembre), JeMÉPRSENTENAME RECU NT pOur ma candidature est patent. On ne peut marquer d'une facon plus méprisante qu'une candidature provinciale est non avenue à l'Administration du Collège de France. « Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de mes plus respectueux hommages. » Albert Turpain, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de l'Université de Poitiers- 8 L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE ET L'ORIGINE DES ADAPTATIONS Il y a en Biologie une question bien intéressante, qui a été beaucoup plus étudiée par les botanistes que par les zoologistes : c'est celle du peuplement des places vides à l’époque actuelle. J'entends par « place vide dans la Nature » un milieu nouveau, susceptible d'être habité, qui se crée en un point donné, par suite de circonstances cosmiques, ou, inieux encore, qui résulle d'interventions hu- maines. Une ile volcanique, qui surgit du sein des mers, ou des eaux thermales sont des places vides; des eaux résiduelles de salines, qui, déversées à l'air libre, forment des mares salées en plein conti- nent, constituent des places vides, dont on peut connaître l'époque d'apparition, de mème que des galeries de mines ou des conduites d'eau de ville. Des plantes introduites et acelimatées dans un pays différent de leur pays d'origine réalisent un milieu nouveau, aple à héberger toutes sortes d'autres êtres. Voilà des exemples typiques, que je choisis entre beaucoup d’autres, parce qu'il résulte des circonstances que ces places vides apparaissent comme des milieux stérilisés, si l'on peut ainsi parler : une mare salée continentale est trop éloignée de la mer pour que des animaux marins puissent y parvenir; une galerie souterraine peut n'avoir aucun rapport de voisinage avec les grottes ou caves qui constituent un milieu analogue, de mnème que les conduites d’eau de ville qui sont alimentées, non pas par des nappes souterraines, mais par des rivières. Une plante introduite à l’état de graine ou de bouture n'amène avec elle aucun de ses hôtes habituels. On est donc dans de bonnes conditions pour étudier le peuplement de ces places vides. I. — MARES SALÉES. En différents points de la Lorraine existent des dépôts triasiques de sel gemme, dont plusieurs sont ou ont été exploités; aux environs des usines qu'on ÿ à installées se trouvent presque toujours des mares salées formées par les eaux de déchet, en communication plus ou moins facile avec les ruisseaux d'eau douce avoisinants; ailleurs, des sources salifères naturelles produisent des ruis- seaux ou des mares d'étendue parfois notable. La salure y est très variable, non seulement dans l'en- semble, mais encore dans un même point suivant la saison; pendant les périodes de sécheresse, la salure peut dépasser de beaucoup celle de l’eau de mer (qui est en moyenne de 31 grammes de chlo- rures par litre) et atteindre jusqu'à 130 grammes de chlorures par litre. La faune des eaux salées de Lorraine a été étu- diée, à ma suggestion, par Florentin (1899-1904), qui à publié sur ce sujet un travail certainement incomplet, mais qui en donne néanmoins une bonne idée générale. Les formes que je vais citer présentent, comme on peut s'y attendre, des ré- sistances inégales à la salure, et le nombre des espèces diminue à mesure que la concentration augmente. La faunule comprend : 1° Une quarantaine d'espèces de Protozoaires, dont quelques-uns sont identiques à des formes connues seulement dans la mer, dont d'autres sont des formes spéciales aux eaux salées continentales, et enfin dont la grande majorité sont des espèces d'eau douce ; 2° Un Turbellarié (Wacrostoma Lystrix), qui vit indifféremment dans la mer, l'eau saumâtre et l’eau douce ; 3° Des Nématodes indéterminés, trois Roetifères d'eau douce, un Gastrotriche d’eau douce; % Un Annélide (Nais elingquis), espèce très ré- sistante qui se trouve aussi dans l’eau putride et les eaux résiduelles des usines; 5° Deux Copépodes, le Cyclops bicuspidatus, qui est fréquent en eau douce, et que l’on a également signalé dans les lacs salés d'Odessa, les marais salants du Croisic, les chotts d'Algérie, et le Mi- tocra (Canthocamptus) palustris, d'eau douce ; 6° Des larves de Diptères variés (surtout le S/ra- tiomys chamæleo) et divers Coléoptères, vivant soit dans l’eau même, soit sur le bord des mares (les Hydrophilides Philhydrus bicolor et Ochthebius marinus, le Carabique Pogonus Juridipennis, . l'Anthicide Anthicus humilis, et le Staphylinide Trogophleus halophilus) ; presque tous ces Coléop- tères sont spéciaux aux bords de la mer et aux eaux salées continentales; 7° Enfin, un Poisson d'eau douce, très résistant, l'Épinoche (Gasterosteus aculeatus, var. leiurus), qui est entré dans l’eau salée avec ses commensaux et parasites, s'y reproduit abondamment et y atteint une plus grande taille que dans l'eau douce avoisinante (fig. 1). En somme, cette faune, qui est par endroits très riche en individus, est très pauvre en espèces; le peuplement, comme cela était rendu probable par l'éloignement de la mer (plus de 400 kilomètres de la côte la plus proche), n’a pu se faire que par des L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE 9 espèces de l’eau douce avoisinante, comme pour les mares salées de Hongrie, également très éloignées de la mer; je suis persuadé que les espèces pa- raissant marines (Protozoaires et Coléoplères) ne sont pas en réalilé de provenance maritime; elles doivent être des modifications des formes alliées, Fig. 1. — Gasterosteus aculeatus, var. leiurus. — À, forme des mares salées de Lorraine, à 6 plaques latérales et de grande taille; B, forme normale des ruisseaux d'eau douce, à 5 plaques latérales. très affines du reste, qui habitent l'eau douce. Quoi qu'il en soit, il est évident qu'un très petit nombre d'espèces d'eau douce ont pu trouver dans les mares salées un milieu à leur convenance; il n'y en à que quelques-unes, très euryhalines, très eu- rythermes, qui ont pu s'ins- taller dans la place vide. Il y à donc eu, à l'entrée des eaux salées, un filtrage qui n'a laissé que les formes capables de s’'accli- mater à leurs conditions spé- passer ciales. II. — CONDUITES D'EAU DE VILLE. Les conduites d'eau de ville, quand elles sont pui- ‘sées sans galerie filtrante, hébergent au bout de quel- ques années une faune assez Fig. 2. — Dreissensia polymorpha. —A, co- quille normale de ri- vière; B, coquille rovenant de con- uites d’eau de Paris (forme Arnouldi de Bourguignat); C, co- quille provenant de conduites d'eau de Paris (forme Bel- grandi de Bourgui- gnat). (D'après Lo- card : Les coquilles des eaux douces et saumätres de France, Paris, 1893). riche, qui s'accommode fort bien de ce milieu spécial, d'une obseurité absolue, à eau fortement courante, et à changements de tempéra- ture beaucoup moins accen- tués que ceux du milieu ex- térieur. En première ligne, il se fixe, sur la paroi des tuyaux, des animaux qui for- ment des colonies très éten- dues, dans les interstices desquelles s'arrête la vase où s'abritent des animaux libres, qui peuvent ainsi résister aux courants ; les animaux fixés sont le Dreissensia polymorpla (fig. 2), Mollusque muni d'un byssus, souvent assez abondant pour avoir amené l'obstruction de conduites ; des Bryozoaires, l'Hydraire Cordylophora lacustris, et des Eponges fluviatiles. Les animaux non fixés sont : des Infu- soires, des Gastropodes variés, des larves d’Insectes, des petits Crustacés (Cyelops, Cypris, Cladocères, voire Gammarus, Asellus), des Oligochètes, elc.; même des Poissons, comme les Gasterosteus, l'Anguille, la Lote et le Flet (P/euronectes flesus), signalés par Kraepelin dans la distribution d'eau de Hambourg (puisée dans lElbe). Quand l'eau est puisée dans un fleuve (Elbe, Seine, etc.), la faune des conduites est formée uniquement par la faune du fleuve en question, à cela près qu'il y a un choix à l'entrée, et que certaines espèces ne peuvent se maintenir, même si elles y sont entrainées. Quand la canalisation capte des eaux de source (Lille, Prague, Nancy), il s'adjoint à la faune superficielle un nombre plus où moins grand d'espèces carac- téristiques des eaux soulerraines : Turbellariés, Haplotaxis, Asellus cavaticus, Nipharqus subter- raneus, etc. L'étude de la faune des conduites d'eau est extré- mement intéressante, car c'est une expérience natu- relle sur l’action de l'obscurité; il est certain que la majeure partie de leurs habitants, dérivés de la faune superficielle, sont là depuis très longtemps et que beaucoup s'y reproduisent ; or, les modifi- cations constatées sont, somme (oute, assez mini- Ines : petits que leurs congénères superticiels, d'une les Mollusques sont souvent un peu plus coloration plus claire, et ils ont, parait-il, une légère tendance à l'allongement; il y a fréquem- ment chez les Crustacés une décoloration mani- feste des téguments; mais les yeux sont toujours conservés el en apparence normaux, aussi bien chez les Mollusques (Bithynella), Rotifères et Tur- bellariés, que chez les Crustacés et Poissons. III. — GALERIES DE MINES. Les galeries de mines réalisent la même expé- rience naturelle que les conduites d'eau, surtout lorsqu'elles sont abandonnées depuis un certain temps, ce qui permet d'aflirmer que les animaux qui y vivent ne son! pas d'immigration tout à fait récente. Dans une mine de fer, près de Nancy, j'ai exploré des galeries profondes de 3 kilometres environ, perforées dans une colline de 50 metres de hauteur, et abandonnées depuis une dizaine d'années; les parois sont revètues de boisages en décomposition, sur lesquels se développent des Champignons, et de 10 L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE l’eau de filtration circule dans les galeries. La fau- nule, assez riche, comprend des Collemboles (Æete- romurus nitidus, Tomocerus tridentiferus), des Diptères variés, un Coléoptère du groupe des Staphylins (Quedius mesomelinus), divers Diplo- podes (Blaniulus venuslus, Orthochordeuma ger- manica, Polydesmus complanatus et sub-integer), un Chilopode (Zithobius forficatus), des Araignées (Porrhomma errans, Lephthy- phantes pallidus), des Isopodes terrestres dont le 7richoniseus r'oseus, un Amphipode aquatique (Nipharqus subterraneus), el deux Mollusques (ZLimax maximus et Helix rotundata). J'aiexploré, également à Nancy, une petite galerie étroite, longue de 110 mètres, creusée pour re- chercher de l’eau, et recouverte d’une épaisseur de 2 à 15 mètres de terre ; elle renfermait des boi- sages pourris et des débris de végétaux entrés par l'orifice, qui Fig. 3. Trichoniseus ro- seus, provenant d'une galerie de mine. débouchait dans un jardin. La faune de cette galerie était, dans l'ensemble, peu différente de celle de la galerie de mine. J'y ai trouvé des Collemboles, des Diptères (à l'entrée), des Diplopodes (Blaniulus quitulatus, Polydesmus complanatus), un Chilopode (Lithobius for fieatus), des Araignées (Nesticus cellulanus, Porrhomma egeria), des Isopodes terrestres (Oniscus asellus, Cylistieus convexus, Trichoniscus roseus), un Ampbhipode aquatique (Aiphargus Subterraneus), et des Mollusques (deux espèces de Limaces et Hyalinia cellaria). Il n'est pas douteux que toutes ces espèces, sou- vent très nombreuses en individus, étaient établies depuis plusieurs années dans les deux galeries explorées, et qu'elles y trouvaient des conditions tout à fait convenables de vie et de multiplication. L'une d'elles, lAmphipode ANiphargus, espèce aveugle et dépigmentée, est un habitant normal des nappes d'eau souterraines, et son passage dans les galeries de mine ne change pas ses conditions d'existence. Les Araignées, espèces lucifuges, cem- munes dans les caves et à l'entrée des srottes, sont entrées par les orilices des galeries ; quant aux autres formes, il est très vraisemblable qu'elles ont été amenées surtout avec les madriers de boi- sage et autres matériaux; en effet, elles sont abon- dantes, extérieurement, sous les pierres, les feuilles mortes, l'écorce des vieux arbres, dans le terreau, les caves humides. À noter que le Ælaniulus quttu- latus, qui habite dans la terre des jardins, est une espèce aveugle et peu pigmentée, et que le 7richo- niscus roseus (fig. 3), qui n'a qu'un ocelle de chaque côté, à le corps dépigmenté comme un cavernicole ; on l’a du reste bien souvent signalé dans la faune authentique des cavernes. IV. — PLANTES INTRODUITES. On doit à Marchal des observalions très intéres- santes sur le peuplement, par une Cochenille euro- péenne, du /obinia pseudo-acacia, arbre d’origine américaine, qui a été introduit en Europe au com- mencement du xvu° siècle; le Robinia ayant été importé à l'état de graines, il est bien certain qu'il n a amené avec lui aucun parasite etqu'il constitue, pour l'Europe, une place vide. Elle est occupée depuis 1879, semble-t-il) par une Cochenille de la grosseur d'un Pois, appartenant au genre Lecanium, qui a même eausé de grands actuellement ravages dans les plantations de cet arbre (Prusse rhénane et Alsace, Hongrie, diverses régions de la France); en 1890, Horvath, entomologiste d'État de la Hongrie, inquiet de l'extension prise par ce nouvel ennemi, envoya des échantillons à Douglas, qui était alors le savant le plus autorisé pour la détermination des Coccides; Douglas déclara que c'était une espèce nouvelle et la nomma Zecaniun) Robiniarum, nom qui lui fut conservé par tous les auteurs. Or, puisque ce Lecanium est d'apparition récente, et qu'il ne peut pas être venu d'Amérique, il faut bien qu'il dérive d'une espèce européenne; Marchal a démontré que cet occupant du Robinia n'élaitautre que le Lecanium Corni (fig. 4), espèce extrème- ment polyphage, qui vit sur toutes sortes de plantes européennes, depuis le Cornouiller et les Rosiers jusqu'à la Vigne; mais il en diffère par des caractères de tulle, de coloration et de rugosité; néanmoins, les traits fondamentaux de structure sont identiques dans les deux formes. Marchal a conta- miné un /tohinia avec des Lecanium Corni récoltés sur un Pécher; et les larves nées et nourries surle Aobinia sont devenues des Coccides présen- yiu, 4. — Leca- tant, à leur état de complet dévelop- mn Go ù E sur Rosier, fe- pement, la coloration, la taille etle melle adulte facies du Z. Robiniarum. L'expé- (prés Mar- rience inverse (infection d'un Pêcher, de Rosiers et de Vigne par des Lecanium du Æ0- binia) n'a pas donné de résultats. Du reste, le Lecanium Corni avait déjà occupé en Europe d'autres places vides; on l’a signalé sur le Diospyros où Kaki du Japon, sur la Glycine de Chine { Wistaria sinensis) (Lecanium wistariæ de Si- gnoret), le Coloneaster microphylla du Népaul, ete. L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLAGES VIDES DANS LA NATURE Les observations de Cholodkoysky sont tout à fait parallèles à celles de Marchal : il a étudié, dans le gouvernement de Saint-Pétersbourg et en Esthonie, des Pucerons du genre Siphonophora, qui se ren- contrent sur une plante sauvage, la Rosacée Spiræa ulmaria, sur une Légumineuse cullivée, le Pois, et enfin sur une Légumineuse récemment importée de Sibérie, le Caragana arborescens. Les Pucerons des trois plantes ne diffèrent que par de petits caractères de taille et de couleur, si bien qu'on peut se demander s'ils n’appartiennent pas à la mème espèce. Si l'on transporte sur le Pois les Pucerons de la Spirée et du Caragana, quelques-uns commencent à sucer la plante et à pondre, mais ne semblent pas pouvoir se maintenir, et dispa- raissent au bout de sept à dix jours. Cholodkovsky en conclut que le peuplement des places vides représentées par le Pois et le Caragana s'est bien effectué par les Siphonophora de la Spirée, mais qu'actuellement l'adaptation à la plante nourricière est assez profonde pour qu'un transfert soit impos- sible; il n'y à pas d'inconvénient à en faire trois espèces (ulmariæ, pisi, caraganæ). Il est bien probable que beaucoup d'espèces d'[n- sectes polyphages prèteraient à des observations analogues ; il n’est pas impossible qu'il se soit dif- férencié chez elles des biotypes, identiques ou à peu près extérieurement, mais déjà différents au point de vue physiologique. Le Pieris brassicæ, la com- mune chenille du Chou, se nourrit habituellement de Crucifères cultivées ou sauvages, mais elle peut adopter d'autres plantes nourricières : on la signale notamment sur une Capparidée, le Càäprier (Cap- paris spinosa); je l'ai vue, chez un horticulteur de Nancy, délaisser des choux pour se porter sur une magnifique Papavéracée de Californie, le Æ'omneya Coulteri, et il m'a paru que les chenilles avaient alors une coloration beaucoup plus foncée que d'habitude; ce Romneya, venu de graine dans le jardin en question, constituait une place vide, qui a été immédiatement occupée, comme on le voit, par les chenilles de la Piéride du Chou, qui y ont trouvé tout de suite des conditions adéquates à leur constitution. Le Sphinx tête-de-mort(Acherontia atropos) n'est pas moins apte que l’espèce précédente à occuper des places vides : la chenille ravage l'Olivier en Algérie, vit en Europe sur le Lilas et le Jasmin {Philadelphus coronarius), où elle acquiert parfois une livrée spéciale, d’un brun feuille morte avec bandes et taches d'un noir verdàtre; on la trouve surtout sur des Solanées indigènes ou introduites, le Lyciet (Zycium barbarum), qui lui donne, pa- rait-il, une teinte noirâtre, le Dafura stramonium, l’Alkékenge, le Solanum dulcamara, la Tomate, la Pomme de terre; en 1853, en Allemagne, les che- ll nilles d'Acherontia se portèrent exclusivement sur les pieds de Tabac (Nicotiana labacum),et en détrui- sirent un grand nombre. Actuellement, la larve de ce Sphingide, qui est d'origine africaine ou indo- malaise, est en Europe adaptée spécialement à là Pomme de terre, qui vient de l'Amérique du Sud, et a été introduite en Espagne et en Portugal, entre 1535 et 1585, par les conquérants espagnols du Pérou. Ce sont de singulières rencontres géogra- phiques V. — PEUPLEMENT ET ADAPTATION. Je me bornerai là dans cet exposé des faits; ils sont suffisants pour nous permettre d'en tirer des enseignements : en somme, nous voyons que, lors- qu'une place vide est créée dans la Nature actuelle, elle est peuplée plus ou moins rapidement par les animaux ou les plantes du milieu analogue le plus voisin, mais seulement par les espèces capables cle gagner la place vide par leurs moyens de migration, capables de s’habituer à ses conditions spéciales el d'y prospérer : il y a filtrage de la faune avoisi- nante. Cela est tellement net qu'on est autorisé à généraliser : de tout temps, les places vides ont été peuplées par certaines espèces des faunes préexis- tantes, l'eau saumätre par des formes marines, l'eau douce par des habitants d'eau sau- côtières mätre, les marais par des espèces d’eau douce, la terre humide par des types de marécages, la terre sèche, la mousse et les profondeurs de la terre par des espèces de terre humide, les cavernes par des formes hypogées ou muscicoles, ele. C'est l'évidence même. D'autre part, lorsqu'on examine les espèces carac- téristiques des places vides qui se sont peuplées de nos jours, on constate qu'elles y sont adaptées, c'est-à-dire qu'elles possèdent les organes essen- tiels, adéquats aux conditions particulières du milieu, et précisément à ces conditions par les- quelles le milieu nouveau diffère de celui qu'elles viennent de quitter. Ainsi, les Épinoches des mares salées résistent parfaitement aux changements de concentration, si bien qu'on peut les faire passer subitement @e l'eau de mer dans de l’eau douce, el vice versa, les faire vivre dans de l'eau sucrée à 10 °/,, etc., sans que ces Poissons en paraissent affectés: les Dreissensia des conduites d'eau ont une coquille d’un certain galbe et un byssus d'une grande solidité qui leur permettent de résister aux violents courants de chasse; les habitants des galeries de mines sont souvent aveugles, dépig- mentés; ils prospèrent avec les maigres aliments des boisages, dans l'humidité continuelle et l'obscu- rité absolue: la faunule des cuves à vinaigre (larves de Drosophila, Anguillula rediviva) vit dans l'acide 12 L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE acétique, mortel aux autres êtres, etc. Au fond, c’est un truisme : si ces formes n'avaient pas eu ces adaptations, elles n'auraient pas pu peupler les places vides; ce sont ces adaptations qui leur ont permis de passer à travers les mailles du filtre. Il en résulte une conséquence capitale : une adap- tation suffisante est nécessairement antérieure à l'installation dans la place vide, c'est-à-dire qu'elle existe avant d'être absolument nécessaire. Assu- rément l'Epinoche, Poisson d'eau douce, avait la propriété de résister à l'eau salée et à l'eau sucrée ou glycérinée, ayant d'entrer dans les mares de Lorraine; la Dreissensia, d'origine marine, avait son robuste byssus et sa forme de coquille avant de remonter le courant des fleuves et de pénétrer dans les conduites d’eau; le Zecanium du Cornouiller possédait en puissance la faculté de prospérer sur le Robinier, la Glycine et le Kaki, avant qu'il füt question d'en introduire en Europe. Ces divers carac- tères élaient jadis, avant l'occupation des places vides. sans grande utilité ou même sans usage, la- lents pour ainsi dire; ce n'est que par la rencontre d'un milieu adéquat qu'ils ont pris une importance décisive. Puisque, de tout temps, les places vides ont été peu- plées par des formes préa- lablement adaptées conditions spéciales de cel- les-ci, il en résulte que /es adaptations Suflisantes, né- cessaires, n'ont rien à Voir ni avec le milieu ni avec l'utilité; 11 n'y a pas de lien causal entre un milieu el l'adaptation suffisante à ce milieu, ce qui est la négation même de la plus grande partie des théories de Lamarck et de Darwin. Il est facile de montrer l'existence, chez les animaux actuels, de nombreux caractères préadaptatifs où prophétiques, qui ne leur sont pas visiblement utiles dans le milieu où ils vivent ou qui dépassent leurs besoins, mais qui constituent des adaptations évidentes pour d'autres milieux où ils n'ont pas pénétré. Je n'en citerai qu'un exemple, entre beaucoup d'autres, unique- ment pour bien faire comprendre ma pensée : Il existe, sur les côtes de la Californie méridionale, un Poisson (fig. 5), le Zyphlogobius californensis, me- surant au maximum 7 centimètres de longueur, qui est aveugle, les yeux étant très petits, recouverts par la peau, et fonctionnels seulement chez le jeune ; il est d'un rose clair uniforme (couleur du Fig. 5. — Téte de Typhlo- gobivscalilornensis: in- dividu de 55 millimètres de longueur, vue du côté dorsal (d'après Ritter : Bull. Mus. Comp. Zool. at larvard Coll: t. XXIV, 1893). aux sang vu par transparence), sans écailles, c'est-à-dire qu'il a les caractères du cavernicole le plus typique (ses yeux sont même plus dégénérés el sa couleur plus claire que chez le Chologaster Agassizi du Mammoth Cave); or, ce Poisson aveugle vit sur la côte, entre les limites des marées, dans le sable, dans des trous creusés par des crevettes, dans les fentes des rochers, exactement comme beaucoup d'autres Poissons très normaux. Ce lucifuge n'est-il pas parfaitement préadapté à la vie dans les cavernes? Et n'est-il pas évident, dans ce cas comme dans les autres que je ne cite pas, faute de place, qu'il n'y a aucun lien causal entre les conditions spéciales des eaux souterraines et les adaptations à ce milieu ? Je ne suis pas le seul à penser ainsi; ces idées sont dans l'air, pour ainsi dire, et plusieurs biolo- gistes les ont exprimées d'une facon plus ou moins explicite : De Vries (Plant Breeding, p. 352) dit très clairement que « le milieu a seulement choisi les formes aptes parmi la foule et n’a pas de rela- tion quelconque avec leur origine ». Morgan (£vc- lution and Adaptation, 1903, p. 348) s'exprime en termes analogues : « L'origine de chaque forme n'a rien à voir avec le milieu ni l'utilité; et la forme apparait indépendamment du milieu. Une fois apparue, elle peut se perpétuer dans des conditions. convenables ». Banta (1907), à propos des animaux cavernicoles, note que « ceux-ci entrent dans les cavernes parce qu'ils y trouvent des conditions adéquates à leur structure et physiologie. Le résultat adaptatif est dû au choix ou à la trouvaille d'un milieu adéquat à une structure donnée. Ces animaux sont cavernicoles parce que leurs yeux sont dégénérés et à cause de leur perte de pigment, avant d'être entrés dans les cavernes ». Je citerai encore Davenport (The animal Ecology, ete., 1903, p. 19) : «.… La théorie de l’adaptation généralement acceptée est celle de Darwin et de Wallace, qui admettent qu'une espèce adoptant un nouvel habitat acquiert l'aptitude à cet habitat par la mort des individus qui naissent les moins aptes. On peut imaginer une théorie fondamentalement différente, à savoir que la structure existe d'abord et que l'espèce cherche ou rencontre le milieu qui répond à sa constitution particulière. Le résultat adaptatif n'est pas dû à une sélection de structure adéquate à un milieu donné, mais, au contraire, au choix d'un milieu répondant à une structure donnée. » VI. — ORIGINE DES ESPÈCES. Le problème de l'origine des espèces est mainte- nant soulagé de toute la partie relative à l’origine des adaptations, dont le faix à écrasé la théorie de la sélection naturelle de Darwin; mais il n'en reste pas moins à résoudre. Il est impossible que toutes les espèces endémiques, spéciales aux divers L. CUÉNOT — LE PEUPLEMENT DES PLACES VIDES DANS LA NATURE milieux, soient entrées, telles que nous les con- naissons aujourd'hui, dans les milieux qu'elles occupent actuellement; beaucoup ont dû y prendre naissance, el il y a toutes raisons de penser que ce processus continue encore de nos jours. Si j'admets que les espèces ont eu, au début de leur immigra- tion, les adaptations nécessaires et suffisantes, je pense aussi que ces adaptations ont pu se raffiner, se perfectionner au cours des âges. Pour comprendre la formation d'espèces nou- velles et le perfectionnement des adaptations, il nous faut tout d'abord rappeler un article paru antérieurement dans cette Revue”, où j'ai résumé les idées récemment acquises sur l'origine des variations. Provisoirement, peut distinguer trois sortes de variations héritables ou mutations*: {° La mutation fixe, qui possède la propriété d'être transmissible dans son entier, sans atténua- tion (mutation laciniée de Chélidoine, pélorie de Linaire, mutations de couleur des Souris, des Lep- on {inolarsa, etc.) ; 2 La mutation oscillante, qui se transmet avec une valeur variable, en dessus ou en dessous de la valeur parentale; par sélection dans un sens déter- miné, on provoque un déplacement progressif du centre d’oscillation de la mutation, jusqu'à un maximum impossible ou difficile à dépasser (pana- chure des Souris, nombre de rangées de grains dans les épis de Maïs); 3° La mutation 21constante, qui ne se transmet qu'à un nombre variable des descendants, et qu'il est impossible de fixer solidement par sélection. Si l'on veut, c'est une mutation oscillante à grande étendue, qui va constamment de l'état normal jusqu'au type le plus extrême (races monstrueuses à queue double ou triple de Poisson rouge, Pavots polycéphales, Trèfle à cinq feuilles, etc.). Quant à son origine, la mutation est, dans son essence, un changement de nature d’un détermi- nant spécial du plasma germinatif, qui apparait spontanément comme réponse à une excitation du milieu ambiant; cette réponse se fait dans un sens quelconque, et il y a (ceci est capital) tout autant de chances pour que la mutation constitue une adaptation, une disharmonie ou un état indifférent par rapport au milieu. 1-L. Cuénor : Les idées nouvelles sur l'origine des espèces par mutation. {tevue gén. des Sciences, t. XIX, p. 860, 15 novembre 1908. ? Les termes que j'emploie ici diffèrent quelque peu de ceux dont je me suis servi dans mon dernier article, et également de ceux qu'a proposés De Vries. Ce n'est pas ici la place de discuter cette question de nomenclature, mais je tiens à dire que c'est à bon escient, et pour des raisons que je développerai plus tard, que j'abandonne le terme vriesien de fluctuations. La fluctuation est un phénomène individuel de variation sous l’action du milieu, qui peut se superposer aux mutations oscillante et inconstante, et qui n'en avait pas été suffisamment distingué jusqu'ici, La forme nouvelle, qui diffère par un ou plusieurs déterminants de la forme normale de l'espèce, constitue une espèce élémentaire, ou mieux un biotype; si deux de ces mutants, à l'état pur, repro- duisent ensemble, leur lignée est conforme au bio- type (breed lrue, suivant l'expression anglaise). Chez les Souris, il y a 128 biotypes connus, dont 32 (ceux qui renferment le déterminant du pelage Jaune) sont impossibles à isoler à l’état de pureté. Ce que je viens de résumer ci-dessus est une théorie cohérente, appuyée sur de nombreux faits expérimentaux, qui rend compte d'une partie du problème de l’origine des espèces, celle qui traite de l’origine et de la transmission des variations. Nous avons, dans cet article, attaqué le problème sous une autre face, celui de l’origine des adapta- tions. Il ne reste qu'à conclure. Voici, il me semble, comment on peut comprendre la naissance d'une espèce nouvelle. Soit un milieu M, habité par une espèce A, el un milieu M’, voisin, peu différent. L'espèce À ne peul pas vivre dans le milieu M’ ou ne cherche pas à l’envahir, en raison de ses tropismes et pathies par- ticuliers; supposons donc que M’ est une place vide, dépourvue de faune ou pourvue d'une faune incapable de faire échec à une espèce du genre de A : 1. L'espèce À, au cours des âges, présente des mutations variées, résultant de modifications du plasma germinatif. Il se constitue ainsi, dans l'espèce À, des biotypes nouveaux, qui diffèrent à divers degrés, aux points de vue morphologique et physiologique, du type qui leur donna naissance. Une de ces formes, A’, capable de vivre dans le milieu M, est également capable de vivre plus ou moins bien dans le milieu M’, et de plus, de par ses tropismes et pathies particuliers, est disposée à passer dans cette place vide : ainsi, tel Isopode, habitant d'ordinaire sous les pierres, est capable de pénétrer dans les cavernes; telle Epinoche, vivant en eau douce, présente des races capables de prospérer dans l'eau saumätre et sursalée. C'est la phase de peuplement et d'isolement. 2. Le biotype A', qui peuple maintenant le milieu M’, est nécessairement et préalablement adapté à celui-ci; mais, comme ce milieu est quelque peu différent de M, le biotype en subit l'influence, et, si peu que ce soit, commence à différer somalique- ment du type originel A : il devient A” (sous-espèce ou variété au gré des taxinomisies) ; ainsi les Epino- ches des eaux salées de Lorraine ont une longueur moyenne bien supérieure à celle des Epinoches d'eau douce de la région (fig. 1); le nombre des plaques osseuses latérales varie de 5 à 10 chez les premières, tandis qu'ilest toujours de 5 ou 6 chez 14 LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER les secondes. Mais, de plus, le changement de milieu, agissant sur le germen, peut provoquer des mutations quelconques : si celles-ci ne sont pas adéquates aux conditions de milieu, elles sont immédiatement supprimées; par exemple, jalbi- nisme s'éleint rapidement chez les Vertébrés de plein air, qu'il rend très visibles, alors qu'il est particulièrement fréquent chez la Taupe et d'autres obseuricoles, où il n'a pas d’inconvénient. Si la mutation est indifférente, elle coexiste avec A": par exemple, pour la Taupe commune, les formes cœca (yeux cachéscomplètement sous la peau) et europæa (yeux petits, à paupières ouvertes des deux côtés ou d'un seul côté). Enfin, si la mutation est très avantageuse et constitue une meilleure adaptation, elle peut supplanter l'espèce A", et ainsi se forme un nouveau type B, assez éloigné de l'espèce originelle À pour que les taxinomistes n'hésitent pas à le considérer comme une bonne espèce. C'est la phase de différenciation spécilique. Dans la {héorie de la survivance des mutations adaptées, que je viens d'exposer, ce ne sont ni les facteurs lamarckiens, ni la sélection des petites variations qui déterminent l'apparition des carac- lères nouveaux : les mutations apparaissent quel- conques, au hasard, fortes ou faibles, à la suite de modifications du plasma germinatif ; si le mutant est adapté par hasard à une place vide, soil tel quel, soit par changement de fonction, et qu'il puisse atteindre cette région inoccupée, il à la chance de survivre et de faire souche; sinon, ilreste dans son milieu originel, ou bien disparait. Autre- fois, lorsqu'il y avait beaucoup de places vides, l'eau douce, les marais, la terre ferme, les fentes du soletles cavernes, les régions polaires, l'air, la mousse, elc., les circonstances étaient favorables à la différenciation de nouvelles espèces et de nouveaux groupes; mais, maintenant,les mutations ont de moins en moins de chances de trouver une place vide parmi le concert des êtres solidarisés qui peuplent actuellement la terre, et l'évolution est, sinon tout à fait arrêtée, au moins extrêmement ralentie. L. Cuénot. Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. Bibliographie. — Banra : The fauna of Mayfeld's Cave (Publication 67, Carnegie Instilution of Washington, 1907). — CHoLopkovsky : Analyse du travail russe dans Zool. Zen- tralblatt, &. XV, 1908, p. 533. — Davexrorr : The animal ecology of the Cold Spring sand spit (The Decennial publi- cations, Chicago, t. X, 1903). — FLorENTIN : Etudes sur la faune des mares salées de Lorraine (Ann. Se. Nat., 8e sér., t. X, 4900, p. 209); (méme recueil, t. XI, 4901, :p. 343). — Marcnaz : Notes sur les Cochenilles de l'Europe et du nord de l'Afrique (Ann. Soc. Entam., t. LXXVII, 1908, p. 223). — MorGax : Evolution and adaptation, New-York, 1903. LE PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER ' Le problème sur lequel je me propose de pré- senter quelques réflexions est celui de la distri- bution de l'énergie entre la matière et l'éther, en lant que cette distribution s'opère par l'émission et l'absorption de la chaleur rayonnante et de la lumière. Depuis Kirchhoff, les physiciens s'en sont souvent occupés, d’abord en se fondant sur les principes généraux de la Thermodynamique, et plus tard en introduisant des idées empruntées à la théorie cinétique de la matière, à la théorie électro- magnétique de la lumière et aussi à la théorie des électrons. Pour fixer les idées, il conviendra de préciser la question. Figurons-nous, à cet effet, qu'une enceinte ayant la forme d’un parallélipipède rectangulaire, dont les faces intérieures sont parfaitement réflé- 1 Conférence faite au IVe Congrès internalional des Mathé- inaliciens et complétée depuis par l'auteur. chissantes, contienne un corps pondérable M, qui se trouve à une certaine distance des parois, et sup- posons que l’éther, le milieu universel qui transmet la lumière et les actions électromagnétiques, rem- plisse l’espace entier à l'intérieur de cette enceinte, pénétrant méme les particules dont le corps pon- dérable se compose. k Kirchhoff a montré que, dans ces circonstances, si le corps M est maintenu à une température déter- - minée T, il s'établira un état d'équilibre dans lequel l'éther est traversé dans toutes les directions par les rayons émis par la matière pondérable. Ces rayons, incessamment réfléchis par les parois, ne larderont pas à rencontrer de nouveau le corps M. Is finiront par être absorbés par lui, mais la perte que subirail ainsi l'énergie de l'éther se trouvera compensée par l'émission de nouvelles ondes lumi- neuses où caloriliques. Du reste, cette égalité de l'énergie émise et absorbée n'est pas limitée à la totalité des vibrations : si, en employant le théo- rème de Fourier, on décompose le rayonnement en LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 15 un grand nombre de parties, chacune caractérisée par sa longueur d'onde, la quantité d'énergie qui correspond à chaque partie restera constante malgré les échanges continuels. De plus, la seconde loi de la Thermodynamique, c'est-à-dire le principe que l'égalité de température d'un système de corps ne sera jamais troublée par leur rayonnement mutuel, exige que l'état de l'éther soit indépendant de la nature physique ou chimique du corps pondérable. Placez dans l'enceinte un morceau de métal, un cristal quelconque ou une masse gazeuse, vous aurez toujours le même rayon- nement dans l'éther ambiant. En somme, cette théorie de Kirchhoff, que je viens de rappeler à grands traits, suppose que l'énergie du rayonnement qui existe dans l'unité de volume de l’éther, en tant qu'elle correspond aux longueurs d'onde comprises entre les limites À et x + d}, peut être représentée par une expression de la forme : (1) F(, T)d), où la fonction F est indépendante des propriétés spéciales du corps qui a produit les rayons. (Dans cette formule, comme dans toutes celles qui sui- vront, nous entendrons par T la température absolue.) Kirchhoff ne laissait pas d’insister sur la haute importance de cette fonction du rayonnement. En eflet, l'existence d'une telle fonction universelle prouve que tous les corps pondérables doivent avoir quelque chose de commun, et le problème de découvrir en quoi cela consiste offre un charme parlieulier. Avant de considérer les recherches théoriques faites sur la fonction F, je dois dire quelques mots de la manière dont elle peut être déterminée expé- rimentalement. Imaginons une enceinte de très grandes dimensions, qui ne contienne qu'un petit corps M placé près du centre. Laissons au système le temps de se mettre en équilibre, et pratiquons ensuite dans l’une des parois une petite ouverture. Les rayons qui se dirigeaient vers la partie de la paroi qui à été enlevée passeront maintenant au dehors du système, et il est clair que, si, au moyen d'un spectroscope muni d'un bolomètre, nous pou- vions examiner la radiation qui sort de l'ouver- ture dans les premiers instants, cela nous ferait connaître l'état de rayonnement existant à l'inté- rieur de l'enceinte. Il faut remarquer, cependant, qu'en général ce ne sera que pendant un temps extrêmement court, beaucoup trop court pour per- mettre des observations, que les rayons sortant de l'ouverture correspondront à cet état. Vu la grande vitesse de propagation, les vibrations qui se trou- vaient à l'entour du corps pondérable auront bientôt quitté le système, et le rayonnement s'aflai- blira, à moins que le corps n'émette rapidement une quantité de rayons suffisante pour remplacer l'énergie qui s'est élancée au dehors. On peut démontrer qu'il en sera ainsi lorsque le corps pon- dérable offrira la propriété d'absorber tous les rayons qu'il recoit; on connaîtra donc la fonction cherchée si l’on réussit à déterminer l'émission d'un corps de cetle nature, d'un corps « noir » comme on dit ordinairement, Or, grâce à une idée ingénieuse de Boltzmann, qui a été reprise par MM. W. Wien et Lummer, on est parvenu à réaliser un corps noir, et à en exa- miner le rayonnement. C'est un point sur lequel nous aurons à revenir. Ce qui nous intéresse pour le moment, c'est le résultat général de ces expé- riences. Pour chaque température T, on peut repré- senter graphiquement la fonction du rayonnement F en prenant pour abscisses les valeurs de À et pour ordonnées celles de F. La courbe obtenue montre une allure à laquelle on aurait pu s'attendre; l'ordonnée est maximum pour une longueur d'onde déterminée à,, et devient valeurs très petites ou très grandes des abscisses. Il n'est guère nécessaire d'ajouter que l'aire com- prise entre la courbe et l’axe des longueurs d'onde, c'est-à-dire l'intégrale : insensible pour des (2) fr », T}d, est la mesure du rayonnement total du corps noir, ou bien de l'énergie totale qui existe dans l'unité de volume de l’éther contenu dans notre enceinte. Cette grandeur croît rapidement lorsqu'on élève la température, et il y a en même temps un change- ment profond dans la distribution de l'énergie dans le spectre. Il en est du corps noir comme de beau- coup d'autres qui ne peuvent pas être appelés ainsi; l'échauffement favorise l'émission de rayons à petite longueur d'onde, de sorte que l'ordonnée maxima se déplace vers le côté du violet. C'est sur cette influence de la température que se sont portées les recherches théoriques qui ont suivi celles de Kirchhoff. Boltzmann a démontré que le rayonnement total doit être proportionnel à la quatrième puissance de la température, et Wien à assigné à la fonction du rayonnement la forme : (3 (QT), où f (1T) est une fonction du produit de la longueur d'onde par la température. On en déduit que le déplacement du maximum vers le violet suit une loi bien simple : la longueur d'onde qui lui corres- pond est inversement proportionnelle à la tempé- ralure. Nous verrons, dans la suite, que cerlaines consi- 16 LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER dérations pourraient nous porter à croire qu'après tout ces lois remarquables ne sont pas conformes à la réalité. Toutefois, le travail de déduction qui à conduit à les énoncer appartient à ce qu'on à fait de plus beau en Physique théorique, et, au pre- mier abord, il semble qu'elles méritent une entière confiance. On peut invoquer à l'appui non seule- ment l'accord très satisfaisant avec les expériences de Lummer et Pringsheim, mais aussi la solidité Boltzmann et servis dans leurs raisonnements. 11 est vrai que la des théorèmes dont Wien se sont Thermodynamique ne leur à pas suffi; on à été obligé d'emprunter à la théorie électromagnétique de la lumière la notion d'une pression exercée par les rayons, et de faire intervenir le changement de longueur d'onde qui est produit, selon le prin- cipe bien connu de Düppler-Fizeau, par le dépla- cement d'une paroi réfléchissante; mais ces prin- cipes semblent être à l'abri de tout doute. On voit que le problème posé par Kirchhofr | n'est pas entièrement résolu par notre dernière équation. Au lieu des deux grandeurs À et T, nous avons maintenant la seule variable AT; mais la manière dont ce produit entre dans la fonction f reste à déterminer. Il On peut aller plus loin et chercher à pénétrer le mécanisme intime des phénomènes ; il faudra se rendre compte des mouvements invisibles des petites particules du corps pondérable et du lien | qu'il y a entre ces mouvements et le champ élec- tromagnétique dans l’éther. La théorie du rayon- nement doit donc se rattacher aux théories molécu- laires de la matière et se conformer à la méthode dont elles se servent. On sait que Clausius à inauguré la théorie mo- derne des gaz et que Maxwell et Boltzmann ont su donner un vaste développement à celte doctrine | et à la théorie cinétique de la matière en général. | Les travaux de exemple remarquable de l'application de deux branches des Mathématiques. En premier lieu, le Calcul des probabilités v joue un rôle considérable, comparable à celui qu'il a dans la Statistique. En effet, à part quelques résultats très simples, on ne peut faire presque rien dans la théorie des mouve- ments moléculaires sans se servir d’une méthode ces physiciens fournissent un | statistique. Comme il est impossible de suivre dans leurs mouvements chacune des innombrables par- ticules dont un corps se compose, on est obligé de grouper ensemble les molécules qui se trouvent dans un même état de mouvement, ou plutôt dont l’état est compris entre des limites suffisamment resserrées. Quand on connait le nombre des mo- lécules appartenant à chaque groupe, on à une image statistique de l’état du corps, et l'on pourra : décrire les changements de cet état, si l’on réussit à indiquer comment les nombres en question varient d'un instant à un autre. L'autre branche des Mathématiques dont je dois dire quelques mots est la Géométrie polydimen- sionnelle, qui, dans ces dernières années, à pris une grande importance pour plusieurs parties de la Physique. Déjà, les physico-chimistes commencent à s'en servir pour coordonner les phénomènes com- pliqués qui se présentent dans leurs recherches. Tant quil s'agit des équilibres dans les systèmes formés de deux ou de trois substances, on peut employer une représentation de l'énergie libre ou du potentiel thermodynamique par une courbe ou une surface; la solution d'un problème est alors sou- vent ramenée à une construction géométrique. D'une manière analogue, on peut, dans l'étude des sys- tèmes à un plus grand nombre de composantes, introduire une représentation graphique dans un espace à plus de trois dimensions. Bien entendu, on ne voit pas cette représentation, et en réalité l'avantage qu'on y trouve consiste dans l'emploi du langage de la Géométrie polydimensionnelle, qui fait ressortir mieux que toule autre chose l’analogie des équilibres avec ceux qui se présentent dans des systèmes moins compliqués. Signalons aussi, à ce propos, l'exemple donné par Hertz dans son admirable Traité sur les Prin- cipes de la Mécanique. Grâce à un mode d’expres- sion qui à été modelé d’après celui de la Géométrie à 2 dimensions, il a pu réduire Lous les phénomènes du mouvement à cette loi fondamentale, que tout système matériel se meut avec vilesse constante suivant une ligne dont la courbure est la plus petite qui soit compatible avec les liaisons du système. Dans cette théorie, certains principes généraux, tels que celui de la moindre action, prennent une forme très claire, que, du reste, on peut leur con- server si l’on préfère les idées fondamentales de la Mécanique ordinaire aux nouvelles hypothèses par lesquelles Hertz a voulu les remplacer. . : Dans les questions de Statistique, les méthodes de la Géométrie polydimensionnelle se présentent immédiatement à l'esprit dès que le nombre des variables qu'on prend pour base du groupement est supérieur à trois. Si les divers cas qui font l’objet de la statistique ne se distinguent que par la valeur d'une variable unique, on peut, en prenant cette dernière pour coordonnée, représenter chaque cas par un point sur une ligne droite. Les cas dans les- quels la variable en question est comprise entre des limites données correspondront à des points situés sur une certaine partie de la ligne, et l'on connaîtra la loi de distribution des différentes valeurs de la variable quand on aura exprimé en F LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 17 fonction de la coordonnée la densité de la distribu- tion des points représentatifs. Une méthode analogue peut être suivie quand le groupement se fait selon les valeurs de deux ou de trois variables; la représentation graphique se fera alors dans un plan ou dans un espace. Ici encore, chaque cas particulier à son point représentatif, dont les coordonnées indiquent les valeurs des variables fondamentales, et la grandeur sur laquelle on devra porter son attention est de nouveau la densité de la distribution, c’est-à-dire le nombre des points par unité de surface ou unité de volume. On comprend facilement l'extension qu'on peut donner à ce qui précède. Lorsqu'il y a z variables fondamentales, on peut considérer leurs valeurs comme les coordonnées d'un point dans un espace à n dimensions; on dira que ces points, ou les cas qu'ils représentent, sont distribués dans un domaine polydimensionnel, et l'on entendra par densité de la distribution le nombre des points par unité d'étendue. Cette définition suppose qu'on puisse évaluer la grandeur d'un domaine qui est limité d'une manière quelconque; en d'autres termes, la grandeur d'un intervalle qu'on laisse libre aux variations des grandeurs fondamentales. C'est un problème qu'on peuttoujours résoudre après avoir fixé que la gran- deur d'un intervalle dans lequel les variables x,, x, x, Sont simultanément comprises entre x, et x, + dx, x, et x, dx,, .… x, et x, + dx, sera repré- sentée par le produit dx, dx... dx. Parmi les théorèmes dans lesquels il est question de l'étendue de ces domaines polydimensionnels, il y en à un, dû à Liouville, qui est d’une fréquente application dans les théories moléculaires. Consi- dérons un système matériel dont le mouvement est déterminé par les équations de Hamilton : a a T= — — DE 37? où l’on a désigné par gles n coordonnées de Lagrange, par q les vitesses, par p les moments correspon- dants, et par Z l'énergie exprimée en fonction des coordonnées el des moments. À chaque système de valeurs des get des p existant à un moment /,, cor- respondront des valeurs déterminées g', p' de ces variables à un instant postérieur f, ; et, si nous lais- sons aux valeurs initiales la liberté de varier dans un domaine dV infiniment petit de l'étendue à 27 dimensions qui leur correspond, les valeurs finales seront limitées à un domaine dV' de l'étendue (g', p'). Le théorème de Liouville nous enseigne qu'on à loujours : dNi— aN. On me pardonnera, je l'espère, cette digression, qui me parait présenter quelque intérêt pour ceux REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. | qui ont un peu perdu l'habitude de la Géométrie polydimensionnelle. LIT Revenons maintenant aux mouvements dans un système de molécules. Dans le cas d’un gaz dont les particules sont considérées comme des points matériels, les composantes de la vitesse d'une molécule peuvent être prises pour variables fonda- mentales, et l'état sera stationnaire lorsque la den- site de la distribution est exprimée par la fonction : (4) aekE, où a et Æ sont des constantes, tandis que Æ désigne l'énergie cinétique d'une molécule. Cette formule exprime la loi bien connue de Maxwell, que Boltz- mann à su étendre à des gaz polyatomiques. Il trouva qu'on n'a rien à changer à la forme de l’ex- pression (4). Si l'on prend pour variables fonda- mentales les coordonnées rectangulaires du centre de gravité d'une molécule, les composantes de la vitesse de ce point, et les coordonnées et moments qui définissent les positions et les vitesses des atomes relatives au centre de gravité, la fonction représente toujours, pour un état stationnaire du gaz, la den- sité de la distribution dans l'espace polydimension- nel correspondant à loutes ces variables, c'est- à-dire que le nombre des molécules pour lesquelles les valeurs des variables se trouvent dans un certain intervalle infiniment petit sera donné par le pro- duit de la grandeur de cet intervalle par la fonc- tion (4). Seulement, Æ doit signifier maintenant l'énergie totale d’une molécule, y compris l'énergie potentielle qui peut être due à l'action de forces extérieures, telles que la gravité. Ce qui nous intéresse surtout dans ces théories, c'est la conclusion qu'on peut en tirer en ce qui concerne l'énergie cinétique d'une molécule ou d'un atome. On trouve qu'à température donnée, la valeur moyenne de cette énergie, pour autant qu'elle dépend du mouvement du centre de gravité, est une valeur entièrement déterminée, à laquelle on ne peut rien changer, ni par l'action de forces exté- rieures, ni par un changement d'état d'agrégation, ni mème par une combinaison ou décomposition chimique. Celte énergie moyenne est proportion- nelle à la température T et peut donc être repré- sentée par 4T, où est une constante universelle. Nous la verrons reparaître dans la théorie du rayon nement. La méthode de Boltzmann est très générale ; mais pourtant il y a des cas où elle ne s'applique pas, l'étatintérieur d'un système pouvant être tellement compliqué qu'il devient difficile ou même impos- sible de choisir les unités ou les éléments pour les- TE 18 LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER a 2 ES SSSR NS quels on établira une statistique. Dans ces circons- tances, on peutse servir d’une autre méthode qu'on doit également à Boltzmann, et que Gibbs à mise sous une forme plus légèrement maniable. Elle consiste à faire la statistique, non pas des molécules dont un corps se compose, mais d'un assemblage de corps entiers, qui peuvent tous être regardés comme des copies de celui qu'il s'agit d'étudier, Nous supposerons que le nombre N de ces corps soit très grand et qu'ils diffèrent plus ou moins les uns des autres par les positions relatives et les vitesses de leurs particules ; alors nous pourrons faire la statistique de l'ensemble qu'ils constituent. Définissons l'état d'un corps par n coordonnées générales q et par les moments correspondants p, et considérons ces variables fondamentales comme les coordonnées dans un espace à 22 dimensions. Soit dV un élément de cet espace, # dV le nombre des points représentatifs ou, comme nous dirons pour abréger, des corps qui s'y trouvent. Au point de vue statistique, l'état de l'ensemble est connu lorsque +, la densité de la distribution, est donnée en fonction des g et des p. Les N systèmes de l’ensemble doivent être regar- dés comme simplement juxtaposés, sans aucune action mutuelle. Cependant, l’état de chacun d'eux se modifiera par les mouvements et les forces inté- rieurs. Donc, les points représentatifs se déplace- ront, et ce n’est que pour certaines formes spéciales de la fonction # que, malgré ce déplacement, la dis- tribution avec laquelle on commence se maintient. En se servant du théorème de Liouville, on démontre facilement qu'on à une telle distribution station- naire, c'est-à-dire un état de choses dans lequel il ÿ a toujours le même nombre de systèmes dans un élé- ment dV, si l’on pose : p—Ce 9, E étant l'énergie d'un système — qui dépend des coordonnées et des moments — et C et @ désignant des constantes. Un ensemble déterminé par celte équation est nommé par Gibbs un ensemble « cano- nique ». Comme chaque système est indépendant des autres, chacun a une énergie constante, et son point représentatif se meut sur ce qu'on peut appe- ler une « surface de constante énergie ». Deux de ces surfaces, caractérisées par les valeurs ZÆ et E+ dE del'énergie, renferment une certaine partie de l'étendue 227-dimensionnelle totale, disons une « couche » mince, et les points représentatifs qui se trouvent dans cette couche, où ils sont unifor- mément répandus, y resteront pour toujours. Cela posé, on peut enlever par la pensée tous les sys- tèmes qui se trouvent au dehors de la couche. Si ensuite, pour ceux qui y appartiennent, on fait abstraction des différences infiniment petites entre leurs énergies, on obtient un ensemble que Gibbs appelle « microcanonique » et que Boltzmann avait déjà étudié sous le nom d'ensemble « ergodique ». Un ensemble de ce genre est caractérisé par la valeur de l'énergie de tous les systèmes, tandis qu'un ensemble canonique est défini par la valeur de la constante ©, que Gibbs nomme le « module ». Quel est, maintenant, le parti qu'on peut tirer de ces considérations, qui, au premier abord, semblent peu propres à nous apprendre quelque chose sur ce qui se passe dans un système réel? Si elles peuvent nous être utiles, c'est parce que, dans les systèmes avec lesquels nous faisons nos expériences, le nombre des particules ou éléments constituants est excessivement grand. Grâce à cela, il est très pro- bable, sinon certain, que les grandeurs qui sont accessibles à nos observations sont sensiblement les mêmes dans la vaste majorité des systèmes d’un ensemble ergodique, et qu'on obtiendra les valeurs de ces grandeurs pour un corps réel en prenant les moyennes des valeurs qu'elles ont dans un tel ensemble, On peut même dire que, lorsque, au lieu d'opérer toujours sur un même morceau de cuivre, par exemple, on répète les mesures un grand nombre de fois sur des morceaux différents, « égaux » les uns aux autres dans le sens ordinaire de ce mot, c'est en réalité sur les corps d'un ensemble microcanonique qu'on fait les mesures. Substituer la considération des valeurs moyennes dans un tel ensemble à l'étude d’un seul et même corps, cela revient, en fin de compte, à négliger les petites différences qu'on trouverait, ou plutôt qu'on ne trouverait pas, parce qu'elles sont trop faibles, entre un échantillon de cuivre et un autre. Quant à l'ensemble canonique, l’idée de s’en servir peut être regardée comme un artifice mathé- matique. Pour une valeur donnée du module 6, les systèmes de l'ensemble ont une certaine énergie moyenne #, et, lorsque les particules ou éléments de chaque système sont très nombreux, il semble permis d'admettre que le nombre des systèmes dans lesquels l'énergie diffère tant soit peu de la valeur moyenne est très petit par rapport au nombre total N. Par conséquent, les valeurs moyennes calculées pour l'ensemble canonique peuvent être considérées comme égales à celles qu'on trouverait pour un ensemble microcanonique ayant l'énergie Æ; elles pourront done nous faire connaître, elles aussi, les valeurs qui se rapportent à un système réel. IA Après ces préliminaires, qui peut-être sont devenus trop longs, nous pouvons enfin aborder LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 19 notre problème principal. Il nous sera facile d'en trouver une solution remarquable, que M. Jeans a été le premier à indiquer. Nous devons nous figurer le corps 47 qui se trouve dans l'enceinte parallélipipédique comme composé d'innombrables atomes animés d’un mou- vement perpétuel; de plus, il y a des particules chargées ou électrons, soit libres, soit captives à l'intérieur des atomes. Ces électrons prennent part au mouvement calorifique des atomes, et doivent ôtre regardés comme les véritables sources du rayonnement. En effet, d'après les idées modernes, le mouvement d'une particule ron chargée n'a aucune influence sur l’éther; un électron, au con- traire, devient le centre d’un rayonnement toutes les fois que sa vitesse change en direction ou en grandeur. D'un autre côté, les forces électriques qui existent dans un rayon de lumière agissent sur les électrons et leur communiquent un mouvement qu'ils partageront bientôt avec les autres parti- cules du corps. Voilà la cause de l'absorption des rayons, par laquelle une partie de leur énergie est transformée en chaleur. Vu le nombre énorme des atomes et électrons, la diversité de leurs mouvements, et la complexité des rayons qui s’'entre-croisent dans l'éther, la méthode statistique est toute indiquée, et, comme il semble difficile de l'appliquer à un seul système, nous aurons recours à la méthode de Gibbs. Exa- minons d'abord la question de son applicabilité à notre problème. L'état de l’éther dans un système où se trouvent des électrons mobiles est déterminé par un système d'équations aux dérivées partielles, qui, au pre- mier abord, semblent bien différentes des équations de Hamilton. Elles contiennent la force électrique, qui, grâce à un choix convenable des unités, peut ètre représentée par le même vecteur D que le déplacement diélectrique, la force magnétique H, la densité 9 de la charge électrique, et la vitesse v avec laquelle un élément de la charge se déplace; enfin une constante €, égale à la vitesse de la lu- mière. En choisissant convenablement les axes des coordonnées, et en indiquant par les signes D,, D,, D., H,, ete. les composantes des vecteurs D, H, etc., nous AUrONS : 9Dx , 9Dy , 8D- or D y or HE EN NNGTE (6) . y = —d 0H: 0H, 1,- (1) en => (Dr + pvr), ete. 9D- 5D, - (s) = Dre etc, dy oz c A ces équations, il faut joindre les conditions qui doivent être remplies aux parois de l'enceinte. Je supposerai que ces parois soient parfaitement conductrices, ce qui les rendra parfaitement réflé- chissantes; alors la force électrique D sera partout normale à la paroi. On peut démontrer que les conditions que je viens d'énumérer déterminent complètement le champ électromagnétique dans l'éther, quand on connaît, outre l’état initial, la distribution de la charge des électrons et le mouvement de ces parti- cules. Quant à ce mouvement lui-même, il faudra tenir compte, en l'étudiant, d'abord des forces qui peuvent agir entre les électrons et les particules non chargées, et, en second lieu, de la force exercée par l’éther. Par unité de charge, les composantes de cette dernière sont données par : (9) D: + - (vyHz— vHy), ete. Comme je le disais déjà, ce système de formules est bien différent des équations de Hamilton. Cepen- dant, on peut les y réduire. C'est ce qu’on peut faire en deux pas, dont le premier consiste dans l'établissement d’un théorème qui est analogue à celui de la moindre action et que j’exprimerai par la formule : (40) 5 [Ludo h Ici, l'énergie électrique est représentée par U, l'énergie magnétique par L, et le signe à se rap- porte au passage d'un état de choses réel, qui satis- fait à toutes les équations précédentes, à un étal fictif, que je nommerai l’état ou le mouvement varié, et que nous précisons comme il suit. À partir de l’état réel qui existe à un moment quelconque !, nous donnons des déplacements infiniment petits aux électrons, et un changement infiniment petit aux composantes D,, D,, D, tels que l'équation (5) ne cesse pas d’être vraie, et que les conditions aux parois restent remplies. Ces déplacements et varia- tions peuvent être des fonctions continues quel- conques du temps; quand ils ont été choisis, nous connaissons pour chaque instant la position variée des électrons et le champ électrique varié dans l’éther. Le mouvement varié n’est autre chose que la succession de ces états variés, et les nouvelles vitesses des électrons, les valeurs de D,, D,, D. et les grandeurs D, + 9v., ete., qu'on peut appeler les composantes du courant varié, se trouvent com- plètement définies. Entendons ensuite par H le vecteur défini par les équations (6) et (7), et calculons la valeur de L pour les deux mouvements par la formule : Q GI D /Heus /, S > =5 / à [QD > = {LILI # 20 LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER où dS est un élément de volume; nous aurons alors la valeur de ôL. Pareillement, nous obtiendrons ÔU en prenant pour les deux mouvements l'inté- grale : es U—; fl. Dus. On peut démontrer maintenant que l'équation (10) est toujours vraie, pourvu que les déplacements des électrons et les variations de D s’annulent pour tt, et {—f,. Réciproquement, on peut trouver les équations (8) et les forces (9) en partant de la for- mule (10). Il importe de remarquer que, pour arriver à cette équation, il n'est nullement nécessaire de penser à une explication mécanique des phénomènes élec- tromagnétiques, dans laquelle L serait considéré comme l'énergie cinétique, et U comme l'énergie potentielle. 11 nous suffit que nous ayons une équa-- lion de la même forme que celle qu'on rencontre dans la Mécanique ordinaire. Jusqu'ici nous n'avons parlé ni des particules sans charge, ni des actions non-électromagnétiques. On en tiendra compte en comprenant sous le sym- bole U l'énergie potentielle de ces actions, et sous L l'énergie cinétique des particules (et des électrons eux-mêmes, si nous voulons leur attribuer une masse matérielle). Passons maintenant du principe de la moindre action aux équations de Hamilton. A cet effet, il est nécessaire d'introduire un système de coordon- nées 7, propres à définir la position des particules et le champ électrique dans l'éther. Je commencerai par choisir un nombre de coor- données que j'appellerai toutes ÿ,, qui déterminent la position des particules non chargées, et un sys- tème de grandeurs 4, qui fixent la position des électrons. Pour simplifier, je considérerai ces der- uiers comme des corps rigides: alors nous pouvons prendre pour chacun d'eux les coordonnées de son centre, et les angles qui déterminent son orienta- lion. [ nous reste à choisir les coordonnées pour le champ électrique dans l’éther. Or, quel que soit ce champ, on peut loujours le décomposer en deux parties superposées, dont la première est le champ qui existerait si les électrons se trouvaient en repos dans les positions indiquées par les coordonnées 4,, landis que la seconde satisfait partout à la relation : 9Dz , eDy xT dy 2D- DE à à cz chacune des deux parties remplissantles conditions aux parois. La première partie est entièrement déterminée par les coordonnées gq,, et le théo- rème de Fourier nous permet d'écrire pour la seconde : : NT UT MT MINT De — N (ga2 + gl'aal) cos —x sin —y sin mL 7 | pæ 1 g à , 52 The VT SOWUT (11) { D, — D (38 + q 38!) sin = cos Tr. sin 2h F7 SE. OL QUT UT À INDE \ (Gay + gay) Sin — x sin y cos Ar 2 Î Gi hi Ici, on à pris pour axes des coordonnées trois arêtes du parallélipipède, et on à représenté par /, 9, L les longueurs de ces arêtes. Les coefficients w, v, w sont des nombres entiers el positifs, et, pour chaque système (u, 1, w) de leurs valeurs, on à introduit deux déterminées par les cosinus z, 6, y, x’, &", +’. ces directions étant per- pendiculaires entre elles el à celle qui est déter- AE TLORTTN 1T s minée par PAT De plus, pour chaque système (u, v, w), il y a deux coefficients g et g'.; enfin, les sommes doivent être étendues à toutes les combi- naisons possibles des w, 1, w. Ce sont les gran- directions deurs q,, g'. — indiquées dans la suite par le seul symbole g — qui seront les coordonnées pour l’éther. | Il s'agit maintenant de former les valeurs des énergies U et L. Lorsqu'un champ électrique ou magnétique résulte de la superposition d'un nombre de champs élémentaires, l'énergie se compose de plusieurs parties, dont les unes appartiennent aux champs élémentaires pris séparément, tandis que chacune des autres provient de la coexistence de deux champs élémentaires. Dans le cas qui nous occupe, il y a d'abord les champs électriques dé- pendant des coordonnées %, et g.. Quant aux champs magnétiques, chacun d'eux correspond à une cer- laine distribution du courant électrique. Quand une coordonnée 7, change avec le temps, c'est- à-dire quand un électron se déplace, nous avons un courant de convection, combiné avec un cou- rant de déplacement dans l'éther ambiant ; l'inten- sité de ces courants et celle du champ magnétique qu'ils produisent sont alors proportionnelles à q.. D'un autre côté, le changement d'une coordonnée 4, déterminera un courant de déplacement dont on trouvera les composantes en différentiant par rap- port à t les expressions (11). Ce courant et son champ magnétique sont proportionnels à Ja dé- rivée 4. Remarquons encore que, dans l'expression pour l'énergie électrique, il n'y à ni termes avec le produit d'un g, par un g,, ni termes qui con- tiennent le produit de deux 4 différents. Pareille- ment, les produits de deux , feront défaut dans l'expression pour l'énergie magnétique. En fin de compte, on peut écrire : < . (163 : 112) Hu, à TD LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 21 U, étant une fonction des coordonnées g, el 4, et fqh \' q 3 1 ETS (43) LL + où L, est une fonction homogène du second degré des dérivées q, et q.. Le dernier terme de L contient tous les produits d'un g, par un g,, chacun d'eux étant multiplié par un coefficient qui est une fonc- tion des coordonnées de l'électron auquel se rap- porte Qui. Ce coefficient dépend des valeurs de , y, w, œ, 8, y correspondant à la coordonnée g;;, mais non pas de cette coordonnée elle-même. Par un raisonnement qu'il est inutile d'indiquer ici, la formule générale (10) conduit maintenant à des équations qui sont semblables à celles de l'agrange et qui pourraient servir à traiter les pro- blèmes qu'on étudie ordinairement à l’aide des équations (5)-(9). Par exemple, dans l'expression pour la force exercée sur un électron, il y aura un terme qui contient les vitesses q, de cet électron, multipliées par les grandeurs g,; ce terme repré- sente la force qui est due au mouvement de la par- ticule dans le champ magnétique. Notons aussi que l'équation relative à une coor- donnée gq, a la forme : (14) FPE din À a id + sfghs) —0. Les termes contenant g:; peuvent nous faire con- naître la radiation émise par les électrons; nous savons déjà qu'une telle radiation existe toutes les fois qu'il y a des accélérations q,. Du reste, lorsque les électrons se trouvent en repos, de sorte que, g, —0 et 4, = 0, la formule (14) montre que g:; peut subir des changements pério- diques représentés par : {3 = à COS (nt +s), où a et s sont des constantes. Si l’on substitue ces valeurs dans les équations (11), celles-ci prennent la forme correspondant à des ondes stationnaires. La longueur de ces ondes est donnée par : (15 RE RE TT ET Vatast et la durée des vibrations par : TC — u v° + Î s 9° h? de sorte qu'on retrouve la relation générale : N— Cr: y Dans ce qui précède, nous avons parlé des équa- tions de Lagrange. Celles de Hamilton s'en déduisent par le procédé ordinaire, si l'on introduit les moments p qu'on obtient en différentiant l'expres- sion (13) par rapport aux grandeurs q. Une des méthode de Gibbs puisse être appliquée à notre système se trouve maintenant remplie. Cependant, conditions nécessaires pour que la il y à encore une difficulté. Dans chacun des sys- tèmes dont nous pourrions composer un ensemble, le nombre des coordonnées g, qui définissent le champ électrique dans l’éther est infini, et il parait difficile de faire la statistique par rapport à un nombre infini de variables. Il est donc nécessaire de remplacer le système réel avec son nombre infini de degrés de liberté par un système fictif pour lequel ce nombre 7 est limité, et de traiter le sys- tème réel comme un cas limite dont on s'approche de plus en plus en faisant croître le nombre n. Le cas est analogue à celui d’une corde vibrante qui a également un nombre infini de coordonnées. [ei, on peut limiter ce nombre en supposant que la masse soit concentrée en des points placés à des distances finies sur un fil qui lui-même est sans masse appré- eiable, expédient dont on se sert souvent pour trouver les modes de vibration d'une corde con- tinue. On pourrait suivre la même voie dans l'étude d'un système électromagnétique, si l'on pouvait commencer par des équations ne contenant que les valeurs des grandeurs électromagnétiques dans un groupe de points situés à des distances finies les uns des autres. Ce remplacement des équations dif- férentielles par des équations à différences finies est facile lorsqu'il s'agit des formules qui s'appliquent à l’éther libre, mais il m'a été impossible de faire la même chose pour les équations qui contiennent la densité 5 de la charge. Heureusement, il y a un autre artifice. Le nombre des coordonnées d'un système mécanique peut être diminué par l'application de nouvelles liaisons; on peut, par exemple, ‘imaginer un mécanisme qui empêche une corde de se mouvoir comme elle le ferait en donnant les harmoniques au delà d'un certain nombre de vibrations, tout en la laissant libre de donner les tons inférieurs. D'une manière analogue, nous obtiendrons un système ne possé- dant qu'un nombre fini de degrés de liberté si nous imaginons dans l'éther des liaisons qui exeluent les champs électriques représentés par les formules (41) pour lesquels la longueur d'onde (15) serait inférieure à une certaine limite à,. C'est avec ce système fictif que nous pouvons former un ensemble canonique de Gibbs au module @. Parmi les propriétés d'un tel ensemble, il ÿ en à 22 LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER une qui est d'un intérêt spécial pour notre but. Sup- posons qu'une des coordonnées q ou un des mo- ments p n'entre dans l'expression pour l'énergie E que dans un terme de la forme &g° ou 8p°. On dé- montre alors que la valeur moyenne de la partie de l'énergie qui est indiquée par ce terme, c'est-à-dire de la partie de l'énergie qui correspond à l'ordonnée ou au moment en question, est donnée par la moitié du module ©. Ce résultat s'applique à quelques-unes des va- riables que nous avons à considérer. En premier lieu, si mest la masse d'une particule non chargée, disons d’une molécule, du corps M, et g, une des coordonnées rectangulaires du centre de gravité de cette molécule, l'énergie L contient le terme À mg 12 2m donnée q,. Évidemment, ce moment ne se retrouve dans aucun autre terme de L; la valeur moyenne, dans l’ensemble canonique, de la partie de L qui lui A ou » si p, est le moment correspondant à la coor- 1 , 3 correspond est 5 6, etl’ontrouve 3 0 pour la valeur moyenne de l'énergie due au mouvement du centre de gravité de la molécule. En effet, on peut répéter le raisonnement précédent, en entendant par q, la deuxième ou la troisième coordonnée de ce point. Fixons maintenant notre attention sur un nom- breux groupe de molécules égales contenues dans le corps M; soit y le nombre de ces molécules. L'énergie totale qu’elles possèdent en vertu du mouvement de leurs centres de gravité aura dans l’ensemble canonique la valeur moyenne 2 Lo el il faudra lui attribuer la mème valeur dans le seul corps M. ê Nous avons déjà vu que l'énergie en question peut être représentée par auT, T étant la tempéra- ture et z une constante universelle. La comparaison des deux résultats montre que le module ® doit être proportionnel à la lempérature du corps, et que l'on à : En second lieu, chaque coordonnée g de l’éther ne se montre que dans un seul terme : ts TELLE de l'expression pour l'énergie électrique. Nous en concluons que, dans l’ensemble canonique, l'énergie qui appartient à une seule coordonnée g, est donnée, en moyenne, par 1 O—= 3er, Ni et celle qui appartient aux deux’ coordonnées g, et ! g’, que nous avons introduites pour un système de valeurs des nombres u, v, w, par : ar SEE La forme de la fonction du rayonnement est une conséquence presque immédiate de ce résultat. Il est permis de supposer que les dimensions /, q, du parallélipipède soient très grandes par rapport aux longueurs d'onde qui entrent en jeu. Cela posé, on trouve : fyho pour le nombre des systèmes (1, r, w) pour les- quels la longueur d'onde est comprise entre les limites À et 1H dà, et : a th pour l'énergie électrique moyenne dans les systèmes de l’ensemble canonique, en tant que cette énergie appartient à l'intervalle (à, à + dÀ). L'énergie doit avoir cette même valeur pour le système que nous étudions, ce qui donne : BraT qu d} pour l'unité de volume. Remarquons enfin que, dans l’éther qui entoure le corps M, l'énergie ma- gnétique est égale à l'énergie électrique, et nous voyons, en nous bornant toujours à l'intervalle @, que la valeur totale de l'énergie par unité de volume est : “ Un 324 et que la fonction du rayonnement est donnée par : : 16%oT (16) RON) ee NI Avant d'entrer dans une discussion de ce résultat, je dois mentionner la belle théorie du rayonnement qui à été développée par M. Planck. Ce physicien suppose qu'un corps pondérable contienne des par- ticules dans lesquelles des oscillations électriques peuvent avoir lieu, la plus simple image qu'on puisse se former d'un tel « résonateur » étant celle d'un seul électron qui peut vibrer autour de sa posi- tion d'équilibre. Chaque résonateur a sa propre période de vibration, et nous admettrons que toutes les périodes se trouvent représentées dans le corps. Or, M. Planck considère d'un côté l'équilibre entre les vibrations des résonateurs et le rayonnement dans l'éther, et d’un autre côté le partage de l'énergie LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 23 qui se fait entre les résonateurs et les particules ordinaires. La première partie de la théorie est basée sur les équations du champ électromagné- tique; dans la seconde, Planek suit une marche semblable à celle dont on s'est souvent servi dans les théories moléculaires. Elle revient à examiner quelle distribution de l'énergie doit être considérée comme la plus probable. Ici, une idée nouvelle est introduite. Planck suppose qu'un résonateur ne puisse pas gagner ou perdre de l'énergie par degrés infinitésimaux, mais seulement par des portions ayant une grandeur finie et déterminée; ces por- tions seraient inégales pour des résonateurs à pé- riodes de vibration 7 différentes. En effet, il attribue à l'élément d'énergie en question la grandeur 2, Enfin, par un raisonnement dans lequel je ne puis le suivre ici, il obtient la formule suivante pour la fonction du rayonnement : Cette équation montre un accord très satisfaisant avec les résultats expérimentaux de Lummer et Pringsheim. Elle a la forme de la formule (3), et elle conduit à un maximum de F pour une valeur de } qui est inversement proportionnelle à la tem- péralure. Pour de grandes valeurs de la longueur d'onde, on peut remplacer : par : et la formule de Planck devient identique à celle qu'on trouve par la méthode de Gibbs. Cet accord des résultats obtenus par deux méthodes bien difré- rentes est très curieux, mais malheureusement il n'existe que pour les grandes longueurs d'onde. Selon la théorie que je viens de présenter, la for- mule (16) devrait être vraie pour toutes les lon- gueurs d'onde possibles; dans le cas limite qu'on obtient en faisant diminuer de plus en plus la valeur que j'ai nommée ?,, elle devrait s'appliquer même à toutes les longueurs d'onde, si petites qu'elles soient. C'est ce résultat que j'avais en vue lorsque je disais que peut-être les lois de Boltzmann et de Wien ne pourraient être maintenues. Il est vrai que la fonction que nous avons trouvée rentre dans la forme générale (3), mais il n°y a plus de maximum, et, si l’on étend l'intégrale de la fonction à toutes les longueurs d'onde, de 0 à æ , on obtient une gran- deur infinie. Cela veut dire que, pour être en équi- libre avec un corps d'une température donnée, l'éther devrait une quantité infinie d'énergie; en d'autres termes, si l’on commence par un corps doué d'une quantité finie d'énergie, cette dernière se dissiperait entièrement dans l'éther. Nous pouvons ajouter qu'à la longue elle s'y trou- verait sous forme d'ondes excessivement courtes, et que même, parce que le produit 4T diminuerait de plus en plus, l'énergie qui correspond aux lon- gueurs d'onde au-dessus de quelque valeur fixe arbitrairement choisie tendrait vers 0. Tout cela semble bien étrange au premier abord et j'avoue que, lorsque Jeans publia sa théorie, j'ai espéré qu'en y regardant de plus près, on pourrait démontrer que le théorème de l'eequipartition of energy », sur lequel il s'était fondé, est inapplicable à l'éther, et qu'ainsi on pourrait trouver un vrai maximum de la fonction F (à, T). Les considéra- tions précédentes me semblent prouver qu'il n'en est rien, el qu'on ne pourra échapper aux conelu- sions de Jeans à moins qu'on ne modifie profondé- ment les hypothèses fondamentales de la théorie. contenir Du reste, on serait conduit à des résultats analogues si l’on appliquait la méthode de Gibbs à d’autres systèmes possédant une infinité de degrés de liberté. On peut se figurer, par exemple, deux systèmes de molécules, dont les centres se meuvent dans un plan fixe, les molécules du premier système se mouvant dans ce plan comme les particules d'un gaz se meuvent dans l’espace, et celles du second système étant attachées à des cordes tendues dans une direction perpendiculaire au plan. On trou- verait sans doute mutuels, l'énergie d'un tel système s’accumulerait de plus que, par les chocs en plus dans les cordes, y produisant des vibrations à longueurs d'onde extrêmement courtes. Je ne veux pas nier que la méthode de Gibbs ne soit un peu artificielle et qu'il ne soit préférable d'établir la théorie du rayonnement sur l'examen de ce qui se passe, non pas dans un ensemble, mais dans un seul et même système. Aussi ai-je fait une tentative dans cette direction il y a déjà quelques années. On a de bonnes raisons pour croire que les métaux contiennent des électrons libres animés d'un mouvement rapide, dans lequel ils se heurtent contre les atomes métalliques après avoir parcouru des trajets d'une très petite lon- gueur. Les changements de vitesse qui sont pro- duits par les chocs doivent donner lieu à une émission dont on peut chercher à calculer les par- ticularités, et l'on obtient la valeur de la fonction F en combinant le résultat avec celui qu'on trouve pour l'absorption; on voit facilement, en effet, que l’état de l’éther dans notre enceinte est entièrement déterminé par les pouvoirs émissif et absorbant du corps pondérable M. 24 Pour simplifier, j'ai effectué le calcul pour une plaque métallique mince. En me bornant à de grandes longueurs d'onde, j'ai trouvé une formule identique à celle que nous venons de déduire au moyen de la méthode de Gibbs. Cela est très satis- faisant, mais je n'ai pas réussi à appliquer ce pro- cédé direct à des longueurs d'onde plus petites. Dès qu'on renonce aux simplifications qui sont permises pour les grandes longueurs, il devient très difficile de débrouiller le rayonnement par le théorème de Fourier et de calculer d’une manière exacte l'absorption produite par un essaim d’élec- trons fourmillant entre les atomes du métal. Pour faire ressortir encore plus la difficulté du problème, j'ajouterai que les ondes qui existent dans l'éther sont continuellement éparpillées par les électrons, et que cette dispersion est accompagnée d'un chan- gement des périodes lorsque les électrons se trouvent en mouvement. La méthode basée sur la considération d'un ensemble canonique a le mérite d'embrasser tous ces détails, parce que les équations de Hamilton qu'elle prend pour point de départ comprennent toutes les actions qui existent entre les électrons et l’éther. Du reste, quel que soit notre jugement sur les différentes théories, leur résultat commun, que, pour les grandes longueurs d'onde, la fonction du rayonnement à la forme : _ 16747 more peut être considéré comme définitivement acquis. Si l'on compare avec cette formule les mesures faites sur les rayons infra-rouges extrêmes, on peut en déduire la constante universelle x. Cela nous donne la valeur 4T de l'énergie moyenne d'une molécule gazeuse à la température T, et ensuite, parce que nous connaissons la vitesse du mouvement calori- fique, la masse des molécules et atomes. C'est M. Planck qui, le premier, a montré la possibilité de ces calculs, dont le résultat s'accorde admirable- ment avec les nombres obtenus par des méthodes entièrement différentes. On voit aussi que l'énigme posée par le fait que la fonction F(, T) est indépendante des propriétés spéciales des corps n'est pas restée sans solution; c’est l'énergie d'agitation des particules consti- tuantes, représentée par 4T, qui détermine l'inten- sité du rayonnement dans l'éther. Dans la formule de Planck, il y a encore la con- slante À qui est commune à tous les corps, et, si l'on adopte la théorie de ce physicien, on peut espérer découvrir un jour la signification physique de cette constante, ce qui constituerait un progrès de la plus haute importance. LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER VIT Il me reste à parler” de la manière dont la théorie de Jeans, dans laquelle il n°y a pas d'autre constante que le seul coefficient «, doit chercher à rendre compte du maximum dans la courbe du rayonne- ment que les expériences ont mis en évidence. L'explication donnée par Jeans — et c'est bien la seule qu’on puisse fournir — revient à dire que ce maximum à été illusoire; si on a cru l'observer, ce serait parce qu'on n'avait pas réussi à réaliser un corps qui fût noir pour les petites longueurs d'onde. En effet, il ne faut pas perdre de vue que la for- mule que nous avons trouvée pour la fonction du rayonnement, qui dépend du rapport entre les pouvoirs émissif et absorbant d'un corps, ne nous apprend rien sur la grandeur de ces pouvoirs pris séparément. Un exemple bien simple, dans lequel je me bornerai à l'intensité de l'émission, peut nous faire voir que l'échange d'énergie entre la matière et l’éther peut devenir de plus en plus lent à mesure que la fréquence des vibrations augmente. Suppo- sons qu'un électron, se mouvant le long d'une ligne droite, soit repoussé par un point fixe de cette ligne avec une force inversement proportionnelle au cube de la distance x. Nous pouvons poser alors, en choisissant convenablement le moment {= 0 : x—Vatiee, où à et D sont des constantes positives, et : aeDa (11) a — Va + DE C'est cette accélération qui produit le rayonne- ment, et, pour décomposer ce dernier en des parties qui se distinguent par la longueur d'onde, nous devons développer la fonction (17) à l'aide du théo- rème de Fourier. Or, sil'on veut déterminer l'ampli- tude des vibrations de la fréquence », c'est-à-dire 270 3 : de la longueur d'onde on est conduit à l’inté-. orale : [e] Je cos nl de, Jo VIE TEREP qui tend vers la valeur : 1 rbn + al? a pour de grandes valeurs de ». À cause du facteur exponentiel, cette expression finil par devenir 1 A partir d'ici, cet article diffère de la conférence telle qu'elle a été prononcée au Congrès des Mathémaliciens. M. Wien a eu l'obligeance de me faire remarquer qu'en m'abstenant de prendre parti entre les deux théories, je ne n'étais pas suffisamment rendu compte des sérieuses objections qu'on peut faire à celle de Jeans. LORENTZ — PARTAGE DE L'ÉNERGIE ENTRE LA MATIÈRE PONDÉRABLE ET L'ÉTHER 95 extrèmement petite. Il est permis de présumer qu'on obtiendra un résultat semblable lorsqu'un électron se meut sous l'influence d'une force suivant une loi différente, et que l'absorption deviendra très faible en même temps que l'émission. Il se pourrait donc fort bien que le corps dont se sont servis Lummer et Pringsheim, tout en étant équi- valent à un corps noir pour de grandes longueurs d'onde, ait eu un pouvoir émissif beaucoup plus petit que celui d'un tel corps pour les ondes les plus courtes. Remarquons aussi que la petitesse des pouvoirs émissif et absorbant doit avoir pour conséquence qu'en ce qui concerne les petites longueurs d'onde l'équilibre entre l’éther et un corps pondérable s'établit avec une extrème lenteur. On peut même dire que l'équilibre final, dans lequel l'énergie se serait uniformément distribuée sur une infinité de modes de vibration, constituerait un état qu'il est impossible de se représenter et qui ne sera jamais atteint dans un temps fini. En réalité, il n'y aurait qu'une transformation continuelle de l'énergie dans la direction de cet état. Ces considérations ont, sans doute, un certain intérêt; mais, en y regardant de plus près, on reconnait facilement qu'elles ne suffisent pas à faire disparaitre le désaccord qui existe entre la théorie de Jeans et les observations. En effet, dans les expériences de Lummer et Pringsheim, le pouvoir émissif du corps rayonnant pour les petites longueurs d'onde à été considérablement inférieur à celui qu'on déduit de notre formule (16); donc, si cette équation était la vraie expression du rayon- nement d'un corps noir, le rayonnement mesuré par ces physiciens aurait été beaucoup moindre que celui d'un tel corps et, en vertu de la loi de Kirchhoff, le pouvoir absorbant du système qu'ils ont employé devrait avoir été inférieur à Punité à un degré quil est impossible d’ad- mettre. Du reste, sans entrer dans les détails de ces expé- riences, nous pouvons faire ressortir l'insuffisance de la théorie de Jeans par un calcul bien simple. Prenons, par exemple, le cas d'une plaque polie en argent ayant la température de 15°, et comparons, pour la lumière jaune, le pouvoir émissif e, de ce corps à celui (e,) d'un corps noir à la température de 1.200°. Sous l'incidence normale, l'argent poli réfléchit environ 90 °/, de la lumière inecidente: FT : 1 son pouvoir absorbant est donc égal à 0° t'on Il 10 émissif d'un corps noir à 15°. D'un autre côté, la formule (16) exige que, pour une longueur d'onde déterminée, le pouvoir émissif F(à, T) soit propor- aura 8, = €, Si l'on désigne par €, le pouvoir tionnel à la température absolue, d'où l'on déduit 288 1 = ES € one nine 50 ‘ Or, à la température de 1.200°, un corps noir EU — el, par conséquent, &, les dont le pouvoir émissif surpasse celui de tous autres) brillerait d'un éclat bien vif, et une sub- stuince douée d'un pouvoir émissif cinquante fois plus petit*devrait sans doute être visible dans l’ob- seurité. Il est done bien certain que, si l'on excepte les ondes très longues, les corps émettent beaucoup moins de lumière, en proportion de leur pouvoir absorbant, que ne le demande la théorie de Jeans. Cela nous prouve, comme j'ai déjà fait remarquer, que la théorie qui se base sur les équations ordi- naires de l'Électrodynamique et sur le théorème de l’« equipartition of energy », doit être profondé- ment remaniée; on devra introduire l'hypothèse de particules rayonnantes, telles que les résonateurs de Planck, auxquelles, pour une raison ou une autre, les théorèmes de la Mécanique statistique ne sont pas applicables. Il ne faut pas croire, cependant, qu'en adoptant cette manière de voir on puisse venir à bout de toutes les difficultés. Il est tout au moins très pro- bable que, dans quelques corps, notamment dans les métaux, il y ait, outre les résonateurs, des électrons libres, et je ne vois aucune raison pour “laquelle la théorie de Gibbs ne s'appliquerait pas à ces particules. On serait done conduit à ce résultat paradoxal que l'état d'équilibre entre l’éther et la matière pondérable qui s'établit par l'intermédiaire des résonateurs ne serait pas identique à celui qui se produit par l'échange d'énergie, d'une part entre la matière et les électrons, et d'autre part entre ces derniers et l'éther, conséquence qui serait en con- tradiction avec les lois de la Thermodynamique, d'après lesquelles il ne peut y avoir qu'un seul état d'équilibre. On pourra peut-être éviter celte contradiction en se représentant — je parle toujours des petites longueurs d'onde — l'échange d'énergie qui s'opère par l'intermédiaire des résonateurs comme beau- coup plus rapide que celui qui est dû aux électrons libres. Si la différence qui existe entre les deux modes d'action sous le rapport de leurs vitesses est très grande, on peut concevoir que, dans nos expé- riences, tout se passe comme si les électrons libres n'existaient pas, et que pourtant, pourvu qu'on leur laisse un temps suffisamment long, ces mêmes électrons finissent par faire sentir leur influence. Alors, en fin de compte, Jeans aurait raison, le système tendant vers l'état final dont nous avons parlé et dans lequel les résonateurs seraient sans influence, parce que leur énergie diminuerait de plus en plus; mais cela n'empêcherait pas qu'au point de vue expérimental on ne dût s'en tenir à la 26 JAMES P. CUNNINGHAM — L'EMBARQUEMENT DU CHARBON A LA MER théorie de Planck. Malgré la présence des électrons libres, qui, à la longue, dérangeraient l'équilibre provisoire qu'on observe, les actions qui amènent cet équilibre peuvent très bien être telles que leurs effets s'accordent avec la seconde loi de la Thermo- | dynamique. | Il n'est guère nécessaire d'ajouter qu'on doit | s'exprimer avec beaucoup de réserve sur ces questions délicates. Sans doute, la théorie se sim- plifierait considérablement s'il y avait quelque moyen d'échapper entièrement aux conséquences que M. Jeans a signalées. H.-A. Lorentz. Professeur de Physique à l'Université de Leyde. L’'EMBARQUEMENT DU Le ravitaillement en charbon au cours des longs voyages est un problème des plus importants, sur CHARBON À LA MER L'un? des solutions les plus pratiques de ce pro- blème est du?àl'ingénieuraméricain Spencer Miller, Fig. 4. — Ravitaillement en charbon d'un navire de guerre par un charbonnier au moyen du câble transbordeur. — Entre les deux navires, on voit le cäble sur lequel se meut le chariot portant les sacs accrochés; sur la gauche, câble auquel est attachée l'ancre flottante. tout pour les navires de guerre. Si le navire est obligé de faire relâche dans un port, il est exposé à perdre un temps souvent précieux. En temps de guerre, cette ressource peut même lui faire défaut. Aussi a-t-on cherché depuis longtemps à approvi- sionner les navires en mer même, à l’aide de cha- lands où charbonniers chargés de combustible et au moyen d'appareils permettant d'effectuer le trans- bordement sans arrêter la marche des vaisseaux. dont le cäble transbordeur est construit par la Lidgerwood Manufacturing Company, à New-York. Le câble transbordeur marin comprend les par- ties suivantes (fig. 4 et 2): 4° Un câble principal, qui forme la voie de halage par laquelle la charge est transportée entre JAMES P. CUNNINGHAM — L'EMBARQUEMENT DU CHARBON À LA MER 2 un navire remorqueur et un navire remorqué ; 2 Un appareil de tension à l’une des extré- mités du cäble principal. Il maintient dans le câble une tension uniforme, suffisante pour con- 3° Un chariot voyageant sur le câble principal, d'un navire à l’autre, et pourvu d'un crochet ‘de sûreté auquel la charge est suspendue : 4 Des cordages de traction (pour l'aller et le $ I Fig. 2. server la charge hors de l'eau dans son trajet entre les deux navires. L'appareil de tension al- longe et raccourcit constamment le câble quand les vaisseaux tanguent, ou lorsqu'une variation de la portée se produit pour une raison quel- conque ; — Embarquement du charbon à la mer. Vue prise d'un cuirassé. retour), attachés au chariot transbordeur et par lesquels il va et vient entre les navires; 5° Deux treuils sur le navire remorqueur et le navire remorqué, qui, par l'intermédiaire des cor- dages de traction, manœuvrent la charge; 6° Des dispositifs d’amenée el de contrôle pour 28 JAMES P. CUNNINGHAM — L'EMBARQUEMENT DU CHARBON A LA MER prendre la charge sur l’un des navires et la déposer sur le pont de l’autre. La disposition du ecäble transbordeur varie, en pratique, avec les dimensions du navire charbon- nier. Pour un navire de guerre et un petit charbonnier, la forme recommandée consiste en un câble prinei- simple poulie sur le câble principal et il est pourvu d'un crochet de cabillot auquel les sacs de charbon, contenant jusqu'à une tonne et demie, sont suspen- dus. Le cordage de retour est attaché au chariot et s'étend sur des poulies conductrices jusqu'au tam- bour du treuil de retour. Le cordage d'aller est fixé au côté opposé du chariot et s'étend dans l’autre Fig. 3. — Chariot portant les sacs de charbon. Manœuvre du crochet pour faire tomber les sacs. — Le chariot porte à l'arrière un ressort à boudin pour amortir le choc à l'arrivée. A gauche, poulie d'amenée; en tirant sur cette poulie, on fait descendre le cable et en mème temps le chariot jusqu'au niveau du pont du navire. pal, attaché en un point élevé du mât du navire remorqueur, franchissant l'espace entre les navires et passant sur des poulies placées en des points élevés des mâts du vaisseau remorqué, puis tom- bant à l'arrière dans l'eau et se terminant par une ancre flottante. L'ancre flottante est l'appareil qui maintient la tension nécessaire dans le câble principal. Le chariot transbordeur (fig. 3) roule sur une direction, autour de la poulie de queue, jusqu’au treuil d'aller. Les treuils de commande peuvent être placés tous deux sur l’un des deux navires, ou un sur chaque navire. A l'extrémité du câble située sur le charbonnier, au-dessus de l'endroit de chargement sur le pont, une poulie d'amenée est placée sur le câble princi- pal. La charge est accrochée après avoir abaissé le JAMES P. CUNNINGHAM — L'EMBARQUEMENT DU CHARBON A LA MER 29 càble principal jusqu'à ce que le chariot transbor- deur arrive au-dessus du pont. L'élingue des sacs de charbon est passée sur le crochet, la poulie d'amenée est relàchée et la charge s'élève. Le treuil priée. Pour le cäble principal, c’est le rôle de l'ancre fotlante ou de l'appareil de tension d'agir ainsi. Quant aux lignes de traversées, commandées par le treuil d'aller et retour, le cas est similaire. de commande transporte la charge jusqu'au navire | Ces treuils travaillent en sens inverse l'un de l’autre ; Fig de guerre, où le càble principal est de nouveau abaissé au moyen d'une poulie d'amenée située sur le pont; on fait tomber la charge en poussant un levier. La poulie d'amenée du navire de guerre est alors relächée et le chariot retourne au charbon- nier. Un tour complet peut être ainsi fait en moins d'une minute, près de 40 secondes. Pour les gros charbonniers, il y a intérêt à sub- stituer un appareil de tension du cable principal g. 4. — Ancres flottantes coniques de trois pieds et de scpl pieds arrangees en tandem. toute variation de longueur de la ligne est obtenue en dévidant ou en enroulant le câble sur les tambours des deux treuils. II L'ancre flottante sert, comme nous l'avons dit, à maintenir une tension uniforme dans le câble transbordeur. Si l'on suppose une distance de 125 mètres entre le navire de guerre et un char- Fig. 5. — Ancre flottante multiplane de quatre pieds. à l'ancre flottante. La seule différence qui en résulte est que le câble principal, après avoir franchi l'es- pace séparant les deux navires, passe surune poulie conductrice à l'extrémité du mât du charbonnier et va s'enrouler sur le tambour de l'appareil de tension. Il est nécessaire que toutes les lignes du câble transbordeur soient soumises à une tension appro- bonnier moyen, il faut que l'ancre flottante main- tienne approximativement les tensions suivantes : 6.000 kilogs pour des charges du chariot de june tonne, 8.500 kilogs pour des charges de une tonne et demie, 10.000 kilogs pour des charges de deux tonnes. Il y a deux modèles d'ancre flottante : 4° l'ancre conique, formée d'un cône en loile, el souvent dis- 30 L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPIIQUÉE posée en tandem pour assurer une tension plus uniforme (fig. 4); 2 l’ancre multiplane, formée d'une série de toiles carrées, espacées d'environ deux fois le côté du carré et maintenues à leurs quatre angles par des cordes (fig. 5); elle pèse moins et assure une tension plus uniforme. III Le càble transbordeur Miller-Lidgerwood a fait l’objet de nombreuses expériences dans les marines américaine, anglaise, russe et italienne. Le premier essai eut lieu en 1899; l'appareil fut installé sur le charbonnier Marcellus pour ravi- tailler le cuirassé américain Massachusetts. Les navires marchant à une vitesse de 6 nœuds, on transporta 22 tonnes de charbon par heure par une mer assez clapoteuse. En 1902, des essais eurent lieu dans la Baltique entre le cuirassé russe Retvizan et le croiseur Asia, | servant de charbonnier. Le charbon fut transporté à raison de 37 tonnes à l'heure avec la plus grande facilité. La même année, l'appareil fut employé au rawi- taillement du cuirassé anglais Trafalgar ; la quan- lité moyenne transportée fut de 35 à 40 tonnes à l'heure, le navire marchant à une vitesse de 8 à 11 nœuds; on atteignit même 64 tonnes à l'heure pendant une demi-heure. Enfin, en 1906, un appareil perfectionné installé à bord du charbonnier Sterope à permis de ravi- tailler le croiseur italien Ziguria à raison de 60 tonnes par heure, avec un maximum de 89 tonnes, les deux navires marchant à la vitesse de 12 nœuds. Ces résultats très remarquables et maintenant éprouvés montrent que le problème de l'embar- quement du charbon à la mer peut être aujour- d'hui considéré comme résolu. James P. Cunningham. REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE A deux reprises déjà, en 1903 et 1905, j'ai entre- pris de signaler sommairement aux lecteurs de la levue quelques-uns des faits nouveaux survenus dans le domaine de la Mécanique appliquée. Je continue aujourd'hui, en conservant à peu près les mêmes divisions générales : I. — PRODUCTION DE LA VAPEUR. $ 4. — Chaudière à lames d’eau. La chaudière à lames d’eau verticales de M. Char- les Bourdon présente une disposition assez spé- ciale. Chaque lame d’eau est comprise entre deux tôles ondulées, à génératrices horizontales, et forme ainsi une série de renflements et d’étrangle- ments. Ces tôles sont entretoisées dans les parties étranglées. Les tôles de deux lames d’eau consécu- tives se touchent par leurs renflements. On peut regarder une pareille lame d'eau comme représen- tant une suite verticale de tubes, réunis au moyen de fentes longitudinales. Le constructeur à voulu améliorer ainsi la circulation de l'eau des chau- dières à tubes d'eau, tout en conservant les avan- ages de ce genre d'appareils. La circulation des gaz chauds s'effectue de la même manière que dans les chaudières tubulaires à retour de flamme, Des expériences ont été faites avec une chaudière dont les lames mesuraient 120 millimètres de lar- geur, hors tôles, aux renflements. Le tirage était faible. En brûlant par mètre carré de grille et par heure 80 kilogs de charbon à 8 °/, de cendres et en alimentant à l’eau froide, on a obtenu 8 à 9,20 kilogs de vapeur sèche à la pression de 10 kilogs. 9 S =. — Surchauffeurs. La question de l'emploi des surchauffeurs de- meure à l'ordre du jour : elle a donné lieu à d'inté- ressantes discussions pendant le Congrès de Méca- nique appliquée tenu à Liége en 1905. L'addition d'un surchauffeur présente l'incontestable avan- tage de dessécher la vapeur et d’atténuer, par suite, les condensations nuisibles qui se produisent sur les parois des cylindres; la consommation de vapeur par cheval-heure se trouve ainsi diminuée. Mais, comme la production d'un kilogramme de vapeur surchauffée exige plus de chaleur que celle d'un kilogramme de vapeur saturée à la même pression, il reste à savoir si le travail correspon- dant à la dépense d'une calorie se trouve réellement augmenté. L'expérience permet de répondre affir- mativement; toutefois, l'incertitude où l’on est sur la chaleur spécifique de la vapeur surchauffée ne permet pas de chiffrer exactement la valeur de cette économie. Il faut, d'ailleurs, remarquer que l’addi- tion du surchauffeur a, en général, pour effet d'accroître le coùt en charbon d'une calorie : on doit done craindre que, malgré l’économie de vapeur et de calories, la dépense de combustible, seule intéressante pour l'industriel, ne se trouve finalement augmentée. C'est, en effet, ce qui arrive L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE avec les surchauffeurs établis dans de mauvaises conditions. Il faut éviter que les gaz n'arrivent trop chauds à la cheminée, et, pour cela, établir une circulation méthodique : c'est-à-dire faire marcher les gaz, à l'intérieur du surchauffeur, en sens inverse du courant de vapeur. Il faut, en outre, que les tuyaux amenant la vapeur de la chaudière à la machine soient aussi courts et aussi bien isolés que possible. La surchauffe est souvent utile pour améliorer d'anciennes machines ayant un rendement défec- tueux. Son emploi est également intéressant dans le cas des locomotives, pour lesquelles la fréquence des démarrages et diverses causes de refroidisse- ment exagèrent l’action des parois. L'économie d'eau est d’ailleurs importante, par elle-même, pour le service des locomotives. Après de nombreux essais, le réseau de l'Etat Belge a définitivement adopté la surchauffe, qui commence également à apparaître sur les locomotives francaises. Elle se répand depuis quatre ou cinq ans sur les chemins de fer d'Amérique. On a constaté, dans ce dernier pays, que les machines à surchauffeurs peuvent réaliser un rendement global égal ou supérieur à celui des machines compound, mais que le grais- sage doit être assuré avec un soin particulier. Quelques ingénieurs américains pensent que la sur- chauffe permet de réduire sensiblement le timbre de la chaudière, sans diminuer la puissance, et d'obtenir ainsi, sur les frais d'entretien de la chau- dière, une économie compensant, et au delà, ceux d'entretien du surchauffeur. Les applications de la surchauffe aux machines marines ne se sont guère développées jusqu'ici, malgré les bons résultats obtenus en Angleterre, dès 1900, par la maison Wilson, de Hill. En 1906, la Compagnie Transatlantique a fait construire deux cargos identiques, la Garonne et la Rance, dont le second était pourvu de surchauffeurs Bielock et d'une distribution à soupapes. On a trouvé, comme moyenne d’une année, une économie de 18 °/, avec le surchauffeur. Encouragée par ce résultat, la même Compagnie a installé des surchauffeurs sem- blables sur le paquebot Pérou et le cargo Hon- duras. Parmi les nombreux types de surchauffeurs essayés ou proposés dans ces dernières années, nous signalerons celui de Maiche, dont le faisceau tubulaire présente cette particularité d'avoir cha- cun de ses tubes rempli par un faisceau de tubes beaucoup plus petits, serrés aussi énergiquement que possible les uns contre les autres et entière- ment plongés dans le courant de vapeur. On remédie ainsi à deux inconvénients pratiques des surchauffeurs tubulaires, savoir la destruction ra- pide de la surface de chauffe et l'irrégularité de température de la vapeur. Ces inconvénients pro- viennent de la mauvaise conductibilité de la vapeur; ils sont ici évités grâce à la bonne conducetibilité du métal. En outre, l'importance de la masse mé- tallique permet à celle-ci de jouer le rôle d'un volant de chaleur. $ 3. — Chaudières à haute pression. Au Congrès de Liége, M. Francois à proposé d'élever beaucoup la température, et par suite la pression, de la vapeur non surchauffée. L'avantage n'est pas discutable au point de vue du rendement théorique des machines à vapeur : c'est une consé- quence directe de la formule de Carnot. Mais M. Jou- guet, reprenant à cette occasion les considérations qu'il avait déjà développées en 1904 (voir la précé- dente Revue), à fait remarquer que la question devait être examinée aussi au point de vue du chauffage dans la chaudière. Si la température de la chaudière est très élevée, la perte de chaleur par les fumées devient énorme. Il doit done y avoir, pour la température de la chaudière, une valeur qui donne le maximum d'utilisation du combus- tible. M. Jouguet est conduit à fixer cette limite aux environs de 500°. On est encore loin de là; malheu- reusement, il est difficile de construire des chau- dières résistant bien aux hautes pressions, insépa- rables, pour la vapeur d'eau saturée, des hautes températures. II. — APPAREILS A VAPEUR, $ 4. — Généralités. L'inconvénient des hautes pressions ne se mani- feste pas seulement dans la chaudière; elles entrai- nent, dans les cylindres moteurs, des oscillations de température qui exagèrent l’action nuisible des parois. On atténue cette action en détendant la vapeur dans plusieurs cylindres successifs, et aussi en ayant recours à l'enveloppe de vapeur. L'Expo- sition de Liége présentait même plusieurs exem- ples de machines dont le piston était, en même temps que les parois du cylindre, réchauffé par un courant de vapeur. On doit à M. Gouy un important théorème con- cernant le maximum du travail que peut fournir un moteur thermique : ce maximum est égal, pour chaque phase du cycle, à la variation de la fonc- tion G=U—TS+Q, dans laquelle U désigne l'énergie interne du fluide, T la température de la source de chaleur (supposée unique), S l’entropie, et Q le potentiel des forces extérieures (telles que la pesanteur et la pression atmosphérique) autres que les résistances utiles. M. Jouguet à fait diverses applications de ce théorème, notamment aux mo- teurs à vapeur. Il appelle énergie utilisable la 32 L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE variation de la fonction G et cherche, pour chaque phase, la valeur de cette énergie : il parvient ainsi à déceler l'influence de toutes les causes de pertes. Il trouve, par exemple, que, dans un essai effectué en 1898 au Laboratoire de Liége, les pertes, esti- mées en kilogrammètres, se répartissaient de la facon suivante : Admission : 849; détente : — 211; échappement: 435; compression : 3. Total : 1.076. Cette perte totale de 1.076 kilogrammètres pouvait encore être décomposée de la facon sui- vante : Espace libre : 82; laminage à l'admission : 22; action des parois : 536; détente tronquée : 415; laminage à l'échappement : 21. Enfin, les 536 kilogrammètres perdus par l'action des parois se réparlissaient ainsi : admission : 745 ; détente : — 211; échappement : —1; compression : 3. On peut dire encore que, sur ces 536 kilogram- mètres, 47 seulement étaient perdus par le fait du rayonnement à travers les parois : la plus forte partie de la perte était due à la différence des températures auxquelles étaient faites, par les pa- rois, la soustraction et la reddition de chaleur à la vapeur. M. Weighlon à exécuté à Newcastle des expé- riences ayant pour but d'étudier l'influence de la vitesse du piston sur l'économie d'une machine à vapeur, el est parvenu aux conclusions suivantes : Dans les machines dont on fait varier la puis- sance en changeant la vitesse du piston, celte vitesse atteint une limite, correspondant à la puis- sance maxima de la machine, au delà de laquelle la puissance diminue. Il existe de même une vitesse correspondant à la dépense minima de vapeur par cheval indiqué. Les deux machines essayées étaient l'une à quadruple, l'autre à triple expansion. Les pistons avaient tous 457 millimètres de course et la pression d'admission était de 9 kilogs 8. La vitesse correspondant à la dépense minima de vapeur a été de 2%,25 par seconde pour la première machine et de 2%,37 pour la deuxième. $ 2. — Turbines. Je me suis étendu, dans la Revue de 1903, sur les turbines à vapeur. Je n'ajouterai ici qu'un mot concernant les /urbines à basse pression de M. Raleau. Ces turbines sont interposées entre les machines d'une usine el le condenseur central; elles sont done alimentées par la vapeur d'échappement des machines. Dans les machines à pistoa, la détente ne peut être poussée très loin sans faire naître des frotte- ments quiabsorbent je supplément de travail fourni par la détente, Le même inconvénient n'existe pas avec les lurbines celles-ci -s'’:ccommodent très bien des basses pressions, et éprouvent même, avec ces basses pressions, moins de frottement qu'avec les pressions élevées, parce que, dans le cas des turbines, il s'agit surtout du frottement du fluide contre les parois. Pour que les turbines à basse pression marchent bien, il faut leur fournir un flux de vapeur régulier. On y parvient en ayant recours à un accumulateur de vapeur : réservoir disposé de facon à avoir une grande capacité calorifique. Sui- vant que la vapeur arrive des machines de l'usine en quantité supérieure ou inférieure à la consom- malion des turbines, elle se condense en réchauf- fant l'accumulateur ou, au contraire, se revaporise en le refroidissant. Dans ses Æéflexions sur la marine, M. Croneau a exposé, en 1906, aux lecteurs de la À vue, l'état actuel de l'application des turbines à vapeur aux bâtiments de guerre et de commerce. Ainsi qu'il l’a indiqué, il y avait deux grosses difficultés à vainere : d'une part, la nécessité de pouvoir faire marche arrière ; d'autre part, celle d'obtenir une assez faible dépense de combustible aux allures modérées. La marche arrière s'obtient généralement à l'aide de turbines spéciales. La seconde difficulté était plus grave, car on sait que les turbines doivent, pour fournir de bons rendements, tourner avec de grandes vitesses angulaires. Cette difficulté est sur- tout générale dans le cas des navires de guerre, notamment des cuirassés, qui, tout en étant sus- ceplibles d'une marche rapide, doivent, en temps de paix, aller à pelite vitesse en vue de réduire la dépense. La solution adoptée par Parsons est basée sur l'emploi de cinq turbines A, B, C, D, E. A grande vitesse, les turbines D et E, dites turbines de croi- sière, demeurent inactives. La vapeur arrive à A et, de là, après une première baisse de pression, est envoyée à B et C, puis au condenseur. À marche lente, les turbines de croisière sont intercalées en cascade entre la chaudière et la turbine À. On aug- mente ainsi le nombre des chutes de pression, ce qui permet de réaliser une vitesse angulaire assez faible sans trop compromettre le rendement. M. Raleau préfère associer aux turbines principales une machine à piston, ce qui donne du mème coup la solution du problème de Ja marche arrière. M. Mavor propose de remplacer les grandes tur- bines actuelles par une seule turbine à grande vitesse, de rendement maximum, commandant une dynamo qui actionnerait, à des vilesses variables, d'autres dynamos montées sur les arbres des hélices. On obtiendrait la marche arrière en ren- versant le sens de la rotation de ces dernières dynamos. Il reste à savoir si la perle due à la transmission électrique serait suffisamment com- pensée par le meilleur rendement de la turbine. unique. L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE III. — MOTEURS À EXPLOSION. $S 14. — Moteurs légers. Les progrès de la navigation aérienne sont inti- mement liés à la création de moteurs légers, et il semble bien que le dernier mot ne soit pas encore dit à cet égard. M. Ader était parvenu, il y a une dizaine d'années, à construire un moteur à vapeur à quatre cylindres, à double expansion, pesant au total 3 kilogs par cheval. Aujourd'hui, le moteur à vapeur est détrôné, pour cette application spéciale, par le moteur à explosion. Celui-ci nécessite le refroidissement artificiel des parois des cylindres. Le refroidissement par l’eau présente divers incon- vénients : il nécessite l'emploi d'un réservoir d’eau, d'une pompe, d'une tuyauterie, qui alourdissent nécessairement l'appareil. Le refroidissement par l'air serait évidemment préférable en pareil cas; mais la mauvaise conductibilité de ce fluide en rend l'emploi assez difficile, surtout pour les moteurs de grande puissance. Le système Adams consiste à faire tourner les cylindres autour de l'arbre vile- brequin, qui reste fixe : les cylindres s'éventent ainsi eux-mêmes. Dans le système Grayer-Millet, l'air, projeté par un ventilateur, est soufflé par des ailettes portées par les parois extérieures des cylindres. M. Ambroise Farcot entoure le moteur d'une enve- loppe percée de fenêtres qui sont disposées en face des organes à refroidir; un ventilateur appelle l'air à travers ces fenêtres. Les moteurs légers de M. Farcot présentent d'autres particularités intéressantes. Prenons, par exemple, le moteur de 100 chevaux récemment construit par cet ingénieur. Il possède 8 cylindres, dont les axes ont des directions parallèles aux rayons d’un octogone régulier; ces axes sont répartis en deux groupes, placés dans deux plans parallèles. Les 4 cylindres d’un même groupe agissent, par l'intermédiaire de bielles évidées, sur un même bouton de manivelle. Les prolongements de leurs axes ne passent pas exactement par le centre de rotation de la manivelle, disposition qui a pour but de diminuer l'influence de l’obliquité des bielles dans les phases de travail. Pour chaque cylindre, une soupape unique, aussi éloignée que possible du corps du cylindre et commandée par une came, produit alternativement l'aspiration et l’'échappe- ment. Ce résultat est obtenu en faisant fonctionner la soupape à peu près à la manière d’un tiroir. Un pareil moteur pèse, en ordre de marche, moins d'un kilog par cheval. Le moteur Esnault-Pelterie est également à re- froidissement par l'air. +[l comporte 7 cylindres à ailettes, divisés en un groupe de 4 et un de 3. Chaque groupe agit sur une seule manivelle. L'inventeur à REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. choisi un nombre impair de cylindres, en vue de répartir les temps moteurs d'une facon plus uni- forme. Chaque cylindre est muni d’une soupape unique, à double levée, qui produit successivement l'aspiration et l'échappement. Signalons encore les expériences de M. Jaubert, qui, en injectant, en cours de marche, dans un moteur à pétrole refroidi par l'eau, de l'oxygène obtenu par l’action de l'eau sur le tétra-oxyde de potassium, a pu réaliser momentanément une aug- mentation dans la puissance de 70 °/,. Un autre moyen de diminuer, pour une puissance donnée, le poids d'un moteur, consiste à demander au piston la plus grande somme possible de travail, en remplaçant le cycle usuel à quatre temps par le cycle à deux temps. La difficulté est alors d'obtenir, d'une facon convenable, le balayage du cylindre et la compression du mélange. Il serait également tout indiqué d’avoir recours au double effet, c’est-à-dire de faire travailler le piston sur ses deux faces; mais alors on est exposé aux fuites à travers le presse-étoupe. J'ai déjà signalé, en 1903, le moteur Kürting, qui est à la fois à deux temps et à double effet; j'ai parlé aussi du moteur Letombe, à double effet. Les recherches se poursuivent dans cet ordre d'idées, comme l'indiquent de nombreuses prises de brevets. $ 2. — Turbines à gaz. La question des turbines à gaz est moins avancée que celle des moteurs à cylindre. Des essais ont été entrepris à ce sujet par MM. Armengaud et Lemale. Le principe de l'appareil est fort simple. Le mé- lange explosif arrive dans un réservoir fixe, où il s'enflamme; puis une tuyère projette les gaz brûlés sur les aubes de la turbine. Dans un premier mo- dèle, la combustion à lieu sans compression préa- lable, et elle se produit par explosions successives de la manière suivante : une soupape à ressort donne accès au mélange, qui détone au contact d’un brûleur, et l'élévation de pression a pour effet de fermer la soupape. Les gaz s'échappent alors en partie, et en même temps le réservoir se refroidit. De là, une baisse de pression, qui permet à la sou- pape de se rouvrir, et ainsi de suite. Pratiquement, le fonctionnement est fort irrégulier; en outre, l'absence de compression rend ce moteur peu économique. On sait, en effet, que la compression élève le rendement‘. Il faut donc introduire dans le réservoir un mélange préalablement comprimé; ‘ J'ai établi récemment, par un calcul assez simple et très général, cette propriété de la compression; j'ai fait voir, en outre, que, théoriquement, la compression ne doit pas Ôtre poussée au delà d'une certaine limite, mais que cette limite est bien trop élevée pour intéresser la pratique. 1** 34 mais cela nécessite l'adjonction d’un compresseur. Si l’on se sert d’une pompe, l'appareil perd la simplicité qui constitue son principal avantage. Si l’on fait usage d’un compresseur rotatif, la com- pression est effectuée d’une facon peu économique. A cetégard, l'emploi du pétrole est plus avantageux que celui du gaz, parce qu'avec le pétrole le travail de compression s'applique uniquement à l'air com- burant. D'autres difficultés naissent de la haute température à laquelle se trouvent portés le réser- voir et les aubes. La détente peut être poussée très loin : c’est un avantage dont M. Jouguet, dans son compte rendu sur « la Mécanique au Congrès de Liége » (Bulletin de la Société de lIndustrie minérale), a discuté avec soin la portée. Il fait remarquer que l'emploi d'une turbine ne serait justifié que pour des détentes très fortement pro- longées, faisant baisser la pression au-dessous de la pression atmosphérique : cela exigerait qu'on eût, pour l’échappement du moteur à gaz, l'équiva- lent du condenseur des machines à vapeur. Mais la difficulté peut être tournée en se contentant d'une détente moindre et utilisant la chaleur des gaz pour produire de la vapeur d’eau à basse pression, au moyen de laquelle on actionne une turbine. MM. Armengaud et Lemale ont recours à ce procédé, et, pour simplifier, ils utilisent la vapeur dans la turbine à gaz elle-même. Les aubes sont alors soumises alternativement à un jet de gaz très chaud et à un jet de vapeur relativement froid ; elles prennent, par suite, une température moyenne qui est favorable à leur concentration. M. Esnault-Pelterie a, de son côté, fait breveter une turbine dans laquelle le mélange employé est envoyé par deux ventilateurs aux extrémités d'un réservoir cylindrique. À chaque extrémité se pro- duisent des alternances rapides d'explosion, au contact d'un brüleur, et de dépression. L'explosion ferme une soupape qui sépare momentanément le réservoir du ventilateur; la dépression rouvre cette soupape. Au milieu du réservoir est placé l’ajutage en- voyant le courant brûlé sur les aubes de la turbine proprement dite. Un piston, qui se meut librement dans le réservoir, et forme tiroir devant l’orifice d'insertion de l'ajutage, ne laisse parvenir à celui-ci que le mélange gazeux provenant de celle des parties du réservoir dans laquelle règne la plus haule pression. La turbine Ferranti emploie, pour produire la circulation, une pompe centrifuge multicellulaire qui aspire les gaz brûlés et les refoule dans l'atmo- sphère. La combustion est facilitée par la présence d'un régénéraleur, dans lequel circule l'air destiné à celle combustion et qui est échaufTé par les gaz venant de la turbine. L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE D’autres turbines à gaz ont été imaginées par MM. Deutz, Holzwaath, Schmick, etc. $ 3. — Allumage. La vitesse d'allumage du mélange présente une importance capitale pour le fonctionnement du moteur à explosion. Les expériences classiques de Berthelot, Vieille, Mallard et Le Chatelier ont été effectuées dans des tubes très longs par rapport à leur section, et les résultats obtenus ne peuvent, dès lors, être appliqués au cas qui nous occupe. Clerk et Kôürting ont fait, il y a une vingtaine d’an- nées, des essais dans des cylindres semblables à ceux des moteurs. L'ingénieur allemand Nägel a entreprisrécemment de nouvelles expériences dans une chambre d’explosion sphérique, avec allumage central : ce dispositif présente l'avantage de donner une propagation parfaitement régulière en tous sens, et de retarder le plus possible la rencontre de l'onde explosive avec les parois. Il résulte de ces expériences que, dans le cas d'un mélange d'hy- drogène et d'air, la vitesse d’inflammation dépend avant tout de la proportion d'hydrogène. Pour un mélange donné, l'influence de la pression ini- tiale est négligeable tant que la teneur en hydro- gène est inférieure à 40 °/5. Avec des teneurs plus élevées, la vitesse croit en même temps que la pression et d'autant plus que la proportion d’hy- drogène est plus forte. Le gaz d'éclairage ou de gazogène donne des résultats moins réguliers, ce qui tient sans doute à la difficulté d'obtenir une homogénéité complète. À basse teneur, pour un pareil gaz, la vitesse d'inflammation diminue sen- siblement lorsqu'on fait croître la pression initiale. Quand celle-ci est assez élevée, la diminution de vitesse peut aller jusqu'à empêcher la propagation de l'inflammation. De 15° à 75°, l'élévation de tempé- rature, pour des teneurs en gaz moyennes, comme celles qu'on rencontre dans le moteur à gaz, n'a pas grande influence sur la vitesse d'inflammation. Au contraire, dans le cas des basses teneurs, la même élévation de température entraîne une no- table augmentation de la vitesse d’inflammation. En vue d'éviter les ratés d'allumage, un savant anglais, M. Lodge, a imaginé, sous le nom d'a//u- meur, un dispositif remarquable, qui rappelle un peu l’excitateur de Hertz. Voici le principe de l'appareil: Le circuit secondaire d'une bobine d'induction est interrompu en un point, à la facon ordinaire. De part et d'autre de cette interruption du circuit sont branchés, en dérivation, deux fils aboutissant à deux plateaux P. En regard de ceux-ci sont placés deux autres plateaux P”, formant avec les premiers un couple de condensa- teurs. Les plateaux P' sont réunis : d’une part, au moyen d'un conducteur présentant une assez L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE grande résistance; d'autre part, au moyen d'un cireuit, qu'on peut appeler le circuit tertiaire, interrompu au point où lon veut faire jaillir l'étincelle. Si l'on fait croitre la différence de potentiel aux bornes du circuit secondaire, les plateaux P chargent par influence les plateaux P”. Les électricités repoussées de celui-ci se neutra- lisent à travers le conducteur. Au moment où une élincelle jaillit dans l'interruption du circuit secondaire, ce-circuit se décharge et le condensa- teur tend à revenir à l’état neutre. Mais on observe qu'à ce moment, si la résistance du conducteur est suffisante, les électricités contraires des plateaux P’, au lieu de suivre la voie offerte par ce conducteur, se recombinent par le cireuit tertiaire, en produisant, au passage de l’interrup- tion existant dans le circuit, l’étincelle à forte tension dont on à besoin. La décharge estoscillante, et de très haute fréquence. Grâce à son caractère en quelque sorte explosif, l’étincelle est capable d'allumer des mélanges extrêmement pauvres et de franchir des obstacles, comme l’eau ou l'huile, qui arrêtent les étincelles ordinaires; l’étincelle secondaire, qui jaillit en dehors du cylindre, sert de témoin : tant qu'elle apparait, on peut être assuré de l'existence de l’étincelle tertiaire. L'explosion survenue le 22 mai 1908 dans la raffinerie Say, à Paris, explosion qui à occasionné une mort, de nombreuses blessures et de graves dégâts matériels, est due, suivant toute probabilité, à la brusque inflammation des poussières de sucre mises en. suspension dans l'atmosphère : l’acci- dent doit donc ètre rapproché de ceux qui sont imputables, dans les mines, à l’inflammation des poussières de houille ; il rappelle également les explosions survenues à diverses reprises dans les moulins où mème dans ls simples boulangeries, par suite de la combustion vive de nuages de farine. Si je parle ici de cet accident, c'est parce qu'il se rattache assez directement à la question des moteurs à explosion. Au commencement du xIx° siècle, Niepce, le futur inventeur de la photographie, avait imaginé une machine appelée par lui pyréo- lophore, dans laquelle la force motrice était produite par l'explosion de poussière de Iycopode. C'est là, sans doute, le premier embryon de la modérne machine à gaz ou à pétrole. Et, de nos jours, ainsi que je l'ai indiqué dans la Revue de 1903, M. Diesel a signalé la possibilité que donne son moteur, grâce à la forte compression préalable à laquelle est soumis l'air comburant, de remplacer l'inflammation du pétrole par celle de poussière de charbon. Il est vrai que, dans le moteur Diesel, on cherche à obtenir une combustion rapide plutôt qu'une explosion proprement dite. IV. — DYNAMIQUE APPLIQUÉE. $ 1. — Dynamique de l’aéroplane. L'aviation est à l'ordre du jour, et ses progrès se succèdent avec une rapidilé déconcertante. Mais ils résultent, on doit le reconnaître, des patients tâätonnements et de la beaucoup plus que de l'application de théories scientifiques. Il y à trois ans seulement, M. Vallier concluait une suite de savantes études sur la dynamique de l’aéroplane en disant que le navire aérien ne sem- blait pas pouvoir être réalisé sous forme d’aéro- plane simple, et qu'il faudrait avoir recours à un dispositif mixte, la sustentation étant assurée par un mécanisme d'hélicoptère. On sait que l'expé- rience n'a pas confirmé cette prévision pessimiste. M. Marcel Deprez pense, au contraire, que, dans un avenir peu éloigné, les aéroplanes permettront de remorquer, sans dépenses excessives, de lourdes charges à de très grandes vitesses. Il a, en atten- dant, réalisé, dans son laboratoire du Conserva- toire des Arts et Métiers, le planement stalionnaire d'un aéroplane sans moteur, placé dans un cou- sant d'air incliné sur l'horizontale. M. Esclangon a fait voir à ce propos que le planement est théu- riquement possible, même avec un vent horizontal, pourvu que celui-ci présente des variations de vitesse et qu'elles soient convenablement utilisées par le planeur. Citons encore les travaux du Com- mandant Renard sur le virage, de M. Soreau sur le poids utile d’un aéroplane, de M. Armengaud sur le problème de l’aviation, etc. MM. Bryan et Williams se sont proposé d'étudier la stabilité longitudinale de l'aéroplane, c'est- à-dire d'analyser les mouvements de langage, en supposant le roulis nul. D'après leurs calculs, la stabilité exige, pour un appareil donné, que la vitesse dépasse une limite déterminée, et elle aug- mente, en général, quand on fait diminuer le moment d'inertie. Le capitaine Ferber ne s'est pas contenté de construire et d’expérimenter un aéro- plane; il a essayé de jeter les bases générales de la dynamique de l'aviation. Supposant l'aéroplant pourvu d'un plan de symétrie, il écrit les trois équations du mouvement du centre de gravité, les trois équations de la rotation aulour de ce centre et les trois équations connues qui lient les angles d'Euler aux composantes de la rotation. Cela fait un ensemble de neuf équations, impossibles à intégrer d'une manière générale. Mais remarque que, dans le cas d’un aéroplane dont le moteur ne fonctionne pas, le mouvement tend rapidement à devenir recliligne pourvu que Ja stabilité soit suffisante, et il parvient à déterminer hardiesse des aviateurs l’auteur 36 L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE cette trajectoire finale. Comparant alors ses formules aux résultats de ses propres expériences, il obtient les conséquences que voici : Le coefficient de la résistance de l'air s'élève à 0,7, tandis qu'on admet ordinairement la valeur huit fois moindre 0,085. L'angle d'attaque est constant et indépendant de la vitesse. Si, par la répartition des poids ou la manœuvre du gouvernail de profondeur, on est arrivé à obtenir la descente rectiligne qui donne le plus long trajet, l'angle d'attaque est la moitié de ‘angle d’inclinaison de la descente. Avec l’aéroplane actionné par un moteur, l'angle d'attaque qui convient pour que la résistance à l'avancement soit minima est le même que celui qui donne la pente minima quand le moteur est arrêté. L'effort nécessaire pour maintenir un aéroplane à une hauteur constante est égal à son poids mulliplié par la pente qu'il suit quand le moteur ne marche pas. La recherche des conditions de stabilité est effectuée par le capitaine Ferber en négligeant les variations d'action du vent dues à la rotation du système considéré. Nous ne le suivrons pas dans ses calculs, et nous nous bornerons à signaler les résultats suivants : Un aéroplane stable, sans mo- teur, parcourt, comme il a été dit, une droite des- cendante avec une vitesse uniforme. Si sa vitesse vient à diminuer, il fait une abatée pour la retrou- ver et s'établit sur une droite parallèle à la pre- mière, mais située plus bas qu'elle. Si, au contraire, sa vitesse vient à augmenter, il se cabre pour la diminuer et s'établir sur une droite parallèle à la première, mais située plus haut qu'elle. $ 2. — Hélice aérienne. En ce qui concerne l'hélice propulsive, le capitaine Ferber montre nettement le rôle du recul. On entend par recul absolu la différence entre la vitesse d'avancement V que prendrait l'hélice, en vertu de sa rotation, si elle était emprisonnée dans un écrou solide, et la vitesse réelle du système. Le recul relatif est le quotient du recul absolu par la vitesse V. La poussée F de l'hélice et le travail T nécessaire pour obtenir sa rotation sont des fonctions linéaires du recul relatif. En outre, si l'on désigne par » le nombre de tours par seconde et par d le diamètre, F est propor- tionnel à r°d',et T à n'd°': c'est ce qu'avait déjà démontré le colonel Renard pour les hélices tour- nant sans translation. La question des hélices a été étudiée à un autre point de vue par M. Drzewiecki, qui, dès 1889, dans sa brochure intitulée : « Les oiseaux consi- dérés comme des aéroplanes animés », prophéti- sait le triomphe actuel de l'aviation‘. Cet ingé- ‘ La Aevue a publié, en 1891, un article de M. Drzewiecki nieur a le mérite d'avoir le premier mis en évi- dence l'influence de l'angle d'attaque. Un élément plan qui se meut dans un fluide résistant avec une vitesse uniforme, formant un angle d'incidence invariable avec la direction de cette vitesse, éprouve, de la part du fluide supposé immobile, une résistance constante, qui peut être décomposée en une poussée utile, normale à la vitesse de translation, et une résistance nuisible, de direction opposée à cette vitesse. Le rapport w de la résistance nuisible à la poussée est indépen- dant de la vitesse : il dépend uniquement de l’angle d'incidence et présente un minimum pour une certaine valeur de cet angle. Partant de là, M. Drzewiecki détermine l'hélice propulsive par la condition que tous les éléments rencontrent le fluide sous l’angle d'incidence optimum. Le ren- dement de chaque élément ainsi disposé, c'est- à-dire le rapport entre le travail de la composante parallèle à l'axe et le travail dépensé, dépend de la distance à l'axe de rotation. Il est négatif pour les éléments très voisins de l'axe, nul pour une certaine distance ; puis, quand la distance conti- nue à augmenter, il passe par un maximum, après lequel il décroit indéfiniment. Dans l'air, l'angle d'incidence optimum a pour valeur 1°50° et correspond à une valeur de x égale à 0,044. Pour cette valeur de y, le rendement maximum est 0,9158. On conclut de là que la partie de la palette qui avoisine l'axe de rotation donne un rendement très défectueux. M. Drzewiecki con- seille de ne faire commencer la surface de la palette d’une hélice aérienne qu'à une distance de l'axe égale au quart du rayon extrême, et de ne pas dépasser pour celui-ci une valeur telle que la vitesse linéaire de rotation soit double de la vitesse de progression. La moyenne des rende- ments des diverses parties de la palette est ainsi 0,90. Dans l’eau, l'angle d'attaque optimum s'élève à 3° environ, et le rendement maximum tombe à 0,85. Les conditions précédentes ne déterminent pas complètement la palette de l'hélice ; les dimen- sions doivent être choisies de telle facon que le travail utile ait la valeur requise. M. Drzewiecki fait remarquer à cet égard que, d'après une obser- vation bien connue, une surface plane rectangu- laire qui se meut dans un fluide sous une inei- dence donnée fournit une plus grande poussée utile si la vitesse est perpendiculaire à la plus grande dimension que si elle est perpendiculaire à la plus petite. Il ne faut donc donner à la palette qu'une largeur assez faible. Si l’on ne peut, dans ces conditions, obtenir le travail nécessaire, on est sur « l'aviation de demain », où se trouvent exposées les mêmes idées. L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 3 conduit à augmenter soit le nombre des propul- seurs, soit celui des palettes. Il importe de remarquer que tous les calculs de ce genre reposent sur l'hypothèse, fort discu- table, d'après laquelle chaque élément d'une sur- face courbe éprouverait, de la part de l'air, la même résistance qu'en se mouvant isolément. La théorie ne suffit donc pas pour élucider sûre- ment la question du fonctionnement d'une hélice aérienne : le concours de l'expérience est indis- pensable. Le colonel Renard avait construit, à cet effet, une balance permettant de mesurer la poussée produite par une hélice tournante, sans avancer, à une vitesse déterminée. Le capitaine Ferber se sert d’un chassis muni de quatre roues et portant un moteur qui actionne l'hélice. La traction de celle-ci est mesurée par un peson. On enregistre en même temps le nombre de tours, ainsi que la vitesse d'avancement. Le moteur ayant été étudié préalablement, on connait sa puissance en fonction du nombre de tours: on a donc à sa disposition tout ce qui est nécessaire pour l'étude de la force propulsive et du travail dans les condi- tions les plus variées. En Italie, le lieutenant Crocco emploie un cadre oscillant (suspendu à la cardan), au centre duquel se place l'hélice à essayer. Celle-ci est actionnée par un moteur électrique. Des bras de rappel, disposés parallèlement et per- pendiculairement au plan du cadre, permettent de s'opposer, par le déplacement de contrepoids appro- priés, à la poussée et au déversement dus à la rota- tion de l’hélice. Des manomètres différentiels ser- vent à explorer les masses d'air déplacées pendant le fonctionnement. La vitesse de l'air en chaque point s'obtient par un dispositif analogue à celui du tube de Pitot, bien connu des hydrauliciens. L'hélice aérienne est susceptible d'applications indépendantes de l'aviation. M. Archdeacon l'a utilisée pour faire marcher une bicyclette : solu- tion qui a, entre autres avantages, celui de réduire l'usure des routes et des bandages, par suite de la suppression de l’action tangentielle éprouvée par ces derniers quand ils servent de points d'appui pour l'effort de traction. Elle peut également être employée pour la remorque des Aydroplanes ou bateaux glisseurs. Ceux-ci ont un tirant d'eau très faible, qui les rend susceptible de naviguer sur des rivières très peu profondes, et il convient, en pareil cas, que l'appareil propulseur soit entière- ment émergé. On est ainsi conduit à substituer l'hélice aérienne à l'hélice marine. Le principal inconvénient est qu'on se trouve mis à la merci du vent. Des essais intéressants se poursuivent actuellement en France. En Italie, divers modèles d'hydroplanes à hélices aériennes sont expéri- mentés depuis trois ans par les aérostiers mili- taires. Au mois de mai 1907, ils ont réalisé sur le lac de Bracciano une vitesse de 40 nœuds. $ 3. — Changements de vitesse. Étant donné un arbre moteur qui tourne à vitesse constante, on a souvent besoin de faire varier la vitesse d’un autre arbre commandé par celui-là: c'est le problème du changement de vitesse. La solution la plus usitée consiste dans l’interposition d'un train d’engrenage mobile, dit train baladeur, qui, en se déplacant sous l'action d'un levier, modifie l'équipage de roues dentées. Mais le chan- gement de vitesse s'effectue alors avec une bruta- lité fâcheuse, et, d’ailleurs, n'obtient ainsi qu'un nombre limité de rapports de vitesse. Le changement de vitesse par poulies extensibles ne présente pas les mêmes inconvénients. On peut aussi avoir recours à l'emploi d'un galet cireu- laire reposant par son contour sur un plateau qui tourne à une vitesse constante. Le frottement oblige le galet à tourner lui-même autour de son axe, et cette rotation est transmise à l'arbre dont on veut pouvoir faire varier la vitesse. Cette variation s'obtient en modifiant la distance du galet au centre du plateau. Le changement de vitesse ainsi réalisé est bien continu et se produit sans choc; mais l'adhérence du galet sur le plateau n'est jamais assez grande pour empêcher des glissements, qui compromettent la régularité de la marche et s'op- posent à la transmission d'efforts importants. On connaît encore l'emploi de trains différentiels, dont voici le principe : un pignon denté, dit satellite, est interposé entre deux roues dentées concentriques, et engrène intérieurement avec la plus petite. Son centre est porté par un châssis qui peut tourner autour du centre commun des deux roues. Si la petite roue demeure fixe, la grande roue et le châssis prennent un rapport de vitesse déterminé. Si la petite roue tourne, le rapport des vitesses de la grande roue et du châssis varie avec la vitesse de cette petite roue. Dès lors, pour faire varier ce rapport, il suffit de disposer un frein qui contrarie plus ou moins la rotation de la petite roue. La grande roue est calée sur l'arbre moteur et tourne, par suite, avec une vitesse constante. Le châssis est relié à l'arbre qu'il s'agit de commander. Cette solution a le grave inconvénient de faire intervenir un frottement, celui du frein, qui con- somme du travail en pure perte. M. Gasnier à ima- giné de remplacer le frein par une dynamo montée sur l'arbre de la petite roue, et d'utiliser le courant de cette dynamo pour actionner une dynamo récep- trice montée sur l'arbre de la grande roue, de facon à restituer à celui-ci la plus grande partie de l'énergie absorbée par la résistance tenant ici lieu de frein. On règle le rapport des vitesses en on 38 décalant plus ou moins les balais de la réceptrice. Un changement de vitesse bien différent a été inventé récemment par M. Bardet. Le dispositif est trop compliqué pour que nous puissions faire autre chose que d’en indiquer le principe. Considérons d'abord deux roues dentées placées dans deux plans perpendiculaires, dont l'intersection contient les centres des deux roues. Après avoir disposé l’une de ces roues, R,, de facon que l'intervalle de deux dents consécutives livre passage aux dents de l’autre roue, R,, nous pouvons faire tourner celle-ci sans déplacer la première : le rapport des vitesses est done nul. Dévions maintenant légèrement le plan de R,. Sinous recommencons l'expérience dans ces nouvelles conditions, chaque dent de cette roue, parcourant obliquement l'intervalle de deux dents de R,, va heurter l’une de celles-ci au passage, et imprimer par suite à R, une petite rotation. Mais un engrenage ainsi constitué donnerait naissance à des chocs continuels, et il arriverait même que cer- taines dents de R,, au lieu de rencontrer un inter- valle vide, seraient complètement arrêtées par la présence inopportune de dents de l’autre roue. Pour éviter ce vice rédhibitoire, l'inventeur a ima- giné de rendre les dents de R, mobiles par rapport à cette roue, sauf pendant le court instant où elles sont en prises avec celles de R,, et de les diriger par des guides convenables qui amènent successi- vement chacune d'elles dans la position voulue. L'idée est ingénieuse; il reste à savoir ce qu'elle donnera en pratique. $S 4. — Mesure du travail. La torsion d'un arbre moteur est à chaque instant proportionnelle au moment de l'effort transmis par cet arbre, et sa connaissance permet, par suite, de calculer le travail par seconde, travail égal au pro- duit du moment de l'effort par la vitesse angulaire. Les appareils destinés à mesurer cette torsion ont recu le nom de forsiomètres. M. Hamilton Gibson, dans l’Ængineering de janvier et février 1908, en a décrit plusieurs; je mentionnerai seulement celui de Bevis et Gibson. L'arbre moteur porte deux disques percés chacun d’une raie radiale. Au repos, ces deux disques sont dans un même plan méridien. Si l’on fait tourner l'arbre sans lui imprimer de torsion sensible, le plan des deux rainures laisse, à chaque tour, passer, parallèlement à l'axe, un rayon lumineux provenant d'une lampe à incandescence, rayon qui est recu par une lunette; quand la rota- lion est assez rapide, l'observateur perçoit un éclai- rage à peu près continu, qui s'explique par la per- sistance de l'impression lumineuse sur la rétine. Mais, dès que l'arbre se tord, les deux rainures éprouvent un léger déplacement relatif, en sorte que le rayon se trouve dévié et ne peut plus atteindre L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE la lunette, Pour retrouver l'impression lumineuse ; il faut dévier l’axe optique de celle-ci, ce qu’on fait à l’aide d’une vis. Un vernier mesure le déplace- ment. On peut ainsi mesurer, sans erreurs prove- nant de l'interposition de mécanisme amplificateur, des angles de torsion de l’ordre du centième de degré. En se placant à 15 mètres des disques et dis- posant le vernier à 350 millimètres de l'axe de rota- tion, on évalue par ce procédé la puissance à 1 /400 près. Ce procédé est remarquable par l'exactitude et la rapidité des mesures. $ 5. — Appareils stabilisateurs. Un corps de révolution, qui tourne rapidement autour de son axe d'abord immobile, continue à tourner indéfiniment autour de cet axe tant qu'au- cune cause étrangère ne vient troubler son mouve- ment, et il oppose aux efforts tendant à dévier l’axe une résistance d'autant plus grande que la rotation est plus rapide; en outre, la déviation de l'axe se produit perpendiculairement à la direction de l'effort. Cette propriété, qui constitue le principe de l'effet gyroscopique, est susceptible de nom- breuses applications. Je citais, à cet égard, dans la Revue de 1903, la flexibilité donnée à l'arbre de la turbine de Laval, flexibilité grâce à laquelle l'axe se maintient spontanément immobile, ou, pour parler plus exactement, ne présente que des vibra- tions imperceptibles, tandis qu'un axe rigide ne pourrait résister aux forces d'inertie dues à l'énorme vitesse de rotation : variante scientifique de la fable du chêne et du roseau. Depuis lors, le jeu du dia- bolo a vulgarisé la stabilité particulière dont il s'agit ici. Le monorail Brennan dérive du même principe. Cette invention, qui a déjà été expérimentée en petit, consiste à obtenir une voiture en équilibre sur un seul rail. La voiture porte, transversalement, une boîte, renfermant deux gyroscopes qui tournent en sens contraire sous l’action de deux dynamos. On à fait le vide dans la boîte, de facon à supprimer la résistance de l'air. L'axe de rotation de chaque gyroscope est mobile autour d’un point fixé à la boîte; ilest guidé par une coulisse qui ne lui permet que de faibles variations d'inclinaison. Si le véhicule vient à pencher, l'axe du gyroscope conserve une direction invariable dans l’espace jusqu'à ce qu'il touche la coulisse; à ce moment, il exerce sur celle-ci une pression qui redresse le véhicule. Ces deux gyroscopes ajoutent leur effet. Il sont con- jugués entre eux de telle manière que, dans le passage d’une courbe de la voie, leurs réactions s'équilibrent et ne produisent aucune résistance. Un procédé analogue a été imaginé par M. Otto Sehlick pour combattre en mer le roulis. Un volant, L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE animé d'une grande vitesse de rotation autour de son axe d'abord vertical, est placé dans un cadre mobile autour d'un axe transversal perpendiculaire au plan de symétrie du bateau. Le centre de gravité du système est situé assez bas pour que, en temps calme, l'axe du volant demeure vertical. Dès que le roulis se fait sentir, le volant oscille. Un frein hy- draulique amortit ses oscillations et absorbe ainsi l'énergie communiquée au bateau par les vagues. Des essais ont été faits en 1906 sur le vapeur Sechär, ancien lorpilleur de la Marine allemande mesurant 35,25 de longueur sur 3",60 de largeur maxima et 1,0% de tirant d'eau. Le volant avait 1 mètre de diamètre extérieur et pesait 502 kilogs. Aucune installation électrique n'existant à bord, on avait pris le parti de faire tourner le volant à l’aide de la vapeur. À cet effet, le volant était disposé en forme de turbine; la vapeur entrait par l’un des tourillons de l'axe transversal et sortait par l'autre. Un régulateur à force centrifuge fermait l'admission dès que la vitesse dépassait 500 tours par minute. Le nombre des oscillations du navire nécessaire pour arriver à l'amplitude d'un demi-degré était mesuré au moyen d'un pendule enregistreur. Le mouvement de roulis était obtenu artificiellement à l’aide d'une grue tirant sur l’un des bords et dis- posée de facon à être facilement détachée au mo- ment voulu. On à constaté, par exemple, qu'avec une amplitude initiale d’oscillation égale à 13°40' le bateau faisait, volant arrèté, 95 oscillations avant d'arriver à l'amplitude d’un demi-degré, tandis que, volant en action, 4 demi-oscillations suffisaient pour ramener l'amplitude de 15° à 1/2 degré. Dans d'autres expériences, exécutées à l'embou- chure de l'Elbe, on à reconnu que les oscillations dues à l’action des vagues tombaient de 15 ou 20° à 1 ou 2° seulement dès que le volant fonctionnait. En présence de ces résultats, la Hamburg America Line a décidé le montage d'un semblable volant sur l’un de ses grands vapeurs. Au sujet du roulis, signalons un autre procédé d'amortissement dû à M. Crémieu et consistant à déposer à fond de cale une masse susceptible de se déplacer transversalement dans un fluide visqueux qui développe un travail négatif propre à absorber la force vive des oscillations. Le principe de l'effet gyroscopique permettrait également d'augmenter la stabilité des machines volantes : cette remarque à été faite en France par M. Regnard et en Angleterre par M. Stuart Bruce. $ 6. — Mouvements vibratoires. J'ai déjà, dans la précédente Revue, insisté sur les phénomènes de synchronisme qui exagèrent, dans certains cas, l'amplitude des oscillations des sys- tèmes élastiques. Le tachymètre de Frahm est basé 39 sur cette propriété. L'élément essentiel est une sorte de peigne formé par une suite de lames d'acier, de 40 à 50 millimètres de longueur et 25 millimètres d'épaisseur, encastrées dans une pièce massive. L'extrémité libre de chaque lame est recourbée à angle droit et peinte à l'émail blanc, de facon à être bien visible. Dans l'angle formé par la tête et le corps de la lame, on dépose une goulte de soudure au moyen de laquelle on obtient un nombre de vibrations par seconde allant de 35 à 100. Un pareil système, appliqué sur le bâti d’une machine dont on veut mesurer la vitesse, éprouve des secousses qui ont pour effet de faire vibrer, avec une intensité particulière, la lame dont la période propre est sensiblement égale à celle des oscillations de la machine; on voit alors la tête émaillée de cette lame prendre un mouve- ment très accentué, tandis que les autres lames paraissent demeurer au repos. L'appareil est com- plété par une graduation appropriée, qui permet de lire immédiatement la vitesse, en tours par minute, correspondant à la lame observée. Le tachymètre Luc Denis dérive d'un principe un peu différent. Soit un solide mobile autour d'un axe vertical O et sollicité par un attaché d’une part en un point À de ce corps, d'autre part en un point fixe B. Le système étant d'abord au repos, le ressort à une tension nulle, el à ce moment la droite AB est, par construction, perpendiculaire à OA. Soit x la longueur OA. Si le corps tourne d’un très petit angle 0, le ressort éprouve la variation de longueur 19, qui lui donne une tension /x6, { désignant une constante. Sup- posons maintenant qu'après avoir écarté le corps de sa position d'équilibre on l’abandonne à lui- même. Il va effectuer des oscillations pendulaires, et, si l’on appelle 1 son moment d'inertie, la durée CPR ie ; de ces oscillations est rl : elle varie donc x ressort en raison inverse de la racine carrée de x. Partant de là, M. Luc Denis a construit un instrument fort intéressant, dont la description m'entraînerait trop loin. Une partie de l'appareil oscille sous l’action d'un ressort; une autre partie recoit un mouve- ment oscillatoire synchrone de la rotation de l’arbre dont on veut avoir la vitesse. Ce ressort est disposé de telle facon que sa ligne d'action se déplace jusqu’à ce que les deux parties vibrent en concordance. On concoit, d’après ce qui vient d'être dit, qu'au moment où la ligne d'action devient immobile, il suffit de connaitre sa position pour en déduire la durée d’oscillation de la partie sur laquelle agit le ressort el pour avoir, par con- séquent, la vitesse cherchée. Les trépidations des machines, transmises par le sol ou par les murailles, troublent souvent le 40 L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE repos des personnes habitant le voisinage; elles | de là résultent des à-coups occasionnant diverses peuvent même, quand elles ont une grande inten- sité, lézarder et désagréger les constructions. Ces inconvénients sont, en général, plus marqués aux étages supérieurs qu'au voisinage du sol; on sait qu'un fait analogue s'observe dans les tremble- ments de terre. M. Prache s’est proposé de recher- cher théoriquement et pratiquement les conditions à remplir pour combattre cette propagation des trépidaüions. Le meilleur isolant est le caoutchouc, substance à la fois incompressible et très élastique. Les vibrations s y propagent avec une faible vitesse de quelques mètres seulement par seconde. Quand, ensuite, elles atteignent la surface de séparation du caoutchouc et d'un milieu où la propagation serait beaucoup plus rapide, le sol, par exemple, elles éprouvent, d'après M. Prache, une réflexion totale, et c’est là le principe de l'isolement. Les supports isolants doivent, d'ailleurs, être placés aussi près que possible de points où existent des nœuds, et non pas des ventres de vibration. Il est facile, dit l’auteur, de soustraire ainsi un bain de mercure aux trépidations produites par le passage des voitures. Mais, en général, il suffit, dans la pratique, d'établir un isolement relatif, c'est-à-dire d'amortir assez les vibrations pour qu'elles cessent d'incommoder les intéressés. On doit ajouter que l'isolement n'est satisfaisant que si tous les contacts ont lieu par l'intermédiaire du caoutchouc : seul contact rigide, provenant par exemple d’un boulon servant à maintenir le caoutchouc, suffit ‘pour livrer passage aux trépidations. un ST. — Freins. La question du freinage est une de celles qui intéressent le plus vivement la sécurité de la cir- culation des trains. Elle est suffisamment résolue, en ce qui concerne les trains de voyageurs, par l'adoption des freins continus automatiques, à air comprimé, dont l'emploi est maintenant général. La même solution n'a pu jusqu'ici être appliquée trains de seulement en raison de la dépense élevée qu'entrainerait l'appli- cation du système à tout le matériel des chemins de fer, mais encore à cause des difficultés pra- tiques résultant de la grande longueur de ce genre de trains. La transmission des variations de pres- sion, produites par le mécanicien en tête de la conduite qui règne d’un bout à l’autre du train, exige un cerlain temps, pendant lequel les freins des véhicules ne se serrent que successivement; aux marchandises, non 4 Rappelons à ce sujet que M. Hamy a réalisé, à l'Obser- valoire de Paris, un bain de mercure parfaitement stable en supportant la cuvette par des ressorts longs et très extensibles, et en éloignant le plus possible le centre de gravité du centre d'oscillation. avaries, notamment des ruptures d'attelage. Je ne parlerai ici que des essais les plus récents. Au mois de mai 1907, des expériences ont été entreprises sur la ligne de l’Arlberg, par l'Admi- des Chemins de fer de l'Etat autri- chien, en vue d'étudier l'application d’un frein continu à vide sur de longs trains de marchan- dises. Dans le système employé, la rapidité de la propagation de la pression est obtenue par l'ou- verture automatique, de proche en proche, de valves de rentrées d'air placés sous chaque véhi- cule; elle s'élève à 360 mètres par seconde. Le remplissage des cylindres à frein est ralenti par des diaphragmes, de facon à obtenir la douceur. voulue dans l'application du sabot. Une soupape automatique, placée sur le dernier véhicule, renvoie de queue en tête la propagation initiale venue de tète en queue qui n’a produit tout d'abord qu'un demi-serrage, de telle sorte que la simultanéité du serrage total sur les divers véhicules soit approximalivement réalisée. Le train expérimenté était composé de soixante- quinze véhicules, non compris la locomotive et le tender. M. Bochet, que l'Administration des Tra- vaux publics avait chargé d'assister aux essais, à constaté la douceur avec laquelle s’effectuaient la plupart des arrêts. Ces expériences ont été reprises en juin 1908 dans la plaine des environs de Vienne, et l’on a pu porter à cent le nombre des véhicules sans observer de réactions violentes. Il est très important, dans le freinage d’un véhi- cule de chemin de fer, de ne jamais atteindre, pour chaque roue, une pression telle que l'effort retar- dateur exercé par le sabot du frein dépasse la résistance tangentielle que le rail oppose au glis- sement de la roue, sans quoi le patinage se produit aussitôt, et ce phénomène n’a pas seulement l'in- convénient d'user rapidement le bandage de la roue : il diminue, en outre, dans une forte mesure l'efficacité du frein. La résistance au glissement est égale à la pression de la roue sur le rail, mul- üipliée par le coefficient de frottement : telle est done la limite au-dessous de laquelle doit demeurer l'effort retardateur du sabot, et le serrage de celui-ci doit être déterminé en conséquence. Le frein automatique maximus résoud ce problème par le déclanchement d'un doigt métallique qui se produit dès que le serrage du sabot approche de la valeur correspondant à l'effort limite, déclan- chement ayant pour effet de caler le piston dans le cylindre du frein. Mais, comme la charge des wagons de marchandises est sujette à de grandes variations, il faut, au départ, régler le frein de chaque wagon d'après sa charge. C'est là une sujétion à laquelle échappe le frein de MM. Chapsal nistralion L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE = et Saillot. Dans ce système, la timonerie est dis- posée de telle facon que la flexion des ressorts de suspension, proportionnelle à la charge, règle automatiquement la limite de serrage. Signalons encore un ingénieux dispositif, dù également à M. Chapsal, et ayant pour but d'em- pêcher automatiquement les dérives. On dit, dans le langage des chemins de fer, qu'il y a dérive lorsque, à la suite d'une rupture d’attelage sur- venue sur une rampe, l'arrière du train rebrousse, entrainé par la pesanteur. Avec les freins à air, ce danger n’est guère à craindre, car ceux-ci bloquent toutes les roues par le seul fait de la rupture d’at- telage. Mais, pour les trains de marchandises, on continue, nous l'avons dit, à se contenter de freins à main gardés par les conducteurs, et si, au moment d'une rupture d’attelage, le conductenr d'arrière est inattentif, ou même endormi, la sécu- rité se trouve gravement compromise. Le principe de l'appareil Chapsal est le suivant : l’un des essieux de chaque véhicule freiné porte un tam- bour sur lequel sont articulées des cames disposées de telle manière que, si la rotation a lieu dans un sens, elles fassent saillie hors du tambour, tandis que, si elle à lieu en sens contraire, elles s'effacent à l’intérieur. Dans le premier cas, elles viennent, l’une après l’autre, frapper un levier qui déclanche le frein. En fait, un wagon n'a ni avant ni arrière : tout dépend de la facon dont il est attelé dans le train. Aussi a-t-il fallu munir le tambour d'une double couronne de cames, éta- blie de facon que, quel que soit le sens de la marche, les cames de l’une des couronnes soient en saillie, tandis que celles de l’autre couronne demeurent effacées. Une poignée placée dans la vigie du conducteur permet à celui-ci de paralyser celle des deux couronnes qui empêcherait la marche en avant. Dans les manœuvres de gares, pour lesquelles il faut pouvoir aller dans les deux sens, la poignée est amenée à une position inter- médiaire, qui paralyse à la fois les deux cou- ronnes ; la poignée obstrue alors le siège du con- ducteur, en sorte que celui-ci ne peut se rasseoir avant d’avoir remis en action l’une des deux cou- ronnes. Ne quittons pas la question des chemins de fer sans mentionner le curieux tracteur-chenille con- Struit par la maison Hornsby et récemment mis à l'essai par l'armée anglaise. Cet appareil, destiné à circuler dans les plus mauvais terrains, trans- porte avec lui son chemin de roulement, constitué par une bande sans fin qu'on déroule entre la terre et les roues de la machine. Cette bande com- prend deux chaînes disposées des deux côtés du tracteur et commandées par une roue motrice. Chacune de ces chaînes est alternativement com- posée de mailles principales, renfermant des :tas- de mailles plus petites, qui s'accrochent à la roue motrice. Ces mailles principales sont butlées de seaux en bois qui s'appuient sur le sol, et telle sorte que la chaine ne puisse jamais prendre forme concave vers l'extérieur. La direction s'obtient au moyen d'un différentiel permettant d'imprimer aux deux chaines des vitesses inégales. Ce singulier véhicule présente un peu l'aspect d’une chenille, dont les pattes seraient représentées par les tasseaux de bois, et de là vient son nom. une V. — QUESTIONS DIVERSES. $ 1. — Arc-boutement. On connait depuis longtemps les effets d’arc-bou- tement dus au frottement : certains mouvements géométriquement possibles se trouvent empêchés par la résistance au glissement, quelle que soit la grandeur des forces mises en jeu, à condition seu- lement que celles-ci ne s'écartent pas de certaines directions déterminées. La presse à vis, le valet de menuisier, l’encliquetage Dobo (utilisé dans les roues libres de certaines bicyclettes) fournissent des exemples d'arc-boutement. L'appareil dit au- toloc, d'invention récente, est une sorte d’encli- quetage Dobo à double effet. Il constitue un ap- pareil de calage au moyen duquel un arbre mobile autour de son axe demeure automatiquement bloqué dans la position où on l’abandonne, tant qu'on n'agit pas sur un levier spécial de déblo- quage dont la manœuvre n'exige qu'un effort minime. L'organe essentiel comprend deux billes qu'un ressort tend à écarter l’une de l’autre, et qui se trouvent coincées dans l’espace compris entre un anneau extérieur el une came intérieure, à contour légèrement elliptique. J'ai donné dans la Revue de Mécanique la théorie complète de cet appareil. L’autoloc se prête à bien des emplois : adapté, par exemple, à un frein de bicyelette, il assure la persistance du serrage, alors même qu'on abandonne la manette du frein, et supprime par conséquent la fatigue que le frein ordinaire impose, sur les longues descentes, à la main du cyeliste. On obtient le desserrage en ramenant la manette à sa position initiale. $ 2. — Roulements sur billes. Les roulements sur billes, qui ont pris un grand développement d'abord dans la construction des vé- locipèdes, puis dans celle des automobiles, tendent à se répandre de plus en plus, en raison de l’aug- mentation de rendement qu'ils procurent : ils rem- placent, en effet, le frottement de glissement par la résistance au roulement, qui est beaucoup plus faible. Mais un roulement sur billes, pour bien 42 L. LECORNU — REVUE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE fonctionner, doit être établi dans de bonnes condi- tions. Les billes doivent être en acier fondu, très dur, et parfaitement calibrées : la maison Glaenzer, qui s'est fait une spécialité de cette fabrication, garantit la forme sphérique à deux millièmes de millimètre près. Il faut autant que possible éviter que les billes se touchent, sans quoi elles dévelop- peraient un frottement mutuel qui entrainerait une consommation de travail. Parfois on sépare les billes les unes des autres par de petits ressorts en spirale; ou bien encore (système Conrad) on les emprisonne individuellement dans des alvéoles hémisphériques qui sont portées par un cercle de bronze et disposées de facon à laisser à découvert la partie des billes qui porte la charge. Les chaînes à rouleaux ont également l'avantage de substituer le roulement au glissement. La même idée a conduit à la création de la transmission Pekrun : c’est un engrenage à vis sans fin, dans lequel les dents du pignon sont remplacées par des cônes, fous sur leurs axes et tangents à la surface de la vis. $ 3. — Travail des métaux. L'assemblage des pièces de tôle s'obtient, comme l'on sait, en croisant ces pièces de facon à mettre en correspondance des lignes de trous percés à l’avance, puis introduisant dans ces trous des rivets à une tête, chauffés au rouge, dont on écrase l'extrémité pour former une seconde tête. Le procédé est fort ancien : on a retrouvé des ri- vures remontant à l'époque gallo-romaine. M. Fré- mont à fait une étude approfondie de cette opéra- tion. A la suite de nombreux essais, il recommande l'emploi de rivets en acier doux possédant 35 à | 45 kilogs de résistance à la traction, avec striction d'au moins 61 °/,. Les aciers au nickel sont parti- culièrement avantageux, en raison de leur résis- tance vive. Il importe surtout que le métal ne soit pas fragile. Les rivets actuellement employés rem- plissent mal les trous, du côté de leur tête, surtout s'ils ont une grande épaisseur à serrer; il faudrait, d'après M. Frémont, adopter un type de rivet pré- sentant, entre sa tête et son corps cylindrique, un renflement destiné à s'écraser pendant le rivetage, en fournissant le métal nécessaire au remplissage du trou. Le température initiale du rivet a une grande importance : il faut que le rivet soit chauffé uniformément sur toute sa longueur, qu'il soit assez chaud pour bien se mouler dans son loge- ment et que, néanmoins, sa température ne dépasse pas une certaine limite, déterminée d'après sa com- position chimique, limite au delà de laquelle le métal serait altéré. Le pression du rivetage doit atteindre au moins 90 kilogs par millimètre carré | de section, dans le cas du fer, et 120 kilogs dans le | cas de l'acier; elle doit être maintenue au moins pendant trente secondes. Les riveuses hydrau- liques actionnées par accumulateur sont préférables à toutes les autres, parce qu’elles fournissent une quantité d'énergie considérable en un court espace de temps et permettent, en outre, de maintenir une pression constante pendant tout le temps néces- saire. Le scléroscope de MM. Shore et Héroult est un appareil d'une grande simplicité, permettant de déterminer rapidement la dureté d’un métal sans détérioration de la pièce essayée. Il se compose d’un tube vertical gradué, en verre, disposé au-dessus d'une enclume. On place la pièce sur l’enclume et, au moyen d'un déclanchement, on laisse tomber dans le tube, d'une hauteur de 250 millimètres, une bille d'acier de deux grammes et demi. On lit, avec une loupe, la hauteur à laquelle rebondit la bille. Des essais répétés ont montré que cette hauteur cor- respond à la dureté du métal éprouvé et donne des résultats bien comparables. M. Taylor a communiqué, en 1905, à la Société américaine des Ingénieurs mécaniciens, le résumé de recherches qu'il a effectuées pendant vingt-six ans sur le travail des outils, et notamment des tours. Ce labeur considérable lui a permis de définir la meilleure forme de l'outil, la meilleure vitesse, le meilleur serrage. Le problème dépend de douze variables principales : qualité du métal, diamètre de l'objet à tourner, profondeur de la coupe, épaisseur du copeau, etc. Les expériences ont été exécutées en faisant varier successivement chacune des données. Après avoir établi des formules résu- mant ses innombrables essais, l’auteur à construit une règle à calcul permettant l'application rapide de ces formules. Il est ainsi arrivé à doubler la production d'un atelier marchant d'après les anciennes méthodes, et à transformer des pertes de 20 °/, en bénéfices de pareille importance. En ce qui regarde le forage et l’alésage des métaux, M. Taylor renvoie à une série d'expériences failes par un Francais, M. Codron, et publiées en 1903 dans le Bulletin de la Société d'Encouragement. Ces expériences concernent la grandeur des pres- sions nécessaires pour couper non seulement des aciers de dureté variée, mais aussi la fonte, le bronze et autres métaux. M. Taylor ajoute, et j'ai plaisir à reproduire ses paroles : «Les expériences de M. Codron sont, sur presque tous les points, faites avec la perfection qui caractérise les tra- vaux de tous les meilleurs savants français ». L. Lecornu, Ingénieur en chef des Mines, Professeur à l'Ecole Polytechnique et à l'Ecole supérieure des Mines, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 13 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Cantor (Moritz). — Vorlesungen über Geschichte der Mathematik. Vierter Band von 1759 bis 1799. (Lec- TURES SUR L'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES. / Ve volume de 4759 à 1799). 4° et 5° livraisons par À. VON BRAUNMUHL, V. KoumereLz, G. Lorra, G. Vivanri, C. R. WaLLNER et M. Canror. — B.-G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1908. Ces deux livraisons terminent le quatrième et dernier volume du Cours sur l'Histoire des Mathématiques dont nous avons déjà analysé les précédents fascicules ‘. M. A. von Braunmühl résume les progrès que fit la Trigonométrie durant cette période de quarante années. Euler introduit, dans les formules trigonométriques, les abréviations'dont nous nousservons encore aujourd'hui, en désignant les angles d'un triangle par A, B, C et les côtés opposés par les lettres minuscules correspon- dantes a, b, ce, tandis que Lambert utilise les fonctions hyperboliques en Trigonométrie et démontre le premier d'une facon rigoureuse que z est irrationnel. De leur côté, divers mathématiciens japonais, Arima et Kuru- shima entre autres, s'efforcaient également de trouver des valeurs approchées de ce fameux rapport du dia- mètre à la circonférence. Avec M. V. Kommerell, nous passons en revue les travaux relatifs à la Géométrie analytique pendant cette même période. Charles Hutton publie d'excellents Eléments des sections coniques (1789), que Montucla regardait comme un modèle de précision et de clarté. Edward Waring découvre, après les Bernouilli, Clairaut et Euler,de nouvellespropriétés des courbesalgébriques, et le général Meusnier énonce le remarquable théorème qui porte son nom (le rayon de courbure d’une section oblique d'une surface est la projection sur le plan de cette section du rayon de courbure de la section faite par le plan normal mené par la même tangente), théo- rème qui complétait la théorie d’Euler sur les cour- bures des sections normales faites, en un même point, dans une surface. M. Gino Loria écrit aux pages suivantes l'histoire de la Perspective et de la Géométrie descriptive. Après un court résumé de la première depuis le Moyen-Age jusqu’à la fin du xvu* siècle, il arrive à la période d’or de la Perspective théorique, qu'illustrèrent Jean Ber- nouilli, Brook Taylor, Zanotti, Lambert et Gustav Karsten. Puis nous assistons à la naissance de la Géométrie descriptive, géniale création de Gaspard Monge, qui avait d’abord pour but de « représenter sur une feuille de dessin n'ayant que deux dimensions, savoir : longueur et largeur, tous les corps de la Nature qui en ont trois, longueur, largeur et profondeur, pourvu néanmoins que ces corps puissent ètre définis rigoureusement », et, en second lieu, de « donner Ja manière de reconnaître, d'après une description exacte, les formes des corps, et d’en déduire toutes les vérités qui résultent et de leur forme et de leurs positions res- pectives ». Le développement du Calcul infinitésimal est esquissé par la plume érudite de M. G. Vivanti. Là les noms des grands savants d'Alembert, Lagrange, Lazare Carnot, Laplace, Euler, voisinent avec ceux, moins connus, de la mathématicienne Agnesi et de ses compatriotes Mal- fatti et Riccati. M. C. R. Wallner étudie les Mémoires plus ou moins remarquables de Condorcet, de Charles 4 Revue générale des Sciences pures U 6 et appliquées, 19e année, n° 4 (29 février 1908), p. 163. ET INDEX et de Trembley sur les équations différentielles. Puis, nous retrouvons encore Lagrange, qui, dans sa Théorie des fonctions analytiques (1797), s'attacha à substituer au Calcul différentiel un ensemble de propositions basées sur le développement des fonctions algébriques en série, Laplace qui perfectionna les procédés d'inté- gration des équations aux différentielles partielles, et Lacroix dont le Traité de Caleul différentiel et intégral fut longtemps classique. Enfin, pour clore le volume, M. Cantor relate, année ar année, toutes les découvertes saillantes qui, de 1758 à 1799, se produisirent dans les divers domaines de la Mathématique. Ce dernier travail et une table fort complète facilitent les recherches dans cet ou- vrage, qui restera le véritable vade mecum des histo- riens scientifiques. Jacques Boyer. 2° Sciences physiques Eiffel (G.), Ancien Président de la Société des Inge- nieurs civils de France. — Comparaisons gra- phiques des valeurs mensuelles, saisonnières et annuelles des principaux éléments météorolo- giques dans diverses stations françaises pour l’année 1906. (Complément à l'Atlas.) Sous ce titre, M. Eiffel nous donne une série de plan- ches destinées à être encartées dans l'Atlas météorolo- gique de 1906, que la Revue a analysé déjà". Ce sont des cartes de France sur lesquelles sont marquées les stations étudiées ; autour de chacun des points cor- respondants, des vecteurs, de longueur, de directionet de couleur diverses, figurent immédiatement ou une donnée météorologique, ou la différence entre cette donnée au lieu considéré et une station de compa- raison. Les températures, rapportées à la température normale au Pare Saint-Maur, les valeurs de l'humidité relative, les hauteurs d’eau tombées, les nombres de jours pluvieux, les valeurs de la nébulosité et de l’inso- lation, les fréquences des directions de vent, les parcours diurnes du vent, sont ainsi représentés gra phiquement sous une forme qui permet une compa- raison rapide et intuitive des climats des diverses régions. BERNARD BRUNHES, " Directeur de l'Observatoire du Puy-de-Dôme. Van der Waals (D'J.-D.), Professeur à l Université d'Amsterdam. — Lehrbuch der Thermodynamik in ihrer Anwendung auf das Gleichgewicht von Sys- temen mit gasformig-flüssigen Phasen, bearheitet von Dr Px. Konnsramm (Cours DE THERMODYNAMIQUE APPLIQUÉE À L'ÉQUILIBRE DES SYSTÈMES A PHASES GAZEUSE ET LIQUIDE, remanié par M. LE D' Pa. Konnsraw). 1e partie. — 1 vol. in-8° de XII-28T pages avec 15 figures. Maas et van Suchtelen, éditeurs. Leipzig- Amsterdam, 1908: Depuis longtemps le Professeur J.-D. Van der Waals avait été sollicité de publier ses Leçons sur la Thermo- dynamique, mais il avait toujours jusqu'ici cru devoir repousser ce désir. La véritable raison était celle-ci : l'étude des mélanges binaires est, dans l'esprit du savant professeur d'Amsterdam, l'œuvre maitresse de ces quinze dernières années et la plus belle application, à son sens, de la Thermodynamique,etil ne s'est décidé à déférer au désir exprimé par ses amis el ses admira- teurs que lorsqu'il lui a semblé que les grandes lignes 1 "Revue gén. des Sc., t. XVII (1906), p. 149. _ BIBLIOGRAPHIE de la théorie des mélanges binaires étaient fixées d'une manière définitive, Les lecons du Maitre, recueillies à l'Université d'Amsterdam par M. Ch. Kohnslarmm, ont été traduites en allemand par lui avec une fidélité que le Professeur Van der Waals s'est plu à reconnaître; nous sommes donc sûrs de posséder sa pensée, Il est intéressant de constater la différence d'état d'âme du savant néerlan- dais et de nos maitres français; ces derniers restent tidèles à la conceplion primitive de la Thermodyna- nique, c'est-à-dire d'une science fondée uniquement sur le principe de l'équivalence etle principe de Carnot; tout au plus, cette science s'aventure-t-elle entre leurs mains dans le domaine des gaz parfaits, auquel cas leur équation d'état : pv RT est considérée comme intuilive. Celle Thermodynamique parait beaucoup trop restreinte à lillustre professeur d'Amsterdam el il appelle à son aide la théorie cinétique des gaz pour en obtenir l'équation d'état et d'autres vues relatives à la chaleur spécifique des gaz à volume constant; c'est celle Thermodynamique qu'il nous développe dans le cas particulier des mélanges binaires. La première moilié seule est parue; elle se divise en quatre parties très inégules. La première partie, de beaucoup la plus courte, est relative au principe de l'équivalence et à ses applicu- tions : les différentes chaleurs spécifiques d'un corps, l'équation des adiabaliques et la valeur de — dans le mn cas des gaz parfaits. La deuxième partie, beaucoup plus importante, s'oc- cupe du principe de Carnot et de ses applications : elle se divise en trois chapitres, dont le premier est relatif au second principe, aux tempéralures absolues, à l’entropie. Le chapitre Il s'occupe du calcul des grandeurs calorimétriques, chaleurs spécifiques à vo- lume ou à pression constante, chaleur spécifique le long des deux branches de la courbe de saturation, chaleur latente de vaporisation ordinaire, interne ou externe; à côté des relations théoriques, l’auteur s'oc- cupe de la détermination expérimentale de ces quan- tités; le chapitre HE est relatif aux applications du domaine hétérogène. La troisième partie est consacrée au principe général d'équilibre et à ses applications. Le chapitre Î étudie les fonctions (hermodynamiques de Gibbs, savoir l'énergie libre 4, la fonction Ket la fonction y. Le cha- pitre Il traite des cinq formes que peut affecter le prin- cipe d'équilibre : il montre comment on peut déduire les conditions d'équilibre du principe d'équilibre et il étudie les conditions de la stabilité, la signitication géométrique des conditions de stabilité sur la surface de Gibbs, la courbe spinodale, la courbe binodale, le point de plissement, ele, Le chapitre IE est relatif aux applications du principe d'équilibre au mélange de liquide el de vapeur et à la dissociation d'un corps. Entin le chapitre IV, qui termine cette partie essen- tielle du livre, étudie l'action des forces extérieures sur un Système. La quatrième et dernière partie traite de la théorie thermodynamique de la capillarité. Le premier cha- pilre expose la théorie de Laplace; le chapitre suivant diseute les conditions d'équilibre et de stabilité: le chapitre HI étudie la pression extérieure et la tension superficielle et traite en particulier la question de l'épaisseur de la couche superticielle, Le livre se ter- mine par un chapitre dans lequel l'auteur donne la solution du problème capillaire pour une sphère. Comme on le voit, le cours de Thermodynamique du professeur Van der Waals porte fortement l'empreinte des sujets de recherches familiers à son auteur; il dif- lère profondément des cours français et il n'en est que plus intéressant à étudier, Il est à prévoir que le tome II l'accentuera davantage encore en originalité, E. Marnras, Professeur à la Faculté des Soiences de l'Université de Toulouse. - ANALYSES ET INDEX Swarts (F.), Professeur à l'Ecole du Génie civil de l'Université de Gand, chargé du Cours de Chimie générale à la Faculté dés Sciences, membre cor- respondant de l'Académie royale de Belgique. — Cours de Chimie inorganique. — 1 vo/. in-8° de 106 pages. (Prix : 15 fr.) A. Hermann, éditeur. Paris, 1909. Le Traité de Chimie organique publié l'an dernier par M. Swarts, el dont nous avons rendu compte ici même, laissait prévoir le Traité de Chimie inorganique d'aujourd'hui. Dans les deux volumes, nous avons noté le même souci des idées générales, associé à l’exacti- tude dans l'exposé des faits particuliers. Plus de la moitié de l'ouvrage est consacrée à ce qu'on appelle généralement la Chimie physique. L'au- teur en à basé l'exposé à la fois sur la Thermodyna- mique et sur l'hypothèse atomique ; il a réussi, avec des calculs peu nombreux, en n'employant qu'excep- tionnellement les Mathématiques supérieures, à donner de cette science des clartés très suffisantes pour la plu- part des chimistes, Aussi ne saurions-nous trop recom- mander la lecture de cet ouvrage aux jeunes chimistes français, que tantôt l'enseignement, tantôt les examens de nos Facultés, laissent trop désarmés à ce point de vue. M. Swarts n'a pas voulu diviser sen volume en deux parties distinctes : Chimie physique, Chimie descriptive; il a tenu à ce que les deux se pénètrent réciproque- ment; aussi a-t-il exposé les diverses théories de la Chimie physique (Cinétique des gaz, lois de Berthollet, théorie des Ions, Electrolyse, Thermochimie, potentiel thermodynamique, etc.) au fur et à mesure qu'un fait particulier lui en donnait l’occasion. Cette méthode, un peu artificielle, est sans doute destinée à reposer l'es- prit du lecteur, en mettant en jeu successivement son raisonnement et sa mémoire. La Chimie physique nous à paru exposée avec com- plaisance. Mais, quoique les différents corps soient décrits d’une manière très précise, que tous les faits susceptibles d'application soient notés avec soin, on sent que la Chimie descriptive est traitée avec une sécheresse un peu méprisante, soulignée encore par l'absence totale de figures. Une phrase de la préface de M. Swarts explique cette différence de traitement : « J'ai voulu combattre cette tendance fâcheuse, souvent constatée chez les élèves- ingénieurs, dont les études ont une allure presque exclusivement mathématique, de considérer la Chimie comme une science empirique et descriptive, s'adres- sant surtout à la mémoire. » Il espère faire accepter la Chimie par sa clientèle à la faveur d'un déguisement physico-mathématique. De ces esprits qui ne s'inté- ressent à la Chimie que dans la mesure de ses rapports avec la Physique et les Mathématiques, il y en a malheureusement autre part qu'en Belgique. L. Bouveaurr, Professeur-adjoint £ à la Faculté des Sciences de Paris. 3° Sciences naturelles Vallaux (Camille), Professeur de Géographie à l'Ecole Navale, Docteur ès Lettres. — Géographie sociale : La Mer. — 1 vol-in 16, de l'Encyclopédie scienti- lique, publiée sous la direction du D' TouLoust. (Prix : 5 fr.) Doin, éditeur. Paris, 1908. La Géographie doit constituer, en quelque sorte, le support des hits économiques et sociaux; voilà pour- quoi la grande Histoire de France, publiée sous la direction de M, Ernest Lavisse, débute par le magistral Tableau de la Géographie de la France qu'a peint M. Paul Vidal de La Blache, et c'est aussi la raison pour laquelle les Bibliothèques de Sociologie et de Socio- logie appliquée, faisant partie de l'Encyclopédie scien- tilique, publiée sous la direction du D° Toulouse, de- vaient comprendre des ouvrages de Géographie sociale. Géographie sociale, Géographie humaine, Anthropo- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX géographie sont des termes qui désignent une même chose : les rapports entre l'homme et le sol. Depuis six ans, d'excellentes thèses de Géographie humaine ont été publiées chez nous presque; toutes sont con- sacrées à des études régionales ; une seule a porté sur un fait humain précis : l'irrigation, Mais nous n'avions pas encore l'ouvrage systématique comprenant la science tout entière, tel que Ratzel l'a puissamment construit dans son Anthropogeographie et dans sa Politische Geographie. Si aucun géographe français n'a entrepris une traduction de ces deux livres, classiques en quelque sorte, c'est peut-être à cause de leur empreinte profon- dément nationale : Ratzel ramène tout à l'Allemagne, de telle sorte que mieux valait pour nous une adapta- tion qu'une traduction. C'est ce qu'a fait, avec un grand succès, M. Camille Vallaux, qui n'est point un inconnu pour les lecteurs de la /tevue. M. Vallaux «s’est efforcé de repenser par lui-même les idées maîtresses expri- mées par Ratzel ». Il ya pleinement réussi, et son premier livre, consacré à la Mer, est d'un intérêt puis- sant et comble vraiment une très grosse lacune de notre littérature géographique. Le traité de Géographie sociale de M. Vallaux sera prochainement complété par un second livre qui portera sur /e Sol. Avant de parler du plan adopté par l'auteur, nous voulons le louer d'avoir donné au facteur humain, trop sacrifié par Ratzel, toute la part qui lui revient dans les phénomènes économiques et sociaux. M. C. Vallaux écrit très justement dans ses conclusions : « L’adapta- tion aux conditions de l'existence maritime a été fa- vorisée ou contrariée, selon la nature des régions où l'homme prenait vue sur la mer, par les multiples agents naturels de la topographie ou du climat; mais elle n'a été rigoureusement déterminée par aucun d'eux. C'est en eux-mêmes et par eux-mêmes que les groupes sociaux ont trouvé les ressources ou subi les nécessités qui les ont menés à la conquête de l'Océan; ni les uns ni les autres ne leur sont venus du dehors. » Et encore : « La spontanéité humaine s'est taillé une forte part dans l'adaptation successive des sociétés à la vie océanique. Dans cette expansion, aucune nécessité extérieure n’eût pu tenir lieu des progrès de l'Astro- nomie nautique et de la Technique iwdustrielle. » Les quatre parties du livre de M. Vallaux sont con- sacrées à l'wcoumène maritime, aux migrations mari- times, aux faisceaux de circulation et à la domination de la mer. « Devenue le champ commun où les grandes routes du commerce tracent leurs sillons, devenue aussi l’objet d'ambitions impériales, mieux connue comme champ d'exploitation, la mer s'est de plus en plus mêlée, au cours de l’histoire, à la vie des peuples. On pourrait considérer, non sans exactitude, le déve- loppement historique comme se mouvant dans un cadre où la part de la mer devient de plus en plus grande. Au point de vue du monde occidental, tout au moins, la civilisation a passé de la phase fluviale à la phase méditerranéenne, puis à la phase atlantique; elle entre aujourd'hui dans la phase océanique. » Après avoir défini la notion d'œcoumène maritime, M. C. Vallaux critique, à juste titre, la théorie de Ritter sur les articulations littorales. 11 cite de nom- breux exemples qui l'infirment. L'Irlande, où aucune population de marins n'a jamais pu grandir, malgré ses côtes extrêmement découpées, fournit un exemple très intéressant. Les causes véritables des mouvements de condensation sont plus variées et plus flexibles que Ritter l'avait imaginé. La mer est d'abord utilisée comme moyen de transport, et la côte agit, à cet égard, bien plus par sa situation que par sa nature. La mer est ensuite un moyen de subsistance qui a attiré, d'autre part, la population dans les régions exception- nellement riches en matière vivante. La rareté relative des côtes de condensation tient au fait qu’elles doivent réunir des qualités différentes et ie opposées : stabilité, fertilité du sol, facilité de communications terrestres, salubrité, situation opportune, extension du plateau continental. A5 | La partie négative de la théorie de Ritter est beau- | coup plus juste : les côtes non articulées sont presque | toujours, au point de vue du peuplement, des côtes de dispersion. Ces rivages peuvent présenter des points de condensation, correspondant aux conditions que nous avons énumérées plus haut, mais on n'y trouve pas de ruban de condensation. Une côte non articulée relève toujours d'un des trois types suivants : falaises, cordons littoraux ou dunes, et ces types du modelé sont tous hostiles à la vie maritime, Les limites d'un compte rendu nous empêchent de | suivre M. C. Vallaux dans les développements si inté- ressants qu'il consacre à l'étude des limites de l'œcou- mène, de l'insularité et de ses effets sur le peuple- | ment, aux pêcheries. La deuxième partie du livre se rapporte aux migrations maritimes; l'auteur montre le rôle de la mer comme « creuset des peuples ». « La circulation et le déplacement en masse des hommes par voie de mer les rapprochent pe vite les uns des autres que ne le font des siècles entiers d'histoire continentale. C'est, au reste, une vérité générale que la mer précipite les manifestations de la vie collective, les rend plus hâtives et plus fiévreuses, et abrège aussi | leur durée : tels sont, par exemple, les caractères de tant d'empires maritimes, rapidement élevés et non moins rapidement détruits. » Après avoir rappelé que les mouvements maritimes ont couvert d'Européens les deux Amériques, l'Afrique du Sud et l'Australie, M. C. Vallaux fait remarquer que les migrations ter- restres sur les frontières continentales n'ont eu que des résultats éphémères et toujours restreints. Il en conclut à l'insuccès de l'expansion allemande, du Drang nach Osten, au delà du Bosphore, vers l'Anatolie et la Mésopotamie. Si les routes des migrations tracent un véritable réseau sur les cartes océaniques, ce réseau ne peut cependant se comparer, au point de vue de la com- plexité et de la finesse des mailles, aux faisceaux que forment les routes suivies par les marchandises et les passagers. Ces faisceaux doivent leur existence au fait que les échanges tendent de plus en plus à se concen- trer dans quelques grands ports. M. C. Vallaux étudie ainsi les faisceaux de la circulation océanique, ceux de la circulation méditerranéenne et les centres du commerce maritime. Il à noté, chemin faisant, de facon très Juste et très précise, ce qui caractérise la transformation des échanges et l’économie du trans- port. M. C. Vallaux consacre, en terminant, quelques pages aux formes maritimes de l'impérialisme. L'Océan ne comporte ni la conquête, ni l'occupation, ni les délimitations, au sens terrestre de ces mots. D'autre part, « les effets foudroyants du combat naval ne font que traduire, d'une manière concrète, la fragilité et l'instabilité de la puissance maritime, et, par consé- quent, la médiocre solidité de la domination de la mer ». Nous souhaitons avoir fait entrevoir à nos lec- teurs tout l'intérêt scientifique et toute la vie que ren- ferme le livre de M. Vallaux. A défaut de cartes géné- rales, que le format de l’ouvrage rendait impossibles, nous pensons que de petites cartes, faisant corps avec le texte et consacrées, par exemple, à la densité de la population, à la localisation des pêcheries, au- raient rendu service aux nombreux lecteurs qui ne sont pas des géographes professionnel] PIERRE CLERGET, Professeur à l'Ecole shpptenre de Commerce de Lyon. Pfeffer (D. W.), Professeur à l Université de Leipzig. — Physiologie végétale, traduit de l'allemand d'après la deuxième édition par M. Jean FriepeL. Tome II, 1“ fascicule. — 1 vol. in-8° de 164 pages, Steinheïl, éditeur. Paris, 1908. Nous avons, en son temps, présenté aux lecteurs de cette Revue le tome I du très remarquable livre de W. Pfeffer, pour la traduction duquel M. J. Friedel A6 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX avait apporté tous ses soins. Nous avons dit également quel service le fidèle traducteur rendait aux botanistes français, en mettant à la portée de tous les idées de l'éminent physiologiste allemand. Pour des raisons spéciales, l'apparition du commen- cement du deuxième volume a été très retardée, et ce n'est pas la faute de M. J. Friedel; nous devons donc le remercier d’avoir continué son œuvre et compli- menter le nouvel éditeur de son désintéressement. Ce premier fascicule complet, puisqu'il est pourvu d'une table spéciale, traite des échanges d'energie dans la plante et comprend cinq chapitres d’inégale étendue. Après avoir étudié le mouvement de crois- sance, l’auteur s'occupe du mécanisme de cette crois- sance, pour la membrane cellulaire et l’amidon. Viennent ensuite les relations entre la division nucléaire et la division cellulaire, les moyens mécaniques de la différenciation des tissus, la disposition des parois cellulaires, l’élasticité et la cohésion des membranes, la tension des tissus, etc. Ces faits établis et discutés dans la moitié du fascicule, le reste est réservé à l'étude de l'influence des conditions extérieures sur l'activité de croissance (température, lumière, électri- cité, pesanteur, agents chimiques, eau, actions méca- niques). Souhaitons à ce fascicule, dont l'intérèt se dégage de cette simple énumération, un succès mérité quiincite l'éditeur à nous livrer au plus vite les autres fascicules qui composeront l'ouvrage entier. Em. PERROT, Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. 4° Sciences médicales Teissier (J.), Professeur de Clinique médicale à l'Université de Lyon. — Artério-sclérose et Athéro- masie. — 1 monographie de l'Œuvre médico-chirur- gical. (Prix : À fr. 25). Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1908. Excellente monographie qui met au point une question difficile et très discutée. M. le Professeur Teissier s’est attaché à démontrer que l’Athérome et l'Artério-sclérose différent par de multiples caractères. Et, pour affirmer la doctrine qu’il adopte de la dualité des deux processus pathogéniques, il s'appuie sur des arguments étiologiques, anatomiques et symptoma- tiques. L'Artério-sclérose est due à une ascendance uricémique ou bien à des antécédents infectieux ou toxiques. La scarlatine, le rhumatisme, la variole, le saturnisme, l'hydrargyrisme, auxquels il faut peut-être ajouter le tabagisme et l’alcoolisme, sont des causes déterminantes plus ou moins lointaines. L’Athérome, au contraire, compte parmi les maladies d'évolution. Dans l’Artério-sclérose, le processus anatomique est, au début tout au moins, irritatif, tandis que dans l'Athérome il est dégénératif. Celui-ci frappe de préférence les troncs artériels volumineux, celui-là les petits vaisseaux. M. Teissier étudie le rôle de l'hypertension dans l'Artério-sclérose. Il pense qu’elle est l'effet d’une suractivité circulatoire provoquée par la résistance qu'éprouve le cours du sang dans la traversée des viscères scléreux. Il montre que, d’ailleurs, elle n’est pas constante dans l'Artério-sclérose. IL insiste très- justement sur l'inégalité de l'hypertension suivant les territoires considérés, ce qui l’amène à décrire les hypértensions relatives et les hypertensions partielles. C'est l'explication de faits, en apparence paradoxaux, où l’on constate une élévation de la tension à la pédieuse, par exemple, plus accentuée qu'à la radiale ou à la temporale. Au point de vue clinique, M. Teissier élablit le parallèle clinique entre l'Athérome et l'Artério-sclérose. La première de ces affections serait caractérisée par 1 V. evue générale des Sciences, année 1906, tome XVII, P. 340. une apparition plus tardive, sans cause toxique provo- catrice, ne s'accompagnerait pas d'hypertension, ni d'hypertrophie cardiaque, déterminerait des accidents par un mécanisme pour ainsi dire passif, ayant pour effet de rendre insuffisant l'apport sanguin, serait souvent bien tolérée et d’une évolution lente. L’Artério- sclérose serait, au contraire, plus précoce, suivrait toujours une toxhémie de nature variable, s’'accompa- gnerait le plus souvent d’hypertension, ‘aurait une répercussion fréquente sur le cœur, déterminerait des accidents par un mécanisme actif, spasmodique, ayant pour effet l’ischémie des organes, et aurait une tendance à une marche rapide. F Au point de vue didactique, ce tableau, dont nous n'avons répété que les grands traits, est bien établi. On en retrouveles applications dans l'exposé thérapeu- tique des deux affections qui termine l'ouvrage, que M. le Professeur Teissier a concu dans un sens tout à fait adéquat au but que poursuit cette intéressante publication de l'Œuvre Medico-chirurgical. A. L. Dulac (Jules), Zngénieur des Arts et Manufactures. — L’Air (Effets de son impureté sur la santé). — 4 vol. iu-8° de 235 pages (Prix: 4 fr.). Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1908. Excellent travail de vulgarisation, dans lequel l’au- teur, montrant le rôle de l’Air et l'importance de l'Aé- ration dans la vie, lire de cette étude des conclusions pratiques, donne de judicieux conseils, expose enfin les règles qu'il faut suivre en matière d'aération. Ou- vrage dont la lecture doit être tout spécialement re- commandée aux architectes. 5° Sciences diverses Gebhart (Emile), de l’Académie française. — Flo- rence. — 1 vol. de la Collection des Villes d'Art célèbres. H. Laurens, éditeur. Paris, 1908. M. Emile Gebhart a écrit quelques mois avant sa mort ce livre dédié à une ville noble entre toutes, qui a été pour le Moyen-âge ce que fut Athènes pour l'Antiquité. Il en a parlé avec la tendresse d’un fils et la ferveur d'un amant. En ces cent cinquante pages, Florence revit tout entière, mieux qu'en de pesants in-octavo; elle revit, non seulement dans-sa grandeur artististique, incomparable, mais avec sa physionomie morale, avec l'âme que lui ont faite des siècles d’une his- toire parfois tourmentée, toujours glorieuse. M. Gebhart s'était proposé, dit-il, d'écrire « pour le contentement des pèlerins d'art ». La tâche a été remplie, et l'œuvre n'est pas indigne de figurer dans la vieille bibliothèque laurentienne, comme le dernier hommage d’un artiste et d'un lettré à la beauté de Florence. LAR°RCE Zuylen de Nyevelt (Mr: Hélène de). — Béryl, pièce en quatre actes. (Prix :3 fr. 50.) Edition du Beffroiï. lioubaix, 1908. x Nos lecteurs, qui ne sont pas accoutumés à trouver dans cette /evue l'analyse de la dernière pièce ou du roman du jour, nous excuseront si nous faisons aujour- d'hui exception à notre règle habituelle. De son beau roman, « L'Impossible Sincérité », Me de Zuylen de Nyevelt a tiré une pièce, Péryl, d'une lecture capti- vante, d'un charme prenant, et dans laquelle elle a su, par la séduction du talent, transformer la simple histoire d'un amour brisé par la fatalité, en une haute et émouvante œuvre d'art. Cette pièce obtiendrait-elle, sur une grande scène, le succès qu'elle mérite? C'est à la critique théâtrale qu'il appartient de se prononcer à ce sujet : en tout cas, Béryl, par le souffle qui traverse ces quatre actes et par la haute tenue littéraire de l'œuvre, recueillera les suffrages-de tous les artistes et de tous les lettrés, et c’est évidemment, de toutes les récompenses, la seule qu'ambitionne Me de Zuylen de Nyevelt, et la seule qui vaille qu'on y attache quelque prix. ACADÉMIES ET SOCIÉT JS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 14 Decembre 1908. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Hamy décrit une méthode expéditive pour le calcul approché des inéga- lités d'ordre élevé. — M. J. Drach présente ses re- cherches sur les intégrales particulières de l'équation des lignes géodésiques. — M. L. Rémy démontre le théorème suivant : Les surfaces algébriques dont les points admettent une correspondance univoque avec les couples de points d'une courbe de genre w non sin- gulière possèdent exactement 2w°—w—1 intégrales doubles distinctes de seconde espèce. — M. G. Voisin donne la description de son aéroplane biplan cellulaire, tel qu'il a été expérimenté par MM. Farman et Dela- grange. — M. J. Guillaume adresse ses observations physiques de la comète 1908c faites à l'Observatoire de Lyon. — MM. Saïint-Blancat el Rossard commu- niquent leurs observations de la mème comète, faites à l'Observatoire de Toulouse. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Dunoyer montre que l'on peut arriver à compenser exactement les compas de grand moment magnétique; toutefois, pour des changements rapides de latitude, il faudra modifier chaque jour la place des correcteurs de fer doux. — M. G. Meslin a constaté que la calcite et la dolomie en suspension dans divers liquides donnent naissance à des liqueurs qui ont exactement des propriétés inverses en ce qui concerne le dichroïsme magnétique; les liqueurs formées avec la dolomie présentent, en outre, un dichroïisme spontané de même signe que le di- chroïsme magnétique. — MM. G. Urbain etG..Jantsch, en rangeant les terres rares par ordre de poids ato- miques croissants, ont observé deux maxima du ma- gnétisme, l'un dans le groupe cérique, l’autre dans le groupe yttrique. — M. P. Pascal à reconnu que la suscepübilité atomique est une fonction exponentielle du poids atomique pour des corps diamagnétiques de même valence et de propriétés chimiques analogues : log ya—4+}8a. — M. J. Becquerel à constaté que le pouvoir rotatoire des cristaux de cinabre diminue, pour une même longueur d'onde, par l'effet du refroi- dissement. — M. E. Rothé a étudié l'influence de la pression sur les phénomènes d'ionisation. Pour les champs très faibles, l'intensité du courant de satura- tion est d'autant plus petite que la pression est plus grande. Pour une valeur déterminée du champ, il existe une valeur de la pression pour laquelle l'intensité du courant est maxima. — M. L. Bloch présente une théorie de l'absorption dans les gaz qui le conduit à envisager le coefficient de frottement des électrons comme variable avec la longueur d'onde. — M. L. Du- breuil répond aux critiques de M. Leduc et maintient la valeur de 108 pour le poids atomique de l'argent. — M. G. D. Hinrichs apporte aussi des arguments pour l'adoption de cette valeur. — M. M. Guichard à re- connu que l’anhydride iodique, porté à la température à laquelle commence sa décomposition, retient une partie de ses éléments à l’état occlus. — M. P. Nico- lardot a étudié l’action du protochlorure de soufre sur les métaux et métalloïdes. Dans tous les cas où il y a réaction, le chlorure formé est le protochlorure. — M. Soury a étudié la dissociation du bicarbonate de soude humide. Il a observé l'existence de deux périodes de tensions fixes dont la première correspond à la for- mation d'un carbonate inférieur 3Na°0.4C0°.5H°0. — M. E. Kohn-Abrest à fait l'analyse de la poudre d'alu- minium en déterminant Al métallique par sa réaction avec le sulfate ferrique; il trouve que cette poudre con- tient 5,72 °/, d'un oxyde d'Al. — M. C. Matignon à pré- paré le chlorure de thorium par l’action du chlore et du chlorure de soufre sur la thorine. Les méthodes à l'oxychlorure de carbone et aux chlorures de phosphore sont moins recommandables. — MM. G. Guillemin et B. Delachanal ont déterminé les gaz occlus dans un laiton complexe au manganèse, criblé de soufflures. Ce sont : H19,10/6; CH#3,90/5; C018,90/0; CO? 8,12/0. — M. L. Henry à reconnu que l'acide sulfurique est l'agent réel du dédoublement du diméthylisopropyl- carbinol en eau et en hydrocarbures ; l’'anhydride acé- tique ne fait que faciliter la réaction. — M. M. Delé- | pine, en entraînant les vapeurs d’aldéhyde et de paral- déhyde dans l'acide sulfurique fumant, a obtenu, avec un bon rendement, l’adhéhyde crotonique et son di- mère,C#H°0?, Eb.195°.— MM.L. Bouveault et G. Blanc | ont préparé synthétiquement un certain nombre de | dérivés de la camphénylone. — M. A. Valeur, en fai- sant réagir la soude étendue sur l’iodhydrate d'iodoi- sospartéine, a obtenu de l'x-méthylspartéine. Avec les acides étendus, il se forme un composé renfermant 3 atomes d'IL — MM. J. Bougault et L. Bourdier ont extrait des cires des Conifères une série d’acides- alcools, dont deux ont pu être identifiés avec un acide oxypalmitique, F.95°, et un acide oxylaurique, F.84. Ces acides s'éthérifient entre eux à la facon des pep- | tides. — M. C. Gerber montre que la dérogation des | présures à la loi des actions diastasiques dans les cas de coagulation rapide paraît due aux albumines et aux globulines qui les accompagnent. — MM. A. Etard et | A. Vila isolent les produits d'hydrolyse des protoplas- | mides en les traitant à plusieurs reprises par le méthol anhydre qui les dessèche et en précipitant ensuite ceux qui sont de nature acide par le métholate de | baryum. — M. G. Gimel a constaté que SnCF® exerce, à la dose très faible de 1/10.000, une action remar- quable sur l’activité du Saccharomyces et augmente le rendement en alcool des moûts. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. G. Lemoine commu- nique 5 observations de malades artério-sclérieux, pré- sentant de l'hypertension artérielle, et traités avec succès par la d’arsonvalisation. — M. M. Ménard mon- tre que, s'il paraît impossible d'obtenir en radiographie la projection d’une synoviale articulaire normale, il n’en est plus de même pour une articulation malade dont la synoviale est distendue seulement par du liquide non purulent. — M. E. de Bourgade de la Dardye à traité certaines tumeurs profondes par l’in- troduction, dans l'intimité des tissus, de sulfure de zinc qui devient phosphorescent sous l’action d’une courte exposition aux rayons X,et le reste ultérieurement ; il a obtenu déjà deux guérisons. — MM. L. Cuénot el L. Mercier ont trouvé, dans le stroma conjonctif des tumeurs B de souris cancéreuses, une catégorie spé- ciale de cellules, prenant le carmin soluble et renfer- | mant des vacuoles à grain central. — M. J. Mawas | montre que l’épithélium clair qui recouvre le corps ciliaire des Mammifères est composé de cellules dans le protoplasma desquelles existent de fines granulations visibles à l’état vivant et qui se colorent en noir par l'hématoxyline ferrique. M. Marcellin Boule à | examiné les ossements d'homme fossile recueillis à la Chapelle-aux-Saints (Corrèze). Ce type, néanderthaloïde, diffère des types actuels et se place au-dessous d'eux ; | il constitue une forme intermédiaire entre le Pithé- canthrope de Java et les races actuelles les plus infé- | rieures. — M. E. L. Trouessart signale la découverte du Rhinocéros blanc (A. Simas Burchell) au Soudan 48 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES égyptien. Cet animal, à une seule corne, doit être iden- tique à la Licorne des Anciens. — M. R. Minkiewicz a observé une inversion du chlorotropisme normal des Pagures, lorsque ceux-ci, laissés dans une cuvette dont l’eau n'est pas changée, commencent à s’intoxiquer par leurs excrétions. — M. E. Hérouard a observé dans l'aquarium de Roscoff un Scyphistome formant des kystes sous son disque pédieux. Ces kystes sont, en réalité, des œufs, et l’on se trouve en présence d’une forme nouvelle à développement cænogénétique, que l'auteurappelle Taeniolhydra Roscoffensis.— M. A. Bil- lard donne la description des Haleciidées, Campanu- lariidées et Sertulariidées de la collection du Challen- ger. — MM. J. Pantel el R. de Sinéty ont observé l'apparition de mâles et d'hermaphrodites dans les pontes parthénogénétiques des Phasmes, considérées comme ne donnant naissance qu'à des femelles. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont étudié les formes endoglobulaires et libres de l'Hæmogregarina lacertæ Dan. et Ch. — M. W. Lubimenko a constaté que la lumière favorise le développement des graines dans les fruits. Les fruits cultivés à la lumière du jour plus ou moins atténuée renferment plus de substance sèche et moins d'acide que les fruits qui ont müri à l'air libre. — M. A. Guilliermond a reconnu que le Saccharo- mycopsis capsularis et l'Endomyces fibuliger offrent les mêmes caractères cytologiques et doivent être rat- tachés tous deux au genre £ndomyces. — M. L. Bla- ringhem, en mutilant des pieds femelles de Spinacra oleoracea, a provoqué l'apparition de fleurs hermaphro- dites et obtenu des lignées héréditaires renfermant des individus hermaphrodites. Il donne à cette variété la désignation de polygama. — M. F. Meunier à constaté que la faune des Phoridæ de ambre de la Baltique est voisine de la faune paléarctique actuelle; la faune des Leptidæ est nettement paléaretique. — M. J. Thoulet confirme, par de nouvelles recherches, l'hypothèse de l'origine cosmique et éolienne dela majeure partie des minéraux fins-fins trouvés dans les fonds marins, sur- tout les plus éloignés de terre. — M. J. Comas Sola signale l'enregistrement fréquent, à l'Observatoire de Barcelone, de microsismes de longue durée, peut-être en rapport avec la région volcanique éteinte, mais mo- derne, au nord de Barcelone. Séance du 21 Décembre 1908. La Section de Physique présente la liste suivante de candidats à la place vacante par suite du décès de M. Mascart : 1° M. P. Villard; 2° MM. D. Berthelot, E. Branly, A. Broca, A. Cotton, H. Pellat et A. Pérot. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré pré- sente quelques remarques sur l'équation de Fredholm. — M. A. Demoulin étudie l'enveloppe des cyclides de Lie relative aux différents points d'une surface. — M. Paul Dienes communique ses recherches sur les singularités des fonctions analytiques. — M. P. Bou- troux présente quelques considérations sur les inté- grales multiformes des équations différentielles du premier ordre. — M. E. Traynard détermine la con- dition pour que sept droites soient situées sur une surface du 4° degré. — M. J. Guillaume adresse ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le troisième trimestre de 1908. Il y a eu une très grande recrudescence des taches du mois d'août. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Arctowski a reconnu qu'il y a des années exceptionnellement chaudes et «es années exceptionnellement froides, années dont les écarts de température, par rapport à la moyenne de dix ans, sont presque universellement positifs ou négatifs. — M. B. Brunhes a étudié les courants tellu- riques entre stations d'altitude différente : l'électricité négative a une tendance à tomber de haut en bas. — M. J. Violle montre que les lignes d'énergie électrique agissent comme de véritables paratonnerres sur les orages à grèle. — M. André Léauté montre que le courant de décharge d'un condensateur à travers une bobine à deux couches peut être considéré comme formé par la superposition d'une infinité de courants sinusoïdaux dont l’amplitude tend vers le zéro avec la période. — M. E. Bauer a constaté que les flammes de gaz d'éclairage ont un pouvoir émissif et absorbant considérable pour les rayons restants de la fluorine; ce pouvoir est dû à la vapeur d’eau. L'absorption est sélective. — M. H. Guilleminot a étudié le filtrage des rayons X par l'aluminium. Une même épaisseur d'Al durcit moins vite un faisceau déjà filtré qu'un faisceau tel qu'il sort du tube de Crookes. — M. Ch. Marie à reconnu que la surtension cathodique des métaux augmente avec la viscosité de l’électrolyte, et d'autant plus que le métal a lui-même une plus forte surtension. — M. H. Woltereck poursuit ses expé- riences sur la synthèse de l’ammoniac au moyen de la tourbe soumise à #50° à l’action d'un courant d’air saturé de vapeur d’eau à 80° C.; on retrouve un excès d'Az, ce qui montre que celui de l'air a pris part à la réaction. — MM. L. Roger et E. Vulquin n'ont pas retrouvé, dans les matières humiques de l'ouate de tourbe, ni les pentosanes, ni les hexosanes des végé- taux originaux ; les fonctions alcooliques des celluloses et divers constituants des lignocelluloses semblent subsister; en outre, une fonction nouvelle, acide, apparaît. — M. A. Monvoisin montre que l'emploi du bichromate de potasse comme conservateur pour les laits destinés à l'analyse ne permet pas de reconnaître, par les méthodes officielles, si le lait a été chauffé ou additionné d'H*0*. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. et J. Bouyssonie etL. Bardon montrent que le squelette humain trouvé à la Chapelle-aux-Saints (Corrèze) est incontestable- ment moustérien et a été enseveli intentionnellement dans une grotte qui paraît avoir servi de tombeau. — M. R. Robinson a étudié deux cas de la déformation du poignet connue sous le nom de luxation congénitale de l'extrémité inférieure du cubitus, dont il donne une interprétation pathogénique. — M. L. Lapicque à reconnu qu'il n’exisie pas d'oiseaux présentant une proportion d'encéphale supérieure à 1/15 du poids corporel. Ce maximum est une condition d'existence qui limite effectivement la variation des espèces. — M. E. Bordage a constaté que les femelles d'Ortmannia Allaudi peuvent donner naissance à de jeunes Ort mannia et à de jeunes Atya serrata; cette dernière espèce ne serait donc qu'une mutation évolutive de l’'Ortmannia. — M. L. Bordas a observé deux sortes d'organes annexés à l'appareil génital femelle des Blattes : un réceptacle séminal, ou spermathèque, et deux glandes accessoires et arborescentes, dont l’une sécrète des cristaux de carbonate de chaux. — M. Y. Delage a étudié le mode d'action de l'électricité dans la parthénogenèse électrique. Il serait encore impru- dent de conclure entre les deux interprétations pos- sibles : actions des charges statiques, actions électro- lytiques développées par le courant de fuite du con- densateur, bien que ces dernières paraissent beaucoup trop faibles pour produire un résultat. — M.H. Piéron montre que l’un des facteurs primordiaux de la fer- meture des Actinies est la diminution d'oxygène dispo- nible dans leur milieu, cette fermeture précoce devant prolonger la survie en milieu à oxygène non renouvelé. — M. Aug. Michel signale la présence de Syllis vivi- para à Naples ; tous les individus rencontrés étaient des femelles, en général en état de gestation d'œufs peu nombreux ou d'embryons. — MM. A. Laveran el A. Pettit ont observé la présence de deux formes de multiplication endogène (kystes à macro- et à micro- mérozoites) de l'Hæmogregarina lacertæ. — MM. R. Maire et A. Tison élablissent que le Sorosphæra Veronicæ, parasite des Véroniques, n'est pas une Ustilaginée, mais une Photomyxinée, et doit ètre rangé à côté du llasmodiophora Brassicæ. — M. E. Haug à constaté l'existence, dans le Salzkammergut, d’une cinquième nappe de charriage, qui constitue presque entièrement le grand massif du Todte Gebirge. — ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 19 M. J. Savornin montre que, pendant l'époque aquita- nienne, une grande parlie du sol algéro-constantinois était occupée par des bassins fermés; la grande épais- seur des dépôts torrentiels n'est conciliable qu'avec un climat subdésertique, à longues périodes de séche- resse. — M. Ph. Négris à étudié le substratum de la nappe de charriage du Péloponèse; c'est tantôt un cal- caire crétacé-éocène, tantôt du flysch, nummulitique ou non. -— M. P. Castelneau a observé les traces d'un mouvement positif le long des côtes occidentales de Corse et montre son rôle dans la morphologie et lévo- lution du littoral. — M. E.-A. Martel à reconnu que la prétendue source sous-marine de Port-Miou (Bouches- du-Rhône) n'existe pas; on à seulement trouvé, au fond de deux puits naturels, deux bassins d'eau sau- mâtre, provenant des infiltrations des calcaires envi- ronnants et en communication avec la mer. — M. A. Angot signale l'enregistrement, à l'Observatoire du Parc Saint-Maur, de deux perturbations sismiques lune très importante, le 12 décembre; l’autre plus faible, le 18 décembre. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 15 Decembre 1908. M. Troisier présente le Rapport général sur les prix décernés par l’Académie en 1908. — M. Pinard pro- nonce l'éloge de Tarnier. Séance du 22 Decembre 1908. M. le Président annonce le décès de M. Chauvel, membre de l'Académie, du Dr Rindfieisch, correspon- dant étranger, et de M. J. Lemaistre, correspondant national. M. G. Dieulafoy est élu vice-président de l'Académie pour 1909, et M. G. Weiss secrétaire annuel. M. Yvon présente un Rapport qui conclut par la proposition d'autoriser les sages-femmes à faire usage, mais seulement à titre de traitement préventif, d'une solution de nitrate d'argent au cinquantième pour la prophylaxie de l’ophtalmie purulente des nouveau-nés. L'Académie adopte les conclusions de ce Rapport. — M. E. Perrot lit un travail intitulé : Qu'est-ce que la Pharmacognosie? — M. E. Léger présente un travail sur l'emploi du sulfate d'hordénine dans le traitement de certaines affections, en particulier des affections gastro-intestinales. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 12 Décembre 1908. MM. L. Nattan-Larrier et M. Parvu ont observé, dans 9 cas sur 10, un abaissement de l'indice opso- nique chez les diabétiques, sans qu'il y ait parallé- lisme entre cet abaissement et l'intensité de la glyco- surie. — M. A. Frouin est parvenu à extraire une partie de l’antitoxine contenue dans le sérum antité- tanique coagulé en l’épuisant par des solutions salines. — M. Pariset appelle unité de pouvoir amylolytique d'un liquide le rapport de la quantité de sucre en cgr. fournie par l’action de { c. c. de ce liquide sur 50 egr. d’amidon soluble pendant 2 h. à l’étuve à 39° à cette quantité d'amidon elle-même. — M. Ed. Retterer à reconnu que les hématies du bœuf, du mouton, de la chèvre, du porc et du cheval sont des solides et non point des surfaces; la plupart sont sphériques, d’autres hémisphériques et lenticulaires. — M. A. Borrel signale de nouveau le rapport étroit entre la présence de para- sites cutanés et de cancers des follicules pileux. — M. P. Boveri a reproduit chez le singe, par injection d'adrénaline, une artério-sclérose anatomiquement semblable à celle de l'homme. — MM. H. Busquet cl V. Pachon ont constaté que l'addition de calcium aux solutions isotoniques de sels de sodium leur confère la faculté de maintenir le fonctionnement de l'appareil cardio-inhibiteur, que par elles-mêmes elles suppri- ment, en circulation artificielle à travers le cœur. — REVUE GENIRALE DES SCIENCES, 1909. MM. L. Le Sourd et Ph. Pagniez ont noté une aug- mentation brusque du nombre des leucocytes dans l'asphyxie aiguë. — M. A. Sézary montre que la tuber- culose chronique détermine progressivement lhypoépi- néphrie, puis la sclérose des surrénales, quelquefois après un stade passager d'hyperépinéphrie. — M. L. Launoy à observé que les particules fines injectées dans le péritoine du cobaye male se localisent non seu- lement au niveau de l’épiploon, mais encore sur la séreuse qui revêt le muscle testiculaire. — M. CI. Re- gaud décrit les mitochondries des cellules de la lignée spermatique. — MM. A. Gilbert et A. Baudouin pro- posentun nouveau procédé pour obtenir, chez l'homme, du sang pour les recherches chimiques. — M. M. Ascoli a constaté que les phénomènes d'anaphylaxie passive, par injection de sérum d'animaux anaphylactisés à des animaux neufs, sont très inconstants et rarement pro- noncés d'une facon décisive en ce qui concerne la toxine typhique. — M. S. Marbé a reconnu que le nombre des microbes phagocytés par les leucocytes des myxædémateux soumis au traitement thyroïdien est constamment plus grand que celui des microbes phagocytés par les leucocytes normaux. — MM. G. Guillain et A. Gy ont étudié les lésions des cellules nerveuses corticales dans l’intoxication tabagique expé- rimentale : ce sont surtout la chromatolyse et la vacuo- lisation. — MM. M. Weinberg et A. Vieillard ont ren- contré, sur 4.511 chevaux, des lésions athéromateuses dans 7,6 °/, des cas. Les plaques calcaires présentent, en général, un aspect analogue à celui de l’athérome spontané du lapin. — M. M. Jungano a isolé des ma- tières fécales d’une jeune fille atteinte de constipation opiniètre un microbe anaérobie strict qu'il nomme B. parvus liquelaciens. — M. C. Fleig recherche dans l'urine les chromogènes du bleu de méthylène par H°0® et le persulfate d'ammoniaque en milieu acide. — MM. Le Noir et J. Camus ont reconnu que les pous- sières sèches des salles de tuberculeux sont encore dangereuses, quoique les bacilles y soient rares et peu virulents. — M. E. Feuillié déduit de ses expériences que la production de l’ictère serait impossible sans l'intervention du foie. Séance du 19 Décembre 1908. MM. Le Noir et J. Camus ont reconnu que, si la tuberculisation par des poussières bacilifères dessé- chées est possible, il faut en inoculer une quantité relativement grande pour obtenir des résultats positifs. — MM. NoicaetS.Marbé ont vérifié chezle nourrisson que ce sont les réflexes tendineux qui apparaissent les premiers ef ensuite les réflexes cutanés. — M. M.F. Guyer a observé que, chezles hybrides des Phasianidés, le produit appartient presque toujours au sexe mâle. — MM. Weinberg el Parvu ont constaté que la présence des anticorps spécifiques, dans le sérum des porteurs de kystes hydatiques, coïncide avec une éosinophilie plus ou moins marquée. — MM. CI. Gautier el T. Nogier décrivent divers procédés de différenciation de l'indol et du scatol et de caractérisation de ces corps dans leurs mélanges. — MM. A. Calmette, L. Massol et M. Breton montrent que, lorsqu'une nourrice fournit un lait qui a la propriété d'activer le venin de cobra, on doit suspecter chez elle l'existence de lésions tuberculeuses. — MM. Rieux, F. Arloing et de Lagoanère ont étudié l’action de diverses toxines, en particulier de la toxine typhique, sur le myocarde du lapin; il se produit une véritable cardiolyse. — M. H. Busquet a constaté que, chez la grenouille, la ration d'entretien se réalise par ingestion de viande de grenouille avec un apport d'albumine plus faible que par ingestion de viande de veau ou de mouton. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild montrent que l'hyperthyroïdie joue un rôle assez important dans la maladie de Basedow. — MM. Ch. Achard et L. Ramond ont étudié l’activité de l'absorption leucocylaire par la coloration vitale au rouge neutre. La proportion la plus élevée d'éléments actifs s’est trouvée dans un cas A++ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de cirrhose alcoolique. — MM. J. Bergonié et L. Tri- bondeau ont examiné les effets de la fulguration sur le rein normal du lapin ; ils sont les mêmes que sur le foie. — M. C1. Regaud à reconnu que les formations mitochondriales de l’épithélium séminal ne sont pas histochimiquement identiques ; il a réussi à y distinguer trois formes différentes — M. R. Legendre à observé de nombreuses pinces fossiles de Cal/lianassa Faujasi cassées à l’ischiopodite, ce qui semble montrer que l’autotomie existait déjà chez les Crustacés secondaires. — M. Ch. A. François-Franck décrit la technique graphique et chronophotographique qu'il a employée pour l'étude des mouvements et de la pression respira- toires des Batraciens. — M. A. Brissemoret montre que la juglone existe préformée, en tant que quinone, dans les feuilles fraiches de noyer, sans qu'on puisse encore affirmer si elle est libre ou combinée. — MM. P. Mulon et E. Feuillié ont constaté la présence de lécithine dans les cylindres leucocytaires granulo- graisseux de l'urine de deux malades atteints de néphrite ; elle semble être un produit de dégénéres- cence leucocytaire. — MM. G. Dubreuil et C1. Regaud ont observé l'existence d’un rythme génital chez la lapine cohabitant avec le mâle, mais non chez la lapine isolée. — M. H. Piéron a reconnu que les phénomènes d’ascension et de descente des Convoluta relèvent de l’action de facteurs externes : lumière, humidité, pres- sion de l’eau, chocs, sans qu'il y ait lieu de faire inter- venir des tendances internes. — MM. M. Garnier et L. G. Simon montrent que, si le lapin digère la viande, il n'est pas capable de fixer dans ses tissus l'azote ainsi absorbé, qui passe, par suite, dans l'urine. — M. V. Pachon a constaté que, chez le chien, la systole auriculaire est un phénomène nettement séparé de la systole ventriculaire et absolument achevé quand entre en jeu l’activité ventriculaire. — M. L.-A. Amblard présente un sphygmométroscope pour l'étude de la tension artérielle. — MM. A. Rodet et Lagriffoul con- firment l’action antibactéricide exercée 1n vitro par le sérum antityphique sur le bacille d'Eberth soumis à l'action du sérum frais d'un sujet neuf. M. E. Feuillié propose de déterminer la résistance globulaire par trois coeflicients : résistance absolue des globules lavés à NaCl; résistance physiologique déterminée avec des gouttes de sang; résistance des globules citratés. La Société procède à l'élection d'un président pour cinq ans en remplacement de M. Giard. M. Malassez est élu. Le Bureau pour 1909 est ainsi constitué : Vice-présidents : MM. G. Weiss el F. Widal ; Trésorier : M. J. Jolly ; Archiviste : M. A. Pettit ; Secrélaires : MM. J. Camus, Ch. Gravier, A. Mayer, Et. Rabaud. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST Séances des 17 Novembre et 3 Décembre 1908. M. J. Athanasiu à inscrit le travail musculaire volontaire, en régime permanent, avec l’ergographe double à bille ; il a constaté que la vitesse de soulève- ment n’est pas constante. — M. V. Babes montre que les paralysies au cours du traitement antirabique ne sont pas dues à un agent toxique de la substance nerveuse normale, mais plutôt à des toxines rabiques. — MM. V. Babes el S. Bobes ont reconnu que le procédé de Fermi (traitement antirabique par les émulsions phéniquées) donne des résultats très incon- stants chez le lapin. — MM. J. Bruckner et A. Jianu ont observé une disparition rapide de la graisse des capsules surrénales chez le chien après que la sécrétion externe du pancréas a été détournée de son chemin par une fistule. — M. D. Calugareanu a constaté que la conductibilité électrique du plasma sanguin, du plasma musculaire et du lait ne varie pas au cours de leur coagulation. Les ions Ca jouent donc un rôle pure- ment physique. — MM. M, Ciuca el C, Jonescu- Mihaiesti montrent que le sérum des animaux vac- cinés contre la trypsine renferme une sensibilisatrice spécifique active. — MM. C. Parhon et M. Goldstein ont reconnu que la quantité d'iode contenue dans le corps thyroïde est plutôt supérieure à la normale dans les cas d’ostéomalacie sénile. — MM. A. Slati- néanu el D. Danielopolu ont constaté que la fixation de l’alexine, en présence d'extrait lépreux, par le liquide céphalo-rachidien des lépreux, est plus rare qu'avec le sérum sanguin. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 11 Décembre 1908. M.J. Bougault, au nom de M. L. Bourdier et au sien, fait une communication sur un 2ouveau groupe de prin- cipes immédiats naturels. Ces nouveaux composés sont constitués par l'association de molécules d’acides- alcools identiques ou différents, réunis par éthérili- cation, la fonction acide d’une molécule éthérifiant la fonction alcool d’une autre molécule, suivant le schéma : L R.CHOH.(CH2}.C0?. CH. (CH?}".CO®.CH. (CH). CO®H. | R' | R' Ces corps, auxquels ils donnent le nom générique d'étholides, rappellent tout à fait par leur constitution les peptides de E. Fischer. Les auteurs les ont rencon- trés en abondance dans les cires des Conifères. Toutes les cires de Conifères qu'ils ont étudiées en sont for- mées, el il est vraisemblable qu'on doit les retrouver dans la plupart des plantes de cette grande famille. Ils décrivent deux acides-alcools simples qu'ils ont obte- nus par saponification de ces étholides : l’acide juui- périque C\H#0* (F. 950), éther acétique (F. 63), et l'acide sabinique C'*H*0* (F. 840), éther acétique (F. 43°). — M. E. Fouard communique les premiers résul- tats qu'il a obtenus dans l'étude de la gélification spon- tanée de l'amidon colloïdal. Utilisant la propriété des membranes de collodion, déjà décrite par l’auteur, d'exercer dans la filtration du colloïde une analyse moléculaire, il établit une loi de variation des extraits des filtrats. à diverses époques, pendant la gélification. Elle conduit à dégager ce fait que le phénomène étu- dié est corrélatif d’une certaine réaction de conden- sation moléculaire des é'éments primitivement dissous. De plus, cette réaction est incomplète et rigoureuse- ment réversible, ce que démontre une expérience de solubilisalion spontanée de l’amidon colloiïdal à tem- pérature ordinaire. L'auteur en déduit une direction de recherche, destinée à préciser la nature de cette réaction, par l'étude systématique de l’action des alca- lis et des acides sur le colloide. Ses expériences éta- blissent le caractère de solubilité réversible d'un col- loïde organique, distinct de la propriété d’insolubilité . absolue des colloïdes minéraux, mise en évidence par J. Duclaux. — M. M. Delépine donne des détails sur une préparation de l’aldéhyde crotonique par action de l'acide sulfurique sur les vapeurs d’aldéhyde. Après les manipulations convenables, on obtient 30 °/, d'al- déhyde crotonique et un peu d’un dimère CH"0*, bouillant vers 195°. Cette préparation peut être rendue infiniment plus facile en partant de paraldéhyde, moins chère et moins volatile. Le rendement atteint 34 °/s, soit 43 °/, de la théorie. Le dimère est une aldéhyde. Son oxime et sa semicarbazone cristallisent bien. En oxydant par l'acide nitrique les résines formées dans les réactions précédentes, on obtient passablement d'acide oxalique et un corps jaune amorphe, soluble en orangé dans l’'ammoniaque. — M. A. Brochet pré- sente, au nom de M. F. Chancel, un mémoire sur la théorie du « procédé à cloche ». L'auteur, prenant comme point de départ les phénomènes qui se passent à la cathode, arrive à des conclusions différentes de celles présentées, il y a quelque temps, par M. Bro- chet, Celui-ci se réserve de revenir prochainement ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 51 sur la question. — M. A. Brochet présente quelques recherches, qu'il a entreprises avec M. G. Boiteau, sur la transformation électrolytique de l'azote ammoniacal en azote nitrique. Les essais ont été laits en employant successivement des électrodes en charbon, en platine et en fer. L'électrolyte était constitué par une dissolu- lion de carbonate ou de nitrate d'ammonium dans la solution d’ammoniaque pure du commerce. Les cathodes de fer sont attaquées très nettement; de plus, la réduction du nitrate dans ces conditions est très importante. Ces deux réactions se trouvent simultané- ment évitées par l'addition d'acide chromique à l’élec- trolyte. Le dispositif à électrodes bipolaires est tout indiqué pour la conduite de l'opération ; malheureu- sement, le rendement baisse rapidement dès qu'il y a une certaine quantité de nitrate en solution. On ne peut donc arriver, de ce fait, à des résultats pratiques intéressants. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 3 Décembre 1908. MM. J. E. Marsh et R. de J.F. Struthers, en agilant une solution aqueuse de K*Hglf avec l’éther ou le formiate d’éthyle, ont obtenu le sel KHgF, qui forme avec le camphre un sel double KHgl*.4C°H10, FE. 65°, — Les mêmes auteurs ont fait réagir les cétones avec Hgl° en solution potassique froide. L'acétone donne le composé C'OHg°l*, la diéthylcétone le corps (CH. CHg*P)?CO, l’acétophénone le composé Hgl.C‘H5.C0. CHg°l". Tous ces corps sont des précipités jaunes. — Enfin les mêmes auteurs ont condensé le camphre avec Hgl° et ont obtenu six composés différents. — MM. E. C. C. Baly, J. N. Collie et H. E. Watson ont examiné le spectre d'absorption de la diméthylpyrone, de l'acide chélidonique, de l'éthyl-diacétylacétone, etc. Il varie souvent avec le solvant, ce qui semble montrer que ces composés peuvent exister sous plus d’une forme. Les pyrones et leurs dérivés simples paraissent contenir un pont d'oxygène, l'oxygène étant quadri- valent. — M. G. T. Morgan et M!!° F. M. G. Mickle- thwait, en faisant réagir AsCI° sur le camphre sodé, puis précipitant par les acides l'extrait alcalin du produit de la réaction, ont obtenu l'acide dicampho- rylarsinique HO.OAs(C1°H#0)?, F. 2669, [æ} — 186°,6. — M. H. E. Cocksedge, en chauffant TeBr' avec AgCAz pendant plusieurs jours dans le benzène, a obtenu par extraction à l’éther et évaporation des cristaux de 2 Te(CAz)°.(C?H5)0, qui, sublimés dans le vide, donnent le cyanure pur. — Le même auteur, en faisant réagir BBr° sur le thiocyanate d'argent en solution benzé- nique, à obtenu le thiocyanate de bore B(SCAz)5. — MM. A. E. Dunstan et R. W. Wilson ont déterminé la courbe concentration-viscosité de divers mélanges d'HS0* et SOS; ils trouvent un maximum pour le mélange H*SO%.SO®. — M. A. Holt jun. a constaté que CO* soigneusement desséché est décomposé par la décharge électrique silencieuse, et en proportion d'autant plus grande que la pression est plus faible. C'est le contraire qui se produit pour CO® humide, A basse pression, la décharge silencieuse parait agir comme la lumière ultra-violette, à pression plus haute comme l’étincelle. — MM. H. O. Jones et H. S. Tasker ont préparé le chlorure d’oxalyle par la méthode de Fauconnier ; le rendement est très faible, mais peut être fortement accru en opérant à 460° sous pression. La majeure partie du chlorure d’oxalyle distille à 70°; il contient 3 °/, de POCE. Le chlorure d'oxalyle réagit vigoureusement avec les amines primaires et secon- daires en formant des oxamides substituées; avec les amines tertiaires, il donne des produits d’addition. — M. R. B. Moore à préparé du xénon et du krypton purs des résidus de 120 tonnes d'air liquide. Leurs densités sont respectivement 65,35 et 41,506, ce qui donne pour les poids atomiques 130,70 et 83,012 (0 —-16). — MM. W. M. Gardner el H. H. Hodgson ont étudié l'action des réducteurs suivants : Zn, Na, Mg, Al, NaS°05 et HI, sur les acides tannique et gallique. En solution acide ou neutre, l'action est faible; en solution alcaline, la réduction est rapide, mais le rende- ment en acide benzoïque n’est pas quantitatif, par suite de la destruction lente de ce dernier par les réducteurs alcalins. — Les mêmes auteurs décrivent une méthode de détermination de l'acide tannique, basée sur l'absorption de l'iode par ce dernier et l'estimation de l'excès d'iode ajouté. — MM. E. Fitzgerald et A. Lap- worth présentent quelques considérations sur la catalyse des éthers et la conception de l'ion H dans la catalyse, la formation des sels et la conductivité électro- lytique. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 5 Novembre 1908. M. G.-J. Elias adresse un Mémoire sur la dispersion anomale de la polarisation rotatoire magnétique. Les expériences antérieures de l’auteur, faites par la méthode des demi-ombres, avaient démontré la né- cessité d'employer une lumière homogène et intense et des intervalles spectraux aussi petits que possible. Dans ses expériences nouvelles, il se sert, comme source de lumière, du Soleil, dont les rayons incidents, sous un rapport d'ouverture de 1/4, sont décomposés à l’aide d’un appareil spectral auto-collimateur; c’est la fente de sortie de cet appareil à grande intensité lumineuse qui fonctionne comme source de lumière très mono-chromatique. L'auteur étudie les quatre séries d'éléments paramagnétiques examinés dans un travail antérieur au point de vue de l'influence de la température et de laimantation sur les spectres sélectifs d'absorption et de fluorescence‘. Les ano- malies constatées sont particulièrement frappantes dans le cas des terres rares, pour lesquelles l’auteur reproduit un certain nombre de courbes très instruc- tives. Bien qu'il n'ait pas encore été en mesure de mettre au point l’ensemble de ses résultats, il croit pouvoir affirmer que la rotation, dans bien des cas, ne change pas de signe. — M. J. Traube adresse un Mémoire très détaillé sur la pression d'adhésion (Haftdruck). Des expériences de E. Overton, d’une part, et de ses propres recherches, de l’autre, il tire la conclusion suivante : La direction et la vitesse d’osmose entre deux solutions aqueuses de substances quelconques, séparées par une membrane, sont déter- minées par la différence de leurs tensions uperficielles par rapport à l'air. La solution à tension superficielle inférieure (par conséquent à pression intérieure moindre) et surtout les composants diminuant la ten- sion superficielle de l’eau présentent une tendance à diffuser vers la solution de plus grande pression inté- rieure. Dans le cas le plus général, la direction et la vitesse sont déterminées non pas seulement par la tension superficielle des solutions, mais encore par les facultés d'absorption et de dissolution de la mem- brane elle-même. L'auteur appelle «pression d’adhe- sion » la pression sous laquelle la substance dissoute adhère au dissolvant; celle qui correspond à une molé- cule de matière dissoute dans un litre de solution serait la pression d'adhésion moléculaire. Or, suivant la théorie de van t'Hoff, l'allure de l'osmose serail déterminée par le nombre de particules de la substance dissoute et non pas par sa qualité. L'auteur substitue à cette théorie, infirmée du reste par bien des phéno- mènes d'ordre surtout physiologique, les principes suivants : En dehors du nombre de particules, la pres- sion d'adhésion détermine l'allure du processus osmo- tique; ce n’est que dans le cas de l'égalité des pressions d'adhésion pour les substances dissoutes des deux côtés de la membrane que l'équilibre des forces osmo- tiques s'établit si les nombres de particules sont égaux. Un autre chapitre du Mémoire contient les mesures de pressions d'adhésion faites sur la base de détermina- 4 Ann. d. Physik, (4), t. XXVII, p. 233, 1908. 52 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES lions capillaires encore inédites. Dans un autre ordre d'idées, il paraît que la faculté d'hydratation aug- mente à mesure que s'accroit la pression d'adhésion. La solubilité (ainsi que la pression de solution) d’une substance dépend également de la différence qui existe entre sa pression d'adhésion en solution et sa pression intérieure. A solubilité égale, les pressions intérieures de deux substances sont entre elles comme les pressions d'adhésion, et, à pression intérieure égale, le composé à pression d'adhésion supérieure présente la solubilité la plus grande. La courbe reliant les tensions superficielles avec les concentrations est déterminée par la seule tension superficielle de la substance dissoute. En se basant sur les recherches de nombreux auteurs antérieurs, qui contredisent la théorie si simple de la solubilité donnée par Nernst, l’auteur résume les relations très intimes qui existent entre les modifications de solubilité, d’une part, et la tension superficielle ainsi que la pression interne, de l’autre. Les substances à pression d'adhésion négative, c'est-à-dire celles qui diminuent la tension superti- cielle du dissolvant, éprouvent une diminution de solu- bilité sous l’action des corps à pression d'adhésion positive, et inversement pour ceux à pression négalive. Lorsque plusieurs sels, c’est-à-dire plusieurs sub- stances à pression d'adhésion positive, se trouvent en présence dans une même solution, la solubilité se déplace au détriment du sel à moindre pression d'adhésion. L'albumine et d’autres colloïdes à poids moléculaire considérable n’exercent aucune influence sur la tension superficielle de l’eau, leur pression d'adhésion, ainsi que celle des particules suspendues, étant exactement ou approximativement nulle. Dans un autre chapitre, consacré aux relations qui exis- tent entre l'absorption, le coefficient de répartition et la pression d'adhésion, l'auteur établit une allure en général parallèle de ces trois facteurs. En ame- nant une solution, à dissolvant organique analogue au benzène, au contact de l’eau, une répartition ne se produit que dans le cas où la pression d'adhésion du corps par rapport à l'eau est inférieure à une valeur maxima, au delà de laquelle il est absorbé entièrement par l’eau. Lorsque, au contraire, la pression d'adhésion par rapport à l’eau est nulle, la substance reste intégra- lement dissoute dans le benzène. Quant aux relations entre la pression de vapeur et la pression d'adhésion, l'auteur fait remarquer que, pour les substances d’un point d’ébullition identique, la pression de vapeur doit être d'autant plus grande que la pression d'adhésion est plus faible, tandis qu’à égalité de pression d’adhé- sion la pression de vapeur est d'autant plus considé- rable que le point d'ébullition est plus bas. Des rela- tions analogues existent entre le point de congélation et la pression d'adhésion. Quant aux phénomènes élec- triques, l’auteur énonce cette règle générale que la vitesse des cations est, en général, d'autant plus consi- dérable que la pression d'adhésion du sel est plus petite, et inversement pour les vitesses des anions. Plus la pression d'adhésion des anions est grande, et plus la tension de décomposition est considérable. Aussi la théorie future des piles galvaniques devra-t- elle être basée exclusivement sur la pression intérieure des éléments composant les électrodes et la pression, d'adhésion des électrolytes. La chaleur spécifique est, à son tour, liée à la pression d'adhésion, croissant, dans la série des anions, à mesure qu'augmentent les pres- sions d'adhésion, et inversement pour les cations. La chaleur de neutgalisation se trouve dépendre du degré d'ionisation aussi bien que de la différence de pres- sions d'adhésion entre l'acide, d'une part, et la base ou le sel, de l’autre. Plus une substance adhère fortement au «dissolvant, plus son degré d’ionisation est grand. L'auteur indique encore les relations se rapportant à la rotation du plan de polarisation, à l'absorption lumi- neuse où chromatique et aux accélérations de réaction. La théorie du covolume lui donne un nouveau moyen de détermination quantitative de la pression d'adhé- sion et lui permet d'établir pour les solutions une équa- tion des états, d'où il résulte que le produit de la pres- sion d'adhésion par le covolume, à savoir le travail d'adhésion, est égal à RT. La pression d'adhésion et le covolume présentent une allure en général parallèle. D'autre part, pour les substances réduisant la tension superficielle de l’eau, le volume moléculaire, la cons- tante D, mais surtout le volume de solution molécu- laire, sont sensiblement proportionnels à la racine carrée de la pression d'adhésion. Suivant une règle établie par l'auteur, les réfractions moléculaires des substances à pression d'adhésion peu élevée sontapproxi- malivement proporlionnelles aux pressions d'adhésion. Il établit également une liaison entre la valence chi- nique et la pression d'adhésion. En première approxi- mation, les racines carrées des pressions d'adhésion sont proportionnelles à la somme des valences. Suivant l'opinion de M. Traube, la pression d'adhésion déter- minerait en premier lieu le pouvoir et le degré d'ioni- sation. Tandis que les molécules d’une substance non conductrice, dissoute dans l’eau, doivent se rendre d’une particule aqueuse à l’autre, en s’associant à elle d’une facon passagère, les molécules de sel, tout en se contentant bien souvent d’une particule d’eau, doivent, en solution concentrée, en raison de la pression d’ad- hésion élevée dela plupart des ions, fixer une particule aqueuse pour chaque équivalent d’ion. C'est ainsi qu'on se passerait parfaitement des hypothèses fonda- mentales d’Arrhenius, inadmissibles dans l'opinion de l’auteur. Séance du 20 Novembre 1908. M. F. Kiebitz rend compte de ses recherches sur la radiotélégraphie dirigée. Dans une expérience d'inter- férence faite sur des ondes hertziennes de 4 mètre de longueur, l'auteur se servait de transmetteurs de Hertz distants d'une demi-longueur d'onde, qu'il excitait à amplitude égale pour donner des vibrations d’une dif- férence de phase d’une demi-période. Les effets de ces transmetteurs s’ajoutaient suivant la droite réunissant les deux transmetteurs, mais se compensaient en direc- tion normale. Or, en adaptant cette expérience à la télégraphie sans fil, on se heurte à de grandes diffi- cultés techniques pour assurer une excitation efficace d'antennes disposées à la distance si grande d'une demi- longueur d'onde. D'autre part, toute variation de la longueur d'onde obligerait à modilier la distance séparant les mâts ou les tours. Aussi, dans le présent Mémoire, l’auteur abandonne-t-il la condition relative à la distance des antennes. Les rayonnements se com- pensent, en effet, quelle que soit cette distance, suivant la droite les réunissant, pourvu que les rayonnements vibrent avec une différence de phase de 180 degrés. Dans la direction normale à celle-ci, le rayonnement s'ap- proche d'autant plus du double du rayonnement d’une antenne (ou de zéro) que la distance des antennes coïncide plus exactement avec un multiple impair ‘ou pair) de la demi-longueur d'onde. D'autre part, M.Kie- bitz réussit à démontrer que deux antennes excitées pour rendre des vibrations d'une différence de phase d'une demi-période, à quelque distance l'une de l’autre et immédiatement au-dessus de la surface de la terre, présentent un maximum derayonnement dans le plan des antennes. Cette même proposition vient, du reste, d'être formulée par Bellini et Tosi. Dans ses expé- riences, l’auteur se sert de stations de transmission et de réception, munies de 4, 2 ou 3 antennes de 8 mètres de longueur, accordées pour une longueur d'onde constante de 100 mètres, et qui, avec une dépense d'énergie de 25 watts, permettent de continuer les observations jusqu'à plusieurs kilomètres de distance. Ces expériences font voir, d'autre part, que la lumière du Soleil n'occasionne pas de modifications appré- ciables. ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. PA Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselte. 20° ANNÉE N° 2 30 JANVIER 1909 Revue générale g Î € D Cienc pures ef appliquées Directeur : LOUIS CR Docteur ès sciences. publiés dans la Relue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y ccmprie In Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie L'observation systématique des trainées météoriques persistantes. — Tout récemment, M. Trowbridse, professeur à l'Université Colombia, à New-York, a abordé le problème des trainées météo- riques persistantes el est arrivé à des résultats très intéressants sur la hauteur, les dimensions et la durée de ces phénomènes, jusqu'ici absolument inexpliqués. D'ailleurs, sur ce sujet, les documents sont peu nom- breux et il serait à souhaiter que des observations systématiques et exactes des traînées météoriques per- sistantes fussent entreprises. C’est ainsi qu'on pourrait espérer résoudre les pro- blèmes suivants : la cause de la luminosité propre appa- rente des trainées météoriques; la hauteur de l'atmo- sphère de la Terre, par la mesure exacte des trainées télescopiques; la densité de cette atmosphère à une hauteur de 80 à 100 kilomètres, par une comparaison directe avec la pression nécessaire à la production de la phosphorescence des gaz, si la traînée météorique est une lueur du même genre; la direction et la vitesse des courants atmosphériques aux grandes hauteurs; enfin, la relation possible entre les mouvements de l'atmosphère à ces grandes altitudes et la pression barométrique. Mais, pour faire œuvre utile. il faut que les observa- teurs apportent à l’étuie des phénomènes une très grande exactitude et ne négligent aucun des détails accessoires qui, à première vue, pourraient paraitre insignifiants. M. Trowbridge donne à ce sujet de très importantes indications, dont tout astronome fera bien de tirer profit. Ces indications portent soit sur l'obser- vation du noyau du météore, soit sur la traînée ; dans l'apparition d'une étoile filante laissant une traînée, on peut, en effet, distinguer facilement deux phénomènes : le noyau lui-même ou, si l'on veut, le corps chaud en mouvement et sa traînée d’étincelles, d'une part, et, d'autre part, les faits se rapportant à la traînée persis- tante proprement dite, qui peut rester visible quelques secondes ou mème un assez grand nombre de minutes. En faisant ces distinctions, on évite beaucoup de con- fusion dans la description des phénomènes et l’on en facilite l'étude théorique. REVUE GÉNÉRALE DES SCIEN(: S, 199, Voici, d'ailleurs, d’après M. Trowbridge, les différents points sur lesquels doit porter l'attention de l’observa- teur : 1° Ubservalions concernant le noyau du météore : Noter le moment de l'apparition du noyau du mé- téore et la durée de sa trajectoire visible ; Fixer le point radiant et donner le nom du météore (dire s’il appartient au groupe des Léonides, des Per- séides, etc.) ; Déterminer la couleur du noyau, la longueur de la taj-ctoire, la longueur de la portion de la trainée par rapport à la trajectoire entière. 20 Observations de la traïnée persistante : Couleur de la traînée immédiatement après la dispa- rition du noyau et tout changement de couleur de la trainée durant tout le temps qu’elle reste visible; Longueur et largeur de la traînée en degrés et minutes d'arc, immédiatement après la disparition du noyau, et sa position dans le ciel par rapport à des étoiles facilement identifiables ; Observer a de courts intervalles de temps les change- ments de dimensions de la traînée en degrés et faire, si possible, une série de dessins, indiquant les change- ments successifs dans la forme de la traînée. La lar- geur de la traïnée, où une partie, à des intervalles successifs de temps, est de la plus haute importance, puisqu'elle indique /a vitesse de diffusion de la masse gazeuse; Le déplacement ou dérivation de la traînée en degrés avec le moment correspondant. Dans ce but, on doit choisir une portion brillante de la trainée vue dès l'origine. I faut également noter la direction de cette dérivation par rapport à la surface de la Terre, et, dans le cas d'observations simultanées en plusieurs stations, si les calculs de la vitesse sont faits en kilo- mètres, ils doivent être ainsi mentionnés. l 11 faut noter également si l'intensité de la lumière de la trainée est : 4) uniforme, b) très brillante à l’exté- rieur, €) très brillante au centre, et le moment de cette observation après la première apparition du météore; Dire si la traînée augmente d'éclat, car le faitsemble se produire souvent. L'observateur veillera attentivement à ne pas prendre pour une augmentation d'intensité une augmentation dans les dimensions de la traînée; 2] 54 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Faire des observations spectroscopiques concernant la présence et la position dans le spectre d’une raie dans le jaune et d’une ou deux raies dans le vert; Enfin, noter la durée de visibilité de la traînée à l'œil nu et au télescope. Il est évident que, dans ces recherches, la qualité des matériaux apportés est préférable à la quantité et qu'il vaudrait mieux laisser de côté un ou plusieurs points si l’exactitude de l’ensemble devait en souffrir. Th. Moreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. $ 2. — Mécanique appliquée L'état actuel de la batellerie en France. — Le Ministère des Travaux publics a fait opérer, le 25 mai 1907, sur tout le réseau intérieur de navigation, un recensement qui a porté sur tous les bateaux de transport ordinaires ou à propulsion mécanique, jau- geant au moins 3 tonnes, ainsi que sur les bateaux de plaisance actionnés par un moteur. Le total des bateaux recensés est de 15.310, jaugeant 3.841.745 tonnes. Au point de vue du tonnage, la répar- tition est la suivante : 7.850 bateaux (51 °/,) de plus de 300 tonnes; 2.405 (16 °/,) de 200 à 300 tonnes: 1.522 (10 °/.) de 100 à 200 tonnes; 3.533 (23 °/,) de 3 à 100 tonnes. Quant à l’origine, 2.649 bateaux appartenaient à des propriétaires étrangers : 2.204 étaient belges et 400 étaient allemands. La plupart étaient utilisés pour le transport des houilles destinées à notre consommation industrielle. Sur les 12.661 bateaux francais, 610 étaient à pro- pulsion mécanique, jaugeant 33.511 tonnes et repré- sentant une force de 77.166 chevaux-vapeur ; 125 étaient actionnés par des roues à aubes et 485 au moyen d'une hélice ; 170 servaient pour le transport des voya- geurs; les autres, destinés au service des marchan- dises, se partageaient en 103 bateaux porteurs, 284 re- morqueurs et 53 toueurs. L'évolution du matériel tend vers l'emploi plus fré- quent du remorqueur. Le bateau porteur, avec ses dix à quinze hommes d'équipage, fait une grosse dépense improductive, quand il stationne dans les ports; tandis que le remorqueur peut travailler sans arrêt pendant que le chaland supporte les manutentions nécessaires à son chargement et à son déchargement. Le touage reste à l’état d'exception, car l'établissement de Ta chaîne ou du cäble comporte une importante dépense préalable, indépendante du trafic; un des principaux avantages du remorquage consiste justement dans le fait que la dépense de premier établissement peut se proportionner exactement au trafic. Le dernier recensement a permis de constater qu'à la suite de l'unification des canaux et rivières canali- sées, la capacité moyenne des bateaux s’est accrue: il en résulte une réduction de l'effort de traction ainsi que du personnel nécessaire; là encore, la concentra- tion provoque une diminution des frais généraux et un abaissement du fret. Les bateaux pontés (10.039) sont de beaucoup les plus nombreux ; ils dominent sur les voies du Nord, où le trafic est le plus intense. La plupart sont encore construits en bois; les bateaux en fer (1.207 en 1902, et 1.396 en 1907) augmentent lentement: nous tou- chons ici, en particulier, à l’une des causes de l’infé- riorité de la navigation fluviale en France : l’état arriéré de son matériel. Les bateaux recensés portent une population de 45.559 personnes, qui a été oubliée par la loi d'hygiène de 1902. Dans un Rapport présenté en juillet dernier à l’Académie des Sciences, M. le Professeur Chantemesse a signalé le fait que ces maisons flottantes constituent des types d'habitations insalubres, très dangereuses, qui jouent un rôle considérable dans la transmission des maladies contagieuses. Le recensement a compté, en outre, 4.512 animaux de trait, dont 2.393 chevaux, 152 mulets et 1.967 ânes. Ce chiffre montre que le halage à col d'homme est encore largement répandu, principalement sur les canaux du Centre. Un des grands inconvénients de la batellerie fran- çaise réside dans son manque d'organisation, de cohé- sion, et le fait est d'autant plus grave que nous sommes ici sous le régime de la petite entreprise : sur 7.678 pro- priétaires, 5.995 ne possèdent qu'un seul bateau, qu'ils conduisent généralement eux-mêmes; 7.340 ont moins de quatre bateaux. La seule grande entreprise de transports fluviaux est la Compagnie Havre-Paris- Lyon-Marseille, qui possède 426 bateaux et jouit d’un monopole de fait pour la navigation du Rhône. Enfin, sur les 15.310 bateaux recensés, 8.020 étaient en cours de route et 7.290 en stationnement. Parmi les bateaux en mouvement, 5.527 étaient chargés, et 2.493 naviguaient à vide. L'absence d'organisation en vue de la recherche du fret, le manque d'outillage dans les ports fluviaux, font que le matériel reste trop longtemps inutilisé : tandis que la batellerie utilise huit fois la capacité de son matériel, le chemin de fer la fait servir quarante-trois fois. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. A propos du vol des oiseaux.— M. Ch. Weyher nous signale que, dans son article : « Oiseaux et Aéro- planes », paru dans la Revue du 30 décembre 1908, il a omis un alinéa important. Voici ce passage, qui doit être placé au bas de la page 975, 2° colonne, après les mots : « convenablement à la main ». « Mais le martinet nous en donne la preuve écla- tante; en effet, à l'encontre de tous les autres oiseaux et mème des hirondelles ordinaires qui se propulsent en battant des deux ailes en même temps, le martine, lui, relève toujours une de ses ailes pendant qu'il abaisse l’autre. Cette simple remarque suffit à démon- trer que l'oiseau est aussi bien appuyé sur l'aile qui remonte que sur celle qui descend, car autrement il pivoterait à chaque coup autour de son axe longitu- dinal. » $ 3. — Physique La charge spécifique des ions émis par les corps chauffés. — Depuis les expériences faites, en 1899, par J.-J. Thomson, la valeur de la charge spécifique (charge par unité de masse) a été déterminée par de nom- breux auteurs, pour les ions négatifs émis par diffé- rents corps chauffés, avec des résultats approxima- tivement identiques pour chacun d'entre eux. Ces ions seraient, par conséquent, des électrons, identiques pour toutes les substances. Mais la quantité corres- pondante pour les ions positifs émis par les corps chauffés n’a été jusqu'ici que peu étudiée; la valeur de 400, déterminée par l’auteur précédent, correspon- drait à peu près au cas où les ions seraient des atomes de fer, porteurs d'une charge égale à celle de lion hydrogène dans l’électrolyse. Dans un récent Mémoire, M. O.-W. Richardson, professeur à l'Université de Princeton, décrit les expériences qu'il vient de faire à ce sujet. Les valeurs moyennes trouvées dans le cas du platine et du car- bone sont de 384 et 353 respectivement, et les rapports de la masse de l'ion à celle de l'atome d'hydrogène, étant de 25,7 et 27,6 respectivement, sont sensible- ment identiques entre eux et avec la quantité corres- pondante trouvée, pour le fer, par M. J.-J. Thomson. Il est difficile d'établir la vraie nature des ions, mais. les valeurs trouvées par l'auteur permettent d’'écarter a priori certaines d’entre les hypothèses jusqu'ici pro- posées. Il ne saurait, en effet, s'agir ni d'atomes de métal (en raison de la grande variation de m qui s'en- suivrait), ni d'atomes ou de molécules d'hydrogène absorbé (en raison de la valeur trop grande du quotient LS SP 1 Philos. Mag., n° 95, 190$. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 55 m/H), ni, pour une raison analogue, d'électrons posi- tifs (établis par Thomson dans les rayons-canal et qui, suivant d'autres physiciens, constitueraient les rayons &). D'autre part, l'auteur établit l'homogénéité presque parfaite des ions et l'absence de tout élargissement dans le champ magnétique. Les ions doivent être, en majorité au moins, d'un poids relativement élevé. La valeur de e/m, malgré une tendance assez incer- taine d’accroissement de m, ne doit pas présenter de relation bien définie avec la température du corps chauffé. Les valeurs de m/H sont approximativement iden- tiques aux poids moléculaires de Az*, CO ef O$, sans qu'on puisse comprendre pourquoi toutes les sub- stances en essai émettraient, pendant l'éc'auffement, l'un ou plusieurs de ces gaz. La plus grande partie du gaz émis par les métaux chauffés semble, en.effet, se composer d'hydrogène. Il est possible que les ions soient produits par quelque impureté, commune à toutes les matières soumises à l'expérience; dans l'hypothèse où ce seraient des atomes de sodium positivement chargés, l'on obtiendrait, en effet, une valeur de e/m s’approchant d'assez près de la valeur constatée par l’auteur. Si l'ionisation positive dans le vide était due à «quelque composant réel commun aux différents élé- ments soumis à l'expérience, et non pas à une sub- stance étrangère dont la présence serait fortuite, il faudrait admettre que les ions transportent une charge inférieure à la charge électronique e fonda- mentale. La valeur de »/H, pour ces ions, est, en effet, supérieure au poids atomique du carbone, l'une des substances qui leur donnent naissance. L'auteur continue les expériences résumées ci- dessus, en les étendant à d'autres éléments. Recherches diéleetriques sur le mica. — Dans une thèse récemment présentée à l'Université de Greifswald, M. E. Mattenklodt s'est proposé d'étudier l'influence des champs électriques d'intensité élevée sur les phénomènes diélectriques que présente le mica. La valeur considérable de la plupart des constantes diélectriques rendait probable l'existence d’un parallé- lisme réel entre les phénomènes diélectriques et ceux que présentent les corps ferromagnétiques, D'autre part, l’on a pas réussi encore à démontrer l'existence d'une véritable hystérèse diélectrique, ni d’une relation entre la diélectricité et l'intensité du champ. L'auteur étudie ce dernier problème dans le cas du mica (moscovite), substance bien définie et chimiquement assez homogène. Incidemment, ilrecherche l'influence de la température sur la cohésion diélectrique de ce Corps. Comme la cohésion diélectrique du mica, pour des intensités de champ allant jusqu'à 600.000 volts/em., ne subit pas de variations sensibles, il ne convient pas d'établir de parallélisme entre les phénomènes diélec- triques du mica et les phénomènes magnétiques du fer; cette constance de la cohésion diélectrique exelut aussi toute possibilité de l'existence d’une hystérèse diélectrique véritable. D'autre part, l'auteur n'a pu constater l'existence d'un coefficient de température différent de 0, même en se servant d’un intervalle de 30° et en assurant une précision de 10, Les variations souvent très considérables de la cons- tante diélectrique du mica, constatées d'un échantillon à l’autre, paraissent être dues en grande partie à la composition chimique et peut-être à la teneur en eau. Les échantillons étudiés par l’auteur présentent‘des valeurs variables entre 7,1 et 7,7. En raison de l'indépendance établie entre la cohésion diélectrique du mica, d’une part, et l'intensité du champ et la température, de l'autre, s’ajoutant aux propriétés si précieuses constatées par M. Bouty, cette matière se prête particulièrement à la confection des condensateurs-étalons. $ 4. — Electricité industrielle Le Probléme téléphonique actuel en France. — Nous recevons de M. E. Mercadier, direc- teur des Etudes à l'Ecole Polytechnique, la lettre sui- vante : Monsieur le Directeur, Dans un article sur le Problème téléphonique actuel en France, paru dans le numéro de votre Revue du 30 décembre 1908, M. Turpain, professeur à la Faculté des Sciences de Poitiers, consacre la plus grande partie de son travail à une diatribe virulente contre l'Ecole Polytechnique et les ingénieurs des Télégraphes qui sortent de cette Ecole. Ancien directeur ou mème professeur delatrentaine d'ingénieurs des Télégraphes actuellement en fonc- tions, permettez-moi, dans cette Revue qui possède une si grande autorité et qui est répandue dans le monde entier, de protester énergiquement contre le procédé qui consiste, à propos d’un accident déplo- rable dont la cause est encore inconnue, à décerner un brevet d'incapacité organisatrice et d’ignorance tech- nique à tout un personnel d'ingénieurs. « Si encore l'auteur de l’article en question possé- dait sur ces deux points une compétence suffisante; mais il est permis d’en douter. « En tout cas, pourquoi attaquer à ce propos l'Fcole Polytechnique? Pourquoi profiter d'une sorte de ca- lembour, en attribuant ici au mot {echnique le sens particulier qu'il a actuellement et qui comporte une spécialisation professionnelle, au lieu du sens tout à fait général qu'il avait en 1795? On a ainsi l'air de donner à entendre que cette Ecole fait des 2ngénieurs, tandis qu'elle ne fait que des élèves-ingénieurs, qui ne deviennent techniques qu'après avoir travaillé deux ou trois ans dans de véritables Ecoles techniques (dites d'application), comme celles des Ponts et Chaussées, des Mines, des Postes et Télégraphes, etc. Si cette Ecole est aussi néfaste, aussi funeste au pays que l’affirme l’auteur de l’article, comment se fait-il que le Parlement lui ait accordé, il y a quelques jours, la déclaration d'utilité publique et la personnalité civile ? « Mais je m'arrête ici, en songeant que l’outranee même des attaques de M. Turpain suflit pour les ré- futer. Vous avez d’ailleurs vous-même, M. le Directeur, indiqué ce point de vue dans les trois notes inscrites au bas des pages 979, 980, 981 de l’article en questfon et formulé des réserves nécessaires. « Veuillez agréer, etc. « E. Mercadier, Ex-ligénieur des Télégraphes, Directeur des Etudes à l'Ecole Polytechnique. » Nous recevons, d'autre part, de M. Estaunié, ingé- nieur des Télégraphes, les remarques suivantes sur la même question : « Monsieur le Directeur, « Dans un article sur le problème téléphonique en France, paru dans le numéro du 30 décembre dernier, M. Turpain, très courtoisement d’ailleurs, à cru devoir me mettre personnellement en cause et inférer, du fait qu'un Traité publié par moi en 1904 ne parle point des multiples automatiques, que « tous les ingénieurs rançais ignorent ce système ou feignent de l'ignorer » « Il y a là une généralisation vraiment un peu hâtive et contre laquelle j'ai le devoir de protester. « Si, dans un ouvrage élémentaire, exclusivement destiné à décrire au personnel le matériel alors en usage, j'avais introduit la description d'appareils non encore utilisés en France, M. Turpain m'aurait à bon droit accusé d’un manque de méthode et trouvé plus dilettante que de raison. « En revanche, mieux informé, M, Turpain aurait appris que le Gouvernement français, le premier en Europe, fit un essai de l'appareil Strownger, qu'actuel- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE lement encore il expérimente l'appareil Lorimer, qu'il n'ignore pas, enfin, et suit de très près les expériences similaires en cours, soit en Autriche, soit en Allemagne. Enlfin, s'il désire être renseigné sur les origines de ce problème et l'importance qui lui fut accordée dès le début par l'Administration française, je me permettrai de signaler à M Turpain une série d'articles publiés sous ma signature, dès 1889, dans les Annales Télegra- piques, et intitulés : « Stations téléphoniques automa- liques », « Veuillez agréer. « E. Estaunié, lngénieur des Télégraphes. n $ 5. — Chimie physique L'action de lémanation du radium sur l'eau, Hans de récentes expériences, Sir William Ramsay et M. Cameron ont recherché si le rayonne- ment d'une grande quantité d'émanalion du radium est susceptible de transformer les atomes de la matière ordinaire, Suivant les résultats de ces savants, le cuivre, sous l'action de cette émanation, serait transformé en lithium et peut-être même en sodium et potassium. D'autre part, ces expériences semblaient prouver qu'en présence des solutions de cuivre, l’'émanation se dé- compose en argon, el, en présence de l’eau, en néon. Or, dans un Mémoire récemment présenté à l'Aca- démie des Sci nces, Mme Curie et Ml Gleditsch ont fait savoir qu'il leur avait éLé impossible d'obtenir du lithium aux dépens du cuivre dans les circonstances où se sont placés les savants anglais. D'autre part, MM. E. Rutherford et T. Royds ‘, à l'aide du radium mis à leur disposition par l'Académie des Sciences de Vienne, viennent de faire des expé- riences destinées à établir si la désintégration de l'émanalion du radium, en présence de l'eau, s'ac- compagne bien de la production de néon. Ils ont déterminé en premier lieu la quantité minima de néon susceptible d'être perçue à l'aide du spectroscope, et ils ont pu d celer avec sécurité une quantité infé- rieure à un millième de millimètre cube. Or, MM. Ramsay et Cameron, dans leur dernier Mémoire, signalaient l'impossibilité d'éviter toute entrée d'air dans leur appareil; en se servant d'un mélange gazeux de 12,6 centimètres cubes, ils oat constaté, après l'élimination de l'hydrogène et de l'oxvyène, un résidu composé de 0,292 centimètre cube d'azote el°de bioxyde de carbone, En supposant que ce résidu consistait uniquement en azote, on en tirerail la conclusion qu'il existait une fuite d'air d'environ 0,36 centimétre cube. Or, comme, suivant MM. Rutherford et Royds, len- tée dans l'appareil d'une telle quantité d'air donne un spectre brillant de néon, comparable pour l'éclat au spectre de lhélium produit simullanément, ces savants se demandent si l'expérience décrite par MM. Ramsay et Cameron suffit pour prouver la produc- tion de néon aux dépens de l'émanation du radium. $ 6. — Anthropologie la découverte de deux squelettes néan- derthaloïides dans le bassin de la bordogne et PHomo primigenius. — Jusqu'à présent on ne possédait, en dehors de la fameuse calotte cranienne trouvée dans la vallée de Néanderthal, en Allemagne, que trois crânes préhistoriques du même type. Ce sont les deux crânes trouvés, avec quelques autres ossements, à Spy, en Belgique, et le crâne de Gi- braltar, décrit depuis longtemps, mais dont le gise- ment a été contesté. Mais voici qu'au mois d'août 1908 on vint à découvrir deux squelettes, bien en place, dans les couches quaternaires du bassin de la Dor- ‘ogne, à une centaine de kilomètres seulement l'un de l'autre. 1 Philos. Maug., n° 9%, 1908 l Le premier de ces squelettes a été découvert par les abbés J. et À. Bouyssonie et L. Bardon, le 3 août 14908, dans une grotte près de la Chapelle-aux-Saints (Cor- rèze), à peu de distance de la frontière du département du Lot. Les ossements ont été envoyés à Paris, au Muséum, où M. Boule, professeur de Paléontologie, en à fait le premier examen; les résultats en sont consignés dans. une Note du 14 décembre 1908 à l'Académie des Sciences. Les conditions du gisement ont été précisées par les découvreurs dans une autre Note, communiquée à l'Académie le 21 décembre de la même année. La grotte où fut faite la trouvaille est située au bord d'un petit affluent de la Dordogne; elle a la forme d’un couloir s'enfoncant dans du calcaire liasique. Dès 1905, MM. Bouyssonie et Bardon y ont fait des fouilles, et c'est dans le prolongement d'une couche moustérienne s’enfoncant dans l'intérieur de la grotte jusqu à 6 mètres de l'entrée qu'ils ont trouvé les ossements en ques- tion Cette couche repose directement sur le sol de la grotte. Elle avait de 30 à 40 centimètres d'épais- seur en général, mais atteignait près du double sur l'emplacement d'une fosse qui était creusée dans le sol, à 3 mètres environ de l'entrée Cette fosse avait 1,40 de longueur sur 0,85 de largeur et 0,30 de hauteur. Le squelette y était étendu sur le dos, la tête tour- née à l'Ouest et calée par quelques pierres, le bras droit plié de facon à ramener la main vers la figure, le bras gauche étendu, les jambes repliées. Au-dessous. de la tête, il y avait « plusieurs grands fragments d'os posés à plat, el, au voisinage, l'extrémité d’une patte postérieure d'un grand Bovidé avec plusieurs os en connexion ». Au-dessus el autour du squelette, des os brisés et des outils en quartz et en silex d'un beau type mous- lérien : racloirs abondants, quelques pointes et des outils variés. La faune qui accompagnait l'outillage comprenait le Renne (Cervus tarandus), très abondant, un grand Bovidé, le cheval (rare) et des débris de Blaireau, Re- nard, Ovidés, ete., ainsi qu'une molaire supérieure dw lihinoceros tychorinus et des os d'Arctomys mar- motta. Celte faune caractérise le Quaternaire moyen. La grotte était donc un lieu de sépulture et de repas. funéraires. Le squelette humain y fut enseveli suivant un rite mortuaire spécial. Laissant de côté les vertè- bres et les os des membres, qui permettent d'estimer la taille du sujet à 4",60, voyons la pièce la plus inté- sante de ce squelette, le crâne. Si l’on avait voulu exagérer à dessein les caractères déjà connus du type dit néanderthaloïde, on n'aurait pas mieux réussi qu'en copiant la tète osseuse en ques- tion, telle qu'elle à été reconstituée par M. Boule avec les fragments trouvés dans la tombe. La boîte cranienne est assez volumineuse. L'état des sutures et la configuration du maxillaire inférieur in- diquent nettement que le crâne appartenait à un in- dividu à âgé. L'indice céphalique est de 75; le crâne est done franchement dolichocéphale, comme ceux de Spy et de Gibraltar. Le peu de développement de la calotte cranienne en hauteur correspond à ce que l’on constale dans ces crânes. Les arcades sourcilières: proéminentes, formant de véritables bourrelets au- dessus de la totalité du bord supérieur de lorbite’, et suivies d'une dépression du frontal en arrière, sont aussi accusées sur le crâne de la Chapelle-aux-Saints que sur celui de Néanderthal. La projection de l'occi- pital en arrière est plus forte que dans le crâne de Spy. Le trou occipital est reporté loin en arrière; l'apophyse mastoide est peu développée. Quant à la perelen ss ds à Polos 2 Met PRE ae FL" © Ch fie ARR 1 J'insisle sur ce délail, car on a souvent décril, sous le nom de bourrelet néanderthaloïde, les arcades sourci- lières partiellement développées du côté interne du bord supérieur de l'orbite, et laissant un méplat triangulaire du coté externe de ce bord, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 57 partie faciale de la tête, elle est tout à fait remar- quable; comme elle est beaucoup plus complète que celle de la tête osseuse de Spy, elle va nous donner d’au- tres et de nouveaux caractères de cette race préhisto- rique de Néanderthal. Voici comment s'exprime à ce sujet M. Boule dans sa Note : « La face... présente un proguathisme facial très considérable; les orbites, saillantes, sont grandes; le nez, séparé du front par une profonde dépression, est court et très large. Le maxillare supérieur, au lieu de se creuser, au-dessous iles orbites, d'une fosse canine, comme chez toutes les races humaines actuelles, se projette en avant, tout d'une venue, pour former, dans le prolongement des os malaires, une sorte de museau, sans aucune dépres- sion. Les dents sont absentes, mais la voûte palatine est très longue; les bords latéraux de l’arcade alvéo- laire sont presque parallèles, comme chez les singes anthropoides ». La mandibule offre aussi les traits des mandibules fossiles que l’on rattache au type de Néanderthal : celles de la Naulette, de Spy, de Krapina, de Malar- naud. Elle est surtout caractérisée par l'absence de menton et l'obliquité de la symphyse, dirigée en bas et en dedans comme chez les anthropoides ; à noter aussi la grande largeur du condyle, l'épaisseur consi- dérable du corps de l'os et la faible profondeur de l'échancrure sygmoïde. Le second squelette a été trouvé dans la célèbre sta- tion de Moustier (vallée de la Vézère), par un préhisto- rien suisse, M. Hauser, qui fouille systématiquement depuis trois ans le sol des berges de la Vézère et de la Dordogne. La découverte a été faite en avril 1908; mais M. Hauser a laissé tout en place jusqu'au 12 août de la même année, jour où l'extraction à été faite en pré- sence d'une dizaine de savants allemands, venus exprès pour constater l'authenticité du gisement et faire la première étude des ossements. C'est M. Klaatsch, professeur d'Anatomie à Breslau, qui s’est chargé plus spécialement de cette étude et qui a transporté le crâne et les os longs au Musée de l'Uni- versité de Breslau. J'ai eu l'occasion d'assister à la con- férence qu'a faite M. Klaatsch au Congrès des Natu- ralistes allemands le 26 septembre dernier et de voir les photographies du crâne de Moustier, ainsi que le moulage d'un crâne néanderthaloïide pour ainsi dire idéal qu'avait « composé » ce professeur d’après l'étude des fragments existants. Ayant pu voir le crane de la Chapelle-aux-Saints un mois après, grâce à l'obli- geance de M. Boule, j'ai pu me rendre compte des res- semblances et des différences entre les deux pièces. Le crâne de Moustier offre, comme celui de la Chapelle- aux-Saints, les arcades sourcilières très proéminentes, en forme de bourrelet surplombant la totalité du bord supérieur de l'orbite; toutefois, ce bourrelet diminue d'épaisseur à mesure qu'il s'éloigne du nez. La dépres- sion transversale de l'os frontal qui s'étend en arrière «le ces bourrelets est aussi beaucoup moins prononcée dans le crâne de Moustier que dans les autres cränes néanderthaloïdes; le front est aussi moins fuyant que dans le crâne de la Chapelle aux-Saints Cette atténua- tion est due, suivant M. Klaatsch, à ce que le squelette provient d'un homme âgé à peine de seize ou dix-sept ans, puisque les épiphyses de ses os longs ne sont pas encore soudées aux apophyses. II faut remarquer, toute- fois, qu'ordinairement le crâne a déjà pris sa forme définitive à cet âge’. Le crâne est moins aplati de haut en bas que celui de la Chapelle-aux-Saints; il paraît être dolichocéphale, et très asymétrique. En effet, la pression des couches de terre qui le recouvraient a eu ‘ Au moment où j'écris ces lignes, je recois le fascicule de janvier 1909 de V « Homme Préhistorique », où se trou- vent la qescrpiess sommaire du crâne par M. Klaatsch et le récit des fouilles par M. Hauser. Je complète mon exposé ultérieur d'après ces deux articles. pour effet de contorsionner le crâne et de le dévier considérablement du plan verticil De même, la mà- choire supérieure, très déviée, ne laisse pas voir exac- tement le degré de prognathisme, quoique celui-ci paraisse être assez considérable. La mâchoire inférieure, très massive, se signale par l'absence du menton. Les dents sont au complet aux deux mâchoires et dans un état parfait. Parmi les os longs, le radius se signale par sa forte courbure. Les dimensions des os font supposer que l'homme de Moustier était de pette taille et trapu. Comme le squelette de la Chapelle-aux Saints, celui de Moustier à été trouvé dans une sorte de tom- beau, gisant sur une couche de silex, avec un véritable coussin de silex sous la tête, Chose remarquable, l'atti- tude est la même chez les deux squelettes : le bras droit plié et porté vers la tè.e, le bras gauche étendu droit. L'âge du squelette de Moustier est attesté par la présence des outils moustériens typiques, avec deux pièces encore plus anciennes (acheuléennes). Pour les ossements d'animaux, les renseignements font dé- faut: une seule pièce, sur #45, un fémur de Bos primige- uIus, est nommée. Un anthropologiste allemand bien connu, le Profes- seur Schwalbe, a proposé de rapporter les crânes de Néanderthal, de Spy et de Gibraltar à une seule et même espèce, par lui dénommée Homo primigentus, pour la distinguer de l'Homo sapieus acluel, auquel appartiennent également un grand nombre de crânes préhistoriques du Quaternaire moyen ou supérieur el du Néolithique, tels que les cränes de Cro Magnon, des grottes de Grimaldi, etc. Les deux crânes trouvés confirment-ils cette hypothèse? M. Boule n’est pas loin de partager l'idée de l'existence d’une espèce spé- ciale après l'étude du crâne de la Chapelle-aux Saints. Il dit, en effet : « Quant à la question spécifique, elle n'aura un réel intérêt que le jour où l’on saura vrai- ment ce qu'il faut entendre par le mot espère. Maïs il faut bien dire que, s'il s'agissait d’un Singe, d’un Carnassier, d'un Ruminant, etc., on n'hésiterait pas à distinguer, par un nom spécifique particulier, le crâne de la Chapelle-aux-Saints des crânes des autres grou- pes humains, fossiles ou actuels » Quant à M. Klaatsch, il se déclare partisan de la création d’une espèce nouvelle et il l’a déjà dénommée, d’après le crâne qu'il a étudié, Homo Musteriensis Hauseri. En rapprochant ces deux apprécialions, on peut. je crois, se ranger à l'avis de M. Schwalbe et considérer l'homme fossile de l'époque moustérienne (Quaternaire moyen) comme appartenant à une espèce différente de celles des hom- mes qui ont vécu après. Cette espèce serait intermé- diaire. morphologiquement entre le Pithecauthropus et les autres espèces ou races du genre Homo. J. Deniker, Docteur ès sciences, Bihliothécaire du Muséum. $S 7. — Sciences diverses Souscription internationale pour lérec- tion d’un monument à E.-J. Marey. — L'inilia- tive de cette souscription a été prise par l'Association internationale de l’Institut Marey qui, à l'Etranger, a déjà recueilli un grand nombre d’adhésions. En France, un Comité de patronage s'est formé sous la présidence d'honneur de M. le Ministre de l'Instruc- tion publique et la présidence effective de M. Chauveau, membre de l'Institut, pour faire appel aux anciens amis, élèves et admirateurs de Marey, et réunir les souscriptions destinées à assurer au savant disparu un témoignage d'admiration et de reconnaissance digne de ses travaux qui ont illustré la science francaise. Les souscriptions pourront être adressées à M Car- vallo, à l’Institut Marey (Parc des Princes, à Boulogne- sur-Seine), ou à la librairie Masson et C!°, 120, boule- vard Saint-Germain, à Paris. 58 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE PREMIÈRE PARTIE : L'ENREGISTREMENT DES TREMBLEMENTS DE TERRE La Sismologie est peut-être la branche de la Géophysique dont la période d'évolution est actuel- lement la plus active, Les résultats des recherches que l’on y fait sont de la plus grande importance: ils se suivent avec une vraie précipitation et four- nissent, sur la nature de ce fléau de l'humanité, des renseignements tout à fait inattendus. Cette science, si nouvelle encore, quoique ses origines remontent déjà jusqu'à l'Antiquité classique, doit cet essor surtout au développement de la technique sismo- métrique, qui consiste à étudier les tremblements de terre à l’aide d'instruments. Il est vrai que nous possédons déjà, depuis l’année 1703, époque à laquelle l'abbé de Hautefeuille s'occupa pour la première fois de ce problème, des instruments des- tinés à l'étude des tremblements de terre; l'ouvrage bien connu de R. Ehlert (Strasbourg, 1897) men- tionne plus de deux cents appareils sismiques, et ce nombre est aujourd'hui largement dépassé. Mais, quoique cerlains de ces appareils fussent très ingénieux, ils ne répondaient que jusqu'à un certain point à ce que l’on attendait d'eux, parce qu'ils n'étaient pas pourvus d'un dispositif amor- tisseur. Cela ne diminue, cependant, en rien le mérite et la valeur incontestables des constructeurs italiens et japonais de date plus récente, de J. Milne et de E. von Rebeur-Paschwitz, qui ont été pour nous d'h eu- reux pionniers. Leurs travaux intelligents, entre- pris dans un but déterminé, ont été la base du développement de la Sismologie, dont ils ont faci- lité les progrès, et c'est ce qui leur donne une valeur durable. Comme, dans les dix dernières années du sièele passé, les travaux de E. von Rebeur-Paschwitz ont imprimé une direction nouvelle à la Sismologie, de même les travaux de W. Schlüter et de E. Wie- chert, de Goettingen, et ceux de B. Galitzin, de Saint-Pétersbourg, marquent une nouvelle étape. Les premiers, ils ont réellement exposé clairement la véritable théorie des sismomètres et démontré ce que l’on peut attendre de ces instruments el comment ils pourront répondre aux exigences de la science. C'est alors qu'on commenca à agir méthodiquement, après n'avoir d'abord fait que tâtonner et essayer. L'adaptation aux sismomètres d’un dispositif d'amortissement a été d'une très grande importance, Comme on le sait, les sismo- mètres sont des pendules qui doivent garder leur position stable dans l’espace, même dans le cas de tremblement de terre, tandis que le levier du méca- nisme, directement rattaché à la terre et oscillant avec elle, se déplace contre la masse stationnaire el trace ainsi, sur le système enregistreur, le mouve- ment du sol. Mais, par suite du frottement dans la suspension, le mouvement du sol se communique bientôt à la masse du pendule et le fait participer au mouvement oscillatoire, avec la période propre correspondant à sa longueur, de sorte que le tracé de la perturbation ne répond absolument plus au mouvement vrai du sol; l'amplitude augmente ou diminue dans le diagramme, selon que les oscilla- tions du sol se produisent dans le même sens ou dans le sens opposé à celui des oscillations propres du pendule. A l’aide d'un mécanisme amortisseur convenable, le pendule, après chaque oscillation. revient à son point de repos, et peut alors marquer chaque nouvelle onde du sol. Si l'on connaît le degré de force de l'amortissement et la valeur des autres constantes de frottement du sismomètre, on peut, en tenant compte de ces données, déduire du sismogranme le mouvement vrai du sol’. Depuis que l'on a réalisé un enregistrement sis- mique inattaquable*, on a pu obtenir d'importants éclaircissements concernant les phénomènes phy- siques qui se présentent lors d’un tremblement de terre, Ces résultats sont d'autant plus importants qu'ils contrôlent la justesse de notre manière de voir, non seulement en ce qui concerne les causes 1 Dans l'ouvrage de K. Keizuacx : Lehrbuch der prakti- schen Geologie. Arbeits-und Untersuchungs-methoden auf dem Gebiete der Geologie, Mineralogie und Paläontologie, 2e Auflage, Stuttgart, 1908, j'ai. au chapitre 35, qui traite des méthodes de sismologie, donné à cet effet des instrut- tions détaillées pour l'analyse des sismogrammes. ? En réfléchissant qu'une toupie gyroscopique en mouve- ment de rotation rapide garde dans l'espace sa position stationnaire, l'idée m'est venue. au printemps de 1907, de, remplacer la masse pendulaire des sismomètres par une toupie gyroscopique rotative, tant pour les pendules verti- caux que pour les horizontaux, et j'ai récemment encore étudié cette question avec S. Szirtes, du Bureau Central international. C'est ainsi que l’on arrivera probablement à obtenir une masse réellement stationnaire et que l'on obtiendra aussi une simplification des plus importantes pour l'analyse des sismogrammes. Un pendule ainsi cons- truit continuerait à fonctionner durant les gr indes oscilla- tions des tremblements de terre locaux et destructeurs, pen- dant lesquels les pendules ont jusqu'ici refusé de fonctionner. L'application de cette idée rendrait possible la construction d'un sismomètre enregistrant exactement la partie verticale du mouvement du sol. L'application pratique de cette idée est en cours d'exécution, SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 59 des tremblements de terre, mais aussi en ce qui concerne l’orogénie et les forces volcaniques, et même toute la formation et la conformation du globe terrestre; ces résultats sont en même temps une pierre de touche pour les théories qui se rap- portent à ces phénomènes physiques. Il est évident que les conceptions les plus vastes ne peuvent et ne doivent ôtre considérées que comme des 2ypo- thèses". Ge n’est que l'étude et l'analyse d'un grand nombre de tremblements de lerre, survenus dans les conditions les plus différentes, aux endroits les plus divers, et relevés-scientifiquement, qui, si je ne m'abuse, aurait chance de nous rapprocher de la connaissance de la vérité objective. Mais quand arriverons-nous au but que nous poursui- vons? Quelles nouvelles perspectives ces études ouvriront-elles en nous placant devant de nouveaux problèmes auxquels nous ne pensons même pas? Voilà des questions qui sont encore du domaine de l'avenir. Le sismomèêtre rendra certainement les mêmes services quant à la connaissance de l'inté- rieur de la Terre que le spectromètre pour l'étude de l'Univers. Mais, comme le spectromètre et le télescope n'ont pu jusqu'ici dévoiler complètement les secrets de l'Univers, et comme l'acceptation d’une loi nouvelle met le savant en présence de nouvelles recherches, de même le sismomètre ouvrira au savant des domaines inconnus dont la découverte exige tous ses efforts. Résumons d'abord brièvement les connaissances acquises jusqu'ici et, nous rattachant à ce que nous savons, essayons de nous rendre compte de la portée de ces connaissances pour l’époque actuelle el pour leur développement ultérieur. Comme on le sait, on désigne sous le nom de tremblements de terre des ébranlements du sol qui montent de profondeurs plus moins grandes de la Terre jusqu'à sa surface. IIS se manifestent surtout par des déplacements subits des roches superficielles, qui, par leur structure et la variété de leurs matériaux, forment une vraie mosaïque. Si, pour une raison quelconque, l'équilibre est rompu à un endroit, de facon à ce que les blocs arrivent à se trouver dans une nouvelle position d'équilibre, il se dégage de l'énergie sismique. C'est surtout par le frottement causé par le glisse- ment des bloes ou des plans de fracture nouvel- lement produits que de violents ébranlements se manifestent provoquant des en oscillations : Pour plus de renseignements, consulter mes deux ou- vrages : Handbuch der Erdbebenkunde, Braunschweig, 1904, et surtout Der Erdball, seine Entwickelung und seine Kräfte, Ess lingen, 1908. élastiques dans les régions voisines. Ces oscilla- lions se communiquent de nouveau à d'autres masses rocheuses et sont bientôt ressenties à la surface de la Terre. Là, tous les objets prennent le mouvement d'un pendule renversé; les parties supérieures, par suite de leur inertie, restent momentanément en repos, mais ensuite elles aussi se mettent en mouvement. Plus les oscillations se suivent de près et les périodes sont courtes, plus les conséquences sont désastreuses; mais, par contre, lorsque les mouvements sont lents, les parties agitées ont suffisamment de temps pour s'adapter entièrement, quoique imperceptiblement, au mouvement. Ce qui, dans le langage de la Phy- sique, veut dire que ce n'est pas l'amplitude du mouvement du sol, mais la grandeur de l’accéléra- tion maximum des particules de la Terre qui est la mesure du degré de gravité d’un tremblement de terre. Pour les tremblements de terre destructeurs, une série de causes accidentelles entrent en consi- déralion; ces causes résident, soit dans la confor- mation du sol, soit dans la construction des bâti- ments et dans la nature des matériaux employés. L'énergie sismique qui s'est dégagée se trans- en forme dans son parcours d’autres formes d'énergie, mais surtout en chaleur, etelle se trouve, par conséquent, amoindrie et absorbée. Comme fa puissance d'absorption de l'écorce terrestre pour des oscillations à courtes périodes est très grande, il faut s'attendre à ce que les chocs sismiques soient le plus violents dans l’épicentre, c’est-à-dire dans la région qui se trouve perpendiculairement au- dessus du foyer souterrain (hypocentre). C'est effec- tivement ce qui arrive, el déjà à quelques centaines de kilomètres de distance de l'épicentre la percep- tion des oscillations du sol cesse pour les sens de l'homme. Autour de cette zone macrosismique, Ou région des ébranlements sensibles, dont le diamètre augmente en raison de la profondeur du foyer, s'étend la région microsismique. Dans cette région, les sismomètres très sensibles peuvent indiquer, mème à des milliers de kilomètres de distance, le passage des ondes sismiques et figurer graphique- ment le phénomène passager, que l’on pourra étudier ultérieurement. A partir d’une certaine distance épicentrale, les sismogrammes marquent, en général, leur dévelop- pement typique. On y distingue les phases sui- vantes : les premières et les secondes vibrations préliminaires (V, et V.), les ondes longues (B) du tremblement de terre proprement dit, et éventuel- lement la phase finale (N). Si, à l’aide d'enregistre- ments d'une seule et même perturbation obtenus en différentes stations, l'on détermine la vitesse avec laquelle les ondes sismiques sont arrivées à | l'endroit où est installé le sismomètre, on trouve 60 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE que, seules, les ondes longues (B) du tremblement de terre principal conservent, indépendamment de la distance épicentraie mesurée sur la surface de la Terre, une vilesse presque constante d'environ 3,8 kilomètres par seconde, tandis que, pour les ondes préliminaires, la vitesse de propagation augmente avec la distance de l'épicentre. Voici les chiffres obtenus par Benndorf : les distances sont exprimées en mégamètres (1.000 kilomètres) : TEMPS EMPLOYÉ PAR L'ONDE en minutes VITESSE SUPERFICIELLE en kilomètres par seconde DISTANCE épicentrale Re TT Yi Ve B Vs Va B 4,0. 21 4,2 4% 10,3 3,9 3,8 2:02 3,6 1,0 8,8 10,9 6,2 3,8 ZA) 6,5 42,1 17,6 12,3 6,9 3,8 6,0 . Gui 16,6 26,4 13,9 7,9 3,8 8,0 . 11,3 20,5 35,2 16,2 9,3 3,8 10,0 . 132 23,8 44,0 19,4 4171 3, 12,0 . 14,8 26,5 52,8 24,2 13,9 3,8 14:07. 16,0 28,6 61,6 31,4 18,5 3,8 16,0 16,9 30.1 70,4 46,3 21,8 3,8 18,0 17,4 31,0 79,2 87,1 55,6 3,8 20,0 16 NSL S 088,0 # z 3,8 L'observation démontre à première vue que les ondes longues se propagent à la surface de la Terre, tandis que les ondes préliminaires doivent néces- sairement descendre dans les profondeurs de la Terre, où elles trouvent moyen de se propager plus rapidement. Comme nous le verrons, cette consta- tation est de la plus grande portée pour toute la Physique du Globe. En ce qui concerne la propagation des ondes sis- miques, il faut faire une distinction bien nette entre les trois valeurs suivantes : 1° Ce que l’on appelle en allemand Zaufzeit, c'est-à-dire le temps que l'énergie sismique met à arriver à un point déterminé de la surface de la Terre, en se dégageant du foyer sismique, hypothé- tiquement représenté par un point, et placé à la surface de la Terre. Les deux suppositions sont admissibles, lorsqu'il s'agit d'une distance épicen- trale d’au moins 1 mégamètre. 2 La vitesse apparente ou vitesse superlicielle, c'est-à-dire le nombre de kilomètres parcourus à la surface de la Terre en une seconde, c’est-à-dire le quotient de la distance épicentrale par le temps que l'onde met à parcourir distance donnée (Laufzeil). 3° La vitesse vérilable où vitesse de propagation, une c'est-à-dire le nombre de kilomètres parcourus en une seconde sur le chemin réel du rayon sismique. Par conséquent, les ondes longues du tremble- ment de terre principal coïncident avec les ondes superficielles et la vitesse véritable est identique avec la vilesse apparente; mais, pour les ondes préliminaires, la vilesse apparente représente la projection de la vitesse réelle sur la surface de la ! Terre. I est maintenant évident que la vitesse réelle ne peut être obtenue que lorsque l’on connait exactement le chemin parcouru par l’énergie sismique, selon sa forme et sa direction. C'est ainsi que nous sommes arrivés au problème le plus difficile de la Physique sismique, qui est en même temps de la plus haute importance pour toute la science de la Terre. Avant d'approfondir le sujet que nous allons traiter, nous donnerons l'explica- tion de quelques expressions techniques. IT D'après les expériences faites jusqu'ici, nous devons considérer le globe terrestre, pris dans son ensemble, comme un milieu #/astique isotrope. Dans ce milieu, la propagation de l'énergie part généra- lement du foyer sous forme de séries d'ondes sphé- roïdales et fermées, dont les ondes sonores sont la meilleure image. Dans le langage adopté par les sismologues, on désigne ces surfaces d'ondes ( WeZ- lenflächen) sous la dénomination d'ondes homoséis- tiques, et la ligne d'intersection avec une surface limite prend le nom d'omoseiste. Le chemin que suit l'énergie sismique depuis son point de départ jusqu'à un point d'observation quelconque est représenté par la ligne de jonction des deux points, ligne perpendiculaire à toutes les surfaces homo- séistiques, ce que l'on appelle le rayon sismique. Si le rayon sismique arrive à une surface limite du milieu transmetteur, comme est, par exemple, la surface de la Terre, il forme avec celle-ci un angle d'incidence analogue à celui que l’on considère en Optique; mais, en Sismologie, on a préféré se servir, à sa place de l'angle d'emergence, qui est son complément à 90°, c’est-à-dire l'angle que le rayon sismique forme avec la surface limite. Wiechert a prouvé ce fait important que non seulement chaque rayon sismique descend dans les profon- deurs du foyer sous le même angle sous lequel il revient finalement à la surface, mais aussi qu’en général cet angle a la même valeur à tous les niveaux, soit que le rayon plonge dans la Terre, soit qu'il en remonte, de sorte que les deux branches du rayon sismique sout symétriques quand on mesure celui-ci à l'endroit le plus profond. E. Wie- chert base sur cela une méthode à la fois graphique etnumérique, propre à donner la direction du rayon sismique dans l'intérieur de la Terre, quand les hodographes (Laufzeitkurven) du tremblement.de terre sont connues, car les angles d'émergence peu- vent être déduits de celles-ci. Comme je l'ai dit, la forme des surfaces homo- séistes, et conséquemment celle du rayon sismique, est généralement déterminée par la conformation du milieu, c'est-à-dire du globe terrestre. Lepremier qui SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 61 se soit occupé de cette question est l'Anglais R. Mallet, dans son ouvrage sur le grand tremblement de terre napolitain du 16 décembre 1857, ouvrage qui à fait époque; avec de nombreux partisans, il admet un milieu absolument homogène; de l’épi- centre partent des ondes sphériques concentriques etdes rayons sismiques rectilignes. Mais, en réalité, les choses ne sont absolument pas aussi simples. Dans son Mémoire sur le mouvement des ondes (1888), Aug Schmidt, de Stuttgart, a montré que, comme les conditions physiques pour la propaga- tion varient en raison de la profondeur sous la surface de la Terre et, par suite, de l'augmentation de la pression, de la densité et de l’élasticité des couches rocheuses, il faut que les ondes sphériques soient excentriques et que, par suite, les rayons sis- miques soient courbes. Schmidt en déduisit une aug- mentation de vitesse de propagation vers l'intérieur de la Terre, ce qui lui fil, en conséquence, admettre des rayons sismiques courbés d’une manière con- vexe vers l'intérieur de la Terre, conception dont il a prouvé la justesse. En 1903, F. A. Faidaga l'a également prouvée par des observations sismiques, et W. Schlüter, à l’aide d'analyses instrumentales précises; en 1905, G. Maas, au contraire, crut devoir admettre une courbure des rayons sismiques exac- tement opposée. En 1897, R. von Kævesligethy, professeur à l'Uni- versité de Budapest, publia, dans les « Comptes rendus sur les Mathématiques et les Sciences phy- siques et naturelles de Hongrie », un travail intitulé « Nouvelle théorie géométrique des phénomènes sismiques », travail qui traite de la question du rayon sismique au point de vue strictement phy- sique et mathématique. Comme cela arrive du reste fréquemment, on ne tint pas d’abord suffisamment compte de cet ouvrage dans les milieux compétents. Mais von Kævesligethy continua sans relâche à tra- vailler au développement de sa théorie, et, tirant profit du rapide essor de la Sismologie en ces dix dernières années, surtout dans le domaine des recherches instrumentales, il put, en 1905, faire paraitre ses études sous une forme nouvelle. Dans son Traité sur «le calcul des éléments sismiques » (Die Berechnung seismischer Elemente), il déve- loppa sa théorie‘ et montra, en même temps, com- ment son application pratique peut être utilisée pour la Sismologie en particulier, ainsi que pour la Géophysique en général. En se servant de l'étude du Professeur Rudolph sur le tremblement de terre de Ceram du 30 septembre 1899, il expose et dé- montre mathématiquement l'application pratique ! On trouve, dans la « Seismonomia » de R. von Kævesli- gethy (vol. XI, 1906, p. 113, du B,Iletino della Socretà Sis- mologica Îlaliana), une méthode détaillée et explicite pour effectuer ces calculs. de sa méthode. Ce qui montre la justesse de cette méthode, ce qui en est comme la pierre de touche, c'est que le calcul et les observations s'accordent, el il en à été ainsi pour les recherches faites jusqu'ici. Malheureusement trop peu de calculs de ce genre ont été faits pour pouvoir en tirer des conclusions d'ordre général. Ce qui est certain, c'est que le rayon sismique est généralement une section conique qui passe par le foyer sismique (hypocentre). La forme de la section conique est déterminée par l'indice de réfraction des couches terrestres traversées; conséquemment, les axes s’obtiennent mathématiquement. S'il en résulte pour les deux axes de la section conique des valeurs réelles, nous avons affaire à une ellipse ; si, le grand axe étant réel, le petit est imaginaire, il s'agit d'une hyperbole; enfin, un petit axe indé- terminé, joint à une valeur infinie du grand axe, donnerait un rayon sismique parabolique. On voit par là que le rayon sismique de Schmidt repré- sente un cas spécial de la théorie de von Kæves- ligethy. Les sept éléments sismiques suivants se présentent dans l'équation qui sert à calculer les rayons sismiques: l'indice de réfraction des couches terrestres, la profondeur du foyer sismique sous la surface de la Terre, le {emps auquel se produit le choc sismique à l’épicentre, le {emps d'arrivée du mouvement sismique à la station sismométrique, la vitesse de propagation du mouvement sismique, ainsi que la longitude et la latitude géographiques de l’épicentre. De ces éléments, il n'y a que le moment d'arrivée du mouvement sismique à l’en- droit où se trouve le sismomètre qui soit connu; les six autres éléments sont les « inconnues » de l'équation. Il faut done six équations qui seront fournies par les données recueillies en six stations au moins pour le tremblement de terre considéré. La manière d'opérer pour faire ces intéressants calculs se rapproche beaucoup de celle qu’on em- ploie pour la détermination des orbites planétaires ; car la aussi la trajectoire est une section conique, el c'est avec six inconnues qu'il faut faire le calcul. La seule différence est qu'en Astronomie il n'y à à considérer qu'une seule section conique, tandis que, pour les tremblements de terre, il faut, pour chaque station d'observation, une autre section conique. Les équations qui expriment en Sismo- logie le rapport entre le moment de la secousse et les éléments inconnus sont des équations dites équations transcendantes, c'est-à-dire que les inconnues ne s'y présentent pas sous forme algé- brique. Si l'on veut résoudre une équation de ce genre, il faut s'y prendre de facon à adopter pour les inconnues des valeurs provisoires aussi approxi- | matives que possible; on les considère alors comme | connues et, avec elles, on calcule comme étant 62 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE inconnues les données de temps réellement con- nues des stations sismiques. Et c’est ainsi qu'il faut continuer, en partant chaque fois d'un autre point de vue, jusqu'à ce que les données de temps obte- nues par le calcul correspondent suffisamment avec celles que fournissent les observations. On obtient ainsi, pour chacune des six valeurs partieu- lières, effectivement inconnues, un certain nombre de valeurs d'où l'on déduit enfin la valeur la plus probable par la méthode des moindres carrés. III Le même problème peut êlre traité d'une façon absolument différente en se basant sur la théorie Tremblement Tremblement de terre . de terre rapproche local N N 4 Tremblement de terre éloigne TD EN Croute solide —-.- /nfracroute ë : Croute de solidificatien — Rayons sismiques directs mm Vo : = cf FA refféchis 18 4% A: Li Antiepicentre — W, W Fig 1. — Représentation schématique de la propagation des ondes sismiques et de leur apparition dans le sismo- gramme, d'après A. Sieberg. de l’élasticité. Cela exige naturellement, en oppo- sition avec ce qui précède, une conception et un traitement tout particuliers. Pour cela, il faut admettre l'hypothèse d’une Terre formée de ma- iériaux isotropes et de surfaces sphériques con- centriques superposées, où le changement des qualités élastiques se produit d’une façon toute graduelle et continue. Rudzki adopta le premier cette manière de voir et, depuis 4905, H. Benndorf' et E. Wiechert* le suivirent, mais à des points 1 H. Benvoonr : Ueber die Art der Fortpflanzung der Erdbebenwellen im Erdinnern. [ und 11 Mitteilung. Neue Folge, n° 29 und... der Mitteilungen der Erdbhebenkommis- sion der Kaïiserl. Akademie der Wissenschaften in Wien, 1995 und 1906. 2 E, Wrecaenr : Theoretisches über die Ausbreitung der Erdbebenwellen. Nachrichten von der Kgl., (Gesellschaft der Wissenschaften zur Goettingen, mathem.-physik. Klasse, 1907, Heft 4, p. M5. de vue différents. Ces travaux ont déjà donné une série de résultats réels, et c'est sur ces résultats que nous fonderons les observations qui vont suivre. Si, en nous basant sur la théorie de l'élasticité, nous résumons brièvement les résultats obtenus de nos jours en mesurant instrumentalement les tremblements de terre, nous pouvons tracer l'image suivante des conditions physiques qui régissent les tremblements de terre (fig. A): De l’hypocentre, situé au maximum à 200 kilo- mètres sous la surface de la Terre, l'énergie sis- mique se propage en tous sens dans le globe terrestre comme des oscillations élastiques sous forme d'ondes sphéroïdales. La propagation des ébranlements élastiques dans un milieu homogène se produit, comme Poisson a été le premier à le montrer, toujours de telle sorte que deux espèces d'ondes se développent simultanément et s'étendent au loin indépendamment l'une de l’autre. Ce sont, d'un côté, des ondes de compression dépendant de changements de volume, et conséquemment des ondes longitudinales qui s'étendent dans la direc- Fig. 2. — Onde de contorsion. tion du rayon sismique; ce sont, de l'autre côté, des ondes transversales, et, d'après les expériences de Fresnel, des ondes de contorsion, dont la direc- tion des oscillations est perpendiculaire aux pré- cédentes. Le point caractéristique des ondes de contorsion, c’est que le déplacement se produit le long de lignes droites et parallèles, et non d'une facon circulaire, comme pour les ondes de l'eau. Si, par exemple, des cubes sont rangés l’un à côté de l’autre, comme on le voit dans la figure 2, quand les oscillations se font en sens transversal, chaque cube se transforme en un parallélipipède . oblique. Cependant, si l'on peut admettre d'une manière cerlaine que la Terre est élastique et non homogène, nous devons néanmoins supposer que nulle part dans l'intérieur de la Terre la réfraction des ondes sismiques n'a lieu, el, par conséquent, la vitesse des deux espèces d'ondes ne changera sur aucun point par transition subite, mais toujours d’une facon uniforme. De plus, les deux espèces d'ondes se propageront dans la direction du rayon sismique, de sorte qu'un obstacle qui se présen- lerait produirait une ombre le long de cette direction. La vitesse de propagation la plus grande est celle des ondes longitudinales, et il faut considérer comme telles les vibrations préliminaires V, pour SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 63 lesquelles la vitesse de propagation superticielle apparente est, en moyenne, d'environ 14 kilomètres par seconde. La vitesse superficielle des ondes lransversales est à peu près la moitié de la précé- dente; c’est celle des secondes vibrations pré- liminaires V,, qui ont une vitesse superficielle d'environ 7 kilomètres el demi par seconde. A l'épicentre, où les ondes sphériques de l'inté- rieur de la Terre paraissent à la surface, elles pro- duisent des oscillations superficielles nommées ondes de Rayleigh, du nom du physicien anglais qui les a découvertes. Comme elles provoquent gé- néralement, pour de grandes distances épicentrales, les plus fortes oscillations du sol et qu’elles se font le plus remarquer dans les sismogrammes, cette phase (B) est appelée la phase principale. En géné- ral, les ondes de Rayleigh correspondent à peu près aux ondes de l’eau, mais elles en diffèrent cepen- dant complètement par un trait principal : Tandis que, lorsqu'il y a perturbation de l'équilibre de l'eau, la pesanteur produit la pression intérieure qui sert à communiquer et à transmettre le mouve- ment d'une particule à l’autre (ondes de gravitation), pour les ondes de Rayleigh, l’élasticité est la force qui refoule et qui produit les oscillations. Il est pro- bable, ainsi que l'a montré Wiechert à l'aide de tracés sismiques, qu'elles sont formées par la réu- nion d'ondes de compression et de torsion, de telle sorte que la réunion ne se produit qu'à la surface. Là, les différentes espèces d'ondes se confirment l'une l’autre pour faire disparaître partout, à la surface, les pressions élastiques, ainsi que l'exige la libre mobilité de la surface. On peut voir, malgré cela, que la contradiction de cette hypothèse concernant la vitesse des ondes superficielles de 3,8 kil. environ par seconde, vitesse moindre, par conséquent, que celles des ondes de compression et des ondes de contorsion, n’est qu'apparente. Il en ressort plutôt que ce ne sont pas les ondes de Ray- leigh, produites au foyer sismique, qui avancent sur une ligne frontale sphérique avec la vitesse appartenant à l'état stationnaire, mais que ce sont, au contraire, des ondes qui ont la vitesse des ondes de compression et des ondes de torsion qui doivent précéderet arriver peu à peu à un état correspondant à celui de l'état stationnaire des ondes de Rayleigh. * Si l’on considère l’épicentre comme pôle, les vagues superficielles diminuent d'énergie jusqu'à l'équateur ; de là au pôle opposé, ou «antiépicentre», l'énergie augmente de nouveau; mais, sur le par- cours, une partie de l'énergie des ondes longues se perd par absorption, car, d’après les recherches de G. Angenheister’, l'énergie concentrée dans l’anti- ! G. ANGENHEISTER : Beslimmung der: Fortpflanzungsge- schwindigkeit und Absorption von Erdbebenwellen, die durch den Gegenpunkt des Herdes gegangen sind. Vachr, épicentre n'est plus que la 490° partie de l'énergie initiale, et l'amplitude du mouvement vrai du sol est réduite à 1/22. Alors l’antiépicentre remplit le rôle d’épicentre; les ondes superficielles qui en partent, les ondes W,, n'ont plus à l’épicentre que la 242.500° partie de l'énergie initiale (—1/490 de l'am- plitude réelle). Ce courant de va-et-vient continue jusqu'à ce que toute l'énergie soit épuisée; on à cependant rarement pu jusqu'ici observer des ondes W,. Par les expériences déjà faites, on voit aisé- ment que les ondes des différents groupes, des « phases » du sismogramme, se suivent d'autant plus lentement que l’épicentre se trouve plus éloigné de l’endroit où se trouve le sismomètre; inverse- ment, la longueur des phases du sismogramme nous permet de calculer la distance de l'épicentre à la station d'observation. Parmi nombreuses formules empiriquement obtenues à cet effet pour les tremblements de terre éloignés, c'est-à-dire pour une distance épicentrale de 2.000 à 12.000 kilomètres de la station sismométrique, le caleul le plus sim- ple est celui de Läska. La règle de Läska, qui per- met d'effectuer le calcul mentalement et qui donne, comme l'expérience le prouve, les meilleurs résul- tats, est la suivante : les (Vs — V,) minutes — 1 — X mégamelres, Si donc la durée de la première phase préliminaire est de 10,7 minutes, la distance épicentrale est de 9.700 kilomètres. Les distances épicentrales que l’on à ainsi obte- nues peuvent être très sensiblement améliorées si l’on tient compte des valeurs que Benndorf à obte- nues pour les hodographes; il suffit alors de tenir compte des corrections suivantes : DISTANCE ÉPICENTRALE selon Läska CORRECTION A INTRODUIRE selon Benndorf 1 mégamètlres. — 0,1 mégamètres, 7) = — 09 — 3 — — 0,5 — 4 — — 0,6 — 5 — — 0,6 _ 6 — — 0,6 _ T — — 0,5 — $ — — 0,3 — 9 — — (0,0 — 10 — + 0.5 —= A1 _ +15 — 12 — + 2,8 — D'après leur tracé, on peut distinguer les trois types suivants (fig. 1) de sismogrammes, en rapport très étroil avec la distance épicentrale : 1° Les tremblements de terre locaux, dans la région épicentrale. L'espace parcouru étant court, le sismogramme ne marque pas la différence entre y. d. Kgl. Ges. d. Wiss. zu Güllingen, mathem.-physik. Klasse, 1906, p. 410 Æ. — In. : Seismische Registrierungen in Gôttingen im Jahre 05. /d.. p.351 , 64 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE les différentes espèces d'ondes. Chacun des chocs de courte période (1/2 à 5 sec.) est indiqué comme tel par le sismogramme; les chocs consécutifs, répliques ou after-shocks, commencent à se dessiner par suite de la diminution progressive des oscilla- tions propres du sol; 2° Les tremblements de terre rapprochés, dont la distance épicentrale atteint 1.000 kilomètres. Ici, une seule phase préliminaire V, se fait remarquer, avec des périodes d'ondes de 1 à 6 secondes. Alors les ondes longues B du tremblement de terre propre- ment dit, du séisme principal, se dessinent avec V | 13h 25m un peu plus longues et de plus petites amplitudes, terminent le sismogramme. Ces phases se voient clairement quand on examine attentivement la figure 3; c'est l'enregistrement obtenu à Stras- bourg de la terrible catastrophe de San Francisco. En étudiant la figure 3, où chaque interrup- tion de la courbe correspond à une minute, la distance entre San Francisco et Strasbourg étant de 9.700 kilomètres, on verra facilement l'exactitude de la règle de Läska. Lorsque l’on connait le temps que l’onde met à parcourir une distance donnée, on peut encore indiquer l'heure exacte du commen- 30 m 35m A AE MA ann pre Anne ANA NA AY AAA AA AR arte arr MM Îve 40 m 45 m | 8 AAA pe ANA A AN PA AA PAR AAA Na NA NAN a a re Nr A, Fig. 3. des périodes d'environ 10 secondes, auxquelles se rattachent les ondes finales N; 3° Les tremblements de terre éloignés, ou dont la distance épicentrale est supérieure à 1.000 kilo- mètres. Immédiatement après les premières ondes préliminaires V, arrivent les secondes V,, dont la période est un peu plus longue et dont l'amplitude l'est aussi le plus souvent. Viennent ensuite les ondes longues B, dont la période varie, selon la distance épicentrale, de 70 à 20 secondes. La prin- cipale phase peut se diviser en trois subdivisions, qui varient le plus souvent quant à la période et à l'amplitude : d’abord les périodes sont longues et les amplitudes faibles, puis l'amplitude augmente sensiblement, tandis que la période diminue, et finalement la période et l'amplitude diminuent toutes deux. Les ondes finales N, avec des périodes lBopqemays del, — Sismogramme d'un télésisme destructeur (tremblement de terre de San Francisco) enregistre 1e 18 avril 1906 à Strasbourg (Alsace). — Distance épicentrale : 9.700 kilomètres. cement du tremblement de terre de San Francisco. Le sismogramme donne d’abord l'heure de Green- wich, dont il faut retrancher 8 heures pour obtenir l'heure du Pacifique, en usage dans l'Ouest des États-Unis. Les ondes des sismogrammes ne se développent, en général, pas aussi nettement qu'on pourrait le supposer par ce qui a été dit précédemment. Les ondes de surface surtout montrent les groupements les plus divers et les plus embrouillés. Des séries d'ondes secondaires de différentes périodes leur sont superposées et permettent souvent à peine de reconnaitre encore l'onde normale, Wiechert est disposé à les attribuer en partie à des oscillations propres, à un état oscillatoire dans lequel entre toute l'écorce solide de la Terre, jusqu'à une couche de magma flexible qui se trouve en-dessous. La SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 65 conformation géologique du sol joue encore un rôle particulier; des blocs de terre, qui ont une période propre différente de celle de la période originale des ondes, accumulent, jusqu'à un cer- lain point, une partie de l'énergie des ondes et la réfléchissent de nouveau avec leur période propre; ils deviennent donc des centres nouveaux el secon- daires pour la réflexion graduelle d'oscillations ultérieures. Outre cela, diverses locales, telles que des vallées transversales, la réflexion causée par des massifs de montagnes, elc., en changent la direction et l'intensité. On concoit done aisément qu'il se trouve précisément dans le tremblement de terre principal des signes caracté- ristiques qui font penser à des interférences. Le sismogramme sera encore plus compliqué si l'im- pulsion qui vient de l'hypocentre, et qui commu- nique le mouvement, provient d'une série de chocs courts et successifs, au lieu de provenir d'un seul choc. Ainsi que M.S. Szirtes a été le premier à le remar- quer, on voit au premier coup d'œil si le sismo- gramme provient d'une perturbation sismique terrestre ou d'une perturbation sous marine. Car, par suite de la conformation plus dense des couches de l'écorce terrestre situées sous le sol sous-marin, les sismogrammes provenant de tremblements de terre sous-marins ont, dans la phase principale, une allure plus régulière, des amplitudes extraordinai- rement petites et de très grandes périodes; tandis que les sismogrammes provenant des perturbations terrestres indiquent les diverses influences agissant sur les blocs légers mobiles, ce qui donne au sis- mogramme une allure irrégulière, dont le tracé forme un grand nombre de dentelures superposées à courte période et à grande amplitude, On peut généralement, pour des sismogrammes tracés de la mème manière, conclure à des foyers identiques ou du moins très rapprochés. Jusqu'ici, nous n'avons parlé que des ondes qui se propagent directement. Il faut cependant tenir compte de la réflexion des ondes sphériques arri- vant à la surface de la Terre. On a, depuis des années déjà, de différents côtés, donné à entendre qu'il est possible que les ondes sismiques se réflé- chissent, mais ce n'est qu'en 1906 que cette réflexion fut reconnue et tracée dans les sismo- grammes à l'Institut Géophysique de Gættingen. L'on s’apercut que les ondes réfléchies sont parfois plus fortes que les ondes directes. Pour com- mencer, On ne put cependant trouver la réflexion qu'à la surface de la Terre et non dans des couches instables plus profondes. En général, une série uniforme d'ondes d’élasticité tombant sur une sur- face limite des plus reculées provoque deux sé- ries d'ondes, car non seulement des ondes de la circonstances inéme espèce se propagent par réflexion, mais des ondes d'une autre espèce se joignent à celles-ci. Comme Wiechert le prouve, par exemple, un rayon d'ondes longitudinales réfléchi à la surface de la Terre se continue par un rayon semblable qui des- cend dans la Terre sous le même angle et reparait de nouveau à la même distance, et ensuite par un rayon d'ondes transversales qui descend plus pro- fondément et remonte aussi à une bien plus grande distance. Un rayon d'ondes transversales, dont les oscillations sont parallèles à la surface de la Terre, c'est-à-dire transversales par rapport au plan de réflexion, n’est réfléchi que comme rayon de la même espèce, sous le mème angle. Les choses deviennent plus particulièrement compliquées pour un rayon d'ondes transversales dont les oscilla- Lions transversales sont parallèles à la surface ver- ticale dans laquelle le rayon remonte à la surface de la Terre. On peut à peine se faire encore une idée de ce que seront les rapports lorsque l'angle d'émergence sera égal à celui de la réflexion totale. La chose est plus claire quand l'angle d'émer- gence dépasse la valeur limite de la réflexion totale : alors une onde transversale est réfléchie sous un angle d'incidence plus aigu. À une onde transversale, avec l'onde longitudinale qui lui fait suite, se joint, dans des condilions géométriques absolument proportionnées, une paire d'ondes dont un rayon d'ondes longitudinales forme le commen- cement et un rayon d'ondes transversales la conti- nuation. Une onde, qui sur son parcours à été réfléchie une, deux ou trois fois sans changer de nature, décrit dans la Terre un ou deux ou plu- sieurs arcs égaux et traverse chacun dans le mme temps. De cette facon, l'hodographe d’une pareille onde, composée d'ares égaux » sur une distance A, sera 2 fois plus grand que l'hodographe d'une onde directe sur la distance A/n. La vitesse super- ficielle d’une onde qui revient à la surface a) rès un nombre quelconque de réflexions est alors tout aussi grande qu'à sa première apparition. Comme la vitesse des ondes directes est d'autant plus petite que nous approchons du foyer, il s'ensuit que la vitesse des ondes réfléchies sur le parcours est moindre que la vitesse des ondes directes arrivant au même point de la surface de la Terre. Il est plus difficile de déduire l'hodographe des ondes de transformation (Wechselwellen), c'est-à-dire des ondes qui, en chemin, changent de nature par la réflexion. Mais, nous ne nous arrêterons pas plus longtemps à cette question. IV Les recherches faites jusqu'ici sur la nature du rayon sismique ont, si peu nombreuses qu'elles 66 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE soient, jeté déjà sur la constitution du Globe une RAYON VECTEUR INDICE VITESSE RÉELLE vive lumière, et fail paraitre sous un jour tout différent d'autres questions fort nombreuses se rapportant à la Géophysique. Nous avons vu que les ondes principales se meuvent le long de la sur- face de la Terre, tandis que les ondes préliminaires se meuvent dans les profondeurs de la Terre ; autrement dit : par rapport au centre de la Terre, le rayon sismique doit étre de forme concave, tandis que les rayons sismiques des ondes pré- liminaires une courbure convexe vers son centre. Un pareil contraste est incompatible avec un milieu également élastique: il décèle natu- rellement des discontinuités dans le globe ter- restre. La contradiction que l'on trouve dans la ourbure opposée du rayon sismique disparait si on admet une couche mince et relativement rap- prochée de la surface de la Terre, couche dans laquelle existent des conditions de réflexion s’éloi- gnant de celles du reste du corps terrestre. Il ne s'agit plus que de trouver les valeurs respectives en chiffres. En se basant sur de tout autres données, E. Wiechert a tiré, en 1897, du degré d'aplatissement de la Terre, des répartitions sai- sonnières, et d'autres valeurs géophysiques ana- logues, la conclusion que le globe terrestre est composé d'un noyau de fer entouré d'un manteau de pierre dont l'épaisseur représente le cinquième du rayon de la Terre. En n'employant, pour ses études les plus récentes, que les résultats de la sis- mométrie, Wiechert arrive au même résultat, ce qui est très significatif. Mais ce résultat diffère grandement des valeurs numériques que J. Milne déduisit en 1903 d'études sismométriques; Milne trouve une épaisseur de l'enveloppe d'un ving- tième seulement du rayon de la Terre, nombre que Läska crut aussi devoir accepter. Mais ces diffé- rentes valeurs ne s’excluent pas l’une l’autre; elles se complètent, comme nous le savons aujourd'hui, de sorte que, sous le rapport physique, nous devons considérer le globe comme composé de {rois corps concentriques. En 1906, H. Benndorf s'est également occupé de cette question. En cal- culant, par une méthode géométriquement syn- thétique, la vitesse des premiers précurseurs dans l’espace, il arrive au résultat suivant : ont € ° RAYON VECTEUR en rayons terrestres INDICE DE RÉFRACTION VITESSE RÉELLE en kilom. par sec. 0,0 0,35 15,7 0,1 0,35 15,7 0,2 0,35 IST 0,3 0,35 15,7 0,# 0,35 15,1 0.5 0,36 15,3 0,6 0,38 14,5 0,7 0,4% 12,1 0,8 0,49 11,3 0,85 0,50 11,1 DE RÉFRACTION en rayons terrestres en kilom. par sec. 0,90 0,50 10,0 0,95 0.54 10,3 0,975 0,63 8.8 1,00 1,00 5,5 Ce qui veut dire que, au centre de la Terre, la vitesse de propagation à un maximum qui diminue continuellement en se rapprochant de la surface; vers les 4/5 de son rayon arrive un état station- naire pour la diminution; peut-être y a-t-il même éventuellement une légère augmentation, qui per- siste jusqu'à ce que, aux 19/20 environ du rayon terrestre, se produise une diminution subite des valeurs superficielles. Ce rapport typique s'accorde, en partie, avec la théorie de Wiechert, fait impor- tant en ce qu'il en confirme la justesse ; il confirme- rait, d'autre part, l'existence d’une croûte terrestre d’un vingtième de profondeur, hypothèse admise par Milne et par Läska (1904). V Il s'agit maintenant de savoir jusqu’à quel point ces couches doivent entrer en considération, en ce qui concerne l'origine d’un tremblement de terre, et cela nous conduit au problème de la profondeur du foyer d'où vient le tremblement de terre; nous arrivons ainsi sur le terrain de la dynamique tellurique en général. C'est R. Mallet qui a encore été le premier à aborder la question par les re- cherches qu'il fit sur le tremblement de terre napo- litain de l'année 1857. En admettant que les lézardes des murs étaient perpendiculaires au rayon sis- mique, il reconstruisit lesdits rayons considérés comme lignes droites et trouva ainsi, à une pro- fondeur de 10,6 kilom., au point d'intersection de deux lignes, le foyer sismique qu'il cherchait. En 1873 , K. von Seebach, et plus tard C. E. Dutton essayèrent de déduire de l'intensité du tremblement de terre la profondeur du foyer. Mais ces méthodes, ainsi que d'autres méthodes semblables, repo- saient sur le principe erroné du foyer sismique en ligne droite. L'expérience a prouvé, par divers faits, que les dommages éprouvés par les bâtiments, que les fentes du sol et la direction du mouve- ment sismique sont diversement influencés, el d'une manière irrégulière, par la constitution locale du sol, de sorte que les observations concernant le temps constituent la partie la moins sûre pour l'étude des tremblements de terre. À la suite des recherches de A. Schmidt, on se rendit bientôt compte des fautes commises; mais c’est seulement dans ces derniers temps que l’on trouva le moyen d'arriver, dans la pratique, à des résultats irréprochables. R. de Kævesligethy retrouve le fait, déjà observé par SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 67 Cancani, que les valeurs absolues de la plus grande accélération, correspondant aux degrés de l'échelle ordinaire Forel-Mercalli, forment presque une progression géométrique : LIMITE DE LA PLUS GRANDE ACCÉLÉRATION en mm/sec.? INTENSITÉ DE LA PERTURBATION G (Forel-Mercalli) 1° 0 — 2,5 11° 2,5 — 5 1110 5 — 10 IVo 10 — 25 Vo 25 — 50 VIo 50 — 100 VIllo 100 — 250 VIe 250 — 500 IX° 500 — 1.000 ÿ X° 1.000 — 2.500 XI 2.500 — 5.000 Xilo 5.000 — 10.000 de l'accélération sur le parcours r. En tenant compte de cela, on obtient : Maintenant, si, à la place de l'accélération, nous introduisons le degré d'intensité, nous obtenons : ' F G— G'= 3108 — + 30M{(r'— r), à où : M=—Ilog e— 0.43429, Si alors nous prenons l'épicentre pour l'un des points, nous obtenons l'équation : ÉÈ—=E log + + 3oM(r— h). Ts) Ces deux équations, appelées par von Kôvesligethy Il exprime le rapport entre le degré d'intensité | « équations de Cancani », rattachent le degré d’in- TaBLeau I. — Caractéristiques de quelques tremblements de terre, déduites par les équations de Cancani. TREMBLEMENTS DE TERRE 31 Août 1886 12 Juin 1897 2 Avril 1904 3 Octobre 1880 10 Janvier 1906 16 Janvier 1906 26 Juin 1906 Charleston. GRETA Hongrie : Délmagvar. . . — Erdély. . _ Jékeü [. . _— Jôokeü II . — Eger. DEGRÉ D'INTENSITÉ dans l'épicentre du foyer sismique (Forel-Mercalli) RÉGION d'ébranlement (kil. carrés) PROFONDEUR COEFFICIENT d'absorption 0,001 196.000 0,0039 3.970.000 0.020 12.800 0,023 62.400 0,033 29.840 0,048 11.386 0,049 8.800 de la perturbation G et celui de l'accélération F communiquée au sol par la formule : G—0,35 +3 log T, d'où il résulte que la différence entre deux degrés d'intensité est : fl G— G'=3 log; - équation semblable à celle qui existe dans la Phy- sique des astres entre la grandeur et l'intensité lumineuse des étoiles. Admeltons que À soit la profondeur du foyer sismique, et que r et r’ re- présentent les distances entre le foyer et les points de la surface de la Terre où les degrés de force de la perturbation étaient respectivement G et G’. Si donc le tremblement de terre ne perdait rien de son énergie, le rapport serait : DEEE Nous devons toutefois admettre que l'écorce terrestre atténue et absorbe graduellement l'énergie du tremblement de terre. Si nous indiquons le coefficient d'absorption par rapport à l'unité de longueur par z, le facteu er donne la diminution tensité d'un tremblement de terre ‘à la profondeur de son foyer et au coefficient d'absorption de l'écorce terrestre. Ces équations servirent à von Kœ- vesligethy ‘ de base à un calcul que E. von Jànosi développa pour des cas spéciaux et qui donne comme résultat la profondeur du foyer et le coeffi- cient d'absorption pour les ondes à périodes courtes de l’intérieur de la Terre. Le degré d’exac- titude obtenu dépend de la qualité des matériaux macroséismiques dont on dispose quant aux obser- vations à faire. Von Jànosi, G. Schindler el A. Réthly ont jusqu'ici obtenu, d’après ce procédé, les valeurs du Tableau I. Ces quelques chiffres nous font déjà reconnaitre les faits importants que voici : 1° La profondeur du foyer varie dans de très grandes limites; quelquefois, le foyer d’où provient la perturbation se trouve tout près de la surface 1 Communiqué par E. von Jänosi et A. Reéthly et démontré par quelques exemples dans : Bearbeïtung makroseimischer Erdbeben, p.83 von A. Rérazy : Die Erdbeben in Ungarn im Jahr 1906. Offizielle Publication der Kgl. Ung. Reichs- anstalt für Meteorologie und Erdmagnelismus. Budapest, 1907. 68 ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS terrestre; il est souvent à une plus grande profon- deur, qui peut atteindre 200 kilomètres et même être parfois beaucoup plus grande. Il ne faut cepen- dant pas perdre de vue que, pour un foyer de 102 à 170 kilomètres de profondeur, les tremblements de terre deviennent destructifs et ont une très grande aire d'ébranlement ; 2° Comme il faut s’y attendre, la profondeur du foyer n'est aucunement en rapport avec l'intensité du tremblement de terre; 3° Par contre, l'opinion reposant sur des données théoriques et supposant que l'étendue du terrain d'ébranlement augmente avec la profondeur du foyer est absolument confirmée ; 4° L'absorption de l'énergie sismique est visible- ment plus faible dans les couches profondes de l'écorce terrestre que près de la surface. Ce n'est que par de nombreux calculs que l'on arrivera à savoir si c’est un phénomène local ou général. Si l'on compare, en outre, les chiffres mentionnés plus haut avec ceux de G. Angenheister, qui attribue aux vagues superficielles une absorption d'accélération de 0,00018 — 0,00031 par kilomètre, l'on voit que les ondes à courte période de l'inté- rieur de la Terre subissent une absorption bien plus forte que les ondes superficielles longues. Ainsi que nous le verrons plus tard, nous avons tout lieu d'espérer, en continuant à effectuer de pareils calculs, des résultats très variés et de pre- mière importance pour les tremblements de terre. Dans un second article, nous essaierons de tirer, des résultats des recherches instrumentales, des indications sur les causes des tremblements de terre. Aug. Sieberg, Secrétaire technique de la Station impérial de Sismologie, à Strasbourg. LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS Depuis quelques années, la littérature scienti- fique s'est enrichie d'ouvrages nombreux sur la planète Mars, et ce monde voisin semble tenir le record de l'intérêt pour le public que passionne l’Astroromie. On parle couramment dans les quo- tidiens des canaux de Mars, des êtres qui peuplent la planète, des signaux qu'ils nous envoient. Le roman marlien est devenu à la mode et les jour- naux n'ont pas hésité à publier des nouvelles et des histoires invraisemblables ayant pour thème des descriptions détaillées de cette mystérieuse planète. La plupart de ces œuvres, faut-il l'avouer, ne possèdent même pas les qualités de style qui, tout au moins, pourraient les recommander au lec- teur au même litre que le Voyage dans la Lune de Cyrano de Bergerac, ou les Æntretiens de M. de Fontenelle, ou encore l’œuvre si humoristique de Wells, le fameux romancier anglais. A quoi faut-il attribuer cette floraison abon- dante qui nous envahit? I-sortirait du cadre de ce travail d'en énumérer toutes les causes. Je me contenterai de dire que la Question martienne à pris surtout un caractère d’acuité marquée depuis les travaux de M. Lowell. Cet astronome américain croit que les détails observés sur la planète ne peuvent s'expli- quer qu'en les supposant l'œuvre de créatures intelligentes, pius ou moins analogues aux habi- tants de la Terre. Prouver que Mars est habitable très originaux, sans conteste, et habité, telle est désormais, semble-t-1}, la raison d'être de la vie de M. Lowell. Son observatoire. construit dans l’Arizona à 2.200 mètres d'altitude, les travaux qu'on y entreprend, l’activité qu'on y déploie n'ont jamais eu d'autre but. À chaque oppo- sition de la planète, M. Lowell publie ses observa- tions, et, toutes, elles viennent converger, on le sent à chaque ligne de ses écrits, vers cette idée que Mars à des habitants. Comme toute opinion fondée sur des hypothèses et des « sentimentalités », celle de M. Lowell a eu des contradicteurs. L'un, entre autres, l'illustre naturaliste anglais Wallace, l'émule de Darwin, s'est constitué l’adversaire résolu des doctrines lowelliennes, et n'a pas craint de publier ses idées dans différents ouvrages “qui ont eu un grand retentissement. Outre que ce serait diminuer l'intérêt d’un aussi passionnant débat que de prendre parti pour lun ou pour l'autre, il me semble que le moment n'est pas encore venu de se jeter dans la lice et de se mêler à la lutte. Il me paraïitra donc d'une plus grande opportu- nité de demander à chaque adversaire les argu- ments qu'il peut fournir et de marquer les coups 1 Consulter en particulier : Percrvaz LoweLLz : Mars, 1896. — In. : Mars andits Canals, 1:07; — les Fulletins de l'Orsér- valoire Lowell et divers articles de Revues anglaises et américaines. 2 Acvnrp Ressez WaLLacE : La place de l'homme dans l'Univers, traduction francaise par Mme C. Barbey-Boissier. — ]p,:1s Mars habitable? A critical examination of Prof. Percival Lowell's book « Mars and its Canals », with an alternative explication. ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS 6) qu'il doit raisonnablement compter à son actif. Je ne perdrai pas de vue que cet article sera écrit aussi bien pour les lecteurs que le débat intéresse, que pour ceux qui veulent savoir, qui sont prêts à croire, à condition qu'on veuille bien leur en fournir les raisons. Car il serait téméraire de vou- loir se renseigner dans les Revues spéciales et les Bulletins des Sociétés, même astronomiques. On y louange les travaux de M. Lowell, — ce qui est parfait d’ailleurs, — mais on ose à peine discuter ses conclusions, et l’artificialité des canaux y appa- rait comme une chose presque acquise à la science. L'esprit des lecteurs n’aurait-il pas changé depuis le Moyen-Age et serions-nous toujours au temps où l’on disait : Magister dixit? Une étude parue en 1906 dans ces colonnes" a exposé les résultats certains de l'Aréographie. Nous prions le lecteur de s'y reporter; notre but aujourd'hui sera plus spécial, et nous chercherons quels moyens nous avons à notre disposition pour tenter un essai de la Climatologie de la planète. Mars à certainement une atmosphère, mais quelle est sa densité? Telle est la première question à résoudre. Une planète privée d'enveloppe atmosphérique, comme la dune, nous montre un disque également lumineux au centre et sur ses bords. La présence «l’une couche d'air appréciable à pour conséquence d'atténuer les détails ou même de les faire dispa- raitre complètement, surtout près des bords. C’est précisément ce que l’on observe sur Mars : le «disque de la planète semble entouré d'une auréole blanchätre, où tous les détails disparaissent. Si, maintenant, nous cherchons à préciser la den- sité d'un tel milieux gazeux, nous nous trouvons en présence de nombreuses difficultés. Evidem- ment, nous pouvons essayer de raisonner par ana- logie. Mars est un monde plutôt petit, comparé à notre globe. Son diamètre est de 6.750 kilomètres seulement et son volume n'est que le septième de la Terre. Son poids est même inférieur à celui qu'on aurait pu conclure de son volume;il ne fau- drait pas moins de dix globes — 9,4 exactement — aussi pesants que Mars pour contrebalancer celui de la Terre. Un corps terrestre transporté sur Mars y subirait donc une attraction beaucoup moindre, et le calcul indique que la pesanteur y serait diminuée dans le rapport de 4 à 0,376. Autrement dit, une masse quelconque, suspen- due à un peson à ressort et accusant un poids ! L’Avsé Tu. Moreux : La planète Mars d'après les travaux récents. livvue générale des Sciences du 30 nov. 1906. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. de 1.000 grammes, ne 376 grammes sur notre voisine. 5 marquerait plus que I a donc paru raisonnable de supposer que, s'il existe là-bas une atmosphère analogue à la nôtre, elle doit exercer à la surface de la planète une pression bien inférieure à ce que nous constatons chez nous. Nous pouvons dire que, si notre propre atmosphère entourait Mars, la pression au niveau de la mer ne serait pas de 760 millimètres, mais de 285,7 millimètres seulement, et chaque centimètre carré ne supporterait qu'un poids de 410 grammes au lieu de 1.093 grammes, ainsi que nous le consta- tons sur la Terre. Ce serait une pression corres- pondant à celle que nous trouvons sur les mon- tagnes les plus élevées, à 8.000 mètres d'altitude. Mais alors un corollaire s'impose: sur Mars, l’at- mosphère doit être beaucoup plus étendue, puis- qu'elle est moins comprimée en raison de la faible attraction; elle peut donc se développer sur une hauteur plus considérable, et la densité de couche gazeuse diminue moins rapidement qu: chez nous. Ces idées sont loin d'être nouvelles : Proctor' les développait déjà il y a une vingtaine d'années lors- qu'il écrivait : « Sur notre globe, une élévation d: 4.000 mètres suffit pour diminuer de moitié la pres- sion atmosphérique. Sur Mars. il faudrait une élé- vation de 10.400 mètres pour arriver au même résultat. Ici, à une altitude de 21.000 mètres au- Ia dessus du niveau de la mer, la pression atmo- sphérique est réduite à 1/32: à la même altitude sur Mars, elle n’est réduite que de 1/4. En admettant qu'au niveau de la mer sur Mars cette pression soit 1/7 de ce qu'elle est ici, l'air martien serait plus dense à une altitude de 29.000 mètres que chez nous à la même hauteur. À de plus grandes élévations, la différence s'accroit encore en faveur de Mars. » On à eu aussi recours à des considérations d'ordre cosmogonique, et l'on est arrivé sensible- ment au même résultal. Nous ne voyons pas d2 raison plausible pour que chaque planète n'ait pas retenu à l’origine une quantité proportionnelle de molécules destinées à former son atmosphère. Or, de deux corps semblables, le plus petit a la plus grande surface pour son volume; dès lors, l'atmo- sphère d'un corps plus petit se trouve obligée #2 recouvrir une plus grande surface et doit, par con- séquent, être plus légère. Mais qui ne voit que de telles considérations sont fondées sur des hyp®- ! Monthly Notices, t. XLVII, p. 307. — PKocror : Old and New Astronomy, Londres et New-York, 1888. — V. égaie- ment du même auteur : Chart of Mars, from 27 drawings by M. Dawes. — Half-hours with the telescope, 1809. — Others worlds than ours, 1870. — The orbs around us, 1872. — Éssays on Astronomy, 1872. — Flowers of the sky. 2" 70 théses absolument arbitraires; tout cela est déduit logiquement de principes qu'il faudrait commencer à prouver et à faire admettre, et la série de pos- tulats sur lesquels reposent nos déductions est loin d’être démontrée. Chercher à évaluer en chiffres la quantité d’at- imosphère entourant une planète, c'est vouloir. dans l’état actuel de notre science, transformer nos réveries en réalités. Et, lorsque Proctor, en se fon- dant sur les différentes causes énoncées plus haut, arrive à ce résultat que la couche d'air, au niveau du sol martien, à une densité égale au 4/7 de notre qu'il à atnosphère, je n'attache à son hypothèse d’ailleurs présentée comme telle — pas plus de créance qu'à l'opinion de M. Lowell affirmant que la densité de la couche inférieure ne dépasse pas le 1/12 de la nôtre, et qu'ainsi l'atmosphère mar- lienne fait équilibre à une colonne mercurielle de 63 millimètres seulement. volontiers à l'opinion du P. Secchi, qui écrivait en 1858' : « Mars paraît avoir une atmosphère. La clarté de son disque est beaucoup plus faible vers les bords qu’au centre; de plus, la netteté des con- tours, des configurations s'efface dans le voisinage des bords, ce qui semble démontrer qu'il y à là une atmosphère, mais {rès faible et certainement beaucoup moins dense que celle de Jupiter et pro- bablemuentmème que celle de la Terre. » Je souscrirais plus IL lei se place tout naturellement une autre ques- lion : Existe-t-il des nuages à la surface de Mars ? Nous allons trouver, là encore, des divergences considérables. Pour M. Lowell, la raréfaction de l'air rend presque impossible la formation de nuages propre- inent dits. « La première et la plus remarquable des caractéristiques de Mars, écrivait-il récem- ment”, est l'absence de nuages. Un nuage est un événement sur Mars, un phénomène rare et extraor- dinaire, et qui, là-bas, serait beaucoup plus apprécié que sur notre Terre, car notre voisine dans l’espace jouit d'un beau temps presque perpétuel. Du com- imencement à la fin du jour et d'une année à l’autre, on ne voit rien qui voile la plus petite partie de la surface de la planète. » Et, d'après lui, si certains observateurs ont cru voir souvent la présence de nuages sur la planète, sous prétexte que les détails étaient flous ou même invisibles, cela lenait ou à l’imperfection de l'instrument, ou, mieux, à la mauvais? qualit5 de l'atmosphère ter- : Sugli spettri prisma ici dei corpi celestli, Rome, 2 Lo vie : Mars, 1896. Ch. X. Almos)icrs. | ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS d'observation. Mais, dans une atmosphère pure et calme comme celle de Flagstaff, ce voile n'apparait jamais ou à peu près. Déjà l’astronome anglais Dawes, l'observateur « à l'œil d’aigle », écrivait en 1864° : « Mon impres- sion est que l'atmosphère de la planète Mars n'est pas habituellement très nuageuse. Pendant la der- nière opposition, les principales configurations se sont presque constamment montrées clairement et nettement. Je n'ai pas une seule fois pu constater qu'il y ait eu avec certitude des régions masquées par du brouillard et des nuages. La seule exception à cette permanence consisie dans des taches très blanches, notées en quelques rares circonstances el qui donnent l'impression soit de masses de neige, soit de masses nuageuses dont la surface réfléchit vivement la lumière solaire. » D'autres observateurs, cependant, ne sont pas de cet avis el ont vu souvent le disque de Mars comme voilé par des nuages appartenant bien à la surface de la planète. En 1863, sir Norman Lockvyer*, dans une communication à la Royal Astronomical So- ciely, décrivant ses observations de Mars pendant l'opposition de 1862, montre que, « tout en regar- dant comme hors de doute la fixité absolue des principaux détails de Mars, cependant chaque jour — on pourrait dire à chaque heure — il se produil des changements dans le détail et dans les tons des différentes parties de la planète, à la fois claires et sombres. Ces changements sont certaine- ment causés par le passage de nuages sur les diffé- rents détails. » Les dessins accompagnant le Mémoire montraient les changements mentionnés et confirmaient les soupçons des effets nuageux notés déjà par Secchi en 1858". Tout récemment, M. Denning, résumant ses observations de 1903, écrivait : « Pendant mes observations, j'ai remarqué plusieurs changements frappants dans des objets bien apparents; ils élaient probablement occasionnés par des mouve- ments atmosphériques à la surface de la planète. La présence de nuages ou de vapeurs obseurcis= santes ne devait cependant affecter que des ré- gions relativement petites, car les détails étaient ordinairement visibles d'une nuit à l’autre sous des aspects semblables, en tenant compte de la défi- nilion variable. » restre au point { Dawes : Hopeñeld Observalory, Haddenham, Bucks, Angleterre. — Royal Astronomical Society, Monthly No- tices, t. XXV. — Memoïirs of the Roy. Astr. Soc., t. XXXIV. 2 Sin Lockyer : Measures of the planet Mars, made at the opposition of 1862. Mem. of the Roy. Astr. Soc., t. XXXII, p. 190. # Sscenr : Osservazioni di Marte, fatte durante l'opposi- zione del 4858. Memorie dell Observatorio del Collegio Romano. Rome, 1859. — In., nuova serie, vol. II, 1863. 4 Knowledge, avril 190%. ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS 11 En 1905, le Professeur W. H. Pickering' vait aussi la preuve de formations nuageuses sur un certain nombre de photographies de Mars, dont quelques-unes avaient été prises à Cambridge dans le Massachusetts en 1888, et les autres au Mont Wil- son en 1890. Ces photographies ne montraient ni les canaux ni les lacs, mais elles indiquaient suffi- samment une variation due aux changements météorologiques. En terminant, le Professeur Pic- kering faisait remarquer qu'il ÿ à maintenant sur Mars la preuve directe d’une circulation atmosphé- rique effective d'humidité, qui semblerait expliquer parfaitement le-(ransport observé des précipita- lions alternatives d’un pôle à l'autre pendant l'an- née martienne. Je pourrais également ciler mes propres obser- valions pendant l'opposition de 1905. L'étude atten- tive de la planète m'a donné, en effet, la persuasion que, sept fois sur dix, le manque de nettelé des détails sur Mars n’est pas attribuable à une mau- vaise définition. Bien souvent, en effet, les bords de l’image sont fort nets, sans oscillations appré- ciables, sans déformation d'aucun genre. Si les détails du sol martien ne peuvent être facilement entrevus, cela tient simplement à la présence de brouillards sur notre voisine. Je n'ai jamais vu de nuages proprement dits, mais plutôt un ensemble confus rappelant de la brume, A la suite de ces observations, M. Lowell m'a fait remarquer qu'il n'avait rien vu de semblable aux jours indiqués et que le flou tenait uniquement au mauvais état de notre atmosphère. Cette expli- cation ne me parait point suffisante, car il est inadmissible de prétendre que l’état de notre atmo- sphère puisse affecter telle ou telle partie de la pla- nèle pendant des soirées entières. D'ailleurs, un astronome habitué aux observations reconnait immédiatement s'il s'agit d’une bonne ou d'une mauvaise définition. Or, je n'ai publié que des observations faites par de très bonnes définitions et, même dans ce cas, j'äi vu plusieurs fois des régions entières tout à fait indistinctes, alors que les parties voisines laissaient apercevoir une foule de détails. trou- On a encore constaté d'une autre façon la pré- sence de nuages sur la planète. Nous voulons par- ler des projections lumineuses hors du termina- teur quand Mars présente une phase sensible. C'est donc un fait acquis désormais : il existe sur Mars des nuages ou, mieux, des brumes et des brouillards voilant parfois une grande partie de la ! Harvard College Observatory Annals, n° 8, vol. LIN, 1905. — Nature, 9 nov. 1905. ? La différence d'heure entre Flagstalf et Paris rend lupossible la comparaison des dessins de la planète Mars pris le mème jour aux deux endroits. planète, et d’autres nuages plus épais qui apparais- sent hors du terminateur. Enfin, Mars nous présente des calottes polaires analogues à celles de la Terre. Ces calottes polaires fondent presque complètement pendant les étés martiens et se reforment durant l'hiver: ce qui suppose évidemment sur notre voisine des préci- pitations atmosphériques. À plusieurs reprises, on a pu assister à leur formation et en saisir le méca- nisme sur le fait. M Lowell à fait d'intéressantes observations à ce sujet’. On pourrait croire que ce qui reste de l’ancienne calotte s'agrandit à mesure par les bords. Il n'en est pas ainsi. A quelque distance de la tache principale se forment des noyaux qui augmentent peu à peu d'étendue et viennent rejoindre la calotte primitive pour for- mer un tout complet avec elle. Pendant des obser- valions de ce genre faites en juillet 1903, le nou- veau dépôt était parfaitement distinet et recou- vrait une vaste étendue des régions arctiques et tempérées jusqu'à 55° de latitude. Quand les nou- velles couches blanches recouvrirent les restes dé l'ancienne calotte, celle-ci ne disparut pas com- plètement, mais son emplacement était facilement reconnu en raison de son plus grand éclat. Ceci montre bien le caractère superficiel de la calotte polaire. Elle est formée de couches successives d'une substance que l’on peut raisonnablement regarder comme du givre; au centre se trouve un petit noyau de neige perpétuelle. Puis les couches de givre s'ajoutent les unes aux autres et les obser- vations montrent des dépôts quotidiens jusqu'au moment où toute la région polaire en est recou- verte. Tout cet ensemble de faits : diminution d'éclat sur les bords du disque, nuages et brouillards, calottes polaires, prouve, une fois de plus, que Mars à une atmosphère, qu'il y existe une circula- tion assez active et que, pour tout résumer en un mot, on y observe des phénomènes analogues à ceux que l’on constate sur la Terre. Seule, la raré- faction de la couche atmosphérique peut expliquer leur différence d'intensité. III Il nous reste maintenant à rechercher la compo- sition de cette atmosphère. Renferme-t-elle, comme chez nous, de l'oxygène, de l'azote, de l'acide car- bonique, de la vapeur d'eau? Les nuages que nous observons sont-ils formés de gouttelettes d'eau; les calottes polaires sont-elles de neige semblable à celle que l'on trouve sur la Terre? Il est difficile 1 Bulletin de l'Observatoire Lowell, n° 22, 1905. — Nature, 40 avril 1905. — Popular Astronomy, 1903. 72 ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS de répondre catégoriquement à ces diverses ques- tions ; pourtant, nous avons des données suffisam- ment sérieuses pour permettre de faire des suppo- sitions raisonnables. Le point sur lequel les astro- nomes ont le plus diseuté a été de savoir s'il existe de la vapeur d’eau dans l'atmosphère martienne: et cette question d’une substance capable de pro- duire des nuages, des brouillards et de la neige est, en effet, fondamentale pour tous ceux qui veulent que notre voisine soit habitée. Il semble bien que, si nous jugeons par ce que nous obser- vons des êtres connus, animaux ou végétaux, tous ont un absolu besoin d’eau, non seulement pour vivre, mais encore pour être constilués. Le problème a été traité de différentes façons el, en l'absence de preuves expérimentales, on à eu recours dès l’abord à d'ingénieuses théories. Les recherches modernes ont démontré que ce que nous appelons milieu gazeux n’est en réalité qu'un amas de molécules beaucoup trop petites pour être perceptibles, même dansles plus puissants microscopes. Chacune de ces molécules est animée d'un mouvement rapide, si bien que, dans la masse gazeuse, chaque molécule rencontre constamment ses voisines; de là naissent des chocs et des chan- gements perpétuels aussi bien dans la direction que dans la vitesse. Pour chaque gaz, cependant, les molécules ont une certaine vitesse moyenne pour une température donnée, et, quand un milieu se trouve composé de plusieurs gaz comme notre atmosphère, chaque molécule de ces gaz continue à se mouvoir avec sa vitesse particulière. On est parvenu à mesurer les vitesses moyennes des molé- cules : c’est ainsi que, pour l'oxygène, celte vitesse n’est que de 400 mètres, tandis qu'elle atteint pour l'hydrogène jusqu'à 1.600 mètres par seconde, en supposant que la température soit la même dans les deux cas, 64° C. au-dessous de zéro, ce qui corres- pond à la température supposée des confins de notre atmosphère. Les vitesses extrêmes, d’après les recherches de Clerk Maxwell, peuvent être dix fois plus grandes ou plus petites. Si la température augmente, la vitesse des molé- cules augmente également; ainsi, à la température de la glace fondante, 0° C., une molécule d'hydro- gène se mouvant en ligne droite et n'étant arrêtée par aucune autre molécule ou corps solide, ne par- courrait pas moins de 2.000 mètres à la seconde. Dans les mêmes conditions, une molécule d'oxygène voyageraitl à travers l’espace au taux de 530 mètres par seconde. En fait, les quantités relalives de mouvement sont inversement proporlionnelles aux racines carrées des densités des gaz. Or, comme l'oxygène est seize fois plus lourd que l'hydrogène, une molé- cule de ce dernier gaz, libre de se mouvoir en ligne droite dans l'espace, serait animée d'une vitesse quatre fois plus grande qu'une molécule d'oxygène. D'autre part, si la température diminuait, la vitesse se ralentirait et finalement la molécule res- terait immobile; le cas se présenterait au zéro absolu de température, à 273° au-dessous de zéro dans l'échelle centigrade. Il y à quelques années, le D' Johnstone Stoney a appliqué cette théorie cinétique des gaz à la question des atmosphères des planètes et de leurs satellites ; voici comment : On sait qu'un corps lancé à la sur- face de la Terre est attiré par notre globe, que sa vitesse diminue peu à peu, et que, finalement, il retombe. Mais, si le corps projeté était animé d’une vitesse suffisante, il pourrait vaincre définitivement la force de la pesanteur et sortir de la sphère d'al- traction de la Terre. Cette vitesse est celle qu'aurait, au moment de sa chute, un corps tombant des étoiles à la surface de notre globe et soumis seule- ment à l'attraction de la Terre. On à donné à celte vitesse le nom de parabolique, parce que le corps décrirait autour de notre globe une trajectoire ouverte en forme de parabole. Cette vitesse parabo- lique est de 11,16 kilomètres à la surface de la Terre. Autrement dit, un projectile lancé avec cette vitesse s'éloigneraitindéfiniment de nous en suivant une trajectoire parabolique. Cette vitesse critique n’est pas la même pour tous les astres: elle dépend de la masse du corps atti- rant; par conséquent, plus cette masse sera faible, et plus cette vitesse sera réduite. Ainsi, sur la Lune, dont la masse n’est que la quatre-vingtième partie de celle de la Terre, un corps ayant un mouvement de 2,4 kilomètres par seconde s'échapperait néces- sairement. Pour le Soleil, au contraire, la vitesse critique serait de 616,4 kilomètres par seconde. Voici, d'ailleurs, les vitesses paraboliques à la sur- face de chaque planète : Mercure, 3,5 kilomètres par seconde; Vénus, 10,16 kilomètres; Mars, 4,98 kilo- mètres; Jupiter, 59 kilomètres; Saturne, 35 kilo- mètres; Uranus, 20,9 kilomètres; Neptune, 22 kilo- mètres. On comprend facilement, d'après la théorie du D' Stoney, que, siles molécules d'un gazsont animées d'une vitesse égale ou supérieure à la vitesse para- bolique d'une planète, ce gaz ne peut rester à sa surface. Supposons donc une molécule d'hydrogène animée d’une vitesse maxima dix fois supérieure à la vitesse moyenne; elle voyagera sur les confins de notre atmosphère à raison de 16 kilomètres à la seconde, vitesse bien supérieure à la force d'attrac- tion de notre globe. Comme il n'y a aucune raison pour que chaque molécule n'atteigne pas un jour ou l’autre cette vitesse maxima, l'hydrogène doit sans cesse quitter la Terre et fuir à travers les espaces. Il en est probablement de même pour ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS l'hélium; mais ce gaz doit s'échapper lentement, puisqu'à — 64° sa vilesse maxima n'est que très voisine de la vilesse parabolique. Il nous à paru intéressant de réunir dans un tableau d'ensemble la vitesse moyenne des molécules pour les prin- cipaux gaz de notre atmosphère : TABLeAu |. — Vitesse moyenne des molécules des gaz de notre atmosphère. VITESSE PAR SECUNDE RE DENSITÉ Température DID Température 64° C. AzOtES 7 Oxygène . TN EP NEN RPC Bioxyde de carbone. Vapeur d'eau. . Ammoniaque. . Hélium Hydrogène. 535 mètres. 27 mètres. 500 | 447 5 426 666 686 1.414 2.000 Cette théorie semble confirmée, d'après M. Stoner, non seulement par ce que l’on voit sur notre pla- nète, mais encore par l'observation des autres corps planétaires. Vénus, par exemple, dont la masse est très voisine de celle de la Terre, nous apparait avec une atmosphère très dense. Mercure, plus petit. semble n'avoir que très peu d'atmosphère. La Lune serait encore un exemple frappant de l'impossibilité où se trouvent les corps relativement légers de con- server une enveloppe gazeuse. Les grosses planètes, au contraire, sont entourées d'atmosphères à forte densité et l'on doit y trouver en abondance les gaz les plus légers. Quant au Soleil, l'attraction qu'il exerce dans les couches extrêmes de son atmo- sphère est si puissante qu'aucun gaz, même l'hydro- gène, ne peut lui échapper. Nous pouvons ainsi expliquer la présence de l'hydrogène dans les atmosphères de soleils très gros comme Sirius et Véga : leur masse est suffisante pour retenir ce subtil élément lui-mème. Pour ce qui est de Mars en particulier, nous avons vu que la vitesse critique à sa surface est de 5.000 mètres en chiffres ronds : dans ces conditions, l'azote, l'oxygène, l'argon et le bioxyde de carbone peuvent y être à l’état permanent, mais la vapeur d'eau doit s’en échapper très rapidement. Or, ici, l'observation contredit nettement la théorie. Déjà certains savants s'étaient inscrits en faux contre les conclusions du D’ Stoney. « On a cherché souvent à expliquer, en s'appuyant sur la théorie cinétique, l'absence de gaz légers dans les atmo- sphères planétaires. Mais alors on peut se de- mander pourquoi les comètes, à la surface des- quelles la vitesse critique est excessivement faible, ne sont pas déjà et depuis longlemps toutes dis- persées; comment aussi les planètes, qui ont été formées par des agglomérations successives de vapeurs et de gaz portés à une haute température, n'ont pas vu leurs matériaux se dissiper avant même d'avoir été réunis? Cette contradiction à, sans doute, échappé à ceux qui s'appuient sur la théorie cinétique pour dire que les petits astres ne peuvent pas conserver d’atmosphère. » M. du Ligondès", à qui nous avons emprunté les lignes précédentes, arrive à cette conclusion que d'une planète à l'autre, les vitesses moléculaires à l'intérieur d'une couche atmosphérique de même densité varient exactement comme les vitesses cri- tiques. La tendance à la dispersion des atmo- sphères est indépendante de la masse. « Ce résultat, ajoute-t-il, pouvait être L'intensité de la pression, au moyen de laquelle on calcule la vitesse des molécules, n'est pas autre chose que le poids sur l'unité de surface, et comme, à l'intérieur d'une petite masse de gaz, la pression est à peu près la même en tous sens, elle doit, ainsi que le poids, suivre les variations de la gravité. D'ailleurs, les mouvements moléculaires, étant sans doute une conséquence de l'attraction universelle, obéissent à la loi de la chute des graves : 1° = 24h; le carré de la vitesse est proportionnel à l'intensité de la pesanteur à la surface de chaque planète: » C'est donc une erreur manifeste d'attribuer à la faiblesse de l'attraction lunaire l'absence d'atmo- sphère autour de notre satellite ; il faut plutôt croire que la porosité du sol, attestée par le relief de la surface, a déterminé l'absorption rapide de l'eau d'abord, ensuite celle des gaz. Ilest non moins faux de dire que l'hydrogène, l'hélium et autres gaz légers ont quitté la Terre pour se concentrer autour du Soleil. Si ces gaz avaient le pouvoir de diffusion qu'on leur prête, aucun astre ne serait capable de les retenir. La théorie cinétique repose sur l'exactitude de la loi de Mariotte. Or, l'expérience apprend qu'au delà d'un certain degré de raréfaction la diminution de pression est plus rapide que celle de la densité; c'est une preuve que les vitesses moléculaires décroissent aussi. Aux limites de notre atmosphère, où la température est très basse, ces vitesses sont donc loin d'atteindre les chiffres que la théorie donne pour les couches inférieures. En résumé, les calculs et les raisonnements sur lesquels on s'appuie pour expliquer, d'après la théorie cinétique, l'absence de gaz légers ou même l'absence totale d'atmosphère autour des planètes ou de leurs satellites, paraissent dénués de tout prévu. ! Bulletin de la Société Astronomique de France, 1905, p. 291-293. ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS fondement sérieux. L'application par Johnstone Stoney de la théorie de Clausius à l'étude des atmosphères planétaires semble donc abusive el sans valeur au point de vue théorique. D'ailleurs, comme vous le disions plus haut, l'observation à propos de Mars lui donne un démenti formel. D'après Johnstone Stoney, la vapeur d'eau ne peut exister d’une facon permanente sur cette pla- nète. Comment expliquer alors la présence de brouillards, de nuages, de calottes polaires? Ces brouillards et ces nuages ne peuvent être formés que de vapeur d'eau. Je sais bien que M. Lowell attribue les nuages et les projections hors du terminateur à des masses de poussières. Mais il resterait toujours à expliquer les calottes po- laires. De plus, comment admettre que les poussières soient si répandues dans l'atmosphère martienne sans qu'il s'y forme des nuages dus à la condensa- tion de la vapeur d’eau? D'autre part, on a remarqué depuis longtemps, et M. Lowell à insisté sur ce point, que les calottes polaires sont entourées d'une ceinture bleuâtre épousant toutes les formes de la masse neigeuse, L'astronome américain l’attribue à la présence d’eau liquide à l'état permanent; c’est elle qui, sous une certaine épaisseur, nous parait bleue. Cette teinte, d'après M. Lowell, prouve caté- goriquement que la calotte polaire n'est pas formée d'acide carbonique solidifié, car, étant donnée la basse pression qui existe sur la planète, l'acide carbonique passerait directement de l’état solide à l'état gazeux. Mais tout le monde n'était pas disposé à ad- mettre cette argumentation, que M. Wallace quali- fiait tout récemment! de « très extraordinaire et irès futile ». Il semble bien toutefois que l’on soit en droit d'affirmer que ces calottes polaires sont formées d’eau congelée. Le spectroscope à donné, en effet, au commencement de cette année, la preuve définitive qu'il existe dans l'atmosphère de Mars de la vapeur d'eau en quantité considérable. Déjà, en 1862, MM. William Huggins et Miller? en Angleterre, Rutherfurd° aux États-Unis, reconnais- saient indépendamment, dans l'atmosphère de Mars, la présence d’une certaine quantité de vapeur d’eau donnant naissance à un spectre d'absorption. Plus tard, Vogel en Allemagne, le Professeur 1 Is Mars habitable? p. 34. ? Murer et HuGcins : On {he spectrum of Mars: Phil. Trans., 1864. — V. également : Roy. Astr. Soc., 8 mars 1867; Month. Not., t. XXVII, p. 179; Astroph. Journ., vol. 1, p. 193. * RornenruRp : Astronomical observations with the spec- lroscope, American Journ. of Science, janv. 1863. # Vocez : Beobachtungen auf der Sternwarte zu Both- kamp. Heft I, p. 66. — Astr. Nach., n°9 1860.— [p. : Untersu- chungen ueber die Spectra der Planeten, 1874, p. 20. — Astroph. Journ., vol. 1, p. 203. Secchi' à Rome, Maunder- à Greenwich, faisaient la même constatation. Toutefois, plus récemment, les recherches de Campbell”, de Keeler*, de Jewel” sont demeurées complètement infructueuses. Celles de M. Marchand’, à l'Observatoire du Pic du Midi, sont très discordantes. En 1905, M. Slipher, à l'Observatoire Lowell, arrivait de son côté à des résultats à peu près négalifs. La question en était là quand le D' Wallace publia son livre Zs Mars habitable? Négligeant les ob- servations de Huggins, Secchi, Vogel, Maunder, l'illustre naturaliste regardait comme seules pro- bantes les observations négatives de Campbell et de Keeler et insistait sur l'absence de preuves spec- troscopiques comme un puissant argument contre la présence de la vapeur d'eau. Dans ces conditions, la thèse de l'habitabilité de Mars devenait insoule- nable et ses adversaires triomphaient complète- ment. Mais le triomphe fut de courte durée. Au début de l'année dernière, un télégramme® arrivait d'Amérique, produisant un vrai coup de théâtre dans les milieux scientifiques anglais, que la ques- tion semblait vivement passionner. L'examen d'une série de spectrogrammes obtenus par M. Slipher, le 15 janvier, ne laissait plus aucun doute sur la pré- sence de la vapeur d’eau dans l'atmosphère de Mars. Le spectre de la Lune avait servi de terme de comparaison et, tandis que la bande d'absorption « manquait totalement sur ce spectre, elle constituait un détail] très apparent sur celui de Mars. TN C'est ainsi que le spectroscope est venu confirmer les observations visuelles, et l’on a maintenant la preuve qu'il existe dans l'atmosphère de Mars de la vapeur d’eau susceptible à certains moments de se condenser en brouillard et en neige. Mais, pour que ces phénomènes puissent se produire, il faut que la température de l'atmosphère de la planète soit alternativement supérieure et inférieure à la tem- pérature de la glace fondante, et c'est là un pro- blème qui, en apparence, semble insoluble. On sait, en effet, que la quantité de chaleur rayonnée normalement sur une surface déterminée varie en raison inverse du carré de la distance de cette sur- face à la source calorifique. Il en résulte que, si la Terre se trouvait lout à coup éloignée à une dis- 1 Sugli spettri prismatici dei corpi celesti, Rome, 1868 el 1872. ? Monthly Notices, t. XXXVIIT, nov. 1877, p. 34-38. 3 Publ. Astr. Pac. Soc., t. NI, p.228; t. IX, p. 109: AStr. and. Astropb., 1. XII, p. 152; Astroph. Journ., t. 1, p. 28. à Astroph. Journ., t. V, p. 328. ÿ Astroph. Journ., t. 1, p. 311: t. HI, p. 254. ° Bull. de la Soc. astr. de France, 1905, p. 321. 7 Nature, 28 mars 1908, t. LXXVII, p. 497 ABBE TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS 15 tance double du Soleil, elle en recevrail quatre fois moins de chaleur et de lumière. Or, en supposant la Terre à la distance unité, Mars est éloigné en moyenne de 1,53 celte distance, de sorte que la chaleur recue du Soleil par l'hémi- sphère boréal martien est à celle de l'hémisphère terrestre correspondant dans le rapport de 43 à 100. Comment alors expliquer, par exemple, la fonte presque complète des neiges formant les calottes polaires de Mars ? Dans une étude’ sur la radiation dans le sys- tème solaire, le Professeur J. H. Poyntinga cherché, par l'application de la loi de Stefan, à se faire une idée des températures des différentes planètes. « Imaginons, dit-il, un petit corps noir bon con- ducteur de la chaleur et placé en plein soleil à la distance de la Terre. Supposons qu'il ait un centi- mètre carré de section transversale, de facon qu'il reçoive 1/24 de calorie par seconde. Il atteindra bientôt une température telle qu'il donnera exacte- ment autant qu'il recoit et, puisqu'il est si petit, la chaleur le traversera rapidement, de sorte qu'il sera tout entier pratiquement à la même tempéra- ture. Une sphère de 4 centimètre carré de section transversale a une aire de # centimètres carrés, de sorte qu’elle doit émettre, par chaque centimètre carré de sa surface, 1/96 — 0,0104 calorie par seconde. » Or, d'après les recherches de Kurlbaum en parti- eulier, on connait la quantité réelle d'énergie émise par une surface noire ou parfaitement radiante par seconde à 100° C., et par conséquent à une température quelconque. Ces recherches sont basées sur une loi proposée il y a trente ans par Stéfan et d’après laquelle le courant d'énergie est proportionnel à la quatrième puissance de la tem- pérature comptée à partir du zéro absolu. Les re- cherches de Kurlbaum ont permis de dresser le tableau suivant de la quantité d'énergie émise par un centimètre carré de surface parfaitement radiante ou « noire » : TABLEAU II. — Quantité d'énergie émise par 1 centimètre carre du corps noir. CALORIES Grammes d'eau chauffés de 1° par seconde TEMPÉRATURE ABSOLUE 0,0 Ebullition de l'air. 0.000127 Surface de la Terre, Chaleur rouge. Charbon de l'arc. ! Discours prononcé au meeting de Cambridge de Ja British Association, le 23 août. 1904, Si l'on applique ces considérations à la détermi- nation de la chaleur recue du Soleil par la Terre, el si l’on admet avec Langley que le courant de radia- tion venant du Soleil el lombant perpendiculaire- ment sur À centimètre carré, hors de l'atmosphère de la Terre, doit échaufler 1 gramme d’eau de on de calorie. par seconde, on trouve que la chaleur radiée par notre petite sphère noire correspond à peu de chose près à une température de 300 absolus ou 27° C. Placée à la distance de chacune des autres planètes, la température de la petite ‘sphère noire variera nécessairement en raison inverse de la racine carrée de la distance, et l’on obtiendra les nombres suivants : TagLeau III. — Température d'une sphère noïre placée à différentes distances du Soleil DISTANCE AU CENTRE DU SOLEIL TEMPÉRATURE CENTIGRADE 6 millions de kilomètres. 23 — — 321 1.200 C. Fusion de la fonte. Presque la fusion du plomb. Presque la fusion A la distance de Mercure. 210 de l'étain. L'alcool bout à l'air libre. Chaude journée d'été. Froid arctique. Solidification de l'azote. Vénus. e la Terre. Mars. Neptune. Ces nombres paraitront bien près de la réalité si nous considérons que la température moyenne de la Terre est, à 10° près, celle que fournit l’applica- tion de la loi de la quatrième puissance. On l’évalue, en effet, généralement à 16 ou 17° C. environ. La différence provient de ce que la Terre est beaucoup trop grande pour que la distribution de la chaleur par conduction joue un rôle sérieux pour l’égalisa- tion des températures en différentes régions. D'autre part, cependant, la rotation du globe assure une température à peu près uniforme à une latitude donnée et les mouvements de l'atmosphère tendent à distribuer également la chaleur reçue. La Terre doit done posséder à peu près la tempéra- ture du petit corps noir à la même distance ; mius, comme elle réfléchit une fraction de Ja radiation solaire, sa température moyenne sera forcément un peu inférieure. Nous pouvons raisonner de même par analogie pour la planète Mars, en supposant toutefois, ce qui n'est probablement pas, que les conditions de constitution physique du globe martien sont les mêmes que sur la Terre. D’après les considérations précédentes, il faudrait abaisser de 10° environ la température calculée, ce qui donnerait pour la 76 ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS -empérature moyenne 37° à 40° au-dessous dé zéro. Pour le Professeur Poynting, la température imnoyenne de la planète ne doit pas différer beau- coup de ces chiffres. « À moins, conclut-il, que cette planète soit très différente de la Terre, sa surface entière est au-dessous du point de congé- lation ». En somme, pour le Professeur Poynting comme pour Fizeau', on est conduit à l'hypothèse de l'existence, à la surface de Mars, d'immenses glaciers analogues à ceux de notre globe, mais d'une étendue beaucoup plus considérable encore. Cette hypothèse est cependant en contradiction complète avec ce que nous montre l'observation de la planète. La neige, qui en hiver couvre des étendues considérables, fond presque entièrement au cours de l'été ; on constate souvent la présence de brouillards ou de nuages, et nous avons vu que le spectroscope décèle dans l'atmosphère martienne la présence de la vapeur d'eau. La température doit donc êtreen général pendant le jour supérieure au point de congélation. Comment expliquer cette anomalie ? Il est vrai qu'on a voulu voir dans les calottes polaires de l'acide carbonique solidifié. Mais nous avons vu plus hautque, d'après M. Lowell, celte théorie paraît bien inadmissible, en raison de la présence constante d’une bande bleuätre sur les bords de la masse neigeuse. 11 faut donc rechercher ce qui peut ainsi relever la température dans l'atmosphère de notre voisine. À la suite de travaux très intéressants, M. Lowell arrive à ce résullat que le pouvoir calorifique réel à la surface de Mars est très supérieur à ce qui existe sur la Terre et doit produire une température moyenne de 22° C., en supposant Mars protégé, comme la Terre, par une atmosphère dense et très chargée d'eau. Mais l'atmosphère martienne, par suite de sa rareté, ne peut remplir aussi efficace- ment ce rôle protecteur; cependant, M. Lowell regarde comme très probable que, tout en étant plus rare, l'atmosphère de notre voisine renferme une plus grande proportion de vapeur d'eau et d'acide carbonique. Il est ainsi amené à fixer la température moyenne de Mars à près de 9° C.; c'est presque exactement la ième température que celle de la moitié méridionale de l'Angleterre. Enfin, comme complément de ces recherches, le Professeur Lowell trouve que le point d'ébullition de l'eau sur Mars serait environ 44° C., la quantité d'air par unité de surface élant à peu près égale aux deux-néuvièmes de ce que l'on constate sur la 4 Académie des Sciences, séance du 25 1558. L'Astronomie, août 1888. juin Terre, landis que la densité probable de l'atmo- sphère martienne est seulement de 63 millimètres. le douzième de la densité de notre couche atmosphérique. soit La base même de tous ces calculs est trop fragile pour qu'on puisse accorder une grande confiance aux résultats. Mais doit-on, par suite, adopter la conclusion du Professeur Poynting, qui, après avoir discuté certains points de l’étudede M. Lowell, affirme-que la température de Mars, avec les don- nées fournies par le célèbre astronome américain, reste encore très au-dessous du point de congéla- tion? « Je pense, ajoute le Professeur Poynting, qu'il est impossible de porter la température de Mars à un point aussi élevé que la valeur obtenue par le Professeur Lowell, à moins de supposer que son atmosphère possède des qualités entièrement différentes de celles que nous connaissons à notre propre atmosphère. » En tout cas, l'observation semble bien prouver que la température du sol de Mars est relativement élevée, el c'est à cette conclusisn que j'étais déjà arrivé en 4905. Mais n'oublions pas que tous ces chiffres ne peuvent fournir que des approximations très grossières, étant donné le peu de documents que nous possédons sur l'état de l'atmosphère de la planète. Nous savons seulement que cette atmo- sphère est plus faible que la nôtre, sans qu'il nous soil possible de dire avec quelque certitude dans quelle proportion. Et cette raréfaction même n'est pas une des moindres difficultés lorsqu'on aborde la détermination de la température de la planète. Sur la Terre, relativement dense, chargée de vapeur d'eau et d'acide carbo- nique, sert de manteau protecteur contre le rayon- nement de la chaleur superficielle ; elle emmagasine en même temps une grande partie de la chaleur solaire qui la pénètre. Elle joue encore le rôle de régulateur : c'est par les courants aériens que se fait le transport de calorique des régions équato- riales aux régions polaires. DU Or, sur Mars, l'atmosphère, nous l'avons vu, est relativement rare. D'autre part, les grandes masses océaniques qui, sur notre globe, jouent un rôle analogue à celui de l'atmosphère, font complète- ment défaut sur notre voisine. Il en résulte que la température doit subir des écarts considérables, et théoriquement les différences doivent être énormes entre les régions polaires et les régions équato- riales, et entre le jour et la nuit surtout. Grâce, en effet, à la basse pression qui existe à la surface de la planète, l'eau peut à peine rester à l’état liquide. Pendant la journée, les rayons solaires la réduisent en vapeur, tandis que le froid brusque de la nuit ou notre atmosphère 1 Rev. gôn. des Sciences, 30 nov. 1906, p. 918. ABBÉ TH. MOREUX — LA CLIMATOLOGIE DE LA PLANÈTE MARS 17 la moindre variation de lempérature doit amener la production de rosée, ou de brumes et de brouillards plus ou moins opaques réfléchissant la lumière blanche. Un froid plus rigoureux précipite la vapeur d'eau en flocons de neige, ou la fait se déposer sous forme de gelée blanche ; différentes régions semblent même en être recouvertes d'une facon continue : ce sont, sans doute, de hauts plateaux. Les neiges polaires elles-mêmes ne sauraient atteindre une forte épaisseur, car la considération d'un été deux fois plus long que les nôtres ne pourrait expliquer la fonte parfois complète des calottes polaires. Dans ces conditions, la fusion des neiges polaires ne peut pas donner de très grandes quantités d'eau. Miss Clerke‘ était arrivée, par des calculs que nous croyons inutile de reproduire ici, à conclure que l'eau résultant de la fonte des neiges des pôles ne pourrait pas, répartie sur toutes les surfaces som- bres, donner plus de quarante-trois millimètres d’eau de hauteur. C'est peu, vraiment, pour subve- nir aux besoins de la végétation. Il est vrai que M. Lowell proteste énergiquement contre les chiffres de Miss Clerke; pour lui, la hauteur de l'eau provenant de la fusion des neiges ne serait certainement pas inférieure à soixante-quinze cen- timètres. Ajoutons qu'un tel débat est parfaitement puéril, et qu'il nous est actuellement impossible de tenter de pareilles déterminalions avec quelque chance de succès. Cependant, la célèbre théorie du Profes- seur Lowell repose entièrement sur celte supposi- tion que toute l'eau nécessaire à la végétation pro- vient de la fonte des neiges polaires. Tel serait, du moins, le résultat de ses observations. Le principal caractère des canaux, et d'une facon générale de la surface de la planète, est certainement la variabi- lité. Rien, en effet, ne parait stable sur ce monde voisin; la teinte des détails, leur intensité, leur visi- bilité, tout cela parait soumis à des changements perpétuels, Ces changements s’opèrent, sans doute, en vertu d'une loi qui nous échappe encore, mais que M. Lowell a entrepris d'élucider. Après avoir réuni tous ses dessins, l'astronome américain fut frappé de ce fait que tous les canaux ne sont pas visibles à la fois, et l'époque de l'appa- rition de chaque canal pendant l’année martienne parait d'autant plus tardive que l’objet se trouve plus loin du pôle tourné vers le Soleil; d'où il résul- terait que le développement des canaux serait gou- verné par une force synchronique dans son début avec la fusion des glaces polaires. Or, cette force se propage peu à peu, de latitude en latitude, jusqu'au delà de l'équateur. Tels sont les faits que M. Lowell* ! Edinburgh Review, oct. 1896 : New Views about Mars. * Nature, 19 mars 1908, t. LXXVII, p. 461. 3 Bulletin de la Socicté belge d'Astronomie : Les Cawr- prétend avoir constatés pendant l'opposition de 1903. Quelle explication en donne-t-il ? Sur la Terre, la végétation, pour apparaitre, à besoin de deux facteurs principaux : le soleil et l'eau. L'eau ne fait défaut presque nulle part; il suffit done de l'apparition d'un soleil plus ardent au printemps pour voir se manifester la vie végé- tale. Sur Mars, au contraire, l'eau est excessivement rare, si rare qu'après chaque hiver elle se trouv presque complètement reléguée aux deux pôles, où nous la voyons à l'état solide. Dès lors, pour que les végétaux puissent renaitre à la vie, il faut que les neiges et les glaces polaires soient fondues el que l'eau ainsi libérée aille arroser les régions fer- tiles de la planète. Cette fusion ne peut se produire que sous l’action d'un soleil plus chaud, par con- séquent assez élevé au-dessus de l'horizon. Les régions polaires seraient alors les premières à être irriguées et à montrer les traces de la végétation. Puis, peu à peu, cette eau s’'écoulerait versl'équateur, donnant partout naissance, sur son passage, à une vie végétalive intense, se traduisant pour nous pai l'apparition successive des canaux. Mais, commi aueune loi physique ne peut expliquer l'écoulement de cette eau vers l'équateur, surtout à travers un sol desséché, M. Lowell en conclut que Les taches appelées canaux sont entretenues artificiellement. M. Lowell avait vues par l'obtention de photographies du disque de la planète. Malheureusement, au foyer des plus grands instruments, Mars nous apparait comme ui disque bien faible sur les plaques photographiques. Sans contester les résultats obtenus, et qui font grand honneur à la persévérance des astronomes de Flagstaff, nous devons avouer que les épreuves, même agrandies, ne peuvent constituer un progrès dans la connaissance de la planète. Ce que l'on voil facilement sur les les détails importants, au sujet desquels nulle contestation espéré confirmer toutes ces clichés, ce sont n'est possible. Tous les astronomes qui ont étudié la planète depuis quarante ans sont d'accord sur les grandes configurations, les seules que montrent les photo- graphies. Le dédoublement des canaux, que M. Lowell pré- tend voir sur ses épreuves, me parait bien sujet à raution. J'ai eu ses clichés entre les mains et je dois avant tout à la vérité d'affirmer que je n'ai jamais constaté de dédoublement aussi net que sur ses dessins. Il existe bien des canaux élargis, mais aucun n'est vraiment double. Je n'insisterai pas sur la fragilité des hypothèses basées sur l'examen de la visibilité des lignes fines touches de Mars. — V. également, dans The Century illus- trated Monthly Magazine, dilféren{s articles publiés en 1907 et 1908 sous le titre général : Mars as the abode of life. 18 C! PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL apercues par M. Lowell. Il ma cependant paru pportun de faire connaître dans une vue d'en- semble l'œuvre entreprise à Flagstaff. \ii Il serait maintenant bien superflu d'essayer de dégager des conclusions certaines relatives à la climatologie de la planète Mars. L'ensemble des travaux que nous avons exposés, avec la plus grande impartialité possible, nous montre que, dans le domaine de l'Aréographie, tout reste à faire; nous commencons seulement à en aborder l'étude, nous en sommes aux premières pages. Cette question d’Astronomie physique est encore loin de recevoir une solution satisfaisante : les raisons nous en paraissent faciles à concevoir. D'une part, le sujet se rattache aux problèmes les plus ardus de la Physique moderne, à ceux qui, à peine posés d'hier, soulèvent déjà ardentes polémiques. D'autre part, une théorie n'est salisfaisante qu'à une condition : celle de grouper autour d'une idée générale un très grand nombre de faits. les plus Or, il ne faut pas craindre de l'avouer, dans l'étude de la planète Mars, ce sont précisément les faits qui nous manquent; et par là nous entendons dire les faits scientifiques, rigoureusement cons- latés et contrôlés. Cela n’a rien qui doive nous étonner; l'Astronomie est encore bien mal outillée pour étudier un disque apparent aussi faible que celui de la planète Mars ; à chaque opposition, notre science n'augmente done que d’une infime quantité, et personne ne pourrait prévoir le jour où l'abondance des faits les mieux élablis nous permettra d'arriver à d’intéressantes et légitimes conclusions. Ce n’est certes pas une raison pour abandonner la partie. Ce qui arrive pour l'étude de la planète Mars se produit journellement dans tous les domaines de la science. À mesure que nous serrons de plus près une question, quelle qu’elle soit, nous sommes amenés tout naturellement à traiter les sujets les plus divers ; l'horizon s'élargit dès que nous avancons et nous avons vile fait d'atteindre ce que Lord Kelvin se plaisait à appeler « les limites de notre science », Abbé Th. Moreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES RÉCENTES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL On admet que, lorsqu'un corps solide est animé d'un mouvement relatif par rapport à l'air am- biant, il éprouve de la part de celui-ci une résis- lance qui peut avoir une inclinaison variable par rapport à la direction du mouvement et qui est fonetion de la vitesse. Lorsque le mouvement est rectiligne et lorsque le corps est symétrique par rapport à un axe parallèle à la direction du mou- vement, on admet que l'effort lui est également parallèle et qu'il est fonction de la vitesse. On admet même que cet effort est égal au produit d’un certain nombre qui dépend de la forme et des dimensions de l’objet, multiplié par le carré de la vitesse. On est, de plus, disposé à admettre, sous certaines corrections, que, pour des corps sem- blables, le nombre par lequel il faut multiplier le carré de la vitesse est proportionnel à la surface de la maîtresse section, c'est-à-dire de la plus grande section perpendiculaire au mouvement. Comme il s’agit de corps semblables, cette section est évidemment proportionnelle au carré des di- mensions homologues. La résistance que l'air oppose au mouvement du corps est exprimée par une formule de la forme eSV', dans laquelle & est un coefficient dépendant de la forme du corps, S la surface de la maitresse section, et V la vitesse relative. Par suite, le coefficient & est une caracté- ristique de la forme du corps en mouvement. On peut le comparer au coefficient d’un corps de forme déterminée qui serait pris pour étalon. Si nous appelons K le coefficient relatif à cette forme spéciale, pour les corps de cette forme, la résis- lance sera exprimée par la formule KSV’, et, pour un corps quelconque, il suffira de connaître le rapport + entre le coefficient d’une surface quel- conque et celui de la surface-étalon. La surface-étalon la plus simple est évidemment celle d'un plan se mouvant perpendiculairement à lui-même. C'est cette surface qui à été générale- ment adoptée. Mais, comme il est démontré par l'expérience que la résistance de l'air ne dépend pas seulement de la surface-avant du corps en mouvement, mais aussi de sa surface-arrière, il est nécessaire pour l'étalon de définir également la forme arrière, et l’on à adopté un plan parallèle au C: PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFTCEL 79 plan avant et aussi rapproché que possible de celui-ci. La réalisation du solide très peu épais compris entre ces deux plans parallèles à été dési- gnée sous le nom de plan mince, el la connaissance du coefficient de résistance normale du plan mince a déjà fait l’objet de nombreuses recherches expé- rimentales. Le coefficient K est done le nombre par lequel il faut multiplier le produit de la surface S d’un plan mince par le carré de la vitesse V avec laquelle il se déplace dans l'air perpendiculairement à lui- même, pour obtenir la force avec laquelle l'air résiste au déplacement. Dans la formule F = KSV”, F est exprimé en kilogrammes, S en mètres carrés, et V en mèlres par seconde. Si la surface du plan mince est de 1 mètre carré et si la vitesse est de 1 mètre par seconde, on aura F = K. On peut donc dire que ce coefficient est numériquement égal à la résistance de l'air au mouvement orthogonal d'un plan mince de 1 mètre carré de surface à la vitesse de 1 mètre par seconde. Ce coefficient est d’une extrême importance dans toutes les questions d'Aérodynamique. On devrait, pour être rigoureux, l'appeler coefficient de résis- tance d'un plan mince se mouvant orthogonalement dans l'air; mais, pour plus de simplicité, on le désigne universellement sous le nom de coefficient de la résistance de l'air. Cette expression montre, d'ailleurs, toute l'importance qu'on y attache. Il est facile de se rendre compte que, lorsqu'un corps de forme quelconque, se déplaçant dans l'air, est soumis à une force constante, au lieu de prendre un mouvement uniformément accéléré comme s’il se mouvait dans le vide, il prend, au bout d'une certaine période de mise en train, une vitesse uniforme. Ce régime permanent à lieu quand, par suite de l’accroissement de la vitesse, la résistance de l'air est égale à la force constante imprimée au corps. En particulier, un corps pesant tombant dans l'air, après une période d'accéléra- tion plus ou moins longue, prend une vitesse uni- forme. Plusieurs expérimentateurs ont utilisé cette propriété pour déterminer le coefficient de résis- tance de l'air. Ils ont laissé tomber librement un plan mince horizontal lesté et l’ont observé à partir du moment où il avait pris une vitesse uniforme. Dans ces conditions, KSV° était égal au poids de l'appareil; S et V étaient connus; K pouvait done se déduire sans difficulté. Ce fut, en particulier, le procédé employé par l'abbé Le Dantec au Conser- valoire des Arts et Métiers, et par MM. Cailletet et Colardeau à la Tour Eiffel. D'autres expérimentateurs ont préféré attacher le plan mince ou l’objet dont on voulait rechercher le coefficient de résistance à l'extrémité du bras d'un manège, animé, celui-ci, d'un mouvement de rotation uniforme, et, par des procédés variables, déterminer la résistance de l'air au corps dont la surface et la vitesse étaient connues. Chacun de ces deux procédés présente des incon- vénients. Le premier est excellent au point de vue théorique; mais il est d’une application difficile pour les grandes vitesses. Le régime permanent s'établit, en effet, avec rapidité quand la surface est considérable, et il correspond à une vitesse uniforme de peu de valeur. Si la surface est très faible, la période de mise en train est très longue et l’on n'a pas le temps d'atteindre la vitesse de régime, qui, dans ce cas, est considérable, Les grandes vitesses peuvent ètre très facilement obtenues par la méthode du manège, mais on reproche à celle-ci, avec raison, d'animer le corps d'un mouvement de rotation et non d’un mouve- ment rectiligne, ce qui fausse tous les résultats, à moins que le manège n’ait les bras tellement longs que l’on puisse négliger les effets de Ja force cen- trifuge. Or, jusqu'à présent, aucun manège n’a eu, en réalité, des dimensions suffisantes pour qu’on puisse le supposer. Ainsi, avec la méthode de la chute libre, on ne peut atteindre que des vitesses faibles, quelques mètres par seconde ; la méthode du manège permet, au contraire, des vitesses rapides, mais dans des conditions qui altèrent d’une facon considérable et inconnue les résultats cherchés. Aussi, le Colonel Renard ne considérait le manège que comme un instrument de comparaison permet- tant de déterminer le rapport entre le coefficient o d'un corps de forme quelconque et le coeffi- cient K fondamental du plan mince. Mais il était persuadé que ce dernier coefficient ne pouvait être obtenu que par des expériences où le mouvement relatif serait rectiligne. Il avait même l'intention, dans ce but, d'employer la méthode du {unnel, e'est- à-dire de faire parcourir un long cylindre par des courants d’air rectilignes et uniformes de vitesses considérables, courants d'air auxquels seraient exposés le corps et, en particulier, le plan mince à expérimenter. La mort ne lui a pas permis de réa- liser ce projet. : Et pourtant, il y avait là une lacune à combler? Les vitesses de l'air peuvent, en effet, se partager en plusieurs catégories suivant leurs valeurs numé- riques : les vitesses faibles, jusqu'à 4 ou 5 mètres par seconde, ne présentent qu'un intérêt théorique ; au delà, jusque vers 50 mètres par seconde, sont les vitesses moyennes, qu'on pourrait appeler les vitesses météorologiques ou aéronautiques. Ce sont celles des vents usuels, ce sont aussi celles des aéroplanes ou des dirigeables. Elles intéressent done au plus haut degré les ingénieurs au point de vue de la stabilité des constructions, les marins au 80 C! PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL point de vue de la navigation à voile, les aéro- nautes et les aviateurs au point de vue de la navi- gation aérienne. Au delà sont les grandes vitesses, qu'on pourrait appeler balistiques et qui intéres- sent plus spécialement les artilleurs. Or, on savail par les expériences de chute libre qu'aux vitesses faibles la loi du carré de la vitesse est sensiblement exacte. On savait aussi qu'aux vitesses moyennes les expériences de manège démontrent également l'exactitude de la même loi, mais ne peuvent pas, par elles seules, en fournir le coefficient fondamental. On savait enfin qu'aux grandes vitesses la loi cesse d'être exacte; toutes les mesures faites sur des projectiles l'ont démon- tré. Pour les vitesses moyennes, qui, en dehors de la Balistique, sont les seules à considérer dans la pratique, on se trouvait donc dans une situation assez peu satisfaisante ; la loi du carré de la vitesse, sur laquelle sont basés tous les calculs d'Aérodyna- mique, n'était pas démontrée d'une facon rigou- reuse pour les mouvements rectilignes. C'est cette lacune que M. Eiffel a voulu combler. Ses expériences portent sur des corps animés de mouvements rectilignes aux vitesses que nous avons appelées moyennes, c'est-à-dire, dans la pra- tique, comprises entre 15 et 40 mètres par seconde. Sa méthode consiste dans une chute libre verti- cale exécutée du haut de la seconde plate-forme de la tour Eiffel. Mais cette hauteur n'est pas sufli- sante pour atteindre le régime uniforme avec les vitesses qu'il se proposait d'expérimenter ; il renonca à ce moyen et se contenta d'observer d'une facon continue le mouvement varié de l’ap- pareil. Si, à un moment donné, on connait non seulement la vitesse, mais l'accélération du corps à expérimenter, le produit de la masse par cette accélération donne la force d'inertie du corps. Gette force est verticale et dirigée de bas en haut, et fait équilibre à l'ensemble des forces verticales appli- quées au même instant au Corps en expérience. Or, ces forces verticales sont au nombre de trois : le poids de l'objet, dirigé de haut en bas; la résistance de l'air cherchée, dirigée de bas en haut; et, enfin, l'effort exercé par un ressort, effort variable et mesurable, et qui prend de lui-même la valeur nécessaire pour qu'il y ait équilibre entre toutes les forces verticales. Le poids et la masse du corps, son accélération, la force du ressort sont connus : on peut donc en déduire la résistance inconnue de l'air au déplacement du corps en question. En somme, la théorie est simple, mais l'exécu- Lion est assez compliquée. Dans le volume qu'il à publié pour rendre compte de ses expériences, (l Hi Fig. 1. — Appareil pour l'étude de la résistance de l'air (élévation de l'appareil ouvert). — Ra, ressort à lames sappItnant sur les coussinels; P, plaque servant au bandage des ressorts par lés tiges boulonnées T;; p, pla- teau support; /,, tube fixe formant guide: {, tube mobile portant la plaque d'essai; G, galets de transmission du mouvement au cylindre; r,, ressort appuyant les galets sur le càble: J, joug guidé tirant sur les ressorts dyna- mométriques r; d, diapason fixé au joug et portant le style S; C, cylindre enregistreur entraîné par les galets. C! PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL 8I M. Eiffel donne une description détaillée de son | nuisibles. La principale consiste en ce que deux appareil. L'inspection des figures 1 et 2 permet | corps symétriques par rapport au cäble sont reliés de voir les dispositions prises. Le lecteur pourra | ensemble et descendent simultanément. Le mou- S'v reporter pour mieux comprendre l'exposé | vement vertical de l'obus est enregistré d'une Fig, 2. — Appareil de chute pour mesurer la résistance de l'air. — L'appareil, après la chute, est engagé sur le cône d’arrèt. que nous allons faire du principe de l'appareil. | manière continue au moyen d'un diapason d, dont Un corps de forme cylindro-conique, que, pour | une des branches porte un style S, qui trace une abréger le discours, nous appellerons l’obus, des- | courbe sur un cylindre vertical C animé d'un mou- cend d’une hauteur d'environ 20 mètres, guidé par | vement de rotation, avec une vitesse proportion- un câble vertical fixe. Des précautions minutieuses | nelle à celle de la chute. L'obus ne porte pas direc- sont prises pour éviter sur le càble des frottements | tement la surface à expérimenter; celle-ci est fixée, 82 C' PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL à une certaine distance au-dessous de sa pointe inférieure, à une tige verticale /, qui peut se dépla- cer d’une certaine quantité par rapport à l'obus. A ce mouvement relatif s'oppose un ressort Rs, qui cède d'une facon plus ou moins considérable, et qui entraine avec lui le diapason dont nous avons parlé plus haut. Si, au lieu d'être porté par un diapason, le style élait porté par une barre rigide, ou si l'on ne mettait pas le diapason en vibration, le style tracerait sur le cylindre une courbe dont les abseisses seraient proportionnelles à la hauteur de chute et dont les ordonnées seraient proportion- nelles au déplacement du ressort par rapport à l'obus. Or, ce déplacement du ressort est propor- tionnel à la tension de celui-ci. Ainsi que nous l'avons vu, cette tension est l’une des quatre forces verticales auxquelles est soumis le corps en expé- rience. La courbe ainsi tracée sur le cylindre permet donc de connaitre la tension du ressort en fonction de l’espace parcouru. Cette relation ne suffit pas pour déterminer la résistance de l'air, car la force d'inertie du corps expérimenté entre dans la formule. Il faut done connaître non seulement l’espace parcouru, mais l'accélération en chaque point. C'est ce renseigne- ment qui nous est donné par le diapason. Lors- qu'on le met en vibration, le style trace une ligne sinussoïdale de part et d'autre de la courbe dont nous venons de parler, et, comme la vitesse de vibration du diapason est connue (environ 100 vi- brations par seconde dans l'appareil de M. Eiffel), chaque ondulation correspond à un temps déter- miné. Plus les ondulations sont rapprochées, plus. la chute est lente; plus, au contraire, elles sont éloi- gnées, plus la chute est rapide. En mesurant la lon- gueur de projection horizontale des ondulations en différents points de la courbe, on peut en déduire la vitesse en chaque point, et, en comparant les vitesses successives, obtenir la valeur de l'accélé- ration. D'ailleurs, si l'accélération est indispen- sable à connaître, puisqu'elle entre dans la formule qui donne la résistance de l'air, la connaissance de la vitesse est également nécessaire pour elle- même ; car, la résistance étant proportionnelle au carré de la vitesse, il est indispensable d’avoir la valeur de celle-ci pour trouver le coefficient K lorsqu'on connail la résistance et la surface. L'appareil présente une foule de dispositions ingénieuses, notamment pour le frénage à la fin de Ja chute; nous nous bornons à les signaler. De l'examen des diagrammes tracés par le dia- pason, il fallait déduire les valeurs cherchées des vilesses, de la résistance et du coefficient. M. Eiffel à imaginé, dans ce but, une méthode de calcul fort ingénieuse, dont l'exposé forme l’objet du deuxième chapitre de son ouvrage. Des précautions minulieuses semblent avoir été prises pour éviter toutes les causes d'erreur : l'impression qui se dégage de cette lecture est la confiance qu'on peut avoir dans les résultals obtenus. Il s’y mélange peut-être même un certain sentiment d'inquiétude, car, en voyant les précau- tions nombreuses qui ont été prises pour se mettre à l'abri de causes d'erreur à la plupart desquelles le lecteur n'aurait pas pensé, il se demande si l'expérimentateur a bien songé à toutes les causes d'inexactitude possibles et s'il n'y a pas encore quelque correction dont l'utilité ait pu échapper à sa perspicacité. Pour notre compte, nous pensons que ces expériences ont été conduites avec autant de conscience et de sagacité qu'il est possible d'en apporter. Nous signalerons, en particulier, la règle excel- lente que M. Eiffel à adoptée avec une intransi- gearice dont on ne saurait trop le louer. 11 s'est abstenu de faire ses expériences quand le vent avait une valeur appréciable. Le moindre vent suf- fisait, en effet, d'après lui, pour donner de la dissy- métrie aux efforts par rapport à la verticale et provoquer ainsi des frottements sur le câble-guide. Des banderolles très légères permettaient, par leur immobilité, de constater l'absence de vent. De plus, l'inspection des diagrammes révélait les cas où il s'était produit des frottements anormaux. Telle est la raison pour laquelle M. Eiffel déclare avoir voulu opérer exclusivement en air calme. Cette raison est excellente, mais il en est encore une autre. En admettant même que le frottement sur le câble ou toute autre cause du même genre ne vienne pas fausser les résultats en cas de vent, celui-ci est toujours nuisible. La présence seule d'un courant d'air horizontal change, en effet, la direction du vent relatif, On ne pourrait donc, en pareil cas, considérer la méthode comme donnant la mesure de la résistance de l'air parallèlement au sens du mouvement de l’'obus. Un vent ayant une : vitesse égale à la vitesse de chute aurait pu doubler. la composante verticale de la résistance, et un vent dont la vitesse aurait été égale à 20 °/, de la vitesse de l’obus aurait augmenté la résistance verticale de 4°/, de sa valeur normale. I était donc, à tous égards, de la plus haute importance de s'abstenir de faire des expériences par le vent et de rejeter celles qu'on aurait pu exécuter par inadvertance. IT L'exposé des résultats obtenus fait l’objet du troisième chapitre du volume. Les expériences ont été nombreuses et variées. On a essayé des plans circulaires, carrés, rectangulaires avec un allonge- ment de 2, rectangulaires avec un allongement de 4. C! PAUL RENARD — LA RÉSISTANCE DE L'AIR ET LES EXPÉRIENCES DE M. G. EIFFEL 83 Pour les plans circulaires, on a essayé successive- ment des surfaces de 1/16, 1/8, 1/4 el 1/2 mètre carré. Il en à été de même pour les plans carrés, el pour ceux-ci on à élé jusqu'à 1 mètre carré. Pour les rectangles à faible allongement, on a essayé les surfaces de 1,8 et 1 4 de mètre carré; pour les rectangles à grand allongement, des surfaces de 1/16 et 1/8 de mètre carré. Les vitesses ont varié de 17,60 à 41,05. Pour chaque surface, la loi de la proportionnalité au carré de la vitesse a été très sensiblement vérifiée; les écarts sont tellement faibles que les ingénieurs peuvent absolument les négliger dans la pratique. Les valeurs trouvées pour le coefficient de résis- lance oscillent entre 0,065 et 0,082; ce dernier chiffre est exceplionnel et la valeur moyenne géné- rale est de 0,074. Ce chiffre est notablement infé- rieur à la plupart de ceux qui avaient été antérieu- rement établis. Pour une surface de forme déterminée, le coeffi- cient augmente légèrement avec les dimensions. C'est ainsi que, pour un plan carré de 1,16 de mètre carré de surface, la valeur du coefficient est de 0,070, et que, pour une surface semblable de | mètre carré, le coefficient atteint 0,079. Une pro- gression analogue se constate avec toutes les formes. Le coefficient de résistance, à surface égale, est plus faible pour un cercle que pour un carré, pour un carré que pour un rectangle à faible allonge- ment, et pour le rectangle à faible allongement que pour celui qui est très allongé. M. Eiffel à fait une autre série d'expériences, qui peuvent avoir un réel intérêt pour les applications pratiques. Il a mesuré, en particulier, la résistance au mouvement d'un treillis, et il a constaté que cette résistance est plus grande, non pas que celle de la surface pleine si le treillis n'avait pas été évidé, mais plus grande que pour une surface con- linue équivalente aux pleins laissés dans le treillis. Il à également cherché si des plans voisins dis- posés sensiblement au même niveau influent les uns sur les autres; cette influence à été reconnue négligeable. Il à ensuite étudié la résistance de l'air sur des plans minces égaux et superposés avec un certain intervalle. Il à trouvé que, dans ce cas, la résis- lance diminue sensiblement et que cette diminu- tion est plus considérable lorsque l'intervalle des deux surfaces augmente. C'est évidemment faux, si la dernière surface est assez éloignée pour être soustraite à l'influence de la première; mais, jus- qu'à un écartement égal à une fois et demie le dia- mètre des cereles expérimentés, la diminution de résistance a été vérifiée. M. Eiffel à fait ensuite tomber non plus des cercles minces, mais des cylindres dont les bases élaient espacées comme les plans superposés dans l'expérience précédente, et qui se trouvaient reliées l’une à l'autre par une surface cylindrique. IL est remarquable que, dans ce cas, la résistance, pour un écartement des bases égal à une fois et demie le diamètre, s'est trouvée à peu près la mèm que dans le cas des surfaces superposées; ce qui semble prouver qu'entre ces deux surfaces se trou- vait une gaine d'air immobile et que l'ensemble s comportait à peu près comme un cylindre solide. Enfin, M. Eiffel à étudié, toujours avec la même méthode, la résistance sur des cônes et des hémi- sphères creux. Il n'a pas étudié la résistance de la sphère ni des corps fusiformes analogues aux ballons dirigeables. Pour terminer ses expériences, il à abordé une étude des plus importantes, celle de l’effort exercé sur des plans se déplacant obliquement par rap- port à l'air. Mais, comme son appareil exigeait que la résistance de l'air fût toujours verticale, pour éviter des frottements latéraux, il étudia des plans jumellés et symétriquement inclinés, de manière que la résultante des efforts sur ces deux surfaces fût verticale. La question qu'il s'agissait d’élucider dans ce cas était de trouver le rapport entre l'effort. normal exercé sur un plan se mouvant oblique- ment par rapport à l'air et l'effort exercé sur le plan de mème surface dans le cas du mouvement orthogonal. Si l'on appelle R; la résistance nor- male à un plan qui se meut en faisant un angle 7 avec la direction du mouvement, et R,, celle d'un plan qui se meut orthogonalement, le rapport FR 0 est donné par une loi expérimentale qu'on appelle la loi de la résistance de l'air aux plans obliques. Celte loi est de la plus haute importance pour toutes les questions de propulseurs et de susten- taleurs aériens; un grand nombre d'expérimenta- teurs ont cherché à l'exprimer par des formules, et M. Eiffel s'est proposé le mème but dans ses dernières expériences. III Après avoir résumé les résullats obtenus, M. Eiffel compare les valeurs qu'il à trouvées pour la résistance de l'air avec celles qui avaient été données antérieurement. Les plus anciennes expériences connues, citées par lui, sont dues à Smeaton el remontent à 1782. Le coefficient trouvé par cet expérimentateur était égal à 0,122. En 1786, Hutton trouva 0,081. Puis une suite d'expériences donnèrent des chiffres supérieurs à 0,100 et atteignant 0,125, si bien qu'il y à une trentaine d'années on considérait ce chiffre 81 CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE comme le plus digne de foi. Mais des expériences plus récentes ont abaissé cette valeur : Langley donnait 0,081, l'abbé Le Dantec 0,080, MM. Caïlletet et Colardeau 0,070. La valeur moyenne établie par M. Eiffel est de 0,074. Il est certain que les expé- riences modernes méritent plus de confiance que celles d'autrefois; on doit donc admettre que le coefficient de la résistance de l'air est compris entre 0,070 et 0,080 et que le chiffre de M. Eiffel doit se rapprocher considérablement de sa véritable valeur. Il est à noter que l'expérience de Hutton, qui était seule, parmi les anciennes, à donner un chiffre inférieur à 0,100, et qui, à ce titre, était géné- valement considérée comme inexacte, se trouvait, au contraire, la plus rapprochée de la vérité. Nous avons signalé, au cours de cet article, l'im- portance de la loi de la résistance des plans obli- ques, c'est-à-dire de la loi suivant laquelle varie le i R PE : rapport D R; élant la résistance normale à un plan 90 rencontré par un courant d'air faisant avec sa sur- face un angle 7, et R,, étant la valeur particulière de cette résistance lorsque l'angle d'attaque est de 90 degrés, c’est-à-dire lorsque le plan est frappé orthogonalement par le courant d’air. A la fin du troisième chapitre de son ouvrage, M. Eiffel examine les formules qui ont été proposées pour représenter celte loi. Il en donne lui-même une qui à évidemment le mérite de la simplicité. < : He s LITE : Pl D'après lui, jusqu'à 30 degrés, R, est égal à 30° °b R; au delà de 30 degrés, p ‘st constant et égal à 1. Cette formule discontinue ne peut évidemment être exacte, el on ne doit la considérer que comme un moyen mnémotechnique. Il faut, toutefois, re- marquer que, au-dessous de 20 °/, et au delà de 50, elle se rapproche sensiblement des formules consi- dérées comme les meilleures, en particulier de celles du colonel Renard, de Duchemin, de Louvrié, de M. Goupil et de Joessel. DV En résumé, M. Eiffel, en exécutant sesexpériences et en les publiant d'une manière aussi complète, a rendu un véritable service à tous ceux qui, à un titre quelconque, s'intéressentaux questions d’Aéro- dynamique. Il a donné un chiffre nouveau, etparais- sant le plus rapproché de la vérité, du coefficient de la résistance de l'air; il a imaginé une méthode d'expérience et des procédés de calculs intéressants ; il à créé un instrument de travail, grâce auquel lui- mème ou d'autres ingénieurs pourront poursuivre ces recherches. Tous ceux qui ont à compter avec le vent, et en particulier tous les adeptes de l’Aéro- nautique, ne pourront que lui en être reconnais- sants. Commandant Paul Renard. LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE L'immense nappe liquide qui recouvre plus des trois quarts de la surface du Globe terrestre ne demeure jamais à l'état de repos ; elle présente des oscillations rythmiques, dues à l’action combinée de la Lune et du Soleil et qui constituent le phéno- mène des marées ; de plus, sa surface est fréquem- ment couverte de rides plus ou moins fortes (houle) produites par le vent; en outre, on observe dans sa masse des mouvements plus ou moins étendus, permanents ou temporaires, orientés dans une : ce sont les courants marins, que l’on peut considérer comme de vérilables fleuves océaniques. Parmi eux, les uns selocalisent direction déterminée à la surface, les autres se maintiennent à diverses profondeurs. Les courants superficiels sont, de beaucoup, ceux sur lesquels on possède le plus de renseigne- ments. Is ont une importance spéciale pour la navi- galion et, de plus, l'étude en est beaucoup plus accessible que celle des courants de profondeur. Il n'en est, cependant, qu'un petit nombre qui aient | élé l’objet de recherches approfondies; parmi ceux- ci, se place, en premier lieu, le Gulf Stream. En 1885, les ingénieurs hydrographes américains firent une longue et instructive série de mesures dans la partie de ce grand courant qui traverse le détroit de Floride. | Le: La plupart des mesures relatives aux courants superficiels n'ont, d’ailleurs, été faites qu'au voisi- nage des côtes, en eau peu profonde, généralement sur des bateaux-feu ou phares flottants. Jusqu'en ces dernières années, on n'avait tenté aucune mesure au large, en pleine mer, pas plus pour les courants de surface que pour ceux de profondeur. L'étude de ces courants, à laquelle se lient étroi- tement les mesures de température, de salinité et des gaz dissous dans l’eau de mer, présente cepen- dant un haut intérêt à divers points de vue. Beaucoup de ces « fleuves océaniques, dont les caracteristiques physiques ne sont pas lesmêmes que celles du milieu ambiant, peuvent, lorsqu'ils ne sont pas à une trop grande profondeur, avoir une faune et une flore CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE 85 EEE —_—"—] "a éééLEéééLéZéu différentes de celles des eaux qui lesentourent. Les animaux prédateurs doivent rechercher avidement ceux qui sont le plus riches en organismes variés : il est vraisemblable de penser que les migrations des Poissons ne sont pas sans relation avec ces cours d'eau nourriciers. A l'étude des courants se rattachent un grand nombre de questions biologiques des plus impor- tantes et des plus difficiles à résoudre actuellement, comme, par exemple : les relations de nutrition entre la faune de la surface (Plankton) et celle qui vit sur le fond (Beuthon de Hæckel)'; les migrations dans le sens vertical des animaux qui nagent à des profondeurs plus ou moins considérables, à une certaine distance du fond (animaux bathypéla- giques); l'accumulation périodique d'organismes pélagiques en certaines régions, etc. En un mot, la connaissance des courants est indispensable pour comprendre la circulation de la matière organique à travers l'océan, pour concevoir ce que les Alle- mands appellent la « Stofwechsel ». Lorsqu'on sera mieux renseigné sur les courants de-profondeur, peut-être pourra-t-on expliquer cer- taines particularités faunistiques, aujourd'hui en- core très énigmatiques, comme semble l'indiquer le fait suivant : Dans la partie centrale de la mer du Nord, au nord du Doggerbank, à des profondeurs comprises entre 50 el 100 mètres environ, le fond est couvert par une couche d’eau tranquille à tem- pérature relativement basse. En 1904, B. Helland- Hansen a découvert l'existence, aulour de cette région, au voisinage du fond, d’un courant d’eau atlantique. Plusieurs formes caractéristiques, entre autres des Crustacés décapodes qui existent dans la mer du Nord, manquent dans cette région cir- conscrite par un courant annulaire, sans qu'on puisse l'expliquer par une différence insignifiante de température el de profondeur. Appellüf à cher- ché à interpréter ce fait en faisant observer que les larves comme les adultes de ces formes, qui, nor- malement, vivent dans les eaux de l'Atlantique, peuvent également pénétrer dans les eaux du cou- rant, sans atteindre la région centrale que ce dernier enveloppe et dont les conditions physiques sont dif- férentes. Quoi qu'il en soit, cet exemple montre l'influence que peuvent avoir les courants sur la répartition des espèces, à l’intérieur d’une aire limi- lée. La Géologie et la Paléontologie ont tout à gagner aussi à une étude approfondie des courants. On sait combien on a eu souvent recours à l'hypothèse de ! Dans ses P/ankton Studien (1891), Hæckel a signalé les courants marins comme étant la plus importante de toutes les causes qui influent sur la répartition du Plankton; il a rappelé à ce sujet les premières observations de Carpenter Wyville-Thomson, J. Murray, C. Vogt, etc. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. courants chauds ou de courants froids pour expli- quer certaines singularités de faunes fossiles qui, dans l'état actuel de nos connaissances, paraissaient êlre des anomalies. La technique relative aux recherches d'Océano- graphie physique s'est singulièrement perfection- née depuis l'établissement du « Conseil permanent international pour l'exploration de la mer » et du « Laboratoire central international » à Christiania. Les recherches approfondies faites à ce point de vue ont conduit à systématiserles méthodes usitées maintenant, de facon à répondre à tousles desiderata, en ce qui concerne la température, la salinité, les gaz dissous et la mesure des courants. Pour l'étude des courants, — qui domine tout, — l'un des Stream-gauges les plus employés est l’'Eckman’s propeller current-meter, qui à été encore perfectionné par l'illustre naturaliste explo- rateur Fridtjof Nansen, spécialisé aujourd’hui dans les travaux d'Océanographie. Un grand avantage de cet appareil est qu'il donne des indications con- cernant à la fois la vitesse et la direction du courant. Des expériences précises de laboratoire permettent de déterminer préalablement la vitesse y du cou- rant, exprimée en centimètres par seconde, et le nombre », enregistré automatiquement, des révolu- tions du propulseur par minute. Celte relation est établie et vérifiée pour les vitesses comprises entre les deux limites extrêmes observées, l’une infé- rieure, l’autre supérieure. L'instrument indique la direction du courant pour 50 révolutions du pro- pulseur”. Ces mesures de courants présentent, d’ailleurs, de très grandes difficultés. L'une des principales est d'obtenir un point fixe. Nansen et Eckman recommandent d’ancrer l'appareil et de le tenir flottant au moyen d'une bouée, l'ancre étant reliée au steamer. Mais on a remarqué que toute con- nexion directe entre le bateau et l'appareil imprime à ce dernier tant de secousses qu'on ne peut avoir aucune confiance dans les mesures. Bien des tenta- tives ont été faites avec le bateau à l'ancre; si les profondeurs sont faibles, l'ancrage peut se faire en avant et en arrière. Mais il n'en est plus ainsi lorsque les profondeurs sont considérables. Avec ‘ I] existe plusieurs excellents modèles d'instruments mesureurs des courants. Celui de OU. Pettersson, à suspen- sion bifilaire, a été construit pour servir surtout à bord des bateaux-feu. R. J. Vitting en a construit un autre type avec enregistreur élect ique. Il offre le grand avantage de per- mettre la lecture des vitesses et des directions continuelle- ment sur le pont; mais, comme il est aussi à suspension bifilaire, que le câble électrique auquel il est attaché a un diamètre de 9 millimètres. il ne peut être utilisé, comme le précédent, qu'à des profondeurs très modérées. 86 CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE une seule ancre, les oscillations du bateau peuvent devenir relativement trop grandes pour que les mesures soient suffisamment précises, surtout iorsqu'il s'agit de faibles courants. Une autre source de grosses difficultés réside dans l'influence encore très insuffisamment connue de la marée sur les courants. Comme l'a fait remar- quer très judicieusement Fr. Nansen, des séries discontinues d'observations de courants prises en différentes stations sont de peu de valeur, parce qu'on ne peut apprécier actuellement la grandeur des variations diurnes dues à la marée; elles peu- vent même conduire à des résultats tout à fait erronés sur la distribution horizontale et verticale des courants dans une certaine étendue de mer. Si, par exemple, à une station déterminée, on mesure les courants de surface au moment où ils atteignent leur minimum de vitesse, tandis que les courants de profondeur le seront quelques heures plus tard, quand ils approchent de leur maximum ou ont changé de direction, on se fera une idée très inexacte de la distribution verticale des courants. Si, à une certaine station, les courants de profon- deur sont mesurés près de leur maximum, tandis qu'à une autre stalion ils le sont à un autre moment du jour, près de leur minimum, lorsqu'ils ont changé de direction, on aura un tableau erroné de leur distribution horizontale. Il est donc nécessaire actuellement de faire des séries continues d'observations à différentes pro- fondeurs, au moins durant vingt-quatre heures à chaque station, afin de déterminer les variations diurnes des courants durant le jour, à toutes les profondeurs, dans les diverses parties de la mer. Lorsque de telles séries d'observations auront été prises aux grandes marées, aux mortes eaux et aux différentes saisons, on pourra déterminer l’action de la marée et ensuite la direction principale actuelle, ainsi que la vitesse moyenne du courant durant chaque période diurne. En portant les temps en abscisses et les vitesses en ordonnées, on obtient une représentation gra- phique des variations de la vitesse d'heure en heure. On peut, de même, tracer le graphique des varia- lions de la direction dans l'intervalle d'un jour. Les courants constants en direction sont représen- tés par des lignes horizontales; les courants de marée, en haute mer, sont caractérisés par des changements constants de direction. En ina et en juin 1904, B.. Helland-Hansen entre- prit une série de mesures de courants, faites aussi rigoureusement que possible, non seulement dans la mer du Nord ‘, mais aussi dans les fjords ; des tra- vaux du même ordre ont été exécutés dans les fjords en 1906. Depuis, des observations nombreuses ont été recueillies et étudiées par le Professeur Grund. Helland-Hansen à étudié au point de vue océano- graphique la partie supérieure du Hjürundfjord et la partie moyenne du Sulefjord (ces deux fjords sont situés au nord du 62° degré, un peu au sud d'Aalesund). Dans le dernier, il constata qu'à la profondeur de 50 mètres, dans les mouvements dus à la marée, la vitesse présente un minimum, el il est digne de remarque que le minimum de tem- pérature a constamment été trouvé dans les fjords norvégiens en élé, à une profondeur comprise entre 20 et 50 mètres. À 100 mètres et à 300 mètres de la surface, les mouvements, sans être rapides, étaient constamment plus forts qu'à 50 mètres. L'eau du fond du fjord était certainement d'origine atlantique, avec une salinité dépassant 35°/,. Les recherches du Aichaël Sars dans l'été de 1905 ont montré une différence fondamentale, dans la configuration du sol, entre le Hjôrundfjord et la plupart des fjords de la Norvège occidentale, et une différence physique des couches les plus profondes en rapport avec la précédente. Tandis que l'accès libre de l’eau de l'Atlantique est empêché par un ou plusieurs seuils pendant la plus grande partie de l'année dans les fjords du Westland en général, dans leur partie profonde spécialement, cette eau pénètre avec la plus grande facilité en tout temps jusqu’au fond du Hjôrundfjord. 11 résulte de là, entre les deux catégories de fjords, des différences d'ordre physique qui retentissent sur leur faune. Ainsi, par exemple, le Pandalus leptoceros Smith var. Bonnieri Caull. a été recueilli en abondance par Appellüf sur le plateau septentrional de la mer du Nord et dans le Hjürundfjord, mais non dans les autres fjords ; en revanche, dans ceux-ci, vit le Pandalus borealis Kr., qu'on ne retrouve pas avec le précédent ni dans la mer du Nord, ni dans le Hjürundfjord. Il semble que les deux espèces doivent, dans la règle, vivre dans des conditions physiques différentes, bien qu'on les trouve dans les mêmes régions marines. Des mesures sur le plateau continental, sur la côte du Sündmüre et au voisinage du talus conti- nental ont été également faites par B. Helland- Hansen. L'éminent océanographe reconnut l'exis- tence de deux courants sur le bane : un dans les 20 mètres supérieurs, venant de la terre ferme ; 1 Dans les cartes allemandes, on distingue lo la Nordsee, comptise entre la Grande-Bretagne, la Belgique, la Hollande, l'Allemagne, le Danemark et le sud de la Nor- vège: 2 la Nordmeer, située au nord des Färô et des Shetland, entre l'Islande et la Norvège, au sud de l'Océan Glacial arctique, CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE 87 Fautre, plus profond, se dirigeant vers celle-ci. Dans le courant de surface, il y avait un fort maxi- mum de vitesse, le matin du 7° juillet, de bonne heure ; dans celui de fond, il y avait un maximum également marqué six ou sept heures plus tard. Au voisinage de la surface, on observait des fluc- tualions considérables, qui, parfois, prenaient le caractère d'un courant de marée. Le long du talus continental, il nota, à 75 mètres de profondeur, l'indication d'un minimum de tem- pérature qui, comme dans les fjords, coïncide avec un minimum de vitesse. À une profondeur plus grande, la vitesse croit ; elle présente une moyenne maxima à 200 mètres environ, soit 15 centimètres par seconde. La vitesse moyenne n'était pas très élevée au fond; cependant, elle devenait assez grande à certains moments; en un cas, on à mesuré plus de 21 centimètres par seconde. Cette vitesse élait suffisante pour balayer sur le fond toutes les petites particules comme les grains de sable ; le fond se montrait, en effet, lormé par le roc sulide. Des séries d'observations montrèrent que le cou- rant à la surface est moindre qu'à quelques centi- mètres au dessous de celle-ci : le maximum se trouve réalisé à 5 mètres environ de la surface, avec centimètres seconde Lorsqu'il étudiait le Gulf Stream dans le délroit de Floride, J. E. Pillsbury montra qu'il y a une période journalière en ce qui concerne les vitesses. Il paraît en être de mème sur le bord du plateau continental, d'après les mesures de Helland-Han- sen, au moins jusqu'à 100 mètres de profondeur. Dans les couches plusprofondes, de 100 à200 mètres, la période, d'après le même océanographe, serait deux fois aussi grande, c'est-à-dire qu'il y aurait un intervalle de vingt-quatre heures environ entre le maximum et le minimum suivant. Mais de nou- velles recherches sont nécessaires pour élucider ce point. Dans la branche européenne du Gulf Stream, de pareilles mesures directes n'ont jamais été faites précédemment. Dans la mer du Nord, Helland-Hansen fit des mesures sur le Ling Bank, à Wester-Holla et. au Great Fisher Bank. À la première station, l'océanographe norvégien observa un courant de marée typique : les courbes de vitesse montrent, en effet, une course presque idéale, avec maxima et minima alternatifs bien définis, un maximum et le minimum suivant étant séparés par un intervalle de six heures environ. Wester-Holla est aussi une région typique de courants de marée, avec des conditions beaucoup plus compliquées qu'au Ling Bank. Dans les 20 mètres à partir de la surface, l'eau a une faible une vitesse de 26 salinité, à cause de l'apport d’eau douce ‘des côtes voisines ; de 25 à 75 mètres est une couche mixte, avec une salinité comprise entre 34 et 35 °/,,; au- dessous de 100 mètres, c'est l’eau salee de l'Atlan- tique. Sur le Great Fisher Bank, Helland-Hansen nota encore l'existence d’un courant de marée typique. À 2 mètres de profondeur, la vitesse élait d'environ 42 centimètres par seconde ; entre 2 et > mètres, la vitesse était beaucoup plus grande et le courant résultant avait une tendance à aller vers l’est. Le D' Damas, collaborateur de B. Helland-Han- sen, fit, les 30 et 31 juillet, des mesures pendant vingt-deux heures consécutives à Hirlshall's Light, sur le côté danois du Skagerack. Dans les couches supérieures, jusqu'à 20-30 mètres, Damas constata l'existence d'un courant à direction constante, mais l’absence de tout courant de marée, A 2 mètres, le courant avait une vitesse de 45 centimètr. s par se- conde et la direclion était S, 14° W. (vraie), Dans les couches profondes, le courant allait plutôt vers l'Est et suivait la côte danoise ; les vitesses étaient considérables jusqu'à une profondeur de 15-20 mè- tres. Au-dessous de 20 mètres, la vilesse décroissait rapidement, et à 75-90 mètres, les expérimentateurs élaient incapables de définir le courant. Ces résul- tats sont en relation directe avec les conditions de salinité : l’eau atlantique, avec plus de 35 °/,, de salinité, fut trouvée à une profondeur d'environ 0 mètres, tandis que les couches superficielles étaient fortement additionnées d'eau douce prove- nant des terres voisines ; de 20 à 50 mètres, c'était l'eau de la mer du Nord, avec une salinité comprise entre 34 et 35 °/60. Au large de Jœæderen, près de la terre ferme, B, Helland-Hansen constata que, dans les couches supérieures, jusqu'à 100 mètres environ, il y avait un courant assez fort allant du sud au nord et un courant faible près du fond, allant dans une direc- tion opposée, III Les observations faites jusqu'ici, malgré leur nombre relativement restreint, montrent, d'après Helland-Hansen, qu'il est possible d'étudier avec une précision satisfaisante le dynamical phenomena of the Sea, même là où la profondeur est considé- rable. Les stations étudiées par Helland-Hansen appar- tiennent à plusieurs groupes. Quelques-unes d'entré elles sont situées dans des aires où les courants réguliers de marée prédominent complètement : c'est le cas, en particulier, du Ling Bank; dans quelques autres, les courants de marée sont de très faible importance comparativement aux autres mouvements, par exemple dans les couches supé- 38 CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE rieures des stations étudiées dans le Skagerack. Les variations trouvées dans la mer norvégienne ne montrent pas le type régulier semi-diurne des marées ; il est difficile actuellement de dire si ces variations sont dues à une période diurne des marées ou si elles n'ont aucune connexion avec ce phénomène. Entre ces deux groupes, il existe et on a constaté plusieurs formes de transi- lion. Même dans les aires où le courant est à peine perceptible, il est encore possible de le tracer et de suivre la direction générale de la masse tout entière de l’eau. Les courants de marée, dans les couches profondes, peuvent être déterminés, même lorsqu'ils sont très faibles. Dans beaucoup de cas, la direction et la force des courants changent à de très courtes périodes et une simple observation à un moment donné ne suffit pas pour donner une idée claire de leur | direction générale et de leur vitesse moyenne. L'étude générale de ces mouvements de tourbillon et des phénomènes du même ordre sera entreprise, il faut l’espérer, dans un avenir prochain. Il semble que l’'Océanographie entre dans une nouvelle phase, grâce aux perfectionnements récemment réalisés dans la technique des recherches. Les Puissances riveraines de la mer du Nord* ont fondé en 1902 un Comité international de recherches océanographiques; un Laboratoire central ful établi à Christiania. La France est restée en dehors de ce groupement scientifique. Aussi, n'y a-t-il pas lieu de s'étonner qu'au point de vue océanogra- phique, les côtes françaises comptent parmi les plus mal connues de l'Europe occidentale. Les rares données que nous possédons à ce sujet ont été recueillies en grande partie au cours des croisières déjà anciennes du Prince de Monaco et de celles de la Société océanographique du Golfe de Gascogne. Dans ces études de l'Océan, la Norvège”, dont la côteestsiprofondémentdécoupée, s’est faitune place à part. Le Michaël Sars, admirablement construit etaménagé pour toutes les recherches relatives aux pêcheries, le mieux outillé des navires de ce genre, peut-être, qui soitau monde actuellement, avec son vaste assortiment de chaluts à mailles fines et de filets pélagiques, a permis au D' Damas de recueillir un ensemble imposant de faits relatifs à la biologie 1 Grâce aux recherches faites de toutes parts, la circula- tion des eaux à l'intérieur de la mer du Nord est aujour- d'hui bien connue dans ses traits généraux, qui ont été résumés récemment par M. Martin Knudsen, à qui on doit tant de travaux d'Océanographie (ManriN Knupsex : Some Remarks about the Currents in the North Sea and adjacent Waters. Publications de circonstance, n° 39, 1907, Conseil permanent international pour l'exploration de la mer). ? Les naturalistes scandinaves (P. TT. Cleve, Hjort,. Gran, etc.) ont, avec l'école de Hensen à Kiel, fourni une large céntribution à l'étude du Plankton en général. des Poissons; grâce à son outillage scientifique si complet, le D' Helland-Hansen à pu rassembler un faisceau de documents concernant l’océanographie des côles scandinaves, des fjords et de la mer du Nord. Les recherches d'ordre purement technique et celles de caractère pratique sont ici étroitement associées; tout en faisant des mesures précises de vitesse et de direction des courants, on a décou- vert, au cours d'une des croisières récentes du Michaël Sars, un véritable banc d'Halibuts, qui ali- mente en partie le marché de poissons de Bergen, dont l'importance considérable est bien connue. Les naturalistes de Bergen, ville où travaillent ces deux océanographes, ont organisé depuis plusieurs années, en août et en septembre, des cours de « Meeresforschung » (études, recherches relatives à la Mer) spécialement appliqués à l'océan norvé- gien qu'ils connaissent si bien, pour l'avoir ex- ploré eux-mêmes depuis de longues années, Cel enseignement est donné par : MM. le D' Appellôf, dont le domaine est l'Océanographie biologique el qui insisite particulièrement dans ses confé- rences sur l'importance de l'étude des conditions géographiques et physiques de l'habitat pour les zoologistes; le D' B. Helland-Hansen, qui traite les questions d'Océanographie physique; le D' Damas, qui s'occupe spécialement du Plankton animal et en même temps des questions de pêcheries; le D' Jürgensen, qui expose la composition du Plank- ton végétal; enfin le D' Kolderup, qui complète cet ensemble d'une facon très heureuse, car il retrace les principales étapes de la formation des fjords en s'attachant particulièrement à l’histoire des périodes glaciaire et postglaciaire. Des excursions métho- diquement organisées, dirigées par le D' Appellüf assisté du D'J. Grieg, permettent d'explorer le dis- trict de Bergen depuis la poussière d'écueils (Skjærgaard) du littoral jusqu'à l'intérieur des fjords. Ces cours sont faits en anglais ou en allemand, le plus généralement en cette dernière langue, à cause de la prédominance de l'élément allemand dans l'auditoire‘. IIS sont fort instructifs, parce qu'ils sont faits par des naturalistes très compétents qui fondent leur enseignement sur leurs travaux - personnels. Pour être admis à suivre les cours de « Meeres- forschung », il faut verser au préalable la somme de 150 couronnes scandinaves (210 francs environ). Aucune autre condition n’est exigée des auditeurs. 1 Parmi les auditeurs des cours de « Meeresforschung » de Bergen en 1908, on comptait : 7 Allemands, 1 Anglaise, 5 Autrichiens, À Français, 1 Japonais, 2 Norvégiens et 1 Suisse, soit en tout 18 auditeurs; il ne parait guère pos- sible, en l'état actuel des choses, d'en admettre un plus grand normbre. nt té. ni Ge CH. GRAVIER — LES RÉCENTES RECHERCHES OCÉANOGRAPHIQUES EN NORVÈGE 39 Chaque semaine, un jour entier est consacré à une excursion en mer. À cause de la faible amplitude des marées et de la nature des côtes dans ces régions du nord de l'Europe, le champ d'exploration, à mer basse, est assez restreint. Les zoologistes de Bergen y suppléent par l'emploi d'une série d'instruments spéciaux, à long manche, qui leur permettent de racler la surface des rochers, d'en détacher les Algues et surtout les Laminaires et de ramener ainsi à la surface une foule d'organismes. Les Polypes hydraires semblent être ici dans leur milieu optimum. Dans les fissures des rochers, il n’est pas rare d'observer de magnifiques exemplaires géants de Zubularia indivisa L., couvrant des surfaces de plusieurs mètres carrés; les larges frondes de Laminaria hyperborea (Gunner) Foslie sont fré- quemment revêtues, dans toute leur étendue, de colonnes de Campanulaires. Des dragages nom- breux, pratiqués dans les conditions les plus variées au point de vue de la profondeur, de la nature du fond, de la force et dela direction des courants, etc., procurent d’abondants matériaux d'étude pour les jours suivants. Le lendemain de l’excursion, le D: Appellüf dresse l'inventaire de la récolte et fait connaître très exactement les caractéristiques phy- siques et biologiques des régions visitées. Outre les sorties en mer réservées aux opérations d'Océano- graphie physique, on fait encore, de temps en temps, des pêches planktoniques dans les fjords et leurs dépendances qui pénètrent si profondément à l'intérieur de la Norvège. En dehors des matériaux provenant des exeur- sions en mer, les auditeurs peuvent utiliser un grand nombre de spécimens du Muséum de Bergen, si riche en formes boréales; des tables de détermi- nation très claires leur permettent de trouver eux- mêmes assez aisément les noms des organismes qu'ils étudient; de plus, les principaux ouvrages se rapportant à la faune et à la flore marines aretiques sont mis constamment à leur entière dis- position. Le plus grand libéralisme règne ici; cha- cun se spécialise à son gré. On peut même se cons- tituer une collection en conservant les exemplaires recueillis aux diverses stations explorées. L'auteur de ces lignes a pu ainsi rapporter de nombreux spécimens de la riche faune norvégienne, dont beaucoup d'espèces, surtout parmi celles de faibles dimensions, n'étaient pas représentées dans les col- lections du Muséum d'Histoire naturelle de Paris. Les conférences ont lieu tous les jours, en dehors du temps réservé aux excursions. Le Laboratoire esl ouvert aux travailleurs de 9 heures du matin à 7 heures du soir. La meilleure confraternité scien- tifique est la règle dans ce milieu cosmopolite; tout le monde se livre avec ardeur et avec joie à ces études océanographiques, poursuivies avec une per- sévérance exemplaire dans les pays scandinaves. Il est à souhaiter, au moment où cet ordre de recherches est si en honneur partout à l'Etranger, que la France ne demeure pas plus longtemps indifférente à des études qui ouvrent de nouvelles voies aux biologistes et qui peuvent rendre des services non seulement à la science pure, mais aussi aux pêcheries. En tout cas, comme Cligny l’a dit dans un article très documenté sur les rapports entre l'Océanographie et les pêches maritimes”, « dans le champ fertile de la mer, on ne fouillera pas sans profit ». Indépendamment de l’Institut de Kielet de la Sta- tion biologique d'Helgoland, spécialement affectée à l'étude des pêcheries, l'Allemagne vient de fonder à Berlin un nouvel « Institut für Meereskunde », annexé à l'Université, avec un enseignement com- plet de l'Océanographie. Des exercices pratiques doivent être faits chaque année sur mer, pour fami- liariser les étudiants avec le maniement des appa- reils employés dans les recherches océanogra- phiques. Avec son Service scientifique des pêches, aujour- d’hui complètement organisé, avec son cadre de jeunes naturalistes habiles et dévoués, versés dans les questions de Biologie marine, la France peut et doit se mettre à la hauteur des autres nations pour l'exploration technique de l'Océan. Ch. Gravier, Docteur ès sciences. ! A. Cuienx : L'Océanographie et les pêches maritimes. Revue du Mois, t. 11, 1906, p. 208-230. 90 = — —. = BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Laisant (C.-A), Examinateur d'admission à l'Ecole Polytechnique, et Perrin (Elie), Professeur de Ma- thématiques à l'Evole J.-B. Say. — Cours d’Arith- métique (CLassE DE GINQUIÈME B). — 1 vo/. i1n-16 de 248 pages avec li. (Prix cartonné : 2 fr.) H. Paulin et Cie, éditeurs, 1, rue Hautefeur!le. Paris, 1909. Les lecteurs de la Æevue connaissent le sens péda- gogique de notre distingué collaborateur M. C. A. Lai- Sant, si bien mis en lumière dans un de ses derniers ouvrages: L'Iuitialion mathématique. On le retrouvera tout entier dans ce Cours d'Arithmétique, rédigé en collaboration avec M. Em. Perrin el conforme à l’es- prit des programmes de 1905. Signalons comme nou- velle la revision du système métrique faite en confor- mité avec les idées exprimées dans les Conférences cénérales du Bureau international des Poids et Me- sures. Lefebvre (L. Charles), Ancien élève de l'Ecole Poly- technique, Actuarre. — Notions fondamentales de la Théorie des Probabilités. — 1 vol. gr. in-8° de 471 pages. (Prix : 10 fr.) L. Dulac, éditeur. Paris, 1909. M. Lefebvre a résumé dans ce volume les lecons de Probabilités qu’il professe aux jeunes gens se prépa- rant à l’actuariat et aux postes de calculateurs des Compagnies d’Assurances. Ce Cours s'adresse à un public ne possédant que des notions de Mathématiques spéciales, mais ayant fait, en général, de bonnes études secondaires; aussi le livre a-t-il été rédigé en tenant compte de ces connaissances, supposées acquises. et il sera, par suite, un excellent guide pour les candidats aux grandes Ecoles qui n'auraient pas le temps de lire les traités classiques. Après un rappel sommaire de l'Analyse combina- toire, l'auteur définit la probabilité mathématique, puis l'espérance mathématique et aborde le théorème de Bernoulli et la probabilité des causes; un chapitre est consacré au problème de la ruine des joueurs. Le livre se termine par un exposé de la Théorie des erreurs d'observation et des annexes contenant la solu- tion de problèmes curieux et la démonstration de Gauss afférente à la méthode des moindres carrés. En ce qui concerne l'espérance mathématique, M. Lefebvre parait faire grief à Poisson d'introduire la valeur de cette espérance dans les bilans; cette idée est-elle si inexacte? Ne voyons-nous pas tous les jours des gens très sensés payer en bonnes espèces la valeur aléatoire d'un lot, et le prix en Bourse des obligations remboursables par Üirage au sort ne comprend-il pas une nue propriété qui n’est autre chose que l’espé- rance mathématique du remboursement escompté à un taux d'intérêt choisi ? On peut aussi regretter que le problème de la ruine des joueurs soit traité un peu sommairement, et que la théorie du plein, si importante en assurance, n’ait pas été exposée, car elle donne lieu à des applications pra- tiques fort intéressantes. Mais ces remarques ne sont que de petites critiques, prouvant l'intérét que nous avons pris à l’analyse de ce livre, qui est bien composé et sera fort utile aux jeunes gens. Espérons, cependant, que les générations futures suivront les méthodes expérimentales et qu'elles apprendront les calculs des probabilités en commen- cant par le théorème de Bernoulli, considéré comme résullat d'expérience : c'est la méthode exposée avec ET INDEX tant de netteté dans un livre de probabilités précé- demment analysé *. Entin, un mot sur l'édition : M. Dulac y a consacré tous ses soins, et les dispositions typographiques sont heureusement choisies, ce qui aide à rendre la lecture très agréable, le style étant fort alerte, malgré l'ari- dité du sujet. A. BARRIOL, L Actuaire-Conseil, Directeur de l'Institut des Finances et des Assurances. Kersten (C.), Ingénieur-architecte, Professeur à l'Evole royale des Travaux publics de Berlin. — La Construction en Béton armé. Guide théorique et pratique (Meuxième yartie : Application à la construction en élévation et en sous-sol). Traduit d'après la 3° edition allemande par M. P. Porxsienon. — 1 vol. in-8 de 280 pages avec 407 figures. (Prix : 9 fr.) Gauthrer- Villars, éditeur. Paris, 1909. Les applications du ciment ou béton armé se ré- pandentetse diversifient de plus en plus; aucune espèce de construction n’y échappe; on commence même à en construire des navires. L'ouvrage de M. C. Kersten, professeur à l'Ecole royale des Travaux publics de Berlin, dont M. Poinsignon nous donne une excellente traduction, est le complément, comme l'indique son titre, de la première partie de ce Traité, consacrée au calcul et à l'exécution des formes élémentaires en ciment armé. Il étudie l'exécution et le calcul des planchers, piliers, murs, toits, fondations, barrages, ponts, cheminées en ciment armé, ouvrages qui ne sont pas toujours aussi élégants qu'on le souhaiterait, mais dont le bon marché et la faciité d'exécution sont indiscutables. Les descriptions, précises etsuffisamment complètes, sont éclairées par un grand nombre de figures, qui permettent de les suivre et les comprendre nettement sans effort; la lecture est à la portée de tous. Aussi sommes nous persuadé que cet ouvrage sera de la pus grande utilité pour tous ceux qui s'intéressent à ce nouveau mode de construction, actuellement répandu dans tout l'univers, et que les Allemands seuls persistent à désigner sous le nom de « Mo- nierbau », en mémoire de l'inventeur français Monier, mort, tout naturellement, oublié et presque dans la misère, G. R. 2° Sciences physiques Louguinine (W.), Directeur du Laboratoire technique de l'Université de Moscou, et Schukarew(A.), Chef des Travaux du même Laboratoire. Méthodes de Calorimétrie usitees au Laboratoire thermique de l'Université de Moscou. lraduit du russe par M. G. Ter GazarIAN, Docteur ès Sciences. — 4 vol. gr. iu-8 de 185 p. avec fig. (Prix : 8 fr.) À. Hermann, édi- teur. Paris, 1909. Il n'est pas besoin d’une lecture bien attentive pour s'apercevoir que les auteurs de ce Traité de Calorimétrie sont des spécialistes émérites, passionnés de recherches thermochimiques, auxquelles ils consacrent presque exclusivement leurs soins, et dont on connait d'ailleurs les remarquables travaux. Convaincus, comme ils le disent dans leur préface, de l'importance que présentent des détails à première vue sans valeur, les auteurs n'hésitent pas a les décrire 4 P. ne Mowressus : Théorie des Probabilités, Revue génc- rale des Sciences, 1er octobre 1908. longuement, avec une minutie qui pourrait sembler excessive à ceux qui n'ont jamais manié un thermo- mètre très sensible ou mesuré avec précision une variation de température, mais qui paraît amplement justifiée aux yeux de qui connaît les difficultés de ces opérations. Il faut savoir gré aux auteurs de n'avoir pas été rebutés par des descriptions parfois fasti- dieuses, mais qu'il faut suivre dans tous les détails si l'on veut ètre au courant de ce qu'est une expé- rience thermochimique. Les auteurs se sont partagé la besogne suivant leur particulière compétence. M. Louguinine decritles ther- momètres employés en calorimétrie et les qualités qu'ils doivent avoir; ce sont toujours des appareils eu verre, malgré leurs inconvénients, et ils n'ont pas encore été détrônés par les thermomètres basés sur les propriétés des couples thermo-électriques (M. Le Chatelier) ou sur les variations de résistance (MM. Callendar et Griffiis). L'auteur indique les caractéristiques des appareils qu'il emploie et les raisons de son choix; il s'est également réservé l’'énumération des qualités requises pour un local destiné aux mesures thermochimiques etilmontre comment il a pu, à peu de frais, les réa'iser suffisam- ment dans une pièce que M. le Professeur Wallerant avait mise à sa disposition à la Sorbonne. M. Schukarew décrit le calorimètre; il en énumère tous les accessoires; il indique les détails qu'exige la bonne marche d'une mesure calorimétrique. Les deux auteurs ont traité ensemble la très importante ques- tion des corrections nécessitées par le rayonnement et exposé les diverses méthodes usitées par Regnault, par Berthelot, par Pfaundler-Ousoff, par Wullner, ete. Dans le chapitre de M. Louguinine, relatif au choix de l'unité de chaleur, l’auteur rappelle les travaux qui, depuis Regnault, ont été faits sur les variations de la chaleur spécifique de l’eau avec la température, en signalant les séries de déterminations particulièrement concordantes effectuées par Bartoli et Stracciati d'une part et Ludin d'autre part. Il choisit alors pour capa- cité calorifique de { kilog d'eau à 25° une valeur qui est inférieure de 0,20 °/, à celle de Regnault et qu'il accepte de préférence à la calorie moyenne (évaluée sur l'intervalle 0°-1002), parce que les diverses détermi- nations relatives à cette dernière unité ne concordent pas à plus de 2,5 0/4. Au cours de ces six chapitres, on trouve à chaque instant la trace des enseignements donnés par Berthe- lot et le reflet des descriptions qu'il a résumées dans son Traité pratique de Calorimétrie chimique ; du reste, M. Louguinine a été le collaborateur du Maître et a longuement fréquenté le laboratoire du Collège de France. Les chapitres suivants portent une empreinte beaucoup plus personnelle; ils sont consacrés : 1° à la description et au mode d'emploi des chambres calori- métriques, avec les modifications qu'il convient de leur apporter suivant la nature physique des corps réagis- sants et suivant leur nombre; 2° à la détermination des chaleurs spécifiques par la méthode des mélanges; 30 à celle des chaleurs latentes de vaporisation ; 4° à la des cription d’une étuve électrique et de ses applications à la calorimétrie. Toute cette partie, signée Louguinine, est accompagnée de copieuses descriptions, illustrées par de magnifiques planches, d'appareils imaginés ou perfectionnés par les savants russes; c’est la partie la plus originale de l’ouvrage et elle mérite une étude attentive. Dans le même ordre d'idées, M. Schukarew a signé les pages relatives à la mesure des chaleurs de dissolution et des chaleurs de neutralisation à l’aide d'appareils ingénieux et précis. L'ouvrage se termine par des chapitres relatifs au calorimètre à glace, au calorimètre à vapeur et à la détermination des chaleurs spécifiques par voie de com paraison ;ilssontparticulièrement nouveaux. et l'on doit en conseiller l'étude non seulement aux thermo-chi- mistes, mais encore aux physiciens; tous y irouve- ront des exposés historiques, des descriptions et des conseils d’un grand intérêt, surtout en ce qui concerne: BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 91 1° les différents types de calorimètres à glace (Bunsen Schuller et Warlha, Detterici, Boys); 2° la disposition adoptée par les auteurs, pour cet appareil précieux et sensible; 3° le calorimètre à vapeur imaginé par Joly et considérablement perfectionné par Schukarew. A la fin du ve'ime se trouvent des tableaux numé- riques en partie dressés par les auteurs et qui complè- tent l'important ouvrage que les savants russes ont consacré à leur science de prédilection. Il faut malheureusement signaler les imperfections de la traduction; le texte français est souvent lourd, parfois incorrect; il me parait uti e de le dire dans les- pérance que ces défauts disparaïtront dans une édition ultérieure. P. LemouLr, Professeur de Chimie générale à la Faculté des Sciences de l'Université de Lille, Nystrom (E.), Zugénreur du Département des Mines du Canada. — Peat and Lignite. Their manufacture and uses in Europe. (TOURBE ET LIGNITE. FABRICATION ET EMPLOIS EN EtROPE.) — 1 vol. in-8 de 247 pages, avec 228 fin. et 34 planches. Département des Mines, Ottawa, 1908. L'ouvrage de M. Nystrom est le fruit d’une Mission dont l’auteur fut chargé l’année @ernière par le Gou- vernement canadien. Le Canada possède de très vastes tourbières, dont l'exploitation n’a malheureusement pas donné jusqu'à présent de très brillants résultats. M. Nystrom fut donc invité à se rendre en Europe, spécialement en Suède, Norvège, Finlande, Danemark, Allemagne, Hollande et Irlande, pour y étudier lin- dustrie de la tourbe, particulièrement développée dans ces contrées, et à rapporter, si possible, au Canada, des suggestions pratiques sur les méthodes d’exploi- tation les mieux adaptées à ce pays. Son Rapport consti- tue une véritable monographie de la préparation de la tourbe et accessoirement du lignite, et sera consulté avec intérêt par les techniciens. La tourbe est, comme on le sait, le produit de la décomposision lente de certaines malières végétales : mousses, herbes, troncs, racines et feuilles d'arbres. Complètement desséchée, sa valeur calorifique est en moyenne de 5.000 calories par kilog; séchée à l'air, elle peut renfermer de 15 à 25 °/, d’eau, et son pouvoir calorifique n'est plus, en moyenne, que de 3.500 ca- lories par kilog, avec de grandes variations suivant l'origine des diverses tourbes. Les méthodes actuellement employées sur une grande échelle pour la préparation de la tourbe sont de deux sortes : 4° la méthode manuelle, où la tourbe est extraite à la main de la tourbière sous forme de blocs réguliers, puis séchée à l'air en tas, sans avoir subi aucun traitement mécanique; cette méthode est la plus couramment employée par les paysans qui pré- parent leur provision personnelle de combustible ou font un commerce restreint; 2° les méthodes méca- niques, où la tourbe brute, après avoir été extraite de la tourbière généralement à la main, est ensuite sou- mise à un traitement mécanique et ultérieurement séchée à l'air. Ces méthodes se divisent elles-mêmes en deux classes : dans la première, on ajoute de l’eau à la masse tourbeuse, en quantité suffisante pour en faire une sorte de purée qui est coulée dans des moules; dans la seconde, la tourbe est traitée sans addition d’eau et possède une consistance suffisante pour être mise en forme sans moules. Dans les méthodes mécaniques, la tourbe, extraite à la main comme nous l'avons dit, est jetée dans un élévateur qui l’entraîne vers la machine à tourbe. Dans certaines exploitations, on emploie un excavateur mécanique; mais l'usage en est Jimité aux lourbières qui ne renferment pas de grosses racines et de souches; pour ces dernières, si l’on ne veut pas extraire à la main, il faut opérer avec des machines spéciales ettrès puissantes (machines Anrep). Les machines à tourbe opèrent un malaxage intime de la substance, qui est réduite à l’état de pulpe; celle-ci est pressée vers une 92 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX bouche d'où elle sort sous forme de bande continue, qui est coupée en morceaux de longueur voulue. Les morceaux sont ensuile transportés dans les champs ROpE la dessiccation à l'air. Le volume assez considérable de la tourbe séchée à l'air en rend la manipulation et le transport à longue distance assez coûteux et s oppose à la généralisation de l'emploi de ce combustible. On a done eu depuis longtemps l’idée de fabriquer des briquettes de tourbe comprimées, et l’on a trouvé dans les machines à préparer les briquettes de lignite un matériel tout à fait approprié à cet usage (la tourbe de bonne qualité possède, en effet, des caractères communs avec le lignite extrait des mines). Dans ces machines, la malière brute passe entre des cylindres qui la réduisent en poudre grossière; on la tamise, et le résidu, après avoir traversé un désintégrateur, est de nouveau tamisé. La poudre fine, par le moyen d'un élévateur, passe dans les appareils de dessiccation, à plateaux ou rotatifs, puis, de là, dans des magasins, où elle se repose et se refroidit. La presse à briqueter est du type à tube ouvert; la poudre y estcomprimée par un piston plongeur directement relié à une marhine à vapeur. Dans certaines in-tallations, la mise en briquettes est accompagnée d’une légère carbonisation par chauffage à 1500-170°; on obtient ainsi une tourbe plus riche en charbon, ne contenant plus que 3 °/, d’eau et, par con- séquent, d'un pouvoir calorifique bien supérieur. Malheureusement, la fabrication des briquettes de tourbe, bien préférables pour l’usage domestique, n’a pas donné de très bons résultats économiques en Europe. Comme pour les autres combustibles, on a essayé de tirer parti de la tourbe par la distillation pyrogénée ; celle-ci s ‘opère dans des fours discontinus. Elle donne naissance à des cokes et demi-cokes, — employés les premiers dans les hauts fourneaux et la méta lurgie, îes seconds au chaulfaze des locomotives et des chau- dières, — et à des sous produits: gaz combustibles et goudrons semblables à ceux du lignite, mais plus riches en créosote. La tourbe est également employée dans les gazo- pen à la production d'un gaz pour le chauffage ou pour l'alimentation des moteurs à explosion ; un bon gaz de tourbe peut contenir 17,2°/, de CO, go d'hy- drocarbures, 6,8°/, d'H, 10,5°/, de CO? et 57 0}, d'A7; son pouvoir calorifique ‘est de 1.450 cal par m.c Enfin, en dehors de son emploi comme combustible domestique ou industriel, la tourbe a trouvé en ces dernières années une foule d'applications intéres- santes : litière pour les chevaux et le bétail (elle est très avantageuse par la grande quantité d'humidité qu'elle absorbe). ouate pour l'emballage des fruits, des œufs, etc., tissus, papiers, etc. Bien que l’auteur soil très bref sur ces derniers points et passe sous silence les belles recherches de MM. Muntz et Lainé sur l’em- ploi de la tourbe à la préparation de nitrières à haut rendement, on doit le féliciter de son exposé très complet de l'industrie de la tourbe ; après être restée longtemps dans l’empirisme, celle-ci commence à se développer scientifiquement et elle est, sans doute, appelée à un avenir plus brillant. Louis BRUNET. 3° Sciences naturelles Lokhtine (W.), /Zngénieur des Ponts et Chaussées. — Phénomènes de la congélation desrivières. Causes de la formation de la glace intérieure fluviale. — A vol. in-8° de 40 pages. Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1908. Etude fort intéressante et toute nouvelle des phé- nomènes hivernaux des rivières. Depuis longtemps, les pêcheurs et les bateliers avaient remarqué, dans les rivières russes et sibériennes, l'étrange apparition, à la surface de l'eau, de masses de glace spongieuse et friable, de couleur jaunâtre, renfermant du limon, du gravier et des herbes aquatiques. Comme on avait trouvé cette glace sur les objets plongés dans l’eau et même sur les rierres du fond, comme, d'autre part, les matériaux qu'elle renferme semblent avoir été arrachés au fond de la rivière, on lui avait tout naturellement donné le nom de « glace de fond ». Lokhtine rapporte les observations et les expé- riences qu'il a faites pendant l'hiver 1904-1905 dans la Néva, où ce curieux phénomène est particulièrement net Il a reconnu que cette prétendue « glace de fond » résulte de l’agglomération de petites aiguilles de glace, formées, pendant les froids intenses, aux surfaces découvertes de la rivière. Ces cristaux de glace, en- trainés dans la profondeur par les courants, com- mencent par fondre; mais, par suite du refroidissement causé dans la masse liquide par cette fusion, il arrive un moment où ils peuvent subsister en profondeur. Alors ils se fixent sur les objets plongés dans l’eau (cordes, filets, paniers, ete.) ou sur les pierres du fond, tout comme le ferait une alluvion, ce qui justifie le nom de « glace alluviale » que lui donne M. Lokhtine. Le phénomène de la glace alluviale nécessite donc pour se produire : 1° l'existence de larges portions libres de glace à la surface de la rivière; > l'existence de courants assurant le mélange des ditférentes couches d’eau. Ainsi s'explique pourquoi les lacs et les affluents de la Néva, où le courant est presque nul et le man- teau de glace continu, ne présentent pas le phénomène de la glace alluviale. Le travail de M. Lokhtine se termine par des consi- dérations sur la congélation des rivières dans les diffé- rentes conditions du courant. Il montre que, dans une rivière calme, la réfrigération, se concentrant à la sur- face, s'achève par la constitution du manteau glacial; au contraire, dans une rivière impétueuse, les cristaux de glace sont entraînés dans la profondeur, où ils forment, avec les matériaux en suspension dans l’eau, les mas-es friables de la glace alluviale. M Lokhtine a tiré de son étude des indications pra- tiques. Il montre que le meilleur moven de lutter contre l’entassement produit, dans les rivières, par la glace alluviale, est de faire en sorte que la rivière se couvre totalement de glace au plus vite. On y arrive en jetant dans les éclaircies des branches de sapins sur lesquelles se fixe l'alluvion glaciale : au bout de quelques heures, le manteau de glace est continu. Bien que d’une lecture un peu difficile, le travail de M. Lokhtine intéresse à la fois l'ingénieur et le géo- logue. Il est d’ailleurs illustré de belles photographies. GABRIEL EISENMENGER, Chargé de Cours à la Faculté des Sciences de Nancy. Godfrin (J.), Directeur de l'Ecole supérieure de Pharmacie, Professeur à l'Université de Nancy, et Petitmengin (M.), Préparateur à l'Ecole supé- rieure de Nancy. — Flore analytique de poche de la Lorraine et des contrées limitrophes. — 1 vo/. in-12 de 240 pages. Maloine, éditeur. Paris, 1909. Cette clef analytique facilitera la détermination des plantes aux étudiants et aux touristes de la région de l'Est. La disposition en tableaux synoptiques est très heureuse; elle permet la diagnose sinon complète, en tout cas essentielle et méthedique de chaque groupe. Plusieurs caractères, parmi les plus importants et d'une observation facile, sont choisis pour chaque espèce. Les ouvrages comme celui-ci, venant après tant d’autres publiés depuis trente ans, rendent la Bota- nique plus accessible au grand public, et d'un agré- ment que ne connaissaient pas les débutants qui s’adonnaient à l'étude des plantes il y a un quart de sièele. Au point de vue de la typographie, qui est très soignée, nous retrouvons une disposition analogue à celle qui est très appréciée dans les ouvrages de Gas- ton Bonnier. Pour une édition ultérieure on aimerait voir, comme adjonction, une conférence générale sur la géographie BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 93 botanique de la Lorraine, que les auteurs connaissent si bien. En somme, au point de vue scientifique, c'est un ouvrage qui fournira des renseignements utiles et récents sur les localités des diverses espèces. Au point de vue pratique, il augmentera certainement le nombre des botanistes herborisants et facilitera leur tâche. Ce livre obtiendra un grand succès près de nos étudiants". Enmonp GAIN, Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de l'Université de Nancy. Hue (E.), Médecin vétérinaire. — Musée ostéologi- que. Etude de la faune quaternaire; Ostéométrie des Mammifères. — 2 vo/. grand in-S8° avec 186 plan- ches. Seleicher frères, éditeurs. Paris, 1909. L'auteur de cet ouvrage a eu pour but de mettre entre les mains des préhistoriens, souvent éloignés des bibliothèques importantes ou des grands musées, une iconographie d’un format maniable, d’un prix assez peu éleve, pour leur permettre de déterminer les ossements de Mammifères trouvés au cours de leurs fouilles. On doit lui savoir gré d’avoir compris la nécessité d'un tel traité. Les recherches préhistoriques sont par- venues maintenant à un degré de précision exigeant de la part de ceux qui s’y adonnent certaines connais- sances anatoiniques et géologiques qui ont parfois trop manqué aux amateurs de silex taillés. Fouiller un gisement sans précautions suflisantes, c'est détruire irrévocablement une des rares pages des archives de l'humanité primitive. L'effort de M. Hue a été considérable, car il a dessiné lui-même à la plume les 2187 figures qui illustrent son travail, et il a rendu exactement, par des procédés qui diffèrent un peu de ceux des dessinateurs de profes- sion, l'aspect des os ou des crânes, sinon toujours celui des dents vues par la couronne. La première partie de l'ouvrage définit les divers diamètres longitudinaux ou transversaux que l'auteur croit utile de mesurer pour établir une série de rap- ports centésimaux, d'indices. qui sont, peut-être, théo- riquement caractéristiques des races: mais l'interpré- tation de ces nombres est toujours fort délicate, en raison des erreurs de mesure pour des corps de forme aussi irrégulière que des ossements, de la longueur des calculs, des décimales que l'on néglige, etc., et l'usage donne rarement des résultats scientifiques préeis. La seconde partie est une iconographie des crânes et des dents d’une cinquantaine de Mammifères ; elle gagnerait beaucoup à être accompagnée d'un texte mettant en évidence, pour les préhistoriens peu accou- tumés aux comparaisons paléontologiques, les diffé- rences qui séparent des espèces voisines et impor- tantes à distinguer: cerf et renne, renard ordinaire et renard bleu. Il faut souhaiter aussi que, dans une édition ultérieure, l’auteur figure les ossements des animaux qui peuvent être rencontrés dans les gise- ments paléolithiques ou néolithiques, plutôt que ceux d'animaux actuels tels que le Rhinoceros bicorne ou l'Eléphant d'Afrique. Dans la troisième partie, M. Hue consacre 117 plan- ches aux os des membres, groupés non par ordre z00- logique. mais d’après leur position dans le squelette, réunissant. par exemple, sur des planches consécutives, tous les radius, tous les humérus, etc. C’est le procédé qu'emploient les paléontologistes dans leurs labora- loires pour les comparaisons délicates. Comme la seconde partie, celle-ci serait utilement complétée par un texte comparatif, si court soit-il, et les planches 1. M. Petitmengin vient de mourir prématurément. Il avait fait partie d'une Mission scientifique en Grèce. On pouvait attendre de lui des publications de Botanique systé- matique intéressantes, rendues faciles grâce à son herbier enrichi par des échanges internationaux. 11 s'occupait spé- cialement des Primulacées. pourraient comprendre plus d'espèces éteintes. M. [ue n'a pas cherché à faire oub'ier aux paléon- tologistes et aux anatomistes la monumentale Osteo- graplie de de Blainville ou l'admirable /u/roduetion à l'Ostéologie des Mammifères de Flower; il a seulement cherché à coubler une lacune dans la bibliothèque des préhistoriens à qui l’étude de la faune quaternaire a souvent paru trop ingrate. A. THEVENIN, Docteur ès Sciences, Assistant de Paléontologie au Muséum. moins d'espèces actuelles, 4° Sciences médicales Lyon (D: Gaston), Ancien Chef de Clinique médicale de la Faculté de Paris. — Diagnostic et Traite- ment des Maladies de l’Estomac. — 1 vol. 1n-8 de 724 pages. (Prix : 12 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1909. Ce livre est essentiellement un livre de Médecine pratique. Il met le médecin praticien au courant des méthodes les. meilleures, employées aujourd’hui pour diagnostiquer avec quelque précision une maladie de l'estomac et pour la traiter par une thérapeutique ra- tionnelle. C’est la simplicité, la limpidité de l’exposi- tion et le souci d'exprimer la substance des travaux les plus récents qui ont assuré à l'auteur le succès légitime de ses très utiles publications antérieures. Le présent ouvrage offre les mêmes qualités. Dans les prolégomènes, M. G. Lyon indique les changements qu'a apportés la Radioscopie dans nos conceptions sur la forme, la situation et la motricité de l'estomac pendant la vie. Il est devenu clair que les ingesta ne tombent pas dans l'estomac, s'il est normal, comme dans une poche, mais que l'organe « adapte constamment ses parois à son contenu ». Après l'exposé succinct de la physiologie du suc gastrique, M. G. Lyon montre comment il faut procéder à l'interrogatoire du malade, l'importance de la mé- thode à suivre; enfin, il poursuit l'examen clinique par les méthodes d'investigation courantes : inspec- tion, palpation, diaphanie, percussion, insufilation, cathétérisme, etc. Par l'analyse du suc gastrique après le repas d'épreuve, on détermine les déviations du chimisme gastrique. Ces déviations ont servi de base à une classification des gastropathies: mais l’auteur discute la valeur de ces résultats. I1 insiste sur la variabilité qu'ils présentent, même à l'état normal. Il conclut qu'à part certains cas très tranchés, il ne faut pas tirer du chimisme des déterminations diagnos- tiques absolues. Il s'appesantit, au contraire, sur l'im- portance des troubles fonctionnels résultant des modi- lications de la motricité gastrique. Mais il faut concevoir que la motricité et la sécrétion ont l’une sur l’autre une action réciproque considérable. M. Lyon étudie ensuite les troubles de l'appétit, les douleurs, hémorragies, vomissements, le pyrosis, la flatulence, l’aérophagie. que la Radioscopie a permis d'observer avec exactitude. Un chapitre est consacré aux complications et au retentissement à distance des dyspepsies. Ici, comme dans nombre d’autres affec- tions d'organes divers, les troubles nerveux sont géné- ralement disproportiounés à la gravité de la lésion, et les lésions organiques les plus graves sont, pour ainsi dire, celles qui en déterminent le moins. La troisième partie de l'ouvrage est réservée à la Thérapeutique générale, la quatrième au diagnostic et au traitement des Maladies de l'Estomac en particulier. M. G. Lyon excelle dans l'exposé des méthodes triéra- peutiques; il a fait ses preuves à ce sujet. Je puis donc ne pas insister et me borner à une légère critique, que motive, à mon sens, le trop faible développement qu'il a accordé au chapitre relatif au traitement chirurgical et à ses conséquences. Une cinquième partie comprend un formulaire détaillé et clôt ce livre qui répond par- faitement au but pratique que l’auteur s’est proposé. D' A. LÉTIENNE. (de) = ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 28 Décembre 1908. M. P. Villard est élu membre de l’Académie dans la Section de Physique, en remplacement de M. E. Mas- cart, décédé. 1° -CIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Belot montre que la distribution des aphélies des petites planètes semble prouver que les masses relativement grandes de Vesta, Cérès et Junon ont absorbé la matière primitive en parcourant une trajectoire oblique sur l'écliptique, fai sant avec son axe un angle de 14°. — M. Œ. Bergs- trand à constaté que la combinaison d’un écran jaune et d’une plaque orthochromatique pour la photographie des étoiles fixes assure une netteté plus grande des images et l'élimination de l'influence nocive due à la réfraction atmosphérique. M.L Thouveny démontre que l'oiseau parcourt, dans un plan vertical, avec vent debout, une trajectoire à pente moins descendante ou plus ascendante que celle de la vitesse du vent prise en sens inverse; c'est l'inverse avec vent arrière. Par vent horizontal, l'oiseau parcourt, dans un plan hori- zontal, un arc présentant sa convexité vers la région d'où souffle le vent. — M. A. Korn présente ses recherches sur le problème des efforts dans la théorie de l’élasticité. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Dufour à constaté que la vapeur de CaF* dans le champ magnétique possède un pouvoir rotatoire magnétique positif en dehors et au voisinage des doublets de toutes les com- posantes de la bande D" et négatif à leur intérieur; pour les bandes 1) et D’, c'est le contraire qui a lieu. Dans la vapeur d'hypoazotide, les raies À —5.925,4 et 5.856,9 présentent à leur voisinage une rotation magné- tique négative. — M. G. Urbain montre que, dans tout système phosphorescent binaire dont on fait varier les teneurs relatives en phosphorogène et en diluant : 1° chaque bande de phosphorescence passe par un optimum; 2° les optima des différentes bandes ne coincident pas nécessairement, bien qu'ils corres- pondent toujours à des proportions relativement faibles du phosphorogène.— MM. A. Guntz el W. Broniewski ont déterminé la résistance électrique spécifique de divers métaux : Cs, 19,3 à 0"; Rb, 12,8; K, 7,01; Na, 4,3; Li, 8,55; Ga, 53,4; Te, 0,102. — M. P. Gaubert montre que le facies particulier de certains cristaux naturels est dû à l'absorption et à la syncristallisation de matières étrangères. — M. W. Oechsner de Coninck a reconnu que la réduction du chlorure d'uranyle par l'hydrogène ne peut pas servir à la détermination du poids atomique du chlore, car elle ne donne pas des résultats assez concordants. — M. A. Béhal a observé que les dérivés halogénés de la série cyclique réagissent sur les acides organiques pour donner naissance à HCI et à un éther- sel du radical cyclique; la réaction est activée par les sels de Fe, Zn, Sn, etc.; elle est retardée par ceux de Mg, Ni, Ca. — M. L.-H. Philippe, en réduisant par l’'amalgame de Na la lactone gluco-heptonique 6, a obtenu un nouvel alcool heplavalent, la glucoheptite 6. Elle fond à 1300-131° et est très faiblement dextrogyre en solution aqueuse; |&ln — + 48". Son éther heptacé- tique a un fort pouvoir rotaloire : [al = + 340,8. — MM. A. Goris et M. Mascré ont constaté la présence de l’urée chez quelques Champignons supérieurs : Tri- choloma Georgii, Psalliota campestris. — M. E. de Stoecklin montre que le tannate de fer constitue une nouvelle peroxydase artificielle, capable de porter l'oxygène de H*0* sur une série de corps ayant résisté à | l'action des peroxydases connues. — M. M. Piettre a reconnu que la bilirubine est la seule matière fonda- mentale des pigments biliaires. La biliverdine n'est pas un simple produit d'oxydation; elle contient du chlore. La bilirubine cristallise bien dans le mélange CCI- CHCI: 30 SciENCEs NATURELLES. — MM. H. Calmette et C. Guérin montrent que le bacille tuberculeux bovin, cultivé sur bile de bœuf, acquiert des propriétés spé- ciales : il est facilement absorbable à travers la paroi du tube digestif et peut créer des lésions à calcification rapide. Injecté par voie intraveineuse aux Bovidés, il produit une maladie générale fébrile, sans formation ‘le tubercules, évoluant comme une typhobacillose. — M. L. Bordas à observé que la glande arborescente gauche annexée à l'appareil générateur femelie des Blattes sécrète des cristaux de carbonate de chaux, surtout abondants à la ponte et servant à l’édilication de la coque ovigère. — M. G. André a constaté qu'une plante vivace se comporte, dans la première et la deu- xième année de sa végétation, comme une plante annuelle qui n'a pas atteint le début de sa floraison. Toutefois, le poids absolu de la racine de la plante vivace est beaucoup plus considérable, et les réserves minérales sont très notables, surtout pour la racine. — M. A. Lacroix a étudié les laves des dernières éruptions de Vulcano (îles Eoliennes). Elles ne constituent pas un type pétrographique spécial : c'est un trachyte à anor- those, augite et olivine. Les enclaves de microsanidinite se rapportent au type de la shoshonose. Ces laves ne présentent que de faibles variations chimiques. — M. M. Gignoux montre que les formations de Palerme appartiennent à un cycle sédimentaire distinct de celui du Pliocène el méritent d'être gardées comme type d’un étage sicilien bien caractérisé. Par ce fait même, ilest naturel de rattacher l'étage sicilien au Quaternaire, dont il marquerait la phase initiale, ou premier eyele sédimentaire. Séance du 4 Janvier 1909. M. Zirkel est élu Correspondant pour la Section de Minéralogie, en remplacement de M. Klein, décédé. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux présente ses recherches sur certains systèmes d'équations diffé- rentielles linéaires analogues à celui qui se présente dans la théorie du mouvement relatif. — M. P. Bou- troux étudie les intégrales multiformes des équations différentielles algébriques du premier ordre. —M.L.F. Bertin montre que les aéroplanes ont besoin d’un plan vertical de dérive, qui leur assure à la fois la force centripète nécessaire aux girations et l'inclinaison de sécurité. Le même résultat peut être obtenu par un gauchissement du plan sustentateur où un mouvement latéral du centre de gravité; mais ces procédés, instinc- tifs chez l'oiseau, semblent d’une complication gênante pour l’aviateur. — M. A. Berget décrit une méthode gravimétrique très sensible pour la mesure des hautes altitudes dans les ascensions en ballon ; il montre que la variation apparente du poids d’un corps entre deux stations est proportionnelle à leur différence de niveau. Il reste à réaliser un instrument approprié. k 20 SciENGES PHYSIQUES. — M. A. Turpain rappelle qu’il fut le premier à indiquer les propriétés des champs interférents en 4898 et montre la différence entre son dispositif et le champ de concentration de M. Blondel, datant de 1903. — M. K. Birkeland poursuit l'exposé de ses recherches sur les orages magnétiques polaires et l'aurore boréale. — M. M. Chanoz a reconnu que le passage d’un courant continu à travers le contact de AUCADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 95 deux dissolutions aqueuses d'électrolytes MR, M'R', est capable de modifier la différence de potentiel entre ces deux liquides. La variation de potentiel produite dépend de la nature des dissolutions et du sens de passage du courant. — M. J. Thovert a constaté que la reproduc- tion des couleurs par les plaques autochromes ne donne pas de bons résultats en lumière artificielle autre que l'arc électrique. — M. A. Faucon a déterminé le dia- gramme de congélation des mélanges d’eau et d'acides gras solubles ; les résultats obtenus ne décèlent pas la formation d'hydrates. — MM. G. Baume et F.-L Perrot ont mesuré avec une grande précision la densité du méthané par la méthode du ballon. Ils ont trouvé en moyenne 0,7168, valeur qui concorde avec celle qu'a calculée Leduc. On en déduit la valeur 12,004 pour oids atomique du carbone. — M. P. Lebeau a trailé e siliciure de magnésium par HCI et condensé dans l'air liquide les hydrures de -ilicium formés Par distil- lation fractionnée, on peut isoler SiH#, Si4° D — 2,18) et un produit liquide S®II*, spontanément inflammable à l'air. — M. H. Marais a constaté que le chlorhydrate et le bramhydrate d'éthylamine possdent une forme stable, monoclinique, isomorphe à la température ordi- daire. Au-dessus de 80° et 83° ils se transforment en modifications uniaxes. stable el instable, isodimorphes. — M. C. Gerber a observé que le temps de coagulation du lait par certaines présures (Maclure, Crustacés déca- podes) est accéléré par l'addition d'alcalis libres. — M. L. Gaucher montre que la caséine passe de l’esto- mac dans le duodénum d'abord sous la forme liquide, ensuite à l’état de caséum. La coagulation du lait dans l'estomac n’est nullement nécessaire; elle peut même parfois être nuisible à la digestion. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Borrel signale la présence constante de Demodex couverts de bacilles dans les follicules pileux et les glandes sébacées des lépreux. Ce parasite pourrait bien être l'agent de conta- mination de la lèpre. —M. Ed. Bordage a observé que l’ablation des chélipèdes chez l'Atya Serrata est sui- vie d'une régénération de chélipèdes présentant la forme ortmanienne, c'est à-dire la forme ancestrale (régénération hypotypique). Au cours du développe- ment, le type atyen reparaît finalement. — M.A.Lécail- lon à reconnu qu'il se produit, dans la cicatricule des œufs non fécondés de la poule, une véritable segmen- tation parthénogénésique ; les cellules de segmentation se multiplient, par mitose: mais elles finissent par dégénérer les unes après les autres. — M. P.Garrigou- Lagrange à étudié le régime des sources en Limousin en 1908 ; la diminution notée les années précédentes s'est encore aggravée, par suite de la sécheresse pro- longée. — M. A. Angot signale l'enregistrement très net, au sismographe du Parc Saint-Maur, du tremble- ment de terre du 2x décembre 1908. Les oscillations ont débuté brusquement à 4 h 23,9 min. et les grandes oscillations ont commencé à 4h. 27, pour devenir moins fortes à 4 h. 50 et à peine perceptibles depuis 5 h. 20. — M. R. Cirera annonce un enregistrement analogue à l'Observatoire de l’Ebre. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 29 Décembre 1908. M. le Président annonce le décès de M. R. Blache, associé libre. M. le D' Lagarde lit un travail intitulé : Résultats éloignés de la prothèse par les injections de paraffine froide ramollie sous pression. — M. le D' Martin du Magny donne lecture d'un travail sur la toux et la voix lointaines, signe pathognomonique de toutes les compressions bronchiques. Séance du $ Janvier 1909, M. F. Raymond présente un Rapport sur un travail de M. G. Marinesco relatif à deux cas de sclérose en plaques ameliores par la radiothérapie. Le nombre des séances a varié entre 6 et 16; l'application des rayons X a eu lieu tous les deux jours au niveau de la région lombaire pendant 7 à 10 minutes. Les résultats obtenus ont élé satisfaisants, surtout pour le tremblement intentionnel, qui a complétement disparu, ainsi que pour les troubles de la mobilité. On n’a pas observé de troubles cutanés. C'est donc une méthode à retenir et à essayer. — M.Ch. Moureu présente, au nom d’une Commission spéciale, un Rapport sur l'emploi des composés arsenicaux en Agriculture, considéré au point de vue de l'Hyqgiène publique. Les avantages des arsenicaux pour la lutte contre les insectes sont incon- testables ; ils sont, au p'int de vue purement agricole, un excellent moyen de défense. Malheureusement, leur emploi présente de redoutables dangers, tant pour louvrier des champs. dont la vie se passe, pour ainsi dire, au milieu de l’arsenic, que pour le consommateur, sans cesse exposé à rencontrer des produits empoi- sonnés. Une réglementation extrêmement sévère, si elle était applicable aux travaux de l’agriculture, pourrait, dans une certaine mesure, atténuer les dangers. Mais les instructions très rigoureuses, comme celles qu'il faudrait prescrire, resteraient lettre morte et ne seraient pas suivies par les ouvriers agricoles. La surveillance, d'ailleurs, serait pratiquement impossible. Quant aux produits agricoles issus de végétaux traités à l’arsenic, leur bon renom serait sérieusement com- promis. On dispose d’ailleurs, dans la lutte contre les insectes, d'autres agents n'offrant aucun danger pour l'hygiène générale. La Commission, à l'unanimité, estime donc que l'Académie a pour devoir de demander au Ministre de l'Intérieur, en réponse à sa lettre du 16 septembre 1908, de prohiber, d'une manière radicale et absolue, l'emploi des arsenicaux en Agriculture, et d'assurer, par conséquent, à l'avenir, l'application pure et simple de l'ordonnance royale de 1846, inter- disant la vente et l'emploi de l’arsenic et de ses com- posés pour la destruction des insectes. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 26 Décembre 1908. M. L. Bruyant, en examinant trois lots de Mousti- tiques provenant du Tonkin, en a trouvé de 5 à 20 °/, parasités par des larves d'Hydrachnides, dont le nombre peut s'élever jusqu'à 12. — M. C. Gerber montre qu'on peut abaisser jusque vers 0° la limite d'activité des présures classiques en augmentant la quantité de sels alcalino-terreux contenus dans le lait. — MM. A. Gilbert et A. Baudouin ont observé, au cours de certaines maladies du foie, une élévation du coefficient glycémique (après absorption du glucose), qui s'élève entre 1,60 et 2,50. MM. L. Ambard et F. Papin ont reconnu qu'il y a une concentration limité de l’urée dans l'urine : elle est de 10 °/,, chez le chien et se retrouve au cours de tous les régimes azotés, quelle que soit leur teneur en azote. Il y a une quantité maxima durée susceptible d’être éliminée par le rein : elle e-t de 4,5 gr. par jour et par kilog de chien. — MM. J.-P. Langlois et L. Garrelon ont cons- taté que, sous l'influence de la cocaïinisation faible de la région bulbaire, la polypnée thermique disparaît chez le chien et latempérature s'élève de 5 à 6 dixièmes de degré; quand l'effet de la cocaïne a disparu, la po- lypnée reparait et la température s'abaisse. — M. M. Jnngano a isolé de l'intestin de la roussette un nou- veau microbe anaérobie, qu'il désigne sous le nom de Bacillus Sporoyenes non liquefariens. — M. CI. Re- gaud montre que les mitochondries sont constituées par un support protoplasmique de forme variable, com- biné à une substance caractéristique possédant des réactions chimiques spéciales — MM. Crespin et Le- louche ont observé que si, au cours de l'accès palustre, il y a un certain trouble transitoire dans le fonction- nement du rein, cet organe recouvre rapidement toute sa capacité d'élimination dans le stade de chaleur. — M. G. Battez montre que c’est par son action sur le système nerveux que le chloroforme produit la glyco- 96 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES surie. — M. W. Oechsner de Coninck décrit une réaction de l'iodoforme en présence du chloroforme ou du bromoforme : c’est sa coloration rose, puis rouge, à froid, en présence d'un cristal d azotate de plomb. — MM. Ch. Achard et M. Aynaud montrent que ni la coagulation du sang, ni la rétraction du caillut ne dé- pendent de la présence des globulins. — M. J. du Cas- tel a constaté que, dans la majeure partie des cas, le thymus rachitique est hypertrophique; dans quelques rares Cas, pourtant, l'hypertrophie fait défaut. — M. H. Piéron a poursuivi ses recherches sur la ryth- micité chez les Actinia equina; il a observé quelques cas de rythmes nycthéméraux. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild montrent que certaines lésions de la glande thyroïde sont des lésions d'hyperthyroïdie compensatrice ou 1éactionnelle. — Mie El. Lazarus à observé qu'un microbe se trouvant en prés nce d'une quantité déterminée d'ions H ou OH peut'se développer ou rester en vie latente, selon la nature des matières nutrilives présente. — M. et Mu L Lapicque ont reconnu que l’excitabilité du muscle est isochrone à celle de son nerf moteur. Quand l'isochronisme du muscle et de son nerf est alléré dans un sens ou dans l’autre, à partir du moment où l'hétérochronisme atteint une certaine valeur, l'excitation n'est plus transmise du nerf au muscle. — MM. G. Barthet et H. Bierry ont constaté que le suc d’Æelix pomatia, ca- pable d'hydrolyser le raffinose et le gentianose, est aussi actif sur le stachyose (mannéotétrose); les sucs de crustacés n’ont aucune action sur ces trois sucres. — MM. Ch. Dhéré et L. Lapicque décrivent un pro- cédé de récolte et de conservation du sang de poulpe par addition de fluorure de sodium. ; Séance du 9 Janvier 1909. MM. H. Bierry et G. Barthet ont constaté que le suc gastro-intestinal d’Helix pomatia, en quantité con- venable et après un temps suffisamment long, hydro- lyse totalement le manninotriose. — M. M. L Bruyant montre que les Phalangides hébergent au moins deux larves parasites différentes de Leptes. — MM. A. Le- lièvre et Ed. Retterer ont trouvé que, de la surface du noyau des hématies nucléées, partent, en rayon- nant, des stries ou trabécules dont la base s’insère au noyau et dont le sommet se termine à la périphérie de l'hématie. Des fils transversaux plus minces relient ces trabécules rayonnantes et deviennent de plus en plus abondants à mesure que les trabécules s’éloignent du noyau. — M. G. Bohn montre que, lorsqu'on a une série de fonds d'éclairements croissants, les réactions vis à-vis d'une source de lumière ou d’un ensemble de surfaces diversement éclairées peuvent être positives jusqu'à un certain éclairement, et au delà devenir négatives. — MM. A. Clerc et A. Sartory ont trouvé, dans les parois de la cavité creusée dans le thalle du Codium Bursa, un nouveau microbe se rapprochant du Microcorcus cinnabareus. — MM. G. Baïnier et A. Sar- tory ont découvert un nouveau champignon patho- gène, voisin de l'Asperçgillus fumigatus, mais en diffé- rant par les spores, et par les ascospores qui sont sphériques et échinulées ; ils le nomment À. fumiga- toïdes. — M. J. Nageotte signale l'existence de gra- nulations lipoides dans la substance grise des centres nerveux, probablement identiques aux neurosomes de Held. — M. L. Gaucher a constaté que le lait ingéré franchit rapidement l'estomac; il met 35 minutes en- viron pour franchir le pylore. — MM. M. Doyon, CI. Gantier et A. Policard ont reconnu qu'une anes- thésie chloroformique un peu prolongée exerce sur le foie une action nécrosante qui se poursuit après la cessation de l’anesthésie. — MM. L. Ambard etE. Papin montrent qu'il y à une concentration limite de NaCl dans l'urine (15 °/,, chez le chien); il existe également une élimination limite de NaCl, qui est d'environ 0,6 gramme par kilogramme et par jour. — MM. F. Ar- loing et de Lagoanére ont constaté que l'association à la toxine typhique des toxines strepto- et staphylo- cocciques rend les troubles cardiaques plus constants et plus marqués. — M. C. Levaditi montre que l’As des composés arsenicaux à structure chimique com- plexe, une fois soumis à l'influence des organes, entre dans la constitution de l’albumine des tissus, pour former une toxalbumine arséniée, qui se fixe sur les irypanosomes sensibles à l’atoxyl. — MM. A. Policard et J. Mawas déduisent de leurs observations qu'il ne semble pas y avoir de rapport entre la fonction motrice cillaire et les mitochondries. — MM. Moussu et Le Play ont constaté que des accidents rapidement mortels surviennent dans le cas d’extirpation totale des surrénales ou, en cas de non extirpation ou d'extirpation incomplète, lorsque les connexions vas- culaires sont supprimées. — MM. Ch. Aubz:rtin el J. Lhermitte ont reconnu que l'intoxication alcoo- lique chronique expérimentale peut s'accompagner de paralysies dont la cause revient uniquement à la destruction des cellules motrices spinales avec inté- grité presque absolue des nerfs périphériques. — MM. J. Jolly et H. Rossello signalent une parenté probable entre le tissu splénique et le tissu médul- laire. Le tissu splénique semble intermédiaire entre celui des ganglions et celui de la moelle: il précède, dans son développement et son rôle hématupoiïétique, le tissu de la moelle. — M. G. Bouet a trouvé, chez un serpent du genre AVaja, et chez une tortue de terre Cinixys belliana, deux Hémocytozoaires pigmentés qu il range dans le genre Plasmodium. — MM. J. Thi- roloix et G. Rosenthal montrent que le sérum des chevaux vacecinés, par l'inoculation de cultures aéro- bisées, contre la bactérie anaérobie de l'hémobio- culture rhumatismale, est inoffensif, préventif et cu- rateur. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 4% Décembre 1908. MM. Coyne et A. Auché ont préparé un sérum anti- dysentérique polyvalent par injection au cheval d'abord de toxines Shiga, puis d'un mélange de cultures Shiga et Flexner. — M. Ch. Pérez a rencontré, dans la ca- vité générale du Termes lucifugus, une Microsporidie nouvelle, voisine des Glugea, qu'il nomme Duboseqia Legeri. — MM. J. Bergonié et L. Tribondeau ont constaté que la fulguration du foie du lapin entraine la destruction massive d'une portion de la glande hépa- tique. Séance du 22 Décembre 1908. M. C. Sauvageau a étudié les variations du Co/pome- nia sinuosa sur les côtes de Bretagne. Après une pé- riode de grande multiplication, il a disparu en beau- coup d'endroits, notamment dans la rivière de Vannes, où il a été étouffé par l'£nleromorpha elathrata. — M. J. Sellier expose un certain nombre de faits dé- montrant l'identité du ferment protéolytique et de la présure. — M. A. Auché décrit une méthode de re- cherche simultanée de l’urobiline, de son chromogène et des pigments biliaires vrais, basée sur l'observation attentive des variations du spectre après addition de divers réactifs. — Le même auteur indique un procédé de séparation de l’urobiline de la bile, consistant à en- trainer les pigments biliaires par des poudres miné- rales lourdes et à extraire l’urobiline par le chloro- forme thymolé. — M. J. Montéli explique la respira- tion faible physiologique, normale, du sommet du poumon droit par le fait que la bronche lobaire supé- rieure droite s'embranche à angle plus ou moins droit sur sa bronche souche verticale, tandis que la bronché lobaire supérieure gauche continue dans sa direction même la bronche souche gauche. — MM. J. Bergonié et L. Tribondeau ont reconnu que la destruction et la réparation du foie sont identiques par leurs manifes- tations bistologiques, qu'elles se produisent après ful- guration, électrolyse monopolaire, broiement ou cau- térisation. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 97 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 15 Décembre 1908. M. C. Gerber a étudié l’action des présures végétales sur le lait aux températures élevées. — MM. D. Olmer et A. Tian ont décelé, par l'examen spectroscopique, la présence du thallium dans le liquide céphalo-rachi- dien dans un cas d'intoxication par l'acétate de thal- lium. — M. Ch. Livon estime que le produit actif de la sécrétion interne de l'hypophyse se concentre sur les éléments nerveux du lobe postérieur, pour delà gagner l'organisme. — MM. Alezais et Peyron signalent l’exis- tence d’un nouveau groupe de tumeurs épithéliales des organes chromaffines : les paragangliomes, à évolution quelquefois maligne, et dont la généralisation s'effectue surtout par la voie veineuse. — Les mêmes auteurs montrent que la présence d'une capsule conjonctive dans les humeurs des glandes salivaires n'a pas la valeur morphologique qu'on lui attribue. — M. J. Cotte signale divers cas de floraison dans les Maures, peudant l'été’1908, en particulier chez la Lavande. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 18 Décembre 1908. MM. H. Calmels et L.-P. Clerc : Sur la theorie des trames utilisées en photogravure. On sait que, par l'emploi de la trame, on se propose de transformer une image à modelés continus en une image discontinue, exclusivement formée d'éléments noirs, de dimensions variables, distribués sur fond blanc, de telle sorte que, vus à quelque distance, la confusion des éléments noirs avec leurs intervalles fournisse en chaque région de l'image ainsi transformée la sensation d’un gris pro- portionnel à la tonalité du modèle dans la région cor- respondante. M. Ch. Féry a montré‘ que cette transfor- mation est exclusivement due, dans les conditiuns habituelles de la pratique industrielle, aux pénombres raccordant de façon continue les cônes de pleine lumière projetés derrière les mailles transparentes de la trame et les zones d'ombre projetées derrière les bandes opaques. Cette théorie ne suffit pas à rendre compte des variations de forme des éléments de l'image négative tramée, et notamment du passage de la dispo- sition en cercles noirs sur fond blanc (demi-teintes foncées) ou en cercles blancs sur fond noir (demi- teintes claires) à la disnosition en damier des demi- teintes moyennes MM. H. Calmels et L.-P. Clerc ont été ainsi amenés à développer les considérations expo- sées jadis par M. Ch. Féry et à déterminer, dans le plan de la plaque sensible, les lieux des points d’égal éclairement, qu'ils appellent courbes isophotes, tout au moins dans un cas particulier simple. correspondant d’ailleurs de très près aux conditions habituelles de la pratique. La connaissance de ces courbes isophotes perinet de prévoir quelle est, en chaque région de l'image tramée, la forme des éléments de cette imaue en éléments ayant précisément pour contours les iso- photes successives, lorsque l’on considère successive- ment les diverses régions d’une échelle de teintes dégradées du noir au blanc, reproduite sous forme de négatif tramé. L'accord est complet entre les formes observées sur négatifs tramés exécutés industrielle- ment, et les formes prévues par le calcul. Pour figurer plus complètement le phénomène, MM. Calmels et Clerc ont matérialisé, sous forme d'un moulage en plâtre, la surface représentative des éclairements dans le plan de la plaque sensible exposée derrière la trame dans le cas de réglage considéré ; cette surface est constituée par des fragments de paraboloïdes de révolution pré- sentant alternativement vers le haut leur concavité et leur convexité, raccordés entre eux par des parabo- loïdes hyperboliques; la section de cette surface par un plan passant à égale distance des sommets des deux 1 Comptes rendus de l'Académie des Sciences, 1er avril 1895. familles de paraboloïdes de révolution reproduit la dis- position en damier observée dans les demi-teintes moyennes d'un négatif tramé. — MM. Léon et Eugène Bloch : Jonisation par le phosphore et phosjhorescence : 1. L'un des auteurs a montré précédemment! qu'un courant d'air sec assez lent qui a passé sur le phos- phore est le siège d’une ionisation et que les ions pro- duits sont des ions de très faible mobilité (gros ions). Dans les expériences dont il va être question, le cou- rant d'air à été progressivement augmenté Jusqu'à des débits assez élevés. Dans ces conditions, la phospho- rescence subit une modification des plus curieuses : d’abord limitée au phosphore, elle s'allonge dans le sens du courant gazeux et, pour un débit suflisant, elle finit par se séparer du phosphore, laissant entre elle et lui un intervalle parfaitement obscur. On n'observe plus alors dans le tube qu'une colonne phos- phorescente isolée qui se déplace, sans grande diminu- tion d'éclat, en suivant les variations du débit, et qui peutse trouver à plusieurs mètres du phosphore. 2. Les auteurs ont cherché si, parallèlement à c- déplacement de la phosphorescence, on pouvait saisir un déplace- nent : 4° de la région où se produit l’ionisation; 2° de la région où se produit l’ozone. Ils ont reconnu que la phosphorescence, l'ionisation et l'ozone se produisent dans la même région, qui peut être séparée du phos- phore quand le courant gazeux est suffisamment rapide. 3. Ces faits indiquent que la phosphorescence, l’ioni- sation et l'ozone ne se produisent pas par l'oxydation directe du phosphore solide, mais par l'oxydation d’une substance émanée du phosphore et entrainée par le courant gazeux. On peut songer soit à la vapeur de phosphore, soit à l’anhydride phosphoreux. Les expé- riences de Jungileisch, de R. Schenk, F. Mihr, H. Bau- thien et et des auteurs sont en faveur de la seconde hypothèse. 4. L'ionisation par le phosphore ne serait donc qu'un cas particulier de l'ionisation par une com- bustion quelconque. De fait, les auteurs ont pu vérifier que l’un des caractères les plus remarquables de l’io- nisation par les flammes, signalé précédemment par l'un d’eux°, se retrouve dans le cas du phosphore : /a mobilité des ions produits deeroït progressivement quand on s'éloigne de la phosphorescence. — M. G. Del- valez présente diverses recherches sur /es anneaux de Nobili, les photographies colorees et les phénomènes de Hall dans les élertrolytes. 1° Mécanisme de formation des anneaux. Toute électrode parasite, plongée dans un électrolyte, dérive une partie du flux électrique qui traverse le liquide. On le voit nettement en détermi- nant la forme des surfaces équipotentielles, lorsque la lame parasite, par exemple verticale et normale aux électrodes, est immergée dans une cuve rectangulaire. C'est ce que l’auteur a constaté dans les deux cas sui- vants : 4° Lame de cuivre immergée au milieu d’une cuve contenant une solution de sulfate de cuivre (400 grammes par litre) ; 2 Lame d'argent dans le mème bain. Les équipotentielles sont normales à la lame vers le milieu de celle-ci. Si l’on place ensuite dans la mème cuve le mélange de Nobili et des lames parasites de laiton, celles-ci se couvrent de figures analogues à celles de Nobili, dont l'aspect varie avec I, /, la concen- tration. Ces dépôts sont dus à une électrolyse du mé- lange, la densité du courant quiles produit variant d'un point à l'autre. Cette électrolyse, étudiée à part, a les caractères suivants : à l’'anode, lames minces de mi- nium d’abord, puis minium en masse et altération du laiton qui se réduit en Zn°u; à la cathode, cuivre d'abord, puis, pour des densités plus fortes, mélanges de cuivre et de plomb, de plus en plus riches en plomb. L'un de ces dépôts devient bleu indigo à l'air, un autre noir: d'autres ne se colorent pas, mais n'ont pas la couleur du cuivre. 2 Photographies colorées. Si deux régions d’une lame de laiton imnergée dans le mélange de Nobili sont différemment éclairées, il y aura un RSS ‘ E. BLocu : Ann. de Chim. et de Phys.,t. 1V,1905, p. 25. , 2? BLocu : Comptes rendus, t. CXL, 1905: p. 1827, 98 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES courant entre elles, d'où formation de lames minces colorées d'une façon variable avec le temps et la diffé- rence d'éclairements. Si l'on met un négatif au-dessus de la lame et le tout au soleil, on a, en effet, une sil- houette colorée. Les blancs donnent : après 5 minutes, jaune brun; 10 minutes, lie de vin; 15 minutes, bleu indigo ; 20 minutes, vert. Les noirs donnent du bleu violacé qui pâlit ensuite. 3° Phénomène de Hall. Un champ magnétique modifie un flux électrique qui lui est normal; par suite, on peut espérer, si ce phéno- mène est intense, comme le dit Bagard (1896), que les figures de Nobili changeront d'aspect si on les produit dans un champ. Elles changent en effet considérable- ment; mais leur production est accompagnée alors de courants liquides (H — 4.050 gauss). Or, l'expérience apprend que l’électrolyse de mé anges en mouvement donne des dépôts differents de ceux qu'on obtient le liquide étant au repos. Si, pour isoler l'effet Hall, on immobilise le liquide par de la gélatine, il reste un eflet dû à ce que le colloide s'accumule autour du bloc; d'ailleur, si l’on emploie, quand on peut le faire, du papier à filtre pour l'immobiliser, il n'y a plus de défor- mations. Celles-ci sont donc uniquement dues au mou- vement de l'électrolyte. Ni l’on étudie alors les expé- riences de Bagard, on trouve qu'elles présentent une cause d'erreur systématique, due à la production de courants liquides ou d'entraînement de la surface au cours des expériences Si l'on évite cela, on n’observe plus rien (H = 4.050 gauss). Un peut enfin, pour éviter ces courants liquides, employer un courant alternatif de haut voltage (champ de 12.000 gauss). Si l’on évite des causes d'erreurs nombreu-es, on ne percoit aucun effet. Mais on peut déduire de l'expérience que le coefticient de rotation de Hall est sûrement inférieur à 5 X 10 —°, alors que Ragard lui assigne une valeur de l'ordre de 10 —6. La théorie des ions, d’après M. Donnau, permet d'expliquer le phénomène et elle donne au coefficient K une valeur en relation simple avec les différences des mobilités des ions. Elle indique que K est de l’ordre de 10—6 pour les vapeurs, 10—* pour les solutions. On est donc encore bien loin de pouvoir constater nettement le phénomène. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 5 Novembre 1908. Lord Rayleigh présente une Note sur les masearets dus aux marées, dans laquelle il donne une théorie simple du phénomène. Celle-ci le conduit à l'expres- sion de la perte d'énergie au lieu du mascaret. Cette perte d'énergie ne conslitue pas une dilficulté, étant donnée l'existence de la viscosité de l'eau; mais l'im- A cos pt M B sin pt Fig, 1. possibilité d'un gain d'énergie montre que les mouve- ments considérés ne sont pas réversibles, M'A" Campbell décrit une méthode pour comparer l'induc- tance mutuelle à la résistance au moyen des courants alternatifs biphasés. Soit M (fig. 1) l'inductance mu- tuelle etR la résistance, et soient À cos pt et B sin pt deux courants en quadrature, provenant, par exemple, d'un alternateur biphasé. Soit G un galvanomètre à vibration accordé à la fréquence », où y — 271. Quand le galvanomètre ne présente aucune déviation, la f.6. m. induite dans le circuit est nulle à chaque instant; donc : = (MA cos pi) +RB sin pé—0, d'où R = 5 M. Cette condition donne une comparaison directe entre R et M, quand p et A/B sont connus. En observant la vitesse de l'alternateur, on à p; tandis que le rapport de À à B est obtenu au moyen du voltmètre électrosta- tique V, qui est placé alternativement à travers les ré- sislance- égales 7, etr,, ou par un électrodynamomètre différentiel. En pratique, A est fait presque égal à B. On arrive à l'équilibre en faisant varier &, M ou » jus- qu'à ce que la déviation gal\anométrique devienne nulle, en maintenant la quadrature exacte par l’ajus- tage de la self induclance 2. — M. F.9.Jervis-Smith poursuit ses recherches sur la production d'une lu- iinescence dans un récepteur à vide se mouvant près d'un champ électrostatique. Un globe de silice tourne dans un champ magnétique ou électrostatique, le gaz résiduel étant de l'oxygène. L’inducteur est chargé jusqu'à ce que le globe luise; puis il est lentement déchargé avec un fil jusqu'à ce que la lueur disparaisse. En établissant le champ magnétique, une lueur bril- laute réapparaît. L'effet magnétique est moins marqué avec l'air comme gaz résiduel. En employant le néon, le globe ne donne qu'une lueur faible, rougeâtre; la lueur est peu aflectre par le champ magnétique. Si l'on tourne entre les pôles d’un électro-aimant un globe en silice en contact avec un peigne en poils de chameau, la pression de ce dernier étant assez faible pour qu'aucune lueur ne soit v sible, quand on établit un champ magnétique le glohe luit brillamment et s'éteint quand on éloigne le champ. — M. W. G. Duf- field : L'effet de la pression sur Le spectre d'arc. W. Cui- vre : À 4.000 à À 4.600. Voici les résultats obtenus par l’auteur sur le cuivre pour les longueurs d'onde indi- quées. A. Elargissement. 1° Toutes les lignes sont plus larges aux hautes pressions qu'à la pression at- mosphérique. 2 L'élargi-sement augmente avec la pression. 3v Il n’est pas symétrique, étant plus grand du côté du rouge. 4° Il est inégal pour les différentes lignes 5° Les lignes de séries deviennent comme des bandes, puis se dissipent aux pressions les plus éle- vées; les lignes non en série, quoique très élargies, restent bien définies. B. Déplacement. 1° Sous pres- sion, la partie la plus intense de chaque ligne est dé- placée de la position qu'elle occupait à la pression ordinaire. 2 Le déplacement est dans la direction de la plus grande longueur d'onde. 4° Le déplacement est réel et non pas dû à l'élargissement non symétrique. 4° Le déplacement de chaque ligne est continu et li- néaire avec la pression. #° Les lignes appartenant à la ire et à la 2° série subordonnées ont de plus grands déplacements que les lignes non en série. 6 Les dé- placements des lignes non en série sont fonctions de leur longueur d'onde. C. Renversement. Aucune ligne n'a montré de trace de renversement sous pression. D. /ntensités relatives. 1° Des changements de l'in- tensité relative des lignes ont lieu sous pression. 2° Celles de la 1r° et de la 2° sériess subordonnées dis- paraissent sous 40 atmosphères et ne réapparaissent pas à plus haute pression. 3° Les lignes de la 1"° sous- série deviennent brumeuses, semblables à des bandes, et se dissipent à haute pression. 4 Le» lignes de la 2 sous-série diminuent graduellement (d'intensité sans élargissement anormal. 5° Parmi les lignes non en sé- rie, celles qui sont nébuleuses sont renforcées. E. Zclat de Pare. L'éclat de l’arc au cuivre augmente considé- rablzment avec la pression de l'air qui l'entoure. — MM. A. T. Cameron et Sir W. Ramsay ont mesuré le spectre de l'émauation du radium sur l’émanation ac- 1 cumulée pendant 12 jours de 477 mgr. de bromure ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 99 de radium. Le dispositif qui leur a donné les meil- leurs résultats consiste à produire le spectre dans un tube entre des électrodes de cuivre. Le spectre obtenu ne renferme pas les lignes de l'hydrogène; il est très brillant et renferme un grand nombre de raies vertes, bleues et violettes, avec une ligne très peu réfrangible dans le rouge. Aucune de ces lignes ne coïncide avec une ligne du spectre des nébuleuses. — MM. le Comte de Berkeley, E. G. J. Hartley et C. V. Burton : Sur la pression osmotique des solutions aqueuses de ferro- cyanure de calcium. 1. Les solutions concentrées. Les recherches des auteurs avaient pour but de vérifier expérimentalement l'équation osmotique de A. W. Porter. Ils ont construit une membrane qui peut résis- ter à des pressions osmotiques de ferrocyanure de cal- cium atteignant 150 atmosphères sans percolation sen- sible de la solution. Ils trouvèrent que la formule ne se vérifie qu'à 3 °/, près. Mais ils reconnurent que cette formule se réfère à des pressions osmotiques dans le vide, tandis que leurs expériences étaient né- cessairement faites dans l'air à la pression ordinaire. En modifiant l'équation pour tenir compte de ce fait, les résultats expérimentaux concordent rigoureuse- ment avec ceux du calcul. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 Décembre 1908. M. J. E. Reynolds, en traitant le pyrrol potassé CH‘ AzK par le chlorure de silicium à basse tempé- rature, a obtenu, après une réaction énergique, KCI et un silicotétrapyrrol Si (AzC‘H‘}‘, F.173°. Si l’on fait réagir le silicochloroforme sur le pyrrol potassé à très basse température pour modérer la réaction, on ob- tient un liquide vert-sombre, Eb. > 2102 sous 50 mm., de composition SiH {AzC‘H‘}, et un liquide bouillant à 135° sous 50 mm., de composition SiH(AzC‘H#)CP. La pyridine donne avec SiBr* et SiCl des produits d'addition, contenant deux molécules de pyridine pour une d'halogénure. L'acétonitrile et le propionitrile fournissent aussi des produits d'addition. — M. V.H. Veley a mesuré les valeurs d’affinité de la tropine et de ses dérivés. La tropine a une affinité de beaucoup inférieure à celle de la pipéridine ; l'ecgonine {tropine- carboxylate) est un électrolyte amphotère; l'anhydro- ecgonine est une base plus forte que l’ecgonine. La cocaine est une base relativement forte ; sa valeur d’af- finité 45—2,9-X 10—7. Les tropéines (atropine et ho- matropine) ont des valeurs d’aftinité supérieures à 1.40 —7. — MM. A. W. Crossley et Ch. Gilling mon- tent que la triméthyleyclohexénone obtenue par l’ac- tion du malonate d’éthyle sur la chlorodiméthyley- clohexénone est ideutique à l'isophorone. La méthode de préparation des cétones hydroaromatiques peut être étendue en employant des éthers maloniques substitués, mais le rendement diminue à mesure qu'augmente le poids moléculaire du groupe substi- tuant. — MM. J. C. Cain et F. Nicoll répondent aux critiques de Lamplough sur leur méthode de détermi- nation de la vitesse des changements chimiques par la mesure des gaz dégagés. — MM. S. R. Best et J. F. Thorpe, en faisant réagir l’éthylate de soude sur le B-imino-a-cyano-y-phénylbutyrate d'éthyle, ont ob- tenu l'acide correspondant, que l'élimination de CO* transforme en f-imino-«-cyano-y-phénylpropane CH. CH®.C(:AzH).CH®.CAz. Traités par H?SO! concentré, le premier donne l'acide 1:3-naphtylènediamine-2-car- boxylique, le second la 1:3-naphtylènediamine. -: MM. W. N. Hartley et A. G. G. Léonard montrent que l'éther est le seul solvant convenable pour déter- miner le spectre d'absorption de la p-benzoquinone ; en solution alcoolique, sous l'influence de la lumière solaire ou des rayons ultra-violets, il y a réaction entre le solvant et le corps dissous, qui se manifeste par une réduction de ce dernier en quinol ou en quinhydrone. — M. W. N. Hartley déduit de ses recherches que la p-benzoquinone est un dérivé du benzène; sa fonction peut être soit celle d’une cétone double, soit celle d'un peroxyde, suivant les circonstances. — M.J. A. Smy- the, par l'action de HCI sur le sulfoxyde de benzyle, a obtenu : benzaldéhyde, chlorure de benzyle, benzyl- mercaptan, disulfure de benzyle, sulfure de benzyle, disulfoxyde de benzyle et benzaldéhyde-benzylmer- captan. La réaction est influencée par la température et la nature du solvant. L'auteur pense aussi que le sulfoxyde de benzyle existe sous deux formes en solu- tion. — MM. A. Slator et D. F. Twiss ont étudié les vitesses des réactions entre le thiosulfate de sodium et les composés organiques halogénés. Les composés 150 réagissent moins que les composés normaux. — M. T. P. Hilditch a déterminé le pouvoir rotatoire optique du cinnamate de menthyle seul et en solution dans divers solvants. Il conclut que ce corps est à l’état uni- moléculaire en solution acétique ou chloroformique, tandis qu'il est associé lorsqu'il est seul. — M1: M. A. Whiteley a reconnu que les dérivés mono et di-bro- més de la malonamide et de l'acide barbiturique, qui contiennent les complexes — CO.CHBr.C0 — ou — C0. CBr°.C0 —, mettent en liberté l’iode de HI à la tem- pérature ordinaire, suivant l'équation >>CBr° + #HI = > CH? + 2HBr + 2F. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 18 Décembre 1908. M. Thiesen adresse un Mémoire sur la chaleur spé- cilique des corps solides. Dans une publication anté- rieure, il avait établi et vérifié sur le platine un système de formules représentant la détente et la chaleur spé- cifique des corps solides. Dans le présent travail, il présente le résultat préliminaire d'une vérification plus générale, fondée sur les déterminations anté- rieures des chaleurs spécifiques des solides. D'après les formules en question, la chaleur spécifique et le coefficient de détente seraient proportionnels à une même puissance de la température absolue. Or, cette relation, tout empirique qu'elle soit, se montra cepen- dant bien supérieure, pour les extrapolations. aux séries de puissances jusqu'ici employées, et possède des propriétés essentielles de la loi véritable. D'accord avec les vues de M. Einstein, l’auteur admet que les atomes chimiques d’un corps solide, à la température du zéro absolu, sont maintenus par les forces élastiques dans des positions données, correspondant par exemple aux points d'entrecroisement d'un réseau à trois dimen- sions. Ces atomes exécuteraient autour de leurs posi- tions d'équilibre, aux températures supérieures, des vibrations dont les fréquences, suivant trois directions données, seraient indépendantes l’une de l’autre. L'énergie de vibration serait en équilibre avec l'énergie du rayonnement noir remplissant le corps. Ces hypo- thèses permettent de calculer la chaleur spécilique d'un corps et de déduire la loi de Dulong et Petit, comme loi-limite s'appliquant aux températures éle- vées. D'autre part, il ne serait pas impossible que, dans le cas des métaux bons conducteurs, l'influence des électrons librement mobiles, regardée comme cause de la conductivité, se fit sentir. La chaleur spécifique de ces métaux s’approcherait alors, pour des températures décroissantes, non pas de zéro, mais d’une petite valeur constante, permettant de calculer le nombre jusqu'ici inconnu des électrons de conduction. — M. O. von Baëeyer vient d'étudier /a réflexion et le rayonnement secondaire des rayons cathodiques lents. D'accord avec ses recherches antérieures, il constate, pour les rayons cathodiques partant d'une cathode d'oxyde incan- descent, et à partir d’une vitesse primaire de 5 volts, une réflexion et un rayonnement secondaire considé- rables sur les plaques métalliques. Cette réflexion décroit et le rayonnement secondaire s'accroît à mesure qu'augmente la vitesse primaire. L'intensité du rayonnement secondaire est si grande que, déjà pour une vitesse primaire d'environ 30 volts, le nombre d'électrons quittant la plaque équivaut à celui des élec- 100 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES trons qui la frappent. La condition superficielle du réflecteur est un facteur assez important pour le phé- nomène en question, landis qu'on ne constate point d'influence sûre de la matière. La suie et le noir de platine ne présentent la réflexion et le rayonnement secondaire qu à un degré extrèmement faible. — M.R. Fürstenau communique un travail sur la relation qui existe entre la température ei le rapport des chaleurs spéciliques des gaz. La méthode dont il se sert est une modification de la méthode de résonance de M. Kalähne. Pour l'air, l’auteur constate une diminution du rap- port des chaleurs spécifiques d'environ 0,2 °/, dans un intervalle allant jusqu'à 527°,2, pour l'acide carbo- pique une diminution de 3,5 °/,, et pour l'acide sulfu- reux une décroissance de 4,8°/, entre 0 et 5000, tandis que, dans le cas du chlorure d’éthyle, la diminution, dans l'intervalle de 0 à 300v, est de 3,4°/6. — M. E. Meyer présente une interprétation du nouvel effet des courants électriques signalé par M. Cantor, au dernier Congrès des Médecins et des Naturalistes allemands. Tandis que M. Cantor admet que la conduction du courant électrique dans les conducteurs métalliques s'accompagne du transport de particules inertes quit- tant le métal aux inflexions subites de la direction des fils du courant, l’auteur fait remarquer que le phéno- mène en question s'explique parfaitement par une ionisation de l'air produite par la décharge lumineuse sur le bord aigu. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 29 Octobre 1908. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. K. Zahradnik: Cons- truction des courbes rationnelles de 3° et de 4° ordres et classes au moyen des éléments incidents colli- néaires. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. F. Theissen commu- nique une monographie des espèces de Xy/aria du sud du Brésil, comprenant 40 espèces el variétés, dont plusieurs nouvelles. Ce genre se caractérise par le poly- morphisme étendu des espèces individuelles. Séance du 12 Novembre 1908. SGIENCES PHYSIQUES. — M. J. Rozice décrit une méthode pour la mesure simultanée des forces électro- motrices et des résistances internes variant d'une façon cuntinue. Le courant est décomposé, au moyen d’une double roue dentée, en deux courants alternant rapi- dement, dont chacun est conduit, à travers une résis- tance mesurable, à un galvanomètre particulier. — M. A. Wellk a étudié, au point de vue de leur teneur en émanation, 81 sources des environs de Graz; la plupart renferment de l'émanation du radium; quel- ques-unes présentent des traces d'émanation du tho- rium. La teneur est généralement élevée, particulière- ment à la source de Sainte-Radegonde, jaillissant des roches primitives, où elle atteint 12.10%. — M. A. Skra- bal a poursuivi ses recherches sur les acides hypoha- logénés et les hypohalogénites par l'étude de la cinétique de la décomposition des hypobromites en bromures et bromates en solution faiblement alcaline. Pour une concentration faible, mais constante, des ions OH, la réaction est du deuxième ordre quant à l’hypobromite. Une diminulion de la concentration des ions OH et une augmentation de celle des ions Br accélèrent la formation du bromate; la présence d’autres sels agit comme celle des bromures. Séance du 19 Novembre 1908. 1° SciENCES PHYSIQUES. — M. A. Defant à déterminé la densité de la neige au sommet du Sonnbli-k (3.106 m.) et a recounu quelle augmente régulièrement avec la profondeur Le facteur le plus important de cette éléva- tion de densité est la pression des couches sus-jacentes, qui chasse l'air se trouvant dans les pores de la neige. La neige d'altitude a une densité de 0,35, la neige de glacier de 0,55 ct la glace de glacier de 0,85. — M S. Strakosch à éludié l'intensité chimique de la lumière du jour du 15 février au 3 mars au Caire, à Luxor, Assouan et Khartoum. Pour une même hauteur du soleil, l'intensité chimique augmente à mesure qu'on s'avance vers le Sud. — M. F. Hauser décrit un appar-il pour copier les inscriptions phonographiques des plaques des Archives phonographiques de l’Aca- démie sur des cylindres Edison. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Hœrnes montre que le lac interglaciaire de Salzburg à Hellbrun s’est étendu encore de 20 km. au S.S.E. dans la partie étroite, en forme de fosse, de la brèche de Salzburg, et que, depuis la formation de ce lac (période Riss-Wurm- interglaciaire), ils’est produit une modification marquée des posilions relatives des hauteurs dans ce bassin, causée très vraisemblablement par un abaissement de la partie montagneuse méridionale interne. Séance du 3 Décembre 1908. 1° SCIENCES MATHÉMATIQ' ES. — M. L. Hanni poursuit son essai d'interprétation cinématique des équations de Maxwell en prenant en considération le principe de réciprocité de la Géométrie. Si l’on forme les différen- tielles totales des variables dépendantes entrant dans les équations de Maxwell, et si l'on considère le temps comme un paramètre, on oblient de cette facon deux systèmes équivalents aux équations de Maxwell, d'où l'on peut parvenir de trois facons differentes seule- ment aux systèmes réciproques de la Géométrie. 2° ScENCEs PHYSIQUES. — M F. Ehrenhaft, en prenant un jet de mercure excessivement mince comme cathode et un fil de fer comme anode, et employant des inten- sités de courant qui maintiennent l'arc lumineux, a obtenu, dans de l’eau absolument pure, le mercure à l'état colloïdal. Cette suspension colloïdale s'est conser- vée sans modification depuis un mois et présente en lumière tran-mise une coloration brun-sombre. — M. W. Sigmund a trouvé, dans les rameaux feuillus des espèces indigènes de saules et de peupliers, une enzyme, qu'il nomme salicase, et qui dédouble la salicine en saligénine et glucose. Deux Ericacées (myrtille et bruyère) contiennent, de même, une enzyme, qu'il nomme #rbulase, et qui dédouble l’arbutine en glucose et hydroquinone. 3° ScrENCES NATURELLES. — M. J, Wiesner à étudié le rapport entre la forme de la feuille et le besoin de lu- mière. Une division très prononcée du limbe coïncide en général avec un minimum accusé de besoins lumi- neux. Chez les arbres ou plantes qui s'ombragent avec une partie de leur feuillage, le minimum du besoin lumineux est d'autant plus accentué que le volume de la feuille est plus petit. Les feuilles de petit volume sont en général très allongées, souvent en forme d’ai- guilles. Séance du 10 Décembre 1908. 4° ScreNcEs MATHÉMATIQUES. — M. A. Wassmuth : Sur le choix de la « division canonique » des systèmes dans la Mécanique statistique. « 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. A. Wagner a profité d'un séjour de 4 semaines au sommet du Sonnblick pour mesurer la teneur en eau des nuages; elle est en moyenne de 2 gr par mètre cube. La grandeur des par- ticules de brouillard a été mesurée par la méthode optique; leur dianètre est en moyenne de 33 p. — M F.M. Exner a mesuré pendant 2 mois la tempéra- ture de l’eau du Wolfyangsee à 8 et 12 m. de profon- deux. Les deux courbes présentent une période de 24 heures et une de 8 heures très nettes, et des indices d'une période de 16 heures. L'arrivée d'un vent violent du sud-est a troublé profondément le régime des tem- pératures. La position moyenne de la couche de transi- tion brusque paraît être à 10 m. de prolondeur. ITIXTXTFTTFTFTFTFTFS.……——————_———…—… … Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. RE Paris. — L. MARETBEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE N°3 15 FÉVRIER 1909 Revue générale HA Sciences pures ef appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adregser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reprcäuction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y ccmpris 1n Suède, la Norvège et la Hollance. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Election à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 25 janvier dernier, l’Académie des Sciences de Paris a procédé à l'élection d'un membre dans sa Section de Botanique, en rem- placement de M. van Tieghem, élu Secrétaire perpétuel. La Section avait présenté : en première ligne, M. L. Mangin ; en deuxième ligne, MM. E. Bureau, J. Costan- tin et P. Dangeard. Au premier tour de scrutin, M. Mangin a obtenu 32 suffrages, M. Costantin 21, M. Bureau 2 et M. Dangeard 2. En conséquence, M. Man- gin a été déclaré élu. Le nouvel académicien est l’auteur de travaux variés dans les différentes branches de la Botanique. En Anatomie générale, il s’est surtout attaché à l'étude des membranes qui fragmentent le corps pro- toplasmique. Ses recherches ont ruiné l’ancienne con- ception de l'unité de constitution de la membrane et montré qu'il faut distinguer, dans les tissus que la lignification ou la subérisation n’a pas altérés, au moins trois groupes de substances fondamentales : la cellu- lose, les composés pectiques et la callose, possédant chacun un certain nombre de réactions caractéris- tiques. Ces réactions l'ont conduit à une méthode très sûre d'analyse des tissus, qui lui à permis d'établir la constitution de la membrane, non seulement chez les Phanérogames et certaines Cryptogames, où elle est relativement constante, mais encore chez les Champi- gnons et les Algues du plankton, où elle se montre très variable. L'étude de l'absorption de l’eau par les Lissus l’a amené à détinir la nature exacte des produits connus sous le nom de mucilages et de gommes et à élucider le mécanisme des phénomènes de gélification et de liquéfaction. A tous ces travaux se rattachent, d'une part, la construction d'appareils de recherche ou de mesure, de l’autre, la découverte de nombreuses réactions colorantes nouvelles. En Physiologie végétale, on doit à M. Mangin des recherches sur les phénomènes respiratoire et chlo- rophyllien et le mécanisme des échanges gazeux ; Préparé par ces derniers travaux, il a pu aborder un sujet encore inexploré : l'étude des conditions de la végétation dans les villes. 11 a montré que, parmi les REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. influences nombreuses qui contribuent à anémier la végétation des avenues et des boulevards, le défaut d'aération du sol est une des plus importantes. Enfin, dans le vaste domaine de la Pathologie végé- tale, M. Mangin est l’auteur de nombreux travaux, tant sur les maladies parasitaires que sur les maladies d'ordre physiologique. Ses contributions sur ce sujet n'ont pas seulement enrichi la Science; elles ont, pour les agriculteurs, un intérêt pratique de premier ordre. On voit que des titres nombreux et variés désignaient M. Mangin pour la distinction dont il vient d'être l'objet; la Aevue est heureuse de l'enregistrer et d'adresser à son éminent collaborateur ses plus chaudes félicitations. $ 2. — Astronomie La forme du Soleil. — On admet généralement que le Soleil est une sphère parfaite. Or, suivant le Professeur Charles Lane Poor, cette opinion serait quelque peu erronée. Ce savant américain conclut, en effet, de l'ensemble des observations méridiennes et des mesures héliomé- triques et photographiques, que la forme exacte de l'astre du jour nous est actuellement inconnue. Toutes les mesures accusent un écart de la forme sphérique ; mais, toutefois, la différence entre les divers rayons n'excède probablement pas 0"25. Les mesures héliométriques révèlent une fluctuation du diamètre solaire, ne surpassant pas d’ailleurs 0"10, et correspondant à la période undécennale des taches. D'autre part, les observations d’Ambronn et Schur semblent indiquer une autre période plus courte, dont la durée serait environ de vingt-huit jours. Ces constalations, quoique fort intéressantes, ne permettent cependant pas encore de déterminer la dif- férence qui doit exister entre le diamètre polaire et le diamètre équatorial. Il serait nécessaire qu'un grand nombre d'observations et de photographies, prises no- tamment à l’aide d'un héliomètre, se confirmassent mutuellement pour obtenir un résultat précis. Des recherches méthodiques sont, du reste, entreprises dans ce but. Souhaitons qu'elles aboutissent à nous révéler la véritable forme du Soleil, 102 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 3. — Mécanique Une revision des lois fondamentales de la matière et de l'énergie. — Les récentes expé- riences indiquant une variation de la masse de l’élec- tron avec la vitesse ont, de concert avecles phénomènes de radio-activité, ébranlé dans beaucoup d’esprits la foi en la validité rigoureuse de certaines lois les plus générales de la Nature. - M. G. N. Lewis‘ s’est posé la tâche de démontrer la possibilité d'établir un système simple de Mécanique, concordant avec tous les faits expérimentaux connus, tout en étant basé sur la validité des trois grandes lois de conservation (de l'énergie, de la matière et de la quantité de mouvement), auxquelles l’auteur propose d'ajouter celle de la conservation de l'électricité. L'auteur postule que l'énergie et la quantité de mou- vement d’un faisceau rayonnant sont dues à une masse se déplaçant avec la vitesse de la lumière. C’est sur cette base qu'il fait voir la dépendance mutuelle qui existe entre la masse et son contenu d'énergie. Aussi faut-il remplacer l’axiome de Newton, suivant lequel la masse d'un corps serait indépendante de sa vitesse, par un axiome où cette masse augmenterait avec l'énergie cinétique. En conservant tous les autres axiomes de la Méca- nique de Newton et en admettant la validité des trois lois de conservation, l’auteur construit un nouveau système de Mécanique où la quantité de mouvement serait mv, l'énergie cinétique intermédiaire entre 1/2 mv° — à petite vitesse — et mv°— à la vitesse de la lumière, — tandis que la masse d'un corps, étant fonction de la vitesse, deviendrait infinie à la vitesse de la lumière. L'équation obtenue par l’auteur concorde avec les expériences faites par M. Kauffmann sur la relation entre la masse et la vitesse d’un électron; d'autre part, elle ressemble d’une façon frappante aux équations établies pour la masse électromagnétique. L'auteur fait remarquer, en terminant, que, bien que la théorie s'accorde parfaitement avec une hypo- thèse modifiée de la nature corpusculaire de la lumière, elle n'implique aucunement la nécessité de cette nature spéciale. Le flux de’ masse partant d'un corps rayonnant peut, en effet, ètre soit continu, soit un système de particules discrètes. Quant à l’agent émis par les corps rayonnants, les considérations suivantes font voir qu'il ne saurait s’agir de matière dans le sens ordinaire du mot. Suivant ce que nous venons de dire, l'agent doué de masse, de quantité de mouvement et d'énergie, et qui se meut à la vitesse de la lumière dans un faisceau de lumière, n'aurait en effet, aucune éner- gie, quantité de mouvement ou masse s'il était au repos ou s'il se déplaçait à une vitesse inférieure, même de la fraction la plus petite, à la vitesse de la lumière. Ces idées, on le voit, conduisent à une conception quelque peu étrange de la nature de la lumière. D'autre part, elles offrent, en théorie, une méthode permettant de distinguer entre les mouvements absolus et relatifs. $ 4. — Art de l’Ingénieur Le transport du pétrole. — Le transport du pétrole des puits aux raffineries et aux ports d’embar- quement se fait en grande partie par des lignes de tuyaux ou Pipe Lines; mais on ne se fait pas, en général, une idée juste de l'importance et du bon marché de ce mode de transport; voici, à ce sujet, quelques renseignements Curieux, communiqués récemment par M. G. Richard à la Société d'Encourage- ment pour l'Industrie nationale. Aux Etats-Unis, ces Pipe Lines ont débuté en Pen- sylvanie, en 1865, par de petits tuyaux de 25 millimètres de diamètre et de faible longueur; mais, en 1879, le 1 Philos, Mag., n° 95, 1908, diamètre des tuyaux atteignait 130 millimètres, et l’une de ces lignes, de Hilliard’s Mills à Cleveland, avait 160 kilomètres et était alimentée par quatre stations avec pompes à vapeur; actuellement, la ligne de Oklahoma à New-York, par Chicago, a 2 240 kilomètres, et l'énorme production de pétrole des Etats-Unis, qui s'élevait, en 1907, à environ 31 millions de mètres cubes, est, en très grande partie, transportée par des lignes de tuyaux. Les réseaux les plus importants de ces lignes appar- tiennent, cela va de soi, à la Standard Oil C°. Ses cinq lignes de la région des Apalaches à la mer débitent, à elles seules, environ 19.000 mètres cubes par jour. Le prix du transport des Apalaches à New-York, Baltimore, Philadelphie.., par ces lignes, ne dépasse guère trois cents par baril, ce qui, avec un amortissement en quatorze ans et un intérêt de 5 °/, sur le prix des lignes, porte le coût total du transport à onze cents par baril, soit à environ 3 francs le mètre cube. La longueur du réseau de lignes de la Standard Oil qui dessert les puits des Apalaches, de l'Indiana, de l'Illinois, est d'environ 65.000 kilomètres, ou, à 15.000 kilomètres près, deux fois le tour de la Terre. Pour le pétrole que ne peuvent transporter ses lignes de tuyaux, la Standard- Oil emploie un matériel spécial de 2.000 wagons- citernes. Les lignes secondaires sont en tuyaux de 50 à 100 millimètres de diamètre, posés à fleur du sol ou à une faible profondeur ou même sur des chevalets. Elles débouchent soit dans des réservoirs, soit directe- ment dans les lignes principales, souvent de 300 milli- mètres de diamètre, alimentées par des stations de pompes espacées de 50 à 110 kilomètres. La pose de ces tuyaux en fer ou en acier est toute une affaire de nivellement très précis et d'ajustage rigoureux ; mais une ligne bien établie, et fonctionnant sous une pression ne dépassant pas soixante-dix atmosphères, peut durer vingt-cinq ans. On a avantage à augmenter le plus possible leur diamètre, parce que leur débit. croit, à pression effective ou charge égale, comme la puissance 5/2 du diamètre, c'est-à-dire plus vite que proportionnellement à la section, en raison de la diminution du frottement avec le diamètre; et l’on peut réduire encore ce frottement par l'emploi de tuyaux rayés. Ces Pipe Lines ne se rencontrent pas seulement aux Etats-Unis; on les retrouve dans toutes les grandes exploitations de pétrole, notamment dans la région de Bakou, dont l'une des lignes, qui franchit le Caucase, a une longueur de 960 kilomètres. Elles procurent, toutes les fois que le débit des puits en vaut la peine, le mode de transport le plus sûr et le plus écono- mique du pétrole. $ 5. — Chimie La nouvelle Table internationale des Poids atomiques.-— La Commission internationale des Poids atomiques, composée de MM. Clarke, Ost- wald, Thorpe et Urbain, vient de publier son Rapport pour 1909. Depuis plusieurs années, les valeurs fonda- mentales des poids atomiques, desquelles on déduit toutes les autres, comme celles de l'hydrogène, de l'azote, du chlore, de l'argent, etc., ont été soumises, de la part de divers expérimentateurs, à une revision soignée, qui à conduit à des chiffres légèrement diffé-. rents des nombres classiques. La Commission interna- tionale, avant de donner son approbation aux valeurs nouvelles, a tenu, avec juste raison, à ce qu'elles fussent confirmées par un nombre suffisant d'expé- riences; mais aujourd'hui, devant les résultats concor- dants des travaux de physico-chimistes de marque, comme T.-W. Richards et ses collaborateurs en Amé- rique, Ph.-A. Guye et ses collaborateurs à Genève, et d'autres, elle a résolu de procéder à une refonte géné- rale de la Table des poids atomiques. ÿ Les valeurs fondamentales, qui ont servi de base,. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ont 6té fixées comme suit, d'après les plus récentes déterminations : H — 1,008 Br — 19,916 CO —12,000 Ag 107,880 Az 14,007 { — 39,095 C1 = 35,460 S — 32,010 Nous reproduisons ci-après la table générale revisée, donnant les poids atomiques de tous les éléments connus; on s’est arrêté à la 2° décimale, la 3° décimale offrant généralement quelque incertitude : Ag Argent 107,88 Mo Molybdène . . 96,0 AÏ Aluminium . 27,1 Na: Sodium . ...=. 23,00 Ar Argon. 39,9 NDENIODIum 0375 As Arsenic . 15,0 Nd Néodyme . 144,3 AMONT. 197,2 NeRNÉONIER 20) Az Azote . 14,01 NTRBNICKELEE SN 058 08 B Bore 11,0 OMROxXYLÈNEM MEME 600 Ba Baryum. da: A7 Os Osmium . .. 190,9 Be Béryllium. . . RE P Phosphore 31,0 Bi Bismuth . 208,0 Pb Plomb . 207,10 Br Brome . 19,92 Pd Palladium. . . 106,7 CG Carbone... . . … 12,00. Pr, Praséedyme. 140,6 CaMCaleune EE M0 09 UP Platine 195,0 Cd Cadmium . . . Radium . 226,4 Ce Cérium . Rb Rubidium . . . 85,45 Cl Chlore. . Rh Rhodium . . , 402,9 Co Cobalt. . . . Ru Ruthénium 101,7 Cr Chrome... £ S Soufre . . .. 32,07 Cs Cæsium. 132,81 Sb Antimoine . . 120,2 Cu Cuivre. . . . 63,57 Sc Scandium. . . 44,1 Dy Dysprosium . . 162,5 SEMSÉleUESE RE ErLErbium : . . . 167,4 SIRIONICIUNE 1082879 Eu Europium. 152,0 Sm Samarium. 150,4 F Dex en Mie D Sr Strontium. 87,62 Ga Gallium. . . . 69,9 Ta Tantale . . . . 181,0 Gd Gadolinium . . 157,3 Th Terbium . .. 159,2 Ge Germanium . . 72,5 Te Tellure 497,5 H Hydrogène . . 1:00 ST ONIUE- 1002327102) He Hélium: . . . . 4,0 DTA EP EAST Hg Mercure. . 2h0.,0 TI Thallium . . . 204,0 ; ne . 426,92" Tu Thulium ù nAIndium: : . .. 114,8 U Uranium 5 Rlriditnn 0310193; 1 M Vanadium: .-: 51,2 É Hour ; + 10 W peine : 184,0 r Krypton. 1,8 XP XENONT SE 0 MU2S La Lanthane . . . 139,0 Y Yitrium. PS0 0 Li Lithium. . .. 1,00 Yb Ytterbium (néo- Rene den Zn Ze 00 00.01 agnes _Lo2t 02 etre al epde Je Mn Manganèse RO ON ZT ZITCONIULNN 9026 $ 6. — Hygiène publique Les dangers du ferrosilicium. — Un acci- dent récent vient d'attirer l'attention sur les dangers résultant du transport d’un produit qui commence à prendre une certaine importance en métallurgie : le ferro-silicium. Le 12 décembre dernier, 5 émigrants russes quittaient Anvers pour Grimsby par le navire Ashton; le soir du même jour, on remarqua qu'ils étaient souffrants, ce qu’on attribua naturellement au mal de mer. Le lendemain matin, 4 étaient morts et le dernier était à l'agonie. Ces émigrants étaient logés dans l’entrepont, direc- tement au-dessus de la soute d’avant, qui contenait, entre autres choses, 9 tonnes de ferro-silicium en barils. L'enquête faite par les autorités anglaises à l’ar- rivée conduisit à reconnaître que la mort de ces cinq personnes était due à un empoisonnement par des gaz toxiques dégagés de cet alliage. Le ferro-silicium con- tient, en effet, du fer, du silicium, du carbone, du phosphore et de l’arsenic; il dégage, même à l’état sec, cinq gaz : AsH°, PH, C°H?, SH? et H, dont les quatre premiers sont des poisons violents. A l'humidité, la quantité de gaz dégagés peut s'élever jusqu’au triple. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois qu'un accident de cette nature se produit. L'année dernière, 4 passa- gers du navire suédois Olaf Wijk décédèrent dans des conditions analogues, et un Rapport du Professeur Cronquist,de Stockholm, attribua également la mort aux 103 gaz dégagés par le ferro-silicium. A la suite de ce Rap- port, le Gouvernement suédois a édicté des mesures sévères concernant le transport du ferro-silicium : sur les navires à passagers, il doit être arrimé sur le pont en plein air et loin des cabines; en chemin de fer, il doit voyager sur des trucks ouverts et sous des bâches imperméables. Le transport en barils étanches doit être évité, car, dans ce cas, il peut se produire des explosions très vio- lentes, dont la cause n’est pas complètement élucidée *, $ 7. — Enseignement École coloniale d'Agriculture de Tunis. — La Revue est heureuse d'apprendre la nomination de M. Chervin, Chef de Bureau à la Direction de l'Agri- culture de la Régence, comme Directeur de l'Ecole coloniale d'Agriculture de Tunis. La compétence de M. Chervin, qu'elle a pu apprécier à diverses reprises, est un sûr garant que la Direction de cette Ecole est mise en bonnes mains. Fondée en vue de donner à ses élèves les connaissances théoriques et pratiques nécessaires pour l'exploitation raisonnée du sol en Tunisie et en Algérie, ainsi que dans nos possessions éloignées, l'Ecole de Tunis, qui peut être rangée parmi les Ecoles supérieures d’Agri- culture, est une des plus heureuses créations de la Métropole. La mise en valeur de nos colonies ne pour- rait que gagner à ce qu’elle fàt mieux connue et à ce qu'un certain nombre de jeunes Français, doués d’int- tiative, en prissent le chemin. $ 8. — Congrès Le S0: Congrès des Naturalistes etMédecins allemands. — Lesnaturalistes et médecins allemands ont tenu leur 80° Congrès annuel à Cologne du 20 au 26 septembre dernier. Un grand nombre de communi- cations, se rapportant surtout aux Sciences physiques, y ont été présentées. Nous donnons ci-après l'analyse de quelques-uns des plus importants de ces travaux. M. H. Strache a présenté une interprétation, fondée sur la théorie des électrons, du système périodique des éléments. L'auteur adopte la facon de penser de cer- tains savants au sujet de l'identité des électrons avec les particules ultimes de l’éther universel; il généralise cette hypothèse en considérant les particules ullimes des atomes, les corpuscules, comme étant, à leur tour, identiques aux particules de léther ainsi qu'aux électrons. La force attractive exercée entre les cor- puscules, à grande distance, la gravitation, se trans- formerait en une force répulsive pour les distances très faibles qui séparent les atomes et les molécules. L’au- teur admet, pour des distances décroissantes, des alternances successives d'attractions et de répulsions de plus en plus intenses, et c’est sur la base de cette hypothèse qu'il explique la presque totalité des phéno- mènes naturels. Or, entre les distances d'attraction et de répulsion, il y a évidemment des positions d’équi- libre, vers lesquelles les corpuscules tendent à retour- ner. L'éther universel serait constitué par un système de corpuscules occupant des positions d'équilibre à distance relativement considérable ; les atomes de nos substances matérielles se composeraient, d'autre part, d’un amas de corpuscules accumulés dans des positions d'équilibre plus rapprochées. Ges atomes doivent, par conséquent, pouvoir se déplacer à travers les particules relativement peu distantes comme à travers les mailles d’un tamis, et l’éther peut pénétrer toutes les substances. Les tensions prenant naissance au sein de cet éther comme dans une masse de caoutchouc peuvent être de deux espèces, suivant qu'il s’agit d'une force attractive ou répulsive centrale rapprochant ou écartant les par- ticules de l’éther (ce qui correspond au cas d’une charge négative ou posilive engendrée par un champ élec- CD A A eq 4 ne sb tee Se ! Engincerinr, numéro du 25 décembre 1908, p. S51. 10% CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE rique), où d'un déplacement des particules parallèle- ment à la surface d'un corps, par exemple, d'un fil métallique (ce qui donnerait un champ magnétique). Le courant électrique consisterait en un déplacement de particules de l’éther (électrons) à travers la substance du conducteur du pôle négatif au positif. C'est sur cette base qu'on explique tous les phénomènes magné- tiques et électriques. D'autre part, les atomes matériels des corps exercent naturellement à leur tour, sur . léther environnant, une force attirante ou repoussante suivant les distances qui séparent les corpuscules de leur surface des corpuseules de l’éther les plus proches. Si un petit atôme attire les particules d’éther environ- nantes, un atome plus grand exercera déjà un effet répulsif, et un atome plus grand encore un effet de nouveau attractif, ete. Or, comme l'effet exercé sur les particules de l’éther équivaut à une charge électrique, on comprend que, pour des poids atomiques croissants (et des dimensions atomiques de plus en plus grandes), les éléments présentent des caractères alternativement électro-positifs et négatifs. Un atome électro-positif peut être déchargé par l'addition d'une ou plusieurs particules d’éther (électrons), de même qu'un atome électro-négatif est privé de son effet sur léther, en lui retirant une ou plusieurs particules pareilles. Or, suivant le nombre de particules d’éther néces- saires pour la saturation, on appellera les éléments monovalents, bivalents, trivalents, etc. Après la com- binaison (due à l'attraction mutuelle d’atomes à charge opposée) d'un atome positif bivalent et d'un atome négatif monovalent, il manquera une particule d'éther et, pour saturer les valences (comme on dit en Chimie), il faudra l'addition d'un atomenégatif ultérieur. La plupart des autres propriétés des éléments, dépen- dant de l'influence mutuelle entre leurs atomes et l'éther, doivent à leur tour changer périodiquement avec le poids atomique : c'est justement ce qu'exprime ème périodique des éléments, dont l’auteur donne un tableau graphique montrant toutes ces relations et suivant lequel il prédit l'existence de quatre éléments nouveaux de poids atomiques égaux à 99, 179, 223, 23%. Comme les particules de l'éther (électrons) interposées entre les atomes des métaux (c'est-à-dire des substances électro-positives) ne sauraient occuper des positions d'équilibre stables, elles doivent, comme les molécules d'un liquide, être librement mobiles entre elles. C'est ce qui explique la conductivité électrique et l’opacité des métaux. La production des ondes hertziennes s'ex- plique par les vibrations imprimées aux particules d'éther entrainées le long d’un fil, en directions alter- nantes, sous l’action d’un courant alternatif. Les mêmes hypothèses expliquent la rotation du plan de polarisa- tion produite par le champ magnétique, les cristaux ou les molécules asymétriques, ainsi que le fait que les réactions chimiques sont liées à des températures don- nées, et bien d’autres caractères de ces réactions. Les variations des états physiques, l’ensemble des phéno- mènes électriques et magnétiques et jusqu'à la radio- activité s'expliquent parfaitement sur cette base com- mune. M. À. L. Bernouilli a adressé une Note sur /a désa- qgrégation atomique et les spectres de série. En partant d'un énoncé spécialisé de l'hypothèse de dissocia- tion formulée par Lockyer, les poids atomiques étant considérés comme moyennes cinétiques, l’auteur a obtenu, pour ces poids, une formule qui reproduit avec une précision remarquable, à l’aide d'une seule “onstante universelle et de deux paramètres à nombres entiers, tous les poids atomiques jusqu'ici connus. L'accord entre les valeurs expérimentales et théoriques devient de plus en plus frappant à mesure que se perfectionnent les méthodes d’expérimentation. L'au- teur considère tout élément chimique, à l’état gazeux ou en solution fortement dissociée, comme une condi- tion, détermine. exclusivement par la pression et la température, d'un même elément fondamental, Yhydro- gene, par exemple. De la théorie de la dissociation gra- duelle des vapeurs, on tire la conclusion que chaque genre de molécule polymère, virtuel, devient instable au delà d’une limite supérieure des pressions et des températures. C’est ainsi que le premier élément se composerait d’atomes M non polymérisés de la subs- tance fondamentale; le second élément, d’un mélange. à l’état d'équilibre, des genres M‘ et M°; un troisième élément, des genres M',M°,M;, etc. En supposant que le rayonnement thermique de ces mélanges gazeux obéit à la loi des rayonnements de Rayleigh, on déduit du second théorème fondamental ce résultat qu'un certain nombre de coefficients de distribution constants sont identiques entre eux. Or, à l’aide de ces mêmes hypo- thèses, l'auteur réussit à établir une théorie cinétique des spectres de série, théorie qui, non seulement est aussi utile que les autres, mais qui embrasse le pro- blème du déplacement des pressions des lignes de série et celui des spectres de bandes, M. J. Classen a déterminé de nouveau, pour les rayons cathodiques, le rapport :/4, sur la base de la déviation magnétique de ces rayons et de la chute de potentiel communiquant aux électrons la vitesse dont ils sont doués. Deux bobines d'un rayon moyen de 28 centi- mètres et de 900 spires (en 30 couches), disposées à la distance mutuelle de leurs rayons, engendraient un champ magnétique bien défini et aussi homogène que possible. Les rayons cathodiques étaient produits au sein de la portion homogène de ce champ. La valeur trouvée par les auteurs, à savoir blanc (+). Il est certain que ce n’est point la luminosité de couleur qui joue ici un rôle prépondérant ; la comparaison attentive des réactions tropiques des Pagures (animaux positifs) avec celles des Lineus (négatifs) et surtout celles des Zoées (positifs), vis- ROMUALD MINKIEWICZ — L'INSTINCT DE DÉGUISEMENT CHEZ LES CRUSTACÉS 113 à-vis des mêmes rayons chromatiques, en donne des preuves suffisantes. Dans le cas des Pagures, le jaune est beaucoup moins tropique, non seule- ment par rapport au vert, mais aussi par rapport aux couleurs aussi peu lumineuses que le bleu et le violet. VIE. L'INVERSION EXPÉRIMENTALE DU CHROMOTROPISME. Ainsi, (out rayon chromatique à une action spé- cilique, autonome et indépendante de laction des autres rayons chromaltiques et de celle de la lumière blanche. Mais cette constatation, bien que très impor- tante, ne nous donnerait pas le moyen d'appro- fondir l'analyse de l'instinct de déguisement, si je n'avais pas oblenu en même temps l'inversion du chromotropisme. Après des recherches longues et infructueuses avec des solutions isotoniques de chlorures divers, avec de l’eau de mer concentrée, etc., je suis arrivé au but d'une facon tout inattendue, par un procédé extrêmement simple : l’addition d’eau distillée (de 25 à 80 centimètres cubes pour 100 centimètres cubes d'eau de mer). Placés dans cette solution, les Lineus ruber, le lendemain, deviennent fous ianthinotropes : tout en restant négatifs par rapport à la lumière blanche, ils se dirigent maintenant vers les rayons les plus réfrangibles du spectre, aussi exactement qu'ils les avaient fuis auparavant. C'est par ce procédé que j'ai pu séparer le chromotropisme du phototropisme, et prouver ainsi d'une manière incontestable son autonomie fonctionnelle, dont j'ai parlé plus haut. Si, auparavant, les Lineus normaux, mis dans un tube horizontal, parallèle à la source lumineuse et placé derrière une série de plaques diversement colorées, s'assemblaient fous sous la plaque rouge, ou bien, en son absence, sous celle qui laissait passer les rayons les moins réfrangibles, mainte- nant invertis, ils s’assembleront fous sous les plaques qui laissent passer les plus réfrangibles. Ainsi, le changement dans l’état physiologique de l’organisme, sous l'influence de la dilution du milieu ambiant, amène le changement de toutes les réactions dues au chromotropisme. Mais ce n'est pas l'Aydratation qui serait néces- sairement liée au janthinotropisme des Lineus, ni la déshydratation à l'érythrotropisme, comme on pourrait le croire d’aprèsles opinions soutenues par G. Bohn'. Les faits suivants le démontrent bien : 1° L'inversion du chromotropisme des Némertes, ? G. Boux : Attractions et oscillations des animaux ma- rins littoraux sous l'influence de la lumière. Mém. Inst. gén. psychologique, t. I. apparaissant le deuxième jour, continue, en géné- ral, deux jours et disparaît le quatrième. L'animal devient normal-érythrotrope. 2 Après avoir vécu pendant deux ou trois semaines dans mes solutions (eau de mer avec eau distillée), et présentant par conséquent leur chro- motropisme normal (érythrotropisme), les Lineus le changent de nouveau lorsqu'on les transporte dans l'eau de mer pure et deviennent de nouveau jianthi- notropes. Ce serait donc plutôt le trouble de l'équilibre physiologique qui provoquerait l’inversion du tro- pisme, ce qui concorde bien avec mes expériences récentes sur les Pagures. Laissons vivre un Pagure normal et chlorotrope (comme nous le savons bien maintenant) dans une cuvette carrée bicolore, d'un à deux litres, sans y changer l’eau. Essayons de temps en temps son chromotropisme, en le mettant sur la ligne qui délimite les deux couleurs. Quelques jours après, nous verrons l'animal, intoxiqué peu à peu par les produits de ses excré- tions, changer le sens de son chromotropisme et devenir nettement érythrotrope (et négatif vis-à-vis des écrans blancs). L'échelle des valeurs tropiques des différentes teintes reste la même, mais elle décroit vers le vert et le blanc, dont l’action néga- tive est la plus forte, selon la formule : (+) noir <- rouge <-— jaune <-— bleu <— violet <— vert <— blanc (—). Ainsi, sur le fond vert-violet, les Pagures se diri- gent vers le violet, bien qu'ils soient négativemen phototropes et érythrotropes, ce qui confirme une fois de plus l'autonomie relative des actions tro- piques des diverses radiations lumineuses. Ce qui est essentiel pour nous, c’est : 1° que le changement du chromotropisme n’est plus la pos- sibilité à priori, mais le fait concret, expérimen- talement établi; 2° que le trouble de l'équilibre physiologique, qui détermine ces changements, peut être provoqué par les agents les plus divers. VIII. — LE CHROMOTROPISME VARIABLE DE L HIPPOLYIE COMME PHÉNOMÈNE NORMAL, ACCOMPAGNANT LEUR SYNCHROMATISME. N'est-il pas possible que, parmi les agents qui provoquent le changement du chromotropisme, se trouvent aussi les agents lumineux et surtout les propriétés chromatiques du milieu ambiant? On sait depuis longtemps qu'il existe un rapport intime entre le phototropisme d'un animal et l'intensité de l'éclairage auquel on le soumet. D'abord Groom et Lœb ‘sur les larves de Zalanus, 1 Grow v. Luez : Der Ilelivtropismus der Nauplien von 114 ROMUALD MINKIEWICZ — L'INSTINCT DE DÉGUISEMENT CHEZ LES CRUSTACÉS ensuite G.-H. Parker sur le copépode Zabidocera, S.-J. Holmes sur l’amphipode Orchestia ainsi que sur le flagellé Vo/rox, G.-P. Adams sur l'annélide Allobophora, ete., ont montré que les changements du pholotropisme positif en négatif ou inverse- ment se produisent sous l'influence seule de l’inten- sité de l'éclairage, c’est à-dire de l'amplitude d'onde des radiations lumineuses. Il n’est donc pas impossible, au moins à priori, de trouver des cas analogues, où l’inversion du chromotropisme se produirait sous l'influence seule de la longueur d'onde des radiations lumi- neuses, autrement dit de leur qualité chromatique. Il est nécessaire, bien entendu, que les êtres chez lesquels on pourrait élablir ce phénomène soient extrèmement sensibles par rapport aux agents lumineux. Ils doivent être doués d’une telle plasticité de leur organisation senso-motlrice que son état puisse être changé sous l’action directe du milieu chro- matique el que ce changement puisse se mani- fester par leurs mouvements tropiques. Le nombre des êtres pareils est évidemment très restreint. Pour le moment, je ne connais que les petites crevettes du genre Æippolyte varians, d'un côté, et les crabes qui se déguisent, de l’autre (au moins les Aa ja). C'est grâce aux travaux de deux biologistes anglais, MM. Keeble et Gamble", que j'ai pris con- naissance de ce phénomène chez l'Æippolyte. Qu'il me soit permis de reproduire ici un des passages de leur premier travail : « Les crevettes manifestent le pouvoir de choisir leur algue, ce qui est démontré sur les figures 1-9 (planches 32 el 33), représen- tant les crevettes placées dans une cuvette pleine d'eau, dans laquelle on a mis ensuite des morceaux d'algues de couleur différente. Les crevettes ont été laissées libres de choisir leurs algues, et leur choix correspondait admirablement à leur coloration... Dans d'autres cas, l'observation directe montre que les crevettes vertes affectionnent les Zostères |ver- tes!}, les crevettes brunes seules les Æalidrys et Dictyota [algues brunes!] », Ce phénomène, que les auteurs anglais qualifient de choix (power of selection), n’est que le chromo- tropisme, seulement fort compliqué, très différen- üel et, si l'on veut, 1ndividuel. C'est pour ce phénomène que j'ai proposé le nom objectif du chromotropisme synchromatique, nom définissant bien tout son caractère spécifique. Mais qu'est-ce donc que ces variétés chroma- Balanus perloratus und die periodischen Tiefenwande- rungen pelagischer Tiere. Biol. Ceutralbl., L. X. KeBBLE a. GAMBLE : Hippolyte varinns, a study in Co- lour-change, Quart, J, of Mier. Se, t. XLUI, pp. 604-602. tiques des Hippolyte, ayant chacune son chromo- tropisme synchrome ? Dans le troisième Mémoire de Keeble et Gamble", au chapitre intitulé Sympathetic coloration, nous lisons que les jeunes individus, encore incolores ou presque incolores, prennent rapidement la cou- leur des Algues sur lesquelles on les à mis. Ce qui est encore plus intéressant, c'est que non seulement les individus jeunes colorés, mais aussi les adultes ayant été transportés sur des fonds (pa- piers) d’une autre couleur, changent facilement leur couleur initiale et en prennent une nouvelle, qui est précisément celle du support. Voici les principaux résultats des expériences que j'ai faites sur ce sujet à Roscoff en 1906-1907 : 1° J'ai obtenu de nombreuses Hippolyte de cou- leur suivante : A. Couleurs simples, c’est-à-dire où les pig- ments correspondants sont seuls dilatés : a) Rouge : foncé et clair; D) Jaune : foncé, clair et blanchâtre ; c) Bleu et bleuâtre (transparent); B. Couleurs composées : d) Orange (pigment jaune + pigment rouge) ; e) Vert : citron et olive (p. jaune + p. bleu en mélanges différents); f) Violet : foncé et lilas (p. rouge + p. bleu. Sans compter les couleurs habituelles — verte, brune et brunâtre (les deux dernières composées des pigments rouge + jaune + bleu). Ainsi, j'ai obtenu toutes les couleurs fondamen- tales du spectre solaire avee de nombreuses nuances, correspondant toujours à la couleur du papier employé. Î Ce qui est frappant, dans les résultats ci-dessus, ce sont les couleurs vives jaune, bleue et violette, qu'on ne rencontre pas dans le milieu naturel des Hippolyte, habitant les herbiers et les algues. Il résulterait de ce fait que l'étendue de la plasti- cité chromatique des Æippolyte n’est point due à la sélection naturelle, qu'elle est d’origine primaire et dépend directement des agents chromatiques du milieu. 2 Toute variété chromatique, naturelle où ob- tenue expérimentalement, peut être changée en n'importe quelle autre. 3° L'intensité de l'éclairage coloré joue un rôle beaucoup moins important que sa qualité chroma- tique; c’est ce qu'on peut conclure, du moins, des : expériences de 1906, où j'ai obtenu les mêmes colorations des /Zippolyte avec des intensités variées de l'éclairage, dans de petits cristallisoirs, enveloppés de fins papiers de couleur. Cette mé- ! Keëgce a. Gameze : The Colour physiology of higher Crustacea. Part. HI. Phil, Trans., série B, t. CLXXXX VII. ROMUALD MINKIEWICZ — L'INSTINCT DE DÉGUISEMENT CHEZ LES CRUSTACÉS 115 thode est bien un peu trop primitive, mais elle est la seule dont j'aie pu me servir. #° Il existe des ZZippolyte très rebelles aux chan- gements (jusqu'à huit jours et plus). Mais, si elles arrivent à changer de couleur, ce n’est qu'après la mue’ qu'apparaitce changement, soit en partie, soit en lolalité. Ce qui prouve que la mue n'est point un processus externe, mais un processus qui affecte tous les tissus en augmentant leur plasticité. 5° Une fois changée, la couleur des Æippolyte, même ,chez les plus rebelles, devient plastique et peut être changée avec une rapidité frappante, quelquefois dans une dizaine de minutes. Le fait me parait fort intéressant, parce qu'il démontre le rôle que peut avoir l'habitude (dans le sens purement physiologique du mot), c’est-à-dire « l’emploi ou le défaut d'emploi » d'un organe (comme le disait Lamarck) dans la formation des variétés stables d’un animal, primitivemenr ,,2lv- chrome. Ainsi, les idées de Lamarck, plus d'une fois tournées en dérision, reprendraient la place qui leur est due. Or, les variétés chromatiques des Hippolytene se développent qu'individuellement, sans être hérédi- laires. Et, puisque chacun de ces individus diversement colorés a, d'après les observations de Keeble et Gamble, son chromotropisme correspondant spéci- fique, il est évident qu'en acquérant sa coloration il acquiert simultanément son chromotropisme synchrome. La couleur et le chromotropisme sont ici tous les deux liés intimement; ils sont toujours synchromes avec la couleur du milieu, sous l'action directe duquel ils se développent chaque fois par une sorte de résonnance de l'organisme entier, aussi bien de ses chromatophores et de sa « rétine » que de son appareil neuro-musculaire. Il m'est impossible de m'occuper ici de la question de cette résonnance chromo-cinétique, à laquelle je consacrerai un cha- pitre spécial dans mon travail prochain. J'ai voulu seulement insister sur ce parallélisme constant de la couleur variable avec le chromotropisme va- riable. Il serait fort important et intéressant d'étudier, par voie expérimentale, la marche progressive des changements de ces deux phénomènes; d'essayer d'établir si ces changements sont absolument simultanés ou s'ils se succèdent dans le temps, le parallélisme n'étant alors que le stade définitif du processus physiologique. C'est là un problème digne de tenter un biolo- La mue des Hippolyte, comme chez beaucoup d'autres Crustacés, s'effectue habituellement pendant la nuit. giste el qui, je crois, n'est pas impossible à ré- soudre. Il est certain, d'après mes recherches, que le pouvoir d'effectuer les changements de couleur diminue avec le défaut prolongé d'emploi de la plasticité chromatique de l'animal. 11 est probable que, dans des conditions constantes du milieu coloré, la plasticité des chromatophores, diminuant alors peu à peu, deviendrait nulle (dans un temps assez long). La couleur serait alors constante. Le chromotropisme perdrait-il aussi sa réson- nance synchrome? Je n'en sais rien. Mais il est probable à priori qu'il existe des êtres qui, ayant perdu complètement leur pouvoir de changer de couleur, à cause de la structure anatomique de leurs téguments, ont conservé ou évolué leur plas- ticité chromotropique et leur résonnance chromo- cinétique des mouvements instinelifs. Tel est le cas de nos Afaja. Et nous voilà ramenés enfin vers le sujet immé- diat de l'analyse présente. IX. — LE « CHoix « DES COULEURS, COMME SYN- CHROMATISME INSTINETIF VARIABLE, DÙÜ A LA RÉSON- NANCE CHROMO-CINÉTIQUE DE L'ANIMAL, Nous sommes fort heureux d’être aidé, dans cette question difficile, par les preuves objectives que nous présentent les Maja par leur costume, comme les Hippolyte en présentaient par leur couleur organique. Le costume nous indiquerait chaque fois le passé chromatique des crabes, le milieu dans lequel les crabes ont vécu. Le « choix » des couleurs se pré- sente alors sous l’aspect suivant : $ 1. — Le « choix » du costume. L'animal, mis dans un milieu coloré, — vert, par exemple, — en acquérant sous l'influence directe du milieu, par résonnance chromo-cinétique, le chromotropisme correspondant (synchrome), de- vientchlorotrope,etpar conséquent négatif vis-à-vis des autres couleurs. S'il trouve des papiers de couleur, il ne peut prendre (c'est-à-dire s'approcher) ni des rouges, ni des blancs, ele., ces couleurs fai- sant, dans l'aquarium vert, des surfaces négatives (repoussantes) pour l’animal accordé chlorotro- piquement. Il se déguisera donc en vert, qu'il rencontrera en errant sur les surfaces vertes. Il en est de même dans un milieu de n'importe quelle couleur, excepté le milieu noir. On comprendra maintenant, ce qui serait inex- plicable autrement, pourquoi le costume ancien. dans les expériences du chapitre II, $ 4, n'avait au- cune influence sur la couleur du costume nouveau. 116 ROMUALD MINKIEWICZ On comprendra aussi maintenant pourquoi on | ne doit pas mettre de papiers ni trop grands, ni | trop nombreux, la couleur propre de l'aquarium | diminuant relativement son influence décisive. Les | papiers ne peuvent être pourtant trop petits, les surfaces tropiques négatives n’effectuant alors aucune action ou une action trop faible pour em- pêcher l'animal d'en approcher. On comprendra encore pourquoi les crabes, dans de nombreuses expériences, avaient sorti tous les papiers synchromes, n'ayant point touché aux papiers dissonnants, quoique ceux-ci fussent là en quantité considérable. S $ 2. — Le « choix » du milieu. Les animaux se déguisent dans les aquariums préparatoires d'une certaine couleur et ne conte- nant que des papiers de la même couleur. l'action directe de ce milieu, ils acquièrent le chro- motropisme correspondant. Une fois mis dans des conditions où le chromotropisme peut s'effectuer, comme dans nos expériences du chapitre IL, $ 2, dans l'aquarium divisé en deux moitiés diverse- ment colorées, les crabes se dirigent vers le milieu correspondant. Le costume lui-même ne joue aucun rôle dans ce phénomène. Il ne sert ici qu'à l'expé- rimentateur, en constituant une vraie recognition mark, grâce à laquelle on ne peut se tromper sur le passé chromatique de l'animal. Afin de confirmer cette manière d'envisager les faits, je suis allé encore une fois à Villefranche, spé- cialement pour exécuter quelques expériences nou- velles et me procurer des arguments irréfutables : 1° J'ai élevé quelques W/aja durant un certain temps dans des aquariums colorés, sans leur donner de matériel pour le costume. J'ai étudié ensuite leurs réactions vis-à-vis des surfaces colorées d'un autre aquarium, divisé en deux. Le chromotro- pisme correspondant s'était établi sans costume ; 2° Dans un aquarium d'une couleur quelconque, par exemple rouge, j'ai remarqué le coin « favori » où se serraient d'habitude mes crabes thigmotropes. Ensuite, j'ai coloré ce coin d'une couleur différente, verle par exemple. Sous Et voici que les crabes accordés pour le rouge ne venaient plus dans ce coin vert, qui présentait maintenant la surface négativement tropique. Plus d'une fois, je les ai rencontrés près de la limite de celte surface, où ils s'arrétaient et reculaient après quelque temps. Alors, j'ai changé le coin dissonnant. Les crabes le fréquentaient de nouveau, mais ils ne pouvaient dépasser maintenant la limite du nouveau coin négalif. Ces deux séries récentes d'expériences sont, à ce qu'il me semble, assez concluantes. L'INSTINCT DE DÉGUISEMENT CHEZ LES CRUSTACÉS $ 3. — Les « erreurs » de l'instinct. Elles n'existent plus dans notre manière d’ex- pliquer les faits de déguisement. Dans l'aquarium noir, l'action chromotropique du milieu étant nulle, chaque surface colorée (papiers) qui se trouverait là exercerait une action positive ; l'animal se dirigerait vers elle et se dégui- serait éventuellement avec du papier coloré et non avec du papier noir, qui n'exerce aucune action. Il peut en prendre quelquefois, s'il le rencontre par hasard sur son chemin vers le papier tropique; mais cela n'arrive que fort rarement. Si nous rapprochons encore une fois les faits de synchromatisme histologique des Hippolyte avec les faits de synchromatisme accidentel ou instinctif des Maja, nous verrons que l'essentiel des deux phénomènes est identique, et qu’il con- siste en une résonnance chromo-cinétique en ré- ponse aux agents lumineux du milieu. Cette résonnance, par l'intermédiaire de la voie rétino-neurale, se manifeste chez les ippolyte par les phénomènes cinétiques des chromatophores, tandis que, chez les Maja, elle se traduit par les phénomènes chromo-cinétiques de l'animal tout entier, c'est-à-dire par des mouvements chromo- tropes qui, forcément, déterminent le déguisement correspondant. Voici tout ce que j'ai à communiquer sur l’ana- lyse expérimentale de l'instinct qui porte les Bra- chyures oxyrhynques à se déguiser. Il ne me reste qu'à résumer les résullats. X. — CONCLUSION GÉNÉRALE : LE DÉTERMINISME PHYSIOLOGIQUE DE L'INSTINCT DE DÉGUISEMENT DANS SON ENSEMBLE. Je me crois forcé de ne parler que du détermi- nisme physiologique, abstraction faite de toute tendance psychologique. La cause en est qu'il nous est absolument impossible de savoir quoi que ce soit sur l'état psychique des animaux inférieurs, auxquels on ne peut même pas appliquer le raison- nement par analogie avec nos états introspectifs. Ainsi, la question du « choix » consciencieux et volontaire, ou déterminé par les « sensations » des couleurs, sensations « agréables » dans certaines conditions et « désagréables » dans d’autres, cette question peut être fort intéressante, mais n'existe point pour nous comme question scientifique ; d'autant plus que tout se passe chez nos animaux comme si les états psychiques n’existaient point, ces états n'ayant aucune influence sur la marche des réactions instinctives que nous venons de décrire et d'analyser. Or, ni au point de vue gnoséologique, ni au point SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE n'avons COmMIMIS aucune erreur, en nous bornant dans celle étude de vue méthodologique’ nous à la méthode objective : physiologique (expérimen- tale) et biologique (comparative). En voici le résultat général : L'instinct des /aja, dans toute sa complexité ravissante, se compose de deux parties, dont on peut séparer el éludier isolément la deuxième, celle qui constitue la partie fondamentale de l'ins- linet. Cette simplification de Finstinet se produit dans le cas de la résection de la masse cérébrale conte- nant les ganglions pholo-récepteurs ou bien de l'ablation des organes périphériques de photo- réception. Dans l'instinct non mulilé, la première phase est D _ Î ES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 11 celle des chromo-réactions de l'animal vis-à-vis de la couleur du milieu et des surfaces colorées des objets de déguisement. Le matériel de déguisement est déterminé par le chromotropisme synchroma- tique variable, qui pousse l'animal fatalement vers certaines surfaces colorées, selon l’ensemble des conditions données. Une fois que l'animal à touché au matériel quel qu'il soit, — si rien ne l'empêche, — on voit commencer immédiatement toute la longue série des mouvements réflexes, fort com- pliqués, provoqués par les tango-réceptions! des pinces, dirigés par les tango et chémo-réceptions des pièces buccales et poussés vers le « but » final par les tango-réceptions des crochets dorsaux. Romuald Minkiewicz. L’INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE DEUXIÈME PARTIE : LES CAUSE Dans un premier article *, nous avons étudié les modes d'inseriplion des séismes et les notions qui en découlent quant à la propagation des secousses. Nous allons maintenant examiner comment et dans quel sens les résultats des recherches instrumen- tales sont en état d'influencer la conception géné- ralement admise sur les causes des tremblements de terre. Un simple coup d'œil rétrospectif pourra nous fournir la base nécessaire à l'intelligence du problème. Une opinion encore assez répandue, et que par- tageait de Humboldt, attribue les tremblements de lerre à des éruptions volcaniques ou, en tous cas, les considère comme une conséquence d’éruptions avortées. C'est qu'un certain nombre d'éruptions volcaniques, mais pas toutes cependant, sont accompagnées de secousses sismiques; toutefois, malgré leur violence, parfois très grande, lesdits tremblements de terre restent dans le voisinage le plus rapproché du volcan. Les dernières éruptions du Vésuve du mois d'avril 1906 fournissent une nouvelle preuve à l'appui de ce que nous avan- ! On trouvera l'exposé fondamental de mes conceptions gnoséologiques et méthodologiques en Zoopsychologie dans la première partie de mon travail d'ensemble, dans la Revue Polonaise de Philosophie (Przeglad lilozoliczny), vol. X, fase. 3, Varsovie. 1907. 3 * lievue gén. des Sciences du 30 janvier 1909, t. »S ef suiv. XX, p. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. S CE TERRE CA DES TREMBLEMENTS DE cons : les plus fortes secousses, seules, furent ressenties jusqu à Naples et elles ne furent enre- gistrées par les instruments sismiques qu'aux stations de lItalie centrale. Même pendant la période des nombreuses éruptions volcaniques des petites Antilles, en l’année 1902, les instruments sismiques n'ont subi aucun mouvement. Remar- quons, en passant, que ce qui vient d'être dit prouve décidément que les forces volcaniques ont leur siège dans des amas de magma qui se trouvent près de la surface de la Terre, dans les foyers péri- phériques de À. Stübel, et non dans le grand foyer central de l'intérieur de la Terre. L'on à cru plus lard, surtout à la suite des travaux de O. Volger, que des massifs entiers, tels que les Alpes, étaient minés à leur base par des eaux et que, par conséquent, de s'élaient formées s'étendaient sur des milliers de kilomètres sous ces massifs ; souterraines, vastes cavités el si celles-ci viennent à s'effondrer sous le poids des Inasses superposées, un tremblement de terre en résulte. Mais bientôt toutes ces théories, basées sur les effondrements, durent étre modiliées et ré- duites. Par suite de l'érosion continue, il se forme certainement, surtout dans les massifs calcaires, des cavités qui peuvent s'effondrer en donnant naissance à des tremblements de lerre; rappelons seulement les tremblements de terre du Karstet des ! Réceptions ou « epliors » 118 SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE Alpes calcaires, dont la cause doit se trouver là. Quelque petites et rapprochées de la surface que Soient ces perlurbalions, el si limitée que soit leur aire, les chocs courts et saccadés qui les accompa- gnent produisent parfois de forts ébranlements. Les tremblements de terre de grande étendue, de longue durée, d'une violence persistante, sont le signe visible et sensible d'une tension qui se rompt dans les parties solides de l'écorce terrestre, phénomène qui entraine à sa suile des changements dans la disposition des couches rocheuses, des dis- locations, comme dit le géologue, soit des plisse- ments, des déchirures, des affaissements, des sou- lèvements ou des déplacements de masses ro- cheuses, Selon l'opinion la plus répandue de nos Jours, celle qu'a émise J. D. Dana, propagée et déve- loppée par À. Hein et par E. Suess surtout, ces déplacements dans la partie solide de l'écorce ter- restre seraient la conséquence du refroidissement du globe jadis en ignition, De nos jours encore, on admet que le centre de la Terre se contracte len- tement, mais d’une facon suivie, par suite de la radiation continue de la chaleur dans l'espace froid qui l'entoure ; l'écorce terrestre, déjà refroidie, ne peut alors s'adapter au noyau qui se retrécit de plus en plus, en raison de la compression et de la superposition. De cetie facon se formèrent les grandes masses du relief du globe, les vastes bas- sins des océans. Parfois le déplacement des blocs force en même temps la masse ignée des.profondeurs de la Terre, le magma, à se frayer un passage, d'où résultent des éruptions volcaniques ; les volcans, ceux qui sont éleints el ceux qui sonten activité, sont aussi souvent étroilement liés aux phénomènes orogé- niques. Quelles qu'en soient les causes, il est en tous cas cerlain que, sous l'influence des poussées formidables qui se produisent dans l'écorce ter- restre, des tensions s'élablissent entre les blocs et dans les blocs. Lorsqu'une pareille tension cesse subitement, des déplacements horizontaux et verlicaux ont lieu, ainsi que des tremblements de lerre. Comme ceux-ci sont en rapport étroit avec l'architecture de l'écorce terrestre et l’orogénie, on les appelle tremblements de terre {ectoniques ou tremblements de terre de dislocation. L'existence réelle de ces états de tension dans les masses rocheuses se manifeste très sensiblement lorsqu'on y pralique une solution de continuité pénétrant dans leur profondeur, ce qui produit une rupture locale d'équilibre. Le cas se présente dans les travaux de mines, dans les Lunnels, et méme, sous cerlaines conditions spéciales, dans les carrières à ciel ouvert. Là ce n’est pas seulement le sol qui se soulève en forme de voûte, mais fréquemment aussi des plaques, d'une dimension de plusieurs mètres cubes, se délachent sans signe précurseur de la surface mise à nu, et celte rupture s'accom- pagne de fortes détonations, tandis que des pierres moins volumineuses sont projelées à quelques mètres de distance; les mineurs d'Allemagne dé- signent ce phénomène sous le vom de « Berg- schlag », « Knallendes Gebirge », les Français sous celui de « Bendon ». A l'occasion des travaux entrepris lors du perce- ment du Simplon, C. Schmidt", de Bäle, a approfondi l'étude de ce phénomène et a soigneusement réuni tous les ouvrages se rapportant à ce sujet. Son Rapport relaie les observations publiées précédem- inent, en particulier celles qui concernent les mines de houille. Il déduit de ses recherches que les « bendons » sont en relation étroite avec la cons- tilution pétrographique et la direction de la schis- tosité. Lorsque les feuillets sont horizontaux ou peu inclinés, les bendons se manifestent, tandis qu'ils manquent quand les feuillets sont redressés. Il faut, outre cela, tenir compte de la pression des masses pierreuses ef, jusqu'à un certain point, de la nature et de l'intensité des dislocalions occasionnées par la formation des montagnes. La tension de la face interne (intrados) diffère de celle de la face externe (extrados'. Sous le rapport sismologique, il est intéressant de remarquer que les bendons des mines peuvent, lorsqu'ils sont très violents, pro- duire à l'extérieur, à la surface, des effets ana- logues à ceux des tremblements de terre naturels. Des objets se mettent à osciller, des lézardes et des creyasses se produisent dans les bâtiments et dans le sol, et l’on entend parfois un bruit res- semblant au grondement du tonnerre. La région superficielle ébranlée est cireulaire et sa partie cen- trale, où l'ébranlement est le plus violent, se trouve perpendiculairement au-dessus du foyer, du bendon. Cremer et Dill?, cités par Schmidt, dé- crivent des secousses sismiques qui se sont pro- duiles le 2 juillet 14897, le 2% mars 1899-et le 14 juillet 1899 dans les environs de Hèrne 1Wesl- phalie) et les mettent en rapport avec des bendons du bassin houiller de la Ruhr. D'après les commu nications de F. Mladeck, également cilé par Schmid, l’on observe aussi, dans les terrains miniers de Pribram (Bohème), des ébranlements sismiques, occasionnés par l’état des piliers qui, par suite des travaux d'exploitation, se trouvent de plus en plus 1! C. Scumior : Ünlersuchungen über die Standfestigkeit der Gesteine im Simplontunnel. Gutachten abgegeben an die Generaldireklion der Schweïizerischen Bundesbahnen. Bern, 1902 * Dis : Die in den letzten Jahren auf Steinkohler- gruben des Oberamtsbezirks Dortmund vorgekommenen Gebirgsstosse und die hierdurch herbeigeführten Unfalle. Zeïtschrilt ur Berg-, Hütten und Salinenwesen, 1903, P. 439. n! Le DT md E-amtiRpEe PT SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 119 exposés. Il faut toutefois Lenir compte du fait que, lorsque des bendons et des tremblements de terre se produisent en même temps, le tremblement de terre peut être la cause première qui provoque le bendon. Deux études récentes de G. Regelmann' nous permettent de voir de quelle façon les forces orogé- niques agissent de nos jours. Ces études donnent l'impression que les Alpes avancent peu à peu vers le Nord et le Nord-Ouest et par là poussent forte- ment les couches peu dures de la Mollasse tertiaire, avec le lac de Conslance qui les limite vers le Nord, contre l'Albe souabe. Les tensions produites par ces pressions latérales se détendent de temps en temps suivant certaines lignes, et occasionnent des tremblements de terre, d’où résultent, dans les plissements des montagnes, des déplacements de lambeaux horizontaux et verlicaux, des affaisse- - ments dans les plis synclinaux, des exhausse- » soit simplement par saccades : ments dans les plis anticlinaux. En ce qui con- cerne le bassin d'effondrement de la fosse her- cyuienne, coupé par les deux lignes sismiques du lac de Constance, on à pu, grâce à la répétilion de nivellements de précision effectués sur les deux bords, déterminer avec exactitude, en mesures absolues, les affaissements qui s'y sont produits dans ces derniers lemps, soit d’une facon continue, ABAISSEMENT À Linmnimètre du lac de Constance de 1874-1890. 93mm — de 1864-1890. . 163 ; — de 1817-1890. 317 Degré d'élévation : Port de Lindau, 1869-1895. . 15 Bregenz, maison du garde- OO dobarr-b Dodo A0 el — HAN er - - CÛ — Fussach, jetée (digue du port). 57 a = = US = Bresenz Port. 4-2 100 Le fond du lac s’abaisse, en général, plus que le niveau de l'eau, surtout sur les bords méridionaux. De plus, on a de bonnes raisons pour penser qu'à la fin de l’époque glaciaire, qu'on désigne sous le nom d’ «époque de Würm », dans cette région, le niveau du lac était à peu près à 410 mètres et qu'il resta pendant assez longtemps à 40% mètres, puis à 399 mètres ; à l’époque des palalittes, il y a donc environ 2.500 ans, il se trouvait à 400 mètres, tandis qu'il est tombé de nos jours à 395 mètres. Les . tremblements de terre qui se produisent dans le lac et sur ses bords ne sont que des phénomènes C. ReGELMANN : Erdbebenherde und Herdlinien in Süd- westdeutschland. Jahresheft des Vereins für vaterländische Naturkunde in Würtlemberg, 1907, p. 410 ff. D D: Neuzeilliche Schollenverschiebungen der Erd- … kruste im Bodenseegebiet. Bericht über die 40° Versamm- … luug des Oberrhenischen. Geologischen Vereins zu Lindau. 1907. 4 concomilants de ces déplacements en rapport avec la formation progressive des montagnes. Citons comme exemple typique d’un tremblement de Lerre tectonique celui qui, le 18 avril 1906, rava- gea la Californie, et notamment San Francisco. I] s'étendit vers le Nord de l'Orégon, jusqu'à Goos- Bay, et vers le Sud jusqu’à Los Angeles: le tremble- ment de terre fut ressenti, vers l'Est, dans la plus grande partie de la Californie centrale et du Nevada ao \ (22) [S o x S e\ œ 2: o CRUE ve @Sañta Rosa $ oSonoma a FRERE FE San led A) eAgnews © 527 JUS ‘Clara # PS Cittenden = < E TBoppemns do, g. 1. — Région éprouvée par le tremblement de terre de San Francisco, oriental, et surtout vers le versant Est de la Sierra Nevada. La zone où la perturbation à été la plus forte se lrouve des deux côtés d'une grande faille que l'on peutsuivre, versleN.-W.,de l'embouchure del’Adler Creek (fig. 1), à Hollister, au S.-E., sur une lon- gueur de 600 kilomètres; au Nord, cette faille se continue, probablement au fond du Pacifique, jus- qu'à Eureka. Selon les recherches des géologues des Etats-Unis, Gilbert, Branner et Lawson, le mou- vement du sol se manifesta par un glissement horizontal le long d'une surface de dislocation presque verlicale de l'écorce lerrestre; sur le bord oriental de cette faille, le sol se déplaça d’une quantité variant de 2 à 7 mètres dans la direction du Sud-Ouest, en mème temps que des aflaisse- 20 ments, allant jusqu'à 1 mètre, affectaient cette mème bande de terrain. Par suite de ce mouve- nent, il s? produisit dans le sol un sillon qui, à la suite d'un effet produisant comme un déchi- rement du sol ou cisaillement, se trouva coupé par de nombreuses déchirures transversales; le phénomène fut particulièrement visible à la tra- versée de routes, de digues ou talus, de clôtures, dont les troncons semblaient avoir été déplacés en sens contraire. La dislocation coupa et déchira les conduites d'eau et de gaz et les circuits électriques de San Francisco, ce qui aggrava considérablement la catastrophe. Alors que les conduiles d'eau se vidèrent immédialement, les court-circuits élec- triques et le gaz enflammé s'échappant des tuyaux de conduite allumèrent de loutes parts les incen- dies, dès lors impossibles à combattre. II Partant de considéralions analogues à celles qui viennent d'être énoncées, R. Hoernes” établit en 1878 son système de classificalion des lremble- ments de terre en {rois catégories : séismes ro/ca- uiques, séismes d'efondrement el séismes de dis- location. On pouvait croire alors posséder ainsi, quant à la question des causes efficientes, une solu- lion salisfaisante, et, pour l'époque, concluante. Toutefois, il élail, à ce moment même, impossible de ne pas reconnaitre que celle distinelion ne repo- sait, en somme, que sur les signes visibles directe- ment; en outre, le moyen de classification n'était rien moins que rigoureux. Les circonstances les plus simples se présentent dans le cas des séismes d'eflondrement locaux, c'est-à-dire à aire peu éten- due, et, dans ce cas même, on ne peut nier que des causes d'ordre tectonique soient de nature à provo- de cavités soulerraines. Les quer l'effondrement difficultés d'interprétation sont déjà plus nom: breuses si l'on considère les tremblements d’ori- gine volcanique, qui sont, du reste, mieux caracté- risés par l'expression de séismes d'explosion, provoqués par le choc du magma päleux contre une paroi solide. Par là s'explique le fait de la plus grande intensité au début de l’éruption, et sa dimi- nution lorsque la communication extérieure devient libre. Les données positives dont nous pouvons disposer se bornent à celle constatation, alors que la question principale consisterait à déterminer la cause des mouvements et épanchements de matières fluides qui provoquent ces tremblements de terre. Faut-il la rapporter à une dilalalion du magma päleux arrivé à une cerlaine phase de refroidisse- ‘ R. Hornxes : Erdbeben-Studien. Jahrbuch der K. K. Geologischen [.cichsanstall, 1878, 1. XXVIII, Band, 3. Hefl. SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE ment, ou bien la chercher dans des phénomènes tectoniques dont l'effet serait de diminuer la capa- cité de la poche qui le contient? Il y a de fortes pro- babilités pour admettre que les deux causes agissent concurremment. Venons-en aux tremblements de terre {ectoniques. Nous savons, il est vrai, par expérience, que, en général, les régions dites régions à tremble- ments de terre sont liées, en premier lieu, aux régions" à plissements montagneux, surtout celles de date récente, et conséquemment à la direction des géosynclinaux ;elles sont plus rarement liées aux bords des blocs de terrains coupés par des failles. On ne peut cependant pas toujours suivre jusqu'à son origine une fente ou une crevasse qui, résultant d'un déplacement subit, peut tout aussi bien être la conséquence d'un plissement que d’une rupture; elle peut aussi n'intéresser qu'une partie faible de l'écorce terrestre. Mais cette objection n’est pas d'une très grande valeur, car nos connaissances nous permeltent d'admettre l'hypothèse qu'une dislocation qui se serait produite dans les profon- deurs de la Terre ne s'étendrait pas sous forme de fente jusqu'à sa surface, parce que la roche com- pacte occupe un moindre volume qu'à l'état détri- tique. Les relevés géologiques et les (travaux histo- riques faits en Calabre par W. H. Hobbs”, peu de temps après la calastrophe sismique du 8 sep- tembre 1905, semblent, en effet, confirmer l’opi- nion qu'il s'élait formée précédemment déjà : c'est que les fentes sismiques, cachées sous la surface rocheuse d> la Terre, peuvent être déterminées surement par l’orientalion de la zone de perturba-- tion. Les régions où les ébranlements sismiques sont les plus violents se trouveraient toujours, d'après ce qui a été dit, perpendiculairement au-dessus du point d'intersection des lignes sismo- lectoniques. Mais, si une crevasse sismique, même visible, est de telle nature qu'elle n'ait pas été pro- duite par un décollement de matières détritiques sur des surfaces inclinées de roche compacte, ou par des tassements de terrains meubles produits par l'ébranlement sismique, mais qu'elle soit l’em- preinte topographique d’une faille réelle, se conti- nuant vers l'intérieur de la Terre, cette crevasse est-elle sûrement la cause d'un tremblement de terre ? Ou bien le tremblement de terre et la faille sont-ils peut-être des conséquences simultanées d'une seule et même cause provenant d'une origine plus profonde, et qui ne serait pas identique- avec 1 Voir l'ouvrage, jusqu'ici unique en son genre, de F. pE Moxressus pe Bazcore : Les Tremblements de terre. Géo- | graphie séismologique. Paris, 1906. # W. H. Hoses : On some Principles of Seismic Geology, ainsi que : The Geotectonic and geodynamic Aspects ol Calabria and northeastern Sicily, vol. VIN, p. 219 fF., 293 ff. von Gerlands Beiträgen zur Geophysik. SIEBERG — L'INSCRIPTION INSTRUMENTALE DES SÉISMES ET LA PHYSIQUE DU GLOBE 121 celle de la formation des montagnes ? En effet, Suess admet que les processus compliqués, tant tectoni- ques qu'orogéniques, ne s'étendent probablement que jusqu'à une profondeur relativement faible, de sorte qu'une distance verticale de 10 kilomètres pour le foyer sismique lui semble être une éva- luation! trop élevée au point de vue géologique. Déjà, en 1897, à l'occasion du XIT Congrès des Géographes allemands à léna, G. Gerland s’est pro- noncé pour celle interprétation, avec de bonnes preuves à l'appui, et nombre de géophysiciens bien connus ont accepté celle manière de voir, en y apportant toutefois certaines modifications. L'opinion de G. Gerland peut s'exprimer ainsi : « Tous les phénomènes que nous remarquons lors d'un tremblement de terre sont les consé- quences élastiques d'un choc violent, toujours loca- lement limité (punctiforme), venant d'en bas, ou d'une succession de chocs semblables. Ces chocs sismiques ne se développent pas dans l'écorce ter- restre; ils sont plutôt la conséquence de phéno- mènes dont l’origine est dans les profondeurs de la Terre. Mais y a-t-il dans ces profondeurs des sources de force assez puissantes pour produire de tels effets? Certainement. Les masses gazeuses de l’in- térieur de la Terre, se trouvant sous une très forte pression, pénètrent continuellement dans l'écorce, en passant naturellement de l’état liquide à l'état solide. Mais le passage de lélat qazeux à l'état liquide est souvent accompagné de violentes explc- sions, telles que celles produites par la combi- naison subite de l'hydrogène et de l'oxygène en eau. Il y à d'énormes quantités de vapeur d'eau dans l’intérieur de la Terre qui ne peuvent se former que dans la zone extérieure du milieu gazeux. Là, cette transformation se produit sou- vent en grande quantité, et avec une extrème violence. À cette occasion, je cilerai aussi Zoep- pritz, qui a également admis la formation d'explo- sions dans ces zones de transition. Je voudrais rapporter la majeure partie des secousses sis- miques à ces phénomènes et à d'autres qui leur ressemblent; il en existe probablement encore de bien divers, même si, quant à l'effer, ils sont les mêmes; c'est là sans doute qu'est la Source princi- pale de la force sismique. Si ces forces sont plus particulièrement actives près des grandes lignes de rupture de l'écorce terrestre, ce n’est pas à cause des nombreux éboulements qui s'y produisent (Milne compte 8.331 tremblements de terre pour le Japon seul dans l’espace de huit ans), mais parce que, à cause de la pression qui se trouve ! Depuis l'époque où Suess émettait cette opinion, les progrès de la Sismologie ont permis de déterminer ces pro- fondeurs avec un degré de certitude telle que des « estima- tions » de ce genre ne sont plus guère de mise. amoindrie à l'endroit de cette ruplure et à cause du refroidissement, les explosions, qui forcément onl lieu dans l'intérieur de la Terre, s'y produisent très facilement. Le sol est plus dense au fond de la mer que sur la terre ferme, parce qu'il se trouve sous une pression plus forte occasionnée par des masses d'eau superposées el sous une température moins élevée: là, les conditions tectoniques sont beaucoup moins variables, plus stables, plus égales que sur la terre ferme; si donc nous acceplons l’interpré- {ation tectonique des tremblements de terre, nous ne devons pas nous attendre à voir se produire des perturbations sismiques au fond de la mer. El cependant les tremblements de terre sous-marins sont très fréquents et très répandus. Mais, quoique très nombreux dans l’espace, ils sont très circons- crils, je dirais ponctuellement circonserits, quant à leur étendue. D'autre part, le fond de la mer est plus près de l'intérieur de la Terre que la surface de la terre ferme; de plus, la masse compacte est un agent transmetteur plus rapide et plus sûr; il n'est done pas étonnant que le nombre des trem- blements de terre sous-marins soitsi grand et qu'ils soient si répandus sur la surface de la Terre. » III Quoiqu'on n'en ait guère tenu compte, les expé- riences faites en ces dernières années par G. Tam- mann' sur les fusions appuient puissamment la manière de voir de Gerland. À. Johnsen * applique le résultat des expériences de Tammann au volca- nisme et touche à peine les séismes. Ci-après, j'es- saie de déduire des résultats obtenus par Tam- mann les plus importantes forces lelluriques dans leurs effets divers; les résultats sismométriques obtenus dans ces derniers temps, et dont il à été question précédemment, me guideront dans ce tra- vail. Des expériences irréfutables sont la base de l'idée qui va être développée, et le résultat s'accorde avec beaucoup d'autres opinions bien fondées et précédemment émises, mais qui jusqu'ici sont r'es- lées isolées. La discussion ultérieure me semble par là reposer sur un fondement ferme et sûr, si méme elle change peut-être un jour quelques détails de cette communication provisoire. Tammann a observé expérimentalement la rela- 1 G. Tammanx : Kristallisieren und Schmelzen. Ein Beilrag zur Lehre der Aenderungen des Aggregaltzustandes. (Voir surtout p. 481-184.) Leipzig, 1905. In. : Ueber die Aenderungen des Aggregatzustandes bei der Abküblung eines Weltkorpers. 1 Bd., 2° Lieferung, S. 321-328 der Verhandlungen der Permanenten Seismis- chen Kommission der Kaiserl. Akalcmie der Wissen- schaflen. St. Petersburg, 1903. 2 A, Jonnsen : Tammann's Schmelzversuche und die mo- dernen Vulkanhypothesen. Naturwisarmi les matières proléiques animales, les nouvelles recherches d'hydrolyse ont porté sur la caséine et les autres protéiques du lait, la fibrine, les protéiques de l'œuf de poule, à savoir : l’albumine du blane, la vitelline et l'hématogène du jaune et la substance de la membrane coquillière, sur la clupéovine de l'œuf de hareng, la membrane de l'œuf de Seyllium stellare, sur la syntonine de la viande de bœuf, la gélatine, les protamines et les histones, l'oxyhémoglobine et la sérumalbumine, diverses kératines (de Testudo graeca, de la corne, de la laine), l'ichtilépidine de poisson, le byssus, la fibroïne, divers tissus animaux, les peptones, les kyrines, un grand nombre de protéiques végétaux (légumine, gluten, albumine cristallisée de se- mences de courges, gliadine, phaséoline, excelsine, hordéine, avénine, glycinine de Soja hispida, glo- buline de Cucurbita maxima, édestine, amandine, protéiques du maïs). Notons que la plupart de ces recherches sont dues à l'école d'Emile Fischer et d'Abderhalden, à Hugounenq et à ses collabo- rateurs Morel et Galimard, et aux chimistes améri- cains Osborne et Clapp'. Les résultats fournis par ces travaux ne donnent encore qu'une idée grossièrement approchée de la constitution des nombreux protéiques du monde animal et végétal; mais ils n’en sont pas moins très intéressants, non seulement au point de vue de la biologie de chaque espèce, mais aussi en tant que premiers fondements d’une (‘himic biologique com- parée. On doit admettre, en effet, comme l'a si bien dit A. Gautier, que tout le fonctionnement de la vie n'est que la conséquence lointaine des fonctions chimiques des molécules qui constituent chaque cellule, done, en premier lieu, des molécules pro- Journ. of biolog. Chem., t. IN, p. 481, 1907. — Levenxe et Bearry : Biochem. Zeitschr., t. AV, p. 299, el p. 305, 1907. — LEVENNE et ALSBERG : Jbid., p. 312, 4907. — Erarp et Vicra : C. R., 9 décembre 1907. ‘ 11 serait trop long de citer ici les 35 à 40 Mémoires se rapportant à ces recherches. La plupart des travaux alle- mands ont paru dans la Zeïtsch. f. physiol. Chem., ceux de Hugounenq dans les Comptes rendus, ceux des Américains dans l'Am. Journ. of Physiology. ROUILLER : E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE téiques, qui sont les constituants cellulaires par excellence. 11 résulte nécessairement de là que les aspects caractéristiques que prend chaque fois la vie, quand on passe d'une espèce à une autre, sont liés à quelque changement dans la structure chi- mique de ces constituants. C'est ce que A. Gautier a d’ailleurs démontré directement, notamment par ses recherches sur les variations de l'espèce Vi/is vililera”. C'est donc dans la nature chimique différente des constituants cellulaires que réside la cause pro- fonde des différences biologiques exprimées el par naturalistes dans la notion d'espèce; mais cette biochimie comparée, dont les premières recherches de Gautier ont fait ressortir il ya plus de vingt ans la portée scientifique con- sidérable, cette anatomie chimique comparée est à peine ébauchée. Et cependant, quand on réfléchit à tout le secours que la morphologie comparée a apporté à la connaissance des êtres vivants, au vaste édifice scientifique que celte étude des formes a permis de construire, bien quelle ne puisse jamais saisir que le contour extérieur des choses de la vie cellulaire, on demeure convaincu que la Chimie biologique comparée, qui descend jusqu'aux molécules constitutives des protoplasmes, c’est-à- dire jusqu'au niveau où se passent les phénomènes élémentaires de la vie, révélera dans le monde des êtres organisés des affinités et fera apparaitre des différences qui échappent nécessairement à la morphologie. résumées les $ 3. — Les produits d'hydrolyse. La liste des produits d'hydrolyse des protéiques ne s'est guère allongée depuis quelques années: il semble bien, comme le dit E. Fischer, que les frag- ments les plus importants de la molécule de ces corps nous sont aujourd'hui connus, et que, pour les plus simples d'entre eux, les protamines, on peut affirmer que l'on à en main la totalité des pierres de l’édifice. Voici la liste de ces produits, telle que l’arrête aujourd’hui E. Fischer * : Glycocolle, alanine, valine, leucine, isoleucine, phénylalanine, sérine, {yrosine, acides aspartiqueet glutamique, proline, oxvproline, ornithine, 1ysine, arqinine, histidine, tryplophane, acide diamino- triox ydodécanique, eystine. En ne comptant pas l'ornithine, qui doit être confondue avec l'arginine dont elle est un frag- ment, on voit que ces corps sont au nombre de 18. D'autres produits d'hydrolyse ont été signalés ! Voy., dans la Revue du 15 décembre 1901, l'étude de A. Gautier sur Jes mécanismes moléculaires de la variation des races et des espèces. ® E.liscuer : Sitzungsber. d. k. p. Akad, d. Wissensch., Berlin, 24 janvier 4907. 129 | encore, notamment un acide caséanique el un | acide gélatinique, respectivement obtenus par Skraup dans le dédoublement de la caséine et de la | gélatine, un acide oxydiamino-sébacique, extrait | par Wohlgemuth d’un nucléoprotéide du foie, une | pseudo-histidine C'HSAz"0* et des pseude-lysines trouvées par Hugounenq et Morel parmi les produits d'hydrolyse de la pepsine. Mais tous ces corps ne sont pas encore définis avec la précision désirable. Quelques-uns d'entre eux sont peut-être des mé- langes ou des acides aminés déjà connus, comme les acides diamino-adipique et diamino-glutarique, dont le premier s’est trouvé être de l’alanine et le second un mélange d'alanine et de glycocolle *. E. Fischer à rencontré aussi un acide aminobuly- rique, el il soupconne parmi ces produits d'hydro- lyse l'existence d’un acide amino-0x ypropionique”. Enfin, nous devons signaler ici un intéressant travail de Hugounenq et Morel”, qui rétablit la concordance entre Îles Schutzenberger sur l'hydrolyse barylique des pro- téiques et les données fournies par les travaux plus | modernes sur l'hydrolyse acide. On sait que Schut- zenberger avait obtenu, à côté d'un certain nombre d'acides aminés bien définis, des corps azotés qu’il classiques résultats de avait classés en leucines, leucéines, glacoprotéines et corps vitreux amorphe. Or, Hugounenq et Morel ont établi que les leucines, leucéines et glu- coprotéines sont des mélanges d'acides aminés divers : leucine, lyrosine, alanine, phénylalanine, proline, acides glutamique et aspartique, et que le corps vitreux amorphe est un mélange de polypep- tides. $ 4 — Constitution des produits d'hydrolyse. Il ne suffit pas d'isoler ces produits; il faut encore en établir la constitution. Cette partie de l'enquête sur les protéiques est aujourd'hui à peu | près achevée. Depuis que les derniers travaux de Knoop ‘ ont démontré que l'histidine est la B-rm1- dazol-alanine : CH PAN AH Az | CH = C — CH? — CH (AZU*) — COOH, il n'y à plus, dans la liste ci-dessus, que l'acide #SKRAUP : Zeïtschr. physiol. Chem., t: XLII, p: 274; Monatsch. f. Chem.. t. XXV, p. 633, et t. XXVI, p. 245. Azad. des Scienres de Vienne ; Sciences math. el 6 avril 1905. — Wouccexurn : Zeitschr. physiol. Chem., t. XLIV, p. 530. — HuGouxexo et More : C. /?., 20 juillet 1908. 2 E. Fiscuer et A. Skrra : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XXXIII, p. 177, et t. XXXV, p. 10.— E. Fiscnen : D. chem. G., 1906. 3 Hucounexo et More : C. Z., 18 juin 1906. 4 Kwoop : Beitr. chem. Physiol. u. Pathol., & X, p. 111, 1907. 130 E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE trioxyamino-dodécanique dont la structure chi- mique reste à établir. Cependant le problème de la constitution de tous ces produits ne peut êlre considéré comme entière- ment résolu que par la synthèse de ces corps. Celle- ei à été réalisée pour la plupart d’entre ces com- posés, et notamment, dans ces dernières années, pour le tryptophane”, l'isoleucine ? et la proline”. Mais on sait que l'on n'oblient ainsi que des corps racémiques, tandis que tous les acides aminés sorlis des protéiques, à l'exception du glycocolle, sont actifs. On s'est donc appliqué à dédoubler ces racémiques en leurs antipodes optiques, et ici E. Fischer s'est servi avec succès de la méthode des dérivés acylés et de leurs sels d’alcaloïdes. Si- gnalons aussi la méthode biologique de F. Ehrlich”® (emploi de la levure de bière), que complète si heu- reusement la méthode de renversement de Walden, préconisée par E. Fischer”. Voici, d'après E. Fischer’, la liste des produits d'hydrolyse aujourd'hui reproduits par synthèse, les racémiques étant marqués 41 et les actifs, iden- tiques aux produits naturels, étant marqués d ou : Alanine (dl, À. Strecker, 1850; d, E. Fis- cher, 1899); Valine (dl, Fittig et Clark, 1866; d, E. Fischer, 1906) ; ZLeucine (dl, Limpricht, 1855, et E. Schulze et Likiernik, 1885 ; Z, E. Fischer, 1900); Isoleucine (dl, Bouveault et Locquin, 1904 ; d, Loc- quin, 1907); Phénylalanine (dl, Erlenmeyer et Lipp, 1883; /, E. Fischer et Schôller, 4907); Sérine (dl, Ë. Fischer et Leuchs, 1902; /, E. Fischer et Jacobs, 1906); T'yrosine (d1, Erlenmeyer et Lipp, 1883; 1, E. Fischer, 1900) ; Acide aspartique (dl, Dessaignes, 1850 ; /, Piutti, 1887); Acide gluta- mique (dl, L. Wolff, 1890; 4, E. Fischer, 1899); Proline (dl, R. Wiüllstätter, 1900); Ornithine (dl, E. Fischer, 1900; d, Sürensen, 1905); Arginine (active; synthèse partielle à partir de l’ornithine, E. Schulze et Winterstein, 1899); Lysine (dl, E. Fis- cher et Weigert, 1902); Tryplophane (dl, À. Ellin- ger et Flamand, 1907); Cystine (dl, Erlenmeyer jun., 1903). La possession de ces formes aclives à permis la préparalion de polypeptides à constituants actifs, 1 A. Ecuwéren et CL. FLamaxn: t. LV, :p: 8, 1908. 2 Bouveauzr el Locouin : Bull. Soc. Chim. (3),t. XXXI, p. 1482, 1904. — Locauix : Ibid. (4), t. ler, p. 895, 4907. — F. Euncicn : D. chem. G., t. XLI, p. 1453. — Brascu el Friro- MANN : Beitr. z. chem, Physiol. u. Pathol., t&. X,p. 316. — % SOFRENSEN @l ANDERSEN : Zeitschr. (, physiol. Ch.,{. LVI, p. 236. 4 CL E: Kiscagn : D. chem. G., A. XXXIII, p.237: FF, Eunucn : Biochem. Zeïtschr., 1. ler, p. 8, 1906, et t. VII, p. 438, 1908. ° E. Fiscaen : D chem. G.,. XL; p. p. 889, 4908. 7 E. liscuen : Organische Synthese und Biologie (Confé- rence de la Soc. chim. de Londres, Berlin, 1908, p. 18). Zeitschr. 1. physiol. Ch. :89, 1906, et &. XLI, analogues ou identiques aux polypeptides naturels, et dont l'étude systématique promet des résultats intéressants dans de multiples directions. (Voy. plus loin. La connaissance complète de la structure de tous ces fragments, qui semble au premier abord n'avoir d'intérêt qu'au point de vue de la Chimie pure, à une importance biologique de premier ordre, et ce Fischer a insisté encore n'est pas sans raison que E. tout récemment sur ce point. C'est parce que la constitution du tryptophane est parfaitement con- nue que l’on voit clair aujourd'hui dans le phéno- mène de la production du scalol et de l’indol dans l'intestin, et dans celui de l'apparition de subs- lances indigogènes dans l'urine ; ce sont les rela- tions chimiques de la cystine avec la laurine qui ont expliqué la production de celle-ci aux dépens de celle-là dans l'organisme; c’est parce que l'on sait que l'ornithine et la lysine sont des acides carbonés de la tétra- et de la pentaméthylène-dia- mine que la produetion de ces deux diamines dans certains cas pathologiques à pu être clairement interprétée et qu'elle est apparue comme un cas particulier de cette formation anaérobie de pro- duits de réduction, élablie longtemps avant par les travaux de À. Gautier‘. C'est la constitution de la valine, de la leucine et de l'isoleucine qui explique aussi la production des alcools isobutylique, iso- amylique (alcool amylique inactif) etamylique actif (c'est-à-dire d’une fraction importante de l'huile de fusel), composés qui, au cours de la fermentation alcoolique, sortent respectivement de la valine, de la leucine et de l’isoleucine. (Voy. plus loin.) Tout indique, enfin, que les acides aminés ne naissent pas seulement de l'hydrolyse des pro- téiques in vilro, mais aussi qu'ils représentent les fragments fournis par la régression de ces maté- riaux dans l'organisme. Tout le problème des pro- duits intermédiaires de la désassimilation normale el pathologique est done lié à l'histoire chimique de ces fragments. Ù : Notons aussi l'intérêt que présente l'étude de ces acides aminés au point de vue de la hiologie des organismes inférieurs. Déjà, en 1902, Czapek et Emmerling ont démontré l’aplitude que possède le groupement aminé de ces corps à servir d'ali- ment azoté, notamment à l'Aspergillus niger, et Galimard, Lacomme et Morel ont étendu cette démonstration à toute une série de microbes (ba- cille pyocyanique, Z. prodigiosus, coli-bacille, pneumobacille de Friedländer, ete.), qu'ils ont ne contenant d'autre aliment azoté que des acides aminés (glyco-" colle, leucine, alanine, Lyrosine, ete.). Ges expé- réussi à cultiver dans des milieux 1 Voy. la Revue du 15 mars 1905, p. 192, E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 131 riences constituent, avec celles d'Arnaud et Char- | rin sur le bacille pyocyanique, la première tenta- tive heureuse faile en vue de cultiver les microbes en milieux chimiquement définis, sans albumine*. La façon dont les organismes inférieurs traitent ces acides aminés est aussi très intéressante. F. Ehr- lich, dont on a cité plus haut les recherches sur le dédoublement des acides aminés racémiques à l'aide de la levure, a montré que, si lon met de la | levure de bière bien développée en présence de solutions sucrées additionnées de valine, de leu- cine ou d'isoleucine, la levure utilise ces acides aminés comme aliment azoté, les dédouble par un double procès de décarboxylalion et de désami- nalion : R.CIL.AZ12.COZH + H?0 = CO* + Az + R.CH*0H, el les transforme respectivement en alcools isobu- tylique, iso-amylique (inactif) et amylique actif: CHNCHS CH° CA: CH® CH | Sa A 4 CH CH CH | CU. AzH? CH° CH. AZI | | coon CH. AZH° Goo COOI Valine. Leucine. Isoleucine. CH® CH* CHI CH: CH* C?H° Na Ne N CH CH CH | CHEOH CH? CH°ON | CH?OH Alcool isobutylique. Alcool isoamylique Alcool amylique (inactif). (actif). Celle réaction parait être un procès biologique très général, car, par la même méthode, Fauteur à pu (transformer la {yrosine en alcool p-oxyphényl- éthylique, la phénylalanine en alcool nhénylélhy- lique, Vacide phénylamino-acétique en alcool ben- zylique. Enfin, ces résultats ne sont pas moins intéressants au point de vue pratique. Ils mon- trent que les principaux constituants de l'huile de fusel sortent, non du sucre, mais des aliments azotés de la levure. Par là, on a été conduit, en donnant à la levure des aliments azotés autres que les acides aminés, par exemple du sulfate d'ammoniaque, à faire reculer la proportion d'huile de fusel, résultat sur l'intérêt industriel duquel il est inutile d'in- sister (Pringsheim) ?. S 5. — Les polypeptides naturels et les polypeptides artificiels. On sait que, par une hydrolyse moins énergique D CZAPEK :" Boitr. "7. chem. Physiol. u. Pathol, 1 1, p.542, 1902.— Eumenrinc : Ber.d. d. Lot. Gesellsch., LXXXNV, P. 2289, 1902, — Garimarp, Lacoume et Morez : €. R., 30 juillet 1906. — AxnauDb et CHarmN: C. ., avril et juin 1901. ? F. Enuzicu : Biochem. Zeïtsehr., t. I, p. 52, 1906. — PRiNGshei : Zhid., L. X, p. #90, 1908. des protéiques (action de HCI ou de SOI forts à froid), E. Fischer et ses collaborateurs ont obtenu des polypeptides dits naturels, dont la plupart ont été identifiés avec les produits de synthèse de même nom. Voici la liste de ces produits : Glyeyl-l-leucine, glyeyl-d-alanine, glyeykktyro- sine, un {étrapeptide composé de deux molécules de glycocolle, une de l-tyrosine et une de d-alanine, d-alanyktleucine, un dipeplide de glycocolle et de valine, un dipeptide de proline et de d-alanine, Abder- halden), un dipeptide de proline et de phénylala- nine (Osborne et Clapp), auhydride du glycocolle el de 1x7 proline (Levenne et Beatty). Enfin, il faut acide T-leneyl-d-glutamique (E. Fischer et ajouter à celle liste deux dipeplides paraissant être une combinaison d'arginine avec la proline pour l'un et avec l'acide aspartique pour l’autre (Hugou- nenq, Morel et Galimard)". | L'Ecole de E. des polypeptides artiliciels®, en introduisant dans Fischer a continué aussi l'étude ces produits de nouveaux acides aminés, Lels que les acides glutamique et aspartique, la phénylala- nine, la tyrosine, le tryplophane, et en employant, à la place des racémiques de synthèse, les produits actifs de mème signe que les acides dérivés des proléiques, de facon à obtenir des produits com- parables aux corps naturels, polypeptides, pep- tones et albumoses. En même temps, ces synthèses ont élé poussées vers des termes de plus en plus élevés. La chaine la plus longue qui ait été cons- truite jusqu'à présent est celle d’un octodécapep- tide, formé par la soudure bout à bout de quinze molécules de glycocolle et de trois molécules de leucine”, La comparaison de ces produits de synthèse avec les corps naturels à révélé de frappantes analo- gies. Pour les polypeptides naturels, cette analogie va jusqu'à l'identité, puisque la plupart d'entre eux ont été reproduits par synthèse. En ce qui concerne les peptones, leurs ressemblances avec les polypep- tides un peu plus compliqués sont remarquables. En effet, lorsque leur chaine est longue, les polypeptides de synthèse sont, en général, comme les peptones, très solubles dans l'eau. Leur saveur n’est pas sucrée, comme celle suffisamment * E. Fiscuer et E. ABDERuALDEN : D, chem. G., t. XXXIX, p. 2315, 1906, et t. XL, p. 3544, 1907, — Acad. des Sciences de Berlin, €. XXX, p. 5174, 1907. — OsBorne el Carr; LEVENNE : cités d'après E. Fiscner (Oryanische Synthese u. Bioiogie, Berlin, 1908, p. 22). — HuGouxexo et GaLimaRD : C. B., 23 juillet 1906. — Hucouxexo et Morez : /bid., 20 juil- let 1908. ? Le lecteur lrouvera une mise complète de cette question des polypeptides artificiels et naturels, avec toute la bibliographie afférente, dans une récente monogra- phie de E. Abderhalden (Weucre Eryebnisse auf dem Gebiete der speziellen Liweisschemie, Iena, 1909). 3 E. Fiscuer : D. chem, (r.,t. XL, p. 1754, 1907, au point 132 E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE D ——————————_————————————_———————————— des acides aminés naturels, mais amère, comme celle des peptones. Ils sont bien précipités par l'acide phosphotungstique, et beaucoup d'entre eux, parfois déjà des tripeptides, donnent la réac- tion du biuret. Revenant sur ces analogies dans un exposé d'ensemble qu'il a fait récemment à l'Aca- démie des Sciences de Berlin, E. Fischer' conelut qu'on ne peut plus guère douter que les peptones ne soient des mélanges de polypeptides allant des tétrapeptides aux octopeptides environ. Au delà, on entre visiblement dans la région des albumoses. Ainsi le tétradécapeptide fait avec douze molécules de glycocolle et deux molécules de I-leucine donne avec les alcalis des solutions qui moussent, comme de l'eau savonneuse. Il est précipité par les acides minéraux, le tannin, l'acide phosphotungstique, par le sulfate d'ammonium introduit à salura- tion. Toutefois, celte dernière réaction, qui, pour Kühne, représentait une différence spécifique entre les albumoses et les peptones, est sans doute de nature très contingente et dépend beaucoup plus de la nature des acides aminés entrant dans un polypeptide que du degré de complication de celui-ci. Ainsi le tétrapeptide naturel cité plus haut (deux molécules de glycocolle, une d'alanine et une de tyrosine) etla Æleucyl-triglycyl-Ætyrosine de syn- thèse, que la briéveté relative de leur chaîne place- rait au niveau des peptones, sont précipités de leur solution par le sulfate d'ammonium, ce qui tient sans doute, d’après E. Fischer, à la présence de la tyrosine. Cette réaction du sulfate d’ammonium n’est done nullement spécifique; elle ne donne nullement la certitude que les corps précipités par ce sel (les albumoses de Kühne) sont /ous des poly- peptides moins simplifiés que ceux qui ne sont pas précipités (les peptones de Kühne). Cela revient à dire que /a notion chimique d'albumoses et de peptones est eu train de S'efacer, pour être reni- placée par une classification rationnelle des poly- peptides de digestion, fondée sur le nombre, la nature et le mode d'association des acides aminés. Enfin, quand on arrive aux polypeptides à vingt acides aminés, on a l'impression, dit E. Fischer”, que l'on est déjà transporté au niveau des albu- mines elles-mêmes. C'est que Fischer ne croit pas, contrairement à l'opinion généralement acceptée, que les protéiques sont des molécules colossales. Toutes les déterminations sur lesquelles repose celte assertion lui paraissent sujettes à caution, cl il pense que les protéiques que nous manions sont des mélanges de divers composés, dont la consti- tution est bien plus simple que ne le font croire ———————— 1 E, Fiscuen Acad. des Sciences de Berlin, 24% jan- vier 1907. 2 KE, Fiscuer : Loc. cit. l'analyse élémentaire et les résultats de l'hydrolyse des dits mélanges. S6. — Applications diverses de l'étude des polypeptides. On sait que, jusqu'à présent, aucun des poly- peptides de synthèse ne s'est montré accessible à l’action du sue gastrique, tandis que la trypsine dédouble un grand nombre d’entre eux. Cette cons- latalion a conduit E. Fischer et ses élèves à étudier méthodiquement l’action des diastases digestives, pepsine, trypsine, érepsine, et celle des suces d'expression de divers tissus (c'est-à-dire d'histo- diastases) sur des polypeptides divers. Ce contrôle à l'aide des polypeptides permet d'abord de démontrer l'identité ou du moins la res- semblance, ou au contraire la nature différente de deux diastases protéolytiques. Ainsi le sue pylo- rique et le suc duodénal (activés par un acide) ne dédoublent pas la glycyl-/tyrosine, que le suc pancréatique décompose, au contraire, très vite”. Ils se comportent done comme le suc gastrique. Le sue pancréatique dédouble un grand nombre de polypeptides, à condition que ceux-ci ne contiennent que des acides naturels; mais il est impuissant vis- à-vis d’une série d’autres”, même quand ils rem- plissent la condition ci-dessus. Au contraire, l'érep- sine et les sucs d'expression de divers tissus ou cellules, foie, rein, museles, ete., de bœuf, de chien, de lapin, de pore dédoublent, toujours sous la condition énoncée plus haut, tous les polypep- tides examinés à cet égard jusqu'à ce jour. Le plasma, le sérum sanguin, les globules rouges, les plaquettes sanguines, le sue de levure, de champi- gnons comestibles‘, etc., ont été étudiés également à ce point de vue. On entrevoit finalement que la grande classe des diastases protéolytiques devra un jour être démembrée en diastases protéolytiques proprement dites, qui dédoublent les divers pro- téiques, eten diastases peptolytiques (Abderhalden), qui attaquent les polypeptides, ces derniers agents étant adaptés à l’hydrolyse de molécules de com- plicalion décroissante. On s’est servi aussi des polypeptides poür étudier détails l’action des diverses diastases protéolytiques, à savoir la vitesse de la réaction, le dans ses 1 AgpennaLnexet Roxa : Zeitechr, physiol. Ch., & XEVH, p. 359, 1906. 2 E. Fiscner et ABDERUALDEN : Jbid., 1. XEVI, p. et t. LI, p. 264, 1907. 3 Voyez les Mémoires d'Abderhalden et de ses collabora- teurs dans Zeitsehr, f. phvsiol. Ch., &. XLVIT, p. 466, 1906; te XVIII, p.537, 4906; t. XLIX, p. 1ret 31, 41906, et 4 DN, p. 390, 1908. 4 Voy. les Mémoires d'Abderhalden et de ses collaboraz teurs dans Zeitschr. 1. physiol. Ch., t. LI, p. 334, 1907; t. LI, p. 280, 294 et 308, 1907 ; & LV, p. 374, 317% et 395, 1908. 52, 4905, E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE AG lieu de premi‘re atlaque de la diastase dans la chaîne du polypeptide, elc., toutes questions dont la connaissance précise du corps attaqué — le polypeptide — et des produits obtenus — polypep- tides plus simples ou acides aminés libres — per- met une étude singulièrement plus précise qu'avec les protéiques, où ni le point de départ, ni le point d'arrivée de la réaction ne sont nettement connus au point de vue chimique”. Cette étude à fait apparaitre aussi l'importance du pouvoir rotaloire des acides aminés et de leur mode d'association sur la résistance des polypep- tides à l'attaque des diastases. Comme on l'a dit incidemment plus haut, ne sont attaquables par le sue pancréatique el les sucs d'organes que les polypeptides formés par les acides naturels, c'est-à- dire par ceux qui existent dans les protéiques. Exemples (les acides non naturels sont en ita- liques)* : HYDROLYSÉS NON HYDROLYSÉS d-alanyl-d-alanine. J-alanyl-l-alanine. d-alanyl-/-alanine. l-alanvl-d-alanine. I-leucyl-d-Jeucine. d-leucyl-l-leucine. 1-leucyl-/-leucine. Quand on emploie un polypeptide racémique, seul l’antipode qui répond à la condition sus- énoncée est dédoublé; l'autre subsiste inattaqué. Ainsi le racémique d-alanyl-/-leucine + Lalan yl-d- Jeucine est dédoublé, et l'antipode d-alanyl-Zleu- eine, qui est à acides naturels, est seul hydrolysé. Au contraire, l’autre forme de ce racémique : d-alanyl- d-leucine + l-alanyl-l-leucine n’est pas touché, parce que chacun des deux antipodes cosstituants contient un acide non naturel. Mais cette condition, si elle est nécessaire, n'est pas suffisante, car le suc pancréa- tique n’attaque pas la /-leucyl-glycine, bien que ce dipeptide ne contienne que des acides naturels. C'est qu'il intervient encore d'autres conditions, notamment la nature des acides et leur ordre d'as- sociation. Ainsi l'alanyl-glycine est dédoublée; la glyeyl-alanine ne l’est pas. Ajoutons que ce dédoublement asymétrique des racémiques dont il vient d'être question ne se retrouve plus, du moins aussi complet, quand on introduit ces corps dans l'organisme animal”. Constatons done qu'il existe des associations d'acides aminés particulièrement résistantes à l'action des diastases, et ainsi apparait l'un des moyens dont dispose l'organisme pour conférer à ! Voy. les Mémoires d'Abderhalden et de ses collabora- teurs dans Zeitschr. f. physiol. Ch.,t. LI, p.294, 1907; t. LIL, p. 326, 1901; t. LUI, p. 251, 1907, et t. LIV, p. 363, 1908. * E. Fiscuer et E. ABpertaLoEN : Zeitschr [. physiol. Ch., t. XLVI, p. 52, 1905, et t. LI, p. 264, 1907. * ABDERHALDEN, B. BLocu et P. Roxa: /bid., t. LIT, p. 435, 1907. — ABDERHALDEN ef SCHITTENUELM : Lbid., t. LI, p.323, 1907. KEVLE GÉNÉRALE DES SCIEN.ES 1909 _ des protéiques ou à des fragments de ces subs- lances une résistance spéciale. C'est à des causes de cette nature qu'est due sans doute la résistance plus grande opposée à l'action des diastases diges- tives par cette portion « anti » de la molécule albu- minoïde, résistance déjà signalée par Schutzenber- ger. On voit dans combien de directions différentes l'étude des polypeptides a été fructueuse. IL. — Les NUCLÉOPROTÉIDES. LES ACIDES NUCLÉIQUES. Des complexes que nous appelons nucléopro- téides, on ne connait avec quelque précision que le groupe spécifique des acides nucléiques' en ce qui concerne les fragments azotés de ce groupe. On sait que ces fragments, tels que les fournit l'hydrolyse de l'acide nueléique du thymus ou de la laitance de hareng par l'acide sulfurique, sont représentés, en fait de bases xanthiques, par la xanthine, l'hypoxanthine, l'adénine et la guanine, et, en fait de bases pyrimidiques, par la thymine, la ceytosine et l'uracile. Mais il est démontré aujour- d'hui que toutes ces bases ne préexistent pas dans la molécule. Seule l'adénine et la quanine, d'une part, la ‘hymine et la cylosine, d'autre part, sont des constituants primaires; la xanthine et l'hy- poxanthine naissent secondairement de l'oxydation de la guanine et de l’adénine pendant l'hydrolyse sulfurique, et l'uracile provient aussi de loxyda- tion de la eytosine. C’est ce qui ressort clairement du travail de Steudel sur l'hydrolyse de l'acide thymonucléique par l'acide nitrique à froid. Par ce procédé, les nitrates peu solubles de la guanine et de l'adénine cristallisent aisément, en emportant avec eux 61 °/, de l'azote total, tandis que les eaux- mères ne contiennent plus que des traces de bases puriques, à côté des bases pyrimidiques*. De ces résullats quantitatifs, combinés avec ceux que fournit pour les bases pyrimidiques l'hydrolyse sulfurique, Steudel conclut que la molécule de ces acides nucléiques renferme respectivement 1 molé- cule de chacune des quatre bases adénine, guanine, thymine et cytosine. Toutefois, par l'hydrolyse acétique, Levenne et Mandel* sont arrivés à des résultats un peu différents (3 purines pour 2 pyri- , Surtout 4 L'acide nucléique étant un excellent précipitant des matières protéiques, on continue à se demander de divers côtés si l'existence des nucléoprotéides, en tant que prin- cipes immédiats des tissus, peut être admise avec une entière sécurité. (Voy. notamment ABDERUAIDEN: Lehrh. d. physiol. Chem., Berlin, 1906, p. 299. — O. ConNsem: Die Physiologie der Verdauung und Ernährung, Berlin. 1908, p. 241.) 2 STEUDEL: Zeitschr. 1. physiol. Chem., t XLNHI, p. 425, 1906; t. XLIX, p. 406, 1906, et €. LILT, p. 14, 1907. 3 LEvENNE et Manpez : Biochem Zeitschr., {. X, p. 215, 1908. 3°* 134 E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE midines). Notons encore que l'hypothèse d'après laquelle les bases pyrimidiques seraient des pro- duits d'une décomposition secondaire des purines paraît bien devoir être définitivement rejetée”. On connaît moins bien le groupe hydrocarboné de l’acide thymonucléique. Steudel* paraît bien avoir démontré, cependant, que cet acide ne ren- ferme pas de pentoses, mais seulement un hydrate de carbone en C’, dont quatre molécules formeraient, avec quatre molécules d'acide métaphosphorique, un acide analogue à l'acide glycérophosphorique, complexe qui fixerait, en outre, une molécule de chacune des quatre bases citées plus haut, adénine, guanine, thymine et cytosine. D'autres acides nucléiques ont été étudiés encore, notamment l'acide quanylique de Bang, dont l’exis- tence a été un instant contestée, mais qui parait bien exister tel que Bang l’a décrit, sauf qu'il ne contiendrait pas de glycérine*. Les produits actuel- lement isolés se réduisent à une seule purine, la quanine, un pentose et de l'acide phosphorique. Les bases pyrimidiques font totalement défaut, aussi bien que l’adénine. Un acide nucléique aussi simple que l'acide guanylique, et mieux connu, parce qu'il est le seul qu'on ait pu isoler à l'état cristal- lisé, est l'acide inosique de la chair musculaire, que Neuberg et Brahm* ont réussi récemment à dédou- bler quantitativement en acide phosphorique, I-xylose et hypoxanthine. Le squelette de ce com- posé est done un acide pentose-phosphorique, qui est à placer à côté de l'acide inosite-phosphorique de la phytine (voyez plus loin) et de l'acide glycé- rophosphorique de la lécithine. IL. —— LES HYDRATES DE CARBONE. L'acquisition la plus importante qui ait été faite au point de vue de la Chimie biologique dans l'étude des hydrates de carbone est la démonstra- lion, apportée par Maquenne, de la constitution du grain d’amidon. Ces résultats ont été exposés dans la ARevue® par l’auteur lui-même. Ils modifient profondément nos idées sur tout le mécanisme de la saccharificalion diastasique, et par conséquent digestive, des amylacés. On ne peut que signaler ici d’autres travaux sur les hydrates de carbone et relatifs à des sucres ou des glucosides nouveaux 1 Sreupez : Zeitschr. {. physiol. Chem., { LILI, p.508, 1907. 3 SreuneL: Jbid., t. L, p. 538, 1907; t. LIL, p. 62,-1907; {. LIL, 44, 1907, et t. LV, p. 407, 1908. 5 G, LEvENNE et Manor : Biochem. Zeitschr., t. X, p. 221, 1908. * NeuBerG et Braun : Biochem. Zeitschr., &. NV, p. 438,1907. 5 Voyez dans la Ztevue du 15 octobre 1906, p. 860, l'étude de M. Maquenne sur L'amidon el sa saccharilication die- stasique, — Voyez aussi Mme GariN-Gruzewska: C, 1? Lt. CXLVI, p. 540. 1908,eL Soc. de Biol, &. LXIV, p. 599, 1908. (idite, sorbiérite, vicianine, bakankosine, sambu- aigrine, prulaurasine, etc...), dus à G. Bertrand, à Bourquelot et à leurs collaborateurs, et dont l’ana- lyse rentre plutôt dans une Revue annuelle de Chimie végétale ou de Chimie organique. Notons encore, en ce qui concerne les méthodes, le nou- veau procédé de dosage des sucres réducteurs pro- posé par G. Bertrand”, où l'opération est ramenée à un dosage de sel ferreux par le permanganate, el le procédé à l’hydroxylamine de Bang ?. IV. — LES LIPOÏDES On sait que c'est à l’occasion d’une théorie au- jourd'hui bien connue, touchant le mécanisme de la perméabilité cellulaire, que ce mot de lipoïde a été créé par Overton”. Bornons-nous à rappeler ici que les corps pour lesquels les cellules ani- males ou végétales sont perméables, narcotiques, colorants dits vitaux, etc., sont en général solubles dans les huiles, et, en particulier, qu'un narcotique est d'autant plus énergique que sa solubilité dans l'huile est plus grande par rapport à sa solubilité dans l’eau. On à été conduit ainsi à admettre que, si ces corps passent à travers les membranes cellulaires, c'est que celles-ci contiennent des substances qui, comme les huiles, sont capables de dissoudre les corps en question et de les introduire ainsi dans la cellule. Ces constiluants cellulaires sont donc, à ce point de vue, semblables aux graisses, d’où le nom de lipoides sous lequel Over- ton les a réunis. Cette dénomination s'applique donc à des corps ayant une propriété physique ou biophysique com- mune, mais non pas des caractères chimiques communs, car rien n'est plus hétérogène au point de vue chimique que la famille des lipoïdes. Pour Overton, les lipoïdes cellulaires sont, en effet, la lécithine et la cholestérine (et le protagon), com- posés parmi lesquels la lécithine seule présente quelque analogie de structure avec les graisses, Pour des raisons qu'il serait trop long d'exposer ici, Bang‘ a élendu récemment cette définition en appelant lipoides cellulaires tous les produits que l'éther ou les solvants analogues enlèvent aux cellules. La définition actuelle des lipoïdes est donc pure- ment biophysique, et les contours de cette famille restent très vagues ; mais celte appellation, évidem- ment provisoire, est commode pour désigner un ensemble de corps que leur histoire biologique 1 G. Bertranp : Bull. Soc. chim.,t. XXXV, p. 1285, 1906. 2 Banc : Biochem.Zeitschr., &. A, p. 271. 3 Ovenron: Studien über die Narkosr, léna, 1901. 4 [, Banc : Biochemie der Zellipoide, in Ærgebnisse der Physiol., par Asher et Spiro, 6° année, Wiesbaden, 1907. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 135 rapproche souvent les uns des autres. Voici com- ment on a provisoirement divisé les lipoïdes": 1° Lipoides phosphorés ou phosphatides, dont les uns sont azotés, comme les lécithines, et les autres non azotés, comme la phytine ; 2% Les lipoides non phosphorés, dont beaucoup sont, comme la cérébrine, de nature glycosidique; 3 Groupe de la cholestérine (ou lipoïdes sans P ni Az); 4° Lipoides de nature chimique inconnue. $ 1. — Lipoïdes phosphorés ou phosphatides. Le centre de cette famille est représenté par la lécithine, qui a été considérée pendant longtemps comme le seul corps organique phosphoré, soluble dans l’éther, figurant comme constituant cellulaire dans nos tissus, à telles enseignes qu'aujourd'hui encore le dosage de la lécithine dans un tissu se ramène à un dosage de phosphore dans l'extrait éthéré. La seule incertitude dont cette manière de faire paraissait affectée, c'est qu'on admettait l’exis- tence de plusieurs lécithines, différant les unes des autres par la nature des radicaux gras (oléique, stéarique, etc.) substitués dans l'acide glycérophos- phorique. Une conception aussi simple de la notion des lécithines ne peut plus être maintenue aujour- d'hui, car les recherches de Thudichum, de W. Koch, de Erlandsen *, ont montré qu'à côté des lécithines proprement dites, où Az : P égale 1 : 4, il existe, dans les tissus animaux, toute une série de composés construits sur le même type, c'est-à-dire fournissant comme produits de décomposition de l'acide glycérophosphorique, des acides gras et des bases azotées, mais dans lesquels le rapport Az : P prend des valeurs différentes de 1 : 1. On est, en général, d'accord pour réunir tous ces corps sous la dénomination de phosphatides (Thudichum) ; celle de /écithanes, proposée par Koch, ne parait pas avoir été acceptée. Voici l'indication d'un certain nombre de travaux nouveaux sur les différentes catégories de phosphatides distingués jusqu'à présent. Dans la catégorie des monamino-monophospha- tides (Az : P = 1 :1), figurent les /écithines pro- prement dites avec leurs dérivés, et les céphalines cérébrales. En ce qui concerne d’abord les Zécithines, de la préparation desquelles on croyait être maitre, on a, de divers côtés, insisté sur la difficulté, on a même 1 J. BANG : Loc. t. IX, p. 44, 1908. ? Taunrcnux: Di: chemische Konstilution des Gehirns,etc., Tübingen, 1901. — W. Kocn: Zeitschr. f. physiol. Ch., tXXXVIT, p.181, 1903. — ErLANDSEN : Zbid.. &. LI, p. 71, 1907. Le lecteur trouvera dans ce Mémoire d'Erlandsen un histo- rique détaillé de l'évolution de cette question. cit. — S. FRANkEL: Biochem. Zeitseür., dit : l'impossibilité, de les obtenir actuellement à l’état de pureté. Le chlorure de cadmium, réactif précipitant recommandé par Bergell, altère le pro- duit en en détachant, d’après Erlandsen, une partie des restes gras. La lécithine est, de plus, auto- oxydable à l'air, ainsi que le montre l'abaissement graduel, parfois énorme, de l'indice d’iode (Erland- sen), en sorte que l’on peut dire avec Bang qu'au- cune lécithine n’a encore été obtenue à un état de pureté complet". La lécithine du jaune d'œuf pos- sède le pouvoir rotatoire à droite (Ulpiani), comme aussi l'acide glycéro-phosphorique qu'on en extrait (Wildstädter et Lüdecke), et cette dernière consta- lation rend très probable que, des deux formules ci-dessous, c'est l’asymétrique (Il) qui doit être préférée, bien que, dans la formule I, la présence de deux radicaux gras différents pourrait aussi rendre compte du pouvoir rotatoire* : CH°.0.(Radical gras). CH?.0.(Radical gras). CH.0.(Groupe phosph. de chol.). CH.0. (Radical gras). CH?.0.(Radical gras). QH=/0.(Gr.-phosph. de chol.). (1) (IT Les diverses lécithines ne diffèrent sans doute que par la nature des acides gras substitués, et l’on admettait autrefois que ces acides sont les acides palmitique, stéarique et oléique. Aujourd'hui, il est établi, par les recherches de Henriquez et Hansen, de Lawes, de Cousin surtout, que la léei- thine du jaune d'œuf contient, à côté des acides palmitique et stéarique, de l'acide linoléique, et, d’une manière générale, des acides moins saturés que l'acide oléique. Mais cette question est encore loin d'être complètement éclaircie *. La lécithine donne avec l’eau des solutions colloï- dales dont la précipitation, en présence des sels, a élé étudiée par Koch et, d'une manière plus précise, par Porgès et Neubauer, et, comme la lécithine est probablement l'un des colloïdes des membranes cellulaires, il est intéressant de constater, au point de vue de l'étude des variations de la perméabilité cellulaire, que déjà les concentrations salines atteintes dans les liquides de l'organisme suffisent pour coaguler les solutions de lécithine*. 4 ERLANDSEN : Loc. cit. — WiNTERSTEIN et HiesTaAND : Zeitschr. f. physiol. Ch., t. LIV, p. 291, 1908.— BerGELL: D. chem. G., t. XXXIII, 2584. — Banc : Biochemie der Zellipoïde, in Ergebn. der Physiol., t. VI, p. 131, 1907. — Pour la compo- sition de la lécithine la plus pure qui parait avoir été obtenue (œuf et muscle de bœuf), voy. ERLANDSEN : Loc. cit. 3 Ucpranr: Gazz. chim. ilal., t. XXXI, 2, p. 41, 1902. — WaiLosragntER ét Luepecke : D. chem. G., & XXXVII, p. 3753, 1904. 3 Hexriques et Hansen: Skand. Archiv f. Physiol., {.XIV, p. 309,1903. — Lawes : Pharm. Zeitsehr., t XLVIII, p. 814. — Cousin : Soc. de Biol., t. LV, p. 913, 1903. 4 W. Kocn : Zeitschr. f. physiol. Ch., t. XXXNII, p. 181, 1903. — Porcxs et NeusauEr: Biochem. Zeiltschr., t. NU, p- 153, 1907. 136 La lécithine présente une grande aptitude à des combinaisons variées, non seulement avec des matières minérales, mais aussi avec des substances organiques, sucres divers, matières protéiques. La lécithine-glycose, étudiée par Bing, a été identifiée par lui, à tort sans doute, avec la Jécorine, qui est cerlainement un corps ou un mélange de corps plus complexes (Siegfried et Mark, Mayer et Ter- roine). Avec les matières protéiques, la lécithine, qui est en solution un colloïde négatif (V. Henri), donne un précipité qui est un complexe colloïdal d'albumine et de lécithine reproduisant les pro- priétés des lécithalbumines de Liebermann (Mayer et Terroine)'. Dans la catégorie des monamino-monophospha- tides rentrent aussi les céphalines du cerveau, qui fournissent par hydrolyse de l'acide glycérophos- phorique, des acides gras et des bases azotées. Dans celle que Cousin a bien étudiée, la base était de la choline”. Les monamino-diphosphatides (Az:P=1:2) ne sont encore représentés que par la cruorine, extraite par Erlandsen du muscle cardiaque du bœuf, et qui donne par hydrolyse de l'acide phosphorique, de la glycérine, des acides gras pauvres en hydro- gène et une base différente de la choline. Les dia- mino-monophosphatides (Az: P—2:1) et les dia- mino-diphosphatides (Az : P = 2:92) comprendraient les premiers, outre l'amido-myéline et la sphingo- myéline de Thudichum, un phosphatide en GC”, isolé par Erlandsen du muscle cardiaque, et les seconds, divers composés également décrits par Thudi- chüm. Enfin $S. Fränkel et C. Bolaffio ont décrit récemment un (riamino-monophosphatide (Az :P —3:1), la néottine, extrait du jaune d'œuf, dont l'étude n'est pas encore achevée *. À côté de ces phosphatides animaux, qui sont tous azotés, il faut placer des phosphalides véqgé- taux, très répandus dans le règne végétal, et qui sont dépourus d'azote (Posternak, Schulze et Win- terstein). Le mieux connu d’entre eux est la phy- tine de Posternak, que cet auteur considère, d'après la formule de dédoublement : C2H°P°0° + H°20 — 2PO'H* +2 CH°0, comme un äcide anhydro-oxyméthylène-diphos- phorique. L'aldéhyde formique qui termine l’équa- tion ci-dessus n'est pas recueillie à cet état, mais sous la forme polymère de l'inosite. Mais, depuis 1 Srecrrien et Mark: Zeilschr. f. physiol. Ch., t. XLVI, p. 492, 1906. — Mayer et TerRoINE : Soc. de Biol., LXII, p. 173 et p. 398, 1907. — Voy. aussi Iscovesco: ibid., t. LXII, 744, 1903. 2 Cousix : Soc. de Biol., t. LXI, p. 23, 1906, et t. LXIL, p. 238, 1907. 3 EnLanDsEN: Loc. cit. — S. FRAENKEL et C. BoLario: Bio- chem. Zeïtschr., t. 1X, p. 41. 1998, E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE que Suzuki, Yoshimura et Takaishi ont montré que le dédoublement, cependant très lent et peu éner- gique, de la phytine par une diastase, la phytase, donne directement naissance à de linosile, et que Neuberg, à l'aide de la réaction du furfurol, a rendu très probable ce fait que l’inosite préexiste dans la phytine, il devient très vraisemblable que ce corps est un é{her phosphorique acide d2 lino- sile, comme la lécithine et les acides nucléiques sont respectivement des éthers de la glycérine et d'hydrates de carbone divers *. Tous ces travaux montrent suffisamment com- bien les lipoïdes phosphorés sont nombreux et combien la notion de lécithine, jadis bornée à un type unique, a dû être élargie. $ 2. — Lipoïdes non phosphorés. Ce sont les corps du groupe de la cérébrine (céré- brosides) et leurs dérivés (acines cérébriques). Ils paraissent fournir par dédoublement, comme les lécithines, des corps à fonction basique, des acides gras et un sucre, le galactose. Mais ce dédouble- ment est encore très mal connu *. $ 3. — Lipoides sans phosphore ni azote. C'est le groupe des cholestérines. Il n'entre pas dans le plan de cette revue de rendre compte des nombreux travaux de chimie pure faits récemment sur ces composés, formés vraisemblablement d'un noyau benzénique hydrogéné*. $ 4. — Lipoides de nature inconnue. C'est une série de corps non encore délinis, que l’éther enlève aux cellules, notamment aux globules rouges, et qui ne sont connus que par des actions physiologiques (voy. plus loin). $ 5. — Rôle des lipoides en Biologie. Ce qui précède montre assez que les lipoïdes constituent une famille de corps très hétérogènes, dont beaucoup ont une histoire chimique à peine ébauchée, et dont la plupart, par leurs caractères peu marqués, leur état amorphe, la complexité de leur molécule, leur facile altération n'’offrent aux chimistes que des aspects peu engageants. Si néanmoins ces corps, très délaissés pendant long- temps, bénéficient en ce moment d’un regain de faveur, c'est parce que, du côté biologique, sont 1 PosrenNAK : C. R., t. CXXXVII, 1903. — Scnurze et Win- TERSTEIN: Zeitschr. f. physiol. Ch., t. XL, p. 120, 1903. — C. Neusenc : Biochem. Zeïtschr., t. IX, p. 556, 1908. 2 TurenreLoer : Zertschr. f. physiol. Ch.,t. XLIV, p. 366, 1905, et t. XLVI, p. 518, 1906. — TurerreLoer et KiTaGAwWaA : 1bid., t. XLVI, p. 518, 4906. 5 Voyez la Revue d'ensemble de Gizxix dans Biochem. Ceatralbl., t. VII, p. 289 et 357, 1908. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 137 venues loute une série de constatations qui mon- trent le rôle important joué par ces composés. On ne fera pas ici une étude systématique de ces faits qui appartiennent plutôt à une revue de Physiolo- gie; montrons simplement, par quelques exemples, la direction et le haut intérêt de ces recherches. On ne rappellera pas ici les expériences à l’aide desquelles, dès 1899, Overton et H. Meyer‘ ont, chacun de son côté, expliqué la perméabilité des cellules animales et végétales pour certaines sub- stances (narcotiques, colorants dits vitaux, etc.) par la solubilité de ces corps dans les lipoides cellulaires (cholestérine, lécithine, protagon), théorie qui a recu depuis cette époque de nom- breuses confirmations. Ainsi Nicloux et M! Frison* ont montré que la quantilé de chloroforme fixée pendant l'anesthésie par la substance blanche et la substance grise est proportionnelle aux quan- lités de substances solubles dans le chloroforme (c'est-à-dire de lipoïdes) que contiennent ces deux parties du cerveau. Pareillement, la mort des ani- maux intoxiqués par le lysol arrive au moment où le cerveau a fixé une certaine quantité de toxique. Si le lysol est donné dissous dans l'huile, l'animal (lapin) résiste à des doses énormes et la quantité fixée par le cerveau est minime ?. Beaucoup d'autres phénomènes paraissent ainsi en relation avec le pouvoir dissolvant des lipoides. On sait que la cholestérine ou ses éthers sont un principe constant de la sécrétion sébacée, et il paraît probable que seules sont absorbables par la peau les substances solubles dans les lipoïdes de cet enduit cutané”. Notons encore que ces éthers cholestériques, dont on peut donc dire qu'ils forment comme un enduit ininterrompu au-dessus du revêtement extérieur de tous les animaux supérieurs, sont très résis- tants à l’action des bactéries. Une gélatine nutri- tive recouverte de lanoline (éther cholestérique) reste inaltérée, tandis qu'une couche de graisse à base de glycérine ne fournit pas la même protec- tion *. Notons encore ce fait intéressant de l’Aydrophilie de certains lipoïdes. Les éthers purs de la choles- térine, par exemple la lanoline débarrassée de la cholestérine pure qu'elle contient, ne présente ! Overton : Arch. de Pfuüger, t. XCIT, p. 269, 1902. — H. Meyer : Arch. f. exp. Path. u. Pharm., t. XLII, p.109, 1899. 2 Mie Frison et Nicroux: Soc. de Biol., t. XLII,, p. 220, 1907. Le lecteur trouvera un exposé complet des intéres- santes recherches de Nicloux et de ses collaborateurs dans l'ouvrage suivant : M. Niczoux : Les anesthésiques géné- raux au point de vue chimico-physiologique. Paris, 1908. * F. BLumExTHaL et E. Jacogy : Biochem. Zeitschr., t. VI, p. 39, 1907. # FiLEaxe : Biochem. Centralbl., t. VII, p. 381, 1908. * GOLDSTEIN, Cité d’après Gicin : Biochem. Centralbl., t. VII, p. 371, 1908. presque pas d'hydrophilie, c'est-à-dire qu'on ne réussit pas à leur incorporer des quantités d'eau appréciables. Si l’on ajoute, au contraire, à de la paraffine de 2 à 5 °/, de cholestérine, et mieux encore d'oxycholestérine, on confère à ces mé- langes une hydrophilie telle qu'on peut leur incor- porer jusqu'à 200 et même jusqu'à 550 °/, d'eau (Unna)". Ces faits, qui paraissent jusqu'à présent n'avoir préoccupé que les dermatologistes, au point de vue de la préparation des onguents, présentent un intérêt biologique évident, en ce qui concerne la pénétration de l'eau, et par conséquent de sub- stances solubles dans l'eau, dans un milieu ana- logue aux graisses. Les recherches de ces deux dernières années ont confirmé aussi le rôle important attribué aux lipoïdes dans le phénomène de l'hémolyse. On a remarqué depuis longtemps que les agents chi- miques qui rendent le sang « laqué », c'est-à-dire qui sont hémolytiques (éther, chloroforme, amy- lène, acétone, éther de pétrole, etc.), sont en même temps des dissolvants des lipoïdes, et leur action s’expliquerait donc par une attaque des lipoïdes de la paroi globulaire. Pareillement, l'hémolyse par les sels biliaires (G. Bayer), par la saponine (K. Meyer) parait être due à une action analogue (dissolution de la lécithine du globule). Le point d'attaque de beaucoup d'agents hémolysants est donc représenté par les lipoïdes du globule attaqué”. On voit aussi les lipoïdes intervenir encore dans le phénomène de l'hémolyse, soit parce qu'ils sont eux-mêmes l'agent hémolysant, soit parce qu'ils jouent un rôle dans la genèse ou dans l’action de l'agent hémolysant. Il y a d’abord des lipoïdes à pouvoir hémolysant, comme ceux que l’on a extraits du corps thyroïde (Iscovesco) ou des proglottides du bothriocéphale (et auxquels on fait jouer un rôle dans la genèse de l'anémie produite par ce parasite) (Tallquist, E. Bloch)”. Les substances lysinogènes des globules rouges (c'est-à-dire ceux d’entre les constituants des stromas globulaires qui provoquent la formation d'hémolysines, quand ces stromas sont injectés à des animaux) sont aussi sans doute de nature lipoïdique (Bang et Forss- mann; Takaki) *. On sait, d'autre part, par les 1 Unna: 1bid., p. 5, 1908. — Unna a fait cette expérience avec lunguentum paraflini de la Pharmacopée alle- mande, c'est-à-dire avec un mélange de 1 partie de paraf- fine solide et 4 parties de paraffine liquide. # G. BAYER : Biochem. Zeitschr., t. IX, p. 58, 1908. K. Mayer : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. XI, p.357, 1908. 3 Jscovesco : Soc. de Biol. t. LXV, p. 106, 1908. — Tazr- quisT, cité d'après E. BLocu : Biochem. Zeïtschr., t. IX, p. 498, 1908. — Voy. aussi MorcexroTu et REICHER : Berl. klin. Wochenschr., 1907, n° 38. 4 Banc et Forssmanx : Beiträge z. chem. Physiol. et Pa- thol., t. VII, p. 326, 1906. — Takaki : Zbid., t, XI, p. 274, 1908. 138 expériences bien connues de Kyes, que la lécithine est indispensable à l'action hémolytique du venin de cobra (formation d’un toxolécithide hémoly- sant), et, de plus, que la cholestérine agit vis-à-vis | de ce venin comme antihémolytique *. Cette action protectrice de la cholestérine a été retrouvée aussi vis-à-vis d’autres agents hémoly- tiques, comme certaines hémolysines provenant des bactéries ou des tissus, ou bien les savons *, ou encore la saponine, et ici on à fait cette remarque intéressante que les globules très vulnérables à la saponine (cheval, lapin, porc) sont pauvres en cholestérine (de 0,39 à 0,72 °/,,), tandis que ceux qui sont plus résistants (chien, mouton, bœuf) sont riches en cholestérine (de 1,25 à 3,59 °/,)°. Cette protection de la cholestérine s'exerce aussi contre des toxines bactériennes : ainsi la toxine tétanique est neutralisée in vitro par la bile, et, dans cette action, c'est la cholestérine biliaire qui joue le rôle éminent (Vincent). D'autres lipoïdes 4 Voy. notamment le récent travail de Miwz : Biochem. Zeitschr., t. 1X, p. 357, 1908. ? Iscovesco : Soc. de Biol., t. LXIV, p. 404, 1908. — K. Mayer : Beitr, chem. Physiol. u. Pathol., t. XI, p. 357, 1908. — Iscovesco et Foucaun : Soc. de Biol., t. LXIV, p.677, 1907. — D'autres lipoides d'origine globulaire et encore mal définis ont le même pouvoir protecteur (Iscovesco, ibid., p. 615). 3 Cf. Iscovesco : Soc. de Biol., t. LXIV, p. 404 et 675, 1908 — K. Mayer : Beitr.chem. Physiol. u. Pathol., t. IX, p.357 1908. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE agissent de même. Ce sont les lipoïdes cérébraux, et surtout la cérébrone, qui confèrent à l'émulsion de masse cérébrale la propriété de neutraliser la toxine tétanique. Cette action est si puissante que 1 gramme d'acide cérébronique (dérivé de la céré- brone) neutralise 12.000 doses mortelles pour la souris (Takaki). Les toxines tétaniques et diphté- riques ont, de même, des propriétés lécithinophiles marquées (Petit). Notons encore que Calmette, Massol et Guérin ont signalé que la résistance à l'infection tuberculeuse paraît être fonction de la richesse du sang en lécithine”. On voit que ces résultats sont intéressants non seulement au point de vue biologique, mais aussi parce qu'ils constituent un sérieux encouragement à des tentatives thérapeutiques. On sait que de telles tentatives ont déjà été faites dans diverses directions. Dans un second article, nous passerons en revue les travaux consacrés à la digestion, au sang et aux échanges nutritifs. E. Lambling, Professeur à l'Université de Lille, Correspondant de l'Académie de Médecine. 1 Vincent : Soc. de Biol., t. LXIIT, p. 623 et 698, 1907. — Takaki : Beitr. chem. Fhysiol. u. Pathol., t. XI, p. 288, 1908. — Perir : Soc. de Biol., t. LXIV, p. 81, 1908. — CaLzmertE, Massoz et GuÉRIN : C. R., p. 1076, 1908. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 139 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Huygens (Christiaan). — Œuvrescomplètes, publiées par la Société hollandaise des Sciences, t. XI. Mar- tinus Nijhof, La Haye, 1909. La Société hollandaise des Sciences poursuit avec persévérance et régularité la grande œuvre qu'elle à entreprise. Après avoir publié en dix magnifiques volumes la correspondance de Huygens, elle aborde aujourd'hui les travaux mathématiques de ce grand géomètre. Le volume XI, qui vient de paraître, est consacré tout d'abord aux travaux divers de jeunesse, à ceux qu'éerivit Huygens en 1645 et 1646, alors qu'il avait de dix-sept à dix-huit ans. La plupart de ces travaux sont moins intéressants par leur valeur intrinsèque que par le développement suecessif des idées qu'ils permettent de suivre; aucun résultat ne mérite d'être spécialement signalé, si ce n’est ce qui est relatif à la quadrature de la parabole et à divers volumes engendrés par la révolution de cette courbe. La seconde partie du volume se rapporte aux tra- vaux des années 1650 et 1651, car on ne possède presque rien pour les trois années qui précèdent; elle débute par l'étude des corps flottants, pour laquelle Huygens lui-même se montra fort sévère dans la suite; elle continue par diverses Notes mathématiques rela- tives à des problèmes résolubles par la règle et le compas ou à des lieux géométriques formés de droites et de cercles; elle se termine par les theoremata de quadratura hyperboles ellipsis et circuli ex dato por- tionum gravilalis centro. Tel qu'il est constitué, le tome XI, sans contenir aucun des travaux qui ont rendu illustre le nom de Huygens, présente cependant ce grand intérêt de faire assister en quelque sorte le lecteur à l’éclosion de cette merveilleuse intelligence. En relisant ces pages écrites par un jeune homme de dix-sept à vingt-deux ans, on se convainc que l’auteur va être bientôt de taille à marcher de pair avec les plus grands. Peut-être un sentiment d’amour-propre national n'a-t-il pas été étranger à l’entreprise de cette publication! En ce cas, MM. les Membres de la Société hollandaise des Sciences ont atteint leur but et ils ne pouvaient rendre à leur glorieux compatriote de plus bel hommage. H. LÉAUTÉ, Membre de l'Institut. Debesson {G.), Zngénieur civil. — Le Chauffage des habitations. Etude théorique et pratique des pro- cédés et appareils employés pour le chauffage des édifices, des maisons et des appartements. — { vol. gr. 1n-8 de 670 p. avec 711 figures. (Prix : 25 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. L'important ouvrage de M. Debesson vient très heu- reusement combler une grave lacune de notre littéra- rature technique. C’est un traité pratique et théorique, — comme l'indique son titre, — de l’une des questions les plus importantes et les plus complexes de l'hygiène et de la technique du bâtiment. Après l'exposé des considérations générales néces- saires à l'établissement rationnel et au calcul approxi- matif d’une installation de chauffage (notions d'Hygiène, de Thermodynamique : émission et transmission de la chaleur, combustion, etc.), M. Debesson aborde la des- cription et la discussion des appareils et installations de chauffage. ET INDEX D'abord, les appareils de chauffage élémentaires, cheminées et poêles: les cheminées, hygiéniques, mais prodigues; les poêles, parfois économiques, rendant Jusqu'à 60 % de la chaleur du combustible, mais souvent dangereux, comme ceux qui sont installés dans les écoles de la ville de Paris. « Alors que beaucoup de nos petites villes de province et que tous les Gouvernements étrangers, dit M. Debesson, s'enorgueillissent de chauf- fer leurs écoles par les systèmes hygiéniques : vapeur ou eau chaude, Paris, ville lumière, restée aux perfec- tionnements du temps de Franklin, chauffe ses écoles par des poêles. Aussi voyons-nous nos pauvres enfants congestionnés quand ils sont placés près des poêles, gelés quand ilssont éloignés, anémiés toujours par l'air malsain qu'ils respirent dans les écoles de Paris »; et, dans ces écoles, on ne se contente pas d'en rester aux poêles, mais on choisit, parmi ces appareils, les plus dangereux, ceux qui sont « abandonnés (p. 148) depuis de longues années par l'étranger et la province. La ville de Paris, à peu près seule, persiste à empoisonner nos enfants avec ces appareils ». Les calorifères à air chaud, chers aux architectes, valent mieux que ces poêles, mais tendent aussi à dis- paraître. Le réglage en est difficile, le rendement défec- tueux; la chaleur sèche en est désagréable et parfois dangereuse en raison des fuites d'oxyde de carbone qui se produisent aux joints des foyers et même au travers de la fonte. Actuellement, ce sont les calorifères à vapeur à basse pression qui sont de beaucoup préférés. Ils s'installent facilement partout; leurs radiateurs peuvent, dans les salles les plus luxueuses, être dissi- mulés sans nuire à la décoration; l'entretien en est peu coûteux, le rendementexcellent, le réglage relativement facile, — on peut même le rendre presque automatique; — les chaudières, en fonte, ou, de préférence, en tôle, et caractérisées par le magasin de charbon, se condui- sent très facilement; il va sans dire qu'elles ne présen- tent aucun danger d’explosion. Ces calorifères se divisent en deux grandes classes suivant qu'ils fonction- nent à cycle (ou circulation) fermé, ou à cycle ouvert à l'atmosphère. C’est à ces derniers que M. Debesson donne la préférence, surtout pour les chauffages con- tinus de jour et de nuit. Ils admettent des tuyauteries de plus petit diamètre, permettent de régler avec un seul robinet le chauffage de chaque radiateur et dispensent des purgeurs d’air. L'installation générale de ces diffé- rents types de calorifères est discutée à fond dans l’ou- vrage, ainsi que leurs éléments : chaudières, tuyauteries, joints, régulateurs de tirage etde pression, purgeurs d'air et d’eau, avec de nombreuses descriptions empruntées à la pratique de tous les pays. Dans un autre genre de calorifères à vapeur, encore peu répandu chez nous, on marche à des pressions inférieures à celle de lat- mosphère, en entretenant un vide dans la circulation, ce qui la facilite par l'absence d'air, absence qui, d'autre part, augmente considérablement la puissance des ra- diateurs. En outre, on peut, en faisant varier le vide, faire varier la température de la vapeur suivant la température extérieure, de 60 à 100° par exemple, ce qui permet à ces appareils d’avoir les avantages des chauffages à l’eau chaude (douceur de chauffe) sans en présenter les inconvénients. Ce système compte, en Angleterre, des applications très remarquables à des édifices ayant à chauffer jusqu’à 150.000 mètres cubes; la marche est presque entièrement automatique et très facilement réglable. Les chauffages à l’eau chaude à haute pression sont presque abandonnés en raison de leurs dangers évi- dents. Les chauffages à eau en basse pression ont encore 140 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX de nombreux partisans, principalement en raison de la facilité de les régler de la chaudière même en fonc- tion de la température extérieure; mais, d'autre part, les appareils à circulation naturelle exigent de grosses tuyauteries, coûteuses, à grand volume d’eau, se prêtant mal aux variations brusques de températures, et désas- treuses en cas de fuites graves. Aussi a-t-on cherché, pour les grands chauffages du moins, à accélérer cette circulation par toutes sortes de moyens : des pompes, des émulseurs, des pulsions de vapeur fonctionnant comme de petits geysers, dispositions très ingénieuses à Coup sûr, mais qui entraînent toujours une certaine complication, et rendent hasardeuse la conduite de ces appareils par le premier venu. Parallèlement au problème du chauffage, se présente celui, non moins important, de la ventilation des locaux. M. Debesson n'en dit que quelques mots, se réservant de l’étudier dans un autre ouvrage, et en constatant, ce que nous savons tous, qu'en France la ventilation n'existe pas. En général, on ne s'en s'occupe .pas; l'architecte « ne la prévoit pas » (p. 642) et il ne faut pas lui reprocher trop cette imprévoyance, car, lorsqu'il s’en occupe, le résultat est, paraît-il, souvent déplo- rable (p. 645), au-dessous de « rien ». L'ouvrage de M. Debesson se recommande par la multitude des renseignements qu'il renferme sur toutes les sortes de chauffages, renseignements fournis, comme nous l’avons dit, non seulement par la pratique française, mais aussi par celle des autres pays, notam- ment de l'Amérique, et par la discussion approfondie de ces divers systèmes. Il a sa place indiquée dans la bibliothèque de tous ceux qui s'intéressent à cette très importante question. G. R. 2° Sciences physiques Sartori (Giuseppe), /ngénieur, Professeur d'Electre- technique à l'Institut Royal technique supérieur de Milan, Professeur spécial d' Electrotechnique à l Ecole 1. R. industrielle de l'Etar et à l'Ecole I. R. supé- rieure de Corstructions navales à Trieste. — La Technique pratique des Courants alternatifs, à l'usage des electriciens, contremaïtres, monteurs, ete. — Deuxième édition française, traduite de l'italien, revue et complétée par M.J. A. MONTPELLIER, /tédac- teur en Chef de « L'Electricien ». — Tome premier : Exposé élémentaire et pratique des phénomènes du courant alternatif. — 1 vol. in-8° de 482 pages avec 260 figures. (Prix :15 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Ce qui caractérise cet ouvrage, c'est la clarté et la netteté avec lesquelles l’auteur a exposé et expliqué les phénomènes si complexes des courants alternatifs, de façon à mettre cette étude à la portée des électriciens n'ayant que des connaissances mathématiques élémen- taires. Des comparaisons tirées des faits physiques les plus connus, des méthodes de démonstration dont la simplicité n'exclut pas la rigueur, font que l’œuvre de M. Sartori, tout en restant scientifique, est une œuvre de vulgarisation. Les Traités relatifs aux courants alter- nalifs sont presque tous d’un niveau mathématique qui n'en permet la lecture qu'à un nombre restreint d'ini- tiés, à moins qu'ils ne rentrent dans la catégorie de ces traités purement descriptifs et qui, sous prétexte de vulgariser, n’expliquent rien. L'auteur a évité ce double écueil, et c'est ce qui explique le succès de cet ouvrage en France et à l'Etranger. Les phénomènes d'induction, les méthodes de mesures des courants alternatifs, les transformateurs, les mo- teurs synchrones et asynchrones, les divers systèmes de distribution y sont traités de façon à donner saltis- faction à la fois au théoricien et au praticien. Dans un second volume, comportant exactement les mêmes chapitres, les phénomènes sont développés avec l’aide du calcul, aussi simplifié que possible. Pour l'édition francaise de son ouvrage, M. Sartori sest adjoint un collaborateur expérimenté et d’une ! haute compétence, M. Montpellier, rédacteur en chef de L’'Electricien et professeur à l'Ecole supérieure de Télégraphie, qui ne s’est pas contenté d'être un traduc- teur fidèle, mais a cru devoir compléter, d'accord avec l’auteur, un certain nombre de chapitres : les chapitres relatifs aux instruments de mesure,aux condensateurs et aux lignes de-transmission. M. Montpellier a même fait une rédaction presque entièrement nouvelle du chapitre traitant des moteurs asynchrones à courant alternatif simple, afin d'exposer les progrès récents réalisés dans la construction de ces moteurs, de plus en plus utilisés pour la traction élec- trique. De cette collaboration de deux hommes de valeur, qui se sont consacrés depuis de nombreuses années à la science électrique, il est résulté une œuvre dont tous ceux qui touchent, de près ou de loin, à cette science et à ses applications, ne pourront que tirer un grand profit, G. pe LAMARCODIE. Dupare (L.), Professeur de Minéralogie et de Pétro- graphie à l'Université de Genève, et Monnier (A.), Privat-docent à l'Université de Genève. — Traité de Chimie analytique qualitative. 2° édition. — A vol. in-8° de 374 pages. Alcan, éditeur. Paris, 1909. I1 semble bien que le plan de l’enseignement de l'Analyse qualitative soit depuis longtemps arrivé à une: forme définitive. Après avoir plus ou moins développé le chapitre des réactifs, du matériel, et des opérations analytiques, on fait l'étude détaillée des éléments pris individuellement; c'est seulement ensuite que l’on cherche à faire l'analyse d’un mélange. J'ai toujours pensé que le temps passé à examiner les sels purs des divers éléments, au point de vue de leurs réactions analytiques, était des mieux employés. L'élève se familiarise dans cette étude, faite soigneuse- ment, avec les opérations de l'analyse, avec les condi- tions de précipitation. avec les difficultés que présentent l'insolubilisation totale de certains éléments, la filtra- tion de quelques précipités, leur lavage, puis leur trans- formation en sels solubles. C'est ici qu'il apprend réellement l'analyse qualita- tive; il ne trouvera aucune difficulté à séparer ensuite les éléments, au moins dans les cas simples, et il sera aussi solidement préparé que possible pour aborder les séparations difficiles. Le choix d’une méthode de séparation des éléments exige de nombreux essais. Tout d'abord, il est très sage de ne proposer aux élèves que la séparation des éléments les plus connus; introduire dans une méthode: d'analyse les éléments rares, cela revient à proposer de: rechercher, dans une foule, des individus dont le signalement n’est qu'imparfaitement donné. Les progrès de l'analyse suivent ceux de la Chimie, et le problème de la recherche des éléments, mélangés en nombre et en quantités quelconques, n'a pas aujour- d'hui de solution générale. : Ceci réservé, le choix d’une marche analytique, parmi les nombreuses qui ont été proposées, doit plus viser la certitude du résultat que la simplicité des méthodes. 11 ne faut pas s'étonner, d'ailleurs, d'entendre les élèves déclarer tout d’abord mauvaise la marche qui leur est proposée : toutes sont imparfaites, et c'est peu à peu que l'on fait connaissance avec les imperfections et avec les remèdes qui améliorent la méthode suivie; l'essentiel est donc d'adopter, pour des élèves qui commencent, un tableau de séparation et de s'y tenir. Plus tard, au contraire, les élèves devront se servir au besoin de toutes les réactions connues et les combiner entre elles pour résoudre les cas difficiles. Il est, d'autre part, essentiel de mettre les débutants en contact avec les divers procédés de recherches dont dispose l'analyse, de leur apprendre à opérer par voie sèche, par voie humide, à se servir du spectroscope, du microscope, ulilisant ces divers moyens d'étude, particulièrement lorsqu'il s'agit d'éléments difficiles à caractériser. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 141 Les divers éléments ont, en effet, des caractères iné- galement sensibles, et une réaction microchimique, par exemple, évitera bien des erreurs aux élèves ; il faut leur recommander, en particulier, d'examiner au microscope l'alun, le phosphate ammoniaco-magné- sien, l’'acétate d'uranyle et sodium. Ces quelques réflexions me conduisent à féliciter MM. Duparc et Monnier d'avoir beaucoup développé l'étude des caractères analytiques. Ils ont eu raison de laisser de côté dans un premier examen les éléments rares. On trouvera dans leur ouvrage une marche générale de recherche des bases et des acides, des conseils étendus sur la solubilisation, la désagrégation, enfin un chapitre sur les réactions des alcaloïdes. Les auteurs ont, en outre, cru utile d'écrire une Infro- duction sur la théorie atomique, la théorie des solu- tions et des équilibres; on ne peut que trouver cette idée heureuse. Il serait beaucoup mieux, cependant, de répandre ces notions dans tout le cours de l'ouvrage. On prend souvent, dans l'enseignement de la Chimie, le parti d'exposer, au début des cours ou du livre, les lois de la Chimie, pour n’en plus parler ensuite. Les élèves apprennent les généralités sans les bien com- prendre, et ils sont ensuite incapables d’en faire l’appli- cation aux cas particuliers. « Il faut maintenant, comme l'écrivaitrécemment M. H.LeChatelier, mettreen évidence les lois de la Mécanique chimique à l'occa- sion de chaque réaction chimique, de chaque méthode d'analyse décrite, les infuser au lecteur, à son insu, et même malgré lui. » Dans le livre dont il est ici question, les propriétés analytiques des diverses substances sont assez longue- ment énumérées, mais on à été trop bref sur l’explica- tion des réactions — les équations chimiques, d’ailleurs abondantes, n'indiquentpas tout: —ilétait, parexemple, fondamental de-montrer que l'action de l’eau sur un composé de bismuth ou d'antimoine est limitée, d'expli- quer pourquoi certains sels ne sont précipités par l'hydrosène sulfuré que dans des circonstances bien définies. La précipitation totale à l’état de sulfure d’un mélange de sels est souvent longue et difficile à réaliser pour des élèves qui ne se rendent pas compte de ce qu'ils font. Si je voulais faire aux auteurs quelques reproches de détail, je montrerais dans leur ouvrage quelques erreurs ou quelques oublis regrettables; on y parle du bore cristallisé, et l’on n'y mentionne pas l'usage du microscope | Les plus grands analystes nous ont laissé des ouvrages très documentés, très louflus et indigestes, à peine utilisables pour l'enseignement. Nos élèves ont parfois aussi entre les mains de tout petits livres écrits par des auteurs non spécialistes,et où voisinent les erreurs. Pour les élèves, les Traités comme celui de MM. Du- pare et Monnier, malgré quelques imperfections, sont recommandables. La vérité est que l'Analyse qualitative est une matière difficile à traiter, et sur laquelle on ne peut espérer voir paraître, avant longtemps, un ouvrage excellent. MARCEL GUICHARD, Chargé des fonctions de Maître de Conférences à la Sorbonne. 3° Sciences naturelles Deherme (Georges). — L'Afrique occidentale fran- çaise. Action politique. Action économique. Action sociale. — 1 vo/. in-8° de 528 pages. (Prix : 6 fr.) Bloud et Ci, éditeurs. Paris, 1908. Le but de ce livre est de poser les diverses difficultés que rencontre devant elle l'action coloniale de la France dans l'Afrique occidentale. L'auteur ayant étu- dié sur place les éléments des questions à résoudre, et ayant su, semble-t-il, observer très librement, a réussi à indiquer les principaux desiderata, ainsi que les résultats acquis, d'une manière précise, quoique sous une forme un peu touffue. On appréciera surtout l'étude économique et l'étude sociale. Ce sont celles qui m'ont paru le plus riches en apereus personnels, et le plus exemptes des jugements sommaires qu'il est malheureusement possible de rele- ver dans la première partie de l'ouvrage. Dans celle-ci, qui est un tableau de l’action politique, on trouvera un exposé très serré de l'organisation judiciaire, des ques- tions sanitaires, du problème de l'éducation des noirs. Les réserves auxquelles je viens de faire allusion se rapportent surtout à la conception que se fait M. De- herme de la vie politique des noirs. Déclarer que tous les non-musulmans sont « sans besoins politiques et incapables de vraie organisation » (p. 121), ou encore qu'ils n’ont pas eu d'histoire jusqu'à ce jour, que leurs légendes sont « sans signification » (p. 107), paraitra sans doute excessif. Un Etat noir qui ne dépasse guère les groupes organiques des familles n’en estl pas moins un Etat, et l'histoire ne commence-{-elle donc que quand il y à « volonté collective continue »? A un autre point de vue, l'auteur établit lui-même, dans la suite du livre, que les noirs obéissent à autre chose qu'à la « brutalité », et que leurs voisins, Maures et Touareg, sont mieux que des « pirates ». Nous avons été mis en présence, à vrai dire, dans l'Afrique occidentale, d’un pêle-mêle ethnique com- plet, que l'interprétation même des totem n’aide pas à débrouiller, dans beaucoup de cas. D'autre part, les groupements politiques et sociaux étaient partout en voie de formation. Il semble bien, comme le dit M. Deherme, que les seuls éléments devenus fixes de ce ferment d'Etat ou de nation sont les castes, et, d’une facon plus générale, les condilions sociales des hommes libres et des esclaves. C'est par là seulement que l'on arrive à comprendre les associations de villages, la spécialisation et la séparation du travail, le semblant d'ordre et le peu de hiérarchie qui apparaissent dans ces sociétés. Notre devoir colonial est certainement de faconner cette matière, en inspirant au noir de vrais besoins d'homme : l'ambition du bien-être, la conti- nuité de l'effort, la prévision de l'avenir. L'éducation par le fait accompli, par la direction, et, au point de vue pratique, « la machine, les procédés techniques, les capitaux, tel doit être, dit justement M. Deherme, notre apport dans l'association coloniale que nous avons à fonder ». Le noir peut, ill’a montré dans la culture du coton, du cacaoyer, devenir un bon ouvrier des champs. En ferons-nous aussi un bon ouvrier d'usine où d'atelier, pour le débitage des bois, le broyage ou le décorticage des produits agricoles à livrer à l'exportation? Quand l'exploitation abusive des ressources naturelles (or, caoutchouc) apparaît comme un péril pour le travail de vraie colonisation, quand les tentatives de cultures riches par sociétés de plan- teurs ont été condamnées par l'épreuve même, il reste à tirer parti des qualités indigènes acquises et des éléments sociaux en présence, en faisant la mise en valeur par le noir lui-même. J. MacHar, Docteur ès sciences, Professeur au Lycée Buffon. Braun (K.), Botaniste du Biologisch-Landwirtschal- tliches Institut à Amani. — Der Reis in Deutsch- Ostafrika (LE RIZ DANS L'AFRIQUE ORIENTALE ALLE- MANDE). -— À vol. in-8° de 52 pages. (Extrait des Berichte uber Land-und Forstwirtsehaft in Deutseli- Ostafrika). C. Winter, éditeur. Heidelberg, 1908. M. le D: K. Braun, dont nous avons analysé il y à quelques mois l'ouvrage sur les Agaves’, vient de faire 1 Voirla Revue générale des Sciences du 30 avril 1908. L'auteur vient de publier un complément à cet ouvrage (1 broch. de 56 pages, Tanga, 1908), où il donne des rensei- gnements sur la culture de la plante dans un grand nombre de localités nouvelles, une liste de toutes les variétés d'agaves qui ont trouvé une application quelconque, des indications sur la préparation de la fibre et un complément à la bibliographie du sujet. 142 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX paraître un intéressant Mémoire sur le riz dans l'Afrique orientale allemande. C’est, depuis longtemps, une des principales cultures des naturels. Il est difficile de fixer si le riz est une plante indigène ou introduite du dehors; quoiqu'il pousse à l’état sauvage à l’inté- rieur du pays, il est cependant probable que les formes de culture actuelles ont été importées par les Arabes ou les Hindous. D'après l'examen des échantillons parvenus à l'au- teur des différentes parties de la colonie, on n’y trouve pas moins de treize variétés de riz, dont il donne la description. On rencontre à la fois le riz croissant dans les terrains humides et le riz poussant dans les régions sèches. Le riz est un des principaux aliments des indigènes; mais la production est loin d’égaler la consommation. Aussi l'importation de cette denrée s'est-elle élevée à 7.800 tonnes environ en 1906, tandis que l'exportation, très variable, n’atteint pas, en moyenne, une centaine de tonnes. l’auteur pense que le développement rationnel de la culture permettrait au pays de suffire, au moins en grande partie, à ses besoins. 4° Sciences médicales Calot (F.). — L'Orthopédie indispensable (Tuber- culoses externes, Déviations,ete.). — 1 ro/. 1n-8° de 141 pages avec 8% figures dans le texte. (Prix : 16 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1909. La Chirurgie orthopédique, fondée et défendue jadis par de hautes intelligences, fut lonstemps abandonnée aux empiriques et aux fabricants d'appareils. Aujour- d'hui, elle a conquis son indépendance; elle possède un domaine reconnu de tous, bien dégagé de l’empirisme ignorant et aveugle. Elle rend les services les plus si- gnalés, car elle à fait, dans ces dernières années, des progrès extrèmement remarquables. Il y à quelques lustres, les coxalgies et les maux de Pott suppurés se terminaient presque invariablement par la mort. La luxation congénitale était la maladie incurable entre toutes. Ces affections sont guéries aujourd'hui dans d’ex- cellentes conditions. Il est incontestable que M. Calot a fait beaucoup pour préciser et pour vulgariser les méthodes orthopé- diques; le livre qu'il publie aujourd'hui condense et expose ses (ravaux antérieurs sur les tuberculoses mêmes et sur la luxation congénitale de la hanche: il y à joint la description des traitements appropriés aux autres difformités de l'enfance : scoliose, lordose, genu valgum, pied bot, torticolis, etc. Ce livre est écrit pour les praticiens; aussi l’auteur insiste-t-il sur la nécessité de traiter les affections jus- ticiables de l’orthopédie dès leur apparition. Guérir une coxalgie parvenue à la phase de suppuration et de fistule est chose extrêèmement difficile: il est relative- ment aisé, si l’on intervient de bonne heure, de l’em- pêcher d'arriver à cette phase désespérante. La précocité du traitement est, en matière de tuber- culose osseuse en particulier, une nécessité absolue : il faut que le médecin, dès que le diagnostic est posé, sache imposer aux parents de l'enfant l'urgence de limmobilisation dans un appareil approprié. Cette nécessité de combattre les préjugés des familles est une des difficultés de l'Orthopédie. Rares sont les dévouements familiaux qui ont la per- sévérance d'aider l’orthopédiste à modifier un squelette d'enfant et à lui rendre son architecture normale, car c’est là œuvre du temps. D'habitude, les parents se lassent bien vite des dérangements, des pertes de temps, des dépenses qu'entraînent les traitements orthopédiques. Les livres de vulgarisation, comme celui de M. Ca- lot, sont donc des plus utiles, en apprenant à tous les médecins, — et par ricochet aux parents, — ce qu'on est en droit d'attendre des méthodes orthopédiques, quels excellents résultats sont obtenus par la patience, la persévérance et la foi dans la Science. Dr P. Desrosses. 5° Sciences diverses Tonnelat E.. — L'Expansion allemande hors d'Europe (Eratïs-Unis, BRÉSIL, CHANTOUNG, AFRIQUE DU Sup). — 1 vol. in-8° de 280 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Libairie Armand Colin. Paris, 1909. L'ouvrage de M. Tonnelat traite à la fois de l’émigra- tion et de la colonisation allemandes, questions étroi- tement liées dans l’histoire de l'expansion allemande. Au point de vue de l'émigration, l'Allemagne occupe le deuxième rang parmi les nations européennes, avec six millions d’émigrants au cours des quatre-vingts der- nières années, et elle offre cette particularité intéres- sante que, «loin de se disperser, de s'émietter à travers le monde, les émigrants allemands ont formé à l'Etran- ger un nombre restreint de groupements compacts »,' restés en relation avec la mère patrie. D'abord consi- déré comme une perte, ce formidable exode a été regardé dans la suite comme devant servir à la fois les intérêts matériels et moraux de l'Allemagne, « en ap- portant au monde, comme un ferment de progrès, toutes les coutumes et toutes les traditions que l’on désigne du terme général et commode de Deutsehtum ». Qu'en est-il en réalité? Le livre de M. Tonnelat, qui a étudié de près les settlements allemands aux Etats- Unis et au Brésil, permet de s'en rendre compte : « Aux Etats-Unis, entourés d’un peuple énergique, domina- teur, les Allemands se sont laissé assimiler presque sans résistance. Dans l'Amérique du Sud, en revanche, les Allemands ont mieux gardé leur langue, leurs usages, leur caractère national. Pourtant, ce serait une erreur de croire qu'ils soient prêts à se con- sidérer comme les sujets d’un plus grand empire alle- mand ». Décus de ce côté, le Gouvernement et les Sociétés coloniales allemandes ont essayé, depuis quelques années, de faire dévier l’émigration vers les terres du patrimoine national. D'une part, les Allemands ont appliqué le système de la pénétration pacifique au Chantoung, dans l’hinterland de leur possession de Kiaotchéou; mais les victoires retentissantes des Japo- nais sont venues contrecarrer leurs projets, que le réveil probable de la Chine pourrait bien détruire complètement un jour. D'autre part, l'Allemagne pour- suit la mise en valeur de son domaine colonial africain. M. Tonnelat à choisi comme exemple typique de ses procédés de colonisation le Sud-Ouest africain, où, malgré la manière forte dont on a usé envers les indi- gènes, des centaines de millions de marks ont été en- gloutis sans grand profit pour les nouveaux possesseurs du sol. c Il serait injuste de juger la colonisation allemande sur ce seul exemple; les colonies du Togo, du Kame- roun et de l'Est africain ont donné de meilleurs résul- tats et pourraient à certains égards être citées comme modèles. Quoi qu'il en soit, les partisans de l'impéria- lisme et de la politique mondiale allemande semblent avoir rencontré jusqu'à présent plus de déboires que de satisfactions. Dunod et Pinat, £diteurs. — Agendas pour 1909. (Chimie, Electricité, Mécanique, Construction, Mines et Métallurgie, etc.). — Chaque agenda, contenant environ 400 pages de texte et 128 pages pour notes journalières. (Prix : 2 fr. 50). MM. Dunod et Pinat viennent de publier leurs Agen- das pour 1909, si appréciés des spécialistes. L'abon- dance des documents renfermés dans chacun de ces volumes en fait un véritable vade-mecum, et les chi- mistes, constructeurs, etc., réserveront certainement à ces nouveaux agendas le même bon accueil qu'ils ont fait à ceux des années précédentes. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 11 Janvier 1909, 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux présente ses recherches sur les familles de Lamé engendrées par le déplacement d’une surface qui demeure inva- riable de forme. — M. Harald Bohr introduit la notion de série m fois indéterminée, due à Césaro, dans l'étude de la série de Dirichlet. — M. F. Severi re- cherche les conditions pour qu'une variété algébrique à trois dimensions possède des intégrales doubles de première espèce. — M. W. H. Young démontre un nouveau théorème fondamental de la théorie des diffé- rentielles des fonctions de deux variables. — M. A.Korn Apnole l'existence d’un point critique particulier de la solution des équations de l’élasticité dans le cas où les efforts sur la frontière sont donnés. — M. H. Andoyer donne les résultats de ses recherches sur le groupe des termes en €“, dans la théorie de la Lune. — M. M. Rin- gelmann décrit un nouveau dynanomèlre pour essais de moteurs à grande vitesse angulaire. En principe, il consisie en une lame de ressort radiale, fixée à l’extré- mité d’un arbre portant un tambour, entraînant par courroie une résistance quelconque. — M. A. Berget indique une formule de vitesse applicable à la propul- sion dans l'air des aéronats : EE VEICOYES où Vest la vitesse en myriamètres à l'heure, F la force en chevaux-vapeur, S la surface de la section maxima du ballon en mètres carrés et C le coefficient d'utilisa- tion de chaque dirigeable. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Foy à mesuré au spec- trophotomètre le pouvoir émissif de lames d'oxyde de cérium relatif à la radiation rouge À— 0,7 uet a vérifié la formule théorique qu'ilavait donnée précédemment. — M. de Pezzer décrit un appareil, adaptable à un phonographe quelconque, et qui, porteur d’une bande où se trouve inscrit le texte accompagnant la musique, amène continuellement sous les yeux de l'auditeur la traduction de chaque syllabe au moment mème de son émission. — M. G. de Fontenay a reconnu que les im- pressions photographiques attribuées par le Ct Darget à un rayonnement de l'organisme humain sont dues, en réalité, à l’action de l'encre du papier imprimé ou écrit entourant la plaque. — M. E. Baud déduit, de l'étude des propriétés des solutions aqueuses de pyri- dine, qu'elles renferment au moins deux hydrates, l'un à 2, l’autre à environ 6H°0. A la température ordi- naire, ces hydrates sont dissociés. —M.M _ Guerbet a constaté que l'acide campholique gauche et ses dérivés, provenant de l'a-camphol gauche, présentent des pro- priétés semblables à celles des composés correspon- dants issus du camphre ou de l'«camphol droit : ils en sont les inverses optiques. — MM. A. Haller et E. Bauer ont préparé les mono-, di- et tri-alkylacéto- phénones par l’action des halogénures alcooliques sur le produit de la réaction de l’amidure de Na sur l’acé- tophénone. — M. P. Carré, en réduisant l'o-nitrodiphé- nylméthane par NaOH alcoolique et la poudre de Zn, a obtenu un peu d'o-hydrazidodiphénylméthane, F. 1489- 1499, etsurtout de l'o-aminodiphénylméthane, F. 520. — MM. E. Kayser et A. Demolon ont étudié l'influence de l’aération sur la formation des produits volatils dans la fermentation alcoolique, La proportion d’al- déhyde augmente d’abord; puis elle disparait pour former de l'acide acétique,. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. H. Rieffel et J. Le Mée ont constaté que les deux lobes thymiques sont toujours, au moins chez le nouveau-né, aisément sé- parables; le contact du thymus et du corps thyroïde est fréquent. Le nerf cardiaque inférieur droit et les nerfs phréniques sont en rapport avec le thymus. — M. Marage a observé que, quand le passage entre les deux registres, grave et aigu, est très marqué, le tracé des vibrations montre que la voix est tremblée et que certaines notes font défaut. — MM. A. Thiroux el L. Teppaz ont guéri par le traitement à l’orpiment seul des chevaux atteints de la trypanosomiase connue sous le nom de baléri. — MM. L. Cuénot et L. Mercier ont observé trois cas de tumeurs spontanées dans un élevage de souris : un sarcome sous-cutané, une tumeur épithéliale cornée sous-cutanée et une tumeur papillo- mateuse du poumon.—M. A. Guépin a extrait de la vessie d’un homme de soixante-huit ans, par cystotomie sus- pubienne, un énorme calcul du poids de 220 grammes. — M. J. Pantel a trouvé, chez les larves des Muscides, une série d'organes rudimentaires : chambres car- diaques, stigmates et trachées stigmatiques, trachées communicantes dorsales. — MM. Chevallier et Sudry ont étudié la source thermale de la Bise, qui jaillit au fond de l'étang de Thau. Sa composition se rapproche de celle des eaux minérales voisines de Balaruc-les- Bains. Séance du 18 Janvier 1909. M. W. Kilian est élu Correspondant pour la Section de Minéralogie. — La Section de Botanique présénte la liste suivante de candidats à la place vacante par suite de la nomination de M. van Tieghem aux fonctions de Secrétaire perpétuel : 1° M. L. Mangin,; 2° MM. E. Bu- reau, J. Costantin et P. Dangeard. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré montre que la méthode de Fredholm permet dé résoudre presque immédiatement certaines questions relatives au développement des fonctions en séries ou à leur re- présentation par des intégrales définies. — M.J. Drach généralise le problème de Beltrami et recherche les éléments linéaires pour lesquels les lignes géodésiques font partie d’un système linéaire à trois paramètres. — M. W. Stekloff généralise un théorème de Jacobi. — M. M. Fréchet démontre que toute fonctionnelle con- tinue peut être représentée par la somme d’une série convergente de fonctionnelles d'ordres entiers. — M. J. Chazy montre qu'il existe des équations différentielles dont l'intégrale générale est uniforme ou a ses points critiques fixes, et dont l'intégrale singulière a des points critiques mobiles, c’est-à-dire variables avec les cons- tantes d'intégration. — M. F. Merlin discute les me- sures micrométriques faites à l'Observatoire de Lyon pendant l'éclipse de Soleil du 28 juin 1908 et indique les corrections à apporter aux différences d’ascension droite et de déclinaison de la Lune et du Soleil. — M. A. de La Baume-Pluvinel donne la description d'une lunette zénithale photographique, destinée à déterminer les coordonnées astronomiques du lieu où l'on opère. — M. G. Lippmann décrit un appareil pour mesurer l'accélération absolue des mouvements sismiques; c’est un pendule sismique muni d’une len- tille qui projette sur un papier sensible l'image d'un point lumineux mobile, pris sur le fil d’un galvano- mètre à corde traversé par un courant particulier. — M. de Montessus de Ballore émet l'hypothèse que les diverses ondes de la phase principale des sismo- grammes correspondraient aux oscillations, autour de leur position d'équilibre, des blocs dont le réajuste- ment est l’origine du séisme. — M. J. Comas Sola signale l'enregistrement du tremblement de terre du 28 décembre à l'Observatoire Fabra (Barcelone). Aucune des formules empiriques connues pour le calcul de la distance épicentrale ne donne correctement la dis- tance observée; le meilleur résultat est obtenu par la formule de Jordan. — M. V. Balthazard décrit un procédé d'identification des projectiles de revolver en plomb nu tirés contre des personnes, au moyen de la trace de la trame du tissu qu'ils ont rencontré tout d’abord, trace que le projectile garde même après avoir pénétré dans le corps. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Becquerel critique les récentes recherches de MM. du Bois et Elias rela- tives à l'influence de la température et d’un champ magnétique sur les spectres d'absorption et de phos- phorescence, et montre qu'elles ne modifient en aucune facon les conclusions de ses propres expériences. — MM. L. de La Rive et C. Eug. Guye signalent une propriété caractéristique d'un réseau hexagonal de petits aimants : c’est l'orientation des aimants exclu- sivement suivant l’une des trois directions diagonales, même sous l'action d’un champ extérieur notable. — M. Th. Guilloz : Dispositif optique pour faire varier l’éclairement d’une surface suivant une loi déterminée d'avance (voir p. 146). —MM. C. Matignon et R. Tran- noy, par l’action d'Al sur le phosphate tricalcique à chaud, ont obtenu rapidement un mélange de phos- phure de calcium P?Ca* et d’alumine, qui, sous l'ac- tion de l’eau, donne de l'hydrogène phosphoré avec un peu d'H. — M. F. Bourion à reconnu que l'action de S°CF permet de préparer commodément à partir de leurs oxydes certains chlorures anhydres qu'on n'obtient pas par l’action de Cl et SCF. — M. G. De- nigès signa'e certaines réactions colorées caractéris- tiques de la dioxy-acétone avec la codéine (bleue), la résorcine (orange), le thymol (rouge sang), le $-naphtol (verte). — M. M. François a reconnu que l’acétamide bromé hydraté d'Hofmann est un hypobromite d’acé- tamide CH*.CO.AzH:.HOBr, et que l’acétamide bromé du même auteur est un amide hypobromeux. — MM. A. Haller et Ed. Bauer ont constaté que les trialkylacétophénones, chauffées avec AzH?\a en solu- tion benzénique, se scindent presque quantitativement en benzène et amides des acides trialkylacétiques, que l’action du sulfate de nitrosyle transforme dans les acides libres. — MM. E. E. Blaise et H. Gault mon- trent que HCI lactonise l’éther dioxalsuccinique avec formation d’une lactone à, en même temps qu'il le saponifie. — M. A. Béhal a étudié le mécanisme de la réaction de l'acide acétique sur le chlorure de benzyle, qui donne naissance à HCI, de l’aldéhyde benzoïque et de lanhydride acétique. — M. Martinand a constaté que les oxydes alcalins et alcalino-terreux susceptibles de donner des peroxydes fixent l'oxygène de l'air sous une forme active et donnent des corps en tous points semblables aux oxydases organiques; il en est de même des carbonates alcalins. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Minkiewicz a observé que la rétine développe, dans certaines condi- tions, toute une série spectrale d'images successives, sans interruption par des teintes complémentaires. Ce phénomène est en complet désaccord avec les thécries classiques de la vision. — M. H. Guilleminot montre les avantages des rayons X de haute pénétration, obtenus par filtrage, pour le traitement des tumeurs profondes. — M. F. Henneguy a étudié l'épithélium de l'œsophage des Bryozoaires ectoprotes; il est formé de cellules n’appartenant à aucune catégorie connue et qui renferment dans leurs parois des fibrilles muscu- laires striées. — M. P. Lesne a étudié les mœurs de la mouche de l'asperge (Platyparea poeciloptera) aux environs de Paris; il montre que la destruction des tiges mortes l'hiver n'est pas suffisante pour combattre cet insecte, mais qu'il faut assurer au fur et à mesure la destruction des pousses qui dépérissent prématuré- ment. — M. E. Roubaud a étudié les conditions de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES viviparité et de vie larvaire de la Glossina palpalis. Les Glossines femelles peuvent régler directement leur propre gestation. — M. A. Billard a procédé à la revision des Sartulariidées de la collection du British Museum. — MM. L. Léger et O. Duboscq ont constaté que, chez les types les plus divers d'Actinocéphalides, le processus sexué, qui rappelle beaucoup celui des Stylorhynchus, se déroule avec une remarquable uni- formité. — MM. A. Laveran et Salimbeni ont trouvé chez un grand Saurien du Brésil une hémogrégarine nouvelle, qu'ils nomment #. {upinambis, et qui est intéressante par les altérations qu'elle provoque dans les hématies qu'elle envahit. — M. Ch. Depéret ter- mine l'étude des migrations des Mammifères tertiaires par celles des temps pliocènes. Séance du 25 Janvier 1909. M. L. Mangin est élu Membre de la Section de Bota- nique en remplacement de M. Ph. van Tieghem, nommé secrétaire perpétuel. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Goursat applique la théorie des caractéristiques à l'étude de la déforma- tion des surfaces à courbure négative. — M. A. Lacroix présente le résumé des observations de M. Riccô sur le tremblement de terre de Sicile et de Calabre du 28 décembre dernier. Il est d’origine tectonique et sa zone épicentrale se trouve dans le détroit de Messine même. La hauteur du raz de marée qu'il a déterminé a varié de 2,3 à 6 mètres suivant les points. — M. A. Angot communique le sismogramme du tremblement de terre du 23 janvier enregistré au Parc-Saint-Maur; l’épicentre paraît être distant d'environ 3.700 kilomètres. 20 SCIENCES PHYsIQUES. — M. Moureaux indique la valeur des éléments magnétiques à l'Observatoire du Val-Joyeux (Seine et-Oise), au 1°" janvier 1909. Décli- naison occidentale 14° 36/,31; inclinaison 64° 43!,8; composante horizontale 0,19733; composante verticale 0,41803. — M. G. Reboul à éludié les phénomènes électro-capillaires dans les gaz aux basses pressions; les résultats obtenus s'expliquent par l'existence d’une couche électrique double à la surface métal-gaz : le feuillet positif serait du côté du métal, le négatif du côté du gaz. — M. Jégou décrit un dispositif pour ren- forcer sensiblement le son perçu dans la réception des messages radiotélégraphiques avec détecteur électro- lytique et son application pour servir d'appel. — M. E. Estanave simplifie son procédé d'obtention du relief stéréoscopique par le moyen des réseaux. Le réseau est tracé sur l’une des faces de la plaque pho- tographique même, l’autre face recevant l’'émulsion; la glace dépolie est remplacée par un vernis recouvrant l'émulsion ou simplement par une émulsion à aspect. mat. — M. J.-B. Senderens est parvenu, en faisant passer des vapeurs d'alcool éthylique (même contenant un peu d'eau) sur de l'alumine précipitée, à 2400-2609, à une déshydratation presque quantitative en oxyde d'éthyle. — MM. A. Guyot et E. Michel, en con- densant les éthers mésoxaliques avec les amines aro- matiques tertiaires, ont obtenu des éthers phényltar- troniques, dont les acides correspondants sont faciles. à transformer en aldéhydes, acides glyoxyliques et glycoliques. — MM. L. Hugouneng et A. Morel ont. obtenu, par l'hydrolyse fluorhydrique ménagée de la pepsine et de la gélatine, plusreurs peptides naturels définis : diarginyl-arginine, glutamyl-lysine, lysyl-1y- sine, arginyl-ayginine. — M. J. Effront a provoqué la fermentation ammoniacale des vinasses de distillerie de deux manières : en milieu strictement anaérobie, avec une culture pure de ferment butyrique; en milieu aérobie, avec de la terre végétale. La fermentation avec la terre est plus rapide et plus complète. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Moutier a appliqué la d'arsonvalisation d'une façon locale, chez des malades présentant de l'hypertension artérielle surtout dans la région céphalique; dans tous les cas, on à observé la disparition des phénomènes objectifs et la diminution de la pression artérielle au niveau de la temporale. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 145 M. F. Vlès a étudié les fibres musculaires striées en lumière polarisée; elles forment un système optique très complexe. — M. J. Pantel a reconnu, par l'étude de la musculature tégumentaire longitudinale, que le tronc des larves de Muscides compte toujours 11 seg- ments, # pour le thorax et 7 pour l’abdomen ; ce nombre est porté à 12 en ajoutant le segment pseudocéphalique ou buccal. — M. J. Dybowski montre que le caféier de l'Oubanghi (Coffea Congensis) est réfractaire à la maladie de l'Hemileia; il pourra servir à régénérer les plantations attaquées par ce parasite. — M. F. Ra- bowski signale l'extension de la nappe rhétique dans les Préalpes bernoises et fribourgeoises. — M. A. Jeannet établit également la présence de la nappe rhétique dans les Préalpes vaudoises de la rive droite du Rhône. — M. E. Jourdy a constaté l'existence de plissements écrasés et d'écailles de charriage sur les deux flancs du grand synelinal carbonifère de la Bre- tagne et de l'Anjou. — M. P. Fliche décrit une Algue fossile trouvée dans le Cinémurien supérieur de Ri- mogne (Ardennes), qu'il nomme Liasophycus seytho- thalioides. Elle est fortement incrustée de carbonate de chaux, qui a permis sa conservation. — Le Prince Albert 1‘ de Monaco donne quelques détails sur la dixième campagne scientifique de la Princesse-Alice II. — M. F. Nausen recommande à l'attention de l’Aca- démie le projet d'expédition polaire de R. Amundsen, comportant une dérive dans le bassin arctique analogue à celle de Nansen sur le l‘ram. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 12 Janvier 1909. M. Linossier, discutant le Rapport de M. Moureu sur l'emploi des composés arsenicaux en Agriculture, estime que l'autorisation en bloc comme l'interdiction absolue sont des solutions trop radicales. La conclusion intermédiaire : interdiction des arsenicaux solubles et de l’arséniate de plomb, avec tolérance et stricte réglementation de l'emploi des arsénites et arséniates de cuivre, déjà adoptée par le Conseil d'Hygiène de la Seine, lui parait s'imposer. M. L.-E. Bertrand signale de nouveau l’état endémo-épidémique de la fièvre typhoide à Toulon, qui s'explique par la conta- mination continue des eaux souterraines résultant de coutumes de vidange déplorables. La fièvre typhoïde présente des périodes de recrudescence qui coincident avec le maximum de la température moyenne et le minimum de la hauteur moyenne de pluie. Il y aurait lieu de modifier le mode actuel d'approvisionnement de la ville en eau potable et de créer un système d'égouts; en attendant, aux périodes de recrudes- eence, il faudrait ne consommer que de l’eau stéri- lisée ou bouillie. — M. A. Chantemesse rappelle que la coagulabilité du sang augmente considéfablement dans certains élats pathologiques, en particuliér chez les nouvelles accouchées et les femmes opérées d’un tibrome utérin, avec, pour conséquence, la thrombose æt l’embolie. L’absorption d'acide citrique à petite dose a pour effet de diminuer celte coagulabilité et dé résoudre les caillots qui peuvent se former dans la coagulation. La mesure de la coagulabilité du sang est une méthode clinique à recommander chez certains malades. Séance du 19 Janvier 1909. MM. E. Lambling (de Lille) et Gilbert (de Mou- ins) sont élus Correspondants nationaux dans la Divi- sion de Physique et Chimie médicale et Pharmacie. MM. A. Gautier, Hanriot et P. Cazeneuve par- lent en faveur de l'interdiction absolue des composés -arsenicaux, tandis que M. J. Lucas-Championnière préférerait une réglementation sévère. — M. Ch. Mo- mod à fait une série d'essais prolongés sur le trarte- ment de la tuberculose par le sérum de Marmorek. I a constaté une action certaine sur les sujets atteints -de la maladie : bien-être éprouvé par les malades, augmentation de poids, diminution de l'expectoration et de la toux, chute de la fièvre, disparition des bacilles dans les crachats, et, dans les tuberculoses chirurgi- cales, fermeture des fistules, modification d'aspect des plaies, etc. Ces phénomènes favorables peuvent aller Jusqu'à constituer dans certains cas, surtout dans ceux de date récente, une guérison complète. Dans d’autres, l'amélioration est seulement subjective, c'est-à-dire que le malade est soulagé ou se croit guéri, alors que le médecin constate des indices certains de la persis- tance du mal. Trop souvent encore, enfin, le résultat est négatif. Il n'en reste pas moins que le sérum de Marmorek, dont l'innocuité est absolue quand on l’'emploie dans de bonnes conditions, peut avoir une action réellement efficace. SOCIETE DE BIOLOGIE Séance du 22 Janvier 1909. MM. A. Lelièvre et Ed. Retterer montrent que les hématies sphériques et hémisphériques possèdent une charpente réticulée et nucléaire, en partie basophile. A mesure que l'hématie évolue et vieillit, le réticulum "devient acidophile et se confond avec la masse amorphe, acidophile, de l'hématie. — M. N. Gréhant propose d'utiliser le lapin pour la recherche et le dosage de l'oxyde de carbone dans les mines de houille et les appartements — MM. P. Carnot et C. Deflandre ont constaté, chez la femme, au moment de l'hémorragie menstruelle, une diminution très importante du nombre des hématies, pouvant atteindre le 1/4 ou le 1/5 de la quantité totale. Le retour à la normale se produit en une semaine environ. — MM. J. Renaut et G. Dubreuil montrent que les ostéoblastes, et les cellules osseuses en lesquelles évoluent seulement certains d’entre eux, répondent à des termes particuliers et élevés de la lignée connective, dont le lymphocyte est le terme ini- tial. — M. Ed. Retterer a reconnu que le tissu du fol- licule clos provient de la prolifération et de la trans- formation des cellules épithéliales. Il en résulte un complexus cellulaire à cytoplasma commun et noyaux nombreux. Après s'être différencié, le cytoplasma subit une fonte partielle, d'où la formation du tissu réticulé à éléments libres et mailles vides. — M. Ch. Julin a découvert que les embryons isolés de Pyrosoma sont phosphorescents; cette luminosité a deux sources dis- ünctes : les cellules du testa et les glandes latérales des quatre ascidiozoïdes primaires. — MM. Moussu et Le Play ont constaté que la glande surrénale, greffée sur la rate, ne conserve qu'une activité physiologique fort restreinte; elle ne peut, en tous cas, suppléer à l’ab- sence de cet organe. — MM. A. Raïlliet et A. Henry proposent une nouvelle classification des Strongylidæ et font connaître quelques formes nouvelles. — M. M. Neveu-Lemaire signale la présence d'une larve de Ligule (Ligula simplicissima) dans la cavité cra- nienne d'une tanche (T'inca vulgaris). — MM. L. Rénon et A. Delille préconisent la médication opothérapique associée, qui permet, par l’adjonction d’autres extraits, d’atténuer les inconvénients de l'extrait principal. — MM. H. Busquet et V. Pachon montrent que l'insuf- flation de vapeurs de chloroforme au cobaye soumis à la respiration artificielle provoque des trémulations fibrillaires du cœur. — MM. A. Sartory et A. Filas- sier montrent que, dans les locaux collectifs, l'emploi des ventilateurs ordinaires est sans utilité; au con- traire, ils créent de véritables tourbillons d'air suscep- tibles d'entraîner avec eux des poussières souvent fort dangereuses. — M. Lippens différencie le colibacille du bacille d'Eberth par l’action réductrice du premier sur l'hémoglobine du sang, qu'il transforme en une couleur violette. — M. E. Poyarkoff a trouvé dans le foie des Cyclas des environs de Bordeaux un Infusoire cilié nouveau, du groupe des Astomes, qu'il nomme Cepedella hepatica. — MM. CI. Regaud et J. Mawas ont mis en évidence des formations mitochondriales dans les cellules des acini salivaires et les cellules res = [er] striées de l’épithélium des canaux salivaires de l'âne, du chien et du chat. M. A. Policard a constaté que la substance caractéristique des mitochondries se colore en gris noirâtre par les vapeurs osmiques; après osmication, elle résiste à l’action de l’acide acétique et sa partie lipoide n'est plus soluble dans le xylène. — MM. A. Gouin et P. Andouard ont observé des fuites dans le bilan azoté de la nutrition; une partie provient de la perte d'azote pendant la dessiccation des fèces. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild signalent un cas d'instabilité motrice provoquée par le traitement thyroïdien : passage de l’état d’acro-cyanose à l'état d’acro-érythrose. — MM. Variot et P. Lassablière ont constaté que, chez des enfants dont la croissance a été considérablement retardée, l’encéphale n'a pas été entravé dans son développement; le squelette à aussi souffert moins que les autres tissus du corps. — M. Ed. Sergent à observé que les moustiques (Culex Mariæ) ayant vécu à l’état larvaire dans l’eau douce et éclos sur l’eau douce ont une tendance générale à perdre leur habitude spécifique d'aller pondre sur l'eau salée et sont retournés vers l’eau douce. — MM. Ch. Achard et L. Ramond ont mesuré la résis- tance leucocytaire par l’action de solutions hypoto- niques de chlorure de sodium, — M. Jungano à trouvé, parmi la flore intestinale anaérobie du rat, deux espèces nouvelles : un gros bacille filamenteux et un bacille diphtéruide. — MM. Ed. Lesné et Cawadias ont injecté à des cobayes des macérations de journaux imprimés ayant servi à des tuberculeux ; à l’autopsie des cobayes, on n'a constaté aucune lésion de tuberculose. Séauce du 23 Janvier 1909. M. A. Clerc a constaté que certains Culicides peuvent régulièrement infester l’eau de mer stagnante, même concentrée. — MM. A. Ranc et A. Nantet ont reconnu «que la cyanamide, comme les cyanures, détruit les globules rouges, mais par un mécanisme différent. — M. Jungano décrit deux nouveaux bacilles, un bacille granuleux et un bacille naviforme, faisant partie de la flore intestinale anaérobie du rat. — M. F. Guéguen est parvenu à obtenir des cultures de Xylaria poly- morpha en semant sur carotte cuite les conidies bien müres que l’on obtient en conservant sous cloche humide les clavules vivantes. — M. A. Besredka empêche les troubles anaphylactiques chez les cobayes hypersensibles en injectant dans le péritoine5 centimè- tres cubes de sérum ; la substance immunisante peut “être obtenue par dialyse du sérum à travers les sacs en collodion.— MM. H. Busquet et V. Pachon ont constaté que : tandis qu’en circulation artificielle à travers le cœur, les divers sels de sodium compatibles avec le fonc- tionnement cardiaque suppriment uniformément le pouvoir cardio-inhibiteur du vague, en injection intra- vasculaire, les sels de Na dont les sels correspondants de Ca sont insolubles dans le sang suppriment seuls le fonctionnement de l'appareil d'arrêt cardiaque. — MM. W. Œchsner de Coninck et E. Chauvenet ont observé qu'à une température peu élevée l'iodoforme entre en réaction avec plusieurs oxydes métalliques en dégageant CO?. — MM. H. Claude et A. Schmiergeld signalent un cas d'adénome parathyroïdien, caractérisé par la multiplication des éléments chromophiles ou oxyphiles., — M. M. Weinberg à reconnu que la recher- che des anticorps spécifiques dans l'échinococcose par la méthode de déviation du complément est plus sûre que le précipito-diagnostic. — MM. M. Weinberg et L. Boïdin montrent qu'il n'existe pas, chez les malades atteints d’échinococcose, de parallélisme constant entre le degré de l’éosinophilie sanguine et la richesse du sérum en anticorps spécifiques. — M. J. Joly a étudié les variations de l’hémoglobine, du nombre des globules rouges et de la valeur globulaire aux différentes périodes de la vie chez le rat blanc. L'hémoglobine ne s'élève qu'après le nombre des globules rouges. — MM. G. Du- breuil et C1. Regaud montrent que la séparation des sexes a sur le rut spontané une influence ralentissante ; ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES le mélange des sexes a, sur le rut de Ja lapine, une in- fluence accélératrice considérable. — M. À. Menegaux donne quelques détails sur le nid du Fournier, d'après des exemplaires reçus de la République Argentine. — M. A. Lécaillon conclut, des faits qu'il a observés sur la cicatricule de l'œuf non fécondé de Paon,que cet œuf subit une segmentation tout à fait semblable à celle qui se produit dans l'œuf non fécondé de Poule. — MM. A. Richaud et Bidot ont constaté que les liquides d'hydrosalpinx renferment une quantité élevée de cho- lestérineet aussi de la pseudomucine.— MM. P. Carnot et A. Lelièvre ont observé sur les cellules bordantes de l'estomac une double ordination, par rapport à la lumière fundique et par rapport aux vaisseaux. — MM. H. Roger, L. Bory et A. Sartory ont trouvé à l'autopsie d’un malade une mycose du poumon gauche, due à une Oospora nouvelle, qu'ils dénomment 0. pul- monalis. — M. A. Sicre montre qu'il ne faut pas attri- buer une valeur rigoureuse au virage du rouge neutre en tant qu'indice spécifique de la présence du coli- bacille, — MM. A. Rodet et Lagriffoul ont constaté que le sérum des animaux immunisés par des injec- tions intra-veineuses de bacilles d'Eberth vivants ne possède jamais qu'un pouvoir bactéricide ou sensi- bilisateur très médiocre. — MM. C. Levaditi et L. Nat- tan-Larrier ont reconnu que le /iroplasma canis, comme les trypanosomes, provoque des modilications du sérum appréciables par le procédé de la fixation du complément; mais il s’agit ici d'un simple phénomène de précipitation exagérée. — MM. Ch. Esmein et M. Parvu montrent que l’ascite de la cirrhose syphi- litique du foie peut présenter une réaction spécifique par la méthode de Wassermann. — MM. L. Morel et E.-F. Terroine ont observé que le dédoublement par le suc pancréatique d’éthers de même composition chimique varie beaucoup suivant la configuration molé- culaire de ces éthers. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 8 Décembre 1908. M. L. Cuénot, pour vérifier si les mâles d’abeilles proviennent d'œufs parthénogénétiques, a entrepris des expériences de croisement entre l'abeille noire commune femelle et l'abeille jaune (golden bee) mâle. Les ouvrières obtenues étaient toutes hybrides; sur les trois cents mâles, une douzaine présentaient des bandes ou des taches jaunes, qui peuvent être l'indice soit d’une hybridation, soit d'une simple variation de l'abeille commune. — M. N. Niskoubina à constaté que l’activité glandulaire du corps jaune cesse brus- quement vers le quinzième jour, c’est-à-dire le milieu de la gestation chez la lapine; le corps Jaune exerce, pendant ces quinze premiers jours, une action physio- logique manifeste sur la gestation: il met l'utérus dans les conditions nécessaires pour assurer le développe- ment de l'œuf fécondé. — MM. M. Lucien et J. Parisot ont observé que le poids absolu et relatif de l'hypo- physe chez les animaux thyroïdectomisés est toujours plus considérable que chez les animaux témoins. — M. Th. Guilloz décrit un procédé optique, basé sur l'emploi d'une lentille cylindrique et d'un diaphragme, pour répartir sur une surface rectangulaire un éclaire- ment uniforme suivant l’ordonnée et variant suivant l'abscisse d’après une loi quelconque déterminée. Il montre comment on peut appliquer ce procédé à l'étude de l’action des radiations sur les êtres vivants. — MM. P. Jeandelize et J. Parisot ont reconnu que les lapins thyroïdectomisés présentent tous de l’'hypo- tension artérielle par rapport à leurs témoins de même portée. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 8 Janvier 4909. La Société procède au renouvellement de son Bureau, qui est ainsi constitué pour l'année 1909 : ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES i Président : M. Pascalis; Vice-Présidents : MM. A. Haller, G.. André, A. Bé- hal et Ch. Moureu; Secrétaire général : M. P. Freundler ; Secrétaire : M. Marquis ; Trésorier : M. Petit. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 9 Novembre 1908. MM. C. F. Cross et E. J. Bevan présentent quelques recherches nouvelles sur /a chimie de la cellulose. Ns ont étudié la décomposition qui se produit souvent au centre des balles de jute importées et qui trans- forme une grande partie de la substance de la fibre (lignocellulose) en matière friable, dont une partie est soluble dans l’eau, et une autre partie soluble dans | les alcalis dilués. On a observé une décomposition similaire dans la pulpe de bois mécanique, due proba- blement à des micro-organismes. Les auteurs se sont occupés, d'autre part, des qualités structurales de la cellulose et ils ont reconnu qu'elles ne dépendent pas des groupes OH. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 9 Novembre 1908. M. H. G. Bennett a fait des expériences de tannage avec l'écorce de mimosa. La grande astringence du tanin du mimosa nécessite l'emploi d'une acidité un peu plus élevée que d'ordinaire. Le cuir obtenu est ferme et de bonne qaalité ; il est remarquablement clair, étant donnée la couleur rouge de l'écorce et des | liqueurs qu'on en retire. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 10 Décembre 1908 (suite). 1° SciExcES PHYSIQUES. — MM. F. HaïseretF. Wenzel n'ont pu obtenir à l’état cristallisé le pentose dérivé de l’inosine ; sa solution aqueuse à comme pouvoir rota- toire [a«]n — — 19°,6. Les auteurs admettent l'existence de d-xylose dans l'inosine et l'acide inosique. 2° SCIEXCES NATURELLES. — M. F. Knoll montre que le mouvement des chloroplastes, chez les plantes supé- rieures, n'a pas lieu par des pseudopodes, comme l'ad- met Senn, mais vraisemblablement par des contractions locales des fils d’un réseau plasmatique existant dans le cytoplasma, donc passivement. Il s’agit probablement ici de la même formation étudiée par Lidforss sous le nom de « fils de conjugaison kinoplasmatiques entre le noyau cellulaire et les chromatophores ». Séance du 17 Décembre 1908. 12 ScrexcEs PHYSIQUES. — M. C. Auer von Welsbach | a reconnu, par des cristallisations fractionnées poussées très loin, que le thulium n’est pas un corps homogène ; il se compose principalement de deux éléments et en petite quantité d'un troisième qui se rattache à l'erbium. Le premier, analogue à l'aldébaranium, forme un sesquioxyde blanc pur, d’où l'on prépare des sels incolores, sans spectre d'absorption. Il est caractérisé par un spectre d'étincelles brillant. Le second élément donne aussi un sesquioxyde presque incolore ; mais ses sels ne le sont pas tout à fait et fournissent le spectre d'absorption caractéristique du thulium. Cet élément est très peu volatil et son spectre d'étincelles peut facilement passer inapereu en présence d’autres corps. — M. H. Meyer a obtenu une forme énolique stable (dianthranol) de la dianthrone, laquelle fournit | par oxydalion ménagée la bianthrone. Le dianthranol donne un dérivé diacétylé et un dérivé diméthylé. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Zuckerkandl pré- > — sente ses recherches sur le cartilage de Jacobson et l'ossification du vomer. L'auteur montre qu'une partie de l'os vomer provient de l'ossification d'un tissu conjonctif et une autre partie de la base du cartilage de Jacobson. — MM. J. Schaffer et H. Rabl ont étudié le système thyréo-thymique de la taupe et de la musa- raigne. Leurs recherches ont porté à la fois sur le fœtus et sur l'animal adulte. — M. V. Vouk a reconnu que le verdissement prononcé des feuilles des arbres toujours verts, qui, d'après Wiesner, se produit un à deux ans après la cessation de leur croissance, coïncide avec une multiplication des chloroplastes. Cette multiplication a lieu exclusivement par division, directe ou indirecte. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 31 Octobre 1908. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. H. Schoute : Sur un groupe de polyèdres admettant des plans diagonaux, déduit de polytopes. L'auteur entend par « plan diago- nal » d'un polyèdre un plan ne coupant ce corps que suivant des arêtes, par «espace diagonal » d’un polytope un espace ne coupant cette figure quadridimensionale que suivant des faces. Il étudie en particulier les sec- tions de la cellule régulière C,,,, qui jouissent de la propriété qu'une äârête quelconque se trouve en deux plans diagonaux formant avec les plans des deux faces par cette arête un rapport anharmonique constant 5 (3 —V5), et plus spécialement encore les sections par des espaces contenant des arêtes de cette cellule, au- quel cas le nombre des plans diagonaux passant par une de ces arêtes peut s'élever à quatre. — M, D. J. Korteweg présente au nom de M. J.-A. Barrau : Le problème combinatoire de Steiner. Il s’agit du pro- blème : Pour quelles valeurs de n ét de combien de manières différentes est-il possible d'indiquer un nombre de combinäisons de 7 éléments pris p à y, sous la condition que chacune des combinaisons g à g de ces éléments y figure une seule fois? L'auteur s'occupe des cas p>3, q>2. En indiquant le système satisfai- sant aux conditions du problème par S (p, ghn, il étend plusieurs théorèmes donnés en 1893 par M. E. Netto. — | M.J. de Vries présente au nom de M. M. Stuyvaert (Gand) : Sur certaines courbes qgaucheS du sixième ordre. L'auteur présente un apercu rapide des résul- tats que l’on peut obtenir en appliquant aux courbes gauches de genre deux et d'ordre cinq ou six les pro- priétés élémentaires des matrices, sujet sur lequel il a fait paraître récemment un volume infitulé « Cinq études de Géométrie analytique » (Gand, van Goe- them, 1908). — Rapport de MM. J. de Vries et W. Kap- teyn sur l'étude de M. M.-J. van Uven: « Algebraische Strahlencongruenzen und verwandte complexe Evenen als Schnitte derselben » (Congruences algébriques et leurs intersections comme plans correspondants com- | plexes). L'auteur s'imagine une relation fonctionnelle entre les variables complexes z, w de deux plans. si ces deux plans sont parallèles, la congruence qui est formée des droites de jonction des points correspon- dants à la propriété que chaque couple de sections parallèles détermine une relation fonctionnelle nou- velle en rapport avec la relation originale. Les rela- tions fonctionnelles examinées sont de la forme zw — A, ZW, 2 ww", z—w-*, Z—aw°+ bw+d, elc. L'étudé paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. \. d°o do L'intersection dés courbes ds —Ù et — 0. — En- de suite M. Van der Waals présente au nom de son fils J.-D. van der Waals Jr: Sur la loi de l'attraction moléculaire des points doubles électriques. — M. H. | Kamerlingh Onnes présente au nom de M. W. Voigt : | Binige Bemerkungen über die Leidener Beobachtun- | gen des Zeeman-Effectes beitiefen Temperaturen.Quel- 148 ques remarques sur les observations de l'effet Zeeman à des températures basses faites à Leyde. — M. H.- A. Lorentz présente au nom de M. O. Postma : Sur la déduction cinétique de la seconde loi prineipale de la Thermodynamique. Dans une communication précé- dente (/iev. géuér. des Se., t. XIX, p. 128), l’auteur a tâché d'indiquer comment on peut s'imaginer qu'un ensemble de systèmes de molécules ne possédant que de l'énergie cinétique passe à un état où toutes les combinaisons de position et de vitesse des molécules ont la mème fréquence. Dans cet état final, les molé- cules ont une distribution régulière et elles possèdent la distribution des vitesses dite de Maxwell. Ce résul- tat exige un complément. Comme le problème de la distribution des positions et celui de la distribution des vitesses ont été résolus l'un après l’autre, le résul- tat dit qu'enfin les molécules admettront une distribu- tion de position régulière par rapport à toutes les vitesses prises ensemble et qu’elles possèderont la dis- tribution des vitesses de Maxwell pour le vase entier. Cela ne prouve pas encore que, pour une série res- treinte de vitesses, la distribution des positions soit déjà régulière et que la distribution des vitesses de Maxwell existe dans toute partie restreinte du vase. L'auteur donne ici ce complément nécessaire. — M. J.- P. van der Stok présente au nom de M. W. van Bem- melen: Enregistrement du courant terrestre à Batavia. III. — M. A.-F. Holleman présente, en son propre nom et en celui de M. J.-J. Polak : Sur la bromuration du toluène. — M. S. Hoogewerff présente au nom de M. N.-L. Sôhngen: La décomposition de l'urée en l'absence de substances albumineuses. 1. Considéra- tions générales. L'urée comme source d'énergie. 2. Sels de calcium d'acides organiques comme source de car- bone. Urobacillus leubii Beverinek. Urobacillus freu- denreichii Miquez. Urobacillus maddoxii Miquez. Uro- bacillus duclauxii Miquez. Urobacillus jakschii. 4. L'irisation des plaques de culture. 5. Résultats. — M. J.- M. van Bemmelen: Nühere Betrachtungen über die von G. Tschermak angenommenen Kieselsäuren (Etude plus détaillée des acides siliciques distingués par M. G. Tschermak). 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H.-J. Hamburger : La perméabilité des cellules du sang pour le calcium. En général, l'accroissement de la pression osmotique du sérum sanguin cause un transport du calcium vers les corpuscules du sang. Si cet accroissement est dû à la présence d’un sel (électrolyte), il se manifeste de plus un mouvement contraire du calcium sous l'influence du cation du sel, mais ce dernier mouvement n’a pas beau- coup d'intensité. — M. H. Zwaardemaker présente au nom de M. A.-K.-M. Noyons : Sur l'indépendance du cardiogramme électrique par rapport au cardiogramme de forme. — M. C.-S.-A. Wichmann présente au nom de M. P. Schmutzer : La constitution minéralogique et chimique de quelques pierres: du Mont Müller du Bornéo central. La communication s'occupe de quatre minerais collectionnés par M. G.-A.-F. Molengraaf et analysés par M. Dittrich. — M. C. Winkler présente, aussi au nom de M. D.-M. van London: Sur la fonc- tion du groupe-noyau ventral du thalamus opticus de l'homme. — M. À -A.-W. Hubrecht présente au nom de M. J.-F. van Bemmelen : « Ueber den Unterschied zwischen Hasen-und Kaninchenschädel » (Sur la difré- rence entre le crâne du lièvre et celui du lapin). Sont nommés rapporteurs MM. M. Weber et L. Bolk. Séance du 28 Novembre 1908. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P.-H. Schoute : Sur des réseaux quadridimensionaux et leurs sections avec des espaces. WI. Les sections du réseau (C,,). Tables et figures en rapport avec ces sections et les réseaux tridi- mensionaux tant soit peu réguliers qui en découlent. Le pol\èdre (10, 20, 12), composé d’un cube portant sur deux faces opposées des pyramides régulières dont ces faces forment les bases et dont la hauteur est égale à la anoitié de l'arète de base, remplit l’espace tridimen- L. LL ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sional, en trois positions différentes, rectangulaires l'une à l’autre. — M. J.-P. van der Stok : Sur les fré- quences de l’état journalier moyen des nuages du riel à Batavia, Etude se basant sur les observations par heure faites depuis 1880. Tandis que les climats boréaux se caractérisent par un grand nombre de jours où le ciel est tout à fait couvert de nuages ou tout à fait sans nuages (surtout en avril et en septembre), ces valeurs extrêmes de l'état nuageux sont très rares à Batavia. En 26 ans, le ciel n’a été d’une sérénité parfaite qu'une fois, c'est-à-dire en un cas sur 9.500, tandis qu'un ciel tout à fait couvert se présente durant l’année entière 3 fois sur 200 et dans la mousson occidentale 4 fois sur 100. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M.9.-D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires, XI. . ; : Rd 4 Lieu des intersections des courbes Ti —0Det —0; — Ensuite M. van der Waals présente au nom de M. A. Keesing : Les températures des points de plissement 419,2 379,4 x : : 365 ï 364,2 : 359 : STE ' ; ) : ï 0 00601 02 0,35 0,5 1 Fig. 1. — Diagramme du système cau-phénol. du système eau-phénol. La projection (/, x)de la ligne des points de plissement (voir le diagramme) montre : 1° qu'en effet, le système en question possède une tem- pérature minimum des points de plissement; 2° que cette température minimum correspond à peu près à x—0,1 ; 3° queles points aux abscisses x== 0,1, x—0,2, x=—1 sont tant soit peu collinéaires, ce qui prouve que la projection de la courbe des points de plissement admet un point d’inflexion. 3° SoiENCES NATURELLES. — M. W. Burk : La significa- tion biologique de la sécrétion du nectar par la fleur. D'après l’auteur, la question se pose de savoir de quels moyens l'ovaire de la fleur dispose pour échapper, dans l’état de repos, aux conséquences périlleuses d'une transpiration excessive. IL croit que la sécrétion du nectar remplit cette fonction protectrice. Etude de la sécrétion du nectar chez le Frisillaria imperialis. — M. S.-H. Koorders : Quelques remarques systématiques et géographiques sur les Casuarinacées de Java, sur- tout celles de l'Herbier de Leyde et d'Utrecht. — Rap- port de MM. M. Weber et L. Bolk sur l'étude de M. 9. F. van Bommelen : Ueber den Unterschied zwischen Hasen-und Kaninchen-schädel (Sur la différence entre le crâne du lièvre et celui du lapin). L'étude paraïtra dans les Mémoires de l'Académie. £ P. H. ScHouTE. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Gasselto. No 4 FÉVRIER 1909 Revue générale des Pen C bureS eLiappliquées. | îrar \ °e = . LEE Directeur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. at Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Élection à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 15 février, l'Académie a procédé à l'élection d'un membre dans sa Section de Chimie, en remplacement de M. A. Ditte, décédé. La Section avait présenté la liste suivante de candidats : 40 M. E. Jungfleisch ; 2° MM. A. Etard et J. Le Bel; 3° MM. A. Béhal, L. Bouveault, A. Colson, M. Hanriot et Ch. Moureu. Au premier tour de scrutin, M. E. Jungfleisch a été élu par 38 suffrages sur 47 votants. Les travaux du nouvel académicien sont trop connus pour que nous ayons à les relater ici. Tout jeune, il s'illustra, comme on sait, en démontrant la possibilité de créer de toutes pièces, à partir des éléments, des produits dissymétriques. On peut dire de ses recher- ches qu'elles se sont étendues au domaine entier de la Chimie organique. Depuis l’année 1869, où il soutint sa thèse sur les anilines chlorées, jusqu'aujourd’hui, M. Jungfleisch n'a cessé d'apporter de nouvelles con- tributions à l'étude des composés gras et aromatiques ; citons, en particulier, ses recherches sur les alcools mono etpolyatomiques, les acides tartriques, le lévulose, l'inuline et surtout les alcaloïdes. Il fut le collabora- teur de Berthelot dans la publication du « Traité de Chimie organique », qui a servi de guide à de nom- breuses générations de savants. $ 2. — Astronomie A la recherche de la planète transneptu- nienne. — Au xvui siècle. les patientes observations directes de William Herschel ont été couronnées par la découverte d'Uranus. Le Verrier a, au xix° siècle, grâce au calcul, reculé les frontières du domaine pla- nétaire jusqu'à l'orbite de Neptune. Suivant l’astronome américain W. H. Pickering, il ne serait pas impossible qu'au xx° siècle la photographie, qui a déjà dénoncé le dixième satellite de Saturne, lequel est invisible, même dans les plus grands instruments actuels, re- cule encore les bornes du système solaire, en révélant l'existence d'une planète transneptunienne. M. Pickering a même récemment indiqué, d'après REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. ses calculs, la portion du ciel dans laquelle il convien- drait de rechercher cette lointaine planète, dont fla position, au commencement de l'année 1909, serait approximativement : AR — 5h47m ; D — + 240, A l'Observatoire d’Arequipa, des photographies de cette région céleste ont déjà été prises avec le téles- cope Bruce de 0,61 d'ouverture. M. Pickering ajoute qu'il serait à souhaiter que les astronomes disposant d'instruments convenables pour ce genre d'exploration entreprissent des recherches dans le même but, etil pro- pose l’organisation d'une étude systématique de cette zone de l'Ecliptique. $ 3. — Météorologie Observations, en ballon libre, de la radio- activilé atmosphérique. — On sait que l'air at- mosphérique renferme normalement les émanations .du radium et du thorium, provenant des composants radio-actifs de l'écorce terrestre diffusés dans l’atmo- sphère. M. Flemming! vient de faire en ballon libre des expériences sur la radio-activité des couches supé- rieures de l’atmosphère. A défaut d’un fil communi- quant avec la terre, il a dû modifier le procédé de mesure employé à la surface du sol, en produisant un champ électrique constant entre deux fils librement suspendus et reliés aux pôles d’une pile sèche. C’est sur le fil communiquant avec le pôle négatif que devait s'accumuler la substance active. La pile sèche à haute tension employée par l'auteur présentait une tension libre d'environ deux mille volts. Les pertes de charge ont été déterminées pendant la course en ballon, immédiatement après avoir ramené le fil. Les difficultés d'observation dues aux oscillations du ballon ont dû être vaincues par une suspension appropriée de l'appareil. Ces expériences font voir, jusqu'à des hauteurs de plus de 3.000 mètres, l'existence d'émanations radio- actives. Les valeurs observées pendant le quatrième voyage, fait par un temps d'orage, sont d'une grandeur 1 Phys. Zeitschriit, n° 23, 105. 150 FER CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE inaccoutumée ; mais, faute d'observations ultérieures, il est impossible de dire s’il existe ou non une relation de cause à effet entre ces valeurs de la radio-activité et les conditions atmosphériques. $ 4. — Electricité industrielle La télégraphie sans fil appliquée à la navigation. — La navigation par temps de brume à proximité des côtes est actuellement très dangereuse. Lorsque les navires ne voient plus la terre, ni, la nuit, les phares, et qu'en même temps le Soleil ou les étoiles leur sont masqués, il ne leur reste plus de moyen certain pour déterminer leur position; dans les statis- tiques des naufrages, c'est la brume qui est la cause le plus souvent enregistrée. À certains points — autour de l'entrée de Brest, par exemple — la sonde peut donner des indications utiles, mais encore insuffisantes pour permettre de se repérer avec l'exactitude néces- saire ; plusieurs phares sont doublés de sirènes dont les appels peuvent prévenir le navigateur de l'approche de la terre, mais la portée de ces signaux sonores est d'autant plus réduite que la brume est plus épaisse et que, par conséquent, ils seraient plus nécessaires; enfin, on a installé et on installe actuellement, en divers endroits particulièrement dangereux, des cloches sous- marines dont les vibrations sont facilement perçues, au moyen d'écouteurs spéciaux, par des bâtiments qui se trouvent à environ 5 milles marins (9 kilomètres); il semble même que ce genre de signaux soit pour le moment le plus efficace, bien que sa portée ne soit pas très étendue et qu'en même temps il ne donne que l'indication vague d'un danger, dont il ne précise ni la direction ni la distance. On a songé, depuis quelque temps déjà, à utiliser pour ce cas spécial la télégraphie sans fil. En supposant, par exemple, un poste émetteur puissant installé sur Ouessant et lançant à intervalles réguliers des trains d'ondes de durées également régulières, tous les navires passant à plusieurs centaines de milles et pourvus d’un poste récepteur recevraient ces oscillations et pourraient les reconnaître ; ils seraient ainsi prévenus de leur entrée dans la zone d'influence du poste. Ce ne serait là, du reste, qu'un renseignement fort vague. On a essayé divers moyens pour avoir des indications plus précises. D'abord, on a pensé à se servir d'ondes polarisées, c'est-à-dire présentant un maximum d'intensité dans une direction donnée ; mais l’axe de polarisation ne peut être déterminé qu'avec une approximation insuffisante (l'erreur peut atteindre une vingtaine de degrés), et, de plus, pour le trouver, il faut que le bâtiment se dérange de sa route et par- coure une distance qui peut être considérable. La polarisation de l'antenne réceptrice, qui serait préfé- rable à ce point de vue, est irréalisable à bord et ne pourrait en aucune manière être obtenue avec la précision voulue. La conjugaison de signaux hertziens avec des signaux sonores aériens ou sous-marins émis simultanément (la différence entre les moments de réception des signaux permettant de calculerladistance, d’après la vitesse connue du son) ne peut donner de bons résultats qu'à trop courte distance, et encore ces résultats seraient-ils erronés à cause de la difficulté qu'il y aurait à noter exactement les temps. Il parait possible qu'un procédé nouveau, qui vient d’être imaginé par M. Lair, lieutenant de vaisseau, permette des mesures plus précises. Le principe de ce procédé est le suivant : la distance du poste émetteur est déterminée par la quantité d'énergie reçue au poste récepteur (les ondes émises étant, bien entendu, de puissance rigoureusement constante); la quantité d'énergie est, en effet, on le sait, inversement proportionnelle au carré de la distance. Si l’on possède des appareils de mesure suffisamment sensibles, on pourra donc, dès la réception de quelques trains d'ondes, avoir un lieu géométrique de sa position, qui sera un cercle ayant pour centre le poste émetteur. Si, aussitôt après, on peut recueillir les ondes émises par un second poste émetteur, placé à une distance suffisante du premier et émettant des ondes de durées et d’intervalles différents de ceux du premier poste, on aura un second lieu géométrique que l'on trouvera également sur la carte; l'intersection des deux cercles donnera la position du navire. Si l'on ne reçoit que les émissions d’un seul poste, on peut néanmoins déterminer sa position par deux opérations successives. Ayant tracé le cercle qui cor- respond à une première mesure, on continue à marcher pendant un certain temps, un quart d'heure ou une demi-heure, par exemple, et l'on fait une nouvelle observation qui donne un second cercle concentrique au premier ; connaissant à peu près, d'après la vitesse du navire, le chemin parcouru dans l'intervalle, il suffit d’une construction géométrique simple pour trouver les deux points de ces circonférences qui sont séparés par une distance égale au chemin parcouru. Il semble bien que ce mode de procéder puisse être d'un emploi pratique admissible, Les premières expériences paraissent concluantes; mais il y a lieu d'attendre, pour se prononcer définitivement, des essais complets qui vont ètre entrepris prochainement au moyen d'un phare hertzien installé probablement sur Ouessant. Le poste émetteur doit être pourvu d’un alternateur dont la régulation en énergie et en vitesse soit absolu- ment parfaite; c’est peut-être dans la recherche de cette perfection que l'on rencontrera le plus de difficultés ; son antenne doit rayonner d'une manière égale dans toutes les directions où l'on peut avoir à s’en servir ; un commutateur automatique, mû par un petit moteur, commandera les émissions d'ondes, qui seront combinées à l'avance comme les éclats d'un phare. Le poste récepteur comporte une antenne, de position invariable par rapport à la coque et au gréement, et rigoureusement accordée avec l'antenne d'émission ; on y trouve, en outre : 1° un mesureur d'énergie de première approximation, constitué par des écouteurs montés sur un circuit secondaire dont le primaire est un solénoïde prolongeant l'antenne ; 2° l'identificateur des postes émetteurs, consistant en un relais action- nant un chronographe qui mesure la durée des trains d'ondes et de leurs éclipses; 3° le mesureur intégra- teur d'énergie, qui n'est autre qu'un bolomètre sem= blable à ceux dont on se sert dans les laboratoires, muni d'un rhéacorde de réglage, et dont le galvano- mètre indique l'énergie reçue et peut même être gradué directement en distances. En attendant que ce système, ou quelque autre analogue, entre dans la pratique courante, il est probable que bientôt la télégraphie sans fil rendra un premier service aux navigateurs : sur la proposition de M. Bouquet de la Grye, on étudie l’organisation de signaux horaires qui seraient lancés par la tour Eiffel et grâce auxquels les marins pourront déterminer sûrement leur longitude et vérifier le réglage de leurs chronomètres. $ 5. — Chimie Un nouveau produit du four électrique : le Silundum. — Un chimiste allemand, M. F. Bélling, vient d'obtenir au four électriqueun nouveau produit, un siliciure de carbone intermédiaire entre le carbone et le carborundum, auquel il donne le nom de si/undum. On le prépare en chauffant du carbone dans une atmosphère de vapeur de silicium; pratiquement, on chauffe du carbone avec un mélange de sable et de car- bone, à une température de 1.700 à 1.800° C. Les objets en carbone peuvent être, si on le désire, convertis en silundum sur un côté ou par places seulement. 4 Chemiker Zeitung, L. XXXII, p. 1104, 19)8, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE La conductivité électrique du silundum est beaucoup moindre que celle du carbone ; elle varie avec la dureté, avec le genre de carbone employé à la fabrication et avec la durée de chauffage dans la vapeur de silicium. Un bâton de 800 millimètres de longueur et de 6 milli- mètres de diamètre peut conduire un courant de 4.000 watts d’une facon permanente et de 8.000 watts temporairement. Le silundum est stable à l'air jusqu'à 1.7500-1.800p ; au-dessus, il dégage des vapeursde silicium. Les métaux fondus, en particulier le fer, le détruisent rapidement ; par conséquent, les creusets ne devront être convertis en silundum qu'à l'extérieur. Le principal emploi de la nouvelle substance paraît être comme matière à résis- tance permanente pour les travaux à haute température, $ 6. — Métallurgie L’Industrie minérale et la production mé- tallurgique de la France en 1906 et 1907:. — Les combustibles minéraux sont extraits en France dans la proportion de 98 °/, pour Ja houille et l’anthra- eite, et de 2°/, pour le lignite. En 1887, leur production totale dépassait à peine 21 millions de tonnes; elle atteint 26 millions, en 1890, et reste stationnaire jus- qu'en 1893; à partir de cette époque, elle augmente graduellement jusqu’en 1900, où elle est de 34 millions et demi; dès lors, elle reste stationnaire entre 32 et 37 millions, comme le montre le tableau suivant où nous avons fait figurer, en milliers de tonnes, la pro- duction et la consommation des combustibles minéraux : EXCÉDENT de la Ë consommation ANNÉES PRODUCTION CONSOMMATION 1900 33.40% 48.803 15.399 1902 29.997 44.810 14.813 1904 34.168 47.030 12.862 1906 34.196 91.182 17.586 Ce besoin d’un excédent, qui semble croître avec la production, ne pourrait cesser que par la découverte de nouvelles mines, d’une mise en exploitation facile et peu coûteuse, ou bien encore par le développement de l'exploitation dans les bassins existants. L'extension vers le sud du bassin déjà si productif du Pas-de-Calais vient d'être démontrée par des sondages; dans la Meurthe-et-Moselle, on a constaté également le prolon- gement du bassin de Sarrebrück, maisle terrain français est pauvre en houille. Dans les deux cas, il faudrait compter sans doute avec un prix de revient plus élevé. Mieux vaudrait donc, comme le pense M. Ed. Lozé, aug- menter la capacité de production des exploitations existantes, ce qui n’est guère possible que dans celles du Gard, de Saône-et-Loire, de l'Aveyron, du Tarn, et surtout dans les départements du Nord et du Pas-de- Calais. La production du minerai de fer est en forte aug- mentation, dans les récentes années principalement. De 1887 à 1892, la production passait de 2.579.000 tonnes à 3.707.000; elle reste stationnaire de 1893 à 1895, puis elle reprend pour atteindre, en 1900, 5.448.000. Après un recul en 1901, la progression reprend d’une facon continue, et, en 1906, on enregistre le chiffre de 8.481.000 tonnes. La production comprend surtout du minerai hydroxydé oolithique, qui provient en grande partie du département de Meurthe-et-Moselle, où l’ex- traction passe, entre 1900 et 1906, de 4.446.000 lonnes à 7.399.000. Ces gisements appartiennent à la forma- tion ferrugineuse oolithique du Lias supérieur et for- ment deux bassins : celui de Nancy et celui du groupe Longwy-Briey. Nous donnons, en milliers de tonnes, dans le tableau suivant, les chiffres de la production, ! Cf. les articles de M. Ed. Lozé etE. Payen dans l'Zcono- Miste français des 22 août et 3 octobre 1908. 151 de l'importation et de l'exportation du minerai de fer: ANNÉES PRODUCTION IMPORTATIONS EXPORTATIONS OUPS ET 5 ZES 2.119 327 1902. 5.004 1.583 423 1904. 1.023 1.738 1.219 AOC 0 S.481 2.015 1.759 1907 PRES — 1.999 2.147 L'extraction des autres minerais métalliques a peu d'importance dans notre pays. Le tableau suivant donne les chiffres de 1906 en tonnes, et la valeur en milliers de francs : VALEUR TONNES en milliers de fr. Minerais de plomb et d'argent. 11.795 2,847 Terres et quartz aurifères. . . 41.404 888 Mineratidefzin ce ES 03 266 1.026 Mineraï de cuivre... 2.547 97 HEC ONE octobre à 0 POI 4.063 Minerai de manganèse. . . . . 11.189 296 Minerai d'antimoine. . . . . . 18.567 3.527 Mineraildarsenic 6.53% 213 MOLÉS DEN EI 18 48 Total. . . . 410.781 19.005 De 1900 à 1907, la production de la fonte a augmenté de 38 °/,; le chiffre de 1907 (3.589.000 tonnes) dépasse de 275.000 tonnes celui de 1906, dont nous donnons ci-dessous la répartition géographique : PRODUCTION DE 1906 en milliers de tonnes Meurthe-et-Moselle.. : … . . .... 2.295. Not ei fol OR ERGtEL CAE Le 427.4 CENTTETEMONESE EEE 169., Hoirete NII PRE ES 167 % SUD OUEST Ne M ee le AVEYLONNELEATIESe EEE ne UT 72.7 Champasne etc 0 49.4 DOtale ne 3.314., Les exportations de fonte ont alteint, en 1907, le chiffre de 256.525 tonnes; les importations n’ont re- présenté que 36.107 tonnes, et la consommation na- tionale grandissante s’est élevée (stocks exclus) à 3.368.531 tonnes. La production de l'acier brut s'est accrue parallèlement à la production de la fonte; de 1900 à 1907, elle a haussé de 70 °/;, passant de 1.565.164 tonnes à 2.677.805. Ce dernier chiffre nous place au quatrième rang dans la production mondiale, après les Etats-Unis (23.217.000 tonnes), l'Allemagne (12.063.632), et l'Angleterre (6.522.000). En ce qui concerne les modes de fabrication de l'acier, c'est le procédé Thomas — auquel on doit la mise en œuvre des minerais de Lorraine — qui est le plus employé (1.630.511 tonnes, en 1907); le procédé Bessemer perd, au contraire, de sa faveur (77.421 tonnes), tandis que la fabrication au four Martin continue de progresser (969.873 tonnes), La situation de notre industrie métallurgique est donc très florissante; son accroissement relatif est considérable et sa solidité a été démontrée par le fait que les grands pays métallurgistes ont plus souffert que nous des répercussions de la crise américaine. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 7. — Agronomie La diffusion des engrais salins dans la terre. — Les engrais salins qu'on donne comme fumures se trouvent, dès leur épandage sur le sol, en 4 Nous n'avons pas encore les chiffres de 1907, mais, pour le bassin de Briey seul, l'extraction comporte une avance de plus d’un million de tonnes sur 1906. 152 présence d'une quantité d'eau incomparablement supérieure à celle qui est nécessaire à leur dissolution. Il semble donc que la diffusion du sel doit être ra- pide et que la répartition uniforme de l’engrais dans ia masse terreuse est complète au bout de peu de temps. Jusqu'à quel point ces prévisions sont-elles justi- liées, et quelles conséquences en résulte-t-il pour l'Agriculture? Telle est la question que se sont posée MM. A. Muntz el H. Gaudechon et à laquelle des recherches approfondies viennent leur permettre de donner la réponse suivante! : Lorsque des engrais salins sont donnés à une terre en état de siccité relatif, le sel attire à lui l'eau de la terre et forme une solution qui reste localisée pendant un très long temps sous forme d'un noyau humide; la terre placée dans l'intervalle des cristaux de sel se dessèche au profit du noyau humide, qui s'agrandit graduellement à mesure qu'il attire à lui l’eau des parties avoisinantes. La terre est alors, pour ainsi dire, {igrée, avet des taches humides contenant la solu- tion saline et des intervalles desséchés entre ces taches, sans qu'il se produise une diffusion de la solution saline dans les couches environnantes. Si l’on pratique des semailles dans un sol placé dans ces conditions, il peut y avoir une mauvaise levée : les graines qui tombent à l'endroit des tachesse trouvent en présence d’une solution saline trop concentrée pour permettre le développement de la jeune plante; au contraire, les graines qui tombent dans les intervalles se trouvent dans une terre trop desséchée et, par suite, ne peuvent germer. Ces faits expliquent les insuccès constatés dans la pratique et montrent qu'il est imprudent de faire coïncider les semailles avec l’'épandage des engrais salins. Lorsque les terres sont mouillées, et ensuite plus ou moins ressuyées comme elles le sont peu de temps après une pluie, on ne constate plus un appel de l’eau vers la solution saline, formée à l'endroit où le sel a été déposé; mais, contrairement à ce que l'on pouvait penser, même dans les sols humides, la diffusion du sel dans la masse terreuse est pour ainsi dire nulle pendant un assez long temps et ne devient manifeste qu'au bout de semaines ou de mois. Les terres humides sont donc, elles aussi, divisées en zones, l’une renfer- mant la solution saline et l’autre exempte de sel. Cette lenteur extrême de la diffusion paraît tenir à ce que la terre ne forme pas un milieu continu, condi- tion nécessaire pour que les phénomènes de diffusion puissent se produire. Si, par un fort tassement, on rapproche les particules terreuses, la discontinuité se trouve atténuée; on constate alors une diffusion un peu plus active, et c'est surtout lorsque, en même temps que tassées, les terres se trouvent noyées d’eau, et forment alors un milieu continu, que la répartition du sel devient plus sensible, sans jamais avoir toute- fois la rapidité qu’elle aurait dans une masse liquide. Quand les pluies interviennent, la diffusion ne se trouve pas sensiblement accélérée ; l’eau, tombant à la surface du sol et s’y infiltrant graduellement, se borne à provoquer un déplacement du sel dans le sens ver- tical, par son cheminement de haut en bas dans la couche terreuse. On voit, par ce qui précède, avec quelle lenteur, contrairement à l'opinion courante, les sels solubles donnés comme fumures à la terre se répartissent dans le sol. $ 8. — Zoologie appliquée La protection du castor du Rhône. — Le Castor, animal autrefois assez commun dans nos pays y à presque totalement disparu, sa fourrure, très 1 Annales de l'Institut National Agronomique, 2 sér., 1. VII, fase. 2, p. 205 et suiv., 1908. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE recherchée, en ayant fait l'objet d'une chasse intensive. On ignore généralement qu'une de ses dernières sta- tions en Europe se trouve vers l'embouchure du Rhône. Dans là partie du Petit-Rhône comprise entre Fourques. et le Mas de Sauvage, on peut encore en voir de petites colonies; dans le Rhône même, depuis Pont-Saint- Esprit jusqu'à Salin-de-Giraud, et dans quelques-uns de ses derniers affluents, on capture de temps à autre quelques individus isolés. M. G. Maingaud, qui étudie depuis plusieurs années. le Castor du Rhône, a demandé à diverses reprises‘ que des mesures soient édictées pour empêcher l'extinction de ce gros Rongeur aquatique, que l’on peut consi- dérer comme uue richesse zoologique nationale. Pendant quelques années, la tête de cet animal avait été mise à prix par le Syndicat des digues du Rhône de Beaucaire à la mer; mais cette mesure fut rapportée sur les instances du Professeur Mavet. On avait prétendu que les digues destinées à protéger les. nouvelles plantations de vigne de la Camargue avaient. été fouillées par les castors pour l'établissement de leurs terriers et que la solidité en avait été compro- mise. En réalité, il n'en était rien, le Castor pratiquant. ses terriers sur les bords mêmes du Rhône, non cul- tivés, et le plus souventsur les petites îles disséminées. dans le lit du fleuve. En somme, ces animaux ne commetlent pas de déprédations bien sérieuses en dehors des terrains sans valeur qui peuvent leur être abandonnés. Aussi, dans quelques fleuves de l'Europe centrale (Elbe, Danube, Vistule, Dniéper, Volga), où l’on en rencontre encore de rares colonies, loin de les proscrire, les Gouvernements ont pris des mesures protectrices en leur faveur. La chasse en est interdite, et une mesure semblable, ou tout au moins l'interdiction de tuer le Castor en dehors des périodes où la chasse est ouverte, devrait être prise dans la région du Bas-Rhône. Peut-être même, comme l’a proposé M. Maingaud, pourrait-on tenter l'élevage du Castor, élevage qui à& donné de bons résultats au Canada et aux Etats-Unis. Il donne une fourrure très recherchée et un produit pharmaceutique, le castoréum; les propriétaires de la Camargue trouveraient là une nouvelle source de: revenus, et en même temps serait assurée, dans notre pays, la conservation d'une intéressante espèce zoolo— gique en voie d'extinction. $ 9. — Enseignement Personnel universitaire. — M, Jeanmaire, rec- teur de l’Académie d'Alger, est nommé recteur de l'Académie de Toulouse. M. Ardaillon, recteur de l'Académie de Besançon, est nommé recteur de l'Académie d'Alger. M. Padé, doyen de la Faculté des Sciences de Bor- deaux, est nommé recteur de l’Académie. de Besançon. Madame Curie, docteur ès sciences, chargée d'un cours de Physique à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé professeur de Physique générale à ladite Faculté. M. G. Bertrand, docteur ès sciences, chargé d’un cours de Chimie biologique à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé professeur de Chimie biologique à ladite Faculté. M. Maire, docteur ès sciences, préparateur de Bota- nique à la Faculté des Sciences de Nancy, est nommé maître de conférences de Botanique à ladite Faculté. M. Lattès, docteur ès sciences, professeur de Mathé- matiques au Lycée de Montpellier, est nommé. maître de conférences de Mathématiques à la Faculté des Sciences de Montpellier. M. Delbet, agrégé de la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur de Clinique chirurgicale à ladite Faculté. 1 Bull. de la Soc. d'étude des Se. naturelles de Nimes, 1907, | et Bull. de la Soc. nat. d'Acclimatation, déc. 1908. LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES. 153 LE ROLE DES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES Nous avons vü, dans un précédent article?, qu'à la suite des études les plus récentes sur les Alpes francaises et suisses, si l'on discute encore entre géologues alpins, ce n’est plus sur la réalité des grands mouvements langentiels, mais seule- ment sur les détails de leur application à l'inter- prétation des accidents locaux. J'ai indiqué, d'autre part, que cette notion des charriages a seule per- mis de comprendre en quoi consistent les diffé- rences qui avaient fait, jusque-là, des deux por- tions de la chaine alpine séparées par le Rhin, pour ainsi dire deux mondes géologiques diffé- rents : celui des Alpes Occidentales et celui des Alpes Orientales. Pour arriver à expliquer ces dif- férences, il nous faut d’abord résumer les notions actuellement acquises sur le rôle des nappes char- riées dans la constitution des Alpes Occidentales et chercher à y préciser, aussi exactement que pos- sible leur extension originelle. Nous partirons du voisinage de la Méditerranée, sans nous préoccuper, pour l'instant, de ce que _ deviennent les Alpes au sud des Alpes-Maritimes. De vraies nappes de charriage, comparables à celles des Alpes suisses, commencent à se rencon- trer avec certitude dans la région de l'Ubaye et de l'Embrunais, où leur existence a été mise en évi- dence par MM. Haug et Kilian. Leur cheminement s’est fait vers l'extérieur de la chaine alpine et, par suite, à cause de la courbure manifeste que montre celle-ci depuis la Savoie, c'est ici vers le sud-ouest que s'est faite cette translation, c'est-à-dire presque en sens inverse de la direction normale vers le nord, qui est celle que nous trouverons à partir des Alpes suisses, en allant vers l’est. D'autre part, il est fort intéressant, au point de vue de la recherche de l'extension originelle des nappes alpines, de considérer en détail la facon dont ces nappes de l'Ubaye et de l'Embrunais se comportent à l'égard des deux massifs voisins de terrains anciens, les massifs du Mercantour et du Pelvoux. Ceux-ci font partie d’une série de massifs semblables, qui s’alignent dans ce que Charles Lory avait appelé la première zone alpine et qu'on désigne souvent actuellement sous le nom de zone EEE LS PS SR EP ER En ©: ‘ Lecons professées au Collège de France en 1908. ? Revue générale des Sciences, numéro du 29 février 1908. OCCIDENTALES ET ORIENTALES des massifs hereyniens. Ce sont bien, en effet, des témoins de l’ancienne aire de plissement des temps carbonifères, car les dépôts houillers et permiens, puis les couches secondaires et nummulitiques sont entièrement discordants sur les terrains anciens cle ces massifs. J'ai rappelé, dans mon article précédent, que le grand géologue viennois Ed. Suess à mis en évi- dence, dès 1875, le rôle de butoir que certains frag- ments de l’ancienne chaîne démantelée ont Joué à l'égard des plissements alpins. Ces massifs de l'avant-pays (ou Vorland) alpin (parmi lesquels je citerai notre Massif Central, les Vosges et la Forêt- Noire, le Massif de Bohème) ont résisté à la propa- gation des mouvements tangentiels alpins; mais ils ont été plus ou moins disloqués dans cette lutte, à la facon de masses devenues trop rigides pour avoir pu se plisser à nouveau facilement et, par contre, insuffisamment résistantes pour pouvoir supporter sans dommage ces formidables pous- sées. Quant aux massifs hercyniens qui se trouvent dans la première zone alpine, ils se sont comportés tout différemment lors des plissements tertiaires. Au lieu d'avoir été des obstacles à peu près invin- cibles à la propagation de ceux-ci et de les avoir forcés à se mouler sur eux, comme l'ont fait les massifs du Vorland, ils ont été englobés dans les plis alpins. Les couches qui avaient recouvert les terrains primaires sur leur emplacement ont été fortement plissées, et les plis de ces couches secon- daires et nummulitiques se continuent souvent, jalonnés par des témoins isolés de celles-ci, par dessus l'emplacement où ne se montrent plus guère actuellement que les terrains primaires. On doit alors admettre que ceux-ci ont été eux-mêmes replissés et que c’est la surélévation locale et simultanée de plusieurs plis contigus qui à per- mis à l'érosion d'y mettre à découvert le substra- tum primaire ; partout ailleurs, celui-cireste enfoui sous sa couverture discordante de terrains permo- houillers, secondaires et nummulitiques. Contraire- ment à la notion qui faisait, de ces régions primai- res intra-alpines, des « massifs centraux », sortes d'amandes anciennes entièrement contournées par les plis des terrains plus récents de leur bordure, elles se montrent alors comme des parties suréle- vées d’une zone de plissement continue. Le soubas- sement primaire y apparaît d’abord dans Paxe des plis antielinaux, puis à la fois sur toute la largour 156 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES danslemassif,pourtanttrès voisin du Mont-Mounier. Dans la région au sud du Massif du Mercantour et de ce dôme de la Cime de Barrot, on a un régime de plis courts, de dômes et de cuvettes synclinales (ou de brachyanticlinaux et de brachysynclinaux, pour employer un langage plus moderne), s’alignant suivant des axes généraux pour donner naissance à des aires anticlinales et synclinales, qui consti- tuent des unités tectoniques plus importantes. Les anticlinaux de ce régime naissent et se terminent très brusquement, en se rompant presque aussitôt qu'ils ont commencé à se montrer et se trans- formant immédiatement en plis failles, de facon à n'avoir presque jamais de flanc inverse, sauf en leurs extrémités. Au contraire, les plis couchés du massif du Mounier se sont déroulés très largement, en conservant une très grande régularité d'épais- seur pour les couches qui les constituent, même pour celles du flanc inverse, qui se suit avec une remarquable continuité et presque sans étirement appréciable. Par ce caractère encore, ils ressem- blent d'une facon frappante aux plis décrits par Marcel Bertrand et Et. Ritter dans le massif du Mont-Joly, en Savoie, dont je parlerai plus loin. J'avais d'abord attribué cette remarquable diffé- rence d'allure tectonique à la seule différence de composition et de plasticité des couches intéres- sées : dans le nord-ouest des Alpes-Maritimes dominent les faciès marneux dauphinois pour les couches secondaires, ou plutôt un faciès intermé- diaire entre ceux-ci et les faciès plus calcaires du Brianconnais, tandis que, vers le Littoral, ce sont des calcaires très massifs et très épais, indiquant une ge- nèse subcorallienne, qui représentent le Jurassique supérieur, avec absence fréquente du Jurassique in- férieur et aussi d'une partie du Crétacé inférieur. Mais le régime des chevauchements par pli-faille commence déjà dans le faciès sub-dauphinois et je pense maintenant qu'en outre de la raison pure- ment physique que je viens d'indiquer et qui inter- vient certainement dans la disposition tectonique, pour ainsi dire hachée, du Littoral, il y a probable- ment lieu de faire intervenir l'extension originelle des nappes charriées venues de la zone alpine située en arrière du Massif du Mercantour et qui sont conservées seulement dans l'Ubaye et au voisinage immédiat de l'extrémité de ce massif. Je crois, en particulier, que la plasticité si grande dont ont fait preuve les couches secondaires du massif du Mounier peut être due, en grande partie, à la surcharge résultant de la superposition des nappes qui se retrouvent dans l'Ubaye ou d’une partie, au moins, de celles-ci. Lorsqu'on examine, dans le détail, l'importance du chevauchement ré- sultant de ces plis couchés, on voit qu'elle diminue très brusquement, aussi bien vers le S.-E. que vers le N.-0., où ces plis disparaissent au bord d'une grande cuvette synclinale. Il me semble que cette localisation ne peut guère s'expliquer que par l'avancée locale, au-dessus de la région du Mounier, de nappes charriées d'origine plus interne que le massif du Mercantour. Mais je tiens à dire, d'autre part, que la probabilité du passage de ces nappes ne me semble pouvoir s'appliquer qu'à l'extrémité occidentale du Massif du Mercantour; la partie centrale de celui-ci me parait avoir, presque certainement, opposé un obstacle infran- chissable aux nappes venues du Piémont, soit par sa plus grande importance, soit parce que la poussée vers l'extérieur de la chaine alpine, qui aurait été amenée là à se faire exactement vers le sud, en sens inverse de sa direction normale, aurait été alors trop faible pour pouvoir vaincre cet obs- tacle (fig. 3). Quant à la région plus orientale des Alpes-Mari- limes qui se trouve à l'est des vallées de la Vésubie et du Var et qui correspond principalement au bassin de la Roya, les lignes tectoniques y montrent bien une incurvation très marquée avec convexité au sud-ouest, qui parait en relation avec une avancée des nappes venues du Piémont iméri- dional, corrélative de la terminaison orientale du Massif du Mercantour et de la prolongation pro- bable de ces zones alpines vers la côle orientale de la Corse. Mais les plis, tout en présentant les importants chevauchements que j'y ai fait con- naître, y montrent un caractère de discontinuité qui en fait certainement des plis autochtones, c'est- à-dire formés sur place et qui, en même temps, ne me parait pas traduire, comme pour les plis du Mounier, la superposition de nappes aujourd'hui disparues. Ce n’est que pour la région de la Roya proprement dite, aux environs de Saorge et de Sospel, que peut-être la question de l'extension originelle de celles-ci pourra se poser; mais je ne crois pas, en tous cas, que l'avancée de ces nappes se soit faite largement, en ces régions, sur le terri- toire français, si même elle s'y est faite. Nous allons maintenant quitter le domaine de l'hypothèse, sur lequel je me suis laissé entrainer pour chercher à préciser, autant que possible, les régions Où nous commencons à trouver la trace de l'existence des nappes alpines, et nous allons revenir aux faits positifs, en remontant vers le nord le long de la chaîne, mais sans entrer dans les détails de structure des régions où l'existence de ces nappes à été bien constatée, puisque le but de cet exposé est simplement de montrer où se sont produits ces phénomènes importants de transla- tion tangentielle, mais non comment ils se sont faits. \ ‘ LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 157 LEGENDE ZONES ALPINES PLUS INTERNES QUE LES MASSIFS HERCYNIENS Ces zones sont elles-mêmes for mées par l'empilement des nap- pes superposées.) NAPPES ISSUES DE CES ZONES ET AYANT PASSÉ AU-DESSUS DES MASSIFS HERCY- NIENS 1° Nappes des Préalpes (séparées de leurs racines, dont l'emplacement est d'ailleurs encore discuté pour les nappes supé- rieures). Bà neË AUOT O2 0 Nappe supérieure ou de la Brèche, Gal Nappe des Préalpes médianes. Nappes des Préalpes externes (Pe) 00) #4 = il == ——— et des Préalpes internes (Pi). 5 \ a ur de - _—. Ë : 5 20 Nappes de l'Embrunais et de l'Ubaye : \ fi 7 1 JE = — L 7 : É En Nappe supérieure. K | À \ 1 à Le C Fa 2) Nappe inférieure (ou du Flysch), E } PE a 3 1 encore en continuité avec sa E racine. € É DRE Æ £ = Régime de nappes enracinées et de plis couchés à grand chemine- ment, et souvent plongeants, dans la couverture et la bordure ex- terne des massifs hercypiens, semblant en relation avec le pas- sage des nappes précédentes, ac- tuellement enlevées par l'érosion (la direction des traits indiquant approximativement celle des mou- vements). —.—.— Limite hypothétique de l'avancée des nappes d'origine plus interne que les massifs hercyniens. Terrains secondaires et nummuli- tiques de la couverture des mas- sifs hercyniens et des régions alpines plus externes. Permien et Houiller de la zone des massifs hercyniens. +++] Terrains cristallins et métamor- + + + phiques de ces massifs. Terrains postérieurs au Flysch aummultique. F£ogsemans ae 153 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES IT Nous nous bornerons donc à enregistrer que, vers son extrémité occidentale, la couverture secondaire du massif hercynien du Mercantour montre des plis couchés autochtones, traduisant l'existence d'un important cheminement vers l'extérieur de la chaîne alpine, c’est-à-dire là vers le sud-ouest, et qui sont probablement en relation avec une extension originelle des nappes charriées de l'Ubaye, ayant eu lieu un peu plus au sud que la limite des témoins actuellement conservés pour ces nappes. Nous allons ensuite traverser l'Ubaye el l'Embrunais, sans nous arrêter à la considéra- tion détaillée de ces nappes, qui serait fort intéres- sante, mais nous entrainerait trop en dehors du cadre de notre sujet; je ne pourrais d’ailleurs que résumer la magistrale étude que M. Haug leur à consacrée ici même’. Ces nappes sont venues de la zone dite du Briançconnais, et surtout d’une subdi- vision occidentale de celle-ci, que l’on en sépare souvent sous le nom de zone du Flysch, à cause du grand développement qu'y prennent les formations de ce nom. au sommet de la série nummulitique ; c'est ce flysch qui forme la majeure partie des ter- rains rencontrés dans notre nappe inférieure de l'Embrunais. Ces nappes ont peut-être été recou- vertes par d’autres plus internes, analogues à celles dont les environs de Briancon montrent l'existence et qui appartiennent, les unes à la partie orientale de cette zone du Brianconnais ou zone houillère (dont on à fait pendant un certain temps l’axe géologique de la chaîne alpine), les autres à une zone plus interne de nos Alpes, qui à été dénommée zone du Piémont par M. Haug et qui est caractérisée par le faciès de schistes lustrés qu'y montrent les couches du Trias supérieur et du Lias et qui les a fait confondre, pendantlongtemps, avec des micaschistes et des schistes métamor- phiques de la base de la série primaire. Nous savons maintenant que toutes ces régions plus internes de nos Alpes sont très probablement constituées par des nappes, formant la prolongation de celles, actuellement bien mieux connues, des Alpes helvético-italiennes. Ce qu’il nous importe, pour le moment, de déterminer avec le plus de précision compatible avec la brièveté de cet exposé, ce n'est pas le détail, encore assez discuté, de ces nappes, qui font l’objet des études de MM. Kilian et Termier, mais leur ancienne extension vers l'extérieur de la chaîne. Pour le Massif du Pelvoux et celui des Grandes- Rousses, les coupes données par M. Termier nous montrent encore une disposition analogue à celle ‘ Rev, gén, des Sc., numéro du 30 décembre 1903, que nous avons rencontrée pour les terrains secondaires de la bordure externe de l'extrémité occidentale du massif du Mercantour. Mais si nous nous en tenons, pour ces coupes intéressantes, à la partre non interprétée, les traces du déversement des plis vers l'extérieur de la chaîne nous apparais- sent bien moins marquées que dans la vallée supé- rieure de la Tinée, et c'est une raison pour laquelle je penserais volontiers qu'une partie du Massif du Pelvoux, tout au moins, a dû être indemne du pas- sage des nappes au-dessus d'elle et qu'elle porte- rait peut-être simplement la trace des poussées résultant de l'arrêt de ces nappes sur le bord interne du massif en question. Je ferai remarquer, en outre, que la torsion graduelle de la chaine alpine nous amène maintenant à des mouvements dirigés vers l'ouest et qui, plus au nord, vont gra- duellement tourner au nord-ouest. Le bord occidental de la Chaîne de Belledonne, autre massif hercynien correspondant à un fais- ceau de plis un peu plus externes de la première zone alpine, ne nous montre qu'un déversement de ces plis peu accentué vers l’ouest et l’on arrive très vite, vers l'extérieur, à une zone où ce déver- sement devient hesitant, c'est-à-dire se fait tantôt vers l'ouest, tantôt en sens inverse; cette constata- tion semble bien démontrer que, dans la région dauphinoise, les nappes issues de l'intérieur des Alpes ne sont pas arrivées jusqu’au bord externe de la chaîne. Mais, à la terminaison septentrionale de ce Mas- sif de Belledonne, dans la région de Beaufort, il se fait un nouvel ennoyage momentané des terrains primaires sous leur couverture secondaire, entre ce massif et ceux des Aiguilles-Rouges et du Mont- Blanc, situés au nord de ce nouvel ensellement transversal. Or, nous sommes arrivés là à la région classique des empilements de plis du Mont-Joly, décrits par Marcel Bertrand et Et. Ritter; ces plis, couchés jusqu'à l'horizontale et la dépassant même pour devenir légèrement plongeants, sont issus de . racines presque droites dans le bord occidental du massif primaire du Mont-Blanc (fig.#)etilsindiquent manifestement l'existence de mouvements tangen- tiels très intenses, assez superficiels et dirigés vers l'extérieur de la chaîne, c'est-à-dire ici vers le nord- ouest. D'ailleurs, toutesles Hautes Chaînes calcaires de la Savoie montrent, à partir de là, un très beau développement de ces accidents, qui prennent une ampleur telle qu’on peut presque les y qualifier de nappes. Mais ce ne sont toujours, en réalité, comme dans le massif du Mounier, que des plis couchés enracinés dans la zone des terrains secondaires à faciès dauphinois où nous les trouvons. Je ne puis indiquer ici en quoi consistent les caractères dis- tinctifs des terrains de ce faciès, pas plus que je ne LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 159 pourrai le faire plus loin pour ceux auxquels nous serons amenés à attribuer une provenance différente ; je me bornerai à me servir de cette constatation, faite par les géologues qui ont étudié le plus ces Alpes de Savoie (en particulier Marcel Bertrand, Haug, Kilian, Lugeon, Ritter), pour dire avec eux N.0. Crête du Calvaïre Mont Joly J | Jurassique moyen ETS BE Cargneules et grpses trissiques Fig. 4. nous le savons déjà, les masses charriées exotiques des Préalpes du Chablais, formées par l'empilement de plusieurs nappes superposées, dont la plus élevée est celle de la Brèche du Chablais (Gg. 5). Les ter- rains qui se rencontrent au sommet des Annes et de Sulens sont d'ailleurs tout à fait semblables à ceux SEE Aiguille de Roselette Col Joly Términeison AN du Massif du MÉ Blanc Lies schisteux EEE Quartzites et grès triasiques I Hourller — Plis couchés du Mont-Joly, dans la bordure externe de la terminaison méridionale du Massif du Mont-Blanc FBogpemas do, le Lias calcaire Fri] /nfrelias Schistes cristallins (d'après MarcEL BERTRAND et ETIENNE RITTER). que nous avons là des nappes ou des plis couchés autochtones, c'est-à-dire réunis à leurs racines et n'ayant subi qu'un déplacement horizontal très limité. Mais les Alpes de Savoie commencent à nous montrer, en outre, d'autres faits bien plus intéres- sants. A l'ouest des plis couchés du Mont-Joly, c'est- à-dire du côté de l'extérieur de la chaîne et déjà à une certaine distance des massifs hercyniens, au milieu d’un large synclinal de Flysch nummulitique appartenant à la série autochtone plissée dont je viens de parler, nous trouvons, à la Montagne de N-0- Sulens, une première apparition de terrains secon- daires exotiques, c’est-à-dire d’un faciès notable- ment différent de celui des couches de même âge qui se trouvent au voisinage. Cette apparition se répète au nord-est de là, aux Annes, toujours dans le même synelinal de la série autochtone, et cela nous amène au voisinage immédiat de la vallée de l’Arve, au delà de laquelle se montrent, comme qui, au-dessous de cette masse de la Brèche, cons- tituent la grande nappe des Préalpes médianes. Après des discussions très vives, où tour à tour furent soutenues, puis abandonnées, l'idée d’une origine enracinée sur place ou en « champignon », avec étranglement presque absolu de la racine, puis celle d’une origine charriée venue de l'extérieur des Alpes et provenant d'une chaine hypothétique qui aurait entièrement disparu sous l'emplacement de lamollasse de la plaine suisse (chaîne vindélicienne), on est maintenant arrivé à la conclusion unanime que ces terrains de Sulens et des Annes, ainsi que SE: grèche A -Tèe Mes Qatstnes ° PRES LA Ce on. Terrains anciens Fig. 5. — Schema de la structure des Préalpes du Chablais (d'après M. LuGEoN). ceux des Préalpes médianes et aussi ceux des Klippes suisses, pour lesquelles on avait, d'ailleurs, fait des hypothèses semblables, ne peuvent prove- nir que d'une région alpine située en arrière des massifs hercyniens. Cette conclusion s'étend aussi à la nappe de la Brèche, qui est superposée à celle des Préalpes médianes. Je ne puis entrer ici dans les détails de la consti- 160 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES tution de ces nappes, ni de celles qui, par-dessous les Préalpes médianes, réunissent les Préalpes internes aux Préalpes externes; je veux seulement retenir le fait indiscutable que, au moins à partir de la coupure de l'Isère entre Moutiers et Albertville, la zone des massifs hercyniens a élé entièrement recouverle par des nappes venues d'une zone plus interne des Alpes et dont les plus élevées, tout au moins, sont certainement d’origine assez lointaine vers le sud-est!. Plus au sud, nous avons vu qu'au- cune donnée précise ne nous permet de dire avec certitude où s’est arrêté ce passage par-dessus l’em- placement des massifs primaires actuels, ni s’il y a eu continuité, autrement que dans la région des racines et le long du bord interne de ces massifs, avec les nappes de l'Embrunais et de l'Ubaye, qui ne montrent, d'ailleurs, pas de représentants des nappes les plus élevées des Préalpes. Quoi qu'il en soit de cette question et quel que soit le point où ait commencé ce phénomène, nous trouvons donc, à partir de la dépression du Lac d'Annecy, puis surtout après la traversée de l'Arve, un beau développement des nappes à racines plus internes que les massifs primaires de la première zone alpine ; à l'extérieur de ceux-ci, elles sont allées recouvrir les plis couchés autochtones formés dans les couches de la bordure externe de ces massifs. Cet état de choses se continue entre le Rhône et l’Aar, dans la seconde partie des Préalpes romandes, plus étendues que celles du Chablais. Les deux nappes de la Brèche (de la Hornfluh) et des Préalpes médianes, à racines sûrement plus internes que les massifs hercyniens (sans que l'accord soit fait entiè- rement entre les divers auteurs sur leur emplace- ment exact) y sont nettement superposées à une série de nappes empilées, où les terrains secondaires se présentent avec des faciès helvétiques, c'est-à- dire avec ceux qui s'observent depuis le Jura jus- qu'à la couverture discordante des massifs hercy- niens de la première zone alpine (fig. 5 de l’article précédent, t. XIX, page 155). À mesure qu'on exa- mine celles de ces nappes qui sont les plus élevées dans la série, c'est-à-dire celles dont les racines doivent, à priori, être les plus internes ou les plus méridionales, il est naturel que le faciès des cou- ches s’y éloigne davantage du faciès helvétique ty- pique. On concoit donc facilement que, pour les plus élevées de ces nappes, qui constituent les Pré- alpes externes el internes, on puisse encore discu- ter sur l'emplacement exact de leur lieu d'origine. ‘ Pour M. Haug, toutes les nappes des Préalpes doivent provenir des régions situées entre le bord interne du massif du Mont-Blanc et le bord externe de la zone du Piémont, tandis que M. Lugeon pense que les Préalpes médianes seraient déjà d'origine bien plus lointaine et proviendraient du bord interne de cette zone des schistes lustrés. Mais ce sont là des questions de détail, sur les- quelles je ne pourrais m'appesantir qu'en indiquant les arguments sur lesquels on s'est fondé pour cher- cher plus ou moins loin les racines de ces diverses nappes, ce qui m'entrainerait bien trop loin. Pour le moment, j'en veux seulement retenir le fait que, toutes ces nappes renferment du flyseh à leur partie supérieure et que, parfois, les terrains secondaires sont discontinus dans ce flysch. Le phénomène de plis couchés très accentués, auquel parait devoir être rapportée la production des nappes en question, se serait fait, d’après M. Lugeon, à l'intérieur de cette épaisse masse de sédiments, relativement très plas- tiques. Ceux-ci, par la pression considérable qu'ils exercaient sur les couches inférieures, ont pu et dü faciliter la translation (on pourrait même dire parfois l'écoulement) de ces dernières ; ilmesemble toutefois qu'il serait imprudent de vouloir irop généraliser cette conception de la formation des nappes char- riées dans la profondeur de l'écorce terrestre. D'autre part, il est une notion de méthode qu'on peut déduire de ce qui précède et qui ressortira de la suite de cet exposé; cette notion est la suivante : Lorsqu'il n'y a pas continuité tectonique absolue (ou presque absolue) d’une nappe jusqu'à un pli évident etquiluisertcertainement deracine,on ne peut guère chercher utilement la région d'origine de cette nappe qu'en se servant de la comparaison des faciès strali- graphiques des terrains qui la constituent avec les fa- ciès connus pour les terrains de même âge dansles di- versesrégions d'où pourrait {ecloniquementprovenir cette nappe. On ne peut infirmer cette méthode parce que, à une époque où l'existence même des phénomè- nes en question était encore très discutée, la considé- ration des faciès a pu servir à combattre l'origine attribuée aux Préalpes. Du jour où l'on s'en sert avec la conviction, basée sur les faits tectoniques, que les charriages existent et qu'ils proviennent d'une direction déterminée, ces considérations de pure stratigraphie deviennent d'une importance tout à fait capitale et d'un très grand secours au tectoni- cien. Mais cette méthode, très délicate, doit être maniée avec prudence et en parfaite connaissance de cause. M. Haug a, d'ailleurs, très bien fait ressortir que la distribution des faciès géologiques dans les dépôts d'un géosynclinal doit se faire suivant des bandes sensiblement parallèles à la direction géné- rale de celui-ci et qu'il doit, d'autre part, en être de mème pour les accidents orogéniques qui se pro- duisent ultérieurement dans le même géosynclinal, lorsqu'une chaîne de montagnes se forme sur son emplacement. De la sorte, sauf le cas de circon- stances très spéciales, il doit y avoir une concor- dance approximative de direction entre la distribu- tion géologique des faciès et la répartition des LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 161 ————_——— accidents tectoniques. Les accidents du versant nord des Pyrénées, plus simples que ceux des Alpes et, par là, plus faciles à interpréter à cet égard, en donnent, en particulier, un exemple très démon- stratif. ITI Après celle digression, nous revenons à l'exposé sommaire de la structure du bord septentrional des Alpes suisses, en nous reportant à la carte schéma- tique ci-jointe (fig. 6). Après la vallée de l’Aar et jus- qu'à celle du Rhin, c'est-à-dire jusqu'à l'extrémité Klippes proprement dite (qui est l'équivalent de celle des Préalpes médianes) et de celle de la Brèche, certaines couches à Radiolaires du Jurassique et des roches très basiques (gabbros, serpentines, ophites), qui ont d'ailleurs été retrouvées, dans les Préalpes fribourgeoises, au-dessus et autour des affleurements de la Brèche de la Hornfluh et que M. Steinmann considère comme les restes d’une nappe encore plus élevée que celle de la Brèche et à laquelle il à donné le nom de nappe rhétique. Les nappes helvétiques des Hautes-Alpes calcaires suisses peuvent être réparties en trois groupes su- Echelle: Æ HI, ont 1 7 VL WW ÈS S —, RAA 1e IN 2 a] LS sl lépontins ” austro-a/pins sud-alpins (1 Dinarides) = = e D w b a e 8 IT er url de charriage importante) Les charriages à 4/8 limite de deux zones\ l'intérieur d'une D /ambezux charries même zone n'ont Ke fenêtres pas éte figures. | ——.- Faille alpino-dinarique (ou ligne éonalitique) Alpes FéhoggEstsns del, Fig. 6. — Carte schématique indiquant la répartilion des divers faciès des terrains secondaires dans les Alpes Occi- dentales et Orientales (d'après les travaux de MM. Hauc, LuGEoN, STEINMANN, TERMIER, etc.). Nora. — Les limites de la zone lépontine et des zones avoisinantes dans les Alpes Occidentales ne sont indiquées qu'approximalivement et la distinction des diverses faciès à l'extrémité orientale de la région axiale des Alpes Orientales n’est pas faite. des Alpes dites Occidentales, leur front n’est guère constitué que par les nappes à faciès helvétiques des Hautes-Alpes calcaires (nappes glaronnaises, Sentis), à l'exception d'un petit nombre de lam- beaux, de taille très réduite, des divers terrains des Préalpes (fig. 6 de l'article précédent, t. XIX, p.155). Ceux-ci sont les klippes, sur lesquelles on a dis- cuté encore plus que sur les Préalpes et à une époque plus ancienne, car leur petite taille et leur isolement au milieu du Flysch, sous forme de masses indépendantes les unes des autres, ne pou- vaient manquer de frapper les géologues. On y ren- contre même, indépendamment de la nappe des perposés, dont le détail nous entrainerait trop loin et dont l'allure générale ressort des coupes dela fig. 6 de mon précédent article et de la fig. 7 de celui-ci.Jeme bornerai à indiquer que le massif du Sentis estformé par les nappes du groupe supérieur et que les Alpes glaronnaises montrentles plus basses; en particulier, le chevauchement glaronnais, qui a été le point de départ de l'interprétation actuelle, correspond à la base du groupe inférieur. Au-dessous de ces nappes helvétiques, fortement plongeantes et entièrement séparées de leur racine, se montrent les plis autock- tones, qui intéressent les couches secondaires et nummulitiques de la bordure septentrionale du 160 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES tution de ces nappes, ni de celles qui, par-dessous les Préalpes médianes, réunissent les Préalpes internes aux Préalpes externes; je veux seulement retenir le fait indiscutable que, au moins à partir de la coupure de l'Isère entre Moutiers et Albertville, la zone des massifs hercyniens a élé entièrement recouverte par des nappes venues d'une zone plus interne des Alpes et dont les plus élevées, tout au moins, sont certainement d’origine assez lointaine vers le sud-est'. Plus au sud, nous avons vu qu’au- cune donnée précise ne nous permet de dire avec certitude où s’est arrêté ce passage par-dessus l’em- placement des massifs primaires actuels, ni s’il y a eu continuité, autrement que dans la région des racines et le long du bord interne de ces massifs, avec les nappes de l'Embrunais et de l'Ubaye, qui ne montrent, d'ailleurs, pas de représentants des nappes les plus élevées des Préalpes. Quoi qu'il en soit de cette question et quel que soit le point où ait commencé ce phénomène, nous trouvons done, à partir de la dépression du Lac d'Annecy, puis surtout après la traversée de l’Arve, un beau développement des nappes à racines plus internes que les massifs primaires de la première zone alpine ; à l'extérieur de ceux-ci, elles sont allées recouvrir les plis couchés autochtones formés dans les couches de la bordure externe de ces massifs. Cet état de choses se continue entre le Rhône et l’Aar, dans la seconde partie des Préalpes romandes, plus étendues que celles du Chablais. Les deux nappes de la Brèche {de la Hornfluh) et des Préalpes médianes, à racines sûrement plus internes que les massifs hercyniens (sans que l'accord soit fait entie- rement entre les divers auteurs sur leur emplace- ment exact) y sont nettement superposées à une série de nappes empilées, où les terrains secondaires se présentent avec des faciès helvétiques, c'est-à- dire avec ceux qui s’observent depuis le Jura jus- qu'à la couverture discordante des massifs hercy- niens de la première zone alpine (fig. 5 de l’article précédent, t. XIX, page 155). À mesure qu'on exa- mine celles de ces nappes qui sont les plus élevées dans la série, c'est-à-dire celles dont les racines doivent, à priort, ètre les plus internes ou les plus méridionales, il est naturel que le faciès des cou- ches s’y éloigne davantage du faciès helvétique ty- pique. On concoit donc facilement que, pour les plus élevées de ces nappes, qui constituent les Pré- alpes externes et internes, on puisse encore discu- ter sur l'emplacement exact de leur lieu d'origine. ‘ Pour M. Haug, toutes les nappes des Préalpes doivent provenir des régions situées entre le bord interne du massif du Mont-Blanc et le bord externe de la zone du Piémont, tandis que M. Lugeon pense que les Préalpes médianes seraient déjà d'origine bien plus lointaine et proviendraient du bord interne de cette zone des schistes lustrés. Mais ce sont là des questions de détail, sur les- quelles je ne pourrais m'appesantir qu'en indiquant les arguments sur lesquels on s'est fondé pour cher- cher plus ou moins loin les racines de ces diverses nappes, ce qui m'entrainerait bien trop loin. Pour le moment, j'en veux seulement retenir le fait que, toutes ces nappes renferment du flyseh à leur partie supérieure et que, parfois, les terrains secondaires sont discontinus dans ce flysch. Le phénomène de plis couchés très accentués, auquel paraît devoir être ‘apportée la production des nappes en question, se serait fait, d’après M. Lugeon, à l'intérieur de cette épaisse masse de sédiments, relativement très plas- tiques. Ceux-ci, par la pression considérable qu'ils exercaient sur les couches inférieures, ont pu et dû faciliter la translation (on pourrait même dire parfois l'écoulement) de ces dernières ;ilmesemble toutefois qu'il serait imprudent de vouloir trop généraliser celte conception de la formation des nappes char- riées dans la profondeur de l'écorce terrestre. D'autre part, il est une notion de méthode qu'on peut déduire de ce qui précède et qui ressortira de la suite de cet exposé; cette notion est la suivante : Lorsqu'il n°y a pas continuité tectonique absolue (ou presque absolue) d'une nappe jusqu'à un pli évident etquiluisertcertainement deracine,on ne peut guère chercher utilement la région d'origine de cette nappe qu'en se servant de la comparaison des faciès strati- graphiques des terrains qui la constituent avec les fa- cièsconnus pour les terrains de même âge dansles di- versesrégions d'où pourrait {ectoniquementprovenir cette nappe. On ne peut infirmer cette méthode parce que, à uneépoque où l'existence même des phénomè- nes en question était encore très discutée, la considé- ration des faciès a pu servir à combattre l'origine attribuée aux Préalpes. Du jour où l’on s'en sert avec la conviction, basée sur les faits tectoniques, que les charriages existent et qu'ils proviennent d'une direction déterminée, ces considérations de pure straligraphie deviennent d'une importance tout à fait capitale et d’un très grand secours au tectoni- cien. Mais cette méthode, très délicate, doit être maniée avec prudence et en parfaite connaissance de cause. M. Haug a, d'ailleurs, très bien fait ressortir que la distribution des faciès géologiques dans les dépôts d'un géosynclinal doit se faire suivant des bandes sensiblement parallèles à la direction géné- rale de celui-ci et qu'il doit, d'autre part, en être de même pour les accidents orogéniques qui se pro- duisent ultérieurement dans le même géosynclinal, lorsqu'une chaîne de montagnes se forme sur son emplacement. De la sorte, sauf le cas de circon- stances très spéciales, il doit y avoir une concor- dance approximative de direction entre la distribu- tion géologique des faciès et la répartition des LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 161 accidents tectoniques. Les accidents du versant nord des Pyrénées, plus simples que ceux des Alpes et, par là, plus faciles à interpréter à cet égard, en donnent, en particulier, un exemple très démon- stratif. ITI Après celle digression, nous revenons à l'exposé sommaire de la structure du bord septentrional des Alpes suisses, en nous reportant à la carte schéma- tique ci-jointe (fig. 6). Après la vallée de l'Aar et jus- qu'à celle du Rhin, c'est-à-dire jusqu'à l'extrémi!é Klippes proprement dite (qui est l'équivalent de celle des Préalpes médianes) et de celle de la Brèche, certaines couches à Radiolaires du Jurassique et des roches très basiques (gabbros, serpentines, ophites), qui ont d'ailleurs été retrouvées, dans les Préalpes fribourgeoises, au-dessus et autour des affleurements de la Brèche de la Hornfluh et que M. Steinmann considère comme les restes d’une nappe encore plus élevée que celle de la Brèche et à laquelle il à donné le nom de nappe rhétique. Les nappes helvéliques des Hautes-Alpes calcaires | Suisses peuvent être réparties en trois groupes su- f J8/II fi: ; fl. | 102 ; pe A bAAK, - Crise | rer] || (1 TEE £ ALL z es AL te 3 ” " = (TT Zone des faces helvetiques lépontins ” austro-alpins sud-a/pins (| Dinarides) ere dur de charriage importante) Les charriages à éla limite de deux zones\ l'intérieur d'une D /3mbeaux charries même zone n'ont Fenêtres pas éte figures. | -- Faille alpino-dinarique (ou ligne tonalitique) Alpes FBoggEemns de. Fig. 6. — Carte schématique indiquant la répartilion des divers faciès des terrains secondaires dans les Alpes Occi- dentales et Orientales (d'après les travaux de MM. HauG, LuGron, SrEINMANN, TERMIER, elc.). . Nora. — Les limites de la zone lépontine et des zones avoisinantes dans les Alpes Occidentales ne sont indiquées qu'approximativement et la distinction des diverses faciès à l'extrémité orientale de la région axiale des Alpes Orientales n'est pas faite. des Alpes dites Occidentales, leur front n’est guère constitué que par les nappes à faciès helvétiques des Hautes-Alpes calcaires (nappes glaronnaises, Sentis), à l'exception d'un petit nombre de lam- beaux, de taille très réduite, des divers terrains des Préalpes (fig. 6 de l'article précédent, t. XIX, p.155). Ceux-ci sont les klippes, sur lesquelles on à dis- cuté encore plus que sur les Préalpes et à une époque plus ancienne, car leur petite taille et leur isolement au milieu du Flysch, sous forme de masses indépendantes les unes des autres, ne pou- vient manquer de frapper les géologues. On y ren- contre même, indépendamment de la nappe des perposés, dont le détail nous entrainerail trop loin el dont l'allure générale ressort des coupes dela fig. 6 de mon précédent article et de la fig.7 de celui-ci.Jeme bornerai à indiquer que le massif du Sentis estformé par les nappes du groupe supérieur et que les Alpes glaronnaisesmontrentles plus basses; en particulier, le chevauchement glaronnais, qui a été le point de départ de l'interprétation actuelle, correspond à la base du groupe inférieur. Au-dessous de ces nappes helvétiques, fortement plongeantes et entièrement séparées de leur racine, se montrent les plis autoch- tones, qui intéressent les couches secondaires et oummulitiques de la bordure septentrionale du 162 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES “(S06E ‘RIAYI LUAATY ‘JOIJ 91 Seude.p) osseryn-srques oubir e[ queains ‘souidje soddeu sap onbryewoyos adno OL 02 0€ Ot ‘114 0S ! À S Ÿ [21 QG Lu] à Ÿ ] Ÿ. Q@ [2] S à. [2] Lu] al 5 à à] È 3 È T à a 6 S SI a o AS % a 3 3 à : Su S È > 3 11895112 ‘JJ8] S9AJ8SU09 SUS8IOUE SU! UoIS0Ja Jed S2h18[U2 SUIJ[E7S110 JJ8] QUE PUDA le ede RSS EEqUI S =<4 sizu2ç NP'W osseiy7 [ r 1 ï IPeL-2Eb,1 2P'N Massif hercynien de T Aar, dans lequel reparaissent au jour les terrains anciens qui avaient disparu depuis la terminaison des massifs des Aiguilles-Rouges et du Mont-Blane, à la traversée de la vallée du Rhône, au voisinage du coude que fait cette vallée aux environs de Martigny. C'est d’ailleurs sur le bord méri- dional de ce Massif de l’Aar que doivent s’enraciner les nappes helvétiques en question, entre ce massif et celui du Saint- Gothard. Ta limite de ces deux massifs est marquée par une traînée de terrains permo-carbonifères et triasiques, très étroite, mais remarquablement continue, qui s'étend de Coire jusqu'à Brigue et à laquelle correspond le sillon si rectiligne qui est occupé par les vallées opposées du Rhône supérieur et du Rhin antérieur. Cette région de racines des nappes helvétiques se poursuit vers l’ouest jusqu'à Sion et même au voisinage de Martigny. Au sud du massif primaire très étroit du Saint-Gothard, com- mence un régime de nappes crislallines, qui forment la grande masse des Alpes Lépontines et Pennines, et que, pour cette raison, M. Steinmann a désignées sous le nom de zappes lépon- tines. Ce sont des nappes de gneiss alternant avec des interca- lalions concordantes de schistes lustrés, qui représentent un faciès géosyneclinal et métamorphique du Trias supérieur el du Lias, reposant souvent directement sur les gneiss, avec les- quels ils ont été autrefois réunis en un complexe métamorphique unique. La coupe 6 de mon précédent article montre la dispo- sition de ces nappes au sud du Pas de la Greina ; leur superpo- silion est devenue indiscutable dans la région du Simplon, grâce aux nombreux travaux des divers géologues suisses qui ont été provoqués par le percement du tunnel. Elles ont été établies, dans la région du Mont-Rose, par les travaux de M. Lugeon et de son élève M. Argand, ainsi que par ceux de M. Carl Schmidt et de ses élèves ; un Mémoire récent de M. Heim sur la partie nord-est du Tessin y montre une distinction ana- logue, et la correspondance de ces nappes lépontines parail maintenant bien certaine, sauf pour des points de détail, dans toute l'étendue des Alpes comprise entre la Suisse et l'Italie ; plusieurs d’entre elles, tout au moins, semblent pouvoir être suivies aussi dans la «zone du Piémont», entre la France et l'Italie. Tout l’ensemble de cette région, qui, par son faciès des couches secondaires inférieures, correspond à la partie axiale du géosynelinal alpin, porte donc la trace de mouvements lan- gentiels dirigés vers l'extérieur de la chaine alpine; en particu- lier, l’importante masse gneissique de la Dent-Blanche apparail bien indiscutablement superposée, sur tout son pourtour, aux schistes lustrés mésozoïques et comme devant se rattacher à une bande gneissique enracinée plus méridionale que celle du Mont-Rose. La seule divergence actuelle consiste dans le fait que MM. Lugeon et Argand en cherchent l’origine dans les gneiss de la Sésia, qui se montrent en place un peu plus au sud que le Mont-Rose et qui n'ont que la valeur d'un repli analogue aux replis plus inférieurs qui se montrent empilés dans le massif du Mont-Rose; au contraire, M. Carl Schmidt en fait une nappe tout à fait indépendante des plus inférieures et d’une impor- tance beaucoup plus grande, sa racine devant être cherchée bien plus àäu sud, Dans la coupe 7 de mon article précédent, celle LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 163 nappe se différencie neltement; c'est la grande nappe à noyau gneissique qui s'étend assez loin au nord et qui se superpose à plusieurs nappes bien moins importantes, qui sont celles du massif du Simplon. Au sud de ces alternances de gneiss paléozoïques et de schistes lustrés mésozoïques, on trouve une zone avec nombreuses amphibolites et roches intru- sives basiques (gabbros, serpentines), très ana- logues à ces roches basiques que nous avons vues exister dans la zone des klippes, au-dessus de la nappe de la Brèche; nous sommes donc amenés, par cette considération, à placer au voisinage de cette zone (dite des amphibolites d'Ivrée) l’origine probable des nappes les plus élevées qui aient pu arriver jusque sur le bord frontal des Alpes suisses. D'ailleurs, cette zone se rattache encore manifes- tement à la région des schistes lustrés ou lépontine, dont elle forme le bord méridional; par suite, les nappes préalpines superposées à celles à faciès hel- vétiques appartiendraient au faciès lépontin, et les plus élevées, tout au moins, pourraient provenir de la partie méridionale de la zone des schistes lustrés. Cette hypothèse, basée sur la seule considération des faciès, n’est d’ailleurs pas contredite par les faits observés sur le terrain : elle devient une chose pres- que certaine lorsqu'on passe le Rhin et qu’on arrive à la limite des Alpes Orientales. IV Jusqu'en ces dernières années, les relations réci- proques des deux moitiés de la chaine alpine étaient restées à peu près indéchiffrables, et il semblait qu'en allant de l’une à l’autre on passät d'une chaîne à une tout autre chaine. Non seule- ment le style tectonique était différent, mais la nature même des couches qui se trouvent dans le prolongement les unes des autres se montrait tout autre. Au premier examen, les Alpes Orientales se pré- sentent comme formées par un axe cristallin de gneiss avec nombreux granites, bordé, de part et d'autre et symétriquement, par de puissantes masses calcaires, qui forment les A/pes calcaires septentrionales et méridionales. Mais, lorsqu'on cherchait à poursuivre ces divisions du côté de l’ouest, on s'apercevait vite que les terrains eris- tallins de l’axe ne prolongeaient que ceux qui, dans les Alpes Occidentales, se montrent dans leur partie tout à fait méridionale, au sud de la zone des amphibolites d'Ivrée, formant une bande très étroite entre celle-ci et le bord septentrional des Alpes calcaires méridionales, qui se montrent encore bien développées dans la région du Lac de Lugano et sur lesquelles je reviendrai plus loin. D'autre part, si, à un examen très grossièrement superficiel, la bande calcaire septentrionale des Alpes Orientales pouvait sembler prolonger celle des Hautes-Alpes calcaires suisses, il était facile de se convaincre qu'en réalité il n’en était absolument rien. Dans celles-ci, en effet, le grand développe- ment des calcaires est attribuable au Malm, c'est- à-dire au Jurassique supérieur, et aussi à l'Urgo- nien, équivalent de certaines couches de la partie moyenne du Crétacé inférieur, tandis que le Trias y présente le faciès germanique ou extra-alpin des gypses et cargneules, qui se poursuit dans toutes les régions françaises et qui se montre done encore caractéristique pour les nappes à faciès helvétique, en devenant toutefois rudimentaire dans la couver- ture des massifs hereyniens.Parcontre,c'estau Zrius alpin, bien caractérisé dans les Alpes calcaires méri- dionales et dans les Alpes Dinariques qui en sont le prolongement direct, qu'appartiennent aussi les grandes masses calcaires et dolomitiques du bord septentrional des Alpes orientales; ces couches em- piètent, d'ailleurs, sur les niveaux les plus inférieurs du Jurassique, et, d'autre part, le Crétacé supérieur montre aussi, dans les Alpes calcaires orientales, des faciès notablement différents de ceux qui se rencon- trent dans le faciès helvétique. Non seulement il était impossible de raccorder les Alpes Occidentales avec les Alpes Orientales, mais la structure mème de celles-ci, lorsqu'on les considérait en elles-mêmes et comme une indivi- dualité tectonique indépendante, montrait des anomalies restées absolument incompréhensibles, malgré les nombreuses et vives discussions aux- quelles elles avaient donné lieu entre les géologues autrichiens. Dès sa Note de 1884, Marcel Bertrand avait con- sidéré le Rhätikon, situé sur la rive droite du Rhin, comme appartenant aux régions en recouvrement du bord septentrional des Alpes, et il insistait même sur la circonstance intéressante que « Les terrains dans la masse de recouvrement présentent le faciès alpin et dans les autres affleurements le faciès helvétique ». Plus tard, dans son Mémoire sur le Chablais, M. Lugeon faisait remarquer l'analogie des roches éruptives du Flysch de l’Algäu et de celles qui se rencontrent dans le Flysch des Préalpes, et il attribuait l'apparition des premières à l'existence d’une ligne de chevau- chement correspondant à la base des calcaires triasiques qui se montrent au bord externe des Alpes calcaires septentrionales. En même temps, il insistait sur la nécessité d'une exploration détaillée de ce bord des Alpes, jusque dans les Alpes de Salzbourg et peut-être plus loin encore. En 1902, dans son Mémoire capital sur les Alpes suisses, M. Lugeon devint plus explicite et plus 164 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES précis. En se basant à la fois sur les faits qu'il même ordre, quoique sur une échelle plus grande, connaissait personnellement et sur des considéra- | que celui qui rend si dissemblables les deux rives tions précédemment développées par M. Haug, il | de l’Arve, au moment où les nappes des Préalpes montrait la disparition des plis helvétiques par | commencent à être conservées, sur une assez grande enfouissement sous la grande nappe triasique du | largeur, par-dessus les nappes autochtones des Rhätikon; d'autre part, la présence du Lias sous | Alpes de Savoie. Cette région de passage, fort inté- les territoires salifères des Alpes de Salzbourg, | ressante, a été bien étudiée, postérieurement au avec un faciès différent de celui qu'il montre au- | Mémoire de M. Lugeon, par M. Steinmann et plu- dessus des couches salifères, lui semblait un indice | sieurs de ses élèves, MM. Hoek, Paulcke, Schiller, de la continuité des recouvrements vers l'est. De | von Seidlitz. son côté, M. Haug avait été frappé de ce que, Tous ces travaux ont montré que, dans la région d'après les descriptions des auteurs sur le Salzkam- | en question et principalement au sud du Rhätikon, mergut, bien des faits y seraient de même nature | la nappe dite du Falknis forme la base d’une série que ceux qui existent dans les Alpes suisses et | de nappes empilées, qui admettent dans leur cons- francaises, et il pensait que le recouvrement du | titution des gneiss et des schistes cristallins anciens, Rhätikon devait entrainer le charriage de toute la | alternant avec des terrains secondaires (fig. 8 et 9). zone des Alpes calcaires septentrionales. Ceux de la nappe du Falknis ont encore un faciès En 1903, lors du Congrès géologique interna- | lépontin, tandis que les couches secondaires de la N. _M. de la Srilvretta__… S Wadrisahorn GY Schollberg GempiFluh i Gafierthal Sasser Calanda ES Prätkigau : à > : LLORPENANS Reel e — Schistes cristallins des nappes austro-al/pines infer. Meppes rhetique M I Weppedu Falknrs ou des Klippes | Flysch du Frättigau (plus au Word, se montrent surtout /es cale. trias. du Rhatikon) et de la Brèche “27 (surtout cale. Eithoniques) (4 des Schistes lustres) Fig. 8. — Vue verspective des nappes lépontines supérieures et austro-alpines au-dessus de S. Antônien (Prälligau), d'après le Dr Von SeroLitz. tional de Vienne, M. Haug, d'une part, et M. Ter- | nappe du Rhätikon proprement dite et celles des mier, de l'autre, eurent l'occasion d'assister aux | nappes plus élevées ont le faciès des Alpes orien- excursions qui avaient lieu dans les Alpes Orien- | fales ou austro-alpin. tales, sous la direction des géologues autri- Vers le bord septentrional des Alpes orientales, chiens. Ainsi que M. Lugeon l'avait aussi pensé, | à partir du bastion avancé du Rhätikon, les ter- ils arrivèrent à se convaincre, à peu près si- | rains anciens ne se montrent plus à la base de multanément et d'une manière indépendante, en | ces nappes superposées, et il n’y a done que des interprétant les faits observés et les coupes don- | terrains secondaires dans ces Alpes calcaires sep- nées par les géologues autrichiens à la lumière | tentrionales, où M. Haug a distingué quatre nappes, nouvelle de la théorie des charriages, que la | caractérisées chacune par un faciès très spécial : structure des Alpes orientales s'explique avec la | des couches triasiques. Cette circonstance, com- plus grande facilité par l'intervention de ces phé- | binée avec les hasards d'érosion qui font apparaître nomènes. Des recherches de détail ultérieures, | les nappes inférieures en fenêtres au milieu des effectuées par M. Haug, accompagné par M. Lugeon | plus élevées, ou bien celles-ci en témoins isolés. dans l’une de ses courses, dans les Alpes calcaires | au milieu des régions formées par les plus seplentrionales et par M. Termier dans la zone | basses, explique que, dans ces Alpes calcaires sep- centrale, achevèrent d'entrainer leur conviction à | tentrionales, bavaroises et autrichiennes, on ren- cet égard. contre des superposilions ou des alternances appa- Les relations des Alpes Occidentales et Orientales | rentes d'ilots de couches de même âge montrant deviennent alors des plus simples ef s'expliquent | des faciès très différents. Ces variations de faciès tout naturellement par la circonstance que certaines | avaient été le point de départ des explications si nappes ont ou n'ont pas élé respectées par l'éro- | compliquées du Trias alpin qui ont régné, non sion. Nous nous trouvons, à la traversée du Rhin ! sans discussions acharnées, tant que la tectonique en aval de Coire, en présence d'un phénomène de | ne fut pas venue rendre à la stratigraphie une LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 165 part de l'aide qu'elle en avait reçue par ailleurs. A l'ouest du Rhin, ces nappes des Alpes Orien- tales ne sont plus conservées el nous n'avons pas de représentants certains de leurs couches dans les Alpes suisses. Immédiatement au-dessous de la nappe du Rhälikon, se montrent souvent des brèches semblables à celles de la nappe de la Brèche du Chablais et de la Hornfluh et les roches très spé- ciales que j'ai précédemment indiquées comme subsistant, par quelques témoins, au-dessus de celles-ci; ces formations représenteraient donc l’en- semble de la nappe de la Brèche et de la nappe rhé- tique, difficiles à séparer l’une de l'autre : en tous cas, elles sont d’origine encore lépontine. La corres- pondance de ces nappes avec celles que nous avons reconnues dans les Alpes Occidentales ne laisse, d’ail- leurs, guère place au doute, car, par-dessous, la nappe du Falknis, bien développée vers le nord, mais s'élirant progressivement vers le sud, qui est princi- palement for- mée de calcai- N forme localement la base de la nappe du Falknis. On peut suivre la nappe du Rhätikon, par-dessus ce substralum, d'abord helvétique, puis lépontin, sans aucune ambiquilé ni discontinuité, depuis le front septentrional des Alpes jusqu'à la région des sources de l'Inn, c'est-à-dire jusqu'au sud de la zone des schistes lustrés, par dessus laquelle on la voit done former un pont continu. Cela nous amène donc directement, de même que les considérations de faciès que j'ai précédemment exposées, à situer la racine de cette nappe, la plus basse de celles à faciès austro-alpin, au voisinage de la zone des amphibolites d'Ivrée (fig. 6). La même s'étend, à fortiori, aux nappes plus élevées des Alpes orientales ou austro- alpines, dont la racine doit naturellement être cherchée encore plus au sud. J'ai d'ailleurs indiqué précédemment que les terrains ceristallins conclusion qui entrent dans la constitution de ces nappes, dans la partie cen- trale de la chai- on Fee ARE Gurgaletsch Parpan. Schwarzhorn Prrpan. Bothorn , : : res du Jurassi- HER PER EEACS Farren Weiss torn 2870 ne, serelient di- jue supérieur, ne 2JEI rectement aux avec quelques neiss méridio- g lambeaux de couches rouges naux situés au sud de la zone du Crétacé su- ï : nr des amphiboli- périeur, corres- tes en ques- : 4. Fig. 9. — Superposition des nappes lépontines supirieures et austro-alpines dans Ë : pond indubita la partie orientale de la Plessurgebirge (d'après le Dr Hork). — I, Nappe des tion. Malheu blement à la schistes lustres, terminée par la série du flysch du Prättigau; Il, Nappe des reusement,tan- KI: klippes, surtout formée de calcaires du Malm, avec nombreux fragments de : nappe des Klip- roches plus anciennes et de granites; 111, Vappe rhélique, complexe varié de dis que nous pes ou des Pré- alpes médianes (fig. 8 et {). Les nappes du Rhätikon et du Falknis reposent d'ailleurs, ainsi que l’a bien montré tout d’abord M. Lugeon, sur divers éléments tectoniques, qui sont les suivants, en allant du nord vers le sud : tout d’abord la terminaison des nappes helvétiques plongeantes du Sentis et des Alpes glaronnaises, qui se réunissent à leurs racines par-dessus les plis autochtones de la couverture secondaire sous laquelle s’est terminé le massif hercynien de l'Aar, et enfin la grande masse des Schistes des Grisons, qui s'étalent largement autour de Coire et qui ré- sultent certainement de la réunion des axes syn- clinaux de schistes lustrés des diverses nappes lépontines du Tessin. La grande région semi-circulaire des collines du Prättigau, située sur la rive droite du Rhin, au pied des nappes en question, qui forment falaise au-dessus d'elle (fig. 8), est formée par une impor- tante masse de flysch appartenant à la partie supé- rieure de ces nappes schisteuses et terminée par des couches à Globigérines, parfois recouvertes di- rectement par une lame granitique très écrasée, qui REVUE GYNÉRALE DES SCIENCES, 1999, schistes et dolomies, avec « hornstein » rouges du Jurassique supérieur, gra- nites (x) et serpentines (8); IV, V, Nappes austro-alpines inférieures : caires et dolomies triasiques; V, schistes cristallins. avons vu que les couches se- condaires(prin- cipalement triasiques) arrivent à se montrer seules sur le front septentrional de ces nappes, inverse- ment on ne retrouve pas, dans cette zone des gneiss méridionaux, du moins au sud des Alpes suisses, de traces de terrains secondaires pouvant être com- parés à ceux des nappes austro-alpines. Maïs, en tous cas, on ne saurait aller plus loin vers le sud dans la recherche de la région d'origine de celles-ci. On arrive très vite, en effet, lorsqu'on à dépassé la zone des roches basiques, à une grande ligne de dislocation, d'un intérêt capital pour la question qui nous intéresse. M. Ed. Suess l’a depuis long- temps mise en évidence, sur une partie de son par- cours (ligne giudicarienne), et presque tous les géologues alpins sont actuellement d'accord pour y fixer a limite méridionale des Alpes proprement dites, définies par leur allure tectonique. Au sud de cette ligne, on rencontre un faciès du Crétacé et du Jurassique encore plus méridional ou méditerranéen que dans toutes les nappes alpines le Trias alpin y recouvre des IV, cal- proprement dites ; masses considérables de roches éruptives, por- 1 + k 166 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIJAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES phyres et porphyrites, accompagnées de couches épaisses de tufs correspondant aux mêmes érup- tions, qui appartiennent probablement au Permo- Carbonifère, et les dépôts carbonifères y sont bien développés. D'autre part, on à une allure tectonique très différente de celle que nous avons vue dans les Alpes. C’est un régime presque tabulaire qui com- mence pour ces couches secondaires; pourtant, il s'y rencontre encore des plis, mais ceux-ci sont incomparablement moins accentués que les acci- dents alpins. D'autre part, tandis que nous avons trouvé jusqu'ici un régime de mouvements langen- tiels vers le nord, ou plutôt vers l'extérieur de la chaine alpine, c’est maintenant un sens constant de mouvements vers le sud qui commence dans ces plis (le sens que nous indiquons pour ces mouve- ments étant naturellement celui du déplacement relatif des parties supérieures par rapport aux plus inférieures). Nous sommes arrivés à la région des Alpes cal- caires méridionales, qui, d'après ce qui précède, ne seraient done plus véritablement alpines et qui, en effet, lorsqu'on les suit vers l’est, se séparent nettement des Alpes proprement dites, en se diri- geant vers le S.-E., pour se continuer par les A/pes Dinariques, où le régime des poussées en sens inverse de celui qui existe dans les Alpes est bien élabli. \ Toutefois, lorsque j'ai dit, plus haut, que les Alpes ne montrent que des mouvements dirigés vers leur extérieur, cela n'est pas entièrement exact et ne s'applique qu'aux Alpes helvétiques, où tous les mouvements en sens inverse qui avaient été invoqués pour la structure du bord externe de la chaine, soit pour les Alpes de Glaris, soit pour l'origine des Klippes et des Préalpes, ont élé controuvés par les recherches plus récentes. Lorsqu'on arrive aux Alpes franco-italiennes, de semblables faits de déversement des plis vers l'in- lérieur de la chaine, c’est-à-dire vers le Piémont, commencent à devenir indiscutables et ont été en évidence, en particulier, par les recherches de M. Kilian et de M. Termier sur la région du Brianconnais et la portion adjacente de bien mis la zone du Piémont. Cette dispositton commence à se montrer dans la zone du Brianconnais et donne, à cette partie de la chaîne alpine, l'allure d'une chaîne en éventail composé, dont l'axe serait constitué par la bande de terrains houillers qui se montre largement à découvert dans la partie orientale de la zone du Brianconnais ; puis le régime des plis déversés vers le côté italien se poursuit dans les terrains de la zone des schistes lustrés ou du Piémont, jusqu'au moment où ceux-ci disparaissent sous les dépôts de la plaine du Pô. L'éventail Louïiller à été consi- déré comme l'axe tectonique de la chaîne des Alpes francaises, jusqu'au jour où l'existence des. nappes des Alpes Pennines devint indiscutable et où, d'autre part, s'imposa l'idée que ces nappes ne doivent pas s'arrêter brusquement au Massif du Mont-Rose, où elles sont si remarquablement développées, et qu'elles doivent se prolonger plus au sud. La conclusion qui parait donc s'imposer actuel- lement est que la disposition en éventail que montrent les Alpes franco-italiennes est une dispo- sition secondaire, résultant de la déformation, par des replis poussés vers l’est, de plis couchés ou de nappes primitivement poussés vers l'extérieur de la chaîne et qui constituent encore, comme dans les Alpes suisses, la caractéristique de la structure de cette portion de la chaine alpine. La seule ques- lion qui, actuellement, paraisse susceptible de dis- cussion, réside dans l'importance à attribuer au phénomène principal de chevauchement vers l'exté- rieur de la chaîne; mais il ne semble plus guère y avoir de doute possible sur le fait que le déverse- ment des plis vers le côté italien n'est qu'un phénomène d'importance secondaire et de genèse postérieure au déversement général en sens in- verse. MM. Kilian et Termier, qui connaissent si bien toute cette région alpine, pensent que la cause de ce déversement anormal doit être cherchée dans la décompression qu'a subie cette portion des Alpes lors de l'effondrement qui a donné naissance à la large plaine du Pô. Cet effondrement, qui, dans sa partie occidentale, réalise si bien la forme elliptique des ovales médilerranéens, arrive là à empiéter jusque sur la zone des schistes lustrés, dans laquelle se serait produit un plissement à rebours (Rückfaltung) ou un retroussement des plis antérieurs, par un appel au vide résultant de cet affaissement des régions plus intérnes, qui avaient originellement transmis les poussées d'ori- gine interne ayant donné naissance au phénomène principal des mouvements vers l'extérieur de la chaine. Mais cette explication locale, qui parait bien adéquate aux circonstances réalisées dans nos Alpes franco-italiennes, ne peut être invoquée avec vrai- semblance pour les Alpes calcaires méridionales ; on trouve certainement, dans le léger déversement au sud des plis qui s'y rencontrent, le début d'un régime tectonique différent de celui des Alpes et d'une autre zone de plissements, qui se sépare d'ailleurs très nettement des Alpes à partir des Alpes Dinariques et que, pour celle raison, M. Suess désigne sous le nom de Zone des Dinarides. LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 167 VI Le grand accident qui sépare les Alpes des Dina- rides suit d'abord un trajet assez sinueux, quoique approximativement dirigé du sud-ouest au nord- est, lorsqu'il commence à apparaitre au nord de la zone effondrée du PÔ et isole des Alpes propre- ment dites les Alpes Bergamasques et le Massif de l'Adamello. Puis il contourne le massif dolomi- tique du Tyrol méridional et s'oriente alors vers l'E.-S.-E. Il longe ainsi le pied septentrional des Alpes Carniques, puis celui de la Chaîne des Karawanken, en suivant presque exactement le cours du Gail, puis celui de la Drave. Cette grande ligne de discontinuité est souvent accompagnée par une roche intrusive récente assez spéciale, la {ona- lite, qui montre en particulier un large dévelop- pement dans le Massif de l’Adamello (le Passo Tonale est au bord septentrional de ce massif). L'intrusion de cette roche parait être en relation avec ce grand accident, qui est parfois désigné, pour cette raison, sous le nom de ligne tonalitique; M. Termier lui a, d'autre part, donné le nom de faille alpino-dinarique, indiquant ainsi qu'il cons- litue la limite des régions alpine et dinarique. Nous réserverons donc actuellement le nom d'Alpes Orientales, au sens géologique, à la partie de la portion orientale de la chaîne montagneuse de ce nom qui est située au nord de la ligne tonalitique (fig. 6). Nous avons vu que, dans leur extrémité occci- dentale, les Alpes Orientales, ainsi définies, se montrent comme le résultat de l'empilement de nappes venues du Sud, dont les plus élevées ont une origine encore plus méridionale que la zone des amphibolites d'Ivrée. Elles ont recouvert à peu près entièrement les nappes préalpines ou lépontines, aussi bien que les nappes plus pro- fondes à faciès helvétique, qui avaient submergé les régions autochtones jusqu'au bord de la chaîne et qui sont venues reposer jusque sur la formation extra-alpine de la mollasse suisse, qui se poursuit vers l’est, au pied des Alpes orientales, dans la dépression miocène de la Bavière et jusque dans le Bassin extra-alpin de Vienne (fig. 10). Les nappes lépontines manquent généralement sur le bord externe des Alpes Orientales, sauf en quelques lam- beaux peu importants, et cela montre bien qu'elles ont été débordées par les nappes austro-alpines ; mais il n'en est pas de même pour les terrains char- riés des nappes à faciès helvétique, qui, quoique assez réduits, se retrouvent néanmoins sur toute la longueur du front des AlpesOrientales. C’est, en effet, à ces terrains helvétiques qu'il faut rapporter le massif du Vorarlberg, et une traînée continue de cette zone se poursuit jusqu'à Vienne, entre la mollasse miocène et les calcaires triasiques alpins des Alpes Bavaroises, puis des Alpes de Salzbourg et, enfin, des Alpes Autrichiennes. Cette trainée est souvent réduite simplement à une bande de flysch, qui p_ut devenir, en partie, d'âge crétacé supérieur lorsqu'on se rapproche de la région carpathique, où la formation détritique importante du flyseh ou du grès carpathique se montre nettement à cheval sur le Crétacé supérieur et le Nummulitique. Quant aux nappes lépontines, que nous avons vu manquer généralement sur le bord externe des Alpes Orientales (bien qu'au Prättigau, sur la rive droite du Rhin, elles s’enfouissent manifestement sous les nappes austro-alpines), elles reparaissent au cœur de la chaîne, dans certaines fenêtres qui traversent entièrement cetle carapace de nappes superposées à elles. Lorsque les terrains lépontins se montrent ainsi de nouveau au jour, c'est avec le faciès qu'ils présentent dans les Alpes Valaisannes et Tessinoises, c'est-à-dire sous la forme de schistes lustrés reposant sur des schistes métamorphiques anciens. D'après les observations de M. Termier, ce fait se montre nettement dans deux régions. L'une est une ellipse très régulière, occupant la Dasse-Engadine et ayant un grand axe de 55 kilo- mètres, le long de l’Inn, avec un petit axe, trans- versal à la vallée, de 148 kilomètres; il ne s'y montre que des schistes lustrés mésozoïques, avec les roches vertes qui les accompagnent souvent dans leurs nappes les plus méridionales ou les plus élevées. Ces couches secondaires s’enfoncent, de toutes parts, avec intercalation de minces lames de Trias et de Lias, sous des gneiss et des schistes gneissiques qui occupent la base de l’une des nappes austro-alpines inférieures et qui formaient primi- üivement une grande coupole elliptique très sur- baissée par-dessus les terrains qui apparaissent dans la fenêtre en question. La facon dont ceux-ci se comportent au voisinage de la vallée du Rhin montre, d'ailleurs, qu'ils ne représentent eux-mêmes que des nappes charriées, probablement super- posées à d’autres nappes à faciès helvétique, en sorte que le substratum autochtone (c'est-à-dire les terrains secondaires qui reposeraient directe- ment sur les couches primaires qui doivent former la prolongation de celles des massifs de l’Aar et du Saint-Gothard) ne pourrait certainement être atteint qu'à une grande profondeur. M. le Professeur Ed. Suess, qui avait depuis longtemps prévu l'exten- sion considérable des phénomènes de charriage dans la chaîne alpine et qui, lors du Congrès de Vienne, avait donné son adhésion à leur applica- tion aux Alpes-Orientales, a apporté, en 1905; une importante confirmation de l'interprétation de cette « fenêtre » de la vallée de l'Inn, aux environs de Nauders. 168 sulout np ‘onbnayjodAy queut U Sp UOIBINSI UT — ‘VION Aou sadde iquou ne quenb 9. 1 Sap Juouuaoepdua, 8 79 a. sa[ snossap-1ed ‘seuquodar ja senbr dye-oxysne saddeu ‘(0e ‘uunygL ‘ONVH “AIN 2p XneAeu} Sa[ Seude,p) 4[j4Oi[ 8p JISSeJt 01 7e ouipebug-esseg e[ied ‘sojejualiQ Sad[y sop enbrewayos 24007 — ‘04 ‘314 que sa ‘anuijuoo anbsaïd aoedeieo aun queuuoy anaç inb saut “JINAHQJUI ANT P SUAIOUE SUIJIEISUO SUTBNE) S2p uoresuoroid e[ 8 ja soddeu sa9 ap sauroe LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES +++ enbiseup a e/ ? Suaiwsed 72 S2JIEPU0I8S UJe ES Ô VVVYv sanbizanjey s o (u] [e] [e) 2 Q_ D SJ o [2] Q. ® (4) œ] o- a [e] 3 o ù LL 2 o ü # 2128. ü 3e senbiipnuwwunu SUIBJJa[ di suIzuo de, Q Z M] ü ü co) S D 5: cs (] [2] Q ù ä: œ © = a] [9] Q nl] 0 3 a] [9] 8U990!:ur suidje-ougsne seloe) e \\ \\ \\\\ Slld seuozyooqne ANANSANA ASSIS AAANNY ANANNNNAN NN L AAA \ AN À AANANANENX NANNAUN MAUR NNNSOENNNENNNEOUS NNNNE NS NN \ AN ÇA À senbigeAjeuy sedde \i \ \ Ü HA AAA AAA LAN | E À N NN \ \ A al souiquode] sodd — gore . 4 £ = > ES à, AL ADS 1? à à IP £ 7 < No 1} n Loi DA ® Vp ® A NP © M) 0 NN S NP Q RAA = W S ANA ® NZ NA © ZA AV % NA œ A TD Ch ® Ÿ c 2 à à à D (97 D ® a à a ©) ®ù % ES Ta'a SS+ IQ S 2 à S [SN CS a & = à où ÿ NS = à D +4 ù [de] = af Ô go à Ê Ÿ 0. SIA 2 ®,0 : el 2 S 0 c S. Rte à > DIEMPIS ET = RES Ÿ ® °u La seconde fenêtre reconnue par M. Ter- mier est beaucoup plus étendue que la précédente; c’est la région des Hobe auern, où se retrouvent non seulement les mêmes schistes lustrés que dans la fenêtre de la Basse-Engadine, mais aussi des voûtes de gneiss inférieurs, qui avaient été autrefois considérés comme formant les terrains les plus inférieurs de la zone axiale et qui, pour cette rai- son, avaient recu des géologues autri- chiens le nom de Zentralgneiss. Les schistes lustrés, qui, d’après M. Termier, enveloppent ces gneiss des Hohe Tauern à la facon d'un manteau, s'enfoncent sous du Trias et celui-ci sous des terrains paléozoïques appartenant aux nappes austro-alpines. Cette grande fenêtre se termine, vers l’ouest, à la région du Bren- ner; mais l'axe de l’anticlinal commun à toutes les nappes superposées, qui à permis à l'érosion de mettre à découvert les nappes lépontines, se poursuit très nettement vers le sud-ouest. Dans le Massif de l'Ortler, on voit les nappes austro-alpines former une grande voûte et présenter nettement l'allure de cara- paces emboiïtées, mais sans pourtant laisser apparaître au jour des schistes lustrés (fig.10). Dans son Étude des Alpes entre le Brenner et la Valteline, M. Ter- mier est arrivé à distinguer quatre nap- pes austro-alpines, superposéesaux schis- tes lustrés et principalement formées par des terrains anciens séparés par d'assez minces lames de terrains secondaires. D'autre part, M. Haug, dans son étude des Alpes calcaires septentrionales des envi- rons de Salzbourg, a aussi distingué, dans les couches secondaires qui y sont seules représentées, quatre nappes su- perposées ; mais jusqu'ici les documents manquent de précision sur les rapports qu'elles peuvent avoir avec celles que M. Termier a reconnues dans la région voisine de leurs racines, Pour l'emplacement de celles-ci, il est évident qu'on doit nécessairement la chercher au sud du bord méridional de la fenêtre des Hohe Tauern. Or, celui-ci est extrêmement rapproché de la ligne tonalitique ou faille alpino-dinarique, et c'est dans l'étroite bande qui les sé- pare, à proximité immédiate de la vallée du Gail, que nous sommes donc amenés à situer cette région des racines des nap- ho un LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES 169 pes austro-alpines. Or, M. Haug avait déjà, depuis que se pose la question des nappes alpines, mis en évidence la grande ressemblance qui existe entre les faciès des terrains secondaires rencontrés dans les Alpes calcaires septentrionales et de ceux quise montrent en minces lames intercalées au milieu des couches primaires dans cette zone du (Grail. M. Termier a constaté que celle-ci se montre formée de couches très redressées, souvent verticales, et qu'elle présente très nettement l'allure d'une région de racines, analogue à celle qui a donné naissance aux plis couchés du Mont-Joly, par exemple. C'est donc dans cette zone du Gail, située immédiatement au nord des terrains anciens des Alpes Carniques, zone extrêmement écrasée et parfois réduite à une largeur de 8 kilomètres, tout au plus, que doivent manifestement s'enraciner les grands plis couchés qui se sont avancés jusque sur le bord septen- trional des Alpes Orientales, donnant naissance aux nappes des Alpes calcaires septentrionales ou du moins, d'après M. Haug, aux moins élevées de ces nappes. Il faut d'ailleurs remarquer qu'à l'inverse de ce qui a lieu pour les nappes qui forment le bord externe des Alpes suisses, la continuité avec la région des racines est restée presque constante, puisque le substratum lépontin de ces nappes austro-alpines ne se montre que dans des déchi- rures isolées de ce grand manteau, qui peut se suivre sans discontinuité depuis son bord septen- trional jusqu'à la ligne de discontinuité qui sépare le pays alpin proprement dit du pays dinarique. Il serait extrêmement intéressant d'examiner aussi la signification de cette ligne et d'étudier l'allure tec- tonique de la région qui appartient aux Dinarides; mais cela nous entrainerait trop loin, et je veux seulement tirer la conclusion suivante de tout ce qui précède. NAN Les Alpes Occidentales sont une région où cer- tainement il y a eu des nappes de charriage bien développées; mais celles-ci y ont été très fortement entamées par l'érosion, qui n'en a souvent conservé que les parties frontales entièrement séparées de leurs racines, surtout pour les plus superficielles de ces nappes (les nappes préalpines), qui ne sub- sistent souvent qu'à l'état de lambeaux entièrement isolés les uns des autres. Au contraire, les Alpes Orientales sont restées un pays de nappes, dont les plus superficielles ont été à peine érodées et ne laissent transparaître que quelques-unes des plus profondes, et en quelques points seulement. D'autre part, la comparaison des nappes qui se rencontrent des deux côtés du Rhin montre que les nappes les plus élevées dont on ait la trace dans les Alpes Occidentales sont les plus profondes qui apparaissent dans les fenêtres des Alpes Orientales. Les nappes austro-alpines sont inconnues en Suisse et, Cela peut évidemment être dû, en partie, à une érosion d'autant plus intense qu'on s'approche plus de la Méditerranée; mais cette cause ne me semble pas suffisante, et il est très probable que les nappes supérieures des Alpes Orientales ont dù manquer effectivement à quelque distance à l’ouest de la région où nous les connaissons, soit qu'il y ait eu diminution graduelle du phénomène dans les parties plus occidentales de la chaîne, suivant une loi qui parait ressortir de ce que nous avons vu pour les a fortiori, dans les Alpes franco-italiennes. Alpes frantaises, soitencore que les nappes se soient successivement relayées longitudinalement, comme on en obs-rve des exemples pour certaines digita- tions des nappes de la région glaronnaise et ainsi que le montre la terminaison même des nappes de Glaris, qui, à l'est du Rhin, ne semblent plus ètre que des replis dans le flysch. Nous ne cherche- rons pas, pour l'instant, à discuter ce point et nous nous bornerons à enregistrer, d'après ce qui a été publié, la généralité aujourd'hui constatée des phé- nomènes de charriage dans les régions alpines. Pour les Alpes Orientales, dont l'étude, à ce point de vue nouveau, est à peine ébauchée parles travaux locaux de MM. Haug, Lugeon et Termier, bien des détails y sont encore à rechercher; il est d'ailleurs permis d'espérer que les géologues autrichiens, con- vertis à la théorie des charriages, nous apporteront à bref délai de nombreux documents à cet égard. Avant de terminer, je rappellerai que, pour le prolongement des Alpes Orientales qui, dans les Carpathes, se montre à l'est de la dépression occupée par les mers miocènes, puis pour les for- mations plus récentes de la plaine danubienne, cet espoir est déjà réalisé en grande partie. M. Ed. Suess avait, en effet, montré, depuis longtemps, que les grès carpathiques chevauchent fortement, au bord externe de l'arc carpathique, sur un avant-pays formé par la région hercynienne des Sudètes et par sa couverture argileuse du Schlier miocène, riche en dépôts salifères, exploités en particulier dans les mines si connues de Wieliczka. D'autre part, cette région des grès carpathiques, qui correspondent au Crétacé supérieur et au Nummulitique, montre un très beau développement de Ælippes, analogues à celles de la Suisse et qui constituent des pointe- ments isolés de roches secondaires plus anciennes; ces klippes avaient été magistralement étudiées par le Professeur Uhlig, qui était arrivé à leur attribuer une origine analogue à celle qui avait été aussi mise en avant pour les klippes suisses, antérieure- ment à la découverte des charriages venus du sud. De même, M. Uhlig, dans une très belle mono- 170 LÉON BERTRAND — LES NAPPES DE CHARRIAGE DANS LA STRUCTURE DES ALPES graphie de détail du Massif de la Tatra, qui montre une réapparition des terrains anciens, n'avait pu expliquer les apparences tectoniques compliquées qui s'y observent que par des mouvements dirigés du nord vers le sud. Mais M. Lugeon, en se basant uniquement sur ces travaux et sans avoir étudié personnellement la région, montra que la structure compliquée du Massif de la Tatra, qui résultait de la notion de plis enracinés, mais poussés vers le sud, c’est-à- nappes avec celles qui ont été reconnues dans les Alpes Orientales, en y distinguant : 1° deux nappes superposées à faciès helvétique (nappes sub-beski- dique et beskidique); 2 trois nappes lépontines (nappes subpiéninique, piéninique et haut-tatrique, cette dernière étant l'équivalent de celle qui se mon- tre dans la fenêtre des Tauern) ; 3° trois nappes aus- tro-alpines (nappes subtatrique, de la « Ceinture in- terne » et du Mittelgebirge hongrois) (fig. 44). Ce parallélisme exact est peut-être encore un dire en sens inverse de ce qui à lieu dans le reste peu sujet à revision, mais il y a toutefois là une re Surface de charrisge nosis la ED /ambeau de nappe isole co Crétovie {+ fenêtre POLE TE Ée ir cl A # ci E io) Ps np QUE N. subbeskidique N_ beskidique SW subpieninique et pienini SSSSY. #auë tabrique N. subtatrique IN. supérieures fn eu uséro-alpine: N. rie des Alippes Méridion”® = HER des Grès Carpatiques … É 2 i 1 e-Nep. beskidique Substratum RE ET à | W. helvetiques a lépontines Innere Gürtel S Ceinture inéerne") Frogsimans del Nappes à faciès helvétiques =—|/#ysch{Cr sup! Eocé)ce ls M beskid. Nappes à —Crét.inf'et Juress. en lambeaux à et ” ” ” la base de ces nap Mippes Septentr{e) 7! SUbPIENINIqU (Klippes méridionale) Fig. 11. de la chaine, s'éclaire d'un jour tout nouveau si l'on admet que ce sont des portions frontales de nappes venues du sud qui se superposent et s’en- foncent dans le flysch carpathique. Un géologue polonais, M. Limanovski, montra que M. Lugeon avait raison de considérer le phénomène des nappes de recouvrement comme devant être aussi recon- naissable dans les Carpathes, et enfin, tout récem- ment, M. Uhlig s'est lui-même entièrement rallié à l'interprétation de M. Lugeon. Il à distingué un certain nombre de nappes superposées, toutes venues du sud, et qui expliqueraient les apparitions de plusieurs LAAMES de klippes, ainsi que les faits constatés dans la Tatra; il a même parallélisé ces Aysch des Npennique et subpreni. TT Terr secondaires | dela Näppe || 22 db Nsubbesk\ 22. yr et Crét.rnf'ce la N piéninique \ +) Granite et Sch cristal. fhaut tatriquel ee Aappe de 3 ‘Ceinture interne” faciès lépontins eme austro alpines FRA] Wu Mitéelgbir 7e hongrois E%/#ysch(Eocére) TL 7 À er. SECONTAITES Schstes metamorphiques, | de la Nappe probablement levontins subtatrique — Carte et coupe schématiques des nappes des Carpathes (d'après le Prof, N. Uaui, 1907). constatation extrèmement importante et qui, jointe à la rencontre de nappes dans les Carpathes orien- tales, puis méridionales (ou roumaines), montre le très grand développement des mouvements di- rigés vers l'extérieur de l'arc alpin dans toutes les régions de l'Europe centrale dont l'étude est suffi- samment avancée pour permettre aux géologues d'avoir une opinion précise sur les déformations qu'y ont subies les couches, lors du grand mouve- ment orogénique qui a donné naissance à cette grande vague de l'écorce terrestre. Léon Bertrand, Collaborateur principal au Service de la Carte géologique de France, Chargé de Cours à l'Université de Paris. AMEN AE à à. tested à W. RITZ — LES SPECTRES DE LIGNES ET LA CONSTITUTION DES ATOMES 151 LES SPECTRES DE LIGNES ET LA CONSTITUTION DES ATOMES I. — GÉNÉRALITÉS. NOUVELLES LOIS EMPIRIQUES, La nature des atomes et des forces moléculaires nous est, on le sait, bien peu connue, malgré les efforts toujours renouvelés des chercheurs; la grande difficulté du problème vient, en effet, de ce que ce ne sont pas, en règle générale, les propriétés des atomes, mais des moyennes compliquées, dé- pendant de l'agitation moléculaire et des condi- tions extérieures, qui font l'objet de nos percep- tions. Pourtant il est, à cette règle, une exception importante : les spectres des corps simples nous renseignent d'une façon immédiate sur les modes de vibration des atomes, car la position des raies dans le spectre est à peu près complètement indé- pendante soit de la température, soit des condi- tions extérieures, et même des actions des molé- cules les unes sur les autres. Évidemment, s'il était possible de conclure des vibrations des charges électriques de l'atome aux forces qui les produisent et à la disposition ou au mouvement des charges elles-mêmes, le problème serait résolu ; la précision extrême des mesures spectrales nous fournit donc, sur ce sujet, des documents nom- breux et précieux, écrits malheureusement en des hiéroglyphes que nous ne savons pas déchiffrer. Pourtant, quelques résultats ont été obtenus dans cette voie, grâce à la remarquable simplicité de quelques-unes des lois empiriques reliant entre elles les longueurs d'onde d'un spectre. On va voir que le problème comporte, en effet, pour l'hydro- gène du moins, une solution très simple, qui s’ac- corde parfaitement avec les vues générales sur la constitution des atomes auxquelles ont mené les dernières découvertes. Rappelons la formule remarquable, découverte par Balmer, qui relie entre elles les longueurs d'onde À des raies du spectre de l'hydrogène. Elle peut s'écrire, en désignant par N une certaine constante : Il «TEA 1 * Ne]. En donnant successivement à m les valeurs 3, 4, >, .…, 32, on obtient exactement les longueurs d'onde de toutes les raies de l'hydrogène. L'erreur, si elle existe, semble être inférieure au cent-mil- lième. Pickering a découvert, dans certaines étoiles où l'hydrogène prédomine, une seconde série de lignes, que nous ne savons pas encore produire au laboratoire, el qui sont données par la formule : LE ER ee à Han An 1 (UE + 5) | où N désigne la même constante que plus haut. On est porté, avec Balmer et Rydberg, à penser qu'en réalité ces formules devraient s'écrire cha- cune avec deux nombres entiers arbitraires m el p, en sorle que le spectre de l'hydrogène serait donné par les formules : VRP) ae à : dan ni NA te ei ; SAME ” NX mr ce les valeurs 2 = 3, 4 .…, correspondant à des lignes infrarouges. Cette hypothèse a recu tout récem- ment une confirmation éclatante. Sur mes indica- tions, M. Paschen a effectivement trouvé deux lignes infrarouges de l'hydrogène, qu'il a pu me- surer avec une grande précision ‘: il a obtenu : 1—18151,3 +1 U À. et )—12817,6 +1,35 U.A. Or, les formules : NS 15 21 NÉ EN Dr donnent À — 18.751,6 et 12.818,7; l'accord ne laisse rien à désirer. Il semble que la recherche de systèmes méca- niques ou électromagnétiques dont les vibrations soient représentées par des formules d’une telle simplicité ne soit pas une entreprise déraisonnable. D'ailleurs, des lois analogues ont été découvertes dans d’autres spectres, comme on sait, par Ryd- berg, Kayser et Runge. lei encore, la démonstra- tion est faite” que les formules contiennent deux entiers arbitraires. En première approximation, on peut les écrire, avec Rydberg : à, 1 1 Ni (na (ma) et, plus exactement, comme l'a montré l’auteur de cet article : 1 1 il 9 == Ni — E TOY x (r DE =) ( Lan —) 11 n° 1 F. PasoHEN : An». der Physik, octobre 1908. ? Pour plus de détails sur ce qui suit, consulter mes diffé- rents Mémoires : C. R., t. CXLV, p. 1178, 1907; Physikal. Zeitschr., août 1908; The Astrophysical Journal, octo- bre 1908; Ann. der Physik, l. XXV, p. 660, 1908 172 W. RITZ — LES SPECTRES DE LIGNES ET LA CONSTITUTION DES ATOMES N a la même valeur que pour l'hydrogène, landis que les constantes à, b, à’, L', varient d'un élément à l’autre. En les choisissant convenable- ment, et posant m = À ‘/ le Dr lAtor inule (3) donne la « série principale » de Kayser et Runge; pour n = 2, m = 2!},, 3/,, ..., elle donne la deuxième série secondaire; aux systèmes de valeurs 7 Hi), à 3, m—2"},, .…, etc., correspondent également des raies observées. Remplacant a!, b', par certaines nouvelles constantes a", }!, on aura pour 2—9%, m=— 3, 4,5, …, la première série secondaire, qui a même limite, pour m—%, que l1 deuxième. Ici encore, les lignes infrarouges n—=3, m—=3, 4, elc., ont pu être observées. Mais, résultat qui précise nettement la signification de ces formules, si, au lieu de combiner. comme nous venons de le faire, un premier terme en a, » avec un deuxième en 4’, D'ou en à”, }", nous combinons ceux-ci entre eux, de manière à former l’expres- Sion : (4) nous oblenons encore des lignes observées, au moins dans certains spectres. Enfin, pour Li, Na, on peut, dans un sens analogue, combiner la série principale avec elle-même : F2 1 j 1 N b Y b\=° Cr te) m° Ces lois énoncent que, par l'addition ou la sous- traction des fréquences de deux lignes ou séries observées, on obtient la fréquence d'une nouvelle ligne ou série de lignes. Les erreurs sont de l'ordre des incertitudes expérimentales; pour l'hélium, on calcule pour la ligne la plus intense du système (4): — 26.241,86 : l'expérience a donné 26.244,78. | > Je n'insiste pas davantage ; on voit que : 1° Les lois simples se rapportent toujours à SE c'est-à-dire à la fréquence; 2° Qu'en faisant augmenter indéfiniment l'un ou l'autre des nombres entiers, les fréquences obte- nues ont une limite ; 3° Que chacun des deux termes de la formule a, en quelque sorte, une existence séparée, et qu'on obtient les raies d'un spectre en combinant de diverses manières entre eux de tels termes. IL. — HYPOTHÈSE DES CHAMPS ATOMIQUES. Ces résultats généraux font nettement ressortir la grande différence qui existe entre tous les modes de vibrations élastiques, électriques et autres que uous connaissons, et les vibrations spectrales. En premier lieu, — et lord Rayleigh a beaucoup in- sisté sur ce point, — les lois simples des phéno- mènes vibratoires se rapportent, à peu d’exceptions près, aux carrés des fréquences, et non aux fré- quences elles-mêmes. Cela tient à ce que, à côté des cordonnées qui définissent l'état des systèmes, les équations du mouvement en contiennent les dérivées secondes ou accélérations. Or, lorsqu'il s'agit de vibrations, le temps n'entre que sous la forme sin y{/-{), expression dont la dérivée se- conde contient le facteur v*; pour déterminer la fréquence y, on à donc finalement, puisque sin v({-{,) disparaît du résultat, une équation en v°, et ce n'est que dans des cas très particuliers qu'on pourra extraire algébriquement la racine carrée. Il en serait autrement, a remarqué lord Rayleigh, si les équations étaient du premier ordre. Malheu- reusement, l'introduction des accélérations s'im- pose à tous les points de vue d’une manière absolue, et il semble que, dès l’abor], nous nous trouvions dans une impasse. Pourtant, une hypothèse simple va nous tirer d'embarras. Si les forces qui produisent les vibra- tions, au lieu d'être déterminées par la position ou la déformation du système, comme c’est géné- ralement le cas pour les systèmes élastiques et autres, dépendent des vitesses, les équations du mouvement ne contiendront, à côlé de celles-ci, que leurs dérivées premières, les accélérations ; elles seront du premier ordre par rapport aux vitesses. Or, la force magnétique satisfait précisément à celte condition, et, de plus, nous ne saurions douter de l'existence de champs magnétiques puissants à l'intérieur des atomes. D’après la théorie du ferro- magnétisme de P. Weiss’, ces champs sont au moins de l’ordre de 10° gauss, ordre de grandeur du champ moléculaire, et l’on sait que l'explication quantitative des anomalies des chaleurs spécifiques du fer, du nickel et du cobalt est venue confirmer cette théorie d'une facon remarquable. D'autre part, M. Humphreys, pour expliquer les lois du déplacement des raies sous l'influence de la pression, phénomène découvert par lui ily a quel- ques années, a élé amené à les attribuer à l’action réciproque de champs moléculaires de l’ordre de grandeur de 10° gauss. Avec un tel champ, on montre sans difficulté qu'il est possible, d'une infinité de manières, d'obtenir des vibrations de corpuseules de fréquence proportionnelle à ce champ et d’un ordre de grandeur correspondant aux vibrations lumineuses. Il suflit, par exemple, d’assujettir le corpuscule à rester sur un élément de surface ou dans un plan ‘ Voir la Revue gén. des Sciences du 15 février 1908. MW. RITZ — LES SPECTRES DE LIGNES ET LA CONSTITUTION DES ATOMES 173 donné : ce corpuscule, mis en mouvement, exécu- alors des multiples de 4, soit 7, = na, r, — ma, el era un mouvement circulaire de fréquence v pro- portionnelle à la composante H, du champ H nor- Jmale au plan. Si au champ H, vient s'en ajouter un nouveau H',, qui produirait à lui seul une vibration de fréquence v', la superposition des deux champs donnera la fréquence + r'. On obtient done bien la forme linéaire exigée par la loi des difré- rences constantes et par les lois énoncées ci-dessus. III. — Les SPECTRES DE L'HYDROGÈNE. L'sS SÉRIES. Admettons donc que les forces qui produisent les vibrations des spectres de lignes, ou, plus exacte- ment, des spectres en séries, soient purement magnétiques. Cette hypothèse va nous permettre d'expliquer l'existence d’une limite des fréquences, et surtout de donner une interprétation simple des formules (1) et (2) de l'hydrogène ; de plus, elle nous fera comprendre l’origine des effets Zeeman anormaux et compliqués. Sa probabilité trouvera accrue d'autant plus que, malgré les efforts de nombreux chercheurs, aucune solution admissible ni de l'un ni de l’autre de ces problèmes n'avait pu être lrouvée jusqu'ici. Admettons (ce sera l'hypothèse la plus simple) que le champ soit produit par un aimant, et supposons, par raison de symétrie, le corpuscule placé sur le prolongement de la ligne des pôles à une distance 7, du premier, r, du second, et exécutant de petites vibrations dans un plan perpendiculaire à cette ligne. Soit 4 la charge magnétique d'un des pôles; la fréquence sera proportionnelle au champ, pris au point où se trouve le corpuseule, c'est-à-dire à Enr: p DE r32|" soit À un facteur qui ne dépend que de la charge et de la masse du corpuseule ; on aura : s'en fréquence = v = Ag [= = “|: 1 T° On reconnait déjà la forme si curieuse des formules (1) à (4). Pour obtenir exactement les formules de l’hydro- gène, 1l suffira dès lors de supposer l’aimant com- posé d'un nombre arbitraire 2° d'aimants identi- ques entre eux, de longueur 4 chacun, posés bout à bout. De plus, l'aimant sera rattaché de facon rigide à l'élément de surface dans lequel le cor- puscule est assujetti à vibrer, au moyen d'un certain nombre de particules de mêmes dimensions que les aimants, également posées bout à bout, mais non magnétiques. Les distances r,, r,, seront les fréquences seront : Il suffit de choisir convenablement les constantes A,u, 4, pour obtenir la formule (4) de l'hydrogène. En somme, il faut admettre que, dans les condi- tions où il émet la série de Balmer, l'hydrogène est susceptible d'états divers, constituant en un certain sens des polymérisations,et résullant de ce qu'un nombre plus ou moins grand d'éléments magné- tiques et non magnétiques, dont il n'est pas néces- saire de préciser la nature, peuvent s'agglomérer entre eux en de chapelet rectiligne et s'attacher à l'atome d'hydrogène. Ou, si l’on veut forme une image concrète : prenons une barre aimantée et deux barres de cuivre de même longueur; placons-les bout à bout. À l'extrémité cuivre du système, placons une charge électrique convenable, et donnons-lui une légère impulsion ; elle vibrera en donnant la raie Ha. Ajoutons au bout de la première une seconde barre aimantée identique : nous obliendrons H$ ; une troisième donnera H, etc. Cette explication est-elle invraisemblable au point de vue des idées modernes sur la constitution de la malière? On ne saurait le prétendre. Il est, en effet, facile, de bien des manières, de distribuer l'électricité dans un corps de révolution en rotation autour de son axe, de manière à le rendre équivalent à un aimant élémentaire. Des mouvements rota- toires ou circulatoires des charges électriques à l'in- térieur des alomes sont, d'ailleurs, indispensables pour expliquer le magnétisme ; les premiers sont les plus stables. D'autre part, les systèmes qui émettent les spectres de lignes — et c'est encore lord Rayleigh qui à particulièrement insisté sur ce point — doivent être extraordinairement stables, sinon les lignes deviendraient diffuses. Si donc on admet que l'atome chimique est un assemblage de divers éléments, l'hypothèse de connexions rigides entre ces éléments sera particulièrement probable. Enfin, parmi les diverses manières d'assembler un nombre variable d'éléments, une des plus simples est sans contredit de les poser bout à bout. Il est bien évident que toute hypothèse parti- culière sur la structure des atomes, capable d'expliquer le grand nombre de lignes des spectres, paraîtra plus ou moins improbable à première vue. On s’en rend compte pour peu qu'on y réfléchisse. L'hydrogène lui-même, qu'on tenté de considérer comme le plus simple des éléments, possède plusieurs spectres et émet des centaines de lignes de caractères très différents. On devra bien admettre que cette simplicité est très relative, et s'estimer heure x d'y découvrir au moins des sera W. RITZ — LES SPECTRES DE LIGNES ET LA CONSTITUTION DES ATOMES rapports géométriques simples et des forces connues, agissant suivant des lois simples, comme c’est le cas dans l'hypothèse qui nous occupe. D'ailleurs, on peut modifier notre système de diverses manières, éviter l'introduction des éléments non magnétiques, ete. Le point essentiel est que les vibralions soient produites par un champ magnétique provenant de deux pôles susceptibles de prendre chacun, dans l'atome, un certain nombre de positions différentes, équidistantes sur des lignes droites. En généralisant ces hypothèses, on arrive à d'autres formules telles que (2), (3) ; il existera toujours une limite des vibrations. L'observation a donné ce résultat remarquable que le facteur N est le même pour tous les corps. Cela exige, dans notre théorie, que non seulement le corpuseule vibrant, mais aussi les « aimants élémentaires », soient identiques pour tous les corps. On voit ainsi apparaître, à côté des corpuscules, un deuxième élément constituant universel de la matière. IV. — LES EFFETS ZEEMAN ANORMAUX. On sait que ce sont précisément les lignes appar- tenant aux séries qui se décomposent, dans un champ magnétique, de la facon en général la plus compliquée. On à compté quinze et même dix-neuf composantes, et les distances de ces composantes sont très souvent entre elles comme des nombres entiers. M. Lorentz a tenté d'expliquer ces décom- positions en remplacant l'électron simple de la théorie élémentaire par des systèmes à n degrés de liberté; et il faut autant de systèmes qu'il existe de lignes spectrales. C'est donc là une hypothèse très compliquée; encore les décompositions observées n'ont-elles pu être interprétées, je ne dis pas phy- siquement, mais mathématiquement, que dans un très petit nombre de cas, et la loi des rapports ra- tionnels reste inintelligible. Il en est autrement dans notre hypothèse. Un système magnétique exé- cutera dans la plupart des cas, sous l'influence com- binée du champ extérieur et du champ intérieur, beaucoup plus intense, des mouvements oscilla- toires périodiques, développables en série de Fou- rier. Il en résulte, pour l'électron vibrant, des mouvements plus compliqués, et le calcul montre que, w étant la période du mouvement de l'atome, la vibralion sera décomposable en une somme de termes sinusoïdaux, correspondant à des lignes de fréquence v, + mo, v, élant la fréquence primitive, et m» un entier, On voit que les distances des com- posantes sont bien dans un rapport rationnel; leurs polarisations sont celles qu’exige l'expérience. Un électron nous donnera, en général, à lui seul, un nombre infini de composantes, dont quelques-unes seulement sont assez intenses pour être perçues; leur nombre dépend de la rapidité de la conver- gence de la série. Le phénomène de Zeeman joue done, dans cette manière de voir, pour les mouve- ments rotatoires de l'atome, le rôle d'un analyseur harmonique. V. — AUTRES MODES D'EXPLICATION. CONCLUSION. Peut-on conclure de là que les vibrations des spectres en séries sont bien dues à des champs magnétiques intenses? Il est dans la nature des choses qu'une telle conclusion ne s'impose pas immédiatement. Les vibrations d'un système ne suffisent pas à nous renseigner sur sa constitution. Pour s'imposer, la théorie devra embrasser de facon simple l’ensemble des observations et les rattacher à d’autres domaines; les autres modes d'explication devront apparaître comme infiniment moins économiques pour notre pensée. Pour cela, il importe de les cultiver tous; aussi voudrais-je, en terminant cet exposé, parler de l'un de ces modes, le seul qui, à l'heure qu’il est, mérite sérieusement d’être pris en considération. On sait que les vibrations des corps élastiques, comme celles des séries spectrales, sont en nombre infini, et que leurs fréquences dépendent de cer- tains nombres entiers qui sont les nombres de lignes nodales (figures de Chladni) ou de surfaces nodales caractérisant chaque vibration. Pour une mem- brane rectangulaire, on à v° = am + bn, a et D étant des constantes, m et n des entiers. Mais, à l’opposé des séries spectrales, lorsque m, nn, augmen- tent indéfiniment, il en est de même de y. Cela résulte, en dernière analyse, de ce que les forces produisant les vibrations élastiques s’annulent à petite distance. On pouvait se demander si d’autres forces, agissant suivant la loi de Newton ou d’autres lois, ne donneraient pas des formules du type (4), (2) et (3). Cette hypothèse a été envisagée par l’au- teur de cet article, et, à sa suite, par MM. Fredholm et Hadamard. Elle trouve son expression mathéma- tique, non dans des équations aux dérivées, mais dans des équations intégrales, et il résulte de ces recherches que la loi du carré des distances, et une infinité d’autres, conduisent bien à une limite des vibrations. Malheureusement, l’analogie semble s'arrêter là. Car, pour obtenir effectivement les for- mules de l'hydrogène (1) et (2), il faut admettre des lois d’une complication invraisemblable. Les équa- tions intégrales simples de M. Fredholm n'y sau- raient conduire. I ne suffit d’ailleurs pas qu'à une série spectrale on puisse faire correspondre une loi d'attraction ; il faut que celle-ci ne soit pas trop invraisemblable, et ne dépasse pas de beaucoup en E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 175 complication la formule qu'il s'agissait d'expliquer. Le fait que les équations, dans cette hypothèse, contiennent le carré des fréquences, n’est pas de nature à simplifier le problème, et montre plutôt la grande portée de la remarque de lord Rahyleigh dont il a été question plus haut, Pour avoir des exceptions, il faut des constructions compliquées. Enfin si, abandonnant lout préjugé physique, on cherche simplement à satisfaire aux conditions mathématiques du problème, on est conduit à des systèmes dont la vibration fondamentale seule rayonne de facon sensible; le rayonnement des harmoniques supérieurs est sensiblement nul par l'effet des lignes nodales; ils ne seraient pas per- ceptibles. Pourtant, toutes ces hypothèses méritent d’être étudiées avec soin, car, si elles ne s'appliquent pas aux lignes sériées, elles peuvent s'appliquer aux autres lignes, sur l'arrangement desquelles nous ne savons rien, ou aux spectres de bandes, dont les fondamentales, données, on le sait, par M. Deslandres, présentent avec les lois des sys- tèmes vibratoires connus plusieurs analogies 1m portantes. En somme, l'explication de beaucoup la plus simple des séries spectrales de l'hydrogène et d'autres corps consiste à attribuer ces vibrations à l'influence de champs magnétiques intenses, pro- venant de pôles magnétiques distribués dans l'atome suivant des lois géométriques simples. L'énergie de ces systèmes, il est important de le remarquer, est purement électromagnétique. lois W. Ritz, Docteur ès sciences. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DEUXIÈME PARTIE : DIGESTION, SANG, ÉCHANGES NUTRITIFS Dans une première partie", nous avons analysé les récents travaux relatifs aux principes immédiats organiques ; nous allons maintenant passer en revue ceux qui se rapportent à la digestion, au sang et aux échanges nutritifs. I. — LA DIGESTION. Les phénomènes chimiques de la digestion, que les travaux de l'École de Pawlow et les progrès de nos connaissances sur les actions diastasiques et sur la structure des protéiques ont, depuis quelques années, replacés au premier plan, ont continué à retenir les efforts d'un nombre si considérable de chercheurs qu'il serait impossible de rendre compte iei des résultats obtenus, même en bornant ceux-ci aux plus intéressants. D'ailleurs, par leur contenu, la plupart de ces travaux appartiennent plutôt à une Revue de Physiologie que de Chimie physiolo- gique. Ils traitent, en effet, du mécanisme de la production physiologique, des sécrétions diges- tives, de leurs actions synergiques *, de l'adapta- tion du travail moteur et du travail chimique dans les divers segments du tube digestif, ete. Lei on se bornera à quelques données proprement chimiques sur l’ensemble de l'opération digestive. 1 Rev. gén. des Sc., du 15 février 1909, t. XX, p. 128 et suiv. ? Sur ce point, voyez notamment le travail de Roger publié par la Revue (t. XVIII, p. 455, 1907). Voy. aussi RoGER : Soc. de Biol., t. LXIV, p. 16 et 1137, 1907, et FrouIN : Zbib., t. LXII, p. 80, 1907. En ce qui concerne les graisses et les hydrates de carbone, on connaît assez bien les produits auxquels aboutit cette opération. Mais, pour la moléeule protéique, dont la structure est si com- plexe, on se demande encore quels sont les produits représentant le but physiologique de l’action chi- mique que ces corps subissent au contact des divers sucs digestifs. Voyons quelle est la position actuelle de cette question. $ 1. — La digestion des protéiques in vitro. On sait que, pour Kühne, la différence essentielle entre l’action du sue gastrique et celle du sue pan- créatique consistait en ceci que la première de ces actions ne dépasse pas le stade des peptones, tandis que la seconde va jusqu'aux acides aminés, au moins pour une partie de la molécule. Hoppe- Seyler, au contraire, admettait que la pepsine fail apparaître aussi ces acides, et l’on à vu dans une précédente revue! que Zunz, Lawrow et d'autres observateurs ont trouvé plus tard, parmi les pro- duits de la digestion pepsique prolongée, la plupart des acides aminés que fournit la digestion trypsique, en sorte qu'ils avaient fini par ne plus admettre entre l’action in vitro de ces deux sucs que des différences d'ordre secondaire. Aujourd'hui, on en revient à l'opinion de Kühne. Abderhalden et ses collaborateurs ont constaté, en effet, que, même après trente-six jours, le sue gastrique pur, recueilli 1 Voyez la Revue du 30 janvier 1905, p. 11. 176 chez le chien d’après Pawlow, ne donne (avec l’édestine) que des traces d'acides aminés, et no- tamment de tyrosine‘. Il est probable que ces acides n'apparaissent en quantités notables que lorsqu'on prolonge l'action pendant très longtemps, ou que l’on emploie des pepsines commerciales ou des extraits de muqueuses stomacales entières, c'est-à- dire lorsqu'on se place dans des conditions qui n'excluent pas la présence de la trypsine ou de l'érepsine. On sait, en effet, par les recherches de Boldirew*, avec quelle facilité le suc pancréatique reflue dans l'estomac après ingestion de graisse et vient, par conséquent, imprégner la muqueuse gastrique. D'autre part, la muqueuse pylorique (et non le suc) contient une érepsine*. Il n'y a donc rien de sur- prenant dans ce fait qu'avec des extraits de mu- queuses stomacales entières ou des pepsines com- merciales, sur la préparation desquelles on n'est pas renseigné, la protéolyse aille plus loin qu'avec le suc gastrique pur. Même des pepsines de bonnes marques peuvent ici induire en erreur. Avec une pepsine de Grübler, la caséine a fourni promptement des acides aminés libres et notamment du trypto- phane, ce que l'on n'observe pas avec le suc pur‘. Toutefois, on continue à admettre que l'hydrolyse pepsique peut aller jusqu'à des polypeptides abiu- rétiques. Il y a donc une différence très nette entre l’action protéolytique du suc gastrique et celle du suc pan- créatique, confirmée d’ailleurs d'une manière frap- pante par ce fait qu'aucun des polypeptides de synthèse obtenus jusqu'à présent ne s'est montré accessible à l’action du suc gastrique, tandis que le suc pancréatique”, au contraire, en dédouble un grand nombre. Zn vitro l'action du suc gastrique apparait donc comme allant moins loin que celle du suc pancréatique, donc comme étant sans doute préparatoire de celle des diastases intestinales. * ABDERHALDEN et Rosroski : t. XLIV, p. 284. ? Un exposé d'ensemble de ces recherches se trouve dans Zentralbl. f. d. ges. Physiol. u. Pathol. d. Stoffwechsels, N. F., t. II1, p. 209, 190$. — Voy. aussi : Archives de Pflüger, t. CXXI, n° 1-2, 1907. 3 BERGMANX : Skand. Arch. f. Paysiol., t. XVII, p. 119, 1906. — O. Conxuemm : Physiol. der Verdauung, etc. Berlin, 1908, p. 69. — C'est cette érepsine qui, mélangée avec la pepsine contenue dans le suc pylorique, constitue la pseudo- pepsine trouvée par Glässner dans la muqueuse pylorique (GLAESsNER : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. I, p. 24 et 105, 1901. — F. Kcuc : Arch. de Pfluger, t. XCIL, p. 281, 1902. — Saraskix et K. KowaLevsky : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XXXVIL, p. 571, 4903). + Cité par ABpernaALDEx et Roxa : 1906. 5 Ici encore on saisit des différences très nettes entre le suc pur (activé) et les produits commerciaux préparés avec des extraits de glandes. Ainsi la leucylalanine est dédou- blée par la « pancréatine » et résiste au suc (E. Fiscaer et P. BerGeLz : D. cher, G., t. XXXVII, p. 3103, 1904). Zeitschr. f. physiol. Chem., Ibid.,t. XLVIII, p. 360, E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE L'utilité de cette action préparatoire ressort d’ail- leurs d’une intéressante expérience d'Abderhalden et Gigon', On met en route en même temps deux digestions d'édestine, l’une avec du suc gastrique, l'autre avec du suc pancréatique activé; puis, après un cerlain temps (quatre jours), on interrompt la digestion gastrique en neutralisant par du carbo- nate de sodium et l’on ajoute un volume de sue pancréatique égal à celui qu'on a employé pour la digestion pancréatique. À ce même moment, on met en route une troisième digestion d'édestine avec du suc pancréatique. Après quatre jours, les trois opéralions sont interrompues en même temps, et l’on mesure le degré d'avancement de chacune d'elles, en dosant les quantités de tyrosine et d'acide glutamique libérées. On constate ainsi que la plus avancée est celle où le suc pancréatique a agi seul pendant tout le temps, puis vient celle où l’action pancréalique a élé précédée du travail pepsique, et en troisième lieu celle où le suc pancréatique a agi seul pendant le même temps que le suc pan- créatique succédant au suc gastrique. Ces deux derniers résultats mettent en évidence l'importance du travail pepsique préparatoire, car ils montrent que, quand l’action pepsique a précédé l'action trypsique, celle-ci est beaucoup plus rapide, sans doute parce que la première crée à la seconde des points d'attaque, dont la mise à nu facilite l’at- taque pancréatique. Avec de la viande riche en tissu conjonctif, la différence est encore plus frappante ; elle s’atténue, au contraire, à mesure que l'on pro- longe la durée de ces essais, ce qui signifie que la préparation pepsique du travail digestif n’est pas indispensable au travail pancréatique, mais rend ce travail plus rapide. Là aussi est l'interprétation du résultat de la première des trois expériences en question. Ajoutons, comme le font remarquer les auteurs, que ces expériences n’ont qu'une valeur d'essais préliminaires et qu'il faudrait les étendre à d’autres matières protéiques, dont on mesurerait la digestion d'après d’autres acides aminés. On verra plus loin que la clinique vérifie assez nette- ment ces résultats 1 vitro. Mais quels sont les produits de ce travail pep- sique préparatoire? {a vitro, il semble bien que ce sont les albumoses qui dominent, les peptones et autres produits plus avancés (polypeptides, etc.) ne représentant qu'une fraction assez faible de l'azote total”. Mais in vivo les résultats sont très différents, car là interviennent à la fois l'évacuation vers le duodénum des parties liquéfiées du contenu sto- macal, et l'absorption par la muqueuse, deux fac- 1 ABDERHALDEN el G1GON : Zeïtschr, f. physiol. Chem., t. LILI, p. 119, 1907. 2 Voy. la Revue du 30 janvier 1905, p. 178. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 177 teurs qui modifient considérablement les conditions du travail chimique. $ 2. — La digestion des protéiques in vivo. 4. La digestion des protéiques dans l'estomac. — D'après les travaux de Tobler, de Lang et d’autres observateurs, et principalement de E. Zunz’, à qui l’on doit une très belle série de recherches systé- matiques sur la digestion gastrique de la viande chez le chien, voici ce que l’on observe chez l'animal. Quand on sacrilie un chien en pleine digestion d'un repas de viande, et que l’on jette aussitôt une large pince sur le sillon qui sépare si nettement, chez l'animal en train de digérer, la portion pylo- rique de l'estomac du reste de cet organe, on trouve que la région fundique contient la majeure partie de son azote non coagulable — c'est-à-dire de ses produits digérés — sous la forme d'albumoses, tandis que, dans la région prépylorique, c’est le con- traire que l’on observe, les produits non coagulables plus avancés (peptones, polypeptides) l’emportant sur les albumoses (E. Zunz). Bien que les résultats varient d'un animal à l’autre et selon l'état de la viande employée (crue ou euite, ingérée avec ou sans l’eau de cuisson), citons néanmoins ceux de l’une des expériences de E. Zunz, à savoir la répar- tition, entre les albumoses et les autres produits (peptones), de 100 parties d'azote non coagulable pour 100 grammes de viande ingérée et après deux heures de digestion. Région fandique :albumoses, 76,8; peptones,etc., 23,2 °/,. — Région pylorique : albumoses, 33,4; peptones, etc., 66,6. — Première portion du duo- dénum : albumoses, 17,3; peptones, ete., 82,7 °/.. Si, d'autre part, on se reporte à ce qui a été dit dans une précédente revue” sur la répartition des aliments entre les régions fundique et pylorique, on doit conclure que, dans la première, s'opère l'imprégnation progressive de la masse par le suc gastrique, suivie d’une digestion aboutissant à fournir surtout des albumoses, et que, par portions successives, la masse ainsi préparée passe dans l’entonnoir prépylorique où la liquéfaction devient plus complète et où l'hydrolyse aboutit principale- ment aux peplones. Ajoutons ici que l’on ne trouve jamais dans le contenu stomacal que des traces d'acides aminés, lesquelles peuvent très bien pro- venir d'un reflux du contenu intestinal*. L'observation de chiens munis d’une fistule duo- 4 E. Zuxz : Mém. de l'Acad. roy. de Belgique, t. XIX, fase. LIT, 1905, et fase. 7, 1907. Le lecteur trouvera là la biblio- graphie et une mise au point très bien faite de toute la question. ? Voy. la Revue du 15 avril 1906, p. 335. % ABDERHALDEN, Kaursen et Lonnox : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XLVILL, p, 549, 1998. — AuDERHALDEN, BAUMANN et Loxpon : Zhbid., t. LI, p. 384, 1907, { dénale très près du pylore confirme ces résultats, à savoir que ce sont les peptones qui l'emportent, parmi les produits non coagulables, dans les jets liquides auxquels le pylore donne passage pendant la digestion gastrique, mais à cette condition, cependant, que l’on injecte de temps en temps dans le duodénum, au delà de la fistule, les pro- duits d'une digestion antérieure’. Sans cette pré- caution, les réflexes normaux ne sont pas conservés, le pylore s'ouvre plus souvent, en sorte que, le chyme séjournant moins longtemps dans l’antre pylorique, les albumoses y dominent et non les peptones”*. Voilà donc quelle est la marche générale du phé- nomène, mais bien des questions restent à résoudre encore, questions physiologiques relatives à la grandeur de l'absorption digestive dans l'estomac”, au rendement total du travail de la protéolyse gas- trique, et questions chimiques relatives à la com- position exacte de ce que l'estomac absorbe et de ce qu'il transmet au duodénum. Bornons-nous à examiner ces questions chimiques. On ne sait abso- lument rien sur la première : on n'aperçoit même pas comment elle pourrait être abordée expérimen- talement, l'absorption marchant sans doute paralle- lement à la protéolyse. La seconde est un problème de Chimie, dont la solution se dégagera à mesure que se perfectionneront nos méthodes de séparation des polypeptides d'ordres divers dont le mélange constitue les produits de la digestion, albumoses, peptones, ete. Alors on connaîtra vraiment le sens du travail pepsique, la nature des fragments que ce travail détache de la molécule protéique, et les points d'attaque qu’il crée ainsi au travail trypsique. Quoi qu'il en soit, l'importance de la digestion stomacale apparaît plus grande qu'on ne l'avait admis, dans ces dernières années, sous l'influence des observations faites en clinique et au labora- 1 Voy.la Revue du 15 avril 1906, p. 336, note i. ? Zuvz (Mém. de l'Acad. roy. de Belgique, t. XIX, fase. 1, 1907) confirme très nettement sur ce point les résultats de Tobler. # Cette absorption, niée par London et ses collaborateurs (Cf. Lonpon et PoLowzowa : Jbid., t. XLIX, p. 328, 19(6. — Lonpon et Sucima : Zbid., t. XLVI, p. 209, 1905), semble bien établie pour les travaux de Tobler !voy. la Revue du 15 avril 1906, p. 335), de Lang (Biochem. Zeïtschr., t. II, p. 225, 1906) et de Zunz (Mém. de l’Acad. roy. de Belgique, t. XIX, fase. 1). — Voy. pour la critique des résultats de London : SALASKIN : Zeïtschr. f. physiol. Chem., t. LI, p. 167, 1907. — Cette absorption a été dans les expériences de Tobler de 20 à 30 °/o, dans celles de Zunz de 8 à 15 °/, de l'azote ingéré. 4 Donnons ici les résultats de Zunz dans l'expérience citée plus haut sur la répartition de l'azote dans le contenu fundique et pylorique. Sur 100 parties d'azote retrouvées dans la région fundique, 41,3 étaient encore coagulables et 58,7 ne l'étaient plus (albumoses, peptones, etc ) après deux heures de digestion. Chez un autre animal, trois heures après l’ingestion de 100 grammes de viande, l'azote coagu- leble ne représentait plus que 23 °/, de l'azote total retrouvé. toire sur la digestion après ablation de l'estomac, ou chez des malades avec sécrétion gastrique presque annulée. Sans doute, la suppléance exercée par l'intestin est assez puissante pour que ces sujets arrivent à maintenir leur poids; mais, sitôt que, chez des malades atteints d'affection gastrique, on hausse l'apport d'albumine au-dessus des quan- tités moyennes", on assiste à une utilisation diges- tive de moins en moins bonne et qui met en lumière l'importance de la digestion gastrique. 2. La digestion des proléiques dans l'intestin. — Les divers protéiques alimentaires introduits dans l'organisme par une autre voie que la voie diges- tive (voie parentérale) se comportent comme des corps étrangers, c'est-à-dire que l'organisme les élimine au moins en partie en nature, et qu'il répond à leur introduction par la production de précipitines. Lorsqu'ils pénètrent par la voie diges- tive, ils sont, au contraire, transformés en pro- téiques propres à l'espèce considérée. Or, on à vu, dans une précédente revue”, que ce que l’on sait sur la structure des protéiques montre clairement qu'une telle transformation n'est possible qu'au prix d'une démolition assez profonde, suivie d'une reconstruction convenable. C'est évidemment l'in- testin qui, avec ses diastases si puissantes, tryp- sine, érepsine, est chargé de ce travail. Mais jus- qu'où va, en réalité, cette démolition ? Voyons d'abord ce qu'apprend l'examen du con- tenu intestinal. On à fait cette étude én sacrifiant des animaux en pleine digestion, et plus récem- mentparle système des fistules en étage de London”, c'est-à-dire en établissant sur une série de chiens . des fistules placées à divers niveaux du tube gastro- intestinal. On constate ainsi que la réaction du biuret sub- siste depuis le pylore jusqu'au cæcum” (ce qui indique la présence d’albumoses ou de peptones) et queles produits cristallisables que voici peuvent être saisis : [leucine, glycocolle, acides glutamique et aspartique, alanine, proline, 1ysine et arginine”. De plus, il semble bien que l’ordre d'apparition de ces produits est sensiblement celui que l’on observe dans la digestion pancréatique 1n vitro. On sait que là toute la tyrosine et tout le tryptophane, par exemple, contenus dans la molécule, se rencontrent déjà à l’état libre dans le liquide, à un moment où 4 D. vox Tasora : Zeitschr. f. klin. Med., t. LIN, p. 460, 1904. — Voy. aussi Fazra : Biochem. Centralbl.,t. VII, p, 391, 1908. ? Voyez la Revue du 15 avril 1906, p. 336. 3 Voy. une série de Mémoires publiés par Abderhalden el London et leurs collaborateurs dans Zeitschr. f. physiol, Chem., en 1906, 1907 et 1908. # ABDERHALDEN, BAUMANN el Loxpox : Zeitschr. Î. physiol. Chem.,t. LI, p. 389, 1907. 5 Loxpox : Zbid., {. XLVIT, p. 368, 1906. — ABDERHALDEN, K. von Künüsy et Loxpon : Zbid., t. LIN, p. 148, 1907. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE la presque totalité de l'acide glutamique est encore engagée dans des combinaisons complexes. Pareil- lement, in vivo, dans le duodénum et dans le jéju- num, on ne trouve plus de tyrosine combinée, tandis que presque tout l'acide glutamique est encore à cet état, cet acide n'étant libéré que beau- coup plus bas’. On dirait donc que l’on assiste à -une démolition progressive de la molécule, consis- tant en un départ successif d'acides aminés divers et dans la production de fragments de plus en plus simples, qui subissent ensuite, dans le segment intestinal suivant, une nouvelle dégradation, les produits plus simplifiés étant absorbés avant les autres. De fait, des essais pratiqués avec du glyco- colle, de la d/-leucine, de la d-alanine, montrent qu'après ingestion ces composés, qui ne sont pas absorbés par l'estomac, disparaissent, au contraire, rapidement dans l'intestin ?. Mais ces résultats ne démontrent nullement que in vivo la dégradation va jusqu'aux acides aminés pour toute la molécule, et, dans une étude récente, Nolf° vient de montrer que des raisons physiologiques très sérieuses peu- vent être produites en faveur d’une absorption sous la forme d’albumoses et de peptones. L'analyse du chyme ne fournissant donc pas de réponse précise à la question posée, on s’est tourné du côté de l'analyse du sang, c’est-à-dire que l’on a essayé de saisir les produits de la digestion de l’autre côté de la paroi absorbante*. Mais ici aussi on n'est arrivé à aucun résultat décisif. La discussion s'est surtout poursuivie autour du problème de la présence des albumoses 4 ARDERHALDEN, LONDON et OPPLER : Chem.,t. LV, p. 4417, 1908. ? ABDERHALDEN, PryM et Lonpow: Zbid., t. LIIT, p.326, 1907. # Nozr : Journ. de Physiol. et de Pathol. yén., t. IX, p. Zeitschr. f. physiol. 925, 1907. # A priori, on pouvait affirmer, étant donné le degré de précision de nos méthodes actuelles de dosage, que dans cette direction on n'arriverait pas davantage à des résultats décisifs. C’est que la marche de la digestion intestinale des albumines place ici l'observateur dans des conditions bien moins favorables que lorsqu'il s'agit d'étudier la résorption des hydrates de carbone. Après ingestion de grandes quan- tités de sucre, l'absorption est si rapide que l’on saisit aisé- ment un accroissement sensible dans la richesse en sucre du sang veineux de l'intestin, vis-à-vis de la teneur, si faible en valeur absolue, de celle du sang artériel. Si, par minute, dit C. von Noorden, il passe de 1 à 2 litres de sang par l'intestin de l'homme en état de digestion, donc environ 100 litres par heure, un tel volume de sang peut aisément emmener pendant ce temps 50 grammes de sucre, mais guère plus de 10 à 15 grammes d'albumine (ou produits d'hydrolyse de celle-ci) avec 2 grammes d'azote environ. Cela fait pour 100 de sang un surcroit de 0,05 de glucose, qui devient aussitôt sensible à nos méthodes, la teneur du sang artériel n'étant que de 0,1 °/,. Mais, pour l'albu- mine, le surcroît d'azote jelé par la digestion dans le sang pendant ce même temps n'est que de 0,002 0/, d'azote. Or, c’est là une quantité infime et nécessairement comme perdue dans un liquide qui contient déjà 3 °/, d'azote albu- mineux et 0,020 à 0,030 °/, d'azote non albumineux (C. vox NoonpENn : Handb. d. Pathol. des Stoffwechsels, 2e éd., Ber- lin, 1906, t. 1, p. 70). E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 179 dans le sang, disons d’une facon plus précise : la présence de substances biurétiques dans le sang débarrassé de toute albumine coagulable. La tech- nique de cette coagulation préalable a donc une importance décisive, puisque la moindre trace d'albumine échappée à la coagulation en impose dans le filtrat pour des albumoses'. Les résultats ont été très variables. Les uns, comme Abderhalden etses collaborateurs, confirmant en cela d'anciennes recherches de Neumeister, nient la présence d’al- bumoses dans le sang; d’autres, comme Embden et Knoop, Langstein, Krauss, Tæpfer, Freund, se ralliant aux conclusions de Schmidt-Mülheim et de Hofmeister, admettent que le sang contient de tels corps”. Ces contradictions s'expliquent en partie par la différence des techniques employées, en partie aussi peut-être par ce fait qu'on a employé indifféremment le sang total et le plasma (ou le sérum), alors qu'il faut sans doute ne pas consi- dérer ces deux points de départ comme identiques. Il semble bien, en effet, que le sang total peut donner des réactions d’albumoses, alors que le plasma n'en donne pas, mais on doit se demander si ces réactions ne sont pas dues. dans ce cas, à un reste de globine provenant de l’hémoglobine*. Il se peut aussi qu'on ne trouve les albumoses que dans le sang total, parce que ces corps seraient fixés par la nucléohistone des éléments figurés, combinaison dont la possibilité est établie par de récentes recherches d'Ignaki*. Quoi qu'il en soit, on voit que rien de précis ne ressort de ces recherches, et, comme Hohlweg et Meyer sont venus affirmer récemment qu'on ne saisit aucune relation entre l'azote non coagulable el précipitable par le tanin (albumose) que con- tient le sang, et la digestion (voy. plus loin à propos du sang, on ne peut tirer de tout cet ensemble de recherches aucun argument décisif pour ou contre une absorption des protéiques à l’état d’albumoses. Quant à la recherche des acides aminés dans le sang au moment de la digestion, elle n’a pas fourni de résultats positifs”, bien qu'il soit démontré que ! On parait s'être rallié en général à la méthode recom- mandée par Hofmeister et pratiquée par Morawitz et Diet- schy et qui consiste à se servir du phosphate monopotassique en présence de l'acide acétique étendu et de sels divers (Na€l, SO“Zn), et en opérant à chaud. Voy. sur ce point : HouzweG et Meyer : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol:, 1. IX, p. 386, 1908. On s'est servi aussi dans ces derniers de la coagulation à l'aide des colloïdes (solution colloïdale de mastic), étudiée par Michaelis et Rona (Biochem. Zeitschr., t. Il, p. 219, 1906, et t. III, p. 109, 1907) et employée par Abderhalden, Funk et London (Zeitschr. f. physiol. Ch., t. LI, p. 285, 1907) pour l'étude du problème qui nous occupe. ? Pour cette bibliographie, voir : HouzwecG et MEYER : loc. cit. % Monawrrz et Drersouy : Arch. f. exp. Pathol., t. LIV, 1905. * Icxaki : Zeitschr. f. physiol. Ch., t. L, p. 449, 1907. 5 ABDERHALOEN : Zeitschr, {. physiol. Chem., &. XLIV, p. 17, ces corps (la d-alanine), introduits dans l'estomac ou dans la circulation, se retrouvent aisément dans le sang”. Ces procédés d'investigation directe n'ont donc conduit à aucun Voici, d'autre part, ce qu'apportent les preuves indirectes. In vitro, les diastases digestives, pepsine, trypsine, érepsine, sont en mesure de scinder rapidement la molécule protéique en un mélange abiurétique d'acides aminés et où des corps plus compliqués, tels que des polypeptides, ont pratiquement disparu en totalité. Or, avec de tels mélanges, on à réussi à maintenir des animaux en équilibre azoté et même à leur procurer des gains d'azote. La Revue à déjà rendu compte de divers résultat décisif. expériences faites dans cette direction”. Elles ont été continuées avec le souci de répondre à cette objection‘ que les produits ingérés, bien qu'abiu- réliques, pouvaient contenir encore des polypep- üides d'ordre suffisamment élevé, et en quan- tité assez forte pour parer, concurremment où non avec les acides aminés, aux besoins de l'organisme. Il faut donc s'assurer que, dans le liquide digestif employé comme aliment azoté, on trouve autant d'acides aminés libres qu'on en obtient en rem- plaçant l'hydrolyse digestive par l'hydrolyse acide poussée à fond*. C'est là une opération très labo- rieuse, exigeant de quatre à six semaines de tra- vail. 11 est donc intéressant de signaler la mé- thode au formol® étudiée récemment par Sôrensen et qui permettrait de mesurer très commodément le degré d'hydrolyse auquel on est arrivé”. Voici 1905. — AenErnALDEN, Fuxk et Loxpox : Zbid., t. 1907. 4 ABDERHALDEN, GIGON et Chem., t. LIIT, 143, 1907. 2 Voir la Revue du 15 avril 1906, p. 366. # C'est de cette objection que sont passibles les expériences, d’ailleurs si soignées, de Henriques et Hansen. # Voy. AgpernaLDen et Rona : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. LI, p. 508. 5 Cette méthode est basée sur la réaction suivante de H. Schilf. Les acides aminés, qui sont en général neutres, deviennent nettement acides et peuvent être litrés à la phé- nolphtaléine, après que leur groupe aminé a été « bloqué » par fixation de formol d'après la réaction suivante : LI, p. 269, Lowvox : Zeitschr. f. physiol. CH° CHS | | CH.AZH2 EHCOH. —.«CH-A7: CH? LE HO: | | COOH CooH Alanine, Si l'on admet qu'à chaque carboxyle correspond un groupe AzH®?, on peut donc non seulement suivre les pro- grès de l'hydrolyse par simple acidimétrie, mais encore l'exprimer par des poids d'azote et en centièmes de l'azote total. À l'aide de cette méthode, Henriques a montré que, même après trente jours d’une digestion trypsique, on peut encore trouver une proportion d'acides aminés non libérés représentée par 14 °/, de l'azote total (SükENsEx : Biochem. Zeitschr., t. VII, p. 45, 1907. — SÜRENSEN et H. JESSEN- Hansen : Zbid., t. VII, p. 407, 1907). $ Henriques : Zeitschr.f.physiol. Chem., . LA, p. 406, 1907. 180 maintenant le plus démonstratif de divers essais de nutrition faits par Abderhalden et ses collabo- rateurs'. Les auteurs sont partis non d’une matière albuminoïde unique, qui constitue peut-être un ali- ment azoté insuffisant, mais de la viande, dont on sait qu'ellesuffit à l'entretien du chien. Cette viande a élé abandonnée à l’autolyse antiseptique (toluène) à 37° pendant quinze jours, puis à l’action du suc pancréatique, avec addition, après quatre semaines, de sue intestinal, la durée totale de lhydrolyse étant de trois mois; puis, sur une portion du liquide ainsi obtenu, on s'est assuré que la dégradation jus- qu'aux acides aminés était pratiquement complète. L'animal choisi était de grande taille, et âgé de trois mois, et sa nourriture comprenait le produit d'hy- drolyse en question, de l’amidon et du glucose bien purs et de la graisse de porc. Il passa en vingt jours de 9.600 à 9.910 grammes avec des gains d'azote quotidiens et un état de santé manifeste- ment très bon. Nous citerons aussi la dernière expérience de nutrition faite par Henriques* et qui est intéres- sante, parce que le contrôle de l'hydrolyse a été pratiqué par la méthode de Sôrensen, bien supé- rieure, d'après Henriques, comme sécurité, au labo- rieux procédé de Abderhalden (voy. plus haut). Des rats ont recu comme aliment azoté, les uns du pancréas digéré pendant cinq mois à 37°, puis hydrolysé encore pendant six heures au bain-marie en présence d'acide sulfurique à 20 °/, et qui ne con- tenait plus que 0,59 °/, de son azote sous la forme d'acide aminé non libéré, les autres de la peptone de Witte traitée de même, d'autres enfin le même produit pancréatique que dans la première expé- rience, mais avec une hydrolyse acide complé- mentaire de dix-sept heures au bain-marie, avec de l'acide sulfurique à 25 °/,. Ces rations étaient complétées par de la graisse, du sucre, de l’amidon, des sels et de la cellulose. Les deux premiers lots ont fait des gains d'azote très nets (pendant des laps de temps allant jusqu'à seize jours), tandis que le troisième a élé constamment en état de déficit azoté. Une hydrolyse acide trop prolongée et trop énergique (dix-sept heures avec un acide sulfurique à 25 °/;,) enlève donc aux produits de digestion la propriété d'entretenir l'équilibre azoté. Comme cause possible de cette différence, les auteurs n'ont trouvé que ce fait que cette hydrolyse trop énergique supprime dans le liquide en question la réaction du tryptophane. 11 semble donc bien que l'organisme peut couvrir * ABDERNALDEN et Rona: Jbid., t, LI, p. 507, 1907. Pour les autres essais, voy. 1bid., t. XLIV, p. 198, 1905, et t. LI, p. 226, 1907. # V. Hexriques : Zeilschr. physiol. Chem., t. LIV, p. 406, 1908. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE son besoin d'albumine avec les produits d’une hydrolyse totale des protéiques, et comme, dans l'expérience d'Abderhalden et Rona, il y à eu aug- mentation de poids, c'est-à-dire formation de tissus beaucoup d'auteurs considèrent au- jourd'hui comme démontrée la synthèse des pro- téiques à partir des acides aminés. Toutefois, Nolf ‘ fait valoir que ni l’augmentalion de poids, ni la ré- tention azotée ne sont des raisons suffisantes pour admettre cetle synthèse d’albumine, car d’une part on peut produire une augmentation de poids passagère chez des animaux en leur fournissant une nourriture constituée uniquement d'hydrates de carbone et de graisse, et, d'autre part, Lüthje * prétend avoir constaté un bilan azoté positif chez NOUVEAUX, ‘ des chiens auxquels il ne donnait, avec des graisses et des hydrates de carbone, d'autre aliment azoté que du glycocolle et de l’asparagine, apport azoté dont on ne peut pas vraisemblablement attendre une synthèse d’albumine. Il serait intéressant de voir ces expériences reprises par d'autres cher- cheurs. La question posée reste donc encore en suspens. D'ailleurs, même s'il était démontré que, dans l'orga- nisme, la synthèse des albumines est possible à partir des acides aminés, cela ne prouverait pas que la dégradation des protéiques dans le tube digestif descend toujours jusqu'à ce niveau pour toute la molécule. Il se peut que la résorption et la reconstruction ultérieure portent à la fois sur des acides aminés et sur des fragments moins sim- plifiés, polvpeptides, peptones, etc. Mais, quoi que l'avenir nous apprenne sur ce point, la signification de l’hydrolyse digestive parait bien être fixée : c’est une démolition totale ou partielle”, préparatoire d'une reconstruction sous la forme d’une albumine propre à l'espèce considérée. La démolition, nous en saisissons les produits dans l'intestin: albu- moses, peptones, polypeptides, acides aminés. Quant à la reconstruction sous la forme d’albu- mines spécifiques, elle est démontrée par la réac- tion biologique (voy. plus haut) et par ce fait que la proportion de tels acides aminés (glycocolle, acide glutamique) que l'on trouve dans les tissus des animaux (chat, lapin, poule) est tout à fait indé- pendante des proportions de ces mêmes acides dans l’alimentation très différente (carnée, végétale) que recoivent ces animaux‘. La question se pose 1 P. Nor : Journ. de Physiol. et de Pathol. gén., t. IX, »- 925, 1907. 2 Lunme : Arch. de Pfüger, t. LXII, p. 547, 1906. 3 Peut-être trouvera-t-on un jour que la démolition néces- saire est moins profonde que nous ne le pensons, car il est possible, comme le pense E. Fischer, que les protéiques que nous considérons comme des individus chimiques soient des mélanges de corps plus simples (voy. la première partie de cette revue). # ABDERHALDEN, G1G0N et Sraauss : Zeitschr. f. physiol. EE PES, E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 181 donc de savoir où se lait celle reconstruction. La Æevue' a déjà rendu compte d'une très belle expérience d'Abderhalden et Samuely sur un cheval nourri de gliadine. Bien que ce protéique contienne 37 °/, d'acide glutamique, ceux du sérum de l'animal n'en continuent pas moins à maintenir leur teneur habituelle de 7 à8 °/,. La reconstruction du protéique ingéré à donc eu lieu dans la paroi digestive ou dans le foie. Or, il ne paraïîl pas que le foie intervienne ici, car chez trois chiens munis d'une fistule d'Eck et nourris, de viande, l'autre de gliadine et le troisième d'ovalbumine — aliments qui contiennent respectivement 10,5, 36 à 37 et 8 à 9°/, d'acide glutamique — le plasma n’a présenté aucune différence, quant à la teneur de ses protéiques en acide glutamique; de plus, le sang ne donnait aucune réaction de précipitine révélant l'absorption de ces protéiques en nature et il ne contenait ni albumoses, ni acides aminés (Abderhalden, Funk et London). De plus, un chien à fistule d'Eck put être maintenu pendant huit jours en état d'équilibre azolé et sans variation de poids, tout en ne recevant comme aliment azoté que de la viande ayant subi une hydrolyse diges- tive poussée à fond (Abderhalden et London*). Ces animaux se sont done comportés comme les ani- maux NOFMAUX. On est donc conduit, au moins provisoirement, à placer la reconstruction en question dans la paroi digestive. La fonction de cette paroi serait done bien plus haute que celle d'une simple surface absorbante, et peut-être faut-il chercher là l'expli- cation du retentissement profond des affections chroniques du tube digestif sur l'ensemble des fonctions organiques. l'un Les phénomènes post-digestifs, c'est-à-dire la for- mation des excréments, le travail chimique lié à la pullulation des bactéries dans le gros intestin, ete., ont fait l'objet d'un grand nombre de recherches. La production des corps du groupe de l’indol, celle des phénols, de l'urobiline, les destinées ulté- rieures de ces corps, el spécialement leur excrétion par l'urine et leur signification physiologique et clinique, ont été soumises à une nouvelle enquête. Déjà le travail de Maillard sur les couleurs uri- nairés indoxyliques, dont la Æevue* à rendu Chem., t. LI, p. M1, 1907. — Rappelons encore cette autre preuve que le gluten du froment et la zéine du maïs, tous deux des aliments très importants de l'homme, sont dépourvus de lysine, acide aminé que l'on trouve, au con- taire, d’une manière constante dans les protéiques des lissus (Kossel et Kutscher). 1 Voy. la Zevue du 30 avril 1906, p. 376. 2 ABDERUALDEN, FUNK et Loxpon : Zeitschr. f.physiol. Chem. t. LI, p. 269, 1907. — Aupergaznex et Loxpon : /bid., t. LIV, p. 80, 1907. 3 Voy. la Zievue du 15 octobre 190%, p. 911. IMEVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. comple alors, avait renouvelé l'intérét de ces recherches sur les produits de la putréfaction de Porcher et Hervieux', de l'indol, de Labbé el Vitry" sur les sulfo-éthers, de Lesieur, Monod el intestinale. Celles Hervieux * sur le scatol et Morel, de Brissaud et Bauer, de Gautier et Russo ‘ sur l’urobiline, sont, dans des directions diverses, des manifestations de l'attention qu'éveille à nou- veau la physiologie de ces corps. On reviendra sur ces questions dans une prochaine revue, Bornons nous à noter ici que la théorie naguère édifiée par Baumann el l'indoxyle et des sulfo-éthers urinaires avec les d'autres, touchant les rapports dt putréfactions intestinales, devient, du moins par son côté clinique, de plus en plus chancelante. IL. — LE sanc. $ 1. — Les matières réductrices du sang. On n'en considérera que deux ici l'acide glycuronique et le glycose. L'acide glycuronique a été trouvé dans le sang par P. Mayer, mais les formes qu'il prend dans cette humeur, ses variations qualitatives, les condi- tions de sa destruction, etc., ont été étudiées par Lépine et Boulud dans une série de patientes et difficiles recherches”. Peu de problèmes de Chimie biologique sont d’une technique aussi délicate que celle des corps réducteurs du sang, et portent sur des matériaux aussi fuyants. Il s'agit, en effet, de quantités très petites, de corps très voisins, glycose et acide glycuronique (et sans doute d’autres encore), et dont les réactions se confondent en partie. D'autre part, tous deux sont détruits par le phénomène de la glycolyse zu vitro, contre lequel il faut donc se garder sans cesse ou dont il faut tenir compte. Bornons-nous à noter ici que, d'après Lépine et Boulud, le sang contient deux formes de combinai- sons glyeuroniques, les unes réduisant immédiate- ment la liqueur de Fehling, les autres ne réduisant qu'après chauffage à une température supérieure à 100° et en présence d'un acide, et que ces corps sont presque entièrement localisés dansles globules. Pour les quantités et les variations de l'acide glyeu- ronique dans le sang sous diverses influences, nous sommes obligés de renvoyer le lecteur aux Mé- moires originaux, d'abord parce que ces résultats ne permeltent pas encore d'énoncer une doctrine 1 Voy. la Revue du 45 décembre 1905, p. 1021. 2 HervIEux : Pecherches biochimiques sur l'indol et l'acide glyeuronique (Thèse de la Fac. des Sciences de Paris, 1908). 8 Lagsé et Virny : Les sullo-éthers urinaires (n° 53 de l'OŒEuvre médico-chirurgical, Paris, 1908). # Voy. les Comptes rendus de la Société de Biologie, 1908. 5 Lépine et Bouzun : Journ. de Physiol. et de Pathol. yén., {. MIL, p. 115, 1905, et t VIII, p. 581, 1906. * A° 182 E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE d'ensemble sur les mutations des matières réduc- trices dans le sang, et ensuite parce que ces résultats doivent étre sans doute corrigés, dans une certaine mesure. Lépine et Boulud sont arrivés, en effet, à ce résultat que l'accroissement du pouvoirréducteur du sang sous l'influence de la chaleur en présence d'un acide ne peut pas être dù uniquement à l'hydrolyse de conjugués glycuroniques, evux-ci étant contenus dans le sang en bien trop petite quantité pour expliquer cet accroissement. Il s'agit en réalité d'un ensemble très complexe de com- binaisons, dont la p'upart sont de nature glycosi- dique et que Lépine et Boulud réunissent sous la dénomination sucre virtuel". Le sucre réel, dégagé de ce suere virtuel, est dextrogyre et fer- mente avec la levure. de Ce dégagement, au moins partiel, peut avoir lieu chez l'animal vivant avec une très grande rapidité, par exemple pendant le passage du sang à travers le poumon. /n vitro, on lobserve quand on conserve le sang (à 60° pour empêcher la glycolyse) pendant quelque temps, mieux encore quand on le recoit dans de l’eau à 59-60°, ou quand on le traite par de l'émuisine ou de l'invertine. Enfin, c'est par un traitement à l'acide fluorhydrique étendu (que Lépine et Boulud emploient maintenant à l'exemple de Hugounenq et Morel) que l’on décèle le plus de sucre virtuel. Au sucre préexistant (sucre A) que l’on dose dans le sérum du sang, caillé avec une solution de sulfate de soude bouillante, et qui s'élève à près de 1 gramme pour 1000 de sang, s'ajoute ainsi ! gramme ou un peu plus de ! gramme de sucre virtuel (sucre B), que l’on extrait du caillot à l’aide de l'acide fluorhydrique”. Nous ne pouvons que citer ici d'autres recherches de Lépine et Boulud, notamment leurs travaux sur le dosage du sucre dans le plasma, problème inté- ressanl, car c'est le plasma et non le sang total qui va aux tissus”, sur la glycosurie sans hyperglycé- nie, sur le sucre du sang du ventricule droit et «le la carotide (voyez plus haut), ete. $ 2. — TL’ « azote restant » du sang. On à vu que l’on appelle « azote restant » du sang l’ensemble des matériaux azotés qui restent en solution, quand on à éliminé toutes les sub- stances azotées coagulables, et l'on a fait ressortir aussi toute l'importance de la technique de cette coagulation (voy. plus haut à propos de la diges- ‘ Lénixe et Bourur 1906. ? Lépixe et Bouitn : Zbid., 1. CXXX VIT, p. 475, 1903, — Soc. de Biol.,t. LXEV, p. 31, 1908. * Lépine et BouLun : C. R., t. CLXVI, p. 226, 1908. * Lépine et Bocrtvo : Comptes rendus, t. CXLV, p. 142, 1907; L. CXLHIE, p. 500 et p. 949, 1906. * Lépine el Boucun : Soe, de Biof., L. LXEV, p. 34, Comptes rendus, 4. CXLIHE, p. 50, 1908. lion des protéiques dans l'intestin). La quantité de cet azote restant est très faible : elle a été en moyenne, dans les expériences de Hohlweg et Meyer sur le chien et pour 100 de sérum, de 0 gr. 0525 d'azote à l’état de jeûne et de 0 gr. 0788 pendant la digestion. Et pourtant trois grands pro- blèmes de la physiologie des échanges nutritifs, dont un tout à fait capital, sont liés à l'étude de cette fraction de l'azote du sang. I y a d'abord la question de l'absorption diges- live des protéiques. Si la reconstruction des pro- téiques à partir des fragments fournis par l'hydro- lvse digestive n'a pas lieu, contrairement à ce que nous avons admis provisoirement, dans la paroi digestive, on doit saisir dans ce reste les fragments en question, albumoses, peptones, polypeptides, acides aminés, et l'on a vu plus haut (p. 178, note #4) pourquoi la petitesse de ce reste n'est nullement incompatible avec cette manière de voir. En second lieu, ce reste azoté doit renfermer aussi tous produits intermédiaires des échanges nutritifs azotés. Entre une albumine, telle qu'elle est ingérée, et les déchets azotés, urée, ammo- niaque, ete., que fournit finalement cet aliment, s'intercale, en effet, toute une série de produits intermédiaires, qui, formés dans un organe, achèvent leur eyele dans un ou plusieurs autres et doivent être, par suite, transportés à un moment donné par le sang. On touche, en outre, ici à la question du transport de matériaux azotés de construction d'un organe à un autre, tel qu'il est démontré par les classiques observations de Miescher sur le saumon du Rhin, de Pflüger sur le crapaud accoucheur, de von Eecke sur l'acerois- sement du fœtus aux dépens des protéiques des tissus maternels. Bien d’autres phénomènes du mème genre pourraient encore être cilés ici, par exemple les opérations de la destruction et de la réfection des globulesrouges, lesquelles portent quo- tidiennement sur des quantités de malériaux azotés beaucoup plus importantes qu'on ne le croirait au premier abord'. Comme tous ces transports de matériaux impliquent des démolitions et des recons- tructions de molécules azotées, il est clair qu'ils les 1 Hofmeister a fait, en effet. récemment le calcul suivant : L'observation d'individus à fistule biliaire permet de fixer à 500 — 1.100 centimètres cubes le volume de bile, done à O gr. 2 — 0 gr. 7 le poids de bilirubine éliminée par jour. Si lon admet une quantité moyenne de 0 gr. 5 par jour et si l'on considère que 1 gramme d'hématine ne peut fournir au maximum que! gramme de bilirubine, que 100 grammes d'hémoglobine ne peuvent donner que 4 grammes Œhéma- line environ, on arrive à celte conclusion que l'excrétion de 0 gr. 5 de bilirubine implique une destruction quoti- dienne de 90 centimètres cubes de sang. Et notons que l'héma- tine sert encore sans doute à la production d'autres corps, de Fhématoporphyrine urinaire par exemple (cité d'après Goopmanx : Beitr. z. chem. Physiol. und Pathol.. {. YX, p. 104, 1907). 2 OT E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 15: doivent relentir sur la composition du reste en question. Enfin, dans ce reste sont confondus aussi les déchets azolés que le sang est en train de trans- porter aux émoncloires : urée, ammoniaque, eréa- {inine, etc. Une connaissance précise de la composition de ce reste serait done d’un haut intérêt, mais on se heurte ici à des difficultés analytiques considé- rables. Voici les résultats obtenus récemment par Hohlweg et Meyer’, au Mémoire desquels nous ren- voyons le lecteur pour les données antérieures. Les auteurs ont dissocié l'azote restant en : 1° azote pré- cipitable par le tannin (albumoses, peptones) ; 2 azote non précipitable par le lannin, déduc- Lion faite de l'azote de l’urée (acides aminés, ele.) ; 3° azote de l’urée. 100 centimètres cubes de sérum ont donné chez le chien (moyenne) : DIGESTION JEUNE (7 jours Airestanttotalins.. 0.18 : 10, 100521 0,078S Az précipitable par le tannin. . 0,007 0,008 Az non piécipilable par le tan- nin (moins Az de l'urée). 0,005 0,015 Az de l'urée. 0,03) 0,052 On voit que la digestion ne modifie pas l'azote des albumoses, etc., qu'elle accroît un peu celui des acides aminés, etc., enfin qu'elle fait monter considérablement (de 50 °/, environ) celui de l’urée. Si, chez le chien à jeun, on retranche de l'azote res- lant total l'azote de l’urée, on trouve une différence de O gr. 013, qui n'est pas beaucoup plus faible que celle que l’on obtient pour l'animal en digestion (0,026) et qui représenterait donc, pour la majeure partie, l'azote des matériaux en voie de transport d'un organe à l’autre {Voy. plus haut). $ 3. — L'oxyhémoglobine. En employant, selon le procédé d'Etard, des tubes de 10,à 50 centimètres, Vila et Piettre* ont observé dans le spectre de l’'oxyhémoglobine une bande Située dans le rouge à À —634, visible aussi avec des cristaux d'oxyhémoglobine écrasée, mais qui n'apparait que lorsque le pigment à quitté le glo- bule. Le sang fraisen nature ne donne jamais cette bande. En présence de solutions de fluorures à 2°/,,, cette bande se déplace et se fixe à À — 612. Cette réaction spectrale du fluor est extrêmement sen- sible ; elle décèle encore en solution neutre 6/10.000 eten solution très légèrement acide 5/1.000.000 de NaF. À ce propos, les auteurs ont étudié systéma- tiquement l'action d'un certain nombre de sels sur 1 HonzweG et Meyer : Beitr. z.chem. Physiol. und Pathol., t. XI, p. 381, 1908. ? Vica et PIETTRE : 6 avril 1905. — Bull. Soc. chim., (3), L. p. 573, 1905. Comptes rendus, 6 février, 9 mars et XXXEI, p. 505 et le spectre de l’oxyhémoglobine ‘et ils signalent notament que les solutions de pigment pur ou les dilutions sanguines ne conservent la bande À — 634 que Lant que la dose de sel est plus petite ou au plus égale à 1,3°/,,. Au-dessus de cette dose, on n'observe plus que les bandes classiques dans le vert. A ces résultats, Ville et Derrien' opposent que la bande À — 634 de la région du rouge n'appartient pas à l’oxyhémoglobine, mais à de petites quantités de méthémoglobine, car toutes les circonstances qui, d’après Vila et Piettre, favorisent l'apparition de cette bande sont connues pour être aussi celles qui bätent la transformation de l'oxyhémoglobine en méthémoglobine. Ils montrent que, dans des solutions de méthémoglobine préparées à la manière habituelle, le fluorure de sodium fait passer la bande en question de 1==634 à 1612, comme l'avaient vu Vila el Piettre, et ils considèrent cette bande* À —612 comme caractéristique de la methe- moglohine fluorée, dont ils décrivent l'obtention à l'état de cristaux. montrent comment! cette réaction peut être appliquée à la recherche des fluorures dans les aliments. Gette interprétation est combattue par Piettre e! Vila, qui maintiennent que la bande } = 634 est bien due à l'oxyhémoglobine ; mais, dans cette partie d leur démonstration, ils ne paraissent pas avoir répondu victorieusement aux raisons avancées par Ville et Derrien. Ils considèrent ce pigment comme ayant dans l’hématie une certaine stabilité ; mais, dégagé de son support, ce corps peut subir dans Enfin ils son spectre, sous des influences souvent minimes, des moditications que l'on aurait Lort de considé- rer chaque fois comme caractéristiques de sub- stances nouvelles. Ils estiment notamment que l'existence de la méthémoglobine en tant qu'indi- vidu chimique n'est nullement démontrée et ils font valoir des objections très fortes contre la démons- tration, fournie par Ville et Derriem ae l'existenee d'une méthémoglobine fluorée cristallisée. Enlin, ils mettent en garde contre une application trop hâtive, à la recherche du fluor, du déplacement de la bande 1=—634 à À — 612 décrit par eux, cette réaction pouvant être diminuée dans sa sensibilité ou même supprimée par des influences accessoires (présence de phosphates, ete.)”. 1 Vacce el DERRIEN : Comptes rendus, t. CXE, p. 743, 1195 et 1549. — Bull. Soc. chim., (3), € XXXII, 854, et {. XXXV, p. 259. — Dernien : Thèse de méd., Montpellier, 1906. 2 ]] serait sans doute injuste d'appeler cetle bande la bande de Menzies, comme le proposent Ville et Derrien, car Vila et Piettre font valoir, non sans raison, que, Si Menzies a aperçu cette bande avec des extraits fluorés d'organes, il n'a pas vu qu'elle provenait de la bande 2. 634, déplacce sous l'influence du fluorure, ce qui constitué après Tout te fait essentiel, pour ce qui regarde la question Spectroscopique. # Visa et Pretrre : Comptes rendus. avril, mai, juin 1905, 18% e Signalons encore un intéressant travail de Piettre et Vila’ sur l'hématine cristallisée et ses produits de décomposition, et une série de recherches im- portantes de Küster, de Marchlawski et d'autres sur les acides hématiques et sur l'hémopyrrol, mais dont un exposé d'ensemble est encore difficile à l'heure actuelle. Je noterai à ce propos une réclamation de priorité de Marchlewski, relative à une indication erronée reproduite par divers traités el qui consiste à altri- buer à iloppe-Seyler et à Nencki le mérite d'avoir signalé les premiers la parenté chimique de la chlorophylle et du pigment sanguin. D'après Mar- chlewski, ce rapprochement aurait été fait pour la première fois par Schunk sen. et par lui-même”. II est, en réalité, beaucoup plus ancien, car la pre- mière démonstration de cette parenté date des recherches de A. Gautier” sur la chlorophylle, publiées en 1879. IIL. — QUESTIONS RELATIVES AUX ÉCHANGES NUTRITIFS. S 1. — La dégradation des acides gras dans l'organisme et la théorie de la « S-oxydation ». On est encore très mal renseigné sur la manière prend pour simplifier ces longues chaines carbonées des acides stéarique, palmitique et oléique, dont nos tissus détruisent chaque jour des quantités si importantes (de 50 à 100 grammes et souvent davantage). Il n'est pas vraisemblable que cette combustion soit d'emblée totale, sans production transitoire de termes inter- médiaires. La présence, dans le beurre, des glycé- rides de tous les acides gras pairs, c'est-à-dire à dont l'organisme S'y nombre pair d’atomes de carbone, depuis CG” jus- qu'à Cet même C?, est au moins un indice que cette simplification pourrait avoir lieu par étapes successives. S'il en est vraiment ainsi, il se trouve que, lorsque ces déchets sont descendus à un certain niveau, mettons celui des acides gras en C”, le pro- blème de leur destinée se confond ou tout au moins — Bull. Soc. chim. (3), t. p. 685, 1906. 3 Prerrre et Vica : Zbid., 1. CXLI, p. 1041, 1906. 2 Cf. L. Marcnzewski : Zeitschr. f. physiol. t. XLIV, p. 423, 1905. A Gaüraen : CL RM EXXXIX; p.861, 1879-=AVoici comment s'exprime A. Gautier à la page 863 de ce Mémoire. « 11 résulte de mes recherches que la chlorophylle.… doit être en réalilé rapprochée de la bilirabine au point de vue XXXI1, 947, 1905;"et .tXXXV, Chem. de ses aptitudes, de ses réaclions, de sa composition élé- mentaire ». Et, après avoir donné les preuves de celte ana- logie, À. Gautier termine ainsi quelques réflexions sur l'intérèt que présente la chlorophylle au point de vue de la Biologie générale : « … Substance d'une si grande impor- lance pour la physiologie végttale et dont les relalions, ci- dessus exposées, avec la bilirubine, et par conséquent avec | matine dérivée de la couleur du sang, rendent l'étude nléressante encore ». E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE se trouve associé à celui de la dégradation des. acides aminés, c'est-à-dire des protéiques. On sait, en effet, que, par « désamination », les organismes font de ces acides des acides « oxygras »‘ ou bien, si la désamination se fait par réduction, des acides gras. Ne voit-on pas la putréfaction transformer, par exemple, l’alanine, la phénylalanine et le tryp- tophane respectivement en acides propionique. phénylpropionique et indolpropionique, ou encore,. quand il y a en mème temps amputation d’un chainon, ne voit-on pas de la phénylalanine, de la tyrosine et de l'indol sortir respectivement les acides phénylacétique, oxyphénylacétique et indol-. acélique? Que l’on n'objecte pas que ce sont là des exemples tirés tous de la chimie de la putré- faction ; il est, en effet, démontré par A. Gautier? que les procès essentiels du travail anaérobie des. microbes se produisent aussi au sein des tissus. Le problème de la simplification des acides gras. intéresse donc à la fois la physiologie des graisses et celle des protéiques. Que sait-on sur ce procès? Ce problème n'a pas pu être abordé directement, car aussi bien les acides gras élevés qui figurent dans nos graisses alimentaires que les acides plus. simples ajoutés à la ration, acétates, propionales, butyrates, etc., disparaissent dans l'organisme sans. laisser de traces. Il faut, pour saisir quelque chose du mécanisme de cette opération, rendre plus dif- ficile la combustion de ces corps en les prenant accolés à des complexes aromatiques qui ralentis- sent leur oxydation. Tel a été le point de départ du travail bien connu de Knoop', qui a conduit cet auteur à sa théorie dite de la B-oxydation. Knoop a trouvé que les acides aromatiques doni la chaine latérale grasse (normale) présente un: nombre pair d'atomes de carbone sont éliminés à l'état d'acide phénylacélique, tandis que, lorsque: cette chaine est formée d’un nombre impair de maillons, l'acide est éliminé à l'état d'acide benzoïque‘. Knoop explique ce résultat de la manière suivante : si l'acide phénylvalérique, par- exemple, qui est à chaine latérale zxpaire, passe dans l'urine à l'état d'acide benzoïque, cela tient à ce fait que l'oxydalion s'attaque toujours au. chainon Bet produit, par la rupture entre & et f,. l'amputation de deux chaînons. Le nouvel acide formé, qui sera l'acide phénylpropionique, est encore attaqué en 6, el l’amputation de deux nou- veaux chaînons laisse enfin l'acide benzoïque : 1 Par exemple, ils transforment l’alanine ingérée en acide . lactique (Voy. la /tevue du 15 janvier 1905, p. 24). 2 Voy. nolamment la evue du 15 mars 1905, p. 192. # F, Kxoop : Beitr, z. chem. Physiol. und Pathol., t&. NI, p. 150, 1905. 5 En réalité, ces deux acides apparaissent dans l'urine res- peclivement à l'état d'acides phénacéturique et hippurique- à cause de leur copulation avec le glycocolle. E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE Acide que. phénylvaléri - CSH5— CH°— CHE — CHS- - CHÈ— CON. 8 œ Acide phénylpropio- nique. CSH5 — CH2-:- CH? — COPH. 3 x Acide benzoique. C°H5 — CO®H. Au contraire, un acide à chaine latérale paire, comme l'acide phénylbutyrique, donnera, par l'attaque en 6, l'acide phénylacétique, qui, ne pos- sédant qu'un chaïnon «, ne peut pas être attaqué en Bet s'élimine par conséquent tel quel : Acide phénylbutyrique . CSH5 — CH° — CHE- -CH?— CON 5 © CSS — CH° — CO°H x Acide phénylacétique. C'est cette oxydation en 5, aboulissant chaque fois à amputer de deux atomes de carbone la chaîne de l'acide, qui explique, dit Knoop, pour- ‘quoi, dans l'organisme, qui ne travaille qu'avec des acides gras pairs (ac. stéarique, palmitique, oléique), on ne trouve, dans le lait, par exemple, que les acides gras pairs, et aucun acide impair. On com- prend aussi pourquoi l'acide butyrique ingéré se transforme chez le diabétique en acide B-oxybuty- rique, substance mère des corps acétoniques de Turine diabétique : c'est un cas d'oxydation en 8, où le premier produit est saisi au passage : B e2 CHS— CHE — CH? — COOH CH°— CHOH — CH? — COOH Acide butyrique Acide B-oxybutyrique . A l'occasion d’une série de recherches très inté- ressantes sur, la dégradation des acides carbonés dans l'organisme, Friedmann a fait valoir, contre la théorie de Knoop, que l'oxydation physiologique en 6 est sans analogie en Chimie organique pure; mais l'objection tombe depuis que Dakin' a saisi in vitro el in vivo des produits d’oxydation en $. Ainsi, l'acide butyrique (normal) lui à fourni, en présence de l'eau oxygénée, l'acide B-oxybuty- rique, qui s'est dédoublé en partie en acétone et en acide carbonique, et les homologues supérieurs étudiés, acides caprylique, caprique, laurique, myristique, ont lous donné les cétones correspon- dantes en vertu de la mème réaction, ce qui montre bien que l'oxydation à attaqué la molécule en $. Enfin, chez l'animal, après ingestion d'acide phé- nylpropionique, il à pu retrouver dans l'urine, non seulement l'acide benzoïque, maisencore l'acide phé- nyl-8-oxypropionique et l’acétophénone, témoins de l'attaque de la molécule en 6. 8 a CSH5 — CH? — CH? — CO? CSH5 — CHOH — CHE — CO'H CSH5 — CO — CHS + CO* CH — CO°H Acide phénylpropionique , Ac. phényl-8-oxypropionique . ÉAGEtOphéN ONE MELON MN Acide benzoïque. . ? FriEnMaAN : Beitr, z. chem. Physiol. und Pathol., t. XI, p. 152, 1908. — Daxix : Zbid., p.404. — K\oop: Zhid., p.411. 185 Notons que l'oxydation ne parait pas avoir lou- Jours pour conséquente nécessaire l'amputation de deux chainons, puisqu'à côté de l'acide benzoïque, qui est produit par le départ de deux chainons, nous trouvons ici l'acélophénone, qui résulte du départ d'un seul chainon. Toutefois, cette amputation de deux chainons est probablement le procès biologique habituel, En voici une autre preuve. Lorsqu'on fai travers un foie de chien de l’acide butyrique en passer à circulation artificielle avec du sang de bœuf, celui-ci se trouve, à la sortie de l'organe, chargé d'acide acétylacétique et d'acétone, parce que l'acide butyrique, s'oxydant en 5, donne la succes- sion des corps suivants : 3 C2 CHS—( HE CHE ‘00H CH5 — CHOH — CH? — COOH CH — CO — CH: — COCH CH®— CO — CHS + CO? Acide butyrique ‘ Acide-8-oxybutyrique. Acide acétylarétique . ACÉLOTERC ES Ed Il suit de là que, si la règle de Knoop quant à l’amputation de deux chainons, consécutive à la B-oxydation, est exacte, les homologues supérieurs de l'acide butyrique à nombre de chainons pairs, comme les acides caproïque, caprylique et caprique (en C°, C* et C”) devront être cétogènes dans l’expé- rience ci-dessus, tandis que les acides valérique, œnanthique et pélargonique (en C’, C et C devront pas l'être. C'est ce que l'expérience vérifie”. ne $ 2. — De l’origine des corps acétoniques à l’état normal et chez le diabétique. A la question de la 8-oxydation se rattache, par un lien indirect, celle de l’origine des corps acéloni- ques. On entend par corps acétoniques le groupe des trois substances : acide B-oxybutyrique, acide acé- tylacétique et acétone, dont la présence dans l'urine constitue l’acétonurie physiologique ou patholo- gique* et dont la production par $-oxydation de l'acide butyrique est expliquée ci-dessus. On a d'abord admis que ces corps sortent uni- quement des graisses. Des recherches nombreuses ont établi, en effet, que, chez les diabétiques graves, l'acide butyrique ingéré se transforme en acide 8-oxybutyrique. Quant à l'origine de cet acide dans les conditions ordinaires, on se l’expliquait en admettant qu'il sort des acides gras supérieurs, sans doute par dégradations successives ; mais, en même temps, on se rendait compte de linsufli- sance de cette explication. De fait, il est établi 1 Eurpenet Marx: Beiträgez.chem. Physiol. und Pathol., t. XI, p. 318, 1908. 2 On sait combien l'une et l'autre peuvent êlre intenses. Dans l'urine d'un sujet à jeun depuis lrois jours, on a trouvé jusqu'à 16 grammes d'acide B-oxybutyrique, et chez des diabétiques au moment du coma, on à assisté en quatre jours à l'élimination de plus de 400 grammes de Corps acé- toniques (Voy. LameziG : Vord médical, 19° décembre 1907). 180 E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE aujourd'hui que les corps acéloniques peuvent sortir aussi des albumines,. Une telle production peut avoir lieu d'abord par l'intermédiaire de l'acide butyrique normal, qui se trouve en grande quantité parmi les produits de la putréfaction des matières protéiques (A. Gautier et Etard), etsur lequel Neuberg et Rosenberg” viennent d'attirer à nouveau méme temps qu'il sort vraisemblablement de l'acide l'attention, en montrant en glulamique par désamination et décarboxylation. La méthode des circulations artificielles, déjà incidemment citée plus haut, à permis de démon- trer directement, pour d'autres acides aminés, qu'ils peuvent être des producteurs de corps acéto- niques. En effet, la leucine, la tyrosine, la phényla- lanine, ajoutés à du sang (de bœuf) traversant un chien, augmentent considérablement la quantité d'acétone ? que cel organe” cède normale- foie de ment au sang. Ajoutons que, contrairement à ce que Embden avait cru d’abord, et en conformité avec les observations faites sur l’homme diabé- tique par Baer et Blum‘, celte transformation des acides aminés en acélone passe aussi par le stade acide $-oxybutvrique et acétylacétique (Embden et Engel”). On trouve, en effet, dans le sang de l'acide acélylacétique”, ce qui démontre le passage par l'acide 8-oxybutyrique”. Tous les corps célogènes actuellement connus passent done, au cours de leur dégradation, par le stade butyrique, puis 8-oxybutyrique et acétyl-acé- tique. Or, ces corps sont très abondamment repré- sentés dans l'organisme, puisque ce sont les acides gras à nombre pair d’atomes de carbone et plu- sieurs acides aminés, leucine, tyrosine, phénylala- nine, acide glutamique, lesquels forment une frac- üion importante de la molécule. protéique. La transformation de ces composés en corps acéto- uiques élant, d'après Embden et ses collaborateurs, une fonction normale du foie, il suit de là que "A. Gavmen el Eranv : Article Pulréfaction du Ler suppl. du Dictionnaire de Wurtz, p. 1320. — NeuserG el ROSENBERG : Biochem. Zeïtsehr., {. NIL, p. 118, 1908. * Euepex el KaLgerrau : Pathol., 4 NI, p. l. XI, p. 329, 1908. * Le poumon, le rein et le musele ne cèdent pas d'acétone au sang qui les traverse (Embden et Kalberlah, Zoe. eil.). Ces auteurs avaient, en effet, observé qu'après ingestion de leucine, de tyrosine, etc., par des diabétiques, la quantité d'acide B-oxybutyrique augmente dans l'urine (Arch. f. exp. Path. u. Pharm., 1. LI, p. 108, 1906) * Eubpex et EXGEL : l. XI,p. 323, 1908. ® Cet acide a été dosé à côté de l'acétone par le nouveau procédé de Emden et Schliep ! Zentralbl. f..d. ges. Physiol. u. Pathol. d. Stoffwechsels, N. E., t. II, p. 7, 1907). : Le mécanisme du passage des acides aminés à l'acide bulyrique, puis f-oxybutyrique, ele., a élé étudié par Embden, Salomon et Schmied (Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., 4 NU, p. 147, 4906) el par Emden et Marx (Zhid., L. XI, p. 318, 1908). Beitr. z. chem. Physiol. u. 120, 4906. — EmBpex el Larres : Zhid., Beïlr. z. chem. Physiol. u. Pathol., l'acide fG-oxybutyrique et l'acide acétylacétique doivent être considérés comme des produits n0r- maux de la désassimilation. Cela posé, on doit se demander où commence la déviation pathologique qui aboutit chez le diabé- tique à l’acidose, c'est-à-dire à l'encombrement de l'organisme par les acides acéloniques. Notons. d'abord que le siège de cette déviation parait étre, du moins au premier rang, le foie, car, si l’on fait passer du sang (de bœuf) à travers un foie de chien enlevé à un animal phloriziné ou dépanceréaté, c’est-à-dire en état d’acétonurie pathologique, on constate que ce sang, auquel un foie normal cède, pour 1.600 de sang circulant pendant une heure, de 12 à 27 mgr. d’acétone par litre, en recoit de l'organe malade de 68 à 139 mer. par litre”. Quant à la nature de cette déviation, elle parait consister dans l'impuissance de l'organisme à dé- truire lacide acétylacétlique. Le foie normal du chien et du bœuf, mis en purée en présence de cet acide, le fait disparaitre rapidement en le trans- formant en corps qui ne fournissent plus d'acé- tone par distillation. L'acétone ajoutée est détruite aussi, mais plus lentement, ce qui est conforme à ce que l’on observe aussi chez l'homme après ingestion de ces deux corps. Le muscle, la rate, le rein, possèdent aussi ce pouvoir destructeur, mais tous ces organes doivent être pris absolument frais. Comme cette destruction n’est pas accentuée par un courant d'air, il s'agit vraisemblablement non d'une oxydation, mais sans doute d’un dédou- blement, peut-être en acide acétique. S 3. — Les produits de l'uricolyse. On à montré, dans une précédente revue, que l'acide urique recueilli à la sortie de l'organisme est la différence entre la quantité d'acide formée à partir des bases nueléiques et la quantité détruite par une diaslase uricolytique. À quels corps aboutit celte destruction? Wiechowski à répondu récem- ment à cette question en montrant : 4° que de l'acide urique passant en circulation artificielle à travers des foies de chien ou de bœuf disparait entièrement et est transtormé en allantoïne ; 2 que l'allantoïne est un produit normal de la désassimi- lation et un constituant de l'urine du chien et du lapin (jusqu'à O gr. 28 en vingt-quatre heures), même pendant le jeûne; 3° que l'acide urique, injecté sous la peau du chien, passe dans l'urine en partie en nature (1/5), et pour le reste à l'état d'allantoïne*, constant E. Lambling, Professeur à l'Université de Lille, 1 Ewmpex et Larres : Zbid., t. XI, p. 327, 1908. = Waiscnowski : Beitr.z. chem. Physiol. u. Pathol., t. IX, p. 295, 1907, et €. XI, p. 109, 1908. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 187 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Fabry (E.), Professeur à l'Université de Montpellier. — Traité de Mathématiques générales, à l'usage des chimistes, physiciens, ingénieurs et des élèves des Facultés des Sciences, avec une Préface de M. G. Darnoux, Secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences. — 1 vol. in-8° de 440 pages. (Prix : 9 {r.) Hermann, éditeur. Paris, 1909. Le livre de M. Fabry s'adresse principalement, comme l'indique M. Darboux dans son intéressante Préface, aux étudiants de nos Facultés des Sciences, qui se destinent plus particuiièrement aux sciences expérimentales, et qui ont besoin de notions de Ma- thématiques supérieures. En effet, sans parler de la Physique mathématique, les sciences appliquées, Phy- sique et Mécanique industrielles, la Chimie phy- sique, etc., exigent aujourd'hui une sérieuse initiation mathématique; aussi voit-on se multiplier dans nos Facultés les cours de Wathématiques générales qui ont pour objet de mettre un éludiant, n'ayant que les con- naissances acquises dans notre enseignement moyen, au courant des principes généraux de l'Analyse et de leurs principales applications géométriques et méca- niques. Ces cours ne font pas double emploi avec ceux de Mathématiquess péciales des Lycées, qui sont parti- culièrement destinés à la préparation aux grandes Ecoles scientifiques; ils doivent être à la fois plus simples et plus étendus, parce qu'ils s'adressent à des étudiants qui ne sont pas spécialisés dans l'étude des Mathématiques, et qui, néanmoins, doivent ac- quérir des notions assez élevées. Du reste, on tend aujourd'hui à donner ce caractère à nos cours de Mathématiques spéciales, et, précisément, le livre de M. Fabry s'adapte très bien à cette tendance. La première partie : A/gèbre, qui comprend quatorze chapitres, est un cours complet qui sera consulté avec profit dans nos Lycées; l’auteur s'y montre soucieux de la rigueur et y introduit certains modes récents d'exposition : nous citerons, par exemple, l'emploi de la plus grande et de la plus petite limite dans la théorie des séries; à noter aussi que l’'exponentielle est in- troduite, selon Cauchy, par son développement en série entière et non plus, suivant la tradition, comme limi'e de (: +2) pour m infini : c'était la méthode 1 déjà saivie dans l'ouvrage similaire de M. Vogt. La seconde partie : Géométrie analytique (16 cha- pitres) contient un résumé très complet des propriétés générales des lignes et des surfaces, y compris la cour- bure et le théorème de Meusnier. Naturellement, il à fallu être très bref sur les applications particulières : c'est ainsi que l'étude des lignes et des surfaces du second ordre est réduite au stricl nécessaire. La troisième partie : Analyse (9 chapitres) contient tout ce qui est essentiel au physicien; ici, saufle calcul des quadratures et les cas les plus simples d'intégra- tion des équations différentielles, on se trouve en face de notions étrangères au cours de Mathématiques spé- ciales : intégrales multiples, intégrales curvilignes et de surfaces, équations aux dérivées partielles; ce sont là des sujets fondamentaux au point de vue de la Phy- sique, et M. {Fabry y insiste avec raison; citons, par exemple, les chapitres consacrés à la série de Fourier et aux formules de Green et de Stokes. Enfin, dans une quatrième partie, l'auteur expose très succinctement (6 chapitres) les notions ivdispen- sables de Mécanique : Cinématique, Dynamique el ET INDEX Statique, qui lui permettent d'établir les théorèmes fondamentaux de la Dynamique des systèmes matériels. Cet ouvrage, qui est ainsi très complet sous une forme concise, sera bien accueilli par les étudiants de nos Facultés, et aussi dans les classes de Mathéma- tiques spéciales de nos Lycées. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. Sauvage (Edouard), Zagénieur en Chef des Mines, Professeur à l'Ecole nationale supérieure des Mines et au Conservatoire national des Arts et Métiers. — La Machine locomotive. — 1 vol. in-16 de 388 pages avec 312 figures. (Prix : 5 fr.) Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1909. | Le personnel de la Traction des Chemins de fer, auquel l’éminent professeur de l'Ecole des Mines dédie la cinquième édilion de cette substantielle étude des locomotives, lui sera reconnaissant, car ce petil livre répond entièrement au programme de l'examen auquel le personnel de la locomotive est soumis par l'arrêté du Ministre des Travaux publies du 3 mai 1892 : cel examen a le double objet de démontrer qu'on peut conduire un train, et qu'on possède une connaissance approfondie des éléments des machines et de leur fonctionnement. Les mécaniciens trouveront dans l'ouvrage de M. Sauvage tout ce qu'ils doivent savoir à cet égard. Le livre se compose de neuf chapitres : LE Géné- ralités. 11. Chaudière. III. Mécanisme. IV. Châssis, suspension, roues. V. Types divers de locomotives. VI. Tenders. VII. Moyens d'arrêt des trains. VIE Con- duite des locomotives. IX. Service dans les dépôts. Les Compagnies francaises de chemins de fer ont largement distribué le Traité de M. Sauvage à leur per- sonnel, témoignant ainsi de leur haute estime pour l'ouvrage, et de sa réelle utilité pratique; cette nou- velle édition, remaniée pour tenir compte des derniers perfectionnements de la construction, sera encore plus appréciée que les premières. La description de quelques dispositifs surannés à été supprimée, alors que d'impor- tantes additions ont été faites, notamment pour la surchauffe, dont les applications se multiplient en Allemagne: de belles gravures ont été ajoutées et les meilleurs types de l'Est, de l'Ouest, de l'Orléans, des Compagnies anglaises et américaines sont représentés, à des échelles un peu trop petites, sans doute, pour permettre de les apprécier dans tous leurs détails, mais suffisantes pour connaître les ensembles. Signalons enfin quelques pages de conclusion, pleines de philo- sophie, qui témoignent des grandes et larges idées de l'auteur. Aimé NVirz, Correspondant de lEnslitu!, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lalle- Rause»sberger (F.), ancien Professeur à Ja Mili- tärlechnische Akademie de Berlin. — Théorie des canons à recul sur l'affût. — 1 vol. iu-8° raisin de 102 pages avec planches. Bridel et C, éditeurs, Lausanne, 1909. L'ouvrage de M. F. Rausenberger est une rédaction des conférences faites en 1905 à l'Académie Militaire de Berlin sur la théorie et le calcul des canons à recul sur l'affût. Outre les matières habituellement traitées, l'auteur à fait figurer dans le volume quelques considé- rations nouvelles relatives aux freins et aux récupéra- teurs. Etant donnée la date de la rédaction de lou- vrage. le lecteur ne devra pas s'étonner de n'y voir point traitée la question des canons à lancer, actuelle- ment à l’ordre du jour et qui a déjà fait l'objet de tra- vaux importants (Brevet Deport). 188 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques Matisse (Georges). — Le principe de la conservation de l’assise et ses applications. — 1 broch. 1n-8° de 65 pages. Hermann, éditeur, Paris, 1909. On sait qu'une quantité d'énergie, quelle que soit sa provenance, peut se mettre sous la forme d'un produit de deux facteurs, que l’on désigne souvent sous les noms d'intensité ou tension et de capacité de l'énergie. Pour éviter toute ambiguité, l'auteur emploie le mot assise à la place de celui de capacité. Ainsi la quantité d'électricité est l’assise de l'énergie électrique, la dis- tance est l’assise de l'énergie mécanique, la masse de matière est l’assise de l'énergie chimique; l'énergie élastique a pour assise le volume et l'énergie thermique l’entropie (dans ce dernier cas, le phénomène doit être réversible). L'assise obéit à une loi générale de conservation, loi bien connue pour la quantité de matière et la quantité d'électricité, et que M. Matisse étend très simplement au volume et aux autres assises. Supposons maintenant que, dans l'étude d’une trans- formation, l’on fasse décrire au corps un cycle fermé; on va exprimer la valeur élémentaire de l’assise en fonction des deux variables indépendantes, et on écrit que l'expression est une différentielle exacte. Joignons- y l'équation analogue et classique de la conservation de l'énergie, et nous obliendrons une série de relations entre les diverses grandeurs. L'auteur nous montre la marche à suivre dans un certain nombre d'exemples relatifs à l'Electricité pure, à la Chimie, à l'Electro-chimie. On arrive ainsi (pour ne citer que quelques exem- ples) à déterminer le sens du courant induit en partant de la règle électro-dynamique d'Ampère, el à trouver, en Chimie, la variation de la chaleur de réaction en fonction de la pression. Par les mêmes procédés, l’auteur démontre l'équation de Gibbs-Helmholtz concernant les piles réversibles"; d’ailleurs, ici, l'application directe du principe de Car- not mènerait plus rapidement au but. Dans tous ces problèmes, les calculs ne présentent aucune difficulté. La méthode proposée par M. Matisse est des plus ori- ginales, et nous recommandons la lecture de son petit livre à tous ceux qui s'intéressent aux généralisations thermodynamiques. P.-Ta. MULLER, Professeur de Chimie physique à l'Université de Nancy. Ewing (J.-A.), Honorary Fellow of King's College, Cambridge. — The mechanical production of Cold. — 1 vol. in-8° de X-204 pages avec T figures et 1 planche. University Press, Cambridge, 1909. Ce livre est une réimpression des Conférences sur la production mécanique du froid, faites devant la Société des Arts en 1897, conférences auxquelles des additions et des corrections ont été apportées pour tenir compte des progrès accomplis par l'industrie frigorifique depuis onze années. Le livre est partagé en six chapitres qui correspon- dent à autant de sujets de conférences. La première a pour litre: Principes généraux de la réfrigération; c'est de la Thermodynamique pure. L'auteur considère une machine réfrigérante idéale et il étudie son coeffi- cient de rendement dans le cas où elle suit un cycle de Carnot renversé. Chemin faisant, il montre les com- modités du diagramme entropique pour l'étude des machines à froid. 1? La première parlie de la démonstration exigerait, à notre avis, une légère retouche. L'auteur traite l'énergie chimique de la pile comme une simple quantité de chaleur, alors que c'est, en réalité, une énergie interne. Cette imper- fection, qui pourrait prêter à confusion, s'élimine d'elle- méme dans la suite, et n'est, du reste, pas reproduite dans la seconde partie du raisonnement. Les machines à froid peuvent se classer en deux catégories tout à fait distinctes : les machines à ahsorp- Lion ou à affinité, dans lesquelle; la production du froid est due à une action chimique, et les machines à com- pression, qui sont des machines thermiques propre- ment dites, disposées pour la production du froid. Les machines à compression se partagent elles-mêmes en deux familles très différentes, selon que le corps qui travaille est l'air ou un gaz liquéfié. La deuxième con- férence est relative aux Wachines à air; elle contient un historique intéressant des machines réfrigérantes à air, qui en attribue la première invention au Dr Gorrie, de la Nouvelle-Orléans, vers 1845, invention qui fut analysée et critiquée avec beaucoup de soin par Sir W. Siemens en 1857. En 1852, le sujet attira l'attention de Lord Kelvin et de Rankine. Lord Kelvin, en parti- culier, décrivit avec précision une machine, qui, per- fectionnée et rendue pratique, est devenue la machine bien connue de Coleman. Les Machines à absorption forment le sujet de la troi- sième conférence. Il y en a deux espèces : dans la première, la vapeur employée est la vapeur d’eau et celle-ci est absorbée par l'acide sulfurique; dans la seconde, la vapeur est constituée par le gaz ammoniac et celui-ci est absorbé par l’eau. Entre les mains du Professeur Denton, la machine à ammoniaque à absorption à acquis un degré élevé de perfection, en transformant en froid 26°/, de la chaleur fournie. Les Machines réfrigérantes à gaz liquélié sont trai- tées dans la quatrième conférence, qui est naturelle- ment la plus longue de toutes. auteur compare l’efli- cacité thermodynamique de l'acide carbonique, de l'ammoniac et du gaz sulfureux; il étudie la forme et l'aire des diagrammes entropiques des trois sortes de machines à froid qui leur correspondent, l'influence de la compression sèche et de la compression humide. 1 signale l'influence de la température sur le coeffi- cient de rendement, plus particulièrement dans le cas de l'acide carbonique. Après une courte esquisse historique, il donne quelques détails sur la machine à acide sulfureux de Pictet, sur les machines à ammo- niac de von Linde etde De la Vergne, sur les machines à acide carbonique de Hall. Chose curieuse, les machines françaises à chlorure de méthyle de Douane sont complètement passées sous silence. Le sujet de la cinquième conférence est double : Essais des machines réfrigérantes et usages de la réfrigération mécanique. L'auteur insiste plus particu- lièrement sur les essais de la Commission de Munich, conduits par le Professeur Schrôter, et sur les résultats pratiques fournis par les trois sortes de machines à gaz liquéfié qui l'intéressent. Quant aux usages du froid industriel : fabrication de la glace, emploi dans les brasseries, conservation et transport de la viande, entrepôts frigorifiques, refroidissement de l'air, con- servation du poisson et des fruits, skatings-rinks, in- sufflation d'air sec, refroidissement des soutes à poudre, l'auteur les décrit sommairement. La sixième el dernière conférence est consacrée aux Applications des très basses températures, c'est- à-dire à l'air liquide considéré soit au point de vue physique de sa liquéfaction, soit au point de vue indus- triel de sa liquéfaction en grand et de la séparation de l'oxygène et de l'azote de l'air par voie purement phy- sique. Pour n'être pas exclusif, l'auteur à inséré dans ce chapitre très intéressant la liquéfaction de l'hydro- gène et celle de l'hélium. Quelques Notes terminent ce volume; elles se rap- portent au diagramme entropique, au rendement du cyele à air de Bell-Coleman, à des tables de propriétés de l'ammoniac, de SO?, de CO® et de la vapeur d’eau (en unités anglaises), au calcul du rendement théo- rique d'une machine à ammoniac quand la compres- sion est adiabatique et à des diagrammes imaginés par le D° Mollier pour le calcul rapide des machines réfrigérantes à gaz carbonique. Le livre du Professeur Ewing contient, sous une BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 189 © —_—_—__ —_—_—_—_——_—_—_—_— er forme extrêmement condensée el très agréable à lire, «Je très nombreux renseignements sur la production mécanique du froid. Je n'aurais que des éloges à lui adresser si loubli des machines réfrigérantes à chlorure de méthyle n'était pas une chose aussi absolue, ce que je trouve regrettable en principe. E. Maruuas, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Toulouse. Bouchard (Georges), Docteur ès Sciences, Fabricant de savons. — Introduction à l'étude des matières grasses. — 1 vol. 1u-8° de 110 pages. Duncd et Piunat, éditeurs. Paris, 1909. Voici un ouvrage concu d'une façon extrêmement originale, intéressante, et qui change heureusement de l'habituelle compilation de la plupart des Traités de Chimie analytique. L'auteur s'est moins attaché à «écrire les méthodes qu'à en exposer les principes, en faire l'étude critique, les coordonner logiquement; ætlatâche était ainsi autrement difficile, mais utile, que s'il se fût agi seulement de reproduire des descriptions. Comme le fait remarquer M. Bouchard, il existe deux catégories de méthodes d'analyses des graisses. On peut, à l'aide de réactions plus ou moins empi- riques, déterminer ce que l’on appelle faussement « la pureté » du produit; c’est-à-dire, par exemple avec HCI sucré, chercher si telle huile d'olive est mélangée ou non de sésame. Il existe une foule de ces procédés «qui, le plus souvent, n'ont aucune valeur scientifique, ou même pratique. En voici un exemple: Pendant dix ans, on aceusa à tort les huiles d'olives tunisiennes «l'être fraudées, parce qu’elles n'avaient pas tout à fait les mèmes réactions que celles de Provence. — Et il y a, d'autre part, les méthodes analytiques « vraies », où lon détermine, sépare et dose les différents consti- tuants des corps gras. Ge sont, on le comprend, les seules qui importent en Chimie industrielle; ce sont les seules qui devraient importer en alimentation, si le consommateur n'avait l'esprit faussé par les pré- jugés, le bluff de la grande presse sur les « fraudes » et celui du Ministère de l'Agriculture sur la « répres- sion » des fraudes. Ces méthodes-là sont moins connues, plus difficilement applicables. M. Bouchard s’est exclusivement attaché à les étudier. Après un court exposé de l'histoire de la Chimie des * matières grasses (au sens industriel du mot), l'auteur passe successivement en revue le dosage des acides gras libres et des corps gras neutres; la détermination «es indices de saponification ; les méthodes d'analyse applicables au dosage de la glycérine, des hydrocar- bures, lactones, résines, des différents acides. Le volume se termine par une bibliographie très complète où les travaux originaux sont mentionnés dans l’ordre de publication. A la fois chimiste et industriel, M. Bouchard s'est particulièrement attaché à montrer le role de toute première importance de l'analyse dans la fabrication des matières grasses et de leurs dérivés. Ce n’est pas faire œuvre inutile. C'est un stéarinier, comme le rappelle l'auteur, d’après l'enquête d'un grand pério- dique, qui prétendait, en 1904, que « l'industrie de la bougie n’a rien de commun avec la Chimie ». Un autre gros industriel disait « que la Chimie ne peut servir absolument à rien dans l’industrie du savon ». Sans doute, les procédés analytiques de la Chimie des corps gras sont encore bien insuffisants et incomplets; ils peuvent cependant rendre les plus grands services. Et l'aide du chimiste est indispensable au fabricant qui sait employer intelligemment le technicien, sans le croire omniscient ou omnipotent, et lui demander de résoudre instantanément toute difficulté. La lecture de l'ouvrage convaincra les industriels et ne manquera pas d'aider beaucoup les analystes. A ce dernier point de vue, peut-être faut-il regretter que M. Bouchard soit, de parti pris, un peu bref: « L'examen des méthodes que j'ai cru devoir passer sous silence, dit-il, m'a donné plus de peine que l'étude de celles que je viens d'exposer. » Il eût été bon d’insister sur {outes ces méthodes et d'en montrer les défauts. Du reste, dans sa concision voulue, le livre, s'il est peut- être moins commode pour le praticien, gagne certai- nement en unité el en clarté. Henri ROUSSET, Ingénieur-Chimiste. 3° Sciences naturelles Thoulet (J.), Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Nancy. — Précis d'analyse des fonds sous-marins actuels et anciens. — 1 vol. petit in-8° de A7 pages. Libraïrie militaire Chape- lot et C°, Paris, 1908. Ce nouvel ouvrage de M. Thoulet est le fruit de vingt années de travail. On sait, en effet, que le savant professeur de Nancy a entrepris depuis longtemps l'étude détaillée et complète des dépôts marins actuels ou géologiques. Il lui à fallu imaginer des méthodes spéciales ou faire des applications nouvelles de celles qu'on emploie dans d'autres branches. C'est une bonne fortune pour ceux qui étudieront le même sujet de posséder le Précis de M. Thoulet, car il n'existe aucun ouvrage semblable en France ou ailleurs: ils y trouveront réunis tous les renseignements dont ils ont besoin. Un Précis d'analyse est naturellement trop technique pour qu'une analyse en soit bien facile. Dans une importante et fort intéressante introduction, l'auteur expose les généralités sur les sédiments marins, leur origine variée; il indique et démontre la nécessité de les étudier mécaniquement et aux points de vue miné - ralogique, chimique et biologique, ainsi que l'intérêt qu'il y a à les connaitre en vue d'applications diverses (pêches, télégraphie sous-marine, navigation, etc.) Il étudie le mode de formation des divers sédiments et expose une série de problèmes à résoudre. Dans un autre chapitre, nous avons l'historique du sujet, puis l'auteur passe en revue les procédés de récolte et de conservation des échantillons, les instru- ments et accessoires utiles pour l'analyse, la classifi- cation. Viennent ensuite les détails des analyses méca- nique, physique et chimique. L'analyse biologique a été laissée complètement de côté; les éléments devront ètre réunis à part et soumis à des spécialistes. Après avoir donné quelques exemples d’une analyse complète de sédiments, l'auteur passe à la confection des cartes lithologiques. Un dernier chapitre, et non le moins important, est celui relatif à la description microscopique des minéraux les plus communs dans les fonds de mers et les roches géologiques. M. Thoulet a réuni là de nombreux détails d'analyse très précieux, surtout quand il s’agit de reconnaitre des fragments extrèmement ténus qui ne mesurent le plus souvent que quelques centièmes de millimètre. D' RicHaRp, Directeur du Musée océanographique de Monaco, Charles-Roux (François. — La Production du Coton en Egypte. — 1 vol. in-8° de 410 payes (Prix: 7 fr. 50). Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. L'ouvrage que vient d'écrire M. F. Charles-Roux est, à vrai dire, une histoire, abondamment documentée, de la culture du Coton en Egypte, depuis les temps les plus reculés. L'auteur montre, tout d'abord, que la culture du Cotonnier, si elle a pris dans le dernier siècle un essor jusque-là inconnu, était cependant pratiquée — du moins, dans la Haute-Egypte — depuis l'Antiquité, et que, non seulement elle suffisait aux besoins du pays, mais que l'Egypte exportail même quelque peu de coton dans d’autres régions de l'Afrique du Nord et dans les Etats chrétiens de la Méditerranée. Des cita- tions intéressantes de Pline et de Pollux, entre autres, | sont fournies à l'appui de cette thèse, qui a d’ailleurs La) pour elle la plus grande vraisemblance, puisque cer- laines espèces du genre Gossypium paraissent exister à l'état spontané dans la Haute-Egypte et que l'idée d'employer le Coton à dû venir tout naturellement aux premiers habitaats. M. Charles-Roux dit, en parlant du pays : « Son climat, son sol, conviennent parfaitement à la culture du Cotonnier et la plupart des phénomènes physiques qui caractérisent la vallée du Nil s'adaptent sans diffi- culté aux exigences de cet arbuste » (p. 119). Sur cette question, M. F. Charles-Roux nous per- mettra de ne point partager son opinion, et la meil- leure preuve que les conditions climatériques naturelles de la Basse-Egypte ne conviennent pas exactement à la culture du Cotonnier, c'est que le cultivateur égyptien se voit obligé de remplacer la pluie absente par l’eau du Nil, prise dans des canaux artificiels et amenée à la surface du sol par des machines élévatoires. Ce qui est vrai, et ce que l’auteur fait admirablement ressortir, c'est que de nombreux et importants travaux ont permis à l'eau du Nil de se répandre aussi loin que pos- sible dans le pays pour porter la fertitilé dans des régions que la sécheresse de l'été rendrait complète- ment arides, et c'est grâce à ces travaux qu'il est devenu possible d'entreprendre la culture du Cotonnier en saison sèche. « Dans aucun pays, à dit Napoléon, et l'auteur le rappelle à propos, l'Administration n’a autant d'influence sur la prospérité publique. Le Gou- vernement en France n'a aucune influence sur la pluie ou la neige qui tombe dans la Beauce ou dans la Brie ; mais, en Egypte, le Gouvernement à une influence immédiate sur l’inondation qui en tient lieu. » Ce qui était vrai autrefois, quaud le système des inondations élait seul en vigueur, l'est peut-être encore davantage aujourd'hui, avec le système si complexe des irrigations, qui exige une réglementalion spéciale et rigoureuse. L'auteur trace un tableau très net des conditions qui ont présidé à l'établissement des grandes cultures de cotonniers sous le règne de Mehémet-Ali et qui ont assuré le développement de ces cultures; il met eu évidence les multiples facteurs d'un progrès remar- quable, que des tableaux suggestifs traduisent de la facon la plus nette et la plus démonstrative. M. F. Charles-Roux n'a pas eu la prétention de traiter spécialement la question du Cotonnier au double point de vue botanique et agricole; aussi ne lui reprocherons-nous ni sa documentalion botanique empruntée à des géographes, ni la partie agricole quelque peu sacrifiée. Mais nous louerons sans réserve le tableau et l'historique des grands travaux concus el entrepris (le plus grand nombre, à l'origine, par des Français) pour doter l'Egypte d'un système d'irri- sation, de même que l'exposé très clair et bien docu- menté des conditions dans lesquelles se fait le com- merce du Coton, soit en Egyple, soit dans les pays d'exportation. M. F. Charles-Roux à fourni un travail intéressant et instructif, que consulteront avec fruit les commerçants et les industriels qui utilisent le coton égyplien, de mème que les nombreux touristes qui se dirigent de plus en plus nombreux vers l'Egypte el qui ne s'intéressent pas seulement aux innombra- bles et grandioses monuments qu'une civilisation ancienne à semés à chaque pas dans la vallée du Nil, mais qui entendent aussi connaître l'Egypte dans le présent pour en dégager lesfpromesses d'avenir. Hennt LECOMTE, Professeur au Muséum Von lhering (H.), Lirecteur, el von lhering/R.), Conservateur du Musée Pauliste, à Sao-Paulo. — Catalogos da Fauna Brazileira. l'ome L : As aves do Brazil. (CATALOGUE DE LA FAUNE BRÉSILIENNE. Tome I : Les Orsgaux pu Brési). — 1 vol. in-8° de 486 pages, avee 2 cartes en couleurs. Museu Paulista, Säo-Paulo, 1908. M. le Professeur FH. von lhering à entrepris une œuvre considérable en commencant la publication BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INLEX d'un « Catalogue de la Faune brésilienne », travail dont l'utilité se faisait vivement sentir. Les divers Etats du Brésil ont été plus ou moins explorés au point de vue de leur faune, et les résultats de ces explorations restaient épars. M. H. von lhering a tenté de les réunir en les complétant par ses propres recherches, pour- suivies depuis vingt-huit ans dans les Elats de Rio Grande do Sul et de Sào-Paulo. Les riches collections qu'il a su amasser au Musée de Sào Paulo sont venues lui faciliter la besogne, en servant de base à son cata- logue. à Le premier volume paru, relatif aux Oiseaux, à été établi en collaboration avec son fils, M. R. von lhering. Il donne l’énumération, par ordres et par familles, des 400 genres, comprenant 1.5u7 espèces et 213 sous- espèces, actuellement reconnus au Brésil: pour chaque espèce, désignée par son nom latin et son nom vul- gaire, on a indiqué la distribution géographique et les sources bibliographiques qui la concernent. Un indice alphabétique des noms latins et des noms vulgaires termine le volume. Dans son Introduction, le Professeur von Ihering & {té amené à donner un aperçu sur les provinces z00-géographiques du Brésil. Il en distingue trois : la province amazomenue où hylvenne, formée de forêts magnifiques et ininterrompues; la province araxa- néenue où du Brésil central, et la province {upia- néenne où du littoral, ces deux dernières formées de forêts et de steppes; chacune de ces divisions peut, à son tour, se subdiviser en deux régions. Deux belles cartes en couleur, à la fin de l'ouvrage, donnent l’une les limites de ces provinces z00-géographiques, l'autre la répartition des forêts et des steppes dans touté l'Amérique du Sud. Il faut féliciter MM. von Ihering de la belle œuvre qu'ils ont commencé à édifier, en leur souhaitant de pouvoir la mener jusqu’au bout, 4° Sciences médicales Cornet (D' Paul), Professeur aux Ecoles municipales d'Infirmières des Hôpitaux de Paris. — Le régime alimentaire des malades. Considérations pra- tiques sur les aliments et les boissons diété- tiques et sur l’ Hygiène de l'Alimentation. — 1 vo/. in-8° de 48% pages. (Prix : 6 {r.) G. Steinheil, éditeur. Paris, 1909. Ce livre comprend cinq parties : 4° Généralités sur l'alimentation des malades; 2° Aliments diététiques tirés du règne animal; 3° Aliments diététiques du règne végétal; 4° Des boissons en diélétique; 5° Les régimes diététiques; Choix de formules alimentaires. « En diététique, écrit l’auteur dans sa Préface, il n'est pas facile, il peut même être dangereux de livrer l'organisme d’un malade à des théories mathématiques. . Le médecin guérit un malade comme il peut; il n'est et ne doit être que l’esclave, quelquefois aveugle, des circonstances si mobiles du malade et de la maladie. C'est pourquoi nous nous sommes gardés de fixer calo- riquement les régimes diététiques; il faut trop 2ndivi- dualiser. » Cette simple citation suffit à indiquer la tendance générale de l'ouvrage et l'esprit dans lequel il à été coneu et écrit. Aucune doctrine, aucune théorie géné- rale ou particulière, aucune synthèse physiologique ou pathologique, des documents assez nombreux, de va- leur inégale, recueillis par un clinicien qui a beaucoup observé, voilà tout le volume. D' ALFRED MARTINET. 5° Sciences diverses Picard (Edmond), Sénateur, Professeur à lUmiver- sité nouvelle de Bruxelles. — Le Droit pur. 4 vol. inA6 de la Bibliothèque de Philosophie seien- tilique du D' Toulouse. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1909. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 191 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 Février 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin àj- plique une nouvelle méthode à la détermination, sans intégration, des familles de Lamé composées de cy- clides de Dupin. — M. J. Hadamard montre que les équations corrélatives conduisent à un nouveau mode d'étude des lignes géodésiques. — M. P. Boutroux poursuit ses recherches sur les intégrales d'une équa- tion différentielle algébrique de premier ordre. — M. W. Stekloff montre que l'application du théorème généralisé de Jacobi ramène presque immédiatement le cas exceptionnel de Sophus Lie-Mayer à celui de Jacobi. — M. M. Fréchet démontre que toute fonction- nelle continue peut s'exprimer approximativement par une intégrale multiple. — M. J. Merlin présente le résullat des mesures micrométriques faites à l'Obser- vatoire de Lyon, lors de l'éclipse de Soleil du 28 juin 1908. — MM. M. Farman et Em. Touchet ont observé les étoiles filantes dans Ja nuit du 14 novembre 1907; près de la moitié étaient des Géminides, le reste des Léonides et des Lacertides. — M. G.-A. Tikhoff à constaté, en particulier sur les Pléiades, que la diffé- rence d'éclat des étoiles augmente, en général, avec la diminution de la longueur d'onde. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. de Kowalski à étudié le déclin de la phosphorescence à basse température ; ce sont les émissions à grande longueur d'onde qui diminuent plus rapidement d'intensité que celles dont les ondes sont plus courtes. — M.J. Meunier montre que la combustion sans flamme est réellement un mode de combustion vive comme l'explosion ou la flamme ; elle en diffère par la manière dont se propage la combustion à travers les couches gazeuses : celles-ci convergent vers le foyer d'allumage, qui est la sub- stance incandescente, et la combustion s'effectue seule- ment à sa surface, au lieu que, dans l'explosion, la marche de linflammation est divergente. — M. J. Du- claux étend aux colloïdes la notion de solubilité, qu'il définit par la concentration-limite au delà de laquelle ils prennent l'état solide lorsqu'ils sont comprimés contre une paroi semi-perméable. — M. O. Boudonard a reconnu que les charbons augmentent de poids à l'air, par suite de l'absorption d'oxygène. Les houilles à coke, oxydées à 100°, perdent complètement leur pouvoir cokéliant; de plus, elles renferment de l'acide humique, alors qu'initialement elles n'en contenaient pas. — M. G. Denigès à observé que la dioxyacétone, addilionnée d'un peu de KBr, donne des réactions colorées caractéristiques avec le gaïacol (bleue), l'acide salicylique (rouge framboise), l'acide gallique (violet foncé). — MM. A. Seyewetz el L. Poizat montrent que l'acide nitrique à 20 °/, oxyde vers l’ébullition un grand nombre de phénols et de quinones en formant de l'acide cyanhydrique. — MM. P. Freundler et Juillard ont constaté que, si l’on fait réagir le nitroso- benzène sur les amines grasses secondaires, on obtient l'hydroxylamine secondaire correspondante, tandis qu'avec les amines primaires et tertiaires il ne se forme pas de dérivé analogue. — M. R. Padova, en faisant réagir le chlorure de benzophénone sur le dihydrure d'anthracène-9 :10, a obtenu le tétraphényl- anthraxylilène, KF.305°, En oxydant la dianthrone de Dimroth par le nitrite d'amyle, il se forme la dianthra- quinone, F. 295%, — M. G. Bertrand et Mi! M. Rozen- band ont reconnu que les acides paralysent la peroxy- diastase; ils agissent non seulement par leur fonction acide, mais aussi par leur radical propre. — M. R. Huerre à extrait du mais blanc hàtif des Landes une mallase dont l’optimum se trouve à 40° et qui cesse d'agir à 65°; elle est détruite par une chauffe de 2 h. à 40°, Le maïs jaune hâtif contient une autre maltase, agis- sant de 229 à 80° et ayant son oplimum à 60°. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. E. Doumer montre que les effets hypotenseurs de la d'arsonvalisation sont, en général, durables (dix-huit mois au moins) et per- sistent {ant que les détendus se maintiennent dans de bonnes conditions d'hygiène physique, intellectuelle et morale. — M. A. Frouin à constaté que le système veineux peut remplacer mécaniquement et fonctionnel- lement, pendant un certain temps, le système artériel, ce qui permet de pratiquer des sutures artério-vei- neuses. — MM. Le Noir et J. Camus confirment, par des expériences sur des cobayes, que la tuberculose est contagieuse par l'air el par les poussières dessé- chées, et ceci à plusieurs mètres de distance du lit des tuberculeux. — M. R. Cruchet rappelle qu'il a déjà publié, en 1901, des remarques analogues à celles de MM. Rielel et Le Mée sur l'anatomie du thymus hu- main. — M. L. Launoy a reconnu que la température optimum de l’autolyse aseptique du foie est de 459 el que, pour S’accomplir, les phénomènes d'autolyse exi- gent la présence d'électrolytes. — M. P. Hallez montre que les cristaux de l’oothèque de la Blatte ne sont pas formés de carbonate de chaux, comme l’a annoncé M. Bordas, mais bien d'oxalate de chaux. — M. Aug. Michel décrit une nouvelle espèce de Syllidien à stolon acéphale, qu'il nomme Syllis cirropunetata: i a égale- ment réobservé la présence de stolon tétracère chez le Syllis amica. — M. E. Hérouard montre que le Scy- phistome qu'il à décrit sous le nom de Taeniolhydra n'est pas un genre nouveau, mais représente un cycle évolutif inconnu jusqu'ici, correspondant à un régime d'inanition et s'intercalant dans le cyele évolutif normal des Acraspèdes. — MM. Vermorel et Dantony onl constaté que la bouillie à l’arséniate ferreux tue les insectes à partir de 100 grammes par hectolitre et ne brûle pas les végétaux aux doses faibles. -- MM. A. Muntz et H. Gaudechon : Sur la diffusion des engrais salins dans la terre (voir p. 151}. — M. P. Fliche à étudié deux échantillons d'une fructification de Lyco- podinée trouvée dans le Grès bigarré (Trias); c'est un axe reproducteur dépourvu de feuilles, pour lequel l'auteur crée la dénomination de Pæcilitostachys Haugi. — M. R. Nicklès signale la découverte de deux couches de houille de 0,7 et 0,6 mètre d'épaisseur, dans le sondage de Gironcourt-sur-Vraine (Vosges), sur le flanc sud du synclinal de Sarreguemines. Ces couches se trouvent aux profondeurs de 700 et 823 m. Scance du S Février 1909. La Section de Chimie présente la liste suivante de candidats à la place vacante par suite du décès de M. A. Ditte : 1° M. E. Jungfleisch; 2° MM. A. Etard el J. Le Bel; 3° MM. A. Béhal, L. Bouveault, A. Colson, M. Hanriot et Ch. Moureu. 1° SCIENCES MAYHÉMATIQUES. — M. E. Vessiot présente ses recherches sur l'intégration des systèmes linéaires à déterminant gauche. — M. Galbrun éludie la repré- sentalion d'une fonction à variable réelle par une série formée avec les polynomes figurant dans les dérivées successives de la fonction «2, — M. J. Guillaume présente ses observations du Soleil faites à l'Observa- toire de Lyon pendant le 4° trimestre de 190$. I y à eu une grande diminution de l'aire tachée, — Le même auteur à observé la conjonction de Jupiter avec 7 Lion (4, 8) le 27 janvier. 22 SGiENCES PHYSIQUES. — M. André Léauté montre 192 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES que, dans là décharge d'un condensateur à travers une bobine portant deux couches de fil, le courant qui parcourt la bobine est la somme de deux courants sinusoïdaux : la fréquence du premier est égale sensi- blement à celle que prévoit la formule de Thomson; le second a une fréquence plus grande et son existence permet d'expliquer tous les faits relatifs aux stries «dans les étincelles d'induction. — M. G. Moreau a déterminé la masse de l'ion négatif d'une flamme à 2.000; elle est de 1,1 gr. X 10%. L'ion négatif est done plus lourd qu'un corpusc ule et plus léger qu'un atome d'hydrogène. — M. J. Danne, en cherchant à séparer de l'uranium et à concentrer l'uranium X, a isolé une nouvelle substance radio-active, qu'il nomme radio- uranium. Son activité paraît intermédiaire entre celles de l'uranium et de l'uranium X. — M. A. Barillé montre que l'acide carbonique est l'agent convoyeur des phosphates, qu'il transforme en carbonophos- phates, lesquels se dissocient ullérieurement. Cette conception permet d'expliquer une foule de phéno- mènes des êtres vivants et des minéraux. — M. G. Rebière à obtenu des solutions d'argent colloïdal électrique renfermant, à l’état d'équilibre au sein de l'eau, des grains d'argent insoluble et de l'argent ionisé. Cet argent ionisé parait être sous la forme d'oxyde, peut-être en partie carbonaté. — M. F. Meyer a cons- taté que le terme final de l'action du brome sur l'or est AuBr*, composé cristallisé noir soluble dans Br -et volatil dans une atmosphère de Br à 300°. AuBr? n'existe pas; AuBr* se dissocie en AuBr et Br. — M. O. Boudouard a étudié le pouvoir cokéliant des -charbons traités préalablement par certains réactifs : HCI n’a aucune action; H2SO et HAzZO® font perdre aux houilles leur pouvoir cokéfiant; KOH et la liqueur de Schweitzer le diminuent d'une quantité notable. — M. A. Wahl a observé que la phénylisoxazolone et ses dérivés réagissent avec le chlorure d'isatine pour donner des colorants indigoïdes dissymétriques. — MM. Brocq-Rousseu et E@. Gain ont reconnu que des grains de blé âgés de cinquante ans contiennent encore des diastases (dextrinase et amylase) capables de trans- former l'amidon en sucre; ces grains ne germent plus. — M. M. Piettre décrit un procédé qui permet de séparer de la bile les divers sels biliaires. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. M. Letulle et A. Mou- tier ont étudié l’action des courants de haute fréquence sur l'hypertension artérielle permanente ; dans les douze cas examinés, Faction hypotensive à été très nette. — M. P. Salmon à constaté que l’émétique est un médi- cament actif dans la syphilis; mais, si les lésions peu- vent rétrocéder et guérir, les rechutes se produisent parfois très rapidement. — M. L. Gaucher à observé que la traversée des laits de femme et d’änesse dans l'estomac s'effectue deux fois plus vite que celle du lait de vache; la caséine de ces laits n’est pas pepto- nisée dans l'estomac. — M. A. Billard présente ses recherches sur les Plumulariidées de la collection du British Museum. — M. Ch. Gravier à reconnu que chacun des fragments d’un Chétoptère qui s'autotomise peut reconstituer les parties qui lui manquent et donner lieu à un individu normal. — MM. L. Léger et O. Du- boseq ont trouvé dans l'intestin du Homard une série de Protozoaires parasites : Anoplophrya minima, Aggre- gala Vagans, Porospora gigantea, et un Sporozoaire nouveau qu'ils nomment Selenococcidium interme- din. — MM. C. Nicolle el L. Manceaux ont décou- vert chez le Gondi un protozoaire nouveau, voisin des Leishmania, qu'ils nomment Toxoplasma gondii. — M. P. Becquerel a reconnu que la féc ondation d'une partie des fleurs du Pavot s'opère déjà à l'intérieur du bouton, au moment où le pédoncule floral commence à se redresser. — M. Arsandaux à étudié la géo- logie de la boucle de l'Ogôoué; il y à trouvé des roches éruptives (granites el diabases), des roches sédimentaires plissées (arkoses, schistes noirs et quartzites), el des roches mélamorphiques à faciès schisteux. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 26 Janvier 1909. L'Académie continue la discussion sur l'emploi des composés arsenicaux. M. G. Weiss estime difficile de proscrire d'une facon absolue Femploi de toute sub- stance arsenicale en Agriculture avant qu'une enquête, faite dans les pays où ces produils sont en usage depuis plusieurs années, mette tout d’abord en évi- dence la réalité des accidents qu'il est légitime de redouter, mais que, jusqu'à présent, on n'a pas cons- tatés d’une facon certaine. MM. G. Linossier et A. Raïlliet appuient celte manière de voir, que com- battent MM. P. Cazeneuve, A. Gautier et Ch. Moureu. — M. J. Courmont lit un travail sur la lutte contre les maladies infectieuses en Suède et en Norvège. 2 Février 1909. M. F. Raymond présente un Rapport sur un travail de M. Oddo relatif à un cas de spondylose rhizomé- lique et à un cas de rhumatisme ankylosant vertébral avec tabès. — Comme conclusion à la discussion sur l'emploi des arsenicaux en Agriculture, l'Académie adopte par 35 voix contre 27 la proposition suivante : L'Académie, vu l'importance des intérêts en jeu, esti- mant qu'elle n’est pas suffisamment renseignée sur la nature, la fréquence et la gravité des accidents dus à l'emploi des composés arsenicaux en Agriculture, décide qu'il sera procédé à une enquête médicale pour rechercher les cas d'intoxication arsenicale aiguë ou chronique résultant de cet emploi et préciser les con- ditions de leur développement. — MM. A. Chantemesse et F. Borel décrivent un nouveau type de sulfurateur pour navires, présentant deux grands avantages, l’un économique, l'autre hygiénique : d'abord il n'est pas brevetable:; tout constructeur peut le fabriquer, les pièces qui le composent se trouvant déjà dans l’indus- trie; ensuite, il n'emploie que le soufre, qui se trouve partout, et peut sulfurer un grand navire en deux ou trois heures. — M. P. Strauss lit un travail sur la politique sanitaire et le devoir social. Séance du 9 Février 1909. M. Kermorgant analyse un travail du D' R. Rœmer sur la médecine des Bataks, tribu de la côte orientale de Sumatra. — M. le D' Sieur lit un mémoire sur deux cas de sténose du larynx traités par la laryngostomie et la dilatation caoutchoutée. — MM. les D'S Delherm et Guisez communiquent un travail sur le traitement curatif des spasmes à forme grave de l'æœsophage par l'æsophagoscopie. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 30 Janvier 14909. M. A. Courcoux à observé, après inoculation de chloroformo-bacilline d’Auclair dans la cavité pleurale du cobaye et du lapin, une réaction hypertrophique purement conjonclive, sans trace de nécrose ou de caséification. — MM. A. Raïlliet et A. Henry poursui- vent l'exposé de leur nouvelle classification des Stron- gylidés. — M. A. Rochaïix indique un nouveau mode de recherche des nitrites dans l’eau de boisson; il est basé sur la coloration bleue que donne l'acide nitreux avec le rouge neutre. — M. H. Piéron a reconnu que l’autotomie des élytres chez l'Acholoë astericola n'est pas liée .nécessairement à la phosphorescence. — MM. J. Ville et E. Derrien ont constaté que la réaction de Pettenkofer pour les acides bilhaires est due à l'oxyde de méthylfurfurol qui se forme par l’action de l'acide sulfurique sur le fructose. — Mie L. Kala- boukoff et M. E.-F. Terroine montrent que la lécithine n'est pas saponiliée par le suc pancréatique; les diges- tions obtenues doivent être rapportées au dédoublement de corps gras entraînés avec elle, — M. E. Maurel à observé que la ventilation augmente les dépenses de Séance du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'organisme; mais elle augmente encore davantage l'appétit, de sorte que la croissance en est favorisée. — M. P. Ikonnikoff a constaté que le passage des microbes à travers la paroi intestinale, à la suite de l’étrangle- ment des intestins, est lié à la desquamation épithé- liale et aux lésions nécrotiques de la muqueuse; les anaérobies traversent plus facilement que le colibacille etles cocci. — M. N. Fiessinger recherche le glycogène hépatique par le tannage bichromaté des pièces, qui l'insolubilise ; celles-ci sont ensuite coupées et colorées à la safranine. — M. Chr. Champy conclut de ses recherches que l’ergastoplasme n'est qu'un état fila- menteux des mitochondries, comme le pensait déjà Bouin. — M. A. Moukhtar montre que la morphine diminue la sensibilité des terminaisons nerveuses cutanées, sans produire l'anesthésie complète; la codéine est plus anesthésique et la thébaïne encore plus. — MM. Berthon, Gagnière-Hédon et Lisbonne ont étudié l'action des courants alternatifs industriels de haute tension (8.600 volts) sur le chien. Dans les électrocutions entre fils, le passage du courant provoque la sidération immédiate et absolue du système nerveux central, avec survie; dans l'électrocution entre fil et terre, il y a une violente crise de convulsions et l'ani- mal succombe. Séance du 6 Février 1909. MM. A. Blanchetière et Gougerot ont constaté que le Sporotrichum Beurmanni fait fermenter la glycérine, le glucose, le galactose, le lactose, l’inuline, en donnant uniquement de l'acide lactique. — M. J. Chevalier décrit un changement de vitesse pouvant s'embrayer successivement avec les trois axes de l’enregistreur de Marey. — MM. A. Marie et M. Tiffeneau ont constaté que la tuberculine puriliée ne possède pas, vis-à-vis des animaux non tuberculeux, l'innocuité qu'on lui attribue. — M. M.-P. Delanoe montre que la voie péritonéale est la plus propice pour faire apparaitre l'hypersensibilité du cobaye vis-à-vis de la toxine typhique. — M. R. Dufour a examiné le liquide cé- phalo-rachidien dans un cas d'insolation:; il est net- tement hémorragique avec polynueléose éphémère, — MM. CI. Gautier et O. Monod recherchent les corps du groupe de l'urobiline dans l'urine humaine par la fluorescence verte que produit l'acétate de zinc dans l'extrait, par le chloroforme thymolé, de l'urine aci- difiée par l’acide acétique et addilionnée d'un peu de teinture d'iode. — Mie P. Cernovodeanu et M. Nègre, en exposant à l'action des rayons ultra-violets des souris porteuses de tumeurs cancéreuses, ont vu les tumeurs se flétrir et tomber en quelques jours après une courte exposition. — M. P. Remlinger montre que le tube digestif de la souris jouit d’une perméabilité très grande aux virus comme aux vaccins; les conclu- sions qu'on tire des expériences faites sur ces animaux ne peuvent donc toujours être généralisées à l'homme. — M. Chr. Champy à reconnu que le cyloplasme a la même structure essentielle que le noyau chez les sper- matogonies des Batraciens anoures : une masse albu- minoide hyaline contenant deux sortes d'organites, les uns pyrénoiïdes, les autres microgranulaires. — MM. L. Alquier et L. Theuveay ont observé que les ovaires, ovules et corps jaunes des chiennes ayant subi l'extirpation partielle de l'appareil thyro-parathyroïdien ne paraissent guère influencés par l'intervention, ni dans leur structure ni dans leur évolution. — M. M. Weinberg montre qu'il serait utile de chercher des anticorps spécifiques dans le sérum des sujets chez lesquels on soupconne la cysticercose; dans la disto- matose, la présence de ces anticorps est une preuve qu'il existe une véritable intoxication chronique, due aux substances sécrétées par les parasites du foie. — M. E. Maurel à reconnu que la ventilation du cobaye avec une vitesse de 16 kilomètres à l'heure exagère tel- lement ses dépenses qu'une augmentation de l’alimen- tation la compense difficilement. — MM. G. Denigès et V. Pachon communiquent l'analyse d'un échantillon 193 de sel de cendres de la région de l'Ibenga, qui con- tient presque exclusivement des sels de potassium c'est un témoignage de plus en faveur de l'usage général des sels potassiques chez certains indigènes de l'Afrique. — Mie M. Loyez a constaté que la formation de la graisse dans l’ovcyte du Tejus monitor parait ètre sous la dépendance de particules chromatiques ayant leur origine dans les noyaux des cellules follicu- laires. — M. C. Gerber a observé que la papayotine résiste aux températures élevées et coagule lentement le lait bouilli au-dessus de 45°; elle caséitie le lait non calcifié à 0°. — M. CI. Regaud a constaté, chez le chien et le chat, une localisation des spirilles parasites dans les canalisations glandulaires de la muqueuse gastrique normale. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST Séance du 16 Décembre 1908. M. V. Babes estime que les accidents paralytiques, d'ailleurs très rares, du traitement antirabique sont dus aux substances toxiques introduites avec les injec- tions antirabiques, mais qui n'ont rien à faire, ni avec le virus rabique, ni avec la substance nerveuse nor- male. — M. J. Cantacuzène a observé que les ganglions lymphatiques résistent à l’action digestive de la pepsine plus que les autres systèmes cellulaires ; cette résis tance croit sensiblement chez les animaux immunisés contre la pepsine.— MM. J.Cantacuzène etC.Jonescu- Mihaiesti signalent la présence d'anticorps spéciliques dans le sérum des lapins immunisés contre la pepsine. — M. G. Marinesco a reconnu que la frontale et la pariétale ascendante diffèrent par leur structure cellu- laire et par leur fonction. — M. D. Mezinceseu montre que la maladie lépreuse des rats et la lèpre humaine doivent être classées, au point de vue des réactions d'immunité, dans le même groupe. Il à, d'autre part, trouvé chez le rat un spirochète analogue à celui de Me Neal; il le nomme Sp. muris var. Galalziana. — M. Al. Obregia a observé un nouveau réflexe patholo- gique conjonctivo-mentonnier. — MM. Al. Obregia et Bruckner, en soumettant à la réaction de Wasser- mann le liquide céphalorachidien, dans la paralysie générale stationnaire, ont obtenu dans presque tous les cas un résultat négatif. —_ MM A.Slatineanu et D. Danie- lopolu signalent la présence d'un fixateur dans le sérum des cobayes sensibilisés à l'infection tuberculeuse. SOCIÉTÉ FRANCAISE DE PHYSIQUE Séance du 15 Janvier 1909. La Société procède au renouvellement de son Bureau, qui est ainsi constitué pour l'année 1909 : Président : M. M. Brillouin; Vice-Président : M. E. Bertin; Secrétaire général : M. H. Abraham: Vice-Secretaire : M. L. Joly; Trésorier-archiviste : M. P. Pellin. M. G. Millochau rend compte des recherches qu'il à exécutées, en collaboration avec M. Ch. Féry, pour utiliser le télescope pyrhéliométrique à la mesure de la constante solaire. Il suffit, en effet, d'intégrer les résultats obtenus avec le télescope sur les divers points de l'image solaire, de facon à en étendre la somme à la surface entière. La valeur de la constante solaire, LA , exprimée en watts, sera : A, —7 a K à, lang” :, © étant l'angle apparent du Soleil, à, la déviation moyenne provenant de l'intégration (Kô,—T'), K la constante instrumentale obtenue par étalonnage sur un four à température connue, et à la constante de la loi de Stefan. Or A, est donné directement par l’actinomètre ; on peut donc déduire de celte formule la valeur de à; on trouve ainsi : a — 3,02 X 10—®. Appliquant cette méthode aux observations faites en 1906, on trouve Aw — 0,178, qui est de 7 °/o plus fort que A% = 0,166 DU 194 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES obtenu directement en 1907. Dans la formule de Bou- Ki guer 1, —1le “#4, employée pour le calcul de l'absorp- tion atmosphérique terrestre, on peut éliminer [, et calculer K/; on trouve K/=— 0,032 en 1906 et K/=—0,037 en 1907, l'emploi de l'une ou de l'autre valeur ne produi- sant sur le résultat qu'une différence de 1°/,, de l’ordre des erreurs d'observation. On est amené à supposer que l'absorption zénithale est constante au sommet du mont Blanc, et qu'on peut calculer en ce point [, par la formule 0,081 I,—le ‘*°{(7— distance zénithale du Soleil). En appli- quant ces résullats aux valeurs expérimentales obtenues par M. Violle en 1875 et par Hanskyÿ en 1900, on trouve : A—2,6% (Violle, 16 août 1875); A—2,21 (Hansky, ; septembre 1900); A — 2,56 (Féry et Millochau, 2 août 1906); A—2,38 (mêmes auteurs, 25 août 1907). La moyenne de ces nombres est de 2,4 et l'écart maxima avec celte moyenne est de 7 °/,. On peut assez bien concevoir la constitution de l'atmosphère solaire, sur- tout depuis les remarquables travaux de Hale, l'inven- teur du spectrohéliographe. Les spectrohéliographies qu'il a publiées el qui montrent les diverses couches de l'atmosphère solaire nous font voir que cetle atmo- sphère est le siège d'agitations continuelles, mais assez régulières, si l'on en excepte les grandés éruptions solaires, localisées dans des espaces relativement restreints du Soleil. Le télescope pyrhéliométrique, mesurant une surface relativement grande de l'image solaire, donne la moyenne du rayonnement de l’en- semble de colonnes gazeuses alternativement ascen- dantes et descendantes et qui tendent vers une position d'équilibre, ce qui explique l'accord des évaluations, en première approximation, de l'absorption due à l'atmosphère solaire et la concordance des résultats de 1906 avec ceux de 1907 pour la détermination de la température apparente de la photosphère : 61009, à 30° près. Gette photosphère, étant données, d'une part sa température élevée, d'autre part l'action de l'enveloppe absorbante qui l'entoure, doitrayonner presque comme un radiateur intégral, et sa température réelle doit être voisine, à un millier de degrés près, au plus, de 6.100 qui est en tout cas un minimum. — M. H. Deslandres présente ensuite une objection grave aux résultats des observations solaires faites au mont Blanc par M. Mil- lochau avec les deux appareils de M. Féry, avec le pyr- héliomètre qui donne les températures effectives des différents points de l’astre, et avec l’actinomètre qui fournit la constante solaire. En réalité, le pyrhéliomètre ne mesure pas les températures, mais seulement les éclats. Récemment, les belles recherches faites sur les corps noirs et sur la mesure des hautes températures ont permis d'avoir dans le laboratoire des corps noirs d'éclat et de température connus et, pour le Soleil, il a été possible de passer des éclats mesurés à ce qu'on a appelé la température ellective, en appliquant la loi simple de Stéfan A—6T*, qui donne l’éclal du corps noir de température absolue T. Mais on suppose que la loi de Stéfan, vérifiée avec le thermomètre à gaz jusqu'à 1.800° absolus, est encore vraie jusqu'à 6.000°, que le Soleil est un Corps noir idéal et que son rayonnement est purement calorifique et indépendant de toute action chimique où électrique (ce qui, à certains égards, est peu probable). À la notion simple de l'éclat, on sub- stitue uné notion plus complexe dont la base est fra- gile. Les éclats du Soleil à la surface de la Terre, aux limites de notre atmosphère, el à la surface du Soleil, ont un sens clair et se rapportent à une réalité nette. En est-il dé même des températures effectives corres- pondantes? La seule qui soit vraiment à retenir est la température de la surface solaire, qui justemen! nous échappe plus que les autres, étant basée sur pasteurs hypothèses et extrapolations. En particulier, l'extrapo- lation qui donne l'absorption exercée par l'atmosphère solaire est tout à fait incertaine, De toute facon, la température effective moyenne du Soleil aux limites de nôtre atmosphère, une fois déterminée, est reliée étroi- tement à la constante solaire par la formule même de Stefan, dont la constante 5 a élé déterminée avec pré- cision par Kahlbaum. A chaque valeur de la tempéra- | Lure effective correspond une seule valeur de la cons- lante solaire el inversement’. Or, M. Millochau a mesuré séparément, le même jour, en 1907, la tempé- rature et la constante solaire avec les deux appareils de M. Féry; ces deux mesures se contrôlent l'une | l'autre. L'actinomètre a donné directement pour la constante solaire le nombre 2%1,38; mais, si on la | calcule en partant de la température effective déter- minée par l’autre appareil, on trouve un nombre nota- | blement plus grand, voisin de 4%1, Les valeurs de la constante solaire données par les deux appareils sont donc dans le rapport de 5,32 à 3,02. Un désaccord aussi grand est inadmissible, et M. Millocheau devra l'expliquer avant de comparer ses résultats aux résul- | Lats antérieurs. D'ailleurs, la valeur de l'actinomètre | (251,38) est très voisine des valeurs nombreuses de la constante solaire, comprises entre 201 e{ 261,5, qui ont été déterminées depuis 1900, avec des appareils excel- lents et avec un calcul précis de l'absorption atmo- sphérique terrestre, plus précis que celui donné par l'application simple de la formule de Bouguer au rayon- nement total. Aussi semble-t-il qu'il faille incriminer surtout le pyrhéliomètre, qui est présenté cependant comme supérieur à l'autre. — M. Ch.-Ed. Guillaume : L'état amorphe des métaux. M. Gledens Schäfer à trouvé, il y à quelques années, au moyen d'expériences faites sur des fils métalliques, que le coefficient de Poisson, déterminé dans un certain intervalle de tem- pératures basses, el extrapolé jusqu’à des températures élevées, arrive à la valeur + à une température voisine de celle de la fusion du métal considéré. IH semblerait résulter de cette constatation que la fusion est un phénomène continu avec la variation des propriétés élastiques des métaux, alors qu'au contraire on admet en général que la fusion, passage brusque de l’état cristallin à l'étatamorphe, avec changement de volume, absorption de chaleur, etc., est un phénomène discon- tinu. I y a donc, dans les résultats de M. Schäfer, une contradiction au moins apparente avec les idées actuelles sur les changements d'état. D'autre part, G. Kahlbaum a trouvé que les métaux purs, soumis a de fortes compressions, augmentent de densité jusqu'à une certaine limite, puis diminuent ensuite de densité. La région du changement est de l’ordre de dix mille mégabaryes. Enfin, M. W. Spring, après avoir retrouvé les raèmes résultats pour les métaux forcés par pres- sion au travers d’un petit trou, à l'exception du bismuth, dont la densité était augmentée, a pu déceler l'existence d’une différence de potentiel entre deux baguettes du même métal, flué ou non flué, plongées dans une solution de leur nitrate. Pour tous les métaux, à l'exception du bismuth, la baguette fluée se dissol- vait. On obtenait des résultats analogues en brunissant des baguettes de métaux purs fondus, et l’on renversail le couple autant de fois qu'on voulait en brunissant ou attaquant alternativement les baguettes, jusqu'à faire apparaître le damasquinage. Une chauffe dérruisait les etTets de l’étirage. Dans le mème ordre d'idées, M. Beilby a trouvé qu'une lame d’or brunie el altaquée à l'acide ne laissait voir, au voisinage de la surface, aucune trace de constitution cristalline, tandis que cette dernière apparaissait à une faible profondeur. Cette structure était visible très près de la surface, lorsque la lame était recuite après avoir été brunie Le sens des phéno- mènes observés par Kahlbaum et par M. Spring montre que les métaux flués diffèrent des métaux coulés, dans le même sens que les métaux en fusion. En tenant compte des observations de M. Beilby, on est conduit à admettre que les mélaux flués sont à l'état amorphe, * Cette dépendance, présentée par M. Millochau comme inexacle au Congrès solaire de 1907, résulte de Ja définition même de la température effective. ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 195 au moins en grande proportion, Et enfin, comme les fils métalliques soumis à la torsion travaillent surtout par leurs couches extérieures, on peut supposer que les résultats trouvés par M. Schäfer se rapportent à des métaux en majorité amorphes. Il est d'ailleurs impos- sible de suivre le phénomène jusqu'à la fusion, si ce n'est pour les métaux à température de fusion très basse; car, dès que la température s'élève, la vitesse de cristallisation devient très grande. De plus, les déformations permanentes masquent bientôt les défor- mations élastiques. L'action des fortes pressions et de la trituralion semble ainsi très efficace pour provoquer le passage des mélaux de l'état cristallin à l'état amorphe, conformément à un diagramme de M. Tammann. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 22 Janvier 1909, M. M. Prud’homme a reconnu que la relation : 1 log (: ne -) = avns où y représente le coefficient d'ionisation et a et n des constantes, se vérilie bien pour les bons électrolytes, dans des limites étendues de variation de la dilution, de v—1 ou 5 litres à r— 2.000 ou 5.000 litres. Les valeurs de » sont très voisines l’une de l'autre pour les électrolytes univalents chlorures, bromures, iodures, fluorures, etc.; de mème pour les nitrates et les sulfates des métaux univalents. Les chlorures, nitrates et sulfates des métaux bivalents correspondent à des valeurs de » différentes, mais très voisines dans chacune des trois séries d'électrolytes. C'est une géné- ralisation de la relation donnée antérieurement !. — M. E. Kohn-Abrest a soumis la poudre d'aluminium, qui lui sert de matière première, à une analyse aussi complète que possible. l'or le dosage de l'aluminium métallique, il attaque la poudre d'aluminium par le sulfate ferrique en très grand exeès à la température de l’ébullition dans un courant de CO*. Tout se passe d'après l'équation : 3 Fe{S01}® + 9 A1 — AI{S0*) + 6FeS0*. Le sel ferreux est dosé à l’aide du permanga- pate, après dilution et refroidissement de la liqueur. { ce. de KMnO' à 3,14 par litre correspond à 0%",000.895 d'aluminium (Al=— 26,9; O — 15,88). L'au- teur a, de plus, vérilié que les résultats obtenus en attaquant, d'une part, l'aluminium par l'acide chlor- hydrique et en pesant l’eau recueillie après passage de l'hydrogène sur l’oxyde de cuivre, et, d'autre part, en attaquant la poudre d'aluminium par le sulfate fer- rique, — conduisent à des chiffres concordants; on trouve, d’une part, 92,84, de l'autre, 92,97 °/, d'alu- minium métallique dans la poudre examinée, D'après les résultats obtenus, rien ne prouve que l'aluminium oxydé existant dans la poudre soit de l’alumine. L'au- teur se servira de sa matière première pour continuer son étude sur les affinités chimiques de l'aluminium. — M. G. Blanc, après avoir passé en revue les diffé- rents modes de synthèse de la menthone et en avoir montré les points faibles, expose une méthode qu'il considère comme correcte. L'anhydride &-méthylglu- tarique est réduit par le sodium et l'alcool amylique en une lactone : CH®.CH* CH°.CH< No (Éb. 235). \GEE. CO L'action successive du pentabromure de phosphore et de l'alcool la convertit en éther à bromé (Eb. 1070 sous 10 mm.). Cet éther 3-bromé se condense avec le malonate d'éthyle sodé; le produit de condensation : /COCTS CH°.CH.CH2-CH2. CH ( NCOrcers CH®.CO#C2H° D ES ER NT SN PR ET RES “ Bull. Soc. chim.. t. I, 4e série, p. 563, 1907. bout à 182° (8mm), Traité par l’iodure d'isopropyle et CHSONa, il donne un dérivé isopropylé (Eh. 186° sous 8 mm.). Le nouvel éther tricarboné, hydrolysé par HCI, donne l'acide #-isopropyl-B-méthylpimélique, dont la diamide fond à 157%; l'éther méthylique bout à 4550 (16 mm.). Cet acide 2!-isopropyl-S-méthylpimélique est aisément transformé en menthone inactive par la dis- tillation lente de son anhydride. — M. A. Béhal com- munique les résultats de ses recherchés sur l'action des acides organiques sur les dérivés halogénés cyeli- ques. Les dérivés monohalogénés (tels que C°H5.CH°CI) sont décomposés à ébullition en donnant HOT et l'éther sel correspondant. Un grand nombre de dérivés halo- génés métalliques, les oxydes, les carbonates ou les sels organiques décomposables par HCI, jouent un rôle ac- livant. Les dérivés dihalogénés (tels que C°H°.CHCF) réagissent à l'ébullition sur les acides organiques pour donner naissance aux aldéhydes correspondantes \C'H5.CHO, par exemple), aux anhydrides des acides organiques employés et à HCI. Cette réaction est activée, comme dans le premier cas, par une série de composés métalliques, parmi lesquels certains four- nissent des produits de condensation. Parmi ces der- niers se trouve le chlorure de zinc, utilisé précédem- ment par Jacobsen. M. Béhal mentionne enfin l'action des acides organiques sur les dérivés trihalogénés. L'acide acétique donne, par exemple, avec G°H°.CC/, de lanhydride acétique, de l'anbydride mixte acélo- benzoïque et HCI; l'anhydride mixte se transforme, comme on le sait, en anhydrides acétique et benzoïque. M. Béhal n'a pas pu trouver, en arrètant la réaction en cours, de chlorure de benzoyle, dont on peut prévoir théoriquement la formation. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 12 Novembre 1908. M. À. A. C. Swinton présente : recherches sur locclusion du gaz résiduel et la luorescence des paroïs en verre des tubes de Crookes. I avait indiqué anté- rieurement que l’occlusion du gaz est due à son trans- port mécanique dans le verre, où il forme des bulles par chauffage subséquent. Il réfute lexplicalion de M. R. Pohl, qui prétend que ces bulles ne sont pas dues au gaz du tube, mais à l'action chimique, sur le verre chauffé, de l'aluminium désintégré des électrodes: il réfute encore l'opinion de J. J. Thomson, qui admet que le gaz a passé dans le verre à chaud par simple diffusion, et celle de MM. Soddy et Mackenzie, qui en voient l'origine dans la décomposition chimique du verre par la chaleur. En usant le verre de la quantité juste nécessaire pour prévenir la formation de bulles par chauffage subséquent, on constate que la profon- deur à laquelle le gaz a été forcé dans le verre varie de 0,0025 imin., pour les tubes à électrodes externes, à 0,015 mm., pour les tubes à électrodes internes, celle dernière distance étant égale à l'épaisseur maximum d'aluminium que traversent les rayons cathodiques. En ce qui concerne la fatigue du verre pour la fluores- cence, quand celle-ci n’est pas due à un dépôt de car- bone ou de la matière de lPélectrode, il est nécessaire, pour la faire disparaître, d'enlever une épaisseur de verre approximativement égale à celle qu'il faut enlever pour empêcher la formation de bulles par chauffage subséquent. La fatigue paraît donc intimement liée à la pénétration et à la présence de gaz occlus. — M. J. S. Townsend : Les charges des ions dans les gaz et l'ellet de la vapeur d'eau sur le mouvement des ions négatifs. L'auteur a constaté que les rayons secon- daires peuvent produire des ions à charges atomiques simple où double, les dernières étant le résultat des rayons les plus pénétrants Le mouvement d'un 1on né- gatif dans un champ électrique est fortement influencé par la présence de vapeur d'eau en très faible quantité, celle-ci tendant à condenser les ions négalifs; on n'observe aucun effet correspondant avec les ions positifs. — MM.J. S. Edkins et M. Tweedy : Le méra- 196 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES uisme naturel pour évoquer la sécrétion chimique de | l'estomac. Par une méthode spéciale, décrite ailleurs, | les auteurs ont pu restreindre l'introduction de nour- rilure à des parties définies de l'estomac et de l'intes- ün. Il était, par conséquent, possible d'étudier la façon de se comporter de ces diverses régions comme canaux | pour l'absorption et quelle était la valeur comparative des différentes nourritures en ce qui concerne l’évoca- tion du mécanisme chimique de la sécrétion du suc gastrique. Les auteurs ont trouvé que le fundus de l'estomac n'a pas de fonction absorbante; au contraire, l'extrémité pylorique en a une très grande; l’absorp- üon dans le duodénum stimule la sécrétion du fundus. On a observé que l'acide seul n’est qu'un faible stimu- lant ; la dextrine à un effet marqué, semblable à celui ue RC Fe o | IL | c pa De d de IT IV | ° ER D g | d es VA & c V VI Fig. 1. — Schéma de l'arrangement de l'aquedue périlym- phatique, du repli périlymphatique, de la fenêtre ronde et de la cochlea chez les lteptiles, les Oiseaux et les Mammifères. I. Reptile : Varanus. — à, c.c., cochlea ; p, repli périlymphatique : le toit du repli périlymphatique par laquelle la péri- lymphe est en communication avec le fluide cérébrospi- nal. Cette ouverture s'étire en forme de tube court chez | l'oiseau et de tube long chez le mammifère, chez les- | quels ce tube est nommé aquedue périlymphatique; r, fenêtre ronde, close par une membrane représentée par une ligne ponctuée. Il. Oiseau: Ahea. ouverture ovale entre la scala tympani de la cochlea et le repli périlymphatique ; elle n'est pas close par une membrane. Les autres lettres cor- respondent à celles de la figure 1, mais l'ouverture ovale d du replile devient le tube d chez l'oiseau: l'ouverture ovale o est présente chez tous les oiseaux examinés et au moins quelques reptiles (alligator). II. Æchidna. — Mèmes leltres que dans la figure 2. IV. Marsupial : Kangourou. — 14. V. Ongulés, Carnivores. — 14, VI. Primates et Homme. — Jd. aqueduc de la périlymphe : d, ouverture sur — 0, que produisent le dextrose et le mallose. La peptone commerciale et l'extrait de viande de Herzen sont les substances les plus efficaces parmi celles qui ont été expérimentées. On n'a pas trouvé de preuve de l'exis- tence de quelque hormone négalive passant dans la circulation et tendant à arrêter la sécrélion gastrique. On doit considérer l'extrémité pylorique de l'estomac "1 et le duodénum comme les canaux normaux de lab- sorption qui hbère l'hormone gastrique. Le fundus est définitivement exclu de cette fonc tion. — M. L.S. Dud- geon présente ses recherches sur la présence d'hémo- agglutinines, d'hémo-opsonines et d'hémolysines dans 1e sang de personnes atteintes de maladies infectieuses et non infectieuses. 1 n'a trouvé aucune relation directe entre les propriétés agglutinantes, opsoniques ou hémo- lysantes des sérums normaux ou immunisants sur les corpuscules rouges du sang; la formation de rouleaux dans le sang et l'hémo-agglutination doivent aussi être regardés comme des phénomènes distincts. — M. A. À. Gray a étudié Ja structure anatomique et les relations du labyrinthe chez le reptile, l'oiseau et le mammifère. Ses recherches ont porté sur le Varanus salvator, le Dromæus novæ-hollandiæ, le Rhea ameri- cana, le Spheniseus demersus et l'Echidna aculeata. 1 y a évolution continue de certaines parties du laby- rinthe, par simplification, depuis le reptile jusqu” à l'homme; la figure 1 ci-jointe montre, mieux qu'une longue description, la marche de cette évolution. — M. A. Edington a observé une nouvelle variété de trypanosomiase dans l'ile de Zanzibar. A l’autopsie d'un cheval arabe mort dans une écurie après une dizaine de jours de maladie, on trouva dans le sang quelques trypanosomes. Ce sang, inoculé à un cheval sain, produisit une affection analogue, terminée par la mort; ilse montra sans effet sur l'âne, le chien, le bœuf, le rat. Le trypanosome cause de cette maladie ressemble au 7. dimorphon, mais il est plus petit et plus délicat; il diffère également du Tr. congolense. — M. H. H. W. Pearson : \ouvelles observations sur les Welwitschia. Les matériaux qui forment le sujet de cette recherche ont été recueillis à Welwitsch et à Haikamchab, dans le Damaraland, en janvier et fé- vrier 1907. Des macrospores et des sacs embryonnaires sont fréquemment présents dans la région médullaire de l'axe du cône femelle. Cela confirme l'hypothèse, déjà adoptée par la plupart des auteurs, que l’ovule des Welwitschia est cauline On ne trouve pas de cellules sporogénées dans une position identique dans le cône male. Le cône femelle et la fleur mâle dérivent proba- blement, par réduction et par spécialisation, d’un stro- bilus amphisporangé d'un type semblable à celui des Benettites. A la fin de la division nucléaire libre, le sac embryonnaire contient environ 1.024 noyaux, qui sont équivalents dans tous les caractères visibles. 11 se pro- duit un clivage du cytoplasma, résultant de la division de tout le sac en compartiments. Quant aux caractères morphologiques de l'endosperme, les Gnetum et les Welwitschia sont complètement séparés de l’Ephedra, chez lequel l'endosperme est un prothalle du type gymnosperme normal. L'auteur suggère l’idée que l'endosperme des Angiospermes primitifs CR ARNeeE avec celui des We/witschia. M semble que : ° l'alliance des Gnetum et des Welwitschia a son dune dans le même fonds que les Angiospermes, mais s'est séparée de la ligne des Angiospermes avant que le carpelle soit devenu le réceptacle du pollen; 21e Welwitschia est le représentant vivant le plus spécialisé de la race à laquelle il appartient. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 21 Janvier 1909. MM. F.S. Kipping el H. Davies ont préparé le benzyléthylpropylisobutylsilicane, Eb. 2820-2830, par action de C*H*Mgkr sur le chlorure de benzyléthylpro- pylsilicyle; ils ont ensuite préparé le dérivé sulfonique correspondant, qu'ils ont essayé de séparer en ses constituants actifs par cristallisation fractionnée de ses sels avec les alcaloïdes, mais les résultats ont été négatifs ou douteux. — MM. F. S. Kipping et W. J. Pope, en faisant cristalliser le d/tartrate de sodium- ammonium de solutions aqueuses de dextrose, ont vu se déposer du d-tartrate presque pur. Un résultat analogue vient d'èlre obtenu par d'autres auteurs avec ne dt Sn ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES des solutions aqueuses pures. MM. Kipping et Pope estiment quil y à eu soit ensemencement par Îles poussières du laboratoire, soit léger excès d'acide 4 dans les solutions employées. — M. S. Ruhemaun, en condensant le benzylidène-acéloacétate d'éthyle avec le phénate de sodium, à obtenu un composé C2H#05, qu'il regarde comme un dérivé de la eyelohexanone. Des dérivés analogues peuvent ètre obtenus avec les éthers monocarboxyliques et les monocétones oléfi- niques contenant plusieurs groupements électroné- galifs. — M. F. D. Chattaway, en ajoutant une solu- lion aqueuse de dichlorocarhamide AZHCI CO.AZHCI à une solution concentrée d'AzH®, à obtenu la p-urazine en cristaux blancs. Celle-ci est facilement hydrolysée, par chauffage avec H?50* concentré, en CU? et hydra- zine. MM. F. D. Chattaway el D F.S. Wunsch ont étudié l'action du chlore sur les carbamides sub- stitués et ont reconnu qu'il est possible de remplacer par CI, atome par atome, tous les Il attachés à PAZ. Les monochloracylcarbamides AZHR.CO.AZHCI sont des solides bien cristallisés et stables. Les carbamides plus chlorés sont des liquides, décomposables par la chaleur. — MM. H. Tutin el H. W. B. Clewer ont extrait des feuilles d'£riodietyon, outre l'ériodict\ol et l’homoëéridictyol déjà connus, du chrysoériol, CSH®205, F.337, contenant 3 OH, du xanthoéridol, C!#H2407, E.258°, contenant aussi 3 OH, et de l’ério- donol, C'*H'S07, F.209° anhydre, contenant 4 OH. — M. S. U. Pickering a déterminé la quantité d'eau d'hydratation entrainée par certains précipités en se basant sur leur propriété d'émulsionner les huiles. IL trouve que le précipité 10Cu0.s0*.CaSO#.Na?SO' contient 42H20. — MM. T. M. Lowry et C. H. Lesch ont coustaté que le spectre d'absorption de l'x-bromo- camphre ne varie guère quand un halogène est intro- duit en posilion $ ou 7; mais la bande connue ne se montre plus quand le second atome d'H en « est rem- placé par un halogène ou un groupe nitré. La bande faible du nitrocamphre est fortement intensiliée par les alcalis. — M. J. E. Purvis à observé que l'intro- duction d'atomes ou de groupes d'atomes dans le noyau de la pyridine et de ses dérivés augmente la persistance de la bande d'absorption, tout en la dépla- cant vers l'extrémité rouge du spectre, tandis que lin- troduction d'atomes dans une chaine latérale diminue généralement la persistance. — M. S Ruhemann à reconnu que les composés cycliques obtenus par l'ac- tion du sulfocyanate de phényle sur les éthers malo- nique et cyanacélique existent sous une seule forme et non sous deux modilications comme il l'avait annoncé précédemment. — MM. D. L. Chapman et P. S. Mac Mañhon montrent que le fait signalé par Bunsen et Roscoe, que la vitesse d'action photochi- mique entre H et CI dans un mélange à volumes égaux de ces deux gaz est réduite par l'addition d'un faible volume de H ou CI, n'est pas exact; cette réduc- tion doit être attribuée à la présence d'un peu d'oxy- gène. — MM. D. L. Chapman et L. Vodden ont déterminé le rapport Az:CI dans la vapeur de chlorure d'azote préparée par l'action de CI sur une solution neutre d'AZH'CI; il correspond à la composition AzCI et le.gaz ne renferme pas d'H. La réaction AzH*Cl + 3CE — AzCI < 4HCI est réversible. MM. A. H. Salway et F. S. Kipping ont observé que la B-mé- th\lhydrindone s’oxyde lentement à Fair, en formant entre autres les acides acétique, phtalique et benz\l- méthylcétone-0-carboxylique. — MM. G. Clarke jun. et S. C. Banerjee ont extrait des feuilles de T'ephrosia purpurea environ 2 °/, d'un glucoside cristallin, F.180-185°, donnant par hydrolyse de la quercétine et du dextrose; il parait donc identique à l'ossritrine, — Me I. Smedley déduit des propriétés physiques et chi- miques des acides carboxyliques que la constitution du groupe carboxyleestle mieux représentée par la formule: (O “CA SOH REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 197 — Le même auteur, par condensation de laldéhyde benzo\lformique avec lacélophénone en présence d'anhydride acétique, à obtenu Ja forme cis du s-di- benzoyléthylène, F.1110. Celle-ci possède une réfrac- tion moléculaire différente de celle de Ja forme trans. — M. J. F. Thorpe, en condensant le sodiocyanoa- célate d'éthyle avec Île 1-cranocyelopropane-1-car- boxylate déthile, a obtenu le 2-imino-3-cyanocyelo- pentane-1-carboxylate d'éthyle, Une condensation similaire a lieu avec le sodiomalonate d'éthyle. — MM. F. M. Perkin el L. Pratt, en faisant réagir le calcium sur les alcools, ont obtenu les alkyloxydes de calcium Ca (OAÏk}?; la chaleur accélère la réaction. — MM. J. W. Porse el J. Read, en condensant l'«-phé- nyléthylamine avec le d-oxyméthylènecamphre, ont obtenu deux produits stéréoïsomères, provenant de chacun des composants optiquement actifs de la base primaire; on à ainsi une méthode pour reconnaitre si une amine primaire est où non extérieurement compensée. — M. P. Haas, en faisant réagir l'acide nitreux sur le produit de condensation de l'éthylamine avec la dihydrorésorcine, a obtenu le dérivé : CH? — C(: AzC*II°) >C : AZOH, CO” Grec CH° rouge carmin à l’état hydraté et bleu sombre à l'état anhydre. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION CANADIENNIE Séance du 49 Novembre 1908. M. J. F. Snell éludie les rapports de la Chimie avec l'étude des aliments. Il indique les principaux résultats obteuus dans les directions suivantes : détermination des valeurs relatives des aliments, au point de vue de la nutrition ; élucidation des processus de digestion ; préservation hygiénique des aliments ; recherche des adultérants. SECTION D'ÉCOSSE Séance du 8 Décembre 1608. M. Th. Ewan étudie les méthodes de détermination des sullures dans les cyanures alcalins. La titration directe par le nitrate de plomb est la méthode la plus rapide et la plus simple; avec des corrections conve- nables, elle est suffisamment exacte. La méthode colorimétrique, modifiée par G. W. Williams, est plus exacte, mais plus lente. La méthode de Feld est la plus exacte, mais beaucoup trop lente pour l'usine et elle nécessite un opérateur habile. — MM. R. R. Tatlock et R. T. Thomson ont recherché la valeur de l'essai de Polenske dans l'analyse des huiles et graisses. Pour eux, cet essai est purement empirique, et il est dépen- dant de tant de conditions qu'il faut beaucoup de circonspection avant d'en déduire la présence de l'huile de noix de coco dans le beurre. Pour la recherche de cette huile dans la margarine, l'indice de Polenske peut servir jusqu'à une teneur de 5 °/,. L'indice de Polenske ne parait pas pouvoir être utilisé pour la recherche des graisses animales dans le beurre, SECTION DE LONDRES Séance du 7 Novembre 1908. MM. P. Schidrowitz et H. A. Goldsbrough ont déterminé la viscosité du caoutchouc et de ses solutions dans le benzène. Ils ont reconnu que celle-ci est en rapport direct avec la résistance ou nerf du caoutchouc brut. — M. P. Schidrowitz a constaté, d'autre part, que les globules du latex ne sont pas détruits par sa coagulation, qu'ils continuent à exister dans le caout- chouc sec et qu'ils ne sont pas enlevés mème par dissolution dans le benzène. 198 ACADÉMIES £T SOCIÉTÉS SAVANTES SECTION DE NEWCASTLE Seance du 10 Décembre 1908. M. Ch. J. Potter a étudié les changements chimiques dans le béton en ciment de Portland, spécialement sous l’action de l’eau de mer. La destruction rapide du béton en ciment de Portland sous l'eau de mer est due à l’action des sels de magnésium sur la chaux et l’alumine faiblement combinées du béton; il se forme du sulfate de calcium et des composés d'alumi- nium qui, en absorbant de l’eau de cristallisation, désagrègent le béton. Cette action est facilitée par la porosité du béton ; celle-ci peut être fortement diminuée en opérant mécaniquement le mélange des constituants. Mais l’auteur est arrivé à de bien meilleurs résultats en incorporant, en cours de fabrication, au ciment Portland destiné à la préparation du béton, de l'argile calcinée servant à la fabrication des briques rouges. Le ciment rouge qu'on obtient ainsi donne un béton parfaitement résistant à l'eau de mer. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 16 Décembre 1908. M. J. M. Wilkie propose une méthode volumétrique pour la détermination de acide plosphorique et des phosphates mono-et di-alcalins. Elle consiste à précipiter l'acide phosphorique ou les phosphates acides par le nitrate d'argent en présence d’un excès d'acétate de Na et à titrer l'acide acétique produit suivant l'équation : HSPO: HE 34 gAzO®—E 3CH*COONa —Ag'POiH 3NaAzO° + 3CH*.COH. La litration a lieu par la baryte avec la phénolphtaléine comme indicateur. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 14 Decembre 1908. M. J. T. Thompson présente un résumé crilique du 5e Rapport de la Commission royale pour l'étude du traitement des eaux d’égouts. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 24 Décembre 1908. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries : Sur des courbes planes bicuspidales du quatrième ordre. Par rapport au triangle dont les deux points de rebrousse- ment O,, 0, et le point d'intersection 0, des tangentes cuspidales sont les sommets, l'équation de la courbe est (X,x, + x, + 2(h,x + x, Lx )xt— 0. A l'aide de cette équation, Pauteur étudie l’involution quadra- tique fondamentale de la courbe; de plus, il fait con- naître plusieurs propriétés nouvelles. A titre d'exemple, nous citons le théorème suivant : « Les huit points d'inflexion de C, se trouvent sur une cubique passant par les deux points de rebroussement 0,, 0, el par le point d'intersection de la droite 0,0, avec la tangente double ». — M. W. Kapteyn : Sur un theorème de M. Painlevé. Dans son Mémoire connu sur les équa- tions différentielles du premier ordre, M. Painlevé s’est occupé de rechercher dans quelles conditions les intégrales admettent un nombre déterminé de valeurs ou de branches, quand la variable indépendante par- court un contour circonscril aux points criliques mobiles (et non pas aux points critiques fixes). Pour TVR (x v) des équations de la forme = — danO Er, y) des polynomes, il à prouvé que, si les intégrales admettent » branches, il y a toujours une substitution de la forme : où P et Q sont ’ PE pe RE m1 Mn—i1yt—1+M,y +1 par laquelle l'équation différentielle se réduit à une ; : 1 . (lu - UE à équation de Riccati De Gus + Hu + K, où les coeff- Ux cients L, M, G, 1, K sont des fonctions de x. M, Kapteyn se propose de démontrer ce théorème d'une tout autre manière, en se basant sur l'équation : LE EP me ct. C— : PH ni LE HT Vo où C est une constante et À et y représentent des fonc- tions arbitraires de x, Il se pose à cet effet la question : à déterminer toutes les équations différentielles de Ja forme indiquée admettant une intégrale égale à cette fraction. Il étudie en particulier les cas 1 = 2 et u =3, — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. L.S. Ornstein : La théorie slalistique mécanique de la capillarité. L'auteur déduit par la méthode slatistique de Gibbs la condition d'équilibre dans la couche capil- laire et traite de quelques questions qui s’y rattachent. Il imagine un système composé de 7 molécules sphé- riques (diamètre 5), parfaitement dures et élastiques, contenues dans un vase cylindrique de section égale à l'unité et de hauteur Z. Les molécules exercent des lorces attractives les unes sur les autres jusqu'à des distances {rès grandes par rapport à ç et à leur distance mutuelle moyenne. Cette attraction, fonction de la dis- tance des centres /, a une énergie potentielle — o{f), supposée nulle pour des valeurs assez petites de f; la fonction 4{f), définie par l'équation /o{f)df=— dY(f), disparaîtra pour les mêmes valeurs. Cela posé, l’auteur considère un système canonique à module 0, composé de N systèmes analogues au précédent. Le volume Z étant divisé par des plans horizontaux en X éléments dz,..., dz4..., dzyx, On peut déterminer dans l'ensemble des systèmes la fréquence de ceux qui contiennent D,..., D... Ur Molécules dans les éléments dz,..., dzx..., dzr. Pour cette fréquence £, on trouve : 3 DyEx 3" à - il t—=N(2rm0) 8 n1] [vd (] 1 ! UP : D fonction de — —nz,est<1, dzx représente l'extension dans un espace à 32 dimensions du volume ({dz4}», où il n'existe pas d'inégalité de la forme : La furme (w:dzx)"x, où wx, Sy + Qu = Vel Fa 2) < 68, Av, Yu, etc., élant les coordonnées des centres, W une constante déterminée jouant le rôle de l'énergie libre (Gibbs), tandis que la signification de <, sera indiquée plus bas. En supposant que l'énergie potentielle mutuelle d’un couple de molécules appartienne pour la moilié à chacune d'elles el en introduisant l'hypo- thèse qu'on peut prendre les éléments 47; d'une telle grandeur qu'ils contiennent un grand nombre de molé- cules, quoiqu'en même temps 4{/) ne change qu'imper- ceptiblement pour un changement de { égal à dz, l'auteur trouve qu'on peut attribuer à chaque molécule de la couche 4z4 une mème énergie e. L'énergie poten- tielle totale peut donc être représentée par : T De ï En exprimant ensuile l'énergie potentielle par les nombres v4 el par la densité moléculaire nx, en ecalcu- lant l'énergie par molécule dans la couche zx, en prenant dans ce but d'abord la contribulion provenant des molécules dans les couches à une distance vgz de la couche dz4 (densités n,—, et n,+,) et en addition- nant les quantités trouvées pour loutes les valeurs de vdz qui diffèrent de zéro, on trouve pour s la valeur — rzEny. y nx+,) Ÿ (vdz), et donc pour l'énergie potentielle : L n Q Ni RU \ of Ÿ NE, = — TZ \ n, Ÿ (n,=,#+n,7,)u(-42) 22 44 RSI É k T [ a 1 Le ACADEMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 199 Ensuite, l'auteur applique le théorème (démontré dans sa thèse) : « On peut trouver les qualités d'un système réel en étudiant les qualités correspondantes du sys- | tème de fréquence maximale dans l'ensemble. » Ainsi il trouve pour la condition du maximum, done pour la | condition de l'équilibre : be Dane d'log w, Des nb og Ru = T, n an, o tandis que & log &, donné par l'équation : k ôny: 1 1109 4\° SEELEÆNÉ dE UE ne Et) Zi2n, an, du. L : L k zdz NY, Q AVES = Pe > ôn, Ÿ your (en -Pén,r), | ll doit être négatif pour que l'équilibre soit stable, En introduisant l'hypothèse que, dans la couche capillaire, la densité change d’une manière continue, et en em- ployant les constantes connues à et GC, il trouve qu'on peut tranformer la première condition en : d'en u, d log w. 10g tn, —2# Ny dnz 2an+ 1Y = —— — Ce AU TS L Pour l'énergie potentielle, on peut écrire &4 = — any + Sex, & ne différant de zéro que dans la couche capil- laire. En retranchant la condition d'équilibre à la hau- teur 7, de celle à la hauteur z,—+ d7, et en introduisant la fonction : D ns Den 20 ! (Q] an oO on {rouve : dpy ee décy = dz, Su me ? condition analogue à celle de l'équilibre statique. En l'intégrant d'un point de la phase homogène à un point de la couche capillaire, on trouve : Z4 à ; 7e } 1, = Dh — 2N,E€c; 2 = ecuZ, Pr =Pa YEC4X 4e Zh extension d'une formule connue. En intégrant de la première phase à la seconde, on trouve }, =p,, la con- dition connue de l'équilibre pour les systèmes à phases coexistantes. Cette équation et celle qu'on obtient en appliquant la condition d'équilibre aux phases homo- uènes, OÙ e4——anz, peuvent servir à déterminer u, et n, et ensuite la seconde fait connaître p. Pour discuter la stabilité, il est nécessaire de diviser à? log € en deux parties, dont la première provient des couches homogènes, la seconde des éléments de la couche capil- laire. La première partie peut être transformée en ; d d log w7 2:n4 1 N\ôn?, 2 log E—=|—1 D, -— | x. CLEA + CP UT o ù ET L mA AUX où «& égale 1 ou 2. Cette partie est négative sous la con- dition : È d d 102 w 2ans — 1 n° > — 0! Te He REEn iu (CI ou, en introduisant la fonction p, sous la condition de connue > 0 de la stabilité thermodynamique. De dm plus, il faut que la seconde partie à, log € soit négative. Elle se réduit d'abord à : rdz SARA Ve z © Dr (vdz)(in,_, +ôn,.,) € y d) ênyèny N) V7) (22 EY + ma), di x, À CERN) € y dz,, En arrangeant les termes de celte somme de manière à combiner toujours quatre termes de la forme : 1 dnx dn.,, _, fênx CD y — y \° ’ - | Llvdz), dz dz., ZT ON'yN un x uz., (174 + om | on voit tout de suite que l'expression en question es négative. Ce qui prouve que l'équilibre est stable aus- sitôt que les parties homogènes jouissent séparément de cette propriété. En observant que la constante Ÿ est équivalente à l'énergie libre (énergie libre statistique de Gibbs), on peut l’évaluer, la somme X, £ des fré- quences élant égale à N. Ainsi l’on trouve : = ce 3 1 lex à L a ñ F gi wff()re 9: y 1 210 m De plus, Gibbs à démontré que l'expression —% déter- minée par l'équation : représente l'entropie s. La quantité : est l'énergie moyenne de l’ensemble. L'énergie cinétique moyenne est égale à — 10 (Gibbs, Lorentz). Dans sa thèse, l'auteur a prouvé que l'énergie potentielle moyenne est égale à l'énergie moyenne du système de fréquence maximale, On obtient donc pour s : SE k 3 \ u = o (27€ 20 = DES 1 log (2r@1m) + n log n + Ÿ n,, log Fe (ART 1 Ainsi on à démontré, sans se servir d'une hypothèse uouvelle, l'hypothèse émise par Van der Waals : « L’en- tropie d’un élément de volume dépend seulement de la densité n et du nombre des collisiors des molécules de cet élément ». Cependant, l’auteur y ajoute la remarque que la démonstration n’est de rigueur que dans la sup- position que les lois d'attraction émises dès le com- mencement soient justes et qu'il est possible que l'hypo- thèse ait besoin d'une correction en d’autres cas. Enfin l'auteur calcule la pression dans la direction de la couche. Il trouve pour la forces exercée par le système de fréquence maximale : % Ko= 42 + / (- Nec + 2 ede) 1z, ‘0 = “hi extension d’une formule connue, et pour la pression cherchée : 29 SaiENGES PHYSIQUES. — M. J. D. Van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. XI. Continuation de la discussion sur la possibilité de valeurs de v > pb, dans le cas où le lieu des courbes dl db? > a () et = —0 est une courbe fermée. — M. P. «x? dv? Zeeman : La loi de la variation de la raie moyenne dun triplet. En deux communications précédentes (Rev. génér. des Se, L. XIX, pp. 340, 516), l'auteur à prouvé le phénomène du déplacement de la compo- Sante moyenne d'un triplet à l'aide du spectroscope- échelon de M. Michelsen, de manière à exclure tout doute. Ce déplacement a été constaté simultanément par MM. Gmelin et Jack; d'après M. Gmelin le dépla- cement de la raie de mercure 5.791 est proportionnel au carré de la force magnétique. Dans une commu- nication faite l’année dernière (/tev. gener. des Se., t. XIX, p.128), l'auteur a publié des mesures de la décom- position asymétrique de la raie susdile du mercure. lei il donne les résultats d’autres expériences d'après la 209 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES méthode de MM. Fabry et Perot; dans un graphique, la ligne faisant connaître comment le déplacement dépend de la force magnétique a la forme d'une para- bole, basée sur trois groupes de cas. — M. A. F. Hol- leman présente en son nom et au nom de M. J. J. Polak : Sur la sullonation de l'acide benzène-sullo- nique. Une des synthèses dont il s'agit se représente schématiquement de la manière suivante : 1:2— C‘H*CI(AZO®) Na2s? HA203 3 —> (A7O°)C'H#.S:S.CSHt(AzO?) —> 1:2— C'H#(AzO?) Zm (SOSR) —> (AzH°) CHA (S0%H) > CHMAZSOS —> CH AZ2S. CSOCEHE) (SOK) KMnO4 CSH‘(SCSO.C?H5)(SOK) —> C'H4(S0!)Ba. BrCle Ensuite M. Holleman présente au nom de M. E. H. Büchner et M! B. J. Karsten : Sur le système HBr— Br. D'après la ligne de fusion de la substance HBr, dressée par les auteurs, les substances Br et HBr n’admettent pas de composé solide; il n’est pas encore décidé si les phases solides qui se précipitent con- sistent en Br pur, en HBr pur ou en cristaux mixtes. 30 ScrENCES NATURELLES. — M. J. W. Moll présente au nom de Me T, Tammes: Le dipsacan et la dipsacotine, un nouveau chromogène et une nouvelle matière colo- rante des Dipsacées. Quand on expose des feuilles de Dipsacus sylvestris pendant quelques heures dans une atmosphère humide à une température d'environ 60° C., elles se colorent en beau bleu foncé. Ce phénomène, accidentellement observé, a donné lieu à une recherche plus détaillée. Les résultats principaux de cette re- cherche sont les suivants : Toutes les plantes examinées de la famille des Dipsacées (59 espèces de 5 genres) contiennent un chromogène, le dipsacan, et un fer- ment, la dipsacase, qui à la propriété de décomposer le chromogène. Le dipsacan est décomposé non seule- ment à la température normale par la dipsacase, mais aussi en présence de l'eau à des températures variant entre 35° et 100° C. Le produit de décomposition forme, après oxydation, une matière colorante, la dipsacotine. La dipsacotine est soluble dans l’eau; elle est décom- posée par l'acide sulfurique et aussi par la lumière. Le chromogène, le dipsacan, se trouve dans tous les organes et tissus, excepté dans la moelle de la tige; probable- ment, il ne se trouve pas dans la membrane de la cel- lule. Les jeunes organes croissant vigoureusement con- tiennent la plus grande quantité de dipsacan, et les circonstances favorables à la vie font augmenter la quantité de cette substance dans la plante. I n'y a pas de rapport direct entre le dipsacan ef l'assimilation du carbone. Probablement, il joue un rôle dans les phéno- mènes de nutrition et de respiration, en se formant et se décomposant continuellement. L'auteur pense que la dipsacase forme le produit de décomposition du dip- sacan aux endroits où ce produit est nécessaire, et parce que ce produit est immédiatement utilisé, il ne peut pas être transformé par oxydation en la matière colorante. Cette interprétation rend compte à la fois de la présence du ferment et de l'absence de la matière colorante dans la plante vivante. — M. L. Boek présente au nom de M. A. J. P. van den Broek: Sur l'histoire ontogéuétique de Furèthre de l homme. P.-H. Scnoure. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du T Janvier 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Muller présente ses recherches sur les surfaces gauches dont un fais- ceau directeur se compose de lignes hélicoïdales ordi- naires. — M. E. Kruppa démontre le théorème sui- vant : Si l'on choisit, dans l’espace à trois dimensions, des points v,, x,, y, Z,, quelconques et qu'on détermine l'hyperbole focale de la surface de second ordre qui à pour point moyen le centre de gravité du tétraèdre v,, X,, Ja Z,, et pour tétraèdre polaire ce tétraèdre, les droites partant d’un point v, de cette hyperbole vers les points choisis forment la projection parallèle réelle d’un croisement d’axe perpendiculaire-équiangle dans l'espace à quatre dimensions. — M. E£. Waelsch Sur le développement du produit de deux fonctions sphériques en fonctions sphériques. 20 SCIENCES PHYAIQUES. — M. W. Schmidt décrit un appareil pour la mesure immédiate de la vitesse de chute des gouttes de pluie. Il se compose de deux disques horizontaux fixés à une certaine distance sur un axe vertical. Au disque supérieur on a praliqué une entaille en forme de secteur, tandis que le disque inférieur est recouvert avant chaque essai de papier- filtre de Wiesner. Si l'on fait tourner uniformément l'appareil, il ne tombe sur le disque inférieur que les gouttes ayant passé par l’entaille, en forme de secteur, du disque supérieur, et cela avec un déplacement cor- respondant au temps qu'elles ont mis à franchir la dis- tance entre les deux disques. D'après ce déplacement, on peut déterminer leur vitesse. La vitesse maxima ne dépasse pas 8 mm. par seconde pour les grosses gouttes; pour les plus petites, elle s'accorde avec la valeur calculée d'après la formule de Stokes. — M. P. Friedlænder à reconnu que la matière colorante du pourpre antique retiré du A/urex brandaris possède la composition C'H#Br?4720; c'est un 6 : 6-dibromo-in- digo. — M. J. Zellner à trouvé des ferments amyloly- tiques dans 19 espèces de champignons parasites et saprophytes; ces ferments sont paralysés par les acides minéraux et activés par les acides organiques dilués. Leur optimum de température est situé à ä0°; ils sont détruits à 70°. Les produits de la dégradation diasta- tique sont d'abord des corps du groupe des dextrines, puis du dextrose. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. F. Krasser a déterminé, après Slur, les fougères appartenant à la famille des Marattiacées de la flore triasique supérieure des couches de Lunz; il a trouvé 7 genres avec 17 espèces, toutes éteintes. Séance du 14 Janvier 1909. SCIENCES PHYSIQUES. — M. K. W. F. Kohlrausch à déterminé la conductibilité électrique de l’atmosjhère d'après la méthode de Gerdien, pendant une traversée de Brème à Galveston; la valeur moyenne a été de 1—2,06><10—* unitésstatiques. Des mesures analogues, faites à Porto-Rico de novembre à janvier, ont révélé une période diurne avec maximum à 1 h.1/2 de l'après- midi et minimum à 4 h.1/2 du matin; la valeur moyenne est de 3,66 X 10—#. — M. E. von Schweïidler à pour- suivi en 1907-1908 ses mesures de l'électricité atmo- sphérique sur les lacs alpins. De l'ensemble des obser- vations, il résulte que la valeur du coeflicient g (rapport de la dispersion négative à la positive) est plus petite que { dans les espaces complètement protégés contre le champ terrestre et plus grande que 1 aux endroits plus ou moins eXposés. Louis BruNEr. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L' MARETHEUX, imprimour, 1. rue Cassette. 20° ANNÉE N° 5 15 MARS 1909 Revue générale D Lonces pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et danse tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ L. — Astronomie Le huitième satellite de Jupiter. — Ce nou- veau satellite, découvert, comme on s'en souvient, par M. Melotte, le 27 janvier 1908, à l'Observatoire de Green- wich, vient d'y être photographié en de bonnes condi- tions, le 46 janvier dernier. Sa position, à 4"4® 7° du malin, était : AR — 1015646817; D —+ 704046. Son mouvement quotidien autour de Jupiter est estimé à — 16° 1’. Cette lune jovienne, qui est de 17° grandeur et se présente, par conséquent, tout juste à la limite de visi- bilité dans les plus puissants instruments d'optique actuels, semble décrire une orbite remarquablement vaste et très excentrique, dont l’inclinaison est de 31°. D'après ces éléments, ce petit astre serait éloigné de sa pl nète centrale plus qu'aucun autre satellite connu. Sa révolution autour de Jupiter s'effectuerait en deux ans et deux mois, à la distance moyenne de 25 millions de kilomètres. En outre, son mouvement parait rétro- grade. Suivant les premiers calculs, ce satellite doit ètre plus minuscule encore que Thémis, la dixième et invi- sible lune de Saturne. Son diamètre est évalué à 56 kilomètres et, vu de Jupiter, il est comparable à une faible étoile télescopique de neuvième grandeur. $ 2. — Physique La contraction de volume et le pouvoir de réfraction. — On à fait d'innombrables tentatives pour trouver une fonction (dite constante de réfrac- tion) de l'exposant de réfraction et de la densité, laquelle resterait constante pour des variations de la densité dues à la température ou à la pression. Dans un récent Mémoire ‘, M. W. F. Hess établit une relation générale s'appliquant à toutes les formes du pouvoir de réfraction R et qui fournit des formules de 1 Annalen der Physik, n° 13, 1908. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. mélange permettant d'obtenir des résultats tout aussi bons que la constante de réfraction de Pulfrich. Les calculs faits sur les mélanges les plus divers prouvent que la relation fondamentale établie par l’auteur, à savoir : RER AE Re —= qc , — où R, est le pouvoir de réfraction que posséderait le mélange, dans le cas où le mélange ne s'accompa- snerait d'aucune varialion de volume, et € la con- traction ou dilatation de l’unité de volume, -— est réellement satisfaite pour toutes les formes usuelles du pouvoir de réfraction R, c’est-à-dire que le rap- port 4 de la « contraction du pouvoir de réfraction » à la contraction du volume est un nombre constant positif, pour toutes les conditions de volume d'un mélange. Toutes les formules de mélange résultant de cette relation fondamentale concordent également bien avec les observations. La relation fondamentale se trouve être presque indépendante de la température et de la longueur d'onde de la lumière dont on se sert. Les nouvelles formules données par l’auteur per- mettent aussi de calculer les exposants de réfraction d’un liquide pour les températures intermédiaires entre deux limites pour lesquelles ceux-ci sont donnés. Les équations antérieurement élablies par M. Pulfrich, d’une part, et l'auteur, de l’autre, rentrent comme cas spéciaux dans la formule fondamentale donnée ci- dessus. $ 3. — Electricité industrielle Le problème téléphonique en France. — Nous recevons de M. A. Turpain la lettre suivante : « Monsieur le Directeur, « A vrai dire, j'attendais bien quelques réponses à mon récent article sur le Problémetéléphonique actuel en France, mais j'avoue que j'espérais des arguments etnon des affirmations sans preuves : « 4° Vous êtes incompétent. » — «2 C’est un déplo- rable accident. » Voilà, en résumé, la lettre de M. Mer- cadier. 202 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE « Nous connaissions très bien l’automatique », écrit M. Estaunié ; il n'ose ajouter, et c’est dommage, car l'examen des faits l'indique : « mais nous le gardions « pour nous ou comme sujet de nos discussions acadé- « miques entre ingénieurs ». « Mon incompétence : peut-être pourrais-je l'atténuer, mais cela me gênerait au moins autant que d'affirmer sans preuves qu'il en est de même du distingué Direc- teur des Etudes à l'Ecole Polytechnique. Et de cela je me garderais d'autant mieux que j'ai l'habitude de lire les travaux qui se publient concernant les techniques dont je m'occupe, et le souvenir de ceux de M. Merca- dier suffirait à arrêter sous ma plume un jugement aussi inconsidéré. « Cela n'est point la question, d'ailleurs, et ferait dévier le débat qui concerne, non pas ma compétence, mais la question de l’organisation des téléphones en France. Je ne puis que prendre acte qu'aucune des deux lettres de M. Mercadier et de M. Estaunié ne détruit les arguments de mon article et les conclusions, bien plus sévères encore que les miennes, des rappor- teurs américains, qui, certes, ne peuvent être taxés de partialité. (Consulter les termes du Rapport, Revue générale des Sciences, 30 décembre 1908, p. 982, en note, et Journal officiel, 7 novembre, p. 2112, col. 2). Ils ignoraient, d'ailleurs, en le rédigeant que leur Rap- port aurait les honneurs de la tribune francaise. « Veuillez agréer, monsieur le Directeur, ete... » A. Turpain, Professeur à l'Université de Poitiers. L'action du courant alternatif sur les lampes au tantale.— L'action du courantalternatif sur les lampes incandescentes à filament de tantale vient d'être étudiée par M. O0. Scarpa’, professeur à l'Université de Naples. L'expérience avait démontré que ces lampes, toutes choses étant d'ailleurs égales, possèdent une durée bien moindre quand elles fonctionnent par courant alternatif que par courant continu; mais les causes de ce phéno- mène étaient restées jusqu'ici inconnues, M. Scarpa avait observé, depuis quelque temps, que la surface des filaments métalliques traversés par les courants alternatifs devient rugueuse, ce qui laissait supposer la formation d’une structure cristalline, aug- mentant la fragilité du filament. Or, parmi les causes favorisant le passage de l’état amorphe à l’état cristallin, les températures élevées et les vibrations mécaniques sont les plus importantes. Comme, à somme égale d'énergie du courant, le pre- mier facteur doit évidemment exercer des effets iden- tiques, qu'il s'agisse de courant alternatif ou continu, le surcroît d'action constaté dans le cas du courant alter- natif ne peut être dù qu'au second facteur. Or, les réactions électro-dynamiques se font sentir avec une intensité assez considérable entre les portions recti- lignes des filaments de tantale, tendant, en raison de leur disposition en zigzag, à se placer parallèlement les unes aux autres. La résultante de ces forces indivi- duelles, distribuées sur une surface cylindrique, ne peut s’'annuler qu'avec la valeur instantanée du courant, mais jamais par compensation mutuelle des compo- santes. Or, les filaments exposés à l'effet de ces forces pério- diques et aux réactions élastiques propres peuvent vibrer avec une fréquence double de celle du courant. Pour démontrer, par l'expérience, la présence de ces vibrations, l’auteur se sert d’un dispositif permettant d'alimenter successivement une lampe au tantale avec une différence de potentiel en courant continu équiva- lant à son potentiel normal (110 volts) et avec un cou- rant alternatif du même effet. Un microscope, pourvu d’un micromètre oculaire, permet d'observer un grand nombre de filaments successivement au passage des courants continu et alternatif. ® L’Eleltricila, n° 19, 1908. Or, l'épaisseur apparente du filament, dans le cas du courant alternatif, a toujours été plus du double, à cer- tains endroits, de la valeur observée pour le continu, en même temps que son imäge sur les bords était plus claire. En raison de la persistance des images de la rétine, ceci démontre évidemment l'existence de vibra- tions transversales rapides du filament, dont l'épaisseur au milieu, et plus encore aux soudures, reste inaltérée, en même temps que l'intensité lumineuse y estplus forte. Dans le cas du courant continu, l'épaisseur de toutes les portions du filament est identique; l'intensité lumi- neuse semble également rester constante. L'auteur remarque aussi des variations à lente période de l'épaisseur apparente du filament alimenté de cou- rant alternatif, variations dues sans doute à l'interfé- rence des vibrations forcées avec les vibrations propres du filament. Dans les lampes tubulaires à filaments de charbon recourbés en U, les vibrations prennent une amplitude suffisante pour être observées quelquefois à l'œil nu. D'autre part, les vibrations d’une lampe Osmin, disposée verticalement, sont bien moins importantes, ce qui, semble-t-il, est dù au poids plus considérable et à la consistance pâteuse du filament, ainsi qu'à la symétrie plus grande des lampes. Ceci concorde parfaitement avec les expériences relativement satisfaisantes faites par les constructeurs et les consommateurs de lampes Osmin alimentées avec du courant alternalif. L'auteur a ensuite étudié au microscope les filaments de lampes au tantale alimentées pendant un certain temps avec le courant alternatif de la ville de Naples (42 périodes), en les comparant à des filaments neufs et à ceux qui avaient été traversés par le courant con- tinu. Cette comparaison fait voir à l’évidence l’action du courant alternatif : la formation d’une structure cristalline (caractérisée par des cassures aiguës) est accélérée, l'agrégation des molécules défaite et les différentes portions sont déplacées les unes par rapport aux autres. En raison de l'énorme dégagement de chaleur aux cassures, la vaporisation el, par là, le noircissement de l’ampoule sont favorisés à certains endroits. Les filaments au tantale alimentés avec du courant continu se comportent d'une facon bien différente : bien qu'il existe toujours une tendance naturelle à la formation d’une forme cristalline, cette tendance est bien moins marquée; l’on ne constate pas de désagré- gation de la structure. Bien que les mesures prises pour augmenter le paral- lélisme et l'égalité de distance entre les portions rec- tilignes du filament, et pour rendre la période propre différente de celle du courant, réduisent certainement les vibrations et ainsi la désagrégation, il est évident qu'aucune d'elles ne permet d'éliminer complètement cet inconvénient, les filaments de tantale présentant la tendance au passage à l’état cristallin — bien qu’à un degré moindre — mème dans le cas du fonctionnement par courant continu. $ 4. — Chimie appliquée Le VII: Congrès international de Chimie appliquée.— Le VII‘ Congrès international de Chimie appliquée aura lieu à Londres, du 27 mai au 2? juin, sous le haut patronage du roi Edouard VII et de son fils le prince de Galles. Il comprendra onze sections, embrassant toutes les branches de la Chimie appliquée, où seront présentées toutes les communications des membres; en outre, des conférences sur des sujets généraux seront prononcées en séance plénière par d'éminents savants et techni- ciens. MM. A. Haller, Paterno, Witt, Sir B. Redwood se sont déjà fait inscrire dans ce but. Les chimistes anglais préparent à leurs collègues étrangers une imposante réception; il est à désirer que les chimistes français répondent nombreux à l'invita- tion qu'ils recoivent d’outre-Manche. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 203 Pour tous les renseignements relatifs au programme du Congrès et aux inscriptions, on est prié de s'adresser au secrétaire général, (0, Cromwell Crescent, Londres, S. W f S. W. A propos du Service de la répression des fraudes. — Le Journal officiel à publié récemment un arrêté spéciliant toutes les localités où les vigne- rons auront, dès maintenant, seuls le droit de dési- gner sous le nom de « vins de Champagne » les produits de leur récolte. C'est là, nous promet-on, seu- lement le commencement de l’œuvre entreprise par le « Service de la répression des fraudes », qui doit élaborer sur le mème type toute une série d’arrèts analogues. Sans discuter la valeur du décret lui-même et, par exemple, remarquer que le fait de placer dans la Champagne des villages situés à quelques kilo- mètres de Soissons paraît s'accorder mal avec les données historiques et géographiques généralement admises, on peut, à ce sujet, signaler quelques points faibles de l'organisation du nouveau Service. L'obligation, pour les commercants, de vendre les denrées sous leurs véritables noms est évidemment une mesure excellente en principe. Mais, pour qu'elle ait un effet utile, pour qu'il soit possible de l'appli- quer, il serait absolument indispensable de /pouvoir, quand besoin est, reconnaître le produit « naturel » de limitation frauduleuse. Le grand public, toujours volontiers victime du préjugé de la compétence, croit généralement que rien n'est plus facile au chimiste; et la grande presse à donné de tels détails sur la répression de la fraude par les nombreux laboratoires dont dispose maintenant l'Administration que la dé- termination de l’origine d’un vin, par exemple d'après les données de l'analyse, passe pour la chose la plus facile du monde. Or, la réalité est tout autre. « On ne peut fixer par des chiffres, même approxi- matifs, le degré alcoolique et le poids d'extrait mini- mum que doit laisser un vin, » écrit M. Armand Gau- tier, pourtant ce sont là les données les plus sûres, qui permettent le mieux de conclure — quand on peut conclure — à la fraude. « S'agit-il de certifier qu'un échantillon quelconque de vin a ou n'a pas été mouillé? On peut répondre à priori que la question posée est à peu près insoluble et que, si d'aventure un chimiste s’avise de vouloir y répondre, il se trom- pera cinq fois sur dix..., » dit M. Magnier de la Source dans son classique « Traité d'analyse des Vins ». Comment, dès lors, les experts du Ministère de l'Agri- culture pourront-ils distinguer le vin de Chavonne, par exemple, de celui de la commune d'à côté, du même canton de Vailly? Et la question est d'impor- tance, puisque, depuis le nouveau décret, un vin et non l’autre sera le vrai, le seul « Champagne ». M. Jean Cruet constatait récemment (La vie du droit) l'impuissance du législateur à changer quoi que 2e fût aux coutumes et aux mœurs. Ne serait-ce pas parce que le « droit » est quelque chose de bien supérieur à la pensée collective des membres d’un Parlement ? Le vrai droit est le rationnel : il résulte logiquement d'une foule de causes quelquefois obscures. Et il est heu- reux, il est « juste », au sens de Hegel, que des lois artiBcielles et mal faites ne puissent rien changer à la marche logique des choses. La législation sur la fraude, qui eût dû être conçue dans le seul intérèt du consommateur, fut « lancée » par le Ministère de l'Agriculture pour se faire une facile popularité près des producteurs de denrées naturelles : elle avorte misérablement. Elle produit même des effets diamé- tralement opposés aux intentions des promoteurs; il arrivera pour les vins de Champagne ce qui arrive pour les sirops : il n’y a plus ou presque plus, dans le commerce, que des mixtures éliquetées « de fan- taisie », conformément à la loi; en sorte que, pour n'être pas fraudé, le sirop n’est pas plus « naturel » pour cela. De même, les succédanés du beurre se vendent maintenant sous des noms nouveaux et jolis : « coc- cose », « végétaline », qui font tout autre impression que celui de la fàächeuse margarine. Ils se vendent de plus en plus. Et ce succès, en dépit des lois qui protègent le beurre, est rationnel, c'est-à-dire « juste ». La matière élaborée dans la plante est utilisée direc- tement, sans l'intermédiaire de mauvais rendement, coûteux et malpropre, qu'est la vache. En outre, le produit est plus pur, de composition plus uniforme, il est à meilleur marché : on ne peut nier que son adop- tion constitue un progrès. Il est d'autant plus regrettable de voir les chimistes officiels perdre leur temps et gaspiller leurs efforts que l’œuvre bien comprise eùt été admirable. Au lieu de recherches impossibles et inutiles, que ne se sou- cient-ils seulement de la pureté, de l’innocuité, de la valeur physiologique des matières alimentaires? Au lieu de publier des « méthodes oflicielles » où sont minutieusement décrites les capacités de pipette à employer, que ne publie-t-on, comme l’a fait le Minis- tère belge de l'Agriculture, des « tracts » sur la façon de se nourrir convenablement et économiquement ? Ne serait-il pas infiniment intéressant d'étudier un moyen d'empêcher ce gâchage de forces et d'argent de la société moderne : la réclame, en indiquant à tous, d'une facon rationnelle, la juste valeur des choses? L'Etat dépense des millions pour l'étude de la Science; que n’en consacre-t-il aussi quelques-uns à l'étude des applications de la science aux choses humbles de la vie journalière! Il est des professorats d'agriculture, des Stations agronomiques où l'on ren- seigne les cultivateurs sur la valeur physiologique des différents aliments à donner aux bestiaux, où l'on fait des essais d'alimentation. Pourquoi n'a-t-on pas conçu ées laboratoires du Service des fraudes comme des sortes d'Instituts Solvay où l'on tâcherait de remédier au gaspillage énorme de temps, de peine, d'argent qu'entraîne la façon habituelle de se nourrir, en com- battant la routine et les préjugés par la « croisade » de l'alimentation rationnelle ? Henri Rousset. 5. — Physiologie Sur le centre de la polypnée. — Lorsqu'on expose un chien au soleil, ou lorsqu'on l'introduit dans une enceinte à température élevée, sa respiration se modifie profondément; elle devient infiniment plus rapide qu'elle n’est chez l'animal placé dans les condi- tions ordinaires de la vie : il y a polypnée. On sait — M. Ch. Richet, qui a fait une très belle étude de ce phé- nomène, l’a démontré — que cette polypnée est le mé- canisme puissant dont dispose le chien pour lutter contre l'échauffement et se maintenir à sa température normale, quand la température du milieu ambiant s'élève: la polypnée a, en effet, comme conséquence une évaporation considérable d’eau par les voies respi- ratoires, évaporation qui consomme une grande quan- tité de chaleur. M. Ch. Richet a démontré que la polypnée est un phénomène délicat, ne pouvant se manifester que dans des conditions très spéciales, qu'il a bien déterminées. On peut penser que l'appareil nerveux qui préside à son établissement est lui-même parmi les plus délicats. C'est cette proposition que MM. J.-P. Langlois et L. Garrelon établissent dans une Note récemment publiée”. : Le centre respiratoire est situé dans le bulbe rachi- dien, près de la face postérieure, au niveau du plancher du quatrième ventricule. La polypnée, étant un mode spécial de respiration, est vraisemblablement due à un mode spécial de fonctionnement du centre respiratoire ; on n’a donc pas besoin d'imaginer lexistence d'un centre polypnéique indépendant, au moins anatomi- quement, du centre respiratoire. | Or, on sait par les travaux d'Aducco et de François- LT OPEN" M TR — 1 J-P. LaxGors et L. Gauxecox : Centre polypnéique et cocaïne. C. AR. Soc. de Bioloyie, 26 décembre 1908, p. 115-116. 204 Franck que la cocainisation superficielle du plancher du quatrième ventricule entraine la suspension de la respiration. Ne serait-il pas possible de trouver des con- ditions, dans la pratique de cette cocainisation, qui permettraient de séparer la fonction respiratoire et la fonction polypnéique du centre bulbaire ? MM. J.-P. Langlois et L. Garrelon ont soumis des chiens à l’action du chloralose, puis les ont placés dans une étuve à 45°, de façon à faire apparaître la polypnée. Ils ont alors introduit dans la cavité du quatrième ven- tricule une solution de cocaïne, ou badigeonné avec cette solution la surface du plancher du quatrième ventricule mise à nu. Selon la méthode adoptée, ils ont observé un arrêt respiratoire ou un ralentissement res- piratoire. Dans ce dernier cas, la polypnée disparaissait, la respiration subsistait; c’est donc que la fonction polypnéique du centre respiratoire disparaît avant sa fonction respiratoire. Dans le premier cas, ils prati- quèrent la respiration artificielle, jusqu'à ce que la cocaine ait été éliminée suffisamment pour permettre la réapparition de la respiration spontanée : la respira- tion ne se montrait pas polypnéique d'emblée; la po- lypoée ne se manifestait que tardivement. Ces faits intéressants confirment la notion déjà clas- sique de la délicatesse du mécanisme polypnéique. Ce mécanisme est merveilleux d'efficacité pour lutter PRE l’'échauffement, mais il est d’une extrème fra- gilité. L'alimentation du paysan finlandais. — Dans un travail très développé, M. Sigfrid Sundstrôm réunit les recherches qu'il a faites sur l'alimentation du peuple finlandais. Nous possédons déjà de nombreux rensei- gnements statistiques sur l’alhimentation des divers peuples d'Europe et quelques renseignements sur les peuples des autres parties du monde, renseignements qui ont permis de tirer des conclusions et de poser des règles générales. Mais, puisqu'il s'agit de statistique, les renseignements nouveaux sont toujours les bien- venus. M. Sigfrid Sundstrôm constate qu'un paysan de Fin- lande, adulte et de poids moyen, travaillant moyen- nement, consomme #.000 calories par jour, une femme en consommant de 2.700 à 2.800. L'enfant de deux à trois ans emploie 1.000 calories, augmentant sa dépense de 200 calories par an. ; L'adulte consomme en moyenne 136 grammes d’albu- mine, 83 grammes de graisses, 580 grammes d'hydrates de carbone; sa consommation d'énergie dérive donc : pour 15 °/,, des albumines; pour 21 °/,, des graisses; pour 64#°/,, des hydrates de carbone, tous ces nombres ne différant pas sensiblement des nombres acceptés comme moyennes pour les Européens. Au point de vue de l’utilisation digestive des aliments finlandais, les albumines sont utilisées pour 84 °/,; les graisses, pour 90 */,; les hydrates de carbone, pour 85 °/,: l'énergie des aliments pour 87,5 °/4. Le paysan finlandais consomme en moyenne par jour : 200 grammes de viande, poisson, lard; 1 litre 1/2 de lait complet; 550 grammes de farine ; 600 grammes de pommes de terre, empruntant ainsi la moitié de l'énergie aux céréales, le quart au lait, le dixième à la viande, le reste aux pommes de terre. $S 6. — Géographie et Colonisation Le développement économique de Ia Répu- blique Argentine. — L'agriculture, l'élevage et l'industriedes viandes congelées. — Récemment, à la Société de Géographie commerciale de Paris, une con- férence faite par un ingénieur français, M. Auguste- P. Potel, montrait, par des chiffres et des documents précis, le prodigieux développement de ce pays depuis quelques années. Ces documents ont d'autant plus de ‘ Unteisu:hungen über die Ernäbrung der Landbevülke- rung in Finnland. Helsingfors, 1908. CHRONIQUE ET CORRESFONDANCE , valeur que M. Potel n'est pas un voyageur pressé : depuis vingt ans, il habite l'Argentine, où il est à Ja tête d'une importante industrie, et, d'autre part, son sens pratique des affaires ne lui fait pas sacrifier la réalité au pittoresque. Aussi nous croyons intéressant de rassembler ici la partie essentielle des renseigne- ments qu'il a bien voulu nous communiquer, celle qui est la plus apte à nous faire saisir l’évolution de ce jeune et vigoureux pays. Tempéré dans sa plus grande partie, le climat de la République Argentine est chaud au nord, froid au sud ; son territoire est environ six fois plus grand que celui de Ja France ; sa population, qui était de 3 millions d'habitants en 1887, a dépassé 6 millions en 1907, mais il est évident que 200 millions pourraient y vivre à l'aise. Sa population ira d'ailleurs en augmentant rapi- dement, d’abord parce qu'elle reçoit chaque année plus de 300.000 immigrants, et aussi parce que la natalité y est considérable (34,6 °/), environ le double de ce qu’elle est à Paris et supérieure à celle de l’Alle- magne (25 °/o0). On compte actuellement en Argentine 185.000 Fran- çais et un million et demi d Italiens. Situalion économique. — Son état actuel mérite d'attirer notre attention, car si les Français y sont toujours reçus avec la plus vive sympathie, si les étu- diants se servent presque exclusivement de livres français, par contre notre commerce n'y occupe que le quatrième rang, venant après celui des Anglais, des Allemands et des Italiens. Le commerce français y décroit sans cesse, alors que celui de l'Allemagne pro- gresse d'une facon continue, surtout pour l'importa- tion. La France exporte plus qu'elle n'importe. EL cependant la stabilité financière de notre sœur latine, faible il y a quelques années, s’est fortement consoli- dée, et l'on peut dire aujourd'hui qu'au point de vue financier cette République américaine fonctionne nor- malement. Les capitalistes anglais, guidés par leur clairvoyance et leur audace, furent les seuls, jusque dans ces der- nières années, à construire des voies ferrées, à fonder des Banques, à créer des établissements frigorifiques pour lexportation des viandes, etc. Leurs capitaux employés au 31 mai 1908 s'élèvent au chiffre énorme de # milliards 380 millions, tandis que les capitaux français, entrés en activité seulement depuis quelques années, occupent la seconde place avec 540 millions. les capitaux allemands n’atteignant que 300 millions et les capitaux belges 10 millions. Il est certain que, par son sol fertile, par son elimat qui permet toutes les cultures, par les nombreuses industries qu'on y peut établir, ce pays offre aux capi- taux non seulement des garanties, mais des rende- ments importants, souvent supérieurs à ceux chtenus en Europe dans les opérations habituelles. : Agriculture. — A l'exception de la Cordillère des Andes, qui le traverse dans toute son étendue du nord au sud, ce pays est plat, et, par suite, propre à toutes sortes de cultures. Au point de vue agronomique, son territoire peut être divisé en deux parties : 104 millions d'hectares. 100 Terres de NabOUREEEE EN Terres aptes à l'élevage du bétail. Sur les 104 millions d'hectares de terres de labour, 14 millions seulement sont cullivés, et 90, pour être cultivés immédiatement, n'attendent que des bras. Parmi les 414 millions d'hectares cultivés, 6 donnent du blé et 3 du mais. Aussi la République Argentine oceupe-t-elle, dans l'exportation mondiale du blé, la seconde place, après les Etats-Unis et avant la Russie ; et dans l'exportation du maïs la seconde place égale- ment, après les Etats-Unis et avantle Danube; elle occupe même la première place dansl'exportation du lin. Elevage. — Si l'avenir de l’agriculture est grand, celui de l'élevage paraît immense. On conçoit, en effet, le nombreux bétail que pourraient héberger les 100 mil- lions d'hectares de terres propres à l'élevage. : CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE A litre de renseignement, voici queile était la com- position du bétail en 1907 : Espèce bovine . -800 têtes. — chevaline. . .110 — Mulets el ânes . . 5.180 — Moutons . PAR RU EPLVE 5 581.000 — POIDS Es TR elle cn ee 2 EU 000 — Chèvres 2.500.000 — Les deux branches principales de l'élevage sont l'exportation des laines et celle de la viande congelée ou réfrigérée (chilled beef). | En 1907, l'exportation des laines a été de 155.000 ton- nes, d’une valeur de 300 millions de francs. Cette production argentine représente environ 15°/, de la production mondiale. Dans le commerce d'exportation des viandes conge- lées, qui se fait presque exclusivement avec l'Angle- terre, l'Argentine occupe la première place, comme le montrent les chiffres suivants se rapportant à l’an- née 1907 : 1. République Argentine. . 211.000 tonnes. 2. Australasie . 169.000 — 3 États-Unis . 125.000 — En 1907, ce commerce a exigé 463.000 bêtes à cornes et 3.050.000 moutons. Les entreprises frigorifiques ont payé pour l’achat de ces bêtes plus de 150 millions de francs. Notons que cette industrie frigorifique, déjà si prospère, pourrait encore grossir son chiffre d’affaires en préparant du lièvre, car cet animal, depuis quelques années, abonde à tel point qu'il commence à inquiéter les agriculteurs argentins. On pourrait donc faire de lui ce que l'Australie a fait de ses lapins, qu'elle envoie congelés en Angleterre pour environ 20 millions de francs chaque année. Enfin, à ces industries pourront s’en ajouter d’autres, comme celles du beurre et du fromage, qui sont peu développées à cause de l'absence du personnel tech- nique et des difficultés de transports ; mais ces obsta- cles disparaïtront, et ce pays, avec les 6 millions de vaches qu'il possède, deviendra vite un grand produc- teur de beurre et de fromage. Quant au lait, il est consommé en grande quantité à Buenos-Ayres (250.000 litres par jour). Il existe dans cette capitale de nombreux établissements (/ambos) qui fournissent le lait en le trayant devant les clients. Inspection vélérinaire. — Nous ne devons pas ter- miner cette rapide description sans parler de l'Inspec- tion vétérinaire que subissent les produits d'origine animale et qui a été méthodiquement et savamment organisée par le Gouvernement. Dans chaque établissement frigorifique ou dans chaque abattoir existent plusieurs docteurs en méde- cine vétérinaire, qui n'entrent dans ce service qu'après quatre années d'études sérieuses. L'inspection vétérinaire commence au marché par l'observation des bestiaux vivants, puis elle se continue par un examen attentif des animaux abattus et par la saisie des viandes suspectes, qui sont alors brûlées dans une sorte de four crématoire. En 1906, sur 560 000 bœufs abattus dans les établisse- ments frigoriliques, on a seulement saisi 1°/, d'ani- maux tuberculeux, alors qu'en Europe, suivant les régions, on en trouve de 25 à 60°/,. C'est qu'en Argen- üne le climat et aussi les méthodes d'élevage permet- tent d'entretenir les troupeaux dans un excellent état de santé. S Ce qui détermine le plus grand nombre de saisies, c'est la mauvaise organisation du transport des ani- maux en chemin de fer, qui fait qu'ils arrivent en grand nombre fiévreux et contusionnés, surtout les moutons. Or, la moindre contusion ou une coloration 205 un peu foncée de la viande suffisent pour justifier la saisie. De plus, les vétérinaires surveillent aussi les procédés d'abatage, la destruction des viandes saisies, et enfin ils exercent un contrôle hygiénique sévère sur les ouvriers qui travaillent dans ces établissements. On conçoit qu'avec une telle surveillance la viande argen- tine arrive en Europe parfaitement saine. Cette inspec- tion vétérinaire aussi fortement organisée est évidem- ment une garantie pour le consommateur ; elle pour- rait, d’ailleurs, servir de modèle à nombre d'abattoirs européens, et il est certain qu'iln'existe nulle part, pour les viandes d'exportation, de législation plus avancée que celle de l'Argentine. En résumé, au point de vue de l’agriculture et de l'élevage, la République Argentine a devant elle un avenir immense. D'autre part, son climat, sa fertilité et le caractère de ses habitants ne manqueront pas d'atti- rer à elle de jeunes Européens courageux et actifs. Assurément, il n'y a rien à faire pour les bureaucrates, mais nous avons la conviction que nos jeunes Français qui sortent de l'Institut Agronomique ou des Ecoles nationales d'Agriculture, n'ayant plus comme leurs anciens l'amour stérilisant du fonctionnarisme agri- cole, ne manqueraient pas de s’y créer, si ce sont des hommes d'action et à l'esprit entreprenant, de belles et indépendantes situations. E. Caustier, À Professeur aur Lycées Henri IV et Saint-Louis. $ 7. — Enseignement Personnel universitaire. — M. Quénu, profes- seur d’Opérations et Appareils à la Faculté de Méde- cine de Paris, est nommé, sur sa demande, professeur de Clinique chirurgicale à ladite Faculté M. Gilbert Ballet, professeur d'Histoire de la Médecine à la Faculté de Médecine de Paris, est nommé pro- fesseur de Clinique, de Pathologie mentale et des maladies de l’encéphale à ladite Faculté. M. H. Hartmann, agrégé de la Faculté de Médecine de Paris, est nommé professeur d'Opérations et Appareils à ladite Faculté. M. Puiseux, docteur ès sciences, maitre de confé- rences de Mécanique et Astronomie à la Faculté des Sciences de Paris, est chargé d’un cours de Physique céleste à ladite Faculté. M. Delassus, professeur de Calcul différentiel et intégral à la Faculté des Sciences de Besançon, est nommé professeur de Mécanique à la Faculté des Sciences de Bordeaux. M. Bourget, directeur de l'Observatoire de Marseille, est nommé professeur d’Astronomie à la Faculté des Sciences de Marseille. M. Chabrié, chargé d'un cours de Chimie appliquée à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé profes- seur de Chimie appliquée à ladite Faculté. | M. Caullery, maître de conférences de Zoologie (Evo- lution des êtres organisés) à la Faculté des Sciences de Paris, ést nommé professeur de Zoologie à ladite Faculté. É M. Cluzet, agrégé près la Faculté de Médecine de Toulouse, est nommé professeur de Physique médicale à la Faculté de Médecine de Lyon. Ju . M. G. Urbain, chargé d'un cours d'Analyse chimique à la Faculté des Sciences de Paris, est nommé professeur de Chimie à ladite Faculté. École Polytechnique. — M. Pérot, docteur ès sciences, physicien de l'Observatoire d'Astronomie physique de Paris, directeur honoraire du Laboratoire d'essais du Conservatoire des Arts et Métiers, est nommé professeur de Physique à l'Ecole Polytech- nique, en remplacement de M. Becquerel, décédé. 206 L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID LE PREMIER CONGRES INTERNATIONAL DU FROID Le premier Congrès international des Industries frigorifiques, tenu à Paris du 5 au 12 octobre 1908, s’est fait remarquer par le nombre et l'importance des communications apportées les divers savants et ingénieurs qui avaient répondu à l'appel du Comité d'organisation. Le Congrès était divisé en six sections; dans chacune d'elles, les questions suivantes devaient par être plus particulièrement examinées : Première Section. — Les basses températures et leurs effets généraux. Deuxième Section. — Matériel frigorifique. Troisième et Quatrième Sections. — Applica- tions du froid à l'alimentation et aux diverses autres industries. Cinquième Section. — Applications du froid au commerce et aux transports. Sixième Section. — Législation. Nous nous proposons dans cet article, non de résumer les nombreux Mémoires ou Communica- tions présentés, mais de caractériser en quelque sorte la physionomie de ce Congrès, qui a réuni des savants, des ingénieurs, des biologistes, des législateurs et des commercants. I. — L'AIR LIQUIDE ET LES PROPRIÉTÉS DES CORPS AUX BASSES TEMPÉRATURES. La 1° Section s’estoccupée plus particulièrement de la production de l’air liquide et des préparations, à partir de ce corps, de l'oxygène et de l'azote dans l’industrie. On sait que, comme tous les gaz, l'air est amené à l’état liquide par les effets combinés d'un abais- sement de température et d’une détente conve- nables. L'air gazeux et refroidi est détendu brus- quement d’une pression p, à une pression plus basse p,; une partie passe à l’état liquide; l’autre partie, gazeuse et très froide, est ramenée dans un échangeur de températures, où elle refroidit l'air primitif venant du compresseur à la pression p,. La détente sensiblement adiabatique de l'air peut se faire suivant deux procédés différents : 4° L'air, comprimé à la pression p,, se détend sans produire de travail extérieur utilisable; il passe du récipient de compression à celui de liqué- faction à travers un orifice étroit. C'est le mode de détente adopté par Linde dans ses machines à production d'air liquide. L'abaissement de tempé- rature réalisé dans ces conditions n'est appréciable que si la différence des pressions p,-p, est considé- rable. Dans l'appareil de Linde', l'air gazeux, refroidi à environ —100°, est détendu de 200 à 40 atmosphères : le gaz non liquéfié, et à une température d'environ —140° C., passe dans un échangeur de températures où il refroidit l'air com- primé à 200 atmosphères; il est alors repris par une pompe de compression qui le ramène à cette dernière pression. Une deuxième pompe auxiliaire puise l'air dans l'atmosphère, de manière à rem- placer la partie qui s'est liquéfiée. Dans les ma- chines industrielles, les gaz comprimés à 200 atmo- sphères sont, avant de passer dans l’échangeur de températures où circule le gaz à —140°, refroidis au moyen d'ammoniaque liquide. Dans ces condi- tions, pour les machines d'une production de 00 litres à l'heure, le rendement en air liquide est d'environ 0,5 litre par cheval-heure ; 2° Le second mode de détente de l'air consiste à utiliser le travail extérieur que le gaz est suscep- tible de produire lorsqu'il passe de la pression p, à la pression p,. Ce mode de détente avec travail extérieur utilisable est la base des procédés G. Claude pour la production de l'air liquide*. L'air, comprimé à une pression maxima de 30 ou 40 atmosphères, passe d’abord dans un échangeur de températures où il est refroidi, comme dans l'appareil Linde, par le gaz non liquéfié; il est ensuite détendu dans le cylindre d'un moteur dont le travail peut être utilisé pour la compression pri- mitive de l'air. En fin de course, il y a liquéfaction partielle de l'air dans le cylindre du moteur auxi- liaire. Le graissage de celui-ci est effectué au moyen d'essence de pétrole de densité 0,675 (essence d’au- tomobile), qui, aux basses températures auxquelles fonctionne le moteur, prend une consistance siru- peuse comparable à celle des lubrifiants industriels. Appliqué sous cette forme, le procédé G. Claude ne donne que des résultats peu satisfaisants. La détente de l'air, porté à des températures de — 175° ou — 180° par le gaz détendu dans le moteur auxi- liaire, se fait dans de mauvaises conditions ; l’appa- rition de l'air liquide dans le cylindre de ce moteur auxiliaire est susceptible de produire des coups d’eau d'un genre spécial, et se traduit par une augmentation notable des frottements, c'est-à-dire 4 Voir, pour Ja description de la machine Linde, E. Maruras : La préparation industrielle et les principales applications des gaz liquéfiés. Revue générale des Sciences, t. XII, 1901.) 3 Nous prions le lecteur désireux de connaitre dans tous ses détails la genèse. des procédés de M. Claude de se reporter à l'ouvrage suivant : G. CLAUDE : Air liquide, Oxygène, Azote. Paris, H. Dunod et E. Pinat, 1909. L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID 207 par une destruction corrélative de l'air liquide produit. Aussi, dans les circonstances les plus favo- rables, le rendement d'une telle machine est-il tout au plus de 0,2 litre d'air liquide par cheval-heure. C'est pourquoi M. Claude a été amené à modifier de la manière suivante la méthode dont nous venons d'indiquer le principe. Sur le courant d'air refroidi et comprimé à 40 atmosphères, on prend, avant l'arrivée au cylindre de détente, une dérivation; l'air de celle-ci, à une pression de 40 atmosphères, arrive dans une enceinte (liquéfacteur) refroidie elle-même par les gaz du courant primitif, qui se sont détendus dans le cylindre du moteur auxi- liaire. Grâce à sa pression de 40 atmosphères, le gaz de la dérivation se liquéfie dans cette dernière enceinte non plus à —190°, comme il le faisait dans le procédé primitif par liquéfaction à la fin de sa détente, mais à —140°. De plus, l'air détendu, qui circule dans le liquéfacteur, se réchauffe et arrive dans l'échangeur de températures non plus à —190°, comme tout à l'heure, mais à —130° environ ; il refroidit moins Je gaz de la conduite d'alimentation; ce gaz arrive au moteur auxiliaire à une température de —100° environ; sa détente s'effectue alors dans de meilleures conditions de rendement, et sa liquéfaction par détente est moins à craindre. En substituant ainsi la liquéfaction sous pres- sion à la liquéfaction spontanée par détente, M. Claude à rendu pratique son procédé de récu- pération du travail de détente. Pour des machines utilisant une puissance extérieure de compression de l'air égale à 75 chevaux, le rendement de ce procédé perfectionné devient égal à 0,7 litre d'air liquide par cheval-heure. Mais on peut aller plus loin : L'air, qui arrive au moteurauxiliaire à une pression de 40) atmosphères et à une température d'environ —100° C., peut subir, pendant la détente, un trop grand abaisse- ment de température. Pour éviter de retrouver ici les inconvénients de la méthode primitive, il suffit de faire la détente par échelons dans plu- sieurs cylindres auxiliaires. L'air de la première détente vient circuler autour d'un premier liqué- facteur traversé par la dérivation de l'air com- primé et froid du circuit d'alimentation; il se réchauffe et va se détendre dans un second cylindre auxiliaire. Cet air de la seconde détente est envoyé dans un second liquéfacteur analogue au premier ; il se rend enfin dans l'échangeur de températures. En pratique, les deux liquéfacteurs ne sont pas dis- tinels; les deux courants d'air, après leur détente, circulent autour de sections différentes d’un même appareil de liquéfaction. M. Claude à donné à ce dernier procédé le nom de Ziquéfaction compound. I marque un progrès nouveau et important dans la pratique de la liqué- faction de l'air. Pour des machines du (type que nous avons défini plus haut, le rendement en air liquide devient, en effet, par l'application de la liquéfaction compound, 0,85 Jitre par cheval-heure. L'air liquide tend à devenir la seule source industrielle de l'oxygène et de l'azote. La fabrica- égal à tion à très bas prix de ces deux gaz est un pro- blème dont la solution à une très grande impor- tance pour la métallurgie et pour l’industrie des engrais. Comment peut-on extraire ces gaz de l'air liquide? C'est ce que nous allons maintenant examiner. L'oxygène et l'azote sont deux corps dont les points critiques sont nettement différents (—118° et 13 atmosphères pour l'oxygène; — 146° et 33 at- mosphères pour l'azote); la courbe des tensions de vapeur de l'azote est au-dessus de celle de l'oxy- gène; à une même température, inférieure à la plus basse des deux températures critiques, les deux gaz, considérés isolément, se liquéfient sous des pressions très inégales. Aussi la liquéfaction de l'air, c'est-à-dire du mélange de ces deux gaz, présente-t-elle des particularités que nous allons rappeler. Si, à une température constante suffisañnment basse T, on comprime de l'air dans une enceinte fermée, on observe les phénomènes suivants : 1° Pour une valeur déterminée P, de la pression apparait une première goutte de liquide; c'est ce qu'avec M. Duhem nous appellerons le point de rosée"; 2% Si, à la température constante T, on diminue le volume de l'air, la pression croit; en même temps, la masse de la phase liquide augmente. Cet accroissement de la pression se continuant, toul l'air passe à l’état liquide; les valeurs P, et T de la pression et de la température à cet instant caracté- risent ce que M. Duhem a appelé le point d'ébulli- Lion; 3° Les points de rosée et d’ébullition obtenus à diverses températures tracent dans le plan POT, d'une part la ligne de rosée, d'autre part la ligne d'ébullition du mélange gazeux considéré ; 4° Pour chaque système de valeurs (T, P) de la température et de la pression, les deux phases liquide et gazeuse admettent un état d'équilibre; dans cet état, les compositions des deux phases sont différentes; 5° Appelons gazeuses le pourcentage de l'oxygène (élément le plus liquéfiable) dans chacune d'elles. teneur des phases liquides ou ——————_—_—_—__ EEE ——èpZpZEZE 4 Dune : Traité de Mecanique chimique, t. IV, chap. 1. Paris, Hermann. 208 L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID La {eneur de la phase liquide est, dans l'état d'équilibre, toujours supérieure à la teneur de la phase gazeuse. Lorsque, à tempéralure constante, la pression augmente, les teneurs des deux phases liquide et gazeuse vont en diminuant jusqu'à liquéfaction complète du mélange. Ainsi, quand on liquéfie de l'air (teneur volumé- trique 21 °/, d'oxygène), la première goutte de liquide qui se forme contient de l'oxygène et de l'azote, et sa teneur est égale à 47 °/,. Ces teneurs vont en diminuant à mesure que le volume de la phase liquide augmente; c'est ainsi que du liquide à 34 °/, ne peut être en équilibre qu'avec du gaz à 12,5 °/,. Mais, tant qu'il existe une phase gazeuse, sa teneur est bien différente de zéro ; elle reste su- périeure à 7 °/,. On voit donc que, si l'on maintient en contact les deux phases liquide et gazeuse obtenues par la liquéfaction progressive de l'air, il est impossible de préparer l'azote gazeux à un degré suflisant de purelé. Il n’en est plus de même lorsque, maintenant la pression constante, on élimine la phase liquide au fur et à mesure de sa formation. On se trouve en présence du phénomène inverse de celui que l’on observe lorsqu'on distille de Pair liquide sous pression constante. Dans ce cas, les teneurs des phases liquide et gazeuse vont en augmentant; ces phases tendent à être constituées par de l'oxygène pur; en même temps, la température d'ébullition s'élève d’une valeur voisine de celle de l'azote pur à la température d'ébullition de l'oxygène pur. Inver- sement, si, sous pression constante, on condense progressivement de l'air, en éliminant la phase liquide au fur et à mesure de sa production, on obtient des liquides et des résidus gazeux de moins en moins riches en oxygène; en même temps, la température de condensation s’abaisse el tend vers la température d'ébullition de l'azote pur sous la pression considérée. On obtient ainsi, beaucoup plus rapidement que dans le procédé étudié plus haut, un mélange gazeux plus riche en azote. Toutefois, pour obtenir un résidu gazeux sensi- blement exempt d'oxygène, il faut encore, dans celte méthode, liquélier presque totalement l'air. On parvient à un meilleur résultat en employant le dispositif désigné par M. Claude sous le nom de retour en arrière. Imaginons que le liquide, en se séparant du gaz, rencontre une masse gazeuse plus riche en oxygène. Le liquide est plus froid par suite de la forte pro- portion d'azote qu'il contient; une partie de l'oxy- gène plus condensable du mélange gazeux va done se liquéfier et prendre dans le liquide la place de l'azote qui se vaporisera. Ainsi, par circulation en sens opposés du liquide et du gaz de teneurs diffé- rentes, on obtient d’une part un liquide très riche en oxygène et de l’autre de l'azote gazeux pratique- ment pur; celui-ci provient, d’ailleurs, d'une grande partie de l'air traité qui n'a pas eu besoin d'être liquélié. M. Claude a réalisé de la manière suivante ce principe du retour en arrière : Une sorte de petite chaudière tubulaire est dis- posée de manière que son axe soit vertical. Les tubes sont entourés extérieurement d'air liquide; à leur partie inférieure arrive intérieurement un courant d'air comprimé et froid. Celui-ci se liquéfie progressivement en donnant des liquides de plus en plus pauvres en oxygène. Ces liquides, en retombant dans un récipient inférieur, rencontrent des gaz riches en oxygène et produisent l’épuise- ment méthodique dont nous avons donné le prin- cipe. Il se dégage finalement, à la partie supérieure du faisceau tubulaire, de l'azote pratiquement pur, tandis que du liquide suroxygéné est continuelle- ment soutiré à la partie inférieure. Une deuxième étape reste à franchir. Au lieu d'air suroxygéné ayant une teneur volumétrique d'environ 47 °/,, il faut obtenir de l'oxygène prati- quement pur. On y parvient grâce aux procédés de rectification calqués sur ceux qu'on emploie dans l'industrie de l'alcool. Dans une colonne circulent : 1° de bas en haut, des vapeurs d'oxygène pratiquement pur; 2° de haut en bas, des liquides à forte proportion d'azote. Ceux-ci, plus froids, condensent l'oxygène et laissent échapper leur azote à l’état gazeux, suivant le processus que nous venons de développer à propos du retour en arrière. L'appareil se compose d'une sorte de chaudière tubulaire à axe vertical; elle est prolongée à sa partie supérieure par un cylindre à plateaux du type de ceux que l’on emploie dans l’industrie de l'alcool. Les tubes verticaux de la, chaudière baignent dans de l'oxygène liquide pratiquement pur. À l'intérieur des tubes, on fait arriver de l'air froid à la pression de 5 atmosphères. Comme nous l'avons expliqué plus haut, cet air se liquéfie en donnant, à la partie inférieure du faisceau, de l'air liquide suroxygéné el à la partie supérieure de l'azote gazeux pratiquement pur; celui-ci, ramené au travers de l'oxygène liquide, se liquéfie à son tour. Le liquide suroxygéné est envoyé, grâce à sa pression, se déverser d’une facon continue à la partie médiane de la colonne de rectification; l'azote liquide est déversé au sommet de la colonne. L'oxygène vaporisé dans la chambre tubulaire, grâce à la condensalion de l'air à l’intérieur des tubes, rencontre donc dans la colonne de rectifica- tion des liquides de plus en plus riches en azote. IL L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID 209 retombe ainsi dans la chaudière de l'oxygène liquide pratiquement pur, tandis que de l'azote pur se dégage à la partie supérieure de la colonne de rectification. La quantilé d'oxygène liquide qui retombe dans la chaudière est supérieure à celle qui se vaporise en montant dans la colonne de rec- tification. L’excédent d'oxygène est évacué el dirigé, au travers d'un échangeur de températures, vers les gazomètres ou les appareils d'utilisation. Tel est le principe de la méthode Claude pour la production de l'oxygène et de l'azote pratiquement purs. La méthode de Linde n'en diffère que par quelques détails. L'usine Bardot, qui fonctionne à Aubervilliers suivant la méthode Linde, produit actuellement 50 mètres cubes d'oxygène à l'heure. Quant à la Société de l'Air liquide, qui utilise les procédés Claude, elle a mis en fonctionnement des appareils capables de donner 100 mètres cubes d'oxygène à l'heure. Le rendement est d'environ 4 mètre cube d'oxygène pur par cheval-heure elfec- tif sur l'arbre du compresseur pour les appareils de 50 mètres cubes, et de 1,19 mètre cube pour ceux de 100. La méthode du retour en arrière a, en outre, permis à M. Claude d'extraire de l'air atmosphérique les gaz rares tels que le néon et l'hélium. Le dispo- sitif permet de recueillir, comme sous-produit de la fabrication industrielle de l'oxygène et de l'azote, un mélange d'azote et d'au moins 50 °/, de néon, d'hélium et d'hydrogène. Pour cela, les résidus gazeux très rebelles à la liquéfaction sont amenés, dans la proportion de 6.000 litres à l'heure pour un débit d'air de 3.500 mètres cubes, à la partie infé- rieure d’un système tubulaire refroidi par de l'azote liquide. Sous l'effet simultané de la pression de 4 atmosphères et de la température très basse, la condensalion de toutes les parties liquéfiables se produit; el le résidu gazeux est constitué, si le débit est bien réglé, par un mélange presque pur de néon et d'hélium. La liquéfaction de l'air ne constitue pas la der- nière étape parcourue par les savants dans la solu- tion du problème de la liquéfaction des gaz. L'hélium, qui avait résisté aux efforts de tous les physiciens, a cependant pu être liquéfié par M. Kam- merlingh Onnes, dans ce Laboratoire cryogène de Leyde’, dont l'installation permet d'obtenir toute la gamme des températures depuis 0° jusqu’à — 2539. En refroidissant de l’hélium au moyen d'hydrogène bouillant dans le vide, et en détendant brusquement le gaz comprimé à 100 atmosphères, le savant hol- landais a obtenu un liquide transparent et incolore, bouillant à — 269°, de densité 0,154. Les constantes ? Maruras : Le Laboratoire cryogène de Leyde. Revue générale des Sciences, t. VII, 1896, p. 381. critiques de l’'hélium paraissent voisines de — 268° et de 3 atmosphères. Grâce à l'admirable outillage scientifique du Labo- ratoire de Leyde, M Jean Becquerel à pu étudier aux très basses températures les phénomènes d'absorption et d'émission de la lumière, ainsi que les phénomènes magnéto-optiques dans les cristaux et les solutions solidifiées. Le travail si important de M. Becquerel porte sur les points suivants : 1° Observation de l'influence des variations de température sur les phénomènes d'absorption et de dispersion anormales. Lois de la variation de lar- geur des bandes; existence pour chaque bande d’un maximum d'absorption. Calcul du nombre des cor- puseules produisant l'absorption. Analyse spectrale aux basses températures; 20 Etude, dans les cristaux et les solutions, d'un phénomène de même nature que l’effet Zeeman. Inva- riabilité, lorsque la température varie, des chan gements de période produits par le magnétisme. Observation aux très basses températures de phé- nomènes montrant la variation de stabilité des système vibrants, lorsque leur période est modifiée; 3° Polarisation rotatoire magnétique aux basses températures. Explicalion des rotations dans le voisinage des bandes d'absorption. Généralisation du phénomène de la polarisation rotaloire magnétique. Extension du phénomène aux cristaux biaxes. Liaison produite par le champ magnétique entre deux vibrations principales nor- males aux lignes de force. Preuve expérimentale de l'existence, dans un corps soumis à un champ normal au faisceau lumineux, d'une composante longitudinale de la force électrique. Comme l’a si bien montré M. d’Arsonval dans sa Conférence de clôture du Congrès, l'étude de ces phénomènes fournit des données nouvelles sur la nature, les mouvements et le nombre des électrons qui produisent l'absorption; elle contribue à étendre nos connaissances sur la constitution de la matière. L'étude du phénomène de la saturation magné- tique aux basses tempéralures permet de détermi- ner, comme l’a fait remarquer M. Pierre Weiss, le moment magnétique de la molécule’. Or, cette donnée est fondamentale dans l’expression de la loi des états correspondants magnétiques, loi analogue à la loi du même nom qui préside à la compressi- bilité et à la dilatation des corps. Les études si importantes des modifications mo- léculaires des corps sont rendues possibles par la propriété bien connue de l'accroissement de la con- ductibilitéélectrique quandlatempératures’abaisse. 1 P. Weiss : L'hypothèse du champ moléculaire et la propriété ferro-magnétique. tevue genérale des Sciences, 15 février 1908. 210 L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID La création de champs magnétiques puissants, au moyen de simples bobines refroidies et parcourues par des courants très intenses, permet d'atteindre l'atome, de le transformer et de modifier ses mou- vements. C'est pourquoi la 4"° Section du Congrès a adopté les vœux suivants qui ont été présentés par MM. Jean Perrin, Mathias et Kammerlingh Onnes : cherait à la modification des atomes, et la possibi- lité d’y arriver par un champ magnétique intense (possibilité que le phénomène de Zeeman démontre déjà), le Congrès émet le vœu que les nations s’unis- sent pour la réalisation d'un grand électro-aimant sans fer dont une forte réfrigération augmenterait l'efficacité ; B. Étant donnés l'admirable outillage scientifique du Laboratoire cryogène de Leyde et l'accueil gra- cieux fait antérieurement par M. le professeur K. Onnes aux travailleurs de toutes les nations; Les physiciens présents à la 1'° Section du Congrès du Froid expriment le vœu : Que les Pouvoirs publics des États représentés au Congrès donnent des facilités pécuniaires pour permettre aux physiciens de poursuivre au Labo- ratoire cryogène de Leyde des travaux relatifs aux propriétés physiques des corps aux très basses températures. À. Étant données l'importance extrême qui s’atta- C. 1° Le Congrès émet le vœu qu'on fonde une Association internationale pour favoriser les études scientifiques et autres, association ayant son centre à Paris et qui, tout en fortifiant les centres de tra- vail déjà spécialisés, l'étude du domaine entier du froid. 2° Etant donné l'intérêt capital qui s'attache à la poursuite et à la coordination des travaux scienti- fiques dans le domaine des basses températures, le Congrès émet le vœu que le Bureau de la Section A soit chargé de poursuivre la constitution d’une Association permanente internationale, en vue de l'étude de toutes les questions scientifiques rela- poursuivrait tives aux basses températures. IT. — MATÉRIEL FRIGORIFIQUE. Dans les entrepôts où l’on conserve actuellement par le froid les denrées alimentaires, les basses températures sont oblenues par la vaporisalion des gaz liquéfiés suivants sulfureux, ammoniaque, anhydride anhydride carbonique, chlorure de méthyle. Le passage de l'agent frigorifique de l’état de vapeur à l’état de liquide peut se faire : a) Soit par l'intermédiaire d’une pompe de com- pression (Machines à compression); b) Soit par l'intermédiaire d’un dissolvant, tel que l’eau (Machines à absorption). Dans les machines à compression, qui sont actuellement les plus répandues dans l’industrie frigorifique, le gaz liquéfié dans le condenseur ou liquéfacteur passe, par un robinet régleur, dans le réfrigérant où évaporateur. Il est alors réduit en vapeurs par la pompe, qui aspire ces vapeurs, les comprime el les fait passer à l’état liquide dans le condenseur. Dans les machines à absorption, il existe aussi un liquéfacteur en relation avec le réfrigérant par un robinet de réglage. Mais le compresseur, pompe aspirante et foulante, est remplacé : a) D'une part, par un absorbeur dans lequel les vapeurs venant du réfrigérant, en fait ici les va- peurs d’ammoniaque, se dissolvent dans l’eau; b) D'autre part, par une chaudière dans laquelle la dissolution ammoniacale chauffée émet des va- peurs d’ammoniaque; celles-ci vont se condenser de nouveau dans le liquéfacteur. L'effet utile d’une telle machine, ou sa puissance frigorifique, est égal à la quantité de chaleur absorbée au réfrigérant pendant un temps déter- miné, ou, comme on dit quelquefois, à la quantité de froid dégagée dans ce réfrigérant pendant le même temps. Comme l'a fait remarquer M. Barrier, cette puis- sance varie dans des limites étendues avec les températures de l'agent frigorilique au condenseur et au réfrigérant. La définition de ces températures permet seule de comparer exactement les offres de machines faites par les divers constructeurs et d'éviter toute contestation dans les contrats et échanges commerciaux. D'autre part, les différents pays adoptent des unités différentes pour exprimer cette puissance frigorifique. En France et en Allemagne, on exprime la puissance frigorifique par le nombre de calories- kilogrammes absorbées ou de frigories-kilogrammes (calories négatives) dégagées pendant une heure. En Angleterre et aux États-Unis, on considère de préférence la puissance frigorifique par journée de vingt-quatre heures et on l’exprime en tonnes fri- goriliques : mais la tonne frigorifique anglaise vaut 81.300 frigories-kilogrammes, tandis que la tonne frigorifique des États-Unis ne vaut que 72.600 fri- gories-kilogrammes. Enfin, aux États-Unis, les architectes et les ingénieurs-conseils expriment souvent les puissances frigorifiques des machines en gallons-degrés par minute, la température du réfrigérant étant égale à 10 Fah. (— 23°,3); une telle unité vaut 110,26 frigories-heure. Il serait très utile d'adopter, pour la puissance frigorifique et pour les diverses grandeurs que l’on doit considérer dans l’industrie du froid, un sys- tème d'unités parfaitement coordonné, comme cela a lieu dans l’industrie électrique. , sat Te élue di? at L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID 214 M. Maurice Leblanc avait déposé dans ce sens un Rapport très étudié. Mais, en présence de l'opposi- tion des congressisies de langue anglaise, la ques- tion n'a pas semblé mûre, et la Section II a émis le vœu : Qu'une Commission scientifique internationale, composée de théoriciens et de praticiens spécialistes du froid, soit chargée de définir les grandeurs, unités et notations applicables à l'industrie frigo- rifique, lesquelles seraient présentées au prochain Congrès. C'est à cette Commission qu'a été renvoyée la proposition de M. Kammerlingh Onnes de donner le nom de Carnot à l'unité d'entropie. Celle même Commission a été également chargée de fixer les températures du condenseur et du réfrigérant qui seront adoptées pour définir la puis- sance frigorifique d'une machine. La Section If n'a pu émettre que le vœu suivant : Que la puissance normale d’une machine frigo- rifique soit définie par le nombre d'unités ther- miques qu'elle peut produire en une heure pour des températures données du gaz au condenseur et au réfrigérant, le choix desdites températures et unités thermiques étant laissé à l'examen de la Commission internationale chargée de la définition des unités. Comme complément à ces vœux, il serait égale- ment désirable d'unifier les méthodes d'essai des machines frigorifiques. C'est pourquoi le vœu sui- vant a été adopté par la Section IT: Que soit mise à l'étude, pour une entente inter- nationale, l'élaboration de méthodes d'essai des machines frigorifiques, simples, pratiques et uni- formes, basées sur l'emploi des unités définies par la Commission internationale et s'appliquant aux diverses catégories de machines et aux différents cas d'installation de l’industrie frigorifique. Les chambres d’un entrepôt frigorifique peuvent être refroidies par diverses méthodes. Dans les abattoirs, l'une des plus employées consiste à envoyer de l'air froid et sec dans les salles de con- servation. Cet air est porté à basse température et suffisamment desséché, soit par passage au travers d’une dissolution saline froide (frigorifère à ruissel- lement), soit par circulation au contact d'un ser- pentin jouant le rôle de réfrigérant (frigorifère sec). Le choix d'un tel frigorifère est, comme l’a fait remarquer M. Barrier, une question d'espèce. Mème dans le cas de conservation de viandes, le cas est différent suivant qu'il s'agit de viandes congelées, pour ainsi dire immunisées, ou de viandes réfri- gérées (portées à des températures de 0 à 4° C.), plus particulièrement sensibles à l'action des germes nocifs. Il en est de même s'il s’agit d'entre- pôts militaires, où les viandes ne sont sorties que pour être mises en consommation, où les chambres restent fermées jusqu'à ce moment; ou bien d’entre- pôts commerciaux, où les viandes sont sorties ou rentrées journellement plus ou moins éventées et où les entrées fréquentes de personnel apportent des miasmes et des impuretés. Dans ce dernier cas, les frigorifères à ruissellement paraissent préfé- rables pour le lavage et l’asepsie de l'air des chambres; dans le premier cas, au contraire, les frigorifères secs présentent, en raison de leur moindre complication et de la suppression de la concentration du bain, de réels avantages. Il ne suffit pas de produire du froid, il faut encore le conserver. À ce titre, l'isolement calori- fique doit être considéré comme une question de première importance dans la construction d'un entrepôt frigorifique. La bonne conservalion des denrées exige, en effet, que la température des chambres d'emmagasinage soit aussi constante que possible. Aussi la question des isolants a-t-elle attiré plus particulièrement l'attention du Congrès. Un bon isolant calorifique doit remplir les con- ditions suivantes : 1° ZI doit être très mauvais conducteur de la chaleur. Si une couche peu épaisse de l’isolant suffit pour obtenir un bon isolement, il en résulte une économie d'espace et une économie de matière à mettre en œuvre pour arriver à ce résultat ; 2 J1 doit avoir un faible poids spécilique. Cette condition est importante pour les installations d'isolement à bord des navires. Son importance n'est pas moins grande pour les entrepôts frigo- rifiques. à cause de la réduction des frais de trans- port jusqu'à pied d'œuvre et de la possibilité de faire des économies sur les dépenses de construc- tion en édifiant des bâtiments plus légers ; 3 L'isolant doit être exempt d'odeur et ne doit pas être putrescible, même quaud il est humide. Cette condition est employés dans la construction des entrepôts fri- gorifiques destinés à la conservation des matières alimentaires; celles-ci, en effet, absorbent très facilement les mauvaises odeurs provenant de la fermentation des isolants et deviennent impropres à la consommation. Aussi doit-on rejeter les substances telles que la balle de riz, la paille hachée, la balle d'avoine, les agglomérés de liège faits avec des substances fermentescibles comme la caséine ; 4 L'isolant doit absorber autant que possible les mauvaises odeurs qui peuvent se dégager dans les chambres frigorifiques de conservation et les capitale pour les isolants rendre moins nuisibles. À ce point de vue, la tourbe peut rendre parfois de grands services; 5° L'isolant ne doit pas être hygroscopique. Il ne doit pas absorber et retenir l'humidité, suscep- 212 tible de lui faire perdre ses propriétés mauvaises conduetrices. Tel est le cas de la laine minérale, sorte de verre filé provenant des scories des hauts fourneaux ; 6° Quand, par suite de certaines circonstances (rupture d'un tuyau d’eau, etc.), un isolant est mouillé, il doit pouvoir se sécher facilement et retrouver après cette opéralion ses propriétés mau- vaises conductrices ; T° Les substances isolantes ne doivent pas altirer les parasites (souris, rats, etc.), ni offrir microbes un bon terrain de culture ; 8° Les substances isolantes doivent étre incom- bustibles ou tout au moins ne pas propager la combustion commencée en un point de la masse. Un certain nombre d’agglomérés de liège pos- sèdent cette propriété : tels sont les agglomérés au brai. M. Brüll a présenté au Congrès divers types d’agglomérés de liège complètement ignifugés ; 9 Une fois mises en place dans les bourrages qui constituent les matelas isolants soit à l’exté- rieur, soit à l’intérieur des murs, /es substances isolantes ne doivent pas se tasser et produire ainsi dans l'isolement des solutions de continuité. Les divers charbons de bois désignés sous le nom de charcoal présentent cet inconvénient, quand ils sont employés sans précautions spéciales ; 10° Les substances isolantes ne doivent pas alta- quer les parties en bois, en fer ou en maçonnerie qui sont en contact avec elles ; 11° Les substances isolautes doivent présenter les plus grandes facilités pour le façonnage et l'ap- plication contre les parois des chambres froides. Elles doivent présenter une certaine résistance à la flexion et à l'écrasement; 12° L'isolant ne doit pas perdre ses qualités avec le temps. aux Il est assez difficile de trouver un isolant qui réunisse toutes ces qualités. Cependant le liège, soit en grains, soit en agglomérés, est actuelle- ment le plus employé dans l'industrie frigorifique. M. Pasquay à indiqué au Congrès que les déchets de soie bien protégés par une enveloppe imper- méable constituent un excellent isolant. La connaissance du coefficient de conductibilité des isolants présente une grande importance au point de vue de l’épaisseur que l’on doit donner dans les chambres froides aux revêtements calo- rifuges capables d’abaisser les pertes de froid jus- qu’à une certaine limite. Diverses méthodes ont élé proposées. Dans les unes, on maintient les deux faces d’une plaque à des températures constantes et on mesure la quan- üté de chaleur qui traverse la plaque dans un temps déterminé; cette mesure fait bien pesant la masse de glace fondue. C’est en principe se en L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID la méthode bien connue en Physique sous le nom de méthode du mur. Il faut toutefois remarquer que ceux qui l'ont employée ne se sont pas mis en garde contre les déperditions de chaleur par les bords des plaques expérimentées; ils n’ont pas utilisé la méthode de l'anneau de garde sous la forme que lui a donnée M. Berget. Les autres méthodes de mesure de la conducti- - bilité dérivent de la méthode de Forbes. Celle-ci consiste à chauffer à une de ses extrémités une barre mince et longue de la matière à essayer. Lorsque le régime permanent est établi, on observe les températures à différents points de la barre, et les formules de Fourier permettent de calculer le coefficient de conductibilité lorsqu'on connaît celui d'émission; ce dernier peut être celui d'un enduit ou d'une couche très mince de métal dont la barre a été préalablement enduite. Une variante de la méthode de Forbes est celle de la barre sectionnée due à Lodge. La barre est sième sont un métal dont on connait déjà le coeffi- cient de conductibilité ; la seconde est formée avec la matière à essayer. On chauffe le bout de la pre- mière section el on observe la marche des tempé- ratures dans chaque section lorsque le régime est établi. La formule générale du mouvement uni- forme de la chaleur dans une barre allongée permet de calculer le coefficient de conductibilité de la matière qui constitue la section du milieu. C'est cette méthode que M. Desvignes a employée pour déterminer les coefficients de conductibilité de quelques isolants; il en a établi la technique sous une forme facilement applicable à l'industrie frigorifique. Voici quelques-uns des coefficients de conducti- bilité obtenus par cette méthode: Coefficients de conductibilité. CALORIES par mètre, heure et degré Tièpesp MERE ÉRRNTREEE 0,05 à 0,014 lièreeranule, CRE 0,068 Liège aggloméré avec de la caséine. . . . 0,069 — avec de la poix inodore . 0,087 _- avec du silicate de soude. 0,067 —— avec de la terre d'infu- soires et calciné. . . . 0,089 Comme le fait remarquer M. Desvignes, il serait toutefois peu prudent de prendre ces chiffres comme base d'un calcul de déperdition d’un en- trepôt frigorifique. En effet, les échantillons qui ont servi aux essais élaient généralement des produits de choix et parfaitement secs. Il convient de ma- jorer les coefficients de conductibilité donnés d'un pourcentage qui ne devrait pas être inférieur à 20 °/,. Dans l'application de certains produits, il alt, L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID 213 faut aussi tenir comple du mode de liaison. Ainsi, dans une cloison en briques de liège posée au mortier de ciment, où les joints représentent, pour une exécution très soignée, le 15 °/, environ du volume total, le coefficient de conductibilité de la brique même, rapporté à la surface totale de la cloison, doit être presque doublé. Ces restrictions montrent combien est délicate celte question du calcul, même approché, du ré- chauffement, dans un temps donné, par les parois d’un frigorifique. Aussi la 2° Section a-t-elle réservé cette question et émis les vœux suivants : 1° Des éludes et expériences seraient à entre- prendre, dans les écoles ou laboratoires techniques, avec les appareils connus ou qui pourraient être ultérieurement proposés, pour déterminer les con- stantes spécifiques de divers isolants pratiquement utilisables dans l'industrie du froid. 2 Les caractéristiques et constantes à déter- miner seraient les suivantes, en tenant compte chaque fois du degré d'humidité : La densité d'emploi; Le coefficient de conductibilité ; La résistance à la flexion; La résistance à l’écrasement ; Le pouvoir hydrofuge; Le pouvoir absorbant des odeurs; L'incombustibilité. Ces constantes devraient être déterminées dans les conditions de température et d'épaisseur appli- cables à l’industrie du froid. 3° La 2° Section attire spécialement l'attention sur l'étude de la conductibilité en fonction des températures, de l'épaisseur, du degré d'humidité et des autres causes pouvant influer sur cette con- ductibilité, par exemple le sectionnement d'une même matière, nécessaire pour assurer un isole- ment donné. 4 La Section demande que le Bureau Interna- tional des Congrès Frigorifiques, dont la création est projetée, constilue une Commission internatio- nale chargée de procéder à l'étude des moyens d'essai et de centraliser, en vue de la fixation de méthodes uniformes et de l'obtention de résultats comparables, les recherches pour lesquelles toute latitude est, d’ailleurs, laissée aux investigateurs. 5° [l y a intérêt à mettre la question de l’unifor- misalion des dites méthodes à l’ordre du jour du prochain Congrès, si les recherches dont il s'agit sont assez avancées. L'enseignement officiel à un peu négligé jus- qu'ici l’industrie frigorifique. Le développement actuel de cette industrie nécessite de plus en plus la formation d'ingénieurs spécialistes. C'est pour- quoi la 2° Section à émis les vœux suivants : 1° Que des enseignements théoriques et profes- sionnels appliqués aux diverses branches actuelles de l’industrie du froid, et dirigés vers de nouvelles applications, soient institués auprès des laboratoires et écoles supérieures techniques de tous les pays, et complétés, sous la direction de spécialistes, par l'étude pratique et détaillée d'établissements frigo- rifiques importants et l'expérimentation raisonnée des machines qu'ils comportent. 2 Qu'afin d’être pourvu de l'outillage scienti- fique et expérimental nécessaire et de pouvoir subvenir aux frais des expériences, cet enseigne- ment soit subventionné par les Gouvernements, les municipalités, les chambres de commerce, les so- ciélés industrielles, les syndicats agricoles et toutes autres collectivités ou individualités s'intéressant à l'industrie du froid. 3° Que les travaux d'ordre général et les résul- tats des recherches de ces laboratoires et écoles, de même que ceux des associations d'ingénieurs et d'industriels s'occupant du froid, soient soumis au Bureau International permanent et centralisés par lui, afin qu'il puisse en publier périodiquement un index bibliographique, en coordonner et en tirer toutes les indications et conclusions utiles, qui seraient portées à l'examen du prochain Con- grès du froid. LA CONSERVATION DES DENRÉES PÉRISSABLES. IT. Nous savons maintenant produire le froid dans les entrepôts et l'y conserver; il resterait à étudier le mode de construction et d'agencement des chambres froides et les règles qui permettent d'y conserver les diverses sortes de denrées. Ces ques- tions ont fait l’objet de nombreux Rapports et dis- cussions, qu'il serait trop long de résumer ici. Nous nous contenterons d'indiquer quelques-unes des conclusions adoptées. L'air froid des chambres d'un entrepôt doit, autant que possible, ne pas circuler d’une chambre dans une chambre voisine, afin d'éviter que les odeurs de certains produits conservés ne viennent en altérer d’autres. En particulier, si le refroidisse- ment de l’entrepôt se fait par frigorifères, 1l est indispensable d’avoir un frigorifère spécial pour chaque chambre ou chaque série de chambres des- tinées à la conservation d’un produit particulier. Les denrées à conserver ne doivent pas passer brusquement de la température ordinaire à la tem- pérature des chambres froides de conservation ou inversement: en d’autres termes, le refroidisse- ment doit être progressif. C'est ainsi que, dans les abattoirs, la viande chaude, venant du hall d’aba- tage, est transportée au moyen d'un rail aérien dans une antichambre froide, à une température les plus importantes qui ont été 214 L. MARCHIS — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DU FROID de 7 à 8 C.; elle y subit, pendant vingt-quatre heures, un premier refroidissement, à la suite du- quel elle est transportée dans les chambres dont l'air est maintenu à une température de 0° à 4° C. et à un état hygrométrique inférieur à 75 °/:. Quant aux salaisons d'une part, à la manipulation desJintestins, peaux, etc..., d'autre part, elles doivent se faire dans des chambres totalement séparées des chambres précédentes, uniquement destinées à la conservation de la viande fraiche. La question de la conservation des produits hor- ticoles est une des plus délicates de l'application du froid aux denrées alimentaires. Les pommes et les poires ont, aux États-Unis, été étudiées d’une manière particulière par M. G. H. Powell. Celui-ci a indiqué au Congrès des résultats de conservation qui démontrent, avec la plus grande netteté, l'in- fluence de la mise en chambre froide des fruits fraichement cueillis et de ceux qui sont restés à l'air pendant quelques jours. Il est nécessaire de placer les fruits sains dans le fruitier froid, aus- sitôt après la cueillette. Diverses circonstances influent d’ailleurs sur la conservation. Celle-ci est d'autant meilleure que le fruit provient d'un arbre plus âgé; il semble aussi que les sols sablonneux ne soient pas favorables à une bonne conservation. Les fruits à pellicule épaisse se conservent d’ail- leurs beaucoup mieux que les fruits à pelure fra- gile. La pêche est, en particulier, un des fruits les plus difficiles à conserver. Cependant, M. Loiseau, horticulteur à Montreuil, est parvenu à conserver ce fruit fragile durant plus d'un mois; selon lui, il faut surtout employer une température aussi constante que possible, ne variant que de 0° à + 1° C. Parmi les nouvelles applications du froid qui ont été signalées, il convient de citer l'emploi du froid artificiel dans la fabrication de la paraffine et de la viscose. Le pétrole brut contient généralement de 0,5 à 6 °/, de paraffine en dissolution. Pour obtenir cette matière, on amène par distillation le pétrole à un degré de concentration de 10 à 25 °/, de paraffine. Puis, en abaissant la température du liquide (huile paraffinée) à un degré qui varie, selon la qualité, de +169 à —18° C., on obtient de la paraffine sous forme de cristaux qu'on sépare de l'huile par fil- trage sous pression. L'emploi des machines frigo- rifiques permet actuellement de traiter à la fois de grandes quantités de pétrole; c’est ainsi que l'usine de Pardubitz, en Bohème, possède des machines d'un million de frigories et produit annuellement pour environ 4 millions de paraffine. La soie artificielle dite viscose est faite en filant par des filières très fines une solution épaisse de cellulose obtenue par des dissolvants alcalins et sulfo-alcalins (soude caustique et sulfure de car- bone). Pour réussir la fabrication, il est nécessaire de laisser reposer la solution avant filage dans des caves refroidies artificiellement à 2 C. Ce repos dure un ou deux mois. La solution est alors suffi- samment pure; décantée, elle peut être filée avec succès. IV. — LES TRANSPORTS FRIGORIFIQUES. Enfin, la question du {ransport des produits con- servés par le froid est une de celles qui préoccu- pent à juste titre les compagnies de transport, soit sur terre, soit sur mer. Les wagons ou les trains frigorifiques appar- liennent à plusieurs {types : 1° Le train-usine, groupe de véhicules dans le- quel l’un des wagons, inutilisé pour le chargement des marchandises, contient une véritable usine de production du froid et alimente les autres wagons, avec lesquels il est mis en communication par un tuyautage convenable. L'impossibilité où l’on se trouve de disloquer un tel train, en séparant les wagons les uns des autres, limite l'emploi des trains- usines à quelques rares applications pratiques. Ce système a été expérimenté en 1905 pour le trans- port des beurres russes de Sibérie (de Kourgane à Riga, à une vitesse moyenne de 15 à 16 kilomètres à l'heure); le coût de la réfrigération (température du beurre à 5°5 en moyenne) s'est élevé à 0 fr. 117 par jour et par kilog de beurre, sans tenir compte du prix du wagon-usine. A ce type, il faut rattacher le wagon-usine russe du système Silitch. Il est à quatre essieux sur bog- gies et présente les caractéristiques suivantes longueur, 8 mètres; largeur, 3 mètres; hauteur, 2M,65; capacilé, 120 mètres cubes. Il est divisé en six compartiments : deux au centre renferment les appareils producteurs de froid et les quatre autres servent au chargement des marchandises. 20 On a remédié au manque d'élasticité des trains-usines en utilisant les wagons réfrigérés ou isolants. Le fonctionnement de ces wagons com- porte, au point de départ, une installation compo- sée d’une machine à produire le froid et d’un dispo- sitif qui refoule, avant et après le chargement des produits, des bouffées d'air froid dans la caisse du véhicule; lorsque la température intérieure du wagon est descendue au degré voulu, on suspend l'envoi d'air froid et on ferme hermétiquement la caisse. Il existe à Springtield (Missouri) une instal- lation capable de refroidir dans une même opéra- tion 40 wagons de bananes à 15° C. On peut rapprocher de ce genre de wagons, ceux où la basse température est obtenue par le refroi- dissement préalable d'une saumure disposée dans des serpentins garnissant la voûte ou les parois du 3. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES 215 wagon. Le wagon thermo-régulateur système Mak- soutoff appartient à ce type; la solulion saline, qui refroidit l'air jusqu'à 5° C., doit être refroidie tous les deux jours, ce qui nécessite des stations frigorifiques tous les 500 ou 600 kilomètres. 3° À côté des wagons tributaires des usines où d’une installation fixe au point de départ, il y a les wagons autonomes, c'est-à-dire des véhi- cules renfermant en eux-mêmes les agents produc- teurs du froid. Ce sont les plus répandus en Europe et en Amérique. Ils se divisent en deux grandes catégories : a) Le wagon à glace ; b) Le wagon à évaporation d'un gaz liquéfie. Dans le wagon à glace, la basse température esl obtenue au moyen de glace disposée dans des bacs placés à la voûte (wagons de la Société des Magasins et Transports frigorifiques de France) ou le long des parois du wagon (wagons américains, wagon du chemin de fer Moscou-Kazan). On a presque généralement renoncé à fermer complètement la caisse à l'air extérieur ; les wagons glacières actuels sont, pour la plupart, pourvus d’un dispositif qui aspire l’air du dehors et l'envoie, après refroidisse- ment au contact de la glace, renouveler l’atmo- sphère intérieure du véhicule. La capacité intérieure restant libre pour le chargement des marchandises ; est environ de 30 à 40 mètres cubes, permettant d'atteindre un chargement de 6 à 10 tonnes suivant la nature des produits. Avec une consommation de glace de 400 kilogs en moyenne par vingt-quatre heures, on obtient une température oscillant entre + 8°et + 4°, mais dont le degré hygrométrique est élevé. Les wagons à évaporation d'un gaz liquélié (en fait ici d'ammoniaque) portent à l'extérieur deux récipients cylindriques d’ammoniaque liquide; ce trains- | fluide estenvoyé au moyen de robinets de régulation dans des serpentins disposés aux deux extrémités intérieures L'ammoniaque passe à l'état gazeux en absorbant de la chaleur. Le gaz ammoniac produit se dissout dans de l’eau contenue dans un récipient placé sous le wagon. Un wagon de ce système a été expérimenté en 1905 pour le transport des beurres de Sibérie. Le coût de du wagon. la réfrigération, pour du beurre maintenu à la température moyenne de #4 à 5° C., s'est élevé approximativement à 0 fr. 068 par jour et par kilog de beurre. Dans des divers types expérimentés par la même Commission russe, le wagons-glacières de coût de la réfrigération, tous frais compris (con- sommalion et chargement de la glace, installation des dépôts de glace, aménagement des wagons) est monté à 0 fr. 009 par jour et par kilog de beurre. Comme le montre l'exposé succinct que nous venons de faire, le premier Congrès international du Froid a examiné avec soin la plupart des problèmes scientifiques et techniques que pose l'industrie frigorifique. S'il a résolu quelques-unes de ces questions, il a, sous forme de vœux, signalé un très grand nombre d’autres, qui n’ont recu Jusqu'ici que des solutions incomplètes. Le prochain Congrès internalional, qui se tiendra à Vienne en 1910, ne sera pas inférieur à celui de Paris et nous apportera, le domaine scientifique, des notions précises sur les propriétés des corps soumis aux très basses températures; dans le domaine technique, l’uniformisation des unités de mesure et des méthodes d'essai machines et des isolants. espérons-le, dans des L. Marchis, Professeur de Physique générale à la Facullé des Sciences de Bordeaux. LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES Si l’on en juge par le nombre et l'importance des Mémoires parus au cours des dernières années sur le géotropisme, il n’est pas de question qui ait da- vantage intéressé les botanistes, point de problème dont la solution aitété poursuivie avec plus d’achar- nement et d'ingéniosité. Nous allons entreprendre de résumer les principales recherches auxquelles ce phénomène a donné lieu. Des expériences que nous sommes obligé de rap- peler tout d'abord, à cause de leur étroite connexion avec les plus récents travaux, tendaient à faire croire que la plante possède une faculté qui nous manque, un véritable sens de la pesanteur. Mais, aujourd'hui, ce prétendu sens qu’on accordait aux racines et aux liges paraît n'être rien de plus qu'une réaction au contact. De telle manière que si, comme tout porte à le croire, les nouvelles théories sont exactes, une fois encore sera mise en l’'admirable unité de moyens qui se cache sous la diversité des formes de la vie. Les tiges des plantes et les troncs des arbres se dirigent naturellement vers le haut; au contraire, les racines principales tendent vers le centre du évidence 216 E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES globe : tels sont les deux faits essentiels dont on a eu tant de peine à donner une interprélation plau- sible. Et d'abord l’accoutumance a longtemps empêché de voir un problème dans une propriété si néces- saire à la vie du végétal. Comme on l’a fait observer avec beaucoup de justesse, seul un esprit particu- lièrement apte à la recherche scientifique pouvait, dans ce cas comme dans celui de la gravitation, se demander quelle était la cause d’un phénomène aussi commun. Cette gloire, parait-il, appartient à Dodart. Vers 1700, il sut s'étonner du géotro- pisme. Partout, au sortir de la graine, la tigelle et la radicule effectuentleur croissance suivant des direc- tions opposées, et (ce que le hasard du semis occa- sionne, sans aucun doute, bien souvent), quand mème la tigelle se trouverait sortir vers le bas et la radicule vers le haut, ces deux membres de la plante, sans qu'on sache ce qui les guide, se courbent et finissent par prendre la position qui seule leur con- vient. Écartés de force de la verticale, ils y re- viennent dès qu'ils le peuvent, et chacun dans un sens déterminé. Au xvi° siècle, Duhamel montra qu'il ne faut pas chercher la cause de ce phénomène dans l'in- fluence de l'air, du sol, de l'humidité ou de la lumière. Et, en 1806, Knight réussit à prouver, par une expérience géniale, que c’est bien la pesanteur qui donne aux plantes leur direction. À la péri- phérie d’une roue verticale animée d’un mouvement assez rapide, il fixa dans les positions les plus di- verses des graines en train de germer : par ce moyen, tantôt l’un, tantôt l'autre côté de la plante regardait le sol ; l'influence de la pesanteur se trouvait annu- lée. Le résultat fut que les tiges se dirigèrent toutes vers le centre de la roue et que les racines s’en éloignèrent en ligne droite, réagissant à la force centrifuge de la même manière qu’à la pesanteur. Knight fit ensuite tourner, cette fois horizontale- ment, la même roue : racines et tiges se dirigèrent encore en sens opposés suivant les rayons; ici l’ac- tion de la pesanteur n'était pas supprimée, mais, en se combinant avec celle de la force centrifuge, donnait une inclinaison par rapport à l'horizon- tale, variable avec la vitesse de rotation. La preuve élait faite : racines et tiges sont bien, en sens in- verse, guidées par la pesanteur. IT Pendant quelque temps, on crut que ces mani- festalions géotropiques sont dues à des causes dif- férentes : la racine n'aurait obéi qu’à son propre poids, tandis que la tige se serait manifestée « ac- tive » en se dirigeant vers le haut. Mais la première hypothèse dut être abandonnée, Johnson ayant montré, en 1828, que la racine peut soulever, en se courbant vers le sol, un poids supérieur au sien, et Pinot, l’année suivante, qu'elle est aussi capable de pénétrer dans le mercure, triomphant d'une poussée considérable. La racine ne se comporte donc pas comme un simple fil à plomb, et la pesanteur, agis- sant sur elle, n'est qu'un stimulus et donne seu- ment l'impulsion première d’après laquelle l'organe, grâce à son énergie interne, effectueses mouvements. Pour interpréter alors la différence d’allure de la tige et de la racine dans des conditions analogues, on dut faire appel à l'irritabilité. Car il fallait aussi expliquer pourquoi les racines secondaires qui naissent sur la racine principale, malgré l’iden- tüité de structure anatomique, ne réagissent pas comme elle et poussent obliquement, si bien que lorsqu'on retourne la plante, elles se courbent de manière à retrouver leur ancienne direction. Et, à leur tour, ces racines secondaires n’émettent-elles pas des ramifications, de structure identique à la leur, qui croissent dans tous les sens et semblent se jouer de la gravité? Le même problème se posait dans les mêmes termes pour les branches et les rameaux. Enfin, on savait que, si l’on enlève la racine principale, une des racines secondaires res- tantes prend sa place et pousse verticalement; les radicelles tertiaires deviennent alors sensibles à la pesanteur et se placent comme de véritables racines secondaires. Comment rendre compte de ces phénomènes sans invoquer une sensibilité spéciale, laquelle paraît indispensable aussi pour expliquer cetle obser- vation : une plante, maintenue horizontalement, redresse bientôt sa tige, mais le but est dépassé de 20 à 30°; alors une nouvelle excitation, inverse de la première, semble se produire, et c'est par une série de corrections analogues que la position défi- uilive est atteinte. L'idée de réponse à un stimulus s'imposa avec encore plus de force quand Cisielski en 1872, Charles et Francis Darwin quelques années plus tard, eurent montré que, si l'on enlève les deux derniers millimètres de sa pointe, la radicule d'un germe placée alors horizontalement ne se courbe plus vers le sol, bien qu'elle continue de croître avec vigueur. Pourtant, l'on a respecté la région de plus forte croissance, qui se trouve à partir du troisième mil- limètre, et où, sur des racines intactes, la courbure s'effectue toujours. La régénération de la pointe est accomplie au bout de quarante-huit heures : à ce moment, le géotropisme reparait. Il était naturel de conclure, avec Charles et Francis Darwin, que l'endroit où l'excitation de la pesanteur est reçue n’est pas le même que celui où elle produit son effet moteur. Mais on objecta que la PS ES EEE bé à E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES 217 perte du géotropisme pouvait êlre causée par les troubles consécutifs à la mutilation. La difficulté était sérieuse si l'on raisonnait par analogie. En 1892, en effet, Rothert' avait fait voir d'abord que les cotylédons de l'Avoine, sensibles à la lumière spécialement à leur extrémité, le sont dans toute leur étendue (car, même si leur pointe estenveloppée d'un corps opaque, il se produit une courbure); ensuite, que, si l’on coupe tant soit peu de sa région terminale, le cotylédon cesse d'être excitable par la lumière et ne le redevient qu'après un ou deux jours. L'héliotropisme peut donc être affecté par une mutilation. N'en est-il pas de même pour le géotropisme? III Il semblait dès lors très difficile, sinon impos- sible, de reconnaître comment se répartit la sensi- bilité géotropique le long de la racine. Pourtant Czapek * ima- gina de faire pousser des racines intactes dans de petits tubes fer- més à une extrémité et coudés à angle droit, de telle sorte que les deux derniers millimètres fussent toujours perpendieculai- res au reste de l'organe (fig. 1). Et, pour soustraire celui-ci à toute action de la pesanteur pen- dant qu'il s’enfoncait dans le tube, on le fixait à la périphérie d'une roue verticale tournant Fig. A.— Dispositir US lentement, appareil que Gule spo: de Czapek pour l'étude du géotro- pisme des racines. Sachs a appelé clinostat et qui a pour effet de présenter au sol à tour de rôle deux côtés opposés de la plante, par suite d'annuler l'action de la pesanteur sans produire de force centrifuge appré- ciable. Lorsque la racine a atteint le fond du tube, on détache ce dernier du elinostat, et, quand on le fixe de telle sorte que l'extrémité fermée soit verticale, aucune courbure géotropique ne se produit dans la région de croissance ; pour toutes les autres posi- tions, la courbure apparait bientôt. Cette expé- rieuce tendrait à prouver que, si la pointe extrême de le racine n’est pas, comme on l’a trop dit peut- : Ueber die Fortpflanzung des heliotropischen Reizes. Be- richle der Deutschen Botanischen Gesellschaft, 1892, pp. 314-390. — Consultez surtout : Uber Heliotropismus (Cohu's Beiträye zur Biologie der Pflanzen, 1994, &. VII, fase. ], æp. 1212, en particulier à partir de la page 196), et : Die Streitfrage über die Function der Wurzelspitze, Flora, 1894; Ergäuzungshand, pp. 1179-18. ? Untersuchungen über Geotropismus. Jahrbücher für Wisseuschaltliche Botanik, 1895, t. XXVII, pp. 243-338. — ‘Voir surtout le paragraphe B de la première partie du mé- moire : pp. 255-263. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. être, l'organe exclusif de la sensibilité géotropique, elle en est au moins le siège principal. Il est vrai que Wachtel', en reprenant les expé- riences de Czapek, obtint des résultats négatifs ; mais ce dernier, discutant la technique de son contradicteur, y montra quelques fautes. Néan- moins, le doute lorsque Francis Darwin* modifia le dispositif des expé- riences dont nous venons de parler. 11 pensa qu’en maintenant dans une direction horizontale, à l’aide d'un tube de verre, la pointe de la racine, ou les cotylédons qui, pour les tigelles de certaines plantes comme la Setaria et le Sorgho, sont l'organe sen- sible à la pesanteur, le stimulus, se continuant, donnerait des courbures qui ne cesseraient de se poursuivre. était encore possible L'expérience prouva la justesse de cette idée *; de plus, lorsque le tube était vertical, il ne se produi- sait aucune tendance à la courbure, ce qui montre bien que, dans le premier cas, la pression exercée par les parois du tube de verre n'était pas la cause du mouvement, puisque la verticalité ne modifie en rien cette pression. IV Enfin, Auguste Piecard', de Bâle, sut trouver en 190%, pour la.solution du même problème, une méthode de grande originalité. Il est clair, ditl, que, si l’on pouvait faire agir la pesanteur en deux sens opposés sur la pointe et la zone de croissance d’une racine qui a poussé en ligne droite, on serait vite renseigné, par la direction de la courbure; sur la manière dont se répartit la sensibilité géotro- pique aux différents points de l'organe étudié. Malheureusement, la chose est impossible. Toute- fois, avec la force centrifuge, on peut tourner la difficulté. Une radicule est rendue solidaire d'un axe horizontal (fig. 2) avec lequel elle fait un angle de 45°, de telle sorte que le prolongement géomé- trique de l'axe vienne passer à 1, 1 1/2 où 2 milli- mètres de la pointe. Quand il y a rotation, la force centrifuge s'exerce sur cette racine en des sens 1 Les expériences de WacureL ont paru en russe. Berichte der neuruss. Gesellsch. der Naturf. in Odessa, t. XXII, 1899. Rornerr les a résumées dans la Botanische Zeitung, 1899, no 15. Elles sont aussi résumées dans le travail cri- tique de Czarek : Ueber den Nachweis der geotropischen Sensibilität der Wurzelspitze. Jahrbücher, 1900; t. XXXV, pp. 313-364. 2 Preliminary note on the function of the root lip in rela- tion to geotropism. Proceedings of the Cambridge Philo- sophical Society, t. XI, 1901. 8 Comme le poids des organes situés à l'extérieur du tube courbait la plante vers le bas et masquait la réaction, II. Darwin avait imaginé un appareil où cetle influence était exactement compensée. 4 Neue Versuche über die geotropische Sensibilität der Wurzelspitze. Jahrbücher, 1904, t. XL, pp. 94-102. 4" 218 E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES opposés de part et d'autre du prolongement de l'axe. Si c'est la pointe qui est l'organe sensible, la cour- bure provoquée par elle augmentera l'angle primitif de 45°; si c'est la région de croissance, cet angle, au contraire, sera réduil. Les expériences de Piccard le conduisirent à admettre que la zone de courbure est sensible à la pesanteur au moins autant que la pointe. (Il faisait tourner des radicules de Vicia faba pendant une heure environ, à raison de 20 à 40 tours par se- conde, puis les plaçait au clinostat.) En 1906 et 1907, Haberlandt' reprit ces expé- riences avec un appareil beaucoup moins défec- | tueux. La vitesse de rotation n'était plus que de 5 à 20 tours par seconde, ce qui évitait la production possible de courbures passives, dues à l'influence purement mécanique de la force centrifuge. Celle-ci, | on le sait, croît avec la distance à l’axe de rotation. Haberlandt à donc remarqué qu’elle est plus con- Fig. 2. — Dispositif de Piccard pour l'étude du géotropisme | des racines. sidérable sur la zone de courbure que sur la pointe très voisine de l’axe, el que, dans le cas où les deux régions seraient sensibles, quand même la pointe se trouverait l'être davantage, cette inégalité, capable de modifier les résultats, pourrait induire en erreur. Il a constaté, chez les espèces Vicia faba, Lupinus albus et Phaseolus multiflorus, que, si la pointe dépasse le prolongement de l'axe de 1,5 à 2 millimètres, elle détermine la réaction : on doit, dès lors, reconnaître qu'elle est sensible à un haut degré, puisque la courbure produite sous son influence a lieu dans une zone sollicitée en sens contraire par une force bien supérieure à celle qui a déclenché le mouvement. Ce fait prouve, cette fois sans réplique, dit l'auteur, que, dans une radi- cule, l'excitation peut se propager d’un endroit à l'autre. Mais, si la pointe qui dépasse l’axe n'est plus que de 1 millimètre, la courbure se manifeste dans le sens qui correspond à la sensibilité du corps de la racine. La zone de croissance serait donc sensible, quoique à un moindre degré. Elle ne ! Uber die Verteilung der geotropischen Sensibilität in der Wurzel. Jahrbücher, mai 1908, t. XLV, pp. 575-600, dirigerait la réaction que dans le cas où le rapport des forces centrifuges antagonistes est par trop au désavantage de la pointe. Ce dernier résultat est d'accord avec les expé- riences de Wiesner' et de Brunchorst*, reprises aussi par Haberlandt. Ces auteurs ont fait tourner autour d'un axe vertical des radicules privées d’un ou deux millimètres de pointe et ont constaté qu'elles se montrent sensibles à l’action de forces centrifuges assez considérables. L'un d'eux, Wies- ner, avait montré, du reste, qu'il ne s'agissait pas d’une courbure passive : dans le gaz carbonique, en effet, elle ne se manifeste plus. Il est vrai que le gaz carbonique arrête aussi la croissance des racines. C'est pourquoi New- combe*, dans un travail terminé le 30 novembre 1907, mais publié seulement le 29 août 1908, à recommencé aussi les expériences de Wiesner. Comme Sachs‘, Czapek”, d'autres encore, l'ont montré, dit-il, un stimulus fourni par la force centrifuge, et supérieur à celui de la gravité, pro- voque, dans les racines intactes, une courbure plus forte que la réaction géotropique normale. Il est donc naturel de chercher, sur des racines privées de leur pointe, et en admettant que la zone de croissance soit excitable, si un tel stimulus ne pourrait pas vaincre l'autotropisme ou tendance à pousser en ligne droite, et l'effet, très probable- ment nuisible, de la lésion. Newcombe a pu établir que, chez plusieurs espèces, la sensibilité géotropique existe encore à plus de 2" 1/2 du sommet de la racine, et même chez quelques-unes à plus de 4 millimètres. Il avait disposé un butoir de liège contre lequel la force centrifuge aurait dù appliquer les 5 à 8 millimètres terminaux de la racine épointée, si les courbures eussent été uniquement passives. C'est le contraire qui fut observé : la racine s'arc-boute sur le liège comme pour y enfoncer sa partie terminale. L'au- teur avait déjà montré‘ que cette incurvation ne doit pas être attribuée au contact du liège. Et sa conclusion est que : ou bien la sensibilité géotro- pique s'étend à toute la zone de croissance et di- minue à partir du sommet, ou cette même sensi- bilité se trouve partout à peu près égale, mais 1 Untersuchungen* über die Wachstumsbewegungen der Wurzeln. Sitzungsber. d. Akad. d. Wiss. in Wien, 1884, t. LXXXIX. 2 Die Funktion der Spitze bei den Richtungshbewegungen der Wurzeln. Ber. der D. Bot. Gesellschaft, 1884, pp. 78-93. 3 Gravitation sensitiveness not confined to the apex of root, Beihefte zum Botanischen Centralblalt, À. XXIV, pp. 96-110. 5 Wachstum der Haupt und Nebenwurzeln. Arbeilen der Bot. Institut Würzburg, 1874, t. 1, p. 607. 5 Op. cit. Jahrbücher, 1895, p. 301. 5 Bot. Gaz., 1902, t. XXXIII, p. 1711, et Beihefte z. Bot. Centralblatt, 4904, &. XVI, p. 61. SU PP ER ER VE PE vd ee Outer PE D ee : | LUE E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES l’autotropisme esl plus éloignée de la pointe. Les expériences d'Haberlandt exposées haut, où les forces centrifuges étaient moins con- sidérables, et où la courbure se produisait toujours dans la région de croissance, sont toutefois de nature à faire adopter la première interprétation. Il faut donc dire, croyons-nous, que la racine est, de la pointe à la région de croissance, sen- sible à la pesanteur, l'extrémité l'étant toutefois davantage *. prépondérant dans la partie la plus V Mais, si la racine est sensible, la tige ne l’est pas moins. Et tout de suite un nouveau problème se pose : comment la plante, écartée de la verticale, est-elle, pour ainsi dire, avertie qu’elle ne se trouve plus dans sa position de repos? Deux réponses ont élé faites jusqu'ici : 1° Czapek? trouve la cause de l’excitabilité dans la pression qu'exercent les uns sur les autres les éléments cellulaires. L'agencement des cellules en files longitudinales et en anneaux concentriques produirait des pressions variables avec l'incli- naison de la racine, et c’est ainsi que cet organe serait déterminé à réagir. Mais des expériences de Noll* sont peu favorables à cette hypothèse, car les rapports de pression, si importants et seuls capables, d'après Czapek, de déclencher le phéno- mène, peuvent être modifiés d'une facon arbitraire, par exemple, à l’aide de poids appliqués à telle ou telle partie de la racine. Néanmoins, la courbure géotropique n’en est pas affectée ; 2° La seconde théorie avait été déjà proposée par Noll' en 1892. L'année suivante, une remar- quable expérience de Kreidl° vint l’imposer à l'at- tention. L'expérience de Kreidl porte sur ce qu'on avait nommé les otocystes, cavités quelquefois en com- munication avec le milieu ambiant chez les Inver- tébrés aquatiques, en tout cas remplies de liquide et qui contiennent des corpuscules ou otolithes. ! Cette conséquence est moins qu'on ne pourrait le croire en contradiction avec celle qu'il faut tirer des recherches de Darwin. En effet, dans les expériences analogues de presque tous les auteurs, Rothert (op. cit., J'lora, 1894) a mis en évidence qu'un certain nombre de racines épointées se sont courbées géotropiquement, bien qu'avec un retard notable et à un degré moindre que les autres. ? Ueber den Vorgang der geotropischen Reizperception in der Wurzelspitze. Ber. der. D. Bot. Gesellschaft, 1901, pp. (116)-(130). * Zur Controverse über den Geotropismus Berichte der D. Bot. G., pp. 403-426. * Uber heterogene Induktivn. Versuch eines Beiträgs zur Kenntniss der Reizerscheinungen der Pflanzen. Brochure de 60 pages. Leipzig, Engelmann. 5 Weitere Beiträge zur Physiologie des Ohrlabyrinthes, Silzungsberichte der Akad. der Wiss. in Wien, Abthei- lung III, 1893, t. CII, fasc. 1, pp. 149-174. 219 Chez les animaux supérieurs, on les considérait, 1 parce qu'elles sont situées dans l'oreille interne, la fonction auditive, et, chez les comme aidant à animaux inférieurs, où elles se rencontrent isolées, comme constituant l'appareil de l’ouïe à son pre- mier stade. Mais il fallut abandonner cette manière de voir. D'abord, l’ablation de ces organes, chez plusieurs espèces aquatiques, aussi bien d'Invertébrés que de Poissons et de Batraciens, produit le déséqui- libre de l'animal et sa désorientation. Et de même, les sourds-muets, chez qui l'oreille interne manque, sont incapables de se diriger sous l’eau. Dès lors, on fut porté à croire que les otocystes étaient des appareils de stabilisation : en effet, si l'animal s'incline, les otolithes se déplacent, pressent sur d’autres parois ou d’une autre facon sur leur pre- mier support, et l'animal réagit en conséquence. Mais la preuve décisive n'était pas faite, car ici encore les résultats pouvaient être attribués au trouble produit par la mutilation, et, pour ce qui est des sourds-muets, à bien des causes inconnues. Enfin, comme toujours en Biologie, les expériences contradictoires ne manquaient pas”. Toutefois, Hensen ayant observé qu'au moment de la mue certains Crustacés perdent leurs oto- lithes et détachent alors du sol, avec leurs pinces, des grains de sable, des cristaux ou des fragments quelconques, pour les glisser dans leurs vésicules auditives ouvertes à l'extérieur, Exner eut une idée très ingénieuse, que Kreidl parvint à mettre à exécution avec des Crustacés de la baie de Naples ressemblant à de grosses crevettes, les Palæmon Xiphios et Squilla. I disposa l'expérience de telle sorte que l'animal n’eûl à sa disposition, après la mue, que de petits morceaux de fer, par lesquels furent alors nécessairement remplacés les otolithes. Au moyen d'un aimant, ces petits grains pouvaient de l'extérieur être déplacés d'une paroi sur l’autre. Et Kreidl put voir que le sujet réagit au dépiace- ment de ces particules, et que c’est bien là un acte physiologique provoqué par leur pression, puisque, si l’aimant les attire d'un côté, l'animal s'incline de l'autre. L'expérience était décisive; c'est pour- quoi otocystes et otolithes changèrent de nom; ils furent appelés statocystes et statolithes. VI Tout cela paraît avoir peu de rapport avec le géo- tropisme des plantes. Mais le lien, comme on va le voir, est assez étroit. En effet, la conjecture de Noll était précisément que des dispositions ana- 1 Plusieurs de ces contradictions s'expliquent aisément lorsqu'on songe que le sens de la vue peut aussi servir à l'animal pour s'orienter. 290 E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES logues devaient se rencontrer dans les parties des végétaux sensibles à la pesanteur. Il avait même imaginé, dans cette hypothèse, des schémas expli- catifs de toutes leurs réactions, sans se prononcer du reste sur la nature et l'ordre de grandeur des statolithes dans le monde végétal. D'après ce botaniste, étant donné que l'influence de la Terre peut être remplacée par celle de la force centrifuge, les plantes ne sauraient subir l’action de notre Globe autrement que les animaux. La pesanteur n'exerce donc sa puissance sur leur exci- tabilité que par l'intermédiaire d'un mouvement de masses, et ne se manifeste en elles, comme chez tous les autres êtres vivants, qu'au moyen de pres- sions ou de tractions subies par certains tissus; en d’autres termes, qu'indirectement par des poids. A l'encontre de Czapek, Noll soutient ensuite qu'on doit placer le siège de l'irritabilité dans la cellule même : n'est-il pas, en effet, plus rationnel, et préférable comme méthode, de soumettre d'abord au contrôle de l'expérience une hypothèse pouvant aussi rendre compte des réactions des plantes monocellulaires ? Si l'on adopte cette manière de voir, il faut localiser encore cette excitabilité dans le protoplasma périphérique moins fluide : le reste du contenu de la cellule, pouvant se déplacer et changer sans cesse de position par rapport aux forces extérieures, n'est pas apte sans doute à réagir d'une manière uniforme contre la gravité. Chez certaines Algues monocellulaires comme les Derbesia, ce protoplasma mobile peut, en effet, se déplacer d'une extrémité à l’autre de la plante, et néanmoins ces extrémités se courbent en des sens contraires. Dans la bordure protoplasmique seule peut donc se trouver l'appareil de réaction contre la pesanteur. En 1900, Haberlandt et Nèmec' crurent pouvoir tous deux faire la même application concrète de la théorie de Noll. Guidés par des observations diffé- rentes, ils furent amenés à croire que cette hypo- thèse si bien construite, mais à laquelle l’auteur avait laissé volontairement un certain degré d’im- Les expériences et les arguments dont nous allons don- ner un apercu sont consignés dans plusieurs Mémoires, dont voici les principaux : Hasercaxot : Ueber die Perception des geotropischen Reizes. Berichte der. D. Bot. Gesellschaft, 1900, p. 261 et suiv. Ueber die Statolithenfunktion der Starkekôrner. Zhid., 1902, pp. 189-195. Zur Statolithentheorie des Geotropismus. Jabrbhücber für WW. Bot., 1903, pp. 447-500. Néwec : Ueber die Art der Wahrnehmung des Schwer- kraftreizes bei den Pflanzen. Berichte, 1900, pp. 241-245 et, même titre, Jahrbücher, 1901, pp. 80-178. Die Perception des Schwerkraftreizes bei den Pflanzen. Berichte, 1902, pp. 339-354. Einiges über den Geotropismus der Wurzeln. Beihefte zum Bot. Zentralblatt, 1904, t. XVII, pp. 45-60. précision, était valable pour des corps bien déter- minés, visibles au microscope. D’après eux, c'est la cellule végétale qui remplit le rôle du statocyste. Et les statolithes seraient des corps solides d'une densité supérieure à celle du protoplasma : grains d'amidon mobiles ou très petits cristaux. L'on peut, en effet, concevoir que le contact de ces par- ticules sur le revêtement protoplasmique des membranes cellulaires détermine une excitation à laquelle deviendrait associé tel ou tel mouvement. Il fut assez difficile de justifier cette hypothèse. On parvint toutefois à montrer, non seulement qu'elle rend compte des faits connus, mais qu'elle permet d'en prévoir d'autres, que l'expérience mit ensuite en pleine lumière. C’est ce qu'il nous reste à exposer. VII Étudiant les racines, Nèmec vit les parties les plus jeunes et les plus profondes de la coiffe con- tenir toujours dans leurs cellules de nombreux grains d'amidon remarquables par leur mobilité. Et il pensa que la paroi de ces cellules est sen- sible à leur contact. Quand une racine est placée horizontalement, les grains d'amidon mobiles se portent sur la paroi longitudinale inférieure du « statocyste », et l'excitation ainsi provoquée dans le revêtement protoplasmique gagne la zone de croissance où un mouvement de courbure se pro- duit. Enfin, la sélection naturelle permet de com- prendre pourquoi cette courbure de la racine est, en général, dirigée vers le sol. De toute évidence, parmi les organismes, ceux-là seuls ont survécu dont les mouvements se sont effectués dans un | sens favorable. En outre, il à fallu que cette réac- tion se trouvât héréditaire dans l'espèce !. A la même époque que Nèmee, Haberlandt, étu- diant les tiges, y rencontrait les mêmes grains d'amidon mobiles, non pas toutefois au sommet, mais dans la partie où se produisent les torsions géotropiques. Dans les régions plus anciennes, incapables de courbure, ils avaient toujours dis- paru. 1 Bien entendu, tous les faits exceptionnels, si difficiles à interpréter quand on regarde la plante comme purement passive, s'expliquent sans peine dans l'hypothèse d'une réaction au contact de statolithes. On comprend alors que certaines racines de Paléluviers, afin de faciliter les échanges respiratoires, soient douées, comme les tiges, de géotropisme négatif, et que, d'autre part, certaines liges puissent se développer sous terre. El l'on conçoit de même qu'il y ait des tiges rampantes, sans que l'influence de la lumière A. Maige l'a prouvé. Annales des Sciences naturelles, 1900. — Ainsi, les mouvements de courbure suscités par le poids des statolithes n'auraient pas une uniformité nécessaire, mais on y constaterait cette adaptation aux circonstances pour en tirer le meilleur parti, décidément caractéristique des êtres doués de vie, soit pour rien dans leur orientation, comme ne né ete. A ee E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES 221 == On ne sait pas encore comment se produisent ces grains particuliers, ni comment ils deviennent mobiles? Mais tout indique qu'ils remplissent un autre rôle que les grains d'amidon qui ne se dé- placent pas et servent uniquement de réserve nutri- tive. Ils offrent plus de résistance aux causes de destruction, et, par exemple, persistent davantage dans les tissus privés d'aliments. D'autres recherches anatomiques ont été favo- rables à £ette manière de voir. Par exemple, chez la jeune plante de Phalaris canariensis, le sommet n'a que des grains mobiles; plus bas, l’amidon se présente sous les deux formes; de fait, la plante est sensible partout à la pesanteur, mais spéciale- ment à la pointe. Aprèsiavoir refait les expériences de Piccard, Haberlandt ‘ a pu montrer, pour ce qui concerne les racines de ses expériences, l’accord de sa théorie et des résultats obtenus. A la sensi- bilité géotropique plus développée de la pointe correspond l'appareil statolithique plus parfait de la coiffe; et à la sensibilité moindre de la région de croissance, la structure de sa partie périphérique, laquelle, dans la radicule de Vicia faba par exem- ple, renferme de nombreux grains d'amidon, dis- posés irrégulièrement, mais mobiles, et que dépla- cent des forces centrifuges appropriées. On sait encore que les tiges des Graminées, couchées à terre par un orage, éprouvent une forte croissance dans la partie des nœuds tournée vers le sol, ce qui les redresse Or, on trouve de l’amidon mobile dans ces renflements, on n'en trouve pas dans le reste de la tige. Nous avons vu que les cotylédons de la Setaria et du Sorgho sont le siège de la perception de la pesanteur; c'est là que les grains mobiles se trouvent. Et on les rencontre aussi dans la zone de courbure de certaines Liliacées qui n'ont point coutume de produire de l'amidon. En sens inverse, le Gui n'en contient pas et ne manifeste aucune sensibilité au géotropisme. Il n°y en à pas non plus dans les racines à crampons du Lierre et de la Marcgravia qui, servant à grimper, ne doivent pas être géotropiques. Si l’on trouve de l’'amidon dans certaines lianes, celui-ci n'est pas mobile, et le géotropisme manque. Enfin, dans les tiges, ces grains d'amidon capables de se déplacer disparaissent à peu près à l'époque où, la crois- sance étant terminée, cesse également le pouvoir de courbure. Et, dans les jeunes racines, l'établis- sement de ce pouvoir coïncide avec l'apparition de ces éléments mobiles. (A l'intérieur des graines, on le sait, les radicules ne contiennent point d'ami- don.) Bargagli Petrucci* a même pu expliquer quelques 4 Op. cit. (1908). ? Nuovo. giorn. b@t. ital., t. X, pp. 398 et suiv. Voir aussi: Tiscuer : Ueber das Vorkommen von Statolithen bei wenig mouvements géotropiques anormaux à l’aide de la théorie des statolithes. A l'hypothèse qui vient d'être résumée en quel- ques mots, on devait faire et on a opposé celte objection : comment se peut-il que les racines ter- liaires possèdent des statolithes et ne réagissent pas à la pesanteur? La réponse est que la racine primaire exerce sans doute une sorte d'inhibition sur les autres, qui doivent remplir des fonctions différentes pour assurer la vie du végétal. Mais la réaction aux statolithes n’est que suspendue, el elle s'exerce dès qu'on coupe la racine principale, Du reste, on a plus d’un exemple de pareils faits d'inhibition. Comment expliquer sans eux ces phé- nomènes que Léo Errera à désignés sous le nom de conflits de préséance ? Si l’on coupe le sommet de la tige principale d'un Sapin, d'un Pin, d'un Mé- lèze ou d'un Epicea, on constate qu’une branche latérale vient prendre sa place. Parfois, plusieurs rameaux se dressent pour remplir le même office, mais le plus rapproché ou le plus vigoureux l’em- porte sur les autres, qui cessent bientôt leur cour- bure. Il y à done une action inhibitrice exercée à distance par le sommet.sur les branches latérales, aussi sensibles que lui au géotropisme. Autre objection : certaines Algues et Fougères, qui n'ont pas de grains d'amidon, sont toutefois géotropiques. Il est vrai, mais d'autres éléments, et peut-être même les parties semi-fluides du contenu cellulaire, ne pourraient-ils pas jouer le rôle de statolithes ? On peut citer en exemple les poils sensibles au géotropisme des racines de Charw, dans lesquels Zacharias ‘, puis Giesenhagen * ont observé de petits corpuseules brillants, toujours rassemblés à la partie inférieure de la cellule. MIII Toutes les remarques de ce genre ne sont certes pas sans valeur, mais l’Anatomie ne peut suffire à fonder une théorie physiologique ; elle ne saurail donner que des indications, utiles pour savoir où et comment doit s'instituer la recherche expéri- mentale. Or, les expériences entreprises sont presque toutes sujettes à une cause d'incertitude très sérieuse, que Fr. Darwin ‘ a mise en évidence dans un cas particulier. Ayant soumis à une tem- pérature assez élevée (de 33 à 38°) de jeunes plantes de Setaria et de Sorgho, il constata qu'elles avaient perdu presque tous leurs statolithes, et se oder gar nicht geotropischen Wurzeln. Flora, t. XCIV, pp. 1-69. Cet auteur a pu, de mème, expliquer les positions anormales de nombreuses racines. 1 Hlora, 1891, pp. 466 et suiv. ® Berichte, 1901, pp. 297 et suiv. 5 The Statolith Theory of Geotropism. Paragraphe 2, Proceedings Roy. Soc., 1903. 222 trouvaient beaucoup moins géotropiques. Cela sem- blait une preuve de la théorie; malheureusement, ces plantes devenaient aussi moins sensibles à la lumière. Ne pouvait-on pas interpréter ce double fait d’une facon très simple en disant qu'à cette température le protoplasma subit un affaiblisse- ment qui lui enlève une partie notable de son pou- voir de réaction. Peut-être cependant que, dans ces plantes, les courbures héliotropiques s'effec- tuent sous l'influence combinée de la lumière et de la pesanteur, la lumière ne donnant ici que l'excitation primitive, comme Stahl l’a montré dans le cas de certains rhizomes, et Noll, d’après les expériences de Fischer, pour les mouvements de veille et de sommeil de nombreuses plantes *. Pour décider entre les deux interprétations possibles, il n'y aurait qu'à voir si, au clinostat, les mouve- ments héliotropiques subsisteraient chez les plan- tules de Fr. Darwin, à la condition, bien entendu, que la source lumineuse fût placée au centre de l'appareil. Tant que cette expérience n'aura pas élé faite, celle de Fr. Darwin ne saurait autoriser aucune conclusion. L'objection précédente peut être reproduite à propos de presque toutes les expériences entre- prises sur le même sujet, commes celles de Némec qui, emprisonnant des racines dans du plâtre, leur fait perdre à la fois les grains d’amidon mobiles et le géotropisme, ou d'Haberlandt qui arrive au mème résultat en exposant le Lin aux froids de l'automne et de l'hiver, et constate que les corpus- cules d'amidon et le géotropisme reparaissent en même temps, lorsqu'on met la plante à l'abri. Ce dernier expérimentateur, ayant eu l'idée d’inten- sifier par des secousses nombreuses dans le plan vertical l'excitation due aux statolithes, et le géo- tropisme ayant été accru, on peut lui répondre encore que ces secousses auraient suffi, même en l'absence de statolithes, à augmenter l'excitation, et l’argument vaut qu'on s'y arrête, malgré cer- taines expériences de Francis Darwin *. Il a fait voir que, dans ce cas, chez certaines plantes, le mouvement de courbure héliotropique ne subit qu'une très légère accélération. D’autres expé- riences® de même type étaient défavorables à la théorie d'Haberlandt; mais celui-ci y a relevé des causes d'erreur *. L'objection du protoplasma lésé revient encore à propos de toutes les expériences où l’on enlève la partie qui contient les grains d’amidon et où l’on ! Voir Nozr : Heterogene Induktion, surtout pp. 11-13. * Op. cit. Proceedings, 1903, paragraphe 2. * Bacn : Uber die Abhängigkeit der geotropischen Präsen- talions und Reaktionszeit von verschiedenen Aussenbedin- gungen. Jahrbücher, 1907, XLIV, pp. 57-123. Voir surtout pp. 108-112, * Berichte, 1908. Fascicule 1, pp. 22-28. E. MAIGRE — LE PROBLÈME DU GÉOTROPISME ET LA THÉORIE DES STATOLITHES constate la perte du géotropisme. Pour être impar- tial, il convient encore de citer comme contraires à la théorie des statolithes les expériences de Jost!, auxquelles ont répondu d’ailleurs, et semble-t-il avec succès, Fr. Darwin et miss Perth”. IX L'attribution aux statolithes des phénomènes de géotropisme pouvait donc être discutée victorieu- sement lorsque, dans les premiers mois de 1908, J. Buder‘ publia de belles expériences qui paraissent définitivement trancher la question. Elles ont porté sur les tiges et les racines de plantes très géotro- piques (par exemple, de Zepidium sativum). L’au- teur dispose des racines horizontalement et les laisse ainsi jusqu'à ce qu'il soit bien sûr que les grains d’amidon mobiles se sont tous rassemblés contre la paroi longitudinale inférieure de chaque cellule. (Douze minutes étaient plus que suffisantes pour obtenir ce résultat.) Ensuite, un appareil d'horlogerie fait tourner brusquement de 180° le disque vertical sur lequel les plantes sont fixées : c'est maintenant la paroi longitudinale, teut à l'heure placée le plus haut, qui se trouvele plus bas. Nouvel arrêt de douze minutes. A partir de ce moment, le disque va effectuer des demi-tours, mais de dix en dix secondes, c'est-à-dire à des intervalles beaucoup trop petits pour que, étant donnée la viscosité du suc cellulaire, les grains d'amidon aient le temps de se déplacer d’une facon sensible. Dans ces conditions, Buder observe que la courbure géotropique se produit dans le sens de la seconde station de douze minutes. Il n’est pas douteux, néanmoins, que les deux parois opposées de la cellule aient été aussi longtemps l’une que l’autre placées au point le plus bas. Mais précisé- ment parce que les statolithes n’ont pas eu le temps de se porter d’une paroi sur l'autre, la bor- dure protoplasmique n’a pu recevoir l'excitation que d’un seul côté, toujours le même. Et le résultat de l’expérience serait impossible à expliquer si l’on admettait que la plante percoit directement la pesanteur, puisque chaque face s'est trouvée aussi longtemps que l’autre placée au point le plus haut, puis au point le plus bas. On peut donc admettre maintenant, croyons- nous, que l'excitation due au contact de corpuscules 1 Die Perception des Schwerereizes in der Pflanze. Biolo- gisches Centralblatt, 1902, pp. 161-179. En particulier, p. 175. Pre Notes on the Statolith Theory of Geotropism. Para- graphe 1, Proceedings of the Royal Society, 1904, €. LXXIHI, pp. 417 et suiv. 3 Untersuchungen zur Statolithenhypothese. Festschriit zur Feier des 25 Jährigen Bestehens der D. Bot. G., t. XXVI, pp. 162-193, 1908- + .« At) tetes 0. de me St. oc ter cm Tete ss Dean. …. ‘sthtiéès A. COTTON — LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO solides est un moyen, et, sans doute, le plus général, grâce auquel la pesanteur est perçue. La plante n’a donc pas, pour reconnaitre la direction de cette force, le sens énigmatique qu'on s'était plu à lui accorder; elle n’en est pas moins capable de réagir physiologiquement. Et ce que nous appe- 223 lons le géotropisme ne serait, suivant toute appa- rence, qu'un acte de réponse, établi par la sélec- tion et l’hérédité, de grande importance dans la lutte pour la vie’. Étienne Maigre. LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO Il a déjà été question de l'Esperanto dans la Revue générale des Sciences : À une époque où ses partisans étaient encore peu nombreux, M. Mé- ray, puis M. Colardeau ont expliqué ici même’ les principes fondamentaux qui avaient guidé le D' Za- menhof dans la formation de la langue nouvelle, et le but qu'il se proposait d'atteindre. L'Esperanto, on le sail, n’a pas la prétention de remplacer les quelques centaines de langues actuellement parlées sur les différentes parties du globe. Tout le monde continuerait à parler, dans la vie de tous les jours, sa langue maternelle; le plus grand nombre, pen- dant longtemps encore sans doute, ne connaitrail que celle-là. Mais tous ceux — de jour en jour plus nombreux — qui ont à entretenir, dans un but quelconque, des relations avec l'Etranger se servi- raient de cet instrument d'échange, de même qu'on utilise un passe partout au lieu de s’embarrasser d'un trousseau de clefs. Qu'est devenu, depuis cette époque, le mouve- ment espérantiste? Continue-t-il actuellement à progresser? Le nouvel instrument se montre-t-il, à l'usage, d’un emploi commode et rend-il déjà des services? Quel paraît être l'avenir qui lui est réservé ? Il s’agit là de questions très sérieuses, qui ne sauraient laisser indifférents les lecteurs de cette Revue. L'existence et le développement d'un lan- gage auxiliaire international constituent un phé- nomène dont l'importance générale n'échappe à personne, mais qui doit particulièrement intéresser ceux qui cullivent et qui aiment la Science. Comme j'ai fait l'essai que conseillait si vivement Tolstoï, comme j'ai appris, pendant mes instants de loisir, l'Esperanto, j'ai pu faire sur ce phénomène quelques observalions et essayer de me former, sur les ques- tions qu'il soulève, une opinion fondée sur des raisons expérimentales : on ne s'étonnera pas de voir un physicien se décider surtout par des raisons de celte nature. Il y a des personnes qui hésitent à se réjouir des ‘ Voir la Revue, 15 avril 1900, p.417, et 30 sept. 1903, p. 947. progrès qu'a fait l’Esperanto, et parfois pour des rai- sons qui méritent un examen attentif. Mais aucune d'elles ne doute de ces progrès. Je n'aurai donc pas besoin de donner ici de nombreux renseignements statistiques, de produire, par exemple, les tableaux et les graphiques qui étaient exposés à. Dresde, dans l’une des salles de l'Ecole Polytechnique, au moment du dernier Congrès.Je me bornerai à exa- miner quel a été le pas accompli pendant l’année qui vient de s’écouler. Je ne chercherai pas quel à été, pendant celte période, l’accroissement du nombre des Espéran- tistes : c'est un nombre trop mal défini : à quel moment peut-on se dire Espérantiste? Jusqu'à quel point faut-il connaître la langue? On est ren- seigné d'une facon plus certaine, quoique incom- plètement, sur les progrès et l'extension de l’Espe- ranto par des procédés indirects. L'un d'eux consiste à compter le nombre des Sociétés qui s'en occupent directement. Les renseignements obtenus ainsi sont incomplets, parce qu'en comptant ainsi toutes les sociétés pour une unité, on ne tient aucun compte de leur importance, de leur activité, de l'accroissement du nombre de leurs membres. Cependant, on à déjà par ce moyen une indication utile. Le nombre des Sociétés espérantistes, petites ou grandes, qui n'atteignait pas 200 au commence- ment de 1904, était déjà de 639 au mois de juin 1907. Le 5 juillet 1908, il est devenu 1.029. Le tableau suivant indique comment cet accroissement consi- dérable se répartit entre les diverses parties du monde : 1 Nous avons exposé les raisons qui conduisent la plu- part des botanistes à considérer le géotropisme des plantes comme un fait essentiellement biologique, pour l’expres- sion duquel le terme le plus adéquat parait être celui de réaction contre un excitant. Ün organisme n'est jamais assimilable à un système inanimé. C'est pourquoi nous ne faisons qu'indiquer une hypothèse de J. Læb, où le géotro- pisme deviendrait un fait d'ordre chimique. La dynamique des phénomènes de la vie, 1908, pp. 260-262. — On trouvera, d'autre part, des expériences intéressantes, mais qui ne nous paraissent pas décisives, dans l'ouvrage de J. C. Bose : Plant response as means of physiological investigation, 1906, pp. 496-498 surtout. Le] to ES A. COTTON — LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO Accroissement du nombre des Sociétés espérantistes du 30 juin 1907 au 5 juillet 1908. 30 JuiN 1907 5 JUILLET 1908 Europe. . . D42 817 Afrique. . 6 1% Amérique. . 69 158 Asie . . 3 16 23 Océanie. . . 6 17 Totale re 639 1029 Parmi ces 1.029 sociétés espérantistes, la grande majorité ne s'occupe que de propager l’'Esperanto. Un nombre plus restreint (104 à la date indiquée) est formé par des sociétés qui se servent, effecti- vement, de l’'Esperanto, dans des buts très variés, qu'il s'agisse de politique, de religions, de com- merce, d'industrie, de sciences, d'arts, de sports, etc. Ce ne sont pas, loin de là, les moins utiles pour la propagande, car elles peuvent montrer, dans des milieux très étendus et très variés, l'utilité pra- tique d'une langue auxiliaire. On peut demander à être renseigné d'une façon un peu plus détaillée sur le nombre des sociétés dans les différents pays. Je reproduirai donc encore e tableau suivant : Répartition des Sociétés espérantistes dans différents pays, en juin 1908. EranCe EN MR AU TE AMÉTIQUe USE EN CRE 0 Angleterre 2 E MSS Beloique eee E Espagne. . . . . . . . 85 | Bulgarie-Roumanie. . 22 Allemagne RENE ENT) PASTE" EEE 2 Etat Unis PE CON 661 NOcEATIe FE Autriche-Hongrie = - MoN) PAÎTIQUe ROUE DURS eee ee ee ON RICA EE PTE 9 Suêderet Norvège .".""M43/|MHollande "100 f) Russich FE 4°)|NDanemarnkt. "6 ce 9 L'ordre des pays, dans de tels tableaux, change d’ailleurs souvent. Il suffit d'un Congrès, ou quel- quefois de quelques bonnes paroles, comme celles que prononcaient récemment, au Japon, le Ministre des Affaires étrangères, en Italie, le Ministre de l'Instruction publique, M. Rava, pour que de nouvelles sociétés se forment. On peut maintenant suivre tous les mois les progrès de l'Esperanto dans l'Oficiala Gazeto Espe- rantista, publié par les soins de l'Office central espérantisle (51, rue de Clichy, à Paris). Les Espé- rantistes ont, en effet, un Journal Officiel : il n'indique pas seulement les progrès de la propa- gande, les sociétés nouvelles, les villes où l'on a créé des consuls espérantistes (288 au mois d'août 1908) ; il publie aussi les travaux du Comité de Linguistique et de l'Académie espérantiste, dont je dirai un mot tout à l'heure; il indique enfin les nouvelles publications faites en esperanto (livres et journaux), qui fournissent, elles aussi, des indi- cations sur ses progrès. Le nombre de ces publications est déjà considé- rable, et Zamenhof remarquait récemment que beaucoup de petits pays n'en ont pas autant. Il s'est augmenté d’une facon remarquable pendant les derniers mois : Par exemple, le nombre des périodiques, qui était 4% à la fin de 1907, attei- gnait déjà 61 le 5 juillet, 64 le 5 août 1908; il a encore augmenté depuis, au moment du Congrès qui à vu paraître, en particulier, une nouvelle revue mensuelle illustrée. Parmi ces périodiques, on comptait 42 journaux de propagande dans les différents pays, 12 journaux spéciaux (dont um imprimé en caractères Braille pour les aveugles), et 10 périodiques d'intérêt général. Dans le nombre se trouvent des Revues importantes, vraiment internationales par le choix des collaborateurs et par leur clientèle de lecteurs. Elles tendent de plus en plus à publier des œuvres écrites directe- ment en esperanto, en prose Ou en vers, en même temps que des traductions. De ces traductions, il y a déjà un nombre assez imposant : Les Espéran- tistes, et Zamenhof lui-même, notamment dans sa collaboration à la /?evuo, ont tenu à aborder les genres les plus divers, passant de Virgile, de la Bible, à une comédie de Molière, de Dickens ou de Tristan Bernard; traduisant un jour une pièce de Shakespeare, de Schiller ou de Gœthe, le lende- main un fragment d'Anatole France : Les Pensées de Riquet! : A côté de ces revues plutôt liltéraires se trou- vent déjà plusieurs journaux scientifiques et tech- niques, notamment : Scienca Revauo. Ce dernier est maintenant l'organe de l'Association scienti- fique internationale ‘, fondée officiellement l’année dernière, à Cambridge, où l'illustre physicien J.-J. Thomson lui a donné aussitôt son appui. Cette Association, qui a déjà recueilli près de 700 adhésions ou approbations de savants ou d'amis de la Science, a été présidée cette année par le Prof. Schmitt, Directeur de l'Observatoire magnétique de Potsdam. Dans sa réunion à Dresde, elle a désigné pour lui succéder M. René Benoit. L'éminent Directeur du Bureau international des Poids et Mesures est depuis longtemps espéran- tiste fervent: il est, de plus, bien placé pour con- naître et pour surmonter les difficulés que ren- contre, avant d'être réalisé partout, un grand projet d'intérêt général. Le travail principal de l'Association nouvelle est de recueillir et d’ordonner les éléments nécessaires pour les besoins du langage technique : c’est là um gros travail, à cause du nombre immense de mots qui se présentent alors et pour lesquels il faut choisir des racines d'un sens précis, aussi interna tionales que possible, et appliquer d’une facon rigoureuse des règles de dérivation. Pour cela, la 1 Internacia Scienca Asocio, 8, rue Bovy Lysberg, Genève. A. COTTON — LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO 295 collaboration — même dans une faible mesure — d'un grand nombre de gens et surtout de gens compétents dans les diverses sciences est néces- saire. Des bonnes volontés nombreuses se sont déjà rencontrées, et les documents qui se con- centrent actuellement à Genève, qui sont souvent discutés, au préalable, dans Scienca Revuo, faci- literont singulièrement la tâche de ceux qui vou- dront faire, en diverses langues, des vocabulaires techniques comme il en existe déjà plusieurs (par exemple : le vocabulaire technique francais-espe- ranto de M. Verax, le Matematika Terminaro de M. Bricard, le vocabulaire des mots spéciaux à la marine de M. Rollet de Lisle, plusieurs ouvrages pour les commercants, ete...). J'ajouterai que les dépenses d’une telle organi- sation ont été couvertes en grande partie par une somme importante, donnée par M. de Saussure, et par d'autres dons volontaires. C’est grâce aussi au dévouement inlassable du général Sébert et à l'appui donné par plusieurs savants éminents que l'entreprise est actuellement en bonne voie. C'est, d’ailleurs, un fait très fréquent dans le développe- ment de l'Esperanto : Il a rencontré souvent des donateurs généreux et des bonnes volontés agis- santes; il ne faut pas oublier que tout ce mouve- ment a été, jusqu'à ces derniers temps au moins, le fruit de la seule initiative individuelle. IT A quoi sert actuellement l'Esperanto? Je répon- drai sans hésiter, en ayant fait à deux reprises l'expérience : À présent, sa principale utilité — non la seule — est qu'il permet de faire des voyages charmants, non seulement dans les villes mèmes où se tiennent les Congrès annuels, mais aussi, à l’occasion de ces Congrès, dans les pays voisins. En rentrant il y a deux ans d'Angleterre, jai parlé ailleurs des services que m'y avait rendus la connaissance de la langue auxiliaire, depuis l'arrivée du paquebot jusqu'à mon retour. Tous les Espérantistes qui s'étaient donné rendez- vous à Cambridge n'ont pas oublié cet accueil cor- dial qu’ils ont trouvé partout, non seulement dans la vieille cilé universitaire, mais à Londres, au pays de Galles, en Écosse, etc... L'année dernière, plus nombreux encore (1.430 congressistes environ), nous avons rencontré à Dresde, à Berlin, à Prague”, 4 Revue du Mois du 10 octobre 1907, p. 490. ? J'ai pu vérifier moi-même, en visitant Prague et son Exposition, la justesse et la portée des remarques que M. Blondel faisait récemment ici mème (voir la Hevue du 30 juillet 1908, p. 559.) J'ai pu constater notamment quel accueil chaleureux recevaient les Francais ; mais, moins heu- reux que d'auties, je n'ai (trouvé, parmi ceux qui nous gui- daient si obligeamment, personne pouvant parler enfrancais. quelques uns, je le sais, ont trouvé à Copenhague, le même accueil empressé. On me dira que j'aurais pu visiter ces villes sans l'Esperanto. D'abord, je ne sais pas si je l'aurais fait : cette langue à eu pour premier résultat de faire voyager beaucoup de Francais qui, autrement, seraient restés chez eux. J'espère bien qu'il y en aura, à l'avenir, de plus en plus; ce ne sera un mal, j'imagine, ni pour l'Esperanto ni pour la France. Puis, mon voyage n'aurait certainement pas eu le même intérêt. J'au- rais bien pu, un Guide en main, voir ces belles villes et les richesses artistiques qu'elles con- servent. Mais je n'aurais pas rencontré, presque à chaque instant, ces obligeants, mais vraiment heureux de se rendre utiles, qui cherchent toutes les occasions de le faire, et qui surtout, étant du pays, donnent, sur interprètes non seulement les choses et les gens, ces renseignements que les Guides ne donnent pas. Enfin, je n'aurais pas eu ma part des fêtes orga- nisées en notre honneur. Les organisateurs de chaque Congrès espérantiste — et les Allemands n'y ont pas manqué, bien entendu — s'efforcent de dépasser, à cet égard, les précédents. Is ren- contrent de plus en plus, dans l'accomplissement de leur tâche, des appuis officiels précieux. Sui- vant l'exemple donné à Cambridge par les auto- rités de la ville et du Comté, le Roi, les Ministres de Saxe, la Municipalité de Dresde ont apporté au Congrès non seulement l'appui de leur nom ou de leur parole, mais une aide matérielle précieuse. D'abord ils ont prêté les monuments publics, l'École Polytechnique où se tenaient les réunions spéciales où l'on travaillait, le Vereinshaus où ont eu lieu les réunions générales, plusieurs concerts et un grand bal en costumes nationaux, l’Austel- lungspark où l’on avait organisé une grande fête de nuit, ete. Mais, de plus, la ville de Dresde à donné une subvention importante à la Caisse du Congrès; elle a permis, en outre, aux Éspérantistes — qui ne s'en sont pas privés — de circuler gratuitement sur les tramways qui tous lui appartiennent; elle a mis à leur disposition quatre bateaux qui on servi pour les excursions. Un jour, cette flotülle aux pavillons multicolores est descendue, sur les eaux brunes de l'Elbe, à Meissen pour la visite du Burg, du Dom et de la Manufacture royale de por- celaine. Un autre jour, elle a remonté jusque dans la Suisse saxonne. La longue théorie des Espéran- tistes s’est déroulée au milieu des grands rochers de grès, aux formes bizarres, de la Bastei, puis dans les forêts silencieuses jusqu'à Wehlen. La nuit venue, pendant que les bateaux retournaient à Dresde, on voyait presque sans interruption, au milieu des collines boisées, tous les châteaux, les restaurants et les maisons s'embraser tour à tour. 226 A. COTTON — LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO Sans doute, de telles fêtes ne sont pas réservées uniquementaux Congrès d'Espérantistes. Mais, dans ces derniers, il y a en plus un spectacle fort curieux très instructif, parfois même impressionnant : celui qui est donné par les Espérantistes eux-mêmes. Il est difficile de s'imaginer leur joie lorsqu'ils se trouvent ainsi réunis, l'empressement avec lequel ils forment des groupes où des représentants de pays lointains, de nations rivales ou hostiles, des gens d'opinions et de goûts tout à fait opposés, deviennent si rapidement amis pendant quelques jours. Certes, de tels Congrès ne peuvent résoudre les problèmes irritants qui les séparent, mais ils peuvent certainement aider, une mesure appréciable, à détruire bien des préjugés, des opi- nions 4 priori qui viennent compliquer encore la solution difficile de ces problèmes. J'insisterai sur ce fait qu'il y a, dans ces groupes, des gens de toute condition et non pas seulement des gens riches, ayant déjà voyagé et connaissant souvent plusieurs langues. À côté des habitués des Congrès, que l’on retrouve d’une année à l’autre, il y à un très grand nombre de nouveaux venus, sur- tout parmi les habitants de la région où se tient le Congrès, qui n'ont jamais assisté à des fêtes sem- dans blables. C'est avec ceux-là, qui ne connaissent sou- vent que leur langue maternelle, qu'il est intéres- sant de causer pour voir si vraiment l'Esperanto est d'une acquisition facile. Certes, avec les débu- tants, surlout avec ceux qui ont appris seuls la langue auxiliaire, la conversation est d'abord un peu lente; il y a des mots qu'il faut chercher dans le vocabulaire, il y a ca et là quelques incorrections systématiques : on oublie par exemple l’accusatif; mais on se comprend, et c’est l'essentiel. Quelques jours de Congrès, où les plus silencieux deviennent loquaces, suffisent pourquela conversation devienne en même lemps plus agréable et plus correcte, et l'expérience donne raison à ceux — dont l'opinion a certes quelque poids — qui ont eu à enseigner l'Esperanto à de tels élèves : On l’apprend plus facilement que n'importe quelle autre langue étran- gère. Dans les réunions générales où les Espérantistes prennent conscience de leur force, on est surtout surpris par leur enthousiasme, leur ardeur commu- nicative et aussi par la discipline qu'ils s'imposent. J'ai constaté à nouveau à Dresde le silence religieux avec lequel on écoute Zamenhof et les autres ora- teurs dont les noms sont connus de tous, puis les ovalions enthousiastes pendant les discours, les acclamations qui saluent ceux qui viennent apporter les nouvelles de la propagande et le salut des amis de pays lointains. J'ai entendu de nouveau, lorsque l'orgue joue les premières mesures de l'£spero, toutes les voix, avec plus ou moins de force suivant qu'elles se sentent plus ou moins sûres d'elles- mêmes, s'unir pour chanter en chœur l'hymne espérantis!e de M. de Ménil; puis, à la fin, tous les exéculants applaudir eux-mêmes avec conviction. Je me rappelle encore la représentation d'Iphi- génie en Tauride dans la salle de l'Opéra Royal. Pour la première fois, c'étaient des acteurs de pro- fession qui interprélaient une œuvre traduite en Esperanto. Grâce, sans doute, au jeu excellent des artistes qu'avait groupés autour de lui M. Rei- chert, du ZLessing Theater de Berlin, quelques craintes, dont j'avais entendu l'écho, se sont mon- trées vaines : Malgré les difficullés tenant au choix de l'œuvre elle-même, ou au fait que la traduelion était en vers, l'action s’est déroulée devant un public recueilli etému, sans qu'aucun bruit, aucun applau- dissement parti à contre-temps, ait nui à cette belle manifestation artistique. III Non seulement, on le voit, l'Esperanto se montre à l'usage d'un emploi pratique, et a résisté vieto- rieusement à une expérience déjà longue, mais il à à son service une phalange de défenseurs disciplinés qui cherchent à le répandre avec zèle par tous les moyens petits ou grands. C'est là pour son avenir un fait d'importance considérable. Il à rencontré les deux sortes d'hommes qui sont nécessaires pour faire aboutir une entreprise aussi difficile que celle d'une langue auxiliaire : d’abord ceux qui élaborent, dans leur cabinet de travail, une langue artificielle ayant, autant que possible, les qualités théoriques voulues; puis d’autres hommes, tout différents, mais également dévoués, qui réussissent à la faire connaitre et à la répandre partout. On peut, sur quelques points de détail, critiquer l’œuvre des pre- miers : on n'a pas le droit de faire table rase de l'œuvre considérable déjà accomplie par les autres. La discipline dont les Espérantistes ont faitpreuve l'année dernière, lorsque quelques personnes ont publié un projet d'Esperanto modifié (/do), est une garantie que leur langue, en se répandant et en s’enrichissant de plus en plus, conservera la plus importante de toutes les qualités d’une langue auxiliaire : son unité. Cela ne veut pas dire qu'ils se refusent aveuglément à améliorer, à l'avenir, l'outil dont ils se servent. Chacun d'eux se refuse, en effet, d’une manière absolue, le droit de pro- poser lui-même, de sa propre autorité, aux autres Espérantistes, tel ou tel changement systématique ; mais il existe une institution qui a le droit de le faire et à laquelle chacun peut s'adresser avec la certitude que ses propositions seront sérieusement examinées. Le Comité de Linguistique, dont l’au- torité pour toutes les questions concernant la A. COTTON — LES PROGRÈS DE L'ESPERANTO langue n’est contestée par aucun Espérantiste, a pour but de sauvegarder à chaque instant l'unité de la langue, mais non de l'empêcher de progresser. Comme ses membres, dont quelques-uns sont de pays très lointains, ne peuvent guère se réunir fré- quemment, ou correspondre vite, il a élu une Com- mission permanente formée d’un petit groupe de gens compétents, qui est chargée précisément d'étudier les critiques et les demandes de modifica- tions. C'est cette Commission que les Espérantistes appellent volontiers l'Académie, bien qu'il y ait, tout de même, quelques différences avec une autre très connue : par exemple, ses membres sont renouvelables par fraction d’un liers tous les trois ans. Il ne faut pas oublier, en outre, que le Comité de Linguistique, qui les nomme, n'a pas un nombre de membres limité et qu'il doit s'adjoindre des membres nouveaux proposés par les Espérantistes eux-mêmes ou les Sociétés qui les représentent. Si donc vraiment quelques-unes des réformes pro- posées le méritent, elles finiront par s'imposer et par pénétrer dans l'enseignement, mais cela peu à peu, sans qu'on s'en apercoive en quelque sorte, sans qu'on risque de ralentir là propagande et de perdre le fruit des efforts déjà faits. A Dresde, où résolutions été approuvées sans discussion, Zamenhof caractéri- sait lui-même cette évolution progressive en disant que, plus tard, l'Esperanto différera peut-être no- tablement de la langue actuelle « comme l’homme mür diffère de l'enfant ». Je crois que l'Esperanto à devant lui un long avenir; je le crois non seulement parce qu'il a eu jusqu'ici des succès croissant régulièrement, mais parce qu'il mérite ces succès et parce qu'il veut continuer à les mériter. Aussi je pense qu'il doit recevoir de plus en plus des encouragements dans le monde scientifique. Il y à certainement parmi les lecteurs de cette Revue des personnes qui peu- vent lui être très utiles. Je ne m'imagine pas qu'ils vont tous apprendre l'Esperanto. Beaucoup, sans doute, savent déjà lire ou même parler les quelques langues dans lesquelles on écrit aujourd'hui les Mémoires scientifiques : on ne peut raisonnable- ment demander à des savants très occupés de s'im- poser une nouvelle tâche, si faible soit-elle, qui serait sans utilité pour leurs travaux. Mais, en ré- fléchissant, ils constateront que, pour arriver eux- mêmes — le plus souvent peu à peu, et sans qu'ils s'en doutent — à la connaissance suffisante de plusieurs langues, ils ont eu, somme toute, à dépenser beaucoup de temps qui aurait pu être mieux employé. Ils voudront donc, j'en suis per- suadé, alléger pour leurs enfants, écarter pour ceux qui viendront plus tard, ce fardeau qui devient de plus en plus lourd à mesure que la science, ces sages ont elle aussi, grandit et demande plus d'efforts. Ils feront en sorte que les savants profitent plus tard, eux aussi, du méme instrument d'échange qui ser- virä aux voyageurs el aux commercants, qu'ils puissent partout, à l'avenir, non seulement lire facilement, mais encore parler une langue étran gère commune, travailler dans leurs laboratoires avec des savants des autres pays et faire avec eux cette connaissance directe que rien ne peut rem- placer. Le plus grand service qu'altendent aujourd'hui les Espérantistes de leurs amis, c’est qu'ils les aident à faire pénétrer de plus en plus la langue auxiliaire dans l’enseignement de la jeunesse. Ils demandent que leur langue pénètre partout dans les écoles où l'on apprend actuellement des langues étrangères, qu'il prenne sa place d'abord à côté d'elles et à titre facultatif, pour devenir ensuite la première langue étrangère commune, apprise par- tout après la langue maternelle, mais avant toutes les autres. Il ne faut pas oublier que les professeurs de langues qui en ont fait l'expérience affirment que l'étude préalable de l’Esperanto facilite lac- quisition ultérieure des autres langues vivantes. Parmi ces langues, il en est une qui occupe à cet égard une situation privilégiée : c'est la nôtre. C'est du francais que l’Esperanto se rapproche le plus. Cela n'est pas seulement parce que Zamenhof a été conduit naturellement à adopter beaucoup de racines latines que l’on retrouve dans notre langue comme dans l'italien, l'espagnol, ete...; cela vient aussi de ce que beaucoup d'Espérantistes se sont recrutés jusqu'ici dans les pays de langue fran- caise et que, malgré tout, sans qu'ils l’aient cherché, leur influence a déjà laissé des traces. Aussi VEs- peranto peut rendre plus facile l'acquisition du francais, et venir en aide à ceux qui cherchent ac- tuellement à le répandre de plus en plus à l'étranger dans les milieux où il a sa place marquée, c'est- à-dire dans les milieux érès cultivés, par l'intermé- diaire desquels les écrits français exercent au loin leur influence. Quelques-uns de ceux qui pour- suivent actuellement ce but dans l'Esperanto — que l’on ne traite plus par des railleries — un adversaire qui pourrait devenir dan- gereux. Je crois que ceux-là font fausse route et qu'ils vont à l'encontre non seulement des tradi- tions de notre pays, mais de son intérêt : Je me réjouis que la France ait pris une part importante dans cette grande entreprise, et je souhaite que la langue auxiliaire, dans son développement et son évolution, recoive de plus en plus l'empreinte de la très louable voient nôtre, A. Cotton, Chargé de Cours à l'Université de Paris. (Ecole Normale Supérieure) BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Zoretti (L.), VWaïtre de Conférences de Mathéma- tiques à la Facullé des Sciences de Grenoble. — — Cours d’Algèbre (CLASSES DE MATHÉMATIQUES A ET B). — 1 vol. in-16 de 464 pages. (Prix cartonné : 6 fr.) H. Paulin et Cie, éditeurs. Paris, 1909. Par cet ouvrage, l’auteur, qui est un de nos jeunes mathématiciens les plus distingués, a voulu faire péné- trer dans l’enseignement secondaire quelques idées émises par son maitre, M. J. Tannery, dans ses leçons de l'Ecole Normale. A l'enseignement purement logique, tel qu'on le comprenait autrefois, il juxtapose un enseignement pratique et concret. Il s'applique aussi à être suggestif, à ouvrir des horizons sur les parties qu'il ne peut développer. C'est ainsi que toute la théo- rite dite dusecond degré n'est pour lui qu'une première étude des fonctions algébriques. La théorie des Fonc- tions occupe presque la moitié de l'ouvrage et cons- titue une source. d'applications intéressantes, où l’au- teur va très loin. Taris (Elienne), ancien Elève de l'Ecole Polytech- nique. — L'Automobile et les Armées modernes. — 1 vol. in-8 de 351 pages, avec 144 fiqures (Prix : 10 fr. 50. Dunod et Pinat, éditeurs.) Paris, 1909. Le caractère industriel de la guerre moderne ne laisse aucun doute sur l'efficacité du concours que l'automobile peut prêter à une armée. Ce concours peut s'effectuer de trois manières prin- cipales : 1° En assurant le transport rapide des généraux et des états-majors sur les divers points de leur zone d'action ; 29 En assurant la propulsion de voitures armées véritables engins de guerre), ou de voitures tech- niques spéciales (voitures-projecteurs, voitures télé- graphiques); 3° En effectuant les transports de ravitaillement et d'évacuation. De ces trois services, le premier seul peut jusqu'ici être considéré comme fonctionnant en réalité. Voilà, en effet, plusieurs années que, dans la plupart des armées européennes, des automobiles sont mises, pour les manœuvres, à la disposition du commandement; elles n’en sont plus à faire leurs preuves. Vienne une guerre, et l'on trouvera dans les voitures de tourisme plus d'éléments qu'il n’en faudra pour assurer le trans- port rapide de nos généraux. Tout au plus pourrait-on souhaiter que l'aménagement intérieur des voitures fût prévu pour permettre à leurs hôtes de travailler confortablement en cours de route : sans créer de toutes pièces des voitures neuves, il serait facile de modifier dans ce but les spacieuses limousines, qui sont aujourd hui légion. L'idée de la voiture de combat est née, à peu près simullanément, vers 1904, dans plusieurs pays : en Autriche, en Angleterre (mitrailleuse Thornycroft- Vernon), en Allemagne (mitrailleuses blindées et voi- tures à canon spécial contre les ballons). En France, MM. Charron, Girardot et Voigt ont construit une mitrailleuse blindée, qui a été expérimentée en Russie; le capitaine Genty à fait aménager, par la compagnie d'ouvriers de Vincennes, un châssis de tourisme 2% chevaux Panhard, pour recevoir une mitrailleuse. Cet engin a été expérimenté avec succès sur la frontière marocaine : il s'est montré mobile et efficace. Il n’est d’ailleurs aucunement protégé. M. Taris estime qu'une voiture de combat doit être protégée, et qu'au lieu d’une simple mitrailleuse, elle pourrait recevoir un canon de petit calibre, comme celui de la Marine de 37 millimètres, qui serait autre- ment efficace. Une voiture de ce genre préterait un concours précieux aux reconnaissances de cavalerie. Comme voiture automobile technique, il faut citer la voiture à projecteur électrique, construite par J. W. Brook and GC», qui a fait son apparition aux dernières manœuvres anglaises. Le matériel d’un poste de télé- graphie sans fil pèse environ 1.300 kilogrammes; le per- sonnel peut être limité à six hommes : une voiture de 2.800 kilogrammes pourrait donc constituer un poste fort mobile et éminemment précieux. Le troisième service qu'on peut demander à l’auto- mobile, celui d'assurer les ravitaillements et évacua- tions, est de beaucoup le plus important. On estime qu'un corps d'armée, avec ses voitures attelées, occupe, sur une route, une longueur de 30 kilomètres, et met, à raison de #% kilomètres par heure, plus de sept heures à s'écouler. Les mêmes éléments, transportés par des automobiles, seraient cinq fois moins longs et marcheraient quatre fois plus vite; leur écoulement sur une route serait vingt fois plus rapide. Un com- prend combien cette substitution diminuerait l’'encom- brement et augmenterait la mobilité de l'armée! Pour l’effectuer, à quel engin automobile s’adresse- rait-on, au train ou au camion? A l'actif du premier, il faut compter la faible longueur, le personnel réduit, l'homogénéité facilitant la conduite et la surveillance. Au passif, il faut porter : l'impossibilité du fractionne- ment, l'importance que prend une simple panne immo- bilisant tout de suite une quantité considérable d'appro- visionnements, une maniabilité moins grande que celle d’un camion, et, surtout, si l'on en juge par le peu de trains automobiles actuellement utilisés par l'industrie, l'impossibilité de trouver chez les indus- triels, au moment d'une guerre, un nombre de trains assez grand pour assurer le service des armées. C'est donc en faveur du camion que conclut très nettement M. Taris, camion pesant au plus # tonnes par essieu et portant une charge utile égale au moins à la moilié du poids total. Quatre-vingts de ces camions seraient nécessaires par corps d'armée : il en faudrait seize cents pour vingt corps mobilisés. L'industrie serait encore impuissante à les. fournir à notre armée, au moment d'une guerre. Cependant, comme l'État ne peut songer à acheter lui-même, dès le temps de paix, un nombre suffisant de camions, qui, lors d’une entrée en campagne, seraient certaine- ment démodés et probablement hors d'état de bien fonctionner, c'est sur l'industrie seule qu'il peut compter pour s'approvisionner au moment critique. La conclusion très nette de tout ceci, c’est que l'Etat doit, par des moyens vérilablement efficaces, favoriser le développement des camions dans l’industrie. L’Alle- magne l’a bien compris, qui donne à tout acheteur de camion automobile, prenant l'engagement de le céder à l’armée en cas de mobilisation et faisant tout ce qu'il faut pour le lui livrer en bon état, une indemnité de 5.000 francs, au moment de l'achat, et une subvention de 1.250 francs, chaque année, pour contribuer à l'entretien. Au lieu de cela, nous voyons l'automobile de tou- risme accablée en France de charges, et le camion automobile menacé, par un projet du Conseil Muni- cipal de Paris, d’une taxe contre laquelle M. de Dion, président de la Chambre Syndicale de l'Automobile, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX s'est vigoureusement et bien justement élevé dans une lettre récente, adressée à M. Chassaigne-Goyon, pré- sident de la Commission du Budget du Conseil Muni- cipal. L'ouvrage de M. Taris traite, avec beaucoup de com- pétence et dans toute son ampleur, cette question si complexe, et vraiment vitale pour le pays, des applica- tions de l'Automobile aux armées. C'est dire tout l'intérêt qui s'attache à ce livre. Deux chapitres y sont consacrés aux ballons dirigeables et aux aéroplanes, dont l'emploi militaire est imminent, si nous en jugeons par les récents progrès de l'aviation. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines, Ancien élève de l'École Polytechnique. 2° Sciences physiques Jeans (J. H.), 47. A. F. R. S., Professeur de Mathé- matiques appliquées à l'Université de Princeton. — The mathematical Theory of Electricity and Magnetism. — 1 vo/. grand in-$° de 536 pages (avec figures). Cambridge University Press. (Prix : 19 fr.) Clay, éditeur. London, 1909. Le Professeur J. H. Jeans s'est proposé de résumer dans ce volume les notions de la théorie mathématique de l'Electricité et du Magnétisme, notionsindispensables à qui veut entreprendre une étude sérieuse de la Physique, Le livre s'adresse donc à des étudiants, mais surtout à des éludiants anglais. Les notions mathématiques nécessaires sont exposées, brièvement mais très clai- rement, au début de chaque chapitre. L'ordre des chapitres et l'ensemble des théories exposées font songer à du Maxwell rajeuni et simplifié. C’est sans doute parce qu'il s'adresse à des étudiants que l’auteur a développé considérablement la partie électrostatique du livre, aux dépens peut-être du Magnétisme et de l'Electromagnétisme. Quant à la théorie électromagnétique de la lumière, il ne lui a été consacré que 40 pages, dans les deux chapitres de la fin. C'est un livre classique que nous donne M. Jeans, mais classique au point de vue anglais. Ce point de vue anglais semble même avoir un peu hypnotisé l’auteur. Certes, la science électrique classi- que doit beaucoup à Faraday et à Maxwell ; mais elle ne doit pas moins à Ampère, et le lecteur sera surpris de l'ignorance presque complète où le Professeur Jeans semble être à l'égard de celui que Maxwell appelait le « Newton de l'électricité ». Il ne sera sans doute pas moins surpris en constatant que l’auteur ignore totale- ment Helmholtz. ; Tous les développements mathématiques de la pure logique analytique, si chère aux théoriciens français, sont supprimés dans le livre, dès qu'ils ne présentent pas une utilité immédiate pour l'étudiant. Des théorèmes généraux, comme celui de Green ou de Stokes, des principes fondamentaux comme celui de Hamilton, les équations de Lagrange elles-mêmes, c'est-à-dire toute la Mécanique, tout cela est présenté comme des outils commodes permettant de résoudre une difficulté survenue accidentellement au cours de l'étude d'un phénomène. L'ouvrage gagne ainsi en clarté et en simplicité ce qu'il perd au point de vue de «l'esthétique », si l'on peut ainsi parler. Ecrit dans un anglais très simple, la lecture pourra en être fort utile à tout étudiant et à tout ingénieur désireux de se mettre, sans trop de peine, au courant des théories de l’Electricité et du Magnétisme. V. CRÉMIEU. Docteur ès sciences. Despaux (A.), Zngénieur des Arts et Manufactures. — L’Electricité dévoilée. — 1 vo/. in-8° de 231 pa- ges (Prix : 3 fr. 50.) Société d'Editions techniques. Paris, 1909. 299 Campredon (L.), Ancien Chef des Laboratoires des Forges de Fourchambault et des Aciéries de Tri- gnac. —- Guide pratique du Chimiste métallurgiste et de l’Essayeur. — /Jeuxième édition, revue, cor- rigée et augmentée avec la collaboration de M. G. CAM2REDON. — 1 vol. gr. 1n-8° de 859 pages. (Prix: 30 fr.) Béranger, éditeur. Paris, 1909. Les métallurgistes et les essayeurs se sont servis avec profit de la première édition de l'ouvrage de M. Cam- predon. La fievue en a donné un compte rendu élo- gieux très mérité. Cette première édition comprenait, outre l'analyse des métaux et des minerais, l'analyse de matières jour- nellement employées par le métallurgiste : les combus- tibles, les gaz, les matières réfractaires, les eaux indus- trielles. L'ouvrage renfermait d'excellentes observations personnelles, surtout à l'égard des fers et des com- bustibles; des indications précieuses relatives au pré- lèvement des échantillons et à la répartition des impu- retés dans les métaux fondus; des renseignements fort utiles en ce qui concerne les marchés des minerais. A côté d'excellentes méthodes, quelques unes n'étaient malheureusement pas à l'abri de la critique. Dans la seconde édition, qui parait aujourd'hui, on retrouve les précieux renseignements et les utiles observations de la première. On y retrouve même la plus grande partie de cette première édition, et c’est dommage, car le livre aurait beaucoup gagné à tenir compte, plus qu'il ne l’a fait, des résultats très heureux acquis en France et à l'Etranger pendant ces dix der- nières années. Néanmoins, on y découvre des additions tout à fait actuelles, comme l'analyse des lithopones, du carborundum, et quelques perfectionnements de méthodes, en particulier dans les analyses des petits métaux (Tungstène, Vanadium, Titane, Molydène). On ne peut pas indéfiniment coudre des pièces neuves sur un vieux drap, si bon que soit ce drap. Il arrive. un moment où il faut tout remettre à neuf. C’est, sans doute, ce que fera M. Campredon lorsqu'il nous don- nera sa troisième édition, qui, elle, sera complètement refondue. Nous lui souhaitons prompte venue et, en attendant, nous ne doutons pas que l'édition présente ne reçoive le meilleur accueil. A. HOLLARD, Chef du Laboratoire central des Usines de la Cie française des Métaux. André (Gustave), Professeur à Institut Agronomiqgne de Paris; Agrégé de la Faculté de Médecine. — Chimie agricole. l'ome I : Chimie végétale. — 1 vol. de 560 pages de l'Encyclopédie agricole. J.-B. Baïl- lière, éditeurs. Paris, 1909. Ce livre n’est pas seulement intéressant au point de vue de l’enseignement supérieur agricole; il représente surtout la partie chimique de l’enseignement de la Phy- siologie végétale, tel qu'on le donne, notamment, dans les Facultés des Sciences. Si beaucoup de volumes de l'Encyclopédie agricole sont rédigés par des élèves qui ont donné une idée de l’enseignement de leurs maîtres, celui-ci est rédigé par le professeur lui-même, dont le nom resté associé à celui de Berthelot dans tant de travaux de Chimie ana- lytique relatifs aux végétaux. On peut donc prédire à cet ouvrage qu'il sera beaucoup lu, et d'autant plus apprécié qu'aucune tentative semblable n'avait été faite depuis longtemps Nous y voyons une synthèse des doctrines actuelles, avec les nouvelles tendances suggérées par les actions diastasiques et catalytiques, ‘le rôle des toxines et des corps antitoxiques. L'ancienne théorie de la nutrition minérale de Liebig, qui paraissait triompher encore il y a vingt ans, va sembler bientôt sinon caduque, du moins singuliè- rement incomplète, à la lumière des faits mis en évi- dence par les théories pastoriennes et par les nouvelles théories chimiques, par tout ce qu'on peut soupçonner, déjà, du rôle de corps tels que le manganèse, le zinc., le fer, le magnésium. Il n'est pas jusqu’au fonction- 230 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX nement toujours si obscur des chlorophylles et de leurs dérivés qui ne se trouve, désormais, envisagé à un point de vue plus moderne. Assurément, le tome Il, sur la Chimie de la terre arable, sera amené à sacrifier davantage encore les notions anciennes trop générales, et montrera combien tant de questions, qui sont insuf- fisamment connues, méritent d'être reprises. A voir la complexité des phénomènes de nutrition des plantes inférieures les plus simples, on peut, en effet, préjuger combien les idées admises sur la nutrition des plantes supérieures doivent être schématiques et seulement approchées. On trouve, dans ce volume, la mention d'un très grand nombre d'auteurs. Malheureusement, il n'y figure guère d'indications bibliographiques détaillées, et c'est une lacune que regretteront certainement les étudiants. Néanmoins, un ouvrage autorisé de Chimie végétale manquait dans notre littérature récente. En rédigeant celui-ci, M. G. André a bien servi la cause des recherches de Biologie végétale. Eomonp Gain, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences, Directeur des Etudes agronomiques à l'Université de Nancy. 3° Sciences naturelles Cyon (D: E. de). — Das Ohrlabyrinth als Organ der mathematischen Sinne für Raum und Zeit (Le Labyrinthe de l’Oreille comme organe des sens mathématiques de l'espace et du temps). — /n-8° de xvu-425 pages, avec 45 fiqures, 5 planches. Julius Springer, éditeur. Berlin, 1908. M. de Cyon a réuni, dans ce volume, l’ensemble des travaux qu'il a consacrés aux fonctions des canaux semi-circulaires, et y a donné à la théorie du sens de l’espace, qu'il a édifiée sur ces recherches, une forme sans doute définitive. L'ouvrage est divisé en sept chapitres. Le chapitre I traite des bases expérimentales de Ja théorie. L'auteur y rappelle que, dès 1872, reprenant les expériences de Flourens, il a conclu que les termi- naisons nerveuses des ampoules des trois canaux reçoivent une série d’impressions qui nous servent à former des représentations inconscientes sur la posi- tion de notre tête, et indirectement de notre corps dans l’espace. Les principaux motifs de son opinion étaient : 1° la disposition anatomique des canaux; 2° la régularité absolue avec laquelle la section de chaque canal produit des mouvements dans un plan parallèle à celui du canal; 3 l'influence que les positions anor- males de la tète exercent sur les mouvements et sur l'équilibre du corps. En effet, M. de Cyon était arrivé à provoquer des troubles tout à fait semblables à ceux décrits par Flourens, soit en imprimant à la tête, par des procédés divers, des attitudes anormales, soit en déterminant un strabisme artificiel, au moyen de len- tilles prismatiques. Il était donc probable que les troubles de l'équilibre qu'entrainent les positions anormales de la tête, à la suite de la section des canaux, étaient dus aux troubles des sensations visuelles. M. de Cyon fut ainsi amené à rechercher l'influence que les lésions des canaux pouvaient exercer sur l'appareil moteur de l'œil, qui joue un si grand rôle dans nos représentations touchant la disposition des objets dans l’espace, et il fut le premier à observer ce fait remarquable que l'excitation de chaque canal provoque des oscillations des globes oculaires, dont la direction est déterminée par le choix du canal excité. Ainsi se trouvaient établies des relations physiologiques entre les centres oculo-moteurs et ceux auxquels abou- tissent les fibres nerveuses des canaux semi-circulaires, c'est-à-dire, en se plaçant au point de vue de l’auteur, qu'ainsi étaient mis en évidence des rapports fonclion- nels entre les sensations qui nous indiquent la dispo- silion des objets dans l'espace et celles qui nous donnent la notion d'espace. M. de Cyon à donc vu se confirmer peu à peu sa théorie par les expériences variées que, de 1872 à 1878, il a instituées chez le pigeon, le lapin, la grenouille, expériences que nous venons de résumer dans les grandes lignes, et dont il a donné un exposé détaillé dans ce chapitre. Le tableau des troubles consécutifs, soit à la section isolée ou combinée des canaux, soit à leur destruction unilatérale ou bilatérale, la description des méthodes, encore classiques aujourd'hui, qui per- mettent d'exécuter ces dernières opérations sans perte de sang et sans lésion des organes voisins, y prennent la plus grande place. Ainsi que l'indique suffisamment le titre du cha- pitre IL : « Lutte contre les doctrines erronées sur les fonctions des canaux. Expériences de rotation chez l'homme et les animaux », l’auteur s'y attache surtout à combattre, par la voie de l’expérimentation, les prin- cipales théories émises sur le rôle des canaux, en particulier celles du sens de rotation et du sens statique. Goltz avait admis, comme on sait, que les changements de pression de l’endolymphe dans les divers mouvements de la tête provoquent des sensa- tions qui, suivant qu'elles partent de tel ou tel canal, nous renseignent sur l'orientation de notre tête par rapport à ses axes, et, en se combinant, règlent l’équi- libre de la tête et, par suite, celui du corps. Pour Crum- Brown, Mach, Breuer, Yves Delage, les canaux sont, soit les organes des sensations d'accélération, soit ceux du sens de rotation, et, pour la plupart de ces expérimentateurs, la sensibilité en est mise en jeu par des mouvements ou des pressions de l’endolymphe. Nombreux sont les arguments que M. de Cyon oppose à ces théories. L’endolymphe n'a rien à voir avec les mouvements réactionnels que l’on observe pendant la rotation, puisque ni la compression des canaux mem- braneux, ni leur immobilisation, ni l'écoulement de l'endolymphe ou de la périlymphe ne donnent lieu à ces mouvements. Au surplus, ils persistent après la section des nerfs auditifs ou l’ablation bilatérale des canaux. Des expériences de rotation que l’auteur a instituées chez l'adulte, l’enfant, chez les animaux d'espèces diverses, placés dans les conditions les plus variées, il conclut que les mouvements dits compensateurs des yeux sont dus aux sensations visuelles et que les mou- vements de rotation de la tête et du corps sont des actes de défense par lesquels l'homme et l'animal réagissent contre la rotation inusitée qu'on leur impose. En outre, si l’on imprime brusquement à un pigeon des mouvements rectilignes, soit à droite, soit à gauche, on observe les mêmes mouvements compensateurs de la tête et des yeux que pendant la rotation : celle-ci n’est donc pas nécessaire pour les produire. L'illusion optique qui, dans les traversées des grandes courbes de chemin de fer, nous fait paraître. les poteaux télégraphiques et les édifices élevés in- clinés vers les wagons à l’intérieur de la courbe, n’est pas non plus, comme l'ont soutenu Mach et Breuer, sous la dépendance du labyrinthe; elle tient simple- ment à la surélévalion du rail extérieur dans les courbes. Enfin, on ne voit pas à quel besoin répond l'existence d'un sens spécial de rotation. Dans le chapitre II, M. de Cyon expose comment est née sa théorie, et quels sont les développements qu'il a été peu à peu amené à lui donner. De bonne heure, ses expériences l'ont conduit à cette conclusion que la vraie solution du problème qui partage les naturistes et les empiristes doit être cherchée dans l'existence de cet organe sensoriel, dont les trois canaux ne sont ainsi disposés dans trois plans perpen- diculaires entre eux que pour nous donner des sensa- tions de direction ayant les mêmes rapports entre elles. A l'aide de ces sensations, qui correspondent exactement aux trois coordonnées de l’espace, il se forme dans notre cerveau la représentation d'un es- pace à trois dimensions sur lequel se projette l’espace BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 231 visuel et l'espace tactile. L'existence d'un sixième sens, d'un sens spécial de l'espace, résout donc toutes les difficultés que rencontrent et l’apriorisme de Kantz et la théorie empiriste qui n'était valable que pour l’es- pace visuel et en désaccord avec la loi de l'énergie spécifique des nerfs. Cette théorie fournit aussi une explication facile du vertige. Celui-ci se produira toutes les fois qu'il y aura désaccord entre l’espace visuel ou tactile (espace objec- tif de Purkinje) et l’espace idéal (ou subjectif de Pur- kinje,. Les désordres de la motilité, qu'on observe après la section des canaux, sont intimement liés à ces fausses représentations de l’espace, ou, pour mieux dire, au manque d'harmonie entre l’espace vu et l'es- pace formé à l’aide des sensations provenant des canaux. M. de Cyon trouve encore une nouvelle confirmation de sa théorie dans les observations faites sur les sourds- muets, et que Kreidl avait cru pouvoir invoquer en faveur de la théorie de Mach. Parmi les sujets atteints de cette infirmité, ceux dont les canaux semi-circu- laires ne fonctionnent plus ignorent le vertige de rolalion : c'est qu'en effet le désaccord entre l’espace visuel et l’espace idéal ne peut se produire chez eux. Il y à loin de cette théorie à celle des auteurs qui voient dans le labyrinthe un organe spécial pour le verlige de rotation, comme pour les sensations de rotation. S'appuyant sur les expériences de Strehl et de Jensen, M. de Cyon soutient, en effet, que le laby- rinthe est étranger au vertige galvanique. Cependant, ni les troubles de l'orientation dans l’espace, ni le vertige qui s'y rattache et qui est pro- prement un vertige visuel, ne peuvent expliquer entiè- rement la « folie » musculaire que l’on observe après l’ablation bilatérale des trois canaux. Ceux-ci, en effet, président non seulement à l'orientation dans les trois plans de l’espace et au choix de celle des directions dans laquelle les mouvements doivent être exécutés, mais aussi à la coordination des centres nerveux qui assurent le maintien de cette direction. Les forces d'innervation de ces centres, comme aussi de ceux qui gouvernent l'équilibre, sont de préférence réglées, quant à leur intensité et leur durée, par le labyrinthe. L'influence que les canaux exercent sur les centres, et par suite sur les mouvements, est donc une influence modératrice, comme l'avait déjà entrevu Flourens : c'est dans ce sens qu'on peut parler d'un tonus d’ori- gine labyrinthique. Il ne faudrait pas attribuer à ces canaux, comme semble l'indiquer la dénomination créée par Ewald (Jabyrinthtonus), la faculté de maintenir d'une façon continue les muscles du corps en état d'activité tonique. Ce sont, au contraire, des résistances opposées à un ensemble d'énergies nerveuses centrales qui disparaissent avec le pouvoir régulateur du labyrinthe. Le chapitre IV est consacré, en grande partie, aux expériences faites sur des Vertébrés à un ou deux canaux seulement, et sur des Invertébrés. Si la théorie de l’auteur est justifiée, les animaux pourvus seulement d'une ou de deux paires de canaux ne doivent con- naitre qu'une ou deux directions, et, par conséquent, ne s'orienter aussi que dans une ou deux directions. C’est ce qui se vérifie chez la lamproie, qui n'a normalement que deux paires de canaux, et chez les souris dansantes Japonaises, chez lesquelles, du moins d'après Rawitz, une seule paire de canaux, celle des canaux verticaux supérieurs, fonctionne normalement, les deux autres paires étant atrophiées. M. de Cyon a étudié minutieu- sement le mode de locomotion, les facultés auditives de ces petites bêtes, la façon dont elles se comportent à la lumière ou dans l'obscurité, etc. Ce qui ressort de plus essentiel de ces observations, c’est que ces souris ne peuvent se mouvoir que dans une seule direction, à droite ou à gauche, et que ces mouvements se trans- forment habituellement en mouvements de manège et de danse; il leur est impossible de marcher droit en avant où en arrière, où de se mouvoir dans le sens vertical. M. de Cyon rappelle aussi, dans ce chapitre, que, dès 1878, il avait émis l'opinion que, chez les Inver- tébrés, les otocystes doivent remplir les mêmes fone- tions que l'appareil des canaux semi-cireulaires chez les Vertébrés, et que, depuis lors, les expériences de Yves Delage ont démontré que leur destruction produit, en effet, la désorientation locomotrice des animaux qui l'ont subie. Divers expérimentaleurs ont soutenu que la pesanteur exerce son influence sur l'orientation des animaux (Poissons et Invertébrés) par l’intermé- diaire de l'appareil otolithique. Pour l'auteur, l'exis- tence de ce sens géotropique n'est pas mieux fondée que celle du sens statique, dont elle est une variante. M. de Cyon arrive aussi à s'occuper des pigeons voyageurs. [Il fait remarquer que, si ces pigeons doivent, comme les autres animaux, la faculté de se mouvoir dans les trois directions de l’espace aux canaux du labyrinthe, ils ne peuvent nullement s'en servir de guides quand ils doivent s'orienter à distance : c'est à tort qu'on lui à attribué cette opinion. Il faut distinguer entre l'orientation locomotrice et l'orientation loin- taine. Celle-ci s’accomplit surtout à l’aide du sens de la vue et d’un sens spécial qui réside dans la muqueuse olfactive, et peut-être dans les sinus frontaux, mais distinet de la faculté olfactive, et qui permet à l'animal d'apprécier les qualités du vent (direction, intensité, température). Ce chapitre se termine par des considérations géné- rales sur la différenciation fonctionnelle des diverses parties du labyrinthe, sur les phénomènes d'excitation ou d'inhibition dont elles sont le point de départ. Parmi les excitations qui agissent sur les terminaisons nerveuses du labyrinthe, les unes seraient continues, tels les bruits entotiques, la pression et la composition chimique de l'endolymphe,, ete.; les autres sont momentanées et représentées par les sons. Les unes et les autres ont un rôle différent et s'exercent aussi sur des parties différentes. Les premières agissent surtout sur les cils courts du saccule et de l’utricule et servent à la régulation des forces d'innervation. Les secondes agissent sur les cils des ampoules, et, en même temps qu'elles nous renseignent sur là direction des sons, elles provoquent les trois sensations d’es- pace. Ainsi les otocystes n'ont vraisemblablement pas de fonctions sensorielles; ils exercent une action modératrice sur les centres moteurs pendant le repos, et régulatrice du mouvement pendant l'activité. Chez les Invertébrés, ils suffisent seuls à cette tâche, mais, chez les Vertébrés, ils ont besoin du concours des véritables organes sensoriels, non seulement des canaux semi-circulaires qui fournissent à l'animal les notions de direction, mais aussi de l'organe de Corti dont les terminaisons constituent, avec le centre cérébral auquel elles aboutissent, un appareil de mesure pour les exci- tations distribuées aux muscles. L'auteur reviendra, comme on verra, dans un chapitre spécial, sur cette fonction du limaçon. Dans le chapitre V, M. de Cyon étudie exclusive- ment les illusions de direction, Les sujets ayant les yeux bandés, et, pour plus de précaution, étant dans l'obscurité, tracent, au moyen d'un crayon et d'une règle, des lignes verticales et horizontales sur un papier vertical, des lignes transversales et sagittales sur un papier horizontal. On peut donc mesurer sur les tracés l'écart de la direction par rapport à la direction vraie, et les rapports entre les écarts des directions diverses. M. de Cyon a, de la sorte, passé successivement en revue l'influence de la position droite de la tête sur ces illusions, celle de sa rotalion autour de ses divers axes, celle de la position des globes oculaires et de la direction des sons, les erreurs dans l'appréciation de la direction des vibra- tions sonores et de la direction des parallèles, enfin l'illusion signalée par Aubert. Les résultats obtenus sont illustrés par 45 figures; il n'est pas possible de les reproduire tous ici, mème en résumé : nous nous bor- nerons à mentionner les plus dignes d'intérêt. Un fait 19 C2 19 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX remarquable, c'est que la plupart des sujets ont de la tendance à ne pas s'écarter de l'angle droit, ce qui prouverait que le cerveau conserve constamment l'image des trois directions de l’espace dans leurs rapports exacts, telle que nous la fournit le système des coordonnées rectangulaires des trois canaux. En second lieu, les illusions de direction, qui se produisent dans les diverses rotations de la tête, sont sous la dépendance de l'inclinaison des plans des trois canaux. Eufin, le fait que les sensations auditives renforcent ces illusions, et que, d'autre part, les illusions dans l'appréciation de la direction des sons se montrent soumises, par une même rotation de la tête, aux mêmes lois que les autres illusions de direction, confirment l'opinion déjà exprimée plus haut que l'excitant nor- mal des terminaisons nerveuses des canaux semi-cir- culaires doit être cherché dans les ondes sonores. Le chapitre VI, qui traite « des bases physiologiques de la Géométrie d'Euclide », est un essai pour ramener les axiomes et les définitions d'Euclide à leur origine naturelle, aux sensations fournies par le labyrinthe: Voici, à litre d'exemple, quel est le mécanisme phy- siologique de notre notion de la ligne droite, plus court chemin d’un point à un autre. Chaque vibration sonore produit, en même temps que la sensation de son ou de bruit, une sensation de direction. L'excita- tion des nerfs ampullaires provoque alors des mouve- ments des yeux, et au besoin de la tête et du corps entier, destinés à diriger la ligne visuelle dans la direc- tion perçue afin d’en découvrir la cause. Le chemin le plus court qui conduit de la source d’excitation au point où a lieu la perception est la ligne droite de cette direction. Cette ligne droite coïncide avec la ligne visuelle; elle est limitée, d'une part, par le point d'excitation, d'autre part, par le point de perception; elle indique ainsi la distance entre ces deux points. Mais la direction idéale de cette ligne n'a pas de limites; elle peut s'étendre à l'infini, conformément à la définition d'Euclide. Et ainsi des autres axiomes. Quant à la Géométrie non-euclidienne, elle a son origine dans de pures opérations de l'esprit : ses formes d'espace ne sont pas naturelles, et, partant, presque inaccessibles à notre représentation. Le « sens du temps et le concept des nombres » font l'objet du VII: et dernier chapitre. En 1886, Yves De- lage, après avoir écrit que l'hypothèse d'un sens spécial de Pespace lui paraissait chose inutile, ajou- tait : « Si M. de Cyon n'est pas de cet avis, je lui demanderai de me montrer le sens spécial du temps dont la notion est tout à fait comparable, au point de vue métaphysique, à celle de l’espace ». Il semble que ce chapitre soit une réponse à celle invitation. Voici quelle est, pour l’auteur, l’origine de l’idée de succes- sion. Nous avons conscience que les phénomènes se suivent dans le temps suivant un certain ordre, une cerlaine direction. Quelle est cette direction? C'est, dit M. de Cyon, la direction sagittale : elle correspond donc à la même coordonnée du sens de l’espace : « Le passé et l'avenir, c'est-à-dire ce qui est derrière nous el ce qui est devant nous, correspondent à la direc- tion arrière-avant. » Par conséquent, les sensations de direction et Iles canaux semi-circulaires auxquels nous devons la représentation des trois dimensions de l'espace servent aussi à former notre représentation de la seule dimension du temps. L'auteur développe ensuite cette idée que c'est aux vibrations sonores, c’est-à-dire à l'organe de Corti, que nous sommes redevables du concept de la durée, et surtout du concept des nombres. Les excitations que les sons exercent sur les terminaisons nerveuses du limaçon, et qui sont douées à un si haut degré des qualités de rythme et de mesure, permettent aux centres nerveux qui les reçoivent de régler, avec une finesse el une précision extrêmes, la durée et le nombre des excitations distribuées aux muscles, au moment de leur activité. Ces centres représentent done de véritables appareils de mesure et de caleul, et le limaçon doit être considéré comme l'organe du sens arithmétique, de même que l’appareil des trois canaux est l'organe du sens géométrique. Les physiologistes sauront gré à M. de Cyon d'avoir mis à leur portée, dans ce livre, toute la série de ses importants travaux, qui occupent une si large place parmi ceux que l'art expérimental à tentés pour résoudre un problème difficile. Mais l'ouvrage, et sur- tout ses deux derniers chapitres, s'adresse aussi aux philosophes et aux mathématiciens, qui trouveront, et ont déjà trouvé, dans les idées originales et hardies qui y abondent, matière à réflexion et à discussion. E. WERTHEIMER, Professeur de Physiologie à la Faculté de Médecine de Lille. 4° Sciences médicales Gautier (Armand), Membre de l'Institut et de l'Aca- démie de Médecine, Professeur à la Faculté de Mé- decine de Paris. — L'Alimentation et les Régimes chez l’homme sain ou malade. — 3° édition revue et augmentée. 4 vol. gr. in-8° de 751 pages. (Prix : 12 fr.) Masson et Ci, éditeurs. Paris, 1909. Avec ce Traité, M. le Professeur Gautier a ouvert à l'étude une voie encore inexplorée chez nous, et, du premier coup, son œuvre a atteint la perfection. Aussi a-{-il obtenu un grand succès, si bien que l'ouvrage en est déjà à sa troisième édition. Le Traité se divise en trois parties : Dans la première, l'auteur expose le but et les prin- cipes de l'alimentation, les méthodes pour déterminer les rations de repos, de travail et d’accroissement, les transformations énergétiques subies par les aliments, les lois de la calorimétrie humaine, le mécanisme cel- lulaire de l'assimilation et de la désassimilation. C’est la partie physiologique. La seconde partie est consacrée à l'étude des ali- ments de toute sorte : animaux, végétaux, minéraux, solides, liquides ou gazeux. Avec une compétence ma- gistrale, le Professeur Gautier fait connaitre la compo- sition chimique des aliments, leurs transformations dans l'organisme, leur préparation, leurs falsifications, les intoxications qui en dérivent. C’est la partie majeure du livre. Dans la troisième, l’auteur expose les Régimes et leur adaptation aux diverses conditions physiolo- giques et pathologiques. Il montre les variations de régime imposées par les races, les climats, les saisons, le genre de travail, l’âge. Il étudie les régimes insuffi- sants, les régimes de suralimentation et leurs inconvé- nients. Puis il indique la composition des régimes exclusifs : végétarien, carné, lacté; les raisons qui font . rechercher ou imposer ces régimes, et celles qui doi- vent faire rejeter de l'alimentation ordinaire de l'homme tout régime exclusif. Les régimes de travail, en rapportavec le budget des ouvriers, les régimes des hôpitaux, des hospices et des prisons se trouvent dans cette partie de l'ouvrage. Enfin, l’auteur passe en revue les régimes qui con- viennent aux diverses maladies aiguës et chroniques. et l'alimentation par les moyens artificiels, nécessaire pour certains malades. Si l'on compare la troisième édition à la première, on y retrouve la même clarté, la même précision, qui en rendent la lecture si attrayante ; l'intérêt en est en- core accru par l'addition de documents nouveaux sur l'alimentation des ouvriers et des soldats; la propor- tion des déchets inutilisables des aliments, tels qu'ils sont fournis aux consommateurs; le parasilisme des viandes comestibles etles accidents de botulisme ; l'ori- gine des matières minéraies des aliments; l'emploi du sucre comme source d'énergie, ete. C'est dire qu'avec l’intérèt croissant qui s'attache aujourd'hui aux questions d'alimentation, la troisième édition est certaine d'avoir le même succès que les précédentes. Dr MarceL LABBé, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 233 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 15 Février 1909. M. E. Jungfleisch est élu membre de la Section de Chimie, en remplacement de M. bitte, décédé. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux montre comment on peut obtenir effectivement, par une cons- truction géométrique ne laissant place à aucune indé- termination, les familles de Lamé qui sont composées de cyclides de Dupin. — M. D. Eginitis présente ses observations de la comète 1908 « (Morehouse) faites à l'Observatoire d'Athènes. — M. A. Angot signale l’en- registrement de mouvements sismiques le 9 février à l'Observatoire du Parc Saint-Maur. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. A. Perkins commu- nique ses recherches sur l'effet sélectif dans l'ionisation d'un gaz par un champ alternatif. — MM. C. Féry et C. Chéneveau montrent que les divergences signalées dans le point de fusion du platine (1-690° à 41-740) tiennent à la nature du milieu gazeux dans lequel se produit la fusion. — M. A. Perot a observé un renver- sement dissymétrique, avec déplacement vers le rouge, de la radiation verte émise par l'arc au mercure dans le vide, lorsqu'on augmente la pression. — M. A. Gar- gam de Montcetz a étudié le relèvement, après une certaine valeur minimum, de la courbe des noircisse - ments d'une plaque photographique solarisée. Ce relè- vement est dû aux rayons infra-rouges et ultra-violets, tandis que les rayons bleus s'y opposent. — M. A. Le- due a redéterminé la compressibilité d'une vingtaine de gaz entre 0 et 3 atm., à toute température. Il donne diverses constantes de ces gaz et leur coeffi- cient moyen d'écart à la loi de Mariotte. — M. P. Pas- cal a déterminé la susceptibilité magnétique de quelques gaz facilement liquéfiables. Le produit de cette constante par le poids moléculaire paraît être une fonction du nombre des atomes dans la molécule. — MM. E. Kohn-Abrest el J. Carvallo déduisent des phénomènes thermiques accompagnant l'action de l'eau sur la poudre d’Al que les grains d'Al sont atta- qués partiellement pour former desoxydes d'Alhydratés. M. J. Bougault : Oxydation catalytique de l'acide hypophosphoreux par le cuivre (voir p. 237). — M. R. Pointet a observé que l'acide diphénylglycidique fait exception à la méthode générale de préparation des aldéhydes au moyen des acides glycidiques; distillé dans le vide, au lieu de se décomposer en CO: et aldéhyde, il fournit CO et de l'acide diphénylacétique. — MM. R. Lespieau et Viguier, en fixant HBr sur l'acide y-oxytétrolique, ont obtenu un acide mono- bromé, F.158°-1609°, et une lactone monobromée, F. 77°: la fixation de l'iode donne un acide CH?0H.CI : CI.CO®H, F.173°-175°. — M. G. Denigès a constaté que les réac- tions colorées de la dioxyacélone avec certains produits organiques, notamment les phénols, en milieu sulfu- rique sont dues au méthylglyoxal qui se forme inter- médiairement. — M. E. de Stoecklin a observé l'oxy- dation de l'alcool éthylique sous l'influence simultanée du tannate de fer et de l'eau oxygénée. Il se forme de l'aldéhyde, dont une partie est absorbée par le tannin et une autre partie oxydée en acide acétique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Guyénot décrit une nouvelle méthode d'électro-diagnostic, utilisant la décharge instantanée d'un condensateur dans un induc- teur sans fer et permettant d'évaluer le degré de récu- pération fonctionnelle du système neuro-musculaire pendant le traitement des paralysies et parésies motrices d’origine périphérique. — M. M. Baudouin présente REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. une série de moulages en plàtre des gravures sur rochers qu'il a découvertes à l'ile d'Yeu. Ces gravures paraissent remonter à l’époque de la pierre polie. — M. Aug. Michel a observé à Naples quelques cas de production anormale de têtes supplémentaires (jus- qu'à 12) chez des Syllidiens en stolonisation. — M. G. Lapie divise l'Algérie, au point de vue botanique, en trois régions : le domaine mauritanien septentrional, le domaine mauritanien méridional et le domaine des hautes montagnes atlantiques. — M. L. Daniel a cons- taté que, dans les plantes vivaces à rhizomes greffées sur plantes annuelles, le sujet et le greffon réagissent l'un sur l’autre : le greffon forme des tubercules aériens dans un grand nombre de cas; le sujet utilise en partie les matériaux nutritifs du greffon à la formation d’un tissu ligneux anormal, — M. F. Baco a reconnu que la greffe ne maintient pas d’une facon absolue les carac- tères des vignes qu'on associe, qu'il s'agisse du sujet ou du greffon. — M. Chifflot a observé le retour du Zea Mays L. à la forme ancestrale Zea Mevs L. var. tunicala sous l'influence du traumatisme parasitaire de l'Ustilago Maydis, qui provoque la castration thé- lygène. — Me Paul Lemoine montre que la caracté- ristique du Lithophyllum est la présence d'un tissu compact, parcouru par d'épaisses bandes dues à l'épais- sissement des cloisons des cellules, tandis que le Lithothamnion se distingue, au contraire, par un tissu lâche constitué par des files de cellules en chapelet. — M. D. P. Oehlert a constaté que la bordure méridio- nale du géosynclinal de Brest-Sablé, ainsi que celle des synclinaux des Coevrons et de Pail situés plus au Nord, ont été particulièrement affectées par les poussées venant du Sud. — M. J. Thoulet montre que l’eau des océans emprunte aux poussières cosmiques une partie au moins du fer qu'elle contient, lequel, sous l’in- fluence de la matière organique, se précipite ensuite dans le fond sous forme de croûtes ou de grains ooli- thiques riches en phosphore. Séance du 22 Février 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré montre comment on peut ramener les problèmes relatifs aux ondes hertziennes à l'intégration d’une équation de Fredholm. — M. A. Demoulin introduit l'emploi d’une figure de référence mobile en Géométrie et signale les avantages qu'on en peut attendre. — M. B. Hostinsky présente ses recherches sur quelques figures détermi- nées par les éléments infiniment voisins d'une courbe gauche. — M. W. Stekloff poursuit l'étude de l'appli- cation du théorème généralisé de Jacobi au problème de Jacobi-Lie. — M. R. de Montessus montre que le théorème de Sturm sur la recherche des racines des équations numériques s'applique aux équations trans- cendantes sous réserve de conditions de continuité fa- ciles à énoncer. — M. L. Lecornu montre que l’addi- tion des quatre forces auxquelles est soumis un aéroplane en translation donne un quadrilatère dont la considération facilite l'étude des conditions de marche de l'appareil. — M. R. Arnoux a reconnu que le maximum de puissance propulsive d'une hélice tournant à vitesse angulaire constante w a lieu lorsque sa vitesse de translation par rapport à l'air ambiant est égale à la moitié de la vitesse limite 2w, 4 étant le pas de l’hélice. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. G. Gouy a étudié les décharges électriques dans les champs magnétiques sntenses. Si le tube possède deux cathodes reliées mé- galliquement, chacune d'elles produit en général son gaisceau magnéto-cathodique sans être influencée par 5 234 l'autre ; mais, si les deux faisceaux viennent à coincider, ils se renforcent mutuellement dans l’espace interca- thodique. L'anode, bien dégagée de tout rayon magnéto- cathodique, se trouve entourée d'une belle couronne lumineuse. — M. M. La Rosa montre que la tempéra- ture de l'arc chantant, dans les conditions dans les- quelles il émet le spectre d’étincelle, est plus élevée que celle de l'arc ordinaire, et suffisante pour que des parcelles de carbone rencontrées par la décharge inter- mittente atteignent l'état liquide. — M. Devaux-Char- bonnel a étudié par le calcul la constitution des lignes souterraines qui amènent dans les grandes villes les circuits téléphoniqnes. Il montre que le câble à faible capacité est celui qui présente lesplus grands avantages, car il ne modifie que très peu l'intensité de la voix. — M. A. Dufour estime que le faisceau déviable des tubes à vide attribué par M. J. Becquerel à des électrons po- sitifs est un faisceau-canal, produit dans des conditions qui diffèrent de celles dans lesquelles on se place d'habitude pour produire les rayons-canaux. — M. G. D. Hinrichs déduit des calculs effectués par sa méthode que le poids atomique du potassium est égal à 39 1/8 exactement. — M. J. Gnezda à constaté que tous les sucres qui possèdent le groupement CHO (ou un groupe cétonique qui, après addition d’aleali, est transformé en CHO) donnent avec l’xméthylindol, à chaud et après addition d'HCI, un précipité vert caractéristique. — M. M. Hanriot a observé que les chloraloses (combi- naisons du chloral avec les sucres) se transforment par oxydations en acide chloraliques. Seul, le mannose donne une lactone en C*; tous les autres acides chlora- liques sont en C?, qu'ils proviennent d'un pentose ou d'un hexose. — MM. E. Blaise et A. Koehler, en fai- sant réagir les dérivés organo-métalliques mixtes du zinc sur les chlorures-éthers et les dichlorures des acides bibasiques, ont obtenu respectivement les acides cétoniques et les dicétones correspondantes. — M. P. Carré, en réduisant l’o-azobenzophénone par le sulf- hydrate d'ammonium, a obtenu non l'hydrazoïque correspondant, mais son dérivé, l’Az-benzophénone-C- phénylindazol, F. 1349-1359. — MM. X. Rocques et L. Lévy ont reconnu que l'acide cyanhydrique n'existe que partiellement à l’état libre dans les kirschs vieux de deux à trois ans et qu'une portion notable de cet acide est en combinaison avec des dérivés gras à poids moléculaire élevé. — M. C. Gerber à constaté que le lait, au moment de la traite, donne des coagulations longues avec la présure de Papayer; mais, plus on s'éloigne du moment de la traite, plus la résistance du lait à la présure augmente. — M. J. Wolf a observé que les extraits de Russula delica ont, vis-à-vis de la tyrosine et d’un grand nombre de réactifs nouveaux des oxydases, leur maximum d'activité pour une réaction voisine de la neutralité à la phtaléine. — M. E. Fouard montre que l’amidon, espèce chimique unique, est simplement le produit de condensation, de degré va- riable et indéterminé, du maltose, véritable noyau moléculaire de cet hydrate de carbone. — M. KR. Huerre a reconnu que l’optimum et les températures limites d'activité des deux groupes de maltases extraites des différentes sortes de maïs sont indépendants de la réaction du milieu, tant que celle-ci n'arrète pas l'hy- drolyse, et de la présence d’un amino-acide tel que l'asparagine. — MM. H. Bierry et J. Giaja ont observé que les sucs digestifs des Mollusques et des Crustacés ont une action plus ou moins marquée sur les man- nanes et les galactanes. — M. A. Piédallu a constaté que la moisissure du tannage à l'huile, le Monascus purpureus, acidifie les huiles, les épaissit et les colore en brun; elle sécrète une oxydase et doil jouer un rôle dans le chamoisage. — M. G. André à reconnu que les cotylédons d'une plante vivace paraissent fournir à la plantule qui en est issue des poids de matière miné- rale et d'azote comparables à ceux que les cotylédons de la plante annuelle mettent à la disposition de celle- ci, à la rapidité près. — MM. P. J. Tarbouriech et P. Saget ont extrait du /tumex obtusifolius un composé = ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES organo-ferrique, contenant 6,36 /, de Fe, soluble dans HCI, et présentant d’étroites analogies avec les dérivés ferriques des nucléones. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. Doyon a constaté, chez le chien, l’incoagulabilité du sang et la nécrose du foie à la suite de l'administration, pendant trente-cinq minutes, de chloroforme par inhalation. — MM. JF. Courmont et Th. Nogier ont reconnu que l’eau sou- mise à l’action des radiations de la lampe à quartz à vapeur de mercure est complètement stérilisée au bout de une à deux minutes. — M. E. Donmer indique un procédé, basé sur l'emploi d'une boucle métallique reliée à un ampèremètre thermique, pour mesurer les champs magnétiques oscillants employés en d'arson- valisation. — M. de Keating-Hart est parvenu à guérir rapidement les radiodermites profondes et rebelles en projetant sur la région malade quelques étincelles de haute fréquence. — M. P. Bonnier montre que les centres diaphylactiques ou centres de défense orga- nique, qui règlent la sécrétion des antitoxines,sont sous la dépendance du bulbe. — M. H. Piéron a reconnu que la Patelle qui abandonne sa place sur les rochers pour aller à la recherche de sa nourriture y revient toujours exactement en suivant au retour le même chemin qu'à l'aller. Elle possède une mémoire précise des mouvements effectués et de la topographie de sa place. — M. Y. Delage annonce que les deux Oursins. parthénogénétiques obtenus en 1907 à Roscoff viennent de mourir accidentellement après avoir atteint l'état adulte ; l'examen à montré qu'ils appartenaient au sexe mâle. — M.L. Bordas à étudié la structure histo- logique de la spermathèque des Blattes ; il a trouvé de l'extérieur vers l’intérieur : une membrane péritonéale, une assise musculaire, une membrane basilaire ténue, une couche épithéliale externe, un épithélium chitino- gène et l'intima chitineuse. — MM. A. Hébert et F. Heïm ont étudié la culture du sisal ou henequen; il est indiqué de reporter sur le sol de la plantation la totalité de la pulpe isolée au cours de la défibration des feuilles fraîches et de compenser par des engrais la perte due à l'exportation des fibres. — M. F. Canu montre que chaque période géclogique est marquée par un perfectionnement morphologique, ou par une différenciation capitale, ou par l'apparition d'une nou- velle famille, ou par l'extinction d'une autre, dans le groupe des Bryozoaires. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 16 Février 1909. M. Meillère est élu membre titulaire dans la Section de Pharmacie. M. E. Lancereaux à employé avec succès la tein- ture de cantharides dans le traitement des néphrites épithéliales rebelles à l'administration des diurétiques. Ce médicament, qui, à une certaine dose, jouit de la propriété de détruire les épithéliums canaliculaires, peut, à une dose moins élevée, les modifier avantageu- sement et faire disparaître rapidement l'anurie prove- nant de l'obstruction des canalicules urinifères. — M. le D' Darier lit un travail sur l’action paraspécifique du sérum de Roux dans les infections médicales et chirurgicales. — MM. H. de Rothschild et Léopold- Lévi communiquent un travail sur l'instabilité thyroï- dienne et sa forme paroxystique. Séance du 23 Février 1909. M. Ch.-A. Francçois-Franck présente un Rapport sur un travail de MM. Tuffier et Mauté, relatif à l'indice de réfraction du sérum sanguin dans les affections chirurgicales. Les auteurs montrent que, chez les malades qui n’ont pas d'œdème et dont l'indice de ré- fraction du sérum est au-dessous de la normale, on ne doit pratiquer que les opérations ayant un caractère de nécessité absolue, et autant que possible éviter l’anes- thésie générale, en abrégeant aussi le traumatisme opératoire. — MM. L. Landouzy et L. Lortat-Jacob ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 235 rapportent l'histoire d'un myopathique atrophique du type scapulo-huméral, qu'ils ont suivi pendant près de trente ans. Le processus atrophique a donc évolué avec une grande lenteur. À part le cubital antérieur, aucun muscle n'a été trouvé normal; les fléchisseurs sont relativement moins atrophiés que les extenseurs. L'atrophie des muscles a produit de nombreuses lé- sions osseuses. Le système nerveux périphérique et central ne présentait aucune lésion. — M. le D' Cou- dray lit une note sur la pathogénie des douleurs dites de croissance. — M. le D' Marchoux lit un travail sur les migrations du bacille de la lèpre. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 13 Février 1909. MM. A. Pi Suñer et R. Turro ont constaté que tous les chiens pancréectomisés sont diabétiques, quoiqu'ils ne soient pas tous glycosuriques. — MM. A. Lelièvre et Ed. Retterer ont reconnu que le tissu musculaire lisse est formé d'un complexus de cellules anastomo- tiques, possédant chacune, outre le noyau et la zone périnucléaire claire, la substance musculaire propre- ment dite et une écorce commune aux cellules voisines. — MM. H. Busquet et V. Pachon ont observé qu'une solution sodo-calcique, qui, employée comme liquide de circulation artilicielle à travers le cœur, est capable d'entretenir le fonctionnement de l'appareil modéra- teur cardiaque, perd cette propriété par addition d'une faible dose de citrate neutre de soude. — M. F. Lus- sana a constaté que l’acide urique déprime la respira- tion des tissus, tandis que les urates et l’urée sont sans action sur elle. — M. P. Delanoe a observé la coexistence de l’anaphylaxie avec un certain état d'immunité chez le cobaye. L'hypersensihilité et l'im- munité du cobaye vis-à-vis du bacille typhique ne sont pas rigoureusement spécifiques. — M. A. Mouchet décrit la disposition des vaisseaux lymphatiques du cœur chez l’homme etdivers Mammifères. — M. A. Conte montre que la race des poules à cou nu est un type de varialion brusque ; la coloration rouge des parties dénudées résulte de la persistance, chez l'adulte, d’un caractère transitoire, commun à tous les embryons de poule. — MM. CI. Regaud et G. Dubreuil exposent l’état de la question des relations fonctionnelles des corps jaunes avec l'utérus non gravide. — MM. W. Mes- trezat et E. Gaujoux ont analysé le liquide céphalo- rachidien dans un cas d’hydrocéphalie consécutive à un gliome du cervelet. À côté du glucose, ils ont pu mettre en évidence l'existence d'un principe réducteur autre ; ils ont aussi décelé la présence de nitrates. — M. H. Carré a reconnu que les distomes n’absorbent guère le sang en nature, qu'ils ne sécrètent pas de substances immédiatement nuisibles pour les hématies et qu'ils ne produisent pas de substances toxiques pour l'organisme du mouton.— M.M. Doyon a observé, chez un chien, l'incoagulabilité du sang etla nécrose du foie à la suite de l’anesthésie chloroformique. — MM. M. Doyon et A. Policard ont étudié les altéra- tions du foie produites chez le chien précédent : elles consistent en nécrobiose et congestion de la région sus-hépatique du lobule. — MM. P. Nubiola et J. Alo- mär ont obtenu, dans les reins inhibés, après injection de parathyroïdine, une abondante sécrétion qui se manifeste douze à vingt-quatre heures après l’in- Jection. Séance du 20 Février 1909. MM. Ed. Retterer el A. Lelièvre ont constaté que la structure du muscle utérin du cobaye varie aux divers stades fonctionnels : dense et dur hors de l’état de gestation, il s’épaissit par hyperplasie des éléments musculaires pendant la période de gestation. — MM. H. Busquet el V. Pachon montrent que l'action nocive qu'exerce le citrate de soude sur le cœur et le nerf vague relève d’un mécanisme proprement chimique d'immobilisation du calcium. Les ferro et ferricyanures ne possèdent pas la même action toxique. — MM. Ch. Achard et M. Aynaud ont reconnu que le bleu de Prusse injecté dans le sang possède des propriétés anticoagulantes, mais différentes de celles de la peptone et de l'extrait de sangsues. — MM. L. el M. Lapicque ont déterminé les consommations alimen- taires d'oiseaux de grandeurs diverses en fonction de la température extérieure. — M. A. Weber montre que l'infection du noyau de la cellule hépatique par le pheumocoque se traduit par une augmentation de la chromaline sous forme de nucléoles ou de grains et par une paralysie de l’activité mitosique ou amitosique du noyau. — M. P. Remlinger a reconnu de nouveau que l’inoculation sous-cutanée de la substance nerveuse normale de lapin n'immunise pas ce dernier contre la rage et que le chien qui ingère des cerveaux de bœuf n'est pas vacciné davantage. — M. M. Stépanoff à observé que l'indice opsonique du sérum s'élève à la suite des injections d'extrait thyroïdien à des lapins ; cette action est attribuable à la thyréo-globuline. — M. A.Sartory poursuit ses recherches sur la stérilisa- tion électrique de l'air. — MM. G. Dubreuil et Cl. Regaud ont déterminé les variations de volume de l'utérus par rapport à l’état des ovaires. En général, l'utérus est plus gros quand il y à dans les ovaires des corps jaunes formés ou en formation que quand il n'y en à pas. — MM. H. Roger, L. Bory et A. Sartory ont trouvé chez un malade porteur d'un phlegmon subaigu de l’amygdale une Üospora nouvelle, qu'ils nomment O. buccalis. — M. Chr. Champy a reconnu que la réduction chromatiqueestnettementquantitatie chez les Batraciens anoures. — MM. Et. Brissaud, E. Joltrain et A. Weiïill montrent que l'éosinophilie sanguine et l’éosinophilie locale sont deux faits sinon constants, au moins fréquents, dans la sporotrichose humaine et expérimentale. — MM. M. Doyon et A. Policard ont constalé que l'injection intra-veineuse d'une solution d'acide arsénieux détermine chez le chien, parallèlement, des lésions hépatiques et une baisse de la teneur en fibrine du sang. — M. G. Roussy décrit un procédé de conservation de pièces macro- scopiques dans la gélatine glycérinée en boîtes de Pétri. — M. G. Seillière signale une cause d'erreur fréquente dans le dosage des pentosanes, due à la fixation du furfurol par les tannins des végétaux. — MM. P. Carnot et A. Lelièvre ont reconnu l'existence d'un produit d'excrétion des cellules bordantes, qui évolue parallèlement au travail digestif. — MM, O. Josué et H. Paillardont étudié les réactions vasculaires chez divers sujets soumis à l'épreuve de la glace posée sur le pli du coude. Chez les artério-scléreux, la pression subit des oscillations considérables. — MM. L. Lutz et G. Oudin ont fait l'étude pharmaco- logique des essences de persil françaises ; la myristicine qu'elles contiennent est à peu près inactive; c’est l’éther de Thoms, plutôt que l’apiol cristallisé, qui leur donne leurs propriétés thérapeutiques spéciales. — M. E. Maurel termine ses expériences relatives à l'influence des vents ou des déplacements rapides sur les dépenses de l'organisme. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Seance du 18 Janvier 1909. MM. G. Etienne, Rémy et Boulangier ont constaté que l'injection de tuberculine chez les tuberculeux âgés produit une diminution immédiate du nombre desleucocytes, qui persisteaprèssix mois. — M. Ph. Las- seur a étudié les cristaux verts produits par le Bacillus chlororaphis sur milieux solides. Ils deviennent jaunes en milieu oxydant etfondentalors à 2369. — MM. P.Jean- delize et J. Parisot ont observé que le sérum des lapins thyroïdectomisés, injecté à des lapins normaux, amène un abaissement de la pression artérielle. — M. Th. Guilloz étudie la répartition de l'énergie dans un spectre au point de vue visuel. Il montre, d'autre part, comment on peut réaliser par la photographie des 236 plaques d'absorption où la transmission se fait suivant une loi déterminée. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST Séance du 28 Janvier 1909. M. V. Babes à trouvé, dans la plupart des reins malades, une substance colorable en bleu par le Grarn- Weigert, qui fait défaut dans le rein normal. — MM. V. et Al. Babes ont isolé, à l’autopsie d'un malade mort d'un phlegmon emphysémateux, un microbe, colorable par le Gram et laissant voir dans sa ligne axiale un fil rouge; il est identique à un bacille déjà décrit par Fraenkel. — M. M. Ciuca signale la présence de fixa- teurs spécifiques dans le sérum antistreptococcique préparé à Bucarest. — M. D. Mezincescu a observé la présence du Leucocytozoon Ziemmanni et de Trypano- somes dans le sang de l’épervier. — Le même auteur a suivi l'évolution des ookynètes d'Haemoproteus dans l'intestin des moustiques; il a observé la phase d’élimi- nation des pigments. — MM. C. Parhon et M. Gold- stein ont constaté que de petits animaux thyroparathy- roïdectomisés, qui continuent à être allaités par leur mère, survivent beaucoup plus longtemps à l'opération. — MM. A. Slatinéanu et D. Danielopolu ont obtenu dans un assez grand nombre de cas une réaction de fixation posilive avec le sérum des lépreux et la léci- thine comme antigène; la fixation est nulle, au con- traire, avec le liquide céphalo-rachidien. — M. D. Da- nié’opolu a reconnu que la tuberculine tant brute que précipitée dialyse par la membrane du sac de collodion, en conservant ses propriétés spécifiques. SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 5 Février 1909. M. Bochet : Le moteur Diesel à combustion inté- rieure. Les moteurs à gaz et à combustibles liquides peuvent fonctionner, soit par explosion sans com- pression préalable du mélange détonant, soit par explosion après compression de ce mélange, soit en introduisant graduellement le combustible dans l'air porté à haute température par une forte compression suivant le système Diesel. L'avantage économique de ce dernier mode d'utilisation du combustible est aisé à mettre en évidence en recourant aux diagrammes entropiques. Il résulte de la possibilité d'atteindre de hautes compressions sans avoir à redouter des explo- sions anticipées. L'inventeur, qui avait poursuivi tout d'abord la réalisation d’un cycle de Carnol, a vite compris les modifications qu'imposait la pratique. Le moteur Diesel fonctionne suivant le cycle à quatre temps. Au premier temps, le piston descendant aspire par la soupape d'admission de l’air pur. En remontant, durant le second temps, le piston comprime cet air jusqu'à la pression de 30 kilog. par centimètre carré, ce qui porte sa température à 500° ou 600°, c'est-à-dire bien au-dessus de celle nécessaire pour l'intlammation du combustible. Dès le début du troisième temps, ce combustible est injecté par l’ajutage central dans l'air ainsi échauffé et brûle au fur et à mesure de son intro- duction pendant une partie de la course du piston; puis, après cette combustion graduelle, les gaz conti- nuent à se détendre jusqu'à la fin de cette course motrice. Enfin, au quatrième temps, les gaz de la combustion sont rejetés par la soupape d'échappement sous l'action du piston qui remonte. Le liquiie com- bustible, refoulé par une pompe, est pulvérisé par de l'air comprimé qui pénètre en même temps que lui dès que l'aiguille qui ferme l’ajutage central est soulevée par le mécanisme de distribution. Cet air, servant à l'insufflation, est comprimé à une pression supérieure à celle qui se produit dans le cylindre moteur, au moyen d'un compresseur actionné par la machine. Ce com- presseur charge en même temps des réservoirs qui servent au lancement du moteur, ainsi qu'au renver- sement du sens de marche. Le point à la fois le plus ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES important et le plus délicat de la marche de ce genre de moteur est le réglage de la combustion, qui doit s'effectuer correctement en un temps très court. Le principe du moteur Diesel permet, de toute évidence, de réaliser, dans d'excellentes conditions, des admis- sions variables. C’est aussi uniquement en réglant pour chaque combustion la quantité du combustible injecté que la puissance du moteur est réglée. Dès sa première mise au point, le moteur Diesel a donné des résultats économiques surpassant de beaucoup ceux de toutes les machines thermiques connues. Un premier moteur de 20 chevaux a, en effet, produit le cheval-heure effectif en ne consommant que 240 grammes de pétrole en pleine charge, et 277 grammes à demi-charge, atteignant ainsi un rendement thermique dépas- sant 25 % à pleine charge et 22 °/, à demi-charge. Depuis lors, ces résultats ont été de beaucoup dépas- sés. Au cours des essais de réception très rigoureux d'une douzaine de machines fournies à la Marine fran- caise pour des sous-marins, les constatations officielles ont fait ressortir une consommation, par cheval-heure effectivement disponible sur l'arbre, de : 151 grammes de pétrole à la puissance de 395 chevaux et à l'allure de 340 t. p. m., 180 grammes de pétrole à la puissance: de 300 chevaux à la même vitesse. 195 grammes de pétrole à la puissance de 75 chevaux à 170 t. p. m., correspondant à des rendements thermiques de : 42 0/, avec:395 chevaux, 35,5 °/, avec 300 chevaux, 32,5 °/, avec 75 chevaux, alors que les meilleures machines à vapeur à triple expansion atteignent diffi- cilement un rend-ment thermique de 13 °/,. Aussi, le moteur Diesel a-t-il pris un développement rapide dans les pays où les combustibles qui lui conviennent ne sont pas grevés, comme en France, de droits prohibi- tirs. C'est ainsi qu'une seule usine allemande a cons- truit en une dizaine d'années 1.400 machines, repré- sentant une puissance totale de 125.000 chevaux. Le nombre de moteurs de ce système livrés actuellement à la Marine militaire française ou en exécution pour elle s'élève à 40, représentant une puissance de 14.300 chevaux. Leur application à la propulsion des bâtiments de fort tonnage se poursuit à l'heure actuelle, en sorte que les résultats acquis seront sans doute dépassés bientôt dans les plus larges proportions. — M. E.-L. Bertin : Stabilité transversale d'un aëro- plane au cours de ses girations. L'aéroplane sur sa courbe de giration recoit obliquement le courant d'air relatif qui lui vient de l'extérieur de la courbe. De là résulte une très grande différence dans les valeurs du moment de stabilité, selon que linclinaison se pro- duit vers l'extérieur ou vers l'intérieur de la courbe. Ainsi, pour un angle de sustentation de 5° et un angle de dérive de 15°, le moment de stabilité atteint sa valeur maximum pour un angle d'inclinaison de 55° vers l'intérieur du cercle et de 9° 1/3 seulement vers l'extérieur du cercle. L'équilibre de l'appareil peut devenir véritablement instable, et le chavirement très menaçant, si la courbe de giration est parcourue sans qu'une inclinaison assez prononcée soit prise vers l’ex- térieur du cerele. L'emploi d'un plan vertical de dérive, établi au-dessus du centre de gravité, suffit pour assu- rer automatiquement l’inclinaison dans le sens de la sécurité ; il garantit aussi contre l'effet des remous qui pourraient, près de terre, faire passer la pression de l'air sur la face supérieure du plan sustentateur, lorsque celui-ci se présente avec une inclinaison trans- versale ; enfin il peut être très utile au point de vue de la précision et de la rapidité des évolutions ainsi que de la stabilité de route. En résumé, un plan ver- tical de dérive judicieusement placé et convenable- ment proportionné doit prémunir contre des dangers sérieux et facilite beaucoup la tâche de l'aviateur. M. R. Arnoux eslime que l'équilibre de l’aéroplane est tout à fait comparable à celui du fléau d'une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 237 balance dont le centre de gravité doit être placé au- dessous du centre d’oscillation pour que l'équilibre soit stable. Dans l'aéroplane, le centre d'oscillation se trouve à un certain point dénommé centre de poussee ou centre de réaction de l'air, autour duquel s'effec- tue la rotation du ou des plans de sustentation de l'appareil, pour se coucher sur sa trajectoire en fai- sant un angle d'attaque tel que la somme des moments du centre de gravité et de la force de propulsion de l'hélice par rapport au centre de sustentation ou d'ap- pui sur l'air soit nulle. Si le plan passant par le centre d'appui et le centre de poussée ou de traction de l'hélice est un plan de symétrie par rapport aux réactions de l'air sur les surfaces de sustentation de l'aéroplane, celui-ci progressera en ligne droite sans sortir du plan. Si l'on veut l'en faire sortir, c'est-à-dire faire virer l'appareil, il suffira de freiner plus ou moins celui-ci à l'une des extrémités de ses plans. Dès lors, l'appareil progressant moins vite du côté freiné, le côté gauche par exemple, le côté droit progressera à une vitesse plus grande qu'à l'instant d'avant, et, comme la réaction de l'air croit comme le carré de la vitesse de translation, elle augmentera la sustentation sous ce dernier côté, qui sé èvera davan- tage que le côté gauche, et les plans de l'appareil pren- dront un angle de bande « en même temps que celui- ci virera à gauche. Toutefois, le freinage dissymetrique de l'appareil ayant toujours pratiquement pour con<é- “quence une réduction de la vitesse V de translation, l'appareil descendra vers le sol en restant transversa- lement incliné, avec une vitesse dans le sens vertical d'autant plus grande que le freinage sera plus éner- gique, et il risquera de briser son aile gauche sur le sol s'il est à une distance insuffisante de celui-ci. SOCIETE CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 12 Février 1909. M. M. Guerbet expose les suiles de ses recherches sur la préparation de l'acide campholique gauche. La rareté du camphre gauche et la faiblesse de rendement des diverses méthodes de transformation de ce corps en acide campholique avaient empêché jusqu'ici de préparer l'acide campholique gauche. M. Guerbet l’obtient avec un rendement voisin de 75 °/,en oxydant l'a-camphol gauche par la potasse caustique. L'acide camphoique gauche fond à 106-107°; il bout à 2550 sous 760 millimètres de pression, comme son isomère droit. Son pouvoir rotatif est &n —— 4605. 11 possède d'ailleurs les mêmes propriétés chimiques que cet isomère. Son éther méthylique bout à 211° (corr.), et son éther éthylique à 2280 (corr.) ; son anhydride fond à 57-580 ; son chlorure d'acide bout à 222°; son amide fond à 78-79, L'action à 250° de la potasse caustique sur l'isobornéol à fourni de même à M. Guerbet un acide campholique inactif dont il poursuit l'étude. — M. H. Copaux présente, au nom de M. Boiteau et au sien, un Mémoire intitulé : Nouveaux documents sur le dosage du bore. — M. Ch Moureu a employé le titrage à la glycérine pour doser l'acide borique dans une eau thermale ; il a obtenu des résultats satisfai- sants. Il signale toutefois que l’évaporation des eaux contenant de l'acide borique est accompagnée d'une perte de cet acide, perte que l’on ne peut éviter que par une alcalinisation. — M. A. Brochet fait la cri- tique de la théorie de M. Chancel relative au fonction- nement du « procédé à cloche ». Le point de départ résultant d’une interprétation erronée de la théorie de la dissociation électrolytique, les calculs et conclu- sions sont nécessairement inexacts. L'alcali formé à la cathode est proportionnel, d’après la loi de Faraday, à la quantité d'électricité traversant l'appareil, ou, en ramenant à l’unité de temps, à l'intensité du courant. Il n’est nullement facteur du coefficient de dissociation de la solution de chlorure; il faudrait, pour cela, que ce coefficient dépendit lui-même de l'intensité, ce qui amèuerait à conclure que, s’il n'y a pas de courant, il n'y a pas dissociation électrolytique, ce qui est en opposition avec la base même de la théorie d'Arrhé- nius. — M. Gabriel Bertrand et Mlle Rozenband ont étudié l’action des acides sur la peroxydiastase. Les acides paralysent l’action de cette substance cata- lytique, mais autrement que celle de la laccase et de la tyrosinase. Tout d’abord, il faut en employer davan- tage ; la peroxydiastase est moins sensible aux acides. Ensuite, au lieu de se diviser en deux groupes, celui des acides qui, à doses extrêmement petites, arrêtent la réaction diastasique, et celui des acides inactifs, avec la peroxydiastase, les acides se rangent en une série continue d'activité décroissante. En comparant les résultats, on est conduit à admettre entre la peroxy- diastase et les acides des relations physicochimiques assez inattendues, en partie même inexplicables dans l’état actuel de nos connaissances. La peroxydiastase est influencée à la fois par la fonction acide et le radical auquel cette lonction est rattachée. — M. J. Bougault, en réduisant le sulfate de cuivre par l'hypophosphite de sodium, a obtenu un cuivre doué d’une activité catalytique remarquable. Ce cuivre, chauffé au bain- marie bouillant avec une solution aqueuse d’hypophos- phite de sodium, oxyde ce sel en dégageant de l’hydro- gène. La quantité de ce gaz dégagée, en opérant avec une quantité illimitée d’hypophosphite, peut être très grande par rapport à la quantité de cuivre mise en jeu; ainsi, M. Bougault à obtenu, avec 1 mol. Cu, plus de 36 mol. I sans user totalement l'activité du métal. — MM. G. Bertrand et M. Javillier indiquent une méthode nouvelle de dosage de la nicotine basée sur la précipitation de l’alcaloïde à l’état de silicotungstate, décomposition du silicotungstate par la magnésie, entraînement de la nicotine par la vapeur d'eau et ütrage alcalimétrique. Ils donnent la formule et les propriétés du silicotungstate de nicotine. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 19 Novembre 1908. M. T. H. Havelock présente une /héorie de la pro- pagation des groupes d'ondes dans les milieux disper- sifs, avec application aux ondulations de l’eau produites par une perturbation qui se déplace. Il analyse la per- turbation au moyen de l'intégrale de Fourier, en admettant que l'élément de la perturbation n'est pas un simple train d'ondes harmonique, mais un groupe simple, un aggrégat de trains d'ondes simples se grou- pant autour d'une période centrale donnée. Dans plu- sieurs cas, il est alors possible de tirer de l'intégrale les quelques groupes simples qui sont importants et ainsi d'isoler les principaux traits réguliers du phéno- mène, sil en existe. — M. R. C. Maclaurin présente ses recherches sur les formules de dispersion optique. Il montre que la formule de Sellmeier : L=K+ La rers SRE X—),° présente de sérieuses objections, ce qui le conduit à rechercher une autre formule qui y échappe. Il arrive à la relation générale : m1 K—1 nan K+a qui donne les indices de réfraction pour toutes les lon- gueurs d'onde pour lesquelles le milieu est transparent. En faisant 4—2 dans cette formule, on a l'expression de Lorentz, qui se vérifie pour les liquides et pour les gaz. Mais la discussion de l’auteur montre que, pour les solides, il n’en est plus de même et qu'il est néces- saire de garder la constante a et de déterminer sa valeur pour chaque substance. L'auteur trouve que, pour le sel gemme, la formule : £ À Co AUS ni VE ni CE JPA + EE 2 K—1 Ci 8 K+a LE n°—1 n?+a —); DE 238 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES est celle qui s'accorde le mieux avec l'expérience, en y faisant : a—5,51: K—5,9; ce, —0,001.916.05; e, — 683,846 ; À, —0,12652; X°,— 0,016.007.4; À,— 51,3; À, — 2632,14. Elle concorde avec les résultats des mesures en indiquant des bandes d'absorption au voisinage de 0,124 et de 51,34; elle suggère une constante dié- lectrique de 5,9, qui est très proche de la moyenne des meilleures déterminations. La même formule s'ap- plique aussi remarquablement bien à la fluorine, en y laissant :a— 1,04; K —6,8; c,—0,001.303; €, — 231.856; À, — 0,084.664.8 ; X,2 — 0,007.167.64 ; À, — 24,007.4 ; À,°— 576,353. — M. T. M. Lowry a déterminé le pou- voir rolaloire dispersif dans les régions visible et ultra-violette du spectre. Il a employé pour cela une méthode analogue à celle de Perkin, utilisant une lumière monochromatique ou multichromatiqne spec- troscopiquement purifiée au lieu d’une bande d’un spectre continu ; cela luia permis de se servir, pour les mesures polarimétriques, non seulement du spectre de flamme, mais encore des spectres de lignes intenses produits par les arcs métalliques. Des mesures ont été faites sur 26 lignes, la rotation étant produite à travers 100 millimètreside camphocarboxylate de méthyle à 20°C. Voici quelques-uns des résultats : À œ a/an Li rouge 6.708 4032 0,728 Na jaune 5.893 66,31 1,000 Cu vert . 5.219 91,73 1,382 Cd bleu . 4.800 116,93 1,762 Hg violet . 4.359 165, 07 2,487 — MM. C. Cuthbertson et M. Cuthbertson : Sur la réfraction et la dispersion du krypton et du xénon et leur rapport avec celles de l’hélium et de l'argon. Les auteurs ont déterminé la réfraction et la dispersion du krypton et du xénon avec de plus grandes quantités de gaz que celles qui furent utilisées au moment de leur premier isolement. Les gaz ont été préparés dans le Laboratoire de sir W. Ramsay par le Professeur R. B. Moore. Les auteurs trouvent que l'indice de réfraction atomique du krypton est: Se 6,97 = 1 + 0,000.837. (+): et celui du xénon : 10,14 —1 0, ô .6 —— |). u — 1 + 0,001.364 (14 on) En comparant ces chiffres avec les indices de réfrac- tion de l'hélium et de l’argon, déterminés parW. Bur- ton, on voit que les réfractivités pour des longueurs d'onde infinies sont encore davantage dans des rapports de nombres entiers que les valeurs primitives. Si l’on prend comme base la valeur trouvée pour l’argon, la divergence des rapports intégraux est pour le krypton de 0,0°/,, pour lhélium de 0,34°/,, et pour le xénon de 2,25 °/,. Si les indices de réfraction sont exprimés au moyen dela formule de Cauchy u — 1 = a (1 L b/X), on trouve qu'en mettant en coordonnées a contre h pour les quatre gaz examinés, la relation est linéaire. A cause du peu d'exactitude des déterminations existantes pour la dispersion de l'oxygène, de l'azote, de l'hydrogène, on ne peut faire de comparaisons avec d'autres groupes d'éléments. — M. H. M. Macdonald donne une théorie des récepteurs et transmetteurs horizontaux en lélégraphie sans fil. Quand la distance du récepteur à la terre n’est pas lrop faible, le récepteur présente une efficacité maximum lorsque sa longueur est le cinquième de la longueur de l'onde transmise: quand le récepteur est proche de la terre, son efficacité est maximum pour une longueur un peu moindre que le cinquième de la longueur de l'onde transmise; ces deux résultats ont été reconnus expérimentalement par Marconi. L'effet total sur le récepteur est plus grand quand son extrémité libre pointe dans la direc- lion opposée au transmetteur que quand elle pointe directement contre lui. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 Janvier 1909. M. Al. Russell indique des formules pour calculer la résistance elfective et l'inductance des conducteurs concentriques. La formule simple suivante donne la résistance effective R, par centimètre de longueur, du conducteur intérieur d'une canalisation concentrique pour des courants de haute fréquence : R—(m/27a) (0,7071 + 1/2ma + 0,265/m°a% — 0,35/m'af), où EP est la résistivilé ‘en volume du conducteur, a son rayon, mm — 87° ul/p, u la perméabilité du conducteur et f la fréquence du courant alternatif. Pour des valeurs de ma plus grandes que 6, l'erreur maximum de la for- mule est moindre que 1/10.000. L'auteur donne aussi une formule pour les canalisations concentriques à conducteur intérieur creux. Pour les basses fréquences, l'auteur arrive à une formule identique à celle qui a été donnée autrefois par Heaviside, — M. C. V. Drysdale a étudié le rendement lumineux (dans le sens que donne à ce terme M. C.-E. Guillaume) d'un corps noïr à diverses températures. Il montre que ce rendement lumineux dépend à un haut degré de la température et qu'il est extrêmement faible aux températures ordinaires. A 1.500, le rendement est seulement de l’ordre de 1 °/,, et à 2.000° il est de 3 °/,. Le plus haut rendement est obtenu à la température de 6.5009, et il est seulement de 40 à 50 °/,. Incidemment, l'auteur est amené à cal- culer l'équivalent mécanique de la lumière, qu'il estime à 0,75 watt par bougie, — M. C. V. Drysdale : L'emploi du potentiomètre sur les circuits à courant alternatif. L'application du principe du potentiomètre aux mesures de courants alternatifs peut se faire de deux façons : 1° en équilibrant la différence de potentiel du courant alternatif par une différence de potentiel continue au moyen d'un dispositif d'équilibre convenable ; 2 en équilibrant deux différences de potentiel alternatives l’une par l’autre. L'auteur a rencontré des difficultés insurmontables dans la première voie; la seconde mé- thode en offre aussi, car les deux différences de poten- tiel à comparer doivent être identiques en grandeur, en phase, en fréquence et autant que possible en forme d'onde. L'auteur a employé un transformateur chan- geur de phase en connexion avec le potentiomètre, et les mesures ont été faites de la même facon qu'avec le potentiomètre à courant direct, en substituant simple- ment un galvanomètre ou téléphone vibrateur au gal- yanomètre ordinaire. En interposant un ampèremètre dans le circuit principal d'un potentiomètre et dérivant le courant du secondaire d’un transformateur changeur de phase, il est possible d'opposer l'instrument avec un courant direct contre la pile étalon, et ainsi de repro- duire le même courant dans le circuit du potentio- mètre et de l’amener en coïncidence de phase avec la différence de potentiel à mesurer. Les essais indiquent qu'une différence de potentiel de 0,1 volt peut être mesurée avec une exactitude minimum de 0,2 2/0. Séance du 10 Février 1909. La Société procède au renouvellement de son Bureau pour l’année courante, lequel est ainsi composé : . Président : M. C. Chree; Vice-Présidents : MM. W. Duddell, A. Schuster, S. Skinner et W. Watson; Secrétaires : MM. W. R. Cooper et S. W. J. Smith; Secrétaire pour l'Etranger : M. S. P. Thompson; Trésorier : M. H. L. Callendar; Bibliothécaire : M. W. Watson. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 4 Février 1909. M. B. Flurscheim a étudié la réduction de la 2:4-dinitrodiphénylméthylamine par le chlorure stan- neux; il ne se forme pas de composé azoxique, mais seulement une amine. — Le même auteur présente RES PR ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES quelques considérations sur la relation entre la force des acides et des bases et la distribution quantitative de l’affinité dans la molécule. — M. F.-E.-E. Lam- plough répond aux critiques de Cain et Nicoll sur sa méthode de détermination de la vitesse des change- ments chimiques par la mesure des gaz dégagés. — M. M.-O. Forster, en faisant réagir l’azoture de so- dium sur le chlorure benzhydroximique, a obtenu le 5:4-phénylhydroxytétrazol, F. 124 avec décomposi- tion. — MM. M.-O. Forster et R. Muller ont préparé les acides «-triazobutyrique, «-triazo-isobutyrique et a-triazo-isovalérique, leurs amides et leurs éthers éthy- liques. — M. A.-W. Crossley et Mi: N. Renouf ont étudié l’action des divers agents de nitration sur l'o-xy- lène et préparé tous les mono-, di- et trinitro-0-xylènes théoriquement possibles. — M. A.-C.-G. Egerton pro- pose une formule simple pour le calcul des poids ato- miques des 15 premiers éléments, basée sur l'addition ou la soustraction de groupes d'électrons aux atomes; il obtient ainsi des valeurs exactes à la seconde déci- male près. — MM. F.-B. Power et Ch.-W. Moore ont extrait de l'écorce sèche de Prunus serotina le gluco- side du /-mandélonitrile, F. 143°-147°, et une enzyme qui hydrolyse les 6-glucosides; les constituants non volatils de l'écorce consistent en une résine verte et une résine brune. La résine verte fournit un phytos- térol, CH#O, F. 1359-1369, les acides palmitique, stéarique, oléique, linolique et isolinolénique, un peu d'ipuranol, et, après hydrolyse acide, de l'acide oléique, du dextrose et de la B-méthylesculétine. La résine brune donne, après hydrolyse acide, des traces d'un phytostérol, un peu d’acide oléique, de la $-mé- thyleseulétine et du dextrose. — MM. G. Martin et F.-S. Kipping ont préparé par la méthode de Grignard les chlorures de tribenzylsilicium et de benzylsilicium ; ils sont décomposés par l’eau en tribenzylsilicol Si(C°H°.CH? "OH et acide benzylmétasilicique C°H°CH® Si0.OH. Le premier, par ébullition avec HCI con- centré, est transformé en oxyde de tribenzyl-sili- cyle, F. 2057. L'ortho-éther de l'acide benzylmétasili- cique C°H°.CH°.Si(OC*H°) se prépare en traitant le trichlorure de benzyl-silicium par l'alcool éthylique; il bout à 170°-175° sous 70 millimètres. — MM. S.-R. Best et J.-F. Thorpe ont condensé intramoléculaire- ment les trois tolylacétonitriles avec formation de f-imino-4-cyano-ditolylpropanes; traités par H?S0* con- centré froid, ces derniers sont transformés en tolyl- méthylnaphiylènediamines, avec un rendement de 80 °/, pour le dérivé méta et de 10 °/, seulement pour les deux autres. — M. T.-P. Hilditch a étudié l'effet des groupes non saturés contigus sur l’activité optique. D'une facon générale, ils augmentent fortement le pouvoir rotaloire moléculaire ; l'effet atteint son maxi- mum quand le système conjugué est le plus proche des atomes de carbone asymétriques. L'effet décraît et peut être détruit si un groupe saturé est interposé entre le système conjugué et le système asymétrique. — M. E. Vanstone propose la théorie suivante de la miscibilité des solides : Deux substances présentent le plus grand degré de miscibilité quand les assemblages des sphères d'influence atomique possèdent le mème arrangement et sont capables d'être divisés en unités possédant des volumes presque égaux, les volumes étant les domaines moléculaires. — MM. J.-J. Sudbo- rough et J.-M. Gittins ont déterminé les constantes d'éthérification d’un certain nombre d'acides acry- liques substilués. Les constantes des acides >f-non saturés sont remarquablement faibles par rapport à celles des acides saturés correspondants; les acides By-non saturés ont des constantes un peu plus élevées que celles des acides saturés. — MM. W.-H. Perkin jun. et R. Robinson donnent les propriétés de la triméthylbrésilone, de l’«- et de la B-anhydrotriméthyl- brésilone et des dérivés correspondants de l’hématoxy- lone. — M. H.-M. Dawson à constaté que l’hydrate cuprique ne se dissout pas dans les solutions de sulfate d'ammonium pur, mais seulement en présence 239 d’ammoniaque, avec formation d'hydrate cupritétram- monique. Celui-ci réagit alors avec le sulfate d'ammo- nium, jusqu'à ce qu'un équilibre s'établisse : Cu.4AzH° (OH)?+(AzH'}S0: 77 Cu.4#AzH°S0! 2AzH'OH. L'auteur montre que les solutions optiquement claires préparées en ajoutant AzH* aux solutions de sulfate de cuivre sont sursaturées d'hydrate cuivrique, dont une partie doit se trouver à l’état colloïdal. — M. ©. Flaschner a observé que le potentiel d’une électrode AgBr/KBr s'élève sous l'influence des rayons $ et diminue quand ils disparaissent; la solution actinométrique d'Eder est aussi influencée par les rayons £. — M. G.-T. Moody critique les résultats de Tilden relatifs à la rouille du fer. — M't M. Boyle a préparé les quatre acides di- iodobenzènesulfoniques et les trois acides tri-ivdoben- zènesulfoniques en introduisant de liode par le chlorure d’iode dans les acides aminosulfoniques appropriés et enlevant ensuite le groupe aminé par la diazo-réaction. — MM. G.-G. Henderson et J.-W. Agnew, par l’action de l'acétate mercurique aqueux sur le pinène à la température ordinaire, l'ont converti en sobrerol, CH'(0H}, et celui-ci est oxydé en une hydroxycétone C!°H#O(OH) par le même réactif à chaud. Cette dernière doit être la 8-hydroxycarvotana- cétone, car elle est réduite par HI en carvacrol. — M. H.-R. Le Sueur, en faisant réagir la monoéthylani- line sur l’éther méthylique de l'acide &x-dibromoadi- pique, à obtenu le 1-phénylpyrrolidine-2 : 5-dicar- boxylate de méthyle; l'acide libre à fond à 252° avec décomposition. — MM. T.-S. Patterson et D.-P. Mc Donald ont étudié l'influence de l’aldéhyde benzoïque et de la quinoline comme solvants sur la rotation du tartrale d'éthyle. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM f Séance du 17 Décembre 1908, MM. T. S. Price et T. C. Humphreys étudient les dispositifs employés dans les méthodesrapidesd'électro- analyse : anodes et cathodes tournantes, dispositifs pour agiter l’électrolyte, les électrodes restant station- naires. Ils décrivent ensuite une méthode éleetrochi- nique rapide pour la détermination de Cu et Zn dans le laiton. L'alliage est dissous dans l'acide nitrique; on ajoute un peu d'acide sulfurique et on électrolyse avec 3 ampères sous 3 volts; le cuivre se dépose en vingt à trente minutes. La solution restante est évaporée à siccité pour chasser l'acide nitrique; on précipite le zinc par NaOH, puis on le redissout par AzH* et chauffe ; l'hydrate ferrique se précipite et est filtré. Dans le filtrat, on ajoute de l'acide acétique glacial et électro- lyse avec 2 ampères sous #-4,5 volts; le zinc se dépose en vingt minutes. Les auteurs décrivent encore une variante de ce procédé, qui évite le chauffage pour chasser l'acide nitrique. SECTION DE SYDNEY Séance du 14 Octobre 1908. M. A. M. Wright décrit les méthodes de contrôle chimique employées dans les usines de congélation de la viande de la Nouvelle-Zélande. Ces méthodes se rapportent à l'examen du sang desséché, de la graisse, de Ja laine, de l'extrait de viande, de la colle forte, etc. Séance du 11 Novembre 1908. M. E. V. Miller présente ses recherches sur /a eir- culation des liquides chauffés par le moyen des tubes de vapeur. La rapidité de la circulation dépend de la vitesse de transport de la chaleur de la vapeur des tubes au liquide qui les entoure, et celle-ci est fonction de la différence de température entre le liquide et la vapeur. Le maintien de cette différence dépend de la + conductibilité calorifique des tubes et de celle du liquide, par conséquent de sa vilesse d’évaporation. Pour augmenter cette dernière, il faut faire dispa- raître, autant que possible, tous les obstacles à la cir- culation du liquide. Parmi ces obstacles figure la viscosité du liquide, qui augmente avec la concentra- tion. Le soufflage de vapeur à l’intérieur du liquide pour accélérer la circulation augmente considérable- ment l’'évaporation. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 8 Janvier 1909. MM. K. Scheel et W. Heuse présentent un Mémoire relatif aux mesures des petites pressions. Hs décrivent un manomètre à membrane, composé d'une boîte en fer nickelé, affectant la forme d’un cylindre plat, dont la base, de 45 mm. d'épaisseur, comporte une mortaise circulaire de 2 mm. de profondeur. Le couvercle creux s'emboîte, par son bord annulaire, dans une rainure de la base, à laquelle il est soudé sur le bord. Une membrane en cuivre, déposée par voie électrique, est tendue sur la base de la boite, qu'elle divise en deux compartiments communiquant respectivement avec les enceintes dont il s'agit d'apprécier la différence de pression. On se sert, à cet effet, des interférences de Fizeau produites par les inflexions de la membrane. Ce procédé permet de déterminer les pressions inférieures à 0,01 mm. à 1/2 °/, près, et les pressions très petites avec une précision absolue de 0,000.01 mm. Les auteurs font voir que les inflexions de la membrane de cuivre sont, à 4/2 °/, près, proportionnelles aux variations de pression, jusqu'au delà de 0,1 mm., et que la loi de Mariotte est valable dans les limites d'erreur de leurs expériences. Ils démontrent également qu'en prenant certaines précautions, le manomètre de Mec Leod se prête à déterminer les pressions avec toute la précision voulue, même pour les compressions à un volume cor- respondant à 1/100.000° de la valeur initiale. La loi de Mariotte doit, par conséquent, être valable aussi pour les compressions considérablement supérieures à celles qui sont accessibles au manomètre à membrane. — MM. H. Rubens et E. Ladenburg ont étudié la disper- sion de l'eau pour le spectre ultra-violet, en procédant par voie indirecte, c'est-à-dire en observant le pouvoir de réflexion et le coeflicient d'extinction dans cette région du spectre. La courbe de dispersion, qui res- semble beaucoup à celle de réflexion, présente deux maxima très prononcés à 3,25 et 6,21 y, correspondant aux deux bandes d'absorption à courte longueur d'onde de l’eau, à savoir à celles de À — 3,06 et 6,08 p. La théo- rie exige que les maxima du pouvoir de réflexion et de l'exposant de réfraction se placent à des longueurs d'onde plus considérables que le maximum d’absorp- tion, et l'expérience confirme ce résultat théorique. D'autre part, l’exposant de réfraction de l'eau pré- sente un minimum très faible à À — 11 y, après quoi il se remet à croitre Jusqu'à ce quil atteigne, aux limites de la région spectrale étudiée, la valeur la plus grande qu'on ail jamais observée dans le spectre optique de l'eau. —M. R. Lindemann rend compte d'une zouvelle méthode pour déterminer les amortissements à l'aide des vibrations électriques non amorties. Les vibrations persistantes engendrées par les arcs de Poulsen à atmosphère d'hydrogène ne se prêtent guère, en raison des fluctuations de leurs longueurs d'onde, aux déter- minations exactes. Or, en se servant d'une lampe de son invention, l’auteur réussit à réduire assez ces fluc- tuations pour utiliser les vibrations non amorties à des déterminations d’amortissements extrêmement pré- cises. L'arc de cette lampe passe entre la surface d’un cylindre vertical en charbon et un tube de cuivre coaxial ethien refroidi; il est maintenu en rotation 6 CAN ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES permanente par un champ magnétique axial. Cette lampe est fermée en bas et en haut par des disques de mica appliqués à l'aide d'anneaux de laiton empêchant l'air d'y entrer. — M. A. Heydweiller, professeur à l’Université de Rostock, adresse un mémoire relatif à une relation simple entre la densité et le degré de dissociation des solutions salines aqueuses. Pour un grand nombre de ces solutions, il constate, d’abord par voie purement empirique, entre l'accroissement de densité équivalent, par rapport à l’eau de tempéra- SR ke et la conductibilité équivalente À — 4 dans des limites de concentration données, une rela- s—1 : _ — A", AHB,, où A’, et B, sont deux constantes indépendantes de la concen- tration. Comme A représente la mesure du degré de ture égale, tion linéraire, à savoir dissociation électrolytique et que 1——, on en tire AÇ’ cette nouvelle relation entre la densité et le degré de SL ie, ASC REPOS étant égal à A",A, ou à A,— B.. L'examen de 67 électro- lytes sur lesquels nous possédons des données sufli- santes fait voir que, seuls, les 16 électrol\tes dont la conductibilité ne paraît pas proportionnelle au degré de dissociation restent en dehors de cette relation si précieuse. — M. O. Reichenheim rend compte des expériences qu'il vient de faire sur la fluorescence due aux rayons cathodiques. Le dispositif dont il se sert est identique, en principe, à celui qu'utilise M. E. Goldstein pour constater, sur les corps isolés, l'existence de rayons cathodiques secondaires. La fluorescence bleue du quartz peut être due, soit à l'absorption des rayons primaires (indépendamment des rayons secondaires concomitants), soit à l'émission des rayons secondaires. Les expériences préliminaires faites pour élucider cette question font voir la nature compliquée des phénomènes cathodiques et rendent probable une liaison entre la luminescence en question et l'émission d'électrons. — M. G. Bode présente une expérience de cours démontrant l'existence d'un champ magnétique rotatoire. L'extrémité libre d’une tige ronde en fer, enchâssée à l'autre extrémité, porte une sphère de laiton bien poli. Cette tige peut être aimantée, dans sa partie centrale, par une bobine auxiliaire tra- versée par courant un continu; son extrémité libre se trouve dans un champ triphasé, produit par un anneau vertical dont les trois bornes communiquent avec une machine à courant triphasé. Lorsqu'après avoir produit la résonnance entre le nombre de périodes des cou- rants alternatifs et la vibration propre de la tige de fer, on l’aimante à l’aide de la bobine auxiliaire, la tige, devenue magnétique, exécute des vibrations très vives suivant les directions du champ magnétique. En insérant une seule phase de courant rotatoire, on voit la tige de fer, et avec elle la sphère de laiton bien visible, exécuter des vibrations dirigées suivant lune des composantes du champ rotatoire. Chaque phase nouvelle donnera une composante déplacée de 1209. En insérant loutes les trois phases, on voit la tige suivre le champ rotatoire en décrivant un cercle. Les effets extérieurs de cette expérience sont rendus encore plus frappants en éclairant le côté antérieur de la sphère par la lumière concentrée d'un arc. Les figures décrites par un point brillant sont alors visibles à grande distance. ALFRED GRADENWITZ. dissociation : Le Directeur-Gérant : Louis OLrIvier. Paris. — L: MARETHEUX, imprimeur, 1. rue Cassette. 20° ANNÉE N° 6 30 MARS 1909 Revue générale es Sciences pures el appliquées DirEcTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollan'e, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ !. — Distinctions scientifiques Académie Royale des Sciences de Berlin. — Dans sa séance du 26 février, l’Académie a conféré à notre distingué collaborateur, M. Ernest Solvay, à Bruxelles, la médaille d’or Leibnitz. Cette distinction, créée en l'honneur du fondateur de l’Académie, m'est décernée que pour services hors pairs rendus à la Science. - Bureau des Longitudes. — Sont nommés cor- respondants du Bureau des Longitudes : M. Andoyer (Henri), professeur d'Astronomie à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris, en rem- placement de M. Baillaud, précédemment nommé membre titulaire. M. Gonnessiat, directeur de l'Observatoire d'Alger, en remplacement de M. Deslandres, précédemment nommé membre titulaire. $ 2. — Physique du Globe Les marées de lécorce terrestre. — Depuis longtemps déjà, on a cherché à savoir si ce que nous appelons la terre ferme ne subit pas, sous l’action de la Lune, des déformations périodiques, autrement dit des marées analogues à celles des eaux de l’océan. Jusqu'à ces temps derniers, les recherches faites dans cette direction n'avaient donné aucun résultat, à tel point que des savants éminents avaient déclaré le pro- blèrme insoluble. L'Observatoire de Potsdam a récem- ment repris les mêmes recherches, et ses patientes et laborieuses investigations viennent d'être couronnées d'un plein succès : elles ont, en effet, mis en évidence le phénomène des marées de l'écorce terrestre qui peut, dès maintenant, être considéré comme acquis à la science. M. Ch. Lallemand, le savant membre du Bureau des Longitudes et Directeur du Service du Nivellement de la France, vient d'exposer à la Société astronomique de France les résultats obtenus à cet observatoire. Nous allons signaler quelques-unes des difficultés qu'il a fallu vaincre et qui avaient paru Jusqu'à présent insurmontables. Tout d'abord, comment constater des mouvements REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. | d'ensemble aussi faibles de l'écorce terrestre? On manque absolument de points de repère. Pour se rendre compte du mouvement des marées océaniques, on dis- pose des côtes, relativement stables, des iles et des continents; mais le navigateur qui se trouve loin des côtes n'a pas conscience des marées, et, si l’on s'ima- gine un instant la Terre entièrement couverte d’eau et une humanité vivant sur des îles flottantes, on peut être certain que le phénomène des marées lui aurait été à jamais inconnu. Or, c'est au pendule que l'on à eu recours pour mettre en évidence le mouvement de l'écorce terrestre que l’on soupconnailt. On sait que le pendule, constitué, par exemple, par une masse cle plomb suspendue à un til, prend au repos la direction de la verticale, c’est-à-dire la direction de la résultante des forces qui agissent sur lui. Si la Terre était seule dans l'Univers, et de plus immobile, homo- gène et parfaitement sphérique, la direction de la ver- ticale passerait rigoureusement par le centre du globe terrestre; en réalité, il n’en est pas ainsi. Tous les corps obéissent à la loi de Newton, c'est-à-dire qu'ils s’atlirent en raison de leur masse et en raison inverse du carré de leur distance; notre pendule n'y échappe pas : sil se trouve, par exemple, dans le voisinage d’une mon- tagne, il sera attiré par elle, et la direction de la verti- cale du lieu sera celle que prendra le fil du pendule; il subit de même l’action de la Lune et du Soleil, pour ne parler que des principaux corps qui agissent sur lui. Or, supposons pour un instant que le sol sur lequel il est monté soit parfaitement rigide et que le pendule obéisse seul à l'action de la Lune, pour ne considérer que ce seul corps céleste en particulier. Comme la Lune se déplace dans l’espace, elle attirera le pendul: dans son mouvement, et la pointe de ce dernier tracera sur le sol fixe une courbe qui sera en rapport avec le mouvement de la Lune. Faisons maintenant l'hypothèse inverse, et supposons que le sol ait une mobilité par- faite, analogue à celle de l'eau par exemple, et qu'il obéisse lui aussi à l’action de la Lune; dans ces condi- tions, le pendule continuera comme ci-dessus à être attiré et déplacé par l'astre des nuits; mais le sol sur lequel il repose sera attiré et déplacé de la mème manière, en sorte que, dans cette hypothèse, le dépla- cement relatif de la pointe du pendule par rapport au 6 19 es 19 sol sera nul. Mais, le sol n'ayant ni une rigidité absolue, ni une mobilité parfaite, nous pouvons supposer qu'il obéira en partie à l'action lunaire et qu'il y aura, entre la pointe du pendule et le sol, un certain déplacement relatif qui pourra fournir la mesure de la déformation ou marée de l'écorce terrestre. Si nous prenons pour unité le déplacement total et théorique du pendule sous l'influence de la Lune et que nous le désignions par 1, puis si nous appelons A le déplacement relatif du pendule sur l'écorce terrestre et B la déformation ou marée de cette écorce, nous pourrons résumer ce que nous venons de dire dans le tableau suivant : Déplacement Déplacement relatif ou du pendule marée sur le sol du sol Total Sol parfaitement rigide . . 1 + 0 = 1 Sol partiellement plastique. A + B Æ 1 Sol parfaitement fluide . . 0 + 1 = 1 Or, le déplacement total et théorique du pendule peut se calculer par la loi de Newton rappelée ci-des- sus; on connaît, en effet, la masse du pendule et celle de la Lune, et l’on peut trouver à chaque instant la position et la distance de cette dernière; donc, si l’on peut arriver à observer et à mesurer le déplacement relatif À du pendule, on en déduira la déformation ou marée B de l'écorce terrestre, puisque ces deux valeurs sont complémentaires l’une de l’autre, c'est-à-dire que l’on à constamment A + B—1. C’est ici que gît la principale difficulté. Le déplace- ment total théorique du pendule est, en effet, d’une petitesse extrême; si l’on suppose un pendule de { mètre de longueur, la courbe tracée par sa pointe sous l'in- fluence de la Lune tiendrait tout entière sur une sur- face bien plus petite que la millième partie d'un milli- mètre carré; pour rendre ce déplacement sensible à l'œil, il faudrait un microscope grossissant dix mille fois,et un tel microscope n'existe pas. De plus, le pendule subit également l'attraction du Soleil; puis le sol qui supporte le pendule est soumis à l'action de la chaleur solaire, laquelle produit des déformations locales du sol bien plus importantes que celle que l'on veut me- surer : ainsi la pertubation due à l’action de la chaleur solaire est 50 fois plus grande à la surface de la Terre que celle qui est due à l'attraction de la Lune et, à 25 mètres de profondeur, elle est encore 7 fois plus grande que cette dernière; par conséquent, le mouve- ment que l’on veut mesurer se trouve noyé dans des mouvements parasites beaucoup plus grands. Voici comment on a procédé à Potsdam pour venir à bout de ces difficultés. On a d’abord remplacé le pendule vertical par un pendule horizontal, dont le principe est le suivant : Supposons que l’on ait un pendule vertical oscillant autour d'un axe horizontal et que l’on incline peu à peu tout l'ensemble du système jusqu'à ce que l'axe d'oscillation soit presque vertical. Dans cette nouvelle position, le déplacement de l'extrémité libre du pendule serait le même que celui d’un pendule vertical dont le point de suspension serait situé au point de rencontre de l'axe d'oscillation prolongé et de la verticale passant par l'extrémité libre du pendule. Il est bien entendu que le pendule ne doit pas être rigoureusement horizontal, car alors il serait fou. À Potsdam, l'axe d'oscillation faisait, avec la verticale, un angle de cinq minutes; de sorte qu'avec un pendule horizontal de 25 centimètres seulement de longueur, on obtenait des déplacements égaux à ceux d'un pendule vertical de 500 mètres de longueur. L'extrémité du pendule était munie d’un miroir sur lequel était dirigé un rayon de lumière; ce rayon était réfléchi, lors des déplacements du pendule, sur un cylindre situé à 4,500 de distance, animé d’un mou- vement de rotation et recouvert d’un papier sensible; on oblenait ainsi un enregistrement photographique des déplacements du pendule. On avait disposé deux CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE pendules perpendiculaires l’un à loutre et inclinés de 45° sur la méridienne du lieu. Le tout était installé dans une chambre située à 25 mètres de profondeur, où régnait une température constante de 1197 d'un bout de l’année à l’autre. On fit une première série d’enregistrements d'une durée de deux ans et demi, puis une seconde série d'une durée de deux ans pour contrôler la première. Le tracé ainsi obtenu représentait une suite d'ondu- lations irrégulières qui correspondaient au déplace- ment relatif du pendule sous l’action de toutes les causes qui agissaient sur lui. Il fallait maintenant déduire de ce tracé complexe le déplacement spécial dû à la seule action de la Lune que l’on voulait con- naître. On a employé, à cet effet, une méthode extré- mement ingénieuse, qui a déjà été appliquée pour étu- dier le mouvement des marées océaniques. On sait que le jour sidéral, ou l'intervalle qui s'écoule entre deux passages consécutifs d’une même étoile au méridien, est exactement de vingt-quatre heures. Le jour solaire moyen, ou intervalle écoulé entre deux passages du Soleil au méridien, est de vingt-quatre heures trois minute trente-six secondes; de son côté, la durée moyenne du jour lunaire est de vingt-quatre heures, cinquantes minutes, cinq secondes. Par con- séquent, si l'on découpe par la pensée le tracé obtenu en bandes dont la longueur corresponde à la durée du jour lunaire et que l’on superpose toutes ces bandes ou que l’on fasse la moyenne des tracés ainsi obtenus, on obtiendra une courbe qui représentera le déplace- ment dû à la seule action de la Lune. En effet, sur chacune des bandes considérées, l’action lunaire se fera sentir d’une manière concordante; son déplace- ment maximum, par exemple, qui à lieu toujours à la même heure, s'inscrira toujours au même endroit sur chaque tracé, tandis que les déplacements dus à d’autres causes, qui n’ont pas la même période de durée, s’inscriront à des endroits quelconques desdites bandes, tantôt au-dessus, tantôt au-dessous de la ligne du zéro, et finiront par s’annuler dans la moyenne vis-à-vis du déplacement causé par la Lune. On a ainsi constaté que le déplacement relatif du pendule était les 3/5 du déplacement calculé en suppo- sant un sol absolument rigide. Par suite, la déforma- tion du sol, ou la marée de l'écorce terrestre, est les 2/5 de ce qu'elle serait si le sol était mobile comme les eaux de la mer, par exemple. Or,comme la hauteur de la marée moyenne de l'océan est de 0,50, celle de l'écorce terrestre en est les 2/5, soit 0w,20. Par consé- quent, la terre ferme qui nous porte se soulève de 20 centimètres toutes les douze heures environ. Il est vrai que ce résultat ne s'applique qu'à Potsdam et devrait être vérilié pour d’autres points du globe. Cett: mobilité du sol semble de nature à influencer dans une certaine mesure les observations astronomiques. D'autre part, il paraît résulter de l'étude des courbes obtenues à Potsdam que la Terre est à cet endroit plus résistante dans le sens est-ouest que dans le sens nord-sud, ce qui semblerait donner raison aux par- tisans de la forme tétraédrique de la Terre, la résistance d'un trétraèdre étant, en effet, plus grande dans le sens des arêtes que dans le sens perpendiculaire à ces dernières. G. Devanlay, Membre de la Société Astronomique de France. $ 3. — Physique Une balance voltamétrique. — Le principe de la balance, utilisé avec tant de succès dans de nom- breux appareils de mesures physiques, a été appliqué par différents auteurs à la construction de dispositifs voltamétriques. L'appareil indiqué par M. A. Wendler! se distingue par sa construction originale, assurant, grâce à la suspension des deux électrodes, l'addition des effets. ‘ Phys. Zeitschr,, n° 23, 1908, : : € ! CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Dans le vase K (fig. 1), en forme de U, rempli de sul- fate de cuivre, sont plongés les deux disques de cuivre K! et K°, de dimensions à peu près identiques, suspen- dus par des fils de platine, à distance égale du point de rotation, au fléau W, fait en matière non conduc- Fig. 1. — Balance voltamétrique. — K, vase en forme d'U; K,, K,, disques de cuivre: W, fléau; J,, J,, vis établissant l'équilibre. trice. L'axe du fléau, qui consiste en cette mème matière isolatrice, se termine (fig. 2) par des lames métalliques S' et S°, reposant sur les supports U! et U* et qui assurent l'entrée et la sortie du courant. Si, après avoir introduit les électrodes dansle liquide, Fig. 2. — Balance voltanétrique, vue par-dessus. — $,,S,, lames métalliques terminant l'axe du fléau; U,, U;, sup- ports; P,, P,, bornes du courant ; D,, D,, fils conducteurs. l'équilibre a été établi à l’aide des vis J! et J°, cet équi- libre, détruit après l’électrolyse, doit être rétabli en déplacant des cavaliers sur le fléau de la balance. Le poids spécifique de la solution de sulfate de cuivre peut être déterminé sur l'appareil lui-même. $ 4. — Chimie La Table internationale des Poids ato- miques. — Dans la Table internationale des Poids atomiques pour 1909 que nous avons publiée dans notre numéro du 15 février, le poids atomique du fer a été omis par erreur; il a été fixé à 55,85 par la Commis- son internalionale. > 5. — Agronomie La sélection de la betterave industrielle. — Le facteur essentiel de la prospérité des industries agricoles, — auquel on n’accorde pas généralement l'importance qu'il mérite, — est le chiffre de la matière première produite par une même surface de terre cul- tivée. C'est ainsi que la quantité de sucre formée par hectare de betterave étant plus élevée en Allemagne et en Autriche qu’en France, la situation de la sucrerie indigène est des plus critiques. En effet, toutes choses égales d’ailleurs : perfectionnement de la fabrication, 249 prix du charbon, de la main-d'œuvre, les prix du marché mondial, rémunérateurs pour les Austro-Alle- mands, ne le sont pas pour les Francais. À quoi tient une infériorité si préjudiciable ? Si l'on peut attribuer à de mauvaises facons culturales le rendement moyen du blé à l'hectare, inférieur de plus du quart à celui des agriculteurs anglais, il n’en est pas de même pour la betterave, cultivée seulement dans les plaines du Nord avec toutes les ressources des méthodes inten- sives. C’est surtout à l'excellence des variétés cultivées que les Allemands doivent leur supériorité. Quoique de nombreux agriculteurs français emploient des graines allemandes, ils ne peuvent évidemment obtenir ainsi les mêmes gros rendements qu'avec des variétés spé- cialement sélectionnées pour le pays où on les cultive. Cette question fut l’objet de très intéressantes discus- sions lors de la dernière réunion de l’Association des Chimistes de sucrerie'. Devant les résultats obtenus en pratique à la célèbre Station expérimentale de Swäloff, dans la sélection des céréales, M. H. Pellet avait proposé d'étudier la création d’une Station agro- nomique exclusivement adonnée à l’étude de la bette- rave et de sa sélection, tant par les méthodes chi- miques, seules utilisées jusqu'ici, qu'en mettant à proit les caractères botaniques observés à la suite de mutations. Mais, ainsi que le fit observer très juste- ment M. de Vilmorin, il y aurait à cela une impossi- bilité : c'est que les multiples variétés de la Beta sont reliées d’une façon continue par d'innombrables inter- médiaires, chez lesquels on ne peut déterminer le moindre caractère des espèces jordaniennes. Pour être difficile, le problème ne paraît pas, 4 priori, insoluble. Ce manque de caractères spécifiques témoigne, au contraire, de l’incomparable plasticité de la betterave. On sait combien diffèrent de la Beta vul- garis originelle les variétés cultivées actuellement; puisque l’on a pu faire subir à la plante de telles trans- formations, elle est évidemment susceptible d'être modifiée encore. Encore arriverait-on malaisément à un résultat dans une de nos stations françaises, où, selon les très justes critiques de M. Vivien, un agronome Maiître-Jacques, tour à tour chimiste, météorologiste, botaniste, bactériologiste, trouve encore le temps de faire commerce d'analyses payantes, constituant sou- vent le plus clair du budget, voire même de la poli- tique... 11 faudrait procéder à l'américaine : disposer de beaucoup d'argent d'abord et réunir les collaborations compétentes de spécialistes autorisés : un botaniste, un agronome, un chimiste. Aussi, M. François Dupont, qui présidait la séance et prit une part très active à la discussion, espère-t-il surtout de l'initiative toute indi- quée du Syndicat des Fabricants de sucre, puissant et riche, plutôt que de celle du Ministère de l'Agriculture. Mais n’y aurait-il pas un autre moyen, plus ration- nel emcore? Que ne préconise-t-on la méthode alle- mande ! Ce sont là-bas des producteurs de graines qui fondèrent des stations de recherches, quelquefois diri- gées par tel illustre professeur d'Université : Briem, par exemple. Sans doute, les cultivateurs francais de porte-graines ne manquent pas de spécifier sur leurs réclames : « laboratoire annexé à l'exploitation ». Mais, en réalité, — nous l'avons pu constater quelque- fois de visu, — le Laboratoire n'existe qu'à l'état d'embryon ou mème de projet. Et, quand il fonctionne vraiment, la direction en est confiée à quelque petit employé soigneux et économique qui, sans doute, sait doser le saccharose dans un jus sucré, mais est totale- ment dépourvu de toute culture scientilique. Le résul- tat, c’est que, dans le pays des de Vilmorin, où l’on « créa » vraiment la betterave sucrière, et malgré des droits de douane considérables, l'on importe d’Alle- magne et de Bohême une importante partie de la con- sommation de graines. Souhaitons que l'initiative des chimistes-techniciens de sucrerie crée un mouvement d'idée qui aboutisse à la fondation de quelque institu- 1 Bull. de l'Association, janvier 1909. 244 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tion bien conçue, dont le rôle et la tâche seraient vrai- ment de la plus grande utilité. Henri Rousset. 8 6. — Hygiène publique La stérilisation de l'eau et des liquides par les rayons ultra-violets. — On sait que la lampe en quartz à vapeurs de mercure émet une lumière très riche en rayons ultra-violets. En 1908, MM. Th. Nogier et Thévenot eurent l'idée d'étudier l’action de ces rayons sur les cultures microbiennes sur gélose, et ils constatèrent qu’ils sont doués d’un pouvoir bactéricide intense. Partant de cette constatation, MM. J. Cour- mont et Th. Nogier ont chercaé à utiliser cette pro- -priété à la stérilisation de l'eau potable, et ils sont arrivés à des résultats très concluants, qu'ils ont récemment communiqués à l’Académie des Sciences de Paris'. Au centre d’un tonneau métallique de 415 litres de capacité et de 0,6 mètre de diamètre, on suspend par ses électrodes une lampe en quartz à vapeurs de mercure, d'une longueur de 0,3 mètre, fonctionnant sous 9 ampères. Le tonneau est rempli d'eau souillée de microbes et la lampe est mise en marche. De très nombreuses expériences ont montré que la stérilisation de l’eau est complète au bout de une à deux minutes, même lorsque l'échantillon est extrêmement pollué, naturellement ou artificiellement {microbes ordinaires de l’eau, colibacille, bacille d'Eberth). Une minute suffit presque toujours. L’échauf- fement ne dépasse pas quelques dixièmes de degré. Pour que la stérilisation s'effectue dans ce court laps de temps, l’eau doit être limpide. L'eau stérilisée n’est nocive ni pour les plantes, ni pour les animaux. MM. Courmont et Nogier pensent que l'emploi de la lampe en quartz à vapeurs de mercure est susceptible d'entrer dans la pratique industrielle de la stérilisation des eaux potables (claires). Il suffirait de disposer les lampes soit dans un réservoir, soit dans le tuyau d'arrivée, à la distance convenable, de façon que l’eau soit éclairée pendant une ou deux minutes. La durée des lampes est théoriquement infinie. En même temps que les auteurs précédents commu- niquaient leur travail, M. Dastre annonçait à lAca- démie des Sciences que, dépuis quelque temps, une série d’études sur les actions, qu'il a appelées ahio- tiques, des rayons ultra-violets étaient entreprises à son Laboratoire de Physiologie de la Sorbonne, et, à la séance suivante, deux de ses élèves, MM. V. Henri et G. Stodel, déposaient une note sur la stérilisation du lait par les rayons ultra-violets?. Ces auteurs se sont servis de deux lampes à vapeurs de mercure en quartz, l’une donnant 1.500 bougies, l’autre 2 000. Leurs expériences ont été faites, d'une part, sur du lait largement infecté avec du bouillon de culture : bouillons de colibacille, de bacilles lactiques, de phléole (l'addition des bouillons ayant été faite à du lait préalablement stérilisé à 1150 et à du lait ordi- naire), d'autre part, sur du lait naturel acheté dans le commerce. Un grand nombre d'expériences, faites sur différents échantillons, ont montré d’une facon absolument cer- laine que l'on obtient une stérilisation complète du lait par l'action directe des rayons ultra-violets sans avoir une élévation notable de la tempéralure. Ce pro- cédé permet donc d'éviter les effets redoutés de la sté- rilisation par la chaleur. Enfin, dans la même séance de l'Académie, M, A. Bilion-Daguerre a demandé l'ouverture d’un pli cacheté déposé par lui le 7 janvier 14907 et relatif au même sujet#, Dans ce pli, l'auteur annonce avoir utilisé l'action microbicide des rayons violets, ultra-violets, ‘ C. R. de l'Acad. des Sc., t. CXLVIII, n° 8, p. 523. 2 C. R,, t. CXLVI, n° 9, p. 582. 3 C. R.,t. CXLVIII, n°9; p: 542: et aussi des rayons X, cathodiques et du radium, à la stérilisation à froid et à distance de divers liquides; il a obtenu, en particulier, de bons résultats dans l’action des rayons violets et ultra-violets sur le lait. Tous ces faits s'accordent pour montrer que l'on dis- pose, dans les radiations à courte longueur d'onde, d'agents bactéricides puissants, susceptibles d’inter- venir efficacement dans la stérilisation des liquides. $ 7. — Géographie et Colonisation La culture du coton en Asie Mineure. — [n important Rapport, présenté au Parlement anglais par le Professeur W. Dunstan, directeur de l’Zmperial 1ns- titute, nous apporte sur ce sujet d'intéressants ren- seignements!. Le coton est cultivé en Asie Mineure spécialement dans le Sud-Ouest (Anatolie) et dans le Sud-Est (Cilicie); la plus grande partie de la production pro- vient des trois districts d'Aïdin, de Kassaba etd’Adana, tous trois reliés à des ports de mer par des chemins de fer. Dans ces régions, le climat et le sol sont très propices à la culture du coton; malgré une certaine irrégularité des pluies, il est possible de faire croître la plante sans recourir à l'arrosage artificiel. Cependant, dans beaucoup d’endroits, l'irrigation favoriserait la croissance de la plante et permettrait d'obtenir une qualité supérieure de coton. Les sources d’eau sont abondantes, etles travaux d'irrigation ne présenteraient pas de difficulté. Le Gouvernement ture a récemment concédé à un groupe allemand l'irrigation de la grande plaine de Konia, au centre de l'Asie Mineure; bien que ces travaux aient surtout en vue la culture des céréales, ils favoriseront considérablement celle du coton, choisie comme culture rotative. Le coton actuellement cultivé en Asie Mineure parait avoir été introduit de l'Inde au temps d'Alexandre le Grand. Ce coton (Gossypium herbaceum?) est grossier et à courte soie. Dans quelques districts, le coton natif, connu sous le nom de yerli, a été très amélioré par la culture; cependant, en général, celle-ci est très primi- tive et rien, pour ainsi dire, n'a encore été fait dans la voie de la sélection des graines ou de l’engrais systé- matique. Dans ces dernières années, à côté du yerli, on à cultivé avec succès en divers endroits le coton américain et égyptien. Actuellement, le coton yerli d'Asie Mineure est en grande partie utilisé par la fabrication indigène, avec des métiers à main. Il existe des machines à égrener le coton dans la plupart des centres; il y a également des filatures de coton dans plusieurs villes du district d'Aïdin, ainsi qu'à Tarse et Adana, où de grandes fabriques, mues par l’eau ou la vapeur, filent le coton ou le tissent en toile grossière connue sous le nom de cabot, et très demandée à Marash, Aintab et dans tout l'intérieur de l'Asie Mineure. Le coton exporté d'Asie Mineure va surtout en Autriche-Hongrie, en Espagne, en Italie et en Allemagne; l'exportation totale est d'environ 500.000 balles. Le Professeur Dunstan conclut que l'Asie Mineure est destinée à prendre une place de plus en plus impor- tante dans la production cotonnière mondiale, soit qu'on poursuive la culture du yerli, soit qu'on étende celle du coton américain de montagne, soit qu'on crée un hybride des deux variétés à soie moyenne. Les seuls obstacles à surmonter sont l'insécurité du pays et l'incapacité pour les non-Ottomans de posséder des terres ; mais, s'ils venaient à disparaitre, le perfection- nement des procédés agricoles et le développement des voies de communication assureraient un grand essor à la culture du coton. 1 Nous les reproduisons d'après le résumé qu'en denne le Scottish Geographical Journal, t&. XXV, n° 2, p. 8 el suiy. PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL La science française a perdu récemment un de ses représentants les plus illustres : Albert Gaudry. Mon cher et vénéré maitre, qui s’est éteint à l’âge de quatre-vingl-un ans, laisse d’unanimes et vifs regrets, non seulement dans le monde savant, mais aussi parmi tous ceux qui l'ont approché et connu et même parmi ceux, et ils sont légion, qui ont lu ses œuvres, empreintes d’un idéal si élevé. Le savant qui consacra, d'une manière exclusive, soixante ans de sa vie à la science laisse derrière lui un sillon lumineux qui éclaire fortement lhis- toire des mondes passés qui se sont succédé sur notre planète, depuis environ cinquante millions d'années. Gaudry s'est attaché, durant toute son existence, à chercher les lois qui avaient présidé aux destinées de ces mondes disparus et il a essayé, avec succès, de souder entre eux les divers chaïinons de cette histoire caplivante. En ce faisant, il a été vraiment le créateur d'une science nouvelle, la Paléontologie historique où philosophique. Je désire exposer ici brièvement les caractéris- tiques de l'œuvre féconde de Gaudry. Que l’on me permette auparavant de dire quelques mots de l’homme avant de m'occuper du savant. Il incarnait la bonté et la bienveillance. Ces deux qualités étaient chez lui inépuisables. Tous ceux qui l’approchaient, Francais et élrangers, étaient conquis par son exquise urbanité et sa courtoisie. La voix un peu fluette achevait de donner de la douceur à son langage. Si l’on ajoute une grande noblesse de sentiments et une droiture de caractère qui n’a jamais fléchi, on comprend que son nom n'ait éveillé partout que des sympathies. Pour comprendre l'importance des travaux de Gaudry, il faut remonter en arrière de plus d'un siècle et évoquer les différentes phases suivant les- quelles se sont déroulées les idées relatives à l'apparition des mondes qui ont peuplé la Terre à ses divers âges. I. — CuviErR ET D'ORBIGNY. Au début du xix° siècle, les travaux antérieurs de Bernard Palissy, Faujas de Saint-Fonds, Guet- tard, Buffon et surtout de William Smith avaient permis de comprendre l'importance des fossiles, grâce auxquels on pouvait déterminer l’âge des terrains sédimentaires de notre globe. Les recherches de Cuvier sur les faunes fossiles conduisirent ce génial naturaliste à établir qu'il existe dans les couches terrestres une série de faunes superposées et distinctes, qui auraient dis- paru successivement el entièrement sous l'influence d'événements géologiques violents, qu'il appelait les Révolutions du globe. De nouvelles faunes, dif- férentes, auraient remplacé les anciennes faunes, non pas au moyen de eréalions nouvelles, comme on s’est plu à le dire fréquemment, mais au moyen de faunes venues de régions où de semblables révolutions ne s'étaient pas produites. Les révolutions du globe, au sens où les enten- dait Cuvier, n'avaient pas un caractère universel. Elles résultaient d'événements considérables, de modifications profondes dans la distribution des mers et des continents, qui se traduisaient par la formation de nouveaux territoires maritimes ou la surrection de chaines de montagnes, modifica- tions qui avaient pour cause le refroidissement ter- restre. Les deux grands ouvrages qui synthétisent l’œuvre de Cuvier : l'un, les Recherches sur les Ossements fossiles, l'autre, le Discours sur les Révolations du globe, bien que vieux de plus d'un siècle, resteront comme des modèles de clarté des- criptive et de divination scientifique. Le premier est le mémento obligé de tout naturaliste qui s'oc- cupe de l'étude des Vertébrés vivants et fossiles, le second de tout géologue ou géographe, qui y trou- vera, au moins en germe, l'exposé des causes des changements physiques opérés sur notre planète et des lois qui les régissent. Cuvier à donc été vrai- ment le créateur de la Paléontologie. N a montré d'abord, contrairement à l'opinion de Buffon, que les animaux fossiles sont différents des animaux actuels et, s'inspirant des recherches d’autres natu- ralistes, tels que A. d’Orbigny, Al. Brongniart, von Buch, W. Smith, Werner, etc., qui s’élaient occupés plus spécialement des animaux inver- tébrés, il admet que chaque terrain présente des fossiles spéciaux, distinels. Il crée ainsi non seulement la Paléontologie, c’est-à-dire l'étude des fossiles en eux-mêmes, mais aussi celle de leur ordre d'apparition sur le globe. Il élargit donc le cadre de cette nouvelle science, complément indispensable de la Zoologie, mais il la fait servir aux besoins de la Géologie pour la recon- naissance des terrains sédimentaires. Ainsi a pris naissance, avec Cuvier et d'Orbigny, la Paléonto- logie straligraphique, sœur de la Zoologie et base essentielle de toute Géologie rationnelle. Rappelons, en passant, que d'Orbigny avait divisé l’histoire de la Terre en 27 époques, entre lesquelles il répartissait alors les 18.000 Mollusques et Echi- 19 SI [er] PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL nodermes connus. Les grandes lignes de la classi- fication de ce naturaliste sont encore suivies au- jourd'hui. Cuvier et d'Orbigny croyaient avoir établi dans leurs travaux la fxité des espèces, leur appari- tion et leur disparition brusque, dans le temps, au moyen de cataclysmes et de créations succes- sives. II. — GEorFRoy SAINT-HILAIRE ET LAMARCK. Deux de leurs contemporains, Lamarck et Geof- froy Saint-Hilaire, vont dresser contre cette théorie de Tabsolu une autre théorie, qui va secouer dé- sormais tout le monde savant et pensant. Depuis cette époque, et autour d'eux, se sont livrées, sous la bannière du Zransformisme, d'innombrables batailles scientifiques et philosophiques. Et, après un siècle d'études et de recherches, la discussion reste encore ouverte sur bien des points. Lamarck et Geoffroy Saint-Hilaire, contrairement à Cuvier, à d'Orbigny et à Brongniart, en se basant sur l'étude des animaux actuels et fossiles, admet- tent qu'il n’y a pas de séparation tranchée entre ces divers êtres, mais qu'il existe entre eux une filiation. Les premiers animaux qui ont apparu se seraient éransformés successivement sous diverses influences, amenant ainsi, sous l'influence des be- soins ou des habitudes (Lamarck) ou sous celle du milieu (Geoffroy Saint-Hilaire), le développement ou l’atrophie de certains organes. Il n'y a plus de créations successives, mais la Nature a créé d'abord des êtres simples, qui peu à peu, sous les influences dont nous venons de parler, se sont modifiés, transformés en des êtres ordonnés en séries de plus en plus compliquées, de plus en plus parfaites, depuis la masse gélatineuse amorphe, mais vivante, du protozoaire jusquà l'homme. Lamarck, dans sa Philosophie zoologique, dans laquelle interviennent bien peu, malheureusement, de données paléontologiques, a dressé un arbre généalogique de toutes les formes animales, depuis les types les plus simples jusqu'aux mammifères les plus élevés (l'homme excepté). Cet essai de synthèse grandiose n’est intéressant que par son esprit et les idées sur lesquelles il est basé. Il est inexact en un très grand nombre de points essen- tiels, mais il est le premier canevas sur lequel les naturalistes futurs poseront des idées plus précises, ayant pour point d'appui un plus grand nombre d'observations. Aussi bien était-ildifficile à Lamarck de faire autre chose qu'une œuvre préliminaire. Il manquait, pour l'étayer et l'établir sur des bases plus solides, de la connaissance d’un plus grand nombre de fossiles, et il aurait dû tenir grand compte de cette loi féconde donnée par Geoffroy Saint-Hilaire : Le développement embryogénique d'un étre vivant actuel est un résumé raccourci des phases par lesquelles a passé le développe- ment paléontologique auquel se rapporte l'espèce étudiee. III. — DARwIN. Quarante ans plus tard, Darwin, reprenant les idées de Lamarck, va donner à la théorie du transformisme un éclat tel que beaucoup de sa- vants l'appelleront désormais la théorie du dar- winisme. Darwin, qui avait beaucoup voyagé el, par suite, beaucoup vu, qui avait un don d'observation pro- digieux et était servi par une vaste érudition, vint ajouter un argument important de plus à la théo- rie du transformisme, celui de la concurrence vitale. Pour le grand savant anglais, il se produisait, par suite de cette concurrence parmi les êtres vivants, une sélection naturelle, analogue à la sélection artificielle créée par l'homme pour faire naître des variétés dans le monde végétal et dans le monde animal. Les espèces les mieux douées résistaient et disparaissaient ensuite devant des espèces mieux organisées. L'exposé et la discussion de /'Origine des espèces de Darwin n'est pas à faire ici; elle est connue de tous. Mais il faut noter et faire ressortir la grande faiblesse des arguments paléontologiques de Dar- win, arguments qui devraient constituer cependant la base de toute théorie transformiste, car il doit y avoir une liaison inséparable de la Paléontologie et de la Zoologie. C'est Albert Gaudry, l'émule et le contemporain de Darwin, qui va lui offrir cet appui indispensable. IV. — L'ŒUVRE D'ALBERT GAUDRY. Né en 1827, à Saint-Germain-en-Laye, Albert Gaudry était le fils du bâtonnier de l’ordre des avo - cats de Paris, amateur éclairé des sciences natu- relles. À vingt ans, le jeune homme, qui avait par- couru, en compagnie de son père, les environs de Paris et visité les principaux gisements de fossiles décrits par Cuvier, montra une vocation irrésistible pour la Géologie et la Paléontologie. En 1850, il fut attaché au laboratoire de Géologie du Muséum d'His- toire naturelle où il travailla sous la direction de d'Orbigny, son beau-frère, et de Cordier. En 1852, ses premiers travaux, sur un groupe d'Echino- dermes (Stellerides) et sur l'origine et la for- mation des silex de la craie et des meulières des terrains tertiaires, lui firent décerner le titre de docteur. PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL 247 $ 1. — Pikermi. La parenté des mondes anciens et du monde actuel. Chargé de mission en Orient, il parcourt avec son ami Damour : la Grèce, la Syrie, Chypre et l'Égypte. En passant par Athènes, il apprend que Duvernoy et A. Wagner avaient trouvé, non loin de là, au pied du Pentélique, en un lieu appelé Pikermi, des traces de faunes fossiles de Vertébrés. Il fit une visite sommaire au gisement et obtint ensuite une mis- sion de l'Académie des Sciences pour exhumer la faune qu’il renfermait. C'est dans ce pays, au-dessus duquel plane le génie des anciens Grecs, que Gaudry allait ressus- citer tout un monde nouveau, qui vivait plusieurs centaines de siècles avant l'apparition de l'homme. « Sur cette terre classique, ses recherches, son esprit, sa pensée ont créé une autre fois, et dans une autre direction, un lieu classique, car pour toujours avec la faune de Pikermi est uni le nom d'Albert Gaudry. » (Discours du Président de l'Aca- démie Royale des Sciences de Berlin.) Les fouilles de Pikermi, poursuivies pendant plusieurs années et avec quelques dangers (on était au moment de la guerre de Crimée), dans un pays infesté de brigands, permirent de recueillir plu- sieurs milliers d'échantillons qui furent répartis entre trois cent soixante et onze individus. Les squelettes de plusieurs animaux fossiles purent être reconstitués dans leur entier. Gaudry établit que cette riche faune comprenait trente-cinq genres, dont vingt étaient complètement éteints et cinq espèces jusqu'alors inconnues ou à peu près. On n'avait jamais rencontré, dans aucune con- trée, un groupe d'animaux gigantesques compa- rable à celui de Pikermi. Si le territoire que ces êtres ont habité a passé jadis pour le séjour des dieux et s’il a vu briller les plus beaux génies de l'Antiquité, l’ensemble des êtres enfouis dans son sol à une époque géologique reculée a exigé de grands espaces. « Il faut croire que les campagnes étaient, non seulement plus vastes, mais aussi plus riches que de nos jours. Les chaînes de marbre du Pentélique, de l’'Hymette, du Laurium ne portent le plus sou- vent que d'humbles herbes, bonnes à nourrir les abeilles ; il est probable que, dans les temps anciens, il y avait, au delà de ces arides montagnes, des vallées d'une végétation luxuriante, où de grasses prairies alternaient avec des bois magnifiques, car la fécondité du règne animal fait supposer néces- sairement celle du règne végétal» (Gaudry). L’abon- dance des Herbivores appuie cette manière de voir d’une facon irréfutable. Les paysagesétaient animés, en effet, par des rhinocéros à deux cornes et d'énormes sangliers, par des singes (Mesopithecus Penteliei), des carnassiers de la famille des civettes, des martres, des chats et des hyènes, qui gitaient dans les cavernes du Pentélique, pendant que dans les plaines couraient, en troupeaux ou en bandes, les hipparions et les antilopes aux formes sveltes et graciles, aux cornes droites, en spirale, ou courbées en lyre. L'Attique avait encore des girafes et des Rumi- nants apparentés à ces dernières, que Gaudry, hanté par la poésie de l'antique Hellade, appela Helladotherium, superbes créatures que l'on croyait disparues à jamais et qui ont surgi, à peine modi- fiées, il y a quelques années, des pâturages du Congo » (F. Perrier). Les Mammifères les plus grands comprenaient : un Edenté aux doigts crochus (Ancylotherium), deux Mastodontes, un Carnassier aux canines gigan- tesques : le Machaïrodus, et enfin l'énorme Dinothe- rium. À côté de ces formes, signalons encore le Chalicotherium, le sanglier d'Erymanthe, la chèvre amalthée (Tragocerus amaltheus) et, parmi les Oiseaux et les Reptiles : le coq d'Esculape, la grue du Pentélique, la tortue des Marbres, etc. Tous ces animaux étaient des animaux terrestres et le gisement de Pikermi représente un dépôt torrentiel. À l'époque où vivait la faune dont nous parlons, la Grèce était unie largement à l'Afrique et son climat était semblable à celui de cette région. Ce n’est que beaucoup plus tard que s'est faite la séparation des deux pays. Les animaux enfouis dans les ravins de Pikermi ont été entrainés, en ce point, par les cours d'eau de l'époque, bordés d’une végétation encore africaine. Les autres conclusions, tirées par Gaudry de l'étude de cette faune, furent des plus remarquables et c’est de celles-là surtout que nous voulons parler. Gaudry ne s'est pas, en effet, contenté de décrire avec soin toutes ces formes si intéressantes, ainsi que le faisaient ses contemporains; en montrant les différences qui les séparaient des types connus, il à été conduit et s'est attaché aux ressemblances qu'elles offraient, soit avec les formes anciennes, soit avec les formes actuelles. Il acherché la Liaison, les rapports qui unissent les êtres anciens entre eux et les êtres actuels. Ce sont ces rapports, cette liaison, que son esprit à établis, qui ont déterminé sa philosophie, qui cOns- tituent la nouveauté, l'originalité et la grandeur de son œuvre. Et ce sont ces données qui apportent un appoint précieux à la doctrine transformiste. Après avoir démontré que la faune de Pikermi est d'âge miocène supérieur, M. Gaudry montre qu'il y a dans la Nature quelque chose de plus élevé que la variété apparente des faunes, c'est l'unité du plan qui les relie. 248 PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL Voici quelques exemples cités par l’auteur : « C’est ainsi que les singes de Pikermi (Semnopithecus Pentelici) intermédiaires entre les singes vivants appelés Macaques et les Semnopithèques. Ils se rapprochent des premiers par leurs membres el des seconds par leur crâne. Le Carnivore appelé Simocyon a des canines de chat, des prémolaires et des carnassières de chien, tandis que la forme de ses mandibules et de sa tuberculeuse le rap- prochent des ours. Avec l'Amphicyon, l'Hemicyon, J’Arctocyon, il relie cette famille à celle des chiens, qui en est bien distincte aujourd'hui. À côté d’ani- maux moitié civeltes, moitié hyènes, on voit une hyène proprement dite, intermédiaire entre les espèces communes actuellement en Afrique, l'hyène tachetée et l'hyène rayée » (Gaudry). En comparant les fossiles de Pikermi à ceux qu'on trouve dans des terrains plus anciens, par exemple à Sansan (Gers) ou en Auvergne, des rapports ana- logues apparaissent à Gaudry et lui indiquent que Pikermi n'est pas le seul gisement présentant des types intermédiaires. « Il en conclut que les types organisés ne sont pas des entités distinctes, qu'ils se relient d'une part à des types plus anciens, pouvant être consi- dérés comme les ancêtres des premiers, d'autre part à des types plus récents, pouvant être regardés comme leurs descendants. « Les changements qu'il constate, en passant d'une forme donnée à une forme voisine, sont si peu considérables, l’ensemble des transformations se coordonne si bien dans le temps, qu'il est conduit logiquement à conclure que les espèces d'animaux fossiles n'ont pas été immuables, qu'elles se sont transformées en d’autres; que le changement est la loi suprême du monde animé comme du monde physique » (Boule). Ainsi Gaudry apporte à la théorie de l'évolution la base la plus solide et celle qui lui manquait jusque-là, l'argument paléontologique. Et ne serait- il pas étrange et antiscientifique de ne pas tenir compte des animaux fossiles, dont les espèces sont beaucoup plus nombreuses que les formes vi- vantes? sont L'apparition du grand et remarquable ouvrage sur Les animaux fossiles et la géologie de l'Attique, où Gaudry expose ses idées sur les faunes de cette région, marque done une date importante dans l'histoire de la Paléontologie et du monde animal. L'étude de la faune de Pikermi établit la réputa- on scientifique du naturaliste parmi les savants. $ 2. — Le Mont Léberon. Les migrations. Quelques années plus tard (1872), Gaudry entre- prend des recherches au Mont Léberon, près de Cucuron (Vaucluse), dans un gisement ayant les plus grandes analogies d'âge et de faunes avec Pikermi. Il fut conduit à l'étude de ce gisement « pour rechercher, non plus si les genres et les familles des Mammifères, mais aussi les espèces ont été des entités immuables, ou bien si elles ont témoigné assez de plasticité pour faire supposer qu'elles sont descendues les unes des autres ». L'ouvrage sur le Léberon fait le pendant de l'ouvrage sur Pikermi et le complète en beaucoup de points. Gaudry, après avoir tracé un magnifique tableau de la nature miocène, conclut qu'elle est caracté- risée par le grand développement des Herbivores et établit que les Mammifères, en raison de leur complexité, ont subi des variations bien plus grandes que les Invertébrés. Il développe aussi une autre idée très importante, entrevue par Cuvier, et qui fournit aujourd'hui des résultats féconds : je veux parler des migra- tions. Si l'on constate souvent des différences notables entre deux formes successives dans des couches terrestres superposées, on ne peut expliquer ces différences qu'à l'aide de changements survenus dans l'habitat des animaux. Or, ces changements ont pour cause des régres- sions ou des transgressions marines, un exhausse- ment ou un affaissement de certains territoires conltinentaux. d Bref, les changements d'ordre biologique dans une région sont sous la dépendance des change- ments d'ordre physique, les changements fauniques sont en relation étroite avec les changements géo- graphiques. « Lorsque je dis que la différence des deux sous-étages du Miocène supérieur résulte surtout des changements survenus dans l'habitat des animaux, je ne pense pas indiquer un fait isolé dans l'histoire du développement des êtres. Il y à lieu de supposer que l’ensemble du monde orga- nique à marché d'une manière continue et que, si les géologues rencontrent de brusques apparitions de fossiles en passant d'un étage à un autre, c'est parce qu'ils ont, en général, placé les limites d'étages sur les points où il y a eu des déplacements de faunes. Le paléontologiste qui ne croit pas aux migrations et aux extinctions locales ne peut admettre les enchaînements des êtres anciens; il rencontre des apparitions, des disparitions et des retours qu'il ne saurait comprendre » (Gaudry). Ainsi s'expliquent lesliens étroits, indispensables, entre la Géologie et la Paléontologie. Un paléon- tologiste, si éminent fût-il, doit être géologue pour connaître les faunes qu'il étudie, et un géologue qui étudie les terrains sédimentaires est obligé d’être paléontologiste. PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL 249 $ 3. — Les Reptiles Primaires et la théorie de l’archétype. Après avoir envisagé l'évolution des Mammifères à la fin des temps miocènes et en avoir tiré les importantes conclusions qui précèdent, Gaudry en- treprend ensuite l'étude des animaux quadrupèdes dont on venait de découvrir des spécimens dans les schistes permiens d'Autun. Avant cette époque, les Amphibiens et les Reptiles primaires étaient presque inconnus en France. En décrivant les formes si curieuses d’Autun : le Protriton, Y Actinodon, l'Euchirosaurus, le Ste- reorachis, ele, en soulignant leurs affinités, Gaudry comble la lacune qui existait dans l'histoire de ces Vertébrés primitifs et il est conduit à discuter la manière dont s'est formé le type Vertébré et par suite l'archétype, qui a donné lieu à tant de controverses de la part des zoologistes et des embryologistes. Pour le savant paléontologiste, « les Vertébrés n'ont pas été dérivés d'animaux conformes à l'idée qu'on s'était faite de l’archétype vertébral. Les prototypes Vertébrés semblent, au contraire, avoir été éloignés de l'archétype vertébral, car l'arché- type est supposé un composé de vertèbres placées bout à bout et peu modifiées, tandis que le caractère principal des Vertébrés les plus anciens parait être d'avoir eu leur colonne vertébrale incomplètement formée. Les plus anciens poissons primaires ont été dépourvus de vertèbres ou bien ont eu des vertèbres dont le centrum n'était pas ossifié. De même, les premiers Reptiles avaient des restes de notochorde, dont les éléments étaient complètement ossifiés. On ne peut pas dire que la tête des Vertébrés n'est qu'une expansion des vertèbres, car les os de la tête et des membres ont été formés avant les vertèbres ». Ce sont là des idées contraires à la théorie d'Oken et à tant d’autres théories, mais les conclu- sions importantes de Gaudry sont réellement basées sur des faits. $ 4. — L'Homme fossile. Avant l'apparition de son premier grand travail sur Pikermi (1859), l'esprit scientifique de Gaudry s'était arrêté sur un autre sujet, qui avait soulevé également de très vives et parfois violentes dis- cussions. Il s'agissait, en effet, de la découverte de l'homme fossile, affirmée par Boucher de Perthes, au début de l’époque quaternaire, découverte niée ou fort discutée. Pour solutionner la question, Gaudry entreprit des fouilles dans la localité de Saint-Acheul (Somme), localité qui devait devenir aussi célèbre que Pikermi, et il recueillit lui- même, dans les alluvions quaternaires, des silex taillés par l'homme, associés à des ossements d'espèces animales aujourd'huiéteintes : de grands bœufs, des Æhinoceros tichorhinus, le mammouth (Elephas primigenius) et l'hippopotame. Ainsi était démontrée irréfutablement cette contemporanéité, niée par certains. Ce fut là la première base scientifique rationnelle de la classification des terrains quaternaires, qui devait plus lard faire l'objet d’un important travail (Matériaux pour l'histoire des temps quaternaires), associait un de ses jeunes élèves, aujourd'hui son successeur, M. Marcellin Boule. La série des travaux dont nous venons de parler, travaux si originaux, dont chacun marque une étape de la Paléontologie, valurent à Gaudry d'être nommé professeur de Paléontologie au Muséum d'Histoire naturelle en remplacement de Lartet (1872). Il avait là, commelaboratoire, un étroit et sombre cabinet aux fenêtres vermoulues, au pavé en briques, donnant sur la cour de la Baleine, et il n'existait pas encore, à proprement parler, de collec- tions paléontologiques. Elles étaient réparties entre les divers zoologistes. Ce n'est que sept ans plus tard (1879) que Gaudry put obtenir de rentrer en possession des fossiles de Pikermi qu'il avait recueillis et étudiés. L'administration bienveillante du Muséum daigna alors lui construire un petit hangar vitré; ce ne devait être là, heureusement, que l'amorce d'une galerie plus digne des richesses paléontologiques qu'il voulait mettre au jour et faire connaitre à tous. Mais, pour obtenir un palais analogue à celui de la Zoologie, quelles ressources de persuasion il dut déployer! Lorsqu'elle fut construite et organisée selon ses idées, elle apparut, ainsi que le disait éloquemment M. Liard, « comme une histoire, comme une philosophie; elle est, en effet, l’histoire de la création animale, rendue visible, tangible, une histoire interprétative ». Dans cette magnifique exhibition des témoins retrouvés des siècles passés, rangés suivant leur ordre d'apparition sur le globe, on a en raccourci l'histoire du monde animal, depuis les Radiolaires des terrains cambriens jusqu'au premier-né des races humaines, qui était déjà l'Homo sapiens. Mais, avant d'arriver à ce terme ultime, Gaudr} avait concrété ses idées de savant et de professeur sous la forme d'ouvrages qui eurent un retentisse- ment considérable. auquel il $ 5. — Les enchaînements du monde animal. L'unité de plan du monde animal. C'est, en effet, après six ans d'enseignement qu'il fit paraître son premier volume sur Les Ænchaïne- 250 PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL ments du monde animal. Fossiles tertiaires, | nons alors pourquoi tels fossiles se rencontrent à ouvrage au titre suggestif qui causa un enthou- siasme considérable dans le monde des naturalistes de tous les pays. Quelques années après parurent les Fossiles primaires, puis les Fossiles secondaires. Cette trilogie scientifique résume une grande partie de l’œuvre et des idées de Gaudry. Le mot « Enchaine- ments » dit assez l'esprit qui la domine. Il existe des enchaînements, des parentés évidentes entre les divers êtres qui ont apparu successivement sur le globe et ceux qui existent aujourd'hui. Et ces derniers ne sont que la résultante ou le reliquat d'une évolution dont les divers termes se trouvent dans la série des temps géologiques. On peut s'expliquer le monde actuel que par la connais- sance des mondes disparus. Il n’y à pas un monde fossile et un monde vivant, il ya un monde unique. Si l’évolution des êtres différents qui, tour à tour, ont peuplé la Terre s’est faite sous l’action de causes naturelles (modifications dues au milieu, aux besoins, aux migrations, mutations, etc.), il parait à Gaudry que « ces causes elles-mêmes ont dù agir pour la réalisation d'un plan, et c'est à découvrir ce plan, à l'exprimer qu'il a écrit de si remarquables ouvrages et qu'il a consacré sa vie » (Liard). En 1896, Gaudry publie un autre ouvrage qui est comme le complément des Ænchaïnements : c'estun Æssai de Paléontologie philosophique, dans lequel il expose ce qu'il pense des problèmes sou- levés par l'étude de la Paléontologie. Dans une série de chapitres, il montre que le monde animé forme une grande unité, dont on peut suivre le développement comme on suit celui d’un individu. Il passe successivement en revue la mul- tiplication des êtres, leur différenciation, la crois- sance de leur corps, les progrès de leur activité, de leur sensibilité, de leur intelligence. Une idée pratique qui découle de ses études est celle qui a trait à la détermination de l’âge des couches terrestres, en se basant sur le stade d'évo- lution des animaux que l’on y trouve. « Personne ne nie plus aujourd'hui que c’est surtout par le secours des fossiles qu'il est possible de déterminer l’âge des terrains. Il est admis que chacun d'eux renferme un certain nombre de fossiles earactéris- tiques. Pourquoi sont-ils caractéristiques d'une époque plutôt que d’une autre? Nul autrefois ne le savait, et cela ne pouvait manquer de déplaire, ear on n'aime pas ce qu'on ne comprend pas et on à grand’peine à le retenir. «Mais, si la Paléontologie nous fait assister à une évolution régulière du monde animé, il est évident que le stade de développement des fossiles doit correspondre à leur âge géologique; nous compre- ne tel niveau. Les stades d'évolution des fossiles que l'on nous apporte à déterminer marquent non seulement les changements de l'organisation, mais aussi ceux des principales divisions des temps géo- logiques. Si, dans deux gisements différents, je constate que, dans l’un, les animaux indiquent un état d'évolution moins avancé que dans l'autre, j'en conclus que le premier est d’une époque plus ancienne » (Gaudry). Ainsi, suivant l’état de développement de la colonne vertébrale, de la queue, des dents, des écailles qui enveloppent le corps des poissons, on distingue le Primaire, le milieu du Secondaire et le Tertiaire. Les Reptiles à colonne vertébrale impar- faitement ossifiée révèlent le Primaire; l'apogée du règne des Reptiles annonce le Secondaire, leur ressemblance avec les types actuels indique le Ter- tiaire. Qu'on montre à un paléontologiste une patte ou une dent de divers animaux d'âges différents, il saura dire souvent : voilà une patte d'un animal éocène, oligocène, miocène, etc. A part quelques cor- rectifs, l'histoire des découvertes de ces dernières années, par exemple celles relatives aux Probosci- diens, apporte une consécration éclatante à ces idées, qui ne sont que le corollaire direct de l’éro- lution continue des êtres. Une visite à la Galerie de Paléontologie du Muséum permettra de se rendre compte, à l'aide d'arguments visibles, des idées exposées par Gau- dry. Et c'est précisément sur ces arguments (en l'espèce les fossiles), puisés dans tous les pays, qu'il a établi sa doctrine, en une langue sobre, pure et harmonieuse. Dans les derniers ouvrages dont nous venons de parler, il a montré, à l’aide de nombreux dessins, très clairs, combien la doctrine transformiste était la seule qui permit d'expliquer l'histoire des ani- maux fossiles. Il a su faire plus: il a jeté sur cette histoire une chaleur communicative, un charme poétique qui rendent la lecture de ses livres aussi attrayante qu'instructive. Mais voici le savant à soixante-quinze ans. L'âge officiel de la retraite à sonné pour lui, il va falloir se séparer de ses élèves, avec lesquels il a vécu dans une intimité si grande, et des collections auxquelles il a voué un véritable amour. C’est là un sacrifice des plus pénibles, que son élève, M. Boule, devenu à son tour un maître éminent, appelé à lui succéder, sut lui éviter. 11 lui conserva son cabinet, toutes ses habitudes, et il resta dans cette maison hospitalière, qu'il avait eu tant de peine à faire créer, jusqu'à son dernier jour. Et, jusqu'à la fin, il donna l'exemple d'un PH. GLANGEAUD — ALBERT GAUDRY ET L'ÉVOLUTION DU MONDE ANIMAL 25 labeur continu, d'une lucidité et d'une fécondité étonnantes. $ 6. — Les Faunes de Patagonie. Une portion du monde antarctique. De 1904 à 1908, il dirige, en effet, ses recherches vers un monde tout nouveau pour lui, sur lequel les découvertes d'Ameghino, exposées ici en leur temps", venaient d'attirer l'attention. Ce monde des étranges Verlébrés anciens de la Patagonie, qui déroute l'esprit, accoutumé aux formes euro- péennes, asiatiques et nord-américaines, attire Gaudry. Les récoltes remarquables faites par un jeune Français, Tournoüer, des spécimens les plus curieux de cette faune, lui fournissent ma- lière à de nouvelles études qui le passionnent, car il trouve là encore des problèmes attachants à résoudre. Dans trois Mémoires successifs, il expose les idées que ses études lui ont suggérées. En voici le résumé : « Sauf au début du Tertiaire, les Mammifères terrestres de la Patagonie sont très éloignés de ceux de l'hémisphère boréal. Tous les genres sont dis- lincts et la plupart le sont à tel point qu’on ne peut les faire rentrer dans les ordres établis pour les Mammifères de nos pays. « Non seulement les genres diffèrent, mais la marche de l’évolution n'a pas été la même. Tandis que la Paléontologie de l'hémisphère boréal nous offre le spectacle d’un progrès continu, l'Amérique australe montre un arrêt de développement. À l’époque miocène, aucun animal n'y est devenu Ru- minant, Pachyderme à doigts pairs, Solipède comme nos chevaux, Proboscidien, Carnivore placentaire, Singe anthropomorphe. Cela à duré jusqu'à l'époque actuelle, car les Mastodontes, les chevaux, les cerfs, les ours, les Wachairodus, qui ont laissé leurs débris dans les couches pampéennes à côté des descendants des animaux tertiaires de la Patagonie, s'en éloignent trop pour qu'ils en aient été des transformations; il n’est pas douteux qu'ils ne soient émigrés du Nord. Les faunes formées sur le sol de la Patagonie ne se sont pas laissé influen- + ! GLanGeAUD : Les Mammifères crétacés de la Patagonie. Revue générale des Sciences, 28 février 1898. cer par les nouveaux venus : plutôt que de se modi- fier, plusieurs de leurs espèces sont mortes, attes- tant jusqu’à la fin la séparation du monde austral et du monde boréal. « Des faits analogues ont dû se passer en Australie, attendu que ses Mammifères n'ont guère dépassé les stades de nos genres éocènes. « Ainsi la surface terrestre se partagerait en deux parties : l'hémisphère boréal, où le progrès s'est continué jusqu'à nos jours et où la vie s'est mani- festée dans toute sa magnificence, et les régions antaretiques, où le monde animal a subi un arrêt de développement. Pourquoi? Nous l'ignorons jus- qu'ici. Il y a là un nouveau problème qui se pose devant les savants s'oceupant de l’évolution des êtres, mais il n'a pas dû y avoir deux centres de création, l'un dans l'hémisphère boréal, l'autre dans l'hémisphère austral. » Gaudry est mort à quatre-vingt-un ans après avoir passé les dernières années de sa vie à l'étude de ces formes antarctiques. Il laisse même un Mémoire posthume, fort remarquable, relatif au Prrothe- rium, l'une des plus curieuses créatures du monde austral, travail qui ne tardera pas à paraitre et sera comme un dernier hommage rendu à sa mémoire. Je n'ai fait qu'effleurer ici l'œuvre de Gaudry. Mais cela est suffisant pour montrer sa variété et sa grandeur. Grâce à lui, à ses contemporains et à ses disciples : à Cope Marsh et Osborn, en Amérique ; à Flower, Lydekker, en Angleterre ; à Neumayr, Zit- tel et Rütimeyer, en Autriche, en Allemagne, en Suisse; Douvillé, Boule et Depéret, en France, etc., l'évolution des mondes anciens est définitivement et solidement établie. Mais il ne faut pas oublier que Gaudry en a été le précurseur. Par la hauteur des problèmes qu'il a étudiés, par l'influence considérable qu'il a exercée et par ses conceptions doctrinales, Albert Gaudry se rattache à Lamarck; mais il est aussi, par ses observations si remarquables, le Darwin des mondes disparus, et son nom doit briller à côté de ceux de ces illustres savants. Ph. Glangeaud, Professeur de Géologie à la Faculté des Sciences de Clermont-Ferrand. 252 202 XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS LA LUTTE D’ART ILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES CHARGÉS EN EXPLOSIF Les luttes maritimes de la guerre russo-japo- naise ont mis en évidence le rôle prépondérant joué par l'artillerie ; cependant, et bien que le canon Superstructure a vf F 801! Fig.A. — Coupe au maitre d'un cuirassé type Amiral-Duperré. apparaisse comme le facteur principal du suecès dans le combat naval, l'accord est loin de régner AMIRAL DUPERRE Fig. 2. — Elévation du cuirassé Amiral Duperré. en ce qui concerne les règles de son emploi. Alors que, sur terre, l’action offensive de l'artillerie de Superstructure | | | | 0 Ben nerf . Fig. 3. — Coupe au maïtre d'un cuirassé type Carnot. | ; 0 campagne contre les troupes ennemies est caracté- risée par l'emploi presque exclusif d'un calibre voi- sin de 75 millimètres et tirant le shrapnell, les don- | | lraire, encore en discussion. La controverse roule ici, non seulement sur le calibre des bouches à feu à employer, mais encore sur le mode d’organisa- tion de leur projectile, aussi bien que sur le mode d'attaque dont on se propose de faire usage vis-à- vis du navire ennemi. Dans le cours du présent article, nous passerons en revue les diverses théories qui ont été émises au sujet du type de projectile devant constituer l'ap- provisionnement des bords, et nous essaierons de | procéder àleur mise au point, en tenant compte soit | des résultats obtenus expérimentalement, soit de S uperstructure 99m blindé inférieur __/ TILL Machines r baqAe me dei 4. Fig. — Coupe au maïtre d'un cuirassé type Charlemagne. | ceux qu'on peut logiquement déduire des diverses . | . données du matériel actuellement en usage dans les différentes marines militaires. I. — PROTECTION DU NAVIRE CUIRASSÉ MODERNE. Il convient donc d'étudier au préalable, tout au moins dans ses grandes lignes, le mode de protec- tion en usage dans les bâtiments en service. A l'origine de la marine cuirassée (type Gloire, 1859), le système défensif consistait uniquement en une cuirasse de fer forgé d’une épaisseur de 12 centi- mètres, recouvrant toutes les superstructures. L'ac- croissement rapide de la puissance de l'artillerie nécessitant une augmentation corrélative de l’épais- seur du blindage protecteur, et les diverses marines nées principales de l'artillerie de bord sont, au con- | hésitant alors à entrer dans la voie des grands ton- XXX — LA LUTTE D’ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS nages, force fut de restreindre l'étendue de la sur- | face protégée. L'évolution précédente se poursui- vant, cette surface se trouva finalement réduite à la cuirasse de ceinture et aux locaux (tourelles et ré- duits) abritant les pièces de gros calibres. Avec un tel dispositif, un coup d’enfilade ou un coup de travers passant par-dessus le can supérieur de la cuirasse pouvail aisément atteindre la machinerie. La nécessité de se sous- traire aux consé- quences désastreu- ses de coups de ce genre donna nais- sance à la concep- tion du pont blindé. L'Amiral-Duperré (1879), dont nous représen- tons ci-contre (fig. 1 et 2) la coupe au maitre et l’élé- vation, est un des premiers navires munis de cel organe protecteur. Ajoutons que, sur les navires construits d'après ce type (Magenta, Neptune, etc), le compartimentage de la partie située au-dessous du pont blin- dé était des plus rudi- mentaires. On saisit immédiate- mentle défaut Fig. 5. — Coupe au maïtre du cuirassé Mikasa. | | | | lil =] TUE En France, ce progrès fut réalisé sur les cuirassés type Carnot (1894). Dans ces navires, la ceinture Fig. 6. — Coupe au maïtre du cuirassé Césareviteh. verticale est surmontée d'un blindage en acier de 6 centimètres d'épaisseur (fig. 3), suffisant pour provoquer l'éclatement extérieur des obus en fonte chargés en ex- plosifetamor- cés à l’ogive. Dans le cas où A S05 des projecti- les de l'espèce + FT 76 e1'espe = (ll A auraient dé- | 1 HO 6 à l’inté l toné à l’inté- rieur après du mode de —— protection en pt tect1o e question, Car / DANTON . un projectile 254 de rupture peut, après perforation de la ceinture, atteindre la machine ou les chaudières. De plus, les superstructures de ces cuirassés étaient à la merci de l’artil- lerie, même de petit calibre. Ce dernier défaut, déjà très grave alors ET E avoir rencon- tré la super- — Plan en élévation du cuirassé Danton. structure, la hauteur du blindage léger était telle que, étant donné l'angle de chute probable du projectile, la détonation de celui-ci lieu à une distance aurait eu du pont blindé as- sez grande pour der- eflets de soustraire ce nier aux que les obus n'é- laient chargés qu'en poudre noire, s’'ac- défoncement résul- tant de l’action de la charge explosive. centua d'une ma- nière telle, avec les obus chargés en ex- plosif, qu'il fallut songer à protéger la batterie, dans la mesure que comportaient la puissance offensive, le rayon d'action et le tonnage adoptés. g. 8. — Plan en élévation du cuirassé Deutschland. On voit qu'ici en- FLO ANT We core, et malgré l’ac- croissement de pro- tection donné à la coque, les organes essentiels du navire pouvaient néanmoins être atteints par un obus ayant perforé la cuirasse de ceinture. 254 XXX — LA LUTTE D’ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS Le caisson blindé, qui fit pour la première fois en France son apparition sur les cuirassés type Bouvet, a pour objet de remédier à cet inconvé- nient. Conslitué latéralement par la euirasse de cein- ture, il est com- plété à sa partie inférieure et à sa partie supérieure par deux ponts cuirassés aboutis- sant aux Cans in- férieur et supé- rieur de la cui- rasse. Le pont d'é- paisseur maxima est généralement le pont supérieur, le pont inférieur jouant alors simplement le rôle de pont pare-éclats. Un blin- dage léger surmonte la cuirasse de ceinture. Schématiquement, la coupe au maître d'un cui- rassé ainsi organisé est donc celle que représente la figure 4. Dans certains navires, tels que le Mikasa, le caisson blindé est constitué (fig. 5) la- téralement par la cuirasse de ceinture et le blin- dage moyen. Le pont supérieur est alors celui dont l'épaisseur est la plus faible. La for- me trapézoïdale du pont cuirassé in- férieur du Wikasa a été adoptée sur beaucoup de ba- teaux récents. Sur le Césarewitch (fig. 6), le pont inférieur pare-éclats, au lieu de se raccorder avec le can infé- rieur de la cuirasse, descend parallèlement à la muraille de la carène pour se relier à celle-ci dans ses formes arrondies. D'une manière générale, dans les diverses ma- rines mililaires, la superficie protégée des super- structures tend à s’accroitre de plus en plus; c'est ainsi que 00 LIDIL) 178 102 127 155 Fig. 10. Z TT) nn, . WW LP M, DIE 277 Li T2 CD (4, UN U 7, 102 Fig. 9. — Plan en élévation du cuirassé King Edward VII. TE : LL Le LL LS, — Plan en élévation du cuirassé Louisiana. principales de la protection défensive du navire contre l'attaque de l'artillerie, il nous reste à examiner les moyens dont celle-ci dispose pour l'attaquer. IT. — ConpiTions A REMPLIR PAR LE PROJECTILE. Pour qu'un pro- jectile puisse cau- ser une avarie sé- rieuse à un navire cuirassé de cons- truction récente, il résulte de ce qui précède qu'il faut, ou bien que le projectile alteigne la carène, ou encore qu'il soit susceptible, après avoir traversé la cuirasse limitant latéralement le caisson blindé, d'éclater au contact du pont pare-éclats. La mise hors de combat du navire altaqué peut d’ailleurs encore résulter de l'impossibilité où se trouverait son personnel de servir l'artillerie du bord, par suite de l'inhabitabilité des tourelles ou de la bat- terie. Au combat de Tsushima, il semble bien que ce soit une telle cause qui ail par- üiellement paraly- sé l'action offen- sive d'une partie desnavires russes. C'est en escomp- tant des faits de ce genre qu'on à tout dernièrement mêné une cam- pagne très vive, dans le but de constituer exelusive- ment l’approvisionnement de l'artillerie des unités de combat en projectiles dits à grande capacité. Dans ces projectiles, l'enveloppe métallique, aussi mince que possible, sert uniquement de véhicule à une charge explosive de poids relative- ment considé- rable par rap- port au poids total du projec- FBoÿjE MANS del 2 TE F£orpenaps du 22g la hauteur de ile. Dans ce la cuirasse de cas, on néglige ceinture est Fig. 11. — Plan en élévation du cuirassé Katori. systémalique- maintenant portée à 4 mètres et que les batteries sont blin- dées sur une notable partie de leur étendue. Les plans en élévation représentés ci-contre mettent nettement ce fait en évidence (fig. 7, 8, 9, 10 et 11). Ayant ainsi mis en lumière les caractéristiques ment les effets destructeurs provenant de la force vive de l’obus pour ne retenir que ceux dus à l'énergie libérée par la détonation de l'explosif. La poudre noire ayant été presque universelle- ment abandonnée pour le chargement intérieur des projectiles, en raison de sa faible énergie poten- XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS 255 tielle, il convient tout d'abord de mettre en évi- dence les difficultés inhérentes à l'emploi des explosifs puissants pour cet usage particulier. L'explosif employé doit, en effet, être tel qu'il puisse être tiré en toute sécurité aux pressions de 3.000 kilogs par centimètre carré dont fait actuelle- ment usage l'artillerie navale; car, si l'explosion, dans l’âme, d'un obus chargé en poudre noire peut ne causer que des avaries insignifiantes à la bouche à feu qui le tire, celle d’un obus chargé en explosif entraînera, dans les mêmes conditions, la destruc- tion complète du canon qui le lance et celle du per- sonnel groupé autour de celui-ci. Cette condition impérieuse de la sécurité au départ n’est, d’ailleurs, point aisée à réaliser sans précautions spéciales. Dans les conditions de pres- sion spécifiées plus haut, l'ordre de grandeur des accélérations maxima imprimées au projectile est voisin de 100.000 mètres par seconde. Une colonne d'explosif d'un mètre de longueur exerce donc, en vertu de son inertie, une pression sur le culot de l'obus sensiblement égale à 1.500 kilogs par centi- mètre carré (en admettant que le poids spécifique de l’explosif soit égal à 1,5). Un manque de com- pacité de la charge explosive peut, par suite, pro- voquer des déformations brusques de celle-ei, sus- ceptibles d'entrainer la détonation de la masse. Ainsi donc le chargement doit être absolument compact. Pour la même raison, l'enveloppe du corps d'obus ne doit être soumise qu'à des défor- mations élastiques très faibles. Cette condition, d’ailleurs aisée à réaliser par le calcul, étant données les constantes mécaniques du métal- em- ployé, conduit, pour une longueur de chargement déterminée, à l'adoption de corps d’obus dont le tracé est fonction de la pression maximum et de la longueur du chargement. Par ailleurs, l’explosif employé doit, en outre, être tel que sa stabilité chimique soit assurée au cours de la conservation du projectile, et qu'aucune réaction dangereuse ne puisse se produire entre le chargement et le métal constituant l'obus. Si l’on ajoute à ces considérations, inhérentes à la sécurité proprement dite, celles qui sont rela- tives au prix de revient et aux facilités de charge- ment, on voit combien se limite, en pratique, le choix que l’on peut exercer parmi les explosifs puis- sants. Une autre considération intervient encore : Considérons l'impact d'un projectile chargé en explosif contre une plaque d'épaisseur € (fig. 12) et supposons que l'obus se brise après un par- cours E, dans la plaque (E, e). Si le mécanisme de mise de feu est bien établi, il n'a pas encore fonc- tionné à cet instant, de sorte que, dans l'hypothèse où l’explosif serait insensible au choc précédent, il sera projeté sans avoir explosé. Au point de vue qui nous occupe, il est done avantageux la l'explosif, provoquée par la déformation du corps que détonation spontanée de d'obus, précède la rupture de ce dernier. E, dési- gnant l'épaisseur correspondant à la détonation spontanée, on sera dans les meilleures conditions possibles en faisant en sorte que la différence E, —E, soit positive et voisine de 0. L'importance de cette considération est surtout très grande pour les obus à grande capacité d'explosif, qui sont relativement fragiles de par leur tracé même. Il s'ensuit que, chargés avec un explosif peu sensible, ils pourront se rompre, dans l'attaque d'obstacles suffisamment résistants, sans que la détonation de la charge intérieure se pro- duise, fait d'autant plus fâächeux qu'on n'escompte guère, à priori, les eflels dus à l'énergie cinétique du projectile. Cette éven- | __ = Ex tualité s'observera surtoul dans le choc sous des inci- dences très obliques, car Ex l’'obus allongé qui ricoche AUD IVRUES contre une plaque subit de ! ce chef des effets de tor- sion considérables, en mé- E2, me temps que le marteau du mécanisme tend à se À e coincer dans son logement, par suite des effets d'iner- tie provoqués par le changement de direction brus- que de lobus. Appelons V, la vitesse au choc minima, néces- saire pour provoquer la détonation de l’obus dans les conditions précédentes. Pour des distances de tir telles que la vitesse restante soit inférieure à V,, l'obus pourra se rompre sans détoner, si (ce qui est le cas général pour les obus à grande capacité) le choc est suffisamment violent pour rompre l’en- veloppe du projectile. Au contraire, les obus similaires de l'artillerie de terre, étant amorcés à l’ogive, détoneront géné- ralement dans les mêmes conditions, pour les raisons qui seront données plus loin. Les obstacles qu'ils sont destinés à attaquer étant, en outre, souvent peu résistants (terres, maconneries ordi- naires), la rupture prématurée du corps d'obus ne sera pas le cas général, comme dans l'attaque oblique, à faible vitesse, des blindages. Enfin, comme les projectiles en question sont lancés en tir courbe ou vertical, le ricochet sur l'obstacle sera exceptionnel. Les desiderata afférents à l'emploi des explosifs élant supposés réalisés, il nous faut déterminer l’organisation et l'emplacement du système d’amor- cage. L Qt (er) XXX — LA LUTTE D’ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS Au début de l'emploi des explosifs pour le char- gement des projectiles de l'artillerie navale, on se contentait de placer le système en question dans l'œil d'ogive de l’'obus. L'expérience ne tarda pas à démontrer que les projectiles ainsi établis éclataient au contact des tôles minces, et que, dans le cas d'attaque de blindages même légers, les résultats obtenus étaient insignifiants. Ce fait tenait, comme on l’a reconnu depuis, à ce que l’explosif excitateur contenu dans le système d'amorcage détonait, par suite de la déformation de ce dernier au choc contre l'obstacle. Dans ces conditions, les dispositifs imaginés pour retarder la transmission de la mise de feu de la fusée à la charge explosive ne pouvaient évidemment remplir leur rôle. Pour se mettre à l'abri de la cause perturbatrice ci-dessus, on a donc élé conduit à placer l'appareil d’amorcage au culot du projectile. C’est dans cette voie que sont entrées les diverses marines qui font usage d’obus chargés en explosif. L'organisation proprement dite du système d'amorcage comporte un mécanisme de mise de feu actionné par le choc sur l’obstacle.Ce mécanisme allume un explosif excitateur, qui provoque à son tour la détonation de la charge. Dans la plupart des cas, l’explosif excitateur est généralement constitué par une forte amorce au fulminate de mercure, soigneusement calée dans son logement. Certaines artilleries intercalent entre le mécanisme de mise de feu et l'explosif excitateur un retard constitué par un grain de poudre comprimée. Le rôle de ce relard est de retarder l’inflammation de l'explosif excilateur, de manière à permettre au projectile de ne détoner qu'après la traversée de l'obstacle contre lequel il est tiré. Il nous reste à considérer le tracé du projectile proprement dit. Remarquons, à cet égard, que, pour un canon de calibre déterminé, lançant un projectile chargé en explosif de poids donné p', notre choix peut se fixer sur une série de projec- tiles. Les deux termes extrèmes de cette série sont, d'une part, l'obus à parois épaisses contenant la quantité d’explosif strictement nécessaire pour dé- terminer sa fragmentation, et, d'autre part, l'obus à parois minces contenant la charge maxima d'ex- plosif susceptible d'être Lirée en toute sécurité. Pour ce dernier, la détermination du problème technique du tracé doit être complétée par la prise en considération des conditions relatives à la sta- bilité sur la trajectoire aérienne. Par suite de la grande quantité d'explosif qu'il contient et du faible poids spécifique de celui-ci ‘ Dans la pratique, p désignant le poids (en kilogs), a dési- gnant le calibre (en décimètres), on ne fait usage que de , {=} projectiles tels que le rapport £ soit compris entre 12 et 16. | par rapport à l'acier (1,5 pour l'explosif — 7,6 pour l'acier), l’obus à grande capacité est, en effet, beau- coup plus allongé que l’obus à parois épaisses: parlant, il a une tendance à culbuter sur sa trajec- toire. Pour obtenir sa stabilité, on peut augmenter soit sa vitesse initiale V,, soit l'inclinaison finale des rayures du canon dans lequel il est tiré. On est limité dans la première de ces deux voies par la résistance du projectile et la sécurité du chargement, et dans la seconde par la tenue des ceintures de for- cement, car celles-ci sont arasées au début du for- cement, lorsque, toutes choses égales d’ailleurs, l'in- clinaison des rayures dépasse une limite déterminée En fait, et étant donnés les résultats expérimen - laux acquis jusqu’à ce jour, on peut affirmer que la réalisation d’obus à grande capacité (c'est-à-dir> d'obus à parois minces, d'au moins 4 calibres de longueur) n’est possible qu'à la condition de ne pas dépasser au tir des pressions maxima de l’ordre de 1.800 kilogs par centimètre carré et de faire usage de rayures relativement très inclinées sur l'axe (inclinaison voisine de 7°). Il résulte de là plusieurs conséquences impor- tantes : 1° Les projectiles en question, étant tirés à des pressions maxima relativement faibles, auront des vitesses initiales inférieures à celle des projectiles ordinaires tirés à forte pression dans des bouches à feu adaptées à leur emploi; 2 En raison de leur faible inclinaison de rayures (4), ces dernières ne sauraient lancer de projectiles à grande capacité ; 3° Réciproquement, un obus à parois d'épaisseur moyenne ou considérable ne saurait être tiré à forte pression par un Canon approprié au tir d'obus à grande capacité; car, en supposant que ce canon eût la résistance nécessaire pour supporter les pres- sions réalisées dans ces tirs, l'inclinaison des rayures entrainerait à coup sûr l’arasement des ceintures de l’obus dès le début de son mouvement dans l'âme. Il en résulterait le basculement du pro- jectile dès sa sortie de la bouche à feu. Ainsi donc, il faut un matériel spécial pour tirer l'obus à grande capacité, et, à longueur d'âme égale, la vitesse initiale de ce projectile sera notablement | inférieure à celle de l'obus ordinaire de mème poids et de même calibre. Ces divers points étant acquis, il nous reste à comparer les effets destructeurs du projectile à grande capacité chargé en explosif avec ceux pro- duits par l’obus à parois plus épaisses et chargé comme le précédent. Du résultat de cette compa- “aison découlera tout naturellement la conclusion concernant le point de savoir s'il convient ou non d'installer à bord un matériel approprié au tir de l'obus à grande capacité. XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EX PLOSIFS 257 Les renseignements dont nous disposons pour la comparaison précitée proviennent de deux sources différentes : 4° L'expérimentation au polygone et les tirs contre des navires servant de cibles; 2% Les documents ayant trait aux combats de la guerre russo-japonaise !. On ne peut guère Lirer des expériences de poly- gone que des conclusions au sujet des résultats obtenus dans l'attaque des blindages. Les effets de souffle et d'intoxication produits par la détonation «es charges explosives ne pourront pas y être obser- vés, à moins de procéder à de vastes installations en tôlerie simulant le compartimentage des navires modernes. Le coût de telles installations explique la rareté d'expériences de ce genre. Depuis quelques années, plusieurs marines mili- taires ont procédé à des expériences de tir contre des coques de navires démodés, à la suite desquelles on a pu se rendre compte assez approximativement des effets du souffle. Nous disons approximative- ment, car, les navires dont il s’agit étant générale- mentägés d'au moins vingt ans, leur compartimen- tage et leur mode de protection sont beaucoup plus rudimentaires que celui des navires récents. Les Lirs qu’on va entreprendre prochainement en France contre l’Zéna offriront done un intérêt docu- mentaire de premier ordre, étant donnée la date de mise en service de ce cuirassé (1902). Relativement aux effets d'intoxication, auxquels certaines per- sonnes attribuent une importance telle qu'on a été jusqu'à parler de « bombardement par l’'oxyde de carbone », les seules sources de renseignements ue nous avons à notre disposilion sont les écrits des officiers russes ayant assisté aux combats livrés dans les mers d'Extrême-Orient. Ils ont été is à contribution pour la rédaction de la présente étude. III. — EFFETS PRODUITS SUR LES BLINDAGES. a) Obus de rupture. — Les obus de rupture en usage dans les différentes marines de guerre sont en acier chromé. Ils sont pourvus d’une coiffe et contiennent une charge d’explosif dont le poids est très faible eu égard au poids total du projectile (environ le 1/40). Lorsqu'ils sont animés d'une force vive suffisante et que le métal qui les con- stitue est de bonne qualité, ils peuvent, sous l’in- cidence de 15°, traverser des plaques en acier cémenté d’une épaisseur égale à leur calibre. Dans ces conditions, qu'ils détonent ou non dans la Nous omettons à dessein les documents relatifs aux com- bats du Yalou et de Santiago, les Marines japonaise et amé- ricaine n'y ayant pas fait usage de projectiles chargés en æxplosifs. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. plaque, ilyaproduction d'effets destructeurs au delà. b) Obus de semi-rupture. — Ces projectiles con- stituent l'échelon intermédiaire entre le précédent et l’obus à grande capacité. Ils sont également constitués par de l’acier chromé, avec ou sans adjonction de nickel, et sont pourvus d’une coiffe. Le rapport de la charge explosive au poids total est voisin de 1/15. Sous l'incidence de 139, ils peuvent traverser sans déformation sensible des plaques en acier spécial d'une épaisseur égale à la moitié de leur calibre et éclater au delà. Lancés contre des plaques de l'épaisseur du calibre, mais avec des vitesses très supérieures aux vitesses minima assurant le passage de l’obus de rupture, ils peuvent encore les traverser et produire des effets appréciables au delà. ce) Obus à grande capacité. — Les projectiles de cette catégorie sont en acier, de nuance assez douce pour pouvoir supporter le mode de fabri- cation par étirage. Leurs parois sont, par suite, relativement minces, et la proportion qui existe Fig. 13. entre le poids de l’explosif et le poids total du pro- jeetile est d'environ 1/4. Tirés sous des incidences voisines de la normale, contre des plaques en acier spécial d'une épaisseur voisine du tiers du calibre, ils sont susceptibles de les percer; mais, dans ce cas, les effets produits au delà sont assez faibles. Ils deviennent considérables si le projec- tile, lancé sous une incidence très oblique, détone au contact même de la plaque (fig. 13). Cette différence d'action s'explique d’aileurs aisé- ment, en remarquant que, dans le premier cas, c’est seulement une fraction de la charge qui détone au contact de la plaque, alors que, dans le second cas, c’est la charge tout entière. Tirés dans les mêmes conditions plaques en acier cémenté, de l'épaisseur du calibre, les effets produits sont insignifiants. Il résulte de ce qui précède que l’obus à grande capacité peut être considéré comme à peu près dépourvu de toute efficacité dans l'attaque des blindages. A l'appui de cette conclusion, on peu: citer les tirs effectués en 1901 par la marine améri- caine pour l’expérimentation des obus Gathmann. D'après Gathmann, simple mécanicien et assez étranger aux choses de l'artillerie, la détonation d’une quantité notable d'explosif au contact d'une g* contre des 258 XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS cuirasse devait entrainer la destruction de celle-ci, | comparatifs exécutés avec les deux types de pro- füt-elle aussi épaisse que les cuirasses employées | jectiles. pour la protection des ceintures des cuirassés. La Commission américaine tira de ces résultats Bien que le Service de l’Artillerie, consulté à ce | les conclusions suivantes : sujet, eût émis un avis nettement défavorable, le L'effet séparé de chaque coup et l'effet accumulé Congrès, sous l'influence d’une campagne de presse | des trois coups du canon rayé réglementaire ont été, habilement menée, décida d’allouer les crédits | dans chaque cas, supérieurs à ceux du canon nécessaires pour l'exécution des expériences coû- | Gathmann. Aucun des coups de cette dernière teuses destinées à vérifier les idées de Gathmann. | bouche à feu n'aurait mis en péril un cuirassé Ces expériences, effectuées en 1901, consistèrent | moderne. Le système expérimenté ne constitue, en des tirs comparatifs, exécutés, d'une part, | par conséquent, pas un moyen d'attaque efficace avec des projectiles Gathmann du poids total de | des navires cuirassés. TABLEAU I. — Résultats du tir des obus Gathmann. NUMÉROS POIDS POIDS NATURE VITESSE des total du pro-|de la charge de du EFFETS PRODUITS SUR LA CIBLE coups jectile intérieure l'explosif choc 1 332 kgs. | 225 kgs. Coton 503% La cible est atteinte au centre et le coton-poudre détone à l'ins- poudre tant du choc. La plaque est cintrée de 30 “= sur son grand humide. axe et de 13 mm sur son petit axe. Léger écaillage au point d'impact. Les tôles d'appui du caisson cellulaire à l'arrière sont pliées de 102 mm, Le matelas, les cadres derrière la eui- rasse et les montants en bois contre lesquels l’ensemble reposait sont indemnes, à part le cisaillement de quelques rivets. 634 kgs. Coton La cible est atteinte au centre de sa partie droite. Mêmes effets poudre généraux que ceux qu'on a observés lors du coup précédent. humide. La plaque, le matelas, les cadres derrière la cuirasse et les supports en bois appuyant l’ensemble sont indemnes. Les tôles d'appui formant les côtés du cofferdam derrière l'encadrement sont pliées davantage, ce qui permet un refou- lement du bord de droite de la plaque, de 085 vers l'arrière. Le bord de gauche revient à sa place primitive, la plaque est pratiquement indemne. Coton Le coup est dirigé au centre de la plaque. Il se produit une poudre fente verticale intéressant toute l'épaisseur, à une distance humide. de 2m44 de l'impact, passant par une rangée de trous de bou- lons et l'impact du coup précédent. Le matelas, les tôles de platelage et les supports en bois sont légèrement déplacés. Le bord gauche de la plaque est refoulé d'environ 0m380 sous la tôle de dessus, le côté inférieur gauche de la plaque est repoussé de 1m21, Toute la muraille, y compris les supports en bois contre lesquels la tranche reposait, est tournée vers la gauche d'environ 300. La tôle de dessus du bordage de pont est détachée et rejetée vers l'arrière. La charpente métallique située derrière la cuirasse sur le côte gauche de la cible est affaissée. 830 kilogs, contenant environ 230 kilogs de coton Par contre, la Commission estimait qu'un coup poudre humide, et, d'autre part, avec des obus | quelconque, tiré avec un des obus réglementaires, réglementaires de rupture et de semi-rupture | aurait causé de sérieux dommages au point de vue de 305, chargés en explosif. de la flottabilité, de la machinerie, de l'armement Les projectiles Gathmann étaient tirés dans un | et du personnel. Elle insista, en outre, sur le fait canon spécial du calibre 557 m/m 2 (18 pouces). | que, par suite de sa moindre vitesse initiale, les L'amorcage consistait en une rondelle de coton | chances d'atteinte de l’obus Gathmann étaient in- poudre sec, placée au contact du coton poudre | férieures à celles de l’obus réglementaire de rupture humide el excitée par un détonaleur contenant | ou de semi-rupture. 5 gr. 25 de fulminate. Quant à la cible, elle con- Les expériences similaires entreprises sur divers sislait en une plaque d'acier Krupp ayant 4,90 de | polygones européens ayant confirmé ces résultats, longueur, 2%,30 de hauteur et 0,292 d'épaisseur. | nous admettrons dès à présent qu'au point de vue Elle était fixée sur un caisson en tôlerie représen- | spécial de l'attaque des blindages l’obus à grande tant la muraille d’un cuirassé. capacité est très nettement inférieur aux obus de Les tableaux T'et IT donnent les résultats des tirs | rupture et de semi-ruplure. XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS 259 IV. — ATTAQUE DES INFRASTRUCTURES. Au-dessous du can inférieur de la cuirasse de ceinture, les navires actuels n’ont, en général, d'autre protection que celle résultant du comparti- mentage de leur coque. Nous disons en général, car, sur certaines unités de combat telles que le Césarewitch, on a abrité tous les organes essen- tiels par un blindage léger en dos de tortue se raccordant avec les fonds du navire. Quoi qu'il en soit de la valeur de ce dispositif, on peut affirmer que la muraille extérieure immergée n'offre aucune résistance sérieuse à un projectile calme, À sera une fonction bien déterminée de la forme du projectile et des conditions de tir; mais, si la mer est agitée, on concoit qu'il pourra arriver qu'un obus pénètre définitivement dans l’eau à une distance moindre que la distance À que nous venons de définir : On peut citer, à cet égard, deux exemples re- marquables : 1° Le 10 août 1904, le Césarewitch est atteint sous la flottaison, à tribord, à l’aplomb de la tourelle de 15 centimètres avant et à environ 2,25 sous la ligne d’eau au-dessous de la cuirasse de ceinture. Le coup à rasé le can inférieur de la cuirasse. Les tôles, laminées par le choc, ont été embouties et déformées de 32,50 TagLeAU Il. — Obus réglementaire de 305". NUMÉROS POIDS des total du pro coups jectile POIDS NATURE de la charge de intérieure l'explosif VITESSE EFFETS PRODUITS SUR LA CIBLE L'impact est au centre. Le projectile perfore et éclate derrière et au contact de la cible. Le matelas, les tôles de platelage, les cadres et les tôles de cofferdam sont complètement démo- lis dans le prolongement du trou d'impact. Des fragments de la plaque et du projectile traversent la muraille et sont retrouvés à des distances de 45 à 60 mètres en arrière de la butte de sable placée en arrière de la muraille. La butte elle- mème présente une souille de 4°60 X 2m. Les rivets de la tôle de dessus sont cisaillés, les tôles latérales du cofferdam sont pliées de 090 et la plaque repoussée en bloc vers l'ar- rière d'environ 19mm, mentaire. rupture. 456 kgs. Obus de rupture. 10 kgs 400/Maximite . L'impact est au centre de la partie droite de la plaque. L'obus détone dans la plaque en disloquant la partie droite et démo- lissant les cadres derrière la cuirasse et les tôles du cofferdam. 415 kgs. Obus de semi- rupture. 27 kgs 180| Règle- L'impact est au centre de la partie inférieure gauche de la mentaire. plaque. La plaque est totalement brisée, le matelas, les cadres, poutres et tôles de cofferdam sont complètement brisés. La plaque offre une brèche de 120 sur 2"40 de longueur. Le quart inférieur gauche de la plaque est brisé en six gros fragments et beaucoup de petits, le plus grand ayant 1735 sur 4#3%. Ce dernier, avec le matelas et les tôles de platelage, est arraché de la muraille et tourné vers l’intérieur. Un gros fragment d'environ 060 X 0m75 X 0292 et pesant environ 1100 kgs. est projeté à travers la cible et la butte, à 40° en arrière de cette dernière. 11 en est de même de nombreux fragments de la plaque et du projectile. dans le sens de la longueur. Il n’y à pas de déchirure ; mais, les rivets ayant sauté, environ 150 (onnes d’eau pénètrent par les trous des rivets dans la tranche limitée par le pont cuirassé ?. 2° Au cours de tirs effectués en novembre 1907 par la flotte anglaise de la Manche sur ie cuirassé déclassé Hero?, ce navire coula sans que la cuirasse eût été traversée au-dessous de la flottaison. Il est, par suite, vraisemblable, au dire des témoins, qu'un des obus explosifs à forte charge employé dans les tirs esttomhé à une certaine distance en deçà du navire et qu'il a continué son trajet sous l’eau sur une petite longueur pour atteindre le Hero au-dessous de la ceinture cui- rassée en agissant comme une torpille*. A noter que le tir de l’escadre s’exécutait à une distance du Hero comprise entre 5.500 et 7.300 mètres. explosif d’un calibre moyen, venant éclater à son contact. À priori et étant données les conséquences graves qui peuvent découler de la production d'ou- vertures dans l'infrastructure, il apparaît donc comme extrêmement intéressant de pouvoir atta- quer un navire dans cette région. Les projectiles ogivaux employés par l'artillerie pénètrent bien dans l'eau, mais l'expérience jour- nalière montre qu'à moins de tirer sous des angles dépassant de beaucoup les angles de projection utilisés par les canons modernes pour les distances extrêmes de combat, l'obus logival se relève dans son parcours sous-marin et sort de l’eau. Il effectue 1 Marine Rundschau, 1904, cité par le Yacht, numéro du ainsi une série de ricochets jusqu’à son immersion définitive. Appelons À la distance qui sépare ce point du canon ayant lancé le projectile. En eau 19 novembre 1904. (La bataille du 10 août. Les avaries du Césarewitch.) ? Lancé en 1888. 3 Revue d'Artillerie, mai 1908. Renseignements divers. 260 XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS Ainsi donc, il est parfois possible que, même avec des obus ogivaux ordinaires, on puisse atteindre l'infrastructure aux distances de combat signalées plus haut. Est-il possible de généraliser ce résultat et de le réaliser à des distances infé- rieures ? Sir Joseph Whitworth, dans ses expériences faites en août 1868”, remarqua que le projectile à Feoprem tp del Fig. 14. — Dispositif des expériences de tir sous l'eau de Sir J. Whitworth. tête plate est seul capable de fournir une solution du problème. Il s'exprime ainsi à cet égard : « Si un projectile est destiné à percer les vaisseaux sous la ligne d’eau, il faut qu'il soit à tête plate. Aucune autre forme n’est admissible pour la pénétration sous l'eau. On comprendra mieux la question de pénétration des projectiles, si je donne à présent les détails d’une expérience exécutée au mois d'août 1868. « La plaque de fer qu'on voit sur la figure 14 était immergée verticalement dans l’eau et le point qu'on voulait atteindre était de 254 millimètres au-dessous de la surface de l’eau. « On employa un canon de 1 livre; il était pointé sous l'angle de 7°,7 au-dessous de l'horizon, et la lon- sueur du trajet sous l’eau, c'est-à-dire la longueur AB, était de 2,030. Les projectiles tirés étaient des projec- liles variant principalement par la forme de la tête. On les voit sur la figure 15, où ils sont marqués par les n°s 4-2-3. « Les projectiles n° 1 étaient en acier Wbitworth à tète plate. Ils ont suivi sous l’eau une ligne aussi voi- fre Fig. 15. — Formes des projectiles employés dans les expériences de tir sous l’eau. sine que possible de la ligne droite et sont venus frapper le but aux points marqués 1 (lig. 16). « Les projectiles n° 2 furent déviés vers le haut et vinrent frapper le but au point marqué 2, tout juste au-dessous de la ligne d’eau. « Les projectiles n° 3 étaient en fonte blanche trempée d’après la méthode indiquée par le Major Pal- 1 Sin J. Wurrwonta : On Guns and Steel. Londres, 1873 (traducliun du colonel H. de Poyen Bellisle). liser; ils ont frappé le but aux points marqués 3 à 228 millimètres au-dessus de la ligne d'eau. « Le dessin indique exactement le chemin suivi par un des projectiles n° 3. Les écrans, placés à intervailes égaux de 508 millimètres, ont été perforés aux points C, D, E, et finalement le projectile a frappé le but au point F. La résistance de l’eau a rapidement dévié le projectile vers le haut, et il n'avait plus aucune force de pénétration, même à la profondeur modérée de 254 millimètres. C’est une démonstration parfaite de l'influence de la forme de la tête sur la pénétration. Ces expériences montrent qu'il est possible de faire pénétrer sous l'eau des projectiles faisant avec la surface un angle de 7°,7. Soit X la portée correspondant à un tel angle de chute; un projec- tile à grande capacité, organisé ad hoc, pourra, par suite, pénétrer sous l’eau et arriver au contact de la partie non prolégée de la carène d’un navire, à la condition que la distance le séparant de ce dernier soit supérieure à X. Si l’on admet, ce qui est sans doute sensiblement vrai, que l'accélération négative subie par le projectile dans son parcours sous-marin est à chaque instant proportion- nelle au carré de sa vitesse, la perte de force vive qu'il subira de ce chef dans les premiers instants du par- cours en question sera très grande. Leseffetsmécaniques qu'on peut escompter du fait de l'impact avec la coque se- ront, par suite, très faibles: mais il y a lieu de remarquer que, dans la région où la ca- rène est supposée atteinte, elle est simplement constituée par une coque cellulaire en tôlerie rela- tivement peu résistante. Le projectile pourra donc, malgré tout, pénétrer dans l'intérieur du navire, pourvu que sa vitesse soit encore de l’ordre de 50 mètres par seconde. Ces efforts de perforation pourront, d’ailleurs, être négligés si l'on sait uti- liser l'énergie potentielle de la charge explosive, en provoquant sa détonation en temps voulu à l’aide d’une fusée appropriée. Supposons ce délicat problème résolu et examinons s'il est avantageux de doter les navires du moyen d'attaque dont nous venons d'exposer le principe théorique. Remarquons immédiatement que, pour produire des avaries, sinon fatales du moins très graves, le projectile employé devra contenir un poids d’ex- plosif de même ordre que ceux qui constituent actuellement la charge des torpilles, soit environ 40 kilogs d’explosif; on est, par suite, conduit à faire usage d'un obus à grande capacité pour un Fig. 16. — Points où les projectiles ont at- teint le but dans les experiences de tir sous l'eau. XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS calibre voisin de 24 centimètres. Or, nous avons vu qu'un tel projectile ne peut être lancé que par une bouche à feu spéciale, tirant à faible pression et ayant une forte inclinaison de rayures. Nous sommes done amené à conclure qu'on ne pourra faire usage du mode d'attaque par l'infrastructure qu’à la condition de doter le navire assaillant du matériel d'artillerie du type ci-dessus. On pourrait, il est vrai, objecter à ce raisonne- ment qu'à la condition d'augmenter le calibre du projectile, on pourra toujours loger la charge explosive de 40 kilogs dans un obus de semi-rup- ture lancé par un canon à tir tendu. La chose est possible; toutefois, il importe de remarquer que l'angle de chute nécessaire pour obtenir la pénétra- tion dans l'eau d'un projectile de ce type se trouve correspondre à des distances minima de combat de l’ordre de 8.000 mètres. On ne pourrait donc attaquer systématiquement l'infrastructure qu'à des distances où la précision du tir commence à ètre faible. Il résulte de ce qui précède que l'installation à bord d’un matériel spécial adapté au tir des obus à grande capacité ne parait pas devoir être prise en considération. Supposons, en effet, le combat engagé, et soit X la distance à partir de laquelle l'attaque par l'infrastructure devient possible. Pour des distances supérieures à X, on pourra avoir recours à ce mode d'attaque; mais, si la distance entre les navires devient inférieure à cette limite, on sera obligé d'y renoncer. Supposons alors l'un des navires armé exclusivement de canons à tir tendu lançant des projectiles de rupture ou de semi-rupture, l’autre n'étant armé que de canons à grande inclinaison de rayure, lançant des obus à grande capacité; il est clair qu'à l'intérieur de la zone de combat de rayon < X, ce dernier sera complètement à la merci de son adversaire. Im- puissant à perforer les blindages de celui-ci, son propre cuirassement se trouvera, par contre, exposé à un tir perforant dans les conditions de distance qui en assurent l'efficacité maxima. Une éventualité aussi désastreuse pourra, sans doute, être évitée par le navire muni de canons à tir courbe, s’il est doué d'une supériorité de vitesse assez grande pour qu'il puisse choisir sa distance de combat et la rendre supérieurè à X. C’est à cette seule condilion qu'il pourra éviter une destruction certaine. : L'intervalle entre les navires devenant supérieur à X, l’obus torpille pourra remplir son rôle spécial et attaquer efficacement les parties non protégées de la carène. Un autre inconvénient se produira alors dans l'attaque des superstructures, car, en raison de la diminution des vitesses restantes, il pourra se faire que les projectiles, arrivant sous 261 une incidence oblique assez grande, se rompentl sans détoner, par suite de l'insuffisance de la vi- tesse au choc. à Ainsi, à faible distance, l’obus à grande capacité serait impuissant à remplir un rôle de torpille, et il est, de plus, sans efficacité dans l'attaque des blindages. Aux grandes distances, il pourrait agir comme torpille; mais, outre qu'il est inefficace dans l'at- taque des blindages, il sera souvent sans effet contre les superstructures par suile de sa fragilité. Aux distances intermédiaires, il est susceptible de remplir efficacement son rôle de torpille et de causer, en outre, de sérieux dégâts dans les super- structures. En tenant compte de l'efficacité des coups courts tombant dans une certaine zone, on pourrait croire que ce fait, en augmentant les chances d'atteinte de l'obus-torpille, lui donne par là même une supé- riorité sur l'obus ordinaire. Dans la réalité, cette supériorité serait à peu près annulée, si l'on tient compte du manque d'efficacité des obus-torpilles touchant la cuirasse de ceinture et de la différence de grandeur des écarts probables des canons tirant les deux projectiles, différence provenant _elle- même des vitesses initiales différentes des deux projectiles. En résumé, un navire armé de canons à tir tendu, tirant l’obus ordinaire de rupture ou de semi-rup- ture chargé en explosif, peut combattre efficace- ment, à toutes les distances de combat, un cuirassé armé de canons à grande inclinaison de rayure lançant des obus-torpilles. La réciproque n'étant pas vraie aux petites distances de combat, nous condamnons nettement le dernier des deux modes d'armement précités. Il ne s'ensuit d'ailleurs pas, pour cela, que l'obus-torpille soit à rejeter pour la défense des côtes. Tout au contraire, nous allons voir que, dans ce cas, son emploi apparait comme étant des plus avantageux, surtout lorsqu'il est tiré par des bat- teries hautes. Pour nous en rendre compte, considérons une bat- terie A (fig. 17), établie à l'altitude H au-dessus du niveau xy de la mer. Le navire ennemi étant en B, à la limite de la zone d'angle mort de la batterie, soient : e, l'angle de site ABX; à, l’angle d'arrivée du projectile du cuirassé dans la batterie (cet angle sera compté positivement au-dessous de l'horizontale AZ); | «, l'angle de tir des canons de la batterie pour la portée X; À £ w, l'angle de chute des tables du canon cuirassé cor- respondant à la portée X. 1 : L'examen de la figure fait ressortir la relation immé- diate : Ô —e€ D. D'autre part, en admettant que la zone d'angle mort 262 2 XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS corresponde à un pointage négatif extrême de — 5°, on aura : d'où l’on tire : Ô— 50 + (a— 0). Or, pour que le tir du navire contre la batterie soit efficace, il faut évidemment que ses projectiles puissent arriver dans la batterie ou tout au moins exploser sur la plongée. La limite supérieure du ricochet sans explo- sion étant caractérisée par une valeur de à voisine de 30, la limite d'efficacité du tir du navire sera donc caractérisée par l'inégalité : w — à < 20, Supposons la batterie armée avec des canons de 24 centimètres tirant des obus à grande capacité, et le navire avec des canons de même calibre, mais de mo- dèles récents et tirant des obus ordinaires. La limite de la zone d’angle mort de la batterie (c'est-à-dire la portée X) sera, en faisant H égal à 100 mètres, voisine de 1.000 mètres, tandis que la distance correspondant à d—— 3° sera d'à peu près 5.800 mètres. La comparaison de ces chiffres montre immédia- tement l'impuissance du navire à combattre effi- cacement la batterie, alors qu'au contraire celle-ci est en mesure d'atteindre son adversaire à toutes les distances de combat supérieures à 4.000 mètres. Si l’on ajoute à ces considérations : 1° la supé- riorité que donne au tir de la batterie la stabilité de plate-forme, ainsi que la facilité de réglage que lui donne l'observation précise des points de chute de ses projectiles ; 2° la gravité des avaries du cuirassé pouvant résulter de coups fichants atteignant son infrastructure ou les ouvertures du pont cuirassé, et la légèreté des dommages causés à la batterie par des coups atteignant les plongées, — on se rendra compte que l'installation de batteries hautes lançant des obus-torpilles constitue, en fait, l'interdiction pour un navire d'évoluer dans le champ de tir de la batterie. Il n’y à d’ailleurs aucun avantage à constituer l'armement de la batterie haute par des canons à tir tendu, car, par suite de la réduction des angles de chute, on diminuerait les chances d'atteinte directe du pont blindé supérieur, en même temps que la gravité des effets de défoncement résultant de la détonation de l'obus au contact de ce pont. Enfin, on démontre que, pour les distances de combat comprises entre 1.000 et 5.000 mètres, les probabilités qu'a la batterie d'atteindre le navire sont, dans le cas du tir courbe (vitesses voisines de 450 mètres), supérieures à celles qu'on réaliserait dans le cas d'un tir tendu (vitesses supérieures à 800 mètres). ; Dans le cas présent, la conclusion à laquelle nous arrivons est done en opposition avec celle que nous avions formulée en étudiant les conditions du combat de navire contre navire. V. — EFFETS PRODUITS PAR LA DÉTONATION DE LA CHARGE EXPLOSIVE. Pour achever de nous éclairer définitivement sur la question de l’organisation et du tracé du projec- tile, il nous reste à examiner la nature des effets produits par la détonation de la charge explosive. Les effets destructeurs produits par la détonation d’obus contenant une charge d’explosif puissant, tels que le coton-poudre ou l'acide picrique, sont dus soit à l'énergie cinétique des éclats, soit aux effets mécaniques engendrés par les gaz de l’explo- sion. Pour nous rendre compte des premiers, nous examinerons le mode de fragmentation des pro- jectiles. $ 1. — Effets produits par les éclats. Les obus en fonte des tracés ordinaires (épaisseur totale voisine du 1/3 du calibre) sont pour ainsi dire pulvérisés et réduits en grenaille, à l'exception de l’ogive qui peut fournir des fragments un peu plus volumineux. Les obus en acier à parois minces (obus à grande capacité) sont décou- pés en lamelles très minces telles que ab, (fig. 18), délimitées par des plans non méri- diens. Ces lamelles, à arêtes vives el coupan- tes, sont elles-mêmes fragmentées suivant leur longueur. L'épaisseur des pa- rois du projectile aug- mentant, l'importance des éclats croît, sur- tout dans les parties de l'obus, telles que l'ogive, qui ne sont pas en contact direct avec l’explosif. Cepen- dant, on observe toujours la production d’un grand nombre de petits éclats. D’une manière générale, la vitesse des éclats est considérable et d'autant plus grande que la partie de l’obus d’où ils proviennent Fig. 18. — Mode de fragmen- tation des obus en acier à parois minces. XXX — LA LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS est moins épaisse ou en contact plus immédialavee l'explosif. C'est ainsi que des fragments d'ogive peuvent n'avoir que des vitesses de 6 à 700 mètres, alors que les éclats provenant du corps cylindrique donnent souvent lieu à l'enregistrement de vitesses de l’ordre de 1.200 à 1.500 mètres par seconde. La grandeur de ces vitesses montre que, dans leur choc sur les obstacles entrainant la délonation du pro- jectile à explosif, il peut y avoir retour des éclats en arrière. De nombreux faits de ce genre ont été enre- gistrés dans les tirs de polygone. Pendant la guerre russo-japonaise', un obus éclata sur lA/maz, à l'arrière, dans une légère tôle de paroi du côté opposé à l'ennemi, après avoir traversé le pont sans rien toucher ; ses éclats, projetés en arrière, tuèrent ou blessèrent une quinzaine d'hommes. Étant donnée la grandeur des vitesses observées, les effets de pénétration produits par les éclats peuvent être considérables, à la condition toutefois que les obstacles soient peu éloignés du lieu de l'explosion (quelques mètres pour les petits éclats), les éclats perdant très rapidement leur vitesse dans le trajet aérien, par suite de leur faible masse rela- tive. A l'intérieur de la zone dangereuse, le matériel et le personnel seront criblés d'éclats, et la mort des combattants pourra survenir sans qu'on observe de blessures apparentes. Relativement au matériel, il sera mis hors de service par l'impossibilité où l’on se trouvera de se servir des mécanismes (dégradation des engrenages, rupture des tuyaux, production de bavures sur les glissières). Enfin, étant donnés le grand nombre et la petitesse des éclats, ainsi que la facilité avec laquelle ils se réfléchissent sur des parois en tôlerie ou sur les blindages, ils peuvent être dangereux, même pour le personnel en service à l'intérieur des blockhaus ou des tourelles, en raison des ouvertures de ces locaux. La guerre russo-japonaise a fourni de nombreux exemples d’atteintes de cette nature; c’est ainsi que le commandant Séménoff, du Æniaz Suwaroff, signale les pertes faites dans les tourelles ?, « où cependant les éclats ne pouvaient pénétrer que par des sabords très étroits »; de même, les éclats qui s'étaient introduits en grand nombre sous le cham- pignon formant toit du blockhaus avaient détruit toutes les transmissions de feu et le compas lui- même. Un fait analogue a été observé sur le croi- seur Gromoboï, lors du combat du 14 août 1904 où sombra le ARurik* : Un obus d'assez gros calibre éclata contre une manche à vent située à tribord, un peu en arrière du + Revue maritime, octobre 1906. ? L'Agonie d'un cuirassé, p. 15. 5 Revue maritime, octobre 1906. 263 blockhaus (fig. 19). Les éclats très divisés frappèrent la muraille verticale du blockhaus, qui est très épaisse; quelques-uns entamèrent cette cuirasse de près de 1 centimètre. Ces éclats, remontant le long de la mu- raille verticale, rencontrèrent le capot cuirassé en forme de parapluie, qui débordait fortement; ils rico- chèrent sur cette paroi courbe, qui les renvoya dans l'intérieur du blockhaus, où ils arrosèrent littéralement presque tous ceux qui s’y trouvaient... L'officier canon- nier recut une quantité d’éclats dans la figure, dans le cou et dans le côté de la poitrine. Ceux qu'il reçut dans le cou, presque à l’état de poussière métallique, péné- trèrent profondément et l’'empoisonnèrent peu à peu. A la suite de cette dure épreuve, on installa à ce blockhaus un rebord cuirassé extérieur. En outre, toute la surface du plafond cuirassé, les plats-bords des fenêtres, le dessous du plat-bord cuirassé furent garnis à demeure de matelas de liège cousu dans de la grosse toile; ce dispositif est, paraît-il, très efficace, Sans insister davantage sur ce sujet, les exemples précédents montrent les effets meurtriers des très Cheminée W Fig. 19. — Trajet des éclats d'un obus ayant éclaté contre une manche à vent. petits éclats et la nécessité impérieuse de réduire au minimum les dimensions des ouvertures des locaux cuirassés, si défilées qu'elles puissentparaitre au premier abord, $ 2. — Effets de souffle. La détonation d’un explosif a pour résultat la production, au centre d’explosion, d'une pression considérable due à la génération d'une grande quantité de gaz. Il s'ensuit une brusque rupture d'équilibre dans l'atmosphère qui donne naissance à des ondes. L'expérience montre que le front de ces ondes présente une condensation très sensible, immédiatement suivie d'une dilatation. Leur vitesse de propagation, voisine de 800 mètres par seconde au voisinage immédiat du centre d’explosion, est encore égale à 635 mètres à une distance de 5 mètres plus loin, pour n'être plus que de 360 mètres par seconde à la distance de 50 mètres. Après un par- cours de 250 mètres, la vitesse de l'onde engendrée par la détonation devient égale à celle du son. Le tableau III donne les valeurs de la pression 9 = 6 ‘XXX — LA À LUTTE D'ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS sur le front de l'onde, déduites des mesures faites à Gävres à l'aide de balances manométriques"'. -En supposant qu'aucun obstacle ne vienne per- turber la propagation de l'onde explosive aérienne, la Commission des substances explosives a reconnu que le rayon limite des effets dangereux de l’onde pouvait être représenté par une formule parabo- lique de la forme : d—KkVe, où ( représente la distance (en mètres), e le poids de la charge (en kilogs) et Æ un coefficient, spéci- TaBLEAU III. suivant cette direction que les effets de sosie atteindront leurs valeurs maxima. D'un autre côlé, et en se basant sur ce qu'on observe dans les explosions sous-marines, il y à lieu de penser que l'onde explosive produite par la détonation d'une charge de poids p renfermée dans un obus présente, sur son front, une condensation plus marquée que celle qu'on observe sur l'onde similaire produite par la détonation de la même charge à l'air libre. On ne possède sur ce point aucun renseignement précis, pas plus que sur le rayon maximum de la zone dangereuse pour le — Pression sur le front de l'onde explosive aérienne. NATURE et poids des charges explosives 7 mètres 10 mètres 25 kgs de mélinite . < 0 kg 500 100 kgs de mélinite . Comprise entre 2 et 3 kgs. fique de la nature de l’explosif et du degré de sécu- rité à réaliser. Cette formule étant admise, il en résulte que les distances dangereuses sont propor- tionnelles aux racines carrées du poids des charges. Or, si l'on observe que, pour des projectiles de ‘même poids, mais de types différents, les charges explosives sont entre elles comme les nombres approximalifs : 1 , d L 3 9 où on conelura que les rayons des cercles dange- reux produits par l'explosion de ces mêmes pro- jectiles seront entre eux cemme les nombres : SE ar Ces déductions supposent l'atmosphère calme, la charge explosive au repos et renfermée dans une enveloppe sans résistance. S'il règne un vent appré- ciable, les ondes seront déformées d’une manière très sensible dans la direction du vent. Enfin, 1 fait d’'enfermer la charge explosive dans un obus à parois résistantes donne lieu aux constatations suivantes : l'obus étant placé en AB au-dessus d'un sol sablonneux, la souille produite par sa détona- tion affectera une forme elliptique dont le grand Oo axe sera dirigé suivant MN (fig. 20). C'est donc ! Mémorial des Poudres et Salpétres, années 1905-1906. Commission des substances explosives. Etude des effets à distance des explosions. M. Lheure, rapporteur. 12 mètres Comprise entre 1 et 2 kgs. PRESSIONS PAR CENTIMÈTRE CARRÉ AUX DISTANCES DE 15 mètres 25 mètres 50 mètres 80 mètres Comprise entre 0k,100 et 0k,150 < 0 kg 500 » Comprise Comprise entre Uk,150 | entre 0k,100 et 0k,200 et 0k150 personnel, correspondant à la détonation d'une charge explosive déterminée. L'expérience de la guerre russo-japonaise a seule fourni sur ce sujet quelques indications, mais elles sont très approxi- matives; il ne pourrait, d’ailleurs, guère en être autrement, étant donnés la variété des effets pro- duits et surtout leur peu d'objectivité. Si, à l’inté- Fig. 20. — Souille elliptique (MN) produite par la détonation d'un obus AB rieur de la zone dangereuse, les effets de pression la condensation du front de l'onde peuvent occasionner des lésions, en dehors de cette zone on ne peut guère enregistrer que des ruptures de tympan ou des effets nerveux dus à la violence de la commotion résultant de la détonation. Nous verrons plus loin ce qu'il faut penser de la réper- cussion de ces accidents sur l’activité des com- battants. En dehors des effets physiologiques dus à une dus à XXX — LA LUTTE D’ARTILLERIE NAVALE ET LES PROJECTILES EXPLOSIFS cause mécanique, il y a encore lieu de considérer ceux qui résultent de l’action délétère due à l'absorp- tion’ pulmonaire des gaz produits par l'explosion. En admettant que l’explosif employé soit l'acide picrique, la réaction de la décomposition corres- pondant à la détonation complète est à peu près la suivante : 2 CH*O?Az° — CO? + 3 H°0 + 9C0 + 20 +- 3 Az°. On voit que plus de la moitié du volume gazeux engendré consiste en oxyde de carbone”. Dans des locaux fermés et non énergiquement ventilés, l'accès, même en petite quantité, des gaz de l'explosion est done de nature à entrainer l'asphyxie des occupants. Néanmoins, et bien que le danger que nous venons de signaler soit des plus sérieux, il ne semble pas que ces effets d'empoisonnement, pas plus que ceux dus au souffle des explosions, aient souvent entrainé, au cours de la guerre d'Extrême- Orient, la cessation du service dans les tourelles ou dans la partie du navire protégée par le caisson blindé. C'est ainsi que, d'après les renseignements recueillis à Tsing-tau le lendemain de la bataille du 10 août?, beaucoup d'hommes (du Cesarewitch) se plaignaïent de surdité, de vertiges, d'évanouissements, de maux de tête, sans avoir cependant recu de blessures directes. Les cheveux, la barbe, parfois même la peau de ceux qui s'étaient trouvés dans le voisinage immédiat d’une explosion étaient d’un jaune intense. 4 officiers et 8 hommes avaient été tués, 50 officiers et hommes blessés, mais ces mises hors de combat résultaient de blessures dues à des éclats. Le relevé des avaries dues au tir a donné lieu, d'autre part, à des constatations dont nous extrayons le passage suivant : « Coupn° 3. Un obus de 305 frappe à tribord la cui- rasse de la tourelle 305 avant ; pas d’avaries. « Coup n° 11. Un obus explosif de 305 touche le toit de la tourelle de retraite de 305 aux environs du casque de visée. Le toit est légèrement bossué; quelques rivets, des cornières de la charpente du casque ont sauté et ont tué un homme à l’intérieur de la tourelle ; le pointeur qui se trouvait dans le casque perdit quelque temps connaissance. « Coup n° 13. Un obus explosif de 305 frappe à babord la tourelle de 305 de retraite. Le coup éclata probable- ment à l'extérieur. Aucun dommage®. » A Tsushima, mêmes constatations : « Un homme étant venu me rendre compte de graves événements survenus à la tourelle de 305 de retraite, je m'y rendis. La partie du toit couvrant la pièce de _babord avait été arrachée et projetée en l'air ; mais cela n'empêchait pas la tourelle de continuer à tourner et ‘surtout de tirer énergiquement" ». De ces citations et du fait que les bords ont pu se servir de leur artillerie intacte jusqu'à la fin du * La détonation du coton-poudre produit également une forte proportion d'oxyde de carbone. ? Marine Rundschau, 190%, cité par le Yacht, n° du 19 novembre 1904. % Ibid. “ Séménorr : L'Agonie d'un cuirassé, page 74. ( | 265 combat, on peut conclure que les effets de souffle et d’asphyxie n’ont pas eu les suites que certains leur attribuent, et cependant le personnel placé dans les tourelles avait subi la dure épreuve de détonations d'obus de 305 chargés en acide picrique se produisant au contact de la tourelle. En rapprochant les textes cités dans-le cours de ce travail, on a l'impression très nette que ce sont les blessures dues aux éclats d'obus à explosif qui ont joué un rôle décisif dans la mise hors de combat du personnel occupant les locaux précités. Nous n'avons pas parlé des effets dus à l'incendie, car, sur un navire moderne, ils ne peuvent se produire que par suite de la négligence des bords dans l'entretien des peintures. En temps de paix, les peintures des super- structures doivent avoir le minimum d'épaisseur ; en temps de guerre, elles sont à proscrire au moins sur les parois des locaux habités. C'est l'incendie des peintures qui, à Tsushimu, a forcé le personnel à évacuer des tourelles encore en état de tirer, de même qu'il a aggravé la catastrophe de l’Zéna”. Les effets de souffle et d’asphyxie n'ont donc d'importance que s'ils se produisent à l’intérieur du navire. Mais, pour qu'il en soit ainsi, il faut que le projectile explosif y pénètre, et cette condition d'efficacité restreint singulièrement le rôle de l'obus à grande capacité, puisqu'il devrait dès lors se borner à l'attaque des superstructures et des cheminées, étant donnée son impuissance contre les blindages. Les effets du souffle n'étant, d’ailleurs, pas proportionnels au poids de la charge, mais à sa racine carrée, cette considération, jointe à sa grande fragilité, restreint encore l'avantage qu'on pourrait avoir à mettre en service un projectile de l'espèce. ! Un point qui n’a pas jusqu'à présent été mis en lumière est le suivant : Les divers bâtiments de la flotte russe se trouvaient en surcharge, peu de temps avant Tsushima, par suite du charbon en excédent qu'ils avaient à bord. D'après les dires de Séménoff, le matin même de la bataille, le Muiaz Suwa- roff n'avait plus que l'approvisionnement normal des soutes: mais il résulte également de son récit que les sacs à charbon ayant servi à contenir le combustible en surcharge se trouvaient encore à bord et vraisemblablement dans la batterie; cela étant, il est extrêmement probable qu'une notable quantité de poussière de charbon se trouvait dans ce même local. Les effets des obus japonais ont done pu se trouver notablement accrus, par l'allumage très facile de cette poussière, provoqué par leur détonation. Les expe- riences effectuées récemment à la galerie d'essais de Liévin sont, à cet égard, particulièrement suggeslives. Dans le même ordre d'idées, il y a lieu de remarquer que la com- bustion complète d'un poids donné de poussière de charbon donne lieu à un dégagement de chaleur beaucoup plus grand que la détonation complète d'un méme poids d'acide picrique enfermé dans un obus, surtout si l’on tient compte de la fraction de l'énergie potentielle de la charge trans- formée en énergie cinétique (force vive des éclats d'obus et travail de détente des gaz de l'explosion, chaleur emportée par les éclats). 266 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE VI. — ConNcLusroNs. Nous pouvons maintenant résumer ainsi quil suit la discussion précédente : 1° L'obus à grande capacité exige, pour être tiré, un matériel spécial, impropre à lancer en tir tendu l’obus de rupture ou de semi-rupture chargé en explosif; 2° Il est inefficace dans l'attaque des blindages; 3° En admettant qu'on püt réaliser un obus tor- pille organisé d'après les idées de Whitworth, il ne pourrait être employé comme tel qu'à partir d'une certaine distance, en dedans de laquelle les autres projectiles ont leur efficacité maxima; 4° Par suite du peu d'épaisseur de ses parois, l’obus à grande capacité se rompt dans le choc sous une incidence oblique, à’ partir d'une dis- tance de tir comprise dans les limites ordinaires de combat ; 5 On ne saurait compter d'une manière certaine sur les effets de souffle et d’asphyxie pour mettre hors de combat le personnel des tourelles. Le rayon de la zone dangereuse résultant de la déto- nation est faible. Ce rayon et, par conséquent, les effets dus au souffle ne sont proportionnels qu'à la racine carrée du poids de la charge; 6° Pour un même poids total, l’obus de semi- rupture chargé en explosif produit des effets de souffle qui ne sont pas très inférieurs à ceux qu'on obtient avec l’obus à grande capacité. Son action sur les superstructures sera done assez voi- sine de celle de ce dernier projectile; 1° Le tir exécuté avec l’obus de semi-rupture est plus précis que celui qu'on effectue avec l'obus à grande charge d’explosif, en raison de la diffé- rence considérable de leurs vitesses initiales et, par suite, de leurs écarts probables. Le pouvoir perforant de l’obus de semi-rupture est tel que, pour les calibres de 305, il peut attaquer avec succès, sous l'incidence de 15° et à des distances de combat au moins égales à 6.000 mètres, des blindages de 15 centimètres. Aux petites dis- tances et dans les mêmes conditions d'incidence, il peut perforer des plaques d’une épaisseur voi- sine de son calibre. L'obus de rupture n'ayant qu'une action très peu efficace contre les superstructures en raison de sa faible charge intérieure, il ne nous semble pas désirable de le maintenir dans les approvisionne- ments. Nous estimons, en effet, qu'on doit n'avoir qu'un seul projectile, car, élant donné le peu de précision du ir de l’artillerie navale aux distances ordinaires de combat, il est vain de vouloir atta- quer une partie déterminée du navire ennemi. C'est ce navire tout entier qui constitue le but, et, comme le cuirassement a, sur les bateaux récents, une tendance marquée à l’uniformité, au point de vue de l'épaisseur, on ne voit pas très bien la nécessité de l'attaquer avec deux projectiles difré- rents. D'ailleurs, et en raison de la grande rapidité avec laquelle un but courant à contrebord défile dans le champ de tir, on ne pourra souvent pas, par suite de l’approvisionnement des monte- charges, tirer le projectile que l’on désirait lancer. L'unité d'approvisionnement étant supposée réa- lisée, le projectile embarqué dans les soutes doit être l’'obus de semi-rupture, à l'exclusion de l’obus de rupture et de l’obus à grande capacité dont nous venons de signaler les inconvénients nom- breux. Cette solution n’est donc, en somme, qu'un compromis, mais il en est de même dans toutes les questions maritimes, à commencer par le pro- blème de l’organisation du navire de combat. XXX. REVUE ANNUELLE D’EMBRYOLOGIE I. — EMBRYOLOGIE GÉNÉRALE‘. — IDÉES NOUVELLES SUR LES PROBLÈMES DU DÉVELOPPEMENT ET DE L'HÉRÉDITÉ. Les problèmes du développement sont envisagés depuis ces dernières années de telles facons ! Bibliographie : CuaRLes Oris WurtMax : The problem of organic deve- lopment. Facts and theories. Seventh Internat. Zool. Con- gress, Boston, 1907. (Manuscrit gracieusement commu- niqué par l'auteur et dont nous donnons ici une traduction presque entière). R. Semox : Die Mneme als erhaltenden Prinzip in Wechsel des organischen Geschehens. Leipzig, 1904. Fraxcis Danwix Inaugural Address at the Dublin qu'elles remettent de plus en plus en discussion nombre d'idées générales qui pouvaient sembler définitivement acquises à la science. La grande loi meeting of the British Association. AMature, t. LXXIX, n° 2027, 3 septembre 1908. RiGnano : Cité par F. Darwin. Weismans : Richard Semon's « Mneme » und die Verer- bung erworbener Eigenschaften. Arch. f. Rassen and Ge- sellschalts Biologie, 1906. R. Semox : Zd., 1907. Lossy : Vorlesungen über Descendenztheorien, 1906. Hakzuyr EGEerrToN : Vature, 8 october 1908. L. VraLeron: Un problème de l’évolution. La théorie de la récapitulation des formes ancestrales au cours du dévelop- pement embryonnaire. 1 vol. 8, Montpellier, 1908, 244 pages, 5 fig. dans le texte et 4 pl. hors texte, GUSTAVE LOISEL — REVUE biogénétique, l'Ontogénèse est la brève et rapide récapitulation de lx Phylogénèse, est de celles-là. On sait que c'est à Hæckel que nous devons le nom et la formule courante de cette loi; mais nous ne devons pas oublier, nous autres Français surtout, que, pendant plus d'un demi-siècle avant l’appari- tion de la Generelle Morphologie de Hæckel, en 1866, les grands biologistes : Lamarck, Geoffroy- Saint-Hilaire, Serres, Meckel, von Baer, J. Müller, Agassiz, Vogt, Fritz Müller et Darwin lui-même, avaient cherché à établir cette formule. La loi biogénétique considère les deux termes ontogénie et phylogénie comme représentant deux séries distinctes de phénomènes; la phylogénie est, pour elle, le phénomène principal, primordial; l’ontogénie en est simplement sa répétition hérédi- taire, condensée et modifiée par l’adaptation. La phylogénie, produit de causes ambiantes, est done la cause fondamentale de l’ontogénie, qui apparait comme le rendement héréditaire de ce produit, dans l’ordre de son acquisition cumulative. Nous avons ainsi dans la Nature, suivant cette conception, deux séries de dénouements tout à fait distincts, avec des relations causales également distinctes. Dans l’un des cas, les causes internes prédominent et sont limitées à des fins spécifiques; leur travail ‘se poursuit avec une régularité d'hor- loge, se terminant ponctuellement et en peu de temps par la production de l'individu. Dans l’autre cas, les causes externes prédominent; elles sont différentes et sans direction ; leur travail est sans but, finissant en ceci ou en cela, sans qu'on puisse en prévoir le résultat. Le hasard et l'utilité seuls sont les maîtres en ce champ. C'est ainsi que Whitman commence le vif plai- doyer qu'il a prononcé contre cette loi au septième Congrès international de Zoologie tenu à Boston en septembre 1907. Déjà l’année précédente, à la fin de son grand Traité d'Embryologie comparée el expérimentale des Vertébrés, Oscar Hertwig, reve- nant sur des critiques antérieures qu'il avait faites de cette loi, semblait avoir renversé complètement la théorie de la récapitulation prise dans son sens strict”. Le processus ontogénétique, dit-il, ne peut pas être regardé comme une simple répétition, même abrégée, du processus phylogénétique, ear ce dernier consiste en d'innombrables ontogénèses. Il y a seulement parallélisme complet entre ces deux séries de développements, qui sont tous deux dépendants l’un de l’autre. En effet, chaque chan- sement dans l'idioplasma de l'œuf ou dans ses ébauches à nécessairement pour suite une modifi- cation correspondante du cours de l'ontogénèse; ! Nous exposons ici les idées d'Osc. Hertwig d'après le résumé qu’eu a donné M. Vialleton dans un ouvrage récent. ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE el, inversement, un changement dans l'ontogé- nèse, qui ne dépend pas de l’œuf et dérive de causes externes, ne deviendra une acquisition durable de l'espèce et, par suite, ne se répétera qu'autant que l'idioplasma de l'œuf aura été changé d’une manière correspondante pour la prochaine généra- tion. Oscar Hertwig appelle loi causale ontogénétique et parallélisme entre l'ébauche et le produit de cette ébauche cette dépendance qui existe entre l'état de l'œuf, d'une part, le cours et le résultat de l'ontogénèse, d'autre part. I1 substitue à la formule de Hæckel : récapitula- tion des formes ancestrales éteintes, cette autre formule : L'ontogénie est larécapitulalion des formes qui obéissent aux lois du développement organique et vont du simple au complexe. Dans son discours de Boston, Whitman vient éga- lement remplacer l'énoncé classique de la loi bio- génétique par une autre formule. 11 montre d'abord que la conception du développement des êtres, telle qu'on l’admet depuis Hæckel, est une conception fausse, en ce sens que les deux termes ontogénie et phylogénie ne doivent pas représenter, dans la Nature, deux séries distinctes de phénomènes.Quand nous prenons, dit-il, deux aspects d’une seule et mème chose, et quand nous nous arrêtons à leurs contrastes, le point de départ où se trouve la vérité peut être perdu de vue tôt ou tard; des contradic- tions s'élèvent, suggérant un nouvel examen du sujet; nous retournons au point de départ, où les contrastes disparaissent dans l'unité essentielle. Les contrastes nous entrainent loin du point de départ et nous décident ensuile à y revenir; par conséquent, la cause de l’erreur est en même lemps la cause de la correction. Dans le cas de l'ontogénie et de la phylogénie, nous poussons l'erreur jusqu'au point de nous contredire nous-même en mettant la phylogénie avant l’ontogénie. Au moment où nous retournons aux faits du point de départ, nous découvrons que, en dehors de l’ontogénie, il n'y a pas de phylo- génie. Tout ce que nous appelons phylogénie est aujourd'hui, et a toujours élé, l'ontogénie _elle- même. L'ontogénie est en même temps le fail primaire et secondaire, c'est-à-dire le fait uni- versel. C'est de l’ontogénie que nous partons el c'est à l'ontogénie que nous revenons. La phylo- génie est seulement un nom donné aux suites directes de l'ontogénie envisagée au point de vue historique. Elle nous donne les lignes de conti- nuité dans la descendance et nous permet de lire clairement l’ordre de succession dans l’origine des espèces, des caractères, des structures, etc. Quand nous pouvons arranger les faits ontogénétiques dans l’ordre de dépendance génétique, nous sommes 268 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE dans une position très avantageuse pour la re- cherche des relations causales. Mais ces relations n'ont pas de base physique en dehors de l’ontogénie, et n’ont d'autre existence extérieure que des con- structions mentales. A ce point de vue, la loi biogénétique représente un fait indiscutable, fondamental et universel, — le fait capital de tout développement organique. Mais, mise en conformité avec les faits connus maintenant, elle doit être, d’après Whitman, re- visée comme suil : L'ontogénie est une récapitulation reproductive, el la variation germinale est la source de toute déviation phylétique dans l'ontogénie. Cette formule à l'avantage, en effet, d’écarter certaines causes de discussion, telle que celle de la transmission ou non-transmission des caractères acquis, dans le sens lamarckien, c'est à-dire dans le sens que l'ontogénie viendrait retracer secondai- rement la voie déterminée par les modifications Somaliques. Et cela nous parait des plus importants pour l'éducation des jeunes biologistes. Altribuer à l’hérédité le pouvoir de récapituler, de reproduire comme une sorte de réverbération des expériences ancestrales, grâce à l’aide d'entéléchies omnipo- tentes ou de pangènes-déités, c'est ouvrir grande- ment la porte à l'erreur, Whitman dit même à la mystification; en tous cas, c'est perdre de vue l'unité de l’ontogénie et de la phylogénie, et le retour des mêmes phénomènes a l'air ainsi d'un mythe prodigieux, exécuté par les hommes pour rapprocher deux sortes de miracles distincts. D'un autre côté, quand nous nous rappelons que l'ontogénie, c’est-à-dire le développement d'un être, circonscrit un champ entier, que la récapitu- lation est la loi qui régit tout ce champ et se rap- porte partout et toujours aux processus primor- diaux physico-chimiquement déterminés, l'onto- génie devient alors le fait le plus frappant, sans l'ombre d'un mythe à côté d'elle. Quand le cristal récapitule la forme et la symé- trie d'autres cristaux formés de la même matière sous des condilions semblables, nous sommes con- tents de considérer ce fait en nous placant au point de vue physique, el nous n'appelons à notre aide ni écho ancestral, ni entéléchies, ni pangènes cir- culant mystérieusement. La récapitulation dans le monde organique est, en principe, la même. Elle ne demande ni architecte, ni influences d'aucune sorte, excepté les éléments physico-chimiques com- binés dans un système de relations métaboliques auquel nous donnons le nom de cellule germina- tive. Cette cellule se développe suivant son espèce et son type; une autre cellule germinalive, prove- nant des mêmes parents, fait de même; des cen- taines et des milliers de ces cellules répètent les mêmes processus en même temps ou à des temps différents. Elles n'imitent pas, elles ne prennent pas leur art l’une de l’autre; elles font exactement ce qu'elles sont physiquement obligées de faire, cha- cune pour elle-même et toutes de même, simple- ment parce que chacune représente le même sys- tème d'unités d'énergie. Toute reproduction est une récapitulation dans le même sens. Les récapi- tulations sont semblables parce que les cellules germinalives dans lesquelles elles se rencontrent sont semblables, et les cellules germinatives sont semblables parce qu'elles proviennent d'une égale anto-division des cellules-mères. La ressemblance n'est pas un phénomène de transmission; toutes les fois qu'elle apparait dans le développement, elle est entièrement et seulement originale. Mais, si cela est vrai, et cela nous séduit beaucoup, faut-il rejeter entièrement les théories basées sur la transmission des pangènes ou des unités de caractères circulant qui sont toujours de mode auprès des savants et dont nous par- lerons plus loin? Chaque être vivant, disait Dar- win, doit être regardé comme un petit univers, comme un microcosme formé d'organites inconce- vablement petits et aussi nombreux que les étoiles". De chaque point du corps partent quelques-uns de ces organites, les pangènes, qui vont se loger dans les cellules sexuelles; puis, après la fécondation et au cours du développement d’un nouvel individu, ces mêmes pangènes émigrent à nouveau et en sens contraire; ils abandonnent cette fois leur lieu de rassemblement et, par une redistribution dans le sens centrifuge, ils viennentse replacer chez l'enfant dans les mêmes points d'où ils étaient partis chez les organismes parents. De Vries, dans sa Pangénèse intracellulaire, sim- plifie la théorie de Darwin en ne prenant plus que la seconde moitié de l'hypothèse. Il imagine, en effet, que les pangènes aux unités héréditaires (heritage units), accumulées dans le noyau ger- minal, sont relativement peu nombreuses et qu'elles produisent des résultats complexes, non pas parce que ces déterminants seraient porteurs chacun d'une minime fraction du résultat total, mais seu- lement par combinaison et de la même façon, dit Lotzy, que les lettres de l'alphabet se combinent entre elles pour former une infinité de mots. Whitman critique cette conception nouvelle et rejette absolument toute théorie du développement basée sur la présence de déterminants spécifiques ou d'unités de caractères, accumulés dans le noyau des cellules. Ces théories, dit-il, sont nécessaire- ment enchaiînées à quelque forme de distribution centrifuge, durant le cours du développement. 1 Animals and Plants, t. Il, p. 483. GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 269 Toutes doivent tomber d'’elles-mèêmes, car 1l est | absolument inconcevable que des éléments spéci- | fiques préformés puissent jamais être transportés, chacun en son temps, dans un point particulier du champ de mosaïque si complexe que l'organisme représente. C’est, pour Whitman,plus que perdre son temps que d'essayer de concevoir le développement comme étant ainsi prédéterminé dans tous ses rap- | ports de temps et de lieu; c'est, dit-il, se livrer à une théologie ultra-scientifique qui frise l'absurdité, En tous cas, il est bon de rappeler avee Whitman que, dans le développement d'un individu, chaque stade de développement présente des formes qui, en elles-mêmes, sont aussi spécifiques que les formes du stade final. Les processus embryolo- giques ne sont que des changements de forme con- tinus et progressifs, et c'est en cela que diffère précisément le développement d'un organisme et le mode de formation d'un cristal. Pourtant, dans l'un comme dans l'autre cas, la forme résulle cer- | tainement de déterminations physiques. Le cristal à sa forme spécifique, et quelquefois | plusieurs formes spécifiques. Dans chaque cas, il doit sa forme à la nature de ses éléments matériels | et aux conditions sous lesquelles il se constitue. Nous ne penserions pas à attribuer ses formes et sa symétrie à la transmission héréditaire; nous ne penserions pas non plus à faire intervenir quelque influence directrice ou formatrice, distincte des éléments matériels qui le composent. Considérés fondamentalement, l'organisme et le cristal sont également auto-déterminants à chaque stade; il en est de même pour les effets de leurs propriétés physiques intrinsèques. On dit que le cristal croît par accrétion et l'orga- nisme par inlussusception; mais ceci n'est qu'une différence superficielle qui ne doit pas atteindre l’idée générale. Au point de vue physique, le fait essentiel n’est pas de savoir où s’attachent les par- ticules élémentaires, ni si elles se lient interstitiel- lement où superficiellement; mais e’est de savoir si elles s’assemblent d'une manière déterminée, réglée par elles-mêmes. C'est ce que soutient la théorie déjà ancienne de l’orthogénèse, défendue à nou- veau par Nægeli et par Whilman. “Cette théorie admet toujours que la variation ger- minale est le point de départ de toute nouvelle ontogénèse; quand la cellule germinative se forme avec une légère déviation initiale, la série entière des stades de son développement est affectée. C'est cette seule variation initiale, de nature très simple, qui peut être récapitulée héréditairement et, par conséquent, perpétuée. Whitman, étudiant le développement du plumage, de la naissance à l’état adulte, chez la colombe, montre que les caractères de chaque plume nou- (record fidèle de tout ce qui a été accompli à la place de velle portent comme l'enregistrement l'organisme où elle est née. Se développant dans la suite des temps, les plumes nous montrent quelque chose de plus, dit-il, qu'une succession kaléidosco- pique de stades désunis. Quoique les aspects de plumage présentés successivement ne montrent pas une continuité parfaite, ils suivent toutefois un ordre déterminé, comme les figures mobiles dans le kaléidoscope, et cela ne permet guère de douter que le processus de développement suive une marche continue. Les phases de transition, qui peuvent être réduites indéfiniment, forment ainsi une vraie série linéaire, ortho en direction et génélique en composition, puisqu'il y à un lien génératif commun qui fait de chaque étape un anneau nécessaire dans la chaine totale. Ce lien génétique qui relie les différentes parties d'un corps entre elles et le soma au germe serait, pour Nægeli, représenté matériellement par un ré- seau de matière vivante, d’idioplasma, quis'étendrait entre toutes les cellules des organismes ; cette sub- slance jouirait de propriétés télégraphiques ana- logues à celles des nerfs et pourrait transmettre ainsi une combinaison quelconque de ses modifi- cations locales à d’autres parties de l'organisme. Nægeli emploie le mot télégraphie pour désigner une forme dynamique de transmission, mais il ne veut pas dire que les mêmes effets ne puissent pas être produits par l’action de substances chimiques ; il va même jusqu'à suggérer l’idée que ces stimuli pourraient être transmis, chez les plantes, par le moyen des vaisseaux criblés. La théorie mnémique d'Hering et de Semon, qui vient d'être fortement soutenue par Francis Darwin, à Dublin, admet également que le germe est le centre et le point de départ du développement ; mais, pas plus que l’orthogénèse, elle ne fait inter- venir de déterminants hypothétiques pour expli- quer les potentialités cachées dans la cellule germi- native. Pour employer la phraséologie de Semon, le noyau des cellules germinatives renferme les engrammes dans lesquels repose le rythme ontogé- nétique. Les engrammes, ce sont les changements produits dans la structure ou la composition du noyau par des excitations internes ou externes, changements dont la nature exacte connue, mais qui seraient de même nature que les changements produits dans les organismes par les habitudes et la mémoire : l’Hérédité, l'Habitude et la Mémoire formeraient un seul et même processus, que Semon désigne sous le nom de mnème. On sait que la mémoire d’une première excitation fait exécuter à un individu une série d'actes suivis qui se déterminent les uns les autres, sans que la pre- mière excitation apparaisse: ainsi un chien qui se n'est pas 270 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE sauve et crie en voyant apparaître un fouet dont il | engrammes efficients dans les a recu des coups autrefois; de même une seule excitalion engraphique, c’est-à-dire fixée dans le noyau par engrammes, peut produire, par une sorte d'évocation (ecphorie), le déclanchement d'actes successifs sans que cette excitation soit renouvelée elle-même à chaque fois. Cette théorie admet et explique en même temps l'hérédité des caractères acquis. Elle suppose que les engrammes recus par les noyaux des cellules nerveuses ou, chez les végétaux, par l'ectoplasma cellulaire diffuseraient peu à peu de tous les points du corps et se condenseraient progressivement dans les cellules germinales. C'est là évidemment, comme pour l'orthogénèse, la partie faible de la théorie, car il est difficile de concevoir comment peul se faire cette circulation continue d'engrammes. Pourtant, et Hering le fai- sait déjà remarquer, c'est un fait d'observation que toutes les parties du corps d'un individu sont si intimement liées les unes aux autres que ce qui se passe dans l’une peut retentir dans une autre partie souvent très éloignée et sans connexion directe apparente; le substratum matériel de cette cireu- lation d’engrammes pourrait être : pour les ani- maux, les cordons nerveux ; pour les plantes, les filaments protoplasmiques intercellulaires. Voici comment Francis Darwin expose ce dernier point. Dans les cellules végétales, l’ectoplasma peut être considéré comme formant l'organe sensoriel ; une excitation recue par celles-ci se traduira d’abord par une modification quelconque dans l'ectoplasma et, comme ce sont précisément les filaments ecto- plasmiques qui relient les cellules, l'excitation primitive rayonnera et produira dans les autres cellules une faible copie de l'engramme formé dans la cellule primitivement influencée. Semon envisage hardiment, du reste, la difti- culté. Quand un nouveau caractère apparaît dans le corps d’un organisme en réponse à une excitation du milieu, il admet qu'un nouvel engramme est sjouté aux noyaux dans la partie affectée et que, ultérieurement, le changement engraphique tend à s'étendre à tous les noyaux et à produire en eux la même modification. De sorte que, par exemple, si nous croyons qu'une habitude individuelle peut ètre héritée et apparaître alors comme un inslinet, la répétition de l'habitude n'indiquera pas sim- plement des modifications dans le système nerveux central, mais correspondra aussi à des modifica- tions dans les cellules germinatives. Ces modifi- cations seront, suivant Semon, faibles en comparaison des engrammes nerveux el pourront seulement devenir effectives par une action prolongée. Semon attache une grande impor- lance à la lenteur du processus d'établissement des excessivement cellules germi- natives. Il y a deux ans, Weissmann, combattant à nou- veau celte théorie, affirma qu'il est impossible de concevoir que des engrammes germinatifs puissent se former ainsi par migration sur des troncs nerveux. Il objecte que les courants ner- veux peuvent seulement différer d'intensité entre eux et que, par conséquent, il ne peut y avoir de communication de potentialités à la cellule germi- native. Il soutient qu'il est impossible que des modifications somatiques soient transmises à la cellule germinative et reproduites ontogénétique- ment, processus qu'il compare à un télégramme expédié en Allemagne et arrivant en Chine. Weissmann se base ici sur l'opinion commune des physiologistes, à savoir que toutes les impul- sions nerveuses sont identiques en qualité et ne diffèrent que par la quantité. Les défenseurs de la théorie répondent à cette objection en disant que la question physiologique ne peut être encore considérée comme tranchée définitivement dans le sens où on la tranche provi- soirement aujourd'hui et que, du reste, ce qui rayonne dans le soma par les nerfs ou par tout autre moyen est l'excitation primitive recue et établie dans les cellules somatiques. Une autre difficulté de la théorie est de com- prendre comment tous les engrammes qui ont agi sur les cellules d'un organisme peuvent être con- tenus dans une seule cellule germinative. La théorie centro-épigénésique de Rignano, qui se rapproche tant de la théorie précédente, répond à cette objection en comparant le noyau germinatif à un accumulateur électrique qui, en se déchar- geant, dégagerait la même sorte d'énergie que celle qu'il aurait recue. Il ne faut attribuer évidemment à ces théories que l'importance qu'on peut accorder à toute dis- cussion qui roule sur quelque chose que l’on ne connait pas. IL est remarquable pourtant, et c'est Hakluyt Egerton qui en fait la remarque, que la théorie mnémique puisse expliquer à la fois la transmission des caractères acquis et la non-trans- mission des simples mutilations. S'il y a vraiment une connexion entre les cellules somatiques et les cellules germinales, cette con- nexion doit être constante, et ces dernières cellules sont comme une espèce de centre où tous les évé- nements de la vie du corps d’un individu sont. enregistrés. Beaucoup de ces enregistrements seront fugaces, comme, de même, la mémoire oublie nombre d'événements qui viennent affecter la conscience ; mais, de la même facon, les change- ments somatiques importants devront produire, par accumulation, des impressions, des enregis- GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 271 trements durables, et ce sera là le champ biolo- | mettre de reconstituer leur ancêtre, montrent gique par le moyen duquel agira la transmission des caractères acquis à de nouvelles générations. Considérons maintenant ce qui se produit dans le cas de simple mutilation. La queue d'un agneau, par exemple, est coupée; quel est le résultat de la mémoire germinative? Simplement le souvenir d'une coupure momentanée. Et, comme il y avait déjà, dans le germe, le souvenir d'une queue com- plète, par l'accumulation au cours de la vie de l'agneau de milliers d’impressions caudales, ce dernier souvenir — comparé ici à ce que nous savons des nerfs et des muscles d'un moignon, qui con- servent longtemps le souvenir de presque toutes les fonctions de la partie du membre amputé, — sera naturellement prépondérant sur le précédent et la mutilation ne sera pas transmise par héré- dité. Tout récemment, L. Vialleton est revenu sur la grande loi biogénétique dans un très important travail, où l’on trouve un exposé complet de la question avec des citations détaillées de F. Müller et de Hæckel, l'exposé des vues critiques d'Oscar Hertwig, et un bon index bibliographique. Vialleton ne se contente pas, du reste, de faire œuvre d'érudition ; beaucoup de vues qu'il expose lui sont toutes personnelles, et c'est ainsi que ses conclusions méritent d'être résumées dans cette revue, en faisant remarquer, toutefois, que quel- ques-unes ne sont que les idées de Hertwig. Si l’on veut entendre par la loi biogénétique, dit-il, qu'il existe un certain parallélisme entre le développement des organes dans l’ontogénèse des animaux supérieurs et celui de ces mêmes organes tel qu'il est montré par l'Anatomie comparée dans les différents êtres d'un même groupe, il n’y a rien à objecter. Mais il faut alors bien préciser qu'il ne s'agit que d'un parallélisme idéal et non pas de la répétition de faits héréditaires, comme on le voulait jusqu'ici. Le développement ne reproduit pas des struc- tures ancestrales, l’ontogénèse ne récapitule pas réellement la phylogénèse, pour beaucoup de rai- SOnS : 1° Parce que la composition de l'œuf, avec les ébauches accumulées dans son idioplasma, en fait quelque chose de tout à fait différent de la cellule primitive, vide d'ébauches, d’où l'espèce est sortie en effectuant son long développement à travers les âges (Oscar Hertwig) ; : 2° Parce que les organes rudimentaires des embryons ne peuvent permettre de rapporter ces embryons à aucun ancêtre déterminé, et ne per- mettent aucune conclusion précise au point de vue généalogique. Les embryons de Mammifères pour- vus d’arcs branchiaux, par exemple, loin de per- simplement que des animaux conformés comme ils le sont auraient été incapables de vivre (0. Hertwig); 3° Parce que les embryons des Vertébrés supé- rieurs, si on les considère dans leur ensemble, et non plus seulement dans leurs organes pris sépa- rément, ne ressemblent jamais à des animaux inférieurs. Ils sont déterminés de très bonne heure comme membres de leur groupe et se distinguent alors nettement des Vertébrés appartenant aux autres groupes. Ainsi le cou et les importantes modifications des ares aortiques qui accompagnent sa présence ne peuvent se produire qu'après la courbure nuchale, et cette dernière suppose elle- même un développement particulier du système nerveux central et des protovertèbres. Aussi Vial- leton dit-il encore, après Oscar Hertwig, que l'embryon, loin d’imiter ou de répéter d’autres formes, ne fait, au sens littéral du mot, que son propre développement; 4° Parce qu'un Vertébré n'est pas un assem- blage quelconque d'organes empruntés à diverses formes du même groupe, mais un tout cohérent, un ensemble de parties coordonnées entre elles el s’influencant toutes réciproquement ; 5° Parce que certains seulement des prétendus stades héréditaires sont maintenus ; un grand nombre d’autres manquent, de sorte que l’on a bien plus sous les veux le schéma du développe- ment phylogénétique que la série réelle des étapes parcou rues ; 6° Parce que, dans l’ontogénèse, tous les organes ne présentent pas un développement progressif el que, d'autre part, les nombreux cas de substitution s'opposent souvent à ce qu'il y ait réellement une répétition des formes inférieures de certains organes dans le cours du développement des ani- maux supérieurs ; 7° Enfin, et ceci est une simple remarque, parce que la théorie de la récapitulation, n’envisageant guère que la série progressive de développements aboutissant à l'homme, ramène inconsciemment à la conception de l'échelle animale, qui ne peut être évidemment, si l’on veut encore l'admettre, qu'une pure abstraction. « En somme, termine Vialleton, l'Embryologie et l'Anatomie comparée montrent que les êtres vivants se forment d’après des lois régulières et en allant du simple au composé; mais il y à loin de là à parler d'une répétitition des formes ances- trales au cours du développement ontogénique, car les structures reproduites pendant ce dernier sont trop générales et d'un caractère trop indéter- miné pour permettre de reconstruire, d'après elles, les ancêtres réels de l'espèce... Cest pourquoi la 212 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE loi biogénétique doit être rejetée dans son sens striet, et comme permettant de reconstituer, par l'étude de l’ontogénie, la série réelle des ancêtres d'une espèce. » On peut conserver la loi biogéné- tique en adoptant la formule donnée par Hertwig, qui ne met pas en doute, du reste, la réalité de l'évolution; seulement Hertwig avait fait remar- quer qu'en raison de la transmission à l'œuf des propriétés acquises par l'espèce, une répétition réelle des formes ancestrales est absolument impos- sible et que l'embryon ne peut aucunement nous révéler les formes que son espèce a traversées dans le cours du temps. II. — EMBRYOLOGIE HUMAINE‘. L'étude statistique de R. C. Punnett: Sur les rapports qui existent entre la nutrition et la déter- miuation du sexe chez l Homme, peut être placée en tête d'une revue générale des plus récents tra- vaux de l’'Embryologie humaine. Punnett trouve que, si l’on divise la population de Londres en trois groupes, correspondant à trois degrés différents de richesse, on voit que la proportion des enfants mâles sur les enfants femelles est d'autant plus grande qu'on s'élève des classes pauvres dans les classes riches. L'on peut en conclure que les conditions favo- rables de la nutrition déterminent la formation 1 Bibliographie : R. C. Pcnneir : Proc. Cambridge Phil. Soc., 1904, t. XII, p. 262-276. Erernon : Arch. Sc. phys. et nat., 1906, t. XXI, p. 639-41. L. Frassr: Arch. mikr. Anat., avec À planche et 17 figures. 1908, t. LXXI, p. 667-694, S. P. GaGe : Amer. Journ. Anat., 1905, t. IV, p. 409-443, 5 planches. BE. Bonnet et R. SEEVERS : Anal. Anz., 1906, t. XXIX, p. 452-459, avec 3 figures. J. E. Scamior : Arch. mikr. Anat., 1905, t. LXVI, p. 12-40 C. M. JACKSON : Anal. K. HELLY : Arch. mikr. avec { planche. H. Kusrer : Arch. f. 172, avec 1 planche. E. Goccro : Atti. Soc. Toscana Sc. nat. p. 33-48, avec 1 planche. Anz., 1905, t. XXVII, p. 488-510. Anat., 1905, t. XLVII, p. 124-141, mikr. Anat., 190%, t. LXIV, p. 158- Pisa, 1905, t. XXI, Giuseepe LEvI: Anat. Anz., 1904, t. XXV, p. 289-298, avec 1 planche. J. Kyrce : Arch. mikr. Anat., 1908, t. LXXII, p. 141-160, avec 1 planche. R. ArGauD : Journ. de l'Analomie et de la Physiol., 1904, t. XL, p. 298-304. C. A. Kia : Arch. mikr. Anat., 1903, t. LXIII, p. 575- 610, 2 planches. J. W. T. Wazker : Arch. f. mikr. Anat., 1904, t. p. 121-157, avec 1 planche et 9 figures. LXIV, O. Sroerk : Arch. mikr. Anat., 1906, t. LXIX, p. 322-339, 2 figures. L. Druner : Anal. Anz., 1904, t. XXIV, p. 251-286. Kxur KJELBERG Morphol. Jahrb., 190%, t. XXXII, p. 159-184, axec 8 figures. H. EcceuinG : Anat. Anz., 190%, t. XXIV, p. 595-605. F. Benrkau : Anat. Anz., 1907, t. XXX, p. 161-180, avec 1 figures, d'un plus grand nombre d'enfants mâles; mais il peut se faire aussi que ces conditions n'aient pas d'effet dans la proportion des sexes, ou même déter- minent une prépondérance relative des femelles, si l’on admet, dans ces deux derniers cas, que l'effet est masqué par d’autres facteurs affectant inégale- ment les diverses classes de la société. Punnett montre qu'en effet de tels facteurs se rencontrent dans la mortalité infantile, dans la proportion différentielle des naissances et probablement aussi dans l’âge différent des parents. Tous ces facteurs tendraient à diminuer la pro- portion des mâles dans les portions les plus pauvres de la population, et ainsi la première des conclusions deviendrait improbable; mais, si l’on se rallie à l'une ou l’autre des deux autres, il est impossible de dire dans quelle mesure agissent les facteurs notés ci-dessus. L'opinion de Punnett est que leur effet combiné ne serait pas assez grand pour marquer une prépondérance de naissances femelles due à une meilleure nutrition; par con- séquent, il incline à penser que, chez l'Homme, la détermination du sexe serait indépendante de la bonne ou de la mauvaise nutrition des parents. L'Œuf humain et son mode de fixation aux parois utérines a été étudié par Eternod, qui, pour cela, a soumis à une revision soigneuse les nombreux œufs humains microtomés en série qu'il possède dans sa collection particulière. L'embryologiste génevois est arrivé ainsi aux conclusions géné- rales suivantes : L'œuf de l'Homme, de même que celui d'un grand nombre de Mammifères supérieurs, traverse rapidement l’épithélium de MENTE et s’encapsule dans le derme de cet organe L'ectoderme de l'œuf ainsi Le Re par proliféralion une couche enveloppante épaisse, épithéliale, et d'aspect syncilial. Cette formation, qu'on appelle trophoderme ou trophoblaste, jest d’abord libre, mais elle adhère bientôt au due de la muqueuse utérine. Le sang de la mère, venant des capillaires san- guins qui se sont rapidement dilatés (peut-être au moment du premier retour des règles), vient faire irruption dans les mailles du trophoblaste et les agrandit. Ce sang maternel vient donc au contact direct des cellules ectodermiques, sans qu'il y ait entre eux interposition d'aucune couche endo- théliale, comme on l’a voulu longtemps. Ce rapport important entre le sang de la mère et les tissus de l'embryon se maintiendra sans changements jusqu'à l'accouchement. Eternod arrive done à cette con- 1 C'estce qu'avaient déjà montré Peter von Spee et d'autres auteurs plus récents. Voir notre revue annuelle d'Embryo- logie de 1906 (Aev. génér. des Sc., n° 10, 30 Mai 1906, p. 461, fig. 8.) sinindilis- im tu èus GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 213 clusion que le trophoderme est un organe persistant durant toute la gestation. C'est là une opinion con- traire à S. Minot, qui fait du trophoderme un or- gane transitoireet disparaissant de très bonne heure. Eternod montre ensuite les villosités du chorion se formant du côté de l'embryon, s'allongeant et se bifurquant dans la masse épithéliale trophoder- mienne. À mesure que les villosités s’agrandissent et se capillarisent (vaisseaux sanguins fœtaux), les lacunes sanguines trophodermiennes les plus voi- sines du chorion ovulaire se dilatent et deviennent les lacs sanguins maternels du placenta. En même temps que cela se produit, la couche plasmodiale profonde du trophoderme confinant au chorion ovulaire se différencie et engendre les deux couches épithéliales classiques : a) à cellules dis- tinctes; D) syncitiale. La couche périphérique du trophoderme continue à proliférer sans arrêt, de manière à engendrer des blocs ou des traînées cel- lulaires polynucléaires qu'on a décrits sous le nom de cellules géantes. Üne partie de cette couche superficielle plasmo- diale maintient son adhérence au derme utérin, au niveau des villosités d'agrafe (Hafl-Zolters des embryologistes allemands); c'est là que se forme le placenta fœtal, par simple croissance du tropho- derme modifié comme nous venons de le voir. L'étude des embryons humains aux premiers temps du développement a donné lieu à quelques travaux d'importance inégale. Le plus jeune est un embryon ou plutôt un œuf étudié 72 situ par L. Frassi. Cet auteur, discutant surtout la question de la caduque et de ses vaisseaux, de l’infiltration des leucocytes et des limites entre les éléments maternels et fœtaux, arrive aux conclusions sui- vantes : Le trophoblaste épiblastique de l'embryon forme au début quatre couches distinctes : couche cellulaire enveloppante, couche de cellules en co- lonnes, couche syncitiale et couche de Langhans; le mésoblaste de l'embryon forme le chorion. A noter, à la fin du Mémoire de Frassi, une suite de tableaux qui montrent les diverses opinions des auteurs pour ce qui concerne la couche de Lang- hans, le syncitium, les espaces intervilleux et les villosités, le mode de fixation de l'œuf, la caduque, les cellules géantes, les glandes utérines, les vais- seaux, la fibrine, la dimension de l'œuf, ete. Deux autres jeunes embryons humains ont été étudiés : l'un, âgé de trois semaines, par S.-P. Gage, qui trouve à cet âge le corps formé de 29 myo- tomes; l'autre, long de 41 millimètres et âgé d’en- viron trente-trois jours, par E. Bunnetel R. Seevers. Les faits les plus intéressants que l'on trouve à noter dans cette dernière étude sont les suivants : Le cœur est, à cet âge, relativement six fois plus grand en volume que chez le nouveau-né et sept REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. fois plus que chez l'adulte. Le volume de la moelle épinière est environ quarante-quatre fois plus grand que chez le nouveau-né el cent quinze fois plus grand que chez l'adulte. L'aorte dorsale est formée par l'union de deux ares aortiques latéraux, qui se réunissent juste au- dessous de l'origine des artères sous-clavières. A son origine, l’aorte est relativement étroite, mais elle s’élargit graduellement jusqu'à devenir deux fois plus large, vers son extrémité inférieure. La veine vitelline envoie une branche dans le mésen- tère, branche qui représente évidemment la veine mésentérique supérieure de l'adulte. J.-E. Schmidt apporte une contribution intéres- sante à l'étude de a muqueuse de Tintestin de lembryon humain. Les cellules de Panett appa- raissent dans l'intestin seulement à partir du sep- tième mois et atteignent leur développement le plus complet chez l'enfant nouveau-né. Elles se trouvent normalement chez l'adulte dans le petit intestin, fréquemment aussi dans l’appendice vermiforme ; habituellement absentes du rectum sain, on les y trouve dans certains cas pathologiques, dans les polypes et sur le bord des carcinomes, par exemple. Les cellules caliciformes apparaissent chez l’em- bryon humain du troisième mois et vont, à partir de ce moment, en augmentant de nombre, de sorte qu'à la fin de la vie fœtale elles deviennent si abon- dantes qu'elles forment une couche presque con- tinue dans le rectum tout entier et dans l'appendice vermiforme de l'entant nouveau-né; les parties inférieures du petit intestin montrent aussi à cet âge des cellules à mucus en abondance. On voit apparaître encore, au milieu de la gesta- tion, dans lépithélium intestinal du fœtus, des inclusions cellulaires particulières qui présentent bientôt, au cours du développement, la forme et les réactions des corpuscules de méconium. Ces inclusions sont vidées par les cellules dans l’in- testin, de telle facon qu'il n’en reste plus dans l’épithélium du nouveau-né. Il est à noter que le moment de leur formation coïncide avec le com- mencement des mouvements de déglutition du fœtus, qui font entrer du liquide amuiotique dans le tube digestif. Et ce serait une chose intéressante à rechercher de savoir s'il y a ici relation de cause à effet. En tout cas, cette recherche serait plus facile à faire chez le chien, où les mêmes élabora- tions des cellules intestinales commencent seule- ment peu de temps avant la naissance, mais se continuent encore quinze jours après. C.-M. Jackson étudie le dévelrppement pancréas chez l'homme à partir du deuxième mois du { Voir notre revue annuelle d'Embryologie de 1902 (Rev. génér. des Sc. du 30 décembre 1902, p. 1193, fig. 3, 40, 41° 12 et 13. 6** 274 GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE de la vie fœtale. Il montre que le corps de cet organe apparait à cette époque sous la forme d'un large bourgeon aplati, présentant une face anté- rieure et une face postérieure; au troisième mois, le bord inférieur du corps du pancréas vient en contact avec l'intestin sous-jacent, et ses portions internes puis externes apparaissent successive- ment; à ce moment, la glande acquiert la forme prismatique qu’elle gardera définitivement. Le développement et la structure des flots de Langerhans sont étudiés par K. Helly dans difré- rents groupes de Vertébrés. Cet auteur considère ces îlots comme des organes particuliers différant fondamentalement du pancréas vrai; ils provien- draient originairement d’un épithélium non diffé- rencié spécifiquement en pancréas et l’on ne pour- rait trouver aucune forme de transition, à aucune période de la vie, entre les deux types. Helly en conclut done qu'on ne saurait considérer les ilots de Langerhans comme formant un matériel de réserve pour la régénération des cellules pancréa- tiques; il est d'accord en cela avec les vues de Diamare, de Renine, de Lage et autres, mais en opposition avec celles de Dale. H. Küster montre que les îlots de Langerhans apparaissent dans le pancréas de l'embryon humain dès le début de la différenciation de la glande, sous la forme de bourgeonnements des conduits glandulaires. Ces ilots se reconnaissent alors à trois caractères nettement marqués : 4° les noyaux cellulaires sont situés vers le centre de l’ilot et le cytoplasme vers l'extérieur; 2° les cellules sont disposées en série, sous la forme de colonnes; 3° les îlots sont en relation intime avec les vais- seaux capillaires. De très bonne heure, ces îlots ainsi différenciés se séparent des conduits glandu- laires; ils grossissent jusque vers la fin de la vie fœtale et gardent alors, pendant toute la durée de la vie, le volume et la structure qu'ils ont acquis. Nous citerons à la suite et comme complément à ces travaux sur le pancréas humain : 1° une étude d'Empedocle Goggio sur le développement de cet organe chez les Amphibiens anoures; là, comme chez l'Homme, le pancréas apparait sous la forme de trois bourgeonnements de l'intestin : un dorsal et deux latéraux; 2° une étude d'histologie com- parée de Giuseppe Levi, qui étudie en particulier le pancréas d’un Lémurien, le Zemur mangos var. rubifrons, où les îlots de Langerhans sont excessi- vement nombreux. Après l'étude de ce Lype, G. Levi montre ensuite comment les îlots varient chez différents types de Mammifères; 3° un travail de J. Kyrle, qui montre que le parenchyme du pancréas et les îlots de Langerhans possèdent un faible pou- voir de régénération chez le Chien et le Cochon d'Inde. Le mode de transition entre l'artère iliaque interne et l'artère ombilicale a été étudié, chez l’en- fant nouveau-né, par R. Argaud. Cet auteur montre que les changements de structure entre ces deux vaisseaux se produisent dans la moitié interne de la portion intra-abdominale de cette dernière artère. Le calibre du vaisseau diminue progressivement et ses parois s’épaississent, sous l'influence, semble-t-il, de la formation des vaisseaux museu- laires longitudinaux de nouvelle formation. La couche élastique de la tunique moyenne, puis de l'élastique interne, commence à se résorber en fi- brilles extraordinairement minces. La délimitation entre les tuniques ivterne et moyenne devient très difficile, sinon impossible à déterminer, et c’est seulement par analogie avec la structure des autres artères du nouveau-né qu'il faut considérer la tunique interne comme réduite à un épithélium vasculaire doublé extérieurement par une très mince couche de tissu conjonctif. La transforma- tion structurale de l'artère ombilicale commence tout près de l'hypogastrique par un épaississement local de la paroi, en forme de sillon longitudinal, au niveau duquel l'artère ne tarde pas à présenter le caractère qu’elle offre dans son trajet extra- abdominal. Un deuxième épaississement se montre ensuite, puis le vaisseau s'épaissit sur tout son pourtour, et dès lors la structure définitive de l'artère ombilicale se trouve réalisée. Le développement des ganglions lymphatiques est étudié par C. A. Kling dans toute une série d'embryons humains. L'auteur, qui a choisi la région de l'aisselle, montre qu'un abondant plexus de vaisseaux lymphatiques se développe dans cette région avant que les glandes proprement dites apparaissent. C'est au troisième mois de la vie fœtale que l’on voit un tissu cellulaire et vasculaire se différencier dans les mailles du réseau lympha- tique et prendre un arrangement trabéculaire irré- gulier. Uue telle aire de différenciation correspond au centre d’origine d'un groupe de glandes lym- phatiques; ces glandes apparaissent en définitive par la division de l'aire d’origine, et cette division semble être causée par la croissance et la dilatation des vaisseaux lymphatiques voisins. Les grands sinus des ganglions sont done, au début, de simples vaisseaux lymphatiques; le reticulum cellulaire qui se forme dans leur lumière apparaît secondai- rement et provient de l’endothélium des vaisseaux lymphatiques. Plus tard, les glandes lymphatiques simples ainsi formées poussent à leur périphérie des bourgeons de différente grosseur; quelques-uns de ces bourgeons atteignent la structure définitive au cours de la vie intra-utérine; d’autres restent dans un état inférieur de développement. On trouve, en plus, chez l'adulte, des glandes petites, parfois GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE microscopiques, qui ne sont que des formes rudi- mentaires arrêtées dans leur développement; mais ce développement peut reprendre, même chez l’a- dulte, sous l'influence de circonstances spéciales. J. W. T. Walker étudie le développement et la structure de la glande coccygienne de l'Homme. Chez le fœtus de six mois, cette glande se présente sous la forme d’une simple masse cellulaire pé- nétrée déjà par des capillaires ltordus; après la naissance, le tissu conjonctif environnant pénètre cette masse et la divise en nombreux groupes cel- Fig. 1. — Schéma des rapports des branches de l'artère sacrée moyenne avec la glande coccygienne et ses glan- dules accessoires. — a, branche artérielle; h, nodules isolés; e, nodules plus volumineux; d, nodule princi- pal; e, pénétration de l'artère dans le nodule principal: f, petits nodules isolés appliqués sur le nodule principal. lulaires distincts, en même temps qu'un certain nombre des capillaires disparaissent; la vasculari- sation de la glande, toujours très développée, présente alors les schémas ci-contre (fig. 1 et 2). Ce fait semblerait indiquer que la sécrétion interne de cette glande, qui reste toujours dépourvue de canal excréteur, est plus importante pendant la vie fœtale que chez l'adulte. A propos de la glande coccygienne de l'Homme, nous citerons un travail de O. Stoerk, qui étudie les réactions histochimiques et les relations de cette glande. _ 215 Stoerk montre que ses cellules ne présentent pas la réaction chromaffine ni chez le fœtus, ni chez le jeune enfant; elles ne présentent pas de connexion histogénétique avec les nerfs du sympa- thique,et ce n’est que tardivement que les relations s'établissent entre cette glande et les branches de l'artère sacrée médiane. On ne peut donc plus voir dans cette glande une sorte de succédané des capsules surrénales, comme ‘on le trefois. L. Drüner, étudiant la séructure et le développe- ment de l'oreille moyenne chez l'Homme et la Souris, discute la question de l'homologie de l’ar- ticulation du marteau et de l’enclume des Mammi- fères avec l'articulation de l'os carré et de l’articu- laire des autres Vertébrés. Il montre toutes les difficultés morphologiques et physiologiques que croyait au- Fig. 2. — Schéma de la vascularisation de la glande. — a, artère; b, capillaire qui en part et pénètre dans un lobe de la glande; ce, espace sanguin du lobe glandulaire ; d, division de l’espace sanguin; 6, capillaire contenu dans l'enveloppe conjonetive d'un lobe glandulaire: f, capillaire venant d'un lobe et passant dans un autre: g, petits vais- seaux situés dans l'enveloppe conjonctive commune de la glande: h, veine. comporterait une pareille homologie et soutient, au contraire, l'homologie de l'articulation de la mächoire inférieure des Mammifères avec celle des Vertébrés inférieurs. Dans le même ordre d'idées, nous citerons le travail de Knut Kjelberg sur le développement de l'articulation mandibulaire. Les observations de cel auteur, faites sur différents embryons, le con- duisent à accepter ces idées générales : que l'arti- culaire et l'os carré des Sauropsidés sont repré- sentés par le marteau (malleus) et l'enclume (incus des Mammifères; que l’articulaire, quand il est renfermé dans la cavité tympanique, entraine avec lui une portion du muscle plérygoïdien externe, alors que la portion la plus considérable de ce musele reste attachée au maxillaire et à son con- dyle ; que la portion la plus postérieure du musele 276 est resserrée entre le Ltympanique et le squamosal et forme ainsi une partie, au moins, du ligament antérieur du manteau; enfin que la région toute antérieure se place entre le condyle et le squamosal et devient le ménisque articulaire. Le développement des glandes mammaires a été repris par H. Eggeling, qui classe définitivement les mamelles comme les homologues des glandes sudo- ripares ; ilmontre, en effet, que ces organes dérivent bien de glandes cutanées à sécrétion mérocrine. L'étude purement histologique de F. Bertkau vient confirmer ces conclusions, en montrant que la formation du lait est un phénomène purement sécrétoire et qu'elle ne s'accompagne d'aucune nécrobiose de la part de l'épithélium mammaire; ceux qui ont décrit un pareil processus auraient été trompés par l’imperfection de leur technique. III. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE DE L'ŒIL ET CYTOLOGIE EMBRYONNAIRE!. Le développement du globe oculaire, considéré dans son ensemble au point de vue de ses origines, a été étudié expérimentalement par E.T. Bell. Au moyen de très délicates opérations, faites sur des embryons de grenouille, cet auteur a enlevé la moitié antérieure du cerveau antérieur et des vésicules optiques, ou bien il à fait tourner la vésicule optique, de manière à reporter le pôle interne de cette vésicule vers l’extérieur, ou enfin il a greffé des vésicules optiques enlevées à d’autres embryons. Ces expériences et d’autres du même genre lui ont montré qu'un jeune œil peut se développer à la place d’un autre enlevé, que la rétine peut être régénérée chez de très jeunes embryons après avoir été entièrement enlevée, qu'un cristallin typique, c’est-à-dire formé de fibres lenticulaires et d'un épithélium, peut provenir ou bien de la couche pigmentaire de la rétine, ou bien du tissu cérébral d’un autre embryon, ou encore de l'ectoderme dorsal du cerveau moyen,ou enfin des cellules ectodermiques qui constituent l'origine de l'organe nasal. Quant à ce dernier, il se développerait indépendamment et du cerveau et ! Bibliographie: E.-T. BEL : Anal. Anz., 1906, t. XXIX, p. 185-194, avec 2 fig. P. BerraccuiNi : ZJnlernat. Monatschr. Anal. Physiol., 1902, t. XIX, p. 77-118, avec 2 pl. M. vox Lexuossek : Die Entwickelung des Glaskôrpers. Leipzig, in-40, 106 p. avec 2 pl. et 19 fig. AUREL VON SziLy : Anat. Anz., 1903,t. XXIV, p. 417-428. HI. Spemanx : Zool. Anz., 4905, t. XXVIIL, p. 419-432. I. Spemanx : Zool. Anz., 1907, t. XXXI, p. 379-386. Jan Grocamazrexi: Zeitschr. Wiss. Zool., 1908, t. LXXXIX, p. 164-172, avec 6 fig. A.-W. WEysse et W.-S. BURGESS : XL; 611-37, avec 17 fig. J. CAMERON Amer. [Vatur., 1906, 1. : Journ. of. Anat. and Physiol., 4905, t. XXXIX. GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE du pharynx, et ses connexions avec ce dernier se formeraient ultérieurement sous l'influence de stimuli extérieurs. Le développement et la structure de l'humeur vitrée ont élé entrepris dans ces dernières années par plusieurs auteurs,qui sont arrivés malheureuse- ment à des résultats quelque peu différents, de sorte que la question reste toujours à l'étude. Déjà il y a six ans’, P. Bertacchini avait trouvé que cette humeur ne doit pas être considérée comme du tissu conjonctif dans lequel les cellules auraient disparu par atrophie, pas plus que comme une simple transsudation sanguine ni une sécré- tion des cellules rétiniennes ; cette bumeur n'aurait même aucun rapport d'origine avec la petite quantité de mésoderme qui reste incluse dans la concavité de la vésicule optique ou qui y entre par la fissure choroïdienne. L’humeur vitrée serait un tissu d'origine secondaire; elle serait exclusive- ment due aux leucocytes des vaisseaux sanguins qui émigreraient par diapédèse pour venir former des éléments fixes, les cellules vitrées; celles-ci, à leur tour, sécréteraient la substance intercellulaire. Dans les premiers temps de la vie fœtale, cette substance apparaitrait dans le cytoplasna sous forme de sphères gélatineuses qui tomberaient au dehors par déhiscence. Plus tard, ce mode de sécrétion changerait un peu ; il serait caractérisé par la présence de granules colorables et par la désintégration des prolongements cellulaires, c'est- à-dire qu'il se ferait par clasmatose. M. von Lenhossek, reprenant cette étude en 1903, arrive à des conclusions différentes. Pour cet auteur, le corps vitré tout entier serait un produit du cris- tallin et, par conséquent, d'origine ectodermique. Les cellules vitrées seraient comparables aux cellules épendymaires du système nerveux central et la substance vitrée serait formée par un réseau extrêmement fin de fibrilles provenant de ces cellules. Les relations que ces fibrilles acquièrent avec la rétine s’opéreraient secondairement au cours du développement. La membrane hyaloïde- dérivée de la rétine n'aurait aucune relation géné- tique avec le corps vitré, et la capsule du cristallin serait une formation cuticulaire des cellules cristal- liniennes. Enfin, A. von Szily, recherchant l'origine de l'humeur vitrée chez le chien et chez la truite, trouve, au début de sa formation, un tissu de sou— tien primitif fibrillaire el privé de cellules. Les fibrilles proviennent des ponts intercellulaires des couches épithéliales adjacentes et sont unies aux cellules de ces couches par le moyen de petits orga- ! Pour l'état de la question à cette époque, voir, dans ce journal même, l'excellente revue d’Anatomie de 1904 du Professeur E. Laguesse. GUSTAVE LOISEL — REVUE nites en forme de quille (Æegellürmiyen), qui res- semblent à ceux découverts par von Lenhossek à la base des cellules du cristallin. Les cellules mésen- chymateuses pénètrent ensuite dans le réseau fibril- laire primitif. Si les fibres se sont formées là où les cellules mésenchymateuses sont abondantes, elles s'unissent secondairementaveccescellules, donnant à l'humeur la forme nettement mésenchymateuse; autre part, la forme fibrillaire prédomine. Ces formations appartiennent-elles génétique- ment à la fois à la rétine et au cristallin? Szily le croit, mais il trouve que c’est là une question peu importante et, en tous cas, difficile à déterminer. Quant au développement ultérieur des éléments de l'humeur vitrée, comme les produits des différents feuillets germinatifs ne peuvent être distingués les uns des autres, il est impossible de dire ce qui appartient ici à l’ectoderme et au mésoderme. Les modes de formation et de régénération du cristallin ont été étudiés expérimentalement par Hans Speman (fig. 3 et 4) dans deux intéressants travaux que nous analyserons un peu longuement, car les résultats auxquels cet auteur est arrivé s'adressent à l'Embryologie générale autant qu'à ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE l’'organogénèse de l'œil. La question avait, du reste, été envisagée déjà avant Speman, et de la même facon, par Lewis, qui avait vu : 1° Que l'influence de la rétine sur l’épiderme est indispensable pour que le cristallin se produise ; 2° Que la présence d’un cristallin pas plus que celle des tissus qui entourent ou sont en connexion normalement avec l'œil ne sont nécessaires pour que la vésicule oculaire devienne cupule oculaire. Cela Speman le confirme ; 3° Que l'excitation provenant de la cupule ocu- laire n’a pas besoin d'agir sur un point spécial de la peau pour que se produise un cristallin : tout ectoderme est vraisemblablement capable de fournir un cristallin, puisque l’ectoderme de la ÆRana palustris peut, dans les expériences, être remplacé par celui de la Rana sylvatica. Mais il restait un certain nombre de questions à résoudre : 1° Les cellules épidermiques auxquelles échoit plus tard la formation du cristallin sont- elles indifférentes avant d'avoir reçu l'influence de la cupule oculaire ou bien sont-elles déjà, avant toute influence, différentes des cellules de leur entourage ? 2° La cupule oculaire peut-elle cons- truire un cristallin au moyen des cellules épider- miques quelconques sur lesquelles elle agit, ou bien doit-elle trouver des cellules qui détiennent déjà en puissance une fonction et n’attendent plus qu’une sorte de déclanchement pour évoluer ? . Pour résoudre à nouveau et approfondir ces ‘questions, Speman a employé la méthode suivante : Avant l'apparition de la première ébauche cristal- linienne, il enlevait la concavité de la vésicule oculaire primaire avec les cellules qui auraient formé le cristallin; ou bien il enlevait seulement la première ébauche cristallinienne aussitôt formée. La plaie cellules ectodermiques quelconques qui n'auraient opératoire était recouverte avec des rien eu à faire normalement avec la formation du cristallin. Les opérations pratiquées sur la ana fuseaet le Triton tœniatus réussissaient facilement etétaient toujours bien supportées par les larves. Voiei ce qu'il observa de cas, la vésicule opérée se reforma et se trans- forma en une cupule normale, mais plus petite ; une nouvelle ébauche de cristallin apparut aux dépens de l’épiderme et évolua comme l'eût fait l’'ébauche normale. Ces cas se concilient avec l’idée que, chez le Tri- dans un grand nombre Fig. 3. — Coupe transversale de la tête d'une larve de Tri- ton. — L'œil du côté gauche est plus avancé dans le développement ; la vésicule cristallinienne est détachée de l'épiderme dont la séparent des cellules conjon lives. Des fibres cristalliniennes sont formées. L'œil opéré est réta- bli; il est plus petit que l’autre. Il s’est formé un cristal- lin aux dépens de l'épiderme. (Gross. 100 : 1.) ton et la Rana, la cupule oculaire provoque la for- mation du cristallin ; mais, avant tout, ils prouvent que cette action peut s'effectuer avec succès sur des cellules de l'entourage de l'œil qui n’ont habi- tuellement rien à faire avec la formation du cris- tallin. En un mot, l'épiderme possède, en puissance, en bien des endroits, la faculté de produire un cristallin. La régénération du cristallin peut s'effectuer même si l'opération est faite à un stade plus avancé du développement, lorsque déjà s’est pro- duite une ébauche cristallinienne, lorsque lépi- thélium est déjà devenu clair et transparent. Mais, dans ce cas, la régénération est plus rare. Ce fait s'explique peut-être parce que les tissus sont plus différenciés déjà, peut-être aussi parce que la cu- pule oculaire n’a point sa forme normale et parce que, à ce stade, une lame de tissu conjonctif s'in- terpose entre elle et l’épiderme. GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D’EMBRYOLOGIE Par quel moyen la cupule oculaire occasionne- t-elle la formation du cristallin et de la cornée? Rien ne nous permet encore de le supposer; mais il est deux questions qui peuvent dès maintenant rece- | voir réponse. C'est d’abord celle-ci : l'influence va-t-elle direc- tement de la cupule oculaire à l’épiderme ou est-elle transmise indirectement par une autre partie de l'organisme ? Cette seconde hypothèse, presque invraisem- blable au premier abord, est à rejeter complète- ment à la suite du fait expérimental suivant : la cupule oculaire, extirpée de sa place et greffée | ailleurs, amène la formation d’un cristallin aux dépens de lépi- derme qui se trou- ve alors en d'elle (Lewis). La rétine embryon- naire n'a donc pas besoin de l’inter- médiaire des sus qui l'entourent face tis- normalementpour exercer une action surles cellules épi- dermiques influence recte. On peut ensuite demander l'influence exercée par la cupule ocu- laire sur l’épi- derme est passa- son est di- se SI gère, OU perma- diverses couches, le cristallin est différencié. L'œil opéré est beaucoup nèèe ane plus petit et séparé de l’épiderme par du tissu conjonctif. Au niveau du MEL SMS UNE bord irien supérieur, on voit la néoformation cristallinienne à son d’une excitation début. (Gross. 100 : 1). une fois produite, ou faut-il que l'excitation se renouvelle pendant tout le temps du développement du cristallin ? Des expé- riences de Schapers répondent à cette question. Gel expérimentateur faisait, dans un autre but que le but cherché ici, une plaie dorsale profonde à des larves de Rana esculenta. La réparation de la plaie rétrac- tait les téguments dorsaux etamenait ainsi un dépla- cement de l’épiderme situé au devant des cupules oculaires. À ce niveau, au moment où avait lieu l'ex- périence, on observait déjà une ébauche très petite de cristallin. Celle ébauche, après la rétraction de l’'épiderme, se trouvait ramenée sur la face dorsale de Ja larve, loin de la cupule oculaire. Eh bien, dans ces conditions, le développement de cette ébauche se poursuivait, normal, jusqu'à un certain point. L'histogénèse n'était point troublée, en ce sens que les cellules épidermiques évoluaient en fibres cris- Fig. 4. — Coupe transversale de la téte d’une larve de Triton plus ägée. — L'œil du côté gauche est normal ; il appartient à une coupe passant à 504 en arrière du plan du reste de la préparation; sa rétine montre ses talliniennes; mais l’organogénèse était arrêtée : l’'ébauche cristallinienne ne se séparait pas de l'épiderme. I faut voir là un fait montrant que le chimiotactisme positif de la cupule vis-à-vis de l'épiderme doit nécessairement s'exercer d’une facon continue pour amener un développement complet; mais il n’en est pas moins vrai que l’ac- tion chimiotactique du début a suffi à {provoquer la transformation totale d’une cellule épidermique en fibre cristallinienne. En même temps que la cupule oculaire à occasionné le bourgeonnement primordial de l’ébauche cristallinienne, elle lui a donné, du même coup, la faculté de se différencier ultérieurement en fibres; la différenciation initiale est dépendante, mais se poursuil de facon auto- nome. Dans toutes les expériences qui précèdent, il était nécessaire que les opérations fussent faites alors que la cupule oculaire était encore en contact par ses bords avec l’épi- derme. De cette fa- con, les actions chimiotactiques peuvent s'exercer et aboutir. Mais, si l’on opère une larve comme il a été di plus haut et que, pendant la régé- nération de la cu- pule oculaire, une lame de tissu conjonctif em- bryonnaire s'insinue entre les bords de la cupule régénérée et l’épiderme, 17 n'y à plus formation d'un cristallin aux dépens de l'épiderme. Un cristallin se régénère néanmoins, et cela aux dépens des cellules originellement ectodermiques les plus proches de la rétine. C'est le rebord irien qui réagit à l’action chimiotactique. Colueci, Wolff, Frischel et Speman voient, en effet, un bourgeon cellulaire se détacher des cellules du rebord, au point où a lieu la réflexion du feuillet distal sur le feuillet proximal rétinien. Ce bourgeon grandit et se transforme peu à peu en cristallin. Les cellules rétiniennes elles-mêmes sont capables de fournir un cristallin si on les irrite au moment de l’opé- ration (Wolff). Un dernier fait, fort intéressant, est mis en GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 219 lumière par les recherches de Wolff et de Speman. L'action — chimiotactique probablement — dont est douée la rétine embryonnaire et qui la rend capable d'amener la formation d'un cristallin aux dépens de cellules ectodermiques situées dans son voisinage immédiat, à son contact, celte action ne se perd point dans la suite du développement. Mais elle ne peut s'exercer que si un cristallin n’est pas déjà formé et en place. Que l’on enlève un cristallin régénéré : la rétine embryonnaire est capable d'en faire régénérer un second (si les conditions de contact sont réalisées encore comme au début). Que l'on irrite le rebord irien de la rétine, tandis que le cristallin est encore en place : on produit un bourgeonnement du rebord irien de la rétine, mais point de cristallin. Il semblerait donc que cet organe jouisse d’une puissance inhibitrice et qui serait de nature chimique. L’année dernière, Hans Speman est venu ap- porter une nouvelle contribution à cette question intéressante de la régénération du cristallin. Il enlève, avec une fine aiguille de verre, l’ébauche embryonnaire de l'œil sur le cerveau d’une jeune grenouille grise (ana fusca) et remarque que le cristallin ne se reforme pas du côté opéré. Au con- traire, cet organe se reformerait parfaitement, dans les mêmes conditions opératoires, chez la gre- nouille verte (Æana esculenta); ici, le cristallin pourrait done se développer sans qu'il soit besoin de faire intervenir aucun stimulus de la part de la vésicule optique. A la suite de ces études de Speman, nous signa- lerons un travail de Jan Grochmalicki, qui a étudié expérimentalement la régénération du cristallin chez de jeunes Truites (Zrutta fario et T. iridens). Cet auteur a trouvé que le processus de régénéra- tion commence sur le bord supérieur ou sur les côtés de l'iris, et, quoique paraissant aller beaucoup plus lentement que chez les Amphibiens, conduirait cependant à la néo-formation de l'organe dans toute son intégrité. Le développement de la rétine a été suivi d'une facon complète et tout à la fois chez le Poulet et chez les Batraciens. Dans le premier type, les auteurs, À. W. Weysse et W. S. Burgess, dis- tinguent trois périodes bien définies : a) Période de multiplication cellulaire, qui s'étend du second au huitième jour de l’incubation; b) Période d'organisation (of re-adjustment), qui va du huitième au dixième jour; ce) Période de différenciation, qui s'étend jusqu à la fin de l’incubation. La rétine se montre d'abord sous la forme d'une couche syncitiale, dont la plus grande partie des noyaux évolue définitivement pour former la couche des cellules ganglionnaires, alors que les noyaux les plus proches du bord externe de la rétine restent sous la forme de noyaux germinatifs; ce sont les seuls qui gardent alors le pouvoir de se diviser par karyocinèse et de faire grossir ainsi la rétine. La différenciation de cette membrane commence au centre de la cupule rélinienne et s'étend progres- sivement vers les bords, là où l’on trouve seulement bientôt des figures karyocinétiques. La couche nu- cléaire externe représente les deux dernières géné- rations de la division des noyaux germinatifs. Les noyaux des cellules à bâtonnets, qui sont plus nom- breux que ceux des cônes, sont aussi les plus jeunes de tous ceux de la rétine; quant aux cônes et aux bâtonnets, ce sont simplement des productions cyto- plasmiques, formées sans aucune participation di- recte des noyaux; ceux-ci restent toujours dans la première position et ne sont pas rejetés ici en dehors de la membrane limitante externe, comme cela se produit chez d’autres types. La couche pigmentaire est une continuation directe de la rétine et, comme celle-ci, apparaît d'abord sous la forme d’une membrane syncitiale à deux couches de noyaux superposées; mais ces noyaux s'étendent peu à peu en surface, de manière à ne plus former qu'une seule couche. Ces noyaux restent toujours de la même grosseur pendant tout le temps du développement; les granules pigmen- taires apparaissent dans l'intervalle et ne paraissent pas jouer le rôle de matériel nutritif. L'étude du développement de la rétine chez les Batraciens a donné l’occasion à J. Cameron de mettre en évidence le rôle des phénomènes de tac- tisme dans la différenciation cellulaire. Cameron analyse d’abord la structure fine de la rétine dès les premières phases du développement, aussitôt après l’invagination du feuillet distal de la vésicule optique. Dans ce feuillet distal, il distingue quatre sortes d'éléments fondamentaux : 1° des spongio- blastes, — qu'il ne faut pas confondre avec les cel- lules qui portent ce nom chez l'adulte, — dont les prolongements anastomosés forment un réseau; 2% le myélo-spongium. Celui-ci, sorte de squelette du feuillet rétinien, forme au niveau des surfaces interne et externe de ce feuillet les deux limitantes de la rétine. Dans les mailles de ce réseau se ren- contrent deux espèces de cellules, si l’on peut ainsi appeler des éléments qui n'ont au début que leur noyau, sans corps cytoplasmique individualisé. Ces cellules sont : 3° les cellules germinatives, situées contre la limitante externe, et 4° les neuroblastes, provenant de la division des cellules ou, mieux, des noyaux germinatifs. Un des points les plus importants que l'auteur ait mis en lumière touche à la formation des pro- longements qui, sur l'adulte, caractérisent toutes ces 280 cellules nerveuses. Les prolongements de toutes les cellules naissent avant qu'un corps cytoplasmique soit individualisé autour des noyaux. En consé- quence, on ne saurait concevoir qu'ils naissent du protoplasma : et, en effet, c'est aux dépens du noyau que vont se former les prolongements cylindre-axile ou protoplasmique des cellules de la couche gan- glionnaire ou de la couche granuleuse interne, ainsi que les premiers rudiments des cônes et bâtonnets des cellules visuelles. A ceteffet, le noyau semble doué d’une fonction sécrétoire et excrète une substance achromatique spéciale, restant incolore par les procédés habituels de teinture de la chromatine, du moins à son état naissant. Cette substance représenterait la sub- stance nucléaire achromatique qui entoure les figures karyocinétiques. Cameron donne à cette participation du noyau à l'élaboration de la cellule le nom de « fonction achromatique » nucléaire et pense en avoir trouvé des effets en d’autres tissus que la rétine. Au cours du développement, au fur et à mesure qu'il abandonne de cette substance, le noyau diminue. Au début, cette substance achro- matique est peu visible et, par conséquent, difficile à démontrer; mais, par suite d’un phénomène de maturité parallèle au développement, ces produc- tions d’«achromatine » deviennent faciles à carac- tériser. Avant d'en arriver aux phénomènes d’histogénèse qui dépendent du chimiotactisme, je voudrais noter une remarque intéressante faite par l’auteur sur l'alternance des divisions indirectes et directes des noyaux, dans la rétine. Mitoses et amitoses se présentent successivement, ce qui montre tout d’abord que les amitoses ne sont pas le mode de division réservé aux cellules dont l'existence est brève. Mais les miloses ne s'’observent au niveau des noyaux germinatifs que tant que ceux-ci n'ont pas montré de trace de leur fonction achromatique. Dès que celle-ci a débuté, c’est-à-dire qu'un prolon- gement est né à ce qui sera la cellule, le noyau perd la faculté de se diviser par karyocinèse : la divi- sion direcle seule la multiplication. Il semble que l'on puisse en inférer que l’excrétion de la substance achromatique par le noyau lui enlève un des matériaux nécessaires au travail compliqué de la karyocinèse, Nous arrivons maintenant au détail du mode de développement des cônes et bätonnets. Le premier rudiment de ces formations consiste, nous l'avons déjà vu, en «achromatine naissante », produite par les noyaux de la couche nucléaire exlerne. À une certaine époque du développement, des granules vilellins qui farcissent le feuillet distal de assure GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE la vésicule optique, aussi bien que les parois des vésicules cérébrales, sont ingérés par ies noyaux des neuroblastes, auxquels ils servent de matériaux de nutrition. Or, la substance achromalique attaque ces granules vitellins et, par un processus de diges- tion, les transforme en petites vésicules claires, les « globules vitellins ». Ceux-ci sont chassés, ainsi que nous l’allons voir, au-delà de la membrane limitante externe et exercent alors un chimiotactisme positif sur le pigment rétinien, de telle sorte que les cellules pig- mentaires vont se développer simultanément avec les cônes et bâtonnets. Mais ces derniers, en outre, ingèrent des grains de pigment et le métabolisent en une substance très sidérophile. Cette substance, rhodopsine où corps voisin, parait se comporter comme matériel nutritif pour les bâtonnets et les cônes. En effet, ces derniers s'accroissent avec une rapidité extraordinaire dès qu'ils ont franchi la membrane limitante externe et qu'ils sont, par con- séquent, en rapportavec le pigment. Lesnoyaux des cônes et bâtonnets continuent d’ailleurs leur apport de substance achromatique pour entretenir une ingestion permanente de pigment. C'est, d’ailleurs, là un indice de ce qui se passe durant la vie de l'individu. La « fonction rhodopsi- nogène » des bâtonnets apparaïîtrait ainsi comme liée à deux facteurs : les prolongements des cellules pigmentées apportant le pigment, et le noyau des bâtonnets et des cônes fournissant la substance achromatique, non seulement nécessaire, mais encore indispensable à l'existence de la fonction. Les cônes, comme les bätonnets, doivent leur développement précoce à l'ingestion de ce pigment; en d’autres termes, ils accomplissent la « fonction rhodopsinogène ». La signification de ce fait prend de l'importance si l'on observe que les cônes des Amphibiens représentent les premiers stades de la formation des bâtonnets, ainsi que Bernard l’a vu. L'arrêt temporaire de développement des cônes est dû à l’arrêt de la fonction achromatique du noyau. Ainsi l'absence de ce facteur essentiel peut empêcher la continuation de la fonction rhodopsinogène. Ceci fournit l'explication de ce fait bien connu que les cônes de la grenouille adulte ne sont pas doués de la fonction rhodopsinogène. Deux types de cônes sont facilement distinguables au cours du développement de la rétine des Amphi- biens. D'abord certains, en forme de fuseaux, pos- sèdent une fine tige; d’autres présentent une large vésicule basale. Cette dernière forme dérive du pre- mier type par suite d'une éjection abondante et brusque d'achromatine par le noyau dans la base du cône. Ce dernier type démontre clairement la réalité de la fonction achromatique. Les « doubles cônes » des Amphibiens sont dus GUSTAVE LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE : 281 au développement côte à côte de différents types de cônes, chacun ayant maintenu son indépendance el ses caractères distinctifs. Les « globules huileux » des cônes des Amphi- biens, au sujet desquels on a tant écrit, sont simple- ment le reste des globules vitellins originels. En outre, le globule huileux existe à la fois dans les rudiments des cônes et des bâtonnets et, dans chacun de ces cas, il paraît disparaître en se mélangeant avec la partie claire de l’ellipsoïde. La lécithine ou quelque dérivé entre probablement largement dans sa constitution, montrant qu'il est directement dérivé du vitellus. Les fibres du nerf optique proviennent du prolongement du noyau des cellules ganglionnaires et n'apparaissent que très tard en tant que couche rétinienne distincte, grâce à ce fait qu'elles sont d’abord achromatiques comme les prolongements des autres noyaux rétiniens. Elles subissent un pro- cessus de maturation, par quoi elles deviennent de plus en plus colorables et visibles, par consé- quent. La simultanéité de développement des prolonge- ments des cellules pigmentaires et des éléments visuels est due à un chimiotactisme positif, ainsi que nous l'avons déjà dit. Ces prolongements seraient l’'homologue de pseudopodes. Quant à la substance achromatique claire dans laquelle baignent les granules de pigment, elle est pro- bablement fournie par le noyau des cellules pig- mentaires rétiniennes, et ainsi elle est l’homologue des produits des autres noyaux rétiniens. Les granulations de graisse jaune que l’on trouve dans les cellules pigmentaires des Amphibiens dérivent des globules vitellins, à l'instar des glo- bules des cônes et bâtonnets. On en peut proba- blement conclure qu'ils consistent surtout en léci- thine ou dérivés. Il est possible que, dans les conditions ordinaires, chez l'adulte, la lumière n'agisse pas directement sur les cellules pigmen- taires. L’élongation de leurs prolongements ne se produit qu'indirectement, grâce à l'intermédiaire des éléments visuels, selon le processus suivant : la lumière stimule les cônes et les bâtonnets d'abord; leurs noyaux excités fournissent une sécrétion de substance achromatique et exercent ainsi une influence attractive sur les cellules pig- mentaires; celles-ci allongent alors leurs prolon- gements, comme aux premiers stades du dévelop- pement. Des grains de pigment sont ingérés, métabolisés en rhodopsine : les phénomènes mor- phologiquement appréciables de la vision sont accomplis. La revue que nous venons de faire des derniers travaux sur l’embryologie comparée de l'œil nous ramène en quelque sorte au premier chapitre de cette revue annuelle; elle vient affirmer, en effet, cette notion d'Embryologie générale qu'au cours du développement des êtres, les éléments cellulaires en voie de différenciation réagissent fortement les uns sur les autres. La formation d’un tissu, d'un organe est sans aucun doute liée d’abord aux qualités contenues en puissance dans les cel- lules embryonnaires de par l’hérédité; mais ces qualités, intimement unies elles-mêmes à la con- stitution chimico-physique de la cellule, ont besoin, pour se manifester, d’un quid movens venant du monde extérieur. Et, dans la plupart des cas, ce quid movens réside dans la constitution chimique et physique des éléments anatomiques voisins de la cellule considérée. En d’autres termes, étant donnée une cellule, de constitution physico-chi- mique déterminée, un certain nombre d'agrégations moléculaires, d’adsorptions, de combinaisons sont possibles entre cette cellule et le monde extérieur. Ces possibilités sont les qualités potentielles de la cellule, héréditaires et peut-être même acquises. Telle ou telle de ces qualités potentielles se déve- loppera selon les variations du milieu extérieur. Les recherches de Cameron sur la rétine nous fournissent un autre renseignement suggestif, con- cernant les fonctions et le rôle du noyau dans la vie de la cellule embryonnaire. L'action de l’achro- matine nucléaire sur les granules pigmentaires des cellules à pigment de la rétine, de même que sur les grains vitellins, montre bien, en effet, que la chromatine possède des propriétés digestives, au moins dans le noyau embryonnaire et à l'état nais- sant; cette substance doit contenir, par conséquent, un ferment ou un préenzyme. Ce fait accroît l'in- térèt des recherches de Hartog, entre autres re- cherches récentes, sur l'existence d'enzymes dans les tissus embryonnaires. Il semble, en outre, démontré que beaucoup de noyaux absorbent le vi- tellus ingéré, et, après l'avoir transformé, le mettent de côté comme chromatine nucléaire. Il semblerait done que l’achromatine est cette part du noyau qui exerce une action digestive et ingestive sur les matériaux de nutrition, tandis que la chromatine doit être regardée comme le premier produit du métabolisme nucléaire. La chromatine nucléaire apparaît aussi comme capable de se retransformer en une substance qui, à l'état naissant, a les carac- tères de l’achromatine et est, sous cette forme, chassée du noyau‘. Gustave Loisel, Directeur du Laboratoire d'Embryologie à l'Ecole pratique des Hautes-Etudes. ‘ L'analyse des travaux de Speman et de Cameron qui ter- mine cette revue, a été faite par M. Paul Mulon, professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Baire (René), Professeur à la Faculté des Sciences de Dijon. — Leçons sur les Théories générales de l'Analyse. — 2 vol. in-8° de 232 et 341 pages. (Prix : 20 fr.) Gauthier- Villars, éditeur, Paris, 1909. Dans la préface de son livre, M. Baire indique le but qu'il s’est proposé : rassembler, sous la forme la plus concise, les théories qui constituent le fond commun de toutes les branches de l'Analyse mathématique. L'ouvrage ne traite donc que certains sujets généraux, mais avec toute la précision et la rigueur désirables, et en tenant compte des travaux les plus récents. Le premier volume est réservé aux variables réelles; le premier chapitre est consacré aux notions fonda- mentales de limite et de continuité; M. Baire y suit le mode d'exposition qu'il avait adopté dans un ouvrage antérieur sur ce sujet (1905), en s'appuyant sur la théorie des ensembles, qui facilite et unifie beaucoup de démonstrations. L'application à la Géométrie achève de donner aux principes la rigueur nécessaire. Dans le second chapitre : Dérivées, différentielles et intégrales, l'auteur, après avoir établi avec soin les no- tions de dérivée et d'intégrale, résume les principes du calcul de ces quantités, puis traite des différentielles suc- cessives à la fois pour une et plusieurs variables; il termine par la formation des équations différentielles et aux dérivées partielles, et l'intégration des différen- tielles totales. Le troisième chapitre : Application et extension de la notion d'intégrale, débute par la mesure d’un arc de courbe, puis d’une aire plane, ce qui conduit à l'inté- grale double, introduite par un procédé absolument analogue à celui qui a servi pour l’intégrale simple : d'où la règle pratique d'évaluation, établie en toute rigueur ; la mesure des volumes et les intégrales triples sont présentées de la même manière. Le changement de variables dans les intégrales multiples est étudié avec grand soin, en commencant par le changement linéaire, et y ramenant le cas général. Enfin, l'aire d'une surface courbe est évaluée d’une facon très pré- cise, d'après les travaux récents. Le chapitre se ter- mine par les intégrales curvilignes et de surfaces, et leurs transformations en intégrales multiples, d’après Green et Stokes. Le second volume traite d'abord des fonctions de variables complexes; M. Baire s'est efforcé d'y suivre une méthode d'ensemble qui fût la synthèse et non la juxtaposition des méthodes antérieures. Le chapitre IV conduit à la représentation fondamentale par une série entière d'une fonction holomorphe, ou ayant une dérivée; on y est conduit en établissant la formule fondamentale de Cauchy, déduite des conditions d'holomorphie par la formule de Green; cette formule est suivie de l'étude des séries de fonctions, ramenée autant que possible au cas le plus courant de conver- gence uniforme, dit de convergence normale, dans lequel les modules des termes de la série demeurent moindres que les termes de même rang d'une série convergente à termes positifs. La série de Taylor résulte ensuite de l'intégrale de Cauchy, et, après les indications nécessaires sur les pôles, points singuliers essentiels et fonctions multiformes, cette série est étendue aux fonctions de plusieurs variables. Le chapitre suivant : Æquations différentielles, com- mence par le théorème d'existence de l'intégrale d’un système différentiel ordinaire, établi à l’aide des fonc- ET INDEX tions majorantes; puis sont étudiés les cas usuels d’in- tégration du premier ordre, les solutions singulières, les équations et systèmes linéaires : ensuite, l'auteur traite conjointement les équations linéaires aux dérivées par- tielles du premier ordre etlessystèmesdifférentiels équi- valents, avec interprétation géométrique, puis les équa- tions différentielles totales du premier ordre, et enfin l'équation générale aux dérivées partielles du premier ordre, suivant les deux méthodes des caractéristiques de Lagrange et Charpit. Pour les équations aux déri- vées partielles d'ordre supérieur, M. Baire s’est con- tenté d'étudier complètement un exemple emprunté à la Physique : propagation d’une onde plane dans un tuyau cylindrique. Viennent ensuite les applications géométriques enveloppes, courbures, contacts, coordonnées curvi- lignes sur une surface, lignes asymptotiques, systèmes conjugués, lignes de courbure, géodésiques, systèmes triples orthogonaux : c’est une excellente introduction à l'étude approfondie de la Géométrie infinitésimale. Enfin, le livre se termine par un résumé à la fois succinet et complet de la théorie des fonctions ellip- tiques, suivant le mode d° exposition de M. Weierstrass; ce résumé conduit au théorème d’addition, à l'inver- sion, aux applications géométriques aux courbes de genre un, et à l'équation d'Euler. Cet: excellent ouvrage, qui atteint parfaitement le but que s’est proposé l’auteur, est remarquable par la précision et par l'unité de méthode; il sera certaine- ment très apprécié des professeurs et des étudiants de nos Facultés : en particulier, les candidats à l'agréga- tion y trouveront un très bon exposé des notions générales qui leur sont nécessaires. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. 2° Sciences physiques Electrotechnik in Einzel-Darstellungen. d N° 10. Wernicke (K.), /ngénieur. — Die Isoliermit- tel der Electrotechnik (Les IsoLanTs EN ELECTROTECH- NIQUE). — 1 vol. in-8°, de 184 pages, avec 60 figures. (Prix cartonné : 7 fr. 50. ) N° 11. Natalis (F.), Zngénieur. — Die selbsttätige Regulierung der elektrischen Generatoren (La RÉGULARISATION AUTOMATIQUE DES GÉNÉRATEURS ÉLEC- TRIQUES). — 1 vol. 1n-8° de 112 pages avec 75 fiqures. (Prix :5 francs.) F. Vieweg und Sobhn, 1909. La collection de la maison Vieweg sur l'Electrotech- nique vient de s'enrichir de deux nouveaux volumes. L'un est consacré à la question des isolants. La con- naissance de ces substances est d'autant plus nécessaire que l’Electrotechnique emploie chaque jour des ten- sions plus élevées. Tandis qu'on a trouvé dans le cuivre, pour la transmission du courant électrique, un excellent matériel dont les propriétés sont bien connues et susceptibles d’une mesure exacte, les nombreuses substances, naturelles et artificielles, qui sont em- ployées à l'isolement du courant ne remplissent jamais qu'une partie des conditions exigées ; les conditions d'application ne peuvent en être calculées à l'avance, et elles doivent d’abord être soumises à des essais compa- ratifs. Les conditions principales que doit remplir un bon isolant sont les suivantes : 1° une résistance suffisante au passage de l'électricité; 2° une hygroscopicité aussi éditeurs, Braunschweïq, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 283 faible que possible; 3° une bonne résistance au feu; 4° une durée prolongée; 5° une bonne résistance mé- canique. L'auteur décrit Les méthodes employées pour l'essai des isolants à ces cinq points de vue. Il passe ensuite en revue les isolants les plus couramment employés dans la pratique et en donne les propriétés et le mode d'emploi. Il termine par quelques considérations sur les isolateurs des conduites aériennes à haute tension. L'autre ouvrage que nous avons à signaler traite de la régularisation automatique des générateurs élec- triques. Celle-ci peut être obtenue soit par des moyens électrodynamiques (compoundage), soit par des appa- reils régulateurs électriques automatiques, qui influent du dehors sur l'excitation des générateurs et s'adaptent à la tension du réseau. C’est de ces derniers que l’au- teur s'occupe. Il décrit les diverses espèces de régula- teurs lents, puis il accorde une attention spéciale aux régulateurs rapides, entrés depuis peu dans la pratique et dont le mode d'action n'est pas encore complètement éclairci. Il termine par l'étude du compourndage artiti- ciel des générateurs ainsi que des installations néces- saires pour la régularisation automatique des ma- chines et des stations centrales entières marchant en parallèle. Trillat (A. — L'Aldéhyde acétique dans le Vin : son origine et ses effets. — 1 hroch. 1n-8° avec plan- ches.Extraitdes Annales de l'Institut Pasteur,t. XXII. Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1908. La composition chimique du vin nous est encore fort médiocrement connue. C’est à peine si nous savons doser la moitié en poids des substances qui constituent l'extrait sec. Quant à la partie volatile, formée princi- palement d’eau et d'alcool, le travail de M. Trillat nous en montre la complexité réelle. Cette complexité résulte des altérations de l'alcool en dilution, sous l'influence prolongée de l'air et des microbes. L'auteur étudie l’action des produits dérivés sur les principesfixes du vin, notamment sur la matière colorante. Dans un travail antérieur (1891), il avait déjà signalé la combi- naison que forme la formaldéhyde avec cette matière, et M. Martinand (1898) avait montré que les aldéhydes du vin jouissent de la même propriété. Il rapproche de ces faits le phénomène de la casse des vins, qui recoit ainsi sa première explication scientifique. Le nouveau travail de M. Trillat est le développement expérimental de cette thèse. Il constate que la formation d'aldéhyde acétique aux dépens de l'alcool est un phénomène qui se produit régulièremeut dans les manipulations de cave que subit le vin : l’aération, l'agitation, la pré- sence de levures et de mycodermes, même des traces de fer, favorisent la production d'aldéhyde. Ces mêmes modifications se produisent aussi avec de simples mé- langes d’eau et d'alcool. Chacun de ces facteurs a été l'objet d'expériences précises et méthodiques, résumées dans des tableaux synoptiques. Les proportions d'aldéhyde qui entrent en réaction sont extrêmement petites; aussi a-t-il fallu mettre au point des procédés de dosage permettantde déterminer avec certitude la présence de quelques milligrammes par litre. L'aldéhyde, corps non saturé, est remar- quable par son aptitude à se combiner à elle-même, et aux divers corps en présence. L'auteur nous la montre se combinant aux alcools pour former les acétals, qui agissent comme l’aldéhyde, mais plus lentement. Par sa transformation en acide acétique, elle occasionne la formation d’éther acétique. Réaction remarquable entre toutes, quand on réfléchit que la présence de l'eau est un obstacle formidable à cette transformation. 200 milligrammes d'acide sont en présence de 100 cen- timètres cubes d'alcool, délayé dans 900 centimètres cubes d’eau. Si les forces chimiques étaient seules en jeu, la pro- portion d'éther acétique formée serait insignifiante ; mais la présence de mycodermes et de levures la fa- vorise. L’oxydation de l'alcool fournit ainsi succes- sivement l’aldéhyde, les acétals, l’éther acétique, qui sont des produits odorants. Avec Berthelot, l'auteur attribue à leur présence le bouquet des vins et des eaux-de-vie. Nous admettons l'explication pour ces dernières, ainsi que pour tous les mélanges d’eau el d'alcool. Mais, pour les vins, il y a encore d’autres facteurs. Certes, les produits de l'oxydation de l'alcool contribuent au bouquet des vins vieux. Mais ils n’en constituent pas la caractéristique. L'arome spécial du fruit, et surtout les parfums qui naissent pendant la fermentation, par l’action des levures anthogènes sur les substances anthophores propres aux cépages, jouent ici le premier rôle. A ces substances-là, l'air et l'oxydation consécutive sont plutôt nuisibles. — Dans la suite de son travail, M. Trillat montre une relation possible entre la présence d’aldéhyde et l'amertume des vins. Cette dernière est concomitante de la pré- sence simultanée d'aldéhyde, qui estnormale, etde celle de l’ammoniaque, qui ne l’est pas. Les sels ammonia- caux, même en milieu acide, agissant sur l'aldéhyde forment des résines jaunes de couleur et amères de goût. Ces produits passent même à la distillation et l’auteur indique le moyen d'empêcher cette amertume des vins de se communiquer aux eaux-de-vie qui en dérivent. Ce sont là des faits nouveaux et d’un grand intérêt. L'action des produits volalils des vins sur les pro- duits fixes est étudiée avec détails. C’est l'influence des aldéhydes et des acétals sur les troubles qui se pro- duisent souvent dans des vins blancs et des vins rouges qui attire surtout l'attention. Elle est la cause des dépôts qui se forment dans les vins. Tout ce qui favo- rise la formation de l'aldéhyde favorise la formation des dépôts, et la casse des vins en est la conséquence. Les dépôts renfermentde l'aldéhyde combinée. L'étude des moyens d'empêcher cette casse présente donc un double intérèt, à la fois scientifique et pratique. La conclusion de cette remarquable étude est fort simple: plus un vin est riche en alcool, en glycérine, en acide, et même en sucre, moins il est exposé à la casse, con- clusion qui est en accord parfait avec l'expérience de tous les jours. Il est un moyen d'empêcher la « casse », qui à été indiqué par M. Bouffard, et dont il convient de dire deux mots. On connaît, par les travaux de M. Gabriel Bertrand, le rôle des oxydases comme transmetteurs d'oxygène, et, par ceux de M. Laborde, l'origine de ces oxydases dans les vins. M. Bouffard recommande l'addition d'acide sul- fureux; le moyen est efficace et très employé. L'emploi, qui en est fort ancien, est toléré, entre certaines limites, par toutes les législations. M. Trillat à forcé- ment rencontré cet acide dans ses études. Et ce qu'il en dit est digne d'attention. M. Mathieu à constaté que l'acide sulfureux favorise les oxydations, et M. Trillat confirme cette observation. Or, l'acide sulfu- reux est lui-même avide d'oxygène, el agit souvent comme protecteur contre l'oxydation. Comment faut- il comprendre son action? Sans doute agit-il par sa combinaison avec l’aldéhyde. C’est le propre des travaux du genre de ceux que nous analysons, qui expliquent tant d'accidents connus, et dont les conséquences pour la pratique sont si importantes, d'être toujours suggestifs. On voudrait en savoir davantage. Le rôle de l'acide sulfureux demande à être éclairci. Quand on chauffe un vin au contact de l'air, il prend un goût spécial. La pratique de la pasteurisation nous à appris que la présence d’un peu d'acide sulfureux empêche cette lare de se produire. L'acide sulfureux a-t-1l em- pêché l'oxydation, ou bien s'est-il combiné avec l'aldé- hyde formée pendant la chauffe ? Quelle est, d'autre part, la relation entre le goût de madère et la pré- sence de l'aldéhyde dans les vins? Voici quelques- unes des questions qui sont suggérées par l'étude du travail si profond que nous venons d'analyser, questions dont il permet d'entrevoir la solution. Le vin est un produit en perpétuelle transformation, comme 284 le sont les êtres vivants. Il à ses années de jeunesse et d’adolescence. Il arrive à son apogée, puis il perd peu à peu ses belles qualités ; il connaît la vieillesse et la décadence finale. L'’oxygène de l'air et les microbes sont de grands facteurs de cette transformation. Pour en étudier le mécanisme avec fruit, il fallait un chimiste doublé d’un bactériologiste. Cette étude sur la formation de l’aldéhyde et de son action sur les vins nous donne la clef d’un ensemble de transformations qui conduisent le vin ou à sa per- fection ou à sa perte finale. C'est dire la haute valeur scientitique et pratique du travail de M. Trillat. G. ROSENSTIERL, Professeur au Conservatoire national des Arts et Métiers. 38° Sciences naturelles Choffat (Paul). — Essai sur la Tectonique de la chaîne de l’Arrabida. — 1 vol. in-4° de 89 pages, avec 10 planches (cartes géologiques, coupes et vues photographiques). Commission du Service géologique du Portugal. Lisbonne, 1908 Jusqu'à présent, M. Choffat s'était surtout fait con- naître comme sitratigraphe et paléontologiste; son nouvel ouvrage nous révèle en lui un tectonicien de mérite. En effet, le petit massif de l’Arrabida, situé au sud du Tage, présente des dislocations très complexes, d'autant plus difficiles à analyser que les diverses for- mations intéressées accusent de fréquentes variations de facies. Il importait donc de nous apprendre tout d’abord la constitution de ces formations sédimen- taires; c’est ce que n'a pas manqué de faire M. Choffat. Une quarantaine de pages sont donc consacrées à une description précise du Jurassique, du Crétacé, de l'Oligocène, du Miocène et du Pliocène qui entrent dans la constitution du massif considéré, La seconde partie du Mémoire traite des dislocations du sol. La petite chaine de l’Arrabida est coupée abruptement, à l'Ouest et au Sud, par l'Océan qui atteint très vite de grandes profondeurs; d’où l’on peut inférer qu'une partie de la chaîne s’est effondrée sous la mer. Cette chaîne est formée par trois lignes de dis- locations orientées à peu près de l'Ouest à l'Est et se succédant en retrait du SO au NE. Les dislocations de la deuxième et de la troisiéme ligne sont des plis ren- versés vers le Sud, n’empiétant que faiblement sur la ligne précédente. En outre, l'extrémité de la dernière ligne est recouverte par une écaille de Miocène ayant chevauché horizontalement sur les strates redressées des terrains plus anciens. Ces lignes de dislocations longitudinales sont de beaucoup les plus importantes, mais les accidents transversaux sont nombreux et variés : déviations brusques des strates, failles transversales avec rejets verticaux, décrochements horizontaux. De plus, les émissions de roches éruptives sont en rapport avec ces dislocations transversales. Les mouvements qui ont affecté la chaîne de l'Arra- bida datent de plusieurs époques. Ainsi, la fin du Lusi- tanien fut marquée par un exhaussement de la contrée; il y eut aussi un mouvement à la fin du Portlandien. Un plissement bien plus important se produisit pen- dant l’époque helvétienne, mais celui qui donna aux strates leur disposition actuelle est postérieur au Tor- tonien, du moins pour le troisième chainon. D'une facon générale, l'étirement des strates et leur che- vauchement sont d'autant plus accentués que les plis sont plus récents. On peut se demander pourquoi la chaîne de l’Arrabida présente des plis aussi accentués, tardis que les plis de la région mésozoïque au nord du Tage ne sont que de faibles ondulations. Il est vraisemblable que ces plis se sont butés contre un obstacle qui est actuelle- ment recouvert par l'Atlantique, mais dont il reste des témoins dans les îlots dévoniens situés entre Palma et Santa Suzanna, sur le prolongement d'une ligne de BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX hauteurs relatives qui se trouve peut-être en connec- tion avec la ligne de hauts fonds s'étendant jusqu'à l'ile de Madère. Telles sont les conclusions de cet important Mémoire, qui sera d'autant mieux accueilli que c’est la première étude de détail que nous possédions sur la tectonique du Portugal. J'ajoute qu'en certains points la compli- cation est extrème; mais les bonnes cartes géologiques, à grande échelle. que M. Choffat a annexées à son ouvrage, permettent de suivre sans peine les descrip- tions. Celles-ci sont encore rendues plus claires par de belles vues photographiques coloriées d’après les teintes conventionnelles, qui montrent immédiatement l'allure des couches. L. PERVINQUIÈRE, Chef des Travaux du Laboratoire de Géologie à la Sorbonne. Ducomet, Docteur ès Sciences, Professeur à l'Ecole nationale d'Agriculture de Rennes. — Pathologie végétale : Maladies parasitaires. Champignons. Bactéries. — 1 vol. in-12 de l'Encyclopédie de l'Agriculture et des Sciences agricoles. (Prix : 3 fr.) Ch. Amat, éditeur. Paris, 1909. Ce livre, dont on regrette les proportions trop modestes, se signale dès l’abord par l'esprit philoso- phique dans lequel il est conçu. Ce n’est point une énumération sèche de nos connaissances sur le sujet, mais une synthèse qui les groupe en les coordonnant. L'auteur. en même temps qu'il traite des maladies des plantes, esquisse un intéressant traité de Biologie des Champi:mons parasites. On remarque une grande analogie entre le plan adopté et celui que suivent les traités de Pathologie humaine. La chose nous paraît tout à fait rationnelle : l'idée de se servir, dans les études de Pathologie végé- tale, de la méthode employée et de l'expérience acquise en Pathologie humaine vient naturellement à l'esprit, mais il y a mérite à ceux qui, les premiers, entrent dans cette voie. Il fallait aussi, pour qu'un tel essai fût tenté, que les progrès de la Pathologie végétale fussent assez avancés pour qu'elle se mit à un niveau pas trop éloigné de sa sœur aînée. L'auteur met la question au point et le tableau qu'il trace permet de repérer exac- tement les routes bien connues et celles qui se des- sinent à peine. Son livre facilitera les recherches nou- velles dans cette voie d’études. Le plan de l'ouvrage est conforme aux tendances nouvelles, et plus scientifiques, des études de Patho- logie végétale, tendances sur lesquelles nous souhaitons que le livre de M. Ducomet exerce une action efficace. « Le problème de la préservation se complique, dit-il, car, dans chaque cas, l'étude de l'agent infectieux doit marcher de pair avec l'étude de l'organisme parasité considéré en lui-même et dans ses rapports avec le milieu physico-chimique. » $ Les grandes lignes du plan de l'ouvrage, que nous allons retracer, permettront de juger de l'esprit ori- ginal qui a présidé à son élaboration. L'auteur rappelle, dans une introduction, les grandes étapes de l'histoire de la Pathologie végétale. IL fait ressortir ici, comme d'ailleurs dans le cours de l’ou- vrage, l'influence considérable du milieu, soit externe, soit interne, sur le développement des maladies para- sitaires. Beaucoup de maladies, dites parasitaires, ne se manifestent que parce que des perturbations physio- logiques préalables ont causé l’affaiblissement de la plante, qui, sans cela, eût efficacement résisté à l’action de l'organisme étranger. « Plus les observations et expériences se multiplient, plus il apparaît comme certain que lé développement des maladies dépend autant de la constitution de la plante, de son état de santé initiale, de sa prédisposition à l’envahissement, que de la présence du parasite. » Dans les différents chapitres, les sujets suivants sont abordés : I. Parasitisme et saproplylisme, commensalisme et symbiose. Les faux parasites. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 285 II. Les champignons parasites. Ectophytes et ento- phytes, pénétration et progression. (Rappelons, à ce propos. que M. Ducomet publiait récemment un impor- tant travail sur les entophytes à thalle subcuticulaire.) Action du parasite sur les tissus : membraneet contenu. Le champignon agit sur la membrane par l'intermé- diaire de diastases qu'il sécrète; mais peu d’études ont été faites à ce propos, sauf en ce qui concerne la mem brane lignifiée, où Czapek a mis en évidence la dis- jonction de son « hadromal » sous l'influence du cham- pignon, el la membrane cutinisée, sur laquelle M. Ducomet a fait porter ses propres investigations. Nos connaissances ne sont guère plus avancées en ce qui concerne l’action du champignon sur le contenu cellulaire le chercheur a, dans cette Voie, un vaste champ d'exploration ouvert devant lui,et nous pensons que l'étude du parasitisme doit être basée sur une connaissance précise de la Cytologie patholowique. Il faudra aborder ces recherches avec to tes les res- sources, actuellement considérables, de la technique cytologique, afin de suivre les modifications éprouvées par les divers éléments différenciés de la cellule : noyau, etc., et produits multiples de sécrétion sous l'influence du parasite. Ce sont là des recherches délicates, mais qu'il est nécessaire d’ahorder pour connaître, d’une façon moins superficielle, les effets des parasites et les moyens de lutter contre eux. C’est ainsi que les questions de parasitisme et réaction, hy- pertrophie, hyperplasie, métamorphose. defense, que l’auteur expose suivant l’état des connaissances ac- tuelles, pourront prendre un essor nouveau. L'auteur traite encore, dans ce chapitre, des ques- tions de propagation : végétative ou par spores, el de l'hibernation. | II. De la prédisposition aux maladies. Comme nous le faisions remarquer, avec l'auteur, au d‘but de cet article, l'apparition et le développement d'une maladie parasilaire dépendent, non seulement de l'existence du parasite, mais encore de l'état de réceptivité de la plante. Ce chapitre intéressant est divisé de la facon suivan(e : Influence de l’âge, de l’état de la végétation, de la vigueur, de l’état des surfaces, de ‘a composition chimique des tissus. Influence du milieu extérieur : sol, eau, aliment, température, blessures et piqûres d'insectes, parasitisme, monophyti.me et polyphy- tisme, mélanges culturaux. Types résistants et Lypes sensibles. De l'hérédité en Pathologie. IV. Considérations générales sur lapparition, lextension et l'aggravation des maladies cryptoga- miques. L'auteur fait ressortir ce fait, si intéressant à noter, que des champignons habituellement non para- sites peuvent, par suite de circonstances accidentelles qui les mettent en rapport avec des plantes en état d'infériorité, passer insensiblement, par adaptation progressive, à la vie parasitaire, et provoquer des maladies jusque-là inconnues. NV. De la lutte contre les maladies. L'auteur donne les bases scientifiques, non seulement des méthodes appliquées depuis longtemps par l’empirisme, mais -encore de celles qui sont appelées à leur être sub- stituées, parce qu'elles sont plus rationnelles : A. Méthodes générales de preservation. Alimentation et suralimentation. Alternance des cultures. Mélanges culturaux. Culture des types résistants et sélection. Traitement des blessures. Destruction des plantes malades et traitements d'extinction. Désinfection du sol. Chirurgie végétale. Introduction de toxiques. Cul- ture atténuée et sérothérapie : l’auteur rappelle, à ce propos, que nous avons élé le premier à faire des expériences dans cette voie nouvelle avec le Botrytis cinerea et la maladie de la Toile. Obligé de suspendre nos recherches dans cette direction, nous regrettons qu'elles n'aient point encore provoqué d'études ana- logues. B. Les anticryptogamiques et la lutte directe. C. Les préparations anticryptogamiques. Ces ques- tions, dont l'application est plus immédiate, sont traitées au point de vue pratique, mais toujours avec esprit critique. VI. Etude des principales maladies cryplogamiques et de leur traitement. Dans ce chapitre, l'auteur groupe les champignons dans l'ordre botanique, les décrit brièvement et fait aux cas particuliers l'application des données générales exposées aux précédents chapitres. VII. Maladies bactériennes. VIII. Méthodes à suivre dans l'étude des maladies et de leur traitement. L'auteur donne des indications sur la technique à suivre pour reconnaître le parasite dans une plante malade, pour vérifier le parasilisme par des infections artificielles, pour le cultiver sur différents milieux afin de suivre son évolution. Il rappelle enfin que les moyens de protection et de défense (prophy- laxie et lutte directe) doivent ètre basés sur la hiologie du parasite considéré en lui-même et dans ses rapports avec le milieu. La richesse de ce plan fait regretter que l’auteur ail dû se mouvoir dans le cadre restreint d’un in-12, de 300 pages. Sans doute, l'exposé est souvent bien bref el pourra paraître touffu à l'étutiant débutant livré à lui- mème. Il est des paragraphes qui se ressentent de quelque imprécision; mais, de cela, l’auteur n'est pas toujours responsable, car il ressort de la lecture même de son travail que la Pathologie végétale, quoique entrée dans une voie nettement scientifique, est encore dans la période de formation. Beaucoup de titres de chapitres du livre de M. Du- comet pourraient s'inscrire en tête de longs et beaux travaux de recherches. C'est donc, en même temps qu'un ouvrage de mise au point, un travail évocateur d'idées. Nous souhaitons qu'il soit lu, non seulement par les éludiants et les agronomes, mais encore par les chercheurs et par ceux qu'intéressent les questions de Biolouie générale. J. BEAUVERIE, Chargé d'un Cours de Botanique agricole à l'Université de Lyon. 4° Sciences médicales Cauchoix (D' Albert), Ancien Interne lauréat des Hopitaux de Paris, Prosecteur à la Faculté de Méde- cine. — Traitement chirurgical actuel des Kystes hydatiques du Foie et de leurs complications. — 1 vol. iu-8° de163 pages. Sternheil, éditeur. Paris,1909. Le travail de M. Albert Cauchoix est une excellente mise au point de la question du traitement chirurgical des kystes hydatiques du foie De nos jours, la méthode qui tend à rallier tous les suffrages est la réduction, dans l'abdomen, du kyste suturé, sans drainage. Le premier temps consiste dans l’incision de la paroi abdominale. Puis. arrivé sur le kyste, on pratique la ponction évacuatrice du contenu kystique On injecte ensuite dans la cavité une solution formolée à 1 °/ qu'on laisse pendant cinq minutes; cette injection esl destinée à tuer tous les germes hydatiques et à empé- cher l’éclosion ultérieure de l’échinococcose secondaire post-opératoire. On évacue la solution formolée, on nettoie la cavité kystique de son contenu, membrane fertile, vésicules filles, sable hydatique; ceci fait, on suture les deux lèvres de l'ouverture de la poche kystique, et, par mesure de prudence, on fixe les fils extrêmes de cette suture à la paroi abdominale que l’on ferme. Cette fixation de la suture kystique à la paroi est destinée à permettre un accès facil vers le kyste, s'il était le siège d’un épanchement séreux ou bilieux. Cette méthode opératoire a donné les meilleurs résul- tats entre les mains du Professeur Quénu, à l'hôpital Cochin. Quand le kyste hydatique est suppuré, il sera sage de recourir à la marsupialisation, c'est à-dire qu'on fixe l'ouverture du kyste aux lèvres de l’incision abdomi- nale, de façon à assurer une évacuation facile et com- plète du liquide purulent. Dr P. DEsFosses. 286 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1°" Mars 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Léon Autonne pré- sente ses recherches sur la fonction monogène d’une variable hypercomplexe dans un groupe commutatif. 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. H. Arctowski a reconnu que les variations arctiques ont une influence incom- parablement plus grande que celles des régions déser- tiques ou océaniques et continentales sur les phéno- mènes d'ordre climatologique et océanographique. — M. L. Teisserenc de Bort montre que l’arrèt de la dé- croissance de la température à une certaine hauteur, faisant place à un régime où la température présente de petites inflexions dans des sens différents, mais oscille autour de l'isothermie, est un phénomène abso- lument général sur tout le globe ; la zone de transition est située en moyenne à une plus grande hauteur dans les maxima barométriques que dans les aires de basses pressions. — M. J. Becquerel estime que les effets observés par M. A. Dufour dans les tubes à gaz raréfié sont différents des siens et n’infirment, par conséquent, pas l'hypothèse des électrons positifs qu'il a émise pour expliquer ses propres expériences. — M. A. Leduc montre, contrairement à l'opinion de plusieurs auteurs, que la méthode des volumes moléculaires permet de déterminer les poids atomiques avec une grande pré- cision et qu'il importe peu qu'on opère sur des gaz sos permanents (Az, CO...) ou très faciles à liquétier (AzO?, SO). — M. D. Gernez à constaté que, lorsqu'un corps composé résulte de l'union directe de deux corps dissous, sa solution conserve les mêmes propriétés quand on l’examine immédiatement après le mélange des deux solutions et après avoir fait cristalliser ‘le composé formé. — M. C. Matignon a déterminé la courbe de fusibilité du système NaCl + H°0; le point de solidification est de — 219,3. Il en résulte qu'on ne peut pas faire fondre la neige par addition de sel marin au-dessous de — 21°. Le chlorure de calcium peut faire fondre la neige jusqu'à — 55°. — MM. L. Lematte et A. Savès ont déterminé les constantes physiques {den- sité, point cryoscopique, réfraction) de quelques pep- tones trypsiques et donnent des formules reliant ces constantes à la concentration de la solution. — MM. A. Besson et L. Fournier, en faisant réagir HCI sec sur Si amorphe, ont isolé deux composés SiH°Cl et SiH?CE, liquides incolores très mobiles, distillant vers — 10° et + 12°. — M. M. Delépine, par l'action de H?50* bouil- lant sur un chloroiridate ou un chloroiridite en pré- sence de sulfate d'ammonium, a obtenu deux sels verts : HO(H:0) Ir (SO) (AzH°)%5 H15 et HO (H20)1r(SO+)(AzH)25 H%5 ; leur solution, traitée par AzH, fournit un sel brun Ir (OH}(SO')*(AzH#)T#H?/5. — M. G. Charpy a constaté que CO, à 1.000, est à peu près sans action sur le co- balt, tandis qu'il oxyde le nickel et le chrome avec dé- pôt de charbon. — M. B. Delachanal à déterminé les gaz occlus contenus dans quelques métaux usuels : Al, Mg, Zn, Sn, Pt, platine iridié; ce sont : H, CO, CH‘ et Az. — MM. À. Guyot et G. Esteva, en condensant les hydrocarbures aromatiques avecleséthers mésoxaliques en présence d'HSO, ont obtenu un mélange d'éthers aryltartroniques et diarylmaloniques R.C(OH)(CO?R/)} et RC(COR/}. — M. À. Kling, en faisant réagir la semicarbazide sur le chloral, a obtenu la semicar- bazide de l’hydrate de chloral, F.90°; avec l’aldéhyde dichlorée, il se forme la semicarbazone. — M. A. Berg a déterminé cryoscopiquement le poids moléculaire de divers dérivés de l'élatérine, ce qui le conduit à admettre pour ce corps la formule C?*H*07. — M..G. Denigès est parvenu à déceler de très petites quantités de glycérine en l’oxydant par l’eau bromée en dioxya- cétone et utilisant les réactions très sensibles de ce dernier corps. — M®° Z. Gatin-Gruzewska a étudié la transformation de l’amylopectine et del’amylose par les diastases et H°0?; pour la première, l’attaque des mi- celles paraît simultanée, tandis que pour le second elle est successive. Les deux substances passent par le stade dextrine. — M. A. Gascard a constaté que les échan- tillons de lait bichromaté conservés à la lumière pren- nent une teinte verte et changent de composition. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. V. Busquet et H. Pa- chon montrent qu'il existe, entre le ceitrate trisodique et le calcium, un antagonisme qui se manifeste avec netteté dans le fonctionnement du cœur et de l’appa- reil nerveux modérateur cardiaque ; cet antagonisme est de nature chimique. — MM. V. Henri et G. Stodel ont réalisé une stérilisation complète du lait par l’ac- tion des rayons ultra-violets (fournis par une lampe à mercure), sans avoir une élévation notable de la tempé- rature. — M. A. Billon-Daguerre demande l'ouverture d’un pli cacheté, déposé le 7 janvier 1907, dans lequel il annonce avoir stérilisé le lait, à froid et à distance, par l'action des rayons violets et ultra-violets et des radiations invisibles. — M. L. Faurot à reconnu que les cloisons calcaires des Æexacorallia se bifurquent comme celles des T'etracorallia. — M. M. Molliard à produit expérimentalement des tubercules blancs et noirs à partir de graines de radis rose en les cultivant dans des milieux renfermant des proportions différentes de glucose. — M. G. Fabre a étudié la structure interne de l’ancien volcan d’Eglazines (Aveyron), qui fit explo- sion à l’époque quaternaire dans l'axe même du canon du Tarn, en permettant à la rivière de mettre à nu son appareil interne. — M. Welsch a constaté que la côte du Poitou a subi dans le dernier siècle des modifica- tions tenant à la formation de languettes de sable en relation avec les lois générales des mouvements de l'atmosphère et qui se retrouvent sur tout le littoral est de l'Atlantique. Séance du 8 Mars 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Carrus étudie les systèmes conjugués admettant une ou deux familles de lignes d'intersection planes. — M. Th. de Donder pré- sente une généralisation du théorème de Poisson. — M. E. Goursat éludie certains systèmes d'équations différentielles linéaires qui sont identiques à leur adjoint. — M. P. Boutroux présente ses recherches sur les intégrales multiformes des équations différen- tielles algébriques. 20 Sciences PHYSIQUES. -— M. A. Dufour communique de nouvelles expériences démontrant que le faisceau observé par M. J. Becquerel dans les tubes à vide est dû à un afflux secondaire prolongé par un faisceau- canal. — M. J. Thovert a réalisé un dispositif speetro- photométrique à champ unichrome en limitant le fais- ceau émergent d’un spectroscope par une fente conju- guée de la fente collimatrice et en séparant sur deux portions contiguës du champ les éclairements provenant de deux sources distinctes. — M. Eug. Bloch à reconnu que l’eau et les solutions aqueuses ne sont pas photo- électriques lorsque leur surface est parfaitementpropre; mais la moindre trace d’impureté provoque l’effel photo- -électrique. — M. M. Chanoz montre que le phé- nomène électrique qui apparaît dans une chaîne symé- trique de dissolutions aqueuses d'électrolytes ayant un ion commun, traversée par le courant continu, résulle ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d'une dissymétrie engendrée par le courant el consis- tant en des variations inverses des concentrations aux deux contacts liquides. — M. G. Reboul à constaté que, quand une goutte de mercure se forme, il y a production, dans le gaz environnant, de charges posi- tives et négatives, faciles à mettre en évidence en opé- rant dans l'air raréfié. — M. La Rosa a séparé, du charbon de sucre placé dans l'arc électrique oscillant, des parcelles lourdes, cristallisées, rayant le rubis. — M. H. Pécheux a observé que la présence de Fe et Si relève la résistivité d’Al et que le coefficient de tempé- rature principal est d'autant plus élevé que la teneur de l’AI en impuretés est plus grande. — M. G. Bruhat a fait une série de mesures du coefficient de diffusion de l'émanation de l'actinium dans l'air, dans CO* et H. Il en déduit pour poids moléculaire de l’'émanation la valeur 70 environ. — M. R. Marcelin a étudié la cris- tallisation spontanée de divers liquides surfondus; il l'explique par la présence de poussières en suspension se coagulant ou se dissolvant pendant la fusion et sur lesquelles se formeraient les germes de cristallisation. — M.H.Copaux montre que les métatungstates doivent répondre à la formule (3420. 24Tu0*) 6M*0 + aq. Il à obtenu un métatungstate de K de cette formule, iso- morphe avec le boro- et le silicotungstate, et comme eux doués du pouvoir rotatoire. — M. P. Jolibois a préparé le corps Sn‘P* pur et cristallisé; il n’y a pas lieu de considérer les composés Sn°P?, Sn°P, Sn‘P?, SnP et SnP° comme des composés définis; enfin, l’au- teur à confirmé l'existence de SnP*. — M. Delachanal a chauffé un verre à vitre de fabrication ancienne, devenu violet sous l’action des rayons solaires. Il s'en est dégagé des gaz : CO*, O, Az, puis une série de sublimés : chlorures etsulfates alcalins, acide arsénieux. — M. M.Hanriot propose une nouvelle méthode pour déterminer la constitution des sucres. Il suffit de les combiner au chloral et d'examiner le chloralose obtenu ou son produit d’oxydation, l'acide chloralique. — M. Alb. Colson a constaté que le benzoate de méthyle est décomposé à 350° en CO? et un carbure; de même le salicylate de méthyle est décomposé en CO® et anisol. — MM. Ph. Barbier el V.Grigrard, en chauffant l'acide pinonique avec Br, ont obtenu, par perte d'H et H°0, l'acide diméthyl-1 3-phénylacétique-4, F. 102. — M. A. Béhal montre qu'il est possible d'obtenir et peut-être de préparer des anhydrides d'acides cycliques et ces acides eux-mêmes à partir des dérivés trihalo- génés sur un même atome de carbone, par l'action de l'acide acétique. — MM. À. Muntzet E. Lainé ont étudié le rôle des fosses septiques dans l’épuration biologique de l’eau d’égout. Dans leurs expériences, le travail de dissolution et de gazéification a été très réduit : le séjour dans les fosses s’est borné à opérer une décan- tation des matières en suspension et une transforma- tion des deux tiers de l’Az des matières organiques en Az ammoniacal. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Calmette et C. Gué- rin montrent qu'une partie des bacilles tuberculeux introduits dans la circulation peut être éliminée par la glande hépatique et évacuée avec la bile dans l'intes- tn ; la bile modifiant l'enveloppe cirro-graisseuse des bacilles et facilitant leur absorption par la muqueuse intestinale saine, les sujets sont exposés à des réinfec- tions. — MM. J. Courmont et Th. Nogier ont constaté que les rayons émis par la lampe en quartz à vapeurs de mercure ont une action atténuante certaine, mais très légère et lente, sur la toxine té tanique.— M. E. Dou- mer à observé que la température périphérique s'abaisse de 09,2 à 0°,9 pendant la durée de la d’arsonvalisation; ensuite, l'abaissement peut se maintenir, ou bien la température peut remonter d'un demi-degré au-dessus de la normale, — M. H. Guilleminot a déterminé expérimentalement les doses efficaces de rayonne- ment X retenues par les divers tissus de l'organisme. — MM. CI. Regaud et M. Favre ont mis en évidence, dans les fibres musculaires striées, des grains et fila- ments interstitiels, appartenant au groupe des mito- 287 chondries de Benda et qui paraissent jouer un rôle trophique. — M. A. Lécaillon montre que le testicule de la taupe, après la période de reproduction, reprend une structure qui est exactement celle qu'a un testi- cule de jeune mammifère bien avant la puberté. — M. E. Fauré-Frémiet estime que la structure granu- leuse du macronucléus dépend de la structure du milieu et serait de nature physico-chimique. — M. P. Vuillemin a constaté que, chez le Phlox subulata, les fleurs à 6 pétales sont habituelles quand la végétation manque de vigueur, tandis que les fleurs terminales tétramères et latérales heptamères sont habituelles quand la floraison présente une grande intensité. — M. J. Dareste de la Chavanne à constaté la présence de l'étage danien, sous la forme d’un horizon fossilifère à Echinides, au nord de la vallée de la Seybouse (Algérie). — M. R. Legendre à étudié les variations physico-chimiques (température, densité et oxygéna- tion) de l’eau de mer littorale à Concarneau. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 2 Mars 1909. M. P. Strauss est élu membre associé libre de l’Aca- démie. MM. A. Chantemesse et F. Borel étudient le nou- veau chemin de fer du Hedjaz, destiné au transport des pèlerins musulmans, au point de vue sanitaire international. Pour arrêter la propagation du choléra, au cas où une épidémie se déclarerait aux lieux saints, on a prévu l'installation d’un lazaret à Tebuk, à mi- chemin entre Médine et Damas; mais il est à craindre que cette unique barrière ne soit quelque peu fragile et qu'une nouvelle voie ne vienne s'ajouter à celles par lesquelles les épidémies de choléra de l'Orient se trans- mettent déjà en Europe. — M. F. Raymond commu- nique ses recherches sur l'affection connue sous le nom d'atrophie héréditaire de la papille; il s’agit d’une cécité partielle, dépendant d’une lésion du faisceau maculo-papillaire de la rétine. Elle se montre le plus souvent entre 148 et 25 ans; elle est toujours le produit de l'hérédité atavique directe ou collatérale, c’est- à-dire qu'elle se transmet des grands-parents aux petits-fils ou d’un oncle au neveu. Arrivée à son étal stationnaire, après une évolution de courte durée, il est rare qu'elle parvienne jusqu’à l’amaurose. Grâce à la vision excentrique que les malades gardent à des degrés divers et peuvent même développer, quelques- uns continuent à se conduire seuls et peuvent exé- cuter certains travaux. Séance du 9 Mars 1909. M. A. Netter a étudié l'épidémie de méningite céré- brospinale qui s’est déclarée récemment à Paris et dans les environs, en particulier à Saint-Denis, aux alentours du Pont de Soissons, où plusieurs enfants fréquentant l’école ont été atteints. La contagion se fait surtout par l'intermédiaire du mucus nasal et pha- ryngé, où l’on a retrouvé des diplocoques de Weich- selbaum. Il y aurait lieu de faire l'examen du mucus nasal des enfants de l’école, de facon à en écarter les porteurs de méningocoques. On possède heureuse- ment dans le sérum antiméningococcique un agent de grande valeur pour le traitement de cette affection; il faut l'injecter dans la cavité rachidienne, l’employer autant que possible à doses élevées et renouveler l'injection plusieurs jours de suite. — M.le D' Blondel lit un travail sur les propriétés physiologiques et thé- rapeutiques du sérum de lait. — M. A. Trillat donne lecture d'un travail sur les théories miasmatiques et les idées actuelles. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 Février 1909. MM. de Beurmann, Gougerot et Vaucher ont re- produit chez le chat nouveau-né ou le très jeune chat, 288 par injection de Sporotrichum Beurmanni, toutes les formes de sporotrichose humaine et animale, depuis la septicémie suraiguë jusqu'aux gommes chroniques curables. — Mie L. Chevroton décrit un dispositif nouveau pour la chronophotographie microscopique. — M P. Portier a reconnu que la larve du Dytique injecte les autres larves dont elle se nourrit avec un liquide noiràtre qui en solubilise de proche en proche tous les tissus, et qu'elle aspire ensuite par les canaux capillaires de ses crochets. — MM. P. Emile-Weil et Boyé ont préparé des extraits desséchés de têtes de sangsues, qui se conservent bien et ont une action physiologique constante. — M.G.. Seillière a déterminé la composition des concrétions pierreuses de la poire; elles sont riches en pentosanes et doivent être consi- dérées comme une sorte d'ébauche de noyau. — MM. J.-E. Abelous et E. Bardier ont constaté que l'urohypertensine est une amine complexe dans la constitution de laquelle figure probablement un grou- pement identique ou analogue à la triméthylamine. — M. P. Delanoë a observé que le sérum des cobayes for- tement anaphylactisés contre le bacille d'Eberth est doué à la fois d’une propriété préventive et d'une propriété favorisante pour lescobayes neufs, la première se mani- festant à dose faible et la seconde à doses fortes. — M. E. Maurel montre qu'il est logique d’assimiler l'action de nos déplacements rapides dans une atmo- sphère calme à celle des vents de même vitesse. Les dépenses de l'organisme sont également augmentées par le fait de la radiation. — M. À. Policard à étudié certaines formations (filaments et grains) de la cellule hépatique de la grenouille qui se colorent en noir par la méthode de Cl. Regaud. — M°*‘° M. Lapicque et J. Weiïll ont constaté que la bobine d'induction permet de suivre, au moins en première approximation, les variations de la vitesse d’'excitation des muscles. — M. L.Lutz a reconnu que les différents produits retirés du persil possèdent, en injections intra-veineuses, un pouvoir toxique à peu près analogue; ils provoquent une diminution de la pression, avec ralentissement des contractions cardiaques et augmentation de leur am- plitude. Û Séance du 6 Mars 1909. MM. de Beurmann, Gougerot et Vaucher ont cons- taté que la sporotrichose expérimentale du chat repro- duit plusieurs des formes de la sporotrichose humaine ; elle réalise dans tous ses détails la plus fréquente d'entre elles : la sporotrichose gommeuse disséminée. — M. F. Battelli et Mlle L. Stern montrent que Îles substances qui interviennent dans la respiration acces- soire des tissus animaux (celle qui reste constante longtemps après la mort) sont solubles dans l'eau et détruites par l'ébullition. — M. P. Rem'ingrr a COns- taté que l’inoculation sous-cutanée de substance ner- veuse normale ne confère pas au sérum sanguin du mouton des propriétés antirabiques. — M. A. Gouget a reconnu que le sérum de lapins ayant recu plusieurs injections d'adrénaline est doué de propriétés athéro- matogènes, bien qu’on n'y décèle pas d'adrénaline. — M. J. Bridré a observé chez un rat un sarcome du foie renfermant un kyste à cysticerque. — M. P. Chausse montre que le processus de la caséification tuberculeuse consiste : 1°en une dégénérescence granulo-graisseuse ; 2 en la fragmentation des noyaux dont les débris restent longtemps visibles et colorables ; 3° en la fusion des produit. gras et protéiformes dérivés de la destruc- tion cellulaire. — M. P. Portier a reconnu que les larves de bytique accumulent dans un cæcum le liquide digestif qui sert à la digestion de leurs proies; ce liquide est noirâtre et parait renfermer une trypsine el une tyrosinase. — MM. M. Garnier et L G. Simon ont observé qu'à la suite des ulcérations de l'estomac dues à un caustique les microbes passent dans le sang porte, mais sont arrêtés par le loie ; si l’ulcération est la conséquence d’un empoisonnement, ils franchissent la barrière hépatique et imfectent la grande circulation. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES — MM. H. Busquet et V. Pachon montrent que les solutions de phosphates di- et trisodiques exercent leur toxicité vis-à-vis du cœur isolé par un mécanisme décalcifiant; lorsqu'elles contiennent de faibles doses de Ca dissous en présence de CO? elles permettent un fonctionnement cardiaque énergique et régulier. — MM. S. Bonnamour et L Thévenot ont observé que des injections sous-cutanées de toxine diphtérique active, même très diluée, ont une action nettement favorisante sur la production de l’athérome expérimen- tal avec l’adrénaline. — M. P. Delanoë à reconnu que ni l'hypothèse de l’embolie par amas d'agglutination, ni celle de la destruction des globules rouges, ni celle de la bactériolyse ne suffisent à expliquer les troubles de l’hypersensibilité typhique. — M. N. Fiessipger a étudié les dégénérescences de la cellule hépatique au cours de certaines intoxications brutales chez les Batra- ciens. — M. M. Doyon a constaté que l’atropine et la peptone déterrainent respectivement une certaine immunité l’une contre l'autre au point de vue de leur pouvoir de rendre le sang incoïgulable. — M. H. Tri- boulet apprécie la fonction biliaire, chez les nourris- par diverses réactions colorées données par les selles. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 16 Février 1909. MM. R. Collin et A. Harter ont examiné une tumeur du ventricule moyen du cerveau. qui leur paraît être un neurogliome ganglionnaire ; elle dériverait de l’évo- lution, à un m ment donné, de neuroblastes restés sous-épendymaires. — MM A. Harter et Gruyer ont observé, chez deux cobayes atteints de sporotrichose expérimentale, de nombreux nodulesactinomycosiques, qui paraissent être des formes de rési-tance. — MM. Si- mon et Hanns ont recherché les anticorps tuberculeux dans le sérum de malades atteints de tuberculose par la méthode de la déviation du complément ; le résultat a été posilif dans 18 cas sur 24. — M. Th. Guilloz montre que les divers tissus vivants réagissent aux dif- férents procédés d’altération physique et chimique, indépendamment de la nature de l’altérant ou du caus- tique. — Le même auteur décrit un procédé de répar- tition proportionnelle de la lumière sur une surface sans appar-il optique. — MM. M. Lucien et J. Parisot ont reconnu que la thymectomie ne s'accompagne pas d'hypertrophie de la thyroïde. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 19 Janvier 1909. MM. C. Gerber et G. Daumézon ont constaté que les Ascidies qui sont soumises à des variations de tempé- rature ont une présure beaucoup plus résistante que celles qui vivent à tempéralure constante. — MM. Ale- zais et Peyron ont étudié les premiers stades des lésions dans les tumeurs des g andes salivaires; c'est aux canaux des glandes qu'est dévolu le rôle prépon- dérant dans l'édification des formations épithéliales de leurs tumeurs. Les glandes salivaires sont suscep ibles d'édifier, aux dépens de leur épithelium propre, des formalions malpighiennes embryonnaires ou adultes. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 2 Février 1909. MM. J. Bergonié et L. Tribondeau montrent que la fulguration constitue un moyen précieux de para- chever une extirpation chirurgicale en détruisant tous les éléments cellulaires sur une grande surface. — Les mêmes auteurs ont reconnu que les cellules nerveuses, les fibres et les muscles sont réfractaires aux rayons X. — M. A. Le Dantec indique deux procédés pour obtenir des cultures d'amibes et d'anguillules pour les travaux pratiques de laboratoire. — M. J. Sabrazès signale un cas d'actinomycose nodulaire de la paume de la main développée autour d’une écharde de bois: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE 19 Février 1909. M. J. Perrin: Sur la prétendue anomalie des vitesses de cristallisation. Si l'on place dans un bain de tem- pérature fixe un tube étroit et mince rempli d'un li- quide surfondu, et si l'on ensemence ce liquide avec un germe cristallin, on voit la cristallisation pro- uresser dans le tube avec une vitesse constante qu'il est aisé de mesurer. C'est la vitesse de cristallisation à la température définie par le bain. Evidemment nulle à la température de la fusion, cette vitesse gran- dit avec la surfusion, et lui est à peu près proportion- nelle jusqu'à une surfusion de 15° ou 20° (Gernez). Mais, dès qu'on à réussi à obtenir de plus fortes surfusions, on s'est aperçu que l'allure du phénomène change bientôt complètement : la vitesse de cristallisation croît de plus en plus lentement, passe par un maxi- mum très allongé, qui s'étend sur un intervalle d'une cinquantaine de degrés, et redevient pratiquement nulle à très basse température (Tammann). Tous les auteurs qui ont écrit sur la question ont regardé cette loi comme une exception curieuse à la loi générale de Mécanique chimique d’après laquelle toute réaction devient de plus en plus lente à mesure que la tempé- rature s'abaisse, et cela de facon à peu près exponen- tielle; un intervalle d'une dizaine de degrés suffit fré- quemment pour que la vitesse tombe à la moitié de sa valeur. Un examen plus attentif de la question montre, au contraire, que l'influence de la température sur la vitesse de cristallisation, loin d'être anormale, est une conséquence nécessaire de la loi générale qu'on vient de rappeler. La cristallisation doit être regardée comme somme algébrique de deux phénomènes inverses, qui s'équilibrent exactement à la température de fusion. A chaque instant, des molécules se fixent contre le cristal, mais à chaque instant aussi d'autres molécules l’aban- donnent. Chacun de ces deux phénomènes tend vers zéro quand la température décroit; leur différence, qui est la vitesse de cristallisation observée, nulle au point de fusion, doit donc grandir d’abord, passer par un maximum et tendre vers zéro. — M. G. Lippmann expose le principe d'un sismographe enregistrant Pac- célération absolue des tremblements de terre. N rap- pelle que, dans les sismographes en usage, la courbe inscrite représente un mouvement relatif, le mouve- ment du sol par rapport à un pendule qui oscille. On sait qu'en appelant vw l’élongation d'un pendule par rapport au sol, u' et u!” la dérivée premiere de cette quantté, on à, quand le sol est immobile : (4) u! + au! — bu — 0, équation différentielle du mouvement d’un pendule amorti Quand le sol est en mouvement, avec l'accélération x", M. Lippmann a montré que l’on a : (2) u! + au! + bu——x". Cette équation montre que, si l’on réalise un appareil qui inscrive à chaque ins- tant la valeur du premier membre, il inscrira par cela même l'accélération x” du mouvement sismique. On peut réaliser le terme en u en munissant le pendule ‘l'une lentille qui projette sur un papier sensible l'image d'un point lumineux I. Ce point [ lui-même est l'index lun galvanomètre qui recoit un courant fonction linéaire de u' et de w". Le pendule porte, à cet effet, un aimant qui produit dans des bobines fixes des forces électromotrices induites du premier et du second ordre, proportionnelles à u! et à n!', et intercalées dans le circuit du galvanomètre. En déplaçant les bobines, on peut amener les coefficients de w, u' et u! à ètre proportionnels à ceux du trinome 4! au! + bn. On vérifie que ce réglage est atteint par l'expérience sui- vante : la terre étant immobile, et le pendule oscillant librement, le point lumineux projeté sur la surface sen- sible doit demeurer immobile en raison de l'équation (1). Dès lors, les indications enregistrées sont indépen- dantes du mouvement propre du pendule. — M. De- vaux-Charbonnel : La photographie de la parole. Application à la téléphonie. La pratique journalière Séance du REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, SOCIÉTÉS SAVANTES 4 259 montre que le téléphone reproduit fidèlement la voix humaine, avec ses différentes qualités. D'autre part, l'oscillographe Blondel, du modèle bililaire, a une sen- sibilité de l’ordre du milliampère. Il est donc facile, en introduisant un oscillographe dans un circuit mi- crophonique, de photographier le courant, et ces pho- tographies seront la reproduction des syllabes pronon- cées. On dispose ainsi d’un moyen commode d'étudier la voix humaine. Ce procédé à été appliqué tout d’abord à l'étude des voyelles. Voyelles. Les tracés des diffé- rentes voYelles sont toujours les mêmes si l'on a soin de les prononcer de la même manière, ce qui est assez difficile, notamment pour les voyelles tres sonores A et O. Les tracés de différentes personnes présentent naturellement des particularités caractéristiques. Les différents microphones donnent les mêmes tracés; cependant, ceux pour lesquels une pression brusque sur la plaque produit une augmentation de résistance (pupitres horizontaux) offrent des tracés inverses de ceux pour lesquels le même phénomène cause une di- minution de résistance (cas le plus général). Les tracés obtenus montrent une périodicité très régulière, cor- respondant à la hauteur de la note sur laquelle on parle. Ils ne renferment donc qu'un son fondamental, compliqué d'harmoniques, mais il ne paraît pas y exister de vibrations propres, provenant du mouve- ment de la plaque microphonique ou de tout autre phénomène étranger à la voix. On re trouve pas non plus, dans le tracé des différentes voyelles, la présence d'une note fixe et caractéristique d’une vocable, comme on l'a appelée souvent. Mais on y voit des harmoniques qui sont jusqu'à six fois plus intenses que le son fon- damental Dans l'A dominent le 4 et le6* harmoniques, le 3e et le 5° dans l'O, le 8° dans l'E muet, le 2 et le 12e dans l'E accentué, le 2 et le 9° dans l'U, le 2? el le 13° dans l'I. Syllabes. L'étude des syllabes permet de constater que les consonnes déforment le tracé des voyelles. Certaines même ont un tracé nettement dis- tinct. On ne peut émettre plus de 10 syllabes par se- conde; on en émet généralement 5. Chaque syllabe se compose de 30 à 40 vibrations complètes. Le commen- cement et la fin des syllabes sont modifiés par les consonnes, mais cette modification ne s'étend que sur 4 à 5 périodes, de sorte que, dans une syllabe, il y a toujours 20 à 30 vibrations régulières qui correspon- dent à la voyelle. Application à la téléphonie. En se placant au point de vue spécial de la téléphonie, on peut admettre que le courant téléphonique se compose surtout de courants d'une périodicité régulière dont le régime dure une vingtaine de périodes. On peut donc appliquer à ce courant les procédés de calcul des courants périodiques sinusoïdaux, ce qui permet de résoudre ou d'étudier commodément un grand nombre de problèmes. Il n'est même pas utile de con- sidérer toutes les fréquences qui entrent dans la com- position de la voix. Les harmoniques élevés, de l'ordre de # à 6, sont les plus importants. Ce sont ceux qui sont indispensables pour que la parole soit comprise, et finalement les fréquences voisines de 1000 sont celles qui doivent entrer en ligne de compte. — M. de Proszynski : Mouvements de précision à grande vi- tesse. Démonstralion d'un nouveau système de cinéma- toqgraphe. L'auteur tient à prouver qu'en construisant des appareils de précision fonctionnant avec une grande vitesse, il est très utile de recourir chaque fois à une minutieuse analyse théorique, ce qu'on néglige généralement en croyant obtenir la précision de fonc- Honnement par une exécution soigneuse. Grâce à cette analyse, on peut construire des mécanismes avec peu de précision, c’est-à-dire peu coûteux, en obtenant néanmoins le fonctionnement très exact; de plus, l'exactitude ne se perd plus par usure du mécanisme. L'exemple présenté à la Société est celui d’un ciné- matographe, résultat des recherches de plusieurs années. l’auteur a obtenu les résultats suivants : 4° La vitesse de déplacement est très grande, permettant les stationnements relativement longs devant l'objectif et ge 290 annulant les scintillements provenant des obturations trop rapides de la lumière. Malgré cela, la pellicule n’est attaquée qu'avec douceur. 2° La stabilité verticale est presque parfaite, bien que la pellicule ne soit serrée dans l'ouverture que juste ce qui est nécessaire pour la mettre à plat. Dans les appareils en usage, le ser- rage est, au contraire, très fort. 3° Le bruit de l'appa- reil est minime, malgré la vitesse considérable de dé- placement (1/150 de seconde pour remplacer une image par une autre) et bien que l'accélération puisse atteindre 2.000 mètres. Les combinaisons mécaniques essentielles sont les suivantes : 1° Celle qui déplace la pellicule. Une bielle commandée par une manivelle est attachée à un bras oscillant. L'extrémité de la bielle décrit une courbe spéciale et porte des griffes qui en- traînent la pellicule. Le parcours de celle-ci est pres- que rectiligne; 2° Le système, reposant aussi sur l’em- ploi de mouvements exclusivement circulaires, qui sert à faire varier la vitesse de rotation de la mani- velle, de manière que celle-ci soit très réduite au mo- ment de l'attaque de la pellicule pour ne pas dété- riorer la bande, et réduite aussi à la fin du parcours pour assurer la stabilité de l’image. La manivelle a, pendant un demi-tour, une vitesse beaucoup plus grande que pendant le second, ce qui imprime à la pellicule une vitesse d'ensemble suffisante. Ces résul- tats ont été obtenus en plaçant sur une bague, qui dé- crit un cercle, un goujon qui sert d’intermédiaire entre l’axe de la manivelle et un autre axe qui tourne uniformément et qui est l'axe moteur. SOCIÈTE CHIMIQUE DE FRANCE Seance du 26 Février 1909. M. P. Nicolardot indique les résultats obtenus dans une première étude de l’action du protochlorure de soufre sur les métalloïdes et sur les métaux seuls; le soufre, le phosphore, l’arsenic, l'antimoine, l'étain, le fer, l'aluminium etle mercure sont nettement attaqués. Le chlorure de soufre paraît agir comme le ferait l'acide chlorhydrique. L'auteur se propose d’éclaircir complètement le mécanisme de ces réactions. — En commun avec M. Krell, il a cherché à séparer le plomb de l’antimoine par une méthode rapide, qui évite surtout de passer par les sulfosels. La détermina- tion de la teneur en antimoine par la densité n’est pas toujours exacte. Les alliages sont attaqués par l'acide nitrique étendu; l’oxyde d'antimoine est insolubilisé par dessiccation et chauffage à 200°. Dans ces condi- tions, le nitrate de plomb reste soluble et tout l’oxyde d’antimoine est insolubilisé. Par filtration dans des cylindres en terre poreuse, on retient tout l'oxyde d'antimoine et on le réduit par l'hydrogène pour le peser. — MM. Berger et G. Darzens présentent une préparation pratique des dérivés $-halogénés du naph- talène, qui consiste à traiter le G-naphtol sodé par les chlorures et bromures de phosphore. Les composés trihalogénés fournissent les meilleurs rendements : 49 0/, pour le naphtalène chloré, 38 2/, pour le naph- talène bromé. — M. L.-J. Simon expose à la Société ses idées sur l'application de la loi de Petit et Dulong à la détermination des poids atomiques des éléments. — M. J. Pastureau a fait agir l'eau oxygénée sur la glycérine en présence de sulfate ferreux, suivant la méthode de Fenton et Jackson; il a constaté que, dans cette oxydation, il ne se fait ni aldéhyde glycérique ni dioxyacétone : la glycérine est intégralement trans- formée en formol et en acide formique. Après la réac- tion, le mélange a été distillé sous pression réduite. Le liquide distillé, très acide, a été neutralisé par la Bitharge à l'ébullition et filtré. Par refroidissement, on obtient une abondante cristallisation de formiate de plomb. Les eaux-mères ont été distillées à nouveau. Le liquide obtenu présente toutes les propriétés des solutions de formol. Le résidu de la distillation sous pression réduite, qui contient encore de la glycérine, traité à nouveau par l’eau oxygénée, donne encore du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES formol et de l'acide formique, jusqu'à épuisement de la glycérine. En faisant varier la concentration, la réaction se fait de la même facon et les produits obtenus sont les mêmes. — MM. R. Lespieau etJ.Du- pont font remarquer qu'ils ont indiqué, le 23 no- vembre 1907 (Bull. Soc. ch., 1908, p. 4), la préparation de la diméthyline du glycol CH*0H.C=C.CH°0H, que M. D. Gauthier décrit dans sa thèse de doctorat sou- tenue le 26 février 1909 à Paris. Ils n’ont point publié la suite des recherches qu'ils ont faites à cette époque sur cet éther, mais ils en extraient ceci : les points d'ébullition de la diméthyline acétylénique et de son dibromure sont bien ceux indiqués par M. Gauthier; mais le dibromure n’est pas liquide : il fond de 320,5 à 3305. La bromuration, faite à — 8° à l'obscurité en solution chloroformique, fournit les cristaux par éva- poration du solvant; effectuée à 25° au soleil, elle fournit un liquide, mais, par addition d’un des cris- taux précédents, ce liquide se prend presque totale- ment en masse. Il serait intéressant de voir si le dibro- mure de M. Gauthier est en surfusion ou s'il constitue un stéréo-isomère du corps fondant à 33°. Ce dernier, projeté dans le brome humide en plein soleil, fournit une certaine quantité d'acide dibromomaléique. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 Février 1909. M. F.S. Kipping a constaté que l’oxyde de d/-sulfo- benzyléthylpropylsilicyle peut être résolu par la d ou la /-méthylhydrindamine ; mais la d/-méthylhydrin- damine ne peut être résolue à l’aide de l’oxyde de d- sulfobenzyléthylpropylsilicyle. L'acide d/mandélique et l'hydrindamine présentent les mêmes phénomènes. — M. P. C. Ray, en chauffant dans le vide une solution de nitrite d'ammonium à 370-409, a observé une faible décomposition en H°0 et Az°, tandis que la plus grande partie du sel cristallise. En chauffant à 70°, la décom- position continue lentement et la majeure partie du sel sublime. — M. H. Hibbert a déterminé les dérivés hydroxylés en présence d’autres composés organiques, tels que cétones, éthers, nitriles, au moyen du réactif de Grignard en excès. Si la quantité de réactifest insuffi- sante, la quantité de CH* dégagée dépend des masses relatives des corps et des vitesses de réaction. En prenant le même composé hydroxylé et des quantités équimoléculaires de diverses cétones, on pourra mesurer les vitesses de réaction relatives des cétones vis-à-vis du réactif, et par conséquent leur affinité chimique. — MM. E. Wedekind et S. J. Lewis ont constaté que le chlore gazeux préparé en faisant tomber des gouttes d’'HCI concentré sur des cristaux de per- manganate de potassium est exempt d'impuretés. D'après M. Scott, les réactions dont les précédents auteurs ont fait usage sont insuffisantes pour justifier leurs conclusions. — M. J. Thomas montre que les acides sulfiniques aromatiques forment des sels ferri- ques insolubles dans l’eau et les acides minéraux ; cette propriété peut être avantageusement employée à leur isolement du milieu où ils se forment. — MM. E. Wede- kind et S. J. Lewis ont cherché à déterminer les impuretés du zirconium métallique. Le métal libre est séparé de l’oxyde à l'état de tétrachlorure par com- bustion dans Cl pur; l'Az est déterminé par une méthode analogue à celle de Kjeldahl, le C par com- bustion dans l'oxygène à basse pression. — MM. J. G. M. Dunlop et H. O. Jones, en faisant réagir 2 mol. gr. de monométhylaniline sur 1 mol. gr. de bibromure d'éthylène, ont obtenu la diphénylpipérazine, F. 1639; avec 4 mol. gr. du premier corps, il se forme la diphé- nyldiméthyléthylènediamine, F. 47°. -- MM. A. Senier et F.G. Shepheard ont préparé la salicylidène-1»1- toluidine, qui présente de la phototropie ; jaune pâle, elle devient orange sombre à la lumière du soleil, pour reprendre la couleur jaune pâle à l'obscurité. — MM. S. Ruhemann et J. G. Priestley, en condensant le sodiocarbamate avec le phénylpropiolate d'éthyle, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SA VANTES 291 ont obtenu le phénylpropiolylearbamate d’éthyle. Le phénylthiocarbimide réagit avec le sodiocarbamate d'éthyle pour donner le carboxyéthylphénylthiocar- bimide et l'acide anhydrodiphényldithiobiuret-carboxy- lique. — M. S. J. M. Auld a réalisé la synthèse asymé- trique de la d-benzaldéhyde-cyanohydrine sous l'in- fluence de l’'émulsine à partir des composants. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 4 Janvier 1909. MM. B. F. Howard et O. Chick présentent leurs recherches sur la cinchonamine et certains autres alcaloïdes rares. Le chlorhydrate de cinchonamine est un excellent réactif pour les nitrates, le nitrate de cinchonamine ‘étant insoluble ; il peut servir à la détermination de tous les nitrates, excepté de ceux des métaux qui donnent des chlorures et oxychlorures insolubles. La méthode est aussi exacte que celle du nitromètre et d'application plus facile. La cinchona- mine répond à la formule C!*H**Az°0 et ne renferme pas de groupe méthoxyle ; [«h—+120°. La quinicine C2H2A720? renferme un groupe méthoxyle; [&]n —+ 38040. La concusconine C*H?#A7z°0* renferme deux groupes méthoxyle, [a«ln—<+19°34. La cupréine C'H#47°0° ne contient pas de groupe méthoxyle; [als = — 163045". — MM. W. P. Dreaper el A. Wilson poursuivent l'étude des réactions entre les fibres et les couleurs. Leurs expériences montrent que des couleurs comme le méthylorange et la benzopurpurine 4B sont présentes sur la fibre dans un état indéfini. L'équilibre qui s'établit entre les fibres animales et la couleur est troublé par les variations de température ; les réactions sont réversibles. Elles dépendent de la concentration des solutions acides dans le cas des fibres animales. — MM. S. B. Schryver et R. Lessing décrivent une méthode physico-chimique pour comparer la valeur antiseptique des désinfectants. L'étendue des transformations chimiques produites dans un sub- stratum par l'infection bactérienne peut être considérée comme une mesure de la vigueur de la culture. En intro- duisant croissance de la culture peut être empêchée ou retardée. Le principe de la méthode des auteurs repose essentiel- lement sur la mesure de l'inhibition produite par l'addition de quantités variables d’antiseptiques à un milieu infecté et la comparaison de ces quantités avec celles de phénol ou d’un autre désinfectant-étalon qui produisent le même effet. Parmi les changements chimiques produits par les bactéries, les auteurs ont choisi la dégradation des protéines, et ils les déter- minent par la mesure dela conductivité électrolytique, qui augmente régulièrement avec la décomposition des protéines. Séance du 1°" Février 1909. Sir EF. L. Nathan étudie la fabrication du coton- poudre. Après un historique de cet explosif, il recherche d'abord quelle est la meilleure matière première à employer. Les déchets des filatures de coton présentent le plus d'avantages; ensuite viennent les déchets de coton ordinaires. Pour la nitration, le procédé par déplacement, employé à l'usine anglaise de Waltham Abbey, est de beaucoup préférable au procédé originel d’Abel ou au procédé d'immersion directe et au pro- cédé de nitration par centrifugation. La purification et la stabilisation du coton-poudre s’obtiennent par une série d’ébullitions avec un liquide alcalin, dont la durée va en diminuant, et dont les trois pre- mières sont séparées par un lavage à l'eau froide. L'auteur décrit encore quelques manipulations acces- soires. des substances nuisibles aux bactéries, la. SECTION DE MANCHESTER Séance du 8 Janvier 1909. M. S. H. Higgins a déterminé la relation entre l'absorption d'humidité et des matières colorantes par les fibres textiles. Il a reconnu qu'après soixante- douze heures les quantités de colorants et d'humidité absorbées par divers échantillons de fibres sont prati- quement constantes; toutefois, l'absorption d'humidité est plus irrégulière que celle des colorants. L’absorption de l'iode et de l'humidité par le coton présente les mêmes caractères, — Ml E. Hibbert décrit une méthode volumétrique pour la détermination du bitane et pour celle du titane et du fer en présence l'un de l'autre. Elle est basée sur la réduction du bleu de méthylène par le chlorure titaneux, qui permet de déceler 0,00001 gramme de métal. Si le titane est à l'état titanique, on le réduit à l’état titaneux par Zn + HCI. Le chlorure ferreux ne réduisant pas le bleu de méthylène, on peut titrer le titane en présence de fer; on titre le fer à part, à l’état ferrique, par réduc- tion avec le chlorure titaneux. — Le même auteur décrit encore une méthode volumétrique pour la déter- mination du cuivre et du chrome et pour celle du cuivre, du chrome et du fer en mélange. Le cuivre à l’état de sulfate cuprique et le chrome à l’état de bichromate sont titrés par le chlorure tilaneux, ce qui donne la somme des deux métaux. Puis le cuivre est titré seul par TiCI, après réduction du bichromate par SO°, ou bien Cu est éliminé par HPS, Cr est réoxydé en bichro- mate et titré par le chlorure titaneux. S'il y a du fer, l’auteur arrive à analyser le mélange au moyen de trois opérations, dont l’une donne Cu, Cr et Fe, la seconde Fe, la troisième Cu et Fe. SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 8 Janvier 1909. M. M. L. Griffin étudie la question de l'échantillon- nage au point de vue mathématique. Il arrive à la con- clusion que, si le chimiste est au courant de son métier et de l'histoire du produit qu'il manipule, le nombre des échantillons prélevés peut être très limité, quel- quefois 10, rarement plus de 20 ou 25. Mais, si le chi- miste manque de savoir et d'habileté, le prélèvement d’un nombre d'échantillons même très grand ne don- nera pas des résultats exacts. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Janvier et de Février 1909. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Bianchi : Sur un cas limite des transformations des surfaces appli- cables aux quadriques. — M. V. Volterra : Sur les équations intégro-différentielles.— M. T. Levi-Civita : Sur les actions mécaniques dues à un flux filiforme d'électricité. Théorie asymptotique des radiations électriques. — M. P. Pizzetti : Sur la moyenne des valeurs que prend une fonction des points de l’espace à la surface d’une sphère. — M. E. Levi s'occupe d'une propriété caractéristique des fonctions harmo- niques. — M. E. Bianchi présente quelques observa- tions sur le terme z de Kimura dans la variation des latitudes. — M. C. Burali-Forti présente de nou- velles expressions absolues des courbures en un point d’une surface. — M. G. Sannia : Doubles sys- tèmes de lignes de la sphère, images d’asymptotiques. Sur quelques enveloppements de æ * sphères. — M.L. Tonelli : Sur la série de Dirichlet. 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. Q. Majorana décrit les appareils qu'il a imaginés pour les transmissions télé- phoniques sans fil, et les expériences qu'il a exécutées avec ces appareils. De ces expériences, il est résulté toujours que la parole articulée arrive même à une disiance supérieure à 400 kilomètres avec son timbre parfaitement inaltéré, ce qui démontre que toutes les périodes acoustiques qui s’y trouvent sont transmises, 292 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES par les ondes électromagnétiques, avec une atténua- tion constante. — M. L. Amaduzzi a entrepris quel- ques mesures de dispersion électrique en relation avec les mesures de pression atmosphérique, dans des lieux où l'air pouvait librement recevoir les matériaux ra- dio-actifs provenant du sol avec les gaz naturels. — M. M.La Rosa étudie quelques nouveaux faits relatifs à la vision des yeux astigmatiques et normaux, et en donne l'explication; ces faits consistent dans des variations qui s'observent dans les dimensions et la distance des objets lorsqu'on les observe en inelinant la tête de côté jusqu'à ce que les deux lignes visuelles se trouvent dans un plan vertical. — M. E. Drago à fait des recherches expérimentales sur la mesure de la variation de ténacité du fer dans le champ magné- tique. — M. D. Pacini étudie l'intensité des radiations pénétrantes capables d'ioniser un gaz renfermé dans un récipient métallique et produites par des causes externes, et la variation de cette intensité avec le temps; il a cherché, en outre, à établir s'il existe quelque lien entre ce phénomène et les autres phéno- mènes connus de l'atmosphère. — M. E. Paterno donne quelques notes préliminaires sur de nom- breuses synthèses de substances organiques qu’il a obtenues à l’aide de la lumière. — MM. G. Kôrner et A. Contardi décrivent l’action de l'hypochlorite de calcium sur la métanitroaniline. — M. A. Contardi indique une méthode simple et nouvelle d'extraction d'un composé phosphoré (phytine) qui se trouve dans les plantes; le matériel qui a servi pour cette extrac- tion a été la balle du riz. — M. G. Rosati transmet une étude cristallographique de la nitrodesmotropo- santonine et de la B-propyl-naphtylcétone. — M. G. Poma : Equilibre entre le chlorure cuivreux et le chlorure cuprique en solution chlorhydrique. — Sur la constitution des chlorosels cuivreux-cupriques. — MM. A. Borgo et M. Amadori ont déterminé la gran- deur moléculaire du soufre dissous dans le bromo- forme. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. E. Artini transmet la description d’un nouveau minéral découvert dans un gisement amiantifère du Val Malenco; à ce minéral, qui est un carbonate ultra basique et hydraté, et se présente sous forme de lamelles couleur de rose sem- blables à celles du mica, a été donné le nom de « bru- gnatellite ». — M. Repossi étudie la formation schisto- bitumeuse de Besano, en Lombardie, où l’on a repris des travaux de fouilles sur le prolongement de la for- mation en territoire suisse; ces (travaux sont exé- cutés pour extraire du schiste le produit pharmaceu- tique connu sous le nom d'ichtyol.— M. F. Zambonini s'occupe encore de la constitution des zéolithes. — M. F. Millosevich communique ses recherches sur les cristaux d’andesine qui se trouvent dans un conglo- mérat polygénique formé en grande partie d'éléments d'origine volcanique. — M. R. Almagià décrit quel- ques phénomènes d'érosion rapide qu'il a pu observer dans les formations pliocènes de la vallée du Tronto — M. E. Oddone a cherché à déterminer, à laide d'un calcul provisoire, la profondeur de l'hypocentre du tremblement de terre de la Calabre et de la Sicile, du 28 décembre 190$ ; appliquant la méthode nouvelle proposée par M. Kôvesligethy, les calculs donnent une profondeur de 9 kilomètres. — M° B. Bonfigli présente ses observations sur le PAylloxera quercus Boyer. — M. F. Silvestri transmet la description préliminaire de plusieurs Arthropodes, en grande partie d’Amé- rique.—M.U. Cerletti a découvert, dans l'écorce céré brale de quelques malades décédés à la suite de fièvres paludéennes, des proliférations dans les vaisseaux sanguins et il en donne une description détaillée el des dessins. — M. V. Nazari à fait des expériences pour déterminer la quantité de semence que l'on doil employer pour la culture du blé; la quantité qui, dans les conditions des expériences, a donné le plus grand rendement économique oscille entre 114 et 152 litres par hectare. Ennesro Mancini. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 21 Janvier 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. R. Kremann et A. Zi- tek ont étudié au point de vue de la loi des phases la préparation du « salpêtre de conversion » d'après l'équation : 2NaAz0* E K?CO*—2Ka470* + Na°CO®, Ils montrent qu'au point de vue technique, le mieux est de mélanger des quantilés de NaAz0", de K?C08 et d’eau telles que, après dépôt de KAzU!, la solution restante soit encore saturée en Na*CO' et en sel double Na°CO*. K°C0*.6H°0. De cette eau-mère, on peut retirer Na*CO* par addition de NaAz0' jusqu'à saturation. A 250, le rendement est meilleur qu'à 10°. — M. K'. von Hemmelmayr à étudié l'action du Br sur l'acide gen- tisique (2:5-dioxybenzoïque). Suivant les proportions de Br, on obtient de l'acide monobromogentisique ou du bromanile, mais pas de produits bi- ou tribromés. L'acide monobromogentisique, chauffé avec l'eau à 1609, perd CO* et forme de la bromohydroquinone. L'acide gentisique est oxydé par HAzO* avec formation d'un produit mononitré, qui n’a pu être isolé, et sur- tout d'acide oxalique. 29 SCIENCES NATURELLES. — MM. K. Linsbauer et E. Abramovicz ont étudié l’action de divers agents sur le mouvement des chloroplastes chez le Lenuma trisulea et le Funaria hygrometrica. L'eau éthérée à 1 °/, arrête les mouvements normaux qui se produisent au passage à l'obscurité, Les mouvements qui se produisent à l’insolation se distinguent de l'écoulement du plasma en ce quils sont liés à la faculté d'assimilation. — M. F. Kuoll à reconnu, contrairement à l'opinion courante, que les genres As/rlbe et Aruncus sont nettement séparés et ne présentent pas de formes de transition; ils ne peuvent, non plus, donner des hybrides. — M. F. Heritsch poursuit ses études géo- logiques sur la zône des grauwackes dans les Alpes nord-orientales. Séance du 4 Février 1909. 4° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Hladik a modifié l'atmomètre de Piche, qui consiste, on le sait, en une éprouvelte graduée remplie d’eau, fermée par un disque de papier et suspendue l'ouverture vers le bas; la quantité d’eau évaporée au bout d'un certain temps permet de calculer l'humidité de l'air. L'auteur donne la formule suivante pour la tension de vapeur moyenne de l’eau dans l'air d'un espace fermé : WBm RE) (40,685 — V/21,8êm) Z où Z est la durée de l'observation en heures, 4, la tem- pérature moyenne, B,\ la pression atmosphérique moyenne, À, la tension maxima à {», w le nombre de ©. ©. d’eau évaporés. — MM. P. Friedlænder et A. Bez- dzik, par action du chlorure d'isatine sur l'x-naphtol et les &-naphtols -substitués, ont obtenu, à côté des colorants indigoïdes, des isomères qu'ils nomment indoliguones. Par l’action de la lessive de soude, les colorants indolignoïdes se dédoublent, comme les indi- goides, en acide anthranilique et oxynaphtaldéhydes. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. A. von Tschermak présente ses recherches physiologiques sur les cœurs de poissons embryonnaires. Il en conclut que le cœur n'acquiert pas les particularités caractéristiques de son automatisme et de son excitabilité secondairement par la formation de son système nerveux interne, mais possède son activité déjà au moment où il est encore un tube musculeux simple et est en apparence privé d'éléments nerveux. Ce caractère essentiellement myo- gène des propriétés fondamentales du cœur est en laveur de la théorie de 6askell et d'Engelmann. Ôm —= Am — Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Gasselte. 20° ANNÉE 15 AVRIL 1909 Revue générale des Sciences pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M, L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés daus la Zevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollance. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Election à l'Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 22 mars, l'Académie a procédé à l'élection d'un membre dans sa Section de Minéralogie en remplacement de M. Gaudry. La Section avait présenté la liste suivante de candidats : en 4religne, M. P. Termier; en 2° ligne, MM. M. Boule, E. Haug et L. De Launay; en 3° ligne, M. J. Bergeron. Au premier tour de scrutin, M. Termier a obtenu 33 sufrages, contre 14 accordés à M. Haug et 13 à M. Boule; en conséquence, M. Termier a été déclaré élu. Le nouvel académicien est connu par une longue série de travaux, qui ont porté principalement sur la tectonique des Alpes franco-italiennes et des Alpes orientales. Disciple de Marcel Bertrand, il s’est attaché à l'étude des phénomènes de recouvrement, et c’est par la considération des nappes de charriage qu'il a magistralement élucidé quelques-uns des problèmes les plus difficiles de la structure de la chaîne alpine. $ 2. — Art de l’Ingénieur Les progrès de la circulation urbaine. — L'accroissement incessant de la population des grandes villes rend plus difficile la circulation des personnes et des véhicules. Ces problèmes constituent ce que M. de Foville appelle la « mécanique des foules ». L'encom- brement de certaines rues va jusqu'à l'obstruction et à la congestion du trafic; il est d'autant plus grand que des obstacles naturels ou artificiels s'opposent à l'extension du périmètre de la ville. Pour Paris, les services rendus par les entreprises de transport en commun, c'est-à-dire exclusion faite des voitures de place, de course et de chemin de fer, mais y compris les services de banlieue, se traduisent, à des intervalles d'environ vingt-cinq ans, par les chiffres suivants cor- respondant au nombre des voyageurs transportés, exprimé en milliers : 1856 1885 1904 Omnibus . 49.590 115.635 121.593 Tramways » 15.151 318.966 Bateaux OFON MONDES LUS » 9.579 21.080 Chemins de fer à l'intérieur. 2.407 13.884 172.344 DOUX 0 007 154.249 693.943 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. | Si le mouvement des voyageurs augmente dans une si forte proportion, ce n’est pas seulement par suite de l'accroissement de la population, mais c'est qu'on prend de plus en plus l'habitude de recourir à un moyen de transport afin d'obtenir un déplacement plus rapide. En 1846, un Parisien utilisait dans l’année 4% fois les lignes existantes ; en 1875, 78 fois, et en 1904, 256 fois. M. Jenkins montrait à l'Association britan- nique que, en 1867, chaque habitant de Londres ne faisait en moyenne que 23 voyages sur les lignes de transport intérieures, tandis que le chiffre correspon- dant atteignait successivement 55 en 1880, 92 en 1890, 126 en 1900, 429 en 1901. Pour l'ensemble de l’agglo- mération new-yorkaise, le même auteur a relevé des moyennes de #7, 118, 182, 283 et 320 pour les années 1860, 1870, 1880, 1890 et 1900. Il ny a que quelques années, New-York possédait des moyens de transport susceptibles d'assurer le déplacement annuel de 1.200 millions de voyageurs; aujourd'hui, la capacité correspondante est évaluée à 2 milliards de personnes’. C'est pour remédier à cette situation qu'on à pro- posé d'établir aux carrefours des rues des trottoirs aériens ou des passages souterrains. Sous des formes diverses, ce que l’on poursuit, c’est la circulation sui plusieurs étages. À Londres, le sous-sol renferme deux ou trois tunnels superposés. Les métropolitains de Paris et de Berlin, les e/evated cars de New-York, les subways de Boston sont une application de ce prin- cipe. Dans les rues, la traction animale est remplacée de plus en plus par la traction électrique pour les lignes de tramways,et par la traction automobile pour les véhicules isolés. À Paris, de 1897 à 1907, le nombre des chevaux a diminué de 92.026 à 83.458. Les tram- ways urbains étendent de plus en plus leur zone de rayonnement et commencent déjà, aux Etats-Unis, par exemple, à effectuer le transport des marchandises. Dans ce pays, les lignes de tramways sont devenues suburbaines et même interurbaines; on les voit s'allonger jusqu'à 40 et 60 kilomètres des grandes villes. Le voyageur n'a pas à se rendre à une gare; il { D. Bezcer : Revue économique internationale, janvier 1908. 294 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE est cueilli sur son passage ; la traclion électrique assure une vitesse commerciale très avantageuse, et, comme les frais d'exploitation sont moins grands, les taxes sont moins élevées que sur les chemins de fer, qui commencent à souffrir de cette concurrence nouvelle. Le prix très élevé des voies ferrées souterraines et, dans une moindre mesure, celui des voies de tram- ways ont conduit à l'emploi de la traction automobile pour les véhicules isolés. C’est seulement en 1905 qu'on à vu apparaitre dans les rues de Londres l'om- nibus mécanique ou autobus. Moins coûteux que le tramway, facilement déplacable et pouvant changer à volonté d'itinéraire, beaucoup plus rapide que l'om- nibus à chevaux, l’autobus n'est pas non plus sans inconvénients. Il y a le coût d'exploitation plus élevé que celui du tramway électrique, le bruit, l'odeur, le danger d'incendie, les accidents. Mais c’est un instru- ment nouveau, susceptible, par conséquent, d’amélio- rations techniques, et qui est appelé à prendre place à côté de la traction sur rail, en remplacement de la traction animale, plus chère et moins rapide". Pierre Clerget, Professeur à l'Eccle supérieure de Commerce de Lyon. $ 2. — Physique Résistances photo-électriques pour Ia transmission télégraphique des photogra- phies et documents graphiques. — On sait que de nombreux systèmes de télé-photographie sont basés sur l'emploi de piles à sélénium, qui convertissent les fluctuations lumineuses en variations d'intensité élec- trique, susceptibles d’être transmises, sur un fil télé- graphique ou téléphonique, à une station d'arrivée, où elles sont reconverties en variations de lumière analogues à celles de la station de départ. Or, ces piles à sélénium, en raison de leur inertie, sont incapables de suivre instantanément les variations lumineuses par des variations correspondantes de leur conductivité. La transmission télégraphique des clichés ne peut, par conséquent, être opérée qu'à une vitesse assez réduite, et les reproductions sont loin de pré- senter toute la précision qu'elles auraient dans le cas d'une action instantanée. On a imaginé, pour éliminer cet inconvénient, d'ingénieux dispositifs de compensa- tion; mais ceux-ci ne donnent pas une solution parfaite du problème. Dans un procédé récemment breveté par une com- pagnie de Munich, le sélénium est remplacé par une substance susceptible d'émettre des électrons aussitôt qu'on vient à l’éclairer. Mentionnons, parmi les sub- stances douées de ce pouvoir, les métaux alcalins, tels que le potassium, le sodium, le rubidium, qui tous émettent des électrons quand on les expose à la lumière, au sein d'une atmosphère gazeuse (d hydrogène dilué, par exemple). L’atmosphère gazeuse acquiert ainsi un surcroit de conductivité électrique, qui augmente l'intensité du courant traversant le circuit dont elle fait partie, d'autant plus que l'intensité lumineuse est plus considérable. Comme les variations de conducti- vité du gaz ont lieu instantanément, sans le moindre retard sur celles de la lumière, la succession de rayon- nements d'intensité variable peut se faire avec une vitesse bien plus grande que dans le cas des piles à sélénium. Dans l’une de leurs dispositions, les inventeurs se servent d'un vase de verre rempli d'hydrogène dilué et qui renferme deux électrodes, dont l’une (communi- quant avec le pôle positif d'une source de courant) est en platine, tandis que l'autre (reliée au pôle négatif) consiste en un corps émettant des électrons sous l'action d’un éclairage variable. Un appareil disposé suivant l’un des systèmes bien connus (celui de Korn, par exemple) déterminera, sous l'influence des fluc- D. Beccer: fevus économique iuternationale, juillet 908. tualions de courant, des effels lumineux d'une inten- sité variable, permettant la transmission, en une succession rapide, d'écritures, de dessins ou de pho- tographies. Au lieu de faire agir directement les fluctuations de courant dues aux variations de la conductivité du gaz, on peut les utiliser pour actionner un relais qui, à son tour, produira les effets désirés. $ 4. — Chimie physique Le problème de la conservation de la matière. — Après les premiers doutes énoncés par Stas au sujet de la validité absolue du théorème de l'indestructibilité de la matière (doutes suscités par les pertes de poids constatées pendant la combinaison de l'argent avec l’iode et le brome), M. Heydweiller, d'un côté, et M. Landolt, de l’autre, ont repris cet inté- ressant problème. Ces deux auteurs ont observé, dans certaines réactions chimiques, des accroissements ou décroissements de poids restant au dedans des limites d'erreur; dans certains autres cas, au contraire, ils ont constaté des pertes de poids supérieures de beau- coup aux erreurs expérimentales possibles. Depuis lors, M. Landolt est revenu sur l'explication à donner de ses premières expériences, relatives aux pertes les plus grandes. En considérant ces perles comme des phénomènes établis, il s’est efforcé d’en rendre compte par l'hypothèse d'une désagrégation partielle des atomes, due aux sécousses violentes que subissent ces particules pendant les réactions en question ; les petits fragments de matière s'échapperaient à travers les parois du vase de verre. Cette hypothèse serait corro- borée par le fait, bien connu, que certains gaz, même à la température ordinaire, se montrent susceptibles de traverser le verre. Enfin, dans son dernier Mémoire consacré à ce même problème, M. Landolt, abandon- nant son hypothèse, à attribué les variations de poids à des causes physiques, étrangères à la réaction chi- mique, à savoir à des changements de volume dus aux effets thermiques résiduels. Or, dans un récent Mémoire’, M. C. Zenghelis, pro- fesseur à l'Université d'Athènes, émet l'opinion que cette explication, basée sur des revisions et des calculs extrêmement laborieux, ne suffit pas à expliquer dans tous les cas les inégalités de poids jusqu'ici établies. Les expériences dont il résume l'allure et les résultats font voir, en effet, que beaucoup de gaz et de vapeurs émis par les corps solides possèdent, mème à la tem- pérature ordinaire, — à un degré faible, à la vérité, et aucunement proportionnel à la volatilité du corps, — la faculté de traverser le verre. Dans un vase scellé, ce passage des gaz et des vapeurs se trouve grandement facilité quand on réduit la pression extérieure. La température — du moins dans le cas d’un accroissement modéré — ne paraît pas exercer d'effet appréciable. D'autre part, le fait que ce passage s'effectue d'autant mieux que le volume du vase est plus considérable, — fait qui concorde parfaitement avec les expériences antérieures de l’auteur sur la volatilité des corps solides à la température ordinaire?, — pourrait être dà à ce que les vapeurs, subissant une dissociation subséquente, pénètrent à travers le verre d'autant plus facilement qu'elles sont plus diluées. Un espace consi- dérable favoriserait, en effet, cette dilution. On comprend facilement que ces phénomènes dépen- dent à un degré considérable de la nature et de l'épaisseur des parois du récipient, le verre très mince étant traversé par les vapeurs avec une extrème faci- lité. L'auteur ne saurait décider si ce passage se fat soit en quelque sorte mécaniquement à travers les pores du verre, soit par dissociation ionique. Il est vrai que, ! Zeitschr. f. pays. Chem., t. LXV, p. 3, 1909. Zeitschr. f. phys. Chem., L. LIT, p. 105, 1905. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 295 d’une part, le passage parfaitement libre, à travers le verre, des rayons cathodiques à masse extrèmement exiguéë, et, d'autre part, le peu de pénétrabilité des rayons à masse bien plus grande semblent être en faveur de cette dernière hypothèse. Les particules traversant le verre devraient être alors d'une masse extrêmement petite et les vapeurs subiraient, semble- t-il, une dissociation subséquente, comme l’auteur l’a, pour la première fois, admis pour expliquer l'alté- ration si singulière de l'argent exposé à l'action des vapeurs émises par des corps solides. Cette hypothèse est, du reste, d'accord avec de nombreux phénomènes auparavant constatés par l’auteur et avec les récents travaux de certains expérimentateurs sur la dissocia- tion partielle que subiraient, d’une facon parfaitement régulière, un nombre limité de molécules de corps liquides et même solides. Or, l'explication, sur la base de l'hypothèse d'un passage matériel à travers les parois du vase, est con- lirmée par des observations assez nombreuses. Ce sont, en eflet, les substances présentant les diminutions de poids les plus considérables qui sont douées du pouvoir de pénétration le plus élevé; les vases de grand volume offrent plus facilement passage et une diminution de poids relativement plus grande; enfin, les vases intérieurement enduits de paraftine, M. Lan- dolt le constate lui-même, ne donnent lieu à aucune diminution de poids appréciable. L'hypothèse de variations de volume dues à des effets thermiques ne suflirait à expliquer les diminu- tions de poids que dans les réactions s'accompagnant d'un dégagement de chaleur considérable. Les dimi- nulions supérieures à 0,04-0,0% gramme s'explique- raient, au contraire, dans toutes les expériences de Landolt, par le passage de vapeurs à l'état extrème- ment dilué et peut-être à l'état ionique. On serait ainsi en présence d'une véritable perte de matière, due à la désagrégation atomique. A propos de la filtration des solutions colloïdales. — Nous recevons de M. H. Bechhold la lettre suivante : « Monsieur le Directeur, « Je viens seulement d'avoir connaissance de la lettre de M. J. Duclaux à la Revue générale des Sciences, parue le 15 juin 1908 et relative à mon procédé d'ultra- filtration. Permettez-moi, à cause de la vérité histo- rique, d'y répondre en quelques mots : « Quand je commencai à m'oceuper de la filtration sur gélatines (Gallerten) en 1904, je n'avais pas encore connaissance de la filtration sur sacs de collodion. Entre temps parurent quelques Notes dans cette direc- tion, que je n'ai pas manqué de mentionner, pour autant que j'ai pu les connaitre, par exemple celle de Malfitano, dans ma publication détaillée *. « Malgré ces notes, je ne vis pas la nécessité d'aban- donner dès lors ma méthode d’ultra-filtration, puis- qu'elle était essentiellement différente du procédé de ines prédécesseurs : « 4° Mes ultra-filtres ne sont pas des sacs de collo- dion, mais des filtres (papiers, tissus) qui sont impré- gnés de gélatines ; en conséquence, l'effet est tout autre, comme Je l'ai démontré dans mon dernier travail ?: «2 Avant moi, personne n'a reconnu et dit que l'épaisseur du filtre est variable avec la concentration des gélatines et tiré les conséquences du fait. En se servant de sacs de collodion, la preuve n'aurait été possible que dans des limites très étroites, puisqu'on ne peut pas produire des sacs de collodion durables * Kolloidstudien mit der Filtrationsmetode (eitschr. Le physikal. Chemie, t. LX, p.259 et 216). Antérieurement, j'ai fait une courte communication à la Vers. D. Naturforscher und Aerzte, en septembre 1906. * Durchlässigkeit von Ultrafiltern (Zeitseur. Chemie, t. LXV, p. 328-342). f. physikal. avec des gélatines aussi peu concentrées que celles dont je me sers pour les ultra-filtres très poreux. C'est pourquoi personne n'a conclu qu'on pouvait séparer des colloides des parcelles de différentes gran- deurs par des ultra-filtres de différentes densités ; « 3° Seule, la construction de mon appareil d'ultra- filtration a permis d'employer chaque gélatine, la plus épaisse comme la plus poreuse, de faire des filtrages avec des pressions allant d'une fraction d'atmosphère jus- qu'à quinze atmosphères et plus, tandis qu'avec les sacs de collodion on ne peut guère dépasser une atmo- sphère. « Veuillez agréer, etc. » D: H. Bechhold, Membre de l'Institut royal de Thérapeutique expérimental à Francfort-sur-le-Mein. $ 5. — Physiologie L'examen, à l'aide du galvanomètre à corde, des courants du nerf vague. — Le cou- rant de démarcation dérivé du bout périphérique d'un nerf vague divisé présente une varialion négative, tous les fois que les poumons se dilatent. Ce phéno- mène, constaté par M. Lewandowsky avec un galvano- mètre Deprez-d’Arsonval et étudié plus en détail par MM. Alcock et Seemann au moyen de l’électromètre FBoFrE na des Fig. 1. — Variations électriques dans le nerf vague qui accompagnent les mouvements respiratoires el cardiaques. — v, électrovagogramme ; p, courbe respiratoire ; e, courbe du pouls. capillaire, vient d’être soumis à un examen plus rigou- reux par MM. W. Einthoven. A. Flohil et P. G. T. A. Battaerd!, qui, à l’aide du galvanomètre à corde ima- giné par le premier de ces savants, ont été en mesure, non seulement de confirmer entièrement les résultats des auteurs antérieurs, mais de constater la présence d'une autre source d'impulsions, localisée dans le cœur, à savoir les courants d'action rythmiques pro- duits par le nerf vague, en parfait synchronisme avec les battements du cœur. Un nerf vague dans le cou d'un chien anesthésié, isolé sur un parcours considérable, a été divisé à un point situé à la partie supérieure du cou. Le courant à été dérivé de l'extrémité périphérique coupée du nerf par une paire d’électrodes non polarisables, amenées en contact, l’une avec la section, l’autre avec la sur- face. L'intervalle entre les électrodes était d'environ 4 cm. 5. Le courant de démarcation des nerfs à été compensé de la facon usuelle ; les électrodes étaient reliées au galvanomètre, de facon qu'une diminution d'intensité du courant de démarcation — c'est-à-dire un courant d'action — produisit un déplacement as- censionnel de l’image de la corde. Dans la figure 4, un millimètre de l’abscisse cor- respond à 0,2 seconde, 1 millimètre de l'ordonnée à 2 micro-volts. Les courbes supérieures, qui repré- sentent les courants d'action du nerf vague, peuvent être désignées sous le nom d'é/ectro-vagogrammes. La courbe moyenne reproduit les mouvements respira- toires de l'animal, de facon que chaque inspiration { Quar!. Journ. of Exper. Physiol., t. 1, n° 3, 1908. + 296 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE corresponde à une portion ascendante et chaque expi- ration à une portion descendante de la courbe. Ce pueumogramme à élé obtenu en faisant respirer le chien dans une grande bouteille, et en transmettant les oscillations de pression de l'air de la bouteille à un tambour enregistreur de Marey. La courbe inférieure indique enfin le sphygmogramme de l'artère crurale. L'électro-vagogramme, on le voit, présente des ondu- lations d’un double rythme, synchrones, d'une part, avec les mouvements respiratoires et, de l’autre, avec les battements du cœur de l'animal. Les expériences faites par les auteurs sur les effets du gonflement des poumons démontrent l'existence de deux espèces de fibres vagues pulmonaires, qui exercent des effets expiratoires et inspiratoires respec- tivement. Il est facile d'isoler les effets individuels de chaque espèce de fibre. Ces phénomènes confirment la théorie de la régulation spontanée des mouvements respiratoires, établie, dès 1868, par Hering et Breuer. Le lien que constitue l’électro-vagogramme entre les ondulations respiratoires et celles des battements du cœur jette des lumières nouvelles sur les relations qui existent virtuellement entre l’action du cœur et les mou- vements respiratoires. Ces relations s'expriment, par exemple, par le rapport entre le nombre de mouve- ments respiratoires et le nombre de battements du cœur par minute, rapport qui, pendant les variations de la fréquence du pouls, reste en général constant. Comme ces expériences font voir que le cœur, en battant, émet des impulsions rythmiques se rendant le long du vague à son centre, il paraît possible que ces impulsions, en atteignant le centre respiratoire, y pro- duisent, à chaque variation de la fréquence du pouls, une variation proportionnelle de la fréquence des mou- vements respiratoires. C'est ainsi que l’action du cœur déterminerait une régularisation automatique des mou- vements respiratoires. $ 6. — Géographie et Colonisation L’exploration du D' Sven Hedin au Tibet. — La magnifique exploration à travers le Tibet inconnu que vient d'achever le D' Sven Hedin, et qui a duré trois années, est le troisième de ses grands voyages dans les régions les plus mystérieuses et les moims accessibles de l'Asie centrale. Comme les précédentes, elle a donné des résultats géogray hiques considérables; complétant ses premières découvertes, le savant explo- rateur suédois à comblé cette fois l’un des blancs les plus vastes qui existaient sur la carte du Tibet. Son ex- ploration comprend en réalité trois campagnes suc- cessives. Après un voyage préliminaire en Perse et au Séistan, Sven Hedin laissa Leh le 14 août 1906 et traversa tout le Tibet en diagonale du nord-ouest au sud-est: il at- teignit Chigatsé au bout de six mois. Ce fut sa première campagne’. Cetle campagne fut très pénible, car le voyageur dut traverser tout le Tibet septentrional en plein hiver. Il franchit le Karakorum par un col haut de 5.943 mètres, situé à l’est du Changlung-yogma, jadis utilisé par Forsyth, et arriva aux hauts plateaux, Ling-shi-tang et Aksaï-chin, où il rencontra moins de difficultés qu'il ne l'avait pensé. On y trouva de l’eau presque chaque jour, mais après de longues marches; il y avait de l'herbe excellente. Sven Hedin alla visiter le lac Lighten, dans le sud du plateau d’Aksaï; ce lac, l’un des plus vastes qu'il ait vus au Tibet, est aussi l’un des plus profonds; il a, par endroits, plus de 68 mètres de profondeur. Le Poul-tso, dont l'explorateur fit une carte, et le Yechil- Koul sont, au contraire, peu profonds. Sven Hedin croisa les itinéraires de Deasy, de Rawling et de Wellby, mais en évitant d'explorer les mêmes régions qu'eux; il constata que la carte de Rawling est très exacte. Laissant alors les routes de l’est et du nord-est, l’ex- ! The Geo raiphical c'oirnal, mai 1905, p. 539-545. plorateur tourna vers le sud-est, entre celles de Bower et de Dutreuil de Rhins. La caravane éprouva les plus grandes difficultés sur les hautes montagnes neigeuses qu'elle eut à traverser; elle subit de terribles tempêtes et perdit presque tous ses animaux. On ne trouvait plus d'herbe, pas même de crottin de yack pour faire du feu, mais il y avait de l'eau partout. On arriva à un en- droit où se trouvent des mines d’or, qui ne peuvent être exploitées qu'en été. C'est après un isolement de 83 jours que la caravane rencontra les premiers noma- des auxquels elle acheta des yacks. L'explorateur, laissant à l’est le lac appelé par Dutreuil de Rhins le lac d’Ammoniaque, alla droit au sud vers le Bog-tsang-tsanpo, où il coupa sa propre route de 1901. La température était très rigoureuse; le thermomètre descendit jusqu'à — 35° C. Le 28 décembre, l'expédition atteignit le Ngangtse-tso, découvert par le pundit Naïn Singh en 1874. Sven Hedin fit une excur- sion de dix Jours en traineau sur la glace du lac; il en dressa une carte qui rectilie celle du topographe hindou et en mesura la profondeur, qu'il trouva être de 10 mè- tres au maximum. Sven Hedin pousuivit ensuite sa marche vers le sud pour franchir la région inconnue, marquée en blanc sur les cartes, qui s'étend entre le Dangrayum-tso, le Ngangise-tso et autres lacs d'une part, et le Tsanpo, ou cours supérieur du Brabhmapoutre, d'autre part. IL constata que cette vaste étendue de pays est occupée par une énorme chaine de montagnes, parallèle à l'Himalaya, qui s'étend sur la rive gauche du Tsanpo. L'existence de cette chaîne était-elle entièrement in- connue? Non; on en connaissait des extrémités, mais on ignorait quels prolongements ces reliefs pouvaient avoir. Sven Hedin a eu le mérite de les faire connaitre et d'en déterminer avec exactitude la direction et l’im- portance. La chaîne reconnue par le voyageur suédois est le prolongement vers l’ouest du Nien-chen-tang-la, qui est au sud du Tengri-nor. Le Khalamba-la, qui est sur la route de Chigatsé au Tengri-nor, appartient à ce système. La chaîne avait été traversée dans sa partie orientale par l'Anglais Littledale et par quelques autres voyageurs, mais aucun d'eux n’en avait soupçonné l'immense développement vers l’ouest. Si cette chaîne puissante, dont la longueur dépasse 3.000 kilomètres, ne présente pas de sommets surpassant en hauteur les géants de l'Himalaya, les cols, du moins, s'ouvrent en général à des altitudes supérieures. Sven Hedin en franchit plusieurs, dont cinq hauts de 5.700 mètres, et cela par d’effroyables tempêtes de neige. Du versant sud, descendent des rivières qui coulent vers je Tsanpo. Le Transhimalaya, comme Sven Hedin appelle cette chaine, est la ligne de faite séparant le bassin du Brahmapoutre, au sud, des eaux sans écoulement des lacs du Tibet central, au nord. Descendant les pentes du Transhimalaya, Sven Hedin atteignit la rive nord du Brahmapoutre en amont de Chigatsé et parvint dans cette ville le 9 février 1907. Fort bien accueilli par le Tachi-lama, il put assister à de curieuses fêtes religieuses à Tachi-loumpo, visiter les temples et les couvents de moines, étudier les pra- tiques du bouddhisme et prendre en toute liberté des photographies et des croquis. Les documents réunis pendant cette première cam— pagne furent déjà considérables : 2.970 pages de notes, des levers couvrant 230 feuilles, 700 dessins de pano- ramas, une collection de 240 échantillons de roches. L'assistant, A. Robert, avait fait les observations astro- nomiques et tenu le journal météorologique; l'altitude de près de 200 points a été déterminée au moyen de l'hypsomètre. Le D' Sven Hedin, se proposant d'entreprendre une seconde Gampagne, s'était dirigé vers le nord et avait franchi la chaine du Transhimalaya, avec l'intention d'explorer le Dangrayum-tso, découvert, comme le Ngangise-tso, par le pundit Naïn Singh; mais il fut forcé par les autorités tibétaines de revenir en arrière | et de retraverser la chaîne; il avait eu le temps, cepen- ne ne CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 297 dant, de fixer des points importants de la topographie du pays et il avait découvert, sur le versant nord, un lac d'une étendue considérable, le Schuru-tso. Revenu au Brahmapoutre, Sven Hedin poussa une pointe en territoire népalais, puis, regagnant le fleuve, il en remonta la vallée jusqu'au lac sacré de Manasa- rovar, ayant suivi depuis Chigatsé unitinéraire presque entièrement nouveau. Il ne se confond, en effet, que pour certaines parties avee ceux du pundit Naïn Singh (1865) et des majors Rawling et Ryder (1903 et 1904). Sven Hedin suivit, comme ce dernier, la principale branche du Brahmapoutre, mais de plus près, ce qui lui permit de faire un levé du fleuve beaucoup plus exact. L'explorateur exécuta dans le lac cinq lignes transversales de sondages comportant 129 stations; ces observations lui permettront d'établir une carte du lac avec courbes isobathes. La plus grande profondeur sondée a été 81m,8. La largeur du lac n’est pas infé- rieure à 25 kilomètres *. Sven Hedin élucida pendant son séjour dans cette région le problème des sources du Brahmapoutre et du Sutledj. D'après lui, l’origine du premier de ces grands cours d'eau serait non le Marioum-tchou, issu du Marioum-la, comme l'ont aflirmé les voyageurs anglais, mais le Koubi-tsanpo, sorti du grand massif glaciaire himalayen du Koubi-Tengri. En ce qui concerne le Sutled}, affluent de l'Indus, il sortirait non du Rakas- {al, comme on le pensait, mais du Tage-isanpo, tribu- taire du Manasarovar, avec celte particularité que les eaux du Tage-tsanpo passent souterrainement du Mana- sarovar à l’autre lac voisin, le Rakas-tal, situé à l’ouest à 12,20 en contrebas, de sorte que le Sutledj paraissait sortir de ce dernier. Après avoir fait le tour de la montagne sacrée de Kaiïlas, non à pied ou en mesurant le sol de son corps comme les pèlerins bouddhistes, mais à cheval (mauvais pèlerinage, lui dit-on), il alla reconnaitre la source principale de l’Indus, qui n’était pas connue des Euro- péens. Il s'avança jusqu'à 32° de Jat. N., puis rallia Gartok le 26 septembre 1907, achevant ainsi sa deuxième campagne. L'infatigable explorateur avait continué à accumuler, pendant cette nouvelle partie de son voyage, les notes, les dessins, les photographies, les collections de roches: il avait effectué encore de nombreux son- dages de lacs. La carte dressée depuis Chigatsé com- prend 301 feuilles, reposant sur 40 positions astrono- miques. Le D' Sven Hedin commenca bientôt une troisième campagne, qui ne fut pas moins fructueuse, ni d’ailleurs moins pénible que les précédentes*. Il n'était pas homme à se laisser rebuter par les obstacles; s'étant vu obligé, au début de sa deuxième campagne, de rétrograder vers le sud, il se proposa de reprendre son exploration du Tibet central. Mais il fallait dépister les Tibétains. Il partit de Leh, le # décembre 1907, avec une caravane entièrement nouvelle, et feignit de se diriger sur Kholan; mais, parvenu à deux jours de marche des passes du Karakorum, il tourna brusque- ment vers l’est et atteignit l'Aksai-chin. Le voyage fut rendu excessivement pénible par le froid et la neige. Sven Hedin eut les pieds à moitié gelés et les moutons de la caravane périrent tous. Le 15 janvier 1908, le thermomètre descendit à —39°,8 C. Parvenue au Tchemen:-{s0, lac signalé par Deasy et Rawling, la cara- vane trouva des nomades auxquels elle put acheter des animaux pour se ravitailler; il y avait soixante-quatre Jours qu'elle n'avait rencontré un être humain. Elle arriva ensuite au lac Lemtchang, ou Lenchung-{so de 1 The Geographical Journal, {article du major Ryder). ? La Géographie, 15 octobre 1908, p. 249 (article de M. Charles Rabot). * The Geographical Jourval, octobre 1908, p. 426 (d'après The Times, 17 et 18 septembre 1908). décembre 1908, p. 585 la carte du capilaine Deasy. Entre ces deux lacs, ül existe, à 3 et 4.000 mètres d'altitude, des gisements aurifères exploités en été seulement, comme tous ceux de cette région. A ce moment, Sven Hedin, pour éviter d'être découvert par les espions tibétains, fit disparaître tout ce qui pouvait révéler sa qualité d'Européen et se déguisa en berger ladakhi. Arrivé le 16 mars au Tong- iso, un peu au nord du 320 lat. N., il pénétra en pays absolument inconnu. Là se croisent les itinéraires de Naïn Singh, de Littledale et de Sven Hedin lui-même en 1901. C’est alors que le voyageur entreprit de tra- verser {out l’espace inexploré compris entre 320 et 30° de lat. N. Laissant à l’est la magnifique montagne du Shakangsham, il piqua droit au sud, franchit la passe de Ladang, et arriva dans la province de Bongba, où aucun Européen n'avait pénétré et dont le nom était presque inconnu. Il découvrit un grand lac, le Tchuni- so, et recueillit des informations sur un autre lac très étendu, le Tabia-tsakha, dont le sel, expédié dans l’est et le sud et jusque dans le Népal, paraît fournir au Gouvernement tibétain d'importants revenus. Continuant de crète en crête sa marche vers le sud, Sven Hedin arriva de nouveau au pied de la grande chaine qu'il avait appelée le Transhimalaya et il put constater la continuité de cet énorme relief jusque vers le 82° de long. Est Gr. Franchissant la chaine par le Samye-la, col situé à plus de 5.400 mètres d'altitude, il explora, sur son versant méridional, le cours supérieur du Tcharta-tsanpo, dont il avait reconnu, dans sa pré- cédente campagne, le confluent avec le Brahmapoutre. Surpris à ce moment par les Tibétains, Sven Hedin se découvrit à eux et ce fut seulement à son audacieuse ténacité et à son habileté diplomatique qu'il dut de pouvoir continuer son exploration de la province de Bongba. 11 franchit de nouveau la grande chaine et atteignit le Tedenam-tso, lac signalé par Naïn Singh en 1873, et dont le vrai nom est Terenam-ts0. Sven Hedin dit qu'il est long et étroit, rempli de sel, et d'une con- figuration très différente de celle que donnent les cartes. Puis, tournant vers l’ouest, Sven Hedin alla visiter le temple de Mending, sur le Soma Tsangpo, la plus grande de ces rivières libétaines qui n'ont aucun débouché sur la mer. Ayant franchi par la passe de Khala (dont les cartes font un pic) un contrefort du Transhimalaya, il gagna le Ghalaring-{s0, figuré comme renfermant un monastère dans une ile; en réalité, ce lac, dont le vrai nom est Ngnanglaring-tso, possède cinq iles dont la forme à été inexactement figurée. Enfin, traversant la grande chaine pour la dixième fois, l'explorateur atteignit le lac Manasarovar, le 26 Juillet 1908, et regagna Simla par des routes connues. Cette expédition a donné, au point de vue géogra- phique, des résultats de la plus haute importance, Tout le territoire compris entre les 30° et 32° degrés de lati- tude et les 82° et 88° degrés de longitude, marqué jusqu'ici en blanc sur les cartes, a été comblé d’une façon détaillée et exacte. Une centaine de positions astronomiques, fixées par le voyageur, servent de base à des cartes qui comptent plusieurs centaines de feuilles. Il a découvert une chaîne de montagnes, la plus puissante du globe peut-être, qu'il a appelée Transhimalaya, et dont l'extrémité connue ne pouvait révéler ni l’existence certaine ni l'énorme étendue. Il a découvert la véritable source du Brahmapoutre et du Sutledj, ainsi que la principale source de l’Indus. Il à exploré une grande province tibétaine, qui était demeurée inconnue, ia province de Bongba. La lon- gueur totale des itinéraires parcourus est d'environ 6.500 kilomètres. Enfin, l'explorateur à rapporté un nombre considérable de photographies, de dessins et d’aquarelles, d'importantes collections géologiques et des observations météorologiques. Gustave Regelsperger. 298 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 L'ÉRUPTION DE L’'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 PREMIÈRE PARTIE : LES PHÉNOMÈNES ÉRUPTIFS Le 1% mai dernier, des dépêches de Catane, publiées par les journaux de Paris, annoncaient une violente éruption de l'Etna. M. le Ministre de l'Ins- truction publique ayant bien voulu, sur la proposi- tion de M. Bayet, directeur de l'Enseignement supé- rieur, me confier une Mission, je partis sur-le- champ, franchissant d'une seule traite la longue distance qui sépare Paris du grand volcan sicilien*. Quand, après trois jours de voyage, j'arrivai à Zafferana, petite ville située à l'entrée du Val del Bove, je constatai que, comme dans la fable, la montagne avait accouché d’une souris... .… D'une souris de quelque importance, il est vrai, puisqu'une coulée de lave, longue de près de 3 kilomètres, est sortie de la partie la plus basse d'une déchirure du volcan, mesurant plus d’un kilomètre et demi de longueur; mais ce n'était point la grande éruption que rendait vraisemblable la statistique des cent cinquante dernières années. Celle-ci montre”, en effet, qu'à l'Etna l'intervalle moyen séparant deux éruptions est d'environ sept années et qu'une éruption est en général d'autant plus violente qu'elle a été précédée d'un plus long repos. Or, le dernier paroxysme effusif datait de 1892, c'est-à-dire de seize ans. La fréquentation des volcans est une bonne école morale : elle apprend à supporter allègrement quelques mécomptes et à savoir, au besoin, tirer parti de peu. Au risque de paraître fort optimiste, je n'hésite pas à considérer-que cette éruption, qui doit être qualifiée d’éruption avortée, a été fort intéressante et que c'est précisément son extrême brièveté et sa faible ampleur qui en ont fait l'inté- rèl spécial. Elle s’est effectuée, en effet, sur le plan le plus habituel des éruptions de l'Etna; on peut y reconnaître toutes les particularités essentielles qui caractérisent celles-ci, mais elles ont été as- sez réduites pour qu'il ait été possible d'analyser certains de leurs détails, malaisés à suivre dans les grands paroxysmes, au cours desquels les événe- ments se précipilent el superposent leurs effets. I. — LES DIVERS TYPES D'ÉRUPTIONS A L'ETNA. À l’occasion de la dernière éruption du Vésuve, j'ai esquissé dans cette Zevue* les principaux : J'ai reçu un accueil particulièrement aimable de mes amis les savants siciliens : MM. les Professeurs A. Riccd, zucca et Gaetano Platania. ? A. Rico : C. R:, t. CXLV, 1907, p. 289. * Numéros du 30 octobre et du 15 novembre 1906. caractères des éruptions de ce volcan et montré, em particulier, qu'on peut diviser celles-ci en deux grands groupes : 1° les éruptions exclusivement explosives; 2 les éruptions à la fois explosives et ellusives. Ces dernières peuvent se produire suivant des mécanismes divers, soit par une lésion du cône terminal (éruptions latérales), soit par une fissure plus ou moins éloignée de celui-ci (éruptions excentriques). Les mêmes types de manifestations ont été observés à l'Etna, mais ils ont joué un rôle difré- rent dans l'histoire du volcan. De même qu'au Vésuve, les éruptions exclusi- vement explosives y sont exceptionnelles ; on peut citer, cependant, au cours du xix' siècle, celles de 1805 et de juillet 1899. Mais l'histoire passée du volcan ne fournit aucun exemple de grand paroxysme de cet ordre, comparable à celui de l'an 79 au Vésuve. Le type normal à l'Etna appartient au second groupe; il est à la fois explosif et eflusif. Mais, tandis qu'au Vésuve ce sont les éruptions latérales qui sont les plus fréquentes et, par suite, les plus caractéristiques de son activité, celles-ci sont plu- tôt exceptionnelles dans le volcan que nous étu- dions. Ainsi, dans les vingt éruptions effusives en- registrées depuis le commencement du xx’ siècle, deux seulement peuvent être rapportées à ce type : celles de 1838 et de 1869. Les éruptions de 1831, 1842 et 1863 pourraient, à la rigueur, lui être ral- lachées ; mais il est plus logique de les considérer, avec M. Mercalli, plutôt comme le début des érup- tions plus importantes qui les ont suivies de près et qui ont été d’un genre différent. Par contre, alors qu'au Vésuve les éruptions excentriques n'ont été réalisées que trois fois (1760, 1792, 1861) depuis le début de la période historique, à l'Etna, au contraire, ce type peut être considéré comme caractérisant le mieux le mode d'activité du volcan, puisque, sur les vingt éruptions dont il vient d'être question, il a élé constaté quatorze fois, c'est-à-dire dans les trois quarts des cas (1802, 1809, 1811, 1819, 1832, 1843, 1852, 1865, 1874, 1879, 1883, 1886, 1892, 1908). En outre, à l'Etna, des phénomènes explosifs plus ou moins intenses se produisent toujours sur la fente excentrique ouverte par l'éruption : ils y édifient d'ordinaire des cônes adventifs, qui constituent l'un des traits les plus caractéristiques du volcan sicilien. alors qu'ils sont à peu près inconnus au A. LACROIX — L'ÉRUPTION Vésuve. Notons aussi que les épanchements de lave à l'Elna sont d'ordinaire fort rapides et que, même lorsque les éruptions se prolongent pendant quel- ques mois, comme cela eut lieu en 1669 et en 1852, par exemple, on n'assiste pas à ces émissions lentes de lave très visqueuse, telles que celles de 1891, de 1895, au Vésuve, qui produisent de grandes accumulalions rocheuses à proximité de leur point de sortie. Pour compléter celte comparaison entre les deux volcans, on peut dire enfin qu'en moyenne les érup- lions de l'Etna sont plus courtes, el moins fré- quentes que cel- les du Vésuve. Après l'étude détaillée que je venais de faire d'une éruption latérale au Vé- suve, une érup- tion excentrique EL} à l'Etna — et le LME récent paroxys- 4711 me à élé de ce À Lype — avait une impor- plus violentes CRATER de1838. NS 1 n 1 RS RE !/\ À HAS NY | st IN Ÿ M Frümento supino À grancle QE ! lance pour moi: c'est celle consi- déralion qui m'a conduit à partir en Sicile à la pre- mière nouvelle d’une éruption produite dans le Val del Bove. L'arrêt que des phéno- imènes explosifs au bout de quelques heures à rendu particulière- ment intéressantes les observations, en laissant la fente éruplive béante sur toute sa longueur, alors que la prolongation des explosions eût déterminé, comme d'ordinaire, son ensevelissement plus ou moins complet sous des matériaux projetés. brus- s Fig. 4: Il. — SUCCESSION DES PHÉNOMÈNES DE L'ÉRUPTION DE 1908. Le siège de l'éruplion récente ne se trouve pas sur le flanc méridional de l'Etna, dans la région où se sont produits les derniers paroxysmes effusifs, ceux de 1883, de 1886 et de 1892. L'éruption s'est produite un peu au-dessous de la bouche de 1819, dans les escarpements dominant le fond du Val del Bove (fig. 1), cette profonde vallée qui déchire le DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 — Le Val del Bove, d'après la carte d'E. Chaïx. La lave récente est figurée en noir. 299 flanc sud-est du volcan et qui est connue de tous les géologues, non seulement pour le rôle qu'elle à joué dans les discussions relatives à l'histoire de l'Eltna, mais encore dans celle, plus générale, de la théorie des cratères de soulèvement". Depuis la période historique, de nombreuses éruptions * ont déversé déjà leurs produits dans le Val del Bove : ce sont les suivantes : 1285, 1446, 1682, 1688, 1702, 1748, 1755, 1759, 1792, 1809, 1811, 1819, 1838, 1842, 1852, 1869. Voici quelle a été la succession des phénomènes récents, d'aprèslesrenseignements que j'ai recueillis moi-même sur place et d’après ceux qui m'ont été obligeam- ment fournis par MM. Riccd, Gae- tano Plalania’ el T. G. Bonney. Le 29 avril, à partir de 5 h. 20 du matin, les ins- truments séismi- ques de l'Obser- vatoire de Catane enregistrent de petits mouve- ments du sol, qui vont en s’accen- tuant jusqu'à 6 h. 22, heure à laquelle s'ouvre la fente excentri- /| que, aussitôt ja- lonnée par des FBoysemals del É bouches érupti- Ves.…A" 5 h.55, un dégagement de vapeurs noires avait été constaté au cratère central; pendant toute la journée, celui-ci et les bouches nouvelles (fig. 2) fournissent des projec- ! Voir l’article de F. Fouqué sur l'Etna dans : La Revue générale des Sciences en Sicile. Guide du savant et du tou- risle, Paris, 1901, et dans la Revue du 30 janvier 1901. > Les renseisnements sur les éruptions anciennes, au sujet desquelles je ne fournis pas de références hibliogra- phiques, ont été empruntés à l'ouvrage de SAnTORIUS VON WALTERSHAUSEN : Der Ætna, édité par von Lasaulx; on y trouve un exposé analytique de tous les travaux publiés sur ce volcan antérieurement à 1882. Voir aussi G. MERCALLI : 1 vulcani atlivi della terra, 1907. 3 Au cours de ma mission, j'ai envoyé aux Comptes ren- dus deux notes préliminaires (séances du 25 mai et du 4er juin, {. CXLNI, p. 1071 et 1134). Depuis lors, les notes suivantes ont été publiées par : M. A. Rrccù : L'eruzione etnea del 29 aprile 1908. Bull. Accad., Gicenia Sc. nat., Cata- nia, 1908, et par M. Grovanxr PLarania : Note sul eruzione etnea del aprile 1908. Revis{. geogr. ital., t. XV, 1908. 300 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 tions d'intensité allernante. Des cendres tombent sur le volcan et sont transportées jusqu'à Acireale, entre 8 h. 30 et 11 heures environ. Deux courants de lave s'échappent de l'extrémité méridionale de la fente et, après s'être réunis, vien- nent s'étaler sur les laves antézieures, qui couvrent le fond du Val del Bove; à minuit, ils étaient pres- que arrêtés. La figure 1 montre le parcours suivi par cette lave récente. Les contours ne doivent êlre consi- bouches récentes ont émis tout d'abord par inter- mittence d’imperceptibles bouffées de vapeurs, puis ont bientôt cessé complètement de fonctionner. L'arrêt de l'activité éruptive a été le signal de la reprise des tremblements de terre, qui se sont fait sentir sur le versant sud-est du volcan (Zaffe- rana, Bongiardo, Santa-Venerina) jusqu'à Aci- reale. Ce rapide exposé élant fait, Je vais passer en revue successivement chacun des phénomènes et Fig. 2. — L'Eina, vu des environs de Catane. Colonne vulcanienne s'élevant des bouches nouvelles. (Photographie faite le 29 avril et commmuniquée par M. de Lorenzo.) dérés que comme approximalifs, le temps dont j'ai disposé ne n'ayant pas permis de faire un levé précis. Le 30 avril, à 10 h. 10 du malin, l'extrémité de la zoulée n’avancait plus qu'avec une extrême lenteur; le lendemain, elle était virtuellement immobile. Pendant cette même journée du 30 avril, le cra- tère a continué à donner des projections avec une intensité intermittente; la dernière de quelque importance à eu lieu à 5 h. 20 du soir; quant aux bouches nouvelles, elles étaient à peine actives. Depuis lors, les seules traces d'activité observées ont été fournies par le cratère central, qui à fumoté ou donné, de Lemps en temps, des explosions de vapeurs ou de cendres plus ou moins violentes; les étudier leur rôle dans les éruptions de l'Etna, con- sidérées à un point de vue plus général. III. — LA FISSURE ÉRUPTIVE ET SON FONCTIONNEMENT. $ 1. — La fissure. 1. La situation de 1a fissure. — La position de la fissure de l’éruption est facile à définir, car sa por- tion principale est comprise entre deux accidents topographiques du flanc sud-est de l'Etna (fig. 1), la Serra Giannicola Grande, au sud, et la Serra Giannicola Piccola, au nord, célèbres par le grand nombre des dykes de laves anciennes qu'ils renfer- ment (fig. 5) et qui rappellent aux géologues fran- cais ceux du Val d'Enfer ou de la vallée de Chau- A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'’ETNA EN AVRIL-MAI 1908 301 defour au Mont-Dore. Cette fissure se prolonge, en outre, plus au nord. Sa direction moyenne esl Fig. 3. — La fissure et les bouches explosives du nord au sud. — On voit la Serra Giannicola Grande et le col du Castello auquel aboutit la fissure. (Photographie faite en descendant du cratère de 1819 dans le Val del Bove.) nord-nord-ouest; mais, après avoir traversé la Serra Giannicola Grande, à un petit col d'altitude d'environ 2.275 mètres, situé entre les rochers Guardiano et Castello, elle se redresse un peu dans metres. dépasse 2.500 extrémité seplentrionale Sa portion prin- cipale, com- prise entre les deux Serra,con- siste en une fente grossière- ment rectili- gne,réunissant une série d’ou- vertures (fig. 3 et 4), quiontété uniquement le siège d’explo- sions (bouches explosi ES il en existe au moins sept principales. Ce ARE AE sont de grandes Fig. 4. — La fissure et ses bouches explosives. (Photographiée du col de Castello, visibles sur la figure suivante.) Cette figure montre, par suite, la fissure vue du sud au nord. Les taches blanches sont dues aux sublimations des fumerolles chlo- rhydriques. cavités (fig. 5 et6), grossière- ment circulai- res ou ellipti- ques, rappelant celles produites par uneexplosion de dynamite; au moment de ma Fig. 5. — La Serra Giannicola Grande (vue du côte nord) et ses dykes; à gauche, extrémité des dykes du Teatro Piccolo. Les dykes les plus élevés sont ceux du Castello à droite; au premier plan se voient deux des bouches explosives. (Cette photographie et la suivante ont été communiquées par M. Frank A. Perret. la direetion du méridien. Sa longueur est supé- | visite, leur profondeur élaitencore de 15à20 mètres, rieure à un kilomètre et demi; l'altitude de son | mais elle à dû diminuer rapidement par éboule- 302 A. LACROIX — L ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 ment : leur diamètre, qui est variable, est en | petites ou grandes, de directions assez variées, moyenne deux ou trois fois plus grand. Le sol sur | lequel elles se sontouvertes étant très en pente et formé par les ma- lériaux de pro- Jeclion d'érup- lions antérieu- res, le bord mé- ridional de ces bouches est plus élevé que le sep- tentrional (fig.#). Ces sont en cavités partie comblées par les débris de leurs parois entaillées à pic; l'une d'el- les, de petite di- mension, située au sud du col du Castello, mon- trail encore, le 20 mai, sur une de ses parois, la neige à vif, sur hauleur. Cette bouche est environ 2 mètres de visible sur la figure 14 (à gauche). Au delà de la Serra Giannicola Piccola trouvent plus de bouches; la fissure était seule- ne se ment jalonnée par des sublimations de fumerolles. Fig. 6. — Les bouches explosives Jes plus rapprochées du-col du Castello. mais oscillant autour du méridien magnétique. Elles élaient donc grossièrement parallèles à la fissure éruptive. Plusieurs de ces fentes pou- vaient être sui- viessur quelques centaines de mêè- tres, à travers d'anciennes cou- lées ou des cou- ches de lapilli. L'une d'elles (fig. 1), située à envi- ron 2.840 mètres d'altitude, le cratère de 1819, était large- ment béante.Elle- avait par places 4 mètre de lar- geur et plusieurs mètres de pro— fondeur : elle se prolongeait sur les flancs de ce vieux cratère par une simple fêlure du sol. Au voisinage de cette fente principale s'en trouvaient d'autres plus petites, qui sont les seules. d'où s'échappaient quelques émissions gazeuses. (vapeur d'eau sans odeur). Ce champ de fractures, se: dans Fig. 7. — Fente béante dans le 1ond du cratère de 1819. 2. Production d'un champ de fractures acces- soires. — Celle fissure n'est pas la seule lésion du sol occasionnée par l’éruption. Au sud-est du cône lerminal, entre celui-ci el la fissure, nous avons constaté, en effet, un grand nombre de fentes, Fig. 8. — J'élures du sol enregistrees par les névés, à l'ouest du cratère de AS19. prolongeant sur le bord du Piano del Lago, mesurait environ 500 mètres de largeur, de l’est à l’ouest. 3. Influence des névés sur la mise en évidence des fractures. — Une particularité curieuse m'a per- A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 303 mis de serrer de plus près l’élude de ce système de fractures; celles-ci ne pouvaient être suivies que sur les surfaces à peu près planes ou peu in- clinées, car, sur les pen- tes raides formées par des cendres ou des sco- ries, elles avaient dis- paru sous l'influence de lassements ou de petits éboulements. Il n'en était plus de meme sur les larges né- vés, qui, en de nom- breux points, cachaient encore le sol, le 21 mai. Leur surface, à peu près régulière, à peine noir- cie par de la poussière volcanique, avait enregistré d'une facon frappante les moindres félures du sol sous-jacent. On pou- vail y constater que celles-ci n'étaient pas toutes rectilignes, que beaucoup d'entre elles étaient cur- Fig. 9. — Félures du sol enregistrées par 1es névés, au nord-ouest du cratère de 1819. fonte de la neige. sièrement parallèles entre elles, elles étaient réunies par de nombreusescassures transversales (fig.8et9). Par la netteté géomé- trique de ces lignes de fractures, ces névés m'ont rappelé les glaces fissurées desexpériences synthétiques de Dau- brée. Leur réseau éltail comparable à une mar- queterie, dont les pièces auraient joué les unes par rapport aux autres, en ne subissant que des rejets minimes, mais Ce- pendant très distincts. Le phénomène à dû ètre certainement plus saisissant encore aussi- tôt après l'ouverture des fentes, car, à partir de ce moment, les irrégularités de la surface des névés se sont progressivement nivelées, par suite de la Fig. 10. — La fissure (parallèle à la ligne de crête) réunissant la Serra Giannicola Piccola (à droite) el la Serra Gian nicola Grande (à gauche) et les deux branches de Ja coulée se réunissant au pied de cette dernière. — Au premier plan, vilignes, à grand rayon de courbure. Enfin, si les principales fissures possédaient des directions gros- lave de l'éruption de 1852. Il est fâcheux que mes observations aient été faites aussi tardivement ; en effet, les tremblements 304 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 de terre consécutifs à l’éruption étaient alors à leur maximum de violence, et, par suite, il n'est pas possible de savoir s'il faut attribuer à leur ac- tion la production de ce réseau de fissures ou Fig. A1. — La partie supérieure de la bouche eflusive. Sur la crète, dyke ancien du Castello. bien s'il ne date pas plutôt de l'ouverture de la fente éruptive principale. $ 2, — Les phénomènes produits aux bouches explosives. Les matériaux qui entourent les bouches explo- sives sont surtout conslitués par des débris du vieux sol, mélangés à une proportion relativement faible de magma neuf; les explosions qui les ont projetés ont donc élé surtout vulcaniennes, et cette conclusion est confirmée par la description que les témoins ont faite des nuages volcaniques qui sont sortis de cette région de la montagne (voir aussi la figure 2). Cependant, M. Riccd a signalé que le 29 avril, à 3 heures du soir, le gardien de l'Obser- vatoire, placé au pied de la Montagnola, à la Schiena dell Asino, a vu’ des jets de feu s'élever de cette fente; elle a donc été aussi le siège de projections stromboliennes. $3. — Les phénomènes produits à la bouche effusive. 1. Les coulées de lave. — La lave est sortie par deux groupes d'ouvertures siluées à l'extrémité mé- ridionale de la fente. Une première coulée, la moins importante, à longé le flane de la Serra Giannicola I a pu distinguer trois bouches; la supérieure, plus grande (c'est l’une de celles dont il est question ici), reje- tait des lapilli et de la cendre, el l'inférieure (c'est la bouche effusive, dont il sera question plus loin) émettait de la lave. Grande (fig. 10 à droite), passant près du Tealro Piccolo, ainsi appelé à cause de la disposition de ses beaux dykes verticaux”, laissant à gauche le plus petit des cônes de 1852, puis tombant sur une pente raide au pied de la Serra, où elle rejoint la seconde bouche (fig. 14 et 15). Elle n'est pas sortie directe- ment des bouches éruptives, mais d'ouvertures, actuellement obstruées, qui se trouvent au-dessous. Il me parait probable que celles-ci correspondent à de petites fissures secondaires, aboutissant à la fente principale et ouvertes dans les matériaux peu cohérents que traverse cette dernière. La coulée la plus importante a élé émise par l'extrémité inférieure de la fissure principale et sur le versant méridional de la même Serra (fig. 10, à gauche). Cette portion effusive de la fissure longe très sensiblement l'un des dykes anciens du Cas- tello. Rectiligne et encore béante, elle est orientée presque nord-sud.C'est un fossé, d’une centaine de mètres de longueur sur quinze à vingt de largeur fig. 11), dont les parois à pic sont entaillées dans les tufs anciens ou limitées par un dyke du Castello. La lave, à surface très scoriacée, remplit ce fossé jusqu à environ 2 mètres de ses bords. Ceux- ci sont recouverts par une sorte de bouclier de lave se déversant vers l'extérieur el jouant le rôle de moraine latérale (fig. 12); il est parcouru par des fissures parallèles aux bords, d’où s'échappaient encore, le 10 mai, des fumerolles très chaudes, qui en#endaient l'abord difficile. Au cours de l'éruption, la lave ne s'est done pas simplement écoulée vers le bas de la montagne Fig. 12. — La partie supéricure de la coulée méridionale. (Photographie faite presque du même point que la pré- cédente, mais en regardant le Val del Bove, sur le fond duquel se détache en noir {a lave récente.) par la fente largementouverte; elle a, en outre, bavé de part et d'autre sur ses lèvres. C'est gräce à cette particularité que s’est produit, à l’est de la fissure, 1 L'extrémité du Teatro Piccolo est visible sur le bord gauche de la figure 5. A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1968 305 un rudiment de coulée, qui est venu encercler la partie supérieure d'un lambeau de terrain ancien (contenant un dyke), qui forme aujourd'hui un ilot au milieu de la lave récente (fig. 13). Sur un des côtés de celui-ci à fonctionné aussi une petite Fig. 13. — La branche méridionale de la coulée descen- dant sur le flan de la Serra Giannicola Grande. — Elle est bordée à droite par une petite coulée boueuse. bouche, qui à fourni, sans projections", un petit courant de lave, bientôt réuni à la coulée prinei- pale. Il est vraisemblable que cet orilice accessoire a été alimenté par une félure du sol, transversale à la fissure principale et traversant souterrainement le dyke ancien, qui est à peu près parallèle à celle-ci. À la sortie de la fente, la coulée s'étale bientot, enveloppe encore un nouvel îlot de terrain ancien (fig. 13), puis, après être descendue sur une pente atlei- gnant 35 à 40°, arrive au pied de la Serra Giannicola Grande: elle est bordée par des mo- raines, dont les dimen- arrétée dans la direction du sud-sud-est, à envi- ron 350 mètres du pied de la Serra del Sulfizio (fig. 1%), La coulée mesure en moyenne une cinquantaine Fig. 14. — La lave récente apparaissant en noir dans le Val del Bove sur la lave de 1852 gauche), et de A819 (à droite). — Les crêtes du dernier plan sont celles de la Serra del Solfizio, au pied de laquelle se voit la lave de 1792. Les trainées blanches sont les portions planes nivelées par les eaux pluviales. de mètres de largeur et de deux à trois mètres d'épaisseur. Il est impossible de préciser quelle a été la vitesse du courant de lave, car les observations précises manquent à cet égard, C’est seulement à 3 heures du soir, le 29 avril, que le gardien de l’Obser- valoire, en arrivant à la Montagnola, a vu la lave couler.M.A.Ricco a cilé le récit d’un mu- letier qui a passé la nuit au voisinage de la coulée eta raconté qu'à la lave presque arrêtée, Si la minuit était sions diminuent en même temps que l'in- sortie de la lave a coïn- clinaison du sol. La cidé avec les premiers coulée, après s'être phénomènes explosifs, réunie à la branche l’'épanchement à duré Seplenttionale(Gg. 15). Fig 1, sono dee deux brepoles de à coulée au pet un maximum de dix- s'est répandue ensuite, s'avance dans le Val del Bove entre les coulées de 1852 huit heures. Quand ; : Te (à gauche) et celle de 1819 (à droite) ; la petite plaine D IEC au fond du Val del blanche située entre la lave de 1908 et celle de 1852 est M. A. Riccô est arriv Bove* sur une surface relativement plane, oc- cupée par les laves de 1819 et de 1852. Elle s'est 1 M. Gaetano Platania, qui observait d'Acireale avec une longue-vue, à comparé la sortie de cette lave au jet d'une fontaine. Ce savant a bien voulu m'accompagner dans mes excursions dans le Val del Bove. ? Le val del Bove fournit ainsi un nouvel exemple de la couverte par une cinérite de formation récente. avril à l’extré- le 30 mité sud-est de la cou- lée, celle-ci n'avaneait plus que d’une facon insen- consolidation d'une lave sur des pentes de grand angle, fait qui, on le sait, était nié d’une facon si énergique par Elie de Beaumont : ce nouveau cas est comparable à celui de la lave de 1852 au Salto della Giumenta (35 à 400) et à celui de la lave de 1865 (30 à 400). 306 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 sible. Elle était superficiellement obscure et de- venue extrêmement pâteuse, un bâton ne pou- vant que difficilement y être enfoncé et seulement au fond de ses fentes. Au pied de la Serra Gianni- cola, sa température était si élevée qu'on ne pou- vait s'en approcher à plus de 2 mètres. La lave récente, dont là composition minéralo- gique sera étudiée plus loin, appartient par ses caractères extérieurs au type fragmentaire scoriacé (fig. 12), sauf cependant vers l'extrémité de la cou- lée où, sur une petite étendue, on distingue une sur- face cordée, grossière, morcelée par le retrait. En ce point, la lave renferme d'énormes cavités bul- leuses à parois stalactiformes. Cette structure frag- mentaire, qui est celle de la lave du Vésuve du 8 avril 1906, s'explique bien par la rapidité de Fig. 16. — La branche septentrionale de la coulée arrivant a un ressSaut situé sur le prolongement du petit cône de 1852 (à droite) ef descendant sur une pente raide pour arriver au picd de la Serra Giannicola Grande. l’épanchement, alors que les portions cordées ré- sultent d'un éclusage produit au moment où la lave était sur le point de s'arrêter. 2. Phénomènes d'érosion dus à la lave. — La branche septentrionale de la coulée, avant de se réunir à la branche principale, est arrivée sur un talus à pente très raide (fig. 16). Elle y à déterminé des phénomènes d'érosion qui peuvent être paral- lélisés avec ceux qu'aurait déterminé dans les mêmes torrent boueux. Elle est tombée tout d'abord en cascade, la pente étant trop forte pour que la lave ait pu s'y accumuler; elle s'est amincie alors; mais, la pente diminuant bientôt, le courant de lave à entamé le sol, peu conditions un cohérent (fig. 17), s’y creusant ainsi un lit encaissé par des parois verticales, qui peuvent atteindre 2 mètres de hauteur. Ce lit se distingue de Ja fente effusive béante, décrite plus haut, par sa sinuo- silé, par l'absence sur ses bords de produits de projection el de moraines. Enfin, plus bas, la pente s'atténuant encore, ce lit devient de moins en moins profond; puis la lave S'élale en remblai à la surface du sol, et suivant la ligne de plus grande pente, change de direction pour aller se réunir à la coulée principale (fig. 16). Les nombreux blocs de matériaux anciens non transformés, qui se trouvent à sa surface, s’expli- quent facilement par les détails qui viennent d'être donnés. 3. Phénomènes explosifs sur la fente eflusive. — Fig. 17. — Phenomènes de creusement déterminés par la lave dans les matériaux meubles (branche septentrionale). — La fissure éruptive se voit en haut, presque parallèle au bord supérieur de la figure. La fente effusive a été le siège de violentes explo- sions stromboliennes; ce sont les jets de feu du récit du gardien de l'Observatoire. Elles ont donné des scories légères, très bulleuses, que l’on rencon- trait à la surface du sol dans tout 12 Val del Bove el qui formaient une couche continue au voisinage immédiat du centre éruptif. C'est leur trituration qui à fourni la majeure partie des cendres tombées à Acireale. L'action du vent soufflant vers le sud- ouest est très manifeste dans la distribution de ces scories légères, car sur les hauteurs qui dominent la fissure éruptive, du côté du nord et du nord- ouest, on n'en trouve pas trace, même à son voisi- nage presqu' immédiat (à l'endroit où se trouvent les deux personnages de la figure 3, par exemple). Les alentours de la fente [effusive, dans un rayon A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L’ETNA EN AVRIL-MAI 1908 907 d'environ 25 mèlres, sont couverts de débris du magma neuf, qui se présentent sous une forme différente, sous celle de grosses bombes, légères, à vastes cavités globulaires, de fragments contournés ou de morceaux informes. J'ai vu un bloc du vieux sol, sur lequel s'était aplati du magma tellement fluide qu'il n'avail constitué par sa ‘consolidation qu'une sorte d'enduit très adhérent. Il me parait vraisemblable que tous ces matériaux ont été rejetés par des projections peu violentes, résultant d'explo- sions Lawaiennes plutôt que stromboliennes. Cette opinion peut s'appuyer, non seulement sur leur structure et sur leur étroite localisation aux alen- tours immédiats de la fente, mais encore sur une observation de M. Gaetano Platania qui, regardant des environs d’Acireale, avec une longue vue, cette bouche de sortie, a vu, entre 8 et 9 heures du soir, la lave incandescente s’en élever sous forme de masses continues, simulant le jet d'une fontaine, alors que de loin en loin apparaissait une gerbe de débris incandescents. L'existence de phénomènes hawaïens sur une fente excentrique de l’Etna ne serait pas d’ailleurs un fait nouveau ; on peut trouver, en effet, la trace d’un fait du même genre dans la deseriplion de l'éruption de 1766 par Hamilton’; cet observa- teur sagace dit, en effet, qu'alors on put voir « la lave jaillir à grande hauteur en un jet liquide ». $ 4. — Comparaison avec les phénomènes habituels aux éruptions de l’Etna. 1. La fissure. — La production de la fissure en 1908 s’est effectuée d’après le mode habituel à l’'Etna. Les fissures éruptives s'y ouvrent d'ordinaire par le haut, là où se trouve le minimum de résistance du sol. La partie élevée de cette lésion est presque toujours exclusivement le siège d'explosions, alors que de la partie basse s'écoule la lave, Quelquefois, cependant, il se produit un épanchement en haut de la fente; mais il est d'ordinaire peu important et éphémère; c'est ainsi qu'en 1892 il s’est formé une petite coulée supérieure, alors que le grand épanchement s'est produit plus bas et plus tard. Par analogie, on peut supposer que si, en 1908, la pro- duction des deux branches de la coulée n’a pas été simultanée, la formation de la branche septentrio- nale a précédé celle de la branche méridionale; inais aucune observation directe ne permet de le démontrer. 2, La situation de la fissure. — Généralement, à l'Etna, les fentes sont radiales, c'est-à-dire que leur prolongement passe par le cratère; parfois même, «omme en 1879, elles traversent de part en part le * Citation faite par M. Mercalli (op. cit.) volcan. Il existe, cependant des exceptions à celte règle : en 1869, par exemple. ën 1908, elle n'a pas été rigoureusement radiale, mais elle s'écarte peu d'un rayon el, parmi les fis- sures d'importance secondaire, quelques-unes s'en rapprochent davantage. Peut-être est-ce sur le pro- longement de l’une d'elles que se trouve une bouche que nous avons vue fonctionner dans le cratère et dont il sera question plus loin. Je terminerai par quelques mots sur la notion des plans éruptifs de Ch. Sainte-Claire-Deville. Quand un grand paroxysme à déterminé une lésion grave dans le volcan, le point de moindre résistance ainsi produit a une grande tendance à redevenir le siège de réouvertures ultérieures. À ce point de vue, la direction nord-sud, passant par le cratère, à joué un rôle considérable dans l'histoire de l'Etna. C'est la direction de la fissure des éruptions de 1536- 1537, 1669, 1766-1780, 1879, 1883, 1886 et de 1892. Dans ces cas de réouverture, il n’y a jamais eu coïncidence exacte dans la position de la bouche d'épanchement de deux éruptions. C’est ainsi qu'en 1879 la bouche méridionale s'estouverte à 2.600 mè- tres d'altitude, la bouche de 1883 à 1.200 mètres, celle de 1886 à 1.400 mètres, et enfin celle de 1892 à 2.000 mètres. Il est vraisemblable qu'à la fin d’une éruption, la consolidation de la lave dans la fissure cicatrise fortement celle-ci et empêche ainsi en ce point précis la réouverture ultérieure du sol. La fente de 1908 ne coïncide avec celle d'aucune autre éruption; elle se trouve au-dessous de celle de 1819; sa direction est intermédiaire entre cetle dernière (nord 30° ouest) et celle de l'éruption de 1869 (nord 10° ouest). Si la prochaine éruption du volcan se produit dans la même région, il sera intéressant de rechercher les relations de sa fissure caractéristique avec celle de l’éruption qui vient de finir. 3. La terminaison habituelle des éruptions ex- centriques de lEtna. — Le plus généralement, dans les éruplions excentriques de l'Etna, les phé- nomènes explosifs sont plus intenses et ne cessent pas aussi rapidement aux bouches nouvelles qu'en 1908. Ils sont parfois extrêmement violents et pro- longés. Dans ce cas, la fente ne reste pas béante, comme celle que nous avons étudiée : les bouches explosives sont cachées bientôt sous des cônes, petits ou grands, formés par l’entassement régulier de débris du vieux sol et surtout des scories de lave nouvelle, rejetées par les explosions stromboliennes. Il existe plusieurs centaines de cônes de ce genre sur les flancs de l'Etna: ils donnent à ce paysage volcanique un cachet des plus caractéristiques. Ils sont particulièrement intéressants pour un JUS A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1998 géologue familier avec la Chaine des Puys. Celui- ci reconnait, en effet, parmi eux des particula- rités [vpiques de cônes auvergnats, dont les noms lui reviennent à la mémoire : cônes réguliers et autres égueulés; cônes isolés ou bien groupés en plus où moins grand nombre, souvent alignés en trainées rectilignes jalonnant une fissure; cônes emboités, etc. Les uns ont donné naissance à une coulée de lave, partie de leur base, alors que d’au- tres en sont dépourvus. Leurs dimensions ne sont pas moins variées, puisqu'elles s’échelonnent de- puis quelques mètres d'élévalion au-dessus du sol voisin jusqu à plus de 250 mètres. Pour l'intelligence des phénomènes dont notre moyenne [170 mètres de hauteur maximum et 10 mètres de hauteur minimum (cônes égueulés)|, ont été formés en cinq jours. Neuf jours ont suffi, en 1886, pour l'édification du Monte Gemmella- ro; il a cependant 140 mètres de hauteur et 500 mètres de plus grand diamètre de base. Enfin, trois ou quatre mois ont élé nécessaires pour la production, en 1669, du cône double des Monti Rossi, qui mesure 3 kilomètres de circonfé- rene? à la base et 251 mètres de hauteur”. La figure 18 montre les cônes alignés des Monti Silvestri, atteignant une hauteur de 100 mètres envi- ron et qui datent de la grande éruption de 1892; Je dois e2lte photographie à M, Bucca. Fig. Chaîne des Puys a été le siège, il est intéressant de remarquer que beaucoup de ses cônes ont des di- mensions comparables à celles des cônes adventifs de l'Etna édifiés par une éruption unique, de durée parfois fort courte et connue. Voici, à cet égard, quelques renseignements sommaires sur des érup- lions relalivement récentes : Le 28 août 1874, sur une fissure de 3 kilomètres en longueur, se sont édifiés 35 petits cônes", dont le plus grand mesure 50 mètres de hauteur: il a été construit en sept heures. Les deux cônes jumeaux (Monte Umberto-Mar- gherita) de l'éruption de 1879, ayant 250 à 300 mè- tres de diamètre de base et 90 mètres de hauteur ‘ Les cônes alignés sur une même fente se produisent tantôt à la partie supérieure de celle-ci (1874) et tantôt à sa base (1669), 18. — Les Monti Silvestri en activité, au cours de l'éruption de 1892. IV. — LE RÔLE DU CRATÈRE CENTRAL. Au cours de l’éruption, le cratère à été unique- ment le siège d'explosions vuleaniennes, ainsi qu'en témoignent à la fois les observations di- rectes et l'examen minéralogique des produits pro- jetés. Le tableau suivant résume les minutieuses obser- valions publiées par M. À. Riccd; il met en évi- dence un balancement entre l’activité explosive du ‘ Le plus grand des Monti Centenarii (éruption de 1852, dans le val del Bove) a 170 mètres de hauteur: le Monte Sartorio (éruption de 1865) en a 76; ce dernier a été formé par la réunion, à la fin de l'éruption, de plusieurs cônes plus petits, distincts au début du paroxysme. ? On sait que le cône de débris (trachyte) du Monte Nuovo (Champs Phlégréens), mesurant environ 2.500 mètres de cir- conférence de base et 134 mètres de hauteur, a été édifié (1538) par de violentes explosions, qui n'ont duré que qua- rante-huit heures. #,- _ A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L’ETNA EN AVRIL-MAI 1908 359 cralère central el celle des bouches explosives récentes : CRATÈRE CENTRAL BOUCHES NOUVELLES 29 Avril. 6h {», Explosions vulcaniennes ( orises. 6 22. Diminuent. Explosions vulcaniennes obscures. 1 30. » Augmentation d'intensité et d'opacité. ( 2 colonnes de vapeur, la supérieure plus claire, l'inférieure obscure. Faibles. Faibles. l 10 3 Presque 0. Une seule colonne de vapeur. 10 10. Grandesexplosions vulca- Colonne faible et légère. niennes. 10 23 Presque 0. Très grandes colonnes obscures (Max. explosif). 11088 Presque 0. Diminuent. 123% Activité médiocre, Diminuent. s'accentuan(. 12267 Va en croissant. Slationnaire 12 43. Beaucoup de vapeurs Beaucoup de vapeurs obscures. obscures. 13 16. Faibles. Grande activité. 15 15. Vapeurs blanches. Vapeurs s'éclaircissent. 16 30. » Vapeurs s'éclaircissent. 17 40. Vapeurs notables. » 20 30. (l .( A la nuit, explos. strom- 21 30 0 boliennes lumineuses. 30 Avril. 4h 30" Vapeurs grises. (l 540” Vapeurs médiocres. 0 HUE Vapeurs fortes. 0 66 Vapeurs fortes. 0 GMT (l Grandes colonnes 17 49. » obscures. 3 Mi. an Vapeurs assez fortes. 0 Plus de vingt jours après la cessation de tout phénomène important, il s'est produit au cratère central, pendant toute la journée du 20 mai, des explosions fort intéressantes, que j'ai pu étudier de près, car, ce jour-là, je faisais l'ascension de l'Elna, en compagnie de M. A. Riccd, qui avait bien voulu m'accompagner et m'offrir l'hospitalité à son Observaloire, situé, comme on le sait, à 2.942 mètres d'altitude, au pied du cône terminal et à 4 kilomètre seulement du cratère. Nous étions partis de Catane de bonne heure. Au moment où nous arrivions à Nicolosi, vers 7 h. 55 du matin, se produisit une violente explosion vul- canienne, donnant naissance à une haute colonue de vapeurs, chargées de cendres, lentement en- trainées par le vent vers le sud-ouest. Des explosions du même genre, diminuant peu à peu de violence et de hauteur, se sont répétées sans interruption jusqu'au commencement de la nuit. Nous avons pu les suivre pendant tout le cours de l'excursion, puis les étudier de près. Dès la sortie du cratère, elles se dirigeaient vers le flane sud-ouest du cône terminal, sans s'élever à plus de 200 mètres au-dessus de celui-ci (à- partir de # heures du soir). Elles roulaient, en développant REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. leurs volutes plutôt dans le sens horizontal que 99 dans le vertical (fig. 19 à 22); tantôt, dans leur marche, elles restaient comme suspendues à quel- ques mètres du sol, avant de toucher sa surface, tantôt elles roulaient sur celui-ci dès l'origine. Il s'en détachait de temps en temps de petites trombes, à mouvement giratoire, semblables à celles qui élaient si fréquentes au Vésuve en 1906; mais leur marche était plus rapide. Ces nuées, à volutes d’opacité variable, sortaient du eratère d'une facon continue, l'une succédant à l'autre, sans interruption. Leur marche sur la pente ne dépassait pas 4 à 5 mètres à la seconde. Arrivées à la base du cône terminal, elles s'accu- mulaient sur les pentes inférieures du volcan, sous forme d'un nuage diffus, immobile, qui laissait tomber lentement sa cendre. Ces nuées étaient essentiellement constituées par de la poussière extrèmement fine, accompagnée de vapeur d'eau. Malgré la netteté de leurs contours, quand on les observait à quelques centaines de mètres de distance, elles étaient bordées par une étroite zone de diffusion avec l'air extérieur. J'ai pu pénétrer dans celle-ci, sans éprouver autre chose que de la gêne respiratoire, due à la pous- sière fine en suspension. Celle-ci était tiède; elle formait un enduit boueux à la surface des névés, sans y déterminer de fusion importante. Je n'ai constaté aucune-odeur spéciale. La facon dont ces nuées roulaient sur les pentes de la montagne à évoqué dans mon esprit le sou- venir des nuées péléennes du type de Saint-Vin- cent; elles en différaient cependant par leur moindre opacité, par leur température peu élevée, par l'extrème lenteur de leur marche et par la con- üinuité de leur émission. Mais, dans les deux cas, la cause initiale me parait avoir été la même. Elle résidait dans une explosion produite au fond du cratère, explosion qui pouvait être violente, mais élait insuffisante, cependant, pour rejeter au loin dans l’espace les matériaux solides, expulsés en même temps que les produits gazeux. Elle ne pou- vait que les élever à une faible hauteur au-dessus des bords du cratère. À Saint-Vincent, la propor- lion des matériaux solides rejetés, et à haute tem- pérature, élait considérable; la nuée, possédant une grande masse, était entraînée par la pesanteur sur les pentes du volcan avec une vitesse très considé- rable, tandis qu'à l'Etna l’action de la pesanteur n'était que très minime, en raison de la faible pro- portion de matière solide en suspension, unique- ment constiluée par la poussière fine. La quantité de cendre déposée pendant plus de douze heures n'a guère dépassé un centimètre d'épaisseur. Elle a recouvert environ le tiers de la surface du cône terminal. 310 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 La température très peu élevée a dû jouer aussi un rôle dans le phénomène. Il semble que ce soit surtout sous l’action du vent dominant que ces sin- guliers nuages volcaniques se mettaient en marche sur les pentes de la montagne. La production d'explosions vulcaniennes dans le cratère central, alors que les bouches situées sur la fissure ont donné, non seulement des explosions de ce genre, mais encore des explosions strombo- liennes, est conforme à ce qui arrive dans la plu- part des explosions excentriques de l'Etna. Au cours de certaines éruplions, ces explosions vulea- dans la cavité cratériforme et rendent, par suite, impossible la production dans celui-ci d'explosions stromboliennes. On connaît cependant des cas (1865, 1883) dans lesquels l'ouverture de la fente excentrique à été assez tardive pour que le magma ait pu monter tout d'abord jusque dans le cratère. Le début de l'éruption a été alors, bien entendu, caractérisé par des explosions stromboliennes. A peine est-il besoin de dire que ces dernières sont fréquentes, comme au Vésuve, dans les éruptions terminales et dans les éruptions latérales produites au voisinage du sommet. En 1838, par exemple, Fig. 20. Fig. 22. Fig. 19 à 22, — Nué2 explosive, roulant sur les flancs du cratère. (Photographies faites en montant au cratère, el près de l Observatoire.) niennes centrales ont été formidables, et même, | trois en 1669, quelques-unes de celles-ci ont décapité le cône terminal et ont été accompagnées d'effondre- ments suffisants pour changer complètement la forme du sommet de la montagne. C'est là un point de comparaison avec les éruptions du Vésuve du type 1906, mais avec cette différence qu'à l'inverse de ce qui est arrivé dans celles-ci, ces grandes ex- plosions ont été intercalées au milieu de phases d'épanchement, au lieu de signaler la fin du pa- roxysme. On s'explique aisément la cause de ces phéno- menes centraux. L'ouverture de la fissure périphé- rique et la coulée latérale, qui en est la conséquence, ne permellent pas au magma de monter jusque petits cônes de projection strombolienne s'élant édifiés dans le cratère central, de l'un d'eux a débordé une coulée qui s'est épanchée tranquille- ment avec seulement de faibles explosions, lançant du magma incandescent. En 18/2, la lave a débordé au sud du cratère pendant que des explosions stromboliennes édifiaient dans l'intérieur de celui- ei un cône de débris à deux pointes. Revenons à l’éruption récente; le 21 mai, j'ai trouvé le cratère central dans un état fort différent de celui que j'avais constaté en septembre 1905. Il était à ce moment moins large el moins pro- fond; il avait environ 350 mètres de profondeur avec de 650 à 800 mètres environ de diamètre. Les parois et le fond, à forme irrégulière, étaient A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 ol couverts de sublimations aux vives couleurs, pro- | de vapeur à odeur sulfureuse. Chaque explosion duites par l’activité de nombreuses fumerolles. déterminait une légère aspiration de la vapeur reje- Le jour de notre ascension, il se lerminait en | Ltée par l'explosion précédente, Les nombreuses Le crat're de l'Etnaen juin 1108 (Photographie communiquée par M. Frank A. Perrel. l'ig. 23, entonnoir. Ses bords très fendillés s'éboulaient ! fissures des bords du cratère que nous avons dû sans cesse; ils étaient creusés de fissures, d'où s'é- | franchir dégageaient de la vapeur d’eau en grande chappait beau- abondance. Depuis lors, M. Frank A. Per- ret a fait plu- coup de vapeur d'eau, mélangée d'anhydridesul- fureux. Les pa- rois élaient tein- tées de gris par la cendre des sieurs ascen- sions du volcan et a pu photo- graphier une au- dernières explo- tre bouche si- sions. tuée dans le fond Aux deuxtiers environ de Ja paroi orientale, se trouvait une bouche, assez large, allongée méme «du cra- tère ; elle est vi- sible sur la fi- gure 2%, qui est la reproduction d'une photogra- dans la direc- phie que ce Sa- tion nord-ouest- vant a bien vou- sud-est et ou- Fig. 24. — Æxplosions vulcaniennes partant d’une bouche lu me commu- verte vers le située au fond du cratère. niquer ‘. nord-ouest. Elle dy nie élait en violente activité; la projection des cendres | ‘ M. Frank A. Perret à assisté le 12 août à 2 pe è : EN Are ACPE ous È . | paroxysme explosif du genre de ceux qui se sont répétés de la veille avait cessé, mais, à des intervalles | depuis lors. Dans un mémoire récent (Science, 28 août 1908), il à discuté les relations qui existent à ses yeux entre les lentes détonations, se produisaient avee émissi éruptions volcaniques et certaines coincidences d'ordre Ë atiOns, Se produisale nt avec émission | astronomique. rapprochés, des explosions, accompagnées de vio- A. LACROIX — L'ÉRUPTION V. — RELATION DES MATÉRIAUX ÉRUPTIFS ET DE LA NEIGE : PRÉNOMÈMES BOUEUX. Lors de l’éruption, les alentours de la fente et des parties hautes des coulées étaient couverts d'une couche épaisse de neige. Celle-ci n'a été fondue qu'au contact immédiat de la lave; je l'ai trouvée intacte à quelques mètres des coulées, el j'ai relaté plus haut que les parois d'une des bouches explosives étaient constituées par un névé, coupé comme à l'emporte-pièce. Dans la direction du sud-ouest et à une grande distance de la fente, la neige était saupoudrée de petits fragments scoriacés, très vitreux, qui, à quelques centaines de mètres de la bouche effusive, formaient une couche continue de plusieurs centi- mètres d'épaisseur. La figure 25 montre l'appa- Fig. 25. — Les névés au voisinage de la bouche effusive. — Ils sont couverts de scories : la neige est visible dans la trace des pas. Beaux dykes de lave ancienne. rence singulière de ces névés, qui ressemblaient à de larges taches d'encre, quand les scories étaient humidifiées par la fusion de la neige sous-jacente : l'empreinte de chaque pas faisait apparaitre l'écla- lante blancheur de celle-ci. La structure de ces scories permet d'assurer qu'elles ont été rejelées à l’état incandescent et päteux ; leur refroidissement superficiel a été assez rapide et leur conductibilité suffisamment faible pour qu'à leur contact la neige n'ait fondu que superficiellement. Les avalanches, qui se produi- saient eà et là, déterminaient la production d’un mélange stable de neige et de matériaux volca- niques. Là où l'action du soleil était suffisamment éner- gique, la fusion de la neige s'effectuait lentement; par dessiccalion superficielle, les surfaces exté- rieures se couvraient d'enduits cristallins, qui seront étudiés plus loin. Des faits analogues ont été signalés déjà à plu- * L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 sieurs reprises au cours d'éruptions antérieures de l'Etna. C'est ainsi qu'en 1828 Lyell a vu, près de l'Observatoire actuel, de la neige intacte sous une coulée récente de lave; trente ans plus tard, il Ja retrouvait dans le même état’. De même, M. H. de Saussure* a observé, en 1879, la neige intacte à travers les fissures d'une coulée encore brülante, qu'au scories incandescentes. Quand les matériaux à haute température sont en plus grande abondance, ils peuvent déterminer la fusion d'une quantité de neige assez grande pour produire des torrents boueux ; ce phénomène a été vu en particulier en 1879. Rien de tel n a été réalisé en 1908, au moins sur une grande échelle. J'ai seulement vu, sur le bord septentrional de la cou- lée descendant au sud de la Serra Giannicola Grande, une petite moraine de blocs accumulés par ce procédé ; elle est visible sur la figure 13. De plus, la petite plaine, située entre la coulée récente et celle de 1852, était couverte par une cinérite à éléments fins, produite par voie aqueuse; elle appa- rait en blanc sur la figure 15. En étudiant la description des anciennes érup- tions de l'Etna, je n'ai trouvé qu'un seul cas ainsi voisinage de bouches rejetant des de très violents torrents boueux, consécutifs à un paroxysme; ils datent de l’éruplion de 1755. Comme la nature de ce phénomène à donné lieu à de nombreuses discussions contradictoires, il me paraît intéressant de l'interpréter à la lumière des faits bien établis depuis quelques années au cours des éruptions des Antilles et du Vésuve. . Cette éruption est connue par la longue descrip- ion qu'en à donnée le chanoine Recupero”. Au début de l'année 1755, l'Elna est entré en éruption. Le 2 mars, un violent paroxysme explosif s'est produit au cratère central. Le sommet de la mon- tagne fut couvert par une prodigieuse quantité de” cendre; deux petites coulées de lave partirent du sommet, et l'une d'elles s'écoula dans le Val del Bove, vers le Monte Lepre [voir la carte (fig. 4)1. Quelques jours plus tard, une nouvelle bouche effu- sive s'ouvrit dans le bas du Val del Bove, près de la Rocca Musarra, fournissant une coulée qui s’ar- rêla près de la Rocca Capra. Des montagnards, en allant voir les progrès de cette lave, constatèrent les traces du phénomène qui nous occupe. Ils vi- rent, dit Recupero, que « l'Etna avait vomi une grande quantité d'eau bouillante, de pierres et de cendres, avec des coquilles marines, et que cette eau avait imprégné le sol de sel marin ». Recupero fit le voyage de l’Elna pour étudier 1 Principles of Geology, 1868 C.R.,t. LXXXIX, 1899, p. 33. 3 AGarino RecuPERo : Storia nalurale e generale dell Etna. Catania, 1815, t. LU, p. 87. w A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 313 cette merveille; il a donné une description saisis- sante de ses observations. Il constata l'existence d'une coulée boueuse, descendue du sommet du volean vers la Serra Giannicola. Au-dessous du Monte Lepre, elle se divisait en deux branches, dont l'une se dirigeait vers le Piano del Trifoglietto et l'autre vers la Rocca Musarra. La première avait nivelé la surface raboteuse et pleine de cavités du vieux sol’, fournissant des ramifications qui étaient venues mourir au pied du mont Zoccolaro, par suite de l'absorption de l’eau par le sol poreux; l'autre finissait dans la basse vallée de Calanna. La deuxième branche descendait entre le Monte Calanna et le Monte Finocchio, se divisant elle- mème en plusieurs branches, qui avaient déter- miné de violentes actions érosives dans le vieux sol des pentes. L'une et l'autre se terminaient par deux lacs de boue, au milieu des päturages silués au pied du Monte Cagliato. Recupero conclut que celle masse énorme de boue et de blocs de roches a été produite grâce à la pénétration de l’eau de mer dans une fissure du sol; parvenue jusqu'au foyer volcanique, elle aurait été rejetée ensuite par le cratère central. C'est la théorie si souvent émise pour expliquer les pré- tendues éruptions boueuses des volcans. Lyell à rejeté, avec juste raison, une telle interprétation. I] attribue le phénomène à la fusion de la neige récente et de la vieille glace (accumulées sur le volcan), sous l'influence des matériaux incandes- cents de l'éruption. Il paraît plus conforme aux observations récentes de faire intervenir, en outre, des pluies torrentielles, produites sur le sommet du volean, et ayant entrainé sur les pentes la masse mouvante formée par la neige en voie de fusion, mélangée aux matériaux brülants. Une tempéra- ture élevée a été observée dans les torrents boueux des Antilles; une fois desséchés, leurs produits étaient, eux aussi, recouverts par des efflores- cences salines. Lyell à cherché à donner une explication de la présence des coquilles marines signalées par Recu- pero; il a supposé que le courant boueux était des- cendu jusqu'à la mer, à Riposto, et qu'entre Milo et Giarre (300 à 400 mètres d'altitude), le torrent boveux avait pu entamer le Pliocène et lui arracher des fossiles. Cette hypothèse n'est pas légitime, car il résulte du texte et des planches de Recupero que le torrent boueux s'est arrêté dans la petite plaine située à l’est du Salto della Giumenta, c'est-à-dire dans la région exclusivement volcanique du Val del Bove. Je pense que, S'il faut attacher créance aux 1 I] faut noter qu'à cette époque le fond du Val del Bove n était pas, comme aujourd'hui, une région déserlique: ses päturages ont été anéantis par les grandes coulées de 1792, 18:1, 1819, 1852, etc. observations personnelles de Recupero, qui sont des plus explicites et faciles à interpréter, il est prudent de faire des réserves au sujet des racontars rapportés par lui. D'ailleurs, lui-même, après avoir parlé de ces coquilles marines, dit que beaucoup de voyageurs venaient voir ces merveilles, et il ajoute : « ed a far crescere di giorno in giorno 1 maravigliosi racconti ». Il me parait bien vraisem- blable que l'histoire des coquilles marines est un de ces enjolivements, ajoutés chaque jour par de nouveaux venus aux récits des visiteurs de la veille. VI. — LES TREMBLEMENTS DE TERRE. On a vu, par l'exposé des phénomènes de l'érup- tion, que celle-ci a débuté, le 29 avril, par de petites secousses du sol, enregistrées à Catane. Elles on été en crescendo jusqu'à 6 h. 22, au moment où d'abondantes projections, s'élevant du Val del Bove, ont annoncé l'ouverture de la fente éruptive. Elles ont cessé pendant les paroxysmes explosif et effusif ; de rares et petites secousses seulement ont été, en effet, constatées dans la journée du 30. Quelques jours plus tard, alors que le volcan élait dans un calme presque complet, les mouve- ments du sol ont recommencé à se faire sentir sur le flanc sud-sud-est du volcan, à Zafferana, Bon- giardo et jusqu'à Acireale. Le 7 mai, nous avons trouvé un très grand nombre des habitants de cette région campés sur les places et dans les rues des villages. De ce jour jusqu'au 10, nous avons subi à Zalferana des secousses répétées et assez violentes pour renverser des murs et déterminer des lésions graves dans les maisons et dans les églises de quelques villages voisins. Ces séismes se sont pro- longés pendant tout le mois de mai et ont même déterminé l'ouverture de quelques fissures du sol dans le voisinage d'Acireale. Ces tremblements de terre, consécutifs à l'érup- tion, ont été de beaucoup plus violents que les secousses prémoniloires. C'est ce qui s'observe toujours à l'Etna, l'un des volcans les plus propres à permettre l'étude des tremblements de terre nettement volcaniques, dans lesquels l'hypocentre, c'est-à-dire la région d’où part l'ébranlement, pa- rait être généralement peu profond et situé dans les flancs du volcan lui-même. En général, les tremblements de terre précur- seurs se font sentir sur une surface assez grande, s'étendant parfois sur toute la base de la montagne; mais ils se localisent bientôt dans la région où va se produire l'éruption. Exceptionnellement, les secousses y sont très violentes, et M. Fouqué a même signalé dans un cas de ce genre, en 1865, la production d’un léger bombement du sol, là où devait se faire peu après la déchirure du sol. A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 4908 Le plus souvent, comme en 1908, les secousses diminuent ou même disparaissent complètement quand l’éruption bat son plein. Cependant, on con- naît des exceptions à cette règle dans quelques grandes éruptions : c'est ainsi qu'en 1852, Gemmel- laro, en observation sur une arêle dominant le Val del Bove, pour étudier la coulée de lave, a constaté des oscillations du sol si violentes qu'elles don- paient l'impression du mal de mer; mais il semble que ce soit là un phénomène exceptionnel dans l'histoire de l’Etna. Enfin, tôt ou tard après la cessation complète des phénomènes explosifs, apparaissent les trem- blements de terre consécutifs, qui généralement sont les seuls désastreux *. Le séisme de la nuit du 18 au 19 juillet 1865, survenu plusieurs mois après la fin de l’éruption, et qui a renversé 150 maisons et tué 64 personnes à l'entrée du Val del Bove, est une illustration saisissante de cette proposition. L'effort nécessaire pour la production de la fis- sure éruptive, le libre dégagement des matériaux d'origine profonde (magma et gaz), puis, plus tard, des phénomènes de tassement, des tentatives in- fructueuses de réouverture de la fissure, obturée par la consolidation superficielle du magma, pa- raissent être les causes efficientes des diverses phases des phénomènes séismiques, tels que je viens de les esquisser brièvement. Ilest un ait remarqué depuis longtemps : c'est que, quelle que soit la région du volean où se pro- duisent les éruptions, le maximum des dommages dus aux tremblements de terre consécutifs est réalisé sur le flanc sud-est de l'Etna, dans le voisi- nage de Zafferana; M. Mercalli a rapproché, et 1 semble avec juste raison, cette particularité de la proximité du Val del Bove, en la liant à un trait de la structure interne du volcan. Il n'est pas sans intérêt de comparer encore à ce point de vue l'Elna et le Vésuve. Dans celui-ci, de violents tremblements de terre se'sont produits au cours de ses deux plus grands paroxysmes, l'érup- lion exclusivement explosive de 79 et l'éruption latérale de 1631. Depuis cette dernière, aucun séisme dévastateur ny a été constaté; les secousses sont généralement faibles, localisées, comme en 1908, aux flancs mêmes du volcan. 1 11 faut citer, comme exception, l'éruplion de 1669, au cours de laquelle une partie de Nicolosi a été détruite dès le début des phénomènes. Les éruptions excentriques (1760, 1794, 1861) font cependant un peu exception : des mouvements du sol plus intenses yontété ressentis et sur unesur- face plus étendue. Il semble donc que la production d'une fente excentrique soit, là aussi, accompagnée d'un maximum de séismicilé; on sait qu'en 1861 il s'est produit, sur les bords de la fente, un sou- lèvement du sol plus accentué encore que celui de l'Etna,en 1865, auquel j'ai fait allusion plus haut. La violence des phénomènes explosifs d'un volcan n'entraine pas nécessairement une grande séismicité. L'éruption de la Montagne Pelée en est un exemple; les tremblements de terre précurseurs y ont été extrêmement faibles; il n'y a eu pour ainsi dire aucun tremblement de terre conco- mitant. L'Observatoire du Morne des Cadets, situé au-dessus de Saint-Pierre, n'a enregistré que cinq petites secousses de 1903 à 1905, alors que le volcan était encore actif. Depuis que celui-ci est en repos, il s’est produit au contraire 94secousses : 64 en 1906 et 30 en 1907, dont une désastreuse en 1906; mais, comme la Martinique est un pays d'une séismicité élevée en dehors de tout phénomène volcanique extérieur, on n'est pas en droit, avec les observations con- cernant une seule période éruptive, de conclure que les phénomènes de 1906 et de 1907 sont à rattacher au volcanisme. Il me semble plus vrai- semblable qu'ils en sont indépendants; on sait, en effet, que le grand tremblement de terre de 1839, qui à détruit Fort-de-France, n'a été accompagné d'aucun réveil de la Montagne Pelée, et que l'érup= lion avortée de celle-ci, en 1852, n'a élé précédée, accompagnée, nisuivie d'aucun mouvement notable du sol”. Dans un deuxième article, nous éludierons les produits de l'éruption. A. Lacroix, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum national d'Histoire naturelle. 1 A. Lackoix : La Montagne Pelée après ses éruptions. Paris, Masson, 1908, p. 6. 2 Ces lignes étaient écrites quand s'est produit le trem= blement de terre tectonique qui a ruiné Messine et la côte occidentale de la Calabre (28 décembre 1908). Aucun des volcans du voisinage (Etna, Stromboli) n'a manifesté de recrudescence d'activité, ni avant, ni pendant, ni après le séisme. La vaste étendue de ses ravages est une fois de plus à opposer à l'étroite localisation des tremblements de terre nettement volcaniques. ÊMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS 315 LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LES PROGRÈS RÉCENTS DE LA THÉORIE DES FONCTIONS La Théorie des ensembles, qui fut d’abord la théorie des ensembles de points, est née de la Théorie des fonctions; sa créalion fut une nécessité imposée par l'étude de problèmes qui se posaient naturellement à l'esprit des analys Une fois créée, la Théorie des ensembles s'est développée d'une manière indépendante et a vécu d'une vie propre, s'éloignant parfois de ses origines. Puis, assez récemment, la Théorie des fonctions s’est développée beaucoup dans diverses directions, en ayant incorporé les notions de la Théorie des ensembles qui lui étaient nécessaires. On peut ainsi distinguer trois périodes dans les relations entre les deux théories : la Théorie des ensembles nait de l'étude des fonctions, se développe ensuite d'une vie propre, et finit par être absorbée, ses éléments utiles faisant partie intégrante de la Théorie des fonctions. Il n'est pas besoin de dire que cette distinction, comme toute distinclion tranchée dans le domaine des idées, est forcément un peu artificielle et ne saurait, en Lout cas, prétendre nous apporter une division rigoureuse en périodes suecessives, à dates bien déterminées"; mais elle nous fournira un cadre commode pour esquisser un chapitre des plus curieux de l'histoire récente des Mathématiques. Le moment semble, d'ailleurs, bien choisi pour tenter celle esquisse, car, d’un côté, la Théorie des ensemble préoccupe beaucoup les philosophes depuis plusieurs années * et, d'autre part, indépen- damment de nombreux Mémoires originaux, il est paru récemment plusieurs livres où la Théorie des ensembles et ses rapports avec la Théorie des fonctions sont éludiés d'une manière systématique; ces ouvrages nous guideront et c'est à eux que nous renverrons le lecteur désireux d'approfondir les détails techniques qui ne peuvent trouver place ici‘. es: L'Algèbre se distingue de l’Arithmétique en ce qu'elle étudie les propriétés des nombres, repré- ‘ Pour certains analystes, la seconde période dure encore ; pour d'autres, nous sommes depuis longtemps dans la troisième. ? Voir notamment la collection de la Revue de Métaphy- sique et de Morale. * Les plus récents de ces ouvrages sont : The Theory of functions of a real variable, par E. W. Hossox (Cambridge University Press, 1907), et Die Entwickelung der Lehre von den Punktmannigfaltigkeiten,zweiter Teil, par A. SCHOENFLIES sentés par des lettres, sans se préoccuper de leur valeur particulière; de même, la Théorie des fonc- tions se distingue de l'Analyse des fonctions parti- culières en ce qu’elle cherche à dégager les pro- priétés générales, sinon de toutes les fonctions concevables, du moins de classes étendues. L’Al- gèbre emploie une lettre x pour désigner un nombre quelconque, une variable; de même, la Théorie des fonctions emploie la notation /(x) pour désigner une fonction non précisée. Je n'ai pas à retracer ici l'histoire complète de cette notion générale de la fonction arbitraire 1(x); les re- cherches dont nous aurons à parler tout à l'heure ont beaucoup contribué à éclaircir et à préciser cette notion, tant dans le domaine des variables réelles que dans celui des variables complexes; mais, au moment où est née la Théorie des en- sembles, le principal effort des géomètres portait sur deux catégories de fonctions, assurément parti- culières, mais dont l'importance exceptionnelle justifie la faveur longtemps exclusive qui leur fut témoignée par les chercheurs : je veux parler des fonctions analytiques d'une variable complexe et des fonctions de variables réelles représentables en série trigonométrique. Ces deux catégories de fonc- (Teubner, Leipzig, 1908). Ce dernier ouvrage est le complément du Bericht publié sous le même titre il y a une dizaine d'années (Jahresbericht der Deutschen Mathematiker-Ve- reinigung, t. VII). Le fait seul que son étendue est compa- rable à celle de l'ouvrage primitif témoigne de la rapidité des progrès accomplis pendant cette courte période. Comme ouvrages français sur la question, on doit citer la traduction par M. Marotte d'une étude de M. G. Canror, le créateur de la Théorie des ensembles : Fondements de la Théorie des nombres transfinis (Hermann, 1903), certains chapitres du Cours d'Analyse de M. CamiLce Jorvan (Deu- xième édition, Gauthier-Villars, 1903), et la plupart des livres de la Collection de monographies sur la Théorie des fonctions (Gauthier-Villars), notamment : Leçons sur Ja Théorie des fonctions, par Emie BoreL (1898); Leçons sur l'intégration et la recherche des fonctions primitives, par Henri LesesGue (1904); Leçons sur les fonctions disconti- nues, par RENÉ Baike (1905); Leçons sur les fonctions de variables réelles et les développements en séries de poly- nomes, par Euie BoreL, avec des Notes par PAUL PAINLEvÉ et Henri Le8EsGuE (1905); Leçons sur les séries trigonomc- triques, par Henrt LeBesGuE (1906). Nous ne pouvons citer tous les Mémoires originaux publiés sur ces questions; nous nous contenterons de signaler ceux qui se rapporteront plus particulièrement aux points dont nous parlerons et, pour le surplus de la Biblio- graphie, nous renverrons aux ouvrages précédents. Je citerai cependant un long Mémoire en langue russe, que je recois pendant la correction des épreuves et qui me parait renfermer une partie historique assez détaillée et une bibliographie assez complète Structure et mesure des ensembles linéaires de points, par W. L. Nekrasow (Tomsk, 1901). 316 tions sont, d'ailleurs, reliées par des liens étroits et les progrès accomplis par l’une d'elles ont souvent eu leur répereussion sur l'autre. Pour ne pas allonger démesurément cet article, J'y laisserai entièrement de côté tout ce qui concerne les séries trigonométriques : par son importance, cette ques- tion mériterait une étude spéciale et j’aime mieux la passer entièrement sous silence que de l’effleurer trop brièvement. C'est donc seulement à propos de la Théorie des fonctions analytiques que je vais essayer de montrer comment la Théorie des en- sembles est née naturellement de la théorie des fonctions. C'est Cauchy qui a eu le premier la notion de la fonetion d'une variable complexe, concue dans sa généralité. Cette notion, d'abord confuse, s’est pré- cisée peu à peu au cours de ses travaux. Pour Cauchy, la propriété fondamentale qui définit une fonction de variable complexe est la continuité de la fonction et l'existence de la dérivée” unique. Cette propriété conduit à la possibilité de l'intégration le long d’un chemin déformable, la valeur de l'inté- grale ne changeant pas tant que le chemin ne tra- verse pas un point singulier, puis à l'établissement de la formule de Taylor. Telle est la marche qui est restée classique en France, sous l'influence notam- ment de l’enseignement d'Hermite. Weierstrass enrichit cependant la théorie d'une idée nouvelle, dont les conséquences sont d’une extrème impor- tance: c'est la notion nette du prolongement ana- lytique. Cette notion n'était pas complètement étrangère à Cauchy, mais celui-ci s'était borné à l'appliquer au calcul par cheminement des inté- grales des équations différentielles (et aux dérivées partielles). Partant d’une solution particulière d'une telle équation, définie par un développement en série, Cauchy savait suivre cette intégrale le long d’un chemin donné à l'avance, n'élant arrêté que si ce chemin contenait un point singulier”. Ceci est bien près de la conception de Weierstrass; mais il est cerlaines généralisations qui paraissent faciles après coup, et dont l'intuition n'appartient qu'aux plus grands génies. Ce que Cauchy faisait seulement pour une fonction définie par une équation difré- rentielle, Weierstrass le fit pour une série de Taylor arbitrairement donnée à priori : dès lors, c'était celle série, accompagnée de lLous ses prolon- gements, qui définissait la fonction analytique, et cette simple différence de point de vue conduisit à d'importantes découvertes. Nous n'avons à nous occuper ici que de celles qui se rattachent à dla ! Reprenant le point de vue de Cauchy, M. Goursat a démontré récemment, en toute rigueur, que ces deux condi- Uüons entrainent Ja continuité de la dérivée (Transactions of the American Mathematical Society, t. 1). ? Œuvres de Cauchy, S. 1, t. V, p. 360 et suiv. ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS Théorie des ensembles : c’est l'étude des points sin- guliers des fonctions analytiques générales de Weierstrass qui forca les analystes à considérer des ensembles très généraux et à en approfondir l'étude. Lorsqu'on donne, en effet, une série de Taylor dont le rayon de convergence est fini (ce que Weierstrass appelait un é/ément de fonction ana- lytique), on ne sait que peu de chose sur les singu- larités de la fonction”; toutes les hypothèses sont permises à ce sujet, de sorte que l'ensemble de ces singularités est un ensemble de points du plan à peu près quelconque; on a été ainsi naturellement conduit à classer et à étudier de tels ensembles. Une première propriété de l’ensemble des singula- rités résultait des définitions mêmes de Weierstrass ; si un point À est un point régulier de la fonction, il existe un cercle de centre À et dans lequel la fonction est représentée par une série convergente; il n’y a donc pas de points singuliers dans ce cercle; on exprime cette propriété en disant que l'ensemble des points réguliers est un ensemble ouvert : c'est un ensemble tel que chacun de ses points est centre d'un cercle dont lous les points appartiennent à l’ensemble. Comme conséquence, l’ensemble des points singuliers est un ensemble fermé”, c'est-à-dire que tout point À dans le voisi- nage duquel il y a une infinité de points de l’en- semble appartient lui-même à l'ensemble. Car, si un tel point A n'appartenait pas à l'ensemble des points singuliers, ce serait un point régulier et, d’après ce que nous venons de voir, il ne pourrait pas y avoir dans son voisinage une infinité de points singuliers, puisque tout point régulier est le centre d'un cerele dont tous les points sont réguliers. Les points À dans le voisinage desquels il y à une infinité de points d’un ensemble E sont appelés points-limites de E; leur ensemble s'appelle l'ensemble dérivé de E et est souvent désigné par E’. Un ensemble fermé peut ainsi être carac- térisé comme un ensemble qui contient tous les points de son dérivé; un ensemble est dit parfait lorsqu'il est identique à son dérivé. On voit comment l'étude de l'ensemble des points singuliers conduisait naturellement à poser des 1 Le problème de la détermination des singularités d'une fonction dont on connait le développement de Taylor est l’un des plus difficiles de l'Analyse et est encore bien peu avancé, malgré de brillantes et profondes recherches, parmi lesquelles on doit particulièrement citer celles de M. Hada- mard (voir son livre sur la série de Taylor, collection Scientia). ? Je suppose ici, pour simplifier, que la fonction consi- dérée n'admet pas d'espace lacunaire, c'est-à-dire que tout point du plan est régulier ou singulier; dans le cas général, il y a trois ensembles au lieu de deux : l'ensemble des points réguliers, l'ensemble des points lacunaires et l'en- semble des points singuliers ; les deux premiers sont ouverts et le troisième fermé. ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS 917 définitions relalives aux ensembles de points et à étudier les propriétés générales de ces nouveaux êtres analytiques. Mais c’est dans la recherche des représentalions analytiques des fonctions géné- rales que la Théorie des ensembles allait se révéler comme un oulil indispensable. Depuis longtemps, les géomètres savaient qu'une fraction rationnelle peut être décomposée en éléments simples, c’est- à-dire en une somme de termes n'admel comme point singulier qu'un seul des points singuliers de la fonction. Il était naturel de chercher à étendre une telle décomposition à une fonction quelconque, et à la représenter par une série dont chaque terme correspondrait à l’un des points singuliers. Mais la question se posait dès lors de savoir s'il était possible d'établir une cor- respondance univoque et réciproque entre les élé- ments d'un ensemble et les termes d'une série. Comme les termes d'une série peuvent être zumd- roles à l’aide des nombres entiers consécutifs, la question revenait à savoir s'il élait possible de numéroter les éléments d’un ensemble donné. La réponse à cette question a été donnée par M. Georg Cantor, qu'on doit regarder comme le fondateur de la Théorie des ensembles, à laquelle sa contribution fut et reste capitale : parmi les notions nouvelles qu'il a introduites, il n’en est peut-être pas de plus importante que celle d'ensemble dénombrable, ou ensemble dont les éléments peuvent être numé- rotés au moyen des nombres entiers successifs : 1,2, 3,... n,... Il est facile de donner des exemples d’ensembles dénombrables : les termes d’une série simple constituent un tel ensemble et en ont été le premier exemple; il en est de même de l’ensemble des termes d’une série multiple, et aussi de l’en- semble des termes d'un ensemble dénombrable de séries. Ces propositions de M. Georg Cantor sont rapidement devenues classiques et sont maintenant d'un usage courant : ce n’est pas une raison pour en méconnaitre l'importance, ni pour admirer moins l'effort d'abstraction qui était nécessaire pour arriver à celle notion générale d'ensemble dénombrable. Il est moins aisé de définir des ensembles qui ne soient pas dénombrables; à vrai dire, si l’on reste sur le terrain purement arithmétique, la possibi- lité d'une telle définition dépend du sens qu'on attache à ce terme définition; c’est là un point sur lequel nous reviendrons tout à l'heure; mais la Géométrie nous fournit de nombreux exemples d'ensembles non dénombrables. Ces exemples, malgré leur variété, se rattachent tous à un même concept géométrique : le concept du continu. Nous accepterons pour l'instant ce concept comme pri- mitif, sans en discuter le fondement métaphy- sique : nous admettrons que l'on sait ce que c'est dont chacun que l’ensemble des points d'un segment de droite, ou que l’ensemble des points intérieurs à un carré, ou intérieurs à un cube, ete. Ces divers ensembles ne sont pas dénombrables, comme il est aisé de le démontrer par ur raisonnement dont le type est devenu classique. En d'autres termes, il n'est pas possible d'établir une correspondance univoque el réciproque entre l'ensemble des points d'un seg- ment de droite el successifs. M. Georg Cantor exprime ce fait en l’ensemble des nombres entiers disant que deux tels ensembles n'ont pas méme | puissance. Au contraire, deux ensembles dénom- brables ont méme puissance; de même, fait plus singulier, l'ensemble des points d'un segment de puissance que points intérieurs à un Carré : blir entre ces ensembles une correspondance uni- voque et réciproque, c’est-à-dire telle qu'à tout point de la droite corresponde un point et un seul de la surface du carré et qu'à tout point de la surface du carré corresponde un point et un seul de la droite. Ce résultat est l'un des plus curieux qu’ait obtenus M. Georg Cantor; il lui permit de droite à même l'ensemble des il est possible d'éta- définir la puissance du continu : c'est la puis- sance commune de l'ensemble des points d'un seg- ment de droite, ou d’un carré, ou d'un cube, ou d'un espace à 2 dimensions. On à dit parfois, et non loujours sans ironie, qu'une théorie est générale lorsqu'elle a au moins deux applications. C’est le cas de la théorie de la puissance : les seules applications qui en aient été effectivement faites sont celles que nous venons de mentionner brables, et la puissance du continu; se borne- rait-elle à cela, la théorie de la puissance n'en oceuperait pas moins une place importante en Mathématiques; nous indiquerons brièvement tout à l'heure quels développements celle lhéorie à recus, développements jusqu'ici restés sans appli- cations, pour des raisons peut-être essentielles à la puissance des ensembles dénom- leur nature; mais, auparavant, il convient d'in- sister sur cette notion de puissance,en se bornant aux deux exemples fondamentaux que nous venons d'indiquer. : La notion de puissance généralise celle de nombre cardinal; deux collections finies d'objets inème nombre lorsqu'on peut coupler les objets de ces collections, de manière que chaque couple renferme un objet de chacune | des deux collections"; lorsqu'on a deux ensembles ont le cardinal 1 Deux collections finies ont le même nombre ordinal lorsqu'on peut définir l'ordre relatif de deux objets quel- conques de chacune d'elles et établir ensuite une corres- pondance entre les deux collections de manière qu'à deux objets de l’une d'elles correspondent deux objets de l’autre, rangés dans le mème ordre. Pour les collections finies, le nombre ordinal se confond avec le nombre cardinal: il n'en 318 ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS infinis dont les éléments peuvent ainsi être couplés deux à deux, ils ont même puissance; on peut dire aussi qu'ils ont même nombre cardinal, mais il faut prendre garde que ces nombres cardinaux des ensembles infinis ont des propriétés fort différentes de celles des nombres cardinaux ordinaires. Soit, par exemple, x le nombre cardinal de l'ensemble E des nombres entiers"; il est clair que c'est aussi le nombre cardinal de l'ensemble P des nombres pairs, car à chaque entier on peut coupler le nombre pair qui est son double; on réalise ainsi la correspondance univoque et réciproque suivante entre les ensembles E et P : ECTS RCE ROSE À 4 8, Puma CE MG ANS 16, : D, 6, "10; 14, Au-dessous de chaque élément de E, nous avons placé l'élément correspondant de P. De même, l'ensemble [ des nombres impairs a même nombre cardinal & que l'ensemble E, car on peut réaliser la correspondance suivante : 5 Re or FE BE OU 00 Sr 3 Lo 8h pute as MEME RO Les ensembles E, P, I ont donc tous trois comme nombre cardinal; mais l'ensemble E est formé par la réunion de P et de I; c'est la somme de ces ensembles, d'après la définition arithmétique élé- mentaire de l'addition; on est donc conduit à écrire la relation : P+I—E, relation qui entraîne, en remplacant chaque en- semble par son nombre cardinal, la formule singu- lière : a+ a — «. On démontrerait très aisément, par des procédés analogues, qu'un polynome quelconque en «&, à coefficients entiers, est égal à x; on voit combien les règles du calcul des nombres cardinaux infinis (ou transfinis, comme on dit aussi) diffèrent des règles du calcul des nombres ordinaires. Mais nous reviendrons sur ce point tout à l'heure ; je voudrais terminer celte première partie de mon étude en indiquant comment les premiers principes de la Théorie des ensembles ont rendu à la Théorie des fonctions les services pour lesquels ils avaient été créés. Une classification put être faite des fonctions analytiques uniformes suivant que l’ensemble de leurs points singuliers est dénombrable, forme une ou plusieurs lignes, ou ést un ensemble parfait ne est pas de même pour les ensembles infinis; nous ne pour- rons parler ici des nombres ordinaux infinis. " On désigne souvent ce nombre par la lettre hébraïque 1leph avec l'indice zéro; cette notation se raltache à une théorie des alephs successifs, dont nous dirons un mot tout à l'heure, formant nulle part une ligne’. Examinons succes- sivement ces trois cas : 1° Si l’ensemble des points singuliers est dénom- brable, il est possible de former une série dont chaque terme correspond à l’un de ces points; le problème se pose naturellement dès lors de repré- senter la fonction par une telle série; ce problème a été complètement résolu par M. Mittag-Leffler, dans un Mémoire célèbre (Acta Mathematica, t. W); 2° Si les singularités forment des lignes, on peut trouver une représentation analytique de la fonc- tion par des séries dont les points singuliers sont choisis à peu près arbitrairement sur ces lignes. De tels développements, dont M. Painlevé a donné de nombreux et très remarquables modèles, sont entièrement satisfaisants si l'on a en vue le caleul de la fonction, c'est-à-dire la solution numérique de problèmes de Mécanique, par exemple. L'arbitraire de ces développements est pratique- ment avantageux, mais est un défaut théorique ; on ne voit aucune raison pour mettre en évidence tels points singuliers plutôt que tels autres. Dans certains cas, il a été possible de mettre en évidence ceux des points singuliers, en infinité dénom- brable, qui doivent être considérés comme les vrais points singuliers, les autres n'étant singuliers que par suite du voisinage de ceux-ci. Mais ces ques- tions sont loin d'être entièrement élucidées et appelleraient des recherches nouvelles”. Signalons que leur étude a conduit à d'importants résultats sur la mesure des ensembles, résultats dont nous aurons à indiquer les conséquences ; : 3° Le cas où les points singuliers constituent un ensemble parfait ne formant nulle part une ligne est le moins connu. La construction de ces en- sembles parfaits est un des beaux résultats obtenus par M. Georg Cantor dans la Théorie des ensembles ; la méthode la plus simple pour réaliser celte cons- truction est la suivante : un segment de droite étant donné, divisons-le en trois parties égales et supprimons le segment du milieu; faisons la même : construction sur chacun des segments restants, puis sur chacun des quatre segments restants après celte seconde opération, puis sur chacun des huit segments restants après la troisième opération, et ‘ Je n'insisterai pas ci sur la notion de ligne. Bien évi- demment, une fonction peut avoir des singularités des trois types qui précèdent: elle est alors la somme de fonctions n'ayant de singularités que de l’un des types. Il ne peut pas y avoir d'autres cas, d'après un théorème fondamental de la Théorie des ensembles, démontré par M. Bendixson : Tout ensemble fermé est la somme d'un ensemble parfait et d'un ensemble dénombrable. Ce théorème s'applique à l'ensemble des singularités d'une fonction analytique, que nous savons être fermé. ? Voir Eure Borez : Sur quelques points de la Théorie des fonctions (Annales de l'Ecole Normale, 1895), et Mé- moire sur les séries de polynomes et de fractions ration- nelles (Acta Mathematica, 1. XXIV). ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS 319 ainsi de suite indéfiniment. Les points qui n'ont été supprimés dans aucune de ces opérations successives constituent un ensemble parfait ne formant nulle part une ligne; les segments sup- primés ont élé appelés par M. Baire segments adja- cents à cel ensemble. On peut en donner la défini- Lion arithmétique suivante : si l’on suppose que les extrémités du segment primilif ont pour abscisses 0 et 1, les points de l’ensemble sont ceux qui peuvent être représentés, dans le système de numé- ration de base 3, par une « fraction décimale’ » indéfinie, dont la partie entière est 0, les chiffres qui suivent la virgule étant 0 ou 2, à l'exclusion de 1. Des exemples de fonctions possédant de tels ensembles de singularités ont été rencontrés par M. Henri Poincaré dans ses travaux sur les fonc- tions fuchsiennes, mais bien des points restent à élucider dans la théorie générale des fonctions caractérisées seulement par cet ensemble de sin- gularités ?. Je bornerai là ce rapide exposé de la première période, où la Théorie des ensembles se borne à résoudre les problèmes posés par la Théorie des fonctions: l'étude détaillée des progrès réalisés depuis par ces divers problèmes nous entrainerail en dehors de notre cadre. IT Les principaux des résultats acquis dans la Théorie des ensembles, et dont les applications à la Théorie des fonctions avaient été immédiates, peuvent être classés en trois catégories prinei- pales : 1° Résultats où intervient la Géométrie de situa- tion, relatifs aux propriétés des ensembles de points qui ne sont pas modifiées par une transfor- mation continue (en particulier, propriétés des points-limites, propriétés relatives aux dimensions des ensembles continus : lignes ou surfaces, etc.); 2° Résultats de Géométrie métrique, relatifs à la théorie de la « mesure » des ensembles. La défi- nilion de la mesure à été donnée par G. Cantor pour les ensembles fermés; son extension pure et simple aux ensembles non fermés conduisait . à des résultats non satisfaisants; on à universelle- ment adopté aujourd'hui la définition à laquelle j'ai été conduit par l'étude de problèmes particu- 1 L'emploi de l'adjectif décimal ne doit prèter à aucune confus on; le terme « fraction décimale » est pris par opposition à « fraction ordinaire »: il s'agit de fractions qui, dans le système de base trois, sont analogues aux fractions décimales dans le système de base 10. ? Voir la Thèse de M. Zoretti et la Note de M. Paul Pain- levé dans les Leçons sur les fonctions définies par les équations différentielles du premier ordre, par Pierre Bou- troux (Collection de Monographies sur la théorie fonctions. Gauthier-Villars, 1908). des liers et que M. Henri Lebesgue a systématisée" ; 3° Résultats de nature arithmélique; notions de la puissance et de l’ordre; nombres cardinaux el ordinaux. Examinons successivement ces trois catégories de questions : 1° Les recherches sur les ensembles au point de vue de la Géométrie de situation ont été nombreuses et ont conduit à des résultats importants. La plu- part d’entre elles sont malheureusement trop spé- ciales pour qu'il soit possible de les résumer sans un appareil analytique qui ne peut trouver place ici. Nous indiquerons dans le troisième paragraphe les résultats particulièrement intéressants au point de vue géométrique; contentons-nous de signaler ici la démonstration rigoureuse de l'impossibilité d'établir une correspondance bi-continue entre deux domaines d'un nombre différant de dimen- sions, c’est-à-dire faisant correspondre à un point de l’un quelconque de ces domaines un point unique de l'autre, de telle manière qu'à deux points indéfiniment voisins correspondent toujours deux points indéfiniment voisins”; comme nous l'avons dit plus haut, M. Georg Cantor à prouvé que, sans cette dernière condition, la correspondance peut ètre élablie. On devrait aussi rattacher à cet ordre de ques- tions des recherches très profondes de M. René Baire, ayant précisément pour but de dégager la notion du point limite des considérations géomé- triques qui, si elles sont quelquefois une aide, sont parfois aussi une gêne. Par la considération de suites d’entiers, M. Baire définit des éléments ana- lytiques dont les propriétés sont plus simples que celles des points d'un espace géométrique quel- conque. L'ensemble de ces éléments à pu être appelé par lui l'espace à zéro dimension. Cet effort d'abstraction considérable promet d’êlre récompensé par une grande simplification dans l'étude des propriétés des fonctions de telles variables. Mais je dois me borner à ces indica- tions sur ces travaux, car la publication n’en esl pas achevée”; ils joueront un rôle fondamental dans le développement ultérieur de ces théories; % La théorie de la mesure des ensembles a été, comme je l'ai indiqué, rendue nécessaire par des problèmes posés par la Théorie des fonctions. Pour mesurer un ensemble du dehors, comme lont fail M. Georg Cantor et, après lui, M. Camille Jordan, on divise le segment de droite qui le contient en 4 Voir, dans mes Leçons sur la Théorie des fonctions, le chapitre sur les ensembles mesurables et les Leçons sur l'intégration de M. Lebesgue. 2 Voir notamment Baire: Bulletin des Sciences Mathc- matiques, avril 1907. # Voir Acta Mathematica, t. XXXI et suivants. 320 ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS un nombre indéfiniment croissant d'intervalles, et on classe ces intervalles en trois catégories, suivant que tous leurs points, ou quelques-uns d’entre eux, ou aucun d'eux n'appartiennent à l'ensemble. La limite de la somme des intervalles de la première catégorie est la mesure intérieure; la limite de la somme des intervalles des deux premières catégo- ries est la mesure extérieure; ensemble est me- surable au sens de M. Jordan, ou mesurable J, si ces deux mesures sont égales. Mais ces définitions ont l'inconvénient de classer parmi les ensembles non mesurables un très grand nombre d'ensembles très simples, dont on peut délinir simplement la mesure lorsqu'on les étudie du dedans et non plus du dehors, je veux dire lorsqu'on considère des intervalles choisis précisément de manière à en- fermer à leur intérieur les éléments de l'ensemble. À ce point de vue, la théorie de la mesure des en- sembles exige seulement que, ayant défini la lon- gueur d’un intervalle comme sa mesure, on fasse les conventions suivantes, évidemment nécessaires : la somme d'un nombre limite ou illimité sembles sans partie commune à pour mesure la d’en- somme de leurs mesures; la différence de deux ensembles (l'ensemble d'où l'on retranche conte- nant, par hypothèse, tous les éléments de l’en- semble souslrait) a pour mesure la différence de leurs mesures. A cette théorie de la mesure, on peut rattacher là théorie nouvelle de l'intégration due à M. Henri Lebesgue. Nous y reviendrons tout à l'heure, mais je tiens à me hâter de dire que ce n'est point là une de ces généralisations faciles, conséquence néces- saire des travaux antérieurs el qui doivent néces- être trouvées par quelqu'un. Cette théorie de l'intégration est une découverte capitale, dont l'importance dépasse de beaucoup la théorie de la mesure des ensembles; c'est un instrument analytique nouveau, mis à la disposition des géo- mètres par M. Lebesgue; nous indiquerons plus loin quelques-uns des progrès qui ont pu être réalisés jusqu'ici grâce à cet instrument; il y a tout lieu de croire que leur nombre et leur impor- tance ne cesseront de croître, mais on peut dès à présent considérer cette découverte de M. Lebesgue sairement comme le plus bel exemple de progrès importants réalisés dans la Théorie des fonctions et qui ne l’au- raient pas été, du moins en ce moment et sous cette forme, si la Théorie des ensembles n'avait jamais élé cultivée pour elle-même. Cet exemple suffirait à justifier le temps et les efforts consacrés à cette élude ; 3° Les résultats oblenus dans l'étude arithmé- tique des ensembles, c'est-à-dire dans la « numé- transfinis, cardinaux ou ration » des nombres ordinaux, sont loin d'être aussi encourageants, à mon avis du moins. Ce n'est pas que ces travaux ne soient pas nombreux, ni qu'ils soient dépourvus d'intérêt; lorsque l’on a surmonté les premières difficultés de ce genre d'études (dont on peut dire qu'il est aussi abstrait par rapport aux autres branches des Mathématiques que celles-ci le sont par rapport aux sciences expérimentales), on est même intéressé très vivement par le calcul de ces singuliers symboles. Mais, d'autre part, on ne peut pas s'empêcher d’être frappé du fait que cet en- semble considérable des travaux s'isole de plus en plus du reste des Mathématiques, et n'a donné aucun résullat nouveau dans la Théorie des fonc- lions. Et l’on est ainsi conduit à se demander si celle stérilité n'a pas une raison profonde et si cette magnifique floraison logique n'est pas viciée par quelque défaut secret. Elle est vraie, si l'on prend comme définition de la vérité abstraite le non-contradictoire, car il semble bien que l'on puisse, au point de vue purement abstrait, échapper à la contradiction; mais le peut-on au point de vue concret? Il peut paraitre singulier de parler d’un tel point de vue en Mathématiques; mais les êtres analytiques, pour être créés par nous, n'en sont pas moins des réalités concrètes, exprimables seu- lement au moyen de mots et de signes; c'est l'étude de ce monde analytique que se propose le mathé- maticien et sa méthode la plus sûre est, comme le disait volontiers Hermite, l'observation attentive des faits. C'est sur ce terrain que je me suis placé récemment pour discuter une objection qui a élé formulée ici même’; je ne reviendrai pas iei sur cette discussion et me contenterai d'en indiquer la conclusion : La notion d'ensemble non dénombrable est une notion purement négalive, en ce sens qu'on ne peut pas donner d'exemple effectif d'un ensemble qui ne soit pas dénombrable. Mais on doit distin- guer entre les ensembles efeclivement énumé- rables, c'est-à-dire tels que l’on puisse, au moyen de conventions précises, fixer sans ambiguïté le rang de chaque élément, et les ensembles non elTectivement énumérables, bien que dénombrables, pour lesquels une inlinité de conventions seraient nécessaires pour fixer la correspondance entre les éléments de l'ensemble et la suite des nombres entiers. Ces réserves faites, voici quelques indications sur la théorie de la numération des nombres transfi- nis. lorsqu'une opération, ayant été répélée un nom- 1 J. Ricuano : Revue générale des Sciences, t. XVI, 1905, et Acta Mathematica, &. XXX (1906); pour d'autres paradoxes analogues et leur discussion, voir le livre de M. Schoenflies cité plus haut, p. 26 et suiv., et le livre de M. E. W. IHobson. J'ai exposé mon point de vue dans une Note qui vient de paraitre dans les Annales de l'Ecole Normale supérieure (octobre 1908). ÊMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS d21 bre fini de fois, peut encore élre répétée une fois, quel que soit ce nombre fini, on dit que la répéti- tion indéfinie de celte opération définit une suite dénombrable, ou de première puissance, dont le type le plus simple est donné par la suite indéfinie des nombres entiers. On désignera par a, le nombre cardinal qui exprime la puissance de cette suite’. De même, si une opération, étant répétée une infi- nité dénombrable quelconque de fois, peut encore être répélée une fois, quelle que soit cette infinité de puissance a,, on dit que la répétition transfinie de cette opération définit une suile de seconde puis- sance, dont le nombre cardinal sera a,. On définira de la même manière les nombres cardinaux successifs à,, 2, .….; on établira ensuite les règles de calcul de ces nombres et leurs rela- tions avec les puissances définies par une autre voie, telles que la puissance du continu; si l’on désigne celle-ci par €, on a, par exemple : C— no, 1 élant un entier quelconque, 10 par exemple; car il est clair que l'ensemble des nombres décimaux de p chiffres renferme 10° éléments; si l’on rem- place l’entier p par a,, on a l'ensemble des fractions décimales illimitées, c'est-à-dire l'ensemble arith- mélique équivalent au continu. J'ai tenu à indiquer ce raisonnement comme type de ceux auxquels on est amené dans l'étude de ces questions; mais je me bornerai à ces indications, car tous ces développements sont restés jusqu'ici dans le domaine de la logique pure. III J'ai hâte d'arriver à la période la plus récente, dans laquelle les idées fondamentales acquises au moyen de l'étude de la Théorie des ensembles sont suffisamment assimilées pour que cette théorie devienne en quelque sorte inutile, son seul rôle — fort considérable — ayant été de créer un état d'esprit permellant un magnifique développe- ment de la Théorie des fonctions. Tout ce dévelop- pement peut être exposé d'une manière presque entièrement indépendante de la Théorie purement abstraite des ensembles ; mais il est conditionné par les formes de pensée acquises au moyen de l'étude de cette théorie : celle-ci n'a jamais rendu de plus éclatants services. Signalons d'abord les beaux travaux de M. René Baire sur les séries de polynomes. Weierstrass nous à appris que toute fonction continue dans un intervalle peut être représentée par une série de ! On emploie souvent la nous écrivons simplement a. lettre hébraïque aleph là où polynomes, uniformément convergente dans cel intervalle; réciproquement, si une série de poly- nomes converge uniformément dans un intervalle, elle y représente une fonction continue. Mais, si on laisse de côté la condition de convergence uni- forme, que peut-on dire au sujet des fonctions représentables, dans un intervalle donné, par une série de polynomes simplement convergente? On peut caractériser aussi ces fonctions en disant que ce sont des limites de fonctions continues. I] était bien vraisemblable que ce n'étaient pas les fonc- tions discontinues les plus générales, mais le pro- blème qui consistait à les caractériser parmi l'en semble de toutes les fonctions discontinues possibles était des plus difficiles. M. Baire a donné à ces fonctions le nom de fonctions de classe 4, et il a démontré que /a condition nécessaire et suflisante pour qu'une fonction soit de classe 1 est qu'elle soit ponctuellement discontinue sur tout ensemble par- lait. Expliquons le sens de cel énoncé. Lorsqu'une fonction est définie dans un intervalle, on peut se borner à considérer ses valeurs pour les points d’un ensemble compris dans cet intervalle; un point de” cet ensemble sera dit alors un point de continuité de la fonclion par rapport à l'ensemble, si la valeur de la fonction en ce point est égale à la limite des valeurs qu'elle prend en des points de l’ensemble tendant vers ce point. Cette définition est particu- lièrement intéressante lorsque l'ensemble est par- fait, c'est-à-dire est identique à l'ensemble de ses points limites : la continuité par rapport à un ensemble parfait où sur un ensemble parfait esl entièrement analogue à la continuité dans un inter- valle. Lorsqu'une fonction n'est pas toujours conti- nue, elle a des points de continuité et des points de discontinuité; on dit qu'elle est ponctuellement dis- continue lorsque tout intervalle, si petit qu'il soit, contient des points de continuité. D'après l'énoncé de M. Baire, pour qu'une fonction soit représen- table dans un intervalle donné comme limite des fonctions continues, il est nécessaire et suffisant que, sur tout ensemble parfait choisi dans l'inter- valle donné, la fonction soit ponctuellement discon- tinue. Si l'on considère une classe 1, il n’est pas malaisé de démontrer que, si elle est uniformément convergente, elle représente une fonction de classe 1 ‘ou comme cas particulier une fonction continue, que qualifiera de classe 0). Mais, si elle n'est pas uniformément con- série de fonctions de l'on vergente, la série représentera en général une fonc- tion discontinue plus compliquée que les fonctions de classe 1; on dira que c'est une fonction de classe 2. Une fonction de classe 2 peut done être représentée par une série convergente, dont chaque ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA TIÉORIE DES FONCTIONS terme est lui-même une série convergente de poly- nomes: c'est-à-dire par une série double de poly- nomes. Mais il faut bien prendre garde qu'une telle série double ne peut pas être ramenée à une série simple, car, la convergence n'étant pas uniforme, on n'a pas le droit de modifier l’ordre des termes. On définira de même les fonctions de classe 3, comme limites de fonctions de classe 2, ete... Cette classification montre d'abord combien est complexe la notion générale de fonction discon- tinue, ce que l’on pouvait déjà pressentir; mais elle fait mieux : elle permet de commencer l'étude de ces fonctions en séparant celles qui sont relative- ment simples de celles qui sont indéfiniment com- pliquées. Les fonctions discontinues peuvent donc devenir un sujet d'étude ; il est permis d'espérer que ce sujet sera fécond et ne sera pas dépourvu d'applications pratiques : la discontinuité parait être, dans les phénomènes naturels, aussi fréquente que la continuité. A ces recherches de M. Baire sur les séries de polynomes réels, on peut rattacher celles de M. Paul Montel* sur les séries de polynomes à variable complexe ; mais nous devons nous contenter de les signaler, malgré leur très grand intérêt, car nous ne pouvons entrer ici dans tous les détails qui seraient nécessaires pour que l'importance en soil comprise. J'ai déjà fait allusion à la découverte capitale de M. Lebesgue concernant l'intégration; je voudrais essayer d'en indiquer le principe et de faire pres- sentir l'influence considérable qu'elle exercera cer- lainement sur le développement de nombreuses théories mathématiques. Rappelons la définition classique de l'intégrale définie, qu'on pouvait regarder comme définitive depuis les travaux de Riemann‘ et le Mémoire sur les fonctions discontinues" de M. Gaston Darboux. Une fonclion étant donnée dans un intervalle, on partage cet intervalle en intervalles partiels de plus en plus petits et l'on multiplie la longueur de chacun de ces intervalles par une valeur prise par la fonction dans cet intervalle. Si la somme de ces produits tend vers une limite indépendante du choix des intervalles (pourvu qu'ils tendent vers 0) et du choix de la valeur de la fonction dans chaque intervalle, on dit que la fonction est intégrable. Nous préciserons en disant : in/égrable au sens de * Lorsque l’on aura défini les fonctions dont la classe est un entier quelconque »n, on appellera fonction de classe w une fonction qui peut être définie par une série dont les termes sont de classe variable dépassant un entier quel- conque » et l'on introduira ainsi successivement des fonc- lions dont la classe sera égale à un nombre transfini quel- conque. Mais je n’insiste pas ici sur ce point. ? Thèse. * Œuvres de Riemann. * Annales de l'Ecole Normale, 1875. Riemann; ou, plus brièvement, intégrable R. Lorsqu'une fonction n'est pas intégrable R, on peut définir son intégrale supérieure en multi- phant la longueur de chaque intervalle partiel par le maximum de la valeur de la fonction dans cet intervalle; cette intégrale supérieure existe tou- jours, pourvu que la fonction soit hornée (c'est- à-dire que toutes ses valeurs soient comprises entre des limites finies). On définit d'une manière analogue l'intégrale inférieure et l'on peut donner l'énoncé suivant: La fonction est zntégrable R lorsque l'intégrale supérieure et l'intégrale inférieure sont égales. Un caractère important de cette définition est le suivant : la division en intervalles est entièrement indépendante des propriétés de la fonction; si l'on considère deux fonctions différentes, on prendra pour ces fonctions les mêmes intervalles, c'est- à-dire qu'on leur appliquera un procédé de calcul unilorme. C'est évidemment là un grand avantage pour le calcul; mais c'est en même temps un incon- vénient : un tel procédé, qui ne tient pas compte des propriétés particulières de la fonction à laquelle il s'applique, peut être comparé à ces vêtements confectionnés qui ne sauraient être exactement ajustés, surtout s'il s'agit d'habiller un individu difforme : certaines fonctions singulières ont pu ètre justement comparées aux types monstrueux de la biologie. La méthode d'intégration de M. Lebesgue, au contraire, est en quelque sorte « faite sur mesure »; elle s'adapte exactement aux propriétés de chaque fonction particulière. Aussi beaucoup de fonctions qui ne sont pas intégrables R sont intégrables au sens de M. Lebesgue ou, comme nous dirons, intégrables L. Au lieu de diviser l'intervalle d'intégration en intervalles partiels quelconques, on considère, dans cet intervalle total, l'ensemble des points pour les- quels la fonction à intégrer est comprise entre des limites très rapprochées; cet ensemble peut être plus ou moins compliqué, mais on sait le mesurer dans tous les cas". On obtient un des termes dont la somme doit fournir une valeur approchée de l'intégrale en multipliant la mesure de cet ensemble par la plus grande ou la plus petite des valeurs qu'y prend la fonction. Mais, d'après la définition mème de l'ensemble, cette plus grande et cette plus petite valeurs sont très voisines l’une de l’autre, quelle que soit la rapidité avec laquelle la fonction varie; au lieu que, dans la méthode de Riemann, ‘ C'est seulement au prix de très grands efforts que M. Lebesgue est parvenu à donner un exemple d'un en- semble qui ne soit pas mesurable au moyen des principes indiqués plus haut. On peut dire que, pratiquement, tous les ensembles sont mesurables. il pouvait arriver que, lorsque les intervalles tendent vers 0, la différence entre les valeurs extrêmes de la fonction dans un intervalle (ou, comme on dit, l'oscillation de la fonction) conserve une valeur supérieure à un nombre fixe. La méthode d'intégration de M. Lebesgue consis- tera done à diviser en un grand nombre d'inter- valles partiels l'intervalle total de variation de la fonction à intégrer; à chacun de ces intervalles partiels correspond un ensemble de valeurs de la variable; la somme des mesures de ces ensembles est évidemment égale à la longueur de linter- valle d'intégration. Si l'on considère les deux sommes obtenues en ajoutant les produits de la mesure de chaque ensemble par la plus grande et la plus petite valeur de la fonction dans cet ensemble, la différence entre ces deux sommes est au plus égale au produit de l'intervalle d'intégration par la longueur du plus grand des intervalles partiels en lesquels on a divisé l'intervalle de variation de la fonction à intégrer; cette différence lend done vers zéro en même temps que la longueur des intervalles partiels; on en conclut que toute fonction est inté- grable, du moment que les ensembles utilisés dans la définition sont mesurables, c'est-à-dire pratique- ment toujours. La notion d’'intégrale Lest donc plus générale que la notion d’intégrale R, qu'elle comprend d'ailieurs comme cas particulier : lorsque l'intégrale R existe, l'intégrale L existe aussi et a la même valeur. Mais il est aisé de citer des cas où l'intégrale L existe, tandis que l'intégrale R n'existe pas. Considérons, par exemple, une fonction égale à 1 pour les valeurs rationnelles de la variable et à O pour les valeurs irrationnelles; son intégrale R n'existe pas, car dans tout intervalle, si petit qu'il soit, le maximum de la fonction est 4 et son minimum est 0; l'intégrale supérieure est done 1 et l'intégrale inférieure 0; mais l'intégrale L existe, car on peut enfermer les nombres rationnels dans des intervalles convenablement choisis, dont l'étendue est aussi petite que l’on veut; en d'autres termes, la mesure de l’ensemble formé par les nombres rationnels est égale à 0. Donc l'intégrale L de la fonction considérée est 0; si l’on considérait une fonction égale, au contraire, à 1 pour x irra- tionnel et nulle pour x rationnel, son intégrale L serait égale à 1, tandis que, au point de vue de Riemann, l'intégrale inférieure et l'intégrale supé- rieure sont respectivement 0 ou 1, comme pour la fonction précédente. Cette remarque n’est pas inu- tile, car elle prouve qu'on ne peut pas espérer déduire la valeur de l'intégrale L des valeurs infé- rieure et supérieure auxquelles conduit la méthode de Riemann; on à bien une notion nouvelle, plus profonde, qui atteint plus précisément la réalité. ÉMILE BOREL — LA THÉORIE DES ENSEMBLES ET LA THÉORIE DES FONCTIONS 323 Il n'est pas possible d'énumérer ici toutes les applications de cette notion : il suffit de songer à toutes les questions mathématiques dans lesquelles interviennent les intégrales définies. Je me conten- terai de mentionner les applications à la théorie des séries trigonométriques, dues à M. Lebesgue lui- même et aussi à M. Fatou !, ainsi que les recherches de M. Lebesgue sur la rectification des courbes et la quadrature des surfaces. Je voudrais insister davantage sur un résultat fort curieux obtenu par M. Lebesgue, dans une question classique en Géométrie infinilésimale : la recherche des surfaces applicables sur le plan. On sait que, sous cerlaines conditions d'existence el de continuité relatives aux dérivées des fonctions qui définissent la surface, on démontre que les seules surfaces applicables sur un plan sont les surfaces développables, c'est-à-dire les surfaces engendrées par les tangentes à une courbe gauche. M. Lebesgue s'est proposé de traiter la question d'une manière plus générale, en supposant seulement vérifiées les conditions nécessaires pour que l’on puisse définir la longueur d'une courbe de la surface; celle-ci est applicable sur le plan si l’on peut établir entre ses points et les points du plan une correspondance telle que la longueur d'une courbe quelconque de la surface soit égale à la longueur de la courbe cor- respondante du plan. Dans ces conditions, M. Le- besgue a trouvé des surfaces non développables qui sont applicables sur le plan. On peut se demander si, lorsqu'on froisse une feuille de papier, la surface obtenue, qui visiblement n'est pas développable, est l’une des surfaces découvertes par M. Lebesgue. Je ne pense pas que la question, posée sous cette forme, puisse recevoir une réponse, car elle n'esl pas correcte. On ne doit pas perdre de vue, en effet, que les formules mathématiques, quelles qu'elles soient, ne donnent jamais qu'une représentalion approchée de la réalité. Or, on peut, avec une erreur aussi petite que l’on veut, regarder toute surface comme formée de morceaux de surfaces dévelop- pables, de même qu'on peut regarder toute courbe à volonté comme continue ou comme discontinue (à moins qu'il n'y ait des discontinuités finies), toute fonction continue comme analytique, ete. La question de savoir si telle propriété mathématique préeise® est vraie ou fausse pour un phénomène 1 Voir les livres cités de M. Lebesgue et la Thèse de M. Fatou (Acta Mathematica, t. XXX). Je tiens à mention- ner aussi le nom d'un jeune étudiant de Gôttingen, Fritz Jerosch, dont les travaux sur ces sujets ontété interrompus par une mort prématurée. 2 Quand je dis précise, j'entends, par exemple, que, le mètre étant défini par l'étalon international de Breteuil, on ne peut pas affirmer que telle barre de platine a précisément 2 mètres. Mais je crois qu'on peut affirmer comme une vé- rité absolue que la longueur d'une telle barre est égale à 324 D' PIERRE BONNIER — LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION réel est done une question entièrement dépourvue de sens: il faut se demander si telle représentation mathématique fournit une image approchée du phé- nomène sous une forme plus simple ou plus cohé- rente que telle autre; dans le cas où il en est ainsi, la représentation considérée est vraie, en ce sens qu'elle permet de systématiser les phénomènes connus et de prévoir des phénomènes nouveaux, avec une approximation suffisante. À ce point de vue, il est assez vraisemblable que les surfaces de M. Lebesgue fournissent parfois, de la déformation « pratique » d'un plan malériellement réalisée, une représentation plus exacte que celle qui est fournie par les surfaces développables. J'aurais voulu par- ler aussi des profondes recherches de M. Lebesgue «sur les fonctions représentables analytiquement », dont le résultat le plus saillant est la « définition » d'une fonction qui n'est susceptible d'aucune repré- sentation analytique. Je regrette, enfin, de mentionner seuiement en passant les beaux travaux de M. Maurice Fréchet sur les ensembles de fonctions et ceux de M. Paul Montel sur les séries de fonctions analytiques, mais J'ai déjà abusé de Ja patience des lecteurs de la Revue; j'aurai, d'ailleurs, sans doute un jour l’occa- sion d'exposer avec l'ampleur désirable les idées de ces jeunes géomètres, qui réaliseront certaine- ment les espérances que leurs premières recherches ont fait concevoir. Mais il est temps de conclure. On vient de voir que, du jour où la Théorie des ensembles à cessé d’être métaphysique pour devenir pralique, les idées nouvelles introduites par cette théorie ont produit, en Théorie des fonctions, une floraison magnifique de recherches et de résultats. Des questions, que l'on pouvait croire closes, ont été rouvertes et leur aspect s'est entièrement trans- formé; des problèmes qu'on n'aurait osé même énoncer ont élé posés et parfois résolus. Cela doit nous rendre prudents dans nos jugements sur les mathématiciens qui développent la Théorie des ensembles des directions qui paraissent éloignées de tout but pratique; peut-être, de cette débauche de logique formelle, qui apparait comme une construction sans aucune base, sortira-t-il un jour quelque idée utile. Mais, même s'il n'en sortait rien et si la Théorie des ensembles n'avait d'autre résultat que d'avoir rendu possibles les progrès récents de la Théorie des fonctions, ceux-ci sont assez importants pour que M. Georg Canlor doive être considéré comme l’un des mathématiciens dont l'influence a été la plus considérable, à la fin du xix° siècle el au commencement du xx°. Et cette influence subsistera tant qu'il y aura des mathéma- liciens, même si les formes particulières données à certaines parties de la Théorie abstraite des ensembles devaient êlre un jour complètement oubliées”. dans Emile Borel, Pro‘esscur-adjoint de Théorie des fonctions . à la Sorbonne et à l'École Normale supérieure. LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION Il doit paraitre plus qu'audacieux de prétendre que, depuis plus de deux siècles, les théories de l'audition reposent sur des hypothèses qui ne sup- portent pas un moment là critique. Et pourtant... On à pu admettre que, dans notre organisme, à travers les mille vicissitudes de la croissance, de la maladie, de la vie elle-même, se trouvaient des parties organiques, animées, qui, pendant toute notre vie, gardaient l'identité de leurs caractères physiques au point de rester des résonaleurs accordés pour tel son, pour telle périodicité vibra- loire. Cette identité des caractères physiques, que le cristal le plus impassible ne gardera pas une année, que n'importe quelle matière vivante ne gardera pas une seconde, on l’a sans hésilation attribuée à des éléments anatomiques d'une fragilité, d'une 2 inèlres à moins d’un millimètre près, ce que n'admettront pas les relativistes ts que M. Henri Poincaré. mobilité, d'une susceptibilité extrêmes à toutes les sollicitations, et cela pendant les cent ans que peut durer la vie d'une oreille humaine. Et, parmi les qualités physiques que l'on peut reconnaitre à un élément vivant, s'il en est une : dont on ne puisse admettre l'identité maintenue, c'est certainement /a tension. Or, c'est précisément sur la fixilé de tension que repose la théorie clas- sique de l'audition. Peut-on imaginer de la matière vivante tendue, el gardant, de notre naissance à notre mort, l'éga- lité de sa tension au point de rester accordée pour tel son et pour nul autre? Et quelle matière vivante ? Des fibres, des cellules, des membranes, si minuscules, si réduites que, pour vibrer à l'unisson des sons connus de nous, il a fallu les supposer détendues, surchargées, au point d'être depuis longtemps devenues incapables 1 Cet article a été écril en septembre 190$. & D' PIERRE BONNIER — LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION de toute vibration au moment où l'on espérer les voir accordées. Bien plus, la vibration leur füt-elle même per- mise dans ces conditions, comment des éléments dont les dimensions extrêmes varient au plus de 1 à 12 pouvaient-ils s'accorder à des périodicités dont l'échelle va de 1 à 2.000 et plus, comme celles que nous notons? Quelle complaisance scientifique le besoin d'im- poser la physique de laboratoire et d'imagination à la physiologie d'organes vivants ne nous laisse- t-il pas supposer de la part des théoriciens? Ce qui, dans la première hypothèse de Helmholtz, joue le rôle d'appareil résonateur, vibrant, devient étouftoir dans à seconde; et ce qui était étouffoir dans la première va devenir l'appareil vibrant et accordé par excellence dans sa seconde théorie. Et celle-ci restera classique jusqu’à nos jours. D'ailleurs, dans aucun de nos appareils sen- soriels, nous ne trouvons d'éléments distinets res- pectivement accordés à la perception de diverses tonalités de leur domaine sensoriel. Avons-nous, dans notre rétine, des éléments pour tous les tons de la palette lumineuse, des organites pour le rouge, le vert, le jaune, etc., parqués en des points distincts de notre papille visuelle ? Notre peau contient-elle, juxtaposés, des corpuscules tactiles respectivement accordés à tous les degrés de pression, de température, d'humidité, ete. ? Chaque point de notre rétine est capable de toutes les réceptivités dans le domaine des tonalités lumi- neuses et colorées, dans la sphère de vision nette. Chaque point de notre peau perçoit tous les degrés de température, de pression dans son domaine tactile propre. Pourquoi supposer dans la papille auditive un assortiment d'organes analyseurs perce- vant chacun sa périodicité propre? Pourquoi faire pour l'oreille une physiologie particulière en dehors de toute physiologie nerveuse et sensorielle ? pouvait La belle théorie des résonateurs, si heureuse- ment développée par Helmholtz, n’est en aucun point applicable à l'oreille. Toutes les parties de l'oreille s'y sont essayées, vainement, depuis deux cents ans. Avec Du Vernay, en 1683, c'étaient les diverses sections des canaux semi-circulaires et la lame spirale osseuse du limacon, dont les diverses épaisseurs accueillaient les diverses périodicités. En 1767, Le Cat; en 1828, Carus attribuaient au squelette de l'oreille interne ces mêmes propriétés d'analyse sonore. Puis l'anatomie fit connaître les parties molles. Claudius, en 1838, fit résonner la membrane basilaire ; Helmholtz, en 1862, les piliers REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 325 cellulaires de Corti; puis, comme Hasse montrait que ces appareils manquent chez les oiseaux, on fit vibrer la membrane de Corti; Hensen, en 1869, et Helmholtz, en 1870, firent jouer le même rôle à la membrane basilaire, qu'ils dotèrentde propriétés physiques en désaccord absolu avec son anatomie : Baer, Waldoyer, P. Mayer (1876) rejetèrent la théorie de Helmholtz ét firent vibrer les petits cils qui couronnent les cellules de Corti. Puis Wein- land reprit la théorie de Helmholtz; Ewald, en 1898, ne fit plus vibrer que la partie interne de la mem- brane basilaire; Gray, en 1899, des segments plus larges de cette membrane; Ter Kuile, la partie externe, etc. Marage reprit la théorie otolithique dont Breschet, en 1838, avait proposé une formule beaucoup plus prudente et scientifique, ear elle ne s'appliquait qu'aux perceptions de trépidation, tandis que Marage fait jouer aux otolithes un rôle dans l'audition, oubliant que les otolithes abondent dans les parties de l'oreille qui ne servent pas à l'audition et font totalement défaut dans les parties auditives. Amaudrut est tombé dans la même erreur. Tous ces petits éléments cellulaires, comblés d’aptitudes physiques bien extraordinaires, sont de véritables petits infusoires nus, pédiculés, ciliés, vivant presque en liberté dans ce liquide de l'oreille interne qui à gardé les caractères du milieu péla- gique originel. Les cellules de la papille, enfermées dans l'oreille interne, ne diffèrent que très peu des cellules qui vivent à la surface de l'animal dans les formations primitives. J'écrivais dans ma thèse, à ce propos, en 1890 : « Il est remarquable de voir ce milieu marin, pélagique, dont l'entretien peut être considéré comme la fonction fondamentale de la nutrition et de la circulation, baigner cons- tamment toutes les formations ectodermiques des organes des sens, plus peut-être que les autres éléments de l'économie. « Toutes les différenciations que nous allons voir survenir dans la structure de l'appareil tactile du sens auriculaire ont lieu au sein d'un liquide qui ne diffère pas essentiellement du milieu marin et dont le renouvellement sera activement assuré par des aqueducs spéciaux". » Cette notion du milieu pélagique maintenu phy- siologiquement en nous, notion que je ne croyais guère neuve il y a dix-huit ans, l’est devenue depuis. Je la rappelle, parce qu'il est intéressant de voir les éléments de la papille auditive vivre comme de véritables infusoires dans le milieu pélagique de l'oreille interne, et de reconnaître combien il fut absurde de les supposer tendus et accordés. ! Le sens auriculaire de l'Espace. Thèse de Paris, 1890 p. 15. , 326 D' PIERRE BONNIER — LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION C'est à ces petits éléments anatomiques que l’on attribue gratuitement la faculté de garder une ten- sion fixe, toute une échelle de tensions invariables, pendant un temps où aucun instrument de musique ou de laboratoire ne pourra garder l'égalité de ten- sion, fût-il de l'acier le mieux trempé. Cette accumulation d’invraisemblances et d’im- possibilités eut assez de crédit pour entrainer les physiologistes à créer et à garder pour l'oreille une physiologie en opposition avec tout ce que nous connaissons de la physiologie générale des sens. Et pourquoi? Pour faire de l'oreille un appareil analyseur. Aucun de nos sens n’analyse. L'œil ne décompose la lumière blanche que si un prisme en étale le spectre sur un écran et si les périodicités colorées diverses se parquent en des points divers. L'oreille ne percoit isolément les sons harmo- niques que s'ils existent isolément dans l’espace, et quand la sensation d'accord se distingue de celle du timbre, comme sur une toupie de Newton nous ne voyons les couleurs distinctes que quand le blanc disparaît, et inversement. D'autre part, toutes ces théories ont supposé que i'ébranlement sonore, par conduction au travers des milieux auriculaires, agissait directement sur la papille et l'influencait dans son élasticité accordée. Autant admettre que la roue d’une locomotive se met à tourner quand la chaleur du foyer, par rayonnement, vient à l'échauffer; ou que le télé- phone ne transmet notre voix que parce que le bois, les diverses pièces métalliques, la plaque et les fils eux-mêmes sont conducteurs du son. Entre l’ébranlement sonore et l'audition inter- vient une caplalion de l'énergie vibratoire sans laquelle il n’est pas de perception sonore. Plus une oreille est sclérosée, ankylosée, ossifiée, figée, plus elle est conductrice du son, moins elle entend. Plus le phonographe est raidi, rouillé, plus la cire est dure, plus l'appareil devient conducteur du son, moins il enregistre. IT Nous avons été seuls, et la même année, Hurst et moi, à montrer que l'oreille n'est pas un résona- teur. J'ai, de plus, indiqué qu'elle est un enre- gistreur, et un enregistreur de pressions. Hurst lut son Mémoire, À 2ew theory of hearing, le 4% décembre 1894 au Royal College of Sciences de Dublin, mais ne le publia qu'un an après, en décembre 1895, dans les Transactions of the Liver- pool Biological Society (t. IX). Je présentai ma théorie à la Société de Biologie de Paris, le 2 fé- vrier 4895, dix mois avant que ne parût le travail de Hurst. J'ai depuis développé ma théorie, en mai 1895, dans le Bulletin scienufique de Giard, dans mes livres sur Oreille, en 1896, et sur l’Audition, en 1901. Comme moi, Hurst se refuse à voir dans l'oreille un résonaleur ; le liquide de l'oreille interne oscille de la fenêtre ovale à la fenêtre ronde, ébranlant la partie initiale de la membrane basilaire, et cette oscillation de la base se propage jusqu'au sommet du limacon le long de la papille. Cette onde de propagation, dont il ne trouve, dit-il, « nulle part l’analogue en Physique », n'est que l’ondulation qui court le long d’une corde suspendue dont une extrémité est secouée transversalement. Mais ici Hurst se perd par le besoin de localiser en des points fixes la perception de périodicités dé- finies. Il suppose que l’ondulation dérivée, parvenue au bout de la membrane basilaire, revient par la membrane de Reissner et rencontre l'onde mon- tante suivante en un point toujours le même pour une même longueur d'onde. Le malheur est que, pour des compositions sonores de périodicités diverses, ces rencontres se multiplieront et la con- fusion apparaîtra aussitôt, etc. L'hypothèse que des points déterminés de la papille devaient percevoir des sons également déterminés a stérilisé toutes les théories et la clinique elle-même. Ma théorie fait de l'oreille un enregistreur de pres- sions. L'ébranlement sonore est une variation de pression du milieu qui nous entoure, et cette varia- lion, extrêmement brève et périodique, saisit de proche en proche nos milieux auriculaires. Or, ces milieux sont suspendus, c’est-à-dire libres d'osciller en totalité, de prendre un branle total sous le passage de l’ébranlement sonore. : L'air du conduit auditif CA (fig. 1), dont le fond est formé par le tympan mobile T, est suspendu entre l'air extérieur et cette membrane. Les couches les plus voisines du tympan oscillent totalement comme lui. Le tympan est suspendu à son cadre. Les osselets, le marteau M, l’enclume E et l'étrier S, sont suspendus à leurs ligaments, à leurs pivots ; leurs grosses têtes font contrepoids à leurs longues jambes, et leurs muscles frénateurs leur permettent plus ou moins d'osciller librement. Ils forment un système de leviers coudés, articulés, oscillant en totalité. Les liquides de l’oreille interne sont également suspendus entre la platine de l'étrier S, le piston qui oscille à chaque vibration, et la membrane de la fenêtre ronde FR, qui donne sur l'air de la caisse, d’une part, et d'autre part l’aquedue A, qui met en communication la cavité du limacon avec la cavité cranienne. Les liquides peuvent donc fluer en masse, osciller en totalité d’une membrane à l'autre. D' PIERRE BONNIER — LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION 327 Ils sont divisés par des membranes, des tympans souples, la membrane de Reissner »R et la mem- brane basilaire MB, également suspendues à leurs cadres. L'air de la caisse C, grâce à la trompe d'Eus- tache TE, est sans cesse à la même pression que l'air extérieur, el les liquides de l'oreille interne font de même, à l'intérieur des parois membraneuses, équilibre à milieux suspendus sont done à la pression atmo- sphérique, et leurs moyens de suspension vont seuls servir à canaliser, à capter, à exploiter l'ébranle- ment venant de l'extérieur. La demi-phase expansive de l’ébranlement sonore refoule le tympan, les osselets et l'étrier; le liquide de l'oreille interne flue de la fenêtre ronde et vers l'aquedue. L'autre demi- phase rétracte tout le mouve- ment en sens in- verse. la pression de la caisse. Tous ces fenêtre ovale à la III Que se passe- t-il li- macon, l'organe auditif ? La papille au- ditive P est for- mée d’un cordon de grosses cel- lules, suivant la spire du limacon de la base au sommet, suspendu sur la membrane basilaire mB qui lui forme hamac. De ces cellules, certaines forment l'échafaudage, la charpente du système papillaire, et soutiennent, à la convexité du cordon, d’autres cellules, celles-ci en rapport avec des filets nerveux : ce sont les -cellules de Cort. Ces cellules de Corti sont ciliées, mais la masse -des cils de toutes ces cellules est si compacte, si enchevêtrée, qu'on l’a prise pour une membrane, la membrane de Corti 21C. Cette chevelure, immense par rapport aux corps cellulaires, ne se dresse pas verticalement, mais semble brossée, inclinée en dedans vers l'axe du limacon, perpendiculairement à l'axe des cellules. Elle quitte le cordon papillaire, s'allonge en dedans sur le dos d’une crête à seclion triangulaire, à arête vive, recouvre cette crête et vient s'attacher en dedans de cell:-ci vers le moyeu du limacon. dans le Fig. 1. — Schéma de l'oreille interne. — CA, conduit auditif: T, tympan; M, marteau: E, enclume; S, étrier; KO, fenêtre ovale; FR, fenêtre ronde; C, caisse: TE, trompe d'Eustache; À, aqueduc reliant la cavité du limacon à la cavité cranienne; mR, membrane de Reissner; mB, membrane basilaire; mC, membrane de Corti; P, papille auditive. Cette crête est fixe, mais la messbrane basilaire, sur laquelle est suspendu le cordon des cellules auditives, ne l’est pas. De sorte que, chaque fois que la membrane oscille, s'abaisse ou s'élève, les cellules suivent son mouvement; mais la cheve- lure des cellules ne peut suivre bien loin les dépla- ments des cellules, au moins dans la phase d’abais- sement. Cette chevelure est attachée au départ de la crête, et l'arête de celle-ci, qui surplombe le cordon papillaire, retient strictement la masse ciliaire, d'où un tiraillement des cellules, entravées plus bas par l’inflexion de la membrane basilaire. Ces cellules sont des organites tactiles, mais sur lesquels, au lieu d'agir par compression, l'ébranle- ment agit par tiraillement. Plus la phase d'expansion est forte, plus le ti- raillement estin- tense ; plus le son est aigu, plus il se répète fré- quermment; et la forme du tirail- lement est liée à celle de l’ébran-, lement. Voilà pour le, mode d'excitation élé- mentaire. Mais quons avec Hurst que les voies de recul liqui- de du limacon n'existent qu'au niveau de la ba- se, tout au com- mencement de l’'enroulement en spirale de l'appareil. Tout le reste de la cavité limacéenne est formé d’une paroi rigide, sans issue, sans voie de recul ou d'échappe- ment. Le liquide n'y oscille pas. L'oscillation ne se fait qu'à la base du limacon, transversalement, de la fenêtre ovale à la fenêtre ronde: et, au niveau de cette base, la membrane de Reissner et le tympan basilaire sont secoués transversalement. Mais cette oscillation transversale du bout infé- rieur du cordon papillaire suspendu va donner naissance à une ondulation dérivée, courant de bas en haut du cordon, et se propageant d'autant plus loin que les dimensions des cellules et de la mem- brane vont aller croissant, c'est-à-dire que la masse et la liberté d'inertie de l'appareil vont en quelque sorte se prêter d'autant plus à cetle ondulation dérivée que celle-ci sera plus près de]s'éteindre. Ce dispositif favorise done visiblement la propagation de cette ondulation longitudinale, qui va répéter le reImnar- du 328 D' PIERRE BONNIER — LES IDÉES ACTUELLES SUR L'AUDITION EEE EEE ——_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—— long du cordon papillaire la série des petites suc- cussions que nous avons étudiées plus haut. À quoi sert cette ondulation ? Elle permet à l'ébranlement sonore de venir en quelque sorte s'inscrire sur une plus grande quan- tité d'éléments auditifs. La même raison qui nous fait mettre en mouvement sous un stylet enregis- treur la plaque ou le cylindre sur lesquels ce stylet a inscrire sa vibration, de facon à obtenir une courbe dont les détails couvriront une plus grande surface d'inscription, cette même raison fait que l'ébranlement va parcourir, c'est-à-dire solliciter successivement un grand nombre d'éléments sen- soriels, et que sa courbe ondulatoire va couvrir un grand espace de sensibilité, dont chaque élément, à chaque instant, percevra un détail de sa forme. C’est donc l'identification absolue avec nos appa- reils enregistreurs; l’ondulation longitudinale de la papille étale l'ébranlement sur une grande quantité d'éléments percepteurs. Chaque élément subit, à chaque instant, le tiraillement correspondant à la hauteur de la courbe ondulatoire en son point, et ‘comme cette excitation d'éléments contigus est continue, toute notre papille auditive perçoit l’ébranlement dans sa force, sa périodicité et sa forme, de facon continue, tonale, auditive et non plus vibratoire, trépidative. L'ébranlement sonore est amené à venir s'inscrire lui-même sur une merveilleuse papille, délicatement suspendue et sensible, sur laquelle la courbe ondulatoire pro- mène constamment les divers détails des formes. Nous sommes loin de l’assortiment de petits résonateurs accordés, immuables, se partageant l'échelle des sons, la décomposition des harmo- niques, etc. L'oreille est le plus parfait des phono- graphes, c'est un enregistreur vivant, infiniment plus intéressant, dans sa belle réalité, que les harpes et les lyres auxquelles on l’a jadis comparé." | JV Cette conception de l'oreille enregistreur, qui date déjà de treize années et a été dans plusieurs livres de moi exposée dans son ensemble, enseignée depuis plus de dix ans par moi à l’Hôtel-Dieu et plus récemment à la Sorbonne par M. Sagnac, est encore très peu connue des physiologistes et des: auristes, pour qui l’autre théorie, celle de l'oreille résonateur, a l'avantage, malgré son impossibilité, d'être vieille de deux siècles. Pourtant cette idée fait son chemin, et l'on & beaucoup remarqué, en Amérique surtout, um travail de Max Meyer, professeur de Psychologie expérimentale à l'Université de Missouri, intitulé : An introduction to the mechanics of the inner ear. L'auteur ne connaît vraisemblablement pas mes travaux sur la question, mais ses idées coïncident assez exactement, de 1895 à 1907, avec les miennes. Comme je l'écrivais dans ma thèse, en 1890, il remarque que les phénomènes de l'oreille interne relèvent de l'{ydrodynanique; il admet la cireula- tion, l’oscillation totale du liquide labyrinthique, dans les seules portions de l'oreille interne où des parois membraneuses permettent ce va-et-vient, et que, par conséquent, elle ne se produit qu'à la base. Il rejette l'hypothèse d'éléments anatomiques vivants tendus de facon constante et accordés. Puis, M. Meyer s’égare, faute de notions anato— miques suffisantes sur la structure de la membrane: de Corti, que nous ne connaissons bien cependant que par les travaux de son compatriote Howard Ayers. On voit que ce sont nos idées d'il y a treize ans qui, par voie de transmigration, sont en roule pour revenir naître de nouveau en France. D' Pierre Bonnier, Auriste de la Clinique médicale de l'Hôtel-Dieu. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 329 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Heywood (H. Bryon), B. Sc. Lond. — Sur l'équation fonctionnelle de Fredholm et quelques-unes de ses applications. Thèse de Doctorat de l'Université de Paris. — 1 vol. in-4° de 113 pages. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. La Thèse de M. Bryon Heywood est une excellente étude de la théorie, dès aujourd'hui classique, que l’on doit à M. Fredholm. L'auteur écrit tout d’abord les formules fondamen- tales de cette théorie. Puis il lui apporte un complé- ment important, grâce à la notion de noyaux ortho- gonaux, découverte simultanément par lui-même et par M. Goursat, et qui jouit de propriétés des plus remar- quables au point de vue de l'application de la méthode de Fredholm. En troisième lieu, il développe l'extension au cas asymétrique des propriétés essentielles démontrées, dans le cas du noyau symétrique, par M. Hilbert : il définit, par conséquent, dans ce nouveau cas, les fonctions fondamentales et étudie les développements Ÿ A de RT Persée # Ÿ Diverses cau- n'est pas mesu- 5 ses générales, ré- rable; enluias LE = sidant au sein signant la valeur moyenne, d’a- près Gylden', des parallaxes des étoiles de même grandeur, on trouve qu'elle serait à environ 350 ans de lumière de la Terre. On en déduit que la différence des vitesses, dans l’espace, des rayons extrêmes du spectre visible serait, «d’après les observations de 6 et RT Persée, res- pectivement environ 0,003 et 0,0% de celle de l’air. Il est d'ailleurs assez digne de remarque que la valeur limite de la dispersion cosmique que four- nissent, d'autrepart, les mesures spectro-radiales de # Cocher (Belopolsky, Tikhoff) assignent à cette limite, en admettant la parallaxe indiquée par Prit- “hard pour cette étoile, une valeur presque égale à celle que fournit Algol (Nordmann) et même légère- ment supérieure. On peut résumer ainsi la discussion précédente : Si on admet que les décalages observés sont réels et sont dus entièrement à la dispersion cosmique, on peut dès maintenant en induire que cette disper- sion a lieu dans le même sens que dans les milieux + ! Axpré : Astronomie Stcllaire, 1. 1, p. 285. Fig. 1. — Courbe de lumière d'Algol. Courbe de lumière des rayons rouges (} moyen — 680 uu). des étoiles pério- diques elles-mé- mes, tendent à produire des dif- férences entre les époques des divers minima mono- chromatiques de ces étoiles. Je ne retiendrai ici qu'une de ces causes générales qui paraît particu- lièrement caractéristique : L’excentricité de l'orbite d'une étoile variable tend naturellement, par le mécanisme suivant, à décaler les minima des courbes de lumière rela- tives à des régions différentes de son spectre : 1° On sait que l’excentricité des orbites des sys- tèmes binaires célestes est généralement notable et a, en moyenne, une valeur voisine de 0,%°. 2% D'autre part, les deux étoiles constitutives de ces systèmes sont généralement très rapprochées dans le cas des variables à courtes périodes. Pour Algol, par exemple, on a calculé que, les masses des deux composantes étant respectivement 4,1 et 0,5 fois celle du Soleil, la distance de leur centre n'est que trois foisle diamètre de l'étoile principale, bleus (x moyen — 450 pu). 1T. J. J. See : Evolulion of the et:llar systems, Vol. f, passim. , CH. NORDMANN — VITESSES DES VIBRATIONS LUMINEUSES DANS L'ÉTHER 399 égal lui-même à peu près à celui du Soleil”. 3° Par suite de la grandeur et de la proximité des masses en présence, on calcule facilement que les atmosphères de l'étoile principale et de son sa- tellite sont soumises à des marées énormes qui doivent les déformer et leur faire prendre des figures d'équilibre allongées et sans doute voi- sines des pyroïdes découverts et étudiés par M. H. Poincaré. Bornons-nous pour l'instant, et pour simplifier, à ce qui concerne la marée atmosphérique de l'étoile principale. Désignons celle-ci par et soit (fig. 8) a be d Vorbite décrite autour d'elle dans le sens de la flèche 92° par son satellite ç. La théorie montre que Je cas le plus général dans les systèmes binaires, et qui correspond à la stabilité, est celui où la durée de la rotation de l'étoile principale est égale à la durée de la révolution du satellite (comme cela a lieu, par exemple, pour la Terre et la Lune). Il suffirait de modifier très légèrement la démonstration suivante pour qu'elle s'applique au cas où la durée de rotation de È diffère de la révo- lution de 6. Dans le cas actuel, l’excentricité de l'orbite a pour effet (3e loi de Képler) que la vitesse orbitale du satellite est plus grande quand les deux astres sont voisins (périastre) que quand ils sont à leur plus grande distance (apoastre). La figure 8 représente une position du satellite voisine de l’apoastre et il est clair que, à ce moment, par suite de la tendance de la rotation de X à rester uniforme, la vitesse angulaire de révolution de s est plus grande que la rotation de È. La protubérance de la marée produite dans l'atmosphère de È par l'attrac- tion de 6, et qui est figurée en M, se trouve, par suite, en retard, sur le rayon vecteur joignant Yo, de l’angle MCs. La Terre étant, dans le cas de la figure, suivant la direction CA, E et ç sont alors en ‘conjonction; l'éclipse de È par o est centrale, c’est- à-dire qu'on devrait observer au moment figuré le minimum de lumière de l'étoile, s'il ne fallait pas tenir compte de l’absorption que lui fait subir sa propre atmosphère. Admettons que celle-ci, pour fixer les idées (et comme cela a lieu pour l’atmo- sphère terrestre), absorbe environ deux fois plus les rayons rouges que les rayons bleus; les absorptions maxima des rayons rouges et bleus de E par la pro- tubérance atmosphérique étant figurées respective- ment par les vecteurs CB, et CB,, et l'obscurcisse- ment maximum dû à l'interposition du satellite étant représenté par le vecteur CA, il est clair que les minima apparents de l'étoile dans les rayons rouges et les rayons bleus seront observés de la Terre quand les résultants de CA avec CB, et CB, respectivement, c'est-à-dire CR, et CR,, viendront, A Le MU, * AnDRé : Astronomie slellaire, t. II, p. 203. par la rotation du système, se projeter suivant la direction « È Terre ». Le minimum apparent du rouge aura donc lieu avant celui du bleu. Si Eet cétaient en conjonction non plus au voi- sinage du périastre, mais près de l’apoastre, on voit de même que CM sera non plus en retard, mais en avance sur Co, et parsuite, ici, le minimum appa- rent du rouge suivra celui du bleu. On arrive ainsi à cetle conclusion inattendue que : Ze minimum observé dans le rouge précédera ou suivra le minimum du bleu pour une même étoile suivant l'orientation de son orbite dans l'espace. On peut analyser d'une manière analogue les apparences produites par les marées atmosphé- riques du satellite lui-même. Je n’y insiste pas. A \\ ï é \ \u \ R} \e °R> Terre Fig. 8. — Dévcalages produits par l'effet de l'excentricit; de l'étoile sur la marée atmosphérique. J'indiquerai seulement (je l'ai démontré ailleurs) qu'une application numérique des principes précé- dents à l'étoile Algol conduit à cette conclusion qu'un décalage de ses minima monochromatiques égal à plusieurs minutes peut être vraisemblable- ment produit par les phénomènes qui viennent d’être invoqués. Enfin, on peut montrer que les phénomènes de marée dans les étoiles variables sont de nature à produire également, et d’ailleurs par un mécanisme tout différent du précédent, des décalages entre les minima des vitesses radiales orbitales déterminées danslesrégions différentes du spectre. Cette démons- tration (que j'ai donnée ailleurs et que le lecteur retrouvera facilement) repose simplement sur l'exis- tence des différences de pression que doivent pro- duire les marées sur la photosphère des étoiles, et sur la variation des longueurs d'ondes qu'en- traînent de telles modifications de pression (Hum- phreys et Mohler). 360 CH. NORDMANN — VITESSES DES VIBRATIONS LUMINEUSES DANS L'ÉTHER Il n'en est pas de même pour les décalages dus X. — MÉTHODE POUR DISTINGUER DES EFFETS DE LA | aux autres causes. DISIERSION COSMIQUE CEUX DES AUTRES l'HÉNOMÈNES INVOQUÉS. Est-ce à dire, comme l'a prétendu récemment M. Lebedeff, que, dans les décalages que nos mé- thodes nouvelles sont susceptibles de mettre en évi- dence, il faille renoncer à distinguer ce qui est dû à la dispersion cosmique de l'effet possible des phénomènes stellaires qui viennent d’être décrits ? Non assurément, car la possibilité de cette distinc- tion n'est pas, comme nous allons nous en con- raincre, moins évidente que celle de la méthode couramment employée en Astronomie pour séparer, par exemple dans le mouvement apparent d'une étoile, les effels de l’aberration de ceux de la nuta- tion et de la parallaxe annuelle. 1° Pour ce qui est de la « méthode des vitesses radiales », il suffira, pour éliminer l'effet des causes invoquées de décalage autres que la dispersion cosmique, de ne faire des mesures comparatives que sur des raies d'une même série; on éliminera évidemment, dans ce cas, l'effet dû à ces autres causes, puisqu'il est alors proportionnel à la lon- gueur d'onde. Dans leurs mesures de $ Cocher, MM. Belopolsky et Tikhoff ne se sont pas astreints jusqu'ici à opérer ainsi et ils ont fait leurs moyennes en employant des séries de raies différentes. Peut- être la difficulté d'obtenir des spectrogrammes stellaires contenant un nombre suffisant de raies nettes et mesurables retardera-t-elle un peu la réali- sation des mesures faites dans ces conditions nouvelles. 2° Pour ce qui est de la « méthode des images monochromatiques », le principe de la séparation 6r. 7.0 Doit de oh 1h 0 gif qzh Fig. 9. — Décalage produit exclusivement par la dispersion cosmique. des diverses causes de décalage des minima repose simplement sur la remarque suivante : Le retard ou l'avance relatifs de deux radiations produits par la dispersion dans le vide, pour une éloile donnée, ont évidemment une valeur constante quelle que soit la phase de variation de Péloile. Pour prendre le cas simple d'une étoile du type Algol, il est clair alors qu'un décalage du à la dis- persion cosmique entre deux courbes de lumière monochromatiques correspondantes commence et Gr 1.3 1.4 (RE 7.6 74 7.8 Vad 8.0 FSOp rs der. — 2h my 0? + +2h Fig. 10. — Décalage produit exclusivement par les causes résidant dans l'étoile. cesse brusquement avec la variation lumineuse; au contraire, le décalage dû aux autres causes invoquées dans le système même de l'étoile décroit progressivement de part et d'autre du minimum pour s'annuler au début et à la fin de la varia- tion lumineuse. Les figures 9 et 10 mettent clai- rement cette distinction en évidence : on a repré- senté par un trait plein la courbe de lumière d’une étoile connue du type Algol (BD + 123557) d'après les observations visuelles’. Je suppose que l’on vienne à constater (c'est le cas figuré) que le mini- mum d'une radiation monochromatique donnée a lieu vingt-cinq minutes après le minimum de la courbe moyenne précédente. Selon que ce décalage sera dû entièrement à la dispersion cosmique, ou exclusivement aux autres causes résidant dans l'étoile elle-même, la juxtaposition des deux courbes offrira un aspect analogue à celui de la figure 9 ou à celui de la figure 10. Or, j'ai montré ailleurs que l'on peut ramener géométriquement toutes les courbes à être rendues comparables d’une manière analogue; on voit, d'autre part, clairement, sans qu'il soit besoin d’y insister, comment, dans le cas d'un aspect intermédiaire, il sera possible graphi- quement de voir quelles sont respectivement les parts du décalage dues à la dispersion cosmique et aux autres causes. / En ce qui concerne les décalages des courbes monochromatiques qui paraissent, pour plusieurs étoiles, résulter, comme nous l'avons vu, des obser- vations de M. Tikhoff et des miennes, il serait, je crois, prématuré de vouloir leur appliquer dès main- tenant le critérium précédent. Il faut attendre d’abord que des observations plus nombreuses et ‘ Anpxé : Astronomie stellaire, &. I, p. 205. CH. NORDMANN — VITESSES DES VIBRATIONS LUMINEUSES DANS L'ÉTHER 361 répétées aient permis de fixer avec une plus grande précision la forme exacte en leurs diverses parties de ces courbes monochromatiques. C'est là peut-être un travail de longue haleine. Mais les astronomes n’en connaissent guère d’autres, et il ne faut pas oublier, par exemple, que, depuis le jour où la découverte de l’aberration permit de débrouiller la complexité des mouvements appa- rents des étoiles, il s’est encore écoulé près d'un siècle avant que l’on possédàt quelques données acceptables sur les parallaxes stellaires. lei la besogne sera sans doute moins longue : mous avons dès maintenant des méthodes précises de mesure et de réduction; une seule chose encore fait défaut : des observations nombreuses. XI. — ConcLustoN. Si l’on embrasse d’un coup d'œil l’état actuel de la question, tel que nous avons essayé de le définir en ces pages, on peut, semble-t-il, le résumer ainsi : 1° Les méthodes nouvelles récemment créées pour l’étude de la dispersion dans le vide per- mettent dès maintenant d’assigner à la valeur de celte dispersion une limite supérieure qui est plu- sieurs milliers de fois plus précise que celle qu'on était en droit de lui attribuer antérieurement ; 2 De la concordance qualitative des premiers résultats obtenus résulte une certaine probabilité pour que cette dispersion ne soit pas nulle et se produise dans le même sens que dans les milieux réfringents ordinaires ; 3° Nous avons été amenés à envisager divers phénomènes généraux, non encore signalés dans des étoiles périodiques, et qui procèdent de leur constitution physique; ces phénomènes rendent plus compliquée la recherche de la dispersion cos- mique. La méthode des images monochromaliques est susceptible de mettre en évidence les effets de ces phénomènes et de les séparer nettement, pour une classe nombreuse d'étoiles, de ceux de la dis- persion dans le vide. La continuation des recherches relatives à la dispersion cosmique est, semble-t-il, d'une haute importance à la fois pour la Physique et pour l'Astronomie. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. D'une part, elle nous renseignera exactement sur une des modalités les plus importantes de cet éther que la Philosophie naturelle tend de plus en plus à considérer comme «le Grand Tout » où germe l’ensemble des formes de l'Energie et de la Matière. En outre, si l'existence d’une dispersion cosmique est confirmée, de vastes horizons aujourd’hui fermés s’ouvriront pour l’Astronomie : la situation exacte du système solaire dans l'Univers stellaire, la forme, les dimensions de cet Univers sont pour nous des énigmes bien passionnantes, mais qui res- teront insondables tant que nos connaissances des parallaxes stellaires seront aussi limitées. Or, nous ne connaissons guère aujourd'hui que la distance exacte d’une cinquantaine d'étoiles voisines, et les méthodes de l’Astronomie de position ne laissent guère l'espoir de mesurer jamais les parallaxes très petites. Maisilest clair, en première analyse, que les déca- lages produits, entre les courbes monochromatiques des étoiles variables, par une dispersion lumineuse dans les espaces célestes, seront proportionnels à la distance de ces étoiles; et alors nous pouvons espérer connaître la distance des\ mondes les plus éloignés, puisque les parallaxes des variables seront d'autant plus facilementmesurables par la «méthode des images monochromatiques » qu'elles seront plus faibles. D'ailleurs, comme l’a fait remarquer M. Lipp- mann, l'existence d’une dispersion cosmique acces- sible à nos méthodes nouvelles ne saurait être attribuée aux gaz répandus dans les immensités célestes. Les lois bien connues qui relient le pouvoir absorbant au pouvoir dispersif des corps gazeux montrent, en effet, que toute dispersion mesurable el produite par des gaz cosmiques serait accom- pagnée d'une absorption tellement énorme que tous les astres et le Soleil lui-mème seraient com- plètement invisibles. La dispersion de la lumière dans les espaces célestes ne peut être qu'une propriété spécifique de l’Ether lui-même. Ch. Nordmann, Docteur ès sciences, Astronome adjoint à l'Observatoire de Paris, A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 L'ÉRUPTION DE L’ETNA EN AVRIL-MAI 1908 DEUXIÈME PARTIE : LES PRODUITS DE L'ÉRUPTION Dans un premier article’, j'ai décrit les phéno- mènes qui ont caractérisé la dernière éruption de l’Etna; je vais maintenant étudier les produits qui ont été amenés au jour. I. — LA LAVE CONSIDÉRÉE AUX POINTS DE VUE MINÉRALOGIQUE ET CHIMIQUE. Les laves récentes de l’Etna ont une composition assez monotone; elles se rapportent à la famille basaltique. Je me suis proposé de poursuivre, à l’aide de ce type pétrographique, les recherches que j'ai entreprises à la Montagne Pelée et au Vésuve, et par suite à l’aide de laves tout à fait différentes, sur.les variations de tout genre qu'un même magma est.susceptible de présenter, en fonction des divers phénomènes qui accompagnent sa venue au jour. Au point de vue des conditions de l'émission du magma de 1908, on peut considérer : 1° la coulée; 2° les projections, probablement hawaïennes, loca- lisées sur les bords de la fissure effusive; 3° les pro- jections stromboliennes, ayant rejeté des scories légères, extrêmement scoriacées, qui ont été en- trainées au loin. 1. Composition minéralogique. — Les matériaux émis dans ces diverses conditions présentent, au point de vue minéralogique, le caractère commun de renfermer les mêmes phénocristaux, qui, par suite, sont incontestablement d’origine intratellu- rique. Ils sont formés de plagioclases (65 °/, envi- ron d'anorthite), d’augite, de magnétiteet,en quan- tité très faible, d'olivine; ces plagioclases, peu zonés, sont très riches en inclusions vitreuses irrégulière- ment distribuées. Les variations que présente la lave émise dans chacune des conditions énumérées plus haut ne portent que sur la nature de la pâte. Le type le plus cristallin, trouvé dans la partie centrale de la coulée, est pauvre en verre; on y distingue des microlites d'augite et d’olivine, ayant sensiblement la même taille, des microlites de labrador de même dimension, et enfin un feutrage de microlites plus petits de plagioclases (20 °/, d'anorthite) et d'augite filiforme, accompagnés de nombreux grains ou cristallites de titanomagnétite. L'examen des types refroidis brusquement per- met de préciser l'ordre de cristallisation des micro- ! Voyez la Revue du 15 avril 1909, t. XX, p. 298 et suiv lites, Malgré leur apparence fort vitreuse, les sco- ries légères des explosions stromboliennes sont déjà riches en microlites de plagioclases, d'augite et d'olivine; par contre, la magnétite est à peu près absente; ces minéraux sont disséminés dans un verre brunâtre, qui, sur les parois des cavités scoriacées, possède une coloration plus foncée. Ces scories datent du début de l’éruption; elles pro- viennent, par suite, de la partie supérieure du magma arrivant de la profondeur à une haute tem- pérature. Leur abondance à la surface, non fondue, des névés prouve qu'elles ont été refroidies rapide- ment et ne permet pas d'admettre qu'elles aient continué à cristalliser après leur venue au jour. Ce fait démontre donc qu'une portion importante des microlites s'est formée dans la cheminée du volcan. Les bombes scoriacées bulleuses et les fragments de toute sorte, rejetés sur les bords immédiats de la fente par les jets hawaïens ou par les explosions stromboliennes, sont déjà plus cristallins que les scories précédentes, mais cependant encore riches en verre. Il en est de même pour des échantillons provenant de l'extrémité de la coulée, là où un éclusage, produit après l'arrêt presque complet de la lave, a donné naissance à des masses cordées, creusées de cavitésstalactiformes à parois vernissées. Ce sont des portions du magma ayant conservé une haute température sous la carapace solidifiée de la coulée et qui, une fois éclusées, se sont refroidies rapidement à cause de leur faible volume.On com- prend, dès lors, qu’elles aient la même structure microscopique que les blocs de projection, mais que, cependant, les gros microlites d'olivine, d’augite et de plagioclases y soient plus nombreux ; ils ont pu croître au cours de l'épanchement. La magnétite microlitique y est toujours presque absente. De ces diverses observations, il faut conclure que la cristallisation du magma microlitique s’est faite en deux phases : Une première, commencée dans les canaux du volcan et continuée pendant l’épanchement, à fourni de gros microlites et une quantité infime de magnélite. Le refroidissement moyennement rapide de la surface de la coulée a interrompu cette cris- tallisation et a brusqué la consolidation définitive, en déterminant la production de la presque totalité de la magnétite, accompagnée de cristallites d'au- gite et de feldspaths de petites dimensions. La cris- A: LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 363 tallisation de l'olivine microlitique, l'une des par- ticularités intéressantes de cette lave, est donc comprise entre deux venues d'augite et de feld- spaths. Dans la nomenclature pétrographique francaise, celte lave est une /abradorite augitique et pérido- tique; elle vient se ranger dans un groupe bien connu des laves de l'Etna. Dans aucune de celles-ci, l'olivine microlitique n'avait été signalée jusqu'ici; l'examen de roches provenant de coulées anté- rieures me fait penser que cette particularité miné- ralogique y est souvent réalisée. 2. Composition chimique. — Je donne ci-dessous les analyses faites par M. Pisani sur : a) la lave la plus cristalline; 2) les scories légères des explo- sions stromboliennes; c) une bombe très scoriacée: des explosions hawaïennes : a b c MOYENNE SIDE 49,75 49,71 50,40 49,95 Al*05 18,30 18,40 18,90 18,53 Fe°0* 2,85 1,93 2,65 2,48 FeO . MAT 6,28 6,96 5,82 6,35 MSC er 3,45 3,45 2,99 3,29 Ca0 . 9,76 9,80 9,41 9.65 Na°0 4,96 5,43 5,20 5:12 K°0 . 1,89 4912 1,54 1,72 TiO® . 2,45 9,58 2,58 2,54 RU 0,03 0,02 0,03 0,03 P. au feu. 0,40 0,0 0,10 0,17 Totaux. 100,12 99,70 99,62 99,83 On voit qu'il n'existe entre ces nombres que de faibles différences et que le magma ne présente pas de variations systématiques de composition. Co fait était à prévoir, d’ailleurs, si l’on fait état à la fois de la faible quantité de matière épanchée et des résultats fournis par l’étude des laves émises par la Montagne Pelée et le Vésuve, au cours d’éruptions ayant fourni une masse de matériaux bien plus considérable et, dans le premier de ces volcans, ayant eu une longue durée. Certaines de ces données concordent assez bien avec celles des analyses des laves de l'Etna anté- rieurement publiées ; elles sont, par contre, assez différentes pour quelques éléments; la teneur en alcalis notamment, et surtout en titane, y est plus considérable, celle en fer moindre; mais les ana- lyses dont il s’agit sont anciennes et il me paraît prudent de les refaire avec les méthodes modernes, avant de conelure à d’aussi grandes variations du magma en fonction du temps. Ces données placent la lave de l'Etna dans le groupe andose de la classification chimico-minéra- logique (1L.5.3.4) et au voisinage de la sa/emose ‘ Ces microlites, allongés suivant l'axe vertical, doivent ètre comparés à ceux que M. Michel Lévy a signalés dans les andésites et labradorites de la Chaine des Puys. (I1.6.3.4). d'orthose et de néphéline virtuelles; ilest très vrai- semblable que l'étude chimique des roches de l'Etna montrerait que leur ensemble se rapproche C'est une roche renfermant un peu beaucoup plus des roches alcalinés qu'on ne se le figure généralement, et qu'il faut les ranger dans Ja même province pétrographique que les laves célèbres de l'ile voisine de Pantellaria. à 3. Les cendres des explosions vulcaniennes du cratère. — Les cendres vulcaniennes du 20 mai, décrites plus haut, sont grises, à grains fins ; celles du paroxysme du 29 avril sont plus grossières, de couleur rouge. Il est possible de montrer que les unes et les autres ne sont pas constituées par des débris du magma neuf, mais qu'elles proviennent de la pulvérisation (par les explosions) des roches formant les parois du cratère, attaquées par les fumerolles acides. L'analyse suivante a été faite sur la cendre du 20 mai : SiO® . 51,8 CAO EE 1,55 AOS 18,45 | Na°O. . 3,52 Fe?05 4,97 REOMENE ds 1,61 FeO . 3064 TIOL ER EL | 2,45 MgoO . 2,99 P. au feu. 3,00 — 100,33 Cette composition se distingue de celle du magma neuf par une teneur moindre en chaux et en soude, par une proportion assez élevée des produits per- dus au rouge (comprenant un peu de soufre) et par l'oxydation plus grande du fer; enfin, il faut y ajouter environ 10 °/, de produits solubles, surtout constitués par du sulfate de chaux et des chlorures alcalins (y compris celui d’ammonium). Ces conclusions sur la nature des cendres fines des explosions vulcaniennes sont donc du même ordre que celles auxquelles j'ai été conduit par l’étude des produits de l'éruption du Vésuve; si, dans ce volcan, la composition chimique des cen- dres vulcaniennes est plus différente de celle des produits stromboliens qu’à l’Etna, cela tient à ce que sa constitution pétrographique est plus hété- rogène que celle du grand volcan sicilien. Toute différente est la cendre tombée sur Aci- reale le 29 avril, cendre que j'ai pu étudier grâce à l'obligeance de M. Gaetano Platania. Elle a eu cer- tainement pour origine les bouches récentes et non le cratère central. Elle est constituée par un mé- lange de poussière de scories noires récentes et de débris rubéfiés provenant des parois de la bouche de sortie. On voit que ce nouvel exemple vient confirmer la démonstration que j'ai faite à la suite de la ré- cente éruption du Vésuve, à savoir que l'étude d’une cendre voleanique n'a de signification pré- cise que s’il est possible d'établir par quel ordre de phénomène elle a été produite, et qu'une même 364 A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 éruption peut fournir des cendres de composition, à tous égards, fort différente. 11. — LES PRODUITS DE FUMEROLLES. L'une des particularités de l'éruption a consisté dans la faible intensité des phénomènes de fume- rolles. Les dégagements gazeux importants n’ont duré que peu de jours le long de la fente éruptive, et les quelques vapeurs qui s’élevaient de la coulée au lendemain de son arrêt étaient localisées en des points très limités, que j'ai trouvés encore actifs, lors de mon arrivée dans le Val del Bove. Cette pauvreté en fumerolles résulte non seulement de la brièveté des phénomènes explosifs eteffusifs!, mais encore de ce fait que le magma, naturellement pauvre en produits volatils, s'est écoulé rapidement sur une pente fort raide, pour s’étaler ensuite en touche de médiocre épaisseur, sur une surface péu accidentée, circonstances qui ont entraîné son rapide refroidissement. Je n'ai pu m'occuper que des produits solides déposés par les fumerolles, à l'exclusion de leurs produits gazeux. 4. Fumerolles à chlorures alcalins. — C’est seu- lement sur les bords de la fente effusive que j'ai rencontré, et en petite quantité, des dépôts cristal- Jisés, attribuables à ce type de fumerolles. Ils con- sistent en cubes cristallitiques (groupés suivant un axe ternaire) de chlorure de sodium, avec un peu de chlorure de potassium ettraces de carbonates et de sulfates alcalins. Bien qu’en ce point la tempé- rature de la lave consolidée füt encore de quelques centaines de degrés, au moment de mes observa- tions, il ne s’y produisait plus ni sublimation, ni dégagement gazeux appréciables; c'est là un exemple typique d’une fumerolle refroidie sans avoir évolué. Sur quelques points de la coulée, s'observaient des enduits blancs, pulvérulents, constitués par un mélange de chlorures et de sulfates alcalins; mais je n'ai pu en recueillir en quantité suffisante pour en faire une étude complète. 2. Fumerolles chlorhydriques. — La fissure effusive ne présentait pas d’autres fumerolles que celles qui viennent d'être signalées. Par contre, des fumerolles chlorhydriques étaient nombreuses aux alentours des bouches explosives, qui jalonnent la fissure entre les deux Serra Giannicola. Elles ne dégageaient qu'une très faible quantité d'un mé- lange suffocant de vapeur d'eau et d'acide chlor- * 1] semble résulter des observations de Silvestri que l'éruplion de 1883, comparable par sa brièveté à celle qui m'occupe ici, a élé, elle aussi, très pauvre en fumerolles. hydrique : la température la plus élevée était voi- sine de celle de la fusion du zine (412 C.). L'orifice des fumerolles était recouvert d’abon- dantes sublimations d'une couleur rouge orangé ; ce sont elles qui sont visibles en blane sur la figure 4 (p.301); leur examen m'a permis de déter- miner sous quelle forme minéralogique le chlorure de fer se trouve à l’Etna. Il y existe à l’état de chlorure ammoniacal (FeCl°.2 AzH‘CIL.H?0), de krémersite, minéral qui n'avait élé jusqu'ici observé qu'au Vésuve. Il forme des cristaux orthorhombiques ou des croûtes cristallines; je l'ai trouvé seul ou asso- cié à un peu de chlorure d’ammonium (salmiac). Au voisinage de ces fumerolles, il en existait d’autres, moins chaudes, ne fournissant que du salmiac et du soufre, généralement fondu ; elles représentaient le passage normal d’une fumerolle chlorhydrique au type sulfhydrique. J'ai observé, en outre, au bas de la coulée nord de la Serra Giannicola Grande, un point très limité où les vapeurs étaient légèrement acides (tempéra- ture un peu inférieure à celle de la fusion de l’étain) et où, cà et là, quelques cristaux de krémersite teintaient d'orangé des croûtes peu cristallines de salmiac. C’est là le seul exemple rencontré sur la lave de fumerolles renfermant du chlorure de fer. 3. Fumerolles à chlorure d'ammonium seul. — Sur cette lave se trouvaient, par contre, quelques groupes de fumerolles assez actives d’un autre genre"; leur température ne dépassait pas 200°C. et était généralement voisine de 100. Elles étaient complètement dépourvues de soufre, mais don- naient d'assez abondantes sublimations de salmiac en cristaux petits, mais nets [4 (211) et rarement p (001)|, incolores ou jaunâtres. Presque toutes déga- geaient un peu d’eau, à réaction alcaline, dont la condensation a permis de mettre en évidence une petite quantité de carbonate d’ammonium, corps déjà constaté par Fouqué et Silvestri sur la lave de l’éruption de 1865. La dissolution d'une dizaine de grammes de sal- miae m'a permis d'y reconnaître une quantité notable de fluor, y existant probablement sous forme de fluosilicate alcalin ; c'est la première fois que ce corps, assez fréquent au Vésuve, est constaté dans les fumerolles de l’'Etna. L'origine profonde du chlorure d’ammonium de toutes ces fumerolles est incontestable. L'absence complète de végétation dans la région où s’est pro- duite l’éruption élimine l'hypothèse d’une origine superficielle, qui est vraisemblable pour une partie des sels ammoniacaux des éruptions au cours des- 4 La plus active se trouvait au pied de la Serra Giannicola ; elle est visible sur la figure 15 (p. 305). A. LACROIX — L'ÉRUPTION DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 quelles (4865) la lave s'est épanchée dans la région boisée du volcan. Cette origine profonde est confir- mée encore par l'existence de ce même sel dans les cendres des explosions vulcaniennes du cratère. Les observalions qui précèdent sont conformes à celles qui ont été faites au cours de diverses éruptions de l’Etna (notamment en 1865) par Fou- qué’ et Silvestri?, car, si la krémersile n’y avait jamais été signalée, il n'est pas douteux qu'elle ne se soit produite dans toutes les éruptions anté- rieures. Il semble que la production de chlorure d’ammonium dans les fumerolles à acide chlorhy- drique, qui est si infime au Vésuve, soit, au contraire, constante et abondante dans ce type de fumerolles à l'Etna. On comprend dès lors pour- quoi, dans sa classification des fumerolles, Silves- tri”, qui se préoccupait surtout du volcan sicilien, ait pris ce sel comme caractéristique de ce type de fumerolles, alors que Fouqué, qui considérait la question à un point de vue plus général, ne le regardait que comme accessoire et pouvant même manquer. L'extrême brièveté de l’éruption explique que les fumerolles à chlorures alcalins, ne s’'élevant que de la lave fluide, n'aient été que très mal repré- sentées en 1908, et aussi qu'il ne s'y soit pas pro- duit en quantité notable de carbonate sodique, si fréquent dans les grandes éruptions de l'Etna (c’est encore une particularité de ce volcan). Enfin, il faut attribuer à la même cause l'absence de chlorure de cuivre et de son satellite habituel, la fénorite (et par suite de l’atélite, formée par l'attaque de celle-ci par l’acide chlorhydrique) ; ces minéraux, en effet, à l'Etna comme au Vésuve, n'apparaissent guère que dans les fumerolles ayant quelque durée. 4. Pseudo-fumerolles sur les névés.— Les pro- duits de projection volcanique renferment toujours, en quantité plus ou moins grande, des sels solubles, qui ne sont généralement pas visibles directement, mais qui apparaissent, sous forme d’efflorescences, sur le sol desséché de tous les ruisselets irriguant les matériaux récents. Les névés avoisinant les bou- ches de sortie, en particulier la bouche effusive, Diverses lettres écrites de Sicile au cours de l'éruption et insérées dans les Comptes rendus en 1865, et Rapport sur les phénomènes chimiques de l’éruption de l'Etna en 1865. Arch. Missions sc. et litt., 1866. ? Atli Accad. Gioenia di Sc. nat. Catania, 3° série, t. I, 1867, p. 53. * Silvestri divisait les fumerolles à chlorure d'ammonium en deux types : a) acides, température moyenne 350°, riches en acides chlorhydrique, sulfureux, sulfhydrique, vapeur d'eau, etc.; ces fumerolles, contenant du chlorure de fer et de l'hémalite, correspondent aux fumerolles chlorhydriques de Deville et Fouqué; b) alcalines, à température de 216 environ, riches en vapeur d'eau, acides sulfureux, sulfhy- drique : ce sont les fumerolles alcalines de Fouqué. mettaient en évidence le même fait d’une facon saï- Là où ils étaient recouverts seulement par une couche mince de scories et de lapilli, ceux- ci étaient, cà et là, teintés de blanc ou de jaune vif, déterminant ainsi des taches de couleur claire, qui donnaient de loin l'illusion d'une végétation. Le mécanisme de la production de ces sels est fa- cile à déméler. Les lapilli, chauffés par le soleil, déterminaient la lente fusion de la neige sous-ja- cente, à condition qu'ils fussent en couches très minces" : l’eau ainsi produite dissolvaitles sels con- tenus dans les scories. La solution saline montait par capillarité dans celles-ci et venait s'évaporer sur leur face exposée à l'air. Les sels grimpaient aussi, comme cela a lieu si souvent sur les bords d’un cristallisoir contenant une solution saline saturée ; ainsi se formaient des croûtes cristallines, essen- tiellement constituées par du chlorure de sodium, avec un peu de chlorures de potassium et d’ammo- nium et des sulfates correspondants : la couleur était due à un peu de chlorure de fer. Chaque fois que j'ai rencontré sur un petit fragment pierreux une croûte un peu plus épaisse que les voisines, j'ai pu constater que ce fragment était l'extrémité saillante d’un bloc plus ou moins gros, enseveli dans la neige. Il s'agissait donc là d’une concentration secon- daire de produits transportés par les explosions et comparables, par suite, comme origine, aux produits des fumerolles sans racine de la Mon- tagne Pelée; mais le mécanisme de concentration y était tout à fait différent *. L'éruption de 1879 a permis à M. H. de Saus- sure de constater la production, à la surface de la neige, de dépôts de véritables fumerolles ; il à vu sortir d'un névé de nombreux petits jets de gaz, provenant doute de fumerolles diffuses, cherchant un passage à travers la cendre sous- jacente. Elles produisaient sur la neige des dépôts riches en chlorure de fer, dont la nature minéra- logique n'a pas été déterminée. Par places, la fusion de la neige était suffisamment intense pour délayer la cendre qui la recouvrait et former, de loin en loin, des plaques de boue acide. sissante. sans III. — L’INDUSTRIE DE LA NEIGE A L'ÉTNA. Avant de terminer, puisque j'ai parlé à plusieurs reprises dans cet article de la neige de l’Etna, il 1 C'est à ce commencement de fusion qu'était due la cou- leur noir de suie des lapilli mouillés, visible sur la figure 25 (p- 312). Quand la couche de lapilli est épaisse, elle protège, au contraire, la neige contre l'action du soleil. ? A la Montagne Pelée, les matières accumulées dans les dépressions conservaient longtemps une haute température : les eaux pluviales, en pénétrant jusqu'à elles, étaient volati- lisées et entraînaient ensuite les sels qui venaient se su- blimer au voisinage de la surface. 906 A. LACROIX — L'ÉRUPTION A me parait utile de fournir quelques renseignements sur l'industrie à laquelle elle donne lieu et sur la- quelle M. le Professeur Buecca à bien voulu me donner d'intéressantes indications. Tous ceux qui ont fait l'ascension du sommet de l’Etna ont gardé certainement le souvenir des théories de mulets, rencontrées dans les étroits sentiers de la montagne, mulets chargés de la denrée glacée, dont les Sici- liens sont si friands. Au x1° siècle, à la suite de sa conquête de la Sicile sur les Sarrasins, Roger de Normandie éta- blit six évêchés dans l’île et les dota de riches pos- sessions. À celui de Catane (devenu plus tard archevéché), il donna l’Etna, de la cime à la plaine, sur le versant regardant la ville; cette dotation était grevée de l'obligation de pourvoir en neige Catane. Dans la suite des temps, les terres culti- vables de cette région devinrent peu à peu propriété des communes du Bois de la Montagne (Paterno, Biancavilla, Bronte, Randazzo, etc.). Mais l’arche- vêché resta propriétaire de la partie haute du volean, au-dessus du Monte Salto del Cane (1.450 m). et à partir de la Montagnola, jusqu'à la Serra delle Concazze, y compris tout le Val del Bove. C'est dans cette région que l’on exploite la neige qui s'accumule naturellement dans les barrancos, à partir de 1.500 mètres d'altitude; on appelle ceux-ci dans le pays des tacche(échancrures). L'ex- ploitation, faite au bénéfice de l'archevêque de Catane, comporte trois séries d'opérations : 1° En octobre, des ouvriers vont nettoyer les tacrhe, enlever les grosses pierres éboulées, les feuilles et les ordures laissées par l'exploitation précédente", 2° En hiver, de novembre à février, la neige tombe et s'accumule dans les {acche. Au mois de mars, une troupe d'ouvriers (40 à 60 hommes) se met à l'œuvre et détermine tout d’abord l'épaisseur de la couche de neige, à l’aide de tiges de fer gra- duées. Seules sont exploitables les portions dont l'épaisseur atteint au moins 3 mètres : on les déli- mite à l’aide de tas de cendre, recueillie dans le voisinage. Celle opération préliminaire terminée, le véritable travail commence; il ne peut être effectué que pendant la nuit et doit être interrompu le jour, le soleil faisant fondre la surface de la neige et rendant la besogne difficile. Éclairés par la lune ou par la lueur de torches, les ouvriers recouvrent la surface exploitable d’un lit uniforme d'environ 0%,30 de cendre, épaisseur qui est dou- blée sur les bords. Grâce à la faible conduetibilité de la cendre, celte couverture est suffisante pour protéger la neige contre les futures ardeurs du s0- La neige souillée d'impuretés est frappée d'une amende à"son entrée à Catane. DE L'ETNA EN AVRIL-MAI 1908 leil. La facca est ainsi prête; on en aménage quatre ou cinq suivant le remplissage des barrancos. L'entreprise de l'exploitation est faite d'ordinaire par adjudication ou de gré à gré avec l’archevêché 8 à 10.000 francs par an). L'adjudicataire est pas- sible d’une amende de 10.000 francs, pour le cas où il laisserait Catane manquer de neige. Afin d'éviter ce péril, à redouter dans le cas d'hivers pauvres en neige ou d'étés très secs et prolongés, on prend deux précautions : 4° on prépare des tacche à haute altitude; on ne les exploite qu'en cas d’absolue nécessité, car leur travail est pénible et coûteux; 2 on accumule artificiellement, dans une grotte grande et profonde (Casa delle neve, située à 1.620 mètres d'altitude), une grande quan- Fig. 1. — Exploitation d'une tocca de neïge. lité de neige, recueillie dans le voisinage (Tacea Cesarella et Tacca la Lupa). 3° Quand il s'agit d'exploiter la neige, une fois l'été venu, on la débarrasse d’abord de sa couche superficielle de cendre; puis, à l’aide d'instruments de fer, que l’on enfonce jusqu'à une profondeur de 1,50, on la divise en un réseau rectangulaire régulier. Ce travail est effectué pendant la nuit; le lendemain, la neige fond légèrement sous l'ac- tion du soleil; l'eau résultante remplit les sillons qui viennent d'être creusés. Elle se solidifie pen- dant la nuit suivante; il est facile alors de débiter celte neige en blocs parallélipipédiques, superfi- ciellement congelés. Ils sont enveloppés de feuilles de fougères et de châtaignier, mis en sacs et trans- portés, par paire, à dos de mulets (fig. 1), jusqu'à Nicolosi, d'où on les descend sur des Catane ou dans les villes voisines. chariots à A. Lacroix, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum national d'Histoire naturelle, D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 367 REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE [. — MALADIES DU FOIE. La pathologie hépatique a été, en ces derniers mois, l’objet d’un $i grand nombre de travaux qu'elle mérite d'occuper presque exclusivement la revue de cette année: l $ 1, — Foie et rate. La cellule hépatique a été étudiée à divers points de vue. Pour se rendre compte de ses altérations morbides, il fallait assurer les notions que nous avons d'elle à l’état normal. L'étude d’une cellule normale est toujours d’une extrème délicatesse. La plupart des cellules glandulaires sont d’une grande mutabilité pendant la vie; les maladies en aug- mentent beaucoup la fragilité. Après la mort, elles s’abiment et l’on ne peut plus faire état des altéra- tions qu'elles présentent. Il faudrait les étudier au milieu des humeurs normales, chose impossible puisque celles-ci courent les mêmes risques d’insta- bilité. On tourne la difficulté en les considérant dans un ‘milieu fixe, approchant le plus possible du sérum normal, ou bien en s'efforçcant de les fixer dans l'état où elles sont au moment défini où l’on veut les examiner. Le fixateur idéal serait celui qui conserverait à la cellule son intégrité à l'instant où il agirait. L'histologie dispose de réactifs qui rem- plissent plus ou moins complètement ces conditions. Avant d'étudier certains états pathologiques des cellules hépatiques, Noël Fiessinger a repris l'étude de la cellule normale. Celle-ci à un cytoplasma clair, parcouru par un fin réticulum formé de petites granulations, avee un noyau simple ou double, à peu près central. Dans ce noyau est un suc nu- cléaire, à réaction colorée basophile, dans lequel se pelotonne un fil de chromatine, et semé de grains, dont l'un, plus volumineux que les autres, constitue le nucléole, à réaction colorée acidophile. M. Fiessinger insiste sur ce point que la cellule hépatique est normalement claire. Elle ne prend l'aspect granuleux, en même temps que sa réaction acidophile, qu'après la mort. Aussi décrit-il trois stades de la dégénérescence cellulaire. Le premier est caractérisé par une condensation granuleuse acidophile du protoplasma, une légère atrophie de la cellule, un épaississement dela charpente cyto- plasmique, une multiplication des granulations, qui deviennent inégales et forment même de grosses granulations polyeyceliques. Le noyau semble normal. Le second stade est marqué par une dégéné- rescence atrophique granuleuse avec lésions du noyau. La cellule prend un aspect étoilé, dû à son atrophie progressive. Le noyau présente une affinité colorante fort grande; il forme un bloc coloré. Dans le troisième stade, la cellule s’emplit de vacuoles claires non graisseuses et de granulations grais- seuses. Le cytoplasma devient amorphe. Le noyau tend à se dissoudre. La cellule s’effile, n’est plus qu'une ligne et peut alors passer pour une cellule interstitielle. L'affinité colorante devient indif- férente. Le protoplasma n'est plus acidophile : la basophilie du noyau diffuse dans toute la cellule. Si les causes de ces dégénérescences cellulaires ne sont pas trop brutales, des cellules du foie voi- sines s'hypertrophient et l’on y voit apparaitre les figures de karyokinèse qui indiquent une régénéra- tion du tissu. La solution isotonique de chlorure de sodium respecte l'équilibre des tensions osmotiques intra- et extra-cellulaires. L. Launoy, en y maintenant la cellule du foie à la température ordinaire, à observé la conservation prolongée de ses caractères mor- phologiques et la stabilité de la chromatine de son noyau. 1 Mais les solutions chlorurées hyper- ou hypo- toniques altèrent plus ou moins rapidement la cel-: lule, et, selon les recherches d’Achard et Paisseau,: ces altérations varient suivant la concentration du sel. N. Fiessinger, expérimentant avec des produits toxiques, a vu qu'il fallait iei tenir compte non seu- lement de l’action du poison même, mais de la tonicité de sa solution. Le phosphore, poison pour- tant redoutable pour la cellule hépatique, ne déter- mine de lésions qu'une heure après son injection dans la veine porte, s’il est dissous dans l'huile. La toluylène-diamine est, au contraire, très rapidement hépatolytique. N. Fiessinger semble attribuer cette nocivité rapide à l’osmose. Il à essayé l’action de l'alcool, du chloroforme, du sublimé, du sérum d’anguille, du sérum hémolytique, et obtenu par diverses voies des dégénérescences cellulaires con- sidérables. Les mêmes résultats suivent les injec- tions intra-portales de cultures d'Eberth et de Gaertner. La fragilité de la cellule hépatique vis-à-vis des toxiques et des toxines est microbiennes- ainsi établie. Mais N. Fiessinger insiste sur son inégale fragilité. Les.cellules périphériques du lobule sont les plus altérées ; lules centro-lobulaires, mais, une fois atteintes; celles-ci dégénèrent plus vite. : Nous avons vu que, pour Fiessinger, la cellule hépatique normale possède un protoplasma clair. Or, d’autres auteurs ont décrit, au cours d'états pathologiques divers, l'état elair de la cellule hépa- puis ce sont les cel- 368 tique; Léon Bernard et Læderich l'ont rencontré | constamment dans leurs expériences sur la sup- pression incomplète des fonctions rénales. La description qu'en font ces auteurs est exacte- ment celle que donne Fiessinger de l’état normal d’une cellule hépatique. Ils disent même qu'à un fort grossissement « on reconnaît de suite qu'il ne s’agit pas là d'un processus de destruction ». Pour eux, ce n’est pas une lésion dégénérative. L'étal clair tiendrait à une surcharge de glycogène. Aussi concluent-ils que la suppression urinaire « brusque et complète » provoque constamment la disparition du glycogène et l'insuffisance du foie, tandis que, «incomplète », cette suppression entraine la sur- charge glycogénique. Ce dernier fait n’a pas été vérifié par les recherches très récentes de A. Ribot. En outre, Gilbert et Jomier, tout en reconnaissant l'état clair du protoplasma des cellules hépatiques normales, ne le tiennent pas pour lié nécessaire- ment à la surcharge glycogénique. Les résultats précédents ont été discutés par Rathery, Mayer et Schaeffer. Ces auteurs ont apporté certaines des raisons du désaccord qui règne entre les observateurs sur l’état clair de la cellule hépatique normale. Ils ont pu, en variant leur technique, obtenir, par certains fixateurs et colorants, une cellule hépatique normale « bourrée de granulations ». Ces granulations prennent par- fois l’aspect de bâtonnets. Certaines cellules sont particulièrement riches en grains volumineux. L'altération cadavérique provoque la conversion de ces granulations en autant de cavités régu- lières, incolores, de sorte que le protoplasma prend un aspect criblé remarquable. Rathery prouve que Paspect granuleux, conforme à la conception struc- turale cellulaire d'Altmann, est dû au fixateur et non au colorant. Comparant, en effet, dans un petit cube de foie, les cellules périphériques qui ont subi l’action directe du fixateur avec les cellules centrales qui ont été imprégnées moins vivement, il vit que les périphériques étaient granuleuses et que les centrales avaient l'aspect clair. Il repousse donc l’état clair comme étant l'expression exclu- sive de l'aspect normal de la cellule hépatique. L. Launoy, poursuivant des recherches sur l’au- tolyse aseptique du foie, a observé les mêmes différences d'aspect selon la nature du fixateur employé, la cellule, suivant le cas, se présentant à l'état clair ou granuleux. Son étude de la désinté- gration spontanée, à l'abri des microbes, de la cellule hépatique maintenue dans une solution chlorurée, isotonique, lui a montré que les cellules laissent passer dans le milieu ambiant le glucose, les sels, les pigments et les substances protéiques coagulables par Ja chaleur ; que les altérations cellulaires précoces consistent: en la disparition du D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE glycogène par fonte lente des plasmosomes, fines granulations presque exclusivement réparties autour du noyau, et en une accentuation du reti- culum cytoplasmique avec élargissement de ses mailles. Pendant tout ce temps, le noyau reste intact. Puis les altérations tardives surviennent vers la vingtième ou vingt-quatrième heure. Elles sont « véritablement l'expression de la nécrose autolytique ». Elles éclatent brusquement à la fois dans le cytoplasma, où apparaissent des corps -myéliniques, et dans le noyau, qui devient plus vivement colorable, puis se transforme en un bloc homogène et finit par ne plus prendre la couleur. Ce sont les réactions de la cellule hépatique vis- à-vis des agents infectieux, parasitaires ou toxi- ques, qui dominent toute la pathologie de l'organe. Ces réactions varient suivant les cas ; et, dans les formes chroniques des maladies, elles sont très difficiles à suivre. Dans les hépatites chroniques qui constituent le groupe si complexe des cirrhoses, on n'est même pas renseigné avec certitude sur le rôle de la cellule du foie. Selon les uns, elle serait altérée consécutivement à la prolifération anor- male du tissu conjonctif ; selon les autres, l’alté- ration cellulaire précéderait la sclérose conjonctive. Des raisons très sérieuses militent en faveur de cette dernière théorie. Les récents travaux de E. Géraudel sur les lésions initiales dans l'hépatite chronique donnent, cependant, la sclérose hépatique comme dérivant d’un processus autochtone. Ce serait, au début, un dépôt de substance fibrillaire autour des capillaires. Cette formation serait ana- logue à la dégénérescence amyloïde. Le dépôt atrophierait peu à peu le trabécule hépatique et finirait par effacer le capillaire hépatique intertra- béculaire. Dans ces scléroses, Géraudel à trouvé constamment des ilots d'hyperplasie parenchyma- teuse. Très considérable dans les cirrhoses hyper- trophiques, celte hyperplasie serait très limitée dans les cirrhoses atrophiques. Le foie cirrhotique: tire les modalités de son aspect des proportions. variables du tissu scléreux et du tissu hyperpla- sique. Il n'y aurait donc plus lieu, d'après Gérau- del, de faire les distinctions anatomiques anciennes de cirrhoses veineuse, artérielle, biliaire et lym- phatique. Souvent, les cirrhoses sont dues à une intoxica- tion. La plus répandue de toutes, la cirrhose alcoo- lique, en est l'exemple le plus typique. Fiessinger x pu déterminer, au moyen du chloroforme, une intoxication expérimentale chez le lapin, aboutis- sant en quatorze mois à une cirrhose très accusée et donnant au foie l'aspect macroscopique du foie clouté. I'intérêt de son travail réside dans ce fait qu'il a poursuivi les étapes du processus morbide au moyen de prises aseptiques de particules hépa- D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 369 tiques au cours de la vie. Il arrive à cette conclu- sion, dont nous parlions plus haut, que le paren- chyme hépatique est atteint le premier et que la lésion cellulaire précède la lésion interstitielle. C'est un fait commun que, dans les cirrhoses du foie, la rate présente des altérations importantes. Dans la cirrhose chloroformique, la rate a été trouvée très grosse. La rate, organe hématopoïé- tique, subit comme le sang l'influence du trouble hépatique. Et le sang, étudié, chez les cirrhotiques, par A. Gilbert et Chiray, a montré une diminution totale de l'albumine. Normalement, le taux albu- mineux du sérum est voisin de 72°/,; dans la cirrhose hépatique, il tombe à 66 °/,. La réunion dans un même syndrome de troubles du foie, de la rate et du sang a été l’origine d'observations très curieuses. Jadis Hayem avait groupé sous le nom d'ictère chronique spléno- mégalique divers éléments morbides caractérisés par l’ictère, l’'anémie, la splénomégalie et une hyper- trophie plus ou moins accusée du foie. Plus tard, on pensa que cette affection était une manifestation de l'hérédo-syphilis. Léon Bernard à publié un cas d'ictère splénomégalique où la syphilis eut un rôle certain. Deux des sujets qui avaient servi à la descrip- tion ancienne de Hayem ont été observés de nou- veau par lui au point de vue de l’état de leur sang. Il constata chez eux une diminution de la résis- tance globulaire, une tendance à la destruction des hématies. L'hémolyse est une des conséquences connues de l’ictère. Mais Hayem, remarquant que, d'une part, des hémolyses très accentuées peuvent ne pas déterminer d'ictère et que, d'autre part, cer- taines formes d’anémie pernicieuse avec ictère acholurique ne coïncident pas avec la fragilité globulaire, proposa de faire une catégorie spéciale d'ictères sous le nom d'ictères hémolytiques. Ce fut là le point de départ d'études très impor- tantes et approfondies par Chauffard, Widal, Abrami, Brulé, Vaquez, Giroux, etc. D'ordinaire, la jaunisse est due à la résorption des principes colorants de la bile. Cette résorption a lieu quand le cours de bile est intercepté ou tout au moins gêné, comme il arrive, par exemple, quand un calcul obstrue les voies biliaires ou qu'une tumeur les comprime; mais elle peut aussi coïn- cider avec la perméabilité des voies biliaires, quand la consistance, l'écoulement et la constitution de la bile ont été modifiés. D'où plusieurs variétés d'ictère. Parmi ces conditions diverses, modificatrices de la bile, il en est une qui est réalisée par la des- truction excessive des globules rouges du sang. Le sang réagit nécessairement sur les qualités de la bile. Qu'est-ce que celle-ci, sinon du sang chargé de matières alimentaires assimilables et traité par la cellule hépatique? Chauffard a donné des ictères hémolytiques les caractères suivants : fragilité globulaire, micro- cytémie, hématies granuleuses. On les observe soit dans l'ictère congénital hémolytique de Chauffard, soit dans l'ictère hémolytique acquis de Widal, Abrami et Brülé, soit dans l’ictère chronique spléno- mégalique de Hayem, soit encore dans certaines formes d'anémie pernicieuse avec fragilité globu- laire. Suivant les descriptions des auteurs précé- dents, ces ictères hémolyliques revêtent des formes cliniques variables. L'ictère est généralisé, plus ou moins accusé, soumis à des variations et à l'in- fluence d'une émotion ou d'une fatigue. Il varie avec les phénomènes de déglobulisation. Get ictère: ne s'accompagne ni de décoloration des selles, ni de passage de pigments biliaires dans l'urine : ik est acholurique. Le foie lui-même ne semble pas modifié. La rate, au contraire, est le plus souvent grosse. L'ictère hémolytique congénital s'observe sur divers membres d'une famille et frappe des générations. successives. Il est, en effet, compatible avec une longue survie et avec une vie active. L'ictère hémolytique acquis semble atteindre de préférence la femme et suivre des troubles intes- tinaux ou des hémorragies. Il est parfois consécutif à un véritable ictère d’origine biliaire. Dans ces états, l'anémie est constante, souvent très accusée. Elle présente des caractères spéciaux. Le nombre des globules et la richesse en hémoglo- bine sont diminués dans de faibles proportions et les indices de la réparation sanguine sont nombreux et frappants : ce sont la chromatophilie des héma- ties, l'inégalité de leurs dimensions, appelée aniso- cytose, la fréquence des éléments myéloïdes et l'abondance des hématies granuleuses. Chez ces malades, l'équilibre entre la destruction et la régé- nération du sang se maintient plus ou moins bien et règle les modalités cliniques. Pour avoir une idée du degré de la fragilité des globules dans les ictères hémolytiques, Chauffard, Vaquez ont essayé la résistance du sang vis-à-vis des solutions salines hypotoniques. Normalement, l’'hémolyse commence quand la solution chlorurée sodique est de 4,2 à 4,8 °/,, c'est-à-dire assez for- tement hypotonique. Chauffard, certaines observations d'hémolytiques, observa son début dès que la solution atteignait 6 °/,,. Au moyen d’un procédé simple, en débarrassant les hématies de leur plasma, par décantation, Widal, Abrami et Brulé obtinrent un commencement de destruc- tion globulaire avec des solutions chlorurées à 8 °/,,. Dans certains cas mêmes, l'hémolyse se produit dans des milieux isotoniques. dans 370 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE —————————————————— mm eZEZEZELEpe Le phénomène de début de l’altération sanguine semble être marqué par l'apparition des hématies granuleuses. Chauffard et Fiessinger ont montré que c'est là une réaction, un indice d’une réno- vation sanguine anormale. Des techniques de colo- ration sur lesquelles nous ne pouvons insister révèlent ces modifications des hématies. À ces caractères, Widal, Abrami et Brulé ont ajouté celui de l’auto-agglutination des globules : les héma- ties sont agglutinées par leur propre sérum. Minkowski, Chauffard font jouer à la rate le rôle prépondérant. Pour Widal, Abrami et Brulé, les lésions spléniques ne seraient que secondaires. L'hypertrophie de la rate serait la conséquence de l’activité excessive qui lui est imposée. Le foie Mui-même n'aurait qu'un rôle passif : la bile serait plus richement colorée à cause de l'élimination plus grande des déchets provenant de la destruc- tion des globules. Quant à la fragilité globulaire, qui domine tout ce processus, on ne sait à quoi elle est due, car on ne trouve souvent chez ces sujets ni infection antérieure, ni parasitisme. Ce sont les phénomènes toxiques qui semblent prévaloir, parce qu'on con- nait des faits expérimentaux, comme l'intoxication par la toluylène-diamine, qui s'accompagnent d’une hémolyse considérable. $S 2. — Bile et voies biliaires. L'étude des infections biliaires, de la lithiase biliaire et de leur traitement a été, depuis vingt- cinq ans, l’objet de progrès continus. On sait aujourd'hui que la bile, dans la plupart des états infectieux, peut contenir des microbes, soit spécifiques de l’état correspondant, soit asso- ciés. Baldwin a ajouté une page intéressante à ces travaux en considérant les modifications de la bile au cours de certaines infections. S'appuyant sur ce que la cholestérine de la bile vient en majeure partie de la dégénérescence des épithéliums vési- culaire et biliaire, l'auteur américain fait de la lithiase une maladie locale des voies biliaires, plutôt qu'une maladie constitutionnelle. Rappe- lons que c'était là une affirmation déjà presque aussi ferme sous la plume de Besnier en 1864. Baldwin, sur 225 échantillons de bile, en a trouvé 72 d’une composition anormale en choles- térine et en calcium, bien qu'il n’y eût aucun phé- nomène hépatique ou biliaire. Dans la cholécystite au début, la proportion de cholestérine est un peu plus forte. Celle-ci augmente beaucoup quand l'évacuation de la bile est gènée et que les déchets épithéliaux sont abondants. L’excès de cholesté- rine ne se dissout pas dans la bile : il y est à l’état de suspension. Une ébauche de choléeystite est lréquente dans la fièvre typhoïde, la pneumonie, les suppurations. Il y a dans ces états une desqua- mation épithéliale plus accentuée, et parfois des lésions inflammatoires de la vésicule. Si la bile coule bien, tout finit par guérir; s'il y a rétention plus ou moins marquée, la cholestérine se préci- pite et sert de point de départ aux calculs. La précipitation de la cholestérine est done une con- séquence de la présence des agents infectieux. D’autres auteurs sont arrivés par d’autres voies à la même conclusion finale. C’est ainsi qu'Exner et Hejrovsky ont établi que les sels biliaires sont rapidement décomposés par les agents infectieux, surtout par le bacille typhique et le colibacille, Les microbes, au contraire, ont peu d’aclion sur les savons et les acides gras. Cessavons sont, d'ailleurs, moins abondants dans la bile qu'on ne l’admet généralement. Exner et Hejrovsky mettent done la précipitation de la cholestérine et sa consé- quence, la formation des calculs, sur le compte de’ la diminution de la teneur de la bile en sels biliaires: Quant aux calculs, depuis longtemps on connaît leur flore microbienne. Des recherches récentes de Gilbert et Lippmann ont complété ces notions, en y ajoutant un certain nombre d’anaérobies. En effet, sur 16 calculs biliaires examinés au point de vue bactériologique, ils ont trouvé 7 fois des microbes aérobies et surtout du colibacille, et 13 fois sur 16 des microbes anaérobies d'espèces variées. Les caleuls biliaires contenant des mi- crobes s'observent dans la proportion de 82 °/. Jadis, on croyait que les microbes remontaient de l'intestin le long des voies normales de la bile jusqu'à la vésicule ou au foie. Quand, en 1892, je tentai de différencier les voies que suivent les divers microbes pour gagner les canalicules bi- liaires et le lobule hépatique et que j'indiquai la voie sanguine comme une de leurs voies impor- tantes, je rencontrai beaucoup d'objections; on était alors à la voie ascendante presque exclusive. Aujourd'hui, après les travaux allemands surtout, la voie sanguine réunitdes partisans plusnombreux. Lemierre et Abrami ont démontré le passage facile du bacille d'Eberth du sang dans les voies biliaires. Ces expérimentateurs ont injecté une émulsion du bacille d'Eberth dans la veine margi- nale de l'oreille du lapin. Très tôt après cette injec- tion la bile contient le bacille, mais celui-ci dispa- raitrait au bout de six jours de la vésicule. Ce fait est curieux, parce qu'il est reconnu que l'Eberth est susceptible de persister très longtemps dans la vésicule. Dès les premiers jours, là couleur et la consistance de la bile se modifient. Elle prend un aspect purulent. En même temps, les parois de la vésicule s'altèrent. Enfin, les lésions se réparent. Lemierre et Abrami tendent à admettre que le bacille est amené dans l'intestin par la bile. Ils D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE n'ont pu obtenir d'infection ascendante par la contamination alimentaire des animaux en expé- rience. Ils pensent que l'infection biliaire se fait presque exclusivement par la voie sanguine, surtout dans les infections intenses. Ce même mécanisme d'infection descendante peut être appliqué à d’autres microbes variés. Au premier rang de ceux-ci, je crois qu'il faut placer le pneumocoque. L'examen bactériologique du sang est d'une utilité incontestable au cours des infections bi- liaires. Il sert à préciser la nature de l'affection. Une belle démonstration en a été donnée par Roger et Demanche. Dans un cas de cholécystite très grave (mais qui finit par guérir), Survenue chez une jeune femme à la suite de coliques hépatiques, ces auteurs ont tiré du sang un bacille du groupe para- typhique B. Une culture de ce bacille était agglu- tinée rapidement par le sérum de la malade, même à très faible dilution, au 4/1000°. À 1/500°, ce sérum agglutinait trois échantillons différents du bacille paratyphique B, mais n’agglutinaitni l'Eberth vrai, ni le paratyphique A. Dans des inoculations de contrôle, Roger et De- manche ont pu déterminer des angiocholites et des cholécystites suppurées par l'injection directe dans les voies biliaires de ce paratyphique B. Injecté dans les veines périphériques, il produisit des abcès microscopiques du foie, mais d’une facon inconstante, dans la moitié des cas environ. Injecté dans la veine porte, il fit des abcès miliaires hépa- tiques et de la cholécystite suppurée. Infections aiguës, infections larvées, lithiase, les microbes peuvent déterminer. Quelquefois même, des phénomènes plus singuliers peuvent suivre leur invasion. C'est ainsi que Pende à publié récemment deux cas de cholécystite accompagnée de la présence de gaz dans la vésicule. Dans l’un, le pneumocholécyste était dû à la communication de l'intestin avec la vésicule, consécutivement à une perforation de cette dernière; dans l'autre, l'infection était purement gazogène, due au 2. per- fringens associé au col bacille et au staphylocoque. Le diagnostic clinique avait été possible grâce à un tympanisme excessif de la région vésiculaireé. Non seulement la lithiase et ses complications retentissent sur le foie, mais encore elles peuvent avoir une répereussion sur le pancréas. W. Mayo, l’un des chirurgiens les plus actifs et le mieux or- ganisés des États-Unis, a signalé que, sur 2.200 opé- rations sur les voies biliaires, 141 fois il avait trouvé le pancréas alteint. Sur 100 affections pan- créatiques, 81 furent reconnues consécutives à la lithiase biliaire. La coïncidence de la pancréatite est plus grande avec les affections du canal cholé- doque et du canal hépatique qu'avec celles de la vésicule. Très rarement le pancréas entier est les | | | 371 altéré; presque toujours la lête seule est lésée. A propos de la stéato-nécrose, Mayo ajoute qu’elle ne se produit que par addition au sue pancréatique normal de de Ja muqueuse duodénale. La lithiase biliaire détermine surtout là forme interlobulaire de la pancréatite interstitieHe. | Aujourd'hui, le‘traitement chirurgical a pris dans la thérapeutique de la lithiase une part presqué prépondérante. Pour péu qu’elle se complique ou menace de causer une obstruction chronique, é’est à la chirurgie qu'il faut recourir. Mais, s'ilest dans la plupart des cas aisé de libérer la vésiculé, il n'en est plus de même des voies elles-mêmes, des canaux d’excrétion de la bile hors du foie, Ceux-ei se composent essentiellement d'abord d'un tronc unique qui recueille toute la bile qui lui est amenée des parties profondes du foie ; ce tronc est dû ordi- nairement à la confluence de deux branches qui se soudent très près du hile de l'organe et constituent le canal hépatique. Il se bifurque plus loin en deux canaux, dont l’un, le cystique, se renfle en un eul- de-sac pyriforme qui est la vésicule, et dont l’autre se rend à l'intestin sous le nom de cholédoque. On peut observer l’enclavement d’un caleul en chacun des points de ce système de canaux; et, comme l'opération a pour but d'enlever ce calcul, le €hi- rurgien est obligé de se rendre un compte exact de la disposition et de la situation de ces canaux : ce qui est pratiquement fort malaisé au fond d'un champ opératoire profond et limité. Bien des mécomptes ont eu leur cause dans la variabilité anatomique des voies biliaires : aussi a-t-on cher- ché à en mieux définir la disposition anatomique. Le très instructif travail de Ruge concerne cette recherche. Sur 43 sujets, Ruge a observé quinze fois la convergence à angle aigu de l'hépatique et du cystique, neuf fois un véritable accolement de l’hépatique et du cystique; seize fois, il a vu le cystique former une longue spire autour de l’hépa- tique, avec adhérences fréquentes des deux conduits entre eux ; trois fois, il a trouvé le confluent des deux ferments venus de la bile ou canaux dans le pancréas mème; une fois, le canal cystique était double; trois fois, le canal hépatique naissait par trois branches. Le cholédoque est constamment en rapportavec le tissu pancréatique : ce rapport n'a manqué que deux fois dans la série d'observations de Ruge. Je n'ai cité ces variétés que pour rendre compte de la difficulté qu'éprouve le chirurgien à explorer les voies biliaires, quand leur cathétérisme est nécessaire. D'ailleurs, malgré les apparences, la vésicule elle-même, souvent si abordable, donne lieu à des surprises singulières. Elle peut être masquée, ou bien prendre un développement extraordinaire, tomber dans la fosse iliaque, simuler une affection 312 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE appendiculaire, etc. Lowie a récemment observé un déplacement rare du cholécyste. Une tumeur était apparue avec les signes cliniques d'un rein kystique ou néoplasique. Le champ opératoire fut donc choisi, non à l'hypochondre, mais à la région lombaire. Au cours de l'opération, on s'aperçut qu'il s'agissait, au lieu d'un rein, de la vésicule biliaire très développée et attirant en arrière le foie lui-même. Ce développement de la vésicule tenait à une obstruction du canal cystique par un calcul enclavé, et, comme les canaux hépatique et cholé- doque étaient tout à fait libres, cela explique qu'il n'y eut point de décoloration des fèces, ni le moindre phénomène clinique hépatique. Les difficultés sont encore très grandes quand, à des signes d'inflammation de la vésicule, viennent se mêler des symptômes appendiculaires. Thévenin a étudié ces cas complexes. Il à vu, au cours de l’entérocolite et de la fièvre typhoïde, la vésicule et l'appendice lésés à la fois ou l'un après l’autre. Généralement le point de départ est vésiculaire, et de proche en proche l'infection devient péricholé- cyslique, sous-hépatique, puis appendiculaire. Mais, dans ces cas, les lenteurs et embarras du dia- gnostic sont peu compromeltants, car il est préfé- rable souvent de ne pas intervenir trop hâtivement. Avant d'en finir avec cette question médico-chi- rurgicale de la lithiase biliaire, indiquons les résul- tats thérapeutiques qu'a rassemblés Gosset dans un très intéressant et original mémoire de tech- nique chirurgicale sur « la cholédocotomie avec drainage de l’hépatique dans la lithiase des voies biliaires principales ». Groupant les statistiques de seize chirurgiens : Kehr, Mayo, Mayo Robson, Czerny, Poppert, Kôrte, Bramann, Garré, Kunmel, Kocher, Terrier, Quénu, Lejars, Hartmann, Pauchet, Gosset, il obtient un total de 1.124 observations d'opéra- tions pratiquées dans la lithiase des canaux biliaires. Elles donnèrent lieu à une mortalité de 12,56 °/,. Et celle-ci est due surtout à l'infection, à la myocardite, à des complications pulmonaires et à l'hémorragie. $ 3. — Kystes hydatiques. On sait que cette affection est due au développe- ment dans l'organisme des embryons du Z#ænia Echinococcus, hôte parasite de l'intestin du chien, où il vit à l’état adulte. À l'état larvaire, il forme une vésicule, dont le bourgeonnement intérieur produit d'autres vésicules secondaires, qui occupent la cavité de la vésicule primitive, dite vésicule- mère. Et c'est à cet élal qu'il vit chez un grand nombre d'animaux domestiques : mouton, chèvre, bœuf, chameau, lapin, rat, porc, cheval, ete., et aussi chez l’homme. Quant un anneau mûr de ce tænia a quitté l'intestin du chien et que l’un des œufs qu'il contenait arrive, véhiculé par un pro- duit alimentaire quelconque (légumes crus, salade), dans l'estomac de l’homme, le suc gastrique dissout la coque de l'œuf et met l'embryon en liberté. F. Devé, qui a fait une longue série de très belles études sur l’échinococcose, a récemment montré que l'inoculation directe, dans le tissu cellulaire sous-cutané, d'anneaux mürs de 7. Æchinococcus permet à l'embryon hexacanthe de produire, au point mème de l'inoculation, une vésicule hyda- tique. Ainsi ces anneaux n'ont même pas besoin d’être attaqués par les sucs digestifs pour mettre les embryons en liberté dans l'organisme. C'est le foie qui est le siège le plus fréquent de l'hydatide. Une fois l'embryon fixé dans son paren- chyme, il s'enkyste et le développement de la vési- cule se poursuit. Elle refoule de toutes parts les cellules hépatiques voisines : aussi voit-on toujours, à la périphérie des kystes hydatiques, un étirement, une Jlamellification des trabécules, qui peut aller jusqu'à l’atrophie et à la disparition complète des cellules hépatiques. En même temps, une hyper- trophie compensatrice s'observe dans les portions saines de l'organe, comme l’a ‘signalé jadis Zadoc Kahn dans son étude sur la régénération du foie. Cranwell à attiré l'attention sur la sclérose hépa- tique consécutive à l'intervention sur le kyste; mais cette sclérose se développe même avant tout acte opératoire. Si elle est trop considérable et mul- tiphiée sur divers points, elle peut aboutir à l'in- suffisance hépatique par une véritable cirrhose atrophique. Cranwell attribue cette sclérose à l’in- fluence des toxines émanées des hydatides, à la suile de fissures survenues dans les kystes. Les observations de Cranwell, parmi lesquelles on remarque un cas rare de kyste hydatique de la face convexe du foie avec saillie dans la cavité thoracique et rupture avec généralisation péri- tonéale, confirment ce que nous savions sur les causes du semis hydatique dans le péritoine. Ses constatations sont précieuses, étant faites dans un: pays qui, comme l'Argentine, est favorable, par l'abondance de ses élevages de moutons, à l'étude biologique et thérapeutique du 7. Æchinococeus. Rapportons à ce dernier propos les résultats de sa statistique chirurgicale. L'opération lui a donné sur 98 cas 38 morts, 34 guérisons et 26 résultats douteux dans la péritonite échinococcique. Le kyste hydatique, représenté par un être vivant, n'a aucune raison, pendant son développement normal, d'être envahi par la suppuration. Mais à un cerlain moment, soit que le parasite souffre, soit qu'un incident mécanique survienne, la vésicule, petite ou grosse, peu importe, se fissure. Le kyste ne se rompt pas, s'il ne trouve une communication éventuelle avec une cavité où un conduit quel- É D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MEDECINE 373 . conque; mais, dès lors, il devient susceptible de recevoir une contamination infectieuse du fait des agents pathogènes en cireulalion presque constante dans l'organisme de l'hôte. C’est pourquoi il est fréquent de trouver dans le pus provenant d'un kyste hydatique suppuré une flore microbienne variée. Quelquefois même, il se forme dans le kyste non seulement du pus, mais du gaz. C'est ainsi que M. Garnier a trouvé récemment dans un kyste suppuré et gazeux un microbe jusqu'ici inconnu. Il forme un bâtonnet renflé, des agglomérats de petites masses disposées en groupes rayonnants,. Dans les cultures, ce microbe se développe en grains soudés en chapelets, d'où le nom proposé par Garnier de B. moniliformis. Ce bacille, inoculé aux animaux, les tue lentement, en provoquant une diarrhée chronique. Il est souvent difficile de découvrir un kyste hydatique, quand il est peu développé, enfoui dans la masse d’un organe ou hors d'atteinte de l’explora- tion clinique. Jadis, quand on soupconnait une tumeur de ce genre, on recourait à la ponction avec un trocart aspirateur. Mais il est aujourd'hui démontré que cette pratique est dangereuse, même avec un trocart très fin, qu’elle peut être suivie de l’inoculation dans les régions voisines, et princi- palement d’un véritable semis miliaire dans le péritoine, quand il s’agit d’un kyste du foie. Aussi a-t-on accueilli avec une grande faveur la notion de l'éosinophilie concomitante des kystes hydatiques. Le sang, chez les porteurs d’échinocoques, contient des cellules blanches, dont l'aspect et surtout les réactions chromatiques sont caractéristiques; ce sont les leucocytes éosinophiles. Malheureusement, ce phénomène ne peut encore être tenu pour constant et il peut se produire dans des cas où le T. Echinococcus n’est pas en cause. Néanmoins, il élait fort important à contrôler et à étudier. Pour Wagner, l’'éosinophilie progresserait au fur et à mesure que le kyste vieillit. Il a observé un kyste septique du foie, rompu dans les voies bron- chiques, où les éosinophiles sont progressivement montés de 2°/, à 37 °/,,etun mois après à 64 °/,. La rupture du kyste augmente l’éosinophilie dans de notables proportions. Dans un cas de Sabrazès, de 2°/, elle atteignit 9 °/,;au moment de la rupture. L'éosinophilie est presque nulle quand la poche du kyste est intacte. Elle semble proportionnelle à la suppuration. Wagner insiste sur la faible éosi- nophilie que peuvent provoquer des médicaments comme l’antipyrine, la phénacétine, le camphre, etc. D'où le précepte de ne faire cette recherche que chez des sujels qui ne sont soumis à aucune médi- cation. Rossello a fait des constatations analogues. Il évalue à 4°/, en moyenne l'éosinophilie dans le cas d’hydatide vivante. D'autre part, Boidin et Fiessinger ont recherché les causes de la production des cellules éosinophiles dans la maladie hydatique. Dans la paroi d'un kyste du foie, ils ont trouvé les éosinophiles qui avaient déjà été signalés par Chauffard et Boiïdin. Ils sont à noyau unique, condensé el d’une colora- tion intense. Ils se trouvent parmi des cellules embryonnaires agminées dans la paroi kystique. Les auteurs pensent que les éosinophiles proviennent de ces amas et se chargent de granulations. Les éosinophiles ont manqué dans un autre kyste, qui n'avait pas donné lieu à l’éosinophilie sanguine. Dans ce cas, la paroi kystique était très selérosée, Son imperméabilité relative s’opposait peut-être à l’éosinophilie. Boidin et Fiessinger pensent que les toxines fil- trant à travers la paroi attirent là des leucocytes qui se transforment en éosinophiles. Si ceux-ei sont nombreux, ils sont charriés dans la circeula- tion générale. L'éosinophilie serait donc propor- tionnelle à la toxicité du liquide et à la perméabilité de la poche kystique. Dans un autre ordre d'idées, on s’est aussi adressé à l'étude du sérum pour arriver au diagnostic de l’échinococcose. Des méthodes de laboratoire per- mettent, en effet, de rechercher dans le sérum la présence d'anticorps. Appliquée par Weinberg au diagnostic de la maladie hydatique, cette méthode a donné des résultats positifs, jusqu'ici satisfai- sants, dans plusieurs essais concernant tantl'homme que les animaux (mouton, chameau). II. — HySTÉRIE. La confusion qui n'a cessé de régner dans les conceptions diverses de l’hystérie appelait une dis- cussion générale, propre à ramener le sujet dans des limites plus raisonnables. On finissait, en vérité, par donner à ces états hystériques une extravagante extension. La discussion qu'a entreprise la Société de Neurologie en avril dernier fut à tous points de vue profitable. Nous lui devons surtout la mise en lumière des travaux de M. Babinski, qui, en montrant la division et l’égarement des idées courantes, avait soumis les phénomènes dits hystériques à une cri- tique sévère et abouti à une revision sage. M. Dupré fut chargé de présenter un programme de discussion. La Société, presque unanimement, admit qu’une catégorie très importante de troubles hystériques, tels que les paralysies et contractures, les anesthésies et hyperesthésies, des perturba- tions des sens, du langage, des phénomènes viscé- raux mêmes étaient capables soit d'être reproduits fidèlement, soit de disparaître par la suggestion. A vrai dire, la plupart de ces manifestations ne compor- taient pas, pour l'observateur impartial, de carac- 374 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE tères de certitude. Parmi elles, une de celles qui peuvent le plus facilement tomber sous le contrôle, c’est la contracture. Que celle-ci soit volontaire ou non, on peut, en effet, toujours la constater : or, la contracture hystérique se résout pendant le sommeil réel. Les stigmates hystériques consistent : en l'abo- lition de la sensibilité eutanée et des organes des sens d’un seul côté du corps (hémianesthésie sensi- tivo-sensorielle); dans le rétrécissement du champ visuel; dans le fait paradoxal de plusieurs images d'un même objet en le fixant avec un seul œil (polyopie monoculaire), — sans que le sujet ait la moindre anomalie dans ses milieux réfringents ; — dans la difficulté de percevoir certaines couleurs (dyschromatopsie) ; dans l'abolition de certains ré- flexes sensitifs normaux, comme ceux du pharynx,: du conduit auditif, de la cornée; dans la présence de zones hystérogènes. Tous ces stigmates ont été soumis à la discussion; et il en est résulté la con- viction que toutes ces manifestations peuvent être réalisées en très peu de temps par quiconque veut: s’en donner la peine. Tout cela peut être parfaite- ment simulé, puisque la volonté suffit à empêcher certaines réactions normales ou à faire apparaitre: les autres. Cependant, quelques divergences s'étant produites, il est intéressant de relever les opinions des observateurs les plus accrédités. Pour M. Ba- binski, qui a mené toute cette critique avec une grande perspicacité, les stigmates hystériques naissent à l’instigation inconsciente du médecin. MM. Ballet, Brissaud, Dupré, Meige, Souques, Thomas partagent cet avis. MM. Dejerine, Pitres et Raymond croient à la réalité de l'hémianesthésie spontanée. Je ne voudrais pas jeter mon humble avis dans la balance où se pêsent les doctrines de maîtres respectés, mais je ne puis m'empêcher de songer ici à la déception éprouvée quand, après un examen mené par un médecin expérimenté avec la plus scrupuleuse attention et toute la peine néces- saire et aboutissant à l'existence d'une hémianes- thésie totale, il suffit de toucher le bras du sujet sans qu'il vous voie, pour qu'il se retourne le plus: naturellement du monde pour savoir ce qu'on lui veut. Une malade bien stylée ne commet pas cette erreur, mais un malade à peu près neuf tombe facilement dans le piège. L'hémianesthésie aurait- elle donc ce caractère singulier d'apparaître pen- dant que le sujet est en « représentation », et de disparaître dans les réactions automatiques? C’est à craindre. De plus, il semble bien que l'hémianes- thésie hystérique ne se produit qu’un certain temps après la cause provocatrice de l'hystérie. Sur les sinistrés qui, plus tard, présenteront de l'hémianes- thésie, on ne rencontre presque jamais de troubles dysesthésiques quand on les examine quelques heures après l'accident. Cela explique la remarque faite par M. Néri (de Naples) sur les sinistrés de Messine. Sur 500 de ces malheureux, atteints de troubles nerveux divers allant jusqu'à l’halluci- nation et le délire, M. Neri n’a rencontré aucun trouble de la sensibilité, ni de rétrécissement du champ visuel. La suggestion ne modifie en rien les réflexes pupillaires, ni les réflexes tendineux régulièrement cherchés. Encore ce dernier point est-il sujet à con- troverse, bien qu'à la Société de Neurologie M. Klippel, esprit prudent et sûr, eût conclu, pour ainsi dire au nom de tous, que les réflexes tendi- neux ne peuvent pas être influencés par la sug- gestion. Cette proposition est vraie si l’on ne tient compte que des réactions médullaires, mais elle cesse de l'être si l’on fait entrer en jeu l’influx psy- chique. Les réflexes, comme toute réaction ner- veuse, sont soumis à une influence mentale. La passion, état purement psychique, agit sur l’en- semble du système nerveux central et périphérique à l'égal d'une substance étrangère excitante ou déprimante. Une émotion vive produit sur les réac- tions réflexes une modification au même titre qu'un toxique, et comme celui-ci, suivant sa nature et son degré, une excitation ou une dépression. De sorte qu'un état passionnel convenable peut, chez l'homme, en un instant, convertir un réflexe patel- laire normal en un réflexe exagéré, excessif, avec tendance à la généralisation, et l’amener même à une ébauche de pseudo-épilepsie spinale. Peut-on dire qu’il y ait dans ce cas ane lésion organique passagère, fugitive, du faisceau pyramidal? Certes, pendant la durée de cet état, il y a des modifica- tions .dynamo-chimiques dans le sein de ce fais- ceau, mais on ne saurait leur donner la valeur que nous attachons au sens du mot lésion patholo- gique. M. Roger (de Montpellier) vient de faire une étude intéressante des réflexes dans l'hystérie, et, à ce propos, M. Grasset remarque avec justesse: que l'exagération des réflexes tendineux et le clonus du pied ne sont pas toujours et nécessaire- ment les symptômes d’une lésion organique du faisceau pyramidal. La séméiologie des réflexes ne tire sa valeur que de la permanence et de la fixité de la modification observée. En outre, il ne faut pas oublier que l’exagération des réflexes visée par M. Babinski est unilatérale, et qu'elle fait partie d'un groupe de signes (phénomène des orteils, etc.) qui ne sont nullement réunis dans l'hémiplégie dite hystérique. Pour les réflexes cutanés, la volonté du sujet joue un rôle indéniable. Quant aux phénomènes vaso-moteurs, ils se produisent normalement sous des excitations diverses, quel que soit l'état d'anes- D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 379 thésie déclaré par le sujet : M. Hallion en a fait le contrôle. La réalité des œdèmes, des altérations des tissus produites par la suggestion, de la fièvre hystérique, est très controversée. Tout récemment, M. Soca, en apportant le fruit de ses études sur la fièvre hysté- rique, a déclaré qu'il n'existe pas de cas probant de fièvre par suggestion, ni de fièvre hystérique à courbe de fièvre infectieuse. Cependant, il retient comme réels certains cas de fièvre d'origine névro- pathique. Cette opinion lui est suggérée par le cas d'une jeune malade souffrant d'appendicite et chez laquelle il observa 39° le premier jour; le lende- main, s'étant, dit-il, entouré de toutes les précau- tions et mesures de contrôle nécessaires, il lut une température axillaire de 45°. M. Babinski a été assez bon, en face de ce cas, pour dire qu'il s'agis- sait sans doute d'une température locale. Certes, le thermomètre de M. Soca marquait 45°, mais de là à conclure que c'était le degré d’une température périphérique réelle. Il faut, en matière d'hystérie, toujours craindre d'observer une illusionniste. En poursuivant avec soin la critique des phéno- mènes dits hystériques, on arrive donc à un doute extrême, etil semble aujourd'hui que, detoutl'appa- reil qui jadis constituait les stigmates hystériques, il ne reste plus grand'chose debout, Voyons maintenant quelle est la conception de l'hystérie proposée par M. Babinski. Après avoir montré la fragilité des stigmates habituels, il divise les troubles hystériques en deux catégories : ceux qui peuvent être reproduits par la suggestion et ceux qui ne le peuvent pas. C'est l'observation méthodique qui sert à les diffé- rencier. M. Babinski classe parmi les phénomènes « suggestibles » les crises convulsives, les paraly- sies, les contractures, les tremblements, les mou- vements choréiques surtout rythmés, les troubles de la phonation, de la respiration, de la sensibilité, les troubles sensoriels et les troubles vésicaux. Il donne comme « non suggestibles » les modifica- tions des réflexes tendineux (nous avons vu plus haut que cette opinion est peut-être trop absolue), des réflexes pupillaires et cutanés, les troubles vaso-moteurs, trophiques, les hémorragies, l'anurie, l'albuminurie, la fièvre, ete. Ce qui dis- tüingue par-dessus tout les phénomènes capables d'être suggérés, c'est leur reproduction et leur dis- parition à volonté. Comme on ne peut guère se rendre compte d'emblée de l'existence de ce carac- tère, M. Babinski conseille judicieusement de dis- traire l'attention du sujet vers un autre point que le phénomène visé, car il a besoin, pour le réaliser, de fixer sur l'acte son attention volitive. I faut bien caractériser ces phénomènes par une dénomination ; aussi M. Babinski, plus puriste grammairien que son respectueux analyste et ne trouvant pas de mot francais pour les qualifier (le mot « suggestible » que j'ai employé n'est pas grammaticalement appliquer le mot « pithiatisme » (rev persuasion, francais), a proposé de leur wros guérissable), d'où l'adjectif « pithiatique ». I] vise d’ailleurs la possibilité de leur disparition par persuasion plus que celle de leur apparition par la suggestion. Le rôle que joue l'émotion dans l'apparition de l'hystérie et, par suite, des phénomènes pithiatiques doit être réduit en faveur de l'imitation, de la con- tagion psychique. C’est elle, en effet, qui les crée, les développe et les entretient. M. Babinski en trouve la preuve dans la distinction, un peu trop subtile, m'a-t-il semblé, qu'il fait entre les mani- festations émotives, sur lesquelles la suggestion a peu d'empire, et les manifestations pithiatiques. Hystérie et pithiatisme deviennent donc, en quelque sorte, synonymes. Les phénomènes qui les constituent ont « pour propriété de dépendre essen- tiellement, dans leur apparition, leur durée, leur forme, leur disparition, du milieu psychique où vivent les sujets suggestionnables, dont la prédispo- sition maladive est susceptible d'être mise en jeu par tel ou tel spectacle, tel ou tel propos ». M. Babinski trouve aussi un excellent caractère différentiel entre l'hystérie ou le pithiatisme et d’autres états mentaux dans ce fait que l'hystérie change constamment dans sa symptomatologie considérée dans le temps, tandis que des psychoses telles que la maladie du doute, par exemple, sont immuables. Les descriptions cliniques de celle-ci sont restées les mêmes qu'il y a trente ans; l'hys- térie, au contraire, à varié dans ses modalités. La conception de M. Babinski, outre qu’elle re- pose sur une critique beaucoup plus juste des faits que sa devancière, a une portée plus générale qu'une simple modification dans une doctrine no- sologique. Elle montre, en effet, le rôle inconscient du médecin dans la production des phénomènes morbides et accentue encore la nécessité d'appor- ter dans l'observation médicale un esprit d'analyse plus minutieux et plus pénétrant. Elle prouve l'influence prépondérante du milieu moral sur les aberrations psychiques. Elle met en garde contre les causes d'échec d'une cure rationnelle de psy- chothérapie. Elle trace une ligne de démarcation nette entre les troubles curables et les symptômes inaccessibles à ces moyens thérapeutiques. Enfin, elle élargit la conscience médicale dans divers rôles sociaux aujourd'hui départis au médecin et elle rendra un service certain à la fois aux malades et à ceux que les lois actuelles rendent respon- sables des suites plus où moins réelles des acci- dents. D‘ A. Létienne. 376 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Boutroux (Pierre), Maitre de Conférences à la Fa- culté des Sciences de Montpellier. — Leçons sur les Fonctions définies par les équations différen- tielles du premier ordre, professées au Collège de France, avec une Note de M.P. Pince é, membre de l'Institut.— 1 vol. in-8° de 190 pages. (Prix : 9 fr.50.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. L'ouvrage de M. Boutroux fait partie de l'importante collection de monographies sur la Théorie des Fonc- tions, publiée sous la direction de M. Borel. L'auteur s’est proposé de perfectionner la théorie des équations différentielles du premier ordre, en s'inspirant des progrès récents de la Théorie générale des Fonctions. M. Boutroux considère plus particulièrement l’équa- tion : dy P{x,y) (E) ARUER TT dans laquelle les fonctions P et Q sont des polynômes entiers en x et y. Les travaux, aujourd'hui classiques, de M. Painlevé ont établi que, sauf un nombre res- treint de cas où elle se ramène à l'équation de Riccati, l'équation (E) définit des fonctions multiformes à un nombre infini de branches, sur lesquelles on est jusqu'ici très peu renseigné. M. Boutroux s'est, dès lors, proposé, au sujet de ces fonctions, des problèmes qui lui ont été suggérés par les recherches récentes de la Théorie des Fonctions; d’ailleurs, il limite sa recherche à celles des équations (E) qui sont du type : Le A6 + A,y + A:y° + A;y° — 0 (les À entiers en x). L'ouvrage comprend cinq chapitres et une impor- tante Note de M. Painlevé. Le premier chapitre est un excellent exposé de l’état actuel de la question. M. Boutroux établit d’abord les propositions constituant ce qu'il appelle le point de vue local, qui est relatif à l'étude de lintégrale en un point déterminé; il précise la distinction fondamentale entre les points critiques fixes et les points critiques mobiles de l'intégrale. Puis il se place au point de vue nouveau de M. Painlevé : Que devient l'intégrale qui a une valeur initiale déterminée, lorsque la variable décrit un chemin quelconque à partir de sa valeur initiale ? Conformément aux conclusions du savant géo- mètre, l'auteur expose d'abord le fait fondamental qu'en dehors des points critiques fixes, l'intégrale n’a d'autres singularités que des pôles ou des points critiques algébriques; puis il établit que les seules équations (E) dont les intégrales sont multiformes, mais à un nombre fini de branches, se ramènent, par des opérations alsébriques, à l'équation de Riccati; la très intéressante Note de M. Painlevé, qui termine l'ouvrage, est une étude approfondie de ce cas important. M. Boutroux est ainsi amené à l'objet principal de son livre, à savoir l'étude des intégrales multiformes à un nombre infini de branches; il y consacre les cha- pitres suivants. Dans le second chapitre, il étudie la croissance et l'allure d'une branche intégrale isolée au voisinage d’un point singulier; il considère en détail à ce point de vue le type particulier d'équation (E) in- diqué ci-dessus. Le troisième chapitre traite d’une classification des points singuliers transcendants des intégrales, d'après le mécanisme suivant lequel s’échan- sent les déterminations de y autour du point singulier ; plusieurs exemples montrent la complexité de la ques- ET INDEX tion. Dans le quatrième chapitre, M. Boutroux examine, à ce point de vue, les points singuliers. dits de Briot et Bouquet, où le coefficient différentiel devient indéter- miné : ils appartiennent, dans l’ensemble, à des types très divers; M. Boutroux n’en envisage qu'un seul, d'ailleurs important, à titre d'application des méthodes qu'il a indiquées dans les chapitres précédents. Enfin, dans un dernier chapitre, l’auteur recherche les rela- tions qui peuvent exister entre les ensembles de per- mutations opérées au voisinage des singularités trans- cendantes d’une même équation; il étudie, en parti- culier, le cas de l'équation : 2% + A,y® + Asy*—0 (A, de degré deux; Chr : 3} = 0 (A, de degré deux}, et montre sur cet exemple le rapport étroit du problème actuel avec celui du chapitre I. Tel est le résumé très succinct de cet intéressant ouvrage : c'est un livre de recherche originale et pro- fonde, qui témoigne d'une véritable maitrise en ces difficiles problèmes. M. LELIEUVRE, , Professeur au Lycée et à l'École des Sciences de Rouen. Adhëmar (R. d').— Exercices et Leçons d'Analyse. — (Quadratures. Equations différentielles. Equa- tions intégrales de M. Fredholm et de M. Volterra. Equations aux dérivées partielles du second ordre.) —1 vol. fn-8°, de viu-208 pages. (Prix: 6 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. Tout le publie mathématique connaît et apprécie hautement le recueil d'exercices sur le Calcul infinité- simal de Tisserand, soit la première édition (1877), soit la deuxième (1896), enrichie de précieuses addi- tions par M. Painlevé. Je ne saurais donner une idée plus exacte, ni faire un meilleur éloge du livre de M. d'Adhémar qu'en l’assimilant à une continuation du recueil de Tisserand, étendue à des théories tout à fait nouvelles, énumérées dans le litre. Un simple coup d'œil sur le livre, sur le résumé et les dates des travaux qui y sont mentionnés, convainc de la rapidité avec laquelle progresse la science. L. AUTONNE, Ingénieur en Chef des Ponts-el-Chaussées. Carlbaum (1.), Licencié ès Sciences de l'Université d'Upsal, Diplômé de l'Ecole Polytechnique de Stock- holm. — Contributions à la Théorie des mouve- ments infiniment petits d'un gaz hétérogène. — Thèse de Doctorat présentée à l'Université d'Upsal. 1 vol. in-8° de 51 pages. Almquist et Wiksell, édi- teurs, Upsal, 1908. L'étude des petits mouvements des gaz conduit, comme on sait, à une équation aux dérivées partielles du second ordre, du type dit hyperbolique. Comme, d'autre part, certains problèmes (ceux que nous avons nommés problèmes mixtes) se rapprochent étroile- ment de ceux que traite la théorie du cas elliptique, les progrès accomplis récemment dans l’une comme dans l’autre de ces deux théories sont susceptibles d'intéresser la Dynamique aérienne. C'est ce que montre l’auteur en établissant qu'on peut aujourd'hui étendre aux gaz hétérogènes la solu- lion de problèmes qu'on ne savail traiter précédem- ment qu'en supposant le fluide homogène, voire de certains d’entre eux restés fort obscurs jusqu'ici, même dans ce cas particulier. Il aurait même pu, parfois, aller plus loin dans cette voie : certaines questions qu'il laisse en suspens trou- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 371 A Rd n ————— vent, en effet, elles aussi, une réponse dans les résul- tats obtenus soit par M. Holmgren ‘ (dans un travail qui date déjà de quelques années et dont l’oubli* surprend chez un docteur de l'Université d’Upsal), soit par nous-même. Mais, telles qu'elles sont, les quelques pages de M. Carlbaum constituent une fort élégante application des nouvelles données et une excellente illustration de leur fécondité, JacQuEs HaDAMaARD, Professeur adjoint à la Sorbonne. Sothern (J.-W.), Principal du Gollège maritime de Glasgow. — Les Turbines à vapeur marines. Traduit de l'anglais par M. J. Izarr, /ngénieur civil des Mines. — 1 vol. in-12 de 176 pages avec planches et figures. (Prix : 9 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. La préface de M. Izart fait ressortir l'utilité du livre : la turbine à vapeur tend à supplanter la machine alter- native à piston à bord des navires de commerce et de guerre; la Lusitania et la Mauretania, qui ont mis Paris à cinq jours de New-York, portent des turbines de 80.000 chevaux, et, à la suite de l’Amirauté anglaise, le Conseil supérieur de la Marine française a adopté la turbine Parsons pour les six navires de 22.500 chevaux, à quatre hélices, dont la construction a été décidée récemment. L'auteur anglais n'a guère envisagé que la turbine Parsons; le traducteur a complété l'édition originale par l'étude des turbines Rateau et Curtis, qui entrent en concurrence avec la première. Cette addition sera appréciée des lecteurs. Le livre à un caractère « essentiellement pratique et relativement élémentaire », dit M. Izart; il s'adresse surtout aux ingénieurs des Constructions maritimes et aux mécaniciens de la Marine, mais (ous ceux qui s'intéressent à l'avenir et aux progrès de la turbine y trouveront d'intéressantes et utiles données. Des généralités théoriques et la classification des turbines forment le premier chapitre, intitulé: Prin- cipe des turbines: le second fournit des détails pra- tiques sur la construction et l'installation des Parsons; le troisième est consacré aux applications et il ren- ferme des résultats des essais de puissance et de con- sommation. On y trouve des détails peu connus relatifs aux torsiomètres mécaniques, électriques et optiques. L'auteur est d'avis que la comparaison des consom- mations de vapeur des navires à machines alternatives et à turbines démontre que ces dernières ne donnent lieu à une dépense supérieure qu'aux .très faibles vitesses ; elles sont plus économiques dès que la vitesse moyenne est la moitié de la vitesse maximum. Par contre, les turbines à marche arrière ont un rende- ment moins élevé que celles à marche avant. Deux belles planches donnent des détails à grande échelle de la construction des turbines et de l'installation de leurs tuyauteries. AIMÉ Wirz, Correspondant de l'Institut, Doyen de la Faculté libre des Sciences de Lille. 2° Sciences physiques Hunt (H.-A.), Météorologiste du Commonwealth aus- tralien. — The Climate and Meteorology of Austra- lia. 1 broch. in-8 de 34 pages avec fig. et carte. — Raïnfall Map of the Commonwealth of Australia. 4 broch. in-8° de 12 p. avec 1 grande carte en couleur hors texte. — Bulletins n° 1 et 2 du Commonwealth Bureau of Meteorology, Melbourne, 1908. L'un des résultats de la fédération des colonies anglaises de l'Australie en un « Commonwealth » a été la création d'un Bureau météorologique central à Melbourne, dont le directeur, M. H. A. Hunt, a entrepris de réunir toutes les observations faites dans l'étendue | E Ofversiqt af Kongl.Vetensk. Akad. Fôrh.,1901, p. 91-403. | ? Voir page 11 de la Thèse de M. Carlbaum. 1 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. de la fédération, en vue de les publier ultérieurement sous la forme d'une série de bulletins. La première publication du Bureau central du Com- monwealth constitue un aperçu général sur le climat et la météorologie de l'Australie, d'où nous extrayons les indications suivantes : Au point de vue de la température, l'Australie jouit d'un climat plus tempéré que les pays de l'hémisphère sud ou nord situés sous la même latitude; l'isotherme de 21° C. n'y dépasse jamais le 30° degré de latitude sud. L'intervalle extrême des températures à l'ombre paraît être de 27, tandis qu'il est plus que le double en Asie et dans l'Amérique du Nord. La partie la plus chaude est l’intérieur du continent, où, dans les étés secs, la température peut atteindre et même dépasser 50° G. à l'ombre ; la partie la plus froide est larégion des Alpes australiennes et la Tasmanie. Parmi les capitales des Etats, Brisbane est la plus chaude (température moyenne annuelle : 20° C.), et Hobart la plus froide (12 C.), les autres : Perth, Sydney, Adelaïde, Melbourne, occupant une position intermédiaire décroissante. Au point de vue de l'humidité relative, Sydney occupe la première place (73), suivie par Hobart, Melbourne, Brisbane, Perth et Adelaïde, celle-ci étant la plus sèche (56). Les chutes de pluie sont déterminées principalement par la direction et la route des vents dominants. L'Aus- tralie est située dans la zone des vents alizés du sud-est etde l'ouest. La limite méridionale des premiers coupe la côte orientale à environ 30° de latitude sud. C’est pourquoi les pluies les plus fortes du continent austra- lien sont précipitées sur les pentes du Pacifique au nord de cette latitude. Les vents alizés de l’ouest, qui enve- loppent les côtes méridionales, sont l’origine des pluies qui arrosent la partie sud de l'Australie et toute la Tasmanie.Parmi les facteurs qui déterminent la distri- bution, l'intensité et l'époque des pluies, l'auteur relève particulièrement: le courant anticyclonique, les dépres- sions en forme de V et les dépressions de la mousson. L'endroitle plus humide de l'Australie est Geraldton, sur la côte nord-est du Queensland, où la moyenne annuelle des chutes de pluie est de 145 pouces; l'endroit le plus sec est le district du Lac Eyre, où la moyenne annuelle ne dépasse pas 5 pouces. Voici les moyennes annuelles en pouces des six capitales d'Etats : Melbourne, 26,31: Adelaide, 20,89; Hobart, 23,38; Perth, 33,03; Sydney, 48,80; Brisbane, #7,#7. La belle carte qui accompagne le second des fasei- cules que nous analysons donne la répartition des pluies sur tout le territoire australien ; celui-ci est di- visé en six zones, recevant de 0 à 40, de 10 à 20, de 20 à 30, de 30 à 40, de 40 à 60 et au-dessus de 60 pouces d’eau annuellement. à Parmi les vents qui soufflent sur l'Australie, on dis- tingue : 4° les vents alizés, déjà signalés; 2° les brisés de mer et de terre, soufflant en général perpendicu- lairement à la côte ; sur la côte est, la brise de mer atteint fréquemment la vitesse d'une tempête ; 3° les vents de l'intérieur, dont la direction dépend des chan- gements saisonniers de la pression. ” Les éléments, en Australie, sont généralement pai- sibles. Pendant les mois d'hiver, les côtes méridio- nales du continent sont sujettes à des tempêtes cyclo- niques, provenant des dépressions en forme de V de la zone sud de basses pressions. Accidentellement, la côte nord-est du Queensland est visitée par des oura- gans provenant des tropiques. Des cyclones très violents, connus populairement sous le nom de « willy willies », sont particuliers à la côte nord-ouest de l'Australie occidentale pendant les mois de décembre à mars. Ils paraissent naître dans l'océan, au voisinage du Golfe de Cambridge, et ils se transportent vers le sud-ouest avec une vitesse conti- nuellement croissante. D'autres cyclones se déve- loppent occasionnellement à l'intérieur du continent, à la suite des basses pressions de la mousson ; ils ne développent leurs effets maxima qu'après ayoir atteint g"* 378 la côte ; les plus violents se trouvent dans le quadrant sud-ouest. Le « southerly burster » est un vent froid particulier aux districts côtiers de la Nouvelle-Galles du Sud, au sud du 30° degré de latitude. Il suit invariablement les périodes de temps chaud, d’août à mai, mais surtout en novembre. Il paraît analogue à la bora ou au mistral d'Europe. Il est actuellement impossible de dire si les progrès de la colonisation ont affecté dans son ensemble le climat de l'Australie. Il y a eu, toutefois, des change- ments locaux : il n’est pas douteux que les forèts exercent une grande influence sur le climat local en l'égalisant, et partout où elles ont disparu, par suite d'une exploitation trop intense, le résultat inverse s’est fait sentir. JB: Maclaurin (R.-C.), Professeur de Mathématiques et de Physique mathématique à Wellington, Nouvelle- Zélande. — The Theory of Light. A Treatise on physical Optics. (Théorie de la Lumière). Part I. — 4 vol. in-8° de 326 pages avec figures. (Prix : 41 fr. 25.) University Press, Cambridge, 1908. La Théorie de la Lumière de M. Maclaurin n'est pas un traité complet d'Optique physique, mais c'est un ouvrage original. Le lecteur ne tarde pas à s’en aper- cevoir : il commence par trouver, au début, une citation de Platon. Dans le premier chapitre, l'auteur se pro- pose, en effet, de rechercher quel est le but de la Science elle-même : Consiste-t-il à rattacher ce qui est inconnu à ce qui est connu ? On pourrait soutenir le contraire avec de bonnes raisons. Doit-on se proposer de chercher la réalité sous les apparences, de connaître la nature des choses en elles-mêmes, ou bien de découvrir les causes dernières et inyariables de ce qui se passe dans la Nature? M. Maclaurin n’a pas de peine à montrer que ce serait bien ambitieux. Le but de la science, pour lui, est d'ordre à la fois « pratique et esthétique »; il s’agit de grouper les faits pour mieux les connaitre et mieux les faire connaître, et de les grouper « harmonieusement » autour de quelque grand principe dynamique. M. Maclaurin choisit le principe de la moindre action sous la forme suivante : Lorsqu'un système passe d'une configuration À à une autre B, le passage se fait de telle façon que, si on change légèrement le chemin AB, la fonction principale /(T-W)dt reste inva- riable (T est l'énergie cinétique, W l'énergie potentielle). C'est donc un calcul de variations, une fois l’expres- sion de W choisie convenablement, qui se retrou- vera dans toutes les questions successivement envi- sagées. Lorsque l'absorption intervient, M. Maclaurin ajoute à W, à l'exemple de Lord Rayleigh, une fonetion de dissipation, qu'il faut, elle aussi, choisir convena- blement, en se guidant — il ne faut pas se le dissimuler — d'après le résultat à obtenir. De cette façon, un peu abstraite sans doute, mais concise, les problèmes rela- üfs aux corps absorbants et transparents se traitent exactement de la même manière. Dans ce premier volume, la notion de vibrations périodiques dans l’éther est suffisante ; la notion d’élec- trons et le langage électro-magnétique n'apparaissent guère qu'un instant, lors de l'étude des propriétés optiques des métaux. Il n’y a aucune expérience décrite et aucune application indiquée : cependant le livre n'est pas purement théorique. Un de ses caractères particuliers est, en effet, la préoccupation de l'auteur de comparer les résullats expérimentaux avec la théorie. Il y a, dans ce but, un très grand nombre de graphiques, etles questions traitées par l'auteur sont discutées d’une façon très complète, souvent — notamment quand il s’agit de celles dont M. Maclaurin s'est occupé lui- même — avec beaucoup de détails qu'on ne trouve pas dans les ouvrages classiques. La situation de l’auteur aux antipodes, loin de nos riches bibliothèques scien- tifiques, fait que les données expérimentales ne sont pas toujours les plus récentes et qu'il y a fort peu d’in- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX dications bibliographiques. Malgré les imperfections qui en résultent, dont l’auteur s'excuse lui-même, on consultera cet ouvrage avec fruit. Aussi j'indiquerai en terminant les questions traitées dans ce premier volume : Milieux isotropes (propagation, réfraction, réflexion partielle et totale, couches de passage, inter- férences par les lames à faces parallèles). Cristaux trans- parents (réfraction, réflexion cristalline, franges en lumière polarisée). Propriétés des milieux absorbants (réflexion métallique, métaux en lames minces, an- neaux de Newton d’une couche mince limitée par un métal, absorption dans les cristaux). Dans le deuxième volume, M. Maclaurin s’occupera surtout des phénomènes montrant la connexion entre l'Optique et l'Electricité; le dernier sera consacré à l’histoire des théories de la lumière. A. Corrow, Chargé de cours à l'Université de Paris (Ecole Normale Supérieure). Molina (Rodolfo), ancien Directeur de la Poudrerie de Terdobbiate, Membre de la Commission consulta- tive des Explosifs. — Les Explosifs et leur fabri- cation. 7raduit sur la deuxième édition italienne par M. J.-A. MONTPELLIER. — 4 vol. in-8° de 375 pa- ges. (Prix : 6 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. L'ouvrage de M. Molina, écrit à un point de vue pra- tique, est une sorte de Manuel du fabricant d’explosifs. On y a laissé entièrement de côté les questions doctri- nales relatives à la Théorie des Explosifs, telle qu'elle a été édifiée par Sarrau. On n’y trouvera non plus aucun renseignement concernant la technique expérimentale des appareils destinés à l'étude balistique des pou- dres, pour lesquels l'auteur renvoie aux ouvrages clas- siques. Par contre, et conformément au plan de l’auteur, la fabrication de la poudre noire et des principaux explo- sifs modernes s'y trouve décrite avec assez de détails, surtout en ce qui est relatif à la poudre noire. En somme, l'ouvrage de M. Molina constitue un bon memento, mais qui ne saurait suppléer à la lecture des traités qui font autorité en la matière. Post (J.), Professeur honoraire à l'Université de Gættingue,et Neumann (B.), Professeur à la Tech- uische Hochschule de Darmstadt. — Traité complet d'Analyse chimique appliquée aux essais indus- triels. Deuxième édition française entièrement refondue, traduite d'après la troisième édition alle- maude et augmentée de nombreuses additions, par M. le D' L. Gautier. — Tome 1e", second fascicule. 4 vol. in-8 de 562 pages avec 109 figures (Prix : 10 fr.). Hermann, éditeur. Paris, 1909. Ce nouveau fascicule s'ajoute à ceux qu'a déjà fait paraître M. le D' Gautier, le distingué traducteur du nouveau Traité de Post et Neumann. C’est, en effet, un traité tout nouveau, si on le compare à la première édition, tellement il est développé et au courant des dernières recherches, et tellement la refonte en est complète. Les noms seuls des spécialistes qui ont signé les chapitres de ces fascicules suffisent à le recommander aux esprits les moins prévenus. Le D'J, Becker (Franc- fort-sur-Main) à étudié le gaz d'éclairage. Le chapitre relatif au carbure de calcium et à l’acétylène a été rédigé par le Professeur Vogel (de Berlin). Les DS En- gler (Carlsruhe) et Ubbelohde (Berlin) se sont chargés de l'analyse du pétrole, des huiles de graissage, des huiles de goudron, de la paraffine, de la cire miné- rale, de l’ozokérite et de l’asphalte. Enfin, c'est le D' W. Fahrion (Hôchst-s.-M.) qui a écrit le dernier chapitre, qui comprend l'analyse des graisses et huiles grasses, de la glycérine, des bougies et des savons. _ Toutes les fois que les données fournies par l'ana- lyse chimique peuvent être complétées par des déter- minations de propriétés physiques de la matière exa- minée, on peut être sûr de trouver une méthode de BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 379 mesure de ces dernières. C'est ainsi que le gaz d'éclai- rage et l’acétylène sont étudiés, non seulement au point de vue de leur caractère chimique qualitatif et quanti- tatif, mais encore au point de vue photométrique, calo- rimétrique et densimétrique. Et, à ce propos, on est saisi d'admiration à la vue de la somme considérable de recherches et d'inventions fournies pendant ces dernières années. L'industrie a maintenant des appareils qui permet- tent à de simples manœuvres de lire tel ou tel facteur chimique ou physique. La teneur en hydrogène sul- furé du gaz d'éclairage s'inscrit d'elle-même sur une bande de papier en regard du temps, compté en jours eten heures; le pouvoir calorifique d’un gaz se lit sur un simple cadran. Les travaux français, qui ont été un peu négligés par les auteurs, ont été ajoutés avec beaucoup d’à-pro- pos par le traducteur. On peut s'étonner qu'un livre, destiné avant tout aux industriels, ait été rédigé par des savants et des professeurs. C'est que, chez nos voisins, la distinction entre savant et industriel est moins tranchée que chez nous. Les savants allemands ne sont.pas cantonnés dans leur laboratoire universitaire; leur laboratoire de choix est bien souvent l'usine, où ils sont reçus avec d'autant plus d'empressement que souvent c'est à l'usine même qu'ils ont débuté dans la carrière scien- tifique. A. HorLarp, Chef du Laboratoire central des Usines de la Ci: française des Métaux. 3° Sciences naturelles Pirsson (L. V.), Professeur de Géologie physique à l'Université de Yale, Géologue du Service géolo- gique des Etats-Unis. — Rocks and Rock Minerals (Les RocHes Er LES MINÉRAUX DES ROCHES). — 1 vol. in-18 de M4 pages avec 74 figures et 36 planches. (Prix : 12 fr.50). J. Wiley and sons, éditeurs à New- York; Chapmann et Hall, éditeurs à Londres, 1908. Cet ouvrage est un manuel de Pétrologie à l'usage des étudiants et des techniciens qui, à divers points de vue, sont obligés de connaître les roches : ingénieurs, chimistes, architectes, mineurs, etc. L'auteur a cherché à leur en présenter les éléments sans recourir à l'étude optique et microscopique, et il a traité son sujet entièrement au point de vue mégascopique. Quoique le microscope soit nécessaire pour l'inves- tigation complète des roches, plusieurs de leurs carac- tères importants peuvent être observés sans l'usage de cet instrument. Parmi les roches à grains grossiers, celles dont le diamètre des grains dépasse un demi- millimètre peuvent généralement être identifiées à l’aide d’une lentille ou par des moyens simples. Même lorsque les grains sont beaucoup plus fins, quelques minéraux peuvent être reconnus par certains de leurs caractères. Enfin, quand les roches sont si denses que les grains qui les composent ne peuvent plus être dis- tingués, la couleur, la dureté, la nature de la fracture sous le marteau, la densité, la réaction des fragments de la roche pulvérisée avec les acides sont des données importantes qui permettent la séparation des divers types de roches. L'ouvrage de M. Pirsson comprend essentiellement deux parties : l’une donne la description des minéraux constituant les roches et les moyens de déterminer ces minéraux isolés, soit par leurs caractères physiques, soit par leurs réactions chimiques (deux tables sont dressées à cet effet); l’autre contient la description des roches, classées en ignées, stralifiées et métamor- phiques, et les moyens de les déterminer. Il ne s'agit, bien entendu, que des roches communes, qu'on est exposé à rencontrer couramment, et non des types relativement rares, que les pétrographes ont peut-être un peu multipliés et pour la distinction desquels il faut, de toute nécessité, recourir à l'examen optique en coupe mince. Le manuel est donc avant tout pratique; il rendra des services pour la prospection des mines et même pour des études géologiques préliminaires. Il n’est, d’ailleurs, point dépourvu de valeur scientifique propre; la personnalité de l’auteur, qui est un des plus émi- pents représentants de l'Ecole pétrographique améri- caine, nous en est un sûr garant. Recueil de l’Institut botanique Leo Errera (l/niver- sité de Bruxelles). — Tome VII, avec une annexe contenant des listes de plantes, 32 planches doubles, 9 planches de diagrammes et 14 cartes. (Prix: 35 fr.) Lamertin, éditeur. Bruxelles, 1909. L'activité de l'Institut botanique Leo Errera ne se ralentit pas : le nouveau volume que nous présentons aujourd'hui en est la preuve. Les Mémoires qu'il con- tient sont, en effet, de toute première importance. Nous trouvons tout d'abord le Cours de Physiologie moléculaire, professé en 1903 aux étudiants en doctorat par le regretté Errera et recueilli par M. H. Schouteden (pp: 1=xv1, 14-153). Ce Cours est appelé à rendre aux biologistes de très utiles services. En effet, la Biologie, telle qu'on la com- prenait il y a quelques années, étudiait les êtres vivants dans leur ensemble ; mais les découvertes récentes, dans le domaine des sciences physico-chimiques, ont amené la création de la Biologie cellulaire qui, seule, est capable d'élucider les multiples problèmes résultant du jeu des actions moléculaires d'ordre physique ou chi- mique. Chaque cellule est un minuscule laboratoire dans lequel se trouvent en contact, sous l’un ou l’autre des trois états de la matière, les corps appelés à réagir pour constituer finalement les molécules vivantes. Les forces mises en action se manifestent dès lors à de faibles distances : ce sont celles qu'on désigne en Physique sous le nom de forces moléculaires, de sorte que l'étude en peut s'appeler Physiologie moléculaire. C'est cette étude qui fait l’objet du présent Cours, dans lequel sont successivement examinés : les unités de mesure, les propriétés physiques des tissus végétaux, fluides ou solides, la pénétration mutuelle des solides et des fluides, la diffusion et l’osmose, la dissociation électrolytique ou ionisation, le mouvement de l’eau. dans les plantes et la transpiration et les théories rela- tives au courant d’eau dans les tissus. Ce rapide exposé montre l'importance des problèmes qui sont passés en revue, et il est presque inutile d'ajouter qu'ils le sont avec cette clarté et cette pro- fonde érudition qui étaient la caractéristique de l’en- seignement d'Errera. Le second Mémoire est de M. I. Starke et traite de l'Influence de la température sur la fluidité des solu- tions albuminoïdes (pp. 155-166). L'auteur montre qu'il n'existe aucun optimum de fluidité des liquides albumineux, notamment des solu- tions albuminoïdes physiologiques, à la température du corps des animaux. Mais, si l’on envisage les rapports entre la coagulation de ces liquides et leur fluidité, on constate que Je blanc d'œuf naturel ne se comporte pas exactement comme ses solutions aqueuses : chez ces dernières, la fluidité augmente avec la température jusqu'à ce que l’opalescence indique un début de coa- gulation, tandis qu'avec le blanc d'œuf naturel la flui- dité, après avoir augmenté jusqu'à 5709, diminue à partir de 58%5, alors que la coagulation ne commence qu'à 59°5. Ce phénomène est l'indice de modifications intimes de la substance albuminoïde, précurseurs de la coagulation. M. Jean Massart donne ensuite une étude magistrale intitulée : Essai de Géographie botanique des districts littoraux et alluviaux de la Belgique (pp. 167-584 et annexe). Il montre que les districts littoraux et alluviaux de Belgique sont tous d’origine récente. On les rencontre le long des côtes et des rivières à marée; ils sont cons- titués, soit par des dunes sableuses, soit par des allu- 380 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX vions de natures diverses déposées dans la partie maritime du cours des rivières. Les dunes littorales ne dépassent pas 30 mètres de hauteur; leur sol est formé de sable quartzeux riche en chaux et d’une sécheresse élevée qui entraîne le caractère xérophyte de la flore. Cependant, grâce à la température douce et à l'humidité de l'hiver, nombre d'espèces annuelles ou vivaces peuvent se développer dans cetté saison, principalement dans les pannes ou fonds humides séparant les rangées de monticules sableux. Dans son ensemble, la flore des dunes belges est calcicole, contrairement à ce qu’on observe pour les dunes plus septentrionales, dont le sable est pauvre en chaux. Les alluvions marines bordent les fleuves dans leur portion affectée par les marées. Leur partie supérieure (schorre) n’est inondée qu'aux fortes marées; leur partie inférieure (s/ikke) est submergée, même par les marées de morte eau. Le sol, argileux, est imprégné de sel, ce qui restreint considér ablement le nombre des espèces susceplibles d'y prospérer : on n’y trouve pas de Cryptogames saprophytes; les Phanérogames ont presque toutes les feuilles charnues et la plupart sont spéciales à ce district et étroitement localisées. Les alluvions fluviales s'étendent sur les berges des rivières à marée, dans les parties que n'atteint pas l’eau de mer. Leur sol est argileux et limoneux; les mouvements de va-et-vient de l'eau favorisent la luxu- riance de la végétation, mais limitent le nombre des espèces à celles seules qui, solidement enracinées, ne risquent pas d'être emportées par les courants. Les Graminées dominent avec les Alisma, Sagittaria, Caltha, Epilobium, Roripa amphibra, etc. Certaines alluvions marines ou fluviales sont endi- guées. Elles constituent les polders, situés en dessous du niveau des marées d'équinoxe. Leur sol, argileux, est entièrement livré à la culture. Seules, les digues donnent asile à une flore banale. Enfin, on peut mentionner les sables à Cardium, isolés au milieu des polders, souvent érigés en petites dunes et caractérisés par leur pauvreté en calcaire. Aussi donnent-ils asile à une flore plus riche en Bryo- phytes que les dunes littorales, et renfermant un cer- tain nombre d'espèces calcifuges : Nardus stricta, Seleranthus pereunis, Cylusus scoparius, Trilolium arvense, Calluna vulgaris, etc. Ce Mémoire est écrit avec un remarquable souci de l'exactitude la plus scrupuleuse; il renferme une somme considérable de documents relatifs à la géologie des régions étudiées, aux conditions climatologiques, aux conditions de vie et aux caractères adaptationnels des végétaux, en un mot aux différents facteurs étho- logiques; il constitue une des plus importantes études de Géographie botanique publiées jusqu'ici sur la Belgique. L. Lurz, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie, Secrélaire général de la Société botanique de France. Î Monnier (H.), Professeur agrégé de Sciences natu- relles au Lycée de Besançon, et Kollmann (M.) Professeur agrégé de Sciences naturelles au Lycée de Nantes. — Manipulations de Zoologie et de Botanique. — 1 vol. 1n-16 de 80 pages avec fig. (Prix : 1 fr. 50.) H. Paulin et Cie, éditeurs, Paris, 1909. Les programmes de 1902 ont apporté une heureuse innovation dans l’enseignement des Sciences natu- réelles au lycée : c'est l'institution de quelques séances de travaux pratiques. L'organisation de celles-ci à ren- contré des difficultés, auxquelles le petit ouvrage de MM. Monnier et Kollmann voudrait essayer de donner une solution. Il renferme une douzaine de manipulations (avec indi- cation du matériel nécessaire à chacune d'elles) sur la digestion, le sang, le cœur et l’encéphale du mouton, les nerfs et les muscles, la dissection d'un poisson, d'une grenouille, d'une écrevisse, la structure de la tige et de la racine, la fleur, la graine et la germina- tion, les cryptogames, la Physiologie v régétale. Celles-ci n'ont pas pour but d'exercer T'habileté ma- nuelle des élèves, mais de former leurs facultés d’ob- servation et de raisonnement. L'ouvrage rendra service à la fois aux professeurs et aux élèves des lycées. 4° Sciences médicales Rénon (D' Louis), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. — Le Traitement pratique de la Tuberculose pulmonaire. — 1 vol. in-8° de 258 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Masson, éditeur. Paris, 1908. Ce petit ouvrage expose, sous une forme très claire et très pratique, l’état actuel de la question du traite- ment de la tuberculose pulmonaire. L'auteur, qui a une grande expérience de cette maladie, ne croit pas qu'il existe encore de médication spécifique de la tu- berculose. En attendant la découverte de ce traitement, la meilleure manière de soigner les malades est de pratiquer la cute d'air et de repos. M. Rénon s'élève avec raison contre les excès de la suralimentation et contre l'absence de tout traitement médicamenteux, pratiqué par beaucoup de médecins. An plus de son action réelle, une médication sage, pru- dente, reminéralisatrice, a une action énorme sur le moral des malheureux tubereuleux, abandonnés trop souvent à eux-mêmes. L'auteur insiste sur l’état d'âme des tuberculeux et montre toutes les ressources d’une bonne psychothérapie. En résumé, livre à la portée de tous, rempli de dé- tails très précieux et très pratiques. D'R. Roux. Schmidt (Dr A.), Professeur à l'Université de Halle. L'examen fonctionnel de l’Intestin par le régime d'épreuve. (Son application à la pratique journa- lière et ses résultats pour le diagnostie et la théra- peutique.) — 1 vol. in-8° de 83 pages, avec figures et planches, traduit par M. le D' Kozeé. (Prix : 5 fr.) Vigot frères, éditeurs. Paris, 1909. Ce livre traite à peu près exclusivement de l'examen fonctionnel de l'intestin basé sur l'étude comparative de la selle réputée normale et de la selle liée à un état pathologique des fonctions digestives, après adminis- tration d’un repas d° épreuve essentiellement constitué par du lait (1/2 litre à 1 litre 1/2), du pain blane (environ 100 grammes), de la purée de pommes de terre (100 à 500 grammes), de la viande de bœuf hachée (425 grammes environ), dont une partie äu moins doit rester crue ou demi-crue. Cette étude, au point de vue coprologique, se ramène à la recherche des causes et des conditions qui déter- minent la non-absorption par le tube digestif de tel ou tel aliment, en l'espèce : résidus de tissu conjonctif et de tendons, résidus de tissus musculaires, résidus de pommes de terre, résidus de matières grasses. La recherche, dans les selles, du mucus, du sang, des cristaux de phosphate ammoniaco-magnésien est, de même, capitale. L'examen macroscopique ultra-rapide, mais métho- dique et systématique, permet presque toujours de reconnaitre ces différents éléments. Il pourra être, il sera souvent avantageusement complété, par les exa- mehs microscopique, chimique (réaction au papier tournesol, réaction au sublimé, réaction à l’étuve), bac tériologique, qui fourniront des renseignements complémentaires utilisables en clinique. Celle technique méthodiquement poursuivie fournit dès maintenant des résultats très intéressants. Com- binée aux autres méthodes d'exploration clinique, elle permettra probablement, quelque jour, de dissocier plus exactement les entéropathies primitives et leurs diverses modalités des entéropathies gastrogènes, hépa- togènes et pancréatogènes., Dr ALFRED MARTINET. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 381 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 Mars 1909. S. A. S. Albert l‘', Prince de Monaco, est élu Associé étranger, en remplacement de Lord Kelvin, décédé. — M. Boudier est élu Correspondant dans la Section de Botanique. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Tzitzeica pré- sente ses recherches sur certains systèmes cycliques qui offrent des analogies avec ceux de Ribaucour. — M. P. Kœbe énonce un principe général d’uniformisa- tion dont il donne deux démonstrations : Toute uni- formisation d'une fonction analytique donnée, qui apparaît comme possible du point de vue de l'Analysis situs, peut aussi être réalisée au sens de la théorie des fonctions analytiques. — MM. H. Deslandres, A. Ber- nard et J. Bosler terminent l'exposé des observations faites à Meudon sur la comète Morehouse. L'une des bandes du spectre est due très probablement au gaz azote; la comparaison avec le spectre des tubes à vide suggère l'idée de l'émission par le Soleil d'un rayon- nement cathodique. 29 SciEKCES PHYSIQUES. — M. H. Poincaré étudie théoriquement la diffraction des ondes hertziennes et explique les effets étonnants de diffraction obtenus en télégraphie sans fil à grande distance. — M. M. Deprez donne deux formules très simples pour le coefficient de self-induction À et la constante de temps Z/R d'une bobine très longue : 4° Æ —12/a, où L est la longueur totale du fil enroulé sur la bobine, et a la longueur de la bobine; 2 Z/R—%4S'/p, où k est le rapport de la section métallique du fil à celle du carré circonscrit au fil recouvert d’isolant, e la résistivité du filet S' la surface de la zone annulaire occupée sur les joues de la bobine par le fil enroulé recouvert de son isolant. — MM. H. Buisson et Ch. Fabry décrivent un dispositif qu'ils emploient pour la mesure des très petits déplacements des raies spectrales. — MM. Ch. Moureu et Ad. Lepape ont déterminé la radio-activité des sources thermales sulfureuses de Bagnères-de-Luchon; elle est très iné- gale. Les gaz spontanés de la Grande Source Bordeu sont les plus radio-actifs de France. — M. A. Leduc a constaté que le poids moléculaire du toluène, déduit de sa densité de vapeur, est parfaitement normal, si l'on se sert de sa formule pour calculer la compressibi- lité. — M. R. Dubrisay a étudié la dissociation hydro- lytique du chlorure de Bi : on se trouve en présence d'un système divariant, ce qui prouve qu'il ne se produit qu'un seul oxychlorure. Le degré de dissocia- tion diminue à mesure que la température s'élève. — M. Alb. Colson montre que la chaleur de formation de composés semblables d'Ag et de Pb ne fournit aucune indication sur leur stabilité relative. A température constante, un corps défini, tel que le nitrate de Pb, peut acquérir une stabilité beaucoup plus grande par dissolution, quoique sa chaleur de formation soit diminuée. — MM. A. Besson et L. Fournier, par Paction de l’effluve sur les vapeurs de silicichloroforme, en présence d'H, ont obtenu les chlorures de Si de la série saturée Si?Cl?#*+?à un haut degré de pureté, grâce à l’absence d'oxychlorures. — M. Morancé montre que la congélation à — 8° est un moyen de purification de l'acide sulfurique hydraté, surtout en ce qui concerne l’arsenic, dont les 9/10 sont restés dans l’eau-mère. — M. L. Vignon a constaté que les solutions aqueuses d'acide picrique teignent la laine et s’appauvrissent quand leur conductibilité électrique atteint une certaine valeur. La fixation paraît due à une réaction chimique de la fibre sur la matière colorante fortement ionisée. — MM. A. Guyot et V. Badonnel ont condensé les éthers dicétobutyriques avec les car- bures aromatiques et obtenu un mélange d'éthers aryl- acétylglycoliques et d’éthers diarylacétylacétiques. — M. H. Pariselle, par l’action du Br sur l’allylcarbinol, a obtenu le dibromo-1:?-butanol-4, Eb. 112°-114° sous 11 millimètres. Ce dernier, traité par KOH pulvérisée, forme le tétrahydrofurfurane monobromé. — MM. E. E. Blaise et A. Kœhler ont constaté que les dicétones :, sous l'influence des alcalis alcooliques à l'ébullition, se cyclisent en dérivés du cyclopentène. Une dicétone f, la nonanedione-2:8, a donné un dérivé du cyclo- hexène sous l’action de l'acide sulfurique. 39 SCIENCES NATURELLES, — Me M. Phisalix a con- staté que les Serpents présentent une grande immunité à l’action du venin de la Salamandre, surtout par voie digestive, laquelle tiendrait à l'antagonisme physiolo- gique de leur venin et de celui de la Salamandre. — MM. M. Doyon et CI. Gautier ont observé que l'ablation du foie détermine chez la grenouille l'incoagulabilité du sang et des crises télaniques. — M. C1. Regaud a appliqué à la myéline des fibres nerveuses périphé- riques le procédé de coloration qu'il a utilisé pour les mitochondries; ces deux formations présentent cer- taines analogies de réactions microchimiques. — M. A. Le Play à réalisé une infection générale de l'organisme par injections de cultures de Stearophora radicicola; mais c’est la glande hépatique qui est le tissu de choix pour le développement du parasite. — M. E. Doumer a conslaté que l’activité thérapeutique des champs magnétiques oscillants dépend de leur pou- voir électromoteur et que des champs magnétiques oscillants, équivalents au point de vue électromoteur, sont aussi équivalents au point de vue thérapeutique. — MM. E. Gaucher et P. Merle ont observé pour la première fois la présence du Zreponema pallidum dans le liquide céphalo-rachidien au cours de la syphilis ac- quise des centres nerveux. — M. A. Laveran a constaté que des moutons, immunisés contre le Trypanosoma Pecaudi, sont infectés par le Tr. dimorphon; immu- nisés contre ces deux trypanosomes, ils sont sensibles au Tr. congolense. On en conclut que ces trois espèces sont bien distinctes. — M. G. Bohn a étudié l’orienta- tion chez les Patelles. Ce Mollusque parait être guidé d'une façon générale par la pesanteur; il suit sur les rochers des lignes de moindre résistance. — M. P. Marchal à fait le relevé des espèces de Cochenilles vivant actuellement en parasites sur les plantes en France, Corse et Algérie. — M. A. Cligny décrit un Zéidé capturé au Maroc et qui constitue un genre nou- veau; il lui donne le nom de Parazenopsis argenteus. — M. L. Blaringhem a étudié le croisement des orges : la règle de disjonction des hybrides s'applique aux combinaisons illégitimes de formes très voisines; elle n'est pas valable pour les mélanges sexuels d'espèces très différentes, malgré la fertilité des produits obtenus. — M. J. Roussel indique la composition de l'Eocène inférieur dans le sud et le centre de la Tunisie et de l'Algérie. — M. J. Welsch a étudié l’escarpement cré- tacé du sud-ouest du bassin de Paris, au sud de la Loire; c’est une sorte de plate-forme monoclinale dis- symétrique, à faible inclinaison vers le nord. — M. ©. Mengel a reconnu que les calcaires primaires en dalles des Pyrénées orientales se sont déposés en même temps que les calcaires en nappes; ils seraient donc d'âge dévonien. — M. J. Blayac à distingué, dans le bassin de la Seybouse, deux facies distincts du Sénonien : l'un nettement bathyal, analogue à celui du nord de la 382 if ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Tunisie; l’autre mi-bathyal, mi-néritique, analogue à celui du centre de la Tunisie. — M. J. Thoulet à ana- lysé 19 fonds sous-marins arctiques, recueillis dans la mer de Kara et sur les côtes de la Nouvelle-Zemble; ils possèdent les caractères typiques de ceux de l'océan Glacial arctique. — M. L. Sudry a fait l'analyse des fonds de l'étang de Thau; on y trouve des zones de sable, de sable vaseux, de vase très sableuse, de vase sableuse qui se succèdent sensiblement parallèles aux isobathes jusqu'à la vase proprement dite occupant toute la partie centrale. Séance du 5 Avril 4909. M. J. Wiesner est élu Correspondant dans la Section de Botanique. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Lattes présente ses recherches sur les transformations de contact et les variétés à » dimensions qui vérifient l'équation de Pfaff. — M. Galbrun a étudié la représentation des solutions d'une équation linéaire aux différences finies ‘pour les grandes valeurs de la variable. — M. Carpen- tier présente un jeu de calibres établis par M. Johans- son, destinés à réaliser, par voie de combinaisons, les étalons de toutes les longueurs, procédant par centièmes de millimètre, comprises entre { millimètre et 200 millimètres. Ces calibres ont des faces tellement parfaites qu’elles adhèrent l’une à l’autre lorsqu'on les applique par un mouvement'tournant. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-A. Le Bel montre que l'élévation de température des roches terrestres enfer- mées dans une enceinte varie avec la nature de l’en- ceinte: la chaleur de ces roches n’est donc pas due à la radio-activité, mais à l'effet d’un rayonnement venant de l'extérieur. — M. Edm. Bauer a constaté que les températures de la flamme des becs Bunsen mesurées par les rayons restants et par le renversement de la raie D sontidentiques. Il en conclut que la température est le facteur essentiel, sinon unique, dans l'émission des spectres de raies par les flammes. — M. E. Hen- riot a reconnu que le rayonnement des sels de potas- sium est sensiblement homogène; il est peu probable qu'il soit dû à un élément radio-actif connu. Il est dû au potassium lui-même ou à un corps inconnu qui lui est toujours associé. — M. J. Becquerel montre que la raie 625 pu de la tysonite, soumise à l’action d'un champ magnétique vers — 256%, fournit un quadruplet formé par deux doublets polarisés en des sens opposés; il n’y a pas de résidus de polarisation. — M. C. Féry a déterminé la constante de la loi de Stefan au moyen d'un radiateur intégral; la valeur trouvée pour sou ra est de 6,40 >< 10 -!? watt par centimètre carré. — M. Cany a reconnu que le procédé de brumification de l’eau minérale pour les salles d’inhalation employé à la Bourboule n'apporte à la constitution physico-chi- mique de l’eau que des modifications insignifiantes. — M. G. Charpy montre que certains carbones, nolam- ment le produit de la décomposition de l’oxyde graphi- tique par la chaleur (oxyde pyrographitique) et le car- bone extrait de l'acier par dissolution du métal dans les sels métalliques, doivent être classés dans la caté- gorie des graphites. — M. M. Guichard a préparé l’anhydride iodique à l'état très pur par l'action de l’anhydride azotique en vapeurs sur l’iode humide. — MM. P. Sabatier et A. Maïlhe, en faisant agir du gaz ammoniac en même temps qu'un oxyde catalyseur de déshydratation (thorine, oxyde bleu de tungstène) sur les vapeurs d’un alcool primaire, ont obtenu, au lieu du carbure éthylénique, l’amine alcoolique. Ceile-ci peut réagir à son tour sur l'alcool en fournissant l’amine secondaire el même un peu d’amine tertiaire. — M. J.-B. Senderens, en faisant passer des vapeurs d'acides libres sur de la thorine anhydre chauffée, a obtenu les acétones correspondantes. L’'acide propio- nique donne la diéthylcétone, l'acide butyrique, la dipropylcétone, etc. — M. H. Wuyts a mis en évidence l'existence de composés peroxydés dans les solutions éthéro-magnésiennes exposées à l’action de l'oxygène. — M.H.Lerouxaobtenudeuxtétrahydronaphtylglycols, F.140et F.118°, en traitant à l’ébullition et en solution acétique le dibromure de dihydronaphtalène par l’acé- tate d'argent etsaponifiant. Le second est l’isomère trans du composé cis, F. 1359, déjà préparé par Bamberger et Lodter. Le corps F. 1400 est un composé des deux 1so- mères. — M. A. Pictet et Ml: M. Finkelstein ont effectué la synthèse complète de la laudanosine en pas- sant par l'homovératrylamine, l'acide homovératrique, l'homovératroylhomovératrylamine et la dihydropa- pavérine. — M. Arsandaux a analysé divers échantil- lons de bauxite; l’alumine y existe à un état d'hydra- tation voisin de l'hydrate défini Al1°0%.H°0; l’oxyde de fer est voisin de l’état anhydre; la silice entre sans doute dans une combinaison alumineuse hydratée amorphe. — M. Florence décrit un procédé de dosage précis, par gazométrie, de l'urée et de l’'ammoniaque urinaires. Il détermine d’abord l'ensemble des deux corps, puis l’urée seule aprèsque les sels ammoniacaux ont été déplacés par le sous-acétate de plomb au bain- marie bouillant, — M.J. Wolff montre que les biphos- phâtes alcalins, les citrates tribasiques alcalins et l'acétate manganeux agissent semblablement sur les oxydases naturelles et artificielles, non seulement en maintenant une certaine alcalinité du milieu, mais en jouant le rôle de véritables co-enzymes. — M. H. Bierry applique la notion de spécificité aux invertines et aux lactases animales. 30 SCIENCES NATURELLES. —- MM. H. Soulié et G. Roig ont examiné 525 bovins des environs d'Alger, chez 74 °/, desquels ils ont trouvé un piroplasme qui, par ses caractères morphologiques et son inoculabilité, se rapproche du P. mutans et du P. annulatum.— M. M. Piettre a reconnu que, chez les Bovidés, la calcifica- tion des lésions tuberculeuses n’est pas un signe de guérison ; elle n’est peut-être pas même un effort de défense. — MM. R. Perrier et H. Fischer ont constaté que le caecum palléal se retrouve chez tous les Bulléens, où il présente trois types : libre, adhérent et exogyre. — M. Chifflot montre que le Monophyllæa Horstieldii possède une ou deux feuilles qui sont des feuilles coty- lédonaires; la tige qui les supporte est un axe hypoco- tylé. Cette plante est en voie de mutation, provenant de la culture intensive, et devrait prendre le nom d'Horslieldia javanica. — M. A. Guilliermond a observé que l'Endomyces Magnusii offre, avant la formation des asques, une véritable conjugaison hétérogamique : les deux gamètes sont de forme et de taille très différentes et ne jouent pas le même rôle dans la fécondation. — M. F. Canu a déterminé les Bryozoaires fossiles du Miocène moyen de Marsa-Matrout, en Marmarique. — M. R. Zeiller a étudié un cône de Lepidodendron à structure conservée provenant de Cabrières, qu'iliden- tifie au Lepisdostrobus Brownii, ainsi que les Lep. Dabadianus, Laurenti et Rouvillei; au contraire, le cône de Schimper forme un échantillon distinct, que l’auteur nomme Lep. Schimperi. — M. J. Giraud et A. Plumandon ont trouvé en Auvergne, dans le massif volcanique de « la Comté », une nouvelle région à roches sodiques, allant des néphélinites franches, par des téphrites andésitiques acides à olivine, à des téphrites labradoriques basiques à olivine. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 30 Mars 1909. MM. Courmont et Oddo sont élus Correspondants nationaux dans la Division de Médecine. A la suite d'un Rapport de M. H. Vincent, l'Académie émet l'avis que la fièvre récurrente soit inscrite au nombre des maladies dont la déclaration est obliga- toire dans toutes les colonies françaises. En raison des modes de transmission du typhus récurrent par les insectes piqueurs, et des mesures de prophylaxie que réclame cette maladie infectieuse, il serait utile que la même mesure füt prise en France, — MM. Ch. Moureu et Ad. Lepape ont étudié la radio-activité des sources ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 383 ————————————————————————.————— thermales de Bagnères-de-Luchon. Celles-ci doivent leur radio-activité à l'émanation du radium. Les gaz, là où ils se dégagent spontanément, sont lous riches en émanalion. Si la radio activité de certaines sources est faible (Bayen, Reine, etc.), d'autres, par contre, sont fortement radio-actives (Bordeu, Groupe Ferras, Groupe du Pré). — M. Boinet a constaté que les anévrismes de l'aorte ascendante peuvent faire dans le péricarde une saillie parfois considérable, s'interposer entre la paroi thoracique et le cœur, comprimer ses cavités et orilices, le refouler en bas, à gauche et en arrière, de facon à simuler une hypertrophie de cet organe. Les anévrismes intra-péricardiques peuvent donner lieu au syndrome asystolique et entrainer aussi des lésions du foie et du rein cardiaques. La saillie de l’anévrisme de l'aorte ascendante dans les espaces intercostaux gauches, observée dans un cas, est exceptionnelle. Enfin ce genre d’anévrisme présente encore comme signé cli- nique intéressant : la régurgitation rétrograde du sang dans la jugulaire externe, qui indique la compression de la veine cave supérieure; l’'épanchement pleurétique droit, tenant à la compression de la veine azygos; l'inféro-traction avec latéro-torsion gauche du larynx. — Le même auteur a reconnu que le cancer pulsatile, l'épithélioma télangiectasique secondaire du sternum peut simuler l’anévrisme extra-thoracique de la crosse de l'aorte. Il indique les principaux éléments du diag- nostic différentiel des deux affections. — M. M. Page lit un travail sur le traitement des maladies nerveuses par un nouvel extrait cérébral agissant comme une anti- toxine. Séance du 6 Avril 1909. M. Marfan donne lecture d'un travail sur une nou- velle forme de rétrécissement de la trachée par hyper- trophie du thymus. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 Mars 1909. M. C. Levaditi considère la toxalbumine arséniée qui se forme dans l'organisme après injection d’atoxyle comme plus stable que les récentes recherches de M. Roehl ne le laissent supposer. — M. N. Fiessinger a observé que le processus dégénératif de la cellule hépatique au cours des intoxications brutales chez les Batraciens tend à la segmentation en boules isolées du cytoplasma d'abord, et du noyau plus tard. Puis chaque boule dégénère pour son propre compte. — M. P. Por- tier a constaté que tous les liquides (graisses, essences, hydrocarbures) qui mouillent la chitine du stigmate des insectes aquatiques pénètrent à l'intérieur des trachées. Il existe chez les insectes un mécanisme de défense contre les corps gras. — M.J. Jolly à observé, chez l’oie et le canard, une disposition spéciale de la structure des ganglions lymphatiques, avec un sinus central, une substance lymphoïde axiale et une sub- slance spongieuse périphérique. — M. A. Manaud à pu entraîner des cobayes tuberculeux à supporter des doses de tuberculine plusieurs fois mortelles pour les témoins ; la tuberculose évolue alors plus vite chez eux. — MM. C. Nicolle et E. Conseil ont observé une infec- tion naturelle à Aicrocoscus melitensis chez des cobayes ayant vécu dans des étables à chèvres prove- nant de Malte. — MM. P. Bouin et P. Ancel montrent qu'au cours de la gestation l'œufn'exerce aucune action sur l'utérus avant sa fixation; les phénomènes prépa- ratoires d'évolution de l'utérus sont sous la dépendance unique du corps jaune. — M. L. Blaringhem estime que la parthénogénèse des végétaux supérieurs est une qualité récemment acquise, n'indiquant aucune rela- tion de parenté entre les genres, les familles qui la présentent. — MM. S. Bonnamour el L. Thévenot ont observé de grandesvariations derésistance du lapin vis- à-vis de l’adrénaline; on peut arriver à mithridatiser complètement l'animal vis-à-vis de ce poison. — MM. J.- E. AbelouselE.Bardier ontdécelé dans l'urine humaine normale plusieurs substances hypotensives, insolubles dans l'alcool, qui ne dialysent pas, sont retenues par le noir animal, et que lébullition ne détruit pas. — M. J. Nageotte signale l'existence de granulations fuchsino- philes siégeant dans le protoplasma des cellules névro- gliquesde la substance grise. — M1e A. Drzewina a relevé la présence de leucocytes à granulationsacidophiles dans le sang de huit espèces de poissons Téléostéens. — MM. P. Emile-Weil et Boyé ont constaté que les extraits desséchés de têtes de sangsues possèdent une action hémorragipare intense sur le lapin. — M. A. Mauté a obtenu d'excellents résultats dans le traite- ment des affections à staphylocoques par l'emploi de vaccins préparés suivant la méthode de Wright; mais il est indispensable d'user pour chaque malade d'un vaccin préparé avec un microbe isolé de ses propres lésions. — MM. A. Chauffard etJ.Troisier ont reconnu que la tache rosée lenticulaire des typhiques est une réaction vaso-dilatatrice locale, trahissant l'existence d'une colonie éberthienne intra-dermique. — M. A. Po- licard a étudié les modifications des filaments bacil- laires sidérophiles de la cellule hépatique des Mammi- fères sous l'influence d'intoxications massives. — MM. HE. Bierry el A. Rance ont constaté que la lactase des Mollusques hydrolyse tous les dérivés du lactose jusqu'ici soumis à son action; la lactase des animaux supérieurs dédouble le lactose et le lactose-uréide seulement. — M. F. Sorel montre que la réaction ther- mique des cobayes tuberculeux à l'iodure de potassium et la réaction à la tuberculine sont différentes, des animaux accoutumés à l’une continuant à réagir à l’autre. — M. E. Guyénot a étudié les variations mor- phologiques des papilles sensorielles de la trompe des Lépidoptères. — M. Al. Carrel a interrompu pendant 12et 16 minutes la circulation des veines rénales; les animaux sont restés en parfaite santé et n'ont pas pré- senté de crise épileptique. — MM. L. et M. Lapicque montrent que, chez les homéothermes au repos, il y à toujours une température ambiante telle que les échanges augmentent si cette température s'abaisse, et diminuent si elle s'élève. L'action de la température extérieure est fonction de la surface. — M. T. Yama- nouchi a constaté que, chez les animaux préparés avec du sang de tuberculeux, la réaction à la tuberculine est le plus souvent négative jusqu'à la #° semaine après ARE Èn après 6 à 8 semaines, elle est généralement positive. — MM. W. Mestrezat et E. Gaujoux on! observé une très grande perméabilité méningée aux nitrates dans la méningite tuberculeuse et en tirent une méthode de diagnostic. —: M. P. Mulon décrit diverses réactions qui rapprochent, chez le cobaye, le pigment du corps jaune de certaines des granulations pigmentées de la surrénale. — M. L. Gaucher montre que le citrate de soude agit sur le système nerveux de l'estomac et sans doute aussi sur la musculature en en régularisant les contractions, mais non pas en empê- chant la coagulation du lait. — M. M. Weïnberg à constaté que les anticorps spécifiques disparaissent lentement du sérum des malades opérés de kyste hyda- tique. On peut observer encore une réaction nette après plusieurs années. — MM. H. Claude et P. Lejonne ont reconnu qu'une irritation méningée locale aseptique s'accompagne habituellement de réactions encéphali- ques très intenses. — M. A. Chappellier a observé que la production des follicules de Graaf est continue; mais leur dégénérescence marche de pair avec leur accrois- sement. Séance du 3 Avril 1909. MM. Ch. Achard, L. Ramond et Ch. Foix ont cons- taté que, dans les diverses sortes de leucémies, les leucocytes normaux possèdent leurs qualités habi- tuelles : résistance forte et activité normale, tandis que les leucocytes pathologiques, s'ils sont assez résistants, sont, par contre, à peu près inactifs. — M. A. Manaud a observé que la tuberculine n'a aucune action directe favorisante ou empêchante, sur la phagocytose 1n vitro, 384 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Mélangée avec les sérums, elle leur enlève leurs pro- priétés opsoniques et leurs propriétés complémentaires. — M. L. Launoy à constaté l'existence. de figures karyocinétiques multiples dans le foie en autolyse ou en cadavérisation de la souris blanche adulte. — M. A. Weber a étudié la dégénérescence des fibrilles muscu- laires striées chez le gecko sous l'influence des sarcos- poridies; elle paraît dépendre uniquement de phéno- mènes de compression. — MM. J. Cluzet et L. Bassal ont reconnu qu'une seule exposition aux rayons X pro- duit une action durable sur la mamelle; tout dévelop- pement des glandes mammaires de la lapine est empêché pendant au moins deux grossesses succes- sives, séparées par un intervalle de sept mois. — M'!° A. Drzewina a observé, dans l’æsophage de la Torpille, un épithélium cylindrique qui vient interrompre la continuité de l'épithélium stratifié. — MM. Ed. Retterer et A. Lelièvre ont constaté l'existence, dans la mus- culature intestinale de la Tanche, d’un réticulum hématoxylinophile et d'un hyaloplasma colorable élec- tivement par le carmin aluné. — MM. L. Nattan-Lar- rier et Parvu ont reconnu que, chez les sujets atteints d'éosinophilie intense, la défense de l'organisme peut s'effectuer aussi bien par les polynucléaires éosino- philes que par les polynucléaires neutrophiles. — M. M. R. Castex a constaté la présence d’une sensibi- lisatrice spécifique dans le sérum de malades atteints de streptococcies diverses. — MM. H. Bierry et P. Por- tier décrivent quelques perfectionnements à leur pro- cédé de dosage du sucre dans le sang. — MM. H. Bierry et J. Giaja ont dosé le sucre dans le sang du Poulpe ; évaluée en glucose, la quantité trouvée est égale à 32 cgr. par litre. — M. P. Portier estime que les corps gras introduits dans les trachées des insectes aquatiques sont résorbés à la terminaison des trachées; ils peuvent servir à l'introduction de particules solides et de germes infectieux. — M. H. Béclère a observé, dans la leucémie myéloïde, l'évolution continue du mégaloblaste d'abord en normoblaste, puis en pycno- blaste (à l'aide de deux karyocinèses successives), enfin en globule rouge par rejet du noyau. — MM. L. Babonneix et P. Harvier ont constaté, dans deux cas de tétanos à évolution rapide, des modifications cellu- laires des parathyroïdes et une hypersécrétion colloï- dale remarquables. — M. P. Marchal décrit quelques espèces nouvelles de Cochenilles de l'Afrique occiden- tale. — MM. A. Gilbert et A. Lippmann ont observé, à la phase terminale des cirrhoses alcooliques avec ascite, une égalisation remarquable du débit urinaire quotidien. — M. A. Delcourt a constaté que les Noto- necta du Midi s’accouplent avec une forme quelconque des Notonecta des environs de Paris, tandis que ces dernières ne s'accouplent qu'entre formes de même espèce. — M. G. Repaci a isolé de la flore bactérienne anaérobie de la bouche de l’homme un bacille rappe- lant par ses caractères le bacille fusiforme de Vincent. — MM. M. Doyon et Cl. Gautier montrent que, chez le lapin, l'injection de bile rend le sang incoagulable si elle est pratiquée dans une mésaraïque, mais non dans la jugulaire. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 16 Mars 1909. M. Fayet a employé le sérum antitétanique à dose suffisante dans 215 cas de blessures diverses des mem- bres et 130 blessures du pied, et n’a observé aucun cas de tétanos. — M. J. Livon a injecté à des cobayes un extrait de corps jaune provenant de truie et de vache ; il produit la mort par asphyxie. — MM. Alezais et Peyron montrent que, contrairement aux conceptions de Cornil et de Ranvier, des cellules isolées d'aspect épithélio-glandulaire banal peuvent, à la faveur d'un mode de groupement spécial, donner lieu à des figures épithéliomateuses de type malpighien. — M. C. Gerber a étudié la relation entre la résistance du lait cru aux présures animales et le temps écoulé depuis la traite, lorsque le lait est conservé soit à basse température, soit à la température ordinaire. — MM. Conor et Huon, en recherchant le pouvoir agglutinant du sérum des chèvres tuées aux abattoirs de Marseille pour le Micro- coccus melitensis, ont constaté qu'un certain nombre de ces animaux sont infectés par ce microbe, SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 19 Mars 1909. M. C. Raveau : Les lois du déplacement de l'équi- libre et le principe de Le Chatelier. Le célèbre principe énoncé en 1884 par M. H. Le Chatelier n’est pas la seule forme que son auteur, puis d'autres physiciens, en particulier M. Gouy, aient donnée aux lois du déplace- ment de l'équilibre. M. Raveau se propose de montrer avec quelle facilité des remarques évidentes sur les phénomènes les plus simples conduisent à des relations dont il suffit d'affirmer la généralité pour retrouver diverses formes connues. Deux cas sont considérés : le déplacement de l'équilibre à température constante, avec variation de volume et (en général) de pression; le déplacement de l'équilibre à pression constante, avec mise en jeu de chaleur et (en général) variation de température. L'auteur arrive à deux inégalités, qui peuvent s'exprimer de la façon suivante : 1° À tempé- rature constante, la compressibilité est toujours plus grande quand il se produit une modification intérieure que quand cette modification est entravée. Pour l’ensei- gnement élémentaire, on pourrait présenter ce fait comme évident en disant que /e signe de la variation de volume est le même pour la modification intérieure, considérée 1solément, que pour l’ensemble de la trans- formation; 2° La capacité calorifique à pression cons- tante est plus grande quand il se produit une modi- fication intérieure que quand cette modification est entravée. Sous une forme élémentaire, la chaleur mise en jeu dans la modification intérieure, considérée iso- lément, est de même signe que pour la transformation totale. M. H. Le Chatelier est bien d'accord avec M. Raveau que les différents énoncés de la loi du déplacement de l'équilibre stable sont identiques quand au fond, mais il est moins convaincu, en se plaçant au seul point de vue de l’enseignement, que les nou- veaux énoncés soient supérieurs aux anciens. Ces remarques amènent M. Raveau à préciser qu'il a entendu s'adresser surtout aux professeurs. Son but était de donner, sans faire appel à la Thermodyna- mique, un exposé qui conduisit à des énoncés rigou- reux, assez simples et faciles à retenir, pour servir de guide sûr. Il espère que ce rôle pourra être joué par les énoncés qu'il a donnés. — M. Ch. Lallemand : Les marées de l'écorce et la rigidité du globe terrestre. Ce sujet vient d'être exposé en détail dans la Æevue (voir p. 212). — M. Louis Bréguet : Sur les hélices de sustentation. M. Bréguet commence par justifier les formules générales données par le colonel Renard : A—an°D', et T—yn°D, où « et y désignent deux coefficients ; A, la poussée en kilogrammes ; 2, le nombre de tours par seconde; D, le diamètre extérieur en mètres; T, la puissance absorbée en kilogrammètres par seconde. Ces formules ont été contestées; aussi importait-il de les justifier et de montrer qu'elles sont la base de la technique des hélices. De ces formules, il tire deux expressions fondamentales, qui peuvent s'écrire : ; a? en posant ur q T— Ces formules permettent de discuter à peu près com- plètement toutes les questions qui peuvent se poser au sujet des hélices de sustentation. M. Louis Bréguet propose d'appeler qualité sustentatrice d'une hélice l'expression : L Im ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 385 il montre comment cette qualité définit bien les avan- tages d’une hélice sur une autre et comment elle se tire immédiatement de l'expérience par la formule : 3 A3 =: L'extrème simplicité de cette expression fait préférer à M. Bréguet l'adoption de cette qualité (g) à la qua- tité (Q) qu'avait proposée le colonel Renard, etil donne la relation qui lie ces deux qualités : qualité Bréguet = 0,258 Vqualité Renard. M. Bréguet montre ensuite que celte qualité varie avec les angles d'incidence donnés aux ailes, avec les formes de ces ailes (profils et contours), et enfin avec la frac- tion de pas totale des ailes de l'hélice considérée. Il montre comment, par une série d'expériences, il à pu déterminer successivement le meilleur profil, le meil- leur contour, la meilleure fraction de pas et la meilleure incidence. Il est arrivé ainsi, en suivant les méthodes expérimentales du colonel Renard et par l'emploi de formes arquées, à une hélice optimum dont la qualité sustentatrice a atteint le chiffre excellent de g — 0,35, soit un gain de 27°/, sur le chiffre réalisé par Renard. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 14 Janvier 1909. M. A. E. H. Love présente ses recherches sur le {é- chissement de la Terre par l'action des forces pertur- batrices. I arrive à la conclusion qu'il n'existe pas de couche fluide uniforme entre le noyau central et la croûte solide de la Terre. Il n’est pas impossible qu'il existe des surfaces au-dessous desquelles il y ait de la matière fondue, mais ces surfaces sont isolées, et la matière fondue ne forme pas une couche continue. Cutte conclusion n'empêche pas l'existence possible d'une couche de rigidité relativement faible; mais, si cette couche existe, elle doit être assez rigide pour prévenir un glissement fini de la croûte extérieure sur le corps central. — M. J. Larmor envisage les rapports entre la nutation précessionnelle libre de la Terre et sa résistance contre les déformations dues aux marées. Il montre que le résultat de Hough — à savoir : que la précession libre de la Terre déformable est la même que celle d’une Terre rigide, de la forme qui résulterait si l’on supprimait le bombement provenant de la force centrifuge de la rotation diurne — est général et s'étend à une Terre d’un degré quelconque d’hétérogénéité ou de plasticité. — Sir N. Lockyer : Notes sur les obser- vations du Soleil et des étoiles dans quelques cercles mégalithiques anglais. IN. Les cercles de Botallek, à Saint-Just (Cornouailles). Le groupe de cercles de Botallek a été érigé pour les observations astrono- miques. Il renferme deux cercles distincts d’aligne- ments, l'un associé avec le culte de l’année de mai, l’autre associé avec le rituel de l’année solsticienne plus récent. Comme un alignement d'étoile horaire existe dans chaque groupe, l’auteur en déduit que le culte de l'année de mai a précédé l’année solsticienne d'environ trois cents ans, les dates approximatives élant 1700 et 1400 av. J.-C. — M. J. A. Crowther expose ses recherches sur le passage des rayons de Rüntgen à travers les gaz et les vapeurs. 4° La quantité d’ionisa- tion produite par l’action directe des rayons Rôntgen primaires sur un gaz est simplement proportionnelle à la pression du gaz. On ne trouve pas trace appréciable d'émission d’une radiation secondaire douce par le gaz, l'ionisation paraissant due à l’action directe des rayons primaires; 2° L'ionisation relative dans différents gaz, comparée à celle de l'air, varie beaucoup avec la dureté des rayons. H et C’HBr présentent une augmentation quand la dureté des rayons s'élève; d’autres gaz restent constants ou donnent une diminution; 3° L'ionisation relative dans un gaz suil approximativement une loi additive. Elle dépend un peu de l’état de combinaison, surtout pour les rayons doux; 4° L'absorption varie avec la pression suivant une loi exponentielle; 5° La valeur de la radiation secondaire émise par différents gaz relativement à l'air est, en général, à peu près indé- pendante de la dureté des rayons primaires; 6° Le coef- ficient d'absorption des rayons secondaires émis par un gaz, dans ce gaz lui-même, n’est pas anormal; 7° L'ioni- sation totale dans les différents gaz n'est pas une con- stante, et les valeurs relatives obtenues diffèrent avec la dureté des rayons; 8 La quantité d'énergie néces- saire pour produire un ion dans divers gaz est diffé- rente, et varie aussi avec la dureté des rayons. — M. R. D. Kleeman à déterminé la vitesse des rayons cathodiques émis par les substances exposées aux rayons y du radium. Une partie de la radiation catho- dique d’une plaque exposée aux rayons y du radium consiste en rayons très doux qui sont absorbés dans 4 à 2 centimètres d'air, La douceur de la radiation est pratiquement indépendante de l'épaisseur du radiateur et du tamisage préalable des rayons y à travers un écran épais. La radiation est beaucoup plus douce du côté de la plaque radiante où les rayons y émergent que du côté où ils entrent. Les mesures de la douceur de la radiation pour des radiateurs de différentes substances, sur le côté où les rayons y entrent, montrent qu'elle est prati- quement indépendante de la nature de la substance du radiateur. La radiation douce produite par les rayons f el y du radium ensemble est d'un caractère plus péné- trant que celle que produisent les rayons y seuls. Les rayons cathodiques pénélrants produits directement par les rayons y ont des vitesses différentes; la vitesse de ces rayons secondaires est, en général, égale à celle des rayons 6 du radium. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 26 Mars 1909. MM. J. A. Fleming et G. B. Dyke : La production d'oscillations électriques régulières dans les eireuits clos el une méthode d'essai des récepteurs radiolélé- graphiques. En utilisant la faible propriété radiante des circuits clos, les auteurs montrent que, par l'emploi de deux circuits oscillatoires presque clos, — l’un employé comme station de transmission, l’autre comme station de réception, les deux étant placés à une dis- tance de quelques centaines de mètres l’un de l’autre, — on peut réaliser quelque chose d’équivalent aux stations radiotélégraphiques à oscillateurs ouverts à très grande distance. On produit dans un des cireuits clos des oscillations amorties extrèmement constantes au moyen d'un transformateur ou d'une bobine d'in- duction, d’une coupure à étincelle sur laquelle on envoie un jet d'air régulier et d’un interrupteur à mer- cure. Le circuit récepteur consiste en un circuit carré de fil isolé qu'on peut faire pivoter dans toutes les directions. Ce circuit est relié en série avec un conden- sateur de capacité variable et avec le détecteur d'oscil- lations à essayer. S'il est du type actionné par le cou- rant, on le place en série avec le condensateur; s'il est du type actionné par le potentiel, on le place en travers des bornes du condensateur, en l’associant avec une pile shuntée et un téléphone. On peut alors placer le circuit récepteur dans une position telle qu'aucun cou- rant n'y est induit par les oscillations du circuit trans- metteur; mais, en le tournant d’un certain angle, on entend des sons dans le téléphone, indiquant la pro- duction d’oscillations dans le circuit secondaire. L an- gle de rotation est une mesure de la sensibilité du détecteur. Cette méthode s'est montrée d’un grand secours pour l'étude des détecteurs à gaz ionisé. — MM. J. A. Fleming et H. W. Richardson : L’efel de l'air soufflé sur la décharge par étincelle d'un conden- sateur chargé par une bobine d'induction ou un trans- formateur. Quand la décharge oscillatoire d'un conden- sateur a lieu à travers une coupure à étincelle, en char- geant le condensateur par une bobine d’induction ou 386 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES un transformateur, l’étincelle intermittente qui se produit est complexe : elle est formée en partie d'une vraie décharge de condensateur, en partie d’un are à courant alternatif dû au courant provenant directement de la bobine d'induction ou du transformateur. Cette décharge en arc est une source de difficultés quand on fait des mesures quantitatives exactes avec les oscilla- tions électriques, et elle doit être prévenue ou arrêtée pour produire une décharge oscillatoire uniforme. Les auteurs montrent qu'on peut y arriver par un soufflage d'air régulier sur la coupure, pourvu que celle-ci soit petite. Quand elle est assez grande, on peut la rem- placer par plusieurs petites coupures en série. — M. S. W. J. Smith : Sur l’artion entre les métaux et les acides et les conditions dans lesquelles le mercure produit le dégagement d'hydrogène. L'auteur étudie l’action d'un acide sur un métal avec dégagement d’'H et, sans autre hypothèse que celle de la réversibilité, il montre que, si un état régulier est atteint après le dégagement d'une certaine quantité d’H, il sera défini par une équation de la forme a2M = bmH, où à et h sont des coustantes à une température donnée, et m les concentrations des ions hydrogène et métal en solu- tion, et H et M des constantes spécifiques de l'hydrogène et du métal. Les expériences de l'auteur justifient l'équation précédente pour le mercure. Avec ce der- nier, on peut faire apparaître de l'hydrogène quaud l'équilibre a été atteint, soit en réduisant la valeur de m, soit en augmentant celle de . SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 18 Mars 1909. M. R. W. Gray et Sir W. Ramsay, en comprimant l’émanation du radium, l'ont condensée en un liquide incolore, dont la tension de vapeur est de 100 milli- mètres à — 7405 et de 10.000 millimètres à 195, et dont la densité est de 7 environ. Le liquide est faible- ment phosphorescent avec une teinte verte ou bleu verdàtre ; mais, en le refroidissant avec de l'air liquide, il devient successivement bleu d'acier, blanc, jaune.et orange; en enlevant l'air liquide, les changements inverses se produisent. — MM. W. H. Perkin, W. J. Pope et O. Wallach ont séparé l'acide 1-méthyley- clohexylidène-4-acétique, par le moyen de son sel de brucine, en deux composants optiquement actifs ; l'acide gauche fond à 52%5 et possède un pouvoir rotatoire spécifique de — 81° en solution alcoolique. Ce cas est remarquable en ce que le corps considéré ne possède aucun atome asymétrique. — M. Ch. W. Moore a extrait du rhizome de l'Apocynum androsæmi- folium une résine brune A, insoluble dans l’eau chaude ou froide, et une résine brune B, soluble dans l’eau chaude. La résine À renferme un peu d'ipuranol, de l'acétovanillone, les acides palmitique, stéarique, oléique et linolique, et une grande quantité de matière insaponifiable, d'où l’on a extrait deux alcools nou- veaux : l’androstérol, C#°H#0H, F.2082-2109, et l'homo- androstérol, C**H#OH, K.192°. La résine B contient un peu d’acétovanillone. Dans la portion de l'extrait alcoolique du rhizome soluble dans l’eau froide se trouve un glucoside de l’acétovanillone, l’androsine, F.2180-220°, et une substance nouvelle, l’apocynama- rine, C?#H#06.2H°0, F.170°-175°, très amère et très toxique. — MM. G. Barger et A. J. Ewins, en faisant agir PCI, puis l'eau, sur le 3:4-méthylènedioxyman- délate d’éthyle, ont préparé un certain nombre d’éthers méthyléniques et de carbonates cycliques reliés aux acides dihydroxyphényl-acétique,-glycolique et-glyoxy- lique. — MM. J. T. Hewitt, S. H. Newman et T. F. Winmill ont constaté que l'hydroxyaposafranone obtenue à partir de la safranine est identique avec celle qu'on prépare par la méthode de Jaubert avec lé nitrosophénol et la m-hydroxydiphénylamine. La synthèse d’une phénosafranine asymétrique par oxyda- üon de l’aniline avec la 2: #'-diaminodiphénylamine, décrite par Barbier et Sisley, n’a pu être réalisée; la safranine obtenue par ces auteurs doit probablement son origine à la présence de 4:#4'-diaminodiphényla- mine. Ces constatations sont en faveur de la formule symétrique de Bernthsen pour la phénosafranine. — M. S. Ruhemann, en condensant le phénylpropiolate d'éthyle avec la sodiobenzamide, a obtenu un com- posé C'"HO?A7 en aiguilles rouge sombre, F.184, donnant des sels bleus avec les alcalis ; c’est proba- blement la diphényldicétopyrroline. — MM. Al. Me Kenzie et H. A. Muller ont réalisé la synthèse asymé- trique de l'acide d-lactique par la réduction du pyru- vate de d-amyle. Il apparaît que plus l’agent asymé- trique directeur est optiquement actif, plus la synthèse asymétrique est prononcée. — M. Ch. Dorée a étudié l'action de l'ozone sur plusieurs dérivés du cholestérol; tous, à l'exception de l'a-cholestanol, réagissent, et la détermination des indices d'ozone confirme l’hypo- thèse de Molinari qu'une seconde double liaison est présente dans la molécule de cholestérol. Toutefois, l'addition de la deuxième molécule d'ozone ayant lieu avec beaucoup de difficulté, il se peut qu'il y ait déve- loppement de ce groupement dans la molécule sous l'iufluence de l'ozone, puis addition subséquente. — M. M. M. P. Muir a préparé le bioxyde d’iode 10° ou #0: par déshydratation et désoxydation partielle de l'acide iodique en le chauffant avec l'acide sulfurique concentré. C'est un corps cristallisé jaune pâle; d= %,2. Il est décomposé à 430° en I et 0. Il est un peu soluble dans l'acide sulfurique concentré; il forme un composé 1°0*.3S0*. — M. J. C. Irvine à constaté qu'une solution de chitine dans HCI concentré se transforme à 45° en chlorhydrate de glucosamine en huit à dix heures; l’hydrolyse est quantitative, sans for- mation de composés humiques ou de matières coloran- tes, et la réaction peut être suivie polarimétriquement. — M. F.-W. Kay, en traitant la d-«-méthylisosérine par le bromure de nitrosyle, a obtenu l'acide d-$- bromo-+-méthyllactique, F. 114, que KOH alcoolique convertit en d-«-méthylglycidate de K; enfin, l’action de l’eau à 400° transforme ce dernier en d-4-méthyl- glycérate de K,[x]n = — 4°. — M.J.-A.-N. Friend a con- staté que la vapeur d'eau exempte de CO*n’a pas d'action sur le fer pur jusqu'à la température où elle commence à se dissocier; il se forme alors un oxyde noir, proba- blement Fe*O*. — Le même auteur expose ses vues sur la constitution des acides sulfureux, sulfurique, carbo- nique et formique, qu'il représente par les schémas : OH OH OH DA GS Yo * QI PANIER Ke HG OR NZ « — MM. S.-R. Best et J.-F. Thorpe, en faisant réagir . le dibromure d’éthylène sur le cyanoacétate d’éthyle sodé, ont obtenu l’aè-cyanoadipate d'éthyle, qui se transforme facilement en carbonate d'éthyle et2-imino- 3-cyanocyclopentane-1-carboxylate d'éthyle, d'où lon retire le 1-imino-2-cyanocyclopentane. Aux dépens de ces composés iminés, les auteurs ont préparé de nom- breux dérivés du cyclopentane. — M. J.-F. Thorpea répété la synthèse du 1 : 1-diméthyleyclopentane-3 : 4-dione-2 : 5-dicarboxylate de méthyle par la méthode de Komppa, mais n’a obtenu qu'un rendement de 10°/.. — M. H. Me Combie et M'° E. Parry, en condensant l'anisaldéhyde-cyanhydrine en présence de HCI gazeux, ont obtenu un composé fondant à 156° et de la 3-céto- 2:5-di-p-méthoxydiphényl-3 : 4-dihydro-1 : #-diazine; la cinnamaldéhyde-cyanhydrine, soumise au même traitement, fournit la 3-céto-2 : 5-distyryl-3 : 4-di- hydro-1 : 4-diazine. — MM. A.-W. Titherley et W.-L. Hicks, en traitant la phénylbenzométoxazone par PCF; ont obtenu la 2 : 4#-dichlorophénylbenzomé- toxazine, qui, sous l'influence de POC, présente de la tautomérie due à la migration des atomes de Cl : il se forme une substance cristalline jaune, qui est décom- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES posée par l’eau en benzoylsalicylonitrile. — MM. W.-J. Pope et S.-J. Peachey poursuivent leurs reclerches sur les composés alkylés du platine. — MM. A. W. Crossley et Ch. Gilling ont reconnu que‘le malonate d'éthyle sodé réagit sur la 5-chloro-1 : ie TU cyclohexène-3-one avec formation de 1 : 1-diméthyl-A‘- cyclohexène- 3-one-5-acétate d'éthyle et é slimination de carbonate d'éthyle. — M. G.-S. Walpole décrit un appareil simple à sécher les gaz pour l'emploi avec une pompe pneumatique méc canique. — M. J.-F. Mackey a préparé quelques éthers organiques du tri- oxyde d’antimoine, par chauffage de Shb*0* avec l'alcool ou le phénol en présence soit de CuSO# anhydre, soit de Ca métallique. Voici les points d'ébullition des éthers sous une pression de 30 millimètres : méthylique, 65°; éthylique, 115°-120°; propylique, 143°; isobutylique, 1440: amylique, 170°; isoamylique, 163; phénylique, 250°; o-tolylique, 352; p-tolylique, 345°. [ls corres- pondent à la formule R*SbO*, SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 4 Février 1909. M. J. H. Stansbie a étudié l'influence de petites quantités d'éléments dans le cuivre sur ses réactions avec l'acide nitrique. Il conclut que la cause principale de la diminution du volume d'oxyde nitrique libéré par la dissolution des alliages de cuivre dans l'acide nitrique est la formation d'une solution solide de l’élé- ment dans l'excès de cuivre. SECTION DE MANCHESTER Séance du 5 Février 1909. MM. L. G. Radcliffe et J. Allan ont déterminé les constantes de la cire des fleurs de jasmin. Le point de solidification est de 56°-57°, Les valeurs données par le butyroréfractomètre de Zeiss sont de 30, à 840 C., à 44, à 56° G. L'indice d'acide correspond à 2,8 milli- grammes de KOH pour 1 gramme de cire. L'indice d'iode par la méthode de Wijs est de 52 à 53 0/6. — M. J. Hübner a reconnu que l'addition de sel à la lessive de soude caustique employée dans la merceri- sation a un effet défavorable sur le rétrécissement des échevaux de coton traités, sur l’affinité des fibres de coton pour les colorants substantifs et sur le lustre des fibres traitées. — M. L. G. Radcliffe a constaté que le tétrachlorure de carbone donne avec la phénylhydra- zine un composé blanc cristallin, fondant entre 198° et 200° C., et avec la triéthylphosphine un composé d’ad- dition moléculaire blanc. D'autre part, il a dosé le sul- fure de carbone quiaccompagne gensaiement CCI" par une modification de la méthode de Gastine, consistant à transformer CS? en xanthate de K et à le titrer avec une solution d'iode N/10. — M. J. H. Lester a observé un tissu de coton teint, incomplètement mercerisé, où les portions de fibre non attaquées montraient une teinte beaucoup plus claire que le reste du tissu. SECTION DE NEWCASTLE Seance du 11 Février 1909. M. F. G. Trobridge a isolé du goudron produit par les fours à coke Otto-Hilgenstock, par distillation frac- tionnée et précipitation avec le chlorure mercurique, les quatre bases suivantes : pyridine, 2-méthylpyri- dine («-picoline), 4#-méthylpyridine (y-picoline), 2 4-diméthylpyridine («y-lutidine). SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Février 1909. M. J. Alexander fait une conférence sur la chimie des colloïides et quelques-unes de ses applications l'argile et de la poterie, du techniques (industries de la teinture, du savon, plâtre de Paris, des engrais, de du lait, etc.). SECTION D'ÉCOSSE Séance du 16 kévrier 1909. M. W. C. Anderson éludie les facteurs qui consti- tuent la valeur des thés. Les qualités utilitaires qui affectent le plus sensiblement la valeur des thés sont : l'arome, l’amertume, le corps et la couleur de la liqueur. Les pointes doivent être enlevées là où elles existent; les feuilles rouges doivent être ôtées dans les thés de qualité supérieure; pour les thés communs, où l’on recourt à la cueillette libre, les conditions de fabrica- tion doivent contribuer à donner la meilleure appa- rence conciliable avec la rétention d'une amertume suffisante de l'infusion. — M. J. Traquair à préparé par traitement de l’amidon sec avec l'acide acétique glacial un mélange d’éthers acétiques auquel il donne le nom de féculose. La féculose donne avec l’eau une solution claire et homogène qui n’est pas réversible après un repos de quelques heures. Etendue sur une plaque de verre, elle sèche en donnant une pellicule claire et flexible, égale à celle qu'on obtient avec la meilleure gélatine. La féculose peut être employée comme succédané des gélatines et gommes, pour l'apprêt des textiles, dans la confiserie, dans la fabri- cation du papier. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 48 Janvier 1909. MM. S. H. Davies el B. G. Mc Lellan décrivent une méthode rapide pour la détermination de CO* dans l'atmosphère. C’est une modification de la mé- thode de Lunge et Zeckendorf, qui consiste à détermi- ner la quantité d’air nécessaire pour saturer l’hydrate de baryte employé pour absorber CO*. SOCIÈTE ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 19 Février 1909. MM. A. Wehnelt et F. Jentzsch rendent compte de leurs recherches au sujet de l'énergie d'émission électronique. On sait que le charbon, les métaux et les oxydes métalliques, chauffés dans le vide, émettent des électrons négalifs, susceptibles d'être éliminés par un champ électrique de direction et d'intensité conve- nables, de façon à refroidir le corps chauffé, Pour maintenir constante la température du corps pendant cette diminution d'énergie, il convient de lui fournir un supplément d'énergie. Les auteurs S’'attachent plus particulièrement à déterminer la quantité d'énergie de l'émission électronique d’un fil de platine électrique- ment chauffé et enduit de CaO. Les valeurs expéri- mentales qu'ils résument dans leur travail sont toutes supérieures aux valeurs calculées; le rapport des deux valeurs décroit à mesure qu'augmente la température et que le vide devient de plus en plus imparfait. Les auteurs ne sont pas encore en mesure d'indiquer la raison du désaccord quantitatif entre la théorie et l'expérience. -- M. A. Wehnelt décrit un appareil fort simple de démonstration des courbes d’aimantation et d'hystérèse, appareil qui s'inspire du dispositif de M. Koepsel, tout en étant plus simple et plus petit. M. W. Nernst présente une étude sur /e pouvoir ne siccateur de l’endosmose. Gn sait que ce phénomène consiste en ce que le courant galvanique transporte des liquides à travers les non- -conducteurs poreux. Il emprunte un intérêt technique aux essais si originaux faits pour priver la tourbe et les substances poreuses similaires de l’eau qu’elles renferment. En munissant, par exemple, une plaque d'argile poreuse et humide de deux électrodes en réseau et en appliquant une tension convenable, on voit le côté supérieur se dessé- cher, en même temps que l’eau sort d'en bas. L'on n’a, par conséquent, qu’à disposer la substance à des- 388 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sécher sur le côté supérieur de la plaque pour lui faire communiquer à cette dernière l'humidité qu’elle con- tient. Ce pouvoir hydrophile n'a, du reste, qu'une intensité assez faible, que l’auteur détermine par voie indirecte, à l’aide de la hauteur d’ascension endos- motique. Une plaque d'argile, baignée d'eau à sa face inférieure, comporte, à sa face supérieure, une sub- stance dessiccatrice maintenant la tension de vapeur à une valeur donnée. L'équilibre s'établit en raison de la vaporisation d’eau qui se fait à travers la plaque d'argile jusqu'à ce qu'une hauteur d’ascension donnée soit atteinte. L'effet utile du dessèchement endosmo- tique est assez modeste. — M. O. von Bayer rend compte d'une nouvelle méthode pour augmenter la luminosité et la netteté des bandes d'interférence sur les plaques à faces parallèles. Il dispose, d’un côté de la plaque, un milieu d’exposant de réfraction un peu supérieur à celui de l'air. En choisissant un angle d'in- cidence convenable, il réalise, à la limite verre-air, la réflexion totale des rayons, qui, de l’autre côté, quittent la plaque en l’effleurant. C'est ainsi qu'il concentre d’un côté de la plaque l'intensité sortante tout entière, en même temps qu'il augmente la netteté des bandes d'interférence. — M. H. Lehmann indique le principe d’un écran de projection nouveau à surface métallique, qu'il utilise, depuis quelque temps déjà, pour la démonstration des photographies en couleurs naturelles. Après avoir décrit la préparation des sur- faces métalliques à réflexion diffuse, l’auteur expose en détail les propriétés de ces dernières. Les écrans d'aluminium. lisse s’emploient avec avantage surtout pour les micro-projections et les projections des phé- nomènes physiques de faible intensité lumineuse, tels que les effets de polarisation et surtout les spectres, qui se présentent avec une richesse de couleurs extraor- dinaire. La luminosité de cet écran est douze fois plus grande que celle de l'écran ordinaire. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 27 Février 1909. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries: l/ne famille d'équations différentielles du premier ordre. Transformation et intégration de plusieurs catégories d'équations différentielles du premier ordre à l’aide de considérations géométriques très simples. — M. J. C. Kluyver: Sur un théorème du calcul intégral dû à Gegenbauer. N s'agit du théorème d’après lequel il est possible de transformer le produit de deux fonctions J'{(ax), J(bx) de Bessel de même paramètre > He en intégrale définie (Nielsen : « Handbuch der Theorie der Cylinderfunktionen », p. 182). Dans un article antérieur sur le « vagabond indécis » (Rev. génér. des Se., t. XVI, p. 962), l’auteur s’est servi de ce théorème dans le cas v— 0 pour la déduction de quelques inté- grales discontinues contenant des fonctions de Bessel. lei il en donne une démonstration directe et il en déduit des extensions des résultats antérieurs. — M. D. J. Korteweg présente au nom de M. L. J. E. Brouwer: Sur la transformation continue et uni-univalente de surfaces en elles-mêmes. Démonstration des trois théo- rèmes suivants : 1. Une transformation continue et uni-univalente à indicatrice invariante d’une surface fermée bilatérale à connexion simple admet au moins un point invariant. 2. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait un point invariant dans le cas de l’indicatrice renver- sée. 3. Dans le cas d’une surface unilatérale, il y a au moins un point invariant. On obtient un exemple bien simple qui prouve le théorème 2, si l’on imagine d'abord la correspondance entre les points P, P' d’une sphère situés de manière que le plan normal à PP' au point milieu soit fixe et qu'ensuite on fasse tourner l’une des moitiés dans lesquelles ce plan divise la sphère d'un certain angle autour de la normale à ce plan dans le centre. — M. E. F. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. W. de Sitter: Sur les solu- tions périodiques d'un cas particulier du problème des quatre corps. Le cas particulier en question est celui d'un corps central et de trois planètes ou satellites dont les masses sont petites en comparaison de celle du corps central, se mouvant autour de ce corps en des orbites situées dans le même plan, les mouvements moyens (en longitude) étant entre eux à peu près comme les nombres 4, 2, 4. Ce cas se réalise pour Jupiter et ses trois satellites intérieurs, si lon néglige les inclinaisons des orbites, l'influence du quatrième satellite et du Soleil et l'aplatissement de la planète. L'auteur trouve 16 combinaisons satisfaisant aux condi- tions de symétrie. Deux de ces combinaisons sont réalisables, quelles que soient les masses; quatre autres exigent une relation déterminée entre ces masses; les dix combinaisons restantes sont impossibles ; de chacun des deux groupes de deux et de quatre combi- naisons, la moitié est instable. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. XUI. Dans les communications précédentes, l’auteur a con- sidéré une certaine courbe fermée comme la projec- î tion de l'intersection des deux surfaces = 0 et E 2 NME s TS —0 sur le plan (v, x); ici il s'occupe de la projec- tion de cette courbe d'intersection sur le plan (T, x). — Ensuite M. van der Waals présente au nom de M. Ph. Kohnstamm: Sur la lorme des isopiestes des mélanges binaires. I. — M. H. A. Lorentz présente : 1° au nom de M. ©. Postma: Sur le calcul de la pres- sion d'un gaz à l'aide de l'hypothèse d'un ensemble canonique. Critique sur la méthode de M. L. S. Orn- stein (/tev. génér. des Se., t. XX, p.198); 2° au nom de M. L. S. Ornstein : Détermination de la pression d'un gaz à l'aide de la Mécanique statistique de Gibbs. Réfutation de la critique de M. Postma; 3° au nom de M. J. J. van Laar: Sur l'état solide. L'auteur donne quelque extension aux résultats qu'il a déposés ailleurs (Archives Teyler, t. XI, p. 235-331). + 3° SGiENCES NATURELLES. — M. C. Eykman: Aecher- ches dans le domaine de la désinfection. La résistance des bacilles de la mème culture contre des tempéra- tures élevées est individuellement très différente. Tan- dis que la majorité meurt en quelques minutes, quel- ques-uns sont encore vivants après un quart d'heure, une demi-heure. Si l'on porte le temps sur l'axe des abscisses, le nombre des bacilles survivants sur l'axe des ordonnées, on obtient la courbe des survivants dans la forme du signe intégral f renversé. Cependant, les recherches de MM. Madsen et Nyman mènent à une courbe d’une autre forme ; c’est pourquoi M. Eykman à étudié la question de plus près. Ses résultats nouveaux en faveur de la première courbe sont déposés en des diagrammes. — M. W. Einthoven présente: Recher- ches faites au Laboratoire physiologique de l’Univer- sité de Leyde. — M. J. P. van der Stok présente : 1° au nom de M. S. H. Koorders: Polyporandra Junghubhni, espèce de la famille des Îcacinaceae, non encore publiée, de l'Herbier de Leyde; 2° au nom de M. E. Du- bois : Sur une oscillation de longue durée du niveau de l'eau du sol dans les dunes de la Hollande. — M. G. C. J. Vosmaer présente au nom de M! W. E. Coward: On Ptilocodium repens, a new gymnoblastie Hydroid epizoie on a Pennalulid. — M. C. A. Pekelharing pré- sente au nom de M. J. G. Sleeswyk: Contribution à l'étude de l'anaphylaxie du sérum. I. P. H. SCHOUTE. —————_—_————û—ê————— a Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. AAA EST PATES ATEN RER EE Sn Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 4, rue Gassetto. 20° ANNÉE INfS , 15 MAI 1909 générale SU CICNC pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ L. — Physique La théorie des serres. — Suivant une opinion assez répandue, la température relativement élevée qui s'établit à l'intérieur d'une enceinte close, recou- verte de verre et exposée aux rayons du soleil, serait due à une transformation des longueurs d'ondes; les rayons thermiques du soleil, susceptibies de pénétrer à travers le verre, élèveraient, en frappant les parois de l’enceinte, la température de celle-ci : l'énergie calorifique serait réémise par les parois sous la forme d'ondes de longueur bien plus considérable, incapables de traverser le verre. Aussi les serres agiraient-elles comme trappes à rayonnements. Dans un récent Mémoire, le Professeur R.-W. Wood ! fait remarquer que, loin d'adopter cette facon de voir, il avait toujours cru ne devoir attribuer à l'action pré- cédente qu'un rôle secondaire, le rôle du verre consis- tant essentiellement à empêcher l'air échaufté par le sol, à l’intérieur de l'enceinte, de s'échapper de cette dernière. En ouvrant les portes d'une serre par un jour froid et venteux, la trappe à rayonnements semble, en effet, perdre beaucoup de son efficacité. Aussi l’auteur est-il d'avis qu'une serre faite d'un verre transparent aux ondes de toutes longueurs présente- rait une température presque — sinon absolument — aussi élevée que celle des serres ordinaires. L'écran transparent permettrait, en effet, aux rayonnements solaires d'échauffer le sol; ce dernier augmenterait à son tour la température du volume d'air limité que renferme l'enceinte, tandis qu'à l'air libre, le sol, en raison des courants de convexion, viendrait sans cesse en contact avec des couches d’air froid. Afin de vérifier cette théorie, l’auteur à construit deux enceintes de carton noir mat, recouvertes : l’une d'une plaque de verre, l’autre d’une plaque de sel gemme d'égale épaisseur, et qui renfermaient chacune l'ampoule d'un thermomètre : elles étaient enveloppées de coton, à l'exception des plaques transparentes, exposées à la lumière du Soleil. Or, la température à l'intérieur de ces deux enceintes est montée graduel- lement à 65°, et, comme la plaque de sel gemme transmettait les ondes de grande longueur, arrêtées par le verre, l'enceinte recouverte de la plaque de sel s'est trouvée être un peu en avance sur l'autre. Afin d'éliminer cette perturbation, l’auteur a disposé sur l'une et l’autre une plaque de verre tamisant la lumière du Soleil. Toutes choses étant ainsi établies, l'auteur n'a pu constater même un degré de différence entre les tem- pératures des deux enceintes, la température maxima étant d'environ 55°. Grâce à nos connaissances sur la distribution de l'énergie spectrale du rayonnement émis par un corps à cette température, nous sommes fondés à dire que la plaque de sel gemme donne pas- sage à peu près à l’ensemble de ce rayonnement, tandis que celle de verre l’arrête entièrement. Aussi, la perte de température que subit le sol en raison du rayonnement est-elle très petite en comparaison de la perte par convexion, c'est-à-dire que l’interception du rayonnement est d’une utilité excessivement limitée. Les rayons du Soleil pénétrant l'atmosphère d’une planète, la Terre, par exemple, en échauffent le sol, qui, à son tour, augmente la température de l’atmo- sphère par contact et par les courants de convexion qui s'établissent. La chaleur recue s'accumulerait ainsi dans l'atmosphère, où elle resterait, en raison du faible pouvoir de rayonnement des gaz. Il semble peu pro- bable que l'atmosphère soit échauffée à un degré con- sidérable, même dans les conditions les plus favora- bles, par l'absorption du rayonnement venant du sol. Les chaleurs spécifiques des solutions. — L'évolution des applications thermo-dynamiques aux problèmes de Chimie fait voir de plus en plus l’impor- tance qu'il y à à connaître exactement les chaleurs spécifiques des corps. Dans un récent Mémoire sur le calcul des équilibres chimiques, M. Nernst! signalait la nécessité de déter- miner les chaleurs spécifiques des corps, non pas pour une température donnée, mais pour une série de tem- pératures différentes. Au lieu d'établir les relations qui représentent les variations des chaleurs spécifiques avec la température, il conviendrait de faire des déter- 4 Phil. Mag., février 1909. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 1 Gôttinger Nachrichten, 4906. 390 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE minations individuelles très précises (à environ 2°/, près) de cette grandeur. Or, comme les méthodes jus- qu'ici suivies dans ce genre de recherches sont labo- rieuses et d'un emploi malaisé aux températures très élevées ou très basses, et que, d'autre part, la plupart des résultats jusqu'ici obtenus représentent des moyennes ne correspondant aux chaleurs spécifiques réelles qu'avec une approximation assez vague, M. H. Schlesinger, sur le conseil de M. Nernst, vient d’éla- borer une méthode nouvelle permettant d'apprécier facilement les chaleurs spécifiques réelles des liquides, pour une température quelconque, intermédiaire entre les points de congélation et d’ébullition‘. Le principe servant de base à cette méthode consiste à utiliser la modification de volume d'un liquide comme critérium de ses variations de température. Le liquide est introduit dans un appareil consistant essen- tiellement en un dilatomètre, qui renferme, en son centre, une spirale de fils de platine fins. En lançant à travers cette spirale (de résistance connue) une quan- tité donnée d'électricité, on mesure la quantité de chaleur communiquée au liquide. Le coefficient de dilatation du liquide permet de calculer la variation de température, et l'ensemble de ces données suffit à éta- blir immédiatement la chaleur spécifique voulue. L'au- teur admet : 1° que la chaleur spécifique se maintient constante pendant les variations de température; 2° que la modification de volume est proportionnelle à la variation de température; 3° que la chaleur tout entière est absorbée par le liquide. Il démontre la légi- ümité parfaite de ces hypothèses. Les résultats sont relatifs aux substances suivantes : Acide sulfurique normal à 40° {moyenne : 0,867), et à des température variables entre 0 et 60°; acide sulfu- rique à 85 °/, à 0° (moyenne 0,388), et à des tempéra- tures variables entre 0 et 70°; acide sulfurique à 65 2/4, à des températures variables entre 0 et 70°; pentane à 78° (moyenne : 0,467) et à 0° (0,512). $ 2. — Chimie physique La production, sous l'action de la lumière, d’aldéhyde formique dans les corps albu- minoïdes.— Dans un travail présenté l’année der- nière à l’Académie Royale des Sciences de Copenhague, M. Aage-A. Meisling signalait la sensibilité à la lumière que présentent certains colloïdes organiques, notam- ment la gélatine et la gomme. Dans un Mémoire ultérieur, communiqué à cette même Académie, l’auteur tâche d'établir la cause de l'action précipitante et durcissante de la lumière, constatée lors de ses recherches antérieures; d'autre part, il s'attache à trouver des méthodes permettant de mesurer l'intensité de l’action lumineuse, à l'aide d'un photomètre de sa construction, où l'effet obtenu est gradué par filtration de la lumière au travers d’un nombre croissant (1-20) de feuilles de papier de soie blanc. Des chiffres imprimés opaques éliminent toute action lumineuse aux endroits qu'ils recouvrent. Les comparaisons se font à l’aide de trois colonnes de chiffres placées à côté de carrés noirs. L'intensité des rayonnements colorés est mesurée en disposant, de- vant les trois colonnes de chiffres, des verres de diffé- rentes nuances. Le papier et les pellicules au charbon utilisés dans ces expériences ont été sensibilisés par des matières colorantes de l’aniline. L'action lumineuse est mesurée : 1° par la modifi- cation que provoque la lumière dans la puissance d’adsorption des substances et dans la solubilité des mêmes substances dans l’eau chaude; 2° par les mo- difications de teintes et de nuances des couleurs d'ani- line employées; 3° par les réactions chimiques que déterminent les corps formés par l'éclairement de la gélatine. La lecture des chiffres donne immédiatement le Re ! Phys. Zeilschr., n° 6, 1909. degré de décoloration déterminé par la lumière dans les matières colorantes du papier à filtrer et le chan- gement de teinte de la gélatine colorée. L'action exercée par la lumière sur la gélatine incolore ou sensibilisée se démontre par la méthode du relief. L'auteur constate qu'aux endroits exposés à la lumière, la gélatine pure ou additionnée de glycérine présente des réactions intenses qui démontrent la pré- sence d’aldéhyde formique, en fournissant ainsi une explication satisfaisante de l’action coagulante et dur- cissante qu'exerce la lumière sur la gélatine : 4° en répandant sur le papier gélatiné, exposé à la lumière, la solution de Fehling, on voit les parties altérées par la lumière se colorer en brun rougeûtre par suite de la précipitation du cuivre ; 2 l’aldéhyde formique pos- sède le pouvoir de former, grâce à une synthèse par oxydation, les colorants des différents composants. D'autre part, en traitant la gélatine exposée à la lu- mière par des solutions diluées de divers colorants d’aniline, comme aussi en éclairant une gélatine co- lorée au préalable par les mêmes solutions colorantes, l’on obtient des résultats assez intéressants : les par- ties exposées prennent un ton plus foncé (rouge-violet), en même temps que diminue la puissance d’adsorption vis-à-vis de l’eau. Or, cette augmentation de l’adsorp- tion des colorants se retrouve chez les noyaux cellu- laires et les microbes; on peut s’en servir pour obtenir des reproductions polychromes. Tandis qu'une insolation intense et prolongée de la gélatine détermine une décoloration des parties im- pressionnées (de façon qu'un négatif peut donner, à volonté, des copies soit positives soit négatives), le papier à filtrer coloré par l’érythrosine donne d'em- blée, aux endroits éclairés, une épreuve négative, produite par une décoloration rapide. Cette décolora- tion est certainement due à la production d'une sub- stance qui décompose les colorants. Or, il a été dé- montré par différentes recherches que l'éclairement de la gélatine et celui du papier déterminent la forma- tion de peroxyde d'hydrogène, dû, suivant les expé- riences de l'auteur, aux substances mêlées à la géla- tine et surtout aux substances résineuses. Dans le cas des pellicules au charbon, sensibilisées par une solution aqueuse d’érythrosine, l'auteur obtient également des copies négatives avec des négatifs pho- tographiques. En sensibilisant ces mêmes pellicules par le bichromate de potasse, il produit des épreuves positives. Ce phénomène, assez compliqué, constitue un effet de solarisation analogue à ceux que présente la plaque photographique aux sels d'argent. $ 3. — Géologie Les publications du Service géologique de l'Indo-Chine. — Le Service géologique de l’Indo- Chine, sous l'impulsion de M. Lantenois, a pris un essor nouveau. Il a, depuis deux ans, publié un assez grand nombre de Cartes et de Mémoires, dont l’en- semble constitue la plus remarquable contribution à la géologie de l'Indo-Chine. é À Je signalerai tout d’abord les feuilles déjà ancien- nes (1907) de Cao-Bang (n°9) etde Ha-Lang (n° 10) dela Carte géologique provisoire à 1/200.000. A ces feuilles fait suite la feuille à 1/100.000 de That-Khe, récemment distribuée et due au capitaine Zeil. La gravure et le coloriage de ces cartes sont très satisfaisants et l’en- semble est fort harmonieux; iln’y a qu'une légère criti- que à exprimer : c’est que la direction des couches ait été notée au moyen de gros traits rouges, que l’on prend au premier abord pour des filons. Le procédé employé pour lever rapidement ces cartes géologiques est fort intéressant; il a consisté à utiliser la bonne volonté et le zèle des officiers de l’armée coloniale, chargés d'établir la carte topographique. M. Lantenois leur a demandé de lui communiquer tous les renseignements sur l'allure générale et la nature des roches, la direc- tion des couches, etc. ; il n’a plus eu ensuite qu'à faire tonne st tete CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 391 copier etcoordonner ces donnéespar ses collaborateurs réguliers. L'un de ces officiers, le capitaine Zeil, est même devenu un véritable géologue. C'est lui qui est l’auteur d’un des Mémoires récem- ment consacrés à la géologie de l’Indo-Chine. Ces Mé- moires ne sont pas des publications officielles du Gou- vernement général de l’Indo-Chine; ils ont été insérés dans les Memoires de la Société géologique de France, ce qui leur donne une vulgarisation plus grande‘. Le Mémoire du capitaine Zeil, accompagné d’une carte géologique en couleur, est, en quelque sorte, l’explica- tion de la carte de That-Khé et de la future feuille de Pho-Binh-Gia. Le travail de M. Lantenois constitue la mise au point de tout ce que nous savons sur la géologie de l'Indo- Chine. Il y expose surtout celle du Tonkin, résumant et coordonnant dans une synthèse heureuse les travaux de ses collaborateurs. Il est naturellement complété par l'exposé qu'a donné cet ingénieur* des résultats de la Mission au Yunnam dont il avait la direction, et qui comprenait deux autres géologues du Service géologique de l'Indo- Chine, MM. Mansuy et Counillon; cette Mission faisait suite, pour ainsi dire, à celle de M. Leclère ® et avait pour but d'étudier les ressources minières de la ré- gion, en vue de l'établissement du chemin de fer. Enfin, des documents paléontologiques ont été ap- portés par le travail de M. Mansuy ‘; c'est une des- cription des principaux fossiles caractéristiques des faunes primaires et secondaires de notre colonie; il est accompagné de 17 planches en phototypie; il sera très précieux aux géologues de l’Indo-Chine et leur permet- tra de reconnaitre les terrains encore peu connus et d'en déterminer l’âge. Au point de vue théorique, il fait connaitre ces faunes fossiles encore trop peu étudiées, qui mériteraient de faire l'objet d’une monographie dé- taillée et d’un travail comparatif avec les faunes similaires d'autres régions du globe. Il pourrait en ressortir des constatations fort intéressantes et fort utiles. On ne peut qu'applaudir à la publication des résultats obtenus par le Service géologique de l’Indo-Chine. C’est la première fois, à ma connaissance, que l’une des colonies françaises commence à imiter de loin les colo- nies anglaises dans lesquelles il existe un Service géo- logique ; il ne semble pas, d’ailleurs, qu'au point de vue pratique ni les unes ni les autres aient à s'en repentir. Paul Lemoine, Docteur ès sciences, Chef des travaux de Géologie coloniale au Muséum d'Histoire naturelle. $ 4. — Botanique Une nouvelle plante potagère : l'Ansérine amarante. — Il y à une trentaine d'années, le bota- niste Honoré Roux découvrit, dans des terrains vagues aux environs de Marseille, une plante nouvelle appar- tenant au genre Chenopodium. En 1907, MM. Coste et Reynier retrouvaient cette espèce, qu'ils décrivirent sous le nom de Chenopodium amaranticolor où Ansé- rine amarante. M. D. Bois, assistant au Muséum, ayant été appelé à donner son appréciation sur la valeur de cetie plante, exprima l'opinion que ses feuilles pour- raient sans doute être utilisées au même titre que ! Capitaine Zeic : Contribution à l'étude géologique du Haut-Tonkin. Mémoires Soc. géol. France, [4], &. 1, mémoire n° 3. — H. Laxrenors : Note sur la géologie de l'Indo-Chine. Ibid., n° 4. — R. pe Lamorre : Note sur la géologie du Cambodge et du Bas-Laos. 2bid., n° 5. ? H. Lanrexois : Résultats de la Mission géologique et minière du Yunnam méridional : Annales des Mines, 1907: 209 pp., 5 pl. * LEeCLÈRE : Elude géologique et minière des provinces chinoises voisines du Tonkin : Annales des Mines, 1901. Me H. OE £ D la carte géologique de l'Indo- ine : Service des Mines, Hanoï-Haïphong ; 14 pp. XVIII pl. ; phong, 1908; 74 pp., celles de l'Epinard, et il entreprit, à ce suiet, avec un certain nombre de ses collègues de la Société natio- nale d'Acclimatation, une série d'expériences de cul- ture au moyen de graines et d'essais de consomma- tion. Voici les résultats obtenus: Sous le climat de Paris, les graines d’'Ansérine ama- rante doivent être semées du 15 avril au 15 mai, en pots, sous chässis. La germination s’effectuant rapide- ment, les jeunes plantes seront repiquées et conser- vées sous verre jusqu'au moment de la mise en place en plein air, qui ne devra être effectuée qu'à la fin du mois de mai ou dans les premiers jours de Juin; en raison du grand développement que prennent les plantes, il est nécessaire de les eéspacer de 60 centi- mètres. Ce n'est que sous l'influence d'une température élevée que leur croissance devient rapide. Si l'été est chaud, elles acquièrent en peu de temps des dimen- sions (2 m. de hauteur) qui permettent de cueillir successivement, pour l'emploi culinaire, des feuilles qui se renouvellent jusqu'au moment où les premières gelées sévissent et font périr les plantes. La plante exige une somme de chaleur telle que ses graines ne peuvent arriver à mürir sous le climat de Paris. Au sud de la Loire, les conditions changent; mais c'est surtout dans la région méridionale que cette espèce parcourt le cycle complet de sa végétation, donnant, avec le maximum de feuilles bonnes à con- sommer, une abondante récolte de graines. Elle semble ainsi pouvoir s'acclimater dans beaucoup de nos colonies. Au point de vue culinaire, tous les expérimentateurs se sont accordés à reconnaître que l’Ansérine ama- rante constitue un excellent succédané de l'Epinard : d'une manière générale, on trouve qu'il y a similitude complète de saveur entre les deux légumes. Etant donnée la végétation luxuriante de l’Ansérine ama- rante pendant l'été, période durant laquelle l'Epinard monte en graines et ne donne que des récoltes minimes, en raison aussi de l'ampleur des feuilles, produites en abondance, son utilisation comme plante potagère serait très intéressante. 5. — Physiologie Un troisième ton du eœur. — En poursuivant, à l’aide de son galvanomètre à corde, les recherches commencées il y a quelques années au sujet des {ons du cœur, M. W. Einthoven, en collaboration avec MM. J.-H. Wieringa et E.-T. Snijders?, a eu l’occasion de constater que, dans certains cardio-phonogrammes, peu après les vibrations du deuxième ton, ilse produit une nouvelle vibration qu'on ne saurait interpréter que comme troisième ton cardiaque. La figure 1 (p.392) représente l’électro-cardiogramme d'un jeune homme sain de vingt et un ans, étendu, pendant les expériences, sur une couchette horizontale. Le commencement du troisième ton est, en général, de 0,13 seconde postérieur à celui du deuxième et anté- rieur de 0,32 seconde au commencement du premier ton subséquent. La durée approximative du premier ton est de 0,08, celle du deuxième de 0,05, et celle du troi- sième de 0,02 à 0,03 seconde. Les deux premiers tons sont des bruits se composant de sons de hauteurs irrégulières. La distance mutuelle de certains sommets de la courbe démontre l'existence de tons se compo- sant de plus de cent vibrations entières par seconde, tandis que le troisième ton ne semble se composer que d’une seule vibration, d’une période d'environ 0,02 se- conde. L'intensité du troisième ton est variable : Tout en faisant entièrement défaut dans certains pouls, il atteint, dans la figure 4, l'amplitude maxima de 1 Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation, t. LVI, 56 et suiv., février 1909. 2 Nederl. Tijdschrilt voor Genceskunde, 1907, t. If, n° 8. 392 2 millimètres. Les amplitudes des vibrations formant les premier et deuxième tons, sensiblement égales entre elles, atteignent 14 millimètres. L'intensité maxima du troisième ton est, par conséquent, environ sept fois plus faible que l'un ou l’autre des deux premiers. M. Einthoven n'hésite pas à considérer la présence de ce troisième ton comme un phénomène tout à fait normal, se produisant chez la plupart des sujets, d'autant plus que beaucoup de cardio-phonogrammes antérieurement enregistrés font également voir des indications de cette vibration antérieure. Pour expliquer la présence du troisième ton, M. Einthoven fait remarquer que cette vibration, se produisant régulièrement, avec une amplitude va- riable, mais avec une période et des caractères presque constants, dans une phase sensiblement identique des mouvements cardiaques, doit nécessairement être liée au fonctionnement mème du cœur. Cette régula- rité est d'autant plus remarquable que les sons pro- RÉRAREMRAAME FROM SE TE ARE a 2 ee aa el LASER FiG. 1. — Electro-cardiogramme d'un jeune homme sain. — 1, 2, 3, premier, deuxième et troisième tons du cœur. duits par le fonctionnement du cœur présentent des variations multiples, contrastant d’une façon éclatante avec la grande constance de l’électro-cardiogramme, dont la forme permet même de caractériser les diffé- rents individus. L’explication la plus vraisemblable du troisième ton consisterait à l’attribuer à une vibration des valvules semilunaires de l'aorte. Ces valvules supportent, en effet, pendant la diastole, la pression sanguine à l'in- térieur de l'aorte, qui, comme on le sait, est sujette à de nombreuses fluctuations durant chaque période du fonctionnement du cœur. Aussi n'y aurait-il rien d'étonnant à ce que l'amplitude de ces fluctuations de pression, dans certains cas, devienne suffisante pour que la valvule, après le ton diastolique, subisse encore une fois un accroissement considérable de la tension, entraînant de nouveau une courte vibration. $ 6. — Géographie et Colonisation Les récents progrès de la navigation sur le Rhin supérieur’. — La Suisse, qui a, au point de vue des transports, le grand inconvénient d'être un pays intérieur, très éloigné de la mer, cherche à béné- ficier du bon marché des taxes fluviales. La plus grande partie de son commerce se fait par la vallée du Rhin, et c'est grâce à l’utilisation de ce fleuve, si merveilleu- sement outillé et aménagé*, que les céréales russes des- tinées à la Suisse trouvent avantage à passer par Rot- terdam plutôt que d’être débarquées à Gênes ou à Marseille. À mesure que se poursuivait l'amélioration du Rhin, sa «construction » (Strombau), comme disent les Allemands, le terminus de la navigation se reportait 1 Maurice DE Corpret : La Navigation sur le Haut-Rhin en 4908. Moniteur officiel du Commerce, 5 novembre 1908. Cf. les articles de M. Gaston VaLran, dans le Bulletin de Ja Chambre de Commerce française de Genève, janvier et février 1909. ? Cf. Pieure CLenGer : La mise en valeur et l'utilisation économique du Rhin. /ievue générale des Sciences, 30 dé- cembre 1906. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE à Mannheim, à Strasbourg, à Bâle, qui marque aujour- d'hui la dernière des « échelles rhénanes ». Là encore, comme pour toutes les œuvres d'intérêt public, on retrouve en Suisse cette ténacité, cette pru- dence, cet accord remarquable de l'Etat (représenté par la Confédération et le Canton) et de l'initiative privée. Une Association pour la navigation du Rhin supérieur s’est formée, il y a quelques années; elle à travaillé à l'instruction des intéressés et, quand l’opi- nion a été suffisamment préparée, des subventions ont été demandées aux Pouvoirs publics. Chaque année marque un progrès nouveau. En 1908, la période de navigabilité a duré 191 jours (du 1°" avril au 8 octobre), sur lesquels 144 seulement ont pu être utilisés, les nouveaux remorqueurs capables de passer! sous les ponts de Kehl n'ayant été prêts que le 148 mai. Pour prouver la navigabilité du fleuve, il fallait attirer des services de bateaux en subventionnant des Compagnies. C'est ce que firent les Bâlois en s'adressant au début à une Compagnie de Ruhrort et, l'an dernier, à deux Compagnies de Mannheim. En 1908, le nombre des voyages d'aller et retour entre Bâle etStrasbourg a été de 30 (contre 8 en 1907), etle trafic total s’est élevé à 13.877 tonnes (contre 4.250 en 1907). Les mar- chandises transportées se composent surtout de houille (10.000 tonnes), céréales et fers importés en Suisse; le fret de retour est peu considérable, 1.592 tonnes contre 1.026. l’année précédente : il est constitué par des pro- duits de l'industrie électro-chimique suisse (carbure de calcium, ferrosilicium). Les bateaux s'adaptent mieux aux conditions de navigabilité du fleuve; en 1908, le tonnage maximum d'un convoi composé de deux chalands à atteint 835 tonnes (300 en 1904, 542 en 1907) ; d'autre part, des convois ont pu descendre le fleuve en aval de Stras- bourg sans changer de remorqueurs. Des courses de voyageurs ont été organisées plus fréquemment et plus régulièrement en aval et en amont de Bâle; on a compté 50.000 personnes en 1908, contre 3.000 en 1907. Les opérations de chargement et de déchargement s'effectuent sur la rive gauche du Rhin, le long d'un quai de 317 mètres de longueur, construit en 1907 par le gouvernement cantonal, avec une subvention fédé- rale. Deux grues électriques fonctionnent déjà ; d’autres vont être installées pour la campagne qui se prépare. Le quai est relié à la gare de Saint-Jean, sur la ligne Bâle-Strasbourg. Le contrat pour 1909 conclu avec la Compagnie Fendel prévoit un plus grand nombre de services; on compte sur un trafic hebdomadaire de 5.000 tonnes“. La durée du voyage Strasbourg-Bâle (130 kilomètres) est de trente heures à la remonte et de cinq à la des- cente, alors qu'il faudrait compter sept jours pour des chalands de 450 tonnes empruntant la voie des canaux pour aller de Strasbourg à Mulhouse et de cette der- nière ville à Huningue. C'est, d’ailleurs, la raison pour laquelle les Bâlois ont renoncé à prolonger ce canal jusque dans leur ville. En amont de Bâle, et en dehors de la navigation de plaisance, aucun essai concernant les transports de marchandises n'a été tenté. On en est encore à la période d'éducation de l'opinion publique, à laquelle travaillent trois Sociétés d'études ayant leur siège à Bâle, Constance et Saint-Gall. Cependant les travaux qui se poursuivent à Augst et à Laufenburg en vue de capter les forces motrices du Rhin doivent être effectués de manière à concilier les intérêts de l'industrie et ceux de la navigation. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 1 Les bénéfices résultant de l'emploi du fleuve ressortent des chiffres suivants : la taxe kilométrique minimum est de O0 fr. 0225 par les chemins de fer allemands et de 0 fr. 0125 par la navigation fluviale. Pour le même parcours Strasbourg-Bâle, 10 tonnes de houille payent par le fleuve 31 fr. 25. et 40 francs par chemin de fer. BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 393 L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES ET LES RÈGLES DE PRÉVISION DE M. GUILBERT' Il y à 18 ans, en avril 1891, M. Gabriel Guilbert exposait à la Société Météorologique de France un certain nombre de règles pratiques qui lui permet- taient de déduire d’une situation météorologique donnée, caractérisée par une carte d'isobares, les changements qu'éprouverait cette situation du jour au lendemain. Au Congrès que tint l'Association francaise pour l'avancement des Sciences à Caen, en 189%, il indiquait comment, en combinant l’ob- servation des nuages et l’application d’une de ses règles, il pouvait prévoir l’arrivée imminente ou la brusque disparition d'une tempête, en ün lieu quelconque, sans gvoir besoin d'être en un Bureau météorologique où le télégraphe apporte chaque matin des nouvelles de toute l'Europe. C’est en ce sens que le présent livre intéresse tous ceux que préoccupe, pour une raison pralique ou théorique, l'important problème de la prévision du temps à brève échéance. Pour quelles raisons les idées de M. Guilbert, exposées par lui dans l'Annuaire de la Société Météorologique de France, résumées dans diverses Notes à l'Académie des Sciences, développées dans le Bulletin mensuel de la Commission météorolo- gique du Calvados qu'il rédige depuis de longues années, ont-elles mis si longtemps à se faire jour? Sans insister sur des causes secondaires sans intérêt pour l'histoire de la science, on peut dire que la vraie raison est que la Météorologie n’est pas enseignée en France. En deux ou trois établisse- ments existent des cours de Météorologie, dont certains tout à fait remarquables, mais donnés comme à titre accessoire. Aucune Université fran- caise ne possède une chaire magistrale de Météoro- logie. Il arrive donc que des hommes doués d'un sens profond des problèmes météorologiques, et qu'un enseignement didactique eût suffi à mettre en garde contre des incorrections de langage, n'ont pas pu, faute de trouver cet enseignement à leur portée, suppléer aux lacunes de leur éducation scientifique. Entre eux et ceux qui, au contraire, munis d’une culture étendue, n'ont appris la Météo- rologie qu'après coup, des malentendus surgissent qu'il est difficile de dissiper. J'ai déjà eu l’occasion de remarquer que M. Guil- ‘ La présente étude constitue la Préface d'un ouvrage qui va paraître chez Gauthier-Villars : Nouvelle méthode de prévision du temps, par GABRIEL GuiLeert, lauréat du Con- cours international de Liége, secrétaire de la Commission météorologique du Calvados. bert emploie parfois d’une manière incorrecte le vocabulaire scientifique, et que le lecteur peut à bon droit s'étonner du libellé de certaines proposi- tions des « Principes de prévision » annexés au Rapport sur le Concours de Liége. Le lecteur aurait tort, cependant, de prendre prétexte de quelques formules contestables pour ne pas approfondir une méthode qui a fait ses preuves. Le Mémoire de M. Guilbert sur les « successions nuageuses », ses communications à la Météorologique et aux Congrès de l'Association francaise pour l'avancement des Sciences doivent le faire classer au nombre des météorologistes de tempérament et de carrière. Sans doute, il lui est arrivé de critiquer avec une certaine aigreur la « Météorologie officielle », qui, selon lui, restait trop longtemps stationnaire; mais ce fut sans jamais méconnaître tout ce que doit la science météoro- logique aux grandes institutions telles que le Bureau Central Météorologique de France. Quelque progrès que l’on puisse réaliser un jour, on ne devra jamais oublier que les travaux du Bureau Central, les documents qu'élaborent avec une haute con- science les savants qui s’y occupent du Service des avertissements, resteront la base fondamentale sur laquelle devra s'édifier toute œuvre solide. A vrai dire, M. Guilbert l'oublie si peu qu'il a proclamé, à l’occasion, la supériorité des cartes du Bulletin quotidien du Bureau Central francais sur les cartes étrangères, avec une vivacité qui a pro- voqué, hors de nos frontières, certaines susceptibi- lités. Mais ilen a provoqué encore, — et de très légitimes, — par l'expression donnée parfois à sa critique des prévisions établies en dehors de sa méthode. Quoi qu'il en soit, cette méthode repose- t-elle sur des bases sérieuses et constitue-t-elle un progrès réel? La question, à mon sens, ne se pose plus. Celles qui se posent désormais sont les sui- vantes : Peut-on donner à la méthode de prévision qui, « entre les mains de M. Guilbert, donne des résul- tats si surprenants dans des cas où les méthodes classiques échouent* »,une forme qui soit à l'abri des objections adressées à son exposé? Etpeut-on donner de ses principes un énoncé assez objectif pour qu'ils conduisent aux mêmes succès tout autre météoro- giste? Société 1 TeISSERENC DE BORT : Ann. 54e année, 1906, p. 35. Soc. Métior. de France, 394 BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES A la première de ces deux questions, je répondrai aujourd'hui d'une facon très affirmative; à la seconde, je ferai une réponse plus réservée. L'ou- vrage actuel est un effort pour en hâter la solution. M. Teisserenc de Bort et moi, nous avons vive- ment engagé M. Guilbert à publier cet ouvrage d'ensemble, où fussent rappelés ses principes et où fussent donnés de nombreux exemples d'applica- tion de ces principes à des situations déterminées. Par l'examen détaillé du mécanisme d'exécution de quelques prévisions concrètes, on reconnaîlra sans peine que tout l'essentiel des principes de prévision de M. Guilbert était bien donné dans son Æxposé, quelque concis qu'il fût, mais que ces principes sont heureusement complétés par un certain nombre de règles auxiliaires qu'il n'était pas inutile de formuler. Ma conviction est que l'étude de ces prévisions — dont plusieurs sont réellement des prévisions faites avant l'événement et rédigées dans des cartes postales dûment timbrées — ne suffira pas à con- férer au lecteur l'expérience de la prévision que possède M. Guilbert, mais l'y acheminera et lui sera un guide précieux. Depuis la publication de mon Æapport sur le Concours de prévision du temps organisé par Ja Société belge d'Astronomie en septembre .1905, la question a fait l'objet de nombreux travaux. Dans la Monthly Weather Review, de Washington, M. Oliver Fassig a appelé l'attention de tous les météorologistes sur le Mémoire de M. Guilbert; et M. Cleveland Abbe a cité, comme un bon exemple d'application de la méthode expérimentale à la Météorologie, mes expériences, suggérées par une des règles de M. Guilbert, sur l’action mécanique exercée par un courant horizontal sur un tour- billon vertical. Au Congrès de la British Associa- tion, à Leicester, en 1907, M. Shaw, directeur du Mcteorological Office, qui a succédé à M. Mascart comme président du Comité méléorologique inter- national, a consacré une longue Communication à l'exposé et à la discussion de mon Rapport sur le Concours de Liége. M. Nils Ekholm a écrit, en juillet 1907, dans la Meteorologische Zeitschrift, sur les règles de M. Guilbert, un article que j'aurai souvent l’occasion de citer. Lors de la réunion exceptionnelle de la Société météorologique allemande à Hambourg, en sep- tembre 1908, à l’occasion du cinquantenaire dé la Société, le directeur actuel de la Deutsche Seewarte, M. Kôüppen, a consacré aux règles de Guilbert une importante Communication; en attendant que la publication en soit faite, il a bien voulu m'en envoyer un résumé manuscrit. Il reconnait que, « dans le cas typique d'une dépression mou- vante », ce que nous ont appris les météorologistes : tels que Angstrüm sur les vents à l'avant et à l'arrière correspond bien à la règle de Guilbert; pour lui, il ÿ aurait à voir si, dans le cas plus général d'une modification quelconque de la dépres- sion, la règle reste toujours vraie, ou si elle ne se vérifie que moyennant certaines conditions parti- culières qui seraient réalisées dans les exemples cités par Guilbert. Enfin, de divers côtés, notam- ment de l'Observatoire météorologique d'Amster- dam, nous avons recu des témoignages de prati- ciens qui appliquent les règles de Guilbert avec profit. Au risque de faire double emploi avec certains chapitres du livre de M. Guilbert, je résumerai d'abord ici ses règles de prévision, et je rappellerai l'interprétation que j'en ai donnée : j'examinerai ensuite, d'après les auteurs précédents, et d’après les conversations que j'ai eues à ce sujet, les prin- cipales objections qui lui ont étéadressées. Le problème fondamental de la Météorologie de prévision est le problème de l’évolution et de la marche des dépressions barométriques. Tout le temps, au sens ordinaire du mot, est déterminé, dans notre Europe, par le passage des dépressions. Supposons qu'une bourrasque — en entendant par ce mot l’ensemble que constituent la dépression barométrique et le système de vents qui tournent autour de son centre — arrive du large, passe sur la Manche et la mer du Nord, pour disparaître en- suite vers le nord-est. En France, le baromètre baissera jusqu’au moment où le centre de la dé- pression passera à la moindre distance de la station d'observation, pour se relever ensuite ; la direction du vent est déterminée par la règle de Buys-Ballot : en regardant le vent de facon qu'il vous arrive en pleine poitrine, on a le centre de dépression à sa droite. Le vent tournera, au cours de la marche de la dépression, du sud au sud-ouest, à l’ouest, au nord-ouest et jusqu’au nord. Les pluies accompa- gnent en général le passage de la dépression, le plus souvent plus fortes à l'arrière qu'à l'avant; la violence du vent est en raison de la profondeur de la dépression et augmente à mesure que la distance de la dépression diminue. Une bourrasque qui passe au sud de notre pays aura des effets qui se détermineront par l’application des mêmes règles. Les effets produits par le passage d'une même dépression varient quelque peu, aux divers points du territoire, suivant les conditions locales. Et, à mon sens, l'avenir de la prévision en un pays tel que la France serait dans une combinaison, à doses convenables, et de la prévision centralisée et de la prévision régionale. Le pays pourrait être divisé en BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES une dizaine de régions : en chacune d'elles serait un bureau situé, autant que possible, auprès d'un Observatoire, à qui le Bureau Central enverrait de Paris, comme à l'heure actuelle, une dépêche un peu détaillée donnant la distribution des pressions sur l'Europe à 7 heures du matin, mais en la com- plétant par des détails circonstanciés sur la distri- bution probable des pressions sur l'Europe le len- demain. Munis de cette donnée, les Bureaux régio- naux, d’après les signes locaux du temps et d'après leur expérience propre, formuleraient une prévi- sion pour la région, qui pourrait être communiquée par lélégraphe ou par téléphone aux communes et organisations abonnées. Quoi qu'il en soit, le problème qui consiste à déduire, d’une carte des isobares à un jour donné, Ja carte du lendemain, est le problème essentiel de la Météorologie pratique. Ge problème n’a pas recu, jusqu'à présent, de solution générale. M. Guilbert donne à cel égard des citations caractéristiques des météorologistes les plus qualifiés : M. Mascart, M. Angot, M. Vincent, auxquelles je me reproche- rais de rien ajouter. 1 En général, les dépressions barométriques sont animées d’un mouvement de translation de l’ouest à l’est, ou plutôt de l'WSW à l'ENE. Le météorolo- giste allemand Van Bebber à dressé la carte des trajectoires les plus habituellement suivies par les centres de dépression sur l'Europe. Remarquons, toutefois, que l'examen de cette carte de moyennes ne nous apprendra pas si une dépression donnée, dont le centre est à un carre- four, aiguillera à droite et à gauche ; elle ne pré- tend, d'ailleurs, nous représenter que les routes les plus fréquentées, mais il n'est aucun chemin, si irrégulier soit-il, qui n'ait chance d'être suivi par un centre de dépression. Que l'on regarde, pour prendre un exemple, au lieu d'une carte de moyennes, la carte de toutes les trajectoires réelle- ment suivies par les centres de dépression qui ont passé sur l'Europe, au mois d'octobre, de 1872 à 1887, telle que l’a dressée le général Rykatchew ‘; et qu'on veuille bien la comparer à une carte de trajectoires de cyclones tropicaux. On appréciera ainsi l'irrégularité de marche des bourrasques européennes. Une bourrasque, d’ailleurs, n'est pas une chose stable et invariable, comme une bouée dans un grand courant. Elle peut se creuser; elle peut se combler et disparaître. Nous en voyons s'éteindre. L'intéressante tentative de Gordon Bennett, d'an- noncer en Europe le départ des bourrasques qui quittent les côtes d'Amérique, comme on annonce 1 HicpeBraNpssoN et TEISSERENC nE Borr : Les bases de la Méléorologie dynamique, t. I, p. 114. 395 le départ des paquebots, n'a pas abouti au succès définitif parce que, des bourrasques parties, plu- sieurs se détruisaient en route, tandis que d’autres naissaient en plein océan. Si l’on arrive un jour à suivre dans leur marche les bourrasques océaniennes par l'organisation régulière d'un service de télégraphie sans fil, ce sera un progrès incontestable. Mais, pour que ce progrès soit vraiment utilisé, il faudra, en outre, que l’on sache ce que va devenir une bourrasque aperçue, dans le ciel ou sur la carte, par l'apparition des cirrus ou par la distribution des isobares. Va- t-elle grandir ou diminuer? va-t-elle stationner sur place, reculer vers l’ouest, s'échapper vers le nord ou vers le sud ? C'est à ce problème que M. Guilbert, le premier, prétend apporter une solution rationnelle, par ses trois règles du vent normal,de la marche des dépres- sions vers les régions de moindre résistance, et de la hausse propagée à gauche de l'excès de vent. Première règle. — L'idée essentielle de M. Guil- bert consiste à comparer, autour d'une dépression, la valeur du gradient barométrique et la force du vent; sa première règle est que « foute dépression qui donne naissance à des vents de force supérieure à la normale se comblera plus ou moins rapide- ment ». Rappelons qu'autour d’un centre de basse pres- sion, caractérisé par des isobares fermées et à peu près circulaires, les vents tournent, en sens inverse des aiguilles d'une montre dans notre hémisphère, dans le sens des aiguilles d'une montre dans l’hé- misphère austral, et que la direction du vent est sensiblement tangente à l’isobare, avec toutefois une inclinaison par rapport à l'isobare, vers l'inté- rieur de la dépression, qui est en moyenne de 20°; elle varie, suivant les cas, de 10° à 40°. Le vent est d'autant plus violent que la dépression est plus profonde: cette profondeur se mesure par la gran- deur du gradient barométrique, c'est-à-dire du nombre de millimètres de mercure dont la pression baisse pour une distance, perpendiculaire à l’isobare, de 1 degré géographique de 111 kilomètres. Plus les isobares, tracées, comme d'habitude, de 5 en 5 millimètres, sont serrées, plus le gradient est fort, et plus la vitesse du vent doit être grande. Or, on constate des anomalies de vent très fré- quentes : vents trop forts ou trop faibles pour un gradient donné. Clément Ley, Sprung, Küppen ont cherché quel rapport existe entre la force du vent et la valeur du gradient : ils sont arrivés, pour les côtes anglaises et allemandes de la Manche, de la mer du Nord, de la Baltique, à un nombre moyen voisin de 4. Le rapport entre la vitesse du vent, en mètres par seconde, et le nombre de millimètres 396 par degré, qui représente le gradient, est environ 4. Dans l'échelle de Beaufort, où l’on caractérise la force du vent par un chiffre, de 0 à 9, qui, au moins pour les premiers chiffres, 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, repré- sente sensiblement la moitié de la vitesse du vent en mètres par seconde, on devra donc avoir, en moyenne, un vent caractérisé par un chiffre qui soit le double du gradient : vent 2 pour un gradient de 1 millimètre par degré, vent 4 pour 2 millimètres par degré, etc. Ce rapport 2 est un rapport empirique, moyen; et je reprendrai cette question dans un instant. Si le rapport réel du vent, évalué dans BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES repousseront le courant électrique mobile seront les régions mêmes de la carte qui attireront ou repousseront notre bourrasque. Mais, pour étudier l'action électrodynamique, il faudra distinguer, autour du courant électrique, entre les lignes de force magnétique qui sont les siennes, et qu'il emporte avec lui, et celles qui existent dans le champ magnétique qui agit sur lui. La distinction qu'il y aurait à faire entre les lignes de force propres au courant et celles qui, du dehors, agis- sent sur lui, si l’on voulait résoudre le problème d'Électrodynamique, est tout à fait comparable à la distinction qu'implique la l'échelle de Beau- fort, qui est em- ployée dans la télégraphie mé- téorologique, au gradient en mil- x neige > tempête _…{burbe d'égale variation. _—.—ourbe de O0 variation. règle du vent normal. Quelle que soit, par ailleurs, la valeur de la comparaison, la limètres de mer- cure, dépasse 2, règle de Guilbert conduit incon- dit M. Guilbert, c'est que le vent est anormal par excès; s'il n’at- teint pas 2, c'est que le vent est anormal par dé- testablement à de bons résultats : une dépression entourée de tous côtés de vents anormaux par excès se comble, faut. et cela d'autant Je dirais, à sa plus vite que place : Si le rap- l'excès est plus port du vent au fort. Nous pou- gradient dépasse notablement ?, le vent est anormal vons donner comme exemple parexcès; s'ilest uotablement in- férieur à 2, l’'ano- malie est par dé- faut; et cela pour tenir compte précisément de la variabilité du rap- port que M. Guilbert appelle normal et que des causes diverses, et en quelque sorte ordinaires, pourraient écarter de la valeur moyenne : mais, si l'anomalie est notable, c'est qu'à ces causes s'ajoute quelque autre chose. C’est, suivant mon interprétation, qu'au vent qui fait partie intégrante du tourbillon se superpose alors un courant aérien, de même sens ou de sens opposé, qui, du dehors, agit sur le tourbillon. Imaginez qu'on remplace la bourrasque par un courant électrique vertical, susceptible de se mou- voir dans un champ magnétique horizontal, dont les lignes de force seraient les lignes de vent : nous verrons que les régions du champ qui attireront ou Fig. 1.— Exemple de compression du cyclone. — Une dépression sur le golfe de Gênes est entourée de tous côtés de vents forts, anormaux par excès. La prévision faite d'après les errements habituels doit annoncer la conti- nuation, c'est-à-dire « mauvais temps en Provence ». La méthode Guilbert annonce la destruction sur place de la dépression. typique la carte du 7 mai 1892,- étudiée au cours de l'ouvrage. Les exemples analo- gues de compres- sion du cyclone abondent, et M. Ekholm déclare, dans l’article qu'il a consacré à la méthode : Diese Guilbert s Regel ist ohne Zweifel für die Prognose wertvoll und wird von ihm, wie erscheint, mit Erfolq benutzt. Deuxième règle. — 1] est fort rare qu'une bour- rasque soit entourée de tous côtés de vents anor- maux par excès. Qu'arrivera-t-il si, de trois côtés, à l'ouest, au sud et à l'est, elle est entourée de vents en excès, et si, au nord, elle est entourée de vents ou simplement normaux ou même anormaux par défaut? Elle sera chassée vers le nord, qui est, pour son déplacement, la région de moindre résis- tance. Les autres courants latéraux, anormaux par NT. BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 397 excès, opposent à sa marche une barrière : elle s'échappe par le côté où cette barrière présente une solution de continuité. Très salisfaisante pour l'esprit, si la première règle est admise, cette seconde règle a donné lieu parfois à des interprétations inexactes. La plus grave est celle qu'a provoquée la dénomination, constamment employée par M. Guilbert, de vent divergent. Si, en une région voisine d'une dépression, le vent, de direction normale, est anormal par défaut, celte région est pour la dépression une région de moindre tance. Elle sera résis - est, pour la bourrasque, par excellence, la région de « moindre résistance ». La raison pour laquelle j'ai craint d’obscurcir et de compliquer encore le problème en substituant un terme différent à celui de « divergent », qu'emploie M. Guilbert, est que, sous ce mot unique, ilcomprend deux choses distinctes. Dans l'exemple cité d’une bourrasque d'Irlande, un vent de nord sur la mer du Nord, — vent tangentiel dont le moment, par rap- port au centre de dépression, serait de sens tel que la rotation qu'il lui donnerait serait dans le sens des aiguilles d'une montre, — est un vent qui attire la dépression. Un vent d'ouest, pour la dépres- sion une région d'attraction d’au- tant plus forte que l’anomalie par défaut sera Ciel © beau © rzageux e Pluie * neige Vent —. faible r— modéré — fort #m—> tempête _….{ourbe d'égale variation _—.— nomalie par dé- M. Gauthier-Villars, sont des cartes muettes d'Europe, sur lesquelles sont Y€2/S- faut est plus grande encore que si le vent était simplement nul, et l'attraction pour la bourrasque plus forte encore. C’est à ce vent, de sens opposé à celui que déterminerait la bour- rasque au même point, que M. Guilbert donne le nom de vent divergent : dénominalion que j'ai cri- tiquée et expliquée, dans ma Vote additionnelle au Rapport sur le Concours de prévision du temps. Une bourrasque a son centre sur l'Irlande. Elle comporte, sur la mer du Nord, des vents de sud, ou plus exactement, à latitude égale, de SSE.; un vent directement opposé, présentant au maximum le caractère de « divergence » au sens de M. Guilbert, est un vent de NNW. Ce vent, s’il existe sur la mer du Nord, attirera immanquablement une dépression d'Irlande : la région où règne ce vent « divergent » tracées les isobares. Pareillement, il appellera vent « convergent », à la fois un vent dirigé vers le centre du cyclone, et un vent tournant autour du centre dans le sens ordinaire de nos pays, c'est-à- dire sinistrorsum. Pour le moment, je le répète, iln’y a qu'à prendre ces mots au sens complexe qu'il leur donne, quitte à les modifier un jour quand l'accord sera complet sur les choses que ces mots recouvrent. On verra par la suite quelle place tient cette con- sidération des vents divergents sur nos côtes dans la prévision de l'arrivée des bourrasques dont la carte d'isobares, ou bien le simple aspect du ciel, nous révèlent l'existence. Et c'est pourquoi l'intel- ligence de cette règle intéresse quiconque, en une station maritime ou continentale, n'a que l'observa- 398 BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES tion des nuages pour lui annoncer l'existence des bourrasques, aussi bien que le météorologiste qui possède les renseignements détaillés de la carte d'isobares. Un vent d'ouest sera « convergent » si le centre de la dépression passe exactement au nord : anor- mal par excès, ce vent rejettera la dépression vers le nord. Le même vent d'ouest sera « divergent » si la dépression est exactement à l’ouest. Un vent de nord ouest, au regard d’une dépression existant dans les régions entre ouest et nord-ouest, sera « divergent ». Si, par ailleurs, d’autres signes nous révèlent la pré- sence certaine mouvement de hausse, qui se propage dans une direction perpendiculaire à celle du vent, comme l’idée maitresse et tout à fait originale de la méthode. Elle m'a longtemps paru étrange. Elle me semble plus naturelle depuis que j'en ai trouvé une inter- prétation, qui est peut-être une simple image, mais qui est, en tout cas, une image commode. Il s'agit encore de la comparaison électro-magné- tique. Un champ de force magnétique horizontal exerce sur un courant électrique vertical mobile une action mécanique perpendiculaire à la direction du champ et horizontale : le courant circule-t-il de bas en haut, de ma- nière à donner dans le plan du champ magnéti- que des lignes de force magné- tique sinistror- sum, le champ repousse le cou- rant sur Sa gau- dans ces régions Ciel Vent x : © beau — faible HS d'une telle dé- © nuageux | —> PO ë © pluxe m—> fort —————— pression, nous x neige | «> tempête F DATE: _Lburbe d'égale variation. FE —%7; serons sûrs de L'Courbe de 0 variation. l'arrivée immi- nente de la bour- rasque vers la station où règne le vent « diver- gent ». C'est ce qui s'est produit pour la bourras- que du 21 février 1893, prévue à che:il l'attirerait à sa droite. Or, un courant aérien horizontal exerce une aäc- tion mécanique de même espèce sur un tourbillon Liége sur la carte vertical sinis- du 20 février par _M.Guilbert, dans trorsum; il l’é- des conditions carte sur Sa gau- très remarqua- bles, qui ne sem- blent pas avoir été bien comprises —pro- bablement parce que mon Rapport n'élait pas assez explicite sur les raisons qui dé- montraient l'existence, le 20 février, d'une dépres- sion placée de telle sorte que, par rapport à elle, le vent NW d'Ouessant fût « divergent ». On trou- vera dans le livre actuel les éclaircissements les plus circonstanciés. & Mars18q7 très Fig. 2. Troisième règle. — La troisième règle de M. Guil- bert peut être énoncée ainsi : La hausse de pression a lieu suivant une direction normale au vent proportionnellement trop fort, et elle se fait de droite à gauche : le vent exagéré fait hausser la pression sur sa gauche. Je n'hésile pas à regarder cette conception du che : il provoque — Exemple de translation rapide d'une dépression, attirée vers une région de moindre résistance. — La pression est en hausse sur tout le nord de l'Europe, mais une baisse de 4um9 au nord de l’Ecosse annonce l'approche d'une bourrasque. Que deviendra-t-elle ? — Les vents forts d'W et SW en Ecosse et Irlande l’empêchent d'aller vers le sud. A l'avant, à l'est, aucun vent du sud ne lui oppose d’obstacle; au contraire, au nord de la Norvège, sur la Baltique et la Finlande, règnent des vents d'ouest et surtout du nord-ouest. ainsi un MOouve- ment de hausse qui se propage de droite à gau- ‘che, normale- ment à la direc- tion du vent. La comparai- son va plus loin encore : si le tourbillon est à droite du vent, celui-ci l'attirera à lui, et fera baisser la pres- sion. Or, qu'est-ce que ce vent qui a un tourbillon sinistrorsum sur sa droite, sinon un vent « diver- gent »? Les deux dernières règles ne sont ainsi que les deux aspects d’une même règle : celle qui régit l'action d'un courant aérien horizontal sur un tourbillon vertical sinistrorsum. Suggérée par la comparaison électromagnétique, l'idée d'étudier cette action mécanique d’un ecou- rant d'air sur un tourbillon m'a conduit à des expériences dont on lira plus loin la description, BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 399 el qui ne laissent aucun doute sur la réalité et sur le sens d'une telle action. En m'inspirant d'un très beau travail de V. Bjer- knes sur les champs de force hydrodynamique, j'ai réussi à lever le paradoxe provenant de l'opposi- lion de signe qu'a révélée lord Kelvin, dans des conditions déterminées, entre les actions hydro- dynamiques et les actions électromagnétiques; et j'ai montré comment la théorie des tourbillons, telle qu'elle résulte des travaux de Helmholtz, de lord Kelvin et de Bjerknes, permet de justifier, avec leur signe, les actions entre vents superficiels et tourbillons at- mosphériques ne seraient jamais qu'un indice et non une cause, affirme — d'une facon très nette — l'importance de cette règle : domaine de hausse (Steiggebiet) envahit une région, il y éveille des vents de force anormale, et qu'il en il a reconnu qu'en effet, lorsqu'un est ainsi, soit que la hausse se propage dans la direction du gradient, soit qu'elle envahisse le domaine des basses pressions obliquement ou même tangentiellement aux isobares. Il excepte le seul cas où le domaine de hausse serail très plat. Que ce vent anormal par excès soit la cause ou qu'il soit le simple indice de ce mouvement de hausse perpendi- culaire au vent, qui explique- Ciel I « È I © beait raient les règles © nuageux . e plure de M. Guilbert. 1e Ces actions existent-elles en réalité? et faut-il y chercher l’ex- plication vérita- la liaison des deux phénomè - nes, si bien vue par M. Guilbert, reconnue sans hésitation par M. Ekholm, qui ne conteste est ble deces mouve- ments de trans- lation des bour- rasques, qui, par- fois, sont décon- certants? « Il ne semble pas dou- ni la nouveauté, ni l'importance de cette consta- tation. Nouspouvons, en définitive, nous représenter teux que de telles la carte d'Europe du matin comme actions existent, m'écrivait M. V. une feuille sur { Bjerknes ; mais laquelle est des- sont-elles de grandeur suffi- siné un spectre magnétique. Le sante pour expli- quer les effets produits?» Il fau- drait, pour l'af- firmer, arriver à un caleul de l'in- tensité de ces actions mécaniques d’un vent sur un tourbillon, et c’est ce qui ne parait pas aisé. Aussi je n'indique ici la comparaison électro- magnétique qu'à titre de métaphore, sans oublier d'ailleurs les réserves qui s'imposent quand il s’agit d’assimiler au « vortex » théorique un « cyclone » réel autrement complexe. Sur cette troisième règle de la hausse produite dans une direction normale au vent, je me bornerai à dire que M. Ekholm!, qui rejette absolument mon explication comme attri- buant aux vents de surface un rôle actif, alors qu'ils 4 Die dritte Regel erscheint, nach unseren Erfahrungen, richtig zu sein. Diese Regel ist für unsere Sturmwarnungen sebhr wichüig, aber dieselbe bewährt sich jedoch nicht, wenn as Steiggebiet sehr flach ist. Fig. 2 bis. — La dépression est venue jusque sur la Baltique, région de moindre résistance,où régnaïent des vents divergents (au sens de Guilbert) à composante Nord. (On avait NW. mème temps, la dépression de Corse de la veille est comblée : il eût suffi, pour le prévoir, de considérer le vent en excès aux iles Sanguinaires. spectre n'est pas complètement tracé : en un Ccer- 4 à Wisby, île de la Baltique.) En {ain nombre de points, on à la direction des li- gnes de force, donnée par la direction du vent, el l'intensité de la force magnétique, marquée par le nombre des pennes de la flèche qui figure la vitesse du vent. C'est dans ce champ magnétique que se déplaceront, non sans un certain frottement, un ou plusieurs courants électriques verticaux, dirigés de bas en haut. Le conducteur qui transporte un de ces courants ne peut pas être assimilé à un fil infiniment mince; c'est un cylindre plat, reposant par sa base sur le sol et mobile sur lui; il modilie, en y glissant, la distribution des lignes de force : pour reconnaitre dans quel sens le poussent les lignes de force qui viennent heurter sa base, il faut, avant tout, faire abstraction deslignes de force magnétique qu'il produit lui-même. Si loute sa 400 BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES base estentourée de lignes de force superposées aux siennes propres et tournant dans le même sens, ce champ circulaire repousse le cylindre vers le centre et le comprime : s'il est compressible, il se con- tractera vers son axe. Un champ magnétique résul- tant trop faible autour de sa base révélera, au con- traire, l'existence d'un champ magnétique de sens contraire au sens du champ créé par le courant lui-même : en tous les points de sa base, le con- ducteur sera attiré vers l'extérieur; s’il est exten- sible, il prendra de l'ampleur. , Sile champ magnétique qui entoure le condue- teur n'est pas sy- métrique, ce dans le sens même du grand courant. Ce seront les différences de courant d’un point à l’autre qui pro- voqueront les actions en sens perpendiculaire. Il faudra donc combiner l’action des vents isolés qui, anormaux et différents des vents voisins, exerceront une action spéciale sur les bourrasques, — les atti- rant sur leur droite, les repoussant de droite à gauche, — avec l’action du grand courant aérien qui entraine les bourrasques dans le sens géné- ral de l'Ouest à l'Est, et qui se charge de chan- ger à chaque instant la situation dans laquelle se trouve la base du tourbillon. Dans la réalité, au moins dans les expériences conducteur sera chassé par les champs les plus forts du côté du champ le plus faible : à plus de laboratoire, les deux effets se combinent : vient-on à lancer un jet d'air d'a- ant vers l'ar- rièresur un (our- forte raison, le conducteur se billon vertical précipitera de ce côté de moindre résistance, S'il y trouve un champ magnétique de sens contraire à celui que produi- sinistrorsum, On voit ce tourbillon dévier d'avant en arrière, en même temps que de droite à gauche. On a, en quelque rait en ce point sorte, un effet le courant lui- d'entrainement même.Unchamp pur et simple sur magnétique fort la matière, el un est une barrière, difficile à fran- effetexercé sur le tourbillon lui- chir, pour un méme; ces deux courant qui se effets sont per- déplace sur sa Fig. 3. — Baisse de pression sur la droite de vents en excès, entraïnant des- pendiculaires 3 truction d'anticyclone. — Pression dépassant 775 en Angleterre et sur la gauche ; au con- traire, le cou- rant traverse-t-il spontanément ce champ s'il est conduit à le traverser de droite à gauche. Le vent normal, la moindre résistance, la hausse normale au vent et propagée vers la gauche, tout cela s'interprète d’une manière intuitive dans la comparaison électromagnétique. Mais la comparaison, füt-elle la base de la véri- table explication, reste incomplète. Des actions analogues peuvent agir sur les tourbillons atmo- sphériques réels; mais ce ne sont pas les seules. Un courant aérien large et puissant, suffisam- ment uniforme, entraine un tourbillon qui n'y constitue qu'un accident, à la facon dont un cours d'eau entraine un tourbillon qui S'y produit, Manche: mais la région comprise entre les deux isobares parallèles de 775 est serrée entre des vents « divergents » (Sud et Sud-Ouest en Ecosse, Nord-Est sur les côtes francaises). Ces deux groupes de vents agissent d'accord pour faire baisser la pression sur | l’un à l’autre et se composent en. un effet résultant complexe. C'est là l’origine de cette remarque profonde que, pour reprendre notre exemple concret d'une bour- rasque sur l'Irlande, un vent de Nord sur la mer du Nord l’attire, et pareillement un vent d'Ouest. Un vent du Sud, venant heurter de front une bour- rasque située au Nord, la chassera à la fois vers le Nord et vers l'Ouest, en réalité dans une direction oblique entre Nord et Ouest. L'effet d'éloignement vers le Nord par un vent régnant au Sud peut être exercé sur la bourrasque, soit par un vent de Sud, soit par un vent d'Ouest, soufflant tous deux au même point. De là, l'idée juste qui a consisté à dé- signer d'un même mot ces deux types de vent, pro- duisant sur la bourrasque le même effet essentiel. eur droite. BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 101 L'idée de choisir le mot de « convergent » est cer- tainement moins bonne, mais l'idée d'appliquer la même qualification et au vent centripète et au vent tangentiel sinistrorsum est justifiée par la pra- tique. Et c'est pourquoi, malgré nos réserves, nous n'avons pas encore proposé de changer les mots « convergent » et « divergent ». Sur la double signification, corrélative, expressions « deux vents convergents » et « deux vents divergents lun par rapport à l'autre », nous renverrons à notre Note additionnelle au Rapport sur le Concours de prévision du temps de Liége, des reproduite en ap- pendice. cation correcte en reste moins automalique que M. Guilbert ne se plait à le dire. Ce que je souhaiterais, c'est qu'il fût possible à M. Guilbert de former des élèves. Le jour où l’en- seignement de la Météorologie serait organisé sérieusement dans nos Universités, comme l’est celui des autres sciences de la Nature, le jour où l’on joindrait à l’enseignement théorique et didac- tique l'apprentissage pratique des situations atmo- sphériques à reconnaître et à débrouiller, tout comme on complète les cours de Minéralogie et de Géologie par des travaux pratiques où les étudiants exercés à distinguer et à sont Non seulement celte vue d'’en- semble n'enlève rien à l'intérêt des quelques rè- gles pratiques de nommer des mi- néraux et des fos- siles, nul ne se- rait plus qualifié que M. Guilbert pour guider des élèves dans l’ap- détail que lex- périence peut B prentissage d'un avoir indiquées aux météorolo- gistes, mais un grand nombre de faits acquis et in- téressants, jus- qu'ici sans lien art qu'il s'efforce de transformer en science, Mais où je crains qu'il ne se rencontre toujours, à côté des habiles, des maladroits. entre eux, se trouvent, par le principe nou- Il veau, rattachés les uns aux au- tres. J'en citerai L'exposé qui précède est assez détaillé pour un exemple : j'ai indiqué, dans mon Rapportsur le Concours de prévision, que la considération des phénomènes de transport de centres de tempête par lignes de grain, auxquels M. Durand-Gréville et M. Küppen, à la suite d'Aber- eromby et de Clément Ley, ont consacré de si inté- ressants travaux, conduit parfois à de très heu- reuses prévisions. Mais, même alors, ces résultats peuvent être obtenus par l'application des règles, plus générales, de M. Guilbert, aux vents qui règnent aux diverses régions atleintes ou menacées par le qrain. Et l'on comprend ainsi que les principes nou- veaux — ou plus exactement, le principe nouveau — introduits dans la science de la prévision donne une süreté inconnue jusqu'ici dans l'étude des situations à variation brusque, mais qu'il n'exelue pas néanmoins l'esprit de finesse, et que l’appli- Fig. 3 bis. — L'anticyclone a disparu, Baïsse maximum sur l'Angleterre. À noter celte particularité qu'il y avait, la veille, des dépressions avec baro- mètre en baisse, au Nord et au Sud de l'anticyclone, E Morrev GR qu'il me soit pos- sible de passer très rapidement en revue les ob- jections adressées à M. Guilbert, soit qu'elles aient été formulées dans les écrits de M. Ekholm ou de M. Shaw, soit qu'elles m'aient été exprimées de vive voix, au Cours de conversalions amicales, par quelques météorologistes des plus qualifiés, parmi lesquels je citerai M. Goutereau. Je classerai ces objections en quatre catégories : 1° Objections s'adressant au langage, aux mots « convergent » et « divergent », et à la facon dont M. Guilbert a exposé le mécanisme de la rup- ture d'équilibre entre le vent et le gradient ; 2% Objections à l'idée d’attacher parfois une 1m- portance capitale à un seul vent, et à la prétention de pouvoir prévoir des variations irrégulières de pression, telle que hausse après douze heures et baisse après vingt-quatre heures ; = 02 BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 3° Objections au principe même de l’utilisation des vents de surface, et à l'emploi d’une relation de proportionnalité du vent au gradient ; 4° Objections relatives à la portée de la méthode. Première catégorie d'objections. — Une critique préliminaire s'adresse au langage de M. Guilbert. Nous nous sommes expliqué, et nous avons obligé l'auteur lui-même à s'expliquer, sur la signi- fication des mots « vents convergents » et « vents divergents ». Mais cette similitude d'action, si bien apercue par M. Guilbert, entre l'effet de vents dirigés vers le centre de la dépression et celui de vents tour- nant autour de ce centre en sens inverse des aiguilles d'une montre, à donné lieu à une erreur de langage plus grave encore. Si le vent a une composante radiale centripète assez forte, on comprend que la dépression tende à se combler. À la vérité, il faudrait, pour l’affirmer, savoir chaque fois quelle est l'intensité du mouve- ment vertical ascendant qui se produit suivant l'axe du eyelone; mais, du moins, il semble naturel que le vent dirigé vers le centre détruise la dépression el soil, comme le dit M. Guilbert, « l'ennemi de la dépression ». Mais, la plupart du temps, la composante du vent qui est tout à fait prépondérante est la com- posante tangente à l'isobare, et l'examen des cartes montre bien qu'un cyclone, entouré de vents tan- gentiels anormaux par excès, est comblé ou détruit. L'excès de vent agit-il, dans ce cas, par une action mécanique sur le tourbillon, qu'il repousserait vers sa gauche? C'est ce que je crois possible. Mais,quelle que soit l'explication du fait, qui, lui, n'est pas dis- cuté comme fait, il faut faire appeliei à autre chose qu'à l'équilibre normal des forces dans le cyclone, regardé en lui-même. Un vent langentiel, anormal par excès, tendrait incontestablement à creuser la dépression, car il crée une force centrifuge, dont l'origine est double : force centrifuge simple, due à un mouvement de rotalion autour du centre de la bourrasque, etforce centrifuge composée de Coriolis. Si le vent langentiel est anormal par excès, cela signifie évidemment que cette force centrifuge dépasse en chaque point la force centripète, mesu- rée par le gradient; et, pour que le déséquilibre cessät, il faudrait que le gradient augmentt, loin de diminuer. Si nous le voyons diminuer en pareil cas, con- cluons qu'il y a autre chose, et cherchons la raison de cette action. Mais ne disons pas qu'il suffit d’invoquer l'équilibre nécessaire entre la force cen- tripète et la force centrifuge dans un cyclone station- naire; car la rupture d'équilibre, que cette considé- ration nous ferait prévoir, se ferait justement en sens inverse de celle que nous observons. Et n'’allons pas surtout, par une confusion inadmissible, inter- vertlir les rôles respectifs du gradient et du vent tangentiel, au point d'attribuer au vent tangentiel l'effet centripète et au gradient l'effet centrifuge. 11 faut reconnaître que cerlaines phrases de l'Exposé des principes de prévision de M. Guilbert, inséré dans notre Rapport sur le Concours de Liége, impliquaient une pareille confusion et supposaient une conception qu'il n’a pas été illégitime de quali- fier d’antiscientifique. J'ai loué précisément M. Guilbert, dans mon Mémoire des Archives de Genève, d'avoir changé l'aspect de la question, en faisant intervenir, par sa troisième règle, la nécessité d'étudier l'action causée sur un centre de dépression par un courant aérien étranger à la dépression, et d’avoir « contre- dit résolument les règles que donnerait l'étude du tourbillon pris en lui-même, abstraction faite du mouvement vertical de l'air au centre ». Il est cer- ain qu'il ne faut pas venir, en même temps, repré- senter les mêmes règles comme pouvant être four- nies par l'étude du tourbillon pris en lui-même. Cette étude, je le répète, aboutirait aux règles exac- tement contraires. La règle de la hausse vers la gauche du vent en excès est, de même, en contradiction apparente avec la règle de Coriolis : l'air en mouvement est soumis, dans notre hémisphère, à une force perpendiculaire au mouvement et dirigée vers la droite. L'effet de celte force de Coriolis, en un point géométrique donné, est négligeable par rapport à l’autre effet considéré par la troisième règle de Guilbert, — et dont M. Ekholm reconnait la réalité, tout en lui donnant une autre interprétation; — cet autre effet vise, non un déplacement de l'air, mais un mouve- ment de la pression ou du domaine de hausse, — et dans ma comparaison : un déplacement d'ensemble du tourbillon. Là encore, on dérouterait à bon droit le lecteur si l'on essayait de présenter cette règle, qui semble contredire le théorème de Coriolis, comme un corollaire du théorème de Coriolis. Cela, M. Guilbert ne le fait en aucun cas : mais n'est-ce pas une erreur analogue que de présenter la compression du cyclone par des vents tangentiels anormaux par excès comme une conséquence du déséquilibre entre l’action du vent'et celle du gra- dient? Si je signale avec insistance ces incorrections de langage, c'ést à la fois pour reconnaitre loyalement que des difficultés sérieuses ont pu arrêter certains savants au début, et pour les inviter à ne pas s'y laisser arrêter à l'avenir. Deuxième catégorie d'objections. — Ce n'est donc pas l'étude de la bourrasque en elle-même et BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES de son équilibre interne qui fait le fond de la mé- thode de Guilbert, {out au moins dans mon inter- prétation, qui n'est pas identique à la sienne. C'est l'étude des régions où la bourrasque pourra se transporter, des conditions où elle sera épanouie ou étranglée. Il est question, sans cesse, dans les discussions de cartes, de barrières, d'obstacles, et, à l'inverse, de régions de moindre résistance. Et c'est là la raison d'une des exigences de M. Guilbert qui m'avait choqué moi-même de prime abord : pour une discussion complète de la carte, il déclare qu'il a besoin de connaître le vent dans le plus grand nombre possible des stations, sinon:dans toutes; un choix qui restreindrait beaucoup le nombre des stations où l’on donnerait la direction et la force du vent lui semblerait très fâcheux. C'est qu'à ne prendre qu'un réseau de stations à mailles trop läches, on pourrait laisser échapper, sans l'apercevoir, l'obstacle qui arrête absolument la dépression dans son mouvement, ou ne pas voir, à l'inverse, le vent « divergent » qui exercera l'influence décisive pour attirer la dépression, Un seul vent en un point pourra suffire, en certains cas, à tirer des conclusions capitales. Le problème est essentiellement différent de ce que serait le problème du caleul de la variation de la pression avec le temps en un point, connaissant en ce point et au voisinage immédiat tous les élé- ments : pression, gradients dans deux directions rectangulaires, force et direction du vent. Ce pro- blème est un problème d'équations aux dérivées par- tielles, dont la solution ferait connaitre la grandeur et le sens de la variation actuelle de la pression avec le temps. Mais on ne voit pas comment, de la connaissance de cette quantité, on déduirait la variation de pression en vingt-quatre heures. Il arrive même que le sens de la variation actuelle du baromètre n'est pas le sens de la variation d’en- semble du jour au lendemain; que, par exemple, en hausse aujourd'hui sur une station et en hausse encore au bout d’une période de douze heures, il se trouve finalement avoir baissé après vingt-quatre heures. Cette constatation, dont l'étude des bulletins quo- tidiens montre aisément l’exacuitude, serait une | objection fondamentale contre toute méthode de prévision qui prétendrait déduire la variation d'un élément au bout de vingt-quatre heures du sens et de la grandeur actuels de la variation du même élément, — qui, d’une facon générale, rai- sonnerait {trop par continuité. Elle n'a pas de prise contre la méthode de Guil- bert, qui, serrant de près la réalilé, ne se choque nullement de rencontrer des propagations de dis- continuités. Elle assignera les régions où il n'y aura pas de changement de temps, au sens vulgaire 403 et si juste du mot, et les régions, au contraire, qui ont chance d'être envahies, à un moment donné, par une onde dépendant d’une bourrasque. Après et avant cet instant, les conditions aux limites en cette station ne sont plus les mêmes; l’évolution du temps, dans les heures qui ont précédé cet instant, a pu être exactement la même, dans tout l’intérieur d’un cerele ou d’un carré ayant la station pour centre, que l'évolution de temps dans ce même espace, au cours d'une autre journée qui n’a pas été marquée par le passage d’une discontinuité. Quelles qu'aient été les similitudes de ces deux débuts de journée, les deux fins de journée seront différentes du tout au tout, si l’une d'elles est mar- quée par le passage d'une discontinuité qui a manqué à l’autre. Et c'est la condamnation de toute méthode qui se préoccupe uniquement des valeurs actuelles de certaines dérivées partielles de la pression dans un espace restreint. Dans la méthode Guilbert, si nous prévoyons le chemin que prendra une bourrasque donnée et le parcours qu'elle y accomplira, nous quelles régions son influence envahira; ce pour- ront être des régions actuellement en hausse barométrique et où la hausse se poursuivra Jusqu à l'instant où elles seront atteintes par le champ d'action de la bourrasque. Rien ne sera moins inattendu que de voir en un point le baromètre commencer par monter, puis s'arrèler pour redes- cendre, et donner, en fin de compte, au bout de douze heures une hausse et au bout de vingt- quatre heures une baisse. saurons Troisième catégorie dobjections. — Un troi- sième type d’objections s'attaque au point d'ap- pui de la méthode. Celle-ci repose sur l’observa- tion des vents dans les stations qui figurent au Pulletin, et des vents à la surface du sol. Or ces vents ne suffisent point à faire connaitre le mouve- ment réel du courant atmosphérique au voisinage : trop de causes perturbatrices interviennent pour modifier le courant au voisinage du sol, et le vent observé est une résultante complexe d'effets parti- culiers dontil est téméraire de tirer des conclusions générales. De plus, à supposer que le vent soit correctement mesuré dans des bien définies, il n'existe nullement une relation simple entre le vent et le gradient; dans l'équation qui relie entre elles ces deux grandeurs, entrent avant tout la courbure de la trajectoire réelle du vent, l'angle qu'il fait avec l’isobare et le coefficient de frotte- ment, mal connu et variable, de l'air sur le sol. Il ya plus : une équation simplitiée à l'excès, débarrassée de tous ses termes complémentaires, est nécessaire- ment inexacte. M. Shaw a fait très justement remarquer que, pour des isobares rectilignes, le conditions 40% BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES vent normal tangent à l'isobare, correspondant à un gradient 1, serait voisin de 9 mètres par seconde, au lieu de 4 mètres; dans ce cas, on ne tient compte que de la force centrifuge composée de Coriolis, on néglige la force centrifuge ordinaire due à la cour- bure de la trajectoire; mais c’est aussi le seul cas où l'on puisse avoir un rapport constant entre la valeur du gradient et la force du vent, et où l'on puisse parler en toute rigueur d’un rent normal. J'accorderai d'abord sans difficulté que le vent superficiel en certaines stations mal situées peut n'avoir pas grande signification. Mais, en général, je trouve qu'on a tendance à exagérer les incer- titudes qui résultent de ce qu'une donnée n'est pas très bien déterminée. Quand les hommes de ma génération étudiaient la Physique dans la classe de Mathématiques spéciales, à force de les nourrir de Regnault, on leur laissait l'impression que les expériences de Dulong ou de Despretz comportaient un nombre tellement formidable de causes d’erreur multiples que, bien certainement, les résultats de ces savants pe signifiaient rien. Et nous découvrions, après coup, que Dulong ou Despretz avaient, à très peu de chose près, donné les mêmes nombres que Regnault lui-même. Plus tard, j'ai eu à corriger des compositions de Concours général sur l'hygro- métrie : si les lauréats n'ont jamais l’occasion de visiter un observatoire météorologique, ils reste- ront convaincus toute leur vie que le psychro- mètre est un instrument d’une théorie trop incer- taine pour être jamais utilisable et que l'hygro- mètre à cheveu correspond à une étape aujourd'hui dépassée de la civilisation. Ces habitudes d'esprit ont heureusement disparu de l’enseignement de la Physique : je crains qu'elles n'inspirent encore quelques météorologistes. Nous savons bien que la loi de Mariotte est aurait-on rendu un grand service aux physiciens si on les avait tellement pénétrés de cette idée qu'ils ne songent jamais à calculer une pression d'un gaz en appliquant la loi de Mariotte? À plus forte raison, dans le domaine de la Météorologie, si quelqu'un tire d'un fouillis de nombres une loi simple qui ne soit qu'approchée, mais qui soit utilisable, ne doit-on pas plutôt louer sa clairvoyance qu'insister sur les écarts à la loi et sur la rigueur insuffisante des observations qui l'établissent? Les termes correctifs de la formule qui lie le vent au gradient sont, à la vérité, trop importants pour être négligés, surtout si l'on convient de ranger parmi ces termes celui qui dépend de la courbure de la trajectoire. En les négligeant, on arriverait, comme l'a observé M. Shaw, à une valeur de vent, pour un gradient donné, au moins double fausse : du vent normal de M. Guilbert pour le même gra- dient. La règle du vent normal revient à prendre comme un fait établi par les météorologistes euro- péens que, dans nos pays, et plus spécialement sur les côtes d'Europe, la valeur du rapport du vent au gradient oscille autour de la valeur 4, et que, lorsqu'il arrive qu’elle s'écarte notablement de cette valeur, en dessus et en dessous, c'est que quelque chose se passe: trouver ce quelque chose, et ne pas se dispenser de réflexion devant une anomalie, en la mettant a priori sur le dos de termes correctifs dont nul ne songe à nier l'existence, est un mérite d'autant plus grand que le problème est plus com- plexe. Et, s'il se trouve que la loi de compression du cyclone entouré de vents anormaux par excès eb d'épanouissement du cyclone entouré de vents anor- maux par défaut est vérifiée par l'observation, et reconnue vraie et utile par des météorologistes éminents, qui, par ailleurs, ne ménagent pas les criliques qu'ils croient justifiées à M. Guilbert, il nous semble en résulter le droit de l'appliquer. Là où, très nettement, je me sépare de M. Guil- bert, c'est quand il exprime l'idée que, si l’on faisait partout des observations anémométriques rigou- reuses, la règle du vent normal permettrait un calcul plus exact des variations de pression d’un jour au lendemain. Assurément, la généralisation de l'ané- momètre serait une mesure excellente. Mais j'es- time qu'actuellement l'harmonie est suffisante en- tre le degré d’exactitude des observations de force du vent et celui de la règle du vent normal elle- même. Des observations rigoureuses de la force du vent pourraient, sans doute, permettre un calcul plus exact du terme anormal de la formule, qui représente l'anomalie réelle du vent; mais ce ne serait qu'à la condition de déterminer exactement les autres termes correctifs, celui qui dépend de la courbure de la trajectoire, celui qui dépend de l'ac- célération centripète et celui qui dépend du frotte- ment; ce ne serail, par conséquent, qu'à la condition de renoncer à la simplicité si commode de la règle de proportionnalité du gradient au vent normal. Quatrième catégorie d'objections. — Une qua- trième objection, à laquelle j'ai déjà fait allu- sion dans mon Æapport sur le Concours, s'atta- que à la portée de la méthode. « Puisqu’il existe des écarts, parfois si notables, entre la force réelle des vents et la force des vents auxquels on devrail s'attendre pour une bourrasque donnée, cela revient à affirmer l'impuissance absolue où l'on est de prévoir les vents que comportera une distribution donnée des pressions barométriques. Or, s'il est intéressant de dessiner d'avance les iso- bares du lendemain, c'est à la condition que le tracé de ces isobares nous renseigne d’abord sur BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES 405 la force et la direction des vents : dans la mé- thode Guilbert, la prévision qu'on fera demain pour après-demain sera d'autant plus sûre que les ano- malies seront plus fortes demain, c'est-à-dire que la prévision faite aujourd'hui pour demain aura été plus mauvaise. » On peut répondre que, quelque grande que puisse ètre l'anomalie de vent en un point, c'est déjà beau- coup que de dire, presque à coup sûr, si ce point sera demain, ou ne sera pas, sous l'influence d'une dépression de profondeur connue. S'il est de l’es- sence même de la méthode de ne faire connaitre qu'avec un écart toujours possible la force du vent qui menace une région, elle fait connaître du moins avec précision les régions menacées. Et, dans le cas où la discussion de la carte peut nous donner une idée de la distribution des pressions le surlende- main, l'anomalie du vent le lendemain nous per- mettra d'apporter les retouches nécessaires à la pré- vision du surlendemain; mais c'est la correction de cetle carte qu'elle nous donnera, non la carte même. Îl arrivera même que des météorologistes, ayant l'habitude et le sens de la méthode, s'ha- bituent à prévoir, non seulement la position et la profondeur de la bourrasque demain, et cela d'après des principes définis, mais encore l’anomalie des vents cireulant autour de cette bourrasque, et cela d'après leur expérience propre de la prévision : par exemple, si une bourrasque marche avec une vi- tesse sensiblement constante de l'Ouest à l'Est, c'est que les vents de N à NW à l'arrière sont plus forts que les vents de S à SE à l'avant; et la vitesse de translation est liée à l'excès des vents à l'arrière sur celle des vents à l'avant : Elias Loomis avait déjà donné une règle de ce genre pour la vi- tesse de translation des bourrasques américaines. Je ne vois donc pas qu'ilsoitimpossible, à un météo- rologiste muni d’une longue expérience, de dire, par exemple, que demain la bourrasque sera en tel lieu à l'Est de sa position actuelle, ceci à coup sûr, et qu'en outre, demain, les vents de N à NW qu'elle éveillera à l'arrière seront anormaux par exces, ceci à titre de simple probabilité. En tous les cas, si la méthode ordinaire, quirevient en définitive à admettre un simple transport des bourrasques avec une vitesse moyenne constante vers l'ENE, sans comblement ni creusement, con- stitue une première approximation, — souvent sa- üsfaisante quand il n’y a pas de variations brusques, — la méthode de M. Guilbert constitue la seconde approximation. Elle réduit très notablement le nombre des surprises dans le cas de variations brusques; elle ne prétend pas apporter la certitude complète et définitive, et réduire absolument ce nombre à zéro. Telle quelle, elle réalise un incon- testable progrès. É REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. Je devrais dire quelques mots de l’objection spé- ciale à l'essai d'interprétation théorique que j'ai tenté des trois règles de M. Guilbert. La discussion de cette interprétation nous entraïnerait loin des limites de cet ouvrage et de cette trop longue intro- duction. Qu'il me suffise de dire que cet essai, je prie les météorologistes de le considérer avant tout comme un moyen de rattacher les règles de Guil- bert à un énoncé unique; la règle d'appel vers les régions de moindre résistance à vents diver- gents (règle IT) et la règle de hausse se propageant vers la gauche du vent en excès (règle III) se rédui- sent à une seule si l'on convient de regarder une dépression comme subissant de la part d'un cou- rant aérien horizontal une action horizontale per- pendiculaire au courant aérien et dirigée vers sa gauche. La règle du vent normal et de la compres- sion ou de l'épanouissement du cyclone (règle I) se déduit immédiatement des autres, à supposer qu'on admette qu'une dépression, comprimée de tous côtés, est, par cela même, détruite. On admettra, je pense, qu'à titre de moyen mnémonique, celte théorie représente au moins ce que Mach considère comme le but essentiel de toute théorie physique : une «économie de la pensée ». TI Pour conclure, des trois règles de M. Guilbert, les règles Let IIT sont acceptées par des météorolo- gistes éminents, cette dernière avec quelques ré- serves et surtout avec une interprétation diffé- rente, la première, pour ainsi dire, sans restriction. Cela suffit déja à repousser toute fin de non-recevoir qu'on voudrait tirer de Pinsuffisante exactitude des observations des vents ou de l'incorrection de la formule simplifiée du vent normal. La règle II est la plus discutée : je suis convaincu que c'est uni- quement faute d'avoir été bien comprise. EL je n'ai pas hésité à rejeter sur le langage de M. Guilbert la principale responsabilité de ces malentendus. L'expression de vent « divergent » était ambiguë. Les nombreux exemples — leur nombre dépasse 50 — donnés et discutés dans les cartes du livre achèveront de faire la lumière. Plusieurs de ces exemples se rapportent à des prévisions réelles faites par l’auteur, dans le dépar- tement du Calvados, sans le secours de la carte iso- barique complète, uniquement d’après la considé- ration simultanée des nuages et des vents. Dans quelle mesure on peut suppléer aux renseignements de la carte par l'observation des nuages, c'est ce que l’auteur expose en détail, et c'est cette partie de son ouvrage qui sera la plus appréciée des obser- vateurs isolés. Mais le rôle des nuages n'est alors que celui de révélateurs de la dépression et les prin- g* 406 cipes appliqués sont les mêmes que dans la diseus- sion des cartes. L'une des situations examinées ne “ ” M ercp'ecsr VE À “À CZ 2 Le PP PUS PS Fig. 4. — Côté de l'adresse d'une carte postale de prévision, adressée de Lonqgues-sur-Mer, près Bayeux, à M. Neyreneuf, à Caen (et qui a fini, non sans peine, par atteindre le destinataire). — Le 2% septembre 1896, une dépression qui était apparue le 22 sur l'Irlande, et qui se trou- vait le 23 sur la mer du Nord, s’éloignait en se comblant vers la Baltique. Mais, en même temps, «une autre, que rien n'a pu faire prévoir, la suivait avec une progression beaucoup BERNARD BRUNHES — L'ÉVOLUTION DES DÉPRESSIONS BAROMÉTRIQUES rendre à la science un service réel, serait de préciser ces cas, d'en dresser à l’avance un catalogue défini, d'imiler, en un mot, l'exemple de M. Ek- holm. Mais se borner à conclure d’un certain nombre d'insuccès à la difficulté d'applica- tion des règles ne ren- drait service à per- sonne; et, quant à con- clure de ces insuccès, si réellement il s'en rencontre, à l'absolue non-valeur des règles, c'est désormais inad- missible. Ce qui reste possible, c'est que la présente étude suggère à quelque savant un énoncé desloisdel'évo- lution des dépressions qui soit susceptible, à un plus haut degré que celui de M. Guilbert, ou d'être appliqué prati- plus rapide » (Angot : Traité, p. 372), et envahissait, le 25, les Iles Britanniques. quement ou d’être in- manquera pas de surprendre les personnes portées | lerprété théoriquement. Mais nous restons persuadé à attribuer à des « ré- miniscences » le suc- cès des prévisions de M. Guilbert au Con- cours de Liége. C'esl une situation citée par M. Angot, Traité de Météorologie, comme exemple-type de la situation où il est dans son impossible de prévoir ce que deviendra une dépression. En recher- chant dans ses cartes postales de prévision, M. Guilbert à retrouvé celle où la marche de cette dépression était annoncée par lui (fig. 4 et 4 bis). Si, après cel exposé, il arrive à des météo- rologistes de recon- naître que les règles de Guilbert, même correctement appliquées, sont parfois en défaut, il leur appartient de le dire; mais je me permets d'ajouter : il leur appartient de dire dans quels cas. La seule manière, désormais, de NS pi SOS î est SR / key » A { Cal ’ # Sr LA m4 #f 7 Pia rar Bu ouf vers D : "26 en, CZ pu meet Lite Age PRET E 2he, Che vote Le LEA rm Cora Le LA ‘ er faire De és à PA DA 7 22 PU More SŸ NU] VA ren 1 LL Per HT 3 ù Vars Bu è R : + A K< Ji CE nee or al, Ne or RD Fig. 4 bis. — Le 24 septembre, M. Guilbert annonce celte seconde tempéte du 25. — L'insuffi- sance des renseignements qu'il possede, à côté de Bayeux, l'empêche seulement de prévoir, pour cette bourrasque, une marche aussi rapide qu'elle le sera en réalité. Mais il en prévoit exactement, non seulement l'existence, mais l'importance. que, si l'on y parvient, les nouvelles règles ne seront pas loin d'être exactement équivalentes aux règles de M. Guilbert. Bernard Brunhes, Directeur de l'Okservaloire du Puy de Dôme. G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES 107 RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES EFFECTUÉES A L'INSTITUT DE CHIMIE MINÉRALE DE GOTTINGEN Le technicien a parfois besoin de recourir aux considérations scientifiques pour juger si ses idées et ses projets sont réalisables. En ce qui concerne les alliages, les données scientifiques faisaient défaut jusqu'à une époque toute récente, L'analyse chimique nous permet, il est vrai, de déterminer avec une précision suffisante la composition des alliages. Mais cette analyse en bloc ne nous ren- seigne nullement sur la manière dont les métaux constituants sont répartis et ne nous fait pas con- naitre si l’alliage est formé de cristaux dont la composition est uniforme ou bien de deux ou plu- sieurs espèces de cristaux de composition distincte. Encore moins les méthodes usuelles des chimistes peuvent-elles déterminer la composition des com- binaisons de métaux existant dans les alliages. L'étude microscopique des alliages a réalisé un progrès très important. Par l'examen en lumière réfléchie d’une surface polie, convenablement mordue par les acides, on peut reconnaître sa struc ture dans les plus petits détails. Si l’on soumet à cet examen une série d’alliages de deux métaux A et B en proportions variables, on leur trouve tou- jours une structure cristalline. L'exemple ci-dessous nous montrera en détail ce qu'on observe : Supposons que, partant du métal À pur, on étudie des alliages dont la teneur en métal B va croissant : La proportion des cristaux du métal pur A ira en diminuant, tandis qu'augmente la quantité d'un autre constituant, à structure en grains fins ou sou- vent en lamelles. On donne à ce constituant le nom d'eutectique; il se forme dans tous les alliages à une même température, dite /empéralure d'eu- texie. Les cristaux de A sont toujours entièrement enveloppés par l’eutectique : ils ont dù, par consé- quent, se séparer en premier lieu du mélange fondu, et ensuite le reste du mélange a cristallisé sous forme d’eutectique. Prenons comme abscisses les teneurs des alliages en métal B, ou concentrations, exprimées en cen- tièmes, et comme ordonnées d'une part les propor- tions d’eutectique, d'autre part les proportions de cristaux du métal À (fig. 1), formés en premier lieu. Les ordonnées de la droite A,4 représenteront les proportions des cristaux A, celles de la droite Aa, les proportions des cristaux eutectiques pour les différents alliages. Lorsque l’alliage a la composition représentée par le point a, tout l’alliage est formé d’eutectique, Si l’on fait croître davantage la proportion de B, on voit apparaître dans l’alliage une nouvelle espèce de cristaux, dont la quantité augmente avec la pro- portion de B (ordonnées de la droite aC,), tandis que la quantité d’eutectique diminue (ordonnées de a,C) et s’annule quand l’alliage atteint la composition figurée par le point C. Ce dernier alliage est formé d'une seule espèce de cristaux. Si un nouvel accrois- C> B, Quantité l2vH 25vH 75vH Fig. 1. — Diagramme des compositions et des points de fusion des alliages. sement de la proportion de B fait apparaître un nouvel eutectique, tandis que la quantité de cristaux de la composition C diminue, on a évidemment affaire à une combinaison G ou de formule AB. Car seul l’alliage dont la composition répond à la formule A*B* est constitué par des individus cris- tallins (ou cristallites) identiques entre eux : les deux métaux À et B se sont donc unis en A”Br, intégralement, sans laisser aucun résidu. De la même manière, l'étude microscopique per- met de déterminer la composition de la seconde combinaison A?B°, En même temps, on détermine aussi la composition globale des trois eutectiques a, b, e. L’eutectique a doit être formé de cristallites de À et de la combinaison A”B", l’eutectique h de cristallites des deux combinaisons AB" et A7B?, A enfin l'eutectique e de cristallites de la combinaison A»B° et d'une autre espèce de cristaux, de composi- tion m, dont nous avons encore à parler. D'ordinaire, les trois eutectiques se différencient aisément par leur aspect, d'autant plus que les espèces de cristaux formées en premier lieu présen- tent habituellement des formes caractéristiques qui les signalent au premier regard. Dès que la compo- sition m est atteinte, l’alliage est constitué par des polyèdres d’une espèce unique. D'après ce que nous avons vu, nous devons nous attendre à l'apparition d’un nouvel eutectique composé des cristaux 7 el des cristaux du métal pur B. Mais l'expérience nous montre que tous les alliages de composition inter- médiaire entre la concentration 2» et le métal pur B sont formés tous de polyèdres semblables entre eux. Les cristaux de B admettent donc le métal A jusqu'à la proportion »1et il se produit une série de cristaux mixtes. La composition de chaque polyèdre cristal- lin est la composition initiale de la matière fon- due, où ils ont pris naissance, puisqu ils sont tous pareils entre eux. Ceci n’est exact, du reste, que si la cristallisation s’est opérée assez lentement ou si l’alliage a été maintenu quelques heures à une tem- pérature un peu inférieure à la température marquée par la fin de la cristallisation. Dans ces conditions, la diffusion fait disparaitre les inégalités de com- position des cristaux feuilletés. En représentant graphiquement, comme dans la figure 1, les résul- tats de l'examen microscopique, on serend aisément compte de la structure de toute la série des alliages. Les ordonnées des droites tracées en pointillé sont proportionnelles aux quantités des eutectiques; les ordonnées des droites tracées en plein sont propor- tionnelles aux quantités des cristaux du métal A formés en premier lieu et de ses combinaisons. Dans l'intervalle de concentrations »B, les ordon- nées de l'horizontale »,B, représentent les quantités des cristaux d'une espèce : l’alliage en son entier est formé alors de cristaux mixtes pareils entre eux. I] Les résultats de l'étude microscopique ne sont en toute rigueur valables que pour la température à laquelle on a opéré. Car la structure des alliages peut être profondément modifiée par une réaction chimique entre deux espèces de cristaux intimement mélangées ou par la séparation des cristaux mixtes en deux variétés de cristaux de composition diffé- rente. Ces phénomènes s’accomplissent dans les mé- langes cristallins, à des températures déterminées, avec une remarquable rapidité. Grâce à un refroi- dissemént très rapide (étonnement), on peut fixer l'état stable seulement à haute température dans 108 G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES les circonstances habituelles, si bien qu'on peu étudier la structure correspondant à cet état, même à la température ordinaire. Mais l'étude microscopique est insuffisante pour caractériser complètement la structure d'un alliage. Il faut, de plus, connaître toute son histoire pen- dant sa cristallisation dans la masse fondue et pendant le refroidissement subséquent. Le moyen le plus simple pour connaître l'histoire de l’alliage consiste à observer la température à des intervalles de temps aussi courts que possible pendant le refroidissement de l'alliage liquéfié. On trace la courbe de refroidissement, dont les abscisses sont proportionnelles aux temps et les ordonnées aux températures. La courbe 1 de la figure 2 représente l'allure la plus fréquente des courbes de refroidissement. À la température /, correspond un point anguleux : le re- froidissement est retardé par la sé- paration des cris- taux. d'une seule espece MEN ARE; trouve un palier : la température se maintient inva- riable pendant un certain temps, malgré la perte de chaleur. La durée de ce palier est, pour les alliages d'une même sé- rie, proportionnelle à la quantité qui cristallise- rait dans le creuset, à la température correspon- dante, si l’on opérait sur toute la série de ces alliages dans les mêmes conditions de refroidisse- ment. Un semblable palier, sans être précédé d'un point anguleux, s'observe seulement quand cristal- lise un métal pur, une combinaison définie des métaux ou un eutectique. La température de fusion d'un eutectique est aussi nettement déterminée que celle d'un métal pur ou d'une combinaison définie. Pourtant, les paliers correspondant aux combinai- sons définies et à leurs éléments ne se produisent que pour certaines compositions exceptionnelles, tandis que les paliers correspondant aux eutec- tiques se retrouvent dans tous les alliages dont la composition est comprise entre deux limites plus ou moins écartées. Pendant la cristallisation des eutectiques, la température reste invariable toujours, tandis qu'au début de la cristallisation la température varie (sauf pour les alliages exceptionnels cités). Gelte circonstance s'explique aisément. Pendant qu'il se forme une seule espèce de cristaux, la composition Température Temps Fig. 2.— Courbes de refroidissement des alliages fondus. G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES 409 de la masse fondue varie constamment, et à chaque composition correspond une température différente d'équilibre entre la masse cristallisée et la masse fondue. Quand l'eutectique se solidifie, la compo- sition de la masse fondue reste invariable et la température aussi. Pour résumer les résultats des expériences de refroidissement, on relève sur les courbes les tem- pératures des points anguleux et des paliers, et on les représente sur un diagramme en fonction de la composition des alliages. A cet effet, nons élevons sur l'axe des concentrations AB un axe de tempé- ratures qui lui est perpendiculaire (fig. 4). La tem- pérature du début de la cristallisation de A s’abaisse à mesure qu'on introduit une proportion croissante de B et le point représentatif se déplace sur la courbe À,a,. Pour une faible proportion de B, le palier se transforme en un point anguleux très accusé, qui devient de moins en moins prononcé à mesure que la quantité de B devient plus grande. Mais, sur toutes les courbes de refroidissement, apparaissent à une même température des paliers de durée variable. Cette durée est maximum au point d’eutexie à,, mais, de part et d'autre, elle décroit, soit qu'on se rapproche du métal À pur, soit qu'on augmente la teneur en métal B, propor- tionnellement à la distance des deux droites 2,/, et de l'horizontale /,,1, : elle s'annule pour le métal A et pour la combinaison définie AB". Au point d'eutexie 2, se coupent les deux courbes À 2, el Ca, correspondant au début de la cristallisa- tion; la masse fondue est, à la température /,, saturée de À aussi bien que de A”B". Aussi les cris- taux de À et de A”B’ se séparent simultanément et la structure est à grains fins ou à lamelles, parce que les formations primaires font défaut. La courbe du début de la cristallisation à,C,b, représente les températures auxquelles la masse fondue est saturée des cristaux de A”*B’. Le sommet C, de cette courbe correspond à la tempé- rature de fusion de la combinaison A”B': cette température s’abaisse par l'addition soit de A, soit de B, et la quantité du mélange qui cristallisera finalement sous forme d'eutectique croit jusqu'aux concentrations figurées par a et b. La cristallisation d'un liquide renfermant plus de métal B que l’alliage m1 demande encore quelques explications. Il s'agit alors de la forma- tion de cristaux mixtes. Sur la courbe de refroidis- sement d'un pareil liquide, on observe un inter- valle de cristallisation, pendant lequel l’abaissement de la température est retardé. Sur la figure 2, la courbe 2 présente un de ces intervalles, s'étendant de la température £, à la température £,; le refroi- dissement y est retardé, parce que la chaleur de cristallisation devient libre. Le point figurant la température /, est sur la courbe B,c, et le point figurant la température /,, qui marque la fin de la cristallisation (fig. 2), est dans la figure 1 sur la courbe B,r,, au-dessous de t,, Sur la mème ordonnée. Les liquides dont la composition est comprise entre B et 2» se solidifient en cristaux mixtes sem- blables entre eux. Ceux dont la composition esl comprise entre m et c fournissent des agglomérés, dans lesquels le cristal mixte saturé m,, formé en premier lieu, est enveloppé d’un eutectique, cons- titué par les combinaisons A?B° et les cristaux mixtes nm. Les circonstances de la cristallisation détermi- nent ainsi la structure de l'alliage. Si, entre la tem- pérature des horizontales d’eutexie et la tempéra- ture ordinaire, n'intervient aucune action chimique entre les diverses espèces de cristaux, la structure à la température ordinaire correspondra encore à la marche de la cristallisation. Aux paliers d’eu- texie, correspondent des quantités d'eutectiques proportionnelles à la durée de ces paliers. Aux combinaisons définies correspondent des paliers, dont la température est toujours plus élevée que celle des paliers d'eutexie voisins. Enfin, les alliages qui cristallisent dans l'intervalle de deux températures sont formés de cristaux mixtes. III Après avoir effectué cette « analyse thermique », qui consiste avant tout à dresser les courbes de refroidissement, puis à reporter sur le diagramme température-composition les températures des points anguleux et celles des paliers avec leur durée, on peut se faire de la structure de l’alliage une idée qu'il faut ensuile confirmer par l’examen micros- copique. Le résultat de ce travail est le diagramme des états ou diagramme caractéristique de la com- binaison binaire A et B. Nous verrons immédiate- ment sur ce diagramme à quelle température les alliages deviennent complètement fusibles et à quelle température chacun de ces alliages com- mence à cristalliser. Au-dessus de chaque droite eutectique commence la fusion, qui se termine seu- lement quand la température à dépassé la courbe au début de la cristallisation. Dans la fabrication des alliages, dans leur coulée, il importe souvent de connaître ces températures. Celui qui est en pos- session du diagramme caractéristique peut les dé- terminer aisément. Mais cesmêmes diagrammes possèdentune impor- tance de premier ordre dans l'étude des propriétés des alliages solidifiés. On n'est plus condamné à faire des essais à l'aventure, mais on peut les limi- ter aux composés définis, aux eutectiques, aux ol 410 G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES Tagceau |. — Propriété 1 Ag. Au. Mg. Zn. Cd. He AI. TL. Sn. " ,2 ES Cu°Cd° 1: AlCu°, 3: Cu!, Sn. cu. lys || leume | fous | far [Adrien | PGR | dass Gus. rs -00 cu TE Fe LxLO—100 | £225—70 Cu.| KZO—100 Cu. aa ADO = ren PAC EnIIeES 9 “4 t ts PTT [ ', Ag?Zn? : f: AgMe PRÉC . f= AgAI, Vie Ag. f20 AoMe AgZnspie Zn°, Combinaisons — AgŸAl. fa 0. fe Ag Sn. 8 k TE RE. rire #LO 9 Ag. | AZ 0—90 Ag. | KL 0—80 Ag. #10,4° 00 [ El [= Aun, f=Au‘Cd’, fa Au'Al, à fs AuSn. fe Au‘Pb, Au'Zn°, AuZn*. AuCd*. —_ Au’Al?, Au’Al, ROUE A AuSn*?, AuSn', AuPb? AL19—88 Au.| ÆZ0—S9 Au. AuAl, AuAl. | #20 29%: |0Z7;0—06 Au. | ÆZ 01008 | [l : . ABMpt, [e TPMo* : , MgZn°. fe MeCd. EF CARRE Le | fe MeSn. fs PbMes NE E — — g?, TÉMpg?. es ar KL 0100 Me. 1e. et 55-2100 Me. | AZ 609 Me. | #2 0—100 Sn. | &£0 100 Me 20. fs 0. F0 fL2—95 TI. f=0. Et TES KLy0—100 Cd.| ÆZ 0—67 Zn. CE KL 0—100Zn.| ÆZ?0—10. KL?0-— 100! [Z£ 9—100 Ca. xL el" es ca, me ae 40 | #73 2400. CERTES ADO == 100 CRETE fs Hg°TI + HgSn. | KL? xl DS 8n. | LOS rs vi fe 0— 100 AI. à fL5—100 PI 4 0- KL se 00 AI xLo_ 300 A1 | Z0—10 AL | x 071008 [20. fe PET? KL? KL 6—2: Pb; at KL? 0—100. / Micible à l'état liquide en toutes proportions. [£L Lacune dans les mélanges à l'état liquide, 0 Pas de combinaison chimique, K+ Série de cristaux mixtes sans lacune. KL Lacune dans la série de cristaux mixtes. KL 0100. KL0-—-100. KL 0—99,5 Ni. fs 0. Ka. C2 Combinaisons. K% KL 0 —100. Combinaison X. KL dépendant de la tempéra- . TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES des métaux associés. | Sb. Bi. Mn. Fe. Co. Ni. Pd. p£ Cr Si SE SP | ——— | "—"— —— — | ————— | ———————— rs ë 0 fs 0. fa 0. 0: f3 0. fa 0 la0 æ Cut, Cu Si, AL0 90 Cu. | AZ0—100. jee KL2,5—97Fe.| KL 4—90 Co. Ke Ka Ke KL 4—100 ST S AgSp. 0 [L 0— 100. [LE 0—100. fL DC Ni. fs 0 fa 0 AD 85 Ao. | KLO_—-9% A6 = 0. 0. F CL 48-05 = ALO—S5 Ag. | KLO—95 Ag. KL 0--100. nn MZ 0 SONT, ne KL 48 —95 Pt. [= AuSb°. fs 0. KL fa 0. fa 0 fs 0: KLO—100. | XLO0—95 Au. + à 20". Ts KL 5—80 Ni. Ka K+. KL20—82Fe. pes | fMeBe = s GeèE 2. 2 ” KL 0—100. | AÆZO—100. FE KL 0 — 100. à 2Sh? £ ES 20 de Fe Son) emmer, D | ne | = - KL? 0—100. 0: FeZn’, FeZn°. HD Q ILE Ne [= CdSb*, Mn insoluble . CaSb. fs 0. dans — — NiCd*, — _ = — KL 0—100. Cd bouillant. - fe ; = = -- - - fL? AISb, *L 2 — 92 Bi. Dihenb es [AS fs NiA : formationlente. ! 0. — ne — 48 Fe se sen Dies NiAl. — = KL ns NS S KL? d De, n_nFe KZ 90,5 —8 (t —$8 LL O0 — SI. PAU SA UDS cb40—0 Fe. 64 6850 Co. | et 68,4—0 Ni. fa TÉSb RENE , EAU a 100. f£ 0—90 Ni. KL? {L 6—66 Dr re D 0 : = me 3 Rte KL 0—100. KL 0,98 Ni. fLISAS. : À = SbSn. < SnMn!, 1 ; 2 F. Co’Sn et 30 — 45 Ni fs BE Sn, ; li S— 50. EL FE & srMint, SnMn ? rs nee Feoisnt v NiSn*, Ni'Sn, F SR SE j = = et53—90S b. ST EE No | une A7 0100) Ni‘Sn? pe : KL 0—85 Ni. eh : , È . PaPb? _ : fL12—90 Mn. | f£0—100. [LE 0—100. L16—72 Ni ls 3 ro . 2% Lee ee 0. e 0. EDS à LE PARRESED, fs X: PEPD, X. — L 0 — 100 Mn. KL 0 —100. KZL0O—100. KL 0—96 Ni. | XZ6— 77 Pa. fa SbMn, P SbMn° rite HS F, Sb?Cr, SbC fa 0. EL + CoSb, CoSbz.| NiSb ORDRE ER [30 ; L 0 —31, = sGoSb; Goshr: > à ne = KL 0— 30 Lt 21 1552100 CDR AR à LR et 55 — k f£ 0 — 100. f£O—100. fLO—100. fL2—100 St û 0 = = 0 0 KL 0 — 99,2 Bi. fa Mn°Si, MnSi! KL 10 — 100 Si. fs Fe’Si, FeSi. KL 20 —100 Si. F5 0. fa FeNi°? Ks. K+ De "= ture à laquelle est portée la [masse fondue. fs 0. 5” Ke A TE fs NiSi, NPSi, Ni, Nisi, Nisi. KL 0—14 et 19— 100 Si. 412 termes extrêmes de la série des cristaux mixtes, en y joignant au besoin quelques termes intermé- diaires. On arrive alors rapidement à se rendre compte si les propriétés cherchées peuvent se ren- contrer dans la série d’alliages étudiée. Deux exemples illustreront cette méthode : Déterminons, pour la série d’alliages AB, les volumes spécifiques et portons-les en ordonnées w v à © & ü ‘vu Q (0) (2) Q £ à S ARABE et AËEE cm B 25vH 50 vH 75 vH Fig. 3. — Volumes spécifiques des alliages en fonction de la concentration. au-dessus de l’axe AB des concentrations (fig. 3). Joignons les extrémités de ces ordonnées par des droites, qui se couperont aux points figurant les composés définis ou les cristaux mixtes saturés. En effet, si l’alliage est formé de deux espèces de cris- taux seulement, le volume variera proportionnelle- ment aux quantités de ces deux espèces de cris- aux; comme celle-ci varie proportionellement à la composition, il en sera de même du volume. Pour- tant, quand on atteint la composition pour laquelle l’une des espèces de cristaux disparaît, le coeffi- cient de proportionnalité varie brusquement et la droite fait un coude. Dans les expériences faites jusqu’à présent, le volume des cristaux mixtes s’est trouvé aussi être une fonction linéaire de la con- centralion. Par conséquent, il suffira de connaître les volumes spécifiques des combinaisons définies et des termes extrèmes de la série des cristaux mixtes pour déter- miner, par une interpolation graphique linéaire, les volumes spécifiques de tous les alliages de la série. En ce qui concerne la conductivité des alliages, nous possédons aussi quelques règles, qui nous per- mettent de nous faire une idée d'ensemble sur la manière dont varie cette conductivité avec la con- centration. Portons en ordonnées les conductivités et en abscisses les concentrations des alliages de la série qui nous occupe (fig. 4). D’après Le Châtelier, dans une série d’alliages formée de deux espèces de cris- taux, dont les quantités varient, comme dans le cas considéré, en fonction linéaire de la concentra- tion totale, la conductivité est également une fonc- tion sensiblement linéaire de cette concentration. D'une combinaison définie à une autre, ou d’un des éléments à une combinaison définie ou encore G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES d'une combinaison définie à une espèce de cristal mixte saturé, la conductivité sera représentée par des courbes se confondant à peu près avec des droites. Ces courbes, presque rectilignes, se cou- pent aux points figuratifs des composés définis. Il convient d’insister sur la variation de la con- ductivité dans une série de cristaux mixtes. Quand un métal forme avec un autre une série de cris- taux mixtes, sa conductivité est fortement diminuée par l'addition de ce second métal, et les premières portions ajoutées provoquent une diminution plus forte que ne le font les autres. Comme la conduc- livité des alliages est toujours, autant que nous sachions actuellement, inférieure à celle du com- posant le plus conducteur, nous n'avons guère de chance de trouver un alliage dont la conductivité surpasse celle des métaux purs les plus conduc- teurs. Ainsi, entre les conditions de la cristallisation, la structure intime et les propriétés des alliages, exis- tent d’étroites relations. Nous n'avons d'autre but ici que de jeter un coup d'œil d'ensemble sur ces relations. À ceux qui voudraient approfondir la question, je recommanderai l’Æxposé élémentaire de la Métallographie (éditeur Léopold Voss, 1907), par le D'R. Ruer, ouvrage clairement écrit et sous une forme aisément accessible. Le lecteur y trou- Conductibilité électrique AÙ = ALB EP ANEMEr B Fig. 4. — Conductibilité électrique des alliages en fonction de la concentration. vera les données théoriques indispensables, ainsi que la technique des expériences qu'exige l'étude rationnelle des alliages. I Renseignés d'une manière générale sur la forma- tion de la structure des alliages, nous sommes à même de nous reconnaitre dans les cas particuliers. Le tableau des pages 410 et A11 résumera les pro- priélés des nombreuses combinaisons binaires for- mées des métaux usuels, en remarquant qu'on ne . G. TAMMANN — RECHERCHES MÉTALLOGRAPHIQUES 4113 peut faire entrer dans un tableau que les données les plus importantes. Celui qui s'intéresse spécialement à un couple particulier de métaux verra aisément si ce couple a élé étudié déjà, et, le cas échéant, trouvera les résultats détaillés dans les derniers volumes de la Zeitschrift für anorganische Chemie, où ont été publiés les travaux de mon Institut. Outre le dia- gramme caractéristique de la série d'alliages, ces Mémoires renferment des photographies de la strue- ture et une description détaillée de celle-ci, les renseignements sur la dureté, la couleur, la sus- ceplibilité magnétique, et aussi sur le mode de préparation. Les associations suivantes n'ont été, de notre part, l'objet d'aucune recherche, parce que leur histoire était déjà complètement faite par d’autres expérimentateurs : Heycock et Neville, Phil. Tr., 202 CusSn : A (1903), Date AuAl : Heycock et Neville, Zhid., 194 A (1901), p. 201. CuZn : Shepherd, Journ. phys. Chemie, t. VII (1904), p. 421. ZnTl et HgTI : Kuznakow et Puschin, Zeitseh. anorg. Chem., t. XXX (1902), p. 86. AgMg : Zemezuznyj, Zertsch. anorg. Chem., t XLIX (1906), p. 400. CuSb : Baikow, Z'rav. de l'Institut des Ponts et Chaus- sées de St-Pétersbourg, 1902. Cdg : Byl, Zeitsch. phys. Chemie, t. XLI (1902), p. 641. BiCd : Kapp (Thèse), Künigsberg, 1901. Dans la première ligne et dans la première colonne du tableau I sont inscrits, rangés dans le mème ordre, les symboles usuels des métaux. De cette facon correspondent à chaque association binaire de deux éléments deux cases, dans une seule desquelles on a fait figurer les données essen- tielles qui caractérisent le couple. La moitié des cases reste inutilisée. Les abréviations doivent être interprétées comme il suit: Le signe /* indique que les deux métaux à l’état liquide se mélangent en toutes proportions. Le signe 0 signifie que les deux métaux ne forment aucun composé défini. S'il existe de tels composés. leur formule est inscrite. Lorsque la composition de la combinaison définie n'est pas certaine, on a employé la lettre X, comme on le voit pour FeSn, FeCr, PtPb. Le signe Kæ signifie que les deux métaux à l'état cristallisé forment sans lacune : ce phénomène se produit surtout avec les métaux de propriétés chimiques voisines et dont la température de fusion est élevée. Le signe KL veut dire qu'il existe une lacune dans la série des cristaux mixtes, et le signe fL une lacune de mélanges dans la série des alliages liquides. Les intervalles de concentration corres- pondant à ces lacunes sont indiqués par les chiffres qui accompagnent les symboles KL et fL. Ainsi KLG —23Pb, dans la case PDTI, doit être lu : le plomb et le thallium forment, dans l’état cristallisé, des cristaux mixtes; mais dans cette série de cris- taux mixtes existe une lacune entre 6 et 23 °/, de plomb. Les alliages dont la concentration totale est comprise entre ces limites se composent, à la température où ils sont complètement solidifiés, d'un mélange des cristaux mixtes saturés à 6 et à 23 °,, de plomb. Dans la case BiAl, on trouve fL2 — 92Bi,0,KL0 — 100, ce qui signifie : le bismuth et l'aluminium sont peu solubles l’un dans l'autre à la température de fusion du métal le moins fusible : la lacune des mélanges s'étend, à cette tempéra- à 92 °/, de bismuth. Par suite, si l'on une série de cristaux mixtes, ture, de 2 à mélange, par poids égaux, du bismuth fondu et de l'aluminium fondu à 660°, il se forme deux couches qui ne se mélangent pas, malgré tout brassage. La couche la plus dense renferme 92 °°, la dense 2 °/, de bismuth. Après refroidissement, comme il n y a pas de composé défini, la couche inférieure est formée de cristaux de bismuth pur, la couche supérieure de cristaux d'aluminium pur, entre lesquels se trouve occlus du métal étranger en petite quantité. Ce tableau fournira ainsi une première indica- tion. Pour les cas particuliers, il faudra recourir aux Mémoires originaux. s L'intéressé qui prendra pour guide l'ouvrage déjà recommandé du D' Ruer n'éprouvera aucune difficulté à utiliser les documents qui lui sont offerts ici. moins G. Tammann, Directeur de l'Institut de Chimie minérale de l'Université de Gôllingen. 41% J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE PREMIÈRE PARTIE I. —- NOUVELLES ÉTUDES SUR LE VOLCANISME, Les remarquables études de M. Lacroix sur la Montagne Pelée et sur l’éruption du Vésuve d'avril 1906, dont nous avons rendu compte dans notre précédente /?evue”, viennent d'être complé- tées par un nouveau travail du même auteur, publié sous le titre : « La Montagne Pelée après ses éruptions * ». Ce savant s'est proposé d'apporter de nouvelles vérifications aux vues théoriques exposées sur la structure du dôme récent, et de montrer comment certaines manifestations des volcans de la Montagne Pelée et du Vésuve s'éclai- rent mutuellement. Après avoir consacré quelques pages à la fin de l’éruption et à l'état actuel de la montagne et des régions dévastées, le professeur du Muséum s'occupe de nouveau de la structure du dôme et des roches qui le constituent. Il rappelle que ce dôme s’est formé par deux mécanismes distinets : 1° émission du magma à l’état visqueux ; 2 extru- sion à l'état solide. Le dôme récent doit être inter- prété comme une masse visqueuse à haute tempé- rature, enveloppée par une carapace solide, fissurée, cachée elle-même par des blocs se détachant sans cesse de sa surface, à mesure qu'elle augmentait de volume et qu'elle se refroidissait. Quand les parois du dôme furent devenues assez épaisses pour résister au mouvement d'expansion du magma: l'activité se localisa au sommet. C’est alors que se produisirent les phénomènes d’extrusion, caracté- risés par les poussées à l'extérieur de portions du magma incandescent, qui n'étaient plus visqueuses, mais solides. 11 en résulta la formation d'une aiguille (octobre 1902 à août 1903). La période d'activité qui suivit la chute de l'aiguille fut caractérisée par des changements dans la modalité des phénomènes explosifs. Ils eurent moins d'intensité, mais furent plus mul- tipliés. Quant aux phénomènes d’extrusion, ils consistèrent dans la formation de petites aiguilles déplacées vers l'Est. Enfin, il y eut augmentation du volume même du dôme. L'examen microscopique des roches produites pendant celte période démontre qu'elles contien- ‘ J. Réviz : Revue annuelle de Géologie. Rev. gén. des ce. numéro du 15 novembre 1907. * A. Lacnorx : La Montagne Pelée après ses éruptions, ivec observations sur les éruptions du Vésuve en 79 et en 1906. Paris, Masson et Cie, 1908. nent des éléments ayant cristallisé moins vite et sans doute plus profondément. Les portions sorties alors n'élaient probablement pas constituées par du magma venant directement de la profondeur, mais devaient consister en portions de celui-ci, consolidées depuis longtemps dans le dôme, et poussées au jour, soit par l’arrivée de nouvelles quantités du magma sous-jacent, soit par des mouvements gazeux pouvant disloquer les parties déjà solidifiées. Ces phénomènes méritaient d’être exposés et de retenir l'attention des géologues; ils démontrent que, dans un massif éruptif, dans un filon, des mouvements de masse solide au milieu d'une masse également solide ont pu se produire sans qu'il soit nécessaire de faire intervenir, pour les expli- quer, des mouvements orogéniques postérieurs à la mise en place. Dans son premier Mémoire, M. Lacroix s'était attaché à décrire aussi minutieusement que pos- sible les nuées ardentes. Il se demande mainte- nant quelle place il faut leur assigner parmi les phénomènes explosifs des volcans. Comme on le sait, ces phénomènes ont pour cause l'émission violente et brusque de produits gazeux à haute tension, entraînant avec eux des matériaux visqueux ou solides. La facon dont les gaz sont libérés du magma est fonction de l'état physique de celui-ci, ainsi que de sa fluidité plus ou moins grande au moment de l'éruplion. Ce sont les variations dans cette propriété du magma qui modifient le phénomène explosif. Ces phénomènes d'explosion peuvent être divisés en un certain nombre de types, que M. Lacroix définit de la façon suivante : 4° 7ype hawaïen, dans lequel l'émission de la lave n'est pas accom- pagnée de véritables explosions, mais consiste dans la production d'un jet avec dégagement de vapeurs légères; 2 Type strombolien, consistant en dégagements gazeux, accompagnés de violentes explosions qui lancent dans l’espace des portions de lave pâteuse ; les projections, vues de près, sont incandescentes, parfois même en plein jour, comme l'auteur a pu le constater, en septembre 1905, sur les bords du cratère du Stromboli; 3° Type vulea- uien, se produisant lorsque, au moment de l'érup- lion, le magma éruptif est très visqueux ; chaque éruption brise la roche plus ou moins solidifiée, produisant ainsi à ses dépens une quantité énorme de débris anguleux et de poussière fine ; les nuées J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 115 sont ordinairement sombres, sillonnées d’éclairs ; 4° Type péléen, consistant en explosions se produi- sant aux dépens d’un milieu plus ou moins complè- tement solidilié: la compacité est plus grande que celle des nuées vulcaniennes, et la proportion des matériaux entraiïnés plus considérable. C'est à des nuées de ce type qu'est due la destruction de Saint- Pierre. L'entraïnement en masse de matériaux à haute température empêche leur prompt refroi- dissement ; aussi les brèches conservent pendant longtemps une certaine température, et, comme conséquence, il y a production de fumerolles secondaires, de phénomènes secondaires périphé- riques, el souvent de {orrents boueux chauds. Nous devons ajouter que ces divers types d'ex- plosion présentent entre eux tous les intermé- diaires possibles. Un type d'explosion n'est pas, en effet, lié à un volcan ou à un magma déterminé. À la Montagne Pelée, où la composition chimique du magma ne s'est pas modifiée, on a vu alterner des coulées épanchées au loin, des tufs constitués les uns par des ponces, les autres par des brèches, et la dernière éruption s’est accompagnée de phénomènes explosifs vulcaniens et péléens. Ces explosions ne peuvent se produire au cours d’une même éruption que quand les conditions de venue au jour du magma changent. La dernière partie de l'ouvrage de M. Lacroix est consacrée à un examen comparatif des causes ayant amené la destruction des villes de Pompéi et de Saint-Pierre. L'éminent professeur publie des extraits de la lettre de Pline le Jeune à Tacite, extraits mettant hors de doute que les phénomènes volcaniques survenus l'an 79 de notre ère sont de même nature que ceux qui ont produit la destruc- tion partielle d'Ollajano el San Giuseppe, en avril 1906. La ville de Pompéi est ensevelie sous les mêmes matériaux sensiblement distribués, et sa destruction est le résultat d’un phénomène ayant eu une durée de quelques jours. C'est un ensevelissement progressif par des projections lancées dans l’espace et retombées sur le sol, à la facon de la grêle et de la pluie. Par contre, à Saint- Pierre, la destruction s’est produite instantanément, sous l'influence de matériaux brülants et de vio- lentes actions mécaniques s'exercant dans une direction horizontale, sans aucun mouvement du sol. Les relations de la lave et des gaz ont fait l’objet de recherches intéressantes, méritant d'être con- nues, et dues à M. Albert Brun‘, chimiste à Ge- nève. Ce savant à joint aux observations faites sur ? A. Brun : Quelques recherches sur le volcanisme. Arch. des Sc. phys. et nal., mai et juin 1905, novembre 1906, février 1908. le terrain des expériences exécutées dans le labo- ratoire et singulièrement suggestives. Elles lui ont permis de conclure que les gaz sont combinés dans la lave, et que leurs générateurs sont des azotur'es, des Aydrocarbures et des siliciochlorures. Une roche quelconque, dit-il, qui en contient quelque peu, fait explosion par réchauffement. Les gaz sont donc indépendants de la nature du magma, Quant à la température explosive, c'est celle de Ja fusion du verre du magma éruptif. Les phases volcaniques peuvent s'exprimer ainsi : de 0° à 8259, volatilisation d'eaux telluriques ; à 825°, début de fumées de chlorures; à 8749, à 1.060°, à 1.100°, températures explosives; à 1.100°, température moyenne des laves coulantes. Dans un second Mémoire, le même auteur croit pouvoir avancer que le volcan fonctionne sans eau d'origine profonde. La seule qui puisse se former, dit-il, est due à la combustion à l'air de l'hydro- gène des hydrocarbures ou de l’ammoniaque. Il y en a peul-être un peu, ajoute-t-il, qui serait dû à la combustion directe, dans le magma fondu, de l'hydrogène par l'oxygène des silicates. Les réac- tions volcaniques, engendrées dans le milieu éruptif, se passent comme si le milieu était presque anhydre, tandis que, dans l'explosion volcanique, l'azote et le chlorhydrate d'’ammoniaque sont d'ori- gine profonde et cratérienne. M. Brun à appuyé ses conclusions sur l « anhy- drité » du cratère en activité par des recherches effectuées au Pic de Teyde ‘et au Timanfaya (vol- cans des Canaries). Avec M. Montagnier, il a orga- nisé une expédition pour doser directement la vapeur d'eau dans les gaz émanés de deux cratères encore chauds. Les résultats obtenus lui ont permis de formuler la conclusion suivante : « Un volcan encore chaud n’émet pas d’eau, pour la raison très simple qu'il se trouve dans une région géogra- phique où les pluies et les eaux telluriques sont absentes. » Ce résultat, ajoute l’auteur, ne semble pas pouvoir prêter à la critique; la température de 360°, si près de la surface, indique un état de cha- leur permanente et l'existence de lave voisine, En terminant, notre confrère signale un fait curieux observé au Pic de Teyde : c’est que les laves, en coulant sur une pente rapide, ont donné lieu à une striation analogue à une s/riation gla- ciaire. II.— LA NATURE DES MOUVEMENTS DE L'ÉCORCE TERRESTRE. La littérature géologique francaise s'est enrichie, à la fin de l’année 1907, d’un nouveau Trailé de Géologie, dû à la plume de M. Emile Haug; il a été édilé avec le plus grand luxe par la librairie Armand Colin". Présenté avec cette clarté d'expo- sition que connaissent les lecteurs de la Revue, le premier volume est consacré à l'étude des « Phé- nomènes géologiques ». L'éminent professeur de la Sorbonne a pris pour fil conducteur non leur localisation, mais leur succession dans le temps; il passe successivement en revue les phénomènes de sédimentation (Lithogénèse), ceux de déformation de l'écorce terrestre (Orogénèse), enfin ceux de la formation du modelé (G/yptogénèse). L'étude de ces phénomènes est précédée de cha- pitres consacrés à la morphologie du globe terrestre et à la distribution des organismes; elle est suivie d'intéressantes considérations ayant trait aux déplacements des lignes de rivages et aux théories orogéniques. Ces deux derniers chapitres, de tous points remarquables, présentent un certain nombre de vues nouvelles, méritant d’être connues de ceux qu'intéressent les Sciences de la Nature. Il nous a semblé utile d'en exposer les principales données, et de montrer où en sont, à l'heure actuelle, les idées des géologues sur des questions qui les préoc- cupent, à Juste litre, depuis de nombreuses années, _L'histoire des temps géologiques montre que les lignes de rivages n'ont pas occupé une position stable, et que la distribution des terres et des mers a été, d'une période à l’autre, sujette à de conti- nuelles variations. On à appelé transgression ma- rine l'envahissement par la mer d’une région précédemment exondée, tandis qu'on a nommé régression le retrait de la mer d’une région qu'elle occupait précédemment. Les mouvements amenant les mers à empiéter sur le continent ont encore été qualifiés de positifs, et ceux qui, au contraire, ont amené les terres à empiéter sur les mers ont été désignés sous le nom de mouvements négatifs. Quelles furent les causes de ces déplacements ? S'agit-il, se demande le savant professeur, de mou- vements du sol, d'affaissements ou de soulèvements, donnant lieu soit à des invasions marines, soit à des retraits? S'agit-il, au contraire, de véritables oscillations du niveau des mers, c'est-à-dire de ces oscillations générales que l'illustre géologue vien- nois Edouard Suess qualifie de mouvements eus- tatiques et qu'il explique, pour les mouvements négalifs, par des effondrements, tandis que les mouvements posilifs seraient dus à l'accumulation des sédiments sur le fond des océans et au rem- plissage des dépressions marines? Ces effondre- ments se sont certainement produits à certaines ‘ Eure Hauc: Traité de Géologie. I. Les phénomènes géologiques (195 figures et cartes et 71 planches de repro: ductions photographiques hors texte); Paris, 4907, librairie \rmand Collin. Le premier fascicule du t. IT (Les périodes géologiques) a paru en décembre 1903. Nous en rendrons compte lorsque l'ouvrage sera terminé. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE époques; ils ont donné lieu à des appels d’eau con- sidérables, ceux-ci s'étant formés sur l'emplacement de terres émergées. D'autre part, par compensation, le niveau des océans devait s'abaisser d’une cer- taine quantité sur la surface du globe. Tout en ne niant pas complètement l'existence de ces variations du niveau des mers, M. Haug revient à l’ancienne idée des variations lentes du sol. Il cherche si les transgressions et les régres- sions marines peuvent être attribuées à ce phéno- mène. Il en trouve la preuve dans les études ré- centes sur l'histoire de la Scandinavie pendant les temps quaternaires. Vers la fin de la troisième gla- cialion, expose-t-il, les grands glaciers se reti- rèrent, laissant derrière eux des moraines stadiaires, et la mer envahit les territoires abandonnés. Cette invasion marine ne s'explique que par un affais- sement général de la région, qui se produisit en même temps que la fusion des glaciers. Cette mer a laissé des dépôts sous la forme d’une argile à Yoldia arctica, dépôts qui se retrouvent actuelle- ment à des altitudes variables, oscillant entre O0 et 270 mètres. Postérieurement donc à l'invasion de celte mer, le sol subit un relèvement qui n'eut pas partout la même amplitude. Postérieurement encore au retrait de la mer à Yodia, il se produisit une nouvelle invasion, celle de la mer à Littorines, suivie aussi d'un soulèvement. C'est bien, conclut M. Haug, dans les oscillations verticales du massif finno-scandinave que doivent être recherchées les causes de ce déplacement. Cela étant, il y a lieu de distinguer, à côté des mou- vements orogéniques, d'autres mouvements, que l'on peut désigner sous le nom d'épirogéniques. Les mouvements du fond des géosynclinaux, qui aboutissent souvent à la formation d’un « géoanti- clinal médian », peuvent être considérés comme le prélude de la formation des plissements devant naître sur l'emplacement des géosynclinaux. Nous les assimilerons aux mouvements orogéniques. Par. contre, nous considérerons les mouvements épiro- géniques « comme des oscillations verticales des aires de surélévation qui ont leur contre-coup dans les aires d’ennoyage voisines ». Ces derniers mou- vements, c'est-à-dire ces oscillations verticales; aussi bien positives que négatives, des masses con- tinentales, constituent de véritables soulèvements. Ils n'ont rien de commun avec les mouvements orogéniques et leur sont consécutifs. Les plissements sont dus à des refoulements laté- raux, à des mouvements tangentiels de l'écorce terrestre. Cette conception est aujourd'hui univer- sellement admise; la preuve matérielle en à été fournie par la constatation de ces gigantesques déplacements horizontaux, bien mis en évidence par Marcel Bertrand. Un Mémoire posthume de ce J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE #1 regrelté maitre’ — mémoire récemment livré à la publicité — a montré la généralité de ces phéno- mènes, dont le mécanisme se rattache à la phase de la formation des plis, et qui s'explique de la façon suivante : « Des actions de refoulement peuvent faire naître dans une nappe horizontale des plis droits ou cou- chés, selon que les points d'application des forces sont placés ou non à la même hauteur; c’est ce que montre bien simplement la comparaison avee une feuille de papier ou de carton peu épais. Or, une fois qu'un pli horizontal s'est produit et a amené en saillie une sorte de bourrelet au-dessus de la nappe primitive, les forces horizontales, qui con- tinuent à agir dans les couches superficielles, ne peuvent avoir d'autre effetsur ce bourrelet que de le pousser en avant. Si la charnière synclinale, main- tenue par les couches qu'elle englobe, reste fixe, et si le mouvement est assez lent, et le bourrelet assez épais pour que les couches qui le forment ne se disloquent ni ne se fragmentent, le résultat sera nécessairement un a/longement du pli couché. Les banes qui en forment le flanc supérieur sont sans cesse amenés par la force qui continue à pousser en avant les couches superficielles. « Quant au flanc renversé, ce mouvement ne peul lui fournir de nouveaux matériaux; il reste con- stilué par les couches renversées du bourrelet pri- mnitif, et par conséquent, à. mesure que le pli s'al- longe, il faut que ces couches se répartissent sur un plus grand espace, c'est-à-dire qu'elles s'amin- cissent s'élirent. L'étirement du flanc renversé peut aller jusqu’à sa suppression totale, et apparait comme une condition nécessaire de la formation du pli couché, quand le déplacement horizontal est con- sidérable”. » L'illustre savant fait remarquer que le phéno- mène ne se produit pas toujours avec cette simpli- cité théorique. La charnière synclinale peut se déplacer, ce qui implique la mise en mouvement d'une tranche plus profonde de l'écorce, et l’on est alors amené à étendre à cette tranche plus pro- fonde les conclusions établies pour la tranche supé- rieure. De plus, la nappe de recouvrement ne reste pas toujours horizontale; il peut s'y produire des froissements secondaires, qu'il faut considérer comme une conséquence de la mise en mouvement de ces masses. « Ainsi, formation de plis horizontaux, déroule- ment de ces plis et glissement relatif, soit par ‘ Marcez BenTrano : Mémoire sur les refoulements qui ont plissé l'écorce terrestre et sur le rôle des déplacements horizontaux. Gauthier-Villars, libraire-éditeur, Paris, 1908. Ce Mémoire est précédé d'une préface de M. Termier, indiquant les circonstances qui en ont amené la publication. * MarceL BERTRAND : Mémoire sur les refoulements... Zocicit..p 207. tranches, soil par zones élémentaires, des parties mises en mouvement, avec propagation plus ou moins profonde. de ces mouvements, tels sont les termes simples auxquels se réduit le mécanisme des grands déplacements horizontaux et qui nous semblent suffire à en expliquer toutes les compli- cations secondaires‘. » Abordant maintenant l'étude du mode d'action des forces qui entrent en jeu, nous dirons qu'à l'heure actuelle les géologues sont loin d’être d'ac- cord. Pour les uns, ces forces consistent en phéno- mènes de contraction, tandis que d’autres y voient des phénomènes d'expansion. La théorie de la contraction — formulée en 1852 par Elie de Beaumont, dans sa célèbre Notice sur les systèmes de montagnes — est déduite de l'hypo- thèse de la diminution du rayon terrestre sous l'influence du refroidissement. Cette théorie a été surtout développée par le géologue suisse Albert Heim, qui a cherché à mesurer la diminution subie par les chaînes des Alpes et du Jura, à la suite des phénomènes de plissement. Il évaluait à 120 kilo- mètres la diminution qu'aurait subie la largeur de la première de ces chaînes. Ces évaluations doivent être modifiées, par suite de la découverte des nappes de charriage, et, dans l’état de nos connais- sances, il semble difficile d'établir des évaluations même approximatives. Trois causes principales ont été invoquées dans les théories orogéniques ayant pour base l'hypo- thèse de poussées unilatérales : les a9aissements, l'isostasieet l'écoulement des masses superlicielles de l'écorce. 5 Basée sur l'hypothèse du refroidissement graduel du globe, la théorie des afaissements suppose que l'écorce terrestre, n'étant plus soutenue par la masse fluide sur laquelle elle repose, s'effondre graduellement. C'est Edouard Suess qui a surtout insisté sur le rôle joué par les effondrements dans la mise en saillie des reliefs terrestres. Une des idées fondamentales de l’œuvre du maître viennois est la notion de la dissymétrie des chaines de mon- tagnes, les plis d'une chaîne étant tous déversés dans une même direction. Lorsque le sens du déversement est inverse, on est en présence d'un plissement à rebours, dû à la tendance au recouvre- ment des dépressions. A ce sujet, M. Haug fait remarquer que celle dissymétrie peut être expliquée par des mouve- ments de descente des deux aires continentales, séparées par un géosynelinal et pouvant déter- miner un écrasement bilatéral de ce géosynelinal. Il se formera sur chacun des bords une zone de plissements déversés en sens inverse. ‘4In: Loc. CIE pe 20 418 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE La théorie de l'isostasie, due à Dutton, est définie par lui : « La condition d'équilibre de la figure vers laquelle la gravitation tend à réduire un corps planétaire, qu'il soit homogène ou non. » Si la terre est suffisamment plastique, elle tendra vers une figure isostatique. D'autre part, on sait que les conditions d'équilibre de la surface sont constamment modifiées par les cours d’eau, enle- vant les matériaux sur les masses continentales, pour les transporter dans les océans. L'équilibre isostatique se rélablira par ce déplacement vers les continents de la matière en excès sur les rivages des mers. La poussée tangentielle, dirigée ensuite de la mer vers les côtes, déterminera la formation de plis parallèles, de direction perpen- diculaire au sens de la poussée. La théorie de l'écoulement des masses superf- cielles de l'écorce suppose l'existence d'un plan incliné sur lequel, sous l’action de la pesanteur, les couches glissent en se plissant, de facon à ce que les plis soient déversés dans la direction de la pente. Le Professeur Reyer a pu reproduire, à l’aide d'expériences, ce mode de plissement”. Examinons en quoi consiste la {héorie de l'expan- sion. Elle suppose que, dans une bande plissée de l'écorce terrestre, les deux bords de cette bande ne se sont pas rapprochés lors du plissement, mais que ce sont les roches constituant la bande qui ont augmenté de volume. Cette interprétation, formulée par Mellard Read, et adoptée par un certain nombre de géologues, attribue l'expansion à la dilatation résultant d'une augmentation de température. Ces théories exposées, l’auteur cherche à pré- ciser la nature des forces mises en jeu. Il les attribue à la contraction et à Ces théories, dit-il, « s’accommodent fort bien de la naissance des zones de plissement sur le pourtour des continents, du déversement des plis vers ces continents, du resserrement graduel des géosyn- clinaux ». La vérité résiderait peut-être, ajoute-t-il, dans la combinaison de ces deux théories : la contraction aurait fourni la force, tandis que l'isostasie aurait déterminé le sens d'une poussée dirigée de la région axiale du géosynclinal vers l'aire continentale. A la contraction doit être im- putée la formation des géanticlinaux médians et l’isostasie. celle des faisceaux de plis à déversement indéter- miné. À elle serait encore due la première ébauche des géosynelinaux. Par contre, l’isostasie aurait facilité leur approfondissement graduel. Quant aux mouvements épirogéniques, M. Haug avoue qu'aucune explication vraiment satisfaisante n’en ! W. Kirran : Les essais de Géologie expérimentale du Professeur E. Reyer, Rev. gén. des Sc., {. IV, pp. 425-498, 1593, a été fournie. On pourrait peut-être y voir des « bossellements lents occasionnés par l'ampleur surabondante de l'écorce ». Concluons avec notre savant confrère que, si le mécanisme des mouvements orogéniques et épiro- géniques commence à être bien connu, la part qui revient aux divers agents physiques nous échappe encore. III. — ÉJYUDES SYNTHÉTIQUES SUR LE CRÉTACÉ INFÉRIEUR. Un ouvrage bien connu des géologues allemands — auxquels il a déjà rendu de grands services — est le magistral Traité de Stratigraphie publié par l'éditeur E. Nægele, de Stuttgart, sous le titre de Lethæa geognostica'. Commencé sous la direc- tion du Professeur Rœmer et continué sous celle de son savant successeur, M. Fritz Frech, cet ouvrage monumental, qui parait par fascicules et dont la publication n’est pas encore terminée, ren- ferme une série de Monographies, dues à des géo- logues s'étant signalés par une compétence spéciale dans les parties de notre Science qu'ils sont chargés de traiter. Cest ainsi que les chapitres relatifs au Paléozoïque et au Carbonifère sont dus à MM. Rœmer et Frech, que le Trias a été étudié par MM. Frech, Philippi, Noething et von Arthaber, le Crétacé inférieur par M. W. Kilian, le Quaternaire de l'Europe septentrionale par M. Geinitz. Quant aux volumes devant être consacrés au Néocrétacé, au Tertiaire et au Quaternaire alpin, ils n’ont pas encore été livrés à la publicité et sont impatiem- ment attendus. L'espace qui nous est réservé ne nous permettant pas de résumer toutes ces monographies, nous nous contenterons d'analyser celle qui traite du Crétacé inférieur, dont la publication est de date récente (octobre 1907), et qui est due — bien qu'écrite en langue allemande — à un de nos plus savants géologues francais, M. Wilfrid Kilian, professeur de Géologie à l'Université de Grenoble. Bien que les divers étages du Crétacé inférieur nous aient livré de nombreux documents et aient été minutieusement décrits, tant en Europe que dans les autres continents, aucune synthèse n'en avait été tentée et nul travail d'ensemble ne leur avait été consacré. C'est cette lacune que vient combler la monographie que nous signalons à l'attention de nos confrères, monographie qui, pendant de longues années, servira nécessairement 1 Lethæa yeognostica. Handbuch der Erdgeschichte. Herausgegeben von einer Vereinigung von Gelogen unter der Redaktion von Fritz Frech. ler Teil : Das Mesozoicum; 3° Band : Kreide. Palæocreta- cicum, von W. Kiran. E. Nägele, Stuttgart, 1907, J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 419 de base à toutes ies études relatives à ces terrains. Elle permet l'établissement de parallélismes rigou- reux et fournit une connaissance exacte des con- ditions bathymétriques que présentaient les mers de cette époque, ainsi que des données précises sur la succession des êtres qui les habitèrent et les changements ou les modifications qu'ils durent subir. Après avoir esquissé les caractères spéciaux de la période et établi quelques données générales sur la faune et la flore, l’auteur reconnait et étudie trois provinces géologiques : Province méditerra- néenne ou Mésogée, Province volgienne ou boréale, Province indo-pacifique. Il rappelle ensuite les divers travaux dont ce groupe à élé l'objet et donne un répertoire complet de tous les termes, noms d’étages, d'assises ou d'horizons qui ont été successivement employés. M. Kilian étudie ensuite longuement les limites inférieures de la formation, au point de vue des étages Berriasien et Purbeckien. Le premier est, avec le Wealdien, rattaché au Valanginien, dont il forme l’assise inférieure, tandis que le second appartient incontestablement encore au Juras- sique, dont il constitue l'horizon supérieur. Les fossiles recueillis et les passages latéraux constatés par l’auteur ou par quelques-uns de ses collabo- rateurs établissent cette interprétation sur des bases indiscutables. Abordant aussi la question de la limite supérieure — qui à prêté à discussion — il la place au-dessus de la zone à Mortoniceras inflatum. Quant aux divisions à établir dans l'en- semble de la formation, elles sont au nombre de cinq et correspondent aux étages suivants : 1° Va- langinien ( Valendisstufe — Unteres Neokom ) ; 2 Hauterivien (Hauterivestufe — Mittleres Neo- kom) ; 3° Barrèmien (Barrêmestufe); 4° Aptien (Apt- stufe — Aptésien); 3° Albien (Aubestufe — Gault- stufe). Un chapitre très intéressant et très documenté est consacré aux nombreux facies que présentent les dépôts de celte époque et qui se classent de la facon suivante : facies continentaux, facies lacus- tres, facies saumätres, facies marins. Ces derniers sont très différenciés et se subdivisent en : facies détritique, facies glauconieux et phosphaté, facies zoogène et récifai, facies bathyal, qui sont étudiés étage par élage. Deux cartes, très claires et nettement établies, permettent de se rendre compte du développement de ces divers facies : l’une indique la distribution du facies urgonien dans l’Europe et le nord de l'Afrique ; l’autre est une carte des mers euro- péennes à l’époque albienne. Le lecteur peut ainsi se rendre facilement compte de la répartition des mers à ces périodes anciennes et suivre l'auteur dans ses considérations sur les transgressions el régressions marines, ainsi que sur les migrations des faunes et leur répartition dans les provinces géologiques énumérées plus haut, En outre, un tableau d'ensemble complète ces indications, en donnant la succession des zones d'Ammonites dans la Province méditerranéenne (Europe centrale) et dans la Province volgienne (Allemagne du Nord, est de l'Angleterre, Russie). Dans la première de ces provinces, cette succes- sion est la suivante, en remontant la série : 1° Zone à Hoplites Boissieri; 2 zone des Hoplites pexip- tychus et H. Roubandianus\, avec Oxynolticeras (Garnieria) ; 3° zone des Duvalia Emerici et Sayno- ceras verrucosum ; 4° zone des Æopl. (Leopoldia) castellanensis, L. Leopoldi et Hopl. radialus ; 5° zone des Crioceras Duvali; 6° zone des Desmo- ceros Sayni; 1° zone des Parahoplites angulatus ; 8° zone des Pulchellia pulchella et des Holcodiseus Caillaudianus ; 9% zone des Æeteroceras Astier ia- uum, Desm. hemiptychum ; 10° zone des Paraho- plites Deshayesi et Ancyl. Matheroni; 11° zone" des Hoplites furcatus, Oppelia nisus et Phylloceras Guettardi; zone? des Douvilleiceras subonodocos- tatum et Douv. Buxtorfi ; 12° zone des Parahoplites Nolani et Douv. nodosocostatum, Douv. Bigou- reti; 13° zone des Æoplites lardefureatus et Hopl. regalis ; 14° zone des Hoplites dentatus et Acan- thoceras Lyelli ; 15° zone des Schloenbachia (Mor- toniceras) infatum. Les zones 1,2, 3 sont valan- giniennes ; les zones 5, 6, 7 appartiennent à l'Hauterivien ; 8 et 9 sont d'âge barrèmien ; 10 et 11 d'âge aptien ; enfin les zones 12, 13, 14 et 15 appartiennent à l’Albien. La seconde colonne du tableau met en parallèle les zones précédentes avec la succession des zones de Céphalopodes (Ammonites et Bélemnites) dans le nord de l'Allemagne (colonne A), dans la Russie et le nord-ouest de l'Angleterre (colonne B). On peut se rendre bien compte de la succession de toutes ces assises et de leur parallélisme, qui est ainsi établi sur des bases absolument rigoureuses. La deuxième partie du fascicule comprend une Introduction à la partie spéciale de la Monographie, c’est-à-dire à la description des types régionaux du Paléocrétacé. Le premier type est celui du sud- est de la France, qui a fait l’objet des recherches personnelles de l’auteur et qui, par suite, est minu- tieusement étudié, avec toute la précision dési- rable. L'étude de ce type, qui mérite de devenir classique, est d'un très haut intérêt. C'est là que le type bathyal est le mieux caractérisé, méritant de servir de cadre aux concordances à établir entre les différentes régions. Pour la première fois est tentée une unification de la stratigraphie du Crétacé inférieur, basée sur 420 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE des considérations rationnelles, en partant du type bathyal et des subdivisions pouvant y être établies. La description de ce type régional du sud-est de la France est seulement commencée dans le fas- cicule que nous avons sous les yeux, et la plus grande partie du deuxième fascicule doit lui être consacrée. Nous en rendrons compte, lors de son apparition, car son importance ne le cédera en rien à celle du premier. La compétence de l’auteur, bien connue de tous, et les nombreux documents actuellement réunis à l’Institut géologique de l'Université de Grenoble nous sont un sûr garant de l'intérêt que présentera son travail. La magnifique publication à laquelle appartient la monographie que nous venons de résumer, et qui est éditée sur un plan analogue à celui du célèbre ouvrage ayant pour titre Das Tierreicb, consacré au règne animal, — également rédigé par un groupe de spécialistes allemands, anglais et francais, — est un véritable monument dont aucune bibliothèque scientifique ne peut se passer. Il cons- titue, en quelque sorte, le bilan de nos connais- sances géologiques à l’époque actuelle. IV. — LES TEMPS QUATERNAIRES DANS LA RÉGION j DE Monaco. Au nombre des problèmes les plus passionnants dont les géologues se sont occupés en ces dernières années se place, sans contredit, celui des change- ments de la Méditerranée pendant les temps qua- ternaires. Un jour nouveau vient de se faire sur cette importante question par des découvertes sen- sationnelles dont la science est redevable au Prince de Monaco‘. Trois grottes des environs de Men- ton (Grotte du Prince, Grotte des Enfants et Grotte du Cavillon) ont été fouillées sous son intelligente direction, avec l’aide du chanoine de Villeneuve; elles ont livré des documents géologiques, paléonto- logiques, archéologiques et anthropologiques d’une extrême richesse. Ces documents ont permis d’ar- river à d'importantes conclusions et, grâce à eux, nous sommes aujourd'hui en possession de rensei- gnements précis sur la succession des temps qua- ternaires dans la région de Monaco. Malgré les explorations dont ces grottes avaient élé l’objet — et dont les plus importantes ont été effectuées de 1871 à 1895 par M. Emile Rivière, dont le zèle inlassable est au-dessus de tout éloge, — il régnait encore une certaine incertitude sur la chronologie des gisements et sur l'âge des sque- 1 JL, pe ViLLENEUVE. M. Bouze el R. VEnneau : Les grottes de Grimaldi (Baoussé-Roussé). 3 vol. in-4° déjà parus. T. I, fase. 4 : Historique et description, par le chanoine L. de Villeneuve; fase. 2 : Géologie et Paléontologie, par M. Mar- celin Boule. T, I : Anthropologie, par le D'R. Verneau. lettes humains rencontrés. Les fouilles nouvel- lement entreprises, méthodiquement poursuivies, ont apporté la lumière sur les questions contro- versées; aussi méritent-elles la reconnaissance non seulement des préhistoriens, mais encore des géologues, en un mot de tous ceux qu'intéressent les études relatives à la période quaternaire. La luxueuse publication où ces documents ont élé publiés a déjà été présentée aux lecteurs de cette Revue’. Il ne sera question ici que des données géologiques étudiées par M. Marcelin Boule, professeur au Muséum d'Histoire naturelle, données qui nous semblent mériter une analyse spéciale. Les grottes fouillées par le prince de Monaco sont creusées dans des rochers jurassiques qui se développent entre Menton et Vintimille ; elles sont connues sous le nom de Paoussé-Rousséou Roches- Rouges, ou encore, et plus communément, de Grottes de Menton, bien qu'elles soient situées sur le territoire de la commune de Grimaldi (Italie). La plus importante d’entre elles, la grotte dite « du Prince », présente des phénomènes de remplissage extrêmement intéressants, car elle a été exposée aux effets d'un ruissellement superficiel, ayant parfois acquis des caractères torrentiels. Tous les terrains, à l'exception de l’assise la plus élevée, appartiennent au Quaternaire (époque pléistocène). En effet, un foyer supérieur renferme des ossements d'éléphants, d'ours et de hyènes, c’est-à-dire d'animaux qui ontactuellement disparu de nos régions. Ces terrains se divisent en deux groupes, que séparent de grands blocs éboulés et dont l'allure est assez différente : le premier renferme des espèces dénotant un climat chaud, tandis que le second indique un climat froid. Cette constatation de deux faunes chaudes et froides sur la Côte d'Azur était un fait important à reconnaitre, car il est conforme à ce qui a été observé dans les régions septentrionales et centrales du continent européen. À Quelle place doivent occuper ces divers dépôts dans la série quaternaire? Les dépôts inférieurs (couches n° 4 et n° 2, avec foyers subordonnés E et Dj) doivent être classés dans le Pléistocène inférieur et considérés comme synchroniques des couches de Chelles. Quant au Pléistocène moyen et au Pléistocène supérieur, ils sont ici, dit M. Boule, très difficiles à délimiter. Au premier doivent être rapportées les couches désignées par les numéros 4, 3, 6, qui correspondent à une période de grande activité des agents atmosphériques. Par contre, on ne peut affirmer qu'il y ait dans la Grotte du Prince des couches fossilifères appartenant au Pléistocène supérieur. Ces dernières assises sont plus déve- HT HR dog pie + +0 VOTRE 1 Rev. gén. des Sc., numéro du 30 octobre 1908, p. 836. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 424 loppées dans les grottes voisines, où les documents archéologiques et anthropologiques sont également plus nombreux. Le remplissage de la Grotte dite « des Enfants » est également quaternaire, car des ossements de renne ont été trouvés dans les couches tout à fait supérieures. Dans leur ensemble, les couches inférieures sont un peu moins anciennes que celles de la Grotte du Prince, tandis que les couches supérieures sont un peu plus récentes". Enfin, la grotte du Cavillon présente aussi des terrains de remplissage d'âge pléistocène. Les phénomènes de ruissellement n'y ont joué qu'un rôle secondaire, et il s'agit presque exclusivement d’apports humains, de cendres mélangées avec des cailloutis, provenant de la désagrégalion des parois rocheuses. Quant à la faune, il faut noter la présence d’un Eléphant, — qui est probablement l'Eléphantantique, — du Rhi- nocéros de Merck, du Daim de la Somme. Ces observations brièvement résumées, arrivons à la partie du Mémoire qui intéresse plus directe- ment les géologues; elle est consacrée à la Paléogéo- graphie, non seulement de la région avoisinant les grottes explorées, mais encore de toutes les côtes de la Méditerranée. Notre savant confrère recherche les vestiges laissés par les anciens rivages sur la Côte d'Azur, pour les comparer ensuite à ceux qu'ont rencontrés observaleurs en foule d’autres points des régions circum-méditer- ranéennes. En premier lieu, il signale, dans la Grotte du Prince, un encorbellement dù à l'action des vagues, et qui se trouve à l'altitude de 23 mètres. Au- dessous de cet encorbellement, la roche calcaire est perforée par des Lithodomes. Ce sont là les traces les plus anciennes d'une ligne de rivage quaternaire. Cette ligne s’est ensuite abaissée jusqu'à la cote 12 mètres, où elle a édifié les dépôts recouvrant le plancher dela grotte, sur une épaisseur moyenne de 2 mètres. Cetle plage correspond à un stade du mouvement négatif, dont la ligne supérieure de Lithodomes indiquerait un temps d'arrêt antérieur. L'exploration du littoral, à l'est de la Grotte du Prince, à permis de retrouver, en plusieurs points, cette plage émergée, dont la partie supérieure ne dépasse pas 12 mètres d'altitude, et supporte des dépôts subaériens renfermant une faune de Mam- mifères qui appartiennent au Quaternaire inférieur (Hippopotame, Eléphant antique, Rhinocéros de Merck). La plage remonte donc à la mème époque. RL WE D ‘ Dans cette grotte ont été trouvés 4 squelettes humains à trois niveaux différents. Les squelettes des couches infé- rieures différent de ceux des couches supérieures. D'après le Dr Verneau, ils constituent une nouvelle race, de type négroide, qu'il appelle /a race de Grimaldi. | divers une REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, Une conclusion analogue s'applique à d'autres points du pourtour de la Méditerranée, où les faunes et flores terrestres rencontrées dénotent une tem- pérature supérieure à la température actuelle. Ces faits rappelés, l'auteur aborde la recon- stitution de l'histoire géologique des Grottes des Baoussé-Roussé. Elles ont pu commencer à se former, dit-il, dès que, à la fin du Miocène, les phénomènes orogéniques eurent amené les calcaires jurassiques dans la situation qu'ils oceupentaujour- d'hui. Au début du Pliocène, les régions cireum-mé- diterranéennes subirent des mouvements positifs. Lorsque certaines cavités s'ouvraient à l'extérieur, elles étaient débarrassées par les vagues de leurs dépôts de remplissage, et leur dimension devait s'accroitre d'une facon assez sensible. D'autre part, vers la tin de la période, le niveau de la mer devait être moins élevé qu'au début. En résumé, pendant toute la période pliocène, il a dû se produire une série de mouvements de sens contraire, dont on ne peut apprécier que le résultat final. Au début du Quaternaire (Période pléistocène), la Grotte du Prince était baignée par les eaux d'une mer dont le niveau s'est maintenu pendant long- temps à la cote de +25 mètres. Il s’est ensuite abaissé jusqu'à la cote + 12 mètres, et c’est alors que la mer a laissé les dépôts recouvrant directe- ment le plancher de la grotte. Ce mouvement s’est continué et, en se retirant, elle a laissé entre elle et les rochers escarpés du littoral un espace assez vaste pour permettre aux Pachydermes d'y circuler. Comme confirmation de cette manière de voir, on peut faire remarquer qu'une plate-forme sous- marine est bien dessinée en face de Grimaldi, de San-Rémo, de San-Lorenzo, où elle présente de 5 à 6 kilomètres de largeur. Nous devons ajouter encore qu'au droit des grandes vallées actuelles de la Ligurie on observe une topographie sous-marine représentant le prolongement de ces vallées. Il s'agit bien là d'une topographie sub-aérienne, aujourd'hui submergée. : Quelle amplitude assigner au mouvement de retour de la mer qui se produisit ensuite? Tout ce que l’on peut dire, répond l’auteur, c'est que ce mouvement positif — dont la réalité ne saurait être niée, puisque c'est lui qui à ramené la mer dans ses limites actuelles — n'a pas permis à celle-ci de dépasser le seuil général des grottes de Grimaldi, c'est-à-dire l'altitude de 10 mètres environ. Après celte esquisse de l'histoire du liltoral, dans les environs de Monaco, M. Boule passe en revue les diverses observations du même ordre rele- vées par de nombreux savants en d'autres points du pourtour de la Méditerranée. Ce sont d'abord, entre autres localités de la Côte d'Azur, la pointe de Cabuel, près de Monaco, 9" 422 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE où M. Ambayrac' a signalé, à 60 mètres d'altitude, un banc de calcaire jurassique percé de trous de Pholades. Ce sont ensuite, à la presqu'ile Saint- Jean, entre Beaulieu et Villefranche, des sables marins à Strombus mediterraneus et Conus Mer- cati, étudiés par MM. Caziot et Depéret”. En Ligurie, M. Issel* a fait connaître une ligne de perforation de Lithodomes, à 7 mêtres au-dessus du niveau de la mer, aux environs immédiats de la capitale ligure. En Toscane, MM. de Stéphami el Lotti* ont reconnu divers lambeaux de grès quater- naires (panchini), à des altitudes variant de 15 à 25 mètres. Le premier de ces auteurs a récolté des débris d'Ælephas antiquus et de Rhinoceros Merki. Dans l'ile de Capri, près de Naples, Oppenheim" a signalé une brèche calcaire à coquilles marines, située à 40 mètres d'altitude, ainsi que divers niveaux de perforations de Lithodomes. Il en est de même en Calabre, où ont été trouvés, à des altitudes variées, des dépôts marins fossilifères. En Grèce, M. Cayeux"a observé plusieurs niveaux de perforations de Lithodomes sur les falaises cal- caires de la citadelle de Nauplie; les plus élevées se trouvent à 28 mètres environ au-dessus de la mer. En Messénie, M. Négris’ a signalé récemment des vestiges d'anciensrivages, consistant en surfaces d'érosion marine sur les rochers, en cavités de lithophages et en terrasses sur le Pliocène récent et probablement sur le Pléistocène. Autour de l'ile de Chypre, les terrains quater- naires, d'après le regretté Gaudry, forment ur cor- don presque continu. Ces dépôts s'observent soit au niveau de la mer, soit à de faibles altitudes. Le plus souvent, ils s'étendent en stratification dis- cordante au bas des terrasses pliocènes. En Egypte se retrouvent, dans les grands traits, des successions analogues à celles qu'on à déjà observées sur d'autres points du littoral. Dawson” a rencontré des terrasses marines dans la basse vallée du Nil, au Mokkatam et près d'Alexandrie, tandis que le Professeur Zittel à décrit des dépôts coquillers dans la région des pyramides de Gizeh, à 64 mèlres d'altitude. D'après M. Schweinfurth", c'est à la même cote que se remarque la limite supérieure des trous de Lithophages du Mokkatam, et qu'existent, près de Suez, des formations analo- gues auxquelles succédèrent des dépôts plus récents. 1 Bull. Soc. géol. France, 4° s., t. 11, 1902, p. 728. 2 Bull. Soc. géol. France, 4e s., t. 111, 1903, p. 321. 5 Boll. dell Soc. geol. ital., L. 1, 1883. 5 Boll. Comit. geol. d'Ilal., &. VII, 1876, et t, XVI, 1885. 5 Zeitsch. d. Geol. Gellese., t. XLI, 1889, 5 Bull. Soc. géol. de France, 4e s., &. IV, 1904, p, ST. 7 Py. Nécrus : Submersion et régression quaternaire en Grèce. Bull. Soc. géol. France, 4° 8s., t. VII, p. #18. 8 Geolog. Magaz., \ 1, 1884. 9 Zé#itsch. deutsch. geol. Gesell., L. XXXV, p, 716, 1885, En Tunisie, M. Bedé' à décrit les dépôts à Strombus mediterraneus et Mactra Lagilleiti des environs de Sfax, tandis que MM. Flik et Pervin- quière ont étudié les gisements de Monastir et de Sfax *, et que le général de Lamothe a donné pos- térieurement un Mémoire détaillé sur les dépôts pléistocènes de la presqu'île de Monastir. Le même auteur? a publié encore d'importants travaux pour montrer la multiplicité des anciennes lignes de rivages de l'Algérie, et leur connexion avec les terrasses fluviales des grandes vallées. MM. Ramsay et Geikie* ont établi l'existence au Maroc, dans les environs de Tanger, de deux ter- rasses marines et, à la base des sables coquillers de la terrasse inférieure, ils ont recueilli une mo- laire d'Zlephas antiquus. À Gibraltar, Smith, Ramsay et Geikie ont décrit des plages émergées ou des plates-formes d’érosion marine jusqu'à 210 mètres d'altitude. Les îles Baléares en présentent également, et J. Haime”* à recueilli de nombreux mollusques, parmi lesquels le Strombus mediterraneus. Enfin, Hermite‘ a donné quelques détails sur des assises marines quater- naires de Majorque, dont l'altitude, dit-il, ne dé- passe jamais à ou 6 mètres. Toutes ces études confirment bien celles de M. Boule; elles permettent de formuler les conclu- sions suivantes : « 1° Le phénomène de déplacement des rivages pendant les dernières époques géologiques est un phénomène général pour la Méditerranée ; « 2° Depuis le début du Pliocène, il y a eu abaïis- sement progressif des lignes de rivages; « 3° Les dépôts quaternaires sont presque par- tout sensiblement horizontaux et, par suile, postlé- rieurs aux grands mouvements téctoniques; « 4 La plupart des plages quaternaires se rap- portent au Quaternaire inférieur; « 5° Le Pléistocène inférieur correspond à un grand mouvement négatif de la Méditerranée; « 6° Nécessité d'admettre plusieurs grands mou- vements négatifs, au cours des dernières périodes géologiques. » V. — La RÉGION Rugzi-GUMMFLUU (PRÉALPES MÉ- DIANES), SUISSE Entre le lac de Thoune, au Nord, el la vallée de l'Arve (Savoie), au Sud, s'étend une zone monta- eneuse dont la structure est extrêmement compli- quée, et où les phénomènes de charriage se pré- Le CSP SRE ER RE 1 Bull. du Museum d'Hist. nat., 1903, n° 8, p. 422. * Bull. Soc. géol. France, 4e s., t: IV, p. 195, 1904. 5 Bull. Soc. géol, France, 3e s., t. XXVNII, p.257, 1889, # Quart. Journ. Geol, Soc.of London,t.XXXIV,p.514,1878, 6 Bull, Soc. géol. France, 2e s., t. XII, p. 742, 1855. “ Etudes géologiques sur les iles Baléares, Paris, 1879. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 423 —_————————…—…—…—…—…—…—…—…—…——_—_——_—_…_—_———————_—_—_——…——…—…—…—…—…—_—…—.——…—…—_—…—_—…_—…—…—…—…—.—.—._——.——_…—_…—…—…’“……“…NNûNNû0"0û"û0û0—"0û0 sentent avec un développement remarquable. Nous avons exposé dans cette /evue les travaux de M. Lugeon sur la partie savoisienne du massif”. M. Frédéric Jaccard, privat-docent à l'Université de Lausanne, l'un de ses élèves, a entrepris des recherches analogues sur la partie appartenant au territoire suisse. En 1904, il publiait une étude sur la région de la Brèche de la Hornfluh ?. Postérieure- ment, il s'est proposé de compléter ses premières recherches en examinant ce que deviennent les restes de la « Nappe de la Brèche » conservés dans le massif voisin, celui du « Rubli-Gummfluh ». Il a été amené à étudier dans ce massif les rela- tions des digitations de la nappe de la Brèche avec les plis sous-jacents des Préalpes médianes. Les premières hypothèses émises par M. Lugeon ont pu être vérifiées, et les vues synthétiques de ce savant, pouvant sembler prématurées, ont ainsi reçu une éclatante confirmation. La région « Rubli-Gummfluh » s'étend de la chaîne du Mont-d'Or au lac de Thoune. On peut y distinguer les plis de la « Breche de la Hornfluh », analogues à ceux de la Brèche du Chablais », en Savoie, et les plis des « Préalpes médianes », que limitent au Sud la zone du Flysch du Niesen et au Nord-Est la chaîne des Gastlosen-Laitmaire. Au point de vue stratigraphique, cette zone des Préalpes médianes suisses se fait remarquer par un facies spécial du Dogger, le Dogger à Mytilus, tan- dis qu'au point de vue tectonique elle se caracté- rise par l'intensité de ses dislocations. Étudiant en premier lieu les plis de la Brèche Chablais-Hornfluh, l'auteur en a retrouvé les restes entre les chaîinons de la Gummfluh et du Rubli- Rocher-Plat, où ils forment deux plis distincts, puis au Nord-Ouest de ce dernier chaïnon, où le com- plexe de calcaires appartenant à la formation juras- sique est disposé en tête anticlinale déversée au Nord-Ouest et entourée par les couches rouges du Crétacé supérieur. Ces divers plis représentent trois digitations de la même nappe; i/s reposent sur les terrains tertiaires (Flysch). On arrive ainsi à la conclusion que les plis de la Brèche Chablais-Horn- fluh forment une seule et méme nappe de recouvre- ment, qui est plissée sur elle-même, chevauchant sur les terrains des Préalpes médianes. Abordant ensuite l'étude des plis formés par ces derniers terrains, le professeur de Lausanne peut établir que « les chainons de la Gummfluh, de la Dorffluh et du Rubli-Rocher-du-Midi représentent ! J. Réviz . Les grandes nappes de recouvrement des Alpes francaises. Rev. gén. des Se., 15 novembre 1902. ? F. Jaccanp : La région de la Brèche de la Hornfluh. Bull. n° 5 des Laboratoires de Géol., Géogr. phys., Minéralogie et Paléontologie de l'Université de Lausanne, 1904. In. : La région Rubli-Gummfluh (Préalpes médianes) Suisse. Bull. Soc, Vaud, Science Nat., vol. XLII, déc. 1907. d'énormes écailles, de gigantesques lentilles, plus ou moins effilées sur leur bord ». Fréquemment, ces lentilles sont repliées sur elles- mêmes, de manière à former des têtes de pli- faille déversées au Nord-Ouest, et reposant sur les terrains du Flysch. Toutes les lentilles surnagent donc sur des assises tertiaires du Flysch. « Si je ne craigrais de me voir accuser de faire de la littérature, au lieu de science, écrit M. Jaccard, je n'hésiterais pas à comparer ces écailles à des épaves flottant sur une mer dont les vagues seraient composées des terrains du Flysch. » En outre de ces grandes écailles, on peut encore constater la présence de lentilles plus petites, qui s’observent, pressées entre les grandes écailles, ou pincées au milieu du Flysch. « Pour continuer notre comparaison, ajoute l’auteur, ces dernières seraient des épaves flottant entre deux eaux. » Le phénomène d'écailles formées par les terrains des Préalpes médianes et surnageant sur le Flyseh n'est point spécial à la région Rubli-Gummfluh. Les mêmes faits ont été retrouvés dans le massif de la Hornfluh. Enfin, quant aux replis des terrains triasiques de la chaîne du Mont-d'Or, on doit les considérer comme l'homologue de l’écaille « Rocher- du-Midi-Rubli, et non, ainsi que l'ont pensé certains auteurs, comme la continuation de la corniche triasique de la Gummfluh. Comment expliquer ces étranges phénomènes de lamination, puis de plissements des parties lami- nées ? On doit, conclut M. Jaccard, concevoir deux phases de mouvements distincts : celle de la nappe des Préalpes médianes et celle de la nappe Chablais- Hornfluh. Cette dernière serait un pli de seconde poussée et doit être classée parmi les nappes à « racines externes » ; elle aurait joué, à l'égard des Préalpes médianes, le rôle des nappes externes à l'égard des Préalpes internes. Les plis de la deuxième poussée se subdivisent également en deux séries ; ils se sont développés dans les régions profondes des gneiss et dans les régions à facies helvétique. Vint ensuite la contrac- tion finale et les Alpes prirent naissance en relief. En terminant, notre confrère se demande si, comme le pense M. Steinmann, il n’existerait pas dans la région Rubli-Gummfluh une nappe supé- rieure à celles qu'il vient de décrire, nappe qui serait l'homologue de la « Rätische Decke » des Alpes orientales. Il avoue ne pouvoir répondre. Il y à là un nouveau problème à résoudre que, nous l’engageons vivement à élucider. Dans un prochain article, nous terminerons l'a- nalyse des travaux géologiques importants parus depuis notre dernière revue. J. Révil, Président de l'Académie des Sciences Belles-Lettres et Arts de Savoie. 424 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Reymond (Arnold). — Logique et Mathématiques. Essai historique et critique sur le Nombre infini. — 1 vol. de N-218 pages; au Foyer solidariste. Saint- Blaise, près Neuchatel, 4909. La pensée mathématique conserve-t-elle un élément synthétique irréductible, ou bien se réduit-elle à des constantes logiques : tel est le problème philosophique général que M. Keymond a en vue. Mais il a précisé ce problème : c'est, en elfet, en étudiant la nature de l'infini mathématique numérique que la question géné- rale se trouvera résolue. Bien que l'ouvrage de M. Rey- mond ne constitue pas, à proprement parler, une étude historique, les considérations sur l’histoire des Mathé- matiques y occupent une large place. Mais nous ne saurions résumer, dans les limites étroites de ce compte rendu, cette partie du travail de l’auteur, et nous abor- derons immédiatement l'examen critique qu'il nous donne des théories logiques modernes. M. Reymond étudie d’abord les logiques néo-criti- cistes de Renouvier et de M. Evellin, logiques qu'on peut appeler aussi finitistes. D'après ces théoriciens, l'infini et le continu, qui sont donnés en fait, ne sau- raient subsister en droit comme éléments consti- tutifs de la pensée pure. M. Reymond n'accepte pas, et avec raison, les thèses finitistes d’après lesquelles, en bonne logique, l'Analyse infinitésimale constituerait un scandale pour la raison. La confusion qui, d'après notre auteur, vicie le raisonnement de Renouvier pro- vient de ce qu'il ne distingue pas le continu de l'analyse pure du continu donné de l'intuition spatiale. « L'erreur de M. Renouvier, c’est de confondre la question de rigueur qui est propre à la continuité de l'analyse pure avec celle qui caractérise la continuité de l’espace. La logique néo-criticiste est donc impuissante à expli- quer l'élément synthétique qui est propre aux Mathé- matiques. » L'auteur examine ensuite, et c'est la partie principale de son ouvrage, la doctrine logistique. On sait que les logisticiens prétendent opérer la réduction de la pensée mathématique à des éléments purement logiques. Leur thèse est-elle légitime”? M. Reymond pose d'abord le problème suivant : « L'appartenance des êtres numé- riques à leur classe peut-elle être définie dans les mêmes condilions que l'appartenance des êtres non numériques à la classe dont ils font partie? » En par- ticulier, l'expression « tous » a-t-elle le même sens lorsqu'il s’agit d'êtres numériques et d'êtres non numé- riques? S'agit-il d'êtres non numériques (le concept d'homme, par exemple), les êtres, en tant que faisant partie de.la classe considérée, sont tous semblables entre eux, au point de vue du concept; « quant au nombre des éléments, il est essentiellement indéter- miné ». Lorsqu'il s’agit d'une classe de nombres, les éléments, tous différents entre eux, sont liés par une loi de succession, ce qui n'avait pas lieu dans le cas précédent, et «tous» implique ici une virtualité numé- riquement déterminée. Maintenant, il faut examiner si l'on peut définir en fonction des constantes logiques l’ensemble des nombres entiers. La définition nominale des nombres entiers d'après la théorie logistique (Russell) suppose les définitions nominales de zéro et de un. Or, M. Reymond soutient que la Logistique ne fournit pas ces délinitions. \Admettons que la classe nulle existe et qu'elle est représentée par l’ensemble des valeurs de x rendant fausse la fonction propositionnelle #{x). Le zéro arith- ET INDEX métique pourra-t-il être défini par ce moyen? « En tant que faisant partie d’une classe numérique, dit notre auteur, dont tous les termes sont dissemblables, la variable doit tous les parcourir pour que nous puis- sions dire avec certitude : #(x) est toujours fausse. La vérification ne pourrait être faite que si tous les termes étaient donnés. Il faut donc ou bien réaliser ou tout au moins définir le nombre infini,ou bien définir le prin- cipe d'induction avant de tenter une définition arithmé- tique du zéro. Celui-ci ne saurait être considéré indépen- damment des autres termes de la série... » M. Revmond développe des considérations analogues pour le nombre un. Mais nous ne saurions exposer complètement les critiques de notre auteur; qu'il nous suffise d'indiquer sa conclusion sur cé point : la théorie ordinale des nombres entiers implique un indéfinissable étranger à la Logistique, à savoir le principe d’induction. Dans un dernier chapitre, l’auteur examine la théorie de l'infini mathématique et du continu, dans la doc- trine logistique et dansle système de Cantor. Bornons- nous, sur ces difficiles questions, à donner quelques- unes des conclusions auxquelles il aboutit. 11 n'accepte pas, tout d’abord, la théorie de Russell justifiant l’infini numérique par la « compréhension » de son concept, parce que « cette justification renferme l'équivoque signalée sur la portée du mot fous ». En ce qui concerne les nombres transfinis, «le principe de formation, dit M. Reymond, qui nous à permis de créer le premier cardinal transfini aleph, ne peut servir à formuler le second, car ce principe n’est autre que la loi d'induction qui s'épuise dans le premier cardinal transfini. Pour définir une puissance supérieure comme l’est celle du continu, il faudrait qu'un nou- veau principe (une nouvelle loi de succession) inter- vint... ». En résumé, en revenant à la thèse principale de son ouvrage, M. Reymond conclut : ce qui carac- térise l'infini mathématique, c'est une loi de succession impliquant la virtualité et le devenir. « Aussi cherche- rait-on en vain, dans tout le domaine de l'Analyse, une entité fixe et immuable correspondant au nombre infini. » L'auteur a placé la discussion sur le véritable terrain : le terrain de la critique et de l’histoire des sciences, et, bien que nous ne puissions ici aborder l'examen approfondi des thèses qu'il soutient, nous indiquerons cependant cerlains points sur lesquels nous ne serions pas tout à fait d'accord avec lui, où qui, du moins, exigeraient de sa part, nous semble-t-il, de nouveaux développements. M. Reymond présente tout d'abord une thèse (il est vrai qu'il la présente comme hypothétique’, qui dépasse les résultats de la science positive et que la critique ne saurait, par suite, accepter. C'est celle (p. 190) d’après laquelle il espère pouvoir rattacher à une loi de suc- cession (?\ des nombres premiers une définition du continu. Observons seulement que les résultats obtenus actuellement touchant la distribution des nombres premiers consistent dans certaines lois asymptotiques (travaux concernant la fonction Zèta de Riemann, etc.), el nous ne voyons pas comment on peut espérer obte- nir, en se basant sur les travaux auxquels nous faisons allusion, une définition du continu. Ajoutons que la définition que donne Cantor du type © du continu linéaire, définition dans laquelle la notion d'ensemble parfait joue un rôle essentiel, ne nous semble pas suffi- samment examinée par M. Reymond. Insistons encore sur deux points généraux. La Logis- tique et le Cantorisme nous paraissent deux doctrines complètement différentes : unies en fait chez Russell, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 425 elles ne sont pas logiquement solidaires. Les erreurs du Cantorisme ne sauraient retomber sur la Logistique, et réciproquement. Enfin, dans sa conclusion, l'auteur assigne comme but à la Logistique de caractériser les indéfinissables propres à chaque science. Mais, dans le corps de son ouvrage. il critique les bases que la Logis- tique veut donner à l'Arithmétique. Cette contradiction n’est peut-être qu'apparente, mais, après les discus- sions de M. Reymond, on se demande ce qu'il reste à faire pour la Logistique dans le domaine des indéfinis- sables arithmétiques. out n’est pas à rejeter, cependant, dans la théorie logistique et, en suivant M. Peano plutôt que M. Russell, on peut croyons-nous, assigner à la Logi-tique un but positif: l'analyse des éléments grammaticaux et logiques impliqués dans les Mathématiques: mais on doit. bien entendu, renoncer à réduire V'Arithmétique à la Lo- gique (thèse métaphysique de M. Russell. Il faut espérer que M. Revmond, qui vient de faire un bon livre, déve- loppera dans des éludes spéciales les points essentiels de sa théorie. M. Winter. 2° Sciences physiques Claude (Georges), Lauréat de llnstituf. — Air liquide. Oxygène. Azote. Préface de M. d’Arson- VaL. — À vol. in-8° de 399 pages, avec 149 figures. (Prix : 15 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Ce volume est le produit de la transformation de l'ouvrage sur l'Air liquide du même auteur, volume dont nous avons rendu compte. L'Air liquide n'était qu'un livre de vulgarisation, fort agréable à lire d’ailleurs, mais uniquement des- tiné aux gens du monde. Le présent ouvrage est à deux fins; c'est encore un livre de vulgarisation, destiné à répandre les connaissances relatives à la liquéfaction des gaz en général et de l'air en particulier, mais c’est aussi un livre destiné à intéresser les physiciens et les ingénieurs, en leur donnant, dans la mesure du pos- sible, la discussion serrée des méthodes employées, soit par le Professeur von Linde, soit par l’auteur, pour liquéfier l'air et le séparer intégralement en oxygène el azote par des moyens purement physiques. Le livre est partagé en quatre parties d'importance inégale. La première et la plus courte est consacrée à la Tiquéfaction du gaz. C'est la partie élémentaire elle est agrémentée de détails historiques assez nombreux, quiaugmentent très sensiblement le charme et l'intérêt de la lecture. La liquéfaction industrielle de l'air constitue la deuxième partie et la plus longue de l'ouvrage. La partie historique traite de la détente et de l'échangeur de températures de Siemens et relate les efforts des théoriciens et des expérimentateurs qui se sont suc- cédé de Siemens à von Linde. L'auteur décrit ensuite le procédé et l'appareil du professeur de Munich Ici apparait, pour la première fois, la comparaison entre la détente par simple écoulement et la détente avec travail extérieur. Avant d'étudier en détail ces deux modes si différents et de montrer la supériorité de la méthode à laquelle il à attaché son nom, M. Georges Claude fait une petite diversion dans les domaines des états correspondants et de la compressibilité de l'air aux basses températures; puis il revient à son sujet de prédilection, en discutant pendant 63 pages les avan- tases respectifs de la méthode de son concurrent et de la sienne propre. L'histoire des premiers succès et aussi des déboires inévitables de l'inventeur est écrite avec la verve et l’entrain propres à l'auteur. La conservation et les propriétés de l'air liquide sont un prétexte à la description de nombreuses expé- riences; c'est, à proprement parler, la rédaction détaillée d’une conférence sur l'air liquide, avec accom- pagnement des expériences instituées spécialement dans ce but par M. G. Claude. Ce sont 80 pages très intéressantes à lire: La séparation de l’air en ses éléments par voie pure- ment physique est la dernière partie du livre, plus du quart de celui ci. Les lecteurs de la /evue qonrrale des Sciences trouveront naturelle la très grande ana- logie de ces derniers chapitres et de l'étude que nous avons fait paraître sur le même sujet. Chemin faisant, M. Georges Claude a fait une incursion dans le do- maine de la liquéfaction des mélanges de gaz. Enfin, de nombreux détails sur les appareils et les installa- tions de la Société Air Jiqurde donnent satisfaction au desideratum que nous avons formulé dans le compte rendu du précédent livre de M. G. Claude. Le volume se termine par l'annonce d'un volume d'égale importance sur les applications de l'oxygène et de l'azote, qui doit paraître l'année prochaine. le chemin énorme parcouru depuis la première plaquette sur Air liquide est fort bien mis en lumière par M. d'Arsonval dans une spirituelle et très substan- tielle Prefure, dans laquelle il juge, à la fois, le livre, l'œuvre et l'homme; nous souscrivons très volon'iers à son jugement, que nous pouvons résumer en disant que le livre est original et intéressant, l’œuvre féconde et l’auteur profondément sympathique. E. Maruias, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Toulouse, Campbell (Norman Robert), Fellow of Trinity Col- lege, Cambridye. — Modern Electrical Theory. — 4 vol. i1u-8°, de 332 pages. University Press. Cam- bridge, 1908. Depuis que les théories modernes de l’'Electricité ont pris l'extension que chacun connaît, bien des physiciens français ont exprimé le regret de ne pas avoir à leur disposition un exposé d'ensemble, à la fois simple et précis, qui leur permit de se renseigner dans leur propre langue sur les conceptions électroniques de la matière, la théorie des ions dans les gaz, etc. Ce regret s'accroît quand nous voyons paraître à l'étranger des livres comme celui-ci, qui, sans avoir de prétention à l'originalité, réalise pour nos voisins ce que nous voudrions pour nous-mêmes. A ceux qui connaissent les admirables Traités de J. J. Thomson, de Drude, de Rutherford, ou les Mé- moires de H.-A. Lorentz, ce livre ne fournira, sans doute, que peu d'indications nouvelles ; il leur per- mettra cependant de systématiser un peu plus des idées encore éparses. Mais il rendra surtout des services à ceux qui, redoutant un appareil mathématique trop compliqué, désirent acquérir une vue d'ensemble des questions théoriques et expérimentales à l’ordre du jour. L'ouvrage se signale, en effet, par sa clarté, la simplicité des moyens mathématiques qu'il utilise, aussi bien que par la richesse des idées. Aucune des notions les plus modernes sur l’éther, l'électron, l'atome, la théorie électromagnétique. n’est passée sous silence, et pourtant l'ouvrage reste abordable pour un bon étudiant. Il est divisé en quatre parties : Dans la première, intitulée : « Le champ électroma- gnétique », sont exposés sommairement les résultats les plus fondamentaux des travaux de Faraday et de Maxwell. Dans la seconde : « La théorie des électrons. Mé- thodes déductives », se trouvent exposées les idées dont l'introduction dans la science est due surtout à H.-A. Lorentz. La théorie électronique y est appliquée à l'explication du pouvoir inducteur spécifique et de la dispersion, à la théorie du magnétisme et du diama- gnétisme, à l'effet Zeeman. aux conductibilités élec- trique et thermique des métaux. La troisième partie, intitulée : « La théorie des élec- trons. Méthodes inductives », est un exposé de la ques- tion de l'ionisation des gaz, assurément sommaire, mais où presque aucun point essentiel n’est laissé de côté. La radio-activité y trouve en particulier sa place. Enfin, la quatrième partie : « Electricité et Matière », 426 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX est, en quelque sorte, un essai de synthèse des pro- priétés de la matière, fondé sur les considérations précédentes. L'auteur y étudie la constitution de ‘atome, en s'appuyant en particulier sur les données chimiques el spectroscopiques, et termine par une cri- tique des théories modernes de l’éther. Les lecteurs français seront un peu surpris, en lisant la première partie, du mode d'exposition adopté, qui est tout anglais, et où les tubes de Faraday jouent le plus grand rôle. Ils pourront regretter aussi que le volume restreint de l'ouvrage ne permette pas de bien mettre en lumière certaines difficultés, par exemple celles que soulève la théorie du phénomène de Zeeman. Mais ils seront enchantés de trouver, sous une forme simple el attrayante, un exposé suffisam- ment précis de toute la théorie électrique actuelle. EuGÈène BLocu, Docteur ès sciences, Professeur au Lycée Saint-Louis, Vieweger (H.), Professeur à liInstitut Electro. technique de Mitweida (Saxe). — Recueil de Pro blèmes avec solutions sur l'Electricité et ses applications pratiques. Traduction française par M. G. Caparr, /ngénieur civildes Mines. — 1 vol. in-8° de xvi-312 pages avec 174 fig. et 2 pl. (Prix : 9 fr.\ H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Le meilleur moyen de reconnaitre si l’on a saisi le sens vrai des lois et des formules dans les sciences exactes, c’est d'en faire aussitôt l'application numérique à des cas pratiques. Nombreux sont les recueils de pro- blèmes pour les différentes branches des Mathéma- tiques; pour l'Electricité, ce genre d'ouvrages faisait défaut. M. Vieweger a donc été bien inspiré en publiant un recueil de 336 problèmes se rapportant aux lois fondamentales de l'Electricité, à la dynamo à courant continu et aux courants alternatifs; ce livre sera un complément utile aux nombreux ouvrages d’'Electro- ÉRDIQUe dont la plupart avaient laissé ce point dans ombre. Charabot (E.), Locteur Conseil supérieur de l'Enseignement technique, et Gatin (C.-L.), Docteur ès Sciences, Préparateur à la Faculté des Sciences de Paris. — Le Parfum chez la Plante. — 1 vol. de 404 pages de l'Ency- clopédie scientifique, publiée sous la direction du D" Toulcuse, avec A figures dans le texte (Prix : 5 {r.) O. Doin, éditeur. Paris, 1909. Les auteurs ont étudié, dans cet ouvrage, l'un des problèmes les plus importants et les plus ardus de la Biologie végétale : l'un des plus ardus, étant donnée la difficulté de doser et de suivre dans les plantes une substance aussi complexe que le parfum; l’un des plus importants, par suite du développement croissant du commerce des parfums naturels, puisque, jusqu'à pré- sent, l’industrie des matières odorantes synthétiques et artificielles n'a pu rivaliser, pour la finesse du par- fum, avec les produits naturels. MM. Charabot et Gatin étaient, d’ailleurs, parfaite- ment désignés pour mettre cette question au point : le premier, par les recherches d'ordre chimique ou industriel qu'il avait effectuées, seul ou en collabora- tion ; le second, par ses études plus spécialement bio- logiques ou agronomiques. Aussi n’avons-nous nulle réserve à faire sur le fond, ni sur la forme de leur ouvrage, qui nous parait conçu et rédigé dans un esprit excellent. Après avoir rappelé les notions générales indispen- sables sur les produits odorants des végétaux : carac- tères, extraction, composition, influence du milieu sur la composition des huiles essentielles, les auteurs étu- dient la distribution de ces dernières substances dans le règne végétal. Ils envisagent, au point de vue des productions odorantes, l'ensemble des représentants du monde des plantes, Ce chapitre comprend un tableau, par familles, des plantes ayant fourni des essences, et Sciences, Membre du un tableau dans lequel sont indiqués, pour chacun des principes odorants et par famille, les végétaux qui élaborent ces principes. Ces données conduisent à examiner, dans ses rapports avec l'anatomie et la clas- sification, la nature des corps énumérés. Serrant de plus près la question, les auteurs exami- nent ensuite la distribution des composés odorants dans la plante, étudiant successivement les méthodes de recherche microchimique etles appareils secréteurs, pour arriver à la question de la distribution de l’appa- reil secréteur dans les divers groupes de végétaux. La matière odorante, sa distribution dans la nature d'abord, chez l'individu végétal ensuite, étant connues, le lecteur rencontrera logiquement l'exposé de nos connaissances actuelles sur la formation et la circula- tion des produits odorants. Ces produits sont suivis dans les diverses phases de leur évolution. Enfin, vient le rôle physiologique des matières odo- rantes. Loin d'indiquer, comme la plupart des Traités de Physiologie végétale, que ces matières sont des dé- chets dont la plante ne saurait faire aucun emploi, les auteurs rappellent les diverses recherches qui mon- trent que ces substances sont susceptibles d’être uti- lisées par la plante, en particulier lorsque celle-ci, placée à l'abri de la lumière, n’assimile plus avec la même puissance l'acide carbonique de l’air. Elles par- ticipent normalement au travail de la fécondation et de la formation des graines, au cours duquel elles sont partiellement consommées. Tous les chapitres sont suivis de résumés ou de con- clusions qui concrètent d’une façon plus tangible les principaux points acquis et permettent au lecteur de les retenir plus facilement. Des index bibliographi- que, botanique et chimique facilitent les recherches. Le volume de MM. Charabot et Gatin constitue, en grande partie, un travail original; c’est là une observa- tion suffisante pour montrer tout l'intérêt de cet ou- vrage, dont on ne trouve nulle part l'équivalent et qui intéresse, d’une facon générale, les chimistes et les botanistes, et, d'une facon particulière, les techniciens s’occupant de parfums. Ce nouveau livre indique en outre la voie féconde dans laquelle doivent s'engager les chercheurs aspirant à faire profiter l’industrie des progrès incessants de la Science, car il conduit à un certain nombre de conclusions d'ordre pratique dont pourront faire leur profit les producteurs de parfums naturels. A. HÉBERT. 3° Sciences naturelles Delgado (J.-F. Nery), Membre de l'Académie royale des Sciences de Lisbonne, Président de la Commis-. sion du Service géologique. — Système silurique du Portugal. Etude de Stratigraphie paléontolo- gique. — 1 vol. in-4, de 247 pages avec 8 planches (cartes et coupes géologiques). Commission du Ser- vice géologique du Portugal. Lisbonne, 1908. On sait que M. Delgado, enlevé récemment à la science, s'était voué depuis longtemps à l'étude des terrains paléozoïques du Portugal, au sujet desquels il a publié plusieurs Mémoires; celui que nous analysons au- jourd'hui résume toutes ses observations sur le sys- tème silurique. C’est essentiellement un ouvrage des- criptil, dans lequel l'auteur envisage successivement les divers affleurements contenus dans les bassins du Douro, du Mondego, du Tage et du Guadiana. D'ailleurs, cette division géographique du sujet n’est pas arbi- traire, car les dépôts de ces bassins possèdent les caractères pétrographiques et paléontologiques assez différents. Il n’en saurait être autrement, puisque ces caractères sont liés aux mouvements orogéniques sur- venus pendant la formation de ces dépôts. Ainsi, nous voyons que, dans le bassin du Mondégo, où la partie inférieure (ordovicienne) du système est particulière- ment bien représentée, il y eut ensuite une interrup- tion dans la sédimentation, tandis que, dans une par- tie des bassins du Douro et du Guadiana, se déposaient BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 427 alors des couches qui n'ont pas leur équivalent strati- graphique dans les deux autres bassins. Le Silurien se présente actuellement à l'état d'ilots reposant presque toujours en discordance sur des couches plus anciennes; il est évident que ces îlots sont les restes d’une formation très étendue qui à dû couvrir une grande partie du Portugal. L'érosion n'a bien souvent respecté que les quartzites, qui ont un rôle orographique important, car ils forment générale- ment des crêtes élevées et peuvent revendiquer les plus hauts sommets. Dans la Serra de Bussaco, ces quartzites ordoviciens reposent en concordance sur des schistes dont la base est précambrienne ; le Cambrien peut donc être repré- senté ici. Il fait défaut dans tout le reste du Portugal; le Cambrien a été, en effet, une période d'émersion. Pendant le Silurien, la mer a eu des oscillations conti- nuelles qui faisaient varier à tout moment la nature et l'extension des dépôts. Dans l’ensemble, les mou- vements d'affaissement l’'emportent pendant la forma- tion des quartzites à bilobites et des schistes qui leur font suite et qui renferment la faune seconde ; toute- fois, ce mouvement se ralentit vers la fin de cette époque. Localement, au Bussaco, il put même être alors remplacé par un exhaussement dû à des phénomènes volcaniques ; mais au Gothlandien l'affaissement recommença partout. Un autre mouvement d'exhaus- sement se produisit plus tard sur toute l'aire occupée par les dépôts gothlandiens et empêcha définitive- ment l'accumulation des sédiments siluriens. Telles sont quelques conclusions qui se dégagent des observations de M. Delgado. Le détail de ces obser- vations occupe la plus grande partie de l'ouvrage, mais nous ne pouvons évidemment que renvoyer aux des- criptions et aux coupes locales le lecteur désireux d'avoir des renseignements précis sur ce sujet. Chaque chapitre comprend un tableau indiquant la répartition des fossiles signalés. Un autre tableau nous fait con- naître le synchronisme de tous les dépôts siluriens du Portugal. Ajoutons enfin que ces descriptions sont basées sur de nombreuses coupes, occupant quatre planches, et sur quatre cartes géologiques au 1/50.000, consacrées aux quatre bassins principaux. Pour une vue d'ensemble, on pourra se reporter à la carte géo- logique au 1/500.000 publiée en 1899 par MM. Delgado et Choffat. Au total, cet ouvrage est le plus complet qui ait encore été consacré au Silurien du Portugal; aussi rendra-t-il service à tous les géologues qui s'occupent soit de Paléozoïque, soit de géologie régionale. L. PERVINQUIÈRE, Chef des Travaux du Laboratoire de Géologie à la Sorbonne. VWildeman (E. de), Conservateur au Jardin bota- nique de l'Etat, à Bruxelles. — Notices sur des plantes utiles ou intéressantes de la Flore du Congo. — Publication de l'Etat Indépendant du Congo; vol. IT, fase. II. Bruxelles, 1909. Nous avons déjà rendu compte de quelques fas- cicules précédents de la même publication, dont l'auteur est également l'infatigable travailleur qu'est M. de Wildeman. Le présent volume est entièrement consacré aux Apocynées, qui, par leurs nombreux représentants caoutchoutifères, sont, en effet, pratiquement, l’une des familles végétales les plus intéressantes du Congo. La première condition d'une étude sérieuse des plantes à produits utiles d'une contrée est la détermination botanique de ces plantes, sans laquelle aucune clas- sification méthodique des produits n’est possible. M. de Wildeman à naturellement insisté tout particu- lièrement sur le genre Landolphia, dont il cite toutes les espèces actuellement connues, même celles qui ne sont pas représentées au Congo; c'est, en somme, une revision rapide du genre, qui rendra les plus grands services à tous ceux qui s'occupent des caoutchoucs d'Afrique et de Madagascar. M. de Wildeman fait ensuite une étude analogue pour les Carpodinus et les Clitandra, autres producteurs accessoires de la même substance. Plus rapidement examinées, parce que les espèces en sont moins nombreuses et rarement utiles, sont les Picralima, Pleiocarpa, Rauwolfia, Alstonia, Tabernanthe, Gabonia, Strophanthus, Alafia, Baïssea, Oncinotis. Nous disons que ce Mémoire sera utilement consulté par toutes les personnes qui s'intéressent à la si importante question des caoutchoucs; nous compre- nons dans le nombre les auteurs des résumés didac- tiques sur les produits de nos colonies. Ces résumés sont aujourd'hui de plus en plus nombreux ; tous ne sont pas documentés autant qu'il serait désirable, et l'on pourrait même reprocher à quelques-uns de faire reculer la science qu'ils prétendent vulgariser, en citant comme utiles des plantes qu'on sait aujourd’hui sans valeur, ou, par contre, en oubliant des espèces plus ou moins récemment décrites, mais dont l'impor- tance réelle est bien établie. Nos connaissances en Botanique coloniale progressent rapidement; on ne peut aujourd’hui, sans commettre de nombreuses erreurs, exposer l’état de ces questions en se conten- tant de documents qui ne dateraient même que de huit ou dix ans. Les ouvrages de M. de Wildeman, toujours tenus au courant des recherches les plus récentes, ré- digés avec une si parfaite érudition, sont de ceux qui doivent être nécessairement consultés. H. JUMELLE, Professeur à la Faculté des Sciences de Marseille, 4° Sciences médicales Chantemesse et Mosny. — Traité d'Hygiène. Tome VII : Hygiène industrielle, par MM. Leccerc DE PuLuiGny, BouLiN, CourrTois-Surrir, LÉVYy-SIRUGUE, J. CouruonT. — 1 vol. gr. in-8° de 610 pages avec 87 figures. (Prix : 12 fr.) Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1909. La publication du nouveau Traité d'Hygiène, sous la direction de MM. Chantemesse et Mosny, se poursuit régulièrement, par fascicules. Celui que nous avons recu, le septième, est consacré à l'Hygiène industrielle. L'Hygiène industrielle est un domaine très vaste. Au point de vue strictement médical, elle comprend l'étude des maladies professionnelles, plus particulière- ment de celles qui atteignent les ouvriers occupés dans les industries dites insalubres. Mais, que l’industrie soit insalubre ou non, l'hygiène de l'atelier et celle de l'ouvrier font partie intégrante, ne fût-ce qu'à titre prophylactique, de l'hygiène industrielle. C’est précisé- ment à ce point de vue que se sont placés MM. Leclerc de Pulligny et Boulin, en étudiant, dans une série de chapitres, ce qu'ils appellent « l'assainissement du travail », à savoir la propreté et la désinfection des ateliers, leur chauffage et leur ventilation, leur éclai- rage, la lutte contre les poussières, les gaz et les fumées qu'on y trouve, puis l'hygiène corporelle de l’ouvrier, la question de la fatigue et du surmenage, enfin la législation de l'hygiène du travail dans les divers pays. Gette étude, qui se poursuit sur près de 400 pages, occupe la première partie du fascicule. La seconde partie est consacrée à l’Hygiène indus- trielle spéciale. Elle contient une série de chapitres, par MM. Courtois-Suffit et Lévy-Sirugue, sur les mala- dies professionnelles causées par les poussières, sur les maladies professionnelles dans les industries toxiques (plomb, mercure, arsenic, cuivre, zinc, phosphore, tabac, hydrocarbures, etc.), dans les industries à haute température (verreries, fouderies), ou à haute pression (tubistes, scaphandriers). Le volume se ter- mine par un chapitre que M. Courmont consacre aux maladies professionnelles infectantes (ankylostomiase, charbon, tuberculose, morve, syphilis). D' R. Rome, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Avril 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Guichard signale trois transformations des réseaux O0 associés, c'est-à- dire dont les coordonnées satisfont à la même équa- tion de Laplace. — M. A. Denjoy présente ses recherches sur l'intégration de certaines inéqualions fonctionnelles. — M. H. Larose donne une solution du problème de l’armille de Fourier. — M. H. Poincaré étudie au point de vue mathématique la diffraction des ondes hertziennes. — M. H. Deslandres décrit une solution générale du spectrohéliographe, qu'il a réalisée. Son appareil comprend en réalité quatre spectrohélio- graphes différents, groupés autour d’un même collima- teur, d'un même objectif astronomique et d'un même cælostat. On fait mouvoir simultanément la plaque devant la seconde fente et l’image solaire devant la première fente, les deux mouvements étant obtenus par deux bonnes vis et deux moteurs électriques synchrones, analogues à ceux de la télégraphie. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Birkeland a vérifié, par les observations magnétiques provenant des stations polaires internationales en 1882-1883, sa théorie sur l'apparition et le développement des perturbations magnétiques. — M. M. Chanoz a étudié l'action du courant continu sur les chaînes symétriques de disso- lutions aqueuses d’électrolytes n'ayant pas d'ions com- muns; la dissymétrie créée dans la chaîne est com- plexe et donne lieu à la fois à une modification de la concentration globale des ions aux contacts et à des réactions chimiques. — M. E. Goutal à constaté que, lorsqu'on attaque des aciers par du chlorure de cuivre et de potassium très peu acide, à température modérée et dans un courant d'azote, il se produit une perte de carbone sous forme de composés gazeux, comprise entre 0,01 et 0,05 0/,. — M. Grossmann a fait l'ana- lyse des gaz occlus dans les laves des dernières érup- tions de la Montagne-Pelée et du Vésuve. Les premiers contiennent CO® (en moyenne 80 2/1, Az, H et CO; les seconds renferment CO?, O, Az, H (50 c/.), CO et CH#. — M. C. Gerber a reconnu que le bois et la moelle des végétaux sont complètement dépourvus de présure; ce ferment est surtout localisé dans le liber de la tige et de la racine. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Gautrelet considère que la choline joue un rôle capital dans l'organisme ; comme hypotenseur, elle est l’antagoniste de l'adréna- line, et ces deux substances règlent la tension san- guine. — M. M. Arthus présente deux notes sur la séro-anaphylaxie du chien et du lapin; la Æevue consa- crera prochainement un article détaillé à cette ques- tion. — M. Ch. Mantoux montre qu'on peut, dans le traitement de la tuberculose par la tuberculine, admi- nistrer celle-ci par voice intra-dermique. On provoque ainsi des réaclions locales, qui servent de guide pour la conduite du traitement et permettent d'éviter les réactions générales, toujours nuisibles. — M. P. Bon- nier montre que les centres qui règlent les fonctions urinaires et génitales sont situés à la partie inférieure du bulbe et qu'on peut les libérer de certains dérégle- ments par de légères cautérisations des régions anté- rieures de la muqueuse nasale. — M. J. Roussel estime que les montagnes de l'Algérie et de la Tunisie ne sont pas dues, dans leur généralité, à des phénomènes de charriage. L'origine des filons-couches de calamine, blende, galène, oxyde de fer, doit être recherchée dans des phénomènes de glissement. Séance du 19 Avril 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Haag donne une solution simple du problème de la déformation inlini- ment petite des surfaces réglées. — M. E. Vessiot présente ses recherches sur les systèmes différentiels isomorphes. - M. A. Denjoy indique quelques pro- priétés essentielles de la fonction analytique égale au module maximum d’une fonction entière. — M. H.H. Turner à reconnu que la distribution dans l’espace des étoiles à mouvements propres considérables est aussi fréquente par degré carré dans les régions éloignées de la Voie lactée que dans cette région même. — M. A. R. Hinks a déterminé la parallaxe solaire d’après les observations de la planète Eros faites dans plusieurs observatoires en 1900-1901 ; la moyenne des résultats est de 8",806, à 2 ou 3 millièmes de seconde près. — MM. H. Deslandres et L.d’Azambuja montrent que les images de l'hydrogène du Soleil obtenues jusqu'ici étaient le mélange d'images différentes et représentaient, comme l'image K,, du calcium, le mé- lange de couches différentes. Si l’on veut avoir la.couche supérieure seule, il faut isoler seulement le centre même de la raie noire; alors apparaissent les filaments noirs de la couche K,, qui sont les mêmes pour Het Ca. — M. G. E. Hale a étudié les flocculi de l'hydro- gène et y a trouvé d'assez grandes différences, qui ne s'expliquent pas par la théorie de la réfraction anomale de Julius. — M. E. Colin présente une carte au 1/100.000° de l'Imerina Sud, avec courbes de niveau équidistantes de 50 mètres, et décrit les méthodes qu'il a employées pour l’exécuter. 20 SciExcEs PHYSIQUES. — M. Halluitte décrit un orage remarquable qu'il a observé dans les mers du Sud; les éclairs, qui durèrent sans interruption pen- dant cinq heures, avaient la forme de bombes qui éclataient en éclairant le ciel. — M. D. Gernez com- munique des expériences montrant la lenteur extrême de la transformation spontanée de l’iodure jaune de mercure et de l’iodure thalleux rouge dans leur variété dimorphe, aux basses températures où ils sont très instables. — M. H. Pécheux a constaté que les cupro- aluminiums les plus riches en Al sont les plus éloignés, en général, de l'Al dans la série thermo-électrique, exception faite pour l’alliage à 94 o/, d’AI. La résisti- vité des cupro-aluminiums croit avec la teneur en Al. jusqu'à 7,5 °/, et décroît ensuite. — M. Ch. Féry montre que l'emploi d'un récepteur sélectif, dans la mesure de l'énergie rayonnante, déforme les courbes représentatives de l'énergie spectrale et peut déplacer la longueur d'onde du maximum. — M. G. Malftano examine les résultats trouvés par Duclaux dans l’étude des micelles et montre qu'ils ne sont pas contradic- toires avec les siens, mais en constituent des cas par- ticuliers. — M. P. Girard a reconnu que la polarisa- tion de la paroi joue un grand rôle dans la perméabi- lité des membranes aux électrolytes. — MM. A. Kling et P. Roy ont constaté que l’Az total correspondant à la matière albuminoïde du lait est un élément inva- riable, quelque profondément altéré que soit le lait. La détermination de cet élément constitue une bonne méthode de recherche du mouillage. — MM. F. Bordas et F. Touplain ont reconnu que c'est la caséine ou plutôt le caséinate de chaux du lait qui décompose H°02; si cette action ne se produit pas dans le lait bouilli, c'est que là caséine soluble de Duclaux se pré- cipite sur la caséine en suspension, en formant un enduit qui empêche la décomposition de H*0*. 3° SCciENGES NATURELLES. — MM. J: Audrain et R: De: “ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 429 merliac ont observé que deux points symétriques du corps humain ne sont pas forcément au même potentiel dans un organisme sain; ainsi, la main droite est gé- néralement à un potentiel plus élevé que la gauche. — M. A. Thooris à constaté que l’abaissement éner- gique du diaphragme, chez des soldats malingres, à produit une ampliation du haut du thorax et une aug- mentation d'hématose, — MM. E. Doumer et G. Le- moine ont soumis à la d’arsonvalisation certains hypertendus dont le foie était hypertrophié et ont vu le retour de la tension artérielle à la normale s'accom- pagner d'une disparition complète de l'hypertrophie hépatique. — M. Lourdel à reconnu que CO* n’a qu'une faible novicité dans les couveuses artificielles; ce sont les poisons volatils exhalés par les embryons de poulets qui sont surtout toxiques et doivent être éloignés. — M. G. Bonnier a constaté que les abeilles possèdent un sens particulier, un sens de la direction, plus ou moins comparable à celui des pigeons voyageurs, et dont le siège ne paraît pas résider dans les antennes, mais probablement dans les ganglions cérébroides. — M. A. Billard a étudié les Hydroïdes de la collection Lamou- roux et indique la synonymie des espèces de cetauteur. — M. P. Becquerel a soumis des graines à l’action com- binée de la dessiccation, du vide et du refroidissement dans l'air, puis l'hydrogène liquides; il estime qu'il y a eu une suspension totale de la vie pendant ce temps. Ces graines ont ensuite germé comme des graines or- dinaires. — M. J. Charcot adresse, de l’île Déception, des nouvelles de l’'Expédition au pôle Sud. De nom- breuses observations scientifiques ont été faites pendant le séjour à l’île Déception. ACADÉMIE DE MÉDECINE Seance du 13 Avril 1909. M. Ch. Périer présente un Rapport sur un travail du D'Sieur relatif à deux cas de sténose du larynx, traités par la laryngostomie et la dilatation caoutchoutée. La laryngostomie ne doit intervenir qu'après la cessation complète des accidents inflammatoires qui ont été la cause de la sténose du larynx ; il faut ensuite aller len- tement dans la dilatation. — M. Ch. Périer présente un second Rapport sur un travail de MM. Guisez et Delherm relatif au traitement curatif des spasmes à forme grave de l’æsophage. Les auteurs recommandent l’æsophagoscopie pour préciser la nature, le siège et le degré de l'affection. Le premier soin est de pourvoir à l'alimentation en passant une sonde, puis de ramener ensuite l’æsophage à son calibre normal par dilatation de la partie rétrécie et retrait de la partie dilatée. Séance du 20 Avril 1909. MM. Kelsch, Camus et Tanon font ressortir que les réactions revaccinales sont aussi constantes que celles des primo-vaccinations, qu'elles sont spécifiques et préservatrices comme ces dernières, et que, précoces, écourtées, fugitives, frustes enfin, dans leur expression clinique, elles sont exposées à échapper à une observa- tion qui ne demeure pas en éveil pendant les deux ou trois Jours qui suivent l’'inoculation. — M. E. Boinet a observé 11 cas d'abcès du cerveau sur 900 autopsies. L'étude et l'examen comparatif de ces cas montre que cette affection est rare ; elle est souvent un épiphéno- mène d'un état infectieux ou la conséquence du trans- port dans le cerveau des germes infectieux puisés dans les foyers pulmonaires ou pleuraux. Dans d’autres cas, la méningite suppurée à eu une action directe locale sur l'abcès du cerveau. Le diagnostic est difficile ; trop souvent cette affection resie latente ou n’est diagnosti- quée que trop tardivement. Le succès opératoire dépend surtout de la précocité du diagnostic; quand l'inter- veution est hâtive, l’'abcès est bien enkysté par sa membrane limitante ; il n'occupe que les régions tolé- rantes de la substance grise et les centres psycho- moteurs ; à ce moment, le malade est dans les meilleures conditionsopératoires, — M. le D" Brissaudlit un travail sur le régime déchloruré etl'alitement dansletraitement de l’ascite cirrhotique, — M. le D' Babinski présente une étude sur l’anesthésie organique et ses modalités suivant la hauteur que la lésion occupe dans la voie sensitive. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 2% Avril 1909. MM. de Beurmann, Gougerot et Vaucher décri- vent deux formes chroniques de sporotrichose, la spo- rotrichose gommeuse sous-cutanée el la sporotrichose pulmonaire et ganglionnaire, qui ressemblent aux tuberculoses torpides à évolution lente. — M. A. Lé- caillon à constaté que les cellules interstitielles sont encore extrèmement nombreuses dans le testicule de la Taupe au repos; elles n'ont pas toutes la même structure; certaines dégénèrent et disparaissent. — MM. Aug. Lelièvre el Ed. Retterer ont observé dans la fibre musculaire du squelette des Vertébrés : 1° une enveloppe élastique ou sarcolemme; 2° des noyaux entourés d'une mince zone de protoplasma clair; 3° une masse différenciée en un réseau figuré et en hyaloplasma amorphe. — MM. P. Ancel et P. Bouin ont reconnu un parallélisme étroit entre l’évolution du corps jaune et celle de la glande mammaire, la seconde élant conditionnée par la première. — M. C. Fleig critique le procédé de M. Gautrelet pour la recherche des chromogènes du bleu de méthylène dans l'urine. — M. G. Bouet décrit plusieurs trypano- somes nouveaux qu'il a rencontrés dans le sang d’Am- phibiens, Reptiles et Poissons de l'Afrique occidentale française.— MM. Ch. Achard, L. Ramond et Ch. Foix montrent que l’activité des cellules éosinophiles, très faible dans le sang normal, subit des variations de sens divers à l’état morbide. — M. F. Battelli et M'ie L. Stern ont dosé l’uricase (ferment oxydant qui détruit l'acide urique) dans divers tissus animaux. Sa teneur va en décroissant du foie de cheval à celui de mouton, en passant par le rein de bœuf, le foie de chien, le foie de lapin, le rein de cheval et le foie de bœuf. Les tissus humains en sont dépourvus. — MM. Poujol et Delanoë montrent que les sérums des chevaux hyperimmunisés contre la toxine diphtérique, et qui n'ont pas présenté d'accidents au cours du trai- tement, ne possèdent pas de pouvoir fixateur. — MM. M. Doyon et Cl. Gautier ont reconnu que l’éther, à l'inverse du chloroforme, n’augmente pas l’urobiline urinaire. — M. C1. Regaud a constaté que desspirilles parasites habitent normalement les canalicules glan- dulaires de la région peptique, avec prédilection pour les canalicules spéciaux des cellules bordantes, chez le chien et le chat. — MM. L. Bérard et H. Alamar- tine montrent que les parathyroïdes externes sont, chez l'homme, des organes absolument constants ; il y en a deux principales, constantes, et d’autres acces- soires, soit rétro, soit sous-thyroidiennes. — M. E. Hédon décrit la technique qu'il emploie pour l’extir- pation du pancréas chez le chien, en vue de réaliser le diabète sucré. — MM. Ch. Porcher et L. Panisset déerivent la technique, basée sur la réaction d'Ehrlich, qu'ils emploient pour la recherche de l’indol dans les bouillons microbiens; ils ont, par ce moyen, reconnu la présence de l’indol dans les cultures du choléra des poules. — M. H. Piéron confirme que les réactions de l’'Actinia equina sont en rapport avec la désoxygéna- tion progressive du milieu où elle vit. — MM. J. Jar- kowski et L. Rajchman ont constaté que la réaction positive du l'quide céphalo-rachidien semble prédo- miner dans le tabes; les rémissions dans la paralysie générale semblent correspondre à une disparition de la réaction. — M. G. Repaci a extrait de la flore mierobienne de la bouche de l'homme trois vibrions anaérobies, dont deux mobiles et un immobile. — M. L. Blaringhem a étudié la disjonction des carac- tères d'hybrides entre espèces aftines d’orges, dans les générations successives; elle met en évidence les 130 affinités plus ou moins étroites des espèces ou formes croisées, — MM. M. Loeper et M. E. Binet ont re- connu que la quantité d'amylase contenue dans le foie est assez Invariable à l'état normal; les purgatifs l’aug- mentent, ainsi que la pilocarpine et l'adrénaline; l’an- tipyrine la diminue, — MM. W. Mestrezat et E. Gau- joux ont constaté que la perméabilité méningée aux nitrates est pratiquement nulle dans les affections chroniques du système nerveux, moyenne dans les méningites cérébrospinales, exagérée dans la ménin- gite tuberculeuse. —MM, W. Mestrezat et J. Anglada ont observé une polynucléose abondante du liquide céphalo rachidien dans un cas d'urémie convulsive terminée par la mort. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 21 Janvier 1909. M. N. Bohr a déterminé la {ension superficielle de l'eau par la méthode de vibration des jets, proposée par Lord Rayleigh. Il montre d'abord comment la théorie de Lord Rayleigh pour les vibrations infiniment petites du jet d’un liquide non visqueux peut être com- plétée par des corrections pour l'influence des ampli- tudes finies comme pour celle de la viscosité. Dans la partie expérimentale, il montre comment on peut assurer simplement que la pièce de jet employée pour les mesures satisfait aux hypothèses sur lesquelles reposent les développements théoriques. Le résultat final des expériences donne, pour la tension superfi- cielle de l’eau à 129, la valeur de 73,23 dynes par em. — M. H. S. Allen : la fatique photo-électrique du zine. IT, L'auteur conclut de ses recherches que l'activité photo-électrique d'une plaque de zinc diminue de telle façon qu'elle peut être représentée par la somme de deux termes exponentiels. Les constantes de variation sont peu altérées par des changements considérables dans le caractère et l'intensité de l'éclairage employé, quoique la valeur du courant photo-électrique varie considérablement. Le degré auquel la surface est altérée n'est pas beaucoup affecté en employant une lampe à vapeur de mercure au lieu d'une lampe Nernst. — M. R. J. Strutt a éludié /a perle d'hélium par les minéraux radio-actifs. 337 gr. de monazite du Trans- vaal ont été pulvérisés, puis placés dans un flacon où l'on fait le vide. De l'hélium se dégage à une vitesse qui décroit de 261 mm. cubes par jour et par kilog de minéral, au commencement, Jusqu'à 1,14 mm. cube au bout de 33 jours. La quantité totale dégagée est insi- gnifiante par rapport à la quantité contenue, mais elle est bien supérieure à la quantité qui peut être produite par des changements radio-actifs. Séance du 28 Janvier 1909. M. H. E. Armstrong : L'origine des ellets osmotiques. IT : Septa diflérentiels. Il est prouvé que les effets décrits par le Professeur Brown peuvent être expliqués dans les termes de la théorie des conditions des sub- stances en solution, récemment communiquée à la Société par l’auteur. Des substances telles que l'ammo- niac, l'acide acétique, etc., qui existent en solution dans un état faiblement hydrolaté, traverseraient les surfaces hydrolatées des passages intramoléculaires dans la membrane colloïdale, tandis que les substances dissoutes hydrolatées seraient maintenues. L'augmen- tation de la rapidité avec laquelle l’eau pénètre dans quelques cas est attribuable à l'effet que possède la substance diffusante d'élever la tension osmotique dans l'eau à l’intérieur du grain. — M. L. Rogers : Les variations dans la pression et la composition du sang dans le choléra et leur rapport avec le succès de la transfusion saline hypertonique dans le traitement de cette maladie. Le capitaine Mackay a trouvé que le sang des Bengalis contient une proportion plus élevée de sels et une proportion moindre de corpuscules rouges sanguins que le sang des Européens. L'auteur à découvert que la pression du sang chez les natifs est ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES plus basse que chez les Européens d'environ 100 milli- mètres de mercure en moyenne. Les observations pa- thologiques sont que, dans le choléra, la sécrétion énorme de fluide dans l'intestin entraine la partie liquide du sang. Il y a un rapport très défini entre la quantité de fluide sanguin ainsi perdue et la gravité et la mortalité de la maladie. Des injections d'une solu- tion saline normale (0,63 °/, de NaCI) dans les veines ont un effet presque miraculeux, en atténuant les symp- tômes et en redonnant au malade une santé apparente. Cette amélioration est, cependant, seulement passa- gère, et, après quelques heures, les symptômes réappa- raissent et les malades meurent. Il a semblé à l'auteur que si, au lieu d'employer une solution saline normale, il injectait dans les veines une solution hypertonique à 1,35 °/, NaC, il y aurait moins de probabilité pour que la diarrhée reparaisse et que le sang soit encore débar- rassé de ses parties fluides. Le résultat de ce traitement a été extraordinaire, et, tandis qu'auparavant la gué- rison d’un cas de collapsus était une surprise, main- tenant sa non guérison est un désappointement. Dans des cas graves, la proportion de chlorure dans le sang tombe au-dessous de la normale, malgré la grande concentration du sang, par suite de la perte d’eau. Par conséquent, l’auteur emploie quelquefois une solution saline à 1,65 °/,, mais généralement celle à 4,35 °/ suffit, Dans de mauvais cas, la coagulabilité du sang est très grandement réduite, de sorte que maintenant l'auteur ajoute en général 3 grammes de chlorure de calcium à une pinte de solution saline. Le développe- ment de l’urémie dans le stade de réaction du choléra est associé à une pression sanguine relativement basse; certaines mesures pour relever cette pression sont indi- quées, telles que l'administration hypodermique de l'adrénaline et de la digitale, afin de prévenir et de traiter cette très sérieuse complication. — Sir Th. Fraser et M. J. A. Gunn présentent leurs recherches relatives à l'action du venin du Sepedon hæmachates de l'Afrique du Sud. Le venin employé est un extrait des glandes venimeuses séchées du reptile. La dose léthale minimum par injection sous-cutanée et par kilog d'animal est de : 1,2 milligrammes pour la grenouille, 1 milligramme pour le lapin, 1,6 milligrammes pour le rat, (5 milligrammes pour le chat et 3,3 milligrammes pour le pigeon. Ce venin agit d'abord et avec une grande intensité sur la respiration; chez les Mammi- fères et les Oiseaux, la paralysie respiratoire est la cause de la mort; chez la grenouille, c'est l'arrêt gra- duel de la circulation. Le venin a peu d'action sur le sang. Les doses non mortelles provoquent une éléva- tion de température, les doses mortelles un abaisse- ment. —- Mile M. Wheldale communique ses recherches sur les couleurs et les pigments des fleurs, spéciale- ment dans leurs rapports avec la génétique. Les pig- ments des fleurs peuvent être divisés en deux séries : 4° les pigments des plastides, insolubles dans l'eau, dont les deux plus connus sont la carottine et la xan- thine; quand le type d'une espèce contient plus d'un pigment de ce genre, le pouvoir de produire chaque pigment est assimilable à un facteur mendélien; 2° les pigments en solution dans le suc cellulaire et qui sont de deux sortes : les uns rouge pourpre à bleu (antho- cyanine), les autres jaunes (xanthéine). La façon dont ces pigments se comportent dans la génétique est en relation avec leurs réactions chimiques. L'étude de l'Antirrhinum majus montre que, dans la production de l’anthocyanine de ce type, entreut une substance analogue à un glucoside et un facteur rougissant. La perte du glucoside donne lieu à une variété albino, toujours capable de porter le facteur rougissant; la perte du facteur rougissant donne une variété portant des fleurs blanc ivoire, qui se distingue de l’albino et contient le glucoside. Les expériences sur le mème genre montrent que le pigment xanthéique d’une va- riélé jaune est un dérivé du glucoside de la variété blanc ivoire, avec lequel il est hypostatique. — M. Adrian J. Brown : La perméabilite sélective des enveloppes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 431 des graines de Hordeum vulgare. Il a déjà été men- tionné que les enveloppes des graines d'orge agissent comme une membrane semi-perméable exceptionnel- lement parfaite, résistant au passage des acides, des alcalis, des sels, mais non de l'iode. Des expériences déérites, il apparaît que non seulement de forts élec- trolytes, mais aussi le dextrose, le sucre de canne et autres substances non électrolytes sont incapables de traverser la membrane. D'un autre côté, le chlorure et le cyanure de mercure, mais non le nitrate, ni le sul- fate, l'iodure de cadmium, mais non le chlorure ni le sulfate, l'ammoniac, l'acide acétique et plusieurs de ses homologues, l'alcool et l’acétate éthylique sont tous capables de passer dans les graines. Les acides lactique et glycolique traversent les membranes, mais bien moins rapidement que l'acide acétique. La capacité d'absorption d’eau des graines, lorsqu'on les immerge: dans des solutions variées, a été comparée à celle des graines placées dans de l'eau seulement. Une quantité beaucoup moins grande d’eau est absorbée des solutions de substances qui ne pénètrent pas l'enveloppe de la graine, que des solutions contenant des substances qui la pénètrent. Dans le cas de substances qui diffusent rapidement dans le grain, telles que l’ammoniac et l’acétate éthylique, la vitesse à laquelle l’eau passe à l'intérieur est beaucoup plus grande que lorsque le grain est placé dans des solutions de substances qui ne pénètrent pas l'enveloppe, ou dans l’eau seulement. — MM. W. West et G. S. West ont étudié le phyto- plankton d'eau douce anglais, et spécialement le plank- ton à Desmides et la distribution des Desmides an- glais. Les lacs anglais sont relativement plus riches en Algues vertes et plus pauvres en formes bleu-vert que la plupart des lacs continentaux; le large pourcentage des espèces vertes dans les lacs anglais est dù généra- lement à la prépondérance des Desmides. Les aires riches en Desmides correspondent : 1° fréquemment avec les aires de plus grande chute de pluie; 2° presque | toujours avec les affleurements des couches paléozoi- ques anciennes et précambriennes. Séance du 4 Février 1909, M. G. C. Simpson : L’électricité de la pluie et son origine dans les orages avec tonnerre. D'observations faites aux Indes, l’auteur conclut qu'il est très probable que, dans tous les orages avec tonnerre, des courants ascendants dépassant 8 mètres à la seconde se forment; ils sont la source de grandes quantités d’eau, qui ne peuvent tomber à travers l'air ascendant; il en résulte une accumulation d'eau au sommet du courant, où la vitesse verticale est réduite par suite du mouvement latéral de l'air. Cette eau est sous forme de gouttes qui s’accroissent jusqu'à ce qu'elles deviennent assez grandes pour se diviser. Chaque fois qu’une goutte se fragmente, il y a séparation d'électricité, l’eau recevant une charge positive et l’air une quantité correspondante d'ions négatifs. L'air emporte les ions négatifs et laisse derrière lui l’eau positivement chargée. Une masse donnée d'eau peut être fragmentée plusieurs fois avant sa chute, et acquiert ainsi une forte charge positive; quand elle atteint le sol, on l’observe sous’ forme de pluie positivement chargée. Les ions qui: sont entraînés par l'air sont rapidement absor- bés par les particules de nuages, et les nuages se chargent fortement d'électricité négative. Dans ces nuages électrisés, il y a une combinaison rapide des gouttes d’eau sous forme de forte pluie négativement chargée. Une analyse rapide montre que l’ordre de grandeur de la séparation électrique qui accompagne la rupture d'une goutte est suffisant pour rendre compte des effets électriques observés dans les orages les plus violents. — M. W. G. Duffield : Æffet de la pression sur le spectre d'arc. III: Argent. L'auteur a observé le spectre d'arc de l'argent, dans la région À 4.006 à À 4.600, sous des pressions allant jusqu'à 200 atmosphères. Les conclusions sont analogues à celles que lui à déjà fournies l'étude des spectres du fer et du cuivre dans les mêmes conditions. — M. G. G. Stoney a étudié la tension des pellicules métalliques déposées par l'électrolyse. On sait que les pellicules métalliques déposées électrolytiquement sont sujettes à se détacher quand elles atteignent une cerlaine épaisseur. L'auteur montre que ce phénomène s'explique en admettant que le métal est déposé de la solution sous tension. Il à trouvé qu'une mince règle d'acier, recouverte d’un côté de nickel, s'incurve ; de l'épaisseur de la règle, de la quantité de nickel déposée et de la courbure, on calcule que la tension sous laquelle la pellicule a été déposée est de 2.840 kilogs par centimètre carré. Cette tension est indépendante de la température, de la concentra- tion de la solution et de la densité du courant. Quand on chauffe la règle au rouge, la courbure est réduite à la moitié ou au tiers. — M. A. A. C. Swinton à pour- suivi ses recherches sur la conversion du diamant en coke dans un vide élevé par les rayons cathodiques. A a reconnu que cette transformation, si elle met en liberté des gaz, n’en dégage pas d'autres que ceux qu'on trouve généralement comme résidus dans les tubes cathodiques à vide. On n’a observé le dégagement d'aucun gaz rare. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 5 Mars 1909. M. E. Gehreke adresse une Note sur un prisme à interférences à surfaces planes et parallèles, L'inten- sité lumineuse et le pouvoir dissolvant du spectroscope à interférence peuvent être accrus, comme le démon- trent les récentes expériences de M. 0. Baeyer, en dis- posant, au contact des deux surfaces planes, des milieux à exposants de réfraction différents. L'auteur s'en ins- pire pour établir une nouvelle méthode d’accroisse- ment du pouvoir de ce spectroscope. Comme, dans les plaques à surfaces planes et parallèles, une grande partie de la lumière se perd en raison des limites finies de la plaque, précisément pour les angles d'incidence les plus importants dans l'emploi du spectroscope, c'est- à-dire ceux qui diffèrent peu de 90°, l’auteur pro- pose de remplacer ces plaques par un prisme carré, qui, en raison de la réflexion totale, donne lieu au développement de. toutes les combinaisons possibles dans le cas d’une plaque à surfaces planes et parallèles d'une longueur infinie. — MM. J. Franck et W. West- phal ont étudié ies ions gazeux à charge double. Dans un récent Mémoire, M. Townsend ‘ publiait des expé- riences semblant démontrer la production, dans l’ioni- sation due aux rayons X, d'ions positifs chargés de deux quantités élémentaires, les ions négatifs restant toujours simplement chargés. Sous l’action des rayons X, chaque molécule dégagerait deux électrons formant deux ions négatifs, tandis que le résidu positif à charge double se convertirait en ion positif. En raison de l'im- portance de ce fait, les auteurs ont voulu démontrer la présence d'ions à charge double par une voie un peu différente, tout en déterminant les constantes caracté- ristiques de ces derniers. Ces expériences, faites d’après une modification de la méthode de Townsend, font voir que les ions à charge double ne constituent qu'une fraction (environ 9 °/;) du nombre total des ions positifs. D'autre part, la présence d’un petit nombre d'ions à charge supérieure devient probable. Les ions à charge double peuvent être séparés des ions simples par une diffusion fractionnée. Leur mobilité est la même que celle des'ions simples, leur coefficient de diffusion est moitié moindre. Donc e/m est identique pour les deux espèces d'ions, la charge double s’agré- geant une masse double. Voilà qui confirme la loi suivant laquelle la mobilité des ions, indépendante de la nature du noyau primaire, ne serait déterminée que par le gaz contenant. — M. R. Pohl étudie l'occlusion des résidus gazeux dans les tubes à vide et la produc- tion des bulles gazeuses à la surface du verre. Suivant ? Proc. Roy. Soc., mai 1908. 132 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES les expériences récemment faites par A. À. Campbell Swinton, cette occlusion serait due à l’action mécanique des rayons catholiques, ce qui expliquerait la raréfac- tion croissante des tubes à vide en cours d'opération. Tout en confirmant la présence de ces bulles, l’auteur ne partage pas la manière de voir de M. Swinton quant au contenu des bulles et au mécanisme de leur pro- duction. Aussi modifie-t-il l'hypothèse du savant anglais, en attribuant la production des bulles à un processus chimique ayant lieu dans la flamme du chalumeau en présence d'aluminium sur le verre. Les nouvelles expé- riences de M. Swinton, l’auteur le démontre, concordent parfaitement avec cette hypothèse. — M. H. Erfle adresse un Mémoire théorique sur la détermination des distances focales au moyen de l'autocollimation. Il déduit la formule qui, dans cette méthode, représente l'influence de la courbure du miroir. ALFRED (GRADENWITZ. ACADÉÈMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mars et Avril 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Volterra : Sur les équations de l'Electrodynamique. Quelques obser- vations sur les propriétés aptes à individualiser une fonction. — M. E. Bertini : Sur la théorie des modules des formes algébriques. — M. P. Pizzetti : Corps équi- valents en rapport avec l'attraction newtonienne exlé- rieure. Sur la signification géométrique du second ‘paramètre différentiel d’une fonction sur une surface quelconque. — M. L. Tonelli : Sur la série de Diri- chlet. — M. C. Burali-Forti donne une démonstra- tion absolue du théorème de Gauss relatif à l’invaria- bilité de la courbure totale dans la flexion. — M. G-. Sannia : Sur quelques enveloppes de 4? sphères. Doubles systèmes de lignes de la sphère, images d'asymptotiques. — M. G. Fubini : L'influence d’une couche diélectrique dans un champ électromagnétique et l'équation d'Euler des lames sonores. — M. G. Zappa s'occupe de la valeur d'une loi particulière de force centrale; etil démontre que M. Griffin, dans un travail où il établit qu'il existe, en plus de Ja force newto- nienne, une infinité simple de forces capables d'engen- drer une ellipse donnée, arrive, au contraire, à la solution particulière d’un autre problème général. — M. A. Alessio donne une nouvelle méthode permet- tant de déterminer la marche d'une montre avec le télescope zénithal. — M. G. Agamennone signale une particularité remarquée à l'Observatoire géodynamique de Rocca di Papa, près de Rome, dans le séismo- gramme des tremblements de terre calabrais de 1905 et de 1908; cette particularité consiste dans l’appari- tion brusque d'ondes d'une grande lenteur et d'am- pleur croissante au commencement du télésismo- gramme. — Dans une seconde Note, M. Agamennone ajoute quelques considérations sur les mécanismes de propagation des ondes sismiques. 20 ScENCES PHYSIQUES. — M. C. Alessandri lransimet une Note sur le fonctionnement des services météoro- logiques dans les divers Observatoires du Mont-Rose. — M. E. Clerici a perfectionné sa méthode de déter- mination de l'indice de réfraction au microscope, et donne la description des simplifications apportées à cette méthode. — M. G. A. Blanc, qui avait déjà déterminé la quantité de thorium existant dans le sol du jardin de l’Institut de Physique de Rome (gr. 1,45 X 410—5 par gramme de terrain), à poursuivi s recherches sur la quantité de thorium qui se trouve dans un certain nombre de roches de différentes natures et provenances, dans le but d'établir si cet élément doit ètre considéré comme un facteur impor- tant ou négligeable de la radio-activité de la croûte terrestre. Les premières mesures, exécutées par une méthode nouvelle de grande précision, font prévoir que le thorium doit être considéré comme un agent d'une importance égale, sinon supérieure, à celle du radium, dans la radio-activité de la surface terrestre. — Dans une autre Note, M; Blanc donne les premiers résultats de ses déterminations de l’action thermique et de l’action ionisante du thorium inclus dans les roches. — M. V. Chiarini a fait des recherches sur les propriétés particulières que présentent les deux variétés de sélénium, rouge et noire, obtenues par sublimation, pour ce qui regarde leur conductivité et leur facon de se comporter vis-à-vis de la lumière et des ondes électromagnétiques. — M. C. Drago a étudié la variation de la ténacité du fer dans le champ ma- gnétique. — MM. G. Ciamician et P. Silber : Produits de condensation obtenus sous l’action de la lumière. —M. L. Balbiano décrit deux réactions qui permettent d'obtenir les deux séries des composés allyliques et pr'opéniques à-l’aide de l’acétate mercurique. — MM. A. Angeli et V. Castellana : Nouvelles recherches sur les produits aldéhydiques. Nouveau mode de formation de la benzoylphénylhydrazine. Méthôde générale de préparation des acides hydroxamiques en recourant à l'action de l’acide nitreux sur les alcools primaires. — M. V. Zunino s'occupe de l’action de la potasse sur l’épichlorhydrine en présence de phénols mono- valents. — M. L. Cambi donne la description de quelques réactions des nitrodérivés. —MM.F. Bottazzi et N. Scalincei ont poursuivi leurs recherches de Chimie physique sur le cristallin de l'œil; ils étudient l'imbibition de la lentille dans les liquides oculaires et dans les solutions de NaCl. 3° SCIENCES NATURELLES. — — M. A. Serra à étudié les basaltes qui se rencontrent dans les plateaux des alentours de Tiesi (Sardaigne septentrionnale); il donne, en outre, la description d’un minéral de plomb assez rare, la mimétite, qui se trouve dans le gisement cuprifère à Bena de Padru (Ozieri), toujours en Sar- daigne. — M. F. Zambonini démontre l'identité qui existe entre la « belonesite » et la « sellaïte », qui sont des fluorures de magnésium dont la cristallisation présente des différences dues à des conditions spéciales de formation. — M. F. Silvestri continue ses descrip- tions préliminaires de plusieurs Arthropodes, en grande partie de l'Amérique. — M. G. Cuboni et L. Petri ont eu l’occasion d'examiner des rameaux d’un pêcher recouverts d’une altération de nature cryptogamique, produite par une Ærisyphacea; ces rameaux prove- naient de localités différentes où se trouvent des chênes envahis par l’oïdium. Les deux auteurs dou- tent que le parasite du pècher trouve dans celui du chène le moyen de se développer. — M. E. Panta- nelli résume ses observations sur les causes d’une maladie qui a frappé divers ceps de vigne près de Syracuse, et qui, à cause d'un excès d'engrais mal distribué, provoque la chute des fleurs; pour combattre cette maladie, l'auteur conseille d'enlever les feuilles les plus proches des grappes, ou, mieux encore, de recourir à un usage rationnel des engrais chimiques.— MM. Spehl et Desguin se sont proposé de faire le dosage de la quantité de sang qui se trouve, à un moment donné, dans la circulation pulmonaire d'un animal vivant à différentes hauteurs. IIS ont trouvé que cette quantité de sang augmente en allant jusqu'à 3.000 mètres ; soit au niveau de la mer, soit à 3.000 mè- tres, la quete du sang dans les poumons est plus grande dans linspiration que dans l'expiration, la différence entre ces deux quantités s'atténuant avec la hauteur. ErxEsTO Mananr. Le Directeur-Gérant : Louis OLIviEr. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Gassette. _—.._— 20° ANNÉE N° 10 30 MAI 1909 Revue générale D Sciences pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L, OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — Ia repreduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Àevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Julius Thomsen (1826-1909). — La mort de Julius Thomsen a mis en deuil le Danemark, dont il était l’une des gloires, et la science danoise, qui perd en lui son plus illustre représentant. N6 le 16 février 1826, J. Thomsen s’est éteint après quelques jours d’agonie, le 13 février 1909, chargé d'honneurs, d'ans et de gloire. Tout jeune encore, le futur savant avait montré un goût manifeste et de rares qualités pour l'étude de la Chimie; une fois ses examens et son apprentissage terminés, il débuta par des recherches très heureuses de Chimie appliquée, qui l'amenèrent à créer une industrie nouvelle : Ja fabrication de la soude à partir de la cryolithe; ses premières éludes sur ce sujet datent de 1856, et, en 1859, les Xemische Fabriker d'Oresund commencèrent, d’après ses indications, l'exploitation fructueuse de cet important minerai, qui sert actuellement dans quelques grandes fabriques à la préparation du bicarbonate de sodium et de l’alu- mine. Cette exploitation industrielle, dont Thomsen resta longtemps directeur, paya pendant trente ans à l'Etat danois, comme frais de concession, 140.000 fr. par an, et contribua sans doute à donner à l'inventeur la liberté entière de se consacrer exclusivement aux recherches de science pure. Déjà à cette époque, d'ailleurs, Thomsen avait com- mencé sa brillante carrière de savant et de professeur; ‘après avoir été assistant de Chimie au Polytechnikum de 1847 à 1853, puis professeur de Physique et de Chimie dans diverses Ecoles, il fut en 1865 docent provisoire, puis en 1866, et jusqu'en 1901, professeur ordinaire de Chimie à l'Université de Copenhague, où il accomplit presque toute sa carrière et dont il fut recteur à plusieurs reprises. Il avait été nommé, en 1902, directeur du Polytechnikum de Copenhague, dont il fit, en grande partie, les plans, et dont il mit au niveau des exigences modernes les méthodes et moyens d'enseignement. Les recherches de ‘homsen, commencées en 1853, se rapportent principalement à la Thermochimie, dont il a été l’un des fondateurs. Il s’appliquait surtout à mesurer les phénomènes calorifiques qui accom- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. pagnent les réactions chimiques, et, dans cette science, où tout était à créer : méthodes rigoureuses et appa- reils précis, il déploya une ténacité et une ardeur inlassables ; on lui doit en Chimie minérale et en Chimie organique un nombre considérable de déter- minations qui font foi et qu'on a reproduites dans tous les ouvrages classiques (voir par exemple : Brr- THELOT : Thermochimie, données et lois numériques). On lui doit également la perception et l'énoncé de quelques-unes des lois fondamentales qui régissent les phénomènes chimico-calorifiques. C'est à la Thermo- chimie surtout que Thomsen consacra son existence et, parmi les 200 Mémoires qu'il publia aux Berichte, depuis 1853 jusqu'en 1906, il y en a seulement 30 à 35 qui se rapportent à d’autres questions de Chimie. L'ensemble de cette œuvre a été publié une première fois en 1882-1886 à Leipzig dans un recueil célèbre Thermochemische Untersuchungen, qui le fit connaître du monde entier, et qui comprend trois volumes pour la Chimie minérale, et un pour les composés orga- niques. Plus récemment, après avoir abandonné la plupart de ses fonctions, le grand savant rassembla les derniers résultats de ses recherches et publia en 1905 un ouvrage intitulé : Résultats systématiques des recherches thermochimiques. Le grand savant qu'était Thomsen et l'homme de génie qu'était Berthelot devaient fatalement se ren- contrer sur le domaine de la Thermochimie, où tous deux faisaient de si belles expériences et que chacun d'eux considérait, sans doute, comme lui étant exclu- sivement réservé. La rencontre des deux chercheurs ne fut point empreinte de cordialité et les journaux scientifiques ont plus d'une fois enregistré des polé- miques ardentes, au cours desquelles les griefs prirent parfois une expression excessive. Le conflit, qu'il est bien difficile de juger en quelques lignes, dura jusqu'à ces dernières années. On sait que Thomsen avait imaginé, pour la détermination des chaleurs de com- bustion des corps organiques, un appareil ingénieux, mais peu sûr, le « brûleur universel », qu'il maniait avec dextérité, mais dont il était à peu près seul à se servir utilement, tandis que Berthelot avait réalisé dans le même but la bombe calorimétrique, incon- testablement supérieure, de l'avis de tous les spécia- 10 43% CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE listes, comme maniement et sécurité. L'illustre Danois resta fidèle à ses méthodes et à ses idées, mais il est probable que le « brüleur universel » s’est éteint avec lui, et que quelques-uns des résultats obtenus avec cet appareil auront besoin de retouches. Néanmoins,son œuvre reste considérable ; les données numériques, qui sont presque toujours inattaquables, surtout en Chimie minérale, forment un monument expérimental précieux auquel on aura toujours re- cours; et le nom de Thomsen reste inséparable de l'histoire de la Thermochimie, même si, comme le disent les journaux de son pays, ses conceptions théo- riques ont vieilli. Il jouissait en Danemark d'une autorité incontestée et d’une très grande vénéralion; ses collègues danois lui firent fête lors de ses soixante-dix ans et lui remirent en grande pompe une médaille d’or. Le Gou- vernement lui avait accordé les plus hautes distinc- tions honorifiques; il était Grand-Croix du Daneborg depuis 1906 et avait été nommé en 1902 « Conseiller de conférence » (Geheimekonferensraad) avec le titre d'Excellence; il avait été pendant trente-trois ans membre de la Représentation bourgeoise et était membre du Conseil du port de Copenhague. OErstedt lui-même avait été moins honoré que Thomsen, et n'avait pas, comme lui, assisté à l’inauguration de sa propre statue : celle de Thomsen s'élève dans la cour du Polytechnikum, et elle le représente penché sur un bloc de cryolithe. Le grand savant disparu laisse, avec une œuvre glorieuse, la réputation d'un homme sévère, n'aimant point à être contredit, mais d'un caractère sans tache, d’une franchise et d’une justice irréprochables et qui savait être aimable. C'est plus qu'il n’en faut pour assurer à son nom l'immortalité. P. Lemoult, Chargé de Cours à l'Université de Lille $ 2. — Astronomie La précision des observations astrono- miques. — Lorsque l’on jette un regard d'ensemble sur les observations astronomiques, depuis celles des temps les plus reculés jusqu'aux dernières dont s'ho- nore la science moderne, on est véritablement surpris de leur précision, en tenant compte, bien entendu, des moyens et des instruments dont disposait chaque époque. On sait que les premières observations astronomiques dont nous avons la trace ont été faites par les Chinois. L'un de leurs livres, le Chou-Kingq, qui constitue le plus ancien document scientifique précis de l'humanité! nous fait connaître que, 2.000 ans avant notre ère, ils déterminaient leurs saisons, c’est-à-dire la position du Soleil à l'époque des équinoxes et des solstices, au moyen de quatre étoiles que nous avons pu identifier ; or, ces éloiles sont si bien choisies qu'un astronome moderne n'aurait pu faire mieux. Ils avaient également déterminé, 1.100 ans avant notre ère, l'obliquité de l’écliptique sur l'équateur ter- restre, et ils l’avaient trouvée égale à 23°54!; or, cette obliquité, qui varie avec le temps, est aujourd'hui de 23027, et le calcul montre qu'à l’époque de leurs observations elle devait être de 23051! au lieu de 23°54!, La précision de leurs observations relativement à cette mesure fondamentale de l’Astronomie était donc de trois minutes d’arc. Si l'on considère maintenant la durée de la révolu- tion des planètes autour du Soleil, qui est l’une des rares valeurs qui n'ont pas varié depuis l’origine des temps historiques, on trouve que les Hindous avaient évalué la durée de la révolution de Mercure autour du Soleil avec un écart de # dix-millièmes de jour sur la durée que nous connaissons aujourd'hui. Pour Vénus, ‘ LéoroLn DE SAUSSURE L'Astronomie chinoise dans Antiquité, Revue générale des Sciences, 28 février 1907. g ; l'écart par rapport aux mesures actuelles est de 23 dix- millièmes de Jour. Pour Mars, cet écart est de 1 mil- lième de jour. Pour Jupiter, il atteint 1/4 de jour, mais il faut tenir compte de ce que la durée de la révolution de cette planète est de 11 ans, en sorte qu'un même observateur ne pouvait pas voir souvent le retour de cette planète au même point de son orbite; cette remarque s'applique également, et avec plus de raison, à Saturne, dont la révolution a une durée de 29 ans: aussi l'écart pour cette planète atteint-il 6 jours. Si nous passons maintenant aux Grecs anciens, nous trouvons une mesure du méridien terrestre effectuée environ 200 ans avant notre ère par Eratosthène, qui a one que la longueur de ce méridien était de 2.000 stades; or, d'après les recherches de M. Paul ue la valeur du stade en tant que mesure astro- nomique doit être de 157,50, ce qui donne pour le méridien une longueur de 39.690 kilomètres au lieu des 40.000 kilomètres que nous connaissons; la précision est encore ici relativement grande, surtout si l’on tient compte de ce que cette mesure à été effectuée en comptant les pas contenus dans un arc de méridien et en multipliant le nombre ainsi trouvé par la longueur d'un pas. Il y a, d'ailleurs, une remarque générale à faire au sujet des observations des Anciens. Ainsi que l’a signalé, en effet, M. Baillaud, le savant directeur de l'Obser- vatoire de Paris, pr ésident de la Société astrono- mique de France, à qui nous sommes redevables de la plupart des renseignements contenus dans cette Note, les premiers observateurs ont négligé de nous faire con- naître les méthodes suivies pour leurs observations ; ils nous ont transmis des résultats bruts, sans indiquer dans quelles circonstances ils avaient été obtenus, en sorte que nous n'avons pas la possibilité de discuter et de corriger au besoin, à l’aide des découvertes plus récentes de la science, les chiffres qu'ils avaient trouvés. Ce n'est que tout récemment que l'habitude s’est géné- ralisée d'indiquer, en même temps que les résultats des observations, les méthodes employées pour les obtenir, afin d’en permettre la discussion ultérieure. Mème les exemplaires de la Connaissance des Temps, publiés au commencement du xix° siècle, sont muets à cet égard. Les lunettes n'ayant été inventées qu'au commence- ment du xvu* siècle, toutes les observations antérieures ont dû être faites à l'œil nu: or, l'œil peut distinguer un objet d'un tiers de millimètre à un mètre de dis- tance, ce qui correspond à une minute d'arc environ : telle est la mesure de la précision des observations qui ont pu être faites dans toute cette période; cette mesure correspond encore au diamètre d’un crayon ordinaire (7 millimètres) vu à 20 mètres environ de distance. Les instruments les plus employés étaient des cercles divisés et des compas munis d'index, qui permettaient de diriger la ligne de visée sur lé ‘toile observée. L’an- neau de Ptolémée était formé par deux cercles verti- - caux concentriques: le cercle extérieur, de 40 centi- mètres de diamètre environ, élait fixe et gradué; il servait de support à l'anneau intérieur mobile, qui por- tait les deux index de visée. Il y avait également le carré géométrique, qui permettait de faire des opéra- tions d’une facon qui ressemble un peu à celles que l'on effectue maintenant avec une table de logarithmes. Il faut ensuite passer une longue suite de siècles d'ignorance, pendant lesquels l'intelligence humaine paraît avoir sommeillé, pour arriver aux observations de Tycho-Brahé (1546-1601). Cet astronome employait également des instruments en bois; lun d'eux était constitué par un grand anneau de Ptolémée, monté à la partie supérieure d’une sorte de pieu verlical muni de bras horizontaux qui permettaient de le faire tourner à la facon d'un cabestan dans un châssis approprié; l'anneau pouvait ainsi être orienté dans un plan vertical quelconque. Tycho-Brahé Rsuemente onstruire un cercle mural. C'est donc à l'œil nu et à l’aide d'instruments rudi- mentaires qu'il accumula 1 observations d'une préci- mt bn net oo nn CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE sion suffisante pour permettre ensuite à Képler d'en faire la base des recherches qui le conduisirent à la découverte des lois du Système du monde. C’est dans une visite de Képler à Tycho-Brahé qu'il se rendit compte de la haute valeur des observations de cet astronome. À la suite de cette visite, il trouva le moyen, à l’aide de la planète Mars, de reconnaitre les variations de la distance de la Terre au Soleil. Il commenca, en effet, par discuter douze observa- tions d'opposition de Mars par Tycho, ce qui représen- tait des observations échelonnées sur une durée de vingt-quatre années; il considéra le triangle dont la Terre, le Soleil et Mars formaient les trois sommets, et il rechercha les époques où ces trois corps reprenaient des positionsrelatives telles que les triangles successifs formés par eux étaient semblables. La considération de la similitude de ces triangles le conduisit à cette conclusion que le Soleil n’est pas au centre de l'orbite décrite par la Terre. Toutefois, ce n'est pas à ce moment que l'ellipse vint à l'idée de Kepler; il pensait que les planètes ne pouvaient pas décrire d’autres orbites que les circonférences, consi- dérées comme les courbes les plus parfaites; ce n’est que plusieurs années après qu'il songea à l’ellipse, dont les propriétés étaient cependant connues depuis longtemps. On ne peut considérer l'œuvre de Kepler sans être saisi d’admiration ; les moyens de calcul lui faisaient défaut. Par exemple, pour déterminer par le calcul la position d'une planète dans l'intervalle de deux positions observées, en un mot pour faire une interpolation, opération qu'un collégien de nos jours fait en quelques minutes, il lui fallait des journées de travail. Aussi le recueil de ses travaux, qui est une sorte de journal, porte-t-il fréquemment des traces de découragement devant des résultats qui ne répondaïient pas à ses efforts; mais il reprend bientôt après le labeur qui devait le conduire finalement à la décou- verte des lois qui l’ont immortalisé. C'est en 1608, en Hollande, que l'on fit la première combinaison d’une lentille divergente et d’une lentille convergente; à partir de ce moment, les lunettes entrèrent peu à peu dans la pratique astronomique. En 1655, Huyghens perfectionna considérablement les horloges en leur appliquant le pendule. Le vernier fit son apparition en 1631. En 1640, on définit pratiquement l'axe optique de la lunette et l’on commença à faire usage du micromètre, que Rœmer perfectionna en 1672 en lui ajoutant des ressorts pour supprimer l'effet nuisible du jeu de la vis. Rœæmer construisit la première lunette méridienne en 1689. La précision des observations de cette époque peut ètre estimée à 10" d'arc, ce qui correspond au diamètre de notre crayon vu à 170 mètres. Les méthodes et les instruments continuent à se perfectionner; les observations de Lalande atteignent comme limite de précision 1" d'arc, soit notre crayon porté à 1.700 mètres. Au commencement du xix° siècle, des progrès notables se réalisent et, en 1875, la précision atteint 4/2 seconde d'arc, ce qui éloigne notre crayon à 3.400 mètres. 5 Afin d'obtenir le maximum de précision, on s'attache à observer la plus grande symétrie possible dans les instruments et dans les installations. Pour montrer jusqu'à quel point est poussée cette recherche de la symétrie, il suffira de signaler l’une des précautions prises pour l'installation de la lunette méridienne de l'Observatoire de Toulouse. Chacun des tourillons de cette lunette repose sur une pierre de 4.000 kilog. ; ces deux pierres sont placées sur une autre pierre de 8.000 kilog., posée sur un lit de béton qui repose lui- même sur un fond de sable. Or, pour être certain que les deux pierres supportant les tourillons de la lunette sont bien identiques, M. Baillaud, alors directeur de l'Observatoire de Toulouse, fit scier en deux, sous ses yeux, une pierre de 8.000 kilog. Il a néanmoins été constaté que le tourillon ouest de cette lunette s’abaisse 435 à raison de 1/100 de millimètre par an, et que cet abaissement est dù à la descente dans la vallée de la colline sur laquelle est installé l'Observatoire. A mesure que la précision des observations astrono- miques augmente, on est amené à rechercher des causes de perturbation que l'on ne soupconnait pas. Un exemple en a été fourni ces temps derniers, à l'Observatoire de Paris, où l’on cherchait à déterminer la verticale du lieu, opération qui semble très simple ; on vise avec une lunette verticale sur un miroir hori- zontal placé à une certaine profondeur, et, si le rayon lumineux se réfléchit bien sur lui-même, il indique la direction de la verticale. Le miroir horizontal était constitué par un bain de mercure. Or, le résultat obtenu n'était pas satisfaisant: après avoir éliminé toutes les causes d'erreur provenant des instruments, de l'installation, et même de l'échauffement diurne des piliers, il subsistait un écart périodique dont la cause échappait. On découvrit enfin que cet écart était dù à l’action de la Lune, qui produisait des marées appré- ciables dans cette cuvette de mercure de quelques décimètres de diamètre. C’est à la photographie que l’on doit les progrès les plus récents dans la précision des observations, mais les clichés photographiques ont une dimension limitée : leur côté correspond à deux ou trois fois environ le diamètre apparent du Soleil et il en faut 10.000 pour faire la carte du ciel. La juxtaposition de toutes ces épreuves avec la pré- cision désirable est une opération délicate, qui néces- site le concours des instruments ordinaires permettant de prendre des mesures directes d'étoiles. Les travaux auxquels a donné lieu l'établissement de la carte du ciel ont permis d'atteindre une précision égale à 1/10 de seconde d'arc, ce qui équivaut à notre crayon porté cette fois à 17 kilomètres! C’est un résultat dont les astronomes et plus partieu- lièrement les astronomes français ont le droit d'être fiers. G. Devanlay. $S 3. — Art de l'Ingénieur Le prochain Congrès de l'Association in- ternationale pour l'essai des matériaux. — L'Association Internationale pour l Essai des matériaux tiendra, du 7 au 12 septembre 1909, un congrès à Copenhague. Elle y discutera spécialement les questions suivantes: MéÉraux.— Wetallographie. Etat de la question, appli- cation à l'étude des aciers spéciaux et des alliages el aux traitements thermiques (Rapporteurs : MM. Heyn, Guillet, Fry, Howe, Sauveur). Emploi des essais de dureté au moyen d'empreintes de billes et de cônes. Elat de la question (Rappor- teurs : MM. Ludwik, Heyn, Martens, Gessner, Moore, Misagyi). Utilisation des essais au choc. Etat de la question, définition de la résilience, essais au choc par traction, sur barreaux entaillés, comparaison des résullats sta- tiques et dynamiques, comparaison avec les effets de charges dynamiques, essais de grosses pièces (Rappor- teurs : MM. Guillet, Révillon, Breuil, Schüle, Brunner, Léon, Ludwik, Welikhoff, Hôünigsherg). Essais de durée. Etat de la question, application aux fils de cuivre (Rapporteurs : MM. Howard, Schüle, Brunner). Essais de la fonte (Rapporteurs : Sulzer). Influence des températures élevées sur les qualités mécaniques des métaux (Rapporteur : M. Rudeloff). Propriétés magnétiques et électriques des métaux dans leurs relations avec la résistance mécanique (Rapporteurs : MM. Wahn et Grünhut, Weiss, Rasch, Esterline). Substances préservant de la rouille (Rapporteurs : MM. Rudeloff, Vorhees, Camerman, Heyn). MM. Moldenke et 436 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Cahiers des charges, conditions de réception, unifi- cation et divers (Rapporteurs : MM. Belelubsky, Ber- man, Hannover, Gulliver, Weisagyi, Ludwik, Rippel, Guillet, Lewis). CHAUX, CIMENTS, BÉTONS, PIERRES. — /?éton arme. Re- cherches expérimentales, méthodes d'essai, études sur les accidents, influences des efforts alternatifs (Rappor- teurs : MM. Schüle, Rabut, Emperger, Leon, Bresz- towski, Kirsch, Müller, Paulsen). Progrès des méthodes d'essai des chaux et ciments (Rapporteurs : MM. Feret, Berger, Deval, Greil, Gary, Schüle, Blount, Herfeldt). Résistance des ciments à l'eau de mer (Rapporteurs : MM. Baykoff et Czarnomsky). Résistance des pierres aux intempéries et actions mécaniques. (Rapporteurs MM. Hanisch, Seipp, Hirschwald, Leduc, Kirsch, Renezeder). ‘ Chaleur spécifique des matériaux réfractaires aux hautes températures: huiles, caoutchouc, bois, divers. (Rapporteurs MM. Albrecht, Camerman, Breuil, Pinchot). La valeur des rapporteurs, dont le plus grand nom- bre est bien connu des lecteurs de la Revue, est un gage certain de l'intérêt du Congrès. Pour recevoir toutes les publications du Congrès, il suffit de se faire inscrire comme membre de l’Asso- ciation Internationale pour l'Essai des matériaux (co- tisation : 15 francs par an). Cette inscription donne, en outre, le droit de prendre part aux séances et dis- cussions de la Réunion des membres francais et belges de l'Association, séances qui se tiennent tous les mois à Paris, et d'en recevoir les procès-verbaux (150 à 200 pages de texte) ainsi que les communications inter- nationales. Pour prendre part au Congrès, ilfauten outre verser 20 couronnes danoises (26 fr. 70). Les dames seront admises moyennant un versement de 12 cou- ronnes (16 francs). Le Congrès sera ouvert le 7 septembre, en présence du roi de Danemark, par une conférence de M. Lar- sen, sur le développement de l'industrie des ciments en Danemark. Le soir, réception par l'Association des ingénieurs danois ; le lendemain, à l'Hôtel de Ville par le Conseil municipal; visite de Tivoli. Tous les jours de la semaine, séance le matin; après-midi, excursions, notammentà Sckodsborg, Elseneur, Marienlyst, Aalborg, Skagen. Les inscriptions seront closes le 12° juin. Pour tous renseignements s'adresser à M. Messager, 182, rue de Rivoli, membre du Comité directeur de l'Association. $ 4. — Physique La vitesse de propagation des rayons acoustiques à courte longueur d’onde. — Le fait que les oscillations de courant constituant les étin- celles électriques peuvent produire des vibrations acoustiques perceptibles à été démontré pour la pre- mière fois par Oliver Lodge ‘ dans le cas d’une grande batterie de bouteilles de Leyde qui se déchargeait à travers des bobines de self-induction choisies de plus en plus grandes. Suivant les recherches de Duddell?, les arcs vollaiques comportant un circuit vibratoire inséré en dérivation fonctionnent comme source d'ondes acoustiques et de courants alternatifs d'une fréquence allant jusqu'à 50.000. Poulsen ? a réussi, enfin, à faire fonctionner les arcs vollaiques à des fréquences bien plus considérables en émettant des ondes électriques, et probablement acoustiques, d’une périodicité allant jusqu'à trois millions. Dans une thèse inaugurale ré- cemment présentée à l'Université de Berlin, M. E. Dieckmann étudie les rayons acoustiques non amortis, à courte longueur d'onde, émis par l’are de Poulsen; ! Nature (de Londres), t. XXXIX, p. 471, 1888-1889. 2 Llectrician, t. XUV, p. 310, 1900, * Elektrot. Zeitschr., t. XLV, 1906. il mesure des fréquences acoustiques allant jusqu'à 800.000 et il tire parti de la facilité du procédé élec- trique pour déterminer la vitesse de propagation des ondes acoustiques les plus petites. Les rayons acoustiques émis par l'arc de Poulsen étaient projetés par un miroir concave, à l'état de faisceau parallèle, sur un réseau plan;le faisceau ré- fléchi ou diffracté par ce dernier était ensuite con- centré, par un autre miroir concave, sur l’une des ailes du système servant à déterminer la pression acoustique. La fréquence acoustique déterminée par la longueur d'onde électrique, conjointement avec la longueur d'onde acoustique donnée par l'angle de dif- fraction, permettait de calculer la vitesse de propa- gation acoustique. La vitesse de propagation du son au sein du gaz d'éclairage se trouve être constante jusqu'à des fré- quences de 800.000 et jusqu'aux longueurs d’onde les plus petites de 0um,59 et Ouw 43, mesurées au sein du gaz d'éclairage et de l'air respectivement. Grâce à l'absence de tout amortissement, à la liberté des har- moniques supérieurs et à la possibilité de mesurer la fréquence acoustique par voie électrique, l'arc de Poulsen constitue une source acoustique extrêmement utile pour les recherches relatives aux vitesses de pro- pagation aux limites d’audibilité, etc. Les longueurs d'onde acoustiques mesurées par la méthode du réseau, — la vitesse du son (trouvée con- stante) étant donnée, — permettent de déterminer la longueur des ondes électriques. Cette méthode semble égaler par son exactitude les autres méthodes, basées sur les déterminations de capacité et de self-induc- tions, à l'aide d'un conducteur parallèle ou d'un miroir tournant, La décharge d'électricité à partir du charbon incandescent. — Dans leurs investiga- tions sur les phénomènes qui accompagnent le rallu- mage de l'arc à électrodes de charbon, MM. J.-A. Pol- lock et A.-B.-B. Ranclaud ‘ se servaient d’un dispositif comportant des tiges de charbon, disposées à peu près comme dans les lampes à arc, et où la température de l'une pouvait être facilement réglée. Un cylindre de charbon, de 4,05 centimètres de longueur et de 0,5 cen- timètre de diamètre, était chauffé par l'électricité; le circuit comportait un intervalle d'air de trois milli- mètres entre le point central du cylindre chauffé et l'extrémité d’une tige de charbon relativement froide. Les courants traversant ce circuit étaient étudiés pour des températures du cylindre intermédiaires entre 1.100 et 1 8000, et pour des différences de potentiel variables entre les bornes de l'intervalle, jusqu'à forma- tion de l'arc voltaique, alin de constater les conditions du passage de la décharge obscure à la décharge lumi- | mineuse dans le cas du charbon chauffé au sein de l'air à la pression ordinaire. Le flux d'électricité négative partant d’un charbon chauffé dépend de la température de ce dernier, de la différence de potentiel entre les électrodes et de la dis- tance qui les sépare. Aux bas potentiels, ce flux, de l'ordre du milliampère, ne s'accompagne d'aucune lumi- nescence; à mesure que le potentiel s'accroît, on atteint une valeur critique, dépendant de la tempéra- ture et de la distance mutuelle des électrodes, à laquelle s'établit l'arc voltaïque, en même temps que l'intensité de courant saute instantanément de quelques milliampères à plusieurs ampères. Si I'est le flux d'ions négatifs, E le gradient de po- tentiel à la surface anodique et y la longueur du dernier chemin libre des ions au bout duquel ils atteignent la surface anodique, il semble que l'arc commence à s'établir lorsque la valeur de I E y suffit pour porter une partie de la surface anodique à une température à laquelle les jons positifs sont émis en abondance. 1 Phil. Mag., mars 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 437 $ 5. — Botanique agricole L'ivoire végétal ou corrozo. — On sait que l'industrie des boutons utilise des quantités impor- tantes d'un produit nommé corrozo où ivoire végétal, qui nous vient de l'Amérique du Sud. Dans une récente séance de la Société nationale d'Acclimatation, M. H. Courtet a présenté, sur l'origine, le commerce et l'in- dustrie de cette substance, une très intéressante com- munication! dont nous extrayons ce qui suit : Le palmier dont les graines fournissent l'ivoire végétal ou noix de corrozo se rencontre dans les régions équatoriales de l'Amérique du Sud, particu- lièrement dans la république de l'Equateur, en Co- lombie, au Brésil et au Pérou. Son nom scientifique est Phytelephas macrocarpa. I croît surtout dans les vallées, au bord des cours d’eau et dans les endroits humides. Ses fruits sont réunis par groupes et chacun contient quatre graines ayant la grosseur d’un œuf de poule. L'’albumen de ces graines, qui est comestible, est mangeable quandil est jeune ; mais, en vieillissant, il durcit d’une telle facon qu'on peut l'utiliser pour certains articles comme l'ivoire provenant des défenses de l'éléphant. On distingue deux sortes industrielles de corrozo : le corrozo provenant de Guayaquil (Equateur), peu ou pas veiné, qui est le plus estimé, et le corrozo de Cartha- gène (Colombie), veiné d’une façon très visible, et possédant une partie centrale défectueuse beaucoup plus grosse que le Guayaquil, ce qui le rend moins avantageux pour l'industrie des boutons; ce dernier, par contre, convient assez à l'industrie des chapelets, bracelets, colliers, etc. Dans les contrées précitées, et surtout en Equateur, le corrozo ne nécessite d'autre main-d'œuvre que celle qui consiste dans la récolte du fruit; une grande partie de ces fruits restent sur place inutilisés, par suite du manque de voies de communication et de la difficulté des transports. De 1889 à 1906, les exportations de l’'Equateur ont été les suivantes : ANNÉES TONNES VALEUR EN FRANCS PRIX DU KILO ABS. 14-273 4.329.745 0,09 AAT2E EN 16810 .460 0,1% 1899 215507 3.959 0,11 A0 US 21 7.940 0,13 1903 18130 ).525 0,17 A0 217085 .102 0,26 None NE EPr .342 0,30 On voit que, si l'exportation en tonnes parait sta- tionnaire, il n'en est pas de même de la valeur du pro- duit, qui a triplé depuis vingt ans. C’est l'Allemagne qui tient le premier rang dans l'industrie du corrozo; l'Italie joue aussi un rôle impor- tant, et ces deux nations nous font une concurrence acharnée, l'Italie surtout, grâce au bon marché de la main-d'œuvre dont elle dispose. Mais la fabrication française est bien supérieure par le fini de ses produits. Voici le montant de l'importation et de la consomma- tion françaises, en 1905, sous la rubrique générale : noix de corrozo, coques de cocos, calebasses vides et grains durs à tailler : PROVENANCE IMPORTATION CONSOMMATION 4 7 Kilog. kilog. Colombie. 163.621 752.483 Brésil. 435.397 435.397 Equateur . DE 00092250 300.230 Autres pays. . . . . 152.408 82.362 CDIONTES RES 4.224 4.202 1.964.880 1.074.674 On a essayé de substituer à la noix de corrozo, dans l'industrie du bouton, des préparations à base de caséine (lactite, galalithe,.…), mais elles ont été recon- ‘ Bulletin de la Société nationale d'Acelimatation, t. LNI, p.66 et suiv., février 1909. - nues difficiles à travailler et elles coûtent plus cher que le corrozo, On a aussi tenté de glisser dans l’in- dustrie française des noix d’autres palmiers, comme celles de l'Æyphaene tebaica, qui n’a eu aucun succès, et la pomme de Tahiti, qui a donné des résultats très défectueux. Le corrozo semble donc n'avoir pour le moment aucune concurrence à redouter el, pour cette raison, il serait très intéressant de l’introduire dans les colo- nies francaises. La chose ne paraît pas difficile, car presque toutes se trouvent dans des conditions de climat et de sol analogues à celles des pays d’origine. On pourrait introduire le corrozo, non pas comme produit de grande ou de petite culture, mais comme produit de cueillette. Vivant en bosquets, en petits bois, excluant presque toute autre végétation, il serait très bien dans tous les endroits que l’on ne peut cul- tiver et encombrés d’une végétation inutile, soit pal- mière, soit tout autre. Un essai vient d’être fait dans ce sens à Tahiti; il est à souhaiter qu'il se généralise. $ 6. — Physiologie Sur le diabète pancréatique. — Le chien auquel on à enlevé le pancréas devient diabétique: la proportion de sucre augmente considérablement dans le sang ; le sucre passe en abondance dans l'urine. Les physiologistes admettent généralement que la cause de ces accidents doit être recherchée dans la suppression d'une sécrétion interne du pancréas ; la démonstra- tion n’en a toutefois pas été fournie d’une façon rigou- reuse ; aussi publie-t-on de temps en temps le résultat de tentatives nouvelles destinées à fixer ce point. Forschbach a pratiqué récemment la greffe siamoise de deux chiens dont l’un avait subi l’ablation du pan- créas. Les deux animaux étant soudés par le flanc, le diabète du chien dépancréaté aurait été, au dire de cet expérimentateur, atténué ou même supprimé, comme si, grâce au mélange des sangs, une substance fabri- quée chez le chien normal venait, chez le chien opéré, supprimer les effets de l'ablation du pancréas. M. E. Hédon vient de faire des expériences présen- tant une certaine analogie avec celles de Forschbhach". Prenant deux chiens, dont l’un a subi l'ablation du pancréas et manifesté les symptômes d’un diabète typique, et dont l’autre est normal, il pratique la com- munication vasculaire entre eux par réunion croisée des carotides, de telle sorte que les sangs des deux chiens sont constamment mélangés. En opérant ainsi, il a pu constater que, chez le chien sans pancréas, le sucre urinaire tombe de 7°/, à 3 et finalement à2°/,; le chien normal présente, par contre, une glycosurie d’ailleurs moins forte (0,5 à 1 °/, de sucre urinaire). Le sang du chien dépancréaté contient, après quelques heures de circulation mixte, 0,26 °/, de sucre ; le sang de l’autre chien en contient 0,20°/,. Quand on cesse de pratiquer la circulation croisée, la glycosurie remonte très vite chez le dépancréaté, qui continue à vivre avec un diabète aussi intense que dans les con- ditions ordinaires; le chien normal cesse aussitôt d'être glycosurique. M. E. Hédon a encore opéré de la facon suivante : Unissant par les carotides deux chiens, l’un normal, l’autre porteur d'une greffe sous-cutanée de la queue du pancréas, le reste de la glande ayant été enlevé, il constate que l'ablation de cette greffe entraîne l’ap- parition de la glycosurie très rapidement chez les deux chiens; sept heures après l’ablation de la greffe, l'urine du chien normal contenait 0,66°/, de sucre, l'urine du chien dépancréaté en contenait 2,30/,. M. E. Hédon ne présente pas encore d'interprétation des faits observés par lui. Ces faits sont intéressants, toutefois, en eux-mêmes, et aussi parce qu'ils four- nissent un nouvel exemple de l'usage qu'on peut faire de l’ingénieuse méthode des circulations croisées. t C. R. Soc. de Biologie, 1er mai 1909, p. 699-701. 138 A. COTTON — LA PUBLICATION DES ŒUVRES DE PIERRE CURIE LA PUBLICATION DES ŒUVRES DE PIERRE CURIE La Société francaise de Physique vient de pu- blier, réunies en un beau volume’, les OEuvres de Pierre Curie. De tous les hommages qu'on pouvait rendre à un grand savant comme lui, c’est sans doute le seul qui aurait eu son agrément. Si on lui avait dit qu'un jour on publierait ses œuvres com- plètes, il aurait, j'imagine, pensé aussitôt tout sim- plement que la publication de ce livre dispenserait plus tard les travailleurs d’une peine inutile : celle qui consiste à rechercher dans des périodiques variés, peu répandus parfois, tel Mémoire qu'on a besoin de consulter. Mais le livre qui vient de parai- tre n’a pas seulement cette utilité, très réelle. Il s'ouvre par une Préface, écrite par M"° Curie, qui éclaire en quelque sorte le beau portrait placé en frontispice, et qui fait revivre l’homme en même tempsquelesavant. Chez Pierre Curie, lesplushautes qualités de l’un et de l’autre se trouvaient réunies : si ceux qui l'ont connu ont ressenti un chagrin si pro- fond en apprenant sa mort, c'estqu'ils comprenaient bien la double perte que subissait la Science française. Ce n'était pas seulement le physi- cien qui disparaissait au moment où les moyens d'action qui lui avaient été si longtemps trop étroitement mesurés, allaient lui permettre de poursuivre toutes ses découvertes; c'élait un homme dont la haute influence morale s'exerçait de plus en plus profonde, dans un cercle qui s’agrandissait chaque jour. D'où venait cette influence, cet ascendant plutôt? Il venait d’abord de ce que les succès et la gloire qu'il rencontra sans les avoir jamais cherchés étaient dus uni- quement au travail, à ces vingt-cinq années qu'il avait passées au laboratoire, étranger à toute cote- rie, détestant l'intrigue et la réclame, toujours prêt à s'effacer devant ses amis ou même ses rivaux. Mais il y avait, à cet ascendant, une autre raison. M" Curie nous la donne : « De caractère éminemmentdroit, loyal envers lui-même et envers les autres, il s’efforçait en toute circonstance de conformer ses actes à ses opinions. Il était con- vaincu que la conduite qui consiste à être toujours d'accord avec un idéal moral élevé, en écartant tout compromis et toute diplomatie compliquée, est précisément la conduite la plus raisonnable et la plus utile au point de vue social. I] lui a souvent fallu un réel courage pour se maintenir au niveau de cette conception. Toutefois, sa fermeté presque ‘ Œuvres de Pierre Curie, publiées par les soins de la Société française de Physique. 4 vol. gr, in-8° de xxr1- 621 pages, avec de nombreuses figures, un portrait en hélio- gravure et deux planches. Gauthier-Villars. Paris, 1908. intransigeante ne devenait jamais blessante; elle s'alliait, par une association rare, à une grande douceur de caractère; il ne s’y mélait ni âpreté ni amour-propre et tout froissement était ainsi exclu. Ce fonds de douceur, joint à une grande bienveil- lance, lui assurait la sympathie de ceux qui avaient l'occasion de l'approcher et l'affection » de qui- conque « se trouvait souvent en rapport avec lui. » Tous ceux qui lui avaient voué cette respectueuse affection souscrivent à ce jugement ; ils sont très reconnaissants à M®° Curie, comme ils l'ont été déjà à M. Langevin !, d'avoir, en retraçant la vie et les travaux de Curie, bien mis en lumière tous les enseignements qu'on peut en tirer, et de continuer ainsi son action bienfaisante. Les savants qui se sont chargés de préparer et de surveiller l'impression de ce volume d'environ 600 pages se sont acquittés avec grand soin de cette tâche *. On a évité les doubles emplois, classé les Mémoires méthodiquement, corrigé bon nombre d'erreurs d'impression qui avaient échappé lors de la première édition. De plus, le livre renferme des choses peu connues ou même entièrement inédites. Curie ne se pressait pas de publier : il lui impor- tait peu qu'un autre le devançät; il aurait même préféré de beaucoup cela à une publication trop hâtive. Aussi lui est-il arrivé souvent de s'occuper pendant longtemps d'une question, non sans résul- tats intéressants, et de n’en rien faire paraitre. M"° Curie nous donne à ce sujet des-renseigne- ments précieux; elle signale notamment divers essais qui avaient abouti à un résultat négatif, ou bien que Curie n'avait pas poussés assez loin pour | les publier. D'autre part, il lui arrivait souvent, en ce qui concerne les appareils qu'il a imaginés, de se borner à donner aux constructeurs les rensei- gnements qu'il avait recueillis en les étudiant lui- même : la partie de l'ouvrage où on les a rassem- blés, et à laquelle M. Chéneveau, un des collabo- rateurs de Curie, a apporté tous ses soins, peut être considérée comme entièrement nouvelle. 4 LANGEvIN : Revue du Moïs, t. 11, p. 5, juillet 1906. ? L'ouvrage a été préparé sous la direction de MM. Abraham, Secrétaire général de la Société, et P. Langevin. MM. Ché- neveau et Sève ont collaboré à ce travail et se sont chargés de la correction des épreuves. M. Sève me signale une légère faute d'impression qui a subsisté, et que j'indique, bien qu'elle soit trop visible pour être grave : Page 173, il faut lire a et non & dans le second membre des équations 12 et 44. Les courbes de ce Mémoire n'ont pas été reproduites photographiquement, A. COTTON — LA PUBLICATION DES OEUVRES DE PIERRE CURIE 439 Aussi la publication de ce livre rend-elle un très grand service à tous les physiciens, et la lecture attentive doit en être vivement conseillée jeunes chercheurs : Curie se montre toujours sin- gulièrement suggestif, même dans les parties de son œuvre quin'ont pas encore suffisamment attiré l'attention, où il s’agit de questions qui ne sont pas actuellement à la mode. Il y a certainement plu- sieurs de ses Mémoires qui, en étant ainsi, dans ce volume, mis en lumière, pourront produire toutleur effet utile. C'est de cette partie moins connue de l'œuvre de Curie que je voudrais surtout dire quelques mots : je passerai donc plus rapidement sur ceux de ses Mémoires qui sont déjà classiques en quelque sorte. Aussi bien, il est inutile que j'in- siste ici sur les recherches de M. et M"° Curie tou- chant la Radio-activité. Les lecteurs de cette Revue, qui ont lu récemment la très belle étude de M. Debierne‘, savent comment se sontenchaînées ces découvertes surprenantes. Quand on relitensuiteles travaux que Curie a écrits sur ce sujet, pour la plu- part en collaboration, et qui forment près du tiers du volume, on est frappé de la netteté et de la pru- dence à la fois avec lesquelles sont énoncées les con- clusions. Les diverses interprétations possibles, même les plus hardies, ont été pourtant émises dès le début : c'est ainsi que M. et M"° Curie ont envi- sagé l'hypothèse d’une transformation de l'atome dès que l’origine atomique du phénomène eut été établie, avant même la découverte du radium. Mais jamais, par la suite, Curie ne cède à cette tendance qui fait trop souvent attribuer plus d'importance aux faits qui paraissent favorables à une hypothèse particulière. Même quand cette hypothèse semble se montrer à la fois plus séduisante et plus féconde, elle est toujours examinée d’une façon impartiale. Ilest particulièrement intéressant, à ce point de vue, derelire les travaux sur la radio-activité induite, de voir comment Curie, qui avait le premier observé ces phénomènes et montré qu'ils donnent aux physiciens une nouvelle méthode de mesure absolue du temps, se rallie peu à peu à l'hypothèse, émise par Rutherford, de l'émanation du radium, puis apportelui-mêmeunecontribution très importante à l'étude de ces transformations successives, où l’on caractérise, en quelque sorte, une substance par le temps qu'elle met à disparaitre. Un Mémoire de Curie qu'on peut aussi considérer comme classique est sa Thèse de doctorat sur les propriétés magnétiques des corps à diverses tempé- ratures. Malgré tout le temps et toute la peine qu'il avait consacrés à ces expériences particulièrement aux DEBIERNE : L'état actuel de nos connaissances sur la Radio-activité. Revue générale des Sciences, tome XIX, p. 691 et 7130, 15 et 30 sept. 1908. difficiles, Curie disait que ce travail n'était qu'une première investigation; il insiste à chaque instant dans la rédaction sur tout ce qui restait à faire. Depuis que Du Bois, dans son Rapport au Congrès de Physique de 1900, soulignait l'importance du travail de Curie, et aussi montrait à son tour toute l'étendue de ce vaste champ d'investigation, ont paru les recherches théoriques de Langevin sur le diamagnétisme et le paramagnélisme, puis l’en- semble des travaux de Weiss sur les substances ferromagnétiques. Les uns et les autres dérivent directement du travail de Curie. Dans ce Mémoire encore, on remarque le soin avec lequel l’auteur énonce, dans ses conclusions finales, les faits qui lui paraissent bien établis, sans laisser dans l'ombre ceux qui semblent constituer des exceptions. A la fin de son travail, Curie insiste sur le passage graduel qui transforme les substances ferromagné- tiques, lorsque la température s'élève, en substances paramagnétiques; mais, quand il parle des sub- stances diamagnétiques, pour lesquelles il trouve en général un coefficient indépendant de la tempéra- ture, il prend soin de rappeler les changements remarquables que présentent, au contraire, le bis- muth et l’antimoine*. En agissant ainsi, Curie ne se conformait pas seulement à son idéal constant de sincérité; en signalant celles de ses expériences qui devaient être reprises, il traçait la voie pour des progrès futurs. IT Les travaux sur la symétrie et sur les propriétés des cristaux constituent, dès à présent, un ensemble très important. Mais qui sait quelles découvertes aurait pu faire Curie dans ce domaine, auquel il était revenu pendant les dernières années de sa vie? Il aurait, sans doute, en tout cas remis à la mode, par son enseignement et ses recherches, les études de Physique cristalline, qu'il regrettait de voir négligées en France. M" Curie nous fait espérer qu'elle pourra publier un jour le livre qu'il prépa- rait sur la théorie des grandeurs dirigées et ses applications à la Physique cristalline, dont une partie était, au moment de la mort de Curie, com plètement rédigée. Les Mémoires qu'il a publiés dans le Bulletin de la Société Minéralogique et dans le Journal de Phy- sique contiennent déjà, sous une forme concise, quelques-uns des résultats de ses longues réflexions sur ces sujets. Ce qui rend ces résultats particuliè- 1 Il est, je crois, intéressant de rapprocher ces cas, où des corps diamagnétiques (eristallisés) ont des propriétés variant notablement avec la température, des observations si curieuses, oubliées un peu, je crois, de Faraday, sur la variation rapide qu'éprouve, avec la température, le couple subi dans un champ magnétique par un rhomboëdre de spath d'Islande bien pur. à ra Le) rement importants, c'est l'étendue de leur domaine d'application. Le point de vue très élevé où se place Curie fait que ses conclusions peuvent intéresser, non seulement les cristallographes, mais aussi les physiciens, et même les chimistes, comme l’auteur le dit expressément, faisant allusion, je pense, aux conceptions stéréochimiques. Dans les premiers Mémoires, Curie envisage, d'une manière générale, un système, limité ou non, de points, qui ne sont pas nécessairement des points mathématiques, et auxquels on peut attri- buer des propriétés physiques variées. Supposons que cet ensemble de points soit en ordre. On peut se poser d'abord la question de savoir s'il y a dans ce système différentes parties qui sont la répétition les unes des autres : d'où le Mémoire où Curie classe les différents systèmes d’après leurs répétitions; ce classement peut se faire sans qu'on ait à se préoccuper de la nature des qualités dont sont doués les points. « Tout repose sur cette remarque de Bravais : que telle répétition, résultant de tel déplacement indifférent du système, entraîne toute une série d’autres dépla- cements indifférents et de nouvelles répétitions; la nature de ce qui se répète n'intervient pas dans les démonstrations. » Le même système est ensuile envisagé dans un second Mémoire à un second point de vue : cette fois, il faudra prendre garde à la nature des pro- priétés physiques supposées. À côté d'un système donné, on peut en considérer un second jouissant des propriétés suivantes : Chacun de ses points cor- respond à un point du premier, les distances des points correspondants sont les mêmes, toutes les grandeurs sont les mêmes, les dispositions relatives des diverses parties définies avec des repères pris dans le système sont les mêmes, et pourtant les deux systèmes ne sont pas, en général, identiques et ne peuvent se superposer. Ces deux systèmes sont définis complètement avec les mêmes données ana- lytiques par rapport à un ensemble de trois axes rectangulaires, l’un droit, l’autre gauche. Les trans- formations par lesquelles on peut passer d’un sys- tème au système symétrique sont appelées transfor- mations symétriques. Curie démontre que toute transformation symétrique d'un système limité peut être effectuée en prenant l'image du système par rapport à un certain plan, puis en faisant tour- ner cette image d'un certain angle autour d'une normale au plan. Lorsqu'un système est identique à son symé- trique, on dit qu'il est lui-même symétrique. Curie éludie les transformations symétriques « 1ndifé- rentes » qui reproduisent le système, établit leurs relalions avec les axes de répétition et montre qu'à côté des plans de symétrie habituelle, il faut intro- A. COTTON — LA PUBLICATION DES OEUVRES DE PIERRE CURIE duire la notion de plan de symétrie allerne. 1 peut alors donner une classification complète des diffé- rents types de symétrie. Cette classification n’a pas seulement l'intérêt d'être plus complète et plus harmonieuse que celles qui l’avaient précédée : elle offre le grand intérêt que, les points du système que Curie considère étant doués de propriétésphysiques, en particulier de propriétés physiques dirigées, il est ainsi conduit à étudier, au point de vue de la symétrie, les propriétés des divers agents physiques eux-mêmes, à chercher, par exemple, les carac- tères que présente à ce point de vue un milieu non cristallisé où existe un champ électrostatique, un champ magnétique, etc., et à examiner les consé- quences qui en dérivent. Les règles qu'il a données à ce sujet sont telle- ment simples qu'on peut s'étonner qu'elles n'aient pas été formulées plus tôt: il faut êtresurpris davan- tage qu'elles n'aient pas rendu encore, à la fois dans l’enseignement et dans la recherche, les ser- vices que Curie en attendait. Aussi n'est-il pas inutile de rappeler ici ces remarques : « Lorsque certaines causes produisent certains effets, les éléments de symétrie des causes doivent se retrouver dans les effets produits. Lorsque cer- tains effets révèlent une certaine dissymétrie, cette dissymétrie doit se retrouver dans les causes qui leur ont donné naissance. La réciproque de ces deux propositions n’est pas vraie, au moins pratiquement, c'est-à-dire que les effets produits peuvent être plus symétriques que les causes. Certaines causes de dissymétrie peuvent ne pas avoir d'action sur cer- tains phénomènes, ou du moins avoir une action trop faible pour être appréciée, ce qui revient pra- tiquement au même que si l'action n'existait pas » (p. 127). Les premières propositions, ajoutaitCurie(p.141), conduisent à des conclusions fermes, mais néga- tives. « Elles répondent à la proposition incontes- tablement vraie : 77 n’y a pas d'ellels sans causes. Les effets, ce sont les phénomènes qui nécessitent toujours, pour seproduire,une certaine dissymétrie,. Si cette dissymétrie n'existe pas, le phénomène est impossible. Ceci nous empèche souvent de nous égarer à la recherche de phénomènes irréalisables. » Or, il n'est pas difficile de trouver des cas où, même dans des travaux récents, ces remarques si simples ontété méconnues. En veut-on un exemple? On s'est parfois demandé si des poussières en sus- pension dans un liquide où un gaz sont métal- liques ou non. Différents physiciens ont pensé, pour résoudre le problème, à utiliser les propriétés de la réflexion métallique. Mais ils ont alors analysé (avec un quart d'onde et un nicol, par exemple) la lumière renvoyée par le milieu troublé, sans prendre garde que, si le faisceau incident n'est pas polarisé A. COTTON — LA PUBLICATION DES OEUVRES DE PIERRE CURIE rectilignement, on ne peut pas s'attendre à observer une polarisation elliptique de sens déterminé, un rayon elliptique droit, par exemple, plutôt qu'un rayon gauche. Lorsque le faisceau incident est naturel, tout est symétrique par rapport au plan d'incidence. C’est donc parce qu'on oubliait les remarques de Curie que telles recherches faites, par exemple, pour trouver la preuve de l'existence de poussières métalliques dans l'atmosphère du Soleil, ne pouvaient pas du tout donner la réponse cherchée. | Ce ne sont pas seulement des conclusions néga- tives de ce genre que l’on tire des études sur la symétrie. « Elles permettent encore d'énoncer une deuxième sorte de conclusions, celles-ci de nature positive, mais qui n’offrent pas la même certitude dans les résultats. Elles correspondent à la propo- sition incontestablement vraie : 7/7 m'est pas de causes sans effets. Les effets, ce sont les phéno- mèênes qui peuvent naître dans un milieu possé- dant une certaine dissymétrie : on a là des indica- tions précieuses pour la découverte de nouveaux phénomènes; mais les prévisions ne sont pas des prévisions précises comme celles de la Thermody- namique. On n’a aucune idée de l’ordre de gran- deur des phénomènes prévus; on n’a même qu'une idée imparfaite de leur nature exacte. Cette dernière remarque montre qu'il faut se garder de tirer une conclusion absolue d’une expérience négative. » De ces phénomènes nouveaux, que l’on peut être conduit à rechercher par cette voie, il en est sur lesquels Curie a lui-même attiré l'attention. Je citerai notamment ses essais sur la conductibilité magnétique et le magnétisme libre (p. 143); ses projets d'expériences sur la séparation des mé- langes inactifs par compensation à l'aide de champs électrique et magnétique associés. Nous avons appris récemment", par M. Ch.-E. Guye, qui a entrepris précisément des expériences sur ce sujet, que Curie n'avait pas renoncé à ses projets. Pour d’autres expériences, suggérées de la même manière, nous ne savons pas s'il avait réfléchi à leur réalisation : par exemple, s’il a recherché la polarisation électrique d'un corps doué du pouvoir rotatoire placé dans un champ magnétique, ou encore la polarisation magnétique du mème corps placé dans un champ électrostatique (p. 136). Ce qui prouve bien que de telles suggestions pourront un jour se montrer fécondes, c'est le beau travail dans lequel, avec son frère Jacques Curie, il A Te, ! C.-E. Guve : Journal de Chimie physique, février 1909. Dans le même numéro, j'ai, de mon côté, l'occasion, en rapportant des essais faits pour effectuer cette séparation avec la lumière polarisée cireulairement, de signaler un autre cas où le travail de Curie avait passé inapereu, alors - qu'il aurait abrégé considérablement de longues recherches. on a découvert et étudié les phénomènes piézoélec- triques. Me Curie nous apprend, en effet, que, bien qu'elles n'aient été publiées que beaucoup plus tard, les réflexions sur la symétrie avaient précédé en fait cette découverte, et qu'elles avaient indiqué, a priori, aux deux jeunes physiciens dans quels cristaux hémièdres on peut rechercher une élec- trisation provoquée par des actions mécaniques. Dans tous ces cristaux, qui comprennent non seule- ment les cristaux pyroélectriques, mais d’autres encore comme le quartz, la blende, ete., le phéno- mène prévu a, en effet, été observé et étudié métho- diquement. D'abord, les observations qualitatives mettent en évidence, dans tous les corps étudiés, une relation simple entre la forme cristalline et le signe des charges développées : l'extrémité pointue du cristal que l'électricité posi- tive apparait par compression, comme si, dans l'hypothèse admise par Curie (p. 19) de la polarisa- lion des molécules, le signe des charges de celles-ci était en relation avec leur forme. D'autre part, les mesures quantitatives sur le quartz et la tourmaline permettent d'établir avec rigueur les lois numé- riques du phénomène, de le mesurer en valeur absolue, de fournir aux physiciens un nouvel instrument précieux : le quartz piézoélectrique. Enfin le phénomène inverse, la déformation élec- trique du quartz, prévu par M. Lippmann, en par- tant des principes de la conservation de l'énergie et de l'électricité, est à son tour mis en évidence par des expériences particulièrement ingénieuses : lui aussi est soumis à des mesures, lui aussi est utilisé à la construction d’un instrument nouveau : un électromètre à bilame de quartz. On voit par là combien on doit regretter que la mort de Curie l'ait empêché de poursuivre ces recherches sur les cristaux auxquelles il n'avait cessé de penser. Les projets de Curie, dans cette direction, élaient nombreux : il avaiten vue, notamment, des recher- ches sur l'absorption de la lumière dans les cristaux et sa variation avec la température, des recherches sur la conductibilité, pour lesquelles il avait indiqué lui-même l'emploi possible de méthodes nouvelles, inspirées par l'étude du phénomène de Hall, ete. Une question au sujet de laquelle il avait déjà poursuivi des expériences est celle de l’accroisse- ment des cristaux et de l'étendue de leurs diverses faces. Les lois de la Cristallographie régissent, c'est toujours" sur ‘ Je ne sais si on a fait depuis de nouvelles vérifications de cette relation remarquable. Il serait intéressant d'étu- dier à ce point de vue les beaux cristaux de silicomolyh- dates et de silicotungstates signa'és par M. Copaux et qui ressemblent tant au quartz. (Voir Annales de Ch. et de Ph., tome VII, 1906, et Comptes Rendus, mars 1909.) 142 A. COTTON — LA PUBLICATION comme on sait, l'orientation de ces faces, mais ne nous disent rien sur leur importance relative, alors que les observations montrent immédiatement que les diverses faces sont très inégalement développées. Dans une Note à la Société Minéralogique (repro- duite p. 153), Curie montre qu’en laissant de côté des effets tout à fait minimes, dus par exemple à la pesanteur, la forme la plus stable sera celle pour laquelle la somme des énergies à la surface de sépa- ration sera la plus petite possible. À chaque espèce de face doit correspondre, au contact de la solu- tion saturée, une constante capillaire distincte, car, s’il en était autrement, le cristal, dans son eau-mère, tendrait à prendre la forme sphérique. Partant de là, on peut indiquer à priori, en sup- posant connues les valeurs de ces constantes capil- laires, le rapport qui devra exister entre la base et la hauteur d'un cristal quadratique, ou encore les valeurs limites en dehors desquelles un cristal sera cubique, octaédrique, ou prendra la forme d'un cubooctaèdre parfaitement défini. Plus tard, des expériences inédites sur l'accroissement des cris- taux lui avaient montré que la vitesse d'accrois- sement n'est pas la même pour les diverses faces, alors que leur solubilité est la même (p. XIV). Il faut souhaiter que ces études de Physique cris- talline soient reprises par d’autres. Les expériences sur la matière à l’état cristallisé sont plus compli- quées que celles qu'on fait sur les corps isotropes : l'étude d’une propriété quelconque doit, en effet, être faite successivement dans diverses directions. En revanche, comme on peut admettre (dans les cas les plus simples au moins) que, dans un cristal, toutes les molécules sont orientées de la même manière, les recherches de Physique cristalline nous permettent de préciser davantage l’idée qu'on doit se faire des molécules elles-mêmes. III Je signalerai, en terminant, les indications pré- cieuses que nous trouvons dans ce volume sur les instruments de Curie. Il a consacré à l'étude et à la construction de ces appareils une grande partie de son temps. «Il y avait là, dit M%* Curie, une forme d'activité directe et pratique à laquelle il se livrait avec un véritable plaisir et où il a souvent fait preuve de l'originalité de son esprit. » Ces appareils sont nombreux; ils ne sont pas tous suffisamment connus. On ne sait pas assez, par exemple, que c'est dans le premier travail de Curie, fait avec Desains, que l’on a appliqué pour ? Plus tard, M. Brillouin a envisagé, pour une même face, des tensions superficielles distinctes pour les diverses direc- lions. (Tensions superficielles et formes cristallines. Domaine d'action moléculaire. Ann. de Ch. et de Ph.,t. VII, p.540, 1895.) DES OEUVRES DE PIERRE CURIE la première fois les réseaux de fils (ou même de bonnes toiles métalliques du commerce) à des mesures de longueur d'onde dans le spectre infra- rouge. Beaucoup de physiciens, qui avaient suivi les beaux travaux effectués depuis en Allemagne sur cette exploration de l'infrarouge, n’ont eu con- naissance de ce travail qu'au moment où Rubens, en 1900, en résumant dans son Rapport les pro- grès accomplis, signalait la première application de cet appareil. Connaïît-on aussi suffisamment le dynamomètre optique de transmission, où l’on utilise d’une facon ingénieuse les propriétés des lames demi-onde, et où l’on ramène à une mesure polarimétrique la détermination de l'angle dont se tord un tube de cuivre rouge servant d'arbre de transmission? Le quartz piézoélectrique, gràce aux travaux deradio-activité, estmaintenant plus connu: je me souviens qu’en 1900, parlant des propriétés du radium devant cet auditoire exceptionnel qui remplissait l’amphithéâtre du Muséum, et au pre- mier rang duquel on voyait Lord Kelvin, Curie a profilé de l’occasion pour faire, disait-ilen souriant, un peu de réclame à cet appareil déjà ancien. Il ne faut pas oublier, en effet, qu'il peut être utilisé dans tous les cas où l’on veut produire, d'une ma- nière sûre et simple, une quantité d'électricité connue en valeur absolue, et que c’est en valeur absolue aussi qu'il permet de mesurer les courants faibles. Les appareils fondés sur la réversibilité des phénomènes piézoélectriques sont moins con- aus, et pourtant /'électromèlre à bilame de quartz, le manomètre piézoélectrique peuvent rendre des services. Bien qu'on ait, depuis que Curie com- parait ce dernier appareil au manomètre optique (p. 43), beaucoup perfectionné les méthodes optiques de mesure des biréfringences, qui sont maintenant au moins cent fois plus sensibles qu'à cette époque, c'est encore l'appareil de Curie qui parait le plus sensible pour des recherches d cette nature. | | Ce sont encore les recherches sur la radio-activité qui ont contribué à répandre, sous ses formes suc- cessives, l'électromètre de Curie. On a reproduit avec raison, dans le volume, l’article où M. Ledeboer a décrit très clairement cet appareil et son mode d'emploi, et où l'on retrouve les indications pré- cieuses fournies par Curie : on peut y voir avec quel soin il étudiait les détails pratiques de fonc- tionnement, qu'il ne jugeait pas du tout indignes de son effort, et qui sont parfois intéressants en eux-mêmes *. 1 Par exemple, Curie remarque que les miroirs en verre argenté très mince que lui taillait Werlein pour ses élec- tromètres semblent varier; il étudie la question et trouve que c’est l'humidité de l'air qui agit sur la farce argentée, si bien qu'on pouvait se servir du miroir comme hygro- H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER 443 La Note inédite sur la Zalance constitue le som- maire d’une excellente manipulation : l'étudiant qui l'aura faite aura une idée nette, pour les avoir lui-même mesurées, des diverses quantités qui interviennent dans le fonctionnement d'une balance de précision, non seulement de la distance du centre de gravité à l'axe, de la longueur et de la masse du fléau, ete., mais aussi de l’amortisse- ment, de la grande importance de celui-ci pour la rapidité des mesures, parfois si précieuse. Les avantages des instruments amortis n'ont échappé à aucun de ceux qui s’en sont servis, mais c'est à Curie que l’on doit d'avoir montré qu'il y a une maaière méthodique d'arriver, sans de longs tâtonnements, à déterminer un amorlissement qui convient mieux que les autres. Il a même donné des tables et des courbes qui dispensent d’avoir à refaire, dans chaque cas particulier, les calculs nécessaires. Dans son Ætude sur les mouvements amortis, il discute, en effet, numériquement, d'une facon complète, sans perdre de vue les diverses applications pratiques, cetle équation différen- tielle du second ordre à coefficients constants qui intervient non seulement lors du problème du retour au zéro d’un équipage amorti, mais qui régit aussi le mouvement de l'électricité dans le circuit de décharge d'un condensateur. Le mode de réduction qu'il applique à cette équation, et qui fait que la discussion numérique est applicable à ces différents cas, est analogue à celui qui a permis à Van der Waals de comprendre dans une formule unique les propriétés fondamentales de tous les fluides. On n'a pas, je crois, pris assez garde aux remarques de Curie (p. 218) sur l'importance que peuvent avoir ces équations réduites. Cette impor- tance n'était pas seulement pour lui d'ordre pra- tique : il pensait que cette méthode pouvait être généralisée encore et adaptée à une relation phy- sique où mécanique quelconque. IV On voit, je l'espère, que la publication des OEuvres de Curie méritait d'être signalée d’une facon particulière aux lecteurs de la Æevue géné- rale des Sciences. Les quelques exemples que j'ai essayé de donner suffisent à montrer combien ces œuvres ont élé déjà suggestives, mais combien aussi elles pourront l'être encore à l'avenir. La haute idée que se faisait Curie de la publication scientifique et son absolu désintéressement l'ont empêché d'écrire davantage. On ne peut que le regretter vivement. Mais cette brièveté et cette discrétion, de la part d'un savant comme lui, con- stituent, elles aussi, une lecon. À une époque où le flot des périodiques monte sans cesse, où l’on publie souvent d’une facon trop hâtive, où l’on se laisse parfois aller à écrire pour soi-même ou contre quelqu'un, sans profit véritable pour la science elle-même, il faut souhaiter qu'au moment de publier un travail on se pose toujours cette ques- tion : Qu'en penserait Curie ? A. Cotton, Chargé de cours à l'Université de Paris (Ecole Normale supérieure). LES EXPÉRIENCES RÉCENTES SUR LE TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER On se souvient qu’en décembre 1903, le Gouverne- ment canadien avait formé une Commission chargée d'enquêter au sujet des différents procédés électro- thermiques de traitement du fer et de fabrication de l'acier en usage en Europe. Les résultats du voyage que fit cette Commission dans nos pays ont été publiés en 1904. La Commission n'avait pu assister à des expé- riences d'extraction qu'aux établissements de M. P. Héroult, à La Praz, et à ceux de MM. Keller, Leleux et C, à Livet; les premières, celles de PE mètre (p. 575). Boys, dans ses mesures sur la constante de l'attraction, signalait ici même un fait analogue (Revue générale des Sciences, 1891, t. VIII, p. 53) : un miroir verni changeait de rayon de courbure dans une atmosphère d'hydrogène, M. Héroult, n'avaient pour but que de montrer la possibilité de fondre les minerais, et il ne fut pas donné de chiffres concernant la production, la consommation, etc. Les expériences de MM. Keller, Leleux et Ci furent plus complètes et se poursuivirent durant plusieurs jours, pendant lesquels deux essais furent faits dans deux fours, de même construction d’ail- leurs. Toutefois, le minerai employé fut une héma- tite poreuse, contenant 3,21 °/, de manganèse el seulement 0,02 °/, de soufre, facilement réduite et désulfurée par conséquent. D'autre part, la consommation d'énergie ne put être exactement fixée; dans le premier essai, elle fut de 0,475 cheval-an par tonne de fonte, ce qui correspondait à une production de 5,769 tonnes A4 H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER par 4.000 chevaux-jour; dans le second cas, elle atteignit 0,226 cheval-an par tonne de produit, correspondant à une production de 12,12 tonnes par 1.000 chevaux-jour. La différence entre les deux rendements était si grande que M. F. W. Harbord, le métallurgiste de la Commission, se crul contraint de prendre pour base de ses estimations une valeur moyenne de 0,350 cheval-an, correspondant à une production de 7,827 tonnes par 1.000 chevaux-jour. Avant qu'une apprécialion fondée püt être énoncée quant à la possibilité du procédé électro- thermique pour le traitement des minerais cana- diens, il restait, en conséquence, à établir avec plus d’exactitude la quantité d'énergie consommée par tonne de produit et à reconnaître aussi la consom- mation d’électrodes; il convenait, d'ailleurs, d'être fixé au sujet de points d'un intérêt capilal, non envisagés ou insuffisamment élucidés dans les expériences de Livet, et les délégués du Gouverne- ment se posèrent les questions suivantes : 1° Tout d'abord la magnétite, le minerai prin- cipal du Canada, qui est quelque peu conductrice du courant électrique, peut-elle être traitée écono- miquement par le procédé électro-thermique? 2° Des minerais de fer à teneur comparativement forte en soufre, mais ne contenant pas de manga- nèse, peuvent-ils être transformés en fonte com- merciale? 3° Les expériences faites à Livet en substituant le charbon de bois au coke ayant échoué, peut-on modifier le four de facon à pouvoir employer le premier combustible? La solution de ces différentes questions avait une grande importance pour qu'on püt se faire une idée sur l'introduction du procédé électro-thermique comme méthode commerciale dans certaines pro- vinces qui ne peuvent produire de coke métallur- gique, mais qui sont riches en forces hydrauliques et possèdent de grands dépôts de minerai. La dernière était particulièrement importante pour ce qui concerne le Canada, parce que le char- bon de bois et le coke de tourbe y constituent des produits nationaux, tandis que le coke de houille métallurgique est pour plusieurs des provinces un produit d'importation. Il fut, en conséquence, décidé d'étudier ces questions expérimentalement, et une somme de 75.000 francs fut mise à la disposition du Service des Mines pour procéder à ces recherches. C'est dans ces conditions qu'un arrangement fut conclu avec M. P. Héroult, de La Praz, lequel s'était offert pour construire le four et les appareils nécessaires aux expériences. Celles-ci eurent lieu en 1906 ; le Rapport officiel de M. Haanel, superintendant des Mines du Ca- nada, chargé de les présider, a été publié l'an passé; l’article ci-après en est la traduction presque intégrale!; il nous a paru intéressant de donner cette analyse détaillée d’un travail que son étendue el sa précision rendront sans aucun doute clas- sique en électro-métallurgie. I. — GÉNÉRALITÉS. $ 1. — Situation et description de l'installation. Les essais ont eu lieu dans un bâtiment mis à la disposition des expérimentateurs par la Zake Superior Corporation, qui a fourni également le courant. Le bâtiment comprenait sept locaux. La matière brute était déversée des charrettes soit sur le toit de la chambre du four à chaux, soit directement dans des huches ad hoc ménagées dans l’une des petites salles du bâtiment. Dans la grande salle contiguë élaient installés un moteur actionnant un petit broyeur Gates et un élévateur transportant la charge dans une huche placée dans la salle du four. Le premier four construit par le D' Héroult (fig. 1) se composait d’une carcasse de fonte A de 4 millimètres d'épaisseur, boulonnée sur un bâti B de fonte également, de 122 centimètres de diamètre. Cette carcasse était en deux parties, renforcées par des cornières et boulonnées ensemble, de facon à faciliter les réparations, la partie inférieure ayant 94 centimètres de hauteur et la supérieure 122. Pour rendre l’inductance aussi faible que pos- sible, on avait fait en sorte que les lignes de force magnétiques ne pussent se fermer dans ladite carcasse, en remplacant la fonte, sur une bande verticale de 25 centimètres de largeur, par une plaque de cuivre. Des tiges de fer C furent d’abord fondues sur le fond de facon à assurer un bon contact avec la pâte de charbon tassée dans la par- tie inférieure du four. Dans un prolongement du bâti, un cylindre de cuivre O était introduit, prenant contact avec un bloc d'aluminium P dans lequel étaient soudés les câbles R, d'aluminium également, constituant les conducteurs d'alimentation. Ce bloc était maintenu contre le cylindre au moyen d'un boulon S, comme on le voit sur la figure 1. Le fond du creuset et les parois étaient en pâte de charbon D, le revêtement de la partie supérieure en briques réfractaires E. s Les électrodes employées élaient des électrodes fabriquées par le procédé Héroult et importées de ! Pour la partie constituant le compte rendu des essais en question. Le Rapport de M. Haanel forme une brochure de 149 pages et comprend, outre le compte rendu reproduit ci-après, la description de divers types de fours ou de perfectionne- ments soumis au Gouvernement canadien. H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER 445 Suède ; elles étaient de section transversale prisma- tiques, à coins coupés, de 40,6 X 40,6 cm. el de 12,825 de longueur. L'une des extrémités s’adaplait dans un sabot 53 of Z & KKKEIKKKKKE KG Z Fig. 1. — Premier four construit par M. Héroult à Sault- Sainte-Marie. — A, B, bâti de fonte; C, tiges de fer; D, pâte de charbon; E, briques réfractaires; O0, cylindre de cuivre; P, bloc d'aluminium: R, cäble électrique; S, boulon; G, sabot d'acier; 1, électrode; K, conduite d'air; H, poulie. d'acier G où elle était maintenue au moyen de coins. Ce soulier d'acier était rivé à quatre plaques de cuivre, dont deux étaient renforcées au sommet au moyen de plaques d'acier el portaient une poulie H. Une conduite K, placée dans le porte-électrode, servait à donner un courant d'air pour refroidir | cette pièce. On espérait qu'avec ce mode de con- struction, on pourrait faire descendre lélectrode dans le fond jusqu'à ce qu'elle fût à peu près com- plètement brûlée, de facon que la partie perdue fût très courte. Le fourneau était surmonté d'une charpente formée de deux poutres en [ pourvues de rails légers et d’un truck mobile portant deux poulies. L'électrode était suspendue au truck par une chaîne passant sous la poulie du porte-charbon et sur les poulies du truck et dont une extrémité était fixée au mur, l’autre passant sur un cabestan actionné au moyen d'une vis sans fin et d’une roue d’engrenages. Ce système de réglage a été reconnu très pralique. Pour renouveler l’électrode, on dépla- cait le truck vers l’avant du four; les cäbles de connexion élaient de longueur suffisante pour per- mettre ce déplacement. $ 2. — Équipement électrique. L'énergie électrique était fournie par l’une des phases d’un alternateur triphasé de 400 kw. à 30 périodes sous 2.400 volts, actionné par cour- roie par un moteur de 300 chevaux à courant con- tinu; le groupe était placé à quelque distance du bâtiment où se trouvait le four, dans l'usine géné- ratrice de la Compagnie du lac Supérieur. Le courant passait dans un transformateur à huile, de 225 kw., qui en abaissait la tension de manière à donner 50 volts au four. Ce transforma- teur était placé dans une chambre séparée, à proxi- mité du four, dans le bâtiment contenant celui-ci. Du transformateur, le courant était conduit à la plaque formant le bâti du four et au porte-charbon par des conducteurs formés chacun de 30 câbles d'aluminium de 1%%,5 de diamètre. Un tableau portait les appareils de mesure voulus : un voltmètre, un ampèremètre, un indi- caleur de facteur de puissance et un wattmètre enregistreur; ces appareils élaient des instruments de la Westinghouse Electric and Manufacturiny Company; un voltmètre de la Xeystone Electric Company, pouvant mesurer de 10 à 80 volls, servait au contrôle; dans la suite, le voltmètre et l’ampè- remètre ont été déplacés et montés sur le pied même de l’appareil de réglage de l’électrode, pour faciliter l'opération ; le wattmètre, endommagé, ayant dù être renvoyé à l'usine, ne fut pas réparé en temps voulu; les autres appareils furent l’objet d’un contrôle spécial par un expert de la Wes- tinghouse, venu spécialement à Sault-Sainte-Marie aux fins de cette vérification et qui fixa le facteur de puissance de l'installation à 0,919. 446 H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER C'est cette valeur qui a servi pour tous les cal- culs de la puissance consommée. $ 3. — Programme des expériences. Les expériences étaient conduites de la facon suivante. La matière brute était d'abord passée au broyeur, qui la réduisait en fragments de 1,8 cen- timètre et moins; il eût été désirable de disposer d’un appareil donnant des morceaux moins menus, mais on n'en avait pas sous la main. Le minerai, le charbon et le fondant étaient pesés, mélangés à la main, et chargés sur l'éléva- teur, puis dans le four, à la main. On notait le nombre de charges introduites. De trente en trente minutes, on prenait note des lectures aux appareils de mesure. Il était prélevé pour l'analyse un échan- tillon de chaque coulée et de chaque laitier. Le service du four était fait par brigades de trois hommes; il y avait, de plus, quelques ouvriers s'oc- cupant de la préparation et du transport des ma- tières brutes et du produit. Les expériences ont été dirigées d’abord par M. Héroult, puis, après l'arrivée de M. Haanel, en grande partie par ce dernier. Quand le four put être mis en service continu, la surveillance fut organisée par brigades placées successivement sous la responsabilité de MM. R. Turnbull etJ. Sejournet, ingénieurs de M. Héroult; B. F. Haanel et E. Nystrom, du Service des Mines canadien. Les minerais traités ont été les suivants : 1. Hématite (de Negaunee); 2, Magnétite, de la mine de Wilbur, Ont. (Wil. Caldwell). 3. Magnétite, de la mine Blairton, Ont. (Pierce et Cie, Marmora, Ont.). 4. Magnétite, de Ja (J. G. Campbell, Perth, Ont.). 5. Magnétite, de la Calabogie (J. G. Campbell, Perth, Ont.). 6. Magnétite, de la Calabogie (T. B. Caldwell, Lanark, Ont.). 7. Pyrrhotine grillée de la Lake Superior Corpo- Mining Co Calabogie Mining Co Mining Co ration. 8. Minerai tilanifère de Québec (J. G. Québec). Scolt, $ 4. — Expériences préliminaires. On procéda d'abord à quelques expériences pré- liminaires, à l'effet de régler la capacité du four sur la quantité d'énergie disponible et pour déterminer la forme à donner intérieurement à l'appareil. La partie inférieure du four se trouvant en place, on donna le courant pour essayer les contacts et l'ins- lallation en général. On employa d'abord une faible intensité, alin de sécher la pâte carbonifère; ce courant fut maintenu pendant vingt-quatre heures. On chargea alors le four et on lui donna un courant plus intense. Tou- tefois, un échauffement considérable du contact inférieur ayant été constaté, on coupa le courant et l’on interrompit le fonctionnement du four. Pour améliorer le contact, on pratiqua, entre le cuivre et le fer, des trous r (fig. 1) que l'on emplit d'aluminium fondu. On mit alors en place la partie supérieure du four; on donna le courant et, sept jours après l'allumage, on procéda à la première charge. Le four fonctionna bien d’abord pendant quelque temps; mais de l'air sous pression y ayant été insufflé par une conduite, la combustion devint très vive, la résistance diminua fortement et, l’élec- trode levée, un are s'établit entre elle et la couche supérieure de la charge, ce qui provoqua la fusion de la matière du four même. La température développée par la combustion de l’oxyde de carbone était telle que la charge dans la partie supérieure du four devenait visqueuse, et ne descendait plus, ce à quoi on ne pouvait malheu- reusement remédier en piquant le feu, l’espace n'élant pas suffisant entre l’électrode et la paroi. En outre, le contact de l’électrode avec son sup- port n'était pas satisfaisant; on y remédia en cer- clant le sabot d'acier d’un anneau de serrage. Malgré celte modification, il fallut ajourner l’expé- rience d'utilisation du carbone dans le four et celui-ci fut modifié en réduisant de moitié la hau- teur de la partie supérieure. Quelques jours plus tard, une expérience fut faite pour produire du ferro-nickel au moyen de la pyrrholine grillée. Le contact de la plaque de fond n'étant pas encore salisfaisant, on le modifia à nouveau; on enleva le cylindre de cuivre et on le remplaca par une nouvelle pièce pourvue d'un rebord à sa partie supérieure; des trous pratiqués dans ce rebord et dans la plaque formant le bâti du four furent remplis d'aluminium; ce contact n'était pas encore parfait et occasionnait une chute de tension de 1/2 à 1 volt; il à néanmoins été maintenu pour les expériences subséquentes. II. — COMPTE RENDU DES ESSAIS. Dix-neuf séries d'essais ont été opérées, dans un espace de trois mois approximativement; les neuf premières expériences ont porté sur le traitement de l’hématite ; les quatre suivantes, sur la magné- tite de Wilbur; l'essai 14, sur la magnétite de Cala- bogie; on à essayé enfin la pyrrhotine grillée et un minerai de fer titanifère. Les premières opérations furent quelque peu laborieuses. On avait débuté en employant comme réducteur H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER des briquettes à 80 °/, de coke et 20 °/, d'argile réfractaire, fabriquées mécaniquement et con- cassées pour l'usage dans le four électrique; l'abon- dance du poussier rendant toutefois le fonctionne- R Al à ALLÉE IIKKiKKKKKKK Fig. 2. — Four Héroult expérimenté à Sault-Sainte-Marie pour le traitement de l'hématite. ment assez pénible, il fut décidé, dès le troisième essai, d’expérimenter l'emploi du coke. Bien que le four eût en même temps été modifié par la suppression de là garniture de charbon sur les parois, et cela afin d'éviter que le courant se distribuât dans tout le creuset, les résultats obtenus avec ce nouveau réducteur furent plutôt défavo- bles : la charge avait une conductibilité trop grande et, d'un autre côté, il n'était pas possible de réduire la tension à la valeur qu'il aurait fallu. On revinten conséquence, pour les essais 3 à 10, aux briquettes de coke, le four étant rendu intérieu- rement cylindrique (fig. 2) pour faciliter la descente de la charge que l’on avait antérieurement constatée assez visqueuse et adhérente; pour empêcher l'attaque des briques par le laitier, un revêtement de quatre pouces d'épaisseur, en päte de charbon tassée, avait de plus été faconné. Les essais 6, 7 et 8, exécutés avec le four ainsi approprié, marchèrent sans encombre. A la neuvième expérience, il fut décidé de faire une tentative d'utilisation de l'oxyde de carbone produit par la réaction; à cette fin, une conduite servant de tuyère fut introduite dans le four à «0,30 du sommet; mais l'épreuve dut être bientôt abandonnée, la chaleur produite par la combus- tion étant beaucoup trop forte pour les dimen- sions de l'appareil. Les essais 10 et 11, avec usage de poussier de coke et de briquettes, réussirent bien : à partir de l'essai n° 12, il ne fut plus fait emploi, comme réducteur, que de charbon de bois: la résistance des charges, avec ce réducteur, convenait bien pour le courant disponible et le four fonctionna dès ce moment d'une manière parfaite, On n'y apporta plus, d’ailleurs, de modification, sauf, cependant, à partir de l'expérience n° 13, un léger rétrécissement de la partie inférieure du creuset et un élargissement, peu notable, de la partie supérieure ; la hauteur fut aussi quelque peu accrue; on constitua, en outre, le revêtement par des briques réfractaires ordinaires, les trous de coulée et de vidange étant garnis de pâte de charbon (fig. 3). Comme fondant, il à été fait usage, pour les essais 1 à 9, 11 et 14 à 19, de calcaire, et pour les essais 10, 12 et 13, de sable ; on a aussi utilisé, en S RS SKKKKKKKKKKKÇ Fig. 3. — l'our Héroult expérimenté à Saull-Sainte-Marie pour le traitement de la magnétite. ordre subsidiaire, du quartz (essais 16 et 17) et du spath (essai 19). Le tableau I ci-contre résume les résultats des mesures auxquelles il à été procédé d'une facon régulière au cours des essais. 448 H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER TagLEAU I. — Résultats d® essais. :1166.748/168. 8661165 .971 ù 7.160 1.18.303 1.17.336 1. € ! 61h25 {66h30 D 888 h.20/ 43 h. 5 56h20) — 0,243| 0,239 111,256] 111,956 111,494] 101,018! 0,243 17h.50|3 h. 20°] 5 h. 5 170.015/181.824/177.367/164.042 9,435 ,290 0 0,919 0,219 0,919 0,294 0,919 0,310 25/| 6h. 40 [23 h. 40/60 h.25/ h 0,949 0,321 h. 30! 2 0,306 1 h.40! 0,292 12 h. 33 h. 4.250 157.4031145.414/150.9451456.5551159. 7821163 .7841162.923|167.912 st, 1,127 Î 328 } 0,354 Durée totale de l'essai. Durée effective de l'essai Volts moyens aux bornes. Facteur de puissance . Ampères moyens aux bornes. Watts moyens . Quantité de fonte produite Chevaux électriques Production par 1.000 ch.-jour. Cheval-an, par tonne de fonte. : laitier, fonte . Rapport Il n’est pas donné de chiffres pour l'expérience n° 9, qui à été arrêtée avant aucune opération pour les raisons précédemment indiquées, ni en ce qui concerne l'essai n° 49. Ce dernier, effectué d'une facon très hâtive, parce que le délai prévu pour les expériences expirait, et avec un four qu'il eùt fallu, pour bien faire, remettre en état, n’a pas non plus permis de. mesure. Au point de vue métallurgique, il a néan- moins donné satisfaction. ITT. — CoxcLUSIONS. Les conclusions du Rapport de M. Haanel peuvent se résumer brièvement ainsi quil suit : $ 1. — Traitement de la magnétite.. Les difficultés que l’on craignait n'ont pas été éprouvées, du moins en employant le charbon de bois comme réducteur. On avait cru que la con- ductibilité de la magnétite aurait empêché l'effet calorifique de se concentrer dans la zone de fusion et que sa perméabilité augmenterait la self induc- tance du four. Il n'en a pas été ainsi. Dans certains cas, toutefois, on a constaté une augmentation rapide de la conductibilité" au cours de l'opération ; l'installation ne permettait mal- heureusement pas d’abaisser le voltage, et l’on à parfois été obligé d'arrêter le four; quand celui-ci n'était pas rempli de menu, on pouvait générale- ment remédier au défaut en y introduisant du minerai sans adjoindre de charbon ni de calcaire. Bronn pense que cette augmentation provient de ce que, par le chauffage, le contact devient plus intime, par suite de la pression des gaz. Si cette hypothèse est exacte, on pourra, d'après M. Haanel, remédier à l'inconvénient ci-dessus, à condition que la charge soit suffisamment poreuse, en la chauffant préalablement, par exemple au moyen de l’oxyde de carbone provenant du four même. Quand la teneur du minerai en magnésie est forte, ce qui était le cas pour les minerais expérimentés à l'exception de l'hématite et de la pyrrhotine, le lai- tier est peu fusible et forme rapidement, si l'énergie disponible n’est pas assez considérable pour main- tenir la température, une eroùle qui obstrue la chute de la matière et augmente la quantité de charbon nécessaire en en faisant brüler, sans effet utile, une partie dans le haut du fourneau. L'installation employée à Sault-Sainte-Marie était peu parfaite; il était impossible d'avoir plus de 5.000 ampères à 35 ou 40 volts, de sorte qu'on pou- vait rarement obtenir l'intensité la plus favorable. 1 Ce phénomène a déjà été observé par J. Bronn : Z{z, 1906, n° 9, H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER 449 Néanmoins, il est dûment établi que les minerais canadiens, la magnélite particulièrement, peuvent étre trailés dans le four électrique aussi économi- quement que l'hématite; que l'on peut transformer des minerais contenant beaucoup de soufre en fonte n'en ayant que quelques centimillièmes, et que l'on peut régler à volonté la teneur en silicium. $ 2. — Traitement de la pyrrhotine. Production du ferro-nickel. Le traitement de la pyrrhotine nickelifère grillée n'a fait l'objet que d'expériences assez restreintes; mais, après la conclusion de ces expériences, le four Héroult et ses accessoires ont été acquis par la Lake Superior Corporation qui les a employés à la fabri- cation du ferro-nickel, en en laissant entièrement le service aux ouvriers qui avaient été chargés de desservir le four pendant les expériences de MM. Haanel et Héroult. L'appareil a fonctionné avec une régularité par- faite; l'électrode ne demande pour ainsi dire aucune surveillance, et le produil obtenu est de qualité uniforme et excellente. On peut donc dire que cette applicalion est imme- diatement réalisable en pratique. M. E. A. Sjôstedt, métallurgiste en chef de la Lake Superior Power Company, à signalé qu'après avoir apporté au four quelques modifications de détail, notamment dans le support de l’électrode, il a pu obtenir d'une facon régulière, par jour, 2.700 livres de ferro-nickel à 0,01 °/, de S et 5 — 11 °/, de Ni. Le traitement a été changé dans la suite en modi- fiant la quantité de chaux employée. Au 1° août 1906, l'installation avait déjà fourni 168 tonnes de ferro-nickel. Sur une période de cent quinze jours de service régulier, on a obtenu 154 tonnes, avec une tension moyenne de 38 volts, un courant de 4.800 ampères, la production étant de 5,96 tonnes par 1.000 ch.- jours. On à employé par tonne de produit : 2 tonnes de minerai (pyrrhotine grillée contenant 2°/, de S); 1.500 livres de calcaire ; 1.200 livres de charbon de bois; -40 livres d’électrode. On peut donc produire avee la pyrrhotine grillée un ferro-nickel ne contenant pas de soufre et de très bonne qualité. $ 3. — Traitement des minerais titanifères. Une expérience faite au moyen de minerais con- tenant 17,82 °/, d'acide titanique, et qui a donné de la fonte de bonne qualité, a établi que Z'on peut traiter électrothermiquement avec suecès des Ininerais contenant jusqu'à 5 °/, d'acide titanique. REVUE G:N RALE LES SC:ENCES, 1209. $ 4. — Emploi du charbon de bois comme réducteur. Le charbon ne doit pas être mélangé au minerai et façonné avec celui-ci en briquettes; il est admi- rablement approprié au {raitement électro-métal- lurgique et remplace des plus avantageusement les briquettes et le coke. Les quantités de charbon de bois nécessaires dans les expériences ont été un peu élevées; mais cela provient de la qualité généralement très mauvaise du combustible utilisé, et surtout de ce que, séjour- nant trop longtemps à la partie supérieure du four, ce combustible s'y consumait inutilement. Il serait aisé d'éviter ce défaut. En résumé : On peut employer comme réduc- teur, sans avoir à le briquetter avec le minerai, du charbon de bois fabriqué au moyen de déchets de scieries, de bois inutilisable à d'autres usages, ou du coke de tourbe. $S 5. — Consommation d’électrodes. L'électrode de 920 livres dont il a été question a permis de travailler deux cent cinquante heures quarante-cinq minutes, pendant lesquelles il a été produit 37.863 livres de fonte grise et 4.848 de fonte blanche, soit au total 42.711 livres. Elle aurait pu être utilisée davantage. De plus, sa partie supérieure, qui n'élait pas protégée, aurait pu être mise à l'abri et ne pas être consumée comme elle l’a été. A la fin des opérations prémentionnées, il restait de cette électrode 472 livres, mais la partie réelle- ment brülée dans le four n’est que 381,26 livres, soit, par tonne de fonte produite, une consommation de 17,85 Livres. $ 6. — Fonctionnement. Il à été constaté que le four fonctionne le mieux quand la température est très élevée à proximité de l’électrode et qu'à ce point de vue /a formation d'une couche de laitier calcaire, peu fusible, conte- nant du carbure de calcium, sur les parois du creuset, est des plus favorables, en empéchant les dérivations de courant. S 7. — Construction à adopter. La plus grande capacité que l’on puisse actuel- lement réaliser est de 2.000 chevaux". Un four de cette capacité, pour être commercial, devrait être construit en tenant compte des indica tions suivantes : 1° La partie supérieure devrait être modifiée de manière à permettre le chargement mécanique ; 2° Il faudrait faire en sorte que le charbon de ! On a monté un four de celle capacité à Baird (California). 10° 450 bois füt protégé dans la zone supérieure du four et qu'on püt recueillir l’oxyde de carbone pour l'utiliser au chauffage ; 3° L’électrode devrait être réglée mécaniquement ; 4° Le four devrait être assez élevé pour permettre l'utilisation de l’oxyde de carbone, et l’électrode placée dans une cheminée latérale alimentée par le corps principal; 5° Pour éviter les dérivations de courant et assurer l'obtention d'une bonne densité de courant à proximité de l’électrode, les parois du creuset doivent être formées de briques de magnésie ou de silice, le fond seul étant en communication élec- trique avec le bâti; 6° La capacité du creuset doit être strictement préportionnée à la puissance disponible. M. Haanel a concu, en parlant des considérations ci-dessus, un four à double cheminée qu'il a fait récemment breveler et dont un croquis est donné à la figure 4. S 8. — Qualité des produits fabriqués. Il est bien connu que les hauts fourneaux pro- duisant du cyanure de potassium ne donnent qu'une qualité inférieure de fer. La formation du cyanure est due à l’action de l'azote de l’air sur le laitier basique; la combinaison de l'azote avec le fer produit un nitrure de fer qui rend la fonte cassante. Ce fait, qui n'a été reconnu que récemment, permet de se rendre compte de la supériorité de la qualité des produits obtenus dans les fours élec- triques ; il explique ce qu'on n'avait pu comprendre antérieurement, que des fontes puissent être cas- santes bien que ne contenant que peu de soufre et de phosphore; dans le four électrique, lant pour la fabrication de l'acier que du fer, azote est exclu du contact avec le métal. $ 9. — Comparaison entre le four électrique et le haut fourneau. La tendance des métallurgistes est d'augmenter la capacité des hauts fourneaux jusqu'à 600-800 tonnes. Il semble toutefois que la dimension la plus écono- mique corresponde à une hauteur de 27 mètres. Déjà, avec cette dimension, il y a des inconvénients : 4° Prix de premiére installation très élevé; 2 Coût élevé des machines de chargement ; 3° Grand dommage résultant, éventuellement, de la destruction du four; 4 Difficulté des réparations, très onéreuses ; 5° Nécessité de charpentes compliquées et dan- gereuses ; 6° Pertes considérables occasionnées par une mauvaise composition de la charge; impossibilité de les corriger rapidement, H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER Néanmoins, le haut fourneau peut être considéré comme une machine parfaite. Quelle sera, dès lors, la valeur du four électrique si, dès à présent, alors qu'il ne compte que quelques années d'âge, il arrive à pouvoir entrer DS KKKKK N\ — Four Héroult-Haanel. Fig. 4. en compétition avec le haut fourneau quand de l'énergie électrique à bas prix est disponible? Dès maintenant, il possède les avantages suivants : 1° Prix de première installation peu élevé ; 2° Absence de machine de chargement; encom- brante ; H. MARCHAND — TRAITEMENT ÉLECTRO-THERMIQUE DES MINERAIS DE FER 451 3° Dommage occasionné par les interruptions peu important; 4° Réparations faciles et peu coûteuses; 5° Charpentes sans complications sérieuses ; 6° Résultats d'une erreur de charge restreints au Minimum ; .1° Contrôle de la température parfait dans la zone de réduction et de fusion. À la différence des installations de hauts four- neaux, celles de fours électriques comporteront plusieurs petites unités; l'arrêt accidentel de l’un des appareils n'occasionnera qu'un chômage partiel, et il y sera facilement remédié parce que l'appareil endommagé, étant de dimensions restreintes, sera promptement refroidi. $ 10. — Remarques générales. 1° L'énorme portée des remarquables résultats de ces expériences est évidente : beaucoup de magnétites du Canada contiennent trop de soufre pour pouvoir être traitées dans le haut fourneau et ont du, pour cette raison, rester sans emploi. Le four électrique permet d'obtenir une fonte supérieure, même en partant d'un minerai conte- nant jusqu'à 1,5 °/, de soufre; le haut fourneau ne permet pas de traiter des minerais à plus de 1 °/,. 2° Les forces hydrauliques que l’on pourrait utiliser pour l’électrosidérurgie au Canada sont nombreuses; dans les provinces d'Ontario et de Québec, il en est plusieurs qui se trouvent au centre de dépôts miniers et qui sont mal situées pour d'autres applications; beaucoup pourront donner le cheval-an à 4,50 ou 6 dollars. A ce prix, et avec la faible consommation d’élec- trode, le bon marché du minerai nécessaire, la qua- lité exceptionnelle du produit, l'extraction élec- rique des minerais canadiens dans des fours convenablement construits et moyennant l'emploi, comme réducteur, de charbon de bois, ou de coke de tourbe, fabriqué avec la tourbe dont le Canada à d'énormes dépôts, l'extraction électrique est cer- tainement commercialement réalisable. 3° Il ne reste plus actuellement qu'à combiner des installations d’une capacité convenable, 100-150 tonnes par jour, avec les machines de ser- vice voulues. Il est certain que, de même que cela a eu lieu avec les hauts fourneaux, l'expérience améliorera encore le procédé; Ze temps est proche, sans doute, où l’on saura récupérer et employer loxyde de carbone, que l'on perd actuellement et dont utilisation augmentera le rendement de 1/1. Quand ce résultat sera atteint, le four électrique pourra entrer en compétition avec le haut fourneau, même là où le coke serait meilleur marché que dans les provinces d'Ontario et de Québec. 4° D'autre part, on pourra installer les établisse- ments mélallurgiques aux mines mêmes, en ali- mentant celles-ci en électricité par des transmis- sions aériennes, de sorte qu'on économisera les frais de transport, n'ayant plus à véhiculer que des produits finis, au lieu de minerais. 5° L'introduction miques dans les pays qui ont de grands gisements de minerais de fer el qui possèdent des forces des procédés électrother- hydrauliques, mais qui n'ont pas de combus£ le métallurgique, aurait les conséquences suivantes : a) Mise à profit de forces naturelles qui ne sont pas à présent susceptibles d'utilisation ; b) Utilisation de la tourbe et des déchets de bois, y compris la sciure, matières restées sans usage ; c) Libération de ces contrées de l'importation étrangère pour le coke métallurgique ; d) Possibilité de produire la fonte dont elles ont besoin ; e) Développement d'établissements métallur- giques exclusivement électriques. S 11. — Estimation du coût d'une installation de 10.000 chevaux, capable de produire 120 tonnes de fonte par 24 heures d'après M. Héroult : Frais d'installation : Fours, contacts, charpentes. , , . . Soutes, goulottes, élévateurs . . . . . 1 BEOVEULS ER Régulateurs, etc . Instruments. L 7 » Câbles conducteurs. 42 » Bâtiments . 52 » MÉlAN PEUT EEE 50. » Grues roulantes et voies. 25. » Bascules PPT te » Wagonnets à laitier. 15. » Bacs à minerai. 45. » Atelier . AE ») Notaleese Installation pour la fabrication du char- DONNUERDOISEE RENE NN 250,000 » BsmepÉnÉRAICE EEE ENS O0FODDMSS Total... 59547000 Installation pour fabrication d'électrode. 30.000 » COOP ÉMS DR AE PASSE QE PE 216.000 » Total. . . 3.500.000 » Frais de production : Amortissement 5 °/,. | Dépréciation 5 °/, ANTÉRELSROR ER Re Soit par tonne (43.200 tonnes pour SOU OUT) SNS RENE à Minerai (à 55 °/,) à 7 fr. 50 la tonne EC TTEER 525.000 » Charbon de bois (1/2 tonne) à 30 fr. la tonne . Eu ONE VON CRT ET OC 15 » EnennreÉlEL TIQUE CR EN 12 15 Main-d'œuvre . . LEON EURE TER 5 » CATCAIRE EE RENE TR co UPS) Blectrodes 4A80liyres) Menu 0" 1 80 BRAS PET ÉTAUX M SE ET. ee Ge) Total. . . 65 60 H. Marchand, Electricien-Chimiste, 452 LEA J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE DEUXIÈME PARTIE Nous terminons ici la revue des récents travaux de quelque importance en Géologie, revue que nous avons commencée dans un précédent article”. Î. — HISTOIRE STRATIGRAPHIQUE ET TECTONIQUE DES PYRÉNÉES ORIENTALES ET CENTRALES. Dans le chapitre de notre précédente revue con- sacré à la géologie des Pyrénées françaises, nous avons brièvement résumé deux Notes de M. Léon Bertrand, chargé de cours de Géologie à la Faculté des Sciences de Paris, ayant trait : l'une aux char- riages du versant nord de la chaine entre la vallée de l'Ariège et le Roussillon, l’autre à l'allure des plis anciens dans les Pyrénées centrales et orien- tales. Depuis lors, le même auteur à publié un remar- quable Mémoire intitulé : « Contribution à l'histoire stratigraphique et tectonique des Pyrénées orien- lales et centrales » *, Mémoire dans lequel il résume toutes les observations faites par lui depuis 1889, et groupe les faits signalés soit par ses devanciers, soit par les géologues qui s'occupent actuellement des régions voisines du massif pyrénéen. Ce travail jette un jour nouveau sur des questions ‘rès discutées ; il a droit à tous les éloges de ceux qu'intéresse le problème si captivant de la struc- ture de ces chaînes de montagne. La première partie du Mémoire a trait à la répar- lition géographique, aux relations statigraphiques et aux facies des terrains. Notre confrère arrive à les coordonner en zones longitudinales bien diffé- renciées, Ce qui — comme nous en exprimions le regret — ne ressorlail pas suffisamment des tra- vaux antérieurs*. Il distingue une zone primaire centrale, formée principalement parles terrains pri- maires, c'est-à-dire par un ensemble de couches ayant élé affectées par les plissements hercyniens. Au Nord de cette.zone s’en trouve une seconde, qu'il désigne sous le nom de zone nord-pyrénéenne, dans laquelle les terrains primaires forment des massifs isolés disséminés au milieu des terrains 1 Voir la Revue du 15 mai 1909, t&. XX, p. 41% et suiv. ? Bulletin des Services de la Carte géologique de France, t. XVII, n° 118, 1908. 3 ]l est juste de dire que, dès 1892, MM. E. de Margerie et Fr. Schrader divisèrent la chaine des Pyrénées en un cer- lain nombre de zones qui, dans les grandes lignes, s'accor- dent assez bien avec celles de M. Bertrand (E. bE MARGERIE et Fr, Scnaaner : Aperceu de la structure géologique des Pyrénées, Annuaire Club Alpin, Paris, 1892). secondaires. En partant de la Méditerranée et en se dirigeant vers l'Ouest, on trouve les massifs sui- vants : massif de l'Agly, massif du Saint-Barthé- lemy ou de la montagne de Tabe, massif des Trois- Seigneurs, massif de l'Arize, massif de la Forêt de Castillon ou du Cap de Bouirech, massif de Milhas, massif de la Barouss?. Quant aux terrains primaires du massif du Mouthoumet, ils doivent être considé- rés comme se rattachant à la Montagne-Noire. La bordure septentrionale de la zone centrale et la couverture des massifs primaires isolés de la zone nord-pyrénéenne sont formées par une série de terrains que l’auteur désigne sous le nom de « ter- rains secondaires », bien que débutant souvent par des (Grès permiens. Pendant le Jurassique et le Crétacé, cette région était une dépendance du géo- synclinal subalpin ou, tout au moins, doit être con- sidérée comme un géosynelinal de second ordre, qui pourrait être appelé géosynelinal nord-pyrénéen des temps secondaires. Au Sud de la zone centrale se développe une autre zone, désignée par M. Bertrand sous le nom de bord pyrénéen méridional. D'une facon générale, celte zone montre une lacune correspondant aux couches les mieux développées dans le géosyneli- nal du bord nord. D'autre part, au Nord de la zone que nous avons appelée nord-pyrénéenne, s'en développe une autre présentant, au point de vue de ses couches secon- daires et tertiaires, les plus grandes analogies avec la couverture méridionale de la zone primaire cen- trale. Cette zone plus septentrionale formait le bord nord du « géosynelinal nord-pyrénéen » : les ter- rains secondaires et tertiaires qui s’y rencontrent n'ont pas participé aux mouvements tertiaires observés dans la zone nord-pyrénéenne. Ils ont servi de substratum à un chevauchement du bord de celte dernière zone vers le Nord, et c’est pour cette raison que notre confrère les attribue à une nouvelle zone : la zone sous-pyrénéenne. En outre, sous le chevauchement principal, une certaine par- tie du substratum a subi également un entraine- ment vers le Nord, pour chevaucher sur le reste de la région. Il y à là une sous-zone, la nappe pré- pyrénéenne, se ratlachant à la région sous-pyré- néenne par ses caractères stratigraphiques. En résumé, du Nord au Sud, nous trouvons les zones suivantes : I. Zone sous-pyrénéenne ayant comme sous-zone la nappe pré-pyrénéenne; Il. Zone J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 453 nord-pyrénéenne ; II. Zone primaire centrale ; IV. Bord pyrénéen méridional. La seconde partie du Mémoire est consacrée à la Tectonique. L'exposé des faits correspond à deux problèmes bien distincts et est traité dans deux chapitres spéciaux. Dans le premier, l'auteur se propose de démon- trer « que Ze bord septentrional des Pyrénées, au Nord de la zone primaire centrale, montre un ré- gime de nappes empilées venues du Sud et, par suite, poussées vers le Nord ». Dans le second, il s'occupe de la structure de la zone centrale et de sa bordure méridionale, en s'en tenant à l'allure géné- rale des plis. Nous résumerons sommairement les considéralions développées : a) Structure du bord septentrional des P yrénées. — Tous les terrains secondaires de la zone que nous avons appelée nord-pyrénéenne ont été affectés par des poussées dirigées du Sud vers le Nord, et n'ayant pas épargné les terrains primaires eux-mêmes. Ces terrains primaires ont élé amenés à la base d’une nappe charriée, principalement formée par les ter- rains secondaires de leur couverture venue du Sud et actuellement séparés de leur racine. M. L. Bertrand désigne par la lettre A la bordure secondaire régulière de la zone primaire centrale. Cette bordure se développe au-dessous d’une série secondaire qui est charriée et qu'il désigne par la lettre B. Le contact de ces séries secondaires A et Best manifestement une surface de charriage plon- geant au Nord, et amenant la série B à reposer sur la couverture secondaire, au bord de la « zone cen- trale » (série A), ou même parfois sur les terrains primaires. Cette série B n'est pas enracinée. Elle résulte d’un phénomène de translation superficielle qui, dans certains cas, a pu se borner à un glisse- ment de la couverture secondaire, tandis que, dans d’autres, il a été accompagné d'un paquet de ter- rains primaires arrachés à la partie supérieure de la zone, et charriés en même temps que les ter- rains secondaires qui les recouvraient. D'autre part, en quelques points, des terrains primaires se montrent superposés à la nappe B. Il est donc nécessaire de distinguer une troisième nappe C. Cette nappe supérieure n'est pas seule- ment représentée par des couches primaires; on y trouve aussi des terrains secondaires, mais se dis- üinguant, le plus souvent, de ceux de la série B par l'absence de marmorisation. Ces trois séries secondaires nord-pyrénéennes se distinguent nettement sur la feuille de Quillan, à l'Ouest de l'Aude et de l’Aiguette ; elles peuvent se suivre aussi bien vers l'Est que vers l'Ouest. La nappe supérieure est très développée sur la feuille de Foix et jusque sur celle de Bagnères. Par contre, on n’en connaît pas de témoin à l'Est de la vallée de l'Aude. Depuis celle-ci jusqu'à la plaine de Roussillon, on ne trouve que les deux nappes inférieures. Sur toute la feuille de Quillan, conclut l’auteur, « la région nord-pyrénéenne est un pays de nappes charriées vers le Nord, et résultant principalement d'un reploiement et d'un empilement de la couver- ture secondaire originelle de la zone primaire cen- trale en deux ou trois séries superposées ». Dans ces nappes ont été entraînés, sous forme de lames, des lambeaux de terrains primaires. Par suile, ces terrains n'ont aucun rapport avec la stratification des assises du même âge ayant été affectées par les mouvements hercyniens. Abordant l'étude des nappes de charriage au Sud- Ouest de la feuille de Quillan, c'est-à-dire dans l'Ariège, la Haute-Garonne et les Hautes-Pyrénées, notre confrère à pu faire d'intéressantes observa- tions. L'étude des environs de Tarascon-sur-Ariège lui a permis d'y distinguer diverses nappes et de formuler les assertions suivantes : 1° les massifs primaires du Saint-Barthélemy appartiennent à la nappe C; 2° la bifurcation si singulière des terrains secondaires dans l'Ouest de la région s'explique par l'apparition d'un massif primaire (massif des Trois- Seigneurs), à la base de la nappe B; 3° Les ter- rains de la nappe À se montrent aux environs de Tarascon, au-dessous de la nappe B; 4 Les forma- tions du Crétacé supérieur se montrent dans une fenétre, à l'Ouest de Tarascon, se superposant aux terrains nord-pyrénéens, et appartenant à une série tectoniquement inférieure à la nappe A. La plupart des terrains secondaires qui se ren- contrent sur la feuille de Bagnères font partie de la nappe B. Cette manière de voir est confirmée par le caractère marmoréen que prennent assez souvent les calcaires, et par le développement corrélatif des intrusions de roches très basiques (lherzolites, ophites) vers le bord méridional de cette zone secondaire. Sur la feuille de Tarbes, la seule ligne tectonique semblant bien établie, quant à la délimitation des nappes sur le bord septentrional, consiste dans «le chevauchement frontal nord-pyrénéen ». Ce che- vauchement frontal se retrouve en bien des points de cette feuille ; il peut se suivre grâce aux déchi- rures de l’épais manteau des formations post-pyré- néennes, que l’on voit ensuite recouvrir ce bord des Pyrénées lorsqu'on se dirige vers l'Ouest. b) Structure de la zone centrale et de son bord méridional. — Lorsqu'on examine l'allure en coupe des terrains primaires, on observe une tendance manifeste au déversement des plis les plus septen- trionaux d’entre eux vers le Nord. On voit ce déver- sement cesser rapidement lorsqu'on quitte le bord de la zone centrale et qu'on se dirige vers le Sud. 454 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE On atteint alors une zone où, sur le trajet d'un même pli, le déversement devient variable. Plus au Sud, on observe exclusivement un régime de poussées vers le Sud, traduit par la structure imbriquée et le plongement isoclinal des couches vers le Nord. Les chevauchements sont de vrais plis-failles, profondément enracinés dans ces ter- rains primaires, et par suite ayant un régime dif- férent de celui des charriages qui existent sur le bord septentrional, lesquels, comme nous l'avons vu, se sont surtout établis aux dépens de la couverture secondaire et sans s'enraciner dans les terrains primaires. Ce régime de plis déversés au Sud est la règle pour les {errains primaires pyrénéens, lorsqu'ils n'ont pas été déformés ultérieurement. L’explica- tion formulée par M. Léon Bertrand consiste à admettre que les plis hereyniens s'étant produits dans le géosynclinal pyrénéen après le Permien inférieur étaient déjà normalement déversés vers le Sud. Ce serait donc à un régime posthume, héri- tage du plissement des temps primaires, qu'il fau- drait rapporter les chevauchements imbriqués pas- sant à des nappes de charriage du type enraciné qui ont été signalées par de nombreux observateurs (MM. Bresson, Fournier, etc.). La thèse soutenue par le savant professeur, c'est que le sens général des poussées tangentielles récentes dans les Pyrénées est vers le Nord, tandis que la disposition contraire observée dans les Pyrénées centrales résulterait d’une circonstance locale, qui serail la préexistence d’un déversement en sens inverse dans les terrains primaires. Le Mémoire se termine par une esquisse de l'his- toire géologique de la région étudiée. Aux temps primaires, nous dit l’auteur, l'emplacement de la chaîne était occupé par un géosynclinal pyrénéen, dans lequel la sédimentation se poursuit jusqu'au Permien inférieur. Ce géosynclinal fut fortement plissé, après le dépôt des assises de cette dernière formalion, et antérieurement à celui des grès permo-triasiques. En effet, ceux-ci se rencontrent, le plus souvent, en discordance sur les couches primaires. Jusqu'au milieu du Crétacé, la sédimentation des terrains secondaires s'effectue dans un géosynelinal uord-pyrénéen. Le dépôt de ces terrains fut inter- rompu par une lacune correspondant au Jurassique supérieur et au Crétacé inférieur. La série se ter- mine par une épaisse masse de schistes d'âge albien. Au Cénomanien se produisit une nouvelle phase orogénique; la région nord-pyrénéenne fut définiti- vement émergée, la mer étant rejetée plus au Nord, sur l’avant-pays septentrional. Au Crétacé supé- rieur, la transgression vers le Nord s’'accentua, et à la fin du Lutétien eut lieu une autre phase, dont le début fut marqué par la production des « Pou- dingues de Palassou ». Des mouvements impor- tants s'effectuèrent sur le bord septentrional, et c'est alors que se produisit la translation des nappes charriées de ce versant. La fin de la formation des nappes semblerait dater de la partie lerminale de l'Oligocène inférieur (Stampien). La dernière phase orogénique se placerait donc à une époque sensi-. blement la même que celle ayant fait disparaitre le géosynelinal nummulitique alpin. > L'histoire de la formation des Pyrénées, conclut notre confrère, « montre qu'elles se sont constituées par une série de phases orogéniques à peu près comparables dans leurs effets à celles des Alpes, mais non synchroniques. Si l'on cherche à les paralléliser, 1l faut vieillir notamment les diverses phases observées dans les Alpes pour en retrouver d’analogues dans les Pyrénées ». II. — TECTONIQUE DE LA CHAINE DE L'ARRABIDA (PORTUGAL). La géologie de la région portugaise est actuelle- ment connue dans ses traits principaux, — pour ce qui à trait plus spécialement aux terrains secon- daires, — grâce aux remarquables travaux d'un géologue suisse, M. Paul Choffat. Attaché au Service de la Carte géologique du Portugal, ce savant à publié en 1908' une intéressante étude sur une chaîne, la Chaïne de T Arrabida, qui forme le bord méridional de la presqu'ile de Setubal, s'étendant de Palmella au cap d'Espichel, suivant une direc- tion générale de E. N. E. à O.S. O. Cette chaine, nous dit l’auteur, « présente toul un traité de géologie, autant par sa structure que par suite des nombreux changements de facies des strates qui la composent ». Toutefois, au point de vue de la stratigraphie paléontologique, l'étude de détail reste à faire. Il n’en est pas de même des problèmes relatifs à la structure, que M. Choffat à. pu élucider complètement, malgré une complica- tion extrême occasionnée par la présence de nom- breuses dislocations transversales, ainsi que par le renversement et l’étirement des plis. Nous ne nous occuperons que de la partie du Mémoire traitant de ces dislocations. La chaine de l'Arrabida n'est que l'extrémité nord-est d’une chaine beaucoup plus étendue qui s’est effondrée dans l'océan. Elle s'élève brusque- ment au-dessus du plateau pliocène, dont les points les plus élevés situés à son pied dépassent rarement 80 mètres, tandis que la chaîne a une altitude de 393 mètres vers son extrémité orientale (S. Luiz), 1 P. Cuorrar : Essai sur la Tectonique de la chaine de l'Arrabida. Commission du Service géologique du Portugal, Lisbonne, mp. nat., 1908. ile ss J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE et présente son maximum (499 mètres) vers le milieu de sa longueur (Formosinho). Considérée dans son ensemble, elle est formée par trois lignes d'anticlinaux orientées E. N. E., se succédant en retrait vers le Nord, lignes d'autant plus récentes qu'elles sont plus septentrionales. La première ligne de dislocations s'étend du cap d'Espichel à Portinho. La partie la plus compliquée se trouve aux environs de Cezimbra, dont les dislo- cations comprennent deux accidents principaux : l'anticlinal du chäteau de Cezimbra et le monocli- nal d'Ares. Une faille limite ce dernier du côté de l'Ouest, et coupe obliquement le premier, qui ne la dépasse pas. ; Ces deux accidents se réunissent à leur extrémité septentrionale, où ils sont coupés par une autre faille transversale (faille de Sant’Anna). Un certain nombre dedislocationstransversalesaffectentencore l’anticlinal du château. Elle consistent en décro- chements horizontaux, changement brusque dans la direction et l’inclinaison des bancs, affaissement des calcaires plérocériens. Enfin, il faut signaler des intrusions de feschénite, surtout localisées dans les marnes de l'Infralias. Les autres accidents appartenant encore à la pre- mière ligne de dislocations sont un horst transver- sal (Fort de Baralha), et quatre anticlinaux lon- gitudinaux, réduits à leur flanc septentrional (Espichel, Burgao, Risco, Solitario), limités au Sud par l'Océan qui empèche d'en observer la base. La deuxième ligne de dislocations, qui commence au Nord de l'extrémité orientale de la première, est formée par deux plis anticlinaux : l’anticlinal de Formosinho et l’anticlinal du Viso. L'axe de ce dernier empièle un peu sur l'extrémité Est de l’autre. Le premier de ces plis est déjeté vers le Sud; le flanc septentrional présente une succession régu- lière de bancs, tandis que, par suite du renverse- ment, le flanc sud montre des couches plongeant aussi vers le Nord. Comme cette inclinaison des couches renversées est la même que celle des couches normales, il semble, à première vue, qu'on ait à faire à une même série de strates. Ce pli est affecté de nombreuses dislocations transversales. En premier lieu, c’est une dévia- tion des couches vers le Sud, à l'extrémité orientale de la chaîne; en second lieu, se voient plusieurs petits décrochements horizontaux qui se montrent entre Outäo et Alto-do-Picoto. A l'Est de ce dernier point s’observe un autre décrochement un peu plus important, et correspondant à peu près à la brisure du plateau d’Anixa, ainsi qu'à la déviation brusque de la ligne de faite, vers le Sud-Ouest. L’anticlinal du Viso offre un type spécial. Les . flancs en sont très redressés, et une faille longitu- 455 dinale fait disparaître le Bathonien du flanc septen- trional; elle introduit un paquet de Néojurassique entre le « Lusitanien ! » et les dolomies bajociennes. La troisième ligne de dislocations est composée des anticlinaux de Säo Luiz, de Gaiteros et de l'écaille de Palmella. Elle est séparée des plissements de la seconde ligne par une grande bande crétacique et tertiaire, et est limitée vers le Nord par la branche septentrionale de cette même bande. La montagne de Säo Luiz consiste en dolomies et calcaires s'élevant de 200 à 300 mètre au-dessus des terrains moins résistants qui les entourent. Une faille transversale la divise en deux parties dis- tinctes, la partie occidentale étant plus élevée et plus abrupte que la partie orientale. Le noyau du pli est formé par un complexe dolo- mitique présentant une forte inclinaison du côté méridional. La base en est constituée par le Siné- murien et par quelques pointements de marnes infraliasiques. ! La colline de Gaiteros est constituée par un cha- pelet de dolomies liasiques, recouvert au Nord par un massif de conglomérats du Néojurassique, et reposant sur une bande de ces mêmes terrains. Ces trois bandes sont à plongement nord. Au pied de la bande inférieure se trouvent les couches miocènes souvent cachées par des éboulis ou du Pliocène. Le contact de ce Miocène avec les terrains plus anciens, se demande l’auteur, est-il dû à une faille ou à un recouvrement? Cette seconde interprétation lui semble plus probable, l'avancement de la ligne reliant les extrémités des bancs dolomitiques de Fazendinha et de Sâäo Luiz indiquant bien un mou- vement plus ou moins horizontal. La colline de Palmella, comme la précédente dont elle est la continuation, est une voûte déjetée vers le Sud. Cette voûte présente la particularité d'être rasée presque horizontalement et recouverte par une « écaille » de Miocène, à bancs nettement inclinés vers le Nord. La troisième ligne de dislocations est aussi affectée de nombreuses dislocations transversales. Elles sont surtout sensibles dans le noyau ancien, et l’on peut spécialement citer celle terminant le noyau de Sào Luiz, à ses deux extrémités, et aux deux tiers orientaux, en produisant un affaissement graduel vers l'axe. Un profil schématique de la chaîne, ramené sur une ligne transversale, montre, du Sud au Nord, le pli effondré du littoral, auquel succèdent le pli déversé de Formosinho, le chevauchement de Säo Luiz et enfin celui de Palmella. L'étirement des 1 M. Choffat appelle Lusitanien les dépôts inférieurs du Néojurassique correspondant à peu près au Séquanien et à l'Oxfordien des géologues francais, le Callovien étant classé par lui dans le Mésojurassique. 456 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE strates et leur chevauchement sont d'autant plus accentués que les plis sont plus récents. Pour terminer, M. Choffat se demande quelles sont les causes ayant amené la chaine de l’Arrabida à présenter des plissements aussi accentués, pen- dant que les plis de la région mésozoïque au Nord du Tage ne sont que de faibles ondulations. « L'obs- tacle, dit-il, contre lequel se sont brisés les plis de l'Arrabida est actuellement recouvert par l'océan ; mais il en reste des témoins dans les ilots dévoniens situés entre Palma et Santa Suzanna, entourés d'Oligocène et de Miocène redressés, et se trouvant sur le prolongement d'une ligne de hauteurs rela- lives, traversant la pénéplaine de l’Alemtejo jusqu'à Elvas. Peut-être y a-t-il une connexion entre cette ligne et la ligne de hauts fonds s'étendant entre celte partie de la côte et l'ile de Madère. » IT. — GéoLoGiE pu Maroc. Bien qu'ayant été parcouru par de nombreux voyageurs, les géologues anglais Maw et Thomson, les géographes allemands von Fritsch, Rein, Theo- bald Fischer, elc., le Maroc était resté, jusqu'à ces dernières années, très peu connu au point de vue de sa constitution géologique. Aucune vue d’en- semble n'avait pu être émise, les données recueillies étant assez sommaires, souvent même fautives, ne s'appuyant sur aucune preuve paléontologique sérieuse. En 1905, MM. A. Brives et P. Lemoine ont publié d'intéressants documents, principalement sur la partie de la contrée connue sous le nom de Bled Makhzen (Maroc occidental). M. Brives' a donné quelques renseignements sur la composition des couches crétacées dans la partie comprise à l'Ouest du méridien de Mazaghan, s'étendant dans les tri- bus de lAbda, du Chiadma, de Mtouga des Haha, des Ida ou Tanan, jusque dans la vallée du Sous et au pourtour de l'Anti-Atlas. Les fossiles trouvés lui ont permis de diviser le Crétacé en deux séries : l'une inférieure (Hoplites Boissieri Pictet, Ostrea Couloni d'Orb., 0. Aquila d'Orb.), correspondant au Crétacé inférieur, l’autre supérieure, caracté- risée par l'Acanthoceras Mantelli Sow., l'Ostrea flabellata d'Orb., etc., correspondant au Crétacé moyen. De plus, il a fourni quelques indications, réunies sous forme d'itinéraires, ayant trait au Haut-Atlas marocain*. Quant à M. Lemoine”, il n'a parcouru que le Bled Makhzen, mais il y a fait de nombreuses décou- 1 A. Brives : Les terrains crétacés dans le Maroc occi- dental. Bull. Soc. géol. de France, 4° s., t. V, p. 81, 4905. * A. Brives : Contribution à l'étude géologique de l'Atlas marocain. Bull, Soc. géol. de Francr, 4 s., t. V, p. 379, 1905. ? Pauz Lemoine : Mission dans le Maroc occidental. Pu- blication du Comité du Maroc, Paris, 1905. vertes. La récolte d'Ammonites lui a permis d’affir- mer la présence du Barrémien à Pulchellia pulchella d'Orb. sp. et de l'Aptien à Hoplites du gr. de Hop- lites consobrinus d'Orb. et à Crioceras cf. Waageni Anthula. Ces niveaux n'avaient pas encore été reconnus dans ces régions. En outre, il a signalé un beau gisement de fos- siles cénomaniens sur les deux bords de l'Oued Tidsi, au Sud de Mogador. 11 a été le premier à indiquer, au Djebel Habid, des couches apparte- nant au Jurassique, et à élucider la tectonique de cette chaîne qui présente un des exemples les plus curieux de ces dûmes anticlinaux très aigus qui sont connus dans le reste de l'Afrique du Nord. D'après ce savant, le phénomène de plissement se serait effectué sur le même emplacement et dans le même sens en deux phases, l'une postcrétacée et prépliocène, l’autre pliocène”. Toutefois, les résultats les plus importants, tant géologiques que topographiques, sont dus à M. Louis Gentil, maître de conférences à l'Univer- sité de Paris, auquel l’Académie des Sciences vient d'attribuer une partie du prix Gay. Dans une première Mission annexée à celle de M. de Segonzac (1904-1905), il a fail quatre voyages dans l’espace de sept mois. Dans le Nord du Maroc, il s'est rendu de Tanger à Tétouan par l'Andjera et le Haouz, tandis que, dans le Haut-Atlas, il explo- rait ensuite le Sous, les Ida ou Tanan et le Massif du Siroua. Il s'était d'abord proposé de s'occuper unique- ment de géologie et de résoudre le problème de la structure de la chaîne de l'Altas; mais, traversant certaines contrées où aucun Européen n'avait encore pénétré, il dut s'improviser topographe et relever ses itinéraires par cheminement à la bous- sole. Les variations d'altitude furent notées à l’aide du baromètre métallique, tandis que les croquis et les notes étaient complétés par une série de plus de 500 photographies orientées et soigneusement . repérées sur les carnets de marche*. Grâce aux documents ainsi recueillis, il a pu dresser une carte à de la région parcourue, L 250.000 où sont tracés ses ilinéraires ainsi que les con- tours géologiques qu il a recoupés. Cette carte four- nit à nos connaissances de celte partie du Maroc, tant topographiques que géologiques, une contribu- tion très importante. L'auteur à eu d'autant plus de mérite à recueillir les documents nécessaires à l'établir que ses voyages se sont effectués dans des conditions particulièrement difficiles. Traversant des tribus hostiles (« Bled es Siba »), il a dù 1 P. LEMOINE : Loc. cit., 180. 3 Louis GENTIL : Itinéraires dans le Haut-Atlas marocain. La Géographie, 4. XVII, n° 3, p. 178 (15 mars 1908). Loc. cit. J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 457 prendre le vêtement indigène et ne se faire accom- pagner que d'un personnel restreint. En 1906, il consacrait un ouvrage spécial au récit détaillé de ses voyages, ouvrage couronné par l'Académie francaise, et auquel nous ren- voyons ceux de nos lecteurs qui désireraient se faire une opinion exacte d’une contrée sur laquelle avaient régné jusqu'alors les idées les plus erronées. Ces divers travaux lui ont permis d'essayer une synthèse de l'orographie du Maroc et de montrer les modifications à apporter aux cartes existantes, modifications qui ont trait à tout le Maroc ocei- dental et, dans l'Est, à la région septentrionale de la zone frontière. En se dirigeant du Nord vers le Sud, on peut reconnaitre quatre régions naturelles : la chaîne du Rif, la Méséta marocaine, le Haut- Atlas, l'Anti-Atlas. La chaîne du Rif est en continuité avec la chaîne bétique, à travers le détroit de Gibraltar. Les obser- vations straligraphiques et tectoniques faites dans la partie occidentale de la chaine marocaine, bor- dant la Méditerranée, sont concluantes à cet égard. Cette chaîne offre un axe calcaire liasique et se poursuit à l'Ouest par ce que M. Gentil a appelé la la Chaine de l'Andjera, laquelle aboutit au Djebel Mouca. De l’autre côté du détroit, le rocher de Gibraltar est le prolongement de cette arête lia- sique. La région littorale s'étendant de Rabat à Safi peut être désignée sous le nom de Méséla Maro- caine. Son substratum cristallin ou primaire forme une pénéplaine, qui à été recouverte par des dépôts crétacés et tertiaires à peu près horizontaux. Ce plateau, dont les altitudes ne dépassent pas 300 mètres, doit être considéré comme limité au Sud par la petite chaine primaire, très régulière, des Dijebilet, et, à l'Est, par les avant-monts du Moyen-Atlas. ; Le Haut-Atlas ne se termine pas au Col des Bibaoun, comme on l'avait cru, mais il se poursuil jusqu'à la côte Atlantique. Depuis ce col, le massif primaire est recouvert de terrains secondaires, jurassiques et crétacés, affectés de plis alpins, dont les axes s'abaissent assez brusquement pour «s’en- noyer » sous le Crétacé avant d'arriver à la côte. Au sud de Demnat, on se rend nettement compte que ces dépôts secondaires portent la trace des plissements alpins el que ce sont ces plissements qui donnent au Haut-Atlas sa structure en chainons parallèles. On arrive ainsi à la notion que le Haut- Atlas décrit, à partir de Tolouet, une courbe tour- nant sa concavité vers le Nord. Au Sud du Haut-Atlas marocain, se trouve un * Louis GexriL : Dans le « Bled es Siba ». Explorations au Maroc. Paris, Masson el Cie, éditeurs, 4906. massif puissant, le Djebel Siroua, massif qui doit être considéré comme la naissance d'une chaîne moins importante, l'Anti-Atlas. Cette chaine est encadrée, au Nord dans la vallée du Sous, au Sud dans celle du Draa, par des plateaux formés de terrains crétacés horizontaux. Le Djebel Siroua * forme un volcan qui semble pouvoir être rapporté au Néogène, si l'on tient compte de sa forme et de son état de conservation. Ses déjections se succèdent sur une puissance totale de plus de 1.000 mètres et recouvrent une superficie que les constructions cartographiques permettent d'inscrire dans une circonférence d’au moins 20 kilomètres de rayon. Quant aux roches du massif volcanique, elles peuvent se grouper en deux séries : l’une /rachy- tique, l'autre phonolitique. La composition chi- mique des deux types extrèmes, liés entre eux par un trachyle à biotite et haüyne, montre qu'on se trouve en présence d’une même province pétro- graphique. Les observations stratigraphiques n'ont égale- ment pas été négligées par notre savant confrère, et il a pu reconnaître les formations suivantes : 1° Cambrien et Algonkien (Précambrien), con- sistant en schistes argileux et chloriteux avec filons de quartz; 2 Silurien, formé de schistes et grès quartziteux avec schistes noirs, dans lesquels il a eu l'heureuse chance de trouver des Graplolithes, ce qui permet un classement précis de ces schistes dans toute l'Afrique du Nord; 3° Dévonien (schistes et grès) ; 4° Carboniférien, dont l'étage inférieur, le Di- nantien, est seul actuellement reconnu; 5° Permien, formé d'une épaisse succession de grès fluviatiles ou lagunaires rouges, intercalés d'assises gréseuses et de conglomérats, renfermant fréquemment à la partie supérieure des dépôts de gypses salifères ; 6° Trias, constitué par des dépôts gypseux el salifères avec marnes bariolées et grès rouges, le plus souvent inséparables des dépôts similaires du Permien ; 1° Jurassique, développé dans l'Est, et formé de calcaires massifs auxquels succèdent des calcaires en bancs intercalés de marnes; 8° Crétacé, jouant un rôle très important, sur- tout dans l'Ouest, ainsi qu'au Nord et au Sud du Haut-Atlas. L'existence à peu près complète de cette formation a été constatée notamment à l'ex- trémité de la chaîne, formant la zone littorale atlantique comprise entre Mogador et la plaine du 4 L. Genriz : Sur le volcan du Siroua (Anti-Atlas maro- cain). C. R. Acad. des Sc., n° du 30 mars 1908. 4538 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE Sous. Les recherches de M. Gentil ont fourni de nombreux matériaux, dont les déterminations pa- léontologiques ont été faites au Laboratoire de Géologie de l'Université de Grenoble par M. W. Ki- lian avec le concours de M. V. Reboul. Les horizons particulièrement riches en fossiles et nettement caractérisés sont les suivants : Haute- rivien inférieur, Hauterivien supérieur, Barémien, Aplien, Gault et Cénomanien. Un gisement de Gault spécialement intéressant se trouve sur le flanc septentrional de la chaine, au bord de la grande plaine de Marrakech, à Imin-Tanout. Dans cette localité ont été trouvés : Parahoplites Ubligi Anth, Par. Nolani Seunes sp., Par. Milletianus d'Orb. sp. La partie supérieure de l'étage, dans la vallée de l’oued Tdzi, des Ida ou Guerd, renferme les fossiles phosphatés caractéristiques de la zone à Schlænbachia Bouchardiana de la Perte du Rhône (Seblænbachia in flata Sow.sp., Schl. Bouchardiana Pictet sp. (typique), Acanthoceras Brottianum d'Orb. sp., ete.). MM. Kilian et Gentil! font remarquer que les formations néocomiennes du Maroc appartiennent au bord méridional du géosynelinal méditerranéen. On y voit apparaitre les formes caractéristiques des régions marginales septentrionales de ce même géosynclinal, alors que dans les régions profondes régnaient des espèces peu ornées (Desmocératidés, Phyllocératidés, Lytocératidés). Quant aux terrains tertiaires, les formations cal- caires à silex n'ont pas été distinguées comme pou- vant appartenir à l’'Eocène inférieur. Par contre, les grès coquillers du Pliocène, s'étendant le long de la côte atlantique, ont été séparés des alluvions des grandes plaines et des dunes maritimes. Dans une seconde Mission que lui ont confiée le Gouvernement, la Société de Géographie et le Co- milé du Maroc, M. Gentil devait étudier le Sud- Marocain. Malheureusement, il n’a pu exécuter le programme tracé, son compagnon, le D' Mau- champ, ayant été assassiné. 11 à dû se reporter sur la frontière algérienne et étudier les environs de Tanger, la région du R'arb et la zone frontière d'Oudja”. Dans les environs de Tanger, le Pliocène du littoral atlantique est identique par son facies et ses fossiles à celui des environs de Tétouan, dans la vallée de Oued-Martil. Dans la région du R'arb, un fait important par sa remarquable constance 1 W. Kazan et L. Genre : Sur les terrains crélacés de l'Atlas occidental marocain. C. A. Acad. des Se.,t. CXLIV, p. 49-51. Paris, 1907. 19. : Sur l'Aplien, le Gaull et le Cénomanien et sur les caractères généraux du Crétacé inférieur et moyen de l'Atlas occidental marocain. C. R. Acad. des Se., t. CXLIV, 1907, p. 105-107. * La Mission Louis Gentil au Maroc en 1907. Documents du Comité de l'Afrique française et du Comité du Maroc, n° 2, p. 33. Paris, 1908. sur de grandes surfaces est celui de l'existence d'un niveau d'eau à la base des grès pliocènes. Enfin, dans la zone frontière d'Oudja, — limitée au Sud par une ligne El Aricha-Berguent, et au Nord parla mer, — 4 chaines parallèles s'étendent de l'Est à l'Ouest et sont, en allant du Sud vers le Nord : 1° La chaîne du Dyebel Sidi-EI-A bed; 2° La chaîne des Peni-Bou-Zegqou; 9° La chaine des Peni-Snassen; 4° La chaine côtière du Sahel du Chems. Ces rides montagneuses séparent des régions de plaines importantes : la région des Gada, la plaine des Angad, la plaine des T'rifas. L'auteur à consacré une étude spéciale au massif des Beni-Snassen, lequel, dit-il, « offre une indivi- dualité autant au point de vue orographique qu'au point de vue politique* ». La série stratigraphique observée appartient aux terrains primaires et aux terrains jurassiques. Le Crétacé ne paraît point représenté. Par contre, sur le bord septentrional se trouvent quelques dépôts appartenant au Néogène. En outre, de nombreuses roches éruptives de profondeur ou d'épanchement ont été rencontrées. Elles appartiennent à trois époques différentes : les unes, de profondeur et de demi-profondeur, datent des temps paléozoïques; les autres. appar- tiennent à deux phases volcaniques. L'une de ces phases remonte à la fin de Ja période primaire ou au début du Secondaire, tandis que l’autre date du Néogène. LS Au point de vue tectonique, le massif des Beni- Snassen consiste en un vaste bombement ellip- tique, dont le grand axe serait dirigé N.N.E.-S.S.O. La carte géologique accompagnant le Mémoire de l’auteur permet de se rendre compte de cette dis- position. Dans l’ensemble s'observe un plongement des couches secondaires autour du noyau primaire. Korn-ecb- Toutefois, le massif n’est pas un simple dôme, mais - est affecté de plis lui donnant une structure plus compliquée. : Les plus anciens affectent les schistes siluriens et doivent se raccorder avec ceux signalés dans le massif des Trara. Is appartiennent à une ancienne chaine (armoricaine ou varisque), mais ont été repris par les plissements tertiaires, affectant les dépôts liasiques et jurassiques. Un fait important se dégage des coupes relevées à travers la chaîne : c'est la trace de poussées vers le Sud. « I n'est pas douteux, conclut M. Gentil, que le massif des Beni-Snassen ait participé aux efforts 1 L. Gexniz : Esquisse géologique du massif des Beni- Snassen. Bull, Soc. géol. de France, 4° sér., t& NI, 15 juin 1908. ? L. Genre : Loc. cit. À J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 459 tangentiels qui ont poussé vers le continent la nappe de charriage décrite plus au Nord, à partir de l’oued Kiss, car il en porte nettement l'empreinte, quoique bien atténuée ». Les observations du savant maitre de conférences lui ont encore permis d'établir l’origine des firs ou terres lortes auxquelles est due la fertilité du bas plateau bordant l'Atlantique, sur plusieurs cen- taines de kilomètres. Elles ne sont pas d’origine -éolienne, comme on l'avait présumé, mais elles sont dues à la décaleification des grès calcarifères, néogènes, dont la composition est très uniforme, sur une étendue de plus de 600 kilomètres. L'Académie des Sciences de Paris a été bien inspirée en attribuant à M. L. Gentil une de ses plus hautes récompenses, car ce géologue a effectué un ensemble de recherches vraiment remarquable, - recherches qu'il a pu mener à bien malgré des difficultés de toute nature. IV. — APERÇU GÉOLOGIQUE SUR LES MOLUQUES ET L'ENSEMBLE DES INDES NÉERLANDAISES. Sous le titre : Rapport sur les Moluques, M. R. D. M. Verbeek * — qui depuis quarante ans se con- sacre à l'étude des possessions hollandaises orien- tales, et qui, en 1905, a communiqué une description géologique de l’île d'Ambon*— a livré à la publi- cité, en mai 1908, un volumineux Mémoire con- sacré à la description des Iles, au nombre de 250 environ, qui sont situées entre Célèbes et la Nouvelle-Guinée. Ce Mémoire débute par un récit du voyage effectué par l’auteur en 1899. Ce récit, nous dit-il, «n'a pas seulement pour but de mettre le lecteur au courant de l'itinéraire suivi, mais de l’orienter en quelque sorte dans la structure géologique très compliquée de la partie orientale de l’Archipel des Indes Néerlandaises; cette structure diffère à - maint point de vue de celle de la partie occidentale, surtout pour ce qui regarde l'apparition de terrains mésozoïques, el l'existence de calcaires coralliens récents, élevés à une hauteur considérable au-dessus du niveau de la mer, mais qui font complètement défaut dans la partie occidentale de l’Archipel ». La seconde partie du Mémoire est consacrée à ‘étude des diverses iles. Elles sont décrites d'après la division administrative à laquelle elles appar- tiennent, en allant de l'Ouest à l'Est. De nom- L. Gexric : De l’origine des terres fertiles du Maroc occidental. C. R. Acad. des Se., 3 février 1908. ? R. D. M. Veregex : Rapport sur les Moluques (Recon- naissances géologiques dans la partie orientale de l’Archipel des Indes orientales néerlandaises); Batavia, Imprimerie de l'Etat, 1908. * In. : Description géologique de l'ile d'Ambon; Batavia, - Imprimerie de l'Etat, 1905. breux échantillons de roches (888), appartenant à dix-sept formations différentes, ont été récoltés et sont Ils ont permis d'établir l'esquisse d'une carte géologique donnant successivement décrits. une idée générale de l'extension des divers ter- rains. Cette carte pourra servir de base aux futurs travaux, et engagera les géologues à se consacrer à la visite des îles qui, par suile de circonstances diverses, n'ont pu être qu'imparfaitement explo- rées. Enfin, comme conclusion de son travail, le géo- logue hollandais nous donne un apercu général sur les Moluques et l’ensemble des Indes Néerlandaises. Nous résumerons celte dernière partie, en nous reportant aux précédents chapitres pour les parti- cularités géologiques qui nous semblent mériter de fixer plus spécialement l'attention. Le terrain le plus ancien se montrant dans le groupe d'îles étudiées par M. Verbeek consiste en roches schisteuses, sans fossiles, dont l’âge n’a pu être précisé. Dans le nombre se trouvent probable- ment des roches archéennes, tout aussi bien que des roches paléozoïques. Elles forment la base sur laquelle se sont déposés les autres sédiments. Les gneiss y sont relativement rares; les schistes micacés, les phylites et surtout les amphibolites y sont fort répandus. Ces couches sont généralement très redressées, plissées et comprimées irrégulière- ment. De plus, elles sont associées à des roches éruptives basiques, dont les unes, à l’état métamor- phique et schisteux, leur sont intimement associées et ont été plissées et redressées avec elles, tandis que les autres semblent être plus jeunes. Les roches granitiques sont également assez fré- quentes, moins cependant que les roches éruptives basiques. Elles sont plus jeunes que ces dernières, et se montrent parfois en filons dans les pérido- ttes et les gabbros. Ces schisies anciens sont très répandus dans les îles Manipa, Léti, Louang, Pélèng, Célèbes, Bornéo, Karimoun, Java, Billiton, Sumatra et dans la pres- qu'ile de Malacca. Au-dessus des schistes anciens déjà redressés, on trouve, comme roches franchement sédimen- taires, des couches d'âge paléozoïque supérieur. Les plus anciennes s'observent à Sumatra, et appartiennent au Carbonifère supé- rieur. A Timor, Léti, Louang et Babar se trouvent des couches d'âge permien consistant en calcaires com- pacts, calcaires arénacés fossilifères, calcaires à Crinoïdes et grès, qui se sont déposés dans une mer de faible profondeur. Un fait important à faire remarquer, c’est l’ana- logie entre les fossiles des couches permiennes de Timor et ceux des mêmes couches de Salt-range assises les 460 J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE (Pendjab) aux Indes britanniques. À cette époque existait done une mer continue entre les deux régions. Les roches triasiques des Moluques consistent en calcaires à Halobia, Daonella et Radiolaires, ainsi qu'en grès calcarifères à débris de plantes. Les calcaires sont partiellement silicifiés et ressemblent parfois à de vraies radiolarites. On connaît des roches triasiques à Savou, Roté, Timor, Céram, Misool, à l'Est de Célèbes, et en dehors des Moluques, dans l'Ouest de Bornéo et dans l'Est de Sumatra. La constitution géologique de Savou mérite d'être signalée. Le sous-sol en est constitué par des roches permiennes sur lesquelles reposent des caleaires à Halobies, des grès et de la lydite à Radiolaires. À une époque plus récente, se déposèrent ensuite des marnes blanches et des calcaires coralliens qui, au milieu de la partie occidentale de l'ile, montent à l’altitude de 300 mètres et, de ce point, s'élèvent en pente douce vers le Nord. Ajoutons que les fossiles triasiques des Moluques se rencontrent aussi en partie dans l'Himalaya et en partie dans les Alpes. À l’époque triasique, il existait donc une mer reliant la région méditer- ranéo-alpine à l'archipel néerlandais, en con- tournant l'Hindoustan par le Nord. Des roches jurassiques s’observent dans l'ile de Roté, à l’état de déjections meubles d'une source boueuse. Des couches en place de la même forma- tion ont été observées en 1899 par l'expédition du Siboga à Misool. Les espèces recueillies appar- tiennent au Lias inférieur, au Lias supérieur, au Mésojurassique (divers étages) et au Néojurassique (Oxfordien). A signaler également des fossiles juras- siques aux Célèbes, à Taliabo, à Bourou, Céram, Timor ainsi qu'en Nouvelle-Guinée. Ils appar- tiennent au Lias inférieur, au Mésojurassique et au Néojurassique (Oxfordien). Le Professeur Bækm a indiqué à Taliabo et à Mangoli des couches appartenant à un étage infé- rieur du Crétacé. A l’ouest de Bourou, il a découvert des couches du Crétacé supérieur avec des Tissoltia. En dehors des Moluques, ce dernier terrain a été rencontré sur les côtes ouest etsud-ouest de Bornéo, ainsi qu'à Java et à Sumatra. Pendant la période mésozoïque, des roches érup- lives se sont fait jour à diverses reprises, et on en a trouvé des débris dans les couches jurassiques de Bourou. Toutefois, c'est à une période plus récente que doivent être rapportées les andésites, les dacites etautres roches affleurant surtout à Ambon, au Ouliaser, à Amblau et à Wetar. On connait éga- lement des diabases, des péridotites, des serpentines et des gabbros d'âge crétacé provenant de Bornéo et de Java. Les roches éocènes des Moluques — qui sont beaucoup plus répandues qu'on ne l'avait supposé — consistent en calcaires quartzifères, calcaires marneux à Nummulites, Discocyclines (Ortho- phragmina des géologues francais) et Alvéolines. Elles s’observent dans l'Ouest de Timor à Rend- jouwa, à la Nouvelle-Guinée, à Misool, Halmahéra, Bourou, Célèbes. Les calcaires de Groot-Kei, qui renferment des Discocyclines extrêmement petites, sont aussi d'âge éocène, mais appartiennent pro- bablement à un étage plus récent que les calcaires à Alvéolines. En dehors des Moluques, des couches éocènes se rencontrent dans le sud-est de Bornéo et à Java. Les dépôts miocènes sont principalement formés de débris d'andésite et de basalte; on rencontre aussi des brèches, des grès, des marnes et des cal- caires n'ayant pas conservé leur position horizon- tale et ayant subi parfois des plissements assez intenses. La petite ile de Rendjouwa est particulièrement intéressante à ce point de vue. Les couches de cal- caires marneux éocènes et les assises miocènes plus récentes sont très inclinées, ce qui prouve que, dans cette partie de l'Archipel, et jusqu’à la fin des temps tertiaires, la croûte terrestre a été soumise à des plissements et à des pressions très énergiques. Dans de nombreuses localités peuvent encore être constatés des plissements et des dislocations semblables d'âge post-miocène. Toutefois, aucune direction n’est constante; partout les couches sont plissées et relevées sous différents angles. Pour Java, par exemple, le plissement est venu du Sud, pour Sumatra du Sud et du Sud-Ouest. Par contre, les calcaires miocènes de Groot-Kei sont sensible- ment horizontaux, et forment des terrasses. Les sédiments plus récents (pliocènes et quater- naires), qui recouvrent en stratification discordante toutes les autres couches, ont été réunis par M. Verbeek sous la dénomination de ferrain coral- lien. Une grande partie d’entre eux consiste, en effet, en calcaires à Polypiers, qui sont accom- pagnés de calcaires marneux, de calcaires à Fora- minifères ou à Lithotamnium et de marnes tendres, de teinte blanche ou rouge clair. Ces roches sont disposées en terrasse autour des iles existantes. Elles ont émergé successivement, de telle sorte que les terrasses les plus anciennes sont celles qui ont la plus grande altitude. Lors des soulèvements successifs, les couches ont conservé, le plus ordinairement, une position horizontale. Cependant, on y observe parfois de légères inclinaisons, qui sont d'autant plus pronon- cées que les calcaires sont plus anciens, c'est-à-dire qu'ils sont plus élevés. Dans les calcaires pliocènes d’Ambon, on peut constater, parexemple, une ineli- . J. RÉVIL — REVUE ANNUELLE DE GÉOLOGIE 161 naison de 5° 1/2 à 4°, tandis que pour les calcaires quaternaires la pente n’est plus que de 1°. L'ile de Saleyer, située au Sud de l'extrémité méridionale des Célèbes, est intéressante à étudier au point de vue des calcaires coralliens, et les faits observés nous semblent mériter une mention spé- ciale. Divers dépôts calcaires s'y sont succédé depuis le Tertiaire supérieur jusqu'à l’époque actuelle, non sans interruption, mais avec des inter- valles de repos. Après chaque nouveau soulèvement de la côte, il se formait dans la mer un nouveau récif. En effet, depuis l'époque pliocène, les forma- tions calcaires se produisaient de facon continue, là où les conditions étaient favorables; seuls les soulèvements étaient périodiques. Vu le temps excessivement long que le dépôt des divers calcaires a demandé, on ne doit pas perdre de vue, écrit M. Verbeek, que « dans les régions tropicales on doit probablement accorder à l'époque pliocène une durée bien plus longue qu'en Europe, par exemple, et il semble qu'il en est de même de l'époque que l’on appelle quaternaire ». Abordant l'étude des phénomènes éruptifs, l'au- teur distingue deux groupes de roches : roches à leu- citeet néphéline, roches andésitiques et basaltiques. Les cônes volcaniques ont fait leur apparition à l’époque néotertiaire, mais se sont édifiés principale- ment pendant les temps quaternaires, par l'amon- cellement des produits d'éruptions autour des cratères. Plusieurs de ces volcans sont encore actifs. Quant aux sédiments quaternaires, ils présentent un très grand développement dans les Moluques. En font partie ces {errasses calcaires dont l'altitude ne dépasse pas 200 mètres, ainsi que des grès inco- hérents, des brèches et des conglomérats. Enfin, les dépôts modernes consistent encore en bancs cal- caires qui, dans le voisinage des côtes et même à une certaine distance, s'édifient continuellement par le travail des Polypiers, des Foraminifères et des Algues calcaires. Jetant un coup d'œil d'ensemble sur les phases par lesquelles a passé l'Archipel dans les périodes géologiques, l’auteur fait remarquer que les terri- toires occupés par les iles des Indes orientales ont constamment fait partie d'une même mer ( « La Téthys » de Suess), depuis des temps très reculés jusqu'à la période actuelle. En ce qui concerne la profondeur de cette mer, il ajoute que les zones abyssales ont été rares aux périodes géologiques antérieures, sauf dans une partie de la formation jurassique, où des dépôts à facies bathyal se présentent fréquemment. Le plus ordinairement, ce sont des mers peu profondes qui paraissent avoir dominé. Les bassins et les mers actuelles des Moluques ne doivent pas être considérés comme le restant d'une ancienne mer, partout également profonde, mais ils ont pris naissance par des affaissements de terre ferme et du sol de la mer de faible profondeur. A la place occupée aujourd'hui par la mer de Banda existaient, à l'époque tertiaire, des terres émergées. En dehors de cette région, il a dû exister aussi des terres qui, par leur mobilité, ont donné lieu à une compression et à un redressement des couches éocènes et miocènes. Quant aux affaissements prin- cipaux, ils ne datent que du commencement du Pliocène, et donnent la raison de la différence de position existant entre les assises miocènes el les sédiments des jeunes formations coralliennes. Nous avons vu que les premiers sont fortement redres- sés et plissés, tandis que les derniers sont hori- zontaux. Il s2 serait donc produit une modification dans l'énergie et la direction de la pression, et cette modification ne peut être attribuée qu'à l'immersion des masses continentales de cette époque. « Toutefois, écrit encore M. Verbeek, la force plissante n'a pas cessé d'agir, car les grands massifs de terre ferme n'ont pas disparu, mais se trouvent seulement à des profondeurs de quelques centaines, parfois même de quelques milliers de mètres plus grandes qu'auparavant. La pression exercée par ces massifs devra plisser les couches profondes, mais aux couches situées plus haut, à proximité de la surface, elle fera subir un déplacement vertical. » Le déplacement vertical des couches supérieures serait la conséquence du plissement des couches inférieures, et ce plissement est dû à la pression tangentielle des masses profondes voisines. Ces conclusions méritaient d'être soumises à l’ap- préciation des géologues ; elles nous semblent judi- cieuses et jettent quelque lumière sur la recherche des causes des mouvements ayant affecté l'écorce terrestre et susceptibles de l’affecter encore. J. Révil, Président de l'Académie des Sciences, Belles-lettres et Arts de Savoie. 162 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Czuber (E.), Professeur ordinaire à l'Ecole supé- rieure technique de Vienne. — Wahrschein- lichkeitsrechnung und ihre Anwendung auf Fehlerausgleichung, Statistik und Lebensver- sicherung (Le CALcUL DES PROBABILITÉS ET SON APPLI- CATION 4 LA THÉORIE DES ERREURS, A LA STATISTIQUE ET AUX ASSURANCES SUR LA VIE). 2° édition, t. [. — 4 vol. in-8 de x-410 pp., avec figures (Prix : 16 francs). Teubner, éditeur. Leipzig, 1909. Nous avons rendu compte ici même ‘ de la première édition du Traité de M. Czuber. La nouvelle édition, dont il commence aujourd'hui la publication, est considérablement augmentée : elle l'est assez pour que l’auteur ait été obligé de dédou- bler son ouvrage, et ne nous en offre actuellement que la première parlie. L'une de ces additions est celle de la probabilité re- lative. Tous les lecteurs l’approuveront; mais je ne sais si tous la constateront sans une nuance de sur- prise. Beaucoup d'entre eux, même parmi ceux qui ont à apprendre à la lecture d'un Traité de Calcul des Probabilités, n'en sont plus à ignorer le rôle classique de la distinction entre probabilité absolue et proba- bilité relative, et le nombre des sophismes — à com- mencer par le préjugé bien connu des « séries » à la roulette ? — qui n'ont d'autre origine que la mécon- naissance de cette notion. Le fait qu'un Traité moderne important ait pu être écrit, je ne dis pas sans la faire intervenir (M. Czuber ne mérite pas cette injure), mais sans la formuler très explicitement, leur mon- trera, s'ils pouvaient en douter, que l'exposition de cette branche de la science a encore plus d’un progrès à réaliser. M. Czuber a, d'autre part, consacré quelques pages aux notions de la Théorie des Ensembles qui com- mencent à intervenir dans le Calcul des Probabilités. Une telle intervention s'impose en l’état actuel de la science, et de récents travaux, comme ceux de M. Borel, la montrent comme devant être certainement féconde. Elle ne joue toutefois encore, dans la suite du volume qui nous occupe, qu'un rôle de pure forme. Mentionnons encore le nouveau chapitre sur la Théorie générale des phénomènes collectifs. Cette théorie, elle aussi, mérite actuellement d'être traitée à part, étant donnée la place qu'elle occupe dans les sciences expérimentales. Elle est, d’ailleurs. non moins intéressante au point de vue purement théorique et philosophique, comme M. Czuber le prouve en étudiant, avec M. H. Poincaré, l'exemple si curieux de la distri- bution des chilfres décimaux dans les tables de loga- rithmes. Ce chapitre marque la fin du volume actuel. Le reste de la troisième partie (statistique, assurances), que contenait encore la première édition, a dù être ren- voyé à un tome ultérieur. Regrettons, en terminant, que la proposilion grave- 1 Revue du 15 septembre 1905. ? Dans ces dernières années encore, une faute de cette nature à été — à notre avis — commise par ceux qui voient une contradiction entre les théories cinétiques et le prin- cipe de Carnot, Nous avons eu l’occasion de nous expliquer sur ce point, à propos de la Mécanique Statistique de Gibbs Bulletin of the American Mathematical Society, 2° série, t. XII; article reproduit dans le Bulletin des Sciences Ma- thématiques, 2° série, t. XXX). ment erronée déjà signalée par nous dans notre pré- cédent compte rendu (et qui occupe le n° 63, p. 97 de la nouvelle édition) n'ait pas été rectifiée cette fois. JacouEes H4apamarD, Professeur-adjoint à la Sorbonne. 2° Sciences physiques Janet (Paul). — Travaux du Laboratoire central d’Electricité. Recherches sur les Unités élec- triques fondamentales, avec le concours de MM. EF. Laporte, R. Jouausr et P. pe La GORGE. — 1 vol. in-8° de 129 pages, avec figures. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. On sait quelles divergences existent actuellement dans les différents pays entre les définitions fonda- mentales adoptées par leurs législations à la suite du Congrès de Chicago. Lorsque, à l'exemple de l’Alle- - magne, on définit l'ampère au moyen du nombre 1 milligr. 118, au lieu de conserver la définition théo- rique, on est conduit à une différence de 1/1.000 pour la f.6. m. à attribuer au Clark, et, par suite, à des diffé- rences systématiques de 1/500 sur les mesures de puissance et de 1/170 sur les mesures d'intensité lumi- neuse. D'autre part, on sait que l'étalon Clark, avec son coefficient de température élevé, convient mal pour les mesures potentiométriques, de plus en plus répandues dans l’industrie. Aussi, à la suite du Con- grès de Saint-Louis (1904), les quatre principaux labo- ratoires nationaux se sont-ils accordés sur un plan d'études à effectuer en vue d'arriver à fixer, avec une précision plus grande, les nombres approchés adoptés par le Congrès de Chicago, et qui, provisoirement, ont encore été conservés sans modification par la Confé- rence de Londres (octobre 1908), celle-ci s'étant bornée à substituer, pour les besoins de la pratique, l'élément Weston à l'élément Clark. Pour sa part, le Laboratoire central d’Electricité à réalisé un ensemble de recherches de haute précision concernant : 4° Les éléments étalons au cadmium ; 2 La détermination, par l’électrodynamomètre ab- solu, de Ja f.é.m. de l'élément au cadmium ; 3° L'équivalent électrochimique de l'argent. I. — L'élément au cadmium, à électrolyte saturé à 4°, tel que le construit la firme Weston, présente une f.é.m. parfaitement indépendante de la température - dans les limites usuelles, mais, malheureusement, cette f.6.m. diminue avec les années. D'autre part, les recherches, entreprises à la Reichsanstalt, pour réaliser un étalon saturé aux températures ordinaires, sem- blaient démontrer l'impossibilité d'obtenir des élé- ments concordant à plus de 1/10.060 à 2/10.000. C'est qu'il convient d’insister d'abord sur les propriétés par- ticulières des substances qui constituent l'élément au cadmium. fl importe, notamment, que le sulfate de cadmium, ainsi que le sulfate mercureux, ne présentent plus trace d’acidité; et, d'autre part, pour ce dernier, des lavages prolongés offrent l'inconvénient d'hydro- lyser partiellement le sulfate mercureux. M. Janet s’est proposé spécialement : 4° de déterminer le degré de concordance des f.6.m. avec des produits préparés par des procédés différents et par des laboratoires de Chimie différents; 2° de s'assurer de la constance des. éléments à des époques différentes; 3° d'envisager la réalisation industrielle de ces éléments en insistant sur les précautions minutieuses indispensables. Après un examen critique des anomalies signalées antérieurement M. Janet formule des conclusions très BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 463 nettes, auxquelles son habileté expérimentale éprouvée donne une haute valeur. Les divers groupes d'éléments ne présentent certainement pas la concordance affirmée antérieurement; les écarts de part et d'autre de la moyenne sont inhérents au mode de préparation chimique du sulfate mercureux. Cependant, il sera facile aux Laboratoires nationaux, chargés de la con- servation du volt dans leurs pays respectifs, de garder inaltérée la valeur de l'unité de f.6.m.; il leur suffira de s'accorder sur les modes de préparation et d’échan- ger entre eux, chaque année, un certain nombre d'éléments construits dans des conditions nettement précisées. Actuellement, chaque Laboratoire sait déjà conserver un élément normal bien défini, et les écarts entre les éléments des différents Laboratoires natio- naux sont inférieurs à 1/10.000. D'autre part, en ce qui concerne uniquement le point de vue industriel, les divers procédés de préparation du sulfate mercureux sont pratiquement équivalents, et les produits purs du commerce suffisent; les écarts ne dépassent pas 1 /5.000. De plus, le coefficient de température des éléments type Weston, très robustes, est pratiquement nul entre 20° et 5°. IT. — Les piles étalons au cadmium pouvant être réalisées avec une concordance supérieure au 4 /10.000, alors que, sur l'équivalent électrochimique de l'argent, il subsiste encore des désaccords de près de 1/1.000, il est préférable de déterminer, avec l'électrodynamo- mètre absolu, laf.é.m. d'un étalon au cadmium, au lieu de déterminer directement l'équivalent électro- chimique de l'argent. Le point délicat est la construc- tion même et l’étalonnement d'un électrodynamomètre absolu de haute précision. Le dispositif adopté par M. Janet est l'électrodynamomètre-balance. L'exposé très complet du mode de construction et des réglages montre avec quelle ingéniosité et quelle précision a été résolu le problème de l'enroulement régulier des bobines sous tension constante, ainsi que le calcul du diamètre moyen des différentes couches de fil, déduit de la mesure précise, avec le concours de M. Ch. Ed, Guillaume, de la longueur du fil enroulé sur la bobine. Le calcul de la constante de l'appareil relative à la force qui équilibre, à l'endroit considéré, l’action d’un courant de 1 ampère (10—1C.G.S.) circulant dans l'appareil, repose sur les formules de Maxwell et de Lord Rayleigh. L'erreur à craindre dans le réglage de la bobine mobile, exactement au milieu de la distance entre les bobines fixes, est absolument négligeable. I] est tenu compte, d'autre part, de l'erreur parasite due à l'action des bobines fixes, d'un côté, sur la bobine mobile, de l’autre. Pour les mesures, on place en série avec l'électrodynamomètre une résistance r rigoureu- sement connue, voisine de 3, et l’on y fait passer un courant maintenu constant au 1/50.000 et d’une inten- sité d'environ 1/3 d'ampère. On règle le courant de manière que la d.d.p. aux bornes de la résistance soit égale à la f.6. m. de l'élément moyen au cadmium du Laboratoire central d'Electricité. L'intensité 7 du cou- rant étant mesurée par l'électrodynamomètre, la f. 6. m. de l'élément employé est immédiatement ri. La valeur définitive obtenue par M. Janet pour l'élément normal du Laboratoire central est, à 209, 17,01869. Ce nombre est légèrement plus élevé que les nombres obtenus au Bureau of Standards et au National Physical Labora- tory. M. Janet, enétudiant les divergences de l’ordre de 5/10.000 entre les résultats obtenus, est amené à con- clure que ces différences sont dues, en partie, aux électrodynamomètres des différents laboratoires, et il conviendra, pour les faire concorder, d'entreprendre des mesures de comparaison. Elles sont dues, partiel- lement aussi, à l'évaluation des résistances employées. M. Janet n'a eu à sa disposition que les étalons mercu- riels secondaires possédés par le Laboratoire, ou prêtés gracieusement par M. Benoît. Il est vraiment regret- table qu'il n'ait pu disposer des ohms légaux eux- mêmes, déposés au Ministère des Postes et Télé- graphes. Leur caractère d'étalon légal interdit, paraît-il, d'y recourir, même pour les mesures qui doivent s'y rattacher directement, et desquelles dépend le bon renom de la Science francaise. II. — Pour la détermination de l'équivalent électro- chimique de l'argent, M. Janet à adopté un voltamètre dont les deux électrodes sont formées d'une capsule et d'une coupelle hémisphériques concentriques, ce qui lui à permis de régulariser les lignes de force et d'obtenir un dépôt remarquablement uniforme. Le courant utilisé était d'environ 04,5. Les résistances étalons et l’étalon au cadmium étant rigoureusement les mêmes que dans l'étude précédente, et ne servant que d'intermédiaires pour le réglage de l'intensité, celle-ci peut être regardée comme mesurée en valeur absolue par l’électrodynamomètre lui-même. M. Janet parvient au nombre 1,11821. En terminant, il signale combien cette méthode de détermination de l'intensité est longue, délicate et pénible; aussi ne peut-il se défendre de souhaiter l'adoption d'une définition pra- tique de l’ampère, dont l'application soit plus com- mode et plus immédiate. E. Haut, Professeur à l'Ecole Navale. Bourrey (Georges), /ngénieur Chimiste des Che- mins de fer de l'Etat, Inspecteur de l'Enseignement technique. — L'Eau dans l'Industrie. — 1 vo/. de l'Encyclopédie scientifique du D' Toulouse. (Prix : 5 fr.) O. Doin, éditeur. Paris, 4909. x L'eau est le liquide vital de toute industrie. Elle doit avoir une certaine composition -selon l'usage auquel elle est destinée. Dans le livre de M. Bourrey, l'indus- triel trouvera tous les renseignements dont il aura besoin concernant l’origine et la composition des eaux que la Nature met à sa disposition, les différentes mé- thodes d'analyse employées et les différents usages industriels de l’eau, le rôle et les inconvénients des corps dissous dans les diverses industries, les réac- tions servant de base à l'épuration chimique, les mé- thodes servant à contrôler cette épuration, les différents appareils destinés à épurer l’eau à chaud et à froid, les procédés de clarification des eaux, enfin un apercu succinct des méthodes employées pour épurer les eaux résiduaires industrielles. Le lecteur sera enchanté de constater la présence de figures schématiques qui rendent la lecture de ce livre facile et rapide. Il cons- tatera, cependant, de nombreuses répétitions de réac- tions, ce qui allonge beaucoup le sujet des six pre- miers chapitres. L'auteur pourrait aisément faire quelques petites coupures dans une prochaine édition. Nous lui demanderons pourquoi, à l'exclusion de ses confrères, il emploie la soude et non le carbonate de soude pour le dosage des matières organiques ? Pour- quoi passe-t-il sous silence le dosage du manganèse, corps très gènant en blanchisserie ? Pourquoi attribue- t-il à M. Beaudet la paternité du filtre à sable non sub- mergé, préconisé par M. le D' Miquel, qui eut, au moins, un prédécesseur dans l'emploi de son système ? Pour- quoi dit-il que les substances organiques dissoutes des eaux résiduaires sont relenues par le sol quand elles y sont transformées et brülées? Enfin, pourquoi décrit- il d'une façon générale les procédés biologiques d'épu- ration des eaux résiduaires à l’occasion des eaux rési- duaires de sucrerie quand, dans cette industrie, on ne peut employer qu'un procédé biologique incomplet pour accomplir ce travail? Le moment était assez mal choisi. Enfin, signalons qu'à l’occasion du dosage de la magnésie, page 64, l'auteur a voulu écrire « phosphate d’ammoniaque » au lieu de phosphate de soude. Sans cela, son dosage de soude qui suit n'aurait aucun inté- rêt s’il en avait ajouté. Ces quelques petites critiques de détail, faciles à sup- primer, n’enlèvent rien à la réelle valeur de cetouvrage qui rendra des services signalés aux industriels. F. DiENErT, Docteur ès Sciences, Chef du Service de surveillance aes Eaux d'alimentalion de Paris. 464 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 3° Sciences naturelles Vidal de la Blache (J.), Capitaine breveté au 20° Batarllon de Chasseurs à pied, Docteur de l Uni- versité de Paris. — Etude sur la Vallée lorraine de la Meuse. — /n-8° de 183 pages avec 13 figures et 8 cartes et planches. (Prix : 4 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. L'attention a été attirée, à diverses reprises, dans ces dernières années, sur l'histoire des principaux cours d'eau de l’est du bassin de Paris. Des études très inté- ressantes ont été publiées à ce sujet. L'histoire des communications de la Moselle et de 12 Meuse à fourni d'importants travaux, et même des controverses assez vives. Mais, bien que quelques points aient pu être considérés comme éclaircis, il manquait encore une monographie solidement documentée, tant au point de vue bibliographique que par l'observation directe sur le terrain, trop souvent insuflisante. Il y avait là une véritable lacune à combler, et l’on doit savoir gré à M. le capitaine Vidal de la Blache de nous donner une bonne étude de la vallée de la Meuse, en se basant d’abord sur ses nombreuses observations personnelles, en utilisant aussi tout ce qui a été publié sur ce sujet en Géologie et en y adjoignant des renseignements inédits dont il cite scrupuleusement l'origine. Très clairement subdivisé, cet ouvrage comprend une première partie, toute de géographie physique, ayant trait à l'histoire géologique de la Meuse et à l'évolution de son cours; la deuxième comprend un aperçu important sur la population et la circulation. Pour chercher à retracer l'histoire de la Meuse, l'auteur s'attache d’abord à l'étude de la partie de ce cours d’eau présentant une véritable unité : ce carac- tère ne peut être refusé certainement au trajet du Bas- signy à l’Ardenne. Sur ce trajet de 250 kilomètres, la Meuse reste indépendante des réseaux voisins et se fait remarquer « par l'extrême étroitesse de son bassin, un véritable couloir qui ne s'élargit qu'à l’Ardenne ». Ce long couloir n’a pu se créer sans affluents; — cette rivière est Je témoin d'un système disparu. Que sont devenus les affluents qui l’alimentaient? « Comment ont-ils abandonné la Meuse, par l'effet de quels voisi- nages? » Pour résoudre ces questions, l'auteur rappelle très exactement les différences permettant de donner aux alluvions vosgiennes des âges divers. Les plus anciennes alluvions, riches en quartzites et quartz, diffèrent beaucoup des plus récentes, où le granit prédomine. Les premières sont de règle dans la vallée de la Meuse : elles n'existent que dans les hauts niveaux de la Moselle. Les secondes, au contraire, ne se rencontrent que dans les alluvions inférieures de la Moselle. Or, « si une faible quantité de ces galets de granit qui con- stituent l'alluvion de la Moselle a pu passer dans la Meuse, c'est un indice en faveur d'une union de la Moselle et de la Meuse antérieure à la dénudation du granit, et de leur séparation vers l’époque où la dénu- dation du granit commenca ». La question du Val-de-l’Ane, ou plutôt des commu- nications ayant pu exister entre la Moselle et la Meuse, se trouve ainsi naturellement reprise, mais avec plus d’ampleur, et sur un champ d'’investigations beaucoup plus large. : L'étude de ces alluvions, jointe à la description très précise des trois terrasses qu'elles ont formées dans la vallée de la Meuse, conduit l’auteur aux conclusions suivantes : : « 49 La vallée de la Meuse est fort ancienne, puisque des dépôts d'alluvion s'étagent sur une profondeur de 100 mètres en moyenne; « 29 Les terrasses inférieures de la vallée de la Meuse et le moment de sa séparation de la Moselle datant de l’époque quaternaire, l’origine de la vallée doit être reculée en pleine période tertiaire. » Ce dernier point sera mieux précisé dans l'avenir, | quand les faunes de Vertébrés de chacune de ces ter- rasses seront mieux connues; 3° « Des communications ont eu lieu dès l’origine entre la Moselle et la Meuse, et les eaux vosgiennes ont été l'agent du creusement de la vallée, puisque de Pagny à Mouzon le gravier vosgien se montre à toutes les hauteurs au dessus et au-dessous du lit, jusqu’au contact du roc même, au moins sur les bords de la vallée. » C'est à l’aide de ces bases, solidement établies, que l'auteur entreprend l'étude détaillée du cours de la Meuse. «1l faut, dit-il, se représenter la Meuse actuelle comme une rivière tronquée », réflexion très juste, complétée par cette remarque que la direction de Ja Haute-Moselle s'agence parfaitement avec celle de la Meuse en aval de Pagny. Il serait impossible, dans cette courte analyse, de suivre dans le détail la description si précise et si documentée des diverses parties de la vallée de la Meuse. L'auteur fait très bien ressortir l'influence spé- ciale du calcaire corallien, présentant tantôt des parties récifales très dures, tantôt des parties friables et fis- surées. De Pagny-la-Blanche-Côte à Dun, la Meuse, sur une longueur de 70 kilomètres, y subit une sorte d'enfouissement. C’est ainsi que la Meuse ne s’est pas échappée vers le bassin de Paris. Très juste aussi, cette réflexion que tous les terrains jurassiques sont minés par les eaux souterraines, guidées elles-mêmes par les plans de failles. C'est à partir de Pagny que sont canalisés les dépôts de gravier vosgien — en amont de Pagny, quelques- uns jusqu'à Neufchâteau, mais épars; — pas de ter- rasses ; — les terrasses sont de gravier calcaire, gravier jurassique. Néanmoins, la Meuse, de Pagny à Neuf- château, a des caractères topographiques se ressemblant d'une façon frappante. L'auteur est conduit naturellement à étudier la région des plateaux compris entre la Meuse et la Moselle. Il montre comment des affluents importants, -tels que la Vraine, ont pu être diminués et presque asséchés par la capture, due au Madon, de leur cours supérieur. Il fait ressortir l’importante différence entre les rivières qui coulent sur leur fond liasique, sans presque l'user, et celles qui s’enfouissent rapidement dans les calcaires fissurés du Bathonien, ne laissant à la superficie que des vallées sèches. Poussant plus loin ses investigations, il examine le rôle joué par la Saône etses affluents : nous apprenons ainsi que le plateau de Vittel est coupé par la faille de Darney, qui a livré la tête des bassins du Vair et du Mouzon aux affluents de la Saône : tout l'angle sud- ouest du plateau lorrain est aujourd'hui démantelé. Ainsi, c'est du côté lorrain et du côté de la Saône que le bassin de la Haute-Meuse est entamé et réduit par les empiètements des rivières voisines. La faiblesse de son débit et de son alluvionnement l'expose au danger des pertes « dans le calcaire bathonien qui absorbe les rivières indigentes ». La Meuse s'enfouit à Bazoilles; le Vair, l'Anger ont le même sort. « La dalle bathonienne qui de Neufchâteau s'étend vers Chaumont abonde en vallées sèches, empreintes de cours d’eau descendus dans le sous-sol. » « Entre Neufchâteau et Pagny-la-Blanche-Côte la vallée de la Meuse étonne par sa largeur monumentale : elle donne à penser que la Meuse du Bassigny avait autre- fois un débit plus fort, par suite d'un périmètre d'ali- mentation plus étendu. » A Pagny-sur-Meuse, on entre dans la section de la rivière caractérisée par l'abondance du gravier vos- gien. Il faut aussi tenir compte des trouées des côtes de la rive droite, enfin d'un élément nouveau, la proximité de la Moselle. Tels sont les trois éléments au moyen desquels l’auteur va tenter de résoudre cette question aussi importante que délicate des relations de la Meuse avec la Moselle. Après une étude détaillée des alluvions vosgiennes Pr k BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 465 de la Moselle, il en montre la continuation dans la vallée de la Meuse. D'autre part, examinant les diverses trouées, il remarque que leurs cols sont à des altitudes sensible- ment égales : quelques-uns, le val de Trondes et le val de Boncourt, « étonnent par la faiblesse des ruisseaux qui y coulent, opposée à Eee grande largeur, toujours égale en amont et en aval; rien ne contredit l'impres- sion qu'ils ont été modelés par des cours d’eau qui de la Woëvre coulaient vers la Meuse ». On est conduit à convenir « que si des rivières ont traversé les côtes de Meuse, elles coulaient à l'origine sur une surface située au-dessus de la Woèvre actuelle ». Ceci révèle l’intense et longue dénudation à la suite de laquelle est apparue la Woèvre méridionale. Ainsi, la Moselle a communiqué largement avec la Meuse, jusqu'au jour où, s'enfouissant dans les cal- caires bathoniens, elle a rejoint la Meurthe à Frouard, d’où elle gagne la région messine en voisinant avec le réseau de fractures qui jalonne et recoupe fréquem- ment son Cours. Le nord du pays entre Moselle et Meuse, c’est-à-dire la Woèvre septentrionale, présente des différences très nettes avec la Woëvre méridionale. Comme elle, elle témoigne d'une dénudation intense, mais dans d’autres conditions de drainage. La limite en est placée par auteur au promontoire d'Hattonchâtel. Sur les côtes dominant la Woèvre septentrionale, plus de graviers vosgiens; des grouines en masses puissantes. Dans la Woëvre même, le Bathonien haché et troué de pertes à permis à la Moselle de soutirer par la vallée faille de l'Orne les cours d’eau de la Woëvre septentrionale, « mais ces captures sont consécutives à la dénudation de la Woèvre, entraînée d'abord par le réseau de rivières orienté vers la Chiers parallèlement aux côtes ». Après avoir examiné ce qui s'est passé à l’est, l’auteur étudie l'histoire hydrographique de la région occidentale de la Meuse. Les dépôts d'alluvions de cette région avaient fait penser à Boblaye et Buvignier que la Meuse avait débouché dans la Champagne, erreur bien excusable, puisqu'à cette époque onignorait encore le mécanisme de l'érosion. Erronées aussi, l’ancienne hypothèse du passage de la Meuse à travers l'Argonne par le défilé du Chesne, et l’idée que tous les cols du Barrois, d’ailleurs sans galets vosgiens, avaient une origine fluviale. Ces cols sont dus à l'érosion régres- sive des cours d’eau. Ce chapitre renferme aussi des détails intéressants sur l’histoire des sources de la Bar, et montre que l’Aire et la Bar, aujourd'hui séparées, n étaient qu'un même affluent de la Meuse. La jonction de la vallée lorraine et de la vallée ardennaise de la Meuse est l'objet d'un chapitre où, après un exposé des hypothèses déjà émises, l’auteur insiste sur l'importance de la dénudation et, montrant que le cycle de la Meuse n’est pas clos, cherche l'avenir réservé à ce cours d’eau. Cette étude des conditions anciennes de la Meuse se termine par l'examen des conditions actuelles de la vallée. De cette comparaison ressortent des conclusions très intéressantes. La Meuse n’est pas une rivière indi- gente, son sol fissuré joue le rèle d'un régulateur sou- terrain, « mais elle est incapable du travail d'érosion qu elle a fourni dans le passé. elle s'est enfouie sous l'alluvion;.. mais elle n'est pas encore au stade de la décrépitude ». Cette remarquable étude de Géographie physique est suivie d’un aperçu sur la population et la circulation, résumant très bien l'impression de ceux qui con- naissent à fond la région meusienne. L'agglomération villageoise, les traits caractéristiques des villages de la Meuse, l’évolution de leurs cultures, l’origine de leurs groupements forment un tableau aussi exact qu'inté- ressant; l'évolution des voies de communication en forme un autre, aussi instructif. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. En somme, on doit féliciter vivement M. le capitaine Vidal de la Blache d’avoir su, en dehors de ses occu- pations professionnelles, trouver le temps nécessaire pour la production d'une œuvre aussi importante; et, en nous donnant cette œuvre, de ne pas s'être borné à l'interprétation, souvent trop facilement faite, des cartes ou des documents bibliographiques, mais de l'avoir basée sur de solides et nombreuses observations sur le terrain. Suivant dignement les traditions pater- nelles, l’auteur a voulu donner une étude complète et approfondie : il y a fort bien réussi. Son travail sera lu attentivement et avec profit par tous ceux qu'inté- ressent la géographie physique et la géologie de l'est de la France. RENÉ NiICkLEs, Professeur de Géologie à la Faculté des Sciences de l'Université de Nancy, 4° Sciences médicales Cornet (D: Paul), Professeur aux Ecoies municipales d'infirmiers des hôpitaux de Paris, membre de la Société scientifique d'Hygiène alimentaire. — Le Régime alimentaire des maladies. — 1 vol. de 480 pages. G. Steinheïil, éditeur. Paris, 1909. La diététique est à l’ordre du jour : trop longtemps les médecins avaient négligé cette branche importante de la Thérapeutique, et, il y a dix ans, il eût été impos- sible de trouver dans un livre de Médecine non plus que dans un livre de Physiologie, des renseignements précis sur la manière de composer le régime d'un homme sain ou d’un malade. Dans les livres de Théra- peutique, ce n'étaient que vagues indications; et, en définitive, la cuisinière dirigeait seule, selon la rou- tine, le régime des malades. Aujourd'hui, les livres de diététique éclosent dans toutes les librairies. Un des meilleurs est celui du D' Paul Cornet. il est surtout remarquable par le sens pratique avec lequel il fut conçu et exécuté. L'auteur passe d’abord en revue tous les aliments, non pas au point de vue scientifique ou chimique, mais au point de vue culinaire et médical. Il nous dit rapi- dement de quoi se composent le lait, la viande, les légumes, etc.; mais il insiste sur les formes sous lesquelles on peut se procurer ces aliments, sur les meilleures provenances, les morceaux de choix, les propriétés spéciales de chaque denrée ; sur la manière d'utihser les aliments, de les faire cuire, de les donner aux malades; sur les dangers qu'ils peuvent parfois offrir lorsqu'ils sont altérés ou falsifiés; il établit la liste des préparations culinaires autorisées et de celles qui sont interdites. Plus loin, il étudie les régimes spéciaux solides et liquides qui peuvent être ordonnés aux malades : diète hydrique, régime lacté ou képhirique, régime végé- tarien, régime déchloruré; puis les régimes qui con- viennent aux diverses espèces de maladies : consti- pation, diarrhée chronique, anémie, diabète, dyspepsie, goutte, obésité, tuberculose. Dans une dernière partie, il expose les formules culi- naires qui conviennent spécialement aux malades; et, en cent quarante-six formules, il nous donne les boissons, les préparations de lait, de café, de thé, les potages, les bouillies, les entremets, les plats de viande qui doivent entrer dans le régime des malades, faisant exclusion de toutes recettes culinaires qui, par leur complication ou la présence de substances nocives, pourraient être dangereuses. Ce livre sera d'une grande utilité pour tous ceux qui voudront se rendre compte du choix et de la préparation des mets destinés aux malades. Il re- présente bien une sorte de catéchisme culinaire de l'infirmière et résume ce que tout médecin devrait savoir des régimes alimentaires. D' MarceL LaBBé. 10° 466 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS :SA VANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 26 Avril 4909. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Drach présente ses recherches sur les congruences de normales et les transformations de contact. — M. W. Stekloff donne une démonstration simple de l'existence des fonctions implicites. — M°° V. Dienes communique quelques résultats nouveaux sur les points critiques logarith- miques. — M. A. Myller étudie une équation aux dérivées partielles du type hyperbolique. — M. Chil- lemi démontre le théorème suivant: Toute surface du 4° degré sur laquelle sont tracées seize droites isolées et une autre droite qui en rencontre dix est une surface hyperelliptique. — M. ©. Bergstrand a déterminé photographiquement la couleur des étoiles fixes; il a distingué des étoiles blanches (À — 420 uy) et des étoiles jaunes (À— 440 à 450 uy), dont la transition est assez brusque. — M. A. Angot signale l'enregistrement, à l'Observatoire du Parc Saint-Maur, du tremblement de terre qui s’est produit le 23 avril en Portugal. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Angot montre que l'emploi des normales (moyennes arithmétiques des valeurs de la pression barométrique obtenues au moyen d'un grand nombre d'années d'observations) est parfaitement légitime en Météorologie. Mais l'étude des variations de pression ne peut donner aucune indication sur leur périodicité, les variations acciden- telles étant trop importantes. — M. C. Raveau montre que, sous le bénéfice d’une seule hypothèse très géné- rale, on peut conclure, de la seule existence de la dif- fusion, telle qu'elle s'exerce entre deux parties non homogènes d’un mélange fluide, à la stabilité des équi- libres physiques et chimiques. — M. G. Meslin a cons- taté que la lumière diffusée latéralement par les liqueurs constituées par l'acide borique associé à des liquides dont l'indice est supérieur à son indice effi- cace est partiellement polarisée et a son plan de pola- risation perpendiculaire au plan de diffusion (dichroïsme négatif). — M. A. Berget a réalisé un amplificateur microscopique comprenant un système divergent inter- posé entre l’oculaire et l'objectif et qui permet d'ob- server avec un fort grossissement un objet dont on ne peut pas beaucoup s'approcher, — M. P, Vaillant déduit de ses observations qu'il semble qu’une solution aqueuse entretient constamment au voisinage de sa surface une couche d'air saturée et que la vitesse avec laquelle elle s'évapore soit réglée uniquement par la vitesse avec laquelle cette couche se diffuse dans l’at- mosphère ambiante. — M. E. Mathias à déterminé le diamètre rectiligne de l’acétylène ; en le comparant à celui de CO*, on voit que, malgré la différence des fonctions chimiques, les constantes a et b des deux gaz sont sensiblement identiques. — M. A. Recoura est parvenu à préparer le sulfate cuivreux Cu*S04, en l'absence de l’eau, par double décomposition entre l'oxyde cuivreux et le sulfate neutre de méthyle. C’est une poudre blanc grisâtre, inaltérable dans l'air sec, mais instantanément décomposée par l’eau. — M. P. Carré, en condensant le dérivé magnésien du bromure de métaxylyle avec les aldéhydes formique, acétique et l’acétone, a obtenu les alcools métatolyléthylique, Eb. 112°-113° sous 410 mm., métatolylisopropylique, Eb.1199-120° sous18 mm., métatolylbutylique tertiaire Eb. 107°-108° sous 10 mm. — MM. A. Seyewetz et L. Poizat ont reconnu que le persulfate d'ammoniaque, en solution aqueuse neutre, acide ou alcaline, décom- pose vers 1009 un grand nombre de dérivés nitrés et nitrosés avec production d'acide cyanhydrique. — M. H. Gault à obtenu l’éther «oxalglutarique par condensation, en milieu éthéré, d’une molécule d’éther oxalique avec une molécule d’éther glutarique en présence de C?*H°ONa. Cet éther se saponifie par HCI en acide +-cétoadipique, F. 1240. — M. H. Arsan- daux montre que, dans les bauxites siliceuses, l’oxyde de fer est voisin de l’état anhydre, tandis que l’alumine est à un état moyen d'hydratation supérieur à celui du monohydrate. — M. R. Huerre a constaté que les variations apportées artificiellement à la réaction du milieu modifient considérablement l’activité des mal- tases du maïs; certaines espèces fournissent des enzymes dont le maximum d'activité s'exerce en milieu franchement alcalin, et d’autres en milieu neutre ou très légèrement acide. — MM. Ch. Dhéré et H. Maurice ont reconnu que la teneur en phos- phore total des nerfs à l’état sec diminue en même temps que l’âge augmente; mais les teneurs en phos- phore inorganique, lipoide et nucléique varient inéga- lement, le premier diminuant, le second augmentant un peu, le troisième beaucoup. — M. E. Gobbi a pré- paré un filtre retenant les grains colloïdaux et les microbes en enroulant en hélice un ruban de nickel et en serrant les spires les unes contre les autres au moyen d’une vis; les interstices sont formés par des cotelures transversales ménagées sur l’une des faces du ruban. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Marage a reconnu que, pour qu'une respiration soit bonne chez un chan- teur, il faut que la cage thoracique se dilate suivant toutes ses dimensions; la plupart des voix se perdent non pas tant par une mauvaise méthode que par une mauvaise respiration. — M. F. Houssay : Sur les con- ditions hydrodynamiques de la forme chez les Pois- sons. La Revue publiera prochainement un article de l’auteur sur cette question. — M. A. Chauveau montre que les inoculations d'humeur vaccinale en dilution progressive impliquent l'existence, dans l'humeur, d'éléments solidiens remplissant le rôle d'agents virulents; d'autre part, les expériences de dif- fusion excluent de toute participation à ce rôle les colloïdes que l'humeur vaccinale contient à l'état d’extra-fine émulsion. Il en résulte que les agents invi- w sibles de la virulence de la vaccine sont bien des êtres vivants parasites. — M. Ed. Heckel a constaté que deux plantes appartenant à des familles distinctes (Kalanchæ et Sarcocaulon), mais vivant dans des con- ditions presque identiques (régions sèches du sud de Madagascar et de l'Afrique du Sud), possèdent dans l’épiderme une réserve de résines protectrices contre l’évaporation de l’eau. — MM. A. Joly et L. Joleaud ont reconnu que la partie centrale des hautes plaines constantinoises a appartenu à un plateau crétacé à structure tabulaire, traversé par des plis sabariens atténués, qui a été morcelé par des effondrements dans lesquels se sont épanchées de petites nappes triasiques. — M. J. Boussac à étudié la mutabilité chez les Cérithes mésonummulitiques du bassin de Paris. Tous les rameaux phylétiques des Cérithes varienten même temps; leurs périodes de mutation sont toutes synchroniques et coïncident avec les change- ments de faune généraux de la région. Séance du 3 Mai 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Guichard pré- sente ses recherches sur les systèmes singuliers de réseaux O associés. — M. M. Fréchet donne une défi- nition du nombre de dimensions d’un ensemble abstrait. — M. A. Denjoy a construit des fonctions analytiques uniformes qui restent continues sur un ensemble parfait discontinu de singularités. — M. A. de Gramont de Guiche a étudié le mouvement d'un disque dans un fluide. Il lance dans un milieu calme des corps entièrement libres et enregistre leur trajec- toire, qu'il compare à celle des mêmes corps dans le vide. Il a trouvé qne la formule de Duchemin est la seule acceptable. — M. Ph. Bunau-Varilla à déter- miné les lois des pentes de l’eau dans un canal à largeur constante et à profondeur sensiblement con- stante réunissant une mer à marée et une mer sans marée ayant même niveau moyen. — M. H. Larose étudie le problème de l’armille avec deux ruptures. — M. Ch. Féry montre que, dans l'application de la loi de Stefan à l’Astronomie, on s’est trop exagéré l’im- portance du terme correctif relatif à l'absorption atmosphérique. Cette dernière, due en grande partie à la vapeur d’eau, ne doit pas être très grande, puis- qu'elle produit son minimum d'effet dans la partie lumineuse du speetre, qui est celle du maximum de l'énergie solaire. — M. V. Crémieu a constaté que la balance de torsion peut servir de sismographe très maniable et très sensible, enregistrant des oscillations que les appareils pendulaires ne perçoivent pas. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Amagat, en pour- suivant ses recherches sur la pression intérieure des fluides, arrive à ce résultat que l'attraction intermo- léculaire est en raison inverse de la quatrième puis- sance de la distance. — M. de Broglie est parvenu à photographier les mouvements browniens des parti- cules en suspension dans un gaz en les éclairant par une lampe à arc et recevant les impressions dans un microscope muni d'une chambre photographique. — M. H. A. Perkins, en alimentant par un courant alternatif un tube de Geisler avec un condensateur en dérivation, a constaté que la décharge, d’abord con- tinue, devient discontinue lorsqu'on augmente la ten- sion. — M. G. Meslin à déterminé le dichroisme magnétique d’une trentaine d'espèces minérales. A mesure que la biréfringence devient plus faible, l'ap- titude à donner des liqueurs actives diminue ou le dichroïsme s’abaisse. —- M. P. Klein a construit une pompe à mercure entièrement automatique, grâce au jeu d’un flotteur qui met alternativement l'appareil en communication avec une trompe à eau et avec l’at- mosphère. — MM. W. Waidner et G. H. Burgess montrent que la divergence des chiffres trouvés par la méthode de rayonnement monochromatique du corps noir pour le point de fusion du platine est due à une connaissance insuffisante de la valeur exacte de la constante C? de l'équation de Wien. — M. A. Leduc a déterminé avec une grande exactitude les coefficients de dilatation moyens entre 0° et 100° et les coefficients vrais à 0° de vingt gaz sous la pression atmosphérique. — M. Alb. Colson a déterminé les conditions nécessaires aux réactions directes et le sens du courant électrique produit dans l'attaque des métaux par le soufre. Les chaleurs de formation n’ont pas d'influence sur les réactions directes irréversibles, dont l'allure est uniquement réglée par des conditions de température. — M. P. Girard donne une inter- prétation physico-chimique des différences de poten- tiel dans les tissus vivants; pour expliquer leur accroissement avec la température, il suffit d'admettre l'hypothèse d'une polarisation de la membrane cellu- laire. — M. M. H. Faucon a étudié la congélation des mélanges d'eau et d'acide butyrique normal. Il n'a pas décelé l'existence d'hydrates. Au-dessus de — 398, les mélanges sont miscibles en toutes proportions; la température d’eutexie est de — 1304, — M. H. Pélabon a étudié la fusibilité des mélanges d'or et de tellure; rien dans la courbe n'indique la formation d’un com- posé défini. Un eutectique renfermant 16,5 °/, d'or se solidifie à 4159. — MM. A. Besson et L. Fournier ont étudié l’action de divers oxydants sur le silicichloro- forme. O pur et sec, à la lumière solaire, forme HC ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 467 et SiCI‘O: Of de même: avec Az0?, on a SiHCI 22420? — Si0®+ 2Az0C1— HCI; S0* donne S?0'CE. — M. E. Rengade a étudié le diagramme de fusibilité des mélanges de cæsium et de protoxyde de cæsium. Les courbes mettent en évidence l'existence de 4 sous- oxydes : Cs’0, Cs'0, Cs'0? et Cs*0, dont le 3° à pu être isolé. — M. G. Austerweil, en hydratant le pinène par la réaction de Bouchardat et Lafont, mais en opérant sous une forte pression, a obtenu un rende- ment très abondant en bornéol. — M. L. Vignon a étudié les conditions dans lesquelles certains colloïdes peuvent être teints. Les gelées amidon se comportent comme le coton, les gelées gélatine comme la laine et la soie vis-à-vis des colorants. — M. Ch. Porcher a reconnu que le tryptophane injecté se retrouve dans l'urine sous trois formes : une partie, soustraite à la destruction microbienne, emprunte la forme d'acide kynurique; l'autre partie donne des composés indo- logènes et des composés indoxyliques. — M. M. Piettre, en fractionnant la bilirubine des calculs biliaires, a obtenu une matière rouge orangé foncé, qui est la vraie bilirubine, et une matière couleur jaune de chrome, qu'il nomme biliflavine. Ces (deux substances contiennent, à côté d’un noyau azoté, une chaine grasse importante. — M. E. F. Terroine a constaté que les électrolytes accélèrent, à des concentrations variables pour chacun d'eux, l’activité lipasique du suc pancréatique. — M. H. Mathieu a étudié l’hydro- lyse des protéines par les acides. La dégradation se fait de la même manière pour chacun d'eux; à même acidité, HCI est plus actif que H?S0“, et celui-ci que l'acide oxalique; à même concentration moléculaire, HCI et H°S0* ont la même activité, l'acide oxalique une activité infiniment moindre. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. P. Vigier a étudié le mécanisme de la synthèse des impressions lumineuses recueillies par les yeux composés des Biptères; cette synthèse se fait dans le periopticum par fusion des excitations semblables transmises par les neuromma- tidies. — M. P. Marchal a constaté que l’Aphelinus mytilaspidis, parasite des Aspidiotus, perce souvent, au moment de la ponte, le corps de son hôte, non pour déposer un œuf, mais pour se nourrir des liquides qui sortent. — M. E. Hérouard montre que le Scy- phistome et la Méduse acraspède présentent tous deux un revêtement cellulaire spécial, différent de celui de la cavité gastrique, sur le pharynx, les entéroïdes et les filaments gastriques; cette similitude est l'indice d'une étroite parenté entre les deux groupes. — M. J. Kunckel d’'Herculais à étudié le mécanisme de la capture des insectes par les fleurs d'Asclépiadées, en particulier d’Araujia sericofera. I conclut que le rôle des Insectes dans la fécondation de ces plantes est très peu important. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont trouvé chez un Python Sebai une hémogrégarine nouvelle, qu'ils nomment A. Sebai. Dans le poumon de l’animal, ils ont également trouvé quatre Pentas- tomes, dans le tube digestif desquels on rencontrait la même hémogrégarine. — M. J. Dumont montre que les agriculteurs auraient tout intérêt à employer les superphosphates en mélange avec le fumier de ferme ; la grande valeur fertilisante des engrais à base de matière noire dépend surtout de leur richesse en humophosphates. — M. L. Vandernotte a étudié les roches de la bordure orientale du massif armoricain. Ce sont des gabbros normaux, des gabbros à olivine et des gabbros-norites. — M. L. Gentil à constaté que la région du détroit de Gibraltar correspond à une aire d'ennoyage des plis de la chaîne du Rif; l’effon- drement du détroit se serait produit dans la partie la plus basse, au début du Pliocène. — MM. A. Viré et A. Piédallu ont exploré une grotte naturelle, mise à jour par les travaux de percement d’un puits, à la Bosse ‘Loir-et-Cher). Cette grotte est due à l’action d’eaux souterraines sur les calcaires. — M. Alf. Carpentier décrit quelques graines et microsporanges de Ptérido- spermées trouvées dans le bassin houiller du Nord. Séance du 10 Mar 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Goursat annonce qu'il a publié en 1903 une démonstration du théorème d'existence des fonctions implicites identique à celle qu'a donnée récemment M. Stekloff. — M. G. Kolossoff présente ses recherches sur les problèmes d'élasticité à deux dimensions. — M. M. d Ocagne indique par quels moyens et dans quelles conditions on peut représenter nomographiquement des équations à quatre variables. — M. M. Caron décrit un dispositif de surfaces portantes pour aéroplane : les surfaces sont reliées au corps de l'appareil, non point d'une facon rigide, mais par l'intermédiaire d'un axe perpendicu- laire au plan de symétrie de l'appareil et passant au bas de la surface et au-dessus du centre de gravité du corps de l'appareil; on réduit ainsi considérablement les couples perturbateurs. — M. M. Ringelmann a déterminé l’énergie nécessaire au pétrissage méca- nique. Les meilleurs pétrins ont exigé de 44.000 à 58.000 kilogrammètres pour préparer 172, 75 kilogs de pâte ferme. — MM. H. Deslandres et L. d’Azambuÿja ont reconnu que l'apparition des plages faculaires noires dans les images du Soleil avec les raies de l'hydrogène est due, pour une large part, non à des particularités dans le pouvoir émissif ou absorbant de l'hydrogène, mais à un défaut du spectrohéliographe, dont la fente de largeur constante ne peut isoler com- plètement une raie de largeur variable. — MM. Ch. Fabry et H. Buisson ont comparé les raies du fer dans le spectre solaire à celles de l'arc au fer dans le vide; les déplacements des raies anormales sont de même sens et de même valeur que pour les raies normales. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. Aubert a étudié les phé- nomènes de thermo-endosmose à travers diverses membranes. Pour une membrane déterminée, le débit est proportionnel à la surface de la membrane, indé- pendant du temps, et croissant avec la différence de température entre les deux couches liquides. — M. G. Moreau a déterminé la charge de l'ion négatif d’une flamme, en partant de la formule donnée par la théorie cinétique. La moyenne de ses résultats est de 4,3 X 10 — 19 unités électrostatiques. — M. E. Cau- drelier montre que la présence de stries lumineuses dans l’étincelle produite sur une coupure placée dans le circuit de décharge d'un inducteur est due en grande partie à l’action de l’air ionisé de la coupure. — M. L. Sémat présente un télautocopiste pour la transmission à distance des dessins, écritures et images. L'image est imprimée sur une feuille métal- lique enroulée sur un cylindre; le style émetteur repose sur cette feuille et envoie dans la ligne des émissions de courant lorsqu'il rencontre des parties conductrices de la feuille métallique. — MM. Colin et Jeance décrivent un système de téléphonie sans fil caractérisé par : 4° la disposition des électrodes néga- tives des arcs assurant leur fixité ; 2 l’utilisation d'un circuit intermédiaire permettant d'obtenir une oscilla- tion simple constante; 3° la disposition et la constitu- tion de l’ensemble microphonique. — MM. Gacogne et À. Léauté ont constaté que toute ligne sur laquelle sont branchés des transformateurs industriels doit ètre considérée comme parcourue, à cause de la capa- cité de ces appareils et tout au moins dans leur voisi- nage, par des courants oscillatoires de grande fré- quence.— M. L. Frischauer à reconnu que l'exposition aux rayons du radium augmente sensiblement la vitesse de cristallisation du soufre en gouttelettes microscopiques; les rayons & paraissent surtout inter- venir. — M. A. Debierne à condensé l’'émanation du radium dans l'air liquide entre — 14509 et — 4175. L'émanalion gazeuse, conservée dans de pelits tubes à la pression atmosphérique, est le siège de décharges électriques spontanées, visibles en plein jour. — M. Ed. Chauvenet à constaté que le chlorure de (ho- rium anhydre se combine aux chlorures alcalins pour ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES donner des composés ThCI‘.2MCI avec les métaux Li, Na, K, Rb et Cs, et ThCI*.4MCI avec Rb et Cs. Excep- tionnellement, le chlorure d’ammonium fournit ThCÏ. AZH'CI. — M. J. Bougault montre que { mol. d'acide glyoxylique se combine à 2 mol. d'acétophénone pour donner de l'acide diphénylacétique. — M. T. Klobb a reconnu que l’anthéstérol retiré de l’Anthemis nobilis peut exister sous 3 modifications, de même que son benzoate. Il ne s'agit pas de stéréoisomères, les pou- voirs rotatoires étant de même sens, mais peut-être de polymorphisme. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Foveau de Courmelles a observé une régularisation des excrétions des malades soumis à la d'arsonvalisation. — M. E. Doumer signale sept cas de flux hémorroïdaires déplétifs, conséquence de l'hypertension artérielle, qui ont été guéris par l'application de la d’arsonvalisation. — M. R. Odier a trouvé sur les pépins des fruits de Sambucus racemosa, employés à préparer un sirop contre le cancer, un Saccharomyces faisant fermenter les sucres. — MM. CI. Regaud et G. Dubreuil ont observé deux œufs de lapins à deux germes, contenus dans une enveloppe commune d’albumine sécrétée par l’oviducte. — M. L. Léger a observé une maladie parasitaire des jeunes alevins de truite, la costiase, due à un Flagellé ectopa- rasite, le Costia necatrix. Un traitement consistant à tenir les sujets malades pendant 15 minutes dans un bain d'eau formolée lui a donné d'excellents résultats. — M. H.-A. Brouwer a étudié une foyaite à aegyrine, tachetée blanc, rouge et bleu, du Transvaal, qui cons- titue une syénite néphélinique à sodalite. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 27 Avril 1909. M. L. Vaillard étudie l'épidémie de méningite céré- bro-spinale qui a sévi sur la garnison d'Evreux et s’est transmise à un certain nombre de personnes ayant été en contact avec les soldats et les réservistes rentrés dans leur foyer. De ces faits, il ressort que la ménin- gite cérébro-spinale est beaucoup plus contagieuse qu'on ne le croit; en outre, le malade et le convales- cent ne sont pas seuls contagieux: des personnes saines servent de propagateur au méningocoque. Le traite- ment par le sérum antiméningococcique a donné des résultats absolument démonstratifs. L'auteur recom- mande une série de mesures prophylactiques à appli- quer dans les casernes. — MM. A. Chantemesse el E. Valude montrent que des foyers d'ophtalmie granuleuse ou trachome sont en train de se créer à Paris par les passages de certains émigrants orientaux allant en Amérique. Ce sont surtout les 4, 11° et 12° arrondisse- ments, où logent ces émigrants, qui sont atteints. Il y aurait eu de modifier la loi antique qui régit l’'émigra- tion. — M. le Dr G. Ballet donne lecture d’une étude sur la descendance des paralytiques généraux: — M.le D" Grancher lit un travail sur un cas de purpura et d’endo- cardite végétante due au tétragène. — M. le D' Voisin présente une étude ayant pour titre : Recherches sur la délinquence juvénile. Séance du 4 Mai 1909. M. A. Netter présente quelques observalions nou- velles sur la récente épidémie de méningite cérébro- spinale. La contagion directe, immédiate, par les locaux ou par les objets inertes ne paraît jouer aucun rôle; tout cadre, au contraire, avec l'intervention des porteurs de germes, anciens malades ou sujets sains; c'est ceux-ci qu'il faut chercher à rendre inoffensifs. La virulence et la diffusion des méningocoques varient suivant les saisons; elles sont maxima en hiver et au printemps, époques de prédilection des épidémies. La sérothérapie donne des résultats toujours plus satis- faisants; le sérum de Flexner parait le meilleur; les chances de succès sont plus grandes à mesure que les sujets sout plus avancés en âge. — M. Motais montre qu'au point de vue oculaire, les métiers applicants ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES comprennent, en France, plus de 1.500.000 ouvriers des deux sexes, qui usen{ leurs yeux dans des condi- tions d'hygiène le plus souvent défectueuses. Les métiers dangereux comprennent au moins 1.750.000 ou- vriers exposés à des accidents oculaires graves par des poussières et des vapeurs irritantes ou caustiques et par des corps étrangers. En fait, beaucoup d'ouvriers sont atteints, chaque année, de lésions oculaires dues au travail, produisant la cécité ou la demi-cécité. Cet état de choses, qui cause les plus graves préjudices aux intéressés et à la société entière, pourrait être prévenu dans une large mesure par une série de mesures législatives que détaille l’auteur et par l’édu- cation des ouvriers. — Le même auteur signale les bons effets qu'il a obtenus dans le traitement de l’ophtalmie des nouveau-nés par le protargol au 1/5; il est complètement inoffensif et aussi actif que le nitrate d'argent, qui n'est pas toujours sans danger. — M. le D' True lit un travail sur un cas de guérison de lèpre oculo-cutanée par injection intra-veineuse de cyanure de mercure. — M. le D' P. Marie donne lecture d'un travail sur une autopsie de dysostose cléido-cranienne héréditaire. Séance du 11 Mai 1909. M. M. de Fleury est élu membre associé libre de l'Académie. $ M. L. G. Richelot apporte de nouveaux faits contre la doctrine de l’abstention en matière d'appendicite chronique; il signale divers cas où sur l’appendicite s'était greffé un cancer, qui aurait pu évoluer dange- reusement pour le malade sans une intervention. — M. J. Bertillon lit un travail sur le degré de fré- quence de la phtisie pulmonaire dans ses rapports avec l'alcoolisme, d’après les statistiques les plus récentes. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 17 Mar 1909. M. H. Roger a reconnu que, à l'inverse des pep- tones, les produits de dégradation plus avancés des albumines, ou produits abiurétiques, ne sont pas toxiques etsont très peu hypotensifs. — MM. L. Babon- neix et P. Harvier ont examiné les encéphales d’ani- maux morts de tétanie consécutive à une thyropara- thyroïdectomie; ils présentent des lésions surtout vasculaires (congestions et hémorragies de la pie-mère) et nerveuses. — M. E. Maurel a étudié l'influence de la voie d'administration sur les doses minima mor- telles de digitaline cristallisée sur la grenouille, le pigeon et le lapin. — MM. P. Bouin et P. Ancel ont reconnu que le corps jaune détermine les phénomènes qui se produisent normalement dans l'utérus pendant la première partie de la gestation et conditionne les multiplications cellulaires qui provoquent le dévelop- pement de la glande mammaire. — MM. J. Sabrazès et R. Dupérié ont obtenu une excellente coloration par la thionine picriquée des préparations de pièces syphilitiques imprégnées à l'argent. — M. G. Seillière montre que, chez les Mammifères, la digestion des pentosanes alimentaires est complètement sous la dépendance des phénomènes microbiens du tube digestif. — M. P. Vigier montre que chaque cellule réticulaire de l'œil composé des Arthropodes émet une fibre nerveuse qui se rend au périopticum et s'y ter- mine librement en contribuant à la formation d’une neurommatidie. — M. A. Fontes a constaté, contrai- rement à M. Hawthorn, que la glycérine est un excel- lent milieu de conservation pour les bacilles des cra- chats tuberculeux. — M. Em. Guyénot a étudié les caractères des papilles de la trompe des Lépidoptères de la tribu des Nymphalinæ. — M. E. Hédon à con- staté qu'une transfusion continue, par circulation caro- tidienne croisée, entre un chien normal et un chien dépancréaté fortement glycosurique abaisse la glyco- surie chez ce dernier, sans la faire disparaître; après 469 la séparation, le diabète évolue comme d'habitude chez le dépancréaté, tandis que la glycosurie dispa- raît chez le normal. — MM. Ed. Chatton et Em. Rou- baud ont observé une grande rareté des formes spo- rulées de l’'Amæbidium recticola, parasite du rectum des larves de Simules, ce qui tient à ce que la sporu- lation n'a lieu qu'au moment de la mue de l'hôte. — MM. M. Parvu et Ch. Laubry ont reconnu que, dans le sang du fœtus d'une mère infectée d'échinococcose, on ne constate pas la présence d'anticorps spécifiques, alors même que la réaction de fixation décèle leur présence dans le sang maternel. — M. A. Sartory a étudié les caractères biologiques du Pseudo-absidia vulgaris du crottin de cheval; il ne s'est pas montré pathogène pour le cobaye ni le lapin. — M. P. F. Ar- mand-Delille montre que la cuti-réaction et la dévia- tion du complément sont, au même titre, des manifes- tations anaphylactiques indiquant le développement d'anticorps lytiques dans l'organisme infecté de tuber- culose. — M. A. Delcourt à observé l'apparition brusque, chez le Drosophila confusa, d'une variété ‘aractérisée par une nervure supplémentaire de l'aile; cette variation s’est montrée héréditaire. — MM. W. Mestrezat el J. Anglada signalent un cas de xantho- chromie du liquide céphalo-rachidien dans un ictère par rétention avec urobiline et hyperglucosurie. Séance du 8 Mar 1909. M. A. Grigaut décrit un procédé pour la recherche de l’urobiline dans le sang et les humeurs de l'orga- nisme, basé sur l'observation de la fluorescence qui se développe après addition de FeC et d'acide acétique. — MM. M. Doyon et CI. Gautier montrent que la bile, injectée dans une veine mésaraïque ou dans le canal cholédoque, produit l’'incoagulabilité du sang, la baisse de la pression artérielle et la narcose. — MM. Larat, R. Voisin et L. Tixier ont observé des altérations de la contractilité musculaire au cours de l'ostéopsathy- rose (fragilité osseuse). — M. R. Voisin a constaté l'arrêt du sang au cours d'une saignée durant une crise d’éclampsie; c'est une preuve de l'existence d'un spasme périphérique des capillaires, danc d’une aug- mentation de la pression artérielle dans l’éclampsie. — M. A. Lévy-Franckel a observé, chez les nouveau- nés hérédo-syphilitiques, diverses lésions de l'aorte qui expliquent les lésions athéromateuses plus accusées qu'on trouve chez les hérédo-syphilitiques plus âgés. — M. V. Pachon montre que, si l’on vient à exercer autour d'une artère ou d'un segment de membre une pression concentrique, le pouls de l'artère ou le pouls total du membre présente la plus grande amplitude quand la valeur de la pression concentrique est juste égale à celle même de la pression artérielle constante ou minima. — MM. Ch. Achard et L. Ramond ont diagnostiqué par le rouge neutre l'état de vie ou de mort des leucocytes dans les liquides pathologiques; les leucocytes morts paraissent se trouver principale- ment dans les processus aigus. — M. H. Bierry a trouvé dans le suc gastro-intestinal d'Helix pomatia une diastase (rhamnino-rhamnase) capable d'effectuer le dédoublement du rhamninose jusqu'au rhamnose. — M. J. Troisier a observé des cas d'urobiligénie d'origine hémolytique, qui montrent une corrélation entre la diminution de la résistance globulaire et la production d'urobiline dans le sérum. — M. G. Bouet décrit diverses Hémogrégarines trouvées chez des rep- tiles de l'Afrique occidentale francaise. — M. L. Gau- cher a constaté que le fluorure de sodium produit un retard dans la sécrétion du suc gastrique et encore plus dans celle de la bile, et diminue la motricité gas- trique ; il est émétique. — MM. L. Gaucher et Glaus- serand ont isolé d’une eau de Vals un bacille chromo- gène nouveau; ses cultures ont une coloration rouge, qui pâlit ensuite. — MM. Ed. Retterer et Aug. Le- lièvre montrent que les cellules du myocarde pos- sèdent, outre le noyau, une charpente chromophile et élastique, qui émet des ramuscules latéraux pénétrant 470 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES dans le corps des fibres-cellules pour se continuer avec le réticulum chromophile et élastique de celles-ci. {M. Ch. Laubry et M. Parvu ont constaté que la réaction delWassermann est positive dans la majorité des cas, au cours de l’anévrisme de l'aorte, ce qui est une preuve nouvelle en faveur de l’origine syphili- tique de cette affection. — M. P. Boveri a reproduit expérimentalement l'artériosclérose chez le singe par l'action de l’adrénaline et du tabac. — M. T. Yama- nouchi a reconnufque les tumeurs cancéreuses pro- duisent dans l'organisme des souris un état de sen- sibilité spécifique;à l'injection fdesjmêmes tumeurs. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 30 Mars 1909. M. R. Brandeis à observé, dans un cancer du sein, des corps d'aspect parasitique, qui sont en réalité des concrétions minérales, vraisemblablement phospha- tiques. — MM.'J.3,Gautrelet el L. Thomas ont reconnu que le sérum de chien décapsulé et mort de son insuffisance rénale, injecté à un autre animal, produit une baisse de pression. — MM. J. Bergonié et L. Tribondeau décrivent leur technique pour l'emploi du courant fulgurant; le muscle semble attirer l’étin- celle presque autant que le tissu néoplasique, le tissu graisseux pas du tout. — Les mêmes auteurs ont étudié la fulguration des microbes; la stérilisation absolue en surface est facile; en profondeur, au contraire, on ne peut compter que sur un effet partiel. — M. P. Mau- riae montre qu'à tout individu présentant des symp- fômes de nature douteuse, même dans les cas où la Syphilis semble improbable, on doit appliquer la séro- réaction de Wassermann, qui, positive, est une indi- cation presque absolue de la maladie. — M. E. Poyar- koff a reconnu que le corps gras de la Galéruque de l'orme joue un rôle phagocytaire pendant la métamor- phose; l'intestin moyen est une simple forme de pas- sage entre l'intestin larvaire et l'intestin imaginal, sans aucune signification phylogénétique. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 301Marsx1909. MM. G. Etienne, Rémy et Boulangier ont constaté que la réaction à laïtuberculine des tuberculeux âgés se traduit par une diminution des mononucléaires, alors que les lymphocytes vrais augmentent de nombre. __ MM. M. Lucien et J. Parisot ont observé une aug- mentation manifeste du poids absolu et du. poids relatif de la thyroïde chez les animaux soumis aux injections intraveineuses répétées d'extrait hypophy- saire. — M. Dufour expose quelques idées intéres- santes d'Ostwald en Chimie biologique. —-MM. A. Char- pentier et Th. Guilloz rappellent qu'ils ont préparé le mercure colloïdal par un procédé analogue à celui décrit récemment par M. Ehrenhaft (p. 100). RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 20 Avril 1909. MM. Simond, Aubert et Noc ont constaté l'existence, à l'état épizootique, de la spirillose des poules à la Mar- linique; le spirochète est transmis à la poule par la piqère de l’Argas miniatus. — M. C. Gerber a observé sur les branches d'arbres un maximum de la teneur en présure en été et un minimum en hiver; dans la feuille, le maximum se présente au printemps, dans le bourgeon. — Le même auteur montre que HCI et les chlorures alcalins jouent un rôle prépondérant dans la coagulation gastrique des laits citratés. — MM. C. Juge et Ed. Hawthorn ont reconnu que le liquide dont la fulguration provoque la sécrétion sous la peau st une véritable lymphe. L'effet de la fulguration sur le sang consiste surtout en une hyperleucocytose marquée, avec polynucléose, abaissement du taux des grands mononucléaires et apparition de myélocytes. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 2 Avril 1909. M. Ch. Féry : Sur l'absorplion sélective des corps zoirs. Quelques expériences préliminaires ont démontré à l’auteur la forte absorption sélective des corps noirs usuellement employés pour mesurer l'énergie rayon- nante. La mesure comparée de l’échauffement d’un cône el d’une plaque recouverts de noir de platine et soumis au même rayonnement lui a donné les va- leurs suivantes : TEMPÉRATURE Âm POUVOIR absolue correspondant absorbant 29400. lu. 100,0 1410 2 98,5 980 3 96,0 735 4 92,0 587 5 85,0 490 6 18,0 420 7 78,5 368 8 88,0 km est tiré de la loi du déplacement : 1m 0—2.940, M. Féry a pensé qu'il était important de déterminer de nouveau en valeur absolue, et en employant un récep- teur intégral, le coefficient de la loi de Stefan a et la quantité os —xa déterminée par Kurlbaum avec un bolo- mètre à lames planes noirci au noir de platine. Dix-huit mesures effectuées entre 530° et 1250°C. lui ont donné pour o la valeur constante 5—6,30: la différence de+18,4 °/, avec l'ancien coefficient adopté 5,32 est bien de l’ordre que faisaient prévoir les mesures préli- minaires. Le récepteur dans ces mesures était un cône noirci dont l’angle au sommet avait 30°. Dans ces con- ditions, le nombre de réflexions imprimées aux rayons 0 suivant la réflexion régulière est de = — 6. L'étalon- nage en watts était obtenu en lançant un courant dans un fil de manganine isolé, enroulé dans un filetage tracé sur le cône; une enveloppe polie extérieure pro- tégeait le cône. Ces mesures montrent l'erreur com- mise dans la mesure de l'énergie rayonnante en employant un récepteur sélectif. Aussi bien pour la mesure de la répartition de l'énergie dans le spectre que pour la détermination de la constante solaire par les actinomètres, il sera nécessaire, dorénavant, de recourir à l'emploi d'un récepteur intégral permettant seul d'appliquer correctement les lois du rayonnement. — M. A. Dufour : Sur l'hypothèse de lexistente d'électrons positifs dans les tubes à vide. M. A. Dufour a été amené à s'occuper de ces électrons à cause de leur introduction possible dans l'explication des phéno- mènes de Zeeman anormaux. Il rappelle d’abord les expériences de M. J. Becquerel sur ce sujet dans les tubes à vide ! à plusieurs cathodes et anodes. M. A. Du- four, qui a utilisé d'abord des tubes aussi identiques que possible à ceux de M. J. Becquerel, est d'accord avec lui au sujet des constatations expérimentales; ce n’est que sur les valeurs numériques des faibles pres- sions convenant le mieux aux expériences qu'il y a un désaccord. M. J. Becquerel a été amené à attribuer à des électrons positifs ce qui forme le faisceau déviable, à cause de la grande déviation qu'il subit sous l'influence d’un champ magnétique faible. M. A. Dufour montre, par diverses expériences, que cette opinion est inexacte et que /e faisceau positif déviable n'est qu'un afflux secondaire prolongé par un faisceau- canal. Après quelques considérations sur la formation de ces afflux secondaires, M. A. Dufour termine en faisant remarquer que jusqu'à présent, tandis que l'explication du phénomeéne de Zeeman par les élec- trons négatifs est appuyée par des faits expérimentaux bien constatés relatifs aux rayons cathodiques, il n’y a 1 Voir la Revue du 15 août 1908, t. XIX, p. 598. ‘ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 471 actuellement rien de comparable pour l'explication des phénomènes de Zeeman anormaux à l’aide d'électrons positifs. M. Jean Becquerel fait observer que les résultats de M. Dufour diffèrent, sur plusieurs points, de ceux qu'il avait obtenus. Il ne peut indiquer, du moins pour le moment, la cause des divergences entre les résultats de M. Dufour et les siens; il propose de reprendre ses expériences en commun avec M. Dufour, estimant que c’est le seul moyen d'arriver à un accord définitif. Au sujet de l'interprétation des expériences, M. Jean Becquerel proteste contre l'idée que lui ont attribuée plusieurs physiciens, qui ont voulu voir dans ses conclusions une affirmation absolue de l'existence des électrons positifs. Il s’agit seulement d’une 2ypo- thèse, et ce mot seul suffit à faire comprendre le carac- tère de l'interprétation. L'hypothèse des électrons posi- tifs n’a d'ailleurs pas été émise uniquement à cause de l'existence de rayons positifs déviables dans certains tubes à vide; elle a été préconisée par M. Becquerel principalement pour expliquer le phénomène de Zeeman de sens contraire au sens attribuable à des électrons négatifs. M. Dufour, qui avait tout d’abord adopté l'hypothèse des électrons positifs, la combat à cause de l'existence de doublets dont les composantes ne semblent pas pouvoir être totalement supprimées par un analyseur circulaire convenablement orienté. M. Jean Becquerel ne peut accepter l'interprétation de M. Dufour, qui attribue l'effet à une polarisation incom- plète de la lumière et qui, par suite, appelle résidus de polarisation les faibles bandes qui, dans les spectres juxtaposés de deux vibrations circulaires inverses, paraissent prolonger les composantes principales. La polarisation étant l'effet primordial dans le phénomène de Zeeman, il est inadmissible que des vibrations puissent changer de période sans être polarisées. M. Becquerel a donc pensé que les prétendus résidus étaient de nouvelles composantes, distinctes des autres et polarisées ; l'expérience a justifié cette prévision. Ces résultats ne sont établis que pour les cristaux. M. Jean Becquerel ne sait si les effets sont les mêmes pour les spectres cannelés des vapeurs, mais il est persuadé que la polarisation incomplète et les résidus ne sont qu'une apparence. M. A. Dufour estime que, quoi qu'il en soit, dès maintenant il a atteint le seul but qu'il s'était proposé dans sa Communication et qui est le suivant : il croit avoir démontré expérimentale- ment que M. J. Becquerel »’'a pas établi l'existence d'électrons positifs dans les tubes à vide, et que l’expli- cation des propriétés du faisceau positif déviable ne nécessite nullement l'hypothèse de l’existence d’élec- trons positifs. M. H. Moulin rappelle que l’ensemble de nos connaissances actuelles sur les centres positifs ne semble pas en accord avec l'hypothèse des électrons positifs. —M. Henri Abraham : Aystérésigraphe. L'ins- trument, tel qu'il est présenté à la Société, est un appa- reil de démonstration destiné à faire voir en projec- tions le tracé instantané, très lumineux et à grande échelle, des courbes d’aimantation. Un échantillon de fer est placé dans une bobine magnétisante conve- nable parcourue par un courant alternatif. La courbe qu'on veut tracer doit avoir pour abscisses les valeurs du champ magnétisant, et pour ordonnées les valeurs du flux à travers l'échantillon de fer. Or, on sait que le rhéographe permet d'imprimer à un rayon lumineux des déviations instantanées exactement proportion- nelles à l'une ou à l’autre de ces deux quantités, selon qu'on emploie l'une ou l’autre des combinaisons de circuits qui ont été indiquées antérieurement. Il suffit donc de combiner optiquement les déviations des deux équipages de rhéographes ainsi disposés et oscillant à angle droit, pour voir la courbe d'hystérésis se tracer instantanément sur l'écran. L'expérience est faite en séance avec deux équipages de rhéographes dont l’un est dans sa position ordinaire, avec axe d'oscillation vertical, tandis que l’autre est couché de facon à avoir son axe d'oscillation horizontal. Chacun des deux miroirs oscillants se trouve au foyer d'une lentille, placée entre les deux appareils, l'image de l’un des miroirs se faisant sur l’autre; et il n'y a comme réglage qu'à mettre au point sur l'écran l'image du point lumineux fixe que fournit la lanterne de projec- tion ordinaire. Cette disposition de deux rhéographes croisés peut servir aussi à tracer plusieurs autres courbes fermées qui offrent un certain intérêt dans l'étude des courants alternatifs : par exemple, la courbe dont les aires élémentaires représentent les quantités d'énergie EI dt débitées à chaque instant par le circuit. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 26 Mars 1909. M. Justin-Mueller a étudié l'absorption compa- rative du charbon de sang et des fibres textiles. Il arrive aux conclusions suivantes : Le charbon de sang est colloïdalement « inactif »; il absorbe sans se trouver dans des conditions spéciales. Les fibres textiles, la laine en particulier, sont colloïdalement « actives » et n'absorbent que lorsque leur activité colloïdale est mise en jeu par des conditions particu- lières. Chevreul à attribué le phénomène d'absorption du charbon de sang à son affinité capillaire; l'absorp- tion des corps qui sont colloïdalement actifs se com- portant différemment, l’auteur l’attribue à leur affinité colloïdale. Cette absorption dépend, d’une part, du coefficient de solubilité du produit à absorber dans le dissolvant, d'autre part, du coeflicient d'absorption du corps absorbant se trouvant dans l’état d'activité colloï- dale ; il s'établit, dans des conditions déterminées, un équilibre inversement proportionnel entre les deux coefficients. — M. P. Nicolardot montre qu'on peut expliquer l'attaque, par le chlorure de soufre, de cer- tains métaux et métalloïdes par la formation préalable d'un sulfure. Quoique la chaleur de formation des chlo- rures soit supérieure à celle des sulfures, c’est pour- tant, dans tous les cas étudiés (Fe, Hg, Cu, Ag, etc.), un sulfure qui se forme tout d'abord; ce sulfure est attaqué ensuite par le chlorure de soufre non décom- posé, avec formation de chlorures. Le chlorure le moins chloré prédomine dans le mélange final. — M. F. Bou- rion rappelle, à ce propos, ses travaux avec M.C. Mati- gnon sur l’action chlorurante d'un mélange de Cl et de bichlorure de soufre, puis du chlorure de soufre seul, sur les oxydes et sels métalliques. L'action du premier mélange sur le platine le transforme en sulfure plati- neux à une température voisine du rouge. — M. M. Delépine fait observer que la formation de sulfure métallique signalée par M. Nicolardot n'est pas néces- sairement en désaccord avec le principe du travail maxi- mum, SCI? étant un composé défini. — M. H. Copaux a reconnu que les borotungstates sont intermédiaires entre les silico- et les méta-tungstates. Il propose donc de considérer les métatungstates eux-mêmes comme des tungstates complexes, des hydrotungstates, [3 H°0.24Tu 0*] 6M°0 + Aq. Les métatungstates ont, en effet, les mêmes propriétés générales que les boro-, silico-et phospho-tungstates ; l'acide métatungstique et ses sels de K et de Ba sont isomorphes avec les com- posés boro- ou silico-tungstiques correspondants. — M. V. Auger a étudié les composés stanniques halo- genés du type Sn X2 Y‘#4, spécialement les trois io do- bromures SnBr°l, SnBr°l? et SnBrl*. Il résulte de ses recherches que, de SnBr' à Snl*' en passant par tous les produits intermédiaires, il y a continuité de propriétés physiques et qu'il n’y a pas lieu d'envisager les com- posés mixtes décrits jusqu'ici comme individualités chimiques. — M. M. Tiffeneau a obtenu les alcools vinyliques par deux méthodes : 1° action de K?CO* seul ou de CH*CO?K suivi de KOH alcoolique sur les dibro- mures allyliques aromatiques, ou action de AgOH sur les iodhydrines styroléniques aromatiques ; 2° saponifi- cation ménagée des acétates vinyliques obtenus comme produits secondaires dans l’action prolongée de l’anhy- dride acétique sur les glycols primaires tertiaires. Les 412 alcools vinyliques fonctionnent exactementcomme tous les autres alcools non saturés; leur propriété caracté- ristique consiste dans leur facile (transformation en aldéhyde par l’action de la chaleur ou des acides miné- raux. Ils possèdent néanmoins une stabilité relative : certains peuvent être distillés dans le vide et bouillent alors environ 30° plus haut que l’aldéhyde correspon- dant et 10° plus haut que l'alcool saturé. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 11 Février 1909. MM. C. Dorée et J. A. Gardner: L'origine et la des- tinée du cholestérol dans lorganisme animal. WI. L'absorption du cholestérol dans l'intestin el son appa- rition dans le sang. Les auteurs, d'après le résultat d'expériences déjà décrites et en considérant le tra- vail d’autres savants, ont été conduits dans ce Mémoire à formuler l'hypothèse suivante quant à l’origine et à la destinée du cholestérol dans l'organisme animal : 1° Le cholestérol est un constituant constant de toutes les cellules, et, lorsque ces cellules sont détruites, le cholestérol n’est pas rejeté comme un produit inutile, mais sert à la formation de nouvelles cellules. 2° Une des fonctions du foie est de détruire les cellules mortes, par exemple les corpuscules sanguins, et d'éliminer leur cholestérol dans la bile. 3° Après que la bile à passé dans l'intestin dans le processus de la digestion, le cholestérol est réabsorbé, probablement sous forme d'éthers, avec les sels biliaires, et transporté par le sang dans les centres et tissus variés pour sa réincorpo- ration dans la constitution de nouvelles cellules. 4° Le cholestérol n'est probablement pas synthétisé dans le corps animal, et toute perte de cholestérol est remplacée par l'absorption directe de celui qui est dans le sang. Dans le but de prouver cette hypothèse, les auteurs ont entrepris des expériences détaillées. En nourrissant des lapins avec une nourriture exempte de cholestérol ou de phytostérol, on ne trouve pas de cholestérol dans les fèces. Lorsque, cependant, on ajoute des quantités mesurées de cholestérol à cette nourriture, une cer- taine proportion est toujours absorbée. Les analyses du sang de ces animaux ont montré une augmentation dans la teneur en cholestérol dans le cas d'animaux nourris avec le cholestérol, comparés avec ceux nourris sans cholestérol. Des expériences similaires, entre- prises sur des chiens, ont prouvé que le cholestérol est aussi absorbé de leur nourriture. — MM. G. W. Ellis et J. A. Gardner : l’origine et la destinée du choles- térol dans l'organisme animal. XV. La teneur en choles- térol des œufs et des poulets. Ce Mémoire contient le compte rendu d’un certain nombre d'expériences entre- prises dans le but d'obtenir la preuve de la réalité de l'hypothèse récemment émise, que le cholestérol est strictement conservé dans l'organisme animal, et qu'il n’est pas synthétisé par l'animal, mais pris dans son organisme Comme nourriture, du moins chez l'animal en état de croissance. Les expériences décrites consis- tent dans un certain nombre d’estimations du choles- térol dans la substance insaponifiable totale obtenue des œufs de poules et des poulets fraîchement éclos. Ces estimations ont été faites avec autant de précision que possible et les résultats ne laissent aucun doute sur le fait qu'il ne se produit aucune augmentation de choles- térol pendant le changement de l'œuf en l'assemblage compliqué de cellules constituant le poulet nouvelle- ment éclos. Les résultats semblent indiquer un pour- centage de cholestérol légèrement inférieur dans le poulet par rapport à l'œuf, mais cette différence peut être due à des difficultés expérimentales lors de l’extrac- tion de tout le cholestérol des tissus du poulet. — M. H. C. Ross: La détermination d'un coeflicient par lequel on peut mesurer la vitesse de diffusion d'une couleur et d'autres substances dans des cellules vivantes et par lequel les bactéries et les autres cellules peuvent être différenciées. Lorsqu'on répand du sang frais sur une pellicule d'agar qui contient la couleur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d'Unna et certains sels, la couleur se diffuse dans les cellules vivantes, et la rapidité de diffusion dépend de certains facteurs. Elle est accélérée par la chaleur et naturellement par le temps. Si la gelée est alcaline, la diffusion est aussi accélérée. Les acides et les sels neutres l’arrêtent. On à trouvé que, lorsqu'une classe de cellules se colore sur une pellicule d’agar donnée, d'autres classes ne se colorent pas. En altérant légère- ment la constitution de l’agar, par exemple en ajoutant plus d’alcali, d'acide ou de sels, ou en essayant une température différente, etc., la catégorie de cellules qui auparavant ne se colorait pas absorbe maintenant la couleur. On a aussi trouvé que les bactéries et d'autres cellules sont sujettes aux mêmes conditions et, par ce moyen, il a été possible de les différencier par leur vitesse ou coefficient de diffusion. Une méthode simple est donnée pour l'arrangement de la gelée d'agar, et, en mesurant en unités les facteurs : chaleur, alcalis, acides, sels et temps, les coefficients de diffu- sion peuvent être exprimés en nombres à l’aide d’une équation simple ; la coloration du noyau ou du eyto- plasme dans les cellules dépourvues de noyau est le moment qui sert pour déterminer le coefficient. La coloration du noyau coïncide avec la mort. Récipro- quement, lorsque le coefficient de diffusion de la cellule est connu, l'équation indique comment disposer une pellicule d’agar de façon à produire la coloration d'une cellule dans un temps et à une température donnés. Parmi les exemples cités, il y en a un qui montre que la vitesse de diffusion des substances autres que les couleurs paraît aussi dépendre du coefficient de diffu- sion des cellules. — M. J. G. Wilson présente des recherches sur /es nerfs du faisceau atrio-ventrieu- laire. Anatomiquement, le faisceau atrio-ventricu- laire contient non seulement une forme spéciale de fibre musculaire distincte du muscle ordinaire de l’atrium ou du ventricule, mais constitue une voie nerveuse importante et compliquée, où nous trouvons : 4° de nombreuses cellules ganglionnaires (monopo- laires, bipolaires et mullipolaires) dont les appendices peuvent passer : a) à des cellules ganglionnaires adjacentes dans le faisceau; b) à des fibres muscu- laires dans le faisceau; ec) à travers le faisceau mus- culaire aussi loin qu'il a été examiné; 2 des fibres nerveuses abondantes, qui le parcourent sous forme de cordons, et dont les prolongements peuvent se ter- miner : a) dans des cellules ganglionnaires du faisceau ; b) dans le plexus musculaire, ou peuvent traverser toute la partie examinée; 3° un plexus embrouillé de fibrilles variqueuses entourant les fibres musculaires du faisceau et en relations étroites avec elles ; 4° un approvisionnement musculaire abondant, avec des nerfs vaso-moteurs bien marqués et des (erminaisons sensi- tives. Physiologiquement, l'auteur montre que la bande atrio-ventriculaire constitue la voie qui assure la com- munication du rythme atrio-ventriculaire. Quand le faisceau est sectionné ou écrasé, les ventricules cessent momentanément de battre, puis ils recouvrentleur pulsa- tion, mais avec un rythme beaucoup plus lent que celui de l’atrium. L'anatomie pathologique confirme cette hypothèse; l’allorythmie de la maladie de Stokes-Adams peut être expliquée d’une manière satisfaisante par des lésions de cette voie. On a affirmé que l'onde de con- traction devait être myogénique. Les découvertes ana- tomiques de l’auteur s'opposent à cette conception. Elles montrent qu'une voie nerveuse importante est comprise dans le faisceau musculaire ; toutefois, rien ne permet de conclure que le faisceau atrio-ventriculaire soit anatomiquement un faisceau neuro-musculaire, — M. A. D. Darbishire présente quelques expériences sur la théorie des contributions ancestrales à l'hérédite. Elles ont consisté dans des croisements répétés entre des pois à graine jaune et à graine verte. Les résultats sont contraires à la théorie que les caractères des parents ou des ancêtres jouent un rôle quelconque dans la détermination de la composition d’une génération donnée. : ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 25 Mars 1909. Séance anniversaire annuelle. La Société procède au renouvellement de son bureau, qui est ainsi constitué : President : M. H. B. Dixon; Vice-présidents : MM. J. C. Brown, J. N. Collie, J. J. Dobbie, F. S. Kipping, Sir A. Pedler et J. Walker ; Trésorier : M. Al. Scott; Secrétaires : MM. M. O. Forster et A. W. Crossley ; Secrétaire pour l'étranger : M. H. T. Brown. Séance du 4 Avril 4909. M. V. H. Veley a déterminé les valeurs d'affinité d'un certain nombre d’alcaloides par les méthodes au méthyl-orange et au borax; quelques-unes sont infé- rieures à 4.10 —7, la majeure partie est intermédiaire entre ce nombre et 3.10 —° (valeur de l'ammoniac), et quelques autres sont supérieures à cette dernière valeur. — M. E. K. Hanson a étudié le spectre de fluo- rescence de la phycoérythrine (pigment des Algues rouges) et y a trouvé deux bandes coïncidant avec les bandes d'absorption de la chlorophylle. La phycoéry- thrine est uu colloide soluble dans l’eau, précipité par les réactifs des protéines; mais elle ne donne pas la réaction du biuret et sa teneur en azote est trop basse pour une vraie protéine. — M. F. Tutin a transformé l'iso-amygdaline en son dérivé hepta-acétylé, qui a été dédoublé en deux composants, l’hepta-acétyla- mygdaline, et l’hepta-acétyInéoamygdaline, F. 1749, [æ]n ==— 659,6. — M. H. Hibbert a reconnu que les composés dérivés de l’action des alkylhalogénures de magnésium sur les amines tertiaires sont en général très instables. — MM. H. Hibbert et A. Wise décrivent une méthode pour la séparation des amines tertiaires et des amines secondaires et primaires, basée sur la facile décomposition des dérivés des premières avec CH°MgBr entre 200 et 2809, et la stabilité des dérivés des deux dernières dans les mêmes conditions. En distillant entre ces limites de température, l'amine tertiaire passe seule. — M. F. D. Chattaway a préparé les Az-tribromophénylhydrazines soit directement par substitution de Br dans les hydrazines, soit par l’action de Br sur les sels de diazonium; en présence de Br libre, ces composés forment des perbromures, stables seulement sous une forte pression de vapeur de brome. — M. P. C.C. Isherwood a préparé le thioviolurate de soude par action de l'acide acétique sur des quantités équivalentes de thiobarbiturate et de nitrite de sodium; l’acide correspondant est violet en solution. L'acide 1 : 3-diphénylviolurique s'obtient par action de AzH#, puis du nitrite de sodium et de l'acide acétique, sur l'acide 1 : 3-diphénylthiobarbiturique.— Me M. A. Whi- teley et M. H. Mountain ont préparé un certain nombre d'acides diphénylthiobarbituriques et diphé- nylthiovioluriques. L’acide 4 : 3-diphénylthiobarbitu- rique fond à 244°; l'acide «1 : 3-diphénylthioviolurique fond à 211-212? et son isomère $ à 2240. — M. J. C. Cain a obtenu un certain nombre de dérivés nitrosoacétyla- minés de la série benzénique et de la série diphény- lique. — MM. N. V. Sidgwick et T.S. Moore ont étudié l’action de l'acide nitrique sur le vert brillant, puis celle de HAzO*, HCI et des alcalis sur le vert malachite. Les acides agissent sur le sel coloré pour former un sel acide incolore; quand une solution du carbinol est traitée par un acide, il se forme d’abord le sel coloré, puis le sel acide. Les auteurs ont également étudié l'action des acides sur le diaminotriphénylcarbinol; pour une petite quantité d'acide, la couleur augmente d'abord, par suite de la diminution de l'hydrolyse; pour une plus grande quantité, elle diminue, par suite de la formation du sel acide. — MM. A. G. Perkin et F. Thomas ont obtenu facilement le p-nitrobenzaldé- hyde-indogénide en hydrolysant l'indican par un acide en présence de p-nitrobenzaldéhyde; la réaction peut 473 être employée à la détermination quantitative du glu- coside. On obtient des composés analogues en présence d'autres aldéhydes. Quand l'indican est hydrolysé par H°S0® ou par HCI, en oxydant simultanément par l'air, le rendement en matière colorante est de $5 °/, dans le premier cas, 93,5 °/, dans le second; le reste est du brun indoxylique. — MM. F. Thomas, W. P. Bloxam et A. G. Perkin ont hydrolysé l’indican pur par l'indi- mulsine et oxydé par l'air les solutions d'indoxyle ainsi produites. Le rendement en colorant n’est pas quanti- tatif, par suite de la nature instable de l'indoxyle; il est le plus élevé quand la fermentation a lieu en pré- sence d'un peu d’acide et l'oxydation en présence d'une trace d’AzH*. — M. A. G. Perkin.a constaté qu'un échantillon d'acide indoxylique conservé dans un flacon s'était oxydé graduellement, en donnant de l’indigotine, de l'indirubine, de l’isatine et du brun d'indigo. — Le même auteur à reconnu que, dans la réduction de l'in- dirubine par la poudre de Zn et un aleali, il se forme, à côté de l'indoxyle, de l’oxindol. — M. J. J. Fox montre que l'augmentation de solubilité du sulfate de plomb dans les solutions concentrées d’acétates de sodium et de potassium est due à la formation d’acétate de plomb en solution. — M. Ch. K. Tinkler déduit, de l'examen du spectre d'absorption des méthiodures de bases cycliques, que la coloration de ces alkylio- dures est due à une polymérisation, la liaison ayant lieu entre deux atomes d'iode. — M. H. M. Dawson décrit une méthode pour l'étude des équilibres de dis- sociation dans les solutions. On ajoute à une solution de À et de B une troisième substance GC, qui se combine aussi avec À pour former un composé dissociable AC, dont on connaît la constante de dissociation. Si la con- centration de C non combiné dans la solution est déter- minée, celle de AC, s’en déduit, et, en combinant ces indications avec la constante de dissociation du composé AC, on peut obtenir la concentration de A non com- biné dans la solution. On peut en déduire le rapport moléculaire de A à B dans le composé AB, qui s'est formé dans la solution. La méthode a été appliquée à l'examen des solutions Hgl? dans KI. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION CANADIENNE Séance du 22 Janvier 1909. M. F.T. Shutt montre que le climat a une influence plus grande que la fertilité du sol sur la composition du grain. La qualité du blé de chaque saison est large- ment déterminée par le caractère de chaque saison. S'il y a une quantité suffisante d'humidité en juin pour amener les plants de blé à maturité, on peut espérer une meilleure qualité de grain si les semaines qui suivent sont caractérisées par un temps chaud et sec que si le temps, durant cette période, est froid et humide. Séance du 25 Février 1909. M. B. L. Emslie fait une conférence sur les sels de potasse de Stassfurt. Il décrit les conditions géolo- giques de leurs gisements, les minéraux cristallisés, l'extraction et la purification des sels et leurs applica- tions industrielles. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 13 Janvier 1909. M. H. Porter a étudié le mouvement des gaz dans les chambres de plomb; il en déduit quelques applica- tions pratiques : A la fin des chambres, l'entrée doit être au fond et la sortie au centre. La longueur d’une chambre doit être environ quatre fois sa hauteur pour pour donner un jeu suffisant aux mouvements naturels des gaz. La vapeur doit être admise au-dessus de la sortie, et non sur les côtés de la chambre. HN 1 re ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SECTION DE LONDRES Séance du 1% Mars 1909. M. G. N. Huntly : Le soufre comme cause de cor- rosion de l'acier. On a supposé jusqu'à présent que, pourvu que le soufre dans l'acier fût combiné complète- ment à l’état de sulfure de manganèse, ses propriétés nuisibles sur la résistance de l'acier étaient réduites à un minimum. Mais l'examen métallographique a montré que beaucoup de fractures de l'acier suivent les lignes de sulfure de manganèse; celui-ci doit donc être exclu autant que possible des aciers. — M. J. F. Briggs expose l’état actuel des connaissances sur la cellulose, considérée comme un polysaccharure. Séance du 5 Avril 1909. M. W. Smith présente un échantillon de charbon fossile connu sous le nom de « boghead cannel » ou « minéral de Torbane Hill » et en retrace l'histoire. Il propose de supprimer le terme de bitumineux appliqué aux charbons. — M. S. Cowper-Coles décrit ses pro- cédés de galvanisage à la vapeur, qui se divisent en deux groupes : procédé à la poudre de zinc et procédé à la vapeur de zinc fondu. Dans le premier, la poudre de zinc (produit de la distillation du zinc) et les objets en fer à recouvrir sont introduits dans un tambour en fer, qui est chauffé dans un four à gaz vers 325° C. pendant quelques heures. Les articles, recouverts uniformé- ment, sont retirés et lavés dans un jet de vapeur. Dans le second procédé, les objets à traiter sont placés dans une chambre remplie de vapeur de zinc où au-dessus d'un bain de zinc fondu; on opère dans une atmo- sphère d'hydrogène. L'avantage du galvanisage à la vapeur est d’être à meilleur marché que le galvanisage à chaud et de donner une meilleure protection. SECTION DE NEW-YORK Séance du 22 Janvier 1909. M. T. B. Wagner retrace les progrès de l'industrie américaine des produits du maïs; il y en a plus d'une centaine, mais les trois principaux sont l’'amidon, le sucre et le sirop de maïs. Séance du 19 Février 1909. M. H. S. Riederer décrit l’industrie du lithopone, mélange de sulfure de zine et de sulfate de baryum employé pour la peinture. On le prépare en précipitant le sulfure de baryum par le sulfate de zinc. Il a l'incon- vénient de devenir gris au soleil. — M. C. D. Holley décrit la fabrication du blanc de céruse par le « pro- cédé doux ». Le plomb fondu est forcé, par un courant de vapeur surchauffée, dans des atomiseurs qui le réduisent en fines particules, lesquelles se solidifient dans un bassin plein d’eau. Ce plomb en suspension dans l’eau est soumis pendant vingt-quatre à trente- six heures à l'action d’un fort courant d'air qui le trans- forme en hydrates basiques, qui sont séparés et soumis à la carbonatation pendant trente-six heures; on obtient ainsi un carbonate de plomb très blanc. — M. L. F. Hughes parle de l'industrie du « blanc de plomb sublimé ». C’est un sulfate basique de plomb qui se produit directement par l’action d'une flamme oxydante sur la galène finement pulvérisée, distille à l'état de vapeur et se condense sous forme de fine poudre blanche amorphe. 11 donne d'excellentes pein- tures. Séance du 19 Mars 1909. M. G. W. Thompson décrit la fabrication du blanc de céruse par le procédé hollandais (attaque du plomb par l'acide acétique). Il montre que le composé qui se forme est un composé défini 2PbCO*. PH(OH}. Ses mérites pour la peinture sont surtout dus à ses pro- priétés physiques, spécialement à l'existence de parti- cules de plusieurs diamètres différents, qui réduisent les vides à un minimum. — M. E. C. Klipstein montre l'influence de la chimie sur l’utilisation du quebracho. Deux chimistes italiens, Lepetitet Tagliani, ont reconnu qu'en traitant l'extrait de quebracho avec le bisulfite de sodium ou d’autres sulfites, on prévient toute perte de tanin soluble et que les tanins insolubles ou diffici- lement solubles sont dissous et rendus utilisables. Cette découverte a fait monter la consommation de l'extrait de quebracho de 5.000 tonnes en 4901 à 50.000 tonnes en 1907 aux Etats-Unis. — M. J. P. H. Perry étudie l'emploi du ciment armé dans la construction des bâtiments industriels. SECTION D'ÉCOSSE Séance du 2 Mars 1909. M. S. Stewart décrit un procédé pour la recherche et la détermination de la résine dammar dans la résine kauri. On dissout dans le chloroforme les résines, puis on ajoute de l'alcool absolu; un volumineux précipité blanc indique la résine dammar, tandis que la résine kauri ne donne rien. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 22 Février 1909. M. H. G. Bennett décrit une méthode pour la déter- mination de l’azote dans les substances organiques, eten particulier pour celle de la substance peau dans les cuirs. La substance est digérée avec H?S0' jusqu'à ce que le liquide soit clair, puis on neutralise l'excès d'acide avec NaOH. On ajoute une solution neutre de formaldéhyde, qui transforme AzH° en hexaméthylène- tétramine, tandis que H?S0* combiné est libéré ; on le titre ensuite avec la soude décinormale, — Le même auteur décrit une méthode de contrôle des liqueurs calciques en tannerie. On sait que celles-ci se chargent peu à peu de matières protéiques, qui sont favorables au développement des bactéries. L'auteur titre ces liqueurs filtrées avec HCI N/10 en présence de phénol- phtaléine et de méthylorange ; la différence des deux lectures donne les bases faibles formées par la décom- position de la peau; elle est proportionnelle à la substance peau dissoute et à l’activité bactérienne. — MM. H.R. Procter et S. Hirst indiquent un moyen de reconnaître le mélange d'extrait de bois de pin aux extraits tannants habituels, On ajoute un peu d’aniline, puis HCI concentré ; avec les extraits ordinaires, on obtient une solution parfaitement transparente, tandis qu’en présence d'extrait de pin il se forme un précipité. — Les mêmes auteurs recommandent l'emploi de la méthode de Læwenthal pour le contrôle permanant des liqueurs en tannerie. — MM. H. R. Procter et D.J. Law ont étudié la diffusion des sels de Cr, Fe et Al à travers les gelées de gélatine. Ces sels sont hydrolysés et l'acide pénètre beaucoup plus rapidement que la base. Séance du 22 Mars 1909. M. H. R. Procter a vérifié l'exactitude supérieure de la méthode de détannisation de l'Association inter- nationale des chimistes des industries du cuir par rapport aux autres méthodes. — M. A. G. Perkin a analysé deux produits indigoïques provenant de la Nigeria du Nord. L'un ne contient que 0,65 °/, d'indi- gotine, l’autre 21,5 °/,; ce dernier provient du Loncho- carpus Cyanescens. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 22 Octobre 1908. M. W. Branca expose les hypothèses indiquées pour expliquer l’existence des cratères de la Lune. Les recherches de Tilghmann et ensuite celles de Mer- rill viennent de démontrer le fait que le « cratère mé- téoritique » de l’Arizona doit bien son origine au choc d'un météorite, les hypothèses d'une explosion ga- zeuse où d’un effet du magma étant également inad- missibles, Il convient cependant de distinguer les cra- ACADÉMIESYETESOCIÉTÉS SAVANTES 475 tères d'origine météoritique possible de ceux qui ont été produits par des phénomènes de nature volcanique ou tectonique localisés sur la Lune. Séance du 5 Novembre 1908. M. R. Helmert adresse un Mémoire sur les i1mper- feetions de l'état d'équilibre de l'écorce terrestre. Les résultats des triangulations aussi bien que des expé- riences relatives à la pesanteur indiquent l'existence d’une compensation des entassements de l'écorce ter- restre, se manifestant sous la forme de continents et de hautes montagnes, compensation due aux variations de densité de l'écorce, laquelle se trouve en général en une sorte d'équilibre hydrostatique avec l’intérieur de la Terre. Il est vrai que certaines anomalies de la pesanteur, se présentant par exemple dans l'Europe et ‘Asie centrales, font voir l’'imperfection de cet état d'équilibre. La contradiction actuelle entre les épais- seurs de l'écorce terrestre calculées sur la base d’obser- vations sismiques, d'une part, et géodésiques, d'autre part, disparaît lorsqu'on tient compte, pour définir l'équilibre de l'écorce terrestre, de l’élasticité de cette dernière et peut-être aussi de la couche de magma sous-jacente. — M. Branca présente les analyses de M. F. Tannhäuser sur la chaîne de gabbros de Neu- rode, analyses établies à l’aide d’un procédé dû à Ossann, discutées en partie et inscrites dans un rec- tangle isocèle. Séance du 12 Novembre 1908. M. Müller-Breslau rend compte de ses recherches relatives à l'influence d’une connexion rigide du tablier d'un pont de fer avec les poutres principales, dans le . cas de l’indétermination statique de ces dernières. Séance du 19 Novembre 1908. M. F. Schottky adresse un second Mémoire sur la théorie des fonctions du symétral, mémoire où il dis- cute les propriétés périodiques des quatre classes de fonctions d’Abel faisant partie du symétral. Seance du 26 Novembre 1908. M. Schwarz présente un travail de M. Arthur Korn anciennement professeur à l’Université de Munich, sur les surfaces minima dont les courbes limites s'écartent peu de courbes planes. Ce travail renferme la solution du problème qui consiste à déterminer une portion de surface minima, à liaison simple, dont la limite est constituée par une courbe spéciale à trois dimensions se rapprochant suffisamment d’un cercle. Séance du 3 Décembre 1908. M. R. Koch rend compte, en se rapportant aux obser” vations antérieures sur les états d'évolution des trypa- nosomes qui se reproduisent dans la voie digestive des Glossines, d’autres recherches rentrant dans ce même domaine. Il discute l'importance de ces résultats nouveaux et leur relation avec l’étiologie de la maladie du sommeil. Séance du 10 Décembre 1908. M. H. Struve rend compte d’un Mémoire inédit de Besse] sur le mouvement d'Uranus. Ce Mémoire, dont le manuscrit se trouve dans les archives de l’'Observa- toire de Koenigsberg, est intitulé : « Investigation d’un phénomène remarquable présenté par le mouvement d'Uranus »; il a été rédigé en 1822-1823, peu de temps après la publication des tables de Bouvard, et présente un intérêt historique particulier par ses relations avec l'historique de la découverte de Neptune, — en nous montrant comment cet astronome a reconnu de bonne heure l'importance du problème d'Uranus, — aussi bien que par les lumières qu'il vient jeter sur l'origine de nombreux travaux importants de Bessel. Une partie seulement de ce travail, resté fragmentaire, à été publiée par l'auteur, dans son Mémoire connu « Investigation de la partie des perturbations plané- taires due au mouvement du Soleil » (Mémoires de l'Académie de Berlin, 1824), en omettantles recherches relatives à Uranus. — M. Struve présente un Mémoire de M. F. Rahnenführer sur l'altitude polaire de Koenigsberg, mémoire faisant partie des travaux astro- nomiques de l'Observatoire de celte ville. Séance du 17 Décembre 1908. M. Zimmermann donne lecture d’un Mémoire sur les conditions d'équilibre des corps creux à parois minces, exposés à un excès de pression intérieure. Ces recherches se rapportent aux deux cas où il n'existe pas de forces extérieures et où un moment de flexion extérieur agit sur le corps. L'auteur fait voir qu'en l'absence de forces extérieures, les sections initiale- ment circulaires se maintiennent circulaires, les varia- tions de courbure de l'axe longitudinal étant limitées au cas où le rayon de la section se modifie sous l’action d’une extension périphérique de la paroi. Les sections des corps creux subissant une flexion changent, au con- traire, toujours de forme, le diamètre situé dans le plan de flexion éprouvant un raccourcissement. — M. H. Rubens présente les résultats d'expériences faites en collaboration avec le regretté E. Ladenburg, sur le pouvoir de réflexion de l'alcool éthylique. Les re- cherches antérieures des mêmes auteurs faisaient voir que l'alcool éthylique, à l’égal de l’eau, présente, dans le spectre infra-rouge, un certain nombre d’endroits à réflexion anomale, reliés aux bandes d'absorption. Or, cette réflexion anomale est encore plus marquée aux basses températures qu'aux températures ordinaires. Les maxima du pouvoir de réflexion observés aux basses températures de l'alcool se produisent tous pour des longueurs d'ondes plus courtes que ceux qu'on observe aux températures ordinaires. Ces faits ne con- tredisent aucunement, au point de vue qualitatif, les phénomènes constatés sur les substances solides, par rapport à la variation thermique des propriétés sélec- tives dans le spectre infra-rouge. D'autre part, il convient d'envisager la possibilité que le déplacement considérable des maxima de réflexion serait dû inté- gralement ou partiellement à l'influence d’une absorp- tion de la vapeur d'alcool, présente, aux températures ordinaires, dans une mesure notable. — M. Orth pré- sente un Mémoire de M. A. Bickel sur /a théorie de la sécrétion du pancréas. Les glandes de l'estomac subissent la double influence du sang et du système nerveux extra-gastrique. Or, le stimulus sanguin est probablement continu; le caractère discontinu de la sécrétion normale et la forme des courbes de sécrétion sont réglés par des influences accélératrices ou retar- datrices, exercées sur le pancréas par le système nerveux extra-gastrique. Ces observations sont impor- tantes pour la pathologie et la thérapeutique des per- turbations des sécrétions de l'estomac. Séance du 7 Janvier 1909. M. Branca présente un travail de M. A. Tornquist, à Kænigsberg, sur l'hypothèse de lélévation sous- marine de la chaïne alpine et sur un essai d'illustrer le mécanisme de la formation sous-marine des mon- tagnes. Bon nombre de phénomènes indiquent le caractère sous-marin des premières phases de l’élé- vation des Alpes. D'autre part, l’auteur signale comme vraisemblable que les calcaires mésozoïques rigides sont venus au contact sous-marin de sédiments ter- tiaires (flysch) se trouvant encore à l'état mou. Les masses calcaires rigides à arêtes aiguës, superposées d’abord sur les sédiments mous en couches de débris grossiers, ont fini par s’y enfoncer sous-marinement de façon à pouvoir produire l'apparence d'un transport glacial. La possibilité d'un processus pareil est confir- mée par une série d'expériences que l’auteur a l’inten- tion de continuer. — M. Schwarz présente plusieurs modèles de lamelles solides, préparées par M. E. R. Neovius, professeur à Copenhague, modèles se com- posant d’un noyau de membranes gélatineuses et d’un 476 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES enduit de cire, dissoute à la chaleur, dans le baume du Canada. Ces lamelles solides servent à illustrer des portions de surface minima données. Séance du 14 Janvier 1909. M. Ad. Martens présente, avec une Note explicative sur les mesures techniques des pressions hydrosta- tiques élevées, deux types de balances manométriques destinées aux pressions intermédiaires entre 50 et 6.000 atmosphères. Séance du 21 Janvier 1909. M. W. Nernst donne lecture d'un Mémoire sur le calcul des forces électromotrices à l'aide des données thermiques. Après avoir passé en revue les tentatives antérieurement faites pour résoudre ce problème, l’au- teur démontre l'insuffisance des deux théorèmes bien connus de la Thermodynamique pour décider la ques- tion. D'autre part, la force électromotrice des piles, n'utilisant que des substances solides ou liquides chi- miquement homogènes, peut être calculée en se basant sur le dégagement de chaleur du processus électromo- teur et les chaleurs spécifiques des substances en réac- tion, pourvu qu'on ajoute à ces théorèmes classiques un nouveau théorème que l’auteur a déjà communiqué à l’Académie, il y a deux ans. M. Nernst applique sa méthode de calcul à différents exemples. Il étend ensuite la théorie au cas où la structure des piles com- porte des corps gazeux. C’est ainsi qu'il finit par trou- ver un moyen de calculer théoriquement la force élec- tromotrice d’une combinaison quelconque, sur la base des grandeurs thermiques et des constantes dites chi- miques. — M. Rubens présente un travail de MM. A. Miethe etE. Lehmann, à Charlottenbourg, sur l'extré- inité ultra-violette du spectre solaire. Les auteurs ont étudié photographiquement à Berlin, Assouan et Zer- matt, sur le Gürnergrat et le Mont-Rose, par la méthode des prismes croisés, la partie ultra-violette du spectre solaire. L’étendue du spectre s’est trouvée être indé- pendante d l'altitude de l'endroit d'observation ; la longueur d’onde la plus courte observée par les expé- rimentateurs a été, dans tous les cas, intermédiaire entre 291,10 et 291,55uy. Quant à savoir si cette extré- mité du spectre est déterminée par l'atmosphère de la Terre ou si elle correspond à l'extrémité véritable du spectre solaire, déterminée par une absorption pos- sible dansles couches supérieures de la chromosphère, ce problème sera traité par voie expérimentale, en étudiant l'absorption qui se produit dans les couches atmosphériques de dimensions correspondantes. — M. Planck présente une Note de M. C1. Schaefer, à Breslau, sur Ja diffraction des ondes électro-magné- tiques par les obstacles cylindriques isolants. L'auteur indique l'intégration des équations différentielles représentant le passage des ondes électro-magnétiques planes à polarisation linéaire, à travers un cylindre mince de substance isolante posé parallèlement à la force électrique. 11 s’en sert pour calculer la réparti- tion des intensités en avant et en arrière du cylindre. L'accord entre la théorie et l'expérience est satisfai- sant. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 11 Mars 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Schmidt a étudié la marche nocturne de la température, qu'il divise en trois parties. La première, caractérisée par une chute rapide de température qui commence peu après le coucher du soleil et dure environ trois heures, est attribuée surtout au pouvoir de rayonnement de l'air. Si l’on calcule ce dernier d’après l’abaissement de tem- pérature, on trouve une valeur de 5' égale à 1,02 X 10 =#, plus que double des valeurs antérieurement trouvées, mais coïncidant mieux avec les résultats des recherches de laboratoire. La deuxième partie de la marche noc- turne de la température est troublée par des courants de convection, tandis que la troisième partie, qui com- ‘mence deux à trois heures avant le lever du soleil, est une sorte de crépuscule de chaleur. — M. K. Przibram a poursuivi ses recherches sur la mobilité des ions dans les vapeurs; les valeurs trouvées par lui précé- demment doivent être multipliées par 1,3. Des essais de condensation à diverses températures montrent que l'expansion de la vapeur nécessaire pour la condensa- tion des ions ne varie pas beaucoup entre — 10° et + 29°, d'où l’on conclut à la constance du rayon des ions dans cet intervalle. — MM. Zd. H. Skraup et H. Lampel ont hydrolysé la sérum-globuline par les alcalis et ont obtenu une substance acide très peu soluble dans l’eau, à la fois albumose et peptone, l'a- cide globuline-protalbinique, puis l'acide globuline- lysalbinique et la globuline-peptone. Dans ces trois substances, il n’y a plus d’arginine; la lysine et l’histi- dine sont à peu près en même quantité que dans le produit original. La tyrosine est en plus grande quan- tité dans l'acide globuline-protalbinique que dans la sérum-globuline. Enfin la phénylalanine est en bien moindre quantité dans les produits de décomposition que dans la globuline originale. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Zahlbruckner a déterminé les lichens rapportés par l'Expédition bota- nique dans le sud du Brésil; il décrit 500 espèces, dont un grand nombre nouvelles. Séance du 48 Mars 1909. 1° ScrENCES PHYSIQUES. — M. A. Kirpal a constaté que, contrairement aux observations antérieures, la réaction de Friedel et Crafts, appliquée à l’anhydride cinchoméronique, conduit à deux acides cétoniques isomères. Ces deux acides ont été ensuite préparés par synthèse en condensant les chlorures des éthers cin- choméroniques isomères avec le benzène. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Knoll a étudié la croissance en longueur et le géotropisme des styles des appareils fructifères du Coprinus stiriacus. I à observé sur plusieurs points une concordance remar- quable avec les phénomènes analogues des tiges des plantes phanérogames. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE Nos 15 JUIN 1909 kRevue générale de SCiences pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $& 1. — Nécrologie Ernest Besnier. — La Science médicale vient de faire une perte sensible en la personne d’Ernest Bes- nier, le chef incontesté de l'Ecole dermatologique française. Né à Honfleur en 1831, il était interne des hôpitaux à vingt-trois ans et médecin des hôpitaux à trente et un ans. Après s'être occupé d’abord de Médecine géné- rale et d'Hygiène, il se spécialisa dans l'étude des maladies de la peau; entré à l'Hôpital Saint-Louis en 1872, il y resta pendant vingt-quatre ans, y faisant installer le premier laboratoire de recherches histolo- giques et orientant la Dermatologie française dans une voie scientifique féconde. Ses travaux, sa compétence, son autorité scienti- fique étaient universellement reconnus en France et à l'Etranger et furent l'objet des manifestations les plus flatteuses dans les Congrès internationaux. $ 2. — Astronomie Absorption de la lumière stellaire dans l'espace. — L'éther absorbe-t-il la lumière des étoiles? Le fait que celles-ci apparaissent d'autant plus faibles qu'elles sont plus éloignées du système solaire serait a priori une preuve de l'absorption lumineuse, à moins que nous n'assignions à notre soleil une posi- üon unique dans l'Univers, autrement dit la place de densité maximum. Mais, en dehors du raisonnement d'induction, certains phénomènes, récemment discutés par le Professeur Kapteyn, prouvent l'absorption de la lumière stellaire pendant son voyage à travers l’espace. Cet astronome avait déjà, par des observations anté- rieures, trouvé pour l'absorption une valeur provisoire s’élevant, pour la totalité du ciel, à une moyenne de 0,016 grandeur pour une distance correspondant à trente-trois années de lumière. Mais la classification spectrale obtenue d’après les mesures prises à Harvard Observatory a permis à M. Kapteyn de reprendre ce problème en basant ses recherches sur les moyennes distances probables de deux classes d'étoiles de Miss Maury, du type « Bou- vier et « Cassiopée. Les spectres des étoiles de la pre- REVUE GÉNÉR:LE DES SCIENCES, 1909. mière de ces deux classes présentent une absorption moindre que ceux de la seconde catégorie, et d’après une analyse des mouvements propres stellaires fournis par le « Catalogue fondamental » de Newcomb, le Pro- fesseur Kapteyn trouve, qu’en règle générale, les mou- vements propres des étoiles du genre « Bouvier sont très supérieurs à ceux des étoiles de la catégorie & Cas- siopée. Ceci nous montre que ces étoiles sont plus près de nous et doivent subir une absorption moindre que celles de la classe « Cassiopée. Cette investigation est donc favorable à la théorie de l'existence d’un milieu absorbant. Nouveaux éléments de la Comète de Hal- ley. — La comète de Halley se rapproche de jour en jour de la Terre etl’on espère que les instruments puis- sants la découvriront à l'automne prochain. Les nou- veaux calculs de MM. Cowell et Crommelin établissent qu'elle passera au périhélie le 13 avril 1910. Les élé- ments sont les suivants : Longitude du nœud ascendant, 57°11'; Longitude du périhélie, 111°32' (celle-ci est mesurée Le long de l'orbite à partir du nœud, dans la direction du mouvement de la comète); Inclinaison — 16243!; Excentricité — 0,96729; q (distance périhélique) — 0,5869 (distance moyenne au Soleil). En un langage moins technique, cela signifie que, si l'on tirait à travers l'orbite terrestre une ligne joignant les positions de la Terre en novembre et en mai, le plan de l'orbite cométaire couperait le plan de l'orbite terrestre dans cette ligne, la première étant au-dessus de la seconde, du côté où la Terre se trouve en été. L'angle formé entre les plans vers la même partie de l'orbite est 17047! (1800 — 162013'). La comète passera au-dessus du plan de notre orbite en février 1910 et atteindra le périhélie le 13 avril. La longitude du péri- hélie est 111°32', mesurée dans le sens contraire à la direction du mouvement de la Terre et comptée du point correspondant à 57°11’ de longitude, dans le sens direct du mouvement de notre planète, en sorte que le point périhélique est à — 54°21' de longitude du Premier point des Aires, lequel est environ dans la direction où se trouve la Terre vers la fin de juillet. 11 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 178 $ 3. — Mécanique Un appareil à miroir pour mesurer les variations élastiques de longueur. — Malgré le nombre assez considérable de bons appareils que nous possédons pour mesurer les déformations élas- tiques, ce problème ne saurait être considéré comme définitivement résolu. Chacun de ces appareils, à côté de ses avantages individuels, présente, en effet, quelque inconvénient. Dans un récent travail, M. B. Kirsch‘', professeur à l'Ecole Polytechnique de Vienne, après avoir passé en revue les appareils les plus répandus en Allemagne et en Autriche, signale le principe de son nouveau dispo- sitif qui évite, d’après lui, les désavantages de ses pré- décesseurs, AP se On sait que, dans les instruments de précision ser- vant à apprécier les longueurs et les variations de longueur, la distance à mesurer est convertie d’une façon quelconque en rotation de miroir; l'emploi d'une lunette pour observer, dans ce dernier, l’image d’une échelle produit (comme, par exemple, dans le galva- nomètre à miroir) un grossissement très considérable des variations de lon- 5 gueur minimes. Les divers appareils en présence ne diffèrent que par le principe constructif utilisé pour convertir les va- riations de longueur en rotations de mi- roir. Le dispositif Bau- schinger (fig. 1) trans- forme la petite variation de longueur élastique en rota- tion de miroir, grâce au frottement d'une barre en acier S sur un petit rouleau en caoutchouc R. Cette barre est recouverte, au point de contact, de papier d’émeri fin. Le miroir est disposé dans l’axe du rou- leau, rigidement relié à l’un des repères de l’'échan- tillon; la barre étant reliée à l’autre repère, le dépla- cement relatif de la barre par rapport à l’axe du rou- leau équivaut à la variation de longueur qu'il s’agit de mesurer. Pour les mesures absolues d'élasticité, le diamètre du rouleau doit être donné avec une grande précision; pour les mesures relatives, le rouleau doit être par- faitement circulaire, de façon à maintenir constant le rapport de transmission pendant sa rotation. Or, comme le caoutchouc finit par s'user d'une façon variable aux différents endroits de la surface, le rap- port de transmission décroît inégalement. Dans l'appareil Martens (fig. 2), la barre en acier S comporte une rainure N 5 où est logé un prisme en acier P. Les variations de longueur, c'est-à-dire les déplacements de la barre S (qui, à son tour, est rigidement reliée à l'un des repères), font A pivoter le prisme, ap- Fig. 2. — Appareil Martens. — pliqué en A au second S, barre d'acier; N,rainure; repère de l'échantillon. P, miroir; À, repère. Un miroir attaché latéra- lement en P prend part à la rotation de P autour du point A, et, par consé- quent, peut servir à faire des mesures. Dans ce cas encore, il convient, pour les mesures absolues d'élas- ticité, de connaître exactement la distance des cou- teaux N A; mais l'inconvénient dû à l’usure inégale du rouleau se trouve parfaitément éliminé, cette distance restant toujours constante. D'autre part, un inconvé- Fig. 1. — Dispositif Bauschinger. — S, barre d'acier; R, rouleau en caoutchouc. Oesterreichische Wochenschrift für den üffentlichen a udienst, n° 54, 1908, | nient se produit, en raison du déplacement progressif du miroir dans la direction de l'élongation, sous l’ac- tion d’une élongation croissante. Enfin, des inexacti- tudes (déterminées facilement par le calcul) sont dues à ce que la surface du miroir ne renferme aucunement l'axe du prisme. L'appareil nouveau construit par M. Kirsch évite les inconvénients énumérés ci- dessus et dispense des con- 5: trôles répétés que nécessite l'usure progressive. Le prin- cipe de construction en est B: représenté dans la figure 3. Les deux barres en acier S,ets,, dont l’une est appli- B2 quée au premier et l’autre au second repère de l’échan- tillon, se déplacent l’une par rapport à l’autre d'une dis- tance équivalant à l’élonga- tion de l'échantillon. Or, comme ces deux barres sont reliées par une bande en acier B, B, d'environ 0,1 milli- mètre d'épaisseur rigidement insérée, le déplacement relatif de S, par rapport à S, imprime à la bande une courbure en S dont la partie centrale contient l'axe de rotation du miroir latéral. La surface du miroir ren- ferme dans une position quelconque le point de bissec- tion de B, B,. La rotation du miroir provoquée par la courbure de la bande B, B, est utilisée, comme dans les autres appareils à miroir, pour apprécier l'élonga- tion de l'échantillon. Ce dispositif, on le voit, est exempt de toute partie susceptible de s’user et l'union rigide de tous les élé- ments dispense d’un contrôle répété. Comme le miroir fait corps avec les barres en acier, leur application sur l'échantillon est très simple: la longueur normale, donnée par l'appareil lui-même, correspond à la posi- tion détendue des bandes. Enfin, la rotation du miroir est relativement plus importante que dans les deux appareils antérieurs. S2 Fig. 3. — Appareil Kirsch. — S,, S,, barres d'acier; B, B,, bande d'acier. Exposition internationale de Locomotion aérienne. — l'Association des Industriels de la Locomotion aérienne à décidé d'organiser à Paris une Exposition internationale qui se tiendra du 18 sep- tembre au 8 octobre, et qui sera exclusivement réservée à la Locomotion aérienne et aux industries qui S'y rattachent. Elle présentera tout d'abord une histoire de la Loco- motion aérienne, qui comprendra la reconstitution de montgolfières, de ballons, ainsi que des anciens appareils d'aviation. Mais ce qui attirera surtout l'attention, ce sera incontestabiement la section scientifique, dans laquelle les oiseaux planeurs seront représentés dans leurs différentes attitudes, et qui groupera, en outre, les instruments de précision et d'étude dont l'usage est nécessaire à qui veut se mouvoir dans l'atmosphère. Il y a là une initiative extrêmement intéressante, et l'on ne saurait trop féliciter l'Association des Industriels de la Locomotion aérienne de l'entreprendre et de contribuer, pour sa part, à donner des bases scienti- encore, est livrée à l’'empirisme. $ 4. — Physique Les rayonnements des huiles siceatives. — C'est un phénomène bien connu depuis assez long- temps, que la gomme arabique, utilisée dans la fabri- cation des enveloppes, passe, dans certaines condi- Or, seules, les enveloppes pourvues à l'intérieur ou à l'extérieur d'une impression quelconque subissent cette modification, et, comme ce phénomène se pro- duit pour toutes les encres d'imprimerie, la cause fiques à la navigation aérienne qui, trop souvent, tions, à l’état insoluble et perd son pouvoir collant. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 419 devait en être recherchée dans l’agglutinant commun à toutes, à savoir le vernis gras. Vu l’extrème lenteur du processus dans le cas de la gomme, M. W. Schmidt, dans de récentes recherches sur ces intéressants phénomènes, a choisi une matière plus sensible, les plaques photographiques. Ces der- nières étaient recouvertes de papiers imprimés de différentes espèces ou de plaques de verre enduites au préalable de vernis. Entre le vernis et les plaques étaient interposés des obstacles de toute sorte, — morceaux de papier, de verre, de métal, coins, etc., — alin d'apprécier, à l'aide des ombres éventuelles, les forces dues à la pression, et surtout pour établir si certaines substances sont traversées par l'effet en question. Huit à dix jours après le commencement des expé- riences, l’auteur a été en mesure de développer sur la plaque des silhouettes parfaitement définies, repro- duisant les contours de tous les morceaux de métal, de verre ou de mica. Les mots imprimés sur le papier à l'encre ordinaire se sont reproduits aussi sur la plaque photographique ; les effets de l'encre d’impri- merie ont même traversé le papier. Afin d'étudier plus à fond la propagation des rayon- nements qui paraissent être en cause, l'expérimen- taieur à choisi le dispositif suivant : Une boîte en carton contenait, en bas, la plaque photographique et, sur cette dernière, un cadre haut d'environ 2 milli- mètres en fibre volcanique, portant, comme dia- phragme, une plaque de laiton, perforée, en son centre, d’une ouverture de 1 millimètre de diamètre. Une plaque de verre, enduite de vernis à l'huile de lin, était séparée du laiton par un cadre identique. En ouvrant, trois semaines après, cette boîte, dis- posée dans une salle bien tempérée, on a remarqué, sur la plaque développée, l’image d'un anneau; un autre diaphragme, percé d’une fente de 1 millimètre de largeur et de 2 millimètres de longueur, a donné, dans des conditions analogues, un anneau elliptique. Les expériences ultérieures faites pour élucider la production des anneaux ont été facilitées par le fait que les rayonnements du vernis augmentent d’inten- sité à mesure que monte la température ambiante. Huit plaques photographiques ayant été disposées, comme ci-dessus, à des températures de 40-450, l’au- teur a étudié la production des anneaux enles retirant successivement à deux heures d'intervalle. La tache noire d'abord formée sur la plaque, après avoir aug- menté graduellement de dimensions, a fini par prendre un noyau clair, en formant ainsi un anneau, qui, en cas de pose assez prolongée, s'est interverti complète- ment, se présentant en clair sur fond noir. L'effet du vernis est donc analogue à celui de la lumière, qui, comme on le sait, en cas de pose assez longue, produit le phénomène d’intervertissement connu sous le nom de « solarisation ». Les expériences de pénétration faites ensuite ont mis en évidence l'imperméabilité parfaite du verre et du mica ; les autres substances soumises à l'expérience sont plus ou moins perméables aux rayonnements du vernis. Le vernis exerce, du reste, des effets de dis- tance analogues sur les plaques de métal nu, qui se noircissent le plus souvent à proximité des surfaces imprimées. , Ces phénomènes si singuliers s'interprètent par l'hypothèse suivante, énoncée par M. Schmidt : Le vernis, en se solidifiant (soit en s'oxydant), dégagerait de l'ozone ou d'autres substances peroxydées, qui, en présence de la vapeur d’eau, formeraient des traces «le peroxyde d'hydrogène. Ces dernières suffiraient à produire, — par les effets oxydants et blanchissants qu'elles exercent à distance sur toutes sortes de corps organiques, — l’ensemble des phénomènes observés par l'auteur, etles modifications de la gomme arabique s'expliqueraient d’une façon analogue. 3 Prometheus, n° 1007, 1909, Les rayons du soleil présentent, du reste, des phéno- mènes parfaitement analogues au rayonnement du vernis, quant à l’action qu'ils exercent sur la gomme : une modification donnée se produit, en effet, dans des temps sensiblement identiques, sous l’action de ces deux agents si divers, $ 5. — Chimie physique La Société de Chimie physique. —Si, dans un périodique bibliographique comme les Fortschritte der Physik, que publie la Société allemande de Physique, on examine les travaux classés sous la rubrique « Chimie physique », on constate immédiatement que le nombre des Mémoires français qui se rattachent à ces questions est relativement considérable. Ce fait de pure statistique montre que, si la Chimie physique est officiellement ‘encore peu en honneur dans notre pays, elle préoccupe en fait un grand nombre de chercheurs qui publient leurs travaux dans les Bulletins de diverses Sociétés, comme la Société de Physique, la Société Chimique, la Société de Minéralogie, etc. Il y avait lieu de créer, par suite, un groupement qui leur per- mit de se rencontrer, de se mettre mutuellement au courant de leurs recherches et de présenter leurs résultats à un public moins spécialisé. La création, en 1908, de la Société de Chimie physique est résultée de cette constatation, et, dès son début, ses fondateurs se sont efforcés d'amener à la Société naissante des adhérents appartenant à des spécialités très différentes; l'examen du premier annuaire publié (1909) permet de constater qu'ils y ont réussi. Pour faciliter la fusion entre ces éléments divers: physiciens, chimistes, électrochimistes, physiologistes, minéralo- gistes, les ordres du jour des séances comportent tou- Jours comme partie principale l'exposition, par un spé- cialiste, d'une question quelconque dont les côtés dou- teux ou peu travaillés sont soigneusement mis en lumière d’abord dans l'exposé lui-même, puis dans la discussion qui suit immédiatement après. Cette ma- nière de faire est particulièrement propre à assurer l’œuvre d'éducation mutuelle et d'entraide scientifique à laquelle sont conviés les membres de la Société; si, dans l'avenir, les communications originales deviennent nombreuses, elles ne devront jamais faire disparaître des ordres du jour ces mises au point suivies de dis- cussions, qui représentent la partie la plus caractéris- tique et la plus importante de la tâche que s’est imposée la Société et dont la réalisation est basée sur la mise en commun des connaissances de tous, pour le plus grand avantage de chacun et l'intérêt général des recherches physico-chimiques. La Société est dirigée par un Conseil composé, pour 1909, de : MM. J. Perrin, chargé du cours de Chimie physique à la Sorbonne, Président; NV. Henri, prépa- rateur de Physiologie à la Sorbonne, Vice-Président; A. Brochet, chef de Travaux d'Electrochimie à l'Ecole de Physique et de Chimie de la ville de Paris, Tréso- rier ; P. Langevin, professeur au Collège de France, Membre du Conseil; L. Lapicque, maître de confé- rences de Physiologie à la Sorbonne, Membre du Con- seil; G. Urbain, professeur à la Faculté des Sciences de Paris, Membre du Conseil; Ch. Marie*, chefde travaux de Chimie physique à la Faculté des Sciences de Paris, Secrétaire Général. $ 6. — Chimie industrielle L'industrie électro-chimique en Suisse. — L'absence de combustible minéral, jointe à l'abondance 1Ilest caractéristique de signaler, à ce point de vue, que, à la Sorbonne, l’enseignement de la Chimie physique n'est représenté que par un chargé de cours; aucun examen ne correspond, d'ailleurs, à cet enseignement. 2M. Ch. Marie se tient à la disposition des personnnes dési- reuses d'avoir des renseignements plus détaillés sur la So- ciété de Chimie physique. (Adresse :98, rue du Cherche-Midi.) 480 des forces hydrauliques, devait naturellement orienter la Suisse vers les industries électro-chimiques. M. Mau- rice de Coppel", qui vient de consacrer à leur situation actuelle une étude d'ensemble, distingue trois catégories suivant que l’utilisation du courant s'opère par voie hu- mide, par voie sèche ou par effluve. Les usines de la première catégorie produisent la soude, la potasse, les chlorures et les chlorates. La plus ancienne, établie en 1890, au Day, près de Vallorbe, avec un capital de 4.400.000 fr., est d'origine française; elle dispose d’une force de 2.700 chevaux et occupe une centaine d'ouvriers. Avec le chlorure de potassium, importé de Saxe, elle prépare le chlorate de potasse et la potasse caustique. La deuxième, fondée en 1895, à Türgi, sur l’Aar, est beaucoup moins importante; elle fabrique, en outre, le chlore et la soude caustique. Une autre entreprise francaise, la Société universelle d’explosifs, produit à Jussy, près de Genève, le perchlo- rate de potasse. Enfin, la Fabrique bàäloise de produits chimiques, fusionnée avec la Société pour l’industrie chimique de Bâle, vient d'acquérir l'usine de Monthey qui se livrait à la production du chlorure de chaux; l’avilissement des prix de cette matiere a nécessité une transformätion. Dorénavant, le chlore sera utilisé à la fabrication des produits des industries bâloises : indigo synthétique, chloral, chloroforme, etc. La production de ces fabriques ne peut être évaluée que très approximativement, mais l'exportation est mieux connue; elle comprend surtout les chlorates, avec une moyenne annuelle de 1.675 tonnes, destinée en bonne partie au Japon,le chlorure de chaux, dontles chiffres ont passé de 1.533 tonnes, en 1904, à 201 tonnes en 1908; quant à la potasse et à la soude caustique, l'exportation en est insignifiante. Les usines de la seconde catégorie préparent au four électrique, soit par l’électrolyse, soit par la chaleur du courant, l'aluminium, le sodium, le carbure de calcium, les produits azotés et les alliages de métaux. La plus ancienne a été fondée à Neuhausen, en 1888; elle fa- brique l'aluminium par le procédé Héroult et dispose d'une force de 4.000 chevaux captée à la chute du Rhin. Cette entreprise est très prospère ; elle a créé d’autres usines: en 1898, à Rbeinfelden badois (5.000 chevaux); en 1899, à Lend et à Ramis 15.000 chevaux), dans le Salzbourg; en 1905, à Chippis (60.000 chevaux), dans le Valais; en 1908, à Saint-Louis, près de Marseille, pour la production de l’alumine au moyen de la bauxite de l'Estérel ; en 1907, à Goldschmieden, en Silésie. Enfin, la Société a, depuis 1905, des participations financières dans des entreprises de fabrication d'acier électrique. L'aluminium est fabriqué à Neuhausen et à Chippis* ; pendant les premieres années, la Société suisse a dirigé le marché de ce métal; la production de ses différentes usines à passé de 237 tonnes en 1892 à 4.000 tonnes en 1907*; mais, dès 1900, la production américaine (Etats- Unis et Canada) atteignait 3.000 tonnes et passait à 8.000 en 1907; celle de la France s'élevait dans le même intervalle de 1.000 à 3.396 tonnes (1906). L'aluminium, qui valait 59 fr. le kilog en 1888, tombait à 2 fr. 50 en 1900. Pour enrayer la baisse, cinq des plus grandes fabriques, parmi lesquelles la Société de Neuhausen, formèrent une entente (Syndicat de vente) qui parvint à relever les prix jusqu’à 4 et 5 francs. Il en résulla une baisse de la consommation et des tentatives de remplacer l'alu- mioium par le ferro-silicium notamment, Les prix ont dù être réduits et le syndicat s’est dissous à la date du 4e octobre 4908. La cote actuelle est de 1 fr. 60, alors que le prix de revient serait de 1 fr. 30. # Mavmce ne Correr : L'industrie électro-chimique en Suisse. Moniteur ofliciel du Commerce, 6 mai 1909. ? Une Sociélé anglaise, la British Aluminium Co, fait con- struire en ce moment dans le Valais, à Orsières, une grande fabrique de ce métal. k ‘Sur ces chiffres, la part qui revient aux deux usines est évaluée actuellement de 4.200 à 4.500 tonnes; l'exportation 1.038 tonnes en 1908) est destinée principalement à l'Alle- rmagne et à la Russie. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Le sodium, déjà fabriqué en Allemagne et à Rioupé- roux (Isère), est produit à Martigny (4.000 chevaux), depuis 1907, par une usine française et le sera bientôt à Monthey par l'usine bâloise. Le carbure de calcium était produit en Suisse, dès 1894, par la Société de Neuhausen et par huit autres fabriques, disposant d'une force totale de 22.000 che- vaux. De 600 francs la tonne, en 1896, les prix tombérent à 350 francs en 1900, en même temps qu'éclatait une crise de surproduction. Quatre fabriques suisses furent arrètées; les autres adhérèrent au Syndicat interna- tional constitué en France et qui s’est dissous l’an der- nier. La situation s'améliora à tel point que l'exportation suisse à passé de 4.286 tonnes, en 1901, à 17.560 tonnes, en 1908; elle est dirigée presque tout entière vers l'Allemagne, où le carbure entre en franchise. Pendant cette période, les prix ont baissé de 300 à 250 francs; ils sont actuellement un peu au-dessous de 200 francs, approchant du prix de revient, 157 francs environ. Dix fabriques produisent actuellement en Suisse le car- bure de calcium : la Société de Neuhausen; les usines de la Lonza, avec leurs trois fabriques de Gampel (Valais) (7.500 chevaux), Thusis (Grisons) (6.000 chevaux) et Chèvres près Genève (1.000 chevaux); cette société, qui est, avec celle de Neuhausen, la plus importante des entreprises suisses de ce genre, est intéressée à l’entre- prise nicoise d’électro-chimie (usine à Plan du Var) et elle aménage actuellement une nouvelle installation à Viège (Valais) (11.000 chevaux); la Société franco-suisse d'Electro-chimie, qui a son siège à Lyon, possède deux établissements à Satigny et à Vernier, dans le canton de Genève: enfin, d’autres usines existent encore à Gurtnellen (Uri), Türgi, Flums (Saint-Gall) et Vernayaz (Valais). La cyanamide est fabriquée par les usines de la Lonza, ainsi qu'à Martigny (Valais). Le ferro-silicium, le ferro-chrome, l'acier sont produits à Gurtnellen, Ver- nayaz, Courtepin et Montbovon (Fribourg). Une autre usine est en construction à Bodio (Tessin). 2.100 tonnes de ces alliages ont été exportées en 1908. En ce qui concerne l'acide nitrique et les nitrates, ce sont plutôt des études et des essais de laboratoire que nous aurions à enregistrer. Comme pour la branche précédente, par le fait de l'absence de minerais, il ne semble pas que la Suisse soit appelée à donner un grand développement à la fabrication des produits azotés, qui nécessitent des forces considérables et faci- lement exploitables, telles qu'on les trouve plus aisé- ment en Norvège. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. a $ 7. — Géologie Le Service des Mines en Indo-Chine. — Le gouverneur de l’Indo-Chine vient de rendre récem- ment un décret sur la réorganisation du Service des Mines, où il est très intéressant de noter un symptôme d'évolution administrative. Le Service existant actuel- lement en France porte, en effet, comme la plupart de nos institutions, la marque du régime napoléonien, et ce qui convenait autrefois parfaitement ne peut évi- demment avoir les mêmes raisons d’être dans le milieu moderne. Il est inadmissible, par exemple, que l’on soumette au même enseignement des élèves destinés à des fonctions essentiellement diverses. Car si, autre- fois, il était possible à l'ingénieur d'être une sorte d'encyclopédiste des sciences alors naissantes, ce des- sein est maintenant irréalisable devant la complexité croissante de chaque science. A vouloir trop embrasser, on n'arrive qu'à mal étreindre; «comme une onde qui bout dans une urne trop pleine », cetle science ency- clopédique, entassée à force de surmenage, se dissipe, 1 La production mondiale annuelle du carbure de calcium a été récemment évaluée à 180.000 tonnes, dont la moitié pour la Norvège seule; la part de la Suisse, d'après M. de Coppet, serait de 20 à 25.000 tonnes. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 181 se perd, reste superficielle et de valeur moindre qu'une culture limitée, mais plus profondément acquise. Le Corps des Mines de l’Indo-Chine est maintenant divisé en trois services. Les ingénieurs, recrutés parmi les élèves des grandes écoles, s'occuperont du contrôle et de la surveillance des mines et des carrières, des appareils à vapeur, Le relevé de la carte géologique sera confié à des géoloques, choisis d’après leurs études, leurs diplômes (une licence ès sciences est exigée) et surtout, critérium excellent, leurs travaux scientifiques publiés. Enfin, des chimistes, anciens élèves des Insti- tuts annexés aux Universités ou de l'Ecole parisienne de Physique et de Chimie, seront chargés du service des laboratoires : analyses des matériaux employés pour les travaux publics, des eaux potables, essais industriels de toute sorte. Il est superflu de remarquer combien est raison- nable une telle méthode : il parait très simple de ne pas prendre de mathématicien pour faire les analyses chimiques. Pourtant, c'est ce qui est un peu de règle, et nous n'avons guère progressé depuis Figaro. Souvent ainsi les solutions les plus rationnelles ne peuvent s'imposer que lors de la création de choses nouvelles : traditions, routines, intérêts lésés ne viennent pas alors s'opposer à l'adoption des meilleures mesures. L'Indo-Chine donne à la France un exemple à suivre. Puisque, pour faire face aux besoins nouveaux, l'on a créé de tous côtés des Instituts de Chimie, il n’est que trop juste d'ouvrir des débouchés à leurs élèves, et de choisir ceux-ci pour les besognes auxquelles ils sont le plus aptes. Puisque règlements et programmes tradi- tionnels sont surannés, on ne doit pas hésiter à les remplacer par d'autres, correspondant mieux à l'état nouveau des choses. H. Rousset. $ 8. — Botanique Relation entre la forme des feuilles et la consommation de lumière. — Dans un Mémoire récemment présenté à l'Académie des Sciences de Vienne, le Professeur Wiesner‘ discute les relations qui existent entre la forme des feuilles et la consom- mation de lumière. On sait que les plantes disposent de différents moyens pour s'assurer une grande consommation de lumière. Mais on n'avait pas, Jusqu'ici, fait attention à un moyen que la Nature utilise fréquemment pour rendre la plante susceptible de supporter impunément de grandes inten- sités lumineuses. Il s’agit, comme le fait voir l’auteur, d'une division très avancée du feuillage, qui diminue le volume des organes d’assimilation. La petitesse de volume des feuilles augmente leur surface relative et leur perméabilité, ce qu'on reconnait de la façon la plus frappante chez les Conifères. La grande surface entraine une abduction très rapide de la chaleur, et la perméabilité une réduction très importante de l’'échauf- fement dù à l’action des rayons qui frappentles feuilles. Or, ces deux conditions concourent évidemment à donner aux organes de peu de volume une grande ré- sistance à la chaleur, d'autant plus favorable à l'organe assimilatoire que sa consommalion de lumière est plus grande. Voici des expériences très intéressantes faites par M. Wiesner pour illustrer la résistance thermique des organes de peu de volume. Un fragment, long de 4,5 centimètres, d’une cellule de liber de Bohmeria tenacisSima, introduit dans le plan focal d’une lentille convexe sous un soleil d'environ 25° d'altitude, ne s'est pas enflammé, même après quelques minutes, tandis 1 Die Umschau, n° 7, 1909. qu'une mèche finement tressée, se composant de plus de 400 cellules, a pris feu immédiatement dans le plan focal. Or, dans des conditions à peu près égales, un faisceau dense se composant de 50 tiges fraîches s'est enflammé immédiatement, et un autre faisceau se composant de 25 tiges n’a commencé à brûler qu'après trois à quatre secondes, tandis qu'une tige individuelle s’est maintenue parfaitement inaltérée pendant quatre minutes. $ 9. — Zoologie Les Jardins Zoologiques à l'Etranger. — Nous avons précédemment rendu compte, dans cette lievue‘, de deux intéressants Rapports de M. Loisel sur l'organisation, le fonctionnement et l’utilisation des Jardins Zoologiques de l’Europe. Un troisième et der- nier Rapport, renfermant une étude comparative des établissements similaires des Etats-Unis et du Canada, ainsi que des conclusions générales, vient d’être publié? ; il traite des Jardins Zoologiques, — parmi les- quels il faut donner une place à part aux Parcs immenses de New-York (105 hectares) et de Washington (66 hec- tares), — des Aquariums de New-York et du Bureau des pêches à Wood’s Hole, des Stations d'expériences sur les Insectes considérés au point de vue agricole, Stations qui dépendent plus ou moins directement du Ministère de l'Agriculture, des réserves d'animaux sau- vages, eten particulier du splendide Yellowstone Natio- nal Park, et enfin des établissements de Biologie et de Zoologie expérimentales, parmi lesquels le laboratoire de Cold Spring Harbor, fondé par Carnegie, réalise l'idéa) du genre. La partie documentaire des trois Rapports de M. Loisel paraît tout à fait intéressante, et il y aurait certaine- ment à y puiser d'excellentes idées sur le logement des animaux, surtout des Fauves, les soins de propreté et d'hygiène qui ont permis de réduire dans de notables proportions la mortalité, toujours si grande dans les Jardins Zoologiques, et enfin sur l'étiquetage, concu de facon à donner tout de suite tous les renseignements que l’on a la manie de réléguer dans des guides à peu près inutilisables et que, du reste, l’on n’achète pas. Quant aux conclusions pratiques, pour notre pays, que l'on peut dégager de ces Rapports, on pouvait un peu les prévoir : pour faire un beau Jardin Zoologique, il faut beaucoup de place, beaucoup d'argent, beaucoup de personnel. On ne doit pas, je pense, lui demander autre chose que d’intéresser ou d’amuser le public, de fournir des documents aux artistes animaliers, et des matériaux occasionnels d'observation aux savants; c'est ce que fait, actuellement, plus ou moins bien, notre Jardin de Plantes de Paris. M. Loisel — et c’est là l’idée domi- nante de ses trois Rapports — voudrait que le Jardin Zoologique de ses rêves eût comme première raison d'être une utilisation scientifique pour la Biologie géné- rale etla Zoologie économique, et il trace un programme très vaste, un peu naïf aussi, des travaux que pourrait envisager un Jardin installé et dirigé comme il le com- prend; mais ce serait le transformer en une immense Station de Zoologie expérimentale, idée évidemment très originale, mais qui paraît aussi impraticable que possible ; sa réalisation n’a, du reste, été tentée nulle part, et pour cause. 1 Rev. gén. des Sc. du 30 septembre 1907, t. XVIII, p. 731; et du 15 juillet 1908, t. XIX, p. 520. ? Rapport sur une Mission scientifique dans les Jardins et Etablissements Zoologiques publics et privés des Etats-Unis et du Canada, et conclusions générales sur les Jardins Zoolo- giques. MVouvelles Archives des Missions scientifiques, L. XVI, 1908, p. 217. 182 E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE La détermination du vecteur qui représente en chaque point de la surface de la Terre la force qui agit sur l'unité de magnétisme nord placée en ce point, l'étude des variations de ce vecteur dans le temps et dans l’espace, et la recherche des causes de ces variations, tel est le vaste sujet d'étude du magnétisme terrestre, sujet qui devrait être étendu aux points de l’intérieur du globe ou aux divers points de l'atmosphère, si l’on voulait poser le pro- blème dans son ensemble. On ne peut s'empêcher de remarquer que l'ampleur et l'intérêt de cette belle question de Philosophie naturelle contrastent, en quelque sorte, avec le délaissement dont elle est l'objet en France, alors qu'au contraire elle est étudiée avec ardeur, et quelquefois profit, chez les autres nations de l'Europe. Je me propose d'exposer ici, non la question entière du magnétisme terrestre qui m'entraiînerait beaucoup trop loin, mais les quelques résultats auxquels je parvenu dans cette étude, depuis 1893, à l'Observatoire de Toulouse. Cet ex- posé comprendra trois parties : la première se rap- porte aux mesures absolues faites à l'Observatoire de 1893 à la fin de 1906; la deuxième est relative aux mesures absolues exécutées dans la région de Toulouse; la troisième, qui est la partie essentielle, est relative à la recherche de la loi de distribution régulière des éléments magnétiques d'une contrée à une date fixe. suis I. — MESURES ABSOLUES FAITES A TOULOUSE DE 1893 4 1906. En un point donné, tel que l'Observatoire de Toulouse, on peut, ou bien étudier les variations du vecteur magnétique T el de ses composantes H, X, Y, Z (ainsi que les angles D et I)‘ au moyen d'enregistreurs photographiques du système de M. Mascart, par exemple, ou bien faire trois ou quatre fois par mois des mesures absolues des élé- ments D, H, I. L'enregistrement des variations du magnétisme terrestre exige une installation toute spéciale et coûteuse, dans une station éloignée d'au moins 8 ou 10 kilomètres de tout tramway électrique à trolley, et un observateur s'occupant exclusivement de surveiller le fonctionnement des enregistreurs, d'en constantes, de dépouiller les courbes photogra- phiques et de les traduire en nombres d'où l’on déterminer fréquemment les 1 H composante horizontale, X — composante nord, Y = composante ouest, Z — composante verticale, D = décli- naison, | — inclinaison, tire les moyennes diurnes, mensuelles, annuelles, non seulement pour les éléments D, H, Z donnés directement par les enregistreurs, mais encore pour les quatre autres éléments I, X, Y, T. L'obli- galion d’avoir un observateur voué uniquement ou quasi-uniquement au service des enregistreurs magnétiques est une question d'argent assez sérieuse pour avoir arrété jusqu'ici la plupart des observatoires de province. Quant à la question des tramways électriques à trolley, elle est la mort sans phrase des études de magnétisme terrestre, par le fonctionnement des enregistreurs magné- tiques rendu impossible et par l’altération que les courants vagabonds produits par la traction élec- trique font subir au vecteur magnétique en tous les points où ils passent. Il me suffira de rappeler le souvenir de l'Observatoire magnétique du Parc- Saint-Maur, obligé en 1900 d'émigrer au Val- Joyeux, et de l'Observatoire magnétique de Per= pignan, obligé de cesser ses travaux, pour justifier le pessimisme de la conclusion précédente et le caractère provisoire de toutesles études de magné- tisme terrestre, condamnées à disparaître définiti- vement lorsque les réseaux de tramways élec- triques auront envahi la France. Pour des raisons variées, parmi lesquelles l'annonce de l'installation (aujourd'hui réalisée) de tramways électriques à Toulouse entre pour une bonne part, le Service magnétique de l'Observa- toire, de 1893 jusqu'à l'heure actuelle, s'est borné à des mesures magnétiques absolues de la déeli- naison, de la composante horizontale et de l'incli- naison, mesures faites à l’aide de boussoles de Brunner, en suivant les errements de M. Moureaux. De 1893 à fin 14905, ces mesures absolues, exécutées par mes assistants ou par moi-même, ont été au nombre de 1289 (613 déclinaisons, 419 compo- santes horizontales, 257 inclinaisons). Quelque grande que soit la confiance qu'on doive avoir dans les observations faites par des assis- tants dont on connaît le zèle et la droiture, il est nécessaire de posséder un critérium capable de faire distinguer à première vue les observations bien faites des observations entachées d'erreurs fortuites ou systématiques. Supposons qu'il s'agisse de la déclinaison D et que celle-ci ait été mesurée à Toulouse, en temps de calme magné- tique, à une certaine heure moyenne exprimée en temps local de Toulouse. Soit D'la déclinaison à l'Observatoire du Parc-Saint-Maur à la même heure, évaluée cette fois en temps local du Parc- Saint-Maur; les déclinaisons D et D’ se correspon- <> E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE dent, car l'expérience prouve que les courbes fournies par les enregistreurs magnétiques de localités même assez éloignées ont des formes pour ainsi dire identiques si on les rapporte au temps local. En toute rigueur, si les formes sont les mêmes, l'amplitude des variations est nettement fonction de la latitude géographique; mais, si l'on admet que, dans toute l'étendue de la France, la variation diurne est la même, les erreurs qui peuvent résulter de cette approximation sont très faibles et ne dépassent pas la limite des erreurs d'observation ; la différence D— D' est donc sensiblement indé- pendante de l'heure du jour où l'on a opéré. Bien plus, l'expérience prouve que cette expression est une fonction assez lente du temps pour qu'en une année, par exemple, la variation en soit insensible et fort inférieure aux erreurs possibles de l'obser- vation. Il en est de même pour tous les éléments magnétiques dans les années de calme. La méthode de vérification des observations de Toulouse depuis 1893 a donc consisté à demander à l'Observatoire magnétique du Pare-Saint-Maur communicalion des éléments magnétiques de cet Observatoire correspondant à ceux qui ont été mesurés à la même heure locale, à Toulouse. S'ils correspondent à une période de calme magné- tique, la différence entre les éléments de Tou- louse et ceux du Pare-Saint-Maur devra, aux erreurs près de l'observation, se maintenir sensi- blement constante pendant le cours d'une même année et varier lentement d’une année à l’autre ; toute observation ne répondant pas à ces condi- tions sera réputée mauvaise. Si l'observation est faite en temps d'orage magnétique, le plus souvent il sera impossible de l’achever; l'état d'agitation de l'aiguille aimantée est alors visible pour l'observateur le moins pré- venu; les vérifications approchées, que les mesures permettent lorsqu'elles sont bonnes et faites en temps de calme magnétique, ne réussissent pas; au cas où l’on à pu achever les mesures, la com- paraison de l'élément obtenu est impossible à faire avec les éléments du Parc-Saint-Maur, à cause des varialions extraordinaires que montrent, en pareil cas, les courbes des enregistreurs magné- tiques, variations qui se succèdent, en signes con- traires, à des instants très rapprochés. Mais, entre le cas idéal du calme magnétique et le cas fâcheux de l'orage magnétique ou de la grande perturbation, il y a toute une série d'états intermé- diaires pour lesquels la différence (Toulouse-Parc- Saint-Maur), pour un élément magnétique donné, peut varier légèrement sans que la mesure consi- dérée cesse d’être bonne. Bien entendu, ce n’est que lorsque la totalité des courbes magnétiques est 483 très agitée qu'il est surtout permis d'attribuer à l'état magnétique général une variation sensible dans la différence en question. S $ 1. — Influence du nombre relatif des taches solaires sur la déclinaison. Alors que, jusqu'ici, les mesures magnétiques absolues faites en dehors des observatoires magné- tiques restaient inutilisées", l'étude de la différence (Toulouse-Parc) entre les années 1893 et 1905 à permis de mettre en évidence la variation, en fonc- üon du temps, de la différence en question pour la déclinaison et la composante horizontale, et de montrer que cette variation est très probablement liée à l’action solaire. Les observations étant groupées année par année, prenons pour chaque année la moyenne des diffé- rences (Toulouse-Parc), en éliminant quelques nombres par trop mauvais pour avoir une signi- fication quelconque. Le résultat de ce calcul est contenu dans le lableau suivant relatif à la décli- naison : NOMBRE ANNÉE d'observations A» TOULOUSE-PARC SOC 59 — 1762/,7 — 29',88 EPL ENS 21 — 621,6 — 29,60 18964057 30 — 837,3 — 27,91 AB EE 11 — 303,0 — 21,54 ASIE ER EL: 39 — 932,5 — 26,6% EE PRES 56 —1521,8 — 21,18 max AOCUME A 43 — 1147,0 — 26,67 IETIINIOMENE 82 — 2263,6 — 21,60 TMS SEM 67 — 1867,85 — 27,88 HOTTES ONE 47 — 1303,0 — 27,72 {KI RSR SRER 60 — 1688 ,7 — 28,14 CNE EE 90 — 2629,4 — 29,22 min. 1906 UE 22 — 636,3 — 28,92 Bien que trois boussoles de Brunner ou de Chas- selon, très différentes par leur taille et par l'époque de leur construction, aient été employées pour faire les mesures de déclinaison et que le nombre des mesures ait été relativement peu élevé dans l'inter- valle 1895-1898, on peut dire que la valeur absolue de la différence (Toulouse-Pare) a été en diminuant de 189% à 1899, tandis qu’elle a été indubitablement en croissant de 1900 à 1905, pour décroître ensuite. Quoiqu'il soit malaisé de tirer des conclusions lorsque les mesures s'étendent à un aussi faible intervalle de temps (1894-1906), la variation mise en évidence par le tableau précédent me paraît confirmer très heureusement la théorie de Rüdolf Wolff relative à l'influence des taches du Soleil sur la variation diurne, théorie sur laquelle la thèse de doctorat de M. Ch. Nordmann a de nouveau attiré l'attention des physiciens. * Les mesures absolues faites dans les Obseryatoires ma- gnétiques servent à transformer les mesures relatives des enregistreurs en mesures absolues. 484 L'avant-dernier maximum du zombre relatif des taches solaires ayant été observé en 1893, le minimum suivant en 1901 et le dernier maximum en 1905, cela est suffisamment d'accord avec la variation observée de la différence (Toulouse-Parc). Toute théorie à part, il est incontestable que la différence (Toulouse-Parc) passe algébriquement par un Maximum au voisinage de 1899 et par un minimum en 1905. On peut mettre ce fait en évi- dence pour les différences (Perpignan-Parc) et (Nice-Parec) en utilisant les éléments magnétiques au 1” janvier des Observatoires du Parc-Saint- Maur, de Perpignan et de Nice, communiqués à l’Académie des Sciences par M. Moureaux : on obtient alors le tableau suivant : PERPIGNAN-PARC NICE-PARC PERPIGNAN-NICE Au ler janvier 1889. . —10133 » » 1890. . 12,4 » » TBE 11,8 Ù ) 180220 11,9 » ) 1893. . 11,4 » » 1894. . 9,6 » » 18950 973 » » ASOERE 9,5 » 5 1897. . 8.2 — 2046!,1 + 1037/,9 1898. . 6,9 45,17 38,8 ASP 6,31 max. 45,31 max. 38,94 max. 1900. . 7,31 45,70 38,39 1901. . 9,01 15,83 36,82 Toutes les différences considérées passent par un maximum très net au 1°” janvier 1899. Il est assez singulier que la différence (Perpignan-Parc), donnée par les mesures absolues de deux obser- vatoires de premier ordre, ne présente pas de minimum, bien qu'elle soit étudiée jusqu'au 1° jan- vier 1889 et que le nombre relatif des taches solaires soit passé par un maximum en 1893. Probable- ment, des bizarreries locales interviennent ici pour empêcher la vérification de l'action solaire. 1 Les nombres relatifs de R. Wolff résultent de l’obser- vation, pour tous les jours de l’année où le Soleil est visible, du nombre p des groupes de taches et du nombre total q des taches simples donnés par une lunette de 4 pieds de Frauenhofer, avec un grossissement de 64 diamètres. On forme alors le nombre 10 p + q, qui caractérise l'état du Soleil pour le jour de l'observation. La moyenne arithmé- tique des nombres ainsi obtenus pour tous les jours d'une année donne le nombre relatif de Wolff qui se rap- porte à cette année. L'idée maîtresse du savant directeur de l'Observatoire de Zurich est que le nombre p des groupes de taches est tout à fait caractéristique de l'état du Soleil; mais comme, d'autre part, le nombre total q des taches simples est aussi une mesure de cet état, il y a lieu de combiner les deux nombres en donnant au premier une importance prépondé- rante représentée par le facteur 10, qui a l'avantage sur les nombres entiers voisins de permettre un calcul très rapide. Il serait plus exact de remplacer les nombres relatifs de Wolff de chaque jour par la fraction de la surface solaire occupée ce jour-là par l'ensemble des taches; mais cela exigerait des observations si nombreuses parfois, et des calculs si longs pour tenir compte de ce que nous ne voyons les taches qu'en raccourci, que R. Wolff y a renoncé. E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE Cependant, un doute sérieux peut rester dans l'esprit en raison de l’espace de temps très court que comprennent les observations qui viennent d'être citées. En effet, la période des taches solaires étant d'environ onze années, les nombres précé- dents ne peuvent pas emporter la conviction. Pour pousser la démonstration le plus loin possible, il faut évidemment utiliser les séries d'observations provenant de l’emploi des enregistreurs magné- tiques. La plus ancienne est celle de l'Observatoire royal de Greenwich; celle du Parc-Saint-Maur remontant à 1883 (bien qu'interrompue en 1901 et remplacée par celle du Val-Joyeux), j'ai pu utiliser ces deux séries. Les observations de Greenwich, comme celles de Potsdam, donnant les moyennes annuelles de D, H, I, tandis que celles du Parc-Saint-Maur donnent les valeurs au 1‘ janvier de chaque année, jai ramené les observations de Greenwich à être com- parables aux observations francaises en prenant la moyenne de deux années consécutives, ce qui fournit la valeur au 1% janvier de la dernière année, Le tableau suivant, relatif à la déclinaison, montre que les maxima et minima de la différence (Greenwich-Parc) sont en relation évidente avec les maxima et minima du nombre relatif des taches solaires : NOMBRE RELATIF des taches solaires ANNÉE GREEN WICH-PARC DU 1er janvier 1883. . . + 105475 max. : RUN nier 54,0 — ASS 4,15 OT ne au 54,t — LSSTEE 54.6 — 1888. 55 AN — ie VASTES 50,25 min. LAS 0 MCE 50,45 SL BETA 50,2 — IPS ©: 19,8 maximum RME 50, max, ET 50,1 18082 48,5 ET en à 48,05 LS RIT ARE 17,35 ER 16,6 = PRO SRE 15,3 — 1ODDE REA 13.8 PRE — ILE pee à 43,3 min PTE — 4902... 14,3 AN - 14,05 re ENT EN RES 15:05) max 2 CU CES L4/05N ARE Me = D NONTARNE 13,7 En ce qui concerne la déclinaison, la coïncidence des maxima et des minima avec ceux du nombre relatif des taches solaires est pour ainsi dire par- faite ; les maxima (ceux de 1893 et de 190%) suivent les minima (ceux de 1889 et de 1901) environ à quatre années d'intervalle et sont peu marqués par rapport aux minima; au contraire, la chute est sans dl E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE 185 généralement brusque après les maxima (du moins ceux de 1893 et de 1904). On doit considérer la Parc) pour la déclinaison comme résultant d'une variation séculaire atteignant — 0,44 par an, super- posée à une variation périodique de faible ampli- tude (+1°,5 à 2°) analogue à la loi de variation des nombres relatifs de Wolff quant à la position rela- tive des maxima et des minima. On retrouve bien entre les années 1894 et 1905 l'allure indiquée par les observations de Tou- louse, c'est-à-dire le minimum voisin de 1899 et le maximum de 1905. Enfin, des causes perturbatrices inconnues font que les points représentatifs de la différence des moyennes au 4° janvier de deux Observatoires magnétiques de premier ordre che- vauchent, metlant ainsi en défaut la continuité harmonieuse qu'on s'attendrait à trouver en pareil cas. différence (Greenwich- — Influence du nombre relatif des taches solaires sur la composante horizontale. 8 2. Les causes perturbatrices qu'on vient de mettre en évidence dans le cas de la déclinaison agissent encore plus fortement dans le cas de la composante horizontale, et rendent, par conséquent, plus difficile la démonstration de l'influence du nombre relatif des taches solaires. Toutefois, cette influence est très nette pour les différences (Perpignan-Parce) et (Nice- Parce) obtenues en utilisant, comme précédemment, les éléments magnétiques au 1 janvier commu- niqués à l’Académie des Sciences par M. Moureaux entre janvier 1889 et janvier 1901 : PERPIGNAN-PARC NICE-PARC PERPIGNAN-NICE Au 1er Janvier 1889. . +0,0266% » » IRIUENS 660 » » 1894 667 » » 18997: 647 min. » » 1893. . 661 » » 18940. 675 » » 1895,.u: 683 » » 1896. . 685 » » 1897. . 702 + 0,02678 + 0,00024 1898. . 702 672 30 1899. . 721 max. 683 38 max. 4900: 710 705 max. 5 19010 695 700 25 La différence (Perpignan-Pare) passe par un minimum très net au 1* janvier 1892 et par un maximum non moins net au 1” janvier 1899: il semble qu'ici le maximum et le minimum de (Per- pignan-Parc) devancent l’un et l’autre le maximum de taches de 1893 et le minimum de 1901. De même, les différences (Nice-Parc) et (Perpignan-Nice) entre 1897 et 1901 présentent l’une et l'autre un maximum un peu en avance sur le minimum de taches de 4901. Le tableau suivant, relatif à la composante hori- zonlale, montre que les maxima el minima de la différence (Greenwich-Parc) sont aussi en relation avec les maxima et minima du nombre relatif des taches solaires : NOMBRE RELATIF ANNÉE GREEN WICH-PARG ; Aer janvier 1883. — 0 ,01290 maximum ‘ SSP EE 1214 1198 1205 1201 — il : — 1887. — ARS © 0 — FES 0 0 — STD EE — ADP _— 18920. — 189327. — 1894... . — 1895 . — 1896 . — ISO — IRIS — 1599. — 1900. = 1901. — 1902. — 1903. — 190%. — 1ODS Se — 1906. minimum « MAX, MmaxIMUumMm minimum 1302 1262 max. 129% 1294 max im um La variation qui s'étend du 1° janvier 1892 au 1°" janvier 1907 seule est régulière ; elle présente, en effet, au 12 janvier 1893 et au 1° janvier 1904 des maxima et au 1° janvier 1904 un minimum qui concordent d'une façon suffisante avec les maxima et minima du nombre relatif des taches du soleil. Il y a toutefois au 1% janvier 1903 un fort minimum, précédé d’un maximum peu marqué au 1° janvier 1902, lesquels doivent l’un et l’autre être rattachés à une même cause perturbatrice inconnue qui à agi simultanément, quoique plus faiblement, sur la déclinaison et l'inclinaison. Si l’on fait abstraction de la valeur relative au 1°" janvier 1883, on est porté à admettre, comme pour la déclinaison, la superposition d’une varia- tion séculaire d'environ — 0,000.036 par année et d'une variation périodique de faible amplitude ( 0,000.20 à 0,000.25) analogue à la loi des taches solaires. « Enfin, la courbe de la différence (Greenwich- Parc), convenablement retournée et envisagée entre 1894 et 1906, offre, pour ainsi dire, point par point, les mêmes particularités que les points représen- tatifs des observations de la différence (Toulouse- Parc) que nous ne reproduisons pas pour ne pas fatiguer le lecteur. L'inclinaison donnerait lieu à des remarques analogues, avec cette particularité que les varia- tions annuelles des différences sont excessivement faibles, de sorte que la moyenne des mesures de 186 Ë. MATHIAS RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE toute une année ne fait pas toujours disparaitre les ivrégularités qui masquent la simplicité des phéno IHieones, Il semble donc bien que l’on soit fondé à dire que, pour tous les éléments magnétiques, les difé- rences analogues à (Toulouse-Parc) paraissent être la superposition d'une variation séculaire propor- tionnelle au temps el d'une variation périodique de luible amplitude à la facon des taches solaires. On entend par là que, pour un élément magné- lique donné, la varialion périodique reprend la |! les bizarreries qu'elle même valeur tous les onze ans environ, qu'elle peul présenter (taches, pores, ele), Nous limilant aux mesures de déclinaison et de composante horizontale, nous considérerons les valeurs de la différence (Toulouse-Pare) : 1° Dans le cas où la surface solaire ne présente nilaches, ni pores; 2% Dans le cas où elle présente seulement des pores ; 3° Dans le cas où elle présente des laches, avec nous oblenons ainsi le tableau I ou sans pores, suivant : Tanzrau 1 — Influence propre des taches du Soleil sur les éléments du magnétisme terrestre. NOLHIL SANS TACHES NI PONES ll Nombre d'obsorva- de lions Valeur moyenne Toulouse-Pare SOLEIL AVEC V'ONRES SEULEMENT SOLKIL AVEC TACHES Nombre Valour moyenne d'observa de tions Toulouse-Pare Nombre Valeur moyenne d'observa do tions Toulouse-Pare Déclinaison, ANUS RAT be Dre 6 de . 2615 ARNO ETN Nr VAR LL ER / — 96,95 TD BRAS 2 AN PEL, RUN, 27,9% 1900 . 26,56 OUR LD M ie qu à : — 27,40 1902", 1903 . 27,10 27,96 ' 5 29!,21 961,50 96,71 96,50 27, 1 » PAU 1 26,85 28:00 28:65 RUE - 271,36 1898 . 1899 . 1900 H 0,02200 | AO ETC RAC ID S + | 0 ,02188 0,02177 0 ,02200 0,02197 0,02219 1902, 1903. Composante horizontale. ++ 0,02188 0 ,02185 + 0,02186 ! 0,02197 ÿ 3 + 0,02183 + 0,02206 0 ,02206 | 0,02220 0 ,02200 ) 0,02205 0,02197 passe par un DaxiDUm OÙ UN minimum vers l'époque du maximum des laches solaires el par un mininurn où un maximum vers le moment du minimum des taches, le maximun etle minimum n'élant pas équidislants, ainsi qu'on l'a vu aupa- ra van. Toutefois, des forces perlurbatrices inconnués ügissent sur les différences en question pour déplacer les maxima el minima et quelquefois les changer de signe. - Recherches sur l'influence propre des taches du Soleil. Puisqu'on ne peul nier l'influence de la période undécennale des taches solaires sur le magnétisme lerrestre en général et la différence (Toulouse- Parc) en particulier, sans vouloir faire de théorie ù ce sujel, on peul se demander comment le Soleil agit, si c'est par sa surface propre ou par 0,02199 0,02195 ; ; Le nombre des observations dans lesquelles la surface solaire présente exclusivement des pores élant loujours très faible, comparons les effets produits par la surface solaire avec ou sans laches pendant les années 1900-1904, où le nombre des mesures n'est pas trop pelil. On voit que les moyennes annuelles de (Toulouse-Pare) sont sen- siblement les mêmes, qu'il y ait des taches ou qu'il n'y en ail pas, et cela aussi bien pour la déclinaison que pour la composante Pour la déclinaison et l'intervalle de lemps considéré, la différence des moyennes annuelles en question n'atleint jamais 0,5 étest lantôt dans un sens et Lantôt dans l'autre. Pour la composante horizontale, de 4900 à 1902, la différence ne dépasse pas 6 unités du cinquième ordre décimal ; elle atteint 44 unités en 1903, probablement parce que le très petit nom- bre (9) des observations failes avec une surface horizontale. solaire sans taches donne une moyenne un peu E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE 147 incertaine, Il semble donc bien l'influence propre des taches, si elle existe, soit très faible. que En supposant que la surface solaire agisse sur l'aiguille aimantée par ses laches, son action est- elle toujours de même sens ? S'il en est ainsi, en prenant la moyenne générale de (Toulouse-Pare) pendant plusieurs années, on devra trouver une différence selon que le Soleil présente des laches ou n'en présente pas. Or, pour la déclinaison comme pour la composante horizontale, on trouve des moyennes remarquablement identiques. Donc, qu'il y ait des laches ou qu'il n'y en ail pas, on arrive au même résultat; bien mieux, malgré le nombre extrémement faites avec une surface solaire présentant unique- restreint des observations meul des pores, le résultat final est encore le même, D'ailleurs, dans le cours d'une méme année, les pores donnent pour la différence (Toulouse-Pare) la même valeur moyenne que la surface solaire avec ou sans laches. On suivante : l'action propre des taches el des pores, si elle existe, n'est pas toujours de même sens, puisqu'elle disparaït dans les moyennes de plusieurs années. On peul encore qu'elles s'appuient sur des centaines d'obser- arrive donc à la conclusion faire aux conclusions précédentes, valions, celte objection que la nécessité de consi- dérer des surfaces solaires sans taches nous à obligé à laisser de côté les années de grande activité solaire, où l’action propre des taches pour- rait plus facilement être mise en évidence, On peut mellre l'objection à l'épreuve en comparant les valeurs moyennes de (Toulouse-Parc) que donnent les {aches visibles à l'œilnu avec celles que donnent toutes les observations d'une même année; c'est ce que montrent les tableaux suivants : MOYENNE GÉNÉRALE de Toulouse-Pare pendant BSOLEII, AVEC TACHES VISIBLES A L'ŒIL NU a — ANNÉE Nombre d'obs, Toulouse-Parc la même année Declinaison. 1894. » 12 — 291,83 - 29188 11:{:} EC 2 — 25,35 — 26,6% 1903, : . 2 — 26,35 — 27,12 1905. 14 — 29,04 — 29,22 Composante horizontale, HRASDAIE . :. 3 + 0,02192 ABUS » 1 + 0,02186 1903871, 5) + 0,02243 1905 , , . 8 + 0,02207 + 0,02180 + 0,02183 + 0,02209 + 0,02207 Lorsque les observations ne sont plus au nombre de quelques unités, comme en 189% et en 1905 pour la déclinaison, en 1905 pour la composante horizontale, on voit que la valeur moyenne de (Toulouse-Parc) donnée par les grosses taches est, pour ainsi dire, identique à la moyenne générale de l'année correspondante, et cela doit paraître d'autant plus probant qu'il s'agil ici précisément des années à maximum de taches solaires. Lorsque les observations sont peu nombreuses, la différence entre les moyennes en question, dans le cas de la déclinaison corne dans celui de la composante horizontale, est loujours dans le même sens; mais alors les différences sont très petites et fort inférieures aux erreurs possibles des observations. La conclusion précédente subsiste doncen entier : qu'elles soient grosses ou peliles, l'aclion propre des taches solaires, si elle existe, n'est pas toujours de même sens. Mais nous pouvons faire un pas de plus dans celle voie; il suffil pour cela de se reporter de nouveau au tableau de la page 486, En effet, si les laches agissent seules sur l'aiguille aimantée, faites avec dénuée de laches et de pores devraient donner des de la différence les observations une surface solaire moyennes annuelles constantes (Toulouse-Pare). Or, il n'en est rien, aussi bien pour la déclinaison que pour la composante hori- zontale. Pour la déclinaison, en particulier, si on laisse de côté les six observations de 1897, qui, à cause de leur petit nombre, peuvent donner une moyenne incertaine, les moyennes de toutes les autres années montrent, avec la dernière évidence, la marche croissante de la valeur absolue de (Toulouse Pare) quand on passe du minimum des laches de 1899 au de 1905. La surface dénuée de taches agit donc comme la surface solaire INAaXITOUIN solaire affectée de taches, ce qui veut dire que ce ne sont probablement pas les taches solaires elles-mémes qui agissent, mais plutôt certaines parties de la surface solaire incomparablement plus étendues qu’elles et qui sont les véritables régions aclives. Ces surfaces actives 8e révélent à nos yeux par les taches; maisqu'elles se manifestent ainsi ou qu'elles ne présentent pas de taches, leur action sur le magnétisme terrestre reste la même. On retrouve ainsi, par la simple considération de la différence (Toulouse-Pare), les parties essentielles théorie due à M. Marchand, directeur de l'Observatoire du Pic-du-Midi, d'après laquelle l'action du Soleil sur les phénomènes de la Physique du Globe se produit par l'intermédiaire de régions d'une d'activité caractérisées surtout par des acules, avec ou sans taches. IL. — MESURES ABSOLUES EXÉCUTÉES DANS LA RÉGION DE TOULOUSE. Les mesures magnétiques, en Campagne, doivent avoir pour sanction la construction d'une carte magnétique, 1488 Une carte magnétique est la représentation, en fonction de la longitude et la latitude géogra- phiques, des valeurs simultanées qu'affecte, à une certaine époque idéale, un des éléments du magné- tisme terrestre en tous les points de la carte. Il s'agit, bien entendu, des points de la surface du sol. A cet effet, on joint par des lignes continues les points pour lesquels l'élément magnétique consi- déré à une mème valeur fixée d'avance; on ne trace généralement que les lignes isomagnétiques correspondant à des valeurs équidistantes de l'élé- ment auquel elles se rapportent. Lorsque les obser- vations forment un réseau serré et sont faites avec soin, elles affectent des formes plus ou moins irré- gulières, phénomène qui s'exagère dans certaines régions, le bassin de Paris en particulier. D'autre part, les trois cartes magnétiques distinctes qu'exige l'étude d’une région sont assez malaisées à cons- truire, parce que les nombreuses mesures absolues qu'elles supposent ne peuvent être faites que dans un intervalle de temps considérable, qui embrasse généralement plusieurs années à cause de la néces- sité de n'opérer que pendant la belle saison. Le champ magnétique d'un point donné de la surface de la terre étant une grandeur essentielle- ment variable avec le temps, la recherche des con- ditions qui, dans une large mesure, soustraient sa représentation à l'action du temps présente un réel intérêt. On est alors conduit, comme je l'ai montré dès 1897, à adopter une station de référence, qu'il conviendrait de placer au centre de la carte magné- üque, et à inscrire sur les £somagnétiques de la carte non les valeurs rapidement variables avec le temps qu'ont en chacun de leurs points les éléments D, H, I, mais les valeurs sensiblement constantes des différences D-D', H-H’, I-I’ entre les éléments des diverses lignes et les éléments correspondants D’, H, 1’, de la station de référence. On voit immé- diatement la signification théorique importante des différences introduites sous la rubrique (Toulouse- Pare) et l'importance qu'il y a à en avoir la varia- tion-en fonction du temps. Les mesures faites dans la région de Toulouse se rapportent à 176 localités visitées par mon assistant M. J. Fitte ou par moi; ces localités appartiennent aux treize départements suivants : Ariège (1 st.), Aude (2st.), Aveyron (10 st.), Dor- dogne (1 st.), Gard (2 st.), Haute-Garonne (26 st.), Gers (22 st.), Lot (46 st.), Lot-et-Garonne (10 st.), Lozère (9 st.), Hautes-Pyrénées (2 st.), Tarn (5 st.), Tarn-et-Garonne (40 st.). Avec ses 46 stations, le Lot est le département de France dont l'étude magnétique est aujourd'hui la plus complète ; cette étude particulière à été faite à la demande du Conseil général de ce dé- parlement. E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE Au cours des mesures précédentes et sur une remarque que j'avais été amené à lui faire‘, M. E.-A. Martel m'a prié d'entreprendre l'exploration magné- tique du gouffre de Padirac, tant pour compléter l'étude scientifique de cet abime que pour voir si, comme je l’ai indiqué, il ne serait pas possible de mettre en évidence, par la discontinuité des élé- ments magnétiques de la surface du sol, les cavités du gouffre qui sont voisines de cette surface. Le relevé topographique fait par M. Martel, sous forme de projection horizontale rapportée au nord magnétique”, ne pouvait indiquer l'emplacement de la salle du grand Dôme, en particulier, qu'à une centaine de mètres près, à cause surtout de la valeur simplement approximative du nombre admis pour la déclinaison de l’intérieur du gouffre. La recherche magnétique de la salle du Dôme devait évidemment être faite au moyen de la déclinaison, à cause de la précision de sa mesure et du retentissement très grand des irrégularités de l'écorce terrestre sur sa valeur. Une autre question très importante était de voir si les éléments magnétiques de la surface du sol étaient ou non identiques à ceux de l'intérieur du gouffre, lequel est creusé dans le Bathonien, c'est- à-dire dans une couche jurassique calcaire, peu riche en fer ou ne contenant que des nodules d'oxyde de fer brun à peu près complètement dépourvu de magnétisme. Il ne pouvait être question de déter- miner la déclinaison dans l'intérieur de l’abime : il restait done à comparer la composante horizontale et l'inclinaison dans les deux cas. Habituellement, on ne fait de mesures magné- tiques précises, avec les boussoles ordinaires, qu'à la lumière naturelle, ce qui exige qu'on soit à la surface du sol. Malgré les difficultés que le contraire présente, j'ai réussi à faire sur le bord du ace des grands Gours, à côté de la salle à manger”, c'est- à-dire à 100 mètres de profondeur et à 1.100 mètres du fond du puits d'entrée, en utilisant la lumière de bougies ordinaires, des mesures absolues de composante horizontale et d'inclinaison; j'ai em- ployé à cet effet le théodolite boussole de voyage de l'École Normale supérieure et une boussole d'incli- naison de Chasselon (modèle moyen). Je me suis astreint, sauf dans une expérience de contrôle, à 1 E. Maruras : L'alpinisme el les études de magnétisme terrestre. An». du Club Alpin pour 1901. 2 E.-A. Marrez : Le gouffre et la rivière souterraine de Padirac. Voir le plan en couleur qui suit la page 180. 3 E.-A. Marrez : Loc. cit. Voir le bas de la page 113. Les observations ont été faites à cet endroit du gouffre parce que c’est le seul dans lequel les trépieds porteurs des bous- soles ont pu être fixés au sol; partout ailleurs le sol était trop dur pour que les pointes des trépieds pussent s'enfon- cer dedans. On s'est évidemment placé le plus loin possible des consoles en fer qui soutiennent les fils de bronze de l'éclairage électrique. E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE 189 opérer le malin de très bonne heure (avant l'arrivée des premiers visiteurs), l'éclairage électrique de l'intérieur du gouffre ne fonctionnant pas. Je remplacais la lumière naturelle par celle de 24 à 28 bougies portées par 4 supports de bois et pla- cées à un niveau un peu plus élevé que celui des yeux de l'observateur (fig. 1). Ces supports, assez sem- blables à des pupitres de musiciens, se composent d’une partie fixe et d’une partie mobile : la partie fixe est un étui prismatique, à section en forme de triangle équilatéral, rendu vertical par un trépied; la partie mobile est un prisme triangulaire plein, entrant à frottement doux dans l’étui précédent et portant une plate-forme horizontale. Le prisme plein CAL DS Fig. 4. — Disposition du support à bougies pour l'éclai- rage des boussoles maynéliques dans le gouffre de Padirac. porte sur une de ses faces une série d’encoches équi- distantes et d'axe horizontal; une goupille de cuivre rouge, placée dans l’une de ces encoches et s’ap- puyant sur le bord de l’étui, sert à fixer ou à faire varier à volonté la hauteur du support, ce qui est nécessaire quand on passe du théodolite-boussole de voyage, avec lequel on observe assis, à la bous- sole d'inclinaison, qui exige que l'on opère debout. Les bougies sont portées par des vis en laiton, fixées dans la plate-forme de chaque support suivant trois rangées parallèles ; leur lumière est diffusée par des écrans en carton blanc portés par une rainure, comme le montre la figure 1 ci-dessus, qui repré- sente le support en question vu de face et de profil et la plate-forme en projection horizontale. Les supports ont été construits, sur mes indica- tions, par M. Carrère, l'habile mécanicien de l'Obser- valoire de Toulouse. Le réglage de la lumière, c'est-à-dire la détermi- nation de l'emplacement à donner aux supports, de leur hauteur, du nombre des bougies absolument nécessaires, a été particulièrement laborieux dans le cas de la composante horizontale; il peut être indiqué en peu de mots grâce à la figure 2 ci-dessous qui représente, en projection horizontale, la posi- tion relative du trépied porteur de l'aiguille aiman- tée NS et des quatre supports porteurs des bougies. L'observateur est supposé assis face au nord magné- tique. On peut évidemment trouver pour l'éclairage des boussoles d’autres dispositifs; ceux qui viennent Fig. 2. — Position relative de l'aiguille aimantor et des Supports à bougies dans les diverses observations. d'être décrits sommairement ont au moins le mérite de la simplicité. On arrive aisément à rendre visible le déplace- ment du trait de repère mobile devant les traits fixes, et un nombre de bougies inférieur à dix est suffisant pour cela; le point difficile est la lecture des verniers, pour laquelle il faut saisir l'incidence sous laquelle les traits peuvent être distingués. C'est cette lecture qui exige impérieusement une augmen- tation notable du nombre des bougies ainsi qu'une vue excellente. Vu l’immensité du gouffre, l'élévation de la tem- pérature (0°,1) produite par les bougies était négli- geable et comme, d'autre part, la distribution des bougies par rapport à la boussole était symétrique, celles-ci ne pouvaient fausser les mesures de la composante horizontale, qui est très sensible aux 490 E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE variations de température que subit le barreau aimanté quand il passe de l’intérieur à l'extérieur de la boussole. Avec un peu d'habitude, les mesures se font aussi bien à la lumière artificielle qu'à la lumière naturelle et avec une exactitude aussi grande; elles sont seulement beaucoup plus fati- gantes. L’exploration magnétique de Padirac a été faite en deux fois, du 20 au 24 mai et du 27 au 29 août 1903, afin de véritier la concordance des deux séries de mesure. La surface du sol a été étudiée en six points (fig. 3). Padirac, et Pa- dirac, sont si- tués à peu près à la même dis- tance (120 mè- tres) de l'orifice du gouffre, l'un au Nord-Est, ë : RE Gore Réthonien l’autre au Sud- du causse Ouest; Padi- (stérile) rac., Padirac,, Padirae,, sont à 500 et 400 mè- tres au nord de l’orifice, dans la région pré- sumée être sur la verticale de la salle du D6- ne AUeSTECE que représente approximative- ment la figure ci-contre, sur laquelle est tra- cée la projec- lion horizon- tale de la cavité du gouffre et de la rivière plane. Padirac, est un point du hameau de Penot, à 50 mètres au sud de la faille qui sépare le Lias du Jurassique et qui s'étend en ligne droite sur une longueur de plus de 20 kilomètres. Padirac, est donc dans le Lias, alors que les cinq autres points sont dans le Jurassique (Bathonien) qui forme le ’ausse dans lequel est creusé le gouffre de Padirac. La recherche de la salle du Dôme a été faite en comparant les valeurs de la différence (Padirac- Lias (verdoyant) Echelle au 21.000€ Fig. 3. — Carte des environs de Padirac. Val-Joyeux) fournies par la déclinaison. La moyenne -58/,82 des deux valeurs concordantes de (Padirac- Val-Joyeux) fournies par Padirac, et Padirac, ! est ‘ Deux points situés à 25 mètres l'un de l'autre, de part et d'autre des pertes, aujourd'hui obstruées, par les- quelles M. Martel suppose que devaient être absorbées les eaux qui ont creusé Ja salle du Dôme, deux plus élevée de 2,7 que le nombre moyen — 56',12 fourni par Padirac, et Padirac, ; cette différence, environ 4 fois plus forte que les erreurs possibles des mesures, parait bien indiquer une discontinuité dans la région du Cloup, et, avec toutes les réserves que comporte une semblable conclusion, on peut ajouter que la différence en question semble bien con- firmer l'induction de M. Martel, que la salle du Dôme se projette horizontalement dans la région du Coup. La comparaison des éléments magnétiques de la surface du sol et de l'intérieur du gouffre résulte de 10 mesures de la composante horizontale et de 6 mesures de l’inclinaison. Ces mesures ont été rendues extrêmement pénibles par l'installation électrique faite par l'usine de Carennac, qui éclaire le gouffre au moyen d'un courant alternatif triphasé à 50 périodes sous la tension de 4.000 volts, ramenée pour l'éclairage à 120 volts au moyen d'un transfor- mateur placé à l'entrée du puits de Padirac. Les courants vagabonds ont souvent gêné les mesures et déchaïné de véritables orages magnétiques. De l'ensemble des mesures de l’inelinaison, et particu- lièrement de la mesure de la composante horizon- tale effectuée le 27 août 1903 au soir pendant l'arrêt de l’usine de Carennac, on doit conclure que l’ineli- naison et la composante horizontale du gouffre ne diffèrent pas d'une facon appréciable des éléments correspondants de la surface du sol. III. — RECHERCHE DE LA LOI DE DISTRIBUTION RÉGU- LIÈRE DES ÉLÉMENTS MAGNÉTIQUES D'UNE CONTRÉE A UNE DATE FIXE. Le champ magnétique terrestre de la France à la date du 1° janvier 1896 étant donné, par exemple au moyen des mesures de M. Th. Moureaux, si on essaie de le représenter par des lignes isomagné- tiques, on voit, surtout en certains points du terri- toire francais, se manifester des irrégularités dues à des causes perturbatrices ou anomalies; si celles-ci n'existaient pas, les lignes isomagnétiques auraient des formes très simples, que la théorie permettrait de prévoir, et la distribution du magnétisme ter- restre serait régulière. Comment procéder pour éliminer, en chaque sta- tion, les causes perturbatrices et obtenir les valeurs vraies des éléments magnétiques de cette station, va- leurs telles que la différence des éléments observés et vrais définisse l'anomalie de la station considérée? J'ai résolu le problème ainsi posé, dans le cas de la France, de deux facons différentes que nous allons passer en revue. $ 1. — Méthode de la formule provisoire. Rapportons les 617 stations du réseau francais de M. Moureaux à l'Observatoire de Toulouse pris E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE 491 comme station de référence. Pour chaque station, nous formerons les différences : A“longs., A lat., AD, AH, AI, AX, AY, AZ, AT, que l’on oblient en retranchant de la longitude, de la latitude, de la déclinaison, de la composante horizontale de l’inclinaison, etc., de chaque sta- tion, données dans le Mémoire de M. Moureaux, la longitude, la latitude, et les éléments magné- tiques de l'Observatoire de Toulouse donnés par le mème auteur. Les AD, AH, AT, etc., ainsi obte- aus seront dits différences observées ou A (obs); nous exprimerons l’idée que le magnétisme régu- lier est une fonction continue de la longitude et de la latitude géographiques" en essayant de représenter les différences observées par un déve- loppement du second degré en (A long) et (A lat.), développement qui contient trois termes du second degré, deux du premier et un terme constant. Il est bien évident que, puisqu'il s'agit, dans le cas d'un certain élément magnétique, de représenter par un développement parabolique en A long. et A lat. la distribution régulière du magnétisme terrestre, il faut exclure des nombreuses équations de condition que l’on est conduit à écrire celles qui correspondent à de grosses anomalies de l'élément magnétique que l’on a en vue. On peut faire cette exclusion de deux facons très différentes. Dans une première méthode, l'élimination des anomalies les plus fortes se fera au moyen de formules provisoires, qu'ilest aisé de trouver par des tätonnements réguliers sur lesquels nous n'insisterons pas pour ne pas fatiguer le lec- teur. Supposons qu'il s'agisse de la déclinaison et que l’on ait trouvé comme formule provisoire” : AD (cale.)— + 0,3961 (A long.) + 0,1677 (A lat.) + + 0,00002(A long.)?+0,00016(Along.)(Alat.}—0,00002(A lat.®. Une station donnée, caractérisée par les valeurs correspondantes de A long. et A lat., sera déclarée régulière où anomale selon que le AD calculé par la formule provisoire donnera avec le AD observ. une différence jugée plus petite ou plus grande que les erreurs possibles de l'expérience ; en général, si le module de la différence ne dépasse pas deux à trois minutes, la station sera considérée comme régulière; s'il est sensiblement plus grand, la station sera considérée comme anomale pour la déclinaison. La séparation des stations régulières et anomales pour un élément magnétique donné, très aisée tant qu'on ne s'éloigne pas beaucoup de Toulouse, ne peut plus se faire avec sécurité aux limites extrêmes de la France, à cause de l'incerti- ! On ne tient pas compte de l'altitude, dont l'influence est, en général, négligeable, sauf dans les hautes montagnes. ? Les éléments angulaires AD, A long., A lat. sont sup- posés exprimés en minutes. tude qui peut régner sur les coefficients du pre- mier degré; il faut donc s'arranger pour que cette incertitude soit très faible : de là des précautions dans le caleul de ces coefficients dont le détail ne peut trouver place ici. Quoi qu'il en soit, admellons que, pour la déeli- naison, le {triage des stations régulières et anomales ait pu se faire, la formule provisoire fonctionnant à la facon d'un crible : soit 400, par exemple, le nombre des stations qualifiées régulières; pour trouver la loi de distribution régulière définitive, on pourra écrire 400 équations de condition de la forme : (1) AD (obs.)=x + y (A long.) +z (A lat.) +4 (A long.)° + u (A long.) (A lat.) + v(A lat.}°, x, y, Z, {, u, v étant des inconnues. Il n'y aura plus qu'à résoudre, par la méthode des moindres carrés, ce système de 400 équations à six inconnues; ce calcul étant très laborieux, on le simplifie en utili- sant la /ormule provisoire et en prenant comme inconnues nouvelles les accroissements qu'il faut donner à ses coefficients pour obtenir la formule définitive; on obtient alors 400 équations à 6 in- connues nouvelles de même forme que les équa- tions(1), mais avec des seconds membres fort petits. La résolution obtenue, on effectuera le calcul de la formule définitive pour toutes les M. Moureaux, et, pour chacune d’elle, la différence algébrique AD(obs) —AD{calc.) mesurera l'anomalie de la station considérée au 1° janvier 1896. Dans les stations vraiment régulières, le module de l’anomalie devra être inférieur à l'erreur de mesure de la déclinaison. On ferait de même pour les autres éléments ma- gnétiques. stations de $ 2. — Méthode des districts modifiée. La méthode qui vient d'être exposée conduit, quand on prend toutes les précautions nécessaires pour avoir de bonnes valeurs provisoires des coef- ficients y et z, à d'excellents résultats. La seule critique qu'on puisse lui faire est l'incertitude où l'on est d'avoir pris des précautions suffisantes pour trier avec sécurité, dans les régions de la France les plus éloignées de Toulouse, les stations régulières et les stations anomales. Il serait évidemment préférable d'employer une méthode capable de séparer systématiquement les stations régulières el anomales ; la méthode des dis- tricts répond précisément à cette condition. Celte méthode, fort ancienne puisqu'on en retrouve les premiers rudiments dans un Mémoire du capitaine Elliot daté de 1851", consiste essentiellement à 1? Captain C. M. Ezuior : Magnetic Survey of the Eastern Archipelago. Phil. Trans. pour 1851, Part 1. 192 diviser la région dont on veut connaître la distri- bution magnétique régulière en un nombre arbi- traire de districts approximativement égaux et possédant sensiblement le même nombre de sta- tions par unité de surface. Cela étant, nous appel- lerons s{ation centrale d'un district donné, une station idéale définie géographiquement par la moyenne arithmétique des longitudes et la moyenne arithmétique des latitudes de toutes les stations du district; les éléments magnétiques de la station centrale sont, de même, les moyennes arithmétiques des éléments magnétiques de toutes les stations du district. La considération des stations centrales a pour but, étant données dans chaque district des stations nombreuses affectées d'anomalies incon- nues, mais quelconques et nullement systématiques, d'obtenir dans chacun d'eux une station idéale que l’on puisse considérer comme absolument régulière dans tous ses éléments, car les anomalies de toutes les stations se détruisent dans les moyennes en vertu de la loi des grands nombres. Il est alors aisé de donner une solution simple, rapide et rigou- reuse du problème de la distribution magnétique régulière. Il suffit de prendre, comme dans la première méthode, une station de référence et de rapporter les éléments géographiques et magnétiques des sta- tions centrales aux éléments correspondants de la station de référence. Soient alors A long., A lat., AD, AH, AI, etc., les différences des éléments primitifs et des éléments de la station de référence ; on expri- mera AD, AH, AI, etc., par des fonctions parabo- liques du second degré en (Along.)et(A lat.). Sin est le nombre des stations centrales, on obtient pour chaque élément magnétique n équations linéaires à 6 inconnues x, y, z, {, u, v, telles que : AD — x + y (A long.) +z(A lat.) + {(A long.)* + u (A long.) (A lat.) + v (A lat.), que l'on résout la méthode des moindres carrés. La loi de distribution régulière ainsi obtenue pour les stations centrales devra s'appliquer à toutes les stations régulières du pays étudié. C'est cette méthode que M. B. Baillaud et moi nous avons appliquée à la France, supposée définie par le réseau magnétique de M. Moureaux, à la date du 14° janvier 1896. Afin de réduire au minimum les calculs énormes qu'entraîne l'emploi de la méthode des moindres carrés et faire en sorte que les opérations effectuées pour un élément magné- tique puissent être en grande partie utilisées pour par les autres éléments, nous avons fait usage unique- ment des stations communes aux sept éléments D, H,1, X, Y,Z, T, et ayant par suile les mêmes distriets et les mêmes stations céntrales. E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE Les districts pouvant avoir une forme quel- conque, il nous a paru très simple de les composer d'un nombre de départements à peu près le même pour tous. Cela posé, on peut se demander quel sera le nombre 2 des districts. Si l'on remarque que chacun d'eux fournira une équation à 6 incon- nues, on voit qu'il faut » >6; en prenant » — 12, on aura vraisemblablement une bonne détermina- tion des coefficients. Comme il y a 86 départements (plus le territoire de Belfort), on voit qu'en moyenne les districts auront 7 départements, quelques-uns en ayant 8. Leur composition, que nous ne rappor- tons pas pour ne pas allonger cet article démesu- rément, les rapproche, autant que faire se peut, des anciennes grandes provinces françaises. On s'est arrangé de facon que le district n° 42, composé des départements suivants : Cher, Eure, Eure-et-Loir, Loiret, Nièvre, Seine, Seine-et-Oise, Seine-Inférieure, contienne, à lui tout seul, ce que l'on peut appeler l’anomalie du Bassin de Paris. La méthode des districts ne s'applique certainement pas dans ce cas particulier et nous avons purement et simplement supprimé le distric! n° 12, la France étant réduite aux 11 premiers districts, qui forment un total de 519 stations comprenant toutes les stations complètes de M. Moureaux, sauf les 2 sta tions de La Châtre et celle du Puy-de-Dôme. Comme dans la méthode de la formule provisoire, la France a été rapportée à l'Observatoire de Toulouse, son choix comme station de référence étant justifié après coup par la valeur voisine de zéro de toutes les constantes x des formules de distribution magnétique régulière. Appliquée au réseau français de M. Moureaux, la méthode précédente en met en relief l’admirable régularité et l’impeccable précision. Vu le grand nombre des observations et la facon dont elles sont uniformément réparties, la méthode des districts produit une compensation à peu près complète des anomalies positives et négatives. Il arrive que la mé- thode des districts et celle de la formule provisoire, en France du moins, représentent en définitive à peu près la même loi de distribution magnétique et conduisent à des formules pratiquement équiva- lentes. Il n'en serait pas ainsi si, dans la formation des districts, on conservait des anomalies énormes que rien ne viendrait compenser, et l’on conçoit qu'en toute rigueur les deux méthodes puissent, en d’autres régions, conduire à des résultats différents. Leur excellent accord, en ce qui concerne la France, démontre que notre pays est, au point de vue magnétique, le type des contrées régulières, en dépit des quelques anomalies que peuvent présenter le Bassin de Paris, le Plateau Central, la Bretagne et quelques points particuliers, comme les environs: immédiats de La Châtre. E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE 193 $ 3. — Quelques conclusions. Puisque nous connaissons maintenant la distri- bution magnétique régulière en tous les points de la surface de la France, nous pouvons chercher à résoudre quelques problèmes particuliers; par exemple chercher quelle est l'influence de l'altitude sur les éléments magnétiques, influence que nous avons négligée systématiquement jusqu'ici. La méthode consistera à comparer la différence présentée entre l'observation et la loi de distribution régulière par les divers éléments magnétiques de stations régulières du département des Hautes- Pyrénées, choisies pour leurs différences d’alti- tude ", savoir : Bagnères-de-Bigorre (alt. 540"), Campan (alt. 668), Col du Tourmalet (alt. 1.800), Col de Sencours (alt. 2.366%), Pic-du-Midi (alti- tude 2.856"). La variation par 1.000 mètres d'altitude a les valeurs suivantes, lorsqu'on l'exprime en minutes pour la déclinaison et l'inelinaison, en unités du cinquième ordre décimal pour les vecteurs H, X, NET 1941 ME ÉLÉMENT VARIATION magnétique pour 1000® d'altitude DR EE CUS HE RS ee EE OS) Lee: — 015 x — 18,0 N'E —1#,2 AR — 15,8 Lo — 41,3 La variation de la composante horizontale, quand on s'enfonce de 100 mètres dans l'intérieur du sol, n'est donc qu'une augmentation de deux unités du cinquième ordre, celle de l'inclinaison étant abso- lument nulle. Il s'ensuit que l'exploration du gouffre de Padirac ne devait rien donner sous le rapport de la composante horizontale. Il en est de même de l’inclinaison, comme mes mesures directes l'ont montré. En ce qui concerne la force totale, les résultats précédents montrent que sa variation pour 1.000 d'altitude est un peu plus du millième de sa valeur, alors que la théorie indique 2/1.000 et que Kreil annonce une variation à peu près vingt fois plus grande. Le résultat, très voisin de la théorie, auquel nous-parvenons tient à ce que nous n'avons opéré que sur des stations régulières, c'est-à-dire pour lesquelles les différences (0-C) entre l'observation et la loi de distribution régulière sont sensible- ment de l'ordre des erreurs de mesure. Or, les grandes altitudes sont ordinairement affectées d'anomalie; c’est la règle générale en ce qui les ! Cette méthode a été indiquée par M. Moureaux dans le cas particulier de la force totale T, mais sans tenir compte des différences de longitude et de latitude des stations qu'il comparait. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. concerne. Il s'ensuit qu'en général on n'a pas le droit de tirer de conclusion des observations faites sur les montagnes, d'autant plus que, ne connaissant pas habituellement la loi de distribution régulière de la région dans laquelle elles se trouvent, on ne possède pas, pour les mesures faites à des altitudes différentes, les différences (0-C) qui, seules, peuvent dire si les mesures employées à la détermination du coefficient d'altitude sont valables ou non. On peut maintenant se demander quelle est l'influence de la nature des roches de l'écorce ter- restre sur les différents éléments magnétiques? Si l'on définit la nature de ces roches par la couche géologique qui effleure à la surface du sol et sur laquelle les mesures ont été faites, on peut re- chercher : 1° Pour une couche superficielle toujours la même, combien, sur 100 stations, il y a en moyenne d'éléments magnétiques réguliers et anormaux ? Comment les anomalies se comportent au point de vue de leur signe et de leur valeur moyenne? 2° Comment les nombres précédemment obtenus se comportent quand la nature de la couche géolo- gique superficielle varie depuis les terrains azoïques jusqu'aux alluvions quaternaires? L'influence de la couche superficielle du sol sur le pourcentage des stations régulières se trouve mise en évidence dans le tableau suivant, qui ne réclame aucune explication particulière : COUCHE SUPERFICIELLE D H I Z T Terrains azoïques : °/o °/0 Jo 0/0 °/0 Basaltes, porphyres . 28,6 30,8 30,8 16,2 46,2 Micaschistes. . 48,1 31,8 54,2 66,7 66,1 Gneiss. . Man OS TE D AL AO ATOS Granite et terrain granitique. . . . . 64,8 59,7 11,1 84,3 85,7 Moyenne . .. 55,4 52,9 56,3 18,4 FE Terrains primitifs : Cambrien . . 45,1 58,8 18,8 75,8 15.8 Silurien. . 80,0 80,0 80,0 100,0 100,0 Dévonien 25,0 175,0 15,0 75,0 15,0 Carbonifère . 62,5 71,8 66,7 88,9 88,9 Permieu. . 100,0 83,3 100,0 83,3 100,0 Moyenne 55,9 67,2 195 £0,7 82,5 Terrains secondaires : EPIAST ee FIEME 45,8 60,0 56,0 92,0 88,0 Jurassique inférieur. 71,2 84,9 84,5 94,4 92,9 — moyen. . 69,8 80,9 84,6 92,3 92.3 — supérieur. 54,5 100,0 18,3 100,0 100,0 — indéterminé. 100,0 100,0 100,0 400,0 100,0 Crétacé inférieur. . . 41,7 83,3 91,7 91,7 83,3 —SUPÉTIEUT 57,0 16,9 72,3 85,1 81,2 Moyenne . . . 61,5 80,4 71,5 91,1 90,5 . Terrains tertiaires : Éocène . . 47,1 81,2 83,3 91,3 92,7 Oligocène . 49,0 85,4 11,7 82,1 19,2 Miocène. . 62,5 80,6 15,0 71,8 80.6 Pliocène. . . 83,3 84,6 89,3 80,8 58,4 Moyenne 55,1 82,1 18,1 84,3 86.0 Terrains quaternaires. 61,5 84,3 82,4 83,1 86,2 MOYENNE GÉNÉRALE. 58,8 15,8 15,4 85,2 86,4 . dl° La moyenne générale indique que l'élément le moins régulier de tous est la déclinaison. Sa fré- quence moyenne dans les divisions : terrains azoïques, primaires, secondaires, tertiaires, qua- ternaires, ne varie guère que de 4 °/, de part et d'autre de la moyenne générale. Cependant l'in- fluence de la constitution de la croûte terrestre superficielle est très grande sous cet élément; c'est tout à fait visible dans les terrains azoïques, pour lesquels la régularité va en croissant régulièrement de 28,6 °/, à 64,8 °/, quand-on passe des roches volcaniques au granite. Dans les terrains primaires, la variation est plus grande encore. Toutes choses égales d'ailleurs, c'est dans les terrains secondaires que la déclinaison est la plus régulière, tout parti- culièrement dans le Jurassique inférieur elle Juras- sique moyen. Il faut également, dans les terrains tertiaires, remarquer le P/iocène, dans lequel la régularité atteint 83,3 °/.. La composante horizontale est un élément beau- coup plus régulier que la déclinaison. Dans les grandes divisions géologiques, la régu- larité moyenne va constamment en croissant à mesure que les terrains deviennent plus récents. A partir du Jurassique, toutes les couches, à la seule exception du Crétacé supérieur qui ne donne que 16,5 °/,, donnent une proportion de composantes horizontales régulières supérieure à 80 °/,. Il est remarquable de constater que les 22 stations du Jurassique supérieur ne fournissent aucune anomalie. La moyenne générale de l'inclinaison (75,4 °/,) est sensiblement égale à celle (75,8 °/,) de la com- posante horizontale; comme celle-ci, inclinaison est très régulière dans les étages récents et même dans les terrains primaires, où proportion moyenne de régularité atteint 79,3 °/,, tandis qu'elle tombe à 56,3 °/, dans les terrains azoïques en général et à 30,8 °/, dans les roches volca- sa niques. A très peu de chose près, la composante verticale et la force lotale se comportent de la même facon et fournissent dans tous les terrains des proportions de stations régulières sensiblement identiques. Toutes choses égales d’ailleurs, ce sont les éléments les plus réguliers de tous. Dans les roches volcaniques, la proportion de régularité descend à 46 °/, et dans les micaschistes à 66,7 °/,; mais, en dehors de ces deux étages, on a toujours au moins 75 °/, de régu- larité et presque toujours plus de 80 °/,. La considération des formules qui donnent les anomalies des éléments Z et T conduit à la curieuse règle suivante : Le nombre des stations régulières de la composante verticale ou de la force totale dans un terrain est sensiblement égal au nombre des stations réqaulières de la composante horizon- » E. MATHIAS — RECHERCHES SUR LE MAGNÉTISME TERRESTRE tale ou de l'inclinaison, augmenté de la moitié du nombre des anomalies de ces mêmes éléments. Cette règle se vérifie remarquablement depuis les terrains les plus anciens jusques et y compris l’'Æocène; à partir de l'Oligocène, tous les nombres calculés sont plus grands que les nombres observés. La règle relative à l'inclinaison parait un peu meilleure que la règle relative à la composante horizontale. Essayons, à titre d'exemple, la vérifi- cation pour l'ensemble des terrains, depuis les roches azoïques jusqu'à l'Æocène; on trouve les nombres suivants : NOMBRE DE STATIONS régulières de la 438 Composante verticale Force totale . Rd note 0 VD) Composante horiz.+ moitié des anomalies. 438 Inclinaison + moitié des anomalies. . . . 440 On voit que la règle de l’inclinaison fournit le nombre 410, intermédiaire entre 438 et 442 et qui ne diffère de chacun d'eux que de moins de 1/200. On peut encore se poser la question suivante : Pour un élément magnétique donné, les anomalies positives sont-elles plus nombreuses que les ano- malies négatives, où inversement? Pour la déclinaison, sur 295 anomalies, 160 sont positives et 139 négatives. Si l’on remarque que le Bassin de Paris est une anomalie tertiaire à déeli- naisons anomales par excès, on en conclut avec une grande probabilité que la légère prédominance des anomalies positives sur les anomalies néga- tives n'a aucune signification et provient unique- ment de ce que le Bassin de Paris a été beaucoup plus étudié que les autres. La composante horizontale, sur 472 anomalies, présente 68 anomalies positives et 10% anomalies négatives; les dernières prédominent à peu près dans tous les terrains, sauf dans les terrains pri- maires; comme les stations des terrains primaires sont peu nombreuses, il reste établi que, en règle générale, une anomalie de la composante horizon- tale en France est plutôt négative que positive. L'inclinaison donne des résultats plus nets encore. Sur 189 anomalies, 126 sont positives et 63 néga- tives, soit une proportion de deux anomalies posi- tives contre une anomalie négative. Comme pour la composante horizontale, ce sont les terrains secon- daires qui donnent la proportion la plus élevée de l'anomalie la plus fréquente : 47 anomalies posi- tives contre 13 anomalies négatives. La composante verticale et la force totale ne donnent pas de prédominance appréciable de l'une des sortes d'anomalie sur l’autre. Ce qui vient d'être dit paraît suffisant pour montrer que des problèmes qui ne sont pas dénués d'intérêt se posent relativement aux relations du magnétisme terrestre et de la composition de la PR A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES 195 croûte superficielle du sol. Il faudrait évidemment que des statistiques telles que celles qui précèdent fussent faites dans les régions autres que la France, alin de voir si les résultats fournis par une même couche géologique superficielle sont constants. S'il en était ainsi, la question prendrait un intérêt Ù [ extrême. Même limitée à notre pays, cette étude m'a paru n'être pas indigne de l'attention des lee- teurs de la Aevue générale des Sciences. E. Mathias, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Toulouse, L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES Je me propose de démontrer dans cet article que l'hypothèse courante du bouleversement incessant de la masse solaire par des éruptions formidables est en désaccord avec un grand nombre d'observations précises, qui prouvent sûrement que, au moins dans les couches du Soleil que nous connaissons, ces éruptions ne se produisent jamais. Le Soleil nous montre bien, dans son réseau photosphérique, ses taches, ses facules, ses floc- cules et surtout, dans ses protubérances, des chan- gements de forme continuels, qui, à première vue, semblent d'accord avec l'hypothèse d’éruptions for- midables. Mais des observateurs aussi expéri- mentés que Secchi, Liais, Young et le Père Fenyi n'ont pas loujours vu cet accord et ils ont fait remarquer, au contraire, qu'en attribuant ces changements continuels à des mouvements maté- riels, on arrive souvent à des transports de matière qui semblent peu vraisemblables. D'après Secchi et Liais, chaque changement rapide dans la granu- lation photosphérique s'explique beaucoup mieux si l'on n'y voit que l'effet d'une évaporation et d'une condensation sur place de la substance des nuages lumineux". Dans les protubérances, le mou- vement apparent, avec une vitesse souvent de plu- sieurs centaines de kilomètres par seconde, est si extravagant, si capricieusement changeant, si éphé- mère, si dépourvu souvent d'aucun lien avec les couches plus profondes, que, d'après Secchi, Young et le Père Fenyi, il fait fréquemment penser plutôt à quelque propagation de l’état lumineux dans la matière tranquille qu'à une éruption maté- rielle véritable*. Voilà aussi pourquoi mon explica- lion des protubérances, que je considère comme dues à la propagation d'un processus chimique empêchant la température de changer, a été citée par Young et le Père Fenyi comme donnant l'expli- cation la plus simple de ce phénomène®, * Liais : p. 119. * Seccur : Le Soleil, Il, p. 108. — Youxc : The Sun (1895). p- 228, 341, etc. — Fexvr : Mem. d. Soc. d. Sp. Italiani, 23 (189%). Publ, d. Haynald Obs., VI (1892), p. 20, etc. ® YouxG : Thé Sun,°p. 228. Æ"FENT : À propos de L'Espace céleste, p. 51. — Secenr : Le Soleil, I, Si ces astronomes ont adopté néanmoins l'hypo- thèse des éruptions solaires, que leurs observations et leur jugement avaient condamnée, c'est surtout parce qu'ils ont cru que le déplacement des raies dans le spectre des protubérances les y forcait. Vers 1870, M. Lockyer à été le premier à inter- préter ce déplacement comme nécessairement pro- duit, d'après le principe de Düppler-Fizeau, par le mouvement matériel violent de la source lumi- neuse. Comme on ne connaissait alors aucune autre cause qui pût déplacer les raies spectrales, l'interprétation de M. Lockyer sembla Juste et porta bien vite tous les astronomes à croire que le Soleil est bouleversé sans cesse par des éruptions prodi- gieuses. Si l’on avait déjà su alors, ce que tout le monde sait maintenant, que le mouvement matériel de la source lumineuse n'est qu'une des causes très nombreuses qui peuvent déplacer les raies, comme par exemple la pression, la présence d'autres sub- stances, la dispersion anomale et beaucoup d’autres causes qn'on connaît et d’autres encore (comme dans les Novae et Mira) qu'on ne connaît pas, l’em- pressement mis à accepter le dogme des éruptions solaires eût été probablement moins grand. Mais il est clair, en tout cas, que, depuis que toutes ces autres interprétations possibles sont connues, l’in- terprétation d'après Düppler a perdu tout pouvoir démonstratif; elle est même devenue absolument impossible. Il existe quatre sortes de phénomènes solaires qui le démontrent. Ce sont ces quatre sortes de phénomènes que nous étudierons en cet article et qui nous convaincront, en somme, que le beau principe de Düppler, bien loin de favoriser l'hypothèse d'éruptions fantastiques, en démontre, au contraire, l'impossibilité. Pour démontrer l'impossibilité des éruptions for- midables, considérons d'abord certaines particula- 2 grandes protubérances durant le mois de septembre 1893. Mem. cit., 23. 296 rités dans le spectre des protubérances. J'ai déjà rap- pelé plus haut combien est grande la difficulté de considérer les protubérances comme dela matière en mouvement rapide. Or, cette difficulté devient sou- vent insurmontable lorsque, du déplacement des raies, on calcule d'après Düppler la vitesse du mouve- ment supposé.On arrivealors quelquefois à des mou- vements impossibles, qui prouvent que l’applica- tion du principe de Düppler-Fizeau nous trompe. Voici, par exemple, ce que le Père Fenyi nous a fait observer’ : Quoiqu'on voie souvent, dit-il, sur le bord du Soleil, une protubérance montrant, d'après l'interprétation courante du déplacement de sesraies, un mouvement par exemple de 250 kilo- mètres par seconde dans le rayon visuel, c'est- à-dire dans la direction des parallèles du Soleil, on ne voit jamais les protubérances montrer aussi quelque mouvement analogue dans la direction méridienne. Si ce mouvement existait, on devrait le voir aisément, car déjà en six minutes il pro- duirait un déplacement de la protubérance de T°sur le bord du Soleil. Ce mouvement ne se révélant jamais dans la direction méridienne, il est absurde de l'admettre dans la direction des parallèles. Il est donc évident qu'ici l'interprétation courante du déplacement des raies nous trompe. Car, si les protubérances sont dues à des éruptions ou des explosions, on ne voit pas pourquoi leur contenu serait toujours lancé dans la direction des parallèles et jamais dans la direction des méridiens. Mais, si l'application du principe Dôppler-Fizeau nous abuse sur les protubérances du bord du Soleil, où cette application peut être facilement contrôlée, il peut très bien nous tromper aussi sur les autres protubérances, où ce contrôle est plus difficile. Au sommet d'une protubérance très haute, observée le 4° juillet 1887 par le Père Fenyi, quelque contrôle était bien possible, mais là encore un mouvement énorme calculé ne produisit aucun déplacement matériel visible”. Les protubérances ont souvent encore une autre particularité, qui démontre aussi, mais d'une toute autre manière, que le déplacement de leurs raies ne saurait être causé par leur mouvement. C'est le fait que, lorsque le pseudo-coronium entre dans leur composition, la raie de ce coronium reste tou- jours immobile lorsque les autres raies se dé- placent”. Et cependant, dans ces protubérances, le coronium, l'hélium et l'hydrogène se trouvent mélangés, comme il résulte de la comparaison des trois images qu'on obtient au moyen des rayons émis par ces trois gaz différents", Or, voilà encore un # Fenvi : Publ. d. Hay nald Obs., VIN, p. 114. ? Fenxi : Publ. d. Huynald Obs., NN, p. 23: * YouxG : The Sun, p. 259. — CLerke : Probl., p. 117. “ FExYI: Astra. Astroph., XI, p. #)0.— CLerke: Probl., p.117. A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES cas où il est impossible d'attribuer le déplacement spectral à quelque mouvement du gaz lumineux. Car il est absurde de supposer que, dans un mé- lange de trois gaz, il puisse y en avoir deux qui soufflent en tempête, tandis que le troisième reste- rait en repos. Même en supposant qu'en de telles protubérances il püt exister quelque endroit acci- dentellement tranquille, on n'en comprendrait pas mieux pourquoi ce serait toujours le coronium qui nous le fit voir, l'hydrogène et l’hélium restant en mouvement, tandis que l'inverse ne s’observe jamais. Mais ce n'est pas seulement dans l'étude des protubérances du Soleil qu'on a abusé de l’appli- cation du principe de Dôppler-Fizeau ; dans l'étude des Novae et de Mira, l'insuccès de cette appli- cation a été encore beaucoup plus retentissant. Là, cette application a donné lieu à tant de suppo- sitions ineptes que, d’un commun accord, on a dû décider que, quelle que puisse être la cause encore mystérieuse des déplacements énormes que les raies de ces étoiles font voir, cette cause n'est sûre- ment jamais quelque mouvement matériel!. Or, si, dans l'étude de ces étoiles, on a dû rejeter l’appli- cation du principe de Düppler à cause des absur- dités qu'elle engendre, on devra la rejeter aussi dans l’étude du Soleil, pour la même raison. IT Portons maintenant notre attention sur /a stratification durable des vapeurs solaires. Cette stratification consiste en ceci qu'indépendamment de la volatilité, chaque vapeur s'élève généralement d'autant plus haut qu'elle est plus légère. Et c’est ainsi que le titane réfractaire, mais léger, se montre à de grandes hauteurs, tandis que le mercure, l’an- timoine et le thallium très volatils, mais lourds, restent ensevelis dans la profondeur. Le poids moléculaire moyen des métaux qu'on ne voit pas au dehors de la photosphère est de 159, tandis que, pour les métaux qu'on y voit bien, ce poids moyen n'est que de 72, Il est clair, du reste, que cette stratification ne saurait dépendre uniquement de la densité des vapeurs, mais dépendra aussi de leur quantité. C'est ce qu’on voit prouvé par le calcium et le titane, qui, quoique plus lourds que le sodium, s'élèvent plus haut. Or, cette stratification solaire est d'une imper- turbabilité remarquable. Les protubérances ont beau sillonner l'atmosphère sans relâche, elle n’en dérangent jamais la stratification. Et si parfois les 4 WisixG : Astroph. Journ., X, p. 113. — VoceL : Astr. Nachr., 3101. — CLerke : Probl., p. 397. — CaPBELL : As- troph. dourn., IX, p. 31. TT D ET PE A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES protubérances elles-mêmes nous montrent des métaux plus lourds à leur base, elles ont beau s'élever avec des vitesses fantastiques, ces métaux plus lourds n'arrivent jamais plus haut. Dans les couches renversantes, on trouve aussi toujours une stratification manifeste. M. Mitchell et M. Hum- phreys l'ont directement observée en mesurant les arcs du spectre-éclair'; mais indirectement elle a été démontrée aussi par les recherches de MM. Jewell, Mohler et Humphreys* et très claire- ment aussi, comme nous le verrons bientôt, par les recherches récentes de M. Adams sur la rotation du Soleil. La stratification des vapeurs à l'extérieur du Soleil est d'autant plus remarquable que ces vapeurs sont généralement très légères. Parmi les 40 vapeurs solaires que nous connaissons, il n’y en à aucune aussi dense que la vapeur diode, mais il y en 6 (comme celle du sodium, par exemple) qui sont plus légères que notre air atmosphérique, et 23 (comme celle du fer) qui sont plus légères que le chlore. Or, si telles sont les vapeurs qui composent les couches extérieures du Soleil, leur stratification démontre qu'il est impossible que ces couches soient bouleversées sans cesse par des éruptions formidables. J'en prends à témoin notre propre atmosphère, qui agitée par des vents relativement minimes, n'en est pas moins empêchée d’accuser la moindre stratification. Je sais bien que, dans le Soleil, la stratification est mieux soutenue par une gravitation 28 fois plus forte. Mais, par contre, les courants perturbateurs qu'on y suppose ont des vitesses des dizaines de milliers de fois plus grandes. On pourrait concéder, d’ailleurs, que ces courants fantastiques doivent rendre toute stratification impossible et n’en affirmer pas moins que, en dépit de la stratification qu'on observe, ces éruptions pourraient exister néanmoins. Mais alors on devrait supposer que la stratification qu'on observe n'est pas réelle, mais résulte de ce que chaque vapeur ne peut luire que jusqu'à une certaine distance du centre, au delà de laquelle le froid doit la condenser tout de suite et la rendre invisible. Or, voilà une supposition qui n'est pas soutenable. Car, si elle était juste, ce ne serait pas surtout la densité des vapeurs, mais plutôt leur volatilité qui détermi- nerait leur superposition, et ce ne seraient pas justement les corps les plus réfractaires qu'on ver- rait s'élever le plus haut dans l'atmosphère solaire, comme le titane, par exemple, qui s'y élève plus haut que le sodium plus volatil. 1 MrrCHELL : Ibid., p. 327. ? Astroph. Journal, UN, p. 138. Astroph. Journ., XV, p. 91. — Humpareys : 197 ITI Examinons, en troisième lieu, comme objection à la théorie des grandes éruptions solaires, la rota- tion du Soleil par couches superposées tournant toutes différemment sur l'axe. Déjà en 1892, j'ai amplement exposé mon idée que la rotation du Soleil a lieu de la manière suivante : « Le gros de la masse du Soleil, par conséquent son atmosphère aussi, tourne sur l'axe avec une vilesse angulaire iden- tique à toutes les latitudes ; il n'y a que les nuages photosphériques qui, avec leur retardation polaire considérable, tournent différemment, parce que leur niveau actuel est tout autre que celui où ils ont été formés. » Je ne sais pas si cette idée, issue de ma théorie d'un soleil sans éruptions formi- dables et appuyée aussi par les recherches de MM. Wilsing et Crew, a jamais été remarquée; mais je sais bien que cette idée, qui m'a fait trouver une explication plausible de la répartition des taches, des facules et des protubérances sur la surface du Soleil, vient d'être brillamment con- firmée par les recherches récentes de MM. Adams et Hale sur la rotation de l'hydrogène à l'extérieur du Soleil. Pour mieux faire ressortir l'importance de ces dernières recherches, nous examinerons première- ment ce que les recherches antérieures nous avaient déjà appris sur la rotation du Soleil. Cette rotation, que le déplacement des taches et des facules à fait connaître d’abord, a été étudiée plus scrupuleu- sement plus tard en appliquant le principe de Dôüppler-Fizeau aux déplacements opposés que chaque raie du spectre accuse aux bords est et ouest du Soleil. On voit alors de combien de mètres par seconde la vapeur qui forme cette raie s'avance vers nous à l'Est et recule à l'Ouest. On utilise généralement plusieurs raies, et leurs déplacements sont mesurés à des latitudes très différentes. Cette étude spectroscopique de la rotation solaire a été inaugurée en 1888 par M. Crew, qui arriva déjà alors au résultat que les vapeurs à l'exterieur de la photosphère n’accusent pas la retardation polaire que Carrington avait découverte dans les taches. Si ce résultat n’a jamais fait beaucoup d'impression, c'est parce que : 1° les mesures peu concordantes de M. Crew n'inspiraient que peu de confiance; 2 les recherches plus exactes de MM. Duner, Halm et Adams ont semblé démon- trer chaque fois de nouveau que les couches ren- versantes accusent bien cette retardation polaire *. DT ns ee à ot SR ER ER 1 Théorie du Soleil. Verh. Kon. Akad. v. Wetensch. le Amsterdam (1892), p. 45. 2 Crew : Amer. J. of Sc., 1888 and 1889. — Duxer : A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES Mais cette démonstration n’a jamais été con- vaincante. Car MM. Duner et Halm ont mesuré deux raies ferriques, qu'on n'a jamais pu voir renversées, en dehors de la photosphère. Si ces raies sont donc probablement produites dans les interstices des nuages photosphériques, alors il va sans dire que ces raies n'ont pu nous faire savoir que ce que nous connaissions déjà, c'est-à-dire la retardation polaire de ces nuages. Et quant aux recherches que M. Adams à publiées au mois de novembre 1907, c’est à tort qu'il les a considérées lui-même comme confirmant celles de MM. Duner et Halm. M. Adams a utilisé 20 raies, dont les déplacements aux bords oriental et occidental du Soleil furent mesurés à 12 latitudes différentes. Mais des mesures admirables obtenues de la sorte, il n'a pas tiré le moindre profit. Car voici ce qu'il a fait : À chaque latitude, il a considéré la moyenne des déplacements mesurés comme devant nous révéler la vitesse angulaire des couches renver- santes. Et, ayant obtenu ainsi 12 vitesses angulaires, qui correspondaient aux 12 latitudes différentes, il les réunit en un tableau qui le mena à la conelu- ion que les couches renversantes étudiées par lui accusent, tout comme la vapeur de fer étudiée par MM. Duner et Halm, une retardation polaire. Or, c'est là une conclusion absolument erronée. Car, des 20 raies que M. Adams a étudiées, il n’y en à que 3 (appartenant systématiquement aux vapeurs les plus lourdes) qui accusent une retar- dation polaire, tandis que toutes les 17 autres raies accusent vers les pôles, à partir d’une lati- tude de 60 à 75°, une très forte accélération. C'est ce qu'on voit tout de suite lorsque, convaincu que les moyennes de M. Adams n'ont aucune raison d'être, on compare et l’on étudie les 20 rotations différentes que les 20 raies font connaitre et dont pas une seule ne ressemble, même approximative- ment, à celle que M. Adams nous presse d'accepter: Ces 20 rotations sont, d’ailleurs, si grandement et surtout si systématiquement différentes qu'on ne saurait douter de leur réalité et de leur existence, par conséquent, en des niveaux différents. Comme beaucoup de ces rotations différentes appartien- nent à un même élément, il est donc incidem- ment prouvé de la sorte que les raies différentes d'un même élément peuvent naître en des niveaux différents. En ce cas, les mesures de M. Adams confirment icisystématiquement la règlesans excep-- tion que voici : Près de l'équateur, les raies diffé- rentes d’un même élément accusent des vitesses angulaires d'autant plus petites que leur longueur d'onde est plus grande. Près des pôles, c'est géné- Recherches sur la Rotation du Soleil (1891 3994. ; Astr. Nachr., — Abas : Astroph. Journ., nov. 1907. ralement tout le contraire : là, la raie à longueur d'onde la plus grande accuse toujours la plus grande vitesse. Ce renversement dans l'ordre des vitesses à l'équateur et aux latitudes très hautes est une autre règle que les mesures de M. Adams ont fait découvrir et qui me paraît pouvoir être expliquée de la manière suivante : Aux niveaux les plus profonds, ce sont les vapeurs les plus lourdes qui tournent avec la relardation polaire que leur donnent les nuages photosphériques. Mais aux niveaux plus élevés, où tournent les vapeurs plus légères, cette influence des nuages est moindre, et là c'est plutôt le frotte- ment sur l'atmosphère extérieure du Soleil qui influe sur la rotation. Mais ce frottement, déter- miné par la différence de vitesse, est près de l'équateur beaucoup moindre qu'aux latitudes de 60 à 70°. Il en résulte qu'à partir de ces latitudes, on voit la rotation de toutes les vapeurs légères ressembler toujours plus à la rotation beaucoup plus rapide de l'atmosphère du Soleil; de là, par conséquent, leur accélération polaire, et de là aussi cette particularité capitale que si, d'accord avec mon idée de l'augmentation de la vitesse angulaire avec la profondeur, les vapeurs les plus légères du fer et du titane marchent à l'équateur plus lentement que les vapeurs plus profondes, cet ordre est complètement renversé aux haules lati- tudes. Et c’est ainsi que la vapeur du zirconium très lourd, qui produit la raie 4.209 dans la profon- deur, marche à l'équateur le plus vite de toutes les vapeurs étudiées, mais est, à la latitude de 80°, à deux près, la plus paresseuse de toutes. Quoi qu'il en soit de l'explication que je viens d'esquisser et que j'ai déjà amplement élaborée en un Mémoire que j'espère publier bientôt, il est certain, en tout cas, que dans les couches renver- santes, il existe en chaque niveau une rotation différente el que ces rotations sont même tellement différentes qu'à la latitude de 80°, par exemple, on. voit le lanthane demander trente-deux jours pour faire le tour de l'axe, tandis qu'à cette même lati- tude le fer, plus élevé, ne demande que vingt-huit jours pour faire le même tour. Si cette rotation, que M. Adams à fait connaitre au mois de novembre 1907, est déjà énormément compliquée, M. Adams à fait, depuis lors, une découverte, qu'il a publiée au mois d'avril 1908 et qui démontre: que celle rotation est beaucoup plus complexe encore. C'est la découverte du fait que, d'accord avec ma théorie, il y a, au dehors-de toutes ces couches tournant à chaque latitude avec des vilesses angulaires différentes, une atmosphère d'hydrogène qui tourne à toutes les latitudes avec la même vitesse angulaire. Cette découverte à été corroborée, d’ailleurs, par les recherches de M. Hale A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES 199 sur les floccules d'hydrogène, qui, elles aussi, accusent à toutes les latitudes la même angulaire !. Cette découverte de MM. Adams et Hale vilesse doit nous convaincre que toutes ces éruptions for- midables qu'on suppose, et qu'on croit indiquées surtout par les protubérances incessantes dans l'atmosphère du Soleil, n'existent pas. Si elles existaient, la rotation du Soleil par couches super- posées tournant toutes différemment serait impos- sible, et il serait impossible surtout qu'au dehors des couches à accélération équatoriale énorme l'atmosphère d'hydrogène püt lourner avec une vilesse angulaire égale à toutes les latitudes. Si ces couches avaient déjà rejeté de tout temps des érup- tions formidables dans l'atmosphère qui les re- couvre, elles lui auraient bien communiqué quelque peu de leur accélération équatoriale énorme. Mais, comme cette atmosphère n'en pas la moindre trace, il est donc certain que les couches profondes à rotation fortement anormale ont eu toujours si peu de communication avec l’atmo- sphère qui les recouvre que, même après des années innombrables, elles n'ont pas encore réussi à changer quelque peu son allure. montre IV Demandons enfin à Zinvariabilité du spectre solaire un argument décisif. Ici encore, c'est l'application correcte du principe de Dôüppler-Fi- zeau qui nous donnera raison. Car ce principe veut que, là où ces éruptions formidables au- raient lieu, les raies du spectre nous les divul- guassent par des déplacements notables, Mais ces raies ne bougent jamais. S'il en était autrement, Rowland n'aurait pas pris la peine d'en photo- graphier 20.000, et les Tables où il les a toutes représentées, chacune avec sa longueur d'onde cal- culée jusqu'aux millièmes du dix-millionième d’un millimètre, n'auraient pas été acceptées comme un étalon d'ondes invariables. Mais, si les raies du spectre sont à ce point immuables, de par le prin- cipe de Dôüppler, cette immutabilité démontre que, quelle que soit l'opinion contraire des astronomes, il est certain que si, en désaccord avec tous les phénomènes étudiés en cet article, il y avait cepen- dant des éruptions solaires, leurs vitesses ne sauraient être qu'un petit nombre de fois plus grandes que celles de nos tempêtes terrestres et n'atteindraient jamais ces valeurs fantastiques, des milliers de fois plus grandes, qu'on y a toujours supposées. Tel est aussi l’avis de M. Newall, qui, après avoir examiné avec M. Hubrecht le spectre solaire durant 4 Anaws : Astroph. Journ., Avril 1908. HALE : /bid. tout l'été de 1906, arriva au résultat qu'en tout ce temps, qui a été cependant un temps de grande activité solaire, le spectre n'a jamais montré le moindre signe de mouvement”. Ce résultat, dit M. Newall, est difficile à concilier avec d'autres tend à éruptions que nous supposons demeurent toujours considérations, mais il prouver que les confinées dans les couches invisibles au-dessous des couches renversantes. Mais, si les éruptions solaires, après quarante ans d’un règne sans conteste dans l'atmosphère visible du Soleil, doivent être reléguées en des couches invisibles, elles sont, sinon déjà mortes, du moins sûrement regret- tons pas. Car, hormis le plaisir qu'elles ont tou- jours donné au publie et aux orateurs des confé- rences populaires, elles n'ont fait que du mal. Si elles n'avaient pas mis tant d’obscurité dans l'in- terprétation des phénomènes solaires les plus ordi- naires, peut-être, parmi ces phénomènes, y en a-t-il que les observations innombrables qu'on à faites depuis Kirchhoff auraient déjà expliqués. Il est temps, en tout cas, que cette obscurité dispa- raisse et que nous rejetions une hypothèse impos- sible pour arriver à une plus grande clarté. enterrées. Ne les \? Dès que l’on considère le Soleil débarrassé de ses éruptions, on le comprend beaucoup mieux. Car, si le Soleil est tranquille, on voit facilement que cette tranquillité a une cause, qui est la cause aussi de tous les autres phénomènes du Soleil. C'est ce que j'ai tâché de démontrer en mon dernier « Essai d'une explication du mécanisme de la périodicité dans le Soleil et les Étoiles rouges variables *». Dans cet Essai, il n’est plus question d’'éruptions radiales et le Soleil y est considéré comme telle- ment tranquille qu'il n’y a que la rotation différente de ses couches superposées qui y cause des cou- rants horizontaux. Celte tranquillité y estexpliquée comme résultant de ce qu'en accord avec le prin- cipe de l’équilibre mobile de van’t Hoff, il n'y à nulle part dans la masse solaire un endroit où quelque changement de la température puisse se produire et où puisse naître ainsi un courant Con- vectif. Tout refroidissement local doit y être em- pêché par la condensation de molécules évaporées, par la combinaison de molécules dissociées et par la décomposition de molécules endothermes as- sociées. Et tout réchauffement local y sera empêché de même par ces mêmes molécules fonctionnant en sens inverse. Il y a d'ailleurs, en outre, la con- 1 Newazz : Monthly Not., jan. 1907. 2 Verhand. d. Kon. Akad. v. Welensch. te Amsterdam jan. 1908. 500 A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES traction de la masse et probablement aussi la désin- tégration d’atomes radio-actifs qui empêcheront la température de diminuer et tendront à l'augmenter au contraire. Si c'est ce jeu isotherme des molé- cules qui cause la tranquillité du Soleil, il est pro- bable que les molécules endothermes, trop mé- connues jusqu'à présent, y jouent le premier rôle. M. Arrhenius les considère comme pouvant entre- tenir la chaleur solaire durant des milliards de siècles‘. Peut-être sont-ce surtout -elles, qui, à défaut d’'éruptions réchauffantes, rendent inces- samment à la nappe photosphérique la chaleur qu’elle perd sans relâche en lançant au dehors les rayons du soleil. Mais le jeu isotherme des molécules ne me semble pas seulement pouvoir expliquer la tran- quillité du Soleil; il explique en même temps aussi la plupart des phénomènes que le Soleil nous fait voir. Dans les protubérances, par exemple, nous voyons ce jeu empêcher tout changement de la température et maintenir ainsi l'atmosphère en repos. Si la radiation photosphérique restait tou- jours la même, ce jeu des molécules ne commen- cerait jamais. Mais, comme cette radiation esl sujette aux grands changements locaux que doivent causer les facules et les taches, c'est sur ces chan- gements incessants en plus et en moins qu'on voit aussitôt le jeu des molécules réagir. Ce jeu produit alors des protubérances, dont la luminescence colorée et la lumière blanche souvent alternantes résultent des processus respectivement chimiques et physiques qui y empêchent la température de changer. Si telles sont les protubérances, leurs vitesses même les plus extravagantes ne sont pas en désaccord avec la tranquillité solaire; car elles la raffermissent, au contraire, et elles prouvent que, dans l'atmosphère solaire entière, les molé- cules sont toujours sur le qui-vive pour empêcher que d’un changement de chaleur local naisse jamais quelque mouvement notable. L'étude plus détaillée de tous les phénomènes que le jeu isotherme des molécules paraît pouvoir expliquer pourra être trouvée dans mon Essai cité plus haut. Tous ces phénomènes ne peuvent être passés ici en revue, car cela demanderait trop de place. Il n’y à parmi eux que celui de la forma- tion et de la périodicité des taches que nous exa- minerons ; encore sera-ce brièvement. Ce phéno- mène important me paraît pouvoir être expliqué de la manière suivante : À une certaine distance du centre plane la vapeur photosphérique, qui, exposée à l'extérieur au refroidissement, produit sans changement de température les nuages photosphériques par con- ‘ Anruenius : Lehrb. d. Kosm. Physik, p. 163. densation. Ces nuages sont des averses, limitées en haut par le renouvellement continuel de la pluie que le refroidissement y fait toujours condenser de nouveau, et limitées en bas par l'évaporation incessante de la pluie en vertu du réchauffement intérieur. Tant que la chaleur que le nuage perd en haut est plus grande que celle que, dans le même temps, il recouvre en bas, le nuage deviendra plus épais; mais la vapeur photosphérique diminuera ;. il en résulte que cette vapeur sera bientôt épuisée dans la couche extérieure où, jusqu'à présent, les. averses se formaient. Cette couche étant épuisée, le nuage descendra dans une couche non pas épuisée encore, mais qui, épuisée plus tard, ne: saura empêcher le nuage de descendre toujours plus bas. Or, cette descente continuelle des nuages s'alour- dissant toujours, aux dépens de leur vapeur dimi- nuant sans cesse, ne saurait durer indéfiniment. Car, dans les couches où ces nuages s'enfoncent, la température augmente. Le moment viendra donc où, la chaleur perdue en haut et celle recouvrée en bas étant égales, les nuages, arrivés mainte- nant à leur plus grande épaisseur, resteront inva- riables au même niveau. Mais, en ce niveau, le pou- voir d'évaporer des averses incessantes n'a, à défaut de courants convectifs venant de l’intérieur, qu'une durée limitée. Et comme les nuages, solli- cités par leur poids, doivent descendre toujours, ils arriveront alors dans des couches plus chaudes, où ils perdront en bas plus de matière condensée que dans le même temps ils n’en peu- vent recouvrer en haut et où, par conséquent, ils diminueront de plus en plus et finalement dispa- raitront. Tandis que ces nuages disparaissent ainsi, la vapeur qui les avait formés apparait de nouveau. Et, comme cette vapeur ne peut se condenser aussi vite en haut qu'elle est produite en bas, elle remonte dans le Soleil pour reprendre son volume primitif. Mais, à la surface extérieure de cette vapeur photosphérique qui monte, le refroidisse- ment fera condenser aussitôt une photosphère nua- geuse nouvelle. Cette photosphère nouvelle, au commencement peu épaisse, ne sera pas unie. Car, en ses endroits les plus minces, la vapeur, qui la pousse en haut, produira des bulles bombées, qui, s'élevant au-dessus du niveau général, seront vues comme des facules. Ces bulles seront des facules précurseurs de taches si leur paroi est mince et si la poussée de bas en haut continue. Car alors ces bulles crèveront et produiront ces trous dans la nappe photosphérique que nous observons comme des taches. Tout à l’entour du trou obscur, l'ouver- ture restera toujours obstruée des débris éraillés de la bulle crevée, qui formeront alors la A. BRESTER — L'HYPOTHÈSE DES ÉRUPTIONS SOLAIRES JOI pénombre, qui nous montre son plus grand éclat près de son bord intérieur, parce que, du moins dans les taches nouvelles, elle est toujours convexe. Si telle est la formation des taches, mon Essai fait voir comment leur spectre, leur répartition, leur apparition successive aux différentes latitudes, leurs mouvements propres, leur tendance à former des groupes, leur visibilité plus grande dans l'hémi- sphère oriental, leur influence sur les phénomènes électriques dans notre propre atmosphère peuvent être expliqués. Mais nous n'avons pas besoin de cet Essai pour expliquer déjà ici leur périodicité. Car, si les taches se forment comme je viens de l'expliquer, il est clair qu'elles se formeront sur- tout et produiront leur maximum tant que la pho- tosphère nouvelle continuera à être poussée en haut par la vapeur, qui, dans la profondeur, sera régénérée par les nuages accumulés durant le minimum, précédent et que cette abondante forma- tion de taches ne cessera qu'au moment où cette vapeur régénérée discontinuera d’excéder celle qui se condense toujours à la surface. En ce moment, la photosphère nouvelle aura atteint sa plus grande hauteur, d'où elle recommencera alors à descendre, comme je l'ai expliqué plus haut. La photosphère descend et monte tour à tour. Lorsqu'elle plane à sa plus grande hauteur, c’est le refroidissement extérieur qui, en l’alourdissant et en effacant ses taches, la force à descendre et, lorsque le minimum étant près de finir, elle est arrivée à sa plus grande profondeur, c'est le réchauffement intérieur qui la force à remonter et à restaurer un maximum nouveau. Si celte explication de la formation des taches est juste, la photosphère met onze ans à faire une vibration complète et elle ne repose jamais, parce que l’intérieur du Soleil repose toujours. Cette explication pourrait être considérée comme tendant à prouver que, même dans les couches invi- sibles, qui sont devenues leur dernière retraite, les éruptions solaires ne sauraient exister plus longtemps. Mais cetle explication n'est qu'une hypothèse et, comme telle, elle n’a encore aucun pouvoir convaincant. Il en est de mème de toutes les autres explications plausibles, qui depuis vingt ans m'ont paru réussir dans ma théorie d'un soleil sans éruptions radiales. Mais, si cette réussite ne saurait prouver que ces éruptions n'existent pas, elle rend bien cependant leur existence moins pro- bable. Car c’est aux fruits qu'on connaît l'arbre et l'hypothèse des éruptions à toujours été éminem- ment stérile. Mais ce n'est pas avec de tels raisonnements. peut-être trompeurs, que je veux terminer cel article, où, pour démontrer l'impossibilité des érup- tions solaires, tant de faits convaincants ont élé énumérés. Revenons donc à ceux-ci et profitons, en outre, de l'occasion imprévue de pouvoir les renforcer par un fait nouveau, qui ne m'était pas encore connu en écrivant les pages précédentes. C'est le fait que vient de découvrir M. Fox, et qu'il a mentionné dans le numéro de septembre de l'Astrophysical Journal, que la rotation des protu- bérances du calcium ne montre, entre les latitudes de 20 à 35°, aucune retardation polaire évidente et ressemble beaucoup plus à la rotation normale de l'atmosphère hydrogénique du Soleil qu'à la rota- tion fortement anormale et beaucoup plus lente des couches plus profondes. La rotation normale de ces protubérances se comprend si ces protubé- rances sont, dans l'atmosphère à rotation normale du Soleil, des endroits qu'un processus chimique ou physique passager rend plus lumineux pour un temps; mais cette rotation serait inexplicable si ces protubérances étaient dues à des éruptions radiales. Car alors leurs vitesses angulaires ne seraient pas plus grandes, mais plus petites que celle des couches plus profondes, et elles accuse- raient la retardation polaire des couches qui auraient rejeté ces protubérances au dehors. C'est done sur un grand nombre de faits convain- cants que je me base lorsqu'en terminant cet article je constate que l'hypothèse des éruptions solaires doit être abandonnée. Elle durera encore quelque temps sans doute. Mais, puisque les faits nous ont fait voir que la Vérité est en marche, les jours du Dogme sont comptés. A. Brester Jz., Docteur ès sciences, 502 D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE Est-il besoin, au double point de vue social el humanitaire, de faire ressortir l'importance de celle étude ? Tout aveugle est, par le fait de son infirmité, incapable de se suffire à lui-même; il ne peut, en l'état actuel des choses, se livrer à un travail vrai- ment productif : il est donc un membre inutile de la communauté sociale. S'il n’a pas de patrimoine, et c’est le cas habituel, il devient vite à charge aux siens d'abord, à l'Etat ensuite, qui est mis dans l'obligation de l'assister personnellement, ainsi qu'un ou plusieurs membres de sa famille, dépour- vus de l'apport du chef ou forcés de se consacrer complètement aux soins que nécessite un individu privé de la vue. La situation morale et physique du malheureux aveugle est suffisamment émouvante pour qu'il soit oiseux de la dépeindre. Il y a donc un intérêt majeur, tant au point de vue de l'humanité qu’au point de vue du bon fonction- nement et de l'économie du régime social, à ce que soient prises et édictées toutes mesures capables de prévenir la cécité. L'Etat intervenant dépensera moins d'argent pour conserver la vue à un citoyen que pour l’entretenir et le pensionner lorsqu'il est devenu aveugle. Il aura, en outre, l'avantage de conserver un collabo- rateur actif, consommant et produisant. Magnus ne prouvait-il pas, il y a quelques années, que la Prusse économiserait 10 millions de francs par an si la prophylaxie dela seule ophtalmie puru- lente était réalisée! Aujourd'hui, l'attention des Pouvoirs publics se fixe de plus en plus sur les moyens de prévenir le développement des diverses maladies et sur les mesures générales propres à les combattre dès leur éclosion. Pourquoi l'hygiène oculaire, comprise dans le sens que je viens d'indiquer, n’occuperait- elle pas une large place dans les préoccupations actuelles? N'en est-elle pas digne, et les mesures capables de sauver un malade de la cécité le cèdent- elles en importance à celles qui ont pour but de combattre l'apparition de la fièvre typhoïde? La cécité ne supprime-t-elle pas un citoyen? Quand, en 1892 (Archives d'Ophtalmologie), j'étudiai les causes de la cécité sur les pensionnaires des Quinze-Vingts, je fus rapidement convaineu que la moitié des individus pensionnés par l'Etat, condamnés à la stérilité, auraient pu, avec des pré- cautions hygiéniques ou des soins appropriés, ne rien coûter à leurs concitoyens, se suffire à eux- mêmes, faire vivre leurs familles, rapporter à leur patrie. J'insiste encore une fois sur ce point que l’aveugle est plus qu'une non-valeur : il est une source de dépenses pour son pays; d'où ce grand principe qui doit être mis en relief, à savoir : qu'assister l’aveugle est bien, mais qu'empècher un être en pleine vie, en pleine jouissance, de perdre la vue, est encore mieux. Pour atteindre ce but, il faut connaître avec pré- cision les causes de la cécité, les cas dans lesquels elle aurait pu être évitée, les moyens efficaces de la prévenir. C'eüt été pour moi une grande joie et un beau titre de gloire que d'apporter ici tous les élé- ments nécessaires à la solution de ces divers pro- blèmes. Malheureusement, la tâche est plus lourde qu'elle ne parait au premier abord, et l'initiative privée est incapable de réussir là où l'intervention du Pouvoir central, avec tous les moyens dont elle dispose, aurait de la peine à aboutir. I. — CAUSES DE LA CÉCITÉ. Les enquêtes sur les causes de la cécité sont longues, minutieuses, onéreuses. Relever seulement le nombre exact des aveugles n'a pu être fait en France officiellement, malgré deux tentatives ré- centes (1876, 1883). Il est relativement aisé de recenser les aveugles qui ont fréquenté les cliniques et les hôpitaux, ceux qui sont inscrits au bureau de bienfaisance ou reçoivent des secours de l'Etat ou des Sociétés spéciales; mais presque tous les aveugles indépendants, doués de quelques res- sources, échappent aux recherches. L'aveugle décou- vert, il faut encore préciser les causes de sa cécité. Ce travail ne peut être fait que par un oculiste exercé, capable de poser un diagnostic rétrospectif, de ne pas considérer l’état de l'œil qu'il examine comme étant celui qui a déterminé la cécité, de chercher, par exemple, derrière une cataracte, le décollement de la rétine ou le glaucome, la cause première d'une atrophie des globes oculaires ou des leucomes de la cornée ; il faut une enquête sur les lieux qu'a habités l’aveugle au début de sa ma- ladie oculaire, sur sa profession, ses unions, son genre de vie, sa constitution, ses maladies passées ou présentes, ses ascendants ou descendants, des recherches sur lhérédité, la consanguinité, ete. Il faudrait éviter de faire figurer dans les relevés plu- sieurs fois les mêmes individus. Nous ne posséderons de statistique parfaite en D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE France que lorsque chaque maire aura compté les aveugles de sa commune, aura fait remplir par la famille ou les ayants droit un questionnaire très complet, et par un ophtalmologiste une feuille d'examen bien ordonnée, le tout devant être dé- pouillé finalement par une Commission compétente. Il parait que, pour réaliser ces desiderata, une somme considérable serait nécessaire; il s'agirait de savoir si, en ne tenant compte que de la question économique, cetle dépense ne constituerait pas pour l'Etat un fructueux placement. Je suis tout disposé à le croire. En 1902, j'ai été chargé, par la Société francaise d'Ophtalmologie, d'établir un Rapport sur la cécité en France, ses causes et sa prévention. C'est le seul travail important et documenté qui ait paru sur la matière dans notre pays, qui, avec ses 36.905 aveugles reconnus par ledernierrecensement(1883), renferme une proportion de 8 aveugles par 10.000 habitants, alors que le Danemark, la Suède, l’Au- triche, la Suisse et la Hollande en contiennent infi- niment moins. La Hollande, entre autres, n'a qu'une proportion de 4,46 aveugles pour 10.000 habi- tants. Avec une prophylaxie bien entendue, on arri- verait à réduire considérablement le nombre des aveugles. En étudiant les statistiques que j'ai eues en mains, j'ai pu évaluer à 43 °/, le chiffre des cécités évitables, que Golescéano croit être de 39°/, et Truc de 34 °/,. En adoptant le chiffre de 35 °/, de cécités évitables dans l’état actuel de la science, je pense être d’un oplimisme modéré, et, si les deux fléaux du jour : la syphilis, cause de tant d'atro- phies du nerf optique, de névrites, d'irido-chorio- rélinites, et l'alcoolisme, père de l’artério-selérose, de bon nombre de glaucomes, d'affections du nerf optique, collaborateur actif de nombreuses dia- thèses nocives, venaient à disparaitre, la cécité diminuerait dans une proportion étonnante. Les diathèses, les maladies générales jouent un rôle néfaste dans la production de la cécité; aussi doivent-elles être avec acharnement attaquées ou habilement dirigées quand elles semblent devoir déterminer des désordres visuels. Je ne puis écrire ici un chapitre de Pathologie générale, mais je rappellerai qu'un rhumatisant, qu'un goutteux verra parfois fuir des déterminations oculaires, le plus souvent irido-choroïdiennes, sous l'influence d'un traitement et surtout d'un régime et d'une hygiène générale; qu'un brighlique dépisté de bonne heure, et chez lequel on évitera les intoxi- cations alimentaires, sera presque toujours à l'abri de la rélinite qui le guette si surviennent les phé- nomènes urémiques ; que le diabétique bien conduit est rarement atteint de troubles visuels, que les soins donnés à l’artério-scléreux le protégeront 503 parfois contre les attaques glaucomateuses, les rélinites hémorragiques. Que d’affections cornéennes seraient évitées si l'on soignait à temps la syphilis héréditaire, si les mesures prophylactiques destinées à empêcher les fièvres éruptives et infectieuses, spécialement Ja rougeole et la variole (isolement, désinfection, vaccin), étaient rigoureusement appliquées ; si les malheureux enfants scrofuleux étaient vite dirigés vers les stations maritimes ou au moins vers des sanatoria de campagne ; si les parents avaient souci de la vue de leurs enfants et les faisaient traiter à temps; si les médecins surveillaient les yeux des rubéoliques et des varioleux pendant le cours de la maladie et pendant la convalescence. L'ophtalmie purulente et la conjonctivite granu- leuse disparaïtraient à jamais si les mesures pro- phylactiques voulues étaient en vigueur. Il existe malheureusement encore quelques affec- tions oculaires incurables et d'autres au sujet des- quelles une étude prophylactique serait prématurée ou nécessiterait des développements qui n'intéres- seraient que les spécialistes. Je me bornerai done, pour faire œuvre vraiment utile, à n’étudier iei que la prévention des causes de cécités les plus fré- quentes et les plus sûrement évitables, soit : Les maladies congénitales ; La conjoncetivite purulente; La conjonctivite granuleuse; La myopie; Les traumatismes. Puis je parlerai des moyens généraux de pro- phylaxie de la cécité. IL. — MALADIES CONGÉNITALES. La prophylaxie des maladies congénitales de l'œil est fort difficile à réaliser, presque toutes les affec- tions étant d'origine héréditaire, comme il est facile de s'en convaincre par des enquêles bien faites, Si les chiffres de nos statistiques n'accusent pas toujours l'hérédité, cela tient à la difficulté des recherches et à la négligence des observateurs. Les parents peuvent transmettre directement aux enfants les malformations dont ils sont eux- mêmes atteints, ou des malformations différentes. C'est ainsi qu'un père possédant une cataracte con- génitale peut procréer des enfants calaractés ou aveugles par buphtalmie, amblyopie, colobomes de l'iris et de la choroïde, etc. Il n'est pas néces- saire que l’ascendant ait lui-même une affection oculaire pour influer sur les yeux du descendant; il suffit qu'il lui transmette une tare, un stigmate de dégénérescence. La consanguinité par elle-même, vention de l'hérédité, me semble impuissante à sans l’inter- amener des lésions oculaires, comme je l’ai dé- montré dans un travail‘ auquel je renvoie ceux que la question peut intéresser. Elle ne crée aucun état morbide sans les matériaux que lui fournit l'hé- rédité. Certains hygiénistes ont cru que la réglemen- tation des mariages consanguins pourrait éviter la plupart des maladies congénitales des yeux. Je ne le pense pas. Il n’y a aucune raison pour interdire le mariage à deux consanguins dont les organes visuels sont sains et bien conformés et qui sont exempts de toute tare pathologique. Ne sait-on pas que, dans l'espèce animale, la consanguinité est recherchée, non dans le but d'amoindrir la race, mais bien de la perfectionner ? Les éleveurs lui doivent leurs plus beaux produits. Les lois qui interdisent les mariages consanguins sont donc moins rationnelles que celles qui inter- diraient les mariages entre gens atteints de tare pathologique. Au reste, quels moyens d'agir sur les unions illégitimes”? Comme conclusion, l'influence du médecin seule peut avoir quelque valeur pour la prévention des maladies congénitales des yeux. Il doit appeler l'attention des individus qui désirent s'unir et de leurs parents, ou des gens mariés lors de la nais- sance d'un premier enfant aveugle, sur les dangers de l'hérédité. Ce n’est pas par des lois, des règlements qu'on atteindra le but; c'est par une instruction de tout le monde sur l'influence néfaste de l’hérédité. III. — CoNJONCTIVITE PURULENTE. Nous possédons aujourd'hui des notions telle- ment précises sur les causes et la prophylaxie de la conjonctivite purulente des nouveau-nés qu'on peut s'étonner à juste raison des ravages que fait encore cette redoutable maladie, qui serait pour- tant aisément évitée par des précautions très simples. Quoique la conjonctivite purulente puisse être engendrée par des microbes tels que le strepto- coque, le pneumocoque, le bacille diphtérique, elle est due, dans la plupart des cas, au gonocoque. L'infection se produit, pendant l'accouchement, au moment du passage de la tête de l'enfant, lorsque les paupières ou la conjonetive se trouvent en contact avec les sécrétions nocives de la mère; elle peut encore se faire la tête de l'enfant étant dans l'utérus, mais à condition que les membranes soient rompues, les causes d'infection étant alors apportées par les instruments et le toucher. ! La consanguinité en Pathologie oculaire. Annales d'Oc., janv. 1892. D: A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE La contagion peut aussi se produire après la naissance, par contact direct des sécrétions pro- venant de la mère, d'un nourrisson contaminé, d'objets de pansement ou de toilette, par les mains souillées des gardes ou des sages-femmes. Pour éviter l'infection la plus fréquente, celle qui se fait pendant l'accouchement, il suffirait que le médecin fit disparaitre les sécrétions morbides de la mère, ou que, avant l'accouchement, il désin- fectât rigoureusement celle-ci par des lavages antiseptiques. Comme cela est quelquefois impraticable et qu'il peut rester des doutes sur la stérilisation des organes maternels, voici la méthode à employer : Aussitôt après la sortie de l’enfant, on essuiera doucement les paupières avec du coton hydrophile sec et non trempé dans une solution, car le liquide peut, en pénétrant dans les culs-de-sac, les ino- culer, alors qu'ils sont indemnes. Pour un motif analogue, on se gardera de laver les yeux de l'enfant avec l’eau du bain qu'il est d'usage de donner sitôt après la naissance. L'essuyage à sec terminé, on lavera les paupières et les culs-de-sac conjonctivaux avec une solution decyanure ou de bichlorure d’hydrargyre au 5/1.000, en ayant soin de se servir de coton hydrophile et non des éponges du bain ou de linges ayant touché le corps de l’enfant ou de la mère. L'enfant sorti du bain, on entr'ouvrira les pau- pières pour laisser tomber dans chaque œil une ou deux gouttes d'une solution de nitrate d'argent à 2°/,, au moyen d'un bâton de verre. Au bout de deux ou trois jours, il se produit un petit écou- lement catarrhal sans aucune gravité, qui ne tarde pas à disparaître. Ces instillations constituent la méthode de Crédé, la plus efficace de toutes les méthodes prophylactiques, puisqu'à la Maternité de Leipzig elle à fait tomber le chiffre des ophtalmies purulentes de 10,8 °/, à 1/2 °/,, et j'ajouterai la plus rationnelle, puisqu'elle produit une escarre des couches superficielles de l'épithélium et détruit les gonocoques qui ont déjà pénétré dans ces couches, et pas seulement ceux qui sont demeurés à la surface. On a essayé de remplacer le nitrate d'argent par d’autres substances, telles que l’iodoforme, le jus de citron, le biiodure d’hydrargyre, le protar- gol, ete., dont l'efficacité est contestable. Je ne les crois pas capables de réduire l’ophtalmie à deux cas sur 4.600 naissances comme l’a fait la méthode de Crédé (statistique de Crédé). La contagion après la naissance s'évitera en prévenant l'entourage de l'enfant du danger de cette contagion, en recommandant à la mère de ne pas contaminer ses mains par les sécrétions, en exigeant des gardes, sages-femmes, infirmières, la D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉE EN FRANCE plus grande propreté, le lavage des mains après chaque pansement ou chaque toilette du nouveau- né, qui doit posséder en propre ses objets de toi- lette et d'habillement, en proscrivant sévèrement l'usage des éponges, compresses, pinceaux, ete., en exigeant la destruction immédiate de tous objets contaminés. Dans les services hospitaliers, les enfants malades doivent être rigoureusement isolés des enfants sains,et, si cela est possible, des enfants déjà atteints, ce qui se réalise par le système des boxes d'une manière assez pratique ; l'asepsie la plus parfaite doit régner en maitresse, et l'on ne devra jamais employer, pour les cautérisations de la muqueuse, ni crayon de nitrate d'argent, ni pinceaux qu'une économie mal entendue peut faire servir à plusieurs sujets, mais bien des baguettes de verre aisément stérilisables, autour desquelles on enroule un peu de coton hydrophile. Parfois un seul œil est atteint; il est rare qu'on puisse préserver l'autre, qui est trop aisément con- tagionné par le pus provenant de son congénère ; mais on devra chercher à atteindre ce but en fai- sant des lavages préventifs de l'œil indemne, en le fermant avec un pansement occlusif, mais permet- tantnéanmoins la surveillance bi-quotidienne, et en exigeant que l’enfant soit couché sur le côté malade, afin que le pus ne coule pas vers l'œil sain. Quand la conjonctivite des nouveau-nés est déclarée, il est le plus souvent facile de l’enrayer par un traitement bien conduit, ou, tout au moins, d'éviter les accidents graves, à la condition que l’en- fant soit soigné dès le ou les premiers jours, aussi- tôt que possible. Or, les parents, les sages-femmes et, il faut l'avouer, souvent aussi les médecins, traitent la chose à la légère et ne se décident à avoir recours à des soins spéciaux que lorsque la cornée est déjà opaque ou perforée On ne se douterait jamais du nombre d’aveugles dus à la seule incurie des sages-femmes. Combien m'a-t-on amené d'enfants, à la Clinique des Quinze- Vingts, dont les cornées perforées baignaient dans le pus depuis quinze ou vingt jours, et combien de fois, sur mes reproches, la mère m'a-t-elle répondu: « Mais la sage-femme m'a affirmé que ce n'était rien. » Les parents, qui ont eux le droit d'être ignorants, attribuent souvent le mal à un « coup d'air », et le négligent comme insignifiant. Aussi s'est-on préoc- cupé d’avertir les intéressés de la gravité de la blennorrhée ou de leur indiquer le traitement d’ur- gence de cette maladie. Je ne crois pas à l'efficacité de cette dernière mesure, qui me semble au con- traire dangereuse, puisqu'elle peut engendrer une fausse sécurité et empêcher les parents de réclamer à temps des soins éclairés. 505 Je préfère la proposition adoptée le 12 mars 1885 par la Société d'Ophtalmologie de la Grande-Bre- tagne et de l'Irlande, qui recommandait l’impres- sion, dans tous les documents publiés par le bureau des naissances, de la note suivante : « Si les paupières sont rouges et enflées ou sont le siège d’une sécrétion quelques jours après la naissance, l'enfant doit être conduit à un médecin sans attendre un jour. La maladie est très dange- reuse; si elle n’est pas soignée à temps, elle peut faire perdre la vue des deux yeux. » Cette note est très claire et présente l'avantage d’'effrayer les parents auxquels ne sont pas suppo- sées des connaissances médicales. On a encore proposé d'indiquer aux sages-femmes le traitement de l'ophtalmie purulente. Si cette mesure était appliquée, on ne compterail plus les cataclysmes. Il faut, pour bien soigner une blen- norrhée, une grande habitude ; il faut savoir retourner les paupières, les écarter avec les rele- veurs pour explorer les cornées, appliquer des trai- tements variables suivant les cas; tout ceci ne peut être fait que par un médecin, et j'ajouterai par un médecin compétent. > Il serait désirable que tout praticien füt au cou- rant des soins à donner aux enfants contaminés et que de sérieuses interrogations fussent faites aux examens sur cette matière. Dans sa séance du 16 juillet 1901, l'Académie de Médecine a adopté les conclusions suivantes d’un Rapport de M. le Professeur Pinard, qui ont été transmises au Minis- tère de l'Intérieur : 1° Faire distribuer dans toutes les mairies avec l'acte de naissance une courte notice indiquant les causes, les symptômes et les dangers des ophtal- mies des nouveau-nés ; 2° Prendre des mesures pour que la déclaration immédiate des ophtalmies purulentes soit faite dans tous les cas et partout en France ; 3° Attacher un médecin ophtalmologiste à toutes les maisons d'accouchement, pour diriger le traite- ment curatif des ophtalmies purulentes et l’ensei- gner aux élèves-médecins et sages-femmes. Il suffirait, à mon avis, que toutes les sages- femmes fussent averties de la gravité de la maladie, mises au courant de la prophylaxie que j'ai indi- quée plus haut, tenues à la déclaration obligatoire de tous les cas d’ophtalmie purulente et contraintes de réclamer immédiatement les soins d'un méde- cin, pour atteindre le but qu'on se propose, à l’en- contre duquel on irait certainement si on les char- geait d'appliquer un traitement qui, simple, serait inefficace, compliqué, deviendrait, par le fait d'une application maladroile, aussi dangereux que la maladie elle-même. L'ophtalmie purulente des nouveau-nés est 506 contagieuse d'enfant à enfant et d'enfant à adulte. Les intéressés doivent être prévenus de cela et être instruits des mesures sur lesquelles j'ai insisté dans le but d'éviter la dissémination du mal. Le méde- cin lui-même n'est pas à l'abri de la contagion, qu'il peut aussi propager ; qu'il ne l’oublie pas et prenne soin de désinfecter ses mains et ses instruments avant et après les pansements. Un moyen de con- lagion assez fréquent est celui-ci : Quand on écarte un peu brusquement les paupières d'un malade, il peut arriver que quelques gouttes ou un jet de pus viennent atteindre l'œil du médecin ou de l’as- sistant. On a proposé, pour éviter cela, d'interpo- ser une lame de verre entre le visage du malade et celui de l'opérateur ou bien d'employer de grosses lunettes; mais je crois qu'en détournant un peu la tête et surtout en écartant doucement les pau- pières, préalablement lavées et décollées, on peut se mettre facilement à l'abri de cet accident. En observant bien les précautions indiquées pour éviter la contagion et la dissémination de la blennorrhée des nouveau-nés, on n'aura pas à craindre la propagation de l’ophtalmie purulente des adultes d'individu à individu, dans la pratique privée ou dans les services hospitaliers. IV. — CoNJONCTIVITE GRANULEUSE. La conjonctivite granuleuse est due à une infec- tion provenant d'un œil atteint, surtout lorsque cet œil sécrète beaucoup; le danger de contagion est donc d'autant plus grand que la sécrétion est plus abondante, d'où la nécessité, pour éviter le transport, de réduire le catarrhe par les moyens appropriés, d'exiger de fréquents lavages des yeux malades et la destruction de tous les objets de toi- lette et de pansement qui auraient pu être souillés. Il faudra avertir les patients et leur entourage des dangers de la situation, que le médecin ne devra jamais compromettre en négligeant de se désin- fecter les mains après les soins à donner aux gra- nuleux ou en se servant pour des malades sains des pinceaux ou crayons qu'il aurait pu employer chez un granuleux. L'isolement du malade est à recommander, sur- tout lorsque celui-ci vit dans la promiscuilé des logements pauvres, des collèges, asiles, prisons, casernes, navires, ateliers, hôpitaux. L'absence d'hygiène, d'aération favorise le déve- loppement des épidémies de trachôme qui, pour- tant, ne peuvent se développer sans la présence de l'agent infectieux. Aussi les logements insalubres doivent-ils être réglementés et les établissements destinés à contenir des collectivités être bâtis sui- vant des règles hygiéniques bien définies. Dans les hôpitaux, les granuleux ne doivent pas être laissés D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE en contactavec les autres malades; ils doivent être recus à demeure et même pansés, lorsqu'ils vien- nent du dehors, dans des salles spéciales. Le per- sonnel infirmier doit être astreint à des précautions de parfaite asepsie, tant pour se protéger lui-même que pour éviter la dissémination du mal. Les sujets atteints de conjonctivite vulgaire sont plus exposés que d’autres à prendre la granulation, d'où la nécessité de soigner énergiquement tous ceux qui peuvent venir au contact des granuleux. Dans les collèges, asiles, prisons, casernes et navires, il faut des désinfections rigoureuses des locaux qui ont été habités par les granuleux, des vêtements qu'ils ont portés, du linge qui leur a servi, Ces mesures peuvent être utilement appliquées dans la pratique civile, d’où l'utilité de la déclara- tion obligatoire du trachôme. Dans les établisse- ments publics que je viens d'indiquer, une inspec- tion médicale des yeux devrait être faite mensuel- lement, et tout sujet suspect devrait être isolé, soigné et seulement rendu à la vie collective après parfaite guérison. Les lavabos communs sont fort dangereux; il faut mulliplier les lavabos individuels ou ne ser- vant qu'à un petit nombre d'individus; les éponges, savons, serviettes doivent être personnels. Les conscrits granuleux seront réformés, si le cas est grave, ou hospitalisés et soignés jusqu'à gué- rison, si le cas est léger, avant d'être recus dans les chambrées. Les soldats granuleux seront traités -de même et ne devront jamais regagner leurs foyers avant la stérilité complète de leur conjonctive. Si les précautions étaient bien prises, on n'assis- terait jamais à d’épouvantables épidémies, comme celle que j'ai pu observer, il y a quelques années, dans un vaste asile d'enfants situé en Bretagne, que je fus chargé d'inspecter et où je ne trouvai, ni un seul enfant, ni une religieuse, ni un infirmier indemne de trachôme ! Que ne suivons-nous, en France, l'exemple des Etats-Unis d'Amérique, qui refusent impitoyable- ment l'entrée de leurs territoires à tout individu suspect de granulation! A l'arrivée des paquebots, les yeux de tous les émigrants sont examinés. Tout sujet contaminé est tenu de se rembarquer. Notre pays offre, au contraire, une très large hospitulité aux granuleux. Je vois presque quotidiennement aux Quinze-Vingts des israélites russes refusés en d'autres régions, pour des granulations, venir réclamer mes soins. Ce sont autant de foyers dan- gereux créés pour nos nationaux. V. — Myorte. La myopie fait beaucoup d’aveugles, d’après mes statistiques : 224 cas sur 3.763 patients atleints de D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE 507 cécité binoculaire, 260 cas sur 2.200 frappés de cécité monoculaire. Ces chiffres sont fort élevés et dignes de fixer l'attention sur les mesures prophy- lactiques propres à empêcher l'éclosion de la myo- pie ou à en enrayer le développement progressif. Je n'ai nullement l'intention de répéter tout ce qui a été dit sur cette vaste question, si bien étudiée dans le livre de Fuchs, — auquel on a même repro- ché de s'être trop étendu sur elle dans un Mémoire qui avait pour but de rechercher les causes et la prévention de la cécité, — et traitée par moi dans mon livre sur l'Hygiène de l'œil. Je me bornerai à mettre en relief les points sail- lants concernant sa prévention. Si toutes les myopies étaient acquises, c'est- à-dire créées par les efforts que nécessite le travail de près, il serait relativement facile de les enrayer par une hygiène scolaire bien comprise; mais il ne faut pas oublier qu'il existe des myopies congéni- tales, qui se développent sans abus de l’accommoda- tion et de la convergence chez des illettrés et abou- tissent aux pires désastres. J'ai même été très frappé, en dépouillant mes statistiques, du grand nombre de campagnards, manuels devenus aveugles par suite d'accidents myopiques et principalement de décollements réliniens. Ceci donnerait raison à Magnus, qui croit que ce ne sont pas seulement l'écriture et la lecture qui disposent les myopes au décollement, mais encore le travail corporel excessif engendrant une hype- rémie veineuse qui se produit dans tout effort. La myopie congénitale ne pourrait être enrayée que par une sélection bien difficile à réaliser. Elle est due à l’hérédité dans la plupart des cas et ne disparaitrait que si disparaissaient les unions entre myopes et même que si certains myopes se vouaient au célibat. Notre état social ne se prête pas à ces solutions rigoureuses; mais il n’est pas mauvais que le public soit averti de l'hérédité de la myopie, ne serait-ce que pour pousser les parents entachés de ce vice à surveiller de bonne heure les yeux de leurs enfants. Existe-t-il une myopie acquise? Presaue tous les auteurs sont affirmatifs sur ce point et en attri- buent la genèse à un effort d'accommodation et de convergence. Bien nombreuses sont les statis- tiques qui montrent que l'enfant ne naît pas myope, le devient vers l’âge de dix ans, que la myopie pro- gresse pendant la période scolaire, est surtout marquée dans les classes élevées, chez les sujets qui préparent les écoles dont l'accès nécessite un grand labeur, et d'une manière générale chez les individus qui abusent du travail de près. Il faut pourtant faire une réserve et tenir compte d'un facteur auquel on n'a pas accordé assez d'impor- tance : l'influence de la croissance. La conforma- d'ouvriers tion de l'œil myope est héréditaire, mais l'hérédité ne s'aceuse qu'au moment de la croissance, quand l'organisme prend l'empreinte qu'il aura définiti- vement. L'œil s'allonge pendant la vie scolaire; d'autres organes ne se développent-ils pas parallèlement pendant la même période, qui ne sont pas soumis au même travail”? Quoi qu'il en soit de ces réserves, il semble que l'hygiène de l’écolier ait, au point de vue oculaire, une grande importance, même si on devait la consi- dérer comme surtout efficace contre les accidents de la myopie plutôt que contre le développement de la myopie. En passant, je tiens à signaler un point laissé un peu de côté, à savoir l'influence de l’état général sur la myopie el sur la tolérance de la myopie; d'où la nécessité de surveiller les veux des enfants après les maladies dont ils ont été atteints, spécia- lement les fièvres éruptives, souvent prétextes à l'éclosion ou au développement de la myopie. Je ne répéterai pas ici tout ce qui concerne l’uti- lité d'une rationnelle construction scolaire, d’un bon éclairage des bâtiments d'école, qui doivent être orientés à l’est, au nord-est ou au sud-est, être entourés de cours spacieuses ou situés sur de lar- ges artères, être éclairés à la lumière électrique réfléchie par des plafonds blancs. Je n'insisterai pas sur la nécessité d'un mobilier scolaire appro- prié à la taille de l'enfant, de livres bien lisibles, de méthodes particulières d'écriture, de la limitation des heures de classe et d'études, de récréations et de vacances suffisantes, de n'admettre à l'école que des enfants ayant dépassé 6 à 7 ans, etc. Tous ces points sont fort bien étudiés dans les traités d'Hygiène scolaire. J'aime mieux rappeler le rôle dévolu à l’oculiste, qui doit instruire les parents des enfants myopes, et les myopes adultes qui le consultent, des inconvé- nients et des dangers de la myopie, des causes qui peuvent l'aggraver, des conditions d'hygiène spé- ciale que doit observer le myope non seulement à l'école, mais dans la famille et pendant toute sa vie de travailleur. Il doit lutter contre ce préjugé qui consiste à déclarer que l'œil myope est le meilleur, et imposer le port des verres correcteurs malgré les répugnances qui lui sont manifestées. Il doit indi- quer quelles sontles professions permises et inter- dites et s'informer, quand il s’agit d'enfants, de celles qui doivent être embrassées. Presque tous mes correspondants ont insisté sur la nécessité de l'inspection des écoles et collèges deux fois par an par un oculiste. J'y ajouterai l'utilité de la remise aux parents d'une fiche vi- suelle indiquant l'état des yeux de l'enfant, le nu- méro des verres qu'il doit porter, voire même des 508 conseils sur l'hygiène qu'il doil observer. Cette mesure est, du reste, adoptée depuis longtemps au Japon! Les médecins spécialistes ne peuvent se rendre dans certaines écoles éloignées des grands centres. Pour combler cette lacune, Leprince a fait cons- truire une échelle optométrique scolaire que les instituteurs doivent faire lire aux élèves et qui a été employée cette année par tous les instituteurs du département du Cher. Dans un but analogue, Dianoux a fait adopter dans certains collèges où il a crédit une revue des élèves par les professeurs à la rentrée des classes et avant Pâques, revue pen- dant laquelle les élèves sont placés en face de lettres découpées dans un en-tête de journal etqui doivent être lues à une distance déterminée. Le concours de tous les éducateurs, dûment ins- truits par des avis spéciaux, doit être réclamé pour la surveillance de la vision, des attitudes de leurs élèves. VI. — TRAUMATISMES. Les traumatismes du globe oculaire amènent 6°/, de cécités binoculaires, et 20°/, de cécités mo- noculaires, chiffres qui seraient réduits dans une notable proportion si des mesures sérieuses concer- nant leur prévention étaient soigneusement ap- pliquées. Les accidents causent la cécité complète lorsqu'ils atteignent les deux yeux, comme cela arrive sou- vent dans les explosions, les coups de mine, les brülures par la chaux, ou lorsque la blessure d'un æil entraîne la perte du congénère par ophtalmie sympathique. Il faut distinguer les traumatismes profession- nels, auxquels sont exposés les ouvriers, de ceux qui sont dus au hasard ou à l’imprudence, tels que les accidents de chasse, ceux qui frappent les enfants. $ 1. — Traumatismes professionnels. Beaucoup de professions exposent à ces trauma- tismes : les serruriers, les mécaniciens ajusteurs recoivent souvent des paillettes de fer ou d'acier; les rémouleurs ou les ouvriers qui se servent de la meule à l’émeri, des éclats de meule, d’émeri, de métal; les meuniers, les tailleurs de pierre, les cantonniers, des fragments de pierre ou de fer pro- venant de l'outil; les mineurs sont exposés au coup de mine, les artificiers aux explosions, les chimis- tes aux explosions et aux brûlures par agents chimiques, les macons aux brûlures par la chaux, les mécaniciens de chemins de fer, les chauffeurs d'industrie aux éclats dus à la rupture des tubes à niveau. Les campagnards ne sont pas exempts des traumatismes oculaires. On sait la gravité des D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE blessures de la cornée dues aux épis de blé pendant la moisson, — alors que les voies lacrymales infec- tées agissent si fâcheusement pour provoquer des suppurations locales, — les désordres fréquents causés par les piqüres d'épine, par les coups de corne de vache. La prophylaxie varie suivant qu'il s'agit de dan- gers d’explosion ou de la projection des divers corps étrangers. Dans les lieux où une explosion est possible, des règlements sévères doivent indiquer les conditions prudentes d'éclairage, interdire de fumer, restrein- dre et ordonner les visites et manipulations des matières explosibles. Inutile de dire que l'usage de la lampe des mineurs doit être absolument imposé et que tout ouvrier coupable d'avoir ouvert sa lampe doit être sévèrement puni. Les tubes à niveau des chaudières, les syphons contenant de l'acide carbonique seront entourés d’un treillis mé- tallique suffisamment solide pour éviter, en cas d’explosion, les projections d'éclats de verre. Les ouvriers exposés aux traumatismes par Corps étrangers ne se livreront à leurs travaux qu'avecla protection de lunettes spéciales qu'on fabrique en verre épais, en fil d'archal, en treillis métalliques divers, voire même en mica. Les ouvriers sont tout à fait rebelles au port des lunettes, contre lequel ils invoquent deux arguments : leur incommodité et la dépense occasionnée par leur achat. Il faut re- connaitre que les lunettes se déforment, se rouil- lent, se couvrent de buée et gênent le travailleur ; les oculistes devraient fixer leur attention sur ces points et créer de bons types de lunettes de travail qui n'exceusent pas la répugnance de ceux qui doi- vent les porter. Il est facile de faire construire des lunettes à très bon marché que l’ouvrier le plus nécessiteux puisse se procurer; de plus, les patrons ont intérêt à fournir gratuitement ces agents de protection à des sujets qu'ils peuvent être appelés à pensionner. L'incurie est presque toujours en cause plus que les raisons invoquées ; en effet, des sociétés charita- bles ont fait des distributions gratuites de lunettes à des ouvriers qui ne les ont jamais portées ou se sont empressés de les vendre. Il serait nécessaire que les patrons fussent contraints, sous peine d'amende, à exiger le port des lunettes dans les usines etateliers ; que les compagnies d'assurance, dans leurs contrats, refusassent les bénéfices de la convention aux individus traumalisés faute de protection. Bourgeois (de Reims) conseille de ne pas em- ployer, dans les métiers dangereux pour les yeux, de sujets borgnes ou atteints de vices importants de réfraction. Dans les usines et ateliers devraient ètre affichés D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE des avis clairs et concis indiquant les dangers oculaires, la nécessité d'une extraction rapide et bien faite des corps étrangers, les premiers soins à donner aux blessés, surtout en cas de brûlure par les agents chimiques, et spécialement l'indication de l'endroit, hôpital ou clinique, où l’ouvrier pourra se rendre pour recevoir des soins médicaux éclairés. Les intéressés doivent aussi être avertis des dangers. de l'ophtalmie sympathique et de la nécessité d'une surveillance après toute blessure d'un œil. S$2. — Traumatismes dus au hasard ou à l’imprudence. Ceux du premier type sont faciles à imaginer et échappent presque toujours à la prévention ; pour- tant, avec quelque présence d'esprit, on peut en évi- ter quelques-uns; l’idée de baisser les glaces d’une voiture, au moment où un choc la menace, a sauvé quelques yeux. Les accidents de chasse, ceux qui surviennent dans les fêtes publiques, ceux qui atteignent les enfants en maintes circonstances, caractérisent ceux du second type. L'accident de chasse devient de plus en plus fré- quent depuis que se généralisent la pratique de ce sport et l'emploi d'armes perfectionnées à longue portée, tirant des poudres pyroxilées et du plomb durci si favorable aux ricochets. Les propriétaires de chasses ne sauraient trop recommander la prudence à leurs invités, répri- mander ceux qui dirigent le canon de leurs fusils vers leurs voisins ou suivent le gibier avant de presser la gâchette. Ils doivent exiger que les tireurs enlèvent les cartouches entre les battues et pendant les marches stériles. Un chasseur imprudent doit supporter, sans se plaindre, les plus dures lecons. Que dire d'un tireur qui, près des rabatteurs, tire un faisan bas ou un lapin? Dans une chasse bien organisée, un coup de corne spécial devrait avertir les chasseurs de la proximité des rabatteurs, si souvent victimes, et interdire le tir dans la zone dangereuse. On à proposé plusieurs modèles de lunettes pro- tectrices pour les chasseurs. Elles sont lourdes et encombrantes, et toutes celles que j'ai étudiées sont incapables de résister au choc d'un plomb animé d'une certaine vitesse. Les ricochets sont aussi dangereux que les coups en plein; aussi, même quand on tire devant ou derrière soi en dehors de la ligne, doit-on se méfier de la terre gelée, d'un tas de pierres, de certaines souches et même de certains arbres, tels que les chênes, qui renvoient le plomb si aisément sur un voisin. Les lendemains de fêtes publiques, spécialement REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 509 après le 1% juillet, la Clinique des Quinze-Vingts recoit la visite de nombreux individus blessés par des explosions de pélards, de pièces d'artifices. Ne peut-on appliquer sévèrement les règlements et prohiber la vente des agents dangereux? Que dire des confetti que l'on continue à autoriser, et qui, à mon su, ont causé la perte de trois yeux, deux par abcès de la cornée (érosion, dacryocystite), un par ophtalmie purulente? Les traumatismes oculaires sont très fréquents chez les enfants et diminueraient si la vente de cer- tains jouets dangereux était interdite, tels que flèches, sarbacanes, frondes, pétards, fusils à cap- sule, etc. Certains jeux devraient être réprimés dans les collèges, où les balles lancées violemment, les coups de poing directs amènent de graves accidents. À la maison, l’enfant doit être surveillé et n'avoir à sa disposition ni couteaux, ni ciseaux pointus, ni aiguilles à coudre ou à tricoter, si souvent coupables de la perte d’un œil, due aussi, dans nombre de cas, à des perforations par les plumes à écrire. $ 3. — Soins médicaux. Leur importance est extrême, en cas de trauma- tisme, et tous les médecins, spécialement les mé- decins d'usines et d'ateliers, devraient être à même de les donner, tout au moins être en état d'enlever, sans dégâts, les corps étrangers de la cornée. C’est aux médecins aussi à aviser les malades porteurs de vieilles affections lacrymales, de dacryocystites, des dangers de suppuration de l'œil auxquels ils seraient exposés, au moindre traumatisme, en con- servant ces maladies. C'est à eux d’avertir les blessés de la possibilité de l'ophtalmie sympa- thique, du rôle préventif de l’énucléation qui en empèche si souvent l’éclosion. C'est à eux surtout de bien soigner leur blessé, de faire aussitôt après l'accident une rigoureuse antisepsie, d'être très sobres d'opérations sur des yeux traumatisés, s'ils veulent éviter cette terrible éventualité à laquelle échappent presque toujours les patients qui ont recu des soins hâtifs et intelligents. VII. — MOYenNs GÉNÉRAUX DE PROPHYLAXIE. Si du particulier je m'élève au général, il ne me reste plus qu'à résumer les moyens qui peuvent prévenir la cécité et qu'on peut diviser en moyens sociaux, législatifs et médicaux. $ 1. — Moyens sociaux. Malgré le scepticisme de plusieurs, je crois à l'utilité des avis donnés au public, qui s'intéresse de plus en plus aux questions d'hygiène, et je pense que des circulaires, des conférences, des brochures ai 510 bien faites et ne mentionnant jamais un moyen quelconque de traitement, peuvent avoir la plus heureuse inlluence pour la prophylaxie des maladies oculaires. Je n'en veux comme preuves que l'agitation qui se répand de plus en plus à propos de l'alcoolisme, de la syphilis et de la tuberculose. Le D' Jacquet n'a-t-il pas fait acclamer la suppression des bouil- leurs de cru en Normandie, à Rouen, à la suite d'une habile conférence? J'irais même jusqu’à con- seiller des procédés de véritable réclame, des timbres affiches, des insertions sur les calendriers, dans les almanachs. Des notes dans le genre de celles-ci seraient-elles mal venues : « L’ophtalmie des nouveau-nés est très dangereuse ». « L'œil myope est un œil dangereux ». « La syphilis et l'alcool font perdre la vue. » On pourrail encore donner des notions d'hygiène oculaire aux instituteurs, dans les Écoles nor- males, en les chargeant de les transmettre sous forme concise aux enfants dont ils ont la charge. Les avertissements aux Pouvoirs publies sont rarement efficaces, mais les Sociétés d'Ophtalmo- logie ne s’honoreraient-elles pas en cherchant à se faire entendre? Éviter l'encombrement des logements, créer des habitations ouvrières saines, répandre la valeur des lois hygiéniques à la ville et à la campagne, con- struire des écoles et des ateliers bien aérés et bien éclairés, relever par tous les moyens le bien-être et l’état moral des classes pauvres, ne serait-ce pas concourir efficacement au but proposé? $ 2. — Moyens législatifs. Souvent infidèles sont les lois et règlements; tout dépend de la manière dont ils sont appliqués. Néan- moins, quelques-uns auraient dans l'espèce une réelle valeur : par exemple l'inscription sur le bul- letin de naissance d'un avis concernant l'ophtalmie purulente, l'obligation pour les sages-femmes de déclarer ladite ophtalmie et de conduire l'enfant à un médecin, des pénalités frappant les sages- femmes rebelles, la désinfection des locaux habités par des groupes de granuleux ; sans parler des lois visant la propagation des maladies contagieuses, de celles dirigées contre la syphilis, l'alcoolisme, et des règlements sur le port des lunettes de travail, points sur lesquels j'ai suffisamment insisté par ailleurs. Comme le réclame le D' Fouchard (du Mans), il faudrait poursuivre les guérisseurs de cam- pagne et tenir la main à ce que la loi Roussel fût strictement appliquée. Les Compagnies de chemins de fer ne devraient-elles pas être obligées d'avoir un ophtalmologiste allaché à leurs services médi- CAUX ? Que dire de l'utilité des poursuiles à diriger D' A. TROUSSEAU — LA PRÉVENTION DE LA CÉCITÉ EN FRANCE contre les divers charlatans qui soignent les ma- ladies des yeux, contre les pharmaciens qui dis- tribuent si aisément les collyres dans leurs offi- cines? $ 3. — Moyens médicaux. L'instruction ophtalmologique des médecins est notoirement insuffisante, et il n’est pas de jour où nous ne voyions survenir des cécités par la faute même du médecin traitant. Combien d'enfants privés de la vue à la suite d’ophtalmies purulentes mal soignées, combien de sujets aveugles par des glaucomes pris pour des iritis et abreuvés d’atro- pine! Il faut avoir le courage d’insister sur cette situation, à laquelle remédieraient un stage obliga- toire pour les étudiants dans un Service d'Ophtal- mologie, une instruction pratique à eux donnée et des interrogations aux examens sur les matières qui nous occupent. On embrasse aussi trop aisé- ment la spécialité ophtalmologique; tous les ocu- listes ne sont pas dignes de ce nom; n’y aurait-il pas quelques mesures de garantie à prendre qui permissent l'affirmation de la compétence? On a pu voir, par nos statistiques, que partout où les malades trouvent des soins médicaux à leur portée, la cécité tend à diminuer; il est aisé de con- clure de cette constatation qu'un des meilleurs moyens de prévention consiste dans la multipli- cation des hôpitaux ophtalmologiques. Dans toutes les grandes villes, il devrait exister une ou plusieurs cliniques ophtalmologiques recevant les malades de la ville et des départements limitrophes. Ces cli- niques seraient aidées, à la ville par des dispen- saires de quartier évitant aux malades de longues courses et ouvrant aux heures commodes pour les travailleurs, à la campagne par des consultations données dans les principaux chefs-lieux, dans les petites villes par un service spécial annexé aux hôpitaux existants. Ainsi serait créé un vaste réseau d'assistance qui donnerait de rapides secours aux malades et permettrait aux ophtalmologistes éloi- gnés des grands centres une pratique suffisante pour entretenir et améliorer leur instruelion au plus grand bénéfice des patients. Cette grande étude de la cécité n'est-elle pas digne de passionner les chercheurs, surtout qu'il est aisé d’entrevoir des solutions suffisantes? Ne voyons-nous pas, sous l'influence des progrès de la science, s'atténuer ou disparaitre des affections autrefois redoutables, telles que la conjonctivite granuleuse, l’ophtalmie sympathique? Grâce à une prophylaxie bien comprise, la France ne comple- rait plus bientôt qu'un petit nombre d’aveugles, et ce serait pour elle, parmi les nations, un beau titre de gloire. D' A. Trousseau, Médecin de la Clinique nalionale des Quinze-Vingts. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 511 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Messersehmitt (Professeur J. B.), Conservateur de l'Observatoire de Magnétisme terrestre et de la Sta- Uon sismologique de Münich.— Die Schwerebestim- mung an der Erdoberfiäche (LA DÉTERMINATION DE LA PESANTEUR À LA SURFACE DE LA TERRE). — 1,4vo0l. in-8, de 158 pages. (Prix : 6 fr. 25.) Vieweg und Sohn, éditeurs, Braunsehweiq, 1909. L'ouvrage dont le Professeur J. B. Messerschmitt vient d'enrichir Ja littérature géodésique allemande présente, sous une forme concise, un aperçu complet et très documenté des questions relatives à la Pesanteur. Ecrit par un savant dont la compétence est universeile- ment reconnue, il renferme l'exposé des plus récents travaux. On n'ignore pas combien, dans ces dernières années, le champ des investigations en la matière s’est élargi, par l'invention de méthodes et appareils nou- veaux pour l'étude de la pesanteur sur mer, pour la détermination des plus faibles variations de g ainsi que de la courbure du géoïde. Le livre de M. Messerschmitt vient donc à son heure ; le géodésien de profession le consultera pour orienter ses recherches, et il lui ser- vira d'introduction aux savants Mémoires de Helmert, Defforges, Sterneck, Hecker, Eôtvüs, Brillouin et autres, pour ne parler que des modernes. Le voyageur désireux de procéder à des observations de pesanteur, trop souvent bien peu au courant de l’ensemble de la question, étudiera avec soin cet ouvrage avant son départ, afin que sa compétence ne soit pas inférieure à sa bonne volonté. Les cinq premiers chapitres sont consacrés aux définitions, aux lois de la chute des corps, à l’attrac- tion universelle, à la théorie du pendule (simple et composé). L'auteur expose ensuite les méthodes basées sur l'emploi du pendule qui permettent les détermina- tions soit absolues, soit relatives de g; il étudie en détail les instruments correspondants. Pour les pen- dules relatifs, sa préférence va naturellement à l'appa- reil Sterneck ; nous aurions, si l’espace ne nous était mesuré, quelques réserves à faire pour défendre, comme il le mérite, le pendule Defforges employé au Service géographique de l'Armée. M. Messerschmitt consacre quelques pages à la nouvelle méthode hypso- barométrique dont M. Hecker a fait, dans l'Atlantique et le Pacifique, de si intéressantes applications. Les trois chapitres suivants traitent de la réduction au niveau de la mer des pesanteurs observées, de la pesanteur sur le sphéroïde normal et de la répartition de la pesanteur à la surface de la Terre, sujets qui, à notre avis, présentent des difficultés considérables d'exposition. Renfermer dans une vinglaine de pages un-exposé bref, mais clair et complet, de l'ensemble des théories dynamiques qui ont pris à l'heure actuelle un si grand développement en Géodésie, est une tâche ardue. Il n’exisle pas, croyons-nous, d'ouvrage français où cette synthèse résumée ait été tentée. En Alle- magne, la question est presque toujours envisagée au même point de vue, qui est celui d'Helmert dans son admirable ouvrage « Die physikalischen Theorieen der hôheren Geodäsie », traité qui, malheureusement, date déjà de vingt-cinq ans. Nous eussions aimé que M. Mes- serschmitt, en élargissant un peu son cadre, donnât au lecteur plus d'idées générales, qu'il fit entrevoir notam- ment l'extrême difficulté de la définition du géoïde, la multiplicité des définitions qui en ont été données. Certes, ses indications bibliographiques ne sauraient avoir la prétention de remplacer les bibliographies de ET INDEX Herschell, Wolf, Bürsch ou Gore. Il est néanmoins regrettable qu'elles ne fassent aucune mention de quelques-uns des travaux récents et originaux en la matière que nous devons à MM. Callandreau, Hamy, Tisserand, Brillouin et surtout Poincaré.Nous regrettons aussi l'absence d'un tableau numérique qui aurait fourni les intensités de la pesanteur aux principales stations de pendule du globe. M. Messerschmitt termine par quelques brèves no- tions sur les méthodes, récentes pour la plupart, qui permettent de déterminer les variations de la pesan- teur dans le temps et l’espace ou les variations de la courbure du géoïde. Les quelques critiques ci-dessus émises ne sauraient atténuer en rien tout le bien que nous pensons de son livre. Il est à désirer que nos géodésiens français com- prennent l'intérêt que présentent de pareilles « mono- graphies » sur des sujets spéciaux, et tentent d'en écrire à leur tour. A notre époque, en Géodésie, comme depuis longtemps dans tant d'autres sciences, la variété des questions devient telle que la spécialisation des connaissances s'impose de plus en plus. La Pesanteur, qui remplissait seulement un chapitre de Puissant ou de Francœur, devient l’objet d'un Traité élémentaire entier, comme celui qui nous occupe, dont le développe- ment pourrait sûrement, sinon aisément, fournir la matière de plusieurs volumes. L'-Colonel BourGEoïs, Chef de la Section de Géodésie au Service géographique de l'Armée. Piarron de Mondésir (L.), Zieutenant-Colonel du Génie, breveté, Professeur à l'Ecole supérieure de Guerre. — Fortification cuirassée; Paloque (Lieutenant-Colonel J.), Professeur à l Ecole supérieure de Guerre. — Artillerie de campagne; 2 volumes de l'Encyclopédie scientifique publiée sous la direction du D' Tourouse. (Chaque volume : 5 fr.) O0. Doin, éditeur, Paris, 1909. Ces deux volumes, très correctement écrits, sont, en quelque sorte, la paraphrase du Cours que les auteurs professent à l'Ecole supérieure de Guerre. Ils sont parfaitement rédigés pour préparer à la lecture des ouvrages plus techniques dont l'étude est néces- saire au spécialiste. 2° Sciences physiques Brunhes (Bernard), Directeur de l'Observatoire du Puy-de-Dôme.— La Dégradation de l'Energie. — 4 vol. de la Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix : 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1909. Depuis une douzaine d'années, M. Brunhes s'occupe du deuxième principe de la Thermodynamique et lutte de tout son pouvoir contre les idées fausses que bien des gens se font à ce sujet. Le livre dont nous rendons compte aujourd'hui est le résumé de ses idées, mises en langage ordinaire, sans aucun appareil mathé- matique; la lecture en est extrêmement atlachante pour ceux qui sont au courant de la question, car il abonde en aperçus nouveaux et souvent très originaux ; je ne sais si l'intelligence en sera facile pour ceux qui n'ont pas déjà une base solide d'instruction scienti- fique. C'est que l'auteur s’est souvent élevé dans les régions les plus délicates de la science, et lui-même s'en rend compte, car, à la fin de son livre, il souhaite voir un vulgarisateur faire pour le principe de la dé- gradation de l'énergie ce que Tyndall et Dumas ont 512 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX fait pour le principe de la conservation. Ce que M. Brunhes nous apporte, ce n’est pas un ouvrage de vulgarisation, c'est une discussion d'ensemble de la question, un examen de celle-ci sous toutes ses faces, où l’on sent l’homme qui a puisé aux sources mêmes, et qui nous donne le fruit de longues réflexions. C’est le premier échelon sur lequel les vulgarisateurs véri- tables feront bien de s'appuyer solidement pour répandre dans le grand public la bonne parole; c’est également un plan qui sera de la plus grande utilité à ceux qui voudront entrer à fond dans l'étude de la Thermodynamique. Le principe de la conservation de l'énergie n'a pas été toujours parfaitement compris, et, au moins dans le grand public, l’idée que l'énergie utilisable se con- serve est assez répandu. M. Brunhes expose, en passant en revue tous les exemples particuliers, que les énergies supérieures chimique, électrique, mécanique peuvent se transformer {oujours intégralement l’une en l'autre et en chaleur, mais que la chaleur est une énergie de déchet dont la transformation intégrale ne serait possible, d’après le principe de Carnot, que si l’on dis- posait d'une source au zéro absolu, ce qui est irréali- sable. D'ailleurs, les réactions des corps les uns sur les autres, indispensables pour la mise en œuvre d’une énergie quelconque, impliquent des phénomènes ana- logues au frottement, qui finissent toujours par dé- grader en chaleur les énergies supérieures, en imposant aux transformations un coefticient de rendement. Les transformations ultérieures de chaleur en énergie utile amènent une égalisation de température dont le terme final sera la mort de l'Univers. Ces idées sont bien courantes, mais M. Brunhes à su les étudier sous toutes leurs faces. Nous ne pouvons ici faire un résumé de ce livre, qui est lui-même un résumé de presque toute la Physique moderne ; indiquons seule- ment les excellents chapitres où il est traité de la radiation, du corps noir, de la pression de radiation, des chaleurs latentes, des phénomènes électriques, des tourbillons, de l'énergie intra-atomique, du principe du travail maximum de Berthelot. Ce dernier principe, M. Brunbhes le discute avec une haute impartialité et il montre comment les critiques qu'il a suggérées sont plutôt des querelles de mots que des critiques fonda- mentales. Mais l’auteur ne reste pas cantonné uniquement dansles phénomènes physiques et chimiques. Il donne un excellent exposé de la Thermodynamique du muscle, et étudie le rôle de l’industrie dans la dégradation finale de l'énergie solaire; la conclusion, assez inat- tendue, c'est que les phénomènes physiologiques ont essentiellement pour résultat de retarder cette dégra- dation, et que l'industrie humaine n’a pas d'autre but. Etre vivant et industrie humaine ne font donc qu'arré- ter un instant, en en tirant profit, la chute incessante du monde vers l'uniformité stérile. L'auteur en profite pour montrer que les lois devraient limiter le droit à l'abus de l'énergie solaire, et il cite comme exemple le déboisement, qui amène d'une manière indirecte à une véritable dilapidation de cette énergie. Voilà de haute théorie qui nous amène à de bonne pratique. La seconde partie du livre est beaucoup moins pré- cise. M. Brunhes nous fait suivre, en effet, l’évolution des idées philosophiques depuis Descartes jusqu’à Ost- wald et jusqu'à la théorie électromagnétique de la matière. Tant qu'il s’en tient aux idées des physiciens, ce qu'il dit est du plus haut intérêt, mais il lui arrive parfois de se laisser envahir par des doctrines de pure philosophie ; il est vrai qu'il en montre l’inanité, mais cela alourdit un peu cet excellent livre. Retenons, parmi les spéculations scientifiques expo- sées par M. Brunhes, celle de Boltzmann sur la genèse des mondes. La théorie cinétique nous fait concevoir l'égalité de température comme une égalité statistique, la force vive différente des diverses molécules pouvant amener des différences de températures pour des espaces infiniment petits. Dans cette étendue, il y aura alors, pendant un temps infiniment court, de l'énergie utilisable. Peut-être notre Univers est-il un accident infiniment petit d'un gaz d'étendue infinie, et ce que Boltzmann appelle une « ère éternelle », c’est-à-dire la durée d’un univers, est-elle un infiniment petit par rapport aux temps que l’on doit considérer pour l'étude des phénomènes de l'univers généralisé. Faut-il le suivre jusqu'au bout quand il dit que ce que nous appelons l'avenir est le temps que nous indique l'échéance fatale de la fin de l'énergie utilisable, et qu'alors pour l'être existant dans l'univers en formation, au moment où se fait positivement la perturbation infiniment petite dont la durée constitue une « ère éternelle », le passé et l'avenir s’intervertissent! Nous ne pouvons ici discuter cet évangile scienti- fique ; espérons que nous en aurons assez dit pour inciter nos lecteurs à lire ce livre, qui leur demandera peut-être un effort, mais un effort fructueux. ANDRÉ BRocA, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine Nicolardot (P.), Capitaine d'Artillerie, Chef du Labo- ratoire de Chimie de la Section technique. — Indus- trie des Métaux secondaires et des Terres rares. — 1 vol. in-18 de l'Encyclopediescientifique. (Prix :5 fr.) O. Doin, éditeur. Paris, 1909. Dans son /ndustrie des Métaux secondaires et des Terres rares, M. Nicolardot étudie le tungstène, le molybdène, le vanadium, le titane, l’uranium, le tho- rium, le cérium, le tantale, le niobium et l’osmium, c'est-à-dire les métaux qui constituent actuellement la partie vivante de la Chimie minérale et sur lesquels les efforts des chimistes se sont concentrés dans ces dernières années. Evidemment, le seul examen du côté par lequel ces éléments se rattachent à l’industrie ne permettait pas d'écrire un volume de 400 pages; mais l'auteur y a joint fort judicieusement une étude mono- graphique de chacun de ces métaux, qui contient à la fois leur histoire, celle de leurs minerais, de leurs gisements et de leurs traitements, l'exposé des pro- priétés physiques et chimiques, leur étude analytique qualitative et quantitative. Une innovation intéressante, . et que je voudrais voir se généraliser, c'est l'indication de la valeur marchande de tous ces produits. Toutes les fois qu'il s’agit d'application industrielle, le coût de la matière première est le premier facteur à envisager. Depuis longtemps, j'ai pris moi-même l'habitude, dans l’enseignement élémentaire de la Chimie, de donner le prix courant des métaux d’une application constante comme le fer, le cuivre, le plomb, l’étain, l'aluminium, car il est impossible de bien comprendre les applica- tions relatives des divers métaux si l’on ne met pas leur valeur marchande en présence de leurs propriétés physiques et chimiques. ; Ce qui frappe également dans l'ouvrage de M. Nico- lardot, c’est son originalité. J'ai lu avec béaucoup de plaisir ses études historiques; elles n’ont rien de com- mun avec ces historiques que les auteurs se trans- mettent d'un ouvrage à l’autre. M. Nicolardot a par- couru lui-même tous les Mémoires cités et il sait communiquer au lecteur l'intérêt et le plaisir qu'il y a trouvés. C'est d’ailleurs au cours de ces recherches historiques que l’auteur proposa de substituer, par un sentiment de justice, le nom de colombium à celui de niobium, par lequel on désigne généralement en Europe le compagnon du tantale, Les applications des métaux secondaires s'étendent surtout dans deux domaines, celui de la Métallurgie et celui de l’Eclairage par incandescence, soit par le gaz, soit par l'électricité. Dès maintenant, le tungstène, le molybdène, le vanadium interviennent régulièrement dans la préparation d’aciers spéciaux intéressants; le rôle de l'uranium, du titane et du tantale dans les aciers n’est pas encore bien établi, malgré les recherches importantes effectuées sur le titane par M. Rossi, un Américain ancien élève de notre Ecole centrale. Avec BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 513 le tantale quelques essais auraient été négatifs, mais je crois qu'il faut attendre des études plus étendues pour se prononcer. En tout cas, les belles recherches de la Société Siemens, exécutées par von Bolton, et qui constituent certainement l’un des plus beaux travaux de Chimie minérale de ces derniers temps, nous ont révélé toutes les propriétés du tantale inconnues jus- qu'ici, et ont montré en particulier dans ce métal carburé un corps doué d'une dureté remarquable, et surtout dans le métal lui-même une résistance à la rupture considérable, jointe à un allongement extraor- dinaire, autrement dit un métal qui possède les pro- priétés des aciers-nickel en les exagérant. L'auteur a montré et indiqué le rôle des oxydes de thorium, cérium, zirconium, yttrium, dans la fabrication des manchons; de l'osmium, du molybdène, du tung- stène, dans la fabrication des filaments pour lampe électrique; il donne tous les renseignements pratiques pour les diverses manipulations de ces substances. En résumé, je ne saurais trop recommander la lec- ture de l'ouvrage de M. Nicolardot ; les chimistes qui connaissent ces questions y retrouveront groupés les nombreux faits nouveaux répandus dans les divers périodiques de ces dernières années; ceux qui les ignorent pourront, en peu de temps, se mettre au cou- rant de cette partie toute neuve de la Chimie minérale; enfin, tous les esprits curieux de connaître les récents progrès de notre science verront la part prise par la Chimie dans certains progrès de la Métallurgie et de l'Eclairage. C. MATIGNON, Professeur au Collège de France. Nagel (Oscar), Docteur ès Sciences, Ingénieur-chi- miste conseil. — The Mechanical Appliances of the Chemical and Metallurgical Industries (Les DISPOSITIFS MÉCANIQUES DES INDUSTRIES CHIMIQUES ET MÉTALLURGIQUES). — À vol. in-8° de 307 pages avec 292 figures. (Prix : 10 fr.) Chez l'auteur, P.-0. Box 385, New-York, 1909. L'industrie chimique se trouve appelée à résoudre, à côté des questions purement chimiques, un grand nombre de problèmes qui ressortent à l’art de l’ingé- mieur. De grandes usines chimiques auraient intérêt à avoir un département de mécanique, et même de petites fabriques emploieraient (et emploient quel- quefois) avec avantage un ingénieur-mécanicien. L'édi- fication des bâtiments, la production de l'énergie, la construction des appareils où se passent les réactions, leur chauffage, etc., sont des questions de première importance pour l'industriel. Ces considérations ne sont pas nouvelles pour les chimistes, mais elles ressortent peut-être encore avec plus d’évidence de l'ouvrage que M. Nagel vient de consacrer aux dispositifs mécaniques des industries chimiques et métallurgiques. Après quelques considé- rations générales sur les joints et les soupapes, l’auteur étudie successivement la production de l'énergie (par la vapeur d’eau, le gaz ou l'essence, et l'électricité), puis le transport des solides, des liquides et des gaz, la mouture, le mélange, le chauffage et les fours, les appareils de séparation (filtres, presses, etc.), la purifi- cation des gaz, l’'évaporation, la distillation, la concen- tration et le séchage. A propos de chacune de ces opérations, M. Nagel décrit les types de machines les plus importants qui sont employés pour l’exécuter. On peut regretter que l’auteur, qui exerce à New-York, se soit borné presque exclusivement à citer des machines de construction américaine, ce qui diminue l'intérêt immédiat de son ouvrage pour les chimistes européens; mais, d'autre part, ceux-ci pourront trouver, dans cette revue d'appa- reils dont beaucoup de détails seront nouveaux pour eux, de suggestives indications pour leur pratique per- sonnelle. HUB: 3° Sciences naturelles Joly (Henry), Docteur ès Sciences, Chargé du Cours de Géologie de là Lorraine à l'Université de Nancy. — Le Jurassique inférieur et moyen de la bordure Nord-Est du bassin de Paris. l'hèse Soutenue devant la Faculté des Sciences de l'Université de Nancy. — 1n-4°, 468 pages, 44 figures, 13 photographies, 12 planches. Barbier, éditeur. Nancy, 1909. La région que s’est proposé d'étudier M. Joly est la région comprise entre le massif ardennais au nord et à l’est, les Vosges au sud. Elle a déjà donné lieu, tant au point de vue stratigra- phique qu'au point de vue paléontologique, à de nom- breux ouvrages : la liste bibliographique par laquelle débute ce Mémoire ne comporte pas moins de 568 réfé- rences. Dans l'historique qui fait suite à cette liste bibliographique, l’auteur n'étudie que les travaux principaux, qu'il classe sous deux rubriques : les ou- vrages de science pure et ceux de Géologie appliquée. Il arrive à cette conclusion qu'il était utile de faire un travail stratigraphique d'ensemble, un travail de Pa- léontologie descriptive et stratigraphique, et enfin, — ce que MM. Gosselet et Jacquot n'avaient fait qu'es- quisser, — un travail d'ensemble sur la tectonique actuelle de la région et l'histoire de cette tectonique. La première partie : Esquisse générale de la région étudiée et géographie physique, bien que placée au début de l'ouvrage, est, en réalité, une véritable syn- thèse dont la place, semble-t-il, eût été peut-être mieux indiquée à la suite de l'étude stratigraphique et tectonique; l'auteur aurait évité ainsi quelques redites et aurait mieux mis en évidence la part qui lui revient dans la distribution des facies et la tectonique de la région entre Ardennes et Vosges. Ce sera cer- tainement le chapitre qui sera le plus lu de tout le travail, car il intéressera à la fois les géologues, par son esquisse stratigraphique et sa tectonique som- maire où l’histoire tectonique du golfe du Luxembourg est admirablement présentée, et les géographes, par l'essai de Géographie physique générale où l’auteur montre les relations qui existent entre la géologie, l'orographie et l'hydrographie d’une région. M. Joly distingue du sud au nord (pl. I) les régions natu- relles suivantes : Les Vosges cristallines ; Les Vosges gréseuses; La région sous-vosqienne ou triasique, dont la limite occidentale seule intéressele travail que nous analysons ; La région liasique marneuse; La région liasique gréseuse, ou région des Grès du Luxembourg, au nord de la précédente; Puis, de l’est à l'ouest, la région des collines ba- Jociennes entre Nancy et Metz, qui établit en quelque sorte le passage avec : La région des Plateaux (Plateau calcaire de la Haye, plateau calcaire de Briey); La région de la Woëèvre au pied des côtes de Meuse. Chacune de ces régions est étudiée et caractérisée par une description sommaire et aussi par de magni- fiques similigravures, reproductions de photographies de l’auteur, qui n'ont qu'un défaut, à notre avis : c'est d'être disposées un peu sans ordre dans tout le corps de l'ouvrage; nous nous contenterons, par exemple, de citer une très belle vue de la région des Plateaux qui se trouve au milieu du chapitre du Lias moyen. Les géographes reprocheront peut-être aussi à M. Joly d'appeler terrasses les reliefs dus à la présence d'une couche dure, alors que le terme cuesla ou côle est entré déjà depuis longtemps dans le langage géogra- phique pour désigner cette structure en gradins; par contre, ils le féliciteront de ses coupes et de sa plan- che IT, où le réseau hydrographique de la Moselle nous est présenté d'une facon très heureuse par les profils longitudinaux des différents cours d’eau et la nature géologique de leurs lits. 514 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Dans la deuxième partie, intitulée Stratigraphie, l’auteur étudie successivement le Rhétien, l'Hettan- gien, le Sinémurien, le Charmouthien, le Toarcien, le Bajocien et le Bathonien. Pour chacun des étages, à côté de l'historique complet, se trouvent une description stratigraphique détaillée des coupes superficielles et des sondages profonds effectués dans la région, la liste des fossiles recueillis dans les différentes zones dis- tinguées et les différents faciès. Des tableaux résument à la fin de chaque chapitre la répartition des diverses zones. L'Aalenien est considéré, au moins dans ces tableaux, comme un étage distinct, malgré la lacune importante que l’on observe au milieu de l’Aalenien dans une grande partie de la Lorraine. Le gisement du minerai de fer sédimentaire, dont on connaît l'im- portance dans l'Est, est étudié par M. Joly d’une façon spéciale; l'auteur, après avoir passé en revue les di- verses théories émises au sujet de l’origine de ce mi- nerai, penche pour la formation autochtone : le fer aurait été amené par des émissions thermales, celles-ci l’auraient emprunté aux micas des roches anciennes et aux grès vosgiens. La troisième partie : T'ectonique, pour laquelle l’au- teur était particulièrement bien documenté, offre le plus grand intérêt à beaucoup de points de vue diffé- rents : la carte de l'extension des mers secondaires dans l’est du bassin de Paris (pl. IV), les coupes sché- matiques du détroit franco-germain depuis l’époque coblentzienne jusqu'à l'époque actuelle (pl. V), la carte de la surface de la pénéplaine ardennaise telle qu’elle semble être actuellement en profondeur (pl. VI), enfin le modelé actuel des couches jurassiques rapporté à l'une d'elles, le Rhétien (pl. VIT et VIII qui reprodui- sent à une plus grande échelle, et avec des complé- ments importants, une carte déjà publiée en 1906 par MM. Nicklès et Joly), sont des documents de haute valeur qui — selon le vœu exprimé modestement par l’auteur à la fin de cette partie — seront de quelque utilité pour prévoir, en particulier, la répartition du Houiïller et son allure dans les gisements de Meurthe- et-Moselle. L M. Joly nous montre ainsi que la région d’entre Ardennes et Vosges doit être envisagée comme un vaste géosynclinal, subdivisé par l’anticlinal du Hunds- rück en deux : au nord, le synclinal du Luxembourg ; au sud, le géosynclinal de Sarrebrück-Sarreguemines, présentant en son axe l’anticlinal houiller de Sarre- brück avec, au sud, le grand bassin de Sarreguemines qui s'étend largement jusqu'aux Vosges. Au Coblentzien, un premier ridement a amené l’émer- sion du sud de l’Ardenne et du Hundsrück. A l’époque houillère, les ridements coblentziens se répètent, le bas- sin de Sarrebrück s’affaisse, le synclinal du Luxembourg s’'ébauche et le Houiller se dépose au sud. A l’époque autunienne, après l’émersion partielle de l’anticlinal de Sarrebrück, l'effondrement du bassin de Trèves et le dépôt du Permien inférieur et moyen avec nom- breuses éruptions mélaphyriques dans le bassin de Trèves, de Lebach-Wadern-Me{z, de Sarreguemines et dans la fosse de Saint-Dié au nord des Vosges, de nombreux ridements hercyniens se produisent, puis le Permien supérieur. La pénéplaine, ardennaise ébau- chée depuis le Coblentzien, s'achève avant la grande transgression triasique. j Aux époques jurassique et crétacée, dépôt lent en transgression du sud au nord des terrains jurassiques et crétacés et plissements posthumes qui vont se con- tinuer pendant l’époque tertiaire. Tous ces phénomènes ont eu pour résultat l'allure en dômes et en cuvettes des terrains secondaires, la présence de failles de direction hercynienne, limitant des alignements hercyniens anticlinaux de dômes et synclinaux de cuvettes. La région d’entre Ardennes et Vosges comprend ainsi, au point de vue des accidents tectoniques, des terrains secondaires, orientés N.E.- S.W. et coupés par des accidents N.W.-S.E. : 1° La région s'étendant de l’Ardenne à la faille de Metzavec,comme traits saillants, le synelinal de Longwy et l’anticlinal Sierck-Briey; 20 La région s'étendant de la faille de Metz à la faille de Nomény, avec la région saillante de l’anticlinal principal lorrain : Remilly-Solgne-Eply-Atton-Martin- court, qui doit correspondre à une surélévation des terrains primaires; 3° La région s'étendant de la faille de Nomény à la faille de Mézerulles, bordée au nord par une ligne an- ticlinale passant par Vulmont et Abaucourt; 4° La région saliférienne des grandes cuvettes et dômes ; 5° La région sous-vosgienne triasique, avec la fosse permienne de Lunéville et Saint-Dié. Au point de vue paléontologique, M. H. Joly nous donne une liste critique des espèces du Rhétien et de l'Hettangien, d’après les travaux anciens et d’après ses études personnelles dans les collections de la Faculté des Sciences de Nancy, du Musée royal de Bruxelles et dans les collections particulières. Le Rhétien (50 espèces) possède à la fois une faune spéciale et des genres surtout liasiques, et doit se rat- tacher au Lias. L'Hettangien a fourni 372 espèces, dont 9 seulement spéciales à la zone inférieure à Psiloceras planorbis. L'influence du faciès sableux se manifeste par la ra- reté des Céphalopodes, l'abondance des Gastéropodes et des Lamellibranches de forme allongée. La faune, comme le montre le tableau de la répartition des espèces fossiles, se compose d’une série de faunes lo- cales en relation intime avec les faciès locaux et spé- ciaux et avec la tectonique; elle a un caractère littoral presque partout, sauf en Meurthe-et-Moselle, où elle semble indiquer, avec une augmentation du calcaire dans les dépôts, un approfondissement progressif de la mer. Il est difficile de résumer en quelques pages une œuvre aussi importante que celle que M. H. Joly vient de mener à bonne fin, et qu’il a présentée comme thèse de doctorat près la Faculté des Sciences de Nancy; les quelques critiques de détail que nous avons faites n’enlèvent rien à la valeur de cette thèse, qui fait grandement honneur à l’école géologique de Nancy, et qu'il sera indispensable de consulter pour la connaissance de la région jurassique d’entre Ardennes et Vosges. H. Douxaur, Professeur adjoint de Géologie et de Minéralogie à l'Université de Lille. 4° Sciences médicales Marie ((D' A.). — La Pellagre, avec une préface de M. le Professeur Lombroso.— 1 vol. in-16 de 250 pa- ges. (Prix : 4 {r.) Giard el Brière, éditeurs. Paris, 1909. ‘ La Pellagre est peu connue en France. Le public l'ignore, et peu nombreux sont les médecins qui s'y in- téressent. La raison en est bien simple : cette maladie, due à une intoxication par le maïs avarié, ne sévit que dans certains pays, comme l'Italie, la Roumanie, la Grèce, la Tunisie, l'Egypte, dans lesquels le maïs forme la base de l’alimentation des ouvriers et des paysans. M. Marie, dont le livre s'adresse aussi bien aux méde- cins qu'au grand public, nous fait connaître tout d'abord l'étendue de ce fléau, dont les ravages offrent, au point de vue social, une certaine analogie avec ceux de la tuberculose. {1 expose ensuite, dans une série de cha- pitres, les travaux qui ont abouti à cette conclusion que la Pellagre, constituée cliniquement par des lésions cutanées, par des désordres gastro-intestinaux et des troubles nerveux et psychiques, est due à une intoxi- cation chronique par le maïs avarié. Dans celui-ci, on trouve des microbes très variés; sous leur influence, il se forme, dans la graine de la plante, des poisons qui réalisent cliniquement chez l'homme, expérimentale- ment chez les animaux, les symptômes et les lésions de la Pellagre. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 15 A côté du traitement médical de cette affection, il y a encore, et surtout, la prophylaxie générale. L’humi- dité jouant le rôle principal dans la décomposition du mais, il est indiqué de modifier les conditions de la culture et du mode de conservation de cette céréale. D' R. Roue. 5° Sciences diverses Astier (P.), Député de l'Ardèche, Rapporteur du Projet de loi sur l'Enseignement technique, et Cuminal ([.), Conseiller général de l'Ardèche, Sous-Chef de Bureau à la Préfecture de la Seine. — L’Enseignement technique industriel et commer- cial en France et à l'Etranger. — 1 vol. in-8° de 500 pages. (Prix : 7 fr. 50.) Georges Roustan, édi- teur. Paris, 1909. S'il est une question passionnante au premier chef our un grand pays, c’est celle de la forme, du degré et de la nature de l'instruction à donner à ses enfants. Intimement liée au développement de l’activité natio- nale, cette question est, d'ailleurs, à l’ordre du jour dans tous les milieux, dans toutes les réunions et dans tous les Congrès qui, en France et aussi à l'Etranger, s'occupent de l’enseignement, universitaire ou tech- nique. De son côté, la littérature s'en est également emparée, et nombreux sont les maîtres et les écrivains qui en ont fait l'objet de leurs dissertations et de leurs écrits. Au nombre des ouvrages qui sont éclos sous la poussée de ces préoccupations, il convient de citer, en toute première ligne, le volume que viennent de publier MM. Astier et Cuminal. Collaboration des plus heureuses, car, si l'un des auteurs a eu le loisir de méditer dans le recueillement du cabinet sur les nom- breux documents et statistiques qu'il a eus à sa dispo- sition, l'autre, par son intelligence et sa pratique des affaires, par ses nombreux voyages d’études dans les divers pays, et aussi par sa situation au Parlement, a pu parler de choses vues et vécues au cours de sa bril- lante carrière industrielle et commerciale. En France, il est rare qu'un commerçant, qu'un agriculteur ou un industriel s’avise d'écrire sur des questions d'enseignement. Homme d'action avant tout, el uniquement occupé de son affaire, il prend ses col- laborateurs où il les trouve, les essaie et les garde quand ils lui donnent satisfaction, ou s'en sépare s'ils ne répondent pas à ce qu'il leur demande; il continue ses tentatives jusqu'au jour où il en rencontre qui ont les connaissances requises, ainsi que les qualités nécessaires pour s'adapter au milieu auquel ils sont destinés. Sans doute, à pratiquer souvent ses choix, il se rendra rapidement compte, s’il est observateur, des imperfections ou des lacunes qui, à son point de vue, existent dans l’enseignement des Ecoles qui fournis- sent habituellement ses collaborateurs Il fera même part à ses amis des réflexions que lui suggèrent ses succès et ses déboires, mais il se gardera bien d'en écrire. Il s’en rapportera entièrement à la Providence Ætat pour les changements ou les amélio- rations à introduire dans l’organisation et les pro- grammes de l'Enseignement. Or, l'Etat, en l'occurrence, est représenté par des fonctionnaires, en général fort distingués, ayant le souci des choses bien ordonnées et de l'uniformité, mais, pour la plupart, étrangers à tout sentiment des réalités. Presque tous, sinon tous, sont des littéraires, élevés dans nos grandes Ecoles ou dans nos Facultés, et n'ont jamais subi un contact quelconque avec les militants des carrières industrielles, agricoles ou com- merciales. Planant au-dessus des contingences de la vie journalière, ils n’en connaissent pas les besoins. Nous devons donc savoir gré à MM. Astier et Cuminal de nous avoir exposé dans leur volume, non seulement un résumé des observations recueillies en France et à l'Etranger, mais encore le fruit de leurs médiations et de leur expérience personnelle. Après nous avoir donné une définition de l'Enseigne- ment technique et nous avoir indiqué son but, les auteurs abordent la question brûlante de la crise de l'apprentissage, en signalent les causes ainsi que les conséquences sociales et économiques, et indiquent sommairement les moyers divers qui ont été proposés pour y remédier. ; Parmi ces moyens, il faut placer en première ligne l’organisation systématique et obligatoire de l’enseigne- ment professionnel. Ces prémisses posées, MM. Astier et Cuminal con- sacrent un chapitre à l'Enseignement technique à l'Etranger, et nous conduisent en Allemagne, en Angleterre, en Autriche-Hongrie, en Belgique, en Danemark, aux Etats-Unis, en Suisse, etc., où 1ls nous montrent les modalités diverses adoptées par ces Etats pour préparer la jeunesse aux multiples carrières qui se présentent à elle. Les auteurs nous donnent ensuite, parallèlement, un tableau exact de notre organisation. Ils passent successivement en revue les divers échelons de notre enseignement national, depuis nos hautes Ecoles dépendant du Ministère du Commerce jusqu'à l'Ecole primaire, montrent les efforts qui ont été tentés dans cette voie, sous tous les régimes, et insis- tent surtout sur les résultats obtenus depuis un quart de siècle. Tout en constatant que nos voisins immé- diats ont une organisation plus complète et mieux adaptée aux exigences des milieux, les auteurs ne manquent cependant pas de faire ressortir les progrès notables qui ont été réalisés dans notre pays. Ces progrès se manifestent surtout à Paris où, depuis trente ans, la Municipalité s’est attachée à multiplier les Ecoles professionnelles de garçons et de jeunes filles, ainsi que les Cours techniques et d’'ensei- gnement commercial. L'ouvrage se termine par deux chapitres, dont l’un traite de la nécessité de compléter l’organisation de l’enseignement technique, et dont l’autre renferme des conclusions. Ce dernier chapitre, dans lequel les auteurs résu- ment d’une manière heureuse le bilan de l’enseigne- ment technique de la plupart des nations étrangères, est extrèmement suggestif. Il nous montre, d’une part, les sacrifices énormes consentis par l'Allemagne, la Belgique, les Etats-Unis, etc., en faveur de l’instruc- tion professionnelle, et le nombre croissant des jeunes gens qui bénéficient de cette instruction; et, d'autre part, la progression indéniable des échanges interna- tionaux de ces pays. Alors que les transactions de ces mêmes Etats ont presque doublé en onze ans, celles de la France se sont accrues seulement de 63 °/,. On ne saurait indiquer d’une façon plus saisissante les bienfaits que retirent les peuples de la diffusion de l’enseignement technique, et trouver d'arguments plus convaincants en faveur d'une organisation métho- dique et judicieuse de cet enseignement sur tout le territoire. Signalons enfin, comme annexe au volume, le projet de loi sur l’enseignement technique industriel et com- mercial, dont l’un des auteurs a été le rapporteur à la Chambre, et différents autres documents et pro- grammes, empruntés à la Suisse, ainsi que des statis- tiques des Ecoles primaires supérieures de garçons et de filles. Bien conçu, bien écrit, richement documenté et rempli de réflexions suscitées par l'observation et l'expérience, l'ouvrage de MM. Astier et Cuminal rendra les plus grands services à tous ceux qui veulent se rendre compte de l'influence efficace, voire prépondé- rante, qu'exerce, sur la prospérité économique d’un pays, une puissante el judicieuse organisation de son instruction technique. A. HALLER, Membre de l'Institut, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 17 Mai 1909. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES.—M. C. Guichard applique la théorie des systèmes singuliers aux réseaux 0,de l'espace ordinaire associés à un réseau plan. — M. L. Rémy;détermine la valeur des invariants p et g° pour les surfaces du quatrième ordre à points doubles isolés. — M. F. Riesz présente ses recherches sur les suites de fonctions mesurables. — M. $S. Bernstein indique un nouveau mode de démonstration du prin- cipe de Dirichlet, qui a pour but de donner en même temps un moyen de développer la solution cherchée en séries de polynomes.—M. R. Garnier communique ses recherches sur les équations différentielles linéaires et les transcendantes uniformes du second ordre. 20 ScIENCES PHYSIQUES. — M. A. Dufour signale un exemple de phénomène de Zeeman longitudinal positif pur dans le spectre d'émission de la vapeur d'oxyde de fer; la polarisation circulaire des composantes du doublet paraît complète. — M. A. Rosenstiehl à construit un nouveau cercle chromatique formé par vingt-quatre couleurs qui, deux à deux, sont exacle- ment complémentaires et possèdent même intensité de coloration. Ce cercle donne par rotation des cou- leurs d’une beauté inimitable par les matières colo- rantes. — M. de Broglie à déterminé, par l'examen ultramicroscopique, la charge électrostatique e des particules en suspension dans les gaz; il trouve [la valeur 4,5 X 16 — 1 unité électrostatique. — MM. G. Sizes et G. Massol, en faisant vibrer un diapason uts, sont parvenus à enregistrer 16 nouveaux harmoniques inférieurs du son! fondamental. — M. L. Houllevigue a reconnu que les projections cathodiques sont cons- tituées d'éléments matériels très gros par rapport aux molécules. Leur diamètre, en les supposant sphéri- ques, serait voisin de 100 pu. — M. G. Baume a déter- miné le point de congélation des mélanges gazeux à de très basses températures. (CH°)*0 et HCI présen- tent deux maxima à 940 et — 102, correspondant aux deux composés (CH*)?0. HCI et (CH*)°0. 4 HCI. — M. F. Wallerant a constaté que l’azoxyanisol cons- titue un liquide cristallisé biaxe. — M. D. E. Tsaka- lotos montre] que la triéthylamine, la pyridine, la pipéridine et la nicotine forment des combinaisons moléculaires avec l’eau et qu'elles existent en solution aqueuse sous la forme d’aquobases. — MM. E. Baud et L. Gay ont reconnu l'existence, dans les solutions aqueuses d'ammoniac, de l'hydrate AzH°. H°0, en équi- libre avec l’eau et l’'ammoniac libres. — M. L. Vignon montre que le chromate de plomb précipité teint éga- lement bien la soie, la laine et le coton; à ce titre, il diffère complètement des colorants solubles. Il ne se fixe pas chimiquement sur les textiles, mais probable- ment par attraction moléculaire. — MM. R. Lespieau et Vavon ont préparé le dérivé dimagnésion du bipro- pargyle, qui, traité par CO*, fournit l'acide octadiine- dioique, CO*H.C : C.CH?.CH°.C : C.CO*?H, F. 190% — MM. Ch. Porcher et L. Panisset ont constaté la pré- sence de corps indologènes dans les bouillons de cul- ture microbiens; ceux-ci proviennent de la décompo- sition graduelle du tryptophane. — MM. G. Bertrand et F. Duchacek ont observé que le ferment bulgare fait fermenter le glucose, le mannose, le galactose, le lévulose et le lactose en donnant des acides lactiques droit et gauche et un peu d'acides formique, acétique et succinique. — M. H. Agulhon a reconnu que l'a- cide borique n'a qu'une faible action paralysante sur les diastases, sauf le cas de la lipodiastase du ricin. 3° SCIENCES FNATURELLES. — M. M. Boule évalue à 1.600 centimètres cubes la capacité cranienne de l'homme de la Chapelle-aux-Saints; les crânes du type de Néanderthal fparaissent avoir eu une capacité ana- logue. — M. J. Pellegrin a reconnu que la faune ichtyologique actuelle du Tchad offre des affinités très grandes avec cellejdes bassins environnants : Nil, Niger, Sénégal, et présente peu d'espèces qui lui soient propres. — M.E. L. Bouvier décrit un nouvel Ony- chophore australien ’du genre Peripatoïdes, qui pré- sente un curieux mélange de caractères primitifs et de caractères qui indiquent une longue évolution. — M. G. Nicolas à constaté que les limbes foliaires re- couverts de vaseline présentent, relativement aux limbes normaux, une énergie respiratoire plus faible, provenant de la difficulté de pénétration et de circu- lation des gaz. — M. E. Haug décrit les caractères stratigraphiques généraux des nappes des Alpes fran- çaises et suisses. — M. O. Mengel à étudié la tecto- nique du revers méridional des massifs du Canigou et du Puigmal. Il y trouve les indices de grands mouve- ments horizontaux post-éocènes. — M. L. Gentil a exploré la Chaouia au point de vue stratigraphique. Il y à reconnu des terrains primaires (Silurien, Dévo- nien, Permien), secondaires (Trias, Rhétien, Hettan- gien), tertiaires (Plaisancien). — M. G. Eisenmenger montre que le relief actuel du Sundgau est l’œuvre du Rhin pliocène qui a modifié sa direction d'écoulement et formé le coude de Bâle. Séance du 24 Mai 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Haag poursuit ses recherches sur la déformation infiniment petite des surfaces réglées. — M. G. Bratu donne la solution générale d’une équation mixte linéaire, d'ordre (n, m), qu'il rattache à la solution d’une équation de Fredholm. — M. C. Hansen a déterminé la somme des 2 premiers coefficients d'une série de Taylor. — M. L. Desaint indique un nouveau procédé de représentation géné- rale des fonctions par des fonctions compliquées à distance finie. — M. R. Birkeland étudie certaines singularités des équations différentielles. — M. J. Chazy présente ses recherches sur les équations diffé- rentielles du second ordre à points critiques fixes. — M. G. Bruel communique une carte de reconnaissance de la région du Chari; les travaux topographiques sont basés sur des positions déterminées par les mé- thodes de l’Astronomie de campagne. — M. Heit pré- sente un compas enregistreur, donnant, sur une feuille de papier perforée, les manœuvres les plus impor- tantes et la direction générale du navire. 2 SCIENCES NATURELLES. — M. H. A. Perkins donne une théorie des décharges discontinues dans les tubes de Geissler; il se figure la cathode comme une des armatures d'un condenseur, l'espace obscur de Crookes comme un diélectrique pas très isolant, et tout le reste du tube comme l’autre armature; le tube entier est représenté comme une capacité en dérivation avec une grande résistance. — M. E. H. Amagat, poursuivant ses recherches sur la pression intérieure des fluides, suppose que le fluide idéal hypothétique serait d'une subtilité infiniment grande; les parois des vases seraient perméables pour lui et on ne pourrait l'y comprimer. 11 formerait de petites atmosphères, de densité décroissante depuis la partie centrale, autour de chaque groupement moléculaire. — M. A. Leduc a déterminé les pressions internes de 18 gaz dans les conditions normales. Pour un gaz quelconque, à tem- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 517 pérature constante, la pression interne est en raison | inverse du carré du volume spécifique. — M. G. Ter Gazarian a déterminé la densité exacte de PH* par rapport à l'air, qui est de 1,1829; il en déduit pour poids atomique de P la valeur 30,906. — M. J. Sehnal a déterminé la solubilité du sulfate de plomb dans l'eau; elle est due à la décomposition de ce corps en acide sulfurique et hydrate d'oxyde de plomb, la solu- bilité de l'hydrate étant à peu près la même que celle du sulfate. — MM. E. de Stoecklin et E. Vulquin ont réalisé l'oxydation des polyalcools (glycol, glycérine, mannite, dulcite, sorbite) par un système peroxyda- sique renfermant de la quinhydrone et du sulfate ou du chlorure de fer. — MM. E. E. Blaise et A. Koehler ont cyclisé les acides :-cétoniques sous l'influence de l'éthylate de sodium sec et ont obtenu des acidyleyclo- pentanones; de même les éthers-sels des acides &-céto- niques se cyclisent en acidyleyclohexanones. Les éthers n-cétoniques n'ont pu être cyclisés. — MM. L. Bouveault et Levallois ont traité l’acide dihydrocam- phocénique par la méthode de Haller et Bauer dans l'espoir d'obtenir son produit de méthylation en &, l'acide dihydrofencholénique; il s’est produit un mé- lange de dihydrofencholénamide racémique avec un isomère. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Ranjard a traité 51 cas de surdité, due à des lésions chroniques non suppurées de l'appareil auditif, par la méthode des exercices acoustiques au moyen de la sirène à voyelles de M. Marage; il a obtenu dans 36 cas une amélioration totale ou suflisante pratiquement. — M. Devaux à reconnu que tout sommeil, même superficiel, est accompagné d’une rétention d'eau interstitielle par tout l'organisme. — M. Ch. Pérez a étudié la méta- morphose du système musculaire chez les Muscides. Les muscles exclusivement larvaires disparaissent entièrement, dès les premières heures de la nymphose, par phagocytose leucocytaire; les muscles exclusive- ment imaginaux s'édifient complètement, pendant la nymphose, aux dépens de myoblastes restés jusque-là embryonnaires. — M. B. Collin a observé l'existence de la conjugaison gemmiforme chez les Acinétiens; ce fait et d'autres indiquent une relation génétique entre Acinètes et Infusoires péritriches. — M. E. Bataillon a reconnu que la rotation brusque de l'œuf de ana fasca qui suit l'imprégnation par le spermatozoïde dans les conditions normales exige l’afflux de l’eau extérieure et la libération de l'œuf dans une atmo- sphère de liquide plus large. — M. Aug. Michel à étudié la formation d’une partie du corps par la sou- dure tardive de deux moitiés, libres sur leur longueur jusqu'à un stade assez avancé chez les Syllidiens. — M. M. Oxner décrit deux modes différents de régéné- ration qu'il a observés chez le Lineus ruber, var. rouge brunâtre. — M. P. A. Dangeard a observé les phéno- mènes de fécondation chez le Zygnema stellinum; cette espèce montre tous les passages entre l'hétéro- gamie, l'isogamie et sans doute aussi la parthéno- génèse. — M. Th. Dumont a constaté que la teigne de l'olivier (Prays oleæ) n'a pas trois générations com- plètes : elle en a deux ou trois suivant que les œufs d'été sont déposés sur les feuilles ou les fruits; quand les fleurs font défaut, on n'observe plus qu’une seule génération. — M. Em. Haug montre que ni les nappes des Préalpes, ni la nappe de la Brèche n’ont leurs racines sur le bord méridional des Alpes occidentales; aucune d'elles n’est une nappe à racines internes. — M. P. Lemoine a reconnu que toute la haute vallée de l'Yères (Seine-inférieure) est constituée, nom par de la craie blanche sénonienne, mais par de la craie mar- neuse turonienne. — M. E. A. Martel a observé dans le gouffre de Poudak (Hautes-Pyrénées), dont le fond est constitué par un bassin plein d’eau, un phénomène d’oscillation du niveau de l’eau, qui monte de 4# mètres en 15 minutes, reste étale pendant 3 minutes, puis redescend en #0 minutes, rapidement d’abord, puis lentement. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 18 Mai 1909. M. le Président annonce le décès de M. E. Besnier, membre de l'Académie. — M. E. Brissaud est élu membre dans la Section de Pathologie médicale. M. H. Huchard présente un Rapport sur un travail de MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild relatif à l'instabilité thyroïdienne et à sa forme paroxystique. Sous ce terme, les auteurs désignent une série de signes appartenant à la fois à l'hypo- et à l'hyperthy- roïdie, provenant d'un fonctionnement exagéré de l'organe, succédant à un fonctionnement insuffisant. Ils forment une transition entre le myxædème et le goitre exophtalmique. Le traitement thyroïdien est susceptible de faire disparaitre ces syndromes, mais il peut aussi les reproduire; aussi faut-il l'appliquer avec dextérité et à petites doses. — M. F. Widal présente un Rapport sur un travail de M. J. Courmont relatif à la lutte contre les maladies infectieuses en Suède et en Norvège. Dans ces pays, la mortalité générale et la mortalité infantile ont beaucoup baissé depuis vingt- cinq ans et la population s'est accrue dans de notables proportions. Il faut en chercher la cause : dans l’édu- cation hygiénique donnée à l’école, dans la déclaration et dans la désinfection obligatoires. — M. G. Dieu- lafoy décrit deux cas de septicémie gonococcique consécutifs à une blennorragie urètrale; en outre, les deux malades ont été pris l’un et l’autre de la fièvre typhoïde à la suite de leur septicémie gonococcique dont ils étaient guéris. Dans un cas, l'injection de vaccin gonococcique a donné de bons résultats. — M. E. Boinet signale un certain nombre de cas de méningite cérébro-spinale épidémique dans le sud- est de la France, où la maladie paraît endémique; le traitement sérothérapique a été très efficace. Séance du 25 Mai 1909. MM. D. Bruce (de Londres) et Mayor (de Genève) sont élus Correspondants étrangers dans la Division de Médecine. M. Tuffier lit une étude de physiologie pathologique des nouveaux agents physiques dans la thérapeutique du cancer. — M. de Lapersonne donne lecture d'un travail sur les gommes tuberculeuses de la sclérotique. — M. Jalaguier lit un travail sur les fissures congéni- tales de la face. — MM. Wickham et Degrais donnent lecture d’une étude sur l'influence des rayons du ra- dium sur certaines néoplasies du sein. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 15 Mai 1909. MM. M. Letulle et L. Lagane ont constaté que des liquides céphalo-rachidiens de méningite cérébro-spi- nale, mis à l’étuve sans aucune addition de sérum précipitant, ont précipité spontanément, — MM. L. Grimbert et M. Bagros montrent que, pour qu'il y ait destruction de nitrate par les bactéries dénitrifiantes indirectes, il faut : 4° qu'il y ait d'abord réduction du nitrate en nitrite ; 2° que le milieu contienne à la fois des substances amidées ou aminées et des aliments carbonés capables d'être attaqués par le microbe en donnant des acides. — M. Ch. Richet a extrait du suc vénéneux du Aura crepitaus une substance active qu'il nomme crépitine. C'est le plus toxique des poisons végétaux ; elle perd sa toxicité par ébullition et contient une hémo-agglutinine. — MM. H. Labbé et G. Vitry ont constaté que l’action la plus nette de l’ingestion de ferments lactiques est de diminuer l'assimilation azotée. — M. M. Parvu a reconnu que l'antigène échinococ- cique est soluble dans l'alcool à 85°, propriété qui permet de simplifier le séro-diagnostic des kystes hydatiques. — MM. A. Brissemoret et J. Mercier montrent qu'au printemps il n'est pas démontré que la juglone constitue un élément de défense du noyer, 518 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES car divers insectes peuvent très bien vivre sur ses feuilles. — MM. Salebert et Louis ont étudié, au point de vue cytologique, le liquide céphalo-rachidien dans Ja méningite eérébro-spinale; on y trouve des cellules endothéliales jouant un rôle phagocytaire. — M. Ch. Dopter à observé que le sérum antiméningococcique préparé par inoculation intra-veineuse de cultures vivantes du méningocoque est aussi, sinon plus antien- dotoxique que le sérum obtenu avec des injections d'extraits de méningocoques. — MM. J. Lhermitte el A. Guccione ont étudié les lésions des vaisseaux, des cylindre-axes et de la névroglie dans la sclérose en plaques; ce sont des lésions inflammatoires évidentes, à évolution sub-aiguë ou chronique. — M. V. Pachon présente un oscillomètre sphygmométrique à grande sensibilité et à sensibilité constante. — MM. H. Bus- quet et V. Pachon montrent que les différents sels de Ca, à des doses équimoléculaires à 0,025 gramme de CaCP°/,5, confèrent à la solution de NaCl à 6 0/,, le pou- voir d'entretenir, en circulation artificielle à travers le cœur de grenouille, le fonctionnement de l'appareil cardio-inhibiteur. — M. E. Maurel compare, au point de vue de la dose minima mortelle, la voie sous- cutanée à la voie veineuse; la dernière est toujours la plus toxique. — MM. A. Blanchetière et P. Lejonne signalent l'existence d’un phénomène de coagulation massive et de xanthochromie du liquide cérhalo- rachidien sans éléments cellulaires dans un cas de sarcome de la dure-mère, Séance du 22 Mai 1909. M. Ch. Richet a constaté que l'injection de crépi- tine chez les chiens anaphylactisés par ce poison fait apparaître chez eux un prurit intense, signe de la formation d’un nouveau poison chez l'animal sensibi- lisé, — MM. Aug. Lelièvre et E. Retterer ont étudié la structure du myocarde des Mammifères. Anasto- mosées à leurs extrémités, les cellules myocardiques sont unies latéralement par du tissu conjonctif ou interstitiel. Les tissus contractile et interstitiel forment un tout continu et ne diffèrent que par l’hyaloplasma contenu dans les mailles du réticulum. — M. J. Louis a employé avec succès la précipito-réaction de Vincent au diagnostic de la méningite cérébro-spinale. — M. M. Weinberg montre que, lorsqu'on a à faire un séro-diagnostic pour un malade suspect de kyste hyda- tique, il faut d’abord pratiquer l'expérience avec le sérum frais; si l'expérience échoue, il faut la recom- mencer avec de l’alexine de cobaye. — MM. L. Massol et M. Breton ont déterminé la toxicité intracérébrale de quelques sels métalliques chez le cobaye; elle décroît dans l'ordre suivant : CuSO', NiSO*, AuC}', AgAz0*. — M. P. Fauvel indique quelques précautions à observer pour l'étude de l’excrétion urique dans le régime sans purines. — M. A. Sézary a constaté que, chez un sujet qui a succombé après une maladie chro- nique et dont les surrénales sont en hyperépinéphrie, on peut, presque à coup sûr, affirmer la coexistence de lésions rénales. Mais la réciproque n’est pas tou- jours exacte. — Mile E. Lazarus signale l’inconstance du pouvoir protéolytique de la bactéridie de Davaine, signe de l'existence de différences individuelles, même chez les êtres les plus simples. — M. J. Nageotte considère comme des mitochondries les inclusions lipoïdes qui sont disséminées dans les divers éléments du tissu nerveux. — MM. G. Dubreuil et C1. Regaud montrent que les phénomènes congestifs de l'ovaire, même lorsqu'ils sont assez intenses pour inonder de sang un grand nombre de follicules mûrs et non mûrs et pour augmenter leur pression, ne suffisent pas pour en faire crever un seul, en l'absence du stimulus de nature encore inconnue que détermine l’accouplement. — Me A. Fichtenholz a constaté que l'hydroquinone retarde l'hydrolyse par l'émulsine de l’arbutine, de la salicine, de la gentiopicrine et de l'amygdaline, beau- coup pour la première, peu pour les trois autres, — M. EX. Maurel à comparé la voie gastrique avec la voie sous-cutanée au point de vue des doses minima mor- telles; la seconde est de beaucoup la plus toxique, surtout pour les glucosides. — MM. W. Mestrezat et M. Lisbonne ont reconnu que la salive sous-maxillaire du chat anesthésié au chloroforme ne renferme pas de sucre. Il en est probablement de même pour la salive normale. — MM. P. Harvier et L. Morel ont observé dans la moitié des cas, chez le chat, un groupe thy- mique de parathyroïdes accessoires. — M.J. Beauverie montre qu'on ne peut tirer des caractères des noyaux du mycélium une méthode de détermination de l'appa- reil végétatif du Merylius lacrymans. — M. J. Wolf a constaté que des doses infimes de ferrocyanure de fer colloïdal ou de sulfate de manganèse acquièrent des propriétés oxydantes spécifiques lorsque, après les avoir associées au citrate trisodique, on les fait agir sur tel ou tel diphénol. — MM. L. Lapicque et J. Petetin ont déterminé le fer du foie chez quelques oiseaux; il est généralement très minime, sauf chez le canard. — MM. Léopold-Lévi et H. de Rothschild décrivent un syndrome oculaire de l'instabilité thyroïdienne, caractérisé par : l’'exophtalmie, l'éclat brillant des yeux et le nystagmus dans l'hyperthyroïdie, le signe du sourcil et l'œdème palpébral dans l'hypothyroïdie. — MM. J. Camus et P. Pagniez ont mis en évidence le passage de l’'hémoglobine musculaire à travers le rein. — M. P. Nobécourt a déterminé la mortalité des lapins soumis à des injections de blanc d'œuf de poule, faites dans l'estomac ou le rectum à des inter- valles variables. Les injections quotidiennes et bimen- suelles ont été bien tolérées par les lapins adultes; les injections répétées tous les trois ou sept jours ont été plus nocives. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 4 Mai 1909. MM. J. Gautrelet et L. Thomas montrent que l'ablation des surrénales supprime la glycosurie adré- nalique, mais non la glycosurie phloridzique. — M. B. Auché a constaté que la cuisson détruit les bacilles tuberculeux introduits dans les pains d’un poids allant jusqu'à 2 kilog. — MM. J. Sabrazès, K.-E. Ecken- stein et L. Muratet décrivent un cas de septico- pyohémie tuberculeuse avec présence du bacille dans le sang circulant. — M.C. Sauvageau signale l'apparition de quelques Colpomenia sinuosa au voisinage des huïi- trières de Marennes, ce qui peut faire craindre l’en- vahissement de ces dernières à la saison prochaine. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du T7 Mai 1909. M. G. Claude présente uu appareil destiné à l'usage des laboratoires et établissements scientifiques et per- mettant de produire, suivant les besoins, l’air liquide, l'oxygène et l'azote gazeux ou liquides, le néon, l'hélium et les autres gaz rares de l'atmosphère. On retrouve dans cet appareil les caractéristiques essen- tielles des procédés dé l’auteur : liquéfaction de l'air par détente avec travail extérieur, séparation progres- sive des éléments de l'air pendant le cours de sa con- densation, grâce au dispositif dit par retour en arrière. La puissance exigée par cet appareil est de 20 chevaux environ, et sa puissance de production, comptée en air liquide, est de 6 à 7 litres à l'heure et, en oxygène gazeux pur, de 40 mètres cubes à l'heure. 11 peut, en outre, produire par heure 2 litres d'oxygène liquide ou d’'azofé liquide purs, 2 à 3 mètres cubes d’azote gazeux à 99,8 0/0, 1 litre de néon et d'hélium, ete. — M. À. Cotton : /temarques sur le phénomène de Zeeman. I. M. Cotton présente d'abord à la Société un tableau destiné au volume des Constantes, et où sont figurés en vraie grandeur, en unités C.G.S. et dans l'échelle des fréquences, les principaux types des changements magnétiques des raies d'émission ou d'absorption des gaz. Les champs employés dans plusieurs mesures ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 519 n'ont pas été déterminés avec assez de précision; c'est ainsi que des recherches intéressantes de Purvis perdent beaucoup de leur utilité par suite des valeurs inexactes indiquées pour les champs. Il conviendrait toujours, mème quand on détermine le champ direc- tement, de photographier dans les mêmes conditions des raies déjà mesurées en valeur absolue et d'indi- quer le résultat direct de ces mesures pour permettre un contrôle ou des corrections ultérieures. La valeur trouvée par Weiss et Cotton pour les raies bleues du zinc, qui s'écartait notablement de la valeur alors admise, à été confirmée, indépendamment de toute. théorie, par les mesures récentes ayant le même objet. D'autre part, diverses mesures récentes sur les rayons cathodiques ont montré que la valeur admise pour le rapport e/m était trop élevée. Classen vient de trouver efm—=1,11><10. La valeur qu'on calculerait d'après le phénomène de Zeeman pour le zinc, en appliquant la formule de Lorentz, est exactement double. Il faut désirer que ces nouvelles mesures sur les rayons cathodiques soient, à leur tour, contrôlées. En admet- tant les nombres actuels, on voit qu'il y à des rela- tions très simples entre le triplet pur d'écart normal de Lorentz et les changements des raies appartenant aux séries étudiées par Runge et Paschen. L'hélium, dont les raies (dans le spectre visible), étudiées par Lohmann, donnent des triplets purs d'écart moitié de celui indiqué plus haut pour le zinc, est donc un corps pour lequel la théorie de Lorentz paraît se vérifier complètement et numériquement : les diverses raies donnent toutes, en effet, le triplet pur d'écart normal. Les raies d'un même corps appartenant à une même série ont toujours donné le même phénomène, avec le même écart dans l'échelle des fréquences. Les raies homologues des métaux chimiquement voisins donnent aussi, en général, le même phénomène; mais Miller a signalé des exceptions à cette règle plus générale (raies des premières séries secondaires où séries dif- fuses). La plupart des raies non sériées donnent des triplets purs dont les écarts entre les composants varient dans de larges limites. Ces écarts semblent se grouper régulièrement non pas autour de l'écart nor- mal, mais autour de plusieurs valeurs privilégiées qu'on retrouve parfois dans des corps différents. Les raies non sériées donnant des changements plus com- pliqués que le triplet ne sont pas toujours en relation avec l'écart normal; les formules par lesquelles Ritz exprime les écarts s'appliquent, au contraire, fort bien dans tous les cas, en faisant intervenir des facteurs entiers très simples. II. M. Cotton passe ensuite aux travaux théoriques. Après quelques remarques sur la théorie de Lorentz et sur celle de Voigt, M. Cotton estime qu'actuellement la théorie proposée par Ritz, à la fin de son Mémoire : WMagnetische Atomfelder und Serien Spestra (Annalen, t. XXV, 1907, p. 675), et qu'il esquisse en prenant comme exemple le cas de la raie bleue du zinc 4680, est celle qui paraît la plus féconde. Ritz suppose que le champ magnétique détermine des mouvements de rotation et d'oscillation de l'atome, ou de parties de l'atome, celles notamment auxquelles Ritz rattache l’origine des séries de raies, Le sens du phénomène, dans l'observation longitudinale, est alors détérminé uniquement par le sens dans lequel s'ef- fectue la rotation (le signe des charges supposées n’in- tervenant pas); sa grandeur dépend de la vitesse angu- laire : celle-ci peut être, dans certains cas, en relation simple avec cette vitesse angulaire de rotation con- eH c stante w — 7’ avec laquelle tourne, autour des lignes de force d’un champ magnétique, dans le sens des courants d'Ampère, un électron Zbre’, Cette théorie a déjà conduit à des formules pour la place des com- posantes que l'expérience a vérifiées; d'autre part, les ——————_____]_]__]_]__ —— — ———— * M. Ritz considère comme possible la présence de tels électrons dans les sources utilisées, hypothèses fondamentales qu'elle admet sont appuyées par des phénomènes tout dilférents; elles se rattachent notamment à l’idée ancienne déjà, défendue par lord Kelvin et par plusieurs autres savants, de l'existence de mouvements tourbillonnaires dans le champ magné- tique. I. M. Cotton examine enfin les cas trouvés par MM. Jean Becquerel et Dufour, où des vibrations circu- laires du sens des courants d'Ampère ont leur fré- quence diminuée par l’action du champ. Pour expli- quer l'effet positif dans Ja théorie de Lorentz, on peut ou bien supposer qu'il y a des électrons positifs, ou bien que le champ réellement agissant est de sens inverse à celui de l'électro-aimant. On rencontre, dans l'une et l’autre voie, des difficultés. Il lui parait pos- sible d'expliquer l'effet Zeeman positif lui-même (et mème le cas des raies insensibles au champ) sans introduire de nouveaux électrons. Il se place au point de vue de Ritz et admet que le sens du phénomène longitudinal est déterminé par le sens du mouvement de rotation d’un atome ôu d'une partie de l'atome. Si l’on renonce à la conception d’un atome envisagé comme un solide rigide, rien n'empêche de supposer que différentes parties d’un atome{ou mieux, ici, d'une molécule) peuvent tourner dans le champ dans des sens opposés. En se bornant à dire cela, on ferait une hypothèse gratuite tout aussi audacieuse que celle qui consiste à supposer simplement des électrons positifs. Mais on peut trouver des raisons pour que de tels mouvements inverses se produisent et aussi pour que leur fréquence croisse proportionnellement au champ. L'auteur fait à ce sujet une expérience démonstrative devant la Société. Séance du 21 Mai 1909. M. P. Janet présente une Note sur l'unification des unités lumineuses, qui sera reproduite u-extenso dans la chronique de la Æevue. — M. Georges Claude présente les résultats d’études relatives aux appareils de sauvetage à oxygène liquide. L'appareil qu'il pré- sente est basé sur la vaporisation spontanée de l’oxy- gène liquide par la chaleur ambiante : la respiration de l'oxygène pur, conformément aux observations de M. d’Arsonval, n’entraine, en effet, aucune action nui- sible ou surexcitante sur l'organisme humain, en dépit de la légende célèbre créée par Jules Verne. Grâce à un isolement calorifuge convenable, l’'évaporation des 1.200 litres d'oxygène renfermés dans l'appareil se pro- longe pendant deux heures trente minutes et assure au sauveteur, pendant ce laps de temps, 500 litres d'oxygène à l'heure, soit 4 à 5 fois ce qui lui est néces- saire. Cette surabondance permet d'éviter la complica- tion des r'égénérateurs employés dans les appareils à oxygène comprimé. D'ailleurs, outre sa légèreté extrême (poids total de l'appareil chargé : 7 kilog. pour 1.200 litres d'oxygène emportés au lieu de 15 kil. pour 300 litres), l'appareil se distingue complètement de tous ceux qui existent aujourd'hui par l'absence voulue et absolue de tout mécanisme ou de tout organe délicat: détendeurs, injecteurs, soupapes, régénéra- teurs, etc. Le masque lui-même, appliqué sur la figure par l'intermédiaire d’un pneumatique élastique, s'ap- plique à l'inspiration de manière à empêcher toute rentrée de l'air extérieur et laisse, au contraire, lors de l'expiration, fuiter au dehors les gaz expirés. Chaque charge exige environ 2 litres d'oxygène liquide. M. G. Claude et son collaborateur M. Le Rouge ont imaginé, pour l'alimentation des postes de sauvetage et, de pré- férence, des stations centrales de sauvetage constituées avec cet appareil, une machine très simple qui, au moment du besoin, produit l'oxygène liquide un quart d'heure après sa mise en route. Elle est basée sur la liquéfaction de l'oxygène comprimé du commerce par de l’air détendu avec travail extérieur. — M. E. H. Amagat présente une Note sur /a pression intérieure des fluides. Des développements thermodynamiques, il tire plusieurs conclusions intéressantes. Tout se passe aux fortes pressions comme si les intervalles molécu- 520 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES laires étaient remplis d'un fluide parfait dont la pres- sion 7" s'opposerait constamment aux diminutions de volume du fluide. M. Amagat pense qu'il pourrait s'agir d'un éther compressible et parfaitement homogène remplissant alors tous les intervalles moléculaires. Aux moyennes et faibles pressions, M. Amagat propose d'admettre que le fluide intermoléculaire n'est plus homogène et se trouve plus particulièrement condensé en quelque sorte autour de chaque molécule en don- nant lieu à une sorte d'atmosphère dont la densité irait en décroissant à mesure qu'on s'écarte du centre de la molécule. Dans ces conditions d'hétérogénéité pour le fluide intermoléculaire, on conçoit aisément que, la notion géométrique de volume ne répondant plus à une réalité physique simple, comme dans le cas de l'homogénéité, la loi de Mariotte ne soit plus véri- fiée. Enfin, l'auteur montre que l'attraction réciproque des molécules peut être considérée comme s'exerçant en raison inverse de la quatrième puissance de la dis- tance des molécules. — M. A. Spangberg : Les Ca- libres-étalons à combinaisons « Johansson ». Le déve- loppement de la construction mécanique moderne exige de nos jours une précision de beaucoup supé- rieure à celle qui était demandée aux anciennes méthodes de travail : 4° parce que le jeu admis, selon leurs différentes vitesses, entre les pièces ajustées ensemble, ne doit être soumis qu'à des écarts très faibles; 2° parce que les machines et appareils ne sont plus exécutés isolément, mais en séries, ce qui oblige à porter la plus grande attention aux tolérances accor- dées dans la fabrication, pour que l’interchangeabilité des pièces soit garantie; les limites entre lesquelles ces tolérances peuvent varier doivent être fixées avec la plus grande précision. Pour assurer cette précision, M. C.-E. Johansson, d’Eskilstuna (Suède), à exécuté un Jeu de calibresétalons, ayant la forme de blocs paral- lélipipédiques, en acier au carbone, trempés de part en part, très durs, et combinés pour réaliser toutes les mesures de 4 à 200 millimètres, avec un intervalle de 1 demi-centième de millimètre entre deux mesures consécutives. Le jeu normal n° 2 se compose de 403 calibres, permettant de réaliser 40.000 mesures différentes avec une précision garantie de 1/1000 de millimètre; on obtient ces mesures soit avec Îles calibres uniques, soitavec des combinaisons de calibres. La division des calibres a été établie comme suit : Pre- mière série :1,01,1,02,..,1,48et1nm,49: deuxièmesérie: 0,50, 1,00, 1,50, …, 24 et 24m 50; troisième série : 25, 50, 75 et 100 millimètres; calibre extra : 4mm,005. Par exemple, pour obtenir les mesures : 4,13, on assemble les calibres 1,13 de la première série, et 3 de la deuxième série; 35,13, on assemble les calibres 1,13 de la première série, 9 de la deuxième série et 25 de la troisième série, etc. Dans un système à combinaisons tel que le système Johansson, il faut qu'en constituant une mesure déterminée par un assemblage de calibres, cette mesure soit exacte dans les limites de la tolé- rance admise pour sa valeur de mesure, c’est-à-dire que la somme des tolérances des pièces constituant l'assemblage soit égale à la tolérance du calibre unique. En d'autres termes, une mesure obtenue par combinai- sons de Calibres doit être tout aussi exacte que la même mesure représentée par un Calibre unique. Geci est obtenu en appliquant à tous les calibres composant un jeu une tolérance qui est proportionnelle à la gran- deur de -la mesure et appelée tolérance progressive. Les faces de mesurage des calibres-étalons Johansson sont d’une planitude telle qu’en appliquant les faces de deux calibres l’une contre l’autre 1 y a adhérence. L'auteur a soumis deux calibres assemblés à un effort de séparation de 55 kilog., et l’'adhérence s'est main- tenue. La surface de contact mesurait 3%€,17 : l'effort correspondait donc environ à 19 atmosphères. Pour permettre aussi les mesurages extérieurs, on dispose de becs d'une Loneeue Abe de celle des calibres; en les appliquant par leur face dressée sur les faces de mesure des calibres, on constitue par adhérence autant de calibres à fourche que le jeu permet de réa- liser de mesures. L’acier employé dans la fabrication des calibres a été soumis à un traitement spécial qui élimine tous les risques de changements de forme ou de volume qui affect-nt toujours ultérieurement les pièces trempéss, par suite d’influences élastiques et thermiques. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 2 Avril 4909. MM. P. Sabatier et A. Mailhe exposent une nouvelle méthode générale de préparation des amines alcoo- liques, qui consiste à soumettre les vapeurs d’alcools, en présence d’AzH® ou d’une amine, à l’action de divers oxydes irréductibles catalyseurs, tels que la thorine, l'oxyde chromique, l’oxyde titanique, à des tempéra- tures comprises entre 400 et 3800. Le cuivre réduit, vers 300°, effectue une synthèse analogue.— M.J.Sen- derens décrit les résultats qu’il a obtenus par l’action de certains catalyseurs sur les alcools et les acides. L'’alumine précipitée transforme les alcools méthy- lique, éthylique et propylique en éthers-oxydes, de 250 à 370°. La thorine convertit facilement les acides en acétones. — M. A. Wahl expose ses recherches dans la série des colorants indigoïdes. La phénylisoxazolone et ses dérivés de substitution se condensent facilement avec le chlorure d’isatine pour donner des indol-indigos bien cristallisés, solubles dans l'acide acétique en rouge violacé intense. D'autre part, l’'oxindol se condense avec les aldéhydes pour former des iso-indogénides, et avec l'isatine pour donner un nouvel isomère de l'in- digotine, le bis-indol-indigo-3:3, en aiguilles rouge- grenat. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 18 Février 1909. M. A. Mallock : Les meilleures conditions pour l'agrandissement photographique de petits objets solides. Lorsqu'on désire faire un agrandissement d'un objet qui n’est pas plat et dont toutes les parties ne peuvent, par conséquent, être au foyer, la question se pose de savoir quelle forme delentille doit être employée pour obtenir les meilleurs résultats. L'auteur montre que, si l'on désire une certaine finesse minimum de définition, par exemple la séparation de points distan!s de a,, alors, tout d'abord, la lentille employée doit être capable de résoudre les points situés à la moitié de cette distance, et ensuite, la plus grande distance b, de la surface au plan focal ne doit pas excéder a/2a, où « est l'ouverture angulaire de la lentille. Le pouvoir résolvant d'une lentille dépandant dewet de la longueur d'onde, il est montré que, si «= à, alors b = n°)/#4 environ. Le mieux donc, pour photographier une sur- face courbe ou non pl. , est d'employer une lentille qui résout la moitié ae ia moindre distance à déliuir sur l’image. S'il en est ainsi, tous les points qui ne sont pas à une distance moindre de «, l’un de l’autre, et pas supérieure à n° À/4 du foyer, apparaîtront séparément dans l’image. D'un autre côté, si best donné, la moindre distance qui sera résolue sur toute l’image est 2 / (23). — M. J. de Graaff Hunter : Un appareil pour mesurer le pouvoir définissant des objectifs. Le principe géné- ral de la méthode employée peut être éiabli comme suit : L'image du tranchant d’un couteau, formée par une lentille photographique, examinée au microscope ne paraît pas comme un bord défini; l’éclairement de la partie brillante du champ diminue graduellement jusqu'à l'obscurité complète en un point situé à l'inté- rieur de la ligne représentant idéalement l’image exacte de l’arête. Le but visé est de mesurer l'intensité actuelle de l'éclairement dans l'image à des distances différentes de chaque côté de cette ligne idéale. La variation de l’'éclairement avec la distance est naturellement très rapide et la distance totale sur laquelle il est nécessaire Fe u POP EP Se I IE nt , , ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 521 de prendre les mesures est, en général, extrêmement faible. Pour isoler la bande parallèle au bord du cou- teau, dont l’éclairement doit être mesuré, on place une fente étroite dans le plan focal de l'objectif du micro- scope, laquelle est ainsi agrandie par l’oculaire. Pour mesurer l'intensité de l’éclairement vu à travers cette fente, par exemple l'éclairement le long d’une ligne parallèle à l’image idéale du bord du couteau, on em- ploie un mécanisme spécial par lequel cette image est rendue alternante avec la lumière d’une source cons- tante, laquelle, cependant, peut varier dans une pro- portion mesurable, jusqu'à devenir d'une intensité égale à l'éclairement à mesurer. Cette égalité est jugée par l'absence de papillonnementlorsque les alternances se succèdent l’une à l’autre avec une fréquence appro- priée. — M. H. A. Miers et M'e F. Isaac ont étudié la ciistallisation spontanée de l'acide monochloracétique et de ses mélanges avec le naphtalène. L'acide mono- chloracétique existe sous trois modifications &, $ et y, dont les auteursont établi les courbes de supersolubilité séparant les régions métastable et labile correspon- dant aux trois modifications. Les températures aux- quelles les solutions recristallisent spontanément en cristaux «, 8 ou y concordent avec les températures auxquelles les solutions correspondantes passent de l'état métastable à l’état labile. Dans l'étude de la cris- tallisation des mélanges d'acide monochloracétique et de naphtalène, les auteurs n’ont pu mettre en évidence la formation de cristaux mixtes, annoncée par Cady. Ils ont tracé quatre courbes de solubilité: celle du naphtalène dans l'acide monochloracétique et celle des acides monochloracétiques «, 8 et dans le naphtalène; chacune de ces dernières rencontre la courbe de solu- bilité du naphtalène en un point eutectique. De même, quatre courbes de supersolubilité ont été déterminées pour cesmélanges, donnantles températures auxquelles ie naphtalène et les acides monochloracétiques cris- tallisent spontanément; ellesse coupent en (rois points hypertectiques. — MM. le comte de Berkeley, E. G.J. Hartley et J. Stephenson : Les pressions osmotiques des solutions de ferrocyanure de calcium. 11. Solutions faibles. Cette communication donne les pressions osmo- tiques d'équilibre observées entre 25 et 5 atmosphères, et aussi les conductivités électriques des solutions les plus diluées; les auteurs montrent que, pour mettre ies deux séries d'observations d'accord, il est néces- saire de supposer que la molécule saline s'associe lorsqu'elle est en solution. Des remarques similaires s'appliquent au ferrocyanure de strontium et ne sont pas incompatibles avec les données trouvées pour le sel de potassium. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 23 Avril 1909. MM. W. H. Bragg et J. L. Glasson : Sur le manque de symétrie présenté par les rayons X secondaires. Quand un rayon X primaire frappe un atome, un rayon X secondaire part du point d'impact. Les expériences décrites par les auteurs ont eu pour objet de comparer l'intensité de l'émission du rayon X secondaire, dans une direction faisant un angle de 45° avec le primaire, avec l'intensité de l'émission dans une direction faisant un angle de 135°. Dans le cas d'atomes de Pt, Sn ou Al, ou d’atomes légers tels que ceux qui sont contenus dans le celluloïd, la première était beaucoup plus grande que la seconde, quelquefois triple. Madsen à obtenu des inégalités analogues, mais encore plus élevées, dans le cas des rayons y. Les atomes de Cu ou Fe, qui donnent naissance à une radiation très douce, produisent une faible inégalité. Dans la théorie pulsatoire originale, le calcul montre qu'il ne devrait y avoir aucune iné- galité de la radiation X secondaire dans aucun cas. Ce nest que par l'hypothèse de rayons matériels qu'on pourrait expliquer ces faits. — M. C. A. Sadler : La trans{ormation des rayons X. Les métaux du groupe Cr-Ag émettent, sous l’action de faisceaux primaires convenables, des radiations homogènes dont le pou- voir de pénétration augmente avec le poids atomique du radiateur. L'auteur à étudié la radiation tertiaire excilée par ces faisceaux homogènes dans d’autres métaux. La radiation terliaire excitée dans chaque métal du groupe Cr-Ag est homogène, et son pouvoir de pénétration est celui qui est caractéristique de la radiation de la substance excitée par un faisceau pri- maire. Pour tout radiateur tertiaire, l'intensité du type homogène de radiations émis quand les radia- tions homogènes provenant des métaux du groupe Cr-Ag tombent successivement sur lui est inappréciable à moins que la radiation excitante ne soit plus péné- trante que celle qui est caractéristique du bte En définissant une quantité À de telle sorte que la fraction de l'énergie du faisceau secondaire, traversant normalement une couche mince àx du radiateur ter- taire, qui est transformée en radiation tertiaire soit égale à Aôx, on trouve que, tant que le pouvoir péné- trant du faisceau secondaire est moindre que celui qui est caractéristique du radiateur tertiaire, X est sensiblement égal à 0. Quand le faisceau secondaire devient plus pénétrant, Æ augmente rapidement jus- qu'à un maximum, puis décroit sur un intervalle con- sidérable, — le pouvoir pénétrant du faisceau secon- daire continuant à augmenter, — suivant une fonction linéaire de lionisation produite dans uue couche mince d'air par le faisceau secondaire. — M. Lyle: Théorie du générateur à courant alternatif. L'auteur examine le cas d'un alternateur monophasé sans fer. Le champ magnétique, supposé uniforme, est dû au courant dans une bobine fixe reliée avec une source de f. 6. m. constante, et l’armature est une bobine de fil tournant dans ce champ avec une vitesse angulaire constante. Dans ces circonstances, on peut suppo-er que l'inductance mutuelle entre les deux circuits varie suivant la Loi harmonique. L'auteur pose les équations différentielles qui déterminent les valeurs des deux courants et indique une méthode pour les résoudre. Les résultats prouvent que les harmoniques impairs apparaissent seuls dans l'expression pour le courant de l'armature et les harmoniques pairs seuls dans l'expression pour le courant du champ. La fréquence de l’ondulation induite superposée au courant excita- teur est donc le double de la fréquence fondamen- tale ; l’ondulation est asymétrique. SOCIÈTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 5 Mai 1909. M. E. C. C. Baly et M!°° K. A. Burke et E. G. Mars- den ont étudié le spectre d'absorption de l'acide nitrique et de quelques nitrates métalliques dissous dans l'alcool, l'eau et leurs mélanges. L'acide nitrique diffère des nitrates en ce qu'il ne présente pas de bande d'absorp- tion et possède une conductivité électrique très faible en solution alcoolique pure ; la bande d'absorption se développe et la conductibilité augmente considérable- ment par l'addition d’eau au solvant. — MM. M. O. Fors- ter et T. Thornley, en condensant la camphoquinone avec l’aniline et quelques-uns de ses dérivés, ont obtenu des aryliminocamphres doués d'un fort pouvoir rotatoire ; la réduction de ces composés donne des ami- nocamphres peu actifs. — M. A. W. Crossley et M'° N. Renouf montrent que l'hydrocarbure décrit par Harries et Antoni comme 1:1-diméthyl-A?:°— cyclo- hexadiène est un mélange des isomères 1:2et 1:3, — MM. H. T. Clarke et S. Smiles, en faisant réagir Na°S sur le chloracétal en solution alcoolique, ont obtenu du sulfure d’acétal qui, traité par un acide minéral, four- nit un sulfure cyclique, le diéthoxythioxane, dans lequel le S possède une faible réactivité et dont le pou- voir de réfraction est anormal. — MM. Al. Findlay et W. E.S. Turner et M!° G. E. Owen ont déterminé les constantes d'’affinité des acides phénylméthoxy-, 522 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES phényléthoxy- et phénylpropoxy-acétiques et æ-et &- hydroxy &-phénylpropioniques à 25° ;les valeurs de 100 x sont égales respectivement à 0,074, 0,053, 0,048, 0,019 et 0,004 — MM. W. J. Jones et K. J. P. Orton, en traitant l'acétanilide en solution acétique à 0,25 °/, par la poudre de blanchiment, ont obtenu un mélange d'o- et p-chloracétanilides contenant 25 °/, du premier. — MM. J. J. Sudborough et M. J. P. Davies ont déter- miné les constantes d'éthérification des acides acry- liques substilués; les groupes méthyle ont un effet retardateur. — M. F. D. Chattaway, en faisant réagir CI ou Br sur une hydrazine aromatique primaire en présence de KOH ou NaOH, a obtenu l'hydrocarbure correspondant avec dégagement d'Az. — MM. D. L. Chapman et P.S. Mac Mahon ont constaté que, lors- qu'un mélange humide de CI et contenant une quan- tité connue d'oxygène est exposé à une lumière d’inten- sité constante, la vitesse de formation de HCI est à peu près inversement proportionnelle à la quantité d'oxy- gène présente. — MM. F. G. Donnan et W. Schneider montrent que les solutions aqueuses pures d'acide vio- lurique ne sont pas incolores comme le prétend Hartley. — M. S.9.M. Aulda retiré du bois de sapin des Indes, provenant du Chloroxylon suretenix, de l’oxalate de Ca, une protéine, deux résines inertes, une huile fixe et un alcaloïde C**H*07A7z, lévogyre, F. 182°-183°, conte- pant 4 groupes méthoxyle, qu'il nomme chlorox ylonine. — MM. N. L. Gebhard et H. B. Thompson ont éludié lescomposés diazohydroxylaminés ; les groupes nitro-, bromo- et carbéthoxy- en posilion ortho en augmentent fortement la stabilité, tandis qu'il la diminuent beau- coup en ,méla ou en para. — M. J. P. Edgerton à obtenu l’anhydride camphorique avec un bon rende- ment en faisant régir l'acide chlorosulfonique sur l'acide camphorique. — M. A. W. Titherley et M':E. Worrall, en traitant la benzamide par PC}, ont obtenu, à froid sans solvant, de l’«-chlorobenzimide qui passe graduellement au benzonitrile, à chaud ou à froid avec solvant, du chlorure aœx-dichlorobenzylphosphamique qui perd HCI pour donner du chlorure «-chlorobenzy- lidène-phosphamique C“H°CCI: 4z.POCF. — M.J. A.N. Friend montre que, dans la titration du fer ferreux par le permanganate en présence d’HCI, la vitesse avec laquelle on ajoute le fer ferreux influe grandement sur le résultat de la titralion. — MM. G. G. Henderson et W. Cameron, en oxydant le terpinène par le chlorure de chromyle, ont obtenu, à côté d’un peu de cymène et d'une cétone C'H'*0, principalement de l’aldéhyde «-,- tolylpropylique et la p-tolyIméthylcétone, dérivant du cyméne. Le limonène donve aussi les mêmes produits. — MM. T. S. Patterson et H.H. Montgomerie ont étudié l'influence des solvants mixtes sur la rotation des composés opliquement actifs. — MM. R. H. Pickard et J. Yates ont résolu les acides A3-dihydro-2-naph- toïque, phénylallylacétique, «-phénylvalérique,B-phényl- a-éthylpropionique etf-phényl 4-méthylpropionique en leurs constituants actifs par cristallisation fractionnée de leurs sels de Z-menthylamine. — M. A1. Findlay et Mie E. M. Hickmans ont déterminé la vitesse de saponifica- tion d’un certain nombre d’acides propioniques subs- litués. L'introduction d'un groupe phényle accélère cette vitesse, excepté quand l’éther contient un groupe OH. L'introduction d'un groupe hydroxyle augmente la constante de saponification jusqu'à 12 fois sa valeur. — M.R. Threlfall présente un appareil pour effectuer des expériences à haute température sous une haute pression. Il à reconnu que la fluidité du graphite est fonction de la pression absolue à laquelle il est soumis ; à haute pression, le graphite se solidifie et transmet très imparfaitement la pression dans cet état. — MM. R. Robinson et J. L. Simonsen ont poursuivi leurs recherches sur la nature de la rhéine. — M.J.K. Wood et Mie E, A. Anderson, en faisant agir l'anhydride acétique sur un mélange de carbamide et d'acide malonique, ont obtenu de l’uréidomalonamide et de l'acide barbiturique. La première, traitée par NaOH, est transformée en barbiturate de soude. Les sels de l'acide barbiturique doivent avoir la constitution : CH.C0 MO.c/ NAzH.C0/ où M est un métal monovalent. — M. E. R. Marle décrit une méthode pour la détermination des carbo- nates en présence de nitrites par distillation avec le bichromate de K à reflux. CO* passe seul sans acide nitreux el avec des quantités négligeables d'oxyde nitrique. ACADEMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 4 Février 1909. M. M. Rubner donne lecture d'un Mémoire sur es bases d'une théorie de la croissance cellulaire. Les expériences dont il rend compte ont été faites essen- tiellement sur différentes espèces de leyures. Après avoir exposé les principes du métabolisme de la levure, il discute les relations entre la croissance etla matière alimentaire. L'absorption des aliments azotés dépend essentiellement de la tension dite alimentaire, c'est-à- dire de la proportion de l’azote de l'aliment à l'azote des cellules. Dans le cas d’une faible tension alimen- taire, la levure ne dépose que des substances de réserve sans donner lieu à une croissance. Le commencement d’une croissance est déterminé par un « seuil d'exci- tation », correspondant numériquement à une tension alimentaire donnée. La tension alimentaire la plus basse de ce seuil de croissance est telle que la provi- sion d'aliments suffit pour faire arriver à son terme définitif la subdivision de la cellule. Ni la durée néces- saire du stimulus, ni la quantité du dépôt alimentaire nécessaire pour amener la subdivision, ne peuvent encore être établies. L'auteur admet que la saturation complète de la levure en substances de réserve est nécessaire pour amorcer la croissance. Suivant les résultats de récents travaux de microscopie, la subdi- vision et la croissance dépendraient d’une relation donnée entre le noyau et le protoplasme, relation dite tension plasma-nucléaire. — M. Zimmermann rend compte de ses études sur /a résistance à la rupture de la barre droite à sections multiples. fait voir que les équations générales qu'il a indiquées auparavant pour représenter la barre rectiligne, disposée sur des sup- ports élastiques individuels et chargée par des forces longitudinales, fournit aussi, comme cas spéciaux, les conditions de rupture d'une barre rectiligne appuyée rigidement en deux points ou davantage, où, à l'inté- rieur ou à l'extérieur des supports, un changement de charge ou de section peut se produire. Les résultats, présentés sous la forme de déterminants à structure très régulière, permettent des conclusions générales quant aux relations qui existent entre la résistance à la rupture d’une barre et la résistance à la rupture de ses différentes parties. — M. K. Stumpf présente ses études de philosophie spéculative sur la loi causale universelle. Cette loi, qui n'est ni théorème aprioris- tique, ni postulat, ni définition simple, se déduit des uniformités observées de concert avec les lois de pro- babilité. En joignant ces dernières aux prémisses, on fait, de l'induction par énumération simple, un pro- cédé de démonstration concluant et pleinement valable. C'est ainsi qu'on établit un intermédiaire entre le point de vue aprioristique de Kant et l'extrême empi- risme de J. St. Mill. Seance du 18 Février 1909, M. J. Orth donne lecture d'un Mémoire relatif à Ja mélaplasie. En écartant un certain nombre de phéno- mènes pseudo-métaplastiques, l'auteur discute : 1° le passage des ligaments aux épithéliums, et inversement, qu'il écarte à son tour; 2 le passage de l’épithélium cylindrique à l’épithélium plan, qu'il confirme dans une certaine mesure; 3° le passage mutuel entre différentes formes de tissus ligamentaires, surtout celui des tissus >AZH, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 523 ligamentaires osseux et cartilagineux, qu'il confirme, en distinguant entre la métaplasie des tissus, c’est-à- dire la conversion simultanée des cellules et de la sub- stance intercellulaire, et la métaplasie cellulaire, c’est- à-dire la conversion exclusive des cellules. Les méta- plasies limitées aux substances fondamentales ne se confirment pas. L'auteur finit par comparer l'hérédité latente ontogénélique et phylogénétique et la réaction ontogénétique et phylogénétique. De même qu'une cellule germinative humaine ne retourne jamais à l'état de cellule primitive, il ne se présente jamais de réaction de la cellule métazoïque humaine, à l’état de cellule embryonale non-différenciée. —M. F. Schottky présente une note rédigée par lui-même, conjointe- ment avec M. Jung, à Hambourg, sur de nouveaux théorèmes relatifs aux fonctions du symétral et sur les fonctions d’Abel de la théorie de Riemann. En étudiant les différentes classes de fonctions d’Abel, appartenant aux équations algébriques fondamentales, les auteurs arrivent à un résultat qui complète la théorie de Rie- mann sur un point essentiel. — M. L. Kœnigsberger adresse un Mémoire sur les relations qui existent entre les équations linéaires générales et les équations binômes. De même que pour les équations al:ébriques, l’auteur tâche de transférer au domaine de l'Analyse, à l'aide de la théorie d'irréductibilité des équations dif- férentielles linéaires, les propositions développées par Abel, sur la forme des fonctions algébriques à éléments donnés, l'expressibilité rationnelle de chacune de leurs parties par des solutions de l’équalion algébrique appartenant comme coefficient à ses éléments, et l'im- possibilité d'une solution algébrique des équations générales d’un degré supérieur au quatrième. Séance du 4 Mars 1909. MM. E. Hagen el H. Rubens adressent un Mémoire sur Ja relation qui existe entre la température et le pouvoir d'émission des métaux. Suivant nos vues actuelles, les phénomènes optiques de la plupart des corps sont déterminés par des électrons oscillant autour des positions d'équilibre stable el des groupes d’atomes électriquement chargés. Dans le cas des métaux, les électrons libres ou « de conduction » jouent, à leur tour, un rôle d'autant plus important qu'on avance plus loin versles ondes croissantes. Daus la région des ondes les plus longues accessibles à l'investigation, les pro- priétés optiques des métaux sont déterminées presque exclusivement par les é'ectrons libres. Les auteurs se sont posé la tâche d'examiner, pour un certain nombre de métaux et d’alliages et dans plusieurs régions du spectre, la relation qui existe entre le pouvoir d’émis- sion et la température. Tous leurs échantillons pré- sentent un pouvoir de polissage considérable et une faible oxydabilité. L'accord entre la théorie et l’expé- rience pour toutes les substances étudiées est aussi parfait dans le cas des rayons résiduels du quartz que dans celui des rayons du spath-flusr. Dans le cas du platine, la variation thermique du pouvoir d'émission est un peu supérieure à celle qui correspondrait aux propriétés électriques du métal. Le nickel présente des points d'inflexion correspondant aux points singuliers de ses courbes magnétiques et de résistance électrique. Les’alliages à faible coefficient de température élec- trique, surtout le constantan, donnent des courbes isochromatiques qui ressemblent beaucoup à celle du corps noir. Dans les régions spectrales étudiées, les coeffients de tempéralure optiques des métaux corres- pondent encore presque parfaitement aux coefficients électriques. — M. Müller-Breslau présente un Mémoire de M. F. Kôtter, sur la pression exercée par le sable contre les orifices pratiqués dans le fond horizontal d'une boïle-réservoir. On sait que les parois rigides sous-jacentes aux couches épaisses de sable sont loin d'être exposées à la pression élevée qui correspon- drait aux lois hydrostatiques; inversement, la force nécessaire pour déplacer dans le sol les plaques de matière rigide augmente pour des profondeurs crois- santes, suivant une puissance supérieure à la première. L'exemple traité théoriquement par l’auteur fait voir l'accord possible entre ces faits expérimentaux et la théorie de la pression terrestre basée sur l'hypothèse de Coulomb. Séance du 18 Mars 1909. M. Th. Liebisch adresse un Mémoire sur les anti- moniures d'argent. Les antimoniures qu'on rencontre dans les gisements argentifères d’Andreasberg et de Wolfach, et qu'on embrasse sous le terme collectif de dyscrasites, renferment, à l’état inaltéré, d'une part le composé Ag’Sb, qui se présente en cristaux rhom- biques reconnaissables, en masse granuleuse, par leurs propriétés de cohésion, d'autre part des mélanges riches en argent (Ag, Sb), en agrégats à grains fins dont les individus ne permettent d’apercevoir aucune déli- mitation par polyèdres cristallins. Cependant, Îles formes de croissance des mélanges obtenus par syn thèse font voir que cette série de mélanges, comme l’ar- gent qui y prédomine, appartient au système régulier. Les cristaux de mélange-limite sont de la composi- tion approchée AgsSb. — M. K. Peter, professeur à l'Université de Greifswald, adresse un tiré à part de son Mémoire : Recherches expérimentales sur la varia- tion individuelle dans l’évolution animale (Leipzig, 1909), ainsi que cinq Notes plus courtes représentant les résultats de recherches faites sous les auspices de l'Académie, à la Station zoologique de Naples. Séance du 25 Mars 1900. M. J. H. Van ‘t Hoff adresse la seconde partie de son ouvrage : « Zur Bildung der ozeanischen Salzablagerun- gen » (Sur la formation des dépôts salins océaniques) (Brunswick, 1909). Séance du 1° Avril 1909. M. G. Frobenius donne lecture d’un second Mémoire sur les matrices positives. Le théorème suivant lequel la plus grande racine positive d’une matrice positive est supérieure à la valeur absolue de toutes autres racines est démontré le plus simplement par le pro- cédé de Cauchy. D'une facon générale, on peut faire voir que cette racine constitue la limite supérieure des racines de toutes les matrices, y comprisles complexes, dont les éléments ne dépassent pas, en valeur absolue, les éléments correspondants de la matrice positive. Toute dérivée de léquation caractéristique d'une matrice positive comporte à son tour une racine posi- tive ; les racines positives les plus grandes de ces dérivés forment une série décroissante. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Seance du 19 Mars 1909. M. O. Reïchenheim rend compte de ses recherches sur la conduction de l'électricité dans les vapeurs électro-négatives et sur les rayons AÀ,. Les travaux de M. Matthies ont fait voir que le gradient de poten- tiel et la chute anodique, au sein des vapeurs halo- gènes, dépendent, dans une mesure notable, de la pression et de l'intensité du courant. Des recherches de l'auteur, relatives à des pressions bien plus faibles, il résulte que la chute anodique augmente, jusqu'à une certaine limite, à mesure que le vide devient plus parfait, dépendant, non seulement de la pression totale, mais des pressions partielles de la vapeur effi- cace et des autres résidus gazeux. Pour les intensités intermédiaires entre 0,1 et 1,0 milli-ampère, cette chute augmente à mesure que s’accroit l'intensité du courant et que diminue la surface des électrodes. Ces phénomènes sont dus, semble-t-il, à ce que les halo- gènes absorbent des électrons négatifs (en formant des ions négatifs) à un degré bien plus élevé que les autres gaz. Les vapeurs d’autres substances électro-négatives (phosphore, iode, etc.) présentent, en effet, une allure 524 ACADÉMIES ET'SOCIÉTÉS SAVANTES similaire. Les expériences de l’auteur viennent vérifier sa conjecture que la chute anodique serait réduite en engendrant artificiellement des électrons (par une cathode de Wehnelt, par exemple) dans l'enceinte où a lieu la décharge. Les vapeurs de phosphore et d'iode présentent le phénomène de raréfaction spontanée. La plus grande partie du phosphore précipité à l’état de phosphore rouge se trouve être chargée d'électricité négative. L'auteur constate la présence des rayons A,, c'est-à-dire des rayons à masse négative traversant une anode perforée et qui, de même que les rayons- canal, se trouvent être composés de particules positi- vement chargées. Ils ont, on le voit, désagrégé sur leur parcours des électrons négatifs. — M. H. Greina- cher adresse un Mémoire relatif à une méthode de démonstration directe de la charge des rayons «. Cette méthode consiste à faire frapper aux particules « une plaque réceptrice entourée, pour empêcher la charge de s'échapper, d'un isolateur solide. Une feuille d’alu- minium de 0®®,0028 d'épaisseur est collée sur une plaque de laiton, enduite d'une couche de laque plate d'environ 0,03 et introduite dans de la paraffine, en laissant libre une section circulaire de 2,6 cm. de diamètre de la feuille d'aluminium. Un anneau de laiton, posé sur la feuille d'aluminium, délimitait une ouverture de 2,2 cm. de diamètre; il servait en même temps pour appliquer différents potentiels à l’armature supérieure. Au-dessus de cet anneau, et séparé de ce dernier par une coulisse de laiton, se trouvait disposé le produit de polonium émettant presque 2 millions de particules par seconde. Les mesures sont faites par la méthode des déviations constantes, indiquée par Bronson. Les résultats sont indépendants du milieu intermédiaire entre la plaque et la substance active. Il semble que les particules «, malgré leur vitesse toujours très considérable, soient parfaitement absor- bées par la plaque. Séance du 3 Avril 1909. M. H. Zahn adresse un Mémoire sur la résistance qu'opposent les fils de fer aux vibrations électriques rapides. L'auteur y décrit, pour déterminer la perméa- bilité du fer par rapport aux courants alternatifs, une méthode nouvelle qui, tout en étant susceptible d'une grande précision, est exempte des inconvénients de tous les procédés antérieurs. Cette méthode est basée sur la comparaison des intensités de courant qui tra- versent les deux branches d'un circuit ne comportant que des résistances ohmiques et des self-inductions, comparaison faite à l’aide d'un thermomètre atmosphé- rique différentiel à fil chauffé. La section du fil est décomposée en un nombre aussi grand que possible de fils minces et parallèles, ce qui augmente le rayonne- ment thermique dans l'air ambiant, tout en diminuant l'inertie de l'instrument. La self-induction variable est constituée par deux barres de laiton cylindriques entre lesquelles on déplace un traîneau n'étant en bon con- tact qu'à sa face antérieure. Les résistances compara- tives sont des fils capillaires de différents alliages (bronze phosphorique, manganine, constantan, etc.). Pour démontrer l'utilité de cette méthode, l’auteur indique les résultats des mesures comparatives de la résistance que présentent les fils de fer par rapport aux oscillations électriques rapides. Il résulte de ces mesures qu'une influence bien marquée de l'intensité du courant sur la perméabilité se constate jusqu'aux fréquences de 10°. Dans ses expériences sur des vibra- tions vingt fois plus rapides, M. Klemencic avait été incapable d'en déceler une pour des variations d'inten- sité limitées à un intervalle relativement petit. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 29 Avril 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Wirtinger pré- sente ses recherches sur la représentation conforme par les intégrales abéliennes, en particulier pour p = 1,2. — M. K. Hillebrand décrit une méthode de calcul des coordonnées héliocentriques à angle droit d'une planète au moyen de l'intégration numérique et une méthode de différences basée sur la première pour le calcul des éphémérides. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Defant présente ses recherches sur les vents de vallées et de montagnes dans le sud du Tyrol. De la marche diurne de la pres- sion atmosphérique dans la plaine du Po et à Bozen, on déduit la marche des gradients périodiques agis- sant entre les deux contrées. La marche de ces gra- dients présente une période journalière simple, avec un maximum le matin et un minimum l'après-midi. Le gradient maxima du matin, qui est dirigé de la montagne vers la vallée du Po, est en moyenne de Oum 85: le gradient maximum de l'après-midi, qui est dirigé de la plaine vers les Alpes, est de 1 millimètre. Le premier produit le vent de la montagne, le second le vent de la vallée. — MM. J. M. Eder et E. Valenta ont fait une série de mesures de longueurs d'ondes dans Ja partie rouge des spectres d'étincelles. — M. R. Schillinger : Le spectre d’étincelles du potas- sium et du sodium. — M. H. Sirk a étudié la précipi- tation cathodique de l'induction du thorium de ses solutions chlorhydriques. La quantité précipitée est proportionnelle à la quantité d'activité induite du Th dans la solution; elle croit plus lentement que la quan- tité d'électricité envoyée par la pile; elle est indépen- dante de la tension et de la substance de la cathode, quand cette dernière n'est pas activée par la solution. — MM. R. Wegscheider et P. Lux ont mesuré la con- ductibilité électrique des solutions aqueuses des acides B-naphtalènesulfonique et yp-toluènesulfonique et de leurs sels. Ils obéissent à la loi de dilution d'Ostwald jusqu'à 0,006 N, comme les autres acides organiques. — M. H. Zikes a trouvé sur les feuilles de laurier une levure qui possède la propriété d’assimiler l'azote de l'air. Cultivée à l’état pur en solution de glucose, elle fixe 2,3 à 2,4 milligrammes d’Az par gramme de sucre; à la surface, l’absorption est encore plus forte. Cette levure est une Torulacée et a été nommée Torula Wisneri. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. Holl a observé, dans le domaine insulaire antérieur du cerveau de l'homme et du singe, deux formations jusqu'à présent inconnues, qu'il nomme gyrus postremus insulæ et suleus obliquus. —- M. H. Molisch a poursuivi ses recherches sur sa méthode de forçage des plantes par le bain chaud. En général, le bain chaud ne peut pas pousser les bourgeons des plantes ligneuses avant la chute annuelle des feuilles. Le bain d’eau ne peut pas être remplacé par un bain d’air humide chaud. Beau- coup de plantes de jardin se laissent très bien forcer par la méthode du bain chaud. — M. A. Nalepa décrit une nouvelle série de parasites produisant des galles : lEriophyes macrochelus crassipunetatus et\Æ. macro- chelus megalonyx sur l'Acer campestre; l'E. paderi- neus sur le Prunus padus; l'Epitrimerus protrichus sur l'Aposeris fœtida. — M. R. Hoernes expose les recherches récentes sur la formation du Bosphore et des Dardanelles. La pénétration de la mer Méditerranée dans les Dardanelles, la mer de Marmara, le Bosphore et la mer Noire n’a pu avoir lieu que lorsque le conti- nent égéen s'est fracturé. Cette rupture s’est accom- plie d'abord au sud, au commencement du Pliocène, puis au nord, à l’époque diluviale ancienne. — M. B. Kubart a étudié la flore du bassin houiller d'Ostrau- Karwin. Il y a trouvé une quantité de spores de Spen- cerites appartenant à une nouvelle espèce qu'il désigne sous le terme de membranaceus. Louis BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. à Pet: 20° ANNÉE N° 12 30 JUIN 1909 Revue générale MN PnCeS pures el appliquées DirecTEur LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — Ta reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Xevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris In Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Elections à l'Académie fRoumaine. — Dans sa séance du jeudi 10 juin, l'Académie Roumaine a élu comme membres étrangers : MM. Henri Poincaré, A. Haller et G. Lippmann, de Paris, collaborateurs de la Revue, et M. L. Henry, de Louvain. Nous sommes heureux d'enregistrer cet hommage à l'œuvre de trois des plus éminents représentants de la Science fran- caise. S La Réunion du Comité international per- mauent de la Carte du Ciel. — Pour la sixième fois, le Comité international permanent pour l'exécu- tion de la Carte du Ciel vient de se réunir à l'Obser- vatoire de Paris. Son œuvre est particulièrement importante el vaut la peine d'être exposée avec quelque étendue. é On se rappelle que, sur l'initiative de l'amiral Mou- chez, initiative justifiée par les admirables photo- graphies obtenues à l'Observatoire de Paris par les frères Henry avec leur nouvel équatorial astrophoto- graphique, un Congrès international a décidé en 1887 d'entreprendre le levé photographique de la Carte du Ciel par une coopération de dix-sept observatoires et avec des instruments du même type que celui des Henry. Cette œuvre immense, fournissant des rensei- gnements précis sur la position et la grandeur de plus de vingt millions d'étoiles, sera assurément, une fois terminée, le fondement le plus précieux de toutes les recherches astronomiques. Son accomplissement parais- sait au début à ses promoteurs devoir demander au plus une quinzaine d'années; en voilà vingt qu'on y travaille et nous sommes loin de la fin. Ce retard était inévitable et s’est montré fécond, car la mise en pra- tique d'une méthode nouvelle soulève bien des pro- blèmes inattendus; et l’action du Comité permanent n'a pas tardé à s'étendre sur presque toutes les branches de l’Astronomie. Le projet primitif demandait la construction d’un atlas donnant l’image de tous les astres jusqu'à la 14° grandeur, c’est-à-dire de tous ceux que l’on voit -dans une lunette de-60 centimètres de diamètre ; mais, 2 A . — Astronomie REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. | tandis que les atlas existants ne permettaient que de se reconnaitre sur la voûte étoilée, celui-ci devait être un document des plus précis; il fallait que le mode de reproduction purement photographique conservât avec fidélité à des images de quelques centièmes de milli- mètre de diamètre non seulement leurs positions, mais encore leurs grandeurs relatives. La réunion du Comité de 1896 avait recommandé le procédé par héliogravure, qui a l'avantage énorme de laisser pour l'avenir, dans la plaque de cuivre qui à servi à faire les tirages, un document presque indes- tructible, mais qui a l'inconvénient d'introduire un grand nombre de fausses images qu'il faut savoir dis- tinguer des vraies. Pour cela, on a dà faire sur chaque cliché trois poses successives, donnant de chaque étoile trois images disposées au sommet d'un triangle équi- latéral; on reconnaît ainsi immédiatement les véritables images d'étoiles, mais la durée des poses est triplée. Aussi les clichés de la Carte sont-ils loin d'être ter- minés. Les observatoires français ont obtenu environ le tiers de ceux qui leur sont attribués; il en est à peu près de même des observatoires de San Fernando (Espagne) et de Tacubaya (Mexique, qui font hélio- graver leurs clichés par l'héliograveur des observa- toires francais. Les observatoires anglais et celui d'Helsingfors ont fait leurs clichés avec une seule pose et les ont achevés; Greenwich a même reproduit les siens, mais ses épreuves sur papier au gélatino-bro- mure, quoique fort belles, sont assurément beaucoup moins stables, et ont moins de valeur pour l'avenir que les plaques de cuivre des héliogravures. D'autres observatoires ont à peine commencé leur tâche ; quelques-uns même y ont renoncé. A la construction de cet atlas vint s'ajouter dès 1889 l'établissement d'un catalogue donnant les positions précises de toutes les étoiles jusqu'à la 11° grandeur. Les clichés nécessaires à courte pose ont pu être assez rapidement obtenus dans la plupart des observatoires, et la difficulté pratique, ne tenant qu'au nombre énorme de mesures et de calculs à faire, s’est réduite à une ques- tion d'argent; mais il y avait des difficultés théoriques à résoudre. Un cliché stellaire représente une projec- tion centrale de la sphère céleste sur un de ses plans tangents; les mesures rectangulaires faites dans ce 12 526 plan ne sont pas immédiatement exprimées en coor- données sphériques : ascension droite et déclinaison. Il a donc fallu établir des formules de transformation aussi simples que possible. Celles-ci nécessitent la con- naissance préliminaire des coordonnées sphériques, fournies par les instruments méridiens, d’un certain nombre d'étoiles, dites étoiles de repère. Malheureu- sement, il n'existe pas de bonnes positions méridiennes pour toutes les étoiles que l’on voudrait utiliser, et un des premiers soucis de plusieurs des observatoires coopérant au Catalogue a été l'établissement de cata- logues méridiens supplémentaires, ce qui ne rentrait assurément pas dans les projets primitifs. Le plan de travail adopté permet, d’ailleurs, de diminuer le nombre des étoiles de repère nécessaires. Les régions photographiées sur chaque cliché s'imbriquent, en effet, les unes les autres, et l’on doit trouver, pour les étoiles des régions communes, les mêmes coordonnées, quel que soit le cliché d'où l’on tire leurs positions. Gette remarque permet de faire concourir à la détermination des éléments d'un cliché les ctoiles de repère des clichés voisins. Ce travail de raccordement n'est pas commencé; on n'a pas encore défini quelle est la bonne méthode pour le faire. Indépendamment des positions des étoiles, le Cata- logue doit donner leurs grandeurs. Le problème à résoudre dans ce but est triple : il faut pouvoir classer les étoiles d'un même cliché par ordre de grandeur croissante, puis raccorder photométriquement les divers clichés de façon que leurs données soient com- parables, malgré les différences apparentes produites par les variations de sensibilité des plaques et de trans- parence de l'air; enfin, il faut définir l'unité dans laquelle les résultats seront exprimés. Il est assez facile de classer les images des étoiles d'un cliché; elles ont, en effet, des diamètres qui croissent avec les grandeurs des étoiles. Mais, pour uniformiser les résultats et pour choisir l'unité de grandeur, il n'y avait point d'entente avant la dernière réunion. Beaucoup avaient résolu en partie le problème en comparant les grandeurs de cer- taines étoiles, déterminées par les procédés de la pho- tométrie visuelle, avec leurs grandeurs estimées sur les clichés; mais il est un peu illusoire de vouloir identifier les deux genres de résultats, qui ne sont pas fournis par les mêmes radiations spectrales. Les avantages qu'offraient, pour la détermination de la parallaxe solaire, les observations de la planète Eros pendant l'hiver de 1900, et la grande précision que l’on attribuait à la méthode photographique engagèrent, sur la proposition de M. Læwy, un grand nombre d'ob- servatoires à arrêter quelque temps le travail de la Carte du Ciel pour se consacrer aux observations d'Eros et à leurs réductions. La discussion de la masse énorme de documents ainsi accumulés, menée à bonne fin par M. Arthur Hinks, de l'Observatoire de Cam- bridge, indépendamment de l'importance qu'offrait son objet propre, a rendu le plus grand service à l'œuvre du Catalogue photographique; elle a mis en évidence bien des causes d'erreur auxquelles on ne s'attendait pas dans les défauts des objectifs, dans les positions des étoiles de repère et dans les méthodes de réduction. Dans la réunion qui vient d’avoir lieu, le Comité avait naturellement à discuter tous les points en sus- pens, el à préparer les observations d'Eros pendant l'opposition de 1931. Un intérêt particulier de sa pre- mière séance était l'annonce du résultat trouvé par M. Hinks pour la parallaxe solaire : 8,806 à 2 ou 3 mil- lièmes de seconde près, nombre très peu différent de celui (8,80) admis précédemment. Les décisions prises ont été très importantes. On a réglé le sort des zones de l'hémisphère sud, non com- mencées; trois observatoires se sont offerts pour les observer. L'héliogravure des cartes n'avait été faite jusqu'à présent que par les Observatoires français, et par ceux de San Fernando et de Tacubaya; l'Observa- toire royal de Belgique va suivre leur exemple, en se CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE chargeant, pour la carte, de la zone dont l'Observatoire de Potsdam fait le catalogue. Mais il reste pour la carte bien deszones que les observatoires qui s’en étaient chargé paraissent abandonner, à cause du manque de temps, d'argent ou d'héliograveur. Les astronomes français ont eu la grande satisfaction de voir confier à leur pays la reproduction des clichés de toutes les zones coupant l’écliptique et restées en souffrance ; ils légueront ainsi aux astronomes de l'avenir l'image sur cuivre d’une grande moitié du ciel, la plus intéressante, monument digne de leurs compatriotes qui, pendant le xix° siècle, ont travaillé à en dresser la carte visuel- lement. Pour les grandeurs des étoiles du Catalogue, on s’est définitivement débarrassé du souci de les faire con- corder avec les grandeurs des catalogues visuels, en adoptant pour grandeurs types celles d’une série d'étoiles voisines des pôles, étudiées photographique- ment par l'Observatoire d'Harvard College. Enfin, on a décidé, en vue de l'amélioration des posi- tions des étoiles de repère, d'entreprendre un nouveau système complet de catalogues méridiens fondamen- taux. C'est là une entreprise de la plus haute importance et des plus difficiles, rendue possible par les progrès accomplis depuis vingt ans dans la construction des instruments méridiens; elle pourra aboutir dans un temps relativement court, grâce à la collaboration et à l'entente d'un bon nombre d’observatoires et des astronomes les plus compétents en la matière. Le Comité permanent de la Carte du Ciel, qui avait déjà étendu ses fonctions en dirigeant les observations d'Eros, les étend donc encore de beaucoup. Il n'y a guère, en effet, parmi les diverses branches de l'Astro- nomie, que la spectroscopie qui ne soit pas affectée par un changement dans les systèmes fondamentaux des positions et des grandeurs des étoiles, et le Comité, comme le disait un de ses membres éminents, se trouve ainsi à la tête d’une nouvelie organisation de l’Astrono- mie. On voit combien a été féconde l'œuvre interna- tionaie due à l'initiative de Mouchez et des Henry. Jules Baïllaud, Astronome-adjoint à l'Observatoire de Paris. $ 3. — Géodésie L'état actuel des travaux du Nivellement général de la France. — Depuis 1885, un Service spécial, dépendant du Ministère des Travaux publics, exécute le nivellement de nos principales voies de communication (chemins de fer, canaux, routes et chemins), en vue d'obtenir finalement, pour les besoins de la Science, une exacte définition du relief du terri- toire et en vue de faciliter aussi les opérations de toute nature (tracé de nouvelles voies, recherches et amenées d’eau potable, irrigalions et drainages) dont le sol est le théâtre. Ces nivellements ont été répartis en quatre ordres d'opérations, greffées les unes sur les autres, et dont la précision décroit, du {°° au 4° ordre, avec l'aire, de plus en plus petite, des mailles à niveler. Dans un Rapport officiel adressé au Ministre, M. Ch. Lallemand, ingénieur en chef des Mines, directeur du Service du Nivellement, vient de rendre compte des travaux effectués par ce Service en 1908. Nous croyons intéresser nos lecteurs en extrayant de ce rapport quelques chiffres qui montrent l'état d'avancement de l'entreprise (voir aussi fig. 1). ‘et Au cours de la dernière campagne, on a exécuté les nivellements ci-après : {0 Entre Cambrai et Compiègne, nivellement de précision d'une partie de la voie navigable de la Belgique sur Paris. . . . . . « . . . 201 km. 20 Lignes du réseau de 3° ordre et routes nalio- nales dans le midi de la France. . . . . 3.829 3° Lignes du réseau de 4° ordre dans les régions où s'effectue la réfection du cadastre. , . . 347 A reporter. & @ & » + + + 4.311 kme sinsétdien. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 27 APPORTENT. 40 Nivellement de vallées dans les Alpes . . . 252 5o Relevé de profils en long de cours d'eau dans les Alpes . . . 558 jo Nivellement effectué sur la commune de Dombasle (Meurthe-et-Moselle) et ses envi- rons, pour mesurer les affaissements locaux IT RSR ER NT 69 ° Vérification dans le bassin houiller, et com- plément de l'ancien nivellement du dépar- een AUNON LR PEN EN LA: 099 Ensemble, Eu égard aux réseaux de 1°r et de 2 ordre, entière- ment lerminés depuis 1898, le développement total des lignes nivelées dépasse actuellement 93.000 kilo- mètres. Les plaquettes en porcelaine fixées sur les repères, ou à côté de ceux-ci, pour en indiquer le matricule et l'altitude, sont actuellement en placé sur toutes les sections de 1‘ et de 2° ordre, surles deux tiers environ des lignes de 3° ordre’et sur le tiers de celles de 4° ordre. Pour ces mêmes lignes, les résultats des travaux du nivellement général de la France sont, en outre, né Fors À INK 7 6 nn: À les Sables d Ulonne 3e Fhtee 4% 53 Misséron obivet : or + Be La 7e: Fi | OPEL Là r A Mont S'Martin 2: + > Le à Be, Avricourt RS (4 la Ciotat *0 °°? % D , 5 A@/ort-Vendres TE ERRANEE hi A ort-Bou Ke er se le Perthus ;' Fig. 1. — Etat d'avancement des nivellements au 1er juillet 1908. INDICATIONS GÉNÉRALES Lignes du réseau de 1er ordre , . . . . . a = LA Den PR = ÉDADES Lignes de nivellement des pays étrangers. Raccordements avec les pays étrangers. . © Marécraphes et Médimarémètres. , . . . —| comprenant 4.177 kilomètres de nouveaux itinéraires et 2.107 kilomètres d'anciens nivellements réitérés. Le réseau nivelé de 3° ordre s’est accra ainsi de 2.430 kilomètres; au 31 décembre 1908, il atteignait 36.369 kilomètres, soit 81 °/, du développement total prévu (45.000 kilomètres) de ce réseau. A la même date, le réseau de 4° ordre comptait 27.573 kilomètres nivelés, soit 46 °/, de son développe- ment probable (170.000 kilomètres). EXÉCUTION DES NIVELIEMENTS Termines. Réseaux de Aer et 2° ordres . . « . . .. . Réseaux de 3° et 4° ordres : Zones nivelées au 1er janvier 1907, . . . — en1907et1908(1e"semestre Pendant le 2° semestre 1908 ont été nivelées les lignes de 3° ordre situées dans les mailles de 2° ordre K'e, K!'d et T'd. publiés dans un Répertoire graphique définissant, avec des cartes et des croquis, les emplacements et les altitudes des repères. Selon la nature des voies en bordure desquelles ils 7 ! Dans la zone limitée, à l'Ouest et au Sud, par une ligne joignant Saint-Lô, Segré, Redon, La Roche-sur-Yon et Lyon, et dans la zone comprise entre Royan, Limoges, Brives, Marmande et Arcachon. ? Notamment dans tout le département du Pas-de-Calais, 528 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE sont situés, les repères sont annuellement soumis à la visite des agents des Ponts et Chaussées ou du Ser- vice vicinal chargés de leur entretien. Le Service du Nivellement centralise les procès-verbaux de ces vi- sites, et prend les mesures nécessaires pour remplacer les repères avariés ou détruits. Il reçoit, en outre, et dépouille les observations du niveau de la mer, effectuées en quinze points du lit- toral de la Manche, de l'Océan et de la Méditerranée. Le niveau moyen de la Méditerranée à Marseille, calculé pour la période de 1885 à 1908, est de 2 centi- mètres au-dessus du zéro normal du Nivellement général de la France. Dans les autres ports, l'altitude du niveau moyen, par rapport au zéro normal, est partout comprise entre — 8 centimètres (Cherbourg) et+19 centimètres (Saint-Jean-de-Luz), confirmant ainsi l'égalité approximative de niveau entre la Médi- terranée et l'Océan, signalée pour la première fois, en 1890, par M. Lallemand. $ 4. — Art de l'Ingénieur La transformation de l'énergie solaire en puissance mécanique. — Le Soleil nous envoie, parmi ses multiples radiations, une quantité de cha- leur qui, si elle était entièrement convertie en travail, donnerait, d'après Langley, une puissance d'environ 2 ch. 6 par mètre carré de surface exposée au rayon- nement solaire. 1 est donc tout naturel de chercher à utiliser cette chaleur en la transformant en une puis- sance mécanique, et l’on s'y est attaché depuis long- temps; mais il ne suffit pas, pour en obtenir une puissance ulilisable, de disposer d’une source de cha- leur; il faut aussi une chute de température, dont l'utilisation industrielle est d'autant plus difficile que cette chute est plus faible, comme dans le cas des chutes d’eau, et pour la même raison : le prix et l’en- combrement considérables des mécanismes et appa- reils nécessaires pour l’utilisation de ces faibles chutes. C'est bien ce qui a retardé jusqu'ici, en hydraulique, l'utilisation de l'énergie lunaire par celle des marées. L'utilisation de la chaleur solaire à été tentée par bien des inventeurs, notamment, en France, par Mou- chot (1871) et Tellier, en Suède, par Ericson (1883). Mouchot et Ericson employaient la concentration des rayons solaires pour faire bouillir de l'eau ou tout autre liquide plus volatil dans une chaudière sur laquelle on concentrait les rayons de miroirs coniques ou paraboliques. Mais ces miroirs coûtaient très cher; il leur fallait, dans les circonstances les plus favora- bles, environ 10 mètres carrés de surface par cheval, de sorte que, malgré les grandes ressources d'argent dont il disposait et sa grande ingéniosité, Ericson dut y renoncer après y avoir consacré plus de 500.000 fr. L'un des derniers appareils de ce genre, établi en 1898 à Pasadéna, en Calilornie, donnait à peine 10 chevaux avec une surface de miroirs de 930 mètres carrés". Tellier, vers 4885, proposa et même réalisa en pelil l'utilisation de la chaleur solaire par l'absorption di- recte de cette chaleur dans une chaudière lamellaire constituée par une grande surface plate, une sorte de lame d’eau où d'un liquide plus volatil, tel que l’am- moniaque ou le sulfure de carbone, comprise entre des plaques de tôle nommées plaques caloriques®*. Les miroirs paraissent devoir être définitivement abandonnés, tandis que l’on revient, au contraire, aux idées de Tellier, avec des ressources autrement abon- dantes et des concours plus persévérants que ceux dont disposait l'inventeur français, et il semble que l'on soit bien près de réussir, comme on le jugera, d'ailleurs, par les travaux de deux ingénieurs améri- cains, MM. Shuman et Willsee*, que M. Gustave Ri- ! Engineering News, 9 mai 1909. ? Llovation des caux par la chaleur atmosphérique (1889), et La conquête pacifique de l'Afrique ocridentale par le soleil 1890. Brochures de M. Tellier, Paris, Michelet. * Lngincering News, 13 mai 1909. chard à exposés à l’une des dernières séances de la Société d'Éncouragement pour l'Industrie nationale. Nous lui empruntons les renseignements qui suivent : M. Shuman emploie comme fluide moteur de l’eau, tout simplement, dont il utilise directement la vapeur dans une turbine de basse pression. La chaudière de Shuman est établie sur le prin- cipe des serres, c'est-à-dire sur la propriété que pos- sède le verre à vitre de laisser passer la chaleur des radiations solaires, mais de s'opposer à son retour dans l'atmosphère. Cette chaudière est constituée par une grande cuvette bitumée, creusée en forme de bac à une faible profondeur. Pour une puissance de 1.000 chevaux, dans un climat comme celui de l'Egypte, par exemple, cette surface aurait 120 mètres de côté, avec un fond en asphalte de 5 centimètres d'épaisseur, recouvert d'une couche d’eau de 75 millimètres, pro- tégée au nord et au sud par des palissades en bois ou en fer de 3 mètres de hauteur, à l'est et à l’ouest par des vitrages verticaux de même hauteur. Au-dessus de cette tranche d'eau, on maintient une couche de pa- raffine de {mm,5 d'épaisseur, et le réservoir ainsi cons- Litué est fermé par des carrés de verre sur châssis en bois à 0m,15 au-dessus de l’eau. Les parois mêmes du réservoir sont en bois créosoté, beaucoup plus résis- tant au soleil et moins indéformable que le fer. L'eau s'écoule lentement sous la couche de paraf- fine, absorbante de la chaleur et qui dispense d'une seconde lame de verre; de ce réservoir, elle passe sit directement à la turbine, soit à un réservoir de 22 mè- tres de diamètre sur 9 mètres de hauteur, qui emma- gasine l’eau nécessaire à la marche de nuit ou pendant les matinées et les soirées, le soleil n’agissant en pleine activité que pendant six heures sur vingt-quatre. L'eau chaude du réservoir générateur, ou du haut de cette réserve, passe dans la turbine, et sa température, dès l'admission à la turbine, s'abaisse de 95 à 40° par exemple, en la transformant en un mélange de vapeur et d'eau, qui, après son action dans la turbine, passe au condenseur refroidi par de l'eau d'irrigation ; de ce condenseur, l'eau condensée froide revient au bas du réservoir aecumulateur par un fond percé de nom= ‘breux trous qui lui permettent de déplacer lentement l'eau chaude du haut de la réserve, sans s'y mélanger. Dans cette installation, qui n’est qu'un projet, M. Shuman estime à 200 francs par cheval l'établisse- ment de sa chaudière de 120 mètres de côté, qu'il fau- drait remplacer, d'après lui, tous les vingt ans. Ce n'est là, évidemment, qu'une hypothèse, mais basée sur des résultats acquis par de nombreuses expériences, notamment dans une pelite installation d'essai établie en 1907 à Philadelphie, et qui était constituée par un serpentin disposé dans une serre de 6 X 18 mètres, à deux vitrages séparés dans une lame d'air. L'eau, por- tée à une centaine de degrés par les radiations so= laires, actionnait une machine verticale à cylindre de 230 X 250 millimètres, dont l'échappement se faisait dans un condensateur aérien. Cette installation d'essai a parfaitement fonctionné en 1907-1908, avec des ré= sultats sur lesquels on s'est basé dans l'étude de ce projet d'une puissance de 1.000 chevaux. M. Willsee emploie, comme M. Shuman, une chau- dière lamellaire à vitrage, mais il applique la chaleur de son eau à vaporiser un liquide très volatil : ammo= niaque ou acide sulfureux, à la vapeur duquel il fait décrire, dans un moteur approprié, le eyele fermé bien connu de ce genre de machines. M. Willsee a déjà établi plusieurs installations de son système, dont la dernière à Needles, en Californie, avec chaudières de 100 inètres carrés environ, qui à permis de recueillir une puissance de 15 chevaux en moyenne. Le liquide cyclique employé est l'acide sul- fureux. D'après les résultats d'une étude pratique de plu- sieurs années, M. Willsee évalue à 9 francs environ par mètre carré le prix de sa chaudière et de ses acces: soires, et compte qu'elle pourrait absorber, dans les 3 #k CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 529 régions au-dessous du 34° parallèle, en moyenne, 5.000 calories de chaleur solaire par mètre carré de surface et par jour, ce qui mène, en tenant compte des variations possibles, à une surface d'environ 40 mètres carrés par cheval et à une dépense de 360 francs, à laquelle il faudrait ajouter environ 10 °/, pour les accumulateurs de chaleur en réserve. La machine, son condenseur et son vaporisateur d'acide sulfureux coû- teraient environ 300 francs par cheval, en tablant sur les prix d'une machine de Josse de 400 chevaux construite par Sulzer, de sorte que l’on peut évaluer, pour une grande installation de 400 chevaux, par exemple, la dépense totale par cheval à environ 800 francs, chiffre très élevé, mais qui, en comptant la dépense de charbon à 7 cent. 1/2 par cheval, ramène néanmoins le prix du cheval-heure de l'installation solaire à 3 centimes le cheval-heure, au lieu de 10 cen- times pour l'installation avec une machine à vapeur ordinaire ne coûtant, d'établissement, que 200 francs par cheval. La machine à vapeur, pour ne pas dépenser plus par cheval-heure, devrait se procurer son charbon à 3 fr. 04 la tonne, et ce prix d'équivalence ne pourrait guère s'élever à plus de 10 francs la tonne pour un moteur à gazomètre. Il ne s’agit encore, ici, que d’espérances, mais assez fondées, semble t-il, pour que celte renaissance du moteur solaire, à l'origine duquel on rencontre les noms de deux inventeurs français, Mouchot et Tellier, mérite d'être signalée. 5. — Physique L'unification des unités lumineuses. — Dans le but de déterminer aussi soigneusement que possible les rapports des unités photométriques d'Amérique, de France, d'Allemagne et de Grande-Bretagne, des com- paraisons ont été faites à différentes reprises durant les dernières années entre les unités lumineuses con- servées au Bureau of Standards de Washington, au Laboratoire central d'Electricité de Paris, à la Physi- kalisch-Technische Reichsanstalt de Berlin et au National Physical Laboratory de Londres. L'unité lumineuse du Bureau of Standards a été con- servée par l'intermédiaire d’une série de lampes à incandescence électrique dont les valeurs avaient été déterminées à l’origine en fonction de l'Hefner. L'unité lumineuse du Laboratoire central d’Electri- cité est la bougie décimale vingtième de l'étalon défini par la Conférence Internationale des Unités de 1884 et qui est prise comme 0,104 de la lampe Carcel, confor- mément aux expériences de M. Violle. L'unité lumineuse de la Physikalisch-Teclmische Reichsanstalt est donnée par la lampe Hefner brülant dans une atmosphère à la pression barométrique nor- male (76 centimètres) et contenant 8,8 litres de vapeur d’eau par mètre cube. L'unité lumineuse du National Physical Laboratory est donnée par la lampe de 10 candles au pentane de Vernon Harcourt, brûlant dans une atmosphère à la pression barométrique normale (76 centimètres) et contenant 8 litres de vapeur d’eau par mètre cube. Outre les comparaisons directes des lampes à flamme effectuées récemment dans les Laboratoires nationaux d'Europe, des mesures furent faites en 1906 et en 1908 entre les unités européennes et américaines par l'in- termédiaire de lampes électriques à filament de carbone soigneusement étudiées, et le résultat de toutes ces comparaisons donne les relations suivantes entre les unités lumineuses énumérées ci-dessus. Aux erreurs d'expérience près, l'unité anglaise au pentane à la méme valeur que la bougie décimale; elle est de 1,6 °/, moindre que la bougie étalon des Etats-Unis d'Amérique et 11 °/, plus grande que l'unité Hefner. Le Bureau of Standards a pris l'initiative de provo- quer l'unification des mesures lumineuses en Amérique, en Angleterre et en France, et, dans ce but, a proposé de réduire son unité lumineuse de 1,6 °/. La date fixée pour ce changement est le 1* juillet 1909. A partir de cette date, dans les limites de précision nécessaires pour les besoins de la pratique industrielle, on pourra utiliser les rapports suivants : 1 Bougie décimale — 1 Bougie américaine — 1 Bou- gie anglaise, et l'unité Hefner sera considérée comme égale à 0,9 de cette valeur commune. Le Bureau of Standards d'Amérique, le National Physical Laboratory d'Angleterre et le Laboratoire central d'Electricité se sont mis d'accord pour assurer la constance de cette unité lumineuse commune. Sur l'initiative du Comité électrotechnique français, puis du Comité électrotechnique britannique, la Com- mission électrotechnique internationale à été saisie d'une proposition tendant à donner à cette unité lumi- ueuse commune le nom de Bougie internationale. $ 6. — Physiologie La perception des signaux de chemins de fer. — La sécurité des voies ferrées est assurée par l'interprétation d'une série de signaux colorés que doi- vent connaître et traduire fidèlement les employés, mécaniciens et chauffeurs, qui mettent en marche et conduisent les convois. Il serait baual d’insister sur l'importance des conséquences d'une mauvaise tra- duction des signaux colorés; elle augmente chaque jour avec la vitesse des moyens de locomotion des grandes lignes. Chacun l’admet : il faut que le chef de station, le chef de train, la garde-barrière, le mécani- cien, l'aiguilleur possèdent une acuité chromatique irréprochable et que cette faculté soit telle à tout ins- tant. Pour obtenir semblable résultat, des examens de la vision chromatique sont nécessaires. Ils sont, en effet, réglementaires à l’arrivée d'un candidat; ils doivent ètre répétés tous les dix ans dans certaines compa- gnies : la Compagnie P.-L.-M., par exemple. Mais ils sont faits de certaines façons qui ne sont pas exemptes de critiques. M. le D" J. Clerc vient de se livrer à ce sujet à une série de recherches intéressantes‘, qui l'ont amené à des conclusions utiles à reproduire : 4° L'examen des employés candidats aux services des voies ferrées doit être fait méthodiquement en ce qui concerne la vision des couleurs. L’échelle de Sau- vineau, les échelles de Parinaud et de Dor sont indis- pensables pour cet examen. Il sera complété par des examens sur les voies ferrées; 20 Cet examen fait à l’arrivée doit être répété tous les trois ans, à la suite de toute affection oculaire, de toute infection générale; il doit être plus fréquent chez les fumeurs, les alcooliques; il sera fait égale- ment dans tous les cas de traumatisme, et chez la femme dans tous les cas de grossesse; 3° Chaque mécanicien doit avoir sa fiche oculaire, courte, mais très utile pour les examens consécutifs; 4 Les signaux colorés actuels répondent aux besoins et, s'ils sont bien interprétés, leur traduction évitera à coup sûr tout accident. Une seule rectification paraît devoir être faite en ce qui concerne les bordures de ces signaux. Les sémaphores rouges devraient avoir une bordure noire ou verte de # centimètres au lieu d’une bordure blanche. Les sémaphoresjaunesdevraient avoir une bordure grise au lieu d’une bordure noire; les signaux verts, une bordure noire au lieu d'une blanche, et les disques ou signaux bleus une bordure grise, en raison de la visibilité plus grande de ces couleurs sur ces fonds; 5° Chaque mécanicien ou chauffeur devrait être doté d'une lunette grillagée à verre jaune orangé. Il faut souhaiter qu'un nouveau règlement vienne assurer, d’une facon plus scientifique et plus certaine, la sécurité des voies ferrées, en tenant compte des conclusions précédentes. ! Revue gén. d'Ophtalmologie,novembre et décembre 1908, 530 D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE L'ANAPHYLAXIE Il est relativement facile de présenter dans son ensemble une question à l'étude, quand celle-ci se rattache à une hypothèse ou à une théorie solide- ment établie, quand les faits qu’elle embrasse con- cordent entre eux et ressortissent tous à un phé- nomène général, sinon à une loi définitivement établie. Cette tâche est moins aisée quand, malgré leurs analogies, les faits sont rattachés les uns aux autres par un lien dont il est encore impossible de saisir la nature exacte. C'est précisément le cas de l'anaphylaxie. A l'heure actuelle, nous ne possé- dons même pas de définition satisfaisante de cet état particulier, sur lequel M. Ch. Richet avait, le premier, attiré l'attention en 1902. Pour lui, l’ana- phylaxie (dvx= contraire de, gühassis — protection) serait « le contraire de la protection », le contraire de la prophylaxie. D'autres la considèrent comme «une vaccination à rebours ». Ces deux définitions laissent manifestement à désirer. Aussi bien, avant d'aller plus loin, nous résumerons la première expérience, aujourd'hui classique, de M. Richet : mieux que les définitions ci-dessus citées, elle nous montrera ce qu'il faut comprendre sous le nom d'anaphylaxie. I. — L'ANAPHYLAXIE D'APRÈS M. Ricuer. $ 1. — Qu'est-ce que l’anaphylaxie? Un chien recoit, en injection intra-veineuse, une dose de congestine (poison extrait des tentacules d'actinie) évaluée à 0 gr. 05 par kilog d'animal. Immédiatement après l'injection, ce chien ne pré- sente rien de particulier. Mais bientôt il est pris de diarrhée avec ténesme et coliques extrêmement vives, et sa température s’abaisse. Le lendemain et les jours suivants, la diarrhée, l'hypothermie s'accentuent,; l'animal paraît très faible, amaigri. Cet état d'intoxication persiste deux ou trois jours, puis se dissipe peu à peu. Au bout de dix à douze jours, l'animal se remet à manger comme d'habi- tude, reprend sa gaieté, retrouve le poids qu'il avait auparavant. Un mois plus tard, il est impossible de le distinguer d'un chien normal. Si à ce moment, si un mois après la première injection de poison, on lui fait, dans les veines, une nouvelle injection de congestine, non pas de 0 gr. 0ÿ decongestine par kilog, mais seulement deO0gr.0025, c'est-à-dire d’une dose vingt fois plus faible, voici les phénomènes qu'on observe : À peine l'injection est-elle terminée que le chien est pris de vomissements intenses, violents, ré- pétés, parfois sanguinolents. Presque en même temps apparaît une dyspnée violente, et la pres- sion artérielle baisse; les membres se paralysent et cette paralysie motrice s'accompagne d'une anes- thésie complète, les excitations les plus fortes etles plus variées ne provoquant pas la moindre réaction. L'animal reste étendu ‘sur le flanc, respirant mal, avec un cœur misérable, une diarrhée sanguino- lente profuse. Le tableau clinique est celui d'une intoxication foudroyante. Malgré la gravité de ces symptômes, le chien finit ordinairement par se rétablir. Il meurt fatalement si, au lieu de0 gr. 0025, on lui injecte 0 gr. 01 de congestine. L'étrangeté de cette expérience et celle des phé- nomènes qu'elle met en lumière sautent aux yeux. Voilà un chien qui supporte relativement bien une première intoxication réalisée par l'injection intra veineuse de 0 gr. 05 de congestine par kilog de son poids : à cette dose, le poison provoque chez lui de la diarrhée, de l'hypothermie, de l'amaigrissement ; mais, dans l'espace de trois jours, tout est fiai. Un mois plus tard, quand il est rétabli de cette pre- mière intoxication, on lui injecte ce même poison à une dose vingt fois moindre : cette fois, il est pris de phénomènes toxiques très graves, lesauels ont encore ceci de particulier qu'ils ne ressemhlent pas à ceux provoqués par la première injection. Quel- quefois l'animal succombe à cette nouvelle injec- tion, et la mort est fatale quand la nouvelle dose est de 0 gr. O1. Or la dose de 0 gr. 0025 et même celle de 0 gr. O1 de congestine ne provoquent presque aucun symptôme morbide chez un animal neuf! Tout cela ne cadre guère avec ce que nous savons sur l’action des poisons. Quand un poison est, à plusieurs reprises, in- corporé dans un organisme, celui-ci peut réagir de plusieurs facons. Ou bien le poison ingéré ou injecté est éliminé au bout de quelque temps, et une nouvelle ingestion provoque les mêmes symp- tômes, si la dose est la même. C'est ce qu'on observe avec la plupart des poisons. Ou bien l'incorpora- tion répétée du poison amène une sorte d'accoutu- mance, ce qui fait que l'organisme réagit de moins en moins violemment à chaque nouvelle dose de. poison; sa sensibilité diminuant, il arrive à sup- porter des doses énormes sans presque réagir : c'est la mithridatisation des morphinomanes et des cocaïnomanes, c'est la mithridatisation utilisée par la vaccination destinée à créer un état d'immu- nité envers les toxines microbiennes. Il existe enfin des poisons qui, comme la digitale, s'accu- mulent dans l'organisme, si bien que les doses PE Lin: D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE 531 —_—_—_—__—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—…—…—…—…—…—…—…..——…—……—————…—…———…————…—_——_—……_—…—…—……—……—…………’ répétées provoquent, même quand elles sont espa- cées, des effets toxiques de plus en plus marqués. Or, dans les expériences de M. Richet, si on laisse de côté l'effet cumulatif sur lequel nous revien: drons dans un instant, les choses se passent tout autrement. Non seulement la première injection de congestine ne laisse pas intacte la sensibilité de l'animal envers ce poison, mais, au lieu de la dimi- nuer, elle l'augmente encore. Elle semble créer un véritable état d'hypersensibilité, au point que l’ani- mal, qui supportait une dose donnée de poison, est maintenant tué par une dose dix ou vingt fois moindre. Au lieu de le protéger contre une nouvelle intoxication, la première dose de poison semble l'y prédisposer davantage. Ælle crée ainsi un état con- traire à la prophylaxie, un état d'anaphylaxie. $ 2. — Mécanisme de l'anaphylaxie. L'anaphylaxie est done un état d'hypersensibi- lité, artificiellement créé par l’incorporation, dans l'organisme, d'un poison. Quel est le mécanisme qui préside à cet état? En 1902, à la Société de Biologie, dans sa pre- mière communication sur l'anaphylaxie, M. Richet se contenta de signaler les faits qu'on vient de lire, sans les interpréter, sans les généraliser sous forme d'une hypothèse. Aujourd'hui, après les nombreuses recherches suscitées par sa décou- verte, on pense, on admet que l’anaphylaxie se rattache à l’immunité et que les deux, l’anaphy- laxie comme l’immunité, ressortissent à un méca- nisme analogue, sinon identique. C'est la conclu- sion qui découle de l'interprétation d’un certain nombre d'expériences que nous allons citer main- tenant. Reprenons, tout d'abord, la première expérience de M. Richet, longuement exposée ci-dessus, celle où l'animal anaphylactisé est foudroyé par la seconde injection de congestine. À la rigueur, on pourrait invoquer l'effet cumulatif dont nous avons parlé plus haut. Cet effet est celui que produit, par exemple, la digitale qui, comme on sait, s'élimine très lentement; chaque nouvelle injection ou inges- tion de cette substance toxique ajoute ses effets à ceux de l'injection ou de l’ingestion précédente, si bien qu'à la seconde ou à la troisième incorpora- tion de cet alcaloïde, ses effets deviennent ceux d'une dose trois fois plus forte, injectée d'emblée. Est-ce encore ainsi qu'agit la congestine ? Certainement non. On peut rendre un chien hypersensible, on peut l’anaphylactiser, en lui injectant non pas 0 gr.05, mais 0 gr. O1 de conges- tine. Anaphylactisé par cette dose minime, il est infailliblement tué par une seconde injection de 0 gr. 01 de congestine. Dans l’espace d'un mois, il aura donc reçu en tout 0 gr. 02 de congestine. Or, cétte dose de Ogr. 02 ne provoque presque pas de symptômes d'intoxication chez un animal neuf; nous avons vu, du reste, que même la dose de 0 gr. 05 n'est pas mortelle, car la congestine ne tue qu'à partir de 0 gr.08 par kilog. Les effets cumula- tifs n'existent donc pas pour la congesline ; en tout cas, ils n'expliquent pas l’intoxication violente que provoque la seconde injection. Voici une autre expérience qui aboutit à la même conclusion : Un chien recoit dans les veines la dose de 0 gr. 05 ou de 0 gr. 07 de congestine. Puis, quelques jours après qu'il est rétabli, c'est à-dire huit, dix, quinze jours après cette première injection, on lui injecte de nouveau 0 gr. O1 de congestine, dose mortelle chez un chien anaphylactisé. Or, dans ces conditions, c'est-à-dire quand la seconde injection est faite non pas au bout d'un mois, mais seule- ment dix ou quinze jours après la première injec- tion, l'animal survit ! Cette expérience montre done, à son tour, que, pour expliquer l’anaphylaxie, on ne saurait invo- quer un effet cumulatif. Elle nous indique égale- ment — et ceci est très important — que l'éfat d'anaphylaxie ne s'établit pas d'emblée après la première injection. Pendant deux ou trois semaines, l'animal garde sa sensibilité normale envers la congestine; il ne devient hypersensible, anaphy- lactisé, que quand un mois s’est écoulé depuis la première incorporation de congestine. Autrement dit, l'anaphylaxie ne s'établil, ne se manifeste qu'après une période d'incubation, qui est de trois à quatre semaines environ. On sait qu'une période d'incubation précède régulièrement tout étal d'im- munité artificielle ou naturelle, suite de maladie. Mais qui dit incubation dit réaction de l’orga- nisme, et c'est là précisément le phénomène com- mun à l’anaphylaxie et à l'immunité. En vertu des théories modernes, cette réaction consiste, pour l'immunité, dans la formation d'une nouvelle sub- stance, d'un anticorps. Un tel anticorps, détermi- nant l'état d'hypersensibilité, se forme-t-il chez les animaux anaphylactisés ? L'expérience suivante de M. Richet répond à cette question : Le sérum d'un chien anaphylactisé est injecté à un chien normal. Le jour même ou le lendemain, on injecte, au second chien, U gr. 04 de congestine. Cette dose, non mortelle pour un chien neuf, tue le chien injecté avec du sérum de chien anaphy- lactisé. On confère donc un état d'anaphylaxie à un chien normal en lui injectant du sérum de chien anaphylactisé. A la suite de cette injection, l'ana- phylaxie s'établit même d'emblée, sans passer par une période d'incubalion. Pourquoi? Parce que le sérum des éhiens anaphylactisés renferme la sub- Qt ee 19 stance anaphylactisante. Celle-ci se développe len- tement, chez un animal neuf, à la suite d'une in- jection de congestine ; injectée directement avec le sérum dans l'organisme, elle crée d'emblée l'état d'anaphylaxie. $3. — Mécanisme des accidents anaphylactiques. L'anaphylaxie est done due à l'existence, à la formation, dans l'organisme, d’une nouvelle sub- stance, produit de la réaction de l'organisme. C'est elle qui crée l’état d’anaphylaxie. Mais quel est exac- tement son rôle dans l’éclosion des accidents toxi- ques mortels qui surviennent à la suite de la seconde injection de congestine? M. Richet répond à cette question en établissant, avant tout, que, par elle-même, la substance qui anaphylactise n’est pas toxique. Un chien en état d'anaphylaxie est un animal qui, à tous les points de vue, se comporte comme un animal normal, tant qu'on ne l'a pas mis à l'épreuve d'une nouvelle injection de congestine. Envers tous les autres poi- sons, ses réactions sont identiques à celles de n'im- porte quel autre chien, non anaphylactisé. Il n’a de réactions spéciales et spécifiques, il n'a d'hypersen- sibilité qu'envers la congestine. Cela étant, il est permis de penser que les phéno- mènes foudroyants de l’anaphylaxie, réalisés par une nouvelle injeclion de congestine, sont dus pré- cisément à la rencontre de la congestine avec la substance anaphylactisante, non toxique par elle- même. Autrement dit, l'intoxication grave ou la mort que provoque la nouvelle injection de conges- | tine semblent être produiles par une nouvelle substance, formée à la fois par la congestine et la substance anaphylactisante. C'est ce que pense effectivement M. Richet, et voici comment il com- prend le mécanisme des accidents anaphylactiques : La première injection de congestine provoque dans l'organisme la formation, par réaction, d'une substance qui n’est pas une toxine, mais une {0x0- génine. Sans être toxique par elle-même, elle est capable de développer un poison lorsqu'on fait agir sur elle la congestine, mème à des doses auxquelles celle-ci est inoffensive. Tout se passe donc comme si l’on avait la réaction suivante : Toxogénine + congestine — apotoxine. Et ce serait l'apotoxine qui réaliserait, chez les ani- maux anaphylactisés, l’intoxication foudroyante après une nouvelle dose non toxique de congestine. Nous sommes ici, évidemment, en face d’une de ces hypothèses que la Médecine moderne doit à la Biologie. Le caractère hypothétique de cette théorie de l'anaphylaxien’échappe pas, du reste, à M. Richet. On peut, en effet, se demander pourquoi l'animal anaphylactisé échappe à l'intoxication par l'apo- D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE toxine (toxogénine + congestine) pendant la pé- riode d'incubation, pendant que son organisme fabrique de la toxogénine en présence de la con- gestine. M. Richet répond à cette objection en disant que la toxogénine n'apparait probablement que lorsque toute trace de congestine a déjà disparu de son organisme. On est ainsi amené à conclure que, lorsque la période d'incubation est terminée, il y à un moment où il n'existe plus, dans l'organisme, de congestine, mais où il n'y à pas encore de toxo- génine. Il est possible qu'il en soit ainsi. Mais,en somme, rien ne prouve que les choses se passent réellement ainsi. IT. — L'ANAPHYLAXIE SÉRIQUE ET LACTIQUE. La plupart des toxalbumines et des toxines mi- crobiennes sont capables de créer, comme la con- gestine, un état d'anaphylaxie dans les conditions ci-dessus indiquées. Les recherches de Rosenau et Anderson, celles de Kraus, de Stenitzer, de Doerr, de Delanoë, sont formelles à cet égard. Quelle que soit la toxalbumine utilisée, l'anaphylaxie qu’elle crée est rigoureusement spécifique. Un animal anaphylactisé contre la tuberculine, par exemple, se comporte envers la congestine ou toute autre toxine comme un animal neuf; inversement, un animal anaphylactisé contre la congestine réagit contre la tuberculine ou tout autre poison albumi- noïde à la facon d’un animal normal. C'est dire que l’anaphylaxie, tout comme l'immunité, possède un haut caractère de spécificité. Ajoulons encore que les alcaloïdes et les poisons salins ne semblent pas susceptibles de réaliser, chez un animal, l’état d'anaphylaxie. C'est, du moins, la conclusion à laquelle est arrivé M. Richet, dans ses recherches avec la cocaïne et l’apomorphine. | $ 1. — Caractères de l’anaphylaxie sérique. Mais ce qui est tout à fait étrange, c'est que, si les poisons minéraux et les alcaloïdes sont inca- pables de créer un état d'anaphylaxie, celui-ei est réalisé avec la plus grande aisance par des substances non toxiques, comme le sérum du sang (Arthus, Rosenau et Anderson, Besredka, Gay et Southard), le lait (Arthus, Rosenau et Anderson, Besredka), l'ovalbumine (Vaughan), la papaïne (Pozerski), l'extrait de petits pois (Rosenau et An- derson), les extraits d'organes (Wolf-Eisner, Kraus, Doerr et Soha). En un mot, tout ce qui est albumose et tout ce qui s’en rapproche par sa constitution semble capable de provoquer un état d'anaphylaxie. Comme dans les cas étudiés précédemment, cette anaphylaxie est strictement spécifique. On peut même, comme l'ont fait Rosenau et Anderson, ana- : mt fat D° R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE 533 phylactiser un animal à la fois contre le blanc d'œuf, le sérum et le lait, et la réaction spécifique provoquée par l'injection de chacune de ces sub- stances est la même que si l'animal n'avait été sensibilisé que contre cette substance. Toutes ces recherches, que nous venons d'énu- mérer, ont élé provoquées par les expériences d’Arthus, qui, le premier, a montré, un an après la découverte de Richet, qu'un lapin ayant recu une injection sous-cutanée de sérum ou de lait présente des symptômes très graves d'intoxication (dyspnée, paralysies, convulsions), quand, au bout de quelque temps, on lui fait une nouvelle injection, intra- veineuse ou intra-péritonéale, de lait ou de sérum. L'analogie avec l'anaphylaxie envers la congestine était, dans les expériences d'Arthus, d'autant plus complète que les animaux sensibilisés contre le lait ou le sérum succombaient parfois à l'injection d'épreuve d’un de ces liquides. La découverte d'Arthus aurait peut-être passé inaperçue si, trois ans plus tard, Theobald Smith n'avait attiré l'attention sur la sensibilité particu- lière, envers le sérum normal de cheval, des cobayes servant au dosage du sérum anti-diphtérique. Les recherches soulevées par cette constatation nous ont valu les travaux de Rosenau et Anderson, de Gay et Southard, d'Otto. On nous permettra de ne pas entrer dans le détail de ces expériences et de résumer seulement ce qu'elles nous ont appris sur l'anaphylaxie sérique. L'injection d'une très faible dose de sérum hété- rogène suffit pour créer un état d'anaphylaxie. Cette dose estordinairement de 1/250 de centimètre cube ; mais elle peut être abaissée à 1/1.000.000 de centi- mètre cube. Les fortes doses de sérum ne sen- Sibilisent pas. L’anaphylaxie créée par l'injection d'une toute petite quantité de sérum est rigoureu- sement spécifique, c'est-à-dire qu'un cobaye ana- phylactisé contre le sérum de cheval ne réagit qu'avec du sérum de cheval et se comporte, à l'in- jection d'épreuve, comme un animal neuf envers tous les autres sérums. Cette anaphylaxie ne s'éta- blit pas d'emblée, mais se manifeste seulement après une période d'incubation dont la durée est de dix à douze jours. Quand l’état d'anaphylaxie est créé, il suffit d'injecter dans le péritoine de l’ani- mal 5 centimètres cubes de sérum hétérogène pour provoquer chez lui des symptômes graves d’intoxi- cation ou même la mort. Si cette seconde injection est faite pendant la période d’incubation, les symp- tômes d'intoxication ne se manifestent pas. On peut provoquer d'emblée l’état d'anaphylaxie sé- rique en injectant, à un cobaye, du sérum prove- nant d'un cobaye déjà anaphylactisé (Nicolle). Enfin, l'état d'anaphylaxie est transmis parfois par la mère à ses petits. - Comme on le voit, l’analogie entre l’anaphylaxie envers la congestine el l'anaphylaxie envers le l'état d'anaphylaxie peut être créé par des doses minimes sérum est complète. Dans les deux cas, de sérum hétérogène; dans les deux cas, cet état ne se manifeste qu'après une période d'incuba- tion ; dans les deux cas, il peut être réalisé par une injection de sérum d'animal déjà anaphylactisé ; dans les deux cas, il se forme dans l'organisme, par réaction, une substance particulière à affinités spécifiques ; dans les deux cas, les accidents, toxiques ou mortels, n'éclatent que lorsque cette substance spécifique est mise en présence de la substance hétérogène qui l’a fait naître. Toutefois, les recherches de Besredka, poursuivies systéma- tiquement depuis deux ans à l'Institut Pasteur, ont montré qu'à côté de ces similitudes il existe, entre l'anaphylaxie à ‘la congestine et l’anaphylaxie au sérum, un certain nombre de points de divergence. $ 2. — Mécanisme de l’anaphylaxie sérique. Importance de la voie cérébrale. L'évolution rapide des accidents anaphylactiques, la mort presque subite qu'ils entraînent parfois, autorisaient à penser que ces accidents et cette mort sont d'origine cérébrale. Besredka a prouvé l'exactitude de cette hypothèse, en faisant la seconde injection, chez les cobayes sensibilisés, non plus dans le péritoine, mais sous la dure-mère. Dans ces conditions, il arrivait à provoquer régulièrement la mort de l'animal dans l’espace de deux à trois minutes. Ce résultat était obtenu avec 1/4 de centi- mètre cube, tandis que, en cas d'injection intra- péritonéale, la dose de 5 centimètres cubes, c'est- à-dire une dose vingt fois supérieure, n'amenait la mort des animaux sensibilisés que dans un quart des cas. Comme pour la congestine, on s'est donc demandé quelle est, dans le sérum, la substance qui anaphylactise les cobayes ? On admit qu'il ne pouvait s'agir que d’une substance toxique qui, après avoir provoqué la formation d’un anticorps anaphylactisant, amenait la mort quand elle était de nouveau injectée avec le sérum. Pour vérifier cette hypothèse, Anderson et Rose- nau ont essayé de détruire cette présumée substance toxique,ou plutôt cette propriété toxique du sérum, en traitant celui-ci par des acides, par des bases, par des caustiques, par des ferments, on peut dire par presque tous les corps que la Chimie met à la disposition des expérimentateurs. L'échec fut complet. Quel que fût le traitement chimique subi par le sérum, son injection intra-péritonéale à la dose de 5 centimètres cubes déclanchait, chez l'animal sensibilisé, les accidents d’anaphylaxie. Seul, le chauffage à 100° fait perdre au sérum ses 531 propriétés toxiques, c'est-à-dire qu'après avoir été chauffé à 100° il ne provoque plus, en injection intra-péritonéale, d'accidents anaphylactiques. Besredka, qui reprit ces recherches, constata son tour que le chauffage à 100°, fait de facon à conserver le sérum à l’état liquide (addition d’eau), lui enlève toute propriété toxique. Un tel sérum, injecté à la dose de 1/4 de centimètre cube dans le cerveau, ne tue plus et rend à peine malades les cobayes anaphylactisés. Mais Besredka poussa plus loin l'analyse des faits qu'il étudiait. Ayant constaté que le chauffage à 100° détruit la substance ou plutôt la propriété toxique du sérum, il s’est demandé si c'était bien cette sub- stance toxique qui créait l’état d'anaphylaxie. Or il constata que /e sérum, chauffé pendant vingt minu- tes à 100° ef dépourvu de toute toxicité, provoque, chez l'animal neuf auquel on linjecte, un état d'anaphylaxie des mieux caractérisés. Non seule- ment le sérum chauffé, dépourvu de toxicité, anaphylactise le cobaye, mais il l'anaphylactise encore mieux et plus énergiquement que le sérum non chauffé et, par conséquent, toxique ! De cette double expérience découle donc cette conclusion que le sérum doit renfermer deux substances, capables d’être dissociées par la chaleur. C'est bien la conclusion de Besredka, et voici ce quil écrit à sujet : « I y a lieu de dissocier dans le sérum normal la propriété qui, chez le cobaye sensibilisé, préside à l'effet toxique, et la propriété qui, chez le cobaye neuf, préside à la sensibilisation : la première dispa- rait après un chauffage du sérum à 400°; la seconde, au contraire, persiste à toutes les températures. Pour éviter de longues circonlocutions, nous propo- sons donc de désigner une des fonctions du sérum sous le nom de sensibilisinogène et l'autre sous celui d'anti-sensibilisine. Par ces qualificatifs, nous visons surtout deux propriétés relevant, peut-être, d’une seule substance. « Le sensibilisinogène est la substance thermo- stable ; c'est celle qui, en sa qualité d'antigène, donne naissance, au bout de douze jours, à l'état anaphylactique ; c’est elle qui produit ce corps nouveau qui présente une affinité particulière pour la cellule nerveuse et que nous désignons sous le nom de sensibilisine. La seconde substance du sérum, appelée anti-sensibilisine, est thermolabile ; elle se caractérise surtout par sa propriété de se combiner avec la sensibilisine, que celle-ci soit libre ou qu'elle soit déjà fixée sur la cellule nerveuse. & © $ 3. — Mécanisme des accidents anaphylactiques. On devine maintenant comment celte théorie per- met de comprendre le mécanisme de l’anaphylaxie. D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE Un cobaye recoit sous la peau une petite quantité de sérum. Absorbé, ce sérum provoque, par son sensibilisinogène, une réaction qui aboutit dans l'espace de douze jours à l'apparition, dans l’orga- nisme, d'une nouvelle substance, la sensibilisine. Celle-ci, formée, va, en raison de son affinité pour le système nerveux, se fixer sur le cerveau, et l’état d'anaphylaxie est ainsi créé. Vient-on en ce moment incorporer dans l'organisme, par la voie cérébrale ou par la voie intra-péritonéale, une nouvelle quantité de sérum, l’anti-sensibilisine qu'il renferme se portera, en vertu de son affinité, vers la sensibilisine, et déclanchera les accidents ana- phylactiques mortels. Nous avons vu que, pour l'anaphylaxie envers la congestine, M. Richet fait intervenir, dans le méea- nisme des accidents, la formation d'une nouvelle substance (toxogénine + congestine — apotoxine). Est-ce ainsi encore que s'expliqueraient les acci- dents de l’anaphylaxie sérique ? Autrement dit, y aurait-il, dans ces conditions, tout comme dans l'hypothèse de Richet, combinaison chimique (sen- sibilisine + anti-sensibilisine) et formation d'une substance toxique? Besredka ne le pense pas. Pour lui, ce qui tue dans ces conditions l'animal ana- phylactisé, c'est la rencontre mécanique de la sensibilisine avec l'anti-sensibilisine, rencontre qui réalise, au niveau du cerveau, une sorte de choc anaphylactique. C'est ce choc qui tuerait l'animal. Cette théorie mécanique est au moins originale. Elle s'appuie sur un certain nombre de faits dont quelques-uns sont fort curieux. Un argument décisif est la facon dont un animal se comporte sous l'éther. On endort à l’éther un cobaye sensibilisé et, pendant qu'il est en état de narcose, on lui injecte, dans le cerveau, la dose fatalement mortelle de 1/4 de centimètre cube de sérum. L'animal continue à dormir, et, lorsqu'il se réveille, il se trouve débarrassé de son état d'a. naphylaxie. Pourquoi cette disparition ? Parce que, dit Besredka, auquel ces expériences ont été suggérées par M. Roux (de l’Institut Pasteur), l'a- nesthésique a insensibilisé les cellules nerveuses et leur à permis de supporter le choc anaphylactique résultant de la rencontre de l’anti-sensibilisine avec la sensibilisine.Le chloréthyle, l'hydrate de chloral, l'alcool agissent comme l'éther. L'action de l'uré- thane et du chloralose est moins nette; celle de la morphine et de l'opium est nulle. (Il serait inté- ressant de savoir pourquoi tous les narcotiques n'agissent pas de la même facon; mais Besredka n'envisage pas cette question, qui constitue cepen- dant une objection sérieuse à sa théorie.) Le mode d'action des sérums chauffés peut aussi être invoqué en faveur de l'hypothèse du choc anaphylactique, D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE d39 Nous avons vu que, lorsqu'on fait à un cobaye une injection intracérébrale de sérum chaufté à 400 ou 120°, on n'observe presque pas de symp- tômes anaphylactiques. Les accidents sont plus marqués, sans être mortels, quand le sérum est préalablement chauffé seulement à 95° ou à 89, ou à 765. Or, que fait le chauffage dans tous ces cas? Sui- vant la température utilisée, il détruit plus ou moins complètement la substance toxique du sérum, l'anti- sensibilisine, et amoindrit ainsi plus ou moins énergiquement son affinité pour la sensibilisine formée dans l'organisme et fixée sur les cellules cérébrales. Qu'il s'agisse d'une destruction plus ou moins complète de l’anti-sensibilisine ou de l'atté- nuation de son affinité pour la sensibilisine, le choc anaphylactique, après l'injection intracéré- brale, ne se produira pour ainsi dire pas ou sera plus ou moins amorti, suivant que le sérum a été chauffé à 120°, à 4100° ou à une température encore inférieure. D'autres faits peuvent encore êlre invoqués en faveur de cette théorie. Nous les retrouverons dans un instant, à l'occasion de l’immunité anti-anaphy- lactique. La théorie du choc anaphylactique n'est pas la seule que nous possédions sur le mécanisme des accidents qui éclatent chez un animal sensibilisé, après une nouvelle injection de sérum. Rosenau et Anderson, ainsi que la plupart des auteurs, se rallient à la théorie des anticorps : la première injection de sérum fait naître dans l'orga- nisme un anticorps qui crée l'état d’anaphylaxie; la rencontre de cet anticorps avec la substance qui l'avait fait naître, et qui existe dans le sérum de la seconde injection (l'antigène), déclanche les acei- dents anaphylactiques. Pour Vaughan et Wheeler (qui ont opéré avec du blanc d'œuf), la première injection provoque la formation d'un zymogène, dont la présence réalise l’état d’anaphylaxie ; en cas d’une nouvelle injection, le zymogène, en présence de la substance albuminoïde, se transforme en fer- ment et décompose celle-ci en deux portions, dont l’une, toxique, provoque les accidents anaphylac- tiques. Gay et Southard admettent que le sérum renferme une anaphylactine qui « prépare » les cellules de l'organisme; en cas de nouvelle injec- tion, une autre substance modifie les cellules pré- parées, et cette modification s'accompagne d'acci- dents plus ou moins graves. La théorie de Nicolle est plus compliquée. D'après cet auteur, toute toxalbumine introduite dans l’or- ganisme provoque la formation d'anticorps spéci- fiques. Ceux-ci sont de deux ordres : les uns, les coagulines, possèdent la propriété de coaguler, de condenser, de précipiter la toxine et de la rendre inoffensive ; les seconds, les lysines, dissocient la la transforment en loxine « vraie », celle-ci plus toxique que celle-là et d'une action plus rapide. Les coagulines et les lysines peuvent se neutraliser; mais, en cas d’anaphylaxie, les lysines prédominent et font éclater les accidents anaphylactiques quand elles se retrouvent en pré- sence de leur antigène. toxine « brute » et A $ 4. — Nature et mécanisme de l’immunité anti-anaphylactique. On n’est pas encore fixé sur la question de savoir si tout état d'anaphylaxie finit à la longue par se transformer spontanément en état d'immunité. M. Richet n'a pas trouvé cette immunité chez les animaux anaphylactisés avec la congestine tirée des tentacules d'actinie. Il l’a, par contre, nettement constatée chez les chiens sensibilisés avec le poison obtenu par trituration des moules. En ce qui con- cerne l'anaphylaxie sérique, Besredka l’a vu per- sister encore après deux ans. En revanche, il est facile de faire disparaitre artificiellement l’état d'anaphylaxie chez un animal sensibilisé. Une fois que cet état a disparu, l'animal se trouve « désanaphylactisé », c'est-à-dire immu- nisé pour un temps variable. Il existe donc une im- munité anti-anaphylactique. Elle à été étudiée avec beaucoup de soin par Besredka. ‘Le procédé le plus simple qui permette d'immu- niser un cobaye contre l'anaphylaxie sérique con- siste à lui injecter, pendant la période d'incubation, une certaine quantité de sérum, soit dans le péri- toine (5 centimètres cubes), soit dans le cerveau (1/4 de centimètre cube). Si, à la période à la- quelle l’état d'anaphylaxie est généralement cons- titué (environ douze jours après la première injec- | tion anaphylactisante), on fait à un cobaye, ayant été déjà injecté pendant la période d'incubalion, une nouvelle injection intra-péritonéale ou intra- cérébrale de sérum, elle ne tue plus l'animal, ni ne le rend malade. On peut encore arriver au même résultat, c’est-à-dire réaliser cette immunité, en injectant, dans le cerveau de l'animal qui se trouve en pleine période d’anaphylaxie, une quantité mi- nime de sérum, 1/40 à 1/400 de centimètre cube. Mème résultat encore quand, en pleine anaphylaxie, on injecte du sérum chauffé dans le péritoine ; mème résultat encore avec du sérum non chauffé, injecté dans le cerveau de l'animal endormi à l'éther. Dans tous ces cas, une injection ultérieure de sérum ne déclanche plus d'accidents anaphylac- tiques, en raison de l'état d’immunité dans lequel | se trouve maintenant l'animal. Le mécanisme de cette immunité, provoquée par | des interventions assez différentes, s'explique par | la théorie du choc anaphylactique. Que se passe-t-il, en effet, en cas d'injection faite 536 D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE pendant la période d’incubation? A cette période, l'organisme est en train de fabriquer de la sensibi- lisine; celte sensibilisine se fixe peu à peu, par petites quantités, sur le cerveau. Mais la nouvelle injection de sérum, faite à cette période, introduit dans l'organisme une certaine quantité d'anti-sensi- bilisine ; celle-ci va donc se combiner avec la sensi- bilisine au fur et à mesure de sa formation, et la neu- tralisera. Ellesecombineraaussiaveclasensibilisine fixée déjà sur les cellules cérébrales ; cette combinai- son produira peut-être une série de « chocs anaphy- lactiques », mais l'effet de ceux-ci ne saurait se com- parer au formidable choc unique, lorsque, en plein état d’anaphylaxie, foute la sensibilisine fixée sur le cerveau est neutralisée par une quantité correspon- dante d’anti-sensibilisine charriée par le sérum de la seconde injection. Cette explication s'applique encore aux autres modes d'immunisation anti-anaphylactique. Si des injections intra-cérébrales de 1/40 à 1/400 de centimètre cube de sérum, faites en plein état d’anaphylaxie, provoquent des accidents mini- mes (un peu de toux) et immunisent l'animal, c'est qu'on met la sensibilisine en présence de petites quantités d’anti-sensibilisine : la combinaison, la neutralisation se fail encore, mais par « chocs » répétés et peu énergiques. L'immunisation par des injections intra-péritonéales de sérum chauffé ressortit au même mécanisme : le chauffage ne détruit jamais complètement l’anti-sensibilisine ; celle-ci, à mesure qu’elle est absorbée, va par petites quantités neutraliser la sensibilisine fixée sur le cerveau. L'éther, enfin, permet à l'animal de sup- porter le « choc » total, et si, en sortant de la nar- cose, il se trouve immunisé, c'est parce que, pendant son sommeil, l’anti-sensibilisine s'est combinée avec la sensibilisine. Cette combinaison, cette neutralisation aboutit- elle à la formation d'un nouveau corps? Quand on parle d'immunité, nous attribuons ordinairement celle-ci à la formation dans l'organisme de sub- stances immunisantes. Est-ce aussilecas del'immu- nité anti-anaphylactique ? Besredka ne le pense pas. A son avis, les choses se passeraient comme dans l'expérience classique qui consiste & laver un cerveau tétanique avec du sérum. On sait que la substance cérébrale est capable de fixer de grandes quantités de toxine télanique, et de conférer le tétanos lorsqu'elle est injectée à un animal; mais il suffit de traiter le cerveau gorgé de toxine avec du sérum anti-téta- nique pour neutraliser la toxine tétanique qu'il ren- ferme et rendre son injection anodine, indifférente. D'après Besredka, l’immunité anti-anaphylactique rentrerait dans cet ordre de faits : en se combinant avec la sensibilisine, l'anti-sensibilisine se conten- terait de désensibiliser l'animal, de le désanaphylac- tiser, de rétablir provisoirement l'état antérieur à l’anaphylaxie. L'immunité anti-anaphylactique diffère donc de celle que crée la vaccination contre les poisons. $ 5. — L’anaphylaxie lactique. La théorie de l’immunité anaphylactique, telle qu'elle vient d'être exposée, est capable d'expliquer l’anaphylaxie et l’immunité anaphylactique envers d'autres substances non toxiques : ovalbumine, extrait de petits pois, papaïne, et même envers les substances toxiques, congestine, toxine typhique, tuberculine. Un petit fait, signalé tout récemment à la Société de Biologie (21 novembre 1908) par Besredka, montre que cette théorie si séduisante n'est probablement pas définitive. Besredka a notamment constaté qu'en dialy- sant le sérum à travers un sac de collodion, on obtient un liquide qui, injecté à très petite dose dans le péritoine de cobayes anaphylactisés, les immunise en quelques heures contre l’anaphylaxie. Autrement dit, après une injection intra-péritonéale de sérum dialysé, le cobaye sensibilisé supporte impunément une injection intra-cérébrale mortelle de sérum : le sérum dialysé l’a immunisé. On obtient le même résultat en opérant avec le préei- pité qu'on obtient en mélangeant une partie de sérum avec deux parties d'alcool à 90°: dissous dans l’eau et filtré, ce précipité confère l’immunité en injection intra-péritonéale et même sous forme de lavement, en injection intra-rectale. Cela étant, on est amené à admettre que le sérum normal ren- ferme non seulement un sensibilisinogène et une anti-sensibilisine, mais encore une substance vac- cinante. La coexistence de ces trois substances est- elle compatible avec la théorie ci-dessus résumée de l’anaphylaxie? On peut se le demander. Ce sont les recherches sur l'anaphylaxie lactique qui ont mis Besredka sur la voie d'un vaccin contre l'anaphylaxie sérique. Nous avons déjà dit que, dès 1903, Arthus avait montré qu’on peut anaphylactiser un animal contre le lait et que cette anaphylaxie est strictement spécifique. Plus tard, Rosenau et Anderson ont établi que cette anaphylaxie exige, pour se réa- liser, une période d'incubation dont la durée est de vingt-six à trente et un jours. Ces recherches ont élé systématiquement poursuivies par Besredka. Nous allons les résumer brièvement. La meilleure facon de réaliser chez le cobaye l'état d'anaphylaxie lactique consiste à lui injecter dans le péritoine une petite quantité de lait, de lait bouilli de préférence. Au bout de vingt jours, il est anaphylactisé. À partir de ce moment, une injection intra-cérébrale de 1/10 de centimètre cube PR » L. D' KR. ROMME — 237 L'ANAPHYLAXIE de lait cru ou bouilli provoque chez lui des accidents anaphylactiques qui se terminent par la mort. Nous avons vu que, dans l'anaphylaxie sérique, cette mort est attribuée par Besredka au choc ré- sultant de la rencontre de l’anti-sensibilisine avec la sensibilisine fixée au cerveau et formée préalable- ment dans l'organisme, pendant la période d’incu- bation. Nous savons également que la sensibilisine est un produit de réaction provoquée par le sensi- bilisinogène, et que celui-ci se trouve dans le sérum injecté, à côté de l’anti-sensibilisine. Nous connais- sons enfin les expériences montrant qu'une tem- pérature de 100° détruit dans le sérum l’anti-sensi- bilisine (pouvoir ou substance toxique), et laisse -persister le sensibilisinogène (propriété ou sub- stance anaphylactisante). Or, dans le lait, le sensibilisinogène et l’antisen- sibilisine se comportent autrement envers la cha- leur. Celle-ci ne les dissocie pas, c'est-à-dire que les deux résistent même à une température de 120°. Si l’on s'adresse à des températures plus élevées, si l’on chaufte à 130 et 135°, on constale que cette température fait disparaître à la fois le sensibili- sinogène et l’anti-sensibilisine. Autrement dit, un lait chauffé à 135° ne tue pas en injection céré- brale un cobaye anaphylactisé, parce que son pouvoir toxique (l’anti-sensibilisine) a été détruit; mais il n'anaphylactise pas non plus un cobaye neuf, parce que son pouvoir anaphylactisant (le sensibilisinogène) a été détruit par la chaleur. En revanche, ce lait chauffé à 135°, qui n'est plus toxique, ni sensibilisant, devient vaccinant : injecté à la dose de 5 centimètres cubes dans le péritoine d'un cobaye anaphylactisé, il lui permet de sup- porter impunément l'injection intra-cérébrale de lait toxique non chaufté. Le lait contient donc une substance vaccinante que le chauffage permet d'isoler. Cette substance vaccinante, où réside-t-elle? Si l’on opère avec de la caséine, on constate qu'elle est toxique pour les animaux sensibilisés, qu'elle sensibilise les ani- maux neufs et qu'elle est capable d'immuniser les animaux anaphylactisés. Si l'on opère avec du petit-lait, on constate qu'il est dépourvu de toxi- cité pour les animaux sensibilisés, chez lesquels, en injection intra-cérébrale, il ne provoque pas d'accidents anaphylactiques; en revanche, il con- tient une substance capable d'anaphylactiser les animaux neufs et possède au plus haut degré la propriété de conférer l’immunité aux animaux en état d'anaphylaxie. Quelle que soit la voie par laquelle on l’introduit, que ce soit dans le péri- toine, dans le rectum ou dans l'estomac, il permet à l'animal anaphylactisé de supporter impunément l'épreuve intra-cérébrale. Cette propriété vacci- nante existe également dans le lait cru, dans le lait en nature. III. — L'ANAPHYLAXIE ET LES INJECTIONS INTRA-VEINEUSES DE PEPTONE Nos lecteurs ont certainement remarqué, dans ce qui précède, la tendance des auteurs à faire ressor- tir le mécanisme de l’anaphylaxie, ainsi que ses diverses manifestalions et même ses particularités, à la théorie moderne de l’immunité. À ce point de vue, il est particulièrement intéressant de noter ici une théorie de l’anaphylaxie qui vient d'être tout récemment formulée par MM. Biedl et Kraus. ÿ {. — La théorie de MM. Biedl et Kraus. MM. Biedl et Kraus ont opéré sur des chiens, chez lesquels ils créaient l’état d’anaphylaxie en leur injectant, sous la peau, 3 à 5 centimètres cubes de sérum hétérogène, sérum de cheval ou de bovidé. Après la période d'incubation d'environ (rois semaines, ils provoquaient chez leurs animaux les accidents d'anaphylaxie au moyen d'une injection d'épreuve de 10 centimètres cubes de sérum, faite dans les veines. Les phénomènes d'intoxication étaient ceux que nous avons notés plus haut. Mais, en examinant le sang et la pression sanguine pendant cette période d'intoxication, MM. Biedl et Kraus ont constaté deux faits auxquels ils attribuent une très grande importance, à savoir : 1° un abaissement considé- rable de la pression sanguine; 2° l’incoagulabilité ou, en tout cas, une diminulion considérable de la coagulabilité du sang. Dans leurs expériences, cet abaissement de la pression sanguine se pré$entait avec les caractères d’un phénomène primitif. A peine l'injection était- elle terminée que, de 120 à 150 Hg, la pression artérielle tombait à 80, à 60, voire à 40; cet abais- sement persislait tant que durail la période d'in- toxication et se relevait ensuite, à mesure que les phénomènes d'empoisonnement se dissipaient. Aussi MM. Biedl et Kraus n'hésitent-ils pas à faire subordonner à cet abaissement de la pression san- guine toute la symptomatologie de l'intoxication anaphylactique. Pour eux, l'anémie cérébrale, se produisant subitement à la suite de la diminution brusque de la pression artérielle, expliquerait suffi- samment la période initiale d’excitation et la seconde phase, celle de prostralion, qu'on découvre dans la succession des symptômes de l’intoxication anaphylactique. Voici done, avec quelques détails, les faits et les expériences que MM. Biedl et Kraus invoquent en faveur de ce rôle primordial de l'abaissement de la pression sanguine. 38 Tout d'abord, chez un animal neuf, une injection intra-veineuse de 10 centimètres cubes de sérum hétérogène n’exerce presque aucun effet sur l'état de la pression sanguine; la diminution de celle-ci, survenant, dans les mêmes conditions, chez un animal anaphylactisé, indique suffisamment son caractère en quelque sorte spécifique. C'est encore la conclusion à laquelle on arrive quand on étudie la pression sanguine chez un animal qu'on désa- naphylactise sous l'éther. Nous avons vu qu'en pareil cas l'animal supporte l'injection d'épreuve sans offrir le moindre symplôme d'intoxication et qu'au réveil il se trouve désanaphylactisé. Or, en matière d'accidents d’anaphylaxie, le seul phéno- mène qu'on constate chez lui, pendant la narcose sous l’éther, c'est encore un abaissement de la pression sanguine. Enfin, cet abaissement existe également chez les animaux anaphylactisés, mais qui résistent et semblent réfractaires à l'injection d'épreuve. Chez eux, cette diminution de la pres- sion sanguine est la seule manifestation, manifes- tation fruste, de l'intoxicalion anaphylactique. Nous avons indiqué, plus haut, que, M. Richet et pour M, Besredka, le poison anaphy- lactisant aurait une affinité particulière pour le système nerveux. MM. Biedl et Kraus sont d'un autre avis. En s'appuyant sur leurs expériences, ils soutiennent que le poison anaphylactisant agit très probablement sur les fibres musculaires lisses, sur celles des vaisseaux entre autres, et que, par consé- quent, la diminution de la pression sanguine qui caractérise l'empoisonnement anaphylaclique est due à une vaso-dilatalion d'origine périphérique. Ils ont, en effet, constaté que, pendant la période d'intoxication, le cœur conserve son rythme normal et que l'excitation du centre vaso-moteur ou des ter- minaisons du splanchnique n'exerce aucune in- fluence sur l’abaissement de la pression sanguine; celle-ci n'est pas non plus influencée par une injec- tion d'adrénaline, laquelle, comme on sait, agit sur les terminaisons nerveuses. En revanche, une injec- tion de chlorure de baryum, qui exerce son action pour sur les fibres musculaires, relève presque instanta- nément la pression sanguine el fait disparaitre aussitôt les symplômes d'intoxication anaphylac- tique. Elle empêche même ceux-ci de se produire, quand elle est faite avant l'injection d'épreuve. Ce qui découle de toutes ces expériences, c'est que la substance qui, dans l’anaphylaxie sérique, fait éclater les accidents d'intoxication est une sub- stance qui agit sur les fibres lisses et amène un abais- sement de la pression sanguine par vaso-dilatation d'origine périphérique. Quelle est cette substance? MM. Biedl et Kraus répondent à cette question en rappelant que l’abaissement de la pression san- guine, l'incoagulabilité du sang et tous les symp- D' R. ROMME — l L ANAPHYLAXIE tômes d'intoxication qui s’observent chez les ani- maux anaphylactisés, existent également dans un autre empoisonnement, celui qu'on réalise par une injection intra-veineuse de peptone de Witte. Or il ne s’agit pas là d'une simple analogie, car les expé- riences ont montré à MM. Biedl et Kraus qu'en matière d'anaphylactisation et de désanaphylactisa- tion sériques (immunité anti-anaphylactique), pep- tone et sérum peuvent être substitués l’un à l’autre. Ainsi, chez un chien qui se trouve désanaphylactisé après l'injection d’épreuve, une injection de peptone faite pendant la période d'intoxication ou plus tard, quand l'animal est complètement rétabli, ne pro- voque plus aucun symptôme d'intoxication. Inver- sement, un chien en état d’anaphylaxie est parfaite- ment désanaphylactisé (immunisé) par une injection de peptone, si bien qu'une injection de sérum, faite après celle de peptone, ne produit chez lui aucun symptôme d'intoxication. On devine comment, à la lumière de ces faits, MM. Biedl et Kraus expliquent le mécanisme de l'anaphylaxie sérique. Ils pensent que la première injection de sérum fait naître dans l'organisme, par réaction, une substance qui réalise l’état d'ana- phylaxie. Lors de l'injection d'épreuve, cette sub- stance se combine probablement avec quelque sub- stance albuminoïde du sérum injecté, combinaison qui forme une albumose ou une peptone toxique à laquelle ressortissent les symptômes d'intoxication anaphylactique. Si, après cette période d'empoison- nement, l'animal se trouve désanaphylactisé (immu- nisé), c'est parce que la totalité de la substance ana- phylactisante à été absorbée par le sérum injecté el a contribué à la formation d'une peptone toxique. $ 2. — Les expériences de MM. Biedl et Kraus commentées par M. Richet. Est-il permis de penser que, d'ores et déjà, les expériences de MM. Biedl et Kraus dépouillent l’ana- phylaxie de son mystère et lui substituent un fait précis : l'intoxication par une peptone? Tel ne semble pas l'avis de M. Richet. En ce qui concerne l’abaissement de la pression sanguine, M. Richet a constaté ce phénomène dès le début de ses recherches sur la congestine. Il ne pense cependant pas que cet abaissement soit d'origine périphérique. En tout cas, il ne lui parait pas possible d'attribuer à cet abaissement le rôle que lui assignent MM. Biedl et Kraus. « Il est évident, écrit M. Richet, que l’abaissement de la pression artérielle ne peut pas suffire à expliquer tous les symptômes, vomissements, diarrhée profuse, tilubation, paraplégie, ivresse, cécité psychique, coma, tous phénomènes survenant avec une rapidité extrème chez le chien anaphylactisé pour lactino-congestine. On connaît les effets D' R. ROMME — L'ANAPHYEAXIE 539 déterminés par une pression artérielle faible. En réalité, ils sont loin d'être aussi terrifiants qu’on le suppose. Même le nitrite d'amyle, qui, à faible dose, abaisse subitement la pression, ne produit pas ces graves désordres. » Ajoutons que M. Richet n'a pas trouvé une dimi- nution appréciable de la coagulabilité du sang chez les animaux anaphylactisés par la congestine. Quant à l'identité de l'intoxication anaphylactique avec celle que provoquent les injections de peptone, elle lui paraît discutable pour les raisons sui- vantes : 1° Les phénomènes d'anaphylaxiesontspécifiques, en ce sens que, dans les injections d’épreuve qui provoquent les accidents d'intoxication, les sub- stances anaphylactisantes ne peuvent être substi- tuées l'une à l'autre; 2° la peptone produit l'immu- nité, ce qui est exactement le contraire de l’ana- phylaxie; 3° les effets généraux des peptones ne ressemblent nullement à ceux de l’anaphylaxie aiguë; 4° certaines substances sont anaphylacti- santes à la dose de 0,05 gr. par kilogramme, dose à laquelle la peptone est absolument inefficace. $ 3. — La conception de M. Arthus. La très grande analogie, sinon l'identité com- plète entre l’anaphylaxie aiguë et les accidents qui apparaissent après les injections intra-veineuses de peptone, se retrouve dans un travail de M. Ar- thus, publié à peine quinze jours après celui de MM. Biedl et Kraus. Comme ces deux auteurs, M. Arthus a constaté que, chez les chiens en état d’anaphylaxie sérique, l'injection d'épreuve provoque, presque aussitôt et comme premier phénomène, un abaissement de la pression sanguine, en même temps que le sang devient incoagulable. On sait qu'après les injec- tions de peptone, le sang redevient, au bout de quelque temps, spontanément coagulable, et qu’on peut obtenir artificiellement la coagulation du « sang de peptone » incoagulable, soit en l’addi- Honnant de deux à trois volumes d’eau distillée, soit en l’acidulant faiblement, soit en y ajoutant des sels calciques. Or, dans les expériences de M. Arthus, le sang incoagulable des chiens séro- anaphylactisés coagule par ces mêmes agents, dans ces mêmes conditions, avec ces mêmes carac- tères du coagulum, quand il est recueilli après l'in- jection intra-veineuse de sérum. Aussi M. Arthus n'hésite-t-il pas à écrire que « l’intoxicalion sé- rique des chiens séro-anaphylactisés est rigoureu- sement superposable à des chiens normaux ». M. Arthus est cependant d'accord avec le Profes- seur Richet pour ne pas faire de la baisse de la pression sanguine la cause première de tous les l'intoxication protéosique accidents. En revanche, en s'appuyant sur ses expériences faites sur des lapins, il n'accepte pas les autres objections de M. Richet que nous avons énumérées. Tout d’abord, chez le lapin du moins, M. Arthus n'a pas constaté la spécificité de l’anaphylaxie. I a vu des lapins anaphylactisés par des injections sous-culanées de sérum de cheval, ou d’ovalbu- mine, ou de gélatine, ou de peptone de Witte, réagir indifféremment à chacune de ces substances. C'est ainsi qu'un lapin ovo-anaphylactisé ou pepto- anaphylactisé présente des accidents d'intoxication après une injection d'épreuve de sérum ou de peptone. En ce qui concerne l’immunité, que M. Ri- chet considère comme non existante dans l'ana- phylaxie, M. Arthus soutient, en s'appuyant sur ses expériences, qu'elle existe dans l’anaphylaxie avec les mêmes caractères que dans intoxication par les peptones; seulement, dans ces deux états, elle est de courte durée et ne dépasse pas vingt- quatre heures. Dans ses expériences, il a vu des chiens ayant subi une première injection de pep- tone ou des chiens séro-anaphylactisés ayant subi une injection d'épreuve de sérum, réagir par les mêmes phénomènes : les premiers à une nouvelle injection de peptone, les seconds à une nouvelle injection de sérum, quand ces nouvelles injections avaient été faites vingt-quatre heures après les pre- mières. Enfin, pour ce qui est des phénomènes généraux, M. Arthus, d'accord en cela avec Biedl et Kraus, les a trouvés absolument identiques dans l’intoxication par les peptones et dans l’intoxica- lion anaphylactique. Dans ces expériences de M. Arthus, faites indé- pendamment de celles de Biedl et Kraus, il est un point qui mérite de nous arrêter un instant : Nous avons vu, plus haut, que la spécificité de l'anaphylaxie était admise par tous les auteurs qui se sont occupés de cette question; c'est même sur cette notion de la spécificité qu'on a établi les diverses théories pathogéniques que nous avons signalées. L'assimilation de l’anaphylaxie sérique à une intoxication par les peptones, telle que Biedl et Kraus l'ont établie dans leur travail, ne s’accordait guère avec cette notion de spécificité. Les expériences de M. Arthus semblent montrer définitivement que, chez les lapins du moins, la spécificité anaphylactique n'existe p: Aussi bien, pour M. Arthus, « la réaction anaphy- lactique est une intoxication protéique, ou, plus exactement, l’intoxication protéique. L'état ana- phylactique d’un animal est l'état de sensibilité à l'intoxication protéique; la préparation anaphylac- tique est l’ensemble des opérations rendant l'animal sensible à l’intoxication protéique (par une protéine inoffensive pour l'animal neuf). La préparation D' R. ROMME — L'ANAPHYLAXIE anaphylactique ne crée donc pas un élat anaphy- lactique spécifique, et c'est là une différence fonda- mentale avec l’immunisation contre les toxines et les microbes ». IV. — L'ANAPHYLAXIE CHEZ L'HOMME. L'anaphylaxie existe chez l'homme, ou du moins on a essayé de faire ressortir à l'anaphylaxie cer- tains faits observés en Clinique. Pour quelques- uns d'entre eux, le rapport avec l’anaphylaxie est évident; pour les autres, il ne s’agit que d'un rap- prochement qui n'est peut-être pas tout à fait justifié. $ 1. — La maladie sérique. On désigne sous le nom de maladie sérique les accidents (douleurs dans les articulations, fièvre, qui surviennent souvent éruptions, ædèmes, ete.) huit ou à douze jours après une injection de sérum anti-diphtérique. Ces accidents offrent ceci de par- ticulier qu’en cas d'une seconde injection de sérum, faite quelques jours après la première, ils appa- raissent plus tôt et revêtent une forme plus grave. Pour expliquer ces accidents, von Pirquet et Schick avaient admis que le sérum de cheval (qui véhicule l’antitoxine) provoque dans l'organisme, par réaction, la formation d'un anticorps el que cet anticorps, en se combinant avec son antigène (le sérum de cheval encore présent dans l'orga- nisme), provoque les acccidents qui constituent la maladie sérique. Si, après la seconde injection, la maladie se déclare plus tôt el revêt une forme plus grave, ce serait parce que l'organisme contient encore de l'anticorps antérieurement formé, ou bien parce qu'il a acquis la propriété de fabriquer une plus grande quantité d'anticorps. Von Pirquet et Schick ont donné à ce processus le nom d’al- lergie. Mais on voit qu'il absolument aucune différence entre l'allergie et l'anaphylaxie. C'est, du reste, à l’anaphylaxie que Marfan et son élève Lemaire ont rattaché la maladie sérique, n'existe en essayant de donner à celle-ci un substratum anatomique. Ils ont notamment constaté que, chez les lapins anaphylactisés contre le sérum de cheval ou chez les enfants présentant des accidents sériques, le sang acquiert une nouvelle propriété : son sérum, mis en présence de sérum de cheval normal, pro- voque dans celui-ci la formation d'un précipité. Autrement dit, chez les animaux anaphylactisés ou chez les enfants « sériques », le sang contient des précipitines spécifiques. Celles-ci, produits d'une réaction, se forment lentement (période d’incuba- ; une fois formées, elles provoquent la forma- tion d'un précipité. Si le sérum injecté n'est pas tion) complètement résorbé au moment de leur forma- tion, il se forme un précipité pouvant constituer de véritables embolies capillaires, qui expliqueraient les douleurs musculaires et articulaires, les érup- tions, les œdèmes, l’urticaire. Une seconde injection renforce cette réaction. $ 2. — La réaction de Koch, la cuti-réaction, l’ophtalmo-réaction. Il est parfaitement évident que, par l'ana- phylaxie, on s'explique fort bien la réaction géné- rale si caractéristique que l'injection de tubercu- line provoque chez l’homme ou chez l'animal tuberculeux. Il est permis de penser que l'infection tuberculeuse et sa toxine, au lieu de créer un état d'immunité, mettent l'organisme en état d'ana- phylaxie par production d'un anticorps, d'une sensibilisine. En cas d'injection de tuberculine, l'anticorps qu'est la sensibilisine se rencontre avec son antigène, la tuberculine, se combine avec lui et déclanche les accidents d’anaphylaxie (fièvre élevée, arthralgie, myalgie, congestion des foyers locaux, etc.). On concoit que c’est de cette façon encore, c'est- à-dire comme forme atténuée des accidents ana- phylactiques, qu'on peut expliquer la cuti-réaction de von Pirquet ou l’ophtalmo-réaction de Calmette. $ 3. — L’intolérance des nourrissons pour le lait de vache. Il n'est pas rare de rencontrer des nourrissons élevés au biberon, chez lesquels le lait de vache, provoque, à un moment, des phénomènes d'intolé- rance. Chez eux, la moindre prise de lait de vache s'accompagne de vomissements, de diarrhée, de fièvre ou d'hypothermie, de phénomènes de col- lapsus parfois mortels. Ce sont ces accidents que le Professeur Hutinel a récemment rattachés à l’anaphylaxie. Le méca- nisme de cette anaphylaxie serait le même que dans la tuberculose. Au lieu de créer un état d'im- munité chez un nourrisson au biberon, le lait de vache finirait par produire chez lui un état d'ana- phylaxie spécifique. Quand cet état est constitué, chaque nouvelle prise de lait de vache provoque des accidents anaphylactiques. Il est possible qu'il en soit ainsi. Rosenau et Anderson sont, en elfet, arrivés àanaphylactiser des cobayes par la voie gastrique, en les nourrissant avec du lait de vache. Il est vrai que ce résultat n’a jamais pu être obtenu par Besredka. Nous avons vu, cependant, que l'intestin laisse passer la substance vaccinante (anti-anaphylactique) du petit-lait et du lait cru. On peut donc admettre que la muqueuse plus ou moins lésée du nourrisson dyspeptique n'arrête peut-être pas, ni ne modifie le sensibilisi- … state. PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE nogène du lait. Si tel était le cas, l'hypothèse de M. Hutinel sur la nature anaphylactique des acci- dents d’intolérance chez les nourrissons au biberon se trouverait confirmée. Disons enfin qu'on a encore attribué à l'anaphy- laxie certains accidents des pleurésies séro-fibri- neuses (Froin), et les accidents qu'on observe parfois après la ponction des kystes hydatiques du foie. V. — CONCLUSION. Nous avons indiqué, dès le début, les difficultés qu'on rencontre lorsqu'on se propose d'exposer d'une facon systématique une question à l'étude, comme l’est encore, à l'heure acluelle, l'anaphy- laxie. Le désir de faire ressortir à un phénomène général des faits parfois disparates conduit à édifier des hypothèses et à baser celles-ci sur des actions qui n'existent pas et sur des substances imaginaires. Il est parfaitement évident que, lorsque nous con- naîtrons mieux la nature et le mécanisme de l’ana- A1 phylaxie, les termes certainement provisoires de sensibilisine, de sensibilisinogène, d’anti-sensibili- sine, de lysine, de coaguline, d’apotoxine, de choc anaphylactique ne tarderont pas à disparaitre, en même temps que les hypothèses auxquelles ils servent de base. Les expériences de MM. Biedl et Kraus et celles de M. Arthus constituent cette pre- mière tentative de revision. Ce qui est à retenir, pour le moment, c'est que l'incorporation de certaines toxalbumines et de certaines albumines non toxiques crée un état d’hy- persensibilité particulière de l'organisme envers ces substances. Ce nouvel état, en contradiction avec tout ce que nous savons jusqu'à présentsur le mode d'action des substances hétérogènes, se crée lente- ment et ne s'établit qu'après une période d’incuba- tion. C’est cet état, dont la nature et le mode de production nous échappent encore presque entie- rement, qui à été désigné par M. Richet sous le nom d'anaphylaxie. D'° R. Romme. Préparateur à la Faculté de Médecine de Paris. LA NAVIGABILITÉ DU RHONE Ï. — LES CONDITIONS GÉOGRAPHIQUES. Deux conditions géographiques intéressent par- ticulièrement le point de vue spécial de la naviga- tion : le climat du bassin et la topographie du lit. Le bassin alimentaire du Rhône, jusqu’à son entrée dans le Léman, mesure 5.220 kilomètres carrés, dont 933 kilomètres de glaciers. Par l’Arve, le fleuve recoit encore les apports du groupe du Mont Blanc. On peut dire ainsi que, jusqu'à l’em- bouchure de l'Ain, le régime du Rhône est fran- chement glaciaire. Mais, à partir de ce point, les affluents de la rive droite, la Saône surtout, ont un caractère uniquement pluvial, qui vient modifier profondément le régime du fleuve, d'autant plus que les affluents de gauche, alimentés par les Alpes : le Fier, l'Isère, la Durance, ont un régime mixte, où les écoulements glaciaires manifestent une ‘nfluence de moins en moins accentuée. Le cours d'eau glaciaire a des eaux abondantes en été, au moment de l'étiage du cours d'eau pluvial; le régime mixte a done un caractère compensateur extrèmement avantageux, au point de vue navi- gable, en particulier‘. Les chiffres que nous donnons ci-dessous, d'après M. René Tavernier, représentent les résultats moyens d'une série ! René Tavernier : La Richesse du Rhône et son ulilisa- tion. Rapport présenté à la Société d'Économie politique de Lyon. 1 br. Bonnaviat, Lyon, 1908. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. d'années; ils permettent de définir le régime 20rmal | du fleuve aux différents points considérés, en déter- minant les débits caractéristiques et la période de l’année pendant laquelle ces débits devront norma- lement se produire. L'écart entre le régime normal et le régime réel sera d'autant plus accusé que le régime pluvial prédominera sur le régime glaciaire. La fonte des neiges et des glaciers est un phéno- mène beaucoup plus régulier que les chutes de pluie dans notre climat. DÉBITS D'ÉTIAGE DÉBITS MOYENS litres par seconde litres par seconde A la frontière suisse . . . 120.000 300.000 A l'origine du canal de Uonare ED: 000 300.000 Du confluent de la Saône à celui de l'Isère. . 310.000 195.000 Du confluent de l'Isère à celui de l'Ardèche , . 400.000 1.130.000 Du confluent de l'Ardèche à celui de la Durance. 470.000 1.255.000 Duconfluent de la Durance au canal Saint-Louis. 500.000 1 452.500 Le régime du Rhône présente un caractère tor- rentiel, non seulement depuis sa source jusqu'au Léman, mais encore, et par suite d'accidents géo- logiques, sur un certain parcours après sa sortie du lac. Ainsi, la puissante influence régularisa- trice du Léman se trouve très sensiblement atténuée dans ses effets utiles par l'apport de l’Arve d’abord, et ensuite par les accidents du lit du fleuve qui 12° PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILILÉ DU RHONE existent jusqu'à Bellegarde. C'est seulement aux environs de Seyssel que le fleuve entre dans la zone de compensation, et c'est après Arles qu'appa- raissent les premiers dépôts d’alluvions qui vont régulièrement agrandir le delta ‘. Au sens ordinaire du mot, tout cours d’eau à forte pente, à courant très rapide, est torrentiel. Dans le langage technique, ce qualificatif est réservé aux Cours d'eau qui présentent des crues soudaines et très élevées, comme il arrive pour ceux dont le bassin supérieur est imperméable, abrupt, déboisé. Ce qui caractérise le mieux le régime torrentiel, c'est l'élévation du rapport entre le débit des plus hautes eaux et le débit d'étiage. M. Barlalier de Mas, auquel nous empruntons ces considérations, estime que, malgré sa forte pente et la rapidité de son courant, le Rhône n’a pas un régime si torrentiel qu'on le croit généralement; le rapport en question ne dépasse pas 47 en aval du confluent de la Saône, et 38 en aval du confluent de la Durance; ce n’est guère plus que pour la Seine à Paris (34). La Loire, au contraire, peut être considérée comme le type des cours d'eau tor- rentiels : le rapport, qui est de 261 à Briare, est encore de 161 à Tours *. Sur une longueur de 532 kilomètres, qui va de la frontière suisse à la Méditerranée, le Rhône doit gagner une différence d'altitude de 370,20, qui se décompose de la manière suivante * : LONGUEUR PENTE PENTE de la totale moyenne section en mètres en mèlres en kilom. par section par kilom. De la frontière suisse au chà- feau du PALC- 8 0... 221,400 13,13 2,691 Du château du Pare au pont du Sault. rie le eau 64,27 0,682 Du pont du Sault à l'origine du canal de Jonage. . 5.200 14,20 0,396 De l'origine du canal de Jo- nage au canal de fuite de TOP ER . 416,900 14,80 0,875 Du canal de fuite de Jonage à la Saône. . 5 10,000 6,10 0,610 De la Saône à l'Isère. . . . 104,300 51,70 0,496 De l'Isère à l'Ardèche . . . 86,700 67,50 0,719 De l'Ardèche à la Durance. 57,250 29,20 0,510 De la Durance à Arles. . 30,750 9,00 0,293 D'Arles au canal St-Louis . 44,500 1,90 0,043 Ces pentes se trouvent aggravées par le fait que le fleuve parcourt la distance qui sépare Lyon de la mer suivant une ligne à peu près rectiligne; il en résulte une augmentation de la vitesse d’écoule- ment. La vitesse superficielle du Rhône est à 1 RENÉ TAVERNIER : Op. cit. 2B, pe Mas : Aménagement et exploilation du réseau navigable français. 4°r Congrès national de Navigation inté- rieure, Rapports et comptes rendus. Bordeaux, 1908. ! Nous empruntons ces chiffres à M. RENÉ TAVERNIER. Op. cit l'étiage de 1,50 à 2%,50, parfois 3,50; elle double pendant les crues. Cette vitesse fait que le fond se déplace avec la surface, de telle sorte qu'étant donné l’accroisse- ment de la dénudation des pentes du bassin du Rhône, l'entrainement continu des matériaux pro- duit l'alternance des mouilles et des maigres, c'est- à-dire de parties profondes et de bancs de graviers qui constituent un des obstacles les plus sérieux à la navigation. Par contre, le Rhône possède une réelle supério- rité sur les fleuves du Nord : l’état de l'atmosphère y est rarement de nature à entraver la circulation ; les fortes gelées sont en nombre pour ainsi dire insignifiant, et les brouillards ne sont presque jamais assez épais pour constituer une gêne sérieuse pour la navigation. II. — L'AMÉNAGEMENT DU FLEUVE. Après la mise en exploitation complète de la ligne du chemin de fer de Paris à Marseille, le trafic s'était écarté du fleuve, dont les conditions de navigabilité étaient déplorables *. Le lit navigable se déplacait à chaque crue et les chômages, par manque d’eau sur les hauts fonds, étaient longs et fréquents. Les arrêts de quinze jours à un mois, et même davantage, se produi- saient souvent; certaines années, on a compté plus de cent vingt-cinq jours d’arrêt complet de la navi- gation par les basses eaux. C'est alors qu'intervint le programme Freycinet : la loi du 13 mai 1878 consacrait à l'amélioration du fleuve une dépense de 45 millions. La direction des travaux fut confiée à M. l'ingénieur en chef Jacquet, auquel succéda bientôt M. Girardon. Le programme comprenait : 1° la constitution d’un lit mineur au moyen d'un ensemble de digues longitudinales et de digues transversales submersibles; 2° la régula- risalion du chenal navigable et la rectification du profil en long par des épis noyés et des seuils de fond dans les grandes profondeurs. Voici les résultats obtenus : La première difli- culté à vaincre était l'insuffisance du mouillage en basses eaux. Le mouillage primitif tombait à 0,40 au moment des eaux d'étiage; les améliorations successives l’ont porté à 0",85 en 1884, 1 mètre en 4 En 1855, le tonnage, ramené à la distance entière entre Lyon et Arles, était de 392.000 tonnes à la descente et 242.000 tonnes à la remonte, soit 634.000 tonnes, y compris 75.000 tonnes de bois flotté. L'ouverture de la ligne Lyon- Marseille fit tomber ce trafic à 586.000 tonnes en 1856 et à 273.000 tonnes en 1859. La diminution continua jusqu'en 1877, où nous relevons 130.000 tonnes. La reprise s'accentua à mesure que les travaux d'aménagement se poursui= vaient; en 1892, le trafic atteint 254.000 tonnes et, en 1907, 267.000 tonnes. {F. TEyssÈpre : Rapport à la Chambre de | Commerce de Nimes. Séance du 2 décembre 1908.) PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE 543 1890, 1,95 en 1894; depuis cette date, les travaux sont reslés à peu près complètement suspendus, mais, ce qui est très important, le résultat acquis s'est maintenu. Les longs chômages et la longue durée des périodes de réduction de chargement ont été autre- fois la source des plus graves difficultés de la navigation sur le Rhône, la cause de son excessive irrégularité et le motif principal de sa décadence. Le changement réalisé dans cet ordre d'idées donne le mieux la mesure du progrès acquis. Avant le commencement des travaux, et particulièrement entre 1853 et 1878, il n'y a pas eu une seule année sans chômage de basses eaux; leur durée a été en moyenne de 70 jours par an. De 1885 à 1901, sur 16 années observées, il y en a eu 11 sans aucun chômage; dans les autres, le chômage à oscillé entre 3 et 28 jours; la moyenne de la période est tombée à 3 jours et demi. On ne pouvait autrefois compter, en année moyenne, sur la profondeur de 1*,60 que pendant 165 jours; on a ce mouillage aujourd'hui pendant 327 jours. On n'avait les conditions larges et faciles du mouillage de 1",80 que pendant 127 jours; on les a aujourd'hui pendant 298 jours; le gain est donc de 171 jours, c'est-à-dire que la durée de la période de belle navigation a été augmentée de près de six mois. Les travaux ont, en outre, régularisé la direction du chenal, fait disparaitre les coudes brusques et adouci les rapides ; la plupart des récifs dangereux ont été dérasés et les ponts trop bas relevés. On peut ainsi résumer l’année navigable en trois périodes : 4) celle des chômages de toute nature, basses eaux, glaces, crues, etc.; sa durée était de trois mois avant les travaux, elle n’est plus que de deux semaines ; ) celle des difficultés et des réduc- tions de chargement; sa durée élait de quatre mois avant les travaux, elle n’est plus que de trois semaines et les difficultés sont moindres qu'autre- fois; c) enfin, celle de la navigation facile et à pleine charge; sa durée était de cinq mois avant les travaux, elle est de onze mois aujourd’hui *. Le tableau suivant, emprunté à M. Girardon, nous permettra de comparer les conditions de navigabilité du Rhône actuel à celles de quelques fleuves allemands : RHIN de Mannheim ELBE ODER VISTULE à Cologne jours jours jours jours Navigation à pleine charge. 193 195 121 155 Navigation à charge réduite. 153 106 157 106 Durée totale de lanavigation. 346 301 284 261 Chômage par basses eaux, crues glaces, etc. + 19 64 81 10% 365 65 365 365 4 HeNR1 GirarDoN : La N'avigabilité du Rhône. Conférence Si l'on excepte le Rhin, dont les conditions de navigabilité sont bien supérieures à celles du Rhône, nous voyons que les autres fleuves alle- mands se trouvent dans une situation moins favo- rable. La navigabilité de l'Elbe, en particulier, est des plus médiocres et le mouillage y tombe souvent jusqu’à 0,7). En 1899, année exceptionnelle où les chômages n'ont duré que 25 jours, les 340 jours de navigation se sont répartis ainsi : 141 jours avec un mouillage de 0",80 à 1",20; 88 jours avec un mouillage de 1,20 à 1%,60 et 111 jours seulement avec un mouillage de plus de 1,60. Ces conditions sont très notablement inférieures à celles du Rhône‘. III. — L'ÉTAT ACTUEL DE LA NAVIGATION. D'après M. Georges Blondel, l'Elbe recoit déjà à la frontière autrichienne un trafic de 2 millions et demi de tonnes, presque égal à celui de la Seine entre Rouen et Paris; ce tonnage augmente à me- sure qu'on se rapproche de Hambourg, où il approche du chiffre de 10 millions de tonnes *. C'est l'Elbe qui a été le principal facteur du développe- ment du plus grand port allemand et qui a permis, notamment, l'exploitation des mines de Stassfurt. Le Rhône ne traverse point une grande région industrielle comme la Saxe; il n’aboutit pas direc- tement à Marseille; il est à l'écart de la sphère de distribution des districts miniers; mais ces causes géographiques et économiques n'expliquent point suffisamment l’insignifiance de son trafic, comparé à celui de l'Elbe. En 1907, le trafic de la navigation sur le Rhône se décompose de la facon suivante : Navigation du Rhône. DU PARC DE LYON D'ARLES ANNÉE 1907 A LYON A ARLES À LA MER Longueur fréquentée (ki- Jometres)le un. 15% 287 48 Nombre de bateaux char- 6-945 6.865 1.648 gés et radeaux. faite à la Chambre de Commerce de Marseille. 4 br. in-49, Marseille, 1905. 1 L'aménagement de l'Elbe (Strombau) a coûté, d'après M. Paul de Rousiers, 1430 millions de francs de 1866 à 1896. Pour mener à bien cette entreprise, il a fallu l'effort com- biné de sept Etats politiques différents qui avaient créé une administration commune, chargée de transformer le fleuve pour unir leurs territoires isolés au grand centre d'activité maritime de Hambourg. 2 GeorcEs BLoNDEL : L’essor industriel et commercial du Peuple allemand. À vol. in-16, 3° édition. Paris, 1900. : Voici la statistique de la navigation fluviale sur l'Elbe, à Hambourg, en 1901 : NES CHALANDS métriques Arrivages de l'intér:eur (entrées). 26.127 3.264.057 { 5.945.454 Expéditions vers l'intérieur (sorties). 25.871 Total 51.998 9.209.511 Rapport consulaire n° 158, 21 janvier 1209. .. DU PARC DE LYON D'ARLES ANNÉE 1907 À LYON A ARLES A LA MER Tonnage effectif(tonnes) 170.009! 6:0292? 412.653 Tonnage kilo nétrique. 2.499.842 76.609.323 11.892.007 Tonnage ramené à la distance entière . . . 16.232 266.931 247.150 1006 a 18.413 219.081 207.176 ADR Te 16.551 289.191 225.255 MODE EE 25 250 201.545 164.344 |A 00S PRE EN M 04302 310.707 247.327 && À 1902 . . . . . . 33.862 290.956 230.460 28 | 1901 . . . . . . 35.432 213.589 © 215.531 En NA OO MEME ENS LE 32.915 271 .065 227.611 © E LÉTCT DOC Pier) LC LA ÉL SEE) 260.305 210.872 = £ |1898 32.94: 267.291 213.728 = 2 Jiso7 296.961 193.729 2 £ | 1896 941.075 190.507 MASON Eee 214.589 154.419 = | 1894 . . 218.598 163.879 1813 . 226.860 157.246 1892 . 254.040 164.241 La Compagnie générale de navigation Havre- Paris-Lyon-Marseille a monopolisé peu à peu d'une manière complète toute la batellerie et tout le trafic du Rhône. Les nouveaux chalands de 350 tonnes, remorqués alternativement par des remorqueurs et des toueurs', qui ont remplacé, en 1893, les an- ciens bateaux porteurs, sont bien étudiés, mais trop peu nombreux et n’offrent pas un tonnage : P P 5 supérieur aux anciens”. Comme tout industriel pourvu d'un monopole, elle préfère effectuer peu de transports à prix élevé plutôt que beaucoup de 1 Dont 167.195 tonnes de matériaux de construction et minerais. Nora. — Les chiffres relatifs au haut Rhône, du Pare à Lyon, ne donnent qu'une idée imparfaite du mouvement sur celte section du fleuve, car, bien que la lo gueur de 154 kilomètres de cette section soit navigable, qu'il circule des bateaux sur toute son élendue, elle n'est réellement fré- quentée que sur 70 kilomètres en amont de Lyon, dans la région qui fournit des matériaux de construction. Le mou- vement sur ces 70 kilomètres est représenté par les chiffres ci-dessous. longueur fréquentée de Quirieu à Lyon . . 70 kilom. Nombre de bateaux chargés et radeaux. 6.844 Tonnage effectif (tonnes). . . 166.505 Honnage kilométrique." 2.377.094 Tonnage ramené à la distance entière . . . 33.958 ? Dont 474.169 lonnes de matériaux de construction et minerais, 122.136 tonnes de produits agricoles et denrées alimentaires, 41.096 tonnes de produits industriels, 317.196 lonnes de combustibles minéraux, 26.161 tonnes de bois à brüler et de service, 11.465 tonnes de métaux et machines et 11.188 tonnes d'engrais et amendements. 3 Dont 158.226 tonnes de matériaux de construction et minerais, 86.616 tonnes de produits industriels, 62 929 tonnes d> produits agricoles et denrées alimentaires, 13.081 tonnes de bois à brûler et de service, 35.220 tonnes de combustibles minéraux, 5.402 tonnes de métaux et machines et 3.785 t. d'engrais et amendements. “ Lu traction s'opère de la facon suivante : Lyon-Tournon : remorquage: Tournon-Pont-Saint-Esprit touage; Pont- Suni-Esprit à Saint-Louis : remorquage; Saint-Louis-Mar- seille : remorqueurs de mer. Le trajet Lyon-Marseille se fait ainsi sans transbordement. ® CL : Notice sur la Compagnie générale de navigation Hivre-Paris-Lyon-Marseitle. À br. m-40 éditée par la Com- pagnie à l'occasion de l'Exposition de Paris, 1900. PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE transports à prix réduit, alors même qu'elle aurait la chance, avec ce dernier système, grâce à une meilleure utilisation des frais généraux, d’aug- menter son produit net. La Compagnie est cepen- dant en train de développer son matériel pour accroître son tonnage et le porter l’an prochain à 300.000 tonnes. Le trafic à la descente représente les deux tiers de celui de la montée‘. Le prix du fret varie avec la nature des marchandises, la sai- son, la provenance; il se tient de 10 à 33 °/, au- dessous des prix du chemin de fer. En été, le trajet Lyon-Marseille s'effectue en 4 à 7 jours, et en hiver, en 8 à 12 jours; pendant les mois de décembre et de janvier, le trafic se réduit dans une forle me- sure. L'outillage n'existe guère qu'à Lyon et à Saint-Louis; il serait d’ailleurs difficile à installer, par suite des changements de niveau du fleuve ; en conséquence, chaque bateau porte son matériel de chargement et de déchargement. En 1900, la flotte de la Compagnie se composait de 91 bateaux à vapeur (porteurs, porleurs-remorqueurs, remor- queurs, toueurs, bateaux à voyageurs), 68 cha- lands en fer, 56 grandes barques et gabares en fer, 400 bateaux de canal. Dans la situation actuelle, la navigation du Rhône ne prend qu'une part très faible, moins du dixième, du trafic total de la vallée; cette propor- tion est assurément très inférieure à celle que l’on peut constater sur les autres grandes voies navi- gables. La statistique que nous avons donnée plus haut montre que la navigation sur le Haut-Rhône, en amont de Lyon, perd régulièrement de son impor- tance; de 1892 à 1908, le trafic a passé de 50.242 tonnes à 16.232. Seule, la partie comprise entre Lyon et Seyssel à fait l'objet de travaux d'endiguement assez importants, en application du programme Freycinet; ces travaux n'ont pas été complétés et l'on se borne à en assurer l'entretien ; on admet cependant que l'état du chenal, depuis l'embouchure du canal de Savières — qui fait communiquer le lac du Bourget avec le Rhône — jusqu'à. Lyon, est suffisant pour assurer la navi- gation. IV. — LES PROJETS COMPLÉMENTAIRES D'AMÉNAGEMENT. Le programme Freycinet n'a pas encore recu son complet achèvement; en 1903, il restait encore 6 millions de francs de travaux à terminer pour REP RE 4 LA NERO 1 À la montée, le fret comprend principalement les vins, céréales, charbon, campêche, farines, huile, soufre, savons, crin végétal, jus de citron, coton, sucre, etc. A la descente : le fer, les tissus, la chaux, les produits métallurgiques, les couleurs, etc. ; PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE 945 = Ÿ que le but que l'on s'était proposé füt pleinement alteint. IL est à souhaiter que ces améliorations soient effectuées dans le plus bref délai et qu'il soit prélevé, en outre, la somme nécessaire pour doter le service de la navigation du Rhône de trois ou quatre dragues spéciales, destinées à écréter rapidement les seuils qui peuvent se former acci- dentellement. Cette dernière mesure est absolument urgente, d'après l'avis de la Compagnie générale de Navigation, si l’on veut conserver les résultats acquis. Les travaux qui restent encore à exécuter sur le fleuve auront pour effet d'augmenter la profondeur d'étiage sur les quelques points où elle est encore faible, en même temps que de consolider les amé- liorations obtenues sur quelques autres, où la régu- larisation n’est pas achevée. Ils ne pourront pas augmenter beaucoup la durée des bonnes eaux navigables, puisqu'elle est bien près d'être aussi longue que possible ; mais, en abaissant encore les rares seuils un peu saillants, qui sont la cause de l'incertitude qui règne sur le mouvement des eaux au commencement et à la fin des périodes de basses eaux, on donnera à la navigation la sécurité nécessaire à sa régularité et l’on permettra à la batellerie une utilisation commerciale complète de la profondeur effective réellement disponible", Sur la question du Rhône navigable, deux cou- rants d'opinion bien tranchés se sont manifestés. Certains, se basant sur le développement insigni- fiant du tonnage transporté sur le fleuve, croient qu'il n'y a rien à espérer des améliorations appor- tées. D'autres, se référant à l'exemple de l’Elbe, dont les conditions de navigabilité ne sont pas meilleures, estiment que cette stagnation du ton- nage doit être imputée, pour une très large part, à l’absence d'outillage des ports, au manque de liai- son avec les autres instruments de transport : voies de fer et voies d’eau. Nous pensons également que, dans l'état actuel des choses, la preuve ne peut pas être faite que le Rhône amélioré n'est pas en état de rendre des services à la navigation ?. Quoi qu'il en soit, un avant-projet de canal latéral au Rhône vient d'être établi par le Service des Ponts et Chaussées. Toute solution mixte, ser- vant à la fois les intérêts de la navigation, de l'in- dustrie et de l’agriculture, devait être écartée pour 4 H. GirarDoON : Op. cit. ? En faveur du canal latéral, cf. : F. ArNoniN : La Lutte économique des transports. 1 vol. in-16. Paris, Rivière, 1909. G. CnamBauD DE LA BRuYÈRE : L'Aménagement du Rhône. Rappert à la Commission :nterdépartementale. 1 br. Lyon, 1901. En opposition au canal, ef. : Yves Guyot : La crise des transports. br. Paris, Alcan, 1908. Prerre FRécon : La Navi- gation du Rhône, 1 vol.in-8°.Lyon,Rey, 1907. A. BREITTMAYFR : Le Rhône, sa navigation depuis les temps anciens jusqu'à nos jours. À vol. in-8°.L on Georg, 1904. [ ne s'occuper que d'un canal latéral à grande sec- tion, spécial à la navigation entre Lyon et Arles. Le projet comporte une longueur de 270 kilom. 750 et une largeur moyenne de 50 mètres; la différence de niveau entre Lyon et Arles, qui est de 160,50, est rachetée par 31 écluses dont les chutes varient de 2 à 7 mètres. Les souterrains ont, dans l’en- semble, une longueur de 20 kilom, 65. Le projet nécessite la dérivation d’un certain nombre de cours d'eau. La dépense totale s'élèverait à 505.850.000 francs, soit environ 1.870.000 francs par kilomètre. Cette estimation ne comprend que la construction du canal proprement dit, et nous savons que l'outillage fait complètement défaut. Si la moitié de la dépense était mise à la charge des intéressés, il faudrait trouver annuellement, au taux de 4°/,, un revenu de 10 millions de francs; or, un droit de péage de 0 fr. 006 par tonne kilomé- trique, sur un tonnage prévu de 1.600.000 tonnes, ne produirait que 2.600.000 francs". Il serait donc difficile, sinon impossible, de s'en tenir à ce premier projet. Si l'on veut un canal latéral, la continuation des études s'impose. Telles sont, d’ailleurs, les conclusions des auteurs de l’avant-projet : « La dépense est énorme et les calculs que nous avons essayé de faire semblent établir que les bénéfices que l'on peut actuellement espérer de la création d'un canal latéral au Rhône ne sont pas suffisam- ment élevés pour le justifier pleinement. Mais nous ne saurions prévoir ce que nous réserve l'avenir, et, si le développement du mouvement commercial, provoqué par l'ouverture des voies ferrées, conti- nuait avec la même progression, le canal latéral au Rhône pourrait peut-être s'imposer bientôt. L'avant-projet ci-joint servirait alors de base aux décisions à prendre à ce sujet”. » 1 Quel serait le prix de transport sur le canal? Le prix cctuel de la Compagnie générale de Navigation parait être de 0 fr. 025 par tonne kilométrique. L'augmentation du trafic pourrait faire descendre ce prix à 0 fr.02 et même 0 fr. 018. D'Arles au confluent ce la Saône (283 km.), le prix d'une tonne serait de 5 fr. 66 à 5 fr. 10. Le projet admet sur le canal un trafic possible de 1.600.000 tonnes pour 320 jours de navigation. En utilisant la traction électrique, on arrive au prix de 0 fr.012 ou 0 fr. Of par tonne kilométrique, soit 3 fr. 25 à 2 fr. 70 sur la lon- gueur totale. D'où économie pour le transport sur le fleuve de 1 fr. 85 à 2 fr. 96. et, sur 1.600.000 tonnes, environ 4 mil- lions. F. TEYSSÈDRE : Op. cit. 2 D'autres combinaisons ont déjà surgi. C'est ainsi que M. le commandant Le Vallois a présenté en 1908, à Cler- mont-Ferrand, au Congrès tenu par l'Association francaise pour l'avancement des Sciences, une étude consacrée à la réalisation pratique du canal latéral au moyen d'élévateurs à bateaux sur plans inclinés. D'autre part, M. Chambaud de la Bruyère a récemment présenté à Lyon, dans une réunien de la Commission interdépartementale du Rhône, un projet de canal latéral différent de celui des ingénieurs de l'Etat et qui aurait le double avantage de ne point comporter de tunnel et de ne coùter que 300 millions au lieu de 50. Sur le projet de M. Le Vallois, cf. l'article de M. Gastox L'avant-projet écarte systématiquement ce que M. René Tavernier appelle les solutions « mixtes », c'est-à-dire celles qui donneraient satisfaction à la fois à la navigation, à l’agriculture et à l’industrie. Mais, sans parler de l’utilisation agricole du Rhône, dont la formule est encore incertaine, l'utilisation industrielle des pentes du fleuve aurait un double avantage : la création de biefs navigables, dont le | canal de Jonage resle le type, et l'établissement d'industries riveraines qui fourniraient du fret en abondance. La communication d'un réseau navigable avec les ports maritimes a une très grande importance. C'est grâce au concours de la batellerie fluviale que Hambourg, Rotterdam et Anvers sont les premiers ports du continent, alors que c’est dans nos places maritimes que se remarque le plus aisément l'insuffisance générale de notre réseau navigable. Le tonnage fluvial est à peu près nul à Marseille (129.528 tonnes, moyenne de 1903-1904) qui se développe si lentement; il n’a quelque importance qu'à Dunkerque (1.279.562 tonnes) et à Rouen (1.723.816 tonnes), que desservent les meilleures voies de notre réseau intérieur et qui, de ce fait, ont progressé plus vite que les autres : ports français, dans le quart du siècle écoulé. Le Rhône, en effet, au lieu d'aboutir à Cette ou à Marseille, « continue à courir vers le sud pour tomber dans le vide ». Bien que la Compagnie générale de Navigation ne pratique pas de trans- bordement à Saint-Louis et se contente de changer de remorqueurs pour le trajet maritime qui sépare ce port de Marseille, on a jugé préférable d'entre- prendre un nouveau canal qui rattachera directe- ment le Rhône au grand port méditerranéen. Le | canal part du port de Marseille, longe la côte jus- qu'à la pointe de la Lave, pénètre en souterrain (tunnel du Rove de 7 kilomètres) sous le massif de la Verthe, longe la côte sud de l'étang de Berre et | s'en va emprunter le canal actuel de Port-de-Bouc à Arles, convenablement élargi et approfondi, pour aboutir finalement à Arles, après un parcours d'environ 81 kilomètres'. mencé en septembre 1906. Le canal aura surtout des avantages au point de vue industriel en permet. tant à la banlieue industrielle de Marseille de s'étendre sur les rives du vaste étang de Berre, pour y créer une spacieuse « rue d'usines ». VaLrax (P. Didier), dans le Bulletin de la Chambre de Com- merce française de Genève, avril 1909. “ L'exécution de ce projet comporte une 17 millions et demi de francs, y compris les augmentations de dépenses prévues pour agrandir la section du tunnel du Rove et améliorer certaines parties du canal; 35 millions et demi seront à la charge de l'Etat; le reste sera couvert par la Chambre de Commerce de Marseille, la ville et le département, Les travaux ont com- | dépense de | PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE Quant à Cette, notre deuxième port méditer- ranéen, il est actuellement relié au Rhône par une voie insuffisante : les canaux des Etangs, de la Gardelle et de Beaucaire. Leur exiguïté s'opposait à l'entrée des bateaux du Rhône, en obligeant à de coûteux transbordements. Ils vont être élargis et rendus praticables pour des chalands de 60 mètres de longueur. Si la région industrielle de Saint-Etienne était mise en communications par eau avec le Rhône, elle fournirait au trafic du fleuve les éléments dont il manque le plus : le gros fret, les produits métal- lurgiques et la houille. L'étude du canal de Saint- Etienne à Givors — qui établirait cette communi- cation — a abouti à la présentation, par le Service des Ponts et Chaussées, d'un projet de canal de Roanne à Givors, par Saint-Etienne, dont le devis monte à 123 millions, dont 46 millions pour la | portion Saint-Etienne à Givors. Si la dépense est élevée, les services rendus seraient considérables*. Le gabarrit des canaux français est fort variable et souvent insuffisant, au point que la navigation à longue distance par canaux est rendue à peu près impossible en raison des dimensions des écluses, qui varient d'une région à l'autre, même pour les artères principales. Quelques améliorations, faciles à réaliser, apporteraient de grands avantages. C'est ainsi que, du Havre à Marseille, il n’y a qu'un seul canal de 240 kilomètres qui ne permette pas aux chalands de 600 tonnes de passer : c'est le canal de Bourgogne. Il y aurait lieu également d'agrandir les écluses de la Saône canalisée, entre Verdun et ‘ On peut affirmer. avec M. Paul Léon, que la prospérité des charbonnages est en grande partie fondée sur la batel- lerie. C’est ainsi que les houillères de Saint-Etienne n'ont pu | depuis quarante ans accroitre leur production faute d'un rayon de vente suffisant. Tandis que le combustible étran- ger pénètre largement sur notre marché, le groupe minier de Saint-Etienne a été de plus en plus refoulé, jusqu'aux limites même du bassin. « Nous n'hésitons pas, écrivait en 1896 le Comité des houillères de la Loire, à attribuer à l'action des tarifs la décadence du bassin de Saint-Etienne. » Le transport de la houille par voie de fer de Saint-Etienne à Lyon est aussi élevé que pour le parcours par voie d'eau de Blanzy à Lyon, 4 francs à 4 fr. 50. par tonne. Les charbons de Saint-Etienne se transportent à 6 et 8 cen- times la tonne kilométrique, alors que ceux du Nord ne paient que 3 ou même 2 centimes, parce que le chemin de fer y est concurrencé par la voie d'eau. Il en est de même pour la grosse métallurgie. Pour alteindre le marché de Fourchambault, dans la Nièvre, les acicries de Saint-Etienne paient 5,5 centimes la tonne kilo- métrique, tandis que celles du Creusot ne paient que 4 cen- times, grâce à l'existence du canal du Centre qui double la voie ferrée. Les houillères de Montceau ne maintiennent leurs positions que dans les directions desservies par la voie d’eau; elles s'efforcent de développer la batellerie; aussi bien, depuis quelques années, la part des transports par eau est passée de 30 à 40 0), de l'extraction. Pauz Léon : La navigation intérieure en France. Revue économique internationale, 18-20 novembre 1904. — F. ARNo- Dix : La lutte économique des transports. Op. cit. PIERRE CLERGET — LA NAVIGABILITÉ DU RHONE Gray, d'autant plus que le bief du port de Saint- Jean-de-Losne constitue une grande gare de triage où aboutissent directement ou indirectement les canaux de Bourgogne, du Rhône au Rhin, de l'Est et de Ja Marne à la Saône’. « La pénétration le plus haut possible des chalands du Rhône, écrit M. J. Coignet, a une importance capitale en vue d’un projet quis'imposera un jour : c'est celui d’un canal à section suffisante entre la Saône et le Rhin qui permette aux chalands du Rhin de venir jusqu’à | Lyon, et à ceux du Rhône de remonter à Franc- fort*. » Le prodigieux développement industriel de l'Allemagne alimenterait certainement un tralic considérable, et Lyon doit se souvenir du rôle important qu'il jouait autrefois dans les échanges avec les villes libres de l'Allemagne. Le 30 janvier 1908, M. Pierre Baudin a déposé à la Chambre des Députés un projet de résolution invitant le gouvernement à présenter un rapport sur la navigabilité du Haut-Rhône de Lyon à Ge- nève. Cette branche du fleuve prendrait une grande importance si la Suisse réalisait son projet de | constituer une voie navigable de Bàäle à Genève”. D'autre part, les lecteurs de /a /?evue connaissent le projet de transport d'énergie électrique du Rhône à Paris, établi par MM. Blondel, Harlé et Mähl”. Ces ingénieurs font ressortir avec raison qu'il serait facile de profiter de l'établissement de l'usine de Génissiat, près de Bellegarde, pour | rendre le Rhône navigable du lac du Bourget à Genève. Le grand barrage de Génissiat formerait en amont un bief navigable de 23 km.5, s’éten- dant jusqu’à la frontière suisse. Il suffirait ensuite de quatre écluses et d’un canal souterrain pour atteindre le Léman. C’est la traversée de Genève qui constitue la grosse difficulté; il y a là, comme nous l'écrivait M. l'ingénieur Bernoud, une ques- tion d'esthétique qui prime en quelque sorte la question financière. Au canal souterrain de MM. Blondel, Harlé et Mähl, M. Bernoud substitue 1 L. LarFiTte : L'expansion économique de la France par l'amélioration et le développement de ses moyens de trans- port. 1 br. in-8°. Paris. Bureaux des Questions diplomatiques et coloniales, 1904. 2 Jan Corcxer : Le projet de canal de Marseille au Rhône. Rapport présenté à la Chambre de Commerce de Lyon. Lyon, 1896. # Sur les projets suisses entre Bâle et Genève, cf. les articles de MM. Léox Manz et GASTON VALRAN, dans le Bul- letin mensuel de la Chambre de Commerce française de Genève, 1908, et notre ouvrage : La Suisse au XX® siècle, 4 vol. in-16. Paris, Colin, 1908. # G. DE LaMancoDiE : Le projet d'adduction à Paris des forces motrices du Rhône. Revue générale des Sciences, 45 octobre 1907. — Cf. également A. BLonpeL, E. HARLÉ, L. Mauz : Projet de transport d'énergie électrique du Rhône à Paris avec aménagement du Haut-Rhône pour la naviga- tion internationale. Extrait relatif : 4° aux considérations générales et à l'étude sommaire des diverses solutions: 29 à la navigation. 547 un canal dans le lit même du fleuve, dans le bras droit du Rhône. Un autre ingénieur suisse, M. Au- tran, propose un canal à ciel ouvert, comportant un ascenseur à plan incliné de 810 mètres de lon- güeur et de 51 mètres de hauteur, et contournant toute la ville depuis Vernier jusqu'à l'embouchure du Vengeron‘. En aval de Génissiat, un ascenseur et cinq bar- rages éclusés prolongeraient la navigation jusqu'au canal de Savières qui joint le Rhône au lac du Bourget, et permettraient de recueillir encore 30.000 chevaux de force en eaux basses. D’après MM. Blondel, Harlé et Mähl, les dépenses incom- bant aux sujétions de la navigation entraïneraient un supplément de dépense de 20 millions de francs, du lac du Bourget à la frontière suisse, de telle sorte que, pour une dépense de 270.000 francs par kilomètre, on obtiendrait une voie navigable acces- sible aux chalands du Rhône et du Rhin. Il reste- rait à améliorer simplement la partie actuellement navigable qui va du lac du Bourget à Lyon et qui n'est aujourd'hui fréquentée que par de petits bateaux plats, le mouillage minimum n'étant que de 60 centimètres. Après le débouché du canal de Jonage dans le Rhône, M. Coignet estime que la meilleure solution consisterait à relever le plan d'eau du Rhône dans la traversée de Lyon par un barrage mobile établi sur le fleuve à son confluent avec la Saône. L'exécution des barrages successifs sur le haut Rhône, en diminuant beaucoup l’ap- port des graviers à Lyon, rendrait sans doute pos- sible cette solution, qui aurait l'avantage de mieux utiliser tous les bas-ports du Rhône à Lyon”. Nous voyons ainsi, d’après le Mémoire de MM. Blondel, Harlé et Mähl, que c'est la vente du courant accumulé dans le haut Rhône qui rend possible les améliorations du fleuve sur ce par- cours. Ce sera une ou des combinaisons de ce genre qui résoudront financièrement le problème sur le trajet Lyon-Arles, qu'il s'agisse d’un meilleur aménagement du fleuve ou de la création d'un canal latéral, de telle sorte que la navigabilité du Rhône nous semble liée à l'industrie et au com- merce du courant d'électricité. « L'industrie hydro- électrique, écrivait récemment M. Gaston Valran”, 4 M. Aura : La Navigation sur le Rhône entre Lyon et le lac Léman, travail présenté à l’Assemblée constitutive de l'Association romande pour la navigation intérieure (23 oc- tobre 1908). Extrait dela Schweizerische Wasserwirtschaft, Zürich, 1908. 2 J. Corcner : Amélioration et extension des voies navi- gables de la France. Rapport présenté à la Chambre de Com- merce de Lyon, le 6 août 1908. 3 Bulletin de la Chambre de Commerce française de Genève, avril 1909. — C'est en vue de ces solutions mixtes que, de concert avec nos collègues MM. Gaston Valran et Paul Masson, et sous le patronage de là Chambre de Com- merce francaise de Genève, si dévouée à tout ce qui touche aux relations franco-suisses, nous avons fait adopter le vœu 548 apportera-t-elle la solution du problème de l’indus- | l’on est plus près que l'on ne croirait de la réali- trie des transports par eau? Telle est l'orientation nouvelle. C'est peut-être une raison d’espérer que A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE sation pratique. » Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole Supérieure de Commerce de Lyon. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE I, — La DÉSAGRÉGATION DE L'ATOME CHIMIQUE PAR LE RADIUM. Dans la précédente revue de Chimie minérale (30 avril 1908, p. 322), nous avons enregistré les résultats obtenus par Sir William Ramsay sur la désagrégation de l'atome chimique sous l'influence de l'émanation du radium. Ces résultats ont vive- ment impressionné le monde savant. Il fallait s’at- tendre à les voir discuter et contrôler. M®° Curie a essayé de répéter les expériences de l’illustre sa- vant anglais, en se placant à l'abri des causes d’er- reurs qu'elles peuvent comporter. L'expérience faite par Ramsay avec la collabo- ration de M. Cameron est très simple. On place une solution de sulfate de cuivre ou de nitrate de cuivre dans un petit ballon de verre, et l’on y introduit une forte quantité d’émanation. Celle-ci s’y détruit spontanément en libérant une énorme quantité d'énergie. On sépare ensuite le cuivre de la solution, et celle-ci, évaporée à sec, abandonne un résidu formé d'un sel de sodium, accompagné d'un peu de potassium et de calcium. En outre, l'examen spectroscopique y décèle la présence d'une certaine dose de lithiuin. Quatre expériences effectuées dans les mêmes conditions ont conduit au même résultat. Des expériences comparatives, faites simultanément avec du sulfate de cuivre ou du nitrate de cuivre non soumis à l'action de l'é- manalion du radium, ont abandonné un résidu notablement inférieur et l'on n’a jamais constaté la présence du lithium. Les essais de détermina- tion des quantités de cet élément fournies par la désagrégation du cuivre ont conduit à admettre que 0,27 gramme de cuivre, provenant de 0,815 suivant par le 9 Congrès international de Géographie, tenu à Genève en 1908 : « Considérant, d'une manière générale, la progression croissante des relations commerciales entre la France et la Suisse, et, d'une manière particulière, les con- ditions économiques naturellement favorables aux échanges entre Marseille, port colonial, et Genève, il est à souhaiter que les Pouvoirs publics et les associations privées des deux pays continuent leurs efforts en vue d'améliorer les moyens de transport fluviaux entre les deux régions. Considérant, d'autre part, l'importance prise par les questions fluviales devant l'opinion publique et rendant hommage aux travaux des ingénieurs qui ont déjà élaboré des projets, il est à sou- haïiter qu'il soit tenu un Congrès du Rhône navigable, avec exposition de plans pour l'étude des moyens de réaliser la jonction entre Marseille et Genève par voie d’eau, » gramme de nitrate employé, ont produit 0,00017 milligramme de lithium. M"° Curie à pensé que le lithium trouvé par Ramsay et Cameron provenait soit de l'attaque du vase de verre contenant du lithium par l'émana- tion, soit des impuretés des réactifs utilisés pour la transformation. Elle a remplacé le vase de verre par un vase de platine; l’eau et les acides néces- saires pour l'expérience ont été redistillés dans un alambic de platine et conservés dans des bouteilles de platine. Enfin, le sulfate de cuivre a été complè- tement purifié, et ne contenait plus de lithium. L'expérience de Ramsay et Cameron a été répétée avec de l’émanation fournie par une solution de de 0,25 gramme de chlorure de radium, qui con- tenait 0,19 gramme de radium. L'examen spec- troscopique du résidu obtenu selon la méthode de Ramsay a montré qu'il était très faible et formé principalement de sodium et d'un peu de potas- sium. La présence du lithium n’a pas pu être cons- tatée. La différence du poids du résidu obtenu dans des expériences directes et dans des expé- riences témoins est très faible. Elle varie de 0,1 à 0,3 milligramme. D'après M%° Curie, elle s'expli- querait « par le fait que, dans l'expérience faite avec l’émanation, la rentrée de celle-ci peut amener l'introduction de matières étrangères. Dans l’expé- rience de MM. Ramsay et Cameron, cette même différence est 0,88 milligramme et nous pensons qu’elle peut être attribuée à l'attaque plus éner- gique du verre par la solution en présence de l'é- manation. » Ces expériences montreraient que la formation du sodium ou du lithium à partir du cuivre ne peut pas être considérée comme établie. Cependant, dans un article paru dans la Che- miker-Zeitung du 9 mars 1909: « Sur la Transmu- tation », Sir W. Ramsay maintient les conclusions de ses expériences, faites à l'abri des causes d’er- reur signalées par M®° Curie. « Les vases de verre que j'ai employés, dit-il, ne contenaient pas de lithium, les sels de cuivre étaient purs, et dans quatre séries de recherches j'ai toujours constaté la présence de lithium. » Il ajoute qu'il ne faut pas s'étonner que M"° Curie ne soit pas arrivée aux mêmes conclusions. Il y a quelques années, Ramsay ayant fait agir l'acide chlorhydrique sur du borure de magnésium provenant de l’action du État mme nord de A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 549 magnésium sur l’'anhydride borique, est parvenu à isoler 70 centimètres cubes d'une combinaison de bore et d'hydrogène, un hydrure de bore gazeux, auquel il attribua la composition B'H* (résultat fourni par l'analyse du composé et par sa densité). « J'ai recommencé vingt-cinq fois la réaction sans pouvoir la reproduire. J'ai employé de l’anhydride borique de toutes les provenances; j'ai fait varier la température, les circonstances de la réaction entre B°0* et le magnésium, sans arriver à un ré- sultat appréciable. Dans aucun cas, je n'ai pu obtenir plus de 2 centimètres cubes de ce gaz. Il est hors de doute, cependant, que ce gaz a été obtenu. Mais il ne m'a pas été possible de reproduire les circonstances de sa préparation, une fois obtenues par hasard. Il a pu arriver dans la transmutation du cuivre que le poids du résidu très minime obtenu par M Curie ait été du sodium au lieu de lithium. La réaction a été moins loin et s’est bornée à atteindre un des corps inférieurs de la même série. Il me paraît hors de doute que la grande énergie produite par la destruction de l’émanation, qui décompose l’eau avec formation de néon, et avec production d'hélium en présence de cuivre, puisse agir sur les atomes de cuivre'. » Ramsay annonce qu'il poursuit ces intéressantes recher- ches. Il n’est pas douteux qu'il parviendra à pré- ciser bientôt d'une manière définitive cette question passionnante de la désagrégation de l'atome chi- mique. IT. — [LA LIQUÉFACTION DE L'IÉLIUM. Nous avons à enregistrer cette année une con- quête nouvelle due aux efforts de M. Kammerling Onnes, directeur du Laboratoire cryogene de Leyde. L’hélium gazeux, après avoir résisté à toutes les tentatives de liquéfaction faites anté- rieurement, à été transformé en hélium liquide. En le comprimant jusqu’à cent atmosphères el en le soumettant au refroidissement provoqué par l’évaporation, sous la pression de 6 centimètres, de l'hydrogène liquide, on a recueilli, dans le fond non argenté d'un verre évidé à double paroi, un corps liquide dont la densité est égale à 0,154 et dont le point d'ébullition, déterminé à l’aide d’un thermomètre à hélium, est de 4,3. Cet hélium liquide n'a pas été encore solidifié. III. — LES PROPRIÉTÉS CATALYTIQUES DES MÉTAUX ET DES OXYDES MÉTALLIQUES. L'étude des phénomènes catalytiques semble jouir, depuis quelques années, de la faveur des chi- ! Rawsay : Chemiker-Zeitung, n° 29, p. 261, 1909. mistes. L'industrie en a retiré des applications qui ont produit les meilleurs résultats. Les procédés de contact pour la fabrication de l'acide sulfurique, soit par l'amiante platinée, soit par l’action com- binée de l’oxyde de fer et de l'amiante platinée, se sont rapidement implantés dans les différents pays du monde et de nombreuses fabriques utilisent ces procédés. L'emploi des métaux divisés comme agents de catalyse à fourni à la Chimie organique une méthode d'hydrogénation universelle. Dans cer- taines conditions, ces métaux peuvent même dés- hydrogéner, accomplissant ainsi une réaction in- verse. Depuis quelque temps, l'industrie utilise ces réactions, soit pour la préparation d’aldéhydes ou de cétones, soit pour la transformation du bor- néol en camphre. L'hydrogénation de l'oxyde de carbone à permis d'augmenter la richesse du gaz d'éclairage en méthane ou de transformer le gaz à l'eau en un mélange de méthane et d'hydrogène. Celte réaction simple et peu coùteuse a l'avantage d'augmenter le pouvoir calorifique de ces gaz et de supprimer leur toxicité. La fixation de deux atomes d'hydrogène sur l'acide oléique a permis de trans- former ce corps en acide stéarique. C’est là un pro- blème du plus grand intérêt dont la solution a été recherchée depuis longtemps par les chimistes. D'autres applications tout à fait inattendues sont en voie d'exécution: nous les ferons connaitre dès que l’industrie les aura fait entrer dans la pratique. Les oxydes métalliques jouissent, comme les métaux divisés, mais à un degré moindre cepen- dant, de propriétés catalytiques de déshydrogéna- ion ou de déshydratation vis-à-vis des alcools. Ils ne se comportent pas tous de la même manière. Certains enlèvent seulement l'hydrogène aux alcools en fournissant des aldéhydes; d'autres sont simplement déshydratants et permettent de pré- parer très aisément les carbures éthyléniques; un certain nombre, enfin, jouissent de propriétés cata- lytiques mixtes, à la fois déshydrogénantes et dés- hydratantes. Mais les réactions les plus curieuses qu'ils fournissent sont celles qui permettent la fixation temporaire d'oxygène ou d'ammoniac. La fixation d'oxygène permet de réaliser l'oxydation directe des alcools et d'ammoniac conduit à une préparalion générale des amines de toute espèce. C’est ainsi que beau- coup d’oxydes irréductibles (thorine, acide tita- nique, oxyde de chrome, oxyde d'aluminium, ele.) réalisent simplement la substitution du résidu amidé AZH°, ou amidé substitué RAZH, à l'oxhy- drile de l'alcool. Fait curieux, le cuivre fournit un résultat semblable, et l’on assiste à une déviation de fonction tout à fait inattendue. L'action du | cuivre sur un alcool seul est une action déshydro- des carbures; la fixation 550 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE génante, conduisant à l'aldéhyde; en présence d'ammoniac, il produit une action déshydratante, fournissant l'amine. D'autres réactions intéressantes pourraient être citées. Nous nous bornerons à signaler un exemple d'oxydation catalytique par le cuivre divisé, indiqué dans ces derniers temps par M. Bougault. On sait que Wurlz avait obtenu l'hydrure de cuivre Cu‘ en réduisant le sulfate de cuivre par l'hypo- phosphite de soude ou l'acide hypophosphoreux. Lorsqu'on utilise l'hypophosphite de soude en employant des quantités bien différentes de ce sel et de sulfate de cuivre (8 gr. de SO*Cu.5H°0 pour 2 gr. d'hypophosphite), on obtient un précipité jaune que l’ébullition transforme peu à peu en un corps bien cristallisé, qui n'est autre chose que du cuivre très pur. Le précipité jaune amorphe formé au début de la réaction est un hypophosphite cui- vreux, décomposé ensuite par l'ébullition en cuivre pur et en sel cuivrique. En changeant les condi- tions de l'expérience (2 à 3 gr. de SO‘Cu.3H°0 et 10 gr. de POH°Na), c'est l'hydrure de Wurtz, de coloration brun-kermès, qui se précipite. Si on le maintient au bain-marie bouillant, on observe un fort dégagement d'hydrogène et le précipité se ras s2mble en une mousse brun rougeûtre à la surface du liquide. Cette mousse, une fois séparée du liquide par décantation, et lavée à l'eau bouillie, ne donne pluslieu à aucun dégagement gazeux lors- qu'on la fait bouillir avec de l’eau. Mais, si on la chauffe avec une solution d'hypophosphite au cin- quième, il se produit un abondant dégagement d'hydrogène. Quand le dégagement gazeux a cessé, si on remplace le liquide décanté par une nouvelle quantité d'hypophosphite, de l'hydrogène se dégage de nouveau et le phénomène se produit indéfini- ment. Un atome de cuivre a pu donner ainsi un dégagement de plus de 30 molécules de gaz. Dans cette réaction, l'eau est vraisemblablement cata- lysée par ce cuivre si actif, qui se trouve dans un état de division extrême, en hydrogène et oxy- gène. Ce dernier oxyde l'hypophosphite et le fait passer à l'état de phosphile et de phosphate de soude. Cette réaction intéressante mérite d'être étendue, et il serait utile de voir si l'hydrogène naissant formé dans ces conditions peut réaliser les différentes réduclions ou fixations d'hydrogène, accomplies habituellement par sodium ou les divers réducteurs. l'amalgame de IV. — MÉraiLoïpes. fois de plus, l'analogie étroite qui existe entre ce corps et le carbone. M. Lebeau a repris l'étude des siliciures d'hydro- gène. On sait que les combinaisons bien définies du silicium et de l'hydrogène se réduisent au sili- ciure gazeux SiH‘ de Buff et Wühler et à l'hydro- gène silicié SH. Ces deux corps sont analogues au méthane CH* et à l’éthane CH°. M. Ogier a décrit un hydrure solide de formule (SFH°}, et Bradley aurait obtenu un composé analogue à l'acétylène, l'hydrure SFH*, en décomposant les siliciures alcalino-terreux par les acides. A cette liste, M. Lebeau a ajouté un nouveau com- posé, analogue à l’éthylène, le siliciure SFH°. En traitant le siliciure de magnésium par l’acide chlor- hydrique, selon le procédé de Moissan et Smiles, et condensant les gaz dégagés par la réaction à l’aide | d’air liquide, il a obtenu une masse solide qui, réchauffée lentement, a abandonné 5 litres d'un gaz totalement exempt d'hydrogène. Soumis à un nou- veau fractionnement, ce gaz a fourni d'abord un silicométhane SiH* pur, et non sponlanément inflammable; puis une fraction renfermant un gaz détonant violemment au contact de l'air, bouillant | à —7°et qui est décomposé par l'action des alealis en silicate alcalin et hydrogène, selon la formule : SH -- 4NaOH + 2 H°0 — 2SONa + T1H°. C'est le silico-éthane. Après séparation de ces deux gaz, il reste un composé liquide qui bout à une température supérieure à 60°, spontanément inflammable au contact de l'air. C’est le silico- éthylène SFH* et c'est à lui.que le silicométhane et le silicoéthane doivent d’être spontanément inflam- mables dans l'air. Les analogies du silicium et du carbone se pour- suivent encore dans les chlorures. On sait préparer aisément tous les chlorures dérivés du méthane et des carbures d'hydrogène homologues. On obtient plus difficilement les composés correspondants du silicium et peu d'entre eux sont bien connus. Par action directe du chlore sur le silicium, Berzélius a obtenu pour la première fois le tétrachlorure de silicium SiCÉ, liquide fumant à l'air, bouillant vers 58° ; la décomposition de ce composé au rouge vif a fourni le composé SFC/", l'hexachlorosilicoéthane, bouillant à 146°. Enfin Gattermann et Weinling avaient décrit un sous-chlorure SFCF, dérivé chloré du silicopropane. On avait là un exemple d'un composé chloré d'un hydrure de silicium inconnu SH et l'on pouvait se demander s’il ne serait pas | possible d'augmenter la liste de ces chlorures à Nous avons à signaler peu de travaux dans la chimie des métalloïdes. Le silicium a été l'objet d'un certain nombre de | recherches fort intéressantes. Elles montrent, une | | l’aide d’une méthode qui les produirait simultané- ment. Il y a quelque temps, MM. Besson et Four- nier ont soumis à l'action de l’effluve un mélange d'hydrogène sec et de vapeurs de silicochloroforme nd TS D ÉD ÉTÉ ÉÉ t dr. dll A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE SiHCP. Il s'est formé un liquide oléagineux, d'où la distillation fractionnée, effectuée sous pression ré- duite et dans une atmosphère de gaz inerte, a sé- paré : Du silicoéthane perchloré SFCI; Du silicopropane perchloré SPC, bouillant à 2190; Du silicopentane perchloré Si°CI®, fumant forte- ment à l'air, et bouillant à 150° sous 15 millimètres; Du silicohexane perchloré Si'CI*, corps solide blanc, se sublimant dans le vide vers 200°; Enfin un mélange très visqueux de chlorures très condensés. C'est done la série des chlo- rures de silicium du type Si”Cl?"+? qui a pris naissance. Cette méthode à l'avantage de fournir ces chlorures complètement purs. Il n'y a pas for- mation d'oxychlorures. On sait combien il est pé- nible, pour ne pas dire impossible, de séparer ces derniers des chlorures formés. Parmi les dérivés chlorés du silicométhane SiCI", on à décrit jusqu’à présent le composé tétrachloré, SiCI*, et le dérivé trichloré SiHC, le silicochloro- forme, analogue au chloroforme. Il paraissait sur- prenant que la formation des dérivés chlorés ana- logues au chlorure de méthyle CH°CI et au chlorure de méthylène CH?C?, ne puisse avoir lieu. Or, si l'on fait passer de l'acide chlorhydrique gazeux sur du silicium amorphe chauffé vers 300-400°, on con- dense à l’aide d’air liquide un composé liquide d’où l'on isole, à l'état pur, le chlorure de silicométhane SiH#CI, bouillant à —10°, et le bichlorure SiH°CF, bouillant vers 12°. Ce sont deux liquides incolores, très mobiles, très dilatables, décomposables par l’eau et les alcalis avec un dégagement abondant d'hydrogène. Leurs vapeurs produisent avec l'air des mélanges détonants. La réaction ne fournit pas le silicométhane SiH*. Si l’on examine les points d’ébullition des quatre dérivés chlorés du silicométhane, on trouve une différence constante (23°) entre deux composés successifs. Celte règle n'existe pas pour les dérivés chlorés du méthane. Dans la série de l'azote, nous avons quelques faits nouveaux à signaler. Dans un brevet pris sous le titre de « Procédé de production de l'hydrazine », Raschig décrit les diverses phases de l'opération qui produit l'hydrazine par action des hypochlo- rites sur l'ammoniaque. Dans cette réaction, que nous avons signalée l'an dernier, il se forme de la chloramine AzH?C], qui se transforme en hydrazine par l’action ultérieure de l'ammoniaque, à chaud. Une réaction secondaire peut se produire ; elle ré- poud à la formule : 3 AZH?CI + 2 A2! — A7? + 3 AzH4CI. Elle représente une perte en hydrazine; on la di- Doi | minue d'autant plus que l’on ajoute au mélange de chloramine et d'ammoniaque une faible quantité | de liquides pouvant augmenter la viscosité de la | solution : par exemple, du saccharose, du lévulose, | de la glycérine, de la gélatine, de la colle forte, ete. | On obtient ainsi des rendements de 70 à 80 °/,. Le mode opératoire de Raschig peut être facilement répété dans les laboratoires. On ajoute, à 3 litres d'une solution concentrée d'ammoniaque, 12 cen- timètres cubes d’une solution de colle forte à 5 °/,, puis un litre d'une solution d'hypochlorite de soude. On chauffe pour chasser l'excès d’ammo- niaque. On évapore le résidu jusqu'à ce qu'il com- mence à se séparer du sel et l'on précipite l'hydra- zine sous forme de sulfate par addition d'acide sul- furique. On obtient 80 à 90 grammes du composé. On sait que l’hydrazine est le point de départ d'une préparation de l'acide azothydrique ou azoï- mide Az. On le produit, soit en dirigeant des va- peurs nitreuses dans une solution, refroidie à 0°, de sulfate d'hydrazine, soit en agilant une solution benzénique de chlorure d'azote avec une solution d'hydrazine. Dans les deux cas, on obtient un mau- vais rendement. Thiele a indiqué récemment une préparation donnant une meilleure utilisation de l'hydrazine. Il remplace l'acide azoteux par un mé- lange de nitrite d'éthyle et de méthylate de sodium. Le nitrite de sodium naissant réagit sur l'hydrazine pour donner la réaction : | AzOSNa + AzH?AZH® — Az°Na + 2H°0. En opérant en solution éthérée, l'azothydrate de sodium se dépose. On le recueille et on le décom- pose par l'acide sulfurique. Il se dégage de l'acide azothydrique que l’on condense dans l'air liquide. On obtient ainsi un corps sensiblement pur. Il titre, en effet, 99,7 °/,. C’est un liquide incolore, mobile, bouillant à 37°, se solidifiant par refroidissement en une masse qui fond à —80°. On peut le conser- ver plusieurs jours sans observer la moindre dé- composition. Il n'explose pas spontanément; mais l2 plus pelit choc suffit. L'explosion se produit également si on le chauffe entre 60 et 100°. La den- sité de vapeur, déterminée à 25°, indique que cet acide a pour formule Az‘. Il est vraisemblable que l'acide azothydrique, obtenu par différents auteurs(Curtius,Tanatar, etc.), acide qui détone par simple agilation, était un com- posé impur, bien que l'on ait fixé son point d'ébul- lilion à 37°. Le nitrite de sodium est devenu un produit chi- mique important pour la fabrication des matières colorantes azoïques. L'industrie s'est préoccupée de le produire à l'état pur et à un prix de revient très faible. Jusqu'à présent, on le préparait par ré- duction du salpêtre du Chili à l’aide du plomb. Le 552 A A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE rendement est de 93 °/,. Des brevets différents ont été pris pour la réduction du nitrate de soude à l'aide du fer, du graphite, du coke, des sulfures, des sulfites, de l'oxyde de carbone, de la chaux, ete. Devant l'immense développement que prend la fabrication du nitrate de chaux par le procédé de Birkeland et Eyde, on devait songer naturellement à utiliser ce corps pour la production du nitrite de soude. Le problème a été résolu. Le sulfure de s0- dium, le sulfite de soude, ou le mélange de ces deux corps produisent avantageusement celte transfor- mation. La soude mélangée de soufre opère la même réduction. Les réactions suivantes rendent compte de cette transformation : 40 90 30 49° 2(Az03;?Ca + Na°S — (Az0®}Ca + 2 AZO?Na + SOCa; (AzO3}Ca + 2 SOSNa? — 2 AZO®Na + SONa? + SO'Ca; 3(AzO8 Ca + Na°5 + 2 SOSNa? — 6 AzO®Na + 3 S0'Ca: 3(Az0%)?Ca + 2S + 6NaOH — 6 AZO?Na + Ca(OH}? + SO'Ca. Cette dernière équation montre qu'il se fait une transformation totale du nitrate en nitrite; le résidu peut être utilisé comme engrais calcaire. Il y à quelques années, M. Matignon a montré que la méthode la plus simple pour la préparation de l'hydrogène phosphoré gazeux, privé de phos- phure spontanément inflammable, consiste à dé- composer par l’eau acidulée le phosphure d'alumi- nium obtenu par réduction du phosphate tricaleique par la méthode aluminothermique. Le gaz obtenu contient seulement 3 °/, d'hydrogène; les 97 °/, restants sont constilués par de l'hydrogène phos- phoré PH”. Il devenait, par suite, intéressant de rechercher une méthode pouvant fournir l'hydrure de phos- phore liquide et l'hydrure solide. M. Jolibois a réussi à isoler ce dernier. Il à préparé du phos- phure de zine P*Zn° en versant du zine fondu sur du phosphore rouge bien sec lassé au fond d’un creuset de terre, et chauffant ensuite le tout dans un four Perrot jusqu'à ce qu'il ne se dégage plus de vapeurs de phosphore. Ce composé P'Zn' a été ensuite traité à 400° dans le vide par-la vapeur de phosphore. 11 est produit le composé P'Zn, qui, sous l’action de l'acide chlor- hydrique, a donné l'hydrure solide PI. C'est une méthode de préparation de ce composé. V. — MÉraUux. Quelques travaux intéressants ont été effectués sur les métaux. On a signalé un procédé original de fabrication des oxydes mélalliques, applicable aux métaux qui fondent à basse température, tels que le zinc, le cadmium, le plomb, l'étain. Le métal fondu est coulé en un mince filet. On le pulvérise par l’action d'un jet de vapeur à 20- 30 atmosphères. La poudre impalpable produite est immédiatement noyée dans un courant d'eau froide et soumise à une lévigation prolongée, puis séchée. Les particules métalliques se trouvant dans un état de division extrême sont lancées par un violent courant d'air dans l’intérieur de la flamme d'un chalumeau, et la traversent rapidement. Elles sont ainsi transformées en un oxyde très ténu, qui est entraîné par un aspirateur dans des appareils de condensation. La réaction a lieu en vase clos et, par conséquent, aucune parcelle ne flotte dans l'atelier. Cette invention est particulièrement inté- ressante au point de vue de l'hygiène, pour la pré- paration des oxydes de plomb. Elle mérite l'atten- tion des industriels, au moment où est engagée dans tous les pays la lutte contre la fabrication des composés du plomb. M. Bourion a continué l'étude de la chloruration des oxydes métalliques, effectuée par l’action simul- tanée du chlore et du chlorure de soufre S'CF. Il à constaté que ce dernier, employé seul, peut facile- ment transformer les oxydes métalliques en chlo- rures selon la réaction : 2M0 + 2S?CE — SO? + 2MC/E +35. Les oxydes de manganèse, l'oxyde de nickel, les oxydes de chrome, de cobalt, des terres rares sont ainsi changés en chorures. Dans tous les cas, les chlorures obtenus sont rigoureusement exempts d’oxychlorures. La méthode est surtout aisée lors- qu'on veut préparer un chlorure fixe (chlorures des terres rares, par exemple) ou un chlorure peu volatil. Elle permet, en outre, la séparation aisée de la silice et de l'anhydride tungstique. L'auteur a appliqué récemment l’action chlorurante du chlore et du chlorure de soufre à la séparation en toutes proportions du thorium et du cérium, et du mélange ternaire thorium, cérium, glucinium, dans le mélange d’oxydes existant dans le corps qui sert à fabriquer les manchons à incandescence. Dans tous les cas, la méthode a donné des résul- tats très exacts. MM. Otto Ruff et Eisner ont signalé une nouvelle classe de combinaisons du titane, les halogénures d'azolure de litane TiAZzX. En chauffant du titane-chloramide, obtenu par extraction avec de l'ammoniac liquide du chlo- rure de titane ammoniacal TiCl'.GAZH, il se dégage du chlorure d'ammonium, de l’ammoniae, et il reste à 270-300° un résidu noir de chloroazoture de titane TiAzCl, souillé d'un peu d'oxyazoture de. Litane et d'acide titanique. En présence de l'eau, ce composé s'enflamme en fournissant de l'oxyde de titane TiO* et du chlorure d’ammonium : TiAzCl,4- 2 10 = Ti0? + AzI*CI. A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 553 Les vapeurs de brome, dirigées par un courant d'anhydride carbonique sur du tilane ou du car- bure de titane chauffé dans un tube en verre d'Iéna, ont fourni le tétrabromure TiBr'. Fondu et traité par l'ammoniaque, il fournit le composé TiBr'. GAZH*. Ce bromure ammoniacal, chauffé dans les mêmes conditions que le chlorure de titane ammo- niacal correspondant, conduit au bromoazoture TiAzBr, à propriétés identiques au composé chlo- roazoté. Il semblait que la découverte du nickel-carbo- nyle Ni(CO)', effectuée en 1890 par Mond, Langer el Quincke, — découverte qui à donné naissance à un procédé d'extraction du nickel métallique à partir de minerais peu riches en nickel, — serait suivie de près par la découverte du cobalt-carbo- nyle Co(CO)'. Ces deux métaux, nickel el cobalt, se comportent, en effet, d'une manière identique dans leurs diverses réactions. Dans le compte rendu du Congrès de l'avancement des Sciences de Montau- ban (1902), M. P. Sabatier, décrivant les expé- riences qu'il avait effectuées sur l’action de l’oxyde de carbone sur le cobalt divisé, écrivait: « Lorsque l'oxyde de carbone passe sur du nickel à 300°, il est détruit avec formation d'anhydride carbonique et de charbon d’après la formule : 2C0 = CO* + C. On constate que le nickel divisé est mêlé de char- bon. Cette expérience a été le point de départ de la découverte du nickel-carbonyle. Nous avons cons- taté que le cobalt divisé produit le même phéno- mène à plus haute température ; l'oxyde de carbone est dissocié en CO° et C. Si l'on admet la formation temporaire de nickel-carbonyle dans le cas du nickel, il est parfaitement rationnel d'admettre qu'il doit se produire du cobalt-carbonyle. On savait, d’ailleurs, qu'en chauffant dans un creuset deux couches superposées, lune d'oxyd? de cobalt, l'autre de charbon, on trouve, au bout d’un cer- tain temps, du cobalt disséminé dans la masse charbonneuse. Cela ne peut s'expliquer que par la formation temporaire d’un cobalt-carbonyle très volatil et très instable, qui se détruit presque ins- tantanément après sa formation. Il y a lieu de voir s’il est possible d'isoler cette combinaison, L’au- teur pense, d’après les expériences récentes sur la formation limitée du nickel-carbonyle, que l’on parviendrait à atteindre le cobalt-carbonyle en opérant avec de l’oxyde de carbone sous pression élevée. » Ces prévisions viennent d'être réalisées par MM. Mond, Hirtz et Cowap. Le cobalt très divisé a été chauffé à 150-200°, dans de l’oxyde de cear- bone comprimé à 100 atmosphères. En refroidis- sant brusquement le récipient, il se condense des cristaux orangés de cobalt-carbonyle Co{CO)'. Leur densité est de 1,827 à 16°. Ils fondent à 42-46° en se décomposant partiellement. Comme le composé similaire, le nickel-carbonyle, le cobalt-carbonyle est insoluble dans l’eau, mais soluble dans les solvants organiques, alcool, éther. Il commence à se décomposer à 25° et il faut atteindre la tempé- rature d> 130° pour effectuer la destruction totale en cobalt et oxyde de carbone. C'est encore à des chimistes anglais que revient l'honneur d’avoir isolé ce nouveau composé qui avait été prévu par un savant francais, lequel s'était fondé sur des faits expérimentaux bien observés. Si M. Sabatier n'a pu, dès 1902, réaliser la formation du cobalt-carbonyle, il faut en recher- cher la cause dans le manque d'outillage des labo- ratoires de province, peu favorisés au point de vue des subventions accordées pour les recherches scientifiques. A. Mailhe, Maitre de conférences à la Facullé des Sciences de Toulouse. 554 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Rouse Ball (W.). Fellow and Tutor of Trinity College. — Récréations mathématiques et Problèmes des temps anciens et modernes. — leuxième édition française traduile d'après la quatrième édition an- glaise par M. Frrz Patrick. 1° partie. —1 vol. in-12, de 363 pages (Prix : 5 fr.) Librairie scientifique A. Hermann, Paris, 1909. Après avoir consacré la première partie de son œuvre aux problèmes d'Arithmétique et d’Algèbre, M. Rouse Ball traite plus spécialement, dans ce second volume, des questions de Géométrie et de Mécanique. On y rencontre, cependant, un chapitre sur les Carrés magiques et une notice historique sur la résolution de l'équation du troisième degré, insérée jadis dans le Bulletin de Terquem (1856). D'ailleurs, la plupart des récréations qu'étudie lau- teur sont tirées des recueils analogues de ses prédé- cesseurs, Ozanam et Lucas; mais il a su souvent sim- plilier leurs démonstrations ou les débarrasser d’inu- tiles détails. De son côté, le traducteur, M. Fitz Patrick, a fait quelques intéressantes additions à l'édition anglaise, entre autres sur le carrelage où parquetage, sur le jeu de dominos et sur les prétendus inventeurs de la quadrature du cercle, dont il a retracé, d'après Montucla, la triste et parfois comique odyssée. JACQUES BoYER. Fagerholm (Erik). — Ueber den Sternhaufen Mes- sier 67 (SUR L'aMAsS D'ÉTOILES MESsiER 67). — T'hèse de Doctorat présentée à la Faculté des Sciences d'Upsal. Almgvist et Wiksells, éditeurs, 1909. La description de l'amas stellaire Messier 67 est basée sur deux chichés obtenus, l’un avec une pose de deux heures, et l’autre avec une pose d'une heure. Ils ont été pris à l’aide de la lunette de 33 centimètres d’ou- verture de l'Observatoire d'Upsal. Il a été possible de mesurer sur ces clichés les posi- tions relatives de 295 étoiles, jusqu’à la grandeur 13,5. Le Mémoire débute par l'étude des corrections ins- trumentales, erreurs de l'échelle et de la vis de la machine à mesurer. Les déterminations reposent sur les coordonnées équatoriales de 9 étoiles zormales, dont 8 figurent dans le catalogue de l'Astronomische Gesellschaft (zone de Leipzig) et qui toutes ont été spécialementréobservées au cercle méridien de l'Obser- vatoire de Lund par M. F. Engstrom. L'auteur a aussi fait usage de la position de 7 autres étoiles, qu'il nomme subnormales, et dont les coordonnées ont été prises sur deux clichés, faits dans ce but, et dont la durée d'expo- sition a été de dix minutes. Les mesures des clichés ont été réduites en suivant les méthodes employées par MM. Bergstrand et Turner. L'auteur donne les coordonnées rectangulaires obte- nues ainsi pour les 295 étoiles, les différences d'ascension droite et de déclinaison, Ax et A, et finalement les coordonnées équatoriales de ces étoiles pour l'équinoxe moyen de 1906,0. La grandeur des étoiles a été déterminée par la mesure des disques stellaires sur la plaque 1 (pose 2 heures) et calculée par la formule d’interpolation : m= a + b log D, où m est la grandeur, D le diamètre, a et b des cons- tantes. Celles-ci doivent être déterminées par la mesure du diamètre d'étoiles d'éclat connu, effectuée sur la ET INDEX plaque. La grandeur visuelle de 15 étoiles de l'amas a été obtenue à l'aide du photomètre de Züllner et rap- portée à l'échelle photométrique du Catalogue de Potsdam, de Müller et Kempf, par comparaison aux étoiles 1289 (grandeur 7,78) et 1290 (grandeur 8,58) de ce Catalogue. Si l’on compare les résultats obtenus par M. Eagerholm à ceux que M.Olsson a déduits des photographies du même amas, effectuées en 1898 à l'Observatoire de Stockholm, on constate qu'il n’est pas possible de mettre en évidence l'existence de mouvements propres réels des étoiles constituant l’amas. Par contre, on trouve de grandes dif- férences systématiques entre l'éclat des étoiles; celles- ci paraissent plus faibles dans les déterminations de M. Fagerholm que dans celles de M. Olsson, en moyenne de 1,56 grandeur. Ajoutons que le Mémoire est accom- pagné d'une carte indiquant la position de toutes les étoiles de l'amas Messier 67 (G. C. 1712). P. STROOBANT, Astronome à l'Okservatoire royal de Belgique. 2° Sciences physiques Duhem (P.), Correspondant de l'Institut de France, Professeur à l'Université de Bordeaux. — Essai sur la Notion de Théorie physique de Platon à Galilée. — 1 vol. in-8° (le 140 pages (Prix : 5 fr.) Hermann, éditeur. Paris, 1909. M. Duhem, avec son érudition et sa clarté habituelles, nous entretient dans cet ouvrage de la notion de Théorie physique, dont il suit, avec une conscience et une finesse admirables, l’évolution chez les Anciens. Aux documentsde Th.-H. Martin, de M. Giovanni Schia- parelli, de M. Paul Mansion, il prend Ja peine d’en Joindre bon nombre d’autres, afin de lever les der- nières incertitudes sur l’idée que les sages, de Platon à Galilée, se sont faite de la Théorie physique. Les troublantes questions de la valeur de la Théorie phy- sique, de ses relations avec l'explication métaphy- sique, toujours actuelles, ont dominé de tout temps les discussions scientifiques et philosophiques; ce sont elles qui, à chaque page de louvrage de M. Duhem, renaitront sans cesse, fournissant les solu- tions les plus diverses à travers les âges et permettant à l’auteur — qui en analyse de très près les moindres mouvements — de montrer quels échos, parfois puis- sants, elles ont fait arriver jusque chez nos contempo- rains. Durant la longue période de äeux mille ans si soi- gneusement scrutée par M. Duhem, la Métaphysique règne en maîtresse sur toutes les investigations et les discussions scientifiques. Il lui appartient, en particu- - lier, d « examiner ce qui concerne l'essence du ciel et des astres », et, bien qu'elle n’ait jamais tiré de ses principes d'explication assez précise pour être contrôlée par les observations astronomiques, elle n’en émet pas moins la prétention de posséder la vérité et de con- damner tout résultat acquis en dehors d'elle. « On peut regarder les hypothèses de l’Astronomie comme de simples fictions mathématiques que le géomètre combine afin de rendre les mouvements célestes accessibles à ses calculs; on peut y voir aussi la description de corps concrets, de mouvements réel- lement accomplis. Dans le premier cas, une seule con- dition est imposée à ces hypothèses : celle de sauver les apparences; dans le second cas, la liberté de celui qui les imagine se trouve beaucoup plus étroitementlimitée : s'il est, en effet, l'adepte d'une philosophie qui pré- tende connaitre quelque chose de la céleste essence, il RP PR BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 5) lui faudra mettre ses hypothèses d'accord avec Îles enseignements de cette philosophie. » Cette condition, imposée parfois aux astronomiques, d’être conformes à la nature des chose a provoqué, par son imprécision nécessaire, les plus ardentes discussiors La science hellénique, après avoir apprécié celte conformité au moyen des principes de Physique ‘ qu'Aristote avait posés, la reconnut, avec Adraste d'Aphrodisie et Théon de Smyrne, à la possi- bilité de construire avec des sphèrés solides convena- blement emboitées un mécanisme qui représentât les mouvements célestes. Mais les Grecs, avec la précision et la sûreté de leur sens logique, ne persistèrent pas dans cette voie; Ptolémée et les penseurs hellènes qui sont venus après lui n’ont voulu voir dans les excen- triques et les épicycles que des fictions de géomètres propres à soumettre au calcul les phénomènes célestes. Les Arabes sont restés étrangers à la tradition hellé- nique; après la prodigieuse ingéniosité géométrique des Grecs, ils ne pouvaient apporter que de bien minces perfectionnements aux hypothèses astrono- miques ; et d'ailleurs, esclaves de l'imagination, ils ont cherché à voir et à toucher ce que les penseurs grecs avaient déc'aré purement fictif et abstrait. Un tel réa- lisme devait forcément indisposer les Péripatéticiens de l'Islam contre les doctrines de l'Almageste. La lutte dura pendant tout le xn° siècle et le héros en fut Aver- roès; son contemporain et condisciple Al Bitrogi, admirateur aussi fanatique d’Aristote, entreprit de substituer un système nouveau à celui de Ptolémée. Ce nouveau système plut également aux disciples d'Averroès et aux conlinuateurs d'Adraste et de Théon. Un reflet de la pensée grecque se manifeste cependant dans le grand traité de +hilosophie et de ‘héologie qu'au xu° siècle composa le juif Moïse ben Maimoun, connu sous le nom de Maïmonide. La Scolastique chrétienne du x siècle est en ba- lance entre le système astronomique de Ptolémée et celui d'Al-Bitrogi; son carartère est bien symbolisé par l'attitude de saint Bonaventure, qui ne sait où porter son choix entre un système qui sauve les apparences, en rejetant les principes de la Physique péripatéti- cienne, et le système des sphères homocentriques qui s'appuie sur ces principes, mais qui ne s'accorde pas avec les faits. Fort heureusement, les principes posés par saint Thomas d'Aquin permettent aux astronomes d'user sans scrupule des hypothèses de Ptolémée pour étadier les mouvements apparents des astres, alors même que leurs opinions métaphysiques les eussent contraints de rejeter ces hypothèses. Les Ecoles ita- liennes de la même époque ne nous ont guère fourni de témoignages intéressants : on y discute peu de la nature et de la valeur des hypothèses que l’on emploie ; il faut cependant faire exception pour Pierre de Padoue (Pierre d'Abano), qui se rallie au système de Plolémée, lequel rend suffisamment compte des apparences et cela par le moindre nombre de mouvements. Du début du xiwv° siècle au début du xvi® siècle, tandis que les Averroïstes italiens persistent à refuser à l’Astronomie le droit d'user d’hypothèses qui ne soient pas conformes à la nature des choses, tandis que dilettantisme etle scepticisme des beaux esprits s’ac- commodent volontiers des idées de Proclus, l'Université de Paris tient le juste milieu que les philosophes italiens n'ont pas su trouver, et donne, touchant la méthode physique, des vues d'une justesse et d’une profondeur qu'on ne retrouvera plus jusqu'au milieu du xix° siècle. En particulier, Nicolas de Cues attribue aux astres une nature toute semblable à celle des quatre éléments et proclame que, comme les hypothèses de la Physique du monde sublunaire, les hypothèses de la Physique céleste ont pour seul objet de sauver les phénomènes. Cette idée si nette se troublera peu à peu aux époques ! On parlerait aujourd'hui de « Métaphysique » en une foule de circonstances où les Anciens prononcaient le mot « Physique ». suivantes, tandis que les œuvres de Copernic renouvel- leront l'Astronomie. L'antique supposition selon laquelle le Soleil serait immobile et la Terre mobile, que Der- cyllide avait autrefois « rejetée avec exécration comme opposée aux fondements de la Mathématique », sera reprise et comparée aux phénomènes; elle se montrera capable de les sauver. Mais Copernic voudra faire plus, affirmer la vérité de cette hypothèse, oubliant peut-être que, pour en avoir le droit, il faudrait établir, en outre, que les phénomènes ne sauraient être sauvés si on l'abandonnait ou la moditiait. Cette dernière prétention de Copernic passera pour- tant longtemps inaperçue, grâce à la Préface anonyme dont se trouvait agrémenté le chef-d'œuvre : Sur les Révolutions des orbes célestes. Osiander l'avait écrite afin de rendre viable l'œuvre du Maitre. « Les Péripa- téticiens et les Théologiens, dit-il dans une lettre à Rhaeticus, le fidèle disciple de Copernic, s'apaiseront aisément si on leur fait entendre qu'à un même mou- vement apparent peuvent correspondre des hypothèses différentes ; qu'on ne les donne pas comme exprimant la réalité avec certitude, mais bien afin de diriger le plus commodément possible le calcul du mouvement apparent et composé. » A cette époque, le sentiment d'Osiander au sujet des hypothèses de Copernic était très répandu. Reinhold de Wittemberg attend avec im- patience la publication des théories de Copernic, et, par ses Prutenicae tabulae, contribue grandement à en répandre l'usage parmi les astronomes. Les disciples de Reinhold partagent les opinions de leur maitre. Ces mêmes opinions se retrouvent d'ailleurs à Nüremberg avec Schreckenfuchs, à Bâle avec Wursteisen. Ce der- nier sera cependant plus exigeant : il voudra que les hypothèses soientau moins possibles, qu'il n'en résulte rien d'absurde ; c'est cette exigence qui prétendra Eien- tôt s'opposer à l'adoption du système de Copernic. Les Ptoléméens italiens usent d'ailleurs des hypothèses comme Osiander voulaitqu'onle fit. A cette mêmeépoque, l'opinion d'Osiander est également partagée par Îles Théologiens. Luther, le premier, avait déclaré la guerre, au nom de l'Ecriture, aux hypothèses copernicaines: il fut suivi par son fidèle disciple, Philippe Mélanchton, qui professait à Wittemberg avec Reinhold; mais cela n'empêche en aucune façon d'admirer Copernic, puis- qu'on est convaincu que ses hypothèses n'ont d'autre but que de sauver les phénomènes. 11 y a tout-lieu de croire que les théologiens catholiques de l'époque pen- saient comme les protestants : la réforme du calendrier de Grégoire XITIT en 1582, accomplie d’après les T'abulae prutenicae, semble l'indiquer. Mais les choses vont changer : durant le demi-siècle qui s'écoule de la réforme du calendrier à la condam- nation de Galilée, on veut trouver dans les hypothèses astronomiques des affirmations sur lanature des choses; il faut que ces hypothèses ne soient pas incompatibles avec les principes de la Physique et qu'elles ne soient pas en contradiction avec les enseignements de l'Eglise et avec les textes de l'Ecriture. C’est le jésuite Clavius qui le proclame, après le protestant Tycho-Brahé. Malgré cet état d'esprit, les Copernicains oublient la sagesse d'Osiander et ont l'imprudence d'affirmer que les sup- positions de Copernic sont seules conformes à la réalité. Giordano Bruno continue la tradition de Copernic et de Rhæticus; Jean Képler est le plus ferme et le plus illustre représentant de cette tradition. La confirmation par la Physique des hypothèses copernicaines est le centre vers lequel convergent les recherches de Galilée. Celui-ci se heurta une première fois en 1616 aux théo- logiens du Saint-Office. Pour les Inquisiteurs, la saine Physique était la Physique d’Aristote et d'Averroès; quant à l'Ecriture, les consultateurs du Saint-Ofice se refusaient à en recevoir aucune interprélation qui n’eût pas pour elle l'autorité des Pères. Aussi les hypo- thèses admises par Galilée furent-elles jugées fausses en Philosophie et hérétiques en Théologie. Galilée ne se laissa convaincre ni par les conseils du cardinal Bel- larmin, ni par ceux du cardinal Maffeo Barberini (plus 556 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX tard Urbain VII), et la condamnation de 1633 vint confirmer la sentence de 1616. « En dépit de Képler et de Galilée, dit M. Duhem en terminant, nous croyons aujourd'hui, avec Osiander et Bellarmin, que les hypothèses de la Physique ne sont que des artifices mathématiques destinés à sauver les phénomènes; mais, grâce à Képler et à Galilée, nous leur demandons de sauver à la fois tous les phénomènes de l'Univers inanimé. » M. Duhem a réuni dans ce petit volume une très riche documentation,qu'il analyse avec la plus parfaite loyauté et la plus grande distinction. C’est toujours textes en mains qu'il discute la pensée des Anciens, de sorte qu'on peut à loisir contrôler ses moindres assertions et reprendre où l’on veut la discussion. Je signale, par exemple, une citation de Galilée (page 131) qui me pa- raît singulièrement profonde et me fait hésiter à rece- voir d'emblée certains jugements de M. Duhem. On ne devra d'ailleurs pas oublier, au cours de la lecture de cet ouvrage, que l’auteur ne juge dans chaque savant que le philosophe et que « les plus grands artistes ne sont pas toujours ceux qui philosophent le mieux sur leur art ». LÉON JALOUSTRE, Aucien élève de l'Ecole Normale supérieure, Agrégé des Sciences physiques. Lewkowitsch(lJ.), Zagénieur-chimiste, ExpertauCity and Guilds of London Institute. — Technologie et Analyse chimiques des Huiles, Graisses et Cires. Tome 11. Traduit de l'anglais par M. Emice Bonroux, Ingénieur-chimiste. — 1 vol. in-8 de xwi-860 pages avec fig. (Prix broché : 30 fr.) H. Dunod et E. Pinat, éditeurs. Paris, 1909. Le secoud volume dela traduction française de l’ou- vrage bien connu du D'Lewkowitschvientde voirle jour. L'éloge de l'œuvre n’est plus à faire ; mais ce qui ajoute à la valeur de l'édition française, c’est qu'une grande partie du texte original a été entièrement refondue, de facon à tenir compte des recherches les plus récentes. Le tome Il s'ouvre par un exposé général des méthodes de préparation industrielle des huiles et des uraisses : fusion, expression, emploi des dissolvants volatils, puis des procédés de raffinage, de blanchiment et de conservation des huiles, graisses et cires. Le reste du volume est constitué par une série de monographies des différentes huiles, graisses et cires, présentées dans l'ordre suivant : À. — HUILES ET GRAISSES. GLYCÉRIDES. I. — Huiles, ou corps gras liquides. — 1. Huiles végétales : a) huiles siccatives : D) huiles demi- siccatives (groupe de l'huile de coton, groupe de l'huile de colza); c) huiles non siccatives. — 2. Huiles animales : 4) huiles d'animaux marins (huiles de poisson, huiles de foie, huiles de céta- cés); b) huiles d'animaux terrestres. Il. — Graisses, ou corps gras scliaes. — 4. Graiïs- ses végétales : a) groupe de l'huile de chaulmoo- gra; b) groupe de l'huile de coco. — 2. Graisses animales : a) graisses siccatives ; D) graisses demi- siccatives; c) graisses non siccatives. PR. CiREs. I. — Cires liquides. IT. — Cires solides. —1. Cires végétales. — 2. Cires animales. ; A propos de chaque corps décrit, l'auteur indique les méthodes de préparation, de raffinage el d'examen, et la recherche des falsifications. Son livre rendra donc de grands services, d’une part aux techniciens des industries des matières grasses, de l’autre aux analys- tes et aux experts, qui y trouveront des informations précises pour l'appréciation des adultérations. Un dernier volume, dont l'apparition est proche, {raitera des industries qui dérivent des matières fTasses, 3° Sciences naturelles Aubin (Eugène). — La Perse d'aujourd'hui. (Iran, Mésopotamie). — 1 vol. in-18 de 442 pages avec une carte en couleurs hors texte. (Prix : 5 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. M. Eugène Aubin a fait en Perse un séjour assez court — il n’a pas duré plus de dix mois — et il a pu néanmoins rapporter de ce pays, comme précédem- ment du Maroc, les éléments d’un ouvrage très sûre- ment documenté. Il a none dans le nord et l’ouest de la Perse et en a visité les principales villes. Son volume contient la description des régions qu'il a par- courues, mais un certain nombre de chapitres sont, en outre, spécialement consacrés à des sujets d'ordre général et d'actualité. Les ouvrages de M. Eugène Aubin — nous faisons allusion aussi à son volume sur le Maroc qui se dis- tingue par les mêmes qualités que celui-ci — n’ont pas seulement le mérite de donner d'une facon très pré- cise la physionomie des pays visités, et cela en une forme élégante et agréable; ils se font également remarquer par le grand nombre de renseignements de toute nature qui font connaître, en même temps que la nature physique des diverses régions, leur état poli- tique, social, économique, intellectuel, ainsi que la part d'influence que les nations européennes se trou- vent y exercer. C’est la partie nord de la Perse que M. Eugène Aubin a explorée le plus en détail. Tauris, le lac d'Ourmiah, le Kurdistan, le Gilan sont longuement décrits. De Téhéran, il a pris les routes du sud pour aller visiter Ispahan, Bagdad et les villes saintes du Chiisme, Ker- béla, Nedjef. II a gagné le golfe Persique en descen- dant le Tigre. L'auteur donne de très curieux détails sur ces lieux saints, très fréquentés des pèlerins, et il montre le rôle que le Chiisme, déformant la religion islamique, a joué dans les destinées de la Perse, en donnant une expression à sa nationalité et en fournissant un lien commun aux diverses races. En dernier lieu, l'évolu- tion de la Perse a amené ce pays à un changement de régime politique et à l'inauguration d’un Parlement, révolution dont M. Eugène Aubin a été mieux à même qu'aucun autre de faire connaître avec précision toutes les circonstances. Il avait aussi une compétence toute particulière pour apprécier l'accord anglo-russe du 31 août1907, qui, partageant l'Iran en zones d'intérêts entre l'Angleterre et la Russie, n’a fait que constater une réalité, car si la Perse est, en droit, un Etat indé- pendant, elle représente néanmoins le terrain sur lequel les lignes russes et anglaises d’Asie se sont rap- prochées. Cet accord, suivant de près la révolution, peut être de nature à favoriser le développement de la Perse. Citons enfin, dans cet ouvrage, le chapitre consacré aux coutumes persanes, où l’auteur parle de la musique et de la danse des derviches et de leurs pratiques, de la chasse au faucon et de l'éducation des diverses espèces. GUSTAYE REGELSPERGER. Mayet (Lucien), Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences. — Etude des Mammifères miocènes des Sables de l’Orléanais et des Faluns de la Touraine. (Thèse de Doctorat.) — Annales de l'Université de Lyon. Nouvelle série. Sciences, Médecine. 1 vol. in-8° de 336 pages avec 12 planches. (Prix : 10 francs.) Baïllière et fils, éditeurs. Paris, 1909. Le Mémoire qui a servi à M. Mayet de thèse pour le doctorat ès sciences comble une importante lacune dans l'étude des Mammifères fossiles. La faune du Miocène inférieur n'avait jamais été l'objet d'une mono- graphie détaillée; de riches gisements situés non loin de Paris, connus depuis Cuvier, avaient fourni aux diverses collections publiques ou privées des ossements fossiles trop longtemps restés inétudiés, ou plutôt BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX souvent cités sans avoir élé attentivement examinés, par suite d’un concours particulier de circonstances. Cette formation géologique, dite « sables de l'Orléa- nais », est d’ailleurs complexe et la stratigraphie en est fort difficile à préciser dans cette région de grandes plaines où les coupes naturelles et les exploitations profondes sont fort rares; M. Mayet à pris soin de visiter tous les gisements et d'en donner ici des des- criptions détaillées. La siratigraphie et l'étude de la faune établissent une distinction absolue entre les « sables de l'Orléa- nais » et les « faluns de la Touraine ». Tandis que les premiers (burdigaliens) renferment des restes de Mam- mifères plus archaïques tendant vers la faune aqui- tanienne de Saint-Gérand-le-Puy, les seconds (hel- vétiens) ont fourni des fossiles présentant beaucoup plus d'affinités avec ceux de Sansan. Dans le Burdigalien, M. Mayet distingue, de bas en haut : le calcaire de Montabuzard, les sables de Chi- tenay, les marnes de Suèvres, les sables de l'Orléanais proprement dits (que l’on peut, je crois, ainsi que l’a proposé récemment M. Stehlier, diviser en deux ho- rizons), puis les marnes de l'Orléanais et les sables de Sologne non fossilifères. Il ne semble pas que l'étude des Mammifères fossiles permelle de subdiviser la formation helvétienne du Blaisois et de la Touraine. On a cru, pendant long- temps, que les ossements fossiles trouvés dans les fa- luns provenaient exclusivement des sables de l'Orléa- nais sous-jacents. Un tel remaniement n'est pas rare, mais les faluns contiennent néanmoins une faune de Mammifères distincte, plus évoluée . On peut voir, dans ces formations successives, dispa- raître les derniers survivants de groupes anciens tels que les Dicératheridés, les Anthracothérédés, évoluer certains ordres, celui des Ruminants, par exemple, ou certains genres (Stencofiber) ou certaines espèces (Anchitherium aurelranense, Trochichtis zibethoïldes) ; on voit apparaître des formes nouvelles (Æhinoceros aurelianensis, voisin des TJ'eleoceras américaines, mastodontes venus probablement d'Afrique, Plio- pethecus) dont les ancêtres n'ont pas été trouvés dans les terrains plus anciens de France, et qui doivent être considérées, dans l’état actuel de nos connaissances, comme immigrées. Les descriptions données par M. Mayet sont claires, très détaillées, appuyées d'utiles comparaisons et accompagnées d'excellentes figures. Après de tels efforts analytiques, patiemment continués pour suivre pas à pas les lentes modifications de la faune dans les assises superposées, les synthèses seront fructueuses et permettront aux paléontologistes de comprendre le rôle des divers facteurs de l’évolution. ARMAND THEVENIN, Docteur ès Sciences, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle. 4° Sciences médicales Kraus (R.), /’rofesseur à l'Université de Vienne, et Levaditi (C.), Attaché à l'Institut Pasteur de Paris. —. Handbuch der Technik und Methodik der Immunitätsforschung (TRaAITÉ De TECHNIQUE Er Mé- THODIQUE DES RECHERCHES SUR L'IMMUNITÉ). Tome Il : Antikôrper (lEs ANTicorPs). — À vol. in-8° de 1220 pages avec 131 figures. (Prix : ki fr.25.) G. Fis- cher, éditeur. lena, 1909. En analysant le tome I de ce Traité ?, consacré aux « antigènes », nous avons indiqué le plan général de 4 M. Mayer vient de consacrer, en collaboration avec Mne la comtesse LECOINTRE, un nouveau Mémoire à l'Etude sommaire des Mammifères fossiles des faluns de la Tou- raine proprement dite. Annales de l'Université de Lyon, fascic. 26, 1909, 1 vol. 80, 72 pages. * ? Revue gén. des Scieuces du 30 août 1908, t. XIX, p. 673. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 1 597 l'ouvrage. Le second et dernier volume, qui vient de paraitre, renferme tout ce qui est relatif aux «anti- COrPS ». Il s'ouvre par un exposé de la technique de la pro- duction des anticorps chez les gros animaux (Fexemple choisi étant l'obtention du sérum diphtérique chez le cheval), dû au Professeur Kretz, de Vienne, tandis que M. Th. Madsen décrit les méthodes d'immunisation chez les petits animaux d'expérience. M. C. Levaditi expose ensuite la technique de l'obtention des immun- sérums antibactériens et anti-toxiques chez les gros animaux, et M. E. Pribram la préparation des anti- corps par les méthodes chimiques et physiques. Vient alors une série de monographies sur les diverses anti- toxines : contre la diphtérie, le botulisme, le télanos, la dysenterie, le choléra, le typhus, les venins des ser- pents, la fièvre des foins, ete. M. C. Levaditi a exposé, dans un important chapitre, l'état actuel de nos connaissances sur la phagocytose, puis, dans un autre chapitre écrit en collaboration avec M. Inmann, ce qu'on sait sur les opsonines. Le D° A. Bühme fait l'étude des sérums bactériolytiques, qui est suivie d'une série de chapitres sur les sérums pesteux, streptococcique, du choléra des poules, de la pesle des pores, de la peste bovine, etc. Au phénomène de l’agglutination est réservée une notable partie de l'ouvrage : M. R. Volk en expose la technique et l'application au sérodiagnostic des bac- téries, M. B. Kreissl l'application au sérodiagnostic cli- nique; MM. P. Ublenhuth et O. Weidanz décrivent le procédé de différenciation biologique des albumines par la méthode des précipitines, et montrent surtout les services qu'il peut rendre dans l'examen médico- légal du sang et de la viande. L'ouvrage se termine par quelques chapitres sur l'anaphylaxie, les hémolysines et cytotoxines du sérum sanguin, les colloides et lipoides dans leurs rapports avec l'immunité, et enfin sur la méthode de fixation du complément de Bordet-Gengou et son emploi au séro- diagnostic des maladies infectieuses, spécialement de la syphilis. Le Traité dont MM. Kraus et Levaditi ont dirigé la publication est un ouvrage unique en son genre; c'est un exposé magistral et complet de l’état actuel de nos connaissances sur tout ce qui touche à la doctrine de S J'immunité. Il sera infiniment précieux, à la fois aux cliniciens, en mettant en pleine lumière les résultats déjà applicables au diagnostic et au traitement des affections microbiennes, et aux chercheurs de labo- raloire, en leur montrant les voies qui restent à explorer et en leur fournissant un guide sûr dans leurs investigations. 5° Sciences diverses Boex-Borel(J. H.), dif J. H. Rosny ainé. — Le Plura- lisme. — 1 vol. in-8°, F. Alcan, éditeur. Paris, 1909. M. Appell a présenté cet ouvrage à l’Académie des Sciences en ces termes : « Dans une étude consciencieuse, M. J. H. Boex-Borel montre que le savoir le plus subtil confirme la discon- tinuité et la diversité des phénomènes, que nous révèle déjà l'expérience familière. L'Univers est mul- tiple; il ne nous fait voir nulle part l'unité ni la dualité. Rien n'est absolument semblable à rien; les relations des phénomènes entre eux sont imparfaites et variées. C'est l’analogie et non l'identité qui se retrouve au fond des évolutions innombrables aux- quelles nous assistons dans le monde visible et que nous suggère l'étude du monde infinitésimal. D'ailleurs, la science s'accommode de moins en moins des mesures absolues qui conviennent aux vues unilaires, et de mieux en mieux des mesures approximatives qui s'harmonisent avec une conception pluraliste. « L'auteur conclut au pluralisme, à un pluralisme illimite et non pas à une monadologie. » 12e ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1° Juin 1909. M. le Secrétaire perpétuel annonce le décès de M. Th. W. Engelmann, correspondant de l’Académie pour la Section de Médecine et de Chirurgie. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUE-. — M. P. Koebe présente ses recherches sur la fonction potentielle et la fonction analytique ayant un domaine d'existence donné à un nombre quelconque (fini ou infini) de feuillets 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Duane décrit une nouvelle méthode pour la mesure de la chaleur dégagée par les corps radio-actifs. basée sur l’augmentation rapide de la tension de vapeur d'un liquide très volatil quand la température monte. 4 gramme de radium dégage à l'heure 120 cal.; le radiothorium dégage une quantité de chaleur du même ordre. — M!:EX,. Gle- ditsch a déterminé le rapport entre l'uranium et le radium dans les minéraux radio-actifs. 11 est plus petit dans l’autunite que dans le pechblende, et plus grand dans la thorianite. — MM. de Broglie el Brizard ont constaté que les fumées produites par action chimique, sans élévation sensible de température et sans barbo- tage, ne sont pas chargées; elles sont transformées par les rayonnementsionisants en gros ions des deux signes jusqu'à une proportion d'équilibre. — M. G. Claude a fait l'analyse de l'air par liquéfaction fractionnée; il trouve que 1 million de parties d’air en volume con- tiennent 15 de néon, 5 d’hélium et moins de 1 d’hydro- gène. — M. W. Œchsner de Coninck, en traitant le sulfate uraneux par le nitrate de baryum, filtrant et évaporant, a obtenu une forme de monohydrate ura- neux spontanément oxydable à l'air en se transformant en monohydrate uranique. — M. P. Pascal, en faisant réagir certains gaz réducteurs (AzO) sur le chlorure de chromyle, a obtenu un sous-chlorure de chromyle (CrO*}CI, en cristaux marrons, d— 2,51, déliquescents, . décomposables par la chaleur, donnant avec AzH° un sel (CrO*)5(OAzH*). — M. E. Caïille a étudié au point de vue physico-chimique certains produits pharmaceu- tiques solides incompatibles, c’est-à-dire donnant des mélanges pâteux ou liquides. 11 donne les courbes de solidification de ces mélanges. — M. C. Gessard montre que la catalase du sang est la cause de la décomposition de H°0? par la fibrine du sang et par l'hémoglobine cristallisée. — MM. P. Mazé, P. Guerault et Dinescu ont constaté que le lait chauffé à 67-68° donne un ren- dement en caillé légèrement supérieur à celui que fournit le lait non pasteurisé; au-dessus, la présure présente une atténuation de son pouvoir coagulant, due à la précipitation des albumines. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier : De l'action Kkvpotensive et mryotique de l'urine humaine normale (voir p. 560). — M. Ch. Pérez a observé, dans la mélamorphose des Muscides, des myoblastes embryonnaires, primitivement extérieurs aux muscles tégumentaires, venant se fusionner avec eux pour donner les muscles définitifs. — M. Col signale l’envahissement de vignobles très anciens de la Loire-Inférieure par le Lathræa Clandestina, plante commune dans le département, dont les racines se tixent par des crampons-sucoirs sur celles de la vigne et la font dépérir, — M. Em. Perrot à fait l'étude d’un arbre de la Côte d'Ivoire dont l'écorce jouit de pro- priélés fébrifuges. C'est une Rubiacée à feuilles oppo- fleurs blanchâtres et petites; l'écorce est presque uniquement composée par un tissu libérien limité vers l'extérieur par une écorce secondaire mince sées, à et un liège irrégulier. — MM. A. Muntz et L. Faure montrent que le degré de perméabilité des sols est le: facteur essentiel de leur aptitude à utiliser l'eau. Une perméabilité très forte est une cause d'insuccès de l'irrigation, au mème litre qu'une perméabilité très faible. — M. P. Termier signale, dans les terrains gra- nitiques de l'ile d'Elbe, des phénomènes d'écrasement tout aussi intenses et évidents que les phénomènes du même genre observés en Corse; il y a trouvé de très beaux types de mylonites granitique et microgranitique. — M. Em. Haug a éludié les nappes des Alpes orientales el leurs racines, qui se succèdent du nord au sud dans Pordre même de l'empilement des nappes correspon- dantes. — M. Ph. Négris a constaté, en Grèce, entre le Lutétien moyen et le Lutétien supérieur, l'existence d'une émersion, indiquée par des conglomérais d'une- part, par une discordance d'autre part. — M. E. Maury établit que toute la région orientale de la Corse où existent des schistes lustrés a été recouverte complète ment par des nappes, au moins au nombre de deux, formées par du granite écrasé supportant des terrains. sédimentaires non métamorphiques. Séance du 7 Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Guichard étudie: les congruences dont les deux surfaces focales sont des. quadriques. Il démontre que les surfaces dont les deux nappes de la surface des centres sont des quadriques de révolution à centre ont même représentation sphé- rique de leurs lignes de courbure que les surfaces à courbure totale constante. — M. A. Demoulin présente ses recherches sur les surfaces telles que les coordon- nées géodésiques des lignes de courbure soient res- pectivement fonelions des courbures principales cor- respondantes. — M. B. Hostinsky présente une généralisation de la géométrie des cyclides, basée sur la transformation 1 de Lie. — M. P. Helbronner donne le résultat des déterminations d'altitude des sommets du massif Pelvoux-Ecrins, d'après ses vpérations de triangulation. — M. H. Larose décrit un procédé de représentation physique des fonctions 0 par la distri- bution de l'électricité le long d'un câble limité. — M. H. Poincaré met sous la forme d'équations de Fredholm les équations du champ électromagnétique d’un conducteur soumis à l’action d'un champ exté- rieur. — M. H. Bourget adresse les observations de l'éclipse totale de Lune du 3 juin faites par MM. Bor- relly et Coggia à l'Observatoire de Marseille. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. H. Hildebrandsson a étudié les relations simultanées des éléments météo- rologiques entre certaines régions de la surface ter- restre; il a trouvé une sorte de compensation entre des centres d'action voisins : ainsi la courbe de la pluie d'hiver à Java est presque identique à celle des varia- tions barométriques à Bombay l'été suivant. — M. K. Birkeland a enregistré à Kaafjord (Finmark) de forts courants telluriques d’induction, provenant de grandes précipitations de corpuscules électriques venant du dehors qui se produisent dans les régions polaires. — M. Devaux-Charbonnel décrit une méthode d’étalon- nement des condensateurs, consistant à décharger x fois par seconde, au moyen d'un électro-diapason, une capacité C, chargée par une pile E, dans un galvano- mètre et à reproduire le courant qui passe au moyen de la pile et d'une boîte de résistance R. — M. D. Hur- muzesceu décrit une méthode de mesure.absolue d'une résistance en unités électrostatiques. Elle consiste à décharger un condensateur électrisé à travers une résistance en diminuant sa capacité de sorte que le Ü D 7 — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES potentiel reste constant. On obtient la valeur de R en fonction de la variation de capacité par rapport au temps. — M. J. Meynier à constaté qu'une quantité infime de vapeur d’eau, débarrassée de tous ses gros ions, suftit à déterminer la combinaison de l'oxygène et du bioxyde d'azote. MM. E. Briner et A. Wroczynski ont étudié les réactions dans les mé- langes de gaz soumis à des pressions-très élevées. AzO el HCI donnent AzOCI et H?0 ; AzO et SO? donnent SO* et Az. — M. Ed. Chauvenet à préparé, par évapora- tion de solutions de mélanges des sels, les combinai- sons hydratées du chlorure de thorium avec les chlo- rures alcalins. Le passage d’un courant de HCI sec vers 150° produit des sels doubles anhydres ou des -oxyhalogénures. — M. G. Dupont a préparé, à partir de l'alcool butylique, le butine normal CHCIPC : CH, Eb. 189,5; son composé cuivreux, oxydé par le ferri- eyanure de potassium, fournit l'octadiine C?4°. C : C. G : CH, Eb.163°-1649. — MM. A. Haller et Ed. Bauer ont préparé les trois oxybenzylidènecamphres, qui sont incolores comme le benzylidènecamphre, mais solubles en jaune plus ou moins foncé dans les alealis. Les dérivés dialcoylamidés du bensylidènecamphre sont colorés en jaune et fournissent avec les acides des sels incolores dissociables par l'eau. — MM. 1. Bouveault et Levallois ont fait la synthèse de quel- ques dérivés de la fénone racémique. — M.J. Huerre a constaté que le sarrasin contient une maltase basse ‘agissant entre + 3° et + 509, avec un optimum à 55°; son activité augmente soit par neutralisation partielle ‘de l’alcalinité du milieu, soit par addition d'amino- acides ou d'acétamide. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. M. Boule à étudié le squelette du tronc et des membres de l'homme fossile de La Chapelle-aux-Saints. L'ensemble du squelette, composé d'os relativement courts et épais, avec des insertions musculaires puissantes, présente les carac- 4ères d'une grande robusticité — M. P. Delanoë signale quelques faits expérimentaux démontrant que les phénomènes anaphylactiques ne sont pas spéci- fiques. Il à pu désanaphylactiser des cobayes hyper- sensibles par des injections d'électrargol. — M. P. Fauvel à constaté que chez l'homme sain, au régime végétarien, le chocolat et le café augmentent l’excré- tion des purines, diminuent l'excrétion de l'acide urique et empêchent la précipitation de ce dernier. — M. Foveau de Courmelles a traité avec succès les nævi par l’électrolyse positive et le rayonnement du radium. — M. C. de Proszynski indique le moyen par lequel il a pu supprimer les scintillements dans la vision cinématographique. — M. E. Bataillon montr que la réaction. propre de l'œuf, qui expulse certains fluides, paraît ètre la condition initiatrice de tout développement complet ou abortif. L'auteur admet un rapport direct entre celte réaction et l'achèvement de da deuxième division polaire. — M. Ch. Gravier décrit les Madréporaires qu'il a recueillis aux îles San-Thomé et du Prince (golfe de Guinée). — MM. L. Leger et O. Duboscq montrent que le Æ#habdospora T'helohani Laguesse n’est pas un parasite des poissons, mais des «ellules muqueuses normales de l’épithélium intestinal de ces animaux. — M. G. Lapie distingue dans la Käbylie du Djurdjura deux subdivisions phytogéogra- phiques : le domaine mauritanien septentrional et le domaine des hautes montagnes atlantiques. — M. J. Lefèvre a constaté que les solutions sucres sont des aliments de choix pour l'embryon de Pinus pinea; la solution à 05 °/, d'amides, aliment de la plante adulte el de la graine, est incapable de nourrir l'embryon. — M. H. Colin à observé que le rougissement des rameaux de Salicornia fruticosa est accompagné d'une accumulation, dans le suc cellulaire, de chlorures minéraux et de composés hydrocarbonés solubles. — M. Alb. Michel-Lévy a étudié quelques basaltes ter- tiaires français du Vorland alpin à fumerolle éléoli- tique ; ils apparaissent surtout vers l’est; les massifs plus à l'ouest présentent des magmas syénitiques. 559 ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 1% Juin 1909. M. A. Railliet rappelle les dangers de contamination du pain qui proviennent du mode actuel de travail de la pâte à la main, et fait ressortir les avantages de la fabrication mécanique, tels qu'ils résultent d’un con- cours international, organisé recemment par le Syn- dicat de la boulangerie de Paris. Le concours à montré que le pétrin mécanique effectue le pétrissage tout aussi bien que la main de l'homme et à un prix beau- coup moins élevé; il supprime la fatigue excessive de l’ouvrier, dommageable pour sa sauté, et donne com- plète satisfaction aux exigences de l'hygiène, — M. le Dr Capitan lit un travail sur la pathologie dans la céramique des anciens Péruviens. Séance du 8 Juin 1909. M. le Président annonce le décès de M. de Saboïa, correspondant étranger. M. Pozzi décrit uue série d'expériences nouvelles du Dr Alexis Carrel relatives à la suture des vaisseaux, à la transplantation des organes et à la greffe des membres. Cet habile expérimentateur à réalisé avec succès : le rapiècement de l'aorte abdominale avec un morceau de péritoine, la transplantation de veines fraiches, celle d’artères conservées plus ou moins long- temps en chambre froide, la transplantation de l'oreille, de la glande thyroïde, de la rate, d'un rein et des membres. Ces expériences ont été faites sur des animaux ; il est possible qu'elles entrent un jour dans la pratique de la chirurgie humaine. — M. le D' Rénon lit un travail sur l'emploi de la tuberculine dans la phtisiothérapie. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 29 Mai 1909. MM. R. Demoll et J. Strohl critiquent les idées de Loeb relatives à l'influence de la température sur le développement des organismes et la durée de vie. — M. C1. Gautier distingue l’adrénaline de la pyroca- téchine par leur coloration avec le permanganate, la première donnant une teinte rouge orangé, la seconde une teinte verte. L'iode et la chaleur détruisent le pouvoir mydriatique de l’adrénaline. — MM. M. Doyon et CL. Gautier ont constaté que, sous l'influence d’une injection de bile dans une veine mésaraique, on peut voir apparaître dans le sang une substance qui empêche in vitro la coagulation du sang normal. — M G. Repaci a isolé et cultivé le bacille fusiforme de Vin- cent sur la simple gélose sucrée en employant la tech- nique de Veillon; c’est un anaérobie strict, peu patho- gène. — MM. A.-B. Marfan, Baudouin et E. Feuillié ont étudié les altérations de la moelle osseuse dans le rachitisme : au stade inilial, c’est la moelle cellulaire qui prolifère; à la période d'état, c'est la moelle fibreuse; dans une phase de transition, les hématies ordinaires sans noyau sont abondantes. — MM. N. Fiessinger et P.-L. Marie ont isolé le ferment protéo- lytique des polynucléaires; il agit de préférence en milieu alcalin et devient inactif à 75°. — MM. A. Net- ter et R. Debré ont fréquemment constaté, au début de la méningite cérébro-spinale, la présence d'un liquide céphalo-rachidien clair, albumineux, riche en microbes, pauvre en cellules à forme mononucléaire. — M. P, Fauvel a constaté que, chez l'homme sain, le rapport de l'acide urique aux purines est constant pour une alimentation déterminée, mais très différent d’un régime à l’autre. — MM. A. Clerc el M. Lœper ont observé, après la ligature du canal pancréatique, une augmentation marquée du pouvoir amylolyüque du sérum sanguin, suivie bientôt d'une diminution au- dessous du taux primitif. —- M. Ch.-A. François- Franck signale les défectuosités de la sph\gmomano- métrie digitale comme méthode manométrique et son ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES intérêt comme méthode pléthysmographique à contre- pression variable. — MM. J.-E. Abelous et E. Bardier ont trouvé dans l'urine humaine normale une subs- tance précipitable par lalcool et le sulfate ammo- nique à saturation, donnant quelques réactions des protéoses et jouissant de propriétés myotiques et hypotensives par injection intra-veineuse. — MM. G. Paisseau et L- Tixier ont observé deux typhiques chez lesquels l'intradermo-réaction à la tuberculine se montra positive au début de la maladie et franche- ment négative pendant la convalescence. — Mie M. Bellion a constaté que le foie, la glande de l'albumen et le muscle du pied de l’escargot contiennent un corps réducteur fermentescible, paraissant être du glu- cose. — MM. Roubinoviteh et C. Levaditi ont reconnu que les altérations cérébrales qui caractérisent la démence précoce ne sauraient être attribuées à l'infec- tion tréponémique. Seance du 5 Juin 1909. M. Ch. Richet a constaté que les parties les plus périphériques de l’aile de oiseau (par rapport à l'axe du corps) sont celles qui jouent le principal rôle dans le vol; on peut diminuer dans cerlaines proportions la surface alaire d'un côté sans empêcher l'oiseau de voler. — MM. Ed. Retterer et Aug. Lelièvre montrent que là forme, l'intensité et la durée de la contraction musculaire dépendent de la structure même du muscle. Les contractions sont énergiques et longues, ou brèves et rapides, suivant que les colonnettes contractiles pré- dominent ou demeurent grêles chez l’écrevisse. — MM. Ed. Lesné et L. Dreyfus, par l'étude des injec- tions de blanc d'œuf chez le lapin, ont reconnu que l’anaphylaxie n'est une réaction spécifique que si on limite le nombre des inoculations; elle n’est pas spéci- fique si on les multiplie. — MM. F. Legueu, L. Morel et H. Verliac ont constaté que la narcose éthérée par voie rectale n’est pas plus dangereuse que la narcose par inhalation; elle offre des avantages indiscutables dans les interventions sur la face, la cavité buccale, le cou et le thorax, mais doit rester une méthode d’excep- tion. — MM. A. Laveran el A. Pettit ont observé que, chez le rat et la souris, l’inoculation intrapéritonéale ou intrahépatique d’une émulsion de parenchyme ou de sang renfermant des Lershmania provoque la for- mation d'un exsudat périlonéal riche en lymphocytes contenant ces parasites. — M. C. Gessard recommande l'emploi du sérum quand il s’agit de reprendre une diastase engagée dans un précipité phosphaté calcaire. . — MM. N. Fiessinger et P.-L. Marie ont constaté que les polynucléaires du liquide céphalo-rachidien, dans les méningites aiguës à méningocoques, possèdent un pouvoir protéolytique accusé. — MM. Ch. Achard et A. Ribot ont reconu que les méninges normales sont légèrement perméables à l’iodure de potassium, qui peut être décelé dans le liquide céphalo-rachidien.— M1 M. Bellion montre que les échanges respiratoires chez l’escargot sont beaucoup moins intenses pendant l'hi- bernation que pendant la période de pleine activité. — M. H. Vincent établit l'existence d’anti-corps précipi- tants dans le liquide céphalo-rachidien de méningite tuberculeuse. — M. CI. Regaud attribue aux forma- tions mitochondriales la fonction générale d'extraction et de fixation électives exercée par les cellules vivantes sur les substances dissoutes dans le milieu ambiant. — MM. E. Fauré-Frémiet, A. Mayer el G. Schaeffer ont recherché quelles sont les substances chimiques qui peuvent présenter les mêmes réactions de coloration que les mitochondries : ce sont les acides gras et leurs combinaisons d'adsorption avec certains pro- téides. — MM.M. Doyon et CI. Gautier montrent que la bile peut déterminer lincoagulabilité du sang, même après l'injection de plusieurs doses successives de pep- tone. — M. A. Guilliermond a reconnu que les anas- tomoses qui se produisent chez l£remaseus fertilis constituent le vestige d'une reproduction sexuelle ancestrale analogue à celle de l'£Zndomyces fibuliger.— MM. F. Widal et Joltrain ont observé une biligénie hémolytique locale dans un cas d'hémorragie mé- ningée. — M. A. Le Play a étudié les variations, dans un même cas d'infection gonococcique compliquée d'infection typhique, de l'indice opsonique en fonction de l’interversion des facteurs de l’'opsonisation. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 18 Mai 1909. M. E. Boinet décrit un cas d'ectromélie longitudi- nale externe de l’avant-bras et de la main gauches chez un ouvrier italien. — MM. E. Boinet et Rousla- croix signalent deux cas de maladie de Basedow, avec hyperthyroïdation, terminés par une asystolie mor- telle. — M. L. Raybaud à observé que les change- ments brusques d'éclairement provoquent des mouve- ments également brusques du protoplasme à l'intérieur du mycélium jeune des Mucorinées. Ces mouvements sont des mouvements de recul vers la lumière et de progression vers l'obscurité. — M. C. Gerber décrit une méthode générale de préparation des présures végétales : les plantes sont réduites après dessiccation en poudres qui sont soumises à la lixiviation par une solution de NaCl; on précipite par le sulfate d'ammo- nium, puis on soumet le précipité à la dialyse. — Le même auteur a étudié la présure des Thyméléacées ; elle est beaucoup moins résistante à la chaleur que les autres présures végétales. — MM. D. Olmer et A. Tian ont constaté que les méninges normales sont per- méables au salicylate de lithium absorbé par voie digestive. — MM. Simond, Aubert, Blanchard et Arlo ont reconnu que la fièvre de Malte existe d'une façon incontestable à Marseille; elle y parait même assez fré- quente. — MM. Alezais et Peyron ont observé la présence d'éléments spécialisés de la série lymphocon- jonctive dans les fibres musculaires striées envahies par les tumeurs épithéliales malignes. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Seance du 23 Avril 1909. M. L. Dubreuil demande l'ouverture d'un pli ca- cheté, relatif à l'enlèvement de la neige dansles villes. Dans une partie théorique, il montre que les sels, anhydres ou hydratés, peuvent former avec l'eau des mélanges eutectiques dont la composition et le point de fusion sont parfaitement définis sous la pression atmosphérique. Si l’on mélange de la glace et un sel, l’eutectique tendra à se former et à dissoudre l'excès. de sel ou de glace : l’ensemble tendra donc à se liqué- fier si la température est supérieure au point de fusion 0 de l’eutectique; cette température est donc la plus basse que puisse fournir un mélange de glace et de sel, Soit d'autre part Ÿ le poids de sel mélangé à 1 gramme d’eau dans l’eutectique; il est bien évident. que la fusion de 1 gramme de glace sera d'autant plus rapide que sa température sera plus éloignée de 6 et que la quantité de sel ajoutée sera plus voisine de E : un excès de sel aurait la même influence retardatrice qu'un excès de glace. Les considérations précédentes. expliquent l'emploi du sel marin pour la fusion rapide de la neige : pour ce sel, 0 = — 240,3 et = — 0,33. La proportion de sel qui assurera la fusion la plus rapide est donc 1/3 environ du poids de la neige à fondre. Mais le principal inconvénient réside dans ce fait que le point d'eutexie et le point de fusion de la glace ne: diffèrent que de 21°, de sorte que la fusion est lente dès. que la tempéralure de la neige atteint — 12° à — 150. Il serait donc désirable de remplacer NaCI par un autre corps : le chlorure de calcium cristallisé, Ca CE. 6 420, paraît être à peu près seul à remplir les conditions re- quises; pour ce sel, 0— — 559,e1 2 —0,425. — M. Douet- teau a fait quelques observations sur l’action de l'acide acétique sur le chlorure de -xylylène : il se forme du diacétate correspondant avec dégagement d'HCI Em 70 heures, la quantité décomposée atteint 980/,. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES GE M. L.-J.Simon, à propos de la loi des chaleurs spéci- fiques, de Dulong et Petit, insiste sur la variabilité de celte prétendue constante physique, qui, sauf de rares exceptions, est essentiellement dépendante de la tem- pérature. La loi de Dulong et Petit, sous sa forme clas- sique, est donc inexacte. L'auteur pense cependant qu'il peut y avoir un rapport encore non défini entre la chaleur spécilique et le poids atomique, à condition de tenir compte de la complexité moléculaire. M. G. Wyrouboff estime qu'il n'y a aucune relation entre la chaleur spécifique, propriété physique, et le poids ato- mique, propriété chimique, et que la première dépend uniquement de la particule cristalline. Séance du 14 Mai 1909. MM. A. Kling et Roy communiquent une méthode d'analyse des laits altérés. Cette méthode, basée sur la détermination de l'azote total et de la matière grasse des laits, leur a permis de déceler mouillage etécrémage dans des laits datant de plus d’une année el présentant une altération profonde. — M. E. Rengade communi- que les résultats de ses recherches sur les sous-oxydes de cæsium. Le diagramme de fusibilité du système Cs-Cs°0 démontre l'existence de quatre sous-oxydes : Cs’0, Cs'0, Cs’0? et Cs'O, le premier fondant à 30, les suivants se transformant successivement les uns dans les autres et dans le protoxyde aux températures de + 10°, Æ 50° et + 170°. L'oxyde Cs'0? s'isole facile- ment par centrifugation dans le vide, à la température ordinaire, des cristaux que dépose sa solution dans un excès de mélal. — M. 3. Bougault revient sur la trans- formation de l'acide benzoylacrylique G‘H°.CO.CH : CH.CO*H en acide diphénacylacétique (CH°.CO.CH?}? CH.CO*H sous l'influence des alcalis dilués. Il avait ad- mis antérieurement que ce dernier acide provenait de la fixation de l'acétophénone, formée dans une pre- mière réaction (par dédoublement de l'acide benzoyl- acrylique en acide glyoxylique et acétophénone), sur l’acide benzoylacrylique non décomposé. A la suite de nouvelles expériences, il a adopté une hypothèse de M. Béhal qui rapporte la formation d'acide diphénacyla- cétique à la condensation de l'acide glyoxylique et de l’acétophénone. M. Bougault a constaté, en effet, que cette condensation est aisément réalisable et il l'a appliquée à plusieurs acétones du type R-CO.CH* {R étant CH substitué ou non.) — M.L. Bouveault, au nom de M. Levallois et au sien, expose les recherches qui les ont conduits à la synthèse de l'acide dihydro- fencholénique racémique. Ils ont employé comme matière première l'acide dihydrocamphocénique, dont la synthèse a été faite récemment par MM. Bouveault et Blanc. En traitant cet acide par la méthode de MM. Haller et Bauer, ils ontréussi à y remplacer le der- nier atome d'hydrogène fixé à l'atome de carbone en « par un groupe méthyle. L'acide obtenu, qui a été étu- dié à l’état d'amide, s'est montré formé de l'acide cherché mélangé à un stéréoisomère cis-trans dont il ne peut être directement séparé. Les séries qui en dé- rivent out pu être séparées et identifiées aux produits nalurels. SOCIETÉE ROYALE DE LONDRES Séance du 25 Février 1909. M. H. A. Wilson : La théoriestatistique de la forme de la courbe d'oseillation pour la radiation émise par un corps noir. L'hypothèse adoptée dans ce Mémoire est que la radiation d'un corps noir est une perturbation irrégulière soumise aux lois statistiques. L'auteur prouve que ces lois peuvent être déduites de la distri- bution d'énergie dans le spectre, et qu’elles permettent de décrire le caractère de cette perturbation. La per- turbation à chaque instant est considérée comme étant la somme des déplacements dans le nombre infini de vibrations harmoniques simples de phases arbitraires qui sont obtenues lorsque la radiation est dispersée dans un spectre. Des expressions sont trouvées pour les chances que le déplacementetses dérivées se produisent dans des limites données. Ces expressions permettent de calculer le nombre moyen de valeurs nulles par centi- mètre du déplacement et de ses dérivées. L'auteur a es- üimé la distribution des maxima et minima et a dessiné une courbe donnant approximativement les propriétés statistiques déduites. La longueur d'onde moyenne (!) de la radiation est définie par 2/n,, où », représente le nombre moyen dezéros par centimètre dans la courbe de déplacement. Si À, indique la longueur d'onde dans le spectre pour laquelle l'énergie est un maximum, l’auteur montre que À'/4, — 2,5. Il indique aussi que le nombre de maxima et minima est environ le double du nombre de valeurs nulles et environ la moitié du nombre de points d’inflexion dans la courbe. — M. J. B. Henderson : La trajectoire d'un projectile de fusil dans Pair. Le problème est traité comme celui d'un corps rotatif en mouvement rencontrant certaines ré- sistances dues à l'air, et il est démontré que tous les phénomènes connus sont expliqués par les mouvements précessionnels du coup, dus aux couples de vibration et de friction qui proviennent de l’obliquité de l'axe du projectile par rapport à la direction du mouvement. On peut ainsi construire la trajectoire complète dans tous ses détails, d’après les conditions initiales et les lois de la résistance, dès que celles-ci sont connues. En supposant connues les lois de la résistance, les détails des portions de trajectoires sont dessinés par les traces que la direction de l'axe du coup et la direction du mouvement laissent sur la sphère céleste. M. Mallock a aussi étudié le phénomène physique d’un projectile en mouvement, en partant du même point de vue, dans un Mémoire sur les portées et la conduite des projectiles de fusil dans l'air, et les deux interprétatious du phé- nomène s'accordent dans leur partie commune. Le but de M. Mallock, cependant, est d'obtenir une expres- sion pour l'impulsion du projectile, ce qu'il fait en supposant que l’axe suit la tangente de la trajectoire, Le présent Mémoire contient les détails du mouvement, les déviations de l'axe par rapport à la tangente et la méthode par laquelle l'axe suit approximativement, en moyenne, la tangente à la trajectoire. Il est démontré que des détails découle l'explication des impulsions horizontales et verticales. — MM. L. B. Prout et A. Bacot : Le croisement des deux races de teigne Aci- dalia virqularia. Les auteurs ont entrepris des expé- riences de croisement systématique très étendues sur deux races locales bien tranchées de la teigne Acrdalia virqularia : la forme sombre de Londres et la forme blanche du sud de la France (Hyères). Entre les années 1906 et 1908, dix générations ont élé croisées et analy- sées, le nombre de spécimens ayant été de 5 à 6.000. Les résultats sont absolument négatifs en ce qui concerne la ségrégation mendélienne. Il semble qu'il soit néces- saire, pour obtenir la ségrégation des formes paren- tales dans une race hydride, de croiser des aberrations habitant la même aire géographique. Séance du 4 Mars 1909. M. A. D. Waller a étudié l'eflet de la chaleur sur l'état électrique des tissus vivants. Le tissu -- muscle, nerf ou peau — est relié au galvanomètre par deux électrodes; la chaleur est appliquée par la brève incan- descence d’un fil de platine sous l’une des deux élec- trodes. Dans le muscle et le nerf, où l'effet électrique d’une excitation locale est négatif, l'effet d'une chaleur modérée est positif; dans la peau, où l'effet électrique de l'excitation locale est positif, l'effet de la chaleur modérée est négatif. Une chaleur excessive, produisant une lésion, donne un effet négatif dans le musele et le nerf et un effet positif dans la peau. Ainsi, dans les trois cas, — muscle, nerf et peau, — l'effet électrique de la chaleur modérée est de signe opposé à celui de l'excitation. — M. F. W. Twort a étudié l'action des bacilles acido-résistants sur 43 glucosides, mais il n'& obtenu aucune fermentation. Un glucoside, l’éricoline, possède la propriété de tuer la plupart des microorga- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES F nismes, en particulier ceux du -groupe du colibacille et les divers cocci, tandis qu'il est presque sans effet sur les bacilles acido-résistants. Cette propriété permet l'isolement direct et facile du bacille tuberculeux des crachats humains contaminés avec d'autres organismes. Le crachat est placé dans une solution à 2 °/, de gluco- side, maintenue à 38° pendant une heure ; ensuite on fait des ensemencements sur le milieu de Dorset et l'on obtient généralement des cultures pures de bacille tuberculeux au bout de 14 à 28 jours — M. L. S. Dudgeon : La présence d'hémo-1gqlutinines, d hemo- opsoutnes et d'hémolysines dans le sang des malades atteints de maladies 1ulectieuses ou non. I. Sur 1% cas de fièvre typhoïde, le sang présentait de l'hémolyse dans 9 cas ; lorsque l’hémolyse se produisait après avoir ajouté du sérum immunisant aux cellules rouges nor- males, les cas se terminaient fatalement. L'auto-hémo- lyse s’est produite deux fois. L'iso-hémolyse a été trouvée quelques fois en ajoutant du sérum normal à des globules rouxes immunisés, moins fréquemment avec le sérum immunisé ajouté aux érythrocytes nor- maux. L'auto-agglutination est un phénomène extrème- ment rare. L'iso-agglutination se présente dans le sang normal, mais non l’auto-agglutination. Les agglutinines hémolytiques sont toujours présentes avec les hémoly- sines. L’agglutination résultant de l'action d'un sérum sur certaines cellules rouges peut être complètement empêchée en saturant préalablement le sérum avec les cellules rouges chauffees à 60° pendant une heure. L'hémo phagocytose est souvent bien marquée; le phé- nomène résulte généralement de l’action des cellules rouges immunisées, du sérum normal et des leucocytes normaux. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES {Séance du 1% Mai 1909. M. W. Duddell présente un nouveau {ype de galvano- mètre à vibration bifilatre. I appartient à la classe des appareils où le courant à mesurer passe autour d'une bobine mobile placée dans un champ magnétique fixe selon le principe du « syphon recorder ». Dans l'ins- trument décrit, la masse des parties mobiles est réduite à un minimum, la bobine mobile étantréduite aux deux fils formant ses deux côtés, comme dans l’oscillographe bifilaire, mais avec cette différence que l'amortissement est aussi faible que possible. Une série d'essais faits sur ces appareils montre que l'intervalle total de fré- quence est très grand; il s'étend de 90 à 1900 vibrations par seconde, La sensibilité au courant alternatif décroît à peu près en raison inverse de la fréquence pour laquelle l'instrument est ajusté, tandis que, pour le courant direct, la sensibilité décroît à peu près en raison inverse du carré de cette fréquence. — MM. W. P. Fuller et H. Grace ont étudié l’snfluence de la tem- pérature sur la perte par hyslérèse dans le fer dans un champ rotatif. Le champ rotatif est produit par des courants diphasés, les deux phases étant reliées à deux bobines à angle droit. Un disque de fer est supporté par une suspension bifilaire et l’on mesure le couple de torsion par un miroir et une échelle. L'échantillon était chauffé par des fils de nickel placés au dessus et au- dessous de lui et la température mesurée par une thermo-jonclion placée contre le disque. Le flux dans le fer était déterminé par le voltage induit dans une bobine de huit tours de fil enroulés autour de lui. Les résultats des expériences montrent que l'effet de l'aug- mentalion de température du fer estde réduire la perte d'hystérèse pour une induction donnée et que la perte maximum a lieu pour une valeur plus basse de l'induc- tion. — MM. A. Campbell et T. Smith décrivent une méthode simple et rapide pour déterminer les vitesses des oblurateurs photographiques, avec une erreur moindre que 0,000! seconde, Un faisceau vibratoire de lumiere tombe à travers une fente étroite sur une plaque mobile et sert à mesurer le temps. Ce faisceau est obtenu en réfléchissant la lumière d'une lampe Nernst par le miroir d'un galvanomètre à vibration actionné par un courant de fréquence connue. Quand on désire seulement la durée totale d'exposition, le faisceau vibratoire passe à travers l’obturateur en traçant une courbe sinusoïdale sur la plaque mobile ; la durée d'exposition se déduit immédiatement du nombre d'on- dulations enregistrées de la plaque. Pour mesurer le rendement en même temps que la durée de l'exposition, on emploie la méthode d’Abney. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 11 Mars 1909. MM. A. H. Hiorns et S. Lamb ont éludié l'influence de petites quantités darsenice et d'antimoine sur le cuivre. La présence d’As augmente la dureté du cuivre; les essais de laminage ont montré que jusqu'à 0,2 2/0 d'As, les lingots présentent des craquelures sur les bords, probablement à cause de la présence d'oxyde inclus; entre 0,2 et 0,5 °/,, le métal se lamine parfai- tement; entre 0,5 et 2°/, d’As apparaissent de nou- veau des craquelures; entre 2 et 3,5 °/,, le laminage redevient parfait. La présence d’As augmente fortement la résistance électrique et diminue la conductivité. L’antimoine a un effet analogue à celui de l'arsenie. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 10 Mars 1909. M. J. E. Southcombe a analysé le beurre retiré des noix du Bassia Parkii et connu sous le nom de shea butter. Il fond à 29° et a une densité de 0,861; indice d'acide, 26,17; indice de saponification, 178,7; indice d'iode, 57,6. Les acides du beurre sont les acides oléique (60 °/,), stéarique (30-35 °/c), laurique (3-4 2/5) et linolique (traces). — Le même auteur a analysé l'huile des graines de Symphonia globulifera, très communes dans l'Amérique du Sud. F. 35°; d —0,8849; indice d'acide, 10,1; indice de saponification, 194,6; indice d’iode, 64,2; F. des acides gras, 48'-50°, SECTION DE LONDRES Séance du 1° Mars 1909. M. J. W. Lovibond a étudié les conditions que doit réaliser un étalon de coloration. 11 préconise l'emploi comme source lumineuse de la lumière solaire diffuse, réduite à une intensité de 18 à 28 unités, qui donne des lectures constantes pour chaque couleur. L'angle d'incidence sous lequel on doit obs:rver ne doit pas s'éloigner de plus de 40° de la perpendiculaire; le temps d'observation le meilleur est de 3" pour les cou- leurs sombres et de 5" pour les couleurs claires. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 22 Avril 1909. k M. H. Landolt donne lecture d’un Mémoire sur les petites diminutions du poids total observées lors des réactions chimiques et les interprétations qui ont été. données de ce phénomène. Il discute plus en détail les observations de M. Zenghelis, suivant lesquelles les vapeurs des substances s'échapperaient à travers la paroi de verre des vases. — M. Liebisch adresse un Mémoire de M. H.-E. Bueke, privat-docent à l’Univer- sité de Koenigsberg, au sujet de la production artifi- cielle de la rinnéite (FeCË.3KCI.NaCl), basée sur le. diagramme de la solubilité. Après avoir déterminé les solutions susceptibles d'être à 38° en équilibre avec ce minéral, il examine le processus de cristallisation accompagnant la vaporisation d'une solution de ce dernier. pr ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 903 Séance du 29 Avril 1909. M. A. Auwers, en se référant à une communication antérieure (du 5 mars 1908), rend compte de l'état actuel de sa rédaction des anciennes observations de Bradley. Le catalogue à fiches des ascensions droites déterminées au quadrant se trouve désormais terminé. L'erreur moyenne d'une détermination individuelle dans cette série, obtenue en comparant les valeurs individuelles relatives aux premières six heures et demie avec leurs moyennes, se trouve être de — 28 secondes entre les déclinaisons + 35 et — 250, — Le même auteur adresse une publication de la Com- mission historique du Ciel des Etoiles fixes : « Listes des erreurs des catalogues d'étoiles des xvin® et xIx° siècles », par M. F. Ristenpart (Kiel, 1909). ALFRED (GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance dy 30 Avril 1909. M. C.-J. Elias rend compte de ses recherches rela- tives à /a dispersion aromale de la polarisation rotatoire magnétique. I détermine d'abord, par voie photomé- rique, l'absorption de solutions de terres rares, à des concentrations différentes. Il établit que l'absorption est liée à la concentration par une loi qui se manifeste par des variations de grandeur relatives des maxima d'absorption. La méthode spectrométrique lui permet ensuite de conslater des variations considérables des speches d'absorption, variations qui accompagnent celles de la concentration et de la teneur en acide. Les résultats donnés par ces deux méthodes ne concordent pas parfaitement; aussi les études photométriques des spectres d'absorption sont-elles préférables au procédé spectrométrique. Dans bien des cas, la connaissance exacte des courbes d'absorption est indispensable pour donner la véritable position des maxima d'absorption. Des expériences ultérieures serviront à décider si les divergences constatées entre les deux procédés de mesure sont dues à des facteurs physiologiques ou à la dispersion anomale. Les déterminations ultérieures de la polarisation rotatoire, faites par la méthode des demi-ombres, ont permis de constater, à proximité des bandes d'absorption, des anomalies particulièrement frappantes dans le cas des terres rares.| La position des maxima et des minima de rotalion se trouve être indépendante, pour uue solution donnée, de la concen- tration et de la teneur en acide. les grandeurs rela- tives de ces maxima el minuna sont, au contraire, fortement variables avec la concentration et la teneur en acide, ce qui peut entraîner des déplacements secondaires. En augmentant la concentration, on produit en général le mème effet qu'enfaccroissant la teneur en acide. D'autre part, l'épaisseur de la couche traversée par les rayons exerce très probablement une influence sur la rotation (relativement plus grande, numériquement, pour les petites épaisseurs). L'auteur constate aussi des divergences de proportionnalité pour des intensités de champ variables, ainsi qu'un accroissement considérable de la rotation elle mème et des anomalies de rotation, à mesure que décroit la température. Les courbes de rotation indiquées par M. Drude semblent assez bien représenter l’ensemble des phénomènes observés. — M. S. Téréchine adresse un Mémoire sur la liaison qui existe entre la densité et le degré de dissociation des solutions aqueuses de sels. L'auteur présente une interprétation simple d’une intéressante relation récemment signalée par M. A. Heydweiller entre ces deux facteurs, relation qui permet de calculer par une formule simple l'accrois- sement de densité de la solution par rapport à l'eau de même température. — M. H. Jordan présente un Mémoire sur l'emploi du magnétomètre astatique de Haupt pour l'examen des matières et plus particulière- ment des barres cylindriques et des ellipses de tôle. L'auteur y rend compte des recherches récemment faites sur de petits échantillons au Bureau des Essais télégraphiques des Postes allemandes, au sujet des propriétés magnétiques des parties en fer que com- portent les appareils télégraphiques et téléphoniques — M.J. Traube adresse un mémoire sur l'équation d'état de Van der Waa!s, dans le cas de l'état solide Bien que cette formule d'approximation n'ait pas réussi à représenter le passage entre les états gazeux et liquide, elle n’en possède pas moins une haute importan:e dans les limites d'une phase unique par exemple, pour comparer, dans un intervalle élroi! de températures, la facon de se comporter de différents liquides homogènes. Dans ce cas, les grandeurs à et h peuvent, sans erreur considérable, être considérées comme constantes. Dans le présent travail, l'auteur continue ses tentatives d'appliquer l'équation à l'état solide. Il fait voir que les compressibilités déterminées par M. Th.-W. Richards et ses élèves sont parallèles aux pressions internes (soil aux Co-volumes) et que dans le cas des métaux, le produit de Ja pression En terne par la racine carrée de Ja compression atomique est, d'accord avec les exigences de l'équation, au moins en approximalion grossière, une constante qui équi- vaut, en moyenne, à 4,04. D'autre part, l'auteur à démontré la possibilité de baser sur cette équation le calcul d'une grandeur qu'il interprète comme mesure approximative de la tension superficielle, Or, cette grandeur est parallèle, avec une régularité surprenante aux différences de potentiel électrique des métaux. c'est-à-dire à la série voltaïque. Grâce à cette liaison immédiate entre les cohésions, calculées sur la base de l'équation d'état et de certains facteurs électriques fondamentaux, cette équalion prend ainsi une impor- tance imprévue pour l’électrochimie et l'électricité en général. — M. A. Koepsel adresse quelques remarques ultérieures au sujet de son étude sur une nouvelle mé- tliode d'analyse continue etectrique des mélanges gazeux, méthode appliquée aux déterminatiens des vitesses d'écoulement des gaz. En répétant ses expé- riences, il vient d'avoir l'occasion de modifier cer- taines de ses conclusions antérieures. I] signale comme extrèmement ‘probable que les mélanges d'air et de méthane ne sont pas du tout si dangereux qu'on le suppose en général. Le contact avec un fil de platine incandescent ne produit, en effet, jamais la détonation de ce mélange, à l'inverse de ce qui a lieu dans les mélanges de l'air avec l'hydrogène ou le gaz d’éclai- rage, déjà au-dessous de la température du rouge sombre. Aussi les détonations du grisou seraient-elles dues à des facteurs secondaires, tels que la présence de la poussière de charbon. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 21 Mars 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. W. Kapteyn : Sur une classe d'équations différentielles du premier ordre et du premier degré. Dans sa dernière communication (Fev. génér. des Sciences), M. JT. de Vries a indiqué un critérium géométrique permettant de décider si une équation différentielle du type indiqué peut être réduite par une transformalion projective, soit à une équation linéaire, soit à une équation de la forme : PR(x)y+S(x) À y'= N(x)}' + P(x)y + Q(x). Ic1 M. Kapteyn démontre qu'une transformation pro- Jective ne mène au but que pour les équations de la forme : fH, HE +x(N+c)} = Ki + M +yiNi to). Corollaires. — M. J. de Vries présente au nom de M.Z, P. Bouman: Sur une famille d'équations différentielles du premier ordre. En suivant les idées développées par M. J. de Vries, l’auteur parvient au résullat que 56% les équations différentielles en question se présentent sous la forme : $xHsr—1(y, x) Her 1(y, x) = yHin (y, x) EH (y, x); ensuite il fait connaître la substitution correspondante. — M. D. J. Korteweg présente au nom de M. L. E. J. Brouwer : Sur des distributions de vecteurs sur une surface. Démonstration des théorèmes : 1. Une direc- tion de vecteur variant d'une manière continue d'un point à l’autre sur une surface bilatérale fermée à con- nexion simple doit être indéterminée en un point au moins. 2. Une distribution continue et partout univa- lente de vecteurs sur la surface indiquée doit admettre en un point au moins un vecteur zéro ou infini. 3. Une fonction univalente et continue d'une variable complexe sans points zéro ou infini n'existe pas. 4. Une direc- tion de vecteur variant d'une manière continue d’un point à l’autre d'une surface unilatérale fermée à con- nexion simple doit être indéterminée en un point au moins. 5. Une distribution continue et partout univa- lente de vecteurs sur la surface unilatérale indiquée doit admettre en un point au moins un vecteur zéro ou infini. — M. J. P. van der Stok présente au nom de M. C. Easton : Sur la période solaire de 35 années, de M. Lockyer. Dans sa communication à la séance pré- cédente, M. E. Dubois parvint à la conclusion que l’eau du sol, dans les dunes de la Hollande, montre une variation périodique de hauteur dont la période cor- respondrait remarquablement à celle qu'on retrouve, d'après M. E. Brückner, en un grand nombre de phé- nomènes météorologiques, la période de 35 années que M. Lockyer croyait apercevoir en 1901 dans les fluctuations de l’activité solaire et du magnétisme ter- restre. M. Easton répète ici que cette période de M. Lockyer n’est pas fondée sur des bases assez solides (Rev. génér. des Sciences, t. XNI, p. #4) et y ajoute des considérations montrant que l'opinion de l’astro- nome anglais est réfutée par les nouveaux faits récents. 2 Sciences PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires. XIV. Condensation rétrograde double. Le phénomène de la condensation rétrograde se présente chez les mélanges binaires quelle que soit la proportion des deux sub- stances constituantes entre des limites de températures très rapprochées l'une de l’autre. En comprimant la vapeur saturée du mélange, on voitse précipiter une petite quantité de fluide, qui disparaît si l'on augmente davantage la pression. Si les deux substances ne sont pas miscibles en toutes proportions, de manière qu'à côté de la vapeur il puisse se présenter deux fluides, différents quant à la proportion des substances cons- tituantes, la théorie exige la possibilité d’une réitéra- tion de la condensation rétrograde, d’abord pour l’un des deux fluides et ensuite pour l’autre. Toutefois, il sera bien difficile de réaliser ce phénomène par l'expé- rience. Des expériences provisoires, faites avec un mélange d'acide carbonique et d'uréthane, ont prouvé que le pourcentage de l'uréthane doit être moindre que { °/,. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. H. Meerburg : Sur le mouvement d'un fil mélal- lique à travers la glace. XI. (Pour la première partie voir Æev. génér. des Sciences, t. XVI, p. 176.) L'auteur revient à la question traitée il y a deux ans, parce qu'une étude de M. G. Quincke (Annalen der Physik, t. XVIII, p. 1), dont il ignorait l'existence au moment de la publication de ses considérations précédentes, attribue un rôle important à des inclusions de sel dans la glace, le trouble de l'espace où le fil métallique a traversé la glace étant causé par des quantités de solu- tion saline admettant un pouvoir réfractif différent de celui de la glace environnante. l’auteur a répété les expériences de M. Quincke; ses résultats diffère ceux de M. Quincke sur divers points, quoiqu'ils ne ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES contredisent pas toute la théorie développée par ce savant. — M. H. Kamerlingh Onnes : Méthodes et appareils en usage dans le Laboratoire cryogène de Leyde. XV. Appareil pour la purification de l'hydro- gène gazeux à l'aide de l'hydrogène liquide. — Ensuite M. Onnes présente au nom de M. J. P. Dalton : /xpé- riences sur l'effet Joule-Kelvin, particulièrement à des températures basses. Les calculs de l’auteur font partie d'une recherche entreprise comme étude prépa- ratoire à la construction d’un appareil pour la déter- mination de l'effet Joule-Kelvin sur l'hélium à la tem- pérature de l'hydrogène liquide. Pour essayer l’appa- reil, on avait à expérimenter d'abord avec de l'air à la température ordinaire et avec de l'hydrogène à la tem- pérature de l'oxygène liquide; mais la construction de l'appareil devait aussi permettre de l'employer dans l'hydrogène liquide. Des expériences provisoires mon- trèrent que l'appareil, dans sa forme originale, n’accu sait pas un effet de Joule-Kelvin propre, et conduisi- rent ainsi à une étude spéciale de la thermodynamique de la dilatation par un robinet et du mode d'installa- tion d'un appareil à robinet procurant des dilatations où l'enthalpie (terme néologique introduit par M. Ka- merlingh Onnes pour la fonction (se pv), la « Heat- function » de Gibbs) possède la même valeur au com- mencement et à la fin. L'auteur publie ses résultats, parce qu'ils ne perdent pas leur importance par la cir- constance que le but original est devenu illusoire à cause de la liquéfaction de l'hélium. Dans cette pre- mière partie, il s'occupe de l'histoire du problème, de la détermination du point d'inversion de l'hydrogène par Olszewski, du rapport entre la pression initiale et la température d'inversion de l’air et de l'azote par Olszewski, de la critique de ces résultats par Hamilton Dickson, basée sur des calculs effectués avec l'équation d'état de Van der Waals, de la nécessité de remplacer dans ces calculs l'équation de Van der Waals par les équations empiriques : BÉRCRDIENERME PAT Etes spéciahisées pour le gaz employé, etc. — M. W. van Bemmelen présente : « Magnetic survey of the Dutch Indies made in the years 1903-1907 » (Relevé magné- tique des Indes Néerlandaises fait dans les années 1903-1907). 3° SCIENCES NATURELLES. — Rapport de MM. Th. Mac Gillavry et C. Eykman sur la question de la désinfec- tion des papiers d'affaires faisant partie des archives des bureaux de poste et de télégraphe. — M. K. KE. Wen- ckebach présente au nom de M. P. H. Eykman : Nou- velles applications de la stéréoscopie. Avantages d'un. stéréoscope àrois lentilles placées dans les sommets d'un triangle équilatéral dans la Rôntgen thérapie. — M.Th Place présente au nom de M. F. J. J. Buiten- dyk: Sur la quantité d'oxygène consommée par les ani- maux à sang froid en rapport avec leur grandeur. Proportionnellement, les pelits animaux ont besoin de plus grandes quantités d'oxygène. — M. L. Bolk pré- sente au nom de M. A. B. Droogleever Fortuyn : Sur quelques noyaux de nerfs moteurs du Lophius pisea- torius. — M. C. H. H. Spronck présente au nom de M. J.-G. Sleeswyk : Contribution à l'étude de lana- phylaxie sérique. Troisième partie. — M. W. J. Burck présente pour les Mémoires de l'Académie, au nom de M.J. Valckenier Suringar : « Nouvelles contributions à l’étude des espèces du genre Melocactus des Indes néerlandaises occidentales. » Sont nommés rapporteurs MM. Burck et Went. P. H. Scnoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLrvier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimour, {, rue Cassette. PT 20° ANNÉE N° 13 15 JUILLET 1909 Revue générale Dos NScienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. L'ABSTENTION DES MÉDECINS ROUMAINS AU CONGRÈS INTERNATIONAL DE MÉDECINE DE BUDA-PESTH Le Comité formé pour la participation des méde- cins roumains au Congrès international de Méde- cine qui doit se tenir à Buda-Pesth, au mois d’Aoùût prochain, a adopté, à l'unanimité de ses membres, une résolution dont le retentissement sera considé- rable. Il a décidé qu'aucun médecin roumain ne devait prendre part à ce Congrès. Il faut que le Comité ait eu des raisons bien graves pour prendre à l'unanimité une semblable décision. Ces motifs doivent être cherchés dans la politique d'oppression du Gouvernement austro- hongrois, politique qui ne saurait être trop énergi- quement flétrie de tous ceux pour qui les idées de justice et de liberté ne sont pas un vain mot. Nous ne parlons pas seulement de la série inin- terrompue de persécutions dont les divers peuples composant la Hongrie sont victimes de la part des Magyars, ni des procédés d'extermination systéma- tique de l'élément roumain en Transylvanie. Un fait scandaleux s'est produit ces jours-ci : la condamnation et l'incarcération de la femme d’un député roumain, M" Aurèle Vlad, dont le crime, irrémissible aux yeux des juges hongrois, est d'avoir conseillé aux enfants des écoles de ne pas négliger l'étude de leur langue maternelle, M®° Vlad a été condamnée pour ce fait à plusieurs mois de prison. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. On pouvait croire, d'après les récits de la persé- cution germanique en Pologne et en Alsace-Lor- raine, que l'Allemagne avait seule le privilège de ces atrocités. Il n’en est rien : l’Autriche-Hongrie, le « brillant second » que célèbre le Kaiser, est jalouse des lauriers allemands. On comprendra que les médecins roumains ne pouvaient être les hôtes des autorités hongroises et assister aux fêtes et aux réceptions officielles de Buda-Pesth. « Si la Science », disait Pasteur, « n'a pas de patrie, le savant doit en avoir une. » Si les peuples civilisés ont protesté contre les crimes du Sultan rouge en Arménie et les agissements du germa- nisme en Pologne, c'est aujourd'hui leur devoir d'approuver les sentiments qui animent la Rou- manie tout entière et la font se dresser, dans un unanime élan de révolte, contre l'oppression hon- groise. Nous croyons savoir que la protestation des méde- cins et des biologistes roumains soulève, en ce moment, un juste émoi dans les chancelleries et que le Congrès annoncé se ressentira non seule- ment de leur abstention, mais aussi de celle d'un bon nombre de leurs confrères étrangers. Louis Olivier. 13 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Le Professeur Th.-W. Engelmann. — Théo- dore-Wilhelm Engelmann, professeur de Physiologie à l'Université de Berlin, est mort le 20 mai dernier. Né le 14 novembre 1843 à Leipzig, il fit ses études universitaires à léna, Leipzig, Heidelberg, Gôttingen, devint en 1867 assistant de Donders à l'Université d'Utrecht, en 1871 professeur de Biologie et d'Histo- logie, et en 1889 professeur de Physiologie à cette même université, comme successeur de Donders. En 1897, à la mort d'Emile du Bois-Reymond, il fut appelé par l'Université de Berlin à diriger l'Institut physiologique. Pendant la longue période de son activité scienti- fique, Engelmann publia depuis 1867 de nombreux travaux se rapportant en général à des questions de physiologie cellulaire : les fonctions des organes étant, à ses yeux, la résultante des fonctions des cellules qui les constituent, il s’appliqua à analyser ces dernières pour mieux connaître les premières. Ses études de Physiologie cellulaire, d'ailleurs, ne portent pas seu- lement sur les cellules des tissus des animaux supé- rieurs, mais aussi sur les cellules végétales, sur les Protozoaires, sur les Infusoires, qu'il étudiait non pour eux-mêmes, mais pour les indications qu'ils devaient fournir à la physiologie des Vertébrés. Ses principaux travaux se rapportent à la physio- logie des cellules vibratiles, à la structure, à l’excita- bilité, aux phénomènes électriques du tissu muscu- laire et en général des éléments contractiles, aux caractères et à la nature de la contraction cardiaque (il représente le promoteur et le principal défenseur de la théorie myogène de la contraction cardiaque), aux échanges gazeux protoplasmiques et à l'absorption des diverses radiations lumineuses par les cellules vivantes. Il convient de noter encore de nombreuses publications d’Histologie physiologique et la construc- tion de divers appareils qu'avait rendue nécessaires l'étude des diverses questions qu'il avait abordées. Engelmann écrivit pour le Handbuch de Stricker l’ar- ticle des «Organes du Goût » et pour le Handbuch der Physiologie de Herrmann la monographie « Anatomie et Physiologie des cellules vibratiles ». Engelmann n'était assurément pas très connu en dehors des physiologistes de profession, car ses études portaient sur des questions de science pure, ne com- portant pas d'applications, au moins pas d'applications immédiates à la Médecine. La plupart des physiolo- gistes d'aujourd'hui s'appliquent à résoudre des ques- tions juxta-médicales, et nous croyons qu'ils ont raison; mais il convient de réserver pourtant une large part de notre admiration à ceux qui, dédaigneux de la renommée bruyante, se consacrent modestement à des études plus désintéressées, et Engelmann fut évidemment l'un des plus remarquables représentants de cette Ecole. Maurice Arthus, Professeur de Plysiologie à l'Université de Lausanne: $ 2. — Physique Les propriétés électriques et optiques du sélénium métallique. — Lors de ses expériences antérieures, M. A.-H. Pfund avait observé que la résis- tance du sélénium métallique est peu influencée par les rayons des régions bleue ét infra-rouge, tandis que la lumière de longueur d'onde À— 700px produit de fortes modifications de sa résistance, la courbe de sensibilité photo-électrique présentant, à cet endroit, un maximum très prononcé, Dans un travail ultérieur !, il discute l'existence pos- sible d’une relation entre les phénomènes électriques et optiques du sélénium. Bien que les courbes de réflexion et d'absorption optiques ne présentent pas de maximum coïncidant avec le maximum de sensi- bilité photo-électrique de la résistance, les considéra- tions suivantes feront comprendre la possibilité d’expli- quer ce maximum en tenant compte de la conductivité électrique des couches minces. Tous les auteurs sont d'accord actuellement pour attribuer à la conduction du sélénium un caractère non pas électrolytique, mais électronique. Aussi doit- on considérer comme probable que les variations photo- électriques de résistance sont dues, non aux sélé- niures présents comme impuretés, mais au sélénium lui-même. Or, l’auteur admet que la lumière absorbée par le sélénium excite dans ses atomes une résonance, laquelle, à son tour, provoque l'expulsion d'électrons, en augmentant le nombre d'électrons disponibles pour le transport du courant et, par conséquent, la con- ductibilité. Si la résonance et l'absorption étaient des phénomènes parallèles, on pourrait s'attendre à voir la conductibilité augmenter constamment pour des longueurs d'onde de plus en plus courtes, d'accord avec l'allure de l'absorption. Or, l'expérience le prouve, cette conclusion est loin de se vérifier. Pour expliquer ce désaccord apparent, l'auteur s'inspire des récentes recherches de Longden, de Vincent et de Patterson, sur les couches métalliques critiques (caractérisées par une résistance spécifique constante), pour faire remarquer que la plus grande partie de l'énergie incidente est absorbée par une couche dont l'épaisseur est juste de l’ordre de grandeur des couches critiques. Comme, d'autre part, la con- ductivité d’une pile exposée à un éclairage est facile- ment portée à une valeur décuple ou même supérieure et que l'épaisseur de la couche superficielle conductrice est infiniment petite en comparaison de l'épaisseur totale de la couche de sélénium, il est évident que la conductibilité de la couche superficielle doit être relativement grande. Cet état de choses est, on le voit, comparable au cas d'une couche d'argent mince précipitée sur verre. En commencant à l'infra-rouge, où la profondeur de pénétration du rayonnement est supérieure à l’épaisseur de la couche critique, l’on constate un accroissement rapide de la conductivité, à mesure qu'augmente l'absorption. Au passage de À = 700 pu, la profondeur de pénétration et, par conséquent, l'épaisseur de la couche conductrice deviennent égales et, plus loin, inférieures à l’épaisseur de la couche critique. Or, c'est précisément dans cette région que se fait sentir l'énorme diminution de la conductibilité pour les couches décroissantes, diminution qui non seulement compense les effets de l'absorption, mais occasionne vraiment une chute de conductivité bien marquée. Ces hypothèses sont confirmées par une expérience, | démontrant que la position des maxima de sensibilité, à mesure qu'on augmente l'intensité lumineuse, se déplace du côté des courtes longueurs d'onde. $ 3. — Electricité industrielle L'influence de la lumière du jour sur la portée des stations radio-télégraphiques. — On sait que Marconi, lors de ses premières expériences de radio-télégraphie à grande distance (1902), consta- tait, la nuit, une portée presque trois fois plus grande de ses stations transmettrices que le jour. Il crut 1 Phys. Zeilschr., n° 10, 1909. ns. co intense CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 567 devoir attribuer cette différence à la dispersion, sous l'influence de la lumière du soleil, de la charge néga- tive de l'antenne, c'est-à-dire à un effet photoélec- trique localisé au transmetteur, tandis que l'antenne réceptrice restait entièrement hors de cause. Suivantune autre explication, indiquée par J.-E. Tay- lor, le milieu intermédiaire entre les stations trans- mettrice et réceptrice déterminerait seul ces variations de portée. Entin, des expériences de M. J.-J. Thomson font voir l'absorption considérable qu'éprouvent les ondes électriques parcourant une enceinte remplie d'élec- trons libres. Or, comme le Soleil émet continuelle- ment des électrons, ionisant l'air intermédiaire entre les deux stations, des différences d'absorption entre le jour et la nuit, correspondant à des variations du degré d’ionisation, pourraient expliquer les différences de portée. Mais des recherches de M. Zenneck ont établi, cependant, le peu d'intensité de l'ionisation et par là, de l'absorption à la surface de la Terre, Dans un récent Mémoire‘, M. Mosler reprend cet intéressant problème, qu'il tâche de résoudre par des expériences spéciales, lui permettant de constater qu'il ne saurait être question d'une influence due à la station transmettrice; qu'il existe, au contraire, une absorption dans le milieu intermédiaire, absorption qui va en croissant à mesure qu'augmente la distance. Il ne reste donc qu'à supposer que la propagation du rayonnement d'énergie, dans le cas des grandes distances, se fait à travers les couches atmosphériques de hauteur considérable, ce que confirment, du reste, les récentes recherches théoriques de M. G. Zenneck. Cet auteur se croit autorisé à admettre que le rayon- nement énergétique se fait, non pas parallèlement à la surface de la Terre, mais, à proximité du trans- metteur, vers le haut, dans une direction pointant vers la station réceptrice. Dans le cas d'une grande distance entre ces deux stations, le rayonnement éner- gétique pourrait parfaitement atteindre des hauteurs suffisantes pour rencontrer des intensités d’ionisation susceptibles d'expliquer les absorptions si considé- rables qu'on constate le jour. Il résulte de ce que nous venons de dire que l’hypo- thèse de Marconi, suivant laquelle les différences de portée seraient dues à un effet photo-électrique s’exer- çant sur l'appareil transmetteur, doit être remplacée par l'hypothèse de l’ionisation. $ 4. — Chimie Une théorie de la teinture. — Plusieurs hypo- thèses ont été faites sur la cause des phénomènes de teinture; très générales au début, elles portaient le nom de théorie physique ou mécanique, théorie chi- mique, théorie de la dissolution ; au cours de ces der- nières années, est venue s'ajouter aux précédentes la théorie colloïdale, Peut-être pourrait-on reprocher à chaque partisan de ces hypothèses de se montrer trop exclusif. Les phé- _ nomènes utilisés en teinture sont, en effet, extrême- ment variés, et ne dérivent pas nécessairement d'une cause unique. Ayant effectué un assez grand nombre d'expériences depuis plusieurs années sur les textiles, les matières colorantes, les différents cas de la teinture, je résume ici les faits que j'ai découverts et les conclusions qui en découlent. I. Texrices. — J'envisage les textiles les plus impor- tants et les plus habituellement soumis à la teinture : la soie, la laine et le coton. Il y a lieu de les examiner au point de vue physique et au point de vue chimique. 1. Propriétés physiques. — Les textiles présentent cette particularité physique d'exister à l'état de fila- . ments d'un très faible diamètre et de longueurs va- æiables : leur surface est, par suite, extrémement con- TRE - * Eleclrot. Zeïtschr.,uo 15,1997; Die Umschau, no 16, 1909, sidérable par rapport à leur volume ou à leur poids. a) Poids spécifique. J'ai déterminé le poids spéci- fique des différents textiles‘, Les nombres suivants résument mes résultats : coton, 1,50: laine 1,30; soie grège, 1,33; soie décreusée, 1,34. b) Pouvoir absorbant. La structure filamenteuse des textiles leur donne, par suite du grand développement de leur surface, les propriétés des corps poreux: j'ai étudié expérimentalement le pouvoir absorbant de la soie, de la laine et du coton, pour divers liquides®, Le pouvoir absorbant des textiles pour l’eau est à peu près égal à celui d’une éponge grossière. En somme, les textiles ont des propriétés physiques assez semblables; leur poids spécifique, le développe- ment de leur surface, leur pouvoir absorbant sont distincts, mais voisins. 2. Propriétés chimiques. — Leurs propriétés chi- miques, au contraire, sont fort différentes; elles accusent l'existence de deux groupes très tranchés : 1° Groupe coton et textiles végétaux: 20 Groupe soie, laine et textiles animaux, a) Etude calorimétrique. En étudiant dans le calo- rimètre le pouvoir absorbant de divers textiles vis- à-vis de réactifs déterminés, j'ai constaté que l’absorp- tion est accompagnée de dégagements de chaleur caractéristiques *. La soie et la laine manifestent des fonctions acides et basiques nettes; le coton n'accuse aucune fonction basique, mais seulement des fonctions acides faibles; d'autre part, le coton chauffé avec le chlorure de calcium ammoniacal fixe de l'ammo- niaque, acquiert des propriétés basiques, et devient capable de fixer des matières colorantes acides #. b) Explication de la teinture. — Partant de ces expériences, je formulais une théorie des cas de tein- ture obtenus avec les matières colorantes solubles. Etant donné que les textiles animaux présentent des fonctions acides et basiques, que tous les mordants et toutes les matières colorantes solubles sont acides ou basiques ou possèdent les deux fonctions, j'émettais l'opinion que la teinture obtenue avec les matières colorantes solubles était d'ordre purement chimique. Une exception paraissait exister à cette règle: c'était celle des matières colorantes substantives teignant le coton sans mordant. En étudiant expérimentalement le rouge Congo’, j'ai pu établir que la propriété sub stantive est due aux groupes > Az-Az < existant dans un grand nombre de ces couleurs; la fixation semble devoir s'effectuer par l'azote devenant pentatomique, s’unissant à la molécule cellulosique. Depuis ces résultats, les recherches faites par divers expérimentateurs et par moi-même sur la constitu- tion des matières albuminoïdes et sur la cellulose ont confirmé mes déductions : au point de vue chimique, les textiles animaux doivent être considérés comme des acides aminés, et les textiles végétaux comme des alcools. J'ai poursuivi l'étude du pouvoir absorbant des textiles, en faisant agir la soie, la laine et le coton sur des solutions aqueuses d'acides et de bases de concen- irations déterminées *. Les textiles sont actifs chimi- quement, indépendamment de leur porosité : les Corps poreux, comme le charbon de bois pulvérisé, sont inertes au point de vue chimique. En outre, une conclusion curieuse s'est dégagée de ces expériences : l’activité chimique, acide ou basique, des textiles augmente avec la dilution de la solution aqueuse des réactifs absorbés; elle est liée, par suite, à l’ionisation des solutions employées; elle explique l'épuisement de certains bains de teinture par les textiles. C. R. Ac. des Sc., Paris, 22 février et 14 mai 1892% C. R., 4 juillet 1898. NE C. R., 10 février 1890 et 28 avril 1890. C. R.,2 mars 1891. C. R., 23 mars 1891. C. R., 9 août 1897. C. R., 15 octobre 1906. NH @œ &æ © 1 = 568 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE IT. MATIÈRES COLORANTES.— 1. Jonisation des bains de teinture. Partant de cette idée que l’activité chimique des textiles est liée à la dilution et, par suite, à la dis- sociation électrolytique des bains, j'ai déterminé à diverses températures la conductibilité électrique de plusieurs solutions aqueuses d'acide sulfurique et de matières colorantes, employées aux dilutions usitées dans la préparation des bains de teinture‘. Les déter- minalions ont porté sur l'acide sulfurique, la roc- celline, l’orangé IH, la fuchsine et l'acide picrique. J'ai constaté que l’ionisation des matières colorantes est fortement accrue par la dilution, mais surtout par l'élévation de la température. Or, ces conditions se trouvent réalisées dans les opérations de teinture directe en un bain : l'influence de l'ionisation des matières colorantes solubles, dans la teinture des textiles en un bain, est donc manifeste. J'ai étudié spécialement les propriétés colorantes et linctoriales de l'acide picrique*. Les solutions d'acide picrique dans l'alcool, l’éther et le benzène, ne teignent pas la laine. La fixation de l'acide picrique sur la laine est due à une réaction chimique de la fibre sur la matière colorante, fortement ionisée au sein de l’eau. L'étude comparative de la conductibilité électrique et de la teinture de divers bains directs : orangé I, roccelline, fuchsine, m'a montré que ces matières co- lorantes ne se fixent sur la laine que lorsque la con- ductibilité électrique des bains atteint une certaine valeur ; dans la pratique, cette valeur est obtenue par l'élévation de la température des bains et par l’action de substances auxiliaires (mordants), acides, bases, sels, etc. Enfin, l'ionisation réalisée dans les bains de teinture, pour être efficace et permettre la fixation sur la laine (ou la soie) et l'épuisement des bains, est liée, pour chaque cas, non seulement à l'intensité de l’ionisation, mais à la nature des ions en présence : la fuchsine, en effet, teint la laine en bain neutre ou faiblement acide, tandis que la teinture ne se produit pas, quelle que soit l’ionisation, en présence de NaOH. 2. Influence de l'état colloïdal de la matière à teindre. — J'ai teint dans des conditions déterminées, avec trois matières colorantes : roccelline (matière acide), fuchsine (matière basique), rouge congo (matière acide et basique, substantive), deux substances colloïdales : l’amidon et la gélatine. Par refroidissement, j'ai obtenu des gelées qui ont été mises à diffuser au contact d’eau distillée froide. Cette eau s'est plus ou moins colorée par diffusion, suivant que la gelée était plus ou moins teinte, ou simplement imprégnée de solution colorée. En compa- rant entre elles les colorations des eaux de diffusion, on trouve : 1° que les gelées amidon se comportent comme le coton, les gelées gélatine comme la laine et la soie; 2° que les colorations des gelées se produisent sous la double influence de l'attraction moléculaire (faible) et de la constitution chimique des gelées (prépondérante), dans les teintures obtenues. Les résultats confirment les conclusions antérieures, sa- voir : Î'amidon est un polyalcool, la gélatine un amino-acide *. 3. Teinture par le chromate de plomb. — Le chro- mate de plomb, fraîchement précipité, bien lavé, non séché, mis en suspension dans l’eau, teint facilement les textiles. La fixation a lieu aussi, mais avec moins d'intensité, dans l'alcool et le benzène. La caractéris- tique de cette teinture est que tous les textiles, à de très petites différences près, se comportent de la mème manière; ils se teignent, quelle que soit leur nature, végétale ou animale. Le chromate de plomb teint également bien la soie, la laine et le coton; à ce titre, il diffère complètement, pour les conditions de la fixation, des matières colo- . l., 14 janvier 1907, . 15,, 29 mars 4909. R., 3 mai 1909. rantes solubles, des acides et des bases, dont j'ai étudié l'absorption par les différents textiles. Il faut, en outre, une proportion beaucoup plus grande de malière colorante, avec le chromate de plomb qu'avec les matières colorantes solubles, pour obtenir une nuance déterminée. Le chromate de plomb ne se fixe pas chimiquement sur les textiles, puisque les fonctions chimiques des textiles sont indifférentes relativement à cette fixa- tion. C’est sans doute en vertu de l'attraction molécu- laire, s’exerçant à très petite distance entre les molé- cules (sens physique) de tous les corps, indépendam- ment de leurs fonctions chimiques, que cette fixation a lieu. Pour préciser ma pensée, je rappelle que cette attraction moléculaire est la cause des phénomènes de cohésion, adhésion, frottement, capillarité, viscosité, tension superficielle, etc. Il faut observer, du reste, que les textiles se com- portent physiquement comme les corps poreux, et que le chromate de plomb précipité, en suspension dans l’eau, est assimilable, par la dimension de certaines de ses particules, aux granules ou micelles des col- loïdes en fausses solulions". HI. Teinrure. — Les conclusions des expériences qui précèdent peuvent se formuler brièvement ainsi : 4° Les textiles sont des corps poreux, comparables, dans une certaine mesure, par le développement de leur surface, aux colloïdes en pseudo ou fausses solu- tions. Par suite du développement de leur surface, les textiles sont particulièrement sensibles à l'attraction moléculaire, et aux actions chimiques résullant de leur constitution; 2% Les textiles ont des fonctions chimiques nettes = le coton est un polyalcool, la soie et la laine sont des amino-acides. On peut résumer ces deux propriétés en. disant que les textiles sont des corps poreux doués de fonctions chimiques; 30 Les matières colorantes peuvent se diviser em deux classes : matières colorantes solubles dans l’eau et matieres colorantes insolubles. Les matières colorantes solubles dans l’eau sont toutes acides ou basiques ou amino-acides; elles se fixent chimiquement sur les textiles; dans les bains de teinture, qui doivent être formés par de l’eau, elles sont fortement ionisées. Le mécanisme chimique de la. fixation est variable; nous en avons donné des exem= ples pour l'acide picrique sur la laine, et les colorants substantifs de la benzidine sur le coton. La nature des combinaisons formées, dans lesquelles peuvent intervenir des mordants, doit être établie pour chaque cas par des études ultérieures. L Les matières colorantes insolubles, très divisées, se fixent en vertu de l'attraction moléculaire que j'ai définie. Elles peuvent teindre les textiles dans de liquides autres que l’eau. Elles doivent être très divi= sées, en grains dont une partie au moins a des dimen= sions comparables à celles des granules ou micelle des colloïdes en fausses solutions : c'est à cette condi- tion seulement qu'elles peuvent obéir à l'attraction. moléculaire. Elles se fixent à peu près également sur tous les textiles, quelle que soit leur nature chimique: J'ai donné les preuves expérimentales qu'il y à en teinture, des cas purement chimiques et des cas purement physiques. Il est facile d'imaginer des ca mixtes, dans lesquels les deux forces que j'ai définies: fonctions chimiques et attraction moléculaire, peu vent être associées. Léo Vignon, Professeur à la Faculté des Sciences de Lyon $ 5. — Biologie La distribution de la longévité en Angle- terre et dans le Pays de Galles. — Un médecin anglais, le D' W. Gordon, vient de se livrer sur € 1 Comptes rendus, 17 mai 1909. - CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 569 sujet à des recherches intéressantes', basées sur les chiffres donnés par le Rapport décennal sur le mouve- ment de la population pour la période 1891-1900, ré- cemment paru. Il calcule d'abord le pourcentage des décès au- dessus de soixante-quinze ans par rapport au nombre total des décès pour les différents districts de l’Angle- terre et du Pays de Galles. Puis il détermine l’in- fluence de deux facteurs qui agissent sur les chiffres obtenus : mortalité infantile élevée dans les villes et mouvement de la population des campagnes vers les villes. Des chiffres recaleulés en tenant compte du premier de ces facteurs (le second n'ayant qu'une influence négligeable) se dégagent des conclusions très nettes : Il y a une disparité très remarquable de la longévité entre les différents districts de l’Angteterre et du Pays de Galles. Cette disparité est en relation étroite avec la densité de la population : les faibles pourcentages de décès au-dessus de soixante-quinze ans sont associés à des populations relativement denses, tandis que les pourcentages élevés sont associés à des populations relativement éparses. Cette relation s'accorde entièrement avec tout ce que nous savons de l'influence de la densité de la population sur la santé. $S 6. — Géographie et Colonisation L’exode montagneux en France*.— Les po- pulations montagneuses, adaptées à des conditions naturelles difficiles, vivent de l'exploitation forestière et de l'élevage; le sol est généralement propriété col- lective et, comme tel, soumis à des abus pastoraux et autres qui y déterminent la dénudation et l'érosion. Le troupeau diminue, les réserves forestières dispa- raissent et l'exode montagneux se poursuil avec une æffrayante régularité. Si, d'après Cézanne, nous répartissons nos départe- ments en trois groupes suivant l'altitude, nous voyons ‘ue, de 1901 à 1906, la zone des plaines littorales (16 départements et 21 °/, du total) a gagné 150.333 ha- bitants; la zone des vallées intérieures (40 départe- ments et 47 °/, du total) a gagné 203.094 habitants; enfin, la zone montagneuse torrentielle (31 départe- ments et 31 °/, du total) a perdu 63.105 habitants. Dans les Pyrénées, de 1851 à 1901, le département «le l'Ariège a décru régulièrement de 267.435 habitants à 210.527, la Haute-Garonne de 481.618 à 448.481, les Basses-Pyrénées de 446.997 à 426.347, les Hautes- Pyrénées de 250.934 à 215.546. Dans les Alpes de Provence, le département des Basses-Alpes est tombé de 153.873 habitants, en 1870, à 118.142, en 1900, perdant 1.100 habitants par an. En cinquante ans, la seule vallée de Barcelonnette a perdu 28 °/, de sa population; on compte que, depuis le grand exode de 1848, 100 personnes en moyenne partent annuellement pour les hauts plateaux mexi- cains. De 1865 à 1900, l'émigration française annuelle à passé de 8 à 13.000 personnes; depuis 1900, elle atteint 15.009. Ce sont les régions montagneuses qui l'ali- mentent en grande partie : la Franche Comté et la Lorraine fournissent 5 à 6 °/,, les Savoies et l'Ariège 7 °/,, les Pyrénées-Orientales 11 °/,, la Lozère 37 °/. Le courant s'oriente surtout vers l'Amérique. Dans la ! British Medical Journal, n° 2527, p. 1344 (5 juin 1909) ? L.-A. Faure : L'exode montagneux en France. Causes physiographiques, culturales, etc. Remèdes. Bulletin de {icographie historique et descriptive, n°s 4-2, 1908. vallée d'Ossau (Basses-Pyrénées), depuis trente ans, le sixième de la population d'Asté-Béon s'est fixé à la Plata. L'érosion se poursuit parallèlement à l'exode des bras. M. L.-A. Fabre estime que la masse des limons et autres matériaux fins, expulsés annuellement par nos rivières torrentielles, peut être évaluée à 72 mil- lions de mètres cubes : « L'entraînement des matériaux arrachés par les torrents aux thalwegs et aux versants des montagnes représenterait en France un décapagt superficiel de plus d’un décimètre par siècle ». Aussi bien, est-il à remarquer que la forêt qui fixe le sol retient en même temps ses habitants. En compa- rant, par exemple, les populations de deux départe- ments de la Basse-Gascogne, où les conditions géogra- phiques et la densité de la population sontsensiblement les mêmes, le Gers et les Landes, les statistiques montreut que la dépopulation a toujours été moins rapide dans les Landes boisées que dans le Gers cul- tivé. Dans les départements à population croissante, la superficie forestière varie de 12 à 47 °/,, tandis que dans les départements à population décroissante ce pourcentage varie seulement de 3 à 18 °/.,. Dans l'Erzgebirge, où la forêt couvre les trois quarts du territoire, M. B. Auerbach a relevé que la forte densité de la population (65 en Saxe et 115 en Bohème) est surprenante : de 1840 à 1900, celle-ci s’est accrue du tiers sans immigration. Malheureusement, des signes nombreux et évidents attestent le recul en altitude de la végétation fores- tière. Ce recul est constaté sur toute l'étendue des Alpes, jusqu'en Autriche. M. W. Kilian observe que les arbres ne se régénèrent plus dans des lieux escarpés, inaccessibles à l’homme et à ses troupeaux, et il en conclut que la marche rétrograde de la végétation forestière alpine dans les Alpes dauphinoises est un « phénomène naturel, continu, qui se poursuit avec une inexorable régularité en dehors de l'intervention humaine ». M. D. Martin, conservateur du Musée de Gap, attribue le recul de la végétation forestière dans ce département à une cause climatique, à une diminution des précipitations solides et liquides. L'hiver, l'arbre n'est plus efficacement protégé, en raison de la dimi- nution de la neige, et l'été, il est insuffisamment arrosé. M. Charles Rabot a fait des observations ana- logues dans la Norvège septentrionale et dans les Laponies suédoise et russe; il æ constaté un recul variant de 50 à 100 mètres, dans des conditions qui excluent toute intervention humaine *. A ces causes naturelles s'ajoutent les influences désastreuses de la pratique séculaire de la transhu- mance. En montagne surtout, à l'exemple de la Suisse, l'élevage du mouton doit être remplacé par celui du gros bétail, beaucoup plus rémunérateur et plus con- servateur des pelouses. Comme l'écrit M. L. Fabre, «la France métropolitaine n'est plus à aucun titre le pays des cultures extensives, un «pays du mouton »; c’est le pays de la houille blanche”et des nitrates qui résolvent la question du pain et de la viande moins chers, celui des cultures dérobées, des irrigations fécondes, des montagnes riches et peuplées. » Le dixième de notre territoire se trouve en haute mon- tagne; c'est assez dire la nécessité d’une législation qui protégerait le sol, sans le nationaliser, en le lais- sant «la propriété de celui qui l'occupe, à charge par ce dernier de subir la tutelle de l'Etat exigée par l'ir: térêt public ». Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 1 Cnarses Ragor : Les forêts du Brianconnais. La Geo- graphie, 15 avril 1909. 510 ÉMILE PICARD — RAPPORT SUR LE PRIX OSIRIS A DÉCERNER EN 1909 RAPPORT SUR LE PRIX OSIRIS A DÉCERNER EN 1909° Le prix de cent mille francs, quela générosité de M. Orisis permet à l'Institut de décerner tous les trois ans, est destiné à « récompenser la découverte ou l'œuvre la plus remarquable dans les sciences, dans les lettres, dans les arts, dans l’industrie, et généralement dans tout ce qui touche à l'intérêt publie ». Il doit être décerné cette année pour la troisième fois. Nous couronnions il y a six ans les brillants succès remportés dans le traitement d'une maladie terrible par un de nos confrères, digne continuateur de Pasteur, et, il y a trois ans, le prix fut accordé à l’éminent historien qui venait de terminer son grand ouvrage sur l'Europe et la Révolution française. Il n’était assurément pas dans les intentions de M. Osiris qu'il y eût en quelque sorteun roulement entre les différents ordres d'études ressortissant aux diverses Académies de l'Institut de France. Aussi votre Commission s'est-elle uniquement pré- occupée de rechercher la découverte ou l'œuvre qui, dans les trois dernières années, a le plus vive- ment attiré l'attention et parait avoir les consé- quences les plus importantes. Elle a unanimement jugé qu'un progrès considérable venait d’être fait dans la question de l'aviation, progrès intéressant à la fois les sciences, l'industrie et l'intérêt public, suivant les termes mêmes du testament que je rap- pelais plus haut. Les étrangers ne pouvant, d'après la donation, participer aux prix”, nous vous propo- serons done de décerner le prix Osiris à l’avialion française, et nous vous indiquerons dansun moment les considérations qui nous ont guidés pour faire un choix parmi les chercheurs opiniätres qui se consacrent à la conquête de l'air. Sans remonter jusqu'au légendaire Icare et à la colombe mécanique d’Archytas de Tarente, il est utile de jeter d'abord un rapide coup d'œil sur l'his- toire de la navigation aérienne. À la Renaissance, Léonard de Vinci comprend que, pour voler, l'oi- seau doit prendre son point d'appui sur l'air, et, après ses études sur le vol, décrit l'hélicoptère et le parachute. Dans les deux siècles qui suivent, de nombreux documents nous montrent l'intérêt sus- cité par la navigation aérienne ; on ne se borne pas EE ‘ Rapport présenté par M. E. Picard au nom de la Com- mission des cinq Académies. ? Une exception est faite seulement quand le prix Orisis est décerné dans une année où il y à une Exposition uni- verselle à Paris. d'ailleurs au plus lourd que l'air, et, à la fin du xvn° siècle, plusieurs pressentent déjà l'invention des ballons. Vers 1750 apparaissent de divers côtés des projets d'hommes volants et de machines volantes. Des appareils sont construits, sortes d'orthoptèresmunis d'ailes à charnières qui frappent l'air normalement, mais ils sont expérimentés sans succès; on propose même d’adjoindie à l’hélicop- tère une hélice propulsive pour la translation hori- zontale. Il est remarquable de voir signalés dès cette époque quelques-uns des dispositifs qui devaient être essayés plus tard. Ces tentatives avec le plus lourd que l'air, sans avoir donné encore aucun résullat pratique, furent interrompues en 1783 par l'expérience célèbre des frères Montgolfier, qui souleva un enthousiasme indescriptible. Six mois après l'expérience d'An- nonay, Meusnier présentait à l'Académie des Sciences un Mémoire admirable, publié seulement beaucoup plus tard. On trouve dans son projet les conditions essentielles qui devaient conduire aux ballons dirigeables : forme allongée du ballon, bal- lonnet intérieur pouvant être rempli d'air, et emploi d'un propulseur hélicoïdal. C’est en suivant la voie. ouverte par Meusnier, mort en 1793 au siège de Mayence, que lecolonel Renardédifiadéfinilivement la théorie de la dirigeabilité des ballons et put réaliser sa mémorable expérience de 1884. Malgré les triomphes des aérostats, le plus lourd que l'air eut toujours ses croyants ; toutefois, pen- dant la première moitié du siècle dernier, ils ne furent guèreencouragés. Des analyses insuffisantes du vol des oiseaux, signées de noms éminents, mon- traient qu'une hirondelle devait fournir un travail énorme pour se maintenir dans l'air, ce qui faisait dire plus tard que les Mathématiques démontraient alors l'impossibilité de voler pour les oiseaux. Il eût été moins piquant, mais plus exact de dire que certains mécaniciens, ayant mal observé les mou- vements des oiseaux, établissaient par leurssavants calculs que les conditions réelles du vol sont diffé- rentes de celles qu'ils avaient supposées; l'erreur provenail de ce qu'on voulait étudier le vol à l’aide de la résistance qu'un plan éprouve en se mouvant normalement dans l'air. Cependant, sir G. Cayley dès 1809 et Dubochet en 1834 indiquaient déjà que le vol est avanttout un glissement ;ilsremarquaient que, en général, l'oiseau s'envole tête au vent. Plu- sieurs autres, comme Hauvel et Wenham, étaient aussi les champions de la théorie du glissement. C'est seulement vers 1865 que l'attention se trouva de nouveau portée vers l’avialion, et les dis- PP ÉMILE PICARD — RAPPORT SUR LE PRIX OSIRIS A DÉCERNER EN 1909 cussions de la Société francaise de Navigation aérienne, très suivies à cette époque, se lisentencore aujourd'hui avec intérêt. L'Académie des Sciences, depuis les essais de Borda datant de l'ancienne Aca- démie, s'était toujours préoceupée des problèmes relatifs à la résistance des fluides; en 1874, sur la proposition de Joseph Bertrand, elle mit au con- cours la théorie mathématique du vol des oiseaux. Le Mémoire d'un des membres les plus actifs de la Société de Navigation aérienne, doué d'un esprit des plus pénétrants, Alphonse Pénaud, fut récom- pensé en 1875, La clef de l'aviation est, pour Pénaud, dans le fait que l'oiseau, dans le vol avan- cant, attaque l'air sous un angle très petit. Il insiste sur l'avantage qu'il y à à attaquer l'air oblique- ment, et il illustre la théorie en construisant un jouet qui réalise le premier appareil mécanique ayant réussi à voler, jouet soutenu par des ailes concaves, dans lequel le moteur est un caoutchouc tordu actionnant une petite hélice, et dont une queue assure la stabilité. L'analyse des trois genres -de vol, vol ramé, vol plané, vol à voile, était déjà ancienne el parait remonter à Dubochet; elle est approfondie par Pénaud, et, peu après, les photo- graphies instantanées de Marey viennent fixer cer- taines interprétations douteuses. Dans le vol plané, l'aile rencontre généralement l'air sous un angle assez petit el joue ainsi le rôle d'un aéroplane, le travail musculaire de l'oiseau étant assez restreint et dépensé surtout pour la propulsion dans le sens horizontal. Nous devons encore rappeler la discus- sion faite par Pénaud de la loi de la résistance éprouvée par un plan mince se mouvant dans un fluide; cette résistance, à vitesses relatives égales, dépend de l'angle d’inclinaison. On avait regardé longtemps, avec Newton, qu’elle était proportion- nelle au carré du sinus de cet angle, ce qui est inadmissible. Borda, suivi par G. Cayley, avait, semble-t-il, proposé pour la première fois la loi de la première puissance du sinus; Pénaud, ayant expérimenté sur la chute des corbeaux, trouve ses observations conformes à la loi de la première puis- sance, et s'en sert pour mesurer certains coeffi- cients. Les lois empiriques de cette nature peuvent avoir d'ailleurs des formes diverses, et plusieurs formules ont été proposées conduisant sensible- ment aux mêmes résultats. Nous voyons donc que les idées inexactes sur le vol des oiseaux, qui, malgré quelques critiques avisés, avaient régné si longtemps, étaient aban- données vers 1880. Le principe du glissement, au moins dans le vol plané, n’est plus contesté; la sus- tentation apparaît comme due à la propulsion, la composante verticale de la poussée exercée par le fluide sur le sustentateur faisant équilibre au poids. Aussi, peu à peu, les inventeurs renoncent 571 au type orthoptère, les partisans de l'hélicoptère se font plus rares, et l'effort des chercheurs se porte sur l’aéroplane, qu'il s'agit d'étudier au point de vue mécanique. La position du centre de pression, l'influence de l’inclinaison et de la forme de la voi- lure jouent un rôle essentiel dans l'étude des con- ditions d'équilibre et dans celle diverses stabilités. Dans ces questions difficiles, beaucoup d'ingéniosité a été dépensée, et des résultats impor- tants ont été obtenus, quoique l'accord soit loin d'être établi sur tous les points. La connaissance des principes généraux de la Dynamique est sans doute indispensable pour raisonner juste en ces matières, mais la théorie seule est actuellement impuissante dans les problèmes si complexes relatifs à la résistance des fluides. Elle ne peut, par exemple, nous renseigner sur la position du centre de pression indispensable à obtenir; c'est à l’expérimentation qu’il faut demander les données que la théorie ne nous fournit pas. Deux méthodes furentsuivies dans ces recherches. La première consiste à rechercher expérimentale- ment les conditions d’un planement artificiel, soit que l’on se serve de tunnels avec courants d'air, ou que l’on utilise un manège tournant. Ce sont là des expériences de laboratoire, faites sur des petits modèles et devant être interprétées judicieusement: car, en toute rigueur, il ne peut exister deux sys- tèmes ailés mécaniquement semblables. La seconde méthode consiste à réaliser un planément dans l'air sans moteur. Cette méthode fut inaugurée par l'ingénieur allemand Lilienthal qui, dans un très grand nombre de glissades faites d'un point élevé, après s'être donné un certain élan, put étudier les conditions d'équilibre et de stabilité; l'exercice ne laissait pas d’être dangereux, car le pilote devait, par des mouvements appropriés de son corps, maintenir la stabilité. On sait que, en 1896, l'infor- tuné voyageur aérien perdit la vie, par suite, à ce que l’on croit, de la rupture d’un des assemblages de sa machine. Lilienthal eut des continuateurs en Amérique; parmi eux, il faut signaler tout d’abord un ingé- nieur francais installé aux États-Unis, M. Chanute, qui munit l'appareil de la queue sensibilisatrice de Pénaud, en la rendant susceptible de rotation au moyen d'un joint à la Cardan et employa le premier d'une manière effective le biplan*'. L'avia- tion doit beaucoup aux observations de M. Chanute, qui, en cessant ses travaux, engagea les frères des 4 M. Chanute a donné, avec photographies à l'appui, la description de ses expériences dans la Æevue générale des Sciences du 30 novembre 1903, t. XIV, page 1133 et suivantes. Le lecteur qui se reportera à cet article sera tout de suite frappé de la ressemblance des aéroplanes, alors inventés et utilisés par M. Chanute, avec les aéroplanes automobiles actuels. (N.p. L. R.) 5172 ÉMILE PICARD — RAPPORT SUR LE PRIX OSIRIS À DÉCERNER EN 1909 Wright dans la voie où ils devaient recontrer les succès connus de tous. En 1900, Wilbur et Orville Wright reprennent les expériences de glissement, avec quelques idées originales, et font faire un grand progrès à la pratique antérieure; la stabilisa- trice est placée à l'avant, el devient le gouvernail horizontal ou de profondeur, mobile autour d’un axe horizontal. Le profil des aïles est aussi étudié avec soin. Quoiqu'on parle toujours de biplan ou de monoplan, les surfaces sustentatrices ne sont pas planes; il y a un grand intérêt à leur donner une légère concavité, l’attaque en marche régulière ayant lieu suivant le premier élément de la courbe, Cette forme permet un écoulement plus facile pour l'air, et diminue la résistance à l'avancement. Ces expériences, prolongées pendant près de trois ans sur les grèves de l'Atlantique, apprirent aux frères Wright, suivant le mot de M. Chanute, leur métier d'oiseau. Dans tous ces essais, aucun moteur n'avait été placé sur l'appareil; d’après des témoignages restés longtemps incertains, mais auxquels on doit aujour- d'hui accorder créance, les frères Wright, ayant construit un moteur de leur invention, firent pour la première fois, à la fin de 1903, un vol de 300 mètres, et en 1904 des vols de 5 kilomètres dans de bonnes conditions de stabilité. Pendantcespremiersexploitsaméricains, exploits restés un peu mystérieux et dont un écho arrivait seulement en Europe, l'aviation trouvait en Europe un apôtre convaincu dans le capitaine Ferber; celui- ei se livrait à des recherches théoriques sur la stabi- lité et reprenait les glissements sur l'air, qui furent aussi reproduits à Berck-sur-Mer par MM. Arch- deacon et Voisin. Ces essais permettaient d'obtenir les valeurs de certaines constantes caractéris- tiques, en même temps qu'ils habituaient au vol ces ardents adeptes de l'aviation. La pensée que Wright avail pu se maintenir dans l'air excitait les chercheurs. N'en va-t-il pas ainsi dans tous les domaines scientifiques, l’ingéniosité et la puissance de l'esprit étantaugmentées quand nous savons que le problème qui nous occupe n’est pas insoluble? A cet égard, les nouvelles incertaines venues de l’autre côté de l'Atlantique ont été un stimulant puissant pour les aviateurs français, qui, comme les Américains W. et O. Wright, ont été ainsi à leur début les élèves de notre compatriote M. Chanute. Quand Ja théorie du mouvement de l’aéroplane fut correctement posée, et que l’on fut à peu près maitre des moyens propres à assurer la stabilité, une question importante fut celle d'un moteur suffisamment léger. En France, les nécessités de l'automobilisme avaient conduit à réaliser de grands progrès dans l'industrie des moteurs. Un moteur à explosion, construit spécialement pour l'aviation par un ingénieur très distingué, M. Levavasseur ', et connu sous le nom de moteur Antoinette, se trouva remplir les conditions désirables de légèreté. Nos aviateurs exercés, « connaissant bien leur métier d'oiseau », étaient donc dans les meilleures conditions, et ils remportèrent l’année dernière les brillants succès auxquels nous avons tous applaudi. Je dois toutefois rappeler que c'est un Brésilien, M. Santos-Dumont, qui, à la fin de 1906, a construit le premier en Europe un appareil qui, muni d'un moteur Antoinette de cinquante chevaux, put s'élever seul et parcourir plus de deux cents mètres *. II Cet historique très incomplet vous aura montré, Messieurs, combien nombreux ont été ceux qui ont apporté leur pierre au grand œuvre de l'aviation, depuis lesobservateurs attentifs du vol des oiseaux jusqu'aux constructeurs de moteurs, et, parmi ces pionniers, je tiens à rappeler encore le colonel Renard, que ses travaux sur les dirigeables ont rendu célèbre, mais dont les études expérimentales sur les hélices sont également précieuses pour les constructeurs d’aéroplanes. Votre Commission rend justice à tous ces efforts; mais devant nécessaire- ment faire son choix entre des collaborateurs si nombreux et si variés, elle s’est souvenue que l’année 1908 restera mémorable dans l'histoire de l'aviation. Aussi a-t-elle décidé de vous proposer de couronner les constructeurs francais d'aéroplanes qui ont réalisé en 1908 des appareils capables de quitter les champs de manœuvres et d'effectuer de véritables voyages aériens en pleine campagne, et ont ainsi été les émules des célèbres aviateurs amé- ricains dans les luttes pacifiques de l’année dernière pour la conquête de l'air. À la question ainsi posée, la réponse était facile, et nous ne pouvions avoir aucune hésitation. Citons ici deux dates : Un appa- reil Voisin, monté par Farman, à fait le premier voyage en aéroplane le 20 octobre 1908, allant de Châlons à Reims, et M. Blériot, conduisant lui-même sa machine, a fait le lendemain, de Toury à Artenay, avec retour, le premier circuit fermé par escales. Nous vous proposerons done de partager le prix Osiris entre M. Gabriel Voisin et M. Louis Blériot. Ces deux éminents ingénieurs ont élé quelque temps associés pour construire et expérimenter des 1 Je rappelle que M. Levavassenr fait expérimenter en ce moment un monoplan qui semble donner des résullats très satisfaisants. # Je laisse de côté dans cet historique un appareil remar- quable, l'avion de M. Ader, expérimenté à Satory le 14 octo- bre 1897, les résultats de cette expérience ayant été discutés et les témoignages officiels n'ayant jamais été publiés. Le moteur de M. Ader élail une machine à vapeur. ÉMILE PICARD — RAPPORT SUR LE PRIX OSIRIS À DÉCERNER EN 1909 appareils d'aviation, el se sont ensuite spécialisés, le premier dans la construction des biplans, et le second dans celle des monoplans. On diseute encore beaucoup sur les mérites des monoplans et des biplans. Une telle comparaison, faite à priori, est assez vague, les arguments à invoquer n'étant pas les mêmes suivant que l’on comparera, par exem- ple, un monoplan Blériot à un biplan du type Wright ou du type Voisin, la résistance à l'avance- ment différant notablement dans ces deux biplans. Il est assez vraisemblable que, suivant le genre de transport, la préférence devra être donnée au biplan ou au monoplan; les locomotives des trains de marchandises n'ont-elles pas d'autres formes que celles des trains rapides ? L'aéroplane que construit M. Gabriel Voisin, associé à son frère Charles Voisin, est composé d'une grande cellule formée de deux planssustenta- teurs superposés mesurant 10 mètres d'envergure sur 2 mètres de largeur et espacés de 1",50. Cette cellule porte le moteur, le pilote et le châssis d’at- terrissage principal avec ses deux roues. Une plus petite cellule, formée de deux plans superposés de 22,50 d'envergure sur 2 mètres de largeur, espacés de 1,50, est placée à l'arrière et fixée par une arma- ture rigide aux deux plans sustentateurs; elle porte deux petites roues et elle contient le gouver- nail vertical donnant la direction dans le sens ho- rizontal. En avant de la cellule principale est placé le gouvernail de profondeur, destiné à faire monter ou descendre l'appareil. La largeur totale de l’en- semble est de 11,50. La surface portante est de 50 mètres carrés, et le poids, en ordre de marche? y compris le pilote, varie de 540 à 570 kilogrammes Nous avons dit que les surfaces portantes n'étaient pas planes; les profils sont courbes, le maximum de la flèche se trouvant au premier tiers avant et mesurant un quinzième de la largeur du plan. L'angle de l'aile (c'est-à-dire de sa corde) avec le plan horizontal est, au repos, de huit degrés; après le soulèvement, lorsque l'appareil aborde la mar- che horizontale, la vitesse de l'ensemble atteignant 18 ou 19 mètres à la seconde, l'angle d'incidence diminue au point de se réduire à environ 2 degrés. Le moteur employé par M. Voisin est un moteur Antoinette; il tourne à onze cents tours par minute et donne à cette vitesse de 36 à 39 chevaux. L’hé- lice, placée à l'arrière de la grande cellule d'avant, est montée directement sur l'arbre moteur. On pouvait craindre que l'emploi d’une seule hélice produisit un déversement transversal; en fait, il n'en est rien. Un contrepoids convenablement placé ou un léger décentrage avait d’abord paru nécessaire, mais il semble que l'air lancé par l’'hé- lice dans la cellule arrière suffise pour empêcher toute tendance à la rotation. La forme cellulaire 573 employée par le constructeur eststable d'elle-même, comme l’a montré l'expérience, au moins quand il n'y a pas de remous violents, et c'est grâce à cette stabilité automatique que le biplan Voisin nous apparaît si bien assuré sur sa trajectoire. Il res- semble à une lourde flèche traversant l’espace, et de plus prend de lui-même dans les virages l’incli- naison convenable La stabilité automatique est d'autant plus im- portante ici que l'appareil ne possède, comme disent les géomètres, que deux degrés de liberté, c'est-à-dire que le pilote dispose seulement, pour rétablir l'équilibre troublé, de deux variables rela- tives l’une au gouvernail de direction, l'autre au gouvernail de profondeur. Le biplan Voisin est un appareil admirablement étudié, et qui a fait ses preuves. C’est avec lui que Farman et M. Delagrange ont effectué leurs courses magnitiques. En dehors de circonstances excep- tionnelles, il est d'un maniement relativement facile et n’exige pas du conducteur une attention de tous les instants, comme il arrive pour le « Flyer » de Wright; il est enfin remarquablement apte à la formation des pilotes. L'aéroplane de M. Louis Blériot, qui a été le pro- moteur du monoplan, est d’un tout autre type. Sans rien changer d'essentiel à l'appareil del'année der- nière, le constructeur y à apporté quelques modifi- cations en placant le pilote et le passager au-dessous du plan porteur au lieu de les placer en dessus ; de plus, les ailerons mobiles à l'extrémité des ailes qui restaient fixes ont été remplacés par un gau- chissement de ces dernières. Sous la forme la plus récente, le monoplan de M. Blériot, que primiti- vement on comparait à une libellule, ressemble maintenant davantage à un oiseau; il se compose d’un plan sustentateur légèrement incurvé et sus- ceptible de gauchissement à ses extrémités, les mouvements de celles-ci étant solidaires, de telle sorte que l'une s’abaisse quand l’autre se relève. L'envergure est de 9%,50, la profondeur des plans étant de 2,40, et l'angle d'attaque de neuf degrés; la surface portante est de 22 mètres carrés. L'hélice unique est à l'avant, et lés voyageurs (l'appareil est construit pour le pilote et un passager), assis dans le châssis central sous le centre de l'aile, ont devant eux l'hélice et le moteur dont la puissance est de 35 chevaux; l'hélice tourne au point fixe à 600 tours par minute. Le châssis central est muni de deux roues et se prolonge perpendiculairement au plan sustentateur par une poutre évidée. Celle-ci porte un empennage horizontal fixe, le gouvernail de profondeur et le gouvernail vertical de direction; elle se termine par une petite roue qui, avec les deux premières, supporte l'appareil au repos; M. Blériot à imaginé un dispositif extrèmement 574 PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART ingénieux qui commande les divers mouvements; en inclinant l'arbre du volant de manœuvre dans le sens transversal ou dans le sens longitudinal, on produit le gauchissement des ailes ou l’on fait tour- ner autour de son axe horizontal le gouvernail de profondeur, et des pédales agissent sur le gouvernail de direction. La charge normale prévue pour l’ap- pareil avec deux voyageurs est de 500 kilogrammes ; il est donc chargé à 25 kilogrammes par mètre carré. Les différences sont sensibles entre le monoplan de M. Blériot et l'appareil que nous avons décrit plus haut. D'abord l'hélice et le gouvernail de pro- fondeur sont dans une position inverse par rapport au pilote, mais ce n’est là qu'un détail. Un point essentiel est que la stabilité n’est pas assurée ici plus ou moins automatiquement par le cloisonne- ment cellulaire; mais, tandis que dans le biplan Voisin nous n'avions que deux degrés de liberté, le gauchissement des ailes mel ici une troisième va- riable à la disposition du conducteur. L'appareil, plus léger et offrant moins de résistance, se trouve davantage dans la main d'un pilote attentif. Ce n'est plus le mouvement de la lèche : c'est le mou- vement, plus souple, de l'oiseau, mais présentant actuellement plus de risques, surtout dans les virages, et demandant un grand sang-froid au con- ducteur. J'ai rappelé tout à l’heure que, entre les mains de l'habile et audacieux pilote qu'est M. Blé- riot, le monoplan a pour la première fois effectué dans la Beauce, entre Toury et Artenay, un véritable voyage aérien. Je ne me hasarderai pas, en finissant, à parler de l'avenir réservé aux monoplans, aux biplans, voire même aux triplans, d'autant qu'on peut ima- giner d'autres formes d’'aéroplanes. Je ne cher- cherai pas non plus dans combien de temps les aéroplanes remplaceront les chemins de fer, ni si cette substitution sera au plus grand bénéfice de la guerre ou de la paix. Laissons ce soin aux roman- ciers et aux politiques. Ce que nous pouvons dire, c'est que les véritables principes de la locomotion aérienne par le plus lourd que l'air sont définitive- ment posés, el que l'aviation est entrée dans la voie scientifique; sur les aérodromes, véritables laboratoires de physique, les mécaniciens avisés que sont plusieurs de nos constructeurs et de nos pilotes font chaque jour des expériences qui con- duisent à modifier tels ou tels détails, et les pro- grès résulteront de ces observations accumulées. Vraisemblablement, quoique en pareille matière le métier de prophète soit dangereux, on ne s’écar- tera guère de quelques-unes des formes imaginées dans ces dernières années, mais on leur adjoindra des appareils propres à assurer la stabilité. Peut- être est-ce dans les moteurs qu'il y aura le plus d’imprévu, l'électricité ménageant probablement bien des surprises, sans parler des sources d'énergie que peuvent nous révéler encore des découvertes comme celles qui ont été faites en Physique depuis dix ans. Quelque timides que doivent paraitre un jour les éssais actuels, l’histoire de l'aviation réservera une page aux voyages au long cours effectués pour la première fois en 1908. Aussi la Commission du prix Osiris vous propose-t-elle à l'unanimité de partager en parties égales le prix entre M. Gabrier Voisin et M. Louis Blériot. Émile Picard, Membre de l'Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. LA VIE ET LES ŒUVRES DE E. MASCART Mascart (Eleuthère-Elie-Nicolas) naquit le 20 février 1837, à Quarouble (Nord), à quelques kilomètres de Valenciennes et de la frontière belge ; son père élait instituteur; aussi loin qu'on pouvait remonter, la famille Mascart n'avait pas quitté le petit village, et était restée attachée à cette terre un peu rude, au ciel gris, au sous-sol creusé par les mines, à la culture uniforme des champs de bette- rave qui s'étendent à perte de vue, à l'industrie active des forges et des hauts fourneaux. Depuis 1659, de père en fils, la charge de clerc de la paroisse el de maître d'école, puis plus tard de secrélaire de l’état civil, se transmettait sans inter- ruplion dans cette famille, qui représentait évi- demment l'élite intellectuelle du bourg; le père était l'autorité suprême et respectée; les traditions se conservaient. C'est de ce milieu obscur et modeste que sortit l'homme dont le nom devait être un des plus grands de la science francaise, el qui, par son seul mérite, devait s'élever aux situations les plus hautes ; ainsi des réserves d'énergies sont lentement aceumulées par la patiente Nature dans les régions les plus saines et les plus fortes de l'humanité, pour s'épanouir à de rares intervalles, comme la floraison de ces plantes puissantes qui n'apparaît qu'une fois tous les siècles. Mascart avait un frère, plus âgé que lui de quel-. PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 5179 ques années ; les deux enfants étaient intelligents, l'école paternelle ne leur suffit bientôt plus ; l'am- bition du père s'éleva jusqu'à les envoyer au Collège de Valenciennes, grave problème pourses modestes ressources. Une misérable mansarde sous les combles fut louée ou prèlée dans le voisinage du Collège ; tous les lundis malin, par les rudes hivers du Nord, les deux enfants parcouraient à pied les 7 kilomètres qui séparent Quarouble de Valenciennes, chargés du pain et du fromage qui, pour le reste de la semaine, devaient seuls faire leurs repas du soir ; la propriétaire de la mansarde leur préparait la soupe de midi ; et lentement, année par année, les études classiques se poursuivaient ainsi pour les deux frères, étroitement associés dans des efforts com- muns. Une telle vie est une forte école d'énergie et prépare des caractères trempés pour la lutte ; lors- que l'aîné des deux enfants fut en âge d'avoir sa volonté et sa personnalité, un drame que nous ne pouvons que soupçonner éclata dans la famille : le père, autoritaire et rigide, se croyant encore aux temps anciens, avait destiné son fils aux ordres et prétendait lui imposer sa volonté ; le jeune homme n'avait pas la vocation; ils'éloigna et partit seul pour Paris ; ce que fut la vie de ce jeune homme de seize ans, isolé dans la grande ville, sans ressources, plein d'intelligence et d'énergie, nous n'avons pas à le raconter ici; à force de ténacité, gagnant son pain, sans passer par aucune école, il s'engagea, et s'éleva seul au grade de capitaine du génie : il mourut jeune, au retour des colonies, en 1869. Ce fut là une ombre qui toujours assombrit Mascart, étroitement lié d'affection avec ce frère ainé qui avait partagé avec lui les peines et peut- être aussi — car il yen a toujours — les joies de l'enfance. Plus heureux, il put continuer ses études. Frappé par les aptitudes des deux frères, M. Cromback, principal du Collège, les avait pris comme boursiers deux ans après le commencement de leurs études ; c'était un peu de sécurité pour l'avenir ; mais que de chemin restait encore à parcourir ! Mascart arriva ainsi aux baccalauréats ès lettres et ès sciences, qu'il passa en 1855 et 1856; son père jugea qu’il avait assez fait pour lui, et lui signifia qu'il avait désormais à gagner sa vie ; à 19 ans, il entra comme maître répétiteur au Lycée de Lille et, l'année suivante, à la fin de 1857, il passa dans les mêmes fonctions au Lycée de Douai ; comme l'avait fait le principal de Valenciennes, le proviseur de Douai, M. Fleury, s'intéressa à lui ; c'était un homme de grande valeur, universitaire dans l’âme; il engagea Mascart à se diriger du côté de l'Ecole Normale, dont il était lui-même sorti; grâce à son ————————————_—_———— aide, Mascart put mener de front ses fonctions de répétiteur etle dur labeur d'une année de Mathéma- tiques spéciales ; il fut recu à la fin de l’année, au concours de 1858. On se figure aisément l'ardeur avec laquelle ce jeune homme, épris descience el enfin arrivé à son but, s'engagea dans ces trois années de libres études qu'ont connues tous ceux qui ont passé par l'Ecole ; il y trouva des maîtres éminents, Briot pour les Mathématiques, Verdet pour la Physique, Sainte- Claire Deville pour la Chimie; dans ce temps-là, les deux premières années d’études étaient communes, et c'est seulement en troisième année que l’on se spécialisait soiten Mathématiques, soit en Physique. Mascart fut bien près de devenir mathématicien: il y était fort poussé par Briot, dont il devait, bien peu d'années après, devenir le gendre, et qui, par manière de plaisanterie, lui reprocha souvent de lui avoir échappé; la Physique l'emporta, mais la trace de la forte culture mathématique de Mascart se retrouva plus tard dans toutes ses œuvres, et ieur donna une vigueur que n'atteindront jamais les expérimentateurs purs. Agrégé des Sciences physiques en septembre 1861, Mascart aurait pu obtenir immédiatement une nomination dans l’enseignement secondaire ; c'était l'avenir assuré, avec une carrière honorable et régulière. Mais l'ambition des études et des recher- ches personnelles était venue au jeune normalien, au contact et à l'exemple journalier de ces maîtres dont c'était là toute la vie et toute la passion. Une situation modeste de préparateur d'Histoire naturelle (!) lui permit de rester à Paris, et lui assura le loisir nécessaire pour préparer une thèse, en mème temps que les Laboratoires de l'Ecole lui en donnaient les ressources matérielles. Le 2 juillet 1864, il était recu docteur, et à peine quinze jours après, il épousait M'° Briot, qui fut pendant quarante-quatre ans l'admirable compagne d’une vie toute de labeur et de science. Nommé au Lycée de Metz en septembre 1864, Mascart ne put se résoudre à abandonner pour longtemps ses travaux; dès 1865, il prenait un congé sans traitement et revenait à Paris pour- suivre ses recherches sur la lumière; une sup- pléance à l'École Normale de son maitre Verdet, qui dura quelques mois, contribua à le mettre en relief; au mois de septembre 1866, il était nommé professeur au Collège Chaptal; après avoir passé successivement au Lycée Napoléon et au Lycée de Versailles, il quittait définitivement l'enseignement secondaire pour entrer en décembre 1868 au Col- lège de France comme suppléant de Régnault. Ces quelques années furent marquées par un incident qu'il n'est pas sans intérêt de rapporter ici : le grand homme d'État que fut Thiers avait 576 PAUL JANET — LA VIE ET LES ŒUVRES DE E. MASCART l'innocente prétention d'être universel en toutes choses; les anecdotes abondent à ce sujet‘ : Un jour, parlant d'un homme élevé à une haute fonction : « Il n'est pas plus fait pour cet emploi que moi pour être pharmacien... et encore, ajou- lail-il en se reprenant, moi, je sais la Chimie! » Si Thiers savait la Chimie, — et même la Phy- sique, — c'est à Mascart qu'il le devait. De 1867 à 1870, il voulut consacrer aux sciences les loisirs que lui laissait la politique; c'est à Mascart qu'il s'adressa pour cela; il trouvait à l'École Normale et des conseils éclairés et des expériences intéres- santes; il aimait à fixer lui-même le programme de son travail et ne se contentait pas facilement. Voici quelques lettres de ce temps-là : « Mon cher monsieur Mascart, écrit-il le 5 janvier 1865, j'irai vous joindre à l'Ecole Normale pour con- linuer mes études avec vous. Je voudrais refaire l'expérience de l’ébullition (variable avec la pression) d'une manière différente, par exemple... en faisant le : : dE p 5 vide par la machine pneumatique. Je voudrais pour- suivre l'étude des corps simples autres que l'oxygène et l'hydrogène, et tels que l’azote, le soufre, le chlore, le phosphore, le carbone, etc., mais bien entendu partie seulement de tout cela et en suivant une marche méthodique. » « Mon cher monsieur Mascart, Demain lundi à 3 heures, je serai à l'Ecole Normale. Nous travaillerons sur le carbone, et, s’il nous reste du temps, sur l’iode, le silicium, l’arsenic. Je voudrais bien revoir l’expé- rience du carbure d'hydrogène combiné avec le chlore. Mardi, j'aurai la séance que M. Sainte-Claire Deville m'a promise sur les grands moyens de produire le calorique et de l'appliquer aux métaux. » Les dernières de ces lettres, par leurs dates, ont presque un intérêt historique; les voici : « 4° juillet 4870. Mon cher monsieur Mascart, J'ai été si occupé cette semaine que Je n'ai pu vous donner signe de vie. Lundi ou mardi, je serai tout à vous. Lundi, nous travaillerons sur le carbone, le soufre, le phosphore, le calcium, l'aluminium; mardi sur l'Elec- tricité, et puis nous prendrons jour pour la semaine suivante. » « 44 juillet 1870. Mon cher monsieur Mascart, Les événements sont si graves qu'il m'est impossible de quitter la Chambre demain. Je crains de ne pas le pouvoir mercredi, mais jeudi je suis à peu près sûr d'être libre. En tout cas, je vous préviendrai. Ainsi, à jeudi. » Ainsi, au début de cette semaine fatale où des événements irréparables devaient s’accomplir, Thiers songeait encore à s'occuper de Physique et de Chimie, et le jeudi qu'il fixait comme rendez- vous au Laboratoire de l'École Normale devait être le jour, désormais historique, où le roi Guillaume rompait les négociations avec notre ambassadeur! La guerre vint bouleverser, pour Mascart comme pour tant d'autres, ce brillant commencement de carrière scientifique. Dès le 24 août, il partait à l'improviste pour faire une tournée d'examens ! HanoTAUx : p. J4. Histoire de la France contemporaine, 1. 1, d'admission à l'École d'Arts et Métiers d'Aix. C'est au cours de cette tournée qu'il apprit les événe- ments du % septembre. Tous ceux qui, même à travers les ignorances de l'enfance, ont entrevu cette époque, se souviennent du magnifique élan- avec lequel tous les hommes de cœur apportèrent leur activité et leur dévouement au Gouvernement de la Défense nationale, et, sans quitter le monde scientifique, que de noms nous pourrions citer! Mascart fut parmi ceux-là; au milieu de la désor- ganisation générale, tout manquait à la fois; Mascart, ce normalien, cet universitaire qui jusque- là avait passé sa vie au Laboratoire, uniquement préoccupé des calmes problèmes de la Science pure, se vit à l'improviste chargé d'organiser une capsu- lerie à Bayonne! Ce fut une période où se révé- lèrent ses qualités maitresses, qu'il devait plus tard porter à un si éminent degré. « Je continue à être très occupé, écrit-il deux jours après son arrivée à Bayonne, le 26 octobre 1870; je fais menuiser et maçonner, jachèle pour des sommes folles; bref, j'installe à grands frais une fabrique qui ne marchera peut-être pas, si nous avons la paix sans tarder. » Un peu plus tard, le 6 novembre, il écrit : « Il n'y a pas quinze jours que nous avons com- mencé à bâtir, et nous produisons avant un établisse- ment parallèle qui s’est installé à Toulouse et qui avait sous la main tous les outils que nous avons été obligés de fabriquer de toutes pièces. » Bientôt tout est prêt, et Mascart se trouve à la tête de 150 ouvriers; les difficultés, les émotions même ne manquèrent pas : un jour, le feu prit dans la fabrique; il y avait près de là 300 kilog. de ful- minate à l’état sec; Mascart, presque seul, éteignit l'incendie et conjura le danger; il le fit, comme il faisait toute chose, simplement et en silence : per- sonne ne se douta de la terrible catastrophe qui aurait pu se produire; ce furent là ses débuts dans l'industrie; il devait s’en souvenir toujours plus tard, et il n’est pas téméraire de penser que ce brusque contact avec la vie pratique eut une pro- fonde influence sur toute sa carrière. La guerre finie, Mascartreprit, avec la suppléance de Régnault au Collège de France, ses travaux scientifiques; la chaire devait bientôt devenir vacante par la retraite de l'illustre physicien, que la mort lragique de son fils venait de frapper si douloureusement; Mascart se porta candidat et, le 6 mai 1872, il fut présenté en première ligne par l'Académie des Sciences, au second tour de scrutin, par 27 voix contre 26 à Janssen; il devait occuper celte chaire jusqu’à la fin de sa carrière. Quelques années plus tard, en 1878, un décret décidait la création, en France, d’un Bureau Central Météorologique; sur la proposition de Sainte-Claire * PAUL JANET — LA VIE ET Deville, de Dumas et d'Hervé-Mangon, Mascart en élait nommé directeur. Il occupa ce poste pendant près de vingt ans. Enfin, le 5 décembre 188%, il était, presque à l'unanimité des suffrages, élu membre de l'Aca- démie des Sciences en remplacement de Jamin, devenu secrélaire perpétuel. Les premiers travaux de Mascart, à sa sortie de l'École Normale, portèrent sur l'Optique ; l'Electri- cité, à laquelle plus tard devait surtout s'attacher son nom et dont les progrès lui doivent tant, était alors peu en honneur en France, et c’est surtout en Allemagne et en Angleterre qu'elle recevait ses principaux développements ; au contraire, l'Optique, depuis l’admirable impulsion que lui avait donnée Fresnel en créant, presque à lui seul, tout le corps de doctrine qui constitue la théorie des ondulations, n'avait jamais cessé d’être pour beaucoup de physi- ciens français une science de prédilection. D'ail- leurs, l'étude de la lumière venait d'entrer en pos- session d'un domaine nouveau, grâce aux belles découvertes de Frauenhofer et de Kirchhoff : l’exis- tence, dans le spectre solaire, d’un système extrè- mement complexe de raies obscures, la coïncidence signalée par Kirchhoff, puis expliquée par lui au moyen dune hypothèse hardie, entre ces raies obseures et les raies brillantes fournies par l'obser- vation spectroscopique des vapeurs métalliques incandescentes, donnait un grand intérêt aux mesures précises effectuées dans cette partie, encore peu explorée de la Science; déjà Frauenhofer, à peine découvertes les raies obscures du spectre solaire, en avait mesuré les longueurs d'onde dans un travail qui est demeuré un modèle de précision et de rigueur; mais l'étude du spectre ultra-violet, découvert par les anciennes observations de Scheele et de Wollaston, était beaucoup moins avancée; par analogie, on avait bien vite soupconné l'existence, dans ces régions obscures du spectre solaire, de raies inactives, analogues aux raies obscures du spectre visible; et ces raies avaient été mises en évidence par Helmholtz, Ed. Becquerel et Stokes, “soit par l'observation directe (l'œil pouvant, dans des circonstances exceptionnelles, aller très loin au delà du violet), soit par les phénomènes photo- chimiques, soit par les phénomènes de phospho- rescence et de fluorescence; mais aucune mesure précise, comparable à celle de Frauenhofer, n'avait encore été faite, et Kirchhoff pouvait écrire : « La résolution de ces bandes. confuses me parait pré- senter le même intérêt que la résolution des nébu- leuses du firmament et la connaissance exacte du spectre solaire ne me semble pas offrir une im- LES OEUVRES DE E. MASCART 577 portance moindre que l'étude des étoiles fixes. » C'est à ces questions difficiles que Mascart s'atta- qua d’abord, et c’est là qu'il trouva la matière d’une thèse qui devait, du premier coup, le mettre hors de pair; son but était d'atteindre, dans la mesure des indices de réfraction et des longueurs d'onde des raies du spectre invisible, une précision com- parable à celle que Frauenhofer avait obtenue dans l'étendue du spectre visible; renoncant aux pro- cédés d'observation directe de Helmholtz, procédés pénibles, ne s'appliquant pas à toutes les vues, et ne donnant les raies inaclives que sous forme de bandes plus ou moins confuses; renonçant égale- ment à l’utilisation de la fluorescence, qui ne permet pas une précision suffisante, Mascart adopta, comme l'avait déjà fait Ed. Becquerel et quelques physi- ciens, les procédés photographiques; mais on peut juger de la perfection qu'il leur apporta si l’on remarque qu'il fit passer de 70 à 700 le nombre des raies inactives du spectre solaire connues au delà de la raie H, la dernière du spectre visible, et élen- dit nos connaissances du spectre ultra-violet dans une région supérieure à celle du spectre visible. La méthode consiste à employer un spectroscope à lentilles de quartz et à prisme de quartz ou de spath et à en remplacer l’oculaire par une petite plaque photographique placée au foyer de l'objectif, dans le plan où se forme l’image réelle du spectre que l’on veut étudier; les difficultés sont nombreuses : il faut opérer de proche en proche, la plaque n’enre- gistrant à chaque opération qu'une faible étendue du spectre ; il faut, par des tâätonnements successifs, meltre au point l’image des rayons invisibles qui, à chaque déplacement de la lunette d'observation, se déplace par suite des variations de l'indice des rayons de plus en plus réfrangibles; il faut enfin, par des mesures micrométriques effectuées au microscope, raccorder toutes ces images les unes aux autres pour arriver à dessiner le spectre com- plet; si l'on ajoute à cela qu'à l’époque où ces mesures ont élé faites, il n'existait pas encore de plaques au gélatino-bromure et que toutes les opé- rations durent être effectuées au moyen du collodion sensibilisé à l'iodure d'argent, on jugera de toutes les difficultés de la tâche entreprise; Mascart les surmonta toutes et put donner, comme conclusion de la première partie de son travail, les indices de réfraction ordinaires et extraordinaires dans le quartz et dans le spath, c'est-à-dire dans deux mi- lieux parfaitement bien définis et peu absorbants pour les radiations ultra-violettes, des principales raies du spectre solaire jusqu'à la raie R (et même Set T pour l'indice ordinaire du spath) : Rudberg s'était arrêté à la raie H, la dernière &u spectre lumineux. Ces constantes une fois défi: s, il fallait les rap- ‘PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART procher des valeurs exactes des longueurs d'onde des mêmes rayons; par là, tout observateur, dans l'avenir, pourrait se dispenser de la mesure des longueurs d'onde et les remplacer par des mesures d'indices ou inversement; à l'exemple de Frauen- hofer, Mascart utilisa pour cette détermination le phénomène des réseaux, et c'est surtout dans cette partie de son travail que se révélèrent ses qualités maîtresses, un sens très aigu, et bien rare chez un débutant, de la métrologie de précision et des méthodes expérimentales. J'en trouve la preuve dans le fait suivant: comme instrument de travail, Mascart a uniquement entre les mains, outre l'excellent goniomètre de Brunner dont nous avons parlé plus haut, un réseau de Nobert dont chaque intervalle valait environ 2,2 millièmes de milli- mètre, ce qui, d’après les formules bien connues, permettait d'espérer une précision de l'ordre du dix-millième dans les mesures relatives des lon- gueurs d'onde. Mais, dès les premières observa- tions, il est arrêté par un phénomène inattendu : les spectres obtenus sont absolument confus et ne permettent aucune mesure précise; c'est à peine si les raies sont visibles. Tout autre eût renoncé à l'emploi d'un instrument qui,au premier abord, paraissait si défectueux; Mascart, au lieu d'écarter ce phénomène embarrassant, résolut de l’aborder de front et de l'étudier en détail : au moyen de la lumière simple du sodium, il reconnut que, pour une cause qu'ilnes’arrêta pas à rechercher, le réseau en question donnait, au lieu du spectre normal ordinaire, trois spectres différents : l’un régulier, «; le second, irrégulier, 3, se produisant presque dans le même plan que le premier : c’est le mélange de ces deux spectres, inégalement déviés et presque au point en même temps, qui amenait la confusion signalée plus haut; et enfin un troisième spectre y, irrégulier lui aussi, mais se produisant à une distance très différente des deux premiers; pour observer ce spectre d’un côté de la normale, il fallait tirer l’oculaire de la lunette, et de l’autre côté l'enfoncer, de sorte que d’un côté le réseau se comportait comme une lentille divergente, et de l’autre comme une lentille convergente de même distance focale : ce spectre irrégulier, se formant à une distance très différente de z et de 8, pouvait être mis au point séparément avec la plus grande netteté, et les mêmes phénomènes s’observaient pour les spectres d'ordre supérieur. C'est ce spectre irrégulier + que Mascart résolut d'utiliser pour ses mesures; comme il ne recherchait que les valeurs relatives des longueurs d'onde, il suffisait de véri- lier, par des mesures faites dans le spectre visible, que les déviations dans le spectre y suivaient les mêmes lois que dans le spectre normal; c'est ce qu'il fit en utilisant les raies brillantes de dix métaux convenablement choisis ; assuré ainsi dela confiance que l’on pouvait accorder même à ces mesures faites sur un spectre irrégulier, il procéda aux mesures définitives. Si nous avons insisté sur ce point, qui n’estqu'un détail, c'est qu'il montre sur le vif la différence profonde qui existe entre l'observateur vulgaire et l’expérimentateur qui a le sens des mesures phy- siques : observer un phénomène anormal et inat- tendu, en étudier les lois, puis l'utiliser pour des mesures de haute précision, est évidemment le fait d'un esprit supérieur. On peut s'étonner que Mas- cart n'ait pas cherché à expliquer ces anomalies ; pour qui l’a connu plus tard, la chose est toute naturelle et le peint tout entier : chercher une explication serait s’attarder en chemin et s'écarter du but poursuivi ; or, le but seul importe : cesser un seul instant d'y porter les yeux, d'y tendre et de s'en rapprocher serait une marque de faiblesse ; Mascart ne s'y abandonne pas, et ce sera là la règle de toute sa vie. Aussi n'est-ce que beaucoup plus tard que Cornu, esprit élégant et curieux, reprit celte question et en trouva l'explication dans les irrégularités systématiques de la répartition des traits du réseau provenant des irrégularités corres- pondantes de la vis de la machine à diviser qui a servi à la tracer : on sait que ce futl'origine de l'un de ses beaux Mémoires sur les anomalies focales des réseaux. Outre ce phénomène, et bien plus importante que lui, Masecart découvrit une propriété fondamentale des réseaux, qui est demeurée classique depuis : je veux parler de la propriété du minimum de dévia- tion ; lorsque, le faisceau incident restant fixe, on fait tourner simultanément le réseau et la lunette d'observation, la déviation passe par un minimum au moment où le réseau forme le plan bissecteur entre le faisceau incident et le faisceau diffracté; à ce moment, et à ce moment seulement, la source virtuelle des rayons diffractés est à la même dis- lance du réseau que la source réelle qui a donné naissance aux rayons incidents : on reconnait là une propriété en tout semblable à celle du mini- mum de déviation dans les prismes. On sait que ces conditions d'expérience sont particulièrement favo- rables aux observations spectroscopiques. Les résultats de ce travail considérable se ré- sument en deux tableaux : l'un qui donne les lon- gueurs d'onde des principales raies brillantes de dix métaux, l’autre qui donne les longueurs d'onde des principales raies obscures ou inactives du spectre solaire lumineux ou ultra-violet jusqu'à la raie R. Toutes ces valeurs sont relatives et caleu- lées en prenant le nombre de-Frauenhofer, 0,5888, pour la longueur d'onde de la raie D. La connais- sance de la valeur absolue de cette longueur d'onde PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 579 eut entrainé à comparer au mètre étalon les micro- mètres dont on avait à faire usage; c'est là un tra- vail considérable que Mascart n'aborda pas : on sait qu'il faut arriver aux travaux modernes de MM. Michelson, Benoît, Pérot et Fabry, ete., pour trouver la solution de celle question. L'extension donnée par Mascart aux mesures d'indices et de longueurs d'onde l'amena naturelle- ment à confronter avec l'expérience les diffé- rentes formules de dispersion données jusqu'alors par les mathémaliciens. On connaît la formule classique de Cauchy, d'après laquelle l'indice de réfraction pourrait être développé suivant les puis- sances paires croissantes de l'inverse de la lon- gueur d'onde; Briot avait montré que cette for- mule peut être retrouvée par une théorie moins sujette à la critique que celle de Cauchy, en admettant que la dispersion de la lumière est due à des inégalités périodiques dans la répartition de l'éther à l'intérieur des corps pondérables; il avait montré également que, si l’on attribuait la disper- sion à une action directe des molécules pondérables sur le mouvement de l’éther, on serait amené à représenter l'indice par un développement suivant les puissances paires croissantes de la longueur d’onde,résultatévidemment contraire à l'expérience. Mascart eut l'idée de combiner les deux théories, en essayant une formule de la forme : BAC 4 n=A ++; M, et trouva que cette formule, qui, il est vrai, contient quatre constantes, représentait très exactement, et avec des différences inférieures aux erreurs d’ex- périence, les résullats qu'il avait obtenus. Délivré du souci de sa thèse, Mascart n'aban- donna pas l'étude du spectre : dans le but de se mettre à l'abri des critiques que pouvait amener l'emploi d'un réseau présentant les anomalies que nous avons décriles, il se procura cinq autres réseaux extrèémement parfaits, grâce auxquels il put continuer ses recherches; il étudia, par les mêmes méthodes, les spectres de l'hydrogène, du lithium, du calcium, du strontium, de l'argent, du zinc, et surtout du cadmium, dont il fit une monogra- phie détaillée : dans ce dernier, il poussa ses mesures jusqu'à À = 0 w, 2217 dans le spectre ultra-violet; on sait que cette limite du côté des faibles lon- gueurs d'onde ne fut pas de longtemps dépassée : Cornu atteignit 0,1852 dans le spectre de l'alumi- nium, et ce n’est que beaucoup plus tard que Lé- nard et Schumann purent mettre en évidence des radiations de O0 5, 1 au moyen de spectroscopes composés uniquement de spath fluor, et placés dans le vide, ces radiations à courte longueur d'onde élant extrèmement absorbables par l'air. Le Mémoire de Mascart fut présenté à l'Académie des Sciences pour le concours du Prix Bordin de 1866, avec l’épigraphe : La simplicité des méthodes est une garantie de la précision des mesures; les commissaires étaient Pouillet, Ed. Becquerel, Fou- cault, Regnault et Fizeau : ce fut ce dernier qui fit le Rapport; il apprécia le travail qui lui était pré- senté comme « le plus approfondi et le plus satisfaisant qui ait été fait depuis Frauenhofer rela- tivement aux longueurs d'onde des divers rayons qui composent la lumière ». Le prix lui fut décerné à l'unanimité. Au cours de ces recherches, dontle but principal était les mesures d'indices et de longueurs d'onde, Mascartfutamené à faire plusieursobservations inté- ressantes, dont quelques-unes auraient pu devenir le point de départ d'un travail nouveau : étudiant le spectre d'émission du potassium dans l'arc élec- trique, il observa le renversement spontané de la raie À; on sait en quoi consiste ce phénomène : dans certaines conditions de température etde den- sité, les raies brillantes d'émission des vapeurs métalliques se transforment en raies sombres sur fond brillant; ce phénomène, qui d’ailleurs peut rentrer dans les idées générales de Kirchhoff, avait été découvert par Fizeau dans le cas du sodium; Mascart l’observa sur la raie la moins réfrangible du potassium en volatilisant ce métal dans l’arc; on sait comment, quelques années plus tard, Cornu donna une extension considérable à cette étude des raies spontanément renversables. Il en est de même de l'étude de la périodicité de certains groupes de raies spectrales, qui a pris aujourd'hui une si grande importance. Mascart fut le premier observateur qui signala l'existence de trois triplets dans le spectre du magnésium; il en tira la conclusion suivante : « N’est-il pas naturel d'admettre que ces groupes de raies semblables sont des harmoniques qui tiennent à la constitution moléculaire des gaz lumineux? » L'avenir devait montrer que, si celle conception du phénomène était trop simple, le phénomène lui-même par son extension devait devenir un des plus significatifs dans le domaine de la spectroscopie. Enfin Mascart, étudiant les observations de Helm- hollz, montra que, pour certaines vues, et en parti- cuher pour les vues myopes, le spectre ultra-violet pouvail être visible (spectre lavande de Herschell) sur une étendue six ou sept fois plus grande que le spectre lumineux : on peut apercevoir jusqu'à À — 04,213. Ces longues études sur le spectre avaient donné à Mascart une grande expérience des phénomènes lumineux ; il était donc tout prêt à aborder de nou- veaux travaux du même genre lorsque l'Académie 580 PAUL JANET — LA VIE ET mit au concours, pour le Grand Prix des Sciences mathématiques de 1870, le sujet suivant : « Re- chercher expérimentalement les modifications qu'éprouve la lumière dans son mode de propa- gation et ses propriétés par suite du mouvement de la source lumineuse et du mouvement de l’observa- teur. » Cette question, l'une des plus difficiles et des plus complexes de l'Optique, a une histoire sin- gulière, qui mérite d’être rappelée en quelques mots. Arago, en 1810, fit l'observation suivante : Si l’on mesure la déviation imprimée par un prisme achromatisé à la lumière qui vient d’une étoile, on observe exactement lamème déviation, soit quel'on ait choisi une étoile vers laquelle la Terre marche, soitque l'on ait choisi une étoite de laquelle la Terre s'éloigne. Cette expérience fondamentale s’expli- quait mal dans la théorie de l'émission; dans une lettre célèbre adressée à Arago en septembre 1819, Fresnel tenta d'en donner l'explication dans la théo- rie des ondulations au moyen de son hypothèse har- die de l'entrainement partiel des ondes lumineuses par les corps en mouvement : il montra que, pour une lumière d’une longueur d'onde donnée, il y a bien, en réalité, un changement dans la déviation (augmentation dans un cas, diminution dans l’autre), mais que ce changement est compensé par un phé- nomène analogue à l’aberration qui impose à la lunette d'observation un changement précisément égal et de signe contraire, en sorte que, dans aucun cas, une telle expérience ne peut mettre en évidence le mouvement de la Terre; la déviation est toujours la même que si le prisme était immobile; c’est bien la conclusion de l'expérience d'Arago. Le phénomène paraissait donc suffisamment bien éclairei, lorsque survint la découverte du fameux principe de Dôppler, précisé par Fizeau; on sait en quoi consiste ce principe, dont chacun peut obser- ver les conséquences dansle cas des ondes sonores : lorsqu'une source périodique (sonore ou lumineuse) et un observateur éprouvent un déplacement rela- tif, que ce déplacement soit d’ailleurs dù au mou- vement de la source, au mouvement de l’observa- teur ou à tous les deux combinés, la longueur d'onde apparente du mouvement qui arrive à l'observateur est modifiée : elle est augmentée s'il y a éloigne- ment, diminuée s’il y a rapprochement. Mascart se posa dès lors la question suivante : « Dans l'expli- cation par Fresnel de l’expérience d'Arago, est-ce la longueur d'onde réelle ou la longueur d'onde appa- rente du mouvement qui frappe le prisme qu'il faut faire intervenir ? » Si, comme semblait le croire Fresnel, c'était la longueur d'onde réelle, on arrivait à une consé- quence bizarre, bien peu probable à priori, mais en observant sur la Terre une source lumineuse lerrestre, on peut se placer dans non impossible : LES OEUVRES DE E. MASCART deux situations différentes : on peut (l'influence du mouvement derotation de la Terreétant négligeable) s'arranger de manière que la lumière chemine dans le même sens que la Terre sur son orbite, ou en sens inverse; dans le premier cas, en vertu du principe de Dôüppler, la longueur d'onde réelle de la lumière qui tombe sur les appareils d'observation estdiminuée ; dans le second cas, elle est augmen- tée; si donc c'est cette longueur d'onde qui inter- vient, on doit, en recevant cette lumière sur un prisme, observer, suivant les cas, un changement dans la dévialion; on pourrait donc, conséquence bien paradoxale, mettre en évidence non seulement le mouvement dela Terre sur son orbite, mais encore le mouvement absolu de la Terre dans l’espace ; ou inversement, si l’on n'observe pas de différence dans les déviations, c'est la longueur d'onde appa- rente qui intervient, et alors l'expérience d’Arago, convenablement disposée, devrait donner un chan- gement de déviation, changement nôn observé par lui, ainsi qu'il a été dit plus haut. Tel est le dilemne extrémement intéressant qui sert de point de départau travail de Mascart. Hâtons- nous d'ajouter que Fizeau, précisément dans le Rapport qu'il présenta à l’Académie des Sciences sur le Mémoire de Mascart, fit remarquer que, telle qu'elle avait été faite, l'expérience d’Arago devait bien donner le résultat trouvé : Arago, en effet, opérait avec un prisme achromatisé, c'est-à-dire qui, par définition, donne des déviations indépen- dantes de la longueur d'onde; le choix de la lon- gueur d'onde à faire intervenir dans la théorie de Fresnel devenait donc indifférent, et, en toutétat de cause, la déviation observée dans tous les cas devait être la même que si le prisme était immobile. Il n'en reste pas moins vrai que, si, au lieu de rece- voir Sur un prisme achromalisé la lumière blanche d'une étoile, on mesurait, à travers un prisme ordi- naire, la déviation imprimée à une raie déterminée du spectre, on obtiendrait des résultats différents suivant que la Terre s'approcherait de l'étoile ou s'en éloignerait : c'est à Mascart quel’on doit d’avoir mis nettement en évidence cetle conséquence du principe de Düppler combiné avec l'hypothèse de Fresnel sur l'entraînement des ondes. Ces difficultés, et bien d'autres du même genre, donnaient un haut degré d'intérêt à une étude d’en- semble sur l'influence que peut exercer le mouve- ment de la Terre sur les différents phénomènes lu- mineux; ce fut ce travail considérable que Mascart entreprit et dont il exposa les résultats dans deux très importants Mémoires, les plus puissants peul- être de toute sa carrière scientifique, insérés aux Annales de J Ecole Normale de 1872 et 1874. Peur étudier les variations possibles de la dévia- PAUL JANET — LA VIE ET LES OŒUVRES DE E. MASCART 581 tion à travers un prisme, Mascart utilisa deux grands appareils, installés sur des piliers en maconnerie, dans les caves de l'Ecole Normale, à une tempéra- ture très constante de 12° environ. L'un était ins- tallé à poste fixe, le collimateur étant dirigé vers l'ouest, de sorte qu'en faisant des observations à midi et à minuit, les rayons incidents pouvaient se propager dans deux sens opposés par rapport au mouvement de la Terre. L'autre appareil était monté sur une plaque tournante qui permettait de lui donner alternativement deux directions opposées : les observations, répétées un grand nombre de fois, montrèrent que le changement de déviation, s'il ‘existe, est absolument inappréciable, et, d'après la précision des mesures, on pouvait affirmer qu'un déplacement vingt fois plus faible que celui qu'in- dique la formule de Fresnel ne serait pas passé inapercu. Ce fut ce résullat négatif qui amena Mascart, comme nous l'avons vu, à modifier la for- mule de Fresnel, ou plutôt la signification des lettres qui y entrent; cette formule est, comme on le sait, la suivante : si on désigne par V la vitesse des ondes lumineuses dans un milieu en mouve- ment dont la vitesse u s'éloigne de la source, U la vitesse de la lumière dans le milieu supposé au repos, » l'indice de réfraction, on a, d’après Fresnel : V=u+u(i— à). Mais la vitesse de la lumière dans les milieux doués de dispersion dépendant de la longueur d'onde, que doit-on prendre pour U? Est-ce la vitesse correspondant à la longueur d'onde réelle de la lu- imière qui aborde le milieu (comme le supposait Fresnel, antérieurement au principe de Düppler); est-ce la vitesse de lalumière correspondant à la lon- gueur d'onde apparente du mouvement vibratoire qui frappe la première face du milieu en mouvement ? On à vu qu'en adoptant cette deuxième hypothèse, Mascart à pu à la fois interpréter ses propres expé- riences et prévoir le résultat que donnerait l’expé- rience d'Arago correctement interprétée. On voit combien l'intervention des milieux pon- dérables dans ces questions les complique; les phénomènes de réflexion et de diffraction, étant indépendants de ces milieux, semblent d'un abord plus facile: c'est par eux, en effet, que Mascart avait débuté. Lorsqu'on recoit sur un réseau un faisceau de lu- mière parallèle, il se forme un système régulier d'ondes planes diversement déviées auxquelles on a -donné le nom d'ondes paragéniques ; la déviation de l’un de ces systèmes, du premier par exemple, dépend de la longueur d'onde de la lumière inci- dente; on conçoit donc que la déviation change avec a valeur apparente de cette longueur d'onde, c'est- REVUE GÉNÉIALE DES SCIENCES, 1909. à-dire avec le mouvement du réseau vers la source ou à partir de la source; le sens du phénomène est tel'que le changement de direction apparent du dé- placement de la lunette s'ajoute au changement produit par le mouvement du réseau, en sorte que la compensation n’a plus lieu comme dans l’expé- rience d'Arago. Ce raisonnement, dû à Babinet, permettait donc d'espérer que l’on pourrait ainsi mettre en évidence le mouvement de la Terre. Mascart tenta l'expérience un grand nombre de fois et dans les conditions les plus variées, soit avec des sources terrestres, soit avec la lumière solaire réfléchie sur un miroir et cheminant tantôt dans le sens du mouvement de la Terre, tantôt en sens inverse : les mesures, exécutées avec la plus extrême précision, ne donnèrent aucun résultat; un changement très inférieur à celui que prévoit la théorie de Babinet n'aurait pas pu passer inaperçu ; quelque circonstance devait donc fausser cette théorie. En analysant ces circonstances, Mascart reconnut que l'explication du phénomène devait se trouver dans la réflexion de la lumière solaire sur le miroir employé pour faire changer sa direction, et il arriva à conclure : qu'un miroir entraîné par la Terre et réfléchissant la lumière solaire, dont par conséquent le mouvement est sensiblement normal aux rayons incidents, se comporte, pour chaque radiation, comme une source terrestre de même longueur d'onde; cette hypothèse fut vérifiée par des expériences directes, en comparant, dans le même spectroscope à réseau, les positions occupées par la raie D de la lumière solaire réfléchie sur un miroir, et de la raie D du sodium: les deux raies coïncident toujours exactement; l'expérience, d'ail- leurs, peut être réalisée avec une précision d'autant plus grande qu'on peut, pour la seconde lumière, utiliser le renversement spontané de la raie D dont nous avons parlé plus haut, en utilisant comme source un arc jaillissant entre deux électrodes de sodium : les deux raies apparaissent alors sous forme de traits noirs sur fond brillant, et leur coïncidence peut être vérifiée très exactement. Dès lors, la théorie de Babinet était en défaut, puisque cette théorie suppose que la longueur d'onde de la lumière qui tombe sur le réseau est indépendante du sens de la propagation de cette lumière par rapport au mouvement de la Terre; si on voulait réellement, par ce moyen, mettre en évi- dence le mouvement de la Terre, il faudrait em- ployer non pas la lumière du Soleil réfléchie par un miroir, mais la lumière directe d’une étoile, comm?2 dans l'expérience d’Arago : mais cette 1 Cela provient essentiellement de ce que dans un prisme la déviation est une fonction décroissaate et dans un réseau une fonc'ion croissante d> la l nzueur d'onde. 13° 582 PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART lumière est si faible que l'emploi d'un réseau devient presque irréalisable. Ainsi, dans le cas de deux des phénomènes les plus importants de l’'Optique, réfraction et diffraction, l'expérience, d'accord avec une théorie convena- blement interprétée, élait purement négalive; en aucun cas, le mouvement de la Terre ne pouvait être mis en évidence. Les expériences purement négatives, quelle que soit leur importance, ont quelque chose de sévère et de rebutant, capable de décourager les esprits les mieux trempés; il faut admirer la force d'âme d'un Mascart, qui, prévoyant le résultat vers lequel il marchait, s'imposa un travail de plusieurs années, souvent pénible, toujours difficile, pour démontrer que cerlains phénomènes n'existaient pas : outre les phénomènes de diffraction et de réfraction dont nous avons parlé, Mascart étudia successivement les phénomènes de double réfrac- tion rectiligne et de double réfraction circulaire, les anneaux de réflexion, les anneaux de trans- mission, les anneaux des lames mixtes; dans tous les cas, l'influence du mouvement de la Terre se montra rigoureusement nulle. Les deux Mémoires de 1872 et de 1874, publiés aux Annales de T Ecole Normale Supérieure, qui contiennent les résultats de ces longues recherches, ont tous les caractères d'une œuvre classique et resteront la base des recherches ultérieures dans ce domaine difficile : l’Académie des Sciences en reconnut la haute im- portance : dès 1872, un encouragement était accordé à Mascart, et en 1874, sur le rapport de Fizeau, le Grand prix des Sciences mathématiques lui était décerné. Nous en aurons fini avec les grands Mémoires d'Optique de Maseart lorsque nous aurons signalé son travail sur les indices de réfraction des corps gazeux. Après quelques essais peu satisfaisants, il abandonna bien vite la méthode de la déviation prismatique, susceptible d'une trop faible préci- sion, pour recourir à une méthode interférentielle : on sait que, si, dans un spectroscope ordinaire, l'on sépare en deux parties, au moyen d'une bilame de Fizeau, le faisceau de rayons parallèles qui sort du collimateur, puis qu’on les réunisse au moyen d'une bilame analogue avant leur entrée dans le système prismalique, si, de plus, sur l'une des moiliés du faisceau ainsi divisé on établit un retard, un spectre sillonné de cannelures sombres qui ont reçu le nom de bandes de Talbot; ce phénomène présente d’ailleurs une dissymétrie singulière on observe les franges n'apparaissent que si le plus grand retard se produit sur la moitié du fais- ceau qui est la plus voisine de l’arête des prismes. La méthode consiste alors à placer, sur le trajet de chacun des deux faisceaux parallèles dont il a été question plus haut, deux longs tubes, fermés par des glaces et contenant le gaz étudié. Si on fait lentement varier la pression dans l’un de ces tubes, on voit passer, en un point déterminé du spectre, un nombre de franges proportionnel à la variation d'indice du gaz éludié. Par des mesures de ce genre, Mascart reconnut que l'excès de réfraction du gaz, c'est-à-dire la quantité 2— 1, ne varie pas proportionnellement à la pression, c'est-à-dire que n—1 le rapport n'est pas constant : il augmente légèrement avec la pression; on peut le représenter par une formule de la forme : n —1 D — a (1 + bp). D'autre part, les expériences de Régnault avaient montré que la densité d’un gaz, elle aussi, n'est pas rigoureusement proportionnelle à la pression, et peut être représentée par une formule de Ja forme : Sa! ( + bp). Mascart eut l’idée de comparer les coefficients À et 2’; il observa qu'ils sont sensiblement égaux, et, circonstance frappante, qu'ils changent de signe en même temps (ils sont négatifs pour l'hy- drogène); il en conclut que, « dans les limites d'exactitude des observations, il semble que la réfraction d'un gaz est sensiblement proportion- nelle à son poids spécifique ». Mascart appliqua ensuite la même disposition expérimentale pour déterminer le pouvoir dispersif de différents gaz ou vapeurs. La méthode est intéressante : on forme un spectre cannelé avec de la lumière blanche et on lui super- pose un spectre de raies, par exemple au moyen d'une étincelle éclatant entre pointes de cadmium ; on compte le nombre de bandes comprises entre deux raies de longueurs d'onde connues X et \; on fail varier la pression dans l’un des tubes, puis on compte de nouveai® le nombre analogue; le caleul permet, en utilisant les expériences précédentes, d'en déduire le pouvoir dispersif du gaz sans être obligé de s'astreindre à compter le nombre des bandes qui passent. Mascart put ainsi déterminer pour différents gaz et vapeurs le coefficient » de la formule4e Cauchy : qui caractérise la dispersion du gaz considéré. Il trouva ainsi que certains gaz (le protoxyde d'azote, le cyanogène) présentent une dispersion plus grande que celle de l’eau. Les autres travaux de Mascart en Optique, fort RÉ D ÉD Se de PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 583 nombreux, ne donnèrent plus lieu à des Mémoires élendus; citons, en particulier, la polarisation par diffraction, la théorie des franges de Brewster et de Jamin, l'étude du passage de la réflexion vitreuse à la réflexion métallique par l'emploi de couches d'argent d'épaisseurs croissantes, l'application de franges de Talbot à la mesure de la compressibilité de l’eau, la démonstration de l'équivalence entre un système quelconque de lames cristallines super- posées el une lame unique, la théorie de l’are en ciel, la principe de Huyghens, l'achromatisme des phénomènes d'’interférence, l'application du spectroscope à l'étude des phéno- mènes d'interférence, etc. Pendant plusieurs années, Mascart fit de l'Optique l'objet de son enseignement au Collège de France; ces lecons avaient un caractère bien particulier que n'oublieront pas ceux qui les ont suivies : même discussion du au milieu des théories les plus difficiles de l'Optique” mathématique, elles restaient expérimentales; mais Mascart n'aimait pas ce qu'on est convenu d’appeler les expériences de cours, qui bien souvent sont plus brillantes que probantes ; ses expériences, ce que rendait possible le petit nombre des auditeurs, étaient de vraies expériences de laboratoire, et les phénomènes les plus rares et les plus délicats de l'Optique y élaient présentés avec une netteté parfaite : ses préparateurs se souviennent du rude labeur qu'ils avaient à les disposer et à les régler; un travail de plusieurs semaines était souvent nécessaire pour préparer l'une d'elles; c'était là une sévère école de Physique expérimentale, et les physiciens éminents qui sont sortis de ce Labora- toire, après avoir peut-être supporté avec quelque impatience ce régime sévère, reconnaissent aujour- d'hui tout le profit qu'ils en ont tiré. « Quand on soumet un travail au patron, écrivait un de ses anciens élèves (cité par M. Joubert), s'il y à un point faible, il l'apercoit de suite et vous le signale; s'il ne dit rien, c'est que ce n’est pas mal; s'il dit que ce n'est pas mal, c'est que c'est très bien. » De tout cet enseignement est sorti un important ouvrage en trois volumes: les Lecons d'Optique, qui constituent le traité francais le plus important et le plus savant que nous possédions actuellement sur ce sujet; pendant bien longtemps ce traité sera consulté par les chercheurs, qui y trouveront les documents les plus précieux et les plus complets. JI Les travaux de Mascart en Electricité sont sur- tout des travaux de précision et de mesures; les plus importants sont la détermination de l’équiva- lent électrochimique de l'argent, et surtout la déter- minalion absolue de l’ohm, qu'il a exécutée en colla- boration avec MM. Benoit et de Nerville, et qui est comme les Mémoires d'Optique que nous avons analysés plus haut, demeurée classique. Les méthodes employées dans ce dernier travail furent successivement celles de Weber et de Kirchhoff, qui ramènent la mesure absolue d'une résistance à la mesure absolue d'une quantité d'électricité; dans la première, cette quantité d'électricité ou décharge est produite par une rotation de 180° d’une bobine connue dans le champ terrestre, dans la seconde par l'induction mutuelle de deux bobines connues l'une sur l’autre; dans les deux cas, la mesure absolue d'une résistance se ramène finalement à des mesures purement géométriques et à la mesure d'un temps qui est la durée des oscillations infini- ment petites du galvanomètre balistique employé pour mesurer les décharges. Tout l'intérêt d'un pareil travail est dans l'exactitude des détails et le soin des expériences; son analyse tient en quelques lignes, mais son importance est de premier ordre. Les expériences furent exécutées à Versailles, dans le Parc du Petit-Trianon, c'est-à-dire dans des con- ditions exceptionnelles de calme, et à l'abri des perturbations du champ magnétique terrestre qui sont si à redouter à l'intérieur des grandes villes. Les autres recherches importantes de Mascart portérent sur le Magnétisme. Bien des problèmes expérimentaux restaient à résoudre après les théo- ries mathématiques de Poisson et de ses succes- seurs, en particulier de Lord Kelvin; Mascart en a abordé quelques-uns. Sa méthode pour la détermi- nation de la position des pôles d'un barreau aimanté est d'une rare élégance : elle consiste à déterminer, par la méthode du galvanomètre balis- tique : 1° la décharge induite dans un long solé- noïde par l’aimant à étudier primitivement placé dans sa partie centrale, puis enlevé brusquement à grande distance; 2° la décharge induite dans une bobine plate placée au centre du même aimant, puis énlevée à grande distance : la première est proportionnelle au moment magnétique de l'aimant, la seconde à la quantité de magnétisme ; le quotient est donc proportionnel à la distance cherchée des pôles, le coefficient de proportionna lité dépendant uniquement des constantes géomé- triques des bobines. Cette méthode, appliquée à plusieurs cas particuliers, donna des résultats inté- ressants : c'est ainsi que Mascart reconnut que l'effet de la trempe est non seulement d'aug- menter le magnétisme résiduel que peut retenir un barreau d'acier, mais encore de rapprocher les pôles des extrémités ; pour un barreau de 40 cen- timètres environ, la distance des pôles aux extré- mités est de 4 centimètres pour le barreau non trempé et de 2 centimètres pour le barreau trempé; d’autres remarques sont encore à signaler : PAUL JANET — LA VIE ET 284 les chocs rapprochent les pôles des extrémités; les ruptures les en éloignent. Pour le fer doux, les pôles se rapprochent d'autant plus des extrémités que le champ magnétisant est plus intense. Le même Mémoire contient également des recherches intéressantes sur les coefficients d'ai- mentation apparents des aimants courts parallèle- ment à leurs trois directions principales : à cause de l'existence des champs démagnétisants, qui ne sont pas les mêmes suivant la direction que l'on considère, il se présente là des propriétés ana- logues à celles des corps cristallisés, et ces trois | coefficients d'aimantation sont inégaux ; ces considérations peuvent recevoir une application immédiate dans les observations de magnétisme terrestre pour évaluer les corrections que peut apporter aux mesures le magnétisme induit par le champ terrestre dans le barreau, dont on suppose, dans les calculs, le magnétisme absolument rigide. Les autres travaux de Mascart en Electricité sont fort nombreux et soulèvent un grand nombre de questions intéressantes, mais ils se résument désor- mais en courtes Notes à l'Académie des Sciences; on sent que le temps manque pour des travaux de longue haleine. Signalons en particulier des expé- riences sur le débit des machines électriques et des Notes sur la théorie de la propagation de l’élec- tricité dans les conducteurs et son application à la télégraphie, sur la théorie des courants d'indue- tion, sur l'action de deux sphères électrisées, sur la détermination de l’ohm par la méthode de l'amor- tissement, sur le diamagnétisme, sur la propaga- tion des ondes électromagnétiques, etc. Tous ces travaux sont, comme en Optique, l'image fidèle de l'enseignement de Mascart au Col- lège de France; dans ce domaine encore si neuf de l'Électricité, les questions se présentent à lui en foule, et, pour les exposer à ses auditeurs, il commence par les approfondir lui-même par des recherches personnelles ; aussi n'’a-t-on pas oublié le succès, d'abord du « Traité d’Electri- cité statique », publié en 1876, puis surtout de ces « Lecons d'Electricité et de Magnétisme » qui ont déjà fait l'éducation électrique de tant de jeunes physiciens ou ingénieurs. Le nom de Joubert est étroitement lié à celui de Mascart dans cette œuvre considérable, et la collaboration de ces deux hommes d'élite, unis par une ancienne et fidèle amitié, à quelque chose de si intime qu'il est presque impossible de discerner la part de l’un et de l’autre. « J'ai recu ce matin, écrit Lord Kelvin le 4 février 1882, le beau livre que vous venez de publier en colla- boration avec M. Joubert sur l'Electricité et le Magné- tisme, et j'ai eu le plaisir d'en couper les pages et de m'y plonger en maints endroits; je le salue comme un organe de haute valeur pour l'expansion de nos con- LES OEUVRES DE E. MASCART naissances scientifiques sur ce sujet, dans une forme qui tend à la fois à l'augmentation de nos connaissances par les recherches récentes et à l'intelligence des applications pratiques de ce qui est déjà connu. » Ce livre venait à son heure; pendant plus d’un demi-siècle, l’enseignement de l'Electricité en France en était resté aux travaux de Coulomb et d'Ampère; Verdet, il est vrai, dans son enseigne- ment de l'École Normale, avait réagi contre cette tendance et tenté de faire connaître les travaux étrangers ; mais les cours de Verdet étaient déjà bien loin, et que de travaux, que d'idées nouvelles Kelvin et les Helmholtz! C'est cette œuvre considé- rable que Mascart et Joubert entreprirent de fondre dans une vaste synthèse, en la reliant aux bases immortelles jetées par Coulomb, Ampère et Faraday. Ce fut avec passion que les débutants aceueillirent ce livre; ils y trouvaient une réponse à leur ardent désir de connaître les théories récentes, et quelques- uns d’entre eux furent immédiatement séduits par les brillantes échappées sur la pratique que ces théoriciens ne craignaient pas de se permettre; car ce fut là un caractère original de ce livre; jusque- là, les physiciens purs tenaient dans un éloigne- ment un peu dédaigneux les applications, .et au- raient cru déchoir en se mélant à ce monde indus- triel qui commencait à tirer un si merveilleux parti des grands phénomènes naturels; Mascart et Jou- bert furent parmi les premiers à reconnaitre le véritable caractère de ce mouvement et à le favo- riser : savants et ingénieurs doivent leur en con- server une profonde reconnaissance. III On peut dire que ce ne fut qu'occasionnellement que Mascart s'occupa de Météorologie : son rôle n'y fut pas moins considérable, et le Bureau Cen- tral Météorologique, dont il a été le premier direc- teur, conservera la trace profonde de son passage. Pendant bien longtemps les astronomes, Le Ver- rier en particulier, avaient considéré la Météoro- logie comme une dépendance de leurs attributions; et, ainsi que le dit Hervé-Mangon dans son premier Rapport présidentiel au Conseil du Bureau Central, «iln'eûtété ni justé ni sage d'enlever à Le Verrier le Service international de Météorologie qu'il avait eu la gloire de créer dans notre pays; mais, sitôt que les circonstances l'ont permis, la réorganisation de ce Service a été mise à l'étude ». Le décret du 14 mai 1878 le rendit autonome et indépendant de l'Ob- servatoire, et Mascart fut chargé d’en poursuivre la réorganisation; la tâche était difficile ; les fonds recours au dévouement désintéressé de plusieurs avaient été accumulés depuis par les Maxwell, les manquaient et il fallut, là première année, avoir PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 585 —————————_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—_—…—…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"…"—"…"…"…"…"…"…"…"…"—"…"—"…"…" —"…"…"…"…"…"”"”"—"—"——— fonctionnaires. Ce que fut l'administration inté- rieure de Mascart, nous n'avons pas à le rappeler ici; mais son rôle international, qui devait plus tard devenir si important dans le domaine de l'Électri- cité, date de cette époque, et l'on peut dire que c'est la Météorologie qui l'y engagea. Je ne puis mieux faire, pour indiquer ce rôle, que d'extraire le pas- sage suivant du Rapport d'Hervé-Mangon que nous avons déjà cité : « Depuis la mémorable Conférence de Bruxelles, en 4853, la France n'avait point pris part aux Conférences météorologiques internationales et n'était pas repré- sentée au Congrès de Vienne, en 1873. Il est inutile de rappeler la cause de cet état de choses, aussi pénible pour les météorologistes français que nuisible aux pro- grès de la science “elle- -même; mais il importait, sous tous les rapports, de faire cesser ce fâcheux isolement au moment de la réorganisation de nos services. L'Expo- sition de 1878 offrait une occasion favorable pour entrer en relations personnelles avec les savants des autres pays. Pour atteindre ce but, la Société Météorologique de France organisa un Congrès libre de Météorologie. Un grand nombre de savants se rendirent à son appel. . Les réunions générales et les réunions privées qui eurent lieu à cette occasion du 24 au 28 août furent des plus cordiales. Quelques semaines après, M. Mascart fut appelé par nos hôtes de Paris à faire partie du Comité per che chargé de régler les questions courantes du Service météorologique “international et de préparer la réunion du prochain Congrès officiel. « La France, convoquée diplomatiquement, a été re- présentée au Congrès de Rome, ouvert le 14 avril 1879. A Ta fin du Congrès, M. Mascart a été réélu à l’unani- mité membre du Comité permanent. La Science fran- çaise a donc repris dans le Service météorologique international la place qu'elle devait naturellement y occuper. » Le Président du Comité permanent était alors Wild, directeur du Service météorologique de Russie, qui avait lui-même succédé au Hollandais Buys-Ballot; à sa mort, Mascart fut unanimement choisi pour le remplacer, et dès lors il prit dans le monde de la Météorologie une influence prépon- dérante; l'obligation de prendre part aux travaux de ce Comité, qui se réunit tous les deux ou trois ans dans les différents pays d'Europe, l’amena suc- cessivement à Berne, Copenhague, Zurich, Munich, Upsal, Saint-Pétersbourg, Southport, et l’on peut présumer que cette nécessité de se mêler à des intervalles si rapprochés aux différents milieux nationaux lui fut une école de connaissance des hommes et de diplomatie scientifique. La dernière de ces réunions, en septembre 1907, eut quelque chose de tragique, et ce n’est pas sans une profonde émotion que j'en parle ici, car le hasard m'amena chez Mascart le jour même où elle avait lieu; c'était un mois après la première et subite atteinte du mal terrible qui devait l'emporter; il était à peine relevé de l'opération qu'il avait subie d'urgence et, pour reprendre quelque force, s'était retiré dans sa maison de campagne de Poissy; c’est là qu'il réu- nit ses collègues du Comité international et, pour la dernière fois, avec une énergie de volonté incom- parable, présida à leurs délibérations; je le vis à la sortie de cette séance, et fus frappé de l’altéra- tion de ses traits : devant l’aveugle atteinte du mal physique, la force morale qui, pendant toute sa vie, avait été l'unique passion de cet homme, se lisait dans son regard et soutenait seule cette vie déjà condamnée ! Mais revenons aux débuts de Mascart dans la Mé- téorologie. L'organisation d'expéditions polaires scientifiques fut “ première œuvre internationale à laquelle il fut mêlé. Depuis longtemps, les pays étrangers s'oceupaient de cette question : on peut en trouver l’origine dans l'expédition autrichienne du Tégéthoff à la Terre Francois-Joseph, qui fut organisée en 1874 par le comte de Wilezik avec Payer comme commandant et Weiprecht comme observateur. Depuis, plusieurs Conférences inter- nationales, où la France n'était pas représentée, avaient eu lieu en différentes villes d'Europe; la dernière datait de 1879 et avait eu lieu à Hambourg. En août 1881, une autre Conférence se tint à Saint- Pétersbourg, et Mascart y fut délégué officiellement ; c'était l'époque même de l'Exposition internatio- nale et du Congrès d'Électricité de Paris, où il de- vait jouer un rôle si important, et l’on doit admirer l'infatigable activité de cet homme, qui, sans sente une minute de repos, à Saint-Pétersbourg, puis à Paris, se dépensa sans compter pour assurer à la France le rôle qu'elle devait jouer dans les re- lations scientifiques internationales. C'est à la suite de cette Conférence que l'Expé- dition française du cap Horn fut décidée et orga- nisée par une Commission mixte formée par les Ministères de l'Instruction publique et de la Ma- rine; Dumas la présidait, l'amiral Cloué y repré- sentait la Marine, et Mascart, comme délégué du Ministère de l’Instruction publique, y apportait les vœux de la Conférence polaire internationale; les critiques ne lui furent pas ménagées, et Faye, le représentant respecté de l'ancienne Météorologie, regretla que l’Académie n'eût pas été consultée à ce sujet, soutenant que les véritables points du globe intéressants au point de vue météorologique étaient dans les régions équatoriales et non dans les régions polaires; l'expédition fut néanmoins soigneusement préparée, et des instructions pré- cises, qui demeureront un modèle pour l'avenir, furent rédigées par M. Angot, qui est aujourd'hui l'éminent successeur de Mascart au Bureau Central Météorologique. Le but principal de l'Expédition consistait dans les observations du Magnétisme terrestre ; pour préparer à ces observations les officiers qui devaient prendre part à la croisière, Mascart organisa, dès 1881, des conférences sur le magnétisme terrestre qui, en octobre 1882, de- 586 PAUL JANET — LA VIE ET vinrent une véritable École de Magnétisme. Ces lecons, que Mascart reprit plus tard à l'École supé- rieure de Marine, furent le point de départ d'un important traité publié seulement en 1900. Il eût été illogique d'organiser des expéditions lointaines destinées à entreprendre dans les régions polaires des observations magnétiques si la base même manquait en France; Mascart trouva cette base dans l'Observatoire du Parc Saint-Maur, qui, primitivement fondé par un particulier, M. Renou, venait, sous l'habile direction de M. Moureaux, d'être rattaché au Bureau Central. 11 tendit dès lors à faire du Parc Saint-Maur un Observatoire spécialement affecté au Magnétisme terrestre, ana- logue au célèbre Observatoire de Kew, par exemple; sa situation isolée, que les tramways électriques ne troublaient pas encore‘, se prêtait particulière- ment bien à cette organisation; ce fut à cette occa- sion que Mascart combina un enregistreur magné- tique qui réalisait un sensible progrès sur tous ceux qui avaient été réalisés jusque-là : dans cet appareil, les trois constantes du magnétisme ter- restre : déclinaison, inclinaison, composante ho- rizontale, s'inscrivent photographiquement sur la même feuille de papier où le temps s'inscrit égale- ment; le dépouillement de ces courbes est ainsi rendu des plus aisés. C'est aussi vers la même époque (1884) que Mascart réalisa, avec le concours de l'habile con- structeur Brunner, un théodolite de dimensions extrêmement réduites et très facilement transpor- table, permettant l'observation en rase campagne de la composante horizontale et de la déclinaison; déjà, d'Abbadie avait combiné une boussole d'ineli- naison de ce genre, et j'ai souvent entendu Mascart, qui aimait les beaux instruments, exprimer son admiration pour ces deux chefs-d'œuvre de préci- sion qui ont grandement facilité le tracé de la carte magnétique de la France et qui sont soigneusement conservés au Pare Saint-Maur. Parallèlement à ses enregistreurs magnétiques, Mascart combina également des enregistreurs élec- triques destinés à mesurer le potentiel en un point de l'atmosphère et constitués par l’ensemble d’un appareil à écoulement ou à flamme, et d’un électro- mètre à quadrant de modèle simplifié; c'est à cette occasion qu'il imagina pour l'emploi de cet instru- ment une méthode idiostatique, différente de celle de Lord Kelvin et aujourd'hui classique. Les études concernant l'Électricité atmosphérique ont d’ailleurs toujours eu un attrait particulier ! On sait que le passage à proximité d'une ligne de tram- ways électriques obligea, il y a quelques années, l'Obser. valoire du Pare Saint-Maur à suspendre toutes ses observa- lions magnétiques, et à les transporter, à grands frais, dans une région plus calme, au Val-Joyeuse, près de Saint-Cyr. LES OEUVRES DE E. MASCART pour lui; c'est ainsi qu'on lui doit de curieuses observations sur l'influence de l'électricité sur l’'évaporation : identiques et remplis d’eau sont en communication avec la Terre; au-dessus de ces vases sont des toiles métalliques, que, pour moitié, on met en commu- nicalion avec l’un des pôles d'une machine de Holtz en activité jour et nuit; la vitesse d'évaporation est augmentée, quelquefois doublée dans ceux-ci. Une autre expérience sur l'électricité atmosphé- rique fut suggérée à Mascart par une observation faite par Lord Kelvin au Congrès de 1881; les méthodes rappelées plus haut donnent uniquement le potentiel en un point de l'air, mais elles n'in- diquent rien sur l’électrisation de cet air. qu'il serait du plus haut intérêt de connaitre; quelques obser- vations lui montrèrent que, si l'on plaçait un appareil à écoulement ou à flamme dans une chambre métallique en communication avec le sol, mais permettant la libre circulation de l'air, les fois même de signe contraire à ceux des appareils enregistreurs ordinairement employés. A ces études de Physique du Globe se rattache également l'application du baromètre à l'étude de la gravité suivant une méthode déjà employée par Boussingault: le principe, fort intéressant, de l'appa- reil consiste à équilibrer par une colonne de mer- cure une pression constante, par exemple la pres- sion d'un volume invariable d'un gaz à la température de la glace fondante; il est clair que la hauteur de cette colonne de mercure varie en raison inverse de g. On montre aisément qu'une erreur de 1/100 de millimètre sur la hauteur du mercure équivaut à une erreur de 1/50 de seconde par heure sur les oscillations du pendule. Maseart utilisa un voyage dans le Nord, à Hambourg, Copenhague, Stockholm, Drontheim, Tromsoë, pour ment transportable; il montra que, en général, les résultats trouvés concordent à quelques cent- millièmes près avec ceux qu'on aurait obtenus par le pendule. ressante des varialions diurnes possibles de la gra- vité en un point donné; Mascart aborda ce pro- blème beaucoup plus tard, en 1893, en utilisant un procédé oplique pour la mesure du niveau du mercure et en faisant l'enregistrement photogra- phique; il crut observer quelques traces de varia- tions systématiques; ces expériences mériteraient d'être reprises, aujourd'hui que les belles recherches de Hecker, au moyen du pendule horizontal, ont mis en évidence les variations périodiques de la direction du fil à plomb. Enlin, c'estencore en équilibrant par une colonne une série de vases métalliques tous. résultats obtenus seraient tout différents, quelque. étudier cette méthode à l’aide d’un appareil facile- La même méthode se prêterait à l'étude si inté- PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART de mercure la pression d'une masse d'air qu'il réalisa un appareil transportable permettant le dosage de l'acide carbonique dans l'air, même en n'opérant que sur de faibles volumes. Au point de vue des questions de Météorologie pure, Mascart fut un défenseur ardent des théories modernes de la formation des cyclones, et les Comptes rendus de l'Académie des Sciences con- servent la trace des discussions extrèémement vives, quoique toujours courtoises, qu'il eut à ce sujet avec Faye, l’illustre défenseur de la Météorologie an- cienne : les cyclones sont-ils des mouvements descendants ou ascendants, se forment-ils dans les hautes ou dans les basses régions de l'atmosphère, telles sont les deux opinions en présence, et encore aujourd'hui il n'est pas sans intérêt de relire les arguments passionnés que les deux adversaires se renvoyaient à chaque séance de l’Académie. Maseart avait mis comme condition, quand il fut nommé à la direction du Bureau Central, que ses nouvelles fonctions seraient seulement celles d'un administrateur, et ne devraient pas le détourner de ses études antérieures; on voit que la conscience scientifique a été la plus forte, et que, placé à la tête d’un des plus importants services de France, il a tenu non seulement à le faire fonctionner régu- lièrement, mais encore à contribuer à ses progrès par des recherches et des investigations nouvelles. IN Personne n'a oublié l’éclatant succès de l'Exposi- tion internationale d'Électricité qui eut lieu en 1881 ; une fois de plus, Paris devenait le centre incontesté où devait se révéler toute la puissance d’une in- dustrie nouvelle. Mascart, qui a toujours aimé ja réalisation et l’action à côté de la spéculation et de la théorie, ne pouvait pas rester étranger à ce mou- vement : il fit partie du Comité d'organisation, puis du jury, dont il fut nommé rapporteur général. La distribution des récompenses eut lieu le 21 octobre dans une séance solennelle, sous la présidence de M. Cochery, alors ministre des Postes et des Télé- graphes; Mascart y lut son Rapport, où il carac- térisa ainsi la manifestation qui prenait fin : « L'Exposition actuelle n’a pas de précédent. Elle représente l'ensemble des applications industrielles d'une science qui est née avec le siècle. Quelques-unes de ces applications ont paru dans les expositions anté- rieures, dont elles ne formaient pas la moindre partie. Il ÿ a quelques mois seulement, on pouvait encore douter que cette industrie fût capable de fournir les éléments d'une Exposition universelle et d'attirer l'attention du public; mais les progrès accomplis de nos jours et presque sous nos yeux ont donné à l’ensemble des objets exposés un éclat incomparable. L'Exposition présente même ce caractère inaccoutumé que la Science et l'Industrie y sont intimement mêlées; 587 on retrouve dans les applications usuelles les déduc- tions de la Science la plus élevée et le génie de l'inven- tion dans ce qu'il a de plus imprévu. » Les Expositions sont éphémères ; leur succès, quelque grand qu'il ait été, ne laisse guère de trace après elles et tombe bientôt dans l'oubli. Il n’en est pas de même des Congrès, du moins de certains Congrès qui peuvent donner pour de longues années {toute une orientation nouvelle à la branche d'activité dont ils se sont occupés ; tel fut le sort du Congrès international des Electriciens tenu à Paris en 1881, à l’occasion de l'Exposition, l’un des plus considérables que l'histoire de la Science ait enregistrés, tant par le nombre et la haute valeur des savants illustres qui s'y rendirent de tous les points du monde, que par l'importance des déeci- sions qui y furent prises. C'est dans ce milieu nouveau que Mascart allait pour la première fois révéler des qualités émi- nentes qui devaient plus tard en faire le représen- tant indispensable et incontesté de la France dans tous les Congrès de ce genre. Quiconque n'a pas été mêlé de près à ces réunions scientifiques inter- nationales ne peut se faire une idée des difficultés sans nombre que l’on rencontre pour faire abou- tir une question quelconque dans des assemblées pourtant formées d'hommes ayant une haute valeur scientifique, en général absolument désintéressés, et alors même qu'aucun intérêt matériel n’est en jeu. C'est qu'un Congrès, quel qu'il soit, ne trouve jamais devant lui table rase pour ses travaux; le voudrait-il, qu'il serait impuissant à imposer de toutes pièces, et par sa seule volonté, une nou- veauté radicalement opposée à tous les usages recus; il ne peut, en général, que consacrer des habitudes, en choisissant les bonnes et en se fiant à la logique des choses pour étoufler les mau- vaises. Celui qui veut réussir dans de pareilles conjonctures doit allier à un esprit scientifique impeccable, un esprit de diplomatie et de finesse peu commun chez ceux qui sont habitués à vivre dans la paix du laboratoire, loin du monde et des réalités. Ce furent justement là les qualités mai- tresses de Mascart. En présence du développement extraordinaire qu'avait pris l’Electricité, et surtout que l’on pré- voyait pour les années à venir, chacun comprenait que c'était une question vitale pour la future indus- trie électrique que de la doter dès l’origine d'un système d'unités aussi clair et aussi cohérent que possible; on sentait bien que, si on laissait seule- ment s'écouler quelques années, il serait trop tard, que des habitudes hétéroclites et incohérentes s'implanteraient un peu partout, et qu’en pleine civilisation du xix° siècle on se retrouverail, pour une science nouvelle, dans un chaos semblable à D88 celui que les civilisations passées ont légué au monde pour les poids et mesures et que notre système métrique a tant de peine à détruire. Il appartenait à la France de prendre l'initia- tive d’un Congrès international d'Electricité ayant pour mission de régler ces questions difficiles ; c'est ce que comprirent quelques hommes émi- nents comme MM. de Freycinet, Sadi Carnot et le Ministre d'alors des Postes et des Télégraphes, Ad. Cochery. Le Congrès inaugura ses travaux le 15 septembre 1881 ; ce n'était pas une assemblée ouverte à tous, comme les Congrès qui ont suivi, mais ses membres, au nombre de 250, avaient été désignés par les divers Gouvernements; vingt-huit pays y étaient représentés ; les délégations les plus nombreuses étaient celles de l'Allemagne, de la Belgique et de la Grande-Bretagne. Un grand nombre des délégués portaient un nom célèbre ou destiné à le devenir; citons, pour l'Allemagne : du Bois Reymond, Clausius, Helmholtz, Hittorf, Kirchhoff, Werner Siemens, Wiedemann; pour la Belgique: E. Gérard, Gramme; pour les Etats-Unis: Rowland; pour la Grande-Bretagne: Ayrton, Lati- mer Clark, Crookes, Warren de la Rue, Dewar, Everett, Fitzgerald, Carey Foster, Gordon, Hopkin- son, Hughes, Jenkin, Preece, Lord Rayleigh, Wil- liam Siemens, Spottiswoode, William Thomson, Tyndall, Varley; pour l'Italie: Galileo Ferraris, Govi; pour la Russie: Egoroff, Lenz, Stoletow; pour la Suède : Thalèn; pour la Suisse : Hagenbach, Weber; et enfin pour la France, tous les plus grands savants de cette époque. Le Congrès se divisa immédiatement en plusieurs sections ; nous ne suivrons que la première, qui fut chargée de l'étude des unités électriques et où Mascart, tout en n'y tenant que la place modeste de secrétaire, joua un rôle considérable dont les procès-verbaux officiels ne peuvent donner l'idée. La tâche était difficile; déjà, spontanément, divers systèmes d'unités avaient pris naissance et évolué indépendamment les uns des autres; deux systèmes dits absolus étaient en présence : l’un, proposé par Gauss et Weber, une cinquantaine d'années auparavant, fondé sur le millimètre, le milligramme et la seconde; l’autre, proposé par l'Association Britannique sous le nom de système C. G.S., fondé sur le centimètre, le gramme et la seconde; d'autre part, le système mèlre, gramme, seconde, auquel l'Association Britannique s'était un moment arrêtée, avait déjà laissé des traces dans des traités classiques. Mais, en dehors de ces sys- tèmes, que d'unités empiriques étaient employées! Pour la force électromotrice, l'élément Daniell ou le couple thermo-électrique bismuth-cuivre; pour la résistance, l'unité de Jacobi (un fil de cuivre de 1 mètre de longueur et 1 millimètre de diamètre), PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART celle de Varley (un fil de cuivre n° 16 de 1 mille de longueur), celle de Wheatstone (un fil de cuivre de 1 pied pesant 100 grammes), et enfin la plus connue, celle de Siemens (une colonne de mercure à 0° de 4 mètre de longueur et de 1"#* de section); cette dernière avait de nombreux défenseurs : son existence déjà répandue, sa reproduction à des milliers d'exemplaires, la précision de sa défini- tion en faisaient pour l’'ohm un rival redoutable, d'autant plus qu'avec beaucoup d’habileté, ses partisans la présentaient comme dérivée du mètre et des propriétés spécifiques du mereure à peu près de la même manière que, au moins dans sa première définition, le gramme dérivait du mètre et des propriétés spécifiques de l’eau. La confusion n'était pas moins grande dans la nomenclature; le Weber des Allemands ou unité de courant était dix fois plus petit que le Weber des Anglais, et pour certains électriciens, comme La- timer-Clark, ce mot de Weber désignait non une intensité, mais une quantité d'électricité; pour d'autres, le farad était à la fois une unité de capa- cité, une unité de quantité et une unité de courant. Enfin, question de principe fort grave, le futur système d'unités se rattacherait-il au système électrostatique ou au système électromagnétique? La grande autorité de Clausius penchait vers le système électrostatique : tous les praticiens savent combien en eût été funeste l'adoption. C'est de ce chaos, de ces habitudes diverses, compliquées quelquefois de l’amour-propre na- tional, qu'il fallait tirer un système unique, logique, clair, adapté aux besoins de la pratique. Dès la première séance, la discussion générale qui s’ouvrit dans la première Section du Congrès. laissa apercevoir de grandes divergences de vues. « Les discussions du Congrès sont intéressantes, écrit Mascart le 16 septembre 1881 ; parmi les Alle- mands, c'est Clausius et Helmholtz qui nous donnent du fil à retordre. Heureusement que les. Anglais sont avec nous et que je ne suis plus seul responsable de ce qui s’y fera pour la France. » Comme toujours en pareil cas, la Seclion confia à une Commission spéciale l'étude du système des unités électriques; nous en possédons les procès- verbaux officiels, mais combien plus intéressant jugera-t-on le récit suivant que quelques amis de M. Maseart, dont nous nous faisons honneur d’avoir fait partie, eurent la bonne fortune d'entendre de sx bouche le jour où, dans une réunion intime, une médaille, l'une des plus belles qui soit sortie du burin de Chaplain, lui fut offerte en reconnaissance des éminents services qu'il avait rendus à la Science et à l'Industrie électrique : « Le Congrès avait constitué une Commission très: uombreuse des unités électriques, qui s'est réunie le: PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 589 16 et le 17 septembre 1881. La première séance a été remplie par une sorte d'exposé de principes sans résultats. Dans la seconde, la question à été serrée de plus près; il s'agissait de savoir si les unités seraient fondées sur un système logique, ou si l'on accepterait, en particulier pour la mesure des résistances, l'unité arbitraire dite de Siemens. La discussion a été pénible et confuse; on voyait surgir des propositions et des objections imprévues, surtout de personnes qui ne comprenaient pas bien la portée des résolutions à prendre. M. Dumas, qui présidait avec un tact et une autorité que j'admirais, interrompit brusquement la séance en disant que l'heure paraissait avancée (4 h. 30) et qu'on se réunirait ultérieurement. C'était un samedi soir. En sortant, j'accompagnais notre Président et je lui dis : « Mon cher maître, il me semble que l'affaire ne marche pas bien. » — « Je suis convaincu, répon- dit-il, que nous n'aboutirons pas, et vous avez compris pourquoi j'ai levé la séance. » Je n'ai pas souvenir de ce que fut ensuite notre conversation. « Le lendemain, dans la matinée, je rencontrai sur le pont de Solférino William Siemens, qui me demanda si J'avais reçu la visite de Lord Kelvin (alors sir William Thomson), en ajoutant qu'on m'invitait à diner et qu'on espérait arriver à une entente. Rentré aussitôt, je trouvai la carte de Lord Kelvin avec ces mots : « Hô- tel Chatham, 6 h. 30. » « Je fus naturellement exact au rendez-vous et je trouvai dans le petit salon d'attente une société im- posante : Lord Kelvin, William Siemens pour l'Angle- terre, puis von Helmholtz, Clausius, Kirchhoff, Wiede- mann et Werner Siemens. La discussion reprit, et, après beaucoup d'hésitations, Werner Siemens finit par accepter la solution proposée, à la condition que le système des mesures serait institué « pour la pra- tique ». Je ne fis aucune difficulté à cette qualification et rédigeai au crayon, sur le bord du piano, le texte de la convention. Le système de mesures pour la pratique avait comme bases les unités électromagnétiques C.G.S. On définissait l’ohm et le volt, en laissant à une Com- mission internationale le soin de fixer les dimensions de la colonne de mercure propre à représenter l’ohm.., « Si le système d'unités a fini par aboutir, on doit l’attribuer d’abord à l'autorité de M. Dumas, dont le grand talent inspirait le respect et empêcha la discus- sion de s'égarer en paroles trop vives, puis à l’in- fluence, sur Werner Siemens, de son frère William, qui vivait dans le milieu scientifique anglais engagé par l'initiative de l'Association Britannique... » Les procès-verbaux officiels montrent d’ailleurs que, même à la séance du lendemain, Werner Sie- mens n'avait pas désarmé; une nouvelle discussion fut nécessaire : la proposition, préparée comme on l'a vu en petit comité, portait qu'une Commission internationale serait chargée de déterminer, défini- tivement pour la pratique, par de nouvelles expé- riences, la longueur d'une colonne de mercure d'un millimètre carré de section à la température de 0°C. qui représentera la valeur de l'ohm. Werner Sie- mens s'opposa formellement au mot définitivement, et l’on dut céder sur ce point pour sauver le reste, en quoi l’on fut sage, car l’on sait que la première détermination de l’ohm, dit ohm légal, dut être revisée à Chicago en 1893, et que c'est à cette époque seulement qu'une détermination définitive put être adoptée. Une unité manquait encore, celle d'intensité de courant, et à ce sujet les difficultés et les confu- sions étaient grandes; comme on l’a rappelé plus haut, il existait deux Webers : le-weber anglais (qui est devenu l’ampère actuel) et le weber alle- mand, dix fois plus petit. La sagesse commandait de faire disparaitre un nom qui prêtait à de telles confusions ; mais c'était un nom allemand! Il faut rendre justice à la haute sagesse de Helmholtz, qui fittout pour faciliter la réforme; les avis étaient d'ailleurs bien divisés; la veille même de l'assem- blée plénière du Congrès, Lord Kelvin proposail encore de donner le nom d’Ampére à l'unité C.G.S. d'intensité, de telle sorte qu'un volt agissant sur un ohm aurait donné un courant de 1/10 d'ampère; c'était condamner cette unité à tomber en désué- tude dès sa formation ; ici encore, les conversations amicales firent mieux que toutes les réunions ofti- cielles; laissons encore une fois parler Mascart : « Nousétionsimpatients de soumettre ces propositions au Congrès dans la séance générale du mardi 20 sep- tembre, mais on avait appris dans l'intervalle la mort du Président Garfield et la séance fut levée en signe de deuil. Comme nous n'avions encore que deux unités. l'ohm et le volt, et qu'il était nécessaire de compléter le système, je demandai au président, M. Cochery, si les commissions au moins pouvaient se réunir. « Je dus m'incliner devant sa réponse négative, et nous restämes avec von Helmholtz, auprès de Lord Kelvin et de Lady Kelvin qui, ayant négligé de déjeuner, prenaient un chocolat dans le restaurant Chiboust, ins- tallé près de la salle du Congrès. C’est dans ce petit Comité, autour d’une vulgaire table de marbre blanc, que furent convenues les trois unités suivantes: Ampère (au lieu de Weber), Coulomb et Farad. « J'étais chargé d'en lire le texte le lendemain 21 sep- tembre en séance générale. Nombre de membres de la Commission, qui ne connaissaient que la séance du samedi, en furent bien un peu surpris, mais les commen- taires de Lord Kelvin et de von Helmholtz ne permirent plus aucune hésitation. Le système pratique d'unités était fondé ! ». Ainsi se termina ce célèbre Congrès, où Mascart s'était révélé sous un jour nouveau et qui devait avoir une si profonde influence sur tout le reste de sa carrière : c'est de ce moment que date la profonde et réciproque amitié qui le lia jusqu'au dernier jour avec Lord Kelvin, amitié touchante et bien rare entre hommes de nationalité différente. À partir de cette époque, Mascart devint en France l'homme indispensable pour toutes les ques- tions concernant les unités électriques. Lors des Conférences internationales qui se tinrent à Paris en 1882 et 1884, il continua le rôle qu'il avait com- mencé en 1881, et dans ces milieux plus restreints, de moins vaste envergure que le Congrès, mais ayant Re ee ‘1lest possible, en ayant recours aux procès-verbaux offi- ciels, et en comparant les dates et les heures, de préciser sur quelques points les souvenirs de Mascart : entre la con- versalion à laquelle il est fait allusion et la séance générale se placa une séance de la Commission qui approuva le texte des propositions sur l'ampère, le coulomb et le farad; mais la Section n'eut pas le temps d'être consultée, et les propo- sitions furent portées directement à l'assemblée générale. 590 aussi une tàche mieux définie et plus concrète, il acquit en peu de temps une autorité considérable; lors de l'Exposition de 1889, il était tout désigné pour organiser et présider le Congrès international des Electriciens qui se tint à cette occasion et qui, bien que moins important que celui de 1881, nous donna le watt et le joule; en 1893, il représentait la France au Congrès de Chicago, qui revisa l’ohm et définit l'unité de self-induction ou Aenry; el enfin en 1900, pour la troisième fois, un grand Congrès international d’Electricité se réunissait à Paris et Mascart en était le président. La question des Unités électriques n’était pas close cependant, et ne l’est pas encore aujourd'hui; pendant ses der- nières années, et jusqu'à son dernier jour, Mascart s'en occupa avec une activité et une ténacité où percait quelque émotion, le souvenir sans doute des époques héroïques du début, où tout était à fonder, et où les fondateurs étaient les disparus d'aujourd'hui. Le Congrès de Saint-Louis, en 1904, avait émis le vœu que des mesures internationales fussent prises pour assurer la concordance des définitions des unités électriques dans les différents pays. En 1905, une Conférence, de caractère officieux, se réunit à Berlin pour préparer la Conférence officielle projetée; Mascart y représenta la France, et en fut désigné à l'unanimité comme président : cette déro- gation aux usages des conférences de ce genre, où d'ordinaire le président appartient au pays où alieu la réunion, marque bien la place qu'il tenait dans la science. Ce fut son dernier acte publie en pays étranger ; mais, de retour à Paris, il organisa et pré- sida la Commission qui fut instituée par le Sous- Secrétariat des Postes et des Télégraphes pour l'étude de ces questions et la préparation de la Conférence internationale qui devait se tenir à Londres et qu'il ne devait pas voir; il fut l’âme de ces réunions et le lien propre à réunir en faisceau les efforts scien- tifiques qui, dans notre pays, ont très souvent ten- dance à se disperser dans un individualismeexagéré ; jusqu’à son dernier jour, il suivit les travaux qui avaient été entrepris à cette occasion et, presque mourant, sut leur imprimer une impulsion efficace. \ L'Exposition de 1881 avait été une véritable révé- lation : dans ce court espace de trois mois, pendant lequel près d’un million de visiteurs s'étaient pressés au Palais de l'Industrie, la puissance prodigieuse de l'Electricité était apparue aux yeux du grand publicet, pour tout esprit clairvoyant, il n'était pas douteux que les années qui allaient suivre ne dussent élre marquées par un développement extraordinai- rement rapide des applications de ce nouvel agent. | | | PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART Mais laissons place encore ici aux souvenirs per- sonnels de Mascart : « Quelques semaines plus tard, quand le succès de l'Exposition eut assuré des bénéfices importants à la Société de garantie, M. Dumas, qui entrevoyait l'avenir de l'industrie nouvelle, eut l'idée d’une belle œuvre nationale : c'était de constituer une société au capital de trois millions dans le but d’instituer un grand Labo- ratoire de recherches scientifiques et pratiques pour aider au développement de l'Electricité. Les bénéfices de l'Exposition devaient en former le premier appoint etles circonstances étaient particulièrement favorables pour trouver auprès des compagnies industrielles les souscriptions nécessaires. «Tout parut d'abord marcher à souhait, mais des susceplibilités personnelles et l’ombrage causé jar le nom de Dumas, alors peu en faveur auprès des Pou- voirs, amenèrent finalement l'échec de l’entreprise. « Le Ministère des Postes et Télégraphes se fit attri- buer les bénélices de l'Exposition en se chargeant de créer lui-même et d'entretenir ce laboratoire. — On sait ce qui en est advenu. € M. Durnas fut très ému de cette déconvenue et sur- tout des termes par lesquels la décision lui était com- muniquée. Comme nous en causions le lendemain, en nous communiquant nos impressions, j'exprimai ma surprise qu'il ait eu l'espoir de réunir un capital si important. Il me répondit : « J'avais en poche cinq cent mille francs de Giffard ». C’est une parole dont je me suis souvenu en temps opportun. » Il n'est pas téméraire de penser que, ce jour-là Mascart entrevit une nouvelle source d'activité qui s'ouvrait devant lui et songea que, ce que Dumas n'avait pu réussir, il le réaliserait peut-être lui- même. Quoi qu'il en soit, les années qui suivirent furent pour lui des années de recueillement; le tra- vailleur infatigable et conscienceux qu'il était les employa à apporter sa contribution aux travaux décidés par le Congrès, et à préparer, par ses mesures de l'ohm et de l’ampère, les travaux des Conférences internationales de 1882 et 1884. Mais, pendant ces mêmes années, le monde scientifique et industriel, à qui, somme toute, était dû l’éclatant succès de l'Exposition de 1881, supportait avec quelque impatience l'idée que les sommes laissées disponibles par l'Exposition restaient improduc- tives, et que l'Etat ne faisait rien pour réaliser ce séduisant projet d'un Laboratoire national qui avait été le rêve des derniers jours de Dumas. On peut attribuer à cette communion d'idées le groupement spontané qui se forma à celte époque et qui devait devenir la Société internationale des Electriciens : dès le jour de sa fondation, cette Société, guidée par une série de présidents éminents, eut un but bien défini qu'elle poursuivit avec téna- cité, sans un instant de défaillance : organiser le Laboratoire qui, dans la pensée des organisateurs, devait prolonger l’œuvre de l'Exposition et du Con- grès. Ce Laboratoire existait déjà. sur le papier. Un décret du 24 Février 1882 l'avait institué sous la haute direction du Ministre des Postes et des Télé- graphes; mais rien n'avait été fait pour le réaliser; PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 591 la Société offrit de s'en charger; les droits de l'Etat seraient entièrement respectés, l'Etablissement pro- jeté resterait établissement d'Etat; sa gérance seule et son administration, tant au point de vue matériel qu'au point de vue technique, seraient confiées à la Société internationale des Electriciens qui, par sa composition même, mi-partie scientifique, mi-par- tie industrielle, assurait toutes les garanties d'une vie active à la nouvelle institution. Cette organisa- tion est excellente : l'Etat ne peut pas être savant, et il lui est difficile d'être industriel; une coopéra- tion de l'Etat, qui donne l'autorité morale, et d’une Société scientifiqueet technique, qui donne la direc- tion effective, est un type d'organisation qui mérite d'être imité dans bien des cas. Telle fut la concep- tion que la Société des Electriciens essaya avec succès de réaliser : grâce aux efforts de ses pre- miers présidents, MM. Georges Berger et Maurice Lœæwy, deux décrets autorisaient dès 1886 l’appli- cation des sommes provenant de l'Exposition de 1881 à l’organisation et à l'entretien du Laboratoire central d'Electricité. Mascart s'était jusque-là tenu à l'écart de ce mouvement, probablement, comme il l'a rappelé lui-même, àla suite de la déconvenue de Dumas dont nous avons parlé plus haut; mais la Société des Electriciens comprit tout l'intérêt qu'avait la fondation nouvelle à s'assurer l'appui et les conseils de celui qui avait été l'âme même du mouvement originel ;ilentra à la Société le 2 février 1887, et en fut nommé Président à l'Assemblée générale du 4 mai suivant : sa première réforme fut d'oblenir que les séances, marquées pour 8 heures 1/2, commençassent à 8 heures 1/2. Mas- cartest tout entier dans ce détail. Dès lors, il devint dans ce milieu, nouveau pour lui, le conseiller indis- pensable et écouté. Nommé Président de la Com- mission administrative du Laboratoire, il en guida et en soutint les destinées pendant plus de vingt ans. Tout restait à faire : les locaux, quelques han- garsprètés par M. H. Menier à la Place Saint-Charles, étaient provisoires; les arrangements avec l'Etat étaient précaires, et il avait fallu tout le dévoue- ment de M. G. de Nerville, qui avait à cette époque la direction du Laboratoire, pour l’organiser et le faire prospérer malgré les difficultés de toute sorte ‘que l’on rencontrait et dont la moindre n'était pas l'insuffisance des ressources ; peu à peu, sous l'in- fluence d'une volonté directrice, éclairée et tenace, la situation du Laboratoire s'affermit, et en 1892, une convention définitive était signée entre l'Etat et la Société internationale des Electriciens pour régler le rôle de l'un et de l'autre dans l'entretien du Laboratoire. Citons encore une fois, à ce sujet, les souvenirs mêmes de Mascart : «La Société obtint du Conseil municipal l'attribution d'une partie des locaux de l’ancien Collège Rollin pour l'installation du Laboratoire. Mais la Ville de Paris ne tarda pas à avoir regret de cette concession et nous proposa d'accepter en échange un terrain nu situé rue de Staël. Ici se place une anecdote qui mérite d'être rappelée. « Au Collège Rollin, il y avait des bâtiments utili- sables. Tout était à faire rue de Staël. Dans une séance de la Commission du Laboratoire, réunie à cet effet, M. Fontaine me demanda si l'emplacement de la rue de Staël me paraissait préférable au point de vue pratique. « Sur mon observation que j'étais fort embarrassé pour donner un avis ferme, parce qu'il devait en résulter un surcroît de dépenses d’au moins 80.000 francs, il me répondit qu'on trouverait l'argent, à condition que j'accepte de tenir l’escarcelle. « Voilà comment je devins frère quêteur. Entrant aussitôt en fonction, je fis passer à mon voisin de droite un bout de papier intitulé : « Souscription pour le Laboratoire ». « En le surveillant d’un regard oblique, je le vis ins- crire, à la suite de son nom, un 2 suivi de plusieurs zéros, en vérifier soigneusement le nombre, et en ajouter un quatrième, formant un total de 20.000 francs. C'était Paul Lemonnier, ancien Président de la Société, qui ébréchait ainsi sa modeste fortune en faveur de notre Institution. Lemonnier était un noble caractère, aimé de tous, et nous devons un souvenir reconnaissant à sa mémoire. » La souscription, ainsi engagée, ne pouvait que réussir, et Mascart s’y donna tout entier; c'était l’époque où l'important legs Giffard permettait d'importantes fondations : la Société des Électri- ciens demanda une attribution de 100.000 francs sur ce legs : « Pour démontrer au ministre que notre intervention rentrait bien dans les intentions du testateur, je lui racontai ma conversation avec Dumas, en ajoutant qu'il devait me croire sur parole, puisque J'étais seul survi- vant des deux interlocuteurs. Le ministre parut se laisser convaincre, mais il trouvait la somme trop élevée et se montra disposé à nous accorder 50.000 francs. Un peu suffoqué et pris de court, j'eus la pensée de lui dire : « Monsieur le Ministre, ce ne serait pas digne du nom de Giffard, que nous voulons inserire sur le pa- villon à édifier. » Il voulut bien sourire à mon obser- vation, ce qui est toujours bon signe, et accueillir notre demande sans réduction ». Ces quelques traits marquent d’une façon carac- téristique l'habileté de Mascart, faite à la fois de bonhomie et de ténacité : nul mieux que lui ne sut solliciter et encourager les initiatives privées ; ik y trouvait le vrai ressort du progrès, et aurait atla- ché moins de prix à une large subvention officielle qu'à une modeste souscription obtenue par ses soins. Il savait d’ailleurs admirablement inspirer confiance, et tous ceux qui lui faisaient crédit étaient sans nulle inquiétude sur l'emploi des fonds qu'ils lui remettaient; ils savaient que Mas- cart avait, au contact des industriels, appris toute la valeur d'une sage administration, et que, de leur côté, ceux-ci lui devaient une haute conception du but à atteindre et des efforts désintéressés qu'ils devaient déployer pour y parvenir. Le Laboratoire, dans la pensée de Mascart, n'était qu'une première étape; et, dès la séance 592 PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART solennelle d'inauguration des nouveaux bâtiments de la rue de Staël, le 14 juin 1893, il laissa pressen- tir pour l'avenir de nouveaux développements et une autre branche d'activité ; déjà, depuis sa fonda- tion, le Laboratoire avait accueilli un certain nombre d'élèves libres, sans enseignement régulier, plutôt aides qu’étudiants ; il restait à régulariser cette organisation qu'un besoin spontané avait fait naître; de grandes Ecoles électrotechniques exis- taient déjà à l'Etranger, et, s’il m'est permis de le rappeler ici, j'avais, pour ma faible part, provoqué dès 1892, à l’Université de Grenoble, un mouvement très vif dans ce sens. L'Ecole supérieure d'Electricité, dont on connait le magnifique développement, doit évidemment son origine aux mêmes tendances. Nous n'avons pas à en retracer ici l'histoire, qui pourtant, en bien des points, se confondrait avec l'histoire même de l'hommeéminentdont nous avons essayé detracerla physionomie ; une fois encore, Maseart « tint l’escar- celle » et eut l'idée d'intéresser d'une manière intime les fondateurs de l'Ecole à son fonctionnementet à son avenir, en les invitant à prendre place dans son Conseil de perfectionnement : d’après les règle- ments qui furent rédigés sous son inspiration, font partie de ce Conseil « toute personne ou société, admises par le Conseil, et s'engageant à verser un capital de 10.000 francs ou une annuité de 1.000 francs. » Grâce à cette organisation, l'Ecole supérieure d'Eleclricité réalise la condition bien rare, peut-être unique en France, de vivre de ses propres ressources ; ici encore, Mascart avait su faire naître et coordonner les efforts dispersés de l'initiative privée, et l'on assiste aujourd'hui à ce spectacle extrêmement intéressant d'une École technique supérieure, Lout à fait indépendante de l'Etat, et où cependant l'Etat, par une sorte de con- sécration, envoie avec des délégations officielles ses officiers et ses ingénieurs. On peut dire que ce ré- sultat résume et représente intégralement les ten- dances et ce qu'on pourrait appeler la politique de Mascart. Son entrée à la Société des Électriciens le mit en contact intime avec le monde industriel, où il joua bientôt un rôle important, et, de son côté, l'Etat lui lit appel pour toutes les questions touchant ses relations avec l’industrie; il lui donna son temps et ses efforts sans compter et fut président ou membre d'innombrables Commissions : Comités d'organisa- lion et jurys des Expositions de 1889 et 1900, Comité consultatif des Arts et Métiers, Comité des Inventions relatives à la défense nationale, Com- mission pour les installations électriques et les paratonnerres des bâtiments civils, Commission pour le régime de l'Electricité de la Ville de Paris, son autorité était telle qu'elle s'étendait à l'Étranger, et, honneur bien rare, il fut en 1900 nommé vice-pré- sident de « l'Institution of Electrical Engineers » : c'était la première fois que ce poste était attribué à un étranger. L'industrie privée elle-même ne pou- vait manquer de faire tous ses efforts pour attirer à elle un homme dont la réputation d'organisateur, jointe à une haute compétence scientifique, s'éten- dait au loin; il résista longtemps, et ce ne fut que dans les dernières années de sa vie qu'il consentit à s'intéresser à deux grandes entreprises indus- trielles, les Mines de la Grande-Combe et les Forges de Montataire : là encore il rendit d'éminents services. D'un autre côté, Mascart n'oubliait pas qu'il était avant tout universitaire etils'intéressa toujours aux questions d'enseignement : bien souvent le Minis- tère de l'Instruction publique lui demanda des rapports sur l’enseignement scientifique dans les Universités de province; il s'acquittait avec plai- sir de ces missions délicates, et savait admirable- ment reconnaitre le vrai professeur de Physique, celui qui sait appuyer son enseignement sur l’ex- périence, tout en le maintenant au niveau élevé qu'exige l'Enseignement supérieur. Ainsi se complète la physionomie de cet homme qui sut à la fois réunir en luile savant, le professeur, l'homme d'action, l'organisateur et l'industriel même : souplesse et puissance d'esprit bien rare et digne d'être admirée. \il Mascart était de taille moyenne; ses traits, à la fois fins et accentués, une barbe drue et courte, une bouche énergique, des yeux d'une vivacité et d’une intelligence rares, un front largement déve- loppé, une tête, enfin, dont la forme puissante lais- sait une trace indélébile dans le souvenir de qui- conque l'avait approché une fois, tout contribuait à donner en lui l'impression non pas tant de la force physique que de la force morale, et celle-ci était grande. Combien de fois n’a-t-on pas fait le parallèle entre l'homme de réflexion et l’homme d'action! Mascart réunissait en lui l’un et l’autre. La forte formation intellectuelle qu'il avait recue à l'École Normale, l'impression profonde qu'avaient laissée en lui les maitres éminents qu'il y avait connus, l'avaient prédestiné à être un homme de science et de laboratoire; on peut dire que la guerre de 1870 lui révéla à lui-même qu'il était capable d'être aussi un homme d'action; dès lors, les deux activités se mêlèrent en lui, et c’est là l'explication de sa fortune exceptionnelle et de la rapidité avec laquelle il s'éleva aux plus hautes voilà quelques noms que nous relevons au hasard; | situations; fortune justifiée, car toutes les nations PAUL JANET — LA VIE ET LES OEUVRES DE E. MASCART 593 ont besoin de tels hommes et ils sont rares. Mascart n’a eu dans toute son existence qu’une passion, le bien public, et il a eu l'énergie de limiter son aclion aux régions où elle pouvait être efficace : des choses et non des mots, des faits et non des théories, voilà quelle eût pu être sa devise, et cette forte discipline fut toujours celle qui régla sa vie. « Il faut aboutir », disait un homme poli- tique bien connu. Mascart aboutissait : l’inten- tion n'est rien, si elle ne se développe pas en un résultat; les plus grands projets à échéance loin- laine ne valent pas un projet plus modeste à réalisation immédiate; la création des choses humaines est faite d'approximations successives, et l'axiome bourgeois: «Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras » n’est pas à dédaigner. Telle fut la phi- losophie pratique de Mascart; elle lui donnait une certaine rudesse apparente, sous laquelle un petit nombre d'amis seuls ont pu soupconner ce qu'il y avait de bonté et de sensibilité; mais, autant qu'on peut analyser une âme qui ne se livre pas, Mascart ne se croyait pas le droit de s’abandonner à cette sensibilité que tant d’autres, au milieu des servitudes de la vie, considèrent comme le champ secret où ils peuvent être eux-mêmes en toute liberté. La sensibilité est grande destructrice de l'énergie, et Mascart considérait que toute son énergie élait nécessaire et due aux œuvres qu'il avait entrepris de mener à bien. Un événement tragique, la mort accidentelle d'une de ses petites filles, une charmante enfant de treize ans, sous l’éboulement imprévu d'une carrière de sable, fut pour lui un coup terrible, dont ses intimes purent sonder la profondeur; mais on sentit très bien à cette époque que, par un acte de volonté, il s’im- posa l'obligation de ne pas laisser entamer par là l'homme pensant et agissant qu'il avait toujours été, qu'il voulait être jusqu’au bout de sa carrière, et cette dernière période de sa vie fut la plus active. Mascart connaissait admirablement les hommes; nul, mieux que lui, ne savait diriger les débats d'une assemblée : il était le président idéal; de l'obscurité d’une question complexe et touffue, il savait dégager les lignes principales et y portait - tous ses efforts en élaguant sans hésitation les détails; habile à faire pencher insensiblement les décisions dans le sens qu'il désirait, ayant l'ins- tinet sûr et rapide de l'opinion à laquelle il pouvait se rallier, sachant au besoin mettre le poids de son autorité dans la balance, allant quelquefois — bien rarement — jusqu'à la menace de se retirer d'une assemblée sur le point de prendre une déci- sion qu'il considérait comme funeste, il a incon- testablement exercé une profonde influence sur le monde scientifique et technique. Dans les congrès et réunions internationales, il était fort écouté; il savait mieux que personne écarter les propositions dangereuses tout en ménageant la susceptibilité ou l’amour-propre de leurs auteurs, et trouver la formule heureuse qui devait rallier tout le monde. Partout et toujours, il avait le souci de la grandeur et de l'intérêt véritable à la fois de la science et de son pays, intérêls qui sont toujours conciliables. Il appartenait à cette génération qui avait vu de près la guerre et en était sortie avec des idées non d'un faux patriotisme vain et agressif, mais de relèvement et d'énergie morale, à cette géné- ration de savants dont d’Almeida s’est fait l'élo- quent porte-parole à la première page du Journal de Physique, en 1872 : « Initié par ma position aux pensées de ceux qui ont inscrit leurs noms sur les pages de ce Journal, je crois devoir faire connaître le but qu'ils se proposent, et les sentiments qui les animent... S'ils ont été conduits à se rechercher par l'amour de la science, un autre sen- timent vient encore fortifier leur union : l'amour du pays. Aussi loin que peut s'étendre leur action, ils veulent, pour leur part, contribuer au développement des forces intellectuelles et morales de la France : des forces intellectuelles par le travail, des forces morales par l'union désintéressée des efforts communs. » Mascart a connu le bonheur, si le bonheur con- siste dans la réalisation du but poursuivi; les hon- neurs sont venus à lui; il ne les a pas repoussés, mais ne les à jamais considérés comme le terme du chemin : l'accomplissement de la tâche d'hier ne le dispensait pas à ses yeux de l'entreprise de la tâche de demain, et jusqu’à son dernier jour il à lutté pour faire profiter les choses et les hommes qu'il aimait des restes d'une belle énergie qui s'éva- nouissait; il est mort simplement, comme il avait vécu; ses obsèques civiles, sans apparat et sans discours, étaient l’image de sa vie; seuls, les hon- neurs militaires lui furent rendus : il avait toujours tenu en haute estime la Légion d'honneur, dont il élait Grand Officier. Pas un indifférent ne suivit le cortège; tous sentaient que c'était une force pro- fondément active et bienfaisante qui disparaissait; mais tous, en revanche, songeaient aux traces ineffacables que cet homme» laissait derrière lui : n'est-ce pas là la véritable immortalité? Paul Janet, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris, Directeur du Laboratoire central et de l'Ecole supérieure d'Electricité. 594 P. NOLF — LA COAGULATION DU SANG LA COAGULATION DU SANG Quelle est cette mystérieuse propriété du sang, si fluide à l'intérieur des vaisseaux, de se transformer en un caillot solide dès qu'il s'épanche à lexté- rieur? Le problème a occupé des générations de physiologistes, et cependant il passe encore, à l'heure actuelle, pour l'un des plus difficiles et des plus obscurs de la Chimie physiologique. Il ne saurait être question de faire ici un tableau complet des connaissances acquises”. [Il suffira d’'ex- poser les faits les plus importants et les tendances qui se dégagent des travaux les plus récents. Comme chacun le sait, le sang comprend des éléments solides, les globules, en suspension dans un liquide, le plasma. En volume, les globules font approximalivement les deux cinquièmes de la masse totale. La très grande majorité des globules sont rouges; une très faible minorité est composée de globules blancs ou leucocytes et de plaquettes, lesquelles sont, d’après les observations récentes, des cellules blanches particulièrement délicates et altérables. I. — HISTORIQUE. On sait depuis Hewson (1770) que c’est la partie liquide du sang, le plasma, qui joue le rôle princi- pal dans les phénomènes de coagulation. Hewson recevait du sang dans une solution concentrée de sulfate de soude, ce qui avait pour effet de suspendre la coagulation. Il laissait se déposer les globules. Le plasma clair, décanté, se solidifiait quand on le diluait dans une quantité suffisante d’eau douce. Le caillol qu'on obtient dans ces conditions a l’appa- rence d’une gelée. Si on le comprime dans un linge fin, on arrive facilement à le diviser en deux par- lies : une partie solide, formée de quelques fila- ments élastiques blancs, la fibrine; une partie liquide, le sérum. Un caillot de sang ou de plasma n'est donc pas une formation homogène : il com- prend une trame fibrineuse solide, formée de fila- ments élastiques très fins, tendue dans tousles sens à travers la masse liquide du sang, qu'elle retient plus ou moins complètement dans ses mailles. L'organisme des animaux supérieurs contient un certain nombre deliquides qui dérivent directement du plasma sanguin par une simple filtration de celui-ci. Plus pauvres en albumine que le plasma lui-même, ils doivent être considérés comme étant ‘ Le lecteur que cette question intéresse particulièrement pourra trouver un exposé complet des travaux parus jus- qu'en 190% dans l'article de Morawrrz : Die Chemie der Blut- gerinnung, Ærgcbnisse der Physiologie, 1905, 1. Abteilung. Mes mémoires originaux ont paru dans les Archives inter- uälionales de Physiologie de 1906 à 4909. des dilulions plus ou moins fortes du plasma. Ce sont les liquides des cavités séreuses. L'un d’eux, le liquide d'hydrocèle (d'origine pathologique), est spontanément incoagulable. Buchanan (1845) démontra que le liquide d'hy- drocèle fournit un beau eaillot quand on lui ajoute un peu de sérum exprimé où exsudé d'un caillot de sang, ou l'extrait aqueux de ganglions lympha- tiques (extrait de leucacytes). La coagulation est due, d’après lui, à l'insolubilisation d’une albumine dissoute dans le liquide d’hydrocèle, qu'il appelait fibrine soluble. L'insolubilisation de la fibrine so- luble est opérée par une substance qui existe dans le sérum et les extraits leucocytaires et qui, pendant la vie, est contenue dans les leucocytes. Les expériences de Buchanan furent reprises par A. Schmidt (1861). Elles lui donnèrent des résultats identiques. A. Schmidt les interpréta d'abord de la facon suivante : le plasma et les liquides des cavi- tés séreuses contiennent une substance protéique soluble, le fibrinogène; les leucocytes contiennent une autre substance protéique soluble, la substance fibrinoplastique. Dans le sang extravasé, les leu- cocyles meurent; ils abandonnent au plasma leur substance fibrinoplastique. Celle-ci, rencontrant le fibrinogène, s’unit à lui en un complexe insoluble qui est la fibrine. En 1872, À. Schmidt adjoignit aux deux premières substances une troisième, de nature enzymatique, qu'ilappela fibrin-fermentd’abord, etensuile throm- bine. La thrombine, qui est aussi d’origine leuco- cylaire, préside à l'union de la substance fibrino- plastique et du fibrinogène, mais elle survit au phénomène; elle agit à la facon d'un agent cataly- tique. La thrombine n'existe pas dans le sang circu- lant. Elle provient des leucocytes du sang, qui succombent en grande masse après la sortie du sang des vaisseaux. La première tentative pour isoler à l’état de pureté la substance coagulable du plasma fut faite par Denis (1842). Denis recevait le sang dans la septième partie de son volume de solution saturée de sulfate sodique. Le plasma décanté était saturé de chlorure sodique. On obtient, dans ces conditions, un préci- pité formé de grumeaux blancs légers qui peuvent être recueillis sur un filtre et lavés à la solution saturée de chlorure sodique. Dissous dans l’eau, le précipité donne une solution claire qui se coagule spontanément au bout d'un temps plus ou moins long. En 1875, Hammarsten perfectionna le procédé de Denis et il obtint des solutions qui ne sont plus P. NOLF — LA COAGULATION DU SANG spontanément coagulables et qui se solidifient seu- lement après adjonction d'un peu de sérum frais. 11 admit que ces liquides ne contiennent pas d'autre substance que le fibrinogène. En se servant de ces solutions, Hammarsten put démontrer que les substances fibrinoplastiques de A. Schmidt ne sont pas nécessaires à la coagulation d’un milieu qui contient thrombine et fibrinogène. La fibrine se forme dans ce milieu par l'action directe de la pre- mière de ces subslances sur la seconde. En 1890, Arthus établit la grande importance des sels de calcium dans les phénomènes de coagu- lation. Si l’on ajoute au sang une quantité d’un oxalate ou d'un fluorure alcalins suffisant à préei- piter toute la chaux du plasma, on empêche toute formation de caillot. En 1892, Pekelharing émit l'opinion que la throm- bine est sécrétée par les leucocytes à l’état inactif, sous la forme de prothrombine, etqu'elle est trans- formée par les sels calciques du plasma en thrombine active. Une fois réalisée, la thrombine agit directe- ment sur le fibrinogène par une action enzymatique. Hammarsten démontra ensuite (1896) que, s'il est bien vrai que l’oxalate sodique empêche la coa- gulation du sang, il est tout aussi avéré que le même oxalate est dépourvu de toute action suspensive sur la coagulation d’une solution de fibrinogène par la thrombine. Il conclut, en conséquence, avec Pekelharing, que les sels de chaux interviennent au moment de la transformation de la prothrombine en thrombine, et qu'une fois produite la thrombine peut se passer complètement d'eux. A ce moment, la théorie classique est définitive- ment constituée : Les cellules blanches du sang (et aussi les cellules des tissus, d’après Pekelharing) contiennent la prothrombine, le plasma contient le fibrinogène. Après extravasation du sang, les cel- lules blanches du sang meurent en grand nombre; elles déversent de grandes quantités de prothrom- bine dans le plasma. Au contact des sels de chaux, la prothrombine devient thrombine, etla thrombine transforme le fibrinogène en fibrine. A l'heure actuelle, cette théorie règne encore dans lous les traités de Physiologie. Malheureusement pour elle, presque tous ceux qui ont repris l'étude de la coagulation dans ces dernières années sont d'accord pour la rejeter. Lorsqu'on fait une injection rapide de propeplone dans les veines d’un chien, on produit l'incoagula- bililé du sang. Recueilli dans des tubes de verre, ce sang reste indéfiniment liquide. Le plasma de propeptone a été l'objet des études prolongées d'un physiologiste anglais, Wooldridge. Les publications de Wooldridge sont, autant par la rigueur du rai- sonnement que par la fertilité de l'invention, ce qui a été écrit de meilleur, de plus profond sur la 595 coagulation du sang. Wooldridge n'a pas eu le temps, étant mort jeune, de donner à ses idées leur expression entière et définitive. Mais la théorie, tout à fait personnelle et directement appuyée sur l'ex- périence, qu'il a émise rend le mieux la physio- nomie générale des faits; en un grand nombre de points, elle est l'expression de la vérité la plus absolue. Wooldridge constata (1886) que le plasma de pro- peptone se coagule rapidement quand on lui ajoute des leucocytes lavés et qu'il ne se coagule pas quand on lui ajoute le sérum exprimé d'un caillot de sang. Ayant isolé, par la méthode de Hammarsten (préci- pitation répétée plusieurs fois par le chlorure sodique à demi-saturation), le fibrinogène de ce plasma, il vit que les solutions de fibrinogène obtenues successivement en dissolvant dans l'eau le premier précipité, puis le second précipité et les suivants, tendent de plus en plus à prendre des propriétés différentes de celles du plasma. La pre- mière solution est encore facilement coagulée par les leucocytes; elle est aussi coagulée (plus difficile- ment) par le sérum. En ce dernier point, elle se différencie du plasma. Déjà dans la seconde solu- tion, d’après Wooldridge (et certainement dans les solutions suivantes), on observe un renversement complet des conditions réalisées dans le plasma : le sérum seul fait coaguler la seconde solution, les leucocytes n'ont plus d'action. Cette expérience fondamentale démontre donc qu'une solution de fibrinogène pur, qui contient des sels de chaux, reste parfaitement fluide quand on lui ajoute des leucocytes (ou un extrait de leu- cocytes). Répétée par Morawitz et par moi-même, elle nous a donné le même résultat qu'à Woold- ridge. À elle seule, elle renverse la théorie clas- sique, puisque, d’après celte théorie, le milieu pré- cédent contient tout ce qui est nécessaire à la coagulation et devrait se coaguler. L'expérience de Wooldridge tend à faire croire que le manque de coagulation de ce milieu est dû à l'absence d’une substance, présente dans le plasma complet, absente de la solution de fibrinogène el que la théorie classique ignore. A. Schmidt, beaucoup plus fortement influencé par les travaux de Wooldridge qu'il ne l'avouait, avait d'ailleurs abandonné, lui aussi, l'hypothèse de l’origine leucocytaire de la prothrombine. Dans sa troisième et dernière théorie de la coagulation (1892), il localise la prothrombine dans le plasma; le rôle des leucocytes change de nature. Ils dé- versent dans le sang extravasé des substances, dites zymoplastiques, qui transforment en throm- bine la prothrombine du plasma. De producteurs de coagulation, ils sont devenus des excitateurs. Après la coagulation, il peut rester dans le plas- 596 P. NOLE — LA COAGULATION DU SANG ma une fraction de la prothrombine qui n'a pas été transformée en thrombine. La prothrombine est plus résistante que la thrombine. Tandis que celle-ci disparait rapidement (après un ou deux jours à la température ordinaire) du sérum, la prothrombine persiste inaltérée. Il suffit d'ajouter au sérum vieilli, qui seul n'agit plus sur le fibrino- gène, un peu de substance zymoplastique pour lui rendre tout son pouvoir coagulant : ce qui restait de prothrombine dans le sérum a été ainsi trans- formé en thrombine. Fuld et Spiro, Morawitz ont repris cette expé- rience d'A. Schmidt et, comme lui, ils ont activé, par certaines adjonctions, des sérums devenus inactifs par vieillissement. Au lieu d'employer les substances zymoplastiques de Schmidt, ils se sont adressés aux extraits de tissus (extrait de muscle, extrait de foie). Ces extraits n’ont, par eux-mêmes, aucune action coagulante sur la solution de fibri- nogène pure, pourvue de chaux, mais ils font éner- giquement coaguler la solution de fibrinogène préalablement additionnée d'un peu de sérum vieilli. Morawitz interprète ce résultat comme A. Schmidt, mais, dans sa terminologie, la pro- thrombine devient du thrombogène. De plus, il affirme que la substance active des extraits d’or- ganes est chimiquement différente des agents zymo- plastiques; il l'appelle thrombokinase. La throm- bokinase transforme le thrombogène en thrombine; elle n'opère cette transformation qu'en présence des sels de chaux. Dans ses grands traits, cette nouvelle théorie peut s’'énoncer comme suit : Le plasma du sang circulant contient le fibrinogène et le thrombogène; il est incoagulable par ses seules ressources. Après extravasation, les leucocytes abandonnent leur thrombokinase (qui est supposée exister dans toutes les cellules de l'organisme et même dans tout protoplasme vivant): en présence des sels de calcium du plasma, la thrombokinase change le thrombogène en thrombine et la coagu- lation s’en suit. Cette opinion, qui a été accueillie avec faveur par un certain nombre de physiologistes allemands, a le défaut, comme toutes celles qui l'ont précédée, de n’expliquer qu'une partie des faits. Elle fait totalement abstraction de certaines données de la plus haute importance, notamment de la qualité fondamentale, que possède tout plasma normal, de pouvoir se coaguler spontanément. II. — COAGULATION DU PLASMA. On démontre facilement la coagulabilité spon- tanée du plasma de mammifère en soumettant à la centrifugalion un segment, isolé entre deux liga- lures el excisé, d’une grosse veine de chien ou d'un autre mammifère. Dans cette veine, le sang reste sans s'altérer pendant de longues heures (Hewson, Fredericq). Après une énergique centri- fugation, plasma et globules sont complètement séparés. On peut recueillir isolément le plasma, complètement fluide et transparent, tout à fait privé de cellules. Transporté dans un tube paraffiné, ce plasma reste fluide plus ou moins longtemps; transvasé dans un tube de verre, il se solidifie en quelques minutes. On peut se procurer plus facilement le plasma pur d’un chien intoxiqué par la propeptone ou le plasma d’un oiseau ou d’un poisson. A l'inverse du plasma normal de chien, ces liquides ne se coagulent pas au contact du verre (ou ne se coa- gulent que très tardivement). Mais il suffira de les diluer dans cinq à dix fois leur volume d’eau pour opérer leur rapide solidification. Cette qualité inhérente à tout plasma de pouvoir se coaguler par ses seules ressources avait été pro- clamée par Wooldridge. Elle est de la plus haute importance, puisqu'elle démontre que tout plasma naturel contient en lui tous les éléments nécessaires à la formation de la fibrine. À ce point de vue, il n'y à donc aucune différence d'un plasma de ver- tébré à l’autre. Si l'on constate qu'au contact du verre, Lel plasma se coagule et tel autre reste fluide indéfiniment, cela ne prouve pas qu'il manque au second un élément présent dans le premier. Cela montre tout simplement que, dans le second, les conditions sont moins favorables à une coagulation que dans le premier, ce que l’on exprime en disant que le second des liquides est une solution colloï- dale plus stable que le premier. Quand on a affaire à un de ces plasmas stables qui se refusent à se solidifier dans les condi- tions ordinaires, on peut en déterminer la coagu- lation par des moyens variés. On a cité la simple dilution dans l'eau. On peut utiliser aussi l'ac- tion coagulante des poudres. Soit un plasma de poisson; conservé dans un tube de verre, il reste indéfiniment fluide. On lui ajoute un peu d'une poudre de verre porphyrisé : il se coagule en quelques minutes. En introduisant la poudre impal- pable de verre dans le plasma, on à augmenté à l'infini la surface de contact entre le verre et le liquide, et ce simple expédient à eu raison de la stabilité du liquide. Procurons-nous un peu d'oxalate calcique en mélangeant, au fond d'un tube à réaction, une goutte d’une solution de chlorure calcique à 10 et une goutte d'oxalate sodique à 3 °/, (le mélange contient un excès dissous de chlorure calcique). Laissons le précipité d'oxalate caleique s'organiser en cristaux. Après quelque temps, ajoutons deux centimètres cubes de plasma de propeptone. Le P. NOLEF — LA COAGULATION DU SANG milieu reste fluide, la poudre cristalline d'oxalate n'a pas d'action coagulante manifeste. Il en est de même du verre porphyrisé. Done le plasma de pro- peptone est plus stable que le plasma de poisson. Mais faisons la première expérience en sui- vant une marche un peu différente : ajoutons à deux centimètres cubes de plasma de propeptone une goutte de chlorure calcique et ensuite une goutte d'oxalate sodique. Chose remarquable, il ne se produit pas de précipité d'oxalate calcique. Le milieu devient fortement opalescent et laisse passer une lumière rougeätre. L'oxalate calcique est main- tenu en solution par les colloïdes du milieu et il est lui-même à l'état colloïdal, comme le prouve le changement des qualités optiques du liquide, Mais cet équilibre de solution est très instable; il ne persiste que pendant quelques minutes. Passé ce temps, le milieu se trouble; il apparait de petits grains visqueux qui s'agglutinent. Ils ont un centre formé de sel calcique, mais leur périphérie est faite de fibrine. Bientôt la coagulation s'élend à tout le liquide; un caillot compact s'est constitué. lei aussi, il a suffi de multiplier énormément le contact entre les éléments de la fibrine et l’oxalate caleique pour que l'expérience donne un résultat tout nouveau. D'un milieu à l'autre, il n'y a aucune différence de composition chimique; la masse pon- dérale de l'oxalate calcique est la même dans les deux essais; seule la surface est différente. L'action coagulante de l'oxalate, comme celle de la poudre de verre, est donc une pure action de surface. Ces deux exemples très simples font comprendre pourquoi des milliers de substances d'origines très diverses peuvent avoir une action très décisive sur la coagulation des plasmas naturels. Les microbes, les levures, les protozoaires et toutes espèces de cellules prélevées aux innombrables formes vivantes appartenant aux deux règnes, peuvent faire ce que fait le précipité naissant d'oxalate cal- cique. D'une manière générale, cette qualité revient à tout protoplasme ou à tout extrait aqueux de protoplasme. Et cela se concoil, puisque ces liquides contiennent tous des colloïdes instables, dont les granules sont, comme les granules d'oxalate eal- cique, autant de centres de formation de la fibrine. Mais, en agissant ainsi, ces extraits de protoplasme n'apportent rien d'essentiel au caillot. Pas plus que le verre pulvérisé ou le précipité naissant d'oxalate calcique, ils ne contiennent de throm- hokinase, à l'encontre de ce que pense Morawitz. Qu'ils n’apportent au plasma naturel que l'occa- sion de se solidifier, cela résulte encore de l'absence de tout effet coagulant sur la solution de fibrino- gène pur ou sur la solution de fibrinogène addi- tionnée de thrombogène. Pour obtenir une solution de fibrinogène conte- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 597 nant aussi du thrombogène, le mieux est d'ajouter un peu d'un plasma naturel de mammifere chauffé à 56° à une solution de fibrinogène pur. Ce mélange ne se coagule ni par la poudre de verre, ni par l’oxalate calcique, ni par les extraits de microbes, levures el autres protoplasmes inférieurs. Mais il se solidifie rapidement par l’action d’une émulsion ou d'un extrait de leucocytes de mammifère. En cela, il se distingue de la solution de fibrinogène pur. Le plasma chauffé lui à apporté le thrombo- gène et les leucocytes lui ont fourni le troisième élément essentiel de toute fibrine, la thrombozyme. Au cours de cet exposé, on a done appris à con- AÉBIES plasmas naturels, qui se coagulent ou spontanément naître trois sortes de liquides coagulables : ou par l'influence des causes les plus diverses et les plus banales; 2° les solutions de thrombogène- fibrinogène, qui se coagulent par les leucocytes; 3° les solutions de fibrinogène qui ne se coagulent pas par les leucocytes seuls, mais seulement par la thrombine, ou par le mélange de thrombozyme et de thrombogène. L'ensemble des expériences failes pour élucider la cause de ces différences prouve que les plasmas naturels contiennent constamment trois facteurs de coagulation : le fibrinogène, le thrombogène et la thrombozyme, colloïde d'origine leucocytaire. Mais les expériences précédentes ont montré, en outre, qu'il ne suffit pas qu'un liquide contienne les trois éléments de la fibrine pour qu'il se coagule spontanément. Au contact d'une paroi qui n'exerce sur eux aucune action coagulante, telle que la paroi des vaisseaux ou plus simplement une paroi paraffinée, les plasmas naturels restent fluides. Pour rompre l'équilibre colloïdal très instable qui les caractérise, il faut une influence excitante, telle que celles de la paroi, ou de la poudre de verre, ou de l’oxalate caleique colloïdal. Ces influences exci- tantes banales, n'agissant que sur les plasmas com- plets, ont été appelées par moi thromboplastiques. II. — LES PRODUITS DE LA COAGULATION DU PLASMA. Le résultat de la coagulation du plasma est un peu différent suivant les rapports de masse des substances en présence. Les conditions les plus simples sont réalisées chez les Poissons. Chez les Poissons, on trouve, comme produit unique de la coagulation, la fibrine, et la formation de la fibrine a été accompagnée de la disparition totale de la thrombozyme et du fibri- nogène et presque totale du thrombogène. On peut conclure de ce bilan que la fibrine nait par union des trois colloïdes du plasma. S'il reste un peu de thrombogène, c'est parce que cet élément se trouve toujours en large excédent dans les humeurs de 43% 598 P. NOLE — LA COAGULATION DU SANG tout vertébré. Cet excédent persiste d’ailleurs inal- téré; il n'a pas pris part à la réaction. La coagulation, quand elle se présente ainsi à l'état pur, est donc tout à fait différente de ce qu'on se figure généralement. Elle n’est pas un phéno- mène où intervient un agent catalytique, comme l'enseigne la théorie classique. Elle est tout simple- ment l'union de trois colloïdes solubles en un com- plexe insoluble, la fibrine. Cette union ne peut se produire (dans les conditions habituelles de température) que dans les milieux qui sont pourvus d'une certaine quantité de sels solubles de chaux, ou mieux d'ion calcium (Sabbatani). Cette interven- lion d’un cation bivalent n'a rien qui doive étonner dans un phénomène de ce genre. On sait l'influence considérable des ions de valence double ou triple sur la floculation des poudres en suspension ou des colloïdes instables (en pseudo-solution). Chez les Mammifères, les choses peuvent se passer, dans certaines conditions expérimentales, exacte- ment comme chez les Poissons. Mais, d'habitude, le phénomène se complique. La raison en est simple : chez les Mammifères, la thrombozyme et le thrombogène sont beaucoup plus abondants dans le sang que le fibrinogène. Il en résulte qu'au moment de l'union des trois facteurs, il se produit deux espèces de complexes : des complexes mieux pourvus de fibrinogène qui sont insolubles, des complexes moins bien pourvus de fibrinogène qui sont solubles, ces derniers probablement en petite minorité. La fibrine insoluble se précipite, c’est celle que l'on voit. L'autre reste en solution (à côté d'un peu de thrombogène qui a échappé à toute combinaison). Cette fibrine soluble a gardé beau- coup d’affinité pour le fibrinogène. Introduite dans une solution de fibrinogène, elle s'unit à cet élé- ment et devient de la fibrine ordinaire, qui se pré- cipite. Cet apport complémentaire de fibrinogène à un complexe qui en contient déjà un peu est un phénomène tout différent de la constitution du complexe même par union directe des trois facteurs. On concoit qu'il se produise dans des conditions légèrement différentes et qu'il suive d’autres lois : ainsi l'union de la fibrine soluble au fibrinogène peut se faire en l'absence de l'ion calcium. Si, dans l'exposé qui précède, on change les noms, si l’on nomme thrombine ce qui a été appelé fibrine soluble, on aura établi les rapports qui existent entre l'opinion ici exposée et la théorie classique. Dans la théorie classique, la (hrombine préexiste à toute coagulation; elle en est la cause. Pour moi, elle apparaît pendant la coagulation, dont elle est un produit. Cette idée avait été déjà nettement concue et exposée par Wooldridge. Il avail montré que tout plasma qui ne se coagule pas, pour l'une ou l’autre raison, est complètement privé de thrombine. Vient-on à provoquer la coa- gulation par un moyen banal, toujours (pour tous les plasmas naturels de Mammifères) on trouvera de grandes quantités de thrombine dans le sérum. C'est ce que l’on obtiendra avec le plus stable des plasmas, le plasma de propeptone, par une simple dilution dans l'eau. Ces expériences prouvent, de plus, que la thrombine se produit abondamment en l'absence de toute cellule blanche, à l'encontre de la théorie classique ou de la théorie de Morawilz. Mais, pourra-t-on objecter, la thrombine appa- rail peut-être bien avant la fibrine, et la coagulation n'est que la conséquence de la formation préalable de thrombine. Si l’on établil exactement le moment d'apparition de la thrombine dans un plasma qui se coagule, on constate que la thrombine apparaît au moment même où le milieu commence à se soli- difier. Si, d'autre part, on ajoute de la thrombine à du plasma de peptone, comme l'a fait Wooldridge, on n'en produit pas la coagulation. Rien n'autorise à dire que la production de thrombine précède la coagulation ; tout porte à croire que les deux phéno- mènes, n'en font qu'un: fibrine insoluble et throm- bine (fibrine soluble) se forment en même temps. Cette thrombine, à laquelle la théorie classique a donné une position centrale, ne serait donc en réalité qu'un produit de la coagulation et, qui pis est, un produit accessoire, sans aucune signification ni utilité. Le fait qu'elle manque chez les Poissons, dont la coagulation est identique dans son essence à celle des Vertébrés, prouve qu'il en est bien ainsi. La coagulation, disent tous les auteurs, est un phénomène catalytique, puisque, lorsqu'on pro- voque la coagulation d’un milieu en lui ajoutant de la thrombine, on retrouve celle-ci dans le sé- rum. Il est probable que si l’on avait pu doser exactement la quantité de thrombine présente avant et après la coagulation, on en aurait trouvé dans la plupart des cas davantage après la coaqula- tion qu'avant. Tout simplement parce que les milieux qui servent à ces expériences sont d'habitude des plasmas et que la coagulation d'un plasma est accompagnée d’une néo-formation de thrombine. IV. — FLUIDITÉ DU SANG DANS LES VAISSEAUX. Tant la coagulation d’un plasma que la coagula- tion d’une solution de fibrinogène par la thrombine sont dues à des unions entre des colloïdes, avec précipitation du produit insoluble. Mais, s'il en est ainsi, comment comprendre la fluidité du plasma dans les vaisseaux? Le plasma comprend tout ce qui est nécessaire à la formation de la fibrine, et pourtant la fibrine ne se produit pas aussi long- temps que le sang n’est pas extravasé. On a parlé d'une action anticoagulante de la paroi des vais- P. NOLEF — LA COAGULATION DU SANG 299 seaux. C'était oublier la lymphe, qui a même com- -posilion qualitalive que le plasma et qui baigne toutes les cellules de l'organisme. L'étude des suites de l'injection rapide de propep- tone dans les veines est très instructive à cet égard. Quand cette injection est faite chez le chien et que la quantité administrée est suffisante, on constate que le sang devient tout à fait incoagulable. Si l'injection est très faible, le sang reste coagulable; mais la lymphe hépatique devient incoagulable. Le plasma incoagulable de l'intoxication peptonée possède tous les éléments de la fibrine, S'il ne se solidifie pas, c'est parce qu'il contient en abon- dance une substance anticoagulante sécrétée par le foie, l’antithrombine hépatique. Cette substance n'est pas seulement sécrétée dans l'intoxication propeptonée aiguë. Le foie la déverse abondam- ment dans le sang chaque fois que la coagulabi- lité du sang est rapidement augmentée. Le foie est donc sensible à un excès de coagulabilité et il peut la neutraliser, même avec excès. On voit appa- raitre ici une régulation extrêmement intéressante, exercée par le foie, et qui à pour effet de maintenir constante, entre certaines limites, la coagulabilité du plasma. L'agent actif est l’antithrombine, qui s'oppose à la gélification du plasma. Dans l'orga- nisme, il existe entre l’antithrombine, d'une part, et toutes les cellules chargées de substances throm- boplastiques, d'autre part, un anlagonisme perpé- tuel, les secondes poussant à la coagulation, la pre- mière s'y opposant. Et la sécrétion de l’antithrom- bine est réglée de telle facon que la coagulation ne se fait pas aussi longtemps que les conditions restent normales. Dans le sang extravasé, les sub- stances étrangères que le sang mouille ou qu'il a dissoutes viennent ajouter leur influence aux actions thromboplastiques appartenant au sang même. L'antithrombine n'est plus suffisante, elle ne se renouvelle plus, la coagulation a lieu. Dans tel plasma recueilli pur, celui du mammi- fère, l'équilibre est tellement instable que le simple contact d’une paroi de verre est suffisant pour déclancher le processus; dans tel autre (ceux de poisson ou d'oiseau), l'action de la paroi de verre est insuffisante; il faut des agents thromboplas- tiques plus actifs. L'intervention du foie dans les phénomènes de coagulation n'est pas limitée à la sécrétion d'une antithrombine. Il y a des arguments très sérieux, tirés de l'expérience, en faveur de l'origine hépa- tique du thrombogène et du fibrinogène. V. — SPÉCIFICITÉ DE LA THROMBOZYME. Dans cette union à trois qui produit la fibrine, il y a lieu de faire une distinction entre les deux sou- dures. Cette distinction ne pouvait être établie qu'à la condition de disposer de solutions pures de cha- cun des trois facteurs. Puisque cette condition est actuellement remplie, on peut faire l'expérience suivante : dans un premier tube, on ajoute du fibrinogène, pris à un mammifère, à un mélange de thrombogène et de thrombozyme pris à un poisson; dans un second tube, on mélange de la throm- bozyme d'un poisson à du thrombogène et du fibri- nogène de mammifère. Le premier liquide se coagule, le second reste fluide indéfiniment. On peut dire que le fibrino- gène de tous les Vertébrés peut s'unir au couple thrombozyme-thrombogène de chacun d’entre eux, mais que la thrombozyme d'un vertébré n'a d'affi- nité que pour le thrombogène du même vertébré ou des vertébrés voisins (la thrombozyme des Séla- ciens nes'unit pas au thrombogène des Téléostéens). En d’autres termes, la soudure thrombozyme- thrombogène possède, d'une facon plus ou moins marquée, le caractère de spécificité, qui manque complètement à la soudure thrombogène-fibrino- gène. VI. — FIBRINOLYSE. Pour acquérir des notions plus complètes sur la valeur qu'il faut donner à chacun des termes cons- titutifs de la fibrine, il y a lieu de suivre l’évolu- tion de celle-ci. Le rôle de bouchon pour vaisseaux ouverts que joue la fibrine est, de par sa nature même, transitoire. Sa destinée normale est de dis- paraitre après un certain temps. Si l’on place de la fibrine lavée dans un milieu salin pourvu d’anti- septiques, on constate que la fibrine s'y dissout lentement. Cette fibrinolyse n'a pas été beaucoup étudiée, parce qu'on l’a toujours considérée comme étant un phénomène contingent, n'ayant aucun rapport direct avec la constitution même du caillot. En réalité, elle en est la conséquence nécessaire. Si l’on ajoute à une solution diluée de fibrino- gène une petite quantité de thrombine pure, on obtient un caillot. Conservé à 37° à l'abri des microbes, ce caillot est complètement redissous après quelques heures. La liquéfaction du caillot est le résultat d'un travail de protéolyse, qui trans- forme en albumoses et peptones la plus grande partie des albuminoïdes constitulifs du caillot. Cette fibrinolyse atleint tout échantillon de fibrine pure; elle est d'autant plus rapide que la fibrine est plus pure. Avec certaines solutions de thrombine, qui résistent bien elles-mêmes à la tempéralure de 37°, on peut faire une expérience intéressante : on ajoute à la solution de throm- bine une quantité de fibrinogène strictement suffi- sante pour qu'un caillot puisse se produire. Ce caillot est bientôt redissous. On renouvelle l'adjonc- 600 P. NOLE — LA COAGULATION DU SANG tion de fibrinogène : nouveau caillot, nouvelle fibrinolyse. La même succession peut encore être répétée un grand nombre de fois. Dans ces caillots successifs, constitués de fibri- nogène et de thrombine, ce qui résiste à la pro- téolyse, c'est la thrombine; ce qui subit la protéo- lyse, c'est le fibrinogène. Le fibrinogène est coagulé par la thrombine et digéré par elle. Au lieu d’une solution de thrombine, on peututili- ser un mélange de thrombozyme et de thrombogène. Quand on ajoute du fibrinogène à ce mélange, en présence de sels de calcium, la coagulation se produit et elle est suivie de fibrinolyse Plus il y a de thrombozyme, plus rapide est la fibrinolyse. Si l’on altère légèrement la thrombozyme par la chaleur, l’activité fibrinolytique faiblit. La throm- bozyme possède donc la propriété fibrinolytique tout comme la thrombine, mais elle l’exerce dans des conditions différentes. Ajoutez la thrombozyme seule (sans thrombo- gène) au fibrinogène, en présence de chaux, il ne se produit ni coagulation, ni protéolyse du fibri- nogène. Ajoutez la thrombozyme et le thrombo- gène, en l'absence de chaux, au fibrinogène; il n'y aura, encore une fois, ni coagulation, ni protéo- lyse. Sans thrombogène, sans chaux, la throm- bozyme est incapable d'atteindre le fibrinogène pour le coaguler ou le digérer. Au contraire, la thrombine a directement prise sur le fibrinogène, en l'absence de chaux, pour le coaguler et le digérer. Si donc il existe entre la thrombine, d'une part, et le couple thrombozyme-thrombogène, d'autre part, une différence essentielle au point de vue du pouvoir coagulant, si la première coagule le fibri- nogène dans les milieux privés de chaux, dans lesquels les seconds sont tout à fait inactifs, la même différence radicale les sépare au point de vue du pouvoir protéolytique. On peul conclure de ce parallélisme que la coa- gulation est le préliminaire obligé de la digestion du fibrinogène : pas de coagulation, pas de pro- téolyse. C'est la thrombozyme qui digère le fibri- nogène; mais, pour le digérer, il faut qu'elle puisse le joindre. Elle n'y arrive pas quand elle est seule avec lui; le concours du thrombogène et de la chaux lui est indispensable. Mais ce pouvoir une fois acquis, elle le conserve. Ces faits nous révèlent l'essence de la coagulation du plasma : elle est une prise de contact entre plusieurs colloiïdes, dont un doué d'activité enzy- malique. Cette prise de contact n’est pas un phéno- mène catalytique, puisqu'elle consommeles colloïdes qui réagissent. EL d'ailleurs, souvent, les choses en restent là : la fibrine résiste à l’autolyse, la coagu- lation n'est pas suivie de digestion (à cause de la présence de substances empéchantes). VII. — COAGULATION DU SANG COMPLET. Quand du sang complet se coagule, la coagula- lation intéresse le plasma et les leucocytes. Les cellules s'agglutinent et se détruisent, le plasma s'enrichit en thrombozyme. L'agglutination et la destruction des cellules sont dues à la coagulation massive, qui se fait à leur surface et dans l’épais- seur de leur écorce protoplasmique, du thrombo- gène et du fibrinogène plasmatiques : le plasma a envahi les cellules. Mais les cellules, en mourant, déversent dans le plasma toutes leurs réserves : elles se dissolvent en lui. Dans les conditions de la vie normale, ces phé- nomènes existent aussi, mais très atténués. Les cellules blanches abandonnent au plasma une partie de leur thrombozyme, et, par une bonne réciprocité, le plasma cède aux cellules de faibles quantités de thrombogène et de fibrinogène qui se fixenten une couche ultra-microscopique de fibrine sur la paroi cellulaire. Ainsi les cellules peuvent prendre leur part des réserves protéiques du plasma et faire de l’albumine insoluble cellulaire aux dépens de l'albumine soluble plasmatique. Mais cette fibrine ainsi acquise pourra être ulté- rieurement digérée par le protoplasme leucocy- laire, el la coagulation, phénomène d'assimilation, aura élé le prélude d'une digestion, phénomène de désassimilation. En se détachant du protoplasme leucocytaire, la thrombozyme a emporté celte qualité mystérieuse de pouvoir digérer certaines substances protéiques. Mais elle peut difficilement l'utiliser, faute de con- act avec les éléments protéiques du plasma. En s'implantant dans le complexe thrombine, elle augmente son champ d'action, elle amplifie ses affinités de surface de toute la surface du com- plexe qui la porte. Agent protéolytique par la thrombozyme qu'elle contient, la thrombine s'at- taque au fibrinogène pur, qui est inaccessible à la thrombozyme seule. Le complexe thrombine est ainsi doué d’une des activités du protoplasme leucocytaire. Il peut coa- guler le fibrinogène à sa surface pour le digérer ensuite, et ce double travail d'assimilation et de désassimilation, il peut le renouveler un certain nombre de fois. Mais, chez lui, plus d'activité inhi- bitrice qui puisse réfréner ce double mouvement en chacun de ses moments. On n'assiste plus à la vie d'une cellule, mais au travail d'une enzyme. Et ce n’est certes pas le résultat le moins inté- ressant de l'étude de la coagulation, que d'avoir montré comment cette enzyme s’est constituée et comment les propriétés de l’ensemble dérivent des P. Nolf, Chargé de Cours à l'Université de Liége qualités des constituants. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 601 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Hale (George Ellery), Director of the Mount Wilson Solar Observatory. — The Study of Stellar Evo- lution. An account of some recent methods of as- trophysical research. — { vo/. 1n-8° de 250 pages, avec photographies et planches. (Prix : 20 fr.) Wes- ley and Son, éditeurs. Londres, 1909. L'astronome qui s'intéresse à l'étude de l'Evolution stellaire, c'est-à-dire au problème passionnant de la vie des étoiles, sera bien déçu s'il achète le livre que vient de faire paraître le savant Hale, très connu par ses recherches solaires. Ce n’est pas dans ce volume qu'il ira chercher la dis- cussion approfondie de toutes les hypothèses cosmo- goniques, et le sous-titre de l'ouvrage nous parait infiniment plus exact. Evidemment, en considérant notre Soleil comme l'une des étoiles de la Voie lactée, son étude peut entrer dans le cadre de l’astronomie stellaire, mais la phy- sique du Soleil est encore trop peu avancée pour nous fournir des renseignements intéressants sur l’évolu- tion des étoiles. L'auteur à d’ailleurs soin, dans sa préface, d'en avertir le lecteur. Aussi laisse-t-il systé- matiquement de côté certaines questions relatives au problème de l’évolution stellaire et qui n’ont même pas été abordées : les théories des étoiles variables et tem- poraires, par exemple; les recherches de sir G. Darwin sur l’évolution et le phénomène des marées; les études de Vogel et de Pickering au point de vue photomé- trique; la distribution des étoiles de divers types; les recherches de Campbell sur les spectres stellaires, le développement par ce dernier de la méthode spectro- graphique pour déterminer les vitesses radiales, etc. M. Hale s'excuse de ces omissions : « Je n'ai pas voulu, dit-il, traiter le problème général de l’évolution stellaire, ni offrir une description complète des mé- thodes d'observation en Astrophysique. » Tel qu'il est, cependant, cet ouvrage est extrême- ment important; il donne une vue d’ ensemble sur les nouveaux instruments imaginés depuis une vingtaine d'années et sur les résultats que nous sommes en droit d'en attendre. Ces instruments sont très répandus à l'Etranger, et M. Hale songe déjà à' grouper tous les efforts pour arriver à étudier systématiquement le grand problème de l'évolution stellaire. En France, remarquons-le en passant, nous sommes moins heureux; c’est avec les plus grandes difficultés que M. Deslandres à pu construire son spectrohélio- graphe à l'Observatoire de Meudon, et, à l'heure actuelle, faute de ressources, on est loin d'en tirer Lout le parti possible. Aussi sommes-nous très distancés par le tra- vail opéré de l’autre côté de l'Océan. Là-bas, en effet, toutes les grandes entreprises scientifiques sont placées sous le patronage de quelque riche Mécène. Il nous suffira de citer les dernières créations astronomiques : L'Observatoire du Mont Hamilton, près de San Fran- cisco, a été fondé à l’aide d'un legs de James Lick. Il est muni d'un réfracteur de 0®,915 de diamètre et de 172,60 de kongueur focale; L'Observatoire de © hicago a été créé par M. Yerkes, qui, en octobre 1882, offrait une somme illimitée à l'Université de cette ville pour la construction d’une lunette « superlative »; Enfin, l'Observatoire du Mont Wilson, a été créé spé- cialement pour les recherches solaires, par l'institution Carnegie, dans des conditions merveilleuses. Aucun autre observatoire ne sera équipé d'une façon aussi ET INDEX parfaite, et il semble, au premier abord, que le rôle des astronomes devienne, dans ces conditions, pure- ment passif. Il n’en est rien, cependant, et là, plus qu'ailleurs, l'as- tronome reste le principal et le meilleur instrument de l'observatoire. La lecture du livre de M. Hale ne peut que nous fortifier dans cette idée. A chaque page on devine toute l'énergie et l'étonnante habileté qu'il a dù déployer pour arriver à la création du spectrohé- liographe et à l'obtention des magnifiques photogra- phies placées à la fin du volume. D'autre part, l'étude du Soleil, dont les astronomes du Mont Wilson font leur spécialité, nous conduira plus tard à la connaissance de ce qui se passe dans les étoiles lointaines qui peuplent l'immensité du Ciel. Notre Soleil, l'une de ces étoiles, se laisse mieux observer grâce à son voisinage immédiat; les phéno- mènes qui se passent à sa surface peuvent donc nous conduire à prévoir les secrets de sa destinée, comme aussi à deviner quel était son état antérieur. Laplace est le premier qui ait donné une synthèse vraiment sérieuse de la formation de notre monde solaire. Mais sa théorie, bâtie à une époque déjà ancienne, à dù être complètement remaniée. De cette hypothèse, il ne reste presque rien, sinon l'idée d'une nébuleuse ; encore admet-on aujourd’ hui qu'elle devait être extrêmement raréfiée. Faye, dans les temps mo- dernes, à essayé de modifier l'œuvre de Laplace, sans parvenir toutefois à résoudre de graves objections, et il faut arriver jusqu'à ces dernières années pour trouver une hypothèse sérieuse tenant compte de toutes les particularités connues actuellement, et don- nant de ces particularités une explication vraiment plausible. Nous voulons parler de la magistrale théorie que M. le colonel du Ligondès a exposée dans sa Formation mécanique du système du monde. Si l'on a souvent reproché aux savants français leur ignorance des œuvres importantes publiées à Il Etranger, il me semble que ce reproche pourrait s'adresser tout autant aux savants du Nouveau Monde qui ne tiennent pas plus compte de la littérature scientifique des autres Puissances. M. Hale semble ignorer complète- ment les tentatives du genre de celles que nous signa- lons : c’est une grave lacune dans son ouvrage, qui cependant discute des théories d'importance fort secondaire, comme celles de Chamberlain et de Moulton. Quant à l'hypothèse météoritique de M. Lockyer, mentionnée par l’auteur, elle parait bien insuffisante pour résoudre le problème cosmogonique qui a été posé en termes si nets par M. Wolf : « Une hypothèse cos- mogonique, pour être complète et répondre au sens mème du mot, doit prendre la matière à l'état primitif d'où elle est sortie des mains du Créateur avec ses propriétés et ses lois, et, par l’application des prin- cipes de la Mécanique, en faire surgir l'Univers entier tel qu'il existe aujourd'hui. » Pour le système solaire, en particulier. le problème se pose donc en termes très nets : « Expliquer comment une même matière à pu, en obéissant aux lois de Newton, donner naissance à des corps, soleil, planètés et satellites! » , remplissant les conditions que l’Astronomie nous a révélées. L'énoncé de ces simples conditions suffit à écarter les théories météoritiques, quelles qu'elles soient. Les météorites qui pourraient donner naissance à un système solaire sont, en effet, des corps trop com- 1 Wozr : Les hypothèses cosmogoniques, p. 1 et 6. 602 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX plexes pour que nous ne soyons pas amenés à sup- poser un état antérieur plus simple. Elles sont, sans aucun doute, le produit d'une évolution déjà longue. D'où viennent-elles? On ne fait donc, en supposant leur existence, que reculer la difficulté sans la résoudre. En admettant leur existence, on étudie l’une des phases de la formation d'un système, mais, encore une fois, on n'a pas remonté à l’origine même du monde. Les chapitres théoriques sont, il faut l'avouer, la partie faible du livre de M. Hale. Mais, dès qu'on aborde l'étude expérimentale du Soleil, on sent que l’auteur est vraiment sur son lerrain. Ici, M. Hale n'a qu'à faire l'histoire de ses propres travaux. Nous recommandons lout particulièrement les pages fortement documentées sur les phénomènes de la surface solaire, — taches, facules, grains de riz, etc., — étudiés d'après les premières données de l'Astronomie moderne. Les travaux récents sur les enveloppes du Soleil et en particulier sur la chromosphère — floccules, cou- ches d'hydrogène et de calcium — sont présentés d’une facon aussi claire qu'intéressante. On trouvera également les dernières conclusions sur la température des étoiles suivant leur type; mais la majeure partie de l'ouvrage est consacrée à la descrip- tion des instruments actuellement employés pour l'étude de la Physique solaire. Ce n'est pas la partie la moins intéressante, et M. Hale l'a d'autant mieux traitée que nous lui devons presque complètement l'invention des appareils des- tinés à remplir le but que se propose, à ce point de vue, l’Astronomie physique. Disons, en terminant, pour guider le lecteur, que le volume est nettement divisé en deux parties : le texte proprement dit, avec quelques figures schématiques, comprenant 250 pages, et un supplément formé de 40% magnifiques reproductions de photographies, où l'on trouve représentés les Observatoires Lick, Yerkes et du Mont Wilson, avec leurs appareils. L'auteur n'a pas manqué d'ajouter les résultats obtenus avec ces magnifiques instruments : photogra- phies du Soleil, des protubérances et des spectres stel- laires. L'ensemble de ces planches forme, sans contredit, l’une des plus belles collections que l’on ait encore publiées dans un ouvrage destiné au grand public. Ajoutons que le livre est imprimé en caractères neufs et sur très beau papier, détail qui n'est pas sans impor- tance, puisqu'il contribue à donner au lecteur une idée plus nette des phénomènes grandioses que l’Astro- nomie physique étudie dans le Soleil. Abbé Th. Moreux, Directeur de l'Observatoire de Bourges. 2° Sciences physiques Mache (H.), Professeur à l'Ecole technique de Vienne, et Schweïdler (E. von), Professeur à l'Université de Vienne. — Die Atmosphärische Elektrizitit. — 4 vol. in-8° de 247 pages, avec 90 figures. (Prix : 7 fr. 50.) Friedrich Vieweg, éditeur. Braunsechweïg, 1909. Dans ce petit volume, on trouve réunies, sous une forme très maniable, la description des méthodes mo- dernes d'étude de l'électricité atmosphérique et l'indi- cation des résultats qui doivent être considérés comme acquis. Il est divisé en sept chapitres : 1° Le champ électrique de l'atmosphère; 2 La conductibilité élec- trique de l’atmosphère; 3° Les ions de Fatmosphère; 4 Les actions ionisantes el électrisantes de l'atmo- sphère; 5° Les courants électriques de l'atmosphère; 60 Les décharges lumineuses dans l'atmosphère; 7° Les théories de l'électricité atmosphérique. Dans le premier chapitre, on indique les méthodes de mesure du champ électrique au-dessus du sol. Les auteurs montrent très brièvement, — trop brièvement, parce que quelques indicalions plus précises ne seraient pas superflues, — que, d’après Benndorf et Conrad, les prises de potentiel à collecteurs radioactifs, du moins à substances émettant des rayons $, ne sont pas à recommander. Après une description de l'électromètre Exner, ils donnent en un tableau (p. 21) un résumé des valeurs trouvées pour le champ (en volts par mètre) en divers points du globe : ces valeurs varient de 53 dans l'Océan Indien (d'après Exner), jusqu'à 242 (valeur moyenne pour l’année) à Potsdam. La variation annuelle, la variation diurne à double oscillation en région basse, et à oscillation qui tend à devenir simple quand on s'élève au-dessus du sol, sont décrites som- mairement. A propos de la condueltibilité de l'air atmosphérique, les auteurs commencent par résumer en quelques pages la théorie des ions. Ils décrivent les appareils d'Elster et Geitel, et de Gerdien. [ls donnent quelques résultats des mesures de déperdition, en nombre de volts pour cent, dont baisse, par minute, le potentiel négalif, puis le potentiel positif; on déduit de ces deux nombres le rapport des vitesses de déperdition 4 — . : A 7 > . TE qui est toujours égal ou supérieur à 1, et qui 2 peut prendre des valeurs notablement plus grandes jusqu'à g — 15 sur des sommets de montagne. Sur ce dernier point, les auteurs glissent très rapidement, et avec raison, à mon sens, puisque, sur la manière dont s'établit cette dissymétrie quand on passe de #a plaine ou de la vallée à la montagne, les physiciens ne se sont pas encore mis d'accord : les premiers auteurs admet- taient que la déperdition négative augmente beaucoup quand on s'élève en montagne, la déperdition positive variant peu; il me paraît, au contraire, résulter de mes mesures et de celles de mes élèves (Baldit, Seignet), confirmées par celles de Piltchikoff, que c’e:t par dimi- nution de la déperdition positive que s'établit la dissy- métrie quand on monte. La teneur de l'atmosphère en ions, dans les diverses conditions météorologiques, les moyens d'ioniser et d'électriser l'atmosphère, et les moyens de rechercher la nature et la proportion des substances radioactives qui peuvent y être contenues, à titre d'émanations, par exemple, font l’objet des chapitres suivants. Le cin- quième chapitre est consacré aux courants électriques dans l'atmosphère, à la recherche de la somme des courants verticaux sur la surface entière de la Terre, aux courants de convection dus à la pluie et à la neige : à peu près tout ce que l’on sait aujourd'hui sur ces questions si importantes est exactement rappelé. Le sixième chapitre sur les décharges électriques, orages, aurores boréales, ete., est vraiment trop réduit. On eût aimé quelques développements sur l’enregistre- ment des décharges atmosphériques, et surtout sur les idées de Lodge, qui ont conduit à de si intéressantes conclusions pratiques, relatives à la construction des paratonnerres. Les théories modernes de l’électricilé atmosphérique sont rappelées en quelques pages. Ce petit ouvrage est, en somme, un bon manuel pour qui veut se mettre rapidement au courant des résultats aujourd'hui connus en électricité atmosphérique. BEnNaun BRUNHES. Directeur de l'Observatoire du Puy de Dôme. Toubeau (M.), Docteur en Droil, Inspecteur du Ser- vice de la Répression des Fraudes. — La Répres- sion des Fraudes sur les produits alimentaires, avec prélace de M. Roux, Docteur ès-Sciences, Chef du Service de la Répression des Fraudes. — 1 vol. in-8° de 328 pages. (Prix : 6 fr.) Rousseau, édi- teur. Paris, 1909. La nouvelle législation sur la répression des fraudes a semé dans le monde commercial des inquiétudes souvent injustifiées, a suscité dans les milieux judi- ciaires, avec un surcroît de besogne inattendu, des incertitudes nombreuses, el n'a été pourtant que le point de départ d’une œuvre de réglementation beau- coup plus complexe encore. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 603 Sans doute, avant la loi du 1° août 1905, qui est le texte fondamental en la matière, il existait déjà des dispositions légales contre la Fraude (Art. #23 du Code pénal, loi du 27 mars 1851); il existait aussi, sur quelques points du terriloire, des services munici- paux de recherche, de prélèvement et d'analyse, qui assuraient au public les garanties nécessaires contre des pratiques frauduleuses préjudiciables à la fois aux intérèts économiques généraux el à la santé des con- sommateurs. Mais il n'y avait là qu'une organisation très insufli- sante, qui n'avait pu s'opposer à celte floraison de so- phistications de toute nature, à laquelle il nous à été donné d'assister en ces dernières années. Pour prendre des mesures plus efficaces, le législa- teur français n'avait qu'à s'inspirer de l'exemple des nations voisines. Depuis 1875 en Angleterre, 1879 en Allemagne, 1820 en Belgique, 1898 en Autriche, l'Etat est armé de pouvoirs spéciaux de surveillance et de contrôle sur les denrées alimentaires ; il a des agents qui vont chez les commercants prélever des échantillons, lesquels sont ensuite soumis à l'analyse de Laboratoires officiels. De celte manière, peut-on dire, la police, au lieu d'attendre que la fraude ait fait des victimes, se porte, en quelque sorte, au-devant d'elle et la saisit à son origine même. La loi du {1e août 1905, après avoir renforcé el codifié les dispositions légales antérieures, à donné à l’'Admi- nistration, par son article 2, les pouvoirs réglemen- taires qui, à cet égard, lui faisaient défaut auparavant. Les trop rares organisations municipales disséminées dans toute la France ont fait place à des services pré- fectoraux permanents et uniformes qui procèdent en vertu d'une méthode identique au contrôle des denrées alimentaires ; les échantillons prélevés par ces services sont soumis à une analyse de triage dans un Labora- toire régional, subventionné à cet effet par le Ministère de l'Agriculture, et, lorsque le laboratoire conclut à l'existence d’une fraude, une enquête judiciaire com- mence. Les résultats heureux de cette procédure nou- velle n’ont pas tardé à se faire sentir ; partout les labo- ratoires constatent une diminution dans la propor- tion des produits reconnus mauvais. D'ailleurs, ce n'est pas simplement à une œuvre de réglementation répressive que nous aura conduits la loi du 14° août 1905. Des décrets ont été élaborés, avec le concours des négociants eux-mêmes, en vue de définir les aliments purs, d'indiquer le sens exact de certaines dénominations, d'éliminer, en s'inspirant des usages constants du commerce loyal, des pratiques susceptibles de créer dans l'esprit de l'acheteur une confusion sur la composition réelle des produits. Dans cet ordre d'idées, le récent Congrès international de Genève a posé les premiers jalons de la législation future. Voilà certainement des questions qui méritent d'être étudiées avec attention. L'ouvrage de M. Toubeau comprend trois parties : La première est consacrée à l'étude des textes (Loi du 1er août 1905, notamment) ; La seconde, beaucoup plus étendue, examine en détail la procédure du prélèvement, le rôle des Labora- toires, l'expertise contradictoire ; La troisième traite de l'intervention des Syndicats professionnels dans la répression des fraudes. Dans une annexe A, se trouvent réunis tous les prin- cipaux documents (Lois, Décrets, Circulaires) relatifs à la matière. Une annexe B contient les lois étrangères fondamentales qu'il y à intérêt à mettre en parallèle avec les nôtres. Enfin, un appendice sur le Congrès de Genève, auquel nous avons fait allusion ci-dessus (avec le Rapport technique de M. E. Roux, Chef du Service de la Répression des. Fraudes), complète cette publication. X. RocQuEs, Chimiste-expert des Tribunaux de la Seine, Membre de la Commission technique permanente de la Répression des Fraudes. 3° Sciences naturelles Wildeman (Em. de), Docteur ès Sciences natu- relles, Conservateur au Jardin botanique de l'Etat, à Bruxelles. — Etudes de Systématique et de Géo- graphie botaniques sur la Flore du Bas-Congo et du Moyen-Congo. — Annales du Musée du Congo, Botanique, série V, vol. II. Bruxelles, 1909. Continuant la série de ses belles recherches sur la végétation du Congo belge, M. de Wildeman vient de publier le second volume de ses Ztudes sur la Flore du Bas et du Moyen-Congo. Ce second volume est com- posé de trois fascicules; le dernier contient 89 grandes planches, qui complètent et éclairent admirablement un texte abondant, dans lequel sont décrites d’innom- brables espèces dont beaucoup sont nouvelles. M. de Wildeman s’est, d'ailleurs, occupé aussi bien des Crypto- games que des Phanérogames; c’est vraiment une Flore de l'Etat Indépendant qu'édifie en ce moment, avec sa haute compétence, le savant botaniste belge. Il faut tout l’acquis scientifique de l'auteur et ses larges connaissances en Botanique systématique pour mener à bien, en dépit de toutes les difficultés, un tel travail. Souhailons que nous ayons le plus tôt possible, pour les autres régions de l'Afrique tropicale, de sem- blables ouvrages d'ensemble, servant de base sûre aux recherches futures qui les compléteront peu à peu. Dans son œuvre, qui peut servir d'exemple et qui est le modèle à suivre, M. de Wildeman nous montre ce qui doit et ce qui peut être fait, si malaisée que la tâche paraisse actuellement. HENRI JUMELLE, Professeur à la Faculté des Sciences de Marseille. Nuttall (Georges IL. F.), Fellow of Magdalene College, Quick Professor of Biology in the University ot Cambridge; Warburton (Cecil), Carist's College, Zoologist to the Royal Agricultural Society; Cooper (W. FE.) et Robinson (Z. Æ). — Ticks. À mono- graph of the Ixodoïidea. Part 1: Argasidæ.— 1 vol. de x-139 pages, avec 3 planches et 11% figures dans le texte. (Prix: 6 fr. 25.) Cambridge, University Press, 1909. La découverte de l'importance économique des Tiques comme agents transmetteurs d'infection pour l'Homme et les animaux domestiques a ramené l’atten- tion sur ce groupe, et de nombreux travaux ont été récemment publiés. MM. Nuttall et Warburton, aidés pour la partie bibliographique par MM. Cooper et Robinson, ont entrepris de grouper nos connaissances sur les Tiques et d'en donner une monographie com- plète. Le présent livre est seulement le début de cette étude, et traite de la famille des Argasidés : deux genres sont admis : Argas avec 6 espèces certaines, et Orni- thodoros avec 11 espèces. La description faunique, très détaillée et d'une admirable précision, accompagnée de nombreuses figures pour la plupart originales, est suivie d'un intéressant chapitre biologique : effets et traitement des piqüres, transmission de la spirochétose des Poules par l’Argas persicus, de la tick tever humaine par l'Ornithodoros moubata, ele. Le volume complet comprendra environ 500 pages et paraîtra, si possible, dans le courant de l’année. L. CuéNor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy. 4° Sciences médicales Hauchamp (D' L.), Directeur du Laboratoire de Radiologie des Hopitaux de Bruxelles; Klynens, (D' J.), Radiologiste à Anvers et Mahaux (D' E.), Docteur spécial de l'Université de Bruxelles. — Atlas de Radiologie normale. — {1 vo/. in-4° de 320 pages, avec 153 schémas et radiogrammes. (Prix: 20 fr.) O. Doin, éditeur. Paris, 1909. Voilà un ouvrage qui sera bien accueilli par les mé- decins radiologistes. Cet Atlas n’est pas le premier en 604 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX date, mais jamais nous n’aurons trop de sciagrammes- types pourinterpréter nos radiographies. Utile au pra- ticien déjà expérimenté, pour lequel il constituera un complément de ses collections de clichés, il sera sur- tout précieux pour le spécialiste débutant,qui y trouvera non seulement d'excellentes planches, mais des ren- seignements pratiques et des conseils de technique qui lui aplaniront bien des difficultés. I faut féliciter les auteurs d’avoir donné, à côté des sciagrammes des régions les plus compliquées, des schémas anatomiques très clairs. Il faut les féliciter aussi de nous montrer les aspects différents que prennent ces régions par suite de changements, même peu considérables, dans la position du sujet. Une chose non moins utile est d’avoir figuré l'aspect des extrémités osseuses aux dif- férents âges, Combien d'erreurs de diagnostic ont été faites, par exemple, à l'occasion d’un traumatisme du coude chez l'enfant, où la tête du radius est séparée largement de la diaphyse ! Des chapitres spéciaux sont consacrés à l'étude des organes urinaires, digestifs, respiratoires, du cœur et de l'aorte. A l'examen radioscopique de l'estomac et à la mensuration orthodiagraphique du cœur est donnée une large place, et les médecins français liront certai- nement ces articles avec intérêt, car les auteursse sont richement documentés dans la littérature allemande, et ils ont donné, sous le titre modeste d'Atlas, un ouvrage qui pourrait être un excellent Manuel. Les travaux français leur sont moins connus; il est vrai que les Traités sont trop nombreux pour qu'il soit possible, lorsqu'on publie un atlas, de puiser à toutes les sources. H. GuiLLEMINOT, Attaché au Laboratoire des Travaux pratiques de Physique à la Faculté de Médecine. Jacquemet (D'M.), Médecin en Chef des Hôpitaux, Professeur à l'Ecole de Médecine de Grenoble. — Le Pansement à l’Asphalène. — 4 broch. in-8° de 6% pages des « Annales de l'Université ». Gre- noble, 1909. Ce sujet est beaucoup trop spécial pour qu'une véri- table analyse lui puisse être consacrée. Contentons- nous de dire que l’auteur rapporte un certain nombre de guérisons de plaies, brûlures, etc., obtenues par le pansement à l’Asphalène, dénomination d'une « pom- made composée aux essences ». 5° Sciences diverses Bouty (Edmond), Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Paris, membre de l'Institut. — La Vérité scientifique, sa poursuite. — 1 vol. in-8° de 358 pages. (Prix : 3 fr. 50.) Bibliothèque de Philo- sophie scientifique. Ernest Flammarion, éditeur. Paris, 1909. Voici un ouvrage dont la première partie, intitulée : Les sciences en général, comprend sept chapitres trai tant des sujets qui suivent : Légitimité et valeur de la Science. La marche de la Science. L'Enseignement et la recherche. La Science et l'Industrie. Les instru- ments, les mesures. Les lois naturelles. L'illusion, les fausses sciences. Le dernier chapitre se subdi- vise ainsi: L'illusion. La fée Morgane. Le spectre du Brocken. Les fausses sciences. L'Alchimie. La Transmu- tation des métaux et la Radioactivité. L'Astrologie, In- fluencés astrales. Les horoscopes. Les présages. L'Onei- romancie. La Chiromancie... Enumération qui vous prouvera suflisamment que les sujels annoncés dans le titre du chapitre ne sont pas simplement effleurés. La seconde partie, qui traite des sciences particulières, considère successivement: L'origine des Mathématiques. Les Mathématiques et la Métaphysique. Les Mathéma- tiques et les Sciences expérimentales. L'Astronomie de position, L'Astronomie physique. La Mécanique ration- nelle. Les ondes. L'Optique, l’éther. Les fluides élec- tiques et les électrons. Les ondes électriques, les vibrations hertziennes. La conservation de l'Energie. Dégradation de l'Energie. Théorie cinétique. La Chimie physique. Les origines de la vie. La Médecine. Les Sciences morales et politiques. J'ai lu ce livre toutentier et très vite, sans être fatigué par l'extrême variété des sujets, sans jamais trouver trop longs les nombreux chapitres consacrés à la science qui m'est familière. Et j'ai cherché à découvrir le secret du charme qui m'avait saisi dès la première page et ne n'avait abandonné qu'avec le regret de la dernière, trop tôt arrivée. J'ai relu et j'ai noté les procédés de style de l'auteur, dont la citation suivante vous donnera une excel- lente idée. Il s'agit de la Science et de l'Enseignement : «Les savants négligent presque toujours de nous initier à la genèse de leurs découvertes. Non seulement ils nous dérobent le spectacle de leurs vaines tentatives, de leurs hésitations ; ils nous conduisent par un chemin tout autre que celui qu'ils ont suivi. Parfois l’idée maitresse, sur laquelle ils insistent, ne s'est précisée pour eux qu'en dernier lieu. A la marche réelle de leur pensée et de leurs expériences, ils en substituent une autre qui, après coup, leur apparaît plus logique, plus aisée. Ils font déjà de l’enseignement. » Observez ces phrases courtes, dont la brièveté offre à la pensée des repos fréquents. Les affirmations ne sont pas dogmatiques, elles ne sont pas non plus entourées de restrictions. Chaque phrase exprime une idée que vous êtes libre d'accepter ou de contester; M. Bouty n'entend pas se colleter avec le lecteur réfractaire; il ne l'enserre pas dans de longues périodes. Il évite les mais, les si, les car, qui font d'une page entière une phrase unique. Quand on est d'accord avec lui, on lui est recon- naissant d'avoir donné à l'opinion que l’on partage une forme si simple et si claire; quand on est d’un avis dif- férent, on lui sait gré de la discrétion avec laquelle il expose les théories auxquelles on ne saurait souscrire. Il en est une au sujet de laquelle, au risque de ne pas imiter l'exemple qui m'est donné, je demanderai la permission de discuter avec mon cher Maitre. M. Bouty donne à une idée fort répandue la forme suivante : « Les Mathématiques sont pour le physicien un outil très parfait, très fidèle. Mais il ne doit pas se laisser aller à y voir autre chose qu'un outil. Le moule ne con- tient ni plus ni moins que ce qu'on y à versé. » Je n'ai jamais compris pourquoi, en définissant les Mathéma- tiques appliquées à la Physique comme un outil ou un moule, on entend leur manifester qu'on les tient en médiocre estime et qu'on éprouve à leur égard quelque défiance. Quand je visite le Musée de sculpture compa- rée au Trocadéro, je ne me sens jamais pris de l'envie de dire que les moules qui ont servi à préparer les pièces que j'admire n'ont rendu ni plus ni moins que le plâtre qu'on y avait coulé. À ce compte, la Chimie ne serait plus qu'une science vaine, depuis le jour où nous avons renoncé à chercher la transmutation des métaux et où nous avons dû nous résigner à ne retrouver dans les composés que les éléments dont ils ont été une fois formés. Et quant à l'outil, je réfléchis que, depuis l’âge de pierre, le progrès matériel de l'humanité consiste dans l'invention d'outils de plus en plus perfectionnés. Je regarde autour de moi : je n'aperçois que des objets qui ont été confectionnés à l’aide d'outils, souvent très nombreux. Il y a des outils, tels qu'un crayon ou une fourchette, dont je ne saurais me passer dans la vie quotidienne, et, dans le laboratoire, je me demande par quel vertige d’orgueil les instruments et les ma- chines ont pu, parce qu'on les a décorés du titre d'appa- reils, oublier qu'ils n'étaient autre chose que des outils. Aflirmer que les transformations mathématiques ne nous donnent pas quelque chose de nouveau, c’est vouloir que la chose soit ce substratum inaccessible, dont les diverses relations équivalentes nous font saisir différents aspects. Mais pourquoi ces relations, parce qu'elles ontunesignitication commune, ne seraient-elles pas, elles aussi, des choses distinctes? C. RAVEAU, Docteur ès Sciences. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES L 605 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1% Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Picard pré- sente quelques remarques sur les équations intégrales de première espèce et sur certains problèmes de Phy- sique mathématique. — M. E. Vallier communique les résultats auxquels il est arrivé dans l'étude des intégrales pseudo-elliptiques où hyperelliptiques de la forme : x XPUX Av VE. — M. S. Zaremba signale que le résultat auquel est arrivé M. Bernstein dans sa note récente sur le principe de Dirichlet rentre comme un cas particulier dans une proposition quil a lui-même déjà énoncée. — M. J. Chazy présente ses recherches sur les équations différentielles à points critiques fixes. — M. Em. Borel communique une étude sur les variations des quan- tités statistiques. —M. Ph. Bunau-Varilla donne une loi permettant le calcul immédiat du profil approché d'un cours d’eau de débit donné : La moyenne arithmétique des inverses des pentes de l’eau en deux points d’un cours d’eau est égale à l'inverse de la pente moyenne du cours d’eau entre ces points, c'est-à-dire au quotient de la longueur du cours d’eau entre ces points par leur différence de niveau. — M. J. Guillaume adresse ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le premier trimestre de 1909. La surface totale des taches a augmenté d'un tiers; la diminution des facules, tant en nombre qu'en étendue, persiste. — M. L. Montangerand a observé l'éclipse totale de Lune du 3 juin à l'Observatoire de Toulouse; il en a pris plu- sieurs photographies. — M. D. Eginitis a procédé à la redétermination de la latitude de l'Observatoire d'Athènes par des mesures d'étoiles fondamentales, par des mesures de circompolaires et par la méthode de Horrebow-Talcott. La moyenne des résultats est de 3705819, 71 + 0,02 pour le cercle Gautier et de 37° 58/19", 32 + 0,02 pour le cercle Starke.— M. A. An- got donne quelques renseignements sur le tremblement de terre du {1 juin, qui a ébranlé tout le littoral fran- çais de la Méditerranée. Il a été complètement enre- gistré au Pare-Saint-Maur sur le sismographe Weichert. — M.G. Bigourdan a recherché les tremblements de terre qui ont dévasté la Provence et le Dauphiné depuis quelques siècles; aucun d'eux ne s’est produit dans la région dévastée le 11 juin. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Dufour à observé, parallèlement aux lignes de force, les dissymétries de positions et d’intensités des composantes magnétiques de certaines raies d'émission (oxyde de chrome); il a trouvé un nouveau type de dissymétrie, où la raie modifiée est symétrique vis-à-vis d'une ligne décalée du côté du violet par rapport à la raie initiale. — M. G. Meslin à étudié le dichroisme magnétique des terres rares : il est direct et beaucoup plus intense pour La et Dy que pour Sa et Ga. — M. d'Ivry présente un dispositif de commande de signaux à distance avec un seul fil ou sans fil. — M. G. E. Petit décrit un nouveau détecteur d'ondes pour la télégraphie et la téléphonie sans fil : il est constitué par une pointe con- ductrice très fine reposant avec une pression déter- minée sur une pyrite de fer naturelle. — MM. M. de Broglie et L. Brizard estiment que, dans de nom- breuses réactions chimiques donnant naissance à des fumées chargées, la production des charges est due, non au phénomène chimique, mais à un phénomène physique concomitant, le plus souvent à une rupture de surface liquide ou cristalline. — M. A. Laborde à reconnu que la nature de la paroi intervient dans le phénomène de la condensation de lémanation du radium. L'émanation est retenue très facilement par certains corps poreux (charbon de bois, écume de mer, mousse de platine), moins par les métaux etencore moins par le verre ou le verre argenté. — M. Barre à constaté que la solubilité du sulfate de Ca est considé- rablement augmentée par la présence du sulfate d'Am et diminuée par celle du sulfate de K. Le sulfate double CaSO*(AzH!}*SO4H°O est stable entre 0 et 100° en pré- sence d’un excès de sulfate d'Am; le sulfate double CaSO!.K°S0#.H°0 est stable de 0 à 99°. — M. P. Lemoult a reconnu que les nitriles sont des composés normaux au point de vue thermique, sans déficit ni surcharge thermique, tandis que les carbylamines sont des com- posés anormaux, à cause d’une surcharge de 17 à 48 cal. — MM. L. Barthe el A. Minet, en faisant réa- gir l'acide cacodylique sur SbCI', ont,oblenu le caco- dylate d'antimoine dichloré As(CH*)?20ShCF ; l'acide méthylarsinique réagit aussi sur SbCI pour donner le méthylarsinate d’antimoine CH*AsO(OSbO)?. — M. J. Leroidea préparé plusieurscombinaisons magnésiennes de la fénone; celles-ci, chauffées pendant longtemps en présence d'une grande quantité de solvant, se trans- forment en dérivés magnésiens d’alcools tertiaires. — M. H. Leroux à préparé le cis-naphtanediol-6 (décahy- dronaphtylglycol-8) et le transnaphtanediol-6. Le premier fond à 4609, le second à 1419; ils donnent un composé fusible à 1250. — M. R. Fosse a constaté que les dérivés monohalogénés du dinaphtopyrane prennent l'allure de sels métalliques en présence des acides minéraux, de l'acide picrique et de HS. 3° Sciences NATURELLES. — M. A. Frouin à constaté que l'absorption de calcium ou de magnésium avec les ali- ments supprime chez les animaux les symptômes consé- cutifs à la parathyroïdectomie (crises tétaniques), ainsi que ceux consécutifs à la thyroïdectomie (cachexie). — MM. H. Guillemard et R. Moog ont reconnu que la perte de poids du corps dans l'unité de temps est plus faible en montagne qu’en plaine; il en est de même de la perte d'eau. Le rapport entre laquantité d'eau éliminée et la perte de poids totale, qui est voisin de 0,88 en plaine, semble diminuer légèrement en montagne. — MM. E. Doumer et G. Lemoine ont observé un parallé- lisme frappant entre l'hypertension artérielle et l'aryth- mie extra-systolique; la d’arsonvalisalion s'est montrée très efficace contre ces deux symptômes. —M. A. Mou- tier a obtenu de bons résultats dans le traitement de la claudication intermittente et de la gangrène des extré- mités inférieures par la d'arsonvalisation. —_M.M.Bau- doin a retiré de l’ossuaire de Belleville (S.-et M.) une série de crânes néolithiques, présentant la déformation artificielle, dite annulaire, connue sur des cränes modernes. Cette déformation est donc très ancienne el autochtone. — M. M. Oxner a übservé un nouveau cas d'hermaphroditisme chezune Métanémerte, l'Oersterdia rustica: il doit être attribué à la nourriture spéciale et très abondante de cette espèce. — M. F. Guéguen à étudié le Bacillus endothrix, trouvé dans certaines affections du cuir chevelu. Il est très sensible aux antiseptiques. — M. L. Gentil a constaté que les tirs ou terres fertiles du Maroc occidental s'étendent à toute la Chaouïa; elles proviennent de la décalcitication, non seulement des sédiments pliocènes, mais encore des calcaires marneux du Crétacé. — M. G. Garde à exploré l'Eguéi, région de monticules sableux au nord-est du 606 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Tchad, où il a trouvé du natron, de la thénardite, du gypse et un phosphate de fer voisin de la borickite. — M. E. Haug a reconstitué les géosynclinaux (au nombre de 6), séparés par 5 géanticlinaux, qui existaient dans les s Alpes aux temps secondaires. Séance du 21 Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Sanielevici pré- sente ses recherches sur une question de minimum d'intégrale définie. — M. M. Riesz applique certaines méthodes de sommation aux intégrales de Dirichlet. — M. L. Thouveny distingue dans l'aile de l'oiseau des qualités propulsives et des qualités de soutien; il y a contradiction entre les qualités des deux ordres et l'un d'eux doit être plus ou moins sacrifié à l’autre. — M. A. Rateau décrit une méthode d'expériences pour re- cherches aérodynamiques : les surfaces, corps, modèles ou hélices à étudier sont placés dans un courant très homogène obtenu en faisant sortir par une buse con- vergente, de largeur assez grande, de l’air soufflé par un ventilateur. — M. Javelle présente ses observations de la nouvelle comète Daniel, faites à l'Observatoire de Nice. — M. H. Bourget adresse les observations de la comète 1909 a, découverte par M. Borrelly simultané- ment avec M. Daniel, faites à l'Observatoire de Mar- seille. —- M. P. Chofardet communique les observalions de la comète 1909 a (Borelly-Daniel), faites à l'Obser- vatoire de Besancon. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. W. Duane à déterminé la chaleur dégagée par les sels de polonium ; elle est de 0,0117 cal. par heure. Les expériences sont favorables à l'hypothèse que la chaleur dégagée est due à l'énergie cinétique des rayons X. — M. L. Houllevigue a cons- taté que le nombre des ions, positifs et négatifs, qui existent au voisinage des canalisations élec triques à haute tension est sensiblement nul, moindre en tout cas que dans les environs; loin de produire des ions, ces canalisations paraissent plutôt capter ceux de l'air ambiant. —M. A. Leduc indique une nouvelle formule du type de Clausius représentant correctement l'écart à la loi de Mariotte entre 0 et 3 atmosphères. — M. E. Mercadier a réussi à envoyer simultanément sur un seul conducteur télégraphique relié à la terre à ses deux extrémités des signaux produits par des courants alter- natifs de périodes différentes, et d’autres signaux pro- duils par des courants continus. — M. J. Guinchant décrit un galvanomètre pour courants alternatifs, dans lequel le courant alternatif agit sur une lamelle de fer suspendue à un fil de cocon et placée au centre de deux bobines fixes à axes rectangulaires. — MM. F. Bo- droux et F. Taboury, en faisant réagir la méthyl-2- pentanone-x sur les combinaisons organo-magné- siennes, puis traitant le produit par HCI étendu, ont obtenu les alcools tertiaires qui doivent normalement se former et les carbures éthyléniques correspondant à ces alcools. — MM. A. Haller el Ed. Bauer, en faisant réagir CIFI sur le camphre sodé au moven de l’amidure de Na, sont parvenus à remplacer les deux H du groupe CH® voisin du carboxyle par deux CH! ; le diméthylcam- phre ainsi formé, Eb. 106° sous 41 mm , peut être trans- formé en amide de l'acide dimé ‘thylcampholique, F. 729-739, quand on chauffe sa solution benzénique avec l'amidure de Na. — M. Béchamp, en traitant le thio-indigo par les dérivés organo-magnésiens, a obtenu dans tous les cas un produit de nee instable, dont on peut préparer les dérivés acétylé, F. 2480, etbenzoylé, l. 2259, — M. A. Berg à préparé l'ac ide élatérique par action de KOH sur l'élatérine. Il fond à 730-750; sa for- mule est C#H#07; ses sels sont amorphes. — MM. G. Bertrand et V.I.Meyeront constaté, par la cryoscopie de son chlorhydrate, que la pseudomorphine corres- pond à la formule C'#H#Az?0° ; elle dérive donc de 2 restes de morphine ayant perdu chacun 1 H et soudés en posilion trans. — M. G. André à reconnu que la proportion centésimale del'Az des feuilles décroît régu- fe rement à mesure que la feuille vieillit; mais celle de l'azote amidé augmente. — M. F. Garrigou à trouvé dans l’eau de la source de la Chaldette (Lozère), émer- geant d’un terrain granitique, une série de substances colloïdes, qui renferment tous les métaux. 3° SCIENCES NATURELLE:. — M. R. Bayeux à reconnu que la température animale et la viscosité du sang subissent, sous l'influence passagère de la haute alti- tude, des perturbations qui sont proportionnelles à la durée du séjour. — M. P. Bonnier estime que le pollen des Graminées ne joue qu'un rôle accessoire dans la détermination des crises de rhume des foins ; celles-ci sont sous la dépendance d'un affolement de certains centres bulbaires; elles disparaissent après la cautéri- sation de la muqueuse nasale. — M. L. Camus à cons- talé que l’état bactéricide des humeurs de l'organisme ne s'égalise pas avec le temps, sous l'influence des échanges nutritifs; les tissus sont d'autant plus récep- tifs pour les virus que l'humeur qui les baigne est moins bactéricide. — M. P. Termier montre qu'il y a à l'ile d Elbe deux séries éocènes, appartenant à des nappes différentes, qui peuvent venir en contact par les hasards du laminage, ma's qui sont séparées strati- graphiquement par la zone des terrains métamorphiques (schistes lustrés). — M. L. Duparc divise les schistes cristallins de l'Oural en deux types : des roches quart- zeuses, qui ne sont que des sédiments métamorphisés, et des roches plutôt basiques, provenant de l'écrase- ment de diabases. — M. G. Garde a étudié au point de vue géologique les régions situées à l’est et au nord- est du Tchad. L'Eguéi, le Toro et le Koro ont été envahis par les eaux à une époque relativementrécente. — M. Ph. Négris a observé de nombreuses brèches de friction dans les surfaces de charriage du Péloponèse. — M. P. Lemoine a reconnu que les lignes tectoniques principales dé la Provence coïncident avec les régions les plus éprouvées par le dernier temblement de terre, de sorte que l’origine tectonique de celui-ci ne parait pas douteuse. — M. Jullien à constaté, d'autre part, que les localités les plus frappées par le tremblement de terre du 11 juin sont situées sur les bords présumés du lac qui s'étendait sur la région à l’époque sex- tienne. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 145 Juin 1909. M. le Président annonce le décès de M. Saint-Yves- Ménard, membre de la Section de Médecine vétéri- naire. — M. Schwartz esr élu membre titulaire dans la sue de Pathologie chirurgicale. le D' Nepveu lit un travail sur la photothérapie de ne tuberculose laryngée. — M. le D' Dominici donne lecture d'un travail sur le traitement des cancers pro- fonds inopérables par le rayonnement ultra-pénétrant du radium. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 12 Juin 1909. MM. Hutinel et L. Tixier montrent qu'il y a àtoutes les périodes du rachitisme une prolifération médullaire insolite, qui tient davantage à la nature de la maladie ie à sa durée. — M. L. Tixier et M'e Feldzer ont cons- taté chez une quinzaine d'enfants l'existence de glandes vasculaires sanguines juxta-thymiques non encore décrites. — MM. P. Widal et R. Benard ont observé un cas de biligénie hémolytique localisée à la peau sur de largesplaques d’érythème noueux sans extravasation sanguine. — MM.M. Doyon el Cl. Gautier ont reconnu que la peptone, injectée dans une veine de la circulation générale, détermine en quelques instants la dilatation de la pupille ; elle paraît agir par l'intermédiaire des centres nerveux, — MM. A. Laveran et A. Pettit ont trouvé chez le Melopelia leucostera une hémamibe nouvelle, voisine de l’Æ. majoris, qu'ils décrivent sous le nom d'#/, melopeliæ. — M. V. Pachon montre que la méthode de Riva-Rocci pour la détermination de la pression artérielle chez l’homme est entachée d'une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 607 erreur de principe et que l'exploration seule du pouls à l'endroit précis de la zone comprimée doit être sy témaliquement adoptée en sphygmomanométrie clini- que. — MM. Busquet et V. Pachon ont constaté que l'action suspensive exercée sur le pouvoir cardio-inhi- biteur du vague par les solutions isotoniques de sels de Na, employées comme liquides de circulation artiti- cielle à travers le cœur, est due à la soustraction par lavage d’une substance nécessaire à la production de l'inhibition cardiaque, substance spécilique qui est le calcium. — M. Ch. A. François-Franck recommande la sphygmomanométrie digitale comme procédé d'anà- lyse pléthysmographique sous pression variable et mesu- rable, et la sphygmomanométrie brachiale comme pro- cédé de mesure de la pression artérielle. — Mie M. Bellion à observé chez l’escargot, pendant l'hiberna- tion, une diminution de poids, une consommation des réserves et un ralentissement des échanges respira- toires ; l'état hygrométrique de l'air est le facteur essen- tiel de la torpeur hibernale ; la température n’est qu'un facteur accessoire. — M. A. Lécaillon a reconnu que les transformations qui se produisent dans l'aspect extérieur de la cicatricule des œufs pondus par les poules qui ne se sont jamais accouplées sont identiques à celles qu'il a signalées précédemment dans les œufs de poules séparées de tout|coq depuis plus de 6 mois. — MM. A. Sartory el J. Maheu ont constaté quele Bacillus anthracis, le B. pyocyaneus, le bacille d'Eberth et le colibacille, conservés en tubes scellés pendant plus de 15 ans, ont conservé leur vitalité, avec amoindrisse- ment du pouvoir pathogène, — MM. A. Courcoux et L. Ribadeau-Dumas ont observé la production d'hépa- tites scléreuses par l'injection des toxines adhérentes du bacille de Koch. — M. H. Bottu décrit les condi- tions où il opère pour rechercher le glucose dans les urines au moyen de l'acide orthonitrophénylpropiolique. — M. L. Launoy montre que le pouvoir antitryplique du sérum de chiens porteurs de lymphosarcomes n’est pas supérieur à la normale; il peut mème lui être nota- blement inférieur. — MM. A. Netter et R. Debré ont reconnu qu'après les injections intra-rachidiennes de sérum antiméningococcique les accidents sériques ne sont ni plus ni moins'fréquents qu'après les injections sous-cutanées. — M. A. Le Play a constaté que la pro- priété opsonisante est bien propre au sérum sanguin et n'existe pas, où du moins existe d'une façon à peine appréciable en dehors de sa présence. — M. Ed. Chatton à trouvé, chez une Réduve du midi de la France, l’Harpactor 1racundus, un Trypanosomide nouveau, le Leplomonas agilis. — MM. Ch. Achard et Ch. Foix ont déterminé le pouvoir leuco-activant des sérosités. Il paraît être fort dans les sérosités de glisse- ment, faible dans les sérosités de remplissage ou de soutien. Séance du 19 Juin 1909. M. A. Guilliermond considère les Saccharomyces et les Schizosaccharomyces comme dérivés d'un genre très voisin de l'Zremascus fertilis. De cette souche se seraient détachés deux rameaux : l’un aurait donné l'E. Magnusii et les Schizosaccharomyees; l'autre aurait fourni l'Endomyces fibuliger, les Zygosaccharo- myces et les Saccharomyces. — MM. W. Mestrezat el H. Roger estiment que le syndrome de coagulation massive, de xanthochromie et d'hémaleucocytose, quand il est au complet, répond à un processus bien déterminé de méningite rachidienne hémorragique et cloisonnée, entrainant une compression médullaire. — MM. Ed. Retterer et A. Lelièvre ont constaté que les muscles offrent le mème type de structure générale : réticulum chromophile et élastique, dont les mailles sont remplies d'hyaloplasma contractile, qu'ils fournis- sent un travail statique ou exécutent surtout un travail dynamique. — M. Ch. Richet, en mélangeant in vitro le sérum d’un animal anaphylactisé et un poison ana- phylactisant, qui sont lous deux séparément sans action sur un animal neuf, a obtenu un produit qui déchaîne immédiatement les accidents anaphylactiques chez l'animal neuf, — M. G. Finzi a déterminé le pou- voir antitrypsique du sérum desanimaux domestiques : il est égal à celui du sérum humain pour le mouton et la chèvre, un peu moindre pour le bœuf, le cheval, le chien, très faible pour les oiseaux. — MM. A. Netter etR. Debré ont retiré, par ponetion lombaire pratiquée plus de deux semaines après le début de la maladie, un liquide céphalo-rachidien limpide dans 55 °/, des cas de méningite cérébro-spinale. — M. A. Lafont à observé dans le latex de l'Zuphorbia pilulifera la pré- sence d'un parasite de la classe des Flagellés et du genre Leplomonas. — M. M. Doyon à reconnu que l'abrine injectée dans une veine mésaraique détermine très rapidement une énorme diminution du glycogène hépatique. — MM. J. Castaigne el A. Weill ont observé, dans un cas d'hémorragie méningée, l'appa- rition za situ d'une sensibilisatrice hémolysante vis-à- vis des hématies humaines. — M. L. Bory montre que la lame élastique interne des parois artérielles est une production endothéliale. — MM. E. Wertheimer et G. Battez ont constaté que le sulfate d'atropine, injecté à la dose de 8 à 10 centigrammes par kilog, amène une paralysie durable des filets excito-salivaires du sympathique. — MM. L. Grimbert el R. Bernier montrent que le corps qui prend naissance dans l'hy- drolyse de l'urine, dans la réaction de Cammidge, existe normalement dans toutes les urines et ne sau- rait avoir aucune signification clinique. — MM. A. Gil- bert et M. Villaret confirment leurs précédentes expériences sur la circulation portale, dont le méca- nisme se continue quelques heures après la mort, par suite de la surviefplus ou moins longue des tissus du foie. — MM. Chartier et Morat ont étudié les variations de la formule sanguine chez les morphinomanes et les héroinomanes au cours de la désintoxication rapide par la méthode de Sollier; il y a polynucléose dans la période aiguë, mononucléose, pendant la convalescence. — M. G. Rosenthal donne une nouvelle preuve de l'iden- tüité du Bacillus perfringens et de la bactérie anaérobie de l'hémobioculture rhumatismale, par l'action croisée préventive sur les cobayes inoculés avec du sérum T. R. — M. L. Cruveilher montre l'existence d'une endotoxine typhique absolument distincte de la toxine soluble et qu'on peut isoler d'une émulsion de bacilles après avoir détruit la toxine soluble par chauffage à 100-1050 à l’'autoclave. — MM. Ch. Achard, L. Ramond et Ch. Foix ont étudié la résistance et l’activité des globules blancs du sang dans les infections aiguës; leur relèvement est un signe de bon pronostic, leur chute à un niveau très bas un indice fatal. — M. CI. Regaud à observé la participation des chondriosomes à la formation des grains de ségrégation dans les cel- lules des tubes contournés du rein chez les Ophidiens et les Amphibiens. — MM. L. Calvet et P. Paul ont obtenu, après plusieurs essais, le développement de la Diatomée bleue dans un des bassins de Balaruc-les- Bains et le verdissement des huîtres qui y étaient con- tenues. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 8 Juin 1909. MM. Ch. Mongour et Roche ont observé, dans un cas de méningite cérébro-spinale, une réaction de Was- sermann négative avec le liquide céphalo-rachidien, devenant positive après l'injection intra-rachidienne de sérum antiméningococcique. — M. J. Gautrelet à constaté la présence constante de choline dans le sérum des chiens décapsulés. — MM. J. Gautrelet el L. Tho- mas ont reconnu que la décapsulation totale supprime chez l'animal le pouvoir de lutter contre la tempéra- ture extérieure par la polypnée. — M. M. Aubaret décrit une méthode pour apprécier la valeur fonction- nelle de l’orifice inférieur du conduit lacrymo-nasal. L'insuffisance de cet orifice dépend exclusivement d'un très léger degré de béance, quels que soient l'aspect, la forme et les dimensions de cet orifice. 608 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 18 Mai 1909. M. Dufour présente une modification du diploscope de Rémy. — MM. L. Garnier et A. Fritsch ont con- staté qu'une ration de 6 milligrammes par kilogramme et par vingt-quatre heures de chaux végétale, c'est- à-dire bien assimilable, a pu suffire pendant cinq mois à l'entretien de l'organisme adulte. — MM. G. Etienne et A. Fritsch montrent que le rôle athéromatisant du chlorure de calcium dans l’athérome expérimental n'appartient pas à sa chaux, car il provoque la décal- cification de l'organisme. — M. J. Parisot a reconnu que l'hypertension céphalo-rachidienne peut entrainer, dans certains cas, une élévation de la préssion san- guine. — MM. P. Jeandelize, M. Lucien et J. Parisot ont observé que les poids absolus et relatifs du thymus sont constamment inférieurs, chez les lapins thyroï- dectomisés, aux poids de la glande chez des témoins de même portée. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST Séance du 12 Mai 1909. M. V. Babes a étudié les lésions fines des testicules dans la rage; la fonction de spermatogénèse est très active dans la rage furieuse et très diminuée dans la rase paralytique. — MM. J. Bruckner el P. Gale- sesco ont étudié la réaction de Hecht, qui consiste à employer l'alexine normale de l’homme pour la réac- tion de Wassermann; ce procédé est plus simple et beaucoup plus sensible. — MM. G. Marineseo et J. Minea décrivent les lésions fines des fibres et des cel- lules nerveuses dans la sclérose en plaques. — M. Th. Mironesco à constaté que, dans le coma diabétique, les organes les plus pauvres en glycogène à l'état nor- mal, comme les centres nerveux, en contiennent main- tenant le plus, et vice versa. — M. G. Nadejde à reconnu que les cellules nerveuses situées au voisinage d'un foyer tuberculeux intra-cérébral sont hypersen- sibles à la tuberculose. — MM. Stanculeano et Radu ont observé dans tous les cas de trachome aigu, parmi les cellules épithéliales normales de la conjonctive, d'autres cellules dont le protoplasna contenait des for- mations ovalaires ou sphériques, se colorant en bleu ou violet comme le nucléole. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 4 Juin 1909. M. Laurent Sémat présente son « Téléautocopiste » isosynchrone pour la transmission télégraphique des dessins et de l'écriture à distance, ainsi que tous au- tres graphiques tracés où imprimés. Get appareil se compose essentiellement de deux dispositifs électro- mécaniques, l'un transmetteur et l’autre récepteur, en circuit dans une ligne télégraphique ou télépho- nique. Ces deux dispositifs comportent, chacun, un cylindre porle-image dont les proportions dissembla- bles pour des transmissions et reproductions d'images en même format sont la caractéristique essentielle de l'invention. Ces deux cylindres sont de même hauteur, mais de diamètres différents. Supposons que le plus petit en diamètre (transmetteur) soit de 1/8 moins grand en pourtour périphérique que le plus grand en diamètre (récepteur). L'image à transmettre est en- roulée sur le plus petit et en occupe toute la surface périphérique. Les feuilles propres à reproduire l’image, enroulées sur le plus grand, ne recevront cette image en même format que sur les 7/8 du pourtour périphé- rique, en laissant une marge inoccupée, parallèle à l'axe du cylindre, de 1/8 de la surface totale. Les vitesses angulaires de rotation des deux cylindres étant dans le même rapport, les vitesses linéaires sur les surfaces sont égales. Lorsque le cylindre transmetteur à ter- miné une de ses révolutions, il s'arrête. Le moment de cet arrèt coïncide avec celui où le cylindre récep- teur n'a accompli que les 7/8 de la sienne. Lorsqu'à son tour ce dernier a achevé sa révolution, il produit une interruption de la ligne du parcours qui provoque le départ à nouveau du cylindre transmetteur, et cela se renouvelle pour chaque tour. Sur chacun des cylin- dres porte-image repose un style : l'un émetteur, l'autre reproducteur, qui sont entrainés, pendant la rotation des cylindres, dans un mouvement de trans- lation parallèle à leur axe. Il résulte de la manœuvre électro-mécanique décrite plus haut que les deux cylindres commencent en même temps à évoluer (syn- chronisme) et qu'ils présentent, sous leur style res- pectif, des ares de cercle de longueurs égales dans le méme temps (isochronisme). Sur un courant d'inten- sité faible, permanent dans la ligne du parcours, se greffent des fluctuations qui déterminent dans le style reproducteur les pressions qui impriment l'image transmise. Ce courant permanent n'est coupé qu'à chaque tour du cylindre récepteur et assure le syn- chronisme. Pour la transmission et la reproduction d'images en formats proportionnellement plus grands ou plus petits, les diamètres des cylindres conservent entre eux les mêmes rapports que ceux décrits, mais proportionnels aux formats, ainsi que l'entrainement des styles émetteur et reproducteur. — M. Kolowrat présente un dispositif destiné au réglage automatique d'un four électrique à résistance; il s'agit de maintenir dans le four, pendant des journées entières, une tem- pérature élevée et aussi constante que possible, en se servant, pour alimenter le four, d’un courant alter- natif de secteur, dont la tension est, comme on sait, assez variable. Un couple thermo-électrique Le Chate- lier est introduit dans le four et relié à un galvano- mètre. Le cadre mobile de ce dernier porte, en outre du miroir destiné à permettre la lecture de la dévia- tion sur une échelle, un autre miroir plan de 4m x 5em de surface. Ce miroir est disposé de telle facon que, lorsque la température dans le four et, par conséquent, la déviation du galvanomètre atteignent une limite arbitrairement prescrite, les rayons d'une lampe Nernst viennent se réfléchir sur le miroir pour tomber ensuite sur les soudures d’une pile thermo-électrique Rubens de 20 éléments cuivre-constantan. Le courant qui se produit dans la pile est suflisant pour actionner un système de relais électromagnétiques et introduire ainsi une résistance supplémentaire dans le cireuit du courant qui alimente le four. La température du four baisse alors, la déviation du galvanomètre diminue et l'image de la lampe quitte les soudures de la pile; le système de relais shunte la résistance qui avait été iutroduite, la température du four se met à monter de nouveau et le même jeu recommence indéliniment. L'appareil ainsi constitué a permis de maintenir des températures allant jusqu'à 1000°, dans un intervalle de 2 à 3 degrés. — M. de Broglie : Les suspensions dans les gaz et les dernières mesures de la charge atomique par les mouvements dans un champ et l'agi- tation brownienne des poussières chargées. Toutes les fumées sont résolubles, quand on examine au micro- scope un faisceau lumineux intense qui les traverse, en un grand nombre de points brillants animés, outre les mouvements d'ensemble que le gaz peut posséder, de vifs mouvements browniens. En ajoutant à ce dis- positif un champ électrostatique, on voit individuelle- ment les poussières chargées, el on peut suivre et mesurer leurs déplacements; cette méthode se prête à une étude approfondie des suspensions gazeuses. En examinant les diverses actions auxquelles sont sou- mises des particules en suspension dans un gaz, on est amené à envisager : {° La pesanteur, dont l'effet se fait sentir par une vitesse de chute v, donnée par la formule de Stokes : (1) 4/3ru%dq —=6racv, où a est le rayon de la particule, 5 le coefficient de viscosité du gaz. 2% Si les particules sont chargées, l'effet d’un champ électrostatique se traduit par une vitesse ou mobilité w donnée encore par la formule de Stokes : (2) He = 67asw, où H est le champ, e la charge d’une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 609 particule. 3° Enfin, la théorie cinétique prévoit et l'ob- servation confirme l'existence d'un mouvement brow- nien très vif dont l'intensité pourra se mesurer par la formule d'Einstein : (3) A? —(RT/N) (t/3rsa). Les rela- tions précédentes montrent que, si l'on connaît à et si lou mesure w, on peut avoir e par la relation (2). M. Ehrenhaft a mesuré récemment à par la relation (1) pour des particules métalliques. Il à trouvé : pv — 1,25.10—2 em : s ; a—3.10—5;e —4,6.10—10; mais il faut connaître exactement la densité d. M. de Broglie est parvenu à enregistrer photographiquement les trajectoires du mouvement brownien; ces trajec- toires s'inscrivent en lignes déliées et sinueuses sur lesquelles on peut mesurer directement la quantité A de la formule d'Einst'ein et noter les particularités de l'agitation moléculaire. Ces mesures, faites avec de la fumée de tabac, ont donné les chiffres suivants : 1AS —0,7.105, pour 4 = 35,5, v — 27,5.10—3, (dans un champ de { unilé électrostatique), d'où a—%4,9.10—6, et e— 4,5.10—10, ce qu'on peut considérer comme une bonne vérilication de la formule d’Einstein et des principes sur lesquels elle repose. Des parti- cules plus grosses, de rayon 5.10-°, ont montré plu- sieurs fois la charge élémentaire, fait qui peut s'expli- quer en admettant qu'à partir d’une certaine grosseur elles subissent l'influence à la facon d'un petit condue- teur, et peuvent ainsi attirer successivement plusieurs charges de même signe. On peut, du reste, montrer directement que l'exposition aux rayons du radium, qui tend à ramener les charges à une valeur d'équi- libre, abaisse la mobilité des particules à charges multiples. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 11 Mars 1909. M. G. H. Darwin : Sur la stabilité de l’ellipsoide de Jacobi. L'auteur réfute certaines objections de M. Lia- pounoff à ses travaux. — M. H. E. Watson a déterminé les longueurs d'onde des lignes dans le Spectre secon- daire de l'hydrogène. Environ 800 lignes ont été mesurées au moyen d'un réseau concave de Rowland, l'erreur ne dépassant pas 0,03 unité d'Angstrôm. L'au- teur n'a découvert aucune ligne qui soit moins réfran- gible que la ligne C, et il paraît en exister très peu au delà de la limite théorique de la série primaire d'après la formule de Balmer. En fait, parmi ces dernières, la majorité est due à la vapeur d’eau, et il n’est pas impro- bable que les autres n’appartiennent pas à l'hydrogène. — M. W. M. Thornton : La mesure des constantes dielectriques par les oscillations d'ellipses ou de cylindres dans un champ de force. La méthode consiste à suspendre par une fibre de quartz, dans un champ de force alternatif, des ellipsoides ou des cylindres de la substance à essayer. Le champ a une intensité d'en- viron 300 volts par centimètre et alterne à une fré- quence d'environ 80 par seconde. Le couple de polari- sation agissant sur le spécimen se trouve en mesurant les périodes de petils ressorts avec et sans le champ. De celui-ci et des dimensions du corps, on déduit la constante diélectrique. Les liquides ont été mesurés en les renfermant dans des cylindres en papier mince suspendus dans une selle en fil de soie. L'air environ- nant à été soigneusement desséché par P°05. Voici quelques-unes des constantes diélectriques obtenues par l’auteur. Quartz, parallèlement à l'axe optique, 4,606; perpendiculairement, 4,548; verre de flint, 10,64 (pour A — 4,65), 8,52 (pour À — 4,12), 6,98 (pour A =3,30); cire de paraffine, 2,32; cire d'abeille, 4,75 ; gomme-laque, 2.45; gutta-percha, 4,43; ébonite, 2,79; ambre, 2,80; ivoire, 6,90; baume de Canada, 2,72 caoutchouc, 3,08; soufre, 4,03; huile d'olive, 3,16; huile de paraffine lourde, 2,55 (pour À —0,885). Séance du 18 Mars 1909. M. H. A. Wilson : Æssai pour découvrir quelques eltets électro-optiques. Ce Mémoire contient une des- cription de quelques expériences entreprises dans le but de découvrir des effets possibles dus à l'action des champs électriques et magnétiques et de la matière en mouvement sur la vitesse de propagation de la lumière dans le verre. Les résultats obtenus: ont été négatifs ; mais, pourtant, il parait utile à l'auteur de publier un court compte rendu des expériences. La partie optique de l'appareil est une forme simple d'interféromètre, avec lequelil a été très facile et commode de travailler. Il consiste dans un cadre en verre formé de barres de verre de section carrée, cimentées ensemble avec du baume de Canada. — M. S. E. Sheppard : /nfluence de l'état des couleurs en solution sur leur spectre d'absorp- tion. Dans les solutions aqueuses de certaines matières colorantes : isocyanines, pinacyanols, cyanine, la cou- leur est présente partiellement ou totalement en solu- tion colloïdale et le spectre d'absorption est tout à fait différent de celui des solutions réelles. L'auteur à exa- miné quantitativement l'influence sur l'absorption de divers agents, comme la chaleur, les acides, les alealis, les électrolytes. Dans d’autres solutions colorées, le pas- sage de l’état de solution vraie à l'état colloïdal est accompagné d’un élargissement et d'une diffusion de la courbe d'absorption, conséquence de l'accroissement du nombre et de la grosseur des particules colloïdales. Il en résulte des déviations de la loi de Beer. L'état des couleurs dans un milieu solide est comparable à l'état en milieu liquide, et le spectre d'absorption est affecté d'une façon similaire. L'auteur à étudié l'absorption d'un certain nombre de colorants par les membranes. La solution des colorants semble être un processus combiné de désagrégation du corps dissous, accom- pagné d'une combinaison progressive avec le solvant. Si le même état de solution est atteint dans des sol- vants différents, les maxima d'absorption sont déplacés d’après la loi de Kundt. — M. Jean White : Les fer- mentset la vie latente des graines au repos. Les graines au repos des céréales, telles que le blé, le maïs, l'orge, l’avoine et le seigle, contiennent toutes des ferments diastasiques, des ferments digérant la fibrine et des ferments éreptiques en quantité appréciable. Ces fer- ments conservent leur activité sans changement appré- ciable dans les graines sèches mises en réserve pen- dant vingt années ou plus, c'est-à-dire longtemps après que le pouvoir de germination a été perdu, ce qui se produit pour le blé entre onze et seize ans, pour l'orge entre huit et dix ans, pour l'avoine entre cinq et neuf ans, et pour le maïs et le seigle après plus de cinq ans. On n'a remarqué aucun rapport entre la vitalité des graines et la persistence des enzymes en elles; mais, puisque les enzymes persistent plus longtemps que le pouvoir de germination, il reste encore à savoir si la germination pouvaitse produire en l'absence d'enzymes préexistantes. Dans aucun cas, des graines qui ne ger- meraient pas autrement ne peuventètre poussées à germer par l'addition d'une enzyme quelconque ; et là où la germination est faible, l'addition d'enzymes abaisse généralement le pourcentage de la germination et souvent aussi la retarde quelque peu. L'érepsine semble être plus abondante que la pepsine; mais, d'ailleurs, dans le cas des trois ferments, on observe de plus grandes différences entre les divers spécimens du même âge qu'entre les différentes graines, ou entre les mêmes graines d'âges variés. La pepsine semble, cependant, être plus abondante dans le seigle que dans toute autre céréréale et est presque absente du mais. L'avoine sèche, l'orge etle blé peuvent partiellement résister à une tem- pérature de 99° à 1000 C., pendant une à quatre heures et demie ; après six heures d'exposition à cette tempéra- ture, toutes les graines sont tuées, mais les ferments ne paraissent pas affectés. Tous les ferments sont détruits après une heure de chaleur sèche, de 1309 à 131°C. La pep- sine paraît être la moins résistante (une heure à 124° C.), 610 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l’érepsine davantage (une heure de 124° à 1280 C.), et la diastase, spécialement celle de l'orge, la plus résis- tante à la chaleur sèche (1 heure de 124: à 131°C.). Une exposition de deux jours à l'air liquide, quoiqu'elle retarde la germination subséquente et puisse aussi diminuer le pourcentage, n'a pas détruit aucune des graines soumises à l'épreuve et n'a pasaffecté d'une façon appréciable les ferments dans aucune céréale. La dias- tase sèche de l'orge est, cependant, capable de résister dans un intervalle de température de — 200° C. à 130° C. ; elle est donc thermiquement un composé chimique très stable. Beaucoup de graines, y compris toutes les céréales, dégagent des quantités appréciables d'acide carbonique lorsqu'on les conserve à l'air sec, mais d’autres n'indiquent aucun signe de respiration. La res- piration du blé séché à l'air est spécialement pronon- cée; mais, pratiquemment, dans tous les cas, tout signe de respiration cesse lorsque les graines sont modérément desséchées, quoique, dans le cas de grosses graines, comme Île mais, de faibles traces d'acide carbonique continuent à s'échapper pendant un certain temps. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 11 Juin 1909. MM. Russell et A. Wright présentent un dispositif électrique pour évaluer les formules et résoudre les équations. Dans ce dispositif, on utilise des résistances à coulisse spéciales. Si R est la résistance de l’une d'elles et qu'un .-doigt métallique établisse le contact avec elle en un point où la lecture de l'échelle est x, la résistance entre ce doigt et l'extrémité de l'échelle est R/x. Les échelles des coulisses sont graduées loga- rithmiquement, comme dans la règle à calcul ordi- naire. Donc, les multiplications et les divisions peuvent être faites mécaniquement en les faisant glisser contre des échelles fixes exactement semblables. Si l’on relie un certain nombre de ces résistances en parallèle, comme le courant est inversement proportionnel à la résistance, la somme des courants qui les traversent sera proportionnelle à la somme des lectures des doigts de contact. On peut facilement équilibrer ce courant, par une méthode de zéro, avec un courant traversant une résistance à coulisse simple X, au moyen d’un arrangement en pont de Wheatstone. Dans ce cas, la lecture de X, quand il y à équilibre, donne la somme des lectures sur toutes les autres échelles. De même, on peut soustraire des nombres en mettant des résis- tances représentant ces nombres en parallèle avec X et établissant l'équilibre en faisant varier la lecture sur X. En inclinant les doigts de contact de certains angles par rapport à un barreau qui peut être déplacé perpendiculairement aux glissières, il est aisé d'ob- tenir sur X les valeurs de f(x) — ax" + hxr + cxr, où les indices m, n, p, peuvent être positifs, négatifs ou fractionnaires, et les coefficients positifs ou néga- tifs. En particulier, si la lecture sur X est 0 quand x = Xx,, alors x, est une racine de l'équation f(x) — 0. Les auteurs présentent un modèle de leur dispositif pour résoudre une équation de degré quelconque n'ayant pas plus de quatre termes. — M. H. Stansfield a étudié l'action du spectroscope à échelon et les ré- sultats obtenus sur la structure de la ligne verte du mercure donnée par la lampe Arons. Le spectroscope à échelon employé a été disposé de telle manière que le prisme auxiliaire puisse être monté près de l'é- chelon. La dispersion du prisme peut être ajoutée à ou soustraite de la dispersion de l'échelon, et la varia- tion de 4°/, de la dispersion ainsi obtenue permet de déterminer si deux lignes du spectre appartiennent au même ordre. La théorie de l’action primaire de l'é- chelon dans la position renversée, quand la lumière sort par la plus large plaque, est comparée avec la théorie de l'échelon dans la position actuelle. Les spectres de Fabry et Perot sont produits par l'action secondaire de l'échelon, c’est-à-dire par réflexion de la lumière à la surface des plaques. Quand Féchelon est incliné, la lumière deux fois réfléchie ou secon- daire peut être séparée de la lumière primaire, et des parties des cercles de Fabry et Perot sont observées avec une fente large: La lumière secondaire subit aussi l’action de l'échelon primaire et, avec une fente étroite, elle est confinée aux points d intersection de deux sys- tèmes de spectres, en donnant des spectres similaires à ceux qu'ont obtenus Gehrcke et Baeyer en croisant deux plaques plan -parallèles. Quand l'échelon est dans la position ordinaire, les spectres secondaires sont des lignes semblables aux lignes de l'échelon primaire; elles peuvent être observées se mouvant à travers la ligne centrale large quand on fait tourner lentement la table de l'échelon; elles se montrent beaucoup plus clairement sur le fond continu du spectre de la ligne verte donné par une lampe de quartz chauffée. — M. C. C. Paterson : La nouvelle unité internationale d'intensité lumineuse. Dans son dernier numéro (p. 529), la Aevue a déjà publié une note sur ce sujet.— M. J. W. Nicholson : /uduction et résistance dans les circuits téléphoniques et autres. L'auteur a déjà donné une formule générale pour l'inductance effective d’un circuit consistant en deux longs fils parallèles, dans les cas où la distribution du courant dans chaque fil est fortement affectée par la fréquence de l'alternance. Ici l'auteur examine certains cas importants et donne des formules susceptibles d’un emploi immédiat. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 20 Mai 1909. MM. H. O. Jones et H. S. Tasker, en chauffant les éthers dithio-oxaliques (préparés par l’action des hydrosulfures d’alkyles sur le chlorure d’oxalyle) avec une solution alcoolique concentrée de KSH, ont obtenu le dithio-oxalate de potassium (KSCO*}, cristallisant en prismes incolores, donnant des réactions colorées intenses avec les sels de Co et de Ni. Le monothio- oxalate de K se prépare par l'action de KSH sur le monothio-oxalate diéthylique ; il possède des pro- priétés analogues. — M. A. H. Salway montre qu'en faisant agir l'acide nitrique sur l’aldéhyde myristique une partie de l’aldéhyde est nitrée directement, tandis que le reste subit le remplacement du groupe aldé- hyde par le groupe nitré; cette transformation est commune aux éthers des hydroxyaldéhydes aroma- tiques. — M. R. W. Gray et Sir W. Ramsay ont con- densé l’émanation du radium en un liquide, qui bout à—62 sous 760 mm.; sa température critique est de 104,5, sa pression critique de 47.450 mm. Si ces nombres sont portés sur des segments de cercles sur lesquels se trouvent les constantes correspondantes pour l’argon, le krypton etle xénon, ils coupent l’ordon- née des poids atomiques au nombre 176. L’'émanation viendrait donc après le xénon dans une famille natu- relle de la table des poids atomiques. — M. G. Barger à isolé des extraits aqueux de l’ergot un principe actif, la p-hydroxyphényléthylamine HO.C‘H'.CH°.CH*.A7H°, dont il a fait ensuite la synthèse par réduction du p- hydroxyphénylacétonitrile. — MM. A. W. Crossley el Ch. H. Hampshire, en faisant agir graduellement l'acide nitrique fumant sur l’o-xylène, ont obtenu, à côté de nitroxylènes, du nitrotétraméthyldiphényle, en aiguilles jaunes, F. 415. Il est oxydé par l'acide nitrique dilué en un acide nitrotétracarboxylique, F. 2259, et réduit par Sn + HCI en aminotétraméthyldi- phényle, EF. 84°. — M. F. D. Chattaway a préparé deux perhalogénures d’ammonium, le dichloroiodure AzH"* CPI et fe chlorobromoiodure AzH'CIBrI; ce sont des corps bien cristallisés, stables, perdant 2 atomes d'halo- gène par chauffage en laissant AzH*CI. Ils ne sont pas analogues aux perhalogénures de diazonium. — MM. Al. Me Kenzie et H. B. P. Humphries ont fait la syn- thèse asymétrique de l'acide /-mandélique : le benzoyl- formiate de Zmenthyle est réduit par l’amalgame d’Al, le produit de réduction est acétylé, et le dérivé acétylé, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 611 soumis à l'hydrolyse, donne un mélange d'où l'on extrait l'acide Z=mandélique. — MM. W. H. Perkin jun. et J. L. Simonsen ont condensé l’acétone et l'acide hippurique, en présence d’anhydride acétique et d'acé- tte de Na, en anhydride de l'acide «-benzoylamino-f- diméthylacrylique, F. 980-999 ; par hydrolyse, ce der- nier forme l'acide correspondant, F. 217, que HCI concentré chaud décompose en acide benzoique et acide diméthylpyruvique, F. 16°. — MM. H. Hartley et W. H. Barrett ont étudié la solubilité des deux formes stables de sulfite de sodium : Na?S0*.7H°0 et Na*5s0* ; la température de transition entre les deux formes est voisine de 220, — MM. T. S. Price et D. F. Twiss ont préparé les a-dithiodibutyrate, a-dithiodiisobutyrate et a-dithiodiisovalérate diéthyliques, bouillant respecti- vement à 487 (22 mm.), 466° (19 mm.) et 1732 (12 mm.), par réduction électrolytique des mélanges obtenus en faisant réagir le thiosulfate de soude sur les «-br'omo- butyrate, -isobutyrate et -isovalérate d’éthyle. — MM. ‘H. A. D. Jowett et F. L. Pyman ont fait l'étude des propriétés physiologiques d'un certain nombre de tro- péines. La prétendue généralisation de Ladenburg ne s'applique pas strictement aux résultats. — M. J. W. Cobb a étudié les verres et les glacures en les considé- rant comme formés par la combinaison et la solution de leurs oxydes constituants. Il constate que la tempé- rature de formation d’une scorie et son point de fusion ne sont pas identiques ni même en relation apparente ; l'interaction entre solides peut aller loin, même être complète, sans fusion. — M. F. E. E. Lamplough a étudié la décomposition du chlorure de benzènediazo- nium et a mesuré Ja quantité d'azote maintenue en solution. La sursaturalion peut aller jusqu'à 300 fois la quantité normale de gaz qui devrait se dissoudre. — Mie À. E. Smith et M. K. J. P. Orton ont mesuré la vitesse d'acétylation du s-tribromophénol en présence des acides sulfurique, perchlorique et orthophospho- rique. Les deux premiers sont des accélérateurs éner- giques, le troisième est moins actif. L'acide perchlo- rique est environ 2,5 fois plus énergique que l'acide sulfurique. — MM. R. H. Pickard el J. Kenyon ont résolu l’octane-2-ol en ses composants actifs par cris- tallisation fractionnée des sels de ses éthers acides avec des bases optiquement actives ; [ain = + 90,9. — MM. R. Meldola et J. G. Hay ont poursuivi l'étude de la formation des iminazols par action du 2:3:5-trinitro- 4-acétylaminophénol sur les amines. Les substituants en position ortho el en position para exercent une influence protectrice contre la réaction. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 5 Avril 1909. MM. C. N. Hake et M. Bell ont étudié l’action des acides sulfurique et nitrique dans la nitration de la cellulose. 4° L'acide sulfurique se trouve à l'état com- biné dans tous les produits de nitration obtenus avec des mélanges d'acides qui le contiennent; 2° La for- mation des éthers mixtes est due au retard de la nitra- tion, à la solution partielle ou à la gélatinisation de la cellulose par H?SO* et à la fixation subséquente de l'acide nitrique; 3° La quantité d'éther sulfurique for- mée est déterminée par la proportion de H?S0! et HAzOS agissant sur la cellulose pendant la nitration, propor- tion dépendant de la densité de la substance. Séance du 3 Mai 1909. M. H. H. Dains donne quelques renseignements sur l'industrie de la magnésite aux Indes. À Salem, dans la présidence de Madras, se trouvent des gise- ments considérables de magnésite, contenant de 96 à 99 °/, de MgCO*. Par calcination à 800° dans des fours à gaz, on obtient de la magnésie caustique, qui, mé- langée avec une solution de MgCl°, donne un très bon ciment. Par chauffage à 1.7009° dans un four Schneider, on obtient la magnésie calcinée, qui sert à la fabrica- tion de briques réfractaires. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 28 Avril 1909. M. R. M. Caven décrit un procédé de détermination du chlore en presence du brome. Dans la solution chauffée à 80°, on fait (omber goutte à goutte de l'acide nitrique (d—1,4#2) tandis qu'on fait passer un courant d'air; le brome mis en liberté est entrainé, ce dont on s'aperçoit à la décoloration progressive de la solution. Le chlore est ensuite titré par la méthode de Volhard et le brome estimé par différence. Pour ana- lyser un mélange de chlorure, bromure et iodure en solution, l’auteur recommande le procédé suivant 1° Litrer tous les halogènes en solution acide par la méthode de Volhard; 2 déterminer I en titrant par le bichromate le fer ferreux produit en faisant bouillir la solution avec de l’alun de fer; 3° déterminer Cl en solution nitrique après avoir éliminé successivement I par H°0? en présence d'acide acétique et Br par l'acide nitrique dilué ; 4° déterminer Br par différence. L’en- semble des opérations dure une heure. — M. F.J.R. Carulla a fait une série d'essais relatifs à l’action des chlorures sur la fonte de fer. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 23 Avril 1909. 1° SGIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Cardinaal : La détermination constructive des vitesses d'un système à trois dimensions. Solution, par la Géométrie descrip- tive, du problème : « De trois points tixes À, B, C d’un solide en mouvement on connait : pour À grandeur et direction de la vitesse, pour B la direction de la vitesse et pour C une surface qui le contient; à construire l'axe principal du mouvement etles vitesses des points B et G. — M. P.-H. Schoute présente au nom de M.S. L. van Oss : La géométrie pentasphérique. L'identité analytique de la géométrie de l'hypersphère à quatre dimensions avec l’espace pentasphérique tridimen- sional mène à un lien intime entre le pentacycle de Stéphanos et la configuration de Segre. Solution sym- bolique de quelques problèmes qui s’y rattachent, par exemple : On donne trois cercles d’une manière quel- conque dans l’espace; à déterminer le cercle qui se trouve sur une sphère avec chacun de ces trois cercles. On donne six cercles quelconques dans l’es- pace ; à déterminer les cinq couples de points dont chacun se trouve sur une sphère avec chacun de ces six cercles. — M. J.-P. van der Stok : Sur la déter- minalion des constantes des marées à l'aide d'expé- riences avec des pendules horizontaux. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals : Contribution à la théorie des mélanges binaires : XN. Décomposition de la courbe spinodale. — Ensuite, M. van der Waals présente au nom de M. Ph. Kohnstamm : Sur la forme des isopiestes des mélanges binaires. IT, et au nom de MM. Ph. Kohnstamm et J. Chr. Reeders : Sur les phénomènes de condensation dans le cas de mélanges d'acide carbonique et d'uréthane, en rapport avec la condensation rétrograde double. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J.J. van Laar : Sur l'état solide. I. — M. H. K.Onnes présente en son nom et au nom de M. J. Becquerel : Sur la phos- phorescence à des températures très basses. 1. Intro- duction. 2. Les appareils. 3. Modification des spectres par la décroissance de la température. Déplacement et position limite des bandes de phosphorescence des sels d'uranyle. La décroissance de la température n’agit pas en contrariant l'émission de la lumière ; les maxima de l'émission se déplacent vers les longueurs d'onde plus petites; probablement les bandes tendent asymptotiquement vers une posilion limite déter- 612 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES minée. 4. Comparaison des différents groupes de bandes d'un même sel. 5. Loi de succession des bandes. 6. Caractère des spectres de phosphorescence. 7. Rapport entre l'émission par phosphorescence et l'absorption. 8. Phosphorescence des composés sulfu- reux à des températures basses. 9. Conclusion. Le croupe des sels d'uranyle a un caractère spécial très prononcé. Deux planches. — Ensuite M. Onnes pré- sente au nom de M. J. P. Dalton : Lxperiences sur lellet Joule-Kelvin, particulierement à des tempéra- tures basses. I. Les expériences de l’auteur démon- trent qu'il est nécessaire, si l'on se sert d’un appareil à robinet de réduction, de prendre des précautions particulières dans la détermination de la température exacte de détente et pour qu'il n'y ait pas de conduc- tion de chaleur vers la veine de gaz qui se délend. L'appareil dont il s'est servi accuse pour Flair à la température de 0° un effet Joule-Kelvin correspondant aux expériences de Joule et de Kelvin calculées avec les isothermes empiriques. Deux planches. — M. P. van Romburgh : 1° L'huile de basilie de Java et le methylchavicol; 2 Les huiles éthérées des fruits de Morindo eitrilolia L. 30 SCIENCES NATURELLES. — Rapport de MM. W. Burck et F.-A.-F.-C. Went sur le mémoire de M, J. Valcke- nier Suringar, intitulé : « Nouvelles contributions à l'étude des espèces du genre Melocactus des Indes occidentales. » L'étude paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. — M. F. Went : « Untersuchungen über l'odostemaceen » (Recherches sur les Podostémacées). — M. M. Beyerinck présente au nom de M. F. Lie- bert : La décomposition de l'acide urique par les bacilles. D'après MM. Fausto et Leone Sestini, le pro- cessus correspond à l'équation C*H*A7#0* 30 +8 H°0 — 4 AZHHCO* + CO, d'après M. Cingolani à C*H*47'0* 30 + 2? H°70 — 2 AzH°COAZH? + 3C0°. L'auteur trouve que les microbes aérobies transforment l'acide urique en acide carbonique et ammoniac, l'allantoine, lurée et l'acide oxalique formant des produits intermé- diaires. Les microbes qui l'effectuent se divisent en deux groupes : une flore du milieu faiblement acide ou neutre (B. fluorescens liquefaciens, B. fluorescens non liquefaciens, B. calco-aceticum) et une flore se développant dans le liquide de culture devenu alealin (B. odoratum, B. Mutculi), etc. — M. S.-H. Koorders : Æinige pflanzengeographische Bemerkungen über eine im dJäava'schen Hochgebirge wildwachsende Art von der Hamamelidaceen-Gattung Distylium Sieb. und Zuce. Contribution à Ja connaissance de la Flore de l'île de Java. IV. — M. W. Einthoven présente au nom de M. J. Boeke : Sur la forme et le développement des plaques motrices terminales des vertèbres supérieures. Avec une planche. P. H. Scnoure. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 6 Mai 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Brommer à éludié la chute de potentiel atmosphérique à Trieste pendant les beaux jours de novembre 1902 à mars 1903. La moyenne annuelle est de 73 V/m, tandis qu'à Potsdam elle atteint 242. La courbe annuelle présente deux maxima : un fort en janvier et un plus faible en juillet. La marche diurne n'a qu'une période simple, la période double des autres stations disparaissant. La chute de potentiel a la même marche que la pression atmosphérique et une marche inverse de la dispersion. — MM. Zd. H. Skraup et E. Krause, en faisant réagir CH'T sur la caséine, ont introduit des groupes méthyle sur l'O et sur l'Az. La caséine méthylée fournit à l'hydrolyse des quantités d'acide glutamique, de Jeucine et de phényl- alanine à peu près égales à celles que donne la caséine même, mais, par contre, pas de tyrosine ni de lysine el presque pas d’arginine ni d’histidine. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Steindachner décrit une nouvelle espèce de Tétragonoplerus trouvée dans le Rio Purus (Brésil); il la désigne sous le nom de T°. huberi. Séance du 13 Mar 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Niessl von Mayendorff a déterminé les trajectoires des météores du 12 décembre 190%, du 11 juillet 1906 et du 8 février 1905. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Kohn, en traitant par KCAZ la combinaison bisulfitique de l'alcool de la diacétone etsaponifiantlacyanhydrine formée, a obtenu la lactone de l'acide 2 : 4-diméthylpentane-2 : 4-diol-1- carbonique, qui est probablement identique avec le timéthyl-oxy-butyl-lactide. — MM. M. Kohn et N. L. Muller, en faisant réagir le tribromophénol sur le benzène en présence d'AICF, ont obtenu du bromo- benzène et du phénol. — M. M. Kohn, en faisant réagir l'hydroxylamine en solution aqueuse en présence d'alcali sur le m-dinitrobenzène, à obtenu de petites quantités de nitrobenzène, 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Steindachner décrit une nouvelle espèce de Brachyplatystoma, le B. paraense, des environs de Para, et une nouvelle espèce de Loricaria du Jaragua, le L. jaraguensis. — M. 7. Wiesper montre que le feuillage des plantes diminue l'intensité du rayonnement solaire direct dans une mesure appropriée à leur développement. Ce résultat est obtenu de deux façons : 1° par la production d'images du soleil qui se projettent sur les feuilles ; 2 par la dispersion de la lumière qui se produit dans tout le feuillage. — MM. V. Grafe et K. Linsbauer ont constaté que la quantité absolue de substances réduc- trices dans la pointe de la racine du Lupinus albus et du Vicia Faba est toujours un minima et qu'elle ne varie pas suivant que les racines sont ou non soumises à l'excitation géotropique. Séance du 21 Mar 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Tietze cherche à déterminer l'ensemble des points qui sont construc- tibles uniquement à l’aide de la règle et du compas. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. O. Hœnigschmid à constaté que le calcium, en présence d'un excès de silicium, ne donne qu'un siliciure défini, CaSi°. Mais, si l'on opère en présence d'un excès de métal, on obtient un siliciure Ca*S®, dont les propriétés se rapprochent de celles du Ca métallique et qui est décomposé par HCI avec formation d'une combinaison silicique blanche. Le baryum, en présence d'un excès de Si, donne un siliciure BaSi; le magnésium fournit un corps Mg?Si. — Le même auteur a étudié la silicone quise forme en décomposant CaSi* par HCI fumant. Elle possède la formule Si#H*0? et perd son H dans le vide en donnant un résidu noir qui doit être un sous- oxyde SiO?. La leucone, qui se forme par éclairement de la silicone, est un produit d'oxydation contenant 2 atomes d'O de plus ; par décomposition dans le vide, la leucone perd H et laisse un résidu brun qui est probablement l'oxyde SiO#. — MM. H. Meyer et R. Turnau ont préparé les anilides et les anisidides de quelques acides cétoniques et aldéhydiques aroma- tiques. — MM. Zd. H. Skraup et A. von Biehler ont déterminé les produits d'hydrolyse de la gélatine et ont reconnu qu'il ne s'y trouve aucun acide aminé autre que ceux déjà connus; environ 85 °/, de la gélatine passe à l’état d'acides aminés dans l'hydrolyse 39 SCIENCES NATURELLES. — M. B. Wahl présente la suite de ses recherches sur la structure des Turbel- lariées parasites de la famille des Dalyellides (Vortici= des) ; elles sont spécialement consacrées à l'anatomie et à l'histologie du nouveau genre et espèce l/magilla forskalensis, rès voisin du genre Anoplodium. — M. F. von Hœhnel poursuit ses recherches sur les champignons de Java par la description de 10 nouveaux genres et de 17 nouvelles espèces. Louis Brune. EE hp Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Gasselte. 20° ANNÉE . 4 30 JUILLET 1909 Revue générale “oienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et ]1a traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions et Solennités scientifiques Hommages à M. Metchnikoff. — Après avoir donné à Stockholm sa conférence du prix Nobel, et avant de rentrer en France, M. Metchnikoff a passé quelques jours en Russie, son pays d'origine. Nous avons recueilli les échos de l'accueil qu'il y a recu, et notre éminent collaborateur nous pardonnera de faire, pour une fois, violence à sa modestie. M. Metchnikoff a été nommé Docteur en médecine honoraire de l'Académie impériale de Saint-Péters- bourg, académie qui correspond à notre Faculté de Médecine de Paris. Le Conseil municipal de Saint- Pétersbourg a donné son nom au Laboratoire de Bac- tériologie de la ville et a fondé en son honneur un prix de mille roubles pour l’auteur du meilleur tra- vail de Biologie publié chaque année. A l’occasion des conférences faites par M. Metchnikoff à Saint-Pé- tersbourg et à Moscou, les nombreuses sociétés scien- tiiques de Russie lui ont envoyé une longue série d'adresses de félicitations. Tolstoï lui a fait fête, et l'Amiral commandant le port de Cronstadt est venu le saluer au moment où il a débarqué. Ces témoignages de sympathie honorent à la fois la Russie et M. Metchnikoff. Mais ils sont en mème temps un hommage rendu à la Science, et c'est à ce titre sur- tout que nous avions le devoir de les faire connaître aux lecteurs de la Revue. Election à FAcadémie Royale de Belgique. — M. W. Oechsner de Coninck, professeur de Chimie à la Faculté des Sciences de Montpellier, vient d'être élu Associé de l'Académie Royale de Belgique pour la Section des Sciences physiques; la Revue lui exprime ses félicitations pour la distinction dont il est l’objet. Le Jubilé de Darwin à Cambridæe. — De grandes fêtes viennent d’avoir lieu à Cambridge, du 22 au 24 juin, pour commémorer le centenaire de la naissance de Darwin (1809) et le cinquantenaire de la publication de son œuvre la plus célèbre : L'Origine des espèces (1859). 4 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 190, Organisées par un Comité anglais, elles ont revêtu un éclat tout spécial, par suite de la présence de délé- gués des Universités, grandes Ecoles, Académies et Sociétés savantes de la plupart des pays du monde. La France était représentée, pour sa part, par MM. E. Per- rier et le prince Roland Bonaparte (Institut de France et Muséum d'Histoire naturelle), E. Metchnikoff (Ins- titut Pasteur), R. Zeiller (Ecole des Mines), F. Le Dantec (Université de Paris), D' Manouvrier (Société d’Anthropologie), D' Eug. Dupuy et L. Lapicque (So- ciété de Biologie), E. de Margerie (Société géologique de France), G. Papillault (Ecole d'Anthropologie), O. Duboscq (Université de Montpellier), A. Malaquin (Université de Lille) et L. Brasil (Université de Caen et Société linnéenne de Normandie). Nous empruntons à notre confrère anglais Nature quelques détails sur cette belle manifestation. Le 22 juin, les délégués furent officiellement recus par le chancelier de l'Université de Cambridge, Lord Rayleigh, au Musée Fitzwilliam. Le lendemain, dans la salle du Sénat de l'Univer- sité, après un discours d'ouverture de Lord Rayleigh, un délégué de chaque nation présenta une adresse, puis quelques discours furent prononcés. M. R. Hertwig (de Munich) rappelle l'influence de Darwin sur la Biologie allemande, en particulier à Jéna, par l'in- termédiaire de Heckel. M. E. Metchnikoff fait ressortir la dette que la science médicale doit à la théorie de l'évolution organique fondée par Darwin. M. H. F. Osborn (des Etats-Unis) apporte le tribut des Univer-- sités américaines à l’A/ma mater et remet au « Christ's College » un portrait en bronze de Darwin par William Couper. Sir Ray Lankester, parlant au nom des natu- ralistes anglais, retrace l’ensemble de l'œuvre de Darwin et montre qu'après cinquante années d'examen et d'épreuve la « théorie de l’origine des espèces au moyen de la sélection naturelle ou de la préservation des races favorisées dans la lutte pour la vie » reste entière, malgré toutes les tentatives faites pour la ren- verser. Le soir, un banquet réunissait les délégués et hôtes de l'Université de Cambridge; on entendit des discours de M. Balfour, du Professeur S. Arrhénius et de M. W. E. Darwin. 614 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE . Le 24 juin, les délégués se réunissaient pour la der- nière foisafin d'entendre la « Rede Lecture », délivrée par Sir Archibald Geikie sur ce sujet: Darwin géologue. L'orateur montra l'influence de Lyell sur la pensée de Darwin, puis l’œuvre propre de ce dernier à la suite de l'expédition du Beagle. La séance se termina par la remise du diplôme de docteur ès sciences honoris eausa de l'Université de Cambridge à MM. le Prince Roland Bonaparte; Ed. van Beneden, professeur de Zoologie à Liége; O0. Bütschli, professeur de Zoologie à Heidelberg; R. Chodat, pro- fesseur de Botanique à Genève; F. Darwin, professeur honoraire à Christ's College; K. F. von Gœbel, profes- seur de Botanique à Munich; L. von Graff, professeur de Zoologie à Graz; R. Hertwig, professeur de Zoologie à Munich; H. Hôffding, professeur de Philosophie à Copenhague; J. Lœb, professeur de Physiologie à l'Université de Californie; E. Perrier, directeur du Muséum de Paris; G. A. Schwalbe, professeur d’Ana- tomie à Strasbourg; H. de Solms-Laubach, professeur de Botanique à Strasbourg; C. Timiriazeff, professeur de Botanique à Moscou; F. Vejdovsky, professeur de Zoologie à Prague; M. Verworn, professeur de Physio- logie à Gottingue ; H. von Vüchting, professeur de Bota- nique à Tubingen; H. de Vries, professeur de Bota- nique à Amsterdam; Ch. D. Walcott, secrétaire de la Smithsonian Institution à Washington; E. B. Wilson, professeur de Zoologie à l'Université Columbia de New- York; et C. R. Zeiller, professeur de Paléobotanique à Paris. Le témoisnage unanime rendu par les délégués à l'influence de Darwin sur le travail et la pensée scien- tifiques.a donné aux manifestations de Cambridge un caractère particulièrement imposant; le monde savant tout entier s'associe, d’ailleurs, à cet hommage rendu à l’un des plus grands génies du xix° siècle. $ 2. — Physique Une nouvelle méthode de recherche de la chlorophylile, avec application possible aux corps du système planétaire. — M. M. Umoff, dans un travail publié il y a quelques années, démon- trait que, si un faisceau de rayons polarisés est dis- persé par un corps, ses rayons émergents sont plus ou moins dépolarisés, tandis que les rayons le plus for- tement absorbés présentent la polarisation la plus considérable. Comme des phénomènes analogues se produisent dans le cas où la lumière incidente est natu- relle, non polarisée, l'analyse du degré de polarisation de la lumière dispersée par un corps permet de tirer certaines conclusions relatives à sa constitution, fait d'une grande importance pour les corps opaques. En continuant ses recherches, l'auteur? propose d'utiliser ce même principe pour constater la présence, sur les planètes, de la chlorophylle, qui présente ces phénomènes avec une intensité considérable. Une solution concentrée de chlorophylle dans l'alcool a été répandue sur un disque de papier, disposé sur le fond plat d’une cuvette évaporatrice. Après avoir vapo- risé le liquide par un faible échauffement continué pendant plusieurs heures, le disque desséché a pré- senté une couleur vert-gris mat et uniforme. L'image du filament d’une lampe de Nernst, projetée sur un disque préparé de cette façon, a été observée à l'aide d’un spectroscope à polarisation, se composant d’un objectif, d’une lentille cylindrique, d'un polari- scope de Savart, d’un prisme à vision directe et, comme oculaire, d’une petite lunette de faible pouvoir en posi- tion renversée. La figure 1 représente, grossie 1 1/2 fois, l’image observée au spectroscope. La partie rouge du spectre s'étend de a à o, l'orange et la jaune de o à gr, après quoi suivent les parties verte, bleue et indigo. Les 1! Phys. Zeitschr., t. NI, p. 674%, 1905. * Phys. Zeitschr., t. X, p. 259, 1909. bandes de Savart croisent le spectre en direction trans- versale; presque la moitié de la région rouge présente l’aspect d'un bord large et sombre, traversé par de courtes et faibles bandes de Savart, semées de taches noires rondes et bien marquées «, de la grandeur d'une grosse tête d'épingle ; cette région correspond à la bande d'absorption maxima de Ja chlorophylle. Quant aux ré- gions suivantes du spectre, les bandes de Savart s’affai- blissent d’abord, pour s’'as- sombrir et s’élargir à la limite de l'orange (f); c'est la se- conde bande d'absorption dans le rouge. Après avoir ensuite pâli, les bandes de Savart, à partir du vert, s'as- sombrissent et s’élargissent de plus en plus, jusqu à ce qu'elle disparaissent dans l’obscurité de l’indigo. Ce même phénomène s’observe sur les feuilles des plantes vivantes. Des bandes analogues se constatent, du reste, dans le cas d’autres corps à absorption sélec- tive (matières colorantes et minerais divers), dont la plupart présentent, soit l'absence de polarisation dans le rouge moyen et une polarisation faible dans le rouge extrême, soit une polarisation qui s'étend sur le rouge tout entier. En remplacant l’image du filament de Nernst par la fente du spectroscope d'une lunette astronomique, l’auteur pense que cette méthode, appliquée à l'obser- vation des planètes, permettra d'y découvrir la pré- sence de la chlorophylle. Les examens faits par cette méthode des minerais de notre Terre, et l'observation d’un point à l’autre de la surface de la Lune, pourront nous renseigner sur la constitution de cette dernière. Ne disposant pas lui-même des ressources nécessaires pour appliquer cette méthode aux espaces planétaires, l’auteur propose aux astronomes de la parfaire et de la vérilier. Fig..1° chlorophylle observée au Spectroscope polari- saleur. — Image de la $ 3. — Chimie Le Congrès international de Chimie ap- pliquée. — Le Congrès international de Chimie appliquée, dont la 7° session vient d'être tenue à Londres, du 27 mai au 2 juin, comple parmi les plus importants, s'il n’est même le plus important de tous les Congrès scientifiques de l’année. 11 a réuni, cette fois, plus de 4.000 membres, appartenant à une trentaine de nations différentes, et près de 1.000 Rapports ou Mémoires sur les sujets les plus variés de la Chimie y ont été présentés et, le plus souvent même, discutés. Dû à l'initiative combinée de l'Association belge des Chimistes et de l'importante Association française des Chimistes de sucrerie et de distillerie, le Congrès s'est réuni pour la première fois à Bruxelles en 1894, sous la présidence de M. Hamise. L'intérêt en fut reconnu tout de suite si manifeste que de nouvelles sessions eurent lieu tous les deux ans, puis, en raison de leur impor- tance croissante et du temps de plus en plus considé- rable nécessité par leur organisation, seulement tous les trois ans. MM. Lindet, Berthelot, Prégis, Moissan, 0. Witt, Paterno, en furent les présidents successifs. Cette année, le Congrès était présidé par sir William Ramsay, avec M. Macnab comme secrétaire général. Les diverses branches de la Chimie avaient été réparties en onze sections, dont plusieurs admettaient deux ou trois sous-sections : Section 4, Chimie ana- lytique; — Section 2, Chimie inorganique el industries qui en dérivent; — Section 3, Métallurgie et mines, explosifs; — Section #, Chimie organiques et industries dérivées, matières colorantes et parfums; — Section 5, Industries des sucres; — Section 6, Industries de l'amidon, de la fécule et des farines, fermentations et distillerie; — Section 7, Chimie agricole; — Séction 8, Hygiène, Chimie physiologique et pharmaceutique, g «2 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Bromatologie; — Section 9, Chimie photographique; — Section 10, Electrochimie, Chimie physique, radio- logie; — Section 11, Lois et Economie politique dans leurs rapports avec l'industrie chimique. Donner même un simple aperçu des travaux de ce colossal Congrès est, pour l'instant, tout à fait impos- sible. 11 faudra, pour se faire une idée de leur impor- tance, attendre que les Rapports, les Mémoires et les discussions aient été publiés. Il semble, cependant, que, parmi beaucoup d'autres, les questions suivantes aient particulièrement attiré l'attention des membres du Congrès : l’unilication des méthodes d'analyses agricoles et alimentaires; la fixation industrielle de l'azote atmosphérique; l'étude physico-chimique des métaux et des alliages; les nouveaux groupes de matières colorantes: la théorie de la teinture; les méthodes de contrôle en sucrerie; les derniers perfec- tionnements apportés à l'industrie sucrière; la con- stitution de la matière amylacée; les propriétés du malt; l'emploi agricole du manganèse et les engrais catalytiques; la valeur des dé-infectants et des pro- cédés de désinfection; la chimie physiologique, pour laquelle il à même été décidé de former dans l'avenir une section particulière; la composition et l'unification de formule des médicaments; les nouveaux procédés photographiques; les applications industrielles de l’électrolyse; l'épreuve des explosifs; la constitution de la chlorophylle; la législation des industries toxiques; la question des marques de fabrique et les brevets internationaux, etc. Des conférences générales par MM. Haller, sur la syn- thèse du camphre, Paterno, sur l'avenir de la synthèse organique, O0. Witt, sur l'industrie allemande, et de sir Boverton Redwood, ont remporté un très grand succès. Comme on pouvait s'y attendre, élant donnée la large hospitalité anglaise, les membres du Congrès ont été conviés à des réceptions et à des fètes où la beauté du cadre, parfois mème la mise en scène de costumes traditionnels, ont contribué à faire régner la plus cor- diale et la plus franche sympathie. Un Comité spécial, formé sous la présidence de Lady Ramsay, s'était chargé, en outre, d'accueillir les dames des congres- -sistes et de leur rendre aussi agréable que possible le hit jour à Londres. Le Congrès, qui avait été ouvert sous la présidence effective du prince de Galles, a été clôturé par une visite au château de Windsor, double témoignage de l'intérêt que le Gouvernement de la Grande-Bretagne porte au développement des questions scientifiques et industrielles. Avant de se séparer, les congressistes ont choisi comme lieu de la prochaine session, en 1912, la ville de New-York, et ont élu M. Nichols, le grand industriel américain, pour présider cette future et imposante manifestalion de l'activité humaine. Tables physico-chimiques annuelles. — Il a été créé par le dernier Congrès de Chimie appliquée, qui s'est tenu à Londres du 2 au 7 juin, un Comité international chargé de recueillir et publier annuelle- ment toutes les données numériques et les constantes physiques dignes d'intérèt pour les recherches physi- -ques, chimiques et physico-chimiques et qui sont éparses dans toutes les publications du monde entier. Il ne nous paraît pas nécessaire d’insister sur l'im- portance de semblables tables. Le vœu concernant leur publication a été présenté au Congrès de Londres par M. C. Marie, secrétaire de la Société de Chimie phy- sique, au nom de cette Société. Le Comité est composé de MM. R. Abegg (Breslau), W. D. Bancroft (Ithaca), Bodenstein (Hanovre), Bruni (Padoue), Carrara (Milan), Dutoit (Lausanne), Findlay (Birmingham), Kistiakowsky (Saint-Pétersbourg), Lewis (Boston), H. Lunden ({Stock- holm), R. Mourelo (Madrid), Rothmund (Prague), G. Ur- bain (Paris), P. Walden (Riga), Wilsmore (Londres). (De travaux pratiques de Chimie physique et d'Electro- chimie à la Faculté des Sciences de Paris. S 4. — Paléontologie Le plus vieil ossement humain. — Parmi les ossements fossiles dé l'homme découverts jusqu'à ce jour, les plus anciens appartenaient au Quaternaire moyen. Tels les « Néanderthaloïdes » du bassin de la Dordogne. Le Pithecanthropus semble bien cependant, d’après M. Eug. Dubois, appartenir au Tertiaire supé- rieur (Pliocène), mais il est possible aussi quil ne date que du Quaternaire inférieur. Or, un savant allemand, M. Schoetensack, vient de faire une découverte des plus intéressantes. Il s’agit d'une mâchoire inférieure appartenant à un être qui semble être l’homme le plus ancien du Globe, sinon le précurseur de l'homme lui-même. Cette découverte eut lieu dans la sablière de Mauer (Sanden von Mauer), à une dizaine de kilomètres au sud de Heidelberg, à une profondeur de 24 mètres et à 0,75 au-dessus du plancher rocheux de la carrière. La sablière est for- mée de trois grands groupes de couches de terrain : le premier contient du læss récent, sur une épaisseur de 5 mètres environ; le second, du læss ancien, sur une épaisseur de 6 mètres; le troisième enlin, épais de 44 mètres, comprend deux couches de sables appuyées sur le fond rocheux et séparées l'une de l'autre par une couche d'argile, mélangée de cailloux roulés. M. Schoetensack, dans le remarquable ouvrage auquel nous empruntons ces renseignements !, à sub divisé méthodiquement ce dernier groupe en vingl- trois couches secondaires, et c’est dans la dix-neu- vième couche, à partir d'en haut, que fut découverte la mandibule en question. Les ossements fossiles que l’on trouve dans cette couche appartiennent à des ani- maux du Quaternaire : Cervus elaphus, Leo spelæus. Cependant, pas d'£lephas primigenius. A sa place, on a trouvé l'Ælephas antiquus, lequel, ainsi que des restes du Æhinoceros etruseus, du À. Merckui, d'un cheval voisin de l'Æquus Stenonis et de différentes co- quilles pliocènes, conduisent à assimiler la couche où fut trouvée la remarquable mâchoire humaine aux « Sables de Mosbach ». au « Forest Bed » pré-glaciare de Norfolk et au Pliocène supérieur de l'Europe méri- dionale. La mandibule, parfaitement conservée et garnie de toutes ses dents, fait songer, tout d’abord, à la mà- choire inférieure d’un gorille. par sa branche mon- tante très élargie, bien que le corps lui-même soit plus court que chez cet anthropoide. Les dents, par leur forme et leurs dimensions, sont identiques aux dents humaines actuelles; très serrées, elles s'élèvent toutes à la même hauteur, au contraire de ce qui se voit chez les Anthropoïdes. Le menton est très fuyant et la sym- phise mentonnière ne toucherait pas un plan horizontal sur lequel on placerait la mâchoire. M. Schoetensack croit qu'il s’agit là d'un reste d’une espèce spéciale du genre //omo, espèce qu'il nomme : Homo Heidelberyensis. En définitive, la mandibule rappelle, par sa conformation générale, celle d’un anthropoide, mais ses dents sont essentieilement humaines et ne permettent pas non plus de l’attribuer au Pithecanthropus. I y a donc lieu de croire que nous sommes en présence d'un ossement appartenant à un ancêtre commun à l'homme et aux anthropoides. On ne saurait donc trop insister sur l'importance de celte découverte. J. Deniker, Bibliothécaire du Muséum d'Histoire naturelle. $ 5. — Enseignement et Sociétés La Société de Secours des Amis des Sciences. — La Société de Secours des Amis des 1 O, ScnoztrexsAc : Der Unterkieler des Homo Heidelber- Le secrétaire du Comité est M. Ch. Marie, chef des 1 gensis. Leipzig, 1908, in-4°, 13 PI, 616 Sciences, fondée en 1857 par un illustre chimiste, le baron ‘Thénard, a tenu en juin dernier sa séance annuelle. M. Gaston Darboux, secrétaire perpétuel de l'Académie des Sciences, a été réélu président; MM. Aucoc et Picard, membres de l'Institut, vice-pré- sidents; M. Joubin, professeur au Muséum, secrétaire ; M. R. Fouret, trésorier. La Société de Secours des Amis des Sciences a pour but de venir en aide aux hommes de science qui se débattent contre les difficultés matérielles de la vie, ou à leur veuve, leurs enfants, que leur mort laisse sans ressources. Elle a distribué depuis son origine plus de 2.500.000 francs. Pendant la dernière année, elle a versé 80 pensions à de vieux savants et à des veuves de savants, profes- seurs et inventeurs frappés par le malheur. Elle à, en outre, donné des ressources pour l'éducation et l,ins- truction de 70 enfants, distribué des secours urgents à 35 veuves et enfin entretenu 20 pensionnaires à la Maison de Retraite Galignani. Cette belle et grande œuvre de réparation et de jus- tice sociale, qui a complé au nombre de ses présidents J.-B. Dumas, Louis Pasteur, Joseph Bertrand, fait appel à tous les hommes de cœur et d'intelligence, à toutes les personnes qui sintéressent aux Sciences, notam- ment aux industriels qui tirent des applications mul- tiples des Sciences des profits auxquels les savants qui les ont découvertes n'ont le plus souvent aucune part. La souscription annuelle nécessaire pour devenir membre de la Société est de 10 francs. On peutobtenir le diplôme de souscripteur perpétuel en versant une somme de 200 francs. Les cotisations doivent être adressées à M. René Fouret, trésorier de la Société, 79, boulevard Saint-Germain. Nous ne saurions trop faire appel à la générosité de nos lecteurs en faveur de cette OEuvre, qui a fait tant de bien déjà, et qui pourrait en faire davantage, si elle obtenait de nouvelles donations ou souscriptions. $ 6. — Sciences diverses Le mouvement de la population française en 490$. — La situation de la France, au point de vue démographique, qui était alarmante depuis plu- sieurs années, s'est enfin améliorée en 1908. Alors qu'en 1907 le nombre des décès l'avait emporté de 49.892 sur celui des naissances, on à pu enregistrer en 1908 un excédent de 46.441 naissances. Ce résultat est dû à ce que le nombre des décès a été inférieur de 48.266 au chiffre de 1907, tandis que d’un autre côté le nombre des naissances augmentait de 18.067. L'accroissement relatif de la population, qui, de 48 0/,, en 1901-1905, s'était abaissé à 7 en 1906 et avait fait place, en 1907, à une diminution de 5 %/,5, est, par suite, remonté en 1908 à 12. Les excédents de naissances se sont étendus de 29 à 45 départements; la plus forte proportion a été enregistrée dans le Pas-de- Calais (110 %/,,), le Finistère (86), le Morbihan (84), le Nord (64), la Corse (58), la Vendée (55), etc. Le seul arrondissement de Béthune a bénéficié d’un excédent de naissance de 6.284, soit plus de un huitième du total. La plus forte natalité se constate toujours dans les régions du Nord, de la Bretagne, aux frontières de l'Est, dans le Limousin et la Corse; la mortalité domine dans les bassins de la Garonne et du Rhône, où la dépopulation est encore accentuée par l'exode mon- tagneux. Notre nombre de naissances diminue régulièrement: de 1886 à 1906, le chiffre tombe de 900.000 à 800.000; CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nous sommes aujourd'hui à 791.712, ce qui représente 20,2 par 1.000 habitants, tandis que la proportion est de 25 pour la Belgique, 27 pour l'Angleterre et la Suisse, 31 pour l'Italie, 33 pour l'Espagne et l'Allemagne, 36 pour la Hongrie, 48 pour la Russie. La natalité est, d’ailleurs, en baisse dans la plupart des Etats de civilisation occidentale; il n'y a guère que la Russie, les pays balkaniques et l'Espagne qui semblent y échapper. De 1875 à 1905, on estime que le nombre des naissances a baissé, en France, de 26 à 20 pour 1.000 habitants, en Allemagne de 40 à 33, en Angleterre de 36 à 27, en Italie de 37 à 31, en Hongrie de 44 à 36, en Belgique de 33 à 25, en Hollande de 36 à 30, en Suisse de 32 à 27, en Suède de 31 à 25,5. En règle générale, la mortalité baisse en même temps que la natalité, d'abord parce que les progrès de l'hygiène et de l’aisance diminuent le nombre des décès à tous les âges, et qu'ensuite le fait seul de la réduction des naissances entraîne un abaissement de la mortalité infantile‘. Nous échappons à cette règle; il n'y a guère que l'Espagne, la Serbie, la Roumanie, la Hongrie, la Russie qui aient une mortalité nettement supérieure à la nôtre, compensée, d’ailleurs, par une très forte natalité. Notre taux de mortalité est de 19 0/,,, tandis qu'il s'élève à 14,6 en Suède, 15,4 en Belgique, 15 en Hollande, de 15 à 17 en Angleterre et en Suisse, 20,8 en Italie, 22,7 en Autriche. De 1871-1875 à 1907, l'excédent annuel des nais- sances sur les décès pour 1.000 habitants a passé en Belgique de 9,2 à 9,8, en Hollande de 10,6 à 15,4, en Italie de 6,4 à 10,6, en Autriche de 6,7 à 41,2, en Alle- magne de 13,1 à 14,2. Dans tous ces pays, la mortalité a baissé plus rapidement que la natalité. Le phénomène inverse est constaté en Angleterre où cet excédent à diminué de 13,5 à 11,3, en Suède de 12,4 à 10,9, en Nor- vège de 12,7 à 12,1, en France de 2,9 à 1,2 en 1908, après avoir été négatif en 1907. Un excédent aussi faible pour notre pays doit attirer l'attention. S'il est difficile d'agir sur la natalité, il est, par contre, plus facile de restreindre la mortalité en assainissant les villes et en répandant les principes d'hygiène. Cette science vitale n’a pas dans nos Univer- sités une place en rapport avec son importance; elle devrait, en outre, figurer dans nos programmes d'ensei- nement secondaire et primaire, et il faudrait répandre à profusion l'enseignement ménager qui est appelé à jouer un rôle social de premier ordre dans les classes ouvrières ?. Le nombre des mariages constaté en 1908 (315.928) est le plus élevé qu'on ait enregistré depuis 1873; l'augmentation est de 1.172 par rapport au chiffre de 1907, qui excédait déjà de 8.269 celui de 1906. Le nombre des divorces s'accroît, par contre, d'une façcom régulière: de 7.157 en 1900, il est passé à 10.019 en 1905, 10.573 en 1906, 10.938 en 1907, 11.515 en 1908. Le chiffre des naturalisations s'est élevé de 2.149 en 1906 à 2.91% en 1908, en augmentation de 338 sur 1907 (2.576). Le nombre de 1908 comprend 1.919 hommes et 995 femmes, auquel il faut ajouter 5.085 enfants. Les naturalisés appartiennent principalement à la Belgique (2.549), à l'Italie (1.223), à l’Alsace-Lorraine (881) et à l'Espagne (374). Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. * Pigrre Lenov-BEatLIEU : Economiste français, 5 juin 1909, ? Sur le rôle économique et social de l'enseignement mé- nager, Cf. les rapports de MreS BRüNuES, Rucner et MONNER ON, de MM. Cueysson et CLenGer, au Congrès international d'en= seignement ménager de Fribourg (29-30 septembre 1908). Rapports et comptes rendus, 2 vol. in-8, Fribourg, 1909. | FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS 617 CARÈNES ET POISSONS STABILISATION PAR LES NAGEOIRES Depuis quelques années, j'ai entrepris de montrer que la forme des poissons est le résultat nécessaire des pressions dues à la résistance de l’eau s'exer- cant sur un corps relativement plastique qui s'y déplace avec une certaine vitesse. J'ai publié déjà quelques résultats‘, mais j'en possède de plus nombreux encore, ayant abordé le problème par des voies très diverses et fait converger vers sa solution des recherches qui tendent au même but, mais qui diffèrent profondément entre elles par les techniques dont elles font usage. En ce moment, une de mes séries d'expériences, sans être encore tout à fait achevée, me semble déjà suffisamment concluante pour mériter d'être connue, et je vais brièvement en exposer les résul- tats principaux. Si véritablement, comme je le pense, la forme des poissons est due au modelage par la résistance de l’eau, elle doit être en même temps la forme de résistance minima, puisque, tant que ce résultat n'est pas atteint, la cause persistante continue à niveler la surface. {. — RÉSISTANCE A L'AVANCEMENT DANS L'EAU DE DIVERSES CARÈNES ALLONGÉES. S 1. — Les formes étudiées. Afin d'avoir des renseignements précis que je pusse utiliser moi-même pour le but spécial ‘que j'avais en vue, j'ai mesuré la résistance à l'avancement dans l’eau d'un certain nombre de mobiles ayant même diamètre transversal, 24 mil- limètres, même rugosité de surface et ne différant entre eux que par la forme. Laissant de côté les cas du plan mince, de la demi-sphère ou d’autres surfaces simples, j'ai choisi six formes allongées susceptibles de supporter la comparaison avec celle du poisson, chacune de celles-ci étant reproduite en trois longueurs différentes, qui étaient entre elles dans les rapports 1, 1,5 et 2, savoir 18,27 et 36 centimètres, la section restant identique. Cela faisait en tout 18 modèles répartis en 6 groupes. J'ai étudié leur marche à 29 vitesses différentes et pris en conséquence 522 mesures au chronomètre. Les 6 formes employées sont les suivantes : I, un cylindre retaillé à son tiers antérieur par un dièdre à arête horizontale et, à son tiers postérieur, par un ‘ La forme et le mouvement. Université de Paris, juin 1905. — Notes préliminaires sur la forme des poissons. Archives de Zoologie expérim. et génér., 1908. dièdre à arête verticale. Cette forme devait être la plus mauvaise, car on sait, en construction navale, qu'il est très défavorable de laisser une partie cylindrique au milieu de la carène; II, une forme rappelant la veine inversée, présentant à partir du milieu une taille horizontale et une verticale, les deux surfaces étant raccordées en s'inspirant de la forme liquide préalablement observée; II, un cylindre retaillé en cône à son tiers antérieur et à son tiers postérieur, les arêtes de raccord rabattues pour la continuité; IV, un cône, surmonté à sa base d'une faible calotte sphérique et marchant le gros bout en avant; V, le même marchant le petit bout en avant; VI, la forme poisson, géométriquement, définie comme un cône de révolution retaillé à son gros bout antérieur par un dièdre à arête horizon- tale intéressant le quart de la longueur et, à l'arrière, par un dièdre à arête verticale. J'ai déjà montré, par l'étude du maïître-couple, que cette définition se retrouve chez tous les pois- sons, parfois avec évidence (fruites, surmulet, squales, etc.), d'autrefois dissimulée et principa- lement parce qu'il s'y superpose une compression latérale générale (carpes, lanches, dorades, ete.). Autrement dit, le cône qui sert de départ pour la construction, au lieu d'être à section droite circu- laire, devrait être à section droite elliptique. Je me propose d'étendre ultérieurement mes invesliga- tions à ce cas; pour commencer, je me borne à celui que j'ai défini, dont la réalité n’est pas moins cer- taine. Les modèles étaient construits en bois, peints à 3 couches pour qu'ils fussent bien imperméables, et lestés de façon à flotter juste dans de l’eau à 12° en- viron. Si la température s'élevait, ils coulaient au fond; si elle s'abaissait, ils flottaient à la surface; mais, dans un cas comme dans l'autre, le poids ou la force ascensionnelle étaient quantités assez faibles pour être négligées. J'ai done considéré mes mobiles comme ‘étant sans poids propre; leur masse ne peut intervenir que dans la mesure où l'accroissement de volume changerait aussi la sur- face au maitre coupleet, comme j'ai conservé celle- ci constante, elle n'intervient pas. 2. — Le mécanisme moteur. V4 La progression dans l’eau était assurée par la chute d’un poids. J'ai pu réaliser une installation peu coûteuse, grâce à l'hospitalité tout aimable que j'ai recue de M. Coudry, directeur de l'École 0 GIS FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS horticole du Plessis-Piquet. Il à bien voulu mettre à ma disposition une pièce d'eau située dans l'an- cienne propriété de Colbert que son école occupe. Au bord de l’eau s'élève un magnifique peuplier qui m'a servi de pylone. À 16 mètres de hauteur, j'y ai- intelligence par mon élève et ami, M. X. Roques, agrégé préparateur à l'École Normale supérieure, et je suis heureux de reconnaitre son efficace col- laboration, sans laquelle je ne serais pas parvenu à mener à bien ces mesures. Les mobiles, marchant horizontalement dans l'eau, ont, abstraction faite des frottements du mécanisme, le même mouvement que s'ils y tom- baient verticalement en ayant successivement pour poids les poids moteurs, et, comme ils sont ürés par leur avant, il faut ajouter que, dans le cas de la chute, leur centre de gravité serait très antérieur. [ls marchent donc dans l’eau comme Q Wi w | ! 1 h j Î 1 1 ‘ { ' A ï i Fig. 1. — Graphique des courbes de marche de divers mobiles donnant les pourcentages de puissance perdue en.fonction def forme; la portion de l'aire couverte d'une teinte de hachures verticales es! fait clouer une planchette portant une poulie gros- | s'ils y tombaient en corps d'abord légers, de plus sière sur laquelle passait une corde, dont les deux extrémités étaient, d'autre part, amarrées près de terre. Avec cette corde, je pouvais hisser à la hau- teur de 16 mètres une poulie plus précise. L'axe de celle-ci était supporté par une fourche prolongée par un axe vertical monté sur billes, qui permet- tait à la poulie d'être toujours dans le plan de trac- tion; elle même tournait sur deux pointes d'acier très fines et réglables. II en était ainsi pour deux poulies de renvoi nécessaires pour lirer les mobiles à 0,30 ou 0,50 au-dessous de la surface de l'eau. A la condition de régler toujours les poulies con- venablement et d'employer toujours la même sorte de fil, j'avais un appareil parfait, qui, à un an de dis- tance, me donnait exactement les mêmes mesures pour un même mobile tiré par le même poids. J'ai été aidé avec le plus grand zèle et la plus pratique en plus alourdis par l'accroissement du poids moteur. Finalement, s'ils devenaient assez lourds pour leur volume, leur marche, ou leur chute, deviendrait identique à ce qu'elle serait dans le vide. Pratiquement, nous nous sommes arrêtés avant cette limite, quand les accroissements de vitesse, devenus inférieurs à 0'"2, ne furent plus appréciables avec certitude, ce qui a été atteint pour un poids moteur de 3 kilogrammes. Nous | avons opéré entre des vitesses de 0,40 à la seeonde ou 1 kil. 440 à l'heure et 7 mètres par seconde ou 25 kil. 200 à l'heure, ce qui, vu la petitesse de nos modèles, représente des vitesses très supérieures à . celles qui sont atteintes par les ballons ou les navires. D'autre part, pour la dimension et la vitesse, nos mobiles sont directement comparables à beaucoup de poissons. puissances du mécanisme moteur sans mobile. FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS 619 Avec les tâtonnements du début, les interruptions par les très mauvais temps, par les devoirs profes- sionnels et par d’autres travaux, ces expériences ont duré près de deux ans. Dans les saisons succes- sives, mon appareil ne m'a permis de voir aucune différence due au changement de la viscosité de l'eau aux diverses températures; sa sensibilité n'allait pas jusque-là, mais elle était suffisante pour me faire retrouver un phénomène bien connu des hydrauliciens et qui est l'état presque pâteux de l'eau au voisinage de 0° et avant qu'elle soit gelée; à 3° ou 4, on n'observe rien de pa- reil. À deux reprises, au voisinage du gel, mon système, qui toujours donnait des raccords justes, ne fournissait plus rien de bon. Les écarts variaient de 0'"9 pour un poids de 200 grammes à 0"4 pour Le système complexe formé des poulies, du fil, de l'air qui s'oppose à la chute du poids et de l’eau dont le frottement retient le fil a, pour un poids donné, une certaine puissance P, facile à calculer puisque je connais le poids moteur p, la hauteur de chute À et le temps f. Tout restant semblable, j'ac- croche un mobile à l'extrémité du fil; j'obtiens un autre temps /' et une autre puissance P°. La diffé- rence entre les deux puissances P—P" est la puis- sance perdue par le fait du mobile. Ce n’est pas encore ce nombre qui est bien intéressant à con- naître: c’est surtout son rapport à la puissance totale, soit le quantième perdu, le tant pour cent par exemple, ou : 100(P — P' — — IVy un poids de 4 et 500 grammes et 0"1 pour 1.000 grammes. Ces retards, indiquant un sensible accroissement de résistance, ne sont pas constants à un même poids ; ils varient avec les diverses formes. Il était tout à fait hors de mon projet d'étudier ce phénomène spécial; je le signale seule- ment pour faire apprécier la délicatesse relative de mon mécanisme. $ 3. — Comparaison des mesures obtenues. Afin de comparer entre elles les mesures ainsi obtenues, j'ai opéré de la facon suivante, qui me semble la meilleure pour éliminer le mécanisme, sinon absolument, du moins autant que cela est possible. Pour chaque poids moteur, je mesure le temps de chute, le fil passant sur toutes les poulies et traïnant dans l’eau, mais sans mobile au bout. — Chaque aire teintée comprend les lracés relatifs aux trois mobiles d'une même imitée par les tracés relatifs aux mobiles de forme moyenne et longue. Par un caleul bien simple, il est facile de voir que : 400 (P — P') _ 100( —1) P t Comme résultat global de ces recherches, les divers mobiles, classés d’après la puissance perdue en moyenne aux divers poids, se rangent ainsi en mettant ensemble les trois longueurs d’une même forme : PERTE MOYENNE de puissance motrice IV. Cône gros bout antérieur. 22 oh V. Cône petit bout antérieur. 24 » VI. Poisson Sp toe 29)» I AVeine inversée. 00-00. ND III. Fuseau biconique. . 32 » I. Fuseau bidiédrique . . . 36 » Bien qu’un pareil classement d’après desmoyennes soit un peu brutal, il donne cependant une idée juste 620 FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS de la valeur des diverses formes employées et de leur résistance à l'avancement. J'ai d’ailleurs con- struit, pour chaque mobile individuellement, les courbes de marche, en prenant pour abscisses les puissances du mécanisme moteur sans mobile et pour ordonnées les pourcentages de puissance perdue à chaque vitesse. Ainsi : = ph. l 100 (1 — t) 2 wv d! Les 18 courbes se répartissent en six groupes correspondant chacun à une des six formes repro- duites en trois longueurs. La superposition de ces courbes donne comme classement le même résultat que la considération des moyennes. Je ne veux ici ni analyser en détail ces diverses courbes, ni les reproduire toutes ; je me borne à donner comme exemple (fig. 1) un graphique montrant ensemble les mobiles de la forme I, VI et IV. Les courbes de marche pour les 3 mobiles d’une même forme délimitent ensemble une certaine aire que je couvre d'une teinte; les tracés relatifs aux mo- biles de forme moyenne et longue en comprennent une autre, partie de la première, que je distingue par sa teinte faite de hachures verticales. On voit ainsi la marche d'ensemble pour chaque forme et le détail pour chaque longueur, à la condition de noter quelques repères : «, pour la petite, 8, pour la moyenne, y, pour la grande. Le cône marchant le petit bout en avant mérite une mention spéciale, surtout quant à la forme courte, les formes moyenne et longue ne présentant rien de bien particulier en outre de ce que je viens de dire. Or, la petite forme est, dans ce type, comme d'ailleurs dans tous les autres, la plus caractéris- tique; il est facile de comprendre, en effet,que toutes les formes, s’allongeant de plus en plus, deviennent de plus en plus semblables entre elles, en devenant semblables à une baguette quelconque dont les caractères de forme s'effacent par rapport à la lon- gueur, Le cône à forme courte, avançant le petit bout le premier, a la marche la plus irrégulière de toutes, tantôt présentant le maximum de perte, peu après le minimum et cela d'une facon répétée. C’est cette forme qui donnerait le plus de renseignements pour une étude purement physique du mouvement tourbillonnaire. $ 4. — Conclusions sur les carènes instables. Quoi qu'il en soit, le résultat auquel nous voici arrivés est quelque peu déconcertant pour l'idée que je poursuis, à savoir la supériorité de la forme poisson, puisqu'elle ne se classe qu’en troisième rang. C'est aussi la forme que M. Weyher proposait icimême pour la meilleure carène, et le résultat de mes mesures n’est guère favorable à cette manière de voir. Je ne me laissai point troubler par ces faits, quelque certains qu’ils me parussent, et ma convic- tion n'en fut point ébranlée. Ils ne sont, en effet, relatifs qu'à des carènes instables, et tout de suite m'apparut le rôle probable des nageoires, quoique certaines expériences récentes tendent à le faire considérer comme insignifiant. Je ne doutai pas un instant qu'après stabilisation la forme poisson ne gagnât la primauté, et, si le fait se vérifiait, il était de nature à rendre mon idée singulièrement plus précise en montrant le déterminisme de la forme singulièrement plus étroit, puisqu'il n’y avait plus d'abstraclion à faire et qu'il fallait la prendre toute, au complet, non seulement dans sa charpente générale, mais avec toutes ses annexes. II. — STABILISATION DES CARÈNES. $ 1. — Les figures d’oscillation. Le mouvement de translation des divers mobiles, tirés comme je l’ai dit, est troublé par des mouve- ments transversaux, causés par les tourbillons de l'eau déplacée, et qui sont, en somme, la manifesta- tion de leur instabilité. Les aéronautes se bornent à décomposer ces mouvements en deux groupes : ceux dont la principale composante est horizontale constituent l'instabilité de route; ceux dont la prin- cipale composante est verticale constituent l’insta- bilité longitudinale. Sans faire cette décomposition, et en regardant le phénomène total, on observe que chaque forme a ses mouvements spéciaux, par lesquels peut être définie son instabilité particulière comme une sorte d'oscillation ou de vibration autour de l'axe du mou- vement. On peut dire, d'une façon générale, que, par suile de ses mouvements transversaux pério- diques et non amortis, chaque mobile dessine dans l'eau une figure virtuelle inverse de la sienne propre. Cette figure, à chaque instant défaite par la transla- tion, se dessinerait seule et purement si le mobile était fixé dans un courant large, rapide et sans remous dus à des frottements de parois, les condi- tions de fixation du mobile restant toujours les mêmes, naturellement. Le cône marchant le gros bout en avant oscille sur un Cône à pointe antérieure (A, fig. 2) ; le cône marchant le petit bout antérieur dessine un cône à pointe postérieure (B, fig. 2); le fuseau biconique, une sorte d'hyperboloïde à une nappe (C, fig. 2); le poisson, qui est l'assemblage de deux coins, l’un à arêle antérieure horizontale, l'autre à arête verticale postérieure, dessine à l'avant un coin dont l’arête horizontale est postérieure, et à l’ar- rière un autre coin dont l'arête verticale est anté- FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS 621 rieure (D, fig. 2); autrement dit, sa tête oscille de bas en haut et de haut en bas, tandis que sa queue oscille de droite à gauche et de gauche à droite. Tous ces mouvements sont assez prompts par rap- port à la translation et sont parfaitement nets. Le fuseau bidièdrique et la forme en veine inversée paraissent d’abord faire exception à la loi générale que j'ai posée; cependant, il n'en est rien. Marchant l'avant horizontal, ils devraient oseiller de haut en bas avec la tête, et battre de droite à gauche avec la queue; ils le font aussi, mais d'une facon extrêmement lente par rapport à la transla- tion. Cette lenteur témoigne de leur plus grande instabilité, et leurs déplacements très faibles, non La forme de toutes les oscillations dont il vient d’être question est toujours la même, quelle que soit la vitesse, et dépend exclusivement de la forme du mobile. La vitesse fait sans doute varier la longueur d'onde, mais je n'ai pas fait d'observa- tions précises à cel égard. $ 2. — Construction et disposition des nageoires artificielles. J'ai entrepris de supprimer ces oscillations par l’adjonction de nageoires et de rendre ainsi le mouvement rectiligne permanent. Les nageoires des poissons ont des positions assez diverses, que je n'ai pu étudier toutes en détail Fig. 2. — Figures d'oscillation des divers mobiles marchant dans l'eau. corrigés par un prompt déplacement inverse, altèrent profondément le mouvement de transla- tion, avec lequel ils se combinent. La lente oscilla- tion horizontale de l'avant transforme la progres- sion en une série de plongeons verticaux, en une marche sinusoïdale ; l’oscillation latérale de l’ar- rière ne se montre pas, effacée qu'elle est par le mouvement de progression qui la redresse à mesure, au lieu de l’accentuer comme il le fait pour celle de avant. Un pareil mobile non retenu par un fil, lancé par exemple à la main. continue sa première oscillation sans se redresser et décrit un cercle complet dans le plan vertical. Si, par la traction du fil, on faisait progresser le mobile en lui mettant l'étrave verticale, dans ce cas la marche, au lieu d'être troublée par des plongeons, le serait par des embardées à droite et à gauche. dès l’abord. J'ai choisi un type réel, congruent à la carène réelle dont j'avais d'abord fait choix ei auquel ultérieurement je rapporterai les autres. Il y à toutefois une certaine fixité dans la disposition et dans le nombre, traduite par la nomenclature même; c’est ainsi que l’on compte deux pectorales, deux abdominales, une anale, une caudale, une dorsale (simple, double ou triple). Je l'ai prise double. La pectorale est la plus variable. Parfois, sa ligne d'insertion est oblique sur l'axe, même presque transversale ; la nageoire sert alors de rame ou de frein et, pendant la nage filée, elle est collée au corps. C'est ce qu'on voit chez les poissons assez aplatis (carpes, vieilles, etc.), que justement je n'étudie pas. Dans le type que j'étudie (squales, truites, etc.), les pectorales, aussi bien que les abdominales, ont FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS une insertion longitudinale; elles ne servent pas de rames ou de freins; pendant la nage filée, après le coup de queue propulseur, elles sont étalées horizontalement le long du corps et n’exéeutent que de faibles mouvements. Dans le plan vertical, les dorsales exécutent de semblables ondulations. Pour faire une nageoire, je découpe un triangle G Fig. 3. — Disposition des nageoires. dans une lame d'aluminium de 02,1 d'épaisseur; je roule le bord antérieur en tuyau, que j'enfile sur une tige d'acier enfoncée dans le modèle, perpendi- culairement au plan de symétrie, s'il s’agit d'une nageoire paire, dans le plan de symétrie s'il s'agit d'une nageoire impaire. L’arrière de la nageoire (fig. 3), percé d'un trou €, bordé par un petit œillet, est rattaché au Corps par un caoutchouc fixé en . La ligne d'insertion bd. fluence mous, est l'in- des re- les na- geoires vibrent de c’ à c', rame- nées par le caoutchouc dont l’élasticité est le coup de barre ou la force qui, remplacant les muscles du poisson, s'oppose aux déplacements d'instabilité Sous Fig. et les rectifie. J'ai disposé sur la carène poisson et sur celle du 6 G) @ C’ g! 4! Fig. 5, — Construction de la nageoire caudale. cône à gros bout antérieur, dans leurs trois formes, des nageoires de cette sorte alternativement hori- zonlales et verticales, savoir : une paire de pec- torales, une première dorsale, une paire d’abdo- 4. — Disposition des nageoires sur la forme conique. minales, une seconde dorsale, une anale et une caudale. La forme conique ainsi garnie a l'as- ral cl À qd Fig. 6. — Nageoire verticale souple disposée sur la moitié postérieure du corps. pect que l'on voit sur la figure 4 et grâce auquel on imaginera facilement les autres. La caudaleest, de toutes, celle qui m'a donné le plus de peine à imiter. Dans le poisson,ellesert, en effet, d'abord à la progression et subit une tor- sion sous l'in- fluence du coup de queue; puis elle se tient étalée comme les autres pendant que le poisson file. Négligeant la première qualité, puisque mes mobiles ne se meuventpas par eux-mêmes, j'ai dis- posé ces nageoires de facon qu'elles aient seulement l'étalement souple. Pour réaliser cela, je plante dans l'extrémité de mon mobile (fig. 5) deux tiges d'acier 4h, a'L', sur lesquelles je fixe par leur bord roulé en luyau deux triangles d'aluminium abe, a'D'e', qui viennent s'affronter sur l'axe par un de leurs côtés. Ces deux côtés libres sont reliés l’un à l'autre par deux cordons de caoutchouc. Les dimensions des nageoires élaient les sui- vantes. Le premier nombre exprime en millimètres la dimension à la base transversale; le second, la dimension longitudinale maxima : FORME « FORME £ FORME Y Pectorales. DID 40 X 50 53 X GS 4re dorsale . 14 X 39 19 X 60 255013 Abdominale. 135430 19 X 46 25 X 61 2e dorsale. 19592 15 X 36 23 X 45 Anal Me rs LAC 24 15 X 35 21 545 Caudale. . . : 245 X 23 10 X 40 103 X 63 Ces dimensions, adoptées par suite du sentiment FRÉDÉRIC HOUSSAY — CARÈNES ET POISSONS de la forme, ont été inspirées par l'examen de plu- sieurs exemplaires de truiles arc-en-ciel. J'ai essayé également, pour un propos plus théo- rique el pour m'en servir ultérieurement, de stabi- liser les modeles en veine inversée avec une nageoire verticale souple faisant tout le tour de la moitié pos- térieure du corps, et avec deux nageoires horizon- tales s'étendant à droite et à gauche sur la moitié antérieure. Ces nageoires sont obtenues en enfon- cant une série de tigelles d'acier (a, à, a, fig. 6) dans le modèle, puis en enfilant sur chaque tigelle un petit rectangle d'aluminium par son bord antérieur roulé en tuyau, le bord postérieur restant libre et battant. Pour limiter son mouvement, je relie ee bord libre à la tige suivante par un caoutchouc qui traverse près de son bord-charnière la plaquette suivante percée d'un trou à cet effet. $ 3. — Stabilisation par les nageoires. Ainsi gréés, tous les modèles sont devenus par- faitement stables, je veux dire que tous les mouve- ments transversaux par lesquels j'ai caractérisé plus haut l'oscillation de leur marche sont supprimés net. Pendant la marche, toutes les nageoires battent vivement autour de leur charnière, rythmiquement ramenées par leurs caoutchoucs. C'est en somme la transformation d'un mouvement vibratoire com- pliqué, auquel prend part toute la forme, en un autre mouvement vibratoire plus simple, n'inté- ressant que les annexes. La stabilité acquise de cette façon est parfaite- ment rigoureuse, el je suis sûr qu'elle existerait mème pour des mobiles sans aucun lest et que ceux-ci conserveraient n'importe quelle position donnée au départ, à la condition qu'aucune force dissymétrique n'existàt en dehors d'eux dans le milieu. Dans mes expériences, ce n'était pas lout à fait le cas. Le fil tirant mes mobiles était un fil tordu. Je prenais bien soin de le détordre pour un poids voi- sin de ceux avec lesquels j'opérais. Néanmoins, pendant la montée du poids, il se faisait une petite détorsion et, au moment où l'on lächait le mobile, la détente amenait une retorsion. Or, pour ajouter à mes mobiles les nageoires, j'avais du les délester presque complètement et je vis alors plusieurs d'entre eux tourner sur leur axe longitudinal, tous de la même manière, tous dans le sens de la retor- sion du fil. Il fallait corriger la petite force étrangère due au mécanisme qui la produisait. [1 suffisait pour cela, comme je l'ai vérifié, de prendre un fil sans torsion, et aucune instabilité ne se manifestait, ou encore de lester plus fortement les mobiles. Ne pouvant changer le fil sous peine d’avoir à recommencer toutes les mesures antérieures, je refis les mobiles qui tournaient en bois de peuplier plus léger que le pitch-pin, que j'avais d'abord employé. Cela me per- mit de lester un peu plus efficacement. Les mobiles refaits sont Ilg, 114, IVe, Vlg, VI. Les trois veines inversées eurentalors la stabilité absolue à toutes les vitesses étudiées. Les trois poissons également, sauf aux petites vilesses.,les trois cônes furent stables, sauf le moyen aux gran- des vitesses et le grand aux faibles vitesses. En laissant subsister la petite cause extrinsèque de trouble, j'ai donc appris que la stabilité, qu'au- trement j'aurais pu croire uniforme, na pas la mème fermelé en toutes circonstances. Il y a des régions du graphique, c'est-à-dire des vitesses, pour lesquelles la stabilité est plus précaire et où les forces étrangères sont plus capables de la trou- bler. Sur le graphique qui représente les courbes de marche des mobiles stabilisés, courbes superpo- sées à celles des trois mobiles instables (fig. 1), j'ai figuré ces zones de stabilité précaire en interrom- pant le trait plus ou moins, suivant que la rotation est plus ou moins accentuée. À son maximum, ce trouble de marche se traduit non seulement par une rotalion du mobile sur son axe, mais encore par une translalion sur une hélice dont le sens est le même que celui de la rotation. Il arrive mème que le cylindre sur lequelest décrite l'hélice de transla- ion dont je viens de parler se transforme en un turau dont l'axe est une hélice. La marche totale est donc la superposition de trois mouvements en hélice. C'est le retour au mouvement oseillatoire autour de l'axe rectiligne de translation; mais ce mouvement n'a plus qu'un seul aspect, quel que soit le mobile qui le subisse. $ 4. — Conclusions sur les carènes stabilisées. D'une facon générale, la stabilisation, en aug- mentant la surface de résistance, fait perdre de la vitesse. Une seule forme fait exception; c'est la {orme courte de poisson dans sa région de stabi- lité absolue. Elle se montre donc comme excep- tionnellement excellente, puisqu'elle gagne tout à la fois, et cela aux grandes vitesses. En résumé, dans chaque forme stable, la petite longueur est toujours la meilleure, puis vient la moyenne et enfin la grande. C'est à peu près le contraire de ce que l’on pense, du moins en Zoo- logie, où les poissons effilés sont estimés les plus rapides; mais c'est conforme aux indications du Colonel C. Renard, qui considère comme nuisible un allongement dépassant une certaine mesure. En outre, dans chaque longueur, on à toujours le classement suivant : 1° poisson; 2° cône; 3° veine inversée. Les résultats sont dès lors conformes à mes prévisions. Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE $ 5. — De quelques objections possibles. On pourrait m'objecter assez raisonnablement que je n'ai pas stabilisé le cône de la facon qui lui convenait, et que peut-être le résultat eût été tout autre en employant un empennage analogue à celui des ballons dirigeables, préconisé en 1904 par le Colonel C. Renard. J'ai donc fait un cône de forme courte en bois de peuplier, mieux lesté par consé- quent que son homologue à nageoires; je lui ai mis un empennage consistant en deux nageoires cau- dales en croix; j'ai donné à ces nageoires les mêmes dimensions qu'à celles de la forme moyenne, pour ne rien épargner. : Aux toutes petites vitesses, le cône empenné est stable, mais marche moins bien que le petit poisson et le petit cône à nageoires. À environ { mètre à la seconde, il rattrape le poisson, qui d’ailleurs à cette vitesse est instable. Puis, à la vitesse de 2 mètres à la seconde ou de 7 kilomètres à l'heure, il se met à tourner violemment sur lui-même, avance sur une hélice et ne retrouve plus jamais de stabilité. Done l'empennage, admissible pour le ballon lourdement lesté par sa nacelle et dont l'effet est d’ailleurs complété par le jeu des gouvernails, est tout à fait inférieur à la disposition que réalisent les nageoires de poissons, surtout pour de grandes vitesses. Il est encore un reproche possible contre lequel je voudrais me défendre d'avance. Sur mes six formes de mobiles, quatre ont rigoureusement la même surface au maitre-couple; cette surface est un peu plus petite chez le poisson et notablement moindre encore pour la veine inversée, et l’on pourrait se demander pourquoi je n'ai pas calculé la puissance perdue par unité de surface au maitre- couple. Cette apparente précision supplémentaire m'a paru tout à fait illusoire. Dans les carènes ins- tables, en effet, la considération de la surface au maitre-couple du modèle immobile ne signifie absolument rien, puisque ce n’est pas elle qui, dans la marche, fait surface de rencontre, mais, en raison de l’inclinaison variable du mobile dans sa figure d'oscillation, une tout autre surface, limitée par un contour apparent à chaque instant changé. Dans lés carènes stabilisées, la surface au maître- couple n’a pas plus d'intérêt, puisque l'inclinaison variable des diverses nageoires modifie à chaque instant la surface de rencontre avec l’eau. Pour que la surface au maïître-couple de la carène fût intéressante à considérer, il faudrait éliminer les nageoires, ce qui serait possible si, par exemple, elles battaient suivant le même rythme sur tous les modèles pour la même vitesse. Mais cela n’est pas certain du tout et je suis même convaincu que ce n’est pas. III. — CoNcLusION. On peut done résumer et conclure de la facon suivante, qui est incontestable : J'avais une carène conique et une carène pisciforme; à l’état instable, sans nageoires, la première perdait moins de la puissance motrice que la seconde. Après la même stabilisation, la meilleure pour les deux formes jusqu'à preuve du contraire, le classement est ren- versé pour les deux mêmes carènes et la pisci- forme devient la meilleure. Frédéric Houssay, Professeur de Zoologie à la Sorbonne. LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE I. — ORIGINE ET DÉVELOPPEMENT. $ 1. — Débuts de la Tectonique française. J'ai expliqué ailleurs" que la Loi de position était née en 41870 sur les ruines du Æ?éseau pentagonal, et j'ai rappelé que l’âge des soulèvements n'est nullement lié, comme le croyait Elie de Baumont, à leur orientation suivant des grands cercles du Globe, mais que la formation des plissements des couches de l'écorce terrestre dépend surtout de la position des massifs résistants contre lesquels les efforts mécaniques les ont appliqués. C'est ce fait 1 E France JounpY : 1907). Esquisse de la Tectonique du sol de la d'observation, cent fois vérifié depuis, que j'ai caractérisé par ce que j'ai appelé la Loi de position, qui date de 1872 et qui a été l’origine de la Tecto- nique moderne, c'est-à-dire de la nouvelle branche de la Géologie qui traite de la structure des reliefs de la Terre. La formule de cette loi que j'ai produite alors comportait trois propositions, une de Géostatique et deux de Géodynamique, à savoir : I. — « Le tracé des reliefs du Jura dôlois est indépendant de l’âge des soulèvements ; il est fonc- tion surtout de la position géographique des couches. » II. — « Cette loi préside à la structure des mon- tagnes dans toute l'étendue du Jura et des Alpes. Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE 625 Occasionnés par une force de plissement originaire du Sud-Est, les reliefs du Jura ont été moulés sur ceux des roches anciennes formant l'angle des- 1° par le Forez, le Charollais et le Morvan ; 3° par le siné : 20 par le pied méridional des Vosges; mole vosgien. » III. — « On doit entendre par môle vosgien le relief primaire souterrain qui prolonge les Vosges au Sud-Ouest et qui a formé obstacle lors du plis- sement alpino-jurassien. » Ce n'est que plus tard, en 1877 seulement, que M. Suess (omettant toutefois de citer et la Loi de position et son auteur) « a mis en évidence" l'unité de la chaîne alpine, la part prépondérante des efforts tangentiels dans sa formation et le refou- lement de cette gigantesque vague terrestre contre les massifs anciens et solides du Vorland ». En 1882, le célèbre géologue autrichien a commencé la publication de Das Antlitz der Erde, assurément le plus beau monument qui ait jamais été élevé à la Géologie. Les mots étrangers de Vorland et de Horst sont devenus fort à la mode en France et y ont fait oublier ceux de rivages anciens, de môle, et même la Loi de position. La Tectonique fran- caise s’est ainsi mise aveuglément à la remorque de la Tectonique autrichienne, et elle en a été punie par une sorte de faillite d'où elle n’a été tirée que par Marcel Bertrand, ainsi qu'il sera expliqué plus loin. $ 2. — La théorie des vagues tectoniques. M. Suess est revenu, avec raison, à plusieurs reprises sur cette comparaison entre les plisse- ments multiples et les vagues, qui a frappé égale- ment tous les tectoniciens, mais sans qu'ils l’aient poussée plus avant. J'ai pensé qu'il y avait là autre chose qu'une comparaison. Plusieurs géo- logues aussi ont comparé les plis couchés à une moisson pliée sous l'effet du vent, ou à une forêt jetée à bas par l'ouragan, avec transport au loin d'arbres déracinés, exactement comme se com- portent les écailles de charriage qui, séparées de leurs racines, ont cheminé sur des parcours de plus de 100, kilomètres. Mais comparaison n'est pas raison. À bien réfléchir aux phénomènes de plissement, depuis les simples courbures des couches jusqu'aux nappes de recouvrement, on ne tarde pas à reconnaître qu'il y à réelle analogie entre les vagues tectoniques et les vagues marines. La vue de beaucoup de groupes de ces plissements des strates inspire la conviction que, par l'effet des poussées horizontales (tangentielles, suivant l'expression de M. Suess), les couches sédimen- M. Léon Bertrand a rappelé le fait dans un article (29 fé- vrier 190$) de la Revue générale des Sciences. aires sont devenues réellement très flexibles. On sait que, sous les fortes pressions, les corps solides se conduisent sinon comme des liquides, tout au moins comme des corps fort souples, et la fixation des plissements (en fin du phénomène) reproduit fréquemment l'apparence de vagues qui se soliditie- raient tout à coup au moment où elles déferlent contre les rivages. Et c'est pour n'avoir pas tiré les conséquences de cette analogie que la Tecto- nique est restée si longtemps stationnaire après ses premiers pas. Pour bien faire comprendre aux géologues la conséquence fâcheuse de leur timidité, je citerai l'exemple tiré de la crise des facies. Dès 1854, Ed. Forbes avait fait remarquer que l'analogie (et non la comparaison) entre les fossiles et les êtres vivants conduit nécessairement à reconnaitre que les êtres disparus devaient être soumis aux mêmes lois de distribution géogra- phique que les animaux actuels, suivant la pro- fondeur des mers, le tracé des courants, la forme des rivages, ete. Et Marcou appliquait immédia- tement ce principe au cantonnement des faunes dans des provinces naturelles. En particulier, pour les terrains jurassiques, il distinguait la province normande-bourguignonne, riche en Coraux, et la province hispano-alpine, féconde en Ammonites. Telle est l’origine de la distinction des facies coral- lien et pélagique”. Suivant en cela la voie tracée par Marcou, et aussi par Etalon, qui avait découvert le célèbre récif corralligène de Valfin, j'ai de bonne heure” reconnu que le facies corallien existe dans des strates supérieures à celles de l'étage dit coral- lien, jadis réputé pour avoir le monopole des agglomérations de Zoophytes. Plus tard, j'ai re- trouvé le même facies avec semblables colonies dans le Bathonien et dans le Bajocien*; opposant les facies à Céphalopodes (pélagiques) aux facies à Coraux (côliers), j'indiquais que ceux-ci s'étaient déplacés suivant les mouvements des rivages, et qu'on devait s'attendre à trouver des colonies coralliennes à tous les niveaux du terrain juras- sique. L'événement a pleinement justifié cette pré- vision pour tous les élages géologiques, car j'ai pu depuis, comme tant d’autres géologues, observer de grands bancs de coraux dans le Carbonifère de Dinant, dans le Dévonien de l’Anjou, etc. On sait que les bancs crétacés à Rudistes descendant des colonies dicératiennes sont devenus des stations coralliennes admises par tous les géologues, de 1 E. Jouroy : L'étage tithonique (La Philosophie positive, décembre 1872). 2 Jp. : Etude de l'élage séquanien des environs de Dôle (B.S. G. F., décembre 1865). 8 {p. : Sur une nouvelle classification des terrains jurassi- ques (B. S. G. F., 1871). 626 Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE sorte quon peut dire que les colonies de Zoo- phytes, ancêtres des atolls modernes, sont des stations locales de tous les temps. Mais les choses n'en étaient pas là quand Hébert voulut absolument que l'absence de niveaux coral- liens dans le Jurassique supérieur des Alpes fût attribuée à une lacune. Les géologues alpins de France, de Suisse et d'Allemagne soutenaient, au contraire, que la région alpine était pélagique à l’époque du Jurassique supérieur (c'est ce qu'ils appelaient l'étage tithonique) et que les divers niveaux s'y superposaient normalement, avec un facies à Céphalopodes différent, mais synchro- nique du facies corallien du Jura et du bassin de Paris. La dispute fut aiguë, puisque une thèse de Géologie, fort bien étudiée, mais conçue dans le sens du synchronisme des facies, fut refusée en Sorbonne, uniquement parce qu'elle déplaisait au maitre qui soutenait acharnement l'idée fausse de la lacune’. J'ai pris une part active, fort vive ma foi, à cette querelle d'antan”. Cette crise retarda de dix ans les progrès de la Géologie fran- çaise. Elle finit quand M. Douvillé, après ses études sur les terrains jurassiques du bassin de Paris’, reprit en main cette analogie entre les facies des faunes fossiles et ceux des faunes vivantes, et l'in- corpora dans son enseignement. La doctrine est devenue, depuis, classique et indestructible. Le sort de la théorie des facies coralliens est un enseignement précieux qui trace la voie à celle des vagues tectoniques. De même que la Strati- graphie s'était trouvée, en effet, arrêtée net parce que les géologues n'avaient pas osé alors tirer de l’analogie entre les stations des faunes vivantes et fossiles tout le parti que cette idée méritait, la Tectonique ne peut progresser maintenant qu'à la condition d'exploiter jusqu'au bout l'analogie entre les vagues fluides et les vagues tectoniques. On l’a bien vu par le développement que j'ai donné à cette idée, et par la fécondité des résultats. avec $ 3. — Fécondité des résultats. effet, coordonné et commenté nombre de faits isolés qui ne paraissaient pas, au premier abord, comporter quelque enseignement, et qui ont mis en pleine lumière loute une partie de la Tectonique*. C'est ainsi que j'ai distingué la vague J'ai, en * H. Douvircé : Notice sur ses travaux scientifiques (1908). * Jourpy : L’étage tithonique (oc cit.). * H. Douvirré et Jouroy : Note sur la partie moyenne du terrain jurassique dans le Berry (Z.S. G. K., décembre1874). HI. Douvicré : Sur le Jurassique moyen du bassin de Paris el sur le terrain corallien en particulier (B. S. G. Æ., 1881). H. Douvizcé et Roccanv : La partie moyenne du terrain jurassique entre Poitiers et Le Blanc (2. S. G. F.. 1885). ‘ Jounpy : Esquisse tectonique, ete. profonde de la vague superficielle. La vague pro- fonde à élé formée par l'effet de l'action tangen- tielle dans la masse même des couches comprimées. Elle explique fort bien la structure en éventail qui a été signalée dans les Alpes, les Pyrénées, contre la Serre, et en Vendée, dans le plissement de la Cornouaille, ete. La vague superficielle a engendré les plis dits normaux, c’est-à-dire ceux dont les courbures n'ont pas dérangé l’ordre stratigra- phique, et, par l'excès de sa force et de sa conti- nuité,elle a produit successivement les plis couchés, les étirements et les transports des masses déraci- nées qui ont donné lieu aux écailles de charriage et aux nappes de recouvrement. La même idée de vague tectonique procure une synthèse claire et facile de tous les genres de plissements. J'en ai tiré l'explication d’une foule de cas particuliers qui paraissaient indéchiffrables, par exemple celle d'anomalies quasi mystérieuses de la tectonique pyrénéenne, qui sont devenues intelligibles par le trajet des vagues tectoniques tertiaires et secondaires à travers le dédale des bosses et des fosses de formation primaire ; — celle des franchissements en sauts-de-mouton des nappes internes (du versant italien) de la chaîne alpine qui ont passé par-dessus les massifs cris- tallins dela crèle pour venir s'étaler sur le versant externe des Alpes calcaires ; — celle du passage de la vague entre les Maures et les Cévennes, s'enfoncant dans le cul-de-sac de Monté- limart, s'y courbant plusieurs fois pour venir déboucher entre le Mercantour et l’Estérel et y présenter des phénomènes de structure qui repro- duisent la solidification des vagues tourbillonnant dans un étranglement. La génération de tous les plissements de l’ouest de la France, depuis les Pyrénées jusqu'au Boulonnais, reproduit la marche classique d’un mouvement ondulatoire dont deux ventres apparaissent l'un au dôme de Mareuil-en- Aquitaine, l’autre à la boutonnière du pays de Bray, ete. | D'une facon générale, Za structure dépend de l'angle de la poussée avec l'horizontale : quan L il est négatif, la structure est en éventail; — nul, elle est normale; — posuif, les plis sont couches, puis transportés à distances variables. L'exaspe- ration de la force produit : dans le premier cas le renversement, dans le second l'aplatissement, dans le troisième le charriage. Mais le plus grand service que la théorie des vagues ait rendu à la Tectonique consiste en ceci : étant admis le mode de formation des ondulations modelées sur les rivages, la réciproque est encore plus importante, puisque le tracé des plissements récents révèle nécessairement celui des rivages préexistants. J'ai fait remarquer, en effet, que la Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE 627 flexibilité, sinon la quasi-fluidité, des couches plissées assimilait leur agencement le long des rivages anciens à celui des vagues de la mer telles qu'elles s'élalent le long des anfractuosités de nos côtes, tenues à distance par les caps, mais s'enfon- cant dans les anses. En d’autres termes, /e modelé des plissements contre les rivages anciens dessine les contours de ces derniers absolument comme l'eau fixe les courbes de niveau du sol, et les topographes utilisent cette notion pour tracer leurs courbes de niveau qui représentent par le dessin les reliéfs topographiques. C'est pourquoi les ondula- tions des plissements tertiaires précisent la forme des rivages du continent hercynien, et celles des plissements hercyniens peuvent être mises à profit pour la connaissance des reliefs archéens. L'appli- cation de ce principe m'a conduit à la découverte d'un faite du substratum archéen, aligné par le méridien 1° Long. E.,que j'ai appelé l'axe tectonique de la France. Je suis ainsi arrivé à séparer les plisse- ments de la couverture sédimentaire, des reliefs les plus anciens du globe, et à donner de leurs réseaux des définitions qu'on ne pouvait jusqu'ici espérer. Je ne puis ici que rappeler sommairement la loi résultant de ces considérations": Le réseau au substratum est marqué par les méridiens et les parallèles. Les réseaux primaires (huronien et calédonien) s'orientent en azimuths variables de 0 à 45°. Le réseau hercynien est caractérisé par les orientations bissectrices et orthoyonales de l'angle des méridiens et des parallèles. Enlin le réseau tertiaire (alpin ou pyrénéen) affecte de préfe- rence des lignes courbes en face des lignes anqu- laires des rivages anciens. Arrivé à ce point, à ce progrès de la Tectonique, j'ai donné” (en 1907) un énoncé plus complet de la loi de position : « La structure des plissements des couches s'explique par leur analogie avec les ondu- lations de vagues successives. Leur formation résulte d'abord de leur mouvement dans une direc- tion déterminée, ensuite de leur fixation suivant un modelé qui dépend de la grandeur de l’action dyna- mique ainsi que de la nature et de la forme des obstacles à leur mouvement. » J'ai reconnu volontiers que M. Godwin Austen, avait, dès 1856, émis une proposition très semblable à la mienne. Je l'ignorais en 1870, mais je puis aussi constater que personne n'avaitencore eu l’idée, assurément hardie, de définir, comme je l'ai fait à cette époque, la formation en bloc du Jura et des Alpes. J'ai reconnu d'aussi bonne grâce* que, dès 1596, M. Bergeron, par la disposition des bassins ? Esquisse de la tectonique, etc. © Jourpy : Le Sillon de Bretagne (Bulletin de la Société des Sciences naturelles de l'Ouest de la France, A°* semes- tre 1909). houillers, avait indiqué une partie des lignes tecto- niques du réseau hercynien, mais j'ai constaté éga- lement que, seule, la (héorie des vagues tectoniques avait été capable de révéler l'existence de l'axe tec- tonique qui est Ze lieu des intersections des réseaux des plissements des deux moïiliés de la France. Mais, à l'inverse de ces courtoises constalations à l'égard de mes confrères, les géologues qui ont emprunté mes idées n'ont pas tous éprouvé le mème scrupule, et j'ai pu souvent, depuis quarante ans, reconnaitre mon linge démarqué aussi bien en France qu'en Autriche. Je n’ai eu à ce sujet d'autre règle de conduite que la patience, attendant l'heure de la Justice immanente, qui a été quelque peu tardive. IT. — OBJEcrIons. $ 1. — Rebroussements. M. G. Dollfus m'a reproché un détail dans le tracé de ma carte’ des réseaux tectoniques de la France, me certifiant qu'il n'avait jamais observé de ces courbes de raccordement qui y figurent le long de l'axe tectonique. L'objection est exacte et.entraîne une rectification. En tracant ces rebroussements, j'obéissais, à tort, assurément, à la suggestion des Shaarungen de M. Suess. Pour rester dans la réalité, il faut dire : l’axe tectonique est le lieu des intersec- tions des réseaux N. O. de l'Ouest et des réseaux N. E. de l'Est, et ces intersections ne doivent, comme toutes choses de la Nature, nullement être considérées d’une facon absolue. Puisque le sol francais s'est ainsi plissé de facons si différentes {orthogonalement) de chaque côté de l’axetectonique, aucun raccord n’est réellement nécessaire; là où les actions mécaniques se sont trouvées de mème valeur, les plissements symétriques se sont forcé- ment arrêtés sur leur bissectrice, qui est précisément ce méridien axial; au contraire, là où l'action de la moitié orientale l’a emporté sur celle de la moitié occidentale ou inversement, il y a eu franchisse- ment, et c'est ce qui est arrivé pour le réseau picard, qui empiète quelque peu en traversant les fosses crétacées ; le cas contraire est visible dans le réseau pyrénéen, où l’action provencale a dépassé le méridien fatidique. Quoi qu'il en soit, nulle part il n'est nécessaire de chercher à raccorder par des courbes de rebroussement réseaux qui viennent s'y croiser. Les croisements ont lieu, non par rebroussement, mais par inter- sections. les directions des $ 2. — Charriages en sens inverse. Dans toute l'étendue de la France, les actions tangentielles, plus ou moins obliques au méridien, se sont exercées du Sud vers le Nord. C'est la règle 1 Jouroy : Esquisse de la tectonique, pl. I. 6238 Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE admise jusqu'ici par les tectoniciens. Cependant, des charriages dans la direction du Sud ont été constatés, qui pourraient être de nature à mettre en doute la réalité de la règle. Cette objection ne paraît pas suffisamment jus- tifiée. Les charriages dans la direction du Sud n’ont été jusqu ici observés que dans les Pyrénées et dans les Alpes. Or, M. Léon Bertrand, dans plusieurs communications à l’Académie des Sciences’, s’est efforcé de démontrer que, dans les Pyrénées orien- tales et même dans les Pyrénées centrales, tous les plis sont déversés vers le Nord, et que les racines des nappes de charriage doivent être recherchées au Sud. Dans les Pyrénées occidentales, MM. Fournier et Besson ont cependant établi l'existence de trans- ports vers le Sud. Il m'a semblé qu'il fallait en tenir compte, et, dans la description du réseau tectonique de cette région, j'ai proposé une explication basée sur les inégalités du substratum sur lequel se sont déplacées les vagues tectoniques secondaires et ter- tiaires, et qui ont ainsi occasionné des plissements en sens inverse. Dans les Alpes occidentales, M. Léon Bertrand” a mentionné de ces déversements vers le Sud, mais il les a expliqués en généralisant la formule du plissement alpin, qui doit être concue de facon à définir le mouvement dirigé non pas strictement suivant le méridien, mais vers l’exté- rieur de la chaine. Les transports vers le Sud deviennent ainsi non pas une exception, mais le résultat de la courbure des Alpes occidentales, qui a forcé les plissements débordant les crêtes à se déverser en dehors du bloc des nappes de recouvre- ment dont le gros a chevauché vers le Nord. L'objection est plus embarrassante pour les Dina- rides, qui, d’après MM. Suess et Termier, sont cons- tamment déversées vers le Sud. Bien que la question ne soit peut-être pas suffisamment mûre, il me semble que l'attraction des Dinarides vers le Sud doit pouvoir s'expliquer par l'effondrement de l’Adriatique, de même que j'ai montré comment toute la couverture tertiaire de l'Asie, depuis l’'Hi- malaya jusqu'au Kamtchatka, s’est décollée du substratum primaire pour s'écouler vers le Sud, par l'effet de l'attraction de la fosse très profonde du Pacifique. M. Suess* admet, du reste, que le massif de Stein dans les Karawanken (entre les Alpes carniques et les Alpes dinariques) a été pri- milivement poussé vers le Nord, puis ensuite (sans doute lors de l'effondrement Adriatique) poussé vers le Sud. 1 23 février 1901; 24 février 1902; 20 février 1905 ; 31 dé- cembre 1906; 4 février 1907; 18 novembre 1907. ? Léox Berrraxn : Revue générale des Sciences, 28 fé- vrier 1909, 3 Suess : La face de la Terre, t. III. $ 3. — Plissements angulaires. Quelques géologues ont observé des plissements qui, au lieu de se produire dans le même sens que les plissements plus anciens, croisent ceux-ci sous des angles variés. Ce phénomène est encore trop peu connu pour qu'on puisse en produire une explica- tion, qui doit varier dans les différents cas particu- liers. Mais il faut bien se convaincre que la Tectonique n'échappera pas au sort des théories les mieux élablies, qui présentent presque toujours des côtés plus ou moins mystérieux, sinon inexplicables actuellement. Il est facile d'en donner des exemples, assurément frappants, pour tous les règnes de la Nature. Le double mouvement de la Terre, qui est donné comme expliquant si clairement l'alternance du jour et de la nuit et le retour périodique des sai- sons, n’a pas tardé à exiger onze mouvements, dont certains sont dus à des corps célestes encore incon- nus des astronomes. Le double mouvement de la marée, si régulier toutes les vingt-cinq heures dans nos ports de l'Océan, devient unique chaque jour dans le golfe du Tonkin, et à peu près nul dans la Méditerranée, avec de fortes exceptions à Bizerte, Gabès et Trieste. La loi de montée verticale de la sève, qui dresse tous les végétaux vers le ciel, ne s'applique ni aux branches horizontales du cèdre, ni aux anastomoses en tous sens des lianes et des palétuviers, encore bien moins au banian, qui pousse de puissants rameaux verticalement, mais de haut en bas, au grand désappointement des botanistes. Si la présence d'organes atrophiés et rudimentaires chez les animaux trouve son explication, enrevanche celle des organes hypertrophiés laisse les biolo- gistes plutôt rêveurs". Pourquoi aussi trouve-t-on fréquemment des Étoiles de mer à sept branches, en dépit de la loi de symétrie pentagonale des Echino- dermes? La Tectonique est encore de date trop récente pour qu'on soit en droit d'en exiger l'expli- cation de tous les cas embarrassants. Pour le moment, on ne peut lui demander autre chose que de dégager les lois les plus saillantes des phéno- mènes les plus fréquents, et, si naturelle que soit la curiosité à outrance, elle est plutôt du ressort de la génération qui doit survivre à ses fondateurs, III. — LE NAPPISME. $ 1. — L'œuvre de Marcel Bertrand. La lenteur des progrès de la Tectonique depuis l'énoncé de la Loi de position fit place brusquement à une ère d'activité due à Marcel Bertrand. Fils d'un mathématicien célèbre, habile mathématicien 1 Derérer : Les transforma!ions du monde animal. Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE 629 lui-même, il apprit aux géologues à lire dans l'espace en leur montrant brillamment l'exemple : certaines de ses coupes (Grand Cerveau, Glaris, Mont-Joly) sont de véritables épures de Stéréo- tomie. On peut affirmer que son influence en Tec- tonique est comparable à celle du chimiste Pasteur en Biologie. Sous son impulsion chaleureuse, éner- gique et étonnamment perspicace, la Tectonique française conquit une place prépondérante qui con- vertit à son École les géologues qui pensaient con- naître le mieux les Alpes : Suisses, Italiens, Au- trichiens mêmes, Polonais, de la Provence aux Carpathes, adoptèrent ses méthodes d'observation et de raisonnement, malgré la hardiesse de ses con- ceptions. Marcel Bertrand rendit ainsi à la Géologie fran- caise un service inestimable. Mais il ne tarda pas à verser dans l’exagération coutumière aux apôtres d'une idée exclusive. Ses études des Alpes l'ont conduit à trop dédaigner lesrégions de relief moins grandiose et, quand il tenta de tracer le réseau orthogonal du sol de la France, il confondit dans une cote mal taillée, ainsi que je l'ai montré’, le réseau archéen avec les réseaux de la couverture sédimentaire. « Ce sont, dit-il?, les refoulements horizontaux qui ont formé les chaînes de montagne. Les plissements sont limités aux couches superti- cielles. » Partant de là, il n’y a plus pour lui, et encore davantage pour ses disciples, de Tectonique que celle des plis couchés et des nappes superfi- cielles de recouvrement, charriées sur de vastes espaces par-dessus les couches profondes, négli- geables à son sentiment. Pour lui, l'écorce terrestre se plisse constamment en glissant sur son noyau et en déplaçant les pôles du Globe. Ce couronne- ment erroné de sa brillante carrière n’a nullement été goûté jusqu'ici. On est d'accord pour estimer qu'à force de lever les yeux au-dessus du sol, il à fini par perdre pied : « Il se perd dans le bleu des cieux démesurés »?°! Son emballement irrémédiable a été caractérisé par le mot de Nappisme, qui rappelle les vieilles disputes du Neptunisme et du Plutonisme. $ 2. — La Tectonique de la Loi de position. Marcel Bertrand est venu à la Géologie quinze ans après moi. Il s'est formé comme moi dans la région qui s'étend au pied du Jura, de Gray à Salins, mais avec une orientation très différente. Pendant que, du haut de la petite montagne de la Serre, je me plaisais à l’idée du mouvement de la vague tectonique venue du cœur des Alpes pour 1 Esquisse tectonique du sol de la France. * Marcez BerrranD : Mémoire posthume édité en 1908. * Terrier : Eloge de Marcel Bertrand (1908). REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, expirer au pied du môle vosgien, lui n'avait d'yeux que pour les failles courbes qui lui ont révélé, par la découverte des surfaces de glissement, le secret des charriages. Nous nous sommes ainsi, au cours des années, de plus en plus tourné le dos. Lui s’est absorbé dans le développement, assurément gran- diose, des plis couchés et des nappes de recouvre- ment, tandis que, plus modestement, j'en restais à la Tectonique terre à terre, méthode excusable pour tout géologue. Pendant qu'il affirmait que sa tectonique était la Tectonique tout entière, de mon côté je pensais qu'elle n’en était qu'une partie, celle de la couverture la plus superficielle. J'estimais et je pense encore que les nappes de recouvrement ne constituent pas toute la géologie, qu'elles ne sont qu'un accident superficiel dont l'étendue n'arrive que rarement à masquer les plissements antérieurs, que cette erreur de grossissement est comparable à celle que commettraient les stratigraphes en donnant, sur les cartes géologiques, un rôle pré- pondérant aux plaques de limons sans se soucier de l’existence des couches inférieures, qui sont bien autrement intéressantes. Les plus grandes nappes elles-mêmes ont des lacunes, des «fenêtres », qui permettent de se rendre compte de la structure des roches recou- vertes. De plus, ces nappes, en raison de leur situa- tion superficielle, ont été les premières victimes des érosions, et leur destruction a laissé réapparaître le substratum dont la structure est devenue acces- sible. La Bretagne en est un exemple frappant. Enfin, les nappes elles-mêmes (et les Alpes en pré- sentent plus d’un cas saisissant) ont été replissées après leur charriage, et ont dû obéir, comme tous les strates, à la Loi de position. La Tectonique terre à terre, celle qui se trouve, il est vrai, un peu éblouie par cette Stéréotomie des hautes altitudes, celle qui, partant de la Loi de position, cherche à pénétrer de plus en plus pro- fondément la structure de l'écorce terrestre, à uti- liser le relief de la couverture sédimentaire pour découvrir les secrets des reliefs du substratum archéen, n'est pas tant à dédaigner. Elle à déjà rendu de grands services que je tiens à rappeler ici. J'ai remarqué‘ que, depuis que la Loi de posi- tion à été énoncée, la plus grande partie des géo- logues français ont produit leurs travaux comme s'ils avaient fait partie d'un groupement agissant simultanément et avec moi. Et, cependant, ils sont nombreux dans les Alpes, le Jura, la Lorraine, le Poitou, la Bretagne et la Normandie ceux qui, pendant plus de trente ans, sont tous arrivés aux mêmes constatations que j'ai synthétisées de la facon suivante : « Dans l'Est de la France, les plis- ! Esquisse de la tectonique du sol de France. 630 Général JOURDY — LA LOI DE POSITION EN GÉOLOGIE sements principaux sont orientés Nord-Est-Sud- Ouest; dans la moitié Ouest, leur orientation est celle du Nord-Ouest-Sud-Est, et la ligne de sépara- tion, l'axe tectonique de la France, est jalonnée par le méridien 1° longitude Est ». $ 3. — Justification de la méthode. La Loi de position est enseignée par les géologues de l'Université, des Alpes à l'Océan : à Grenoble, à Nancy, à la Sorbonne, à Caen. Je citerai plusieurs géologues qui ont constaté que les prévisions de cette Tectonique se sont parfaitement vérifiées et qu'elles cadrent d'une facon remarquable avec les faits. C'est M. Joly‘, qui a déclaré que les études entreprises en vue de la découverte de la houille avaient démontré que les plissements de la Lor- raine, depuis les Vosges jusqu'à l’Ardenne, obéissent docilement à la Loi de position; — c'est M. Nicklès?, qui a montré combien la Tectonique de la Séranne (sud des Cévennes) devient claire et facile, grâce à la conception de la vague tectonique en face d'un môle archéen; — c’est M. Lantenois *, qui à consacré la synthèse de la Tectonique de l’est du Tonkin, que je n'avais cependant indiquée qu'à la hâte, en raison des événements de guerre dont la contrée que j'avais parcourue était alors le théâtre. Personnellement j'ai d’autres services à inserire à l'actif de cette méthode, si terre à terre puisse- t-elle paraître. Tout d’abord, celui de la décou- verte du mode de formation des Alpes et du Jura (4870 et 1872), tel que je l’ai indiqué et qui est devenu classique. Puis, si court (3 journées) qu'ait été mon passage dans le Sud-Oranais, je n’en ai pas moins, dès 1901‘, démontré que les plissements de la cou- verture secondaire et le voisinage des reliefs pri- maires sont les indices d’un vaste bassin carbo- nifère, avec espoir fondé de la découverte de la houille, On voudra bien reconnaître, je pense, que j'ai été bon prophète”, et si jamais la houille trans- forme l'Algérie, ce qu'il faut espérer, cette tecto- nique en aura sa part de mérite. Dernièrement, enfin, en partant de la découverte par M. Bergeron de la nappe de recouvrement de Saarbrück, j'ai fait observer * que la symétrie des ‘ Jozx : Le terrain houiller existe-t-il dans la région sud de Longwy? (p. 14, Nancy, février 1908). * NickLës : Réunion extraordinaire de la Société Géolo- sique de France en 1907, p. 629 (B.S. G. F.) 3 Lanrenors : Note sur la Géologie de l'Indo-Chine, p. 41 Mémoires de la S. G. F., 1907). “ Jourpy : Une excursion géologique à la lisière du Sahara (Bulletin de la S. G. F., mai 1902). 5 Jourpy : La houwlle du Sud-oranais (Bulletin de Ja So- jéte des Sciences naturelles de l'Ouest de la France, 1°r se- mestre 1908). ‘ Jounoy : La houille lorraine (Bulletin de la Société des Sciences naturelles de l'Ouest de la France, 2° semestre 1908). plissements et des fosses en Lorraine et en Breta- gne autorise à penser que ce phénomène de char- riage a dû intéresser la partie occidentale tout autant que la partie orientale de ce bloc hercynien de tectonique identique. J'en ai alors conclu (et les textes sont là pour éliminer toute crainte de retouche) que la Bretagne doit aussi avoir ses nappes de charriage. Je ne me suis pas plutôt mis à les chercher que j'en ai trouvé plusieurs", et immédiatement voilà que MM. Bergeron et Oehlert en découvrent à Camaret et à Sablé, et j'imagine que M. Bigot ne va pas tarder à s'ins- crire aussi, Car ses écailles de la fosse bocaine ressemblent terriblement à des écailles charriées*. Nous en causerons à la prochaine réunion extra- ordinaire de la Société géologique de France, à Laval, en septembre prochain. Je ne suis nullement un antinappiste déclaré, ainsi qu'on l’a affirmé à tort à la Société géologique en novembre 1906, et, si je me suis refusé alors à traiter cette partie de la Tectonique, ce n’est nulle- ment en protestation des belles découvertes de Marcel Bertrand et de ses élèves, mais uniquement parce qu’à cette époque la question n'était pas mûre. Elle ne l’est même pas encore, malgré les magni- fiques travaux de ses disciples, de MM. Termier, Kilian, Haug, Léon Bertrand, Bergeron, etc., car, si l'on est maintenant fixé sur les nappes de recouvre- ment des Alpes, on ne l’est pas du tout pour celles des Pyrénées occidentales. C'est depuis l'an der- nier, seulement, qu'on commence à en pressentir dans le Massif Central, et ce n’est que depuis quel- ques mois que la Lorraine” et la Bretagne, à la stu- péfaction générale, s'inscrivent parmi les régions à charriage. La somme considérable de talent fructueux qu'a déployée Marcel Bertrand ne doit pas faire perdre de vue que sa tectonique. loin d'être toute la Tecto- nique, n'en est qu'un cas particulier, celui des Alpes, qu'il a heureusement appliqué au bassin houiller de Valenciennes et au nord de l'Écosse, mais qui ne s'adapte pas facilement aux Pyrénées, qui n’a rien de commun avec la tectonique des montagnes Rocheuses et encore moins avec celle des Andes. Elle est uniquement la tectonique de la poussée horizontale unilatérale des vagues tectoniques contre un obstacle résistant; mais elle ne résout pas tous les problèmes de la poussée bilatérale, qui commence à réclamer ses droits. Il est d’autres problèmes tectoniques encore qui 1 Journy : Sur des phénomènes de charriage en Anjou et en Bretagne (C. R. A. S., janvier 1909). ? Jouroy : Le Sillon de Bretagne (Bulletin de la Société des Sciences naturelles de l'Ouest de la France, {er semestre 1909). 3 Tenmier : Sur l'existence de terrains charriés au-des- sous du houiller de Géroncourt (C. R. S. G. F., 15 Kvrier 4909). D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 631 ouvrent un champ peu exploré jusqu'ici, mais fer- | tile en découvertes: ceux des actions dynamiques | autres que les poussées tangentielles unilatérales ou bilatérales, par exemple les phénomènes d'étire- ment que M. Barrois a signalés depuis longtemps dans le nord de la Bretagne‘. Je les ai retrouvés sur la limite de la Bretagne et de la Vendée”. Ils | sont des plus intéressants et ont révélé, par la com- position de la poussée horizontale Sud-Nord avec l'étirement Est-Ouest, de curieux solides de torsion suivant les lignes directrices du Léon et de la Cornouaille. Au fur et à mesure que la Tectonique progressera (et elle ne fait que débuter), on en découvrira d'autres. La formule synthétique que Marcel Ber- trand à donnée des plis couchés et des charriages comme cause unique de la formation des montagnes | préjuge, à la vérité, de notre connaissance du phé- nomène géodynamique. Mais c'est précisément là l'inconnue, celle que nous devons dégager de longues, très longues observations, qui n'en sont qu'à leur début. Si grand que soit le progrès que cet éminent géologue ait déterminé en Tectonique, il n’est que le second pas en avant (le premier est sans conteste la Loi de position) dans une voie qui | s'ouvre largement vers l'avenir et qui promet de belles découvertes à nos successeurs. Général Jourdy. REVUE ANNUELLE D’AGRONOMIE I. — LA DIFFUSION DES ENGRAIS SALINS DANS LA TERRE ARABLE. — EXPÉRIENCES DE MM. Münrz ET GAUDECHON. Nous sommes, aujourd'hui encore, très mal ou, du moins, très imparfaitement renseignés sur la facon dont les engrais salins sont absorbés, dis- sous ou diffusés dans les sols en culture. Sans doute, des expériences classiques nous ont fait connaître, d'une facon générale et sommaire, quel est, notamment, le pouvoir absorbant de la terre arable à l'égard des sels divers que l'agriculteur emploie comme engrais complémentaires. Il paraît résulter des essais institués dans les laboratoires que les sels de potasse, les carbonates notamment, sont très énergiquement retenus par la terre. Il en serait de même pour les phosphates de chaux, et même pour les superphosphates, tandis que les nitrates ne seraient pas fixés de la même facon, et circuleraient, au contraire, dans le sol à l’état de dissolution. Non seulement ces faits sont intéressants à con- naître, et seraient encore plus intéressants à pré- ciser, à cause des déperditions possibles, mais, en outre, il convient de les étudier pour savoir quand et comment les engrais répandus sur le sol pé- nètrent ce dernier et peuvent être absorbés par les radicelles avec lesquelles leurs dissolutions entrent en contact. Les expériences de MM. Müntz et Gaudechon * viennent précisément compléter nos connaissances au sujet de la diffusion des engrais salins et plus * CH. Barrois : Le Bassin du Menez-Belair, 1895. ? Jouroy : Le Sillon de Bretagne, 1909. 3 C. R. Ac. des Se., 1° février 1909. spécialement des deux engrais représentés par le nitrate de soude et le chlorure de potassium. $ 1. — Résultats des expériences. On admet, disent les auteurs de ce travail, que les matières salines employées comme fumures se diffusent rapidement à la suite de la dissolution qu'elles subissent au contact de l'eau du sol. Même pendant les périodes de grande sécheresse, la terre, en effet, renferme toujours plusieurs centaines ou plusieurs milliers de fois la quantité d'eau néces- saire à la dissolution des 200 à 300 kilogs d'engrais salins qu'on emploie d'habitude par hectare. Il y a lieu, toutefois, de remarquer que la terre arable est constituée par des particules chargées ou enveloppées d'eau, mais séparées les unes des autres. Les sels, placés en contact avec les éléments du sol, ne doivent pas se comporter comme s'ils étaient plongés dans l'eau, et l'expérience seule peut nous apprendre comment la dissolution des cristaux répandus sur la terre, puis la diffusion de ces solutions salines, sont obtenues dans ce milieu spécial. Pour observer et constater les faits, MM. Müntz et Gaudechon ont institué les expériences sui- vantes : Dans un vase rempli de terre contenant seulement 7 à8°/, d'eau, et par suite presque sèche, ils ont en- foui de place en place, à une faible profondeur, des cristaux de nitrate de soude et de chlorure de potas- sium. Au bout d'un à deux jours, ils virent appa- raître des taches très visibles, correspondant aux places occupées par les cristaux des sels enfouis; une sorte d'auréole, grandissant chaque jour, per- sista pendant plusieurs semaines et même durant 632 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE plusieurs mois. Les premiers faits constatés par les auteurs valent la peine d'être notés et sont les sui- vants : En examinant séparément la terre prise dans le noyau humide et celle qui se trouvait dans les intervalles, les auteurs remarquèrent : 1° que les sels ne s'étaient pas diffusés dans ces intervalles; 2% qu'ils avaient emprunté de l'eau pour se dis- soudre à ces inter valles, qui se trouvaient relative- ment desséchés. Un dosage d'humidité, effectué au bout de huit jours, a donné des résultats très nets, pour une terre siliceuse légère renfermant, en moyenne, 3,2 °/, d'eau : Dans les taches salées 7,3 °/o d’eau Dans les intervalles entre les taches. 2,6 — En répétant les mêmes essais et les mêmes dosages pour une terre contenant 4,3 °/, d’eau, on à obtenu encore au bout de dix jours : Dans les taches... . ce 2-00 EE Dans les unter valles "mn 3 1 — Quant à la diffusion du sel, elle a été si lente que le chlorure de potassium se trouvait (dix jours après l'enfouissement) réparti de la facon suivante : CHLORURE dans la terre Dansila'tache salée tee AMEN 1,48 0/0 A 20 millimètres de la tache. 0,03 Dans la terre primitive témoin. . 0,03 « Ces faits, disent les auteurs, expliquent la mau- vaise levée des graines quand on répand des engrais salins à l’époque des semaiMes. Les grains qui tom- bent dans les parties humides, où le sel reste con- centré, se trouvent en présence d’une solution fortement salée, qui fait périr la jeune plante dès la germination ; celles qui tombent dans les intervalles sont en présence d’une terre qui s’est desséchée par la migration de l’eau, et dès lors la germination n’a pas lieu. » Une expérience nouvelle confirma, en effet, cette hypothèse et permit aux auteurs de formuler une conclusion identique. Dans une terre de jardin ren- fermant 9,8 °/, d'eau, ils déposèrent des fragments de nitrate de soude et de chlorure de potassium, puis ils semèrent des grains de blé et d'avoine. Aucune de ces graines ne germa, tandis que, dans une terre de même origine, mais non fumée avec des cristaux de sels, et servant ainsi de témoin, la germination fut parfaite. Poussant plus loin leurs recherches, MM. Müntz et Gaudechon ont déterminé exactement les profon- deurs auxquelles parvenaient les sels répandus sur la terre et enfouis seulement à 1 centimètre de la surface. Dans le sens horizontal, la diffusion était presque nulle au bout de six jours dans une terre de jardin renfermant 15 °/, d'eau, et fumée avec du nitrate de soude et du chlorure de potassium. À une distance de 25 millimètres des points où les sels avaient été placés, la terre ne renfermait pas plus de nitrate ou de potasse que dans une terre témoin de même origine. Dans le sens vertical, la dissolution saline s'abaissait si lentement qu'après un mois on ne pouvait pas trouver trace des sels dissous au delà de 40 millimètres de profondeur! Enfin, les auteurs ont constaté que la pluie ne produit qu'un déplacement dans le sens vertical, sans diffusion latérale sensible, sauf en cas de pluie prolongée. « En résumé, disent-ils pour conclure, la terre est un milieu discontinu dans lequel la diffusion des matériaux, même très solubles, ne se fait qu'avec une extrême lenteur, et où même peuvent coexister, pendant un long temps, des zones de compositions différentes, que les cullures finissent par unilier. » $ 2. — Conclusions pratiques. Il y a lieu de se demander quels enseignements comporte pour les praticiens la Note de MM. Müntz et Gaudechon. En ce qui concerne les engrais salins répandus à l'automne, — ce sont des phosphates ou des super- phosphates, — la question est toute résolue si les semailles ne suivent pas immédiatement l'épandage des sels. Il en est ainsi, notamment, pour les terres qui doivent porter des céréales de printemps, des betteraves ou des pommes de terre. Lorsque l’agri- culteur sème, au contraire, des blés d'automne, d'octobre à décembre, on peut admettre que les essais des auteurs dont nous parlons justifient la pratique des hersages qui mélangent intimement les engrais au sol après l'épandage de ces derniers. Bien que les semailles suivent parfois de très près l'incorporalion des phosphates à la terre arable, on n'a pas observé, croyons-nous, des irrégularités dans la levée des graines, irrégularités qui pour- raient être attribuées à l’action des sels sur la ger- mination. Il est vrai que les phosphates ou super- phosphates n'exercent peut-être pas sur les graines la même influence que le nitrate de soude ou le chlorure de potassium dont MM. Müntz et Gaude- chon ont étudié plus spécialement la diffusion dans le sol. Quant aux fumures de printemps, elles consistent en épandages de nitrate de soude et de chlorure de potassium; mais les nitrates sont presque tou- jours distribués sur des céréales déjà levées, et, par suite, la germination ne saurait être entravée par l'engrais salin. Quant au chlorure, il est le plus souvent incor- D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE poré au sol assez longtemps avant les semailles, de sorte que les praticiens n'ont pas à redouter l'in- fluence nocive des dissolutions salines concentrées et accumulées dans les taches dont nous avons parlé. Les nitrates distribués au printemps « en couver- ture » sur des céréales jaunes et languissantes produisent visiblement un effet rapide, au bout de huit à quinze jours au maximum. Il semble donc que, dans les champs, la diffusion du nitrate soit plus rapide que dans la terre choisie par les expéri- mentateurs pour étudier la facon dont ce sel est dis- sous et pénètre le sol. Il. — L'ÉLECTRICITÉ, LA VÉGÉTATION ET LA GERMINATION. Il s'agit d’une question déjà bien vieille, mais qui est assez intéressante pour mériter l'attention et provoquer des recherches nouvelles. Quelques travaux récents ont donné à ce problème un caractère d'actualité qui nous oblige à l'étudier aujourd'hui et à rappeler très sommairement quelques-uns des résultats obtenus. Vers 1843, des expérimentateurs américains avaient signalé les résultats surprenants que l’on pouvait obtenir, au point de vue de l'augmentation des récoltes, par l'électro-culture. Malheureusement, les essais institués en Angleterre n'avaient nulle- ment confirmé les résultats annoncés aux États- Unis, et l’on a constaté, une fois de plus, que les conclusions proposées successivement par divers savants élaient presque toujours opposées l'une à l’autre. C’est ainsi qu'Ingen Housz a nié l’exacti- tude des résultats obtenus par Bertholon; l'Anglais Solly réfute le D' Forster, et M. Naudin a répété sans succès les expériences de M. Grandeau, il y a plus de vingt ans. A cette époque, un professeur de Physique à Genève, Wartmann, résumait les expériences faites par lui sur des plantes semées dans des conditions identiques d'exposition, d'humidité, de nature de terre employée, etc. Les unes avaient été cultivées dans un état d'isolement électrique absolu; les autres avaient été placées dans le voisinage d'un réseau métallique terminé par un paratonnerre élevé, sans qu'il existât aucun obstacle à la lumière. Des graines enfoncées dans le sol ou dans des vases non enterrés, hors du cercle présumé des appareils, avaient servi de témoins. « Or, écrit Wartmann, bien que les pluies d'orage aient élé fréquentes et les manifestations d'électricité bien marquées, aucune différence notable n'a pu être constatée entre les diverses plantes mises en observation, au point de vue de leur développement. » 633 L'auteur coneluait ainsi, de la facon la plus pré- cise, contre l'hypothèse d’une influence exercée par l'électricité atmosphérique sur la végétation. A l'inverse, M. Selim Lemstrôom, professeur à l'Université d'Helsingfors, s'est prononcé en faveur de l'hypothèse d'une influence très nette exercée certainement par l'électricité atmosphérique. Les travaux beaucoup plus récents de M. Lemstrom sont peu connus; c'est pourquoi il nous parait intéressant de les signaler, d'autant plus que l'au- teur rattache ses hypothèses scientifiques à des faits curieux observés par lui durant ses explora- tions dans les régions polaires. $ 1. — Les observations de M. Lemstrôm dans les régions polaires. D'après M. Lemstrôom, lorsque les plantes de culture échappent à l'influence désastreuse qu'exercent fréquemment dans ces régions les gelées nocturnes, leur développement surpasse de loin celui des plantes du même genre dans les régions plus méridionales et sous un climat plus favorable. Cette exubérance se reconnait aux nuances vives et éclatantes des fleurs, à leur parfum intense, à la rapide croissance des feuilles des arbres, aux senteurs qui s’en exhalent, et surtout aux riches moissons que donnent diverses céréales telles que le seigle, l'orge et l'avoine, lorsque les gelées nocturnes ne les ont pas fait périr. Il n'est pas rare, paraît-il, qu'un hectolitre de seigle en rapporte quarante; un hectolitre d'orge, vingt, et ainsi de suite. Ces résultats s'obtiennent bien que les labours soient peu développés. Dans la partie septentrionale de la Laponie finlandaise, on n'employait, il y a une dizaine d'années, que des charrues et des herses de buis, sans la moindre pièce de fer. Pour atteindre un grand développement, les plantes ont besoin — indépendamment d'un sol fertile — de chaleur, de lumière et d'humidité en quantité suffisante. Mais, dans les régions polaires, un de ces éléments, la chaleur, n'existe qu'en minime proportion. Jusqu'à présent, on avait, dit l’auteur, attribué la rapide croissance des plantes dans ces régions à l'absence de nuit durant deux ou trois mois de l'été. Cette explication doit être rejetée, puisqu'il est démontré que les quantités de chaleur et de lumière que le Soleil y verse aux plantes sont infé- rieures à celles qui existent, par exemple, au soixantième degré de latitude. Cela tient à la posi- tion du Soleil sur l'horizon, et à l’obliquité des rayons solaires qui viennent frapper la Terre. Force est donc de chercher ailleurs la cause d'une végé- tation aussi rapide et aussi luxuriante. ES Plusieurs raisons portèrent M. Lemstrüm à soup- conner que la vraie cause doit se trouver dans les courants électriques dont l'activité se manifeste dans la lumière polaire ou aurore boréale. Ces | courants vont de l'atmosphère vers la Terre, et réciproquement. Lors de l'Expédition polaire inter- nationale finlandaise de 1882-84, on ne se borna pas à en constater l'existence; autant que les cir- constances le permirent, on en mesura la grandeur et on les détermina de plus près. La Physiologie végétale, ajoute le savant finlan- dais, explique d’une manière satisfaisante les fonc- tions dévolues à la plupart des organes des plantes; elle fournit des raisons suffisantes de l'existence de ces organes et de leurs formes variées. Il n'en est pas ainsi, toutefois, en Ce qui con- cerne les aiguilles des Conifères et les barbes des épis de la plupart des Céréales. Or, dans le vaste atelier de la Nature, rien n'existe sans avoir sa raison d'être; donc, les aiguilles et les barbes d'épis doivent avoir aussi leur fonction déterminée. De fait, leur structure les rend éminemment propres à servir d’instru- ments pour transmettre l'électricité de l’atmo- sphère à la Terre, et réciproquement, c’est-à-dire pour agir comme les pointes métalliques en com- munication avec la Terre. Sans doute, il ne suffit pas qu’elles possèdent, dans une certaine mésure, cette propriété, pour qu'on puisse en conclure qu'elles servent à cette fin. Mais la présence de l'électricité dans l'air les place dans les conditions voulues pour que cette action s'exerce réellement, et une expérience, faite lors de l'Expédition ci-dessus mentionnée dans la Laponie finlandaise, a démontré, par analogie, qu'elles ont véritablement cette destination, c'est- à-dire qu'elles servent à transmettre l'électricité de l'atmosphère à la Terre. On ne saurait nier leur proche ressemblance avec l'appareil qui a servi à faire cette expérience, à savoir un fil métallique isolé, muni de pointes, et mis en communication continue avec la Terre. Sans parler des autres plantes, nous pouvons donc admettre, déclare M. Lemstrôm, qu'un cou- rant électrique passe par les aiguilles des Conifères et les barbes des épis de Céréales. Cela ne suffit pas encore à démontrer que le courant exerce une influence bienfaisante sur Ja végétation. Pour fournir cette démonstration, il fallait des preuves expérimentales. & à 2, — Les expériences de M. Lemstrôm. L'auteur nous offre deux séries de preuves résul- 1° des faits observés sur des arbres — des — dont la croissance inégale pourrait être, selon lui, rattachée à des phénomènes élec- tant : Conifères D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE triques intermittents ou périodiques; 2 des expé- riences de culture instituées et commentées par lui. Voici quelles seraient les observations faites à propos de la croissance des résineux étudiés : Une étude très étendue des couches concen- triques annuelles des Conifères de diverses lati- tudes (du 60° au 67° parallèle) a montré, dit-il, que leur épaisseur varie d'une manière tout à fait spéciale. Il existe généralement une grande inéga- lité de croissance selon la diversité d'âge des arbres; mais, si l'on fait abstraction de ces diffé- rences et que l’on y regarde de plus près, on découvre d’autres inégalités qui se rapportent manifestement aux circonstances plus ou moins favorables dans lesquelles la croissance s'est faite, c'est-à-dire à des années plus ou moins favorables. Ces inégalités dans l'épaisseur des couches con- centriques accusent une périodicité en étroite con- cordance avec les périodes des taches solaires et de la lumière polaire, soit des périodes de dix à onze ans. La comparaison des coupes de gros sapins des régions polaires (au 67° degré) avec celles d'arbres des régions plus méridionales a démontré que ces variations sont plus accentuées lorsque l'arbre a poussé dans les contrées polaires. Le fait de la concordance de cette périodicité avec celle de la lumière polaire conduit à rechercher le lien qui existe entre les courants électriques qui déterminent cette lumière et l'accroissement annuel ou les cercles concentriques de ces arbres. Comme cette particularité s'accuse davantage là où les courants électriques de l'atmosphère sont à la fois plus nombreux et plus intenses, il semble bien qu'il existe là un rapport de cause à effet. « Étant pénétré, dit l’auteur, de la nécessité de rechercher la cause des phénomènes indiqués plus haut qui s'observent dans la végétation polaire, et convaincu en même temps de l'existence dans l'atmosphère d’un courant électrique descendant ou ascendant, je fus naturellement porté à rap- procher ces phénomènes, et à considérer le courant électrique de l'atmosphère comme la véritable cause des particularités observées dans le règne végétal. » Tout ce qui a été dit plus haut concernant ces particularités trouve ainsi son explication : Richesse des moissons et leurs variations pério- diques; Périodicité de l'accroissement des couches con- centriques des Conifères ; Disposition des feuilles des Conifères et des barbes des épis en forme d'aiguilles s’adaptant par- faitement à la transmission de l'électricité de l'at- mosphère au sol. « Le courant électrique ayant la D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 635 plus grande intensité dans les régions polaires, c'est là aussi que son action doit être le plus éner- gique. » Jusque dans ces derniers temps, on envisageait l'électricité comme étant de nulle ou de médiocre importance en ce qui concerne la vie des plantes et on ne devait pas, par conséquent, s'attendre à constater sous ce rapport des effets considérables. « Le présent Mémoire, conclut M. Lemstrüôm, montrera que cette opinion doit être modifiée et qu'il faut compter le courant électrique de l’at- mosphère parmi les facteurs importants de la vie végétale. » Quant aux expériences de laboratoire instituées par l’auteur pour mettre en évidence l’action de l'électricité atmosphérique ou statique sur la végé- lation, voici comment on peut les décrire d’après ses notes : Devant des fenêtres, l’expérimentateur a installé trois petits compartiments séparés entre eux par des cloisons de carton fixées sur une table. Dans chaque compartiment, on placa deux pots à fleurs remplis de terre de même espèce. On sema dans ces pots de l'orge, du froment et du seigle, quatre grains de même poids et de même aspect dans chaque pot. Au-dessus des pots, dans chaque compartiment, était suspendu un réseau de fil métallique isolé, pourvu de pointes. La terre des pots était mise en communication avec le sol au moyen de feuilles d’étain, de telle manière que, en désignant les compartiments par les chiffres I, II, III, le courant du pôle positif d’une machine à influence de Holz était dirigé, dans le comparti- ment I, du réseau métallique vers les plantes dans les pots, et dans le compartiment Il, en sens in- verse ; dans le compartiment II, il n'y avait point de courant. Le pôle négatif était mis en communi- cation avec le sol. La terre des pots fut arrosée avec de l’eau à la même température et en même quantité pour chaque pot. À des intervalles déterminés, on me- sura la hauteur des plantes, la largeur et la lon- gueur des feuilles. Déjà au bout d'une semaine on put constater une différence sensible. Dans les compartiments I et Il, les plantes se développèrent plus rapidement et acquirent plus de force. La machine électrique ne fonctionnait que cinq heures par jour. L'excédent fut évalué à 40 °/,. Toutes les autres circonstances extérieures, dit l'auteur, ayant été identiques dans les trois com- partiments, la cause de ce surcroît ne pouvait être que le courant électrique. - Durant l'été, une expérience eut lieu à X..., dans un champ. La moitié d'un certain nombre de planches fut soumise à l’action du courant élec- trique, l’autre servit de contrôle. Voici les excédents constatés dans les planches électrisées : Betteraves . ; 107 0/5 Pommes de terre. . 16 Betteraves rouges . RTL SAR EU 65 HUB S ES SR AS PT RS LORS ARTE CU 59 ANR ET ON 2 0 NE AARE OS à à MENU LUE 54 Poireaux. . 42 Céleris. . L ARTE : 36 Carottes PC PME AA PRE Rs 109) Choux-raves . — 5,2 Choux. . —43,6 Navets. . + 1,8 Turneps. . + 2,6 Des fraisiers de jardin furent plantés en pots dans une orangerie et placés dans trois comparti- ments séparés les uns des autres par des cloisons de carton, deux pots dans chaque compartiment. Dans le premier compartiment, le courant allait du réseau métallique vers le sol; dans le second, en sens inverse; dans le troisième, il n'y en avait pas. Dans le premier, les fraises arrivèrent à maturité en vingt-six jours; dans le second, en trente-trois jours; dans le troisième, en cinquante-quatre jours. Ici, le courant électrique avait pour effet d'abré- ger d’une manière surprenante le temps nécessaire à la maturation. On remarque aussi une différence entre l'électricité positive et l'électricité négative, l’action de la première ayant été plus efficace que celle de la seconde. La conclusion générale de l’auteur est ainsi for- mulée : « L'action des deux courants peut se définir de la facon suivante : « Le courant négatif, qui se porte du sol, à tra- vers les plantes, vers les pointes du réseau, facilite l’ascension de l’eau et des substances qu'elle con- tient en dissolution des racines vers les tubes capil- laires des plantes; il active, de cette facon, la cir- culation de la sève. « Le courant positif amène à la plante les divers éléments de l'atmosphère et les introduit, par les ouvertures que présentent les tubes capillaires, pour y subir le travail d’assimilation. Ce second effet est notablement plus important que le premier. « Dans les expériences faites par l’auteur, l'ac- tion exercée par l'électricité était due à un courant artificiel; mais il est certain que, dans les régions polaires et dans nos latitudes, un courant électrique descend ou monte constamment; 12 est probable qu'il en va de même dans les autres parties de la Terre. Ce courant doit exercer une influence sur la végétation. « Le rôle joué par l'électricité dans la vie des plantes est bien plus considérable qu'on n'avait lieu de le soupconner. » 636 Déjà les expériences de M. Lemstrôm avaient montré que l'électricité produit des effets très difré- rents selon les espèces de végétaux cultivés, et, en se reportant au tableau reproduit plus haut, on peut constater notamment que, pour les choux, les choux-raves et les carottes, les rendements ont diminué au lieu d'augmenter. Ces contrastes prouvent déjà qu'il serait singulièrement téméraire d'affirmer d'une facon générale que les courants électriques sont favorables à la végétation. $ 3. — Influence des courants continus sur la germination. Des expériences nouvelles, faites tout dernière- ment à Toulouse par M. Elie Lazerges et citées avec éloges par M. G. Bonnier‘, démontrent précisé- ment que l’action des courants continus est très variable selon les cas. Ici, toutefois, la précision des essais nous donne des certitudes scientifiques dont il y a lieu de tenir grand compte. Voici dans quelles conditions ces expériences ont été instituées par l’auteur : Le liquide de culture était l’eau de la Garonne, qui constituait un électrolyte très dilué ; puis, dans une série d'expériences, on à pris comme milieu de culture un électrolyte concentré, constitué par une solution nutritive de composition déterminée. Dans chaque cas, on mesurait exactement l'inten- sité du courant lemployé et l'on pesait ensuite les germinations qui s'étaient effectuées dans ces con- ditions. Les expériences portèrent sur l'orge (Æordeum vulgare). On placait les graines sur un fin tamis disposé sur un léger cadre en verre, et ce tamis, supportant les graines, affleurait à la surface libre du liquide contenu dans un cristallisoir en verre. Le courant électrique était fourni par des piles du type Daniell, dont la force électro-motrice est sen- siblement constante. Ces piles présentent l'incon- vénient d'offrir, à cause du vase poreux intérieur, une résistance considérable; mais, comme la résis- tance extérieure était très grande, la résistance intérieure des piles était négligeable. De plus, dans les expériences de M. Lazerges, ces piles étaient montées en séries. L'intensité était exactement mesurée au moyen d'un galvanomètre Desprez- d’Arsonvyal apériodique. Dans chaque expérience, on disposait sur le tamis un poids connu de graines et, toujours à côté du cristallisoir contenant les graines soumises au courant, on disposait un cristallisoir témoin placé dans des conditions absolument identiques. Le courant était amené dans le liquide par deux élec- ? Communication à la Société nationale d'Agriculture, avril 4909. j D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE trodes au charbon placées chacune à une extrémité du tamis. Enfin, pour opérer dans des conditions toujours semblables de température et d'humidité, les expériences se faisaient à l’étuve d’Arsonval à régulateur métallique, à l'obscurité totale, et à une température constante de 27° C. Leur durée, tou- jours la même pour une série d'expériences et déterminée par tâtonnements, était d'environ soixante-douze heures. Au bout de ce temps, la germination était, en effet, assez avancée et l'in- fluence du courant s'était fait sentir durant une période assez longue pour que les effets dus à son action fussent nettement appréciables. De la première série d'essais tentés par M. La- zerges, on peut dégager des conclusions tout à fait opposées. Tantôt le courant a favorisé et accéléré la germination et la croissance, tantôt il a géné et retardé le développement du végétal ou la germi- nation elle-même. Or, les expériences ayant été faites dans tous les cas en ayant soin de ne pas changer les conditions, seule l'intensité du courant avait varié. C'était donc à cette différence d'intensité du cou- rant que doit être attribuée la différence des résultats et l'on peut dire que, dans certains cas, le courant électrique a sur la germination une influence nettement favorable et que, dans d’autres cas, son action est tout aussi nettement défavo- rable. On doit donc admettre l'existence d'une intensité optima. « Il paraît, dit l’auteur, résulter de nos expé- riences que cet optima se localise aux environs de 0 amp. 0005. « Maïs il est nécessaire de remarquer encore que nous n'avons déterminé cet optima que dans un cas particulier, celui de l'orge, et qu'il est seule- ment relatif à l'orge. Voici les intensités de courant relevées et les excédents de poids accusés par le végétal : INTENSITÉS EXCÈS DE POIDS 9, 000.23 ampère. + 0 gr. 050 0, 000.4 = — 0 gr. 300 0, 000.5 — + 0 gr. 505 0, 000.7 — + 0 gr. 080 0, 001.6 — — 0 gr. 0329 0, 003 — — 0 gr. 0415 « En résumé, l'on constate dans les expériences — avec l’eau de la Garonne comme milieu nutritif — que, à partir d'une intensité assez faible et jusqu'à l'intensité optima, un courant continu favorise la germination et active la croissance : les racines et les tiges ont une plus grande longueur que lorsque la germination s'effectue normalement et, de plus, il y a toujours une racine qui prend un très grand développement. « Puis, lorsque l'intensité dépasse la valeur optima, un phénomène inverse du précédent se D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE produit : les graines électrisées germent moins vite et prennent un développement moindre que dans le cas d'une germination normale. « Mais, ici encore, les phénomènes galvanotro- piques sont très manifestes. Et, si l'intensité du courant s'élève encore, le développement des jeunes plantes ne s'effectue que très lentement et très difficilement. M. Lazerges à fait varier, dans une autre série d'essais, la composition du liquide nutritif dans lequel ces graines germaient. La composition de ce liquide était la suivante : (AT AE eee ue NE ES ROUE NPA ONErs 25 SUMMER ee er Ci pObE POHE® 22 He OR ERENE Il est à remarquer que les résultats obtenus furent analogues et que les conclusions déjà formulées plus haut pourraient être de nouveau consignées ici. $ 4. — Conclusions. Contradictoires, insuffisants sans doute, bien que fort intéressants, tous les résultats que nous avons successivement consignés n'ont pas encore de portée et d'applications pratiques. Il est clair que les considérations financières sont de la plus haute importance lorsqu'il s'agit de pro- duction, et nous ne savons pas à quel prix l’électro- culture, même en cas de succès, pourrait permettre d'augmenter les rendements, de hâter la matura- tion ou la germination, etc. Rien, pourtant, ne saurait être négligé, lorsqu'il s'agit de faits scientifiquement établis ou d'expé- riences instructives. C'est pourquoi nous avons cru devoir parler ici avec quelque développement de l'électricité et de la végétation. III. — LE BLANC DU CUËNE. L'Oiïdium du chène a fait son apparition très brusquement à partir de 1907, et peut-être plus tôt, dans plusieurs régions de la France. A l’École de Grignon, M. Griffon recevait, il y a deux ans, des feuilles de chêne pédonculé recou- vertes d'Oidium quercinum et qui provenaient des environs de Blois. Successivement, la Station de Pathologie végétale était mise en possession de nombreux envois analogues, dont l'origine ne laissait aucun doute sur la présence du blanc de chêne dans les taillis de chènes du centre et de l'Ouest (Loir-et-Cher, Sarthe, Charente, Seine-et- Marne, Loiret). MM. Mangin et Hariot ont trouvé l'Oïdium dans les bois de: Verrières, auprès de Paris, et M. Fliche, professeur honoraire à l'École forestière, en constatait la présence dans l'Yonne. 637 « En 1908, écrivent MM. Griffon et Maublanc’, le blane a été plus précoce et a redoublé d'intensité, envahissant les repousses des taillis et des arbres d'émonde, dans toute la France, desséchant les jeunes feuilles et même les rameaux. Dans certains points, ces repousses apparaissent comme couvertes de givre ou de farine, et l’un de nous à pu con- templer dans le Morvan et en Auvergne, entre Clermont et Thiers, des paysages produisant un véritable effet de neige. » Enfin, d'après les mêmes auteurs, divers corres- pondants leur auraient signalé la présence du blanc de chène dans le nord de l'Espagne, en Portugal, dans toute l'Italie, en Corse, en Suisse, en Hol- lande, en Allemagne, en Autriche, en Angleterre et en Algérie. Toutes les espèces francaises de chêne seraient atteintes, d'après Hariot?. Les chênes pubes- cents, pédonculés et tauzins, paraîtraient surtout éprouvés; il en serait de même, d'après M. Griffon, pour le chêne rouvre, et pour d’autres espèces européennes (Q. Lusitanica, austriaca, macra can- thera du Caucase, etc.). ) Enfin, les chênes américains, quoique peu atteints, peuvent être cependant attaqués, ainsi que le prouve l'examen d'un certain nombre d'échan- tillons étudiés par MM. Griffon et Maublanc. Quel est exactement le blanc du chêne dont l'apparition vient d'être signalée et paraît avoir été très brusque ? MM. Griffon et Maublance exposent longuement, à ce propos, les diverses opinions avancées jusqu'ici et concluent ainsi : « En somme, on ne peut rattacher avec certitude le blanc actuel à aucune des Erysiphées connues jusqu'à ce jour comme formant leurs périthèces sur le chêne en Europe. » Quant à l'origine, les deux auteurs hasardent simplement deux Aypothèses, en se défendant notamment d'avoir jamais affirmé l’origine améri- caine du blanc du chêne. En premier lieu, ils supposent : 1° que le blanc est indigène, quoique très peu connu, et qu'il s’est développé soudain d’une facon tout à fait imat- tendue; > qu'il a été importé comme l'ont été le Phytophtora de la pomme de terre, l'Oidium, le mildew, le black-rot de la vigne, venant d'Amé- rique, le blanc du Fusain du Japon et la rouille des Chrysanthèmes venant du Japon. Cependant, MM. Griffon et Maublanc déclarent expressément, à propos de la première hypothèse, que leurs recherches attentives dans la bibliographie botanique et agronomique de notre pays, aussi bien que les travaux des érudits qui ont étudié l'histoire { Bull. de la Soc. mycologique de France, 1909, 1°" fase. 3 C. HR. de l'Acad. des Sc., 2 novembre 1908. 638 D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE de nos forêts, permettent au moins d'affirmer ceci : « Jamais le blanc du chêne n’a été signalé en France comme maladie importante, analogue à celle qui sévit actuellement. » Nous ne sommes pas, d'ailleurs, certain que le blanc actuel soit d’origine exotique et spécialement d'origine américaine. Sans doute, les chênes américains, comme nous l'avons fait observer plus haut, ne sont pas souvent atteints, mais nous ne savons pas ce qu'il advien- drait si ces espèces étaient cultivées en taillis ou traitées en arbres d'émonde. D'autre part, n’a-t-on pas constaté que le black-rot, par exemple, ne cause guère de ravages sur les vignes améri- caines, alors qu'il est très dangereux pour les vignes francaises ? « Le blanc du chêne, dit M. Griffon !, présente, du reste, des caractères qu'on retrouve souvent lors de l'introduction de parasites étrangers. Les Éry- siphées exotiques, en particulier, ont envahi de grandes étendues en peu de temps, après quelques années de faible développement en un point donné. Ce fait est très net pour l’Oïdium de la vigne. » Au point de vue agronomique et économique, quels dangers fait courir à nos chênes le blanc dont ils sont attaqués depuis deux ans? Si le blanc est indigène, il est probable que nous n'avons pas à redouter de grands ravages, parce que le mal disparaîtra lorsque les circonstances momen- tanément favorables à son développement seront modifiées. Dans le cas où l’origine exotique serait certaine, il y aurait, au contraire, tout lieu de craindre des pertes, car nous ne pouvons savoir comment il se développera et quels ravages il pourra exercer dans nos taillis. Les traitements avec la fleur de soufre semblent réussir, mais ils sont économiquement imprati- cables en raison de leur prix élevé. IV. — ACTION DES ENGRAIS SUR LES VÉGÉTAUX LIGNEUX. M. Chancerel, inspecteur adjoint des Eaux et Forêts, s'est livré dernièrement à des expériences très instructives relativement à l’action que peut exercer une fumure d'engrais minéraux sur le développement de nos arbres forestiers. Ces essais ont été poursuivis méthodiquement, en utilisant comme milieu nutritif l'eau distillée, les sols artificiels, les terrains naturels, avec adjonction des engrais suivants : Engrais organiques : Engrais minéraux. . fumiers, sang desséché. Phosphatés : superphosphate, phos- phate de chaux, scories. ‘ Loc. cit., p. 4 Potassiques : sulfate et carbonate de potasse, chlorure de potassium, Engrais minéraux SENS IR ”" { Calciques : sulfate et carbonate de (Suite). ! chaux, chaux. Azotés : nitrate de soude, d'ammoniaque. sulfate | A titre accessoire : Sulfate de magnésie, de fer, de man- ganèse. I. Pour expérimenter en utilisant l’eau distillée, on se servait de bocaux en verre, et les solutions différentes renfermant l’engrais avaient une teneur variant de 0 gr. 75 à 2 grammes par litre. Résultats : Les semis des essences feuillues — chênes pédonculés (munis ou dépourvus de leurs cotylédons), frènes communs, peupliers, trembles — ont surtout bénéficié de l'adjonction des sels cal- ciques, — sulfates, superphosphates et phosphates. La chaux seule donne également de bonsrésultats. Dans les solutions de tous les autres engrais, et spécialement dans les composés potassiques, les plants dépérissent. Les rejets de tige sont très vigoureux dans les solutions renfermant du sulfate de chaux, tandis qu'ils supportent mal les engrais azotés et potas- siques. Les coinposés calciques activent la croissance des résineux (sapins pectinés, pins sylvestres et maritimes); la chaux, cependant, employée seule semble nuire au sapin pectiné. Quant aux substances azotées ou potassiques, elles paraissent toxiques pour les résineux comme pour les feuillus. II. En utilisant les sols artificiels, M. a procédé de deux façons différentes : 1° Par culture en pots remplis de sable purifié et lavé; 2 Par culture en place d'essais. Dans ce dernier cas, le sol naturel était enlevé à la profondeur d'un mètre, et remplacé par du sable lavé. Résultats : Les semis de chêne pédonculé, hêtre, aune, bouleau, pin maritime, sylvestre, noir d'Au- triche, sapin pectiné, étaient favorisés par les mi- lieux calciques, sulfate et phosphate de chaux, scories, et le fumier (à dose massive); le sang des- séché et les cendres de bois donnent une végétation médiocre; les composés azotés et potassiques sont nuisibles, aux doses employées de 100 kilogs à 2.000 kilogs à l’hectare. Les repiquages des mêmes essences réussissent ou manquent avec les mêmes engrais que les semis. Les bouturages en sols artificiels donnent les mêmes résultats qu'en eau distillée. Notons, comme en eau distillée, la même action dangereuse de la chaux envers le sapin pectiné. III. En se servant des (errains naturels, Vexpé- rimentateur à constaté des résultats analogues à ceux qui avaient été notés précédemment. Chancerel D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 639 En terrains naturels, les semis, repiquages, rejets de tiges, bouturages des essences précé- demment citées sont favorisés par les mêmes engrais : en première ligne, les sulfates et phos- phates de chaux; en seconde ligne, les scories et chaux avec le fumier ordinaire, quand celui-ci peut être fourni à doses considérables. Mêmes résultats médiocres en ce qui concerne le sang et les cendres de bois. La croissance des diverses essences est arrêtée ou ralentie avec les autres corps; à noter, cepen- dant, les bons résultats produits par le sulfate de fer, quand il n'est pas mis au contact direct des racines, mais déposé, à dose minime, en surface, au pied des plants. Voici les conclusions générales que l’auteur à eru pouvoir dégager de ses essais : Les composés potassiques sont des ralentisseurs de la croissance et ne doivent être utilisés que dans les cas où l’on veut obtenir la mise à fruits des arbres, notamment pour favoriser une coupe d’en- semencement. Les engrais calciques sontles vrais accélérateurs de la végétation ligneuse. Le sulfate de chaux peut être employé sans limite de quantité, et favorise à la fois les semis, les repi- quages, les rejets, les bouturages; des plants qui, transportés par les temps chauds, risquent de s'échauder, sont revivifiés si on les trempe dans une solution plätrée. La chaux produit d'excellents effets sur les feuillus et sur les résineux, sauf sur le sapin pectiné. Les scories sont également favorables. Les phosphates, et notamment le superphos- phate de chaux, donnent de remarquables résultats ; ce dernier corps, à doses modérées, constitue l’en- grais de choix pour le sapin pectiné. Assurément, pour les végétaux ligneux, les con- ditions physiques extérieures sont d'une impor- tance capitale; cependant, particulièrement sur le végétal jeune, les engrais calciques, sulfate et superphosphate principalement, donneront à la plante une vitalité précieuse et pourront être les facteurs prédominants du succès dans les reboi- sements. On voit que les résultats des nombreuses cultures et expériences de M. Chancerel sont tout à fait imprévus et semblent même contraires à ce qu'on enseigne couramment en sylviculture; mais il faut bien remarquer qu'il s'agit des arbres jeunes, et | qu'une fois les plants bien constitués, bien pré- parés, pourrait-on dire, par le milieu calcique, ceux-ci peuvent ensuite se développer et prospérer, même dans un terrain presque complètement dépourvu de calcaire. V. — L'INDUSTRIE SÉRICICOLE EN FRANCE. LES ENCOU- RAGEMENTS OFFICIELS AU POINT DE VUE FINANCIER ET TECHNIQUE. Dans la seconde moitié du xIx° siècle, la produc- tion séricicole, brusquement réduite des quatre cinquièmes par l'invasion de la pébrine, ne s'est relevée qu'avec une extrême lenteur, sans jamais atteindre, depuis cette époque, le niveau auquel elle était parvenue. Le poids de cocons frais récoltés en 1853 attei- gnait le chiffre de 26 millions de kilogs. Cette pro- duction n'a pas dépassé, dès lors, 16 millions de kilogs (1866), et variait de 8 à 9 millions entre 1880 et 1890. Au moment où fut discutée la question du rema- niement complet de notre tarif douanier (1890-91), les sériciculteurs, les moulineurs et filateurs récla- mèrent une protection douanière efficace au nom des principes dont on voulait faire l'application géné- rale à l’agriculture aussi bien qu’à l’industrie. Les réclamations de l’industrie de la soie furent aussi vives qu'elles étaient justifiées. L'intérêt, la vie même du tissage ou de la filature exigeaient l'importation libre de la matière première, c'est-à- dire des cocons et des grèges. Toute élévation du prix de ces marchandises ne pouvait que porter un coup funeste à des industries, qui trouvaient leur principal débouché à l'étranger et y rencontraient des concurrents. Les 8 ou 9 millions de kilogs de cocons produits en France ne représentaient, au prix de 3 à 4 francs par kilog, qu'un produit brut de 30 à 35 millions de francs, tandis que l'industrie de la soie exportait pour 250 à 270 millions de tissus de toutes teintes, sans compter 130 à 140 millions de soies ouvrées dont le commerce eût été entravé visiblement par une législation douanière protectrice et tracassière. Pour donner, cependant, satisfaction aux sérici- culteurs, la majorité protectionniste du Parlement décida qu'il serait attribué aux éleveurs des primes spéciales par kilog de cocons récoltés, et que, d'autre part, les moulineurs-filateurs directement concurrencés par l'Etranger recevraient également des subventions. La loi du 11 janvier 1892 fixait la prime à 0 fr. 50 par kilog de cocons frais, et le même texte accor- dait aux filateurs une autre prime « à la bassine » ainsi graduée : « Cent francs par bassine à deux bouts; Quatre cents francs par bassine à plus de deux bouts; Deux cents francs par bassine même à un bout pour la filature des cocons doubles. » La durée de l'application de cette loi ne devait pas dépasser six ans; mais une nouvelle loi, celle du 2 avril 1898, éleva la prime accordée par kilog 610 de cocons, la porta à O0 fr. 60, bien loin de la réduire, et modilfia simplement le régime des sub- ventions à la filature. Enfin, le texte voté il y a quelques mois par les Chambres se borne à proroger jusqu'au 31 mai 1909 les dispositions de la loi de 1898, en attendant une modification de son texte qui vient d'être discutée à la Chambre et donne à cette question une véri- table actualite. « Ce système d'encouragement, ditun rapporteur parlementaire, fut la conséquence naturelle du régime économique établi par la loi du 11 janvier | 1892. » Il apparut comme une compensation légi- time, en faveur des sériciculteurs et des filateurs francais, de la franchise douanière accordée aux cocons et aux soies grèges provenant des pays étrangers, dans l'intérêt majeur de nos grandes industries nationales des soieries pures, des rubans et des étoffes mélangées de soie. « L'appui financier donné à la filature ou à la séri- ciculture était indispensable pour leur permettre de lutter efficacement contre la concurrence de l'Italie, de l'Asie Mineure, de la Perse et des empires de l'Extrème-Orient, et pour les préserver d'une déca- dence irrémédiable et d’une ruine fatale. » Nous venons de voir que les lois protectrices de 1892-1898-1908 liaient, en réalité, le sort des fila- teurs à celui des sériciculteurs en leur accordant simultanément des primes à la fabrication. Dans l'esprit du législateur, la décadence de la séricicul- ture francaise devait entraîner la ruine des filateurs chargés de dévider les cocons ou d'en filer les « brins », et d'autre part, la prospérité de la filature était nécessaire à la sériciculture qui vend des cocons aux filateurs. 8 $ 1. — Les encouragements au point de vue financier. Signalons dès à présent l'étendue des sacrifices imposés au Trésor par les primes à la sériciculture : NOMBRE FRAIS DÉPENSES à moe DONS AAC totales MRtnlers | des primes lle (milliers de de kilos de francs francs) | 1892. 1.611 3 838 * 56 3.895 S\ 1893.| 40 «28 5.014 66 5.089 | S 1594. | 10 578 5.258) 67 tal | "D 41895: 92295 4.647 59 4.707 las) 9.515 1.657 62 2.120, || |=| 1897.| 7.132 3.806 14 3.920 | | { 4898. 53 | 1899. 49 |& \ 1900. 58 | ) 1904. 571 | \ 4902. 51 | 1903. 49 = | 1904 54 1905. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE Le tableau précédent présente par année, sous l'empire des deux lois de 1892 et 1898, le nombre de kilogs de cocons primés et les sommes ordon- nancées tant à titre de primes qu à titre de frais d'administration et de contrôle ‘. Quant à la répartition des primes entre les dé- partements séricicoles, nous la donnons ci-dessous pour montrer dans quelle mesure chacun d'eux bénéficie de ces subventions spéciales. Nous indiquons, bien entendu, le chiffre des primes, en comptant à part les frais de réparti- tion et de contrôle : DÉPARTEMENTS PRIMES ACCORDÉES ANA UP Es de 5 & ce 13.498 05 Passes-Alpes . . . 90.047 55 Hautes-Alpes . . . . 14.689 66 Alpes-Maritimes 10.903 05 Ardèche 1.074.920 18 Aude. à TT » IVAAONLELENS PRMENELOME 3.331 45 Bouches-du-Rhône . . . 149.318 01 Corse eee 55.608 44 Drome . Lolo CUS de 831.078 60 Garde. st RAS EN SE S 16 Garonne (Haute-). Gers: ie MIA ENENE Hérault. . Isère sa AT DOTE RIRE NRA Lot-et-Garonne . . . . . LOZÈTÉ SE EE Pyrénées (Hautes-) . : Pyrénées-Orientales. : =. . Rhône . . Savoie : . . Tarn . F HU Tarn-et-Garonne Var Vaucluse . Alrer- Ne Oran . . Totaux . . Sous l'empire de la loi de 1892, les sacrifices du Trésor se sont élevés à 27.688.000 francs, durant six années. ï La loi de 1898, ayant porté la prime de 0 fr. 50 à O fr. 60, les dépenses auraient dù grandir, mais, comme, d'autre part, les récoltes de cocons ant diminué, les sommes accordées par année moyenne ont légèrement fléchi. Elles s'élevaient à 4.614.000 francs de 1892 à 1898, et tombent à 4.576.000 francs de 1898 à 1906. En résumé, la France a consacré, en quatorze ans, 64.461.000 francs aux encouragements accordés à la sériciculture nationale. Avant de porter un jugement personnel sur cette opération économique et financière, analogue par ses conséquences au système des primes accordées aux fabricants de sucre, ainsi qu'aux cultivateurs 1 Voir le décret portant règlement en date du 28 avril 1898, règlement prévu par la loi de 1898 et encore en vigueur aujourd'hui. D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE 611 de lin et de chanvre, nous voudrions citer l'opinion du rapporteur’ de la Commission des douanes chargée récemment de demander à la Chambre la prorogation des dispositions de la loi de 1898. « Les résultats obtenus ont-ils réalisé les prévi- sions du législateur et justifié les sacrifices con- sentis par l'État? Les primes avaient un double but : assurer l'existence et fortilier la vitalité des industries protégées, d'une part; d'autre part, les encourager dans les voies du progrès, stimuler leur ardeur dans la recherche du perfectionnement de l'outillage, des procédés de culture et des moyens de fabrication ; elles ont incontestablement produit d'heureux effets sur le premier point. Grâce aux encouragements du Trésor, la sériciculture et la filature se sont maintenues en France depuis seize ans. « Ælles ont vécu; eiles ont été des sources im- portantes de travail et de profit pour de nom- breuses populations rurales; elles ont distribué des salaires abondants à des familles ouvrières intéressantes; elles ont alimenté la fabrique des soieries d'une matière première fine et précieuse, indispensable pour la bonne élaboration des riches tissus de soie recherchés par la mode, le décor et l'ameublement. Tout cela n’est pas négligeable. « Quant à l'amélioration des méthodes et au progrès de l'outillage, ils sont affirmés par les uns, mais contestés par certains. Il semble bien, pour l'observateur impartial, qu'il y ait une égale part de vérité dans ces opinions contradictoires... » D'un autre côté, le rapporteur * de la 4° Section, à la Commission des Valeurs de douane, dit en parlant de la filature : « Ce qui frappe d’abord, c'est le manque de dé- veloppement de cette industrie... L'on sent que la filature de la soie est une industrie qui n’a pas confiance dans l'avenir. C’est qu'en effet, cetavenir repose en grande partie sur la protection que le budget français lui accorde sous forme de primes et que le régime des primes est actuellement remis en question... » Considérée comme liée au sort de la séricicul- ture, la fortune de la filature ne paraît donc guère brillante, bien que chaque année cette industrie spéciale recoive environ quatre millions de francs sous forme de primes! Quant à la sériciculture elle-même, le rapporteur de la Commission des Valeurs de douane signale la hausse du prix des cocons et ajoute : « Peut-être nos populations du Midi trouveront- elles là un encouragement à revenir à une indus- trie familiale un peu abandonnée chez nous de- M EE at 4 ! Doc. parl., n° 1700, session 1908. Annexe au procès- verbal de la séance du 10 avril 1908. ? Session de 1907. puis plusieurs années, ou du moins qui ne recrute guère de nouveaux adeptes et ne s'étend pas... « Les grands rendements que nous obtenons depuis quelques années tiennent principalement à l'excellence des graines mises à l'éclosion. Aussi l’industrie du grainage reste-t-elle fort intéressante à suivre. » Les précautions oratoires et l’optimisme officiel ne démontrent que trop clairement l'insuffisance de la législation des primes. Le rapporteur de la Commission des Valeurs de douane déclare nettement que la sériciculture est dans un état de stagnation et de malaise dont les encourage- ments de l'État n'ont pas pu réussir à la tirer, et il constate sans hésitation la situation fâcheuse autant qu'anormale de la filature, « dont l'avenir repose, en France, sur la protection de l'État »! Les résultats du système inauguré en 1892 sont donc très médiocres. D'autre part, les dépenses ont été considérables. L'État accorde chaque année 4.500.000 francs à ütre de primes aux sériciculteurs et cette somme représente près de 20 °/, de la valeur de la récolte! Ce fait démontre l’énormité des sacrifices imposés aux contribuables, sacrifices qui n'ont pas pu, ce- pendant, provoquer un développement de la produc- tion, ou prévenir sa décadence incontestable. Il est done permis de se demander si les subven- tions accordées aux sériciculteurs n'auraient pas été plus efficaces si elles avaient été employées d'une autre facon et si, notamment, une partie des 64 millions distribués aux éleveurs avait été destinée depuis seize ans aux recherches d'ordre technique visant le contrôle des graines, l’acerois- sement de la richesse soyeuse des cocons, la re- constitution des müreraies, etc. À tout le moins est-il bien fâcheux de constater que le budget des œuvres d'amélioration des conditions de produc- tion ne représente qu'une fraction presque déri- soire des allocations dispersées par sommes insi- gnifiantes entre les éleveurs. Voyons donc les efforts faits par l'État pour seconder les producteurs et faciliter leurs re- cherches relatives aux méthodes techniques de perfectionnement des conditions de la production. 2. — Les encouragements au point de vue technique. un L Il y a leu de signaler immédiatement la fonda- tion d'une Station séricicole annexée à l'École Na- tionale d'Agriculture de Montpellier. Cette Station a été créée en 1873 dans le but de vulgariser, pré- cisément là où il était utile de le faire, les mé- thodes de Pasteur appliquées au grainage. L'établissement scientifique de Montpellier cons- titue en même temps une École de sériciculture et D. ZOLLA — REVUE ANNUELLE D'AGRONOMIE un laboratoire de recherches expérimentales. Une magnanerie annexée à la Station permet de se livrer à des éducations, de compléter l’enseigne- ment théorique qui s'adresse tant aux élèves de l'École d'Agriculture qu'à des élèves libres é/ran- gers venus d'Italie, de Grèce, de Turquie, de Rus- sie, de Roumanie, de Bulgarie, du Japon, de la Chine, de l'Amérique et de l’Angleterre. On prépare chaque année à Montpellier des graines saines distribuées gratuitement pour servir à la propagation des races les plus vigoureuses et les plus avantageuses à élever. Dans un champ de collection récemment créé, on a, de plus, groupé diverses variétés de müriers, et l'on étudie la culture de ces arbres, les systèmes d'expériences de la Station de Montpellier ne dépassent pas 1.700 francs. Le personnel fort réduit, — deux personnes à Montpellier et dans les autres établissements, — est, en outre, insuffisam- ment rétribué et son rayon d'action aussi bien que ses moyens d'investigation ou d'étude sont | beaucoup trop restreints. de taille, les maladies dont ils peuvent être | atteints, etc. Une pépinière jointe à ce jardin expérimental permettra de distribuer des bou- tures et des plants en répandant les meilleures variétés de müriers. À Aubenas, dans l'Ardèche, il existe un établis- sement officiel dénommé Magnanerie-Ecole. C'est, en fait, non une Ecole de Sériciculture, mais une magnanerie modèle créée en 1881. Le personnel s'occupe de l'amélioration des variétés de vers, francaises et étrangères; il est chargé, en outre, d'un service d'inspection des cocons destinés au grainage. Les éleveurs sont admis à suivre toutes | les opérations de la magnanerie pour y recevoir ainsi des leçons de choses. L'Etat s’est proposé de placer ainsi dans un centre séricicole important une installation-type, une magnanerie fonctionnant de la façon la plus satisfaisante, pour servir en quelque sorte à l’enseignement par les yeux. Des spécialistes bien choisis, attachés à cette Ecole pratique, peuvent rendre des services de tous genres aux éducateurs de la région. Une industrie capable de produire chaque année pour 30 ou 35 millions de francs de denrées utiles méritait, à notre avis, d'être étudiée avec plus de soin, d'être protégée avec plus de frais contre les dangers de l'ignorance, de la fraude s'exerçcant grâce au commerce des graines douteuses et mau- vaises, contre la propagation des maladies qui détruisent le mürier… Une partie des primes distribuées eût été avanta- | geusement consacrée à des recherches scientifiques, Enfin, deux « Stations » séricicoles ont été ins- | tallées à Manosque (Basses-Alpes) et à Alais (Gard). Ce sont des laboratoires de recherches scienti- fiques qui peuvent, en outre, être utiles au public par les contrôles de la qualité des graines, des cocons, des appareils destinés aux élevages, par l'étude des maladies nouvelles comme celles des mûriers, par des tournées de conférences ou d'ins- pection confiées aux directeurs, enfin par des recherches personnelles de toutes sortes. $ 3. — Conclusions. Les encouragements techniques donnés par l'Etat à la sériciculture sont uniquement représentés par les deux magnaneries-modèles de Montpellier et d'Aubenas, par les trois stations scientifiques de | Montpellier ‘annexe de la magnanerie), de Manosque et d'Alais. Le budget de ces fondations est des plus modestes. C’est ainsi que les frais de cours et à des distributions de plants de müriers, à des con- férences nombreuses, à des expériences publiques, nombreuses et répétées sur une foule de points, servant à démontrer par l'exemple le succès tech- nique et financier des bonnes éducations. Sans nul doute, la diversité de n6s cultures, la | richesse et la productivité de certaines d’entre | elles, la faveur excessive dont a joui la viticulture, expliquent parfois, justifient même exception- nellement, l'abandon ou la décadence de la sérici- culture. Mais, dans la grande majorité des cas, c'est surtout l'insuffisance des connaissances, le défaut de conseils éclairés et d'exemples probants — placés sous tous les yeux — qui ont provoqué en France la réduction du nombre des éducations. Si l'action persistante et, selon nous, efficace des encouragements techniques avait été, au contraire, reconnue stérile et inopérante, on se serait rendu compte avec précision des causes de l’irrémédiable décadence de la sériciculture française, et l’on eût alors cessé de faire des sacrifices en faveur d’une industrie que la force et la nature des choses con- damnaient à disparaître. Les primes eussent été réduites avec toute raison et en toute justice. La France n’eût pas dès lors consenti à dépenser 64 mil- lions de francs pour donner satisfaction à des récla- mations insuffisamment justifiées. L'Etat a pour fonction sociale, non de faire vivre artificiellement, aux frais des contribuables, les industries qui sont vouées à la ruine, mais bien de secourir momentanément celles qui n’ont besoin pour se développer ou pour renaître que d'encou- ragements /echniques donnés au nom de la nation, quand l'initiative privée est impuissante à les fournir. Si le Sénat maintient le régime des primes, il sera indispensable de doter plus largement le budget des Établissements de recherches scienti- fiques. D. Zolla, Professeur à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 643 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET 4° Sciences mathématiques Schilling (D: Friedrich), Professeur à la Technische Hochschule de Danzig. — La Photogrammeétrie comme application de la Géométrie descriptive. — Edition française, par M. L. Gérarr, Professeur au Collège Chaptal. — 4 vol. in-8& de 101 pages avec 80 figures et 5 planches. (Prix : 6 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. Le but de ce livre est bien indiqué par les vingt pre” mières lignes de la préface : ce n'est pas un Traité’ c'est une Conférence, et cette conférence paraît plutô faite par un professeur que par un praticien. Elle ne s'adresse, d'ailleurs, ni à des praticiens, ni à des élèves, mais bien à des professeurs (« aux professeurs des Ecoles supérieures de Gôttingen »). Le but du conféren- cier n’est pas tant d'enseigner la restitution des projec- tions par les perspectives, que de montrer comment « l’enseignement » de la Photogrammétrie peut être rattaché à celui de la Géométrie descriptive. L'ouvrage, l’auteur le dit explicitement, est «un utile complément des Traités de Géométrie descriptive », et la Photogram- métrie est considérée comme une science «éminem- ment propre à développer la faculté d'intuition dans l’espace », s'adressant, par conséquent, à tous les « partisans de l'intuition géométrique ». L'ouvrage sera donc intéressant pour les professeurs qui voudront ajouter à l’enseignement de la Géomé- trie descriptive un chapitre de photogrammétrie. Mais, comme traité complet, il est insuffisant, car, dans une telle science, la partie géométrie pure ne constitue qu'une portion de ce qu'il est nécessaire de savoir pour arriver à la réussite dans la pratique. La première partie du livre traite du cas où l’on ne dispose que d'une seule perspective pour obtenir la restitution. L'auteur a présenté le sujet de la façon la plus simple, la plus claire et la plus propre à être com- prise par ses lecteurs, et cela tient certainement à ce que le cas visé, où l’on est obligé de suppléer à l'ab- sence de la seconde perspective par la condition d’avoir affaire à des surfaces ou à des solides géométriques, est celui qui se rapproche le plus des cas traités par la Géométrie descriptive. La seconde partie est intitulée : « Extension de la méthode au cas de deux ou plusieurs perspectives données ». L'auteur, tout en traitant très clairement le sujet, s’'écarte néanmoins, quelquefois assez sensible- ment, des conditions de la pratique, en particulier à l'article XXXI, où il attribue peut-être au théorème de Hauck, fort élégant d’ailleurs, une application qu'il n’a pas à un aussi fort degré. Ce théorème suppose, en effet, que l'emplacement de chacune des deux stations doit être visible sur l’épreuve prise de l’autre, ce qui est loin d’être le cas général, lequel n'est ensuite pré- senté par l’auteur que comme un corollaire. La troisième partie est consacrée aux rapports de la Photogrammétrie avec la peinture, l'architecture et la photographie, avec un aperçu des instruments em- ployés. C'est un simple coup d'œil jeté sur toutes ces questions, coup d'œil du reste très bien présenté et avec beaucoup de clarté dans l'exposition. En résumé, ouvrage intéressant, d'une lecture at- trayante, ce qui fait plus grand honneur au rédac- teur de l'édition française, mais où la Photogrammétrie est traitée à un point de vue spécial et non dans sa généralité. Lt-Colonel R. BourGEois, Chef de la Section de Géodésie au Service géographique de l'Armée. INDEX Ratel (C.), Zngénieur des Arts et Manufactures, an- cien directeur de Sociétés minières. — Préparation mécanique des Minerais.— 1 vo/.in-8° de514 pages, avec 190 figures et 11 planches. (Prix : 22 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. La préparation mécanique d'un minerai consiste en une série d'opérations qu'on doit lui faire subir pour le rendre marchand, ou, en d’autres termes, ven- dable avec profit. Avant d'y avoir recours, il faut naturellement, comme le dit fort bien l’auteur, et comme on l'’oublie souvent, mettre les bœufs devant la charrue, c’est-à-dire avoir sur le carreau des mines un cube déterminé de minerai d'une teneur moyenne probable, et, en prévision directe, un cube de minerai tracé, soit sectionné par des galeries de direction et des montages. C'est là une vérité que beaucoup de Sociétés de mines devraient graver dans leurs statuts : combien en connaissons-nous qui ont décidé l’instal- lation de laveries, alors que les moyens d'investigation du cube vrai minéralisé et de ses qualités faisaient encore défaut. Dans le livre de M. Ratel, les considéra- tions financières relatives au degré d'utilité de la pré- paration des minerais et des installations d’enrichisse- ment sont fort judicieusement présentées, et le lecteur peut largement profiter de l'expérience de l'auteur. Nous ne ferons qu'une petite réserve au sujet des for- mules de vente de quelques minerais, celles pour le plomb et pour le zinc, qui ne nous paraissent refléter que de loin les conditions actuelles du marché. Quant à la représentation graphique de ces formules et des revients, M. Ratel les préconise avec raison. C'est un moyen de comparaison fort simple et très rapide. L'auteur entre ensuite dans le cœur de son sujet: théorie de la préparation, broyage, classement par trommels, lavages, traitement électromagnétique, etc. Tous ces procédés et appareils sont fort bien décrits et avec beaucoup de détails. Nous avons été toutefois surpris de ne pas voir mentionner les tamis inclinés à vibration qui, en Sardaigne, ont presque partout rem- placé les trommels avec avantage. En ce qui concerne les nouveaux procédés d’enrichissement par flottage, on aurait pu joindre au procédé Elmore ceux de Potter et de Delprat, appliqués aux minerais sulfurés mixtes de Broken Hill, ainsi que la méthode purement méca- nique de Macquisten, employée aux Etats-Unis dans les usines Adélaïde. Les considérations sur l'installation d’un atelier d'enrichissement et l'organisation de la comptabilité industrielle d'une laverie sont pleines de sens pratique et sont à suivre de tout point. L'ouvrage se termine par la comparaison de diverses laveries à charbon, au point de vue de la récupération des poussières. EuiLE DEMENGE, Ingénieur Civil. 2° Sciences physiques Boeuasse (H.), Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse. — Cours de Physique, conforme aux programmes des Certificats et de l'Agrégation de Physique. Tome IV : Optique, Etude des instru- ments.:— 1 vol. gr. in-8° de 420 pages. (Prix :13 fr.) Ch. Delagrave, editeur. Paris, 1909. Si l'Optique ondulatoire a fait perdre une partie de sa rigueur à l'ancienne conception du rayon lumineux, en montrant que ce rayon lumineux doit être envisagé seulement à titre de première approximation, il n’en est pas moins vrai que cette approximation reste, dans bien des cas, suffisante pour permettre de pousser très loin l'étude des transformations d’un faisceau lumi- neux de section assez grande, à travers une série de milieux réfringents. Et cette approximation présente souvent assez de commodité et de clarté pour per- mettre d'apercevoir, immédiatement et presque d'ins- tinct, des particularités qui seraient voilées par des apparences complexes, si on voulait chercher à les aper- cevoir à travers le mécanisme ondulatoire. D'autre part, de nombreux travaux ont été entrepris depuis un certain nombre d'années avec le but pra- tique de perfectionner les microscopes, les lunettes, les objectifs photographiques, les appareils projec- teurs, etc. C’est par une application constante des prin- cipes de l’Optique géométrique qu'ont été poursuivies ces études, et chacun sait l'importance des résul- tats obtenus et des progrès réalisés dans cet ordre de travaux. C’est pourquoi M. Bouasse, en écrivant le tome IV de son Cours de Physique, qui est spécialement destiné à l'Optique, a consacré une part au moins aussi grande à l'Optique géométrique proprement dite qu'à l'Optique des vibrations lumineuses. On trouve dans cette partie du livre une étude détaillée des dioptres et systèmes centrés, suivie de développements très étendus sur les caustiques, les focales, les aberrations, etc. Un cha- pitre spécial est réservé aux phénomènes optiques du domaine de la Météorologie. La seconde partie du volume expose les principes des méthodes photométriques et traite de l'émission de la lumière. Le lecteur trouvera des détails intéres- sants sur ce chapitre de la Physique, que les travaux des physiciens modernes ont beaucoup étendu et d'où sont sorties des conséquences pratiques importantes, telles que l'amélioration du rendement des sources lumineuses. Enfin, la dernière partie du livre est consacrée aux vibrations lumineuses proprement dites. Les phéno- mènes d'interférence et de diffraction, le principe d'Huyghens et ses conséquences sont développés d’une manière très complète. Un dernier chapitre expose comment ces divers phénomènes interviennent dans le fonctionnement des instruments d'optique, et il résume les résultats les plus importants que l’appli- cation qui en est faite apporte à la construction et au mode d'emploi de ces instruments. Le mode d'exposition, bien personnel, de l’auteur se retrouve dans ce volume comme dans les trois précé- dents. 1] lui conserve le caractère d'originalité élevée que nous avons déjà signalé pour ceux-ci. E. COLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Barral (E.), Professeur agrégé à la Faculté de Méde- cine et de Pharmacie de Lyon. — Précis d'Analyse chimique biologique, pathologique et clinique. — 4 vol. 1n-18 de vu-544 pages, avec 2 planches en cou- leurs et 460 figures. (Prix : 6 fr.) J.-B. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1909. En publiant, l’an dernier, son Précis d'Analyse chi- mique biologique générale (voir cette Revue, t. XIX, p. 164, n° du 29 février 1908), M. E. Barral nous pro- meltait un autre volume d'analyse spéciale, consacré aux applications directes de la Chimie biologique aux analyses pathologiques et cliniques. Le voici. Il passe en revue l'urine, le sang, divers liquides pathologiques, tels que les épanchements pleuraux, péricardiques et péritonéaux, les kystes de l'ovaire et du rein, le liquide céphalo-rachidien, etc., puis le lait, enfin les divers produits de la digestion. Au lieu d'indiquer sans distinction un grand nombre de méthodes, bonnes ou mauvaises, l'auteur s'est as- treint à n’en décrire qu'un petit nombre, qu'il s’est efforcé de choisir judicieusement parmi les plus dignes de confiance, Comme dans ses précédents ouvrages, M. E. Barral a adopté des caractères typographiques différents pour les méthodes de choix et pour les mé- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX thodes secondaires, d’un emploi moins fréquent ou d'une exécution plus délicate. Au précédent volume de M. E. Barral, consacré à l'Analyse biologique générale, je m'étais vu forcé d'adresser deux critiques. D'abord, l'ouvrage ne déga- geait pas l'impression de vigoureuse jeunesse qu'on eût souhaitée, ou, pour parler franc, semblait né vieux. Ensuite, la classification s’y agrémentait parfois d’un harmonieux désordre, qui, peut-être effet de l’art, ne pouvait, certes, être pour le lecteur garantie de science. Le volume d'aujourd'hui échappe en grande partie au premier reproche : beaucoup plus classique, plus familière à l'analyste, maintes fois traitée dans d’ex- cellents ouvrages, sa matière est plus homogène et n'offre pas les regrettables lacunes de l'Analyse géné- rale. A vrai dire, on eût aimé voir dans cet ouvrage, por- tant la date de 1909, certaines méthodes récentes, comme, par exemple, la méthode si précieuse de dosage de l’ammoniaque urinaire en présence du formol, pratiquement instaurée par A.-D. Ronchèse en 1907; mais chacun sait combien il est difficile de tenir un livre à jour jusqu'à son apparition. En revanche, il nous faut bien reconnaître que l'ordre dans les classifications laisse encore à désirer. C'est ainsi, par exemple, qu'énumérant les principaux composés organiques de l'urine (p. 23), M. Barral les range en trois groupes : 1° corps azotés ; 2° corps ter- naires ; 3° corps aromatiques. Sans s'arrêter au prin- cipe même de cette division, le lecteur regrette de voir dans le premier groupe un enchevêtrement des bases puriques avec les bases guanidiques. Il s'étonne de trouver parmi les corps ternaires l'acide phosphogly- cérique, qui renferme bien, je pense, un quatrième élément, et non des moins intéressants. Il est stupé- fait, enfin, de voir les corps aromatiques expulser de leur sein l'acide benzoïque pour y accueillir, en re- vanche, le scatoxyle, que nul n’a jamais vu, et les dérivés sulfonés des phénols, dont molécule ne fut oncques signalée dans notre sécrétion rénale. Peccadilles, dira-t-on, dont ne saurait s'émouvoir le chimiste averti! Peut-être; mais les maîtres de la Chimie n'ont pas besoin de ce livre, et, quant au dé- butant, il faut qu'il soit, non pas troublé, mais affermi dans ses connaissances méthodiques. Tous ces petits défauts paraissent relever d’une même cause : la hâte avec laquelle l’auteur a dû com- piler l'énorme matériel qui s'offrait à son labeur, et qui n'a pu, faute de temps, subir une assimilation complète. Voici le cinquième volume d'analyse que M. Barral livre au public depuis 1904; et, si l’on y joint ses ouvrages de Minéralogie pratique, on voit que l’auteur a dû, en six années, trouver dans ses fonctions officielles les loisirs nécessaires pour écrire la Chimie analytique tout entière, qualitative et quantitative, dans ce qu'elle a de plus délicat, depuis les minéraux des roches silicatées jusqu'aux protéides les plus com- plexes de la Biologie. ; Nous ne sommes plus aux temps héroïques des Ber- zélius et des Dumas, où un seul cerveau, une seule plume suffisait à écrire un Traité « de omni re chi- mica », et l'on pouvait craindre de ne plus revoir cette époque. M. Barral a tenté vaillamment de la ressus- citer, et sur le mode analytique, le plus difficile de tous, parce que le plus exigeant en précision. Nous devons le féliciter de sa belle ardeur, et lui souhaiter maintenant l'occasion — et la patience — de remettre sur le métier son ouvrage, afin d'en repolir les mille rugosités. Dr L.-C. MAiLLARD, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. Righi (Aug.). — La Materia radiante e i Raggi magnetici. (LA MATIÈRE RADIANTE ET LES RAYONS MAGNÉ- TIQUES.) — 1 vol. in-8° de 302 pages, avec 46 figures et 22 reproductions photographiques. (Prix : 8 fr.) N. Zanichelli, éditeur. Bologne, 1909. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 615 3° Sciences naturelles Granderye (L. M.), Docteur de l'Université, Ingé- nieur chimiste, ancien Préparateur à l Universite de Nancy.— Détermination des Roches. — 1 ro/. 1n-8°, de 472 pages, de l'Encyclopédie scientifique des Aide-Mémoire. (Prix : 2 fr. 50.) Gauthier- Villars et Masson, éditeurs. Paris, 1909. La lecture de cet ouvrage donne l'impression que l’auteur s’est servi pour sa rédaction de manuels fran- cais, allemands, anglais, qu'il n'a pas remarqué que les termes et les expressions pour désigner le même minéral, la même roche, le même phénomène, etc., ne sont pas toujours les mèmes, que les pétrographes français et étrangers ne sont pas d'accord pour définir les différents types des roches, etc. Aussi ce livre contient-il de nombreuses contradictions et plusieurs erreurs. Ainsi l’auteur croit que des syno- nymes français ou étrangers désignent des minéraux particuliers (amphigène et leucite, sphène et titanite, cordiérite et dichroite, idocrase et vésuviane); il en est de même pour les roches. Par conséquent, cet ouvrage ne facilitera pas beaucoup la détermination des roches et pourra mème, dans quelques cas, embarrasser le lecteur non prévenu. P. GAUBERT, Assistant de Minéralogie au Muséum d'Histoire naturelle. Doncieux (Louis). — Docteur ès Sciences, Preépara- teur à l'Université de Lyon, avec la collaboration de M. Lenicne (Maurice), Maitre de Conférences de Géo- logie à la Faculté des Sciences de Lille. — Cata- logue descriptif des fossiles nummulitiques de l'Aude et de l'Hérault, 2° partie (fascicule 1) : Cor- bières septentrionales. — Ann. de l'Université de Lyon. — 1 vol. gr. in-8°, de 250 pages, 13 planches. (Prix : T fr. 50.) Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1909. Les analyses bibliographiques de cette Aevue sont généralement réservées à l'exposé d'idées nouvelles, et le compte rendu d'une œuvre d’érudition, si excellente soit-elle, doit nécessairement être ici très bref. La riche faune de Mollusques fossiles de l'Eocène inférieur ou moyen du Languedoc n'avait fait l'objet d'aucun travail important depuis la publication d'un Mémoire de Leymerie en 1846, quand M. Doncieux entreprit, en 1905, la publication de ce Catalogue des- criplilr. 1 avait découvert, au cours de ses explora- tions géologiques, de très importantes séries de fossiles en bon état de conservation; le soin avec lequel il les décrit et les figure maintenant facilitera certainement beaucoup les travaux d'ensembie ultérieurs des géo- logues et des paléontologistes. Les deux premiers fascicules de son Catalogue sont purement descriptifs, fort consciencieux d'ailleurs, et témoignant des qualités d'analyse de lauteur, mais on y chercherait en vain quelque conclusion générale; il faut souhaiter qu'une troisième partie nous montre bientôt la mise en œuvre de ces matériaux. Le second fascicule, récem- ment publié, traite surtout des Gastéropodes recueillis dans l'Eocène au sud de l'Aude ; il débute par un cha- pitre où M. Maurice Leriche étudie les rares fragments de Poissons ou de Reptiles trouvés jusqu'à présent dans la même région. | ARMAND THEVENIN, Assistant au Muséum d'Histoire naturelle. t DONCIEUX (L.). Catalogue descriptif des fossiles nummu- litiques de l'Aude et de l'Hérault. Première partie. Annales de l'Univers. de Lyon. Nouv. Série, fase. 17, 1905. Celle première parlie est précédée d'une introduction stratigraphique sur les terrains nummulitiques de la Mon- tagne Noire et du Minervois; elle est particulièrement intéressante parce qu'elle renferme l'étude critique d'une bonne partie des Mollusques décrits autrefois par Leymerie. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 4° Sciences médicales WVickham (D Louis}, Médecin de Saint-Lazare, ancien Chef de Clinique dermatologique de la Faculté de Paris, et Degrais (D'), Chef de Laboratoire à l'Hôpital Saint-Louis. — Radiumthérapie, avec Pré- face de M. le Professeur FourNier. — 1 vol. in-89° de 350 pages, avec 20 planches et T2 figures. (Prix 18 fr.) J.-B. Baïillière et fils, éditeurs. Paris, 1909. La découverte des Curie (1900) fut capitale en Science. Elle étonna par la possibilité, très vite entrevue, de son rôle en Thérapeutique. La Radiumthérapie tient ses pré- cieuses promesses, et la réalisation en est maintenant enregistrée et commentée dans le premier livre étendu qui lui ait été consacré. Ce livre, MM. Wickham et Degrais le présentent aujourd'hui au public avec une modestie vraiment scientilique. Après que Becquerel (1901) et Curie eurent éprouvé sur eux-mêmes l’action irritative du Radium, et que M. Danlos en eut commencé les premières applications thérapeutiques, M. Wickham (1905) entreprit l'étude du Radium en Dermatologie. Ses essais eurent pour résultat la création du Laboratoire biologique du Radium (1906). A peine en possession d'appareils qui déjà étaient perfectionnés, M. Wickham s’appliqua à régler l'action de leur pouvoir radio-actif. Il pensa utiliser diverses propriétés inattendues du Radium, telles, par exemple, que celles qui résultent de sa puissance d’induction. Le Radium communique à distance à certaines substances sa radio-activité ; il les induit, en quelque sorte, comme un courant traversant une bobine donne naissance à un courant induit dans une autre bobine sans relation directe avec une source d'électricité. Mais M. Wickham fixa surtout son attention sur la mesure de la radio-activité, ce qui devait le conduire à un emploi méthodique du Radium, débarrassé de tout empirisme. Pratiquement, en effet, les radiations émanées du Radium n'arrivent sur la région malade qu'après avoir traversé les parois d’un récipient ou la substance dans laquelle le Radium est incorporé. On ne peut donc disposer des rayons qu'après leur émission hors de l'appareil: Ce n’est point l'activité même du sel de radium, mais celle du rayon extérieur utilisable qu'il importe de connaitre. Cette considé- ration conduisit M. Wickham à chercher à moditier l'action des rayons par l'interposition d'écrans à filtrer en quelque sorte les radiations. Cette filtration s'obtient au moyen de feuilles d’ouate ow de lames d'aluminium. Le maniement rationnel des émissions radio-actives ne provoque ni inflammation superficielle, ni irritation sur les tissus qui y sont exposés. Sans déterminer une révulsion de surface, on obtient une sédation remarquable des douleurs superficielles. Les tissus néoplasiques résistent plus facilement que les tissus sains à l'action destructive du Radium. Un grand nombre de tissus néoplasiques sont susceptibles d'être influencés par le Radium. Les auteurs citent maints cas de guérison d'épithéliomes cutanés, de papillomes, de chéloïdes, de variétés de tuberculose de la peau, de nævi vasculaires, d'ulcérations diverses. Une solution aqueuse au millionième de bromure ou de sulfate de radium, injectée dans les tissus, mani- feste son pouvoir radio-aclif. Le Radium enfermé dans des appareils ne semble pas bactéricide : mais il n’en est plus de mème si, à une culture microbienne, on ajoute de l’eau radifère. Cela tient sans doute à l'émis- sion directe de corpuscules &. Dans une première partie de l'ouvrage, les auteurs ont traité de la partie physique. Ils rappellent la décou- verte de la radio-activité, par Becquerel (1896), sur l'uranium. Ils mentionnent les corps radio-actifs actuel- lement connus : le thorium (M®e Curie et Schmidt, 1898), le radium et le polonium (les Gurie, 1900), l'actinium (Debierne, 1900), le radio-thorium (Ramsay et Hahn, 1904). Ils indiquent les minerais contenant le Radium, les modes d'extraction de ses sels et la mesure de la 14" 646 radio-activité par l’ionisation. Ils étudient ensuite les propriétés du Radium : dégagement de chaleur et de lumière, coloration d'ordinaire passagère de certains corps, impression des plaques photographiques. Le adium rend l'air conducteur d'électricité par ionisa- tion, en dissociant ses particules, d'où la décharge plus ou moins rapide d’un électrosçope sous son influence. C'est là le principe de la mesure de la radio-activité d'un sel de radium. Certaines substances exposées au Radium redeviennent phosphorescentes, même avec l’interposition d'un corps opaque. Les radiations tra- versent donc les corps avec une facilité variable. L'alu- minium, le mica, certains vernis sont particulièrement perméables. L'énergie du Radium provient de sa désintégration constante. Celle-ci produit un gaz, «l’émanation »,etdes rayons invisibles de trois ordres : les rayons &, formés d’atomes très ténus, animés d’une vitesse de translation moindre que celle de la lumière, faiblement déviés par l'aimant et peu pénétrants; — les rayons $, particules mi-éthérées, animés d'une vitesse égale à celle de la lumière (deux à trois cent mille kilomètres à la seconde) et, suivant leur pénétration plus ou moins grande, qua- liliés de durs où mous;—les rayons y, d’une inconce- vable ténuité, d'une vitesse égale aux précédents, et d’une extrême pénétration. L'émanation, gaz radio-actif, a le pouvoir d’induction. Cette induction est plus ou moins stable : elle se perd par le temps. C’est elle qui charge de radio-activité les eaux minérales. A l'inverse du Radium, dont l’activité, abolie temporairement par la chaleur, se reforme sans cesse, les substances radio- actives par induction ne récupèrent plus spontanément leur puissance. Dans la seconde partie, MM. Wickham et Degrais exposent Finstrumentation employée en Thérapeu- tique. L’émanation capable d'induire la radio-activité dans certaines substances peut être fixée temporai- rement sur des véhicules divers : eau, vaseline, lano- line, glycérine, etc. Les rayons émanent d'appareils dont la forme peut être variée selon les besoins de l'application locale : tubes de verre contenant le sel et recouverts d’un tube d’or ou d'argent; sels collés sur une armature métallique et recouverts d'un vernis; toiles recouvertes d’un vernis radifère, etc. La technique de l'application est décrite avec un soin tout particulier. Et c’est là un des chapitres les plus in- téressants et les plus personnels de l'ouvrage. La durée et le nombre des applications successives sont régies par Le principe suivant : L'action sur les tissus dépend de la quantité totale des rayons absorbés. Un appareil très faible, longtemps appliqué, fera une révulsion qu'un appareil d’une extrême puissance ne produira pas si le temps d'application en est réduit. L'intensité d'action est donc proportionnelle à la durée de contact des appareils. Les grandes énergies sont utilement ré- servées à des applications rapides sur les divers points d'une grande surface. Par le fractionnement et l’espa- cement des applications, on obtient des effets diffé- rents. Les auteurs ont imaginé un procédé qu'ils dénomment « le feu croisé ». Il consiste à poser deux appareils vis-à-vis l'un de l’autre, et à les transférer parallèlement en divers points de la tumeur à traiter. L'appareil s'applique soit directement sur la peau, le vernis qui le recouvre servant seul d'écran, soit à une petite distance (5 centimètres), la colonne d'air faisant écran. Entre l'appareil et la peau, on peut interposer des écrans solides plus ou moins épais. C'est ici qu'apparail la question du filtrage, que M. Wickham employa rationnellement dès mars 1905. Le filtrage est « l'interposition, voulue et dans un but thérapeutique, d'un écran entre l'appareil et les tissus ». Il se fait au moyen de feuilles d'aluminium, de coussins d’ouate et de baudruche ou de lames de plomb, qui, suivant leur épaisseur, arrêtent une partie des rayons $, ou tous les rayons f et ne laissent passer que les rayons +. Les appareils se placent soit au contact de la peau, soil à l’intérieur des tumeurs, fistules ou cavités. Des BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX dispositifs différents sont utilisables Suivant les cas. Tout un chapitre, très important, est consacré à la mesure et au dosage des radio-activités utilisables. La puissance des appareils est variable. Nouvellement construits, leur pouvoir émissif est faible. Mais pro- gressivement leur force s’accroit, et, au bout de trois mois, ils sont à l'état de « maturité » et d’un rende- ment suffisamment stable. Les grains de radium, vus au travers du vernis, ont passé du jaune au brun foncé. Signalons le détail précis dans lequel sont exposés les procédés employés à l'analyse quantitative et quali- tative des rayonnements. Que vont faire ces rayonnements sur les tissus? C'est l'objet de la troisième partie du livre. Outre une action destructive, qui est loin d’être toujours défavorable, le Radium exerce une action élective sur certains tissus pathologiques, qui, sans phase inflammatoire, se mo- difient et entrent en régression. Ce fait est surtout accentué dans certaines néoplasies cancéreuses. En nombre de cas, des douleurs rebelles ont cédé aux applications, sans que le Radium ait provoqué la moindre réaction tégumentaire. Quand des réactions inflammatoires se sont produites, les tissus détruits ont été remplacés par des tissus de restitution, dont la surface souvent est souple, lisse et unie. Quelquefois, cependant, on observe une légère dépression, l’appa- rition de petites télangiectasies ou de pigmentations. L'exposé des résultats thérapeutiques tient la plus grande partie du livre de MM. Wickham et Degrais. C’est, avec planches coloriées à l'appui, la démons- tration des guérisons obtenues par le Radium dans les cas les plus variés : épithéliomes cutanés bourgeon- nants, ulcérés ou non; cancroïdes divers; papil- lomes, etc. Le traitement de 59 cas de ces productions n'a donné que 3 insuccès. Des néoplasies malignes graves, cancers de la face, infiltrations ganglionnaires, néoplasmes du sein, can- cers de la langue, des lèvres, ete., ont présenté des régressions remarquables. Les chéloïdes et cicatrices vicieuses sont influencées d’une manière suprenante par le Radium, surtout quand elles sont récentes ou siègent sur des enfants. Les angiomes, nævi vasculaires superficiels ou pro- fondément infiltrés, plans ou mamelonnés, les tumeurs érectiles en nappes ou saillantes fournissent à la Radiumthérapie ses plus remarquables résultats. Le Radium a une véritable action élective sur les angiomes. Le procédé est indolore. De même, dans les nævi pig- mentaires et pilaires, on obtient une dépilation en mème temps qu'une décoloration. Des planches colo- riées et de nombreuses photographies illustrent la relation de ces différents cas. L'action favorable du Radium se manifeste encore sur certaines tuberculoses cutanées, sur les dermatites prurigineuses et eczémateuses, et particulièrement sur diverses catégories de névrites et de névralgies (scia- tique, intercostale, etc.), et sur les douleurs si tenaces consécutives au zona. Les derniers chapitres sont con- sacrés aux essais des applications de la Radiumthé- rapie à la cure des affections internes. ë Tel est le compte rendu, trop suecinct malgré sa longueur, de ce livre, dont l'intérêt est majeur. La modestie des auteurs nous a privés, au cours de cet ouvrage, d’un chapitre général sur l'histoire de la Radiumthérapie. La place qu'ils y occuperaient est trop grande pour que nous ne relevions pas ce fait. Indépendamment des notions nouvelles et originales que ce volume contient en abondance, il offre la parti- cularité d’être le premier livre qui ait paru aussi com- plet sur cette question. MM. Wickham et Degrais peu- vent à bon droits’enorgueillir de leur œuvre, Le lecteur leur saura gré de la lui avoir donnée si riche en appli- cations utiles. Il marquera encore quelque fierté, au moment où la Radiumthérapie prend son essor par le monde, à considérer qu'elle dérive d'une découverte française, dont l'étude fut sans cesse poursuivie et approfondie par des savants français. D'A. LÉTIENNE. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 647 DR EE TR RP ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 28 Juin 1909. M. le Secrétaire perpétuel annonce la mort de M. R. Bergh, Correspondant pour la Section d'Anatomie et Zoologie. 1% SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Picard pré- sente la suite de ses recherches sur les équations inté- grales de première espèce. — M. A. Chatelet : Sur une extension de la théorie des fractions continues. — M. R. de Montessus présente ses recherches sur le calcul des racines des équations numériques. — M. J. Guillaume adresse ses observations de la comète 1909 a, faites à l'équatorial coudé de l'Observatoire de Lyon. — M. J. Bosler montre que la comète d'Encke paraît avoir une variation d'éclat synchrone de la période undécennale des taches solaires. — MM. H. Buisson et Ch. Fabry ont comparé les spectres du centre et du bord du Soleil. Pour la plupart des raies, on trouve en passant du centre au bord du disque : 4° un déplacement vers le rouge de 0,005 angstrom ; 29 un élargissement de 0,010 angstrüm. — M. P. Pui- seux estime que les teintes de la surface de la Lune, à cause de leurs variations, ne sauraient appartenir à un manteau glaciaire général, non plus qu'à un revêtement uniforme de poussière météorique. — M. D. Eginitis signale l'enregistrement, aux sismo- graphes d'Athènes, d'Egion et de Zante, du tremble- ment de terre du golfe de Gorinthe du 30 mai. Le foyer de ce séisme se trouve au nord-ouest d'Egion. 2 Sciences PHYSIQUES. — Mile Blanquies a tracé les courbes d'ionisation de l'air en fonction de la distance, produites par les rayons &« émanant de différentes sub- stances radio-actives. Les courbes du radium C et du polonium sont identiques, tandis que celle de l’acti- nium B est tout entière au-dessus des deux autres. — M. N. Moulin à vérifié le fait que les ions produits dans les gaz par les particules & sont localisés le long des trajectoires de ces particules et qu’un champ élec- trique normal aux trajectoires tend à disperser les ions et à empêcher leur recombinaison beaucoup plus qu'un champ électrique parallèle. — M. C. Tissot indique que le détecteur d'ondes à pyrite de fer décrit récemment par M. Petit rentre dans la catégorie des détecteurs thermo-électriques qu'il a signalés il y à un an. — M. Loutchinsky a constaté que, dans le plomb cristallisé par fusion, le coefficient d’aimanta- tion spécifique est dix fois plus grand environ que pour le plomb déformé mécaniquement. — M. Ed. Bauer a mesuré la température de la flammeoxhydrique en déterminant l'émission et l'absorption de cette flamme pour les rayons restants de la fluorine et pour la raie D du sodium. Il trouve des valeurs voisines de 2.240° C. — M. G. D. Hinrichs décrit une méthode pratique de calcul simultané des poids atomiques et en donne les résuliats généraux. — M. Ed. Bonjean à constaté la formation de composés oxygénés de l'azote et de leurs combinaisons métalliques (fer*et plomb) dans les grandes installations de production de l'ozone pour la stérilisation des eaux. — MM. H. Le Chatelier et Wologdine montrent qu'il n'existe actuellement aucune preuve expérimentale de l'existence de plu- sieurs variétés du carbone ordinaire, dit amorphe. Il n'ya probablement qu'une seule variété de ce carbone, de densité voisine de 1,8, les densités inférieures résultant dé la présence d'inclusions gazeuses. — M. G. Charpy à reconnu que le carbone provenant de la décomposition du carbure de fer produit à des tem- pératures variant de 700 à 1100° et sous des pressions allant jusqu’à 15.000 atmosphères, se sépare à l'état de graphite. — M. de Forcrand à constaté que le car- bonate de potassium hydraté à 1,5H°0 nest pas un déshydratant, et qu'il faut employer le sel anhydre (avec certaines précautions) pour déshydrater. L’exis- tence d'hydrates à 3 ou 4 H°0, formés à basse tempé- rature, est possible. — M. H. Gaudechon à obtenu, par action de AzH'OH sur une solution chaude de HeBr° et lavage à l’eau chaude, un précipité jaune de (AzHe*Br)'HgBr?, d'où l'on peut isoler le bromure de dimercuriammonium AzHg°Br. — M. W. Oechsner de Coninck a obtenu le chlorure d’uranyle UO?CF par double décomposition quantitative entre le sulfate ura- nique etBaCE.— MM. P. Sabatier et A. Maïlhe ont étu- dié la décomposition catalytique de l'alcool méthylique par les oxydes métalliques; l'alumine, la thorine, 110? donnent de l’oxyde de méthyle et de l'eau; les oxydes de Mo, Pb, Cd, Fe, Va, Sn donnent CO et H*. — MM. E.E. Blaise et A. Kohler ont préparé les acides-alcools par réduction des acides cétoniques correspondants; à partir de la position £, ces acides ne se lactonisent plus. — M. Ch. Tanret à reconnu que l'amidon soluble préparé à chaud est un mélange de corps qui diffèrent les uns des autres par leur pouvoir rotatoire, leur action réductrice sur la liqueur de Febling, leur colo- ration par l'iode et leur solubilité dans l'alcool à divers titres. —M. E. Fourneau a retiré de l'écorce du Pseudo- cinchona africana un nouvel alcaloïde cristallisé, forte- ment lévogyre, de formule C#H*A70°, — M. I. Szreter montre que l’oxyhémoglobine de première crislallisa- tion conserve, provenant des globules rouges, des sub- stances catalysantes pour H°0?. — M. M. Piettre à reconnu que les acides cholaliques biliaires sont diffé- rents, non seulement par le fait qu'ils sont unis à des acides aminés différents (glycocolle, taurine), mais encore en eux-mêmes. Seul l'acide taurocholalique donne un produit de réduction cristallisé; sa formule estC#H20? 30 SCIENCES NATURELLES. — M. J. de La Riboisière a constaté que ce sont les Oiseaux carnivores qui ont le moins de foie et les Oiseaux à régime insectivore et piscivore qui en ont le plus; les Uiseaux granivores sont intermédiaires. — M. R. Dubois, à propos d'une note de M. Devaux, rappelle qu'il a annoncé il y à long- temps que, pendant le sommeil hibernal, la lymphe s'accumule dans le péritoine chez les marmottes. — Me M. Phisalix montre que le sang et le venin des serpents mélangés à la salamandrine préviennent la convulsion due à cette dernière chez les serpents et chez les cobayes. Il y a antagonisme physiologique et non neutralisation chimique. — M. E. L. Bouvier à reconnu que les Atyidés sont issus des Acanthéphyridés et que les représentants de cette dernière famille, abyssaux à l'heure actuelle, ont eu jadis des formes lit- torales qui se sont adaptées à la vie dans les eaux douces. — M. Aug. Michel a constaté que, pour tous les fragments de Syllidiens ayant continué à vivre, la réparation antérieure est toujours suivie de la régéné- ration de la tête, de même que la production d'une queue est la règle pour la réparation postérieure. — MM. R. Perrier et H. Fischer, par l'étude des con- nexions du cœur et de la branchie chez les Bulléens, confirment le fait que l’'Actéon est la forme primitive du groupe des Tectibranches, lequel se rattache aux formes archaïques des Prosobranches.— M. Ch. Pérez a étudié la métamorphose des muscles splanchniques chez les Muscides : la partie myoplasmique, la plus différenciée, seule disparaît par phagocytose; la partie 648 sarcoplasmique nucléée persiste et régénère des élé- ments contractiles. — M. A. Gautier a analysé les gaz des fumerolles du Vésuve après l’éruption de 4906. Ils renferment surtout CO*,0 et Az avec un peu de CO,H; il n'y à pas trace de gaz sulfurés. — MM. A. Michel- Levy el A. Lacroix ont étudié une roche mise à jour par les travaux du funiculaire de la Bourboule : c'est un trachite quartzifère à arfvedsonite (bostonite), {ype nouveau pour la France centrale. — M. A. Lacroix à examiné des baguettes de cristal de roche taillé que les femmes du Haut-Oubanghi portent implantées dans la lèvre inférieure. Elles sont polies sur des dalles quart-- zeuses qui offrent la plus grande analogie avec les polis- soirs néolithiques. — M. G. Eisenmeng er à reconnu que le Loch Lomond et le Loch Tay, en Ecosse, pré- sentent les traces les plus manifestes d’un intense surcreusement glaciaire. — M. E.-A. Martel signale la présence de gouffres dans deux lapiaz des Pyrénées et du sud de l'Espagne : c'est une nouvelle preuve de origine torrentielle mécanique des lapiaz. Séance du 5 Juillet 1909. M. J. C. Kapteyn est élu Correspondant de l’Aca- démie pour la Section d’Astronomie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Riesz présente ses recherches sur la sommation des séries de Dirichlet. — M. B. Gambier signale une équation du 3° ordre et du 2° degré dont l'intégrale générale et l'intégrale sin- gulière sont respectivement les racines Pèmes et Qèmes (le fonctions à points critiques fixes, P et Q étant des entiers aussi grands qu'on veut. — M. R. Garnier communique quelques observations sur les équations différentielles linéaires et les transcendantes uniformes du second ordre. — M. A. Korn éludie quelques inéga- lités jouant un rôle dans la théorie des vibrations élastiques et des vibrations électriques. — M. J. Guil- laume à observé un certain nombre d'occultations d'étoiles, à l’équatorial Brunner de l'Observatoire de Lyon, pendant l’éclipse de Lune du 3 juin. — M. A. Angot annonce que le tremblement de terre du 41 juin a été ressenti dans dix-sept départements du Sud-Est et dans quelques îlots isolés (Dordogne, Landes); un autre séisme local à été ressenti le 23 juin en Vendée. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. B. Brunhes et P. David ont constaté une grosse différence de poten- tiel normale entre le sommet et le pied du Puy- de-Dôme. Les orages magnétiques créent des diffé- rences de potentiel occasionnelles variables le + d'une ligne télégraphique suivant ce parcours. — M. de Beauchamp a réussi à empêcher les orages et la grêle à Saint-Julien-l’Ars en faisant établir un con- ducteur mé tallique entre le sommet du clocher et ia nappe aquifère. — M. À. Chassy montre que la con- ductibilité électrique de l hydrogène croît d'une façon continue avec la tension; ce n’est que pour les fortes tensions, bien supérieures à la tension critique, que la capacité du condensateur à gaz est la même que celle que l’on obtient en remplaçant le gaz par un liquide conducteur. — M. A. Quidor montre que le relief relatif des objets vus avec une jumelle est divisé par la racine carrée du grossissement, tandis qu'avec un téléstéréoscope il est multiplié par la racine carrée du rapport de la base visuelle de l'instrument à celle de l'observateur. — MM. E. Henriot et G. Vavon ont reconnu que la radio-activité du potassium est bien due à cet élément et non à une impureté; elle est for- mée par des rayons $. — MM. P. Th. Muller et M. Thouvenot ont décelé, à l’aide des mesures de pouvoir rolatoire magnétique, des changements tauto- mériques dans le cyanacétate et l’acétylacétate de méthyle et leurs sels sodiques dissous dans l'alcool méthylique et éthylique. — MM. À. Besson et L. Four- pier, en soumettant à l’effluve un mélange de H sec et de vapeurs de SiClé, ont obtenu la série des chlorures de silicium saturés SrCl?+?, — M. G. Urbain décrit une nouvelle méthode d'isolement de la terbine par cristallisation fractionnée des nitrates de terres rares ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES après addition d'une grande quantité de nitrate de bismuth. — MM. M. Delépine el P. Bonnet ont pra- tiqué l'oxydation des aldéhydes avec de bons rende- ments en acides en ajoutant à la solution du nitrate d'argent, puis de Ja soude ou de la baryte diluée. — MM. A. Haller et Ed. Bauer ont constaté que, quel que soit le poids moléculaire des radicaux alcoylés dans les trialcoylacétophénones, le dédoublement de ces dernières sous l'influence de l’amidure de sodium se fait toujoursen benzène et acides trialcoylacétiques. — MM. L. Hugouneng et A. Morel ont poursuivi l'étude de lhydrolyse fluorhydrique des matières pro- léiques. L'acide concentré donne surtout ou même exclusivement des peptides. — M. G. Tanret a isolé de l'asperge deux nouveaux hydrates de carbone l'asparagose (C°H2°05) *. II2O, F. 1980-2000, lévogyre, don- nant par hydrolyse du lévulose et du glucose, et le pseudo-asparagose, [xls — 309,3, dons les mêmes produits par hydrolyse. — M. G. André à constaté que la teneur des feuilles en acide phosphorique subit une diminution marquée correspondant à l'époque de la migration de l'azote vers les organes floraux; la teneur en malières salines reste assez uniforme.— M.J. Apsit et Ed. Gaïn ont reconnu que les grains de blé tués par l'éther sulfurique conservent leurs propriétés amy- asique et peroxydiastasique. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Lécaillon à reconnu la présence de sphères attractives et de centrosomes dans les cellules issues de là segmentation parthéno- génétique de l'œuf de la poule. — M. L. Papin décrit la structure de l'amygdale pharyngienne des Crocodi- lens. — M. F. Kovessi montre que les poils spéciaux de certaines plantes, décrits par MM. Jamieson, Zemplen et Roth, ne jouent aucun rôle dans l’utilisation de l'azote de l'air. — M. P. Seyot a observé que la greffe à une influence marquée sur les caractères des pépins du Tannat greffés dans la région landaise. — M. Ed. Griffon établit qu'un certain nombre de formes bac- tériennes fluorescentes, pathogènes pour les plantes, ne sont que des variétés des B. iluorescens lique- faciens et putridus de Flugge. — M. P. Termier déduit de ses recherches géologiques que la Corse appartient à l’Apennin et que l'ile d'Elbe n'est plus, entre les nappes corses et les nappes apennines, qu'un trait d'union. — M. E. Romer estime que la morphologie des deux zones alpines suisses exige l'hypothèse de plusieurs mouvements épirogéniques, auxquels l’en- semble des Alpes à pris part. Le mouvement de sou lèvement a été dans la suite remplacé par un mou- vement d'affaissement. — M. A. Viré donne des renseignements sur le travail de désobstruction des grottes de Lacave (Lot) qui a mis à jour une série de galeries nouvelles. — M. G. Garde à étudié les prin- cipaux gisements de roches alcalines du Soudan fran- cais (Mounia, Gamedou, Zinder, Hadjer el Hamis). — M. J. de Schokalsky signale l'existence, depuis plu- sieurs années, d’une crue des lacs et des rivières de l'Asie centrale russe, en relation avec une augmenta- lion des précipitations atmosphériques. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 22 Juin 1909. M. E. Boinet à constaté que la dysenterie des climats tempérés, c’est-à-dire la dysenterie bacillaire, épidémique où non, détermine l'abcès du foie nostras, qui peut présenter les mêmes modalités que les abcès des pays chauds, d’origine dysentérique amibienne. L'abcès dysentérique nostras est parfois d'un diagnostic difficile; 1lexiste sous deux formes principales: l’abcès unique, bien enkysté, assez facilement curable après une opération large et hâtive; l'hépatite aiguë suppurée, assez diffuse et destructive, d’un pronostic plus sérieux. — M. le D' Lowenthal lil un travail sur l’état sanitaire des armées françaises (de l’intérieur) et allemande de 1902 à 1906. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 649 Séance du 29 Juin 1909. M. Capitan*est élu membre associé libre de l'Académie. M. F. Widal présente un Rapport sur un travail de M. S. de Poggenpohl relatif au pouvoir antitryptique. L'auteur a reconnu que laugmentation du pouvoir antitryptique du sérum est la règle dans le cancer et la pneumonie lobaire et qu'on peut l’'observer, par exception, dans la fièvre typhoïde, la tuberculose et les néphrites. La réaction antitryptique présenterail une grande valeur pour le diagnostic des deux premières affections. Séance du G Juillet 1909. MM. Lacassagne et Queirel sont élus associés natio- naux de l’Académie. M. Gilbert présente un Rapport sur un travail de MM. Billard et Ferreyrolles, qui ont constaté que les injections hypodermiques d'eaux de la Bourboule sont parfaitement tolérées et constituent une excellente méthode d'administration de l'arsenic. — MM. Kelsch, Teissier et Camus ont fait une série d'expériences, négatives, sur la transformation de la variole en vaccine. Malgré tout, ils inclinent à penser que les deux mala- dies dérivent l'une de l’autre ou d’une souche com- mune. La transformation ne réussit que rarement et l’on ignore dans quelles conditions elle s'effectue. — M. A. Chauffard signale un nouveau signe, celui du flot transthoracique ou transabdominothoracique. caractéristique des kystes hydatiques de la convexité du foie. — M. Piot-Bey a reconnu que l'isolement individuel des animaux contaminés est bien supérieur à la sérothérapie dans la prophylaxie de la peste bovine. — M. H. Lagrange préconise, après les opé- rations d'énucléation, la gréffe d'un œil de lapin ou de chien dans la capsule de Tenon; celui-ci constitue un moignon mobile, volumineux et vivant, capable de porter d'une manière définitive la pièce artilicielle destinée à la prothèse. Cette opération lui a donné d'excellents résultats. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 26 Juin 1909. M. T. Yamanouchi a constaté que le filtrat des cul- tures en bouillon des bacilles typhiques et para- typhiques est très toxique ; il est neutralisé par le sérum anti-endotoxique de Besredka. — M. F. Guéguen à déterminé une Mucédinée isolée d'une nodosité juxta- articulaire; c'est un Aspergillus nouveau, en voie d'évolution, que l’auteur nomme A. Fontoynonti. — M. A. Lécaïllon montre qu'il n'y a pas de différences dans les caractères de la segmentation qui se produit dans les œufs non fécondés de la poule, que ceux-ci proviennent de poules ne s'étant jamais accouplées ou de poules séparées du coq depuis longtemps. — M. Ch. Dopter a reconnu que la réaction de Kraus seule ne saurait servir de critérium pour établir un diagnostic différentiel entre les méningocoques et les pseudo- méningocoques; les précipitines de ces derniers sont des co-précipitines. — M'° L. Chevroton et M.F. Vles ont examiné la striation musculaire en lumière ultra- violette; ils considèrent comme réelle l'existence des deux ordres de stries Z et Q. — MM. E. Wertheimer et G. Battez montrent que l’atropine n empêche pas la glycosurie de se manifester après la piqûre du bulbe; elle n'est donc pas due à l'excitation de nerfs glyco-sécréteurs, qui sont paralysés par l'atropine. — M. A. Weber à étudié au point de vue morphologique la sarcosporidie du Gecko (Sarcocystis platydactyl). — MM. À. Weber et M. Beguet ont suivi l'évolution du noyau dans un sarcome globo-cellulaire du tissu conjonctif. Le nucléole est expulsé du noyau dans le cytoplasme et devient acidophile. — M. C. Viguier à étudié la structure du corps thyroïde du Gecko; il y a trouvé des vésicules épithéliales et des vaisseaux ou espaces lymphatiques. — MM. Chevalier et Clerc ont constaté que la toxine diphtérique agit comme un para- lysant de la fibre cardiaque du lapin. — MM. H. Roger et M. Garnier ont reconnu que l’invertine intestinale peut être attirée par le saccharose dans la cavité péri- tonéale; elle y dédouble ce sucre et permet à l’orga- nisme d'en utiliser une partie. — M. L. Tanon à constaté la présence de cellules à granulations méta- chromatiques dans la pulpe vaccinale. Ces granulations sont susceptibles de s'accroître et leur abondance parait être en relation avec l'activité du vaccin. — M. Girard-Mangin a observé que les tumeurs ulcérées ont une toxicité particulière qu'on ne peut attribuer aux cellules cancéreuses; les poisons cancéreux sont hypotenseurs et hypothermiques. — M. $S. Marbé a reconnu que la phagocytose est plus active chez les animaux hyperthyroidés et moins active chez les ani- maux éthyroïidés que chez les témoins. Chez les pre- miers, ce sont les grands mononucléaires qui agissent; chez les seconds, les polynucléaires. — MM. Aug. Lelièvre et Ed. Retterer ont étudié les différences de structure des muscles rouges et blancs du lapin; elles tiennent à la différence du travail qu'ils accom- plissent et de la nutrition plus ou moins énergique qui en est la conséquence. — MM. C. Levaditi et Raïjchman montrent que le sensibilisinogène est absorbé par le stroma des éléments cellulaires des organismes capables d'être anaphylactisés. — MM. M. Parvu et Ch. Laubry ont constaté que, dans les anémies pernicieuses, l'indice opsonique est notablement abaissé, et cela parallèlement à la valeur phagocytaire. — M. EX. W. Werbitzky cite des expériences d'après lesquelles l'empoison- nement par la peptone de Witte et l’anaphylaxie chez le cobaye sont deux phénomènes indépendants et différents; l’anaphylaxie est spécifique chez le cobaye. — M. R. Laufer a déterminé pour plusieurs sujets les courbes de contraction statique ou d'endurance ; l’endu- rance n'est pas en raison directe de la force vive. — MM. W. Mestrezat et E. Gaujoux ont fait l'analyse du liquide céphalo-rachidien dans la méningite tuber- culeuse. L'albumine est en proportion forte; le sucre et les chlorures présentent un taux bas. — MM. Ch. Aubertin et E. Bordet ont observé qu'il se produit, sous l’action des rayons X, une véritable métaplasie du tissu thymique en tissu conjonctif indifférencié, qui évolue ensuite en tissu fibreux. — MM. H. Labbé, G. Vitry et M. Touyéras indiquent un procédé de calcul de lindosé organique urinaire, qui est égal à extrait organique total moins le double de l'azote total. — M. P. Chaussé à constaté que la réceptivité du chat pour le virus bovin tuberculeux, donné par les voies digestives, est réelle, mais que cette méthode d'infection échoue souvent chez de jeunes sujets. — MM. R. Lépine et Boulud montrent que jamais le sang veineux ne contient plus de sucre total que le sang artériel et ce dernier plus que le sang du ventricle droit. — MM. A. Rodet et Lagriffoul critiquent la théorie de Neisser et Wechsberg sur l’action antibacté- ricide de certains sérums. — MM. J. Sabrazès et R. Dupérié ont observé le passage du spirochète de Schaudinn dans le cytoplasme des fibres musculaires lisses chez un hérédo-syphilitique; par contre, les cel- lules nerveuses lui ont opposé une barrière infranchis- sable. Séance du 3 Juillet 1909. M. G. Bohn distingue chez certains animaux trois sortes d'oscillations : celles que provoque une varia- tion brusque et momentanée du milieu extérieur, celles qui suivent une modification assez profonde de l’état chimique des tissus et celles qui sont la mani- festation d'habitudes rythmiques contractées dans Ja Nature. — M. O. Laurent signale, comme adjuvant important de l'intervention directe sur le cancer, la saignée régionale, l'injection de sérum artificiel, l'in- jection intraveineuse désintoxicante et la transfusion du sang. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont constaté ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES que l'inoculation intra-péritonéale de parenchymes riches en Leishmannia détermine chez le cobaye une infection légère. — M. A. Laveran à reconnu que l'Hémogrégarine trouvée par Carini chez le Tupinambis n’est pas identique à celle que lui-même a décrite sous le nom de #. Tupinambisi ; il propose de la nommer H. Carinii. — M. F. Guéguen a étudié les formes évolutives et les caractères spécifiques de l'Aspergillus Fonloynonti; c'est une espèce mal fixée, qui subit des modifications rapides dans les divers milieux. — MM. J. et A. Déjerine et André Thomas montrent que, dans la constitution du faisceau géniculé et du faisceau interne du pied du pédoncule, le contingent des fibres extra-operculaires peut être considérable. — M. A. Policard déduit de ses observations sur les cellules de l’épithélium de la vésicule biliaire que celle-ci est un organe glandulaire et non un simple réservoir de bile. — MM. H. Roger et M. Garnier ont observé que l’émulsine peut être attirée dans la cavité péritonéale du lapin par une injection d’amygdaline ; celle-ci est dédoublée et HCAz formé produit l'empoi- sonnement. — M. A. Weber à étudié au point de vue cytologique la sécrétion des glandes parathyroïdes du Gecko. — MM. A. Gilbert et M. Villaret décrivent quelques particularités de structure des veines sus- hépatiques, notamment chezle chien. — M. P. Bonnet a observé, chezun Psammodromus algirus, un testicule droit tout à fait rudimentaire. — MM. A. Jousset et P. B. Paraskevopoulos ont reconnu que le complé- ment augmente chez l’homme dans la plupart des états pathologiques. Il est impossible de substituer le com- plément humain au complément du cochon d'Inde dans les recherches des ambocepteurs par la réaction de fixation. — MM. L. M. Pautrier el Lutembacher ont obtenu une subcutiréaction positive chez deux sporotrichosiques par injection sous-cutanée de cultures jeunes de sporotrichose, broyées, diluées dans du sérum et stérilisées. — MM. J. Camus et Ph. Pagniez ont injecté au chien de la méthémo- globine musculaire et ont observé son passage dans l'urine. — MM. G. Rosenthal et P. Chazarain-Weteel ont préparé une émulsion, dans la solution: sale physiologique, du Bacillus perfringens et de l’anémo- bactérie du rhumatisme aigu ; après l'avoir stérilisée, ils comptent s’en servir comme vaccin de Wright. — M. L. Nègre a constaté qu'une tumeur donnée de la souris s’inocule bien plus facilement chez des souris soumises au même régime alimentaire que chez des souris soumises à un régime alimentaire différent. — M. M. Doyon montre que l’abrine, qui détermine une forte diminution du glycogène hépatique, agit en provoquant un certain degré d’asphyxie, soit par hémolyse, soit par une action toxique sur les tissus. — M. A. Lécaillon a reconnu qu'entre les divers blasto- mères qui se produisent lors de la segmentation de la cicatricule des œufs non fécondés, il n'y à pas la presque identité qui existe entre les cellules de segmen- tation de l'œuf fécondé., — M. G. Finzi a constaté que les microbes anaérobies jouent un rôle prépondérant dans la genèse des maladies infectieuses de l'appendice. — MM. L. Morel et E. Terroine ont observé que le suc de sécrétine ne se maintient pas constant pendant une sécrétion assez longue : Ja concentration en alcali et en ferment lipasique baisse graduellement, — MM. H. Labbé, G. Vitry et M.Touyéras estiment que l'albu- mine alimentaire est la véritable origine de l'indosé organique urinaire. — MI V. Ceaparu a constaté que certains tissus embryonnaires peuvent se conserver vivants et se développer dans le péritoine des animaux de même espèce pendant un certain temps, après quoi la résorption survient. — M. Ed. Chatton a découvert chez une Nyctéribie un Trypanosomide nouveau, qu'il nomme Crithidia nycteribiæ. — M. $S. Marbé à reconnu que l'ingestion de corps thyroïde produit une hyperleucocytose avec mononucléose, tandis que l'ablation de ce corps provoque une hyperleucocytose polynucléose. M. J. Troisier montre que avec l'ictère et l'urobilinhémie qui se produisent au cours de la pneumonie sont d'origine hémolytique. — MM. Ch. Laubry et M. Parvu ont observé que la réaction de Wassermann est positive dans un assez grand nombre d’affections cardio-vasculaires d’origine indéterminée, ce qui décèlerait leur nature syphilitique. — MM. C. Levaditi et S. Mutermilch supposent que la création de variétés de trypanosomes partiellement résistantes à l’atoxyle n’est pas due à une immunisation active à l'égard des anticorps, mais à une simple sélection. — M. N. Gréhant décrit un procédé de mesure de la capacité respiratoire du sang, basé sur le déplacement de l'oxygène par l'oxyde de carbone. — M. Ch. Mantoux montre que la tuberculine pour intradermoréaction conserve bien son activité lorsqu'on la stérilise simplement à l'autoclave. — MM. Ch. Man- toux et L. M. Pautrier ont observé une réaction extrèmement sensible du tissu lupique à l'injection locale de tuberculine. M. H. Claude est élu membre titulaire de la Société. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 15 Juin 1909. MM. E. Boinet et Rouslacroix ont observé, dans la méningite cérébro-spinale épidémique, des altérations dégénératrices très marquées du cerveau et du cervelet, alors que dans la moelle on constate presque exclusi- vement des lésions irritatives avec congestion hémor- ragique. — M. L. Raybaud à étudié les modifications morphologiques provoquées par l’osmose chez les Mucorinées; elles sont la cause d’un arrêt de formation de l'appareil reproducteur. La transpiration provoque la formation de spores irrégulières et très inégales. — MM. Alezais et Peyron décrivent quelques particula- rités d’une tumeur coccygienne : présence d'une mem- brane basale, abondance des mastzellen et leur localisation dans de petits vaisseaux intra-épithéliaux. — M. C. Gerber a étudié l’action de la présure des Composées et de celle des Algues brunes sur la pep- tone et la caséine. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 15 Juin 1909. MM. R. Collin et M. Vérain ont constaté que l'état sombre des cellules nerveuses somatochromes chez la souris se caractérise par une diminution énorme du volume du noyau, le passage de la forme sphérique à la forme ellipsoïde et l'apparition d’une quantité notable de paranucléine. — MM.L. Richon et M. Perrin ont étudié l’état du squelette chez les lapins ayant subi un retard de développemeut par intoxication tabagique ; il ya simplement un ralentissement de croissance; il en est de même pour les organes génitaux. — M. Th. Guilloz expose les principes auxquels doivent satisfaire les photomètres à acuité visuelle et décrit un nouveau lype de ce genre d’instrument. — M. M. Lucien a observé chez l'homme un cas qui montre la migration du muscle court extenseur du cinquième orteil, de la région péronière au dos du pied. — M. Ch. Garnier signale un cas de cryptorchidie chez l'homme adulte stérile avec conservation de la fonction diastématique. — M. 3. Parisot a reconnu la toxicité certaine de l'extrait d'hypophyselorsque cette substance est directe- ment introduite dans le sang; à la suite d’injections répétées, il se produit chez l'animal une sorte d’accou- tumance. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 28 Mai 1909. M. Grenet eslime que, quand on parle des alliages fer-carbone, il n’est pas rationnel de faire une distinc- lion entre les élats du fer et ceux du carbone. La trans- formation du fer pur doit être considérée comme le passage du fer pur en solution solide; au-dessous de la ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES , 651 température de transformation, on ne peut passer sans discontinuité du constituant fer pur au constituant fer C de carbone; au-dessus de la température de transformation, on passe sans discontinuilé du consli- tuant fer à un constituant plus carburé, La notion de solution s'étend donc aux corps purs. — M. Rengade présente un nouveau modèle de galvanomètre à enre- gistrement photographique. — M. L. Bouveault à pré- paré des pinacones mixtes R'RC(OH).C(OH\(CH*)} en condensantles éthers des acides-alcools à R'RG(OH)CO*H avec CH'Mgl. Ces pinacones, chauffées avec de l'acide oxalique, fournissent des pinacolines dont la consti- tution est à l'étude; oxydées par l'acide chromique en solution acétique, elles sont transformées intégrale- ment en diméthyleétone et RR'CO. Séance du 11 Juin 1909. MM. M. Prud’homme et A. Colin : Sur la formation du rouge de para-nitraniline : 4° Un tissu, préparé en naphtolate de sodium ou en naphtol, donne un bon rouge avec le diazoïque de p-nitraniline à l'état de sel neutre ou d'hydrate de diazonium ; 2 La présence d'un acide fortement ionisé, comme HCI, détermine la for- mation d'ions complexes, retarde considérablement la copulation et donne naissance à d’autres colorants que le rouge; 3° L’acide acétique, en quantité équiva- lente, faiblement dissocié, ne peut former qu'une quan- tité restreinte d'ions complexes, qui ne donnent nais- sance qu'à une minime proportion de colorants étrangers. La présence d’acétate de sodium maintient l'acide acétique à l'état de molécule neutre, et empêche la formation des ions complexes. Elle agit aussi pour s'opposer à la diffusion du naphtolate de sodium dans le bain, et pour diminuer la solubilité du naphtol dans l'acide acétique. Le rouge formé en présence d'un excès d’acétate de sodium devra donc posséder le maximum d'intensité et de pureté de nuance; 4 La nuance plus ou moins bleuâtre du rouge semble surtout dépendre de l'intensité, c'est-à-dire de l'épaisseur plus ou moins grande de la couche de colorant déposé sur la fibre; 5° Pour une concentration donnée du bain de naphtol et du bain de diazoïque, il existe une durée de passage optima. En decà, le rouge est moins intense; au delà, le diazoïque en excès parait réagir sur le colorant déjà formé pour le dégrader. — M. A. Gautier apporte à la Société les prémisses d’un travail, fait avec M. Clausmann, sur la recherche des traces de fluor dans les matières minérales ou organiques. La méthode est fondée, en principe, sur la séparation du fluor à l’état d'acide fluorhydrique, que l’on fait agir sur le cristal. Il se fait ainsi du fluorure de plomb que l'on transforme en sulfure et dose ensuite colorimétri- quement. La méthode permet de retrouver 2 à 3 milli- grammes de fluor dans 1 litre d’eau ou dans 1 kilog de substance animale. — M. E. Kohn-Abrest fait quelques remarques au sujet de l'action simultanée de l'hydro- gène et du gaz chlorhydrique sur l'aluminium en poudre et en rognures entre 200 et 1.150°. Après avoir décrit les dispositifs qu'il emploie, il donne la composition de l'hydrate d'aluminium qui préexiste dans les poudres. La quantité de l'hydrate que l’on isole par action du gaz chlorhydrique à 300° dans les conditions indiquées par. l’auteur concorde tout à fait avec celle qui était prévue lors des analyses par d'autres méthodes, dont il a entretenu la Société chimique antérieurement. Le silicium et la silice existant à l'état d'impuretés sont entièrement volatilisés dans ces conditions; le fer l’est en grande partie à l'état de perchlorure, si l’action du gaz chlorhydrique est prolongée pendant vingt-cinq minutes. L'auteur montre que l'aluminium en poudre, mélangé à de la poudre de fer, influe notablement sur le mode d'attaque du fer par le gaz chlorhydrique. A haute température, l’action du gaz HCI sur l'aluminium est très énergique et rapide; à 3000, elle est très rapide à condition de chauffer au préalable dix minutes la substance dans l'hydrogène. L'analyse des résidus montre qu'ils renferment des quantités variables et très faibles de chlorure neutre qui n'est pas entière- ment du chlorure ferreux, et non plus du chlorure d'aluminium, mais qui contient du calcium. L'auteur met à profit ses observalions pour appliquer l’action du gaz HCI sur l'aluminium au dosage de l'aluminium métallique, et à lPétude des différents oxydes d’alu- minium qu'il à pu isoler antérieurement, soit préexis- tant dans la poudre, soit par oxydation de la poudre à l'air, soit par action de l’eau sur la poudre, soit enfin par action de l’alumine hydratée sur la poudre d'alu- minium. — M. G. Berlemont fait une réclamation de priorité à propos d'une note publiée par M. M. Guichard, dans laquelle ce dernier décrivait un modèle de trompe à mercure; ce modèle est exactement celui qui a été décrit en 1900 par MM. G. Berlemont et Jouard. M. Ber- lemont décrit une modification apportée aux trompes à mercure permettant d'obtenir des vides rapides et de faire des distillations dans le vide sous des pressions absolument constantes de 0 à Om®,5 de mercure. — M. Paterno expose à la Société les résultats de ses recherches sur l’action synthétique de la lumière sur les composés organiques. Les cétones et les aldéhydes se condensent à la lumière solaire avec les carbures éthyléniques, en donnant naissance à des composés de la forme : 0 O0 RL AN R, NX 2 U:CH:CR ou DER SE R, | RON RE VEN EU Ces composés se scindent sous l'action de la chaleur en régénérant les constituants primitifs. Beaucoup d’entre eux présentent une certaine analogie avec diverses résines naturelles. Les carbures gras saturés four- nissent, dans les mêmes condilions, avec les cétones les mêmes combinaisons, avec formation simultanée de pinacones 3 (CSH5) CO H CHE —|(CSH5 )COH — |? + C"H#0. Avec l’ammoniaque, l'acétophénone donne un composé basique dont l'étude n’est pas achevée. — M. G. Wyrouboff expose ses idées sur la constitution de l'acide chromique en solution. 1] conclut, en se basant sur la saturation par les carbonates, que cet acide a la formule Cr*07H*. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 25 Mars 1909. MM. S. Russ et W. Makower : L'expulsion de la matière radio-active dans les trans{ormations du ra- dium. Les auteurs ont suspendu, daus le vide, des disques au-dessus de surfaces rendues actives par les divers produits de désintégration du radium, et ils ont mesuré l’activité obtenue sur les disques après exposi- tion par l’électromètre à quadrant. Ils arrivent aux résultats suivants : 1° Quand l’'émanation du radium, en équilibre radio-actif avec ses produits de désinté- gralion, est condensée au fond d'un tube où l’on a fait le vide, immergé dans Pair liquide, des particules du dépôt actif sont rayonnées vers le haut du tube. Ce phénomène est attribué au rebondissement de l’atome résiduel quand une particule & est émise, 2° La radia- tion atteignant une surface à une distance fixée de l'émanation condensée est une fonction exponentielle de la pression du gaz. 3° On déduit de la vitesse de diminution de lactivité recueillie sur une surface exposée à la radiation de l'émanation que le radium A et le radium B atteignent tous deux la surface. 49 Le ‘adium B et le radium C sont tous deux rayonnés à travers le vide d'une surface primitivement rendue active par exposition à l'émanalion. En supposant que le radium B émet seulement des particules $, la radia- tion du radium C doit ètre due au rebondissement des atomes quand les particules 8 sont émises. — M.J.-A. Gray a étudié la /ibération de l'hélium des minéraux radio-actifs par le broyage. 4° L'hélium est libéré de la thorianite par le broyage jusqu'à une proportion de 632 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 28 °/,; 2° plus le minéral est broyé finement, plus il y a d'hélium libéré; 3° ce dégagement a une limite lem- poraire quand le minéral est réduit à une dimension d'environ 3 p; 4 il est impossible de dire à quel état les 72 J restants d'hélium sont contenus dans le mi- néral et à quelle dimension plus faible que 1 u le mi- néral devrait être réduit pour dégager tout l'hélium. — Mie M. Benson a étudié le Sphaerostoma ovale (Conostoma ovale Will.), qui est le plus ancien ovule paléozoïque actuellement connu dans sa structure. C'est un petit ovule de 3,5 mm. de longueur, du même type général d'organisation que les Lagenostoma. La chambre pollinique ne s'engage pas avec le micropyle, mais s'ouvre et se ferme par un mécanisme très par- fait, rappelant un peu le péristome et l’épiphragme du Polytriehum. MM. G..-E. Hale, H. Kronecker, E. Picard et S. Ramon y Cajal sont élus membres étrangers de la Société. Séance du 22 Avril 1909. M. J. H. Shaxby décrit un procédé de détermination graphique des intégrales de Fresnel par l'application de la règle de Simpson aux valeurs calculées de cos 4/2 74° et de sin 1/2 zx° pour un nombre suffisant de valeurs de x.— Le Comte de Berkeley et M. E.G. J. Hartley : Les pressions osmotiques « dynamiques ». Les auteurs décrivent une nouvelle méthode. cinétique, de mesure des pressions osmotiques: Un tube de por- celaine, portant une membrane de ferrocyanure de cuivre à l'extérieur, est placé dans un appareil à pres- sion osmotique, avec de l'eau des deux côtés de la membrane. L'intérieur du tube est en communication avec un capillaire gradué, tandis que l’eau extérieure peut être soumise à une pression. La première partie de l'expérience consiste à noter la vitesse à laquelle des pressions hydrostatiques connues forcent l’eau à travers la membrane. Dans la seconde partie de l’expé- rience, le tube, avec son capillaire attaché, est entouré de la solution dont on désire connaître la « pression osmotique dynamique », et l’on mesure la vitesse ini- tiale à laquelle l'eau est aspirée à travers la membrane dans la solution. Les résultats obtenus sont les mêmes, pour les solutions diluées, que par la méthode sta- tique. orie des contributions ancestrales s à l'hérédité et fe corrélations gqamétiques ancestrales d'une population mendélienne se croisant au hasard. L'auteur arrive à la conclusion que les cor- rélations gamétiques mendéliennes obéissent exacte- ment aux conceptions fondamentales de la loi de l'hérédité ancestrale, et que la seule antinomie ré Fe repose dans le principe de la dominance absolue. Les corrélations trouvées biométriquement suggèrent l'idée qu'il y a une relation plus étroite entre la constitution gamétique etsomatique — au moins pour certains carac- tères des espèces étudiées — que ne l'indique le premier principe mendélien de la dominance absolue, — M. A. Dendy a étudié le système vasculaire intracranren du Sphenodon au moyen d'une méthode spéciale qui consiste à fixer et à durcir in vitro le contenu entier de la cavité cranienne au moyen de bichromate de potasse acétique. Il à pu ainsi mettre en évidence un grand nombre de vaisseaux sanguins qui n'avaient pas encore été décrits chez les Reptiles. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 3 Juin 1909. M. Al. Scott a déterminé le poids moléculaire du bromure de tétraéthylammonium par titration avec Ag. pa en déduit pour poids atomique du carbone —12,026, en prenante Mi07 082 MIT Veley a constaté que la vitesse de formation (déter- minée par la méthode du tintomètre) des composés azoïques aux dépens des chlorhydrates de diamines benzénoïdes et du nitrite de sodium est conditionnée par HCI et le monochlorhydrate libéré par l'hydrolyse ; c’est un exemple de réaction linéaire simullanée régie simplement par l'équation Ax/At— k. La quantité totale de colorant capable d'être formée est une fonction linéaire de la concentration. L'addition d'HCI ou d'autres acides produit une accélération initiale, mais un retard total. — M. A. H. Salway a fait la synthèse de l’oxyisocotarnine en partant de la myristicine et en passant par l'isomyristicine, l’aldéhyde myristicique, son dérivé nitré, l'acide nitrométhoxy méthylènedioxy= cinnamique, la” cétométhoxyméthylènedioxydihydro- quinoline et son dérivé méthylé à l’'Az. — MM. J. C. Irvine el Al. Hynd, en méthylant la lévulose-diacétone par Ag*0, ont obtenu un dérivé cristallisé, F.1459, donnant par bydrolyse l’«-méthyllévulose, présentant de la mutarotation : laln — — 700,5 > —"530,1.La fusion donne un excès de la forme f, qui présente le changement optique inverse après solution. — M. W. H. Mills et M!° AI. M. Bain ont fait cristalliser le selde quinine de l'acide 4-oximinocyclohexanecarboxylique, puis l'ont décomposé par NaOH; le sel de sodium qui se forme est distinctement lévogyre e; [al — — 40,4. Pour que ce composé soit optiquement actif, ilfaut que les trois valences de l'atome d’Az du groupe oximiné ne soient pas dans un même plan, ce qui vient à l'appui de la théorie de Hantzsch-Werner sur l'isomérie des oximes. — MM. W. H. Perkin jun. et J.L. Simonsen ont étudié l’action de HBr et de Br sur l'acide cyclobu- tane-{ :3-dicarboxylique et sur l'acide nopinique et les conditions de rupture de l'anneau du cyclobutane. — M. F. Ferraboschi a oxydé l'acide mucique par H*0° en présence du fer ; le principal produit, fortement réduc- teur, est un acide dihydroxymucique ou dihydroxydi- céloadipique. — Le même auteur a observé la produc- tion d'ozone en quantité considérable dans l’action de SO? sur H°0°. — M. W. $S. Denham, en faisant bouillir le benzoate d'Ag avec une solution de S°CE, a obtenu un composé (CSI COS} très instable, qui se décompose en donnant S. SO® et de l’anhydride benzoïque. Cette méthode peut servir à la préparation d’anhydrides d'acides organiques. — M. R. Robertson a étudié la décomposition de la nitroglycérine par la chaleur dans un courant de CO?. Elle est uniforme et donne Az0®°. La vitesse de décomposition est une fonction de la tempé- rature; elle double pour chaque 5° entre 95° et 1250. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE BIRMINGHAM Séance «u 18 Mars 1909. M. E. A. Lewis : Les relations du chimiste avec l'industrie du cuivre et du laiton. IL. L'auteur décrit et critique les diverses méthodes d'analyse des mine- rais, métaux et résidus dans ces industries. NEW-YORK Séance du 23 Avril 1909. M. G. S. Fraps décrit une méthode pour la déter- mination des coques dans la farine de graine de coton. Elle est basée sur la détermination du résidu inso- luble : lorsqu'il est supérieur à 10 °/,, la farine con- tent certainement des coques. SECTION DE Le Directeur-Gérant : Louis OLiviEr. Paris. — L. MARETHEUX. imprimeur, 1, rue Gassette. 20° ANNÉE b) 15 AOÛT 1909 Revue générale des Porc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Æevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Henri de Parville. — L'écrivain scientifique bien connu Henri de Parville vient de mourir à l’âge de 71 ans. Il s'était d’abord destiné à l’art de l'ingénieur et avait fait de fortes études à l'Ecole Supérieure des Mines; les circonstances l'introduisirent dans la car- rière du journalisme scientifique, où, par des efforts soutenus, et servi, d'ailleurs, par un incontestable talent, il s’'éleva peu à peu au premier rang. Pendant 38 ans, il donna chaque semaine au Journal des Débats une chronique scientifique très appréciée, et il rédigea longtemps pour le Journal ofliciel le compte rendu des séances de l’Académie des Sciences. Il a collaboré également au Correspondant, au Consti- tutionnel, aux Annales politiques et littéraires. Enfin, en 1897, à la mort de G. Tissandier, il avait assumé la direction du journal La Nature, qu'il dut, contraint par la maladie, abandonner il y a quelques années. Dans tout ce qu'il a écrit pour faire connaître au grand public les travaux des savants, Parville a mon- tré à la fois une remarquable aptitude d’assimilation et un réel talent d'exposition. En un langage clair et accessible à tous, il répandait les vérités essentielles acquises à la science. Il a ainsi rendu au monde savant et au public un service de prix, que M. G. Dar- boux s’est plu à faire ressortir, au nom de l’Académie des Sciences, aux obsèques du regretté défunt. La Revue rend, elle aussi, hommage à l'écrivain qui a su maintenir à un niveau élevé l'art difficile de la vulga- risätion scientifique. $ 2. — Solennités scientifiques L'inauguration du monumert de Brouardel. — Le mardi 20 juillet a eu lieu, dans la cour de la Faculté de Médecine de Paris, l'inauguration du monument élevé par souscription publique au regretté Professeur Brouardel. M. le Professeur Thoinot, parlant au nom du Comité qui à assuré l'érection du monument, a remis cette belle et importante œuvre d'art à la Faculté de Méde- cine. Puis M. le Professeur Landouzy, doyen de la l'acullé, en a pris réception et a retracé la carrière si RiVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19(9. bien remplie de son éminent prédécesseur, en parti- culier son rôle d’initiateur en Médecine légale. M. le Vice-Recteur Liard est venu apporter l'hommage de l'Université de Paris, puis M. le Docteur E. Roux à redit les services que Brouardel a rendus en tant qu'hy- giéniste. M. le Professeur Guyon, président de l’Asso- ciation des médecins de la Seine, et M. Lereboullet, président de l'Association générale des médecins de France, ont rappelé ce qu'a fait Brouardel pour le corps médical. Enfin M. Doumergue, ministre de l’Ins- truction publique, a salué la mémoire de l'excellent serviteur du bien public et fait ressortir les services qu'il a rendus à son pays comme « ambassadeur de la science médicale française à l'Etranger ». Le monument de Brouardel, dû au ciseau de Puech, se compose d’une stèle supportant un buste en marbre blanc, au pied duquel deux figures allégoriques sym- bolisent la Médecine légale et l'Hygiène. Il rappellera aux futures générations d'étudiants en médecine le souvenir d’un savant estimé et d’un homme de bien. Hommage à Avogadro. — C'est en 1911 que s'accomplira le centenaire de la publication du célèbre Mémoire d'Amedeo Avogadro sur la constitution molé- culaire des gaz. La loi d’Avogadro et les conséquences que lui-même et d'autres savants en ont déduites sont devenues, depuis longtemps, le pivot des théories chi- miques atomiques, et, par leur enchaînement avec diverses lois physiques, constituent tout un corps de doctrines qui sert aujourd'hui de fondement à la Phy- sique moléculaire, en particulier à la Théorie des Gaz. Un Comité international vient de se constituer, sur l'initiative de l’Académie royale des Sciences de Turin, pour honorer la mémoire du grand chimiste et physi- cien; il ne croit pas pouvoir le mieux faire qu'en publiant les travaux les plus importants du grand penseur, et en érigeant à Turin — où Avogadro est né et où il enseignail — un monument digne de lui. A cet effet, le Comité fait appel à tous les chimistes et physiciens, dans l'espoir qu'ils voudront tous con- tribuer à ce tardif, mais bien mérité hommage à la mémoire d'Avogadro. Les souscriptions peuvent être adressées au Trésorier de l'Académie royale des Sciences de Turin. 15 654 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE —————————————_—_____ ____ _—_ "| —"——_ om $ 3. — Physique La Thermodynamique des mélanges de solutions binaires et homogènes. — Dans un Mémoire récemment présenté à l’Académie royale des Sciences de Copenhague, M. E. Bose et Mme M. Bose apportent une contribution à la thermodynamique des mélanges de liquides binaires et homogènes. Dans un travail antérieur‘, l’un des auteurs avait tâché en vam d'établir, par voie purement empirique, une formule d’interpolation appropriée aux isothermes de la chaleur de mélange, formule qui permit d’expri- mer ce facteur comme fonction fermée de la compo- sition du mélange. Les réflexions faites à ce propos l'ont convaincu de la nécessité de fonder la formule sur des considérations théoriques. Tel est l’objet du présent travail. En tenant compte de la relation qui existe entre la température et la chaleur de mélange, les auteurs formulent de la façon suivante le problème qu'ils se sont posé : En mélangeant, à la température absolue T, x molé- cules-grammes d’une substance a avec 1-x molécules- grammes d’une substance b, on trouve, pour le déga- gement de chaleur Q dont s'accompagne ce processus, une expression analytique, représentant Q comme fonction Q (x, 1-x, T) de la composition et de la tempé- rature. En partant de l'équation générale des chaleurs de mélange établie par Nernst, les auteurs réussissent à trouver la formule théoriquement justifiée des iso- thermes qu'ils s'étaient proposé d'établir, à l’aide de certaines solutions de l'équation différentielle de Duhem-Margules. Comme la relation entre la température et les ten- sions de vapeur est représentée par les formules choisies avec une pré -ision considérablement supérieure à la précision des données relatives aux dégagements de chaleur, il faut s'attendre à ce que le degré de préci- sion de l'équation des isothermes soit parallèle à la précision des solutions, données par Margules, de l'équation de Duhem-Margules. Si l'accord fait défaut dans un cas, il faut par conséquent s'attendre à le voir faire défaut aussi dans l'autre, à un degré plus ou moins considérable. Or, comme leurs calculs font voir un désaccord très marqué, les auteurs n'hésitent pas à considérer les formules de Margules comme assez inexactes, tandis que l'équation différentielle de Duhem- Margules elle-même se trouve représenter les faits expérimentaux avec une précision bien plus grande. $ 4. — Electricité industrielle Les chemins de fer électriques en Suisse :. — La traction électrique a été introduite en Suisse en 1888: tramway de Vevey à Chillon et funiculaire du Bürgenstock. Le tableau suivant indique les progrès réalisés de 1901 à 1908: 1901 1908 Chemins de fer à voie normale. 44 kilom. 85 kilom. _— à voie étroite, . 62 . — 316 — _ à crémaillère . . 12 — 28 — FUDICHAITES EP ER LTET.: 13 — 24 TrAMVAYS ES A EC D Me AU27P = 566 — Total. 403 kilom, 1.019 kilom. Cette extension est due, malgré les difficultés de construction de la plupart des lignes, à l'abondance des forces hydrauliques etau bon marché de l'énergie, aux progrès remarquables de la science électro-tech- nique, propagée par de nombreuses écoles spéciales, et, en particulier, par l'Ecole polytechnique de Zürich, au : Zeitschr. f. Phys. Chem., t. LVIIT, p. 611, 1907. * Maurice pe Copper : Les chemins de fer électriques en Suisse, Moniteur officiel du Commerce, 2% juin 1909. développement parallèle de l'industrie des construc- tions électriques, et, notamment, à Zürich (ateliers d'Oerlikon), à Baden (Brown, Boveri et Ci), à Bâle (Alioth et Cie), à Genève, etc., enfin, à l'influence du tourisme, qui a encouragé surtout la création des lignes de montagne. Les principales lignes électrifiées sont les suivantes : Lauterbrunnen à Mürren (1891), voie étroite . 4 kilom. Orbe à Chavornay (1894), voie normale {courant ON MORE EN M on lo ie CR deu NO — Burgdorf à Thoune (1899), voie normale (courant alternatftriphasé) PE CUT Stanstadt à Engelberg (1898), voie étroite (cou- rantialternati de SO OS) EEE RE Fribourg à Anet (1903), voie normale (courant coitinuideM10006volts), EMA RP Seebath à Wettingen (1904), voie normale (cou- rant alternatif monophasé). . . . . . . . . . 20 — Brigue à Iselle (1906), voie normale (courant alTELNAUTLIPhASE) M EVENE EP Spiez à Frutigen (projet), voie normale (courant BITETHALNNONOPRASE) NRC NU CE Lucerne à Wildegg (en transformation), voie normale (courant alternatif monophasé) , . . 54 — Sur l'ensemble du réseau ferré suisse {tramways compris), la traction électrique représente aujourd'hui 18°/, du total des lignes, contre 10 °/, en 1901. La Com- pagnie du chemin de fer des Alpes bernoises (Lôtsch- berg), qui a résolu d'exploiter tout son réseau à l’élec- tricité, va commencer à titre d'essai sur le tronçon, déjà construit, de Spiez à Frutigen, en utilisant un courant alternatif monophasé, avec tension de 15,000 volts et 15 périodes (Société Alioth, de Bâle). L'Administration des Chemins de fer fédéraux étudie l'extension de la traction électrique à tout son réseau, n'exploitant jusqu'ici, de cette facon, que les tronçons Seebach-Wettingen et Brigue-Ilselle. Elle a acquis, en 1907, des cantons d'Uri et du Tessin, les forces nécessaires à la ligne du Gothard, nationalisée depuis le 1e" mai 1909 t. Parmi les lignes électrifiées à voie étroite, avec ou sans crémaillère, mentionnons encore celle de Montreux à Zweisimmen (1905. 62 kilom. courant continu à ten- sion de 750 volts), qui a coûté 17 millions, et qui franchit, par des rampes maxima et sans crémaillère, des altitu- des supérieures à 1.200 mètres; le réseau des chemins de fer veveysans (1903. 43 kilom. courant continu); la ligne de Martigny à la frontière française (1906. 21 kilom. courant continu) raccordée avec Chamonix; les deux lignes tessinoises (1207) de Locarno à Bignasco (27 kilom. courant alternatif monophasé) et de Bellin- zona à Mesocco (31 kilom. courant continu à 4.500 volts); la ligne de Monthey à Champéry (1908. 12 kilom.) qui comportera un embranchement sur Morges, à la frontière de Savoie. D’autres lignes sont en voie d'électrification, tel le chemin de fer de la Wengernalp (18 kilom.); il en sera de même du projet qui reliera l'Engadine (Saint-Moritz) à la Valteline (Tirano) et qui aura 60 kilomètres. Les chemins de fer électriques de la Suisse repré- sentent un capital engagé de 104 millions de francs; les frais d'établissement sont fort variables : on compte en plaine, 80.000 francs par kilomètre; les chiffres s'élèvent considérablement pourles lignes de montagne. En 1907, la recette kilométrique a varié de#.713 francs (chemins de fer du Jorat) à 89.842 francs (chemin de fer de la Yungfrau). Les dividendes sont nuls pour les deux tiers des lignes, et notamment pour toutes celles qui n'ont été ouvertes que depuis 1901 (la ligne de Montreux à Zweisimmen exceptée). Les excédents doivent être consacrés, d'après la législation fédérale, à la constitu- tion de fonds de renouvellement et de réserve, de telle sorte que, pendant quelques années, le capital-actions reste sans rémunération. La traction à vapeur n'enre- ! Sur le rachat des chemins de fer suisses, cf. notre ouvrage : La Suisse au XAX® siècle. Paris, Colin, 1908. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 55 gistre pas de résultats meilleurs ; ce n’est donc pas le système de traction qu'il faut incriminer, mais seule- ment l'insuffisance du trafic dans certaines régions. Les lignes qui prospèrent sont celles qui jouissent le plus de la faveur des touristes. Une Commission étudie depuis plusieursannées l'élec- trification de toutes les lignes principales du réseau d'Etat. D'après M. Wyssling, cité par M. de Coppet, il faudrait une puissance continue de 125.000 chevaux pendant 24 heures (100.000 en hiver). Quant aux sys- tèmes de traction, la Commission semble devoir se prononcer pour le courant alternatif monophasé, au moins pour les grandes lignes. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. $ 5. — Métallurgie L'analyse des aciers à l'aide des étin- celles. — On connaît les difficultés qui s'opposent à la classification des échantillons d'aciers de différentes provenances, accumulés dans les usines mécaniques. Il est vrai que la microscopie métallographique, sui- vant les méthodes indiquées par M. H. Le Châtelier, ren- seigne immédiatement sur la teneur en carbone d'un échantillon donné. Mais l'emploi du microscope exige des connaissances très complètes de métallurgie et une pratique assez considérable, et la préparation mécanique de l'échantillon entraine une somme de travail assez importante. Quant à l'analyse chimique, elle est encore infiniment plus compliquée. Or, M. Max Bermann, à Budapest, vient de faire une remarquable découverte, qui permet d'utiliser les étin- celles de polissage pour décider d'emblée si un échan- tillon donné est de l'acier doux (fer forgé), de l'acier carboné mi-dur ou dur, de l'acier au chromo-tungs- tène (acier dit rapide), etc., sans apprentissage théo- rique et sans l'emploi d’un appareillage mécanique. Les bords vifs des cristaux d'émeri détachent de la surface métallique, à une vitesse considérable, des éclats extrèmement petits, portés à la chaleur rouge par l'énergie mécanique convertie en chaleur. Ces fragments incandescents, projetés assez loin, forment les étincelles de polissage. Bien que les cristaux déta- chés du disque à émeri soient également jetés au loin, ils ne sont pas incandescents et, par conséquent, ne sauraient être confondusavec les élincelles elles-mêmes. M. Bermann appelle rayon de l'étincelle le chemin lumineux qu'elle traverse, depuis son origine jusqu'à son extinction. Sa longueur est très variable, les grandes étincelles volant assez loin, tandis que les plus petites ne parcourent que quelques centimètres ou mil- limètres. La grandeur de l'étincelle dépend essentielle- ment de la grosseur de grain de l'émeri, de la vitesse de coupe, de la nature du métal à polir et de la pres- sion qu'il exerce contre le disque. La température ini- tiale des étincelles est déterminée, en première ligne, par la vitesse et la facilité de coupe du disque à émeri, et, en seconde ligne seulement, par la nature du fer à polir. Un rayon d'étincelle de longueur considérable d’un acier doux (fer forgé) constitue, par exemple, une ligne lumineuse parfaitement lisse, dont l'extrémité prend la forme d’une goutte allongée. Or, un examen plus attentif fait voir que cette goutte, qui varie du rouge clair à l'incandescence blanche, comporte une extrémité pointue rouge sombre, s'élargissant en une seconde goutte bien plus petite, D'autre part, la pre- mière goutte, à son endroit le plus large et le plus vivement incandescent, forme en détonant des ramifi- cations qui constituent un faisceau épineux (fig: 1): Or, la forme de ces ramifications, produites par l'explosion du bout du rayon de l'étincelle, diffère tellement d'une espèce de fer à l’autre qu'elle peut servir parfaitement à la caractériser. M. Bermann la désigne sous le terme d'image de l'étincelle. L'image d'étincelle de l'acier au carbone est un fais- ceau épineux qui, dans le cas d’une teneur de 0,07 à 0,08 °/, en carbone, comporte 2 à 3 épines, et un nombre plus grand, proportionnel à la teneur en car- bone, à mesure que celle-ci augmente, ce qui permet d'apprécier exactement, par l'aspect de l’étincelle, la quantité relative de carbone. D'autre part, l'image d'étincelle de l’acier au manga- nèse est tellement caractéristique qu'on ne saurait la confondre avec celle d’un autre acier quelconque. Loin d'être pointue, comme dans le cas précédent, l’extré- mité de chaque ramification présente, en effet, un phénomène d’explosion secondaire, donnant naissance à des lignes très courtes qui s'amoncellent, comme des feuilles, autour d’un centre commun. Le nombre et la densité des ramifications primaires de la goutte sont d'autant plus considérables que la teneur en carbone est plus grande. L'étendue et la forme des bouts élargis des embranchements pri- maires semblent être liées à la te- neur en manganèse. Dans le cas de l'acier au creuset, l'image de l’étincelle est d'une forme analogue à une branche cou- verte de fleurs; les ramifications rappellent, par leur configuration, les grappes du lilas. C’est ainsi qu'on distingue l'acier au creuset, par l'examen de l’étincelle, de toute autre variété. L'image d'étincelle de l’acier ren- fermant du tungstène n’est pas moins caractéristique : les rayons d’étin- celles y sont des lignes intermit- tentes d’un rouge sombre, dont les extrémités ne présentent pas d'i- mage d'étincelle, à moins que le disque à émeri ne soit suffisamment aigu et la pression entre luiet l'acier assez considérable. Dans ce dernier cas, les bouts des rayons se rami- lient, en effet, d'une facon caracté- ristique. La gerbe d’étincelles de l'acier au chromo-tungstène (acier rapide) se distingue de celle de l’acier au tungs- tène par la présence de deux espè- ces de rayons : les uns très minces et d’un rouge sombre, les autres plus gros et d’un rouge clair, qui man- quent tous les deux dans l'acier au tungstène. Les images d'étincelles de l'acier rapide se composent exclu- sivement de gouttes recourbées très courtes. Dans certaines marques, on observe, en outre, de longues aiguilles isolées, aux bouts recourbés en massue, qui Jaillissent d’un centre commun; elles semblent indiquer la présence de quelque élément d'alliage secondaire. Les gouttes caractéristiques de l'acier rapide se distinguent, en outre, par une vitesse de vol incomparablement plus grande, L'image d'étincelle de l'acier renfermant peu de nickel (3 °/.) est parfaitement identique à celle de l'acier au carbone. Dans le cas d'une teneur considé- rable en nickel (acier au nickel), l'examen de l'étin- celle permet, cependant, de reconnaître facilement cette variété d'acier, grâce à la distribution sporadique des images d'étincelles, qui, dans l’acier au carbone, se présentent, au contraire, en amas très denses, les unes à côté des autres et derrière. La fonte donne des images d'étincelles variables sui- vant sa composition, et surtout sa teneur en carbone lié et en manganèse. La connaissance des formes caractéristiques de ces images permet donc de reconnaître les diverses va- riétés de fer et d'acier, et, dans certains cas, de déter - miner, dans un échantillon analysé, la teneur exacte en carbone combiné. Fig. 1.— Ærincelles de polissage des aciers. 656 Pour faciliter l'emploi intelligent de cette méthode, l'auteur indique une explication plausible de l'origine des images d'étincelles, explication basée sur les deux hypothèses suivantes : 4° L’étincelle, dans un point donné de sa trajectoire, est portée de l’incandescence rouge à l’incandescence jaune, après quoi elle atteint l’incandescence blanche, en même temps qu'elle se ramifie en détonant, de facon à donner la figure caractéristique ; 20 Au moment de sa ramification explosive, l’étin- celle se trouverait à l’état liquide. - La première hypothèse n'a guère besoin d’être démontrée ; l’état liquide de l'étincelle, au contraire, n'est pas immédiatement évident. Or, en plaçant une plaque de verre normalement à la direction du vol de la gerbe d'étincelles, on la voit se recouvrir d’étincelles, et l'examen microscopique de celles-ci montre qu'une partie des étincelles ont atteint la plaque de verre à l'état liquide, pour s’y figer ou se pulvériser en formant les reliefs les plus divers. Une autre partie, composée d’éclats de différentes formes, s'attache, au contraire, si légèrement qu'un faible frottement les enlève. D'autre part, en examinant la poussière de polis- sage qui recouvre le plancher, on y remarque, à côté des éclats de fer, des sphérules lisses, produites, sans doute, par la solidification de gouttelettes liquides. Les applications pratiques de cette nouvelle méthode sont multiples. L'examen à l'aide de l’image d’étin- celles est d’une sensibilité extrême et permet de reconnaitre facilement une différence de 0,04 °/, de la teneur en carbone. Elle fournit donc un moyen de contrôle simple et extrèmement rapide de l'analyse chimique relativement au carbone combiné dans l'acier. L'examen des étincelles permet aussi de constater toute variation locale, d’un endroit à l’autre, dans la composition chimique, d'un produit sidérurgique ou d’une pièce de construction donnée. Alfred Gradenwitz. $ 6. — Agronomie Le prix du blé dans divers pays depuis 4771:. — M. Emile Levasseur a présenté récemment à la Société nationale d'agriculture de France un très intéressant commentaire des variations du prix du blé en Angleterre et dans huit autres pays : la France, la Belgique, la Prusse, l’Autriche, la Hongrie, l'Italie, la Suède et les Etats-Unis. L'éminent statisticien remarque d’abord que, par le fait du régime restrictif de la douane, c’est en Angle- terre que le blé est le plus cher pendant la première moitié du xix° siècle. Mais, depuis 1849, date de la sup- pression des lois sur les céréales, la courbe du prix anglais se confond d’abord dans le faisceau général, puis descend au-dessous des courbes des autres pays d'Europe, tout au moins jusqu'en 1904. Dans tous les pays, les courbes sont beaucoup plus accidentées avant 1870 qu'après, c'est-à-dire que les variations annuelles de prix ont été beaucoup plus fortes dans la première période que dans la seconde. On retrouve là l'influence du développement des rela- tions commerciales qui ont contribué efficacement à régulariser les approvisionnements de chaque pays. ‘ Eure Le vasseur : Le prix du blé dans divers pays depuis 1771. Extrait du Bulletin de la Société nationale d'agricul- ture de France, décembre 1908. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE M. Levasseur estime, en outre, que la production du blé, évaluée vers 1880 à 550 millions de quintaux, et, en 1903-1907, à 900 millions, a augmenté plus rapidement que la population consommatrice de froment‘. Jusque vers 1870, les variations annuelles oscillent autour d’une moyenne de 26 francs l'hectolitre; c’est surtout depuis 1876 que la tendance générale à la baisse est nettement accusée; en 1900, la moyenne n’est plus qu'à 12 fr. 50 environ. La mise en valeur de terres nou- velles dans les pays neufs, les perfectionnements de la technique agricole, la réduction continue des frais de transport, et principalement des frets ?, ont amené cette baisse importante des prix. Dans la première moitié du xix° siècle, les courbes de chaque pays sont en général très espacées; en 1825, pendant que l'hectolitre coûte 28 fr. 50 en Angleterre, il ne vaut que 9 fr. 50 en Prusse. En 1801, le blé valait 11 francs dans la Marne et 46 francs dans les Alpes- Maritimes*. C’est le développement des transports qui a été le grand facteur du nivellement des prix. En 1880, la différence de prix n’est plus que de 7 francs entre les pays d'Europe (25 fr. 50 en Italie et 18 fr. 50 en Angleterre); en 1908 (du 9 au 16 décembre), l'écart est de 6 fr. 90 entre les prix extrêmes des principaux marchés de l’Europe, et de 0 fr. 96 seulement entre Londres et Chicago. Les grands marchés deviennent de plus en plus solidaires les uns des autres. En France, le prix du blé a été généralement plus élevé que dans les autres pays, l'Angleterre exceptée, depuis le commencement de la Restauration. Depuis 1860, il est devenu supérieur à celui de l’Angle- terre, et il n’est guère atteint actuellement que par ceux de l'Italie et de l'Allemagne. Ce prix plus élevé est dû au droit d'entrée de 7 nr par quintal qui frappe les blés étrangers; mais, comme la produc- tion nationale est devenue presque suflisante et que l'importation est très réduite, nos prix se rapprochent beaucoup de ceux des marchés libres et l'écart est loin de représenter le montant du droit. Cette situation de producteur et aussi l'élévation des prix nous mettent à l'abri des brusques variations qui ont motivé récem- ment une hausse des prix du pain en Angleterre, à la suite des spéculations américaines. Notre consomma- tion de blé est stationnaire depuis vingt ans, dépassant. 3 hectolitres par tête. C’est un avertissement pour les agriculteurs de ne pas trop étendre leurs cultures de froment, en recherchant plutôt l'augmentation des ren- dements. Si la Russie et les Indes sont destinées à réduire leurs exportations à mesure que se dévelop- pera le pouvoir d'achat de leurs habitants, le Canada, et la République Argentine renferment des « possi- bilités » d'extension de culture avec lesquelles il faut. désormais compter. Mais la remarquable organisation commerciale des Etats-Unis leur conservera encore longtemps la prépondérance dont ils jouissent sur les grands marchés européens. Pierre Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. 1 D'après le Dornbusch's, la production du blé en 1908 s'élèverait à 1.126 millions d'hectolitres dont : Etats-Unis, 239 millions; Russie, 187; France, 112,5: Inde, 71; Argen- tine, 60,9; Hongrie, 53,1; Italie, 52,9; Allemagne, 50,2. ? De 1869 à 1885, le fret des Messageries Maritimes à des- tination de l'Extrème-Orient a baissé de 951 francs par tonne à 83 francs. De New-York à Liverpool, le fret du blé est descendu de 30 francs par tonne en 1867-1876 à 8 francs en 1897-1906. % Pauz Léon : La navigation intérieure en France. Revue économique internationale, novembre 1904. HENRI POINCARÉ — SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN I. — LES PAPIERS MATHÉMATIQUES DE SULLY PRUDIOMME. On sait que Sully Prudhomme a recu dans sa jeunesse une éducation scientifique, qu'il a songé à se présenter à l'École Polytechnique et qu'il n'en à été empêché que par la maladie. On trouve dans ses vers la trace de préoccupations scientifiques ; les problèmes de la Science n'ont jamais cessé de l'intéresser et on ne peut le lire sans s'apercevoir que sa pensée en était comme hantée. Mais on pour- rait croire que ce n'était là chez lui qu'une aspira- tion vague, que ces mystères grandioses devant les- quels l'intelligence humaine hésite lui inspiraient plutôt une sorte d'émoi religieux que le désir de les dévoiler par des efforts systématiques, ou bien encore que le spectacle de nos récentes conquêtes lui donnait plutôt de l'admiration pour les savants que l'ambition de les imiter. Cela ne serait pas lout à fait exact; de volumi- neux manuscrits que l'on a retrouvés chez lui en font suffisamment foi. Pour la plupart, ils sont consacrés à la philosophie des Mathématiques; d’autres traitent de différentes questions de Phy- sique ou de Biologie. Rien de ce qu'a pu penser un esprit aussi élevé ne peut nous être indifférent et je crois qu'il ne sera pas sans intérêt de dire quelques mots des idées du poète philosophe sur des questions si étrangères à la plupart des hommes de lettres. Il convient, sans doute, de commencer par une courte description de ces manuscrits, qui nous sont parvenus dans un état de désordre extrème : 1° Nous trouvons d’abord une sorte de grand registre vert (format 23X 35) contenant 151 feuillets écrits d'un seul côté; c’est la rédaction d'un Mémoire sur les fondements de la Géométrie. Le manuscrit n'est pas de son écriture; c'est donc la copie d'une rédaction antérieure, mais, presque à chaque page, on trouve des corrections et des additions de sa main; des feuilles de papier de diverses dimensions sont collées sur divers endroits du texte, sans doute dans l'intention de substituer une rédaction nouvelle à l’ancienne, qui ne l'avait pas satisfait; mais la plupart de ces feuilles sont restées blanches ; de temps en temps, sont intercalées des feuilles volantes, sur lesquelles sont sommairement indi- «ués au crayon ou à la plume des projets de modi- fication ; 2° Sont jointes à ce registre une vingtaine de pages volantes du même format, avec des essais de rédaction se rapportant au même sujet; elles sont de la main de Sully Prudhomme; elles portent de nombreuses ratures et aussi des corrections écrites sur des papillons collés sur le texte. Elles ne sem- blent pas être d’une rédaction postérieure à celle du registre, mais plutôt des débris d’une rédaction antérieure, qu'il se proposait de fondre avec celle du registre pour en tirer un texte définitif ; 3° On trouve encore, joint à ce même registre, un manuserit in-8° de 17 pages environ, intitulé « Ma- thématiques générales, de la Signification des infinis mathématiques ». Il est de la main du poète ; mais, de place en place, sont intercalées des portiens d’un texte imprimé, avec quelques corrections manus- crites; il semble que Sully ait fait une première rédaction, l'ait envoyée à l'imprimerie, puis, dési- rant donner à son ouvrage plus de développement, ait découpé les placards et les ait collés sur des feuilles de papier en y intercalant les additions très considérables qu'il désirait y faire; 4° Nous trouvons ensuite un carton gris conte- nant trois chemises; dans la première chemise, 21 pages in-4° avec le titre « Livre I : Propriétés générales de l'Espace; les diverses espèces de gran- deurs géométriques — le point — la distance ». Sur l'une des pages, je relève des indications au crayon bleu : «M. Vandert, 136 lignes, en 9, épreuves à M. Sully Prudhomme, 82, faubourg -Saint-Ho- noré ». Ces indications prouvent que cette, partie du manuscrit a été effectivementenvoyée à l'impres- sion (le nom de M. Vandert est celui du compositeur à qui cette page était confiée; en 9, c’est la désigaa- tion du « corps » à employer). On n’a pas retrouvé les placards et on ignore ce qu'ils sont devenus. Dans la deuxième chemise, on trouve la suite de la même rédaction, et le manuscrit est, comme le pré- cédent, calligraphié avec soin en vue de l’impres- sion; mais il ne semble pas avoir été envoyé à l'imprimerie. La troisième chemise contient une série de propositions numérotées de 35 à 124; c'est évidemment une sorte de résumé ou de plan général d’une partie de l'ouvrage; 5° Un cahier vert (format 21 X 31) contient une centaine de pages de la main de Sully, toujours relatives au même sujet; les ratures Sont extrême- ment abondantes; il n’est pas rare non plus de trouver des corrections écrites sur papillons. Nous relevons les sous-titres suivants : « Grandeurs en général, espace, génération des étendues, conti- guité des étendues, concept du mouvement appliqué } à la Géométrie. Ligne droite parallèle, contiguïté des droites; le plan, etc. »; 6° Un grand carton noir contenant des manus- 658 HENRI POINCARÉ — SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN crits de la main de Sully et du même format que le grand registre vert. Toujours beaucoup de ratures et de papillons. Ces manuscrits sont répartis en sept chemises : première chemise, 60 pages avec le titre : « Des fondements logiques de la Géométrie pure »; deuxième chemise, 15 pages environ sur les parallèles et le plan; troisième chemise, une feuille de titre : « Livre III : Théorie des parallèles et du plan (cette feuille devrait se trouver évidem- ment dans la chemise précédente), et en outre des pages numérotées 94 à 126 avec le titre : « Livre IV: Théorie des angles et du triangle »; quatrième che- mise, pages numérotées 56 à 67 avec le titre : « Livre IT: Théorie de la ligne droite »; on y trouve aussi de nombreuses feuilles volantes et 6 pages non numérotées; cinquième chemise, pages 128 à 145 avec le titre : « Livre V : Rapports du point, de la droite et du plan avec le plan dans l’espace »; sixième chemise, pages 146 à 170 avec le titre « Livre VI : Définilion des dimensions, définition de la circonférence par les directions »; septième chemise, 6 pages détachées de la même rédaction: un cahier de plus petit format, 14 pages écrites au commencement sous le titre « Introduction », et 16 pages écrites à la fin sous le titre « Euclide »; le milieu est resté blanc. En plus une quinzaine de feuillets détachés; 1° Première chemise isolée; vingt pages déta- chées relatives au même sujet. Elles sont écrites par Sully Prudhomme évidemment pour lui-même et constituent un premier brouillon de la rédaction précédente; dans cette même chemise, on trouve des notes relatives à la Géométrie et deux manus- erits in-8° intitulés : l'un « Biologie » et l’autre « Système solidaire des rapports »; 8° Une enveloppe contenant une correspondance avec divers savants ; 9° Deuxième chemise isolée; vingt pages in-4° sur la Géométrie ; mêmes observations qu’au sujet des pages détachées contenues dans la première che- mise isolée ; 10° Troisième chemise isolée portant la mention carton 7; une vingtaine de pages contenant des débris d'une rédaction antérieure du grand Mé- moire sur la Géométrie; une quinzaine de pages suivies sur la nature des axiomes ; 11° Quatrième chemise contenant 1° 12 pages sur la nature des axiomes; 2% une première rédaction du travail dont nous avons le texte définitif dans le cahier de petit format dont j'ai parlé plus haut et qui se trouve dans la sep- tième chemise du grand carton noir; 3° 8 pages intitulées « Préliminaires » ; isolée 12° Cinquième chemise isolée ne contenant que des pages détachées, débris des rédactions succes- sives du grand Mémoire de Géométrie. IT. — IMPOSSIBILITÉ D'UNE PUBLICATION. Cetle description montre assez que Sully Pru- dhomme ne s’est pas seulement occupé de Mathé- matiques d’une facon occasionnelle, mais qu'il est revenu à diverses reprises sur ces questions, qu'il y a pensé pendant plusieurs années et qu'il y a consacré beaucoup de travail. Il reste des traces de trois rédactions successives de son principal Mémoire et il y en a peut-être eu davantage. Il à songé à les publier et il semble même avoir envoyé une partie de son manuscrit à l'imprimerie; il a ensuite découpé les placards, et a cherché à les faire entrer dans une rédaction nouvelle entière- ment remaniée. N'élant pas parvenu à se satisfaire, il paraît avoir renoncé à son dessein. Dans ces conditions, une question se pose : Con- vient-il de publier en totalité ou en partie les manuscrits qu'ils nous a laissés, ou bien serait-ce une trahison envers sa mémoire de livrer au publie un travail incomplet qu'il ne lui destinait pas? L'une des trois rédactions, probablement la plus ancienne, est par trop informe, elle présente trop de lacunes pour qu'il puisse y avoir doute. La seconde, celle du grand registre vert, est celle qui semble la plus complète; mais elle porte la men- tion suivante, de la main de Sully Prudhomme : « Cette copie de mon travail sur la Géométrie pure est erronée. Je ne reconnais comme expri- mant mes idées que le manuscrit sur lequel cette copie a été faite et qui depuis a été corrigé et revu par moi. » Voilà qui tranche la question. D'ailleurs, des pages entières sont recouvertes de feuilles de papier blanc collées sur le texte, sans doute dans l'intention de les rédiger entièrement à nouveau; on ne saurait donc imprimer le texte ainsi recou- vert sans trahir délibérément la pensée de l’auteur ; ou le supprimer, sans que tout le reste de l'ouvrage devienne incompréhensible. Reste donc la troisième rédaction, comprenant les 21 pages intitulées : « Livre I », dans la pre- mière chemise contenue dans l'enveloppe cartonnée grise, et les 24 pages qui paraissent en être la suite et qui sont dans la deuxième chemise dans cette même enveloppe; et, d'autre part, les contenus des deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième chemises du grand carton. L'ensemble constituerait 170 pages avec quelques lacunes. Mais on peut se demander s’il ne s’agit pas d’une rédaction antérieure dont Sully Prudhomme n'avait pas été satisfait, puisqu'après avoir envoyé à l’im- primerie le commencement du Livre I, il paraît l'en avoir retiré et n'y avoir pas envoyé les livres suivants. EL d'ailleurs nous devons nous rappeler la mention que Sully avait inscrite sur le grand HENRI POINCARÉ — SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN (59 registre vert et que j'ai citée plus haut. La rédac- tion que nous avons entre les mains est-elle bien « le manuscrit sur lequel la copie a été faite », le seul qui exprime les idées de l’auteur? Il y a d'évidentes ressemblances, des phrases entières textuellement reproduites; maisil y à aussi des divergences notables; par exemple, je prends le second alinéa : « L'identité de deux choses consiste en ce qu'elles ne sont pas distinctes l'une de l'autre dans la réalité, bien qu'elles l’aient été dans la pensée », el je lis dans la copie : « L'identité de deux choses, c’est done leur unité effective sous leur pluralité putative. » Les deux énoncés sont équivalents, bien que le second soit plus concis. Mais les divergences ne peuvent pas être attribuées à une erreur de copiste; ce n'est pas un scribe qui, lisant dans le texte qu'il a à reproduire cemembre de phrase: «bien qu'elles l’aient été dans la pensée », a pu avoir l'idée de le traduire par « sous leur pluralité putative ». D'ailleurs, Sully Prudhomme dit que son manus- crit à été corrigé et revu, probablement depuis que la copie a été faite, et que c'est parce que ces cor- rections ne figurent pas sur cette copie que celle-ci ne rend plus exactement sa pensée. Or, les cahiers que nous possédons ne portent pas trace de ces corrections ; ce n’est donc pas là qu'il convient de chercher le texte qui reproduisait convenablement la pensée de l’auteur. Dans ces conditions, il me semble qu'il serait inopportun de rien publier. III. — CE QU'ON DOIT ATTENDRE DE L'ÉTUDE DE CES PAPIERS. Mais, si nous devons renoncer àlivrer ces papiers à l'impression, ils n’en contiennent pas moins une foule d'idées intéressantes dont je voudrais ici dire quelques mots. D'ailleurs, la peine que l'auteur s'était donnée ne sera pas entièrement perdue, puisque les manuscrits seront déposés au Foyer Sully Prudhomme, où les lecteurs pourront les consulter. Avant de commencer cette analyse, je dois bien expliquer ce qu'on peut espérer d'une pareille lec- ture. Il serait puéril de s'attendre à une véritable découverte mathématique. Sully Prudhomme ne s'était rien proposé de pareil. Il a écrit sur les fon- dements de la Géométrie, il ne fait rien de nouveau, il réfléchit sur ce qui a été fait. Mais va-t-il sortir, du moins, de ces considéra- tions un système nouveau qui va bouleverser toutes nos idées sur la philosophie des Mathématiques; il serait absurde de s'y attendre. Ces pages ont été écrites il y a plusieurs années; elles n’ont donc pu profiter de tout le mouvement scientifique qui s'est produit dans ces derniers temps et, en particulier, —_—_—_—_—_——_—_——_——_——_——————__—— des travaux de M. Hilbert, qui ont entièrement renouvelé la question. Ce n'est pas tout; Sully Prudhomme ne parait pas avoir connu les découvertes de Bolyai et de Lobatchewski; sans doute, il n'aurait pu à cette époque en trouver une traduction française, mais il aurait pu, s'ils lui avaient été signalés, lire le texte latin de Bolyai ou une traduction allemande de Lobatchewski. Mais toute cette partie de la Science était ignorée en France au moment où Sully Prud- homme faisait ses études scientifiques, et il ne l’a jamais soupconnée. Une foule de questions qui jouent aujourd'hui le premier rôle ne se posaient donc pas pour lui. Ainsi ces Mémoires ne pourront pas accroitre l'étendue de nos connaissances. S'ensuit-il que la lecture en doive être pour nous sans profit? D'abord, il est toujours intéressant d'étudier la pensée d'un homme supérieur; par elle-même, et indépendamment de son contenu, elle est digne de l'attention du psychologue. Et puis, pour le mathé- maticien même, il n’est pas sans utilité de voir comment ces questions se présentent à un esprit distingué, mais peu au courant de ce qui à été déjà écrit sur le même sujet, à une intelligence fraiche pour ainsi dire. Nous ne les apercevons plus qu'à travers une foule de travaux antérieurs, ou, si l'on veut, à travers une série de prismes qui leur ont fait subir des réfractions multiples. Nous les avons schématisés, dépouillées de leur contenu ima- ginatif, et nous opérons souvent plutôt sur des symboles que sur des réalités. Je crois donc que les lecteurs, même mathématiciens, verront dans l'analyse qui va suivre autre chose qu'une simple curiosité. IV. — ANALYSE DU MÉMOIRE SUR LA GÉOMÉTRIE. Voyons donc quelle marche il suit dans son prin- cipal travail, celui qui est relatif à la Géométrie. Il commence par rechercher ce qu'on doit entendre par identité, rapport et égalité, par unité, pluralité, grandeur continue où discontinue, par mesure el par quantité. Dans cette partie de son ouvrage, il s'écarte peu des facons habituelles de voir des mathématiciens; je signalerai seulement que le mot rapport est pris tantôt dans le sens précis que lui donnent les géomètres, tantôt dans le sens vague où les littérateurs l’entendent. Ce n’est pas sans intention d’ailleurs, car l’auteur veut prouver que le premier de ces sens dérive du second et expliquer comment on a pu passer de l'un à l'autre. J'insisterai plus longuement sur ce que dit Sully Prudhomme du fini et de l'infini. Pour lui, le concept de l'infini est antérieur logiquement à celui du fini: l'étendue finie ne peut être concue que 660 HENRI POINCARÉ — SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN comme une limitation de l'espace infini; c’est un morceau découpé dans cet espace, et qu'on n'y aurait pu découper si l’on ne supposait l’existence préalable de cet espace; l'indéfini est postérieur encore, puisqu'une grandeur indéfinie n’est autre qu'une grandeur finie croissant sans cesse de facon à dépasser toutes les bornes que l’on pourrait lui assigner dans l’espace infini où elle est découpée. S'il y a un infiniment grand, préexistant au fini, il n’y a pas, en revanche, un infiniment petit, il n'y a qu'un indéfiniment petit, qui est un devenir. Comme celle du devenir lui-même, cette notion répugne à notre raison, mais elle lui est imposée par la nécessité d'expliquer le mouvement, qui, sans elle, serait incompréhensible. Il est manifeste que l'influence des philosophes, celle de Zénon et celle de Kant, a joué un rôle prépondérant dans la genèse de cette théorie. L'auteur distingue ensuite les éléments de la science : ce qu'il appelle les constatations initiales, c’est-à-dire les axiomes ; les définitions et les pro- positions, c'est-à-dire les théorèmes. Ce mot de constatations initiales pourrait faire croire qu'il considère les axiomes comme des faits expérimen- taux; mais il n’en est rien, car il ajoute immédia- tement que les « attributs les plus généraux de l'espace sont les conditions mêmes de la perception du corps ». Son point de vue est donc celui de Kant. Sully Prudhomme aborde ensuite l'étude propre- ment dite de la Géométrie; et, ce qu’il y a de plus original, c'est le détour par lequel la notion deligne droite est introduite. Nous considérerons d'abord des couples de points; et, à propos de chacun de ces couples, nous envisagerons la distance des deux points qui le composent. Quant à cette distance elle-même, on la définit en considérant les divers chemins qui vont d'un point à l’autre et en prenant celui de ces chemins dont la longueur est minima. On peut critiquer cette facon de procéder, qui met à la base de tout cette notion très complexe de la longueur d’un arc de courbe. Le plus court chemin d'un point à un autre est ce que Sully appelle une ligne de distance, et il ne sait pas encore, d’ailleurs, si ce chemin est unique. Mais ce n’est pas ainsi qu'il définit la ligne droite; il se réserve de démontrer plus loin l'identité de cette ligne de distance avec la ligne droite définie d’une tout autre manière. Grâce à cette notion de distance, nous pouvons maintenant définir des séries de points équidistants, où la distance de deux points consécutifs est tou- Jours la même. Parmi ces séries, il distingue les séries droiles, et pour définir ces séries droites, il introduit la notion d'orientation; cette notion lui apparait comme primordiale. Si l’on envisage deux couples de points dont la | distance est la même, il lui semble qu'on peut aper- cevoir immédiatement, par intuition pour ainsi dire, si les deux distances égales ont même orientation, et que cette orientation, tombant immédiatement sous notre intuition, n'a pas besoin d’être définie. Il n'apercoit pas le postulat qui est implicitement supposé par l’introduction même de ce mot. Parler d'orientation, c'est supposer que, si, dans une figure, nous avons deux couples de points dont l'orientation est la même, ces deux couples ne cesseront pas d'avoir la même orientation quand cette figure se déplacera. C'est donc admettre qu'il y a des dépla- cements où toutes les orientations se conservent, d'où il suit aisément que tous ces déplacements forment un groupe et qu'ils sont tous permutables entre eux. C'est admettre, en un mot, le postulatum d'Euclide. Sans doute, il n’y a aucun moyen d'éviter l'intro- duction de ce postulat, mais il n’est pas sans incon- vénient que cette introduction se fasse d'une facon pour ainsi dire subreptice, à tel point que je ne suis pas bien sûr que Sully Prudhomme n'ait pas eu l'illusion qu'il avait démontré le postulatum d'Euclide. Quoi qu'il en soit, l’auteur donnele nom de séries droites à une série de points équidistants dont les couples successifs ont une orientation constante, et il établit d'abord pour les séries droites une suite de théorèmes analogues à ceux que l’on démontre d'ordinaire des lignes droites. Pour aller plus loin, Sully Prudhomme introduit ensuite la notion de ce qu'il appelle la proximitédes points. « On peut, dit-il, concevoir la distance de deux points aussi pelite qu'on veut, moindre que toute longueur finie donnée, et difiérant, par consé- quent, aussi peu que l'on veut du zéro d'étendue: conçue dans ces conditions, la situation relative des deux points est une proximité sans fin. Cette rela- tion des deux points n'est pas identique à une coïncidence..…….; elle n’est pas non plus identique à une séparation. » Les deux membres de phrase soulignés ont été ensuite effacés, et le premier rem- placé par le suivant : « diminuant indéfiniment, par conséquent ». Il n'y a donc aucun doute sur sa pensée : deux points en proximité ne sont pas autre chose que ce que l’on appelle d'ordinaire deux points infiniment voisins. La proximité n’est qu'un devenir, comme l’infiniment petit leibnitzien. Cela posé, considérons une série droite, et soit dla distance de deux points consécutifs de celte série; nous pouvons en déduire une autre série droite contenant tous les points de la première et où la distance de deux points consécutifs soit d/n; sur la série ainsi obtenue, nous pourrons opérer de la même manière, et ainsi de suite. Nous serons ainsi conduits à des séries droites où la distance HENRI POINCARE SULLY PRUDHOMME MATHÉMATICIEN GGL de deux points consécutifs décroit au delà de toute limite, ou, comme dit Sully, à des séries droites de points en proximité. Etc'est là l'origine de la notion de ligne droite. Cette façon détournée d'introduire la ligne droite oblige le philosophe à démontrer par un théorème spécial que l'on obtiendra la même ligne droite, quelle que soit la manière dont l'équidistance de la série tend vers zéro ; c'est-à- dire que le résultat sera le même, que l'on passe me d : : de l’équidistance d à l’équidistance 3» puis 55° puis d ; < ER —; etc., ou bien que l'on passe de l'équidistance 93 Enr @le ln G1 d aux équidistances 3° 3° 3% etc. On voit aisément comment on peut définir el comparer les angles de deux couples de séries droites, ou de deux couples de lignes droites. L'angle est pour un couple de droites ce que la distance est pour un couple de points. Deux droites parallèles sont définies comme deux droites dont l'orientation est la même. La démons- tration des propriétés essentielles des parallèles se fait aisément, puisque le postulatum d'Euclide a été tacitement introduit la première fois qu'on a parlé d'orientation. Si l’on considère deux couples de droites paral- lèles, il pourra se faire que ces couples aient ou n'aient pas même distance ; mais celte distance ne suffit pas pour les caractériser; il faut pour cela un élément de plus: c’est leur orientation. On définira alors les séries de droites parallèles équidistantes, comme on a défini les séries de points équidistants. Parmi ces séries, on distinguera celles dont l’orien- tation est constante et qu'on appellera séries planes. On verra que, dans une série plane d’équidistance d, on peut intercaler une série plane d'équidistance d/n; on sera ainsi conduit à des séries planes de droites parallèles équidistantes en proximité, et c'est ainsi qu'on arrivera à la définition du plan, de la même facon qu'on est arrivé à celle la ligne droile. V. — APPRÉCIATION DES TUÉORIES PRÉCÉDENTES. Les objections que l’on peut faire aux vues philosophiques qui ont inspiré cet essai de Géo- métrie sont trop évidentes pour qu'il y ait lieu d'insister. Elles se présentent immédiatement à nous, parce que nous connaissons l’histoire de la Science, parce que nous savons que d’autres se sont engagés dans des voies analogues et comment ils y ont été arrêtés ; nous comparons du premier coup la construction élevée par Sully Prudhomme à d’autres constructions du même genre et nous voyons tout de suite ainsi en quoi elles diffèrent et ce qui manque à l'une el à l’autre. Pour Sully Prudhomme, qui n'avait lu ni Bolyai, ni Lobat- chewsky, ni Gauss, ni Lie, et qui venait avant Hilbert, ces objections ne se présentaient que successivement et à de longs intervalles. De là ces remaniements incessants, ces corrections qui ne parvenaient pas à le satisfaire, ces doutes sans cesse renaissants qui l'ont empêché de publier son œuvre. Ses papiers contiennent une enveloppe blanche où se trouve sa correspondance avec divers savants (entre autres M. Lippmann) qu'il avait consultés au sujet de son travail. Cette correspondance est de nature à nous éclairer sur la marche de sa pensée. J'y trouve deux projets de lettres qu'il voulait adresser à l’un de ses correspondants, sans doute M. Lippmann. L'un de ces brouillons est daté du 31 mai 1884, l'autre du 2 juin de la même année; le premier, au moins, n'a pas dû être envoyé au destinataire. C’est une réponse à une des premières objections qu'on devait lui faire et que j'ai signalée plus haut. Au début de ses raisonnements se trouve la définition de la distance, qui est définie comme la longueur du plus court chemin entre deux points, ce qui oblige à mesurer la longueur d'une ligne courbe. À vrai dire, il n'avait besoin que de définir l'égalité de deux distances, et il aurait pu le faire en disant que les distances AB et A'B’ sont égales lorsque l'on peut déplacer la figure dont fait partie AB de facon que A vienne en A'et Ben B’. Mais il ne s’en est pas avisé, je ne sais pour quelle raison. Citons cependant quelques passages de ce projet de lettre : « Je jouis de mon reste; c'est demain que je vais m'atteler à la versification pour travailler à un poème de longue haleine que j'ai commencé l’année dernière ici même... Quand je parle de relation entre deux points au début même de la Géométrie, j'entends dire seulement que la continuité même de l’espace où je les considère les met en rapport, en ce sens qu'on peut les concevoir comme appar- tenant à une même donnée géométrique quel- conque. On concoit, par exemple, que, parmi toutes les longueurs qui les peuvent joindre, il y en ait une minima, que j'appelle leur distance, et celte distance est une relation entre eux. Vous m'objec- terez peut-être que les longueurs, indépendamment de la figure des lignes, ne sont pas comparables, que, ne pouvant dès lors les mesurer, je n'ai pas le droit d'en supposer une minima entre deux points. Je répondrai que je n'ai pas besoin de déterminer numériquement la différence de deux longueurs pour pouvoir affirmer qu'il peut y en avoir une plus grande que l’autre. « La mesure exprime numériquement la diffé- rence, mais cette expression numérique ne m'est 662 JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME pas nécessaire au début de mes recherches. Par exemple, soit un point O origine des deux lon- gueurs; On concoit, partant du point O, un point mobile pengendrant la première, et, partant aussi du pointO, un point mobile p' engendrant la deuxième. Le point p peut prendre autour du point de départ une infinité de positions ; supposons qu'il prenne la position À ; le point p' peut prendre autour de ce même point de départ une infinité de positions : Supposons qu'il prenne la position A! différente de la position A. Rien n'empêche d'admettre que les deux points ont engendré la même longueur en prenant des positions différentes à proximité du point de départ. De même, on peut admettre qu'ils ontensuite engendré la même longueur en prenant des positions quelconques, l’un à partir de la posi- tions A, l’autre à partir de la position A’. On peut les concevoir, enfin, engendrant des longueurs égales et de figures différentes, et l’on pourra affirmer que, sile premier continue à progresser de À en B, en C, en D jusqu'en M, tandis que le second s'arrête à la position D', la longueur engendrée par celui-là sera plus grande que la longueur engen- drée par celui-ci, bien que la trajectoire OA/B'C'D' ne soil pas superposable à la trajectoire O A BCD et qu'on ne puisse déterminer de combien la longueur OABCDM dépasse l’autre, On peut donc concevoir des longueurs égales ou différentes et, par consé- quent, parler de longueur minima, avant même d'avoir institué des figures superposables... » IL est clair que l'objection n'est pas écartée. Com- ment, en effet, savoir que les deux longueurs infini- ment petites OA et OA, ou encore AB et A'B! sont égales entre elles? Cela nous donne seulement le moyen de ramener la comparaison de deux distances linies à celle de deux distances infiniment petites, regardées, sans doute, comme directement acces- sibles à l'intuition. Il eût été étonnant que Sully Prudhomme s'arrêétât définitivement à une sem- blable conception, qui définit le fini par l'infiniment petit; nous avons vu, en effet, quelle peine il se donne pour ramener la notion de la ligne droite, c'est-à-dire, dans son langage, la notion d’une série droite dont les points consécutifs sont infiniment rapprochés, à celle d’une série droite dont les points consécutifs sont à distance finie, pour ramener en un mot l'infiniment petit au fini. Cette difficulté a contribué, sans doute, à lui donner les scrupules qui ont arrêté ses projets de publication. On remarquera également que la notion du déplacement des figures ne joue pas, dans cette philosophie de la Géométrie, le rôle prépondérant que, depuis Lie, nous sommes accoutumés à lui attribuer. J'en crois apercevoir la raison dans cer- laine défiance qu'avait laissée dans l'esprit de Sully Prudhomme les arguments de Zénon d’Elée; sans doute, il n'accepte pas ces arguments, mais il cherche à les tourner, et, le plus souvent, il n’intro- duit le mouvement que par un détour. On doit d'autant plus s'étonner que, dans la définition de la distance, c’est-à-dire tout au début de sa théorie, il fasse tout reposer sur la considération d'un point mobile, comme le montre la lettre que nous venons de citer. Il est fâcheux que ses correspondants ne lui aient pas signalé les lectures à faire ; ils lui auraient épargné bien des tâtonnements, bien des difficultés dont il n'a pu sortir; faute de ces lectures, il ne pouvait évidemment faire avancer la science, puis- qu'il lui fallait d’abord refaire tout le chemin par- couru par ses devanciers. Quoi qu'il en soit, la peine que s’est donnée Sully Prudhomme pour élu- cider ces questions est pour nous un enseignement ; elle nous montre ce qu'était ce grand esprit, quelle élait son impatience de ne pas comprendre, son inapaisable inquiétude, la sincérité de son désir de savoir ; l’âme d’un homme éminent est par elle-même un sujet d'étude digne d'intérêt. Henri Poincaré, de l'Académie des Sciences et de l'Académie française. LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME Les alliages de chrome définis ont été assez peu éludiés jusqu'ici au point de vue théorique. Mais, comme le chrome pur n’est point encore d'un usage courant et que, par contre, il forme avec quelques éléments des alliages d’un grand intérêt industriel, il semble utile de connaître les résultats qu'il peut donner avec les métaux les plus employés dans l'industrie. Grâce aux travaux de quelques savants et métal- lurgistes, on connaît déjà un certain nombre d'al- liages de chrome, en particulier ceux que ce métal forme avec l'aluminium, le cuivre, le manganèse, le nickel, etc. En s’alliant à ces métaux, le chrome leur communique des propriétés particulières et les rend propres à des usages spéciaux. Ce sont ces composés qui feront l'objet du pré- sent travail. JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME 663 J. — ALLIAGES CHROME-SILICIUM. $ 1. — Siliciures de chrome définis. On connait actuellement quatre siliciures de chrome nettement définis : SiCr', SiCGr*, SirCr' et SiCr. Ils peuvent tous être préparés au four élec- trique, soit en opérant directement sur un mélange de chrome et de silicium, soit en faisant réagir sur un mélange de cuivre et de chrome des proportions variables de silicium. Siliceiure SiCr°. — Ce siliciure a été obtenu pour la première fois par Zettel ". MM. Lebeau et Figueras l'ont préparé en provoquant la fusion d'un mélange de chrome et de cuivre additionné d’une petite quantité de silicium. En traitant alternativement par l'acide nitrique et la lessive de soude étendue un culot renfermant 85,63 °/, de cuivre, 12,83 °/, de chrome et 1,24 °/, de silicium, on obtient un résidu entièrement formé de cristaux prismatiques répondant à la formule SiGr°. Si l’on utilise un mélange comprenant 84,32°/, de cuivre, 10,83 °/, de chrome et 4,36 °/, de silicium, il reste encore, après attaque, ce même siliciure parfaitement homogène. Siliciure SiCr°. — Moissan a obtenu ce composé en chauffant au four électrique, à l’aide d’un arcde 900 ampères sous 50 volts, du chrome non carburé avec 145 °/, de son poids de silicium, le tout étant disposé dans un creuset de charbon”. Après une chauffe de neuf minutes, on obtient un culot à cas- sure cristalline contenant le siliciure noyé dans le métal en excès. Pour retirer tout le siliciure contenu dans cette masse métallique, on la pulvérise grossièrement, puis on la soumet à l’action de l'acide fluorhy- drique concentré et froid; lorsque la réaction se produit, après quelques instants, on ajoute alors de l’eau pour éviter une élévation de température qui occasionnerait l'attaque du siliciure. Après un lavage à l’eau, on fait de nouveau réagir HF jus- qu'à ce que l'attaque se réduise à néant. Le siliciure que l’on obtient finalement corres- pond à la formule SiCr°. Il se présente sous forme de petits prismes isolés ou soudés les uns aux autres et contenant une faible quantité de siliciure de carbone dont il n'est guère possible de le débar- rasser. Le chlore l'attaque au rouge avec incandescence; l'acide chlorhydrique gazeux le transforme, vers 700°, en chlorure de silicium et en chlorure de chrome. L'azotale de potassium fondu donne rapi- ! Comptes rendus de l'Académie des Sciences, t. CXXVI. ? Annales de Physique et de Chimie, 7e série, t. IX. dement un chromale et un silicate de potassium. MM. Lebeau et Figueras ont oblenu ce même composé en faisant réagir l'un sur l'autre du cuivre, du chrome et du silicium, ce dernier élé- ment entrant dans le mélange dans une proportion supérieure à 5, le chrome et le silicium y étant asso- ciés dans un rapport voisin. On voit alors appa- raître dans le culot fondu, outre le siliciure SiCr’, d'autres cristaux très différents, présentant des facettes brillantes en forme de losange et consti- tuant précisément le siliciure SiCr*. En traitant ainsi un culot renfermant 78,82 °/, de cuivre, 12,04 °/, de chrome et 8,92 °/, de silicium, on peut obtenir ce siliciure en cristaux doués d’une très grande pureté. Siliciure SiCr°. — Ce siliciure a été obtenu par MM. Lebeau et Figueras en chauffant, dans un creuset de charbon et à la température du four électrique, un mélange comprenant 400 grammes de siliciure de cuivre à 12 °/, et 4 grammes de chrome *. Après une chauffe de quatre minutes à l’aide d'un courant de 600 ampères sous 70 volts, on obtient un culot que l’on traite successivement par l'acide nitrique, la soude et l’eau; lorsque les réac- Lifs ne donnent plus rien et que le lavage s’est com- plètement effectué, on sèche le produit à l’étuve. On obtient ainsi le siliciure SFCr*. Ce siliciure cristallise en longs prismes quadran- gulaires et raie le verre, mais non le quartz; il possède une densité de 5,6 à 0°. Le chlore et le brome l'attaquent à des températures plus ou moins élevées, mais l’iode est sans action sur lui. L’acide chlorhydrique concentré le dissout facilement si l'on chauffe légèrement. L'azotate et le chlorate de potassium n’agissent pas sur lui, mais les carbo- nates alcalins le transforment facilement en silicate et en oxyde de chrome. Siliciure SFCr. — Le siliciure SFCr, qui est le plus riche en silicium parmi les siliciures de chrome, a été signalé pour la première fois par De Chalmot; mais ce chimiste n'a pu réussir à l’isoler du milieu où il l'avait préparé. MM. Lebeau et Figueras l'ont obtenu en augmentant, dans les mé- langes précédents de cuivre, de chrome et de sili- cium, la proportion de ce dernier élément; dans les produits de la fusion, on constate alors la présence de ce siliciure, qui apparaît dansle culot sous forme de petits cristaux de couleur foncée, mais beau- coup moins brillants que les composés SiCr el SiCr*. Ces derniers disparaissent d'ailleurs complè- tement pour des teneurs élevées en silicium, et les attaques à l'acide nitrique ne donnent naissance, 4 Lesgau et Ficueras : Sur les siliciures de chrome (Comptes rendus, 2 juin 1903). 664 dans ce cas, qu’au siliciure SiCr mélangé à du silicium libre qu'on peut éliminer par la soude. $ 2. — Silico-chrome. M. Girod fabrique, à Ugine (Savoie), un alliage ternaire composé de silicium, de chrome et de fer, auquel il a donné le nom de silico-chrome et qui présente la composition suivante : Silicium. . 17,17 0/6 Chrome. 50,20 Fer. ARR EC 257 2 129 Carbone MORALE RE RE 3,40 Manganèse . ù re 0,70 Magnésium. . ST A 4 0,2% SOUL PME: NEA MEN ; 0,01 Phosphore 0,03 Cet alliage est principalement utilisé pour les aciers de moulage. Il cristallise en grandes lamelles planes groupées et formant souvent des alvéoles. On peut le préparer au four électrique comme le ferro-chrome et le ferro-silicium, en employant le charbon comme réducteur; mais on peut également, si l’on désire obtenir un produit ne contenant pas de fer, faire simplement agir le carborundum sur le sesquioxyde de chrome; dans ce dernier cas, on obtient des silico-chromes dont la teneur en sili- cium va de 11 à 20 °/, environ, la proportion de carbone pouvant être comprise entre 0,90 et 6,70 °/,. . La réduction de la chromite par le carborundum donnerait l'alliage ternaire silicium-chrome-fer, avec des pourcentages variés des divers éléments suivant la composition élémentaire du minerai soumis à l'opération. $ 3. — Silichromite. On à donné ce nom à un produit obtenu en trai- ant au four électrique un mélange de fer chromé naturel, de sable et de charbon. Les différents constituants du fer chromé, entre autres le pro- toxyde de fer, le sesquioxyde de chrome, l'alu- mine et la magnésie, réagissent les uns sur les autres, et, avec la silice et le charbon, donnent fina- lement une masse fondue à structure cristalline. Le produit, une fois refroidi, constitue une matière douée d’une grande dureté, mais qu'il est cependant facile de pulvériser à l’aide de broyeurs. La poudre obtenue peut dès lors servir pour la fabrication des meules et des polissoirs. IT. — ALLIAGES CHROME-ALUMINIUM. Wôübler et Michel ont obtenu un alliage de chrome et d'aluminium en réduisant par ce der- nier métal le chlorure violet de chrome; sa com- position répondait sensiblement à la formule CrAl. \u cours de cette préparation, ils ont pu constater que, pour avoir un alliage pouvant supporter le JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME martelage et le laminage, il faut une proportion de chrome ne dépassant pas3 °/, dans le produit final. En projetant du sesquichlorure de chrome dans l'aluminium fondu, il se produit, par réduction, du chrome métallique qui peut s’allier à l'aluminium et donner un alliage de ces deux métaux ; la réaction est très violente. On peut ainsi préparer des alliages contenant des proportions variées de ces deux éléments : l’alliage à 7 °/, de chrome est cas- sant et sa structure est finement cristalline; l'alliage à 13 °/, est complètement cristallisé et il se laisse facilement pulvériser au mortier. M. Guillet! à préparé par voie aluminothermique des alliages à teneurs variées en chrome et en alu- minium, dont il a pu extraire les deux combi- naisons Cr'Al et CrAl. Ces deux composés se pré- sentent sous forme de poudres de couleur gris- argent et extrêmement brillantes. Leurs densités, à la température de 20° environ, sont les sui- vantes : DENSITÉS DENSITÉS trouvées calculées Cr‘Al. 6,75 5,18 CrAl - 4,93 4,60 L'oxygène n’attaque ces alliages que vers 325° el l’eau est sans action sur eux. Les acides sulfurique et chlorhydrique, ainsi que l’eau régale, les dissol- vent lentement à la température ordinaire et assez rapidement à l’ébullition. Le chlore n'agit qu'à chaud. Les alcalis ne les attaquent pas sensible- ment, même à l’'ébullition. Les culots métalliques qui permettent d'arriver à ces produits sont très nets; ils se séparent aisément de la scorie d'alumine qui les recouvre et ne pré- sentent que rarement des cristallisations franches; mais il y a toujours des pertes notables de chrome dues à l'entrainement de ce métal par l’alumine fondue. Ces culots sont durs et cassants. Ils per- mettent d'obtenir des alliages à teneurs élevées de l’un ou l’autre métal par simple réaction entre l’alu- minium et l'oxyde de chrome en poudre. En employant le four électrique à électrode mo- bile, il est également possible d'obtenir des. alliages bien fondus de chrome et d'aluminium. On commence par introduire dans l'appareil une certaine quantité d'aluminium, ou de chrome et d'aluminium, juste nécessaire pour amorcer l'arc, puis on baisse l’électrode supérieure; dès que la masse métallique est fondue, on charge progressi- vement le four avec un mélange d'oxyde d’alumi- nium et d'oxyde ou de fluorure de chrome. L’al- liage peut être recueilli à l’état liquide dans un creuset, grâce à un trou de coulée ménagé dans ce but à la partie inférieure du four. Pendant l'opé- 1 Léon Guiczer : Contribulion à l'étude des alliages d’alu- minium, p. 31 (Thèse de doctorat, Paris, 1902). JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME 66 ration, ce trou de coulée est fermé par un lampon d'argile. Les alliages de chrome et d'aluminium sont susceplibles de multiples usages : pièces méca- niques devant subir de grands frottements ou des chocs répétés, objets divers d'appareillage, pièces d'outillage, etc. On s'en estégalement servi dans ces derniers temps pour fabriquer des résistances élec- triques; l’alliage employé contient, en outre, du nickel qui entre dans le mélange dans la.propor- lion de 88°/,; le chrome y entre pour 8 °/ et l'alu- minium pour 4 °/,. L'aluminium aurait pour effet de donner naissance à une couche d'oxyde capable de protéger complètement l'intérieur de la masse métallique contre une oxydation plus avancée. III. — ALLIAGES CHROME-NICKEL. On peut préparer, avec facilité, des alliages de chrome et de nickel en faisant réagir le siliciure de chrome sur un mélange de nickel et d'oxyde de nickel en présence de la chaux. La réaction serait la suivante : CaO + SiCr? + 2Ni0 + (n — 2) Ni — Cr°Nir + SiO!Ca. Cet alliage peut servir aux mêmes usages que le nickel, sur lequel il a l'avantage d’être plus dur et plus résistant. Il est employé, en particulier, pour la fabrication de certains aciers destinés à la pré- paration des plaques de blindage. Il sert également dans la fabrication des projectiles et de certaines pièces mécaniques. Les lignes qui suivent concer- nent ces applications des alliages de chrome et de nickel. $ 1. — Aciers pour blindages. Les principaux types d'acier employés pour la fa- brication des plaques de blindage sont les suivants : No1 N°2 N°3 Chrome. . . 0,82 0/0 0,50 0/0 0,20 0/0 Nickel . . 2,80 2,5% 1,70 Carbone . 0,43 0,33 0,24 Le type n° 1, dont la teneur en chrome est assez faible par rapport à celle en nickel, possède une résistance à la rupture égale à 82,7 kilogs par milli- mètre carré, une limite élastique de 64,7 kilogs etun allongement de 15 °/,. Les propriétés mécaniques des types n° 2 et n° 3 sont plus faibles. Les effets du chrome et du nickelsemblent donc s'ajouter dans un même acier, le nickel communiquant surtout au métal de la résistance à la rupture et le chrome une grande dureté. L'alliage nickel-chrome le plus employé pour cette fabrication est le suivant : DNICKO LR ER ce = 24,00 COTOME ER eur 12,15 Carbone. . 1,00 Silicium 0,25 Les figures 1 et2, que nous devons à l'obligeance de M. Matignon, permettent de se rendre compte de la grande supériorité mécanique des aciers au chrome-nickel sur les aciers ordinaires au carbone. Elles concernent une série d'essais effectués sur des plaques de blindage pour cuirassés, en vue de déterminer leur résistance à la rupture sous des forces égales. On voit nettement que l'acier au car- bone cémenté n'a pas pu supporter trois chocs d'obus sans se fracturer (la fracture se manifeste dans toute l'épaisseur de la plaque métallique), alors que l'acier au chrome-nickel ne possède pas la moindre trace de fissure, bien que les projectiles aient traversé totalement les plaques soumises aux essais. $ 2. — Projectiles. Les aciers au chrome-nickel destinés à la fabrica- Fig. 1. — Plaque de blindage en acier au carbone cémenté montrant la formation d'une fracture par le choc dun obus. tion des projectiles de perforation présentent géné- ralement l’une des deux compositions suivantes : CÉDOMeE NM ANA 2,0 0) 0,65 2/9 NICE PR EEE ie 2,0 2,60 Carbone. à 0,8 0,65 Pour obtenir le maximum d'effetavec ces aciers, on commence par les tremper, à la température de 1409, dans un bain d'huile à 25°; puis, une fois le projectile fabriqué, on dirige sur la pointe portée à 180° un jet d’eau qui arrive à la fois par l'intérieur et par l'extérieur de l'ogive. Ces obus possèdent alors une dureté et un pouvoir brisant considé- rables. $ 3. — Pièces mécaniques. Pour la fabrication des pièces mécaniques, celles qui sont employées notamment dans l’automobi- lisme, on utilise un acier dont la composition correspond aux chiffres ci-dessous : Chrome. 0,38 Nickel 2,65 Carbone. 0,35 666 JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME A l'état brut de forge, cet acier possède les pro- priétés mécaniques suivantes : Résistance à la rupture, en millim. carrés. 65 kg. Limite élastique, en millim. carrés. . . . 42 Allongement. . 20 °Jo Trempé à l'huile et revenu, ces propriétés sont modifiées comme suit : Résistance à la rupture, en milim. carrés. 95 kg. Limite élastique, en millim. carrés. . 80 ATloOnSeMeNt- RE RTE EN 10 0/0 En outre de ses qualités de résistance à la rupture et de limite élastique élevées, cet acier présente une très grande dureté, ce qui lui permet de supporter de gros efforts sans conserver de déformation permanente. L'industrie utilise parfois aussi des aciers à leneurs en nic- kel et en chrome beaucoup élevées que cel- les de l'échan- tillon précédent, Un des types courants de ces aciers,richesur- tout en nickel, est le suivant : plus composition correspond aux chiffres ci-dessous : Etain . 14,00 2/5 Chrome. 4,75 Cuivre TS FN EE 84,25 Zinc traces. Phosphore traces. Cet alliage ne présente pas un grand intérêt pra- tique, le chrome restant isolé dans le métal et ne communiquant ici aucune qualité de dureté ni de ténacité supérieure à celle du bronze ordinaire. On préfère, du reste, généralement aux cupro- chromes les alliages cuivre-chrome-manganèse; qui sont plus maniables et plus faciles à dissoudre dans les bains de fusion. V. — ALLIAGES CUROME-CUIVRE. Allié au cui- vre, le chrome communique à ce métal des propriétés inté- ressantes.Un al- liage de cuivre et de chrome contenant seu- lement 0,5 °/, de chrome possède une résistance Chrome. 2,50 o/c mécaniquepres- Nickel . 22,00 | : | que deux fois Carbone. 0,65 Fig. 2. — Plaque de blindage en acier spécial au chromo-nickel : aucune trace de fracture après le choc el la pénétration en masse de cinq obus. Sa résistance à la rupture est de 80 kilogs par millimètre carré environ, sa limite élastique de 48 kilogs et son allongement de 42 °/,. Sa dureté et sa résistance au choc sont très remarquables et il possède éga- lement la qualité de prendre un très beau poli par le frottement. On s'en sert principalement pour la fabrication des arbres d'automobiles et des boulons d'entretoise des plaques de garde des locomotives. IV, — ALLIAGES CIHROME-ÉTAIN. Les alliages de chrome et d'étain n’ont pas en- core beaucoup été étudiés jusqu'ici. La considéra- tion des forces électromotrices de dissolution à permis, cependant, d'établir que les deux métaux alliés ne forment ni solution solide ni combinaison : ils sont simplement juxtaposés, quels que soient leurs pourcentages dans l’alliage. On fabrique depuis peu en Allemagne un bronze contenant une faible quantité de chrome et dont la supérieure à celle du cuivre; il peut, de même, prendre un très beau poli et s'altère moins que le cuivre pur au contact de l’hu- midité atmosphérique. D'après M. Guillet, le chrome allié au cuivre ne se combine pasavec ce métal; quelles que soient les proportions relatives des éléments dans l’alliage, on les trouve toujours entièrement séparés. Si le cuivre existe dans l’alliage en plus forte proportion que le chrome, ce dernier apparaît sous forme de paillettes grises qu'il est facile de reconnaitre, même à l'œil nu, dans la masse métallique après simple polissage. De plus, une attaque à l'acide nitrique étendu dissout tout le cuivre et laisse le chrome intact. Cependant, un alliage de cuivre et de chrome à 80°/, environ de chrome, étudié soigneu- sement, a montré ce dernier métal à l’état de solution. Ces divergences tiennent sans doute à la manière dont les alliages sont préparés. A l'heure actuelle, on fabrique généralement le cupro-chrome par l'union directe des deux éléments ou en réduisant l'oxyde de chrome par l'aluminium JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME 667 en présence du cuivre. On obtientainsi des alliages dont le type le plus répandu possède la compo- sition suivante : chrome, 45 °/,; cuivre, 55 °/,. On peut également fabriquer industriellement du bronze chromé en réduisant le siliciure de chrome par l'oxyde de cuivre et en ajoutant au mélange du cuivre métallique et de la chaux pour éliminer le silicium. On a alors la réaction sui- vante : SiCr? + 2 Cu0 + (n — 2) Cu + CaO = Cr°Cur + SiO*Ca. La préparation de cet alliage est plus facile à réaliser que celle du chrome, l’oxyde de cuivre étant plus aisément réductible que les oxydes de chrome. Le bronze chroméest principalement utilisé pour la fabrication des fils télégraphiques et télépho- niques. Si l’on prend pour représenter la condueti- bilité du cuivre pur le nombre 100, celle des fils télégraphiques en bronze chromé est de 98,5, avec une charge à la rupture égale à 45 kilogs par milli- mètre carré. À la température de 0° C. et pour un diamètre de 1 millimètre, ces fils ont une résistance de 20,88 ohms par kilomètre, un poids de 7 kilogs environ et une charge de rupture de 35 kilogs par millimètre carré. La conductibilité des fils télépho- niques n’est que de 34 par rapport à celle du cuivre, toujours représentée par 100. À 0° C., le fil de 1 millimètre de diamètre a une résistance de 60 ohms par kilomètre et une charge de rupture de 59 kilogs par millimètre carré. Le fil de bronze chromé destiné aux longues portées possède une charge de rupture beaucoup plus élevée, soit de 150 kilogs environ par millimètre carré; mais sa conductibilité n’est que de 20, c’est-à-dire qu’elle est 5 fois plus faible que celle du cuivre pur. VI. — ALLIAGES CHROME-MANGANÈSE. Le chrome et le manganèse se trouvent souvent réunis dans les ferro-alliages de ces deux métaux ; le ferro-chrome, en particulier, contient presque toujours une certaine proportion de manganèse. Il est donc intéressant de déterminer les alliages définis que ces deux métaux peuvent former. En réduisant par l'aluminium pulvérisé des mé- Janges d'oxydes de chrome et de manganèse en pro- portions convenables, M. Arrivaut’ a pu obtenir une série d’alliages titrant de 6,25 °/, à 60,89 °/, de chrome. Ces alliages de manganèse et de chrome se pré- sentent généralement en culots bien fondus el homogènes ; ils possèdent un aspect cristallin, sont très brillants, mais d'autant plus fragiles qu'ils 4 G. ArrivauUr : Contribution à l'étude des alliages de man- ganèse (Thèse de doctorat, Bordeaux, 19)8$). contiennent davantage de manganèse. L'aiguille aimantée n'a aucune action sur eux. Au point de vue chimique, ils sont tous dissous sans résidu par les acides chlorhydrique et sulfurique; l'acide nitrique les attaque faiblement, de même que l'acide acétique, qui n’agit à la longue que sur les alliages contenant moins de 20 °/, de chrome. Les carbonates alcalins, les nitrates, le bisulfate de potasse les attaquent à la température du rouge. La réaction la plus intéressante est celle qui a lieu avec l'acétate d'ammoniaque en solution alcoo- lique; ce composé permet, en effet, de caractériser l'alliage et de séparer de la masse métallique deux combinaisons définies de chrome et de manganèse, répondant respectivement aux formules CrMn° et CrMn*. L’alliage défini CrMn° existe dans les produits contenant de 6 à 10 °/, de chrome environ, d'où il peut être retiré par une attaque ménagée à l'acétate d’ammoniaque. Pour obtenir de beaux cristaux de cet alliage, il faut éviter leur attaque par la liqueur agissant à chaud et adopter pour cela un dispositif particulier. Il consiste en une longue éprouvette à pied dans laquelle on a versé une solution d’acétate d’ammoniaque neutre à 10 °/,. Dans ce liquide, on fait plonger un panier en toile de platine contenant des fragments de l’alliage à attaquer, et autour de ce panier est un serpentin de verre traversé par un courant de vapeur d’eau. De cette façon, la partie supérieure seule de la liqueur est chauffée et les fragments d’alliage qui y baignent sont vivement attaqués. Si l'on à soin d'agiter de temps en temps le panier de platine pour laisser s'échapper de celui-ci les parcelles de l’alliage isolé, on retrouve au fond de l’éprouvette, dans le liquide froid, de fines lames cristallines qu'il est facile de recueillir après l'opération. Ces cristaux, analysés, répondent à la formule CrMnf. Leur densité, à 0°, est de 7,12. Ils sont très brillants el inaltérables à l'air. ; L'alliage CrMn* peut être retiré des culots conte- nant de 13 à 17,5 °/, environ de chrome, toujours par une attaque à l'acélate d'ammoniaque. Le culot, une fois pulvérisé, est trituré dans un mortier, souvent pendant plusieurs jours, puis mis au bain- marie dans l'acétate d'ammoniaque en solution alcoolique à 10 °/,; l'attaque est très vive au début, puis elle s'arrête et reprend dès qu'on passe au pilon; ce n’est qu'à la longue que la composition du résidu reste constante. Cet alliage se présente sous forme de poudre cristalline brillante, ayant une densité de 7,36 à 0°. Il est à peu près inaltérable à l'air. Les culots contenant plus de 20 °/, de chrome ne sont pas attaqués par la liqueur alcoolique d’am- moniaque. Si l'on cherche à isoler quelque consti- 668 JEAN ESCARD — LES ALLIAGES INDUSTRIELS DE CHROME tuant analogue aux précédents : ou il n'y a pas d'attaque, ou, au contraire, il y a dissolution com- plète de l'alliage. On ne peut pas ainsi caractériser de composés définis dans ces derniers alliages. Dans les alliages de chrome et de manganèse contenant moins de 20 °/, de chrome, le manganèse libre semble donc associé à l’un des deux composés définis CrMn* ou CrMn’, qu'il est facile d'isoler et de caractériser par l’acétate d'ammoniaque en solution alcoolique. VII. — ALLIAGES CHROME-TUNGSTÈNE. Les alliages de chrome et de tungstène sont déjà connus et utilisés depuis un certain nombre d'années. Le carbure double de chrome et de tungstène, qui répond à la formule 3C°Cr° + CTur, a été préparé par Moissan de plusieurs manières. On peut tout d'abord l'obtenir en chauffant au four électrique, dans un creuset de charbon, un mélange composé de 100 grammes de sesquioxyde de chrome, 45 grammes d'acide tungstique et 30 grammes de coke de pétrole ou de charbon de sucre : on obtient ainsi un culot qui, traité par l’eau et par une solu- tion ammoniacale concentrée, donne une poudre composée de cristaux de ce carbure double. On peut également chauffer au four électrique un mélange de tungstène, de chrome, de carbone et de cuivre; après refroidissement, il reste dans le creuset un culot métallique homogène qui, après une attaque par un excès d'acide nitrique, laisse déposer de petites géodes cristallines répondant à la formule 3C°Cr° + CTu’. Ce carbure possède une densité de 8,41 à la tem- pérature de 22°; il raie le quartz et la topaze avec la plus grande facilité et produit même sur la sur- face bien polie d’un rubis très dur des stries pro- fondes. Il est très stable et non magnétique. L'alliage binaire, ou alliage simplement composé de chrome et de tungstène, mérite une mention spéciale, à cause des applications dont il est suscep- tible, principalement dans la fabrication des aciers à coupe rapide. Pour le préparer, on peut partir du siliciure de chrome et de l’oxyde pur de tungstène, que l’on traite, au four électrique, par un mélange de chaux et de chromate de calcium. Il se produit la réaction suivante : 3 SiCr? + Tu0% + 2 Ca0 + CrO'Ca = CrTu + 3Si0*Ca. On peut, si l’on veut, ne mettre en réaction que les trois premiers composés et supprimer le chro- male de calcium. On à alors : 3SiC1? + 2Tu0* + 3Ca0 = CrfTu? + 3 Si0°Ca. De cette facon, il est possible d'obtenir toute une gamme d’alliages compris, par exemple, entre Cr'Tu et Cr°Tu’, ainsi que l’établissent les équations précédentes. VIIT. — ALLIAGES CHROME-VANADIUM. Les alliages de chrome et de vanadium sont encore très peu utilisés dans l'industrie. On sait cependant que les aciers au vanadium additionné de chrome donnent de très bons résultats pour la fabrication des pièces ayant à subir des efforts mécaniques prolongés ou subits, comme celles que l’on emploie, par exemple, dans la construction des automobiles. On les utilise également pour la fabri- cation des ressorts. Voici la composition d'un acier destiné à ce der- nier usage : Vanadium, 0,188 °/,; Chrome, 1,044°/,; Carbone, 0,440 °/,; Silicium, 0,173 °/,; Manga- nèse, 0,837 °/.. En raison du prix élevé du vanadium, ces aciers n'ont cependant pas encore pu pénétrer d’une facon satisfaisante dans la métallurgie. Ils ne paraissent, du reste, pas présenter plus d'intérêt que les aciers au vanadium seul, les deux éléments vanadium et chrome remplissant un rôle semblable et commu- niquant au produit final des propriétés comparables. IX. — AMALGAMES DE CHROME. En faisant réagir l’amalgame de sodium sur une solution de sesquichlorure de chrome, Vincent a obtenu un amalgame de chrome. Si, au lieu de ses- quichlorure, on se sert de protochlorure ou de pro- toiodure, on arrive à des résultats plus satisfaisants, car l'amalgame obtenu est plus riche en chrome que celui qu'on prépare par le premier procédé. Pour éviter la présence du sodium dans cet alliage, il suffit de le maintenir, pendant une heure environ, dans l'eau bouillante en agitant cette eau de temps en temps. Cet amalgame se présente à l’état liquide; il est cependant moins mobile que le mercure. A l'air, il se recouvre d'une couche noire d'oxyde. L'eau le décompose assez rapidement, l'air sec plus len- tement. M. Férée a également préparé un amalgame de chrome en électrolysant une solution contenant 160 grammes de chlorure de chrome cristallisé, 100 grammes d'acide chlorhydrique concentré et 740 grammes d’eau; l'anode de l'appareil électro- lyseur était constituée par du platine et la cathode par du mercure. L'intensité du courant était de 22 ampères et sa densité absolue de 0,27 ampère. Après lavage et expulsion de l'excès de mercure par compression, on oblenait un alliage répondant à la formule Crilg”. Cet amalgame de chrome est mou, brillant, peu altérable à l'air et, par une élévation suffisante de J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE 669 température, il perd du mercure et s'oxyde. La pression agit également sur lui, car, à raison de 200 kilogrammes par centimètre carré, elle lui fait perdre du mercure en laissant un amalgame dif- férent du premier comme composition : il répond, en effet, à la formule CrHg. Cet alliage est plus dur que le précédent, sans doute à cause de sa plus forte teneur en chrome; il est brillant,-mais il s’altère en perdant du mercure. Ces deux amalgames, chauffés dans le vide, Jonnent du chrome métallique très friable. Si la “empérature est restée inférieure à 300° pendant toute la durée de l'expérience, le métal ainsi pré- paré estpyrophorique. Il s'enflamme, en effet, spon- tanément au contact de l'air et absorbe non seu- lement son oxygène, mais encore son azote. Il s'empare également, à froid, du protoxyde d'azote et de l'acide sulfureux. Porté à une température élevée, ce chrome pyrophorique perd cependant toute activité, tandis qu'à une douce chaleur il est encore capable d'absorber l'azote, l'oxyde de car- bone et l'acide carbonique. Jean Escard, Ingénieur civil. LA LOI DE MAGENDIE ; LE TEMPS PHYSIOLOGIQUE On sait depuis l'Antiquité que les nerfs servent à une double transmission: l’une amène les impres- sions du dehors à notre cerveau ; l’autre, inverse de la première, porte du cerveau aux muscles les impulsions intérieures qui leur commandent le mouvement. Est-ce une voie commune, utilisable dans les deux sens, qui livre passage aux unes et aux autres, comme dans le télégraphe électrique, ou bien sont-ce des voies distincies, orientées, polarisées en vue de leur fonction? C'est Magendie qui à tranché ce débat en faveur de la seconde manière de voir, par des expériences qui ont long- temps paru décisives’. Il n’est pas inutile de les rappeler en ce qu’elles ont d’essentiel, car elles peuvent prêter à discussion, et il s’agit d’un point fondamental de la physiologie nerveuse. I. — EXPÉRIENCES PRIMITIVES. Le terrain de choix pour faire cette démonstra- tion, c'est l’endroit où les nerfs quittent la moelle épinière, pour gagner les trous dits de conju- # C'est à Magendie incontestablement et non à Ch. Bell, comme il a été longtemps d'usage de l'affirmer, qu'appar- tient cette importante découverte. L'hypothèse directrice de Ch. Bell était la suivante : les racines antérieures (ventrales), {ju il suppose se continuer dans le cerveau par les pédon- cules cérébraux, présideraient à la sensibilité et au mouve- ment; les postérieures (dorsales), qu'il suppose se continuer dans le cervelet par les pédoncules cérébelleux, préside- raient à la nutrition. Des expériences, faites sur des animaux venant d'être assommés, ne pouvaient, du reste, pas lui laisser voir les manifestations de la sensibilité, mais seulement l'irritabilité motrice des racines antérieures. Pour lui, sensibilité et motricité paraissent se confondre. Quand les expériences si claires de Magendie eurent fait la lumière sur ce point, il lui fut facile de donner à ses propres expériences une interprétation exacte. Tout démontre que cette interprétation correcte est postérieure à la première publication du physiologiste francais. (Voy. spécialement Vucprax : Leçons Sur la physiologie générale du système .ncrveux, p. 109 et suivantes.) REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, gaison, qui leur ménagent, entre les vertèbres, une issue hors du canal rachidien. Chaque nerf, répon- dant à un segment métamérique de l'organisme, est là dédoublé, représenté qu'il est par deux cor- dons distinets, les racines de la moelle épinière, avant de mélanger ses fibres composantes dans le trone commun qui leur succède. Il y avait une présomption pour que ces fasciculations distinctes répondissent à des fonctions elles-mêmes dis- tinctes. Il s'agissait de faire une hypothèse et de la vérifier expérimentalement. L'hypothèse se trouva juste et la démonstration éclatante. Si, d'un côté de la moelle épinière, on sectionne sur leur continuité toutes les racines dorsales (dites postérieures chez l'homme) correspondant à une région déterminée, au membre postérieur par exemple, ce membre ne communique plus au cerveau les impressions recues ; il est paralysé de la sensibilité, tout en conservant sa motricité. Si l’on coupe de l’autre côté toutes les racines ven- trales (dites antérieures), le membre correspondant ne reçoit plus d'impulsion du cerveau ; il est para- lysé de la motricité, tout en conservant sa sensibilité. Le tissu nerveux étant directement excitable, on peut faire la contre-épreuve, qui est tout aussi démonstrative. Des bouts résultant de la section de tous ces nerfs, seuls les bouts des racines dor- sales tenant à la moelle, quand on les irrite, réveil- lent la sensibilité, et seuls ceux des racines ven- trales dirigés extérieurement mettent en jeu les muscles correspondants. Tels sont les faits par lesquels s'exprime la loi de Magendie. Complétés par tout ce que nous savons d'autre part de l’organisation nerveuse, ils conduisent à d'importantes conclusions. — Le système nerveux, comme le système circulatoire, avec lequel il a de si évidentes analogies, est le siège d'un mouvement circulaire et ce mouvement, en vertu d'un méca- 15" 670 nisme de sélection, est orienté dans une direction d'ensemble bien déterminée, qui l'empêche de revenir sur lui-même. Ces deux cordons voisins et parallèles, qu'on appelle les racines de la moelle épinière, doivent leurs réactions si différentes, non pas, comme on semble le croire encore générale- ment, aux propriétés particulières de leurs élé- ments (isolés du système nerveux, ceux-ci se mon- trent identiques à tous les points de vue), mais à la place qu'ils occupent dans le cycle de l’exei- tation nerveuse. Les uns, placés à l'entrée du système nerveux, manifestent sa fonction la plus hautement spécifiée, la sensibilité consciente; les autres, placés à son stade final, ne manifesteront que leur propre irriltabilité cellulaire, forme primitive, sans doute, mais inférieure de la sensibilité. L'une comme l’autre se dévoile à nos yeux par des mou- vements visibles, généralisés plus ou moins dans un cas, localisés dans l’autre à la région muscu- laire intéressée. Les éléments radiculaires sont donc des conduc- teurs qui, les uns importent dans le système ner- veux et les autres exportent de ce système, des impulsions de provenance ou de destination étran- gère à lui-même. Le système nerveux proprement dit (moelle épinière et cerveau), intercalé entre eux, est formé par des éléments qui se communi- quent, se répartissent ces impulsions, les organi- sent en représentations, les conservent en un mouvement intérieur toujours circulaire, ou les traduisent en exécutions motrices, suivant:les cir- constances. Le pouvoir de conservation, de super- position et d'organisation que possède le système nerveux à l'égard des renseignements qui lui vien- nent du dehors, ne se comprendrait, du reste, guère sans cette irréversibilité de son cycle fonctionnel, c'est-à-dire si, par des passages alternés dans leur sens, une excitation venait aussitôt effacer ce qu'a laissé en lui la précédente. Mais, avant d'aller plus loin, les faits sur les- quels se fondent ces déductions sont-ils catégori- ques ou seulement approximatifs, ou bien compli- qués de faits restrictifs dont il convient de les dégager? — Ils sont, en réalité, complexes et il faut les interpréter. Il. — DonNNÉES PLUS RÉCENTES COMPLIQUANT LA QUESTION. Lorsque la racine dorsale a été coupée en travers et qu'à l'aide d’un induit alternatif on excite soit son bout supérieur (resté en connexion avec la moelle épinière), soit son bout inférieur (resté en connexion avec le membre), il semble bien d’abord que seul le bout central provoque une réponse. L'excilation du bout inférieur est sans effet sur la J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE musculature proprement dite du membre; mais, en y regardant de plus près, il y a dans ce membre des changements visibles. Stricker (en 1876) vit que cette excitation de la racine dorsale, à contre-sens de sa conduction admise, est suivie d'un échauflement de la région qui lui correspond. J'ai moi-même montré que cette excitation provoque un changement dans la circulation de cette région, une congestion locale, donc un mouvement vasculaire. Tout compte fait, la racine dorsale n’est pas dépourvue de la fonction motrice, tout en possédant la fonction sensitive ‘. Dans ce qu’elle a d’essentiel, la loi énoncée plus haut reste sauve, il est vrai, si, transportant des racines à leurs éléments composants les fonctions de transmission centripète et centrifuge, nous considérons la racine dorsale comme un nerf mixte, dans lequel sont mélangés un certain nombre d'éléments moteurs avec les éléments sensitifs qui lui sont essentiels. Quand nous excitons le bout central, ce sont ces derniers qui sont mis en jeu, et les premiers quand nous excitons le bout péri- phérique de la racine coupée. C'est cela, sans doute; mais les anciennes expériences ne suffisent plus à nous le démontrer. En effet, si la racine elle-même est un tronc mixte, ce sont ses éléments composants qu'il faut individuellement interroger. Or, nous ne le pouvons pas; ou nous ne le pouvons que grâce à certains artifices. La loi est à établir sur de nou- velles preuves, si nous voulons éviter un cercle vicieux. En agissant sur les racines des nerfs, Magendie avait pu croire qu'il avait trouvé, en Biologie, des équivalents de ce que sont les corps simples en Chimie, des amas formés d'éléments ayant tous mêmes propriétés, el ces corps lui étaient fournis, croyait-il, à l’état en quelque sorte natif, sans purification préalable. On voit qu'il n'en est rien. Il faut trouver des moyens de séparer, dans la racine dorsale, les éléments que nous supposons être les supports de la double manifestation sensi- tive et motrice qu'y décèle l'excitation; ces moyens sont indirects, mais néanmoins probants. 1 Dans des expériences inédites, qui seront publiées en détail, j'ai vu que cette complexité structurale et fonction- nelle de la racine dorsale n'est pas particulière aux Mammi- fères, mais qu'elle existe aussi chez les Batraciens, en prenant pour exemple Ja grenouille. Cel animal étant dis- posé de manière qu'à l’aide d'un microscope à objectif faible le réseau vasculaire de l'une des membranes interdigitales soit bien visible, si l'on excile périphériquement la racine dorsale (préalablement préparée el sectionnée) qui corres- pond à ce département vasculaire, on voit, après quelques secondes, ces vaisseaux s'élargir (notamment les artères) et se maintenir dilatés un certain temps après la cessation de l'excitation, puis finir par reprendre leur calibre primitif, Le phénomène ne m'a paru bien visible qu'en saison d'été, alors que l'excitabilité générale des lissus, et principalement du système nerveux, a sa plus grande valeur. FATA 1 dibide J.-P. Si, à l'exemple du chimiste, qui ne peut agir sur les molécules isolées du corps qu'il étudie, nous ne pouvons interroger individuellement les fibres composantes des nerfs que nous expérimentons, nons avons néanmoins sur lui l'avantage de voir nos éléments à nous par les méthodes histologiques et de leur reconnaître ainsi certains caractères empiriques, qui les distinguent en catégories. Il n'y à aucun doute que la racine dorsale contienne deux catégories de fibres nerveuses. Les unes, incomparablement plus nombreuses, ont leurs cellules originelles (corps des neurones) dans le ganglion dit spinal, qui forme sur cette racine un renflement caractéristique, près du point où elle confond ses fibres avec la racine ventrale ; les autres, en très petit nombre, ont les leurs dans la substance grise de la moelle épinière. Les premières sont celles que l’on appelle sensitives, parce qu’elles convoient l'excitation de la surface cutanée à la moelle épinière; les secondes, mélangées avec elle, fibre à fibre ou par petits paquets, sont évidemment celles qui ont le rôle moteur, c’est-à-dire qui con- voient l'excitation de la moelle vers les vaisseaux cutanés. La démonstration de ces origines est donnée par l’'Embryologie. Elle l'est également par l'application de la méthode dite de la dégénération wallérienne. Si la racine dorsale est coupée en travers au milieu de sa longueur, ses fibres ainsi interrompues subissent la loi de Waller ‘ ; elles dégénèrent dans 1 La loi de Waller est la suivante : Toute fibre nerveuse, interrompue dans sa continuité, subit une désorganisation particulière, dans l'extrémité qui est séparée de sa cellule nerveuse originelle (centre dit trophique), tandis que l'extrémité restée en continuité avec cette cellule, après quelques réactions passagères de celte dernière, peut rester intacte et mème régénérer par bourgeonnement la partie séparée. La loi de Waller ne doit pas être considérée, à l'égal de celle de Magendie, comme une loi propre au système nerveux, mais, ainsi que je l'ai fait remarquer, comme une loi cellulaire. Pour s'en convaincre, il suffit de rappeler les résultats obtenus par Nusbaum, Balbiani, Metchnikoff, sur les infusoires, les amibes, c'est-à-dire sur des êtres unicellulaires, dans lesquels on voit de même, après une section qui divise le protoplasme en deux parties, celle qui est séparée du noyau périr et celle qui contient le noyau conserver sa vitalité et régénérer la portion disparue. Couper un nerf dans sa continuité, ce n'est pas autre chose que couper un faisceau de prolonge- ments cellulaires de nature nerveuse (axones des neurones). Pour le dire en passant, la loi de Waller suffit à légitimer la conception du neurone, dans ce qu'elle a d'essentiel, Seules les exagérations et les hypothèses invraisemblables, dont on l'avait surchargée à son apparition, ont pu la com- promettre un moment aux yeux du public scientifique. Cela, une fois de plus, parce qu'on cherche dans les pro- priétés des éléments l'explication des fonctions d'un système, le plus compliqué de ceux à nous connus, ainsi que j'en avais prévenu, du reste. La méthode wallérienne nous offre un précieux moyen de débrouiller la systématisation des nerfs. En frappant d'un signe distinctif les éléments intéressés par la section, elle nous les fait reconnaitre au milieu des autres restés intacts et nous permet de les suivre dans les trajets les MORAT — LA LOI DE MAGENDIE 671 toute la longueur des extrémités qui sont séparées de leurs cellules les deux extrémités coupées contiennent des fibres dégéné- rées et des fibres saines. nerveuses d'origine. Or, L'extrémité de la racine qui tient à la moelle contient beaucoup des unes et peu des autres ; l'extrémité tenant au ganglion spi- nal contient, inversement, beaucoup des secondes. peu des premières el La conclusion à en tirer, c'est que les unes ont leurs cellules d'origine dans le ganglion spinal ce sont évidemment les fibres à conduction centri- pète ou sensitive ; les autres ont leurs cellules d’origine dans la moelle épinière : ce sont les fibres à conduction centrifuge, qui prennent le chemin de la racine dorsale. Ce point ayant été contesté, je l'ai soumis à une vérification minutieuse dans un travail en collabo- ration avec mon très regretté élève le docteur plus compliqués. Dans l'espèce, elle nous sert, ainsi qu'on voit, à reconnaitre le sens de la conduction des éléments mélangés dans un tronc commun. La règle générale est, de ce point de vue, la suivante : Tout neurone est essentiel- lement une cellule nerveuse ramifiée qui se prolonge au loin par une fibre plus ou moins longue, ramifiée elle-même à son extrémité. Son pôle (ou mieux son champ polaire) récep- teur est représenté par les arborisations de la cellule; son pôle émissif par celles du cylindraxe ou axone, qui est son prolongement. Tous les faits expérimentaux confirment cette règle. Dans les masses profondes du système nerveux, où la conduction se fait évidemment en deux sens, on trouve toujours des neurones ayant les deux orientations inverses. Dans la racine ventrale, où la conduction est uniquement centrifuge (en tant qu'il s'agit des éléments propres à cette racine), les neurones n'ont qu'une orientation (cellules dans la moelle épinière et arborisations cylin- draxiles dans les muscles). Chez les Invertébrés, cette règle est absolue; les nerfs sensitifs ont leurs cellules d'origine dans la peau et les nerfs moteurs ont les leurs dans la chaine ganglionnaire qui, chez eux, a les fonctions de la moelle épinière. Chez les Vertébrés, il y a une complication remarquable, concer- nant précisément les nerfs sensitifs cutanés, et qui consiste en ce que les cellules d'origine de ces nerfs sont remontées le long de ceux-ci jusqu'à la masse renflée, qui est le ganglion spinal (dit encore rachidien ou intravertébral). La cellule d'origine de ces neurones se trouve, dans ce cas, entre deux axones, de sorte que, pour appliquer la règle, il faut ici faire abstraction de l'un des deux, de celui qui s'étend de la peau au ganglion. Le critère tiré de la forme anatomique, en ce qui concerne la conduction, est donc, comme on voit, purement empi- rique et, pour s'en aider, il faut le compléter par des indications venues d'ailleurs. Le fait exceptionnel qui est ici indiqué a, du reste, son enseignement par lui-même: il nous montre que le sens de la conduction, s'il est générale- ment le même que celui de la dégénération, en est indé- pendant au fond. Un nerf sensitif coupé entre la peau et un ganglion d'origine dégénère du côté de la peau, c'est-à- dire en sens inverse du courant nerveux, aussi bien que, coupé entre la moelle et le ganglion, il dégénère du côté de la moelle suivant le sens de la conduction, comme c'est la règle. En somme, il y a une orientation morphologique- ment reconnaissable des éléments nerveux (neurones). Confrontée une fois pour toutes avec ce que l'expérimenta- tion nous a appris sur l'orientation fonctionnelle des racines médullaires, nous pouvons conclure de l’une à l’autre, dans les cas où l’un des deux critères nous fait défaut. J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE Bonne, qui en a fait le sujet de sa thèse inaugurale”. Les figures ci-jointes proviennent de préparations faites sur les deux bouts d’une racine dorsale, cou- pée entre son ganglion et la moelle. La figure 1 montre une portion du bout ganglionnaire, prise sur le ganglion même, donton voit les cellules. Les fibres saines sont celles qui procèdent de ces cellules et ont la conduction sensitive. Les fibres dégéné- rées dans cette préparation sont celles qui, ayant leurs cellules trophiques dans la moelle, ont été séparées d'elles et ont subi la dégénérescence de Waller. La figure 2, prise sur le bout médullaire, Fig. 4. — Bout ganglionnaire d'une racine dorsale coupee. en est la contre-partie. Ses fibres dégénérées sont la continuation de celles qui sont restées saines dans le bout ganglionnaire et ses fibres saines sont l'origine de celles qui procèdent de la moelle. Ces figures n'indiquent nullement les proportions relatives des fibres centripètes et centrifuges, mais | ont été choisies pour bien mettre en évidence l’exis- tence de ces dernières, en somme peu nombreuses. III. DISTINCTION FONDAMENTALE ÉLÉMENTS RADICULAIRES ET ÉLÉMENTS NON RADICULAIRES. la racine dorsale. Celle excilation retentit sur des organes de mouve- Revenons à l'excitation de ! Cuances Bonxe : Recherches sur les éléments centri- luges des racines postérieures. Thèse de la Fac. de Méd. ment, mais celte action motrice est d'un ordre bien différent de celle qui appartient à la racine ventrale ; c'estune action vaso-motrice, c'est-à-dire identique à l’une de celles qui ressortissent à un ensemble très particulier de nerfs, le grand sympathique. Et, de fait, Kôlliker, qui, un des premiers, a constaté l'existence des fibres centrifuges de la racine dor- sale, les a vues aboutir aux ganglions de ce système et s'yterminer par des arborisations entourant leurs cellules. Je considère cette distinction comme d'une réelle importance, car c'est elle qui va nous permettre de Fig 2. — Bout médullaire d'une racine dorsale coupée, après 04 jours. ramener l’ordre el l'unité dans cette question en somme embrouillée. La racine dorsale, dirons-nous une fois de plus, contient des éléments centripètes el avec eux quelques éléments centrifuges, et c’est là ce qui dérange ou complique la loi de Magendie. En réalité, il faut dire : /a racine dorsale contient | des éléments radiculaires de conduction centripète et un certain nombre d'éléments non radiculaires, dont la conduction nous importe peu, en tant que nous considérons spécialement les éléments radi- culaires. EL c'est ce qui va nous permettre de retrouver la loi de Magendie, sous des termes équi- valents à ceux qu'il employait, mais plus précis et plus exacts. de Lyon, 1897. Je renvoie à c2 travail pour la bibliographie |! du sujet. J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE 673 Un élément radiculaire est celui qui établit, entre le milieu extérieur et le système nerveux propre- ment dit (moelle et cerveau), une relation d'apport (éléments centripètes) ou de départ (éléments cen- trifuges). Tous les autres éléments, intérieurs au système nerveux lui-même, et à ce titre nullement radiculaires, établissent des relations du même ordre entre les différents champs nerveux par les connexions qu'ils contractent dans les différents relais de la substance grise. Les neurones de la racine dorsale, qui d’un seul trajet vont de la peau à la substance grise de la moelle épinière, sont des éléments radiculaires ; de même les neurones de la racine ventrale, qui d’un seul trajet vont de la moelle aux muscles. Ce sont bien là les « racines » au sens fonctionnel du mot, les unes absorbantes, les autres exhalantes du système nerveux. Par contre, les éléments de la racine dorsale qui vont de la substance grise de la moelle épinière à cette autre substance grise de cette autre moelle que représentent le grand sympathique et ses ganglions, ne sont pas des éléments radiculaires, mais des éléments intercentraux, intérieurs au système ner- veux, donc étrangers à la catégorie particulière que constituent les premiers, bien que contenus dans la même gaine, appartenant à la même fascicula- tion qu'eux. Le mot « racine », en anatomie, a une signification purement topographique, qui, là comme ailleurs, ne suggère ou n'exprime les fonc- tions que d'une facon approchée. IV. — LA VÉRITABLE FORMULE. En somme, la loi de Magendie est bien celle qu'il a exprimée lui-même. /7 y a des éléments distincts pour la conduction centripète et la conduction cen- triluge, rigoureusement parlant, pour l'entrée de l'excitation dans le système nerveux et pour sa sortie de ce système; ce sont les éléments radicu- laires ; et non seulement ces éléments sont distincts, mais ils aflectent des chemins topographiquement différents, les uns par la RACINE DORSALE, Les autres par la RACINE VENTRALE, sans se mélanger entre eux. Nous sommes par là en mesure de les sup- primer ou de les mettre en jeu indépendamment les uns des autres; pour dire mieux, nous mani- festons les effets des uns en agissant sur la racine dorsale et ceux des autres en agissant sur la racine ventrale; et c'est de l'indépendance de ces mani- festations que nous coneluons à leur individualité distincte. Débarrassées par artifice des éléments étrangers à leurs fonctions, les racines, en prenant ce mot dans son expression non plus topogra- phique, mais fonctionnelle, redeviennent pour nous ce qu'elles étaient pour Magendie, des corps simples, c'est-à-dire des masses accessibles à nos moyens expérimentaux, formées d’une seule catégorie d’élé- ments, el par là nous permettent d'établir sans erreur les réactions et les fonctions de ces éléments”. La loi de Magendie n’est donc pas une formule approchée, c'est une loi absolue. Elle exprime l'irréversibilité foncière du mouvement nerveux. Cette irréversibilité appartient au système en tant que système el non à ses éléments composants, au même titre celle du mouvement du appartient au système circulatoire et non à ses canalisations composantes, lesquelles permettent, une fois isolées, un mouvement équivoque des liquides dans leur intérieur. Les valvules du cœur et des veines sont le mécanisme de sélection qui oriente ce mouvement dans l'appareil circulatoire. Un mécanisme analogue, présentement tout à fait inconnu, doit exister dans la substance grise du système nerveux, vraisemblablement aux points de raccordement des neurones. Excitées isolément, après leur séparation d’avec les centres, les fibres nerveuses des deux racines propagent une onde, qui se déplace avec une vitesse définie dans les deux sens, autant du moins qu'on en peut juger par les phénomènes électromoteurs qui accom- pagnent leur état d’excitation. Il n'y a guère que sur le terrain des racines que nous puissions faire la démonstration de cette loi, d’une facon irréprochable. Partout ailleurs, sa véri- fication n'est plus qu'approximative ou indirecte. Plus, en effet, on s'enfonce dans le système nerveux, plus les fibres de conduction inverse et de fonctions distinctes se mélangent entre elles, pour réaliser les relations multipliées, les associations de toute nature, qui sont le fond et comme la raison d'être du système nerveux. Le sens général de la transmission est bien toujours le même, mais avec des branchements innombrables, qui se côtoient ou s'intriquent pour aller à leurs multiples destina- tions. La simplicité, la forme schématique de ce système ne se trouvent qu'à sa base, et encore là seulement où des conditions particulières de déve- loppement ont aidé à rendre évidente à nos moyens, que sang 1 Toute l’argumentation qui précède serait faussée si la racine dorsale contenait des éléments centrifuges propre- ment radiculaires, c'est-à-dire des fibres allant aux muscles articulo-moteurs et non pas seulement des fibres pour les organes viscéraux (vaisseaux ou glandes). C'est ce qu'un auteur a affirmé, mais le fait a été aussitôt contredit. J'ai soumis ce point également à une vérification minutieuse et ma conclusion est pleinement négative. Les expériences sur les racines médullaires sont d'un déterminisme en somme simple et qui peut être rigoureux, mais elles sont délicates; ceux qui les ont pratiquées se rendent bien compte des causes d'erreurs qui peuvent y intervenir. Pour tout le détail technique et proprement physiologique des expériences, comme pour la discussion concernant les vaso dilatateurs de la chaîne du sympathique abdominal et ceux qui sont contenus dans les racines ventrales, je renvoie le lecteur à un Mémoire qui paraitra dans les Archives inter- nationales de Physiologie de la présente année. [er] 1 ES en somme grossiers, celle dissociation des éléments radiculaires. Le système nerveux procède de cellules embryon- naires, qui originellement font partie de l’ectoderme. De ces cellules, certaines restent séparées de la totalité, sous forme de masses distinctes, qui seront les ganglions spinaux, tandis que d’autres forment un cylindre tubulé, qui sera la moelle épinière. Les axones (prolongements cylindraxiles) des cellules des ganglions spinaux bourgeonneront du côté de la moelle, pour l’atteindre, et aussi du côté de la peau, surface réceptrice par excellence des excita- tions venues de l'extérieur. Les axones des cellules propres de la moelle bourgeonneront du côté des muscles du squelette, et ainsi s'établissent ces deux tractus caractéristiques, dont l'association anato- mique et fonctionnelle forme ce qu'on appelle la paire nerveuse. L'éloignement originel des lieux de naissance des deux ordres de fibres, la conden- sation de la moelle épinière en un cylindre régulier, la répétition métamérique de ses segments compo- sants, ainsi que des ganglions et des racines elles- mêmes, sont les circonstances qui ont créé ces dispositions si appropriées aux expériences de mérotomie et d’excitation localisée et réalisé ce terrain de choix, où tant de problèmes propres à la physiologie nerveuse ont pu être soumis à véri- fication et recevoir leur solution. V — DiFFÉRENCES ANATOMIQUES ENTRE LES SYSTÈMES ; LEUR RESSEMBLANCE FONCTIONNELLE. Par ailleurs, dans un système partiel équivalent au précédent, ces conditions font défaut. Le grand sympathique, qui représente une moelle extrara- chidienne, a, lui aussi, on n'en peut douter, une double communication, par voie afférente et effé- rente, avec les organes et les surfaces réceptrices qu'il met en relation fonctionnelle, au moyen de ses arcs réflexes. Des viscères à ses ganglions et de ses ganglions aux viscères, s'étendent à coup sûr deux ordres de conducteurs de nature radiculaire ; mais la dissémination de ses centres ganglion- naires, depuis la chaîne prévertébrale jusqu’au contact des organes et des éléments qu'il gouverne, aussi bien que la gracilité des tractus qui repré- sentent ces voies de communication, enlèvent sa raison d'être à la séparation anatomique des deux ordres de conducteurs, en tout cas empêchent que nous puissions à l'œil nu la voir et l'utiliser; on ne la reconnaît que d’une façon indirecte, par l’orien- lation des neurones et, comme toujours, en super- posant à ce caractère histologique les expériences faites sur les racines médullaires. Préposé au gouvernement local des appareils qui règlent la nutrition (vaisseaux sanguins, lympha- J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE tiques et aériens, tube digestif et ses glandes, ete.), le grand sympathique est, de ce fait, éparpillé dans l'organisme; c'est l'inverse pour la moelle épinière, système centralisé en vue de réactions dirigées contre l'extérieur. La moelle est un système simple qui est à la disposition du cerveau infiniment plus complexe; elle est l'organe exécutif, qui traduit finalement en actes moteurs les représentations et élaborations cérébrales, plus ou moins longtemps poursuivies, sous forme de véritables expériences intérieures, aussi économiques que possibles. Le grand sympathique, d'une facon plus simple, mais au fond analogue, répète celte disposition. Lui aussi se surmonte d'un système plus complexe que celui que représentent ses ganglions extérieurs et qui est construit en vue des associations nécessitées par la nutrition d'ensemble; il trouve, dès la moelle elle-même, certaines masses de la substance grise de celle-ci qui sont pour lui ce que le cerveau est pour la moelle. Au surplus, le système nerveux est un, c'est-à-dire solidarisé dans toutes ses par- ties. Cette séparation des deux grands départements du système nerveux, l’un pour les relations exté- rieures et l’autre pour les relations interorganiques, . vu la facon dont elle s’est opérée, est précisément ce qui a mélangé les éléments radiculaires de l’un avec les éléments intercentraux de l’autre. Les fibres radiculaires du premier ont été étirées de bas en haut par le retrait de la moelle dans le canal rachidien; les éléments intercentraux du second ont été élirés en sens inverse, pour alteindre dans leur position extra-rachidienne ses ganglions pri- maires. Dans ce double chemin, ces deux ordres d'éléments ont suivi les lois propres de l’organisa- tion des systèmes auxquels ils appartiennent; dans le cycle inférieur de l’un, simplicité schématique de la distribution des fibres suivant le sens de la conduction; dans le cycle supérieur de l’autre, multiplicité des associations réalisées par les chemins divers offerts au trajet des fibres. La complication des relations établies entre l’axe gris médullaire et les régions supérieures de la substance grise (écorce cérébrale, couche optique, cervelet, olives, noyaux du pont, ete.) est bien connue : elle fait le fond des descriptions de l’ana- tomie et des fonclions propres du système nerveux ; celle des ganglions du grand sympathique, avec les centres qui le surmontent (dont l'axe gris médul- laire lui-même), l’est beaucoup moins. On ne peut entrer ici dans ces détails, mais on s’en fera une idée en sachant que, de la moelle à un ganglion du grand sympathique, des fibres descendantes peuvent exister dans les deux ordres de racines (dorsales et ventrales) et que ces fibres, toujours pour atteindre le même ganglion, peuvent procéder d'étages mul- J.-P. MORAT — LA LOI DE MAGENDIE _. 61 tiples de l'axe gris par des racines éloignées les unes des autres. Si la dissémination du grand sympathique à créé des conditions qui nous masquent son système ra- diculaire, elle a, par compensation, singulièrement facilité l'étude de ses éléments intercentraux el permis de découvrir, dans le jeu réciproque de ceux-ci, une des fonctions les plus originales du système nerveux, l'inhibition"… Par contre, dans les masses compactes de la substance blanche cérébrale ou médullaire, il n’est pas facile d'identifier les nerfs, difficilement isolables les uns des autres, sur lesquels on agit, et c’est ce qu'il faut pouvoir faire pour tirer d'une expérience des conclusions fermes : même pro- blème, ainsi qu'on voit, que pour les fonctions des racines, trouver à l’état natif le corps pur ou facilement purifiable, dont on se propose d'étudier les propriétés. VI. — LE TEMPS PHYSIOLOGIQUE. En somme, le système nerveux est le siège d'un mouvement particulier, à peu près inconnu dans sa nature, mais auquel on peut assigner les trois carac- tères suivants : Ce mouvement est circulaire; il se réfléchit sur lui-même, non seulement dans les parties profondes du système, mais (par les organes qu'il provoque au mouvement) jusque sur les objets extérieurs qui lui restituent une partie de l’'ébran- lement qu'il a déchaîné contre eux. Dans les masses dites centrales, comme le cerveau, il est à croire qu'il se réfléchit, dans les deux sens, d’un étage à l’autre de la substance grise, d'une facon à peu près indéfinie, une fois qu'il y a été amorcé. Nos repré- sentations sont des états dynamiques et non pas statiques du système nerveux. Il est donc, d'autre part continu, entretenu qu'ilest, du reste, par des agitations (d'ordre spécifique) du milieu qui nous entoure, en même temps qu'ilse décharge lui-même, 4 L'inhibition est essentiellement une activité nerveuse, qui, en s'opposant à une autre activité nerveuse, suspend les effets de cette dernière, pendant qu’elle-même est en jeu; exemp'e: suspension des battements du cœur par l'excitation du nerf pneumo-gastrique ou moyen sympa- thique des Anciens. En voulant très à tort rapprocher ce phénomène, si particulier dans son déterminisme, d'autres phénomènes n'ayant avec lui qu'une ressemblance tout extérieure, on a fini par le défigurer complètement et, avec l'altération du mot, la notion qu'il représentait s'est elle- même à peu près perdue. Sous la plume de la plupart de ceux qui l’emploient, le mot « inhibition » est devenu synonyme de paralysie. Equilibre ne veut pas dire impuis- sance. par les organes moteurs, dans ce milieu. Enfin, il est irréversible. Les ondes qui le parcourent, amenées en lui par les voies des différents sens, interfèrent avec les ondes non seulement contempo- raines, mais avec celles aussi dont l'écho se pro- longe en lui, d'où une richesse de relations (asso- ciatives et dissociatives) véritablement infinie. Ce pouvoir à la fois de conservation, d'analyse et de synthèse du système nerveux, ces caractères ne sont pas suffisants à nous l'expliquer ; mais, à coup sûr, sans eux, il ne se comprendrait pas. Ces caractères, remarquerons-nous pour finir, sont ceux des systèmes naturels qu'étudie l’Astro- nomie et aussi des systèmes artificiels, réglés sur les précédents, qui nous servent à mesurer le temps | physique. Notre système nerveux est une horloge consciente de son propre mouvement; et, si les systèmes sidéraux ou autres pareils, qui nous mar- quent l'heure, nous donnent une mesure plus exacte du temps, sont aptes, par la forme de leurs mouvements propres, à constituer, par leur associa- tion avec lui, un système total plus puissant et plus précis, cela tient à ce qu'ils ont quelque chose de commun aveclui, comme ces verres grossissants, qui ne sont utilisables par nous que parce qu'ils ont la structure de notre œil. Il n'ya pasen nous un sens du temps, ni un organe du temps, pas plus qu'il n'y a un sens de l'espace, ni un organe de l'espace; mais il y a en nous, et plus visiblement dans notre système ner- veux que dans tout le reste de notre économie, une condition générale d'organisation qui répond à ce que nous appelons le temps et une autre qui répond à ce que nous appelons l’espace. Cette double con- dition, c’est dans le champ de la paire nerveuse, expérimentée par Magendie, qu'elle nous apparait clairement. Entre le système nerveux et le monde extérieur s'établit, par la voie des racines, une cir- eulation de ce quelque chose que, faute de le pou- voir mieux définir, on appelle l’excitation. La con- dition de la notion d'espace, c'est que le cercle soit fermé sur lui-même. La condition de la notion de temps, c’est que ce cercle ne soit praticable que dans un sens. Ainsi est créée en nous cette double toile de fond, aux bords fuyants et indistincts, mais à la trame continue, sur laquelle viennent s’or- donner toutes les impressions fournies par nos sens spécifiques, toutes nos sensations, tous les événements de notre existence. J. P.-Morat, Professeur à l'Université de Lyon 676 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Flammarion (Camille). — La Planète Mars et ses conditions d'habitabilité. 2°. 21. — 1 vol. gr. in-8° de 600 pages avec 426 dessins télescopiques et 16 cartes. (Prix : 12 francs.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1909. Il n’est pas de problème plus controversé, en Astro- nomie, que l'étude des surfaces planétaires et de leurs variations ; il n’en est pas de plus minutieux, de plus délicat. Il exige une attention continue, une méfiance perpétuelle, et, depuis l'invention des lunettes et des télescopes, la question est restée sensiblement station- naire jusqu'au milieu du xix° siècle. À ce moment, les observations précises commencaient à apparaître, à se multiplier ; mais le progrès était lent, d'abord à cause des variations singulières, et parfois très rapides, dans les détails des surfaces, moditications mystérieuses et déconcertantes au début; puis aussi, il faut bien l'avouer, parce que certains observateurs, emportés par la passion de leur sujet, dépassèrent les déductions vraiment légitimes de leurs observations pour entrer dans le domaine si captivant de l'hypothèse hardie. Alors se produisaient des réactions, et, plus était facile la cri- tique, plus les dilettantes niaient les efforts persévé- rants, les observalions cependant assurées, pour traiter de fantasmagories pures des déductions qui n'étaient qu'aventureuses. C'est que le problème posé est beaucoup plus diffi- cile qu'on ne pouvait l'imaginer a priori : l'influence de notre atmosphère et de son état local est considérable, et cette première cause de perturbation doit avant tout être écartée ; puis, la critique générale des résultats obtenus montre qu'il faut diminuer autant que possible les causes de divergence entre les divers observateurs, et que ceux-ci doivent accepter une discipline absolue dans tous les modes de notation et dans la façon d’uti- liser leurs instruments {rès variés. Car la synthèse des détails d’une surface planétaire, par un instrument de plus en plus faible, nous permettra, seule, de suivre en ordre inverse l'analyse progressive des instruments puissants ; la connaissance certaine des configurations planétaires est à ce prix. La valeur scientifique du résultat et sa haute portée philosophique légitiment largement des efforts énergiques et persévérants. Ainsi tous les efforts ont leur valeur et concourent au but commun; toutes les observations doivent être utilisées sans parti pris. La difficulté — et elle est déjà bien assez grande — consiste à grouper les faits, à les comparer, à les contrôler mutuellement, pour en déduire l’état vraiment scientifique de nos connaissances. Le problème a paru un instant résolu lorsque la pho- tographie est entrée si brillamment en compte dans les recherches astronomiques : la plupart des profession- nels crurent même qu'ils pouvaient s'en remettre défi- nitivement à la plaque photographique, et cesser toute confiance aux déterminations visuelles. Ce fut, là encore, une grosse illusion. Au fur et à mesure que le rôle de la photographie allait en grandissant, on lui demandait plus de détails, plus de précision, plus de puissance; mais, en même temps, surgissaient de toutes parts des doutes sur fa fidélité photographique, sur la stabilité et la permanence de la gélatine elle-même, qui se révélait capricieuse ; et l'homogénéité des résul- tats, indispensable au point de vue scientifique, était loin d'être acquise. Le nouveau procédé avait créé, de toutes pièces, de nouveaux problèmes, ardus et délicats, qui sont loin d'être entièrement élucidés. Certainement, c’est désormais à la photographie qu'il faudra surtout s'adresser: surtout, mais non pas exclu- sivement, la chose est assurée. Car, d’une part, la plaque a son langage particulier, qu’il faut savoir com- prendre, puis interpréter ; d'autre part, si l’on peut se lier à elle pour la description des lignes, pour l'in- terpréter géométriquement, il ne faut pas oublier qu’elle a aussi ses équations personuelles dans la traduction des couleurs, et qu'il serait illusoire de la vouloir mettre en contradiction avec l'œil; enfin, ces couleurs elles- mêmes, traduites par un clair-obscur, n’ont pas une impression constante, et la traduction photographique dépend de lois fort mystérieuses dans lesquelles entrent les procédés chimiques et techniques du photographe. Aïnsi, tant qu'on ne sera pas parvenu à amplifier et à vulgariser un procédé analogue au procédé Lippmann, la photographie restera muette — parfois dangereuse — sur ce côté de la question. Il faut donc, jusqu’à présent, à côté de l'appareil pho— tographique, un observateur attentif et exercé pour étudier les couleurs de toutes les taches, grandes et petites, les jeux de lumière et d'ombre : alors on peut espérer faire de véritables portraits d’une planète, comme ceux dans le style de Green, qui n’ont pas encore été dépassés, bien qu'ils soient assez pauvres en détails. D'ailleurs, les mêmes variations rapides des détails, si troublantes pour les observations visuelles, viennent compliquer le travail photographique : des. épreuves différentes, de la même soirée, analysées par diverses personnes, ne paraissent pas avoir donné les mèmes résultats! Encore une nouvelle difficulté qui surgit. Malgré tout, le progrès se fait jour tout doucement : l'ouvrage récent de M. André sur les Planètes le prouve d’une manière surabondante, quoique le savant di- recteur de l'Observatoire de Lyon dissimule mal son scepticisme au sujet des plus récentes découvertes. Pour Jupiter, en particulier, ne doit-on pas admirer les dernières recherches de M. Williams ? Mais il y a plus. Qui se serait douté que la science fût assez avancée pour fournir sur Mars deux volumes de 600 pages chacun, avec 1.016 vues télescopiques et 39 cartes géographiques de cette planète ? C’est pour- tant le tour de force que vient d'accomplir M. GC. Flam- marion : ses beaux livres, édités avec luxe, contiennent toutes les observations faites depuis deux siècles sur ce: monde voisin. Ce sont là de véritables annales de Mars : non seulement elles serviront aux astronomes et à tous les astrophiles de notre temps, mais elles constitueront un trésor inappréciable pour tous les chercheurs ultérieurs, et formeront la base absolue de tous les nouveaux travaux. Aussi est-ce avec grande rai- son que M. C. Flammarion a adopté le sous-titre d'En- cyclopédie générale, et le volume actuel s'arrête à la lin du xix° siècle. D'ailleurs, à côté des observations et des dessins, l'auteur a placé un exposé des efforts théoriques que: l'on a faits pour arriver à comprendre les manifestations de cette singulière planète : c’est là, à tous points de vue, une méthode excellente et fructueuse. C'est dans le volume suivant, assurément, que l'on verra la part exacte de Ja photographie, car nous entrons dans une ère nouvelle pour les études aréographiques. Sera-ce un triomphe ? Les plus récentes photographies de Lowell semblent l'indiquer : les disques supportent l'examen à la loupe ; ils apprennent souvent autant, parfois plus à certains égards, que les meilleurs disques dessinés au crayon, et les détails qu'ils présentent ne sont pas affectés d'équation subjective. Nous ne pouvons entrer ici dans les détails de la topo- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 6 graphie martienne : aussi bien, en outre, ce serait dimi- uuer les éloges que nous voulons faire de cet ouvrage, puisque tout y est signalé, critiqué et classé avec la plus grande méthode, avec le meilleur esprit encyclo- pédique ; tous les détails reconnus par plusieurs obser- vateurs sont notés, contrôlés, et l’on est en présence d’une quasi-certitude en matière de cartographie pla- nétaire. De plus, tous les problèmes sont étudiés, parfois élucidés, et il résulte une impression étrange après la lecture de cette Encyclopédie de M. C. Flammarion : il semble, véritablement, que l’on voyage sur un autre monde dont on saisit les dimensions, la densité et la distribution géographique, dont on connaît l’atmo- sphère, les climats et les saisons. Assurément, c'est la première fois que l'humanité terrestre a entre les mains la description aussi complète d’un autre monde, assez semblable à celui que nous occupons : est-ce suffisant pour nous laisser penser que Mars pourrait être habité, actuellement, par — comment s'exprimer! — par une race peut-être supérieure à la nôtre? Ii semble bien que l’on en apercoive déjà certaines mani- festations dans plus d’une forme bizarre observée à la surface. Mais le terrain ici se dérobe, scientifiquement. Nous ne pouvons que souhaiter très sincèrement à cet im- portant travail un succès égal à celui des autres œuvres de l’astronome érudit et fécond qu'est M. C. Flamma- rion. JEAN Mascarr, Astronome à l'Observatoire de Paris. 2° Sciences physiques Voigt (W.), Professeur de Physique mathématique à l'Université de Gôttingen. — Magneto und Elek- tro-Optik. — 1 vol. in-8° de 396 pages. (Prix 417 fr. 50.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1909. Les phénomènes magnéto- et électro-optique sont pris une importance de plus en plus grande, au fur et à mesure des découvertes expérimentales. Ils justifient l'identité de nature des phénomènes électriques et des phénomènes lumineux, soupconnée seulement par Faraday et Maxwell. Il semble même que l’étude de ces phénomènes nous promette encore d’autres résultats, et l’on peut supposer sans témérité qu'elle nous con- duira quelque jour à une théorie générale de la matière, c'est-à-dire, en résumé, à une théorie géné- rale du monde physique. Jusqu'ici, les nombreux travaux dont ils ont été l’objet se trouvaient dispersés dans les diverses publi- cations, et, sauf quelques monographies relatives à quelques-uns d’entre eux, nous n’en possédions aucun exposé d'ensemble. Il était donc assez difficile, surtout à celui qui n'avait pas suivi au jour le jour le dévelop- pement de ces questions fondamentales, de se faire une idée exacte de leur état actuel. D'autant plus que les théories des divers auteurs, tout en gardant en commun un certain nombre d'hypothèses, diffèrent notablement dans leur développement. On accueiilera done avec le plus grand intérêt l'ouvrage du Professeur Voigt, qui nous apporte l'exposé systématique dont on ressentait le besoin. Le Pro- fesseur Voigt était des mieux désignés pour cette tâche. Mathématicien de talent, ce qui n'exclut pas chez lui un sens très juste des réalités expérimentales, il s’est constamment préoccupé de ces questions, auxquelles lant ses travaux personnels que ceux qui ont été effectués sous sa direction ont apporté une con- tribution importante. Comme point de départ, il a adopté la théorie des électrons, qui était tout indiquée. En effet, si cette théorie n'a pas encore revêtu une forme définitive, elle est actuellement celle qui permet de relier le plus grand nombre de faits. È Rappelons que cette théorie explique les phénomènes électriques et optiques par les mouvements de corpus- cules très petits, ou électrons, possédant une masse mécanique et une charge électrique invariables. Cette masse mécanique et cette charge électrique sont sup- posées obéir aux lois générales de la Mécanique et de l'Electricité, telles qu'on les déduit des observations faites sur les corps de dimensions finies. Ces électrons sont groupés en systèmes ou constel- lations, auxquels on peut donner le nom d'atomes ou de molécules. L'un des points délicats de la théorie consiste précisément dans la nature des liaisons qui doivent exister entre les électrons ainsi groupés. L'extrème complication qu'on observe dans certains cas du phénomène de Zeeman oblige à supposer des liaisons assez compliquées aussi. M. Voigtfaitremarquer qu'il ne paraît guère possible d'admettre pourtant que ces liaisons soient exprimées par des équations non linéaires, comme l’ont proposé quelques auteurs. Des équations non linéaires, en effet, ne satisfont plus au principe de superposition, c’est-à-dire à l'indépendance des vibrations de période différente. Il préfère donc abandonner l'hypothèse admise par Lorentz de l'isotropie des groupes d'électrons. Si ces groupes ne sont pas isotropes, on conçoit aisément que leurs vibrations seront modifiées différemment par le champ magnétique suivant l'orientation de ce champ relativement au groupe. L'ouvrage est divisé en dix chapitres : 4. Polarisation rotatoire magnétique. — 2. Phéno- mène de Zeeman. — 3. Théorie des phénomènes magnéto-optiques dans les corps isotropes normaux; remarques générales, dispersion et absorption dans la théorie des électrons, phénomènes longitudinaux, phé- nomènes transversaux. — 4. Essai d'une théorie des types compliqués de l'effet Zeeman. — 5. Phénomènes magnéto-optiques dans les cristaux absorbants. — 6. Phénomène magnéto-optique de Kerr. — 7. Théorie des électrons et phénomène de Kerr. — 8. Phénomènes électrooptiques dans les corps isotropes et anisotropes. — 9. Vibrations des électrons associés dans un champ électrique. — 10. Théorie des électrons et phénomènes électrooptiques. Plusieurs reproductions, très bien venues, de photo- graphies relatives aux différents cas de l'effet de Zeeman permettent de se faire une idée suffisamment exacte de ces phénomènes; elles ont d'autant plus de valeur que l'observation directe exige un matériel dont beaucoup de physiciens ne disposent pas. MARCEL LAMOTTE, Professeur adjoint à l'Université de Clermont-Ferrand. Bayliss (W. M.), Assistant Professeur de Physio- logie à University College, London. — The Nature of Enzyme Action. — 1 vol. in-8° de 90 pages. (Prix: 3 fr. 75). Longmans, Green and C°, éditeurs. Lon- dres, 1909. Depuis quelques années, l'étude expérimentale des diastases et la théorie de leurs effets sont à l'ordre du jour dans la plupart des laboratoires, où chimistes, physiciens et physiologistes s'efforcent de déterminer la nature et d'expliquer l’action de ces agents mysté- + rIEUX. L'importance du sujet justifie pleinement ces efforts, puisque chaque jour nous apporte de nouvelles preuves que les équilibres diastasiques forment la base de tout phénomène vital, comme s'ils en étaient la cause prin- cipale et peut-être unique. Il est donc du plus haut intérêt de réunir et de coor- donner, dans la mesure du possible, toutes les connais- sances acquises sur cette question. Qu'est-ce que les Enzymes, comment s'exerce leur activité et d'où pro- viennent-ils? C'est ce que le Professeur Bayliss à essayé d'apprendre à ses auditeurs de University Col- lege. L'ouvrage qu'il nous présente aujourd'hui n’est autre chose qu'un résumé de ses lecons ; il se borne, d’ailleurs, à y envisager les caractères généraux des diastases, sans s'arrêter à décrire chacune d'elles en détail. M. Bayliss commence par examiner rapidement les principaux catalyseurs minéraux, puis il en rapproche les diastases, qu'il n'hésite pas à considérer comme autant d'agents de catalyse, instables par nature et surtout très sensibles à l’action de la chaleur. Il déduit de là la notion bien connue d’un optimum de tempéra- ture spécifique : c’est le point où l'accélération ther- mique de l'effet catalyseur est exactement compensée par l'effet destructeur que la même élévation de tem- pérature exerce sur l’enzyme. Passant ensuite à l'examen physique des diastases, M.Bayliss nous les montre formées de colloïdes en sus- pension dans une solution parfaite. La phase solide de ce système hétérogène conserverait une grande énergie réactionnelle à cause de l'énorme développement de sa surface micellaire, et posséderait, comme tous les col- loïdes, la faculté de s'unir par absorption à une foule d'autres substances. Le signe de leur charge électrique joue sans doute un rôle prépondérant dans ces phéno- mènes d'absorption. L'auteur passe ensuite rapidement en revue les di- verses méthodes qui permettent de préparer les dias- tases et de mesurer leur activité ; à ce dernier point de vue, il signale l'emploi du viscosimètre, applicable à l'étude des enzymes protéolyliques ou protéoclastiques, du réfractomètre, du spectrophotomètre et du colori- mètre ; il recommande particulièrement la mesure des conductivités électriques, qui permet de suivre, sans modifier la composition du milieu, la réaction dans tous les cas où il y a mise en liberté d’un électrolyte acide, comme dans l'hydrolyse des graisses, ou salin, comme dans celle de la sinigrine. Les actions diastasiques sont, au moins dans un cer- tain nombre de cas, réversibles. M. Bayliss rappelle à ce sujet les diverses recherches qui ont permis d’éta- blir ce point important de leur histoire, Peut-être faut- il faire quelques réserves à propos de cette affirmation de l’auteur que l’isomaltose est un simple isomère optique du maltose; quant à cette opinion, exprimée plus loin (p. 55), que l'arrêt observé autrefois par Brown et Héron dans la saccharification diastasique de l'empois est dù à une action réversible capable de transformer le maltose en dextrine, on ne saurait l’accepter aujourd'hui, alors que nous savons que ce prétendu arrêt n’est qu'un ralentissement de l’hydro- lyse. Vientensuite un long chapitre relatif aux lois numé- riques de l'action des enzymes. L'auteur y rappelle les différentes formules qui ont été proposées à ce sujet, puis fait remarquer avec raison que ces lois ne peuvent être aussi simples que celles qui régissent les autres effets de catalyse, parce que l'énergie de l'agent actif est, dans le cas des diastases, variable à chaque instant avec la composition du milieu dans lequel il fonctionne. Déjà cette variabilité s'observe dans nombre de réac- tions d'ordre purement chimique, et c’est à ce propos qu'Ostwald à introduit dans la science la notion d’auto- catalyse : dans la saponification par l’eau des éthers- sels, par exemple, il apparaît des acides qui accélèrent rapidement la vitesse de réaction tant qu'ils restent libres, puis la ralentissent s'ils sont capables de se lac- toniser. L'autocatalyse peut ainsi être positive ou néga- tive, suivant que les substances formées agissent dans le même sens que le catalyseur ou, au contraire, en sens inverse. Dès lors, M. Bayliss compte parmi les causes qui tendent à retarder l’action diastasique : 1° La réversibilité; 2° La combinaison de l’enzyme avec les produits de dédoublement ; 3° L'autocatalyse négative ; 4° La décomposition ou quelque transformation irré- versible de l’enzyme ; Et parmi les causes d'accélération : 1° La combinaison de l’enzyme avec le corps hydro- lysable ; 2° L'autocatalyse positive. Nous ne pouvons qu'approuver hautement ces con- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX clusions, qui rendent bien compte de la complexité des phénomènes d’origine diastasique, comparés à ceux qui se manifestent dans l'emploi des catalyseurs minéraux. L'auteur examine ensuite la question, bien obscure jusqu'ici, de l’union des enzymes, par combinaison chimique ou absorption, avec leur substratum, puis celle des co-enzymes, des anticorps et des substances zymogènes. À ce propos, il rappelle l'expérience capitale de Harden et Young, dans laquelle on voit la zymase de levure perdre ses propriétés fermentatives quand on Ja prive par filtration de sa partie colloïdale, d'ailleurs inactive, et la reprendre quand on la lui rend. Il consacre enfin un assez court chapitre à l'étude de quelques systèmes complexes, en particulier du pro- cessus d'oxydation diastasique et de la fonction chlo- rophyllienne. Admettant l'hypothèse de Bach et Chodat, il considère les oxydases comme la réunion d’une peroxydase avec un peroxyde sans cesse renouvelable, mais constate qu'il est impossible d'expliquer d'une manière satisfaisante la spécificité de certains de ces enzymes,comme, par exemple, la laccase et la tyrosinase de M. G. Bertrand; il est sans doute nécessaire, comme dans bien d'autres circonstances, qu'il existe quelque relalion de structure entre le peroxyde et son sub- stratum, pour que le premier puisse agir sur le second. En résumé, le petit livre de M. Bayliss renferme un grand nombre de considérations intéressantes, dont quelques-unes personnelles, mais qui sont, en général, d'ordre théorique plutôt que d'ordre pratique. Le côté chimique de la question y est un peu négligé, et nous aurions aimé y voir plus d'indications expéri- mentales sur chacun des enzymes étudiés, mais il eût fallu pour cela donner à l'ouvrage la forme plus banale d’une suite de monographies et en accroître les dimen- sions au delà, sans doute, des limites que l’auteur s'était imposées. Tel qu'il est, il peut rendre de réels services, et la lecture s'en recommande à tous ceux qui s'inté- ressent à l'histoire des diastases. L. MAQUENNE, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum national d'Histoire naturelle 3° Sciences naturelles Vélaïn (Charles), Professeur de Géographie physique à la Faculté des Sciences de Paris. — Revue de Géographie annuelle. Tome 11, année 1908. — 1 vol. in-4° de 730 pages, avec figures et planches. (Prix : 415 fr.) Delagrave, éditeur. Paris, 1909. Ce nouveau volume renferme, comme le premier, un grand nombre de Mémoires intéressants à divers titres. Dans une originale Ætude analytique du relief de Ja Corse, M. J. Deprat met en évidence, d’une manière saisissante, les contrastes de structure entre la Corse cristalline et la Corse sédimentaire. Il montre que ces deux régions, accolées dos à dos, sont si complètement étrangères l’une à l’autre dans leurs formes extérieures que, bien loin de se prolonger, les directions générales de leurs accidents tectoniques sont presque orthogo- nales. L'auteur, entrant dans le détail, analyse ensuite les facteurs génétiques du modelé des côtes et du relief intérieur, en insistant sur le rôle prépondérant de la distribution des massifs granulitiques. Des conséquences ethnographiques et économiques, dont M. Deprat nous promet pour bientôt l'exposé, viendront compléter heureusement cette consciencieuse étude de Géographie physique. La majeure partie du volume est consacrée à un important travail de M. le Capitaine G. Perrier sur La liqure de la Terre. L'auteur, qui a pris pendant plu- sieurs années une part très active à la nouvelle mesure de l'arc méridien de Quito, ne s’est pas seulement pro- posé de nous initier d’une manière pittoresque aux difficultés rencontrées par les artisans de cette mémo- rable opération géodésique. Il à voulu surtout en montrer la haute importance scientifique, et, dans ce BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 679 but, faire un exposé logique du rôle de la Géodésie et des perfectionnements successifs imposés à ses méthodes par le souci, de plus en plus nécessaire, de l'exactitude. Cette tâche séduisante était loin d’être inutile. Beau- coup d’esprits cultivés, tout en admirant le témoignase crucial apporté par les premières mesures géodésiques précises en faveur des plus hautes théories de la Méca- nique céleste, s'étonnent parfois de voir poursuivre dans un domaine ayant pour objet principal l'étude du globe terrestre tout entier, une minutie scrupuleuse qui leur apparaît comme un luxe assez peu justifié. Le travail de M, Perrier sera pour tout lecteur attentif une démonstration convaincante de l'utilité que présente en Géodésie cette recherche incessante de l’absolu. Avec une netteté parfaite, et sans entrer dans des développements mathématiques que ne comportait pas le cadre de ce recueil, l'auteur montre comment, pour mettre plussûrement d'accord lesrésultats desanciennes mesures, on à été conduit, tout en perfectionnant les instruments, à préciser les idées théoriques qui doivent guider tout travail géodésique : forme la plus avanta- geuse à donner aux triangles, compensation du réseau, enfin réduction des observations à une surface de réfé- rence convenablement choisie. L'impossibilité, bientôt reconnue, d'appliquer absolu- ment tous les arcs mesurés sur le même ellipsoïde de révolution amène à l'étude plus délicate du géoïde. Ici, la méthode dynamique, susceptible en principe de faire connaître à elle seule la forme du géoïde, vient apporter aux mesures géodésiques un concours pré- cieux. Mais comment choisir la surface de niveau à laquelle on rapportera les mesures de gravité effectuées sur la surface géographique du globe? Aucune ques- ton n’a été plus discutée, plus embrouillée même, et il faut savoir le plus grand gré à M. Perrier de guider le lecteur avec sûreté parmi le labyrinthe des défini- tions multiples du géoide. Les conceptions de Bouguer, de Stokes, de Faye, de M. Helmert et celle de M. Brillouin, la plus logique, assurément, sinon la plus en faveur auprès des géodé- siens, sont tour à tour présentées avec leurs avantages particuliers; et la notion de la compensation isosta- tique de Pratt montre quels résultats précieux la Géo- logie est en droit d'espérer des travaux géodésiques futurs. M. Perrier ne pouvait manquer d'indiquer la voie féconde nouvellement ouverte par l'adoption de la méthode hypsométrique, grâce à laquelle on peut mesurer la pesanteur en mer, c'est-à-dire sur la por- tion du géoïde à la fois la plus étendue, la seule réelle- ment matérialisée, mais aussi la seule inaccessible aux mesures géodésiques. On en trouvera l'exposé dans la dernière partie du travail, avec ce qui concerne la variation des latitudes. Tout cet apercu théorique est excellent, et d’une lec- ture attachante. Tout au plus pourrait-on se demander si l’auteur, à son insu, n'a pas cédé parfois à la ten- dance d’exagérer la précision, déjà si remarquable, des résultats obtenus. Malgré tous les perfectionnements apportés à la détermination de l'heure, n'est-il pas un peu osé d'assurer que l'emploi du télégraphe électrique permet d'obtenir les différences de longitudes au 1/100 de seconde près? On ne peut que souhaiter la justification sans résarves de cette assertion par la publication des résultats de la récente détermination Paris-Greenwich. Ayant ainsi éclairé le lecteur sur l'importance des opérations géodésiques, M. le Capitaine Perrier lui offre un historique comparatif fort intéressant des mesures de la méridienne de Quito effectuées au xvir® siècle par les académiciens, et dernièrement par le Service géographique de l'Armée. On y trouvera, une fois de plus, la preuve qu'à toute époque la science française n'a jamais reculé devant les plus grandes difficultés matérielles pour la simple conquête d’une décimale minime qui, en dépit de son apparence négligeable, n'en révèle pas moins l'existence d’un de ces faits à grand rendement dont parle M. H. Poincaré. La seconde partie de la Revue renferme d'abord un article de M. A. Berget sur Les Méthodes et les instru- ments du géographe voyageur, où les explorateurs trouveront de fort judicieux conseils. Certaines pres- criptions, néanmoins, eussent encore gagné à être un peu plus précisées dans le détail. C'est ainsi que, dans l'exposé de la méthode graphique empruntée au Géné- ral Berthaut pour la détermination de la latitude, l'omission de la prescription essentielle de retourner la lunette du théodolite en passant d’un bord à l’autre du soleil risque de rendre peu compréhensible la solu- tion de continuité entre les deux courbes corrigées l'une et l'autre pour le centre de l’astre. Mais l’auteur avait évidemment en vue plutôt des indications géné - rales qu'un formulaire pratique pour chaque cas parti- culier. On lira enfin avec fruit les Notes sur le Pérou, de M. Guibeaud, un substantiel bilan de la Colonisation européenne dans le monde, de M. Zimmermann, et une étude comparative des limites de la Glaciation quater- naire et de la glaciation actuelle en Maurienne et eu Tarentaise, de M. P. Girardin. E. Ficor, Ingénieur hydrographe de la Marine. Mayet (Lucien), Docteur en Médecine et Docteur ès Sciences, Chargé de Cours à l'Université de Lyon, et Lecointre (Comtesse Pierre). — Etude som- maire des Mammifères fossiles des Faluns de la: Touraine.— 1 fascicule de 12 pages des Annales de l'Université de Lyon. Baillière et fils, éditeurs. Paris, 1909. Cette monographie est une contribution des plus intéressantes à l'étude scientifique des faluns, et qui prend place, à la suite des grandes publications d’en- semble, parmi les meilleures études régionales. La nouvelle série de documents paléomammalogi- ques que les auteurs ont mis au jour infirme, sur plu- sieurs points, les opinions reçues, et confirme l'indivi- dualité et les caractères propres de la faune des faluns. Il faut remercier M. le D' Mayet et Me la comtesse Lecointre, — qui donne à la science tout le temps dont elle dispose —, d'avoir attiré une fois de plus l'attention sur l'intérêt que présente l'étude de la faune des Mammifères des faluns, qui se place parmi les faunes ayant le plus directement précédé l'apparition de l'Homme sur le sol français. 4° Sciences médicales Marie (D' A.), Médecin en Chef de l'Asile de Vile- juif, Directeur du Laboratoire de Psychologie de l'Ecole des Hautes-Etudes. — L’Audition morbide. — 4 vol. in-16 de 146 pages de la Bibliothèque de Psychologie expérimentale. (Prix : 4 fr. 50.) Bloud et Cie, éditeurs. Paris, 1909. « Les sens spéciaux précisent nos connaissances en se contrôlant mutuellement, et nous donnent l'appré- ciation la plus pénétrante possible des réalités qui nous entourent. « On concoit donc, toutes choses égales en ce qui concerneles voies d'association intellectuelles centrales, que l’obstruction des voies centripètes et de réception d'un ou plusieurs sens spéciaux altèrent secondaire- ment notre appréciation du monde réel ambiant; si ces altérations sont précoces ou congénitales, on conçoit même que l'insuffisance sensorielle puisse entraîner l'insuffisance intellectuelle. Au premier rang des sens spéciaux, l’ouie, sens intellectuel par excellence, puisque sens du langage articulé, est particulièrement à considérer dans ces altérations morbides fonction- nelles. » Il est donc intéressant d'étudier les perturbations qui appartiennent en propre au sens spécial de l’ouie, 6S0 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX et de chercher à définir la part qui revient à ces per- turbations dans le fonctionnement mental. « Les dégénérés à insuffisance auditive ne forment que des jugements incomplets et défectueux sur les impressions sonores. Chez eux, l’image auditive suscite mal l'idée. C’est qu'il leur manque, de même qu'aux «débiles visuels, bien qu'à un plus faible degré, l’atten- lion volontaire suffisante. » Par une éducation spéciale de l'attention, on peut perfectionner notablement ces sujets. Par là, on entrevoit l'intérêt pratique de cette étude. L'auteur examine successivement deux sortes de troubles de l'audition : les troubles par défaut, Aypoa- cousie; les troubles par excès, hyperacousie. Il passe en revue les mécanismes de l'audition et les différents troubles morbides qu'elle peut présenter, soit que le sujet, par suite du développement imparfait de son appa- reil auditif, se montre incapable de percevoir certains sons, soit que, les percevant, il ne puisse les interpréter. Chez les hyperacousiques, on n'observe pas une acuité plus vive de l'organe sensoriel, mais la réaction dispro- portionnée du cerveau à une excitation banale. Un index bibliographique complète cette étude. 5° Sciences diverses Mach (Ernst), Professeur à l'Universilé de Vienne. — La Connaissance et l'Erreur, traduit sur la der- nière édition allemande par M. le Dr Marcez Durour, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Nancy. — 1 vol. de la Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix :3 fr. 50.) Ernest Flammarion, éditeur. Paris, 1909. Le livre de M. Mach contient une méthodologie scien- tifique et une psychologie générale de la Connaissance. Et, à ce titre, il intéresse à la fois les savants et les phi- losophes. En analysant les voies par lesquelles le savant abou- tit à la découverte d’une vérité, M. Mach s’est con- vaincu que l'activité scientifique n’est en somme qu'une modification aiguisée, affinée, de l’activité déployée Journellement par les hommes à l'état de nature et à l’état civilisé, et même de l'activité instinctive des animaux. Pour lui, tout le travail scientifique, en effet, comme la vie psychique dans ses diverses manifesta- tions, a comme source profonde les exigences biolo- giques, et pour point de départ la sensation. Nos sensations sont le fondement de toutes nos per- ceptions physiques, et on les retrouve aussi à la base de nos souvenirs, représentations, sentiments, volontés et concepts. C’est pourquoi il faut s'attacher avec le plus grand soin à cette étude de la sensation. Le pre- mier bénéfice qu'on en retire est de se débarrasser immédiatement de certains préjugés philosophiques qui encombrent les recherches actuelles et sont restés comme les débris de recherches antérieures. Au nombre de ces préjugés se trouve la croyance qu'entre le physique et le psychique il y a une démarcation nettement tranchée. Le physique et le psychique ont, au contraire, des éléments communs, et leur point d’at- tache est dans la sensation. Quand on remonte au point de vue primitif, quand on essaie d'examiner les faits avec une naïveté voulue, on s'apercoit qu'il n’y a pas de choses isolées, qu'il n'y a pas d’un côté les « corps », la «réalité extérieure », et, d'un autre côté, le « moi», le « sujet pensant ». L'antagonisme que la pensée vulgaire a créé, à tort, entre le « phénomène » et la « chose » se retrouve en philosophie entre l’in- connaissable « chose en soi » el les « apparences ». Après avoir montré l'importance de la sensation dans la vie psychique, M. Mach insiste sur le rôle, con- sidérable aussi, des associations. Etant donné que les faits offrent une fixité et une périodicité approximatives, c'est sur les associations d'idées que reposent toutes les adaptations psychiques du milieu, toutes les expé- riences vulgaires, et même toutes les expériences scien- tiliques. M. Mach examine la formation des associa- tions chez de jeunes animaux, puis chez l’homme, et il remarque que le principe est le même;iln'yena qu'un seul : le principe de simultanéité. L'étude que M. Mach consacre au « concept » est une des parties les plus fines, les plus pénétrantes du livre. Il montre que la formation du concept n’est pas ins- tantanée comme celle d’une représentation sensible; elle n’est pas simple, elle n’a lieu que lentement au cours du temps, et c’est pourquoi il est difficile de retrouver dans la conscience un contenu intuitif, con- cret, qui en épuise complètement le sens. Le point de départ du concept est pourtant la représentation simple, mais qui s’est enrichie peu à peu, grâce aux associations, aux souvenirs multiples emmagasinés dans une foule d'expériences et de réactions. Ce n’est qu'avec effort, et lentement, que nous arriverions à évoquer les représentations concrètes embrassées par le concept. « Avec le sentiment de la possibilité cer- taine de la reproduire, l'intuition potentielle doit ici remplacer l'intuition actuelle. » La fin du livre est consacrée plus particulièrement à l’activité scientifique. Le travail scientifique peut se ramener à deux par- ties essentielles : d’abord, l'adaptation des pensées aux faits dont on doit obtenir une image suffisamment exacte, ensuite l'adaptation des pensées entre elles. L'adaptation des pensées aux faits, c'est, pour mieux dire, fobservation. L'adaptation des pensées entre elles. dépasse ce qu'exige la logique, c'est-à-dire l'absence de contradiction. Toute simplification dans les pensées, tout allégement pour la mémoire, tout arrangement qui ménage la plus grande économie possible d'effort intellectuel est un progrès dans le sens de cette adap- tation. En somme, le travail scientifique répond aw besoin que nous avons de nous orienter, de nous reconnaitre à travers la multitude des faits. Examinant ensuite dans le détail l'activité du cher- cheur, M. Mach distingue l'expérimentation mentale de l’expérimentation pAysique qui la suit et la précise. Il étudie d'une façon concrète, avec d'excellents exemples à l'appui, la méthode des variations, la méthode de la sommation des eflets, celle de la com- pensation et les méthodes de zéro. Il étudie également d'une facon très fine le rôle de la similitude et celui de l’analogie comme motifs directeurs de la recherche scientifique. La similitude lui apparaît comme étant une identité partielle, l’ana- logie une similitude d'ordre abstrait. Dans le chapitre si intéressant sur la psychologie de la déduction et de l'induction, M. Mach montre que le syllogisme et l'induction n’augmentent pas nos con- naissances: elles ne font que les ordonner. C’est seule- ment par l'observation et l’abstraction que nos con- naissances s'étendent. L'œuvre se termine par une étude sur le sens et la valeur des lois scientifiques. La définition de la lor est originale. « D'après leur crigine, les lois naturelles sont des restrictions que, conduits par l'expérience, nous prescrivons à notre attente des phénomènes. » Le livre de M. Mach est digne des plus grands éloges d'un bout à l’autre. Je ne veux pas dire qu'il n’appelle pas la critique ou la contradiction sur plus d'un point. Mais cela même est le fait des œuvres nouvelles et fortes qui obligent le lecteur à renouveler et à con- trôler ses propres idées. On n’en regrette que plus vivement l'absence de deux chapitres concernant les théories-de la Géométrie, et qui ont été supprimés comme faisant double emploi avec ce que M. Poincaré a écrit sur la question. La rencontre, sur un même point important, de deux esprits éminents, n’eût sans doute pas été entièrement dépourvue d'intérêt. LÉON JALOUSTRE, Ancien élève de l'Ecole normale supérieure, Agrégé de l'Université, Professeur au Lycée et à l'Ecole de Médecine d'Amiens. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 681 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 12 Juillet 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Lebesque com- plète une démonstration relative aux suites de fonctions naturelles. — M. D. Pompeiu présente ses recherches sur les singularités des fonctions analytiques uniformes. — M. Edm. Maillet étudie le mouvement de » réser- voirs (d'eau avec surface libre, de gaz, de chaleur), communiquant deux à deux. — M. L. Fabry déduit, de l'examen des pays atteints par le tremblement de terre du 11 juin en Provence, que l'écorce terrestre à été frappée de bas en haut par une masse sous-jacente. — M. À. Angot signale l'enregistrement, à l'Observa- toire du Parc Saint-Maur, d'une perturbation sismique le 7 juillet, dont l'épicentre doit se trouver dans la région de l’Hindou-Kouch ou du Pamir. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Tscherning préconise un nouveau genre de verres de lunettes, dits orthosco- piques, où la distorsion a été supprimée en les rendant aplanétiques pour un point situé à l'endroit de la pupille. — M. G. Reboul décrit un appareil permettant de déceler les phénomènes électriques qui se produi- sent pendant les réactions chimiques. Il conclut que dans tout milieu où se produit un bouleversement moléculaire, il y aurait production d'électricité. — M. B. Szilard à séparé l'uranium X de l’uranium en précipitant de l'hydrate de fer au sein des solutions d'uranium, lequel précipité entraîne la majeure partie de l'uranium X. Ce dernier, à l'état de pureté, serait 10 milliards de fois plus actif que l'uranium en équi- libre radio-actif. — M. M. Kernbaum a vérifié que les rayons pénétrants du radium décomposent l’eau avec formation de H°0? et H°; l'effet parait dù entièrement à l’action des rayons $. — M. G. Moreau a reconnu qu'une lame de métal chauffée peut être facilement traversée par les ions négatifs produits dans une flamme. La vitesse de diffusion est proportionnelle à la différence des pressions des ions de part et d'autre de la lame. — M. T. Bialobjeski a obsefvé que les rayons & émis par le polonium produisent dans le soufre, pris comme diélectrique, un courant très fort au début, qui se réduit rapidement à zéro, tandis que le rayonnement pénétrant produit un courant qui s'affaiblit avec une extrème lenteur. — M. G. D. Hinrichs critique la solution proposée par M. Dubreuil pour l'équation de condition relative au calcul des poids atomiques. — M. D. Gernez montre que l’opacitication des cristaux transparents de sulfate de sodium heptahydraté au con- tact des cristaux du décahydrate est due à la pénétra- tion, dans les réseaux cristallins des premiers, de solu- tion sursaturée ambiante des seconds. — M. de For- erand à constaté que l’hydrate normal du carbonate de rubidium Rb?C0*.1,5H°*0 donne un monohydrate paf efflorescence. Au contraire, Cs?C0*.1,54°0, chauffé vers 98°, fournit lentement, mais sans arrêt, le sel anhydre. — M. R. Dubrisay a reconnu que l'élévation de température est sans action sensible sur la décom- position hydrolytique du bromure de bismuth; il ne se précipite qu'un seul oxybromure. — MM. L. Guillet et Ch. Griffiths montrent que le carbone pur ne cémente par le fer dans le vide si l'on se met à l'abri des gaz; mais, si l'on assure le contact, la cémentation a lieu; elle augmente avec la pression, tout en étant très lente. — MM. G. Urbain, F. Bourion et Maillard décrivent les méthodes qui leur ont permis d'extraire le lutécium des terres de la gadolinite et de le séparer du scandium et du thorium qui l’accompagnent dans ce minéral. — M. M. Guerbet, en faisant réagir l'alcool isopropylique sur son dérivé sodé, a obtenu le méthylisobutylcarbinol déjà connu et le diméthyl-2 : 4#-heptanol-6, Eb. 1940- 1950. — MM. A. Wahl et P. Bagard ont préparé les iso-indogénides de quelques aldéhydes aromatiques, par condensation de ces dernières avec l’oxindol au sein de l'alcool bouillant. Ce sont des composés colorés en jaune. — M. M. Mirande a constaté que, sous l'influence des vapeurs dégagées par les substances qui d'ordinaire suspendent la fonction chlorophyllienne (Hg, CS?, chlo- roforme, etc.), les plantes qui contiennent des com- posés cyaniques exhalent de l'acide cyanhydrique. I] en résulte un procédé rapide de recherche de ce der- nier dans les plantes. — M. L. Guignard à observé de son côté que, si l’on fait agir des anesthésiques ou le gel sur certaines plantes contenant des slucosides, ces derniers sont dédoublés en leurs constituants. — M. C. Gerber a reconnu que la présure de la Belladone se trouve dans toutes les régions du cylindre central de la tige, même le bois; c’est la plus résistante à la chaleur des présures végétales. — M. N. A. Barbieri à fractionné la bile de bœuf en # parties : principes solubles dans l'éther de pétrole (cholestérine, huile de bile), dans l'eau (biline), dans l'alcool (sels sodiques biliaires), dans le chloroforme (biliverdine). — MM. E. Kayser et A. Demolon montrent qu'après fermenta- tion la cellule de levure se comporte comme une cel- lule normale, respirant normalement et brülant, en particulier, les acides organiques. — MM. Maurain et G. Warcollier ont constaté que les rayons ultra-violets, agissant sur des couches minces de cidre pur ou des couches plus épaisses de cidre dilué, arrêtent la fer- mentation des cidres doux. — MM. J. Courmont, Th. Nogier et A. Rochaix montrent que l'immersion pro- longée d’une lampe en quartz à vapeur de mercure dans de l’eau renfermant de l'oxygène ne produit pas d'ozone et modifie peu les matières dissoutes. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier : Action de l'urohypotensine sur la pression artérielle {voir p. 682). — MM. Th. Nogier et C1. Regaud ont constaté qu'à égalité de rayonnement l’épithélium est beaucoup plus vulnérable que les tissus profonds par les rayons X mous que par les rayons durs. Par contre, les spermatogonies sont beaucoup plus vulné- rables par les rayons durs. -— MM. Florence et Clément montrent que l'élimination du sucre dans l’épilepsie est irrégulière, prolongée, polycyclique; la glucosurie serait due à des excitations réflexes parvenant au foie. — MM. J. Gautrelet et L. Thomas ont observé que le sérum du chien privé de surrénales a une action hypo- tensive ; celle-ci paraît due à la présence de la choline. — M. Ch. Nicolle est parvenu à transmettre le typhus exanthématique de l'homme au chimpanzé et, après passage par celui-ci, au bonnet chinois, espèce com- mune, par inoculation du sang. — M. E. Fauré-Fré- miet à reconnu que les mitochondries sont insolubles dans l'acétone, l'alcool, l'éther et le chloroforme ; mais, après l'action de ces solvants des graisses, leur affinité pour l'acide osmique diminue fortement et certaines colorations ne peuvent plus s'effectuer. — M. J. Pelle- grin a étudié la daune ichtyologique du lac Victoria; sur 65 espèces connues, 49 lui sont spéciales. Jusqu'à une période récente, le lac est resté séparé du Nil. — M. Aug. Michel poursuit ses recherches sur les Sylli- diens en stolonisation et en régénération. — MM.-A. Laveran et A. Pettit ont trouvé chez le Pituophis molanolencus une hémogrégarine nouvelle, qu'ils nom- ment 4. pituophis; ses kystes présentent une résistance remarquable. — M. Aug. Chevalier signale 1x présence 652 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de sortes de tourbières sur les rochers granitiques de l'Afrique tropicale, constituées par le feutrage des racines et rhizomes de l'£riospora pilosa. — M. V. Roussanof a déterminé les fossiles trouvés dans les schistes argileux noirs de Ja Nouvelle-Zemble; ils appartiennent au Silurien de Bohême, ce qui montre qu'à cette époque il y avait une large communication entre la mer arctique et la mer de l'Europe centrale. — M. A. Gautier a observé que les gaz des fumerolles volcaniques sont ceux qu’on obtient en distillant au rouge dans le vide les roches primitives; la vapeur d’eau en forme la partie la plus abondante et elle est bieu d’origine interne. CO? diminue à mesure qu'on s'éloigne de l’éruption. Le gaz qui se dégage des an- ciens cratères est surtout du CO*. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 10 Juillet 1909. M. Ch. Dopter a isolé du rhino-pharynx quelques germes voisins du méningocoque, mais en différant par l’inagglutinabilité et l'épreuve de la saturation des précipitines; il les nomme paraméningocoques. — M. A. Sicre recommande d'utiliser, pour la recherche de l'indol dans les cultures microbiennes,. des pep- tones qui n’en contiennent pas, c'est-à-dire celles de Chaix, Witte ou Poulenc. — M. A. Therre a observé chez la chèvre en état de lactation physiologique, des variations légères du nombre des globules rouges et insignifiantes du chiffre des Jleucocytes, puis une élé- vation du taux de l’hémoglobine. — M. G. Dubreuil estime que les lymphocytes sortis d’un vaisseau et tombés en tissu conjonctif peuvent, dans certaines conditions, aiguiller soit vers la lignée des cellules connectives, soit se transformer en plasmazellen. — MM. Ch. Achard et M. Aynaud ont constaté que les globulins du sang d’un animal préparé pour l'anaphy- laxie sont excessivement sensibles à l’agglutination. — MM. L. Lesourd et Ph. Pagniez ont observé que le sérum syphilitique donne une réaction précipitante qui paraît spécifique vis-à-vis des solutions de glyco- cholate de soude. — M. J. Verne aétudié les phéno- mènes de régénération de l’épithélium de l’appendice iléo-cæcal après une inflammation aiguë. — MM.C. Va- ney et A. Conte montrent que les cellules vitellines de l'œuf du ver à soie ne jouent pas le rôle passif de sacs à réserves; elles résorbent leurs globules vitellins, créant un matériel nutritif fluide que l'embryon em- prunte par osmose. — MM. J. E. Abelous et E. Bar- dier montrent que la baisse de pression consécutive à une injection intra-veineuse d'urohypotensine est le résultat d’une vaso-dilatation généralisée par excitation périphérique. — M. G. Billard signale l'immunité naturelle du Lérot commun (£/iomys nitela) contre le venin de la vipère. — MM. Maurel et Carcanague ont constaté que le blanchiment (ébullition) des légumes dans l’eau pendant trente minutes diminue beaucoup leur richesse saline, surtout en sels de potasse; elle paraît les rendre plus digestibles. — M. E. Laguesse a reconnu que le nombre des îlots endocrines du pigeon augmente considérablement pendant la période de jeûne, pour diminuer de nouveau pendant celle qui suit le retour à la ration normale. — M. Lafforgue a inoculé à des cobayes le sang de cobayes tuberculeux; dans deux cas sur quatre, le résultat a été positif; la tu- berculose qui s’est développée affectait la forme gan- glionnaire. — MM. C. Mathis et M. Léger signalent la présence d’un leucocytozoaire chez les chiens du Tonkin. — MM. A. Netter et R. Debré ont constaté que l'absorption du sérum injecté dans la cavité rachi- dienne, au cours de la phase aiguë de la méningite cérébrospinale, se fait à peu près aussi vite que si le sérum étaitinjecté sous la peau. — M. À. Guilliermond a observé chez un bacille de l'intestin de l'Zchinocar- dium cordatum, un filament axial fortement colorable. M. E. Brumot a reconnu que le Balantidium coli est inoculable d’un animal à un autre, en reproduisant la dysenterie; il se reproduit par division transversale et s'enkyste par conjugaison. — MM. H. Labbé, G. Vitry et Touyéras ont constaté que l’indosé orga- nique urinaire est plus élevé chez le tuberculeux et plus faible chez l’obèse qu'à l'état normal. — MM. N. Fiessinger et P. Marie ont vérifié quil existe une lipase commune à tout l'appareil Iymphoïde; elle est surtout abondante dans les ganglions; elle diminue dans la rate et fait défaut dans les tissus mé- dullaires. — MM. L. Gaucher et R. Abry ont isolé des gélatines commerciales un bacille pathogène présentant tous les caractères du vibrion septique. — M. $S. Marbé montre que le sérum, dans la réaction de Wright, stimule les leucocytes, mais que cette stimulation est dépourvue de toute spécificité. —M.E. Fauré-Frémiet a reconnu que les cils du Trichodinopsis paradoxa sont en réalité des spirilles qui vivent en symbiose étroite avec cet Infusoire. — MM. L. Lapicque et H. Cardot ont observé des actions polaires antagonistes dans l'excitation électrique du cœur de l’escargot. — M. N. Girard-Mangin a constaté que les poisons can- céreux agissent à petite dose; ils sont coagulés en totalité par l'alcool et par la chaleur; ils ne dialysent pas; ce sont là des caractères généraux des substances colloïdales. — M. L. Launoy montre que le sérum des chiens atteints de lymphosarcome, spontané ou d’ino- culation, ne possède pas de pouvoir antitryptique supé- rieur à celui des chiens normaux. — M. A. Fava à reconnu que le Sporotrichum Beurmanni esl capable de produire des gommes de la conjonctive, de la cornée et de l'iris chez le lapin. — M. Ch. A. François-Franck décrit un appareil de contrôle pour les indications comparatives des manomètres à mercure et à cadran et du sphygmoscope. — M. S. Mutermilch a constaté que la réaction de Wassermann dans la syphilis ne décèle pas de vrais anticorps dirigés contre les trépo— mènes. — MM. A. Gilbert et E. Chabrol montrent qu'il est possible d'obtenir la sclérose du pancréas à la suite de ligatures vasculaires du système porte. — M. J. Nageotte a observé dans le corps des cellules nerveuses des formations distinctes des mitochondries. qu'il nomme « grains spumeux ». — M.S. Poggenpohl a reconnu que, chez les cobayes tuberculeux, le prin- cipe stimulant la phagocytose n'est pas spécifique, car il exerce son action vis-à-vis de microbes étrangers. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 2 Yuillet 1909. M. Klein : Nouvelle pompe à mercure automatique. — Cet appareil se compose essentiellement de deux récipients de verre reliés d'une facon rigide par un tube de la même substance. L'un des récipients joue le rôle de la boule-pompe des pompes à mercure elas- siques; l’autre récipient, un gros tube renflé, rem- place le récipient mobile de ces mêmes instruments. Au lieu d'être produit par le déplacement du récipient à mercure, le fonctionnement est produit par des * variations alternatives de la pression qui s'exerce sur le mercure du récipient. Ces variations de pression sont réalisées automatiquement d’une manière très simple : un flotteur, qui se déplace dans le tube renflé sous l'influence des fluctuations de niveau du mercure, met alternativement ce tube en communication avec l'atmosphère et avec une trompe à eau, en soulevant ou en laissant retomber une soupape de verre, qui établit ou supprime la communication avec l’atmo- sphère, tandis que le flotteur lui-même, rodé à sa partie supérieure, obture ou découvre l'orifice d'un tube relié à la trompe à eau. L'évacuation des gaz aspirés dans la boule-pompe s'effectue suivant un pro- cessus nouveau : la boule-pompe est terminée par un tube vertical qui débouche à l’intérieur d'une autre: boule, reliée à la trompe à eau. L'oritice supérieur du tube est noyé pendant le fonctionnement de l'appareil sous une couche de mercure, qui laisse passer les gaz de la boule-pompe vers la trompe à eau, mais qui ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 633 s'oppose au cheminement des gaz dans le sens opposé. L'agencement de l'appareil est tel qu'aucun robinet | n'est nécessaire. Il n'y a pas d'autre manœuvre à faire pour le mettre en marche ou l'arrêter que d'actionner ou d'arrêter la trompe à eau. — M. de Chardonnet : Sur l'œil des oiseaux et le rôle du peigne. Au cours de ses études sur la transparence des milieux de l'œil, M. de Chardonnet a constaté que l'œil des oiseaux de nuit est plus transparent que tout autre pour les rayons ultra-violets. Il eût été intéressant de constater chez eux la perception de lultra-violet seul. Les expé- riences ont échoué par l'inertie de l'animal, qui n’ac- cusait aucune sensation en passant de l'obscurité à la lumière, que cette lumière fût visible ou non pour l'homme. Cet insuceès fit penser qu'un organe dont on ne connaissait pas jusque-là la fonction pourrait bien intervenir dans cette circonstance Lorsqu'on dis- sèque l'œil d’un oiseau quelconque, on est frappé d'y rencontrer un organe auquel les naturalistes ont donné (provisoirement au moins) le nom de peigne. On s'en ferait mieux une idée en le dénommant ombrelle. Cet organe est formé d'une . membrane mince, noire, opaque, dont le centre est inséré sur la rétine là où le nerf optique pénètre dans l'œil; le développement de cette ombrelle correspond à la surface de la rétine, qui se trouve complètement masquée lorsque cette ombrelle est ouverte. Il paraissait donc logique de supposer que c'est là un écran destiné à protéger la rétine contre une lumière trop vive, qu'elle soit visible pour nous ou bien ultra-violette. M. Gayet, alors pro- fesseur d'Ophtalmologie à la Faculté de Médecine de Lyon, voulut bien examiner avec l'ophtalmoscope un œil d'oiseau; il opéra sur un coq. Le résultat de cette expérience fut très net : l'oiseau, mis en présence d’un objet brillant, étalait son peigne sur sa rétine et se trouvait à l'abri de toute sensation lumineuse; dès lors, la fonction du peigne semble nettement déter- minée. Si le coq est hypnotisé devant un point brillant, c'est qu'il se rend volontairement ou automatique- ment aveugle; si l'aigle regarde le Soleil en face, c’est qu'il ne le voit pas. — M. W. Duane : Sur la chaleur dégagée par les corps radio-actifs. L'auteur a constaté que le polonium et le radiothorium dégagent de la chaleur, et il a pu effectuer des mesures quantilatives. La méthode de mesure est basée sur l'augmentation rapide de la tension de vapeur d’un liquide très volatil quand la température s'élève. Deux récipients de verre sont réunis par un tube capillaire. La moitié du vo- lume des récipients est remplie du liquide volatil et presque tout l'air est retiré des récipients. Une petite bulle d'air est placée dans le tube capillaire, et l'on observe le déplacement de cette bulle à l’aide d'une lentille et d'une échelle. Deux tubes de verre plongent dans le liquide, et, si l'on introduit dans un de ces tubes une substance qui dégage de la chaleur, la ten- sion de vapeur augmente et le liquide pousse la petite bulle d'air. Le déplacement de la bulle dû à une petite quantité de chaleur est très grand. Pour protéger l'instrument contre les variations de température exté- rieure, il est enveloppé d'une série de boîtes métalli- ques et d'ouate, et le tout est placé dans un ther- mostat à chauffage électrique. En introduisant la source de chaleur dans le tube, on peut employer plu- sieurs méthodes pour mesurer la quantité de chaleur dégagée; mais l’auteur préfère une méthode de com- pensation, dans laquelle la chaleur est absorbée par un courant électrique (effet Peltier) en mème temps qu’elle est produite. 1l est très important de savoir si, en général, la chaleur dégagée par un corps radio-actif est équivalente à l’énergie des rayons de ce corps. L'auteur obtient des renseignements sur cette question en comparant la chaleur dégagée par le polonium avec celle dégagée par le radium privé de l'émanation et de l’activité induite. Les mesures de chaleur indiquent que le sel de polonium employé dégage 0,0117 gramme- calorie par heure. L'auteur constate que si ce polo- nium est déposé en couche mince sur une lame de métal, il produit la même ionisation que 05,749 de bromure de radium, déposé également en couche mince. Cette quantité de radium dégage 0,04 gramme- calorie par heure. Le fait que la quantité de chaleur dégagée par le polonium est très voisine de celle dégagée par le radium est favorable à l'hypothèse que la chaleur est due à l'énergie cinétique des rayons «. — M. H.-A. Perkins : Les courants continus produits par un champ alternatif dans les tubes de Geissler. En faisant des recherches sur les tubes de Geissler, où une décharge était excitée par un champ électro- statique alternatif, l'auteur avait trouvé qu'un galva- nomètre d'Arsonval intercalé dans le circuit du tube indiquait un courartt dépendant de la manière dont le tube était excité, et de la pression du gaz dans le tube. Le dispositif adopté était le suivant : un anneau de laiton entourait le tube et était relié à l’un des pôles d’un transformateur capable de donner 2.000 volts. L'autre pôle était au sol. Si l'anneau était déplacé sui- vant l'axe du tube, la déviation du galvanomètre dé- pendait de la position de l'anneau. Si la pression du gaz dans le tube était de l'ordre de 2", on trouvait deux valeurs maxima du courant de sens contraire, pour deux positions de l'anneau de chaque côté du centre; tandis que, au centre, la valeur était zéro, et aussi si l'anneau était trop près d'une des électrodes distantes de 2tm. Avec les pressions de cet ordre, l'électrode la plus près de l'anneau était toujours le pôle positif du circuitextérieur. À un vide plus avancé, les stries apparaissaient et compliquaient le phéno- mène. À environ Ovw,{ par exemple, on constatait plusieurs renversements du signe du courant en va- riant la position de l'anneau d'un bout à l’autre, et, à chaque changement du signe, il y avait toujours un changement brusque dans le régime des stries. Si le vide était poussé encore plus loin, on trouvait à en- viron Oum,02 des courbes très régulières reliant le cou- rant et la position de l'anneau, avec deux maxima comme dans le premier cas; seulement leur sens était opposé et l'électrode la plus près de l'anneau était négative. Pour expliquer les courants produits aux pressions relativement élevées, l’auteur propose une théorie qui fait intervenir la différence de mobilité des ions positifs et négatifs produits par choc dans le gaz. En raison de la mobilité supérieure des ions né- gatifs, on peut expliquer les deux valeurs maxima du courant, le renversement du signe au centre et la polarité de l’électrode la plus près de l'anneau. Mais, dans le cas où le vide est plus avancé, la théorie s'ap- puie sur la différence des coefficients de diffusion des ions à travers la surface des électrodes : parce que, à une pression de l’ordre de 0m®,02, les ions sont pro- duits dans toute la longueur du tube, et la différence de mobilité à peu d'influence. En admettant que les ions négatifs diffusent plus facilement à travers la surface des électrodes, et que les charges reçues dé- pendent aussi de la chute de potentiel entre l'anneau et l’électrode, on trouve des courbes théoriques de la même forme générale que celles de l’expérience, et l'on explique aussi le renversement du sens du cou- rant quand le vide est poussé assez loin. SOCIÉTE CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 25 Juin 1909. M. G. Rosentiehl résume les travaux de MM.Sisley, Léo Vignon, et les siens propres, et, tenant compte des faits constatés en bactériologie, il montre que la tein- ture de la fibre textile n’est qu'un cas particulier d'un ensemble de phénomènes beaucoup plus étendu, que l’on peut énoncer ainsi : Quand un corps en dissolution est mis en présence d'un autre corps 1»soluble dans le même milieu, les deux corpss'unissent, de manière que ni le lavage, ni lefrottement ne peuvent plus lesséparer. Le corps soluble, en perdant sa solubilité, à acquis l'adhérence au corps insoluble. Mais les deux corps ont 684 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES vardé toutes leurs propriétés chimiques et physiques. Un autre dissolvant peut de nouveau les séparer sans altération. Quelles sont les forces qui entrent en jeu ? L'examen des nombreux cas connus montre que l'affi- nité intervient et que, souvent, il ya même combinaison en proportions définies. Cette combinaison n’est que superficielle si le corps insoluble est la fibre textile. La couche colorée l'enveloppe comme d'une gaine, et y est adhérente ; l'ensemble a conservé la cohésion de la fibre elle-même. Or, l’'adhérence est une forme de la cohésion ; par définition même cette adhérence est tou- jours en jeu, elle est la condition sine qua non de la teinture. Tandis qu'il ya des cas où aucune affinité chi- mique ne saurait être invoquée. Dans ces cas, la tein- ture est due à la simple cohésion. — M. E. Fouard pré- sente uneétude des précipitations alcooliques d’amidon et de potasse, établissant que la composition du coagu- lum varie d’une façon continue avec la quantité de po- tasse totale. Cette fixation de la base dépend, en outre, de l’état physique des éléments en présence : elle est en effet, pour l'amidon colloïdal, toujours inférieure à celle de la solution parfaite; du côté de l’alcali, elle est d'autant plus faible que celui-ci est moins dissocié en ions: maxima pour la potasse, elle est ainsi presque nulle pour l’ammoniaque et la pipéridine, faiblement ionisées. Enfin, la valeur des conductibilités électriques de solutions équimoléculaires de potasse, de pipéridine et d'ammoniaque, avec ou sans amidon, montre que celui-ci n’a aucune influence sur la dissociation en ions des solutions alcalines, à l'inverse de ce que serait né- cessairementune combinaison des deux éléments. L’au- teur en conclut qu'il n'existe aucune de ces combinai- sons chimiques. Le phénomène observé estuneabsorp- tion continue qui n'obéit nullement aux lois fonda- mentales ; il suit d’ailleurs la loi de Van Bemmelen, retrouvée dans les cas très nombreux de fixation d’une substance dissoute par une autre insoluble. M. L. Ma- quenne fait observer que les expériences deM. Fouard, contrairement aux conclusions de cet auteur, fournis- sent une preuve manifeste de l'existence d’un composé défini entre l'amidon et les alcalis; elles montrent, en effet, qu'il se produit entre ces corps un équilibre con- forme à la loi des masses, d'où l'enlèvement progressif de la potasse contenue dans le précipité par lavages à l'alcool; d’où, enfin, la forme hyperbolique de la courbe représentative des résultats. Une seule combinaison potassique de l'amidon suffirait à produire toutes ces particularités, mais il est possible qu'il s’en forme plu- sieurs simultanément, toutes dissociables dans le mi- lieu où elles prennent naissance, ainsi qu'il arrive avec un grand nombre de pseudosels. M. G. Tanret n'a pas à répondre à M. Fouard, puisque M. Maquenne vient de montrer que ses conclusions concernant une ou plusieurs combinaisons de potasse et d'amidon sont inexactes. Il expose seulement ce qu'il a observé en voulant se rendre compte de la nature de l’amidon so- luble de Fernbach préparé à 100° et au-dessus. Or, en traitant cet amidon par de l'alcool à divers titres, il a obtenu des corps qui différaient les uns des autres par leur pouvoir rotatoire, leur coloration par l'iode, leur action sur laliqueur de Fehling et leurs solubilités dans l'alcool. Cetamidon soluble, qu'on devrait plutôt appeler amidon solubilisé, n’est donc pas constitué par un corps unique. — M. Baubigny annonce que le sulfite d'argent, par l’action de la chaleur (100) en présence de l'eau, ne se décompose pas seulement en sulfate d'argent avec dépôt d'argent et mise en liberté de gaz sulfureux, ainsi qu'on l'enseigne, mais principulement en hyposulfate ou dithionate d'argent avec séparation d'argent. Dans le cas où l’on opère avec la solution de suliite double d'argent et d'un métal alcalin (le sodium, par exemple), la formation d'acide sulfurique est sensi- blement nulle: ilse produit presque exclusivement du dithionate alcalin et tout l'argent se sépare. L'action de la lumière (même en dehors de toute insolation directe) est la même que celle de la chaleur. Elle est seulement beaucoup plus lente. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 29 Avril 4909. M. T. H. Havelock étudie le problème de la résis- tance au mouvement des navires due à la formation des ondulations. En considérant les ondes divergeant de la proue et de la poupe et l’interférence de ces systèmes, il arrive à une formule semi-empirique : R= ae "PE + {1—7y cos (10,2/c?) j 41, où R est en livres par tonne de déplacement du navire, e est le rapport entre la vitesse en nœuds et la racine carrée de la longueur du navire en pieds, «, $ et y sont des constantes dépendant de la forme du navire. L'au- teur a construit les courbes de modèles d'expérience et a reconnu qu'elles sont bien représentées par la for- mule ci-dessus. La constante x est généralement petite et pour les valeurs de c supérieures à 0,9 on peut généralement supprimer le premier terme. — MM. H. T. Barnes et A. N. Shaw : Sur un phénomène en rela- tion avec la décharge de l'électricité par les conduc- teurs en pointe. M. Zeleny à constaté au microscope que les pointes d'aiguilles d'acier, après s'être déchar- gées comme anodes, sont couvertes d'un dépôt irrégu- lier, ressemblant à de la rouille; après avoir servi comme cathodes, le dépôt est beaucoup moindre. Les auteurs ont étudié en détail ce phénomène pour les pointes d'acier et d’autres métaux. Ils ont observé quatre formes caractéristiques : 1° dépôt granulaire ; 20 dépôt tubulaire; 3° formation lisse ; 4° formation en pellicule mince. La seconde est la plus intéressante ; elle consiste en un tube d'oxyde croissant autour d’une minuscule goutte d’eau ou peut-être de H°0*: ces tubes s'allongent sous le microscope quand on souffle dessus de l'air humide. Le dépôt granulaire semble consister en tubes brisés. La formation d'une pellicule mince ne se produit qu'avec les métaux les moins oxydables. Ces dépôts sont en relation avec la présence de la vapeur d’eau dans la chambre de décharge, car ils ne se pro- duisent pas dans l'air absolument see. — M. J. A. Crowther a étudié l'effet de la lempérature sur l'ioni- sation. Il a mesuré l’ionisation produite par les rayons Rüntgen dans l'air à la température de l'air liquide et dans le bromure d’éthyle et l’iodure de méthyle à diverses températures jusqu'à 484°C. Dans chaque cas, la quantité d’ionisation produite était indépendante de la température du gaz lorsque la densité de ce dernier restait constante. — M. R. D. Kleemann communique ses recherches sur l'ionisation des divers gaz par les rayons y secondaires. L'auteur a trouvé que l'ionisation des gaz dont les molécules consistent en atomes de H, C, Az. 0,5, CI, à l'exception de H°, est la même que celle qu'on obtient avec les rayons y primaires ; par contre, les rayons secondaires produisent une quantité d'ionisation beaucoup plus grande que les rayons pri- maires dans les gaz dont les molécules contiennent des atomes de poids atomique plus élevé que celui du chlore. L'ionisation de H° est anormale; elle est plus faible pour les rayons secondaires que pour les rayons primaires. — M. J. £. Reynolds : Le résultat du refroidissement de certains platino-cyanures hydratés dans l'air liquide. En refroidissant dans l'air liquide des cristaux vert d'herbe de platinocvanure de lithium Li*Pt (CAz). 5H*O, ceux-ci prennent une teinte plus pâle, et recouvrent leur couleur à la température ordi- naire. Dans les mêmes condilions, le platinicyanure de lithium Li®Pt(CAz)". 3H*0, presque incolore à la tempé- rature ordinaire, devient rouge intense dans l'air liquide, par perte de 4 H°0, qu'il reprend en se réchauf- fant, en reformant le trihydrate incolore. Si le refroi- dissement a été três rapide, le trihydrate passe à l’état de monohydrate jaune, qui revient au trihydrate par absorption d'eau à la température d’eau. Mais, en pré- sence de certains sels neutres, celte rehydratalion est emnéchée et le sel jaune peut persister à latempérature ordinaire. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 6 Mar 1909. La Société procède à l'élection annuelle de 15 nou- veaux membres. Sont élus : E. C. C. Baly, Sir T. Bar- low, E. W. Barnes, F. A. Bather, Sir R. A. Hadfield, A. D. Hall, A. Harden, A. J. Jukes-Browne, J. G. Kerr, W. J. Lewis, J. A. Mc Clelland, W. Me F. Orr, A. B. Rendle, J. L. Smith et J. T. Wilson. M. J. N. Collie: Sur une propriété curieuse (lu néon. Eu agitant un tube contenant du mercure et du néon, l'auteur à constaté que ce gaz luit avec une belle lueur rouge; après un certain temps d’agitation, la lueur devient très faible, mais on peut la restaurer en faisant passer dans le tube la décharge d’une bobine d'induc- tion ; une trop forte décharge détruit complètement la lueur. Le chauffage des {tubes ne détruit pas cet effet; il le restaure, au contraire, dans les tubes qui l'ont perdu par suite d'une trop forte décharge. La moindre trace d'humidité empêche complètement la lueur. — M. W. M. Bayliss : Les propriélés des systèmes colloidaux. 1. La pression osmotique du rouge Congo et d'autres colorants. Le rouge Congo, quoique étant un colloïde, a une pression osmotique égale à celle qu'il donnerait s’il était présent en solution vraie à l’état de molécules simples ; mais il faut opérer en l'absence complète d'électrolytes étrangers, lesquels produisent une chute de pression par l'agrégation des molécules en particules. Un colloïde stable protège contre l’action des électrolytes. L’acide libre du rouge Congo forme une solution colloïdale bleu sombre par dialyse; elle est résoluble à l’ultra-microscope, mais donne cepen- dant une pression osmolique définie et mesurable, quoique faible. Ces résultats s'expliquent en admettant que les particules colloïdales possèdent l’énergie ciné- tique des molécules. — Mie M. T. Fraser et M. J. A. Gardner : L'origine et la destinée du cholestérol dans Porganisme animal. NV. Action inhibitoire du sérum des lapins nourris avec des aliments contenant des quantités variables de cholestérol sur l'hémolyse du sang par la saponine. Les auteurs, pour déterminer si le cholesté- rol est absorbé dans le courant sanguin tel quel ou sous forme d'éthers, ont utilisé la propriété du choles- térol d'empêcher l'action hémolytique de la saponine, que ne possèdent pas ses éthers. A l’aide de ce procédé, ils arrivent aux conclusions suivantes : 1° quand le cholestérol est administré avec la nourriture des lapins, une partie est absorbée et passe dans le courant sanguin à l'état libre ; le reste est excrété sans change- ment ; 2° les éthers du cholestérol administrés avec la nourriture subissent en partie l'hydrolyse pendant la digestion et passent dans le sang sous la forme de cho- lestérol libre ; 3° quand les animaux sont nourris avec du phytostérol, il est en partie absorbé et apparaît dans le sang soit sous forme de phytostérol, soit sous celle de cholestérol. — M. C. S. Sherrington: L'innervation réciproque des muscles antagonistes. XIV. L'innervation réciproque double. L'auteur montre que la sommation algébrique de l'excitation et de l’inhibition, déjà signa- lée pour les muscles extenseurs, se vérifie aussi pour les muscles fléchisseurs. L'action de la strychnine sur l'inhibition des fléchisseurs consiste, comme dans le cas de l'inhibition des extenseurs, en une conversion de l’inhibition en excitation. — M. W. B. Bottomley : Quelques effets des bactéries fixatrices d'azote sur la eulture des plantes non légumineuses. L'auteur a cons- taté la présence, dans la zone algale de certains tuber- cules de Cycas, d'une espèce d’Azotobacter associée au Pseudomonas radicicola. Ges organismes produisent une augmentation de l'assimilation d'azote libre par la plante. L'auteur a alors recherché l'effet de l'addition d'une culture mixte de ces deux organismes aux racines d’autres plantes non légumineuses. L'augmentation de l'assimilation azotée a été : pour l'avoine, de 76 °/, ; pour l'orge, de 13,6 °/,; pour le Galtonia candicans (bulbe), de 18,6 / ; pour le panais, de 24,7 °/,. Dans toutes les expériences, le sol était traité avec de la chaux avant l'application de la culture mixte. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1919, 685 Séance du 13 Mai 1909. M. J.Mercer: Fonctions de type positif et négatif. — M. G. E. Hale : Les récentes recherches solaires. — M. A. Mallock étudie l'utilisation de l'énergie emma- gasinée dans l'élasticité. La « valeur dynamique » d'une substance est le travail qui peut y être emmagasiné élastiquement, divisé par sa masse. La valeur dyna- mique du caoutchouc est plus de 10 fois plus grande que celle de toutes les autres substances connues; pour certains cas, il peut être employé avec avantage comme source de puissance motrice. Pour que l'é- nergie potentielle contenue dans la matière tendue soit efficacement convertie en travail mécanique, aucun contact à friction ne doit se produire pen- dant que la substance déformée retourne à sa forme originale. Ainsi, si la substance tendue est sous forme d’une longue corde enroulée sur une bobine, la condi- lion de l'absence de friction pendant la contraction oblige à développer l'énergie emmagasinée en cycles. L'auteur décrit un cycle répondant à ce desiderata. — M. L. Bairstow : Les limites élastiques du fer et de l'acier sous des variations cycliques de tension. L'au- teur opère avec une machine d'essai spéciale, où les répétitions se produisent si lentement que l'extension de l'échantillon aux charges extrêmes du cycle peut être observée dans les conditions normales de l'essai. Il à ainsi découvert que le fer et l'acier peuvent être amenés à se rompre par l'application répétée d'un cycle de tensions dans lequel la tension maximum est beaucoup moindre que la tension de rupture statique. L'auteur à trouvé lès positions des limites élastiques pour un certain nombre de rapports de la tension maximum à la tension minimum. — M. H. V. Gill: Une nouvelle espèce de lueur dans les tubes à vide. Une pièce de feuille de palladium, couverte ou non de noir de palladium, est chauffée au blane dans l'air à une pression de 0,15 mm. On aperçoit une lueur bleu- pourpre entourant le mélal chaud et séparée de lui par un espace sombre, dont l'épaisseur varie avec la tem- pérature de la feuille. A une température plus élevée, la lueur disparait; elle reparaît par refroidissement. La présence de cette lueur dépend d'une réaction entre les gaz introduits dans le tube par le chauffage du palla- dium et les particules désintégrées de ce métal. La pré- sence de vapeur d'eau est nécessaire. D'autre part, le spectre de la lueur présente certaines coïncidences avec celui de l’oxyde de carbone. Les champs électrique et magnétique n'ontaucun effet sur la lueur. La cause pro- bable de cette luminosité est l'union de CO avec O sous l'influence du Pd chargé d'H en présence de vapeur d’eau. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 25 Juin 1909. M. H. S. Carhart signale l'existence d’un point de transition dans lamalgame de zine. La chaleur de dilu- tion des amalgames de zinc est négative, c'est-à-dire que la dilution par addition de mercure absorbe de la chaleur. Si l’on ajoute du mercure à des amalgames dont la concentration va de 0,5 à 2,20/,, la chaleur de dilution négative varie régulièrement; mais, pour une concentration de 2,3 °/,, elle passe brusquement de 450 à 8.700 joules par gramme-molécule de zinc. Pour l'amalgame à 3 °/,, dilué de moitié, l'absorption de cha- leur est d'environ 10.000 joules par gramme-molécule. Cette variation abrupte est le signe d'un point de tran- sition dans l’amalgame de zinc. — M. T. M. Lowry recommande l'emploi des lignes du mercure et du cadmium comme étalons en réfractométrie. La série Li 6.708, Cd 6.438, Hg 5.461, Cd 5.086, Cd 4.800, Hg 4.358 présente de grands avantages sur la série habituellement employée, à cause du grand éclat et de la grande pureté des lignes. Pour produire un spectre de cadmium d'intensité suffisante, l'auteur fait jaillir l'arc entre des électrodes d’alliage cadmium-argent et élimine les lignes de l'argent. — M. A. Campbell : 45** ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS Sur la mesure de la lonqueur d'onde pour les oseilla- tions de haute fréquence. L'auteur à eu en vue de calibrer des ondomètres pour mesurer les hautes fré- quences employées en télégraphie sans fil. Ceux-ci consistent en séries de bobines de self-inductance mises isolément en série avec un condenseur à air variable et un thermo-ampèremètre, la lecture au condenseur étant obtenue par altération de la capacité jusqu'à ce que le circuit entre en résonance avec le circuit en travail. La valeur absolue de la fréquence élait, d'autre part, déterminée par photographie des trains d'onde du circuit primaire aumoyen d'un miroir tournant à une vitesse connue. Les nombres déduits des deux séries de mesures étaienttrès concordants. — MM. Russell el Alty décrivent une méthode électro- magnétique pour l'étude de la théorie et la résolution des équations algébriques d'un degré quelconque. Is montrent que le problème de trouver les racines d'une équation algébrique de n° degré est identiquement le même que celui de trouver les positions des points ueutres, C'est-à-dire des points où la force résultante due à la Terre et à des courants définis dans n fils verti- caux longs est nulle. Les » fils sont disposés à des dis- tances convenables dans un plan qui est à angle droit avec le méridien magnétique. Les courants dans les fils sont amenés à certaines valeurs qu'on trouve rapi- dement par la méthode des fractions partielles. Si x,et y, sont les coordonnées de l’un des points neutres par rapport à des axes définis, x, + y,V —1 est une paire de racines de l'équation originale. — M.S. D. Chalmers montre comment on peut obtenir la relation entre le coma d’un système optique et les erreurs dans la condition du sinus. — M.F. W. Jordan décrit une méthode pour mesurer l'intensité d’un champ magnétique horizontal intense ; elle consiste à déter- miner directement la force transversale sur un conduc- teur traversé par un courant dans une direction à angle droit avec le champ. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 Juin 1909. M. S. U. Pickering a isolé trois nouveaux carbonates de cuivre : 5Cu0.2C0* et 5 Cu0.3CO* en précipitant les sels de cuivre sur le carbonate et le bicarbonate de soude, et 8Cu0.3C0%.6H?0, par l’action de l’eau sur le carbonate double de Cu et Na. Ils sont solubles dans le bicarbonate de soude en formant un carbonate double ou son isomère, le carbonate sodio-cuprique Na0.C0.0Cu0.C0.Na0 ; ce dernier, traité par un excès de CO'Na*, forme un cupricarbonate Na?Cu(CO:)?, existant sous deux modifications & et 6, et oxydant le dextrose. — M. F. L. Pyman, en oxydant la laudano- sine, à obtenu de l’aldéhyde vératrique et du 4:5-dimé- thoxy-2-6-méthylaminoéthylbenzaldéhyde. L'addition de KCAZ au chlorure de ce dernier précipite de la 1-cyan 0-6: 7-diméthoxy-2-méthyl-tétrahydroisoquino- line. — MM. J. T. Hewitt et W. Thomas ont étudié les couleurs données par divers composés azoïques doublement substitués; ils sont jaunes en solution neutre, rouges en solution chlorhydrique diluée et orangés en solution chlorhydrique concentrée. — MM. T. M. Lowry et C.H. Desch ont constaté que la bande présente dans le spectre d'absorption de l’a- bromocamphre se retrouve dans celui du 7-sulfonate d'’ammonium, du 7-sulfonamide, du &-sulfonate et du 5-sulfonamide. Elle disparaît quand les deux atomes d'hydrogène & sont remplacés par des halogènes. — MM. H. J. H. Fenton et W. A.R. Wilks, en chauffant à 100° un mélange intime d'acide dibydroxymaléique sec et de carbamide en excès, ont obtenu entre autres une isoiminazolone, cristallisant dans le système tétra- sonal. — MM. H. J. H. Fentonct F. Robinson, en ap- piquant la réaction de Friedel et Crafts au chloromé- thylfurfuraldéhyde, ont obtenu le benzylfurfuraldéhyde, l,319, — M. B. Flurscheim a déterminé les valeurs d'alfinité des anilines halogéno-substituées et constaté SAVANTES qu'elles concordent avec celles qu'on déduit de sa théorie. — M.H. D. Dakin, en oxydant les o-et p- hydroxybenzaldéhydes et les o-et-p-hydroxyacétophé- nones par H°0? et AzH, a obtenu du catéchol et du quinol, tandis que les dérivés m-hydroxy fournissent l'acide i-hydroxybenzoïque. Beaucoup d’autres dérivés o-et-p- hydroxy se comportent d’une façon analogue; mais quand lH de l’OH est substitué, il n'y a plus formation : de phénol. — MM. E. de B. Barnett el S. Smiles ont constaté que les orthosulfoxydes de diphénylamine sont convertis, sous l’action de certains réactifs acides, en dérivés orthoquinonoïdes du phénazothionium.— M. F. W. Robinson a préparé une série de ferrocyanures doubles et triples de magnésium, d'aluminium et de cé- rium avec K et avec Ket AzH#. — MM. J. K.H. Inglis et A. S. Mason, en faisant réagir C*H°MgBr sur l’oxalate d’éthyle et hydrolysant le corps formé, ont obtenu un mélange d'acide propionylformique et de son éther; l'oxime de l'acide fond à 154°. En em- ployant C°H°MgBr, il se forme l’éther phénylglyoxylique, Eb.1510-154° sous 30 à 40 mm. — M. Al. Findlay et Mie E. M. Hickmans ont reconnu que la résolution de l'acide r-mandélique par cristallisation de son éther I-menthylique ne peut être effectuée au-dessus de —15°; le point de transition se trouve donc au-dessous de cette limite. — MM. K.J. P. Orton et. W. J. Jones montrent que le chlore et les acyl-anilides en solution acétique entrent en réaction réversible : Ar.AzHAc CE Ar.AzCIAc-L HCI. L'équilibre est atteint très SE q rapidement, mais il est graduellement troublé par la chloruration de l’anilide. La constante d'équilibre est proportionnelle au carré de la concentration de HCI. — M. O. Ch. M. Davis a étudié quantitativement l’hy- drolyse des anilides par NaOH. La vitesse de décom- position est influencée par les éléments et groupes substituants. — M. F. B. Thole montre, contrairement aux assertions de Muhlenbein, que la viscosité du nitro- benzène fraichement distillé ne varie pas au bout d’un certain temps de repos. Celle de l’acétoacétate d’éthyle augmente rapidement d’abord, puis faiblement ensuite jusqu'à un état d'équilibre; cette variation correspond au passage de la forme cétonique à la forme énolique. — MM. C. A. Seyler et P. V. Lloyd ont étudié les eaux contenant du chlorure et du sulfate de Ca, du bicarbonate, chlorure et sulfate de Na et du sulfate de Mg. Quand une eau de cette nature est en équilibre avec les calcaires qu'elle traverse, le carré de l’alcali- nité est directement proportionnel à CO? libre et inver- sement proportionnel à la dureté totale. — MM. W. R. Lang et J. O. Woodhouse, en chauffant le résorcinol avec As?0%, ont obtenu un arsénite de résorcinyle (CSH‘O*)'As®, EF. 240, d—1,9. — MM. F. Tutin et H. W. B. Clewer, en comparant les propriétés de la quini- zarine etde la 2-méthylquinizarine avec celles de l'acide chrysophanique, arrivent à la conelusion que ce der- nier est une 1-méthylchrysazine, et l'émodine une hydroxy-1-méthylchrysazine. — M. G. Jerusalem à préparé une série de sels des acides picrique et styph- nique avec des amines primaires, secondaires et ter- tiaires et des bases ammonium quaternaires. Leurs formes cristallines obéissent à la loi de Barlow et Pope. D'autre part, les volumes moléculaires de ces sels sont directement proportionnels aux sommes des valences composant les complexes moléculaires. — M. W. E. S. Turner a constaté que les acides phénylalkyloxya- cétiques en solution aqueuse deviennent Jaunes au bout d’une longue période et déposent des cristaux jaunes qui sont constitués par des substances de mème poids moléculaire, mais de constitution différente. — M. G. T. Morgan et M!° M. Alcock estiment que l'absence de couleur dans les sels de diazonium de la benzoyl-p-phénylènediamine et de ses homologues et la présence de couleur dans les séries correspondantes de diazodérivés de la benzoyl-1:#-naphtylènediamine dépendent de différences entre les propriétés chromo- gènes des noyaux benzénique et naphtylénique, plutôt que d’une variation dans la structure du complexe dia- ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 687 zonium dans les sels colorés de la base naphtalénique. — MM. J. W. Walker et V. K. Krieble ont constaté que HCI concentré et l'acide oxalique hydrolysent l'amygdaline en produisant de l'acide /amygdalique, tandis que l'acide sulfurique l'hydrolyse avec forma- tion de ;-mandélonitrile. L'acide trichloracétique n'a pas d'action. — MM. D. Harrop, R. V. Norris et Ch. Weizmann, en faisant agir les acides sulfurique ou borique sur les acides dichlorodiméthylbenzoylbenzoï- ques produits, par la condensation de l'anhydride 1 :#- dichlorophtalique avec les trois xylènes en présence d'AICE, ont obtenu les dichlorodiméthylanthraquinones correspondantes. — MM. F.S. Kipping et B. D. W. Luff, en traitant le chlorure de l'acide phényl-p-tolyl- phosphorique par des bases asymétriques, ont obtenu des mélanges de composés isomères, ce qui tend à montrer que l'acide phényl-p-tolylphosphorique est un composé extérieurement compensé. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mai et Juin 1909. 1° Sorences marnémaTIQuEs. — M. L. Bianchi : Sur les croupes de substitutions linéaires correspondant aux divisions de l'espace non-euclidien en tétraèdres et octaèdres réguliers. — M. G. Fubini s'occupe des solu- tions fondamentales des équations aux dérivées par- tielles. — M. O. Nicoletti : Sur la caractéristique du déterminant d'une forme d'Hermite. — M. N. Crudeli apporte une contribution à la théorie de quelques équa- tions fonctionnelles. — M. F. Cecioni : Sur les équations entre matrices AX—XB, X"—A. — M. L. Tonelli : Sur une propriété caractéristique des fonctions harmo- niques. — M. A. Garbasso s'occupe des trajectoires des électrons. — M. G. A. Crocco transmet une note dans laquelle il étudie une importante question de stabilité des aéroplanes, et affirme que l’empennage des aéroplanes n’est pas nécessaire, ayant la même valeur qu'un gouvernail antérieur. — M. L. Orlando rappelle la priorité de M. Crocco pour une nouvelle attache des ailes d’un aéroplane, et il fait voir que la disposition de M. Crocco régularise le roulis de la ma- chine. Dans une autre note, M. Orlando décrit un moyen d'intensifier les effets de l’attache élastique dans un aéroplane. Enfin, le même auteur s'occupe de l'équation de Riccati. — M. F. Amodeo fait un examen des docu- ments qui prouvent la priorité du P. Bonaventure Cavalieri dans la construction linéaire des coniques. 20 SareNces Paysiques. — M. A. Righi s'occupe des valeurs limites du champ entre lesquelles se produisent les rayons magnétiques, et de | « anode virtuelle » d’un tube de décharge dans le champ magnétique. — M. O. M. Corbino étudie les tensions provoquées dans un corps élastique par les distorsions de Volterra, et la double réfraction accidentelle qui en dérive. M. G. C. Trabacchi décrit ces déformations, obtenues à l’aide de la gélatine, déformations dont il présente les photo- graphies. — M. A. Pochettino donne la description détaillée des expériences qu'il a exécutées pour étudier les transformations que subit le sélénium par l'effet de la chaleur, et les variations de sa résistance électrique. — M. V. Chiarini a entrepris une série de recherches sur les propriétés électriques que présentent les diffé- rentes parties d’une flamme et l'air qui enveloppe ces dernières. — M. A. Occhialini a étudié les particula- rités de l’'amorçage de l'arc électrique entre les deux charbons: il a reconnu que, pour cet amorçage, l’appa- rition de l'étincelle électrique n’est pas suffisante, qu'il ne se produit pas par;effet d'une ionisation de l'air entre les deux électrodes, et que, dans l'amorçage ordi- naire par rapprochement des deux charbons, l'arc se forme parce que l’étincelle réchauffe l'électrode néga- tive. M. Occhialini étudie, en outre, la phase prépara- toire de l'arc, et ce dernier dans sa période initiale. — M. V. Polara : Sur le pouvoir émissif des corps noirs. — M. M. Tenani étudie la décomposition magnétique des lignes spectrales, et décrit la façon dont se com- porte, au point de vue magnélo-optique, la ligne », du magnésium. — M. L. Tieri a étudié l'action de la lumière ultraviolette sur la distance explosive dans l'air; l’action de la lumière qui empêche les décharges serait apparente, et en réalité elle dépendrait de la suppression de l’effluve qui favorise énergiquement les décharges. — MM. C. Alessandri et F. Eredia décrivent la marche diurne de la température de l'air à la Cabane Margherita et à Alagna, dans les Observatoires du Mont Rose. — M.E. Pannain a suivi les variations qui se manifestent dans la structure des alliages d'argent par l'effet des actions mécaniques et du recuit; ces variations de la structure et du poids spécifique sont caractéristiques et permettent de reconnaître, dans les cas de falsification des monnaies, si la falsification à été obtenue par fusion ou par frappe. — MM. G.. Cia- mician et C. Ravenna ont poursuivi leurs recherches sur la manière de se comporter des matières organiques introduites dans les plantes, en vue d'éclairer quelques points de la formation et de la signification biologique des glucosides; ils démontrent qu'en inoculant au maïs de l'alcool salicylique, celui-ci se transforme en partie en un glucoside identique à la salicine. — MM. A. Mazzucchelli et E. Pantanelli décrivent les résultats obtenus en préparant des sels complexes du titane où cet élément se trouve à l’état de peroxyde TiO,, en faisant agir l’eau oxygénée sur des sels com- plexes du titane tétravalent. — M. O. Angelucci s'occupe d'un sel double de nitrate et oxalate de tho- rium. — M. L. Cambi : Sur les acides triohydroxa- miques. — MM. R. Ciusa et A. Bernardi : Sur les composés de la phénylhydrazine avec les phénols. — M. M. Padoa : Expériences sur la phototropie de quelques phénylhydrazones. — M. G. Pellini : Contri- bution à l'étude de l’isomorphisme entre le tellure et le soufre. — M° M. Traube-Mengarini et M. A. Scala ont établi que l’eau distillée est capable de dissoudre à chaud l'argent et le platine; ils donnent des détails sur leur manière d'opérer, qui conduit à obtenir d'une facon très simple les métaux à l’étal colloïdal. Dans les dernières expériences, ils ont réussi à préparer une solution colloïdale qui renfermait 2 milligrammes d’ar- gent par centimètre cube. 30 Sciences NATURELLES. — M. L. Colomba transmet une étude sur la barytine de Brosso et de Traversella. __M. A. Rosati : Etude cristallographique de l'acide or- thothymotique et de deux thymotidesisomères.—MM.R. Pirotta et M. Puglisi ont observé, au cours de leurs recherches sur la variation des formes végétales et sur l'origine des formes nouvelles, des changements dans la couleur de la fleur d’/ris florentina; ces change- ments consistent dans l'apparition de taches azurées, ce qui fait admettre avec toute probabilité que l’/ris florentina doit être considéré comme une variation albine de l'Iris à fleur azurée, et plus précisément de l’ris pallida Lmck. — M. B. Grassi résume les résul- tats de ses recherches sur les caractères morpholo- giques de l'Acantothermes quereus Kollar, dont il décrit le cycle très simple du développement. — M!° V. Foù ajoute ses observations sur lœuf d'hiver du même parasite, qui prouvent que le cycle de ce dernier s'accomplit avec une seule généralion parthénogéné- tique et non sexuée. — M!° R. Bonfigli transmet ses nouvelles observations sur le Phylloxera quercus Boyer de Fonse. — M. F. Silvestri décrit quelques insectes parasites de la Diaspis pentagona, insectes qu'il à cherché à acclimater au Laboratoire d'Entomologie agraire de Portici. — M. L. Petri a pu établir que le desséchement des feuilles de l'olivier est produit par un champignon parasite, le Phyllostieta insulana Mont.; dans une autre note, il s'occupe du mécanisme de la résistance naturelle présentée par quelques végé- taux supérieurs contre les champignons parasites. — M. F. Bottazzi décrit la technique qu'il suit dans ses recherches de transport ou de dialyse des colloïdes organiques. — M. U. Cerletti décrit les dispositions en forme de nœuds, tresses, recoquillements, qu'il a 688 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES découvertes dans le cerveau des personnes âgées. — M. P. Principi décrit des couches à Posidonomya alpina du Mont Tezio. ERNESTO Mancinr. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 11 Juin 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. S. Meyer et E. von Schweïidler ont retiré des résidus du traitement de la pechblende l'ionium découvert par Boltwood. Il produit une activité induite faible, qui diminue de moitié en 11 heures. Des essais d'absorption dans l'aluminium ont donné pour le rayonnementc et l'épaisseur d'extinc- tion les valeurs À, (1/em.) — 2.100 et s (10-cm.) — 15, ce qui le place entre luranium et le polonium. L'ionium est encore mélangé à une grande quantité de thorium. — M. Ad. Lieben et M! M. Furcht, en faisant agir l’eau bouillante sur le lévulinate d'argent blanc, ont obtenu une modification jaune de ce sel, de même composi- tion, ainsi que CO? et un produit de décomposition. Les auteurs montrent que le sel jaune est du sel blanc souillé par une petite quantité d’un produit brun qui paraît identique au produit de décomposition ci-dessus. — M. J. Mauthner poursuit ses recherches sur la cho- lestérine. Le cholestène et le pseudo-cholestène, hydro- génés, donnent deux hydrocarbures saturés différents, le cholestane et le pseudo-cholestane ; leur isomérie ne provient donc pas de la double liaison. Le chloro-cho- lestane, chauffé avec la quinoline, fournit un troisième cholestène, le néocholestène, qui, hydrogéné, donne le même cholestane que le cholestène ; le cholestène ne diffère donc du néo-cholestène que par la position de la double liaison. 29 SCIENCES NATURELLES. — M. M. Holl présente ses recherches sur le développement de la circonvolution du corps calleux dans l’ilot antérieur du cerveau de l’homme et des singes. — MM. E. Brezina et E. Ranzi ont préparé des sérums immunisants avec l'extrait de fèces, l'extrait et la sécrétion d'intestin grêle et de gros intestin, la bile et le sérum sanguin du chien, et ils ont essayé de les précipiter par ces divers antigènes. Ils concluent que tous les antigènes examinés sont voisins, mais plus ou moins différents. Les sécrétions du canal intestinal au-dessous du pylore sont plus proches comme antigènes entre elles et avec l'extrait de fèces qu'avec le sérum sanguin. Le suc gastrique, par contre, réagit avec le sérum de la sécrétion d'intestin grêle et avec le sérum sanguin, mais non avecle sérum d'extrait de fèces. — M. V. Pietschmann décrit une nouvelle espèce d'Hemipleronotus du Japon, qu'il nomme /. megapter yqius. Séance du 18 Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Weiss : Sur le faisceau de surfaces de second ordre à quatre points de base. — M. K. Federhofer : Sur la stabilité des arcs de cercle chargés radialement. — M. S. Oppenheim : Sur la détermination de Ja période d’un phénomène pério- dique et application à lathéorie du magnétisme terrestre. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. M. Exner cherche à expliquer les phénomènes de la clarté du jour par les propriétés des milieux troubles, en se servant des équa- tions que Lord Rayleigh a données dans sa théorie de la dispersion de la lumière par les particules minimes. I] trouve que l’éclairement d’une surface horizontale par un ciel supposé hémisphérique est proportionnel au logarithme du coefficient de transmission et dépend en partie de la hauteur du Soleil. L'éclairement que la même surface reçoit par la lumière solaire directe s'exprime par les mêmes grandeurs. En comparant les résullats du calcul avec ceux des mesures photo- chimiques, l’auteur constate une assez bonne concor- dance. — M. J. Zellner a constaté que les cham- pignons du bois renferment une enzyme qui peut dédoubler le mallose, produit par la décomposition diastasique de l'amidon, en dextrose. Les ferments glu- cosidolytiques du Trametes suaveolens et du Polyporus pinicola sont analogues à l'émulsine, mais différents. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. O. Pesta décrit un Isopode qu'il a découvert, le Microniseus à. Séance du 24 Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Tietze indique un critérium de convergence pour les développements des fractions périodiques infinies. — M. Th. Poeschl étudie graphiquement Ja dynamique de deux systèmes plans articulés. — M. J. von Hepperger a cherché à déter- miner les éléments du système de 8 Lyre d'après sa variation de lumière; on arrive à des solutions presque égales suivant que l’on considère la clarté J du plus gros composant comme plus grande ou plus petite que la clarté J' du plus petit composant. Les éléments trouvés différent de ceux qui ont été déduits des obser- vations d'Argelander. Les observations spectroscopiques rendent plus probable l'hypothèse J ° Les ions polyvalents interviennent en neutra- lisant plus ou moins, selon le degré de leur va- lence, l’action des ions monovalents actifs et de signe contraire (H+ et OH=). C’est ainsi que, pour une même concentration de la liqueur en ions H+#, un acide à ion négatif monovalent (HCI) chargera beaucoup plus énergiquement la paroi qu'un acide à ion négatif di ou trivalent (acide sulfurique, acide citrique). Inversement, la présence d'ions positifs di, tri, ou tétravalents, dans une liqueur alcaline, affaiblira l'influence des ions actifs OH-; 6° Les ions monovalents de signe contraire aux ions H+ et aux ions OH- les peuvent aussi neutra- liser; mais, pour que leur influence soit sensible, il faut de grandes concentrations. La connaissance de ces lois générales, que très brièvement nous venons de résumer, jette, comme l'a montré M. Perrin, de réelles clartés sur le mé- canisme physico-chimique de phénomènes très dif- férents et sans relation apparente, comme l'entrai- nement des précipités, les phénomènes de teinture, certaines propriétés de l'état colloïdal. Dans le domaine de la vie, le rôle de l'électrisation de con- tact est resté Jusqu'à présent à peu près insoup- çonné; il est probable, pourtant, qu'il est considé- rable, et nous allons, tout d'abord, nous efforcer de montrer le secours qu'apporte l'hypothèse, que nous montrerons légitime, de son intervention dans l'in- telligence de ce phénomène mystérieux qu'est l'hé- miperméabilité de la cellule vivante auxélectrolytes. 11. — IÉMIPERMÉABILITÉ DES MEMBRANES CELLULAIRES AUX ÉLECTROLYTES. On sait que les membranes des cellules vivantes, tant animales que végétales, possèdent cette remar- quable propriété, qu'illustrèrent les observations de De Vries, Wiener, Overton, Pfeffer, Loeb et de beaucoup d’autres auteurs, d'être perméables à cer- tains électrolytes et, sinon imperméables, du moins fort peu perméables à d’autres. Chez les végétaux, en particulier, « la membrane plasmatique qui en- toure le protoplasme, assure, dit Pfeffer, à la cel- lule l'avantage extrêmement important de retenir et de conserver la matière dissoute, qui, autrement, serait entraînée dans l’eau ambiante ». C'est de cette hémiperméabilité aux électrolytes (la seule que nous voulions envisager ici) que dé- pend la nutrition minérale de la cellule, l’une des fonctions les plus essentielles de la vie. L'on sait à la vérité, depuis que Traube nous apprit à le faire, fabriquer des membranes hémiperméables en ferrocyanure de cuivre, de cobalt, de nickel, ou constituées encore par le précipité qui se forme au contact de la gélatine et de l'acide tannique, ou de l'acide tannique et de l’acétate neutre de plomb. Mais il ne semble pas que les membranes cellu- laires soient comparables aux membranes de préei- pité; nous voulons dire qu'il est douteux qu’elles soient hémiperméables par elles-mêmes, du fait de leur structure chimique et de leur constitution. Le peu que nous savons des substances qui les com- posent, parmi lesquelles on reconnait la cellulose, la chitine, les matières protéiques, étaie mal, du moins, l'hypothèse de l'hémiperméabilité. Vraisem- blablement, les minces membranes plasmatiques étanches aux sels dissous dans le suc cellulaire, si nous savions les découper, ne se montreraient, isolées des cellules, guère moins perméables à ces sels que des pellicules de gélatine aussi minces qu'elles. Et c’est là justement que git le merveilleux. Un animiste parlerait ici d’une force de rétention par quoi la vie se manifeste. Plus positif et plus soucieux de comprendre, nous envisagerons un déterminisme physico-chimique. Et nous poserons le problème dans les termes suivants : Etant donné qu'une membrane est par elle-même perméable aux électrolytes, quelles conditions physico-chimiques, et telles qu'on les sait réalisées dans la cellule vivante, sont nécessaires el suflisantes pour modi- fier sa perméabilité? En réalité, comme Ostwald l’a très judicieusement indiqué dès 1890, il convient de parler, non pas de l'imperméabilité, toute relative d’ailleurs, d’une membrane pour un sel, mais pour un ion de ce sel. Partant de ce principe, la première question que nous nous sommes posée est la suivante : Soit une pile de concentration dont la différence de po- tentiel est due, comme on sait, à l’inégale mobilité des deux ions du sel qui diffuse de la solution la plus concentrée à la solution la moins concentrée, des régions de plus forte pression aux régions de PIERRE GIRARD — L'ÉLECTRISATION DE CONTACT EN BIOLOGIE 697 moins forte pression osmotique.Si nous interposons entre les deux éléments de concentration C, et C, d'une telle pile une membrane en gélatine, en ves- sie de porc, en parchemin animal, quelle modifi- cation à la mobilité des ions apportera cette inter- calation ? En fait, en abordant le problème de cette manière, nous attribuions implicitement à la mem- brane une structure continue, qui n’est pas la sienne; mais, quoique le principe dont nous étions parli et qu'il est inutile que nous précisions ici, fût faux, nos expériences nous ayant progressi- vement conduit à des résullats positifs sur les- quels il nous paraît possible de baser une concep- tion de l’hémiperméabilité, ce sont ces résultats que nous allons reproduire à peu près dans l’ordre même où nous les avons obtenus. Le premier fait qui nous apparut nettement fut que, si, dans un couple liquide constitué par deux solutions inégalement concentrées d’un sel neutre, tel que NaCI, KCI, Nal, MgCF, SO'K*, etc., l’on in- tercale une membrane en gélatine, en vessie de pore, longuement lavée, cette intercalation n’ap- porte aucune modification au voltage du couple. D'autres membranes, comme le collodion, le papier parchemin sulfurisé, nous donnèrent, il est vrai, des résultats différents; mais nous nous sommes vite apercu qu'en réalité ces membranes n'étaient point neutres, et qu'elles intervenaient comme un élément chimique intercalé dans le couple liquide ; si longuement , en effet, qu'on les lave, on trouve, lorsqu'on les éprouve par le procédé de l’osmose électrique, que, même dans des solutions de soude relativement concentrées (1/10 normales), elles restent chargées positivement, témoignant ainsi d’une acidité notable. Si maintenant nous consli- tuons un couple liquide parle moyen de deux solu- tions de concentration C, et C,, d'un acide monova- lent ou d'un alcali, et que le voltage de ce couple soit égal à x, l'intercalation d’une membrane en gélatine, en vessie de porc, l’abaissera à la valeur z ; cel abaissement du voltage est instantané ; il va de suite jusqu'à l'annulation ou même jusqu'au changement de signe; mais la différence r—7 dimi- pue ensuile progressivement jusqu'à la réalisation d’un état d'équilibre que vient seul modifier, mais irès lentement, la diffusion de l’électrolyte à tra- vers la membrane, Nous venons de supposer le couple liquide constitué par deux solutions C, et C, d'une base ou d’un acide monovalent; si nous ré- pétons l'expérience avec un acide divalent (sulfu- rique, oxalique), nous retrouverons le phénomène, mais l'abaissement du voltage correspondant à l’interposition de la membrane sera déjà moins accusé. Il le sera moins encore si nous nous adres- sons à un acide trivalent comme l'acide citrique, ou bien à un acide monovalent dont le degré de dissocialion en ions est faible. Enfin, la présence, même en faible quantité, des ions tri el tétravalents négatifs, des ferricyanures et des ferrocyanures de K dans une solution d'HCI par exemple, sera suf- fisante pour diminuer considérablement la valeur de la différence r—7'. La présence d'ions divalents positifs ou d'ions trivalents du même signe dans une solution de NaOH ou KOH agira dans le même sens. En résumé, l’interposition d'une membrane chimiquement neutre dans un couple constitué par deux solutions d'un sel également neutre n’en mo- difie pas la différence de potentiel. C’est seulement dans les piles acides ou alcalines contenant même un excès très léger d'ions H+ou OH (il suffit d'une acidité ou d'une alcalinité égale, même infé- rieure au millième normal) que l'interposition d'une membrane est efficace. En outre, la présence d'ions polyvalents négatifs dans le cas des piles acides, et positifs dans le cas des piles basiques, affaiblit con- sidérablement le phénomène. Nous retrouvons ici les règles formulées par M. Jean Perrin : l’abaissement r— 7 du voltage est lié étroitement à la charge électrique qu'est suscep- üble de prendre la membrane interposée au contact de la solution acide ou basique; et les ions poly- valents présents dans cette solution interviennent en neutralisant plus ou moins, selon le degré de leur valense, l'action des ions monovalents H+ ou OH actifs et de signe contraire. Il nous faut maintenant tâcher d'expliquer le mécanisme du phénomène. En fait, une membrane, quelle qu'elle soit, n’est pas un milieu continu; sa structure est toujours criblée; schématiquement, on peut se la représenter comme constituée par un faisceau de tubes capillaires ; il y aura, au contact d'une solution acide, des charges positives adhé- rant à la paroi du tube et des charges négatives en regard, dans la zone de‘contact de la veine. L'orientation de cette couche double sera inver- sée dans le cas d’une solution alcaline; une force tangentielle très faible (une différence de pression osmotique, par exempie, de part et d'autre de la membrane) déterminera le glissement des charges adhérant à la veine; des charges de signe con- traire s'accumuleront aux extrémités des capillaires. Il naïtra une force électromotrice de filtration (Quincke). La membrane ainsi polarisée réalisera l'image d'un feuillet magnétique dont le champ sera nécessairement, comme il est aisé de s'en rendre compte, de sens contraire au champ de diffusion de l'acide ou de la base, ou, si l’on veut, de sens contraire au sens de la différence de poten- tiel du couple liquide. Le voltage rx’ du couple liquide eloisonné par une membrane est la somme algébrique de deux diffé- rences de potentiel : celle du champ de diffusion 698 PIERRE GIRARD — L'ÉLECTRISATION DE CONTACT EN BIOLOGIE de l’électrolyte et celle du champ du feuillet cor- respondant à la force électromotrice de filtration. La différence 7 — x (x désignant le voltage du couple non cloisonné) nous donnera donc le champ du feuillet. Cette interprétation est susceptible d’une vérifi- cation quantitative. Un raisonnement dû à Helm- holtz permet, en effet, de calculer la force électro- motrice de filtration. I1 suffit d'écrire l'équation d'équilibre entre le courant de convection que réa- lise le glissement des charges dans le sens de la force tangentielle et le courant de conduction pro- duit au sein du liquide par la force électro-motrice de filtration. On aboutit, tout calcul fait, à l’'équa- tion : Ep c Eh 4rn E— où € désigne la différence de potentiel de la couche double, p la force tangentielle, le coefficient de viscosité de l’eau, ? la résistivité du liquide. Il est digne de remarque que, dans cette expression, l'épaisseur de la membrane et sa section n’inter- viennent pas. Or, le champ de polarisation du feuillet (r—7') se montre, en effet, rigoureusement indépendant de l'épaisseur et de la section du dia- phragme; nous avons vu qu'il variait comme e, nous avons vérifié sa proportionnalité à p; enfin, pointessentiel, sur lequel nous aurons tout à l'heure l’occasion d'insister, il est de façon rigoureuse inversement proportionnel à n. Il peut paraître assez surprénant que l’interpo- sition d'une membrane ne modifie pas la difré- rence de potentiel d'un couple constitué par deux solutions d'un sel neutre. En fait, il est facile d'imaginer que la membrane intervient comme un élément neutre, intermédiaire, de concentration C, : -de l'élément de concentration C, à l'élément de concentration C,, il existe une différence de poten- tiel; de l'élément de concentration C, à l'élément C,, il existe une autre différence de potentiel, plus petite et de signe contraire ; le ealeul et l'expérience montrent que leur somme algébrique est égale à la différence de potentiel existant de l'élément C, à l'élément C,. Il nous reste à montrer comment la connaissance de ces faits va nous fournir une solution, sinon parfaite, du moins approchée, du problème que tout à l'heure nous nous étions posé. On sait que, dans sa belle théorie de la diffusion des électrolytes, Nernst fait intervenir, dans le calcul des débits des ions, deux forces dont il évalue les effets séparément en supposant qu'ils se super- posent; l'une de ces forces est la pression osmo- tique, l'autre force est électro-statique; c'est le champ créé par l'inégale mobilité des ions de signe contraire de l'électrolyte dissous et supposé entièrement dissocié. Sous l’action de ce champ, les ions positifs et négatifs se déplaceront dans les deux sens; or, sans faire ici d'hypothèse précise, on peut supposer, cependant, que l'interposition d'un feuillet polarisé entre deux solutions d’électro- lyÿtes inégalement concentrées modifiera considé- rablement le jeu des forces électrostatiques qui interviennent dans la diffusion et qu’il en devra résulter, au point de vue de la vitesse de diffusion, des conséquences importantes. Pour déceler cette influence, nous partirons de l'équation approchée de Fick : de dq=— Ds ra dt, Nous ferons constantes les quantités s (somme des sections capillaires), € (concentration de l’élec- trolyte,, de/dx (chute de concentration). Pour un temps { assez court et pour les sels neutres qui ne chargent pas la paroi, les quantités q diffusées devront être sensiblement proportion- nelles aux coefficients D. 11 n’en sera plus de même, si notre conception est exacte, pour les acides et les bases. Voici quelques chiffres parmi ceux que nous avons recueillis à la température de 18, € étant égal à 0 gr. 200 et / à 60 minutes pour chaque sel : D.105 q T— 7 centim.-sec, g. volt. RCI PL EMEA D 0,009 0,000 Ne Cle 20e tt 00 0,0076 0,000 ICI ESS NEO 0) 0,007 0,000 AzO'H . REZ OÙ 0,0066 0,040 CHOSE ADS 0 0,0048 0,012 CHHPOIEEER 0720 0,0032 0,008 Na DH PAS RRN2E 0,0035 0,033 La plupart des acides monovalents et les bases qui diffusent dans l’eau plus rapidement que la plupart des sels neutres monovalents diffusent à travers les membranes moins vile que ceux-ci. L'abaissement de la perméabilité de la membrane est moindre pour les acides à ions négatifs diva- lents et trivalents qui la chargent moins énergique- ment par contact. Tous ces faits accusent le rôle de la polarisation de la paroi dans sa perméabilité aux électrolytes. En voici d’autres, plus suggestifs peut-être au point de vue biologique. Soit un couple liquide dont un élément sera constilué par de l'eau ou une solution très diluée, l'autre par une solution plus concentrée d’un sel neutre, à laquelle nous ajouterons une trace d'acide ou de base juste suffisante pour polariser la mem- brane interposée; si le champ du feuillet polarisé est de même sens que le champ de diffusion du sel, le cloisonnement du couple en accroîtra le voltage ; il l’abaissera dans le cas contraire. En outre, pour PIERRE GIRARD — L'ÉLECTRISATION DE CONTACT EN BIOLOGIE une cerlaine orientation de son champ, l'interposi- tion du feuillet devra gêner la diffusion du sel; pour une orientation contraire, il la devra favo- riser. - Or, si l’on fait diffuser à travers une membrane en vessie de porc, dégraissée par un épuisement à l'éther et longuement lavée, dont la section est s, une solution de MgCl 1/10 normale vers une solu- tion 1/100 normale, il passera en 30 minutes, à la température de 18°, 12 milligrammes de ce sel à travers la membrane; si on acidule par une trace d'HCI (1/100 normal d’acidité) la solution de MgCl 4/10 » et celle-là seulement, à la même tempéra- ture, à travers la même membrane (dont le cloison- nement augmente le voltage du couple), et pendant le même temps, il n’en passera que 3,5 milli- grammes. Inversement, une trace de soude dans une s0- lution de NaCIl suffit à doubler presque pour ce sel la perméabilité d’une membrane en vessie de porc. Si, maintenant, on suppose fixé le sens du champ du feuillet, en prenant comme point de compa- raison la perméabilité d'une paroi non polarisée, le feuillet témoignera d’une imperméabilité relative pour l'ion d'un sel et d’une perméabilité accrue pour l'ion d’un autre sel, selon l'orientation du champ de diffusion. Ainsi donc, 12 vitro, et du seul fait qu'elle se polarise au contact d’une solution saline dont la neutralité n'est pas stricte, une membrane, d'ail- leurs quelconque, à laquelle il n'est pas nécessaire d'attribuer la structure et la constitution chimique des membranes de précipité, se montrera, pour le sel dissous qui diffuse, et à la condition que le champ de diffusion de ce sel soit orienté dans un sens donné, non pas imperméable sans doute (les membranes de précipité elles-mêmes ne le sont pas), mais trois fois moins perméable qu'elle ne le serait si, dans la solution saline qu’elle sépare de l’eau, les ions H+ et les ions OH s'équilibraient exactement. Vraisemblablement, d'ailleurs, d'une membrane à l’autre, cel abaissement de perméabilité doit être différent; en effet, le pouvoir d'absorption des ions - positifs ou négatifs, dont dépend la valeur e de la différence de potentiel de la couche double, nous a paru varier suivant la nature de la membrane et, conséquemment, la valeur E du champ de polarisa- tion. Il n’est dont pas absurde d'imaginer, à priori, qu'il puisse exister des membranes en substance protéique, par exemple, pour lesquelles la valeur de E correspondant à l’adsorption des ions H+ et OH, el corrélativement l’abaissement de la per- méabilité, puissent être plus considérables que dans les expériences que nous venons de relater. 699 Au point de vue biologique, on voit l'intérêt que ces faits présentent. Certes, nous ne devons pas oublier (nous le disions tout à l'heure) que, de notre schéma in vitro à la vie, aux cellules vivantes, l'interpolation n'est légitime que dans la mesure où les conditions physico-chimiques réalisées de part et d'autre sont identiques ou, tout au moins, très voisines. Mais cette analogie ne nous parait justement douteuse. Les Hertwig, Schwann, Reinke, de Vries et de bien d'autres ont élabli que la réaction du sue des cellules vivantes animales ou végétales s’écarte assez de la neutralité pour qu'on la puisse déceler aisément, même au tournesol; chez les animaux, l'acidité ou l'alcalinité du suc des cellules de cer- taines glandes est, comme on sait, fort élevée; si l’on envisage, en sens inverse, la perméabilité des éléments vivants aux électrolytes du milieu qui les baigne, le sérum, la lymphe s'écartent également de la neutralité. Quant à la structure capillaire criblée ou lacu- naire de notre membrane, qui est, avec la présence d’un excès d'ions H + ou OH — dans le milieu qui la baigne, la seconde condition nécessaire à la pola- risation, nous ne pensons pas qu'il soit raisonnable d'en douter; ce ne peut jamais être que par des interstices, si fins qu'on les suppose, que l’eau dif- fuse dans le cas de la plasmolyse, ou dans le cas de la turgescence; et, quelque hypothèse qu'on puisse faire sur la grosseur des micelles qui composent la membrane, il est vraisemblable qu'à traverser ces interstices, les plus grosses molécules d’électrolytes ne doivent pas éprouver plus de difficulté que n’en éprouverait un rat à s'engager dans une porte co- chère. Il reste, enfin, la force tangentielle qui, si faible qu'elle soit, doit suffire à assurer dans les inter- stices capillaires le glissement de la couche élec- trique mobile appartenant à la veine liquide ; mais l’on voit sans peine que, dans les cellules vivantes, cette force tangentielle sera la différence de pres- sion osmotique partielle correspondant à l’électro- lyte dont on envisage la perméabilité de part et d'autre de la membrane d'enveloppe. Ainsi donc tous les facteurs essentiels qui, dans notre schéma physico-chimique, suffisaient à assurer à la membrane une hémiperméabilité rela- tive aux électrolytes, nous les retrouvons dans les tissus vivants; cette hémiperméabilité est chez eux incontestablement plus parfaite, mais c’est qu’en vue de cette fin, et corrélativement, d’autres fac- teurs probablement interviennent; nous les con- naissons mal; il en est un toutefois dont il est légitime de supposer l'existence : c’est l'absorption des électrolytes par les granules colloïdaux que le suc cellulaire contient en suspension. pas observations de 700 III. — DiFrFÉRENCES DE POTENTIEL DANS LES TISSUS VIVANTS. La connaissance des lois de l’électrisation de contact va nous permettre de jeter quelque jour sur une autre question dont l'intérêt physiologique est encore profond. Nous voulons parler de l'interpré- tation physico-chimique des différences de poten- tiel des tissus vivants, et plus particulièrement d'une difficulté qu'on rencontre dans cette inter- prétation lorsqu'on étudie la variation de cette différence de potentiel en fonction de la tempé- rature. Nous supposerons connus les phénomènes eux- mêmes el nous nous contenterons de rappeler qu'entre deux points dissymétriques d'un muscle (du tendon à la face longitudinale), de la surface de section à la surface longitudinale d'un nerf, ou de la face interne à la face externe d'un tissu quel- conque, il existe une différence de potentiel. Considérons des cellules vivantes et le liquide interstitiel qui les baigne; d’une cellule à l’autre, ou d'un groupement de cellules à la lymphe ou à la sève qui les imprègne, l'inégale concentration des électrolytes dissous (ou la différence de pression osmotique qui y correspond) déterminera un mou- vement de diffusion; mais les membranes qui enveloppent ces éléments vivants sont hémiper- méables, c’est-à-dire imperméables à certains de ces électrolytes ; nous envisagerons l’un d'eux : ce sera, je suppose, un sel bivalent. Ostwald pense‘ que la membrane, sur la structure de laquelle il ne se prononce, d'ailleurs, pas clairement, laissera passer l'un des deux ions du sel, le négatif, par exemple, et qu'elle arrêtera l’autre au passage; une différence de potentiel prendra naissance, et « les forces électro-statiques ainsi révélées empêcheront, quand elles seront devenues égales à la pression osmolique des ions négatifs, la progression de ces derniers ». Ceux-ci formeront, en un mot, sur l'une des faces de la membrane, une couche électrique de densité égale et de signe contraire à celle que constituent, sur l’autre face, les ions positifs arrêtés au passage; c'est le schéma physico-chimique des phénomènes électriques des tissus vivants le plus rationnel et le plus légitime, puisqu'il ne fait que se fonder,en somme, sur ce que nous savons être la réalité objective : des inégalités de concentration saline et l'hémiperméabilité des membranes cellu- laires. Une seule part d'hypothèse : la représenta- tion qu'Ostwald se fait, et qui n'est d'ailleurs qu'à demi-explicative, des membranes hémiperméables. Le mécanisme très simple qu'il imagine aboutit, comme celui, singulièrement plus compliqué, que 4 Zoïtschrift für physikal, Chem., 1890. PIERRE GIRARD — L'ÉLECTRISATION DE CONTACT EN BIOLOGIE nous décrivions tout à l'heure en détail, au résultat essentiel de la polarisation de la membrane. Mais l'on serait mal fondé à croire, en présence de cette identité du résultat, que la simplicité du méca- nisme imaginé par Ostwald soit une raison pour l’adopter; en effet, les différences de potentiel de part et d'autre de la membrane, réalisées par le mécanisme qu'il décrit, « ne sont, dit-il, qu'un cas particulièrement simple des phénomènes que Nernst expliqua par le contact des solutions d’élec- trolytes, et, des équations qu'il a posées, on tire celles qui sont valables ici si l’on égale à 0 la vitesse de transport ». Mais l'équation d'une pile de concentration : Re qu U—Y Ce établit la proportionnalité de sa force électro- motrice à la température absolue T. Or, comme la très bien remarqué Bernstein !, des divers facteurs dont dépendent les phénomènes électriques des lissus vivants, la température est le seul dont nous soyions maître, et la proportionnalité à T, le seul crilérium dont nous disposions pour vérifier l'exac- ütude de l'interprétation physico-chimique d'Ost- wald. Disons de suite que, si l’on consulte l'expérience, les résultats qu'elle fournit ne lui sont guère favo- rables; Bernstein, il est vrai, a trouvé, avec les muscles et les nerfs de la grenouille, des variations en fonction de T qui, bien que s’écartant notable- ment des valeurs théoriquement prévues (les écarts atteignent 8 ‘/, dans cerlaines expériences), lui paraissent encore conciliables avec l'hypothèse des « courants de membranes ». Mais les recherches de Hermann, de von Gendre, de Biedermann, et surtout celles de Lesser*® sur la peau de grenouille montrent que, tout au moins chez ce dernier tissu, les différences de potentiel croissent suivant une loi à peu près impossible à éta- blir exactement, en raison des difficultés expéri- mentales qu'on rencontre, mais certainement beau- coup plus rapide que la proportionnalité à la tem- pérature absolue. En fait, cette difficulté nous paraît facile à résoudre si, à l'interprétation qu'Ostwald propose de la polarisation des membranes d'enveloppe, nous substituons la nôtre, plus compliquée, mais à laquelle l'expérience nous à paru donner raison déjà. Dans l'expression : ! Archiv für die gesammte l’hysiologie, 1892, p. 760. * Archiv für die gesammte Physiologie, 1907. M. Lapicque el moi, nous avons trouvé sur la peau de grenouille des ré- sullats dans le sens de ceux de Lesser. Nous nous dispo- sions à les publier quand nous eùmes connaissance de l'article de Lesser. ALFRED GRADENWITZ — LA PRODUCTION ARTIFICIELLE DU DIAMANT 701 du champ de polarisation de la membrane figure en dénominateur le coeflicient 7 qui, comme on sait, varie en fonction de la température suivant une loi beaucoup plus rapide que la proportionnalité à la température absolue; l'intercalation d’une mem- brane dans un couple dont la réaction n'est pas neutre aura donc pour effet d'en faire varier le voltage, non plus proportionnellement à T, mais suivant une loi plus rapide. Nous pouvons distinguer deux cas,suivant l'orien- tation réciproque du champ du feuillet interposé et du champ de diffusion de l'électrolyte. Si ces deux champs sont de sens contraire, le cloisonnement du couple en abaissera le voltage 7, qui devient 7'; la différence x — z'(rx x'), qui cor- respond au champ du feuillet, est de signe contraire à x et croîtra en raison inverse de n. L’élévation de la température aura donc cet effet, paradoxal pour un observateur non averti, d'abaisser le voltage z'et suivant une loi beaucoup plus rapide que la pro- portionnalité à la température absolue. Æxemple 4. — Soit un couple liquide constitué par une solution d'HCI 1/50 » et une autre solu- tion du même acide 41/2500 7. À 15°, x est égal à + 0,034 volt; l'intercalation d’une membrane en vessie de pore abaisse le voltage, qui devient égal, en régime permanent et à la même température, àz'— + 0,004; à 38°, le sens du voltage est inversé et l’on a x'——0,016 volt. Si le champ du feuillet et le champ de diffusion sont de même sens, le cloisonnement du couple en accroîtra le voltage, qui passe de x à x" (r" >7),et la différence x! — 7, étant cette fois de même signe que rx et croissant en raison inverse du coefficient de viscosité, l'élévation de la température fera croître +’ suivant une loi plus rapide que la pro- portionnalité à T. Exemple 2. — Un couple liquide, dont un élé- ment est constitué par une solution de SO'K° nor- male alcalinisée par une petite quantité de KOH (1/100 n d’alcalinité) et l’autre élément par cette même solution diluée au 100° (et non alcalinisée), donne un vollage x — 0,020 volt à 20°. L'intercala- tion d'une membrane augmente le vollage de ce couple qui, à la même température et quand le régime permanent est établi, devient égal à x” == + 0,026; à 48°, x! — + 0,031. Revenons aux tissus vivants; si l'on commence par ne pas tenir compte de la polarisation des mem- branes enveloppantes, d’une cellule à l’autre ou des cellules au milieu interstitiel qui les baigne, les différences de concentration en électrolytes engen- dreront des différences de potentiel au contact, orientées de facon quelconque, mais dont la somme algébrique n'est pas nulle; d'autre part, la réaction du liquide protoplasmique s'écartant plus ou moins de la neutralité, cette condition est suffisante pour rendre légitime l'hypothèse d’une polarisation de la membrane cellulaire; dès lors, conformément au mécanisme que nous avons décrit, les diffé- rences de potentiel d'un point à l’autre du tissu envisagé varieront suivant une loi plus rapide que la proportionnalité à T; pour qu'elles croissent avec la température, il suffit que la polarisation des membranes cellulaires intervienne dans le phé- nomène électrique global comme un facteur positif; il suffit d'imaginer, en un mot, un schéma ana- logue à l'expérience 2. Nous ne pensons pas que les deux phénomènes biologiques à l'étude desquels nous venons de nous attacher soient les seuls dont la connaissance des lois de l'électrisation de contact facilite l'interpré- tation. Nous n'émettrons pas d'hypothèses; elles risqueraient fort d'être vaines, ne s'appuyant sur rien de précis. Mais nous pensons qu'il y a quelque utilité à attirer sur ces lois l'attention des biologistes. Nous l'avons fait, du moins, dans l'espérance qu'un jour, jaillira, en rapprochant les faits qu'elles syn- thétisent des autres faits que l'observation pourra révéler, un peu de clarté sur l’un des mille points du monde vivant qu'embrument encore tant de mystères. Pierre Girard. LA PRODUCTION ARTIFICIELLE DU DIAMANT On sait qu'un are voltaique, comportant, en dérivation sur ses électrodes, une capacité el une self-induction, rend, dans des conditions convena- bles, un son musical dû aux fluctuations régulières de la décharge électrique. M. M. la Rosa, professeur à l'Université de Palerme, a constaté que ce phé- nomèêne (observé pour la première fois par Duddell) se produit aussi en l'absence d’une bobine de self; | 4 tout en étant d’une moindre régularité, les oscilla- lions de courant deviennent alors plus rapides et d’une amplitude plus grande, de facon que l’éner- gie moyenne de chaque décharge s'accroît dans des proportions notables. L'analyse spectrale confirme ce fait remarquable. Dansces conditions, ilétait tout naturel de tenter l'application de cet are « musical » modifié à Ja production d'effets thermiques impossibles dans le cas des ares et des fours électriques ordinaires, par exemple à la fusion du carbone. On sait que Moissan, dans son travail classique sur le four électrique, n’a pu observer la moindre trace de carbone fondant. Il en concluait que le car- bone, comparable à l’arsenic, passe directement de l'état solide à l'état gazeux, sans liquéfaction inter- médiaire, dans le vide aussi bien qu'à la pression atmosphérique. Il n’en affirma pas moins que le car- bone pourrait être fondu sous une pression extré- mement élevée, et il s’en inspira pour produire des particulesidentiques, par leurs propriétés physiques et chimiques, au diamant. Aussi, pour résoudre définitivement la question de la fusibilité du £arbone, M. la Rosa a-t-il eu l'idée de profiter des effets thermiques si énormes de l'arc musical. L'arc dont il se sert affecte la forme d'un éclateur à électrodes de charbon verticales. Au charbon in- férieur, est attaché un creuset en terre réfractaire percé d'un trou et rempli d'une fine poudre de char- bon de sucre à 3 ou 4% de hauteur au-dessus de l’électrode de charbon. Le charbon supérieur passe à travers un autre trou pratiqué dans le couvercle du creuset. Le charbon de sucre était d'une remar- quable pureté etne laissait, après combustion dans un courant d'oxygène, qu'un résidu de 7 ®/,,. Les électrodes de charbon étaient également d’une grande pureté et donnaient un résidu de 33 ®/,, seulement. Au passage de l'arc musical entre la poudre du creuset et l’électrode de charbon supérieure (la po- larité élant variée à volonté), un petit tourbillon de carbone incandescent s’est produit entre les deux électrodes. La poudre charriée par ce tourbillon frappait les parois, dont on la détachait par des chocs convenables, de façon à la faire toraber à tra- vers l'arc voltaïque. Après avoir continué ce pro- cessus pendant quelques heures, l’on a trouvé des incrustations de formes et de dimensions variables, attachées aux deux électrodes. Celles de l’électrode positive étaient larges plutôt que hautes, et à peu près de la forme de cônes tronqués reposant par leur petite base sur l'électrode, tandis que l’autre base, considérablement creusée, donnait à l'incrus- tation l'aspect d'une calotte d’une hauteur maxi- mum de 6 millimètres et d'un diamètre maximum de 44 millimètres. L'incrustalion recouvrant l’élec- trode négative présente, au contraire, la forme d'un cylindre d’un diamètre inférieur à celui de l'élec- trode et d'une surface plus ou moins irrégulière; sa hauteur maximum est de 10 millimètres. La partie tournée vers l’autre électrode est amincie et arron- die vers le haut. Des particules de charbon desucre adhèrent aux surfaces terminales entre lesquelles ALFRED GRADENWITZ — LA PRODUCTION ARTIFICIELLE DU DIAMANT passe l’arc musical, présentant une nuance unifor- mément grise, avec des veines légèrementémaillées d'un gris päle lumineux. En cassant ces incrustations, on obtient, dans les parties périphériques, une substance de faible résistance mécanique et presque friable, se rédui- sant en poudresous un effort minime. Dans cette poudre, on reconnait, sous le microscope, les par- ticules primitives de carbone transformées en partie ou intégralement en graphite. Les parties intérieures consistent, au contraire, en un graphite plus compact et plus résistant, d’une surface onc- tueuse et lumineuse. Ces particules ne permettent plus de distinguer au microscope la moindre trace des contours ni de la structure des particules de carbone primitives. Ces échantillons de graphite présentent une résistance assez grande à la combustion; leur résidu, de 5 °/,, est plus faible que celui du charbon de sucre employé à le produire. Cette analyse et les résultats de l’observation microsco- pique, ainsi que la ténacité de l’agglomérat, au- torisent à affirmer que les particules en question ne sauraient être identiques aux particules primi- tives de carbone converties en graphite, et collées l’une à l’autre par de faibles quantités de matières étrangères. L'hypothèse que la formation de ces incrusta- tions serait due à la sublimation du charbon doit être écartée, l'expérience faite dans des conditions identiques avec un arc à courant continu ne don- nant pas les mêmes résultats. Les incrustations formées dans ce cas sont, en effet, d'une consis- tance très peu solide. De ces observations, M. la Rosa tire la conclu- sion que les particules de charbon, frappées par l’'are musical, passent, en raison de la température exceptionnellement élevée de ce dernier, à l'état liquide. Dans cette hypothèse, il était bien légi- time de supposer que les particules de carbone liquide, en se refroidissant, pourraient prendre une forme cristalline. Or, on sait que le graphite est la seule modification allotropique du carbone aux températures élevées, et que le diamant lui-même se convertiten cette forme au four électrique. Aussi, pour obtenir des cristaux, fallait-il assurer aux particules de carbone frappées par la décharge un retour prompt et définitif à une température basse, et, comme cela n'était guère possible avec la dispo- sition décrite ci-dessus, M. la Rosa substitua à l'arc musical une étincelle condensée très puis- sante. Dans ces conditions, la masse de charbon $e maintient à la température ordinaire et ce ne sont que les particules immédiatement frappées par la décharge qui subissent l'échauffement. C'est ainsi que M. la Rosa a réussi à isoler, du LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 103 charbon de sucre soumis au traitement électrique, des particules d'un poids spécifique intermédiaire entre 2,9 e l'iodure de méthylène respectivement), particules t3, 2 (densités du bromophone et de plus ou moins arrondies, parfois luisantes ou par- faitement transparentes, et d'un grand pouvoir ré- fracteur. Quelques-unes de ces particules présentent des propriétés cristallines indubitables. Les figures 1 et 2 reproduisent les microphoto- Fig. 1. graphies de quelques échantillons choisis parmi les particules les plus belles ainsi obtenues. La fi- gure À représente un cristal simple, combinaison de deux tétraèdres à faces courbes, d’un grand éclat et parfaitement transparent. Une autre parti- cule (fig. 2) se compose d’un système de plusieurs cristaux plus ou moins tronqués, où l’on distingue parfaitement deux tétraèdres et deux petites pyra- mides aux bases carrées. Toutes ces particules sont extrêmement dures et rayent parfaitement le rubis. Elles résistent à l’action continue des acides con- centrés bouillants les plus énergiques. Or, il n'y a que deux substances qui possèdent les propriétés physiques et chimiques énumérées ci-dessus, à savoir : le diamant et le carborundum, cristallisant, le premier dans le système cubique, le second en prismes hexagonaux. Pour établir exactement la nature des deux cristaux, il faudrait déterminer leur système cristallin, ce que l’auteur n'a pas encore été en mesure de faire. La com- bustion permettrait également de trancher la ques- Fie22: tion, mais la quantité minime de malière jusqu'ici disponible ne se prête guère à un essai pareil, que l’auteur se réserve, du reste, de faire. Mais, comme une expérience de contrôle qui éli- minait absolument la présence de quantités appré- ciables de silice à donné des résultats identiques, M. la Rosa affirme avec une haute vraisemblance que ces particules sont bien du diamant véritable. Alfred Gradenwitz, Docteur ès sciences. REVUE ANNUELLE PREMIÈRE I. — QUESTIONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL. $ 1. — Bibliographie. 1. Traités généraux. — Nous signalerons parmi les traités généraux : Un grand traité allemand de Technique physiolo- gique en trois gros volumes, publié, sous la direction du professeur R.TicersrepT, d'Helsingfors, par une série de spécialistes : Handhuch der physiologischen Methodik, Leipzig, 1908-1909. Plusieurs fascicules ont paru, notamment : Berne : Wirbellose Tiere ; ASBER : Physikalische Chemie; OPPENNEIMER Methodologie der Enzymforschungen ; MaAGnus : Bewegungen des Verdauungsrohres ; PAWLOW : Absonderung der Verdauungsdrusen, etc. ; DE PHYSIOLOGIE PARTIE : GÉNÉRALITÉS La continuation de la publication du Grand (raité de Physiologie publié sous la direction de NaGez, qui constitue une encyclopédie complète des sciences physiologiques ; Le 8° volume (1909) des Ærgebnisse d'Asuer et SPiRo. Parmi les monographies qu'il contient, nous relevons : Psychophysiologie de l'analyse des sons, par SCHABFER ; Physiologie comparée des substances irritables, par BIEDERMANX ; Coordination et repré- sentation mouvements dans le système nerveux central, par B£sevor ; /anervation du cœur chez les Invertébrés, par CarzsoN ; Thy- roide et circulalion, par VON Fürtu; des musculaires Dioptrique oculaire,par Rour; Pouls artériel, par TiGERSTEDT ; Actions bhotodynamiques, par VON TAPPEINER, ete. ; 104 LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE Un vol. nouveau des Further advances in Physio- logy, édité par LéonarD Hiec et contenant une série de monographies sur le cœur, le pouls, les mouve- | ments respiratoires, les localisations cérébrales ; Les fase. 1 el 2 du tome VII du Dictionnaire de Physiologie de Cuarzes Ricuer (Méthode graphique, greffe animale, grenouille, hématie, hémoglobine, hémolyse, hémorragie, hérédité, hibernation, ete.); Plusieurs traités spéciaux : J. Cu. Bose : Comparative Electrophysiologr, Londres, 1908 ; Borurrau : Lehrhuch der medicinisechen Physik, Leipzig, 1908; Vicror Henri: Cours de Chimie physique, Paris, 1909 ; A. von Koranvyt et P. F. Ricurer : Physikalische Chemie und Medizin, Leipzig, 1907-1908. 2. Périodiques et Recueils de travaux. — Le projet de publier à partir du 1‘ janvier 1908 le Journal of Anatomy and Physiology en deux sections, l’une d'Anatomie, l’autre de Physiologie, dont nous avions parlé dans notre précédente revue, a été abandonné. Le Professeur Schäfer, d'Edimbourg, qui devait en diriger la partie physiologique, s’est associé avec les Professeurs F. Gotch, d'Oxford, W. D. Halliburton, de Londres, pour éditer une nouvelle revue sous le titre de Quarterly Journal of experimental Physiology, dont le premier fascicule a paru en janvier 1908. L'année dernière a vu naître une autre revue exclusivement consacrée à la Technique physio- | logique : Zeitschrilt für biologische Technik und Methodik, publiée à Strasbourg par MARTIN GILDE- MEISTER, privat-docent à 1 Université. Le 1° fasci- cule est daté du 12 mai 1908. Parmi les nouveaux périodiques pouvant inté- resser les physiologistes, nous citerons égale- ment : a) Folia neuro-bioloyica, organe international pour la biologie du système nerveux, publié à Leipzig et dirigé par le D'E. H£ekma, de Groningue, avec la collaboration de nombreux spécialistes de différentes nationalités ; b) Archiv für Zelllorschung, publié à Leipzig sous la direction de Ricuarb GoLpscumipr, privat- docent à l'Université de Munich ; c) Zeitschrilt lür induktive Abstammungs- und Vererbungslehre, Berlin ; d) Zeitschrift für JImmunitälsforschung und experimentelle Therapie ; 1. Originale; II. Refe- rale, publiée à Iéna à partir du 1* janvier 1909 par E. Fri&oserGEr (Berlin), R. Kraus (Vienne), [. Sacus (Francfort-sur-Main), P. UuLenuuru (Gr. Lichterfelde, de nombreux Bon- Berlin) avec la collaboration spécialistes : BaABes (Bucarest), bET (Bruxelles), METCANIKOFF (Paris), etc. ; e) The Journal of Pharmacology and experi- mental Therapeutics, publié à Baltimore (U. S. A), à partir du 4° mai 1909 par Joux J. ABEL, professeur de Pharmacologie à Johns Hopkins University. f) Heart, a Journal for the Study of the Circula- tion, publié à Londres, à partir du 1‘ juillet 1909, par Tn. Lewis, avec la collaboration de Gaskell, Bayliss, Lauder Brunton, Carlson, Erlanger, Gotch, Starling, etc. g) La Revue psychologique, publiée à Bruxelles, par M"! loreyro, depuis le 1°" mars 1908. h) Rivista di Scienza (Scientia), Bologne, Paris, Londres, Leipzig, revue internationale en quatre langues, dans laquelle paraïtront de nombreuses revues générales ayant trait à des sujets de Bio- logie. Signalons aussi Biometrica, a Journal for the Statistical Study of biological problems, publié à Cambridge sous la direction de FRANCIS GALTON, dont nous aurions dù mentionner l'apparition dans notre avant-dernière revue. Parmi les recueils de travaux, nous citerons : Beiträge zur Physiologie und Pathologie. Fest- schrift (volume jubilaire), dédié à LuormaR HERMANN, par ses élèves, Stuttgart, 1908. ADOLF FIck Gesammelle Schriften, Würzburg. A. Mosso : Laboratoire scientifique international du Mont Rosa. Travaux des années 1904-1907, Il. Turin, 1908. Travaux de la Station physiologique du Pare des Princes, à Boulogne-sur-Seine, pendant 1906- 1907. Paris, 1908. CaLuETrE (Lille), 4 vol., 3. Monographies. — Parmi les nombreuses mo- nographies pouvant intéresser les physiologistes : AweLarp: Mesure clinique de la tension artérielle. Paris, 1909. Aucé : De la perception à distance des bruits intracar- diaques. Paris, 1908. à Luowié Bacn : Pupillenlehre. Anatomie, Physiologie und Pathologie. Methodik der Untersuchung. Ber- lin, 4908. BäârAxy: Physiologie und Pathologie der Beugungsap- parate beim Menschen. Wien, 1907. Béxéoirr : Biomécanisme et biovitalisme en médecine et en biologie. Trad. Robert-Tissot. Paris, 1908. P. Bonxier : La voix professionnelle, Paris, 1907-1908. Rorenr Bic : Die Bedeutung der spinozerebellaren Sys- teme. Wiesbaden, 1907. Becurerew : Die Funktionen der Nervenzentra. Edit. al- lem. Iena, 4908. KarL Braguni@: Mechanismus und Vitalismus in der Biologie des neunzehnten Jahrhunderts. Leipzig, 1907. O. Connuxmm : Physiologie der Verdauung. Leipzig, 1908. E. von Cyon : Das Ohrlabyrinth als Organ der mathe- matischen Sinne für Raum und Zeit. Berlin, 1908. H. Druescu: Der Restitulionsreiz. Leipzig, 1909. Dumas : Bradycardies et faisceau de His. Paris, 1909. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 705 L. Eoncer et En. CLaparène : Ueber Tierpsychologie. Leipzig, 1909. P. Fauvez : Physiologie de l'acide urique. Paris, 1907. S, I. Franz: On the functions of the cerebrum. New York, 1908. V. Franz: Die Welt des Lebens in objektiver nicht anthropocentrischer Betrachtung. Leipzig, 4907. Hans FrienenraaL: Arbeiten aus dem Gebiet der expe- rimentellen Physiologie. lena, 1908. Mie S. Frisox : Recherches expérimentales sur l’anes- thésie par le chloroforme. Paris, 1908. Grénanr : Recherches expérimentales sur la toxicité de l’'urée. Paris, 1908. H. Guzzmanx : Physiologie der Stimme und Sprache. Braunschweig, 1909. Erieorica HEwPELMANN : Der Frosch. Leipzig, 1909. J. Joreyro : La fonction musculaire. Paris, 1909. J. Joreyko et SreraxowskA : Psychophysiologie de la douleur. Paris, 1909. Leoporn Levi et Hexrr pe RorusemLp : Etudes sur la physio-pathologie du corps thyroïde et de l'hypo- physe. Paris, Doin, 1908. Jacques Log: La dynamique des phénomènes de la vie. Paris, 1908 ; trad. française de l'ouvrage signalé dans la revue de l’année dernière. ; Ferxano Masay : L'hypophyse, étude de physiologie pathologique. Bruxelles, 1908. 3. G. Moxcregerc : Untersuchungen über das Atrioven- tricularbündel im menschlichen Herzen. Iena, 1908. M. Niczoux : Les anesthésiques généraux au point de vue chimico-physiologique. Paris, 1908. Herman Mu : Ueber die Funktionen von Hirn und Rückemark. Ges. Mitt. Berlin, 1909. Parnon et GoLpsrein : Les sécrétions internes. Patholo- gie et Physiologie. Paris, 1909. Æ. Rape : Geschichte der biologischen Theorien. Leip- zig, 1909. II. Sonaor : Die Bedeutung der Katalyse für die Medizin. Kiel, 1908. Cu. S. SaerRiNGrox : The integrative action of the ner- vous System. New-York, 1907. RicaarD Scamior : Fakire und Fakirtum im alten und modernen Indien. Berlin, 1908. J\coues Sougies : Physiologie de l’aéronaute, 1908. C. Srress : Recherches sur l'évolution de la fonction digestive avec quelques réflexions sur les progrès de la Physiologie. Paris, 1909. von SrEunEcx : Der Sehraum auf Grund der Erfahrung. Leipzig, 4907. H. Srrasser : Lehrbuch der Muskel- und,Gelenkmecha- nik. Berlin, 1908. J. A. van TrorsexBurG : Die Seekrankheit, 1908. F&érNaND ViLLEMIN: Le corps jaune considéré comme glande à sécrétion interne de l'ovaire. Thèse de Lyon. Paris, 1908. €. Vion Dezpuin : Contribution à l'étude des mouve- ments de pronation et de supination. Paris, 1908. R. M. Yerkes : The dancing mouse. New York, 1908. 2. — Nécrologie. CA [l La mort a fait cette année de nombreux vides dans les rangs des physiologistes. Nous avons eu à déplorer la mort de : €arz von Voir, professeur de Physiologie à l'Uni- versité de Munich; Oscar LANGENDORFF, professeur de Physiologie à l'Université de Rostock ; JIüFNER, professeur de Chimie physiologique à l'Université de Tübingue ; RosemaNnx , professeur de Physiologie à Münster (Westphalie) ; REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. O. Domricn, ancien professeur de Physiologie à l'Université d'Iena ; CoppiNGER, professeur de Physiologie à l'Univer- sité de Dublin ; DesEazaut, professeur de Physiologie à l'Ecole de Médecine de Limoges; DAnNNER, professeur de Physiologie à Médecine de Tours ; PuisALIX, préparateur au Muséum de Paris ; WILBUR OLIN ATwatER, professeur à la Wesleyan Université, Middletown (U. S. A.); HENRY JAcKsoN, professeur de Physiologie à l'Uni- versité de Vermont de Burlington (U. S. A.) : G. J. PREsrow, professeur de Physiologie à Balti- more (U. S. A.); BIELLOUSsOw, professeur d'Anatomie et de Physio- logie à l'Université de Charkow ; CuaRLes E. BEEvor, médecin de l'hôpital pour mala- dies nerveuses, à Londres; E. D. Maporuer, professeur d’Anatomie et de Phy- siologie, à Dublin ; Cu. SrewarT, professeur d'Anatomie et de Physio- logie comparées, à Londres ; Tarouan Muraxow, professeur de Physiologie à Saint-Pétersbourg ; BARBERä, professeur de Physiologie à l'Université de Messine, qui a péri dans le tremblement de terre de décembre 1908. Citons aussi : CHAMBERLAND, sous-directeur de l'Institut Pasteur, à Paris; ALFRED GraRD, professeur de Zoologie à Paris; Oscar LiEBREICH, ancien professeur de Pharmaco- logie à l’Université de Berlin ; Virrorro Marcur, professeur d'Histologie ; J. von MeuRiG, professeur de Clinique médicale à l'Université de Halle a/S. ; NEUMANN, directeur de la Section chimique à l'Hô- pital Rud. Virchow de Berlin; Orromar ROSENBACH, professeur l'Université de Breslau ; SCHLAGDENHAUFFEN, ancien professeur de Toxicolo- gie et de Physique à l'Ecole supérieure de Phar- macie de Nancy, un des derniers survivants du corps professoral de l’ancienne Faculté de Méde- cine de Strasbourg. l'Ecole de de Médecine à II. — PuySIOLOGIE GÉNÉRALE. $ 1. — Actions moléculaires. Les questions de Physique moléculaire prennent chaque jour une importance croissante en Physio- logie. La Physico-Chimie el la Physiologie se prêtent ici un mutuel appui. La constitution et les propriétés physiques des solutions colloïdales sont en ce moment un sujet à l'ordre du jour dans 16° 706 ce domaine intéressant, Examinons brièvement quelques-unes des notions récentes concernant l'état colloïdal. 1. Colloides. Soles. — Une solution d’albumine, telle que nous la présente le sérum sanguin ou le blanc d'œuf dilué, est, pour le physiologiste, le type du colloide hydrophile stable. C’est une pseudo- solution où « sole», constituée par des particules extrêmement fines (0,1 4 à 0,01 y) tenues en sus- pension dans le liquide. a) Ultraliltration des soles. L'existence de l’état granulaire du colloïde à l'état de sole peut être démontrée de différentes facons. L'une des plus probantes, c’est la filtration. En faisant passer les pseudo-solutions colloïdales, sous pression, à tra- vers des filtres de gélatine durcie à pores très fins, Bechhold * est parvenu à retenir les granules, le liquide traversant seul le filtre, et même à séparer les uns des autres différents colloïdes à grains iné- gaux. Voici un exemple de ce triage par filtration : Une solution colloïdale de bleu de Prusse est mé- langée avec une solution d’oxyhémoglobine, de manière à former une liqueur verdätre. Ce mélange est versé sur deux filtres inégalement perméables el filtré sous pression modérée. Le filtre le plus serré retient les deux substances et laisse passer de l'eau claire. Le filtre à pores un peu moins fins relient les granules les plus gros, ceux de bleu de Prusse, et laisse passer la solution rouge d’hémo- globine. Un mélange d’albumoses peut être égale- inent séparé par cette filtration fractionnée. Ajou- tons que Bechhold avait été précédé dans l'étude de la filtration des colloïdes par Starling et par d’autres. b) Ultra-microscope. Siedentopf et Zsigmondy ont réussi à rendre visibles au moyen de l’ultra- microscope les granules des pseudo-solutions col- loïdales. On sait que les particules solides en sus- pension dans un fluide réfléchissent la lumière, ce qui donne lieu à l’opalescence et au phénomène de Tyndall. En concentrant au moyen d’une lentille une vive lumière au sein du sole, on produit un cône lumineux qui fait tout à fait défaut dans les milieux homogènes optiquement vides. Si l’illumi- nation est très intense et si la lumière est projetée latéralement, les granules apparaîtront dans le champ obscur de l'ultra-microscope comme des points brillants animés de mouvements browniens. On pourra les compter, mesurer leurs dimensions, Pur volume, leur surface, ainsi que l'amplitude et la vitesse de leurs excursions. Ainsi une solution d'albumine à 4 °/,, dont les granules ont un dia- ! Zeils. Î. physikal. Chem., t. LX, p. 3, et Zeits. f. Chem. und Ind. d. Kolloïde. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE mètre de 0,1 y, contient par centimètre cube 20 trillions de granules. La distance qui sépare ces granules est de 1,3 y et la surface totale des gra- nules contenus dans 1 centimètre cube est égale à 60 mètres carrés. L'ultra-microscope nous permet d'apercevoir des particules dont le diamètre ne représente qu'un petit nombre de fois celui des molécules. Quoique d'invention récente, l'ultra-microscope a servi à de nombreuses recherches. Kreidl et Neumann” ont vu à l'ultra-microscope la caséine du lait de vache, d'ânesse, etc., sous forme de par- ticules brillantes animées de mouvements brow- niens très actifs. L'addition d'une petite quantité d'alcali les fait disparaître. Dans le lait de femme, les grains de caséine ne sont pas visibles à l’ultra- microscope, sans doute à cause de la faible acidité de ce liquide. L’addition d'une très faible quantité d'acide ou de présure au lait de femme y fait appa- raitre les granules de caséine. On peut, d’ailleurs, observer toutes les transitions entre les pseudo- solutions de colloïdes et les émulsions à particules visibles au microscope ordinaire. Dans les deux cas, les granules sont animés de mouvements browniens. c) Microcinématographie. Francois-Franck* a récemment étudié ces mouvements au moyen du microscope ordinaire par le procédé de la micro- photographie cinématographique (micro-cinémalo- graphie). Il s'est servi comme objet d'étude des granules d’une émulsion de caoutchouc. Les pré- parations étaient photographiées au moyen d’un objectif à immersion homogène, avec un temps de pose de 1/300 de seconde. Ce procédé permet de fixer et d'analyser les phases les plus fugitives des mouvements microscopiques. Hürthle * l’a appliqué à l'étude des phénomènes microscopiques de la contraction des museles striés de l'Hydrophile. Les fibres musculaires encore vivantes, et parcourues par des « ondes de contraction », fournirent des instantanés avec des temps de pose variant de 0", à 0",05. Comme les résultats obtenus par Hürthle diffèrent notable- ment de ceux des travaux classiques d'Engel- mann, etc. (voir le schéma fig. 121, p. 248 du Précis d'Histologie humaine de Tourneux, qui reproduit un schéma publié en 1876 par l’auteur de ces lignes), nous ne les analyserons pas ici. d) Ultra-microorganismes. Mais revenons à l’ultra-microscope. En voici une autre application intéressante : Leo Errera s'était basé autrefois sur des consi- dérations purement lhéoriques pour affirmer le 1 Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXXIII, p. 523. 2C"RSoc. Biol. t. 'LXIV, p.272. 5 Arch. f. d. ges. Physiologie, t. CXXV, p. 1. LÉON FREDERICQ — REVUE peu de probabilité de l'existence de microbes ultra- microscopiques. Les observations directes de Molisch" ont pleinement confirmé ces prévisions. Les microbes les plus petits que l'ultra-microscope ait jusqu'à présent permis de découvrir sont éga- lement visibles au microscope ordinaire. Les mi- erobes invisibles devraient, d'ailleurs, par multipli- cation fournir des colonies visibles. On ne connait aucun cas de colonies microbiennes visibles dont les individus seraient trop petits pour être vus individuellement. L'existence d'ultra-microorga nismes parait done peu probable (contesté par Chauveau). e) Ultra-micrographie de la coagulation. Le phé- nomène de la coagulation du sang a été également étudié à l’ultra-microscope par A. Mayer et par G. Cesana”. Tous deux s'accordent pour admettre que les filaments de fibrine qui se forment dans le plasma au moment de la coagulation résultent de la juxtaposition de granules ultra-microscopiques qui se disposent en séries linéaires. Les granules eux-mêmes ne préexisteraient pas dans le plasma selon Mayer, tandis que Gesana les apercoit à l’ultra-microscope en dehors de toute coagulation. Pour Cesana, le phénomène de la coagulation ne correspond pas à la solidification d'une substance primitivement dissoute : il s'agi- rait uniquement d’un changement dans l’arrange- ment de particules solides préexistantes qui s'agglu- tinent pour former la fibrine. Enfin, Fauré-Frémiet* et d’autres ont employé l'ultra-microscope pour l’étude de la structure intime du protoplasme. f) Charge électrique et cataphorèse des colloïdes. Les particules en suspension possèdent une charge électrique positive ou négative, d’où leur transport vers le pôle négatif (colloïdes positifs) ou positif (colloïdes négatifs), quand on fait passer un courant électrique à travers leur solution. Ce transport des particules positives vers le pôle | négatif et des particules négatives vers le pôle posi- tif peut être démontré macroscopiquement. Mais on peut également, à l'exemple de Cotton et Mouton, l'observer directement à l’ultra-microscope. On voit les particules exécuter des trajectoires rectilignes dans un champ alternatif, décrire des arcs de cercle dans un champ tournant, etc. _ C’est probablement la répulsion due à la charge électrique des grains qui les empêche de se réunir et contrebalance l'effet de la tension superficielle. Cette dernière force devrait les pousser à s’agglu- liner, de manière à réaliser le minimum de surface. g) Gels. Le colloïde peut être séparé de sa solu- tion ou sole par différents moyens et donner lieu à ‘ Botan. Zeils., t. LXVI, p. 131. ? Arch. di Fisiol., t. N, p. 480. * CG. R. Soc. Biol., t. LXIV, p. 582 ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 1 la floculation, la précipitation, la coagulation, ete. Il prend alors le nom de gel. Les sels, les acides, les alcalis réalisent cette séparation avec une facilité plus ou moins grande suivant le degré de s{abilité du colloïde. Comme l’albumine appartient au groupe des colloïdes stables, il faut de grandes quantités de sels neutres, par exemple la saturation au moyen du sulfate ammonique, pour la précipiter. Le phénomène est, dans ce cas réversible, c’est-à-dire que l’albumine précipitée en flocons se redissout quand on éloigne le sel, par exemple par dialyse. La coagulation des solutions d’albumine par la chaleur est un exemple de formation de gel non réversible : une fois coa- gulée, l’albumine ne peut plus se redissoudre; elle est dénaturée. h) Adsorption. L'adsorption mutuelle des colloïdes el leur précipitation ont donné lieu à des applications pratiques intéressantes. Si l'on mélange du sérum dilué et légèrement acidulé par l'acide acétique avec certains colloïdes minéraux, par exemple une sus- pension d'hydrate de fer colloïdal ou de kaolin, il y a adsorption de l’albumine à la surface des grains minéraux et précipitation mutuelle des deux col- loïdes. C’est un moyen pratique d'obtenir la désal- buminisation des liquides albumineux, par exemple du sérum sanguin dans les cas de dosage du sucre. Ce dosage ne peut s'effectuer par la liqueur cupro- potassique qu'avec des liquides exempts d’'albu- mine. La même précipitation de l’albumine s’ob- serve quand on mélange ses solutions avec une émulsion de mastie. i) Précipitation mutuelle. Coagulation du sang. Des recherches toutes récentes de Nolf semblent montrer que la coagulation du sang est, au fond, également un phénomène physique de précipitation mutuelle de plusieurs colloïdes en suspension dans le plasma, et nullement un phénomène de transfor- mation chimique du fibrinogène par le ferment appelé thrombine, comme on l’admet encore géné- ralement. D'après la théorie la plus en vogue, celle d'Alexandre Schmidt, la coagulation du sang est un phénomène de fermentation. Le fibrinogène dissous dans le plasma sanguin éprouve une transformation chimique qui le fait passer à l’état solide, et le change en fibrine, sous l'influence d'un ferment qui prend naissance au moment où le sang sortant des vaisseaux vient au contact d'un corps étranger. Ce contact agit comme irritant sur les globules blancs du sang et les pousse à sécréter une substance qui joue le rôle principal dans la formation du fer- ment. D'après les derniers travaux de Fuld, Spiro, Morawitz, le ferment de la fibrine ou thrombine serait un produit fort complexe, dans la formation duquel interviendraient au moins trois éléments 708 Deux de ces éléments, le {hromhogène de Morawitz (prothrombine de Schmidt, plasmozyme de Fuld) et les sels de chaux, préexisteraient à côté du fibrino- gène dans le plasma sanguin,tandis que le troisième, la /hromhokinase de Morawitz (cytozyme de Fuld- Spiro, parte pro substances zymoplastiques de Schmidt), n'y préexisterait pas, mais serait fourni par les leucocytes au moment de la coagulation. Nolf a montré que le plasma du sang des Mammi- fères contient tous les facteurs de la coagulation, sans en excepter celui qu'il a nommé thrombozyme et qui ne correspond pas tout à fait à la thromboki- nase de Morawitz. Pour Nolf, les facteurs primor- diaux sont au nombre de trois : {brinogène, throm- bogène, thrombozyme, préexistant tous trois dans le plasma sanguin en circulation. Ces trois colloïdes albumineux forment dans le plasma des pseudo- solutions ou soles, dont l'équilibre instable peut se maintenir indéfiniment au contact de la paroi vas- culaire intacte ou d'un vase enduit de vaseline. Mais cet équilibre est des plus instables : il peut être rompu et le sole passer à l’état de gel par l'interven- tion de différents agents que l’auteur nomme {hrom- hoplastiques : contact du verre ou de tout autre corps étranger, fibrine concrète ou dissoute, col- loïdes extraits des tissus, etc. L'équilibre une fois rompu, les trois colloïdes s'unissent pour former des produits d'addition, dont une partie passe à l'état de gel et se précipite sous forme de fhrine solide, dont une partie peut rester en solution et constitue la {brine dissoute, que Nolf identifie avec la thrombine des auteurs. La coagulation du sang serait donc, dans les con- ditions ordinaires, une précipilalion réciproque de colloïdes au contact d'un corps étranger, donnant naissance à de la fibrine concrète et à de la throm- bine. La thrombine, dans les conditions ordinaires, serait non l’antécédent et la cause de la coagulation, mais un de ses produits. Ce produit est d’ailleurs lui-même {hromboplastique et provoque la précipi- tation des solutions de fibrinogène auquel on l'ajoute. Mais il ne s'agit pas là de phénomène de calalyse, de fermentation. La thrombine est con- sommée et disparait dans la réaction. k)\ Hémolvse. Un autre phénomène moléculaire pour lequel les recherches récentes ont substitué également une explication purement physique à l'explication chimique qu'on en donnait autrefois, c'est celui de l’Lémolyse. On sait que la matière rouge de notre sang, l'hémoglobine, se trouve con- centrée dans les globules, dont elle imprègne la substance Quoique très soluble dans l’eau, les s0- lutions salines et le plasma sanguin, l'hémoglobine ne diffuse pas dans ce dernier liquide et reste dans les globules. On admettait autrefois, avec Hoppe- Seyler, que l'hémoglobine est retenue dans le glo- LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE bule grâce à des affinités chimiques qui la lient à certains constituants du stroma globulaire. Les liquides, comme l’eau distillée ou les solutions sa- lines très diluées qui produisent ce qu'on appelle l'hémolyse, c'est-à-dire qui attaquent les globules et font passer l'hémoglobine en solution, étaient censés attaquer et décomposer ces combinaisons : l'hémoglobine libérée passait alors en solution dans le liquide ambiant. Hamburger a montré il y a quelques années que l'explication est inacceptable : dans les cas dont il a été question, l'hémolyse dépend, non des propriétés chimiques du liquide hémolysant, mais de ses pro- priétés physiques, avant tout de sa pression osmoti- que. Au point de vue de l’hémolyse, le globule rouge peut être considéré comme formé d'une enveloppe semi-perméable englobant un contenu liquide te- nant l'hémoglobine, les sels, etc.,en solution. L'eau distillée et les liquides dilués hypotoniques gon- flent le globule au point de dépasser la limite d’'ex- tensibilité du globule : la paroi éclate ou tout au moins s'altère, perd sa constitution de membrane semi-perméable, et le contenu d'hémoglobine se répand au dehors. L'éther, le chloroforme, les acides biliaires et une foule d'autres agents produisent le même effet et font passer l'hémoglobine des globules rouges en solution. Ici aussi Nolf! a montré qu'il faut recourir à l'explication physique et rejeter l'explication chi- mique. Les agents hémolytiques produisent tous, non l'éclatement ou la déchirure de la paroi globu- laire, mais une altération de sa perméabilité ou de son pouvoir d’imbibition. Ainsi on a signalé comme constiluants de la paroi globulaire plusieurs sub- slances nettement définies. Leurs molécules y sont probablement juxtaposées à la facon des éléments d'une mosaïque. Tous les dissolvants de ces sub- slances sont des agents hémolytiques ; ils enlèvent quelques-unes des pierres de la mosaïque et la so- lution d'hémoglobine s'échappe par les trous qui en résultent dans la paroi globulaire. Ainsi se trouve ramenée à une seule idée directrice l'expli- cation d'un grand nombre de faits d'apparence disparate. 1) Adsorption et hémolyse. Gengou* s'est atta- ché récemment à l'étude de l'adhésion moléculaire ou adsorption et de son intervention dans divers phénomènes biologiques. Il a montré que les agents hémolyliques d'origine animale, tels que le venin de serpent, le sérum d’anguille, la lécithine, l’alexine n'attaquentles globules et ne les dissolvent qu'après s'être attachés à leur surface par adsorption. Les agents tels que le citrate de soude, qui empêchent ‘ Nour : Art. Hémolyse du Dict. de Physiol. de Richet. # Gexcou : Arch. intern. Physiol., t. V, p. 1 et 115, 4908. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 709 l'adsorption de l'hémolysine, s'opposent ipso facto à l'hémolyse. Réciproquement, une hémolysine dont l’action est paralysée en milieu citraté est réactivée par addition de chlorure de caleium ou de tout autre électrolyte qui neutralise l'action du citrate. Il s'agit ici, en général, de la substitution d'un phénomène d'adsorplion à un autre phéno- mène d'adsorption. m) Adsorption des ferments acides. Puisque nous traitons la question des phénomènes d’adsorption par les colloïdes, mentionnons les travaux de Mi- chalis et Ehrenreiche sur l’adsorption des fer- ments”: diastase, trypsine, pepsine, présure, inver- lase, par différentes substances minérales pulvéru- lentes. On sait que les granules de kaolin ont une affinité spéciale pour les substances basiques : ils adsorbent avec avidité les matières colorantes ba- siques. L'argile et l’hydrate ferrique n'adsorbent, au contraire, que les matières colorantes acides. Or, certains ferments, notamment la pepsine et l'inver- tine, se comportent comme ces dernières substances et adhèrent aux grains d'argile ou d'hydrate fer- rique, quand on les mélange ensemble. Ils parais- sent donc présenter un caractère acide. Les autres ferments se comportèrent dans ces expériences comme des substances amphotères. 2. Métaux colloïdaux. — Comme on le voit par les quelques indications qui précèdent, l'étude des colloïdes organiques n'en est qu'à ses débuts; elle nous promet encore une ample moisson de faits et d’apercus nouveaux. Mais les colloïdes minéraux, notamment les solutions métalliques colloïdales, intéressent également le physiologisteet le médecin. Bredig et d’autres ont étudié l'action catalytique des solutions métalliques colloïdales à un point de vue purement physico-chimique et l'ont rap- prochée de celle des ferments. On leur a même donné le nom de ferments métalliques. Albert* a insisté sur la similitude de leur action physiolo- gique in vivo avec celle des ferments solubles ordi- naires. Les médecins ont cherché à utiliser leur action thérapeutique dans une foule de maladies. 11 paraît établi” qu'une injection d'argent colloïdal faite à haute dose chez le lapin augmente considé- rablement la résistance que présente cet animal vis-à-vis de l'action délétère des toxines diphtéri- tique et télanique. Foi et Aggazzotti‘ admettent que le collargol favorise in vivo la destruction des toxines par oxydation. Car, 2n vitro, l'argent col- loïdal ne parait avoir aucune action sur les toxines ! Biochem. Zeils., t. X, p. 283. ? R. AzgerT : Les ferments métalliques et leur emploi en Thérapeutique. Paris, 1901. % Foa, AGGazzorni, etc. Giorn. Acad. med. Torino, t. XII. * Giorn. Acad. med, Torino, t. XII. microbiennes, landis qu'injecté à dose suffisante chez le lapin il lui permet de résister à une dose dix fois mortelle de toxine. Foû et Aggazzolti ont décrit une série de symp- tômes physiologiques extrêmement marqués qui se montrent après injection intraveineuse de petites doses d’Ayrgol (mercure colloïdal), de calomelol (calomel colloïdal), d'Aydrate de fer colloïdal, ete. S à) 2. — Antigènes et anticorps. Immunité et anaphylaxie. 1. Toxines bactériennes, végétales et animales. — Roux et Yersin avaient, en 1888, retiré pour la première fois d'un bouillon de culture micro- bienne (bacille diphtéritique) une {oxine dont l'in- Jection chez l'animal vivant produisait les mêmes symptômes que l'infection par le microbe corres- pondant. Peu de temps après, Kitasato isolait par un procédé analogue la foxine létanique. Depuis celte époque, l'étude des toxines était restée l'apa- nage presque exclusif des bactériologistes. On avait, il est vrai, signalé plusieurs {oxines d'ori- gine végétale : la ricine des graines de Æicin, l’abrine du Jequirity, la crotine du Croton tiglium. Depuis quelques années, l'étude des toxines -a envahi le domaine de la Physiologie proprement dite ou plus exactement de la Physiologie com- parée. On a reconnu, en effet, que les venins de serpent, de poisson, de scorpion, de scolopendre, d’arai- gnée, d'abeille, ete., ainsi que le sang d'anguille, doivent leur activité à la présence de {oxines très analogues à celles que sécrètent les microbes. Comme ces dernières, les toxines des venins animaux sont des produits spécifiques de l’activité des cellules vivantes, très toxiques, incristalli- sables, colloïdes, à constitution chimique encore inconnue, mais probablement compliquée, très sensibles à l’action de la chaleur et de la lumière, capables de provoquer chez l'animal auquel on les injecte à dose non mortelle la formation d'anti- toxines. Les toxines ne résistent pas à l’action des ferments digestifs, ce qui explique l’innocuité de leur ingestion par la bouche : Non qustu sed in vulnere necant. Une autre analogie avec les toxines microbiennes, c'est la pluralité des toxines des venins animaux. On a décrit dans les venins de serpent au moins une demi-douzaine de toxines différentes exerçant chacune une action toxique spéciale. Ainsi, Flexner et Noguchi ont montré que les venins des différents serpents contiennent des pro- portions, très variables d'une espèce à l’autre, des toxines suivantes : 1° La neurotoxine, très abondante dans le venin 710 LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLUGIE du Cobra ou serpent à lunette; elle paralyse les cellules nerveuses, notamment les centres respira- toires, et amène rapidement la mort par asphyxie. Elle résiste mieux que d'autres toxines, notam- ment que l’hémorrhagine, à l’action destructive de la chaleur ou des acides, ce qui permet de la séparer de l'hémorrhagine. Elle n’est pas, comme l’'hémolysine, précipitée par la lécithine ou la cho- lestérine, ce qui fournit également un moyen de l'isoler de l'hémolysine ; 2° L'hémorrhagine, qui attaque les endothéliums vasculaires et produit des troubles circulatoires locaux. Elle est surtout abondante dans le venin des Vipéridés, où sa présence explique les accidents spéciaux (gonflements œdémateux) qui caracté- risent la morsure des vipères ; 3° L'hémolysine, qui dissout les globules rouges. Elle existe dans tous les venins de serpent, et est surtout abondante dans celui du Cobra. L'hémo- lysine ne préexiste pas toute formée dans le venin de Cobra : elle se forme par l'union chimique de deux constituants, dont l’un, l’hématotoxine, inac- tif par lui-même, préexiste seul dans le venin de serpent. Preston Kyes a montré que cette hémato- toxine ne devient active qu'en présence de lécithine (fournie par le sérum ou les globules sanguins), avec laquelle elle forme une combinaison, une toxolécithide. L'hémolysine du venin de Cobra est depuis quelques années un objet de prédilection pour l'étude des réactions entre toxines et anti- toxines et de plusieurs autres questions générales concernant la constitution et le moue d'action des toxines; 4° Une agglutinine, agglutinant les globules rouges ; 5° Une leucolysine, dissolvantles globules blancs ; 6° Une haclériolysine, attaquant certaines bacté- ries ; 1° Des coagulines et des anticoayulines, agissant sur la coagulation du sang. 2. Immunité naturelle. — L'ichneumon, le héris- son et quelques autres animaux qui se nourrissent volontiers de serpents venimeux présentent, contre l’action toxique de la morsure de ces serpents, une résistance extraordinaire. Cette immunité naturelle s'explique par la présence, dans le sang de ces ani- maux, de substances antitoxiques. Les serpents sont, d’ailleurs, eux-mêmes particu- lièrement résistants à l’action de leur propre venin. C'est une règle générale qu'il est pour ainsi dire impossible de Luer un animal venimeux en lui inoculant le venin de la même espèce : il en sup- porte sans danger des doses considérables. Ceci, soit dit en passant, met à néant la fable du prétendu suicide du Crotale ou du Scorpion par | l’action de leur propre venin. On affirmait qu'un Scorpion enfermé au centre d’un cercle de char- bons ardents, reconnaissant l'impossibilité de se sauver par la fuite, prenait le parti héroïque de | mettre fin à ses souffrances en se transpercant Jui- même de son dard empoisonné. Le Crotale s’ino- culerait pareillement son propre venin el se suici- derait dans des conditions analogues. Le suicide par inoculation du venin est ici une impossibilité physiologique, puisque les animaux venimeux sont réfractaires à l’action de leur propre venin. Les expériences de Phisalix ont montré que le sang des vipères contient une antitoxine, ce qui explique leur résistance à l’action de la toxine. 3. Immunilé acquise. — Il est possible de provo- quer artificiellement, chez n'importe quel animal, la faculté de résister à l’action de n'importe quel venin animal. Il faut, pour cela, injecter à différentes reprises, chez l’animal que l’on veut immuniser, de petites doses, non mortelles, du venin ou de latoxine en question. Au bout d'un certain nombre d'injec- tions, l'animal immunisé acquiert la faculté de résister à l'injection d’une dose plusieurs fois mor- telle de la même toxine. La toxine a provoqué chez l'animal injecté une réaction spéciale; elle a agi comme antigène, c'est- à-dire qu'elle a fait apparaitre, dans le sang de l'animal immunisé, un anticorps, une antiloxine, substance nouvelle capable de neutraliser une dose plus ou moins forte de toxine. Non seulement l'ani- mal injecté est vacciné contre l’action du venin employé, mais son sang ou son sérum, qui contient l'antitoxine, peut être employé comme remède contre l’action toxique du venin chez un animal non préparé. Il suffit d'injecter à ce dernier le sérum de l'animal immunisé pour le rendre capable de lutter, lui aussi, contre l’action du venin qu'on lui a injecté ou qu'on va lui injecter. Fait curieux, un chauffage modéré (n’atteignant pas 100°), qui supprime la toxicité du venin de serpent, ne lui enlève pas la propriété vaccinante, c’est-à-dire la facullé d'agir comme anligène. Le venin chauffé au préalable conserve ses propriétés immunisantes et peutservir à réaliser la vaccination antivenimeuse. 4. Combinaison de la toxine et de l'antitoxine. — Pourquoi l’antitoxine, qui prend naissance dans l'organisme de l'animal immunisé, empêche-t-elle l’action nuisible de la toxine? Les spécialistes sont à peu près d'accord pour admettre que la /oxine et l’antitoxine se combinent directement pour former un composé inoffensif. Fraser a montré qu'il faut des quantités très différentes d’'antitoxine pour neutraliser in vivo LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE une certaine dose de toxine, suivant les conditions dans lesquelles on opère, parce que la combinaison toxine + antitoxine met un certain temps, une demi-heure environ, à se former. Si l'on mélange à l'avance la toxine et l'antiloxine, on arrivera à neu- traliser l'action de la première avee un minimum d'antitoxine. Ce minimum d’anlitoxine sera tout à fait insuffisant pour combattre les effets de la toxine, si les deux substances sont injectées en même temps, mais séparément, à deux endroits différents chez un même animal vivant. Martin et Cherry ont également démontré l’exis- tence de la combinaison de la toxine avec l’anti- toxine par leur célèbre expérience de filtration. Ils avaient constaté que le filtre de gélatine laisse passer la toxine du venin de Cobra, mais non l’an- titoxine, ni la combinaison toxine + antitoxine. Or, si l’on procède à une expérience de filtration avec un mélange neutre de venin et d’'antitoxine, peu de temps après l'addition des deux substances une partie de la toxine traverse encore le filtre, tandis que la même expérience peut être répétée avec un mélange vieux d'une demi-heure sans que la moindre portion de la toxine traverse le filtre. Dans le dernier cas, la combinaison a eu le temps de se réaliser intégralement. Calmette et Massol (1907 ont montré que la toxine du venin de Cobra est soluble dans l'alcool à 50 à 80 °/,, tandis que l’antitoxine y est insoluble et, de plus, est détruite au contact de l'alcool. Or, si l’on a mélangé depuis quelque temps le venin et l’anti- venin, on constate que la combinaison foxine + an- titoxine est insoluble dans l'alcool à 50 °/, et n'est pas même détruite par l'alcool à 80 °/,. La combi- naison à done des propriétés qui la distinguent de ses deux constituants. Morgenroth a d’ailleurs montré que la combinai- son inoffensive toxine + antitoxine peut être dis- sociée par l’action de l'acide chlorhydrique. La démonstration à été fournie tant pour l'hémolysine que pour la neurotoxine du venin de Cobra. Si l’on fait bouillir en présence de HCI la combinaison neurotoxine + antitoxine, on la dissocie intégrale- menten ses deux éléments : l’antitoxine est détruite par la chaleur, tandis que la neurotoxine, devenue thermostabile, a récupéré la faculté d’empoisonner le système nerveux central. Il paraît donc bien établi que l'immunité anti- toxique réside dans la combinaison directe de la toxine avec l’antitoxine, le produit de cette combi- naison étant dépourvu de propriétés Loxiques. Mais s'agit-il d'une combinaison simple par addition directe et intégrale, comme lorsqu'on fait réagir ensemble de l'acide sulfurique et de la potasse (Ehrlich)? Dans ce cas, la courbe qui représente les quantités qui interviennent dans la réaction est re- 711 présentée par une ligne droite. Faut-il, au contraire, assimiler, avec Arrhenius et Madsen, le phénomène à la réaction complexe qui intervient lorsqu'une base faible, telle que l'ammoniaque diluée, se trouve en présence d’un acide faible, tel que l'acide borique? Dans ce cas, la réaction n’est pas complète : il s'éta- blitun équilibre chimique particulierqui correspond à une courbe de combinaison plus ou moins com- pliquée. C’est là une question encore controversée que je ne puis qu'effleurer ici. 5. Sérum antivenimeux de Calmette. — Une des applications les plus heureuses de la théorie de l'immunisation, c'est la préparation du sérum anti- venimeux de Calmette. Le savant directeur de l’Ins- titut Pasteur de Lille a donné la formule pratique qui permet de provoquer chez le cheval, par des injections répétées de venin de Cobra, un état d'immunité tel que l'animal résiste finalement à une injection de 2 grammes de venin sec, soit 200 fois la dose mortelle (qui est de 10 milligr.). L'animal immunisé sert à fournir le remède qui neutralise les effets de la morsure du terrible Cobra. Une fois immunisé, le cheval peut être saigné de temps en temps, afin de fournir le sérum antivenimeux que l’on conserve dans des tubes scellés. Ces tubes con- tiennent 10 centimètres cubes de sérum : c’est la dose qu'il faut injecter à l’homme qui vient d'être mordu par un Cobra. De grandes quantités de ce remède sont expédiées aux Indes par l’Institut Pas- teur de Lille. D'autres établissements analogues ont été créés dans plusieurs des pays où pullulent les serpents venimeux, afin de fabriquer en grande quantité le sérum antivenimeux : à Saïgon, Hanoï et Nhatrang dans l’Indo-Chine française, à Bombay et Kasauli dans l’Inde anglaise, à Philadelphie (États-Unis), à Butantan (Sao-Paulo, Brésil) et à Sidney (Australie). Le sérum antivenimeux de Calmette a déjà sauvé bien des vies humaines. 6. Spécificité de l’action antitoxique. — Comme l’a montré Calmette, le sérum antitoxique obtenu chez le cheval par injection de venin de Cobra est un remède sans égal vis-à-vis du venin de Cobra, mais il n’a pas ou presque pas d'action contre l’em- poisonnement par le venin de la vipère. En effet, la formation d'anticorps est nettement spécifique. Si l’on vaccine un animal avec de la neurotoxine, il se forme dans son organisme de l'anfineurotoxine, qui n'exerce son action antitoxique que sur la neuro- toxine. De même, l'hémolysine provoquera la for- mation d'un anticorps absolument spécifique, une anlihémolysine. Mais il est possible d'immuniser en même temps le même animal pour plusieurs toxines ou plusieurs venins et de provoquer dans son sérum l'apparition de plusieurs antitoxines spécifiques. Si l’on fait alterner chez un cheval ou un lapin les injections de venin de cobra avec celle du venin de vipère, on obtiendra l'immunité pour les deux venins (Krause). Le sérum de l'animal immunisé sera polyvalent. Vital Brazil prépare depuisquelquetempsà Butartan un sérum bivalent dont l’action curative s'exerce vis-à-vis des deux grandes catégories de serpents venimeux du Brésil. 1. Délense de l'organisme par formation d'anti- corps. — La formation d'antitoxine à la suite d’in- jection de foxime n'est qu'un cas particulier delarègle générale en vertu de laquelle l'introduction répétée dans l'organisme de certains poisons ou éléments étrangers agit comme antigène, c'est-à-dire provo- que une réaction spécifique de défense, consistant à faire apparaître dans le sang une substancenouvelle, un aulicorps, capable de se combiner chimique- ment avec l'élément étranger, l’antigène, et souvent d’annihiler son action nuisible. Ehrlich a imaginé, comme on le sait, sa fameuse théorie des chaines latérales pour expliquer l’action des antigènes, la formation des anticorps, etc., théorie qu'il serait 1rop long d'exposer ici. J'ai eu à différentes reprises, dans mes revues antérieures, l’occasion de signaler des faits rentrant dans cet ordre d'idées. Je citerai l’'immunité con- lérée par une première injection de peptone vis- à-vis d’une seconde injection de la même sub- stance”"; l'immunisation du lapin et du cobaye vis-à-vis de l'action toxique du sérum d’anguille*. Dans ma revue du 15 septembre 1901 (p. 800), je notais l'apparition de propriétés spécifiques préci- pitante, agylutinante et hémolytique dans le sang d'une espèce À, ne s’exercant que vis-à-vis du sang d'une autre espèce B, dont le sang a servi à vacci- ner À. Le sang de À devient un réactif qui permet de reconnaitre et de caractériser le sang de B et de le distinguer de tous les autres. Ainsi chaque substance albuminoïde injectée au lapin développe dans le sérum de cet animal la propriété de préci- cipiter cette substance à l'exclusion de toutes les autres. La Médecine légale a tiré, comme on sait, de ces faits un moyen de diagnostic des taches de sang humain. Le sérum d’un lapin, auquel on a injecté au préalable du sang humain, peut ulté- rieurement servir de réactif vis-à-vis du sang humain, qu'il précipite à l'exclusion de tous les autres. Nous sommes ainsi dotés d’un moyen pra- tique de reconnaître si une tache de sang est d'ori- gine humaine ou si c'est une vulgaire lache de sang d'animal. tev. gén. des Sc., 28 février 1899, p. 154. QUE * Rev. gé». des Sc. du 30 juillet 1900. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE On sait combien l'organisme est admirablement armé en vue de la lutte pour l'existence : les influences nuisibles auxquelles il est ordinaire- ment exposé ne manquent pas de provoquer de sa part des réactions appropriées, qui répondent le plus souvent d’une facon vraiment victorieuse aux perturbations venues de l'extérieur. Nous sommes familiarisés avec les mécanismes physiologiques qui permettent à l'être vivant de combattre les influences thermiques, mécaniques, chimiques cou- rantes, auxquelles il peut être soumis. Mais n'est-il pas étonnant de constater que l'organisme est éga- lement armé pour résister à des causes de destruc- tion aussi exceptionnelles et aussi peu probables que l'inoculation du venin d'un serpent habitant à deux mille lieues d'ici, ou l'injection expérimentale de sang d’un animal étranger dans ses propres vaisseaux ? Tous les cas sont, pour ainsi dire, prévus à : l'avance : l'introduction accidentelle de n'importe quel albuminoïde étranger, de n'importe quelle toxine, agit comme autigène et provoque la for- mation du remède, de l’anticorps spécifique qur doit rendre l’antigène inoffensif. Un grand nombre de venins animaux ont été, dans ces dernières années, étudiés à ce point de vue. On à constaté la formation d'anticorps spéci- fiques à la suite de l'injection des venins de scor- pion, d’araignée, d'abeille; et ce n’est pas seulement dans le cas de morsures de serpents que l'on à cherché à appliquer les principes de la sérothérapie antivenimeuse. Je cilerai le cas d'une araignée de Tartarie, la Caracurte (Lathrodectes lugubris), dont la morsure est dangereuse pour le bétail, notam- ment pour le chameau. Le D' Konstanssow a réussi récemment à immuniser deux chameaux par des injections répétées de petites doses de venin de Caracurte et à en obtenir un sérum antivenimeux très actif. 0,01 ce. de ce sérum suffit pour immu- niser une souris vis-à-vis d'une dose cinq fois mor- telle de venin de Caracurte. On a fait des observations analogues sur le venin d'abeille. L'abeille qui vous pique inocule une dose, heureusement fort petite, d'un venin analogue à celui des serpents : il en résulte une douleur plus ou moins vive et une inflammation de l'endroit piqué. Mais ces phénomènes ne se montrent plus chez les personnes qui sont fréquemment piquées par les abeilles, par exemple chez les apiculteurs. Chez eux, le dard de l'abeille ne produit pas plus d'effet qu’une simple piqüre d’épingle, Il est facile: d'en comprendre la raison. Le venin d'abeille doit son activité à des toxines. Ces toxines provoquent, chez la personne piquée, la formation d’antitoxines,. d’où une véritable immunisation vis-à-vis de nou- velles piqüres. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 113 8. Anaplhylaxie. — Ch. Richet à découvert que certains poisons, certaines substances élrangères introduites dans l'organisme, agissent comme anti- gènes d'une facon tout à fait spéciale. Ils provoquent bien une réaction, qui donne lieu à la formation d’un corps nouveau capable de se combiner avec l’'antigène. Mais ce corps nouveau, loin d'être une antitoxine qui neutraliserait l'effet nuisible de l’an- tigène, est, au contraire, une toxogénine, c'esl- à-dire une substance qui se combine à l’antigène pour former un composé nouveau beaucoup plus toxique. Il en résulte qu'une première injection de poison crée, chez l'animal injecté, une sensibilité exagérée vis-à-vis d'une nouvelle dose de ce mème poison. Richet a donné le nom d’anaphylaxie (dvx contre, gvhàcow protection, contraire de prophy- laxie) à ce phénomène, qui est pour ainsi dire Fopposé de l’immunité. 1 l'a étudié en premier lieu pour la congestine, poison qu'il avait retiré des tentacules des actinies, des crevettes, des moules, ete. Un chien qui a recu une première dose de conges- line présente ensuile, vis-à-vis de ce poison, une susceptibilité exagérée. Il pourra mourir à la suite de l'injection d'une dose trois à sept fois plus | petite que la dose mortelle ordinaire et vomira sous l'influence d'une dose vingt-cinq fois plus faible que la dose vomitive ordinaire. Les symp- tômes ne sont, d’ailleurs, pas les mêmes que ceux de l’empoisonnement par la congestine d’un animal neuf. Il s'est formé, sous l'influence de la première injection de congestine, une substance nouvelle, inactive par elle-même, la {oxogénine, que l’on peut transfuser de l'animal anaphylactisé à un autre (anaphylaxie passive), sans produire le moindre accident. Mais, si l’on introduit en présence de la toxogénine une pelite quantité de congestine, il se produit une combinaison nouvelle, l’apotoxine, beaucoup plus toxique que la congestine et empoi- sonnant d'une facon différente. L'anaphylaxie se développe graduellement: elle met plusieurs se- maines pour atteindre son maximum, s’y maintient pendant quelque temps, puis décroit et disparait au bout de plusieurs mois. La toxicité immédiate de la congestine est sup- primée complètement par un chauffage à 105, tandis que l’action anaphylactique persiste. On peut donc anaphylactiser sans crainte d'empoison- nement par de la congestine soumise à un chauf- fage préalable. C'est une analogie nouvelle avec les toxines, dont le chauffage fait également dispa- raître la toxicité, mais non les propriétés immuni- santes. L'anaphylaxie a été étudiée également pour les injections de sérum d'anguille. On sait que ces injections sont très toxiques et qu'elles donnent lieu au phénomène d'immunitlé. lei l'immunité el l’anaphylaxie se déroulent côte à côte dans l’orga- nisme de l'animal qui a subi l'injection, mais ces deux phénomènes se développent avec une rapidité très inégale. Leurs maxima ne coïncident nullement; c’est ce qui permet de constater l'existence succes- sive, chez un même animal, de ces deux états pour ainsi dire contradictoires. : L'injection de certaines substances inoffensives peut également créer un état anaphylactique extré- mement curieux. Je citerai comme exemple les expériences toutes récentes d'Arthus sur l'anaphy- laxie. La notion de l'anaphylaxie a pris une importance particulière depuis qu'on a reconnu qu'elle est applicable aux injections de matières albumi- noïdes ordinaires contenues dans nos humeurs. Le sérum de cheval injecté sous la peau, dans la cavité péritonéale ou dans les veines du lapin, est absolument inoffensif, mais il crée chez l'animal un état anaphylactique particulier : une seconde in- jection d'une minime quantité du même sérum de cheval (1/2 c.e.) provoque des accidents locaux el généraux extrèmement graves. On observe une chute notable de pression sanguine artérielle et une polypnée intense, pouvant amener la mort immé- diate ou plus souvent lointaine. Dans le dernier cas, les animaux succombent aux suites d'une cachexie anémisante progressive. L'anaphylaxie demande un certain temps pour se développer : il y a une période d'incubation de six à neuf jours au moins. Ce sont les albuminoïdes du sérum qui sont ici les agents actifs de l’'anaphylaxie. Arthus'a observé des phénomènes d’anaphylaxie analogues à la suite d'injections d’ovalbumine, de gélatine, de peptone de Witte, etc. Arthus a établi que les accidents généraux de l'anaphylaxie ne sont pas la conséquence de la production d'un précipité résultant du conflit du sérum de cheval et du sérum précipitant de l’ani- mal injecté. matières Dans un deuxième article, nous analyserons les travaux spéciaux se rapportant à la circulation, à la respiration et aux systèmes nerveux et musculaire. Léon Fredericq, Professeur de Physiologie à l'Universilé de Liège. ‘ Arch. intern. Physiol., t. VI. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques H. B. |Berthaut (Général). — Les Erreurs de la Carte de France. — Topographie d'Exploration. — 2 fascicules 1n-8° des Cahiers du Service géogra- phique de l'Armée. Paris, 4909. Nous sommes en retard pour rendre compte de deux récents « Cahiers » du Service Géographique de l'Armée. Mais ces brochures, malgré leur titre modeste, ne sont pas de ces publications éphémères que peu d'années suffisent à démoder. On en a le sentiment plus net encore quand on les relit après quelque temps écoulé; on sent alors, mieux qu’à la première lecture, qu'elles sont le fruit de longues méditations, mürement formu- lées en principes, et que, de ces cahiers qui traitent de questions distinctes et en apparence séparées, se dégage un corps de doctrine, sous la plume sincère et studieuse du général Berthaut, reconnaissable sous les initiales H. B. Cette impression est surtout frappante pour le cahier n° 25, qui traite, sous un titre d'une franchise toute militaire, des Erreurs de la Carte de France. s'agit, bien entendu, de la propre Carte au 1/80.000, dite de l'Etat-Major; et le cahier presque tout entier est con- sacré à l'examen d'un ouvrage critique fort particulier, dû à M. P. Arnaud, ancien notaire à Barcelonnette, lauréat de la Société de Géographie de Paris, récem- ment décédé. Cet examen n’est point un plaidoyer, mais un véri- table examen, et c’est de là qu'il tire son intérêt. L'au- teur du 25° cahier, respectueux de l'œuvre d’un homme parfaitement respectable, d'un érudit sur le chapitre de la toponymie locale, d’un fervent admira- teur de sa vallée, désolé des erreurs qui en ont déparé la carte ou laissé ignorer les détails, lui répond par un historique de la Carte au 1/80.000 dont un fragment avait suscité les critiques, un peu âpres, du studieux et vénérable M. Arnaud, et de M. Maurice Paillon qui, avec l’ardeur de la jeunesse, s'était chargé de la pré- face. Les reproches spéciaux de M. Arnaud, ou ceux, plus généraux, de M. Paillon, n'étaient point de ces « érein- tements » qu'adressent à toute œuvre scientifique et spécialement cartographique ceux qui ne peuvent pas la comprendre. Ils avaient tous les deux étudié leur sujet et présentaient une appréciation réfléchie. C’est pourquoi ils étaient dignes d'une réponse. Cette réponse a pris la forme d’une documentation : seul moyen de répondre dignement à un travail docu- menté. Et l'intérêt du dialogue consiste en ceci: que la critique d'un fragment faite par un spécialiste local a fourni au rédacteur du cahier l'occasion d'indiquer en quoi la création d’une carte générale (dont il recon- naît loyalementles défectuosités) diffère de l'épluchage d'un petit coin par l'habitant le plus autorisé de ce petit coin. Or, cette étude est pleine d'intérêt. Les reproches de M. Arnaud, ou les critiques de la préface de M. Paillon, portaient sur des points où l’un et l’autre faisaient autorité. Il s'agissait de la représen- tation et de la nomenclature des régions de haute montagne, spécialement de la vallée de l'Ubaye. Mais de ce qu'une critique porte sur des points indiscutables, il ne s'ensuit pas qu'elle soit toujours méritée. Où le montagnard jugera que la carte est pauvre, l'habitant des plaines la jugera trop chargée, etle cartographe conclura, pour mettre les deux d'ac- cord, qu'à chaque échelle, à chaque point de vue, à ET INDEX chaque conception générale d’une œuvre, correspond un ensemble de nécessités qui parfois s’excluent les unes les autres.C'est la méconnaissance de ces condi- tions contradictoires qui explique les sévérités de juges qui seraient bien empêchés de mettre sur pied une carte quelconque. Mais, dans ces sévérités, si elles viennent d'hommes sincères, le cartographe doit rechercher la part de vérité qu'eiles contiennent. C'est ce que fait l’auteur du 25° cahier. Il suffit, tout d’abord, d'examiner les croquis accompagnant la brochure de M. Arnaud, pour s'assurer que sa nomen- clature est beaucoup plus abondante que celle de la carte qu'il critique. La topographie est inexistante, il est vrai, mais néanmoins le croquis indique de nom- breux traits (sources, cols secondaires, passages, etc.) absents sur le 4/80.000. En outre, la toponymie prend une physionomie étrange, qui indique la connaissance profonde du dialecte local. De là à déclarer la carte officielle insuffisante et fautive partout où l’on en dif- fère, il n’y a pas loin. L'écrivain du Service Géographique en convient immédiatement: parmi les critiques de détail, beau- coup sont justes, et la raison en est claire. Si l’on avait dû confier le travail de la Carte, pour chaque région locale, à un habitant de cette région, elle n’au- rait certainement jamais vu le jour. L'officier chargé de l’'Ubaye avait dü lever avant, et a dû lever après, d’autres parties de la France. On sourit avec raison si, pour un abreuvoir (abéourou), la carte inscrit ? Abbé heureux; mais il est probable qu'un bas-alpin trans- porté en Picardie eût fait des bévues analogues. On ne peut pas demander à une œuvre d'ensemble les quali- tés d’un travail local, surtout quand cette œuvre date d'une époque où les érudits locaux qui la critiquent n’existaient pas. À un autre point de vue, il y a quelque injustice de la part d’alpinistes fervents, comme M. Arnaud ou M. Paillon, d'oublier que, quand la Carte a été créée, l’alpinisme n’était pour ainsi dire pas né. Certainement, tous les cartographes de montagne, aujourd'hui, trouvent la topographie du 1/80.000 insuf- fisante. Pourquoi oublieraient-ils que c'est grâce à elle qu'ils ont pu s’en apercevoir? Blämer une œuvre cartographique d'être vieillie, c'est blâmer l'escalier du premier étage, qui a permis d'arriver au troisième. Une fois faites les corrections suggérées par M. Ar- naud pour l'Ubaye, par exemple, on aurait une carte dont le fond serait insuffisant pour la nomenclature nouvelle, parce qu'il a été fait à un autre point de vue. A M. Paillon qui, dans sa préface, porte ce jugement sommaire : « la carte est à refondre entièrement », le cartographe militaire répond avec l'expérience du technicien : « Non, on ne refond pas une carte, pas plus qu'on ne refond un matériel d'artillerie. I] faut en faire une autre, conçue dans un autre esprit, pour répondre à un autre but. C’est ce à quoi nous nous occupons. » Rien n’est plus juste; et l’on peut ajouter que M. Arnaud à collaboré dans une certaine mesure à cette nouvelle carte, en montrant que l'ancienne ne répond plus aux besoins actuels. Combien toutefois cette Carte au 1/80.000 mérite de tenir une place honorée dans la Cartographie, lhisto- rique contenu dans le 25° cahier, et qui en relate la naissance et la croissance, le démontre victorieuse- ment. Il y a là toute une révélation de faits peu connus et caractéristiques : les vastes projets d’une carte com- plète, répondant à tous les besoins, confiée à toutes les administrations de la France, puis les objections, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX -1 SL les défections, les divergences, les budgets insuffisants, et finalement l'Armée s'attelant seule à cette entreprise que tous devaient mener de front. Lorsqu'on lit ail- leurs (dans les œuvres si remarquables d'Henri Be- raldi) l'histoire oubliée des officiers géodésiens ou topographes des montagnes françaises, dont l'auteur du 25° cahier s’est interdit de faire le panégyrique, on se dit qu'entre les hommes qui laissent après eux des ingrats, le cartographe est certainement le plus favo- risé. Quoi qu'il ait pu faire, les non initiés trouveront toujours qu'on peut faire mieux; et le pire, c'est que l'avenir leur donnera raison. Les 49 pages de texte, les photographies, les nom- breuses cartes contenues dans ce cahier illustrent l'idée, dont tous les Français devraient être pénétrés, de la nécessité d’une carte nouvelle, et la démontrent jusqu'à l'évidence. Mais les moyens? Il n’en est qu'un: un budget suffisant, que seule l'opinion publique peut imposer. Siles moyens d'exécution sont insuffi- sants, la nouvelle carte au 1/50.000, dont ce cahier donne des spécimens, sera insuffisante à son tour avant d’être achevée. On ne peut plus, au xx° siècle, courir après le progrès, pas plus qu'après un train express. Il faut se placer hardiment en avant du point de vue actuel. Mais à quoi bon, si les ressources bud- gétaires font défaut? Là est le nœud de la question. Ni le talent, ni la science, ni la volonté ne manquent; ce qui manque, c'est l'argent; il ne faut pas se lasser de le redire. M. Arnaud, obligé par les limites de sa fortune à supprimer la topographie de ses cartes, n'a pas réflé- chi que le même obstacle s'opposait à la création d'une carte de France conforme à ses vœux. Songeons qu'avec le développement de lélectricité, l'emploi de la « houille blanche », la restauration des montagnes, l'irrigation méthodique des plaines, surgissent chaque jour des problèmes nouveaux, dont la cartographie nationale doit préparer la solution. Elle doit même préparer la solution des problèmes non encore posés, pour rester à la hauteur des circonstances de demain. Déjà, pour certaines régions de montagnes, les alpi- nistes réclament et obtiendront bientôt des cartes au 1/20.000. Qui pouvait y penser il y a trente ans? C'est aux Pouvoirs publics de comprendre cette situation nouvelle, C’est le devoir des hommes de science de les y aider, bien plutôt que de déprécier les grandes œuvres du passé, qui ont nécessairement fait leur temps. Ce point de vue nous parait tellement important pour le développement national que nous voudrions nous arrêter là. Il faut cependant mentionner en quelques lignes le 27° cahier, consacré à la Topogra- phie d'exploration. Là, il n’est plus question de l'étude détaillée de la vieille France, mais de l'exploration sommaire et cependant méthodique de nos possessions d'outre-mer. Cette brochure, plus abondante encore que la précédente, mériterait à elle seule un examen détaillé. Elle révèle, de la première page à la dernière, la croissante largeur d'esprit du Service Géographique, - dont la méthode, en Topographie, s'imprègne de plus en plus des hauts principes du Colonel Goulier, et qui ne cesse de les compléter par les études de ses propres membres ou de savants civils, parmi lesquels il faut eiter M. H. Vallot. Nous aurons sans doute l’occasion de revenir sur cette série de publications qui font bien augurer du développement prochain de notre carto- graphie nationale, à la condition, nous le répétons encore une fois, qu'on lui donne les moyens de trans- former ses efforts, ses désirs et ses principes en réalités. F, SCHRADER, Ancien Président de la Commission Centrale de la Société de Géographie. 4 Voir notamment Balaitous et Pelvoux; les officiers de la Carte de France. 2° Sciences physiques Pécheux (Hector), Professeur à l'Ecole nationale d'Arts et Métiers d'Aix. — Etude de quelques couples thermo-électriques. {Thèse de Doctorat.) — Allier frères, imprimeurs. Grenoble, 1909. Le couple thermo-électrique est un transformateur direct d'énergie calorifique en énergie électrique; il constitue une machine thermique d'un type très parti- culier : à ce titre, son étude ne peut que présenter un très grand intérêt. Presque immédiatement après sa découverte, la thermo-électricité a été appliquée à la création d'une méthode thermométrique extrèmement commode. L'industrie n'a pas tardé à apprécier tout le parti qu'elle pouvait tirer de celte méthode, et de nom- breuses usines possèdent aujourd'hui des installations de pyrométrie thermo-électrique. M. Pécheux vient de présenter comme thèse de Doc- torat une intéressante étude sur les propriétés de quelques couples thermo-électriques formés par du cuivre pur électrolytique associé successivement avec des nickels, cupro-nickels, maillechorts de diverses provenances. Le but spécial de l’auteur était : 4° De déterminer l'influence de la composition chi- mique ou de l’état physique d’un nickel, cupro-nickel, sur sa thermo-électricité; 20 D'étudier l'application possible des couples formés avec ces divers éléments à la mesure des températures élevées. Chaque couple a été étudié par chauffe méthodique dans un four à gaz, conjointement avec un couple pla- tine-platine iridié, soigneusement étalonné et jouant le rôle de thermomètre. Les principales conclusions formulées par l’auteur sont les suivantes : Pour les nickels, la présence de certains métaux, tels que le cuivre, relève la force électromotrice thermo-électrique et les températures critiques de transformation moléculaire, tandis que le fer les abaisse. Avec les cupro-nickels, la force électromotrice des couples croît avec la teneur en nickel : l'effet est sur- tout marqué pour les teneurs comprises entre 9 °/, et 20 °/,. La température critique s'élève aussi avec la teneur en nickel. La constance des couples formés par l'association du cuivre pur avec le nickel ou avec le cupro-nickel à 40 °/, de nickel (constantan) justifierait l'emploi de ces couples en pyrométrie. Les maiilechorts paraissent moins recommandables à ce point de vue. La force électromotrice du couple nickel-cuivre est au moins deux fois plus grande que celle du couple platine-platine iridié; d'où une approximation au moins double dans la mesure des températures. Cette approximation serait de l’ordre de 4° jusqu'à la tempé- rature de 500 à 600°; elle resterait de l’ordre de 3° aux environs du point de fusion du cuivre. E. COLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Deuxième Supplément au Dictionnaire de Chimie pure et appliquée de Wurtz, publié sous la direc- tion de Cu. Frigoez et C. CHaBrié. — 7 vol. gr.in-8° avec figures. (Prix broché : 150 fr.) Librairie Ha- chette, 79, boul. Saint-Germain. Paris, 1897-1908. Quand, en 1874, parut le Dictionnaire de Wurtz, chacun sentit qu'il apportait une révolution. L'auteur ne s'était pas seulement proposé d'y renfermer, en un répertoire facile à consulter, l'ensemble des faits chi- miques acquis à la science de son temps. Il entendait y combattre pour les doctrines atomiques, qui venaient de naître et dont il était déjà l’apôtre enthousiaste, aussi fougueux qu'éloquent. 716 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX L'immense savoir, la hauteur de vues et le magni- lique chauvinisme scientifique qui bientôt allaient faire de lui, dans le monde savant, un conducteur d'hommes sans égal, devaient marquer son œuvre d’un cachet impérissable. Cette œuvre voyait le jour à une époque où des sciences ardues, telles que la Cristallographie et la Théorie vibratoire de la lumière, commencaient à pénétrer le domaine chimique et, avec l'Analyse spectrale, promettaient de l'agrandir et d'y faire lever des moissons nouvelles. Wurtz comprit tout l'intérêt qu'il y avait à répandre parmi les chimistes la con- naissance de ces sciences : les articles étendus et de forme didactique que leur consacra son Dictionnaire furent, pour la grande majorité des lecteurs, une révé- lation. D'autre part, le nombre des fabrications indus- trielles tributaires de la Chimie ne cessait de croître; en plusieurs, des phénomènes inexpliqués réservaient, sans doute, à la science pure des découvertes impor- tantes, grosses d'applications à l’industrie elle-même. Enfin, ne se contentant plus de pousser leurs analyses jusqu'à l'élément anatomique, les sciences de la vie s'orientaientrésolument vers le déterminisme physique. La Physiologie enrichissait la Chimie de corps très complexes et sollicitait, en retour, pour son propre progrès, l'intervention, de plus en plus fréquente, de celte science. Lasse de coditier ses recettes, la Pharma- copée aspirait à débrouiller la composition des drogues que lui fournissait la Nature, et déjà s’apprètait à en isoler les substances actives. L'Agronomie, qu'avait illuminée Boussingault, adressait un appel de plus en plus pressant aux chimistes pour déterminer les rap- ports de la nature du sol et des engrais avec l’abon- dance et la qualité des récoltes. Ce fut, certes, l’un des grands mérites de Wurtz d'avoir discerné ces ten- dances et embrassé toutes ces sciences. En un temps où les plus grands problèmes qu'elles devaient poser ne faisaient que poindre, il sentit leurs liaisons et prévit la fécondité de leur rapprochement. Son Dic- tionnaire leur fit large place et dut, en partie, à cette circonstance le succès énorme et sans précédent qu'il obtint dans le monde entier, Mais la large envergure de l'Ouvrage n’eût point suffi à l'imposer. Wurtz était, en science, un merveilleux leader : chef d’Ecole à l'âge où la plupart ne sont encore que disciples, il demeura jusqu'à son dernier jour l'entraîneur du bataillon de savants qui s'étaient groupés autour de lui, autour de sa chaire, dans son laboratoire et dans son salon pour recevoir ses inspi- rations. Ces élèves, ces amis dévoués, qu'il avait enflammés de son ardeur et dont plusieurs sont devenus des Maîtres, devaient être, non seulement au labora- toire, mais dans la préparation du Dictionnaire, ses collaborateurs assidus. Toute la pléiade de savants qu'il avait formée, tous ceux qui, grisés par son enseigne- ment et ses découvertes, vinrent, d'année en année, grossir le nombre de ses fidèles, prirent part à sa grande entreprise. Chacun y mit le meilleur de lui-même, toute l'information qu'il avait acquise dans la poursuite de ses travaux personnels. Il n'y a peut- être pas, dans tout le Dictionnaire de Wurtz, un seul article, même réduit à quelques lignes, qui ne soit l'œuvre d’un spécialiste hautement qualifié. Cinq gros volumes en petit texte, bourrés de faits méthodique- ment classés, de formules précieuses et solidement établies, de dessins d'appareils et d'exposés lumineux sur toutes les questions relevant de la Chimie ou les connaissances capables de l’éclairer, ont été le fruit glorieux de cette association. En tout pays, dans le monde scientifique élevé, dans la grande industrie chimique, dans la partie instruite du monde médical, chacun estima que l'Ouvrage lui était indispensable, et ce fut, de mémoire d’éditeur, la plus belle opération de la librairie scientifique. Mais, la science même dont le Dictionnaire suscita l'avancement ne tarda pas à dépasser celle qu'il con- tenait, Un copieux Supplément fut consacré aux corps et aux instruments nouveaux, aux méthodes, aux doc- trines et aux hypothèses postérieurement apparues. Pour considérable que fût cette publication supplé- mentaire, il était à prévoir qu'elle deviendrait bientôt insuffisante. Dès 1897, la Maison Hachette, heureuse propriétaire du « Wurtz », entreprenait un Deuxième Supplément en sept volumes. Le dernier fascicule de ce grand ouvrage vient de paraître. En signalant à nos lecteurs cette œuvre méritoire, nous ne saurions avoir la pensée d’énumérer tous les sujets qui y sont traités, car ce serait passer en revue le progrès même de la science chimique et de tous ses rameaux depuis trente- cinq ans. Toute la chimie des sucres, des terpènes, des camphres, des albuminoïdes, pour nous borner à quelques exemples, a été transformée. Les matières colorantes se sont multipliées au delà même de toute espérance; des corps d'une délicatesse fonctionnelle extrême, tels que les chlorophylles, ont été l’objet de profondes études; l’argon et ses satellites ont surgi; l'hélium s’est laissé prendre à la surface de la Terre, et, la radio-activité une fois établie, le radium et son émanation sont venus, ainsi que leurs rapports stupé- fiants avec l'hélium, bouleverser toutes les idées reçues. en Chimie, ou plutôt — car ces belles découvertes ajoutent à nos Connaissances sans rien détruire — agrandir nos conceptions chimiques et encourager les. audaces des chercheurs dans des proportions insoup- connées. La notion des équilibres a müri; la théorie de la dissolution à été constituée; la thermodynamique s’est étendue de plus en plus à l'étude des réactions chimiques; la loi des phases s’y est imposée, et d’autres départements de la Chimie générale se sont développés au point de devenir dans nos Facultés l'objet de chaires spéciales. Sans nous livrer encore les secrets de leur structure, non plus que de leur fonction, l'étude physique des diastases et des colloïdes nous fait apercevoir l’une des voies à suivre pour dépister la nature et le méca- nisme d'activité de ces substances mystérieuses. La teinture fait aujourd'hui appel à plusieurs de ces nou- veautés pour assurer le succès régulier de ses procédés. Il était donc indispensable d'incorporer dans le Deuxième Supplément la multitude des faits récoltés et des théories écloses depuis la publication du Premier Supplément. Si nous ne nous trompons, on peut dire que tous les-sujets que des recherches récentes ont’ éclairés avant l'impression du nouvel ouvrage y sont traités. Et c’est ainsi que l'esprit de Wurtz vit encore dans cette suite à son œuvre. Le mérite en revient à son vieil ami et confident de chaque jour, le regretté Friedel, et, depuis la mort de ce dernier, à un savant disciple de ce maitre, M. C. Chabrié, professeur à la Faculté des Sciences de Paris. A ces deux directeurs, tous ceux de nos compatriotes qui ont attaché leur nom au progrès récent de la Chimie ont donné leur concours. Quelques professeurs étrangers qui publient en francais leur ont aussi fourni un précieux apport. Il est remarquable que, malgré la diversité d’origine de ces contributions, l'ensemble conserve jusque dans le détail l'harmonieuse pondération dont Wurtz avait donné l'exemple d'un bout à l'autre de son Diction- naire. On doit en faire honneur à la vigilance des deux directeurs du Deuxième Supplément et à l'abné- gation de leurs éminents collaborateurs. Louis Orivier, 3° Sciences naturelles Clerget (Pierre), Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. — La Suisse au XX! siècle. Etude économique et sociale. — 1 vol. in-18, de 268 pages, avec cartes et graphiques (Prix : 3 fr. 50.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. La Suisse est un pays trop peu connu et qui pourtant mériterait de l'être davantage. Les étrangers qui y vien- nent si nombreux y admirent ses montagnes, mais ignorent ses institutions et les qualités du peuple au milieu duquel ils se trouvent. Quant à ceux qui, par leur profession ou leurs études, s'occupent de ques- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES E Le] TL INDEX 117 tions politiques, économiques el sociales, ils ont un très grand intérèt à savoir comment elles sont envisa- yées en Suisse el comment on les y a résolues, car ce pays, comme on l'a dit avec raison, est un véritable laboratoire d'expériences sociales. L'on ne saurait comprendre la Suisse quand on ne fait qu'y passer. Il faut y avoir séjourné comme M. Clerget, qui a appartenu pendant huit années au corps enseignant suisse, pour pouvoir donner un tableau arssi juste de la physionomie des races et de la population de ce pays, de son organisation politique et d- ses conditions économiques. L'auteur a fort bien montré comment ce peuple de montasnards et de bergers a tiré ses caractères de la nature du pays ainsi que de la nécessité de s'unir pour la défense commune. L'élevage est resté si principale occupation. Sur les alpages se sont maintenues de curieuses communautés agraires, et, depuis les temps les plus reculés, les « bisses » fournissent l’eau d'irri- gation des prairies. La Suisse à gardé beaucoup de ses trails origin 1ux. Mais son unité est faite d'éléments très divers, et l’auteur parle ensuite des cantons, des religions, des langues. Il fait un exposé de la constitution fédéral”, du budget et des impôts fédéraux et cantonaux; il rappelle les prérogatives politiques du peuple suisse; il donne de nombreux détails sur la mounaie, le crédit et les institutions de prévoyance. M. Clerget consacre un intéressant chapitre à l'essor agricole et industriel, où il passe en revue les cultures variées que les diversités de climat ont rendues pos- sibles : arbres fruitiers, cultures maraïchères, vigne; puis les industries : coton, soieries, broderies, produits chimiques et alimentaires. Les conditions du travail sont particulièrement inté- ressantes à connaitre, car elles ont donné lieu en Suisse à d'importantes réglementations; en outre, des projets sur les questions ouvrières y sont actuellement en discussion. L'étude des voies de communication terrestres et fluviales amène l'auteur à parler du rachat des chemins ‘le fer suisses et à examiner les divers grands travaux de communication trans-alpestre exécutés ou prévus; à ce sujet, il étudie la question si actuelle de nos voies d'accès vers l'Italie. Il expose l’état du développement du commerce extérieur suisse et envisage particulière- ment les relations avec la France. Enfin, il termine en exposant le rôle international de plus en plus marquant que prend la Sui-se par le lait même de sa neutralité, ainsi que par le choix de ses représentan(s officiels comme arbitres, el par la création de Bureaux internationaux ayant pour objet la sauvegarde d'intérêts généraux divers. G. REGELSPERGER. Hochreutiner (G.), Conservateur du Conservatoire botanique de Genève. — Sertum madagascariense ; étude systématique de deux collections de plan- tes récoltées à Madagascar. — 1 hrochure in-8° de 100 pages. Atar, éditeur. Genève, 1909. Ce Mémoire constitue une importante contribution à l'étude de la flore de l’est et du centre de Mada- gascar. Après quelques aperçus sur la géographie botanique de l’île, M. Hochreutiner y décrit les espèces de Cryptogames et de Phanérogames recueillies en 1903 par M. J. Guillot dans le district de Vatomandry et en 1905 par M. Rusillon sur les hauts plateaux de l'Imerina. Les quelques espèces nouvelles que l’auteur fait connaître dans la seconde de ces deux régions, et qui appartiennent à des genres ou à des sections de la flore du Cap, sont, pour lui, une nouvelle preuve des relations étroites qu'il y a, au point de vue botanique, entre le centre de Madagascar et l'Afrique australe. Peut-être cependant, à notre avis, ne faudrait-il pas vouloir trop forcer ce rapprochement, que peut rendre discutable la maigre végétation actuelle de l'Imérina Il faudrait savoir au juste en quels endroits croissent, jours échappé et avec quelle fréquence, ces espèces recueillies par des collecteurs trop sobres de détails. La végétation des hauts plateaux est vraisemblablement aujourd'hui bien différente de ce qu'elle était à l’origine, quand la contrée était boisée. Retenons donc surtout dans le travail du botaniste genevois les diagnoses des espèces, diagnoses que, on le conçoit, nous ne pouvons songer à résumer ici. II ne nous est possible, après les avoir signalées, que de renvoyer au travail même, non sans pourtant avoir exprimé un léger regret : c'est que M. Hochreutiner, avec les quelques rares spécimens dont, évidemment, il disposait pour chaque plante, n’ail peut-être pas tou- i suffisamment à la tendance qu'ont beaucoup de botanistes, qui étudient les seuls herbiers, à multiplier le nombre de ces espèces. Evidemment, lorsqu'on à devant soi, pour un genre, deux ou trois spécimens seulement, il est facile, d’a- près les quelques caractères distinctifs que, souvent par simple hasard, peuvent présenter ces rameaux, de créer deux ou trois espèces; on n'éprouve aucun em- barras. L'’hésitation est bien plus grande lorsqu'on peut voir cinquante ou soixante de ces mêmes échan- tillons, et que tous diffèrent par des caractères qui, cependant, en s'entreméêlant, les relient insensible- ment les uns aux autres. On est dès lors acculé à la nécessité de créer cinquante ou soixante espèces ou bien de n’en admettre qu'une! C'est ce dernier parti qui est incontestablement le plus sage; or, c'est celui que, sûrement, avec des matériaux plus abondants, M. Hochreutiner aurait pris en quelques cas, et no- tamment pour le genre Cryptostegia, pour lequel il crée une nouvelle espèce glaberrima, parce qu'il en possède une forme très glabre, alors que les types de de Candolle sont un peu velus. Il est bien vrai que le Cryptostegia madagascariensis — à l'inverse du C. grandiflora — est très rarement littéralement glabre; mais nous connaissons de nombreuses formes inter- médiaires entre cette forme complètement glabre — el qui n'est que le dernier terme d'une série — et la forme velue. Nousavonsdit,ailleurs, qu'on peut trouver, côte à côte, sur un même terrain, des types glabres, des types glabrescents, d’autres pubescents, d’autres velus. Où sera la ligne de démarcation entre les deux espèces ? Il est d'autant plus impossible de le dire que M. Hochreutiner fait erreur lorsqu'il croit que réguliè- remeut, dans le Cryptostegia madagaseariensis typique (velu), les fleurs sont isolées et les tiges sans lenti- celles. Nous avons sous les yeux de nombreux exem- ples du même type où les fleurs sont groupées, et où les rameaux portent des lenticelles proéminentes. Puis, remarquons que la plante nommée C. glaberrima par M. Hochreutiner est vraisemblablement un pied eul- tivé, car jamais les Cryptostegia n'ont été signalés sur la côte Est, et l’auteur dit lui-même que les rameaux proviennent d'une concession où sont des Hevea. Autre espèce « d’herbier » :le Aascarenhasia mi- crantha Bak. (pourquoi Elliott?)}, qui n'est qu'une forme du très polymorphe Mascarenhasia arborescens. Est-il nécessaire de faire observer que ces petites critiques — que nous avons cru devoir faire parce que nous pensons qu'il y a vraiment de grands incon- vénients, tant au point de vue théorique qu'au point de vue pratique, dans cet abus de la pulvérisation des espèces, d’après des caractères en somme insignifiants, — ces petites critiques, disons-nous, n'affaiblissent en rien la haute valeur du consciencieux travail de M. Hochreutiner! Et l'intérêt de cette étude est encore accru par les clefs analytiques que, incidemment, l'auteur a établies pour quelques genres restés jus- qu'alors très embrouillés. HENRI JUMELLE, Professeur à la Facullé des Sciences de Marseille. Vermorel (J.), Membre du Conseil supérieur .de l'Agriculture. — Les Ennemis de nos Jardins (/r0- cédés de lutte contre les Parasites du Poirier et du Pommier). — À pctit vol. (Prix : 2 fr.) Librairie du Progrès agricole ( Villefranche-du-Rhone). 718 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4 Sciences médicales Martinet, Mougeot, Desfosses, Durey, Du- crocquet, Delherm,; Dominici. — Les Agents physiques usuels. — 1 vol. in-8, de 633 pages avec 170 figures. (Prix : 8 fr.). Masson et Cie, éditeurs, Paris, 1909. Les agents physiques prennent dans la thérapeu- tique une importance croissante. Il est utile que tout médecin sache le parti qu'il peut tirer de ces divers agents. Dans les grands centres, il est rare qu'il ait à appliquer ces méthodes variées. Il trouve à sa portée des établissements où des confrères offrent à ses pa- tients la garantie de leur expérience spéciale et tout l'outillage convenable, qu'il s'agisse de kinésithé- rapie, d'hydrothérapie, de massage manuel ou méca- nique, d'électrothérapie, de radio ou de radiumthé- rapie. Il n’a besoin que d’en connaître les indications. Mais, dans les centres éloignés où nos confrères doi- vent tout savoir, tout faire et si souvent forger mille moyens de fortune, un guide au moins sommaire est nécessaire à la pratique médicale. C'est ce qu'ont compris une pléiade de thérapeutes expérimentés, réunis pour rédiger le présent ouvrage, où chacun, avec sa compétence spéciale, à traité un sujet parti culier. M. Martinet a écrit une intéressante partie concer- nant la climatothérapie. Celle-ci est à la fois succincte et très complète. L'auteur a eu l'heureuse idée d’en consacrer un fragment à l'étude des environs de Paris. Il me permettra cependant de ne pas le suivre tout à fait dans le choix des résidences qu'il conseille aux tuberculeux. Je vise particulièrement certaine région boisée (p. 54), où il dit avoir « vu maint tuberculeux s'améliorer ou guérir ». Sur ces coteaux, dont le front exposé au nord est sans cesse balayé par les vents, j'ai vu, malheureusement, depuis seize ans, chez les tuber- culeux, beaucoup plus de trépas que de guérisons. Il faut se garder de l'illusion climatérique que peut donner sur un pays une promenade dominicale, faite par un beau jour, choisi à souhait. Les parties relatives à l'hydrothérapie, la crénothé- rapie, la thermothérapie, la crymothérapie sont dues à M. Mougeot. M. Durey a exposé la méthode de Bier, le massage et les sports; M. Desfosses, la kinésithé- rapie ; M. Ducrocquet, la mécanothérapie. Enfin M. Del- herm a écrit l’électrothérapie et la radiothérapie, et M. MH. Dominici, la radiumthérapie. Bref, cet ouvrage est un excellent précis d’une branche désormais im- portante de la thérapeutique clinique. Dr A. LÉTIENNE. 5° Sciences diverses Doutté (Edmond), Professeur à l'Ecole supérieure des Lettres d'Alger. — Magie et Religion dans l'Afrique du Nord (La Société musulmane du Maghrib).—1 vol. gr.in-8° de 618 pages.(Prix : 10 fr.) A. Jourdan, éditeur. Alger, 1909. M. E. Doutté, le savant professeur d'Alger, vient d'ajouter une œuvre nouvelle à la liste déjà longue des travaux d'une si haute valeur scientifique qu'il a con- sacrés à l'Afrique septentrionale. « Magie et Religion dans l'Afrique du Nord » est une étude magistrale de la civilisation musulmane, abstraction faite du mouvement libéral et même na- tionaliste qui se dessine en Orient et commence à gagner le Maghrib. Cette étude a pour base : d'une part, l’observation directe de la société musulmane en Algérie et notämment au Maroc, « ce document paléontologique, où nous avons la chance de retrouver intact l'Islam d'il y a dix siècles »; d'autre part, l'ap- plication aux phénomènes observés des théories élabo- rées depuis un demi-siècle par les ethnographes, de facon à présenter la raison sociologique et psycholo- gique des institutions et leur évolution séculaire. Alors que, dans nos sociétés modernes, les institu- tions religieuses ne sont qu'un élément de la civilisa- tion, au même titre, par exemple, que la morale ou la science, la civilisation musulmane porte dans toutes ses manifestations l'empreinte profonde de l'Islam : les paroles et les actes des croyants sont soumis à une multitude de règles qui ont presque la valeur de pres- criplions canoniques ; le droit et la morale sont entiè- rement religieux ; la science, l'art, la poésie sont éga- lement sous la dépendance de la religion; la langue écrite, qui est celle du Livre sacré, à un caractère divin et est immuable; l’organisation de la société elle-même est toute religieuse; il en est de même de l'histoire, et le patriotisme des musulmans, au lieu de se rapporter à leur pays, se rapporte à leur foi. On peut donc à bon droit parler d’une civilisation musul- mane. Mais l'Islam, dans sa marche victorieuse vers l'Orient et vers l'Occident, s’est étendu sur des terri- toires géographiques si variés et chez une foule de peuples si disparates, il s'est heurté à tant de civilisa- tons qu'il a dû, pour s’acclimater, subir des altéra- tions considérables; et l'Islam des Berbères ou des nègres du Soudan n’est pas, évidemment, celui des Hindous, des Chinois ou des Malais. Pour retracer l'histoire de la civilisation musulmane, il faudrait donc noter les modifications qu'elle a subies partout où elle a pénétré. Toutefois, avant de déter- miner les différentes espèces d'Islam, il était indis- pensable d'étudier analytiquement non seulement la doctrine orthodoxe, mais aussi un type moyen de civilisation musulmane pris dans la réalité. C'est cette tâche que M. Doutté à entreprise pour l'Afrique du Nord, et en particulier pour le Maroc, qui est peut-être, de tous les pays, celui où s’est conservée la civilisation islamique la plus pure; et, la société musulmane étant essentiellement religieuse, c'est sur les phénomènes religieux qu'il a porté tout d’abord son attention, en commençant par les plus antiques : les croyances magiques qui sont à la base de la reli- gion. Ces croyances, il les a reconstituées à l’aide des rites qui leur ont survécu et qu'il a recherchés partout, mais surtout chez les tribus bédouines, où il les a re- trouvés dans le folklore, dans les jeux et dans les pra- tiques des femmes et des enfants. Il étudie successivement les magiciens et les devins; les rites magiques : gestes, incantations, talismans; leur fin pratique, qui est de faire arriver un événement désiré ; les rapports de la magie avec la science et la religion ; la divination inductive et intuitive, qui inter- prète les événements en vue de la connaissance de l'avenir; les forces sacrées et leur transmission; le sacrifice, moyen de se purifier et de se sanctifier par la communication avec des sources sacrées; les débris de l'antique magie, tels que le carnaval du Maghrib, les fêtes saisonnières et les rites naturistes. Il s'arrête au moment où les forces magico-sacrées vont se per- sonnifier et être conçues comme des volontés : où de la magie va naître la religion, remettant à un travail ultérieur l'étude des personnifications sacrées et celle des représentations abstraites et de la société reli- gieuse considérée au point de vue de son organisation. Le nouveau livre de M. Doutté est destiné non seule- ment aux étudiants, mais au public instruit en général. Il sera lu avec fruit par tous ceux qui sont appelés à vivre en pays d'Islam, et par ceux notamment qui sont chargés, à quelque degré que ce soit, d’y représenter l'autorité. Si la conquête de l'Algérie a été si longue, si coûteuse en hommes et en argent, c’est surtout à cause de l'ignorance où nous étions — et où, en une certaine mesure, nous sommes encore — des popula- tions dont nous avions entrepris la conquête. L'œuvre de M. Doutté est de celles qui contribueront à dissiper cette ignorance, et à répandre les connaissances qui nous sont indispensables pour gouverner pacifiquement les populations musulmanes dont nous avons assumé la tutelle, et que nous devons élever de facon à en faire nos collaborateurs dans la tâche civilisatrice que nous ayons entreprise dans l'Afrique du Nord. D' F. WEISGERBERS ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES 119 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS l Séance du 19 Juillet 1909. M. le Président annonce le décès de M. S. New- comb, associé étranger de l’Académie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Edm. Maillet pré- sente ses recherches sur les systèmes d'équations différentielles. — M. M. Hamy expose une nouvelle méthode, à la fois expéditive et susceptible d'une grande précision, pour la détermination des déplace- ments de l'axe de rotation des lunettes méridiennes. — M. H. Deslandres à étudié, avec le spectro-enre- gistreur des vitesses radiales, les mouvements de la coucbe supérieure de l'atmosphère solaire. Il a reconnu qu'à l'emplacement de certains filaments la vapeur s'élève nettement et, à une cerlaine distance, redescend un peu de chaque côté. — M. P. Puiseux cherche à expliquer les contrastes de teintes et les dénivellations brusques qui se rencontrent sur la Lune par les mouvements orogéniques dont l'écorce lunaire a été le siège. — M. A. Borrelly adresse ses observations de la comète 1909 à (Borrelly-Daniel) faites à l'Observatoire de Marseille au chercheur de comètes. — M. Coggia communique ses observations de la même comète, faites au même observatoire à l’équatorial d'Eichens. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Becquerel à observé l'existence, dans la décomposition magnétique des bandes d'absorption d’un cristal uniaxe, de dissymé- tries de positions et d'intensités parallèlement aux lignes de force du champ et à l'axe optique du cristal. Ce phénomène avait été prévu par la théorie de Voigt. — M.J. Chaudier a constaté que le dichroisme élec- trique des liqueurs mixtes, comme le dichroiïsme ma- gnétique, diminue quand la biréfringence optique du constituant solide devient plus faible. La biréfringence électrique maximum des groupements étudiés est sen- siblement proportionnelle à la biréfringence optique des solides constituants. — M. H. Abraham montre par un exemple que, dans l'analyse des phénomènes périodiques, la représentation par la série de Fourier correspond bien aux harmoniques qui peuvent être excités dans des résonateurs ; mais les termes de cette série ne représentent pas nécessairement la structure physique du phénomène étudié. — MM. A. Fodor et de Büty montrent qu'on peut appliquer les propriétés magnétiques des métaux à des commandes mécani- ques de précision, en l'espèce, il s'agit d'une machine à recommander les lettres, qui fonctionne par l’intro- duction d'une pièce en nickel de 25 centimes, dirigée par un aimant, tandis que l'introduction d’une pièce fausse d’un autre métal ne provoque pas d'attraction magnétique. — M. A. Colani à préparé un chloro- phosphate de thorium 2P?0%. 31h0%. ThCI' et des phosphates doubles P*0*. ThO®. Ca0 et P*0*. ThO*. SrO analogues aux composés correspondants d'uranium. — M.J. B. Senderens a étudié la catalyse des acides forméniques par les oxydes métalliques avec forma- tion de cétones symétriques. La thorine donne les meilleurs résultats, puis les oxydes d'uranium; il y a formation d’un sel avec le catalyseur, puis destruction de celui-ci. — MM. A. Arnaud et S. Posternak ont constaté que les acides gras supérieurs de la série CH?—40° fixent quantitativement et presque instanta- nément l'iode en milieu acétique, en donnant les dé- rivés diiodés correspondants. — M. G. Bertrand à reconnu que le perséulose donne, par hydrogénation avec l’amalgame de Na, un mélange de deux alcools stéréo-isomères, la perséite et la perséulite; c'est donc un sucre cétonique. — M. R. Padova décrit quelques réactions de l'anthranol : chauffé avec le phénylchloroforme au sein du toluène, il y a forma- tion d'HCI, d'un composé chloré et d'une petite quan- tité de dianthrone; fondu avec les arylamines, il donne des arylanthramines et H°0. — MM. A. Pictet et A. Gams ont réalisé la synthèse de la papavérine par déshydratation, au moyen de P?0°, de l'homovéra- troyl-oxy-homovératrylamine. — M. C. Tanret a re- tiré de l’ergot de seigle une base nouvelle, de formule C'HAZ°0?5. 2H°0, qu'il nomme ergothionéine. Elle est très soluble dans l’eau, dextrogyre, [æ]»—+ 110, et donne des sels monoacides.— M. M. Delépine a extrait de l'essence de criste marine un composé C‘#H#0:, isomère de l'apiol de persil, qui est le diméthoxy- 2: 3-méthylènedioxy-#4: 5-allvl-1-benzène, Eb.2940-2950, — MM. L. Morel et E. F. Terroine ont reconnu que l’action du suc pancréatique sur les éthers est très. faible ; elle est considérablement renforcée par l’addi- tion de sels biliaires; elle diffère généralement de celle qu'opèrent les agents chimiques. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Calmette et C. Guérin difflérencient les bacilles tuberculeux par introduction sans effraction dans la mamelle de chè- vres venant de mettre bas. Les cultures d'origine bo- vine produisent toujours une mammite grave,amenant la mort de l'animal, tandis que les cultures d'origine humaine produisent une mammite bénigne. — M. A. Marie a constaté que le cerveau humain renferme une substance possédant un pouvoir antirabique élevé; cette substance parait être une nucléoprotéine. — M. J. Bergonié preconise le travail musculaire élec- triquement provoqué pour la cure des maladies par ralentissement de la nutrition, en particulier pour celle de l'obésité. — M. L. Léger a trouvé, dans les tubes de Malpighi de l'Olocrates abbreviatus, un Mycé- tozoaire endoparasite nouveau, qu'il nomme Pelto- myces byalinus. — MM. A. Muntz et H. Gaudechon ont reconnu que, pendant l'insolation directe, les quantités de carbone fixées par la végétation sont, en moyenne, 5 fois plus fortes que pendant les temps sombres et pluvieux. — MM. Al. Hébert et A. Kling ont constaté que les cellules chlorophylliennes ne peuvent exercer le phénomène d'assimilation sous la seule influence des rayons du radium; cette influence les altère légèrement.—M. Trabut a trouvé en Algérie: des espèces secondaires d’Avena sterilis qui ne pré- sentent aucune différence importante avec les races d’Avoines cultivées dans la région méditerranéenne, auxquelles elle a sans doute donné naissance; ces. races sont les plus résistantes à la sécheresse et à la rouille. — M. E. Romer estime que le Plateau suisse est encore actuellement en voie d’exhaussement; en raison de ce fait, la principale thèse de la morphologie glaciaire n’est pas soutenable. Séance du 26 Juillet 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Boutroux dé- montre que l'inverse d'une fonction entière ne peut pas être singulière le long d’une ligne continue ou en un ensemble non dénombrable de points. — M. A. Den- joy présente ses recherches sur les fonctions analy- tiques uniformes à singularités discontinues. — M. A. Rateau déduit de ses expériences que, pour les aéro- planes, les surfaces épaisses ayant un profil lenticulaire et composées de deux toiles sont préférables aux sur- faces minces, même en dehors de l'avantage qu'elles offrent de pouvoir dissimuler et soustraire à l’action de 720 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES l'air une grande partie des armatures. — M. Ch. Du- pont signale de Laokay diverses secousses de tremble- ment de terre ressenties au Yunnan les 11, 12, 13 et 14 mai etle 41 juin. — M. L. Fabry fait connaître des oscillations du niveau de la mer qui se sont produites dans le port de Marseille le 15 juin entre 9 heures et midi, de quart d'heure en quart d'heure, et auraient atteint 80 centimètres d'amplitude; elles ont été en relation avec des variations barométriques très nettes. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. de Gramont et C. de Watteville ont mesuré le spectre de bandes ultra-vio- let du phosphore, dont ils donnent le tableau des lon- sueurs d'onde. — M''° Gleditsch a reconnu qu'il n'existe pas un rapport constant entre le radium et l'uranium dans les minéraux radio-actifs; ce rapport varie de 2,85 X 107 dans une autunite de France à 4,19 X 107 dans une thorianite de Ceylan. — M. L. Wertenstein à constaté que l’activité induite qui se dépose d’un pla- teau supérieur sur un plateau inférieur par l’action de la pesanteur ne contient pas de radium A. Le diamètre des particules qui tombent varie, suivant les cas, de 105 à 280 pu. — M. B. Szilard a déterminé la longueur de parcours des rayons & en utilisant la scintillation que ceux-ci produ'sent, à l'exclusion des rayons & et y, sur un écran de sulfure de zinc. Les parcours ainsi mesurés sont un peu plus courts que ceux qu'on déter- mine par l’action ionisante sur les gaz. — M. M. Kern- baumareconnuquelesrayonsultra-violets décomposent l’eau en H°0* et H°, de la même facon que les rayons $ du radium. — M. H. Herchfinkel a observé que les hydrates de Fe et d'Ur entrainent la presque totalité du radium dans les solutions où ils se précipitent, tandis que ceux de Th, Di et Al ne le font que très peu. Tous ces hydrates dégagent une assez grande proportion d'émanation à l’état sec, à l'inverse des sels de Ba. — M. L. Bloch estime que de nouvelles recherches sont nécessaires pour affirmer que l’origine de l’ionisation par voie chimique se trouve dans des conditions ana- logues au barbotage. — M. T. Bialobjeski a étudié la condactibilité spontanée de la paraffine à diverses températures et celle qu’elle manifeste lorsqu'elle à été soumise à l’action ionisante des rayons du radium : la seconde est en moyenne 15 fois plus forte que la pre- mière. — M. C. Tissot montre que l'arc de Poulsen est stable et donne une oscillation unique, de période parfaitement déterminée et égale à la période propre du circuit dérivé, quand le rapport de la capacité à la self-induction prend une valeur suffisamment faible. — M. E. Louise à déterminé les températures de misci- bilité correspondant à des poids variables d'huiles sèches additionnées d’un volume constant d’acétone sèche; ces courbes sont caractéristiques pour chaque huile et peuvent être employées en analyse. — M. H. Le Chatelier montre que, si la loi des tensions fixes de dissociation ne semble pas se vérilier sur les corps solides, c'est qu'on n’a pas fait intervenir, parmi les forces agissant sur le système, les actions capillaires résultant de la porosité des substances. On peut faire disparaître celles-ci en opérant en présence d'une petite quantité d'un dissolvant des corps solides, pris en quantité juste suffisante pour les humecter. — M. P. Jo- libois montre que le P rouge ordinaire est un état ins- table, quoique défini; la variété allotropique stable du P, ou phosphore pyromorphique, peut être obtenue par l'action de la chaleur seule au-dessus de 360° et en présence d’un catalyseur au-dessus de 250°; elle a une densité constante de 2,37. P rouge fond à 7259. — M. Ed. Chauvenet a préparé des hydrates de chlorure de thorium à 2, #4, 7 et 8 H°0 et des hydrates de bromure à 7, 10 et 12 H°0. — M. Barre à préparé les sulfates doubles suivants: K®SO!.SrS0#; (AzZH##S04.SrS0#; PhSO*. K?S01etPbSO!,(AzH#)s0f.— M. A. Gautier décrit les dis- positifs qu'il a employés pour recueillir sur place et con- server les gaz des fumerolles, des sources ou des sols volcaniques. — M. Pariselle à préparé la monométhy- Ene du butanetriol-1 : 2 : #4, qui, par enlèvement de CHON, fournit l'oxyhydrofurfurane, Eb. 1819. — M. M. Rosenblatt et M': M. Rozenband ont constaté que plusieurs acides, parmi lesquels l'acide borique, sont sans action appréciable sur la fermentation alcoolique; pour les autres, la concentration qui arrête complé- tement l’action de la levure est, en général, très élevée. — MM. V. Henri el J. Schnitzler ont observé qu'une exposition de trente minutes aux rayons ultra-violets arrête complètement la fermentation acétique du vin en présence de l'air; l'aspect du vin est alors le même qu'après addition de quelques gouttes de H?0#, — M. H. Bierry à trouvé dans le suc pancréatique du chien un ferment différent de la maltase qui dédouble l'«-méthyl d-glucoside; le suc gastro-intestinal d’Helix pomatia hydrolyse surtoutle dérivé 6. — M. X. Roques a constaté que l’amylase et la diastase protéolytique, chez la larve de Limnophilus flavicornis, atteignent leur maximum dans la période qui précède la nymphose, puis diminuent ensuite considérablement; l’invertine, au contraire, va toujours en croissant. —M.J. Larguier des Bancels a observé que les textiles usuels prennent dans l’eau distillée une charge négative; elle augmente dans une liqueur alcaline et diminue jusqu'à changer de signe dans une liqueur acide. Le mordançage ne modilie pas la charge, tandis que la teinture la modifie généralement. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Pédebidou montre que les strophantines, même aux doses ultra-théra- peutiques, sont parfaitement tolérées par la voie sto- macale et par la voie intra-musculaire, tandis que l’in- jection intra-veineuse provoque la mort à dose infime. — M. A. Pizon à étudié le stolon génital des Diplosomes et son évolution au cours de la régression partielle et de la displanchtomie des ascidiozoides. — MM. L. Léger et E. Hess: ont rencontré dans les tubes de Malpighi du Doreus parallelipipedus un Entophyte nouveau, qu'ilsnomment Ophryomyces dorer. — MM. Eberhardt et M. Dubard ont constaté que le Bleekrodea tonki- nensis végète dans des terrains riches en calcaire, où l'écoulement des eaux est rapide; il en résulte une richesse particulière des tissus en sels de chaux et la présence de dispositifs destinés à constituer des réserves aqueuses (tubercules radicaux) ou à diminuer la déper- dition de vapeur d'eau (cystolithes à incrustations externes). — M. L. de Launay montre que toute une série importante de gisements aurifères se relie à des dérivations plus ou moins éloignées des magmas gra- nitiques. — M. M. Lugeon a reconnu qu'une nappe continue, crétacique, existait au-dessus des nappes helvétiques. Bousculée par ces dernières, elle a été pincée avec une autre série de Trias et de Flysch en un vaste synclinal couché, mis à jour par le profond cirque de Derborence. — M. A. Joly a constaté que des for- mations néogènes continentales, synchroniques de celles de Constantine et de même facies, couvrent en partie l'étendue des Hautes plaines constantinoises; elles s'y montrent doucement plissées ou ondulées, quelquefois affectées par des accidents tectoniques violents. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 13 Juillet 4909. M. le Président annonce le décès du D' Bondet, associé national. M. N. Gréhant à soumis divers animaux à la respi- ration d'un mélange de 79 °/, d'acétylène et 21 °/ d'oxygène; le pigeon meurt en 30 minutes, le lapin en 40 minutes; la tortue estindifflérente; la grenouille est asphyxiée au bout d'une heure; mais revient à la vie lorsqu'on la ramène à l'air. Le chien est beaucoup plus sensible que le lapin à la respiration d’un mélange d'air ét de 1 °/, d'oxyde de carbone. — M. Martel lit un travail au sujet de la production du lait pour les enfants. Séance du 29 Juillet 1909. MM. P. Rosenthal el A. Berthelot présentent un appareil destiné à utiliser le chlorure d'éthyle pour ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 721 l'anesthésie générale. — M. H. de Brun donne quel- ques renseignements sur une épidémie de peste pneu- monique observée à Beyrouth en janvier 1907. Elle parait n'avoir frappé que six personnes : un indigène, sa femme, une religieuse qui soigna cette dernière, el trois autres religieuses couchées en face de la première dans le même dortoir. L'épidémie s'arrêla là, grâce aux mesures rigoureuses d'isolement et de désinfection prises par l'auteur. L'aflection se caractérise par la grande difficulté de diagnostic des premiers cas: l'examen bactériologique des crachats qui sont rejetés au bout de quelques jours permet de reconnaître le bacille pesteux en abondance. Le pronostic est exces- sivement sévère : tous les malades moururent, les trois dernières malgré un traitement énergique avec le sé- rum de Yersin. — M. le D' R. Simon lit un travail sur les enseignements de la lutte contre la mortalité infan- tile à New-York. — M. le D' Gauducheau lit une étude sur la question de l'unité vaccino-variolique. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 17 Juillet 1909. M. P. F. Armand-Delille expose une méthode sim- pliliée de déviation du complément à la tuberculine, utilisant le pouvoir alexique du sérum à étudier et l'existence de la sensibilisatrice hémolytique normale du sérum humain pour les globules de mouton. — M. G. Dubreuil montre que les plasmazellen de lépi- ploon du lapin sont des cellules du tissu connectif provenant d'une transformation sur place de quelques- uns des lymphocytes immigrés, y apparaissant surtout au cours des inflammations à évolution lente. — MM. A. Blanchetière el Gougerot ont déterminé la composition chimique du Sporotrichum Beurmanni et de ses endotoxines. — M. H. Roger estime que c'est dans le protoplasma des microbes, champignons ou bactéries, qu'on doit actuellement s'efforcer de découvrir les substances toxiques ou vaccinantes. — M. C. Fleig a constaté que les spermatozoïdes humains lavés dans l’eau de mer et les eaux minérales conti- nuent à vivre pendant un certain temps; les sels de chaux sont nécessaires à la production de ce phéno- mène. — M. H. J. Rossello à obtenu, chez les ani- maux, une éosinophilie locale hydatique, non seule- ment autour d'une vésicule fille inoculée, mais même avec la simple inoculation des scolex et bien avant que ceux-ci aient produit un vrai kyste. — MM. CI. Regaud et G. Dubreuil ont constaté que la rupture artificielle des follicules de la lapine, même pendant le rut, n'est pas suivie de la formation de corps jaunes. — M. E. Brimont décrit quelques Hémato- zoaires nouveaux qu'il a trouvés dans le sang de Ver- tébrés de la Guyane. — M. Ch. Foix décrit une tech- nique simplifiée de la réaction de fixation, utilisant les hémolysines naturelles et les globules de lapin. — M. M. Loeper a reconnu que la quantité de chaux éliminée par l'intestin joue un rôle important dans la concrétion et la coagulation du mucus intestinal, quelle que soit la cause de l'irritation de l'intestin. — M. E. Brumpt signale l'existence d’une spirochétose des poules dans le pays Somali; elle est due à lino- cutation par les Argas d’un parasite identique au Sp. gallinarum du Brésii. — M. G. Kimpflin, en cultivant à l'obscurité des prothalles de Fougères dans un milieu contenant de l’acroléine, a observé la formation de grains d’amidon dans les chloroplastides. — MM. N. Fiessinger et P.-L. Marie ont constaté la présence de lipase dans tous les exsudats à lymphocytes, tandis qu'elle fait défaut dans les exsudats à polynucléaires. La lipase constitue un ferment de défense contre l'in- fection des bacilles gras. — MM. C. Mathis et M. Lé- ger ont trouvé dans le sang du singe dormeur (Nyc- ticebus tardigradus) une nouvelle Filaire à embryons sanguicoles, qu'ils nomment F. Sergenti. — MM. P. Aimé et C. Champy ont pu enlever l'organe de Bid- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, der du crapaud, même à l'époque de son maximum de développement, sans provoquer la mort de l’ani- mal. M. Lafforgue signale un cas où le réflexe de Babinski était d'origine exclusivement médullaire. — MM. H. Bierry et A. Rance ont constaté que largi- nase ne peut pas dédoubler les cyamines autres que l'arginine en urée et acide aminé; de même, aucune diastase n'a pu dédoubler un uréide, l'oxalylurée, en urée et acide. — M. A. Netter signale de nouveau les bons effets du chlorure de calcium comme moyen pré- ventif des éruptions après injection sous-cutanée de sérum antidiphtérique; les résultats sont beaucoup moins satisfaisants dans les injections intra-rachi- diennes de sérum antiméningococcique. — MM. C. Levaditi et V. Stanesco sont parvenus à cultiver deux Spirochètes de l'homme, le Sp. gracilis etle Sp. bala- nitidis, soit sur milieu de Schereschewsky, soit sur sérum de cheval coagulé à 75°. — MM. J. Lhermitte et A, Gruccione ont constaté la persistance des cylindres-axes dans les tumeurs non inflammatoires du système nerveux, comme le gliome ou le sarcome. — MM. P. Emile-Weil et Boyé n'ont pu réaliser 71 vivo la prévention de l’incoagulabilité hirudinique du sang chez le lapin ; la correction, tant in vivo qu'in vitro, est difficile à obtenir. — MM. E. Brissaud et E. Bauer montrent qu'on ne peut établir, d'apres les résultats des injections portes, une division lobaire complète, puisque tout territoire porte, petit ou grand, a son indépendance relative. — M. H. Vincent a isolé l'hémolysine du Bacillus megatherium rendu virulent par culture en sac; elle est très énergique, dialysable et détruite par la chaleur en 2 heures à 75°. — M. H. Iscovesco à constaté que le courant continu détruit la pepsine ; cette destruction est proportionnelle au temps, à l'intensité et au voltage; en mème temps, il la transporte vers le pôle négatif. — M. A. Alexeieff a déterminé les Flagellés parasites de l'intestin des Batraciens indigènes. — M. D. Keilin a reconnu que la larve du Pollenia rudis, mouche commune dans nos régions, vit en parasite dans la cavité générale de l'Allolobophora chlorotica. — MM. W. Mestrezat et H. Roger ont analysé le liquide céphalo-rachidien dans la méningite cérébro-spinale épidémique et lui ont trouvé une composition tout à fait caractéristique, pouvant servir au diagnostic. — M. CI. Gautier à constaté que, chez un animal dont l'urine ne renferme pas d'indoxyle, l'introduction d’indol dans le gros intestin est rapidement suivie de l’élimination uri- naire de chromogène indoxylique. — M. L. Bruyant a observé sur l'homme la forme larvaire du rouge décrite sous le nom de 7. inopinatum; élevée, elle a donné une nymphe non encore décrite. — M. A. Therre a étudié le Jait de la chèvre en pleine période de lac- tation physiologique et soumise à la cure thermale de Vichy. — MM. E. Maurel et Carcanague ont reconnu que la cuisson dans l’eau enlève aux céréales, aux légu- mineuses et à la pomme de terre la moitié de leurs matières salines et encore davantage de leurs sels de potasse. — MM. Ch. Achard et M. Aynaud ont observé que les globulins du sang deviennent très fragiles et disparaissent rapidement dans les infections par les Protozoaires. — MM. G. Weiss el M. Labbé montrent que le corps thyroïde sec n'augmente point les échanges respiratoires à jeun chez les obèses, tandis que, sous l'influence du corps thyroïde frais, ils aug- mentent dans des proportions notables, — MM. H. Bus- quet et V. Pachon ont reconnu que la choline exerce une action vaso-constrictive particulièrement intense chez l'animal aux pneumogastriques sectionnés ou atropinisés. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 6 Juillet 1909. M. R. Lautier confirme la haute valeur de la réac- tion de Rivalta comme moyen de différencier les exsu- dats des transsudats. — M. A. Auché a appliqué au sérum 16 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sanguin sa méthode de recherche simultanée de la bili- rubine et de l’urobiline dans l’urine ; la présence de la bilirubine est générale, celle de l’urobiline exception- nelle. — Le même auteur décrit un procédé de prépa- ration de l'urobiline pure aux dépens des matières fécales ; il indique également un procédé de dosage de l'urobiline par superposition de son spectre sur celui d'unesolution étendue de permanganate. — MM.J. Gau- trelet el L. Thomas ont constalé qu'après la décapsu- lation chez le chien le cœur devient petit et rapide, tandis que la pression s’abaisse ; ces phénomènes sont dus en partie au fonctionnement insuffisant de l'appa- reil modérateur. — Les mêmes auteurs ontobservé que, chez le chien décapsulé, l'excitation du splanchnique ne produit pas de glycosurie, — M. R. Brandeis montre que l'intestin est le lieu de formation prépondérante de l'indoxyle ; cette formation est sous la dépendance des malièresalbuminoïdesalimentaires insulfisamment uli- lisées. — M, E. Aubaret a reconnu que la contraction de l’orbiculaire et de ses faisceaux lacrymaux, loin de dilater le sac lorsqu'il est distendu, a une action plutôt constriclive, et nulle quand le sac est réduit, — M. J. Sellier a constaté que les faibles doses du suc diges- tif des Crustacés décapodes sont à la fois présurantes el protéolytiques ; les doses élevées sont seulement protéolytiques. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 9 Juillet 1909. MM. L. Bouveault et R. Locquin ont préparé une quantité importante de pinacone en réduisant l’acétone par l’amalgame de magnésium (méthode de Couturier et Meunier). Is ont reconnu qu'il se faisait à côté de la pinacone divers composés, qu'ils ont identifiés à des produits déjà connus ou dont ils ont démontré la constitution par des synthèses lotales, Gette réduction, qui ne donne pas d'alcool isopropylique, a fourni de l’'oxyde de mésityle, de laldol de l'acétone (alcool diacétonique de Heintz CH%.CO.CH*.C(OH)(CH*}?, le glycol correspondant et une glycérine nouvelle triter- tiaire : OH oh CH* CH où _ Y{OII).C(OH) CIP.C(OH) | | CHS.C. CHE. C. CH CHE Nos CH.C.CHE OH CHS | ON pinacone mixte de l’'acétone et de son aldol, qui bout à 1409 sous 10 millimètres. Cette substance perd aisé- ment une molécule d'eau au contact d'une solution d’a- cide oxalique fusible à 80°,en donnantunalcooltertiaire- éther oxyde cristallisé. L'acide sulfurique étendu lui enlève deux molécules d’eau el le transforme en un éther-oxyde liquide bouillant à 126, — MM. M. Delé- pine el Bonnet indiquent les conditions dans lesquelles ils pratiquent l'oxydation des aldéhydes par l’oxyde d'argent. Au lieu de préparer séparément l’oxyde et de le laver soigneusement comme on le prescrit ordinaire- ment, ils précipitent progressivement l'oxyde d'argent par addition de soude, de potasse ou de baryte, dans un mélange d'aldéhyde, d'eau et de nitrate d'argent, éventuellement aledolisé s'il est nécessaire, Ce procédé donne d'excellents résultats. M. L. Bouveault indique qu'il a employé une méthode analogue pour transformer le citral en acide géranique ; le procédé n'a toutefois pas été publié. M. L. J. Simon pense que l’on pourrait peut-être substituer le borax à la baryte, et ajouter le premier réactif jusqu'à neutralité à la phtaléine. — M. Georges Tanret, analysant les sucres de l’asperge, a reconnu qu'ils contiennent, à côté de saccharose et de sucre interverti, deux hydrates de carbone nouveaux qu'il appelle asparagose et pseudo-asparagose, Ce sont des sucres voisins de l’inuline, donnant par hydrolyse | Î un mélange où prédomine le lévulose et contenant un peu de glucose. — MM. Gabriel Bertrand et V. Meyer ont essayé les méthodes cryoscopique et ébullioscopique pour déterminer le poids moléculaire de la pseudo- morphine. Les résultats auxquels ils sont arrivés confirment la formule C*#H%A720f proposée par Polstorff et admise, à la suite de ses recherches chimiques, par Vongerichten. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 6 Mar 1909. M. F. E. Schulze donne lecture d’un Mémoire sur le rôle des sacs à air des oiseaux; il discute les diffé- rentes fonctions de ces organes, en exposant plus en détail l'importance qu'ils possèdent pour le mécanisme respiratoire. Il donne une description détaillée des « bronches rétrogrades » jusqu'ici inconnues, prenant naissance dans les trois sacs à air postérieurs el qui, pendant l'expiration, introduisent l'air directement dans le parenchyme respiratoire des poumons. — M. Branca présente un Mémoire de M. Jaekel, profes- seur à l'Université de Greifswald, sur l'origine des extrémités paires des Vertébrés. On connaît les deux hypothèses qui se trouvent en présence, à savoir celle de l’archiptéryge de Gegenbaur, d’une part, et la théorie des plis latéraux, d'autre part. Or, la troisième facon de voir, que préconise l’auteur, se base sur de nouvelles observations, faites sur le squelette des variétés de baleine les plus anciennes jusqu'ici connues. A chacune des nageoires antérieures et postérieures de ces variétés, M. Jaekel constate, en effet, la pré- sence d’un long rayon principal postérieur (qu'il con- sidère comme rayon métaptérygial) et d'un rayon secondaire antérieur (qu’il regarde comme rayon prop- térygial). D'une façon analogue, un rayon postérieur ulua-fibulaire et un rayon antérieur radio-libial s'attachent, chez les Tétrapodes, à l'humérus et au fémur respectivement. Cette homologie s'étend, en outre, aux Arthropodes, dans les extrémités desquels le basi- podite correspondrait à l’axe principal (humérus, fémur), auquel s'attacheraient également deux rayons, l'exopodite et l'endopodite. C’est ainsi que l’auteur croit confirmer les vues qu'il a préconisées autrefois, à savoir que les Vertébrés descendraient des Arthro- podes, non pas grâce à l’évolution ultérieure de leur crganisme, mais par suite d’une entrave opposée à leur développement, dans les stades initiaux, et qui lui permet de se continuer dans une voie nouvelle. Séance du 27 Mai 1909. M. Schottky donne lecture d’un Mémoire rédigé en collaboration avec M. Jung, sur de nouveaux théo- rèmes relatifs aux fonctions du symétral et aux fonc- tions d’Abel de la théorie de Riemann, Mémoire où il traite d’un problème dont la solution est nécessaire à la représentation algébrique des fonctions du symétral. Séance du 10 Juin 1909. M. Schwartz communique les modèles de morceaux de surfaces minima, établis par M. E, R, Neovius, actuellement à Copenhague, Les 50 modèles présentés à l'Académie, avec une note explicative, se rapportent à un problème traité par Riemann en 1861 : Détermi- ner par voie analytique un morceau de surface minima, limité par trois lignes droites dont les directions forment, deux à deux, des angles droits, tandis que les secteurs s'étendant à l'infinise comportent comme des surfaces hélicoïdales. Ces modèles ont été confeo- tionnés d'après le nouveau procédé suivant : Chaque morceau de surface minima ayant été moulé avec une membrane mince de gélatine liquide, adhérant à un cadre de fils approprié, on applique à cette membrane solidifiée un enduit de cire et de résine, en la plongeant dans une solution de cire et de résine au baume de Canada, préparée à chaud, Un nouvel enduit, consis- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tant en une gélatine très mince, assure aux membranes leur forme correcte pendant des mois. Séance du 17 Juin 1909. M. Munk donne lecture d’un Mémoire sur les varia- tions d'isolation et l'ajustement du système cérébro- spinal. Il recherche les sources des modifications que subissent les parties subordonnées de ce système quand leur liaison avec les parties supérieures est défaite. C'est ainsi qu'il apporte de nouvelles lumières à l'in- telligence de la mécanique générale du système céré- bro-spinal. Séance du 8 Juillet 1909. M. E. Fischer rend compte d’une méthode établie en collaboration avec M. K. Delbrück, pour préparer /es disaccharides du type du tréhalose. En traitant le 8-acéto-bromoglucose par un peu d'eau et de carbonate d'argent, l'on produit, à côté du tétra-acétylglucose, le dérivé octoacétylique d'un disaccharide, d’où lon prépare facilement, par saponification, le nouveau sucre C'2 H?2 01, — Le même auteur donne lecture d’un Mémoire relatif à la synthèse, faite en collaboration avec M. E. Flateau, de l'acide propyl-isopropy1-cya- nacétique. On a souvent discuté l'hypothèse bien connue de Guye et de Crum Brown, suivant laquelle l'activité optique dépendrait de la différence des groupes attachés à l'atome de carbone asymétrique. Comme une relation entre la rotation et le poids des groupes est manifeste dans bien des cas, il était désirable d'étudier ce pro- blème sur un exemple très simple, comme celui de l'acide propyl-isopropyl-cyanacétique, où les complica- tions dues aux diversités du poids moléculaire sont absentes. D'autre part, cet acide se prépare plus facile- ment que le composé exempt de cyanogène. Comme la rotation optique de cet acide, en opposition aux pré- visions théoriques, est relativement considérable, la différence de structure entre le propyle et l’isopropyle doit suffire à provoquer une asymétrie optique relative- ment grande de la molécule. Séance du 15 Juillet 1909. M. O. Hertwig rend compte de ses recherches rela- tives à l'influence des rayons du radium sur les cellules animalesembryonaires.\laexécuté, pendant l'hiver 1908 et l'été 1909, des expériences diversement variées sur de jeunes larves d'Axolotl, sur des œufs de grenouilles fertilisés pendant quatre stages initiaux de leur ontogénèse, ainsi que les produits sexuels des Echino- dermeset de Rana viridis, expériences dont les résultats seront publiés prochainement. — Le même auteur adresse un travail exécuté, sous les auspices de l’Aca- démie, par M. Poll, premier assistant de l’Institut d'Anatomie biologique, sur « Les reins secondaires chez les Invertébrés » : les cellules chromogènes dans le système nerveux central des vers annulaires (Nephthys). — M. Engler communique une Note de M. J. Mildbraed, botaniste de l'expédition du duc Adolphe-Frédéric de Mecklembourg (1907-1908), sur « Les conditions de végétation de la zone lacustre de l'Afrique Centrale, depuis le lac Victoria jusqu'aux volcans de Kiwou ». L'auteur y dépeint la végétation des pays bas de Kagéra, du Sud-Mororo, du plateau élevé de Ruanda, des montagnes de Bugege, des forêts de Bugoi et des volcans du bord septentrional. Parmi les formations observées sur les volcans, les forêts de Bambou et d'Hagenia, les Ericacées et les formations de Senecio sont d'un intérêt spécial. — M. Branca présente un Mémoire de M. Tornquist, professeur à l'Université de Kæœnigsberg, sur le Trias extra-alpin aux Baléares et en Catalogne. Le facies triasique extra-alpin, décou- vert par l’auteur en Sardaigne, se retrouve d’une façon analogue aux Iles Baléares; d'autre part, il présente un développement identique en - Catalogne. C'est dire que l’antagonisme jusqu'ici admis entre le prétendu facies alpin à Minorque et le facies extra-alpin dûment apprécié de la Catalogne n'existe pas. L'auteur établit 723 cependant à Minorque deux horizons où le Trias extra- alpin rappelle le Trias alpin, à savoir: d'une part, le Conchylien supérieur avec sa pétrification extra-alpine, associée à une faune d'ammonites alpines, et d'autre part, les marnes keupériennes qui, par leur configu- ration pétrographique, se rapprochent des dolomites alpines principales. Il en résulte cette intéressante image paléogéographique : la mer intérieure allemande de l’époque triasique s'étendait bien avantau sud-ouest danslarégion de la Méditerranée actuelle, en embrassant la Sardaigne, les Baléares et la Catalogne actuelles. A l'époque du Conchylien supérieur, le raccord de cette merintérieure avec l'océan ouvert se serait élargi, et, à l'époque des marnes keupériennes, l'océan aurait fait irruption dans la mer intérieure. Alfred GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 44 Mai 1909. M. E. Hupka donne lecture d'un Mémoire sur la masse inerte des électrons en mouvement. Les expé- riences dont il rend compte ont été faites sur des électrons amorcés par voie photo-électrique el accélérés par des champs électro-statiques. En exposant une cathode de cuivre, à l'intérieur d'un tube de Crookes à vide avancé, à l'éclairage d’une lampe à mercure à vase de quartz, l'auteur détermine un courant d'élec- trons, fortementaccéléré par un champ interposé entre la cathode et l’anode, qui affecte la forme d'un dia- phragme. Passant à vitesse constante à travers l’'anode, ce courant d'électrons va projeter la silhouette de deux fils de Wollaston, fixés à un second diaphragme, sur un écran fluorescent disposé au bout du tube. En lançant un courant magnétisant par une paire de bobines disposées verticalement à l'axe du tube derrière le second diaphragme, on voit le rayonnement électro- nique subir une déviation, et la silhouette se déplacer d’une certaine distance. L'auteur se sert, à ce propos, d'un procédé récemment indiqué par M, C. Müller, pour produire et mesurer avec une grande précision des tensions statiques élevées. Les valeurs des masses électroniques résumées dans ses tableaux s'accordent particulièrement bien avec la théorie dite relative, Les vitesses atteintes dans ces expériences sont les plus élevées qu'on ait jusqu'ici réalisées par l'accélération à l'aide des champs électrostatiques. Séance du 28 Mai 1909. M. E. L. Lederer rend compte d’un phénomène caractéristique des éclateurs à électrodes de mercure. En reliant aux bornes d'une petite bobine d’induction un tube spectral à électrodes de mercure, on voit souvent la décharge ne s'établir qu'après un choc imprimé au support du tube. Ce phénomène ne saurait ètre dû à des défauts de contact des fils amenant le courant. Suivant l'interprétation donnée par l'auteur, le mercure frottant sur les parois de verre engendrerait des différences de tension suffisantes pour déterminer la décharge. Une expérience spéciale, qui accentue les effets de frottement, confirme cette hypothèse. — M.E. Wiedemann présente une contribution à l'histoire de la boussole chez les Arabes. Pour élucider certains points douteux des travaux antérieurs présentés à la Société par l’auteur, d'une part, et M. E. Gerland, d'autre part, il a engagé M. Lampe à faire, à l'Institut de Physique d'Erlangen, quelques expériences sur des tiges de fer carburé d’une composition analogue au fer des auteurs arabes. En rapprochant la magnétite dela tige de fer, cet expérimentateur a observé une intensité magnétique presque identique à celle qu'on produit par la touche, ce qui doit être dû en partie à la répar- tition irrégulière du magnétisme de l'aimant naturel. Un rapprochement répété se montre sans influence. — M. H. Barkhausen fait la démonstration de quelques expériences sur les états instables des courants électri- 724 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ques. Un arc voltaïque, dont il donne les courbes caractéristiques, fournit, sur une résistance de 30 ohms, à une tension de 110 volts, deux états d'équilibre stable, correspondant respectivement à l'arc éteint et à l'arc brûlant. Le troisième état d'équilibre théorique- ment possible est, au contraire, instable, c'est-à-dire qu'il ne saurait se réaliser par suite des petites fluctua- tions toujours présentes. Or, en augmentant la résis- tance insérée dans le circuit, on voit l'état de l'arc devenir unilatéralement instable pour une intensité de courant donnée (1 ampère), à laquelle se produit l'extinction de l'arc sans qu'il puisse être rallumé. L'auteur discute ensuite le cas d'une petite dynamo série accouplée directement à un petit moteur. En fermant le circuit de cette dynamo sur une résistance supérieure à 15 ohms, on la voit rester inerte. Au- dessous de 15 ohms, existent trois conditions possibles de courant stationnaire, dont la moyenne, celle de l'absence de courant, est instable. Aussi la machine s’'amorce-t-elle spontanément dans l’un ou l’autre sens. En fermant la dynamo sur un grand condensateur (100 microfarads) et une faible résistance ohmique, on voit, au lieu d'un état stationnaire, se produire des oscillations de courant permanentes autour du point instable qui correspond à l'absence du courant. — M. W. Westphal donne lecture d’un Mémoire sur une démonstration perfectionnée du choc élastique; il conseille de remplacer les boules d'ivoire dans les appareils jusqu'ici employés pour ce même but par des boules d'acier. Il compare les propriétés élastiques de différentes matières en mesurant la perte d'énergie qu'elles subissent pendant le choc. Or, cette perte varie entre 6,60 °/, et 6,70 °/, pour les boules d'ivoire, et entre 1,30 °/, et 0,52 °/, pour les boules d'acier, ce qui prouve nettement la supériorité de ces dernières. Les boules de verre se placent entre deux. Séance du 2 Juillet 1909. MM. J. Franck et W. Westphal rendent compte de leurs recherches relatives à la charge des ions gazeux. Dans un travail antérieur, les auteurs avaient étudié la charge des ions engendrée par les rayons X, en mesurant leur diffusion et leur mobilité. [ls avaient constaté qu'une fraction des ions positifs porte des charges doubles, tandis que les ions négatifs portent toujours des charges simples. Les ions à double charge présentent un coefficient de diffusion inférieur à celui des ions simples; une sorte de diffusion fractionnée permet de les séparer les uns des autres. Or, dans le présent travail, les auteurs étendent leurs recherches à d'autres ionisateurs, à savoir aux rayons «, fetyet aux décharges par pointes. Pour aucun de ces ionisa- teurs, ils ne constatent d'ions à charge double; pour les rayons y, ils gardent, à la vérité, une certaine réserve, par suite surtout de l’analogie qui existe entre ces rayons et les rayons X. Dans le cas de la décharge par pointes, ils observent, pour les ions positifs à diffusion très forte, des coefficients de diffusion décrois- sants. Comme les ions négatifs présentent la même tendance, il s'agit évidemment, non pas d'ions à charge double, mais d'ions « lents » (positifs ou négatifs), dont la production, en raison des processus re qui accompagnent les décharges par pointes, serait, du reste, parfaitement plausible. — M. U. Meyer donne lecture d'un Mémoire sur /a dispersion magné- tique rotatoire dans la région infra-rouye du spectre. On sait que la rotation électro- magnétique du plan de polarisation de la lumière dépend, à un degré consi- dérable, de la longueur d'onde de la lumière trans- mise ; dans la région visible, elle est en général inver- sement proportionnelle au carré de la longueur d'onde. Nous possédons, entre autres formules "représentant cette relation, deux formules établies par M. Drude sur la base respectivement de la théorie des courants moléculaires et de l'effet de Hall. Pour comparer et vérifier ces deux formules, l’auteur étudie la dispersion magnétique rotatoire dans la région ultra-violette (où les rotations relativement importantes sont mesurées avec plus de précision) sur les cristaux transparents, même pour les ondes très longues, de sel gemme, de sylvine et de spath-fluor. Il constate que les deux formules représentent également bien les observations faites sur ces trois substances. ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris — L. MaRETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE 15 SEPTEMBRE 1909 Revue générale des MCiences pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédact jon à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauvyeau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés éans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $S 1. — Nécrologie Simon Newecomb,. — Le 11 juillet dernier est mort, après une longue et douloureuse maladie, l'un des hommes qui auront laissé dans la science, au x1x° siècle, la trace la plus profonde. Avec Simon New- comb s’est éteint un des flambeaux de l’Astronomie. A sa naissance, le 42 juin 1835, à Wallace, dans la Nouvelle-Ecosse, et pendant les vingt premières an- nées de sa vie, il eût été bien difficile de prévoir que S. Newcomb düt s'élever, dans la science, au premier rang. Rien ne semblait devoir l'y aider. Il était issu d'ancêtres de condition modeste. Cependant son grand-père paternel, tailleur de pierre et propriétaire de carrières, était relativement instruit et avait quelque temps dirigé une école. Son grand-père ma- ternel, « Squire » Thomas Prince, était un magistrat intègre, religieux, puritain, {rès respecté. Son père, le plus calme el le plus méthodique des hommes, menait sa vie suivant les règles de la logique. Ayant conclu de longues réflexions que l'âge convenable pour le mariage était vingt-cinq ans, il s'était, à l'approche de cet âge, mis en route à la recherche d’une femme qui réalisât l'idéal qu'il s'était tracé. Il était allé ainsi, de proche en proche, jusqu'à 100 milles de distance et avait trouvé dans une église la femme parfaite qui devait être la mère d'un des hommes qui honorent le plus l’humanité. Instituteur nomade,changeant souvent de résidence, le père de Simon Newcomb fut le seul éducateur de son fils, qui, dès l’âge de quatre ans et demi, savait compter Jusqu'à cent. et, quelques semaines après, faisait du calcul mental. À cinq ans, Simon commença à aller à l'école et eut une ardoise entre les mains. Il eut, tout enfant, une crise passagère de santé dans laquelle il perdit Le goût de la lecture, de l'étude, des jeux, de la conversation. De bonne heure, il montra peu de goût pour les exercices du corps et le travail manuel, mais une grande force morale. Dans ses lec- tures, il ne passait pas un mot sans l'avoir compris. Il lisait les livres qui lui tombaient sous la main. A dix ou douze ans, il étudiait la Constitution de l'homme, de Combe ; à treize ans, la phrénologie; à quinze, l'Euclide de Simpson, les Conversations de Marcet sur REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. la Philosophie naturelle, l'Economie, la Psychologie ; il apprenait intuitivement la Géographie, lisait la Navi- gauon de Moore : quand il eut quatorze ans, son père fut tenté de l embarquer. « Malgré le plaisir intellectuel que j'ai ressenti, écrit S. Newcomb dans ses /eminiscences of an As- tronomer, mon enfance fut toute triste. A l’occasion, ma passion pour les livres me valait un mot d'éloges de quelque visiteur; le plus souvent, elle provoquait des exclamations déplaisantes ». 1] lui semblait qu'on le regardait comme un monstre. « Au lieu de sentir que mon amour des livres était à mettre en valeur, je me regardais comme formé cruellement par la Nature pour souffrir d’une constitution anormale; je me désolais de ne pouvoir ressembler aux autres enfants. » Il vivait à quatorze ans chez un fermier où le travail essentiel était de conduire les bœufs; il en était entièrement incapable. Il était dans un monde de froidure et de ténèbres. Ses lectures lui faisaient soupconner l'existence d'un monde de charme et de lumière, habité par des hommes qui écrivent des livres et par leur entourage; mais il ne savait comment s’y introduire. Il avait oui dire qu'un gentilhomme, ayant rencontré un enfant qui lisait « les Principes », l'avait complimenté et fait instruire; mais il n'y avait pas de gentilshommes dans la Nouvelle-Ecosse. Il avait lu l'autobiographie de Franklin, mais il n'avait aucune des facilités dont celui-ci avait profité. Son père avait l’idée de faire de lui un avocat; mais comment le devenir ne sachant pas de latin, et n'ayant pas de ressources pour faire des études; il se voyait condamné à rester toute sa vie fermier cultivant ses propres terres; sa mère dési- rait quil se fit prédicateur, mais comprenait bien qu'il n'était pas apte à le devenir. A seize ans, il habitait près de Yarmouth avec ses parents un pelit district scolaire.Un oncle et une tante, étant venus le voir, lui conseillèrent de revenir avec avec eux à Moncton où était son grand-père maternel. Leur voiture n'ayant que deux places, il fit la route, une centaine de milles, à pied. Son grand-père lui ayant conseillé d'apprendre un métier, il pensaà devenir char- pentier. Mais, avant de commencer son apprentissage, une occasion se présenta qui fut décisive pour sa vie 17 126 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Il s'attacha à un certain docteur Foshay, qui soignait les malades par le système botanique de médecine et qui lui fit les plus belles promesses du monde, Il devait rester avec lui pendant cinq ans, l'assistant dans la préparation des remèdes, l’accompagnant et faisant tout ce qu'il y aurait lieu. Le docteur devait lui fournir le vivre et l'habillement, lui enseigner la Bota- nique et son application à la Médecine, « autant au moins qu'il les connaissait lui-même ». En fait, il ne lui enseigna rien, et S. Newcomb résume ainsi sa vie chez le D' Foshay : « Médecin, apothi- caire, chimiste et droguiste, fille à la maison, garçon à lécurie ». Le 13 juin 1853, après de vaines tentatives pour obtenir que Foshay l'instruisit, il partit, lui laissant une courte lettre d'explication. Arrivé à Saint-John un jour d'inauguration du pre- mier chemin de fer, il trouva à Calais, une ville du Maine, un petit vaisseau dont le capitaine consentit à l'embarquer pour Salem, où il arriva après trois se- maines de traversée. À Salem, il trouva son père qui, après la mort de sa mère, était venu chercher fortune dans les Æ£tats. Le résultat fut qu'au commencement de 1854 S. Newcomb tenait une école à Massey’s Cross Roads, dans Kent County, et un an après, une école plus avantageuse dans le petit village de Sudlersville, à quelques milles de là. C'est de son séjour à Massey que date l'entrée de S. Newcomb dans la vie intellectuelle. Dès le début de son séjour, sentant s'ouvrir de nouveaux horizons, il écrivit à sa tante Rebecca Prince que sa fuite de chez le D' Foshay était ce qu'il avait fait de mieux dans sa vie. Il étudia la grammaire anglaise, un peu de français; dans des livres très médiocres ou vieillis, la Géomé- trie analytique et le Calcul; il lut aussi l'Economie politique de Say et conclut finalement que c'était vers l'étude des Mathématiques qu'il devait se tourner. Il se procura une traduction anglaise des Principes, de Newton, Science; la lecture des Principes était difficile : du moins S. Newcomb comprit çà et là le sens; dans l'American Journal, il ne trouva rien à apprendre. C'est à Sudlersville qu'il se hasarda à écrire. Il ne savait d'Algèbre que ce qu'on apprenait alors dans les manuels : il ignorait même le nom d’Abel. Ayant ima- giné une démonstration de la formule du binôme, il l'envoya au Professeur Henry, secrétaire de l’Institu- lon smithsonienne Ce travail fut apprécié pour son élégance : il manquait de rigueur; le Professeur Henry le lui renvoya avec une note encourageante. Sa première publication fut une lettre adressée en 4855 au {National Intelligencer, réfutant un article contre les idées de Copernic. Sa lettre fut insérée : le colonel Albert lui envoya avec ses compliments un exemplaire des tables et formules de Lee; le Professeur Lawrence Smith lui envoya une brochure consacrée à l'origine des météorites regardés comme projetés par les volcans lunaires, et lui demanda son avis. En 1856, il enseignait chez un planteur nommé Bryan, à Prince George County, à quinze ou vingt milles de Washington. Il allait à cheval visiter la capi- tale, attiré surtout par la Bibliothèque smithso- nienne. En mai, il obtint de circuler dans les galeries et de regarder les livres. On lui prêla pour un mois le premier volume de l'édition de Bowditch de la Wéca- nique céleste, qu'il parcourut, arrêlé à chaque pas par des formules et des notions mathématiques qui dépas- saient son instruction. Le Professeur Henry l’accueillit avec son urbanité ordinaire el lui conseilla de demander du travail au Coast Survey. I fut reçu d'abord par le secrétaire, puis de la facon la plus charmante par Hilgard, qui, en décembre, lui écrivit qu'il pourrait se présenter à Winlock et essayer d'entrer à Cambridge, au Nautical Almanae. W s'y présenta, et Winlock l’attacha au bu- reau en janvier 14857. S. Newcomb était vivement un exemplaire de l'American Journal of attiré par le travail des éphémérides; il lui semblait que leur formation exigeait la plus haute préparation intellectuelle à laquelle un homme pût attendre : « Déduire de la loi de Newton les masses des corps célestes, prédire leurs mouvements, calculer leurs orbites, en déterminer les variations pendant des milliers d'années; faire des cartes indiquant exacte- ment les villes de la Terre où l’on pourra observer des éclipses dans une période de cinquante ans, dans quelles régions elles seront visibles pendant de longs siècles : voilà un problème moins abordable que tout autre à une intelligence ordinaire. Pour des dizaines de milliers d'hommes qui peuvent être heureux dans la vie ordinaire, on en compte des centaines qui peu- vent gouverner des empires, des milliers qui peuvent gagner des richesses; il n'en est pas plus d’un qui puisse entreprendre ce problème de l’Astronomie. Les hommes qui ont travaillé à sa solution sont peut-être, en intelligence, l'élite la moins nombreuse de la race humaine; ils constituent une aristocratie placée au- dessus de toutes les autres dans l’échelle des êtres : l’'éphéméride astronomique est la dernière application pratique de leur génie producteur. » Ces lignes des eminiscences marquent le début de la carrière astronomique de Newcomb. Ilavait 21 anset demi. Les Æeminiscences sont datées de 1905. Elles avaient été écrites bien auparavant et, dans sa préface, Newcomb dit : Les premiers chapitres ont tellement le caractère d’une autobiographie que l’auteur a long- temps hésité à les publier durant sa vie. Le passage cité est au commencement du chapitre HI, et l’on doit admettre qu'il exprime des aspirations de S. Newcomb ressenties dès sa jeunesse, comme un engagement pris vis-à-vis de lui-même. Ce qui suit dira comment cet engagement a été tenu. Le passage de S. Newcomb à Cambridge fut marqué par d'importantes recherches. Docteur ès sciences de Lawrence Swift School en 1858, il élabore un important Mémoire sur les variations séculaires et les relations mutuelles des orbites des astéroïdes, dans lequel il conclut contre l'hypothèse d’Olbers, qui en attrivuait la formation à la rupture d’un mème astre; puis un autre, publié en 1865, sur la parallaxe du Soleil, d’après des observations de Mars faites en 1862 dans 6 stations de l'hémisphère nord et 3 de l'hémisphère sud. Entre temps, il va en 1860, à la Saskatchewan River, essayer d'observer une éclipse de Soleil : il trouve la contrée pratiquement sous l'eau; etlejourde l’éclipse, 18juillet, le ciel fat complètement couvert En 1861, Gould,qui était alors à Washington, l’engagea à demander un emploi de professeur de Mathémati- ques vacant à l'Observatoire naval. S. Newcomb hésila beaucoup à quitter Cambridge, foyer de science et de lumières, pour un observatoire où le travail de nuit pouvait être un grand obstacle à la régularité de ses recherches. Il se décida à poser sa candidature lé 22 août, et reçut un mois après, sans autre avertissement, une très grande enveloppe officielle contenant sa nomination. « La confiance dans la valeur, les capacités, etc... du nouveau professeur, exprimée dans la nomination, était très encourageante. » Il fut attaché à l'instrument des passages, sous la direction du Professeur Yarnall, et trouva le service beaucoup moins dur qu'il ne se Pétait figuré. Yarnall et Newcomb, au même instrument, appli= quaient des plans de travail différents; Hubbard, dans la mème salle, au cercle mural, en avait un autre. Quand, en 1863, Newcomb remplaça Hubbard à cet instrument, il était préoccupé toujours d'introduire un plan de travail uniforme et aussi parfait que ceux de certains grands observaloires européens. Chargé en 1865 du nouveau cercle méridien de Pistor et Martins, il prépara un plan de travail pour 4 ans. concernant des observations fondamentales d'étoiles. Il avait soup- conné dans les ascensions droites de Greenwich, Paris, Washington des erreurs systématiques variant avec les saisons. Pour les mettre en évidence et en détruire CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE l'effet par des moyennes, il organisa le travail de façon qu'un même astronome observät de 9 heures du matin jusqu'au milieu de la nuit. L'entreprise fut terminée en 1869 : le but que Newcomb s'était proposé avait été pleinement atteint. A ce moment, occupé par d'importantes recherches théoriques, il demanda à passer au Nautièal Almanac Office. Le Secrétaire de la Marine refusa: mais il fut convenu que S. Newcomb resterait attaché à l'Observa- toire naval sans être chargé d'aucun service. Il installa cependant, en 1873, le grand équatorial avec lequel Asaph Hall trouva les satellites de Mars. Cette situation dura jusqu’en 1877, date à laquelle Newcomb fut appelé à la Direction du Vautical Almanac. Les recherches théoriques de Newcomb jusqu’à cette date avaient été des plus importantes. En 1871, il avait étudié l'orbite de Neptune et en avait publié des tables générales; en 1874, il donnait celles d'Uranus; pour préparer les recherches relatives à ces deux planètes, il avait fait de nombreuses observations de leurs satellites. La Société royale astronomique lui décernait sa médaille d'or. En 1878, il publia ses recherches sur le mouvement de la Lune.danslesquelles il a discuté toutesles observations d’occultations faites depuis l'invention du télescope et les 150 années d'observations de la Lune faites à Paris. La même année, il recevait de la Société des Sciences de Harlem la médaille d'Huyghens. Il avait donné une théorie du mouvement d'Hyperion et montré que son mouvement rétrograde est dù à l’action de Titan. Sous sa direction, l’activité du Nautical Almanae Office a été un des faits scientifiques les plus remarquables de la fin du xix° siècle. Newcomb y à poursuivi l'idée première qui a dirigé son travail pendant toute sa vie. Le résultat de ces 20 années, contenu dans les VIT volu- mes des « Astronomical papers », a été la détermination d'un système de valeurs des constantes astronomiques aussi homogène que possible. Pour y parvenir, Newcomb a observé au Cap le passage de Vénus de 1882, a repris la discussion des passages de 1761 et 1769, a déterminé par la méthode de Foucault la vitesse de la lumière, s’est occupé de la rotation de la Terre et des variations de latitude et a fondé les théories des quatre planètes intérieures Mercure, Venus, la Terre, Mars sur la discus- sion de plus de 60.000 ob-ervations. En même temps, Hill donnait des théories nouvelles de Jupiter et de Saturne. Eu 1896 se tint à Paris, sur l'initiative de M. Downing, après le Congrès de la Carte du ciel, une réunion des directeurs des éphémérides astronomiques, dans le but d'arriver à une entente sur les valeurs à adopter pour les constantes fondamentales del’Astronomie. Les membres de la Conférence étaient: Auwers et Bauschinger, représentant l'Allemagne, Newcomb et Backlund, repré- sentant l'Amérique, Downing et Christie, représentant lAngleterre, Gill, l'hémisphère Austral, Læwy et Tisse- rand, la France : Bakhuyzen et Trépied avaient été invités en qualité de membres consultatifs. Auwers, ‘empêché par sa santé, n'avait pu venir et Christie était “au Japon. Les procès-verbaux de cette conférence montrent le rôle prépondérant qu'y eut S. Newcomb, ‘dont la plupart des propositions furent adoptées. C’est a la suite de cette réunion que S. Newcomb compléta son œuvre en publiant son Cataloque d'étoiles fondamentales en 1900. Newcomb quitta la Direction du Nautical Almanac and american Ephemeris Office en 1897. De 1884 à 1893, il avait été professeur de Mathématiques à l'Université John Hopkins à Baltimore. Au cours de sa carrière, il publia nombre de livres didactiques, dont l’un : « Sphe- rical Astronomy » était le premier d'une série de la plus haute valeur; cette série est malheureusement inter- rompue par sa mort. : 11 avait fondé l'American Journal of Mathematics. Il serait trop long d’énumérer ici les honneurs qui lui furent conférés. Membre honoraire d'un grand nombre “d'Universités et de la plupartdes Sociétés mathématiques 1 et astronomiques du monde, la Société Royale de Londres lui décernait en 1900 la médaille de Copley; il élait élu en 1903 associé étranger de l'Académie des Sciences et recevait en 1907 la cravate de commandeur de la Légion d'honneur. Il a fait en France de nombreux séjours et a résidé à l'Observatoire de Paris et à l'Observatoire de Nice. Il aimait notre pays, et c'était pour les astronomes fran- çais une émotion profonde que d'y revoir en maintes occasions la belle figure, pleine d'énergie intellectuelle et de douceur morale, de celui qui fut dans l'Astronomie et la Mécanique céleste l’émule de Le Verrier. B. Baïllaud, Wembre de l'Académie des Sciences, Directeur de l'Observatoire de Paris. $ 2. — Physique La première solution réelle du problème de la télévision. — Le problème de la télévision préoccupe depuis longtemps l'esprit de nombreux in- venteurs, qui lui ont consacré une somme considérable d'ingéniosité et de travail. Les dispositifs téléphotogra- phiques imaginés pendant ces dernières années sont le fruit provisoire de ces tentatives, la transmission télé- graphique des photographies, dessins et écritures, et leur reproduction à la station d'arrivée, étant incom- parablement plus faciles que la reproduction instan- tanée des objets environnants et de leurs mouve- ments. Il est vrai qu'une solution du problème est théori- quement possible sur la base du principe même des dispositifs téléphotographiques. Ce qu'il faudrait, c'est que les différentes sections d’un cliché fussent repro- duites, non pas successivement comme dans la télé- photographie, mais simultanément et instantanément sans aucun retard, de facon à apparaître immédiate- ment sans l'intermédiaire d'un procédé photographique quelconque. Or, l’on se heurtait jusqu'ici, dans les ten- tatives faites pour réaliser cette idée, à deux difficultés sérieuses, à savoir le coût extraordinaire d’un tel appa- reil et, d'autre part, l’inertie de l'organe vital de la plupart des systèmes : la pile photoélectrique au sélé- nium. M. Ernest Ruhmer, de Berlin, l'inventeur bien connu dans le domaine de la télégraphie et de la téléphonie sans lil, vient de construire le premier appareil de démonstration qui fournisse vraiment une solution du problème. Nous avons eu l’occasion d'examiner ce curieux dispositif, immédiatement avant son expédi- tion à Bruxelles, où il sera présenté aux membres du Comité de l'Exposition Universelle de l’année pro- chaine. Un appareil de télévision complet et définitif, du prix relativement minime de 6 millions de francs, serait, en effet, destiné à être le «clou » de cette expo- sition. Le dispositif de démonstration, construit au prix de 6.250 francs, ne se prête, en raison de sa cons- truction plus élémentaire, qu'à la reproduction de des- sins assez simples, composés de diverses combinaisons de carrés. Un projecteur produit, sur un écran suspendu au mur, l’image du dessin voulu. Cet écran se compose de 25 sections, derrière chacune desquelles se trouve une pile à sélénium très sensible, dont l'inertie a été absolument éliminée par un nouveau procédé. Aussi cette pile répond-elle instantanément à toute variation d'éclairage qui la frappe. A la station d'arrivée se trouve un écran analogue, comportant le même nombre de sections, dont chacune communique avec la section correspondante de l'écran de transmission. Les détails du procédé utilisé pour transmettre les impressions visuelles sont gardés secrets; le principe consiste, cependant, à utiliser un galvanomètre à miroir très sensible pour reconvertir toute fluctuation de courant due aux variations d’éclai- rage de l'écran de transmission en variations lumi- neuses correspondantes. À côté de l'écran de réception “28 se trouve la batterie d'accumulateurs qui fournit le courant aux circuits de télévision. Aussitôt qu'un patron perforé constituant le dessin voulu à été inséré dans le projecteur et que ce dernier produit son image sur l'écran de transmission, cette image devient visible à l’autre bout du fil télégraphique, sur l'écran de réception. L'inertie des piles à sélénium a été compensée à un degré si considérable que l’image télégraphique répond presque instantanément à tout mouvement de l’objet. Tandis que, dans les appareils phototélégraphiques jusqu'ici construits, une repro- duction prenait, en général, un quart d'heure à une demi-heure, mais, en tout cas, un nombre considérable de minutes, le nouveau dispositif l’effectue en une fraction de seconde, de facon que plusieurs phases d'un mouvement donné soient rendues en une seconde. IL est difficile d'apprécier la somme de travail et de patience qu'impliquera la construction de l'appareil définitif. Chaque section, avec sa pile à sélénium et son dispositif galvanométrique, constitue, en effet, un appareil de précision en lui-même et l'appareil complet se composera de 10.000 éléments identiques. Or, l'inventeur, qui ne conlie jamais ce travail à ses collaborateurs, aura à bobiner lui-même chacune de ses piles à sélénium, Alfred Gradenwitz. $ 3. — Métallurgie L'analyse des aciers à l’aide des étin- celles. — Nous recevons de M. E. Demozay la lettre suivante : « Monsieur, « Plusieurs personnes ont eu la bonté de me signaler que la Revue générale des Sciences pures et appliquées du 15 août dernier (p. 655) attribue, sous la signature de M. A. Gradenwitz, à M. Max Bermann, de Budapesth, « l'analyse des aciers à l’aide des étincelles ». « Je vous serais très obligé de vouloir bien remar- quer que j'ai publié dans la Æevue de Métallurgie d'octobre 190%, sous le titre : « Essai sur un mode de classement des aciers », une étude absolument sem- blable, qui paraît bien avoir la priorité sur celle de M. Bermann. « Veuillez agréer. « E. Demozay. » $ !. — Chimie L’extracto-ænomètre et le disque extracto- œnométrique de M. Dujardin. — L'extracto- ænomètre n’est autre qu'un densimètre très sensible, qui, plongé dans un vin, en indique la densité vraie, c'est-à-dire rapportée à l’eau à H4° C. et toujours à la température de l'expérience. Il en existe deux modèles. Le plus grand est repré- senté par la figure 1. C'est un appareil fort précis, qui fournit le coefficient demandé à un dix-millième près, c'est-à-dire avec quatre décimales exactes, au prix de rigoureuses précautions de propreté, par exemple #. Il faut éviter de toucher avec les doigts, non seulement la tige graduée, mais même la carène et l’intérieur de l'éprouvette servant à l'essai. Il convient, avant une série de mesures, d’essuyer d’abord le tout avec un papier buvard imbibé de soude caustique, puis avee un linge net et fin. On maniera donc exclusivement le flotteur par l'extrémité de la tige graduée; on l'intro- duira doucement dans le liquide à essayer et; l'équi- libre une fois établi, on procédera successivement à une légère immersion, puis à une minime émersion pour vérifier l'invariabilité du point d'affleurement. S'il y a de petites oscillations dans les niveaux succes- sifs constatés, on prendra une moyenne. Le vin étant un liquide toujours coloré, parfois presque opaque, les lectures se fontau sommet du ménisque etnon, comme ! Nous avons figuré, grossie, une portion de l'échelle dans la figure 1 bis. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE en alcoométrie, dans le plan horizontal du niveau libre. Les trois premières décimales sont lues directement sur la division émergente la plus basse, et l’on compte ensuite les subdivisions de haut en bas jusqu'au cercle de raccordement. L'emploi d'une loupe s'impose. Suffisant dans bien des cas, le petit modèle ne fournit les dix millièmes que d’une facon approchée, car il ne porte que les subdivisions paires. Il faut observer les mêmes précautions que ci-dessus, plus strictement encore, à cause de la plus grande influence de la capillarité sur un aréomètre plus léger et à tige plate. Ces inconvénients se compensent par une fragilité moindre et par une notable économie a sur le volume du vin à éprouver. Dans tous les cas, il faut apprécier- la température de ce même vin avec un thermomètre bien sensible et bien propre, immédiatement avant ou après, Jamais pendant l'expérience. La densité du vin ainsiobtenue, puis rectifiée (nousre- parlerons tout à l'heure de la cor- rection), n'est in- téressante,en somme, à Con- naître que parce que,combinée avec le degré al- coolique légal, elle donne l’ex- trait sec par litre (extrait à 100°). De là le nom de l'instrument; quant à la défi- nition de l'ex- trait, nous la sup- poseronsconnue. Soit donc un vin à examiner. Nous procéde- ----0,986 1,000- = (210) ire en haut du ménisque : Kig. 1 his. "ONS AV ou : De QE ue ae Portion de l'échelle une mes grossie. simétrique au moyen de l’un ou l’autre des instruments précédents, et noterons la température {° du liquide. L'expérience n'aura consommé que quelques centimètres cubes sacrifiés: à rincer l'éprouvette, et le reste pourra resservir pour les autres ti- trages et nommément, celui de l'al- cool. D'ailleurs, la correction de tem-— pérature, qui permet de ramener la densité observée à la température de- 15° C., est fonction de la richesse em alcool. ; Le poids spécifique, désormais. connu, résulte de l'équilibre de deux influences opposées : celle de lal- cool qui allège et celle de l’extrai® qui alourdit. Il suffit, dès lors, pour obtenir ce der-=, nier élément, de recourir à des tables à double entrée : densité, force alcoolique, dont l'emploi n'offre pas grande difficulté, tout en exigeant une certaine atten=, lion, à cause de la confusion possible des décimales» et de l'ennui d'interpoler. Mais une personne étrangère à la chimie, ou que les calculs effraient, peut se tirer rapidement et facilément d'affaire avec le disque extracto-ænométrique (fig. 2): C'est moins un « disque » qu'une «couronne» mobile autour d’un bouton axial, disposé au centre d’une plaque mélallique carrée dont le revers porte la petite table, de correction des températures. La couronne es& Fig.1.— Extrac- 1o-ænomètre de M. Dujardin. nn. | CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 129 divisée en degrés et fractions de degré alcoolique et | sécrétion comporte, en outre, une flèche ou index peint en rouge; la plaque est munie de deux graduations circulaires et concentriques ; la première, extérieure,en millièmes el dix-millièmes de densité; l'autre, interne, en grammes et cinquièmes de grammes d'extrait sec par litre. Exemple : la densité brute d’un vin à 219,7 C. de tem- pérature est 0,9948 pour 9,3 de poids alcoolique. Il faut, pour ramener la densité à 15° C., ajouter 13 au chiffre des dix-millièmes. Résultat 0,9961. Faisons tourner le disque de manière à amener la flèche rouge vis-à-vis de ce dernier nombre et alors, en face'du trait 9,3 sur le disque, nous lisons intérieurement moins de 19 gr. 4, plus de 19 gr. 2; 19 gr. 3 est le chiffre de l'extrait. La détermination de l'extrait par les procédés clas- siques de laboratoire n'exige, il est vrai, que très peu de vin, mais requiert un matériel dispendieux, encom- brant et prend un temps considérable. La méthode extracto-ænométrique rendra donc de bons services à l'œnologue occasionnel, surtout s'il est pressé, et au Dujard' Dre e : PA 394 995 9393 LV eo Le & 997 ® go 22 & _ çatrait see < > 2 998 S 990 £ 9399 $ DISQUE S 989 EXTRACTO ŒNOMETRIQUE Q DUJARDIN 1000 | 1@ do Ca 2 de 1002 gai ; à pens't® Fig. 2. — Disque extraclo-ænométrique Dujardin. mégociant qui désire identifier ses échantillons ou » 10 —* volt; il convient parfaitement pour la téléphonie? Les barretters ne sont en fait que des bolomètres modifiés : même le fonctionnement du barretter à liquide, que l’on a voulu considérer comme électro- lytique, est à peu près exclusivement basé sur l'effet thermique des ondes; des mesures faites par M. Austin, du Bureau américain des Mesures, le démontrent*; l'effet électrolytique ne joue qu'un rôle tout secondaire. Néanmoins, dans un brevet pris en 1907, M. Fes- senden”* indique de disposer le détecteur de manière à ce que le gaz formé sur l’anode de l'appareil ordi- naire soil entrainé par un courant de liquide dans un rétrécissement où il puisse interrompre le cou- rant électrique local. 2. Détecteurs thermo-électriques. — Les récep- teurs thermo-électriques sont nombreux; ils sont basés sur l’effet de Seebeck et peuvent être consti- tués au moyen de corps quelconques entrant dans l'échelle thermo-électrique, les plus éloignés l’un de l'autre; si tous deux sont métalliques, on les emploie sous forme de fils fins; dans le cas con- traire, le non-métallique est pris en morceau à arêtes vives’. L'élément est, en tout cas, mis en circuit de manière à ce que l'échauffement des ondes soit concentré au contact thermo-électrique. Parmi les détecteurs les plus récents de cette classe, on peut citer ceux de L. W. Austin, G. W.Pic- kard, de la Gesellschaft für drahtlose Telegraphie et de H. H. Dunwoody. 4 P. Brexor : Lumière électrique, 2 janvier 1909. ? S. M. KinixEr : Am. Inst. of Electrical Eugincers, jan- vier 1907. 5 K.E. F. Scaminr : Zlectrician, 21 mars 1908. 4 L. W. Ausnn : Journal of tue Bureau of Standards, vol. 2, no 2. | 5 R. A. FesSENDEN : Electrical Engineering, 1907, p. 638. 5 C. Tissor : Comptes rendus, 6 juillet 1908. 7 W. H. Eccces : Ælectrician, 24 janvier 1908. Le récepteur de L. W. Austin se compose d'un morceau de tellure en biseau, monté sur un fil rigide et pressé par un ressort contre une tige de silicium. Celui de Pickard comprend une pointe de métal plantée verticalement sur une plaque de silicium. Dans le dispositif de la Gesellschaft für drahtlose Tel-graphie, l'élément est chauffé extérieurement à l’état normal, et l'échauffement dû aux ondes modifie simplement l'intensité du courant local. Le thermo-élément est constitué par une plaque de cuivre oxydée dans une flamme et un fil de platine touchant ladite plaque. Dunwoody utilise un cristal de carborundum pris entre deux conducteurs ou attaché à un conduc- teur métallique et plongeant dans une solution con- ductrice. On remarquera qu'en aucun dispositif de ce genre il ne pourrait y avoir amplification d'énergie, puisque c'est l'énergie recue qui doit se transfor- mer en énergie électrique après avoir passé par la forme thermique. Eccles', qui a expérimenté un certain nombre de ces détecteurs (tellure-galène, tellure-molybdène, sélénium-galène), les a trouvés d'une sensibilité comparable à celle des détecteurs électrolytiques. Suivant lui, le fonctionnement ne serait pas uni- quement dû à l'effet Seebeck et, pour la plupart, il y aurait aussi un phénomène de redressement; Brandes et Pierce ont mis ce redressement en évi- dence pour certains cristaux : le phénomène n'a plus alors son siège au contact du cristal avec le métal, mais dans la masse même”; Austin est arrivé aux mêmes conclusions *. 3. ledresseurs. — G. W. Pierce a obtenu plu- sieurs brevets pour des redresseurs à carborundum, à oxyde de titane et à tellure*. 4. Tubes à vide. — Le tube à vide, qu'Elster et Geitel avaient reconnu capable de redresser les courants alternatifs et qui avait été expérimenté par Edison, puis par Fleming, dès 1890, a été repris par ce dernier sous une forme à peine modifiée. De Forest, qui l'appelle audion, l'utilise avec un montage spécial (fig. 5), dans lequel l'instrument, de simple clapet qu'il est dans le montage Fleming, devient véritable relais”. L'artifice qui, selon l'in- venteur, fait toute la valeur du dispositif consiste 1 W. H. Ecczes : Zlectrician, 24 janvier 1908. ? W. H. Eccues : Zlectrician, 24 janvier 1908. 3% L. W. Ausrix : Bulletin of the Bureau of Standards, août 1908. * G. W. Prerce : Electrician, 20 novembre 1907 et 27 mars 1908; Electrical World, 29 avril 1909. 5 Lee DE Forest : A7». Inst. of Electrical Engineers, jan- vier 1907. 130 H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL à insérer une pile dans le circuit du gaz ionisé et du récepteur; l'instrument est formé d'une lampe de 6 volts dont le filament est chauffé par une batterie de 3 accumulateurs; la batterie auxiliaire donne de 6 à 18 volts; elle peut être composée d'élé- ments de pile sèche. La lampe doit être de préférence au tantale, plu- tôt qu'au charbon ou au platine, et mieux encore au tungstène ; le vide ne doit pas y être poussé trop loin, sous peine de faire perdre de la sensibilité au tube. Les détecteurs de ce genre ont, particulièrement sur les redresseurs, le grand avantage d'une robus- tesse complète; on les fabrique aussi industrielle- ment que les lampes à incandescence. Des modifications d'une grande imporlance ont été décrites dans un brevet accordé en février 1908 au D' Lee De Forest à propos de l'appareil en ques- — Fig. 5. — Aécepteur à audion De Forest. — Le gaz raréfié de l'ampou'e D est ionisé par le filament F que porte à l'incandescence le courant de la pile B ; F’, électrode mer- eurielle: B, pile locale actionnant le récepteur ; on règle le tube en déplaçant l'électro-aimant H ou en modifiant l'intensité du courant passant dans l'enroulement de cet électro. tion. Le perfectionnement principal réside” dans l'adjonetion d’un fil de platine replié, placé dans la lampe entre le filament et la plaque d'aluminium; ce fil est connecté au circuit récepteur par linter- médiaire d'un condensateur; il augmente notable- ment la sensibilité. 5. Détecteurs électrolytiques. — L'emploi étendu qui est fait de ce genre de détecteur (adopté par la Telelunken, Vun des systèmes les plus avancés) en démontre suffisamment la valeur pour qu'il ne soit pas nécessaire d'y insister. D'excellents résultats ont particulièrement été obtenus au moyen d'un détecteur électrolytique à pointe de tantale* et l'on a pu, avec cet instrument fig. 6), transmettre la parole à 800 kilomètres envi- ron avec une puissance de 2 kilowatts seulement. Western Electrician, 28 mars 1908. Royal Society, T mai 1908; Ælectrician, 1 LEE DE Fonresr : ? L. H. WALTER : k sept. 1908. Une modification permettant d'employer ledit dé- tecteur avec un galvanomètre est indiquée dans le brevet allemand 190.639 de 1908. Les détecteurs magné- tiques et électrolytiques anciens ont générale- ment l'avantage d'être plus stables et mieux réglables que les nou- veaux. : Fig. 6 — Détecteur au tantale III. — OUTILLAGE. de L. H. Walter. — P, P', tiges de platine, dont tr RER l'une, P, plonge dans le Les appareils auxi- mercure M de l’ampoule et dont l'autre, P', porte deux ou trois appendices de tantale; ces derniers sont repliés, à l'exception de l'un d'eux, qui touche le mercure; on les met en circuit en les dépliant à l'aide d'une baguette intro- duite par l'ouverture 0. liaires, transformateurs, condensateurs, induc- tances, antennes, etc., ont recu moins de per- fectionnements ou de modifications que les os- cillateurs et détecteurs, et je n'ai que peu de chose à mentionner sous ce rapport. Les modifications apportées ont été nécessitées par les grandes puissances mises G en jeu. On s’estsurtout occupé de simpli- fier les liaisons entre les appa- reils; le génie français a réalisé dans cette partie des progrès nota- bles. A. Antenne. — Les dernières an- nées n'ont pas vu de forme nou- velle d'antenne; on continue à em- ployer, selon les circonstances, la Il portée à attein- dre,lesconditions Fig. 1. — Antenne et support d'an- tenne De Forest (montage employé locales, ete., l'an- aux stations de l'Administration tenne filiforme, à anglaise à Hunstanton et à Skeg- | 5 x ness). — G, vergue de support; fil nu ou isolé ê, jan d'attache des fils cons- FETES ' tiltuant l'antenne; 1, isolateurs des (cerf-volant, bal- haubans; O, traverse de rassem- lon) ; l'antenne blement des fils; V, isolateur à haute tension: E, tube d'intro- prismalique(pour petites longueurs d'ondes), avec support élevé; l'antenne verticale duelion. H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL en nappe (stations côtières); l'antenne horizontale en nappe; l'antenne en plan de Blondel, ou en para- pluie. On s’est néanmoins occupé de simplifier le mon- lage des antennes et surlout de leur support, el quelques compagnies ont fait breveter des disposi- tifs de montage spéciaux" (fig. 7). On cherche principalement à réaliser sous une forme peu coûteuse des antennes à grande surface et possédant, sans l'addition d'inductances auxi- liaires, une périodicité se rapprochant autant que possible de celle produite par les oscillateurs; cette tendance est bien montrée par l'antenne en para- pluie, qui est celle de la Gesellschalt für drahtlose Telegraphie. 2. Condensateurs. — Les bouteilles de Leyde et les tubes de Moscicki font place aux condensateurs à plaques. On évite dans ceux-ci les diélectriques solides et l’on revient ainsi au condensateur d’Ae- pinus (Marconi); au besoin, de l’air comprimé ou un gaz inerte comprimé est insufflé entre les pla- ques (Fleming, Fessenden); on augmente de cette facon la résistance diélectrique et on réduit les di- mensions de l'appareil. Pletts à fait breveter un condensateur à plaques réglable qui, avec les mêmes dimensions, a une capacilé double du condensateur ordinaire”. Cet appareil est formé de plaques semi-circu- laires dont les paires sont fixes, et les impaires mobiles, étant montées sur un axe isolant qui per- met de les faire se déplacer vis-à-vis des premières et parallèlement à celles-ci. 3. Inductance. — Une bobine de self-induction réglable curieuse à été imaginée par M. Tissot : elle consiste très simplement en une bobine enveloppée par un cylindre métallique, fendu longitudinale- ment, et dont l'ouverture peut être plus ou moins obturée au moyen d'une pièce mobile actionnée par un levier dont la position indique la valeur de l’in- ductance. 4. Transformateur. — Les bobines d'induetion, alimentées en courant continu, ont fait place aux transformateurs recevant du courant, alternatif ou continu interrompu, de dynamos industrielles. La construction de ces transformateurs a surtout été étudiée par Seill et Blondel et par Berthenod, qui à établi les formules les plus complètes pour leur calcul. M. Fessenden emploie’ un transformateur ré- W. H. Eccues : Ælectrician, 24 janvier 1908. W. H. Ecczes : Zlectrician, 24 janvier 190$. Am. Inst. of Electrical Engineers, 1 # R. A. FESSENDEN : juillet 1908. glable dans lequel les deux enroulements peuvent être débobinés du noyau de travail pour passer sur un noyau métallique qui annule l'effet des spires qu'on y fail passer. L'interrupteur éventuellement nécessaire est de préférence constilué par un appareil de Klingelfluss, noyé dans un mélange de pétrole et de mercure amalgamant les surfaces, et assurant entre les frol- teurs et les lames du tambour rotatif un contact parfait. Ce dispositif est employé dans les stations françaises de Sainte-Marie-de-la-Mer et d'Alger’. Fessenden et Majorana ont essayé un interrupteur à billes, avant d'adopter l’are soufflé. 5. Transmetteur. — En pratique, le travail se fait exclusivement par le système Morse; le manipula- Fig. 8. — Transmission par clef Morse (dans le système De lorest). — M, alternateur; J', bouteilles de Leyde absor- bant les oscillations du circuit de transmission: R, bo- bine de résistance réglable; T, clef; PS, transformateur: J, bouteilles de Leyde; D, éclateur; |', bobine d'induc- tance; CG, curseurs; G, éclateur auxiliaire; À, antenne. teur ordinaire de la télégraphie sans fil permet d'at- teindre, dans le travail par étincelles, une vitesse de transmission de quatorze mots environ par mi- nute; dans les procédés à ondes entrelenues, on peut travailler avec plus de célérité. En tout cas, on le sait, le manipulateur, placé dans le circuit primaire, que celui-ci soit à bobine ou à alternateur (fig. 8), doit supporter de grands wattages et être d'une construction appropriée. D'intéressantesexpériences de transmission auto- matique par Wheatstone modifié ont été faites par Marconi, par les ingénieurs du Gouvernement anglais, par Poulsen et par Fessenden. 1 P. Brexot : Lumière électrique, 2 janvier 1909. En 1905, Marconi avait indiqué! une vitesse de travail de 100 mots par minute; mais les ingénieurs du British Post Office, qui reprirent peu après ses essais, n'arrivèrent, entre deux postes distants de 25 kilométresapproximativement, qu’à 70 mots par minute; ils ne purent aller au delà; à 90 mots, les signaux étaient indéchiffrables?. M. Poulsen, avec d’autresenregistreurs, d'ailleurs, estarrivé plus récemment à 150 mots par minute”, et M. Fessenden à déclaré pouvoir travailler, au moyen d'un Wheatstone qu'il possède, à 250 mots par minute; il compte aller sous peu à 500. 6. Récepteurs. — Pour la grande distance, la 1 5 réception se fait couramment à l’ouie, au moyen d'un écouteur télé- phonique, les appa- reils très spéciaux et sensibles que l'on em- ploie alors ne permet- tant pas l’enregistre- ment: ilest probable, toutefois, que cet in- convénient disparai- tra avec les nouveaux dispositifs détecteurs qui ont récemment vu le jour. fe L'écouteurest bran- EF = | ché sur les bornes de F l'électrolytique ou du ANY M détecteur, avec une En pile dont le £ourant Fig. 9. — Système récepteur De Peut être réglé par Forest à antenne double, avec électrolytique et écouteur, — I, inductances réglables; E, détecteur électrolytique; K,, condensateur; V, batterie pri- maire; F, potentiomètre; B, téléphone; A, antenne; G, éclateur auxiliaire. un rhéostat ; cette disposition est à peu près générale; elle à étéemployée dèsl'ori- gine, au surplus, no- tamment par M. De Forest (fig. 9) à la station de Cullercoats. Deux méthodes ont principalement été indiquées pour permettre l'enregistrement : celle dela Gesell schaft für drahtlose Telegraphie et celle de l'A mal- gamated Radiotelegraph Company. Dans la pre- mière, le détecteur électrolytique est combiné avec un relais à bobine mobile; dans la seconde, on uti- lise un galvanomètre à corde fonctionnant comme relais microphonique*. Les expériences de Marconi et du British Post Office sur la transmission automatique avaient été G. Marcont : Royal Institution, Aer mars 1905. Electrical Review, Londres, 19 juillet 4907. N. MAskELyNE : London Institution, 45 avril 1908, R. A. FESSENDEN : Am. Inst. of Elect. Eng., juillet 1908. 5 N, MAskELynE : London Institution, 15 avril 1908. » = à » H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL faites en employant comme enregistreur un siphon recorder. Poulsen a obtenu la vitesse indiquée plus haut à l’aide de l'enregistrement photographique proposé par Rieder”. Ce système comporte les appareils suivants : un galvanomètre d'Einthoven, une chambre noire, avec objectif, un mécanisme d’horlogerie entraînant la pellicule photographique et les appareils de déve- loppement et de fixation photographiques voulus. Le galvanomètire d’Einthoven * est formé d’un fil métallique (or, argent, platine, quartzplatiné) tendu dans un champ puissant produit par defortsaimants permanents ou par des électro-aimants; le fil est parcouru par le courant électrique dont les varia- tions sont à enregistrer; il présente à une certaine hauteur un épaississement aplati dont l'ombre por- tée — il y a une lampe électrique derrière le fil, à la même hauteur — est photographiée sur la pelli- cule. La bande, qui, dans les appareils les plus récents, sort del'instrument, développéeet fixée six secondes après la réception des signaux, montre les images du fil en blanc sur fond noir. Cet appareil est d’une sensibilité extrême, supé- rieure même, parail-il, au Léléphone, et il a l'avan- tage qu'avec un peu de pratique un opérateur intel- ligent parvient à distinguer les traces dues aux perturbations atmosphériques de celles représen- tant les signaux ; quoique délicat en apparence, il n'est nullement fragile. Fessenden a proposé‘ l'emploi d'un relais à con- tact microphonique formé de deux bobines soli- daires, montées en opposition, et pivotant dans l’entrefer d'un électro-aimant, les enroulements étant parcourus par le courant contrôlé par le détec- teur. Dans le même ordre d'idées, Gardner a préconisé l'emploi d'un télémicrophone accordé“; d’après une communication de M. Péri, chef du Service de la télégraphie militaire en Indo-Chine, à l’Ælectricien, cette disposition serait employée, avec l’électroly- tique, à la station d'Hanoï*; on a aussi mis en avant l’idée d'amplifier les ondes recues au moyen d’une dynamo de construction appropriée, soit après les avoir redressées®, soit directement”; celte dernière disposition semble impraticable; 1 N. MaskeLywe : London Institution, 15 avril 1908. # In. : /d., et Engineering, 4 novembre 1904. 8 R. A. FessenDEN : Am. Inst. of Electrical Engineers, juillet 1908. # W. H. Eccces : ÆZlectrician, 24 janvier 1908. 5 G. Péri : Zlectricien, 15 mai 1909. 9 Henry : Bulletin de la Soc. belge d'Electriciens, oc- tobre 1908. 7 H, A. Hazz : Ælectrical Review, Londres, 29 novembre 1907. H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPIIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL 13) aucune des trois n'a été expérimentée, d'ailleurs, que je sache ; à signaler toutefois qu'Alexanderson, en Amérique, vient d'obtenir un brevet pour l'am- plification des courants faibles (téléphoniques) au moyen d'un allernaleur*. 7. Téléphonie. — Dans la téléphonie sans fil, les appareilsne diffèrent pas, en principe, de ceux que nous venons de voir, sauf l'adjonction d'un appa- reilmicrophonique pour moduler les ondes de trans- mission. La plus grande difficulté (la seule, peut- être, une fois les ondes non amorties adoptées) est de faire supporter au microphone les quantités d'énergie considérables qui doivent entrer en jeu. M.Majorana a obtenu de bons résultats” au moyen du microphoneà écoulement dontilestlinventeur*. M. Poulsen emploie un microphone ordinaire; pour les grandes distances, il en monte au besoin plu- sieurs sur une même embouchure; dans les expé- riences qu'il fit en- tre Syngby et Ber- lin,six microphones constituaient le transmetteur”. Je 0200000 00000 à 2E ÉÉ 3Ë A L E Fessenden fait usage d'un micro- phone à électrodes refroidies par une circulation d’eau et du lype à granules ; Fig. 10. — Système transmetteur Vreeland pour la téléphonie sans fil. les électrodes sont en platine-iridium ; elles sont tenues à distance par un anneau de sléatite; l'appareil est employé directement pour agir sur les circuits os- cillateurs, ou bien il produit les variations voulues d'ondes, grâce à l'intervention d'un relais spécia- lement construit pour cette application. Le micro- phone peut être monté de diverses facons; il peut être inséré dans le système primaire, par exemple, ou être intercalé sur la liaison entre l'antenne et la terre; Vreeland, dans son procédé à tube Cooper- Hewitt, le monte dans un circuit accouplé induc- tivement à l'antenne (fig. 10); c’est préférablement l'un des deux derniers montages que l’on emploie habituellement; M. Fessenden a également fait des essais en agissant sur l’inducteur de l'alternateur; ce procédé, qui paraît devoir être celui de l'avenir, serait bon s’il ne demandait pas que l'alternateur füt exceplionnellement soigné * ;: le mème expérimen- 1 Electrical Review, New-York, 25 novembre 1908. ? CarLeTrI : Ælectricien, 24 avril 1909; Henry : /ndustrie électrique, 25 avril 1909. # Journal télegraphique, 25 octobre 1907. #N. MAskEeLyNe : London Instilution, 15 avril 1908. 5 R. A. FESSENDEN : Am. Inst. of Electrical Engineers, juillet 1908. laleur à pu relayer avec succès, en recourant à un relais approprié, les courants téléphoniques d'un cireuil ordinaire à un poste de télécommunication sans fil (expériences failes entre Brant-Rock et la Jamaïque en 1906). Le téléphone utilisé semble être’très générale- ment un écouleur ordinaire {à enroulement appro- prié, loutefois, comme pour la télégraphie sans lil, d’ailleurs\; seul M. Fessenden a indiqué l'usage de récepteurs téléphoniques spéciaux * : celui de Thomson (où les déplacements de la membrane sont produits par des courants circulant dans une bobine fixée à la membrane) et un appareil ampli- ficateur (un petit disque de fer est placé à proxi- mité d’une tuyère par laquelle est envoyé un cou- rant d'air à haute pression; les déplacements dudit disque, produits par les courants reçus, réagissent sur l’ecoulement du gaz, qui, à son tour, actionne une membrane) dont le principe paraît emprunté au relais Léléphonique imaginé en 1897 par Erdman *. IV. — MÉTIODES DE TRAVAIL. 1. Formalion des signaux. — Pour lirer le meil- leur parti possible du système à ondes non amorties, c'est-à-dire pour pouvoir bénéficier de tout l'avan- tage que procure, au point de vue de la réduction de l'énergie nécessaire, la similitude complète des ondes successives composant les émissions, il est habituellement bon que lesdites oscillations soient produites d'une facon permanente dans le travail, les signaux élant obtenus en provoquant, par la variation des constantes du système de transmis- sion, la cessation de l'accord entre le poste de départ et le poste d'arrivée. C'est ce que font, entre autres, MM. Poulsen et Pedersen. Le circuit oscillateur est, par exemple, accouplé à l'antenne au moyen d’un certain nombre de tours de fil, et la clef morse, court-circuitant, quand elle est abaissée, quelques-unes des spires, supprime momentanément la syntonisation *. Ce procédé est d’un usage assez courant, bien qu'il présente des inconvénients”, parmi lesquels l'instabilité de l’are et la détérioration rapide des surfaces de contact sont les plus graves. Pour y remédier, M. Poulsen indique © de modifier l'intensité des ondes en agissant sur le jet de gaz qu'il fait arriver entre les électrodes, et cela de l’une des facons suivantes : 4° à la main (transmis- 1 American Telephone Journal, 26 janvier 1907 et 2 fé- vrier 1907. 3% R. A. FESSENDEN peers, juillet 1908. 3 K. B. MILLER : 4 N. ] LV 5 W. LS 5 V. PouLSEn : : American Inst. of Elcelrical Engi- American telephone practice, 1899, : London Institution, 15 avril 4908. : Llectrician, 2% janvier 1908. Brevet anglais 28.602 de 1906. H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL sion ordinaire); 2° à l’aide d'une bande perforée (transmission automatique); 3° au moyen d'une capsule manométrique (téléphonie). I] n’a pas été publié de compte rendu d'expériences faites avec ce procédé, qui paraît cependant exceptionnellement ingénieux et intéressant et semble n'avoir d'équiva- lent, au point de vue de la facilité de la transmis- sion, tant télégraphique que téléphonique, que # dans la méthode qui con- sisterait, avec l'alterna- = teur de Fessenden, à D former les signaux en — agissant sur l'inducteur, = ; b selon ce qui à été dit. le F= Comme M. Poulsen, E F M. Fessenden travaille, en télégraphie, en pro- duisant des ondes de fa- con continue et en rom- pant l'accord des circuits pour la transmission des signaux. Trèsintéressantesaus- si sont les dispositions employées par les deux der- niers expérimentateurs, M. Poulsen et M. Fessen- den, respectivement dans la méthode du tikker et dans la méthode hétérodyne. La méthode du {ikker *, imaginée par M. Pedersen (ig. 11) et perfectionnée par M. Poulsen ‘fig. 12), consiste à intercaler dans le circuit récepteur un contact intermittent, un vibrateur, de telle facon que, dans une position de cet organe, le cireuil oscillant est fermé directement sur le dispositif, tandis que, dans l’autre, il décharge son énergie sur le récepteur; le tikker est simplement un vibra- Fig. 11. — Récepleur à tikker de Pedersen; système ori- ginal, employé avec cohe- reur. — a-d, antenne; b, condensateur; €, tikker; e, prise de terre; f, cohé- reur. Fig. 12. — Récepteur à tikker de Poulsen; système perfec- tionné, employé sans détecteur. — a-b, jigger: c-f, condensateur, teur de Neef, enfermé dans une boîte protectrice, plate, en fer; le tikker permet de supprimer le dé- tecteur; il n'est évidemment utilisable qu'en télé- graphie; la téléphonie exige indispensablement un récepteur continu. L'emploi d’un dispositif de cette nature est indis- pensable dans les méthodes à ondes entretenues 1 W. NH. Eccces : Zlectrician, 24 janvier 1908. pour que les signaux soient perceptibles dans le téléphone; à défaut d'organes de ce genre, la mem- brane ne donnerait qu'un « clac » ne permettant pas la traduction. Dans le système Marconi, les vibrations sont assurées par les irrégularités dues aux pointes du disque tournant. Dans le procédé Léférodyne', un champ local, dû à une source alternative de fréquence bien con- stante, interfère avec le champ produit par les ondes recues de manière à ce que des battements perceptibles se produisent. 2. Couplage des circuits. — I] n'y a pas de nou- veauté à signaler sous ce rapport. A la réception, le couplage inductif, très lâche, qui permet seul de se mettre à l'abri des influences perturbatrices, est couramment employé dans tous les procédés qui ne craignent pas un rendement faible des appareils récepteurs”. Au repos, le couplage est toutefois rendu conductif, afin d'assurer la réception régulière et certaine des signaux d'appel. Par une disposition de circuits très ingénieuse, et rappelant le système de combinaison de circuit d'Edison, M. Fessenden est parvenu, suivant ce qu'il rapporte, à faire en sorte que l'on puisse simultanément converser et écouter par téléphone, sans avoir à manœuvrer de commutateur, c'est- à-dire dans des conditions absolument semblables à celles où se fait le travail par fils. 3. Communications multiples. — Le même pro- cédé permet d'utiliser la même antenne à la trans- mission et à la réception télégraphique, et par conséquent d'établir une communication duplex. M. Fessenden déclare que ce mode de travail est plus stable en télégraphie sans fil que dans la corres- pondance par fils ordinaire, parce qu'il est beau- coup plus aisé de maintenir la balance entre l'antenne réelle et l'antenne artificielle qu'entre des circuits télégraphiques, les lignes souffrant de varia- tions constantes qui ne se présentent pas pour l'antenne *. La facilité d'accord réalisable avec les systèmes à ondes non amorties permet, au surplus, d'escompter que l’on arrivera assez aisément à établir des com- munications multiples ou, du moins, que ce pro- blème ne donnera pas lieu à des difficultés plus grandes que celles qui existent pour la solution de la téléphonie multiple. On peut dire, dès à présent, 1 R. A. FESSENDEN : Am. Inst. of Electrical Engineërs, juillet 1908. 2 N. MAskELYyNE : London Institution, 15 avril 1908. # In : Zd. — R. A. FESSENDEN : Am. Inst. of Electrical En- gineers, juillet 1908. 4 R: A. FESSENDEN : juillet 1908. Am. Inst. of Electrical Engineers, H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL 7 «ue l'accord est réalisable, sans faiblesse, à +5 °/, près", les correspondances émises simultanément étant supposées échangées entre les mêmes postes. Rappelons, toutefois, que le point délicat est de garantir l'indépendance de chaque poste vis-à-vis «des stations de plus ou moins grande puissance situées à proximilé. D'après une communication de M. E. R. Barker”, M. Poulsen serait parvenu à faire du duplex entre des postes éloignés de 2.000 kilomètres. %. Ondes dirigées. — Indépendamment des études théoriques de Zenneck”, les seules expériences réellement notables faites dans cet voie sont celles poursuivies en France depuis dix-huit mois par MM. Bellini et Tosi et qui ont récemment fait l'objet de communications à plusieurs sociétés savantes et notamment à l'Académie des Sciences. Le procédé de MM. Bellini et Tosi est basé sur des principes analogues à ceux énoncés en 1898 par Blondel et auxquels celui-ci donna un commence- ment de démonstration expérimentale en 1898 et en 1902. L Il comporte l'emploi, à chaque poste, de deux antennes triangulaires, ouvertes au sommet et placées perpendiculairement l’une à l’autre; cette «lisposition à pour effet de faire interférer les ondes «le telle manière qu'il y a neutralisation desdites ondes dans une direction et renforcement dans la A Fig. 13. — Système transmetteur employé par MM. Bellini el Tosi. — Deux enroulements n', n°, placés perpendicu- lairement l'un à l'autre, sont insérés chacun dans un circuit oscillateur; un troisième enroulement, », est en relation avec le système excitateur; il peut étre déplacé É par rapport aux deux premiers. direction opposée; le phénomène est semblable à celui de même nature en acoustique. La direction dans l’espace du faisceau d'orienta- tion peut être modifiée d’une facon très simple et 1 N. MaskELYNE : London Institution, 15 avril 1908. — LO0GE : British Association, 5 août 1907. E. R. Barker : Ælectrical Review, Londres, 10 juillet 1908. — Ælectrician, 26 juin 1908. * J. Zexeck : Physikalische Zeitschrift, \5 janvier 1908. * Bezunt et Tosr : Comptes rendus, 11 mai 1908. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. Sans qu'on ait à déplacer les plans des antennes. Celles-ci sont excitées chacune, grâce à une bobine dont elles sont munies au milieu de leur côté inférieur; les deux bobines, qui sont dans des plans perpendiculaires, comme les antennes, Microwatts Fig. 14. — Diagramme de la distribution de l'énergie rayonnee par un système transmetteur de MM. Bellini et Tosi. — Mesures effectuées au moyen du thermo-galva- nomètre de Duddell. enveloppent une bobine inductrice commune, mobile, qui fait partie du circuit oscillant; la direc- tion du faisceau varie avec la position de cette bobine mobile par rapport aux bobines fixes induites (fig. 13). La zone influencée par un tel dispositif se com- pose de deux parties symétriques par rapport au transmetteur et affectant la forme d'une ellipse aplatie (fig. 14); l'angle d'ouverture du faisceau émanant des deux cadres ne dépasserait pas, à 80 kilomètres de distance, une dizaine de degrés; cela est remarquable. V. — RÉSULTATS. Je terminerai ici ce court apercu en citant quel- ques-uns des records qui ont été signalés en ces derniers temps. En télégraphie, les résultats les plusremarquables sont ceux qu'ont indiqués : M. Lodge, qui travaille couramment entre Burma et Adaman, à 480 kilomètres de distance, avec une puissance totale de moins de 4 cheval (système Lodge-Muirhead, sans prise de terre, spé- cialement étudié pour la synlonisation); M. Fessenden, qui a pu correspondre entre | Brant Rock et Cap Saint-Roc, à 4.800 kilomètres de | distance, le jour aussi bien que la nuit (fréquence . de 80.000 périodes par seconde); WE 742 M. Marconi, dont le service fonctionne dans de bonnes conditions entre Glace Bay et Clifden‘ (fré- quence : 70.000; les signaux sont couramment recus à Brant Rock* et à la Tour Eiffel); M. Poulsen, qui, avec une antenne suspendue à un mât de 28 mètres, a recu de la station de Culler- coais, disposant d’une puissance de à kilowatts, à 2.200 kilomètres”. Le service transatlantique Marconi n’est pas en- core absolument régulier ; mais on peut citer comme modèle celui qu'assure le poste de la Tour Eiffel. Celle-ci a communiqué sans défaillance avec les stations côtières du Maroc; le croiseur Xléber a aussi pu correspondre dans la Méditerranée, avec cette station, au moyen d'une puissance de à kilo- Walts *. Dans la téléphonie : M. Fessenden avait pu échanger, en 1906, des communications entre Brant Rock et un schooner à 17,5 kilomètres; peu après, il a établi une com- munication entre Brant Rock et Cap Saint-Roc; d'après lui, la fréquence des ondes servant à la transmission doit être d'au moins 25.000; Le système Poulsen a donné complète salisfac- tion entre Syngby (Copenhague) et Esbjerg (Jut- land), dont la distance est de 280 kilomètres, avec 6 kilowatts*, et même entre Syngby et Berlin, à 430 kilomètres® ; le système De Forest, qui se con- fond avec le Poulsen (et le Stone Stone), a été adopté dès 1907 par une trentaine de navires américains”, et l’on sait les résultats qu'il a tout 1 Electrical Review, New-York, 9 mai 1908. — Jd., Lon- dres, 6 mars 1908. 2 R. A. FESSENDEN : juillet 1908. # N. MaskELYNE : London Institution, 15 avril 1908. # P. Baenor : Lumière électrique, 2 janvier 1909. 5 N. MAskeLyne : London Institution, 45 avril 1908. $ Electrician, 14 août 1908. 7 Id., 17 janvier 1908. Am. Inst. of Electrical Engineers, H. MARCHAND — LA TÉLÉGRAPHIE ET LA TÉLÉPHONIE SANS FIL récemment donnés en France; la marine des Etats-Unis vient au surplus de décider d'étendre l'usage de la téléphonie sans fil"; Le procédé Telefunken a marché convenable- ment entre Nauen et Berlin‘; Des expériences très réussies ont été faites par MM. Colin et Jeance entre Paris et Melun; Le système Clark a fonctionné à 40 kilomètres; M. Majorana, avec son microphone spécial et un oscillateur à arc de Poulsen, à atteint successive- ment 60, 120, 200 et même 500 kilomètres. Je pourrais ajouter, aux indications finales ci-dessus, la mention des expériences de transmis- sion sans fil de photographies de Berjonneau- Knudsen et Rieder; mais cette partie de la ques- lion m'a paru devoir être provisoirement réservée. Ce qui précède permet, d’ailleurs, de se rendre compte de l’état actuel de la télégraphie sans fil; on en concluera, avec raison, que les étapes fran- chies en treize années (depuis 1895) sont énormes. Ce n'est point dire, toutefois, que le problème soit commercialement résolu d’une facon com- plète; la question des interférences et celle du secret des correspondances restent pendantes; des. constatations diverses ont dernièrement fait voir que les signaux des grandes stations sont facile- ment interceplés, même sans appareil spécial”, même sans antenne°. Mais.., il faut un temps pour chaque chose, et chaque chose aura son temps, n’en doutons point. H. Marchand, Électricien-chimiste. 1 Electriral Review, New-York, 28 nov. 1908. ® Electricien, 14 sept. 1907; Ælectrical Review, Londres,. 6 déc. 1907. 4 Western Electrician, 4 juillet 1908. # CarLerTI : Electricien, 24 avril 1909. 5 Ælectrician, 3 avril 1908. 5 1d.. 25 sept. 1908. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE REVUE ANNUELLE DEUXIÈME PARTIE : CIRCULATION, RESPIRATION, $ -1 es Lee) DE PHYSIOLOGIE 12 STÈMES NERVEUX ET MUSCULAIRE Dans un premier article, nous avons résumé les récents travaux de Physiologie générale; nous allons maintenant aborder les travaux plus spéciaux qui se rapportent à la circulation, à la respiration et aux systèmes nerveux et musculaire. I. — CIRCULATION. 1. Zndividualité de lélectrocardiogramme. — Pendant de longues années, la boussole de Wiede- mann, sous la forme que lui avait donnée du Bois- Reymond, est restée l'instrument classique pour les recherches d’électrophysiologie. Puis l'outillage créé par le célèbre physiologiste berlinois a été peu à peu délaissé et remplacé par l'emploi de l’électro- mètre capillaire de Lippmann. Iei la masse mise en mouvement par le courant électrique est si petite et ses déplacements si faibles, que les effets de l'inertie, si gènants dans la boussole de Wiede- mann, ne se font pour ainsi dire pas sentir. Les excursions du ménisque mercuriel suivent d’une facon très satisfaisante les variations les plus rapides et les plus subtiles du courant électrique. En photographiant ces excursions sur un cylindre enregistreur recouvert de papier sensible ou sur une plaque photographique en mouvement, on peut recueillir une image fidèle de toutes les phases des courants d'action des muscles, des nerfs, etc. Depuis quelque temps, le galvanomètre à corde d'Einthoven fait une concurrence souvent victo- rieuse à l'électromètre pour les recherches d'élec- trophysiologie. Ici l'on enregistre photographique- ment les déviations d'un fil de quartz argenté tra- versé par le courant et tendu entre les pôles d’un puissant électro-aimant. L'appareil d'Einthoven fournirait des tracés encore plus fidèles que ceux de l’électromètre. L'année dernière, j'ai signalé ici plusieurs appli- cations heureuses de l'électromètre à l'étude de l'électrocardiogramme et à celle des bruits du cœur. Einthoven‘ et ses élèves ont enregistré au Labo- ratoire de Leyde les phénomènes électriques qui accompagnent la pulsation cardiaque chez un grand nombre de personnes. La technique est assez simple. On sait que le cœur battant dans notre + © * Onderzoek. Leiden (2 R), t. NI, p. 106. corps développe à chaque pulsation un courant électrique qui est conduit vers toutes les parties de notre organisme, par exemple vers nos mains et nos pieds. Le sujet est commodément assis sur une chaise et plonge chaque main dans un grand vase rempli d'un liquide conducteur, solution de sel marin par exemple. Ou bien le sujet plonge une main dans un vase et le pied du côté opposé dans l’autre vase. Il suffit de raccorder les deux vases conducteurs avec le galvanomètre pour observer un écart de la corde à chaque battement du cœur. La courbe fournie par cet écart est assez compliquée. Einthoven distingue dans l’électro- cardiogramme au moins cinq inflexions, qu'il désigne par les lettres P, Q, R, S et T. Le premier sommet P correspond seul à la contraction des oreillettes, tandis que Q, R, Set T représentent le mouvement électrique produit par la systole des ventricules. Einthoven à constaté que les inflexions de la courbe présentent, d'un sujet à l’autre, des difré- rences individuelles notables, quant à leur forme et leur hauteur. Fait curieux, le tracé qui en ré- sulte a une allure spéciale et personnelle pour chaque sujet examiné. L'électrocardiogramme est quelque chose de presque aussi caractéristique pour chaque individu que sa signature ou ses empreintes digitales : il pourrait, au besoin, servir à identifier la personne qui l'a fourni, Ce n'est pas la première fois que l'on signale l'existence d’une caractéristique individuelle dans un phénomène physiologique. On sait depuis longtemps que les courbes de fatigue, telles que les fournit l'ergo- graphe de Mosso, présentent la même particularité : ici aussi la personnalité du sujet en expérience imprime à la courbe une allure caractéristique, 2. Enregistrement des bruits du cœur. — Les physiologistes et les cliniciens s'efforcent, depuis des années, de perfectionner les procédés qui per- mettent l'étude objective des bruits du cœur par leur enregistrement automatique. J'ai signalé, dans ma revue de l'an dernier, un mode d'utilisation du galvanomètre à corde imaginé par Einthoven pour l'inscription des bruits du cœur. Marbe” a décrit presque en même temps un pro- EE , ! Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXX, p. 205. cédé d'enregistrement des bruits du cœur basé sur un principe différent, Une capsule spéciale, pré- sentant quelque analogie avec celle du cardiographe de Marey, est appliquée à la surface extérieure du thorax, du côté gauche du sternum, au niveau du troisième espace intercostal. La capsule est inter- calée sur le trajet de la conduite de gaz qui ali- mente une flamme manométrique de Kônig. À chaque pulsation du cœur, les vibrations de la paroi thoracique correspondant aux bruits du cœur agissent, par l'intermédiaire de la membrane en caoutchouc de la capsule, sur le débit du gaz qui alimente la flamme. Celle-ci exécute done, à chacun des bruits du cœur, une série d'oscillalions ou de vibrations. Marbe obtient l'enregistrement direct des oscillations de la flamme sans avoir besoin de recourir à la photographie. À cet effet, la pointe de la flamme est légèrement écrasée contre une bande de papier mise en mouvement par l'appareil enregistreur. Le noir de la flamme qui se dépose laisse sur la bande une trace rectiligne et uniforme, tant que la flamme reste immobile. Dès que la flamme vibre, ses vibrations s'inscrivent pareillement sous forme de trace ondulée, dont chaque bec ou sommet correspond à une vibration. L'appareil peut servir à enregistrer fidèlement les vibrations d'un diapason, celles de la membrane du téléphone, etc. O. Weiss et Joachim’ ont étudié les sons de faible intensité, notamment les bruits du cœur, en transmettant leurs vibrations à une lame mince constituée par de l'eau de savon. Les excursions de la lamelle savonneuse sont enregistrées par la pho- tographie. 0. Weiss a donné le nom de phonoscope à un appareil basé sur ce principe. Les bruits du cœur ne correspondent pas à des vi- brations rigoureusement isochrones. Le nombre de vibrations varie de 66 à 166 à la seconde. L'inter- valle qui sépare le début de deux bruits corres- pond à 0"285. Le début de la pulsation carotidienne retarde de 0"067 à 0"077 sur le premier bruit. La position des deux bruits ne serait pas constante par rapport aux inflexions du cardiogramme. 1. Gerhartz vient de décrire également* un pro- cédé d'enregistrement photographique des vibra- tions d’une membrane élastique actionnée par les bruits du cœur. 3. Nature de la pulsation cardiaque. — Stassen, Schmidt-Nielsen, etc., ont montré dans mon labo- raloire que, si l'on provoque chez le chien une pul- sation supplémentaire, ou extrasystole, par excita- tion directe du cœur pendant l'arrêt dû à l’excita- a 1 Arch. f. d, ges. Physiol., 1. GXXNI. Leits. 1. exp. Path. u. Ther., t. V, p: 105. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE tion du pneumogastrique, la pulsation débute à l'endroit excité et se propage de là à la facon d'une onde aux autres parties du cœur. En portant l'excitation artificielle à la pointe d'un ventricule, on obtiendra une pulsation à rythme renversé, la systole des oreillettes faisant suite à celle des ven- tricules au lieu de la précéder. Ces faits ne cadrent pas bien avec la théorie neurogène de la pulsation, qui suppose que la pulsation du cœur est due à l'excitation d'un centre nerveux automoteur et coordinateur du cœur. Dans cette théorie, l’extra- systole, provoquée par excitation de la surface du cœur, doit être assimilée à une espèce de réflexe ayant pour centre les ganglions automoteurs, et pour point de départ l'excitation de nerfs sensibles de la surface du cœur. On ne voit pas pourquoi la contraction réflexe du myocarde débute toujours à l'endroit excité; tandis que, si l’on se place au point de vue myogène, qui assimile la pulsation cardiaque à une onde de contraction, cette locali- sation du point de départ de la pulsation est toute indiquée. Stassen et Schmidt-Nielsen étaient arrivés aux résultats précédents en enregistrant les phéno- mènes mécaniques dont les deux étages du cœur sont le siège au cours de la pulsation provoquée. Ces conclusions ont été confirmées par les études de Nicolai et de Rehfisch. Ces expérimentateurs ont pris l’électrocardiogramme comme indice du sens dans lequel se propage l'excitation dans le cœur. Ils ont constaté que l'électrocardiogramme présente une allure inverse suivant qu'on provoque l'extrasystole par excitation du ventricule droit ou par celle du ventricule gauche. Ici aussi le sens de la propagation de l'excitation dans le myocarde dépend de l'endroit excité, comme le suppose la théorie myogène. 4. Période réfractaire de la pulsation cardiaque. — On sait en quoi consiste la période réfractaire ou inexcitabilité périodique du cœur. Une excitation atteignant le cœur pendant la durée d'une contrac- tion, ou systole, reste sans effet, le cœur étant à ce moment inexcitable et réfractaire aux stimulants. Carlson ‘ a cherché à déterminer la part qui revient aux éléments lant nerveux que musculaires dans la production du phénomène de la période réfrae- laire. Il s'est adressé au cœur de Limulus, où les ganglions cardiaques sont analomiquement sépa- rables des muscles. L'inexcilabilité temporaire pen- dant la durée d'une pulsalion spontanée ou pro- voquée serait, d'après lui, une propriété apparte- nant à la fois aux ganglions et aux muscles du cœur de Limulus. Le dernier point, surtout, paraît 1 Amer. Journ, of Physiol., L. XVIII, p. 71. socio. LÉON FREDERICQ — REVUE bien établi par les expériences d'excitations artifi- cielles du muscle cardiaque isolé des éléments nerveux. Un conservé vivant pendant six jours, montre jusqu'à la fin la période réfractaire. Or, on peut vraisemblablement admettre que les éléments nerveux meurent dans ces conditions avant les éléments musculaires. Dans les derniers stades de l'expérience, la période réfractaire doit donc être mise sur le compte du musele cardiaque même. cœur de tortue, isolé et 5. Action anticoagulante de l'hirudine. — Le phy- siologiste est obligé, dans un grand nombre d’ex- périences,de pratiquer des ouvertures dans les vais- seaux et de mettre les parties métalliques ou autres des instruments d'étude en contact direct avec le sang qui y est contenu, d’où le danger de coagula- tions et de aépôts de fibrine à la surface de ces corps étrangers. Lorsque les appareils sont greffés latéralement sur un vaisseau, en cul-de-sac si l'on peut dire, comme c’est le cas pour les manomètres enregistreurs, il n'y a souvent que demi-mal. On remplit les parties creuses de l'appareil au moyen d'une solution anticoagulante (carbonate de soude par exemple), qui S'intercale entre le sang et le mercure ou les parties métalliques. Mais, lorsque l'appareil doit être intercalé sur le trajet d'un vais- seau el traversé lui-même par le courant sanguin, comme c'est le cas dans les compteurs destinés à mesurer le débit du sang, il devient nécessaire de suspendre la coagulation dans la masse entière du sang de l'animal. Jusque dans ces derniers temps, le procédé le plus employé consislait à injecter au préalable, à l'animal destiné à l'expérience, une dose appropriée de propeptone (20 à 30 centigrammes de propeptone Grubler par kilog d'animal). Dans ces conditions, l’incoagulabilité du sang se maintient pendant plusieurs heures. Malheureusement, la propeptone Grubler est un véritable poison, qui exerce son action perturbatrice précisément sur les conditions mécaniques de la circulation. la propeptone provoque une paralysie vaso-motrice, d'où résulte une chute énorme et assez durable de la pression artérielle. Cette chute de pression avait, d’ailleurs, été observée également lorsqu'on rempla- cait la propeptone par d'autres substances anti- coagulantes. Parmi ces dernières, l'hirudine mérite une men- tion spéciale. Les médecins savent depuis longtemps que les petites hémorragies résultant de la morsure des sangsues s'arrêtent difficilement, et que le sang avalé par ces dernières ne se coagule pas dans leur corps, mais y reste longtemps fluide. Haycraft (1884) a découvert la raison de ces phénomènes. Il à montré que la salive de la sangsue médicinale con- tient une substance particulière, voisine des albu- 1 — ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE moses et qui jouit de la propriété d'empêcher la coagulation du sang tant in vivo qu'in vitro. Cette substance a été préparée à l'état de pureté par Jacob; (en 190%). Il lui a donné le nom d'Aérudine ou hirudine. A faut environ 24 milligrammes d'hirudine, correspondant à 3 têtes de sangsue, par kilog d'animal pour obtenir l'effet anticoagulant. Von Hertzen et Oehmann! ont fait une étude systématique de l'action physiologique de l'hirudine. Comme leurs devanciers, ils ont constaté une chute de pression sanguine assez nolable après l'injection intraveineuse d’hirudine. Mais, à l'inverse de ce qui se passe pour l’action de la peptone, cette chute de pression dure à peine quelques minutes. Au bout d'un temps fort court, l'animal se retrouve dans des conditions absolument normales au point de vue des particularités mécaniques de la circulation, de la teneur des gaz du sang, etc. Dorénavant la substitution de l’hirudine à la pro- peptone s'impose dans toutes les expériences où l’on doitéviter la coagulation du sang. Gràce à ce progrès technique, les physiologistesvontpouvoirreprendre, dans des conditions particulièrement favorables, l'étude du débit du sang dans les vaisseaux, de la circulation croisée entre deux animaux, de la circu- lation artificielle au moyen de sang non défibriné, etc. Ajoutons que l'on trouve dès à présent dans le commerce l'hirudine toute préparée (par la firme E. Sachsse u. C° de Leipzig-Reudnitz). 6. Réseaux nerveux périphériques vaso-moteurs. — On sait que la section des nerfs vaso-constricteurs d'une région déterminée provoque, dans tout le domaine de leur distribution, une dilatation de la paroi des petites artères. Le tonus vasculaire y est supprimé parce queles innervations vaso-constric- trices qui s'exercaient continuellement pendant la vie ne sont plus transmises à la tunique musculaire des artères. Cependant, la perte du tonus vasculaire n'est pas irrévocable : au bout d’un certain temps, les artères d'abord paralysées se rétrécissent peu à peu. Elles reviennent à leur état de demi-contrac- tion normale et reprennent la faculté de varier leur calibre dans certaines conditions physiologiques, par exemple sous l'influence de la chaleur ou du froid. Les physiologistes ne sont pas d'accord sur le mécanisme du rétablissement du tonus vasculaire après suppression des liens nerveux entre les vais- seaux et le système nerveux central. Pour les uns, la fonction nerveuse remplie originairement par le système nerveux central est reprise, dans cè cas, par les plexus nerveux périphériques qui entourent les artères. Ces plexus fonctionneraient comme de { Skandin. Arch. f. Physiol., t. XX, p. fi. 746 LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE petits ganglions, comme des centres périphériques. D'autres biologistes, se basant principalement sur le peu de développement anatomique et la rareté des éléments nerveux dans la paroi des artères, pré- fèrent investir directement les fibres musculaires de la tunique moyenne des artères des fonctions ner- veuses qui étaient remplies par les centres cérébro- spinaux avant la section des nerfs. Eugling” a cherché à résoudre cette question par l'étude des changements histologiques que présen- tent les plexus nerveux contenus dans les parois artérielles après la section des nerfs vasculaires. Ses expériences et ses observations ont été exécu- tées sur l'oreille du lapin et sur les membres posté- rieurs de la grenouille. La méthode au bleu de méthylène permet de suivre les phases successives de la dégénérescence qui envahit les réseaux ner- veux artériels après section des troncs nerveux correspondants. Cette dégénérescence est des plus marquées et va jusqu'à la disparition totale ou pres- que totale de ces réseaux. En même temps, l’exci- tation artificielle du bout périphérique des troncs nerveux coupés perd la faculté de provoquer la con- traction vasculaire locale. Ces réseaux nerveux représentent donc de simples prolongements du système nerveux cérébro-spinal, et non des centres autonomes. Ils ne jouent aucun rôle dans le méca- nisme du rétablissement du tonus artériel périphé- rique après section des troncs nerveux, ni dans la suspension de ce tonus sous l'influence de l’empoi- sonnement par le nitrite d’amyle. IT. — RESPIRATION 1. Apnée par respiration forcée. — On sait que Factivité du centre nerveux qui préside aux mouve- ments respiratoires du thorax est réglée à chaque instant par la teneur des gaz du sang artériel. Chaque fois que le sang qui nourrit le centre respi- ratoire devient plus veineux, c'est-à-dire plus pauvre en oxygène et surtout plus riche en acide carbonique, il en résulte une stimulation plus forte du centre, d’où une exagération en profondeur des mouvements respiratoires. La surartérialisation du sang (c'est-à-dire l'augmentation de l'oxygène et la diminution de l'acide carbonique) produit un effet inverse : l'excitation du respiraloire est momentanément diminuée ou même supprimée. L'individu ralentit sa respiration ou même la sus- pend tout à fait. Il est en état d'apnée. centre M. Vernon vient de faire une application intéres- sante de ces notions. On sait qu'il est impossible de retenir sa respiration volontairement pendant plus de trois-quarts de minute; mais on peut notable- ‘ Arch, f. d. ges. Physicl., t. CXXI. ment augmenter la durée de cette suspension respi- ratoire si l’on a soin de se mettre au préalable à l'état d’apnée, en exécutant systématiquement pen- dant quelque instants une série de mouvements respiratoires très profonds. Ces mouvements ont pour effet d'augmenter légèrement la provision d'oxygène du sang, mais surtout de diminuer très notablement sa teneur en acide carbonique. Dans les conditions ordinaires, M. Vernon n’arrive pas à dépasser 42 secondes de suspension respiraloire. Après une minute de respiration forcée, la suspen- sion respiratoire atteint 221"; après 3 minutes de respiration forcée, elle atteint 3/21"; enfin, si la res- ration forcée a été continuée pendant six minutes, l'arrêt respiratoire consécutif peut atteindre 4! 5". Dans cette dernière expérience, M. Vernon atteint presque le record du monde, établi en 1898 par Miss E. Wallenda. Miss Wallenda, après s'être mise en état d’apnée, était restée sous l’eau 4! 45 1/2". On sait que les plongeurs arabes de Ceylan employés aux pêcheries des huîtres perlières ne restent pas plus de 90" sous l'eau. Vernon, reprenant les expériences de Hill et Pluck, a constaté que, si l’on fait, à la fin de la période préparatoire d'apnée, quelques inhalations profondes d'oxygène pur au lieu d'air, on peut doubler la durée du temps de l'arrêt respiratoire consécutif. Après 1 minute de respiration forcée, quelques respirations d'oxygène lui permettaient de retenir la respiration 4 18". Après 3' de respiration forcée et oxygénation consécutive, la suspension respiratoire atteignait 6 34". Enfin, si la respiration forcée avait élé prolongée pendant 6', la suspension respiratoire atteignait la valeur énorme de 8°13". L'oxygène rend donc le centre respiratoire moins sensible à l’action stimulante de CO* et lui permet de résister plus longtemps à cette excitation. Ajoutons que la respiration forcée produit une sensation de malaise tellement pénible quebeaucoup de personnes ne peuvent la prolonger pendant plus de 2 à 3 minutes. Elles éprouvent des sensations de fourmillement et d'engourdissement dans les pieds et se sentent tout élourdies et prêtes à perdre connaissance. 2. Choc opératoire.— C'est, parait-il, la diminu- tion exagérée de la tension de CO dans nos lissus qui cause ces malaises. On sait que Mosso considère le mal des montagnes comme dû également à la diminution de tension de CO?, d'où le nom d'a- capuie qu'il lui à donné. Cette théorie n'a pas rencontré l'adhésion générale. Henderson” vient de proposer une explication analogue pour le choc opératoire qui se montre dans ! Amer. Journ. of Physiol, 1. XXE, p. 126. LEON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 747 les opérations graves, où l’on met à nu la moelle épinière, le cerveau, etc. Il admet que les organes exposés à l'air se dépouillent trop complètement de leur CO*. Une certaine dose de CO* serait néces- saire au fonclionnement des centres nerveux et la tension de ce gaz ne pourrait sans danger S'y abaisser en dessous d'une certaine limite. Il a réussi à provoquer chez les chiens en expérience tous les phénomènes physiologiques du choc opératoire, rien qu'en pratiquant une ventilation exagérée du pou- mon et, par suite, un abaissement de la tension de €CO* dans le sang et les tissus. 3. Respiration des Poissons. — La respiration des Poissons a été récemment étudiée avec détails par un assez grand nombre de physiologistes : Kuiper, Westerlund, Lumbroso, Calugareanu, Babäk et Dédek. Kuiper' constate, comme Wester- lund *, que les mouvements respiratoires des pois- sons ne sont pas d'origine réflexe. Ils sont provo- qués et réglés par l'activité automatique d’un centre cérébro-spinal fonctionnant d'une facon analogue au centre respiratoire des Vertébrés supérieurs. U. Lumbroso* plonge des barbeaux et d'autres poissons d’eau douce dans de la vaseline liquide ou de l'huile d'olive. Il constate la persis- tance des mouvements respiratoires. Le contact de la branchie avec l'eau n'est donc pas une con- dition sine qua non pour la production de ces mouvements. L'auteur étudie les différents fac- teurs qui modifient le mécanisme des mouvements respiratoires. Winterstein * constate que les pois- sons Leuciscus supportent une diminution no- table de la tension de l'oxygène dans l’eau qui sert à leur respiration. Il faut abaisser cette ten- sion jusqu'à 1,5 °/, d’une atmosphère pour amener l'asphyxie et la mort. Par contre, le poisson est assez sensible à l’action de CO*. Une tension de CO de 11°/, d'une atmosphère est suffisante pour para- lyser le Leuciscus. Le Cyprinus Carassius est plus résistant et supporte 30 °/, de CO*. La dyspnée par manque d'oxygène ou excès de CO* pousse l'animal à venir à la surface de l'eau avaler des bulles d'air. Ces bulles ne passent pas à travers les branchies comme on le croit générale- ment : elles servent seulement à aérer l’eau conte- nue dans la cavité buccale. L'auteur a imaginé un dispositif ingénieux qui lui permet de jauger le volume d’eau qui traverse les branchies du ZLeuciscus. Chaque mouvement respiratoire pousse 0,5 à0,6 centimètres cube d'eau à travers les branchies, ce qui fait 3.000 à 4.000 cen- ‘ Arch.f. d. ges. Physiol., t. CXVII, p. 4. 2 Voir revue de l'an dernier, p. 111. 3 Rendic. Ac. Lincei, t. XVII, p. 861. #4 Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXXV, p. 99. timèêtres cubes par heure. Le Leuciseus utilise jus= qu'à 68°/, de l'oxygène dissous dans l'eau. La consommation de l'oxygène est, chez les Poissons comme chez les Vertébrés aériens, indépendante des variations de la pression partielle de l'oxygène, à condition que cette tension ne soit pas abaissée en dessous d’une certaine limite. On sait que l'intestin joue un rôle important dans la respiration de la Loche (Cobitis {ossilis). Calugareanu” a constaté que la structure de la paroi intestinale se rapproche, chez ce poisson, de celle du poumon des vertébrés supérieurs en ce qui con- cerne les rapports de l’épithélium avec les capil- laires sanguins. Cependant, l'intestin ne peut suf- fire seul aux besoins respiratoires de lanimal; l'absorption d'oxygène est suffisante dans ce cas, mais l'élimination de CO” n'est pas assez complète. C'est la respiration cutanée qui joue le principal rôle dans l'élimination de ce gaz. Aussi, les respi- rations cutanée et intestinale s’exercant simulta- nément suffisent pour maintenir l'animal en vie. L'auteur à imaginé des procédés expérimentaux qui lui permettaient d'exclure à volonté telle ou telle forme de respiration: cutanée, branchiale ou intestinale. Babäk et Dédek” ont étudié également la respiration chez le Cobitis et le Polycacanthus opercularis. III. — SYSTÈMES NERVEUX ET MUSCULAIRE, il Électrovagogramme. — L'excitation des nerfs, celle des muscles se marque, comme on sait, par un phénomène électrique que du Bois-Reymond appelait variation négative et qui porte actuelle- ment le nom de courant d'action. H n’est pas diffi- cile de démontrer l'existence de ces courants d’ac- tion quand on soumet un nerf ou ur muscle à des excitations artificielles maximales. Mais le fonc- tionnement normal physiologique des nerfs se fait d'une facon plus discrète: l'organisme travaille avec un minimum de dépense. Les excitations qui cheminent normalement le long des nerfs sont loin d'être maximales et les courants d'action qui les accompagnent sont extrêmement faibles. La boussole de Wiedemann était incapable de les déce- ler. Tout au plus l’électromètre capillaire avait-il, dans quelques cas exceptionnels, réussi à en dé- montrer l'existence. Heureusement l'électromètre à corde, dont il a été question plus haut, est un appa- reil d'une exquise sensibilité. Il a permis à Ein- thoven* de constater, dans le tronc du pneumogas- trique de l'animal vivant, l'existence de variations ! Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXX, p. 425. ? Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXIX, p. 483. 3 Arch.f. d. ges. Physiol., t. CXXIV, p. 246, et Quart. Journ. of exper. Physiol., t. 1. électriques périodiques, dont les unes correspon- dent aux excursions respiratoires du poumon et les autres aux pulsations cardiaques. Les variations électriques respiratoires étaient déjà connues par les travaux de Lewandowsky, Alcock et Seemann. Chaque variation respiratoire présente une phase allongée répondant à l'inspiration et une phase plus courte répondant à l'expiration. On peut pro- voquer artificiellement ces phases électriques dans le tronc du vague, en réalisant mécaniquement soit l’insufflation (inspiration), soit le retrait (expi- ralion) du poumon. Elles correspondent à l'excita- tion physiologique des fibres pulmonaires d’'inspi- ration et d'expiration de Hering et Breuer. De même, les variations électriques cardiaques du pneumogastrique correspondent à une excila- ion centripète émanant de la pulsation cardiaque. Ces variations disparaissent momentanément si l'on arrête le cœur par excitalion du bout périphé- rique de l’autre pneumogastrique. Elles consti- tuent un fait nouveau du plus haut intérêt. 2. Système nerveux autonome. — Comme je l'ai exposé dans ma revue annuelle, parue ici même en 1906”, beaucoup d'anatomistes et de physiolo- gistes ont accepté de réunir, à l'exemple de Langley et de Gaskell, sous le nom de Système nerveux autonome, l'ensemble des nerfs viscéraux qui pré- sident à l’innervation des muscles lisses de l'œil, du tube digestif, de la rate, des organes génito- urinaires, des vaisseaux, du cœur et des glandes. Ce système autonome comprend, outre la totalité du système nerveux grand sympathique, un cer- ain nombre de rameaux appartenant au système nerveux cérébro-spinal, provenant de l'oculo- moteur commun, du glosso-pharyngien, du pneu- mogastrique, etc. Ce système nerveux lire son origine de quatre porlions du système nerveux central, des fibres qui y ont leur cellule d’origine. Ces fibres et ces cellules constituent le premier neurone ou neurone central. Ces fibres, dites préganglion- par naires, se mettent en relation à la périphérie avec des cellules nerveuses ganglionnaires situées en dehors du système nerveux cérébro-spinal. Ces cellules nerveuses constituent le point de départ d'un second neurone, où neurone périphérique ; elles émettent des fibres, dites post-ganglionnaires, qui se rendent directement aux organes périphé- riques innervés par le système nerveux autonome. Frôblich® et Lœwi ont fait une étude systéma- lique des conditions du fonctionnement du sys- ème nerveux autonome. Gaskell et Langley avaient Rev. gén. des Se., t. XVII, p. 601. ? Arch. f. exper. Pathol., 1. LIX, p. 34. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE montré que la nicotine excite d'abord, puis para- lyse les cellules ganglionnaires (neurone périphé- rique) de tout le système autonome, qu'il appar- tienne ou non au grand sympathique. Frühlich et Lœwi ont constaté quelques différences dans l'ac- tion de plusieurs autres poisons, suivant qu'it s'agit du système nerveux grand sympathique ou de la partie non sympathique du système nerveux autonome. L'action n'est pas la même non plus, suivant qu'on considère l'influence du poison par rapport aux fibres excitantes d’une fonction ou aux fibres d'arrêt. Le tableau suivant résume sché- matiquement les résultats des expériences : LES FIBRES NERVEUSES D'ARRÈT SONT CR. paralysées LES FIBRES NERVEUSES EXCITANTES SONT RE — excilées paralysées excitées I. Nerfs aulonomes non sympathiques. Nitrite de soude. Pilocarpine. Atropine. II. Nerfs sympathiques. Adrénaline. | Ergotoxine. | Adrénaline. ———_—_—_—_——. — —— — Il ne faudrait cependant pas adopter ce schéma sans restriction : il comporte quelques exceptions. Ainsi l'atropine paralyse les fibres d'arrêt du sys- tème nerveux autonome du cœur. Elle ne paralyse: pas les appareils moteurs du rectum et de la vessie. Toutes ces expériences se rapportent à l'action des poisons sur les appareils nerveux périphéri- ques post-ganglionnaires. 3. Pneumogastrique et branche interne du spinal. — On sait que le tronc cervical du pneu- mogastrique est formé non seulement par les filets radiculaires d'origine du X° nerf cranien ou pneu- mogastrique proprement dit, mais aussi par une partie des filets d’origine du XI° nerf ou spinal, la branche interne du spinal se jetant tout entière dans le pneumogastrique. Quelle est la part res- pective de la X°et de la XI° paires dans la distri- bution périphérique des différentes branches du pneumogastrique? Les expériences physiologiques, d'excilation, de section, d'arrachement avec obser- vation ultérieure de dégénérescence, sont fort déli- cates à cause de la difficulté d'accès de la région où se trouvent les origines des deux nerfs. Aussi règne-{-il encore bien des incertitudes et des con- tradictions sur la détermination de l'aire périphé- rique de leur distribution. Lesbre et Mignon’ ont repris cette étude chez le: 4 Journ. de Physiol. et Path. gén., t. X, p. 311, 415. LÉON FREDERICQ — REVUE -1 _— ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE porc, qui se prête particulièrement à la solution de celte difficile question. En effet, chez le pore, la branche interne du spiaal ne se réunit au tronc du pneumogastrique qu'à une distance nolable du lorumen jugulare, ce qui facilite singulièrement expérimentation. On peut résumer les résultats de leurs nombreuses et délicates expériences en une formule schématique très simple. Tous les effets moteurs et sécréteurs des pneumogastriques sont empruntés à la branche interne du spinal, appartiennent done à la XI° paire. Le pneumogas- trique proprement dit, ou Xe paire, remplit des fonctions purement sensibles, centripètes.Le spinal et le pneumogastrique se comportent done vis-à-vis l’un de l’autre comme la racine motrice (spinal) et la racine sensible (pneumogastrique) d'un même nerf spinal. 4. Théorie acoustique de la résonnance. — Quand on ouvre la caisse d’un piano et qu'on enlève les étoufloirs, de manière à permettre aux cordes de la table d'harmonie de vibrer librement, on constate que chaque note chantée, chaque son émis dans le voisinage, provoque par résonnance la vibration de la corde qui est accordée pour le même son. La table d'harmonie répète tout ce qu'on lui chante. Helmholtz admettait que notre oreille interne contient un appareil de résonnance construit sur le même modèle. Dans cette théorie, les fibres ou cordes de l'organe de Corti (membrane basilaire), accordées chacune pour un son de hauteur déterminée, entrent en vibration par résonnance chaque fois que le même son leur est amené dans l'audition. À chacune de ces cordes vibrantes aboutit une fibre du nerf auditif qui a pour fonc- tion de transmettre l’excilation aux centres psy- cho-acoustiques. L'appareil de résonnance nous permet de distinguer ainsi l'intensité et la hauteur des sons simples entendus; il nous permet aussi de reconnaître le timbre des sons, car il réalise l'analyse des sons complexes. Dans ce dernier cas, chaque composante du son complexe éveille la ré- sonnance de la fibre accordée pour la même période. Cette théorie a le grand mérite — comme d’ail- leurs la théorie de Young-Helmholtz du fonction- nement de la rétine — de se maintenir strictement sur le terrain de la doctrine des énergies spécifiques des nerfs sensoriels, telle que l’a formulée Jean Müller. On sail que, d'après cette doctrine, chaque qualité d'une sensation suppose un appareil ner- veux distinct. La qualité de la sensation est donc déterminée par l'individualité anatonnque du nerf soumis à l'excitation : seule l'intensité de la sen- sation pourra présenter des variations suivant l'in- tensité de l'excitant qui agit sur une fibre déter- minée. Le défaut de la théorie, c'est qu'elle est pour ainsi dire invérifiable et qu'elle est construite en grande partie sur le terrain de l'hypothèse. Aussi les atta- ques ne lui ont-elles pas manqué, principalement parmi les acousticiens francais. Cependant cette théorie est si élégante, elle satis- fait si bien au désir que nous avons de rattacher les faits particuliers à un petit nombre de prin- cipes ou de rubriques générales, que j'avoue res- sentir une certaine satisfaction lorsque j'ai connais- sance de faits nouveaux qui peuvent lui servir d’argument. Cette satisfaction, au fond antiscienti- fique, je l’ai éprouvée récemment à la lecture du travail de Wittmaack. L'auteur a pris cinq cochons d'Inde, les a soumis chaque jour pendant quatre semaines à l’action d'un son assourdissant d'une hauteur déterminée, ut’ de 256 vibrations doubles, de manière à produire un ébranlement morbide de la région correspondante de leur organe de Corti. Les animaux furent sacrifiés au bout de quelques se- maines : à l'examen histologique de l'oreille interne, on conslata une destruction de l'organe de Corti, limitée à une portion circonscrile du second tour du limacon. L'auteur rapproche ce fait de la dégé- nérescence que présente une partie du limaçon chez les vieillards, dégénérescence qui explique l'abaissement sénile de la limite de perception des sons aigus. Beaucoup de vieilles personnes n’'en- tendent même plus la stridulation des grillons et des sauterelles, alors que, dans leur jeunesse, elles percevaient des sons notablement plus élevés. 5. Labyrinthe acoustique. — Les fonctions des canaux semi-circulaires et du labyrinthe acous- tique ont élé, dans ces derniers temps, l’objet de travaux intéressants et même de débats passionnés parmi les physiologistes. La place me manque pour trailer ce sujet avec l'ampleur qu'il comporte. Je me borne à signaler la magistrale monographie que lui a récemment consacrée un vétéran de la Physiologie et qui a été analysée ici même, dans la Revue du 15 mars 1909 (p. 230), par M. Wer- theimer. L'illustre de Cyon' voit dans l'appareil des canaux semi-circulaires l'organe du sens de l’espace et du temps. Le sens du nombre est loca- lisé dans l'organe de Corti (sens arithmétique et géométrique). 6. Audition chez les animaux. — à) Chien. Kalis- cher* et Seljonoï' ont constaté chez le chien un développement de la faculté d'apprécier la hauteur D Arch. f. d. ges. Physiol., t. CXVIII, p. 525, et Das OBrlabyrinth als Orqan der mathematischen Sinne 1ür Raum und Zeit, Berlin, 1907. 1 Ber. d. preuss. Akad., 1907, t. 1, p. 204. 3 Dissertation russe, Saint-Péterbourg, 4907. 750 = LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE des sons musicaux que l’on n'aurait jamais soup- conné, Kalischer avait, par exemple, dressé un chien à n’accepler un morceau de viande qu'avec accom- pagnement d'un son d'orgue ou d'harmonium d’une hauteur déterminée. Le chien devait refuser la nourriture quand on produisait un autre son. Il reconnaissait le son caractéristique du repas de viande dans un mélange de plusieurs sons et était également capable de le distinguer d’autres sons ne différant de lui que d’un demi-ton. Seljonoï à fait des observations analogues en associant, chez ses chiens en expérience, certains sons ou bruits avec l'acte de manger. Au bout d'un certain temps, ces sons produisaient chez les chiens la salivation, à l'exclusion de tous les autres sons. Lui aussi à constaté que les chiens apprécient d'une facon très correcte l'intensité, la hauteur et le timbre des sons. La mémoire de ces sons persiste pendant assez longtemps, deux mois par exemple. b) Poissons. Presque tous les physiologistes qui se sont occupés dans ces dernières années de l’audi- tion chez les poissons les ont considérés comme totalement privés de ce sens. Les poissons seraient absolument sourds; et les anecdotes concernant les carpes ou autres poissons qui s’approchent de l’en- droit où l’on sonne la cloche pour leur annoncer la distribution de leur repas, ne sont plus considérées comme démonsiralives. Les poissons habitués à répondre au signal de la cloche le font encore quand on a retiré le battant et que la cloche ne produit aucun son. Ils sont donc guidés par un autre sens que l'ouie. On remet à présent en doute ces conclusions. On fait observer que tous les pois- sons ne sont pas muets, qu'il en existe un assez grand nombre qui produisent des sons, ce qui fait supposer, par analogie, qu'ils ne sont pas tous sourds. Ils possèdent un rudiment d'appareil acous- tique. Piepers à, d’ailleurs, fourni la démonstration directe de la mise en branle de cet appareil par des excilations acoustiques. L'excitation est révélée par son signe habituel, le développement d'une va- riation électrique ou courant d’action dans le nerf acoustique correspondant. Sur quoi se base-t-on pour affirmer la surdité des poissons? Sur ce qu'ils ne réagissent pas quand on fait résonner un diapason dans leur voisinage ou qu'on leur joue un air de violon. Edinger’ fait ob- server fort justement que ces expériences sont peu démonstratives : il faudrait, pour résoudre la ques- lion, soumettre les poissons à des excilations acous- tiques analogues à celles qui peuvent les atteindre à l’état de nature dans leur vie de tous les jours, el * Centralbl. 1. Physiol., 1. XXII, p. 1. éviter des excitants aussi anormaux que les sons de nos instruments musicaux. À ce compte, il faudrait également refuser le sens de l’ouïe au crapaud son- neur, à la rainette et autres batraciens chez lesquels les excitants sonores (coassement, chant printanier) jouent cependant un rôle indubitable comme moyen d'attraction sexuelle à l’époque desamours. Edinger rapporte les expériences de Büttger, fort démonstra- tives à cet égard. Les sons les plus variés et les plus intenses ne produisent aucun effet sur la rai- nelte : on pourrait la croire sourde, et cependant elle réagit immédiatement quand on produit artifi- ciellement dans son voisinage un son voisin comme hauteur de son coassement habituel. Elle s'approche alors dans la direction du bruit. Yerkes a constaté qu'il est pareillement impossible de provoquer chez la grenouille des réactions motrices en produisant les bruits ou les sons musicaux les plus variés. L'animal nous parait sourd, etcependant Yerkes a pu démontrer,par une série d'expériences extrêmement ingénieuses, que, si les sons qui frappent l'appareil auditif, assez développé d’ailleurs chez la grenouille, paraissent la laisser indifférente, ces sons agissent cependantsurson organisme. Ilsinfluencent certains réflexes dans le sens de l’inhibition, ils en favorisent d’autres. Von Thomassini a fait des expériences ana- logues chez les reptiles, qui semblent également, à l'observateur superficiel, dépourvus pratiquement du sens auditif. Winterstein’ a montré récemment que la faculté de réagir aux excitations acoustiques ne présuppose pas nécessairement l'existence d’un appareil auditif différencié, chez les animaux inférieurs. Il a fait à l'aquarium de Naples des observations et des expé- riences très démonstratives sur plusieurs Annélides tubicoles. Le Spirographis Spallanzani rétracte ins- tantanément son élégant panache branchial et se retire dans son tube quand on fait résonner un sifflet dans son voisinage. Le même animalreste insensible à des chocs ou des ébranlements ondulatoires de l'eau, même assez intenses. L'Hydroïdes pectinata (Serpulide) rentre également dans son tube aussitôt que commence le concert de symphonie dans la promenade voisine de la Villa nazionale et n'épa- nouit à nouveau sa couronne de tentacules qu'après la dernière mesure du concert. A l'encontre d’autres annélides, les Spirographis et Hydroïdes sont privés de statocystes où de tout autre appareil auditif. Léon Fredericq, Professeur de Physiologie à l'Université de Liège. ! Centralbl. f. Physiol., t. XXII, p. 759. BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 191 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques André (Ch.), Directeur de l'Observatoire de Lyon. — Les Planètes et leur origine. — 1 vo/. in-8° de 285 pages. (Prix : 8 fr.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1909. On retrouvera dans cet élégant ouvrage la profon- deur des idées générales, la précision dans le détail et le sens critique aigu, qui ont fait la renommée du célèbre « Trailé d° Astronomie stellaire ». Après avoir fourni aux astronomes tant d'idées sug- gestives sur le monde immense des étoiles, M. André a cru devoir revenir à ce petit canton de l'Univers qui gravite autour de notre modeste Soleil. Rien, je crois, n'aurait pu répondre à un besoin plus pressant et plus actuel de la littérature scientifique. En effet, le système solaire connu s’est depuis un siècle enrichi de deux grosses planètes, treize satellites, et de centaines d’asté- roïdes. Beaucoup de ces astres ont présenté des mou- vements qui, jugés des anciens points de vue, ont paru anormaux ; en outre, la constitution physique de cer- taines planètes, Mars en particulier, à donné lieu aux annonces les plus sensationnelles et les plüs surpre- nantes. Il était devenu nécessaire, non seulement de synthé- tiser les résultats des nombreux travaux provoqués par ces faits, mais aussi d’en faire une critique d'ensemble suffisamment aiguë et objective pour fournir à la fois une idée générale de la constitution du système plané- taire, et une indication motivée sur l'attitude qu'il convient d'observer à l'égard des nouveaux problèmes soulevés. C’est le but que vise et qu'atteint pleine- ment l'ouvrage actuel. Il est divisé en trois parties : la première est consa- crée aux planètes, la seconde aux satellites, la troisième à la formation du système planétaire. Dans les neuf chapitres relatifs aux planètes, rien de ce qui peut intéresser le physicien ou le mécani- cien n'a été oublié : la rotation des planètes, leurs températures superficielles, les résultats fournis sur leurs albedos par la photométrie, la nalure des atmo- sphères et des surfaces sont étudiés complètement sous une forme concise et claire. Ce qui frappe surtout en lisant ces chapitres, c'est qu'ils sont éminemment suggeslifs; c'est qu'en même temps qu'ils exposent des résultats, ils font surgir des questions nouvelles qui demain en soulèveront d'autres; € ’est, en un mot,qu ‘ils n'instruisent pas seulement, mais qu'ils font penser. De cette première partie du volume, trois études nous ont particulièrement charmé : elles sont relatives à Mars, aux astéroides, à Neptune. Mars ! Que d’enthousiasmes ce nom seul a déjà pro- duits, dans les âmes mystiques etromanesques pour qui le but final de l’Astronomie est de savoir s'il y a des habitants dans la Lune... ou ailleurs. Heureuse pla- nète dont tout ce que nous ne savons pas peut occuper un instant les gens du monde, alors que toutes les merveilles démontrées de l'Astronomie les laissent froids. Respectons ces enthousiasmes! Ils sont le fil unique et ténu qui maintient dans l'estime du public le prestige de l'Astronomie tout entière. Ce n'est pas ici le lieu d'examiner si la question de la pluralité des mondes habités est aussi importante, pour nos progrès futurs dans le Savoir, que l'analyse spectrale par exemple. Nous ne voulons pas débattre non plus si, comme le dit quelque part Anatole France, la vie organisée n’est qu'une moisissure sur ET INDEX la pureté minérale des globes célestes, car sur de tels sujets toutes les hypothèses sont permises. Mais si nous examinons avec M. André quelles sont les bases positives qui permettent de croire à l'existence des fameux canaux de Mars, à leur merveilleuse rectitude, à leur gémination, à leurs variations colossales, nous sommes obligés de conclure avec lui : « La canalisation de Mars n'existe pas. » Il serait trop long d'exposer ici la discussion approfondie que fait M. André de tout ce qui a été publié sur ce sujet; mais force nous est d'avouer que, si sa critique est acérée, les arguments en sont irréfutables à l'heure qu'il est. Nous n’en citerons que trois entre beaucoup : 1° seuls les observateurs munis de lunettes faibles ou fortement diaphragmées ont cru voir des canaux sur Mars; les astronomes qui ont observé Mars avec de très ‘grands instruments n'y ont, si paradoxal que ça puisse paraitre, jamais vu rien qui ressemblât aux canaux, alors qu'en diaphrag- mant fortement les objectifs (ce qui augmente beau- coup la diffraction), ils er à voir des apparences de ce genre ; 2 il résulte d'expériences nombreuses et variées, faites sous la direction de Maunder, du regretté Newcomb, de Pickering, etc.,qu'en observant à une distance assez grande un disque sur lequel on a dessiné des taches irrégulières (analogues à celles qu'on voit sur Mars avec de zrands instruments), toutes les taches irrégulières paraissent réunies par des lignes rectilignes ; 3° dans toutes les cartes de Mars de Schiaparelli, tous les prétendus canaux sont en projec- tion absolument composés de lignes droites, malgré la sphéricité de Mars. Malgré cela, certains partisans à toute force des canaux martiens ont cru triompher récemment en obtenant des photographies de Mars (de l'ordre de { millimètre de diamètre) sur lesquelles on aurait vu des apparences analogues à des canaux. A cela M. André répond fortement que les phénomènes de diffraction photographique ne sont pas d’une nature autre que la diffraction visuelle, et il publie à ce sujet, avec photographies à l'appui, des expériences fort cu- rieuses, faites récemment par MM. Lumière, de Lyon, et qui démontrent clairement qu’en diminuant le pouvoir séparateur d'un objectif, celui-ci donne, à partir d’un certain moment, d’un objet constitué par des poinis séparés, une image où ces points sont réunis en lignes droites parallèles. M. André conclut, en toute ri- gueur : « Rien de ce que l’on a imaginé pour décrire le mode de vie intellectuelle et physique des habitants supposés de la planète Mars n'a aucun fondement de réalité. » Et, siM. Todd ne s’est, malgré lui, pas trompé, lorsqu'il a écrit que «les aspects de Mars indiquentune œuvre hu- maine dont il n'estplusmaintenant possible de douter », c'est que cette œuvre humaine n’est autre que celle de M. Todd et de ses confrères. Ces observateurs ont vu dans Mars des canaux par suite d'une illusion et d'une défectuosité d'optique, à peu près comme ils auraient pu y voir (qu'on me permette cette comparaison un peu vulgaire) trente-six chandelles, s'ils eussent heurté leur œil contre la bonette de l'oculaire. Quant à la pluralité des mondes habités, c'est une question qui ne relève guère, à l'heure actuelle, que du calcul des probabilités. Si je me suis étendu un peu plus que de raison (ce dont le lecteur voudra bien m'excuser)sur ce problème, qui n'occupe qu'une faible partie de l'ouvrage de M. André, c’est qu'il ne m'a pas paru inutile que le public scientifique, tout au moins, püt se faire à ce sujet une opinion motivée. Le chapitre consacré par M. André aux petites pla- 152 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX L nètes est particulièrement remarquable ; les variations d'éclat si mystérieuses de certains astéroïdes, que l’on étudie d’ailleurs actuellement à l'Observatoire de Lyon, y sont exposées el discutées, ainsi que toutes les ques- tions relatives à la constitution, à la statistique et à l'origine des astéroiïdes ; c'est dire que les remarquables études faites dans cetordre d'idées par M. de Freycinet, M. Stroobant et surtout M. Jean Mascart y sont claire- ment exposées etsynthétisées. Deux petites planètes ont été plus particulièrement étudiées par M. André, à cause de leur importance : d’une part, Eros, dont l'orbite for- tement excentrique fait qu'elle est par moment beau- coup plus rapprochée de la terre que Mars elle- même, ce qui la rend précieuse pour une détermi- nation plus précise de la parallaxe solaire; d'autre part, la planète 1906 TG, qui offre la particularité remar- quable d'avoir une orbile presque identique à celle de Jupiter. Dans le chapitre relatif à Neptune, M. André a réa- lisé ce joli tour de force d'exposer clairement, dans un style élégamment simple et sans aucun appareil mathé- matique, la méthode par laquelle Leverrier à décou- vert l'existence et la position de cette planète. On sera charmé par cet exposé qui rappelle, par sa manière, certaines pages où M. H. Poincaré explique au lecteur, joyeusement surpris de comprendre, la signification physique de la géométrie à quatre dimensions. Tout ce qui est relatifaux satellites est également fort intéressant, Les données numériques et les enseigne- ments qui s'en dégagent sont clairs, succincts et com- plets, ainsi que l'exposé des méthodes qui fournissent les masses des planètes et de leurs satellites. En ce qui concerne l'origine de ceux-ci, le dernier mot n'a sans doute pas encore été dit; cela ressort surtout d'un Mémoire fort important de M. See, paru il y a quelques jours seulement, et d’où résullerait, contrai- rement à toutes les idées acceptées, que les satellites, loin d'être des émanations des planètes autour des- quelles ils gravitent, ontété, au contraire, capturés par elles. M. André, avec une sagacité el une hauteur de vue qui donnent une envergure particulière à cette der- nière partie de son ouvrage, examine enfin la forma- tion du système solaire. L'hypothèse géniale de La- place à paru un moment mise en défaut par la décou- verte, notamment, d’un satellite de Mars, Phobos, dont la révolution a une durée inférieure à la rotation de sa planète, par celle de la rotation rétrograde d'Uranus et de Neptune et de la révolution, également rétrograde, de leurs satellites. Les recherches de Roche, de Strat- ton, de Darwin, qui sont ici étudiées successivement, ont conduit à modifier et à compléter sur certains points la conception laplacienne. Mais, comme le montre M. André, dont la conclusion est un bel hommage à la mémoire de Laplace, si, dans le monument que ce grand homme a édifié, quelques pierres ont dû être abbalues ou remplacées, les fonde- ments grandioses en sont encore, aujourd'hui comme il y à un siècle, plus solides que le granit. « Les planètes », ornées de nombreuses et belles illus- trations, sont écrites dans une langue nerveuse, élé- gante, attique, malheureusement trop rare aujourd'hui dans les ouvrages didactiques. M. André pense sans doute, comme les grands ency- clopédistes du xvin® siècle, qu'il ne messied point à une divine liqueur d'être servie dans une coupe arlis- tement ciselée. La Science, pour être belle, doit être nue, mais non pas décharnée. CuaRLEs NORDMANN, Astronome à l'Observaloire de Paris. Feyréy (François). — Les Oiseaux artificiels (Lidee aérienne. Aviation). — 1 vo/. in-8° de 664 pages, avec 253 fiqures. Prélace de M. Sanros- Domonr (Prix : 42 fr. 50.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. 2° Sciences physiques Vignéron (Eugène), Ancien Professeur et ancien Sous-Directeur de l'Ecole supérieure d'Electricité. Electrostatique. — 1 vo/. in-8° raisin, de 127 pages avec 80 figures, de l'Encyclopédie électrotechniqur.. (Prix : 2 fr. 50.) Librairie des Sciences et de l'Iu- dustrie. L. Geisler. Paris, 1909. L'Encyclopédie électrotechnique, éditée par la Librairie des Sciences et de l'Industrie, se compose de #4 fascicules, traitant chacun une partie spéciale de la science électrique appliquée à l’industrie. Le premier volume, que M. Vigneron a écrit dans un style précis et avec une rigueur toute scientifique, résume fort bien tout ce que l’on sait en Electro- statique. Là où nous voyons une note personnelle très intéressante à signaler, c'est dans la préface de l'ouvrage, où, sous le titre : « Sur les bases des Théories scientiliques », l'auteur expose très nettement le rôle respectif de l’expérience et de l'hypothèse dans les Sciences physiques. L’£ncycelopédie électrotechnique ne pouvait débuter par un meilleur prologue. G. DE LAMARCODIE, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique. Morel (D: Albert), Docteur ès Sciences. Professeur agrége à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Lyon. — Précis de Technique chimique, à l'usage des laboratoires médicaux. — 1 vo/. in-18 colom- bier (Collection Testut) de 832 pages, avec 160 figures et 2 planches. (Prix : 9 fr.) O. Doin et fils, éditeurs. Paris, 1909. Voilà entlin un livre excellent, très souhaité, très. attendu de tous ceux — et ils sont légion — dont les études biologiques nécessitent à chaque instant des. déterminations d'ordre chimique. L'ouvrage de M. Albert Morel deviendra vite pour eux un ami, par les services considérables qu'il leur rendra. Sous le titre trop modeste de Précis (l'ouvrage fait partie de la Collection Testut), M. Albert Morel a écrit un véritable Traité d'Analyse, comprenant toutes les recherches de Chimie animale, depuis les éléments. minéraux de l’oruanisme jusqu'aux protéides les plus élevées. Et c'est un Traité tout à fait moderne, non seulement par les méthodes, mais aussi par l'allure. Ce n'est pas que nous manquions, dans le domaine de la Chimie biologique appliquée surtout aux sciences médicales, de précis, manuels, guides, ouvrages nom- breux de rubriques diverses. Mais beaucoup sont mé- diocres, parce que les auteurs se bornent à se copier les uns les autres, et, parfois, dans les ouvrages de ce: genre, certains détails trahissent l'inexpérience fatale de ceux qui désertent trop le laboratoire pour la bibliothèque. Je ne saurais dire assez Lout le plaisir qu’on éprouve, en ouvrant le livre de M. Morel, à ressentir la sensa- tion inverse. Si aride qu'en soit, en apparence (mais. non en vérité), le sujet, ce livre exhale un parfum de vie intense, de réalité; on sent que l’auteur a exécuté de ses mains toutes (ou presque toutes) les manipula- tions qu'il décrit; l'ouvrage n'a pas été compilé, mais vécu; il est né au laboratoire. C'est le labeur technique d'une jeune, mais déjà riche existence de savant, qui est condensé en ces huit cents pages. Toutes les méthodes classiques ont été étudiées par l’auteur : on s’en apercoit à la décision judicieuse qui fait choisir, entre les diverses variantes d’une méthode, le tour de main le plus sûr et le plus rapide, pour l'exposer en un langage précis et d'une élégante sobriété. Parmi les méthodes de premier plan, les plus importantes par les corps qu'elles étudient, ou les plus fréquentes dans l'application, beaucoup ont recu de M. Morel des perfectionnements ingénieux, presque toujours orientés vers l'économie du temps pour la multiplication du travail. Si, dans l'ouvrage, on trouve cà et là cité le propre nom de l’auteur, ce n’est certes BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 753 pas par une hypertrophie de la personnalité, car je lui reprocherais plutôt trop de modestie, mais tout sim- plement parce que la science et la technique ont béné- ficié largement déjà des travaux d'Albert Morel. L'auteur a su mettre à profit les relations et les sym- pathies quil possède dans le monde scientifique, pour recueillir des indications de la bouche même des col- Tègues plus familiarisés avec telle ou telle technique utilisée ou créée par eux pour leurs propres recherches. Quelques-uns même lui ont donné des notes écrites. On jugera par là du soin mis par M. Morel à remonter aux sources, et ceci suffit à qualifier l'ouvrage. Le livre débute par un excellent chapitre consacré aux Préliminaires. La personne la plusnoviceapprendra à manipuler avec une parfaite correction, pourvu qu'elle se laisse guider par les conseils simples, mais précis de M. Morel, soit pour l'extraction de substances délinies, soit pour les opérations chimiques quantitatives, soit pour les mesures physiques telles que la détermination des densités, des températures, du point de congé- lation, de la tension superlicielle, de la viscosité, de la conductibilité électrique, du signe électrique des col- loides, ou les examens ultramicroscopiques, spectro- scopiques et spectrophotométriques. Viennent ensuite l'Alcalimétrie et Acidimétrie, la Détermination de l'extrait sec et le dosage de l'eau, l'Analyse des gaz; puis les Procédés de minéralisation totale, suivis d'un chapitre précieux, Æecherche et dosage des éléments simples et de leurs combinaisons minérales, qui constitue en somme un traité complet d'Analyse minérale qualitative et quantitative en ce qui concerne le domaine biologique. L'auteur examine alors la Caractérisation et le dosage des substances organiques inférieures de la série quasse; il passe à l'£tude de l'extrait éthére et à l'Etude des lipoïdes de l'extrait alcoolique; puis vient, sous le titre : Différenciation et dosage des hydrates de carbone, un grand chapitre très complet et très soigné. Citons encore : Séparation des substances protéiques, puis Extraction, caractérisation, dosage des principales substances protéiques. Les deux chapitres qui suivent : Etude de la constitution des molécules protéiques, et Caractérisation et dosage des acides amidés et de leurs dérivés existant dans les échantillons naturels, mé- ritent une mention toute particulière, comme émanant de l'une des plumes les plus autorisées qui soient en France. Les travaux d'Albert Morel, en collaboration avec le Professeur Hugounenq, sont à peu près les seuls, en effet, à poursuivre dans notre pays les re- cherches constitutionnelles sur les protéiques,. dont la glorieuse initiative avait cependant auréolé le nom de notre Schützenberger, et à maintenir dignement la renommée de la science française, par leur précision et leur intérêt, en face des innombrables Mémoires fabriqués journellement dans les usines des E. Fischer ou des E. Abderhalden. Mais nous n'avons encore décrit que les trois quarts de l'ouvrage. Il se continue par une série de chapitres rédigés avec une haute compétence. L'énumération seule suffit à en indiquer l'intérêt : Zxtraction et carac- térisation des ptomaïnes et des toxines, — Préparation et caractérisation des acides biliaires, — Préparation, caractérisation et étude de la constitution des prin- cipaux acides nucléiques, — Etude des corps puriques, — Etude des corps pyrimidiques, — Extraction des uréides autres que les corps puriques, — Préparation, caractérisation et dosage des pigments non protéiques, — Notions générales sur la caractérisation, la prépa- ration et l'étude des ferments solubles, — Techniques chimiques à mettre en œuvre dans l'étude des ferments digestifs, — Etude des substances actives des glandes closes. l Tous ces chapitres, comme les précédents, ne sont pas seulement des guides précieux à consulter au mo- ment d'une recherche de laboratoire; M. Morel a trouvé le secret d'en rendre la lecture courante aussi facile qu'attrayante. Peut-être le louable souci d'être simple (et aussi, sans doute, la limitation de l’espace accordé par l'éditeur) ont-ils entrainé parfois l'auteur à sup- primer, surtout dans les quelques techniques dont il n'a point l'habitude personnelle, certains détails jugés par lui surabondants et cependant fort importants : ce serait le seul reproche, léger, que j'aurais à lui faire. Tel qu'il est cependant, et malgré son extérieur si modeste, on peut dire de ce livre que bien peu, dans notre littérature scientifique francaise, peuvent lui ètre comparés au double point de vue de la valeur intrinsèque et de l'utilité pratique. Ou je me trompe fort, ou il est destiné à marquer une date par son introduction dans l'outillage des laboratoires : tous les biologistes, tous les médecins soucieux du travail scientifique feuilleteront «le Morel», comme dans d'autres laboratoires on feuillette «le Frésénius », jusqu'à ce que l'usure rapide fasse à l'exemplaire sur- mené les glorieuses funérailles des bons serviteurs. D' L.-C. MArLcaR», Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 3° Sciences naturelles Legendre (R.). — Contribution à la connaissance de la cellule nerveuse (La cellule nerveuse d’Helix pomatia) | l'hèse de doctorat ès sciences]. —1A vol. de 267 pages, avec planches et fiqures. Paris, 1909. M. Legendre a choisi comme objet principal de ses recherches sur la cytolôgie, l'histophysiologie normale et pathologique de la cellule nerveuse, celle de l'Es- cargot, à cause de la taille de cette cellule, de la résis- tance aux actions pathologiques que la faculté d’hiber- nation confère à cet animal. Il a étudié les variations de structure observables pendant l'hibernation, l’acti- vité estivale, l’asphyxie par immersion, etc., et les a comparées à celles qu'on connaît chez des Vertébrés et d’autres Invertébrés. L'auteur n'est pas de ces histologistes qui, sans esprit critique aucun, décrivent et tiennent pour dignes d’être relatés tous les aspects qu'ils ont observés. Dans un avant-propos intéressant et original, il se met en garde contre les erreurs d'observation et de raisonne- ment qu'il ne faut pas commettre, c’est-à-dire contre les divers artefacts produits par les réactifs, les diffi- cultés qu'on rencontre à fixer une cellule nerveuse dans un état physiologique donné, — le sommeil, par exemple, — les conclusions trop faciles à des rapports existant entre les états physiologiques ou pathologiques et les images histologiques, la confusion des langages psychologique et histologique. La première partie du travail contient l'étude histo- logique de la cellule nerveuse, et successivement de sa morphologie externe, de la structure du noyau et du cytoplasme et de la névroglie. Chacun des chapitres de cette partie se termine par des conclusions partielles, dont quelques-unes méritent d'être signalées, parce qu'elles visent des points controversés de la cytologie nerveuse. Quant au noyau, la membrane nucléaire ne semble pas livrer passage à des particules figurées de substance nucléaire ou cytoplasmique; il existe des grains d'une substance faiblement acidophile que Le- gendre nomme chromatine; les nucléoles sont entiè- rement basophiles ou formés de deux substances, dont l’une basophile périphérique, l’autre acidophile cen- trale. Quant au cytoplasma, le centrosome n'existe pas; le réseau spongioplasmique semble identique au réseau neurofibrillaire; les canalicules de Holmgren sont pathologiques et sont un phénomène de neuro- nolyse. La névroglie est formée de cellules et de fibres; elle a normalement une fonction de soutien, et patho- logiquement intervient pour la cicatrisation du tissu nerveux et sans doute aussi pour la destruction des cellules lésées. La deuxième partie est consacrée à la physiologie et à la pathologie de la cellule nerveuse. L'auteur insiste une fois de plus sur la difficulté qu'il y a de déceler au 1 L = BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX microscope des variations physiologiques normales : la veille, le sommeil, l’anesthésie, dans les cellules ner- veuses. Ses recherches ont porté sur des Chiens anes- thésiés, insomniques, inanitiés, séniles, sur des Escar- gotshibernants,éveillés, nourris ou jeûnants,asphyxiés, et sur d'autres animaux. Il divise les résultats en quatre chapitres : 4° nutrition; 2° fonctionnement; 3° patho- logie; et # mort de la cellule nerveuse. 1° Les altéra- tions de nutrition, provoquées par les divers moyens employés par les expérimentateurs, consistent surtout en chromatolyse périphérique ou totale, en vacuolisa- tions du protoplasma et des dendrites, parfois en un dé- placement du noyau et du nucléole; l'homogénéisation du noyau est une lésion plus grave; les lésions des peurolibrilles sont plus difficiles à préciser. 2° Dans le chapitre du fonctionnement de la cellule nerveuse, l’auteur commence par se défendre d’avoir voulu dis- socier, pour une autre raison que celle de la clarté de l'exposition, les phénomènes de nutrition de ceux du fonctionnement. Il examine les différentes théories proposées pour l'explication des phénomènes nerveux, celle de l'amæboiïsme, celle de Dustin, à laquelle il reproche de ne pas tenir comple du chimisme cellu- laire, puisqu'elle s'appuie sur une comparaison stricte de l'influx nerveux avec l'électricité, celle du fonction- nement glandulaire de la cellule nerveuse, qui a le tort de ne pas montrer d'autre produit de sécrétion que l’influx nerveux. Les conclusions de ce chapitre ne sont pas encourageantes. On y hit : « l'étude histo- logique des cellules nerveuses ne nous permet pas de constater les variations de leur activité normale; l'étude du sommeil est impossible et celle de l’hibernation peu instructive; les changements observés sont inéga- lement distribués dans les divers organes et dans les diverses cellules sans qu’on connaisse les causes de cette inégalité; ils n'ont rien de spécifique, d’ailleurs, et sont les mêmes que dans les troubles de nutrition et aussi que dans les états pathologiques; ils atteignent toutes les structures qui ont été systématiquement étudiées, et ne permettent de distinguer ni des sub- stances fonctionnelles différentes des substances nutri- tives, ni des substances énergétiques différentes des substances conductrices. » 3° La distinction entre les états physiologiques et pathologiques de la cellule nerveuse est impossible. Les lésions cellulaires con- trastent par leur banalité avec la grande variété cli- nique des maladies nerveuses, et la cellule nerveuse ne parait pas avoir de réactions spécifiques aux divers agents morbides. L'auteur distingue cependant trois modes de dégénérescence survenant dans des circons- tances différentes : la dégénérescence toxique ou in- flammatoire avec neuronophagie, la dégénérescence atrophique, la dégénérescence pigmentaire; 4° Quant à la mort de la cellule nerveuse, il n'en existe pas de signe histologique certain. Dans une troisième partie, l’auteur expose et critique les théories relatives à la cellule nerveuse; il penche vers la théorie du neurone, sans toutefois se prononcer catégoriquement. La première et la seconde partie, la première sur- tout, sont accompagnées d'une abondante bibliogra- phie et représentent un exposé très complet et tout à fait à jour de l’état de nos connaissances sur la struc- ture et sur l’histo-physiologie normale et pathologique de la cellule nerveuse. On s'instruira beaucoup en les lisant. ; A la fin de son travail, M. Legendre, après avoir conclu partiellement et spécialement à la fin de cha- cun des chapitres de sa thèse, est tourmenté du besoin de présenter une conclusion générale. Il ne voudrait pas que « la lecture de ce travail sans conclusion, où tant de questions sont soulevées sans que j'aie pu les résoudre, inspirât à quelque lecteur sceptique des réflexions comme celles que l'abbé Jérôme Coignard communique à son disciple Tournebroche » : à savoir que les microscopes et lunettes ne sont que des moyens d'aider les sens dans leurs illusions et de multiplier notre ignorance de la Nature. Que M. Legendre se rassure, ses conclusions partielles suffiront au lecteur; leur sagesse même est un résullat dans une matière aussi sujelte à controverse que la structure de la cel- lule nerveuse, dans un problème aussi troublé que celui de l'histophysiologie du système nerveux. A. PRENANT, Professeur à la Faculté de Médecine de Paris. 4° Sciences médicales Sabourin (D' Ch.). — Traitement rationnel de la Phtisie. — 3° édit., À vol. in-16 de 328 pages. (Prix : 4 {r.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1909. Il est hors de doute que les cures les plus solides de la Tuberculose pulmonaire sont dues, pour la plupart, à la discipline hygiénique que les malades avertis veulent bien suivre. Pour accepter de plein gré cette soumission à une véritable direction d'habitudes, il faut au malade une confiance entière en son médecin. Pour qu'il l'acquière, il faut encore que le malade comprenne bien ce que le médecin veut de lui. Un des plus graves échecs de la médecine professionnelle tient à ce que les médecins n’ont pas le temps suffisant pour « dresser » leurs malades. Alors il ÿ a divergence fréquente entre le conseil et son application pratique. L'inestimable service que rend le Sanatorium est précisément d'apprendre au tuberculeux à se soigner : le bienfait moral prime tous les autres. Cette notion qu'une déjà longue expérience a dictée à M. Sabourin, il s’est efforcé de la généraliser. Il a voulu entretenir une com- munauté d'idées entre le médecin et le malade, en expliquant à l’un les raisons si diverses de l’action de l'autre. La première partie de l'ouvrage est consacrée à la curabilité de la phtisie. M. Sabourin montre comment on devient phtisique, et met en relief ce principe étio- logique si utile à retenir : « Nous devenons tubercu- leux parce que nous nous trouvons à un moment donné, enfant, adulte ou vieillard, dans un état de déchéance organique qui fait de notre économie un terrain propre à la culture du bacille qui est partout autour de nous. Et cet état de déchéance, nous l’appor- tons en venant au monde, ou nous le devons à quelque maladie affaiblissante ou bien à la misère physiolo- gique. » M. Sabourin dit le nombre considérable de tubercu- loses guéries. Il pourrait être plus grand encore, si on laissait à la guérison le temps d’être parfaite. La con- dition du succès thérapeutique réside dans le diagnos- tic précoce. L'auteur à résumé tous les moyens dont dispose la médecine actuelle pour l’établir avec certi- tude. . : La seconde partie comprend le traitement même. Iei le lecteur peut, en réalité, profiter des mille détails que la pratique à pu enseigner à un médecin attentif et per- spicace. Nous ne pouvons en faire une revue même sommaire. C'est aux intéressés de lire ce livre : ils feront bien d'en faire leur bréviaire, de le relire et d’en suivre les préceptes. .- Sous la plume de M. Sabourin, ce petit livre a pris un charme particulier. Il se distingue par la clarté d'exposition, le bon sens lucide, et, surtout, par cette tendance à la généralisation, coutumière à l’auteur et qui transparaît presque malgré lui. Et encore, il a con- servé l'allure convaincante et persuasive que jadis M. Sabourin savait mettre dans des œuvres de science plus spéculative et plus hautaine, qui nous firent regretter qu'il n'appliquât pas à la Science pure d'aussi rares facultés. Au lieu de charmer des histologistes, M. Sabourin rend aujourd'hui un service direct aux malades. Ose- rai-je prétendre que nos regrets d'antan aient encore quelque raison ? D' A. LÉTIENNE. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mu 19) ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2 Août 1909. 10 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Œ. Bergstrand déduit des mouvements des deux satellites intérieurs d'Uranus que l’aplatissement de la planète est très probablement de l'ordre de 1/20 et sa durée de rota- tion de 13 heures; sa densité moyenne est de 0,16 par rapport à celle de la Terre. — M. Ch. Lallemand essaie de déduire la valeur de la rigidité du globe terres des mesures faites à Potsdam par le D' Hecker sur deux pendules horizontaux disposés en croix; les va- leurs trouvées diffèrent du simple au double dans les deux directions E.-0. et N.-S. 29 SCIENCES PHYSIQUES.—MM. A. Cotton et H. Mouton montrent que la biréfringence magnétique des corps aromatiques n'appartient pas seulement aux liquides, mais aussi aux Corps vitreux. Si l’on conserve l'hypo- thèse de l'orientation moléculaire, il faut admettre que, dans les corps vitreux, les molécules jouissent d'une certaine liberté d'orientation. — M. P. Pascal a vérifié l'additivité des propriétés magnétiques sur les composés organiques. Il détermine les susceptibilités moléculaires en fonction des susceptibilités des atomes qui composent la molécule. — MM. G. Massol et M.-A. Faucon ont déterminé la chaleur latente de fusion de l'acide propionique (23,35 cal. pour 1 gr.) et sa chaleur spécitique à l’état solide (0,728); elle est supérieure à sa chaleur spécifique à l’état liquide. — M. G. Busignies, en faisant réagir sur les cétones amidées ou amido-alkylées les dérivés magnésiens des halogénures d'alkyles, a obtenu des amines éthy- léniques, qui peuvent fixer 2H pour donner des com- posés saturés. — MM. J. Courmont et Th. Nogier ont constaté que les rayons ultra-violets ont un très faible pouvoir de pénétration à travers les liquides contenant des substances colloïdes; pour stériliser ces derniers, il faut opérer sur des couches extrêmement minces. — MM. Dornic et Daire ont employé avec succès les rayons ultra-violets à la stérilisation de l’eau employée pour le lavage du beurre de crème pasteurisée; on augmente ainsi de 3 semaines la durée de conserva- tion des beurres. — M. A. Barillé montre qu'il existe dans le lait une combinaison carbonophosphatée faci- lement dissociable, que la pasteurisation décompose en déterminant une décalcification partielle en mème temps qu'une déminéralisation phosphatée, — Mme 7, Gruzewska et M. H. Bierry ont constalé que le suc pancréatique normal agit moins énergiquement sur le glycogène et sur l'amylopectine que sur l’amidon; la digestion est plus rapide quand l’alcalinité du suc pancréatique a été neutralisée dans une certaine limite. — MM. Em. Bourquelot et M. Bridel ont hydrolysé le raffinose par l'invertine avec formation de: lévulose et de mélibiose; ce dernier est dédoublé à son tour en glucose et galactose par l’'émulsine, grâce à la mélibiase qu'elle contient. L'action de ces deux ferments peut être utilisée à la recherche du raffinose dans les végétaux ; les auteurs l'ont ainsi décelé chez l’Erythrina fusea et chez l'Entada scandens. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. J.-T. Florence et P. Clément ont constaté que l'épileptique, en dehors des périodes d'attaques, oxyde la benzine en phénol- sulfates plus énergiquement que l’homme normal; ce pouvoir oxydant est diminué en période d'attaques. — M! P. Cernovodeanu et M. V. Henri ont étudié l'ac- tion de la lumière ultra-violette sur la toxine téta- nique : elle est proportionnelle à la concentration de la toxine, au carré de la durée, peu sensible à la tem- pérature, indépendante de la présence de l'oxygène. Les rayons actifs sont inférieurs à À = 2.021.— MM. A. Laveran el A. Pettit ont reconnu que, lorsqu'on injecte dans la cavité péritonéale d'une couleuvre à collier du sang riche en 1». Lewisi ou en Tr. Evansi, les trypanosomes passent rapidement dans le sang de la couleuvre, pour disparaitre au bout de quelques jours; mais rien ne permet d'affirmer que leur viru- lence est modifiée après passage par la couleuvre. — M. P. Hariot à fait quelques expériences sur la crois- sance des Æueus, qui le conduisent à admettre que cette croissance est plutôt lente. — M. A. Guillier- mond à observé qu'en dehors de l'Humaria rutilans, aucune des autres espèces d’Ascomycètes qu'il a étu- diées n'offre la seconde réduction numérique con- statée par Fraser et Welsford au cours de la seconde ou de la troisième mitose de l'asque. — M. J. Dareste de la Chavanne esquisse l'histoire géologique et la tectonique de l'Atlas tellien de la Numidie orientale. Séance du 9 Août 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Denjoy présente ses recherches sur les singularités discontinues des fonctions analytiques uniformes. — M. Ch. Lalle- mand essaie de concilier les deux modes principaux de détermination de la rigidité du globe, en faisant intervenir la considération des marées de l'écorce, qui auraient mème amplitude que les marées océani- ques et seraient les 2/3 des ondes théoriques calculées pour une Terre indéformable. Le coefficient de rigidité de la Terre serait de 6,3. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. G. Gouy à poursuivi l'étude de la couronne magnéto-anodique dans les tubes de Crookes. Tout obstacle y produit une sorte d’ondulation ou de zigzag, formée par une sinusoïde ou une ligne brisée, tracée sur un tube de force ma- gnétique. — M. J. Becquerel a observé, sur les com- posantes magnétiques, polarisées circulairement, des bandes d'absorption des cristaux uniaxes, deux sortes de dissymétries d'intensités : l’une liée à la dissymé- trie de positions, la composante la moins déplacée étant augmentée aux dépens de l’autre, l’autre consis- tant en un renforcement de la composante accélérée. — M. H. Herchfinkel à constaté que l'acide carbo- nique est décomposé en oxyde de carbone et oxygène par les rayons ultra-violets. — M. Rosenstiehl : De l'intervention de la pression osmotique en teinture (voir p. 683). — M. E. Kohn-Abrest décrit un procédé de dosage rapide de l'aluminium métallique, basé sur l’action d'un courant de H et de HCI à 300° qui en- traine tout l’Al métallique à l’état de chlorure. — M. P.-L. Viguier, par action de Br sur l'aldéhyde crotonique, a obtenu un dérivé bibromé, qu'on trans- forme par la méthode de Claisen en acétal «f-bibro- mobutyrique; l'enlèvement de 2HBr à ce dernier fournit l'acétal tétrolique CH°C: C.CH (OC°H°)*, Ep. 1639-1669. — M. H. Duval a étudié l’action des agents de benzidination sur les hydrazoïques dérivés du diphényle, du diphénylméthane et du diphényléthane. — MM. H. Labbé et G. Vitry ont observé, chez le glycosurique et le diabétique, un indosé urinaire constitué par des substances qui ne se confondent ni avec les sucres habituels, ni avec l’indosé habituel, et peuvent, à ce litre, constituer un élément distinetif de la lésion.— M. F. Landolph a reconnu qu'à chaque espèce de glucosurie ou de diabète correspond, dans les urines, la présence d’un mélange de plusieurs espèces de sucres ou d'hydrates de carbone. — M. X. 756 Roques montre que l'oxydase qui existe dans la lymphe et le corps gras de la larve de Limnophrilus flavicorais, ès abondante pendant la fin de la vie larvaire, décroit très rapidement au début de la vie nymphale, pour repasser par un maximum qui coin- cide avec les phénomènes de pigmentation, puis dé- croitre définitivement. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. J. Athanasiu et A. Gradinesco montrent que la mort des animaux privés des capsules surrénales est due à l’arrêt des échanges entre le sang et les tissus. — M. Rappin, par l'injection intra-veineuse de bacilles de la tuberculose humaine et bovine modifiée par l’action de solutions de fluorure de sodium, à conféré aux animaux, eu particulier aux Bovidés, une résistance manifeste à l'injection par voie intra-vasculaire du virus tuberculeux. — M. J. Crolbois, en ensemencant avec des ferments lactiques accoutumés les pulpes de distillerie et de sucrerie en fosse, en a fait disparaitre l'odeur repoussante ; l'en- graissement des animaux (bœufs) nourris avec ces pulpes à été hàté de près de 3 stmaines à 1 mois. — MM. A. Müntz et H. Gaudechon ont constaté que l'humectation de la terre végétale desséchée dégage une certaine quantité de chaleur; c'est l'argile et surtout l'humus qui interviennent dans ce phénomène ; il y a action de surface et aussi hydratation chimique. — MM. D. Bois et C. Gerber décrivent une maladie parasitaire du Cannellier de Ceylan, due à un Acarien nouveau, l’£riophyes Boisi, qui provoque sur les feuilles la formation de deux sortes de pustules. Cette maladie, quoique commune à Ceylan, ne semble pas influer sur la valeur des écorces ; il n'en est pas de même à Java. Séance du 17 Août 1909. 1° SctENCES PHYSIQUES. — MM. H. Bodroux et F. Taboury ont observé que les acétones de la série grasse qui possèdent dans leur molécule le groupe- ment CO.CH* attaquent à l'ébullition le carbure de calcium et donnent naissance, par condensation avec élimination d’eau, à des acétones non saturées. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. Cl. Regaud a étudié les mitochondries des fibres musculaires du cœur. Quel que soit le sens de la coupe, les chondriosomes apparaissent toujours comme des corps indépendants; ilsne participent à la formation d'aucun réseau. — Mie EI. Lazarus à constaté que les limites d'acidité ou d'alcalinité entre lesquelles la bactéridie de Davaine peut se développer, ainsi que le degré de réaction auquel correspond l'optimum de la protéolyse, varient non seulement selon la race, mais encore selon la nature de la matière alimentaire. — M.J. Dareste de la Chavanne poursuit l'esquisse de l'histoire géolo- gique et de la tectonique de l'Atlas tellien de la Numidie orientale aux temps néogènes. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 27 Juillet 1909. MM. Hansen (de Bergen) et Morisani (de Naples) sont élus Associés étrangers de l'Académie. M. L. Guignard présente un Rapport sur un travail de MM. E. Perrot et A. Goris relatif à la stérilisation des plantes médicinales. Les auteurs ont traité à l'auto- clave par les vapeurs d'alcool les feuilles de plantes médicinales et ont reconnu que les feuilles ainsi stéri- lisées ne s'altérent pas à l'abri de l'humidité et conser- vent sans modifivation les propriétés physiologiques qu'elles présentent à l’état frais. — MM. P. Reynier el Masson signalent un cas rare de sténose pylorique due à un lobule pancréatique aberrant; le malade guérit par résection du pylore, et gastro-entéro-anastomose. — M. A. Netter a observé, au cours de la récente épi- démie parisienne, un cas de septicémie méningo- coccique sans méningite, qui guérit par le traitement sérothérapique. Cette septicémie s’est traduite par une lièvre d'allure continue ou rémittente accompagnée ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d'éruptions de caractère pétéchial: cette forme est facile à méconnaître. D'autre part, l’auteur donne les résultats globaux de la sérothérapie antiméningo- coccique pratiquée chez 68 malades; la mortalité a été de 12,5 °/,. Dans un cas, on a procédé à 22 injections. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 2% Juillet 1909. M. A. Maja a observé que les injections d'émétique et d’atoxyl agissent sur le trypanosome du surra en donnant naissance à des formes d'involution. Les para- sites attaqués par le poison viennent s'arrêter dans le foie pour y être détruits. — M. P. Verdun propose une nouvelle division des formes larvaires connues des genres Allotrombidium et Trombidium. — MM. Gouge- rot et A. Blanchetière ont constaté que les corps microbiens tués de Sporotrichum Beurmanni, bruts ou dégraissés et épuisés à l'alcool, reproduisent les lésions humaines dans tous leurs détails. — MM. A. Blanche- tière et J. Chevalier n'ont pas rencontré de choline dans le pancréas et n’en ont trouvé que destraces dans la thyroïde. — M. J. Chevalier montre que l'hypoten- sion déterminée par l'injection de choline et par celle d'extraits glandulaires ne se produit pas de la même facon. — MM. A. Netter et R. Debré signalent l’exis- tence de liquides céphalo-rachidiens normaux, dépour- vus de microbes, dans les formes atténuées ou abor- tives de la méningite cérébro-spinale ; par contre, dans ces cas, le sang agglutine le méningocoque. — M. A. Fava a constaté que le Sporotrichum Beurmanni donne lieu, par injection dans la chambre antérieure de l'œil du lapin, à des lésions gommeuses de l'iris ; dans le corps vitré, cet organisme produit de graves altérations des membranes profondes et du vitré même. — MM. A. Gilbert et E. Chabrol, par injection de sub- stances toxiques et hypertension porte, ont provoqué des hémorragies pancréatiques et une stéatonécrose. — MM. A. Gilbert et M. Villaret montrent la possi- bilité de l'expulsion trans-hépatique, à contre-courant, d'une injection poussée dans les veines sus-hépatiques. — MM. H. Labbé et V. Hancu ont reconnu que, chez les goutteux, les échanges puriques sont réduits ; ily a en même temps une réduction dans l'oxydation purique.— MM.F. Battelli et L. Stern ont constaté que, dans la respiration accessoire des tissus, le quotient respiratoire est généralement assez bas ; l'absorption de l'oxygène est due à l'intervention de l’uricase et d'une oxydase. — MM. J. E. Abelous et E. Bardier ont observé une anaphylaxie manifeste chez le lapin et chez le chien à la suite d’injections successives d’uro- hypertensine. — M. A. Besredka montre qu'on peut empêcher la mort subite, produite par des injections répétées de sang dans la circulation générale, par l'in- jection préventive d'une faible quantité de même sang dans les veines. — MM. P. Nicolle et E. Conseil sont parvenus à communiquer la fièvre méditerranéenne au cobaye par inoculation sous-cutanée ou injection de cultures de A. melitensis. — M. R. Laufer a étudié l'influence du sucre et de l'alcool sur les courbes stati- ques ou d'endurance. — MM. L. Morel et E. Terroine ont mesuré l’action du sue pancréatique sur les glycé- rides. La vitesse de dédoublement décroît considérable- ment en passant de la tri- à la di- et de la di- à lamono- acétine. — M. M. Nicloux a constaté qu'une certaine quantité de chloroforme absorbée par l'organisme pendant l'anesthésie disparaît, vraisemblablement par hydratation et saponification. — M. L. Bazy signale deux cas de salpingite ulcéreuse et végétante hémorra- gipare. — MM, H. Busquet et V. Pachon ont observé, chez le chien atropinisé, que le chlorhydrate de choline et le chlorhydrate d'adrénaline, injectés simultané- ment à dose convenable, peuvent additionner leurs effets hypertenseurs. — M. L. Lapicque donne une nouvelle définition expérimentale de l’excitabilité. — M. et Mn L. Lapicque préconisent l'estomac de la gre- nouille comme milieu pour l'étude de l'excitabilité ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 7157 lente. — Mn: C. Phisalix et M. G. Dehaut ont isolé le venin muqueux du Pélobate cultripède : c'est un poison stupéfiant, paralysant et diastolique, se rapprochant comme activité du mucus des crapaudsetsalamandres. — MM. Imbert et Bonnamour ont constaté la pré- sence constante d’acétone dans les urines des diabéti- ques glycosuriques avant l'apparition du sucre, pendant la glycosurie et après sa disparition. — MM. L. Babon- neix à reconnu que, dans le tétanos expérimental comme dans le tétanos humain, l'hyperexcitabilité élec- trique aux courants de fermeture comme aux courants d'ouverture manque constamment. — MM. P. Nobé- court et Paisseau ont observé, chez des lapins qui ont recu des injections répétées de blanc d'œuf de poule par la voie gastrique ou par la voie rectale, des lésions rénales caractérisées surtout par la cytolyse protoplasmique. — M. H. Iscovesco à constaté que l'hépatocatalase est électropositive ; elle est détruite par le courant électrique. — M. S. Marbé montre que le corps thyroïde en ingestion influence la réaction des leucocytes et du sérum en augmentant l'acidité normale à la phtaléine de ces éléments ; cette acidité est due à un excès de CO*. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 12 Juillet 1909. M. Abeille de Perrin décrit un Ditomide nouveau de Syrie, caractérisé par la petitesse de sa tête et par son corselet cordiforme ; il le nomme Aristus infans. — M. S. Costa à observé une association du bacille fusi- forme et du spirille de Vincent dans un cas de nécro- pyohémie. — M. C. Gerber a constaté que la présure de la belladone est fortement basiphile en présence des sels neutres des métaux alcalins, faiblement oxyphile et calciphile, fortement résistante à la chaleur. Les anomalies de localisation de la présure dans les diver- ses espèces de Solanées et dans les diverses régions d'un même membre s'expliquent par les anomalies de situation ou de développement du liber dans cesplantes. — MM. Alezais et J. Livon fils ont observé un cas de tumeur utérine à la suite de môle vésiculaire ; il s'a- gissait d’un chorio-épithéliome. —MM. Ed. Hawthorne et C. Juge ont trouvé, sous l’épiderme du cobaye neuf soumis à la fulguration, un œdème Iymphorréique, d'abord séreux, mais riche après quelques heures en leucocytes, surtout polynucléaires. La formule hémo- leucocytaire du cobaye se caractérise par de l'hyper- globulie, de l'hyperleucocytose aux frais des polynu- cléaires surtout et aussi des lymphocytes. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 20 Mar 1909. MM. J. O. W. Barratt et W. Yorke décrivent une méthode pour le détermination du volume total de sang contenu dans le corps vivant. En principe, elle con- siste à injecter dans le courant sanguin une quantité connue d'hémoglobine dissoute et à déterminer le degré de l’hémoglobinémie résultante. On peut ensuite calculer le volume du plasma sanguin, et à l’aide de la détermination hémocrite de la composition en volume du sang, on déduit la quantité totale de sang présente dans le corps vivant. L'hémoglobine employée est pré- parée avec les cellules rouges du sang du sujet en observation: on n’a observé aucun trouble chez ce dernier après l'injection de l'hémoglobine dissoute. La détermination de l'hémoglobine est généralement faite avec l'hémoglobinomètre de von Éleischl. — M. J. Cammidge présente des observations sur l'urine dans les maladies du pancréas. L'auteur à constaté que l'urine d’un malade souffrant d'une affection inflam- matoire du pancréas, après précipitation de l'acide glycuronique, donne avec la phénylhydrazine un pro- duit qui varie en quantité suivant l'intensité et le stade de la maladie. Les urines normales et celles qui pro- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. viennent de malades atteints d'autres affections ne donnent pas cette réaction. L'urine de trois chiens chez lesquels on avait provoqué expérimentalement une pancréalite aiguë ou chronique donne la réaction. Cette réaction est due à un sucre ayant les propriétés d’un pentose et donnant une osazone fondant à 1789-1800. La substance-mère n’a pu être encore isolée; elle dérive probablement du pancréas, d'où elle passe dans le sang, puis dans l'urine. — MM. E. F. Bashford et J. A. Murray ont déterminé la fréquence relative du cancer chez des souris d'äge connu. On sait que le cancer est relativement fréquent chez les souris femelles, où il se transmet en quelque sorte « épidémi- quement », à la façon d'une maladie infectieuse. Les auteurs ontobservé un lot de souris d'âge connu et ont noté la date à laquelle les tumeurs apparaissent chez elles. Voici le résultat de leurs observations : AGE TOTAL CANCER POURCENTAGE 6-9 mois . . . . 135 3 2,2 AD UE à 110 4 3,5 PAS LEE 94 7 1,4 LE = 4,30 21 3 14,2 HT = Lee 6 2 33,3 On voit que la fréquence des cas de cancer augmente avec l’âge; cette règle, déjà observée chez l'homme, se vérifie donc aussi pour les animaux à courte vie. Toute explication de l'étiologie du cancer devra ainsi s'accorder avec ce fait que, statistiquement, le cancer est une fonction de l’âge, et biologiquement une fonc- tion de la sénescence. — Sir D. Bruce, MM. A. E. Hamerton, H. R. Bateman et F. P. Mackie: Le Trypanosoma ingens n. Sp. Séance du 27 Mar 1909. M. A. L. Dixon : Quelques résullats dans la théorie de l'élimination. Dans de précédents travaux, l’auteur a donné des expressions, sous forme de déterminants, pour les éliminants de deux quantiques en une variable et de trois quantiques en deux variables. Le but du présent travail est de montrer comment, de ces expres- sions, on peut en dériver d'autres qui donnent les éliminants comme une somme de termes. — Lord Rayleigh : Sur les oscillations dues à la marée sur un globe en rotation. L'auteur développe d'abord la théorie des vibrations libres d'un feuillet de liquide rectangulaire plan, sous la seule restriction que la vitesse angulaire est relativement faible. Puis il passe au problème correspondant pour un océan sur un globe en rotation, limité par deux méridiens, mais sans grand succès. — M. H. T. Barnes : La valeur absolue de l'équivalent mécanique de la chaleur en termes d'unités électriques internationales. L'auteur fait remarquer que les piles de Clark employées dans ses déterminations de l'équivalent mécanique de la chaleur en termes d'unités électriques étaient prépa- rées d’après d'anciennes méthodes. Les mesures abso- lues de la pile de Clark obtenues maintenant avec une grande précision dans les divers laboratoires d’étalon- nage sont exprimées en termes de la nouvelle forme de pile avec du sulfate mercureux spécialement pré- paré. Il existe une différence importante entre les deux genres de piles, qui, d’après Wolff et Waters, s'élèverait à 0,30 millivolt. L'auteur à comparé une série de piles modernes avec des piles établies d'après les anciennes méthodes, et il trouve la même difré- rence constante. Si l'on prend 1,4330 volts internatio- naux à 15° C. comme représentant les piles modernes, on peut alors prendre 1,4#333 volts internationaux à 45° C. pour les piles établies par les anciennes mé- thodes. Les mesures de l’auteur de l'équivalent méca- nique à différentes températures ont été calculées sur la base d'une valeur pour la pile de Clark égale à 1,4342 volts internationaux à 15° C. En recalculant sur la nouvelle base, l'auteur trouve que la valeur de la calorie moyenne est de 4,1849 joules. Ces chiffres (7 la 758 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES s'accordent avec la moyenne déterminée directement par Reynolds et Moorby, laquelle, exprimée d’une façon précise pour l'intervalle de température entre 0° C. et 1000 C., s'élève à 4,1836 joules. La valeur moyenne de Rowland entre 5° C. et 35° C. est de 4,185 joules, tandis que la valeur de l’auteur entre les mêmes limites de température est de 4,1826 joules. Ainsi, en supposant la variation de la chaleur spécifique de l’eau correctement déterminée, la valeur de la pile de Clark, égale à 1,4330 volts internationaux, donne pour l'équivalent mécanique déterminé électriquement un excellent accord avec la même constante mesurée mécaniquement. — M. H. C. Greenwood : Une déter- minalion approximative des points d'ébulhtion des métaux. Quoique les températures élevées puissent maintenant être facilement obtenues au moyen du chauffage électrique, on n’a pas encore entrepris une recherche générale sur les points d'ébullition des métaux. De plus, telles valeurs qui sont utilisées ont été déduites indirectement dans la plupart des cas, et sont très discordantes. L'auteur vient de construire un appareil pour mesurer directement les tempéra- tures d’ébullition, sous la pression atmosphérique, d'un nombre considérable de métaux, jusqu'à une température de 2.700° C. Le chauffage a été produit électriquement; le métal, lorsqu'il n’est pas attaqué par le carbone, est renfermé dans un creuset de gra- phite à parois minces, à l’extérieur duquel la tempé- rature à été estimée au moyen d’un pyromètre optique de Wanner. La différence de ternpérature entre les surfaces interne et externe des parois du creuset à été trouvée négligeable. On a assuré la précision des mesures de température en calibrant le pyromètre avec les points de fusion (corps noir) de bandes de platine, de rhodium et d'iridium spécialement puri- liées. Voici les valeurs trouvées : aluminium, 1.800 C.; antimoine, 4.440° C.; bismuth, 1.420° C.; chrome, 2.200° C.; cuivre, 2.3100 C.; fer, 2.450° C.; magnésium; 1.120° C.; manganèse, 1.900° C.; argent, 1.955° C.; étain, 2.2709 C. En opérant avec les métaux aluminium, chrome, fer et manganèse, qui se combinent rapide- ment avec le carbone, l’auteur a eu des difficultés considérables pour empêcher le contact avec le car- bone aux hautes températures en question. Il y est finalement parvenu en employant des creusets de graphite brasqués avec de la magnésie préalablement fondue. En l'absence de cette couche protectrice, le point d'ébullition est grandement modifié par la carburation. Les températures indiquées pour l’alu- minium et le manganèse sont bien inférieures à celles supposées jusqu'ici nécessaires pour l'ébullition. — MM. J. H. Andrew et C. A. Edwards : Les courbes du liquidus du système ternaire aluminium-cuivre- étain. L'objet de ce travail était de jeter quelque lumière sur les propriétés, peu connues, des alliages ternaires et, incidemment, l'effet des impuretés sur les alliages binaires, Les métaux constituant les alliages avaient le degré suivant de pureté : AT, 99,57 °/,; Cu, 99,98, °/,; Sn, 99,98 0/,. Plus de 400 déterminations de points de fusion et de solidification ont été faites. Le caractère des courbes du liquidus indique qu'aucun com- posé ternaire bien défini n est déposé d’un quelconque des alliages liquides. L'affinité de Sn pour Al ou Cu n'est pas suffisante pour surmonter l’affinité de ces deux derniers l’un pour l’autre. En conséquence, les courbes des points de fusion des alliages contenant un pour- centage constant de Sn offrent une grande ressem- blance avec la courbe du liquidus des alliages Al-Cu; l’'étain est insoluble dans le plus grand nombre des alliages, — MM. M. C. Stopes et K. Fujii présentent leurs études sur la structure et les affinites des plantes du Crétacé. Les auteurs décrivent 48 plantes nouvelles, pétrifiées dans des nodules calcaréeux. Elles provien- nent toutes d'Hokkaido (Japon septentrional) et sont d'âge crétacé supérieur, comme le montre la faune qui les accompagne. Elles comprennent un champignon, fougères, huit gymnospermes et trois angio- trois spermes. Les plus intéressantes sont : un nouveau type de gymnosperme, l’Yezonia, dont | anatomie végétative diffère de celle de tous les genres connus; une fructi- lication gymnospermique nouvelle, qui semble appar- tenir à l'Yezonia; un angiosperme appartenant aux Sabiacées; un angiosperme de la famille des Sauru- racées, et la première fleur pétrifiée, le Cretovarium japonicum, qui possède trois carpelles entourés par le périanthe. Séance du 10 Juin 1909. M. À. E. H. Tutton décrit un comparateur de lon- queurs d'onde pour les étalons de longueur. Le prin- cipe de l'instrument est celui de l’interféromètre de l'auteur, avec cette exception qu'un prisme à déviation constante de Hilger est employé à la place d'un train de deux prismes de spectroscopes. Le point essentiel de l'instrument est que l’un des deux microscopes em- ployés pour mettre au point les deux lignes de défini- tion d'un barreau étalon porte, juste au-dessus de l'objectif, une des deux plaques de verre de l'appareil à interférence qui réfléchit la lumière monochroma- tique devant interférer et produire des bandes sombres rectilinéaires. Quand on déplace le microscope, la plaque se meut avec lui, et la quantité de mouvement est déterminée par le mouvement des bandes d’inter- férence, étant égale à la moitié de la longueur d'onde de la lumière employée pour chaque bande qui passe devant le point de référence au centre du champ du télescope de l’interféromètre. Ce mouvement délicat a été si parfaitement assuré que l’on peut faire mouvoir simultanément le microscope et les bandes, par la rotation d’une grande roue à ajustement de précision, d'une facon si tranquille que chaque bande passe devant le point de référence aussi lentement que l'on veut et peut être arrêtée instantanément sans le moindre tremblement, en un point quelconque de sa largeur, de sorte que le contrôle et le compte des bandes est tout ce qu'il y a de plus simple. Pour com- parer deux barreaux étalons, il suffit de placer le bar- reau de longueur connue sous les deux microscopes, de sorte que les deux lignes de définition soient ajus- tées, dans chaque cas, entre les deux fils d’araignée du micromètre de l’oculaire. Puis l’on remplace l’éta- lon par la copie à essayer, de sorte que la ligne de définition de l’un des bouts soit ajustée de la même façon sous le micromètre correspondant; si l’autre ligne de définition n'est pas ajustée automatiquement sous le second microscope qui porte la plaque d’inter- férence en verre, on fait mouvoir ce microscope jus- qu'à ce qu'il soit ajusté, en observant et comptant le nombre de bandes d'interférence qui passent sur le point de référence. La différence de longueur entre les deux barreaux est égale à ce nombre, multiplié par la moitié de la longueur d’onde de la lumiere qui sert à produire les bandes. — M. A. E. H. Tutton : L'emploi des traits de longueur d'onde comme lignes de définition sur les étalons de longueur. La délicatesse de la méthode de mesure décrite dans la communica- tion précédente appelle une finesse correspondante dans les lignes gravées qui constituent les lignes de définition de la longueur des barreaux-étalons. Or, actuellement, les lignes de définition des étalons employés contiennent dans leur largeur 15 à 40 bandes d'interférence de lumière rouge. L'auteur a fait appel au talent de M.J. H. Grayson, de Melbourne, qui est parvenu à exécuter sur métal de spéculum des lignes gravées dont la largeur ne dépasse pas celle d'une seule longueur d'onde de lumière rouge (1/40.000° de pouce). L'auteur propose d'employer comme marques sur les barreaux-élalons un système composé de cinq lignes parallèles de ce genre, distantes de 1/40.000° de pouce, bordées de chaque côté par une paire de fortes « lignes de recherche » et limitées par une autre paire de « lignes de recherche » perpendiculaires; c'est la ligne centrale des cinq lignes fines qui constituera la ligne de définition, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 759 SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance du 3 Mai 1909. M. E. À. J. Kuhnke décrit un nouveau compteur de vapeur, basé sur la formule simple W=—S;V, où West la quantité totale de vapeur passant à travers le compteur exprimée en kilos par seconde, S la section en mètres carrés, V la vitesse de la vapeur en mètres par seconde et y le poids de { mètre cube de vapeur en kilos à la pression moyenne. Au moyen d’un dispositif parti- culier, on s’est arrangé, en faisant S variable, pour rendre V, qui est dilficilement mesurable, constant pour chaque valeur de y. La variation de S est enre- gistrée sur un cylindre, en même temps que la pression de la vapeur, d’où l’on déduit y. — M.J. Lewkowitsch présente un nouveau réfractomètre, construit par M. H. Heele, de Berlin, et basé sur la méthode de Kohlrausch-Abbe pour déterminer l'angle sous lequel le rayon limite, entrant dans l’objet en observation sous une incidence rasante, émerge d'un quadrant cylindrique en flint francais à grand pouvoir réfrac- teur. Séance du 7 Juin 1909. M. J. M. Wilkie a étudié la valeur de la méthode au sulfure alcalin pour la détermination colorimétrique du plomb en presence de fer. Il existe une différence essentielle entre le fer ferreux et le fer ferrique, le premier étant seul convertible par le cyanure @e potas- sium en substances incolores non affectées par le sul- fure alcalin. L'hydrate ferrique, au contraire, absorbe le plomb, et si sa proportion dépasse le double de celle du plomb présent, la précipitation est complète et il ne reste pas de plomb en solution. Cette propriété pourra être utilisée à la préparation de produits chimiques exempts de plomb. Lorsque le fer ferrique est présent dans la détermination du plomb, il devra donc être réduit à l’état ferreux (par le thiosulfate de soude) en présence de cyanure de potassium. — M. A. G. Green communique ses recherches sur les sels quinonoïdes des phtaléines, qui confirment la théorie récente de von Baeyer sur la coloration des colorants du triphé- nylméthane : celle-ci serait due à une oscillation de la liaison quinonoïde entre les deux noyaux benzéniques, accompagnée par une oscillation correspondante et opposée de l'ion du groupe formant sel entre l'O ou l’Az en para d'un des noyaux et celui de l’autre. SECTION DE MANCIIESTER Séance du 7 Mai 1909. MM. J. Hubner et F. Teltscher poursuivent leurs recherches sur l'action de la lessive de soude caustique sur le coton. Les quantités d'hydrate de soude absor- bées par le coton dans des solutions de soude caustique variant de 30° à 80° Tw sont pratiquement identiques ; il y à un léger maximum d'absorption dans les solu- tions à 40° Tw. Il ne paraît pas se former de composés chimiques (celluloses sodées) distincts. d SECTION DE BIRMINGHAM Séance du 1% Avril 1909. M. R. Threlfall : L'échaullement spontané du char- bon, en particulier sur les navires qui le transpor- tent. L'auteur commence par résumer les recherches classiques de Fayol sur ce sujet, puis celles, plus récentes, de la Commission de la Nouvelle-Galles du Sud. 11 conclut que la possibilité d'incendie spontané du charbon est liée d’abord aux dimensions du navire, les cargos de plus de 2.500 tonnes étant les plus expo- sés. Les tas de poussière de charbon qui se trouvent sous les écoutilles sont les plus dangereux. Une légère ventilation du charbon est dangereuse. Les risques d'inflammation spontanée sont plus grands quand le charbon est chargé en été qu'en hiver. Enfin, la cass du charbon pendant le chargement est un facteur contribuant à la combustion spontanée, SECTION D'ÉCOSSE Séance du 6 Avril 1909. M. J. Hendrick : La chaux dans la scorie basique. L'auteur montre que la chaux dans la scorie basique u’est pas seulement une quantité très variable, mais qu'elle existe sous diverses formes de combinaison. Une petite partie est de la chaux caustique libre: le reste est en combinaison sous forme de silicates et de phosphates basiques, Une partie de cette chaux com- binée est libérée facilement dans le sol, le reste plus lentement. — MM. J. L. Baker et H. F. E. Hulton ont étudié l’action de la farine de froment sur la levure des boulangers et des brasseurs. Ils confirment l'exis- tence, dans la farine, d’une substance toxique pour la levure de fermentation basse des brasseurs, l’action toxique étant la plus forte en présence d’eau distillée, tandis.que le sulfate de potassium et d’autres sels l’atté- nuent. La levure de brasserie, cultivée trois fois const- cutivement sur un moût de matière à whisky, acquiert les propriétés d’une levure de boulangerie. La levure de boulangerie semble devoir son immunité contre la toxine au fait qu’elle à été produite dans un moût pré- paré avec des céréales. Les levures de boulangerie et de brasserie se comportent de même vis-à-vis du sucre inverti. La fermentation d’une solution de sucre par la levure de brasserie est arrêtée par l'addition de farine, à moins qu'on n'ajoute en même temps du sul- fate de potassium. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 29 Mai 1909. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Zwaardemaker : Sur des corrélations d'odeur, en rapport avec des expé- riences de M. J. Hermanides. Sous la direction de M. Zwaardemaker, M. ilermanides a rédigé une thèse sur les constantes des olfactomètres usuels, au nombre de neuf, dont les substances odorantes, aussi pures que possible, ont pour milieu porteur la paraffine liquide, à l'exception de la muscone, dispersée dans l'acide myristinique. D'abord on fixe pour chaque olfactomètre la quantité minima perceptible, Pour pouvoir comparer les résultats obtenus par M. Herma- nides à ceux d’autres expérimentateurs, l’auteur donne dans le Tableau I (p. 760) un aperçu de ces quantités minima. Les expériences de M. Hermanides ont trait à toutes les combinaisons possibles en des proportions choisies de telle manière que les odeurs se détruisent, soit parfaitement, soit à peu près. Les nombres de proportions p et q obtenus par M. Zwaardemaker et par M. Hermanides sont déposés dans le Tableau Il. Ainsi, dans les cas indiqués en chiffres gras dans le tableau ci-après, les différences des résultats de MM. Zwaar- demaker et Hermanides tombent entre les limites des erreurs probables. — M. P. van Romburgh présente aux noms de MM. E. Cohen et W.Tombrock: La conduite electromotrice des amalgames de zine, et au nom de M. C. J. Enklaar : Sur la réaction du cuivre actif sur le linalol. — M. W. H. Julius présente la thèse de M. G. J. Elias : « Anomale magnetische draaiingsdi- spersie in verband met selectieve absorpsie » (Disper- sion de rotation magnétique anomale en rapport avec l'absorption sélective). — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. J. J. van Laar : Sur l'état solide. HI. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen : Notice nécrologique sur le Dr Th. W. Engelmann. M. Engelmann, né à Leipzig en 1843, fut, de 1871 à 1897, professeur de Physiologie à l'Université d'Utrecht. — M. C. E. A. Wichmann : Les lourbières de Parchipel Indien. En 1778, F. von Beroldingen publiait une théorie d’après laquelle les couches de 7160 TaëLeAU I. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES — Quantitès minima d’odeurs perceptibles dans les différents olfactomètres. ZWAARDE- MAKER ZWAARDE- MAKER Acélate d'isoamyle 1/2 2/0. . Nitrobenzène 5 0) . Terpinéol 2,5 0/0. Muscone 0,627 0/, PERLE sisulfure d’éthyle 10/600 : Gaiacol 1 2/60 SPORE Acide valérique 1 0/000- Pyridine 1 ne Katol 1 0/50 0,23 0,003 NOYONS KUBO HERMANIDES HERINGA 0,34 0,007 1,00 DES —- 0,004 0,50 0,02 0,023 0 ,0003 Cr] TaBLEAU II. — Comparaison des résultats de MM. Zwaardemaker et Hermanides sur les proportions d'odeurs qui se détruisent. ZWAARDEMAKER HERMANIDES houille doivent être considérées comme des tourbières dont la tourbe, ensevelie sous d'autres couches plus lourdes, s’est transformée en charbon. Cette théorie s’est maintenue brillamment jusqu'à ces temps-ci. Il n’est pas douteux, non plus, que, dans la période de la formation de la houille, un climat tropique égal régnait sur toute la terre. En flagrant conflit avec cette théorie, la plupart des traités de Géographie prétendent qu'on ne trouve pas, dans les régions des tropiques, des tour- bières autochtones, ce qui mène à la supposition que la formation des tourbières et des couches de houille ne peut se présenter que sous un climat modéré. M. Wich- mannp donne ici une énumération des tourbières des îles de Java, de Sumatra et de Bornéo. — Ensuite, M. Wich- mann présente la thèse de M. L.M.R. Rutten: «Die dilu- vialen Säugetiere der Niederlande » (Les mammifères diluviaux des Pays-Bas). — M. F. A. F. C. Went présente au nom de Me C.J. Pekelharing : ltecherches sur le rapport entre le temps d'exposition et le montant de l'excitation dans le cas des courbures géotropiques.Par des recherches de M. A. H. Blaauw et de M. P. Früschel datant de 1908, il a été prouvé que, dans le cas d'irri- tation phototropique par de la lumière d'intensité différente, le produit des temps d'exposition et des intensités est constant. On ne sait pas encore si cette loi simple existe dans les cas d'irritation d'un autre caractère. Dans le cas des courbures géotropiques, les expériences de H. Bach, datant de 1907, en donnent toutefois une légère indication. M. Frôschel est d’opi- nion que les résultats de M. Bach prouvent bien l'exis- tence du rapport en question. Comme le nombre des expériences est assez faible et que les oscillations et les divergences sont assez grandes, M. Went jugea dési- rable de provoquer des recherches plus étendues el plus minutieuses. Mile Pekelharing, inspirée par cel appel, publie ici le résultat de ses expériences faites sur les cotylédons étiolés d'Avena sativa; elle trouve que le rapport simple, rendu probable par les expé- riences de M. Bach, existe en effet. — Ensuite, M. Went présente la thèse de M. A. H. Blaauw : « Die Perzep- tion des Lichtes » (La perception de la lumière). — M. S. H. Koorders : 1° /iemarques sur la communica- tion de M. Wichmann sur les tourbières de l'archipel Indien; 2° Contribution à la connaissance de la disper- sion endozoïque des graines par les oiseaux à Java, en rapport avec une collection faite par M. Barthels sur le Pangerango et près de Batavia. 1; 3° Quelques remarques Sur la nomenclature et la synonymie de XYylosma leprosipes Clos., Xylosma fragrans Deone et Flueggea serrata Miq. P. H. Scroure. Le Directeur-Gérant : Louis OL1vier. Paris, — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE N° 18 30 SEPTEMBRE 1909 Revue générale D. Crences pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Kevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Météorologie Le Service météorologique de lFExposition aéronautique de Franefort.— L'Exposition aéro- nautique internationale qui vient de s'ouvrir à Franc- fort-sur-le-Main comporte une Station météorologique spéciale. La tourelle nord-ouest du grand Palais est, en effet, affectée spécialement aux recherches aérolo- giques, c'est-à-dire d'aéronautique scientifique. Un cabestan, construit d’après les indications de M. Küp- pen et actionné par un moteur de 7 1/2 chevaux, y sert aux lancements de ballons captifs à instruments enre- istreurs. Ces lancers, qui, par un temps calme, sont aits aussi fréquemment que possible, sont destinés à explorer, par des inscriptions automatiques, l'état météorologique des couches les plus basses de l’atmo- sphère. Deux ballons captifs, d’une capacité de 25 et 35 mètres cubes respectivement, se trouvent installés dans une salle de la tour située immédiatement au-dessous de la plate-forme. Une porte à glissière pratiquée dans cette dernière permet de les en retirer au moment voulu, pour procéder au lancement. Un bureau installé dans la même tour permet la rédaction immédiate des résul- tats. Les données obtenues à cette station temporaire, qui vient s'ajouter aux stations aérologiques déjà nom- breuses en Allemagne, sont publiées journellement avee les données des stations permauentes, de façon à tenir les aéronautes, avant leur départ, au courant de l'état des différentes couches atmosphériques. D'une façon générale, le Comité de l'Exposition a eu soin de prévoir tous les accessoires que la Météoro- logie met à la disposition des aéronautes. C'est ainsi que chaque hall à ballons renferme des indicateurs automatiques de la direction et de la vitesse du vent. Grâce à un service d’information grandiose compor- tant environ 100 stations, dans un rayon de 150 kilo- mètres autour de Francfort, on tâchera de publier, quelques heures déjà avant l'éclatement d’un orage, des signaux d'alarme transmis aussi aux aéronautes en cours de route, par la télégraphie sans fil ou les signaux optiques. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. | $ 2. — Art de l'Ingénieur Le Laboratoire d'Essais du Conservatoire national des Arts et Métiers. — Le Rapport sur le fonctionnement du Laboratoire d'Essais pendant l'année 1908 vient de paraître. Il a été établi par M. L. Guillet, professeur au Conservatoire des Arts et Métiers, membre de la Commission technique du Labo- ratoire. Ce document fournit un certain nombre de renseignements des plus intéressants pour les indus- triels; nous pensons être utiles à nos lecteurs en résu- mant les parties essentielles de ce Rapport. On sait que le Laboratoire d’Essais fut créé en 1900, par décret, à la suite d’une convention passée entre le Ministre du Commerce et de l'Industrie, alors M. Mil- lerand, le Conservatoire des Arts et Métiers, et la Chambre de Commerce de Paris. Cette convention avait permis de réaliser les fonds nécessaires à l’orga- nisation et au fonctionnement du Laboratoire, grâce à l’importante contribution de la Chambre de Commerce de Paris, à laquelle il faut joindre les subventions annuelles des grandes Sociétés d'ingénieurs ou d’in- dustriels. À Le Laboratoire d’Essais est actuellement divisé en cinq grands services ou Sections : 1° Section de Physique. Chef : M. Biquard; 2° Section des Métaux. Chef : M. Breuil ; 3° Section des Matériaux de construction. M. Leduc; 4 Section des Machines. Chef : M. Boyer-Guillon; 5° Section de Chimie. Chef : M. March. Depuis le 10 juillet 1908, la direction du Laboratoire a été confiée par M. le Ministre du Commerce et de l'Industrie à M. F. Cellérier. Les essais électriques proprement dits sont restés toutefois en dehors des attributions de ce Laboratoire, fondé postérieurement au Laboratoire central d’Elec- tricité. Depuis sa fondation, le Laboratoire a constamment progressé. M. Guillet fait remarquer, à ce sujet, « qu'il semble bien que l’année 1908 marque, pour le Labora- toire d’Essais du Conservatoire des Arts et Métiers, une étape importante vers le développement que l’on était 18 Chef : en droit d’escompter. Le nombre des essais demandés, les recettes que ces essais ont entraînées, les re- cherches scientifiques qui ont été poursuivies, tout indique une marche très nette vers le progrès ». C’est ainsi que les recettes, qui, en 1907, s'élevaient à 71.131 francs, sont montées en 1908 à 80.016 fr. 61, auxquels il convient d'ajouter les taxes de vérification des alcoomètres, densimètres et thermomètres légaux, directement encaissées par le Trésor, s'élevant à 29.422fr. 75. La Section de Physique s'occupe plus spécialement de toutes les mesures industrielles de longueurs, d’angles, de poids, de densités; de la vérification des manomètres industriels ou de précision, de celle des baromètres, thermomètres, pyromètres, sacchari- mètres; elle effectue des essais d'optique de toute espèce, de photométrie, d'étude des combustibles, etc. Elle assure également le service de la vérification légale des thermomètres, alcoomètres, densimètres. Une grande extension vient d'être donnée au Service de la Métrologie pour la vérification pratique des mesures de longueur industrielles, grâce à la con- fection d’un outillage de haute précision qui vient d'être complété par la confection d’étalons de mesures provenant du Service de l’Artillerie, après étalonnage au Pavillon de Breteuil. Prochainement, il pourra être procédé aux études sur les vis, grâce aux nouveaux procédés pratiques de vérification de M. Ch. Marre. La Section des Métaux s'occupe des propriétés des produits métallurgiques en échantillons, produits bruts et ouvrés; elle effectue les essais de barres, chaînes, câbles, cordes, courroies, tissus, bois, caout- choucs, cuirs, au point de vue des propriétés méca- niques, ainsi que l'étude des matières lubrifiantes au point de vue du frottement des métaux, devenue d’une importance si considérable pour la marche des ma- chines modernes. Différents fours sont utilisés pour l'étude des traite- ments thermiques et chimiques des produits métallur- giques. Enfin, une installation fort complète, compre- nant appareils à polir, microscopes, salles de photographie, etc., permet d'appliquer la métallo- graphie microscopique aux cas les plus variés et les plus difficiles, le grossissement pouvant aller à 3.600 diamètres. Parmi les principaux essais effectués par cette Sec- tion dans le cours de l’année 1908, le rapporteur signale une étude, demandée par l'Administration des Monnaies et Médailles, de la nouvelle monnaie d'alu- minium; de très nombreux essais d'huiles à des vitesses, des pressions et des températures différentes; une étude des métaux antifriction; des essais méca- niques de chaînes, rivets, tôles, arbres, rails, fontes, etc., ayant donné lieu à des renseignements du plus haut intérêt pour les industriels. La Section des Matériaux de construction s'occupe des chaux, ciments, mortiers, pierres, produits réfrac- taires, céramiques, etc. La préparation des matières premières se fait dans une série d'ateliers, l’un destiné à la taille des pierres, un autre au broyage, malaxage et séchage, un troi- sième à la cuisson, etc. Il a été demandé, en particulier, des essais méca- niques de diverses briques silico-calcaires, de chaux, de ciments, kaolins, etc.; de carreaux, de grès, meules, etc.; des conditions de frittage de dolomie, d'usure de papier d’émeri, etc. La Section des Machines s’est occupée d'essais d'appareils à vapeur, chaudières, machines, turbines, de moteurs à gaz, à essence, à pétrole, de gazogènes, de machines hydrauliques, de voitures automobiles, de freins, ventilateurs, etc. Les essais d’autoclaves ont pris un très grand déve- loppement, ainsi que les essais de calorifuges, de con- sommation et de fonctionnement des moteurs de CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE groupes électrogènes, de moteurs d'automobiles et de moteurs d'aviation des derniers modèles. Des essais d'hélices aériennes particulièrement inté- ressants ont été également effectués et leurs résultats ont sans aucun doute favorisé, pour leur part, le déve- loppement de la science aéronautique. La Section de Chimie s'occupe plus particulièrement des matières premières végétales nouvelles ou insuf- fisamment connues. Elle elfectue, en outre, les ana- lyses des caoutchoucs, des huiles, des combustibles, celles des métaux et des matériaux de construction, complément d'essais mécaniques. L'installation de cette Section se parachève de plus en plus et nul doute qu’elle ne prenne bientôt une très grande importance. _ Dans ses conclusions, M. Guillet signale que, «malgré cette activité et un personnel restreint, les sections ont poursuivi de nombreuses recherches. Il est tout particulièrement à noter que tous ces travaux ont un caractère essentiellement industriel, que toutes ces recherches constituent un apport très sérieux à nos connaissances sur les propriétés des matériaux de construction et sur l’utilisation de certaines machines. « Elles montrent combien le personnel se tient au courant des méthodes modernes d'essais et quel souci il a de la perfection scientifique. « Elles sont bien faites pour développer le prestige du Laboratoire d’Essais du Conservatoire national des Arts et Métiers et lui apporter fort justement la con- fiance des industriels. » $ 3. — Physique Les limites de sensibilité des piles thermo- électriques. — On sait que les piles thermo-électri- ques, grâce aux fils excessivement minces fabriqués actuellement, viennent d'augmenter beaucoup de sen- sibilité. C’est ainsi qu'un élément de pile constantan- fer, relié à un galvanomètre à aiguille qui indique 3 X 107 par degré, peut, suivant le rapport de M. Bran- des’, apprécier des intensités de 2,1 10% ampère. Or, M. Hartmann, à Francfort-sur-le-Main, vient de préparer des fils excessivement minces avec de nou- velles matières, mises à sa disposition par M. Guil- laume. En accroissant autant que possible la longueur de ces fils et en disposant des soudures d’une étendue minime, ila réussi à apporter aux piles thermo-élec- tiques un nouvel accroissement considérable de leur sensibilité. Sur le conseil de M. K. E. Schmidt?, l’un des élèves de ce dernier vient de procéder à un examen systéma- tique des limites de sensibilité accessibles aux piles thermo-électriques dans l’état actuel de la technique. Cet expérimentateur constate qu'un élément composé de fils manganine-constantan, de 0®*,0154 d'épaisseur et d’une longueur chacun d’environ 2 centimètres, cons- titue, si le vide est poussé à l'extrême, une pile d'une sensibilité maximum. Reliée à un galvanomètre à miroir (système Deprez-d'Arsonval)de sensibilité moyenne,cette pile permetde mesurerdes courants d'environ 89 > 107% ampère. En réduisant ultérieurement de 0,001 le diamètre du fil, on serait en mesure d'apprécier 89—16,5— 72, 5 X 10-10 ampère, c'est-à-dire que cha- que millième de millimètre de diminution du diamètre correspondrait à un accroissement de 16,5 x 1075 de la sensibilité du dispositif thermo-électrique. Cette pro- portionnalité ne semble pas toutefois se conserver pour les diamètres excessivement petits. Or, comme les difficultés techniques ne permettent pas, à l'heure qu'il est, de réduire davantage le diamètre du fil, un courant d'environ 0,0001 ampère peut être considéré comme limite actuelle de la sensibilité des piles thermo- électriques pour les vibrations électriques rapides. . —— ! Phys. Zeitschr., 4. VI, p. 503, 1905. 2 Phys. Zeitschr., t. X, p. 438, 1909. it hé ns tits dt. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 163 $S 4. — Chimie La volatilisation des métaux lourds par l'action du monoxyde de carbone et son application industrielle ‘. — Quelque temps après ma publication en 1890 (Journal ofthe Chemical Society), -en collaboration avec MM. les D'S Langer et Quincke, traitant des propriétés d’un composé volatil du nickel et du monoxyde de carbone, auquel j'ai donné le nom de nickel-carbonyle, Lord Kelvin, quiétait alors Prési- dent de la Société Royale de Londres, me demanda : « Avez-vous donné des ailes à un autre métal lourd ? » Je lui répondis : « Pas encore, mais nous y travaillons et j'espère réussir dans quelque temps. » Plusieurs années de travail continu se sont passées avant que . nous soyons arrivés à volatiliser par l’'oxyde de carbone composé ont été communiquées à l'Association Britan- nique l’année dernière(Chemical News,2 octobre 1908). Tout dernièrement, nous avons réussi à obtenir les composés carbonylés du molybdène et du ruthénium. Nous avons dû arriver à une pression de 450 atmo- sphères et à une température de 300° C., pour obtenir de très petites quantités de ces substances ; dans le cas du ruthénium, la quantité obtenue a ét6 insuffisante pour faire une analyse, mais suffisante pour condenser le carbonyle par un mélange frigorifique, et pour pré- parer des dépôts métalliques de molybdène et de ruthé- nium en évaporant le carbonyle dans un courant de CO, en exposant le gaz à une température suffisam- ment élevée dans un tube de verre pour décomposer le carbonyle. J'ai apporté au Congrès, pour les montrer, des échan- TagLeau I. — Formules et propriétés physiques et chimiques des carbonyles. FORMULE FORMULE POINT POINT DENSITÉ empirique | moléculaire ce fusion Ni (CO): d'ébullition FORMATION DÉCOMPOSITION Ni + CO à la pression ordinaire. En Ni et CO (partiellem.) à 00 C. dans le vide et à 500 C. à la pression ordi- naire. On n'a pu trouver de pro- duits intermédiaires. décomp. Fe?{(CO) décomp. décomp. décomp. + 1030 décomp. Co + CO à 40 atm. et En Co et CO (complètem.) au-dessus 1509 C. au moins. de 60° C.; en Co (CO * et CO entre 50 et 60° C. Pas de recombinaison à 0 — 600 C.en Co (CO. En Co et CO au-dessus de 60° C.; on n'a pu trouver de produits inter- médiaires. Aux dépens de Co (CO)' à 600 C. En Fe?(CO) et CO par la lumière; en Fe et CO par chauffage des va- peurs. Par Fe + CO à haute pression; par Fe (CO) par distilla- tion dans CO. Action de la lumière sur Fe(CO } ou sur Fe + CO. En Fe(CO et CO et Fe, par chauf- fage à 1000 C.; en Fe (UO)' et Fe (COŸ par chauffage des solutions à 950 C. très élevé. décomp. décomp. En Fe et CO par chauffage à 1000 C. ou au-dessus. Aucune recombinai- son. En Fe (CO ou Fe° (CO)° par la pression de CO jusqu'à 150 atm. Aux dépens de Fe? (CO)° par chauffage en solution à 95° C. Mo. | Mo (CO) Se volati-|Se volati- lise avant| lise avant de fondre.| de fondre. Mo + CO à un mini- mum de 130 atm. el 2000-C. En Mo et CO par chauffage au-des- sus de 1500 C. d'autres métaux que le nickel. Le fer fut le premier à prendre des ailes et produisit plusieurs composés intéressants, dont les propriétés ont formé l’objet d’une communication présentée par moi-même et par MM. les Dr Langer et Quincke à la Société Chimique de Londres en 1891, et plus tard de communications très détaillées présentées par Sir James Dewar et M. Jones, à la Société Royale, en 1905 et 1907. Plusieurs années se passèrent avant d'obtenir la volatilisation du cobalt, qui a des propriétés si semblables à celles du nickel; enfin, l’année dernière seulement, mes deux assistants, M. le D' Heinrich Hirtz et M. Dalton Cowap, ont réussi à obte- nir le cobalt-carbonyle, en quantités suffisantes pour étudier les propriétés de ce composé, en comprimant le gaz CO à une pression de 100 atmosphères et en le chauffant à la température de 200° C.,en présence de -cobalt en état de très fine division. Les propriétés de ce ! Communication présentée au Congrès de Chimie appli- uée de Londres. tillons de ces substances, avec les miroirs métalliques obtenus par elles. Quelques-uns de ces échantillons sont exposés pour la première fois et j'ai reproduit les formules et les propriétés de ces composés dans le tableau I ci-joint. Nous avons essayé de volatiliser par le CO plusieurs autres métaux, mais jusqu'à présent sans résultat. Ayant néanmoins établi qu'une augmentation considé- rable de pression est nécessaire pour la formation de quelques-uns de ces composés, dont on n'obtient aucune trace à des pressions inférieures, je me propose de continuer ces recherchas à des pressions encore plus élevées. En ce qui concerne l'application industrielle de ces carbonyles, jusqu'à présent le nickel-carbonyle, le premier connu, a seul été appelé à rendre service à la Chimie appliquée. Ilvous intéressera peut-être d’appren- dre qu'à présent environ 10.000 mètres cubes de monoxyde de carbone, chargé de nickel-carbonyle, circulent continuellement heure par heure à travers 164 ‘CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE les appareils des usines de nickel à Clydach dans le pays de Galles, et que Le nickel contenu dans ce gaz est déposé dans un état presque chimiquement pur à chaque instant du jour et de la nuit. Ludwig Mond, de la Société Royale de Londres. $ 5. — Botanique l’échauffement spontané des feuilles vé- gétales vivantes. — Le fait que certains organes végétaux, tels que les fleurs et les semences en ger- mination, s'échauffent considérablement sous l'action de la respiration, dans des conditions appropriées, fait voir d’une façon frappante l'intensité que possède ce -processus vital, même chez les organismes végétaux. M. H. Molisch, professeur à l’Université de Prague, a constaté un échauffement spontané analogue sur les feuilles végétales, ce qui démontre que la respiration ‘de ces dernières est bien plus intense qu'on ne l'avait jusqu'ici admis. Des feuilles fraîches et vivantes, sépa- rées de la branche, avaient été entassées en quantités considérables : elles se sont échauffées fortement pen- dant quelques heures, et, dans certains cas, à un degré si élevé que leur chaleur propre a fini par les brûler. Les feuilles récemment cueillies, aussi sèches que possible, ont été introduites, en couches très compactes, dans des paniers d'osier d'environ 40 centimètres de hauteur et de 30 centimètres de largeur moyenne. La surface supérieure libre du panier a été pourvue d’un couvercle en carton, perforé au milieu pour recevoir la tige d'un thermomètre allongé très sensible. Ce pa- nier ayant été introduit dans une boîte en bois, l’in- tervalle entre cette dernière et le panier a été rempli de laine de bois, de facon à éviter autant que possible les pertes de chaleur; le couvercle ayant été mis, le thermomètre sortait suffisamment de la boîte pour vermettre les lectures de la température sans ôter le couvercle. Afin de réduire ultérieurement la conduc- tion et le rayonnement de chaleur, le tout a été enve- loppé plusieurs fois d’un drap protecteur. Aussitôt que la maximum de température des feuilles a été atteint, M. Molisch a examiné si elles étaient res- tées vivantes, après quoi l'expérience a continué. Pour terminer, l’auteur à fait un examen relatif à la pré- sence de micro-organismes (bactéries, etc.). Dans les premières expériences, faites sur des feuilles de Carpinus Betulus, M. Molisch a constaté, pendant l'intervalle relativement très court de 9 heures, un échauffement de 22° à 430,9, et, pendant 15 heures, à 519,5. Pendant les 37 heures subséquentes, il a observé une chute lente de la température à 33°,7, après quoi le thermomètre est remonté à un maximum un peu plus faible (479,2), suivi d’une chute définitive. L'accroissement de température observé pendant les 45 premières heures, loin d'être dû à l'action des micro- organismes, ne saurait être attribué qu'aux réactions chimiques, surtout à celles de la respiration. A 43°, les feuilles continuent à vivre ; ayant été posées sur l'eau, elles se conservent fraîches et vertes pendant plusieurs jours. Le maximum d'échauffement spontané (510,5) a été atteint après 45 heures. La chute de température constatée ensuite paraît toute naturelle. L'expérience a, en effet, fait voir que, les feuilles à 519,5 étant mor- tes, la respiration normale cessait, tandis que les bac- téries n'étaient d'abord présentes qu’en faibles quan- tités. Or, sur les feuilles désormais brûülées, les micro- organismes, à la faveur de la haute température, ont commencé à se multiplier très rapidement; la chaleur due à la respiration propre de ces micro-organismes a produit, à son tour, un maximum de température un peu moins élevé (472,2). Après que le développement des bactéries et d'autres micro-organismes eut ainsi culminé, la température s’est mise à tomber progressi- vement jusqu'à la température ambiante. Des résultats analogues ont été constatés sur les feuilles récemment cueillies de nombreuses autres plantes. Dans le cas du Prrus communis, une tempé- rature maxima atteignant 59° s'est établie après 27 heu- res. Il est intéressant de constater que certaines plan- tes, surtout les plantes toujours vertes et celles dont: les différents organes séparés présentent une durée de- vie considérable, ne produisent que de faibles quan— tités de chaleur. Les feuilles plongées dans l'eau sont tuées à des tem- pératures bien moins élevées que dans l'air : c'est que- la limite de température supérieure de la vie végétale est réduite de beaucoup quand on empêche la respira- tion de se produire librement, La blessure produite en: cueillant les feuilles favorise sans doute l’'échauffement. spontané; comme, cependant, les branches touffues, réunies en quantités considérables produisent à leur- tour des températures élevées, M. Molisch n'hésite pas. à affirmer que les feuilles vivantes, même sans stimulus vulnéraire, s'échauffent à un degré considérable. On peut exécuter une démonstration fort intéres- sante de ce phénomène d’échauffement spontané, en: faisant bouillir de l’éther sous l’action de la chaleur: propre des feuilles. Un tube de verre de 90 centimètres de longueur, scellé à son extrémité inférieure et se- terminant en ampoule à sa partie supérieure, a été- rempli au 1/3 de sa longueur d'éther coloré. Après. avoir introduit ce tube par son bout fermé au sein des. feuilles ayant subi l'échauffement spontané à 45-509, on voit l’éther, dont le point d’ébullition est de 34,5, se mettre à bouillir immédiatement; ce phénomène- peut être aperçu distinctement d'un auditoire consi- dérable, même à des distances très grandes. D'une: façon analogue, on fait la démonstration de la fonte du beurre de cacao et de la paraffine molle. Voilà un beb exemple de la conversion en énergie mécanique de- l'énergie thermique engendrée par les plantes. L'échauffement spontané des feuilles vivantes à la limite de température supérieure de la vie constitue um cas fort remarquable où un organisme vivant est lué par une fonction normale : la respiration. Ce phéno— mène, à première vue, semble peu compatible avec les. intérêts de l'organisme; mais il convient de tenir compte qu'un cas pareil, en raison de la ventilation naturelle, ne saurait se produire dans la Nature aussi longtemps que la feuille reste solidaire de la plante- mère. Alfred Gradenwitz. $ 6. — Sciences médicales Un nouveau procédé de radiothérapie. — Peu de temps après la découverte des rayonnements: du radium, on a eu l’idée d'étudier leurs effets sur l'organisme malade. Ces rayonnements n’ont pas tardé: à révéler le pouvoir curatif qu'ils possèdent, surtout sur- certaines affections de la peau, et l’on a introduit dans, la pratique médicale, non seulement les effets directs: du radium, mais encore ceux de son produit gazeux, l’'émanation. On a, en effet, constaté que de nom- breuses eaux thermales renferment de grandes quan-— tités de cette émanation, susceptible, grâce aux rayons, invisibles qu'elle émet à son tour, d'activer tous les. corps situés à proximité. Convaincues de ce que les: effets curatifs de ces eaux sont précisément dus à leur teneur en émanation du radium, plusieurs usines chi- miques viennent de mettre sur le marché des produits: médicaux renfermant de l’'émanation. Récemment, le D' A. Fürstenberg! a traité par l’'éma- nation du radium plus de cent personnes affectées des maladies les plus diverses, en leur administrant de l’eau artificiellement additionnée d’émanation, soit comme boisson, soit sous forme de bains. 11 va sans dire que la boisson nesaurait être aussi concentrée en émanation que les eaux de bains; la nécessité d’un dosage exact s'impose donc pour garantir le corps contre des dégâts sérieux. Or, chose remarquable, ces cures, dans bien des eas,. ! Die Umschau, n° 20, 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 765 présentent un phénomène familier, depuis longtemps, aux hôtes de presque toutes les villes d'eaux : quelques jours après le commencement du traitement, le malade ‘ à S 22000 50000 + 100000 50000 +2000 30000 F 20000 F /0002 [4 1 2 5] æ 5 Nombre des Helogénes Fig. 1. — Influence du nombre d'halogènes sur la force des désinfectants. l’action désinfectante vis-à-vis des diverses bac- téries et qu'on peut obtenir certains optima qui exercent une action en quelque sorte spécifique sur les bactéries. Ainsi, pour les staphylocoques et les streptocoques, l’action désinfectante augmente jusqu'à trois atomes de brome, reste constante pour le 4° et s'abaisse de nouveau avec le 5°. Pour le colibacille, le maximum est déjà atteint avec le 2° atome de brome, puis l’action baisse rapidement par l'introduction de nouveaux halogènes; avec le bacille du paratyphus, la courbe suit presque une horizontale, qui s'abaisse lentement vers l’extré- mité. Pour le bacille de la diphtérie, la courbe s'élève très rapidement jusqu'à 3 atomes de brome, et s’abaisse ensuite presque aussi vite. J'espère avoir montré, dans ce qui précède, au moins à l'état d'ébauche, que la Chimie colloï- dale ouvre de nouvelles voies à la désinfection et que ce n'est que par un contact étroit avec la Chimie qu'on évitera des conclusions erronées dans ce domaine. D' H. Bechhold, Membre de l'Institut de Thérapeutique expérimentale à Francfort-sur-le-Main. à BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 187 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 4° Sciences mathématiques Borel (Emile), Professeur-adjoint à la Faculté des Sciences de Paris. — Eléments de la Théorie des Probabilités. — 1 vol. gr. in-8° de 191 pages. (Prix : 6 fr.) A. Hermann, éditeur. Paris, 1909. Les statisticiens vont avoir l'embarras du choix parmi les ouvrages de Calcul des probabilités qui leur sont offerts depuis quelques années, mais le livre de M. Borel se signale plus particulièrement à leur attention. Sta- tisticien et philosophe, M. Borel à su très finement discerner ce qu'il fallait dire et ce qu'il convenait d'éliminer dans un traité élémentaire de Calcul des probabilités, et il a réussi à faire un ouvrage que l'on pourra consulter avec fruit, même sans avoir appro- fondi longuement les Mathématiques. La division du livre est originale : probabilités dis- continues, c’est-à-dire loi des grands nombres et par conséquent statistiques ; probabilités continues ou géométriques, moins immédiatement applicables en pratique; entin, probabilité des causes auxquelles se rattachent les erreurs d'observations, les études statis- tiques, sociales, biométriques de l’école Solvay, etc. M. Borel a quelque tendance à tirer les conséquences philosophiques des études mathématiques dans les- quelles il guide son lecteur; aussi insiste-t-1l — et nous devons lui en savoir gré — sur la précision des termes employés. Les exemples élémentaires de calcul sont choisis avec beaucoup de soin et la solution en est exprimée en un langage clair et précis : nous citerons en particulier une étude très remarquable du jeu de pile ou face, qui amène l’auteur à la définition des écarts de la fonc- tion © et du théorème de Bernoulli. La probabilité géométrique, qui présente au point de vue purement spéculatif un intérêt considérable, donne lieu à un exposé sommaire, mais complet, et les fameux problèmes de la position d’un point sur une sphère et du jet de l'aiguille sont exposés et discutés à fond; M. Borel est alors amené à faire des mathématiques pures et à étudier les fonctions arbitraires, la théorie cinétique des gaz et la loi de Gauss sur les erreurs d'observation. La troisième partie est la plus importante à notre point de vue : M. Borel y étudie longuement les varia- tions des naissances masculines et féminines, les nais- sances gémellaires, les naissances par famille, la sta- tistique des décès, etc. Le problème de la détermination des causes termine le livre, et l’auteur, dans sa dernière page, conclut que « le seul rôle de la Théorie des probabilités, déjà très beau, si elle sait le remplir, est de guider l'expérience et l’observation par l'interprétation qu'elle fournit de leurs résultats ». En tant qu'actuaire et statisticien, nous ne pouvons que souscrire à cette conclusion et remercier l'auteur d'avoir fait un travail qui sera profitable aux écono- mistes. Nombre de ces derniers devraient se pénétrer des idées de M. Borel, afin d'éviter des généralisations hâtives résultant d'un nombre d'observations tout à fait insuffisant, et qui revêtent, malgré cela, une certaine apparence d’'exactitude grâce à un appareil mathéma- tique parfois ingénieux, mais le plus souvent puéril. Pour terminer, un mot sur l'édition soignée par M. Hermann et un regret concernant l'absence d’une bibliographie. A. BARRIOL, ÿ Actuaire-Conseil, Directeur de l'Institut des Finances et des Assurances. ET'INDEX Andoyer (I.), Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. — Cours d’Astronomie : Seconde partie : Astronomie pratique. — 1 vo/. grand 1n-8° de 304 pages, avec figures. (Prix : 10 fr.) A. Hermann, éditeur. Paris, 1909. L'Astronomie pratique, qui forme la deuxième partie du cours de M. H. Andoyer, est rédigée avec la même concision que la première partie, parue en 1907 et ana- lysée ici même (t. XVIII, p. 851). Mais l'éditeur, heu- reusement inspiré, à remplacé l’autographie par l'impression; personne ne s'en plaindra, malgré la disparité entre les deux volumes. « Les problèmes de l’Astronomie pratique sont mul- tiples; les méthodes imaginées pour les résoudre se perfectionnent chaque jour, mais deviennent de plus en plus nombreuses, en même temps qu'elles exigent de nouveaux instruments. Il est donc impossible, dans ce cours nécessairement restreint, d'aborder toutes les questions pratiques qui relèvent de l'Astronomie. Aussi ferons-nous un choix et, bien loin de prétendre épuiser le sujet, nous nous bornerons à quelques problèmes parmi les plus importants; nous les étudierons avec détails, en nous proposant pour but principal d'initier le lecteur aux méthodes générales d’Astronomie, et de le mettre ainsi à même de poursuivre plus tard, avec facilité, des études plus spéciales. » Après cet avant-propos, le lecteur, en possession du cours théorique, sait immédiatement qu'il va trouver une exposition brève et remarquablement méthodique de l’Astronomie pratique. L'ouvrage est divisé en trois parties : Calculs, Instru- ments, Observations, avec un chapitre complémentaire sur les calculs d’orbites. Les calculs comprennent l’interpolation, l'usage des tables et la méthode des moindres carrés. Ils sont pré- cédés de notions très précises sur les grandeurs, les unités fondamentales de mesures, et de données numé- riques que l'étudiant et le praticien doivent posséder. Quelques mots sur les erreurs numériques serviront de guide dans l'emploi et la combinaison des nombres approchés. Les formules d'interpolation sont données sommairement, sans le souci d’épuiser la question; le chapitre des erreurs d'observation et méthode des moindres carrés est plus étendu et très développé ana- lytiquement. Les instruments fondamentaux sont : le théodolite, l'équatorial, la méridienne et le sextant. L'auteur y adjoint, sous le nom d'instruments accessoires, soit des organes essentiels, soit des compléments indispen- sables des instruments types : cercles divisés, niveaux, micromètres, pendules et chronomètres, etc. Les uns et les autres sont traités en vue de leur fonction, sans détails de construction aussi bien pour l’Optique que pour la Mécanique, parce que « quelques heures de pratique sont plus profitables que l'étude de minutieuses descriptions ». Avec des changements convenables d'axes, la théorie du théodolite peut s'appliquer à l’'équatorial et à la méridienne. Après avoir préalablement exposé les accessoires avec toute l'ampleur que comporte le programme du cours, M. Andoyer s'appuie sur cette remarque pour développer sobrement et sans redites inutiles la théorie de ces instruments, faisant toutefois une exception en faveur de la méridienne, « à cause des simplifications qui se présentent et pour conserver les notations con- sacrées par un long usage ». Ainsi, avec chaque instrument complet ou accessoire, le lecteur possède les méthodes les plus simples et les plus récentes pour les constantes instrumentales, les 188 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX formules théoriques et usuelles et l'usage de l'appareil. Il est en mesure, avec un peu d'attention, de passer aux observations. « L'objet propre de l'Astronomie est la connaissance de l'Univers et des lois de son mouvement ». Si on laisse de côté l’Astrophysique, le problème fonda- mental est celui qui a pour but de « savoir déterminer les apparences des astres à un instant donné et dans un lieu donné ». Mais la solution de ce problème appelle la question inverse : « d’après les apparences des astres à une certaine époque et en un certain lieu, déterminer cette époque et ce lieu ». Ce second pro- blème constitue l'Astronomie géographique et nau- tique. La solution du problème fondamental, comme il a été établi dans l'Astronomie théorique, exige l'emploi de certaines hypothèses et le concours de résultats théoriques appartenant à la Physique, à la Géodésie et à la Mécanique céleste. Mais la solution n’a de valeur pratique que si elle peut être traduite à l'aide de nombres fixes, dits : constantes de l Astronomie. « Les observations ont pour but la détermination de ces constantes et aussi la vérification des hypothèses admises comme point de départ. » Ce dernier point de vue étant laissé de côté, la première partie des obser- valions est consacrée,sous une forme concise et rapide, à, la détermination de ces constantes : I. Constantes physiques : réfraction et aberration ; II. Constantes mécaniques : masses des corps cé- lestes, moments d'inertie principaux de la Terre et de la Lune, intensité de la pesanteur. À ces constantes directes se rattachent la précession, la nutation, ainsi que la variation des latitudes ; IL. Parallaxes : Constantes relatives aux distances ; IV. Eléments des orbites : Terre, planètes, satellites et comètes. Rotation des corps célestes. Obliquité de l'écliptique et position de l’équinoxe ; V. Coordonnées des étoiles, des nébuleuses. Mouve- ments propres des étoiles. Le champ est vaste : « Aussi devons-nous nous borner à quelques indications sommaires sur les prin- Cipaux points, en nous contentant de faire comprendre l'esprit des méthodes employées.» Malgré sa concision, ce chapitre inédit intéressera les professionnels aussi bien que les débutants. L’Astronomie géographique et nautique, définie plus haut, a encore pour but « l’explication des principales méthodes astronomiques que l’on peut employer pour la détermination des éléments géographiques d'un lieu » par l'emploi des instruments les plus simples : théodolite, sextant, cercle méridien portatif et chrono- mètre suffisamment réglé. Le triangle PZS [Pôle-Zénith-Astre|, avec ses moyens variés de résolution et ses formules différentielles, constitue la base des méthodes appliquées en Astro- nomie géographique aux deux problèmes principaux : recherche de l'heure et de la latitude. Les cas les plus favorables, sur lerre et sur mer, sont examinés et traités avec toutes les formules indispensables. . Les observations en hauteur et au chronomètre (problème de Douvwes, deux hauteurs, trois hauteurs et davantage) avec leurs solutions classiques si élé- gantes, les formules de Gauss, de Cagnoli, la méthode nouvelle et si remarquable de MM. Claude et Drien- court, avec l'emploi de l’astrolabe à prisme, quelques notions essentielles de navigation, la détermination des longitudes envisagée surtout à l'égard des observa- tions de la Lune, achèvent ce chapitre des observations astronomiques, où l’on pourra puiser à volonté des sujets d'exercices intéressants. L'ouvrage est terminé par la solution classique de Gauss pour les calculs d'orbites, mais les développe- ments sont très concis et serviront d'introduction à la lecture d'ouvrages plus étendus, où le praticien est assuré d’avoir un guide plus complet dans des ques- Uons parfois très délicates. Aussi bien que l'Astronomie théorique, le cours d’Astronomie pratique est un livre de réflexion, éveil- lant des idées et suscitant la recherche. Il invite à l'étude des Mémoires originaux en attendant qu'on puisse le regarder comme la préface d’un véritable Traité d'Astronomie, digne de cette science et du savant professeur de la Sorbonne. A. LEBEUr, Directeur de l'Observatoire de Besançon. 2° Sciences physiques National Autarctic Expedition (1901-1904): Meteo- rology. Part. 1; Physical Observations. Part. 2. — Publié par la Royal Society. Londres, 1908. Les deux volumes où sont publiées les données météorologiques et les observations physiques de la Discovery, au cours de son expédition antarctique, présentent pour les météorologistes et les géographes le plus vif intérêt. L'hivernage de la Belgica avait fourni le premier journal d'observations météorologiques poursuivies durant toute une année dans les régions antarctiques. En un volume qui fait partie de la collection des Rapports scientifiques de la Belgica, et qui a paru en 1904, M. Arctowski avait donné 12 extenso les tableaux d'observations du 1°" mars 1898 au 1° mars 1899 : pendant cette période, la Belgica, prise dansles glaces, était allée à la dérive, entre 69 38" et 71° 36/ de latitude Sud, et entre 80° 30'et 96° 40' de longitude Ouest (de Greenwich). La température moyenne de cette année s'était trouvée égale à —9°,6, la pression moyenne à T&ämw,4. Les vents dominants étaient d'Est durant l'été antarctique et d'Ouest durant l'hiver. Les observations de la Discovery, qui sont publiées dans le volume « Meteorology » de la N. A. E., portent sur deux années complètes, du 1° février 1902 au 45 février 1904; elles ont été faites au « quartier d'hiver » du vaisseau, situé dans une petite baie vers le Sud-Ouest de l'ile Ross, au Sud du mont Erebus, à 77° 50/50" de latitude Sud et 166° 44/45" de latitude Est (de Greenwich). On y a joint quelques notes d’observa- tions faites dans l'ile même, sur la terre ferme, et aussi le journal météorologique de divers voyages d'explora- tion effectués par des membres de l'expédition à partir des quartiers d'hiver. Parmi ces voyages, celui au cours duquel on avait atteint l'extrême limite Sud était celui du capitaine Scott, qui, accompagné du lieutenant Shackleton, était arrivé le 30 décembre 1902 à 82° 16!, après avoir franchi la « Grande Barrière de Glace ». On sait comment, depuis lors, le lieutenant Shackleton a repris la route suivie par lui en 1902, et a poussé beaucoup plus loin vers le Sud. L'intérêt de ses nouvelles observations, non encore publiées in extenso, apparaitra plus vif encore à celui qui aura étudié, dans le présent volume, les conclusions qui se dégagent des observations de la Discovery, et aussi les lacunes que ces conclusions comportent. On était, au quartier d'hiver de la Discovery, bien plus au sud que la Belgica, et dans une toute autre région. La température s'y est montrée plus basse. Elle a atteint un minimum de —50°{— 589,5 Fahrenheit) et un maximum de-+6° environ (+ 42F). Les moyen- nes mensuelles ont varié entre — 39,2 et — 2995, La pression à varié entre 766,6 et 7{14mm 7 avec une moyenne annuelle de 744 millimètres. Mais ce qui est peut-être la caractéristique la plus remarquäble de ces observations, c’est la prédominance générale des vents d'Est en toute saison. Si les vents de surface viennent surtout de l'Est, les nuages inférieurs viennent surtout du Nord et du Sud, souvent aussi de l'Est, presque jamais de l'Ouest ; les nuages supérieurs et la fumée de l’Erebus viennent surtout des régions Ouest. S'agit-il, aux quartiers d'hiver de la Discovery, d’un vent local où d'un vent commandé par la circula- tion générale ? Telle est la question que pose, sans la résoudre, M. Shaw, dans l'avant-propos qu'il consacre à ces observations météorologiques. On serait tenté BIBLIOGRAPHIE — A ALYSES ET INDEX 789 de conclure à un anticyclone ayant son centre au pôle Sud; la différence que présenterait le pôle Sud avec le pole Nord tiendrait assez naturellement à la présence d'une masse continentale au pôle Sud, et l'anticyclone serait d’origine thermique. Le maximum de pression au pôle ne s'étendrait d’ailleurs qu'à une assez faible épaisseur d’atmosphère, et plus haut existerait une dépression. Il faudrait, pour conclure, avoir des notions plus précises que n’en ont encore donné les voyages de reconnaissance à partir de la Discovery, sur les vents régnants plus au Sud, et sur la variation de pression comparée à l'augmentation d'altitude. Parmi les Mémoires de ce premier volume, citons encore la discussion, par M. C. T. R. Wilson, des observations d'électricité atmosphérique. Le potentiel à «5 pieds » au-dessus du sol s’est constamment trouvé positif, comme aux latitudes moyennés (on n’a eu que 41 jours de potentiel négatif). Le gradient de potentiel a été, en moyenne, de 40 à 60 volts par mètre, c’est- à-dire plus faible qu'en Europe. En ce qui concerne sa variation diurne durant les trois mois d'été, il y a un minimum très nel vers midi, et un maximum quand le soleil est le plus bas sur l'horizon. Pour la variation annuelle, maximum en décembre, minimum en juin ou juillet, et peut-être un minimum secondaire en mars ou avril. Les phénomènes d'électricité atmo- sphérique ne paraissent pas influencés par les aurores australes, qui ont été soigneusement observées, et qui agissent, au contraire, nettement sur le magnétisme terrestre. Le volume relatif aux observations physiques com- prend cinq chapitres : observations de marées dans les régions antarctiques, observations du pendule, tremblements de terre, observations des aurores en 1902-1903, observations magnétiques antarctiques. L'intensité de la pesanteur au quartier d'hiver de la « Discovery » est, en combinant toutes les observations, 982, 985, nombre un peu supérieur au nombre théo- rique : 982, 963 que donnerait la formule d'Helmert. Les observations magnétiques absolues ont été faites dans une petite hutte établie en terre ferme au cap Armitage, au voisinage du quartier d'hiver. On les à répétées souvent de 1902 à 1904. On a fait de nombreuses mesures en divers points du continent antarctique, dans les voyages de reconnaissance. Enfin, l'on s’est servi, pour réduire les observations, de la comparaison avec les observations continues qui se sont poursuivies durant le même temps à Christchurch, en Nouvelle- Zélande. L'exploration magnétique du Continent ou de FOcéan avait pour principal objectif de fixer la position du pôle magnétique Sud. On n'a pas abordé ce pôle même; mais, en étudiant les isogones au voisinage, on arrive à la conclusion que ce pôle est situé au voisi- nage de 71°50'S. de latitude et 156°20' E. de longitude. L'étude des isoclines conduirait, pour les coordonnées du pôle Sud, aux valeurs 72° 54! pour la latitude, 156025! E. pour la longitude. Les deux volumes sont illustrés de cartes, de photo- graphies, de reproductions de dessins à la plume (dessins de nuages), de figures en couleurs donnant les phénomènes de halos, enfin de {rès belles planches qu représentent les aspects des aurores australes. BERNARD BRUNHES, Directeur de l'Observatoire du Puy-de-Dôme. Wernicke (Gustave), /ngénieur. — Elektrotech- nische Messungen und Messinstrumente {MESURES ET INSTRUMENTS DE MESURES ÉLECTROTECHNIQUES). — À vol. in-8° de 138 pages, avec 92 figures. (Prix : 6 fr. 25.) AN°13de l« Elektrotechnik in Einzel-Darstellungen». F, Viewegund Sohn, éditeurs. Braunschweïiq, 1909. Ce petit ouvrage donne des imdications sur la mesure du courant, de la tension et de la conduction, de la résistance, de l'induction et de la capacité, ainsi que des grandeurs magnétiques. Les méthodes et instru- ments de mesure usuels dans la pratique électrotech- nique sont seuls traités. Pour les instruments, l’auteur s’est étendu surtout sur les propriétésetle mode d'em- ploi, en réduisant au strict nécessaire les détails sur la construction. Lorsqu'on mesure de très faibles courants ou ten- sions, il arrive fréquemment qu'on croit devoir se ser- vir d'instruments très sensibles, mais incommodes, alors que des instruments plus commodes seraient encore utilisables dans la plupart des cas. Pour cette raison, l’auteur s’est attaché à indiquer, à propos de chaque instrument, la sensibilité maximum pour laquelle il est ou peut être construit. Schryver (S. B.), Maitre de Conférences de Chimie physiologique à University College, Londres. — The general characters of the Proteins. — 1 vo/. i1n-8° de 86 pages.(Prix :3 fr. 25.) Longmans, Green and C®, éditeurs. Londres, 1909. Deux biochimistes bien connus, MM. R. H. Aders Plimmer et F. G. Hopkins, publient à Londres, en une série de petits volumes cartonnés de 60 à 100 pages, des monographies fort intéressantes sur les divers sujets qui sollicitent l'attention des chimistes physio- logistes. Il ne manque pas de raisons pour justifier cette publication, peut-être plus utile ici que dans toute autre discipline. La Biochimie évolue aujourd'hui si rapidement, elle est cultivée par tant de savants que les trayaux s'accumulent, les points de vue chan- gent, les idées foisonnent et il est pratiquement impos- sible de les enfermer dans le cadre forcément limité d'un traité didactique, que les longueurs de la rédac- tion exposent à l'inconvénient de ne refléter jamais qu'imparfaitement l’état actuel de la science. Dans sa monographie, M. Schryver a laissé systéma- tiquement à l'écart tout ce qui a trait à la physico- chimie des colloides; elle fera l'objet d’un volume spé- cial. Par contre, son travail nous donne, en un résumé bien fait, le tableau des propriétés physiques et chi- miques des substances protéiques: solubilité, précipita- tion par les sels, coagulation par la chaleur, séparations par fractionnement. Quelques notions historiques inté- ressantes, trop souvent négligées ailleurs, nous per- mettent de remonter jusqu'à l'origine des méthodes aujourd'hui classiques et dont beaucoup d’entre nous ne connaissent pas les auteurs. Signalons, en passant, la part très justement faite à l’initateur que fut Denis (de Commercy). Une seconde partie est consacrée aux caractères proprement chimiques : composition, réactions colo- rées, répartition de l'azote dans la molécule; présence et signification du phosphore, modes de fixation diffé- rents de ce métalloïde dans les diverses espèces : on sait que, dans ces derniers temps, cette question à beaucoup préoccupé l'École anglaise, et particulière- ment R. H. Aders Plimmer. On trouvera des rensei- gnements précis et fort utiles à connaître sur l'appli- cation des procédés de la Physico-Chimie à la solution de quelques problèmes touchant la constitution des matières protéiques : conductivité, acidité, basicité, etc. L'étude des divers réactifs occupe les derniers chapitres: on y trouvera résumée, trop brièvement peut-être, l'action des agents oxydants, des halogènes, de l’acide nitreux, elc. Cette partie aurait gagné à des dévelop- pements plus détaillés, l’auteur écrivant, comme il le déclare lui-même, pour des chimistes. Un dernier chapitre est consacré aux méthodes biologiques de différenciation des protéines et, par conséquent, aux précipitines : des exemples empruntés à Schultz éclairent cet exposé. En somme, une monographie claire, intéressante et susceptible de rendre des services aux spécialistes, telle est l'œuvre de M. Schryver. D: L. HUGOUNENQ, Professeur à la Faculté de Médecine de Lyon Correspondant de l'Académie de Médecine. 790 Palomaa (H.). — Contribution à l'étude des Dérivés alkyloxylés &es Alcools, des Acides et des Ethers gras. — Thèse de Doctorat, présentée à la Faculté d'Helsingfors, 1909. Il est toujours tentant d'abandonner l'étude banale d’un type de corps ou de réaction pour rechercher les relations générales susceptibles de donner des éclair- cissements sur la nature intime de la matière. Le malheur est que, lorsqu'une pareille question est traitée consciencieusement, les résultats ne répondent pas à la peine, car les relations que l’on peut déduire sont tellement compliquées qu'elles deviennent inutilisables. Tel est le cas du travail de M. Palomaa. L'auteur s'est proposé d'étudier les variations de propriétés que provoque l'introduction de divers groupements, à diffé- rentes places, dans la chaîne carbonée des éthers- oxydes. On sait déjà que les éthers-oxydes a&-halogénés R.O.CHX.R', sont des corps très aptes à réagir; au contraire, les dérivés 6-substitués R.0.CH°.CHX.R' sont inertes, tandis que les dérivés y sont intermédiaires. M. Palomaa a étudié, au même point de vue, les éthers- oxydes à fonction mixte, dans lesquels le symbole X représente l’un des groupements OH, CO*H ou CO?C?H ; il a, de plus, cherché à faire ressortir une relation entre la constitution et les propriétés chimiques de ces corps, d’une part, et leurs propriétés physiques (vola- tilité, densité, fusibilité, etc.), d'autre part. Cette étude à nécessité une bibliographie des plus minutieuses et des plus complètes, ainsi qu'une revision expérimentale des constantes physiques des nombreux corps rentrant dans la catégorie définie plus haut; en effet, beaucoup de ces constantes, et principale- ment les densités, ont dù être corrigées de quantités variables. C'est là, à mon avis, la partie la plus fruc- tueuse de la thèse de M. Palomaa. La préparation des matières premières, nouvelles ou non, a été faite, en général, par des procédés classiques, dont quelques- uns, cependant, ont été l’objet de critiques intéres- santes. Je ne parlerai pas du système de nomenclature et de classification adopté par l'auteur, qui semble un peu compliqué, bien qu'il permette de calculer assez rapidement le nombre d'isomères possibles dans le cas de composés à fonction mixte. Quant aux conclusions, elles sont à peu près néga- tives; d’ailleurs, M. H. Palomaa reconnaît lui-même, avec la meilleure bonne foi, que les relations entre la constitution chimique et les propriétés physiques (en dehors des séries homologues) sont extraordinaire- ment complexes et variables. En résumé, cetle thèse constitue un travail extrème- ment consciencieux et très utile au point de vue de la revision des constantes physiques. Mais je doute fort que l'objectif en puisse être jamais atteint, et l'exemple du travail gigantesque accompli par Bischoff et ses élèves, non sans utilité, mais sans conclusion, vient à point pour confirmer cette opinion. P. FREUNDLER, Maitre de Conférences adjoint à la Faculté des Sciences de Paris. 3° Sciences naturelles Métin (Albert), Professeur à l'Ecole coloniale et à l'Ecole des Hautes Etudes commerciales. — La Colombie Britannique. Etude sur la colonisation au Canada. — 1 vol. in-8° de 431 pages, avec cartes et photographies. (Prix : 12 fr.) Armand Colin, édi- teur, Paris, 1909. Cet ouvrage, présenté à la Faculté des Lettres de l'Université de Paris comme thèse de doctorat, doit compter parmi les deux ou trois meilleures produc- tions géographiques de l’année. La géographie, en effet, l'imprègne tout entier, c’est-à-dire la préoccupation incessante de placer dans leur cadre de phénomènes et de rapports naturels l’activité humaine et l’évolu- tion économique. La vue directe du pays, au cours de deux voyages, donne d’ailleurs à ces pages une sin- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX gulière expression de vie et de vérité, en même temps que l'étude scrupuleuse des documents de toute espèce en fait le plus exact et le plus sûr des guides. L'analyse de la vie sociale en Colombie Britan- nique était tentante, même si l’auteur n'eût pas fait sa spécialité des pays de colonisation anglaise. Nous avons là, à un degré plus fort que dans le reste du Canada, et avec une netteté plus grande qu'en Sibérie, le spectacle infiniment attrayant d'un groupe humain très civilisé aux prises avec les plus dures fatalités naturelles (p. 14). La contrée est à peine connue dans beaucoup de ses parties; en dehors des solitudes du nord, l'ile de Vancouver, par exemple, entrée la pre- mière dans la voie de l'évolution économique, n’est pas encore levée sur plus du tiers de sa surface, et l’on y rencontre dans la forêt primitive, à quelque distance des établissements miniers du S.-E., le puma et le glouton, devenus si rares ailleurs. Au milieu de cette « nature forte et drue », 180.000 habitants (en 1901) arrivent à ürer du sol pour 250 millions de francs de marchandises, mais sans pouvoir encore se nourrir par leurs propres moyens. A la première prospection, aux premiers efforts isolés d'exploitation, ils ont immé- diatement, dans les parties les plus favorables, substi- tué la mise en valeur capitaliste, scientifique, et déjà destructive, le travail organisé par la loi: les étapes intermédiaires, si péniblement franchies dans d’autres pays de colonisation beaucoup moins difficiles, n’ont pas existé ici. Les hommes se sont complètement armés bien avant d'être assez nombreux pour faire partout la conquête de l’eau, ou pour entamer partout la forêt et le désert. La base de la géographie physique de la Colombie est la distinction des zones orographiques qui se suc- cèdent du Pacifique à la Prairie : 4° chaîne marine des iles, très récemment séparée du continent, succession de massifs de roches métamorphiques à gîtes minéraux, tout à fait sauvages sur la côte 0. jusque dans Vancou- ver ; 2° chaine côtière, dont les massifs granitiques, largement découpés par les vallées-canons et les. «entrées » marines en forme de fiords, présentent à l'O. leur pente la plus longue, tout entière occupée par la forêt, le glacier et le torrent, à l'E., au con- traire, de courts versants abrupts et secs; 3° plateaux intérieurs, de roches crétacées, recouvertes par d'énormes épanchements de basaltes et par les dépôts. glaciaires d’argiles à blocaux et de limons blancs, larges séries de tables sculptées par de grands cañons (Fraser, etc.); 4° Sierras des Selkirk et des Monts du Caribou, dénudées et rocheuses au sommet, bocagères sur le versant ouest, amas de schistes et de calcaires paléozoïques, traversés par des granites qu'accom- pagnent d’autres gites minéraux variés; 5° enfin plis. récents de la Cordillère Rocheuse, découpés en mas- sifs par les cols et les vallées qui aboutissent aux « gaps » ou portes de la Prairie. , Le climat varie de l'O. à l'E., selon ces zones, la végé- tation de même, et ainsi se succèdent les milieux très. différents de l’activité humaine, uniformisés dans le nord par la rigueur de l'hiver. Aux versants pacifiques, le tiède vent «chinook », les grandes précipitations de printemps et d'automne (2.345 mm. de pluie, et965 mm. de neige à Port-Simpson), les étés ensoleillés qui, dans le Sud, colorent les célèbres roses de Vancouver, et éclairent, en avant de la futaie vierge des conifères géants (sapins Douglas, thuyas et pruches), la bordure continue de grands arbustes toujours verts. — Sur les : plateaux intérieurs, au contraire, les pluies d'été, rares et irrégulières (moins de 25 cm. dans Chilcotin), les celées tardives (mai) ou précoces (septembre), les vagues de chaud et de froid. C’est la transition entre le dry belt américain et le climat forestier arctique, avec des différences accentuées entre le Sud et le Nord; là, le soleil hâtif de printemps donne essor à la floraison dès avril (Okanagan) ; au Nord, la navigation recommence aussi en avril, mais les semailles ne peuvent se faire qu’au début de mai, à l'arrivée des BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 791 hirondelles. Partout d'immenses espaces dénudés, ou bien, au milieu de maigres bouquets de pins jaunes, des herbes sèches, des buissons épineux groupés comme dans le « chaparral » mexicain, des opuntias ; le domaine du puma et du serpent à sonnettes voisine celui des animaux arctiques: le caribou, le castor. Depuis le temps où les marins de tous pays venaient à Nootka (Vancouver) poursuivre la loutre de mer, et où le voyage de Mackensie (1792-93) préparait la fon- dation des premiers forts à l'intérieur, le fait décisif pour la colonisation de la Colombie a été la découverte de l'or de 1851 à 1858 (Fraser), presque en même temps que la Compagnie d'Hudson perdait son monopole commercial. Dès lors, le peuplement blanc a véritable- ment progressé. M. Métin étudie le milieu indigène dans lequel se sont faits les groupements. 16.000 In- diens, sur les 25.000 qui habitent la Colombie (1/4 du total du Canada), vivent sur la côte O.; leurs traits mongoliques accusés, leurs totems, leurs associations demi-religieuses, leurs villages fixes de maisons carrées en bois. leur civilisation de pêcheurs les distinguent des Indiens des plateaux. Ceux-ci, de type athabas- cain, étaient restés nomades; « marcheurs secs et ner- veux », ils partageaient leur vie entre leurs villages de èche, construits en bois aux passages du saumon, et eurs campements de huttes qu'ils déplaçaient à la poursuite de l'élan Sauf 3.500 environ, dans le Nord, tous les indigènes sont aujourd'hui cantonnés sur les réserves, «nation dans la nation, mineurs en tutelle », mais dont le genre de vie évolue assez rapidement vers la civilisation. L'une des plus vivantes descrip- tions de l'ouvrage, et des plus géographiques, est celle des villages indiens des réserves, avec les bâti- ments de la Compagnie, de la mission, et les cultures qui peu à peu font tache tout autour (p. 168). De ces villages partent déjà d'assez nombreux ouvriers d’in- dustrie. Les blancs immigrés, en très grande majorité venus du Royaume-Uni, sont groupés, nécessairement, sur les districts miniers ou agricoles : Vancouver S.-E., district de Burrard et plaine du bas Fraser, partie méridionale des plateaux intérieurs. Dans ces régions, les agglomérations de villes retiennent une partie notable de la population : 27.000 à Victoria-cité et à Nanaimo-ville, sur un total de 50.890 habitants pour Vancouver (1901); 27.000 à Vancouver-ville sur un total de 42.000 habitants pour tout le district de Bur- rard. Au sud du Fraser seulement, la densité kilomé- trique dépasse 3 : c'est, dit M. Métin, la seule région d'existence normale. Ailleurs, la population, « accapa- rée par les mines, les moyens de transport, l’exploita- tion des forêts et des eaux, est égrénée en groupes que séparent des étendues presque désertes » (p. 180): vue saisissante des conditions démographiques dans lesquelles se fait la mise en valeur. La pêche est restée l’une des principales ressources. En 1904, la Colombie occupait le deuxième rang des Etats de la puissance pour la valeur des prises et pour le capital engagé. Les 3/5 de la production sont four- nis par les saumons, du genre « sockeye » principale- ment, que l’on poursuit d'avril jusqu'au 10 août, d’abord dans les « entrées », et le long de la côte O. de Vancou- ver, puis dans le bas Fraser. À ce moment de l’année, toute une flotle de voiliers, montée en grande partie par des employés japonais, anime les parages de l'embouchure. Mais l'exploitation est devenue destruc- tive, et des règlements nombreux ont dû intervenir, soit pour la pêche même, soit pour la protection des œufs et des alevins contre les Indiens de l’inté- rieur. C'est 800.000 caisses de 48 livres que les usines colombiennes de préparation ont pu livrer en 1905. Déjà on se préoccupe de suppléer à la diminution de ce revenu: une compagnie américaine a organisé la pêche du flétan, pour fournir de poisson frais les Etats de l'Est. . La prospection et l'établissement des mines ont fait pour la pénétration et pour le peuplement ce que n'avait pu produire la pêche. Dans toute la Colombie, c’est par la recherche du minerai qu'ont débuté,et l’exploi- tation de la forêt, et le groupement des hommes en villes, condition première de la véritable agriculture. La Colombie fournit actuellement presque tout l'or de la puissance en dehors du Yukon, les 3/4 du cuivre le 1/4 du charbon. M. Métin à fort bien décrit l'évolu- tion générale qui, dans quelques cas, a fait sortir de grandes villes, comme Æossland où Nanaimo, d'un pri- mitif établissement de prospecteurs : édification d'une scierie près des cabanes, puis création d’un camp minier d'approvisionnement dans la vallée proche, et aménagement graduel de ce camp en cité (p. 246-247). Pour l'or, dont la production à dépassé 29 millions 1/2 en 1905, sur un total général de 73, le fait géographique important est que les « placers », quoique exploités par galeries (placers fossiles) et par dragues, grâce à l'intervention des Compagnies, ne donnent que 1/6 en- viron de l'or de minerai: les principaux sont ceux de Caribou et d'Atlin. L'or de filon (25 millions de francs, en 1905) est obtenu par le broyage de minerais com- posés, dans lesquels il se trouve associé au plomb (Trail-Creek) ou au cuivre (Boundary-Creek). D'assez puissantes Sociétés sont seules capables de mener à bien cette exploitation, et l’industrie minière, livrée d'abord aux mains d'aventuriers qui agissaient à leurs risques et périls, a pris de la sorte la même forme scientifique et capitaliste qu'aux Etats-Unis ou dans les autres colonies anglo-saxonnes. Il en est ainsi pour tous les métaux en général. De fort belles photogra- phies (pl. XII) et une description tout à fait attachante (p. 267) montrent Comment s'est faite la concentra- tion près des mines, et comment ont été organisées ces séries d'usines, où l’on à visé, comme aux Etats- Unis, à réduire la main-d'œuvre au minimum : pour faciliter les manipulations, les bâtiments s’étagent le long du versant minier, depuis les abris pour les broyeurs jusqu'aux fours de fusion, qui occupent le bas des pentes, à proximité des rails, des ateliers de réparation et des scieries. Un «smelter » peut ainsi devenir le centre d’une ville (ex. Granby). Pour une énorme étendue de bois (725.000 kmdg), dont beaucoup, il est vrai, en brousses et en taillis, la surface forestière régulièrement exploitée est très faible, 2.500 kilomètres. On peut dire que l’industrie du bois est presque restreinte à la zone côtière (p.221); elle livre surtout des bois de charpente et des bar- deaux tirés des grands conifères. Les camps de bûche- rons et les scieries s'égrènent jusque dans le nord, ravitaillés par les «timber cruisers ». Les scieries à transformations sont à Vancouver et appartiennent, elles aussi, à des Sociétés qui font l'exportation dans le Royaume-Uni, l'Australie, le Chili, l'Afrique aus- trale, et déjà dans les Etats canadiens de la Prairie, où va 1/10 du bois ouvré. La culture digne de ce nom n'existe encore que par ilots, et la cherté d’une main-d'œuvre attirée surtout par l'industrie rend les progrès plus lents. On remarquera dans l'ouvrage de M. Métin la description des franches (p. 231) et l'étude de l'élevage au point de vue de son orientation nouvelle, c’est-à-dire la pro- duction des vaches laitières et des porcs. Cette trans- formation n’a pu évidemment se faire que dans les parties peuplées du sud, où les débouchés sont assurés ; elle a entraîné l'introduction des fourrages artificiels : le trèfle sur la côte (bas-Fraser, Vancouver), la luzerne dans l'intérieur plus sec. Laiteries-beurreries s'orga- nisent, et des règlements émanés d’un service spécial du Ministère de l'Agriculture protègent déjà cette industrie. Il y aurait lieu d’insister enfin sur les pro- grès de l’horticulture, dirigés aussi par un «board » particulier du même Ministère. Une très expressive photographie nous montre les vergers irrigués de pom- miers-arbustes. Okanagan produit des raisins et des pêches. L'exportation des fruits a commencé pour le Yukon et pour la Prairie, réglementée aussi dans les détails. 192 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX J'ai essayé de donner une idée des principaux résultats de la transformation de la Colombie. La der- nière partie de l'ouvrage (p. 279 et suiv.), intitulée les Régions économiques, est une vue synthétique qui permet d'apprécier à quel point de son évolution est parvenu chacun des « pays » de la Colombie. On sera frappé de l'énorme avance des parages du sud, prin- cipalement le long des voies ferrées, et de l'immen- sité du champ encore ouvert à la colonisation. Les cartes sont tout à fait géographiques, puisqu'elles visent à traduire aux yeux des rapports. Les photo- graphies ont une valeur éminemment démonstrative. Les unes et les autres contribuent à laisser de ce volume l'impression d’une œuvre achevée et solide. La vue des choses n’y a point été prétexte à pédan- tisme. Les idées générales dégagées ont une vraie nou- veauté. J. Macnar, Docteur ès Lettres, Professeur au Lycée Buffon. Pitard(J.), Docteur ès Sciences, et Proust (L.).— Les Iles Canaries. Flore de l’Archipel. — 1 vol. in-8° de 500 p.,avec19 planches. Klincksieck, édit. Paris, 1909. S'il ne s'était agi que de faire un catalogue des plantes croissant dans l’Archipel des Canaries, point n’était besoin d'écrire un nouveau livre. Il eùt suffi, dans le silence du cabinet, de compulser les Mémoires des nombreux botanistes que la flore de ces belles iles a attirés. Aussi n'est-ce pas pour la satisfaction unique de décrire quelques espèces nouvelles que M. Pitard nous a promis sur ce sujet trois volumes, dont le deuxième vient de paraître. Après deux longs séjours de quatre à cinq mois, occupés à parcourir en naturaliste convaineu et en bota- niste ardent les treize îles qui composent l'archipel, M. Pitard s'est livré à de nombreuses observations sur l’ensemble de la végétation, la durée de l’évolution des types annuels, l'époque de floraison et de fructification des espèces vivaces, la répartition des espèces, et il a fixé les localités très précises où l’on peut les ren- contrer. Un point particulier était intéressant à établir, et l’auteur n'a eu garde de l'oublier : c'était de suivre l'évolution de certaines espèces méditerranéennes qui se trouvent là sous la latitude la plus méridionale de leur aire de dispersion; aussi trouve-t-on dans l’ou- vrage, avec beaucoup d’autres renseignements, les altitudes extrêmes qu'atteignent ces espèces. Les résul- tats de ces investigations, joints aux critiques des espèces endémiques et à l’examen de celles qui sont en voie d'extension ou au contraire d'extinction, dans leurs rapports avec les flores des régions voisines ou éloignées, ont amené l’auteur à exposer ses présomp- tions « en faveur de l’existence de l’antique Atlantide ». Pour l'étude de ses notes et herbiers, M. Pitard s'est annexé la collaboration éclairée d'un amateur pas- sionné, M. Proust. Dans la Préface, qui comprend près de quatre-vingts pages, toutes intéressantes et écrites dans un style concis, quoique toujours agréable et clair, les auteurs n'ont naturellement pas repris l'étude géographique de l'archipel, faite dans le premier tome, mais se sont étendus sur les conditions extérieures de la vie : tem- pérature, régime des pluies et des vents, pression baro- métrique, nébulosité, etc. Aux Canaries, la végétation ne subit pas, comme dans les régions tropicales, deux arrêts annuels, mais un seul repos qui, dans les diverses zones soumises à des facteurs différents, se produit à des époques variables. Il ne faudrait cependant pas croire que le cycle évolutif de la plante s'exerce avec la régularité que nous lui connaissons sous nos climats; il y a là des différences assez considérables, comme la durée du phénomène de la chute des feuilles, qui tombent lentement une à une, et non plus en chute brusque comme à l'automne en Europe tempérée. De même, les fleurs s'épanouissent pour une même espèce souvent pendant plusieurs mois, au lieu de présenter une époque bien déterminée de floraison. L'étude du sol est l'objet d’un autre chapitre, puis M. Pitard par- tage l'ile en trois zones botaniques : 1° zone maritime, avec cultures tropicales (0 à 600 mètres environ); 2° zone sylvestre, avec cultures tempérées (600 à 1.800 mètres); 3° zone suprasylvestre ou subalpine (au-dessus de 1.800 mètres). Nous renvoyons à l'ouvrage pour l'étude des espèces caractéristiques de ces zones de végétation et les conclusions tirées sur les carac- tères de la flore canarienne ancienne ou récente. Nous terminerons seulement en disant que déjà dix-neuf espèces nouvelles pour la flore générale sont décrites, que soixante-dix espèces non recueillies aux Canaries sont citées pour la première fois et accompagnées de nombreuses variétés spéciales à cesiles. Vingt-sept très belles photographies, très judicieusement choisies,com- plètentla documentation. Félicitons vivement M. Pitard qui, avec une situation professorale des plus modestes, à pu, sans aucun concours pécuniaire ofliciel, faire des expéditions coûteuses, et remercions les auteurs de nous donner une œuvre qui fait honneur à la Botanique française. Ex. PERROT, Professeur à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. 4 Sciences médicales Darier (J.), Médecin de l'Hôpital Broca. — Précis de Dermatologie. — 1 vol. in-8° de 707 pages, avec 122 fig. (Prix : 12 fr.) Masson et Cie, édit. Paris, 1909. La Clinique, fortement étayée par l’Anatomie patho- logique, telle est la caractéristique du livre de M. le D' J. Darier. A côté de la description clinique, l'expli- cation anatomo-pathologique est d'une clarté remar- quable. De nombreuses photographies, d’une grande netteté, nous montrent les divers types cliniques; des coupes multiples, avec des légendes explicatives, objec- tivent merveilleusement les lésions histologiques. Les légendes de ces dernières figures sont détaillées, jusqu'à la minutie, et ne laissent rien dans l'ombre. Bien plus, l’auteur tire de ses études anatomo-patho- logiques les déductions les plus utiles pour la théra- peutique, témoin le chapitre des épithéliomas. La première partie, de beaucoup la plus importante (430 p.), est consacrée aux formes dermatologiques. C’est l’œil qui fait le diagnostic en dermatologie; la morphologie et la topographie des lésions cutanées sont les guides principaux pour le diagnostic clinique des maladies de la peau. Ce sont là aussi les fils conduc- teurs qui permettent au débutaut, ou à celui qui se trouve, pour la première fois, en présence d’une derma- tose un peu rare, de s'orienter dans un Traité et de rechercher ce qu'il a bien pu voir. On comprend donc le souci de l’auteur et l'importance qu'il a donnée dans son livre à l'étude de la morphologie des dermatoses el des principaux syndromes que l’on rencontre le plus communément en Pathologie cutanée. 1 La deuxième partie est une mise au point de la noso- logie dermatologique, d’après les données les plus récentes. Sous une forme volontairement concise, mais claire, l’auteur donne tous les renseignements réel- lement importants sur cette question, qui restera long- temps encore à l’état débauche, en raison des maladies de nature encore indéterminée et des syndromes, simples réactions cutanées complexes, qu'on a eu trop de tendance, jusqu'ici, à envisager comme de véritables entités morbides. A propos de chaque dermatose, M. le D' Darier à indiqué la conduite à suivre, mais il ne s’est pas cru quitte pour cela, et il a tenu à donner, dans la troi- sième partie de son ouvrage, un mémento de thérapeu- tique dermatologique raisonnée : les médications der- matologiques. Tel est cet ouvrage, où la clinique, l'anatomie patho- logique et la thérapeutique, exposées avec précision et clarté, se servent en quelque sorte mutuellement, pour le plus grand profit des lecteurs: étudiants, prati- ciens, et tous ceux qu'intéresse la Dermatologie. D: J. BrauLr, Professeur de Clinique dermatologique à l'Ecole d'Alger. PR CT ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 23 Août 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Lémeray signale qu'il à déjà exposé, il y à onze ans, le principe de la méthode récemment développée par M. de Montessus pour le calcul des racines des équations au moyen de substitutions uniformes convenables. — M. Ch. Lalle- mand à calculé les mouvements de la verticale dus à l'attraction de la Lune et du Soleil, la Terre étant sup- posée absolument rigide. . 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. A. Fernbach a extrait de la cellule de levure une substance toxique pour la levure même et aussi pour les bactéries. Cette substance est volatile avec la vapeur d'eau à 40°; elle traverse les filtres en porcelaine et est détruite à 1000. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Tur à étudié l'effet du radium sur le développement des œufs de Philine aperta. La segmentation n’est pas retardée, mais l’em- bryon se hérisse de cellules qui sortent de leur rang et se séparent ensuite de la larve; celle-ci diminue pro- gressivement et meurt après neuf à dix jours. Séance du 30 Août 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. N. Saltykow pré- sente ses recherches sur le perfectionnement de la théorie des équations partielles de premier ordre. 29 SGIENCES PHYSIQUES. — M. Boulouch montre que certains artifices employés par M. Muller dans sa récente démonstration de la règle des phases sont sus- ceptibles de critiques qui leur enlèvent toute valeur. — M. P. Gaubert à constaté que, dans le cas de pseudopolychroisme, le maximum d'absorption de la lumière, dans les sphérolites constitués par une seule substance, a lieu suivant une direction perpendiculaire à la section principale du nicol; dans les sphérolites formés de deux substances ne se mélangeant pas inti- mement, le maximum d'absorption peut se produire dans une direction perpendiculaire à la précédente, mais il n'y a pas d'absorption anomale. — M. R. Du- brisay a constaté que l'élévation de température aug- mente la dissociation de l’iodure de bismuth. Il peut se former deux produits : un oxyiodure rouge BilOH et un corps noir contenant Bi0* pour 5HI, — M. P. Lemoult simplifie la méthode de détermination du pouvoir calo- rilique des combustibles gazeux en comptant H° et CO ensemble, sans les séparer, ces deux gaz donnant la même contraction en présence d’alcali, consommant la même quantité d'O par molécule et dégageant la même quantité de chaleur. — M. P. Martinand a reconnu que la levure ne peut faire fermenter un moût sucré contenant SO? libre ; la fermentation des moûts sulfités est provoquée par des micro-organismes analogues aux Torula, qui font disparaître SO? et permettent ainsi aux levures de proliférer ensuite. — M. J. Wolff montre que la spécilicité des oxydases peut résulter soit de la présence d’une diastase particulière, soit de la super- position d'un certain nombre de facteurs qui exercent mutuellement leur action. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. J. E. Florence et P. Clément ont constaté que l'ingestion de sels ammo- niacaux provoque des accès chez les épileptiques et que le traitement bromuré contrebalance cette action. — M. R. Anthony décrit un Mesoplodon, cétacé rarissime, qui s’est échoué le 2 novembre 1908 sur la presqu'île de la Hougue. C'est un mâle adulte, de 5 mètres de longueur; l'étude anatomique se poursuit. — M. Aug. Chevalier montre que la forêt vierge africaine diminue REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. d'étendue : vers le nord, elle est en régression et la brousse soudanaise prend peu à peu sa place; dans l'intérieur, les défrichements l’appauvrissent. Séance du 6 Seplembre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Ch. Lallemand a déterminé les marées du géoide, en supposant Île globe terrestre absolument rigide. Du fait de la Lune, le géoïde présenterait d'abord une marée semi-diurne, nulle aux pôles et maxima à l'équateur (0m,50), puis une marée semi-mensuelle, une marée mensuelle et une marée de 18 ans 8 mois, nulles à la latitude de 35014! et maxima au pôle (8 cm.,# em. et 4 cm. res- pectivement). De même, le Soleil produirait une onde semi-diurne, une onde semi-annuelle et une onde annuelle, analogues aux trois dernières ondes lunaires. L'élasticité du globe aurait pour effet d'augmenter d’un tiers les maxima. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. J. Perrin et Da- browski ont étudié à l’ultramicroscope le mouvement brownien des grains de mastice en émulsion dans l'eau. L'observation de la répartition des grains et celle des déplacements donnent pour N (constante d'Avogadro) les valeurs 70.10*? et 73.10%, nombres presque identiques à ceux trouvés avec la gomme gutte. — M. J. Guinchant a constalé que la constante cryoscopique du bromure mercurique fondu employé comme dissolvant, déduite de la formule de van't Hoff, est notablement plus grande (403) que la constante expérimentale donnée par les sels dissous (340 en moyenne). 39 SGIENCES NATURELLES. — MM. Ch. Nicolle,C.Comte et E. Conseil ont reconnu qu'il est possible de trans- mettre le typhus exanthématique du bonnet chinois infecté au bonnet neuf par le moyen du pou du corps. Il est probable que la propagation de cette maladie chez l'homme a lieu aussi par ce parasite. — MM. H. Jumelle et H. Perrier de la Bathie décrivent quel- ques ignames sauvages de Madagasrar, qui entrent dans l'alimentation des Sakalaves (Dioscorea Beman- dry, D. Soso, D. Macabiha, D. Antaly, D. Maciba). — M. A. Roussy à constaté que, pour certaines moisis- sures, les substances grasses peuvent, à elles seules, être à peu près un aussi bon aliment que les hydrates de carbone, à condition d'observer certaines propor- tions (optima : 6 à 10 °/,). — M. A. Allemand-Martin a étudié la structure géologique de la péninsule du Cap Bon (Tunisie); il a observé trois plis anticlinaux, constitués surtout par des grès rouges, séparés par deux synclinaux parallèles occupés par des formations néogènes. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 31 Juillet 1909. M. C. Gerber attribue aux présures végétales un rôle dans la synthèse, la translocation et la mise en réserve des substances protéiques, et dans la conduction et la nutrition du boyau pollinique du stigmate à l’ovule. — Mr° Déjerine-Klumpke et M. André-Thomas ont constaté l'existence de fibres sympathiques irido-dila- tatrices provenant de la moelle cervico-dorsale et aboutissant au ganglion ciliaire. — M. et Mn° L. La- picque ont reconnu que la consommation minima n'a pas la même valeur, par unité de poids, chez des oiseaux de tailles diverses; elle est d'autant plus grande que les oiseaux sont plus petits. — M. A. Therre a observé que la cure thermalæde Vichy, chez la chèvre en état de lactation physiologique, entraîne une exci- 18°* 194 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES {ation des organes hématopoïétiques, suivie de leur épuisement; elle ne modifie pas la tension artérielle. — MM. V. et J. Baur décrivent un cas de méningite cérébro-spinale où le précipito-diagnostic fut positif dès le début de l'affection, mais où les méningocoques n'apparurent dans le liquide céphalo-rachidien que le dix-septième jour de la maladie. — MM. G. Meillère et P. Fleury estiment que l’inosurie est intimement liée à la glycosurie; elle n’accompagne la polyurie que dans les cas où celle-ci est elle-même liée au syndrome glycosurique. — MM. Ch. Achard et H. Bénard ont déterminé le pouvoir leuco-conservateur des humeurs; celui du sérum se relève, en général, au déclin des maladies aiguës. — MM. CI. Regaud et G. Dubreuil ont constaté que l'isolement d’une lapine, par rapport au mâle, fait diminuer la glande interstitielle de l'ovaire, tandis que la cohabitation permanente en provoque l'augmentation. — MM. M. Loeper et G. Béchamp montrent que les affections intestinales chroniques s’accompagnent des éliminations de chaux les plus élevées, que l'intestin soustrait ainsi à l'organisme. — MM. Gougerot et Blanchetière ont observé que les endotoxines sporotrichosiques extraites à l’éther ten- dent à faire de l’infiltration cellulaire Iympho-conjonc- tive, tandis que les endotoxines chloroformiques ten- dent à faire une réaction lympho-conjonctive basophile, fibrocellulaire, puis scléreuse. — M. P. Lassablière a reconnu que des températures élevées peuvent à la longue avoir une action défavorable sur la valeur nutritive des aliments. — MM. Ch. Mantoux et J. Le- maire ont constaté, par l'intradermoréaction à la tuberculine, pratiquée sur 300 enfants non malades de un à quinze ans, l'extrême fréquence de la tuberculose latente. — MM. E. Wertheimer et G. Battez montrent que l’atropine n'empêche pas la glycosurie asphyxique de se produire, ce qui est contraire à l'hypothèse de l'existence de nerfs glyco-sécréteurs. — M. J. Nageotte a observé dans le sang du foie de la grenouille des granulations spumeuses et des granulations libres. — M. F. Picard décrit un Hyménoptère fouisseur du genre Oxybelus, qui attaque violemment les Glossines au Soudan français et les tue. — M. S. Marbé à reconnu que, dans la maladie de Basedow, l'indice phagocytaire et opsonique est diminué, qu'il n°y a pas mononucléose, que les leucocytes se colorent en violet, caractères qui excluent l'intervention de l'hyperthy- roïdie. MM. W. Mestrezat et E. Gaujoux confir- ment la valeur diagnostique et pronostique de la formule chimique du liquide céphalo-rachidien dans la méningite cérébro spinale à méningocoques. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 12 Juillet 1909. MM. J. Apsit el Ed. Gain ont constaté que des grains tués par l'immersion dans l’eau chaude à 65%, pendant vingt minutes, renferment encore de l’amy- lase dont l’activité n’est pas atteinte par la chaleur. — M. R. Moreaux à étudié la spermiogenèse chez le macaque. — MM. G. Etienne, Rémy et Boulangier ont reconnu que la réaction leucocytaire des tubercu- leux à la tuberculine n'est modifiée que très légèrement dans l’état anaphylactique. — M. R. Collin présente la reconstruction photostéréoscopique d’une cellule gan- glionnaire spinale du chien. — M. A. Colas a observé que l'argent colloïdal électrique a une action élective sur les cultures d'Aspergillus fumigatus. Le mercure colloïdal est éminemment toxique. — M. M. Lucien montre que le faisceau interne du muscle pédieux jouit d'une véritable individualité. — MM. M. Lucien et J. Parisot ont reconnu que l'augmentation du nombre des corpuscules de Hassal doit être considérée comme un signe d’involution et non comme une mani- festation spéciale d'activité du thymus; l'existence d'une sécrétion spécifique de ce dernier n'est pas confirmée. — M. J. Pagisot a observé que, dans l'ac- tion hypotensive exercée par l'extrait de thymus, c’est la partie lymphatique de cet organe qui joue le rôle le plus important, RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 27 Juillet 1909. M. M. Coyne a étudié une tumeur congénitale de l'ombilic développée dans un vestige de la vésisule allantoïdienne; elle rappelle les caractères de l’ou- raque. — M. R. Lautier montre que la réaction de Rivalta indique, dans les liquides organiques d’origine inflammatoire, la présence d'une substance spéciale, caractérisée par sa réaction avec l’eau acétique. — MM. J. Gautrelet et L. Thomas ont constaté que la température du lapin décapsulé suit, dans certaines limites, les variations de la température extérieure. Le sympathique (abdominal surtout) est moins excitable. — MM. A. Lancien et L. Thomas ont reconnu que la grenouille normale n'ionise pas les gaz, non plus que le cobaye, ni les géraniums. — M. B. Auché a pro- voqué expérimentalement de la gangrène cutanée e: sous-cutanée par l'injection de staphylocoque doré au lapin et au cobaye, — MM. J. Sabrazès et L. Muratet ont observé la présence de kystes à sarcosporidies, dans le tissu musculaire, au voisinage immédiat d’une tumeur fibro-sarcomateuse chez un cheval. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 23 Juillet 1909. M. Ch. Tanret a retiré du seigle ergoté une base nouvelle, renfermant du soufre, l’ergothionéine, C'HAz"0°S. Elle cristallise avec 2H°0 dans le système clinorhombique. F. 290° avec décomposition; [x] — 110. Ses sels ont ceci de particulier que leur acide peut être titré aux indicateurs colorés comme s'il était libre. — M. M. Delépine a trouvé dans l'essence de criste marine l'isomère de l’apiol, dit apiol d'essence d'aneth ou diméthoxy-2: 3-méthylènedioxy-# : 5-allyl-1- benzène. — Le même auteur présente une nacelle à compartiments dont il se sert pour les combustions en tube ouvert. — MM. A. Haller et Ed. Bauer, en faisant agir l’'amidure de sodium sur la pinacoline en solution dans l’éther, ont obtenu, avec dégagement d'AzH*, un dérivé sodé qui, traité par CHI, fournit la monomé- thylpinacoline déjà connue. En sodant cette dernière et traitant de nouveau par CHFI, on obtient la dimé- thylpinacoline ou pentaméthylacétone, déjà préparée par Nef, dont J'oxime fond à 141°. Cette cétone, réduite par Na dans l'alcool, donne l'alcool pentaméthylisopro- pylique, dont le phényluréthane fond à 79°. La penta- méthylacétone, traitée par NaAzH?, puis par CH°I en solution benzénique, fournit l'hexaméthylacétone, Eb. 150-151°, donnant par réduction un alcool, F. 500. — M. E. André a préparé, à partir du phénylacé- tylène, cinq acétones acétyléniques, dont trois déjà connues, puis le valérylphénylacétylène et le caproyl- phénylacétylène, bouillant tous deux vers 186-1889 sous 18 millimètres. Les acétones acétyléniques se com- binent avec les amines primaires, pour donner des combinaisons très altérables à l'air, et avec les amines secondaires, pour donner des combinaisons cristal- lisées : le diéthylamine-propionylphénylacétylène fond à 459, le diéthylamine-butyrylphénylacétylène à 40. Ces combinaisons s’hydrolysent facilement par les acides en donnant des dicétones 8:(G°H5.C0.CH.C0.CH*}, F. 191°; (C‘H5.CO.CH.CO.C?H5};°, F. 452°; etc. — MM. Ch. Moureu et Bongrand ont obtenu, en déshydratant la diamide COAZH®.C : C.COAZH®, un corps fondant à 20°. en une huile légère, Eb. 76, Sa vapeur irrite violem- ment les yeux et le nez et son odeur est analogue à celle du cyanogène; il est combustible avec une flamme pourprée. Le nitrate d'argent, en solution aqueuse, l'attaque rapidement avec formation de cyanure d’ar- gent. Les auteurs considèrent ce corps comme un sous- azoture de carbone, de constitution Az : C.C : G.C : Az; l'analyse correspond bien à une formule C*Az ou C'A7°. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 795 — M. E. Kohn-Abrest utilise l'action du gaz chlor- hydrique pour le dosage direct de l'AT métallique dans des échantillons de poudre, de rognures, ou d’alliages d'aluminium avec des métaux donnant des ehlorures peu volatils. Un simple dosage de CI, dans le chlorure d'aluminium recueilli, donne la quantité d'Al métal- lique. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 17 Juin 1909. M. G. E. Hale présente ses recherches sur /a nature des flocules d'hydrogène sur le Soleil. Dans les photo- graphies de la ligne Ha du spectre du disque solaire faites à Mount Wilson avec une forte dispersion, on voit : 4° une ligne sombre large, différant d'intensité et de largeur suivant les régions du Soleil; 2° à l'inté- rieur des limites de la ligne sombre, une ligne bril- lante étroite, simple ou multiple, dans certaines régions du Soleil. Quelquefois, l'aspect ressemble à celui des lignes K° et K° du calcium, c'est-à-dire que la ligne brillante sur son fond sombre est divisée en deux composantes par une ligne noire centrale; dans d'autres régions, la ligne brillante est divisée en un plus grand nombre de composantes. Les images des flocules d'hydrogène sombres prises avec une fente presque égale en largeur à Hx paraissent dues, eu général, à une augmentation locale d'intensité de la ligne sombre, correspondant à une augmentation d'absorption. Les proéminences sur le bord du Soleil sont fréquemment enregistrées comme flocules sombres quand elles sont photographiées en projection contre le disque. L'auteur montre que la dispersion anomale n'est pas le facteur principal dans la production des flocules d'hydrogène; elle peut jouer un rôle secon- daire en en moditiant la forme. — Sir N. Lockyer, MM. F. E. Baxandall et C. P. Butler : Sur l'origine de certaines lignes dans le spectre de e Orion (A/nitam). Le spectre de l'étoile e d'Orion renferme encore quatre lignes d’origine inconnue 4.097, 4.379,8 et un double 4.647,7 — 4.650,8. Les auteurs montrent que les deux premières appartiennent au spectre de l'azote, tandis que le double fait partie du spectre du carbone. — M. W. J. Harrison : La dimi- uution des ondes de surface produite par une couche superposée de fluide visqueux. L'auteur obtient une estimation de l'effet d'une mince couche de liquide visqueux sur la diminution des ondes à la surface d’un liquide légèrement visqueux. L'équation de la période du mouvement est du 4° degré, et a deux racines réelles et deux racines complexes dans le cas des ondes moindres qu'une certaine longueur, et quatre racines complexes dans le cas d'ondes d'une plus grande longueur. Les racines réelles corres- pondent aux modes amortis et les racines complexes aux modes propagés. On ne peut obtenir une expression générale de quelque utilité pour l'amortissement, mais l'équation peut être résolue numériquement dans chaque cas particulier. Dans ce mémoire, la vitesse de propagation et le module de diminution sont donnés pour des ondes d’une longueur de 2, 5, 10 et 20 centi- mètres à la surface du mercure sur lequel est super- posée une couche de glycérine de 1 millimètre d’épais- seur. — M. H. A. Wilson : /nduction électrostatique à travers des isolateurs solides. Ce mémoire contient le compte rendu d'une série d'expériences sur la varia- tion de la capacité de l’ébonite et d'autres condenseurs, avec le temps de chargement et la différence de potentiel. Il est prouvé que la capacité C, après un certain temps de chargement #, est indiquée par la formule GC—C1<+8B log (1+pt)|, dans laquelle Co marque la capacité quand 4 —0, et B et p sont des constantes. Dans le cas de l'ébonite à 30° C., cette for- mule représente les résultats obtenus à 1/2.000 près. L'auteur a trouvé les valeurs des constantes pour plusieurs substances à diverses températures. Il montre que la capacité est indépendante de la différence de potentiel dans la limite des erreurs. Après un change- ment de température d'un condenseur d'ébonite, il se produit un changement très lent dans la capacité, qui continue pendant plus de cent heures à une tempéra- ture constante. — M. A. Russell a déterminé /es coef- ficients de capacité et les attractions ou répulsions mutuelles de deux conducteurs sphériques électrisés proches l'un de l'autre. En étendant un théorème mathématique dû à Schlümilch, l’auteur montre que, lorsque les sphères sont rapprochées, les formules ordinaires en séries pour les coefficients de capacité, qui sont très laborieuses, peuvent être écrites sous une forme qui en rend le calcul très facile. L'auteur a recalculé et étendu par ce moyen les tables de Kelvin pour les coefficients de capacité de deux sphères égales quand la plus petite distance entre elles ne dépasse pas leur rayon. Quand les sphères sont très rapprochées, les lois d'attraction et de répulsion sont simples. Soit a le rayon de chaque sphère et x leur plus petite dis- tance; si le rapport V,/V, des potentiels des deux sphères n’est pas égal à l'unité, et si x/a est très petit par rapport à l'unité, la force mutuelle entre les sphères est attractive, et représentée par la formule ae sx Si les potentiels des sphères sont égaux, la force répul- sive entre elles est donnée approximativement par la formule de Kelvin pour la force répulsive entre deux sphères égales qui se touchent. Enfin, si les charges des deux sphères sont Hg et — q et si x/a est faible par rapport à l'unité, la force attractive entre elles est donnée par l'expression : 2 q° ax [loge (a/x)f? — MM. E. Wilson, G. E. O’Dell et H. W. K. Jennings ont étudié l'effet de l'histoire magnétique antérieure sur la magnétisation. Ils ont constaté qu'entre cer- taines limites les aires des courbes d’hystérèse d’un anneau de fer soumis à la magnétisation après avoir été soigneusement démagnétisé ou après avoir été soumis à une force magnétisante considérable pré- sentent une différence qui dépend de l'histoire magné- tique antérieure. — M. E. M. Wellisch : Le passage de l'électricité à travers les milieux gazeux. L'auteur à utilisé une méthode expérimentale (basée sur celle de Langevin) pour rechercher si les ions positifs et négatifs produits par les rayons Rüntgen dans un mélange de deux gaz, ou d’une vapeur et d’un gaz, ont des mobilités distinctes. Les résultats ne permettent pas de supposer l'existence de deux mobilités dis- tinctes. Les mobilités ioniques dans l'air diminuent d’une façon sensible par l'addition de petites quantités de vapeurs d'alcool ou d’acétone, mais non par l’addi- tion de vapeurs plus lourdes de CHI ou de C2H'I. Les expériences sur les mobilités ioniques dans les mélanges d’un gaz el d'une vapeur, les ions étant formés aux dépens de la vapeur seulement, montrent qu'il y a, au moins au commencement, un transport de la charge (positive et négative) de la molécule de vapeur à la molécule gazeuse. — M. H. Geiger : L'ioni- sation produite par une particule «. Le but de cette recherche était la détermination précise du nombre d'ions produits par une particule & lorsqu'elle est com- plètement absorbée dans l'air. Le moyen le plus direct pour trouver le nombre d'ions serait de mesurer toute l'ionisation produite par les particules « provenant d'une quantité connue de radium C. Mais, comme il est pratiquement impossible d'obtenir le courant de satu- ration dù aux particules x à la pression atmosphérique, il était nécessaire d'adopter une méthode indirecte. Voici brièvement quelle est cette méthode : On a mesuré l'ionisation due à toutes les particules « expulsées d'une quantité connue de radium C à une basse pression, en permettant à une petite portion définie de la trajectoire de chaque particule « d'être active. Le rapport de l'ionisation produite dans cette ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES faible portion de la trajectoire à l'ionisation produite le long de la trajectoire entière a été déduit d’après une détermination précise de la courbe d'ionisation. L'auteur à trouvé que le nombre d'ions produits dans l'air par une particule & du radium C durant tout son parcours est de 2,37 X 10°. Puisque les particules & de produits radio-actifs différents varient seulement dans leur vitesse initiale, il est possible, à l’aide de la courbe d'ionisation du radium GC, de calculer le nombre d'ions produits par les autres substances. — MM. H. Geiger et E. Marsden : l/ne réflexion diffuse des particules «. On observe qu'une réflexion diffuse se produit lorsque les particules «& font incidence sur une plaque. On compte les particules réfléchies d’après les scintillations produites sur un écran de sulfure de zinc. Les auteurs trouvent que l'effet varie avec des métaux différents comme réflecteurs, le montant de la réflexion étant approximativement proportionnel au poids ato- mique de la substance réfléchissante. En employant des nombres différents de minces feuilles d'or comme réflecteurs, on trouve que la réflexion est un effet de volume; elle est, par conséquent, semblable à la réflexion des particules 6. Prenant une quantité mesurée de radium C comme source, et employant une plaque de platine comme réflecteur, on trouve que, sur le total des particules « incidentes, environ 4 pour 8.000 subit la réflexion. — M. R. Rossi : L'ellet de la pression sur le spectre de bandes des fluorures des métaux alcalino-terreux. 1 à été prouvé par A. Dufour que le spectre de bandes des fluorures des métaux alcalino-terreux présente un effet Zeeman marqué; il était intéressant de voir si ces bandes particulières seraient aussi déplacées par la pression, parce qu'il est connu que les bandes du cyanogène, lesquelles, comme la plupart des bandes, ne présentent pas d'effet Zeeman, ne sont pas déplacées par la pression. On à employé le grand spectrographe à réseau concave de 2 pieds 1/2 du Laboratoire de Physique de l’Université de Manchester, et l’on a trouvé que les bandes des fluorures de calcium, baryum et strontium sont déplacées par la pression. L'ordre de grandeur du déplacement est environ le même que pour les spectres de ligne. Les composants en lesquels les bandes sont résolues sont élargis par la pression. et la relation linéaire entre la pression et le déplacement déjà découverte par de précédents observateurs sur les spectres de lignes semble exister ainsi pour ces bandes. Il ne semble pas qu'il y ait une relation évidente entre les grandeurs de l'effet de Zeeman et de l'effet de déplacement dû à la pression dans le cas de ces bandes. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE NEW-YORK Séance du 21 Mai 1909. M. A. Vorisek propose de rechercher l'alcool méthy- lique dans l'alcool éthylique par oxydation avec une solution faible d'acide chromique, exempte d'acide sulfurique; on recherche l'aldéhyde formique dans le distillat par l’essai de Hehner modifié. — M. ©. B.May conseille de mélanger l'huile de castor avec son poids de magnésie en poudre fine. La substance pâteuse obtenue est stable, sans goût et sans odeur, et possède toutes les propriétés thérapeutiques de l'huile de castor avec celles de la magnésie. SECTION DE SYDNEY Séance du 12 Mai 1909. MM. J.S. Maclaurin et W. Donovan décrivent une méthode rapide et exacte pour déterminer le fer dans ses minerais. Elle consiste à : 4° griller le minerai finement pulvérisé; 2° réduire le minerai grillé par chauffage dans le gaz d'éclairage ou l'hydrogène; 30 dis- soudre le minerai réduit dans l'acide sulfurique dans une atmosphère de CO? ; 4° fitrer la solution par le per- manganale. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 26 Juin 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Korteweg présente au nom de M. L. E. J. Brouwer : Sur la trans{orma- tion continue el uni-univalente de surfaces en elles- mémes. Deuxième partie (pour la première partie, voir /iev. génér. des Sciences, t. XX, p. 388). Démons- tration des trois théorèmes suivants : 4° Une transfor- mation continue et uni-univalente d'une surface bilatérale en elle-même possède au moins un domaine de transformation, interrompant la connexion de la surface en joignant deux systèmes isolés ouverts de courbes, invariants pour la transformation; 2° Cette transformation possède au moins un domaine de transformation, interrompant la connexion de la sur- face ou joignant deux points invariants; 3° Une trans- formation continue et uni-univalente d'un plan cartésien en soi-même possède au moins un point invariant ou bien elle est l’image continue et uni- univalente d'une translation. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals présente au nom de MM. A. Smits et E. C. Witsen- burg : Sur les phénomènes qui se présentent lorsque, dans le cas d'un système ternaire, la surface du point de plissement et la surface à deux nappes des trois phases se rencontrent. Le système ternaire étudié est: éther-antraquinone-alcool. — M. H. A. Lorentz : Sur la théorie de l'ellet Zeeman dans le eas d'observations à directions quelconques. Les phénomènes observés par M. Hale sur les raies spectrales des taches solaires ont incité l’auteur à étudier théoriquement l'effet Zeeman dans le cas où la direction de l'observation fait un angle quelconque avec les lignes de force ma- gnétique. Ce problème ayant été traité par M. W.Voigt en 1900, l’auteur ne publie ici que quelques considé- rations ne se trouvant pas chez le savant allemand. — Ensuite M. Lorentz présente au nom de M.J. J. van Laar: Sur l'état solide. IN. — M. H. Kamerlingh Onnes : /sothermes de substances mono-atomiques et de leurs mélanges binaires. IV. Données sur le néon et l’hélium. — Ensuite M. Onnes présente : 1° au nom de MM. P. Lénard, W. E. Pauliet lui-même : La conduite des phosphures des terres alcalines à des températures dillérentes et très basses; 2 au nom de M. J. Bec- querel : Contribution à la connaissance du phénoméne de Zeeman dans les cristaux. — M. H. E. J. G. Du Bois : Sur un électro-aimant semi-annulaire perfec- tuonné. — M. A. F. Holleman présente au nom de M. E. H. Büchner : La radio-activite des composés du radium, et la thèse de M. S. van Dorssen : Contri- butions à la connaissance des acides nitro et amido- sulfobenzoïques. . 39 SCIENCES NATURELLES. — M. J. W. Moll lit la biographie de feu M. C. A. J. A. Oudemans, de 1859 à 1906 professeur de Botanique à Amsterdam. Cette biographie paraîtra dans l'Annuaire de l'Académie. — M. L. Bolk : Sur Ja posilion et le déplacement du Foramen magnum chez les Primates. — M. G. À. F. Molengraaf : Sur quelques sédiments océaniques de Bornéo central. — Ensuite M. Molengraaf présente au nom de M. H. A. Brouwer : « Glimmerleucithasalt » du Bornéo oriental. — M. F. A. F:C. Went présente la thèse de M. J. Boldingh : « The flora of the dutch West Indian Islands St-Eustatius, Saba and St-Martin » (La flore des îles des Indes occidentales hollandaises Saint-Eustache, Saba et St-Martin). — M. E. GC. van Leersum présente la thèse de M. M. A. van Andel : « Volksgeneeskunst in Nederland » (La médecine du peuple dans les Pays-Bas). P. H. Scnoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris — L, MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. ht. 20° ANNÉE N° 19 15 OCTOBRE 1909 Revue générale D Cliences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie L. Bouveault. — Avec une constance et une rigueur impitoyables, la mort semble s'acharner à choisir ses victimes parmi les plus distingués de nos hommes de science, sans se préoccuper de la cruauté de ses coups ni de l'étendue du vide qu'elle fait dans nos rangs. Comme Curie, comme Moissan, comme Becquerel, comme Arth dont la tombe est à peine fermée, Bou- veault est enlevé à l'affection de sa famille et de ses nombreux amis en pleine vigueur intellectuelle et en pleine activité scientifique. Né à Nevers en 1864, Bouveault, après sa sortie de l'Ecole Polytechnique, en 1885,entracomme préparateur aux travaux pratiques de Chimie, à la Faculté de Médecine de Paris, et mena de front ses études médicales et celles de la licence ès sciences physiques, tout en consacrant ses loisirs à des recherches personnelles, sous la direc- tion de son maître et ami M. Hanriot. Recu docteur ès sciences physiques en 1890, puis docteur en médecine en 1892, il fit un court stage à la Faculté de Médecine de Lyon et ne tarda pas à être attaché à la Faculté des Sciences de la même ville en qualité de maître de Conférences de Chimie. Son passage dans l'Université lyonnaise a été mar- qué par une série de très belles recherches, publiées, les unes en collaboration avec M. Barbier, les autres en.son nom seul. La délicatesse des sujets traités, l'habileté avec laquelle il a su résoudre certaines difficultés d'ordre technique, et les déductions ingénieuses qu'il a su tirer de ses expériences le révélèrent, dès lors, comme un maître sur lequel on pouvait fonder les plus belles espérances. La suite de sa carrière a montré que ces espérances étaient justifiées. En 1898, nous voyons Bouveault maître de Confé- rences de Chimie générale à Lille, et en 1899 maître de Conférences, puis professeur adjoint de Chimie orga- nique à la Faculté des Sciences de Nancy. Fécond en idées et en projets, le jeune maitre n’a pas manqué de mettre à profit les ressources nom- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCE:, 199, breuses, tant en élèves qu'en crédits et en appareils de toute nature, qu'il a trouvées à l’Institut chimique de cette dernière ville, pour associer la jeunesse à ses travaux et faire des disciples dont l’un est déjà devenu un maître à son tour. Cette suite non interrompue de travaux, tous d’une incontestable originalité, devait le désigner tout natu- rellement pour la maîtrise de Conférences de Chimie organique de la Faculté des Sciences de Paris, devenue vacante en 1901. Cette situation de maître de Conférences fut convertie en 1905 en celle de professeur adjoint. Ici sa carrière de chercheur se poursuit avec la même constance et le même succès. Chaque année apporte son contingent de découvertes et d’études qui enrichissent le domaine de la Chimie organique et font le plus grand honneur au savant et, partant, à la science française. Fils d'architecte, très épris de toute les manifes- tations de l’art, Bouveault avait l'esprit imaginatif etse plaisait aux constructions chimiques les plus ingé- nieuses. Il avait la vision des arrangements moléculaires dans l’espace. Mais ces envolées de l'esprit étaient tem- pérées par la conscience de l’expérimentateur, qui ne voulait rien abandonner aux hasards de l'hypothèse. Les édifices moléculaires suggérés par son ingéniosité d'artiste ne recevaient le jour de la publicité que lorsque l'expérience du chimiste les avait reproduits pierre par pierre. Profondément modeste et insoucieux des hon- neurs, ceux-ci sont venus à lui sans qu'il les ait jamais sollicités. A peine sept années s'étaient-elles écoulées depuis l'apparition de son premier mémoire, que l'Académie des Sciences lui décerna, en 1896, une partie du prix Jecker, puis, en 1893, le prix tout entier, c’est-à-dire la plus haute récompense dont elle dispose en faveur des auteurs de travaux de Chimie organique. En 1907 et en 1908, la Section de Chimie le présenta en troisième ligne sur la liste des candidats à la succession de MM. Moissan et Ditte. Sa place à l'Académie des Sciences était, en effet, toute marquée pour l'avenir, En raison de ses multiples mérites el aussi de son beau désintéressement, ses collègues de la Société Chimi- que l'ont choisi en 1897 comme président de la Société 19 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE et l'ont, la même année, désigné à l'unanimité pour la croix de la Légion d'honneur. Entre temps, l'Ecole Polytechnique lui ouvrit ses portes et lui confia les fonctions d'examinateur d'entrée. C'est au cours de cette tâche, pleine de fatigue et de responsabilité, tâche qu'il remplit avec le scrupule et la ponctualité dont il était coulumier, que le mal implacable qui le minait depuis quelque temps l'a terrassé. La Chimie perd en Bouveault un de ses représentants les plus éminents et sur lequel elle était en droit de fon- der les plus beaux espoirs. La mort, en nous l’enlevant, anéantit toutes nos espérances el, eu égard à l’œuvre accomplie, nous frustre des bienfaits et de la renommée qu'aurait valus à la science française l’ample moisson de décou- vertes que sa belle intelligence etson inlassable activité nous réservaient encore. Ces regrets que suscite la perte prématurée du col- lègue et de l'ami ne sont pas moins douloureux que ceux que provoque la disparition du savant. Bon, bienveillant et serviable, Bouveault inspirait la sym- pathie à tous ceux qui l’approchaient. Sa nature généreuse, son esprit élevé, son caractère empreint d'une douceur à peine ombrée d’une pointe de malice indulgente, en faisaient un collaborateur plein de charme et un maître attirant au premier chef. C’est à l'ensemble de ces belles qualités que Bou- veault a dû de pouvoir réunir autour de lui une élite de jeunes travailleurs, auxquels il communiquait son ardeur pour la recherche et qu'il enflammait de son enthousiasme pour la science. Aussi, le culte de la mémoire de l'homme, comme celui du savant, n'est-il, de longtemps, pas prêt à disparaître. A. Haller, Membre de l'Institut. $2. — Mathématiques La théorie des équations intégrales. — Les travaux de MM. Fredholm et Hilbert ont élucidé d’une manière d'ores et déjà très complète la résolution des équations intégrales linéaires, dites de seconde espèce, c'est-à-dire de celles où la fonction inconnue figure dans un terme fini en même temps que sous le signe intégral. Les propriétés des équations intégrales linéaires de première espèce (où la fonction inconnue figure seule- ment sous le signe intégral) sont non seulement beau- coup moins bien connues quant à présent, mais assurément beaucoup moins simples. Au lieu qu'une équation intégrale de seconde espèce dont le « noyau » reste fini et continu a (tant que le déterminant reste différent de zéro) une solution unique, cela n'a lieu pour une équation de première espèce que sous cer- taines conditions de nalure assez compliquée et qu’on ne savait pas former jusqu'ici. Cependant, ces équations de première espèce jouent, elles aussi, un rôle important dans les questions clas- siques de la Physique mathématique. C’est par elles, en particulier, que se traduit de la manière la plus naturelle le problème de Dirichlet, lorsqu'on le prend sous la forme où l’introduit l'Électrostatique, au lieu de le transformer par l’artifice connu de Neumann. Aussi est-il utile de signaler le progrès accompli dans leur étude par une récente communication pré- sentée par M. Picard à l'Académie des Sciences. M. Pi- card s'attaque précisément aux conditions de résolu- bilité dont nous parlions tout à l'heure, et les obtient en supposant le noyau « fermé » par la convergence de certaines sommes de carrés. Il peut, en particulier, 6tu- dier par ce moyen l'équation intégrale qui traduit le problème de Dirichlet. ! M. Lauricella, qui avait déjà été conduit à considérer à ce propos les sommes en question, a repris le pro- blème à la suite de la Note de M. Picard et donné une autre forme à la condition cherchée. $ 3. — Physique L'amortissement des ondes du mercure. — Au cours de ses récentes expériences sur la construc- tion d'un télescope à miroir de mercure,M.R.W.Wood, professeur à l'Université John Hopkins, a eu l’occasion d'observer que les ondes superficielles du mercure en rotation — même celles de grande amplitude — sont supprimées presque complètement en recouvrant de glycérine la surface du métal. Il a obtenu des résultats encore plus satisfaisants avec l'huile de castor, qui, tout en étant presque aussi visqueuse, ne donne point lieu à la production de stries dues à l'absorption de l'humidité atmosphérique et dont la transparence égale presque celle de l’eau. Le même expérimentateur‘ vient de se servir, pour étudier l'effet amortisseur de différents liquides, d’un grand diapason actionné par l'électricité et pourvu d'un stylet de verre plongeant dans le mercure. La surface du liquide réfléchissant était observée à tra- vers deux fentes étroites partiellement superposées dans un carton mince, monté sur les branches d’un autre diapason électrique de même note. En déran- geant légèrement l'accord des deux diapasons par l'addition d’un peu de cire, on voit dans le strobo- scope les ondes ramper lentement en recouvrant, à partir du centre de perturbation, la surface tout entière du mercure. La lumière d’une petite source lumineuse est rendue légèrement convergente par une lentille, avant de tomber sur le mercure, l'image de la source étant projetée sur les fentes vibrantes. Or, en recouvrant le métal d’une couche mince de glycérine ou d'huile de castor, on voit les ondes s’évanouir complètement, après avoir parcouru la distance de 1-3 longueurs d'onde, suivant l'amplitude du diapason excitant. Cette expérience fournit une saisissante illustration des phénomènes que présente la lumière à son entrée dans un milieu absorbant. Lors de ses recherches relatives au flux d’énergie dans le cas des bandes d’interférence (recherches que l'auteur se propose de traiter dans un mémoire ulté- rieur), M. Wood a réussi à éliminer toute perturbation due à la réflexion des ondes, en répandant de la glycérine autour du bord du plateau, dans la dépres- sion capillaire formée par le mercure. La conductibilité spontanée de la vapeur non lumineuse de sodium. — Le renversement spontané des raiesd’absorption s'explique par la consi- dération des ions atomiques positifs que, depuis la dé- couverte de l'effet Doppler dans les rayons-canaux, l'on peut considérer comme véhicules d'émission et, par conséquent, d'absorption du spectre de lignes. Dans un récent Mémoire, M. Ch. Füchthauer? rend compte des expériences qu'il vient de faire surla vapeur de sodium non lumineuse. Comme l'absorption des lignes D se produit déjà à la température de 190», l’au- teur en tire la conclusion qu'à partir de cette tempéra- ture, environ, la présence d'une conductibilité spon- tanée, indépendante de tout ionisateurextérieur, devrait être constatée. Cette prévision est, en effet, confirmée par l'expérience. En mesurant cette conductibilité (entre les limites de validité de la loi d’Ohm), on dé- termine, à l’aide des mobilités ioniques, le nombre d'ions contenus dans chaque centimètre cube. Lorsque, d'autre part, on apprécie. par voie optique, le nombre d'électrons absorbant les lignes D, on peut examiner si les supports de ces électrons sont identiques avec des ions atomiques positifs ou d’une constitution plus com- pliquée. La conductibilité de la vapeur de sodium non Iumi- neuse est importante à un double point de vue, à savoir : 1° au sujet de la question relative aux véhi- 1 Phil. Mag., juillet 1909. ? Phys. Zeitsch., n° 11, 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 199 cules des séries de lignes; 2° pour la raison suivante : comme le sodium, les autres métaux alcalins absor- bent la série principale aux basses températures, d’où l'on conclut qu'ils sont également ionisés à l’état de vapeur. Le mercure ne présente, au contraire, dans ces conditions, ni conductibilité, ni absorption, tandis que lune et l’autre se produisent probablement aux tempé- ratures élevées. Les métaux alcalins fortement électro- positifs semblent, par conséquent, présenter plus que les autres matières une tendance à la formation d'ions à l’état gazeux comme à l’état de solution. Des expé- périences ultérieures sur la relation qui existe entre la témpérature et le courant de saturation, dans les va- peurs de différents métaux alcalins, fera voir s'il s'agit d'une ionisation due à la température (en raison, par exemple, du choc thermique des ions négatifs toujours présents). $ 4. — Métallurgie Expériences sur un haut fourneau élec- trique en Suède. — Nous avons donné récemment l'analyse du compte rendu des expériences faites par le Gouvernement canadien, à Sault-Sainte-Marie, sur le traitement des minerais de fer dans le four ‘élec- trique ‘. Poursuivant l'étude de cette importante question, le Département de l'Intérieur du Canada a délégué, il y a quelques mois, son directeur de Mines, M. Haanel, à Domnarfvet, en Suède, pour y assister aux premiers essais d’un haut fourneau électrique qu'ont établi MM. Grünwall, Lindblad et Stalhane. M. Haanel a bien voulu nous communiquer, au sujet de ces expériences, les renseignements que nous résu- mons ci-après. Le haut fourneau de Domnarfvet offre beaucoup d'analogie, sous le rapport de la forme, avec le haut fourneau ordinaire. Il à 72,50 de hauteur : la partie inférieure, élargie sur une hauteur de 2,10, forme la chambre de fusion; elle est surmontée d’une cheminée à peu près cylin- drique, sauf sur une hauteur de 1,20 immédiatement au-dessus de la chambre de fusion, où elle a l'aspect d'un tronc de cône renversé, formant de la sorte un étranglement qui dirige vers la partie centrale de la zone de fusion la chute des matières. Les électrodes sont introduites dans la zone de fusion, protégées par l'étranglement dont il s’agit, qui les met, de même que le revêtement, à l'abri du con- tact direct avec les matières. C'est cette disposition qui constitue la caractéris- tique la plus importante du four et c’est à elle que les inventeurs attribuent la plus grande part du mérite de leur appareil. Elle réalise d'une façon heureuse, en effet, ce desi- deratum fondamental énoncé par les précédents expé- rimentateurs, notamment par MM. Haanel et Héroull : l'isolement des électrodes et du revêtement à proximité de celles-ci. Les électrodes sont au nombre de trois — le four étant alimenté en courants triphasés — et elles sont réglées à la main au moyen de treuils à volants sur lesquels s'enroulent les câbles d'alimentation. Les montures dans lesquelles elles glissent sont refroidies par une circulation d'eau. A titre de précaution supplémentaire, le vent de tuyères obliques est dirigé contre la voûte. Les gaz soufflés par ces tuyères proviennent du haut fourneau même. Leur combustion dans le four représente donc une grande économie de combustible. Elle procure, en outre, une sérieuse amélioration du fonctionne- ment, car il a été constaté qu'avec ce procédé supplé- mentaire de chauffage, la répartition de la chaleur ? H. MarcHann : Les récentes expériences sur le traitement électro-thermique des minerais de fer. Revue gén. des Se. du 30 mai 1909, t. XX, p. 443 et suiv. dans la masse est beaucoup meilleure que par aucune autre méthode. Les matières composant les charges, — minerais, ré- ducteur et fondant, — sont chargées par la partie supé- rieure, qui est équipée de la mème façon que le sont les hauts fourneaux ordinaires. Il est fait usage d'électrodes de poussier, fabriquées par un procédé spécial (une usine existe en Suède pour cette fabrication) qui donne des produits absolument remarquables. Leur homogénéité est parfaite, leur résistance mécanique très grande, leur conductibilité électrique comparable à celle des électrodes de gra- phite. Le procédé de préparation consiste à mouler la matière sous une très haute pression, puis à la sou- mettre à une cuisson prolongée, à une température de 1.200° C. environ. M. Haanel a constaté, au cours des expériences faites en sa présence, que ces électrodes sont nettement supérieures à celles dont il avait disposé à Sault-Sainte-Marie. L'ensemble du four a, d'ailleurs, donné des résultats excellents, bien que les circonstances fussent très défavorables. Au moment où les essais ont été entamés, le four venait à peine d’être achevé; il n'avait pas eu le temps de sécher; le revêtement en était encore humide. De plus, les matières premières étaient mau- vaises. Le coke, notamment, que l’on employa d'abord comme réducteur, contenait énormément d'humidité. Aucune des pièces n'avait été essayée préalablement. Des accrocs étaient inévitables dans de telles condi- tions, et il n’est pas étonnant qu'il s’en produisit (bris d'un porte-électrode). Malgré ceia, M. Haanel est d'avis que le haut four- neau de MM. Grünwall, Lindblad et Stalhane est, dès à présent, entièrement approprié aux opérations sidé- rurgiques. Quoique l’on n'ait pu procéder à des mesures précises, la production peut ètre considérée comme supérieure, en quantité, à celle obtenue à Sault-Sainte-Marie. La marche du travail a d’ailleurs été parfaite; la fusion se faisait tout à fait régulière- ment; les coulées ne donnaient jamais lieu à difficulté. L'homogénéité des produits était satisfaisante. Quant au mode de récupération et de soufflage dont nous avons parlé, il n'a pu en être fait qu'un essai restreint; son efficacité n'en est pas moins démontrée. MM. Stalhane, Grünwall et Lindblad ont, au surplus, obtenu la commande d’une installation importante de leur système pour une compagnie norvégienne. Cette installation comprendra, au début, indépéndamment de la machinerie ordinaire d’une aciérie et de lami- noirs, deux hauts fourneaux de 2.500 chevaux et deux fours d’affinage de 600 chevaux, ceux-ci du système spécial à induction qu'ont imaginé les mêmes inven- teurs. H. Marchand. $ 5. — Chimie industrielle L’azote assimilable des moûts et des bières. — Dans le Bulletin de l'Ecole de Brasserie de Nancy, paru en 4903, je signalais l'importance pratique que pouvait avoir la notion d'azote assimilable, c'est-à- dire de l'azote que les levures peuvent utiliser direc- tement pour se reproduire. Dans les bières livrées à la consommation, le développement des cellules constitue un accident de fabrication fréquent, par les troubles ou les dépôts qu'il provoque, et, bien que les troubles ne soient pas toujours dus à la seule présence des cel- lules en suspension, la formation de ces cellules est au moins l’origine première des louches constatés. On ne peut songer à la filtration pour retenir entiè- rement la levure, puisque les masses ou substances à grain assez serré pour empêcher le passage des cel- lules enlèvent aussi à la bière les éléments azotés normaux ét modifient le goût et la mousse. D'autre part, il ne peut ètre question d’'antisepsie dans les levures, agents indispensables de la fabrication ; il ne reste à envisager que la pasteurisation en canettes, | traitement onéreux et compliqué, el l'emploi de l'anh- 800 dride sulfureux, qui est une tolérance, mais non un procédé régulier. Nous avons voulu chercher quelles seraient les conditions à réaliser pour rendre impos- sible la formation des cellules, et cela d'après la com- position de la bière. On sait que la levure ne peut former de cellules nouvelles qu’en absorbant un nombre relativement restreint de composés azotés, les uns chimiquement bien définis, comme les sels amoniacaux, les acides amino-amidés, les acides amidés, certaines bases xan- thiques, tandis que d’autres, comme les peptones, ont une constitution beaucoup plus obscure, et l’assimi- lation directe de celles-ci n’est pas absolument démon- trée. On sait aussi qu’au stade de la formation de cel- lules nouvelles l'aliment minéral et hydrocarboné joue un petit rôle et se trouve toujours en quantité large- ment suffisante dans les conditions pratiques pour toutes les bières. L'azote assimilable joue donc un rôle prépondérant et l'on peut dire qu'une bière ne donnera plus de cellules nouvelles si elle est entièrement dépouillée d'azote assimilable. D'après les travaux d'Ehrlich, puis d'Effront, les acides amino-amidés et les acides amidés subissent un dédoublement préalable avec mise en liberté d’am- moniaque, seule absorbée par la cellule, et création de produits accessoires, acides ou alcools, qui peuvent modifier le goût et la composition des liquides fer- mentés ; mais nous considérerons néanmoins ces corps comme faisant partie de l'azote assimilable. Les aliments assimilables par les levures dans une bière terminée peuvent avoir plusieurs origines : 1° Azote directement assimilable existant déjà dans les moûts et non absorbé en cours de fabrication ; 2° Azote albuminoïde ou peptonique transformé par les enzymes protéolytiques de la levure pendant la fermevutation; 3° Azote provenant du contenu des cellules et qui, après avoir subi une transformation à l'intérieur, est diffusé dans le liquide sous forme d'acides amidés, de bases xanthiques, etc.; 4° Azote assimilable et créé dansla bière même après livraison par les cellules de levure qui s'y trou- vent. L'azote assimilable des deux premières origines peut être déterminé par l'expérience, c’est-à-dire par une fermentation effectuée toujours dans des condi- tions identiques, comme température, durée, quantité de levure, la race de celle-ci demeurant constante. Quant à la troisième cause, elle dépend beaucoup de la température, puisqu'il s’agit d'une action enzyma- tique et, par conséquent, elle sera très faible ou nulle dans les caves de garde froides de fermentation basse. Si, au contraire, la levure et la bière sont exposées, à la brasserie même, à une température élevée, la quantité d'azote diffusé dans le liquide augmentera aussi avec la quantité de levure présente, c'est-à-dire avec le nombre de cellules; pour un même nombre de celles- ci, la diffusion s'accroitra si les cellules restent en suspension. Enfin, la quatrième cause, création de l'azote assi- milable aux dépens des albuminoïdes dans la bière livrée, suppose la présence de levures nombreuses et énergiques. Donc elle sera plus forte en fermentation haute qu’en basse, et, pour cette dernière fabrication, une bière ayant eu une longue durée de garde en cave très froide, bien clarifiée au foudre, ne donnera que très peu de cellules, et seulement des cellules affaiblies par une longue inanition. Au contraire, une bière jeune, ou ayant eu unefermentation secondaire énergique ou additionnée de Kräusen, ou enfin ayant une clarifica- tion imparfaite, contiendra des levures nombreuses et actives, capables d'attaquer les albuminoïdes et de faire apparaître l'azote assimilable. On voit qu'il se montre là une différence nette entre la fermentation basse et la haute; cette dernière a fait l'objet le deux Mémoires du plus haut intérêt, publiés | trois moûts, et les bières terminées répondent à la CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE par M. H. T. Brown, dans le Journal of the Institut of Brewing, sous le titre : Nitrogen question in Brewing, et les résultats obtenus sont trop considérables pour que je veuille continuer les recherches dans cette direction ou faire quelques objections. Aussi me bor- nerai-je ici à considérer la fermentation basse et à signaler quelques observations faites dans mes essais. Je rappellerai d’abord mon procédé de dosage pour l'azote assimilable des moûts et des malts, procédé comparatif bien entendu. Le malt, en farine fine, est saccharifié d’après la méthode de Vienne; puis, après avoir complété au poids de 900 grammes °/, de malt, on filtre et on stérilise dans la vapeur sans pression à raison de 200 centimètres cubes en ballons munis de tampons de coton. Pour le moût, on filtre et on stérilise comme précé- demment. Sur le moût, on détermine la densité au pic- nomètre et l'azote total au Kjeldah]l; ensuite, on ajoute 5 gouttes d'une levure pure épaisse, toujours la même, et on place dans un bain d’eau à 11° situé lui-même dans une cave, dont la température n'atteint pas 15°. On laisse douze jours en agitant deux fois par vingt- quatre heures; puis, dans le local même, on filtre sur papier demi-dur qui retient parfaitement les cellules, de sorte que le liquide est clair ; on dose sur celui-ci l’azote total et la densité, ce qui fournit par différence l'azote assimilé et l’atténuation finale. Pour éviter toute erreur, on effectue en même temps l’atténuation finale à 25° et les deux déterminations doivent concorder à 4 °/, près. Nous donnons ci-dessous quelques dosages faits par la méthode précédente sur des moûts pratiques, com- parativement avec l’azote disparu pendant la fermen- tation principale à la brasserie; il s’agit de différents mélanges de malts : ÿ PROTÉINE DISPARUE en fermentation principale M —————_—_——— PROTÉINE ASSIMILABLE du moût ———_———_— J'ECAC °/, d'extrait °/0 c.c. °/, d'extrait ASE 0,235 1259 0,158 1,10 B . . 0,234 1,56 0,185 4,25 CENSNU 262 A5 0,182 1,22 DE 0,199 1,55 0,140 1,10 E - 0,206 1,61 0,152 1,19 Le 0,231 1,57 0,158 4,07 7 CE 0,220 1,50 0,153 1,04 Ho TO 1,61 0,147 0,98 JP 00010224 1,46 0,166 1,09 Comme on le voit, la détermination d’azote assimi-" lable donne toujours une quantité supérieure à celles qui disparaît pendant la fermentation principale ; cela signifie évidemment que, dans notre essai, les actions, enzymatiques de la levure sur les albuminoïdes s'exer= cent d'une façon au moins aussi intense qu'en pratique et que notre détermination fournit le maximum de ce que la levure pourrait absorber. Il est évident qu'en opérant à 14°, nous favorisons plutôt les effets hydro- lysants des diastases de la levure, par rapport aux con= ditions pratiques, et il est à noter, d’ailleurs, que notre essai de 12 jours nous donne une atténualtion finale presque toujours supérieure à celle que fournit l'expérience à 25°. ; Nous avons examiné pour quelques malts, à la bras= serie de l'Ecole, l'influence du brassage et séparément celle du malt sur l'azote assimilable et assimilé prati= uement. 1° Influence du brassage. — Nous avons employé deux malts, orge Sarthe I et II. Le premier a été utilisé à trois brassins de la facon suivante : 1° brassin à 2 trempes; 2° brassin à { trempe; 3° brassin par infu- sion au macérateur avec empâtage à froid. L'analyse des moûts montre que la protéine totale °/o d'extrait du moût est identique au chiffre de protéine non coagulable °/, d'extrait trouvé dans le malt. La protéine assimilable 2/4 d'extrait est la même dans les CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 801 même proportion de protéine disparue, de 1,57 °/, en moyenne. Avec le malt I, entièrement désagrégé et nettement forcé, l'influence du système de brassage à donc été nulle, pour l'azote total, pour l'azote assimi- lable et pour l'azote absorbé en pratique. La mème série de brassins a été faite avec le malt IT, travaillé à la case pneumatique; il s’agit ici d’un malt très peu germé, à désagrégation grossière et imparfaite. Cette fois encore, la protéine assimilable °/, d'extrait est la même, et celle qui a été absorbée présente pour les trois brassins une très faible variation 1,55 à 1,61. Nous avons, au contraire, une variation assez étendue pour la protéine totale ‘/, d'extrait : celle-ci n'est égale à la quantité dosée comme non coagulable dans le malt que pour le brassage à 2 trempes; celui à 1 trempe donne moins, celui par infusion donne davan- tage, et ceci peut être attribué justement à la désa- grégation imparfaite du grain. La dissolution d'azote se faisant mal à 60° et au delà, c’est l’infusion avec réchauffage progressif à partir de 10-12° qui fournit l'attaque la plus grande. Malgré ces différences dans la protéine totale, l'azote assimilable reste constant. Nous croyons pouvoir conclure des essais précédents que l'azote assimilable et assimilé est indépendant du mode de brassage pour un même malt; la protéine totale n’est pas modifiée non plus pour un malt com- plètement désagrégé et forcé, et reproduit la dose de protéine soluble non coagulable dosée dans le malt. Au contraire, il y a des variations pour un malt à désagrégation très incomplète et c’est le procédé par infusion qui donne le maximum. 2% Influence du malt. — Nous avons fait avec divers malts le brassage à 2 trempes : empâtage à 45° et 2 trempes épaisses donnant 63 et 75°. Les mêmes procédés de brassage et de fermentation appliqués à ces malts conduisent à des variations très notables de l’azote assimilable et de l'azote absorbé dansles conditions pratiques ; il n’y a d’ailleurs aucune relation entre l'absorption d'azote et l’atténuation. Quatre malts champagne IT, IV, VIII et XVI, dont le travail de maltage n’a pas été identique, mais qui proviennent de la même orge, donnent des doses d'azote assimilable très différentes dans les moûts et bières; Je III est voisin à ce point de vue des deux Sarthe I et IL. Un malt VIT Beauce, avec trempe de l'orge dans l’eau nitratée, fournit une atténuation finale et une dose d'azote assimilable élevées, mais l'azote assimilé ou qui disparaît à la fermentation n’est pas en rapport avec la quantité dosée dans le moût; l'écart entre l’atténua- tion pratique et l’atténuation finale est également con- sidérable. Nous croyons pouvoir déduire de ces essais que l’in- fluente du malt est très considérable, celle du brassage insignifiante, quant à l'azote assimilable et assimilé, au moins dans les limites des procédés de fabrication considérés; le malt VII semble indiquer que même l'eau de trempe employée pour l'orge peut exercer une influence sur la composition future des moûts. Ces essais seront naturellement continués. P. Petit. Professeur à l'Université, Directeur de l'Ecole de Brasserie de Nancy. $ 6. — Botanique Contribution à l'étude des céréales. Le blé, l'orge et le seigle à l’état sauvage. — Sous ce titre, M. A. Aaronsohn, ingénieur agronome à Caïffa (Palestine), vient de publier, dansle Bulletin dela Société botanique de France, un travail qui a fait quelque bruit dans les milieux botaniques et agrono- miques. Aussi croyons-nous devoir en résumer les principales données pour les lecteurs de la Aevue. Jusqu'à ces dernières années, le problème de l’ori- gine des céréales actuellement cultivées était des plus obscurs. Aucune donnée historique précise n'existait sur ce point, et jamais les botanistes n'avaient rencon- tré le froment à l’état sauvage. Cependant quelques savants, tels que Kôrnicke, Ascherson, Schweinfurth, etc., croyaient fermement qu'il devait exister un prototype spontané de nos blés et que ce prototype était une Graminée dont un seul exemplaire avait été rapporté en 14855 du Hermon par Kotschy. Cet exemplaire, dont l'importance avait tota- lement échappé au collecteur, fut décrit par Kôrnicke, en 1889, sous le nom de Tritieum vulqare Vill. var. dicoccoides Kcke. Depuis, Ascherson et Græbner l'ont appelé T. dicoccum Schr. var. dicoccoides Kcke. Quelques mots sur les vues de Kôrnicke relatives à la classification des blés cultivés ne seront pas inu- tiles pour bien saisir les déductions que cet auteur a échafaudées sur la découverte du Triticum dicoc- coides. Rappelons tout d’abord que la section Æutriticum du genre Triticum contient les espèces: T. Spelta (Epeautre), T. dicoccum (Amidonnier) et T. monococ- cum (Engrain), possédant toutes trois un rachis fragile et dont les grains, à maturité, s’échappent difficile- ment des glumes qui les enferment ; et les 7°. vulgare, T'. durum et T. polonicum, dont les axes ne sont pas fragiles et dont les grains s’échappent facilement de leurs enveloppes. Tous ces caractères ont été acquis et fixés par la culture: ils ne peuvent donc servir à sub- diviser en sous-sections les Æ£utriticum; aussi Kôr- nicke, puis Ascherson et Græbner ne reconnaissent-ils en définitive, dans les blés de cette section, que trois grandes espèces collectives, dont dériveraient toutes les autres: 7. monococcum, très éloigné spécifique- ment des autres blés, T. dicoccum et T. Spelta. Le prototype du 7. monococcum cultivé devrait se chercher dans le 7. ægylopoides Bull., qui présente comme lui des épis étroits. Lés caractères des glumes et de la radicule embryonnaire ont fait supposer à Kürnicke que celui du 7. Spelta réside dans une espèce encore inconnue d’Ægylops. Enfin le 7. dicoc- cum dériverait d'un prototype qui se serait différen- cié de celui de l'Epeautre avant que chacun d’eux ait été soumis à la culture. Quant aux races de blés cultivés, l’'Engrain excepté, leur unité spécifique n'est plus douteuse : elles dérivent, selon toute vraisemblance, des 7°, diccecum et T. Spelta. Partant de là, Kürnicke pensait que le Triticum dicoccoides sauvage rapporté par Kotschy constituait, à n’en pas douter, le prototype de nos blés, comme étant celui du 7°. dicoccum type. Tel était l’état de la question lorsque M. Aaronsohn, au cours d’une exploration géologique et botanique dans les vignes du Dschebel Saffed, en 1907, remar- qua, dans une crevasse de rocher de calcaire nummu- litique, un pied isolé d'une Graminée qui, à première vue, pouvait passer pour une orge, mais qui, en réalité, était un Triticum à rachis fragile et épillets caducs: c'était le Triticum dicoccoides, et, en poursuivant ses recherches dans la mème région, M. Aaronsohn décou- vrit, au pied et sur les pentes de l’'Hermon, de nou- veaux et riches peuplements de ce blé sauvage. Mais, chose curieuse, ce Triticum présentait une innom- brable quantité de formes, tantôt se rapprochant du T. durum, tantôt rappelant le 7. monococcum. Une nouvelle campagne d'exploration, en 1908, per- mit de compléter ces recherches, de confirmer l’iden- tité avec le Triticum dicoccoides des échantillons précédemment recueillis et de constater sa présence à l'état spontané dans diverses autres localilés de la Syrie méridionale, où son indigénat ne fait plus main- tenant aucun doute. D'autre part, les herborisations de 1907 avaient fourni à M. Aaronsohn des échantillons de Triticum monococcum var. ægylopoides provenant de l’'Hermon ; aux environs de Damas, il avait récolté quelques pieds de seigle (Triticum (gene) cereale) et, peu après, il avait rencontré sur l’Anti-Liban le T. [Secale] monta- 802 num Guss., qui est le prototype du seigle. L'indigénat des deux prototypes se trouve ainsi établi dans la région de l'Hermon, de même que la présence du seigle dans les cultures de l'Orient, où on le croyait totalement inconnu. Une autre observation présente également une réelle importance. Partout le Triticum dicoccum se trouve mélangé à l’Hordeum spontaneum, dont les Arabes ne semblent pas le distinguer, de telle sorte qu'il est permis de supposer que la mise en culture de cette orge à pu avoir lieu en même temps que celle du blé. Ainsi donc sont réunis à l’état spontané en Syrie et en Palestine les prototypes du blé, du seigle et de l'orge. C’est là un document de première importance pour ceux qui veulent faire partir de ces régions l'ori- gine de la culture des céréales alimentaires. Mais, quelque intéressantes que soient les décou- vertes de M. Aaronsohn au point de vue théorique, elles présentent encore une importance économique de tout premier ordre. Le blé sauvage, en effet, préfère les stations ensoleil- lées et les terrains rocheux, secs et maigres; il se développe d'autant mieux que l’aridité du sol est plus grande. On peut donc supposer que, par sélection et croisements, il sera possible d'obtenir des races nou- velles, très endurantes et très rustiques, qui permet- tront d'étendre la culture du blé aux régions déshé- ritées où elle est actuellement impossible. Des essais très instructifs ont été entrepris dans cette voie, à l'Institut agronomique de Bonn-Poppels- dorf et aux Etats-Unis. Les premiers résultats sont des plus encourageants ; la rusticité et les facultés d'adaptation de la céréale se sont trouvées tout à fait exceptionnelles, de telle sorte qu'il est permis d'espérer, dans un avenir pro- chain, et grâce à l’importante découverte de M. Aaron- sobhn, une notable extension de la culture du blé à la surface du Globe. L. Lutz, À Professeur agrégé à l'École supérieure de Pharmacie de Paris. $ 7. — Sciences médicales Le rappel à la vie, en cas de mort appa- rente, à l’aide des courants électriques. — M. Battelli, à Genève, se livrait, il y a déjà un certain nombre d'années, à des expériences relatives à la mort causée par l’électrocution et au rappel à la vie par le courant électrique, en se servant d’une seule stimu- lation de courant alternatif de 4.800 volts, agissant pendant une fraction de seconde sur l'animal électro- cuté. Bien que ce procédé soit peu efficace et, dans certains cas, puisse même devenir dangereux, il n’en a pas moins eu le mérite incontestable d'appeler sur ce sujet l'attention du monde scientifique. Plus récemment, MM. Leduc et Rouxeau, à Nantes, ont obtenu des résultats un peu plus encourageants, en disposant la cathode sur la tête et l’anode sur l'abdomen du sujet et en lui appliquant des excitations rythmiques produites à l’aide du courant électrocuteur lui-même. M'e la doctoresse L. G. Robinovitch, qui, en partie aux laboratoires de ces deux savants, s’est adonnée avec un zèle particulier à l'étude de cet important problème, à été amenée à constater que leur méthode, efficace dans le cas du lapin, ne réussit plus quand on l’applique au chien. Pour opérer avec plus de sécurité, il conviendrait d'exclure la tête de l'influence des excitations de courant et d'employer, pour les pre- mières impulsions électriques, une tension minime augmentée graduellement, s'il y a lieu. Comme la mort apparente peut durer quelques minutes, il est, en effet, dangereux d’épuiser l’excitabilité du cœur par CRHONIQUE ET CORRESPONDANCE l'emploi de tensions élevées dès le commencement des excitations rythmiques. La méthode indiquée par M'ie Robinovitch fait entrevoir la possibilité de rappeler à la vie les victimes des accidents dus aux courants de haute tension, dans les installations électriques où l’on dispose presque toujours d'une source de courant de basse tension. Les électrodes étant disposées sur le dos et dans la région lombaire, les excitations rythmiques sont continuées jusqu’à ce que la pression sanguine et une respiration spontanée satisfaisante se rétablissent. Dans la plupart des cas, la mort due au contact des conducteurs de courants électriques n’est, en effet, aucunement instantanée; comme le contact s'établit en général par la main ou le pied, le choc électrique est rarement aussi profond que dans l’élec- trocution artificielle réalisée au laboratoire. Le malade respire presque toujours à l’arrivée du médecin et la mort ne survient que quelques minutes ou même une demi-heure après l'accident, par suite de la paralysie définitive de la respiration et de l’activité cardiaque. C'est dire qu'on dispose parfaitement du temps néces- saire pour appliquer les impulsions rythmiques des- tinées à ranimer la respiration et le fonctionnement du cœur. Ces excitations rythmiques sont provoquées à l’aide d’une grande bobine d'induction spéciale, à fil de moins de Om",6 de diamètre. L'expérimentateur recommande d'utiliser un courant rapidement inter- mittent. Le même procédé est appelé à rendre des services aussi grands pour la réanimation des malades ayant subi une syncope dans la narcose au chloroforme. Dans ce cas, le succès serait d'autant plus sûr que le médecin peut tenir prêt l'appareil de rappel à la vie dès le commencement de la narcose. Les procédés de animation mécaniques jusqu'ici en usage élaient très peu efficaces, surtout dans les cas les plus graves, d'autant plus que la mort apparente, loin d'être tou- jours provoquée par une même cause, est due, soit à la paralysie du cœur, soit à la paralysie de la respira- tion, soit enfin à ces deux causes combinées, causes qui, d'une action lente dans certains cas, peuvent, dans d’autres, agir très rapidement. Or, le procédé électrique permet de tenir un compte exact de ces diverses circonstances et d'adapter exactement le mode opératoire à chaque cas donné. M'ie Robinovitch a fait de très nombreuses expé- riences sur des chiens asphyxiés d'abord par le chloroforme jusqu'à cessation complète de la respira- tion et de l’activité cardiaque, et les a ranimés ensuite par l'application d’impulsions rythmiques de courants électriques. La pression sanguine s'observe en reliant l'artère à un manomètre, et la respiralion, en appli- quant un pneumographe à la poitrine. Le chloroforme n'est appliqué à dose maximum qu'une fois l’insen- sibilité parfaite établie par l’anesthésie électrique. | Mile Robinovitch vient d'avoir la première occasion d'essayer cette méthode sur l’homme, en rappelant à la vie une malade ayant subi une grave syncope due à l'intoxication chronique par la morphine. Après avoir pris, pendant deux années, deux grammes de mor- phine par jour, cette femme s'était vue tout à coup privée de la drogue à son arrivée à l'hôpital Sainte- Anne, à Paris. Pendant la syncope, qui durait depuis vingt minutes, plusieurs autres médecins avaient esssayé en vain les procédés usuels, tels que les tractions rythmiques de la langue, la respiration artificielle par la méthode de Sylvester, etc. Or, l'application de la méthode électrique, à l’aide de la bobine d’induction spéciale indiquée par Mie Robinovitch, a suffi pour rappeler cette femme à la vie, après des excitations rythmiques continuées pendant environ trente secondes. Alfred Gradenwitz. E.-L. BOUVIER — LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES 803 LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES La plupart des Crustacés sont comestibles, mais | les principaux se rangent dans l’ordre des Déca- podes, qui renferme des espèces plus ou moins grandes, loutes caractérisées par la présence d'yeux portés au bout de pédoncules mobiles, d’un bou- elier qui protège le céphalothorax et de dix pattes disposées en cinq paires. Homards, Langoustes, Crevettes et Crabes sont des Crustacés décapodes. Les parties comestibles les plus fines des Crus- tacés décapodes sont les muscles, et l’on peut dire de ces animaux qu'ils ont d'autant plus de valeur que ces parties sont plus développées. À ce point | de vue, les groupements naturels de l’ordre repré- sentent aussi des groupements économiques, car ils sont essentiellement fondés sur la musculature. Les Crustacés décapodes, en effet, se divisent en trois groupes : les Nageurs ou Crevettes, qui ont une puissante queue musculeuse et des pattes grêles; les Marcheurs à longue queue, où l’ab- domen s’aplatit quelque peu, en même temps que les pattes deviennent puissantes à divers degrés; enfin les Crabes, qui sont des marcheurs où les pattes sont fortes, et où l’abdomen, foliacé et presque dépourvu de muscles, se rabat sous un très volumineux céphalothorax. Les Décapodes du premier groupe sont fort estimés, parce que riches en chair, mais leur taille est médiocre ou petite; ceux du second groupe tiennent le premier rang au point de vue commercial, à cause de leurs grandes dimensions et du développement des muscles qui se trouvent dans leur queue ou qui font mouvoir leurs appendices; quant aux Crabes, ils ont une importance moindre à cause de leur musculature médiocre, qui se réduit presque à celle des pattes. Examinons maintenant les principales espèces comestibles de chaque groupe. I. — DESCRIPTION DES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES. 1. — Les Nageurs ou Crevettes. un Dans les Nageurs ou Crevettes, il convient d’éta- blir deux subdivisions : une pour les Pénées, une autre pour les Palémonides; les premiers avec une longue queue latéralement comprimée et les pattes des trois paires antérieures terminées par des pinces, les seconds avec une queue plus courte et plus large, et des pinces au plus sur les pattes des deux premières paires. Les Pénées sont de fines et grosses crevettes, qui recherchent les eaux chaudes et envoient quelques représentants dans les mers tempérées. Ils ont pour type le Pénée caramote (Penæus cara- mola Risso), qu'on pêche partout dans les eaux méditerranéennes el qui se retrouve jusque sur la côte de Mauritanie, où il a pour compagnon une forme très voisine, le Pénée brésilien (P. brasi- liensis Latr.). Cette dernière espèce apparaît en nombre sur les deux rives de l'Atlantique tropical, où elle est fort recherchée. Elle est commune en certains points sur la côte occidentale de l'Afrique, où (d’après les renseignements de M. Lefèvre, adjoint des Affaires indigènes) on la pêche dans plusieurs lagunes du Dahomey pour la vendre fraiche aux Européens, fumée et séchée aux indigènes de la Nigérie et du Togoland. Cette espèce remonte les fleuves jusqu’à l'extrême limite des eaux saumâtres et ressemble en cela à une autre espèce très appré- ciée des Américains, le Pénée sétilère (P. seti- ferus Edw.), qui habite le littoral atlantique des Etats-Unis. Les Pénées sont très nombreux au Japon, où dix espèces au moins sont capturées et mises en conserves, entre autres le Pénée canaliculé (P. ca- naliculatus O1.), qui ressemble beaucoup à notre caramote. M. Kishinouye a récemment publié une belle étude sur les crevettes japonaises, et il note en passant qu'on en exporte chaque année en Chine 900.000 kilogrammes, qui représentent une valeur de 200.000 yen, soit à peu près 510.000 francs. Au surplus, les Japonais savent tirer un grand parti des richesses carcinologiques de leurs mers, et je tiens de M. Gallois, interprète de l'Ambassade fran- caise à Tokyo, qu'ils exploitent pour le moins vingt et une espèces de Décapodes. Les conserves de ces animaux occupaient une place importante dans le compartiment japonais de la Galerie des Machines, à la dernière Exposition universelle. Beaucoup de Pénées tropicaux sont exploitables et vraisemblablement exploités; mais on manque de renseignements sur ce point, et j'ajouterai même que plusieurs sont inconnus des zoolo- gistes. Dans le travail de M. Kishinouye se trouve une intéressante carte indiquant la distribution géographique des Pénées à la surface du globe; leurs espèces sont particulièrement nombreuses en Indo-Malaisie, autour des possessions néerian- daises, mais on n'en voit signaler aucune sur les côtes occidentales de l'Amérique du Sud. À coup sûr, les Pénées ne manquent pas dans ces régions, et j'en ai acquis la preuve indubitable. En étudiant les récoltes faites au Pérou par M. le D' Rivet, j'y trouvai un magnifique Pénéide, auquel je donnai 804 E.-L. BOUVIER — LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES le nom de Xiphopenæus Riveli; cette espèce était restée inconnue jusqu'alors, et pourtant on la servait à table dans les hôtels de Païta! C’est dire combien il reste à faire pour posséder une notion définitive sur les meilleurs Crustacés comestibles. Les Palémonides sont mieux connus des Euro- péens, parce qu'ils recherchent surtout les eaux tempérées ou froides. Leurs principales formes comestibles sont les Crangons, les Palémons et les Pandales. Les Crangons aiment les vastes étendues sablon- neuses du littoral; ils se distinguent par leur corps trapu, leur rostre rudimentaire et leurs pattes anté- rieures où un crochet remplace la pince; on les appelle fréquemment sauticots, souvent aussi cre- veltes grises, à cause de la teinte grisâtre qu'ils prennent par la cuisson. Leurs espèces exploitées sont le Crangon commun (Crangon erangon L.), qui habite les plages européennes et se retrouve au Japon, le Crangon à 7? épines (C. septemspinosus Say), qui représente notre sauticot à l’est des Etats- Unis, et le Crangon de San-Francisco (C. francis- corum St.), qui fréquente le littoral californien. Ces espèces sont généralement consommées fraiches, mais on fait aussi des conserves avec leurs queues épluchées. Les Palémons ou bouquets se tiennent dans les prairies de Zostères ou parmi les roches couvertes d'Algues brunes ; ils se distinguent des « sauticots » par leur rostre en sabre denté, les pinces qui terminent leurs pattes des deux paires antérieures, leur forme plus élancée et la couleur rouge qu'ils prennent à la cuisson ; ils ne sont pas plus savou- reux que les sauticots, mais leur taille est plus grande, leur forme plus élégante, leur couleur cuite plus belle, de sorte que leur prix est bien plus élevé. La plus grande espèce de nos côtes est le Palémon scie (Leander serratus Penn.), dont les plus beaux « brins », qui se pêchent aux environs de Cherbourg, peuvent atteindre 12 centimètres ; l'espèce est souvent accompagnée de deux autres plus petites, le Palémon squille (L. squilla L.) et le Palémon tacheté (L. adspersus Rathke). Ce der- nier est surtout pêché en Danemark, où l'on dédai- gne le sauticot; on l'y a même trop exploité, car il se raréfie de plus en plus et son prix augmente en conséquence ; d'après M. Mortensen, pour une pêche annuelle de 200.000 litres dans le Limfjord, on employait 180 nasses en 1894 et 738 en 1895, ce qui correspond à un rendement quatre fois plus faible. — Les Japonais ont aussi des Palémons qu'ils ne manquent pas de capturer et de mettre dans le ‘commerce, avec les Crangons et les Pénées ; la valeur de toutes ces crevettes s'élevait, pour 1906, à 1.415.263 yen, c'est-à-dire à plus de 3 mil- lions et demi ; je tiens ce renseignement de M. Gal- lois, qui l’a pris dans l'Annuaire économique et financier du Japon. Quant aux Pandales, ils ressemblent d'aspect aux Palémons, mais avec une carapace plus courte et de fines pattes antérieures dépourvues de pinces; ils abondent dans les mers arctiques et se tiennent à une certaine profondeur au milieu des rochers ou dans les régions avoisisinantes. Le Pandale boréal (Pandalus borealis Krüyer) est l'objet, en Norvège, d'une pêche très active et fort rémunératrice; M. Wolleboeck mentionne un bateau qui, en trente- six heures, en captura 260 kilogrammes : une vraie pêche miraculeuse ! Cette crevette meurt très vite et se garde peu, même après la cuisson qu'on lui fait subir de suite; aussi ne peut-on l'emporter plus loin que Londres, Hambourg et Stockholm, et encore faut-il la mettre en caisse avec de la glace pilée. On en fait aussi des conserves; à Christiania, elle se vend 0 fr. 50 le kilogramme en moyenne. Une autre espèce, le Pandale de Montaqu, se prend quelquefois avec le bouquet dans la baie de Seine; en Amérique, le Pandale danae (P. danae St.) est vendu couramment sur le marché de San-Francisco. $ 2. — Les Marcheurs à longue queue. Laissons les Crevettes et arrivons aux Marcheurs à longue queue, qui sont presque tous volumineux et d'une grande valeur commerciale. Suivant que leurs pattes antérieures se terminent par des pinces puissantes, ou par un doigt crochu, on les divise en deux familles, dont la première a pour type le Homard et la seconde les Langoustes. La famille des Homards a pour représentants les Homards et les Néphrops, abstraction faites des Ecrevisses, qui sont localisées dans les eaux douces. Les Homards ne comptent pas plus de trois espè- ces ; le Jomard commun (Homarus vulgaris Edw.), qui habite les mers d'Europe depuis la Norvège et qu'on retrouve à Mogador, sur la côte marocaine de l'Atlantique ; le Homard américain (H. ameri- canus Edw.), qui se tient dans les régions orientales de l’Amérique du Nord, depuis le golfe de Saint- Laurent jusqu'au New-Jersey, et le Homard du Cap (H. capensis), propre à l'Afrique australe. Ce dernier est à peine plus gros que l'Ecrevisse et sans valeur commerciale, tandis que les deux autres, surtout le second, sont très grands et comp- tent parmi les espèces comestibles les plus recher- chées. On a capturé des Homards communs qui mesuraient 50 centimètres et qui pesaient plus de 9 kilogs, des Homards américains de 25 pouces (63 centimètres), avec un poids de 25 livres (11 kil. 3); mais ces vieux exemplaires sont coriaces; les meilleurs individus sont ceux de moyenne taille. Les Homards se tiennent à de fai- bles profondeurs et l’on peut même en capturer à E.-L. BOUVIER — LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES mer basse ; ils recherchent surtout les endroits rocheux, et, comme tous les Crustacés littoraux, descendent en hiver à des niveaux plus bas, qui peuvent attendre 10 brasses pour le Homard com- mun et 100 pour celui d'Amérique. Les Iles Britan- niques recherchent activementle Homard commun, sans toutefois suffire à la consommation locale ; elles recoivent le surplus des côtes norvégiennes, qui sont le principal centre de cette pêche. En France, la pêche est encore moins fructueuse, surtout à mesure qu'on s'éloigne vers le sud ; elle ne commence guère qu'à partir du Cotentin. Beau- coup plus abondant, le Homard d'Amérique est sur- tout exploité pour les conserves, c’est-à-dire sans mesure; aussi a-l-on quelque peu dépeuplé les eaux des Etats-Unis, qui furent tout d'abord exploitées pour cet usage ; aujourd'hui, la pêche est particu- lièrement intense au Canada et à Anticosti, où, pour la même raison, elle ne tardera pas à fléchir si l’on n'y porte remède. D'après H. M. Smith, les pêcheries de la Nouvelle-Angleterre produisirent : En 1880 : 19.800.000 livres valant 473.000 dollars — 1889 : 30.500.000 — — 833.000 — — 1902 : 14.000.000 — — 1.210.000 — Ainsi, de 1880 à 1902, le rendement avait faibli, mais les prix avaient quadruplé. Dans la famille du Homard, je veux encore men- tionner les Néphrops, bien qu'ils apparaissent assez rarement sur le marché, où on les remarque à cause de leur couleur rose et de leurs pinces agréa- blement sculptées. Les espèces comestibles du genre se tiennent à des profondeurs médiocres, d’où les ramène le grand chalut; elles sont représentées dans les mers d'Europe par le Néphrops norvégien (N. norvegicus Leach.), appelé à tort « Zangous- tine », et, dans les mers d’Asie, par le Néphrops du Japon {N. japonicus T. C.). Ces deux jolies espèces sont intermédiaires, par leur taille, entre l’Écre- visse et le Homard. Les espèces de la famille des Langoustes sont presque toutes de grande taille, et plus riches en chair que les Homards, à cause de leur puissante queue et des forts muscles de leur thorax; elles recherchent toutes les eaux chaudes et ne s'aven- turent pas au delà des régions tempérées les plus voisines de ces dernières. Les types de cette famille sont les Langoustes, reconnaissables à leurs antennes longues et puis- santes, que font mouvoir de forts muscles cachés sous la carapace. Grâce au courant chaud du Gulf Stream, nous en avons une espèce sur nos côtes, la Langouste commune (Palinurus vulgaris Latr.), qui, très rare en Angleterre, où on l'appelle omard épineux (spiny Lobster), devient commune vers le sud, puis vient s'éteindre en Mauritanie où, pour- tant, M. Gruvel l’a trouvée encore à la Baie du 805 Lévrier. Elle se tient à une certaine profondeur, près du littoral ou au voisinage des îles, en des zones particulières qui constituent de véritables gisements. Trop exploités par les pêcheurs, ces fonds s’appauvrissent de jour en jour, et depuis longtemps les bateaux viviers bretons se rendent en Portugal eten Espagne pour y acheter les cap- tures plus riches faites en ces pays. Actuellement, ils vont même jusqu'au commune et dédaignée par les indigènes, ainsi qu'il résulte des communications qu'a bien voulu me faire M. Dyé. La Langouste commune devenant rare, on com- mence à chercher d’autres espèces pour suffire aux besoins de la consommation. Sur les côtes de Mau- ritanie pullule une forme différente de la nôtre, la Langouste royale (Panulirus regius Br. Cap.), dont M. Gruvel a signalé l'extrême abondance au banc d’Arguin, qui se retrouve au Sénégal, et qui doit même s'étendre plus au sud. Depuis qu'on la sait abondante en ces parages, la Langouste royale est l'objet d’une exploitation de la part des armateurs français; on la ramène en France dans des bateaux viviers et on l’écoule sur le marché de Paris, où elle se vend de 5 à 6 fr. 50 le kilog. Lorsque la Baleine, il y a un an, fit naufrage tout près du Cap Juby, elle était chargée, pour une part, de Lan- goustes royales. Ce nouveau venu ne le cède en rien à la Langouste commune, dont il se distingue par sa couleur verdâtre ou violacée et par ses pattes plus longues; on m'en a envoyé quelques exemplaires de Roscoff et j'ai pu en apprécier la délicate saveur. D’autres ont exprimé un avis diffé- rent, mais on sait combien la préparation influe sur la qualité des Langoustes. J'ajoute, d’après les recherches de M. Gruvel, que les Langoustes com- munes se rencontrent encore au banc d’Arguin (Baie du Lévrier), qui semble être le point sud extrême de leur distribution. Dans les eaux tropicales de la mer Caraïbe et de l'Atlantique avoisinant habilent la Langouste tache- tée (Panulirus guttatus Latr.), ainsi nommée à cause de ses nombreuses marques blanches, et la Langouste argus (P. argus Latr.), qui porte sur l'abdomen quatre grandes taches ocellaires; ces deux espèces alimentent le marché des Antilles, tandis que la Langouste interrompue (P. interrup- tus Rand.) se pêche dans le Pacifique américain. Parmi les nombreuses espèces indo-pacifiques, je signalerai la Langouste japonaise (P. japonicus Sieb.), la Langouste ornée (P. ornatus Fab.), qui devient gigantesque, la Langouste à longues pattes (P. longipes Edw.), et la Langouste de Lalande (Jasus Lalandei Lam.), qui pullule au Cap de Bonne- Espérance. Abstraction faite de la Langouste japo- naise, qui est l’objet d’une pêche active, toutes ces Maroc, où l'espèce est 806 espèces sont peu coûteuses, parce que maigrement exploitées ou très communes; mais, comme on ne peut les transporter vivantes dans nos pays, il ne reste que le moyen d'en faire des conserves. Cette industrie tend à prendre un sérieux développement; elle se pratique à Juan Fernandez, sur une espèce dont j'ignore la nature (probablement le Jasus . Lalandei), et au Cap de Bonne-Espérance, sur la Langouste de Lalande, où elle ne fut pas sans causer d'abord de graves déceptions, faute d'avoir élé conduite par des mains expertes. Je tiens de mon excellent collègue et compatriote, M. Périn- guey, directeur du Musée d'Histoire naturelle de Cape Town, qu'aux environs de Table Bay on pourrait mettre en conserve 200.000 Langoustes de Lalande par jour durant la saison de pêche (de mi-février à fin-septembre) et que chaque exem- plaire n'y coûte pas plus de 10 centimes pièce. C'est le prix d'un beau spécimen que M. Péringuey a envoyé récemment au Muséum’. Je n'ai cité que les espèces principales et les régions où elles sont communes, mais il s'en faut que nous soyons renseignés sur tous les gites à Langoustes. Avant M. Gruvel, on ne savait presque rien sur la Langouste royale, qui, pourtant, pullule sur les côtes africaines de l'Atlantique; on ne con- nait pas les espèces du Golfe de Guinée et l’on connaîil moins encore celles qui habitent les côtes occidentales de l'Amérique du Sud. Ces champs inexplorés sont des réserves qui s'ouvriront plus tard à l’activité commerciale. Pour en finir avec cette revue de la famille des Langoustes, Je veux citer encore des espèces plus rares, Mais non moins fines, qui se distinguent par leurs très courtes antennes largement foliacées : les énormes Scyllares, au corps lourd et massif, les Ibacus plus déprimés, mais de taille à peu près semblable, et les Arclus, ou « cigales de mer », qui ont la taille des Ecrevisses. On trouve fréquem- ment l'Arctus ours (Arctus ursus Dana) à Mar- seille, où on l'emploie dans les meilleures bouilla- baisses; on y trouve aussi quelquefois le grand Scyllare (Scyllarus latus Latr.), qui habite, comme l'espèce précédente, les faibles profondeurs de la Méditerranée et des eaux avoisinantes jusqu'aux Açores, où je l'ai vu prendre dans les rochers à mer basse. Aux Antilles, on apporte sur le marché le Scyllare équinoxial (S. æquinoctialis Fab.), qui représente notre grand Scyllare dans les mers ca- raïbes;auxîles Hawaï et dans le Pacifique se pêchent ‘ Les conserves de cette Langouste se vendent couram- ment à Paris, en des boîtes qui portent parfois l'étiquette de Kerguelen. Cette indication est manifestement fausse; on n'exploite pas les Langoustes aux Iles Kerguelen ; je le sais par nos entreprenants compatriotes, les frères Bossière, du Havre, qui ont établi là-bas des êcheries de Baleines et de grands Phoques. E.-L. BOUVIER — LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES le Seyllare écailleux (S. squamosusEdw.) et l'/bacus antarctique (Ibacus antarcticus Rumph.). S3. — Les Crabes. Je dois signaler enfin quelques Crabes dont l’im- portance alimentaire n'est pas négligeable. Dans nos pays, on Capture en abondance le très vulgaire Crabe enragé (Carcinus mænas Leach) et, autant qu'on le peut, trois fines espèces littorales ou sub- littorales : le Portune velu ou « étrille » (Portunus puber Latr.), qui nage et patine au moyen de ses pattes postérieures élargies en rames, le volumineux Cancer pagure où « tourteau » (Cancer pagurus L.), dont la carapace festonnée est pluslarge quelongue, et le non moins grand Wajïa épineux (Maïa Squinado Latr.), reconnaissable à ses pattes grêles (araignée de mer) et à sa forme triangulaire. Aux Etats-Unis, où le goût des Crabes est très développé, on capture plusieurs espèces de Cancer, une grande espèce caraïbe, la Ménippe géante (Menippe mercenarius Say), et surtout une espèce voisine de notre « étrille », mais plus grande, le Callinecte sapide (Callinectes sapidus M. Rathbun) sur lequel je reviendrai plus loin. Une autre espèce voisine, mais beaucoup plus volumineuse, la Scylle dentée (Scylla serrala Forsk.), est pêchée dans la mer des Indes; enfin le géant du groupe habite les eaux japonaises: c’est le Maïa de Kaempfer (Macrocheira Kaempferi de Haan) qui atteint, les pattes étendues, 1", 50 d'envergure. Le Callinectes sapidus, où « Crabe bleu », est l’objet d'un commerce important aux Etats-Unis, où il abonde sur la côte orientale. On l'estime sur- tout au moment où il va rejeler sa carapace, c'est-à- dire à l’état de « crabe mou » (soft Crab). Les cap- tures sont mises en vivier flottant, puis expédiées au lieu de consommation dans des caisses où on les range verticalement et serrés en couches avec des lits d’Algues et de la glace pilée. Les « crabes durs » sont de valeur beaucoup moindre. En 1901, la pêche du « crabe bleu », dans le Maryland, ne fut pas inférieure à 28 millions d’in- dividus, dont deux tiers de crabes durs; ces derniers représentaient une valeur de 125.400 dollars, infé- rieure de 75.000 dollars à celle des crabes mous. II. — LA PÈCUE DES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES. Le « crabe mou » fréquente le littoral et se pêche du 1% mai au 1°" octobre, soit à la senne, soit au haveneau, mais surtout avec une petite drague traînée par des bateaux à voile. Les « crabes durs » se prennent avec des longues lignes qui portent de distance en distance un appät; en un point, on fixe une bouée indicatrice et à chaque bout un poids pour l'immersion ; la levée se fait de E.-L. BOUVIER — LES CRUSTACÉS MARINS COMESTIBLES 807 dix à douze fois par jour et les crabes sont cueillis dans une éprouvette. En France, les crabes sont pris à la main sous lesrochers où ils se cachent, et par- fois avec un harpon ; la plupart se trouvent dansles casiers à Homards ou dansles chaluts des pêcheurs; beaucoup, également, sont ramenés par la senne. Quand on veut obtenir en abondance le « crabe enragé », on met dans un casier à Homards quelques débris de poissons, et la capture peut être telle que les erabes s'empilent les uns sur les autres jusqu'à ne laisser aucune place libre dans le casier. La pêche des Crevettes s'effectue également par des procédés très divers. Sur nos côtes, on se sert beaucoup du haveneau ou filet à poche monté sur une armature en T; ses petits modèles sont bien connus des baigneurs, mais les plus grands exigent une force peu commune el ne sont guère poussés que par les professionnels. Pour la pêche intensive, on a recours à des nasses à une ou deux ouvertures, les casiers, quise groupent d'ordinaire en série sur un câble commun ; on emploie aussi le petit chalut, qui est une poche de chalut monté sur une arma- ture de drague. Au surplus, les méthodes sont va- riables suivant les pays, les espèces et les époques. En Danemark, le Zeander adspersus se pêche suivant les méthodes courantes; mais, quand les femelles chargées d'œufs vont abandonner leurs larves loin des côtes, on fait des hécatombes désas- treuses pour l'espèce en barrant avec des nasses à ailes le chenal des fjords que déserte momentané- ment le crustacé. Au Dahomey, d'après M. Lefèvre, les indigènes exploitent autrement les eaux du lac Ahémé et de la rivière d'Ahé, qui sont riches en Pénée brésilien : la pêche se fait la nuit et durant la période des basses eaux, qui sont alorstrès salées. Avec une sorte de senne qui a 9 mètres de longueur et 1%,50 de hauteur, on établit une sorte de barrage dans lequel sont intercalées des nasses où les cre- vettes viennent se prendre, attirées de loin par des tor:hes qui surmontent le filet. Il va sans dire que ce dernier touche le fond et dépasse un peu la sur- face, ce qui est rendu possible par la faible hauteur des eaux. Les crevettes de profondeur, comme le Pandalus borealis, se pèchent au petit chalut. Les grands Décapodes, Homards et Langoustes, se prennent surtout au casier. Pour le Homard, cet engin est employé en Europe aussi bien qu'en Amé- rique; on l’appäte avec des chairs mortes, encore que l'animal, en captivité, dédaigne les morceaux un peu faits. C’est également avec les casiers que se capture la Langouste sur nos côtes. Dans la chaussée de Sein, qui est, en France, le principal centre d'exploitation de ce crustacé, la pêche de la Langouste occupe de juillet à septembre près de 500 bateaux, qui mouillent chacun 10 câbles de 60 brasses portant 2 casiers cylindriques à deux orifices et 4 flottes de liège dont la dernière fait bouée. Cela représente en tout 10.000 casiers qu'on amorce avec du poisson frais et relève toutes les deux heures. J'emprunte ces renseignements à M. Coutière auquel on doitune savoureuse étude sur la pêche des Crustacés comestibles de nos côtes : « Pendant les deux jours où j'accompagnai la Reine d'Armor sur la chaussée de Sein, écrit M. Coutière, — deux jours de pluie et de « crachin » où le roufle de l'arrière meparaissait un lieu de délices, — nous rentrâämes le soir avec une moyenne de quarante Langoustes, trois Homards, une douzaine de Tour- teaux et de Maïas, un Congre. C’est une prise de quelque cent cinquante francs à partager entre les trois hommes du bord et le bateau, comptant pour deux, soit trente francs pour chaque part. I faut compter au plus six mois de sortie par an, parce qu'il y a ou trop de mer, ou trop de calme. » Au banc d'Arguin, d'après M. Gruvel, la Lan- gouste commune se trouve parfois en assez grande abondance dans les chaluts, tandis qu'elle n’est jamais prise au casier; sans doute aime-t-elle une certaine fraicheur qui l’éloigne de la côte. Il n'en est pas de même de la Langouste royale, qui se trouve en abondance sur tous les rochers sub-littoraux ; aussi la pêche-t-on par les deux méthodes : au ca- sier de mai à juin, au petit chalut de juin à octobre- novembre. Très robuste, elle supporte presque sans mortalité le voyage en bateau-vivier, contrairement à la Langouste commune africaine; aussi bien et même mieux que cette dernière, elle se conserve dans les viviers de nos côtes. Il me reste à dire un mot de ces derniers, qui ser- vent non seulement à la conservation des Lan- goustes, mais aussi à celle du Homard. La disposi- lion de ces réservoirs varie suivant les régions, mais, d'après M. Coutière, peut se ramener à trois types : les viviers flottants, qui sont de simples caisses à claire-voie amarrées sur le fond par des chaines; les viviers simples ou maçonnés, qui sont pris sur la mer, dont les sépare seulement une digue à vannes : vanne d'entrée pour le flot montant, el vanne de sortie pour la vidange à mer basse; enfin des viviers maconnés et en dessus fermés de lattes qui sont totalement recouvertes par les flots à marée haute; dans ces derniers, l’eau se renouvelle automatiquement, sans manœuvre, et il suffit d’une vanne de sortie pour la vidange. Les viviers des deuxième et troisième types sont fort grands, certains d’entre eux pouvant recevoir plus de 30.000 Crustacés. Ils sont nécessaires plus que jamais, maintenant que les bateaux arrivent du Portugal, du Maroc, de Mauritanie et mème du Sénégal avec des cargaisons complètes de Lan- goustes. C'est d’un vivier de Roscoff que le Muséum recut, 808 MARCEL LAMOTTE — EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES il y a deux ans, sa première Langouste royale provenait lot ramené par M. Bossière; un autre individu vivant me fut en- voyé de Concarneau il y a quelques mois, à la suite d’une campagne sur la côte sénégalaise. Je tiens d'ailleurs de M. Gruvel que deux voyages ont été faits, en 1908, par un bateau-vivier spécial, pour ramener cette Langouste ; la première fois le bateau recueillit 7.500 individus et la seconde 3.500 envi- ron. J'ai hâte de terminer cette étude qui paraîtra longue, beaucoup trop longue, encore qu'elle vivante, qui d'un effleure à peine la question très importante de la pêche des Crustacés comestibles. J'ai voulu montrer surtout combien sont éten- dus, variés et encore peu connus les champs qu'offre à l’activité du pêcheur la faune de ces Crustacés et en mettre en évidence la grande portée pratique. Il ne me reste plus qu'à remercier les correspon- dants et les amis qui m'ont procuré sur le sujet des documents très rares : MM. Gallois, Coutière, Périn- guey et Gruvel. E.-L. Bouvier, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum. EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES La liquéfaction de l'air, devenue une opération courante, à ouvert à nos investigations le domaine des températures très basses, que nous ne connais- sions seulement que par des extrapolations souvent plus hardies que légitimes. Les expériences déjà nombreuses et variées que les procédés nouveaux ont permis de réaliser n'ont pas toujours confirmé une généralisation préma- turée et sont de nature à modifier plusieurs de nos idées préconçues sur ce que deviennent les phéno- mènes physiques et chimiques aux très basses températures. Ces recherches ont été poursuivies avec une acti- vité particulière à l’Institution Royale de Londres, sous la direction du Professeur Dewar, qui a, comme on le sait, contribué pour une large part à la réalisation pratique de la liquéfaction des gaz en masse. Les lecteurs de la Revue ont connu, en son temps, la première série de ces travaux’. Un résumé de ceux qui ont suivi vient d'être publié par le Professeur Armstrong*. C'est à sa brochure que nous empruntons la plus grande partie des éléments de l’artiele ci-dessous : I. — ABSORPTION DES GAZ PAR LE CHARBON DE BOIS. L'absorption des gaz ou des vapeurs par le charbon de bois est un phénomène connu depuis longtemps. On savait que la quantité de gaz absor- bée dépend de la nature du gaz et est en général d'autant plus grande que le gaz est plus facilement liquéfiable; que le gaz absorbé peut être chassé par l'élévation de température, mais non par une ® Miss A. Crenke : Recherches sur les basses tempéra- tures. Rev. gén. des Sciences, t. XIII, p. 130, 1902. — — H. Travers : Obtention et mesure des basses tempéra- tures. Rev. gén. des Sciences, t. XIV, p. 597, 4903. * H, E. AnusrroxG : Low Temperatur Research at the R. I. of G. B. London, 1900-1907. simple réduction de la pression, même à une valeur très faible. Les charbons les plus absorbants, c'est-à-dire qui, à volume égal, retiennent le plus grand volume de gaz, sont les charbons denses, compacts, pré- parés avec les bois durs : buis, bois de campêche, ébène, et, au premier rang, celui qu'on obtient avec l'écorce de la noix de coco. Il semble étonnant, de prime abord, que les charbons les plus denses soient les plus absor- bants. Si, comme on le suppose en général, l'ab- sorption est due à une action superficielle, à une condensation du gaz sur la surface du charbon, le fait s'explique aisément. Il est naturel d’ad- mettre, en ce cas, que la masse de gaz absorbée est proportionnelle à la surface en contact avec le gaz. Or, à volume extérieur égal, la surface fofale est d'autant plus grande que les pores sont plus petits, en d’autres termes que la densité apparente est plus grande. Cette surface peut être, d’ailleurs, extrêmement considérable au rapport du volume. D'après des mesures de Mitscherlich, le diamètre moyen des cellules du bois carbonisé est d'environ 0,0016 centimètre. Un centimètre cube de char- bon, découpé en cubes de 0,0016 de côté, offrirait une surface de 30 décimètres carrés, environ, en tenant compte de l’espace réellement occupé par la matière. D'autre part, en comparant la densité réelle et la densité apparente, on évalue à 15 centimètres cubes environ le volume des pores contenus dans 100 grammes de charbon. Connaissant le volume du gaz absorbé, on peut en déduire que la densité du gaz absorbé est égale ou même un peu supé- rieure à celle du gaz liquéfié. Cette interprétation du phénomène n'en cons- titue pas évidemment une explication, car nous ignorons en quoi consiste cette condensation MARCEL LAMOTTE — EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES superficielle. Sans insister sur ce point, signalons une propriété du charbon qui est des plus impor- tantes par ses applications : c’est le rapide accrois- sement du pouvoir absorbant quand la tempéra- ture s'abaisse. Le tableau ci-dessous donne les volumes, ramenés à la pression de 760 millimètres de mercure et à la température de 0° C., de différents gaz absorbés par un même échantillon de charbon à 0° et à — 185°. VOLUMES ABSORBÉS . GAZ à 0 à —185 RAPPORT HÉTUME 00. 2 15 15 Hydropène, 0.0.0. 4 135 34,0 Gazitonnant. -.,: . -1 1.42 150 12,5 Ananas SO E D 175 14,6 ADIEU ON 155 10,3 Oxygène... AI LS 230 12,8 Oxyde de carbone. sie; 2i 190 9,0 Oxyde de carbone et OXYCENCH = ACER e O0 195 6,5 Ces nombres mettent en évidence la rapide variation du pouvoir absorbant et, d'autre part, l'inégalité de cette variation pour les divers gaz. Quant à la valeur absolue du pouvoir absorbant, elle dépend beaucoup du mode de préparation du charbon. Ainsi, en carbonisant la noix de coco par élévation lente de la température, on augmente son pouvoir absorbant dans le rapport de 1 : 2,5; 4 gramme de charbon absorbe alors de 300 à 100 centimètres cubes d’air. La pression n’a que fort peu d'influence sur la quantité de gaz absorbée. Aussi est-il impossible de prévoir dans quelles proportions seront absorbés les constituants d’un mélange gazeux. Elles dif- fèrent tant de celles qui existent dans le mélange résiduel que de celles qu'on calcule par la règle ordinaire des mélanges. Ainsi le gaz extrait du charbon saturé d'air à —185° renferme 60 °/, d'oxygène; soumis à l’action d’un courant lent d'hydrogène, il perd de l'azote, puis de l'oxygène. Si le charbon a été saturé d'hydrogène, celui-ci peut être entièrement déplacé par un courant d'air. D'une manière générale, c'est le gaz le plus fai- blement condensable qui est retenu en plus grande quantité, en sorte que le charbon peut servir à séparer dans un mélange les gaz inégalement volatils. Aux températures très basses comme celle de l'air bouillant, l’action absorbante du charbon est extrêmement énergique. Ainsi, en mettant en communication avec un tube contenant 7 grammes de charbon de coco, refroidi dans l'air liquide, un récipient de 300 centimètres cubes dans lequel la pression a été amenée au préalable à 1 ou 2 milli- mètres de mercure, on constate qu'au bout d'une heure la pression est tombée au-dessous de 02#,0005 de mercure. 809 Si l’on examine le spectre du gaz pendant que l'absorption se produit, on observe la disparition progressive des raies de l'oxygène, dans l'ordre des volatilités. La raie F de l'hydro- gène et la raie jaune caractéristique du néon restent toujours visibles. C’est une réaction très délicate pour ce dernier gaz, dont la proportion dans l’air n'excède guère 1/70.000. L'hélium est absorbé moins facilement que le néon; cependant, pour en obtenir le spectre avec un éclat suffisant, il faut répéter plusieurs fois l'opération, de manière à réunir dans le tube de Plücker le résidu provenant du traitement d'un litre d'air au moins. Toutes les raies de l'hélium apparaissent alors avec un éelat comparable à celui de la raie F et de la raie jaune du néon. Il est donc possible de déceler l'hélium dans un mélange où il n'entre que pour 1/360.000 du volume. La même méthode sert à séparer les différents gaz extraits des substances radio-actives ou qui se trouvaient dissous dans les eaux de diverses pro- venances; par exemple, on extrait assez aisément le crypton et le xénon de l'air. Cet air, purifié d'abord par refroidissement dans l'air liquide, passe sur du charbon maintenu à — 185°; on fait ensuite revenir le charbon à la température du mélange d'anhydride carbonique et d'acétone, et on laisse dégager une partie du gaz. Enfin, on extrait les gaz qui restent, on les débarrasse des produits carbonés et de l'oxygène; le résidu ren- ferme l'azote, le crypton, le xénon, qu'on sépare l'un de l’autre par distillation fractionnée. Dans certains cas, l'absorption est fort rapide. Dewar a solidifié l'hydrogène liquide, entouré d'air liquide, en quelques minutes, grâce au refroidisse- ment provoqué par une évaporation rapide. Cette évaporation était activée par l'absorption du gaz par le charbon refroidi, dans un dispositif analogue à celui du cryophore. de l'azote, etc, II. — PuÉNOMÈNES ÉLECTRIQUES DANS LE VIDE EXTRÊME. Les procédés employés habituellement pour me- surer les pressions deviennent illusoires quand la raréfaction est aussi avancée que celle qu'on produit à l’aide du charbon. Une mesure proprement dite n'est plus possible, et il faut se contenter de carac- tériser le degré de raréfaction par certains phéno- mènes particuliers. On peut utiliser à cet effet le radiomètre de Crookes. Si l'ampoule du radiomètre renferme de l'hydro- gène et est mise en communication avec un tube contenant du charbon refroidi par l'hydrogène liquide, le moulinet ne tourne plus quand on con- centre sur ses ailettes noircies le faisceau lumineux 810 MARCEL LAMOTTE =XPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES d'une lampe à are, Mais, dans les mêmes conditions, le moulinet continue à tourner si l’ampoule ren- ferme de l'hélium. Cependant, l'ampoule est assez « vide » pour ne pas être traversée par la décharge d'une puissante bobine d'induetion. I faut en conclure que la pré- sence d'une certaine quantité de gaz n'est pas suffisante pour assurer le passage de la décharge électrique. Le transport d'électricité dépend donc de la pré- sence de certains systèmes de molécules plutôt que de molécules d'une espèce particulière. Il est vraisemblable que la conduetibilité de lhélium, telle qu'on l'observe d'ordinaire avec le gaz préparé sans les précautions minulieuses auxquelles s'est astreint Dewir, est due à des traces de malières étrangères, très probablement à de minimes quan- Lilés de vapeur d’eau. Quelques autres observations paraissent bien confirmer celle supposilion. Un lube de Crookes renferme qui devient phosphorescente sous l'influence de la décharge : si l'on refroidilen un point la paroi en y une subslance placant un tampon plongé dans l'air liquide, la décharge cesse de passer et la phosphorescence de se produire. La facon dont se produit le phéno- mène suggère l'idée que le tube renfermait une matière volatile servant de véhicule à la décharge el qui s'est condensée par le refroidissement, Une expérience de cours, souvent répétée par Dewar, est de nature à montrer, sous une forme en quelque sorte langible, la puissance réfrigé- vante de l'air liquide. Un ballon, dont la paroi présente un léger enfoncement, renferme de la vapeur de brome sous une faible pression. Dans la cavité, on verse quelques centimètres cubes d'air liquide. Dès que cet air s'évapore, les molécules de brome semblent se précipiter vers la paroi refroidie, où elles se condensent, laissant parfaitement inco- lore l'intérieur du ballon, Ces observations sur le passage de léleetricité dans les gaz extrèmement raréliés ont une très grande portée, car elles mellent en question l'exis- lence des électrons, ces éléments électrisés qui jouent un rôle prépondérant dans nos théories modernes, Il semble que, dans la conduetibilité des gaz, les traces de vapeur d'eau ont une grande part el que peut-être il faut leur attribuer la totalité de la conduelibilité. L, I. P. Baker a mis déjà en évi- dence l'influence qu'exercent ces traces d'humidité dans les réactions chimiques entre les gaz, D'autre part, il convient de rapprocher de ces observalions une autre faite par Dewar sur le spectre des aurores boréales. Dans ce spectre, on a reconnu les raies des gaz récemment découverts, en particulier du néon, tandis que les raies des celles de l'azote. Or, des régions supérieures de l'atmosphère, où autres font défaut, notamment règne une tempéralure extrêmement basse, doivent ètre absentes la plupart des substances qui accom- pagnent les gaz préparés dans le laboratoire, entre autres la vapeur d'eau. Celle décharge, « sélective » en quelque sorte, dans un mélange de gaz raréfiés, est assez difficile à expliquer dans l'état actuel de nos connaissances, parce que nous ignorons le mécanisme de l'élec- troluminescence. Nous ignorons si les centres de l'émission lumineuse sont les véhicules de lélec- tricilé, ou si ce sont d'autres particules qui deviennent luminescentes par suite de leurs colli- sions avec les premières. Les expériences de M. Slark, sur l'effet Doppler dans le rayonnement lumineux des rayons-canaux, montrent que les centres d'émission sont, au moins en partie, animés d'une même ordre de grandeur que celle qu'altribuent aux véhicules électriques les théories de la décharge. I y à done vilesse de translation du vraisemblance que ces éléments sont identiques : ce qui ne laisse pas de rendre plus difficile encore l'explication du phénomène signalé par Dewar. Nous avons dil que le radiomètre de Crookes cesse de faisceau lumineux quand il se trouve dans une atmosphère très rare, ne renfermant pas d'hélium. Les répul- sions altribuées aux ondes lumineuses ne se pro- duiraient donc plus dans les gaz à leur extrême degré de raréfaction, et l'on est en droit de se demander si les répulsions observées en d'autres se mouvoir sous l'action d’un condilions ne sont pas un effel secondaire, dues à des circonstances accessoires. Il serait très intéres- sant de répéter les mesures de ces forces répul- sives dans le vide le plus parfait que nous sachions réaliser avec le charbon de bois. Il serait aussi important de mesurer de nouveau, dans le vide extrême, les différences de potentiel moyen de trancher la vicille querelle entre les partisans de l'action chi- au contact, Ce serail un mique el ceux de l'action purement électrique. Un autre problème, qui se rattache au précé- dent, est celui du « pouvoir inducteur du vide ». D'après les mesures effectuées en 1880 par le Comité de l'Association britannique, dans le vide obtenu avec la trompe de Sprengel, ce pouvoir inducteur différerait peu de la valeur déduile des mesures antérieures faites dans des gaz moins raréliés. On sait que Faraday considérait dans tous les cas « l'induction » comme une action de milieu, c'est-à-dire se propageant de proche en proche; le « pouvoir inducleur spécilique » caractérisait pour lui la facilité avec laquelle s'opérait celle propa- galion, Mais il n'élablissait pas de différence essen- MARCEL LAMOTTE — EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES 811 tielle entre les conducteurs et les isolants, qu'il regardait bien plutôt comme les termes extrêmes d'une même série. Actuellement, nous savons que, dans les circonstances ordinaires, les isolants se comportent comme des conducteurs électrolytiques de très grande résistivité, et nous pouvons regarder leur pouvoir inducteur comme une mesure de leur conductivité. Si, comme nous l'avons suggéré ci-dessus, Île passage de l'électricité à travers les gaz dépend de la formation de systèmes complexes, analogues à ceux qui assurent la conduction électrique dans les électrolytes liquides, il est permis de supposer que les propriétés électriques du vide extrême, obtenu par Dewar, différeront beaucoup de celles que nous connaissons. C'est là un champ très vaste ouvert aux investigations, mais qu'il conviendrait d'aborder sans idée préconcue. De leurs expériences, effectuées sur les liquides ou électrolytes congelés, Dewar et Fleming con- cluaient que, d'une manière générale, le pouvoir inducteur de toutes les substances, autres que les métaux, tend, quand la température s'approche du zéro absolu, vers une valeur qui ne dépasse pas deux ou trois fois le pouvoir inducteur du vide. Des traces d'impureté suffisent, d’ailleurs, à modifier le pouvoir inducteur dans des proportions consi- dérables, ainsi qu'il résulte de la comparaison des résultats obtenus avec l'eau distillée ordinaire ou avec l’eau spécialement purifiée. Si l'induction diélectrique à travers les isolants tels que l’eau est due, pour la plus grande part, à une « percussion » électrolytique, cette action n’est plus possible aux températures assez basses pour que la fluidité soit abolie et les molécules fixées dans leur position; le pouvoir inducteur tomberait alors à la valeur qui répond à celui du vide. Sans doute, Faraday pensait qu'une décharge électrique peut être transmise à travers un espace entièrement vide, mais 1l s’abstint de l’affirmer avant d'avoir une preuve expérimentale. Nos moyens actuels nous permettront peut-être d'ap- porter cette preuve : jusque-là, nous ne saurions mieux faire que d'imiter la réserve de Faraday. III. — LES RÉACTIONS CHIMIQUES SOUS LES PRESSIONS TRÈS RÉDUITES. 4. Soufre et mercure. — Dans un tube en nn, dont les branches sont fermées à leur partie infé- rieure (fig. 1), on a mis d’un côté un peu de soufre, de l’autre un peu de mercure. On a fait le vide dans le tube pendant qu'il était plongé dans l'air liquide et on l’a fermé à la lampe, puis on le laisse revenir à la température ordinaire. Au bout de quelques heures, on constate qu'il s'est formé sur la surface du mercure une pellicule de sulfure. On aurait pu s'attendre à voir le sulfure se former du côté du soufre, puisque la vapeur de mercure à une NZ S Hg Si Hg Pig. 1. Fig... force élastique supérieure à celle de la vapeur de soufre. Lorsque les deux branches du tube sont réunies par un tube rétréci (fig. 2), c'est dans la courbure que se dépose le sulfure. On sait que le soufre, même à des températures notablement su- périeures à sa température d'ébullition, est formé de molécules complexes (S° au moins), tandis qu'aux températurestres élevées, il est entière- ment à l'état de molé- cules diatomiques S”, Mais, après l'expérience qui vient d'être décrite, la vapeur de soufre émi- se, même à la tempéra- ture ordinaire dans le vide, renfermerait de ces molécules diatomiques. Toutefois, il resterait à vérifier si la réaction n'a pas été provoquée par un restant d'humidité. 2. Phosphore et oxy- gène. — À cet égard, l'expérience effectuée sur le phosphoreetl'oxy- gène présente des garan- ties plus grandes, sinon absolues. Un ballon A (fig. 3) est relié par un tube assez long à une ampoule renfermant du charbon recouvert d'anhydride phos- phorique. Il porte, d'autre part, un petit appendice Fig. 3. 812 capillaire P contenant un peu de phosphore, et communique par un tube laléral avec un petit ma- nomètre à mercure G. Tout le récipient ayant été soigneusement vidé, on le remplit d'oxygène sous la pression atmosphérique et on le ferme à la lampe. En plongeant l’ampoule au charbon dans l'air liquide, on fait tomber rapidement la pression à une fraction de millimètre. Aussitôt, le ballon se remplit d’une lueur phosphorescente, accusant une réaction chimique. Lorsque la pression est réduite jusqu'à n'être plus mesurable au manomètre, la lueur disparait et il ne se produit plus qu'une distillation du phos- phore qui vient se condenser dans l’ampoule à charbon. Si on laisse le charbon se réchauffer de facon qu'il abandonne l'oxygène, le phénomène repasse par les mêmes phases en sens inverse; lorsque l'oxygène et le phosphore viennent en contact dans le ballon A, la combinaison s'opère, comme l’attestent des éclairs onduleux : tout le reste du récipient reste obscur. L'origine de la phosphores- cence doit donc être cherchée soit dans l'apparition d’une forme moléculaire particulière du phosphore, soit dans la formation d'un oxyde particulier. Jungfleisch l’attribuait à l'oxydation de l'anhydride phosphorique; mais on ne constate, dans les conditions présentes, aucune trace de phospho- rescence quand on remplace le phosphore par l'anhydride. Il n’est nullement certain d’ailleurs que l'humi- dité, ici encore, ne joue aucun rôle : il est difficile d'admettre que l’anhydride phosphorique soit un déshydratant parfait, c’est-à-dire qu’en sa présence il ne subsiste aucune trace d’eau. 3. Actions photographiques. — Les actions pho- tographiques s’exercent encore à la température d'ébullition de l'hydrogène; toutefois, leur intensité est environ moitié moindre qu’à la température d’ébullition de l'air. Il est difficile d'en tirer une conclusion, puisque nous ignorons encore en quoi consiste l'action de la lumière sur les sels d'argent et même quel est, en réalité, le système « sensible ». Les considéra- tions électriques qui ont été invoquées ne paraissent guère s'appliquer : car, si l'on peut dire que les haloïdes argentiques sont des électrolytes quand ils sont ou fluides ou solides visqueux, ils ne sauraient vraisemblablement l'être à l’état solide. Peut-être trouverait-on la cause de l’action pho- tographique dans une auto-excilation provoquée par la phosphorescence qui devient aux basses températures une propriété si répandue. 4. Réactions du {luor solide. — À la température MARCEL LAMOTTE — EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES de l'hydrogène bouillant, le fluor liquide jaune se solidifie en une masse blanche, dont la température de fusion est environ — 233°, un peu inférieure à celle de l'oxygène. Si on scelle un tube contenant le fluor solide et qu'on brise la pointe après l'avoir plongé dans l'hydrogène liquide, il se produit une violente explosion. Le soufre, le sélénium, le phosphore rouge, l'arsenic, refroidis au préalable dans l'air liquide, sont très violemment attaqués par le fluor solide, tandis que le tellure et l’antimoine ne le sont pas. Le sodium est attaqué lentement, le potassium très fortement au bout d'un instant : la chaux est décomposée très vite et l'anthracène tout d’un coup. Faut-il en conclure que les affinités chimiques subsistent avec une telle intensité jusqu'à des lem- pératures aussi basses? Ce serait sans doute trop hardi : car on a le droit de soutenir qu'il suffit d’une très minime trace de réaction pour produire un échauffement local et amener une réaction beaucoup plus vive parce qu'elle se fait, en réalité, à une température beaucoup plus élevée. IV. — PROPRIÉTÉS PHYSIQUES DE LA MATIÈRE AUX BASSES TEMPÉRATURES. 1. Alliages du fer. — Aux températures extré- mement basses, les propriétés physiques des métaux, et plus encore celles de leurs alliages, subissent des modifications très curieuses, qui se maintiennent pendant toute la durée du refroidissement. La ténacité augmente considérablement, tandis que la ductilité croît ou décroit, suivant les cas. Le coefficient d'élasticité du fer au bois de Suède s'est élevé de 3,12 kg. : mm° à 5,95, sans allonge- ment sensible. Les aciers se comportent à peu près de mème. Le coefficient d’élasticité du nickel varie de 4,53 à 7,18 kg. : mm° et sa ductililé de 43 à 51 °/,.Toute- fois, la ductilité de tous les ferro-nickels diminue légèrement quand on les refroidit. L’acier au manganèse Era (contenant 1,23 °/, de carbone et 12,6% °/, de manganèse) n’est pas ma- gnétique; sa ténacité est remarquablement élevée (8,75 kg. : mm°), de même que sa ductilité (30 °/, d’allongement). Refroidi à —185°, il subit une légère augmentation de ténacité, et perd presque toute sa ductilité, car il ne supporte plus qu'un allongement de 2 1/2 °/, environ. Parmi les alliages fer-nickel-manganèse, les plus remarquables sont ceux qui contiennent environ 6 °/, de manganèse et de 14 à 24 °/, de nickel. Ces alliages, non magnétiques, possèdent la résistivité la plus grande que nous connaissions parmi les . MARCEL LAMOTTE — EXPÉRIENCES AUX BASSES TEMPÉRATURES alliages ; ce sont aussi les plus ductiles. La ductilité d'un alliage renfermant 14 °/, de nickel environ s’est abaissée par le refroidissement de 75 à 25 °/,; celle d’un alliage à 18 °/,, de 57 à 42 °/, seulement. Mais la ductilité de l’alliage à 2%°/, a augmenté de 60 à 67 °/,. Ces résultats nous conduisent à des idées diffé- rentes de nos idées antérieures sur la nature du magnétisme. Ils tendent, en effet, à prouver que le magnétisme n'est pas une propriété inhérente à la nature même des molécules, mais plutôt à certains arrangements de molécules. À ce point de vue, il convient de les rapprocher de l'existence de certains alliages magnétiques, ne contenant que des métaux non magnétiques à l'état isolé. 2. Glace. — La glace possède une viscosité et une plasticité particulières, qui l'ont fait supposer n'être pas homogène, mais formée d'un mélange de solide et de liquide en proportions variables. Lorsqu'on abaisse la température, les molécules liquides se solidifieraient en nombre de plus en plus grand et la glace devient de plus en plus rigide. En fait, Dewar a trouvé que la densité de la glace à —185° est 0,929.99; le coefficient de dilatation moyen entre 0° et —185°est, par suite, 0,000.080.99, soil la moitié environ du coefficient moyen entre 0° et —20° (0,000.155.1). Des morceaux de glace transparente plongés dans l'air liquide éclatent dans tous les sens; s'ils ont été refroidis lentement dans l'air liquide, ils n'éclatent pas quand on les projette dans l'hydrogène liquide : preuve que la dilatation diminue aux températures très basses. Tammann à prouvé que, sous les pressions très élevées, la glace existe sous deux formes allotro- piques qui sont probablement l'une et l’autre plus denses que l’eau : l’une d’elles fond à — 15°,8 sous la pression de 5.040 atmosphères. On ne peut done guère conclure, des observations faites aux tempé- ralures peu inférieures à 0°, que la pression influe sur la température de fusion suivant les mêmes lois jusqu'aux températures beaucoup plus basses. Une expérience de Dewar est significative à cet égard. De l’eau est congelée par portions succes- sives dans un cylindre d’acier,et une balle de plomb emprisonnée dans la glace au milieu et à la partie supérieure. Le cylindre est refroidi à —80° et la glace soumise à une pression de 4.600 kg. : em°; les balles ne tombent pas. La pression n'abaisse done pas la température de fusion autant qu'on le sup- posait. Il est donc permis de supposer que les affinités chimiques peuvent s'exercer de différentes manières entre les éléments des systèmes moléculaires qui existent dans l’eau. Lorsque la température est suf- lisamment basse, la pression peut modifier la ten- REVLE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 813 dance de ces affinités à s'exercer dans telles ou telles directions et orienter leur action dans un sens différent, moins favorisé lorsque les systèmes ont un plus grand degré de liberté. Aussi serait-il fort intéressant d'étudier à fond les propriétés optiques des diverses formes solides de l’eau aux basses températures, sous des pressions variées. Nous avons des raisons de penser que la coloration de la glace est beaucoup plus marquée que celle de l’eau, quoique la comparaison n'ait jamais été faite dans des conditions bien précises. Si les explications proposées jusqu'ici sont exactes, il se pourrait bien que les molécules H°0 ou hydrones fussent par elles-mêmes incolores : la coloration apparaîtrait seulement lorsque plusieurs de ces molécules se sont groupées en systèmes, contractant des liaisons analogues à celles qui paraissent nécessaires à l'existence des couleurs dans les hydrocarbures et autres combinaisons voisines. Le vermillon et l’iodure de mercure passent du rouge au jaune, l’azotate d'urane et le chloro-pla- tinate d'ammonium du jaune au blanc quand on les refroidit dans l'air liquide; on peut voir dans ces changements une preuve qu'il se produit des dissociations résultant de la suppression de cer- taines affinités. Les matières colorantes organiques, dont la couleur est due à la constitution de la molécule fondamentale, ne sont que fort peu altérées par le refroidissement. 3. Densité des gaz solidifiés. — D'après les quelques déterminations qui ont été effectuées, les densités de l'oxygène, de l'azote, de l'hydrogène sont plus grandes à l’état solide qu’à l’état liquide. Il y aurait lieu de chercher s’il n'existe pas, parmi les substances qui se condensent seulement aux très basses températures, quelques-unes qui se comportent comme l’eau. D'après les calculs de Dewar, les volumes molé- culaires à l’état solide (volume occupé par le poids moléculaire en grammes) de l'oxygène, de l'azote, de l'hydrogène sont respectivement 21,2, 25,5 et 24,2 centimètres cubes au zéro absolu. Le volume moléculaire de l'hydrogène liquide à sa tempéra- ture d’ébullition est 28,6, tandis que celui de l'hélium est 26,6. Ces deux valeurs sont remarqua- blement voisines, étant donnée la grande différence des masses moléculaires. 4. Caoutchouc. — Le caoutchouc, si élastique à la tempéralure ordinaire, devient tout à fait friable quand on le refroidit dans l'air liquide. Des feuilles de 1/50 de millimètre d'épaisseur ne sont plus per- méables pour l'oxygène ou l'hydrogène liquides. 19* 814 Le principal constituant du caoutchouc est un hydrocarbure terpénique, renfermant de nom- breuses liaisons éthyléniques; ce sont sans doute ces liaisons qui lui donnent des propriétés toutes particulières et notamment en font un dissolvant de l'oxygène. Leur action se localiserait, sous l'influence de l'abaissement de température, par l'apparition de nouveaux groupements moléculaires plus ou moins analogues à ceux qui se forment dans la glace. Cet effet du froid sur le caoutchouc n'est pas le même que sur le charbon de bois, dont on peut expliquer aussi les propriétés par la constitution polyéthylénique. Mais le charbon est assez rigide, sans doute, pour que la molécule ordinaire ne puisse subir de réarrangement et que les liaisons éthyléniques conservent ainsi tout leur effet, même aux températures très basses. Le pouvoir absorbant sélectif du charbon, si accusé, peut être regardé comme amorcé en quelque sorte dans le caoutchouc, qui absorbe l'oxygène et seulement des traces des autres gaz. À P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES La grande affinité de l'hydrogène pour le charbon, qui ressort des observations décrites plus haut, permet aussi de supposer que les molécules diato- miques de ce gaz monovalent possèdent des affi- nités résiduelles, se manifestant quand l'énergie cinétique des molécules est abaissée par le refroi- dissement. A ce qui précède, il faudrait ajouter les expé- riences effectuées au Laboratoire cryogène de Leyde, notamment la liquéfaction de l'hélium, par le Professeur Kammerlingh Onnes, les expériences de Becquerel sur la phosphorescence, les procédés de M. Claude pour la séparation des gaz rares de l'atmosphère. Mais ce sont là des faits déjà connus des lecteurs de la Revue, grâce à l'article de M. Marchis : « Le Premier Congrès International du Froid », t. XX, p. 209, 1909. Marcel Lamotte, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Clermont-Ferrand. LES RECHERCHES RÉCENTES DE M. VAN THOFF SUR LES DÉPÔTS OCÉANIQUES Les études microscopiques de la seconde moitié du siècle dernier ont achevé de nous fixer com- plètement sur la composition minéralogique des roches constituant l'écorce terrestre. En outre, la plupart des minéraux ont été reproduits artifi- ciellement; mais, dans beaucoup de cas, les condi- tions expérimentales réalisées dans les laboratoires ue correspondent nullement à celles de la Nature, de telle sorte que la genèse de la plupart des minéraux, surtout celle des silicates, est loin d’être établie. Ce sont justement ces derniers, qui, au point de vue de la formation de l'écorce terrestre, sont les plus intéressants. Des tentatives de recherches ont été faites dans ces dernières années par MM. Vogt, Dœlter, elc., pour préciser les con- ditions de formation de quelques minéraux, mais elles n'ont pas encore donné de résultats indiscu- tables, à cause des difficultés expérimentales; il faut, en effet, opérer à haute température, faire un grand nombre d'analyses fort pénibles; les pres- énormes ayant existé moment de la certaines roches font défaut et les sions au formation de recherches sont faites sur une trop petite quantité de matière. L'étude de la formation des dépôts salins n'offre pas toutes ces difficultés expérimentales; aussi, M. Van C'Hoff l'a-t-il complètement résolue, malgré sa très grande complexité. Les sels en dissolution dans les eaux marines sont les chlorures et les sulfates de sodium, de potassium, de magnésium, de calcium et parfois aussi des borates. Suivant les proportions des sels dissous, la température, il se produit, par évaporalion de l’eau, un grand nombre de sels différents, qu'on trouve presque tous réunis dans le célèbre gisement de Stassfurt-Leopoldshall et dans les autres localités exploitées appartenant au même bassin salin. À cause de la complexité des produits déposés et de l'influence de la température, etc., les recherches ont demandé plus de dix ans de travail; un grand nombre d'analyses techniques, de mesures de tension de vapeur, de dilatation, de coefficients de solubilité, ete., mesures ayant pris beaucoup d'im- portance dans le domaine de la Chimie physique, ont dû être faites; aussi, M. Van L'Hoff a-t-il eu recours à un grand nombre de collaborateurs, parmi lesquels il faut citer, en premier lieu, Meyerhoffer, et les résultats obtenus ont été publiés à diverses reprises dans les Mémoires de l Académie des Sciences de Berlin. ‘P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES En condensant dans deux petits volumes ces divers travaux, M. Van L'Hoff! en a facilité l'étude au lecteur, qui peut ainsi se rendre compte de l'intérêt du problème, suivre les méthodes em- ployées pour le résoudre el voir l'importance des résultats obtenus. Ce sont ces divers points que nous allons exposer suecinctement ici. ‘1. — FORMATION DES SELS DE SODIUM, DE POTASSIUM ET LE MAGNÉSIUM. Le problème de la formation des dépôts salins est complètement résolu si les lois de la cristalli- sation d'une solution contenant plusieurs sels sont établies. L'ordre de succession des composés déposés n'est pas constamment en rapport avec la solubi- lité des sels, et ce n’est pas toujours le corps le plus insoluble qui se dépose le premier. En outre, pour voir facilement la marche de la cristallisation, en tirer toutes les conséquences, prévoir tous les cas, ‘il est très avantageux de trouver un graphique représentant le phénomène dans tous ses détails. M. Van UHoff considère d’abord le cas le plus simple : une solution contenant seulement deux sels n’agissant pas l’un sur l’autre, comme, par exemple, les chlorures de sodium et de potassium. 1.000 molécules d'eau dissolvent 111 molécules du premier chlorure et 88 du second si ces deux sels sont seuls; mais il n'en est pas de même s'ils sont dissous ensemble. Le coefficient de solubilité pour chacun d'eux diminue, et la solution est saturée à la fois des deux corps lorsqu'elle contient 89 molé- cules de Na! et 39 molécules de KCI. Par évapora- tion, des cristaux des deux substances se déposent simultanément jusqu'à épui- sement complet. La figure 4 re- présente le phénomène : OA et OB indiquent respectivement les quantités de chlorure de sodium et de chlorure de potassium saturant 1.000 molécules d'eau, el C le point de satu- C1 Na ration des deux sels. C1K : 0 È Tous les états é de la solution Fig. 1. — Diagramme de solubilité : non concentrée des solutions de chlorures de so- dium et de potassium. correspondent à des points inté- rieurs à la figure AOBC. Prenons celle dont la composition est indiquée par le point intérieur €. 43. H. Van v Horr: Zur Bildung der ozeanischen Salzabla- gerungen. 1'e partie : 1 vol. in-8° de 86 pages et 34 figures; 2e partie : 4 vol. de 90 pages et 15 figures. F. Vieweg et fils, éditeurs. Braunschweig, 1909. (Prix de l'ouvrage complet : 9 marks.) 815 L'évaporation ne change pas le rapport des quan- tités des sels dissous, et les différents états succes- sifs dé cette solution évaporée sont représentés par la droite Oc en s'éloignant progressivement du point e, jusqu'à la rencontre en 4 de la droite CB. A ce moment, il se dépose du chlorure de potas- sium et la composition de la solution est indiquée par les divers points de la ligne dG, puisque là quantité de chlorure de potassium diminue, tandis que celle du chlorure de sodium reste constante. L'état de la solution arrivant au point C, les deux sels se déposent simultanément. Ce point est désigné comme point final de cristallisation et les flèches indiquent la marche de la cristallisation. MgCl 2 Ce fait peut être 0 exprimé de la ma- A nière suivante la Fig. 2. — Diagramme d'évapora- composition d'une tion d'une solution avec trois sels. solution en voie de cristallisation s'éloi- gne de plus en plus de cellé qui contient le corps qui se dépose et qui la sature. M. Van ('Hoff examine ensuite le cas où les deux sels forment un nouveau composé, ce qui arrive avec le chlorure de magnésium et le chlorure de potassium, produisant un sel double, la carnallite (MgCÉ.KCI.6 H°0). Les divers stades de l’évapora- tion d’une solution avec trois sels sont représentés par la figure 2. OBindique 108 molécules de MgCF (coefficient de solubilité de ce sel à 25°) et OA 89 molécules de KCL comme dans la figure 1; EF correspond à la carnallite. La composition de la solution au point E est la suivante : 4.000H°0.11 KCI.72,5MgCF, et celle du point F: 1.000H0.2KC1.105MgCF (le chlorure de magnésium et la carnallite cristallisent par évaporation à 25°). En répétant le raisonnement développé dans le cas précédent, on se rend compte de la signification des flèches indiquées sur la figure et représentant la marche de la cristallisation. Il y a deux cas à distinguer. Dans le premier, l'état de la solution est représenté par le point F et il se sépare de la carnallite et du chlorure de magnésium (bischoffite) jusqu'à évaporation com plète; aussi le point F, qui est toujours atteint, est désigné comme point final de cristallisation. Dans le second, au point E, il se forme de la carnallite et du chlorure de potassium. Avec une solution contenant les chlorures de potassium et de magnésium, les sulfates de potas- sium et de magnésium, le phénomène est beaucoup plus complexe, car, indépendamment de ces qua- 816 P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES tre sels, il peut se produire de la carnallite, du sul- fate de magnésie à 6 équivalents d'eau, dont l’exis- tence n'a pas encore élé constatée dans la Nature, de la reichardite (epsomite) (MgS0*.7H°O) et de la schünite (K*S0'.MgS0*.6H*0). La composition de la solution et la marche de la cristallisation ne peu- vent plus être représentées par une figure plane, mais par une figure dans l’espace. Plusieurs modes de figuration peuvent être choisis, mais le mieux est de prendre, à l'exemple de M. Lüwenherz, sur les 4 arêtes aboutissant au sommet du même angle solide d'un octaèdre régulier, des lon- gueurs comptées à partir du sommet O, et G correspondant respectivement au nombre des molécules de KCF(OA), MgCl'OB), K*S0'(0D), MgSO'(OC), saturant une solu- tion aqueuse quand ces sels sont seuls. Les résultats des mesures quantitatives diverses faites sur une telle solution à la température de 25° sont indiqués par la figure 3, qui est une projection sur un plan perpendiculaire à l'axe quaternaire de l'octaèdre passant par le sommet O0. Cette figure est partagée en plu- sieurs polygones correspondant à une solution saturée d’un des sels : AEQPNML correspond à KCI, EQRE — à la carnallite, BFRG — au chlorure de ma- gnésium, RGHPQ — à MgSO*.6H$0, CINPH — à MgS0*.7H°0, JKMN — àla schænite, DKML — ausulfate de potasse. Les droites séparant deux polygones représentent là composition des solutions JÉ saturées des deux sels cor- respondantaux deux parlies. Les points de jonction de ces droites indiquent la composition d'une solution saturée des trois sels. La composition d'une solution non salurée est représentée par un point intérieur au solide. Par évaporalion, on arrive à un point d'un des polygones partageant la figure, et la substance représentée par ce polygone se dépose d'abord et ensuite les sels dans l’ordre indi- qué par la direction des flèches. La figure est évidemment très compliquée, mais elle donne une idée exacte de la succession des dé- pôts et des sels pouvant cristalliser simultanément. Ainsi, si la composition d'une solution est repré- Fig, 3. — Diagramme d'évaporation d'une solution contenant sept sels. { q £ sentée par le point R, il se déposera à la fois de la carnallite, de la bischoffite et MgSO*, 6H°0 ; la para- genèse des minéraux des gisements salifères est ainsi expliquée et exactement déterminée. M. Van C'Hoff examine l'influence du temps et il a constaté que celui-ci joue un rôle considérable dans la production des composés complexes, sur- tout avec des solutions contenant les sels précédem- ment examinés et saturées de chlorure de sodium. Ce dernier existe toujours d’une façon constante et en très grande quantité par rapport aux autres corps dans les eaux marines. DF Des sels qu'on n'obtient que bien au- dessus de la température ordinaire se forment sous l'influence du temps à 25°. Leur présence dans les solutions à été constatée par des mesures tonométri- . ques. La figure dans l'espace 4 indique les sels pouvant se produire. Comme il n'est pas possible de représenter les quantités de chlorure de so- dium, on suppose, ce qui est à peu près exact, que la solu- tion est toujours saturée par NaCI. Le sulfate de soude, dont la quantité est donnée par la formule : Na®SO! = Na!CI® + SOMe? — MeCl, est reporté sur l'axe OC. Les différen- tes divisions de la figure cor- respondentaux minéraux ou composés sui- vants pouvant se déposer à la température de 259: ALZD correspond à la bischoffile, | BFMNPQE sylvine, | CGSH — thénardite, | DZRQE — carnallite, FMTSG — glasérite, SHIVUT — astrakanite, JXWVI — reichardite, JXYK — MgSO*.6H°0, KYRZL _ kiesérite, TUNM — schœnite, NUV WP - Iéonite, PWXYRQ — kaïnite. M. Van L'Hof a établi les graphiques représentant la marche de la cristallisation, c’est-à-dire la suc- P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES cession des dépôts, de la même manière que dans les cas simples déjà examinés au début de cette étude. La température a une grande influence, due non seulement à la variation des coefficients de solubi- lité des différents sels, mais aussi à l'action des nou- veaux sels pouvant se produire et à la disparition de certains d'entre eux. M. Van t'Hoff a d'abord fait des recherches entre A (MgCL) D - -71© ETES AA LB (K Ci) u \ 1 L Li 1 (Na,S Ac Fig. 4. — Diagramme des sels pouvant se produire dans une solution des sels précédents saturée de chlorure de sodium. 25 et 85° el est arrivé à déterminer trois périodes distinctes dans cet intervalle de température : 4° De 25 à 37°, des 12 composés pouvant exister, trois deviennent instables et disparaissent : la schænite à 25°,95, la reichardile à 34° et le sulfate de magnésie à 6H°0 à 35°,3; 2° La seconde période, comprise entre 37 et 55°, est caractérisée par l'apparition de trois minéraux: la langheinite (K*S0*.2MgS0‘), pouvant se produire à 55° aux dépens de la léonite (K*SO*.SO‘Mg.4H°0) 817 et de la kiesérite (MgSO*.H°0) par le départ de l'eau d'hydratation; la læweile (NaSO*.MgS0*.2'/, H°0) et la van l'hoflile (3Na*SO*.MgS0') apparaissent à 46°, Il est à remarquer que la découverte de cette dernière substance dans la Nature, où elle existe intimement mélangée à d'autres sels, est due indi- rectement aux recherches de M. Van L'Hoff, qui l'avait obtenue artificiellement avant qu'on ait constaté son existence dans les dépôts de Stassfurt- Leopoldshal] ; 3° Pendant la troisième période, de 55° à &5°, trois minéraux disparaissent: l'as{rakanite (MgSO*, Na*SO*.4H°0) à 60°, la léonite à 619,5 et la kaïnite (MgSO*. KCI. 3H°0); de telle sorte qu'il ne peut se déposer à 85° que la bischoffite (MgCl), la kiesé- rite, la carnallite, la læwéite, la van C'hoffite, la thénardite (SO'Na*), la langbeinite, la glasérite ([K,NafSO*) et la sylvine (KCI]). Au-dessous de 25°, quelques minéraux devien- nent instables, ou ne peuvent plus se former : ce sont : la kiesérite (18°), le sulfate de magnésie à 6 H20 (13°), la glasérite (18°), la thénardite (13,95), la léonite (18°) et l'astrakanite (4°,5). La tempéra- ture change aussi la paragénèse dans quelques cas. Pour exprimer ces faits, M. Van L'Hoff développe la figure 4. Les plages représentant chaque sel sont étalées de manière à conserver leurs rapports réciproques, tout en étant complètement déformées. L'influence de la pression a aussi été examinée. Elle se décompose en deux facteurs : action sur la vitesse de réaction et sur la position d'équilibre. La première n'agit seulement que dans le cas des gaz dilués; aussi la seconde intervient seule en mo- difiantle coefficient de la solubilité, qui estdiminuée dans le cas où la dissolution d’un sel provoque une dilatation, et augmentée dans le cas contraire. Mais cette modification est tellement faible qu'on ne peut pas la représenter sur les diagrammes. La pression modifie la température de forma- Lion de la tachydrite (2MgCl’. CaCF. 12 H*0). Ce sel double se produit à 22 à la pression atmosphé- rique. Au moyen du manocryomètre, il a été cons- taté que la température de formation s'élève de 0°,016 par atmosphère. Comme, d'après M. Precht, les mers au fond desquelles s'est produite le tachy- drite de Stassfurt n'avaient pas plus de 1.500 mètres de profondeur, la pression, si on évalue la densité de l’eau à 1,2, était environ de 180 atmosphères, ce qui aurait amené une élévation de 3° pour la température de formation de la tachydrite. Les applications pouvant être déduites de ces recherches expérimentales sont intéressantes : re- production artificielle des minéraux, conditions de formation des dépôts anciens et des dépôts pro- 818 duits par l'évaporation des eaux marines et des laes salés, ete. Ainsi on obtiendra artificiellement la carnallite avec une solution à 25° composée de 1.000 molécules de H°0, 6 de KCI et 89 de MgCl- La kaïnile se produira avec la solution suivante à 25°: 1.000110, 411 NaCl, 12 KCI, 64 MgCE°, 12MgS0"; el la langbeinite avec 1.000 H°0, 43NacCl, 42KCI, 36MgCP, 11MgS0". M. Van Ulloff cite beaucoup d'autres exemples. Usiglio s'était déjà occupé en 1849 de la forma- lion successive des sels déposés par l’eau de mer évaporée à sec, mais n'a observé que quelques-uns d'entre eux. La composition de l’eau de la Méditer- ranée rapportée à celle du sel marin est la sui- vante : 100 NaCI, 2,2KCI, 78MgCl°, 3,8MgSO". La figure 4 permet de suivre la marche de la cristallisation. Après un dépôt de sel, on arrive à la région de la kiesérite et ensuite dans celle de Ja carnallite. On reviendra plus loin sur les résultats de léva- poralion de l’eau marine en étudiant les sels cal- ciques. IT. — KORMATION DES SELS CALCIQUES. Jusqu'ici, on n'a tenu compte que des sels de sodium, de potassium et de magnésium; mais, dans les eaux marines, il existe, en outre, des sels calciques, formant des dépôts importants dans les régions salines, où l’on constate aussi parfois l'existence des borates. Le cas est beaucoup plus compliqué que les précédents, mais il a été résolu avec le même succès, et M. Van l'Hoff y consacre le second volume de son ouvrage. Les minéraux déjà étudiés se produisent encore, mais il y a formation de sels nouveaux : anhydrite (CaSO”), gypse (CaSO'. 2H°0), glaubérite (CaSO*. Na’S0O!), syngénite (CaSO*. K°S0'. H°O), polyhalite (2 CaS0*. MgS0*. K°S0*. 2H°0), :krugite (4 CaSO*. MgS0O*. K°S0*. 2 H°0) et tachydrite. Les recherches présentent beaucoup plus de diffi- cultés que les premières, à cause du retard des réactions et des transformations des sels produits. La mesure des coefficients de solubilité à peu d’im- portance, les sels de chaux étant peu solubles dans l'eau, et les déterminalions tonométriques et volu- métriques passent au premier plan. ’armi les résultats obtenus, il en est qui intéres- sent particulièrement le minéralogiste : telle est la production de l’anhydrite et du gypse. Dans les laboratoires, le premier minéral ne se formait, d'après les anciennes recherches, qu'à des tempé- ratures relativement élevées, alors que, dans la Nature, il se produit déjà à 25° et dans un milieu aqueux. M. Van L'Hoff a constaté qu'une solution dont la tension de vapeur est inférieure à 15"%,5 de P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES mercure dépose de l’anhydrite, alors qu’il se forme du gypse si celle tension est supérieure. C'est à la température de 25° que la glaubérite, la syngénite et le gypse jouent le plus grand rôle. On peut étudier leur formation au moyen du diagramme de la figure 4, représentant celle des autres sels déjà étudiés el aussi celle des sels cal- ciques, dont les domaines sont séparés par les gros traits. Des recherches expérimentales, faites en ajoutant du sulfate de chaux aux diverses solutions des sels de potassium, de sodium et de magnésium, mon- trent que, malgré la présence du calcium, des sels de ces derniers corps se produisent comme aupara- vant et que la glaubérite, la syngénite et le gypse, ou bien l'anhydrite, ont leur domaine particulier de stabilité : la glaubérite en CHI, la syngénite en FGSTMUNV WP, etle gypse dansles autres solutions, la polyhalite suivant la ligne £}, la krugitesuivant}, là où la polyhalite et l’anhydrite sont en contact. Ces recherches théoriques, qu'il n’est pas possible de développer ici complètement, permettent quel- ques applications intéressantes. Ainsi on a pu reproduire artificiellement, pour la première fois, la polyhalite et la krugite, et préparer le pentasulfate de calcium qui n’existe pas dans la Nature. En considérant que, dans le diagramme, la région de la polyhalite est immédiatement avant celle de la kiesérite, on devait s'attendre à la pro- duction du premier minéral en évaporant une solu- tion dont la composition est voisine de celle qui doit donner du sulfate de magnésie à 1 équivalent de HO. 11 y a eu concordance parfaite entre les nombres trouvés el les nombres calculés, comme l’indiquent les nombres suivants : H20 Sos Ca Mg K 6,2 63,4 6 63,7 433 4 13,2 observés. 13,3 4 13 calculés. La formalion des sels de calcium dans l’eau de mer est indiquée par la figure 4. Le commencement de la séparation du sel gemme se trouve dans le domaine du gypse, el à ce moment l’eau de mer a la composition suivante : 1.000H°0, 95,1NacCl, 2,1KC1, 7,4MgCl', 3,6MgS0', 0,72CaS0', et une tension maximum de 17"%,1. La séparation du sulfate de magnésie se fait dans le domaine de la polyhalite quand la composition de l’eau correspond à 1.000H°0, 24NaCl], 11,5 KCI, 10,7MgCl, 30Mg$0*, 0,1CaS0*, avec tension maxi- mum de 143"%,3, Le gvpse est done remplacé par de l'anhydrite, puisque la lension est inférieure dA5205: La cristallisation, continuant, conduit à la direc- tion W, X, Y el Retla composition delasolution est P. GAUBERT — LES RECHERCHES RÉCENTES SUR LES DÉPOTS OCÉANIQUES 819 finalement représentée par le point Z; de telle sorte qu'on tombe de nouveau dans le domaine du gypse el il ya production d'un nouveau dépôt d'anhydrite. La production des sels calciques dépend de la quantité de calcium contenue dans l'eau de mer (jusqu'à 2,21 de CaSO* pour 100 NaCl). Ce qui est intéressant au point de vue minéralo- gique, c'est l'influence de la température sur la pro- duction des différents sels, influence expliquant, par les modifications amenées par les changements de saison, l'alternance des couches constatées dans certains dépôts. En résumé, le dépôt des sels de Stassfurt s'est fait de la manière suivante : 1° à) Gypse, séparation de 1,45 de CaSO”; b) Sel gemme ancien (95,4 de NaCI), déposé suc- cessivement dans le domaine de l’'anhydrite, de la polyhalite et accompagné de gypse, d'anhydrite et de polyhalite (séparation de 0,74 de CaSO®) ; 2° Kiesérite, sel gemme et kaïnilte accompagnés successivement de polyhalite et d'anhydrite ; 3° Carnallite, kiesérite et sel gemme, accom- pagnés d'anhydrite; 4° Chlorure de magnésium, sel gemme, kiesérite et carnallite accompagnés d’anhydrite. M. Van L'Hoff a étudié, en outre, la formation des borales des gisements naturels. Le problème est encore beaucoup plus complexe que les précédents, mais il est résolu par les mêmes méthodes. Les sels dont la production à été étudiée dans le cours de cet article ne sont pas toujours stables; ils se transforment en donnant d’autres minéraux secondaires; ces modifications ont été envisagées par M. Van UHoff, mais il serait trop long de relater les résultats de ses observations. Un tableau final donne la paragénèse de tous les minéraux des dépôts océaniques. Des 231 associa- tions imaginables, 84 ont élé décrites, mais 70 seu- lement de celles-ci ont été prévues. Les 14 cas de paragénèse contraires à la théorie sont tous discu- tables el ainsi il est possible que le minéral décrit comme demandent de nouvelles observations : gypse et associé à la kiesérite soit du pentasulfate de calcium el de potassium, inconnu jusqu'ici comme minéral, et ressemblant beaucoup à du gypse. Il reste encore 40 paragénèses prévues, à trouver dans les gisements salins, et à découvrir dans ces derniers les composés MgSO',6H°0, Ca’K°(S0*)'H°0 et Na CaBa‘O".4H°O, préparés par M. Van VHoff dans le cours des expériences étudiées ici. On voit done, par ce rapide exposé, tout l'intérêt des recherches de M. Van LIHoff et les services que peut rendre la Chimie physique à la Minéralogie. Les conditions de formation des minéraux, la paragénèse, les modifications successives dues à des influences postérieures, sont déterminées avec une précision rigoureuse ; de telle sorte que la présence de certains minéraux, leur association minéralogique, leur quantité relative nous lixent complètement sur la composition des eaux marines leur ayant donné naissance, la profondeur des mers et la température de ces dernières, faits qui peuvent jeter une certaine lumière sur divers phénomènes biologiques et géologiques. P. Gaubert, Assistant de Minéralogie au Muséum d'Histoire naturelle. 820 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Autonne (Léon), Zngénieur en Chef des Ponts et Chaussées, Professeur adjoint honoraire à la Faculté des Sciences de l'Université de Lyon. — Sur les Groupes de Matrices linéaires non invertibles. — 1 fasc. i1n-8° de 78 pages, des Annales de l'Univer- sité de Lyon. L'étude des formes algébriques bilinéaires a donné lieu à des recherches importantes sur les groupes linéaires constitués par des matrices n-aires ou tableaux carrés de n° éléments auxquels on attribue la valeur appelée, comme on sait, le déterminant des n° éléments. On s'était surtout occupé jusqu'ici des groupes ordi- naires, où chaque matrice est invertible, ayant son dé- terminant différent de 0. Dans le présent travail, M. Autonne s'affranchit de cette restriction : il étudie les groupes à rang variable, où les diverses matrices peuvent avoir un déterminant principal de rang quel- conque et ne sont pas, en général, invertibles. Sans prétendre avoir résolu complètement le pro- blème, l’auteur établit quelques propositions générales très importantes et construit des groupes particuliers. Nous indiquerons seulement le plan de l'ouvrage, qui comprend d’abord une introduction résumant les résultats obtenus, puis des préliminaires consacrés aux définitions et notations, ainsi qu'à l'exposé d'une ter- minologie géométrique commode pour représenter les opérations linéaires dans un espace à n dimensions. La première partie se rapporte à la multiplication et à la division des matrices et plus généralement des tableaux rectangulaires. La seconde partie est consacrée aux propriétés générales des matrices de rang donné. Enfin, dans la troisième partie, on aborde l'étude des groupes qui font l’objet essentiel de l'ouvrage : un sys- ième de matrices n-aires forme un groupe, si tout pro- duit de deux d’entre elles appartient au système. Le système formé par les matrices de rang minimum forme le groupe 20yau: l’auteur en étudie les propriétés et construit en particulier les groupes confondus avec leur noyau; il obtient également d'autres groupes in- téressants, qui font l’objet du dernier chapitre, et qui remplissent certaines conditions de permutabilité. L'introduction est terminée par un index bibliogra- phique indiquant les références aux travaux antérieurs, que le présent ouvrage complète de la façon la plus heureuse. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'École des Sciences de Rouen. Andrade (J.), Professeur à la Faculté des Sciences de Besançon.— Chronométrie. — 1 vol. in-18 de 382 pages, de l'Encyclopédie scientifique du D'TouLouse. (Prix : 5 fr.) O. Doin, éditeur. Paris, 1909. Voici comment l’auteur expose l’objet de son ou- yrage : « Dans ce livre, on trouvera, pour la première fois réunis, l'exposé descriptif de l'œuvre des artistes qui ont fondé la chronométrie et l'ensemble des travaux des savants qui ont réussi à comprendre cette œuvre et à la compléter. Les théoriciens trouveront rassemblés ou résumés des travaux qui méritaient vraiment d'être réunis auprès des problèmes réels qui les ont suscités, à savoir : les Mémoires fondamentaux de Villarceau, Phillips, Cornu et Caspari; ils trouveront encore quel- ques travaux de l’auteur et de nombreux emprunts aux enseignements de MM. Grossmann père et fils. » Ce n'est donc pas de l'usage, mais du mécanisme et de la construction des chronomètres qu'il est traité. ET INDEX On peut s'étonner à bon droit que cette science, qui a donné naissance aux premiers fondements de la Dyna- mique (Galilée, Huygens, etc.), n'ait trouvé jusqu'ici personne pour la professer dans les Ecoles ni pour en exposer l'ensemble dans un livre : lacune d'autant plus regrettable que cette discipline est de celles dans les- quelles notre pays tient sans contestalion le premier rang. La création de l’enseignement horloger à l'Uni- versité de Besançon et le traité publié parle professeur qui inaugura cet enseignement viennent la combler fort à propos. L'ouvrage comprend quatre parties dont voici les titres : 1. Exposé historique des faits et des idées; comment est née la chronométrie; ses grands inventeurs : Huy- gens, Arnold, Pierre Le Roy. 2. Lerouage, depuis le poids ou ressort moteur jusqu'à l'échappement et au balancier. Les axes, les pierres, les huiles. Etude élémentaire de la compensation et des méthodes de réglage. 3. Chronométrie mathématique. Les lois du réglage et de la synchronisation. 4. Notions d'électro-horlogerie. M. Andrade possède à fond son sujet; il a su mettre dans son exposé les qualités de clarté et de méthode que développe la pratique de l’enseignement. Nes'adres- sant pas exclusivement aux savants, et voulant pourtant garder à son œuvre un caractère hautement scientiïque, il y a introduit les notions nécessaires de Mécanique générale et d'Analyse mathématique. Nous signalons plus spécialement le développement de la théorie gra- phique des mouvements oscillatoires, amortis ou non, et ses applications à la synchronisation, auxquelles l’auteur apporte personnellement une importante con- tribution, réussissant à départager des théories qui se combattaient. Notons encore le soin avec lequel est mis en évidence le degré d’exactitude et d’approximation des résultats du calcul. — Au point de vue de la doc- trine pure, nous aurions peut-être à faire des réserves, par exemple sur la manière d'appliquer le principe de d’Alembert à déterminer l'influence de l’inertie du spi- ral sur l'isochronisme; mais, eu égard au but visé et à l'approximation utile, ce sont là détails secondaires. L'auteur signale lui-même et excuse les lacunes que son cadre lui imposait. Il est un sujet, toutefois, que nous regrettons de n'y point voir abordé: c'est la sus- pension à ressort du pendule, dont Bessel a donné la théorie, vérifiée ensuite par les expériences de Laugier et Winnerl. On pourrait aussi souhaiter une étude plus complète de la résistance des milieux, tout en recon- naissant qu'en l'état actuel cette théorie est incom- plète. Nous espérons que l'ouvrage aura assez de succès pour qu'une nouvelle édition vienne réparer ces omissions. En. Caspani, Ingénieur hydrographe en Chef. Renard (Commandant Paul). — L'Aéronautique. — — 1 vol. de la Bibliothèque de Philosophie scienti- lique, de 368 pages, avec 68 figures. (Prix : 3 fr. 50.) Ernest Flammarion, éditeur. Paris, 1909. Parmi les ouvrages relatifs à la navigation aérienne, qui se multiplient en ce moment avec une si grande rapidité, celui-ci s'impose tout d’abord à l'attention par l'autorité qui s'attache au nom du Commandant Renard. I ne faudrait pas croire toutefois qu'il s’agit ici d'un traité de science abstraite; on n'y trouvera, au contraire, ni formules, ni calculs, car le livre ne s'adresse pas à des spécialistes. C'est avant tout un BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 821 ouvrage de vulgarisation, destiné au grand public. L'auteur nous avertit que la plus grande partie du volume est consacrée à faire connaître au lecteur l'œuvre du Colonel Charles Renard; mais la naviga- tion aérienne n’en est pas moins envisagée sous toutes ses faces. Au surplus, existe-t-il, dans cette science si complexe, une question que n'ait pas étudiée, appro- fondie et, si l'on peut dire, marquée de sa puissante empreinte celui que l’on considère à juste titre comme le créateur de l'Aéronautique moderne ? Peut-être, néanmoins, eût-on désiré voir rappeler avec un peu plus de développement les travaux parallèles d'autres ingénieurs-aéronautes remarquables, tels que MM. Her- vé, Crocco, etc. Parmi les sujets traités, nous mentionnerons spé- cialement : l'étude de l'océan aérien, comprenant l'énoncé des principales lois météorologiques; les méthodes usuelles de fabrication des gaz plus légers que l'air et en particulier de l'hydrogène; les principes et les règles de l'architecture aéronautique; les lois qui régissent les mouvements des ballons suivant la verticale; l'emploi des aérostats libres, captifs et dirigeables; les appareils d'aviation. Un historique succinct de l’'Aéronautique, de ses applications scien- liliques, militaires et sportives, et quelques considé- rations générales sur son avenir, terminent cet inté- ressant volume. Des questions souvent ardues, difficiles à exposer en langage courant, y sont développées avec la simplicité et la clarté qui caractérisent le talent de l’auteur. Commandant Voyer. 2° Sciences physiques Chwolson (D. O.), Professeur à l'Université de Saint-Pétersbourg. — Traité de Physique, {ra- duit sur les éditions russe et allemande par M. E. Davaux, /ngénieur de la Marine. Tome II, fasci- cule 4: Diffraction. Double réfraction et Polari- sation de la lumière. — 1 vol. in-8° de 548 pages, avec 182 figures. (Prix : 17 fr.) Librairie scientifique A. Hermann et fils. Paris, 1909. Ce fascicule termine le second volume du grand Traité de Physique de Chwolson, dont nous avons déjà entretenu à plusieurs reprises nos lecteurs'. L'étude de la lumière s'y achève par 5 chapitres sur la diffraction, la polarisation, la double réfraction, l’in- terférence des rayons polarisés et la rotation du plan de polarisation. Cet exposé est suivi d’une importante Note de MM. E. et F. Cosserat sur la théorie des corps déformables, qui occupe à elle seule près de la moitié du fascicule. Besson (Louis), Sous-Chef du Service physique et météorologique de l'Observatoire de Montsouris. — Sur la Théorie des Halos. Thèse présentée à la Fa- culte des Sciences de Paris. — 1 vol. in-8 de 89 pages. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. M. Besson est à coup sûr le météorologiste français qui connaît le mieux la Météorologie optique. Il vient de faire la synthèse de ses longues études sur la théorie des halos et de la présenter comme thèse de doctorat. Durant dix années consécutives, du 14 janvier 1898 au 31 décembre 1907, avec l’aide d’un collaborateur, M. Dutheil, il a tous les jours observé à Montsouris les phénomènes de halos solaires : halos de 22 et de 46°, parhélies, are circumzénital, anthélies, paran- thélies, etc.; rapprochant cette longue série d'observa- tions des séries antérieures d'Upsal, du Parc-Saint- Maur et des Pays-Bas, il a mis en lumière la variation diurne et la variation annuelle de ces divers phéno- mènes, estimant fort judicieusement que deux de ces phénomènes ne peuvent être attribués à la même cause — réfractions à travers des faces différentes d’un 1 Voir la Revue des 15 mars 1906, 15 mars et 30 dé- cembre 1908. même cristal de glace ayant une position définie — que s'ils sont fréquents en même temps el rares en même temps. C'est ainsi qu'il apporte le concours de la statistique météorologique à la théorie de Bravais, qu'il confirme d’une facon très solide sur presque tous les points. Après avoir observé, M. Besson a expérimenté : La théorie admet que certains phénomènes optiques s'expliquent par des réflexions et réfractions dans des prismes hexagonaux de glace, horizontaux et verticaux ; ces positions sont-elles réalisées dans les nuages glacés, et sont-elles stables? Pour le savoir, M. Besson à institué une série de recherches expérimentales sur l'orientation que prennent les corps solides en tombant dans les fluides. Entre Bravais, qui admettait, non sans quelques réserves, que les cristaux, en traversant l'air, prennent la position qui leur assure le minimum de résistance de la part du fluide, et Wood, qui a énoncé l'opinion contraire, M. Besson arrive à une opinion plus complexe : il à taillé en bois d'ébène et en ébonite des prismes et des cylindres allongés, qu'il a terminés à l'une de leurs extrémités par une lamelle plate. Suivant les rapports que présentent entre eux les quatre para- mètres qui définissent un pareil système (épaisseur et diamètre de la lamelle, longueur et diamètre du prisme ou cylindre), on voit l'axe du système prendre une position horizontale ou verticale en tombant dans l'eau. Sur des « formes » semblables à celles de cristaux complexes de glace que l'on a réellement observées, on obtient bien les orientations de chute que la théorie sup- pose pour expliquer les apparences. M. Besson apporte des éléments nouveaux sur deux points principaux. La théorie de l'arc cireumzénital avait été donnée d'abord par Galle, puis par Bravais, dont l'explication a été contestée récemment par Pernter dans sa Météorologie optique. On donnera une idée précise de l'importance du travail de M. Besson en indiquant que Pernter, qui a groupé toutes les mesures faites auparavant de la hauteur de l'arc circum- zénital, n’en a trouvé que 17; et MM. Besson et Dutheil ont effectué à Montsouris 91 mesures, portant sur 49 arcs différents. Ces mesures vérifient, au contraire, la formule de Bravais, et dans des limites beaucoup plus larges qui n'avaient jamais été atteintes. Pour l’anthélie, les paranthélies et les deux types de halos blancs, phénomènes beaucoup plus rares, M. Besson substitue, au contraire, à la théorie de Bravais une théorie fondée sur l'existence d'associations par- ticulières de prismes de glace, dont le beau Mémoire de M. Dobrowoski sur « la neige et le givre» a montré la réalité. BERNARD BRUNHES, | Directeur de l'Observatoire du Puy de Dôme. Beltzer (F.). —— La Chimie industrielle moderne. Tome I. Industrie chimique minérale, Métalloïdes. — 1 vol. in-8° de T10 pages. (Prix : 20 fr.) Société d'Editions Techniques. Paris, 1909 Deux volumineux ouvrages publiés assez récemment — le Traité de M. Chabrié et celui de M. J. Garçon — étaient consacrés déjà à l’étude de la Chimie indus- trielle; dans ces conditions, M. Beltzer devait tenter de faire autrement ou mieux. Or, si le nouvel ouvrage diffère des précédents, dans une certaine, quoique faible mesure, il ne leur est pas supérieur. Pourtant M. Beltzer, publiciste, technicien, ancien directeur d'usine, était bien qualifié pour l'écrire. L'impertec- tion ne viendrait-elle pas de ce qu'il est impossible de mener à bien la confection d'un Traité de Chimie industrielle de cette ampleur? N'est-ce pas ce qu'a compris Lunge, par exemple, un des maîtres de la Chimie industrielle, à qui l'on doit des traités classiques consacrés à certaines spécialités, mais qui, pour écrire un ouvrage d'ensemble (Analyse appliquée aux essais industriels), s'adjoignit de nombreux collaborateurs? Si compétent que soit en effet l’auteur, il ne peut l'être également pour toutes les parties de la Chimie industrielle. Aussi devra-il, en certains points, se 822 borner à compiler, et, si soigneusement que soit fait le travail, il est forcément incomplet et banal.M. Beltzer, par exemple, étudie la fabrication de SO“H? par les procédés de contact d’après des travaux datant de quelques années; il en résulte qu’il ne mentionne pas d'autre catalyseurs que le platine, ce qui est tout à fait impardonnable. L'inconvénient contraire est qu'un auteur accorde une importance exagérée à tel chapitre de sa spécia- lité. Ainsi, M. Garçon donne du mercerisage une monographieexcellente, mais démesurée. Ainsi, M. Cha- brié consacre vingt pages d'un de ses volumes à l'étude du rôle probable de la lécithine dans la calcifi- cation des cartilages et les phénomènes de nutrition ; et Le travail, peut-être parfait en soi, n'a aueun rapport avec l’objet de l'ouvrage. Ainsi, M. Beltzer consacre, par exemple, à la préparation électrolytique des solu- tions décolorantes d'hypochlorites et à la nomenclature des hydrosulfites commerciaux, une étude exagérée. Enfin, un ouvrage embrassant une telle étendue de connaissances devrait être très longuement préparé, et, si M. Beltzer a des années d’études antérieures et d'expérience, il ne paraît pas avoir consacré grand temps à la préparation de son Traité. Non seulement le style en est critiquable, mais on rencontre souvent dans l'ouvrage des renvois bibliographiques à des travaux de valeur nulle, des citations de quelques bre- vets pris entre beaucoup d’autres d'importance égale, des reproductions in extenso d'articles parus précé- demment et qu'il eût fallu tout au moins remanier : telle l'étude sur l’électrolyse de NaCl publiée déjà dans la Revue générale de Chimie. Très souvent, surtout dans les descriptions d'appareils, l'auteur étudie seulement tel système qui n’est peut-être ni le meilleur ni le plus généralement employé. Sans doute, M. Beltzer explique fort ingénieusement dans sa Pré- face qu'il s’est borné de parti pris aux choses jugées parfaites ou plus intéressantes, mais on peut trop faci- lement croire qu'il y a là d’abord une recherche du moindre effort (le constructeur donnant clichés, ren- seignements, notices) et peut-être aussi quelque pré- férence intéressée. Ces quelques réserves faites, on ne peut méconnaître l'intérêt du nouveau Traité de Chimie industrielle ; c’est le seul où l’on puisse trouver des documents sur les questions économiques : devis d'installation, prix de revient. Les plans d'usines sont très clairs et de valeur documentaire bien supérieure aux gravures de catalogues dont sont seulement illustrés la plupart des ouvrages de Technologie. Nous avons dit que cer- taines questions familières à l’auteur avaient été très bien — trop complètement — étudiées. Enfin, et nous ne saurions trop en féliciter M. Beltzer, on sent, dans le nouvel ouvrage, l'influence des idées développées par M. Le Chatelier dans la préface de ses « Lecons sur le carbone »; pas plus que la Chimie pure, la Techno- logie ne doit être seulement descriptive. M. Beltzer s’est efforcé de faire penser le lecteur et de le guider par des idées et des lois générales; il expose très simplement et très heureusement la loi des phases à propos de son application aux composés du chlore; il mentionne les travaux de Ramsay, de Lehmann, de Le Bon, toutes choses dont se désintéressent malheureu- sement trop la plupart des techniciens de Chimie in- dustrielle. C'est ce qui nous fait regretter que l’auteur n'ait pas plutôt consacré ses efforts à la rédaction de quelque monographie où il eût pu moins embrasser, mais mieux étreindre. Ce serait le seul moyen de pouvoir écrire un ouvrage de valeur répondant à ce que l’on a besoin de connaître en Chimie industrielle. H. Rousser. Sidersky (D.), /ngénieur-chimiste. — Polarisation et Saccharimétrie. 2° édition. — M vol. in-46, r'e 168 pages, avec 40 figures, de l'Encyclopédie scienti- lique des Aide-Mémoire. Gauthier-Villars. Paris, 1909, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 3° Sciences naturelles Naudeau (Ludovic). — Le Japon moderne, son évo- lution. — 1 vol. in-18 de 40% pages de la Biblio- thèque de Philosophie scientifique. (Prix : 3 fr. 50.) Ernest Flammarion, éditeur. Paris, 1909. C’est en véritable psychologue que M. Ludovic Nau- deau à étudié l'évolution moderne du Japon et l’in- fluence que le succès heureux de la guerre avec la Russie a exercée sur le développement du pays et sur le caractère de ses habitants. Fait prisonnier après avoir passé près de quinze mois en Mandchourie, c’est avec des convois de vaincus qu'il entra au Japon; il fut laissé libre peu de temps après et y séjourna une année entière. Mêlé au peuple japonais et partageant sa vie, il chercha alors à en pénétrer l'âme intime, étude que les événements historiques rendaient à ce moment particulièrement intéressante. L'auteur a pu ainsi mettre en relief les traits les plus saillants du caractère des Japonais d'aujourd'hui et faire quelques pronostics sur leur avenir. Il parle d’abord de la bravoure japonaise qui venait d’avoir une occasion de se montrer avec éclat, et montre comment les Japonais, sans être plus eruels que nous, admettent plus volontiers l’idée de donner la mort ou de la recevoir; il n'est pas non plus de pays où le suicide soit plus fréquent. L'auteur recherche et discute les causes pouvant expliquer cette indifférence des Japonais pour la mort. Aucun peuple ne pouvait être mieux préparé à se faire tuer pour une cause, et ce fut une frénésie patriotique qui vint, en 1903 et 1904, surexciter la bravoure Japonaise. Mais cette bravoure ne s’'emploiera-t-elle toujours qu'à des fins nätionalistes? L'auteur, examinant l’état social du Japon, montre que dans ce pays, caractérisé par l'indigence et la forte natalité et qui est accablé par des charges croissantes, la pénétration des idées révolutionnaires pourrait amener des perturbations que la bravoure japonaise rendrait effroyables. M. Naudeau expose ensuite la situation de la femme au Japon. Elle est aujourd'hui ou ménagère étroite- ment asservie à son mari, ou courtisane; il n’y a pas de milieu. Mais le féminisme fait des progrès et tend à sortir la femme de sa misérable condition. Enfin, l'auteur termine par quelques considérations sur l'avenir du Japon. 1l constate que ce pays, épuisé par un effort trop considérable, a besoin de calme pour se reconstituer et qu'il est, de plus en plus, acculé à la nécessité de se créer des richesses. Il est peu pro- bable qu'il puisse se lancer de longtemps dans une aventure belliqueuse. G. REGELSPERGER. NVhite (James), Géographe du Gouvernement. — Atlas of Canada.— 1 vol. in-folio, avec 83 planches. Département de l'Intérieur, Ottawa (Canada). Id. — Raïlway Map of the Dominion of Canada. — 1 carte en8 feuilles de 64 X 64 cm. Département de l'Intérieur, Ottawa (Canada). Depuis quelques années, le Département de lInté- rieur du Canada a fait paraître une série de publica- tions géographiques du plus haut ‘intérêt. Parmi celles-ci, il faut signaler en premier lieu l'Atlas du Canada, préparé sous la direction de M. James White, géographe du Gouvernement. Ce gros volume renferme, outre une partie introduc- tive consacrée à des statistiques géographiques et démographiques, 83 planches en couleur. Il nous est impossible de les décrire toutes, mais nous voudrions signaler comme spécialement intéressantes au point de vue scientifique : la carte géologique, faisant ressortir l'énorme surface du pays qui est occupée par le noyau archéen; la carte des gisements de minéraux; la carte des forêts et célle qui indique les limites, septentrio- nales et dans quelques cas méridionales, des prinei- pales essences forestières; la carte des isothermes pour chaque mois de l’année, celle de la précipitation, BIBLIOGRAPHIE —. ANALYSES ET INDEX de la chute de neige et des isobares, établies d'après les observations du Service météorologique ; celles des heures de soleil possibles en été et celles de la tempé- rature, faisant en particulier bien ressortir l'effet favo- rable sur le climat, à l’est de l'Océan Atlantique et des grands lacs, et, à l’ouest, du courant du Japon; la carte des aborigènes du Canada, de l'Alaska et du Groenland et celle de l'origine des différents peuples qui ont colonisé le Canada; celle des routes des explo- rateurs, etc. — Au point de vue économique, il y à également de nombreux graphiques concernant la population, l'agriculture, les industries, le commerce, les ressources financières, le mouvement des bateaux et des chemins de fer. L'exécution cartographique est très remarquable, et l'ensemble de l'Atlas fait le plus grand honneur à M. James White qui l'a concu et en a dirigé la publica- tion. La grande carte des chemins de fer du Canada est également digne d'éloges. L'exploitation est entre les mains de 57 Compagnies, dont les lignes sont repré- sentées par des couleurs autant que possibles diffé- rentes et pourvues d'ailleurs d’un numéro d'ordre. Les principales Compagnies sont le Canadian Pacific Railway, dont le réseau atteignait 9276 milles en 1908, et dont la principale ligne va de Saint-John, sur l'Atlantique, à Vancouver, sur le Pacifique; le Grand Trunk and Grand Trunk Pacific Railway (3.704 milles), dont la principale ligne, encore en partie en construc- tion, ira d'Halifax à Prince Rupert, dans le nord de la Colombie britannique; le Canadian Northern System (3.934 milles), dont le réseau principal part actuellement de Port-Arthur sur le Lac supérieur pour rayonner dans les provinces de Mannitoba, Saskat- chewan et Alberta, où la colonisation agricole se déve- loppe rapidement; enfin les Canadian Government Raïlways (1.759 milles), dont le réseau couvre une partie des provinces orientales jusqu'à Montréal. Outre les réseaux ferrés, la carte indique en détail le régime hydrographique, les divisions territoriales et un grand nombre de noms de villes. L. B. Recueil de l'Institut botanique Leo Errera (Uni- versité de Bruxelles). Tome III. — 1 vol. gr. in-8° de 481 pages, avec 16% figures et 10 planches. (Prix : 25 fr.) Lamertin, éditeur. Bruxelles, 1909. L'Institut botanique de Bruxelles continue rapide- ment la publication des volumes contenant les travaux anciens du laboratoire. Celui que nous présentons aujourd'hui contient un assez grand nombre de Mémoires datant de 1885 à 4898 et portant principale- ment sur les sujets suivants: Recherches diverses sur les Bactéries, les Myxomycètes, les Algues etles Cham- pignons; études d’histologie et d’embryogénie; in- fluence des facteurs externes sur le développement des organes, sur la karyokinèse et la division cellulaire ; cicatrisation. Dans le premier groupe de recherches, il convient de citer tout d'abord les importants travaux de Bacté- riologie agricole de E. Laurent. Cet auteur démontre qu'il n'y a pas d'organismes bactériens dans les tissus végétaux à l'état normal et que la propriété de produire de la diastase ou d’autres ferments solubles est aussi bien l'apanage de la cellule végétale que de la cellule microbienne ; il étudie une bactérie qui intervient dans la fermentation panaire, le Bacillus panificans, capable, après la cuisson et en milieu insuffisamment acide, d'attaquer l’amidon et de le transformer en érythro- dextrine, ce qui occasionne la production de pain visqueux; il élucide le rôle important joué par les bactéries du sol dans l'assimilation des composés humiques par les plantes vertes ; il établit l'identité du Cladosporium herbarum avec diverses formes fongiques imparfaites : Penicillium cladosporioides, Dematium pullulans avec ou sans formes levures, diverses formes levures et Fumago: il montre que l'action de la lumière sur le Bacille rouge de Kiel amène sa décoloration et la 823 constitution dune variété incolore susceptible de se maintenir dans les conditions ordinaires. Enfin, un dernier travail de Laurent est consacré à ses intéres- santes recherches sur le microbe des nodosités des Légumineuses; il constate que la formation des nodo- sités est conséculive à Ja pénétration du micro-orga- nisme sous forme filamenteuse par l'intermédiaire des poils radicaux; à l'intérieur de la racine, le mycélium donne ensuite, par prolifération, une infinité de cor- puscules, les bactéroïdes, riches en matières albumi- noïdes qu'ils peuvent céder à la plante support. De Wèvre étudie la biologie de quelques Champi- gnons filamenteux : (Ædocephalum fimetarium Riess., (ŒE. glomerulosum Bull., Rhopalomyces elegans Corda, Phycomyces nitens Kunze, Rhizopus nigricans Ehrenb. L. Errera établit l'identité avec le Lecanora esculenta d'une substance alimentaire appelée « Pain du ciel » par les Kurdes de Mésopotamie. Clautriau émet quelques considérations sur les bacté- ries lumineuses, notamment sur le Photobacterium phosphorescens. Nypels étudie la germination de quelques écidio- spores; il constate, en particulier, que l’Aecidium leuco- spermum produit parfois des spores secondaires lors de la germination des écidiospores normales, mais il ne peut déceler la cause occasionnelle du phénomène. Massart décrit un nouveau genre de Flagellates qu'il dédie à Clautriau, le genre Clautriavia, avec l'unique espèce G. mobilis. Norbert Ensch examine, enfin, le développement de quelques Myxomycètes et la désorganisation de leur sporange. Aux études histologiques se rattachent les recherches de de Wèvre sur l'anatomie des Broméliacées, de de Wildeman sur les sphères attractives dans quelques cellules végétales (Funaria hygrometrica, Ceratodon purpureus, Bryum caespiticum, Spirogyra Jjugalis, S. nitida, Equisetum limosum), de Errera sur un tronc de Hêtre à cœur rouge. L'embryologie est représentée par plusieurs Mémoires importants, parmi lesquels on peut citer en première ligne celui de Massart sur la récapitulation et l'innova- tion en Histologie végétale. Un sait que le principe de la récapitulation est celui-ci : le développement de l'individu présente en abrégé les diverses phases qu'a parcourues l’espèce dans le cours de son évolution : l'ontogénie résume la phylogénie. On a signalé chez les animaux de nombreux faits qui ont servi de base à ce principe ; ils sont beaucoup moins connus chez les végé- taux. Les très intéressantes observations de Massart le conduisent à admettre que, lorsque l’organogénie de la feuille récapitule la phylogénie, ce qui est très rare (Eucalyptas, Achillea, Ptarmica), la récapitulation porte sur des caractères provenant d’ascendants très peu éloignés. Dans tous les autres cas, l'organogénie de la feuille est directe : on n’observe pas la formation, même incomplète ou transitoire, d'organes ancestraux devenus inutiles et éliminés par la sélection naturelle; en outre, sous l'influence de cette sélection et de l'hérédité, l'ordre de fonctionnement des diverses parties de la feuille est déterminé par leur ordre de formation. Massart signale ensuite de très curieuses fleurs anor- males de Corydalis solida dont les pétales extérieurs sont munis de deux éperons. Errera montre qu'un électro-aimant puissant n'a pas d'action appréciable sur la karyokinèse dans les poils staminaux du radeseantia virqiniea. La karyokinèse fait encore l’objet d’un intéressant travail de E. de Wildeman, qui examine l'influence de la température sur la marche et la durée du phénomène. 11 constate l'existence d'un optimum de température, variable avec les espèces; la lumière, au contraire, n'a aucune action directe. La cicatrisation des tissus végétaux est enfin étudiée par Massart et de Wildeman. Le premier auteur trouve | que, chez les Phéophycées et les Floridées, le processus | cicatriciel suit, dansses grandes lignes, la mème marche que chez les Phanérogames. La segmentation cellulaire réparatrice, dans ces dernières plantes, est amitosique et fait suite à une excitation émise par la surface lésée. Quant à l'excitation « phellagogue », elle est probable- ment déterminée par la transpiration contre laquelle réagissent les cellules externes en subérisant leurs membranes. De Wildeman s'occupe spécialement des phénomènes de réparation chez les Algues filamenteuses; il est con- duit à formuler cette règle : « Toutes les cellules des Algues filamenteuses sont capables, après blessure et mort d’une de leurs voisines, de donner naissance à d'autres cellules et de régénérer par suite les portions détruites du thalle. » On voit, par ce très bref résumé, que les nombreux travaux contenus dans ce Tome ne le cèdent en rien à leurs devanciers par l'importance des résultats acquis. ALU: Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. Bohn (D' Georges). — La naissance de l'Intelligence. — 1 vol. de 350 pages, illustré de 40 figures, de la Bibliothèque de Philosophie scientifique. (Prix 3 fr. 50.) Flammarion, éditeur. Paris, 1909. Dans ce livre, M. Bohn a entrepris de tracer un tableau d'ensemble des résultats récemment acquis sur la psychologie comparée des animaux inférieurs, sujet difficile, dans lequel il s'est spécialisé depuis plu- sieurs années, et qu'il a enrichi d'observations inté- ressantes et originales. Pendant longtemps, à l'exemple des Anciens et de Montaigne, on attribua aux animaux nos pensées et nos sentiments, nos vertus et nos vices : c'est l’anthropomorphisme, auquel s'oppose la doctrine de l’automatisme, issue de Descartes, qui fait des animaux, au contraire, de pures machines, des auto- mates construits d’une certaine façon, et aux réactions immuables. Lamarck eut l'intuition géniale de [a con- ception moderne, qui a trouvé en Loeb son expression la plus parfaite; c'est ce dernier qui a orienté définiti- vement l'analyse psychologique vers une voie nouvelle, en définissant les tropismes, la sensibilité différentielle et les phénomènes associatifs : réactions de l'être aux forces du milieu extérieur, dont on peut étudier l’action qualitative et quantitative, en éliminant, en tant que causes productrices des mouvements des animaux, les concepts d’instinct et de volonté. L'œuvre de Loeb a été le point de départ de deux mouvements con- traires : l’un, purement mécaniste, celui de l'Ecole allemande (Bethe, Ziegler, Nuel, etc.); l’autre, à légère tendance vitaliste, rendu célèbre par la théorie des essais et des erreurs de Jennings; M. Bohn, à l'exemple de son regretté maître Giard, étudie surtout la psycho- logie d’un animal dans le milieu même qu'il habite naturellement (méthode éthologique); il cherche à comprendre le déterminisme de ses actions par une analyse serrée, aidée par des expériences calquées sur celles qui se trouvent effectuées dans la Nature, etil retrouve, combinées et modifiées de façons variées, les modes de réactions mis en lumière par le génie de Loeb. Les tropismes sont des mouvements automatiques et irrésistibles dans lesquels la volonté et les sentiments de l’animal ne sont pour rien, qui ont pour effet d'orienter l'organisme suivant la direction de l'excitant, assurant ainsi son équilibre (phototropisme négatif ou positif, réaction à la lumière; géotropisme, réponse à la gravitation; chimiotropisme, réponse à des excita- tions chimiques; etc.). Les criteriums des tropismes sont : 4° la composition géométrique des attractions, par exemple lumière, amenant un égal éclairement des deux moitiés du corps; 2° les mouvements de manège produits par l'excitation unilatérale, après sup- pression d'un des organes récepteurs pairs, yeux ou antennes. Enfin, les tropismes peuvent présenter des variations d'intensité liées aux variations de l'état de la matière vivante (par exemple teneur en eau), et BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX alors s’annuler ou bien changer de signe; ils sont influencés par les périodicités vitales (rythmes de marée, rythmes nycthéméraux), si bien qu'une Con- voluta, une Littorine, présentent en aquarium, pendant quelques jours au moins, les réactions tropiques qui, à l’état de nature, sont réglées par les mouvements de la marée. Les réactions du type de la sensibilité différentielle sont des mouvements en réponse à des variations plus ou moins brusques du milieu extérieur : lumière, gra- vitation, changements chimiques, etc.; ce sont des arrêts, des reculs, des rotations, produisant l’accumu- lation des animaux dans certaines régions du milieu où ils se déplacent, régions qui se comportent comme des pièges; les combinaisons complexes des impulsions motrices, tropiques et de sensibilité différentielle, va- riant suivant les circonstances ambiantes, expliquent l'apparente spontanéité des mouvements des animaux, mais l'analyse conduit à rejeter absolument l'interven- tion de volonté. Il peut arriver qu’à des associations déterminées de certains stimulants correspondent des séries déter- minées de mouvements; l'animal n'obéit plus direc- tement aux forces du milieu extérieur, mais bien à des états spéciaux du système de coordination mo- trice (système nerveux); il y a alors associations de sensations, mémoire associative, et on est alors sur le terrain du psychisme. On constate expérimentalement (méthode du labyrinthe, boîtes avec ouverture de sortie, etc.) que les animaux à système nerveux bien développé et à organes des sens perfectionnés, tels les Arthropodes et les Vertébrés, sont capables d'acquérir des habitudes individuelles; il y a, dans le système nerveux, association entre les impressions actuelles dans divers points de la surface du corps et des impres- sions passées. Quand l'habitude est établie, un seul stimulus prédominant (stimulus ecphorique de Semon) peut déterminer la suite des actes qui étaient autrefois provoqués par le complexe de sensations, ce qui pro- duitune simplification des phénomènes associatifs com- plexes, et simule, comme dans l’attraction des Insectes par les fleurs, une sorte de faux tropisme, qui paraît provoquée par une seule force du milieu extérieur. Lorsqu'il s'établit un système nerveux très perfec- tionné, comme chez l'Abeille, la Fourmi, les Céphalo- podes et surtout les Vertébrés, l'appareil enregistreur des sensations, jusque-là imparfait, garde désormais des empreintes durables; il permet la formation d’une multitude d'associations diverses et compliquées, qui finissent par jouer un grand rôle dans l’activité encore toute mécanique des animaux, en diminuant la part du pur automatisme. Ce n'est pas encore, peut-être, de l'intelligence, c’est-à-dire la faculté de former des con- ceptions par abstraction et d’en tirer des conclusions, mais c’est au moins un terrain favorable à la naissance de l'intelligence, apanage des seuls animaux supé- rieurs. Enfin,une dernière révolution psychique est marquée par l'apparition de l'Homme sur la Terre; il apparaît avec un cerveau hypertrophié, dont la pensée va do- miner le monde, et il y a un hialus, jusqu'ici infran- chissable, entre son intelligence et l'intelligence des animaux. On voit que M. Bohn s’est efforcé, souvent avec bonheur, de débrouiller l’origine et le mécanisme des phénomènes qui paraissent au premier abord échapper à l'analyse par leur complexité; il ne veut pas se servir du mot instinct, qu'il regarde, peut-être avec raison, comme une étiquette imprécise qui à été appliquée à des phénomènes aussi différents que les tropismes, les réactions différentielles, les rythmes vitaux, le pouvoir associatif; les instincts, au sens habituel du mot, seraient des phénomènes associatifs transformés en habitudes par la constance des sensa- tions, et qui se transmettraient ensuite par hérédité ; visiblement, il comprend cette hérédité comme celle d'un caractère acquis, ce qui a tous les avantages, mais BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 825 aussi tous les inconvénients des interprétations lamarc- kiennes. J'aurais aimé à lui voir serrer de près cette conception, qu'il indique en passant, et qui me paraît susceptible de graves critiques. Mais, comme il le dit dans son Introduction, il s’agit encore plus, dans l’état actuel de la Psychologie comparée, de démolir que de reconstruire ; c’est déjà beaucoup que d’avoir substitué, au verbalisme qui a tant sévi, des notions solides, expé- rimentales, comme celles que résume M. Bohn dans cet excellent livre; le reste viendra en son temps. L. CuÉNoT, Professeur à la Faculté des Sc'ences de Nancy. 4 Sciences médicales Marfan (A.-B.), Agrégé à la Faculté de Médecine de Paris; Andérodias (J.), Agrégé à la Faculté de Médecine de Bordeaux; Cruehet (R.), Agrégé à la Faculté de Médecine de Bordeaux.— La Pratique des Maladies des Enfants. l'ome I. Introduction à la Médecine des Enfants. — 1 vo/. 1u-8° de 480 pages, 81 figures. (Prix : 10 fr.). J.-B. Baillière et fils, édi- teurs. Paris, 1909. Le présent volume est le premier tome d’un impor- tant ouvrage de Pédiatrie, consacré à la « Pratique des Maladies des Enfants ». Vingt-cinq collaborations, demandées aux spécialistes les plus notoires des Ecoles de Paris, Lyon, Bordeaux, Nancy, Toulouse, Mont- pellier, Genève et Bruxelles, ont été groupées par M. René Cruchet. A chacun d’eux a été dévolue une des parties de l'ouvrage. Les considérations par lesquelles s'ouvre le volume, les généralités sur l'enfance, ses périodes et ses maladies, ont été justement attribuées à l’un des maîtres, qui, par l'ampleur et la sagesse de ses conceptions doctrinales et sa perspicacité clinique, était bien choisi pour jeter sur l'œuvre un prestige réel et immédiat. Cette première partie est, en effet, signée par M. Marfan. C'est d'abord l'exposé des caractères généraux de l'enfance. La croissance domine cette période de la vie. Elle est soumise aux lois héréditaires. Elle est influen- cée par des causes telles que les conditions extérieures, le régime, les maladies. Pendant la croissance, l’assi- milation l'emporte sur la désassimilation. Toutes deux sont extrêmement actives. Un des corollaires de ce principe est la suractivité de la circulation sanguine et lymphatique. La croissance des divers organes ne suit pas une marche égale pour tous : c'est pourquoi, chez l'enfant, certains organes sont déjà parfaits, alors que d’autres sont loin d’être développés. En outre, la croissance procède, pour ainsi dire, par poussées : le rythme de la croissance n’est pas régulier. Toutes les réactions organiques vis-à-vis des causes morbides se font chez l'enfant de la même manière que chez l'adulte ; mais les processus diffèrent beaucoup, suivant l'âge, d'intensité et de forme. Certaines affec- tions sont plus fréquentes dans l'enfance que dans les autres périodes de la vie; et même les aptitudes mor- bides varient aux diverses phases de la croissance. D'où | la nécessité de diviser l'enfance : première enfance, de | la naissance à deux ans inclus ; — deuxième enfance, | de deux ons à six ans inclus ; — troisième enfance de sept ans à la puberté, quatorze ans inclus. Il ne faut pas prendre ces repères d'une façon absolue : ils n’ont de valeur que pour les grandes moyennes. M. Marfan étudie ces trois périodes. Il montre l'influence des maladies des procréateurs sur le nou- veau-né ; celle des actes de la parturition, d'ordre obsté- trical. Le nourrisson subit des infections diverses : les unes spéciliques, qu'il prend par contagion; les autres non spécifiques, qu'il prend par une atténuation de sa résistance naturelle, où par un excès de virulence de l'agent pathogène. Les premières sont rares dans la pre- mière enfance, parce qu'en général la contagion n'est 1 as réalisée. Les secondes sont communes, parce qu'après la naissance, l'enfant élimine très vite les substances immunisantes qu'il puisait chez sa mère et | parce que la porte d'entrée la plus commune des infec- tions, le tube digestif, est dans un état d'infériorité pour tout ce qui n’est pas le lait puisé directement à ia mamelle. M. Marfan indique, à ce propos, tous les dan- gers de l'allaitement artiticiel et son retentissement sur la nutrition générale. Les voies respiratoires et la peau sont assez mal défendues chez le nourrisson : ce sont encore là d'importants sujets d'infection. L'évolution des maladies aiguës est caractérisée dans la première enfance par l'intensité et la diffusion des réactions morbides, la participation fréquente du sys- tème lymphatique, la fréquence et la gravité des septi- cémies, et aussi par une grande rapidité de réparation. Les maladies chroniques, au contraire, y sont remar- quables par leur latence, la faiblesse de leurs réactions et l'absence de réparation. Le rachitique en offre l'exemple le plus démonstratif. M. Marfan donne comme caractéristiques les réactions spéciales des organes hématopoiétiques : la moelle osseuse, d'abord siège d’une suractivité défensive intense, devient bien- tôtinsuffisante, et les déformations apparaissent. Dans la deuxième enfance, les deux conditions qui modifient la pathologie sont le régime, où le lait est progressivement remplacé par d’autres substances ali- mentaires, et le développement actif du système ner- veux. En outre, c'est la période par excellence des maladies contagieuses aiguës. La troisième enfance se divise en diverses phases que M. Marfan distingue en : phase de croissance lente ou d'initiation scolaire; — phase prépubère, où la taille s'accroît brusquement et rapidement, et où la déshar- monie du développement peut s’observer; — enfin la puberté. Une des conclusions importantes de cette par- tie de l'ouvrage, c'est la nécessité d'enseigner spéciale- ment la pathologie infautile et l'intérêt majeur que doit prendre la médecine infantile dans les préoccupations du praticien. Soigner les enfants comme de petits adultes, c'est un contre-sens aisément prouvé par M. Marfan. Nouveau-né et nourrisson, tel est le sujet traité dans ses détails pratiques par M. J. Andérodias. Il étudie d’abord le nouvean-né à terme, ses conditions anato- miques et physiologiques. Puis il en expose l'hygiène, en commencant par la première intervention médicale qu'il doit subir, la ligature du cordon ombilical. Minu- tieusement, il décrit ce qu’on doit faire et comment il faut le faire toilette des yeux, lavage, pesage, emmaillotage, couchage, promenade, etc. Les maladies ou accidents qui surviennent au début de la vie sont traités avec soin : mort apparente, céphalématome, paralysies obstétricales, fractures, infections transpla- centaires ou d'origine amniotique et vulvo-vaginale, infeclions après la naissance, hémorragies, ictères et sclérème. M. Andérodias passe ensuite à l’étude dé- taillée du développement, de l'hygiène et de l’alimen- tation du nourrisson. Il insiste sur les précautions à prendre dans l'allaitement artificiel et le sevrage. Une part importante de son travail concerne les prématurés, ces enfants nés avant terme dans des conditions de débilité et de fragilité quelquefois extrèmes, et qu'on parvient par des soins incessants à faire vivre et pros- pérer. M. Cruchet prend l'enfant à l'âge de deux ans et le conduit jusqu à la puberté. A l'étude de la croissance physique il a joint celle du développement psychique, avec l'exposé des méthodes préconisées par M. A. Binet, puis celle de l'hygiène et de l'éducation générale. La puberté est traitée sur le mème plan. Divers tableaux démonstratifs concentrent de nombreux renseigne- ments et présentent d'utiles comparaisons. Cette analyse, insuffisante pour faire apprécier un Traité aussi général, aura atteint son but si elle à pu attirer l'attention sur un excellent ouvrage de Pédiatrie, qui, malgré son caractère scientifique, reste néanmoins à la portée de tous les esprits cultivés qui s'intéressent à l'éducation de l'enfant. D' A. LÉTIENNE. ACADÉÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Septembre 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. N. Saltykow pré- sente une nouvelle solution simple du problème de Sophus Lie. — M. Drzewiecki donne une série de for- mules permettant aux constructeurs d'établir facile- ment et sans tätonnements des hélices aériennes nor- males, d’un rendement déterminé. —M. H. Deslandres, poursuivant l'étude des mouvements de l'atmosphère solaire supérieure au-dessus et autour des facules, a constaté l'existence de tourbillons cellulaires dans le Soleil; les vapeurs qui s'élèvent, et qui, en s'élevant, se détendent et se refroidissent, correspondent aux parties sombres des images; les vapeurs qui s'abaissent sont, au contraire, comprimées et plus lumineuses. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Bouquet de la Grye propose d'ajouter aux données actuelles du Bulletin du Service météorologique les observations de l’état ther- mométrique de la mer, prises tous les huit ou quinze jours, les variations de l'état thermique de la mer avant une grande influence sur la température de l'air. — M. P. Pascal a étudié le rôle magnétique de l'oxygène dans les composés organiques : relié à deux atomes différents, il est diamagnétique en combinaison ; doublement lié à un atome de C, il est paramagnétique. — M. P. Lemoult propose l'emploi de la bombe calo- rimétrique pour la combustion des corps phosphorés en vue du dosage du phosphore, à condition d'éviter l'emploi des capsules en métal et de les remplacer par des capsules de porcelaine consolidées, garnies inté- rieurement d’azotate fondu. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Piéron à établi la loi d'évanouissement, en fonction du temps, des traces mnémoniques chez la Limnée. Elle est voisine de la loi de l'oubli chez l'homme, établie par Ebbinghaus. — Mi. A. Laveran et A. Pettit ont constaté que le sang de certains Vertébrés inférieurs (triton, grenouille, anguille) contient des substances trypanolytiques assez actives. — M. A. Massaglia à reconnu que la défense de l'organisme de certains Vertébrés à sang froid contre le trypanosome du surra n'est pas due à la phagocytose, mais plutôt aux propriétés trypano- lytiques de leur sang. Séance du 20 Septembre 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Comas Sola indique une formule nouvelle pour le calcul de la pro- fondeur des hypocentres sismiques, qui s'applique aux sismes sévères distants au plus de 500 kilomètres. — M. A. Angot présente une carte de l'intensité de la remière secousse du tremblement de terre du 11 juin 1909. Les courbes isosistes présentent de grandes irré- gularités en rapport avec la structure géologique; les mouvements ont montré une tendance remarquable à se propager au loin par les vallées. — MM. H. Des- landres et L. d'Azambuja ont étudié les images mono- chromatiques multiples du Soleil données par les raies larges du spectre; ils ont reconnu les couches succes- sives du fer, du calcium et de l'hydrogène, en parti- culier les couches supérieures, qui sont les plus diffi- ciles à dégager. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. H. Alliot et G. Gimel ont constaté que l'addition d’hypochlorite de chaux (40 à 60 grammes par hectolitre d’eau) assure, en vue du lavage des pommes à cidre, la purification d'eaux douteuses au point de vue bactérien. Le jus des fruits ainsi traités subit une défécation énergique et se cla- rifie rapidement. La coagulation des matières pectiques se fait bien; les diastases sont éliminées par la préci- pitation. L’hypochlorite de chaux a une action élective favorable sur le Saccharomyces mali et nuisible à. l'égard des anaérobies. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Lauby montre que c'est grâce à la présence de sources minérales dans les lacs anciens qu’on observe, dans les sédiments déposés par les eaux douces aux diverses époques géologiques, des formes de Diatomées à facies saumâtre ou marin, la présence de minéralisateurs modifiant la striation et la forme des Diatomées d’eau douce. — M. A. Thiroux a constaté que le sérum de mouton normal exerce une action préventive sur l'infection de la souris par le l'rypanosoma Duttoni. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 2% Juin 1909. M. J. H. Poynting : Sur la pression perpendicu- laire aux plans de cisaillement dans les cisaillements purs finis, et sur l'allongement des fils chargés quand ils sont tordus. Antérieurement, l’auteur a analysé les tensions dans un cisaillement pur et montré que, sie est l'angle de cisaillement et n la rigidité, il existe une pression <°n perpendiculaire aux plans de cisaillement. Il pense aujourd’hui que cette analyse est fautive en ceci que les diagonales du rhombe dans lequel un carré est cisaillé ne sont pas les lignes de plus grande élon- gation ou contraction et ne sont pas à angle droit après le cisaillement, quand on tient compte des quantités de second ordre, c'est-à-dire de l'ordre de 7. L'auteur donne une nouvelle analyse plus correcte; quoiqu'elle ne donne pas de résultat définitif, elle laisse ouverte la question de l'existence d’une pression longitudinale. Cette question paraît être résolue affirmativement par quelques expériences décrites ensuite, dans lesquelles des fils chargés s'allongent, quand on les tord, d’une petite quantité proportionnelle au carré de la torsion. — Le même auteur étudie le mouvement ondulatoire d'un arbre en rotation et en tire un rapprochement avec le moment angulaire dans un faisceau de lumière polarisée circulairement. — MM. B. D. Steele et K. Grant : Micro-balances sensibles et nouvelle mé- thode pour peser de faibles quantites. Les auteurs décrivent deux nouveaux types de micro-balances. Le fléau, dont le poids ne dépasse pas un demi-gramme, est constitué par des barreaux de quartz fondu de 0,6 millimètres de diamètre ; les tranchants de couteaux ordinaires sont remplacés par des paires de pointes très fines taillées à l'extrémité de barreaux de quartz; la paire centrale repose sur un plan poli de eristal de quartz; le pointeur ordinaire est remplacé par un petit miroir de verre concave attaché en ligne avec l’axe central. La méthode de pesée est tout à fait nouvelle. On emploie comme contrepoids un tube de quartz d’un volume exactement connu, rempli d'air à une pression connue. La balance est placée dans une cage où l'on peut faire le vide; en faisant varier la pression dans cette cage, le poids de l'air contenu dans le tube variera de O0 (à la pression ordinaire) à son poids maximum (pour une pression nulle). Avec cette balance, on a pu mesurer des variations de poids à 4 X 10—° gramme près et des poids absolus à 1 X 107 gramme près. — M. H. A. Wilson : L’ellel d'un champ magnétique sur la conductivité électrique de la flamme. Ce mémoire contient un compte rendu de quelques expériences sur le changement dans la conductivité d'une flamme Bunsen produit par un champ magnétique, Le courant ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES à travers la flamme était horizontal et le champ magné- tique était aussi horizontal, mais perpendiculaire au courant, Le rapport du gradient de potentiel dans la flamme au courant a été pris comme mesure de sa résis- tance. Les résultats indiquent que èR/R = AH°—+ BH, où H indique le champ magnétique, R la résistance et A et B sont des constantes. La rapidité des ions négatifs peut être calculée d’après le terme AH° : le résultat est 9.600 em./sec. pour 4 volt par centimètre; ce résultat s'accorde avec ceux de M. E. Gold, obtenus par une méthode entièrement différente. Le terme BH est pro- bablement dù au mouvement vers le haut des gaz de la flamme, mais sa valeur est environ cinquante fois plus grande que la valeur calculée d’après la théorie ionique. — M. W. Wilson : L'absorption des rayons 5 homo- gènes par la matière, et sur la variation de l'absorption des rayons avec la vitesse. Les expériences ont été entreprises dans le but de déterminer la manière dont varie le coefficient d'absorption des rayons $ avec la vitesse. Le radium, qui émet des rayons dont les vitesses varient entre de très larges limites, a été employé comme source de rayons. On fait passer un faisceau de rayons du radium dans un champ magné- tique, au moyen duquel des rayons approximativement homogènes peuvent ètre dirigés dans un électroscope. On peut déterminer les vitesses des rayons d'après la force du champ magnétique. L'auteur a interposé des écrans de métal de diverses épaisseurs sur le passage des rayons et il a trouvé que la loi d'absorption n'est pas exponentielle, mais approximativement linéaire, excepté pour de grandes épaisseurs de la matière absor- bante. Le fait que les rayons $ de l'uranium, de lacti- nium, ete., sont absorbés par la matière d’après une loi exponentielle est une preuve, non de leur homogénéité, mais de leur hétérogénéité. On peut réunir des groupes de rayons qui représentent les propriétés de ces rayons quant à ARR DUC D'autres expériences ontété entre- prises sur le changement de vitesse des rayons après avoir passé à travers une substance absorbante, et l'auteur a trouvé que là vitesse des rayons, contraire- ment à l’idée exprimée par H. W. Schmidt, est réduite d'une façon appréciable lorsqu'ils pénètrent la matière. La loi d'absorption des particules 8 lorsqu'on les mesure par la méthode d ionisalion comprend un nombre con- sidérable de facteurs, et, comme on peut s'y attendre, on n'a pu trouver de rapport simple entre l'absorption des rayons et leur vitesse. — M. G. W. Todd a déter- miné les conductibilités thermiques de l'air et d'autres gaz à la pression atmosphérique. a observé le flux üni- forme de chaleur entre deux plaques métalliques cir- culaires horizontales maintenues à des températures différentes, la supérieure chaude fixe, l'inférieure froide mobile. Les températures des plaques étant maintenues constantes, la quantité de chaleur passant par seconde de la supérieure à l'inférieure, quand leur distance est x, est donnée par la formule Q=K/x+R + Ex, où la constante K est proportionnelle à la con- ductivité thermique, R est la chaleur radiée et Ex est l'effet dû au bord. Ce dernier est négligeable quand x est petit relativement au rayon des plaques. Alors, la relation entre Q et 1/xest une ligne droite, dont l'incli- naison donne K, d'où l'on déduit la conductibilité. Les valeurs obtenues sont indépendantes de la nature de la surface des plaques et de la dimension de ces der- nières, ce qui montre que les courants de convection étaient absents ou négligeables dans les expériences. — M. A. Fowler à étudié le spectre de l'hydrure de magnésium. Il se compose de lignes à courts intervalles dans toutes les parties du spectre depuis l’extrème rouge jusqu'à À 2.300 et de groupes définis de canne- lures commencant à 5.621,57, 5.211,11, 4.844,92, 4.371,2 et près de 2.430. Douze des séries de lignes qui com- posent la bande verte ont été tracées ; aucune des for- mules connues ne permet de représenter toutes ces séries d'une façon exacte. Les auteurs confirment la présence d’hydrure de magnésium dans le spectre des taches solaires; cette présence tend à montrer que les taches sont des régions de température réduite. — M. G. T. Beilby présente ses recherches sur l’écoule- ment superliciel dans la caleite. La surface polie d'un plan de clivage de la calcite, sous une forte illumina- tion oblique, ne présente aucune trace des graves per- turbations que lui à fait subir l'opération du polissage. L'enlèvement graduel des couches superficielles par un solvant révèle, au contraire, la nature et l'étendue de ces modifications, qui consistent dans un labourage et une rupture des lamelles jusqu'à une profondeur de 500 à 1.000 pp. La substance qui a été mise en mouve- ment et qui s'est resolidifiée est d’abord attaquée par le solvant. La couche superticielle formée par le polis- sage est plus dure que la surface cristalline inaltérée, et elle est également dure dans toutes les directions, à l'inverse de la surface naturelle. La nouvelle surface forme une couche protectrice sur la face cristalline, mais elle n'empêche pas la croissance parallèle de cristaux de nitrate de soude sur la surface polie. — MM. A. Har- den et W. J. Young : Le {erment alcoolique du suc de levure.1V : La fermentation du glucose, du mannose et du fructose par le sue de levure. 1° Le mannose se comporte vis-à-vis du suc de levure, à la fois en pré- sence et en l'absence de phosphates, substantiellement de la même manière que le glucose; 2° Le fructose ressemble au glucose et au mannose; mais, en pré- sence de phosphate, il fermente beaucoup plus rapi- dement que ces sucres, et la concentration optimum du phosphate est beaucoup plus élevée ; 3° Le fructose a la propriété de produire une fermentation rapide en présence du suc de levure dans les solutions de glu- cose et de mannose contenant un tel excès de phos- phate que la fermentation à lieu très lentement. Le glucose et le mannose ne possèdent pas une propriété semblable. Ces propriétés du fructose indiquent que ce sucre, lorsqu'il est ajouté au suc de levure, n'agit pas simplement comme un substratum apte à être fer- menté, mais possède quelque rapport spécifique avec le complexe de fermentation. Tous les faits se tiennent si l’on suppose que le fructose forme actuellement une partie du complexe fermentatif. Lorsque la concen- tration de ce sucre s'accroît, une plus grande quantité du complexe se forme, et comme résultat de cet accrois- sement dans la concentration de l'agent catalytique actif, le suc devient capable de produire la réaction avec le sucre en présence de phosphate à un degré plus élevé, et en mème temps la concentration opti- num du phosphate devient plus grande, exactement comme on l’a observé. — M. J. C. Ewart : Les ancôtres possibles des chevaux domestiques actuels. 1. Plusieurs théories ont été émises à ce sujet. Pour élucider le problème, l’auteur a examiné le cràne, les dents et les os des jambes de chevaux trouvés dans des camps romains et aux environs des habitations sur pilotis, et il a constaté que les chevaux domestiques ont appar- tenu, à l'origine, à des types différents dont il décrit cinq, caractérisés par les dimensions des molaires. Les ancêtres possibles des variétés dont les molaires ont des piliers courts sont l’£quus sivalensis des dépôts pliocènes de l'Inde, l’£. stenonis des dépôts pliocènes de l'Europe et de l'Afrique du Nord, et une nouvelle espèce, l'£. gracilis. — M. J. H. Orton signale l'exis- tence de lhermaphroditisme protandrique chez le Cre- pidula fornicata. Le Crepidula fornicata est un Gas- tropode streptoneure de la famille des Calyptréidées. Les individus de cette espèce s'associent d'une façon permanente en séries linéaires formant chaines, com- posées de deux à douze individus. L'auteur a trouvé que les individus situés aux extrémités attachées des chaînes sont toujours des femelles ; ceux qui se pré- sentent près des bouts libres sont des mâles, tandis que les individus placés au milieu possèdent les carac- tères sexuels secondaires des deux sexes, avec des intermédiaires vers les mâles d'un côté, vers les femelles de l'autre. Les jeunes sont toujours des mâles ; il ne parait pas douteux que les individus commencent tous leur vie comme mâles et se transforment gro- ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES duellement en femelles au cours de leur évolution. — M. G. H. Drew a étudié la reproduction et le commen- cement du développement du Laminaria digitata et du L. saccharina. Les aires reproductives se présentent sous forme de taches sombres sur les lames et con- sistent en gamétanges englobés parmi des paraphyses, contenant de petits gamètes sphériques et des globules huileux. Mürs, les gamétanges se rompent et les gamètes libres développent deux flagelles de longueur différente. Dans certaines cultures, on a observé des stades de conjugaison isogamique, avec formation d'une zygospore sphérique. Ensuite un prolongement se forme sur la zygospore; le contenu de la cellule y passe et il se sépare par une paroi du reste de la zygo- spore qui dégénère. La cellule formée développe des chloroplastes, s'augmente et se divise en produi- sant une chaîne de cellules, qui, par division répétée et rupture des parois extérieures des cellules, donne naissance à la laminaire. — MM. G. H. F. Nuttallet S. Hadwen ont découvert un remède contre la piro- plasmose du chien (jaunisse maligne) et celle du bétail. Le « trypanblau » et le «trypanrot » exercent un effet direct sur les parasites de ces affections : les parasites piriformes disparaissent rapidement du sang après une injection sous-cutanée de solution saturée du colo- rant; ils réapparaissent quelquefois, pour disparaître tout à fait après une nouvelle injection. La plupart des chiens traités ont guéri complètement, tandis que les chiens témoins succombaient. — M. R. T. Hewlett a étudié Zeflet de l'injection des constituants intra-cel- lulaires des bactéries (endotoxines bactériennes) sur l'action opsonisante du sérum des lapins sains. L'en- dotoxine typhique produit d’abord une diminution de l'indice opsonique, puis une élévation jusqu'à un maximum le troisième jour, suivie d’une nouvelle diminution. L'endotoxine staphylococcique produit d'abord une élévation de l'indice opsonique, suivie d'une chute considérable. L'endotoxine tuberculeuse provoque généralement une élévation de l'indice, quel- quefois précédée d’une diminution. — M. C. Russ : Les réactions électriques de certaines bactéries appli- quées à la recherche du bacille tuberculeux dans l'urine, au moyen d'un courant électrique. Le but de ces expé- riences était de déterminer si les bactéries suspendues dans un électrolyte sont transportées pendant l’élec- trolyse à l’une ou l’autre des électrodes, dans le but de recouvrer les bactéries pathogènes d’un fluide patho- logique. Durant l’électrolyse de certains sels dans lesquels des bactéries étaient en suspension, on s'est aperçu que les organismes émigraient vers une élec- trode ; dans quelques cas, il n’y avait pas de migration. Il à été remarqué que l’elfet se produit aussi bien avec des bactéries vivantes qu'avec des mortes. Pour utiliser ce mouvement bactérien, on a ajouté à l'urine tuber- culeuse un électrolyte dans lequel des bacilles tuber- culeux présentent une agrégation marquée à la cathode, et on a arrangé la cathode sous forme d’une trappe à bactéries. Après l'électrolyse, les bacilles tuberculeux pénètrent dans la trappe, qui est ensuite retirée, et les organismes sont reconnus sur une pelli- cule colorée préparée avec le contenu de la trappe. Une série durines ont été éprouvées de cette manière et dans chaque cas on a trouvé des bacilles tuberculeux dans la trappe. Dans l'expérience finale. l'auteur a ajouté à 100 centimètres cubes d'urine nor- male un certain nombre de bacilles tuberculeux (esti- mé à 500), et il a essayé de les découvrir par des recherches séparées, au moyen de la centrifugation et du courant. Par la centrifuge il n’en a trouvé aucun, tandis que par le courant il a retrouvé 128 bacilles. Communications reçues pendant les vacances. M. R. A. Houston : Sur le mécanisme du spectre d'absorption des solutions. Dans la théorie des électrons, la couleur des corps peut s'expliquer de trois façons, dont deux seulement permettent de prévoir l'existence de spectres d'absorption en solution. L'auteur étudie l’une d'elles, d'après laquelle les corps sont homogènes et les électrons qu'ils renferment exécutent des vibra- tions autour de leurs positions moyennes dans les molécules. Une bande d'absorption correspond alors à une oscillation principale de la molécule ou de tout autre système dont le spectre d'absorption est caracté- ristique. L’auteur, traitant la question mathématique- ment, arrive à la relation suivante : où p est le nombre d'électrons par molécule de matière colorante appartenant à la bande d'absorption consi- dérée, e leur charge en unités électrostatiques, m leur masse, e la concentration de la solution en gr.-mol. par litre, À, et À, les longueurs d'onde des bords de la bande. L'auteur a {déterminé la valeur de pe/m pour un certain nombre de solutions, d'après les observations de bandes d'absorption faites par divers auteurs; voici quelques-uns des résultats obtenus : d h pe/m Fuchsine dans l'alcool . . . . . . 550 585 1,8 X 107 — dans l'aniline . 565 595 LIU Phloxine dans l’eau Ne Fr, 515 560 1,4 X 407 Bleu de méthylène dans l'eau 665 690 5,4 X 105 — dans l'aniline . 675 690 1,1% 408 Eosine dans l’eau SE 516 525 9,2:X 109 — dans l'alcool . 527 542 2,3 X 107 Cyanine dans l'alcool. 587 609 5,8 X 109 — dans l'éther. DRE 628 6,9 X 104 CoOCIATans lea PR ROUE 540 DOEIOS Les valeurs pe/m obtenues pour les matières colo- rantes aniliques dissoutes dans l’eau, l'alcool ou le chloroforme sont très frappantes, puisque le rapport de la charge à la masse d'un électron est voisin de 1,8 X 107; on se trouve évidemment ici en face d'élec- trons. Quand le solvant est l'éther ou le benzène, les valeurs de pe/m sont beaucoup plus basses; le colo- rant est peut-être alors en solution colloiïdale. Les valeurs obtenues pour les sels incrganiques suggèrent l'existence d'ions. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, {, rue Cassure. 19 0° ANNÉE N° 20 30 OC'OBRE 1909 Revue générale M lences pures et appliquées DirEcrEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, Ja Norvège et ln Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Anton Dohrn. — Anton Dohrn, décédé à Munich le 26 septembre 1909, à l’âge de soixante-huit ans, s'était fait une place considérable parmi les biologistes de son temps par des travaux personnels et surtout par la fondation de la Station Zoologique de Naples. Né à Stettin et fils d’un entomologiste connu, ilavait eu, dès l'enfance, le goût des Sciences naturelles. Il appartenait à la génération qui a débuté avec l’avène- ment du darwinisme, et, comme il eut, à Iéna, Haeckel parmi ses maîtres, il fut immédiatement au nombre de ceux qui cherchèrent à étayer la doctrine transfor- miste sur l'embryogénie des animaux marins. Frappé ainsi des difficultés pratiques que rencon- traient les zoologistes, obligés de se constituer de toutes pièces, en chaque occasion, un laboratoire for- cément rudimentaire, il rêva de réaliser pour tous, au bord de la mer, un établissement où ils trouveraient, avec les matériaux d'étude, toutes les ressources de l'outillage, de la technique, de la bibliographie, etc., comme dans les centres universitaires les mieux pour- vus. Après avoir hésité entre Messine et Naples, il choisit la dernière ville qui, à la richesse faunique de son golfe, joignait la précieuse attraction qu'elle exerce sur toutes les imaginations. C'était à la veille de la guerre de 1870; le projet ne put aboutir qu'après la tourmente. Dohrn avait gagné à ce retard le prestige des victoires allemandes. 1l eut cependant à triompher de difficultés considérables à Naples et dans son pays même. Mais il s'était lancé à corps perdu dans son entreprise, que ses amis consi- déraient comme une folie; il y avait engagé sa fortune personnelle, résolu, en cas d'échec, à aller se refaire une existence dans quelque pays neuf. La réussite fut rapide (Ja Station s'ouvrit en 1874) et brillante au delà de ce qu’on pouvait espérer. Et le mérite en revient aux qualités de Dohrn. Il joignait au goût de la science pure un sens pénétrant des difficultés pratiques. Au service de l’un et de l’autre, il mettait l'activité et la volonté autoritaire et méthodique de sa race. .La Station Zoologique de Naples, merveilleusement située, au bord de Ja mer, sur la Villa Nazionale, fut pourvue d'emblée de ressources considérables, grâce REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, auxquelles Dohrn put offrir aux zoologistes des faci- lités exceptionnelles. Au rez-de-chaussée, un aquarium payant attirait la foule des touristes qui traversent Naples; au-dessus étaient les laboratoires proprement dits, qui eurent, dès le début, une clientèle internatio- nale. Dohrn, en effet, avait proposé aux divers Gouverne- ments (ou à des universités) de louer, pour leurs nationaux, des places de travail (moyennant 2,500 fr. par place et par an). L'Allemagne a naturellement été toujours la princi- pale commanditaire dans cette combinaison; mais presque tous les pays y ont participé. La France, tou- tefois, n’y à jamais eu de place régulière et c'est seule- ment dans ces dernières années et d'une facon occa- sionnelle que des zoologistes de notre pays ont travaillé à la Station de Naples. Cette organisation, si heureusement conçue, n’a pas seulement assuré à l'œuvre de Dohrn la prospérité matérielle; elle marque une date, en ce que la Station de Naples a été le premier établissement tirant sa vita- lité même du caractère international de la science. Nul autre laboratoire n'a été, au même degré, le rendez- vous permanent de savants de tous pays et de toutes écoles, venant travailler indépendamment, mais à côté les uns des autres; comme on l’a dit, elle a été une sorte de congrès permanent, à qui l’on ne peut refuser d'avoir exercé une influence silencieuse, mais réelle, sur l'évolution de la Zoologie depuis trente ans. Il serait injuste de ne pas associer à ce succès les collaborateurs que Dohrn a su se choisir et dont plu- sieurs, ouvriers des premières heures, sont encore à leur poste. Je me bornerai ici à citer M. S. Lo Bianco, que tous les zoologistes connaissent et qui a fait un art de la conservation des organismes marins. Grâce à lui, la physionomie des vitrines des musées consacrées à la faune marine a été transformée. La Station Zoologique de Naples était la vie même de Dohrn. Il y rapportait tout. Au fur et à mesure que sa prospérité augmentait, il élargissait son œuvre; il y a quatre ans, il doublait les bâtiments (qui ont mainte- nant 100 mètres de façade), en installant des labora- toires, magnifiquement outillés, pour l’expérimentation physiologique sur les animaux marins. 530 Si l’on considère le progrès général de la science, les facilités créées par la fondation et la vitalité d'une pareille institution valent une œuvre personnelle con- sidérable. à Dohrn avait su, cependant, garder du temps pour ses propres recherches. Il laisse, en outre de diverses con- tributions à des questions de Zoologie marine, une série de Mémoires, échelonnés sur un espace de trente ans, et consacrés à l'étude embryologique de la région céphalique des Vertébrés. Il a cherché à en reconsti- tuer la métamérie originelle, et son nom est un des principaux dans la phase moderne de ce vaste et si dif- ficile problème, posé, il y a un siècle, par Gæthe, sous le nom de théorie vertébrale du crâne. L'homme était ce que l’œuvre fait presséntir. Ce qui frappait surtout en lui, c'était la volonté tenace, par- fois rude, constamment tendue vers le même objet; mais il y joignait une sollicitude très attentive pour ceux qui étaient ses hôtes à la Station. Il possédait une vaste culture, et en particulier un goût très vit pour la musique. Polyglotte et entouré d’une élite cosmopolite sans cesse renouvelée, fixé depuis près de quarante ans dans le sud de l'Italie, il était mieux placé que quiconque pour apprécier les qualités des divers peuples; mais il était resté (et il n’y a qu'à l'en louer) très attaché à son pays, qui d’ailleurs l'avait puissam- ment aidé, et, malgré sa fréquentation internationale, la Station Zoologique de Naples, propriété privée de Dohrn, est restée, sous sa direction, une institution alle- mande. Les circoustances ont fait ainsi que la France s’est tenue à l'écart. Cette abstention, naturelle au début, a certainement trop duré. Il y eût eu, pour nos zoolo- gistes, un profit certain à se mêler à un milieu aussi varié. Il à été fait beaucoup pour la Zoologie marine sur nos belles côtes de France. Lacaze-Duthiers, Giard et d’autres s'y sont dépensés avec talent, ténacité et désin- téressement pour la science. Loin de moi la pensée de rabaisser leur œuvre, con- temporaine de celle de Dohrn; loin de moi aussi la pensée de détourner de nos laboratoires des res- sources que la dispersion de nos efforts rend si maigres. Mais il y a toujours avantage à fréquenter où l’on peut apprendre, et ce n’est pas diminuer les nôtres que de savoir reconnaître les mérites de l'étranger. C'est pour- quoi nous devons saluer en Dohrn, au moment où il disparaît, un homme qui, par son effort méthodique et ses rares qualités d'organisateur, a bien mérité de la science universelle. Maurice Caullery, Professeur à la Sorbonne. $ 2. — Astronomie Le retour de la comète de Halley. — On se souvient que, dans le numéro du 15 juin, la Revue a annoncé que la célèbre comète de Halley serait probablement découverte par la photographie dans le courant du mois de septembre. Cette prévision a été pleinement confirmée. Le retour de cette fameuse voyageuse sidérale a, en effet, été observé par l’habile astronome Max Wolf, de l'Observatoire de Heidelberg, sur un cliché pris le 12 septembre dernier, à 2 heures du matin, avec une heure d'exposition. Depuis plusieurs semaines, le savant observateur photographiait, toutes les nuits où l'atmosphère le permettait, la région du ciel, comprise dans la constel- lation d'Orion, vers laquelle on espérait voir repa- raître la comète. Déjà, le 28 août, il avait constaté, sur une photographie prise dans la nuit, la présence d'une légère nébulosité qui pouvait être la visiteuse attendue, et il avait signalé cette observation au bureau de Kiel. Il poursuivit son investigation les nuits suivantes, et les clichés obtenus dans la matinée du 12 septembre ne lui laissèrent plus aucun doute sur l'identité de l'appa- rition. C'était bien la comète de Halley, revenant vers le Soleil, après s'en être éloignée à une distance d’envi- ron Cin({ milliards de kilomètres, et après avoir accom- pli une révolution de 74 années dans l'espace interpla- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nétaire, autour du foyer solaire. Elle est apparue au nord-est de la constellation d'Orion, non loin de la position indiquée par la carte du Bulletin de la Société Astronomique de France. Elle se trouvait alors par AR — 94033; + 1701: à une distance d'environ 522 millions de kilomètres de la Terre. Extrèmement faible, totalement invisible, même dans les plus puissants télescopes, son éclat ne surpasse guère celui d’un astre de 17° grandeur. L'instrument qui a servi à la révéler est un téle- scope Foucault, de 2,80 de longueur focale, dont le miroir, construit par Zeiss, mesure 0%,72 de dia- mètre. Nous aurons l’occasion de reparler de cette intéres- sante comète, qui a joué un rôle siimportant dans l'his- toire comélaire, et qui, pour la vingt-cinquième fois depuis l'an 12avant notre ère, revient en vue de la Terre. Son passage au périhélie est prévu pour le 13 avril, d'après les dernières éphémérides de Crommelin et Cowell. s Nous nous faisons un devoir de féliciter ici le savant professeur Max Wolf, auquel la science astronomique est déjà redevable d'importantes découvertes, notamment sur les comètes et les nébuleuses, et qui a contribué pour une si large part au perfectionnement et à l’orga- nisation de l'Observatoire de Heidelberg; les principaux instruments en sont dus à la générosité de chaleureux amis de l’Astronomie, parmi lesquels nous devons citer deux femmes dévouées à la Science, Miss Bruce, des Etats-Unis, et Mme Weiss, de Heidelberg. Cet établis- sement est, d'ailleurs, l’un des mieux installés de l'Europe. $ 3. — Électricité industrielle Expériences relatives à un nouveau géné- rateur d'oscillations à haute fréquence. — On sait que les moyens employés par M. Poulsen pour engendrer des vibrations non amorties se sont mon- trés incapables d'assurer un fonctionnement écono- mique. D'autre part, en raison des fluctuations d'am- plitude et de fréquence, la grande précision de syntonisation que prévoyait la théorie n’a pu être réalisée dans la pratique. En outre, les expériences de M. Wien au sujet de l'excitation dite « en choc » d'un circuit accouplé ont donné naissance à un formi- dable rival de la méthode des arcs voltaiques. Le principe du transmetteur Wien est fondé sur le concours d'un éclateur primaire à grand amortisse- ment avec un circuit secondaire, synchrone et faible- ment amorti. Il élimine les fluctuations d'énergie vi- bratoire qui se produisent dans les conditions normales entre les circuits accouplés. Grâce à la réaction du circuit secondaire, la vibration primaire ne tarde pas, en effet, à s'éteindre, si bien qu’au moment où le circuit secondaire s'apprête à rendre au primaire l'énergie qu'il lui a empruntée, ce dernier se trouve déjà ouvert, dégagé de l’accouplage. Aussi le secon- daire est-il libre de vibrer sans influence étrangère, avec sa période et son amortissement caractéristiques, et, comme ce dernier facteur peut être réduit beau- coup, ce procédé permet d’engendrer des vibrations faiblement amorties. D'autre part, les récentes recherches de M. Steidel{ sur le contact imparfait entre un disque tournant mouillé d'huile et un ressort appliqué contre lui, ont engagé M. W. Peukert, professeur à l'Ecole Polytech- nique de Brunswick, à utiliser une disposition ana- logue pour la production de vibrations électriques, en lui ajoutant en parallèle un système composé d’une self-induction et d’une capacité. Pour assurer la con- stance d'énergie nécessaire pour les emplois pratiques, l'expérimentateur a tâché, dans des appareils de plus ‘ Elektrot. Zeitschr., p. 679, 1905. en CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 831 en plus perfectionnés, d'accroitre la surface de l’élec- trode opposée au disque mouillé d'huile. L'appareil définitif se compose essentiellement de deux disques de fer plans et parallèles, susceptibles, lun, de tourner sur l’axe commun, l’autre, de s'y déplacer en direction longitudinale. Le disque tournant, dont le contact avec la base est assuré par un balai, repose dans des paliers cylindrique et conique, de façon à être garanti contre les déplacements axiaux ; ilest actionné par un électromoteur monté en bout d’axe. Un engre- nage à roues dentées permet d'en rapprocher le disque fixe, en lisant sa distance sur une graduation. Un canal qui aboutit dans une ouverture de ce disque amène l'huile dans l'intervalle des disques; distribuée uniformément à la surface des électrodes, grâce à la force capillaire, eette huile les mouille d’une couche capillaire sans remplir l'intervalle. Dans une thèse inaugurale‘ présentée pour l’obten- tion du grade de docteur-ingénieur, à l'Ecole Polytech- nique de Brunswick, M. Adolphe Wasmus, sur le conseil de M. Peukert, étudie l'ensemble des phéno- mènes que présente ce dispositif. En appliquant aux bornes de cet appareil (les dis- ques au repos étant ajustés à environ 0®»,10 de distance) la tension croissante d'une source de courant continu, l’on voit à environ 250 volts un transport d'électricité se produire sous la forme d'étincelles minuscules. Les grandes variations de résistance n’entrainent d’abord qu'une faible modification du courant, jusqu'à ce que, dans une région donnée, la tension tombe à une fraction de volt, en même temps que les étincelles nombreuses sont remplacées par une seule décharge se produisant sous la mie d'un arc voltaïque. En croissant ulté- rieurement l'intensité de courant ou en continuant, pendant un certain temps, l’action d'un courant donné, l'on voit cet arc disparaître, sans déterminer la cessa- tion du passage d'électricité. La conduction présente alors tous les caractères de la conduction métallique. Pendant la rotation d’un des disques, la courbe carac- téristique du circuit est bien plus élevée, et l'arc vol- taique, étiré par une lente rotation, se met, à son tour, à tourner avec un faible retard sur la rotation du disque. En accroissant la vitesse de rotation, on voit l’are voltaique se décomposer entièrement en un cou- rant d'étincelles aux orbites disposées suivant un cer- cle. C'est dire que la rotation, avec une parfaite régu- larité, fait fonction d'interrupteur. Les courbes caractéristiques de ces étincelles-arcs font voir une allure parfaitement identique à celle -de l'arc voltaïque. Aussi ne doit-il pas exister de difté- rence physique entre les deux phénomènes. En réglant le nombre de tours, l’on convertit à volonté l'arc voltaiï- que en étincelles électriques. La tension aux électrodes se montre dépendante aussi de la distance explosive. Le nombre de tours de l’électrode tournante n’exerce pas d'influence sensible sur la tension aux bornes. Cette similitude frappante avec les arcs voltaiques ordinaires se maintient lorsque l’on insère, suivant la disposition de M. Steidel, un circuit vibratoire en parallèle avec l'éclateur. Un courant continu supérieur à 5 ampères — c'est-à-dire d’une énergie très faible — est toutefois indispensable pour produire avec cet appareil des vibrations non amorties; en dessous de cette limite, l’éclateur se comporte comme les généra- teurs de vibrations usuels. Même dans le cas de l'accouplage le plusétroit entre les circuits primaire et secondaire, les ondes d'accou- plage cessent de se produire, c’est-à-dire qu'il n'existe plus de réaction sensible; l'énergie communiquée au circuit secondaire s'accroit continuellement avec le degré d’accouplage. Les propriétés grâce auxquelles les vibrations engen- drées par cet appareil deviennent si éminemment appropriées pour les besoins de la télégraphie sans fil ! Ueber Versuche am Peukertschen Hochfrequenzgene- rator. Hambourg, 1909. et des mesures électriques ne se présentent pas d’em- blée dans le circuit vibratoire disposé en parallèle avec l’étincelle; ce n’est qu'en induisant une vibration dans le circuit secondaire à faible amortissement qu'on obtient une vibration fournissant une résonance extrêmement nette dont la période ne dépend que des constantes de ce circuit. L'énergie oscillante dans le circuit secondaire est parfaitement constante. Le ren- dement économique du générateur est déterminé par l'énergie qu'il permet de soustraire au circuit secon- daire. Cette énergie augmente à mesure qu'on réduit la résistance additionnelle, jusqu'à un maximum de l'énergie de courant continu, après quoi elle se met à décroître. Elle augmente également avec la tension de charge jusqu’à environ 815 volts. A self-induction et tension de charge constantes, le rendement économi- que s'accroît avec la capacité Jusqu'à un maximum, el il en est de même, à capacité et tension de charge constantes, pour les accroissements de la self-induction. Grâce à sa sécurité de service et au minimum de surveillance qu'il nécessite, ce générateur d'ondes à haute fréquence trouvera de nombreuses applications, même en dehors de la télégraphie sans fil. Les écoles et les institutions de ressources limitées l’'emploieront au lieu des bobines d'induction relativement chères; dans les laboratoires, il fournira un moyen fort com- mode et toujours prêt à servir pour exécuter les ex- périences de haute fréquence, et, dans la thérapeutique par vibrations à haute fréquence qui est en voie de formation, il sera particulièrement le bienvenu. NS 4. — Chimie physique Curieuse propriété des solutions ceellulo- siques. — Depuis le développement considérable de la fabrication des soies artilicielles, l'on emploie in- dustriellement diverses solutions de cellulose : collodions à base de nitro et d’acéto-celluloses, solu- tions cupro-ammoniacales et xantho-cellulosiques. Aussi a-t-il été fait, sur la préparation et la précipi- tation de ces solutions, un grand nombre de travaux intéressants, qui ont donné lieu à la prise de nom- breux brevets. On peut constater à cette occasion, une fois de plus, que l’industrie a rendu à la science pure l’aide féconde qu'elle en avait recue. Un des techniciens les plus autorisés en matière de technologie chimique des textiles, M. Francis Beltzer, a fait récemment, sur la précipitation des celluloses, les plus intéressantes remarques, de nature, non seulement à donner nais- sance à de nouvelles applications industrielles, mais peut-être à changer les opinions admises sur la nature des phénomènes de la dissolution. Des solutions aqueuses de xanthate de cellulose (viscose) furent abandonnées à l'air en couche mince; après plusieurs jours, l’anhydride carbonique de l'air, en neutralisant la soude caustique de la solution, pro- voqua la précipitation de la cellulose régénérée. Si l’on opère avec des fibres de coton, au fur et à mesure de l'exposition à l'air, « on peut constater la for- mation de filaments qui envahissent de plus en plus le liquide, et finalement on obtient une sorte de tissu formé de l’enchevêtrement des fibres cellulosiques pré- cipitées. Ge tissu, très léger, lavé à l'acide et rincé, présente l’aspect d'une sorte de gaze ou d’une toile d'araignée très irrégulière ». Mais, si l'on substitue aux fibres de coton de la pâte de bois, si bien purifiée soit- elle, on n'obtient, en opérant dans des conditions iden- tiques, qu'une pellicule amorphe où il est impossible de discerner le moindre filament long. Comme les compositions chimiques des celluloses mises en œuvre n'étaient pas absolument semblables (on sait que le bois contient des ligno-celluloses com- plexes), on ne peut conclure, comme semble le faire M. Beltzer, que la différence de précipitation est due à une conservation de la structure des fibres dissoutes. De nouveaux essais permettront sans doute d’élucider cette question. Mais on voit déjà tout l'intérêt pratique 832 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE que pourrait avoir l'application industrielle des résul- | que les bactéries dénitrifiantes peuvent se diviser en tats observés. Ne serait-il pas a priori possible de | deux grands groupes : substituer aux filières microscopiques des usines de soies artificielles des appareils à rendement infiniment plus élevé, où la formation des fibres aurait lieu en masse? Mieux encore, ne pourrait-on suppprimer à la fois filature et tissage et produire directement avec les solutions cellulosiques des étoffes de soie artificielles à fibres naturellement enchevêtrées ? Pour osée que paraisse l'hypothèse, peut-être la réa- lisation n’en est-elle pas si lointaine. Le célèbre Wells a montré que la prévision raisonnée des choses à venir est une science tout aussi exacte — ou pareillement inexacte — que l'histoire des temps passés. Et il s’est trouvé un savant prophète qui, en 1734, après avoir exposé tout au long le principe de la fabrication des soies artificielles, réalisée seulement un siècle et demi plus tard, décrivait de la facon la plus étrangement exacte un procédé de préparation d'’étoffes artificielles analogues à celles que vient d'obtenir M. Beltzer. « Une idée qui paroïitra peut-être singulière, écrivait l'illustre Réaumur dans ses Mémoires pour servir à l'histoire des insectes, et qui seroit peut-être praticable, ce seroit de faire, avec nos vernis, des étoffes qui ne fussent nullement tissuës... qui ne fussent point com- posées de fils régulièrement entrelacés les uns aux autres, Imaginons une table bien unie, une glace qui estenduite de vernis soyeux; imaginons que nous avons en grand sur cette glace ce que nous avons en petit dans les coques de soye... Ce seroit une pièce d’étoffe d'une espèce bien particulière : elle seroit de la même matière que nos tissus soyeux et ne seroit point tissuë : elle auroit des qualités qu'ils ne sçauroient avoir, seroit impénétrable à l'eau et à toute humidité, seroit légère et forte, auroit un très grand éclat. » Sans doute, les embryons de tissus obtenus par M. Beltzer n’ont actuellement aucun intérêt industriel; mais, si l’on songe que les premières soies artificielles exposées en 1889 par M. de Chardonnet étaient irrégu- lières, fragiles, d’un prix de revient élevé, et si on leur compare les soies fabriquées maintenant, on jugera que l’idée de Réaumur est peut-être très proche de la réalisation pratique. H. Rousset. Comité international des Tables annuelles physico-chimiques.— Ce Comité, dont nous avons annoncé la création (n° du 30 juillet 1909, p. 615) par le dernier Congrès de Chimie appliquée, s’est réuni à Paris les 41 et 12 octobre pour étudier d’une manière systématique le projet d'organisation qui avait été pré- paré par M. C. Marie, secrétaire général. A ces réunions, qui ont eu lieu à la Sorbonne, dans le Jaboratoire de M. G. Urbain, membre du Comité, assistaient: MM. Abegg, professeur à l'Université de Breslau; Cohen, professeur à l'Université d'Utrecht; Dutoit, professeur à l’Université de Lausanne; Findlay, professeur à l'Université de Birmingham; Mourelo, membre de l’Académie des Sciences de Madrid, et C. Marie, chef des travaux de Chimie physique à la Faculté des Sciences, secrétaire général du Comité. La Société Chimique, la Société de Chimie physique et la Société de Physique se sont réunies à cette occa- sion pour offrir un banquet aux membres étrangers du Comité; ce banquet à eu lieu le lundi 14, et, par la qualité et par le nombre des adhérents, les hôtes des trois Sociétés françaises ont pu se rendre compte de l'intérêt que soulevait dans nos milieux scientifiques l'idée de ces tables annuelles. $ 5. — Chimie biologique Le mécanisme de la dénitrification chez les Bactéries dénitrifiantes indirectes. — MM. L. Grimbert et Bagros ont communiqué sur ce sujet, au dernier Congrès international de Chimie appliquée de Londres, une série de très intéressantes recherches. Déjà, en 1898, M. Grimbert avait démontré 1° Les bactéries dénitrifiantes directes, qui attaquent directement les nitrates en dégageant seulement de l'azote. Le type de ces bactéries est le bacille pyocya- nique ; 2° Les bactéries dénitrifiantes indirectes, qui n'at- taquent les nitrates que par l'intermédiaire de sub- stances amidées ou aminées. Dans ce cas, il y a d'abord réduction du nitrate en nitrite et réaction de ce der- nier sur les substances amidées existant dans le milieu où se développent les bactéries. Ces bactéries ont pour type le coli-bacille ou le bacille d'Eberth. Cette notion résulte de ce fait que, si l'on cultive le coli-bacille ou le bacille d'Eberth dans une solution de peptone additionnée de nitrate, aucun dégagement d'azote n'a lieu; il se produit seulement une réduction partielle du nitrate en nitrite. Mais, si l’on remplace la solution de peptone par du bouillon peptoné, ou si on lui ajoute de l'extrait de viande, la destruction du nitrate se produit avec dégagement d'azote et de CO?, et l’on peut constater que la quantité d'azote recueillie est toujours au moins le double de celle qui correspond au nitrate décomposé. C’est là un procédé très simple pour distinguer un bacille dénitriliant direct d’un dénitrifiant indirect. Les expériences qui suivent ont pour but de com- pléter ces premières recherches en démontrant que le mécanisme de la dénitrification, chez les bactéries déni- trifiantes indirectes, peut se ramener à l'équation générale suivante : CO(AzH?)? + 2Az0*H— 242? + 2C0°+3H°0, dans laquelle l'urée peut être remplacée par d’autres corps amidés. Les auteurs se sont adressés au coli-bacille comme type de bacille dénitrifiant indirect, et ils se sont servis, comme milieu de culture, d’une solution de peptone Collas à 1 °/, additionnée de 1 °/, de nitrate de potasse pur. Dans une telle solution, le coli-bacille ne donne aucun dégagement d'azote, mais provoque seulement la réduction partielle du nitrate en nitrite. 4. Influence de l'aliment carbone. — Si, à la solution de peptone nitratée dont il vient d'être question, on ajoute divers aliments carbonés tels que : glucose, sac- charose, glycérine, acide lactique, acide citrique, acide tartrique (ces derniers neutralisés par de la soude), on retrouve, après trente jours de culture, la même quan- tité de nitrate que celle qui existait dans la solution primitive, et cela, malgré la fermentation active qui se manifeste dans certains milieux. Par conséquent, du moins en ce qui concerne le coli-bacille, la présence d’hydrates de carbone ou de sels à acide organique ne suffit pas à provoquer la décomposition des nitrates, quelle que soit la source d'énergie qu'ils représentent. Contrairement aussi à l'opinion de Wolf, la dénitrification n’est pas sous la dépendance de la fermentation des hydrates de carbone. 2, Influence des substances amidées ou aminées. — La solution de peptone nitratée a été additionnée de glycocolle, d’urée, d'asparagine, de leucine, de tyrosine et ensemencée avec le même coli-bacille : les milieux ont donné une culture florissante, mais sans dégage- ment gazeux. Au bout de trente jours, il n'y avait pas de nitrate détruit. Par conséquent, la présence seule de matériaux amidés ou aminés ne suffit pas pour provoquer la déni- trification. 3. Influence combinée de l'aliment carboné et des substances amidées ou aminées. — Si on ajoute à la solution de peptone nitratée à la fois un hydrate de carbone et un acide aminé, on obtient immédiatement une dénitrification active, à la condition que l'hydrate de carbone soit attaqué par le coli-bacille. En résumé, pour qu'il y ait destruction du nitrate par les bactéries dénitrifiantes indirectes, il faut : 1° qu'il y ait d'abord réduction du nitrate en nitrite; 2° que le: CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 833 milieu contienne à la fois des substances amidées et des aliments carbonés capables d'être attaqués par le microbe en donnant des acides. Ces conditions une fois réalistes, le mécanisme de la dénitrification devient des plus simples : La bactérie attaquant l'aliment carboné donne nais- sance à un acide qui agit sur le nitrite et provoque ainsi la réaction immédiate de l'acide nitreux sur le corps aminé, d'où mise en liberté d'azote et de CO*, pendant que l'acide se combine à l’alcali du nitrite, d'où neutralité de la solution. Dans les expériences, le saccharose et le valérianate de soude n'ont donné lieu à aucune destruction de nitrate en présence de glycocolle parce que ces deux substances n'étaient pas attaquées par le coli-bacille. D'ailleurs, on peut donner la démonstration de ce fait en faisant agir sur la solution de peptone nitratée, additionnée de glycocolle et de lactose, d'une part, le coli-bacille qui attaque le lactose, et de l'autre, le bacille d'Eberth qui ne l'attaque pas. En remplaçant ensuite le lactose par le glucose qui est attaqué par les deux bactéries, on aura la preuve du rôle important que joue l'hydrate de carbone dans ces réactions. Ces faitsexpliquent suffisammentlesrésultats obtenus par M. Grimbert en 1898 en substituant le bouillon de viande à la peptone, et peuvent s'appliquer à un grand nombre de bactéries dénitriliantes 2ndirectes. $ 6. — Physiologie Appareil thyroïdien et sels de ealeium. — L'attention des physiologistes vient d’être rappelée sur les accidents consécutifs à l’ablation de l’appareil thy- roidien (thyroides et parathyroïdes) par une très inté- ressante Note présentée par M. Albert Frouin à l’Acadé- mie des Sciences et par un article du même auteur paru dans la Presse médicale“. On sait que l’ablation de l'appareil thyroïdien déter- mine, lorsqu'elle est totale, des accidents graves, con- duisant plus ou moins rapidement l'animal à la mort (les faits sont surtout nettement établis pour le chien, le chat, le lapin, etc.). Ces accidents, connus sous le nom de tétanie, sont essentiellement caractérisés par des tremblements fibrillaires, des raideurs musculaires et des crises convulsives. Les physiologistes ont démon- tré — et la démonstration est due particulièrement à M. Moussu — que la tétanie est la conséquence de la parathyroïdectomie et non de la thyroïdectomie pro- prement dite. MM. Parhon et Urechie ont, les premiers, annoncé, plutôt que démontré, l’action sédative des sels de chaux sur la tétanie des animaux parathyroïdectomi- sés*. Ces auteurs injectent, dans la cavité péritonéale d’ani- maux ayant subi la thyro-parathyroïdectomie, de 0 gr. 50 à 1 gr. de chlorure de calcium dissous dans 100 centi- mètres cubes d’eau, à intervalles réguliers, de 24 heures en général. A la suite de ce traitement, ils auraient observé une atténuation, mais non une suppression des symptômes de tétanie, et quelquefois, mais non pas toujours, une prolongation (très légère de la survie. Les protocoles d'expériences de ces auteurs ne con- tiennent pas de tels résultats qu'on puisse considérer comme établis des rapports incontestables entre l’appa- reil thyroïdien et les sels de calcium. Ce sont MM. Mac- * A. Frounx : Sur la possibilité de conserver les animaux après ablation complète de l'appareil thyroïdien, en ajou- tant des sels de calcium ou de magnésium à leur nourri- ture. C. R. Acad. des Serences, CLVIII, 7 juin 1909, p. 1622. — Presse médicale, # août 1909, p. 553-555. ? Recherches sur l'influence exercée par les sels de cal- ‘cium et de sodium sur la tétanie expérimentale. 7° Sess. du Congr. des méd. aliénistes, août 1907. — Note sur l'in- fluence exercée par le chlorure de calcium et l'iodure de Sodium sur les phénomènes convulsifs consécutifs à la thyro-parathyroïdectomie totale, ainsi que sur la survie des animaux ayant subi cette opération seule avec les injections «de ces substances. C. R. Soc. Biologie, 19 mars 1909, p.622, Callum et CG. Vœgtlin qui ont, les premiers, montré de facon nette la possibilité de supprimer la tétanie chez les chiens opérés, en administrant à ces animaux des sels de chaux par injection suivant différentes voies, ou simplement par ingestion“. D'après ces expérimentateurs, l'injection intravei- neuse de 5 à 10 centimètres cubes de lactate de chaux à 5 °/, suffit pour arrêter rapidement la tétanie ; de même, l'ingestion de 5 grammes de lactate de chaux a pu sup- primer ces mêmes accidents chez les animaux thyro- parathyroiïdectomisés. — Dans nombre de cas, ils ont fait les injections après l'apparition des accidents, et ils ont ensuite, au bout de quelques jours, greffé de nouvelles parathyroïdes à leurs animaux : les chiens ainsi traités et opérés se sont rapidement rétablis. M. Albert Frouin, enfin, établit très nettement : 1° que l'ingestion des sels de chaux supprime la tétanie due à la parathyroïdectomie ; 2° que les sels de chaux et le chlorure de magnésium à la dose de 5 à 10 grammes par jour empêchent l'apparition des phénomènes de tétanie. Voici le résumé de deux expériences prises comme exemples : 4° un chien de 2 ans 1/2, pesant 12 kilo- grammes, subit le 16 septembre 1908 l’ablation de l'appareil thyroïdien; 36 heures après l'opération, il recoit, au moyen de la sonde œsophagienne, 10 grammes de chlorure de calcium dissous dans 100 centimètres cubes d'eau, puis, dans la suite, 5 à 10 grammes du même sel par 24 heures, ajoutés à sa nourriture. L'animal n'a jamais présenté. d'accident, et 5 mois après l'opération, soit le 27 février 1909, il avait aug- menté de 2.500 grammes. Deux chiens opérés à la mème date et de même facon étaient morts tétaniques, respectivement après » et 7 jours. 29 Une chienne de 15 mois, pesant 10 kilogrammes, est opérée le 3 octobre 1908; 2 jours après l'opération, elle à des crises tétaniques. On lui fait absorber 10 grammes de chlorure de calcium : les crises ont disparu le lendemain. Le 7 octobre, la chienne a une nouvelle cerise durant de 8 heures du matin à 5 heures du soir : on lui fait ingérer, avec la sonde -œsopha- gienne, {0 grammes de chlorure de calcium le matin à 9 heures et 10 grammes le soir à 6 heures. Le 9 octobre, elle à encore une forte crise tétanique dans l’après- midi : on lui fait ingérer 15 grammes de chlorure de calcium en deux fois, à 2 heures et à 7 heures. A partir de ce moment, elle recoit de 5 à 10 grammes de chlorure de calcium par 24 heures. Le 3 novembre, donc { mois après l'opération, elle est en bonne santé, pesant 11.500 grammes. Deux chiens opérés en même temps qu'elle et de même facon sont morts, respectivement 4 et 6 jours après l'opération. — Le 12 novembre, on supprime le chlorure de calcium; l'animal meurt en 3 jours, après des crises caractéristiques le 3° jour. Au chlorure de calcium, on peut substituer le chlo- rure de magnésium; les résultats sont équivalents; le chlorure de strontium, par contre, est inefficace.-Dans la série des sels de chaux, on a obtenu des résultats positifs avec le lactate de chaux, mais ces résultats sont moins nets et moins constants qu'avec le chlorure. M. Albert Frouin signale encore un fait intéressant : après avoir soumis les chiens thyro-parathyroïdectomi- sés au traitement calcique pendant3à#mois, il supprime le sel de chaux et leur rend l'alimentation normale : ces animaux ne présentent pas d'accidents tétaniques ou autres (l'observation a été poursuivie pendant # mois), comme si, pendant le traitement, l'organisme avait créé une suppléance de la fonction thyroïdienne. Tels sont les faits importants que nous font con- naître ces travaux. Les théories proposées pour les expliquer (car les expérimentateurs n’ont pu se défendre d'émettre prématurément des théories) ne doivent pas, pour le moment, retenir notre attention. Quand les faits observés seront plus nombreux, plus variés, l’heure sera venue de les grouper en théorie. ! The Journal of experimental Medecine, t, XI, 1909, 834 LÉON TEISSERENC DE BORT — L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE PAR LES SONDAGES AÉRIENS Les sondages aériens faits à Trappes et dans les régions tempérées en général, depuis une dizaine d'années, nous ont permis d'étudier à nos lati- tudes l'atmosphère dans sa profondeur. Il devenait nécessaire d'étendre ces investigations à des pays de latitudes très différentes pour déterminer dans leur ensemble les phénomènes qui se produisent à diverses hauteurs. C’est ce qui a motivé notre Expé- dition franco-scandinave en Danemark de 1902- 1903, les trois campagnes scientifiques de l'Ofaria sur l'Atlantique moyen et intertropical, enfin les deux séries de lancers de ballons faites en Laponie dans les saisons froides de 1907 et de 1908, grâce à l'appui de mon ami M. le Professeur Hildebrands- son. Toutes ces déterminations ont été rappro- chées d'observations analogues recueillies par ballons-sondes à Trappes pendant les mêmes périodes. Elles conduisent à des conclusions que nous allons exposer. I. — HisToRIQUE. Disons d’abord quelques mots de l'exploration de l'atmosphère marine, qui commence à tenir une grande place dans les recherches météorologiques. M. Rotch, directeur de l'Observatoire de Blue- Hill, a démontré, il y a quelques années, la possibi- lité de faire de fructueux lancers de cerfs-volants en mer; peu de temps après, une première application de cette méthode fut faite en 1902 par notre Mission franco-scandinave de Hald, à l’aide de deux canon- nières que le Ministre de la Marine de Danemark voulut bien mettre à notre disposition. Sur treize ascensions, on put dépasser quatre fois l'altitude de 4.000 mètres et atteindre même 5.900 mètres, ce qui, à cette époque, était un chiffre tout à fait remarquable. Quelque temps après, M. Rotch proposa de faire une campagne méléorologique sur l'Atlantique. M. Hildebrandsson donna à cette proposition l’appui de son autorité el traca les grandes lignes d’un programme qui a élé exécuté presque complè- tement depuis, grâce à une entente commune entre M. Rotch et moi. La réalisation de notre projet fut hâtée par l'imprévu des résultats obtenus, au cours d’une croisière de la Princesse-Alice, par M. Herge- sell, résultats que ce dernier a présentés en septem- bre 190% à la Conférence d’Aérostation scientifique tenue à Saint-Pétersbourg. Dans sa communication, M. Hergesell faisait ressortir qu'il avait trouvé au-dessus de l’alizé une couche de vent de N. W. très persistante, ce qui tendait à mettre en doute l'existence du contre- alizé à composante sud, admise jusqu'ici par tous les météorologistes. Il cherchait, d’ailleurs, à concilier l'existence de ces vents du N. W. avec la circulation en circuit admise jusqu'ici, circuit formé par les alizés se rendant aux régions équatoriales et les vents de retour ramenant l'air de l'équateur vers les lalitudes plus élevées. Bien que cette explication ne fût présentée qu'à ütre de première indication, comme elle recut dans la suite de nouveaux développements, il nous parut absolument nécessaire de procéder à des recher- ches méthodiques pour élucider cette question d’une importance capitale pour la théorie de la circula- tion générale. On peut ainsi déterminer ce qui doit être changé dans les idées admises jusqu'à ce jour. On verra par ce qui suit que quatre cam- pagnes consécutives, portant sur trois années dif- férentes et sur des moments divers d’une même année, ont montré que la théorie de la circulation intertropicale est exacte dans son ensemble et que les vents de N. W. observés pour la première fois par M. Hergesell, et retrouvés très souvent depuis, ne remplacent pas le contre-alizé. Pendant ces campagnes, nous avons employé, pour sonder l'atmosphère, les cerfs-volants et sur- tout les ballons-sondes, qui permettent de s'élever à des hauteurs très considérables. Enfin, dans cer- lains cas, on a fait usage de petits ballons captifs en baudruche, à l’aide desquels nous avons pu élever les instruments à 3 ou 4.000 mètres dans les cas où le vent était trop faible pour porter des cerfs- volants. II. — TECHNIQUE DES SONDAGES AÉRIENS. Quand on lance des cerfs-volants du pont d’un navire à vapeur, On à ce grand avantage qu’en faisant machine avant ou machine arrière on peut accélérer ou diminuer le vent relatif qui agit sur les cerfs-volants. Il y à ainsi bien des périodes où la brise serait trop légère pour porter les cerfs-volants avec leurs lignes et l’enregistreur, et dans lesquelles. on peut procéder à des lancers très fructueux. Pour faciliter la manœuvre, et comme nos cerfs- volants sont retenus par des lignes de fil d'acier qui parfois atteignent plus de 10 kilomètres de lon- | gueur, le treuil sur lequel la ligne est enroulée LÉON TEISSERENC DE BORT — L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE 835 est commandé par un employé à bord d’un petit va- peur un treuil mû comme le guindeau, par un piston à va- peur; mais, sur l'Otarra, avons pu ins- taller un treuil mü électrique- ment, disposi- tif analogue à celui que nous avons organisé à Trappes il y a dix ans et qui a été adopté de- puis dans Ja plupart des grands obser- vatoires aéro- logiques. nous moteur. Fig. 1. Nous — Le treuil à cerfs-volants sur l'Otaria. avons | le rend libre tout à fait en faisant descendre le crochet. La figure 2 représente cette opération sur une des canon- nières danoises où elle a été mise en prali- que dans nos sondages de 1903. Les lancers de ballons-son- des se font en mer à peu pres dans les mêmes conditions que sur terre, mais on ne peut dis- poser de han- gars pour les abriter pendant le gonflement; La figure 1 représente le treuil de l'Ofaria; la | dans ces conditions, il est presque impossible d’em- dynamo génératrice était placée dans la salle des machines, et le courant allant à la réceptrice pas- sait par une résistance placée sous la main de la personne qui manœu- vrait le treuil, ce qui per- mettait de dérouler le fil à des vilesses comprises entre 40 centimètres et 3 mètres par seconde. Les lancers des cerfs- volants du pont d'un ba- teau demandent quelques précautionsspéciales pour éviter que l'appareil ne se brise, au moment du départ ou à sa ren- trée, les agrès. Nous nous som- mes très bien trouvés de suspendre le cerf-volant par sa partie supérieure à un crochet que l’on peut faire monter et descendre le long d'une drisse fixée à l'extrémité d'une ver- On enlève ainsi le contre les mâts et gue. cerf-volant à une assez grande distance du pont et, quand il est bien porté par le vent, on g. 2. au-dessus — Lancer d'un cerf-volant. ployer des ballons de pa- pier de grandes dimen- sions : on se sert de bal- lons de caoutchouc ana- logues à ceux qu'on vend pour les enfants, mais qui ont au départ un diamètre d'un mètre et demi à deux mètres. Ces ballons sont ordinairement réunis par deux; un des ballons porte l’enregistreur et un flotteur fixé à une corde à dix ou quinze mètres en dessous de l’enregistreur; l'autre ballon est relié au premier, et on le gonfle davantage, de facon qu'à une certaine hauteur il finisse par éclater, ce qui limite la durée de l’as- cension. À partir de ce moment, le second ballon redescend lentement jus- qu'au voisinage de la sur- face de la mer; dès que le flotteur repose sur l'eau, le mouvement de descente s'arrête, et l’enregistreur reste suspendu à l'abri des ,vagues. Le vent en- traîne alors tout le système jusqu’au moment où: 830 il a pu être repris à bord du bateau, qui, pen- dant toute l'ascension, n’a cessé de suivre le ballon de son mieux. C'est dire que ces opérations ne peuvent être Fig. 3. — Le gonflement des ballons-sondes. effectuées que lorsque le ciel est assez clair pour permettre de voir le ballon du pont du bateau. On procède à des mesures systématiques de la hauteur du ballon au-dessus de l'horizon de la mer et de l’azimut où il se trouve au même instant; on répète ces déterminations à des intervalles très rappro- chés, par exemple de minute en minute, et on dé- termine en même temps aussi exactement que possible la direction suivie par le navire et sa vitesse donnée par le loch. On peut ensuite, à l’aide de ces données, construire la route du ballon dans l'atmosphère et déterminer ainsi quels sont les mouvements des vents en vitesse et en direction à toutes les hauteurs atteintes par le ballon. Les figures 3, 4 et 5 représentent le gonflement des ballons et les différentes phases du lancer. Dans la première campagne de l'Ofaria, on lança 14 ballons, 30 dans la seconde et 41 dans la troisième. Les ascensions de cerfs-volants, surtout fréquentes dans la seconde campagne, furent au nombre de 65. LÉON TEISSERENC DE BORT — L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE —_—_—_— IIT. — RÉSULTATS PRINCIPAUX LES TROIS CAMPAGNES. CIRCULATION DE L'AIR. On peut résumer ainsi qu'il suit l'ensemble de la circulation sur la partie explorée (de 35° N. à 828. et des côtes d'Europe jusqu'à 47° de longitude W ). L'alizé régulier de N.à N.E., qui souffle au niveau de la mer, forme une couche dont l'épaisseur moyenne nest guère que d'un millier de mètres; puis vient une zone de vents ayant encore une composante nord, qui ordinairement soufflent du NW. Ces vents du NW. paraissent cesser à une dizaine de degrés du point de convergence de l'alizé qui, en été, se trouve vers 8° N., par consé- quent au sud des îles du Cap-Vert. En s’élevant plus haut, on trouve la zone des vents à composante sud qui forment le contre- alizé; ces derniers se rencontrent à une altitude moindre lorsqu'on se rapproche de l'équateur. C'est ainsi que, vers les iles du Cap-Vert, le contre- alizé se trouve aux environs de mille huit cents mè- — Rentrée du ballon et des instruments. Fig. 4. tres ; à la latitude des Canaries, il souffle au-dessus de trois mille mètres, ce qui concorde d'ailleurs avec les observations faites au Pic de Ténérifre. La région équatoriale ou, plus exactement, celle où a lieu le point de rencontre des alizés, et dont la latitude varie un peu dans le cours de l’année, LÉON TEISSERENC DE BORT — L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE est occupée par des vents à composante Est très dominante, jusqu'aux plus grandes hauteurs qu'on ait explorées. Dès le 5° sud, on retrouve, au-dessus des alizés proprement dits, des vents à compo- sante N., qui forment le contre-alizé : ces vents sont du NE. et quelquefois du NW. Ces change- ments de rhumbs peuvent s'expliquer parce que ces diverses couches superposées viennent de ré- gions différentes du minimum barométrique. L'équivalent des vents de NW. qu'on rencontre . dans l'hémisphère nord au-dessus de l'alizé de NE. nous est donné par les veines de vent de SW. qui se retrouvent aussi aux environs de l'ile de l'Ascen- sion {au-dessus des vents de SE. formant l’alizé de l'hémisphère sud. Ces vents sont d’ailleurs superposés à des veines de vents alizés ou de con- tre-alizés. Ces intrications de couches de vents différents rencontrentaus- si dans l'hémi- sphère N. dans les latitudes moyennes. Mais là elles sont plus rares. On en trouve desexem- ples dansles tra- jectoires des bal- lons détermi- nées par des vi- sées faites à Trappes depuis une dizaine d'années, lorsque ces lancers ont lieu dans les aires de forte pres- sion. Nous devons insister sur ces courants superposés de directions différentes et particulièrement sur les courants de Sud-Ouest ayant été rencontrés à grande hauteur par certains ballons un peu au nord de l'ile de l’Ascension, le 16 juin vers 11 kilomètres, et le 15 à 14 et 15 kilomètres, courants soufflant au- dessus du contre-alizé de Nord-Ouest et d’alizés de Sud-Est. Ces vents à composante Ouest, qui se sont présentés comme une couche intercalaire, sont très difficiles à expliquer, à cause même de leur vitesse de rotation supérieure à celle de la Terre. Dans les deux hémisphères, du reste, on trouve dans les hautes régions, près du point de rencontre des alizés, des couches de vents qui se rapprochent de l'équa- teur, alors que le contre-alizé régulier s'en éloigne. La haute atmosphère nous ménage ainsi bien des Se Fig. 5. — La pêche du ballon-sonde sur l'Otaria. 837 surprises, que des recherches prolongées peuvent seules élucider. Malgré ces quelques points obscurs, la circulation intertropicale est bien dans ses grands traits telle qu'on l'avait supposée jusqu'ici. L'air dans l'hémi- sphère Nord se rend vers l’équateur par la partie inférieure de l'atmosphère sous forme d’un vent de N.E. à E., et plus haut, dans la partie moyenne, sous forme de vents de N. W. Au-dessus se trouvent d'ordinaire des vents de retour ayant une compo- sante dirigée vers le pôle. Ces vents forment d'abord une nappe de S.E., puis du $., puis de S. W. en s'infléchissant l'influence de la terrestre. Ils se terminent enfin comme vents de W. à la latitude des Acores. Ce sont les contre- sous rotation alizés classi- ques. Naturelle- ment, il y a des irrégularités journalières, c'est-à-dire que les courants, au lieu d'être perposés, quelquefois jux- taposés. On ren- su- sont contre des situa- tions atmosphé- riques où l'alizé de :N. Ë. ou de N. W. s'étend jusqu'à 7 ou 8 kilomètres ou même plus, et dans lesquelles le contre-alizé est repoussé soit à droite, soit à gauche. Mais ce sont là des siluations transitoires, qui se limitent à une portion de l'aire de forte pression atlantique, comme on s'en apercoit lors- qu'on étend les observations sur plusieurs mois de trois années différentes, ainsi que nous l'avons fait, ce qui permet d'établir le régime normal. IV. — DISTRIBUTION DE LA TEMPÉRATURE DANS LA VERTICALE. En s'élevant au-dessus de la mer, la température décroit d'abord rapidement à peu près en suivant la détente adiabatique. Puis, au-dessus de 5 à 600 mètres, on rencontre une zone avec décroissance très faible qui s'étend, avec ou sans inversion, jusque vers 2.500 mètres ‘. Au voisinage du contre- 1 Ce fait a été signalé pour la première fois par M. Her- gesell en 1904. 838 alizé, la température recommence à décroître assez régulièrement ; la variation de température res- semble alors à ce qu'elleest dans nos régions, mais elle se maintient très forte jusqu'à 14 ou 45 kilo- mètres ; au-dessus, on rencontre la zone isotherme dont j'ai démontré l'existence il y a quelques années. Ces caractères ne sont pas particuliers à ces régions intertropicales, mais ils offrent la plus grande analogie avec ce qu'on observe dans nos régions quand il existe un maximum barométrique bien formé. Le fait que la température continue de décroître rapidement jusqu'à une grande hauteur à pour conséquence que l'atmosphère supérieure, dans les régions équatoriales, est sensiblement plus {roide que celle des régions tempérées et même des hautes latitudes. La température de 80° au-dessous de zéro n'est rencontrée que tout à fait exception- nellement dans la saison froide au-dessus des ré- gions tempérées et même du N. de l’Europe, alors qu'elle s'observe assez souvent au-dessus de la ré- gion intertropicale. Ce fait, que j'ai déjà signalé! à la Conférence d'Aérologie à Milan en 1907, est un des plus inattendus que nos explorations aient mis en lumière. Grâce aux déterminations faites en Laponie et à Trappes pendant deux hivers (1907 et 1908), nous avons pu montrer que, dans l’en- semble de l’année, la température de la haute atmosphère est moins froide en Laponie que dans les régions équatoriales, alors que l'excès de la température près du sol est de 25 à 40° en faveur des régions équatoriales. Nous considérons, quant à nous, que ces tempéra- tures très froides sont dues à ce fait que la circula- tion atmosphérique à composante verticale se pro- duit sur une beaucoup plus grande épaisseur dans les régions équatoriales que dans les régions tempé- rées ou sub-polaires. La marche des nuages élevés, tels que les cirrus [dont on a pu mesurer la hauteur par des triangulations photographiques], montre, d'ailleurs, l'augmentation d'épaisseur de la cireu- lation atmosphérique auprès de l'équateur. La dis- cussion de nos observations de la haute atmosphère faites à Trappes nous fait reconnaître que ces tem- pératures très froides de la haute atmosphère sont dues à la détente de l'air causée par les dépres- sions barométriques tlourbillonnaires et dispa- aissent d'ailleurs assez rapidementau-dessus de nos régions lorsque les phénomènes tourbillonnaires qui ont produit ce gigantesque effet de pompe se déplacent. On peut ainsi voir, en moins de deux jours, la température changer de 15 à 20° dans la haule atmosphère, alors qu'elle n’a varié que de 2 ou 3° près du sol dans un sens quelconque. ? Voir Comp. Rendus, 8 juillet 1907. LÉON TEISSERENC DE BORT — L'ÉTUDE DE LA MÉTÉOROLOGIE INTERTROPICALE Ces déterminations ont permis de préciser d’une manière satisfaisante les vraies caractéristiques de la circulation atmosphérique et dela distribution de la température entre les tropiques; mais elles ne peuvent encore nous renseigner sur un des pro- blèmes les plus importants de la Météorologie générale, qui est de connaître la répercussion des phénomènes intertropicaux sur la circulation géné- rale de l'atmosphère. On a cru pendant longtemps que les contre-alizés se répandaient en nappe de vent de SW. ou de NW. [suivant l'hémisphère] sur les deux hémisphères, d’où le rôle de la circulation équatoriale était considéré comme tout à fait pré- pondérant. Mais le Professeur Hildebrandsson a démontré, par la discussion des observations des nuages sur Loute la Terre, que les vents supérieurs prédominants à partir de 40° de latitude viennent de! W., c'est-à-dire qu'il semble qu'en moyenne il ne passe presque pas d'air de la région intertropi- cale dans les latitudes moyennes. Mais cet état est loin d'être permanent, et il y a des jours où des courants de SW. apportent aux hautes lati- tudes de l'air de la région des Acores qui, antérieu- rement, à passé au-dessus du tropique, et inverse- ment il y a pénétration par l'atmosphère moyenne et inférieure de vents à composante N. venant de nos contrées dans la région des alizés. Ces trans- ports d'air par échelonnements successils sont dus à ce que la rotation terrestre, se produisant sur des parallèles de plus en plus petits, dévie rapi- dement le vent vers la droite et l'empêche ainsi de se rendre directement du Sud au Nord ou in- versement sur de grandes étendues. Mais, quand l'air, par des mouvements tourbillonnaires ou des mélanges avec d'autres masses aériennes, arrive à diminuer sa vitesse relative par rapport à la sur- face de la Terre, il peut de nouveau, sous l’in- fluence des différences de pression, pénétrer dans des régions de latitudes différentes. Les conditions dans lesquelles l’air use ainsi sa vitesse relative sont mal connues et, malgré les beaux travaux théoriques d'Helmholtz, le méca- nisme réel qui produit cet effet est encore très obscur. Il y aurait un intérêt considérable pour la Météo- rologie à déterminer, par des flotteurs atmosphé- riques, la trajectoire des vents généraux, non plus seulement pendant une ou deux heures comme on le fait en visant des ballons, mais durant un long intervalle. Il y a à cela des difficultés techniques que tous les aéronautes connaissent bien ; mais, en constatant que certains ballons-sondes en papier ont pu franchir la distance de plus de mille kilo- mètres qui sépare Trappes de la Pologne russe, on peut espérer que, dans un avenir rapproché, il sera possible d'étudier les courants : généraux D' L. HUGOUNENQ #er D' A. MOREL — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE supérieurs par des flotteurs aériens. Il serait très important de voir, par exemple, si un ballon lancé du Pic de Ténériffe, au sein même du contre-alizé, tinit dans certaines circonstances par atteindre l'Europe, éloignée seulement de 1.100 kilomètres. Ce jour-là, il sera possible de vérifier directement ce que nos observations semblent démontrer : à savoir qu'une partie du contre-alizé est formée par de l'air provenant de l'hémisphère voisin. Ce sera là encore un point très utile à fixer, car les cartes de pression barométrique nous montrent qu'il y 839 a un échange d'air suivant les saisons entre l'hé- misphère Nord et l'hémisphère Sud, el nous con- naissons déjà dans les régions des moussons asia- tiques un des chemins que prend l'air des couches basses pour passer des latitudes australes dans les latitudes boréales. Mais, par contre, nous sommes fort peu renseignés sur les échanges qui peuvent avoir lieu d'un hémisphère à l’autre au sein de l'atmosphère élevée. Léon Teisserenc de Bort, Directeur de l'Observatoire de Météorologie dynamique de Trappes. L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE ET LA CONSTITUTION DES L'étude des matières protéiques est le fondement de la Biologie générale, ces substances, chez tous les êtres vivants, servant de substratum aux phé- nomènes chimiques. Nombreux sont les savants qui ont abordé cette étude; les résultats de leurs recherches forment déjà une œuvre considérable, qui a été présentée aux lecteurs de la Æevue génc- rale des Sciences par les articles si clairs et si bien documentés de Kossel', Hofmeister*, Maillard”, ainsi que par les remarquables revues générales de Lambling*. L'intérêt de ces résultats n’a échappé à personne, car, bien qu'incomplets encore, ils ont permis de mettre en évidence de nombreux constituants de la molécule protéique, parmi lesquels les acides mono- et diamidés sont les plus simples et les mieux étudiés. Ces acides ont, de toute évidence, un rôle des plus importants dans l'édifice moléculaire, où ils paraissent être liés entre eux sous la forme de com- plexes extrêmement variables, dont la diversité a pour conséquence l'infinie variété des corps pro- téiques, au sein des cellules et des liquides inter- stitiels. La formule très compliquée de chacune de ces combinaisons est fort difficile à établir avec certitude, et les chimistes ont successivement modifié leurs conceptions, depuis Schützenberger” qui considérait les albumines comme des dérivés substitués de l’urée et de l’oxamide, jusqu’à Em. Fischer” qui les envisage comme des produits ! KosseL : Rev. gén. des Sc., 1902, p. 455. ? Hormeister : Rev. gén. des Se., 1903, p. 501. % Maiccanp : Rev. gén. des Se., 1906, p. 145. * LameuixG : Rev. gén. des Se., 1906 et 1909. ® ScnürzENBERGER : Dict. Würtz, 2 suppl. : article Albu- minoides, et Ann. Chim. et Phys., 5° série, t. XVI, p. 334. $ Em. Fiscuer : Untersuchungen über Aminosäuren, Poly MATIÈRES ALBUMINOIDES tout à fait analogues aux polypeptides R.CO.AzHR". CO.AZHR”"., .…, préparés synthétiquement par lui d'abord, par Curtius * ensuite. La séparation, après hydrolyse, des amidés a permis d'expliquer et de localiser l’ori- gine de nombreux dérivés des matières pro- téiques, tels que les ptomaïnes d'Armand Gautier, les phénols, les corps indoliques, les combinaisons simples de certains acides amidés (acides biliaires), les acides amidés libres, les leucomaïnes créati- niques, l’urée, etc. Nous n'insisterons pas sur tous ces faits, aujourd'hui classiques. Mais on se tromperait fort si l'on regardait les acides amidés comme les seuls constituants des matières protéiques : on a pu établir la nature de quelques groupements prosthétiques qui sont com- binés à certaines albumines très différenciées et, si l’on peut ainsi dire, très élevées dans la hiérarchie. C'est ainsi que les beaux travaux de Kossel et de ses collaborateurs ont élucidé la constitution des acides nucléiques associés à des complexes pro- téiques (protamines, histones) dans les nucléopro- téides et les nucléohistones. Les recherches de Nencki et surtout celles de Küster ont permis de représenter la structure moléculaire de l'hématine liée à la globine dans le pigment des hématies. Toutes ces conquêtes ont été consacrées par des applications pratiques : verte des bases puriques dans les nucléoprotéides a renouvelé complètement et établi sur une base scientifique toute la théorie de l’uricopoïèse, chez les Mammifères. Rappelons également que la con- acides c'est ainsi que la décou- peptiden und Proteinen, et Ber. der deutsch. chem. Ges., 1903 et 4904. 1 Currius et 190% Journ. prakt. Chem., N. F., 1902, 1903 D'° L. HUGOUNENQ er D' A. MOREL — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE statation de noyaux communs dans l'hématine et les pigments biliaires a fixé, avec une précision définitive, les relations qui existent entre ces matières colorantes. Enfin, un dérivé aminé du groupe des sucres à été signalé parmi les constituants des matières protéiques : c'est la glucosamine CHO.CHAzH°. (CHOH}.CH*OH, très abondante dans les chitines et les mucines, mais quantitativement si peu impor- tante, dans les albumines proprement dites, que sa présence ne permet pas d'expliquer les proportions considérables de glucose‘ fabriquées par l’orga- nisme, au cours de certains états pathologiques (diabète), aux dépens de ces matières. Les chimistes ont le droit de parler avec quelque fierté des résultats obtenus. Il ne faudrait pas se dissimuler, néanmoins, que de nombreuses et im- portantes lacunes appellent de nouvelles recherches. En effet : 1° Une fraction de la molécule protéique échappe encore à nos connaissances et, en parcourant les publications des auteurs, on constate aisément que, même dans les cas les plus favorables, et sauf pour la constitution de quelques substances particulièrement simples, comme les protamines et les protones de Kossel, la proportion des con- Stituants connus dépasse rarement 60 °/,; très souvent même, elle n’atteint pas ce chiffre ; 2° On ne connait pas encore les groupements naturels qu'affectent entre eux les constituants déjà connus et on ignore les lois qui président à leur formation ; 3° Les relations si intéressantes et si grosses de conséquences pratiques, établies par la physiologie et la clinique entre les matières protéiques et les élé- ments ternaires de l'organisme (sucres et graisses), n'ont pas encore recu d'interprétation précise”. Ces diverses constatations justifient les re- cherches entreprises par nous depuis plusieurs années pour ajouter quelque contribution nouvelle aux résultats déjà acquis. Après avoir pendant longtemps mis en œuvre les méthodes classiques d'hydrolyse des matières pro- léiques, nous avons été à même d'en bien saisir les défauts, dont le plus important nous paraît être la destruction de certains constituants par l’action des réactifs employés. L'hydrolyse, en effet, est à la base de toute recherche sur la constitution des matières protéiques, puisqu'elle a pour but de cliver ces molécules compliquées en éléments de plus en plus simples, jusqu’à obtention de produits dont la détermination chimique soit accessible à nos { Consultez R. LÉPINE : « Le diabète sucré », chez Alcan, 1909, p. 468. ? Consultez PrLücer : aaire de Richet. Article « Glycogène », in Diction- moyens actuels d'investigation. Or, cette hydrolyse est, en général, effectuée par l’action de l'acide sul- furique ou de l'acide chlorhydrique à 20 ou 30 °/,, à des températures dépassant + 100°, c'est-à-dire dans des conditions très favorables à la destruction de certains dérivés par l’action oxydante, directe ou indirecte, des acides sulfurique et chlorhydrique. Nous avons eu l’idée de remplacer ces réactifs par l'acide fluorhydrique, dont la stabilité entraîne l'absence de pouvoir oxydant et dont l’action extré- mement corrosive sur la peau, qu'il désorganise sans la carboniser, avait attiré notre attention. Les expériences, déjà nombreuses, que nous avons faites avec cet acide convenablement dilué nous ont donné des résultats avantageux, que nous allons faire connaitre. I. — CRITIQUE DES AGENTS D'HYDROLYSE ACTUELLEMENT EMPLOYÉS. La simplification des molécules protéiques effec- tuée par des ferments digestifs et des diastases microbiennes donne des résultats très intéressants ; mais elle est longue, compliquée et, inconvénient beaucoup plus grave, elle n'est pas sans altérer ou détruire quelques-uns des constituants qui sont peut-être parmi les plus intéressants : aussi doit- elle, à notre avis, être réservée pour la solution de certains problèmes particuliers. L'action des réactifs énergiques est plus rapide et plus régulière : mais les résultats varient beaucoup suivant la nature du réactif et suivant les conditions de l'expérience. L'action des alcalis et de la baryte, qui a permis à Schützenberger’ d'effectuer ses belles recherches, ne saurait être considérée comme aussi avantageuse que celle des acides : en effet, elle est très incom- plète, laissant intacts de gros fragments incristalli- sables (glucoprotéines, dileucéines, etc.), dont nous avons réussi à démontrer la nature en les résol- vant par l'hydrolyse acide en un mélange d'acides amidés”. De plus, elle est fortement destructrice, car elle dégage des constituants manifestement trop simples : les acides carbonique, oxalique, acétique, ainsi que l’ammoniaque, dont nous démontrerons tout à l'heure l'origine secondaire. Enfin, elle décompose l’arginine et racémise certains acides monoamidés qui deviennent alors très difficiles à séparer par cristallisation. C’est pour ces raisons que les chimistes ont unanimement adopté aujour- d’hui l'hydrolyse par les acides. L'action de l'acide sulfurique à 25 ou 30 °/,, à 1 SCHÜTZENBERGER : LAON p. 334. ? HuGouxenQ et MoreL : p. 153. Ann. Chim. Phys., 5e sér., Bull. Soc. Chim., 4e sér., t. I, D' L. HUGOUNENQ £r D' A. MOREL l'ébullition, employée avec un grand succès par Kossel et Kutscher dans l'étude des protamines, et adoptée par Em. Fischer et son École pour le dosage de la tyrosine dans les protéines plus compliquées, présente le grave inconvénient de s'accompagner de carbonisation et d'oxydalions secondaires, dont témoignent le dégagement d'ammoniaque et la pro- duction de matières goudronneuüses. Aussi, Em. Fischer et ses élèves ont-ils presque toujours préféré l’action de l'acide chlorhydrique à 25 ou 30 °/,, à l'ébullition. Mais cet acide, à cause de son pouvoir oxydant très marqué, n'est pas, non plus, un réactif de choix. Lorsque son action est poussée assez profondément pour être complète, on constate une carbonisation intense des matières, avec une production considérable de produits d'oxy- dation. Il devient impossible, dans ces conditions, de rechercher non seulement les sucres, qui sont sûrement détruits avec production de substances furfuroliques et de goudrons, mais même de retrouver en totalité certains acides amidés parti- culièrement oxydables, comme la tyrosine. Ces critiques suffisent, pensons-nous, à légitimer les tentatives que nous avons faites pour recher- cher un agent d'hydrolyse plus avantageux ; nous croyons l'avoir trouvé dans l'acide fluorhydrique, réactif à la fois énergique, stable, et cependant très souple dans ses applications. II. — TECHNIQUE DE L'HYDROLYSE PAR L'ACIDE FLUORHYDRIQUE. Pour faire agir l'acide fluorhydrique, nous employons une chaudière en plomb de 12 litres de capacité, obtenue par une feuille de plomb de 2 millimètres d'épaisseur doublant un récipient de cuivre susceptible d'être chauffé au bain-marie. Cette chaudière est coiffée d’un dôme en plomb de 2 millimètres d'épaisseur, dont on applique le rebord sur un anneau de caoutchouc plat posé sur le bord, également plat, de la chaudière ; un:cercle de fer, maintenu par des boulons, assure la ferme- ture parfaite de l'appareil. Soudé au dôme, un ser- pentin en plomb, entouré d’un manchon à eau courante, sert au dégagement et à la condensation des vapeurs. Enfin, sur le dôme, un trou fermé par un bouchon à vis fait oflice de regard et permet de recharger l’appareil ou de prélever des échan- tillons (fig. 1). Dans certaines expériences, où nous tenions à recueillir tous les produits volatils susceptibles d'être dégagés, nous avons employé une bouteille en plomb de 3 millimètres d'épaisseur et de 1 litre de capacité, sur le goulot de laquelle un tube en plomb était fixé par la soudure autogène (fig. 2). Nous remplissions la bouteille par ce tube flexible, — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE 841 d'un diamètre intérieur de 1 centimètre; il servait pendant l'expérience au dégagement des gaz à tra- vers des barboteurs. Cet appareil, pourvu que les Fig. 1. — Chaudière en plomb pour l'hydrolyse fluorhydrique des albuminoïdes. dimensions en soient suffisantes, peut être employé à hydrolyser des quantités quelconques de corps protéiques : ilest plus simple et moins coûteux que le précédent. L'acide fluorhydrique est l'acide fumant, à 60 °,,, quelivre couramment l'industrie dans des bouteilles en plomb et qui a été gracieu- sement mis à notre disposition par la So- ciété électrochimique de Saint-Fons, près Lyon. L'acide, con- venablement étendu d’eau, est ajouté dans la chaudière à la ma- üère protéique. On chauffe au bain-ma- rie, après avoir fixé le couvercle, si on emploie le premier appareil. La dilution et la quantité de l'acide in- troduit, ainsi que la durée de la chaufre, varient suivant la nature de la substance pro- téique et le stade d’hydrolyse auquel on veut s'ar- 2 Fig. avec tube de dégagement pour les gaz, pour l’hvdrolyse {luor- hydrique des albuminoïdes. — Bouteille en plomb 8242 D' L. HUGOUNENQ er D' A. MOREL — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE rêter. Dans les expériences courantes, une teneur de 15 à 20 °/, d'HFI réel convient très bien, ce pourcentage étant rapporté à la masse totale du mélange (albumine, acide et eau). Quand on juge l'hydrolyse achevéé par l'examen d'une prise d'essai, on laisse refroidir et on ajoute avec précaution, pour que la température ne s'élève pas au-dessus de + 40° et en évitant que la réaction devienne alcaline, un lait de chaux, jusqu'à ce que le mélange n'ait plus qu'une faible réaction acide. On laisse déposer, on décantele liquide, on essore le précipité au filtre-presse et on le lave à l’eau tant qu'il contient des matières organiques. On procède alors à la séparation des divers constituants qu’on veut mettre en évidence, parles méthodes générales, plus ou moins modifiées. Nous ne nous arrêterons ‘pas à les décrire. III. — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE N'ENTRAINE PAS LA DESTRUCTION SECONDAIRE DES CONSTITUANTS. Dès les premiers essais, nous avons constaté que l'acide fluorhydrique respecte beaucoup mieux que les acides sulfurique et chlorhydrique les consti- tuants des matières proléiques, même lorsque l'attaque est prolongée pendant cent cinquante heures et qu'elle atteint le stade de décomposition complète des, peptides les plus simples. En effet, il ne mélanise pas les matériaux attaqués et ne pro- duit pas ces matières goudronneuses qu'on a décrites sous le nom de substances humiques. Ces premiers résultats, déjà très avantageux, nous ont engagés à rechercher si les constituants inférieurs (acides carbonique, oxalique, acé- tique, ammoniaque, ete.), considérés par divers auteurs comme faisant partie des molécules pro- téiques, ne seraient pas des produits de destruction secondaire, témoins de la disparition de consti- tuants plus compliqués et, par cela même, plus inté- ressants. Des expériences répétées nous ont montré ‘que ni CO’, ni les acides oxalique et acétique ne prennent naissance quand on effectue l’hydrolyse par l'acide fluorhydrique. Ainsi, par exemple, en attaquant de la gélatine ou de l'ovalbumine dans une bouteille en plomb, pourvue d’un tube de déga- gement en relation avec des barboteurs, et en employant l'acide fluorhydrique à 48 °/,, à la tem- pérature du bain-marie, pendant cent soixante heures, nous n'avons observé, à aucun moment, de dégagement gazeux. Le dosage dans le liquide de l’ammoniaque libérée n’accusa que defaibles traces, bien inférieures à 1 °/,; enfin, la recherche des acides organiques simples (formique, acétique, pro- pionique, butyrique, oxalique) est demeurée abso- Jlument négative. Ces résultats nous autorisent à penser que ces composés n'existent pas préformés dans les molécules protéiques, et que leur dégagement par les autres agents d'hydrolyse tient à une action destructrice, dont l'absence est certainement un des grands avantages de notre technique. IV. — L'HYDROLYSE FLUORUYDRIQUE ET LA DÉSAGRÉ- GATION COMPLÈTE DES MOLÉCULES PROTÉIQUES. Par un grand nombre d'expériences effectuées sur des albumines de résistance variable (albu- minoïdes, albumines proprement dites, nucléo- protéides, etc.), nous nous sommes rendu compte qu'en faisant agir, à la température du bain-marie, l'acide fluorhydrique à 18 ou 20 °/, pendant un temps suffisamment long (150 heures et parfois davantage), on peut obtenir des liquides ne conte- nant plus de substances biurétiques ni de corps donnant des précipités floconneux avec l'acide phosphotungstique. Bien plus, un examen minu- tieux nous à montré qu'on obtient pour les acides amidés un rendement maximum, tandis qu'on ne sépare plus que des traces de peptides sim- ples, susceptibles de donner des dérivés cristallisés et sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir. L'acide fluorhydrique, pourvu que son action soif suffisamment prolongée, provoque done la désagrégation complète des corps protéiques et la disparition des peptides, si génants dans cet ordre de recherches. Dans les produits d'hydrolyse ainsi débarrassés de peptides et de matières visqueuses, on peut facilement isoler les acides monoamidés par cristallisation fractionnée, par éthérification où par toute autre méthode, tandis qu'aux dépens des précipités phosphotungstiques on obtient, par les procédés connus, des picrates d'arginine et de lysine parfaitement purs. — L’HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE ET L'ATTAQUE MÉNAGÉE DES ALBUMINES RESPECTENT LES GROUPE- MENTS NATURELS DES ACIDES AMIDÉS. N: S'il est intéressant de mettre en évidence les divers constituants des molécules protéiques, il n'est pas moins important de savoir de quelle facon ils sont groupés dans les édifices moléculéaires. L'évolution des conceptions touchant les modes de liaison qu'affectent entre eux, dans les pro- téines, les acides aminés, apparaît historiquement depuis Schützenberger, qui croyait à la présence de groupements AIR Cod et Nas CO — AzHR' | 1 CO — AZHR jusqu'à Em. Fischer, qui n'admet guère que des peptides AZH *— R — CO—AzH—R!'— CO—AzH—R"—CO—... ete D: Ces conceptions reposent sur des raisonnements indirects. Examinons-les : 1° Les faits sur lesquels Schützenberger avait basé sa théorie appellent une autre interprétation, puisque nos propres recherches sur la constitution des substances protéiques nous'ont montré que les acides carbonique et oxalique, ainsi que l'am- moniaque, ne préexistent pas, du moins en propor- tion notable, et résultent de destructions profondes de la molécule. 2% Les méthodes de Curtius' et d'Em. Fischer permettent de préparer des combinaisons artili- cielles d'acides amidés ; ce sont les polypeptides, qui présentent beaucoup d’analogies avec les dérivés naturels des substances protéiques: ainsi, quelques-unes d'entre elles peuvent être hydro- lysées par le suc pancréatique. 3° D'ailleurs, pour comparer les polypeptides naturelles dérivées des protéines et les urées sub- stituées par des radicaux d'acides aminés, nous 2 avons préparé quelques-unes de ces urées'. Les corps que nous avons obtenus sont inattaquables par le suc pancréatique et n'ont aucun point de ressemblance avec les albumoses et les peptones. Mais aucun de ces raisonnements indirects n'entraine la conviction au même degré que la mise en évidence de corps naturels définis extraits des produits de l'hydrolyse des matières protéiques. Nous avons pu retirer de la gélatine et de la pepsine hydrolysées par HFI à 20 °/,, pendant trente-six heures, des corps possédant la consti- tution des dipeptides préparés par Fischer‘. En effet, dans les liquides mères du picrate d’argi- nine et du picrate de lysine et en poursuivant le fractionnement des cristallisations, nous avons isolé des picrates cristallins bien définis, que l'ana- lyse et l'examen des propriétés ont permis d’identi- fier avec le éripicrale d'arginyl-arginine (C°H* Az'O®)(C'H°Az'0") et avec Le bipicrate d'anhydro- 1ysine (C*H**Az‘O*)(C'H'Az'0'}), que Em. Fischer avait préparés par condensation de l’éther méthy- lique de chacun des acides diamidés correspon- dants. Cette mise en évidence de groupements condensés : arginyl-arginine, lysyl-lysine, ete, dans les matières protéiques vient à l'appui des conceptions de Kossel”. On sait que ce chimiste, en étudiant, avec Goto, les propriétés des protones, a été conduit à supposer l'existence de l'arginine polycondensée dans la molécule des prolamines. Nous avons, du reste, vérifié que les peptides 4 Curnius : Journ. prakt. Chem., N. F., 1902, 1903 et 1904. 3 Eu. Fiscuer : Ber. der deutsch.chem. Ges., 1903 et 1904. 3 HucouxexQ et Morez : (2. R., 1905 et 1906. 4 Ex. Fiscner et Suzuxt : Ber. der deutsch. chem. Ges., t. XXXVIII, p. 4173. 5 KosseL : 35e Congrès de l’Assoc. franc. pour l'avance. des Sc., Lyon, 1906. L. HUGOUNENQ et D° A. MOREL — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE 843 ainsi isolées ne dérivent pas d'une action conden- satriceelLanhydrifiante de l'acide fluorhydrique; car, en faisant agir cetacide dans des conditions diverses sur l’arginine, la lysine et même les acides monoa- midés, on n'observe aucune formation de peptides". Enfin, nous avons réussi à isoler, par fluorhy- drolyse ménagée de la gélatine, des substances ne renfermant pas plus de 3 ou 4 acides amidés (argi- nine, lysine, glycocolle et leucine ou phénylala- nine). cristallisés et nous en poursuivons l'identification Nous avons pu en préparer les picrolonates avec les picrolonates de peptides artificielles. En définitive, l'hydrolyse fluorhydrique, grâce aux conditions dans lesquelles elle s'effectue (température relativement basse et prolongation de la durée d'attaque), peut être très ménagée et apparait comme remarquablement souple. Aussi pouvons-nous la préconiser comme permettant, coneurremment avec la méthode d’Abderhalden ? (acide sulfurique concentré à froid), de respecter certaines combinaisons naturelles dont l'étude éclaire le mode de groupement des acides amidés dans les molécules protéiques. VI. — L’HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE ET LA SÉPARATION DE CONSTITUANTS AUTRES QUE LES ACIDES AMIDÉS, EN PARTICULIER DES SUCRES. Tandis que l’hydrolyse pratiquée avec les acides chlorhydrique et sulfurique, lorsqu'elle est poussée jusqu'à la décomposition complète des peptides, ne permet pas de mettre en évidence les conslti- tuants autres que les amino-acides, à cause de son action destructrice, l'hydrolyse fluorhydrique, au contraire, respecte de facon remarquable les sub- stances de cette catégorie. Pour en déterminer la nature, nous avons mis en œuvre les procédés d'extraction des principaux groupes de corpsauxquelson pouvaitéventuellement penser. Après avoir vérifié que, dans la gélatine, l’osséine et l’'ovalbumine hydrolysées par HF, on ne rencontre, en qualité appréciable, ‘ni acides gras inférieurs ou supérieurs, ni acides-alcools du groupe de l'acide lactique ou de l'acide hexosa- mique (tétraoxyleucine COOH.CHAZH”.(CHOH)*. CH°0H), séparé de l'acide chondroïtine-sulfurique par Orgler et Neuberg”, nous avons été conduits à l'hypothèse que les constituants encore inconnus des albumines pouvaient être des substances non acides appartenant au groupe des sucres. Cette hypothèse se confirme, si l'on considère que les substances qui sont détruites au cours de l'hydro- 1 HuGouxexo et Morez : Comp. Rendus, 1909. ? ABDERHALDEN : Zeit. physiol. Chem., 1909. 3 OrGLer et NeuBenG : Zeit. physiol, Chem., t. XXXVII, p. 407. ‘ D' L. HUGOUNENQ £r D' A. MOREL — L'HYDROLYSE FLUORHYDRIQUE EEE aaaaaLELaLaLELELELELULUL SE —————————— ——— — lyse ou qui échappent aux méthodes habituelles de séparation sont facilement oxydables. On connait, d'autre part, les arguments que Ja physiologie et la clinique ont multipliés en faveur de la formation dans l'économie du glucose aux dépens des ma- tières proléiques”. Rappelons enfin, à titre de preuve directe, que les travaux de Langstein? et Frænkel° et d'autres chimistes” ont montré que, dans certaines protéines proprement dites (ovalbumine, sérum-albumine), on peut mettre en évidence un amino-sucre réduc- teur: la glucosamine CHO.CHAZH®.(CHOH )°.CH20H, dont l'imperfection des procédés de séparation ne permet d'extraire qu'une faible quantité. Frappés de ces diverses considérations, nous avons hydrolysé quatre matières protéiques : géla- tine commerciale de carnasses, osséine pure préparée par nous, ovalbumine, fibroïne de la soie. Nouslesavons chauffées au bain-marie pendant 150 heures avec HFI à 18 °/, et nous avons essayé de séparer d'abord les corps réducteurs du groupe des sucres, puis les aminopolyalcools non réduc- teurs, en mettant en œuvre la méthode suivante : 1° Pecherche des sucres réducteurs. Les liquides provenant de la gélatine et de l'osséine sont lotalement dépourvus de pouvoir réducteur. Le liquide dérivé de la fibroïne de la soie ne réduit que très faiblement; celui qui dérive de l’ovalbumine agit, au contraire, fortement sur la liqueur de Fehling (le pouvoir réducteur, calculé en glucose, correspond à une teneur de 10,6 °/, du poids de l’albumine). Par l'application de la méthode de benzoylation de Baumann, nous avons extrait du liquide dérivé de l'ovalbumine une forte proportion, égale à Ja moitié du poids de protéine hydrolysée, d'un dérivé benzoïque insoluble dans les alcalis. Après purification, ce dérivé est demeuré quelque temps päteux, puis a abandonné des cristaux qui, après plusieurs cristallisations dans l'acide acétique cris- tallisable, se sont montrés identiques avec le penta- benzoate de glucosamine(C'H*AzO) (C'H°CO)”’ étudié par Pum’. Le liquide mère des cristaux n'était autre que Je tétrabenzoate de glucosamine (C'H°AzO') (C'H°CO)* décrit par Müller”. La saponification de ces dérivés benzoylés pré- sente de très grandes difficultés, déjà signalées par cet auteur; cependant, nous avons réussi à régénérer la glucosamine, dont nous avons vérifié Consultez : R. Lépine : « Le diabète sucré », chez Alcan, 1909 : p. 30, 105, 137, 283, 378. * LanGSreIN : Zeil. physiol. Chem.,1. XXXI, p. 49. % FRÆNKEL : Monatshefte f. Chem., t. XIX et XXIV. * Consultez LanGsrein : Ærgebnisse der Physiologie, {. 1, p. 60, et t. III, p. 453. * Puu : Monatshefte für Chemie, {. XI, p. 435. * MüLer : Zeit. . Biologie, t. XLII, p. 468. | la teneur en Az, le pouvoir réducteur et la trans- formation en glucosazone. Il faut en conclure que l'hydrolyse fluorhydrique, même poussée à fond, et après cent cinquante heures de chauffe, respecte très bien la glucosa- mine. Ce n'est pas tout. 2 Recherche des amino-polyalcools non réduc- teurs. — Les liquides d'hydrolyse dérivés de la gélatine et de l'osséine ne renferment pas, comme nous l'avons dit, de sucre réducteur; néanmoins, la benzoylation nous à donné ici des résultats inattendus, En agitant les liquides, alcalinisés par la soude et fortement refroidis, avec un grand excès de chlorure de benzoyle, nous avons observé la for- mation d'abondants dépôts insolubles dans les alcalis, même après une agitation prolongée. Ces dépôts, parfaitement débarrassés par lavage à l’eau alcaline des dérivés benzoylés des amino-acides et repris par l'éther, correspondent, après départ de ce dissolvant, à une fois et demie le poids de géla- tine commerciale’, à la moitié du poids de l'oval- bumine; ils ne cristallisent pas, même après plu- sieurs jours de repos à basse température. Analysés tels quels, ils donnent, l’un et l’autre, en Az, Cet H, ainsi qu'en acide benzoïque libérable par saponification, des chiffres correspondant très exactement avec l'hexabenzoate d'un aminohexane- pentol : CH°OH. CH AzH°.(CHOH).CH°OH ou gluca- mine. La saponification de ces produits benzoylés est très difficile, et l'étude des dérivés qu'on en retire n'est pas encore assez avancée pour que nous nous étendionssur ce sujet, qui sera développéultérieure- ment. Nous poüvons ajouter, cependant, que nous avons obtenu, à partir de l'hexabenzoate, le dérivé monobenzoylé CH°OH.CH,AzH (CO.C'H°). (CHOH). CH°OH, en décomposant l'hexaéther par l'éthylate de sodium glacé. Nous avons même réussi à isoler des produits d'une saponification plus complète l'oxalate très bien crislallisé d'une base qui présente les plus grandes analogies avec la glucamine CH°AzH. (CHOH)".CH°OH, préparée par Maquenne et Roux° à partir de la glucosoxime CH*AzOH.(CHOH)*.CH°OH. Ces résultats, très encourageants, suffisent à montrer qu'il existe dans les matières albuminoïdes des constituants différents des amino-acides et des aminosucres, ces constituants ne se dissolvant pas dans les alcalis et ne réduisant pas la liqueur de Fehling, quand ils ont été dégagés de leur combi- naison benzoïque. Ces corps nouveaux, que l'acide * Il s'agit de gélatine blanche fabriquée avec des car- nasses (déchets de peaux, tendons, etc.), riches en tissw conjonctif et en cartilage. * MaQuEeNxE et Roux : C. R., t. CXXXII, p. 980. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE fluorhydrique dégage inaltérés de la molécule protéique, ne présentent que la fonction amine etla fonction alcool. Ce qui précède suffit à montrer tout le parti qu'on peut tirer de l'hydrolyse fluorhydrique des albu- mines. Cette méthode joint, en effet, à l'avantage d'assurer une décomposition complète avec des rendements plus élevés, la faculté d'opérer gra- duellement désagrégation une plus ou moins profonde de la molécule. Enfin et surtout, elle libère et permet d'isoler des constituants autres que les amino-acides : les amino-polyols du groupe des sucres. Il est, pensons-nous, inutile de faire ressortir toute l'importance de cette dernière constatation. D' L. Hugounenq, D' A. Morel, Prof'à la Faculté de Médecine de Lyon, Agrécé Correspondant à la Faculté de Médecine de l'Académie de Médecine. de Lyon. REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE PREMIÈRE PARTIE Le seul espoir que l’on puisse avoir en écrivant une revue de Zoologie est de signaler un certain nombre de contributions de fait, soit en elles-mêmes, soit par leur application aux idées générales qui dominent la Biologie, et d'ail- leurs fréquemment contradictoires dans l’état ac- tuel de nos connaissances. Il est de plus en plus interdit à nos forces d'embrasser tout ce qui se publie, ni de le juger sur-le-champ d'une facon vraiment sûre. Sous ces réserves, glanons donc, en les groupant autour d'un certain nombre de grandes questions et en les rattachant à ce que nous avons relevé dans les revues précédentes, un certain nombre de travaux parus depuis deux ans. intéressantes, I. — PÉRIODIQUES NOUVEAUX. Les périodiques continuent à se multiplier, affir- mant deux tendances que nous avons déjà signalées: une spécialisation croissante, répondant au dévelop- pement de nouvelles branches particulières de la Biologie, et une internationalisation dans la colla- boration. Ce sont des phénomènes naturels; nous, Francais, pouvons seulement regretter que ce soit trop exclusivement en Allemagne, sous l'égide et au profit de la librairie allemande, qu'ils se manifestent. À ce mouvement répondent : l'Archiv für Zelllor- schung', périodique de Cytologie générale sous la direction de R. Goldschmidt; l’/nternationale Revue der. gesammten Hydrobiologie und Hydrogeoqra- plie”, qui s'ajoute aux Annales de Biologie la- custre,. fondées un peu auparavant à Bruxelles. De même, pour les questions d'évolution, deux recueils nouveaux sont à signaler : Zeitschrift für 1 Leipzig, Engelmann, t. 1, 1908; €. II, 1909. 3 Sous le patronage de A. AGassr, CHun,, Forez, V. HEx- sEN, etc, et dirigée par HELLAND-HANSsEx, KARSTEN, PENCK, WESENBERG-LUND, WOLTERECK, ZSCHOKKE. (Leipzig, KLINC- KkuarDT), t. 1, 1908. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. ZOOLOGIE GÉNÉRALE induktive Abstammungs und Vererbungslehre" el Zeitschrift für den Ausbau der Entwicklungslehre”. Sous le titre Ærgebnisse und Fortschritte der Zoo- logie*, Spengel a fondé un recueil où seront pu- bliées des mises au point sur les progrès récents de grandes questions zoologiques, comme Renaut à fait en France avec. la Revue d'Histologie. Cette idée est très féconde : il est indispensable que des spécialistes dressent de temps en temps le bilan de ce qui s'est accumulé dans les divers comparti- ments de la Zoologie. Citons enfin un nouveau recueil anglais, Parasi- tology*, dont le titre indique suffisamment le pro- gramme et l'intérêt actuel. II. — ÉvoLuTIon. Cette année 1909 était pour le transformisme un double centenaire : celui de la publication de la Philosophie zoologique par Lamarck et celui de la naissance de Darwin, dont Z'Origine des Espèces atteignait en même temps un demi-siècle. La France et l'Angleterre ont célébré ces deux grands hommes. On a inauguré une statue de Lamarck au Jardin des Plantes le 13 juin, et en même temps la Société zoologique de France a publié un livre substantiel sur la vieet l'œuvre du fondateur du transformisme, par M. Landrieu *. Depuis plusieurs années, M. Lan- drieu a fouillé tous les documents relatifs à La- marck, il en a médité l’œuvre, et ainsi, de la tra- duction du livre de Packard (paru il y a quelques 1 Publié par Correns, V. Hæcker, Steinmann, von Wett- stein, t. [, 1908. ? Publié par R.-H. Francé. Stuttgart, 1er vol., 4907. 5 Jena, G. Fischer, t. I, 1908. # Supplément au Journal of Hygiene, publié par Nurtare et Satrcey. Cambridge (Univ, Press.), t. 1, 1908. 5 M. Laxprreu : Lamarck, le fondateur du Transformisme : sa vie, son œuvre. Paris, Soc. Zoologique de France, 28, rue S erpente. Kosmos-Verlag 20% 846 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE années), qui à été son point de départ, est sorti un ouvrage original auquel on recourra nécessaire- ment. Le centenaire de Darwin a été célébré à Cam- bridge avec un éclat plus grand encore. Il a donné lieu à de nombreux articles dans les périodiques biologiques de tous les pays. Les organisateurs des fêtes jubilaires ont imprimé à cette occasion la première version de Z’Origine des Espèces, restée manuscrite et écrite en 1843. Ils ont publié en même tempsunlivre: Darwin and modern Science’, où une série d'auteurs ont montré l'influence exercée par le darwinisme sur les diverses sciences biologiques et sociologiques. Il à paru, en outre, sur le problème de l'Évolution divers livres. Nous citerons ici celui de Kellog”, Darwinism to day, très darwinien, mais sans aller cependant jusqu'à tout expliquer par la sélection; les Vorlesungen über Deszendenztheorie de Lotsy *, recueil de leçons sur le transformisme et qui constituent une très bonne mise au point de ; l'ensemble du problème; La Crise du Transfor- | misme de F. Le Dantec, crise que l’auteur voit dans une opposition de principe entre la théorie des mutations de de Vries‘, si en faveur actuellement, et la notion même du transformisme. Dans l’ensemble de la littérature transformiste contemporaine, on est de plus en plus frappé et aussi attristé de la forte poussée d'idées vitalistes qui surgissent surtout en Allemagne, et il est à noter qu'elles s’y réclament souvent de Lamarck. C’est ce qu'on trouvera particulièrement dans le livre de Pauly”, qui va jusqu'à admettre dans chaque cellule un principe psychique, afin d'expliquer la coordina- | tion dans l'adaptation des diverses parties de l’or- ganisme. K. C. Schneider° considère également le vitalisme comme la conséquence nécessaire des idées lamarckiennes. Boveri” pense, lui aussi, que la sélection et les principes de Lamarck ne suf- fisent pas à expliquer l'adaptation et penche éga- 1 University Press, Cambridge, 1909. 2 New-York (Holl.), 1907. 3 Jena, G. Fischer, 2 vol., 1906-1908. # À propos de la théorie des mutations, signalons briève- ment les controverses qui se sont élevées sur le cas fonda- mental produit par de Vries, celui d'Ænothera lamarckiana. Boulenger (Journal of Botany, 1907), l'herpétologiste bien connu du British Museum, conteste que la preuve soit faite qu'il s'agisse d'une espèce autonome, dont les mutations seraient des variations nouvelles. Il admettrait plutôt (se basant notamment sur des observations faites en Bretagne, à Saint-Cast, et aussi sur des (Ænothera biennis redevenus sauvages dans les jardins du British Museum) que l'Œ, lamarckiana soit un hybride de l'(Æ. biennis. Ses mutations pourraient alors n'être que des cas de dissociation d'hybrides. Bateson a exprimé de son côté une idée analogue. # Darwinismus und Lamarckismus. Munich, 1905. ‘ Einführung in die Deszendenztheorie. Jena (Fischer), 4906. 7 Die 1906. Organismen als historische Wesen. Würzburg, lement vers un psycho-vitalisme. H. Driesch con- tinue à soutenir une thèse vitaliste dans ses divers écrits. Toutefois, ces tendances ne sont pas heureu- sement sans contre-partie, et nous citerons L. Plate comme un des auteurs qui montrent une critique avisée et étendue dans les controverses actuelles sur les divers problèmes évolutionnistes. III. — HÉRÉDITÉ. HYBRIDATION. MENDÉLISME. L'étude cytologique et principalement celle de la division cellulaire restent un des principaux terrains pour l'étude de l'hérédité, terrain qui, à vrai dire, prête beaucoup plus aux conjectures et aux hypo- thèses qu’à l'expérience décisive. La forme même de la figure caryokinétique, le rôle de la chromatine dans la fécondation suggéraient que cette substance devait jouer un rôle dans le transfert des propriétés héréditaires. Gette suggestion est devenue tyranni- que. On a localisé dans la chromatine le siège maté- riel de l’hérédité. On a interprété dans ce sens le dé- tail des phénomènes : de là les théories sur l’indivi- dualité et la différence qualitative des chromosomes, sur leur permanence, plus récemment sur leur conjugaison deux à deux, avant les divisions de maturation (qui précèdent la formation des élé- ments sexuels); de là l’idée que les chromatines paternelle et maternelle restées distinctes dans le soma et les glandes sexuelles ne se fusionnent qu’au moment de cette maturation. Ces idées, pa- tronnées par des hommes tels que Strasburger, Boveri, Ed. Wilson”, sur lesquelles ont été édifiées les théories de Weismann, continuent à être illus- trées par de nouveaux exemples; nous les trouvons ainsi défendues par l’école de Louvain‘, par Mi: Bonnevie*, par A. et K. Schreiner”, etc. Si ces idées directrices ont fait progresser beau- coup notre connaissance du noyau et des phéno- mènes de la maturation et de la fécondation, il n'en est pas moins vrai que l'expérience ne peut en véri- fier d'une facon précise les points fondamentaux, tels que l’individualité des chromosomes. Une réac- tion est en train de se manifester contre la tyrannie véritable et dangereuse par son excès que ces hypo- thèses ont exercée. Nous signalions dans notre dernière revue le { Analyses critiques dans Archiv. für Rassen und Gesell- schaftsbiologie, passim. — Die Beweismittel der Descendenz- theorie und das Verhältniss von Lamarck zu Darwin, /bid., t. V, 1908. — Selektionsprinzip und Probleme der Artbildung, 3e édit., 1908 (Leipzig, Engelmann). 2 Voir nos Revues précédentes : 1903, p. 615: 1906, p. 40- 43; 1907, p.837. — Cf. Boverr : Arch. f.Zelllorschung, t. IH, 1909. 3 La Cellule, t. XXIV et XXV (voir en particulier les mémoires de W. Dutton, de Janssens et Willems). + Biolog. Bulletin. Woods-Holl, t. XUI, 1907. 5 Vidensk. Selsk. Skrilt., 1, 1908. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE vigoureux appel à la prudence lancé par F. Meves”. Presque en même temps, paraissait une autre cri- tique, non moins énergique, des mêmes tendances, sous la plume de R. Fick*, révoquant en doute presque toutes les affirmations régnantes. Fick, comme Meves, ne trouve, dans l'examen détaillé des faits, de preuves effectives, ni pour l'individualité et la diversité qualitative des chromosomes, ni pour leur conjugaison au début des divisions de matu- ration, ni pour l’état dissocié des chromatines pater- nelle et maternelle dans le soma, en particulier chez les hybrides. Le seul fait qui subsiste vraiment est la constance, dans une espèce donnée, du nombre des chromosomes. Mais ce n’est pas plus surprenant, dit-il, que la constance du nombre des élamines dans une plante, et ce serait la variabilité de ce nombre qui serait surprenante. Les chromo- somes « ne sont que des unités tactiques pour les manœuvres de la division cellulaire ». C'est à des nécessités de cet ordre, non à l’hérédité, que se rat- tache sans doute la réduction de leur nombre, de 2n à n, lors de la préparation à la fécondation. Quant à l’hérédité elle-même, pourquoi en loca- liser le substratum exclusivement dans la chroma- tine? Son siège doit être bien plus général. Fick repousse, d'autre part, l'identification proposée par Semon entre l'hérédité et les phénomènes de mé- moire ; il admet la possibilité d'un idioplasma, au sens de Nägeli, sans aller jusqu'à le particulariser, avec Weismann, dans des corps figurés, dont les chromosomes seraient des assemblages. Les parti- cules héréditaires doivent être, suivant lui, d'ordre intramoléculaire et, par suite, non limitées aunoyau. S'il y a, au début de chaque génération sexuée, une .autorégulation de la masse de la substance hérédi- taire, c’est un phénomène d'ordre moléculaire et non pas cellulaire, ni surtout nucléaire. Au reste, des faits nombreux (Cf. Ret., 1906, p. 84-86, et 1907, p. 838) montrent l'importance du cytoplasme ovulaire dans la morphogénèse de l’embryon* et dans son hérédité.Telles sont notamment les expé- 1 V. Rev. 1907, p. 835, note. ? Ficx : Vererbungsfragen, Reduktions- und Chromoso- menhypothesen, Bastardregeln. Ergebn. A nat. und Entwick- lungsgesch., t. XVI, 1907. A signaler également, comme revue générale des faits et théories sur les chromosomes, l’article de V. Hxæcker : Die Chromosomen als angenommene Vererbungsträger. Ergebn. und Fortschritle der Zoologie, t. 1, 1908. $ En particulier, les faits relatifs à la polarité de l'œuf et à la répartition des substances différenciées à son intérieur. A ce sujet, on verra avec intérêt une série de mémoires récents où l'on étudie l'influence de ces substances sur la segmentation et la morphogénie, en faisant agir sur les œufs la force centrifuge. Les résultats obtenus sont assez divers suivant l'espèce employée et les conditions précises de l'expérience. V. notamment : MorGan (œuf de Cumingia. Science, 1908); — Morçan et Lyon (œuf d'Arbacia. Arch. fur Entwicklungsmech., t. XXIV, 1907); — Lire (œuf de Che- topterus. Journ. of experim. Zool., t. I, 1906); etc. riences de mérogonie ou d'hybridation entre espèces éloignées (Loeb, Godlevski, etc.). Ce qui se dégage donc notamment de cette critique, c’est un retour à la considération du cytoplasma extranucléaire dans l'étude de l'hérédité. Rabl', Conklin*, dé- fendent les mêmes idées. Meves’, avecson souci habituel des données de fait précises, cherche dans le cytoplasme cellulaire les éléments auxquels on pourrait attribuer le rôle de support de l'hérédité. Cette tentative de localisation nouvelle sera pas- sible d’objections analogues à celles faites précé- demment aux chromosomes, mais, d'ici à ce qu'il en ait été abusé, elle peut conduire à d'intéressants résultats. Meves nous en fournit déjà, en nous en annonçant, en outre, une série d'autres. Les élé- ments qui, d'après lui, pourrraient, dans le cyto- plasme, avoir une valeur spéciale pour l'hérédité sont les mitochondries de Benda (qu'il préfère appeler chondriosomes). Meves s'attache à prouver leur généralité (condition nécessaire) et, dans son Mémoire actuel, il montre qu'elles existent dans tous les tissus de l'embryon du poulet, entre la seconde moitié du premier jour de l’incubation et le commencement du quatrième. Elles existent d'ail- leurs aussi dans l’ovule et dans le spermatozoïde et sont, par suite, d’origine mixte (paternelle et mater- nelle). Meves les suit dans leur destinée, et cette partie positive n'est pas la moins importante de son travail. Il les identifie avec les productions sur lesquelles Flemming avait édifié autrefois sa théorie filaire de la structure du protoplasma et aussi en partie avec les granules d’Altmann. De plus, d’après ses observations, lors de la différenciation des tissus, les mitochondries sont une catégorie d'élé- ments d'importance capitale, car ce sont elles qui donnent naissance aux fibrilles musculaires, aux neurofibrilles, aux fibres de la névroglie, aux fibres conjonctives et vraisemblablement aux produits de sécrétion. « Toutes ces différenciations, dit-il, si hétérogènes soient-elles, naissent par les métamor- phoses d'un seul et même élément plasmatique, les chondriosomes. Les chondriosomes sont le sub- stratum matériel des processus de différenciation qui se manifestent dans les substances spécifiques des divers tissus » (p. 845). On voit tout ce qu'une pareille conception appelle de vérifications et de recherches. « L'hérédité, dit-il encore (p. 850), est assurée, suivant moi, à la fois par le noyau et le cytoplasme : les qualités du noyau sont transmises par les chromosomes, celles du cytoplasme par les chondriosomes. » Ainsi, à côté de cette théorie de 2 1 Organbildende Substanzen und ihre Bedeutung für die Vererbung. Leipzig, 1906. ? The mechanism of heredity, Science, t. XXVII, 1908. 3 Die Chondriosomen als Träger erblicher Anlagen. Arch. für mikr. Anat.. t. LXXII, 1908. 848 l'hérédité, passible de bien des objections dans son principe même, il y a là tout un programme d'ob- servations positives et de vérifications, déjà en partie réalisé et certainement fécond. En même temps qu'une réaction contre la loca- lisation absolue du substratum de l'hérédité sur la chromatine du noyau, on peut enregistrer un retour en faveur de l'hérédité des caractères acquis, qu'à la suite de Weismann et de la théorie du plasma germinatif, la plupart des biologistes avaient complètement écartée. Nous trouvons cette ten- dance, par exemple, chez E. von Tschermak (qui, à la vérité, est un botaniste}, chez Semon*, dont la théorie mnémique de l'hérédité s’'accommode natu- rellement de la transmission des caractères acquis. Semon reprend d'ailleurs d’une facon critique toute l'argumentation de Weismann, réfute la distinc- tion du soma et du germen et considère comme un exemple authentique d'hérédité des caractères acquis la transmission des aberrations obtenues par E. Fischer *, sur des papillons, dans ses expé- riences sur l'action du froid et de la chaleur sur les pupes. Jennings* discute le même problème sur les Protozoaires, à propos d'expériences sur les Paramécies, où certains résultats (formation de chaînes d'individus qui ne se séparent pas) se pré- sentent comme caractères acquis transmis. Il n'admet pas, d'autre part, la distinction établie par Weismann entre les Protozoaires et les Mé- tazoaires et qui est basée sur la distinction du soma et du germen. Enfin, nous voyons la néces- sité de la transmission des caractères acquis pro- clamée par E. Schultz*, un des adeptes du néovi- talisme à la facon de Driesch; pour cette école vitaliste, en effet, l'organisme, en tant qu'en- semble, possède des propriétés spéciales qui ne résultent pas seulement de celles des parties, et les cellules germinales, qui dérivent, suivant Schultz, des cellules somatiques par une réversibilité de dif- férenciation (dédifférenciation), peuvent et doivent subir les empreintes acquises par les cellules soma- tiquess Mais cette argumentation est d'ordre méta- physique. Dans le domaine des faits, nous mentionnerons la suite des expériences de Kammerer° sur la Sala- mandra atra et la S. maculosa. I avait expérimenta- lement diminué la viviparité de la première et 1 Voir notamment : Arch. {ur Rassen und Gesellschafts- biol., t. V, 190%. “ Jbid., t. IV, 1907. * Voir un article d'ensemble d'E. Fischer sur ces expé- riences : Arch. für Rassen und, Gesellschaftsbiologie, t. IN, 1907. * Journ. Exper. Zoology, t. V, 1908. 5 Vorträge über Entwicklungsmechanik, 1. Leipzig, Engelmann). 5 Arch. für Entwicklungsmech., t. XXV, 1907. Cf. Rev. 1907, p. 834-835. IV, 1908 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE augmenté celle de la seconde, de facon à inverser les conditions naturelles de leur reproduction. Or, la génération suivante à gardé, en se reproduisant, les caractères ainsi modifiés : les S. atra ont donné -de trois à cinq jeunes, ayant la forme larvaire, avec de courtes branchies et une large queue; un exemplaire montrait même des taches jaunes’; par contre, les S. maculosa ont mis bas des jeunes très avancés, à branchies externes atro- phiées. Il y a donc eu transmission héréditaire de la modification produite. Cependant, dans un des deux cas, au moins, on peut objecter qu'il n'y a pas véritablement caractère nouveau acquis, mais seulement réveil d'un caractère ancien et latent. Des expériences de Kammerer, il convient de rapprocher la série si intéressante des recherches de Wintrebert sur le déterminisme de la méta- morphose des Batraciens et en particulier de l'Axo- lotl, où l'on trouve une analyse pénétrante, une critique expérimentale remarquable de l’action des facteurs externes et de l’hérédité. Laissant de côté les importants résultats obtenus sur les Anoures*, nous nous bornerons à indiquer la discussion des conditions dans lesquelles s'effectue la métamor- phose de l'Axolotl. Spontanée et se faisant norma- lement dans l’eau, au Mexique (Vélasco), elle pré- senta encore ces caractères chez les premiers individus que Duméril vit se transformer, au début de l'importation de l'espèce en Europe. Mais, depuis, la métamorphose ne s'effectue plus que par l'intervention de stimuli externes (mise à l'arr sec, Wintrebert), et de plus en plus difficilement, au fur et à mesure que la race européenne d'Axolotls vieillit. Il y a donc là un caractère acquis (perte de la métamorphose, néoténie) sous l'action d'in- fluences extérieures, qui se transmet et se renforce héréditairement, et, comme le suggère Wintrebert, il serait très intéressant d'observer ce que devien- draient nos Axolotls si on les replaçait au Mexique dans leur habitat naturel, de même qu'il serait très curieux d'observer l'allure d’individus qu'on importerait actuellement du Mexique. L'Axolotl est un animal extrêmement intéres- sant, parce qu'il y a chez lui un équilibre véritable- ment instable entre l’hérédité et les actions exté- rieures, et Wintrebert a pu arrêter à mi-chemin sa métamorphose, en replaçcant dans l’eau, en cours de transformation, un individu qui l'avait commencée L_! 1 C. R. Soc. Biol., passim 1905-1908; Congrès Assoc. franç. Avance. Sc., 1907 (Reims), 1908 (Clermont), 1909 (Lille). * Notons seulement que Wintrebert a réfuté par des expé- riences précises les théories qui attribuent à une action nerveuse, où à l'asphyxie, le stimulus déterminant de la métamorphose.ll considère celle-ci comme une nécessité héré- ditaire, se faisant sentir sur l’ensemble des cellules de l'orga- nisme et comme ayant apparu phylogénétiquement sous l'influence de facteurs externes, probablement du dessèche- ment périodique des marais. - M. CAULLERY er F: MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE sous l'influence de l'air sec, el qui s'est ainsi fixé à l'état de demi-amblystome*. Les faits les plus frappants d'hérédité des carac- tères acquis sont encore ceux apportés par les microbiologistes. L'exemple classique est celui des vaccins pastoriens. Ces dernières années, Ehrlich”?, Mesnil et Brimont* ont montré que l'on pouvait obtenir des Trypanosomes réfractaires aux mé- dicaments qui agissent sur les races normales, ou bien aux sérums des animaux chez lesquels les Trypanosomes évoluent de façon à donner une maladie chronique. Cette propriété se conserve héréditairement, en dehors de la cause agissante. Elle est liée au parasite lui-même : une race qui manifeste sa résistance chez la souris peut ne plus la manifester chez le rat; mais, revenue chez la souris, elle la montre à nouveau. Ces races ont une spécificité assez étroite et certaines réactions d’im- munité montrent qu'on à affaire à de véritables espèces secondaires. Barfurth* a étudié la transmission héréditaire de l'hyperdactylie chez des poules. Certaines races (Houdan, Dorking) ont régulièrement un doigt supplémentaire et même quelquefois deux. Barfurth a croisé sept poules pentadactyles (trouvées dans une basse-cour de 220 individus) de race Orpington avec un coq normal de même race; 152 poulets obtenus se répartirent en 80 normaux et 72 penta- dactyles. Le pourcentage de l’anomalie est done passé de 3,2 °/, à 47,4°/,. Mais s'agit-il ici d'un caraclère nouveau (en tout cas congénital) ou la pentadactylie des mères tenait-elle à une impureté (Houdan ou Dorking) dans leur ascendance ? L'un des aspects actuels des recherches sur l'hérédité est l'expérimentation sur les premiers stades du développement de l'œuf, après fécondation normale ou après hybridation. Herbst a consacré deux nouveaux Mémoires*® à analyser l'hérédité, sur les œufs d’oursins hybridés, en cherchant à faire prédominer la tendance de l’un des parents. 11 obtient la manifestation dominante des carac- tères maternels, en faisant précéder la fécondation d'un commencement de développement parthéno- génétique. Dans son dernier Mémoire, il étudie très minutieusement comment se comportent dans 1 Les Amphibiens sont une matière abondante à l'étude des adaptations plus ou moins complètes au milieu ter- restre. On lira avec beaucoup d'intérêt l'étude que Siedlecki (Bull. Acad. Se. Cracovie, 1908) a faite à Buitenzorg (Java) sur une grenouille (Rhacophorus reinwardtii), remarquable- ment adaptée à la vie arboricole. ? EarLica : Berliner klin. Woch., 1907. Woch., février 1909. 3 Mesxiz et Brimonr : C. R. Soc. Biolagie, t. LXIV, 1908. — Ann. Inst. Pasteur, t. XXII, 1908, et XXHH, 1909. #* Arch. für Entwicklungsmech., t. XXVI, 4908. $ Arch. fur Entwicklungsmech., t. XXIV, 4907, et XXVII, 1909; Cf. Rev. 1907, p. 838. 6 È — Muünch. mediz. Î } À ces expériences les deux pronucléi; il constate, d'une facon générale, que, si le spermatozoïde n'intervient qu'après un début de parthénogénèse, la chromatine paternelle ne prend pas part, d’une facon régulière, à la conjugaison des pronuceléi; une partie de cette chromaline peut, par exemple, rester en dehors de la reconstitution des premiers noyaux de segmentation. Herbst voit donc, dans cette constatation tangible, l'explication probable de la déviation héréditaire ultérieure. Hagedorn‘ a hybridé les deux espèces Strongy- locentroltus purpuralus et S. franciscanus entre elles et avec les spermatozoïdes d'une Astérie (As- terias ochracea). Les hybrides ont montré, d'une facon constante, des caractères maternels purs. Nous avons mentionné (Rev. 1907, p. 837) le développement des œufs d'oursins (Strongylocen- trotus) obtenu par Kupelwieser, en faisant agir sur eux du sperme de Mollusque (moule). L'examen cytologique* a montré à l’auteur que, dans ce cas, le spermatozoïde produit un aster à l’intérieur de l’ovule, mais que son noyau ne se transforme pas et ne se fusionne pas avec le pronucleus femelle. La figure karyokinétique à donc une chromatine exclusivement maternelle, mais des pôles et des. centrosomes paternels. Ce développement est done presque une parthénogénèse. Dans les conditions des expériences de Kupelwieser, il ne se forme pas de membrane autour de l'œuf et il y a souvent polyspermie, ce qui empêche le développement. Loeb” à repris ces expériences, en faisant agir, en mème temps que le sperme d'oursin, des doses convenables de NaOH et à ainsi déterminé la for- malion d'une membrane autour des œufs; il n'ya plus eu de polyspermie el un grand nombre d'œufs se sont développés. Des expériences témoins ont prouvé que la segmentation des œufs est bien due à l’action du sperme de mollusque. Les larves ob- tenues sont des plutei. Elles ont donc entièrement les caractères maternels, mais cela n'est pas sur- prenant, élant données les conslalalions cytolo- giques de Kupelwieser *. Arch. für Entwicklungsmech., t. XXVII, 1909. Arch. fur Entwicklunysmech., t. XX VIF, 1909. Arch. {ür Entwicklungsmech., &. XXVI, 1908. A rapprocher des expériences d'hybridation ci-dessus, les travaux d'Iwanoff (Arch. xlaves Biolog., t. XIT, 1906) sur la fécondation artificielle des Mammifères, qui, d'après l'auteur, aurait une valeur pratique considérable. Il à ob- tenu, grâce à elles, d'assez nombreux hybrides, notamment des zébroïdes (cheval X zèbre) et vu que leur sperme ne renferme pas de spermatozoïdes, Il a obtenu aussi deux hybrides d'une souris blanche © avec un rat blanc Il y aurait lieu de mentionner aussi de nombreuses Notes relatant des faits particuli-rs d'hybridation. Citons seule- ment : Wozrersrorr (Zoo!. Anz., t. XXXIII, 190$), hybrides de Triton cristatus et T. vulysris = T. blasii de l'Isle; — Noack (/bid.), hybrides de Félidés; — Rogpxe (Jen. Zeitsch. für INaturw., t. XLIV, 1908), sur l'anatomie interne des > © © = Les études sur l'hybridation tirent un regain d'actualité de la vogue de la loi de Mendel ; la créa- tion du néologisme mendeliren en allemand est un petit symptôme entre beaucoup de la place que tiennent en ce moment les expériences à son sujet. Les vertus du mendélisme sont glorifiées particu- lièrement par W. Bateson‘, dans la lecon d'ouver- ture de la chaire de Biologie fondée à Cambridge pour l'étude des questions de génétique. L'individu se réduit, pour Bateson, à une somme de caractères unités existant d’une facon indépendante dans les gamètes et se combinant dans la descendance. Le problème de l'hérédité devient ainsi purement analytique ; le sexe, en particulier, est un caractère mendélien; son déterminisme relève donc des mêmes méthodes. Bateson donne, dans cet article, les exemples les plus probants d'hérédité mendé- lienne étudiés récemment, notamment par lui et ses élèves; il insiste sur l'importance pratique que la doctrine peut avoir pour l'élevage et la cul- ture, en permettant la réalisation ad libitum de telle combinaison de caractères utiles. En rendant compte, dans nos précédentes revues, des prinei- pales recherches sur le mendélisme, nous avons insisté, à diverses reprises, sur leur importance et leur fécondité; mais nous pensons toujours que, si un certain nombre de faits d'hérédité s'interprèlent aisément et se prévoient même d'une facon assez précise par les conceptions mendéliennes, il serait exagéré de faire de celles-ci le pivot du problème général de l'hérédité. On peut noter, du reste, dans les travaux publiés, beaucoup d’arbitraire et de sub- jectivité, quant à la délimitation des caractères que l’on traite ensuite comme des unités réelles et indé- pendantes, et beaucoup de subtilité dans l'interpré- tation statistique des résultats, ou même dans celle de leur valeur qualitative. D'autre part, il est cer- tain que nombre de faits d’hybridation résistent à la conception mendélienne. Tel est, en particulier, le cas du croisement des races humaines, ainsi que le fait remarquer K. Pearson”, et cependant des auteurs d’une grande autorité, tels que Davenport”, reconnaissent le mécanisme mendélien dans l'héré- dité de la couleur de nos cheveux ou de celle de no yeux. Donc, tout en reconnaissant la fécondité de la conception mendélienne et sa valeur dans les hybrides de Lépidoptères (Smerinthus ocellata X S. populi) obtenus par Standfuss. 1 The methods and scope of genetics (Cambridge Univ. Press, 1908), traduit dans Biolog. Centralbl., t. XXIX, 1909. Voir aussi son livre : Mendel’s Principles of Heredity (Cam- bridge, University Press, 1909), dont nous avons eu connais- sance trop tard. 2 Biometrica, t. VI, 1908. 3 Cu. B. et GerrruDE DAvenrORT : Amer, Natur., t. XLVII, 1908; Science, t. XXVI, 1907, — Voir aussi : Cu.-B. DAvEN- pont : Determination of dominance in Mendelian inheri- tance. Proc, Amer. Philosoph. Soc., t. XLVII, 1908. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE problèmes pratiques de croisements, soit de végé- taux, soit d'animaux (de génétique, suivant Île terme anglais heureusement créé), il faut éviter de vouloir faire rentrer de force tous les faits dans ce moule. Il y a là une suggestion aussi dange- reuse que celle à laquelle ont conduit les concep- tions de Weismann sur les particules héréditaires (conceptions d'ailleurs proches parentes du men- délisme), ou sur l'individualité des chromosomes”. Parmi les travaux les plus méthodiquement et patiemment conduits sur le mendélisme, sont cer- tainement ceux de Lang sur le croisement entre l'Helix nemoralis et V'H. hortensis*. I a publié à ce sujet un nouveau Mémoire”, où il a étendu ses recherches à divers organes, en particulier aux organes génitaux, et il promet un ouvrage d'en- semble ultérieurement. Pour terminer l'examen de ces questions en rap- port avec le sexe, nous indiquerons une récente revue d'ensemble de Hartmann ‘ sur les phénomènes de sexualité variés que présentent les Protistes, et qu'il distingue en amphimixie (la fécondation or- dinaire), automixie (conjugaison de deux éléments cellulaires ou nucléaires ayant une origine com- mune très proche, et dont il distingue trois va- riétés : pædogamie, autogamie, pseudogamie), et apomixie (processus dérivé de la reproduction sexuée, mais où n'intervient plus de fécondation : parthénogénèse, apogamie). C'est particulièrement sur l'automixie qu'Hartmann s'étend, tant au point de vue des faits que de leur signification. Nous ne pouvons le suivre ici dans les spéculations aux- quelles il se livre sur la filiation de ces divers pro- cessus. Notons, en particulier, que Hartmann, sans nier la grande signification biologique de l’'amphi- mixie, au sens de Weismann, considère qu'elle ne peut plus expliquer la fécondation. 1! Une note de Ziegler (Zoo!. Anz., t. XXXIII, 1908), sur la spermatogénèse d'H. hortensis et H. nemoralis, montre combien il est aisé de selaisser suggestionner; l'A. nemoralis présente quarante-huit chromosomes, dont deux grands qui ne se retrouvent pas dans toutes les spermatides. L’au- teur explique les faits observés par Lang, dans le croise- ment des deux espèces (et conformes à la loi de Mendel), relativement à la transmission des bandes noires de la coquille, en supposant que les deux grands chromosomes représentent ces bandes. Sans doute, toutes les hypothèses sont permises, mais il est dangereux de déduire ensuite, quand elles sont aussi gratuitement établies, et on l'oublie trop souvent. ? Un espace de neuf ans n'a pu fournir que cinq expé- riences successives. La croissance des Helix est lente, et il est indispensable d'élever ab ovo les individus sur lesquels on opère d'abord, pour être sûr qu'ils soient vierges. Les spermatozoïdes introduits par un premier acccouplement restent, en effet, actifs pendant plusieurs années, et si un Helix a été fécondé une première fois par un individu de son espèce, en cas d'hybridation ultérieure, ce sont seule- ment ces premiers spermatozoïdes qui interviennent. 3 Festschrift Univ. Iena, 1908; cf. Rev., 1906, p. 35. 4 Arch, für Protistenk., t. XIV, 1909. M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE AN UELLE DE ZOOLOGIE 851 IV. — VARIATION. Une expérience de Marchal! sur un coccide de l'Acacia, le Lecanium robiniarum, montre sur le vif la formation d'une espèce nouvelle, Ce coccide, en effet, n’est signalé que depuis une trentaine d'années, et il a été décrit comme une espèce dis- tincte, en 1890, par le savant le plus autorisé, Dou- glas. Il est invraisemblable de supposer qu'il ait existé antérieurement sur le Aobinia, car, en raison de sa taille (celle d'un pois), il n’eût pas échappé à l'observation, soit en Europe, soit en Amérique, patrie de l'arbre : d'où l’idée qu'il devait provenir récemment d'un autre Lecanium, et Marchal a sup- posé que ce devait être d’un type très voisin, le L. corni, parasite du pêcher, du rosier et de la vigne. Marchal a placé alors sur un ÆRobinia (en prenant les précautions d'isolement nécessaires) une femelle müre de Z. corni; elle a pondu, les larves ont grandi sur le Æobinia; finalement, il a obtenu quatre individus adultes identiques au Z. robiniarum. C'est la démonstration de la formation de cette forme aux dépens de Z. corni. Marchal n'a pas pu réussir la transformation inverse, en mettant des Z. robiniarum sur un pêcher, ni sur des rosiers ou des vignes. Il conclut de ses obser- vations que le ZL. robiniarum n’est qu'une variété du Z. corni. C’est, en effet, ce qui est conforme à nos habitudes en systématique. Mais il nous paraît non moins certain que nous avons là un exemple de la formation d’un type nouveau, par adaptation à des conditions nouvelles; d’ailleurs, en l'absence de l'expérience, les systématistes autorisés ont fait du Z. robiniarum une espèce nouvelle autonome, et l'on peut supposer que plus d’une espèce nom- mée par eux dans les conditions habituelles prête- rait aux mêmes considérations, si l’on expérimen- tait à son sujet comme l'a fait dans ce cas Marchal. La formation de ce type nouveau est, en outre, un exemple en faveur des idées lamarckiennes. C'est encore à la variation sous l'influence de facteurs extérieurs que se rattache une Note de Tornier*, qui montre l'influence de la nourriture sur la pigmentation des larves d’un Batracien, le Pelobates fuscus. Une nutrition insuffisante pousse vers l’albinisme, un excès de nourriture conduit au mélanisme. D'autre part, Powers” conclut, d'une façon analogue, des recherches sur l’'Amblystoma tigrinum; selon lui, la plupart des variations individuelles constatées chez ce batracien sont déterminées pendant la vie larvaire par les facteurs extérieurs; la métamorphose tend à uniformiser. “ C. R. Soc. Biol., t. LXV, 1908, et Ann. Soc. Entom., t. LXXVII, 1908. ? Zool. Anzeïiger, t. XXXII, 1907. * Stud, Zool. Labor, Univ. Nebraska, Lincoln, 4907. Woltereck a cultivé, d'une façon pure, en fai- sant varier diverses conditions", deux variétés de Daphnia longispina des deux lacs de Lünz et conclut que ce sont deux formes locales fixées; il exprime, en outre, l'opinion que la source de la formation des espèces doit être la variation continue sous l’action du milieu. Krätschmar”* a étudié, d'autre part, le polymorphisme d'un Rotifère, l'Anuraea aculeata, par des élevages méthodiques. Il a vu les types à épines très courtes donner des œufs d'hiver d'où sortent des individus à épines longues. La longueur de celles-ci diminue graduellement pen- dant une série de générations parthénogénétiques jusqu'à ce qu'arrive la génération bisexuée qui forme les œufs d'hiver (Vauereier). Mais l’auteur n'a pas pu mettre en évidence une action nette de facteurs tels que l'éclairement, la nourriture, la viscosité, la température, sur ces variations; tout au plus ces agents ont-ils accéléré ou retardé le développement. Ces divergences montrent combien complexes sont les questions de cette nature. Citons enfin un intéressant travail de Noack*, dans lequel il décrit les rapides variations du crâne chez le loup et le chacal sous l'influence de la captivité et la ressemblance qui se manifeste dans les deux cas avec celui du chien. Aussi l’auteur fait-il dériver le chien du chacal et du loup plutôt que d’une forme sauvage spéciale, plus ou moins voisine du dingo. NA NSEXE. Dans les nombreux travaux sur le déterminisme du sexe, au milieu de résultats discordants, il apparait cependant comme de moins en moins probable que le sexe puisse être déterminé sous l’action de facteurs externes au cours du dévelop- pement. H. D. King conclut dans ce sens, au sujet de l'in- fluence possible de la nourriture sur les embryons d'Amphibiens (Bufo*). Le degré de maturité de l'œuf, lors de la fécondation, ne lui paraît pas non plus avoir d'influence décisive *. 1 Verhandl. deutsch. zool. Gesellsch., 1908. ? Internal. Rev. der gesammten Hydrobiol. und Hydro- geogr., t. I, 1908. 3 Zool. Anz., t. XXXI, 1907, * Biolog. Bull. Wood's Holl, t. XIII, 1907, et XVI, 1909. 5 Il y aurait lieu de mentionner ici les recherches faites sur l'influence des facteurs externes (température, nutri- tion, etc.), pour déterminer l'apparition de la reproduction sexuée chez les animaux qui se multiplient par bourgeon- nement. Whitney (Arch. für Entwicklungsmech., t. XXIV, 1907) a expérimenté à ce sujet sur l'Hydre verte et constaté que le froid (0° environ), suivi du jeüne (à des températures variant de 11 à 260), amenait la production de sperma- tozoïdes puis d'ovules, tandis qu'une alimentation abon- dante, dans les mêmes conditions, empêchait l'apparition des cellules sexuelles. Des expériences analogues faites par 852 M. CAULLERY £r F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE Le cas du Rotifère Æydatina senta, où Punnett (v. Revue 14907, p. 840) avait nié l'influence de la température (Maupas) et de la nutrition (Nussbaum), est encore le sujet d'expériences de Whitney’ dont la conclusion est négative comme celle de Punnett, et l’auteur attribue la détermination du sexe à des facteurs internes. On est done amené de plus en plus à admettre que le sexe résulte de facteurs internes et qu'il est déterminé, au plus tard, lors de la fécondation. Nous avons relaté (Revue 1907, p. 838) les nom- breux travaux inspirés surtout par Edm. Wilson, où la détermination du sexe est rattachée à la composition du noyau et plus spécialement aux chromosomes. La présence ou l'absence de chro- mosomes d'aspect et de dimensions spéciales (idio- chromosomes), déterminerait le sexe, et les deux dis- positions possibles seraient réalisées dans nombres égaux de gamètes lors des divisions maturatives. Le sexe du produit serait un phénomène d'ordre mendélien. Ed. Wilson et ses élèves ont continué à accumuler des faits dans ce sens, en étudiant la spermatogénèse de types nombreux, surtout chez les insectes”. Au fur et à mesure que ces recherches se multiplient, il faut noter que les résultats s’en diversifient, et Wilson, dans un de ses Mémoires récents (S{ud. on chromosomes, IV), en fait une revue d'ensemble qui le conduit à distinguer au moins cinq cas et peut-être sept. Il serait trop long d'entrer ei dans les détails, pour lesquels nous ren- voyons à l'original. On trouvera aussi une discus- sion étendue de l'ensemble des faits publiés dans un Mémoire tout récent de von Baehr* sur l’ovo- génèse et la spermatogénèse de divers Aphides*. Frischholtz (Biol. Centralbl., 1909) n'ont pas donné de résultats bien précis. A propos de l'#ydra viridis, signalons le procédé très élégant, trouvé par Whitney (Biol. Bull., t. XI, 1907), pour la débarrasser de ses zoochlorelles: celles-ci sont rejetées dans le tube digestif et de là au dehors, quand on fait séjourner l'hydre dans une eau contenant 1,5 à 5 0}, de glycérine : l’hydre continue à vivre et peut être nourrie aisément. 1 Journ. Exper. Zoology, t. NV, 1907. ? En Wicsox : Studies on chromosomes, IV et V. Journ. Æxper. Zoology, t. VI, 1909. — N. M. Srevexs : Zhid., t. V, 1908;"et-VI, 1909 A. M: Born : Zbid., t. IV, 4907. — H. Ranpozen : Biol. Bull., t. XV, 1908. — P. DEberER : 1bid., t. XILT, 4907. — Payxe : /bid., t. XIV, 1908, etc. 3 Arch. 1. Zellforschung, 1. II, 1909. * Entre autres faits nouveaux, von Baehr a constaté que, dans la spermatogénèse d'Aphis saliceti, l'une des sperma- tocytes résultant de la première division de maturation avorle: celle qui persiste renferme l'hétérochromosome caractéristique du sexe femelle. Comme, d'autre part, l'œuf fécondé des pucerons donne nécessairement une femelle, l'auteur voit là une confirmation des idées de Wilson. En elfet, par suite de l'avortement d'une spermatocyte de deuxième ordre, les spermatozoïdes qui ne renferment pas d'hétérochromosome ne se forment pas, et les seuls qui aboutissent sont ceux qui ont la structure caractéristique du sexe femelle; on s'explique donc l'absence totale de mâles ‘ans les générations non parthénogénétiques, qui a priori C'est également à une combinaison mendélienne que Correns” rapporte la détermination du sexe, au moins pour une partie des végétaux supérieurs, à la suite d'expériences d'hybridation entre le Pr yonmà alba (monoïque)etle Z. dioica (dioïique). Nous men- tionnons ici ce travail, quoiqu'il se rapporte aux végétaux, en raison du retentissement assez grand qu’il a eu et des analogies qu'il offre avec les recherches précédentes. Correns déduit de ses expériences que tous les éléments Q de Z. dioica ont la tendance ©, tandis que les éléments 7 ont : 50 °/, la tendance Ç* et 50 °/, la tendance Q. Il y à production d'un individu mâle quand la féconda- tion est opérée par un grain de pollen à tendance ç* (qui est dominante), et la dissociation des deux ten- dances dans la lignée mäle se ferait lors des divi- sions maturatives ?. VI. — CARACIÈRES SEXUELS SECONDAIRES. Quel est le mécanisme de leur corrélation avee les glandes sexuelles? On est porté à admettre une sécrétion interne des testicules ou des ovaires, agissant pour déterminer les caractères sexuels secondaires. Cunningham‘ développe cette con- ception générale, d'une manière d'ailleurs toute théorique, et appelle (avec Starling) hormones les sécrétions en question (pour le moment hypothé- tiques); il imagine même un mécanisme de cet ordre pour expliquer l'hérédité des caractères ac- quis. G. Smith‘ objecte à Cunningham des faits tirés de la castration parasitaire des crabes par la sacculine. Un mâle châtré par elle acquiert des ca- semblait une objection décisive contre la théorie de Wilson. Indiquons, du méme auteur, un travail (Zool. Jahrh (A nat.), t. XXIV, 1907) où il a constaté que les œufs parthénogé- nétiques d'un Phasmide (Bacillus rossi) n'expulsent qu'un globule polaire. ! Correns : Die Bestimmung und Vererbung des Ge- schlechts, nach Versuchen an hüheren Pflanzen. Arch. für Rassen und Gesellschaftsbiol., t. IV, 1907, et à part. ? Il ne peut cependant, en tout état de cause, y avoir là une explication générale, car on s'expliquerait difficile- ment par un mécanisme mendélien les cas où les deux sexes sont numériquement très inégaux, et Montgomery (Jdourn. Exper. Zoology, t. V, 1908) vient d'en étudier avee précision un très caractéristique, celui d'une Araignée, le Lathrodectus mactans ; les mâles sont faciles à reconnaitre, étant dès la sortie du cocon beaucoup plus petits que les femelles. Montgomery a compté les sexes à la sortie du cocon, et, dans ses élevages, a trouvé 37.210 GG contre 4.539 © (soit T _s19). Des cocons sauvages ont donné ? 3.866 g' contre 223 © (soit — 17,3); dans les cocons con- sidérés isolément, le rapport à varié de 2 à 27. Resterait cependant à voir si la différence numérique entre les œufs des deux sexes ne s'explique pas par des circonstances de l'ovogénèse, telles que l'absorption de plusieurs cellules ovulaires sœurs par chaque ovule femelle définitif. % Arch. für Entwicklungsmech., t. XXVI, 1908. * Ibid., t. XX VIT, 190$. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE ractères sexuels secondaires de femelle en l'ab- sence de tout ovaire; la sécrétion ne dépendrait donc pas de la présence de la glande même”. Nous avions relevé (Revue 1907, p. 841) l’intéressante expérience de Nussbaum, faisant réapparaitre les caractères sexuels secondaires (tels qu'ils se mani- festent lors du rut) chez le mâle chätré de Æana- fusca, auquel il greffait sous la peau un morceau de testicule. Cela plaide en faveur d'une sécrétion testiculaire agissant directement ou indirectement par le système nerveux. Des expériences du même ordre, faites en châtrant des chenilles, par Oude- mans (Üeneria dispar) et par Kellog* (Bombyx mori), n'avaient produit aucune modification sur le papillon. Meisenheimer', de même, a opéré plus de six cents chenilles d'Ocneria dispar, entre la seconde et la troisième mue; les unes ont été simplement châtrées; chez d'autres, on a, en outre, transplanté des glandes génitales du sexe opposé (elles se sont développées après greffe), mais il n'y a pas eu, chez les papillons, d'altéra- tion des caractères sexuels secondaires. Ils sont restés ce qu'ils auraient été normalement. Mei- senheimer conclut seulement qu'ils doivent être déterminés avant la seconde mue*. Kopec°, lui aussi, à transplanté” des glandes génitales de Lépi- : Smith fait remarquer, à l'appui de sa thèse, que, chez les Mammifères, le plein développement de la mamelle est en rapport avec la gestation, non avec l'ovaire; mais on peut opposer à cet argument les travaux récents relatifs au rôle du corps jaune, qui est une partie de l'ovaire, et qui parait, au moins chez certains animaux, commander les transformations de l'utérus, et par suite être à l’origine des transformations des glandes mammaires. Voir à ce sujet les travaux de Ancel et Villemin (C. Æ. Soc. Biol., t. LXII, 1907), et Bouin et Ancel (Zbid., t. LXV, 4908, et LXVI, 1909 passim). Chez la femme et la chienne, où l'ovulation est spontanée, les auteurs montrent que le corps jaune pré- cède la menstruation pour la première, le rut pour la seconde. Chez la lapine, où l'ovulation suit l'accouplement, ils font couvrir la femelle par un mäle dont les canaux déférents sont réséqués; et, suivant qu'ils laissent évoluer ou non le corps jaune, ils voient se produire ou non toutes les transformations de l’utérus qui précèdent la fixation de l'embryon. Sur le déterminisme de l'ovulation et des modifications consécutives de l’utérus, voir aussi les notes de Regaud et Dubreuil (C. 4 Soc. Biol.,t. LXIIT, 1907; LXIV, LXV, 1908; LXVI, LXVII, 1909 passim), dont les conclusions sont com- patibles avec les derniers résultats de Bouin et Ancel. ? Zouloy. Jahrbücher (System.), t. XII, 1899. SJourn. Exper Zovl., t1, 1904. # Zvol. Anz., t. XXXII, 1907, et Experimentelle Studien zur Soma und Geschlechtsdifferenzierung. lena (Fischer), 1909. 5 Hegner (Journ. Exper. Zool., t. VI, 1969) a fait, sur l'œuf de certains Chrysomélides, des constatations qui mon- trent la précocité de la différenciation des glandes génitales et peut-être des caractères sexuels. Si l’on enlève, en elttet, à l'œuf non segmenté, un groupe particulier de granules situés dans la couche cytoplasmique, près du pôle posté- rieur (ou, un peu plus lard, un groupe de seize cellules dans lesquelles ces granules sont inclus), on obtient des individus chätrés. $ Bull. Acad, Cracovie, novembre 190$. ? Signalons ici, à propos de transplantation, quoiqu'elles 853 doptères, d'un sexe à l’autre, ou injecté à des indi- vidus préalablement châtrés, soit de la substance de glandes génitales broyée, soit du liquide de la ‘avité générale d'individus du sexe opposé, mais sans obtenir d'altération dans la morphologie n1 dans les instincts des papillons opérés. VII. —— GÉOGRAPHIE ZOOLOGIQUE. — FAUNES. Signalons d’abord, comme manuel de détermina- tion pouvant être très utile, la Deutsche Stüiss wasser- excursionsfauna, qui a commencé à paraitre cette année, sous la direction de Brauer', avec la collabo- ration de divers spécialistes. Nous mentionnons pour mémoire les contribu- tions documentaires à la faune du globe, fournies par les diverses expéditions océanographiques en cours de publication?, et nous nous attachons seu- lement à quelques faits particuliers ayant un intérêt général. Germain * a publié une très importante thèse sur la faune malacologique de l'Afrique équatoriale ; on y trouvera, basée sur une documentation très abondante et personnelle, la discussion des diverses hypothèses sur les anciennes connexions territo- riales de l'Afrique avec l'Amérique du Sud et l'Inde, etc.*. On lira aussi avec fruit un article de Hagmann’, d'ordre plus restreint, sur les Mammifères ter- restres de Mexiana, l'une des îles situées dans l'estuaire de l'Amazone. La largeur des bras du fleuve et la rapidité des courants y rendent toute migration de Mammifères extrèmement difficile. L'ile constitue donc une aire de ségrégation pour ceux qui s'y trouvent. Hagmann n'y à pu collec- tionner que quatorze espèces (la grande île voisine de Marajo lui a fourni cinquante espèces de grande taille); or, chez toutes, et bien qu'il n'ait eu que des matériaux restreints, il a trouvé de nom- breuses variations par rapport aux formes corres- pondantes du continent, notamment une réduction de taille, de fréquentes anomalies dentaires, etc. aient été faites dans une autre intention (celle d'essayer de modifier l'hérédité), les expériences de Guthrie sur des poulets. Il transplante chez une poule noire l'ovaire d'une blanche, et inversement. Il voit ensuite quelle est la cou- leur des descendants. Ses résultats sont trop peu nombreux pour avoir une signification précise. Citons aussi comme ouvrage d'ensemble : Regeneration und Transplantation, de Korschelt. Lena (Fischer), 1907. 4 Jena, Fischer, 1909. Suite de fascicules. ? Prince de Monaco, Expéd. Charcot, Valdivia, Siboga Gauss, Belgica, Discovery, Scotia, Expéd. antarctique sué- doise, etc. * Arch. Zool. Exper. (sér. 5), t. I, 1909. 4 Von Jhering a réuni, sous le titre Archhelenis et Archi- notis (Leipzig, Engelmann, 1907), les divers Mémoires pu- bliés précédemment par lui sur la faune malacologique de l'Amérique du Sud et les problèmes connexes de Géologie. 5 Arca. 1. liasseu und Grsellschaftshisl., € N, 1908. ‘Cela a été particulièrement accentué sur les espèces de grande taille, dont la population et, par suite, les possibilités d’amphimixie sont restreintes. Les grandes espèces ont une tendance à être éliminées d’un milieu ainsi confiné; les petites subsistent, mais en variant. Des études de cet ordre illustrent très bien le transformisme actuel *. L'article de Steinmann * sur la faune des ruis- seaux de montagne offre aussi un intérêt général, parce qu'il montre bien les traits communs aux animaux de ce milieu : la convergence sous l’action de l’eau courante et qui se traduit par l’aplatisse- ment dorso-ventral, la différenciation d'appareils de fixation, l’alourdissement (tubes des phryganes), la grosseur des œufs et l'allongement de la vie embryonnaire, enfin la reproduction à basse tempé- rature. Cette faune est le résidu localisé de celle des eaux douces de la période glaciaire. Dans le domaine de l’océanographie biologique, nous mentionnerons un nouveau travail de Loh- mann* sur le dosage du plancton (Cf. Rev. 1903, p- 624) par les méthodes indiquées par Kofoïd (filtration sur papier buvard, etc.). Ces procédés, outre qu'ils rectifient les données quantitatives, permettent l'observation des petits organismes qui passent à travers le filet de soie à bluter. Tels sont les Coccolithophorides, sur lesquels le même auteur publie un intéressant article‘; ils s'accumulent sur le fond, au point qu'on en évalue le nombre à 500 millions par mètre carré en certains endroits, mais on les trouve aussi, en abondance, dans les excréments d'animaux pélagiques (Salpes, Ptéro- podes, etc.), qui en sont de véritables collecteurs. Sur ce grand problème de la répartition et de l'équilibre de la vie dans l'Océan, Pütter® a publié un Mémoire des plus suggestifs sur le cycle de la 1 Du même auteur, signalons une intéressante note (Mitth. geolog. Landesanstalt Elsass-Lothringen, t. VI, 1908) sur les variations de la marmotte. L'Arctomys primi- genius de la période glaciaire est la souche des deux espèces actuelles (A. marmotta de nos montagnes et A. bobac des steppes russes), qui se sont différenciées par ségrégation. Sur l'importance de la ségrégation pour la formation des espèces, on lira avec profit un Mémoire de K. Jordan (Zeitsch. fur wiss. Zoologie, t. LXXX!HII, 1905), résultat de longues recherches sur les Lépidoptères. ? Ann. Biolüg. lacustre, t. 11, 1907. 3 Wissensch., Mecresunters., N.-F., {. X, Abth. Kiel, 1909. 4 Internat. Rev.der gesammten Hydrobiol., ete., t.1, 1908. 5 Zeitsch. fur allg. Physiologie, t. VII, 1907. — Cf. analys. in Rev. du Mois, t. V, p. 487. M. CAULLERY £r F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE substance vivante dans les eaux. Il fait toucher l'erreur de raisonnement qui a consisté à appliquer sans contrôle aux organismes aquatiques ce qui est sûr pour les animaux terrestres, à savoir que leur nutrition se fait principalement par absorption de matériaux solides. Pütter fait remarquer que l'eau de mer renferme des masses énormes de carbone à l’état de combinaisons dissoutes (65 milligrammes par litre dans le golfe de Naples, d’après ses mesures). Il y aurait d'après lui, dans l’eau de mer, 24.000 fois plus de carbone dissous (dont 17.000 à un état différent de CO*) que de carbone solide sous forme d'organismes, et c'est surtout de ce car- bone dissous que beaucoup d'animaux marins infé- rieurs doivent se nourrir. Des calculs de Pütter (faits sur une Eponge : le Suberites domuncula, sur des Radiolaires : les Collozoum, etc.) font ressortir que c’est seulement en faisant entrer en jeu le car- bone dissous qu'on arrive à des chiffres raison- nables. On peut imaginer que l'absorption s’en fait par osmose, comme pour le CO* de la respiration et par les mêmes organes. Ces simples indications font concevoir l'importance du problème ainsi posé. Enfin, nous rattacherons à l'océanographie zoolo- gique les résultats obtenus sur les migrations de l’Anguille. C’est il y a quelques années ‘seulement qu'on à établi vraiment que les Leptocéphales sont les larves des Anguilles. J. Schmidt‘, réunissant toutes les données acquises, conclut que les An- guilles des fleuves de l’Europe septentrionale doivent naître et se développer au bord de la grande falaise sous-marine, dans les profondeurs de 1.000 brasses, par environ 10° long. O. C'est là, en effet, que l’auteur a constaté les essaims de Leptocé- phales (mesurant environ 7 centimètres) qui doivent effectuer leur migration vers la côte en un an enwi- ron. Les stades qui précèdent et les circonstances de la ponte sont encore inconnus, mais on peut considérer comme certain que les œufs sont bathy- pélagiques?. | F. Mesnil, Chef de Laboratoire à l'Institut Pasteur. M. Caullery, Professeur à la Faculté des Sciences de Paris. ‘ Conseil permanent pour l'explor. de la mer du Nord, Rapp. et procès-verbaux, t. V. * Sur les migrations et la détermination de l'âge de l’An- guille basée sur les écailles; voir également un Mémoire de Genzoë(Rep.danish Biol. Stat.to Boardof Agric., t. XLV,1908). BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 855 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Perret (E.), Lieutenant de Vaisseau, Professeur à l'Ecole navale. — Navigation. (Instruments. Obser- vations. Calculs). —1 vol. de l'Encyclopédie scienti- fique publiée sous la direction du D' Toulouse. (Prix: 5 fr.) O. Doin, éditeur. Paris, 1909. Ce livre, qui appartient à la Bibliothèque de Mathé- matiques appliquées de l'Encyclopédie publiée sous la direction du D' Toulouse, expose les méthodes et les moyens employés aujourd'hui pour la conduite des navires. Monographie particulière dans ce vaste en- semble, il contient seulement au début, avec un tableau des notations employées, un rappel des plus succinets des formules relatives à l’ellipsoide terrestre et de celles de la trigonométrie sphérique dont on fera usage; puis l’auteur entre de plain-pied dans son sujet avec la «navigation par l'estime », c'est-à-dire par che- minement. Après une description sommaire du compas, on étudie comment corriger ses indications pour les rapporter aux pôles vrais de la Terre, et comment vérifier à la mer que ces corrections sont exactes. Vient ensuite l'exposé des différents lochs réclamés par les vitesses sans cesses croissantes des navires. L'étude complète des cartes marines, qui suit, explique et montre que la représentation de Mercator adoptée par les marins est purement conventionnelle et n'a d'autre but que la simplification considérable des problèmes de navigation, qu'elle ramène, en effet, aux opérations graphiques les plus élémentaires. — Les instruments primordiaux de toute navigation ainsi passés en revue, le problème du point estimé est ensuite abordé et, par conséquence immédiate, celui des navigations loxodro- mique et orthodromique, correspondant soit au plus court chemin sur la carte, soit au plus court chemin sur l’ellipsoide terrestre. Bien entendu, la discussion rationnelle de ces deux genres de navigation suit cet exposé. k Ù Cette navigation première ainsi dégagée, l’auteur aborde la « navigation astronomique ». Suivant le même processus que précédemment, il commence par expliquer les ouvrages et instruments qu’elle néces- site. La « connaissance des temps » retient d'abord son attention : à noter, dans ce chapitre, le para- graphe relatif à l’interpolation; M. Perret y montre clairement comment et pourquoi ont été choisis les différents échelons des tables de cet ouvrage, et en déduit le procédé optimum d'’interpolation dans chaque cas. À propos de l'usage de ces tables se trouve traité le problème général de la conversion des temps simul- tanés, en supposant toutefois toutes les notions d'astro- nomie nécessaires acquises. Le sextant est ensuite décrit et analysé en détail, avec les erreurs possibles et probables et les vérifica- tions et rectifications indispensables. L'usage de cet instrument conduit logiquement à exposer les correc- tions que doivent subir les angles mesurés pour passer de l'apparence à la réalité, et, naturellement, l'auteur traite la question de la correction des hauteurs. Enfin, le dernier, mais le plus précieux des instru- ments du navigateur, le chronomètre, est l'objet d'une étude approfondie, avant de passer au problème du point proprement dit. L'importante question du ré- glage des chronomètres y est divisée en trois parties. Dans la première, on traite de la détermination de l’état absolu au moyen des différents calculs d'heure (calcul par hauteurs considérées isolément, puis réduc- tion par séries de hauteurs, enfin méthode des hauteurs ET INDEX égales, la plus précise de beaucoup, surtout si l’on se sert de l’astrolabe à prisme, dont il n'est fait que mention avec indication des traités spéciaux sur ce sujet, et, cas particulier de celie-ci, méthode des hau- teurs correspondantes). La détermination de létat absolu par comparaison dans un observatoire ou au moyen des différents signaux horaires est mentionnée ensuite. Dans une seconde partie, on s'occupe des marches des chronomètres et de la façon de déter- miner d'après les observations la marche la plus pro- bable; puis, dans un troisième et dernier paragraphe, intitulé « variation des marches », l'auteur étudie le chronomètre proprement dit, c'est-à-dire ses varia- tions avec la température et avec le temps, et montre comment on peut tirer parti des différentes observa- tions et des diverses circonstances, afin d'arriver à connaître le «tempérament» propre de chacun des chronomètres. L'exposé critique des différents instru- ments du navigateur est alors achevé : les pages qui suivent vont montrer comment on utilise leurs indica- tions dans le problème du point astronomique. Cette étude sera divisée en trois étapes : détermination d'un lieu géométrique du navire sur la sphère terrestre et image de ce lieu sur la carte; utilisation de ces lieux géométriques pour conclure le point observé (point à midi, point par hauteurs simultanées) et influence des erreurs des données sur le point conclu; enfin naviga- tion sans chronomètre. Le cadre du livre n’a pas permis de traiter la ques- tion des courbes de hauteur, et l’auteur a dû se con- tenter d'en énoncer les propriétés principales et de démontrer que la substitution de la droite de hauteur à la courbe était légitime, sauf dans quelques cas rares où il donne alors le moyen de tracer directement la courbe de hauteur. Il examine, en outre, quelques cas où le calcul de la droite de hauteur se simplifie en particulier celui de hauteurs circumméridiennes. Dans la navigation sans chronomètre, on voit que, si l'on peut avoir avec assez de précision la latitude, soit par la méthode des circumméridiennes, grâce à un calcul d'heure approché lorsque l’on possède cependant une mauvaise montre, soit par la méthode des culmi- nations indépendante de l'heure, par contre la longi- tude ne peut guère s'obtenir que par la distance angn- laire d'un astre à la Lune, et le rapide exposé de la méthode qui en est fait suffit à en montrer toute l’illu- sion en pratique. Toutefois, lorsque les progrès de l'optique auront augmenté suffisamment la puissance des jumelles de dimensions pratiques, l’Astronomie pourra fournir aux navigateurs, au moyen des occulla- tions des étoiles moindres, un excellent procédé de connaitre la longitude. M. Perret complète son livre par un appendice sur le calcul logarithmique (emploi et choix d'une table, exécution matérielle d'un calcul), puis il montre la pré- cision avec laquelle les logarithmes donnent le résultat, et l'ouvrage se termine par quatre tables complémen- taires des tables de logarithmes ordinaires, sur la réfraction astronomique, la correction d’azimut dans le tracé d’une droite de hauteur, la droite de hauteur au moyen de la polaire, et la distance entre la courbe de hauteur et la droite de hauteur, ainsi que par quatre types de calcul courants : calcul d'heure par hauteurs correspondantes, calcul d'une droite de hauteur (2 méthodes) et enfin point complet par hauteurs simultanées d'étoiles. En somme, dans son livre, M. le lieutenant de vais- seau Perret s’est appliqué à condenser tout ce qui pou- vait être pratiquement utile aux navigateurs et à BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX exposer cet ensemble aussi scientifiquement que pos- sible, c'est-à-dire d'une manière à la fois précise et critique. Son livre forme ainsi un véritable manuel de l'officier de navigation; mais qu'il nous soit permis cependant de regretter de ne pas voir dans cet ouvrage un aperçu de la théorie des marées et surtout un résumé de celle des compas. Ce sont là deux questions de toute première importance dans la navigation, et, sil est vrai que tout navigateur aura sous la main les ouvrages sur ces sujets auxquels l’auteur renvoie lui- même dans son introduction, il eût cependant été dans le caractère de P « Encyclopédie scientifique », semble-t-il, que cette monographie formât un tout complet et homogène sur toutes les questions pri- mordiales de la Navigation. Il semble aussi qu'un rappel un peu moins succinct des notions relatives à l'ellipsoide terrestre eût rendu ce livre plus abordable à beaucoup d'intéressés en le faisant plus autonome, c'est-à-dire indépendant de tout autre ouvrage, et cela sans l'alourdir. L'écriture en plusieurs lignes de la plupart des relations trigonométriques un peu longues en rend parfois aussi la lecture laborieuse, mais cela n'atténue cependant aucune des nom- breuses et très sérieuses qualités de cet ouvrage, qui le font précisément désirer encore plus parfait. J. Bio, Enseigne da Vaisseau, Diplômé de l'Ecole supérieure d'Electricité de Paris. 2° Sciences physiques Rubhmer (Ernst). — La Téléphonie sans fil. Traduit de Pallemand par M.L. ANCEL, Ingénieur des Arts et Manufactures. — 1 vol. gr. in-8' de 225 pages avec 151 figures. H. Deslorges, éditeur. Paris, 1909. Bien que l'on entende plus précisément par téle- phonie sans fil l'étude des procédés qui ont pour objet la transmission de la parole par les ondes électriques, on ne saurait passer sous silence les tentatives anté- rieures qui ont élé faites pour obtenir une pareille transmission, soit à l’aide des ondes lumineuses, soit jar les moyens physiques les plus divers. L'exposé que fait l’auteur de ces différentes tenta- lives constitue une introduction d'autant plus naturelle à l'étude de la téléphonie par ondes électriques que les procédés de transmission par ondes lumineuses et ondes électriques présentent nombre de caractères communs. M. Ruhmer, dont la contribution à l'étude de la cellule de sélénium est bien connue, se trouvait particuliè- rement qualifié pour exposer la photophonie, où il a su obtenir des résultats tout à fait remarquables. Ces développements sur la photophonie font saisir d'une manière claire le mécanisme par lequel les modulations de la parole peuvent influencer les ondes électriques, soit en modifiant l'intensité des ondes émises, soit en en modifiant la période. L'auteur s'est étendu — un peu longuement peut- être — sur les nombreux et infructueux essais qui ont élé entrepris, dès les débuts mèmes de la téléphonie sans fil, pour obtenir la transmission de la parole à l’aide d'oscillations excitées par étincelles. De pareilles tentatives étaient vouées à un échec certain, à cause de la discontinuité des décharges. La télé- phonie sans fil ne pouvait avoir quelque chance de succès que le jour où l’on serait parvenu à substituer, à la succession de décharges discontinues et amorties que fournit l'excitation par étincelles, un train unique et continu. C'est le résultat que permet d'atteindre le procédé de Poulsen. Aussi est-ce de l'apparition du procédé d'excitation par arc que datent les essais vraiment sérieux de transmission de la parole par ondes élec- triques. M. Ruhmer, qui s'est occupé avec succès et de l'arc parlant, et de la production des oscillations continues, soit par l'arc à basse tension, soit par l'arc à haute tension, fait connaître tous les dispositifs utilisés et toutes les expériences exécutées. L'auteur a eu l’idée heureuse de donner, en traitant chacune des questions qu'il rencontre, le résumé des théories générales capables de les faire comprendre même des non-spécialistes, initiative dont on doit le féliciter. En dehors de la description des propres expériences de M. Ruhmer, l’ouvrage fournit par ailleurs des préci- sions techniques très complètes sur l’are de Poulsew et son emploi, ainsi que sur les procédés plus récents de production des oscillations continues de haute fréquence. Les spécialistes y trouveront, en particulier, à pro- pos d'une discussion de priorité, fort intéressante d’ailleurs, de l’auteur avec Poulsen,une étude complète des procédés de soufflage magnétique. À L'on trouvera également traitée la question pleine d'avenir de la production des oscillations par les alter- nateurs à haute fréquence. Bien que l'arc de Poulsen permette d'obtenir une solution immédiate du problème de la téléphonie sans fil, il paraît jusqu'ici difficile de lui donner une stabi- lité assez parfaite pour en rendre l'emploi vraiment industriel. Le problème serait complètement résolu si l'on parvenait à produire les oscillations à haute fré- quence par des procédés purement mécaniques, à l'aide d’alternateurs, de même que l'on produit les courants alternatifs de basse fréquence. Dans la con- struction de pareils alternateurs, on rencontre malheu- reusement nombre de difficultés que l’auteur est en mesure de discuter avec une autorité d'autant plus grande qu'il a réalisé personnellement l'alternateur qui donne la fréquence la plus élevée qui ait été encore atteinte avec un alternateur (300.000 périodes p. sec.). On trouvera dans des tableaux insérés dans l'ouvrage les principales données sur les divers alternateurs à haute fréquence qui ont été établis jusqu'à présent. Il faut savoir gré à M. Ruhmer d'avoir rassemblé ces documents qui étaient épars dans nombre de publi- cations. La lecture de l'ouvrage est d'autant plus attrayante que la traduction en a été faite d'une manière particu- lièrement élégante et claire, et que l'exécution typo- graphique ne laisse rien à désirer. Ajoutons que l'ouvrage est précédé d'une préface substantielle de M. Blondel. De consciencieuses références bibliographiques offrent au lecteur une mine de documents très riche en lui permettant de se reporter aux sources originales: C. Tissot, Professeur à l'École navale. Euler (H.), Professeur de Chimie à l'Université de Stockholm. — Grundlagen und Ergebnisse der Pflanzenchemie. |. Das chemische Material der Pflanzen. {(FONDEMENTS ET RÉSULTATS DE LA CHIMIE VÉGÉ- TALE. J. LES MATÉRIAUX CHIMIQUES DES PLANTES.) — 4 vol. in-8° de238 pages. (Prix : 7 fr. 50.) Vieweg et fils, éditeurs. Brunswick, 1909. Il est rare qu'une science se développe sans fournir à d’autres sciences des méthodes et des éléments de progrès supérieurs à ceux qu'elles tirent de leurs pro- pres ressources. Aussi, à mesure que se sont étendues nos connaissancessur la composition et la constitution de la matière, nos moyens de pénétration des mysté- rieux phénomènes de la vie sont-ils devenus de plus en plus puissants. La présence, dans l'organisme végétal, d'une multi- tude de substances dont les théories chimiques ont fait prévoir l'existence et réaliser la synthèse, n’est point sans soulever d'importants problèmes intéressant aussi bien la science pure que ses applications. Que l’on songe, en effet, à ce que l'existence et la succession, dans un ordre déterminé de composés, d'une structure particulière, d'une fonction définie, peuvent signifier BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 857 —— ————————————— de précis au point de vue du travail chimique qui s'accomplit au fur et à mesure de la vie. Et n'est-ce pas ouvrir un champ nouveau et fécond à la curiosité scientilique que de fournir des matériaux nécessaires à l'étude des relations entre la forme, la structure des végétaux, l'ensemble de leurs caractères physiologiques et la présence permanente, chez eux, d'individus chi- miques d'une fonction et d'une constitution déter- minées? En d'autres termes, la classification botanique ne gagnera-t-elle pas en précision lorsqu'elle pourra s'appuyer d’une facon plus solide sur les données que la science moderne nous a fournies concernant la dis- tribution des substances organiques dans le règne végétal ? Et je ne parle pas des nombreuses industries qui ontun profit immédiat à tirer de la connaissance de la présence, dans telle ou telle plante, des condi- tions de production et d’accumulation des substances qu'elles exploitent ou sont susceptibles d'exploiter. Aussi serait-il superflu d'insister davantage sur l’in- térêt qu'il y avait à dresser le catalogue méthodique de cette riche collection de principes définis qui peuplent l'organisme végétal. Non pas un catalogue formé d’une énumération banale, mais bien un catalogue avec com- mentaires judicieux, d’abord sur chaque groupe de corps possédant des liens de parenté, ensuite sur cha- que individu en particulier. Tel est le travail qu'a exécuté avec soin et avec succès le Professeur H. Euler. L'auteur établit, dans ce travail, trois grandes divi- sions correspondant respectivement aux combinaisons acycliques non azotées, aux combinaisons cycliques non azotées, aux combinaisons azotées. Dans chacune d'elles, il est conduit a examiner séparément les princi- cipales fonctions ou les groupes de corps bien définis, tels que les matières grasses, les hydrates de carbone, les glucosides, etc. Sommairement, mais d'une facon suffisamment précise, il définit chaque fonction ou chaque groupe de corps, en indique les propriétés et les réactions générales ; enfin il énumère les caractères particuliers de tous les principes végétaux, en indi- quant d'une facon aussi complète que possible les espèces chezlesquelles ces principesontété caractérisés. Dans un semblable travail, englobant des connais- sances si étendues, formé de matériaux si nombreux et primitivement siépars, quelques lacunes étaient iné- vitables, et, dans son ouvrage, M. H. Euler n’en a pas laissé de bien grandes, tout au moins en ce qui con- cerne les questions qui me sont le plus familières. Cet ouvrage a donc le mérite d'être aussi complet que le comportaient la multiplicité des matières et la variété des sujets. Je ne formulerai, à son adresse, qu'une cri- tique relative à l'inobservance, dans un grand nombre de cas, des conventions typographiques réglant l’écri- ture des noms d'espèces botaniques, et aussi à l'oubli fréquent de signaler, à la suite des noms de plantes, les noms d'auteurs. Cette critique, toute légère et qui d’ailleurs pourrait s'appliquer à bon nombre d’autres ouvrages sinon à la plupart, ne réduit nullement le mérite du travail de M. H. Euler, document indispensa- ble à tous ceux — et ils sont nombreux dans le monde scientifique — qu'intéressent les questions si prenantes de physiologie et de chimie végétales. Eug. CHARABOT, Docteur ès Sciences, Membre du Conseil supérieur de l'Enseignement technique. 3° Sciences naturelles Sion (Jules), Ancien Elève de l'Ecole Normale supé- rieure, Docteur ès Lettres. — Les Paysans de !a Normandie orientale. Etude géographique sur les populations rurales du Caux et du Bray, du Vexin normand et de la vallée de la Seine‘. —1 vol. 1n-8° de 544 pages. (Prix:12fr.) Colin, éditeur. Paris, 1909. Ce livre est le tableau actuel et rétrospectif de la vie rurale dans la partie de la Normandie qui comprend ‘I est humiliant pour les points cardinaux de chavirer le département de la Seine-Inférieure et l'arrondisse- ment des Andelys dans l'Eure. Dans cette Normandie orientale, le peuple reconnait depuis longtemps l’exis- tence de plusieurs individualités régionales, de plu- sieurs pays : le pays de Caux et le Vexin, au sol limo- neux reposant sur la craie, tous deux campagnes fertiles vouées à la grande culture; le pays de Bray, dépression verdoyante, destinée par la nature à l’her- bage et à la pâture; enfin la vallée de la Seine où, sur les sables et graviers, se développent les prairies et les petites cultures, tandis que les versants ‘sont couverts de vergers. La diversité physique de ces régions se reflète dans la diversité de leurs fonctions agricoles; et pourtant elles sont unies par une véritable solidarité économique qui date de très loin, de même qu'elles ont toujours été groupées dans le même assemblage politique : de là vient que M. Sion associe dans la même étude ces pays originaux. On pourrait, tout d'abord, s'étonner que Rouen, qui, par son industrie, son commerce et ses capitaux, a exercé et exerce encore une influence si profonde sur toutes ces cam- pagnes, ne possède pas dans l'étude de M. Sion sa monographie particulière; mais c'eût été un nouveau travail de longue haleine que l'avenir nous réserve peut-être; en tout cas, la personnalité de cette ville n'est pas absente du livre; et souvent, à travers les chapitres, des remarques suggestives nous permettent de mesurer l'intensité de cette influence urbaine sur toute la vie rurale. Le cœur du livre se compose de trois tableaux don- nant l’aspect de la vie rurale en Normandie orien- tale à trois époques différentes : le Moyen-Age, le xvi® siècle et l'époque actuelle. Dans cet exposé de l'évolution économique du pays, on note à chaque instant un double souci, qui est la marque propre de l'originalité de l’auteur : d’abord, le souci d'analyser les rapports qui, à chaque époque, unissent le milieu humain au milieu physique; ensuite le souci de recher- cher avec précision les traits particuliers à chaque époque et d'en composer une figure d'ensemble. Jamais ce double effort ne fléchit; il en résulte pour tout l'ouvrage une impression de force, l'impression que toujours une idée domine les faits. Chacun des trois tableaux de géographie rétrospec- tive fournit une masse de faits intéressants et nou- veaux, que l’auteur a puisés, non seulement dans une bibliographie intelligemment interprétée, mais surtout dans les documents d’Archives. Au Moyen-Age, de grandes forêts s'étendent encore; autant que les champs, elles constituent un élément capital dans l'existence du paysan : droits d'usage et de vaine pâture, bois et jachères jouent un rôle essentiel dans l'économie rurale. La Normandie est alors, avant tout, une région de culture et d'élevage à la fois, de blé et de bétail. Elle connaît à peine le pommier : l'usage du cidre ne commence guère que vers 1550. Elle n’a d'in- dustries que dans les villes. Au xvnre siècle, la vie économique des campagnes normandes est caractérisée par le développement de l'industrie textile; en 1782, la filature du lin et du coton occupait près de 200.000 personnes dans un rayon de 15 lieues autour de Rouen; c'était vraiment l'union intime de la culture et de l’in- dustrie. En même temps, l’agronomie transformait la culture par la réglementation ou la suppression des droits d'usage et de vaine pâture, par la pratique de la culture intensive, par l'augmentation des rende- ments el la multiplication du bétail. Le Caux et le Vexin comptaient parmi les pays les mieux cultivés de France ; aux céréales et au bétail s'ajoutaient encore le dans le cerveau d'un géographe. M. Sion intitule son livre : « Les Paysans de la Normandie ORIENTALE ». Ce qu'il appelle l'Orient, c'est la région située sur la rive droite de la Seine ! Selon lui, le Havre est en Orient, et Elbeuf en Occident. On fait des papiers quadrillés pour les enfants qui ne peuvent écrire des lignes droites. Va-t-il falloir fournir les géographes de papier figurant les longitudes ? Louis OLIVIER. 858 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX lin et le colza. Toute cette prospérité économique nous explique les progrès du chiffre de la population. Mais, avec le xix° siècle, l'union de la culture et de l'industrie domestique se dissout peu à peu sous les attaques du machinisme, qui chasse les antiques rouets: l'industrie du filage du coton déserteles plateaux, tan- dis que, au contraire, les usines, attirées par les rivières, contribuent au développement d'une série de centres industriels dans les vallées de Cailly, de Baren- tin et de Bolbec. Toutefois, le tissage à domicile survé- cut au filage ; il prit même un grand essor durant le Premier Empire et le règne de Louis XVIII ;. 10.887 métiers à tisser battaient dans les chaumières d'alors ; leur nombre augmenta encore et, en 1863, on comp- tait dans la Seine-Inférieure 81.237 ouvriers occupés au tissage ; dans chaque village, l'existence d’un quart, parfois d’un tiers des habitants dépendait de l’industrie cotonnière. Mais les jours du tissage à domicile étaient comptés ; la crise de 1863 lui donna un coup décisif ; il n'est plus aujourd'hui qu'un souvenir dans la plu- part des villages; les tisserands ont émigré vers les villes. Tandis que cette révolution s’opérait dans l’'indus- trie rurale, une évolution nouvelle entraîoait la culture cauchoise ; devenant de plus en plus pastorale, elle abandonnait la culture exclusive des céréales et des plantes industrielles et se tournait vers les cultures fourragères, les herbages, la production de la viande et du lait; cette évolution était encore hâtée par la rareté de la main-d'œuvre, résultat de la dépopulation des campagnes ; elle se marque dans le paysage par l’éten- due des champs de trèfle et le grand nombre de vaches qui paissent, régulièrement alignées le long des prai- ries artificielles. A cette peinture de l'économie rurale s'ajoutent d’autres traits caractéristiques : la prépondé- rance du fermage, excepté dans la vallée de la Seine ; de la grande exploitation dans le Vexin, de la moyenne dans le Caux et le Bray; de la petite dans la vallée de la Seine ; — la dépopulation des campagnes par suite de l'exode des tisserands et des ouvriers agricoles; — enfin, ce qui est l’un des charmes du paysage, ce type d'habitation cauchoise composé d’un herbage entouré de hètres où se trouvent, séparés les uns des autres, le logement du cultivateur et les bâtiments ruraux. Chacun de ces trois tableaux de géographie rétro- spective ou actuelle n’est pas seulement une description vivante et minultieuse, c’est aussi vraiment une expli- cation géographique des phénomènes, c’est la recherche raisonnée de leur répartition et de leur localisation dans leur rapport avec le milieu. Dès le début, M. Sion, étudiant les origines de la population, nous donne une carte de la répartition des vestiges gaulois, romains et barbares : il en tire cette conclusion que l’homme n’a pas au début occupé exclusivement les plateaux limo- neux aux terres riches et qu'il n’a pas toujours évité les contrées dont le peuplement semblerait tout récent, comme les vallées du Caux, comme le Bray, comme ces massifs forestiers qui continent à la Picardie. De même, la localisation des abbayes coïncide avec l'emplacement des forêts. La carte de la répartition des industries en 1787 permet de constater l’ubi- quité du métier rural à cette époque et cette union intime de la culture et de l'industrie qui a longtemps été ie cachet propre de la vie économique en ces régions. L'importance du fermage dans le Caux fournit un exemple de l'influence urbaine sur la vie rurale en montrant le rôle de la bourgeoisie rouennaise dans la propriété. À propos d'une carte de la répartition des ouvriers de l’industrie cotonnière en 1863, l'auteur nous donne une curieuse analyse des facteurs géographiques qui avaient pu déterminer celte localisation : la dis- tance, les moyens de transport, l'état des industries de la laine et du lin, l'influence des villes. Mème préoccu- palion constante de coordonner et d'expliquer dans la répartition des cultures, l'extension des herbages, l'étendue des propriétés et des exploitations, l’origine et la direction des courants d'émigration, la répartition des types d'habitation et des types de villages. . En somme, nous avons là unlivre qui peut se propo- ser comme le modèle d'une étude de géographie humaine : il nous offre une analyse perspicace et large des conditions géographiques de la vie rurale, un tableau synthétique des différents modes d'adaptation de l’activité humaine aux lois du milieu géographique dans la Normandie orientale. A. DEMANGEON, Professeur à l'Université de Lille. Kimpflin (G.), Docteur ès Sciences, Préparateur à la Faculté des Sciences de Lyon. — Essai sur l'assimilation photochlorophyllienne du Carbone. — 1 vol. in-8 de 158 pages. À. Rey, éditeur, Lyon, 1909. L’assimilation du carbone atmosphérique par les plantes sous l'influence des radiations lumineuses est universellement admise dans son principe, mais bien des points de détail restent obscurs dans la marche de ce phénomène. Ainsi, par exemple, la production de méthanal comme premier résultat de cette syn- thèse et sa présence dans les tissus végétaux estencore controversée. On s’est également demandé si une relation effective existe entre la présence de la chlorophylle et l'absorp- tion de l’anhydride carbonique, d’une part, et, d'autre part, entre l'absorption de l’anhydride carbonique et le dégagement d'oxygène, ou bien si ces deux phéno- mènes sont simplement concomitants et sans lien physiologique étroit. M. Kimpilin a cherché la solution de ces problèmes dans l'étude de l'assimilation du carbone par les plantes décolorées ou panachées. Les dosages ont été faits selon la méthode de Bonnier et Mangin. On peut constater de cette façon que, dans un même organe, la feuille, par exemple, dont une partie est verte et l’autre dépourvue de chlorophylle, seule la partie chlo- rophyllienne possède le pouvoir de fixer l’anhydride carbonique atmosphérique en dégageant de l'oxygène. Les parties blanches, au contraire, aussi bien à l’obs- curité qu'à la lumière, ne sont le siège que d'échanges respiratoires. Cependant, pris dans son ensemble, le végétal panaché possède une intensité assimilatrice qui est sensiblement égale à ce qu'elle serait si le même végétal füt resté vert entièrement; en effet,.les por- tions vertes des feuilles panachées assimilent avec une intensité très supérieure à celle des feuilles d’un sujet de même espèce non panaché. L'auteur a, de plus, constaté que les phénomènes photochlorophylliens sont susceptibles de rémanence et de latence : l’action de la lumière ne s'établit pas instantanément, de même qu'après sa disparition, un certain temps s'écoule avant que cesse totalement l'assimilation du carbone. La recherche du méthanal dans les tissus et sa loca- lisation ont été tentées au moyen du bisulfite de rosa- niline de la manière suivante : on prépare une solu- tion concentrée de bisulfite de soude à laquelle on ajoute un excès de méthylparamidométacrésol. Un long tube vertical est rempli de cette solution. Il com- munique par sa partie inférieure avec un tube court. et effilé qui est introduit obliquement dans le paren- chyme d’une feuille d'Agave mexicana exposée à la lumière. Sous l'influence de la transpiration et de la pression du liquide, une certaine quantité pénètre dans les tissus de la feuille. On sectionne la partie imprégnée, on la tue par immersion dans l'alcool absolu et on examine au microscope. On observe alors dans les cellules l'existence d’une coloration rouge, répartie en taches ou en traînées, et identique à celle obtenue directement par l’action du méthanal sur le réactif. On peut encore opérer avec des plantes nageantes ou flottantes mises directement en contact avec le réactif à la lumière ou à l'obscurité. On cons- tate ainsi que le méthanal est localisé dans les chloro- plastides, ce qui présente l'intérêt de rendre nulle sa nocivilé vis-à-vis du protoplasma. De BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX EE ———_ — — " " Î — ———”—”————— Le travail de M. Kimpflin se termine par la discus- sion de quelques hypothèses récentes relatives au dégagement de méthane constaté autrefois par Bous- singault et récemment par Pollacci, ainsi qu'à la pos- sibilité d’une intervention de l'électricité dans la syn- thèse photochlorophyllienne sous la forme de courants photochlorophylliens. Les quelques expériences pour- suivies en vue de leur contrôle n’ont, jusqu'ici, donné aucun résultat probant, et ces hypothèses restent encore purement théoriques. Les observations de M. Kimpflin apportent à la question de l'assimilation du carbone des données nouvelles intéressantes, et confirment dune manière élégante la nécessité de la présence de la chlorophylle pour la synthèse des hydrates de carbone par la plante. L. Lurz, Professeur agrégé à l'Ecole supérieure de Pharmacie de Paris. Vialleton (Prof. L.). — Précis de Technique histolo- gique et embryologique (2° édition). — 1 vol. grand 1u-18 de 467 pages avec 86 figures en noir et 12 plan- ches en couleurs. (Collection Testut.) (Prix : 9 fr.) O. Doin et fils, éditeurs. Paris, 1909. Il n’est pas inutile de rappeler les lignes par lesquelles débutait la préface de la {re édition de ce livre. M. Vial- leton y soutenait avec raison que les travaux pratiques d'Histologie doivent avoir pour but non pas de faire des étudiants de véritables techniciens, mais de mettre sous les yeux des élèves les préparations destinées à compléter l'enseignement donné au cours. Cependant, il est bon que les principes de la technique histolo- gique soient connus des étudiants, et qu'un livre les leur apprenne. Celui de M. Vialleton convient tout à fait à des élèves et, en général, à des débutants; car les manipulations les plus faciles, les appareils les plus simples y sont décrits avec telle clarté que nul ne peut se trouver embarrassé en les exécutant, en les maniant. Dans cette 2° édition, enrichie de toutes les acquisi- tions essentielles que la technique histologique a faites depuis dix ans, M. Vialleton n'a pas visé cependant à être complet, au risque d’obliger le commencant à faire parmi d'innombrables méthodes un choix difficile, mais il a fait lui-même ce choix. Douze planches colo- riées représentent les images très réelles des princi- pales préparations qu'on peut obtenir. Aucun ouvrage de technique histologique n’est mieux adapté au débu- tant que le Précis de M. Vialleton. A. PRENANT, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Paris. 4 Sciences médicales Martinet (D: Alfred), ancien Interne des Hôpitaux de Paris. — Les Médicaments usuels. Troisième édition entièrement refondue et conforme à la nouvelle édition du Codex. —1 vol. in-8° de 515 pages. (Prix : 5 fr.) Masson et Cie éditeurs, Paris, 1909. Les médecins et les pharmaciens accueilleront avec la faveur qu'ils ont accordée à ses deux aînées la troisième édition du livre si instructif du D" Alfred Martinet : « Les médicaments usuels ». Cette édition a pour but, comme les précédentes, « d'exposer claire- ment, simplement, pratiquement tout ce qu'il est nécessaire de savoir des médicaments vraiment usuels, c’est-à-dire de ceux qui ont fait leurs preuves et qui, bien connus, ne donneront au praticien aucun déboire et suffiront le plus souvent à son action ». Mais elle diffère des autres éditions par l'adoption d'une classifi- cation pluscommode,— car la division par action théra- peutique remplace l’ordre alphabétique, — et par une progression qui suit de si près les récents travaux de Pharmacodynamie, que le lecteur peut être assuré d'être mis au courant des principales méthodes théra- peutiques modernes. ï Le Dr Martinet, en praticien judicieux, a su échapper à deux écueils également dangereux : le scepticisme, qui dédaigne aveuglement tout progrès scienufique, et l'illusionisme, qui à pour devise : « tout beau, tout nouveau ». Il a étudié toutes les drogues nouvelles vraiment intéressantes, il connaîtles théories pharmaco- dynamiques qui ont présidé à la préparation synthé- tique des médicaments nouveaux, il à réfléchi sur les théories et les méthodes thérapeutiques mises en avant par les cliniciens les plus justement célèbres, et, après avoir passé toutes les acquisitions au crible d’une saine pratique, il a écrit son livre en ne retenant que les indications vraiment utiles par la solidité de leur fondement. Après avoir, dans une introduction, indiqué l’évolu- tion de la Pharmacodynamie et exposé très clairement quels sont les principes chimiques et physiques qui dirigent la médication actuellement en vigueur, le Dr Martinet étudie avec méthode l'emploi de chaque médicament : modificateurs de la nutrition et de l'hématose (arsenic, fer, iode, phosphore); cardio- rasculaires et diurétiques (digitale, caféine, théobro- mine, ergotine) ; anesthésiques (antipyrine, belladone, bromures, chloral, opium); neurotiques stimulants. (strychnine) ; purgatifs; antithermiques, antirhuma- tismaux ; antisyphilitiques (mercure); anti-infectieux (sérum antidiphtérique, métaux colloïdaux, ferments lactiques). Il examine les principales questions qui se présentent dans la pratique : quand et pourquoi faut-il administrer le médicament ? à quels accidents peut-il donner lieu ? quel est l'effet des associations qu'on peut lui adjoindre ? quelles sont ses incompatibilités? com- ment faut-il prescrire le médicament? et, à ce propos, l’auteur donne des formules empruntées aux maîtres incontestés de la thérapeutique. En résumé, la troisième édition des « Médicaments usuels » ne laisse dans l'ombre aucune des questions pharmacodynamiques qui intéressent le praticien, et celui-ci sera heureux de trouver des indications nettes et précises, immédiatement formulables, qui lui servi- ront à se reconnaitre au milieu des innombrables publications et réclames qui fatiguent son attention. x Dr Albert.Morez, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine et de Pharmacie de Lyon. 5° Sciences diverses Rey (A.), Agrégé de Philosophie, Docteur ès Lettres. — Les Sciences philosophiques. Leur état actuel. — 1 vol. in-8° de 1.050 pages. (Prix : 9 fr.) Ed. Cor- nély et Cie, éditeurs. Paris, 1909. Id. — La Philosophie moderne. — {1 vol. in-18 de la Bibliothèque de Philosophie seientilique. (Prix : 3 fr. 50.) E. Flammarion, éditeur. Paris, 1909. On trouvera, dans le premier de ces ouvrages : 4° un exposé de l’état actuel de la Psychologie expérimen- tale et positive, et, nettement distinct, l'exposé des théories générales qui appartiennent plutôt à la philo- sophie de cette science qu'à cette science elle-même; 20 un aperçu des conceptions générales des esthéti- ciens modernes et des principales théories philoso- phiques de l’art; 3° un bref résumé des orientations diverses qui renouvellent aujourd'hui la vieille logique, et des vues générales sur l’histoire des sciences et des méthodes scientifiques et sur ces méthodes elles- mêmes; 4° un examen des nouvelles conceptions de la morale comparées aux anciennes, et des principales solutions que l’on propose actuellement aux problèmes moraux et sociaux; 5° enfin un historique aussi ré- sumé que possible des grands systèmes philosophiques et des principaux problèmes de la Métaphysique. Dans le second ouvrage, l’auteur expose les deux tendances vers lesquelles s'oriente de plus en plus la philosophie {moderne : le rationalisme scientilique et le pragmatisme; il montre la facon dont ces deux points de vue renouvellent les vieilles questions philo- sophiques de la matière et de la vie, de l'esprit et de la raison, du vrai et du bien, et il indique les résultats déjà obtenus. 860 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 21 Septembre 1909. 19 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Jean Perrin a mesuré la rotation des granules de mastic dans une solution d’urée à 270/,. Il a trouvé une valeur de 149,5 par minute, alors que la formule théorique d'Einstein conduit à une valeur de 14°, — M. A. Guillet a étudié l'électro-diapa- son à entretien direct à contacts définis. Pour une f. 6. m. donnée, l'amplitude maximum de la vibration dépend de la distance de l’électro au raccordement des branches, de l'intensité du courant d'entretien et de l’aimantation initiale du circuit magnétique formé par le diapason et le noyau de l’électro. —M. P. Lemoult a déterminé la chaleur de combustion du gaz PH5, qui est de 311,2 cal. à pression constante; le remplacement des 3H par 3C°H° augmente la chaleur de combustion de 2169,5 = 3 X 723,2 cal. L'appoint thermique d'un atome de P dans un composé organique est de 230,5 cal. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran a obtenu de très bons résultats dans le traitement des trypano- somiases expérimentales du cobaye par l'injection hypodermique d'émétique d'aniline en mélange avec l'acétylarsinate de soude. L'émétique d’aniline a donné également des résultats encourageants dans le traite- ment de la trypanosomiäse des nègres au Sénégal. — M. À. Lacroix signale l'existence de roches grenues intrusives pliocènes dans le massif volcanique du Can- tal. La roche normale est une sorte de monzonite à grains fins, accompagnée de gabbros à olivine et de gabbros essexiliques. Seance du 4 Octobre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — Mme V. Myller-Lebedef présente ses recherches sur les solutions de l'équation hypergéométrique. — M. J. Chazy étudie les équations différentielles dont l'intégrale générale est uniforme et admet des singularités essentielles mobiles. — M. Ch. Nordmann a déterminé, au moyen de son photomètre stellaire hétérochrome, la température d'un certain nombre d'étoiles. Voici quelques résultats obtenus : 9 Persée, 29800; €Céphée, 46109; Soleil, 5990°; y Cygne 6330°; y Taureau, 8400°; Polaire, 9800°; « Lyre, 18.500° ; à Persée, 55.600°. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Angot donne les résul- tats de l'observation, au Val-Joyeux, de la perturbation magnétique du 25 septembre, qui a duré de 11 h. 50 à 21 h. 20. La variation totale dépasse 3° pour la décli- naison et 0,0098 pour la composante horizontale. Cette perturbation a été accompagnée d'une aurore boréale.— M. A. Lafay a étudié l’action de la pression sur la résistance du platine, du mercure et de la manganine. Seule, cette dernière peut être employée à la détermina- tion des pressions, parce que son coefficient de tempéra- ture est pratiquement nul. L'auteur a trouvé la relation (r-r,) rr=2,23.10-6 P. — M.J. Guinchant a constaté que l’azotate d'argent constitue un excellent dissolvant cryoscopique; l’abaissement moléculaire est normal et peu variable avec la concentration. La constante cryos- copique théorique est égale à 264. — M. J. Jacobsen, en décomposant le tétrachloroplatinate argentique par l'eau bouillante, a obtenu l'acide bichloroplatinique PtCI (OH) 4H? avec un rendement de 80 à 90 v/,. Quand on traite cet acide par AZI, il se précipite un corps brun floconneux qui, séché, détonne violemment par chauffage. Ce platine fulminant paraît répondre à la composition (OH)Pt. AzH#. Pt(OH). — MM. P. Nico- lardot el L. Clément proposent une méthode d'examen des essences de térébenthine basée sur la détermina- tion du pouvoir rotatoire des diverses fractions obtenues par ébullition sous pression réduite. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 5 Octobre 1909. M. le Président annonce le décès de M. A. Heur- teaux, Associé national. M. P. Yvon décrit quelques instruments destinés à l'étude de la vision entoptique, imaginés autrefois par Robert-Houdin et restés complètement inconnus. Ce sont : un iridoscope; un dioscope, destiné à montrer le renversement des images qui se forment sur la rétine; un pupilloscope; un pupillomètre ; un diopsimètre; un optomètre; un rétinoscope. — M. E. Boinet indique les résultats de l’opothérapie surrénale dans la maladie d'Addison. Dans un cas, il a obtenu une guérison qui dure depuis dix ans; dans d’autres cas, il observé une amélioration considérable; enfin, dans certains cas, le traitement n'a eu aucun résultat. Plusieurs fois, à la suite d'une injection sous-cutanée d’adrénaline, la maladie s'est terminée par le syndrome aigu d'insufli- sance surrénale ef la mort; dans ces cas, l'autopsie a montré quil existait une tuberculose caséeuse primitive et étendue des deux capsules surrénales. L’opothérapie paraît surtout indiquée dans la surrénalite seléreuse.: — M. le D'Dupré lit un travail sur le témoignage au point de vue médico-légal. — M. le D' Vallon présente une étude sur les rapports de l'alcoolisme et de la crimi- nalité. — M. le D' Lesage donne lecture d'un travail sur l'hygiène du nourrisson. Séance du 12 Octobre 1909. M. Th. Jonnesco présente ses recherches sur /a rachianesthésie générale. Cette méthode a deux prin- cipes fondamentaux : la ponction du rachis à tous les niveaux, et l’adjonction de la strychnine à l’anes- thésiant : stovaine, tropocaine, novocaiïne, etc. La ponc- tion du rachis à n'importe quel niveau est bénigne; la crainte de la piqüre de la moelle est absolument non fondée; peut-être la produit-on, mais elle est tout à fait innocente. La ponction médio-cervicale est inutile et même nocive, la ponction dorsale moyenne est dif- ficile et inutile. Les ponctions dorsale supérieure et dorso-lombaire sont faciles et suffisantes pour obtenir l’anesthésie de toutes les régions du corps. Le sulfate neutre de strychnine ajouté à la solution anesthésiante lui conserve toute sa puissance analgésique, tout en lui ôtant son action nocive sur le bulbe; c’est grâce à lui que l’anesthésie supérieure est possiblesans danger. La préparation de la solution anesthésiante doit être faite au moment de l'emploi, avec de l’eau stérilisée. La rachianesthésie générale ne connait aucune contre- indication; elle doit réussir toujours si le liquide à pénétré dans l’espace arachoïdien et si la dose d’anes- thésique est suflisante. Elle est absolument bénigne : elle n’a jamais causé la mort ni donné lieu à des acci- dents de quelque importance, immédiats ou tardifs. — M. le Dr P. Delbet lit un travail sur le traitement du scalp. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. ER Paris, — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE 15 NOVEMBRE 1909 Revue générale Ne Cienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 15, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $S 1. — Nécrologie \Valther Ritz. — L'un des collaborateurs de cette Revue, Walther Ritz, de Sion, est mort le 7 juillet dernier, à l’âge de trente et un ans. La perte est grande pour la science. Sa trop courte carrière à été marquée par des résultats de tout premier ordre, et ceux qui ont eu la confidence de sa pensée savent que peu d'années, sans doute, lui auraient suffi pour réaliser de vastes projets et ajouter à ses découvertes de nouvelles et importantes révélations. Telle qu’elle est, incomplète et trop tôt interrompue, son œuvre laissera une trace impérissable. Dès ses débuts, un jugement très sûr lui avait indiqué comme un problème de choix celui des séries des raies spectrales. Sa thèse est consacrée à l’explica- tion de ce phénomène par les vibrations des corps élastiques. Quoique conduisant à un succès partiel, en donnant des formules meilleures quê celles que l'on possédait déjà, cette première recherche a surtout servi à lui faire toucher du doigt l'impossibilité d'aboutir en suivant cette voie classique. La vérité a commencé à lui apparaitre, après plusieurs années de méditations, dans une tout autre direction. Il trouva d'abord la possibilité de réaliser la série des fréquences donnée. par le phénomène naturel, au moyen de champs magnétiques inversement proportionnels aux carrés des nombres entiers; puis, plus tard, comme deuxième étape, la production de ces champs magnétiques. au moyen d'une construction simple de l'atome. Cette construction s'est montrée féconde. Elle lui a donné, peu après, une explication ingénieuse du phénomène de Zeeman, contenant la première théorie satisfaisante des décompositions multiples. Enfin, plus récemment, le même schéma l'a conduit à une remarquable loi de combinaison, permettant de déduire les séries les unes des autres et d'en découvrir de nouvelles à partir des séries connues. Il à pu ainsi classer un grand nombre de raies déjà connues, mais non sériées. Et, depuis son travail, de nombreuses raies ont pu être découvertes d'après les indications de cette curieuse loi de combinaison. On peut dire sans exagération que jamais avant lui on n avait jeté REVUE GÉNÉ"ALE DES SCIENCES, 1909, un coup d'œil aussi pénétrant dans ce monde merveil- , leux et inconnu qu'est l’intérieur de l'atome. | Un autre groupe de recherches dérive d'une manière | tout à fait différente de son premier travail sur les vibrations élastiques. En développant des méthodes de calcul nouvelles | qui lui sont personnelles, bien qu'inspirées par l’ensei- | gnement d’un de ses maîtres de Gœttingue, le Profes- seur Hilbert, il a réussi à rendre abordables à un | calcul numérique rapide un grand nombre de problèmes dépendant des équations aux dérivées partielles qui avaient résisté jusqu'alors aux efforts des analystes. 1] a montré la portée de sa méthode en calculant, dans un Mémoire d’une rare élégance et comme en se jouant des difficultés, les nombreuses figures de vibrations de la plaque carrée que Chladni avait autre- fois observées et dont Kirchhoff avait résolu par les méthodes anciennes l’un ou l’autre cas particulier. Enfin, le troisième ordre d'idées qui l'a préoccupé et auquel il a, sans doute, consacré le plus d'efforts, peut à juste titre être considéré comme le problème fondamental de la Physique actuelle, 11 s'agit de la recherche d'une explication cohérente des phénomènes électromagnétiques et optiques. On sait les difficultés que la théorie de Maxwell rencontre à tenir compte de ce que les faits observés ne dépendent que des mouvements relatifs des corps ét non du mouvement des corps par rapport à l’éther. On sait que Lorentz et Einstein ont donné des solutions éliminant le système de coordonnées absolu lié à l’éther. Ritz a imaginé un système conduisant au même résultat en revenant au point de vue newtonien et abstrait, supprimant com- plètement tout milieu. Il a développé sa théorie dans un important Mémoire sur l'Electredynamique, paru aux Annales de Chimie et de Physique, qui, dans son esprit, n'était qu'un commencement, 1] se proposait d'étendre ses résultats à l'Optique. Quel est l'avenir réservé à sa théorie et aux théories rivales? Il serait téméraire de vouloir le prévoir, mais on peut craindre | que sa mort ne retarde l'élaboration définitive de | l'Electrodynamique. | Pierre Weiss, j Professeur de Physique à l'Ecole Polylechnique fédérale de Zurich. 21 862 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Emile-Christian Hansen. — Le savant éminent | qui vient de disparaitre avait une notoriété mondiale, non seulement parmi les savants, mais encore dans les industries de la bière et de l'alcool; ses travaux de science pure, modèles de méthode et de rigueur, ont conduit à l’un des plus importants perfectionnements de ces industries. A peine entré au Laboratoire de Carlsberg, la célèbre fondation deJacobsen, Hansen constata que le procédé indiqué par Pasteur pour purifier les levains des fer- ments de maladie était inutilisable, parce qu'il laissait subsister des levures, dites « sauvages », qui étaient capables de déterminer des troubles dans la bière en l'absence de toute bactérie. Peu après, Hansen décou- vrait la méthode qui fournit une levure pure en par- tant d’une cellule unique, puis les caractères distinc- tifs des levures sauvages par rapport aux bonnes levures.Ces découvertes n'ont pas été acceptées d’abord sans quelque résistance; mais, depuis longtemps déjà, elles sont enseignées et mises en pratique dans le monde entier. Elles procurent, aux brasseries notam- ment, la régularité entière de la fabrication et une grande sécurité comme goût et comme conservation de la bière. j Hansen, devenu directeur du Laboratoire de Carls- berg, était considéré partout comme la suprême auto- rité en fait de levures et de ferments non pathogènes; son jubilé avait.été célébré en 1902 avec un grand concours d'élèves et de collègues, et l’an dernier, lors du Jubilé de l’Institut des Fermentations, à Berlin, Hansen à pu voir, par les acclamations qui l'accueil- laient, de quelle vénération il était entouré. C'est une grande figure qui disparaît, mais le nom de Hansen vivra dans la reconnaissance de tous ceux qui s'intéressent aux industries de la fermentation. P. Petit, Professeur à la Faculté des Sciences, Directeur de l'Ecole de Brasserie de Nancy. $ 2. — Art de l'Ingénieur Le voyage du « Clermont ». — On vient de célébrer à New-York, solennellement, deux commémo- rations : le troisième centenaire du grand voyage de Hudson, etle premier centenaire du premier voyage par bateau à vapeur. 11 a fallu, vraiment, beaucoup de bonne volonté pour accoupler ces deux fêtes. Tout d'abord, le premier voyage par bateau à vapeur ne fut pas celui qu'exécuta sur la Hudson River le C/ermont de Fulton. Il remonte à 1776, année où le premier « pyroscaphe » de Claude- Dorothée de Jouffroy d’Abbans cireula fréquemment sur le Doubs, entre Baume-les-Dames et Besançon, pendant la presque totalité des mois de juin et juillet. En second lieu, ce fut en 1807, et non pas en 1809, que le Clermont se rendit de New-York à Albany, puis revint à New-York. Mais, en l'espèce, peu importent ces détails. Ce quinous a semblé intéressant, etce que nous nous proposons d'offrir ici, c’est le récit de cette « per- formance », d'aprèsles journaux américains de l’époque. Le Clermont n'était qu'un agrandissement et perfec- ionnement du modèle que Robert Fulton avait expéri- | menté avec succès sur la Seine, en plein Paris, le 9 août 1803. C'était ce que, dans le baragouin sportif d'aujourd'hui, on appelleraitle Æulton IL. Le bateau, qui mesurail cinquante mètres de lon- gueur sur cinq de largeur, et jaugeait cent cinquante tonneaux, avait été construit à New-York. I] avait fallu deux années, — d'octobre 180% à octobre 1806, — pour établir en Angleterre la machine, qui était de la force de dix-huit chevaux. Le lancement avait eu lieu le 10 août 1807, et immédiatement le « monstre », comme disaient maintes bonnes gens, avait remonté toute East River et la majeure partie de la North River, pour venir s'amarrer auprès de la prison de l'Etat de New- York, bâtiment qui occupait l’espace aujourd'hui limité par la Washington Street, la West Tenth Street, la West Street, et la Charles Street. Satisfait de ce premier essai, Fulton avait cependant voulu consacrer quelques jours encore à la « mise au point » de sa machine. Le lundi 17, l'American Citizen publiait l'information que voici : « L'ingénieux bateau à vapeur de M. Fulton, inventé en vue de la navigation sur le Mississippi entre la Nou- velle-Orléans et les villes d'amont, a appareillé aujour- d'hui dans la North River, près de la Prison d'Etat, à destination d'Albany. La vitesse du bateau à vapeur est évaluée à quatre milles (six kilomètres et demi) par heure ; mais l'on pense que, contre le courant du Mississippi, elle ne sera que de deux milles. Quoi qu'il en soit, il y aura là une inappréciable conquête pour le commerce des Etats de l'Ouest. » Dès l'aube, une foule considérable stationnait sur les deux berges de la North River. La majorité des assis- tants étaient accourus avec la conviction qu'ils allaient bien s'amuser aux dépens du présomptueux innovateur. Celui-ci était criblé.de quolibets par les badauds, qui sont toujours et partout si spirituels, comme on sait. Sous le prétexte qu'il allait voyager un peu versle Nord, il se trouva même un plaisantin pour lui crier : — «Hé, Bobby ! (diminutif de Robert) rapporte-nous un copeau du Pôle ! » A une heure, le Clermontse mit en marche. Il avait à peine vogué pendant cinq minutes qu'un revire- ment comme foudroyant se produisit dans la foule, et ce fut au milieu d’un ouragan d'acclamations que Ful- ton commença son voyage. En amont de la grand'ville, le passage du monstre produisit une impression fort différente. Les bûches de pin employées pour le chauffage projetaient des tourbillons de fumée noire, de hautes flammes rouges, d'étincelles crépitantes. La machine et les roues me- naient un vacarme effroyable. Plus d'un paysan tom- bait à genoux, se signant et marmottant des oraisons éperdues. Les autres s’enfuyaient vers leur maison en criant que « le Diable en personne se rendait à Albany dans un engin à rémouler les âmes », Certains affir- maient avoir vu un volcan cheminer sur l’eau. Le lendemain à une heure, le Clermont avait « cou- vert » cent dix milles. Sa vitesse moyenne avait done été jusqu'alors d'à peine moins de sept kilomètres et demi par heure, et ce résultat enthousiasmait Fulton, d'autant plus qu'il avait eu constamment à lutter contre le vent. Pour ne point forcer sa machine, et aussi pour se geposer de ses émotions, il stoppa jus- qu'au lendemain à neuf heures du matin. Il arriva à Albany ce mercredi même, à cinq heures du soir, ayant pu fournir, pour cette dernière étape, jusqu'à du « huit à l'heure », — alors qu'il avait an- noncé, nous l'avons vu, « du six et demi ». La population d'Albany l’accueillit comme un Messie; mais il ne se laissa pas griser par les ovations, et repartit pour New-York dès le jeudi matin. Loin de pouvoir profiter du courant, il eut l'ennui de voir le vent tourner « de bout en bout ». L'espace se défen- dait, — comme il essaya de le faire en 1909 contre les aviateurs à Bétheny. Le trajet de retour s’effectua d'une seule traite, en trente heures; c'était encore du huit à l'heure. Le samedi 22, on pouvait lire ce qui suit dans l'Ame- rican Citizen : «Nous félicitons M. Fulton et le pays du succès remporté par le bateau à vapeur, qui décidé- ment ne peut manquer de devenir un mode de loco- motion très avantageux. Nous enregistrons que les passagers n'ont pas été le moindrement incommodés par la chaleur ou la fumée. » 4 Rapprochement curieux, c'est la même constatation de sécurité que celle faite aujourd'hui par les compa- gnons de voyage des aviateurs. A. Chaboiseau. $ 3. — Physique L'échelle des longueurs d'onde. — Les données numériques de la spectroscopie sont les lon- gueurs d'onde des diverses radiations. Les mesures CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 863 æourantes ne se font jamais en les comparant avec un étalon de longueur, mais par interpolation, en rappor- tant chaque raie à des raies voisines de longueurs d'onde connues. Il faut, pour cela, avoir une série de repères, ou raies normales, constituant un système de Tongueurs d'onde. La précision avec laquelle ces repères sont connus limite celle de toutes les autres mesures spectroscopiques. Les puissants appareils dont on dis- pose exigent que cette précision atteigne le millio- nième. L'établissement d'un système de longueurs d'onde ‘comprend deux parties : 1° La comparaison de la longueur d'onde d'une radiation avec le mètre, opération métrologique qui ‘exige l'intervention de l’étalon fondamental du système métrique. La radiation ainsi mesurée deviendra la base du système; 20 La comparaison avec cette base d’un certain mombre d'autres radiations, qui constitueront les repères. Les anciens systèmes de longueurs d'onde, tels que celui d'Angstrôm, ne visaient pas à une grande préci- sion. Depuis vingt ans, toutes les mesures spectrosco- piques ont été faites en prenant comme point de départ les nombres de Rowland : les repères sont des raies noires du spectre solaire, et la base du système «est la longueur d'onde de la raie D, obtenue par Bell. Les mesures absolues de Michelson et Benoit, en 1893, montrèrent que la base de l'échelle de Rowland était erronée d'environ 1/30.000. En 1901, Fabry et Perot montrèrent que les rapports n'étaient pas non plus corrects. La nécessité d'un nouveau système de lon- gueurs d'onde était donc évidente. La question a été mise à l'étude par l'Union interna- tionale des recherches solaires‘ dans ses réunions de Saint-Louis (1904), Oxford (1905), Meudon (1907). Bien “que toutes les décisions définitives ne soient pas encore prises, la question peut ètre considérée comme à peu près résolue. Comme unité, on a décidé de prendre l’angstrôm, défini de la manière suivante : la longueur d'onde de la raie rouge du cadmium est 6438,4696 angstrôms dans l’air sec à 15° et sous la pression normale. Ce nombre à été choisi d'après les mesures de Benoît, Fabry et Perot, presque rigoureusement concordantes avec celles de Michelsan et Benoît, de telle manière que l’angstrôm vaut 10 — 1 mètre avec toute la préci- sion que comporte la définition du mètre, c'est-à-dire à quelques dix-millionièmes près. La raie rouge du cadmium constitue ainsi l’étalon primaire ou base du système. Pour les repères devant constituer le système de longueurs d'onde, il a été décidé que l’on abandon- merait le spectre solaire, dont les raies n'ont certaine- ment pas la fixité que l’on pensait, et qu'on les pren- drait dans un spectre d’arc. MM. Buisson et Fabry ont mesuré, dans ce but, 415 raies appartenant presque toutes au spectre du fer, ‘entre les longueurs d'onde 2.373 el 6.495. Elles sont nssez rapprochées pour servir à toutes les interpola- tions. Pour compléter ces déterminations et rendre ces repères facilement utilisables, ils ont publié un atlas “du spectre du fer’, reproduction directe de clichés obtenus au moyen d'un grand réseau concave de 7 mètres de rayon; l'échelle est de 02,76 par angstrüm, -ce qui donne, pour l'ensemble des spectres visible et ultra-violet, une longueur de 3",30. Il est désirable, avant qu'une décision définitive soit prise, que les mêmes mesures soient faites par d'autres “observateurs. Quelques déterminations ont été faites à Bonn par Eversheim et à Baltimore par Pfund; elles 1 Transactions of the International Union for solar re- search. ® Journal de Physique, mars 1908. * Annales de la laculté des Sciences de Marseille, t. XVII, 4908. Hermann, éditeur. présentent une concordance très satisfaisante avec les nombres de Buisson et Fabry. Aussi, l'emploi de cette nouvelle échelle de longueurs d'onde a-t-il commencé à se répandre, Sous le nom de système international, un certain nombre d’observateurs ont adopté ces repères et publié des séries importantes de données numériques". Les spectres d'arc du mercure, du vanadium, du cérium et du thorium, les spectres d'étincelle du chrome, du calcium et du mercure ont été ainsi mesurés. Il est désirable que de telles mesures se multiplient, et que toutes les données numériques de la spectros- copie soient exprimées dans cette échelle. On fera ainsi cesser la confusion actuelle, résultant de l'emploi simul- tané de deux échelles différentes, dont l’une est cer- tainement condamnée à disparaître à cause des erreurs dont elle est entachée. $ 4. — Chimie industrielle Traitement électrique des minerais titani- fères. — Le Rapport du Service des Mines du Canada sur les travaux de ce service en 1908 rend compte d'expériences qui ont été faites en présence d'un délé- gué du Gouvernement canadien à Welland, Ontario, sur le traitement électrique des minerais titanifères, par l'Electro-Metall Company. Le four employé était semblable, ou à peu près, à celui expérimenté à Sault-Sainte-Marie ?. Le minerai traité provenait du Wyoming etcontenail 20/, d'acide titanique. L’essai a duré, arrêts déduits, 22 h. 45 m. La tension était, au primaire de 10.800 volts et au secondaire de 35,6 volts. L'intensité, du côté primaire, atteignait 25 ampères. Le facteur de puissance était de 0,91. La puissance absorbée était de : .800 X 25 ,9! 329 chevaux, +0 (en chevaux américains valant, comme on le voit, 746 watts.) La quantité de fonte produite s'est élevée à 3.317 livres, ce qui correspond à une production de 5.040 tonnes (de 2.000 livres américaines) par 1.000 chevaux-ans. Les charges employées comprenaient : CHARBON FER de bois CALCAIRE De la 1re à la 10° charge. 200 livres 60 livres 50 livres Ale a la 13e — .. 200 — (NE 50 — Age à la 35e — . . 200 — T0 — 50 — Les laitiers contenaient beaucoup de fer, mais il a été reconnu dans la suite qu'on peut réduire la teneur du laitier en fer en diminuant le proportion de calcaire dans les charges; 35 livres de calcaire suffisent. La fonte obtenue était de composition très sais faisante; des analyses en seront publiées. H. M. $ 5. — Physiologie De la fréquence des pulsations cardiaques chez la souris. — On sait que, d’une facon très générale, le nombre des contractions cardiaques esl d'autant plus grand, dans un temps donné, que l'espèce animale sur laquelle est faite l'observation est plus petite. On a noté, par exemple, 30 pulsations par mi- nute chez l'éléphant, 40 chez le cheval, 50 chez l'âne et le mulet, 70 chez l'homme, 90 chez le chien, 450 à 200 chez le lapin. La difficulté de compter les pulsations cardiaques quand leur nombre dépasse 150 à 200, la difficulté 4 LAwRENCE Cooper : Asérophysical Journal, juin 1909. — HaroLo Srices : Zd., juillet 1909. — fl. Suaw . 1d., septembre 1909. 2 Voyez la Revue du 30 mai 1909. 864 presque insurmonlable d'enregistrer ces pulsalions avec les appareils d'usage courant, chez les très petits animaux, avaient empêché les physiologistes de faire des déterminations chez ceux-ci. Cette lacune vient d'être comblée par F. Buchanan. Cet auteur avait été conduit, par des considérations théoriques, à supposer que, chez les souris, le nombre des contractions cardiaques ne doit pas être inférieur à 500 par minute. Pour vérifier l'exactitude de ses déductions, il recueillit l'électrogramme de cet animal, c’est-à-dire la variation électrique produite chez lui par les contractions cardiaques. Il y parvint assez faci- lement en faisant plonger les pattes de devant et les pattes de derrière de la souris, suspendue par un ban- dage abdomino-dorsal, respectivement dans deux solu- tions remplissant les fonctions d'électrodes impolari- sables, mises en rapport avec un électromètre, et en photographiant les oscillations du ménisque sur une bande de papier, se déplaçant d’un mouvement régulier et avec une vitesse connue. Il trouve ainsi : chez 3 souris pesant de 29 à 35 grammes, de 520 à 675 contractions cardiaques par minute; chez 2 souris relativement jeunes (huit semaines environ), pesant 17 et 21 grammes, 720 et 780 contractions, enfin, chez une souris albinos pesant 45 granimes, 680 contractions. La moyenne de ces diverses observations donne 670 contractions car- diaques par minute. La respiration des souris est également très rapide : Buchanan a noté 140 et 160 respirations par minute. Le rapport du nombre des contractions cardiaques au nombre des respirations est donc 4 environ, comme chez l'homme et comme chez la plupart des Mammi- lères. Ainsi le cœur de la souris bat 4 fois plus vite que celui du lapin, 10 fois plus vite que celui de l'homme. $ 6. — Sciences médicales Rachianesthésie générale. — En injectant dans l’espace sous-arachnoïdien de la région lombaire une solution de cocaine, les chirurgiens réalisent une analgésie des membres inférieurs, du bassin et de l'abdomen assez complète pour leur permettre de pra- tiquer les opérations les plus graves et les plus com- plexes sur tous les organes de la moitié sous-diaphrag- matique du corps. On admet qu'aux doses adoptées et dans les conditions réalisées, la cocaïne suspend les fonctions conductrices des racines postérieures des nerfs rachidiens, par lesquelles se fait la propagation vers les centres supérieurs des impressions produites à la périphérie. Il importe d’ailleurs peu, pour la réus- site et pour l’innocuité de cette méthode, que les autres fonctions de la moelle inférieure soient suspendues en même temps que la conductibilité sensitive des racines postérieures, car aucune de ces fonctions n'est nécessaire à la conservation de la vie. Il n’en serait assurément pas de même si l'action de la cocaïne portait sur les centres bulbaires, car ces centres pré- sident aux grandes fonctions de la vie organique, et leur inhibition pourrait entraîner rapidement des troubles mortels : l'inhibition du centre respiratoire, en particulier, provoquerait la mort par asphyxie. Aussi les chirurgiens partisans de la rachicocaïnisa- lion se sont-ils, en général, imposé comme règle de conduite de n'injecter la cocaïne dans l’espace sous- arachnoïdien que dans la région lombaire et qu'à dose assez faible pour que la diffusion de lalcaloïide ne lui permette pas d'atteindre, à dose dangereuse, le bulbe rachidien. La rachicocainisation semblait done devoir demeurer un procédé d'analgésie partielle et ne paraissait pas devoir assurer jamais une analgésie uénérale s'étendant au corps tout entier. Mais voici que le Professeur Th. Jonnesco, de Bucarest, vient de publier dans la l’resse Médicale! le résultat des très !‘ La rachianesthésie générale, Presse Médicale, 13 octo- bre 1909, no 82, p. 721-725. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nombreuses anesthésies générales pratiquées par chez l’homme par rachistovainisation. M. Jonnesco injecte la solution anesthésiante dan la région dorsale supérieure, entre la première et 1] deuxième vertèbres dorsales. Pour faire tolérer cett solution par les centres supérieurs, il ajoute de | strychnine à la stovaine. C'est ainsi que, chez l'adulte il injecte 1 centimètre cube de liqueur contenan 1/2 milligramme de sulfate neutre de strychnine € 3 centigrammes de stoyvaine. L'analgésie de la tête e du cou est rapidement réalisée, surtout si l’on pren soin de coucher horizontalement le malade, la têt basse, après l'injection : il suflit le plus souvent d 2 à 3 minutes. Elle se maintient entre 4 heure 1/ et 2 heures; le plus généralement on observe l'immo bilité des parties analgésiées; parfois, cependant, lim mobilité n’est pas totale ; dans tous les cas, l’analgési: précède l’immobilité. Les phénomènes tels que päleu. de la face, nausées, sueurs, vomissements, si fréquent dans la rachicocaïnisation, sout exceptionnels ici; le accidents post-anesthésiques sont rares, bénins,incom parablement moins marqués que dans la rachisto vainisation simple. M. Jonnesco n'a pas eu d'accident: sérieux dans plus de 400 opérations pratiquées sur k tête, le cou, les membres supérieurs et le thorax quand il à pratiqué la rachistovainisation strychnique dorsale supérieure selon les règles très précises qu'i donne dans son travail... « J'ai la conviction absolue, écrit-il, que la rachi anesthésie générale sera la méthode d’anesthésie di l'avenir. » $ 7. — Géographie et Colonisation L'Institut de Biologie agricole d'Amani (Afrique orientale allemande). — En 1902, les autorités allemandes fondaient dans leur colonie de l'Afrique orientale, à Amani, un Institut de Biologie agricole. Depuis sept ans, cet établissement s'es développé rapidement, suivant les traces d'un de ses émules, le Jardin botanique de Buitenzorg, et il cons- titue aujourd'hui l’une des plus belles institutions coloniales que les Européens aient établies sous les tropiques. Il nous parait donc intéressant d'en dire ici quelques mots. Dans l'esprit de ses fondateurs, l'Institut d'Amani a pour but de soutenir pratiquement la colonisation et les plantations dans l'Afrique orientale allemande, de relever les cultures des indigènes, d'étudier les mala- dies des plantes, d'introduire de nouvelles cultures lucratives dans le pays et de faire l'inventaire des produits du règne animal et végétal: il s'occupe, en outre, de l'exploration de la flore et de la faune de la colonie. L'Institut est situé à Amani, dans l'Usambara oriental, à six heures de la station de chemin de fer de Nyussi, qui le relie à Tanga, port de l'océan Indien fréquenté par les grands steamers ; bientôt, d’ailleurs, un chemin de fer à voie étroite atteindra Amani même. L'établis- sement comprend un domaine de 250 hectares, aux- quels viennent s'ajouter 100 hectares de réserves indigènes: ce terrain s'étend de 400 à 1.100 mètres d'al- titude environ, les bâtiments se trouvant à 900 mètres; une grande partie du pays est recouverte par la forêt tropicale. Les bâtiments en pierre, au nombre de 15, com- prennent : un observatoire météorologique complet, des laboratoires botanique, entomologique et chimique avec tous les accessoires nécessaires, une bibliothèque, une chambre noire, des salles de collections de plantes économiques, la poste et le télégraphe, les habitations du personnel et une maison pour les visiteurs. Le personnel comprend un directeur, trois bota- tanistes, un enlomologiste, un chef de station, quatre jardiniers, deux aides européens et de nombreux aides indigènes. e Voici, d'après le Rapport du directeur, un aperçu des ; derniers travaux effectués à l'Institut d’Amani Dans la Section de Botanique, on s'est livré à une tude des diverses espèces de plantes à caoutchouc du pays, de leur rendement, des méthodes d’incision, des procédés de coagulation du latex, ete. On à fait l'exa- men des diverses espèces d'acacias pouvant fournir des matières tannantes: seuls l’'Acacia mollissima et l'Acacia decurrens pourront être exploités dans ce but dans la colonie. La Section a poursuivi l'étude systéma- tique des diverses variétés de manioc; on a fait venir d’autres pays tropicaux des graines et des boutures qui ont été plantées afin de voi quelles sont les variétés les plus appropriées au sol et au climat de la colonie. Elle à également entrepris une série d'essais sur le mode de culture (par bulbilles ou par HEURES) el sur le rendement en fibre des agaves (sisal). L'étude des diverses sortes de riz, au nombre de 166, cultivées dans la colonie, a montré qu'elles appartiennent à 13 variétés, qui sont actuellement l’objet d'essais de cultures destinés à montrer si ces variétés sont constantes. Les plantations de l’Institut d'Amani sont aujour- d'hui très développées; une grande partie des plantes les plus vieilles donnent déjà des graines, qui sont partagées entre les colons allemands. Parmi les plantes alimentaires, le Coffea arabica var. columnaris et le caféier de Bukoba ont prospéré dans la dernière année; les arbustes à thé ont fleuri abon- damment et donné des graines; le maté ou thé du Paraguay a prospéré entre 00 et 1.000 m.; les cacaoyers, bien abrités et pourvus d'une ombre suffisante, ont réussi dans la vallée de la Sigi. Comme plantes d’ombrage pour les caféiers et autres, PAlbizzia stipulata et le Pithecolobium Saman ont donné les meilleurs résultats. Le Cassia florida, le Parkia africana, les Peltophorum donnent également un bon ombrage, mais ils poussent trop lentement à partir de 800 à 1.000 m. Le Gliricidia maculala, importé de l'Amérique centrale pour donner de l'ombre aux cacaoyers, s’est bien développé, sans qu’on puisse cependant porter un jugement définitif sur cet arbre. Parmi les plantations les plus importantes de l’Ins- itut figurent celles des arbres à caoutchouc. Celles de Manihot Glaziovii (caoutchouc du Ceara) prospèrent bien, quoique, en quelques endroits, les racines aient Sté attaquées par un champignon ; sur trois nouvelles spèces de Manihot importées récemment du Brésil, ane seule à bier poussé, le A. dichotoma, quoiqu'il roisse plus lentement que le précédent. Le Kickxia 2lastica s'est bien développé et les vieux arbres four- nissent un excellent caoutchouc; toutefois, par la “pétition des incisions, la quantité de latex diminue beaucoup plus rapidement que chez le Manihot ou ‘Hevea. L'Hevea brasiliensis (caoutchouc de Para) rospère bien dans la vallée de la Sigi, ainsi que le Fieus elastiea et le Castillon elastiea; le Mascarenhasia 2lastica croit lentement entre 500 et 800 m., et donne ncore peu de caoutchouc; il en est de mème des liverses lianes à caoutchouc. Parmi les plantes à fibres, la culture du coton a été entée, bien que les conditions de climat et de sol de soient pas des plus favorables. La variété caravoniea A CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 865 a réussi entre 500 et 850 m. el on a pu récolter déjà quelques capsules. Le usa Becihe a donné des fibres, isolées à l’aide de l'appareil Duchemin, utilisables industriellement. Diverses espèces d' Agaves et d Bambous se sont développées vigoureusement. Les plantations de l'Institut renferment encore une foule d’autres arbres donnant des épices, des subs- tances médicinales, des huiles essentielles, des huiles grasses, des matières tannantes et colorantes, des sommes et résines, des bois de construction, des fruits comestibles, du sucre, des fourrages, etc. La plupart poussent bien et la culture pourra en ètre développée dans la colonie, en profitant des observations-faites à Amani. L'activité du Laboratoire chimique porte surtout sur l'examen des produits récoltés dans le pays, spéciale- ment sur le caoutchouc, les matières tannantes et les gommes et résines. Sur 127 échantillons de caoutchouc étudiés pendant le dernier exercice, 80 provenaient du Manihot Glaziovii, 13 de diverses Landolphiées, les autres des Ficus, Hevea, Castilloa, etc. ; ils étaient en général de bonne qualité. Au moyen de l'analyse, on à cherché à élucider quelques problèmes, comme: limite d'âge des arbres à inciser, influence des divers sols sur la qualité du caoutchouc, meilleur mode de coagula- tion du latex, changements chimiques dans le caout- chouc sous l'influence de la conservation. Les matières tannantes proviennent presque toutes de l’ Acacia decurrens, quelques-unes de l'A. mollissima; la moyenne de la teneur des écorces est de 40 °/,; cepen- dant, quelques-unes renferment jusqu’à 59 °/, de ma- tière tannante. Les résines étudiées sont surtout de celles qui se gonflent dans l’eau; malheureusement, l'emploi en est limité et le prix minime, de sorte que l'exportation n’en serait pas très rémunératrice. Le Laboratoire chimique a entrepris également une série de recherches étendues sur question des engrais, en particulier pour le caféier et les agaves, et il a fait, d'autre part, de nombreuses A de sols de différentes localités de la colonie et des analyses de minerais qui ont permis de constater l'existence de gisements de cuivre très riches. Enfin, le Laboratoire entomologique poursuit l'étude de tous les animaux (insectes surtout) qui s’attaquent aux plantes et recherche les moyens de parer à ces attaques; il prête également son concours à l'étude des insectes transmetteurs de maladies tropicales. Tous les travaux exécutés à l’Institut d’Amani sont publiés dans deux revues : les Berichte über Land=und Forstwirtscehaft in Deutseh-Ostalrika, qui paraissent à la librairie Carl Winter, à Heidelberg, et Der Pflanzer, qui est imprimé dans la colonie même, à Tanga. Ces deux recueils constituent une source très précieuse de documents pour tout ce qui concerne l'Agriculture tropicale. L'Institut d'Amani commence à être connu dans les milieux scientifiques et coloniaux. Au cours de ces dernières années, il a reçu la visite d’un certain nombre de savants et de planteurs, qui y ont trouvé, avec une cordiale hospitalité, les re nseignements les plus com- plets sur les questions pour lesquelles ils étaient venus se documenter. 866 PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (14377) UN PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) 1. — INTRODUCTION. En 1368", l'un des maitres les plus autorisés de la Faculté des Arts de Paris, Albert de Helmstædt, surnommé Albert de Saxe, commentait le 7raité du Ciel et du Monde d’'Aristote. En une des Ques- tions sur le second livre de ce traité, il se demandait « si la Terre, placée au milieu du Ciel comme au milieu du Monde, repose sans cesse ou se meut sans cesse ». Il écrivait® à ce propos : « Au sujet de cette question ou conclusion, je dois dire qu’un de mes maîtres semble professer l'opinion suivante : Démontrer que le mouvement de la Terre et le repos du Ciel ne s'accordent pas avec les phénomènes est chose impossible. « Mais, sauf le respect que je lui dois, il me sem- ble que c’est chose fort possible, et cela pour la raison suivante : Nous ne pouvons d'aucune manière, par le mouvement de la Terre et le repos du Ciel, sauver les conjonctions et les oppositions des pla- nètes, non plus que les éclipses de Soleil et de Lune. Il est vrai que mon maitre ne pose ni ne résoui cette raison, bien qu'il pose et résolve plu- sieurs autres des preuves par lesquelles on s'efforce de nous persuader du repos de la Terre et du mou- vement du Ciel. » Il est très certain, et Albert a raison de l’affirmer, que le-seul mouvement de la Terre ne saurait expli- quer tous les phénomènes célestes; il n’en est pas moins vrai que le mouvement diurne peut s'expli- quer en laissant le Ciel immobile et en faisant tourner la Terre autour de l'axe du Monde, tout aussi bien qu'on l'expliquait en maintenant la Terre au repos et en faisant tourner le Ciel; le témoignage d'Albert de Saxe nous apprend qu'au milieu du xiv® siècle, en l'Université de Paris, un de ses mai- tres soutenait l'équivalence de ces deux explications et l'impossibilité de choisir entre elles à l’aide d'arguments tirés de l'expérience. Ce maître, dont le nom nous est inconnu, n'avait pas réussi à convaincre Albert de Saxe; n’avait-il pas eu plus de succès auprès de certains de ses élèves? I convainquit au moins un de ceux quisuivaient les leçons de la Faculté des Arts vers le temps même où Albert de Saxe les entendait; et l’adepte qu'il 1 Sur cette date, voir : P. Dune, Jean Buridan et Léo- nard de Vinci. I. Une date relative à Maitre Albert de Saxe (Bulletin Italien, t. IX, p. 21; Janvier-Mars 1909). * ALBERTI DE SAXONIA Subtilissimæ quæstiones in libros de Cælo et Mundo; in lib.1], quæst. XXVI (Ed. de Venise, 1492). parvint à conquérir devait être l’un des personnages les plus importants de l'Université de Paris sous le: règne de Charles V : nous avons nommé Nicole: Oresme. Dès 1348, nous voyons‘ Maitre Nicole Oresme, du diocèse de Bayeux, étudier en Théologie à Paris. En 1556, il est grand-maître du Collège de Navarre. En 1362, déjà pourvu du grade de maitre en Théologie, il est nommé chanoine de Rouen. Le 148 mars 1364, il est élevé au rang de doyen du chapitre. Le 3 août 1377, il devient évêque de Lisieux. Il meurt à Lisieux le 41 juillet 1382. L'activité intellectuelle d'Oresme fut très grande; on lui doit un grand nombre d'ouvrages?, les uns composés en latin, les autres en un français qui en. fait, au x1v° siècle, l’un des maîtres de notre lan- gue. Beaucoup de ses écrits ont pour objet de lutter contre l’Astrologie. Son traité Ve origine, natura, Jure etmutationibus monetarum, dont il avait éga- lement donné une traduction francaise, le font regarder par les économistes comme un précurseur; et en étudiant son opuscule De latitudinibus for- marum, Maximilien Curtze a montré* qu'en l’inven- tion des coordonnées, il avait devancé Descartes et Fermat. Charles V désirait répandre en sou royaume les connaissances réservées jusque-là aux clercs qui possédaient le latin; pour le seconder en ce dessein, il s'adressa au doyen du chapitre de Rouen, auquel, à maintes reprises, il avait manifesté sa confiance. Oresme avait déjà composé en francais un Traicté de TEspère [de la Sphère], destiné à enseigner « la figure et la disposition du Monde, le nombre et l'ordre des éléments et les mouvements des corps du Ciel à tout homme qui est de franche condition et de noble engin ». Charles V le chargea de traduire en français et de commenter quelques- uns des écrits d’Aristote. Oresme donna ainsi la, traduction, avec glose et commentaires, des Éthi- ques d’Aristote en 1370, des Politiques et des Éco- nomiques en 1371; ces écrits ont été imprimés au xvi° siècle. 11 donna également la traduction, avec commentaires, des quatre livres Du Ciel et du Monde d’Aristote. 1 DENIFLÉ et CHATELAIN, Chartularium Universilatis Pari- siensis, tomus If, pars prior (1300-1350); p. 638 et p. 641, en note. ? Voir, au sujet des écrits d'Oresme : Francis MEUNIER, Essai sur la vie et les ouvrages de Nicole Oresme; thèse de Paris, 1857. 3 Sur Nicole Oresme mathématicien, voir : Morirz Can- TOR, Vorlesungen über die Geschichte der Mathematik, 2tt Auflage. Ltér Band, Leipzig, 4900; pp. 128-137. - PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) 867 Ce dernier ouvrage n'a jamais élé imprimé; mais on en possède diverses copies manuscrites. La Bibliothèque Nationale en conserve une” qui est ornée de miniatures et porte la signature du Duc de Berry, frère de Charles V. Une autre copie”, également contemporaine de Nicole Oresme, et fort correcte, à été mise à notre disposition par la Direction des Manuscrits de la Bibliothèque Natio- nale*. C'est de cette copie que sont extraits les textes que nous allons donner. L'ouvrage de Nicole Oresme commence en ces termes : « Au nom de Dieu‘, ey commence le livre d’Aris- tote appelé du Ciel et du Monde, lequel, du com- mendement de très souverain et très excellent prince, Charles le Quint de cest nom, par la grâce de Dieu Roy de France, désirant et amant toutes nobles sciences, » Je, Nicole Oresme, Doyen de l'église de Rouen, propose translater et exposer en françois. » Il se termine par une page où nous trouvons ce passage : « Et ainsi, à laude de Dieu, j'ay accomplile livre du Ciel et du Monde au commendement de très excellent prince Charles Quint de ce nom, par la grâce de Dieu Roy de France, lequel, en ce faisant, m'a fait évesque de Lisieux. » Cette phrase nous fait connaître la date de l’ou- vrage, puisque Oresme fut nommé évêque de Lisieux le 3 août 1377. Au second livre du Traité du Ciel et du Monde, Aristote établit que la Terre demeure immobile au milieu du Monde; c'est l'objet des deux chapitres qu’en sa traduction Nicole Oresme intitule ainsi : Au XA1V® Chapitre, il commance à déterminer de la Terre, en tant comme elle est centre du Monde, et premièrement de son lieu, en reprenant autres oppinions. Au XX V® Chapitre, il récite les oppinions d'au- cuns du mouvement de la Terre. Après avoir traduit et « glousé » ces deux cha- pitres, Oresme expose sa propre opinion dans les termes suivants” : ! Bibliothèque Nationale, fonds français, n° 565. ? Bibliothèque Nationale, fonds francais, n° 1083. * Une très obligeante indication de M. Omont, directeur du Département des Manuscrits à la Bibliothèque Nationale, nous à permis de consulter ce texte. Nous lui demandons la permission de lui exprimer ici notre gratitude. “ Nous gardons scrupuleusement le langage d'Oresme. L'orthographe de certains mots varie beaucoup, au cours de l'ouvrage, selon le caprice du copiste: entre ces orthogra- phes diverses, nous avons choisi celle qui se rapproche le plus de l'orthographe actuelle. Le seul signe de ponctuation qui figure au texte manuscrit est le point; les autres ont été introduits par nous ; il en est de même de l’apostrophe, inconnue au temps d'Oresme ; le copiste écrit, par exemple, il sensuit là où nous écrivons : il s'ensuit. 5 Bibl. Nat., fonds français, ms. n° 1083, fol. 87, col. a, à fol. 90, col. b. II. — QUE L'ON NE POURROIT PROUVER PAR QUELCONQUE EXPÉRIENCE QUE LE CIEL SOIT MEU DE MOUVEMENT JOURNAL ET LA TERRE NON‘. Mes, soubs toute correction, il me semble que l’on pourroit bien soutenir et colorer la derrenière oppinion, c'est assavoir que la Terre est meue de mouvement journal et le Ciel non. Et premièrement, je vueil déclairer que l’on ne pourroit monstrer le contraire par quelconque expérience; secundement, ne par raisons; et, tier- cement, remettre raisons à ce. Quant au premier point, une expérience est que nous voions sensiblement le Solail et la Lune et plusieurs des estoilles de jour en jour lever et rescoucer, et aucunes tournoier entour le pôle artique, et ce ne peut estre fors par le mouvement du Ciel, sicomme il fut monstré au XVI° Chapitre ; et doneques est le Ciel meu de mouvement journal. Une autre expérience est : Car si la Terre est ainsi meue, elle faict I tour parfait en I jour natu- rel, et doncques nous, et les arbres, et les maisons sommes meus vers orient très isvelment*; et ainsi il nous sembleroit que l’aer et le vent ventist tou- sjours très fort devers orient et bruerait auxi comme il fait contre un carreau; et le contraire appert par expérience. La tierce est que met Ptholémée : Car qui seroit en une naif meue très isvelment vers orient et trairoit une saecte* tout droit en haut, elle ne cher- roit pas en la naïf, mes bien loing de la naïf vers occident; et semblablement si la terre est meue si très isvelment en tournant d'occident en orient, posé que l’on giestast une pierre tout droit en haut, elle ne cherroit pas au lieu dont elle part, mes bien loing vers occident; et le contraire appert de fait. Il me semble que par ce que je disoie à ces expé- riences, l'on pourroit respondre à toutes autres qui seroient amenées à cest propos. : Et doncques, je met premièrement que toute la machine corporelle ou toute la masse de tous les corps du Monde est divisée en deux parties : Une est le Ciel, ouvecques l’espère* du feu et la haute région de l'aer; et toute ceste partie, selon Aristote, au premier des Mélhéores, est meue de mouvement journal”. 1 Ce titre et les trois titres analogues que l'on trouvera plus loin n'occupent pas, dans le manuscrit, la place que nous leur avons donnée; on les trouve en une table des « chouses bien notables » contenues aux deux premiers livres de l'ou- vrage d’Aristote et du commentaire d'Oresme, table qu'Oresme a mise après le second livre (Ms. cit., fol. 122, col. a, à fol. 124, col. b.) 2 Isvelté, ysvelté, ysvelleté signifie : vitesse. (De là notre mot actuel sveltesse); isvelment ou ysvelment signifie : vite; isvel ou ysvel, signifie : rapide. 5 Saecte — flèche (Sagitla). 4 Espère — sphère. 5 Aristote en donnait pour preuve le mouvement diurne 868 PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANCAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1375) L'autre partie est tout le mourant : c'est assavoir la moenne et la basse région de l’aer, l’eaue, et la terre, et les corps mixtes; toute celte partie est immobille de mouvement journal. Item, je suppose que le mouvement localne peut estre sensiblement apperceu fors en tant comme l'on apperçoit un corps soy avoir autrement au regart d'autre corps. Et pour ce, si un homme est en une naïf appelée À, qui soit meue très souef!, isvelment ou tardifvement, et que cest homme ne voie autre chouse, fors une autre naïf appelée B, qui soit meue de tout semblablement comme À en quoy il est, je di qu'il semblera à cest homme que l'une et l’autre ne se meuve; et si À repose et B est meue, il lui appert et semble que B est meue; et si A est meue et B repose, il lui semble comme devant que A repose et que Best meue. Et ainsi, si À reposoit par une heure et B feust meue, ettantoust en l’autre heure ensuyvant feust econverso, que À feust meue et B reposast, cest homme ne pourroit appercevoir ceste mutacion ou variacion, mes continuelment que B feust meue; et ce appert par expérience. Et la cause est que ces deux corps À et B ont continuelment autre regart un à l’autre, en telle manière dutout quant À est meu et B repose, comme il ont quant econverso, quant B est meu et À repose. Et il appert au quart livre de la Perspective de Witelo* que l’on n'appercoit mouvement fors telle- ment comme l’on apperçoit un corps soy avoir autrement au regart d'un autre. Je di doncques que si, de ces deux parties du Monde dessus dictes, celle dessus estoit au jour d'huy meue de mouvement journal, comme si est, et celle de bas non; et demain feustle contraire, que celle de cy bas feust meue de mouvement journal, et l’autre non, c'est assavoir le Ciel etc., nous ne pourrion appercevoir en rien ceste mulacion, mes tout sembleroit estre en une manière huy et demain quant à ce. Et nous sembleroit continuellement que la partie où nous sommes reposast et que l’autre feust tousjours meue; auxi comme il semble à un homme qui est en une naif meue que les arbres dehors sont meus. Et semblablement, si un homme estoit au Ciel, posé qu'il soit meu de movement journal, et que cest homme qui est porté ouvecques le Ciel veoit cleirement la Terre et distinctement les mons, les des comètes qui se forment, croyait-il, en la région la plus élevée de l'air. ! Souef— doucement (suaviter). * Le nom de cet opticien de la fin du xmr° siècle est géné- ralement écrit Vilello ou Vitellio. Maximilian Curtze a sou- tenu (Bulletino de BoncomrAGxt, t. IV, p. 49: 1871) que ce nom devait s'orthographier Witelo. Cette orthographe est justement celle qu'a adoptée Nicole Oresme. a ——_ —_ — — _—" — —————————————_—_—_—_ vauls, fleuves, villes et chastiaux, il lui sembleroit que la Terre feust meue de mouvement journal, auxi comme il semble du Ciel à nous qui sommes à Terre. Et semblablement si la Terre estoit meue de mouvement journal et le Ciel non, il nous semble- roit que la Terre reposast et que le Ciel feust meu; et ce peut ymaginer légièrement chascun qui a bon entendement. Et par ce appert eleirement la responce de la première expérience, car l’on diroit que le Solail et les estoilles appairent auxi couscher et lever et le Ciel tourner pour le mouvement de la Terre et des ellémens où nous habitons. A la secunde, appert la responce par ce que, selon ceste oppinion, la Terre seulement n’est pas auxi meue, mes ouvecques ce, l’eaue et l’aer, comme dit est; quant combien que l'eaue et l'aer de ey bas soient meus autrement par les vens ou par les autres causes; et est semblable comme si en une naif meue, estoit aer enclos; il sembleroit à celuy qui seroit en tel aer que il ne se meust, A la tierce expérience, qui semble plus forte, de la saecte ou pierre jetée en hautete., l'on diroit que la saecte traicte en haut, ouvecques ce trait, est meue vers orient très isvelment ouvecques l'aer par my lequel elle passe et ouvecques toute la masse de la basse partie du Monde devant signée qui est meue de mouvement journal; et pour ce la saecte rechiet au lieu de terre dont elle est parti. Et telle chouse appert possible par semblable; car, si un homme estoiten une naïf meue vers orient tres isvelment sans ce qu'il apperceust ce mouve- ment, et il tiroit sa main en descendant et en des- crissant une droicte ligne contre le maast de la naïf, il lui sembleroit que sa main ne feust meue fors de mouvement droit; et ainsi, selon ceste oppinion, nous semble de la saecte qui descent ou monte droit en bas ou en haut. Item, dedans la naïf ainsi meue comme dit est, peuvent estre mouvemens du lonc, du travers, en haut, en bas, en toutes manières, et semblent estre du tout comme si la naif reposast, et pour ce, si un homme eu telle naïf alloit vers occident moins isvelment qu’elle ne va vers orient, il lui semble- roit qu'il approicheroit vers occident,et il approiche vers orient; mes semblablement, en cas devant mis, tous les mouvemens de cy bas sembleroient estre comme si la Terre reposast. Item, pour déclairer la responce à la tierce expé- rience, après cet exemple artificiel, j'en vueil mettre un autre naturel, lequel est vray selon Aristote; et posé que, en la haute région de l’aer, soit une por- cion de pur feu appelé À qui soit très léger, en tant que par ce il monte au plus haut, au lieu appelé B (fig. 1), près de la superfice concave du Ciel. Je di PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) que, auxi comme ilseroit de la saecte au cas dessus mis, il convient en cestuy que le mouvement de A soit composé de mouvement droit et de partie cir- culaire; car la région de l’aer et les espères du feu par lesquelles À passa sont meues selon Aristote de mouvement circulaire. Et doncques, se il n’es- toient ainsi meues, À mon- / teroit tout droit en haut par la ligne AB; mes pour que, par mouvement / circulaire et journal, Best | entre temps translaté sie- 4 ques! en droit C, il appert A que A, en montant, des- Fig. 1. crit la ligne AC, et est le mouvement de À composé de mouvement droit et circulaire; et ainsi seroit le mouvement de la saecte comme dit est; et de telle composicion ou mixtion de mouvemens fut dit au tiers Chapitre du Premier. Je conclut doncques que l’on ne porroit par quel- conque expérience monstrer que le Ciel feust meu de mouvement journal et que la Terre ne feusl ainsi meue. | ce III. — Que CE NE POURROIT ESTRE PROUVÉ PAR RAISON. Quant au secunt point, si ce povoit estre monstré par raisons, il me semble que ce seroit par celles qui s'ensuivent, auxquelles je respondré tellement que, par ce, l’on pourroit respondre à toutes autres à ce pertinentes. Premièrement tout corps simple a un seul simple mouvement, et la Terre est un ellément simple qui a selon ses parties droit mouvement naturel en descendant; et doncques elle ne peut avoir autre mouvement; el tout ce appert par le quart Chapitre du Premier. Item, mouvement circulaire n’est pas naturel à la Terre, car elle à un autre, comme dit est; eb se il lui est violent, il ne pourroit estre perpétuel, selon ce qu'il appert au Premier Livre, en plusieurs lieux. Itern, tout mouvement local estau regart d'aucun corps qui repose, selon ce que dit Adverrois au NII: Chapitre; et pour ce il conclut que il convient par nécessité que la Terre repose au milieu du Ciel. Item, tout mouvement est fait par aucune vertu motive, si comme il appert au VII et VIII de Phisique, et la Terre ne peut estre meue circulai- rement par sa pesanteur; et si elle est ainsi meue 1 Sicques — jusques. | 865 par vertu dehors, tel mouvement seroit violent el non perpétuel. Item, si le Ciel n’estoit meu de mouvement jour- nal, toute Astrologie’ seroit faulse, et une grande partie de Philosophie naturelle, où l'on suppose partout ce mouvement au Ciel. Item, ce semble estre contre la Sainte Escripture qui dit : Oritur Sol et occidit, et ad locum suum reverlitur, tbique renascens giral per meridiem, et flectitur ad aquilonem ; in cireuitu pergit species et in circulos suos revertiltur. Et ainsi est il escript de la Terre que Dieu la fit immobile : £t enim firmavit orbem Terræ qui non commovebilur. Item, l'Escripture dit que le Solail s’arresta au temps de Josué et que il retourna au temps du roy Ezéchias; et si la Terre feust meue comme dit est, et le Ciel non, tel arrestement eust esté retourne- ment, et le retournement que dit est eust plus esté arrestement, et c'est contre ce que dit l'Escripture. Au premier argument, où il est dit que tou corps simple a un seul simple mouvement, je di que la Terre, qui est corps simple selon soy toute, non à quelconque mouvement selon Aristote, comme il appert au XXII° Chapitre. Et qui diroit que tel corps a un seul mouve- ment simple non pas selon soy tout, mes selon ses parties, et seulement quant elles sont hors de leur lieu, contre ce est forte instance de l’aer qui des- cent quant il est en la région du feu et monte quant il est en la région de l’eaue, et ce sont deux simples mouvements. Et pour ce, l’on peut dire moult plus raisonna- blement que chascun corps simple ou ellément du Monde, excepté par aventure le souverain Ciel, est meu en son lieu naturellement de mouvement cir- culaire. Et si aucune partie de tel corps est hors de son lieu et de son tout, elle y retorne plus droit qu'elle peut, osté empeschement. Et ainsy seroit il d’une partie du Ciel si elle estoit hors du Ciel; et n'est pas inconvénient que un corps simple selon soy tout ait un simple mouve- ment en son lieu, et autre mouvement selon ses parties en retournant en leur lieu; et convient telle chouse octroier selon Aristote, si comme je diré tantoust après. Au secunt, je di que ce mouvement est naturel à la Terre, toute et en son lieu, et néantmoins, elle à autre mouvement naturel selon ses parties quant elles sont hors de leur lieu naturel, et est mouve- ment droit et en bas. Et selon Aristote, il convient octroier chouse 1 Ce mot est pris ici dans le sens qu'a aujourd'hui le mot Astronomie. 870 PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) semblable de l’ellément du feu, qui est meu natu- relment en haut selon ses parties quant elles sont hors de leur lieu ; et ouvecques ce, selon Aristote, tout cest ellément en son espère et en son lieu est meu de mouvement journal perpétuellement, et ce ne pourroit estre si ce mouvement estoit violent. EL selon ceste oppinion, le feu n’est pas ainsi meu, mes c'est la Terre. Au tiers, où il est dit que tout mouvement re- quiert aucun corps reposant, je di que non, fors à ce que tel mouvement puisse estre apperceu, et oncor souffisoit il que tel autre corps fust meu autrement; mes il ne requiert pas autre corps quant à ce que tel mouvement soit, si comme il fust dé- clairé au VIII chapitre. Car posé que le Ciel soit meu de mouvement journal, et que la Terre feust meue semblablement, ou au contraire, Où que par ymagination elle fust adnichillée, pour ce ne cesseroit pas le mouvement du Ciel, et ne seroit pour ce ne plus isvel ne plus tardif, car l'intelligence qui le meut ne le corps qui est meu ne seroient pas pour ce autrement disposés. D'autre partie, posé que le mouvement circulaire requerist autre corps reposant, il ne convient pas que ce corps reposant soit au milieu de ce corps ainsi meu, car, au milieu de la mole d'un molin ou d'une telle chouse meue, rien ne repose, fors un tout seul point mathématique ‘qui n'est pas corps; ne aussi au milieu du mouvement de l’estoille qui est près du pôle artique. Et doncques l’on pourroit dire que le souverain Ciel repose ou est meu autrement que les autres corps pour ce que il est requis à ce que les autres mouvemens soient ou à ce que euls soient percep- tibles. Au quart, l'on peut dire que la vertu qui ainsi meut en ecircuite cette basse partie du Monde, c’est sa nature, sa forme; et est ce même qui meut la Terre à son lieu quant elle en est hors, ou par telle nature comme le fer est meu à l'aymant. D'autre partie, je demande à Aristote quelle vertu meut le feu, en son espère, de mouvement journal; car l’on ne peut pas dire que le Ciel le traie ainsi ou ravice par violence, lant pource que tel mouvement est perpétuel, tant pource que la superfice concave est très polie, sicomme il fut dit au XI° Chapitre, et pour ce elle passe sur le feu très souef, sans fréer, sans lirer, sans bouter, sicomme il fut dit au XVIII: Chapitre. Et doncques convient dire que le feu est ainsi meu circulairement de sa nature et par sa forme, ou par aucune intelligence, ou par influence du Ciel. Et semblablement peut dire de la Terre cellui qui met qu'elle est meue de mouvement journal, et le feu non. Au quint, où est dit que, si le Ciel ne faisoit un circuite de jour en jour, toute Astrologie seroit faulse etc., je di que non, car tous regars, toutes conjuncions, toutes opposicions, constellacions, figures et influences du Ciel seroient auxi comme il sont du tout en tout, sicomme il appert par ce que fut dit en la responce de la première expé- rience. Et les tables des mouvemens et tous autres livres auxi vrais comme il sont, fors tant seule- ment que du Ciel selon apparence et en Terre selon vérité; et ne s'ensuit autre effel de l’un plus que de l’autre. Et à ce propos fait ce que met Aristote au XVI chapitre, de ce que le Solail nous appert tour- ner et les estoilles sintiller ou ocilleter, car il dit que si la chouse que l’on voit estre meue, ou si le voiement est meu de mouvement journal. Au sixte, de la Sainte Escripture qui dit que le Solail tourne etc., l'on diroit qu'elle se conferme en ceste partie à la manière de commun parler humain, auxi comme elle fait en plusieurs lieux, sicomme là où il est escript que Dieu se repanti, et courroca, et rapesa, et telles chouses qui ne sont pas ainsi comme la lettre sonne. Et meisme près de notre propos lisons nous que Dieu queuvre le Ciel de nues : Qui operit celum nubibus. Et toutes voies, selon vérité, le Ciel queu- vre les nues. Etainsi diroit-l-on que le Ciel est meu selon apparence de mouvement journal et la Terre non ; et, selon vérité, il est au contraire. Et de la Terre l’on diroit qu’elle ne se meut de son lieu ne à son lieu selon apparence, mes bien selon vérité. Au VII‘, presque semblablement l’on diroit que, au temps de Josué, le Solail se arresta et, au temps de Ezéchias, il retorna, et tout selon apparence; mes selon vérité, la Terre se arresta au temps de Josué, et avenca ou hasta son mouvement au temps de Ezéchias, et en ce n'ont différence à l'effet qui s'ensuit, et ceste voie semble plus rai- sonnable que l’autre, sicomme il sera déclairé après. IV. — PLUSIEURS BELLES PERSUASIONS A MONTRER QUE LA TERRE EST MEUE DE MOUVEMENT JOURNAL ET LE CIEL NON. Et quand au tiers point, je vueil mettre persua- sions ou raisons par quoy il sémble que la Terre soit meue comme dit est. [ Premièrement, que toute chouse qui a mestier d'une autre chouse doit estre appliquée à recevoir le bien qu’elle a de l’autre parle mouvement d'elle, qui reçoit. Et pour ce voions nous que chaseun ellément est meu au lieu naturel où il est conservé et va en son lieu, mes son lieu ne va pas à luy. PIERRE DUHEM — UN .PRÉCURSEUR FRANÇAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) 871 Et doncques la Terre et les ellémens de cy bas, qui ont meslier de la chaleur et de l'influence du Ciel tout environ, doivent estre disposés par leur mouvement à recevoir ce proufit deuement. Auxi, à parler familièrement, comme la chouse qui est roustie au feu recoit environ elle la chaleur du feu pource que elle est tournée, et non pas pource que le feu soit tourné environ elle. Item, au cas où ne expérience ne raison ne monstrent le contraire, dit est, c’est moult plus raisonnable que tous les principals mouvemens des simples corps du Monde soient et voiesent en procédant tous en une voie ou en une manière ; et ce ne pourroit estre selon les philoso- phes et les astrologues que tous feussent d'orient en occident. Mes si la Terre est meue comme dit est, tous procèdent en une voie d'occident en orient; c'est assavoir la Terre en faisant son circuite en un jour naturel sur les pôles de ce mouvement, et les corps du Ciel sur les pôles du Zodiaque, et la Lune en un moys, le Solail en un an, Mars en deux ans ou environ, et ainsi des autres. Et ne convient mettre au Ciel autres pôles prinei- pals, ne deux manières de mouvemens, un d'orient en occident, et les autres auxi comme au contraire el sur autres pôles, la chouse il conviendroit mettre par nécessité si le Ciel estoit meu de mouvement journal. Item, par ceste manière, el non autrement, seroit le pôle artique le dessus du Monde, en quelconque lieu que ce pôle soit, et occident seroit la dextre partie, en supposant l'ymaginacion que Aristote met au quint Chapitre. Et ainsi la partie de la Terre qui est habitable, et meismement celle où nous sommes, seroit le dessus de nous et la dextre du Monde, et au regart du Ciel, et au regart de la Terre, car tout mouvement de tels corps par ce seroit d’occident en orient, comme dit est. Et c'est raisonnable que habitation humaine soit en plus noble lieu que soit sur terre. Et si le Ciel est meu de mouvement journal, tout le contraire a vérité, selon ce qu'il appert par Aris- tote au VIL Chapitre. Item, combien que Adverrois die au XX° Chapitre que mouvement est plus noble que repos, le con- traire apperl, car, selon meisme Aristote en ce Chapitre XXII°, la plus noble chouse qui soit et qui puisse estre a sa perfection sans mouvement : c’est Dieu. Item, repos est fin de mouvement et pour ce, selon Aristote, les corps de cy bas sont meus à leurs lieux naturels pour euls y reposer. Item, en signe que repos vault mieux, nous prions pour les mors que Dieu leur donne repos : Requiem eternam ele. sicomme Et doncques reposer ou estre moins meu est mieux et plus noble condicion que estre meu ou plus meu, et plus loing de repos. Et pour ce, appert la position dessus dicte très raisonnable ; car l’on diroit que la Terre, qui est le plus vil ellément, et les ellémens de cy bas font leur circuite très isvelment; et l’aer soverain et le feu moins isvelment sicomme il appert aucunes fois par les comètes. Et la Lune et son ciel encor plus tardifvement, car elle fait en un mois ce que la Terre fait en un jour naturel. Et ainsi, en procédant tousjours, les plus haux cieuls font leur révolution plus tardifve- ment, combien que en ce soit aucune instance. Et est ce procès siques au ciel des estoilles fichiés, lequel repose du tout, ou faitsa révolution très tar- difvemement et, selon aucun, en XXX VI" (36.000) ans; c’est, en cent ans, meu par un degré. Item, par ceste voie, et non par autre, peut estre légièrement solue la question que propouse Aristote au XX[I° chapitre, ouvecques peu de addicion; et ne convient pas mettre tant de degrez de chouses ne tèles difficultés obscures comme Aristote met en sa responce au XXII Chapitre. Item, c'est chouse raisonnable que les ciels qui sont plus grans ou plus loing du centre facent leur circuite en révolucion en plus de temps que ceuls qui sont plus loing du centre ; car se il les faisoient en temps équal ou mendre, leurs mouvemens seroient très isvels excessivement; et doncques l’on diroit que nature recompense, et a ordrené que les révolucions des corps qui sont plus loing du centre soient faictes en plus grant temps. Et pour ce, le souverain des ciels qui est meu fait son cireuite ou sa révolucion en très lonc temps, et encor est il très grandement meu pour la grandeur de son circuite. Mes la Terre qui fait très petite circuite, si l’a tantoust fait par mouvement journal. Et les autres corps moiens entre le plus haut et le plus bas font leurs révolucions moiennement, combien que ne soit pas proporcionnelment. Et par ceste manière, une constellation qui est vers aquillon, Major Ursa, que nous appelons le char, ne va pas à reculons, le char devant les bœufs, sicomme il yroit posé qu'il feust meu de mouve- ment journal, mes va par droict ordre. Item, tous philosophes dient que pour néant est fait par plusieurs ou par plus grandes opéracions ce qui peul estre fait par moins d'opérations ou par plus petites. Et Aristote dit au VIII Chapitre que Dieu et Nature ne font rien pour néant. Or est il ainsi que si le Ciel est meu de mouvement journal, il convient mettre ès principals corps du Monde et au Ciel deux manières de mouvemens auxi comme contraire, un d'orient en occident, 872 et les autres econverso, comme souvent dit est. Et ouvecques ce, il convient mettre une isvelté excessivement grande; car qui-bien pense et consi- dére la hauteisce ou distance du Ciel et la grandeur de lui el de son circuite, si tel circuite est fait en un jour, un homme ne pourroit ymaginer ne penser l’isvelté du Ciel comme elle est merveilleusementet excessivément grande, etauxi comme inoppinable et inestimable. Et doncques, puis que tous les effez que nous voions peuvent estre fais, et toutes apparences sabiées, pour mettre en lieu de ce une petite opéra- cion, c'est assavoir le mouvement journal de la Terre qui est très petite au regart du Ciel, sans multiplier tant d'opéracions si diverses et si oultra- geusement grandes, il s'ensuit que Dieu et Nature les auroient pour néant faictes et ordrenées; et c'est inconvénient, comme dit est. Item, posé que tout le Ciel soit meu de mouve- ment journal et, ouvecques ce, que la VIII: espère soit meue d'autre mouvement, sicomme mettent les astrologiens, il convient selon euls une IX° espère qui est meue seulement de mouvement journal. Mes, posé que la Terre soit meue comme dit est, le VIII® Ciel est meu d'un seul mouvement tardif. Et ainsi, par ceste voie, ilne convient pas songier ne adunner' une IX° espère naturelle, invisible et sans estoilles, car Dieu et Nature auroient pour néant faicte telle espère, quant par aulre voie toutes chouses peuvent estre comme elles sont. Item, quant Dieu fait aucun miracle, l'on doit supposer et tenir que ce fait il sans muer le com- mun cors de nature, fors au moins que ce peutestre; et doncques, si l’on peut sauver que Dieu aloisgna le jour au temps de Josué pour arrester le mouve- ment de la Terre ou de la région de ci bas seule- ment, laquelle est si très petite et auxi comme un point au regart du Ciel, sans mettre que tout le Monde ensemble, fors ce petit point, eust été mis hors de son commun cors, et meismement tels corps comme sont les corps du Ciel, c’est molt plus rai- sonnable; et ce peut estre ainsi salvé, sicomme il appert à la responce à la VIT raison qui fut faicte contre ceste oppinion. Et semblablement pourroit- I-on dire du retour du Solail au temps de Ezéchias. V. — COMMENT TELLES CONSIDÉRACIONS SONT PROFI- JABLES POUR LA DEFFENSE DE NOTRE Foy. Or appert comme l’on ne peut monstrer par quel- conque expérience que le Ciel soit meu de mouve- ment journal; car comment qu'il soit posé, qu'il soil ainsi meu et la Terre non, ou le Ciel non meu et la Terre meue, si un oisel estoit au Ciel et il veist \dunner — ajouter, adjoindre. PIERRE DUHEM — UN PRÉCURSEUR FRANCAIS DE COPERNIC : NICOLE ORESME (1377) cleirement la Terre, elle sembleroit meue, et si le oiseau estoit en Terre, le Ciel sembleroit meu. Et le voiement n'est pas pource déceu, car il ne sent ou voil fors que mouvement; mes se il est de tel corps ou detel, ce jugement est fait par les sens dedans, sicomme il appert en Perspective; et sont tels sens souvent déceus en tel cas, sicomme il fut dit devant de celui qui est en la naïf meue. Après est monstré comment par raisons ne peut estre conclut que le Ciel soit ainsi meu. Tiercement, ont esté mises raisons aucunes con- traires, et qu'il n’est pas ainsi meu et la Terre non: Deus enim firmavit orbem Terre qui non commo- vebitur. Nonobstant les raisons au contraire; car ce sont persuasions qui ne concludent pas évidemment. Mes considéré tout ce que dit est, l’on pourrait par ce croire que la Terre est ainsi meue et le Ciel non; et n'est pas évident du contraire. Et toutes voies ce semble de prime face autant et plus contre raison naturèle comme sont les articles de notre Foy, ou tous, ou plusieurs. Et ainsi ce que j'ay dit par esbatement en ceste malère peut valoir à confuter et reprendre ceuls qui vouldroient notre Foy par raisons impugner. » VI. — CONCLUSION. De cette dissertation en faveur du mouvement diurne de la Terre, Nicolas Copernic a-t-il eu con- naissance? C'est une question à laquelle il serait bien malaisé de répondre d’une manière péremptoire. Écrit en francais, sur l’ordre du roi, à ses frais, par un des personnages les plus considérables de l'Université de Paris, le Commentaire au 7raité du Ciel et du Monde composé par Maître Nicole Oresme dut jouir en France d'une grande vogue. En revanche, le fait même qu'il était rédigé en langue francaise dut empêcher qu'ilne fût aisément connu dans les Universités étrangères. | Au début du XVI: siècle, l'imprimerie francaise publia les autres traductions faites par Oresme, celle des Æthiques comme celle des Politiques et des Économiques “elle donna aussi, et par deux ‘fois, ce Traicté de l'Espère que les manuscrits joignent souvent au Traité du Ciel et du Monde, conformément au désir qu'Oresme lui-même avait exprimé; chose étrange, la presse délaissa le seul Traité du Ciel et du Monde. Il est donc fort possible que Copernic ait ignoré ce traité. Et d'autre part, quand on lit ce que Copernic a écrit! pour établir la possibilité et la vraisemblance | 1 NicoLar CoPeRnicr ToriNENsis De revolutionibus orbium | cælestium liber primus, Capp. VIN, VIII et IX. M. LAMOTTE — THERMOMÉTRIE ET CALORIMÉTRIE AUX TEMPÉRATURES TRÈS BASSES 8 1 5] du mouvement diurne de la Terre, on est frappé des analogies qui rapprochent la pensée du cha- noine de Thorn de celle de l’évêque de Lisieux ; volontiers on prendrait les Chapitres du De revolu- tionibus orbium cœlestium pour un résumé, trop concis et quelque peu obseur, de ceux que nous avons trouvés au Traité du Ciel et du Monde. Nicole Oresme n'a-t-il été que le précurseur de Nicolas Copernic? N'en a-t-il pas, en outre, été | l'inspirateur? Nous posons la question sans oser | formuler la réponse. Pierre Duhem, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Bordeaux! THERMOMÉTRIE ET CALORIMÉTRIE Aux températures très basses que nous sommes aujourd'hui en mesure de réaliser, grâce aux gaz liquéfiés, les méthodes thermométriques et calori- métriques ne sont plus applicables, pour la plu- part, sous leur forme usuelle. Et même la défini- tion pratique de la température n'a plus une signi- fication bien rigoureuse; les mêmes difticultés alteignent les définitions calorimétriques, qui sont étroitement liées à celles de la température. Sans insister davantage pour le moment sur ces difficultés, examinons tout d'abord quelles sont les méthodes employées, en nous reportant principa- lement aux travaux du laboratoire de la Royal Ins- litution' de Londres, dirigé par le Professeur Dewar. I. — CALORIMÉTRIE. Un courant d'air passant dans un liquide volatil provoque une évaporation : par suite de la chaleur de vaporisalion absorbée par le changement TasLeau IL. — Températures d'évaporatio AUX TEMPÉRATURES TRÈS BASSES Il s'ensuit que l'hydrogène barbotant dans l'azote liquéfié, dont la température est de —16°C.) 127° abs., amènera ce dernier à la tem- pérature de (— 210°C.) 63°, inférieure à sa tempéra- ture de fusion ; par conséquent, l’azote se solidifiera. En fait, on réalise aisément par ce moyen la soli- dification de l'azote. De la même manière, l'hydrogène liquide doit se solidifier quand on le fait traverser par un courant d'hélium : effectivement, celte solidification se pro- duit quand on fait circuler, dans un serpentin à régénération, un mélange d'hydrogène et d'helium refroidi par l'air liquide s'évaporant dans le vide. critique L'air ou l'hydrogène liquides sont done suscep- tibles d'être employés comme substances calorimé- triques, en mesurant la quantité de ces liquides évaporés, à température constante, par la quan- tité de chaleur à mesurer. La figure 1 représente le dispositif quand on utilise l'air. Le calorimètre proprement dit B, un n et températures critiques des liquides. TEMPÉRATURE _ d'évaporation 340 500 550) 80) 1390) 2390 29230 2480 1860 1410 Ether . A Me Anhydride sulfureux. Chlorure de méthyle Ammoniaque . Ethylène ( TEMPÉRATURI TEMPÉRATURE d'ébullition critique Te 3080 2630 2490 92340 1700 4670 4280 4140 1039 2830 (+ 350) {— 100) 240) — 390) —1030) d'état, la température du liquide s'abaisse. Cette propriété a été utilisée par Dewar pour solidifier l'azote et l'hydrogène liquéfiés, en faisant bar- boter de l'hydrogène à travers l'azote liquide, de l’hélium à travers l'hydrogène liquide. D'après lui, la température atteinte par le liquide s'évapo- rant est sensiblement (dans l'échelle absolue) la moitié de la température critique, comme le montre le Tableau [ ci-dessus. ! H. Enw. AnmsrRoxG6 : Low Temperature Research at the R.I. of G. B., 1909. petit récipient à enveloppe de vide, contenant de 25 à 50 centimètres cubes, est placé dans un réci- pient À de même nature, mais plus grand. La matière dont on veut déterminer la chaleur spéci- fique est renfermée dans un tube C, réuni à B par un joint flexible D. En modifiant quelque peu la disposition, comme on le voit à droite de la figure, on peut introduire la substance en B par portions successives. En chauffant ou refroidissant C ou C', on détermine la chaleur spécifique de la substance entre une température donnée quelconque et la température 874 M. LAMOTTE — THERMOMÉTRIE ET CALORIMÉTRIE AUX TEMPÉRATURES TRÈS BASSES d’ébullition du liquide contenu dans le calorimètre. En pratique, le vase À renferme une paire de litres d'air liquéfié de préparation ancienne, déjà enrichi en oxygène par l’évaporation de l'azote, et le calorimètre B contient également de ce liquide, ce qui permet de rnaintenir la température inva- riable pendant la durée d’une mesure. On étalonne l'appareil en y introduisant un poids connu d'une Fig. 1. — AR à air liquide. — A, enveloppe conte- nant de l'air liquide; B, calorimètre; C ou C,, substance à étudier; D, joint flexible; E, tube pour le dégagement de l'air liquide vaporisé; F, tube gradué. — A droite, dis- positif pour introduire la substance par portions succes- sives, au moyen d’une tige P, glissant dans un bouchon Q. substance à poids atomique élevé, comme le plomb, dont la chaleur spécifique dépend peu de la température La sensibilité du calorimètre varie avec la nature du liquide calorimétrique, comme le montre le Tableau II. TABLEAU II. riences préalables semblaient indiquer qu'aux environs de (— 90°) 183°, la chaleur spécifique du diamant devient sensiblement nulle. Toutefois, d’après les observations de Dewar, elle reste mesu- rable jusque vers (— 220°) 53°, quoiqu'elle diminue très rapidement avec la température. Il en est de même pour la glace: CHALEUR S PÉCIFIQU E de 180 à — 780 --—78° à —188° —188à Diamant . 0,0794 0,0190 0,0043 Graphite . 0,1341 0,0599 0,0133 Glace Ce 0,463 0,285 0,146 Il semble, à en juger par ces mesures, que les vibrations moléculaires s'affaiblissent de plus en plus quand on s'approche du zéro absolu, et sans doute cessent complètement au zéro même. Les métaux ont alors leur conductibilité élec- trique maximum, les substances non métalliques el les électrolytes leur conductibilité minimum. « Pour se faire une image grossière des chan- gements produits par le refroidissement, on peut se représenter les molécules du métal comme des tubes à large rebord, ces rebords glissant l’un sur l’autre, de manière qu'un fluide circulant dans une série de ces tubes, placés bout à bout, soit gêné plus ou moins dans son déplacement par les oscil- lations qui se produisent à tous les joints. A mesure que la température s'abaisse, les rebords se rapprochent de plus en plus, jusqu’à ce que finale- ment ils coïncident. La conductibilité atteint alors son maximum, car elle n'est plus fonction que de — Propriétés des liquides calorimétriques. TEMPÉRATURE d'ébullit:on 2830 1950 170° Oxygène . ne EE) LUE) POTERIE er. M LUS 19506) 7704 HyOLOPÉDERR Pr CL. se. 0 25205) 92005 Anhydride sulfureux . . . . . . 100) Anhydride in EE 180) Ethylène. . . . RERO SD — 4030) VOLUME SPÉ CIFIQUE du liquide en cm° à la température d'ébul- VOLUME DE GAZ en cm° à 0° et 760 millimètres par calorie-wramme CHALEUR LATENTE de vaporisation lition en calories-grammes (solide) L'oxygène est donc environ deux fois plus sen- sible que l’éthylène, l'hydrogène cinq à six fois plus sensible que l'oxygène. En pratique, il est commode d'employer l'air liquéfié, parce qu'il n'y a pas à craindre le mélange avec les gaz de l'atmosphère. Pour se servir de l'hydrogène, il faut empêcher l'accès de l'air dans l'appareil, qui doit être alors modifié comme on le voit sur la figure 2. Les résultats les plus intéressants obtenus par celte méthode sont ceux qui sont relatifs au car- graphite, et à la glace. Des expé- bone, diamant ou la section des tubes et du frottement, sans être réduite par les oscillations des tubes. » II. — THERMOMÉTRIE. Les thermomètres à résistance de plaline, qui ont rendu de grands services dans la mesure des températures basses, ne sont plus utilisables aux températures très basses, parce que leur sensibi- lité est trop réduite. Le coefficient de variation de la résistance du platine diminue, en effet, beaucoup quand la température est très basse. M. LAMOTTE — THERMOMÉTRIE ET CALORIMÉTRIE AUX TEMPÉRATURES TRÈS BASSES 819 Mais les thermomètres à gaz sous volume cons- lant permettent de pousser les mesures jusqu'au voisinage de la température d'ébullition du gaz, qu'on emploie un gaz simple comme lhélium, l'oxygène, l'hydrogène, ou un gaz composé comme l'anhydride car- bonique. Il suf- fit que la pres- sion initiale du gaz soit infé- rieure à la pres- sion atmosphé- rique. La valeur moyenne de la température d'ébullition de l'oxygène, dé- terminée par ce procédé, est (— 182°,5 C.) 90° ,5abs.et celle de l'hydrogène (— 252°,5) 200,5 abs. Cette valeur relative à l'oxy- gène est d'accord avec la moyenne des résultats obtenus par Wroblewski, Olzewski et autres. La température de fusion de l'hydrogène, mesu- rée par le thermomètre à hélium, est 45° abs. En comparant entre eux un grand nombre de thermomètres à résistance, on à reconnu qu'aux basses températures leurs indications sont très variables, et qu'aux environs de la température d'ébullition de l'hydrogène, il est impossible d'obtenir une mesure quelque peu précise avec les instruments de ce genre. À cette température, la résistivité est réduite à une fraction de sa valeur Fig. 2. à 0°, qui est = pour le cuivre, = pour l'or, = se our le platine EL our l'argent 17 P P , 24 P to) « La résistivité d'un métal sans alliage paraît diminuer constamment quand la température s'abaisse et, dans chaque cas, lendre vers une limite asymptotique définie. Ce sont l'or et l’ar- gent qui fournissent les meilleures mesures. Ce.serait un travail d'un grand intérêt, mais qui présente de grosses difficultés, de poursuivre cette étude sur des échantillons de métal purifiés avec toutes les ressources de la Chimie. Dewar s'est servi des propriétés du charbon pour construire un (thermomètre à gaz qui a, sur les autres, l'avantage que sa sensibilité augmente quand la température baisse. Un ballon A (fig. 3) renferme le charbon saturé d'air, d'hydrogène ou d'hélium sous une pression convenable. En V se trouve de l'air ou de l'hydrogène liquide; l’espace — Calorimètre à hydrogène liquide. — À, générateur d'hydrogène pour remplir l'appareil; B, dessiccateur; C, robinet à 3 voies; D, calori- inètre: E, tube de dégagement de l'hydrogène vaporisé dans le calorimètre. | entre À et D est rempli de la vapeur du liquide V. En faisant tomber surle ballon un faisceau de lumière peu intense, on observe une dénivellation sensible du manomètre. La chaleur dégagée par le radium peut être me- surée à l’aide du calorimètre à oxygène ou hy- drogène liqui- des. Un écran de blende, sembla- ble à celui du spinthariscope de Crookes, ne scintille plus sous l’action du radium quand il est refroidi à la température de l'air liquide. Mais, quand on refroidit le ra- dium, placé, ainsi que l'écran, dans le vide, les scin- tillations sont aussi intenses qu'à la température ordinaire. C'est une preuve de plus que les subs- tances phosphorescentes perdent cette propriété . Flat Fig. 3. — Thermomètre à gaz de Dewar. — A, ballon ren- fermant du charbon saturé de gaz; V, air ou hydrogène liquide; E, tube par lequel la pression du gaz vaporisé se communique au manomètre; C, F, robinets. aux températures très basses et que le radium est une substance tout à fait exceptionnelle. III. — REMARQUES SUR L'ÉVALUATION DES TEMPÉRATURES. Les températures que nous avons énoncées dans ce qui précède sont exprimées dans le système 876 M. LAMOTTE — THERMOMÉTRIE ET CALORIMÉTRIE AUX TEMPÉRATURES TRES BASSES qu'on appelle improprement l'échelle absolue. La seule définition {héorique de la température indépendante du corps thermométrique que nous possédions est la définition thermodynamique. On sait que, dans cette échelle, l'intervalle de tempe- rature est déterminé par le rendement d'un cyele de transformations réversible, effectué entre les températures qui sont les limites de l'intervalle. Il est impossible en pratique de mesurer directement l'intervalle de température ainsi défini. Un calcul simple, qu'on répète dans tous les cours, montre que l'échelle thermodynamique est représentée exactement par l'échelle d'un thermomètre à gaz parfait sous volume constant. Cette circonstance nous permettrait de réaliser un thermomètre absolu, mais aucun gaz réel ne jouit des propriétés de gaz parfaits. Quelques-uns s’en écartent assez peu dans les limites des températures moyennes : mais les écarts deviennent certainement considérables quand ces gaz sont dans des conditions de tempé- rature et de pression voisines de celles où ils se liquéfient. L'échelle du thermomètre à gaz devient alors arbitraire comme toutes les autres, puisqu'il est impossible de la comparer à l'échelle absolue. De plus, la notation usuelle des températures procède par progression arithmétique, tandis que l'échelle thermodynamique procède par progression géométrique. Il est naturel, en effet, d'appeler inter- valles de température égaux dans l'échelle absolue deux intervalles caractérisés par une mème valeur du rendement d'un eyele réversible opéré entre les deux limites des intervalles. Remarquons, à ce pro- pos, qu'il n'est pas exact à lous égards de dire, comme on le fait dans la plupart des cours, qu'on ne peut pas additionner deux températures. Cela est vrai en ce sens que la somme de deux nombres, par lesquels nous exprimons deux températures, représente une température qui n'est liée par aucune relation précise avec les deux autres. Mais nous pouvons très bien concevoir la superposition de deux intervalles de température ayant une limite commune intermédiaire aux limites extrè- mes. Elle correspond à l'association de deux ma- chines thermiques, la source froide de l’une étant la source chaude de l’autre. Seulement celte addi- tion physique des deux intervalles se traduit non pas par une addition algébrique, mais par une mul- liplication des nombres ou une addition des loga- rilhmes, comme celle des intervalles acoustiques. Si la limite commune des deux intervalles n'est pas la limite intermédiaire, il suffit de supposer que l’une des machines fonctionne en sens inverse de l’autre. De la différence de notation signalée, il résulte que le degré centigrade a une valeur thermodyna- mique variable avec la température elle-même. Si nous désignons la température absolue centigrade par T, cette valeur est: DEEE T—— = 1+ elle croil, et très rapidement, quantT devient petit. La température tend done asymplotiquement vers le zéro absolu. Aussi, si les nombres de la nota- lion arithmétique se resserrent aux très basses températures, les intervalles thermodynamiques restent du mème ordre de grandeur. Il ÿ a le même intervalle entre la température de fusion et la tem- pérature d'ébullition de l'hydrogène (de 15° à 20° abs.) qu'entre les températures de fusion et d'é- bullition de l'eau (273° et 373°,. Entre la tempéra- ture d'ébullition de l’hélium et celle de l'hydrogène, l'intervalle thermodynamique est plus grand qu'en- tre les températures d'ébullition de l’eau et celle du zinc. Les difficultés qu'il faut surmonter pour gagner quelques degrés dans la région des basses tempéra- tures croissent donc rapidement. Quelles chances avons-nous d'atteindre le zéro absolu ? Pour pou- voir répondre à cette question, il faudrait d'abord savoir ce qu'il faut entendre par zéro absolu. Or, actuellement, nous ne pouvons nous faire aucune idée sérieuse de ce que, au point de vue physique, représententlesconditionsquenous désignons ainsi. La seule conception rationnelle est de considérer le zéro absolu comme un point où tous les thermo- mètres seraient d'accord, comme le point de conver- gence de toutes les courbes thermométriques cons- truites à une échelle convenable; où, d'autre part, la température moyenne d'un système, la seule que nous mesurons, serait égale à la température de chaque molécule. Ce dernier point est encore gros de difficultés. Quoi qu'il en soit, nous ne saurions méconnaitre l'intérêt et l'importance des progrès accomplis, ni marchander notre admiration à tous ceux qui, par leurs travaux théoriques ou praliques, ont réussi à nous ouvrir un domaine qu'auparavant nous osions à peine entrevoir. Marcel Lamotte, Professeur-adjoint à l'Université de Clermond-Ferrand. M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE DEUXIÈME PARTIE : La plupart des travaux que nous signalons dans cette partie de la Æevue ne sont pas intéressants seulement pour des spécialistes: à leur valeur de contribution, à la connaissance des groupes étudiés, s'ajoute un intérêt biologique général; mais la diversité des points de vue rend plus commode de les mentionner en suivant l'ordre de la clässifica- tion. I. — PROTOZOAIRES. La floraison de travaux portant sur les Proto- zoaires n'a pas diminué ces dernières années. Les plus importants à considérer, au point de vue qui nous occcupeici, Sont toujours ceux qui traitent du cycle évolutif, soit qu'ils apportent des contribu- tions à la Cytologie générale, soit qu'ils complètent nos connaissances sur les affinités des divers {types ou qu'ils nous fassent mieux connaître les migra- tions de ces organismes, surtout en ce qui con- cerne les maladies infectieuses Les recherches cytologiques ont d'abord conti- nué à mettre en évidence l'extrême complexité et variété de distribution des substances nucléaires : c’est de là que sont nées la notion de chromidies, sur laquelle nous avons attiré l'attention dans nos précédentes revues", et les théories de la Linucléari- té, qui en ont été jusqu à un certain pointla consé- quence. On trouvera un résumé clair et une appré- ciation judicieuse de nos connaissances actuelles dans la revue de Dobell *. Il conseille, pour le moment, de ne pas étendre cette notion de chromi- dies en dehors du monde des Protistes et d’être sceptique sur les explications qu'on à voulu en donner. Nous avons montré dans la première partie de revue (p. 850) quelle importance Hartmann attache aux nombreux faits connus d'autogamie, relative- ment à l'explication de la fécondalion. Comme contributions de faits rentrant dans l’or- dre d'idées que nous venons de soulever, notons : L'existence, seulement {emporaire, du micronu- cleus chez certains Infusoires, les Zchthyophthirius, curieux parasites de la peau des Poissons * Les phénomènes nucléaires dans les divisions de maturation des micronuelei des Infusoires ‘, ! 1904, p. 596 ; 1906, p. 38. ? Quart. Journ. of müicr. Se., t. LIII, 1909. % NERESHEIMER : Ber. Bay. biol. Versuchsstat. in München, £. I, 1908. * CazxiNs et Cv : Arch. f. Protistenk., t. X, Pororr : Zeitschr. f. wiss. Zool., t. LXXXIX, 1908. 1907; — REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. ZOOLOGIE SPÉCIALE accompagnées de réduction. Dans le cas des Para- mécies éludié par Calkins et Cull, où il n’y à pas différenciation des individus qui se conjuguent, la dernière division de maturation est hétéropolaire et les micronuclei-gamètes sont inégaux ; Le cas de l'Amaba diploïdea, où les noyaux de copulation restent séparés pendant toute la vie et la multiplication végétatives et ne s'unissent qu'à la copulalion suivante ! ; Les nouveaux exemples d'automixie (union de noyaux provenant d'une même division ou de cellules-sœurs ou proches cousines) chezles Myxos- poridies” ; Enfin l'existence de noyaux tels que ceux de l'Infusoire parasite Rhizocar yum concavum, faisant le passage entre les macronueléi typiques et les noyaux très amiboïdes ou même diffus des Æoltin- geria et des Chromidina”. Les Trypanosomes pathogènes les plus typiques, tels que le Tr ypanosoma gambiense, offriraient, sous leur forme ordinaire, des phénomènes assez parti- culiers, interprétés, par Breinl et Moore ‘ qui les ont découverts, comme sexuels : le noyau cinétique (centrosome) et le noyau trophique copuleraient par l'intermédiaire d'une bande chromatique ou de masses globuleuses que celui-là enverrait à ce- lui-ci. Les auteurs voient dans ces faits, qui se présen- tent chez le Trypanosome de la dourine de la même facon que chez les espèces convoyées par des insectes, des raisons de ne pas croire à l'existence, pour les Trypanosomes pathogènes, d'un autre hôte que le mammifère infecté naturellement. La lutte continue, en effet, plus ardente que jamais, entre ceux qui n'attribuent qu'un role mécanique aux insectes convoyeurs et ceux qui croient, pour les trypanosomiases à tsétsés tout au moins, à une évolution chez ces insectes si spéci- fiques. Et, à notre avis, la balance, malgré tout, penche de plus en plus vers les derniers. Que les insectes puissent jouer un rôle mécanique dans les infections sanguines, personne ne le conteste, et, en particulier pour les trypanosomiases, Bouffard, er 1 Harruanx el NAGLER : Berlin, janv. 1908. ? KeysseLirz : Arch. f. Protistenk., t. XI, 1908 ; AWERIN- ZEFF : 1bid., t. XIV, 1909. * CauLcery et MEeswiz : Congrès de J'Afas, Reims, 1907; Do8ELL : Quart. Journ. of micr. Se., t. LIN, 4909. * Ann. of trop. Med. a. Parasit., t. I et t. Il, et Proc. Roy. Soc., B, t. LXXX. Sitzgber. Ges. naturf. Freunde 21° M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE au Soudan !, les membres de la Mission francaise d'études de la Maladie du sommeil, au Congo *, ont montré que les faits parlaient pour un rôle de simples vecteurs accompli par certains Insectes, les Stomoxes, dans le cas de Ja Souma du Niger, des insectes domestiques, peut-être des Moustiques des genres Stegomyia et Mansonia pour les épidé- mies de familles et de cases dans la maladie du sommeil au Congo’. Mais quel que soit le rôle épidémique de ces insectes, le rôle endémique reste aux tsétsés,. Roubaud' a découvert l’évolution des Trypano- somes pathogènes dans la trompe des Glossina palpalis ayant sucé du sang parasilé, évolution spé- cifique, limitée à la trompe, qui trouve éyidemment ses éléments nutritifs dans la salive de l'insecte, et qui amène la transformation rapide des trypa- nosomes en formes trapues fixées solidement aux parois de la trompe par leurs flagelles, puis leur multiplication sous cette forme. Des infections totales du tube digestif ont été rencontrées dans la nature, qui ne sont ni de vulgaires cultures, ni une évolution de trypanosomes « sauvages » propres à la tsétsé. On ne sait pas encore exacte- ment lesquelles de ces formes sont en cause dans les remarquables résultats expérimentaux obtenus avec divers virus, dont le 7. gambiense, par Kleine* en Afrique orientale allemande, reproduits avec le même succès par Bruce en Ouganda et par Bouffard au Soudan: ces savants ont vu que les isétsés, capables de convoyer, sans doute mécani- quement, les trypanosomes, les premiers jours qui suivent la piqûre des animaux infectés, perdent vite ce pouvoir ; mais, au bout d’un temps variable de dix à vingt jours, elles redeviennent infectantes et le restent longtemps, probablement jusqu'à leur mort. Bien qu'on ait décrit, chez ces tsétsés, un assez grand polymorphisme de Flagellés, certaines formes faisant penser à un dimorphisme sexuel, bien qu'on ait vu un retour final aux types du sang, on n’est pas encore fixé sur le mode d'évolution des Trypanosomes; mais qu'il y aitévolution, celanous semble difficile à contester. L'hypothèse a été faite plus d'une fois que la transmission des trypanosomes pouvait aussi être héréditaire chez les tsétsés ou autres invertébrés convoyeurs, comme c'est le cas ordinaire avec la plupart des piroplasmes pathogènes chez les tiques. On n'a encore aucun fait positif pour ce qui con- — 4 Bull. Soc. Path. exot., t. 1, 1908. 2 G. Maurix, Lesogur et ROUBAUD : d'Etudes de la maladie du sommeil au Paris, Masson, 1909. # Rappelons qu'en présence de faits analogues, Kocn a incriminé les rapports sexuels comme dans la Dourine. “ Rapport de Ja Mission d'études, I. ce. 5 Deutsche mediz. Woch., 1909, n° 11, 21 et 29. Rapport de la Mission Congo français, cerne les trypanosomes des Mammifères, mais. Brumpt' a bien établi l'existence d’un pareil mode pour le 7rypanosoma inopinatum de la /iana escu- lenta chez la Sangsue Helobdella algira. Ces faits et tous ceux basés sur la présence et la morphologie comparée des Flagellés propres à l'intestin, tant d'insectes suceurs de sang que d'autres à mœurs différentes”, amènent à la con- clusion que les Trypanosomes sanguicoles ont pour origine des Flagellés intestinaux d’Invertébrés ; eux-mêmes ont probablement une origine com- nmune avec cette très intéressante forme découverte par Lafont”, dans le suc d'Euphorbes malades de l'ile Maurice, et convoyée d’ailleurs, en toute yrai- semblance, par des Hémiptères. La maladie du sommeil africaine n’est plus la seule maladie humaine à trypanosomes. Déjà des. trypanosomes avaient été apercus dans des lames. de sang humain en Transcaucasie (Marzinowsky), aux Philippines (Bureau of Science) ; mais les cir- constances n'ont pas permis de poursuivre ces. intéressantes découvertes. Il n’en a pas été de même récemment au Brésil, à l’Institut dirigé par Oswald Cruz, où la découverte de Flagellés intestinaux d'un Hémiptère réduvide du genre Conorhinus à conduit Chagas à celle d’un trypanosome, agent d’une maladie infantile de l'État de Minas: la piqûre de la punaise ayant produit chez un ouistiti une in- fection à trypanosomes, transmissible aux divers. animaux de laboratoire, une enquête conduisit à cette découverte que l'homme, qui est surtout piqué par le réduvide, est l'hôte naturel du nouveau try- panosome. Ce trypanosome diffère déjà notablement des. trypanosomes pathogènes actuellement connus, par sa schizogonie pulmonaire en rosaces de huit éléments dépourvus de flagelles et par son exis- tence transitoire intraglobulaire. De nouvelles. études montreront peut-êtresesaffinitésavecl'Ændo- trypanum de Mesnil et Brimont”, découvert par ce dernier dans le sang d'un Édenté de la Guyane, le: Cholæpus didactylus ; c'est une sorte de Trypano- some ou, mieux, de Crithidia, à centrosome situé très près en avant du noyau, avec flagelle rudimen- taire, et qui se loge dans les hématies. Cette forme curieuse apparaît comme nettement intermédiaire entre les Trypanosomes et les Leish- mania (parasites du kala-azar, de l'anémie splé- LS TD MS PRE AT 157 ©) RENE 1 (, R, Soc. Biologie, t. LXIII, 1907. 2 Voir, pour l'exposé des faits et leur analyse très péné- trante, Rousau in Rapport de la mission d'Etudes, etce., I. e., et Thèse Docl.'ès Sciences, Paris, 1909, et les deux articles de cet auteur que la Revue générale des Sciences publiera dans ses deux prochains numéros. 5 C, R. Soc. Biologie, t. LXVI, 1909. 4 Voir entre autres CnaGas : Bull. Soc, Path. exot., {. I, juin 1909. 6 (!, R. Soc, Biologie, 1. LXV, 1908. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE nique infantile, du bouton d'Orient). Pour ces der- niers, la diflérence essentielle® est que la forme qui existe chez l'homme est devenue globuleuse; mais elle a encore, du flagellé, le centrosome et même souvent un filament qui en part et qu’on a le droit de regarder comme un rhizoplaste, partie de l'appareil flagellaire*. Notons, en passant, les progrès accomplis par cetle question des leishmanioses, grâce surtout à Ch. Nicolle, qui a découvert l'infection spontanée du chien et la sensibilité, non seulement de cet animal, mais encore des singes, à l'inoculation expérimentale”. Faut-il, comme le voudraient quelques auteurs (Novy, Patton), établir, après les Leishmania, une barrière infranchissable et se refuser à reconnaitre des affinités entre tous ces organismes dont nous venons de parler et les hématozoaires endoglobu- laires anciennement connus : Plasmodium, Piro- plasma et Hemogregarina? Même en ne faisant pas fond sur les faits mémorables avancés par Schau- dinn en 190%, et qui, somme toute, n'ont jamais été infirmés, on ne peut s'empêcher de reconnaitre qu'il existe, chez les Hémocytozoaires que nous venons de citer, bien des particularités qui ne trouvent d'explication logique que comme restes d'un état ancestral flagellé. Hartmann en a cité quelques-unes”; d’autres sont venues s'ajouter et fortifier l'opinion que tous les Hématozoaires endo- globulaires sont reliés phylogénétiquement aux Trypanosomides et qu'il y a lieu d'admettre pour l'ensemble le groupe des Binucleata de Hartmann. Mais alors faut-il attribuer simplement à la con- vergence les ressemblances indéniables des Hémo- cytozoaires, dont l'hématozoaire de Laveran est le type, et des Coccidies? Les recherches de Miller viennent encore corroborer ces affinités”. On lui doit une remarquable étude sur l’évolution d'une hémogrégarine que l’on rencontre dans les leucocytes du rat et qui occasionne chez cet animal une maladie parfois mortelle. Il à vu que cette hémogrégarine a pour second hôte un Acarien du groupe des Gamasidae, le Lelaps echidninus, ecto- parasite du rat. Le Lelaps s'infecte en sucant le sang du rat; les formes enkystées des leucocytes ‘ Nous n'attachons aucune importance au fait que les Leishmania sont parasites de cellules, généralement de gros macrophages, rentrant dans la catégorie des phago- cyles de Metchnikoff. Les hémogrégarines qui habitent dans les leucocytes ne semblent pas diflérer de celles des héma- ties. Les globules rouges ne possèdent-ils pas aussi, au moins à l'état jeune, la propriété phagocytaire d'englober leurs parasites, comme NERESHEIMER (Arch. f. Protistenk.,t. XVI), vient de l’observer chez la grenouiHe ? | ? Voir Novy : Bull. Soc. Path. exot., t. XI, 1909. # Voir Ann. Inst. Pasteur, t. XXII, 1909. * Arch. f. Protistenk., t. X, 1907. 5 Hyq. Lab., U.S. Publ. Health a. Mar.-Hosp. Serv., | Bull. n° 46. deviennent ookinètes qui en résultent évoluent dans les lacunes libres, s'unissent deux à deux et les du corps pour donner les kystes à sporocystés renfermant eux-mêmes les sporozoïtes; c'est une sporogonie typique de Coccidie, sauf la pseudo-iso- gamie qui est à la base et qui rappelle celle de beaucoup de Grégarines. Les sporozoïtes ne de- viennentjamais libres chez l'Acarien ; il est donc peu vraisemblable qu'ils soient inoculés par sa trompe. Le suc digestif de rat les libère et Miller à obtenu des infections régulières en faisant absorber aux rats, avec leur nourriture, des corps de ZLelaps écrasés. Après une courte phase sanguine, le para- site va au foie et y accomplit sa schizogonie; le sort ultime des mérozoïtes est d'être englobés par les leucocytes où ils vivent enkystés jusqu'à ce que leur évolution puisse se continuer chez l'Acarien. Au point de vue des modes d'infection, cette étude fait connaitre un type intermédiaire entre celui commun aux hématozoaires (l'hôte invertébré les prend dans le sang et les y reporte, ou bien, cas des filaires, les dépose sur la peau) et celui réalisé chez les Sporozoaires du genre Aggreqala, pour lesquels Léger et Duboseq ont démontré que, aussi bien chez l'hôte schizogonique, le crabe, que chez l'hôte sporogonique, le céphalopode, l'infection se fait par la voie digestive. Si la scission des Sporozoaires en deux groupes, — Télosporodies ou Eclosporés, comprenant les Coccidies et les Grégarines, et Néosporidies ou Endosporés (Myxo-, Micro-, Sarco- et Haplospo- ridies), — que l’un de nous préconisait en 1899, est généralement admise*, il reste encore bien des points à préciser, particulièrement en ce qui con- cerne les Sarcosporidies, pourtant si intéressantes à considérer en Pathologie comparée. Les expé- riences de Négre’, tout en confirmant celles de Th. Smith sur la voie d'infection intestinale pour la Sarcosporidie de la souris, ont établi l'existence d'un stade intestinal particulier, qu'on n'a pas directement observé. Negri*, en donnant au cobaye, avec la même Sarcosporidie de la souris, une infection d'un type morphologique très spécial, a réalisé un cas de transformisme expérimental qui oblige à une revision de nos idées sur les rapports spécifiques étroits entre hôte et parasite. Les travaux continuent à être nombreux sur la délimitation du groupe des Protozoaires, tant du côté des Bactéries que de celui des formes à la limite de la visibilité. La nature animale ou végétale des 1 Nous avons cité, dans une précédente revue, les notes préliminaires des auteurs. Leur travail in extenso a paru dans le tome XII d'Arch. f. Protistenkunde. 2 Voir HARTMANN, 1. €. 3 (!, R. Soc. Biologie, t. LXIIT, 1907. 4 Rendiconti d. R. Accad. d, Lincei, t. XVII, mai 1098. 880 M. CAULLER® er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE Spirochètes est toujours très discutée, bien que l'accord soit fait sur l'existence formes qui relient les Protozoaires aux Bactéries et que, comme nous le disions dans une précédente revue”, il est fort possible qu'il s'agisse d'un groupe de formes où aucun des critères distinctifs des deux règnes ne puisse être applicable. Ce qui est en dis- eussion, c'est la place exacte des Spirochètes dans cette série, soit plus près des Trypanosomes (ce qu'on traduit en disant Protozoaires), soit plus près des Spirilles proprement dits (alors Bactéries). On a voulu, en dehors de la morphologie, appli- quer comme caractéristiques l’action d’un certain nombre de substances, tels que les sels biliaires et la saponine, qui respectent en général les Bactéries, mais détruisent les Protozoaires. Prowazek se base principalement sur cette propriété pour affirmer la nature animale des nombreux micro-organismes, actuellement connus, à la limite de la visibilité {agents de la variole et autres épithélioses, de la rage, de la fièvre aphteuse, etc.), et il crée pour eux le groupe des Chlamydozoaires (de yhæubs, manteau)” nommé ainsi en raison de l'enveloppe protectrice que les cellules de l'organisme infecté sécrètent autour des germes qui sont à leur intérieur. Si cette conception nous parait encore bien discutable, nous sommes disposés à généraliser la notion que nous développions dans une précédente revue* : le fait, pour les agents des maladies sep- ticémiques, d'avoir, comme second Aôfe, un inverté- bré suceur de sang, les rapproche des Protozoaires. Pareille notion est importante, disions-nous, en ce qui concerne les germes ultramicroscopiques, tels que ceux de la fièvre jaune et de diverses maladies du bétail de l'Afrique du sud. Ii faut y ajouter maintenant ceux de la dengue et des maladies similaires (qu'ils soient propagés par le Culex fatigans, comme le veulent Graham, Ashburn et Craig‘, ou par le Phlebotomus pappatasii, comme l’ontétabli Dœrr et ses collaborateurs”), — peut-être aussi d'autres germes ultramicroscopiques septicé- miques tels que celui de l'anémie infectieuse du cheval ou dela fièvre aphteuse, si les taons, accusés de les transmettre, sont vraiment des hôtes inter- médiaires. Et ainsi, tout ce groupe d'organismes sanguicoles, parallèle à ceux des Trypanosomes, des Spirochètes et des Filaires, serait à classer dans les Hématozoaires. Signalons, en terminant, l'apparition de plusieurs traités sur les Protozoaires. D'abord la fin de cet embranchement dans le d'une série de 1 1906, p. 91. 3 Arch. [. Protistenk., {. X, 1907. 3 4906, p. 91. # Philippine Journ. of Se., t. I, 1907. 5 Berl. klin. Woch., 1908, n° 41. traité de Ray Lankester'; il comprend les groupes plus ou moins alliés aux Rhizopodes et les Mastigophores. Tout récemment, ont paru les traités de Calkins* et de Doflein*; conçus dans un esprit très différent, ils n'en ont pas moins, en commun, de présenter une documentation très moderne, où les diverses questions à l'ordre du jour sont envisagées, et de donner une très grande extension aux Protozoaires parasites et surtout pathogènes. II. — MÉTAZOAIRES. $1. — Cælentérés. Enregistrons les intéressantes recherches d'Hé- rouard sur le eyele évolutif des Acraspèdes”*. Il à constaté d'abord la production, par des Scyphis- tomes fixés dans l'aquarium de Roscoff, sous le disque pédieux, de kystes qu'il compare juste- ment à des statoblastes, et qui, comme ceux-e€1, sont recouverts d'une paroi anhyste résistante. Ces kystes se forment de mai à novembre et, pendant ce temps, il ne se produit pas de bourgeons nus. Ils évoluent ultérieurement en nouveaux Scyphis- tomes. Pendant quatre ans, Hérouard a vu ces phénomènes se reproduire, sans qu'il apparaisse de Méduses (£phyra), etil en était arrivé à conclure que ce Scyphistome ne comprenait pas de forme médusoïde dans son cycle. Mais, ayant été conduit à nourrir abondamment les Scyphistomes, pendant l'été de 1908, avec des ovaires d’oursin (S/rongylo- centrotus), il vit d'abord un bourgeonnement actif intervenir, puis, trois mois après, se formèrent des Ephyra. Ces expériences montrent done que le Scyphistome possède un triple moyen de multipli- cation : bourgeons nus, statoblastes, strobilisation en Æphyra, et que la nutrition détermine l’un ou l'autre; les statoblastes sont une forme d’inanition et de résistance. Les expériences de nutrition avec l'ovaire de Strongylocentrotus ont, en outre, fourni à Hérouard un critérium histologique qui lui fait admettre avec Gôütte (contre Chun, Hein, etc., Cf. Rev. 1903, p. 617) que les Acraspèdes ont bien un pharynx et des bandes entéroïdes ectodermiques comme les Anthozoaires, ce qui justifie la validité du groupe des Scyphozoaires. S 2, — Dicyémides et Orthonectides. Caullery et Lavallée” ont poursuivi l'étude de la 1 Part I, f. 1. Introduction and Protozoa. London, A. et C. Black, 1909. Protozoology, New-York et Philadelphie (Lea et Feebi- " uer), 1909. 3 Lehrbuch der Protozoenkunde, Jena, Fischer, 1909. ‘ C. R. Acad. Se., t. CXLV, 1907; CXLVII, 1908, et CXLVIIT, 1909. 5 Arch. Zocl. expér. (sér. 4), &. VIIL, 1908. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 881 reproduelion sexuée des Orthonectides, sur le /?ho- palura ophiocomæ et obtenu expérimentalement les diverses stades de la fécondation des œufs, de l'expulsion des globules polaires et du développe- ment jusqu'à la larve libre. D'autre part, Hartmann” a publié 1n extenso les observations par lesquelles il a mis hors de doute la fécondation des germes” qui, chez les Dicyémides, deviennent les individus mâles (v. Rev. 1904, p. 604). $ 3. — Plathelminthes. Un certain nombre de travaux sur cet embran- chement nous paraissenl mériter d'être signalés ici. En premier lieu, celui de C. H. Martin® qui vient de prouver que les nématocystes des Turbellariés (il a expérimenté sur le Hicrostoma lineare et le Stenostoma Sieboldii) ne leur appartiennent pas en propre, mais proviennent des Hydraires dont ils se nourrissent. Il l’a prouvé par diverses expériences (avec des Hydres, des Cordylophora lacustris, des Eudendrium) dont le détail est facile à imaginer. Ce résultat était à prévoir depuis la démonstration de la même origine, établie par Grosvenor(v. Æev., 190%, p. 607), et confirmée par divers auteurs, notamment par Cuénot® pour les nématocystes des Æolidiens. Hallez* a publié une étude intéressante et très complète sur l'anatomie et. le développement d'un Rhabdocèle parasite dans l'estomac des Cardium, le Paravortex cardii. Malgré son parasitisme, cette espèce a encore une anatomie assez normale. Quant à son développement, l'étude s'en présente dans des conditions favorables parce que l'animal est vivipare et que ses œufs, dans le corps maternel, sont entou- rés d'une coque mince. Grâce à ces circonstances, Hallez a pu suivre pas à pas l'embryogénie, géné- ralement très difficile à observer chez les Rhabdo- cèles, et sur laquelle nous avons peu de documents. De cette description, nous retiendrons ici seule- ment le rôle très important (el qui nous semble très paradoxal, malgré le apporté aux observations) attribué aux cellules vitellogènes qui accompagnent les ovules dans la coque des œufs. Ces éléments, tout à fait indépendants des ovules par leur origine, contribueraient cependant à l'édi- fication de l'embryon. Leurs noyaux, après avoir montré dans les phases initiales un aspect fripé de dégénérescence, se rajeuniraient et seraient le point de départ de cellules qui constitueraient l'épiderme et l'épithélium intestinal de l'animal Il y a là une dérogation si considérable aux données fondamen- soin 1 Mém. couronnés. Acad. de Belgique, 4°, N.S., t. 1, 1907. £ Quart. Journ. Micr. Se., t. ILAI, 1908. 3 Arch. Zool. expér. (sér. 4), t. VI, 1907. # Arch. Zool. expér. (sér. 4), t. IX, 1909. tales de l'embryogénie qu'on ne saurail trop souhaiter d'autres études des mêmes processus sur des types voisins. Surface ! a étudié la filiation des cellules dans le développement d'un Polyelade (Planocera inqui- lina). Nous avons signalé (/?ev., 1904, p. 606, et 1906, p.89) les nombreux travaux de cel-lineage pu- bliés sur les Annélides, Mollusques, etc., et dont les résultats sont si remarquablement concordants. Sur les Polyelades, nous ne possédions que des données déjà très anciennes de Lang, et qui d'ailleurs faisaient prévoir un accord très étroit avec les autres groupes cités plus haut. I était done indiqué d'étudier minutieusement à cet égard un animal de ce groupe. Les résultats de Surface sont bien ceux qu'on pouvait attendre. Explicitons-en un trait inté- ressant pour l'embryologie générale. Dans tous les groupes de Trochozoaires, trois des macromères, après avoir fourni trois quartettes de cellules ecto- dermiques, forment l'endoderme, c'est-à-dire la paroi intestinale. Lei il se forme une quatrième quartette de grosses cellules, 4 a, 4 b, 4 c, 4 d (cette dernière donne comme d'ordinaire le mésoderme rudimen- taire), tandis que les macromères proprement dits persistent, mais à l'état de petites cellules qui dégé- nèrent. Et ensuite les cellules 44, 4h, 4c ne jouent plus qu'un rôle passif, celui de réservoir de vitellus, tandis que l’épithélium intestinal dérive de la cel- lule 41 comme le mésoderme. Le plan du dévelop- pement est donc le même qu'ailleurs, mais nous voyons ici une régression des éléments endoder- miques fondamentaux. Citons, à propos des Némertiens, un fait de corré- lation découvert par Yatsu?, minime mais Signi- ficatif, car il montre dans quels détails se font les adaptations réciproques des organes. Il est extrême ment difficile de distinguer deux Némertes : l'une, le Cerebratulus lacteus, de la côte Atlantique des États-Unis; l'autre, le C. marginatus, de la Médi- terranée et de nos côtes de l'Océan. Mais la pre- mière pond des œufs entourés d’une coque relative- ment épaisse, tandis que la seconde a des œufs nus. Or, Yatsu a constaté que, tandis que la première a des spermatozoïdes offrant une partie céphalique longue et recourbée, en rapport avec la coque de l'œuf, ceux de la seconde ont une tête très petite, qui suffit à assurer la pénétration dans l'œuf nu. Des faits de cet ordre font concevoir l'état d'amixie où peuvent parfois se trouver des variétés très voi- sines dans le même habitat. Citons rapidement diverses recherches sur les Cestodes. M" Plehn” définitivement un Cestodaire (Cestode non métamérique) dans le reconnait Proc. Acad. Se. Philadelphie, &. LIX, 1907. Biolog. Bull. Woods-Holl, {. XI, 1907. Zool. Anz., t. XXXIII, 1908. œ de 882 parasile du sang des Tanches et des Carpes qu'elle avait décrit (/?ev., 1906, p. 92) comme un Turbel- larié (Sanguinicola), et, à ce propos, signalons que, de plus en plus, ce groupe des Cestodaires semble constitué par des formes larvaires progénétiques de Cestodes métamériques. Cela a été dit pour les Wageneria, Archigetes, Caryophylleus. Janicki* arrive à la même conclusion pour l'Amphilina et il doit en être de même pour le Gyrocotyle*. Enfin, mentionnons un Mémoire où Wolf* a suivi la migration du Cyatocephalus truncatus et reconnu que son premier hôte est le Gammarus pulex. Des truites nourries avec les Gammarus contaminés ont montré des œufs dans les fèces quatorze jours plus tard. Mais ce qui est intéressant est qu’à l’au- topsie faite ensuite, on n'a pas trouvé le tænia dans l'intestin, et Wolf en conclut qu’une fois la repro- duction achevée le parasite est digéré par son hôte. Ce serait là un point biologique curieux sur lequel ilest bon d'attirer l'attention en vue de vérifications. Nous insistions, dans une de nos précédentes revues, sur l'intérêt des nouvelles méthodes biolo- giques (en l'espèce, celle des précipitines) pour apprécier la parenté de diverses espèces animales, en particulier des Anthropoiïdes. Les mêmes méthodes ont été appliquées au diagnostic des infections par divers helminthes, et en parti- culier pour celui des kystes hydatiques. La méthode des précipitines, d'abord appliquée, a donné d'assez bons résultats, mais inférieurs à ceux fournis par la méthode de la fixation du com- plément de Bordet et Gengou‘; dans la grande majorité des cas, l’anticorps qui fixe le complé- ment existe. Cette méthode, maniée avec toutes les précautions nécessaires, permet de diagnostiquer l'existence de kystes hydatiques chez l'homme, alors que les phénomènes cliniques, la radios- copie, l'absence d’éosinophilie parlent contre ce diagnostic; d’où son grand intérêt au point de vue des interventions chirurgicales. Cette existence d'anticorps spécifiques dans le sérum des helminthiasiques est peut-être en rap- port avec l'élaboration par ces parasites de toxines: hémolysines, etc., déjà démontrées pour d'autres raisons. $ 4. — Rotifères. Nous avons parlé, dans la partie générale, des recherches de Whitney sur la détermination du sexe chez les animaux. Nous devons mentionner ici 1 Zeitsch. für wiss. Zool., t. LXXXIX, 1908. ? A signaler aussi, de Janicki, un Mémoire où est suivi avec détail le développement embryonnaire du Tænia ser- rata (Zeit. fur wiss. Zool., &. LXXXVIF, 1907) et qui précise, en les modernisant, les données anciennes de Leuckart et de P. J, van Beneden. 3 Zoo!. Anz., t. XXX, 1906. * Voir surtout WeNserG: Ann. Inst. Pasteur, t. XXIII, 1909, M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE l'important Mémoire que de Beauchamp‘ a con- sacré à la morphologie, l'anatomie et la physiologie de la digestion chez ces animaux. Dans l'impossi- bilité d'analyser ce long travail, disons seulement qu'il constitue un document désormais capital pour l'étude comparative des Rotifères et qu'il est une contribution précieuse à la physiologie de la diges- tion chez les animaux inférieurs. $ 5. — Entéropneustes. Nous ne connaissions le début du développement des Entéropneustes que pour le Palanoglossus Kovalewskii, où il a été suivi par Bateson. Mais c'est une espèce à développement direct, sans larve Tornaria, si bien que l'organogenèse de celle-ci restait un desideratum. Il vient d’être comblé par Heider*, grâce au hasard d’un envoi d'animaux (Ptychodera clavigera) de Trieste à Innsbruck. Pen- dant ce trajet, des œufs furent pondus et fécondés, ce qu'on n'avait pas réussi à obtenir jusqu'ici. Hei- der a mis heureusement ce hasard à profit et obser- vé les embryons jusqu’au début du stade Tornaria. La gastrulation estembolique, le blastopore se ferme complètement; le sommet de l'archentéron s'isole pour former le cœlome du gland; le cœlome du tronc provient d’une paire de diverticules, à l’extré- mité postérieure de l'intestin ; la formation de celui du collier n’a pas été vue. Les faits constatés ne causeront pas de surprise, mais il est intéressant de noter que cette première phase du développe- ment montre une analogie frappante avec les Echi- nodermes, etvient par conséquent, à l'appui desidées formulées autrefois par Metchnikoff, sur les affi- nités des Entéropneustes et des Echinodermes, quand il découvrit que la Tornaria est la larve des Balanoglossus. Davis” a obtenu de son côté les pre- mières phases du développement du Polichoglossus pusillus, mais il semble que cette espèce ne présente pas de Tornaria et qu'elle se rapproche du Z. Kova- lewskii. Citons enfin le fait singulier, observé par Ikeda, d'innombrables Glardiceps Hacksiinageant à la sur- face comme des animaux pélagiques; l'expédition du Siboga avait constaté un essaim analogue de G. malayanus. Quant à la raison déterminante de cette dérogation à l’éthologie des Entéropneustes, elle est obscure. Il semble bien que, dans les deux cas, il ne s'agissait pas d'animaux arrivés à la complète maturité sexuelle et qui videraient leurs produits génitaux à la surface comme les Annélides épitoques”. 1 Arch.Zool.exp.(sér. 4), 1. X, 1909, et Thèse l'ac. Se., Paris. ? Zool. Anz., t. XXXIV, 1909. 3 Univ. Calif. Publicat. (Zoology), vol. IV, 1908. # Annotat zoolog. daponenses, t. VI, 1908. 5 Cf. Cauzzery et Mesxi : Les formes épitoques et l'évo- lution des Cirratuliens. Ann, Univ. Lyon, 1898. M. CAULLERY er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE $ 6. — Annélides. Un nouveau cas d’épitoquie vient précisément d'être observé chez un Polygordius des iles Aru, dans le Pacifique, par K. Dawydoff. La région posté- rieure du corps est bourrée de produits génitaux, landis que les autres organes (tube digestif, muscles) sont atrophiés. L'animal, à cet état, nage pélagi- quement, puis autotomise sa région modifiée et la régénère. C'est donc un cas tout à fait analogue à celui du Palolo”. Pierantoni, dont nous avons déjà analysé les tra- vaux sur diverses Archiannélides (Rev., 1907, p.846), a publié sur le genre Protodrilus une belle mono- graphie détaillée”, qui sera la base des recherches ultérieures. Enfin signalons une étude anatomique minu- tieuse du Dinophilus Conklini, par Nelson ?, où l'on trouvera en particulier une clé dichotomique pour la détermination des diverses espèces. $ 7. S — Mollusques. Conklin*, un des initiateurs et des maitres dans les études de Cell-lineage, vient d'étudier la segmen- tation et l'organogenèse du Fulqur carica, Proso- branche dont les œufs, très chargés de vitellus, atteignent 1.700 x de diamètre eb un volume 2.200 fois plus grand que celui du Crepidula plana (diamètre 136 uw). L'intérêt de l'étude nouvelle de Conklin est de constater que, malgré cette énorme surcharge de vitellus, la segmentation se fait, cel- lule par cellule, d'une facon identique à celle des œufs petits, au moins jusqu'au stade 60. C'est seulement ultérieurement que se manifestent des divergences, mais les groupes cellulaires d'où pro- viennent les divers organes sont strictement ho- mologues dans tous les cas. Kœæbler et Vaney* ont trouvé, sur des Echinides provenant des campagnes de la Princesse-Alice, un nouveau genre de Gastéropodes parasites appar- tenant à la famille des £ulimidæ et voisins des Mu- cronalia et Stylifer. Ils lui ont donné le nom de Pelseneeria et en ont décrit trois espèces. Ces Pel- seneeria nous montrent une des premières étapes des transformations qui aboutissent aux formes si dégradées, telles que Æntosiphon, Entoconcha, Æntocolax, ete. L'animal ici est encore extérieur à son hôte, sa coquille est à nu, mais il a déjà une trompe, qui s'enfonce dans les téguments de l’oursin, 1 Voir aussi.sur le Polygordius un article d'ensemble publié récemment par Hempelmann (Zoo1. Zentralbl, t. XV, 1908). ? Jauna und Flora des Golfes von Neapel, Monog. XXXI, 1909. * Proceed. Acad. Sc. Philadelphie, t. LIX, 1907. * Proceed. Acad. Sc. Philadelphie, t. LIX, 1907. * Bul. Inst. Océanogr. Monaco, n° 418, 1908. 883 et autour de la bouche commence à se développer une large collerette, début du pseudo-pallium des Endoparasites. Si l'on en croit Günther’, c'est du côté des Mol- lusques qu'il faut chercher les affinités encore si deux peu précises des Chætognathes. Dans les groupes, il y a symétrie bilatérale originelle, absence de segmentation, système nerveux du même type, armature buccale semblable, la tête chez le Nautilus et le Spadella; enfin l'anneau cilié préoral des Chaetognathes est superposable au vélum des larves de Mollusques. Günther réunit les Chætognathes aux Céphalopodes pour former les homologies génitales, endosquelette de Nectomalacia, tous les autres Mollusques étant des Herpelomalacia. $ 8. — Némathelminthes. Les Mémoires de R. Goldschmidt*, dont nous dirons ici quelques mots sont au moins autant une contribution à l'étude générale du système nerveux qu'à la connaissance des Nématodes. L'auteur s’est proposé, en effet, d'étudier, cellule par cellule et dans toutes leurs connexions, un système nerveux suffisamment simple pour que ce soit possible (au prix encore d’une grande patience); et il pense être arrivé à celte reconstitution totale. Le système ner- veux de l'Ascaris lombricoides se compose, d'après lui, d’une facon absolument constante, de 162 cel- lules, dont la place et les connexions sont également constantes. Ce nombre est atteint dès la fin de la période embryonnaire, et l'auteur croit même pouvoir retrouver, dans les descriptions précises publiées récemment sur la segmentation des Né- matodes”, les cellules qui constitueront le système nerveux. Pendant toute la vie de l'animal, il n'y à donc que croissance et non multiplication des cellu- les nerveuses. C'est à des conclusions tout à fait semblables qu'Apathy est arrivé antérieurement pour la sangsue, où il fixe le nombre de ces cellules nerveuses entre 350 et 400. En ce qui regarde la théo- rie du neurone, Goldschmidt à trouvé des anasto- moses entre les prolongements des cellules nerveu- ses. Mais la question continuité ou contiguité des cel- lules est, à son avis, secondaire et il voit dans ses recherches un appui à la théorie du neurone, en ce sens que le système nerveux tout entier est ramené uniquement à des cellules et à leurs prolongements et qu'il n'existe pas d'éléments indépendants de ces cellules tels que des neuropiles ”. 1 Quart.Journ. of mier. se., t. LI, et Zool. Anz., t. XXXII. 2 Zeitsch.{ür wiss. Zool., t. XC, 1908 ; t. XCII, 1909. 3 Marnnr : Zeïitsch. für wiss. Zool., t. LXXXI, et XCI, 1908. * Sur les questions fondamentales relatives au système nerveux , voir aussi un Mémoire d'Harrison (Journ. expér, 1906, 584 $ 9. — Crustacés. Signalons à l'attention (afin d'en provoquer des vérifications) un intéressant Mémoire de Bordage* sur le dimorphisme des Atyidae. Bouvier (V. Rev. 190%, p. 595) avait remarqué que, si l'on étudie les divers groupements géographiques d'Atyidae, on oblient souvent des couples de formes, se ran- geant l’une dans le genre Afya, l'autre dans le genre Ortmannia,etne différant que par la forme des pinces; il avail été conduit à supposer que ces formes couplées appartiennent à une seule et même espèce; 1] considérait l'une comme une mutation de l'autre. 11 avait done engagé M. E. Bordage à rechercher à la Réunion, où existe un semblable couple d'espèces (A{ya serrata — Ortmannia al- luaudi), la vérification de cette hypothèse. Bordage à isolé dans un bassin (en prenant des précautions pour se mellre à l'abri des contaminations) une femelle ovifère d'Ortmannia. I] a vu successivement dans l’eau, des zoës, des mysis? et ensuite trois Jeunes ayant achevé la métamorphose. Finalement il à recueilli 10 Ortmannia et 6 Atya. Si donc aucune cause d'erreur n'est intervenue, l’hypo- thèse de Bouvier serait exacte: malheureusement, celte expérience unique n'a pu être répétée par Bor- dage, à cause de son départ de la Réunion, et, en raison de l'importance du fait, il est à désirer que quelqu'un la reprenne. Bordage avait, en outre, provoqué la régénération d’une des pinces d'Atya serrala et l'a vu s'opérer, en passant d'abord par la forme Ortmannia, ce qu'il interprète comme un cas de régénération hypotypique (sensu Giard), analogue à ceux qu'il avait découverts antérieu- rement pour les tarses des Phasmides ?. L'examen des collections de la Princesse-Alice conduit Coutière* à poser un intéressant problème Zoology, t. IV, 1907), où, par l'étude de la greffe de mem- bres sur des larves d'Amphibiens, cet auteur conclut, pour la formation des nerfs, en faveur de la théorie de His (élongation des cylindre-axes) et contre la théorie de Hen- sen (chaines cellulaires se différenciant en fibres nerveuses). Voir aussi la très substantielle et très prudente étude de Legendre (Arch. Anat. microseop., t. X, 1909 , Sur la cel- lule nerveuse chez l'Helix pomatia. / 1 Bull. Scientif. France Belgique, t. XLIII, 1909. * Cette conservation de la métamorphose complète chez une forme d'eau douce est intéressante en elle-même et a été également décrite ces temps derniers pour un Atyidæ des grands lacs africains (Caridina wyckii) par E. von Daday. ,Zool. Jahrb., Abth. f. Anat., t. XXIV, 1907.) 8 Cf. Rev. 1906, p. 88. Sur la régénération et le dimorphisme des pinces des Crustacés décapodes, voir le Mémoire de Przibram (Arch. für Entwicklangsmeeh., t. XXV, 1908). Nous avons signalé antérieurement ses recherches et celles d'E. Wilson (v. Rev. 1906, p. 88) sur l’hctérochélie des Alphaeus et inversion de celle disposition dans la régénération. Przibram montre aujourd'hui, par des expériences sur de nombreuses espèces, la généralité de ce phénomène: en‘outre In section du nerf n'a pas, suivant lui, d'influence spécifique, mais n'agit que par un eflet inhibiteur sur le développement. * Bull. Inst. océanog. Monaco, n° 10%, 1907. M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE Ze EE relativement à des formes de Décapodes qui atteignent une taille déjà considérable (jusqu'à | plus de 4 centimètres) et qui cependant ont gardé de nombreux caractères larvaires. Sont-ce des formes normales du développement ou bien des individus attardés, malgré leur croissance, à une forme larvaire? Se reproduiront-ils sous cette forme? Bouvier' a déjà posé cette question pour les grands Glaucothoës qu'il interprète comme des larves de Pagures n'ayant pu gagner le fond et contraintes à mener une vie pélagique en conser- vant la forme larvaire. Il y aurait là des cas très curieux de pœcilogonie, dont la vérification pré- cise et le déterminisme sont malheureusement peu accessibles. Enfin, mentionnons encore un Mémoire de G. Smith” sur les Anaspidea vivants et fossiles. L'unité de ce groupe et son intérêt ont été décou- verts par W. T. Calman, il y à quelques années. Smith est allé étudier les quelques formes vivantes dans les lacs de Tasmanie, où elles paraissent loca- lisées. On trouvera dans son travail un examen complet de leur morphologie; comme Calman, il voit dans les Anaspidea (ou Syncarida) un groupe tout à fait primitif de Malacostracés, équivalent d'une part à l'ensemble des Eucarides (Décapodes + Euphausides), de l'autre aux Péracarides (Mysides + Edriophthalmes), qui, les uns et les autres, sont beaucoup plus spécialisés. $ 10. — Insectes. Metalnikoff” a fait, sur l'anatomie et la physiologie d'une chenille de Pyralide (Galleria mellonella), de très intéressantes observations. Cette espèce, qui vit dans les ruches d'abeilles, où elle occasionne de grands dégâts, se nourrit de cire. Metalnikoff a spé- cialement étudié sa nutrition et constaté que la cire pure (dépourvue de matières azotées) n'était pas suffisante pour assurer la croissance de la che- nille, mais lui permet de vivre et de se métamorpho- ser; —que, d'autre part, la chenillesuecomberapide- ment si on lui donne les seules substances azotées mélangées à la cire impure, que celles-ci deviennent pourtant suffisantes si on leur ajoute un peu d’eau, etque la cire doit notamment suppléer l'eau dans les conditions naturelles. Parmi les autres points visés par l’auteur, nous citerons surtout ses expériences sur l’action des microbes pathogènes, en particulier des bacilles tuberculeux. Metalnikoff à vu que l'immunité dépend essentiellement de la phago- cytose des microbes par les leucocytes; pour le bacille tuberculeux pisciaire, par exemple, il y & phagocytose avec destruction complète du microbe, 1 Bull. Mus. océan. Monaco, n° 51, 1905. ? Quart. Journ. Micr. Se., t. LUI, 14909. # Arch. Zool. Expér. (sér. 4), & VIII, 1908. M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE 885 et par suite immunilé, à 35°, qui est la température de la ruche, c’est-à-dire la température normale pour la chenille ; tandis qu'à une basse température, il ya bien englobement des microbes, mais leur di- gestion ne s'effectue pas et l'animal suceombe en quelques jours. Avee le Bacillus subtilis, il n’y à plus de phagocytose du tout et la chenille meurt en deux à quatre heures. Metalnikoff' a fait également de jolies expériences sur la métamorphose des Lépidoptères. Il y met en évidence le rôle phagocytaire des leucocytes, par le procédé employé également par Mercier pour les Batraciens, en faisant préalablement absorber par ces leucocytes de la poudre de earmin. I] à injecté à des chenilles jeunes : dans un cas, le sang d'autres chenilles jeunes, dans l’autre, celui de chenilles prêtes à se chrysalider. Le premier est inoffensif, le second est toxique; de là l’auteur conclut qu'au moment de la métamorphose le sang renferme une substance toxique pouvant expliquer, au moins en partie, l’histolyse. Portier®, reprenant l'étude, trop délaissée, d'un certain nombre de larves aquatiques d'Insectes, est arrivé à des résultats très intéressants relatifs à leur digestion et leur respiration. C'est ainsi qu'il a vu que les larves de Dytique, de Cybister, d'Hy- drobius, qui présentent, au lieu de bouche, deux longs crochels coniques et pointus, traversés par un canal très fin qui s'ouvre près de la pointe, n'en sont pas moins capables de digérer comple- tement le contenu d'un autre Insecte ou d'un Crus- tacé; le liquide diastasique, en réserve dans un vaste cæcum en relation avec la partie terminale de l'intestin grèle, est vidé brusquement dans la proie, dont le contenu est bientôt digéré; le liquide résul- tant est aspiré par les canaux des crochets. En revanche, la larve d'Hydrophile mange ses proies à la facon ordinaire. Les larves aquatiques à respiration aérienne luttent avec succès contre l’asphyxie à l'aide de mécanismes particuliers qui défendent l'entrée de l’eau dans leurs trachées; le stigmate vrai n'est pas superficiel, mais au fond d'une vaste chambre qui s'ouvre à l'extérieur par un faux stigmate. Cette chambre joue également un rôle pour empêcher l'entrée des liquides qui mouillent la chitine, comme les huiles ou l'eau de savon ; la gouttelette d'huile qui a réussi à pénétrer par l'ouverture externe s'étale à la surface de la chambre et la rentrée de l'air devient possible. En passant, disons quelques mots de recher- ches sur les Diptères. Nous signalerons d’abord l'étude de Jost' sur les migrations, dans le corps 1 Biolog. Centralbl., &. XXVII, 1907. ? C.R. Soc. Biol., t. LXVI, passim. 3 Zeitsch. {ur wiss. Zool.. t. LXXXVI, 1907. | du bœuf, de l'œstre Æypoderma bovis. I a montré par quel chemin compliqué elle arrive au tissu l'étal sur les poils de l'animal) dans la gueule de l'hôte sous-culané : introduit à d'œuf (pondu par léchage, ie parasite devient larve dans l'intestin, dont il traverse la paroï, el gagne le canal vertébral, puis, par les trous vertébraux, le tissu conjonetif intermusculaire et enfin la peau. Une Note de Cholodkovsky" montre la suite de varialions très graduelles de lappareil femelle des Mouches, parallèlement au degré de viviparité qu’elles présentent et qui atteint son maximum chez les Pupipares, où, dans l'utérus, débouchent des glandes sécrétant une sorte de lait sucé par la larve. L'auteur confirme les observa- ions de Leuckart et de Pratt sur ce sujet. Même disposition existe chez les Glossines, dont la biologie vient d'être si brillamment étudiée par Roubaud*. 11 a vu combien la vie de ces insectes, au moins la Glossina palpalis qui transmet la maladie du sommeil, dépend étroitement de leurs conditions d'habitat. Une moyenne thermique de 25° et un état hygrométrique voisin de la saturation sont nécessaires pour leur nutrition, le développement intra-utérin de leurs larves et enfin l’évolution régulière de leurs pupes. Ces conditions n'étant réalisées que dans les galeries forestières du bord des rivières, on concoit la grande importance du génital débroussaillement pour la prophylaxie de la maladie du sommeil. Roubaud insiste sur diverses particularités anatomiques des Tsésés : extrême développement des glandes salivaires, qui fait que leur salive peut être un milieu de culture pour les Trypanosomes ; — disposition de la trompe, qui ne peut aspirer que le sang circulant et rend l'animal aussi adapté à la vie parasitaire qu'un véritable ectoparasite ; — extrême développement des glandes annexes de l'appareil femelle, qui commande la viviparité de l'insecte ; — modifications adaptatives de l'appareil digestif larvaire. Sa comparaison avec les Diptères Pupipares permet à l’auteur de considérer le déter- | minisme biologique de la pupiparité et de mettre en évidence les facteurs primaires de convergence entre les Glossines et les Hippoboscides. $ 11. — Tuniciers. Signalons seulement pour ce groupe la Note de Julin * sur le développement de l'œuf du Pyrosome. Il a constaté que l'embryon est phosphorescent et que la phosphorescence siège dans les cellules du testa, ces éléments folliculaires auxquels on à 1 Zool. Anz., t. XXXIII, 1908. 2 Thèse Fac. Se. Paris, 1909, et Rapp. Mission française maladie du sommeil (Paris, Masson, 1909). 3 C. R. Soc. Biol., t. LXVI, 1909. 886 M. CAULLERY Er F. MESNIL — REVUE ANNUELLE DE ZOOLOGIE fait jouer divers rôles et dont cette propriété était tout à fait inattendue”. $ 12. — Vertébrés. Moins qu'ailleurs nous ne songeons à être complets pour cet embranchement. Nous mention- nerons d'abord un récent travail de Brachet*® sur l’ontogenèse de la tête des Amphibiens, où l’on trouvera un exposé d'ensemble de ce gros problème. L'opinion globale de l'auteur est qu'il ne faut pas chercher à expliquer la tête par une succession de métamères du type de ceux du tronc. Il considère comme vraisemblable que la tête, siège des prin- cipaux organes nerveux et sensoriels, s'est diffé- renciée comme telle avant la différenciation du tronc. Si donc une certaine métamérie est recon- naissable dans la tête, il n’y a pas à s'efforcer de la ramener rigoureusement au type de lasegmenta- tion du tronc. D'ordre plus spécial sont les recherches publiées par Gr. Kerr* sur le développement du Polyptère, d'après les documents et matériaux laissés par Budgett. Cette embryogénie complète les données acquises récemment sur celle du ZLepidosiren, du Protoptère, du Ceratodus, dont ce Ganoïde Crosso- ptérygien se rapproche, en même temps qu'il rappelle, comme eux, le développement des Amphibiens*. Signalons aussi, dans les fascicules récents sur les matériaux de l'expédition de R. Semon en Australie, le Mémoire de Gaupp sur la morphologie des deux premières vertèbres cervicales et des condyles occipitaux de l'Echidné. Gaupp émet la conclusion importante que la dicondylie du crâne des Monotrèmes est secondaire et dérive de la monocondylie des Sauropsidés. La dicondylie de Mammifères ne serait done pas homologue de celle des Amphibiens et il n'y aurait pas à voir là un argument en faveur d'une filiation directe des * 11 a paru récemment plusieurs mémoires sur la phos- phorescence de divers Invertébrés : Kutschera (Zeitsch. f. wiss, Zool., t. XCII, 1908) sur une annélide (Acholoe); Reichensperger (JZbid., 1. XCI, 1909); Sterzinger (Jbid., LL LXXXIIT, 1907); Mangold(Pflüger's Archiv., t. CX VIII, 4907); Trojan (Biolog. Centralbl.,t. XXNIII, 1908); ces quatre der- niers sur les Ophiures et surtout sur l'Amphiura squamata. Sterzinger conclut que le siège de la phosphorescence de £et animal est extracellulaire, les trois autres, au contraire, qu'il est intracellulaire. ? Arch. de Biologie, t. XXII, 1907. * Proc. Roy. Soc. Edinburgh, 1. memorial volume). * Assheton, dans le même volume, a étudié le dévelop- pement du Gymnarehus niloticus, Téléostéen de la famille des Mormyrides.Ce développement rappelle aussi par divers caractères celui des Amphibiens : rapidité de l'éclosion (1 jours), vestiges d'un tube neural, appareil excréteur, etc. XVII, 1907 (Budgett Mammifères à partir d'un groupe voisin des Amphibiens. Le crâne de l'Echidné se montre, au contraire, un véritable intermédiaire, spécialisé précocement, entre celui des Sauropsidés et celui des autres Mammifères. Leche”, dans ses recherches approfondies sur la dentition et la phylogénie des Mammifères, met en évidence des faits de convergence très accentués et qui pourraient être pris pour une parenté plus étroite qu'en réalité. Telle est, par exemple, la ressemblance de notre Hérisson et du Ceutetes ; la faculté d'enroulement, le revêtement épineux ont été acquis d'une facon indépendante dans ces deux genres. Plus remarquable encore est la convergence si accentuée de la Chrysochlore* et d'un Marsupial fouisseur (Notoryctes typhlops) : l'éclat métallique du poil, la forme du nez, celle du crâne, l’ossification d’un tendon pour former un troisième os de l’avant-bras, la forme de la main, etc., sont autant de traits frappants de cette similitude qui est uniquement le résultat d'étho- logies parallèles, Terminons enfin, dans un ordre d'idées analogue, par l'explication que Kukenthal° propose de l'asy- métrie craniale des Cétacés. Le côté droit est plus large que le gauche, dont les os sont plus épais. Kukenthal établit une corrélation entre cette disposition si singulière et l'insertion oblique de la nageoire caudale, qui fonctionne comme une hélice. L'effet de celle-ci est que la pression de l'eau dans la natation est plus forte sur le côté gauche de la tète que sur le côté droit, d’où réaction plus intense des os de gauche qui deviennent plus épais en même temps et plus étroits. Cette hypothèse expliquerait assez naturellement pourquoi l'effet est beaucoup plus marqué chez les types tels que le Cachalot, où la tête est coupée de façon abrupte, que dans ceux où la tête n'est pas tronquée, tels que les Baleines, et aussi pourquoi l'asymétrie en question intéresse surtout la région tout à fait antérieure de la tète. Si de pareilles explications ne sont qu'hypothétiques, notons cependant que le transformisme seul permet de concevoir une interprétation plausible de semblables bizarreries. M. Caullery, F. Mesnil, Professeur Chef de Laboratoire à la Faculté des Sciences à l'Institut Pasteur. de Paris 1 Zoologica, fasc. 49, 1907. 2 Sur cet animal, voir aussi le Mémoire consacré par Sweet (Quart. Journ. Micr. Sc., t. LIT, 1909) à ses yeux rudimentaires. Leur régression est plus accentuée que chez le Motoryctes typhlops (Cf. Sweet : Quart. Journ. Micr. Se., t. L, 1906). 5 Anat. Anz., (.XXXIIE, 1908. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 887 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Thomae (J.). — Vorlesungen über bestimmte Inte- grale und die Fourierschen Reihen. — 1 vo/. gr. in-8° de 182 pages. (Prix: 9 fr. 75.) B.-G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1909. Ces lecons sur les intégrales définies et leurs appli- cations débutent par un € chapitre dans lequel l’auteur rappelle les principales propositions de la Théorie des fonctions dont il aura besoin dans la suite, et sur lesquelles on passe souvent très rapidement dans les cours d'Analyse. Il étudie ensuite la notion de fonction primitive, celle d'intégrale définie considérée comme limite d’une somme et les méthodes d'intégration ; puis viennent les intégrales dont les limites sont infi- nies. Cette étude est accompagnée d'intéressants exemples. La théorie des séries de Fourier fait l’objet d'un important chapitre; elle est développée en partant de la notion d'interpolation trigonométrique de Lagrange et en suivant ensuite la méthode de Dirichlet. On y trouve l'exemple de la fonction sans dérivée de Weier- strass et une étude très approfondie du problème clas- sique des cordes vibrantes. Avant de continuer la théorie des intégrales définies, M. Thomae aborde les intégrales doubles, qui lui four- niront des méthodes très élégantes pour l'évaluation des intégrales simples. 11 examine plus particulière- ment l intégrale de Fourier. Signalons aussi son exposé très concis des intégrales eulériennes et des intégrales curvilignes. Pour terminer, l'auteur passe aux fonctions de variables complexes et donne le théorème fonda- mental de Cauchy, établi à l'aide de la méthode de Riemann. Il nous paraît utile d'ajouter que, tandis que dans la première partie, consacrée aux intégrales simples, les démonstrations sont établies à l’aide de moyens pure- ment arithmétiques, l’auteur à recours dans la suite à la représentation graphique des intégrales définies. Ses leçons s s'adressent donc plus particulièrement à ceux qui désirent approfondir l'étude des intégrales définies par en vue de l'évaluation des intégrales que de l'étude purement analytique. Hi. FEBR, Professeur à l'Université de’ Genève. Risser (René), ancien Elève de l'Ecole Polytechnique, membre agrégé de l'Institut des Actuaires français. — Etude sur l'établissement des Tables de mor- talité de population, mortalité professionnelle, mortalité dans le cas d'invalidité. — 1 vol. 1n-8 de 105 pages. (Prix: 6 fr.) Dulac, éditeur. Paris, 1909, Cet ouvrage est entièrement consacré à l'étude technique de la construction des tables de mortalité. L'auteur développe d'abord les méthodes de calcul relatives aux tables de population et fait une très inté- ressante critique des divers ajustements, principale- ment de l'ajustement par formules linéaires. On peut se demander si, dans la pratique, il est nécessaire d'employer de telles méthodes, qui nécessitent des calculs extrêmement compliqués ; pour notre part, nous n’en avons Jamais reconnu l'utilité, les statis- tiques à ajuster étant généralement incomplètes et présentant même souv ent des erreurs supérieures aux limites d'ajustement. Mais l'exposé des méthodes générales présente cepen- dant un grand intérêt théorique, et l’on doit remercier M. Risser de l'avoir fait, quitte à ne pas attribuer une trop grande importance pratique à ces spécu- lations. ET INDEX La dernière partie du travail.de M. Risser est relative à la mortalité des professionnels et à l'étude des courbes et des surfaces de mortalité ; l'étude de la question des tables à double entrée est fort bien faite et les applications diverses des formules à deux variables sont traitées très complètement. Ce livre est donc à retenir et à consulter. L'édition est soignée, et la lecture, quelquefois un peu aride, est facilitée par une heureuse disposition typo- graphique. A. BarRIOL, Actuaire-Conseil, Directeur de l'Institut des Finances et des Assurances. Lebeuf (A.), Directeur de l'Observatoire de Besançon. — 20° Bulletin chronoméetrique de l'Observatoire national astronomique, chronométrique et météo- rologique de Besançon. — 1 2roch. in-8°. Millot et Cie, éditeurs. Besançon, 1909. Les Congrès internationaux de Chronométrie de 1889 et 1900 ont mis en lumière l'appui réciproque que se prêtent la science et la tec hnique dans l'art de l'hor- logerie. Les Bulletins chronométriques de l'Observa- toire de Besançon nous en apportent chaque année une preuve nouvelle. « Trois faits saillants : l'accroissement des dépôts, celui des plus hautes récompenses et la transmission automatique de l'heure à Besançon, dis- tinguent l’année 1907-1908. » C'est ainsi que débute je Rapport. Il établit la statistique des épreuves subies par les chronomètres, la comparaison avec les années pré- cédentes, puis avec les résultats publiés par les Obser- vatoires de Genève, Neuchâtel et Kew. Ces chiffres ne se peuvent analyser, mais ils nous laissent l'impression que notre grand centre horloger de l'Est, grâce au concours de l'Observatoire et de l'Université, peut marcher maintenant de pair avec ses émules de Suisse, bien que ses concours datent d’une époque beaucoup plus récente. Nous en félicitons le dévoué et actif direc- teur de l'Observatoire ainsi que les fabricants bisontins. On trouve à la fin du Rapport deux Mémoires très intéressants : 1° Sur la désaimantation des pièces d’horlogerie, par M. E. Grassot ; 2 Transmission automatique de l'heure, par M. A. Sallet. Evo. CasPaRi, Ingénieur hydrographe en Chef. Sciences physiques Turpain (Albert), Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Poitiers. — La Télégraphie sans fil et les Applications pratiques des Ondes élec- triques. — 2° édition. 1 vol. in-8° de 386 pages, avec 220 figures. (Prix : 12 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. M. Turpain à apporté par ses études personnelles une importante contribution au domaine de la télégra- phie sans fil à une époque où elle n'était pas encore née à la vie industrielle. On ne saurait oublier, notam- ment, qu'il a imaginé, dès l'année 1895, le résonateur äd coupure associé au téléphone, pour déceler les ondes électriques, et signalé, dès l’année 1898, les pro- priétés des champs interférents, dont M. Slaby à su tirer parti ultérieurement dans ses essais de multicom- munication. M. Turpain était donc particulièrement qualifié pour entreprendre le présent exposé, et l'on doit se féliciter que cette seconde édition lui ait permis de mettre au point les différentes questions que soulèvent les appli- cations de plus en plus nombreuses des ondes hert- 558 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ziennes. Il s'en est acquitté en physicien et en critique averti, mettant le lecteur justement en garde contre l’autodidaxie en laquelle semble se confiner depuis quelques années la télégraphie sans fil. Le plan général de l'ouvrage est resté le même que dans la première édition. Après une étude générale, succincte et très claire, des ondes électriques, de leur mode de production, et des méthodes d'observation, l’auteur présente, dans trois chapitres importants, les principes de leur application à la télégraphie sans fil. Cette question de la télégraphie sans fil proprement dite à recu dans cette seconde édition d'importants développements. L'auteur y donne, notamment, un exposé complet des méthodes de détermination des longueurs d'onde et des amortissements, déterminations qui jouent maintenant un rôle capital dans la technique. L'étude de l'accouplement des circuits, qui est pré- sentée d'une manière élémentaire et élégante, conduit tout naturellement l'auteur à envisager le problème de la syntonie sous ses divers aspects, et les différentes solutions qui ont successivement été proposées pour en obtenir la solution partielle. M. Turpain indique avec netteté la véritable position du problème et montre que sa solution intégrale est subordonnée à la production pratique d'ondes entre- tenues. Les chapitres suivants sont consacrés aux applica- tions des ondes hertziennes à la télégraphie avec con- ducteurs, à la commande à distance et à l'étude des orages. Ce sont des applications intéressantes aux- quelles M. Turpain à apporté une contribution très personnelle et qui sont susceptibles de prendre un certain développement. La mullicommunication télé- graphique par ondes hertziennes (par fil), notamment, parait destinée à un grand avenir. L'ouvrage se termine par un chapitre documenté sur l'exposé des procédés qui permettent de produire les courants de haute fréquence. Les courants de haute fréquence n'ont guère recu jusqu'à présent que des applications médicales, mais il est permis d’entrevoir pour l'avenir des applications industrielles plus impor- tantes (pour l'éclairage, notamment). Le lecteur trouvera dans l'ouvrage de M. Turpain un exposé tout à fait au point des tentatives qui ont été faites dans ce sens. C. Tissor, Professeur à l'Ecole Navale. Svedberg (The). — Studien zur Lehre von den kolloiden Lôsungen. (ETUDES SUR LES SULUTIONS COL- LNÏDALES.) Thèse présentée à la Faculté des Sciences d'Upsal. — 1 vol. in-8°. Berling, éditeur. Upsal, 1908. Bredig a, le premier, réussi à obtenir divers métaux à l'état d'hydrosols, c'est-à-dire de suspensions très lines et stables dans l'eau, par des moyens purement physiques : on sait que, pour cela, il allumait sous l'eau un arc électrique entre deux pointes métalliques. M. Svedberg a obtenu, par la pulvérisation électrique au sein d'un liquide, un très grand nombre de sols nouveaux : d’une part, il a employé comme milieux divers liquides organiques (£ther ordinaire, pentane, alcools propylique el ïisobulylique, etc.); d'autre part, il a réussi à pulvériser des métaux tels que les alcalins et les alcalino-terreux. Les premiers, en par- ticulier, se font remarquer par les belles couleurs de leurs sols (ceux de sodium dans l’éther sont rouge pourpre à —709, ceux de potassium bleus). Les résultats indiqués ne peuvent être obtenus que dans des condi- tions assez étroitement déterminées, qui sont étudiées dans la première partie du Mémoire. La pulvérisation doit être souvent obtenue au moyen d'une décharge oscillante : pour se placer dans les meilleures condi- tions, on doit opérer avec une très grande capacité, une self-induction très petite, une faible résistance ohmique et une longueur d'étincelle très réduite, On diminue ainsi le plus possible la quantité du liquide décomposé par la chaleur de la décharge par rapport à la quantité de métal pulvérisé. De belles planches pho- tographiques, mises en tête de l'ouvrage, montrent l'aspect de la pulvérisation dans les différents modes de décharge. Une autre condition, toujours utile et souvent indispensable pour obtenir des sols métalli- ques, est d'opérer à température aussi basse que pos- sible : souvent les appareils sont refroidis dans un mélange de neige carbonique et d'acétone. L'auteur a obtenu de belles suspensions de sodium et de potas- sium dans le méthane liquide, dont le point d'ébullition est à — 16%. Une basse température semble être aussi l'une des principales conditions de stabilité des suspensions obtenues. Ces conditions, M. Svedberg les discute dans la deuxième partie de son Mémoire. Bien qu'il con- sacre un exposé assez long aux travaux antérieurs sur la stabilité des hydrosols, la partie la plus intéressante de cette division de l'ouvrage est naturellement celle où il traite de la stabilité dans les milieux non disso- ciants dont il s'est servi dans ses recherches. 1 ne peut donner de règles définitives qui permettent de déterminer 4 priori les conditions de cette stabilité; mais il fait ressortir l'influence que divers facteurs exercent sur elle : il est nécessaire d'employer, pour cette étude, un milieu faiblement ionisé et un métal en suspension possédant une faible tension de disso- lution (c'est le cas, par exemple, de la suspension de platine dans l’éther)}. Dans ces conditions, on peut observer qu'il existe, pour chaque système de compo- sition donnée, une température critique bien définie au-dessus de laquelle il cesse d'être stable. Ce point critique, qui s’abaisse quand la concentration de la suspension augmente, se trouve toujours élevé par l'addition d'une petite quantité de substance étrangère non colloïdale. Inversement, il s'abaisse considérable- ment lorsque le milieu liquide devient très pur; ce qui amène à penser que, pour une pureté parfaite du milieu, le système serait instable à toute température. La viscosité du liquide n'a pas, comme on l'a écrit quelquefois, une influence notable sur la stabilité de la suspension. M. Svedberg s'est servi des colloïdes nouveaux qu'il avait réussi à préparer pour faire une étude des mou- vements browniens dans divers mili-ux. Pour cela, il faisait lentement couler une suspension étendue dans une cellule adaptée à un appareil ultramicroscopique. Grâce aux mouvements browniens, les images des par- ticules entrainées par le courant, au lieu de se présen- ter à l'œil comme de petites droites, affectaient la forme de lignes ondulées que l’auteur assimilait à des sinusoides, comme si le mouvement brownien était oscillatoire : il mesurait alors ce qu'il appelle Fampli- tude des mouvements propres des particules : pour cela, il prenait la moyenne d'un certain nombre d'écarts accomplis par les particules perpendiculaire- ment à la translation, et tels que l'œil peut les perce- voir sur la ligne ondulée. Malgré l'incertitude qu'en- traîne un tel procédé d'étude du mouvement brownien, l'auteur en a tiré des résultats intéressants : l'amplitude des mouvements varie en sens inverse de la viscosité du milieu, et selon une loi très régulière (courbe hyperbolique). A l’aide d'un dispositif un peu différent, Svedberg à aussi vérifié qu'en amenant petit à petit une suspension à l'état isoélectrique et même en ren- versant son signe électrique, on modifie sa stabilité, mais non l'ampleur des mouvements browniens {ils'est servi d’un hydrosol d'argent auquel on ajoute peu à peu du sulfate d'aluminium.) Enlin, il a cherché à tirer de ses expériences une confirmation de la théorie cinétique des mouvements browniens et en particulier un argument pour choisir entre les formules données alors par Einstein el Smoluchowski. Les travaux sum cette question ont été récemment poursuivis avec tant d'activité et d'une manitre si heureuse, en particulier par J. Perrin (C. PR. Ae. Se.), que ce point spécial du travail de Svedberg ne présente déjà plus qu'un BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 881 _—— ——————…—…—…—……—……………………—…….…—…——…—…—…—……—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—…—.—…—…—…"—…"…"…"…"…"…—…—…………….….………—— intérét sensiblement diminué. Au reste, quelque inté- ressantes que puissent être les applications que Sved- berg a faites dans ce Mémoire des curieuses suspen- sions qu'il a réussi à préparer, elles ne représentent évidemment qu'une faible partie de la contribution que l'étude de ces nouveaux liquides peut apporter à la connaissance des propriétés des colloïides. Il faut ajouter, en terminant, qu'un grand nombre de vues photographiques, de schémas et de courbes permettent de bien, se rendre compte des dispositifs expérimentaux et de lire facilement les résultats des recherches : ces nombreuses figures contribuent à rendre aisée la lecture de ce beau travail. H. Mourow, Chef de laboratoire à l'Institut Pasteur. Meurice, Directeur de l'Institut de Chimie pratique de . Bruxelles. — Cours d'Analyse quantitative minérale. — 1 vol. gr. 1n-8° de 830 pages, avec 62 figures. (Prix : 30 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. l'aris, 1909. L'étude de cet important ouvrage de 800 pages, où toutes les données de détail ont leur importance, ne peut être résumée en quelques lignes. Ce qui fait la valeur de ce Traité, c'est qu'il est écrit par un analyste doublé d'un professeur; il a subi l'épreuve du laboratoire et l'épreuve de l'amphithéâtre. C'est dire qu'il s'adresse, d'une part, à tous les chi- mistes praticiens qui savent déjà l'analyse, d'autre part, aux étudiants qui l'apprennent. L'auteur a fait un choix parmi les méthodes décrites par les meilleurs analystes, et il ne les recommande qu'après en avoir contrôlé la valeur dans son laboratoire. Les chimistes trouveront des développements analy- tiques très étendus sur les minerais du fer, et sur tous les produits qui se rattachent à sa métallurgie, sur la plupart des métaux usuels et sur un grand nombre de métaux rares, sur les combustibles, les calcaires, chaux, morliers, ciments. Les étudiants liront avec prolit de précieux conseils sur la manière de tenir leur cahier de laboratoire, et des exemples de ces calculs analytiques si simples, et qui, cependant, embarrassent tant les débutants. Il est seulement regrettable que, dans les exemples de calculs, l'auteur se serve de la notation en équiva- lents, qui n'est plus enseignée aujourd'hui. On pourrait remarquer aussi que M. Meurice, qui recommande beaucoup lexamen microscopique des métaux, ne lui donne pourtant que très peu de déve- loppement dans son cours d'Analyse. La raison en est, sans doute, dans l'usage adopté jusqu'ici d'exposer celte méthode dans des ouvrages spéciaux. Des figures schématiques, remarquablement claires, représentent les divers appareils décrits. MArcEL GUICHARD, Maître de Contérences à la Sorbonne. Sauveur (Albert), Professeur de Métallurgie et de Métallographie à l'Université d'Harvard, et Boyi- ston (H. M.), Waïtre de Conférences à la méme Université, — Laboratory Experiments in Metal- lurgy (ExPÉRIENCES DE LABORATOIRE EN MÉTALLURGIE). — 1 vol. in-4° de T3 pages. Chez les auteurs, Cam- bridge (Mass.), 1909. M. Albert Sauveur, le savant professeur de Métal- lurgie à l'Université d'Harvard, et M. Boylston, maître de Conférences, viennent d'écrire un livre de manipu- lations de Métallurgie qui prouve quelle place occupent les exercices pratiques dans leur enseignement. La première partie a trait à la métallurgie générale, la seconde à la sidérurgie. Les mesures calorimétriques et pyrométriques jouent un grand rôle ; on étudie éga- lement quelques réactions métallurgiques particuliè- rement bien choisies : réduction des oxydes métalli- ques par le carbone, par l'aluminium, réaction des sulfures et des oxydes, etc. L'importance donnée à la sidérurgie n’étonnera | aucun métallurgiste; l'étude des alliages fer-carbone est trop complexe, les manipulations auxquelles se prêtent ces produits sont trop nombreuses et variées pour que l’on ne s'y arrête bnncenene l'influence du carbone et du nickel sur les propriétés mécaniques, la détermination des points critiques, la température de trempe et la variation des propriétés mécaniques, l'influence du recuit, des différents coefficients inter- venant dans la trempe, etc., font l'objet de minu- tieuses et instructives manipulations. L'utilité du livre de MM Sauveur et Boylston ne peut être mise en doute et l’on doit souhaiter que sa publi- cation développe dans nos Ecoles spéciales ces exer- cices pratiques qui ÿ sont si peu répandus. Personnellement, nous devons adresser de vifs re- merciements aux auteurs : leur travail nous a consi- dérablement facilité l'établissement des manipulations que nous faisons effectuer le dimanche matin à nos élèves du Conservatoire National des Arts et Métiers. L. GUILLET, Professeur de Métallurgie et Travail des Métaux au Conservatoire National des Arts et Métiers. Chaplet 'A,), Ancien directeur d'usine, el Rousset (H.), /ugénieur-Chimiste. — Les Soies artificielles. — 1 vol. de l'Encyclopédie scientifique des Aïde- mémoire. (Prix : 2 fr. 50.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1909. Les soies dites artificielles sont le produit du filage, obtenu par des moyens mécaniques appropriés, des dissolutions de cellulose, d'éthers de la cellulose (nitri- que, acétique, Se etc.) ou de matières orga- niques azotées, comme la gélatine, l'albumine, la caséine, etc. Certains de ces corps nécessitent l'émploi de dissol- vants spéciaux: pour la cellulose, la liqueur cupram- monique; pour la nitrocellulose, un mélange d'alcool et d'éther. Le brillant des soies artificielles, qui dépasse parfois celui de la soie naturelle, tient, comme celui du coton mercerisé sous tension, à la forme cyclindrique des fils et à la réflexion presque totale de la lumière sur leur surface géométriquement réguliere. L'industrie des soies artificielles doit être considérée comme une industrie d'origine française et le nom de M. de Chardonnet restera attaché à sa création. D’autres procédés ont suivi le sien, et la production annuelle monte à 5 millions de kilogs, peut-être même à l'heure actuelle à 10 millions, contre 50 millions de kilogs de soie naturelle, Par suite de l'effet de la concurrence, les prix de celle-ci ont notablement baissé dans ces der- nières anné MM. A. Chaplet et H. Roussel, après quelques pages consacrées à la soie naturelle, dans le but d'établir un arallele avec ses substituts artificiels, passent en revue Le principaux procédés de fabrication, indiqués dans de nombreux brevets. Ces procédés comprennent deux parties : préparation des solutions destinées au filage, moyens mécaniques de filage, d'enroulage, de bobinage, de séchage, elc., et sont traités séparément, comme il convient. Il est ‘certain que les soies artificielles pourraient remplacer la soie naturelle dans toutes ses applications, si elles ne possédaient un grave défaut. Leur élasticité et leur ténacité sont bien inférieures à celles du pro- duit naturel, surtout à l'état mouillé. Cette malheureuse propriété limite forcément l'em- ploi des soies artificielles dans la confection des tissus. Aussi, tous les efforts de ces dernières années ont-ils tendu à faire disparaitre ou du moins à atténuer cette infériorité. M. Eschalier est arrivé à Ie RR Ass la substance même du fil, par l'action de la formal- déhyde, et à empêcher ainsi l'absorption de l'humidité, La ténacité de la soie artificielle passerait de 1## à 208 à l'état sec et de 39 à 140 à l'état mouillé, par l'emploi de son procédé de sthénosage. À Le problème qui se pose est de trouver une solution 890 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX d'une matière homogène, de viscosité convenable, et capable de donner des fils qui, à l’état sec ou à l'état mouillé, présentent l'élasticité et la ténacité de la soie naturelle dans les mêmes conditions. Cette matière pourra être et sera probablement un mélange de divers corps. Le problème est loin de paraître insoluble et nous partageons la conviction des auteurs de cette fort intéressante monographie: que « nous fabriquerons un jour des textilesartificiels, à la fois plus solides et moins chers que les fibres naturelles ». M. PRUD'HOMME. 3° Sciences naturelles Outes (F.-F.), Professeur à l'Université de La Plata, Duclaux (E.-H.), Vice-directeur du Musée de La Plata, et Bucking (H.), Professeur à l'Université de Strasbourg.— Estudio de las supuestas Escorias y Tierras cocidas de la Serie pampeana de la Republica Argentina (ETUDE DES PRÉTENDUES SCORIES ET TERRES QUITES DE LA SÉRIE PAMPÉENNE DE LA RÉPU- BLIQUE ARGENTINE). — 1 vol. in-8° de 6% pages, avec liqures. Musée de La Plata, 1908. Pour la première fois, en 1865, on a trouvé dans les niveaux inférieurs de la Série pampéenne certaines roches d'apparence volcanique, à texture fréquem- ment cellulaire, qui ont été décrites sous le nom de « scories ». D'autre part, M. J. Ameghino découvyrait en 1874, dans la même série, des fragments d’une terre compacte, d'une couleur brique parfois un peu foncée, qu'il décrivait sous le nom de « terres cuites ». Ces scories et terres cuites ont été retrouvées en divers endroits; elles sont aujourd’hui considérées par M. FI. Ameghino comme « les restes de feux millénaires, utilisés par l’homme ou son précurseur à de lointaines époques géologiques, et dans lesquels la terre, avec une quantité notable de sable, s’est vitrifiée par suite de la grande intensité du foyer calorifique ». Cette opinion a été combattue de divers côtés, en par- ticulier par G. Steinmann*. Pour élucider cette question controversée, les auteurs du présent travail se sont livrés à une étude approfondie des « scories » et « terres cuites », M. E. H. Ducloux s’occupant plus spéciale- ment de l’examen chimique, M. H. Bucking de l'exa- men microscopique. Les conclusions auxquelles sont arrivés les auteurs peuvent se formuler comme suit : 4° Les matériaux scoriacés, de structure cellulaire, extraits du Monte Hermoso et d'autres gisements, sont des scories de laves andésitiques; 1 2° Les matériaux compacts, rouges, bruns ou gri- sâtres, considérés jusqu'à aujourd'hui comme des « terre cuites », sont en majeure partie des tufs éruptifs ; 3° On ne possède pas de critères suftisants pour classer les échantillons d’Alvear (province de Santa-Fé) ; mais on peut déclarer que, dans aucun cas, ils ne doivent être considérés comme des restes d’un ancien feu attribuable à l’homme quaternaire, ni comme des vestiges laissés par l'homme actuel, LB. Gonnard (René), Professeur d'Economie politique à l'Université de Lyon.— La Hongrie au XX: siecle. — 1 vol. in-18 de xu-400 pages. (Prix : 4 fr.) A. Colin, éditeur. Paris, 1909. La Hongrie est encore bien imparfaitement connue des autres pays de l'Europe. Les [Hongrois prétendent que leurs’ adversaires profitent volontiers de cette ignorance pour répandre des idées fausses en ce qui les concerne. La vie, économique et sociale du peuple hongrois est d'autant plus intéressante à analyser que les faits d'ordre économique servent à expliquer, au moins en partie, les luttes politiques qui agitent l'Eu- rope centrale et à nous faire comprendre la place qu'y lient une race énergique, à laquelle on peut adresser Re © G. SreiNmaNx : Le Diluvium dans l'Amérique du Sud, lievue gén. des Sciences du 15 août 1907. quelques reproches, mais. qui est parvenue, en défini- itive, à créer dans la vallée moyenne du Danube une civilisation puissante et originale. L'invasion des Hongrois, au x° siècle, a eu une importance considérable dans l'histoire du continent européen; la poussée magyare a pénétré comme un coin dans la grande plaine de l'Alfüid, séparant les Slaves en deux tronçons qui, depuis mille aus, n'ont plus pu se réunir. Convertis au christianisme, les Hongrois ont été au poste d'avant-garde contre les Turcs, et, en défendant l'Europe contre l'invasion nouvelle dont elle était menacée, ils lui ont rendu des services que celle- ci ne doit pas oublier. Si, aux xvu® et xvure siècles, la Hongrie s'est laissé germaniser, le xix° siècle nous à fait assister à une sorte de réveil. Depuis 1825, historiens, publicistes, patriotes ont travaillé à donner à la Hongrie une quasi-autonomie vis-à-vis des nations qui l’entoürent, et le fameux compromis de 1867 a fondé le système du « dualisme ». Les Hongrois n’en sont déjà plus satis- faits : ils trouvent qu'il n'assure pas suffisamment le libre jeu de leur développeinent économique. Ils s’en sont, du moins, servis avec succès pour réduire à l’obéissance certains éléments réfractaires à leur hégé- monie, les Croates et les Serbes, les Slovaques et les. Roumains. Grâce à lui, les peuples non magyars, qui forment plus de la moitié de la population du royaume, sont dans une étroite dépendance. La Hongrie étant surtout un pays agricole, le livre de M. Gonnard, sur le titre un peu ambitieux duquel on doit faire quelques réserves, est avant tout une étude sur les progrès de l’agriculture en Hongrie. Il suffit de visiter le Musée agricole de Budapest, qui est, sans doute, le plus beau musée de ce genre: existant en Europe, pour se convaincre que la culture se pratique aujourd'hui en Hongrie d'une facon rigou- reusement scientifique. Les rendements se sont accrus dans d'énormes proportions, les écoles d'Agriculture sont remarquablement organisées, les stations d’expé- rience, comme les associations agricoles, ont reçu de grands développements. C'est la répartition du sol lui- même qui laisse malheureusement. beaucoup à dé- sirer : les deux tiers de la terre appartiennent à de: grands propriétaires qui ont des domaines de plusieurs. milliers d'hectares, sur lesquels résident des ouvriers obligés, par leur ‘situation même, de vivre dans un état voisin de la pauvreté, et qui voudraient bien acqué- rir quelques lambeaux de ce sol auquel ils sont profon- dément attachés. Beaucoup partent pour l'Amérique et reviennent avec des centaines, parfois même des mil- liers de couronnes, qu'ils ne désirent employer ni en fonds d'Etat, ni en valeurs industrielles, mais avec les- quelles ils veulent acheter un lopin de terre. Et ils ne le peuvent pas! On cherche aujourd'hui.les moyens pratiques de démembrer ces domaines, mais c'est une question très grave. D'abord les lois d’expropriation: comportent toujours quelques atteintes inquiétantes au droit individuel. Ensuite il faut observer que les grands propriétaires hongrois se croient en droit de résister aux efforts qu'on fait pour les expulser de domaines qui sont depuis des siècles dans leur famille, de domaines qu'ils ont fortement contribué à améliorer par des. travaux de drainage ou d'irrigation, par l'emploi d’en- grais chimiques ou l'acquisition d’un outillage perfec- tionné. Le démembrement de ces domaines aurait, disent- ils, bien souvent pour effet de rendre propriétaires un grand nombre de personnes qui ne sont pas de nationalité magyare, qui ne sont peut-être pas les | défenseurs de cette patrie hongroise à laquelle les propriétaires actuels sont si attachés. C'est par le développement de l’industrie, par la construction de fabriques ou d'usines qu'on pourra, au moins dans une certaine mesure, améliorer le sort des prolétaires et résister à la propagande socialiste dont M. Gonnard nous a décrit d'une facon très nette les origines et les: premiers succès. 4 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Il est permis de penser, avec le distingué professeur de l'Université de Lyon, que l'ère de la Hongrie exclu- sivement agricole est près de se clore. Une Hongrie nouvelle va naître avec une vie économique plus com- plexe. Le Gouvernement se trouve déjà en présence de problèmes nouveaux, nombreux et délicats. Il s'agit notamment d'introduire des réformes qui permettent l'utilisation sur place d'une partie des produits du pays. L'autonomie douanière, à laquelle aspirent beaucoup de Hongrois, et vers laquelle le royaume s'achemine, permetlra-t-elle de se garantir contre les concurrences qui viennent d'Allemagne, de Russie, d'Autriche surtout? C'est bien douteux. Ce qu'on peut affirmer, en tout cas, c'est que les modifications qui se préparent en entraineront d'autres, à la fois dans le domaine social et dans la politique extérieure du royaume de Saint-Etienne. Les difficultés qui troublent aujourd'hui les pays de l'Europe occidentale, et qui ont été jusqu'ici épar- gnées à la Hongrie, vont l’assaillir inévitablement. Nous souhaitons que le courage avisé et l'esprit pra- tique des Magyars leur permettent de triompher de ces nouvelles épreuves. Ils ont su, depuis mille ans, tenir tête à beaucoup d'attaques; les succès qu'ils ont obte- nus dans le passé sont un gage de ceux qui leur sont probablement réservés dans l'avenir. GEORGES BLONDEL, Professeur à l'Ecole des Hautes Etudes Commerciales. Delacroix (D: G.), Directeur de la Station de Patho- logie végétale, Maître de Conférences à l'Institut national agronomique, et Maublane (A.), Chef des Travaux de Pathologie végétale à l'Institut national agronomique. — Maladies des plantes cultivées : I. Maladies non parasitaires. — Il. Maladies para- sitaires. — 2 vol. in-18 de 431 et 452 pages, avec nombreuses fiqures et planches.(Prix:5 fr. le volume.) J.-B. Baïllière et fils, éditeurs. Paris, 1908-1909. Nos connaissances en Pathologie végétale ont marché de pair avec les progrès de la Botanique, et elles forment aujourd'hui un corps de doctrine scientifiquement ordonné, qu'il est possible d'exposer dans son ensemble sous forme de Traité. Les étrangers nous ont précédés dans cette voie, et voilà bien des années que les Allemands possèdent des Traités comme ceux d'Hartig, de Frank, de Sorauer. La troisième édition de ce dernier ouvrage, véritable monument élevé à la pathologie des plantes, est en cours de publication, les Angiais ont les Traités de G. Massee et de Marshall Ward; les Italiens, ceux de Berlèse, Briosi et Cavara ; les Danois, celui de Rostrup. Nous trouvons chez ces diverses nations des périodiques spécialement consacrés à la Pathologie végétale, tandis que chez nous les articles concernant ce sujet sont épars dans les publications botaniques ou agricoles; il y a là une lacune qu'il serait utile de combler. Il faut joindre à cette énumération les Etats-Unis avec leur Bulletin du Département de l'Agriculture, Division of vegetal Pathology, et ceux des Agricultural Experi- ment Stations. Il serait cependant injuste de ne pas rappeler cer- tains ouvrages francais, qui n’ont qu'un défaut, à notre point de vue, celui de n'embrasser qu'une partie du sujet, tels sont : « Les Maladies de la Vigne » de Viala, et le « Traité des Maladies des Plantes agricoles » de Prillieux. Ce dernier ouvrage à fait beaucoup pour développer en France le goût de ces intéressantes études. É Mais nous aurions mauvaise grâce à nous plaindre, au moment où parait un ouvrage de premier ordre. Le Traité de M. Delacroix est publié, d’ailleurs, presqu'en mème temps qu'un autre livre, fort intéressant, mais beaucoup moins étendu, sur le- même sujet, et dont nous rendions compte ici même, il y a peu de temps". * Ducomer : Pathologie végétale. Revue gén. des Se. du 30 mars 1909, t. xx, p. 284. 891 On sait quel grand travailleur et quel savant conscien- cieux fut le D' Delacroix. Collaborateur, puis succes- seur de M. Prillieux à la Direction de la Station de Pathologie végétale de l'Institut agronomique, il put poursuivre, sur les centaines d'échantillons qui lui étaient expédiés chaque année de France et des colo- nies, des études personnelles sur les maladies des plantes; aussi son enseignement à l’Institut agrono- mique fut-il excellent : « Ses élèves sentaient bien qu'il connaissait d'expérience personnelle ce qu'il exposait à l’'amphithéätre ‘. » Delacroix tenait à ce que cet enseignement lui survécüt. Il faut lire, à ce propos, les pages émues que M. Pril- lieux consacre à son ancien collaborateur et ami, et où il nous le montre, malade et sentant ses jours comptés, travaillant avec acharnement à fixer son œuvre. Il ne put, hélas, achever que la rédaction du premier volume, et ce fut seulement quelques heures après avoir écrit la dernière page que la mort vint interrompre à jamais son labeur. Mais ses notes étaient assez complètes pour qu'aidé de son cours, son dévoué élève et collaborateur, M. Maublanc, püt achever l’œuvre commencée. Le premier volume est fortement original, dans ce sens qu'il traite d’un sujet qui n'avait jamais été abordé dans son ensemble par les auteurs français, celui des maladies non parasitaires des plantes. Après des notions de Tératologie végétale, l’auteur expose ce que l’on doit entendre par maladies non parasitaires, en commençant par les lésions d’ordre mécanique : les blessures et leur cicatrisation, la for- mation de la gomme dans les tissus blessés, et la ma- ladie de la gomme des Amygdalées. L'auteur passe ensuite à l'étude des altérations pro- duites par les agents météoriques : froid, gelée, chaleur, sècheresse et humidité; vient ensuite l’action de la lumière, de la foudre et, enfin, des diverses matières toxiques, notamment des gaz et vapeurs que déversent certaines usines sur les cultures avoisinantes et dont les effets ont donné lieu souvent à des contestations portées devant les tribunaux. Viennent ensuite les maladies de causes incertaines ou complexes : la chlorose, la verse, la coulure, la brunissure, les intumescences, etc. L'important chapitre qui termine le premier volume, et constitue, en quelque sorte, une introduction au second, est particulièrement à signaler. L'auteur fait, pour la première fois en France, un exposé développé et suggestif des questions de l’immunité des végétaux et des causes du parasitisme, ce qui lui permet d'abor- der d’une façon aussi scientifique que possible le sujet qui est le but pratique de la Pathologie : la lutte contre les maladies des plantes. En médecine végétale, comme en médecine humaine, mieux vaut prévenir que guérir; aussi, la création de variétés douées d'immunité complète vis-à-vis des para- sites doit-elle être l'objectif principal des recherches, et les faits actuellement acquis suffisent à établir qu’un tel but n’est point chimérique. L'auteur rapporte, dans cet ordre d'idées, les travaux d'E. Laurent, de G. Massee, de Miyoshi qui sont des plus encourageants. Non seulement on peut atténuer les prédispositions à la maladie par les soins culturaux et par la sélection artificielle des variétés reconnues plus résistantes, mais encore les expériences effectuées font entrevoir le moment où l’on réalisera d'une façon plus directe l'immunité, en produisant dans la plante un milieu négativement chimiotactique pour les cham- pignons parasites, et cela soit par absorption, soit par inoculation, en se servant de solutions simples ou même de sues de plantes naturellement réfractaires (sérum- thérapie). On a aussi réalisé l'introduction efficace de substances toxiques pour le parasite (sulfate de cuivre à une dilution convenable); enfin, on pourra effectuer une sorte de vaccination, comme nous l'avons expéri- Puzreux : Notice sur la vie et les travaux de G. Dela- croix. Bull. de la Soc. myc. de Irance, 1908, p. 48. 892 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX menté au cours de nos recherches avec la « toile », qui détruit les boutures en serre, et le Botrytis cinereä; ici, ce sont les produits de sécrétion de la forme atté- nuée du parasite qui tendent à réaliser l'immunisation de l'hôte contre la forme virulente. Ces dernières expé- riences, que nous allons reprendre et poursuivre, semblent ignorées de l’auteur. Nous ne saurions trop insister sur l'importance de ce chapitre du livre de M. Delacroix, dont la lecture, espérons-le, attirera l'attention des chercheurs sur une voie nouvelle et féconde. Sorauer termine le deuxième volume de son grand Traité en souhaitant que les études se portent de plus en plus vers la connaissance de l’immunité et la réalisation de l’immunisation. Il s'agit donc d’une orientation nouvelle des recherches de Pathologie végé- tale, que les esprits éclairés s'efforcent d’accentuer le plus possible. En tête de ce premier volume, et à la fin de chaque chapitre, se trouvent de précieuses indications biblio- graphiques que l’on regrette fort de ne pas retrouver dans le second volume. Dans ce deuxième volume, les auteurs traitent des maladies d'origine parasitaire, c'est-à-dire causées par des bactéries, des champignons et des plantes phanérogames. L'ordre adopté est celui de la classiti- cation botanique des parasites; c'est incontestablement le meilleur, quoiqu'il puisse paraître, à des esprits superficiels, moins pratique que celui qui consisterait à partir des hôtes attaqués, pour décrire leurs parasites. Cette dernière méthode, outre qu'elle expose à de perpétuelles redites, ne met pas le lecteur à même de se rendre compte des cas non expressément décrits; il n’en sera plus ainsi s'il sait reconnaitre les carac- tères des groupes et possède le fil d'Ariane de la classification. Ce second volume est bien au courant des plus récents travaux; il est aussi intéressant au point de vue scientifique qu'au point de vue pratique. Nous devons abréger ce trop long compte rendu d’un ouvrage qui comble de la façon la plus heureuse une fâcheuse lacune. Il fait grand honneur à l'Encyclopédie agricole et à notre Institut agronomique dont elle émane. 1] nous reste maintenant à souhaiter que l'on fonde quelques stations de Pathologie végétale bien outillées, pour qu'à l'exemple du D' Delacroix S'y effectuent des travaux plus nombreux encore dans la voie si féconde de la Pathologie végétale. L'intérêt de ces études pour l’agriculture et le pays s'affirme d'une facon chaque jour plus évidente. J. BEAUVERIE, Chargé d'un Cours de Botanique appliquée | à la Faculté des Sciences de l'Université de Lyon: 4 Sciences médicales Bordier (Dr H.), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Lyon.— Technique radiothérapique. — A vol. de l'Encyclopédie des Aide-mémoire. (Prix : 2 fr. 50.) Masson et Ci, éditeurs. Paris, 1909. Ce petit volume de 175 pages nous apporte-t-il la tech- nique définitive que nous devrons suivre pour nos opérations radiothérapiques? La valeur scientifique de l'auteur, sa compétence incontestable, l'étude ration- nelle qu'il a faite d’un procédé de mesure particulier avec une unité de quantité bien définie donnent cer- tainement un intérêt tout spécial à son travail. Mais il ne faut pas se dissimuler que la grosse question, dans la technique radiothérapique, est celle du dosage du rayonnement, et tous les procédés de dosage actuels, le sien, hélas! comme les autres, sont entachés de graves défauts. La confiance absolue qu'il a en sa méthode, d’autres l'ont aussi pour leur méthode, et les hésitations des praticiens entre les systèmes proposés prouvent tout au moins que chacun d'eux pour être bon, doit porter la marque du coefficient d'habileté ou d'habi- tude de celui qui l'applique. M. Bordier expose sa technique avec l'enthousiasme que donnent les bons résultats qu'il en a tirés; il a raison, et l'on ne dira jamais trop aux praticiens que la radiothérapie sans mesure est l'arme la plus dan- gereuse que nous puissions manier, parce que l'énergie radiante, suivant sa qualité et sa dose, va se répartir différemment entre les éléments vivants des tissus traversés, excitant les uns, faisant dévier les autres de leur voie d'évolution normale, et les frappant parfois d'une tare indélébile. D’ailleurs,son enthousiasme et sa confiance ne lui enlèvent pas l'impartialité du savant : il décrit avec soin les autres procédés de mesure, et, si l’on excepte le procédé ionométrique de Villard, publié alors que son livre était déjà sous presse, on trouvera là un exposé concis de cette inté- ressante question de la dosimétrie des radiations nou- velles. Quelques pages sur les applications de la radiothé- rapie; quelques conseils utiles sur la conduite des tubes ; un chapitre très clair sur l'appréciation de la qualité des rayons X; un chapitre sur la quantito- métrie; un rapide exposé de recherches personnelles sur les lois de répartition de l'énergie radiante dans le champ d’un tube et sur l'influence du nombre d’exci- tations par unité de temps; des considérations pleines d'intérêt sur l'absorption de l'énergie radiante par les tissus aux différentes profondeurs; enfin, une étude pratique des applications de la méthode aux cas par- ticuliers, tel est le bilan des matières traitées dans ce recueil dont la lecture sera instructive pour tous, et où tous, quelle que soit leur propre expérience, puise- ront des renseignements précieux. H. GuiLLemINor. Marie (D' A.), Médecin en Chef des Asiles de la Seine, et Martial (D° R.). — Travail et Folie. — 1 vol. de 110 pages de la Bibliothèque de Psychologie expé- rimentale et de Métapsychie. (Prix :1 fr. 50.) Bloud et C*®, éditeurs. Paris, 1909. Les auteurs ont essayé de déterminer dans cet ou- vrage la part que prend le travail, manuel ou intellec- tuel, dans l'ensemble étiologique dont relèvent les psychoses. Ils étudient, d'autre part, la proportion des travailleurs atteints de psychose comparée à la totalité des travailleurs. C’est surtout un livre de documenta- tion, contenant des relevés statistiques nombreux, d’après lesquels les auteurs estiment qu'il est possible d’entrevoir les rapports qui relient le travail à la folie. Toutefois, ils ne se dissimulent pas l'incertitude des notions dont on dispose à cet égard. Negreseu (D' V. G.) — Notiuni de Igiena alimen- tara (Norions D'HYGIÈNE ALIMENTAIRE). — À brochure in-8° de 88 pages. (Prix : 4 fr.) Imprimerie A. Codreanu, Focsani. Cette petite brochure, écrite en roumain, nous paraît digne d'être signalée comme un exemple à suivre. En quelques pages, l’auteur a réussi à présenter d’une facon populaire les premières notions de l'hygiène alimentaire, à l'usage des paysans de son pays, dont le mode de nutrition laisse encore beau- coup à désirer et qui paient un lourd tribut à des affections d'origine alimentaire comme la pellagre. Cette maladie a, d’ailleurs, fait l'objet de recherches spéciales de l’auteur et d’autres médecins roumains, comme M. V. Babes, et il est possible que d'ici peu leurs efforts aboutissent à une méthode à la fois préventive et curative de traitement de cette affection. Le D' Negrescu, qui a fait ses études médicales en France, s'est heureusement inspiré de l’enseignement de ses maîtres, et son travail nous paraît des mieux adaptés au but qu'il vise. Dans bien d’autres pays, le besoin d'un petit manuel semblable, pour les classes populaires, se fait sentir, et il faut féliciter l'auteur d'avoir mis par son livre cette question à l'ordre du jour. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 11 Octobre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. Jarry-Desloges communique ses observations de Mars faites au Re- vard (Savoie), à 1.550 m., et au Massegros (Lozère), à 900 m. Les plages assombries de la planète ont été d'une pâleur excessive en juin et juillet et ont repris leur coloration habituelle en septembre.—M. A. Angot signale l'enregistrement, au Parc Saint-Maur, du tremblement de terre de Croatie du 8 octobre. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Em. Marchand a ob- servé au Pie du Midi la grande perturbation magné- tique du 22 au 26 septembre; elle se sépare nettement æen trois périodes, qui paraissent se rattacher à trois passages de groupes de taches ou de facules sur le Soleil. — M. P. Besson à constaté que, à pression constante, la radio-activité atmosphérique est maximum pour le passage de la Lune au méridien, et minimum pour le passage au méridien antipode. Pour une heure de puisée constante par rapport à celle du passage de la Lune au méridien, elle croit quand la pression atmosphérique décroit. — M. P. L. Mercanton a étudié l'effet des ébranlements mécaniques sur le résidu des condensateurs ; cet effet, s’il existe, est incomparable- ment plus faible que celui qu'ils exercent sur l’état magnétique des substances ferro-magnétiques. — M.M. Chanoz explique la dissymétrie engendrée par le courant continu dans des chaînes liquides initiale- ment symétriques, formées de couples aqueux iden- tiques à la viscosité près, en admettant que, dans des milieux différemment visqueux, les ions de l’électro- dyte considéré se propagent avec des vitesses relatives différentes. — MM. Ph. A. Guye et N. Zachariadès ont constaté que l'erreur commise sur la pesée de 400 gr. de substance lorsqu'on effectue par le calcul la réduction du poids au vide, au lieu de le faire expé- rimentalement, varie de 1 à 3 dix-millièmes du poids en valeur absolue ; il en résulte que la presque totalité des rapports atomiques est entachée d’une erreur cor- respondante. — M. ©. Scheuer a redéterminé, avec de grandes précautions, la densité de HCI; il trouve pour poids du litre normal gr. 1,6394, ce qui conduit, pour poids atomique du C|l, à une valeur voisine de 35, 45.—M. G. Urbain a analysé par la spectrographie 64 échantillons de blendes ; 38 contenaient du germa- nium, #1 de l’indium, presque tous du gallium, 32 de l’étain, 26 de l’antimoine, etc. — M. P. J. Tarbou- riech, en faisant réagir sur la cyclohexanone une solution concentrée de KCAz, à obtenu le nitrile de l'acide hexahydro-oxybenzoïque, qui, hydraté par HCI, donne l’acide correspondant, F.107°.—M. P. Lemoult a constaté que les dérivés alkylés du pp-diamido- diphényléthène sont des leucobases; oxydés, ils for- ment des colorants capables de teindre en donnant ‘des gammes de nuances. — M. P. Gaubert a observé que les combinaisons de la cholestérine et de l’ergostérine avec l’urée normale et les uréines donnent une phase liquide anisotrope. En général, avec les urées sulfu- rées, il se produit des cristaux losangiques, alors qu'avec l’urée normale et d’autres uréines on observe habituellement des sphérolites ou des gouttes liquides biréfringentes. — MM. R. Lépine et Boulud mon- trent que, si l’on a toujours pour la somme des sucres immédiats du plasma et des globules un chiffre supé- rieur au sucre immédiat du sang, on peut, si l'on sait doser le sucre total, obtenir la concordance entre la somme des totaux du plasma et des globules et le total du sang. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Aug. Chevalier «a étudié les Dioscorea (ignames) cultivés dans l'Afrique occidentale; ils se rattachent à trois espèces, dont la principale est le 2). prehensilis, qui a donné naissance à plus de 20 races. — MM. E. Joukowsky etJ.Favreont observé la couche à Æeterodiceras Lucii au Salève et reconnu qu'elle se place nettement à la base du Valan- ginien. — M. H. Arsandaux à étudié la répartition des granits au Congo français. Ces roches, générale- ment d'un type banal, forment 4 massifs très étendus, correspondant à des nœuds hydrographiques impor- tants. Séance du 18 Octobre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Lichtenstein communique ses recherches sur la détermination des intégrales de l'équation : d'u , 9'u au au an nr sn nr dlamar ei ri ox cy ox cy par leurs valeurs le long d’un contour fermé. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Poincaré poursuit ses études sur la diffraction des ondes hertziennes et montre avec quelle rapidité décroît l'onde diffractée avec la distance. — M. Th. Tommasina montre que la considération de la pression de la lumière oblige à réadmettre l'existence d’une composante longitudinale dans le rayon lumineux; en outre, les trajectoires des vibrations transversales ne seraient nullement planes, mais hélicoidales, de facon que la vibration, même dans un milieu isotrope, n’est pas exactement perpen- diculaire au rayon lumineux. — M. le capitaine Tilho signale l'existence probable d’un centre très accentué de basses pressions dans la région du Tchad; les obser- vations de la Mission Niger-Tchad, de novembre 1907 à juin 1908, réduites au niveau de la mer, donnent, en effet, des valeurs variant de 749,4 à 757,9 mm. — M. H. Masson a isolé de l'essence de girofles quatre nouveaux alcools : le méthyl-1-amylcarbinol, Eb. 4570-1580, le méthyl-n-heptylcarbinol, Eb. 195°-196, l'alcool furfurolique et l'alcool benzylique. — M. A. Monvoisin a déterminé la composition chimique du lait des vaches tuberculeuses: elle passe insensible- ment de la composilion normale à celle du sérum san- guin à mesure que progresse la maladie. 3° SCIE NATURELLES. — M. P. Marchal à constaté que le Chermes pini (orientalis) descendant directe- ment des galles sur Picea orientaliset le Chermes print de nos forêts constituent deux lignées qui ne se com- portent pas entièrement de même au point de vue bio- logique; toutefois, la formation constante de la race orientalis aux dépens de la race pini indigène, partout où se rencontrent des Picea orientalis, est d’une ex- trême vraisemblance. — M. I. Borcea a reconnu que le mésoderme intermédiaire des Téléostéens donne naissance, par différenciation, à l'endothélium des vaisseaux, aux cellules du sang, aux canalicules rénaux et au tissu lymphoïde du rein. — M. A. Vayssière à découvert dans le golfe de Marseille un petit mol- lusque, voisin du genre Madrella, qui constitue le type d'un genre nouveau, Æliotia, qui doit être rangé avec les Madrella dans une famille nouvelle, celle des Madrellidés. — M. L. Raybaud a étudié l'influence des rayons ultra-violets sur le développement des moisis- sures; la zone nocive va de À 3.030 à 2.480; la nocivité va en diminuant à mesure que l’on s'éloigne de part et d'autre de cette zone. — M. G. Martinet a constaté que les abeilles peuvent féconder certaine forme de trèfle à corolle courte; la propagation de cette . 21% 894 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES forme peut présenter un grand profit pour les apicul- teurs et les agriculteurs. Séance du 26 Octobre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. -— M. J. Guillaume pré- sente ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le 2° semestre de 1909. Le nombre de groupes de taches et leur surface totale ont beaucoup diminué; ceux des facules ont peu varié. — M. Ch. Nordmann a déterminé la température de f-Persée d’après son éclat; il trouve 22.900°, valeur très voisine de celle que lui a donnée l'emploi du photomètre stel- laire hétérochrome (23.800). — M. Javelle a observé le retour de la comète de Halley à l'Observatoire de Nice et en donne les positions du 12 au 22 octobre. — M. R. Jarry-Desloges communique ses observations de Mars, faites au Revard et au Massegros, et qui semblent mettre hors de doute l'existence de trois catégories de canaux, différant par leur largeur. — M. A. Angot signale l'enregistrement au Parc-Saint-Maur d'un tremblement de terre de grande intensité, dans la nuit du 20 au 21 octobre, dont l'épicentre parait situé à 6.700 kilo- mètres, vers le centre de l'Himalaya. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. H. Hildebrandsson a constaté que la température d'été en Scandinavie et dans toute la région baltique depuis le cap Nord jusqu'à Hambourg et Hanovre est déterminée, non par la température simultanée de la mer d'Islande, mais par la température de cette mer pendant l'hiver précédent. — M. V. Crémieu à déterminé la con- stante newtonienne au moyen de sa balance de torsion très sensible. La valeur trouvée, K — 6,674 X 105, n’est approchée qu'au millième, par suite de l'existence de deux causes d'erreur que l’auteur va essayer d'éli- miner. — M. G. Gouy a étudié la constitution de la charge électrique à la surface d’un électrolyte. Pour les fortes charges, la presque totalité de la charge doit réellement être accumulée à la surface, conformément à l'opinion commune; une charge moyenne ou petite consiste en une légère condensation des ions d’un certain signe et une légère raréfaction des ions de signe opposé, toutes deux s'annulant asymptotique- ment quand on s’éloigue de la surface. — M. G. Atha- nasiadis a recherché l'influence de la température sur le phénomène de polarisation dans la soupape électro- lytique. En général, la différence de potentiel produi- sant un courant d'une intensité définie dans la soupape électrolytique diminue quand la température de lélec- trolyte va en augmentant. — M. L. Gay, à l’aide de considérations d'équilibre chimique, établit une for- mule très générale entre les variations des tensions de vapeur partielles des mélanges de liquides et la com- position de la phase liquide. Cette formule comprend comme cas particulier celle de Duhem-Margules. — M. G. Belloc a constaté que les métaux sont des réser- voirs de gaz occlus pratiquement inépuisables, malgré des chauffes répétées et prolongées, atteignant jusqu'à 1.000°. — M. E. Cornec à suivi la variation de l’abais- sement du point de congélation au cours de la neutra- lisation d'un acide par une base; les résultats de la cryoscopie sont d'accord avec les données de la Chimie. L'étude de la conductibilité au cours de la neutralisation, par contre, conduit parfois à des résultats différents. — M. M. Coste a étudié les trois états du sélénium. La densité du Se métallique en poudre est de 4,8, en cris- taux, de 4,82; il fond à 219. Le Se rouge cristallisé a pour densité 4,455; il fond à 144° en se transformant en Se métallique. — M. M. Barrée a déterminé les températures de transformation des alliages cuivre- aluminium par l'étude de la variation de la résistance électrique avec la température. 11 à trouvé un nouveau point singulier vers 200° et deux transformations déjà connues vers 500 et 750, — MM. G. Darzens et Rost, en traitant l’hexahydroacétophénone par PCF, ont obtenu l’hexahydrochlorostyrol, Eb. 70-749 sous 24 mil- limètres, qui, traité par KOH, fournit l’hexahydrophé- nylacétylène, Eb. 130-132, dont le dérivé sodé fixe CO? pour former l'acide hexahydrophénylpropiolique,. Eb. 138-140° sous 6 millimètres. — M. M. Molliard a recherché si les amines constituent des aliments pour le radis; en aucun cas, les chlorhydrates des diverses: amines ne se sont comportés comme des substances capables de provoquer une augmentation de poids sec. — M. A. Monvoisin à constaté sur le lait des vaches. tuberculeuses une hypoacidité corrélative de l’envahis- sement de la mamelle par le bacille de Koch. Le dosage: de l'acidité du lait pourra servir au diagnostic d’une: mammite douteuse. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. A, Imbert a constaté. que des mouvements rapides, sans production em | ' quantité appréciable de travail mécanique extérieur, engendrent assez rapidement une fatigue qui peut être mise objectivement en évidence par des tracés ergographiques et dont le degré peut être assez élevé. — M. C. Fleig a reconnu que les eaux minérales. radio-activées et les sérums artificiels radifères à minéralisation complexe n’ont pas d'action défavo- able sur la survie d'organes ou d'éléments cellulaires isolés du corps (muscles lisses et striés, globules. rouges, spermatozoïdes). — MM. M. de Rothschild et H. Neuville ont étudié le squelette de l'Okapi adulte; M dans l’ensemble, il se rapproche de celui des girafes. jeunes, bien qu'il y ait convergence entre l'articulation cervico-dorsale de l’'Okapi et celle des Oryx. — M. I. Borcea a observé que le cœur et les cellules vascu- laires migratrices des Téléostéens dérivent du méso- derme céphalique, tandis que les cellules pigmen- taires ont une origine ectodermique. — M. E. L. Bouvier a constaté que le déménagement de la fourmi moissonneuse, le Messor barbarus, est précédé par la formation d’un double train de reconnaissance qui s'établit entre le gîte défectueux et le gite définitif. Les Cloportes commensaux émigrent en même temps. que les fourmis; ils suivent le même chemin et savent parfaitement s'y orienter. — M. H. Arsandaux à reconnu que les latérites renferment des silicates alu- mineux hydratés, le plus souvent alcalins, formant. une série continue où la teneur en alcalis varie en sens inverse de celle en eau, et celle en silice en sens. inverse de la teneur en alumine. — M. E. A. Martela exploré la rivière souterraine de Labouiche, près Foix (Ariège). ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 19 Octobre 1909. M. H. Hallopeau présente un Rapport sur um tra— vail de M. A. Nepveu relatif à la photothérapie de la tuberculose laryngée. L'auteur a substitué, aux rayons: solaires jusqu'alors utilisés, ceux de la lampe à arc, plus riches en radiations chimiques, réfléchis par des miroirs de quartz; la pulvérisation d’une solution de cocaine et d’adrénaline décongestionne les tissus. La plupart des malades ontété très notablement améliorés. M. E. Kirmisson signale deux cas de coloboma facial (fente oblique de la face), l'un simple, l’autre double. Ses observations confirment la théorie d’Al- brecht, qui explique la fente labiale par l'arrêt de développement; mais le reste des malformations faciales. doit être attribué à la compression des brides amnio- tiques. = Séance du 26 Octobre 1909. M. H. Vincent présente le Rapport général sur les. épidémies observées en France en 1907. Il s'attache spécialement à l’étiologie et à la prophylaxie de la fièvre typhoide. Cette maladie est d’une extrème fré- quence en notre pays : la proportion des décès pour 100.000 habitants est de 27,6 (en Angleterre 17,5, en Allemagne 10,3). Comme véhicules de la maladie, il faut citer les eaux de boisson et les aliments souillés; l'une des causes qui contribuent le plus à l'entretien de la fièvre typhoïde est l'épandage des matières fécales. Comme programme de la lutte antityphique, l'auteur A “ADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 895 préconise une série de mesures : éducation hygiénique et populaire de l'enfant et de l'adulte; affiches, notices et circulaires à l'occasion des épidémies; organisation d'un nombre croissant de laboratoires ou- stations de recherches épidémiologiques et bactériologiques ; 1s0- lement précoce des malades et des douteux; désinfec- tion quotidienne et sur place de tous les objets con- taminés; proscription ou limitation de l’épandage direct. — M. le D' Wurtz lit un travail sur la fièvre de Malte en France. — M. le D' Thibierge présente une étude sur les procédés nouveaux de diagnostic de la syphilis dans leurs rapports avec la Médecine légale. — M. le D' Mosny lit un travail sur la tuberculose traumatique et la loi sur les accidents du travail. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 23 Octobre 1909. MM. C. Mathis et M. Léger ont découvert dans le sang de la poule, au Tonkin, un embryon se rapportant à une nouvelle espèce de Filaire, qu'ils nomment Mcrofilaria Sequiui. — MM. F. d’Herelle et H. Seidelin ont trouvé dans le sang d’un Boa imperator, capturé au Yucatan, des embryons d’une Filaire nouvelle, caractérisée par une gaine énorme, qu'ils nomment F1laria imperatoris, et des œufs d’une autre Filaire, qu'ils appellent #. kïlincher. — M. V. Babes critique les recherches de MM. Slatineanu et Danielopolu sur la réaction des lépreux à la tuberculine et considère comme établi que tous les lépreux réagissent à la tuber- culine, qu'ils soient ou non tuberculeux. — M. G. Dehaut a étudié le venin cutané de l'£uproctus mou- tanus de la Corse; en injection intra-veineuse chez le lapin, il produit des convulsions cloniques et la mort ; le cœur s'arrête en diastole. — MM. E. L. Backman et J. Runnstrôm ont constaté que l'œuf de grenouille fécondé possède une pression osmotique bien inférieure à celle de la grenouille développée ou de l'œuf ovarien de grenouille. — MM. E. L. Backman et H. C. Jaco- baeus ont observé que la qualité hémolytique du sérum humain et la quantité d'ambocepteur qu'ilcontient sont assez variables chez le même sujet en différentes occa- sions ; la quantité de complément varie peu, au contraire. — MM.E. Maurel et Arnaud ont étudié l'influence de la voie de pénétration sur les doses minima mortelles de venin de cobra, puis d'arséniate de soude, chez la grenouille, le lapin et le pigeon. — M. F. Battelli et M'ie L. Stern ont trouvé dans le foie de plusieurs ani- maux une oxydase (a/coolase) qui oxyde énergiquement l’alcool éthylique en acide acétique; les autres tissus en paraissent dépourvus ou n’en contiennent que de très faibles proportions. — M. L. Blaizot a constalé que la virulence du Spirochetus qallinarum inoculé à des poussins par FArgas persicus augmente régulièrement par passages directs d’un poussin à l’autre. — MM. À. Brissemoret et J. Mercier ont étudié la localisation de la juglone dans la nervure médiane des feuilles de noyer, de mai à octobre. — M. J. Troisier a examiné le liquide d'un kyste hydatique du foie trouvé chez une typhique morte dans la deuxième semaine de la maladie. Il ne renfermait ni bacille, ni agglutinine, ni anticorps typhique. — M. CI. Gautier décrit une modification de Ja réaction d'Ehrmann, pour la caractérisation de l’adrénaline, applicable soit à des solutions, soit aux tissus. — MM. P. Emile-Weil et G. Boyé ont constaté que les extraits du lobe bypophysaire postérieur accé- lèrent de façon constante la coagulation du sang chez l’homme et le lapin normaux; ceux du lobe antérieur la retardent, au contraire, notablement chez l’homme, légèrement ou pas chez le lapin. — MM. M. Weïnberg et G. Laroche ont reconnu que différents liquides d'ascite ou de pleurésie renferment des substances antitryptiques; les liquides céphalo-rachidiensnormaux n’en contiennent pas. — M. M. Weinberg a observé que la présence seule d'un kyste hydatique ne déter- mine pas l'augmentation de la quantité de substances antitryptiques dans le sérum. Par contre, l'indice anti- tryptique monte lorsquele kyste estenflammé ;ilesttrès élevé dans le cas de suppuration. — MM. M. Weinberg et U. Mello montrent que lesérum des malades atteints de tumeurs malignes renferme souvent des isolysines, mais on en trouve aussi dansle sérum des tuberculeux. — M. Ch. Mantoux a constaté que la tuberculine concentrée donne, chez les enfants ne réagissant pas à la solution ordinaire, et qu'on peut donc considérer comme vierges de tuberculose, une réaction irritative précoce, se distinguant nettement de la réaction aller- gique tardive qui constitue l’intradermoréaction véri- table. — MM. P. Nobécourt, Ch. Mantoux et Perroy ont reconnu que l'intradermoréaction permet de faire le diagnostic de la tuberculose chez le cobaye d'une façon assez rapide. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 10 Juin 1909 (fin). M. E. A. Schäfer prononce la « Croonian Lecture » sur /es fonctions du corps pituitaire. En voici les con- clusions : 4° Le corps pituitaire consiste en trois par- ties : a) la pars anterior, formée d'un épithélium glan- dulaire vasculaire; L) la pars intermedia, formée d'un épithélium moins vasculaire sécrétant un colloïde; c) la pars nervosa,consistant principalementen névroglie, mais envahie par le colloiïde de la pars intermedia, qui passe à travers elle dans l’infundibulum du 3° ven- tricule. Ces parties différent par leurs fonctions. 2° La fonction de la pars anterror est associée probablement avec la croissance des tissus squelettiques, comprenant le cartilage, l'os et le tissu conjonctif en général. On le déduit surtout du fait que l'hypertrophie de la pars anterior est associée à un excès de croissance du sque- lette et du tissu conjonctif chez les individus en période de développement et spécialement du tissu conjonclif chez les adultes. Ces effets sont probable- ment produits par des hormones. 3° La fonction de la pars 1ntermedia est de produire une matière colloïde qui contient des principes actifs ou hormones, agissant sur le cœur, les vaisseaux sanguins et les reins. Il existe probablement plusieurs hormones agissant indépendamment et aussi d’une façon antagoniste sur les vaisseaux sanguins et les reins, de sorte que, sui- vant les circonstances, il se produit une élévation ou une chute de pression sanguine, une diminution ou une augmentation de sécrétion de l'urine. Les hormones qui paraissent le plus actives sont celles qui produisent la contraction des vaisseaux sanguins en général, avec une dilatation des vaisseaux rénaux et une augmenta- tion d'activité des cellules rénales; mais il semble en exister d’autres, qui provoquent une contraction des vaisseaux rénaux et une diminution d'activité des cel- lules rénales; l'effet de ces dernières est moins pro- noncé. Il y a également, en général, un effet inhibitoire produit sur le cœur. 4 L'extirpation du corps pituitaire est incompatible avec la survie pendant plus de deux ou trois jours. Une lésion non étendue de l'organe ne produit aucun symptôme prononcé autre qu'une aug- mentation de sécrétion de l'urine, accompagnée d'une augmentation de production du colloïde par la pars intermedia. L’enlèvement complet d'une tumeur pitui- taire chez l'homme ne doit pas être tenté, car l’ablation entière de la glande serait probablement rapidement fatale. 5° L'acromégalie et le gigantisme paraissent dus à une augmentation de fonction du lobe antérieur seul. C’est ce lobe qui est toujours hypertrophié le premier dans ces affections. Si le lobe postérieur est intéressé aussi, il en résulte de la polyurie. [a terminaison fatale qui est de règle dans l'acromégalie — mais qui peut être longtemps différée — est probablement associée à un changement dans la nature de la tumeur, qui, d'hyperplasie surtout glandulaire, devient sarco- mateuse, le tissu normal étant détruit. 6° L’addition d'une quantité faible, mais régulière, de substance pituitaire à la nourriture produit une augmentation de la quantité d'urine sécrétée. Cet effet est obtenu 896 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES avec la pars intermedia et le lobe postérieur, mais non avec le lobe antérieur. L implantation du corps pitui- taire d’un autre individu de la même espèce peut pro- duire un effet similaire sur l’urine, mais qui disparaît bientôt. 7° L'addition d'une petite quantité de sub- stance pituitaire à la nourriture paraitfavoriser la crois- sance des jeunes animaux; en tout cas, elle ne l’em- pêche ni ne la restreint. Les essais d’ implantation de corps pituitaire chez les jeunes animaux n'ont pas été suivi d'une diminution de la croissance; la nutrition semble plutôt améliorée. Mais l’auteur n’a pas réussi à établir de greffes permanentes. Communications reçues pendant les vacances. MM. G. S. West et B. M. Griffiths : L'Hillhousia mirabilis, une bactérie sullurée géante. L'Hillhousia mirabilis est la plus grande des bactéries solitaires qui ait été trouvée; sa longueur moyenne est d'en- viron 60 p, sa largeur de 26 y. C'est une bactérie péri- triche, avec un grand nombre de cils courts. Elle se trouve parmi les matières organiques en décomposi- tion dans la vase des petits étangs d'eau douce. Chaque individu consiste en un réseau protoplasmique dont les mailles renferment de gros globules de soufre ; le réseau contient également de nombreux petits gra- nules, la plupart de nature nucléo- -protéique ; aucun d'eux ne constitue un granule de chromatine; la paroi cellulaire est je et offre une grande rési tance aux réactifs; l'action de l'acide carbolique à 5 °/, montre qu'elle possède une structure lamellaire. La multiplication de cet organisme est relativement lente ; il n°y a qu'une division par vingt-quatre heures. SOCIÉTÉ ANGLAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LIVERPOOL Avril 1909. MM. C. Beadle et H. P. Stevens attirent l'attention sur la présence de moisissures dans le papier et les fibres de bois préparées pour la fabrication du papier; ils indiquent les caractères observés et la proportion de furfurol et d'extrait aqueux qu'on en retire. — Les mêmes auteurs ont étudié l'utilisation des sous-pro- duits de la graine de coton, généralement considérés comme des déchets. Le coton séparé des coques de la graine par les machines Minck et de Sesundo peut servir à la fabrication d'un papier de bonne qualité ; les coques elles-mêmes peuvent servir de nourriture pour le bétail, surtout après un traitement dù aux auteurs qui consiste à hydrolyser la cellulose par l’ac- tion de HCI à haute température. Séance du A SECTION DE SYDNEY Séance du 1% Juillet 1909. M. A. M. Wright a étudié l'absorption de l'humidité de latmosphère par les laines. 4° Cette absorption dépend de l'humidité relative de l'atmosphère; elle est d'autant plus forte que l'humidité relative est plus élevée; 2° la fibre de laine pure peut absorber 148 à 20 °/, de son poids d'humidité atmosphérique, mais cette quantité n'est pas suffisante pour rendre compte de l'absorption totale d'humidité par la fibre de laine normale sèche; 3° la graisse de laine naturelle est capable d'absorber environ 17 °/, de son poids d'humi- dité atmosphérique ; #° le suint est très hygroscopique et peut absorber de 60 à 67 °/, de son poids d'humidité quand il est exposé à l'air; 5° la matière grasse autre que la graisse de laine naturelle a un effet retardateur sur la quantité d'humidité absorbée. De ces recherches découle Ja nécessité d'enlever autant que possible la graisse naturelle et le suint de la laine pour diminuer l'absorption d'humidité. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Juillet et d'Août 1909. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Bertini : Sur la théorie des modules de formes algébriques. — M. G. Lauricella : Sur l'intégration de l'équation A#UÙ = 0; sur l'équation intégrale de première espèce. — M.S. Pincherle : Sur quelques équations intégrales. — M. A. Venturi présente un rapport sur les résultats obtenus dans la quatrième campagne gravimétrique en Sicile. — M. L.-S. da Rios étudie le mouvement des filets vorticaux d’une forme quelconque. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. M. Tenani a étudié l'effet de la lumière ultraviolette sur la conductibilité des vapeurs d’hypoazotide ; il a reconnu que ce gaz, tandis qu'il rend plus facile la décharge de l'électricité positive, tend à empêcher la décharge de l'électricité négative. L'interposition d’une lame en verre sur le passage des rayons ultraviolets est suffisante pour faire disparaître tout phénomène. — MM. C. Alessandri et F. Eredia décrivent la marche diurne de la pression barométrique, de l'humidité relative et de la tension de la vapeur, aux Observatoires de la Cabane Margue- rite et d'Alagna (Mont-Rose). — M. F. Bottazzi a fait des recherches expérimentales, dont il donne les résul- tats, sur le transport électrique du glycogène et de l'amidon en solution acide et alcaline; ces résultats diffèrent de ceux obtenus par Hardey, qui probable- ment se servait d'un matériel moins pur que celui de M. Bottazzi. — M. A. Campetti cherche à établir la mobilité des ions de didyme en solution aqueuse, dans le but de reconnaître si, par rapport à leur valence et à leur poids atomique, ils présentent une mobilité normale ou anormale. — M. G. Pellini décrit ses recherches, qui montrent que le soufre etle tellure ne peuvent former des composés entre eux, mais donnent naissance à des cristaux mixtes, par fusion et par solution. — Mn° Traube-Mengarini et M. A. Scala donnent d’autres détails sur la solubilité des métaux à l’état colloïdal dans l’eau distillée bouillante, en remarquant que cette propriété de l’eau distillée s'étend à toutes les substances avec lesquelles l’eau vient en contact. Les deux auteurs ajoutent quelques observa- tions sur l'innocuité des conduites en plomb où passe l'eau potable. — MM. A. Angeli, V. Castellana et R. Ferrero donnent communication de leurs recher- ches sur la décomposition de quelques sels d'argent. — M. R. Ciusa poursuit ses recherches sur les nitro- dérivés aromatiques, et étudie les propriétés basiques des hydrazones. — MM. R. Ciusa et U. Pestalozza s'occupent des relations de l'«-benzalphénylhydrazone avec quelques substances azotées. — MM. L. Masca- relli et A. Constantino présentent plusieurs notes contenant leurs recherches sur les propriétés du cyclohexane comme solvant cryoscopique. — M. Olivari décrit ses travaux pour déterminer le poids moléculaire du sélénium dans une solution de chlo- rure mercurique fondu. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Millosevich décrit quelques formes nouvelles ou rares que présente la phosgénite de Monteponi en Sardaigne. — M. A. Serra transmet à l’Académie l'étude des minéraux suivants : barytine de Bonvei (Mara) et heulandite du col Ginar- gada (Villanova Monteleone). — M. S. Scalia donne la description de quelques fossiles qu'il a trouvés dans un gisement crélacé aux alentours de Troina, près de Catane. — M. E. Carano transmet ses observations sur l'accroissement secondaire de la tige des Mono- cotylédones ; il est impossible de pouvoir affirmer, quant à l’origine du méristème, que ce dernier appar- tent plutôt au cylindre central qu'à l'écorce, ou vice versa. Ennesro MANGINi. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. PRE 20° ANNÉE N° 30 NOVEMBRE 1909 Revue générale DS SCIienc pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Cesare Lombroso (1836-1909). Le célèbre professeur de Turin, qui vient de mourir, laisse une œuvre impérissable, une des plus originales et des plus fécondes qu'ait produites le xrxe siècle. Bien qu'il ait eu des précurseurs, surtout en France et en Angleterre (Broca, Morel, Maudsley, etc.), il n’en reste pas moins le véritable fondateur de l’Anthropologie criminelle. Malgré la caducité de ses conceptions fondamentales, on doit reconnaître, avec Taine, qu'il a ouvert une voie nouvelle et qu'à son instigation les découvertes se multiplièrent. Cesare Lombroso naquit à Vérone; il fit ses études à Padoue, à Vienne et à Paris; il servit cinq ans comme médecin militaire pendant la guerre de l'Indépendance; il fut nommé en 1862 directeur du Manicome de Pavie, et en 1876 professeur de Médecine légale à Turin. Ses premières études sur le crétinisme attirèrent déjà l'attention. En 1871, par ses recherches expérimentales sur la farine de maïs verdéramé, il démontra l’origine de la pellagre et indiqua les moyens d'arrêter l'inva- sion du mal qui ravageait le Piémont. Il se spécialisa bientôt dans la psychiatrie et surtout dans la crimino- logie. La bibliographie de ses ouvrages sur ce sujet tiendrait plusieurs pages; citons seulement : L'Homme criminel; La Femme criminelle et la Prostituée; Le Crime, causes et remèdes; Nouvelles recher ches de Psy chiatrie et d'Anthr opologie criminelle; Les Palimp- sestes des prisons; L'Antisémitisme; Le Crime poli- tique et les Révolutions; Les Anarchistes. Il inspira, en outre, quantité de travaux : il fut le maître incon- testé de cette Ecole italienne dont l'influence rayonna partout à l'étranger et qui compte tant de noms illustres, parmi lesquels “il nous suffira de rappeler ceux de Enrico Ferri, Garofalo, Morselli, Sergi, Marro, Carrarra.. Les conceptions du savant criminaliste sont au- jourd’'hui universellement connues; d’abord taxées de révolutionnaires, elles soulevèrent d'ardentes discus- sions. Nombre d'entre elles n'ont pas résisté à la cri- tique, mais l’idée générale, la doctrine n’en renfermait pas moins une grande part de vérité qui a déterminé d'utiles modifications dans la jurisprudence. Lombroso entreprit d'abord l'étude anatomique et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. physiologique d’un nombre considérable de criminels et de délinquants; puis 1l étendit ses recherches aux formes primordiales du erime chez le sauvage, l'enfant et l'animal. Les faits qu'il découvrit lui prouvèrent que «les crimes les plus horribles ont un point de départ atavique dans ces instincts animaux dont l'enfance nous offre un pâle reflet». De l’ensemble des caractères observés il crut pouvoir conclure à l'existence d’un type spécial de criminel, type si accentué qu'il efface le type national. C’est le "eriminel-né, qui se distingue nettement du criminel d'occasion, du criminel-fou et de l’alcoolique. Le criminel-né est voué au crime par son organisa- tion : on le reconnaît à des signes anatomiques et physiologiques qui rappellent l'homme primitif et le sauvage. Tels sont, par exemple : la faible capacité cranienne, le front fuyant, les arcades sourcilières saillantes,le développement énorme des mâchoires, le prognathisme, les oreilles écartées et en anse, la che- velure touffue, la barbe rare, le nez irrégulier, la grande acuité visuelle, l'hypoalgésie, la paresse, l'impulsivité, l'imprévoyance, l'alternance du courage et de la lâcheté, la grande vanité, la susceptibilité, la violence et la fugac ité des passions, l'habitude du tatouage, les jeux cruels, l'abus des gestes, la fréquence des onomatopées dans le langage. Il s'agit là de caractères ataviques qui se rencontrent chez 40 °/, des criminels. Dans certains cas de crime féroce, l'atavisme peut aller plus loin et les anomalies du criminel reproduisent alors les caractères de certains animaux inférieurs. La longueur des bras et le pied préhensile rappellent les quadrumanes. La fossette occipitale médiane, si carac- téristique du type criminel suivant Lombroso, se retrouve chez les rongeurs. On s'explique de la même manière la fréquence de la soudure de l’atlas avec l’occipital, la saillie de la dent canine, l’aplatissement du palais, la fréquence des côtes et des vertèbres sur- numéraires, l'hypertrophie du cervelet et l'existence d'une morphologie spéciale des circonvolutions céré- brales. Certaines anomalies histologiques de l'écorce font remonter l'atavisme des criminels même jusqu'aux oiseaux. Ces caractères ataviques se retrouvent en grand | nombre chez les épileptiques. En outre, ceux-ci pos- 22 898 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE sèdent quelques caractères qui paraissent surtout pathologiques, tels que l'asymétrie exagérée, l'acrocé- phalie, les dépressions craniennes, les traces de ménin- gite. Or, ces signes s’observent également chez le criminel-né, qui réalise ainsi la fusion de l'élément ata- vique et de l'élément morbide épileptique. Lombroso étendit sa théorie à l’homme de génie. Cette partie de son œuvre provoqua de vives polé- miques. En voici la conclusion, basée sur une accumu- lation énorme de documents et de faits : « La fréquence et la multiplicité des délires, des caractères de dégéné- rescence et de la perte de l’affectivité, la dérivation et plus encore la descendance d’alcooliques, d'imbéciles, d'idiots, d’épileptiques, et surtout le caractère spécial de l'inspiration, montrent que le géuie est une psychose dégénérative du groupe épileptoïde, conclusion qui se trouve confirmée encore par la fréquence d'une génia- lité temporaire parmi les fous, et par le groupe nouveau des mattoïdes, auxquels la maladie donne toutes les apparences extérieures du génie, sans la substance. » L'assimilation du génie à la folie apparaît aujourd'hui comme un paradoxe que Lombroso aurait évité s'il avait insisté davantage sur un point essentiel qu'il signale dans la préface de son livre : « Les hommes de génie, en même temps qu'ils ont une imagination ardente et primesautière, possèdent un grand sens cri- tique qui s'exerce chez eux presque immédiatement, concurremment avec l'idéation créatrice. C'est le mélange de cet esprit critique avec l'esprit d'invention qui fait leur force..….; l'étendue de leur pensée leur permet de corriger la fougue de leur imagination. » Ce sens critique fait, au contraire, entièrement défaut à l’aliéné. L'homme de génie et le criminel-né de Lombroso n'ont plus actuellement qu'un intérêt historique. Séduit par des généralisations hâtives, Lombroso s’est trop appuyé sur des faits particuliers et quelquefois excep- tionnels; il n'a pas toujours soumis ses documents à une critique suffisante, il s'est contenté parfois de mesures approximatives. Mais c’est le lot habituel des grands inventeurs de laisser des lacunes dans leur œuvre; il appartient aux disciples de la compléter et de la rectilier. Si des travaux postérieurs ont établi qu'il n'existe pas une parenté aussi étroite entre le crime et l'atavisme ou l'épilepsie, elles ont démontré, en revanche, la réalité d'un fait qu'on soupconnait seu- lement avant Lombroso : la relation fréquente du crime avec la folie. L'activité de Lombroso ne s'est pas bornée à des recherches spéculatives ; après avoir étudié la cause du mal, il a proposé le remède. Ici encore l’exubérance de son imagination l’a conduit parfois à l'utopie. De longtemps encore on ne tentera pas d'utiliser un remède qui lui était cher et qu'il appela la symbiose. Il entend par là l’utilisation des criminels dans les tra- vaux les plus en rapport avec leurs instincts alaviques : la guerre, par exemple, ou la chirurgie pour les homi- cides, la police ou le journalisme pour les escrocs. Hätons-nous d'ajouter que Lombroso a présenté tout un ensemble de mesures prophytactiques et thérapeu- tiques du plus haut intérêt : moyens préventifs contre l'influence de la richesse et de la misère, lutte contre l'alcoolisme et contre la prostitution, institutions de prévoyance, méthodes d'éducation, placements à la campagne, création d’asiles spéciaux pour les aliénés criminels, détention perpétuelle pour les criminels- nés, ete. A la doctrine religieuse du péché, à la concep- tion métaphysique du libre-arbitre, il oppose le droit de la défense et de la sécurité sociales. À la notion de responsabilité, il substitue celle de nocuité. Ces idées, si elles n’ont pas encore prévalu, n'en ont pas moins déterminé un mouvement d'opinion qui a profondé- ment transformé, sinon la lettre, du moins l'esprit des institutions judiciaires et pénitentiaires. Dépouillée des erreurs ou des théories subjectives qui ont pu s'y glisser, l'œuvre de Lombroso reste ainsi féconde en résultats. Novateur génial, il a complété : l'œuvre de Pinel et élevé au rang de malades nombre de malheureux qui jusqu'ici n'inspiraient que lemépris. Philanthrope éclairé, il a eu le mérite de nous enseigner que le premier devoir social n’est pas de châtier, mais de prévenir et de soigner. D' P. Sérieux, Médecin en chef des Asiles d'aliénés de la Seine. $ 2. — Physique Photographie d'éclairs ou d’étincelles. — Si, après avoir photographié une étincelle pas trop forte ou un éclair, on éclaire faiblement la plaque sensible avant de la développer, l’image vient comme une faible ligne sombre, disparaît ou vient en clair sur sombre, suivant la grandeur de l’illumination subsé- quente. Ce phénomène (effet Clayden) peut gravement troubler la photographie des éclairs, car l'image des décharges préliminaires, faibles mais caractéristiques, risque d'être effacée par la lumière réfléchie par les nuages. Au cours d'une étude sur la solarisation, M. B. Walter! a comparé à ce point de vue un certain nombre de plaques du commerce. Il a déterminé, au moyen d'un étalon Hefner, l'i/lumination b, nécessaire pour effacer l'impression; l’opacité s, correspondante de la plaque (échelle arbitraire de 1 à 10) et l’opacité s! après une illumination subséquente de 1,25 bougie- mètre-seconde. Voici un extrait de ses résultats : LIN SORT. Plaque Ilford (ordinaire) "1:25 1 4 NT UE Elo crea Sr one PE) A 6 — Ilford (à rayons X) . - . 4 10 oi] UNITED RC 5 8 8 — étincelle violette) , 5 5 8 — létincelle bleue) . . 20 10 2 L'avantage de l'emploi des plaques Lumière saute aux yeux, et l'intensité particulière que prend le phé- nomène avec les plaques Ilford explique qu'il ait été découvert en Angleterre. Les vitesses initiales des électrons engen- drés par la lumière ultra-violette.— Après que les recherches de M. P. Lénard? eurent démontré l'existence d’un effet de résonance chez les électrons émis par une plaque métallique éclairée par la lumière ultra-violette, M. E. Ladenburg* a étudié plus profon- dément la nature de cet effet. Il a constaté que la vitesse maximum des électrons émis par un métal donné est directement proportionnelle au nombre de vibrations de la lumière incidente. Le même auteur, en collaboration avec M. Markau #, a ensuite démontré que les vitesses de tous les électrons dégagés dans un intervalle donné du spectre se trouvent comprises entre d’étroites limites. é M. A.-W. Hull’, dans un récent Mémoire, étudie ces mêmes phénomènes dans l'intervalle des rayons à courte longueur d'ondes découvert par Schumann. La source de lumière dont il se sert est un tube à décharges à âme capillaire, analogue au tube employé par M. T. Lyman dans ses recherches spectroscopiques. Ce tube, rempli, à environ {4 millimètre de pression, d'hydro- gène ou d'acide carbonique, était fermé par une plaque de spath fluor. Les différentes longueurs d'ondes s’obte- naient en insérant différents écrans d'absorption entre le tube à décharges et la pile photo-électrique. En mesurant l'énergie cinétique initiale des électrons intermédiaires entre À = 1.710 et À — 1.230 unités Ang- strom, dégagés du charbon sous l’action de la lumière, l’auteur constate que la proportionnalité, découverte par Ladenburg, entre la vitesse initiale maximum des Ann. der Physik, t. XXVII, p. 94. Ann. d, Phys., t. I, p. 359, 1900; t. VIII, p. 149, 1902. Phys. Zeitschr., t. VIII, p. 590, 1907. Id., t. IX, p. 821, 1908. Id., &. X, p. 537, 1909. CCR CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 899 électrons, c’est-à-dire la racine carrée de leur énergie cinétique initiale maximum, et le nombre de vibrations de la lumière génératrice, s'applique à ces courtes lon- gueurs d'ondes, au degré de précision avec lequel cet intervalle du spectre est connu. Ces résultats autorisent M. Hull à affirmer que, dans l'intervalle tout entier de À — 2.700 à À — 1.230 unités Angstrüm, les vitesses initiales des électrons les plus rapides, dégagés par la lumière d'une fréquence donnée, ‘sont proportionnelles à cette fréquence. $ 3. — Chimie L'action de l’émanation du radium sur les €léments du groupe du carbone.— On sait le retentissement considérable qu'ont eu, il y a deux ans, les expériences de Sir William Ramsay relatives à l'action de l'émanation du radium sur le cuivre. D'après le savant anglais, la quantité considérable d'énergie emmagasinée dans l’'émanation produit une véritable désagrégation de l'atome de cuivre, qui est réduit en éléments de poids atomique moins élevé appartenant à la même famille dans la classification de Mendéléeff. En fait, Sir William Ramsay annonceait avoir trouvé, parmi les produits de l’action de l’'émanation sur le cuivre, de faibles quantités de potassium, de sodium et de lithium. Me Curie, qui a repris ces expériences, n'a pu, il est vrai, les confirmer, et a signalé certaines causes d'erreurs dans le mode opératoire du savant anglais; mais Sir William Ramsay a recommencé son travail en se mettant à l'abri des critiques de M2° Curie et il a maintenu intégralement ses conclusions. En même temps, il se préoccupait de généraliser sa décou- verte, en l’étendant à d’autres familles naturelles, et il vient de faire paraître, sur ce sujet, une communi- cation ! qui ne cède en rien, en intérêt, à ses précé- dents travaux. Sir William Ramsay s'est adressé, cette fois, à un certain nombre d'éléments de la famille du carbone : Si, Ti, Zr, Th, Pb; si son hypothèse est exacte, ceux-ci, sous l'influence de l'émanation, doivent se désagréger et donner des éléments plus simples de la même famille, en particulier du carbone. Voici exactement le mode opératoire suivi par l'auteur æt son collaborateur, M. F.-L. Usher : L'émanation est . pompée, avec le gaz tonnant qui l'accompagne, d'une solution de bromure de radium contenant 0 gr. 211 de radium métallique. Le gaz produit dans le cours d’une semaine s'élève à environ 25 centimètres cubes et contient 0,0912 centimètre cube d'émanation. Après explosion du gaz tonnant, il reste environ 1/2 centi- mètre cube; celui-ci est recueilli dans un petit tube en verre recouvert de potasse caustique fondue. Au bout d'une heure, le gaz, débarrassé d'acide carbonique, est introduit dans un flacon de verre où l'on a fait le vide et qui contient la solution à soumettre à l’action de Pémanation. Le contenu du flacon a été abandonné pendant quatre semaines, temps au bout duquel Pénergie de l’'émanation est complètement épuisée. Les gaz sont alors pompés et analysés. Or, parmi ces gaz, on a trouvé constamment du car- bone sous forme d'anhydride carbonique ou d’un mé- lange d'anhydride carbonique et d'oxyde de carbone. Voici la quantité de carbone produite aux dépens des diverses solutions par un millimètre cube d'émanation : CARBONE (MGR-) SOON TETE ERP OIL TS OS RME, 1: 21 = 2 : Th (Az0°):} Eu 2 Dh (CIO MALE ORNE EN ! Berichte der deuts:h. chem. Ges.. t. XLII, p- 2930. Sir W. Ramsay et M. Usher concluent que les élé- ments du groupe du carbone, sans exception, four- nissent des composés du carbone après action de l’'éma- nation. Les quantités produites ne sont pas identiques; il semble que les éléments qui possèdent un poids ato- mique élevé sont généralement désagrégés plus faci- lement que ceux d’un poids atomique faible. Le plomb seul ferait exception à cette règle et serait spécialement stable. Des expériences analogues sur les composés d'autres éléments sont en cours d'exécution ; mais, dès à pré- sent, il semble bien que la désagrégation de l'atome chimique sous l'influence de l’émanation est un fait définitivement acquis à la science. $ 4. — Physiologie L’eflet de la lumière sur les matières colo- rantes du sang et les corpuseules rouges. — Dans un Mémoire présenté à l’Académie Royale des Sciences de Copenhague, M. K. A. Hasselbalch vient d'exposer les recherches qu'il a faites sur ce sujet, dans le laboratoire de l’Institut Finsen. Partant de la dé- monstration, fournie par un travail antérieur, que l’ac- tion des rayonnements ultra-violets diminue le pouvoir d'absorption et de dégagement du sang vis-à-vis de l'oxygène, il détermine la nature et les conditions de cet effet lumineux, et d’autres analogues, sur quelques dérivés de l'hémoglobine. Dans la seconde partie de son travail, il recherche les effets hémolysants de la lumière, effets récemment découverts par d'autres au- teurs. Dans une troisième partie, il recueille de nou- velles observations relatives à l’action de plusieurs sen- sibilisateurs photo-biologiques sur les matières colo- rantes du sang et les corpuscules, en l'interprétant par une théorie nouvelle. L'auteur se sert exclusivement de sang de bœuf déli- briné frais ou des corpuscules purifiés qu'on en retire, ainsi que de solutions d’oxyhémoglobine. Il emploie comme source lumineuse une lampe à vapeurs de mer- cure, système Kromayer. Cette lampe, alimentée par un courant d'environ 3,6 ampères, sous une tension de 120 volts, entre les bornes, rend une lumière d’une constance remarquable, comportant les rayons inter- médiaires entre 600 et 220 pu. En insérant devant la fenêtre de quartz de cette lampe une plaque soit de verre ordinaire, soit de verre Uviol, on élimine dans certaines expériences les rayons ultra-violets extrêmes (de 310 à 220 et de 250 à 220 y respectivement). Il résulte de ces expériences que la matière colo- rante naturelle du sang se convertit, sous l’action de la lumière, en méthémoglobine, qui se dédouble ulté- rieurement, par exemple en hématine. La condition nécessaire à l'établissement de cette réaction est la pré- sence d'oxygène, l’hémoglobine réduite étant résistante à la lumière. Ces effets s'observent dans le cas des rayons de longueurs d'onde supérieures ou inférieures à 310 puy, mais avec une prépondérance marquée pour ces dernières. La formation de méthémoglobine, qui a lieu dans une mesure constante, que l’oxyhémoglobine soit con- tenue dans les corpuscules ou qu’elle se trouve en solu- tion, suit, quant aux durées d'éclairage, la formule des réactions monomoléculaires. Dans le vide, la méthémoglobine exposée à un éclai- rage se transforme en hémoglobine réduite ; dans l'obs- curité, l'oxygène scindé produit la formation d’'oxy- hémoglobine. L'hématine est réduite par la lumière en hémochro- mogène ; dans l'obscurité, l’hématine se reforme. L'hémoglobine oxycarbonée subit sous l’action de la lumière une conversion partielle en hémoglobine ré- duite ; dans l'obscurité, l'hémoglobine oxycarbonée se reforme. Les corpuscules du sang se dissolvent sous l’actice de la lumière, à l'air aussi bien que dans le vide, In plus fortement pour les rayons d'une longueur d'once 900 inférieure à 310 puy, mais à un degré appréciable aussi pour les rayons visibles. En ajoutant des sensibilisateurs chromatiques, on accélère à l'air libre l'ensemble des réactions lumi- neuses étudiées par l'auteur; dans le vide, on n'accélère que les réactions dégageant de l'oxygène. Le rôle du sensibilisateur consiste à être une substance facilement oxydable qui absorbe la lumière. $ 5. — Enseignement La « Carnegie Institution » de Washington. — La Carnegie Institution est une sorte d'Université supérieure, Université sansétudiants, complétanttoutes les autres Universités. Elle fut fondée en 1902 par M. Andrew Carnegie, qui confia 40 millions de dollars (50 millions de francs) à un Comité de savants présidé par M. le D' Daniel C. Gilman ; ce savant venait de résigner ses fonctions de président de la Johns Hopkins, la grande Université de Baltimore, l’une des plus importantes des Etats- Unis, et même du monde entier. Pendant deux ans. le Comité prépara le plan et le programme de l’Université, et, en 190%, la Carnegie Institution fut « incorporée » par le Congrès, ou Parle- ment fédéral: cela équivalait à la reconnaissance d’uti- lité publique. Après ces deux premières années passées à installer l'Université, M. le Dr Gilman se retira, étant trop fati- oué: le Comité appela alors à sa présidence un savant également autorisé, M. Robert S. Woodward, qui était alors doyen de la Faculté des Sciences et professeur de Mécanique et de Physique mathématique à l'Université Colombienne. Avant d'occuper cette fonction de pro- fesseur, M. Woodward avait appartenu au Service fédé- ral des Lacs, au Service géologique fédéral, et au Ser- vice fédéral des Côtes et de la Géodésie. C'était donc un homme plein d'expérience administrative, en même temps qu'un savant. Il devait mener à bien le projet de M. Carnegie. L'Institution fut organisée sur le principe suivant : toutes les fois qu'un homme, présentant des garanties suffisantes, viendra soumettre au Comité directeur un projet de recherches spéciales qui ne peut être mené à bien {pour une raison quelconque) dans une des Universités existantes, la Carnegie Institution ouvrira ses portes à ce travailleur. Elle lui fournira labora- toire, instruments et appareils, chauffage et éclairage, matières premières, personnel auxiliaire, et, qui plus est, une pension lui permettant de vivre honorable- ment pendant tout le temps que dureront ses recher- ches, afin qu'il n'ait pas à s'occuper de gagner sa vie. È Bien entendu, les projets présentés sont soumis à l'examen d’autorités compétentes; l'intéressé a toute latitude pour exposer ses idées, les défendre; si le projet est agréé, le chercheur commence son travail par une période d'essais, dont la durée varie selon le genre de travaux. Cette manière de faire évite tout mé- compte à l'intéressé et à la caisse de l'institution. La publicité des travaux exécutés dans les labora- toires de l’Institution est assurée par des périodiques édités par l'établissement. Un exemple, entre mille, de la générosité de la Car- negie: en une année, on a versé 19.000 dollars à M. Luther Burbank, le célèbre botaniste, pour ses expériences d'horticulture, et 100.000 dollars à divers chercheurs, pour des travaux sur la Physique du Globe, sur la nutrition, sur la Physique solaire. Mais la Carnegie Institution ne se borne pas à accueil- lir les travailleurs dans les locaux dont elle dispose ; si cela est nécessaire, elle n'hésite pas à faire construire de nouveaux laboratoires; ce ne sont pas, évidemment, de luxueuses constructions qu'elle érige ainsi, mais quelque chose d'éminemment pratique, peu durable, et répondant à tous les besoins du travailleur qui l'a demandé. On a ainsi aménagé souvent des labora- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE toires à outillage spécial, des serres, des observatoires, des ateliers, des écuries ou des étables pour des ani- maux d'expériences, etc. Le centre administratif et les principaux édifices de l'institution sont à Washington ; mais il y a des annexes un peu partout, suivant le besoin. A Washington, dans le quartier Nord-Ouest, à l’angle de ja rue P et de la 46e rue, se trouve une très belle construction à trois étages, en liais gris et granit bleu, œuvre des architectes Carrère et Hastings, de New- York. C'est le centre de la Carnegie. On y trouve toutes les salles des commissions spéciales, la salle du Con- seil des trustees où administrateurs, etun vaste audi- torium, amphithéätre où se font des conférences publi- ques sur l'actualité scientifique. C’est là également: que s’emmagasinent et se vendent toutes les publica- tions de l'Institution. A Tumamoc Hill, près de Tucson, dans l’Arizona, om a installé le Laboratoire de Botanique désertique; c’est le seul établissement de ce genre dans le monde. On étudie là les conditions de développement, de repro- duction, de distribution, de migration et de variation de la flore du désert. Ce laboratoire, ou plutôt cette « station », comprend de nombreuses et très grandes serres, de vastes laboratoires, d'énormes jardins et champs d'expériences; en tout, il occupe une super- ficie de 350 hectares. On y étudie notamment l’accli- matation des autres flores. Cette station a pour direc- teur le Dr Daniel T. Macdougal, ancien directeur du Jardin botanique de New-York. La station a pour annexes des plantations expéri- mentales de flore alpestre dans les montagnes de | Santa Catalina, qui sont peu distantes ; ces planta- tions se font à 2.000 ou 3.000 mètres d'altitude. Le résultat de tous ces travaux sera une meilleure mise en valeur du sol de la région. Ce laboratoire a été fondé en 1904, etses publications ont une telle valeur qu'il a déjà fallu en réimprimer une seconde édition. Le Département de l'Evolution expérimentale, qui étudie, sur les plantes et sur les animaux, les problèmes de l'hérédité, de l'hybridisation, de la mutation, elc., possède à Cold Spring Harbor, près de New-York, un laboratoire biologique, une ferme, des champs de cul- ture, etc. Le directeur est M. le D' Charles B. Daven- port, ancien professeur de Zoologie à l'Université de Chicago. Ce laboratoire a été inauguré officiellement en 1904, sous la présidence de M. le Professeur Hugo de Vries. Quelquefois, les travaux exécutés dans ce laboratoire empruntent la collaboration de la Station biologique, toute voisine, de l'Institut de Brooklyn, et celle du Jar= din botanique de New-York. à IL existe un Laboratoire de Biologie marine, dans l'ile Tortugas, près de la côte de la Floride; le direc- teur en est M. Alfred G. Mayer. Dans ce laboratoire, on étudie surtout la faune marine du golfe du Mexique eb de la mer des Caraïbes, ainsi que celle de la portio tropicale du Gulf-Stream. Cette station possède des habitations démontables pour les savants étrangers qui veulent venir étudie sur place cette partie de la Biologie. Toutes les Univer sités américaines et plusieurs Universités d'Europe on eu de leurs membres qui ont travaillé là; c'est ains que M. le D' Robert Hartmayer, directeur du Muséu zoologique de Berlin, à fait une saison de deux mois pendant l'été de 1907, sur les côtes de la Floride. Sur une colline voisine de Washington, et bien isolé cependant, s'élève le Laboratoire de Physique du Globe qui comprend. un vaste bâtiment de trois étages. Cett construction, inaugurée en 1906, à coûté, installatio comprise, 450.000 dollars (750.000 fr.). Le directeur d la station est M. le Dr Arthur L. Day. Un détail, qui montrera que les institutions de | Carneqie jouissent d'une grande réputation : c'est à © laboratoire de Physique du Globe que M. le D' Georg F. Becker a fait ses recherches, pour le Service géola CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE gique fédéral, sur l'élasticité et la plasticité des miné- Taux. Le Département du Magnétisme terrestre est situé à Washington, mais il possède un grand yacht (le Ga/ilée) sur lequel on fait des études dans toutes les régions de l'Océan Pacifique. Le directeur de ce laboratoire ambulant est M. le D: L. A. Bauer. Les travaux fournis par ce département ont eu pour résultat que le Service hydrographique de la Marine fédérale a substitué à ses propres « cartes magnétiques » du Pacifique celles dressées par les savants de la Carnegie Institution. Ce laboratoire a d'ailleurs dressé des cartes magnétiques pour toute l'Amérique du Nord, et il poursuit, en ce moment, le mème travail pour l'Afrique. Le Département d'Astronomie méridienne est ins- tallé à Albany, capitale de l'Etat de New-York. Le direc- teur est M. le D' Lewis Boss, ancien directeur de l'Obser- vatoire Dudley. Dans cet observatoire, on travaille à l'établissement de la carte du ciel pour tous les astres des sept premières grandeurs et, en attendant, on à établi un catalogue préliminaire dans lequel est déter- minée la situation de plus de six mille étoiles. La Carnegie Institution projette l'installation d'une station semblable dans l'hémisphère austral. Un observatoire pour l'étude du Soleil a été construit sur le mont Wilson, en Californie, à deux mille mètres d'altitude. Le directeur de cet observatoire est M. le D' George E. Hale, ancien directeur de l'Observatoire Yerkes, à l'Université de Chicago. On y étudie la cons- titution du Soleil, les radiations solaires, l’évolution des nébuleuses, etc. Un Laboratoire d'étude de la Nutrition, dirigé par M. le D’ Francis G. Benedict, a été construit en 1906 à Boston. Son édification seule a coûté 100.000 dollars. Ce laboratoire a été installé près de l'Ecole de Médecine et de l'Hôpital-Ecole de l'Université Harvard. Le D' Bene- dict y étudie les résultats physiques et chimiques que les divers genres d'alimentation, les quantités et qua- lités d'aliments, peuvent donner sur des sujets des deux sexes, de tous âges, de toutes professions et con- ditions sociales, chez les malades ou chez les normaux. MM. R. H. Chittenden et l.. B. Mendel y travaillent des questions de Chimie physiologique, et M. T. B. Osborne étudie plus spécialement l'alimentation des végétaux. Puis, l'Institution Carnegie a créé un Pépartement des Recherches historiques, sous la direction de M. J. Franklin Jameson. D’infatigables chercheurs accumulent là les matériaux d’une énorme bibliothèque historique, et y rédigent les catalogues des biblio- thèques publiques et des archives nationales, munici- pales, régionales, etc., de tous les pays du monde; ils y préparent des «dossiers » ou catalogues spéciaux per- mettant à tout chercheur de savoir où se trouvent tous les documents possibles qu'il doit consulter pour l'étude de telle époque ou de tel pays. Merveilleuse ins- titution, qui rendrait de réels services à tous les savants et à la Science, si elle se généralisait. Les travaux du catalogue sont déjà très avancés pour tout ce qui concerne la France, la Grande-Bretagne, le Mexique et l'Amérique du Nord avant le x1x° siècle. Un très grand nombre d'érudits et de Sociétés savantes ont déjà eu recours aux collections du Département des Recherches historiques, qui est unique au monde, 1l est à peine besoin de le dire. Ce département publie déjà une American Historical Review, et MM. Claude van Tyne et Waldo G. Leland y ont publié un Guide des Archives fedérales des Etats-Unis qui en est à sa seconde édition. La Carnegie Institution à également créé un Dépar- tement des Sciences économiques et sociales, qui est dirigé par M. Carroll D. Wright, l’ancien directeur du Bureau fédéral du Travail. (On sait que M. Carroll Wright est le véritable créateur des ministères ou offices 901 du travail tels qu'ils existent actuellement dans le monde entier.) Dans ce département, on exécute le même travail, pour la Sociologie et les questions éco- nomiques, qu'au Département des Recherches histo- riques. 285 personnes travaillent à recueillir les docu- ments nécessaires pour établir l'histoire économique des Etats-Unis; on y prépare, en outre, un ouvrage comprenant un volume spécial à chaque Etat, District ou Territoire; plusieurs de ces volumes ont déjà paru. Et les cent quatre-vingt cinq travailleurs, de rédiger mémoires et monographies, qu'ils adressent aux Sociétés savantes ou aux Revues. En dehors des travaux se rattachant à des sections spéciales, il faut mentionner encore d’autres résultats : MM. H. O. Sommer et Charles W. Hodell font et publient des recherches sur la période légendaire de l'histoire britannique, et notamment sur l’époque du roi Arthur ; M. le D' Ewald Flügel vient de publier un lexique de l'anglais du moyen âge; M. W. F. M. Goss fait des recherches sur les loco- motives à haute pression ; M. W. F. Durand étudie les hélices; L'Institution envoie à ses frais des archéologues pour faire des études à Rome et à Athènes; Elle à pris à sa charge la publication des travaux de la Commission californienne d'enquête sur le grand tremblement de terre qui bouleversa San-Francisco, 1l y à quelques années; Elle édite le Traité de Météorologie et Hydrologie dynamiques de deux professeurs de l'Université de Cbristiania, MM. V. Bjerknes et J. W. Sandstrôm ; De même, elle publie le colossal Rapport de la Mis- sion d'études géologiques envoyée en Chine, sous la direction de M. Bailey Willis, par le Service Géologique fédéral. L'Institution a, en outre, tout un ensemble de publi- cations : L'exploration archéologique et géographique du Turkestan, par M. Raphaël Pumpelly; les tortues fossiles de l'Amérique du Nord, par M. le D' O0. P. Hay: les sceaux antiques de l'Asie occidentale, par M. le D: William Hayes Ward. Le Muséum médical de l’armée, à Washington, publiait annuellement un /Zndex Medicus, répertoire de toutes les publications mondiales concernant la Méde- cine. Après quelques années, la publication fut sus- pendue, comme trop onéreuse pour la Société; la Carnegie Institution a repris le travail à son compte, et, depuis l’année 1903, elle dépense annuellement pour cela 12.500 dollars (62.500 francs). Citons encore deux travailleurs auxquels l’'Institution a ouvert ses portes : M. T. C. Chamberlain, qui étudie les « problèmes fondamentaux de la Géologie », et M.T.W. Richards, qui s'occupe des «poids atomiques». Enfin, l'Institution subventionne la Station zoolo- gique de Naples! Rien que pour l'année 14907, l’Institution a publié 38 volumes, contenant 3.428 pages in-4°, et 6.28% pages in-8°; elle a dépensé, de ce chef, 65.359 dollars (326.795 francs). Le service gratuit de toutes les publications de la Carnegie est fait aux principales bibliothèques de tous les pays; le reste est vendu au prix de revient. Il est évident que les dix millions de dollars du début sont épuisés depuis longtemps ; M. Carnegie en a versé bien d’autres depuis! Le budget de l’Institution, pour le temps écoulé du 1®* janvier 1904 au 31 décembre 1907, accuse une dépense de 2.140.864 dollars (10.704.320 tr.) rien que pour le département des Recherches histo- riques. Tel est l'exposé des services immenses que l'initia- tive privée rend, dans le domaine scientifique, à l'Amérique et aussi au monde. Me L. Chaboseau-Napias. 902 L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER Depuis plusieurs années, j'ai entrepris, d'abord seul”, puis avec la collaboration constante et pré- cieuse du D’ Degrais, l'étude de l’action thérapeu- tique du radium sur divers tissus pathologiques et plus spécialement sur les tumeurs malignes de na- ture cancéreuse. Quelques-uns des résultats heureux que j'ai ob- tenus ont particulièrement intéressé ceux qui ont pu les observer, et récemment diverses sociétés savantes m'ont demandé de les leur exposer. Aussi bien, la question est devenue toute d'actualité, et il est intéressant de constater qu'à l'heure où le fléau du cancer augmente très certainement et exerce partout ses ravages, un moyen nouveau de le com- battre est venu prendre position aux côtés de la chirurgie, de la roentgénothérapie (rayons X), de la fulguration (étincelle électrique), etc. Dans quelle mesure? C'est ce qu'il convient de préciser, car il faut se garder de toute exagération incompatible avec un bon esprit scientifique; telle est précisément la mise au point que le Directeur de cette Revue m'a prié d'établir. Tout d’abord, il faut être bien averti de ce que signifie le terme de « cancer ». Pris dans le sens le plus large, il exprime toute une série de tumeurs fort différentes les unes des autres, mais dont la malignité, ou l'évolution tou- ours croissante, ou le caractère rebeile consti- tuent l’un des traits communs. Il y à des épithéliomes, des carcinomes, des sar- comes, des lymphosarcomes, des lymphadénomes, des mycosis fongoïdes, etc., toutes tumeurs qui ont leur marque spéciale et une offensive spéciale. Elles peuvent siéger, selon leur nature, en tous les points de l'organisme, être facilement ou diffici- lement accessibles, atteindre des organes essentiels ou des tissus d'importance vitale secondaire. A la peau, il faut les considérer depuis leurs for- mes les plus simples, comme les verrues ulcérées ou les croûtes des vieillards, depuis les épithélio- mas simples jusqu'aux formes les plus graves etles plus malignes. Elles peuvent rester longtemps tout à fait loca- lisées et progresser avec une extrême lenteur, ou, au contraire, intéresser dès leur apparition les vais- ‘ Les premiers travaux faits (1905) dans mon service à Saint-Lazare ou dans ma clinique furent la base (1906) de la création du Laboratoire biologique du Radium de Paris, premier centre existant pour l'étude (thérapeutique du ra- dium, où collaborent des laboratoires de Physique, de Chi- mie et de Pathologie, et d'où est né l'essor radiumthé- rapique actuel. D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER seaux lymphatiques correspondants et envahir rapidement les ganglions. Parfois, même on assistem très vite à une infection générale. ; Et voilà déjà que cette description, bien que sin- | gulièrement ébauchée et réduite, laisse entrevoir la difficulté de la lutte à soutenir et l'improbabilités de la découverte d'un moyen vérilablement curatif qui, à lui seul, répondra dans tous les cas à toutes les conditions requises. Le radium a-t-il une action élective spéciale sur les tissus cancéreux? Jusqu'à quelle profondeur cette action se manifesle-t-elle? Quels sont enfin les résullats pratiques de l'emploi du radium? Telles sont les diverses questions qu'il s’agit d'analyser. Voyons d'abord quelle est l'arme dont la radium- thérapie se sert. Ce I. — INSTRUMENTATION. L'instrumentation joue un rôle considérable ; de fait, c’est seulement lorsqu'elle s’est perfectionnée, lorsqu'elle nous à rendu possible la mesure de l’6- nergie utilisée, nous permettant par cela même de sorlir de l'empirisme pur, lorsqu'elle a mis entre nos mains une quantité suffisante de radio-activité, que des progrès rapides ont pu être accomplis". Tant qu'on n'opérait qu'avec des quantités de radium minimes, on ne pouvait atteindre que des lésions de surface et de petite étendue; aujourd'hui on peut disposer d'appareils nombreux, de formes différentes, quelques-uns contenant jusqu'à 10 cen- tigrammes de radium pur”. Le degré d'intensité de la source radio-active à une grande importance, ainsi que nous le montre- rons, et il est à souhaiter qu'on puisse disposer dans un avenir prochain de plusieurs grammes de radium ; on possédera dès lors une énergie théra- peutique incomparable. Les appareils se présentent sous deux types diffé- rents : les uns contiennent le sel de radium à leur surface, où il se trouve {xé par un vernis spécial ; ! En mars 1905, M. Armet de Lisle mit à ma disposition, pour une première étude, huit appareils de construction nouvelle dont le radium provenait de son usine de Nogent- sur-Marne; ces appareils représentaient, dans leur en- semble, une force radio-active considérable. ? Malgré le prix fort élevé du milligramme de bromure de radium pur, il n'est plus invraisemblable de parler d'appareils contenant 10 ou 20 centigrammes de ce sel; l'industrie française a résolu le problème et l’on peut main- tenant, dans un but pratique, agir sur des cancers avec 30 ou 40 centigrammes de radium pur, en combinant l'action de plusieurs appareils. D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER ce sont les appareils à vernis radifères; les autres sont sous forme de tubes. 1. Appareils à vernis radifère. — Ces appareils peuvent être construits selon loutes les formes et les dimensions qu'on juge nécessaires. L'un d'eux’, par exemple, est en forme de clou ou de champi- gnon ; il s'adapte à l'utérus, de façon à couvrir le col tout en pénétrant dans la cavité, et permet ainsi le traitement des cancers de l'utérus. Un autre est une lame plate qui s'introduit aisément sous les paupières pour traiter les cancers de la muqueuse et du rebord palpébral. D’autres ont une forme Sphérique ou cylindrique; d’autres, enfin, sont plats, de petites ou de grandes dimensions, et pro- jettent la radio-activité d’une facon homogène sur une grande surface; ils peuvent être superposés, ou juxtaposés, ou opposés les uns aux autres de facon à couvrir el à inonder de radio-activité de larges tumeurs comme les cancers du sein, par exemple, ou les cancers du cou, etc. Ces appareils peuvent être fixés sur un manche qui permet de les appliquer au fond de cavités, telles que le vagin, la bouche (amygdales, pha- rynx, efc.). 2. Appareils tubes. — D'autres appareils sont tout différents. Ce sont des tubes de petit diamètre dans lesquels le sel de radium est enfermé à l'état libre, comme des grains de blé dans un sac. Ces tubes peuvent être introduits dans les fissures, les fistules. Ils peuvent être véhiculés par le moyen d'un cathéter, ou sonde en caoutchouc creuse, à travers des orifices naturels (bouche, æsophage, rectum, canal de l’urètre) ou à travers des orifices artificiels (ouverture de l'abdomen, anus contre nature, etc.), pour être placés au contact des tu- meurs profondes (cancers de la prostate, du rec- tum, des intestins, ete.). Ces tubes, enfin, peuvent être introduits dans l’intérieur même des tumeurs, à la faveur d'incisions chirurgicales (Procédé Morton et Abbé). Tous ces appareils peuvent être soit tenus à la main, soil fixés avec des bandes, et, comme ils ne déterminent pas de douleur, ils peuvent, sans in- commoder® rester en place un temps plus ou moins long, voire même des nuits entières. Ces appareils, à vernis ou tubes, varient d'éner- gie, cela va de soi, selon la quantité et l'intensité du sel de radium qu'ils contiennent. Le radium pur est 2.000.000 de fois plus actif que l'uranium pris pour unité de mesure; on peut ‘ Présentation d'un appareil radio-utérin parle DrWickham au Congrès de Médecine; Genève, septembre 1908. Si ce n'est par leur poids, lorsqu'on emploie les filtres épais de 1, 2 et 3 millimètres de plomb. | 903 l'incorporer aux appareils à l’état pur ou mélangé à moitié, au quart, au vingtième ou plus encore, avec un sel de baryum. L'instrumentation se présente sous une autre forme, peu utilisée encore il est vrai, mais appelée à un avenir lrès certain : elle met en valeur Le gaz- émanation dont il sera parlé plus loin. En effet, les sels de radium peuvent être incorpo- s; et des rés à des substances injectables, ingérable tumeurs ont pu être influencées par des sels injec- tés dans leur intérieur. Nous ne voulons pas insister sur ce côté de la radiumthérapie, car le moment n'est point encore venu de pouvoir lui consacrer une analyse suffisamment complète. Ce rapide exposé montre que l'instrumentation jouit de qualités précieuses, entre autres la variété, la souplesse et la commodite. IL. — L'ÉNERGIE RADIO-ACTIVE. En quoi consiste l'énergie qui sort de ces appa- reils ? Le bromure de radium, une fois extrait de la pech- blende ou oxyde d'uranium (Bohème, Hongrie, Saxe, Turquie, Suède, Canada, Colorado, etc.), de l’autu- nite ou phosphate double d'uranium et de calcium (Autun, Auvergne, Portugal, Tonkin), de la chal- colite ou phosphate double d'uranium et de cuivre (Autun, Auvergne, Saxe, Portugal), de la carnotite ou vanadate d'uranium (Utah, Etat-Unis), de la thorianite ou oxyde d'uranium et de thorium (Ceylan), de la pyromorphyte ou phosphate de plomb (Issy-l'Evêque en Saône-et-Loire)", a tout d'abord une couleur jaunätre. Ce sel n'a pas au début toute son énergie. Chose curieuse, 17 prend spontanément de la « maturité » dans les trois mois qui suivent. Sa radio-activité, faible d'abord, devient plus énergique, pour atteindre peu à peu avec le temps son maximum d'intensité; il est alors passé au brun foncé. Aussi bien un appareil fraichemeni préparé ne possède-t-il sa pleine énergie qu'après quelques mois. L'énergie radio-active provient de l'émission d'ur gaz appelé émanation et d'un rayonnementinvisible a) Emanation. — Nous ne parlerons pas de l’em- ploi thérapeutique de ce gaz, cet emploi n'ayant 4 A l'usine Armet de Lisle, la seule qui, à ce jour, se soit spécialisée pour l'extraction des substances radio-actives, on traite la plupart de ces minerais, et spécialement les résidus qui proviennent des fabriques d'uranium, pour en extraire les sels de radium, d’actinium, etc., sous forme de bro- mures, de chlorures ou de nitrates, sels solubles, ou sous forme de sulfates et de carbonates, sels insolubles. — Les principaux corps radio-actifs qui y sont actuellement étu- diés sont l'uranium et le thorium, métaux connus depuis longtemps, le radium et le polonium (découverts par Curie et Mme Curie, 1898-1900), l'actinium (M. Debierne), le radio- thorium (MM. Ramsay et Hahn). D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER pas encore été suffisamment étudié ; seulement, il faut savoir qu'il remplit, dans les appareils qui servent à l’utilisation des rayons invisibles, un rôle fondamental et fort intéressant. L'émanation a la propriété de conférer à tous les corps qu'elle frappe une radio-activité d'emprunt (radio-acti- vilé induite). Enfermée dans les tubes ou dans le vernis des appareils, elle ÿ reste concentrée, car elle ne possède aucun pouvoir de pénétration et ne traverse pas les corps; elle s’y accumule, radio- active toutes les particules qu'elle touche; et, comme le rayonnement invisible, qui, lui, peut traverser les parois et en partie s'échapper, est le résultat de la désagrégation de cette émanation, au fur et à mesure de la déperdition qui résulte de l’échappement du rayonnement, le gaz-émanation, qui se reproduit sans cesse, rétablit da radio-activité. Aussitôt après la construction d’un appareil, la production de ce gaz est considérable et l’échap- pement des rayons très faible, puis un équilibre radio-actif s'établit entre la production et la perte d’émanation, traduite elle-même par l'émission du rayonnement. À ce moment, la production du rayonnement est stable, l'appareil a acquis sa maturité. b) Rayonnement.— Lerayonnement invisible ‘ est composé de trois sortes de rayons appelés &, B et y. Rayons « : Les rayons + sont composés d'atomes matériels extrêmement ténus, ayant un volume comparable à celui de l'atome d'hydrogène. Ils sont émis avec une vilesse égale au vingtième de la vitesse de la lumière et sont spontanément chargés d'électricité positive. Kayons 6: Les rayons $ sont des électrons, c’est- à-dire des particules électro-magnétiques tenant le milieu entre la matière et l’éther, et chargés spon- tanément d'électricité négative. Ces particules for- ment un groupe hétérogène, c'est-à-dire qu'elles varient des unes aux autres par leurs dimensions et leur vitesse de translation, et, comme conséquence, par leur pouvoir de pénétration. Les rayons 6 les moins rapides etles moins ténus sont plus ou moins comparables par leur pouvoir de pénétration aux rayons x : ce sont les & mous. D'autres rayons, appelés 8 durs, sont composés de particules dont la ténuité est extrême (2.000 fois moindre que celle des atomes d'hydrogène) et la vitesse voisine de celle de la lumière; ils sont, en conséquence, extrèmement pénétrants. ‘ On peut déceler sa présence en le placant, dans l’obseu- rité, derrière un écran au platino-cyanure de baryum qu'il éclaire d’une lueur très vive; il suffit de placer un corps quelconque entre lui et l'écran pour démontrer la propriété qu'il a de traverser les corps, car l'écran continue à être éclairé. Ce rayonnement impressionne la plaque photogra- phique; il ionise l'air, le rendant bon conducteur de l'élec- tricité, décharge l’électroscope, etc. Enfin, entre les 8 mous et les 8 durs sont les B moyens”. Rayons: Les rayons sont de tout autre nature ; ils n’ont absolument rien de matériel; ils consis- tent en une vibration de l'éther de même ordre que les ondes hertziennes, la lumière, et les rayons X, et ont une vitesse égale à celle de la lumière. Il était important de connaître la constitution de ces rayons, car l'explication du passage à travers les corps, qui joue en thérapeutique un rôle primor- dial, en découle tout naturellement. — Ce passage se fait d'autant plus aisément que l'élément est plus petit et plus rapide : les x et les $ mous auront done un pouvoir de pénétration moindre; les 8 moyens traverseront plus facilement; les 8 durs auront un pouvoir de pénétration allant jusqu'à traverser 1 et 2 millimètres d'épaisseur de plomb. Les y, dont les vibrations se propagent aisément dans l’éther qui empreint tous les corps, auront un pouvoir de pénétration extrème (5 à 10 centimètres de plomb). III. — MÉTHODE DU FILTRAGE THÉRAPEUTIQUE ET APERÇU DES TECHNIQUES. On conçoit que ce pouvoir de pénétration per- mette aux rayons de traverser le vernis des appa- reils et la paroi des tubes; mais les rayons qui, après ce passage, seront utilisables pour la théra- peutique auront été l'objet d'une sélection; plus les corps à traverser formant filtres seront-épais, plus les rayons qui auront pu filtrer seront pénétrants. Si, pour la thérapeutique, on était réduit à utiliser les appareils tels qu'ils sont fabriqués, ce qui était le cas avant l'application du filtrage thérapeutique, : on n'aurait pour chacun d'eux qu'une radiation donnée, toujours la même; il était intéressant de parvenir à faire varier la valeur quantitative et qua- litative des rayonnements une fois émis hors des appareils, pour donner à ceux-ci un jeu d'action plus varié. Lorsque j'eus entre les mains les appareils de construction nouvelle prêtés par M. Armet de Lisle, comme ces appareils étaient d'extrême puissance, j'eus l’idée d'interposer entre eux et les tissus à traiter des substances formant écran mobile, d'é- paisseurs différentes, destinées à retenir une cer- taine quantité de rayons; c'est ainsi que je com- mençai la pratique du filtrage thérapeutique. Puis, ce filtrage a été étudié au point de vue physique par M. Beaudouin, le chef des travaux physiques de notre Laboratoire biologique du radium, qui a défini le dosage et la mesure analytique des rayon- 1 Les rayonnements hors du vernis des appareils con- tiennent une proportion considérable de rayons f, envi- ron 90 0/0. D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER 905 nements filtrés à travers la série des filtres, et par le D' Dominici, qui l’a méthodisé en ce qui concerne les filtres épais et denses. Ce filtrage a été étudié par le D' Degrais et par moi-même. Les écrans ou filtres (aluminium depuis 1/100 de millimètre d'épaisseur jusqu'à 1/10 de millimètre, plomb ou argent depuis 1/10 de millimètre jusqu'à 3 et 4 millimètres) non seulement diminuent la quantité des rayons, en arrêlant ceux qui, étant plus facilement absorbables, n'intéresseraient que la surface des tissus, mais aussi modifient la qua- lité du rayonnement; en effet, un rayonnement qui a pu filtrer à travers une certaine épaisseur est composé de rayons doués d’un plus grand pouvoir de pénétration; après 4 millimètre de plomb, les rayons qui passent (surpénétrantsouultrapénétrants composés de 8 durs et de y) ont un extrêmement grand pouvoir de pénétration, et, comme les autres rayons qui sont facilement irritants pour la sur- face des tissus ont été arrêtés, on comprend qu'avec de tels filtres on puisse agir dans la profondeur des tissus sans intéresser la surlace. Ce rapide apereu montre que, selon qu'on utilise un appareil à nu ou recouvert de la série des filtres, on à un jeu d'énergie qui permet d'agir soit à la surface, soit dans les couches moyennes, soit dans les profondeurs ; d'agir, en d'autres termes, sur des cancers superficiels, des cancers de moyenne épais- seur et des cancers profonds. D'autres méthodes, celle du feu croisé par exemple (Wickham et Degrais), permettent d'agir dans la profondeur. Les techniques consistent donc à calculer la dose quantitative et qualitative nécessaire, en fonction de la durée et du mode des applications des appareils, pour obtenir tel ou tel résultat. Si l’on désire agir à la surface sans irriter les tissus, on emploiera les appareils à nu ou recou- verts de légers filtres et on les laissera peu de temps en contact: de 3 à 30 minutes; on répétera cette courte durée plus ou moins souvent et à intervalles plus ou moins éloignés. Veut-on irriter et détruireune lésion superficielle? le même appareil sera laissé à demeure un temps plus long. Veut-on agir dans la grande profondeur, et respecter la surface? on emploiera un filtre de 2 à 4 millimètres d'épaisseur et on laissera l’appa- reil à demeure un temps donné qui sera toujours assez long : 50 à 80 heures. Veut-on agir dans la profondeur et détruire en même temps la surface ? le même rayonnement sera laissé au contact le triple de ce temps ou même plus’. ? En un article de revue, il est impossible d'aborder les diverses questions qui intéressent les techniques; je n'ai pu ici que schématiser, le sujet étant des plus complexes. Voir le Traité de Radiumthérapie de Wickham et Degrais. IV. — ACTION ÉLECTIVE DU RADIUM SUR LA CELLULE CANCÉREUSE. Il a élé dit depuis longtemps (Danlos) que la cel- lule cancéreuse semble être terrain d'élection vis- à-vis du radium ; c'est-à-dire que, sous l'influence de la radio-activité, la cellule malade se modifie, se transforme ; qu’elle perd ses caractères de malignité et donne naissance, dans son évolution nouvelle, à un tissu qui n’est plus nocif. Sans cette notion de l’électivité, il serait diffi- cile de comprendre qu'une tumeur profonde puisse régresser sans qu'il soit nécessaire de faire passer les tissus sus-jacents par une phase d'irritalion ou de destruction. Cette éleetivité n’est démontrée que par l’action de certaines doses et de certaines durées d'application”. L'explication intime de ce phénomène ne peul encore être donnée ; il faut se contenter de sa simple constatation. Pourquoi les rayons, en traver- sant les cellules, modifient-ils leur vitalité morbide? Comment se fait-il que ce soit seulement deux ou trois semaines, ou plus, après qu'un tissu cancé- reux à été influencé, qu'on le voit peu à peu se modifier ? Telles sont les questions qui se posent et n'ont point encore été résolues. V. — LES RÉSULTATS. Ces notions préliminaires étaient importantes à définir avant d'aborder l'analyse des résultats. Avec l’aide précieuse du D’ Degrais, j'ai traité dans mon service, au Laboratoire biologique du Radium, en- viron 1.200 malades dont la moitié étaient atteints de tumeurs de nature cancéreuse; dans chaque groupe de cancers, je me bornerai à indiquer quel- ques-uns des faits saillants” que nous avons obte- nus le D' Degrais et moi. $ 1. — Cancers superficiels de la peau ou épithéliomes torpides à évolution lente. Il faut considérer : 1° des cas bénins; 2° des cas présentant quelque tendance à la gravité. 1. Æpithéliomes bénins. — Ces tumeurs se pré- tantôt il s'agit de simples verrues ou croûtes qui saignent sentent sous des aspects très divers assez facilement au moindre grattage; tantôt ce sont des duretés sèches, comme de petits grains ! Les études histologiques de MM. Dominici et Barcat, plus récemment celles de MM. Delbet et Herrenschmidt, ont mis en évidence les modifications apportées aux élé- ments cellulaires sous l'influence des rayons. Ces derniers auteurs contestent l'électivité et pensent simplement à une différence de résistance des tissus ; mais, pour nous, c’est là précisément que réside l’électivité. ? Radiumthérapie. Loc. cit. 906 D° LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER placés les uns près des autres selon une ligne plus ou moins circinée, souvent en croissant; tantôt, enfin, ce sont de petites plaies comme de simples écorchures. Ces diverses lésions ont comme carac- tères communs d'évoluer lentement vers l'agran- dissement constant, et d'aboutir à des ulcérations graves après plusieurs années. Leur apparence inoffensive constitue leur danger. Elles n'existent que rarement avant quarante ans et siègent le plus souvent à la face. Or, ces épithéliomes bénins, pris au début, sont facilement curables par de nom- breux moyens; aussi sembleraient-ils, à première la rapie, qui se présente en général plutôt comme un moyen d'exception. Nous sommes d'avis contraire. En effet, les cas de cet ordre traités par le radium ont été très suf- fisamment nombreux pour permettre une statis- lique définitive vue, intéresser moins directement radiumthé- et apprécier as- sez justement la valeur des résul- tats qu'on peut obtenir. Notre ami, le D' Lenglet, dans son remarquable Rapport au Con- grès de Budapest (AoûL 1909), éva- choix, non seulement en raison de la valeur des résultats, mais aussi en raison de la commodité et de la facilité avec lesquelles le traitement est effectué, ce qui n’est point sans in- | térêt, puisqu'il s'agit très souvent de traiter des vieillards. | L'appareil est appliqué très aisément, au domi- | cile du malade s'il le désire, une heure, deux heures | ou au plus trois heures, au cours de cinq à huit jours. Le malade ne s’apercoit volontiers de rien, car ce traitement est indolore; après dix à quinze jours, la petite lésion se transforme et se modifie. S'il s'est formé une croûte légère, celle-ci tombera d'elle-même vers la troisième semaine, et sans | aucun pansement, sans aucun soin spécial, du trentième au cinquantième jour, une cicatrice de réparation fine et souple sera obtenue. | Il va de soi que, parmi les cas qui rentrent dans lasérie du D' Len- glet, il y a des degrés fort difté- rents à considé- rer, puisqu il en- globe äes épithé- liomes de 7 cen- timètres ; pour ces derniers Cas, le traitement est plus long, la ré- paration n'est dé- | 1e traitement de à = je io. 9 de . : lue l'action du Hu Dee gr ï u finitive qu'après A A ra CHERE Fig. 4 et 2. — Cancer épithélial du nez, à caractère rebelle, inflammatoire, je PA. cureltage chirur- rongeant. trois mois et gical, suivi de Fig. 1. — L'ulcération térébrante, à bords coupés à l'emporte-pièce, avait plus, et il faut l'irradiation par résisté à divers autres traitements (rayons X et cautérisations). : parfois refaire de Fig. 2. — La cicatrice obtenue est encore en excellent état, près de trois ans Le À I les rayons X (ce qui constitue un des meilleurs traitements qui soit), de la facon sui- vante « Si, dit-il, l'épithéliome n'a contracté d'union avec les plans osseux sous-jacents, s'il n’a pas envahi dans les profondeurs les voies et les ganglions lymphatiques, si totale n'excède pas 5 à 7 centimètres de diamètre, si l'évolution de la lésion s’est produite avec torpidité ou tout au moins sans brusquerie, le pourcentage de guérison est de 87 °/, sans récidive plusieurs mois ou même plusieurs années après l'opération. » Eh bien, en nous en tenant strictement aux limites définies par le D' Lenglet, nous devons reconnaitre que l'influence du radium, sans inter- vention chirurgicale préalable, donne une statis- tique plus favorable encore. Aussi pensons-nous que, même pour ces petites lésions, le radium est pas sa surface 1 Les figures 4 à 12 et 15 à 18 sont tirées du Traité de ladiumthérapie, par Wickua et DeGrars ; Baillière, éditeur, 1909, Les autres figures sont inédites. après le commencement du traitement ‘. nouvelles séries d'applications. Il était important de bien marquer l'influence du radium sur ces lésions, que trop souvent les malades négligent,en raison de leur bénignité appa- rente, et qui cependant sont fréquemment le point de départ de véritables cancers de la peau. La même simplicité opératoire se retrouvera dans les autres groupes, mais, bien entendu, avec une statistique relativement bien moins favorable, puisqu'il s'agira de cas malins el graves, souvent incurables. 2. Epithéliomes superficiels présentant quelque signe de gravité. — A] s'agit, dans ce groupe, de lésions de même aspect que les précédentes, mais à marche plus rapidement envahissante, d'ulcéra- tions adhérentes aux plans osseux ou accompa- gnées d'inflammation périphérique. Ici encore, tant que le caractère de gravité ne sera pas particulièrement accentué, les résultats seront très fréquemment satisfaisants. Les récidives se D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER 907 rencontrent un peu plus souvent que dans les | partout où nous avons à lraiter des cancers qui formes précédentes; mais, si le malade est averti de la nécessité de venir se soumettre à l'examen tous les deux mois, la récidive, prise au début, rélrocédera facilement. Nous donnons deux cas qui rentrent dans ce groupe. Le premier (fig. 4 et 2) était un ulcère ron- geant et térébrant siégeant au côté droit du nez; l'ulcère avait ré- vidivé, même après l'emploi des rayons X,et du reste aussi après des curet- tages et l'emploi de caustiques. Le bord infé- rieur de la plaie était à pie et commencait à présenter quel- que caractère malin et inquié- tant. Sur le conseil de notre ami le D' Hudelo, la malade fut sou- mise au radium, et la guérison, qui s'est faite par la produc- tion d’une cica- trice très fine et très esthétique, s'est maintenue, bien que le dé- but du traite- ment date du 6 décembre 1906. Les figures 3, %, 5 et 6 mon- trent les quatre stades de l'évo- lution régres- sive d’un cancer bourgeonnant dont la marche élait très rapi- dement crois- sante (malade adressé par le D° Coyon). Aussitôt que le radium fut appliqué, le développement rapide s'arrêta; la croûle qui recouvrait le bour- Fig-.3: io 5: Fig. 4. Fig. 6. Fig. 3 à 6. — Tumeur cancéreusr épithéliale bourgeonnante de la tempe. — Avant le traitement, une croûte épaisse recouvrait le bourgeon. Elle a été enlevée par la première application et ne s'est plus reproduite. Fig. 3. — Etal du bourgeon au deuxième jour; la surface est déjà beau- coup plus sèche. Fig. 4. — Treizième jour du traitement. Fig. 5. — Trentième jour. Au trente-cinquième jour, la cicatrice était obtenue. Fig. 6. — Cicatrice photographiée une année après la fin du traitement. Sa superficie s'est sensiblement réduite. Il ne s'est produit aucune récidive depuis 3 ans et demi. el le saignottement produits à la surface du sont le siège d'hémorragies et de sécrétions séro- purulentes, le premier bénéfice de l'emploi du ra- dium se marque par l'arrêt de ces écoulements cancers de l'utérus, cancers du rectum. $ 2. — Cancers épithéliaux graves. 1. Cancers épithéliaux de la peau, graves par leur extension. — Mais deux cas fort voici graves où il eût semblé, il y à quelques an- nées, impossible au radium d'ob- tenir une guéri- son. L'ulcération représentée par la figure 7 était énorme; elle mesurait près de 15 centimètres de longueur sur 8 de largeur. De plus, elle avait une base épais- se,assez profon- dément infiltrée et était bordée d'un gros bour- relet cancéreux. Il suffit de six heures d’appli- cation de notre plus puissant appareil obtenir un pre- mier résultat très net. Deux mois après, une nouvelle de six heures fut faite, et encore une fois cin- quante jours après. Au sep- tième mois, la cicatrice de ré- pour série paration semblait assez solide (fig. 8). La figure 9 montre un vaste cancer épithélial bourgeonnant, à évolution maligne, entièrement | Il geon ne se reforma plus; enfin, les sécrétions | guéri huit semaines après la fin des applications. 1 bourgeon se tarirent. Et c'est là un fait à noter que, 2. Cancers sous-cultanés intéressant les tissus 908 D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER profonds. — Le malade que représente la figure Les figures 13 et 14 représentent l’envahisse- 11 avait un cancer infiltrant jusqu'à la paroi ment cancéreux des ganglions du cou dans un cas osseuse temporale, où il était adhérent (ce qui ; de cancer du pharynx et de l’amygdale inférieure. La constitue un ca- ractère grave) ; de plus, ce can- fusait la paupière infé- cer sous rieure. Un stylet pouvait pénétrer une fistule jusqu'à la partie moyenne de la paupière. L'œil élait en partie exorbité. Il fallait, dans ce cas, agir dans la grande pro- fondeur sans ir- par riter la surface et, par quent, utiliser le rayonneme nt consé- surpénétrant, composé en petite quantité de rayons très pénétrants 8 durs et y isolés. Un appareil de puissance moyenne, recouvert d'un filtre de plomb de 1 millimètre, fut appliqué en chaque point trois fois vingt-deux heures con- sécutives, une fois par semaine, soit en tout soi- xante-six heures. La réparation se fit en deux mois et demi. Ce résullal est par- ticulièrement in- téressant, car une opération auraitété accom- pagnée d'un dé- labrement consi- dérable destissus elvraisemblable- mentsuivie de la rétraction des paupières; ni la fulguration niles rayons X raient pu facile- n'au- ment agir dans la profondeur , tout en respectant l'œil et l'intégrité de la surface". Fig. 1. Fig. 8. .— Cancer épithélial grave, extensif, de la région temporo-frontale. g. 8. — Malade après traitement. — Pendant la durée du traitement, le malades’est transformé au point de vue de la santé générale. Fig297 Fig. 10. Fig. 9. — Volumineux cancer bourgeonnant. Fig. 10. — tal S semaines après le commencement du trailement. * Les trois malades précédents appartiennent au serviee de M. de Beurmann (hôpital Saint-Louis), qui voulut bien autoriser son chef de laboratoire, le Dr Degrais, à utiliser à leur profit les appareils de mon service. masse cervicale se développait rapidement et étouffait le ma- lade (malade a- dressé par le D° Récamier). Nous avons combiné, pour agir dans la gran- de profondeur, deux méthodes : celle du gros fil- trage ne laissant passer qu'un rayonnement surpénétrant et celle du feu croi- sé. Des appareils puissants, re- couverts de 2 et 3 millimètres de plomb, furent placés en opposition les uns aux autres, de facon à ce que les rayons déjà très pénétrants pussent se croiser dans la profondeur. Il devait en ré- sulter une action très puissante et une véritable inondation de la tumeur par la radio-activité. Quatre mois après le traite- ment, la tumeur était beaucoup moins saillante et réduite dans de grandes pro- portions. Le can- cer de la gorge, qui ne put être traité, finit par emporter le ma- lade. Mais voici (fig. 15 et 16) un des résultats les plus intéressants que nous ayons obte- nus. MMlemD: Brocq disait, à l’occasion de la présentation que nous avons faite du malade à la Société médicale des Hôpitaux, qu'il ne semblait pas qu'aucune méthode de traitement eût pu faire aussi bien. De fait, le résultat à été surprenant. Le cancer, développé au niveau de la région D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER 909 parotidienne, élait dur comme du plâtre et forte- | surtout lorsqu'il s'agit de cancers de la lèvre, sem- ment adhérent par sa base aux tissus profonds. Il blent montrer que le radium peut] donner parfois eût été impossible de songer à l'enlever chirurgi- | des résultats heureux. MM. Gaucher et Dominici calement. Il me- surait 5 centi- mètres de saillie et s'étendait sur un espace de 9 centimètres transversale- ment et de 12 centimètres ver- ticalement. La tumeur fut inondée deradio- activité par l'em- ploi de diverses méthodes combi- nées : introduc- tion d'un tubepar lesommet dela tu- meur, gros filtra- ge, feu croisé, mais en ayant soin de doser les rayons de telle sorte que l’action portât spé- | cialement dans la profondeur, fort peu en surface. Le traitement fut commencé vers la fin du mois | d'août 1908, et, vers la fin du mois de janvier | suivant, le résultat était celui que représente la fi- gure 16. Il reste sur la face deux ou trois bosse- lures fibreuses dures, mais qui ne semblent plus évoluer etnesont quele reliquat de la régression de ce vaste cancer. Le malade a été revu le 30 septem- bre dernier, et, à cette date, l’état s'était maintenu dans de bonnes conditions. un 3. — Tumeurs malignes can- céreuses graves par leur siège. A la lèvre et aux muqueuses en général, à la langue, au pharynx où les Iymphatiques sont intéressés si facilement et de bonne beure, le traitement est particulière- ment délicat etaléatoire’; cependant, quelques faits, Fig. 11. Rig42° Fig. 11. — Cancer grave, très profond, intéressant la paroi osseuse qui était décollée, et fusant sous la paupière inférieure. Fig. 12. — Après le traitement, les ulcérations Se sont cicatrisces. Fig. 13. Fig. 14. Fig. 43. — Ænvahissement cancéreux des ganglions sous-maxillaires, secon- daïre à un cancer de l'amygqdale. Fig, 44. — Etat cinq mois après le début du traitement. — La tumeur a diminué dans de grandes proportions. Quelques mois après, le malade a succombé par suite du développement du cancer de l’amygdale. effets heureux du radium., ont insisté sur l'utilité d'agirsur les tissus d’une facon douce el alténuée. Les figures 17 et 18 montrent un épithéliome de la lèvre qui se présentait avec l'apparence d'ex- trême gravité; il élait parsemé de fistules et d'exca- valions, il infil- trait la moitié su- périeure de la lèvre. Parla méthode du feu croisé (un appareil appli- qué en dedans, un autre au dehors), combinée au filtrage moyen (6/10 de millimètre de plomb), et en agissant lentement et patiemment, nous sommes arrivés à la guérison apparente de cette lèvre. Les dépressions qu'on constate sur la figure 18 sont des pertes de substances ci- catricielles ; elles ne sont plus le siège d'infiltra- tion cancéreuse. Dans ces cas, une surveillance très étroite doit être faite pour dé- pister la moindre velléité de ré- cidive. Pour qui con- nait la gravité de ces cancers et la facilité avec la- quelle se font les récidives, même l'extirpa- lion chirurgica- le, un tel résul- tat ne manque après pas d'un certain intérêt. J'ai observé un résultat favorable sur un cancer de la voûte palatine. Dans d'autres régions, on peut signaler certains Le] Ï [e] FT 910 D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉRAPEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER Le 25 mai dernier, nous avons exposé à l'Académie de Médecine des résultats intéressants obtenus sur date de novembre 1907; il se maintient en bon Nous pensons qu'un cancer du col au début pourrait régresser par le radium; mais nous ( | des tumeurs malignes du sein. L'un de nos cas | n'avons pas voulu tenter l'expérience, ayant tenu | état et, cepen- dant, Ja mala- de est très âgée et sa lésion can- céreuseétaitcon- sidérée comme inopérable lors- que nous l'avons entreprise. La figure 19 montre un can- cer du sein avec rétraction du ma- melon; le résul- lat indiqué par la figure 20 a été obtenu après quatre mois de 2 Fig. 15. Fig. 16° traitement. Il £ à Fig. 45 et 16. — Cancer de la region parotidienne. — La lumeur dure reste de la du- faisait corps avec la tète. Au cours du traitement, elle devint mobile sur reté à la palpa- sa base, à mesure qu'elle diminuait de volume. tion, mais le ca- par serupule à envoyer directement ces cas aux soins de la chi- rurgie. Il est de toute évidence que, pour des lé- sions d’une aussi extrême gravité, il ne faut agir avec le radium que si la chirur- gie,pour quelque raison ne peut intervenir. Il est évident aussi qu'une fois les cancers ex- tirpés, le radium pourra être, avec juste raison, em- ployé dans le but d'empêcher ou de retarder les récidives et ractère de malignité ne semble plus exister. | d'aller détruire les germes éloignés qui auraient Nous avons traité ainsi une quinzaine de malades, | pu ne pas être extirpés. de ceux qui ne voulaient ou ne pouvaient pas être : DEnQ (QT AESE : « opérés, et nous avons la parfaite conviction des S 4. — Tumeurs malignes de nature diverse excellents services d'ordres divers que peut rendre | (Sarcomes, Mycosis fongoïde, etc.). le radium dans certains cas de cancers du sein *. | Plusieurs cas de sarcome, de lymphosarcome, Il en est de mème pour les cancers de l’uté- | de lymphadénome (Hodgkins’s disease), ont rétro- rus, du rectum. Dans un cas, un cancer de l’uté- rus inopérable a pu être rendu opérable. D'au- res, qui sécré- taient abondam- ment du pus et du sang, ont été g, séchés après plusieurs appli- cations de dou- ze heures de rayons très pé- Mie re Fig. 18: Fig. 17 et 18. — Cancer épithélial grave de la l'vre inférieure, avant et après traitement par le radium. nétrants ; il en est résulté pour les malades un cédé très heureu- sement, àce point que ces dernières lésions, comme les lymphadéno- mes, semblent être de toutes les tumeurs mali- gnes celles qui régressent Île mieux sous l'in- fluence du ra- dium. Une tu- meur siégeait au côté droit du cou chez une jeune Anglaise de tren- te-deux ans. Elle soulagement et une survie fort appréciables. | avait été opérée déjà deux fois, et les rayons X 1 Nous pensons que, dans les ‘cas peu profondément | chirurgicalement toute la chaine ganglionnaire sous-pec- infiltrés dans lesquels la malade ne voudra pas étre amputée | {orale et axillaire; 20 traiter le sein même par le radium du sein, on pourra procéder de la facon suivante : 10enlever | à doses intenses en feu croisé, gros filtrage. D' LOUIS WICKHAM — L'ACTION THÉI APEUTIQUE DU RADIUM SUR LE CANCER 911 avaient été employés; à la troisième récidive, le chirurgien n'osa plus tenter l'opération, car la base de la tumeur avait envahi les gros vaisseaux el nerfs du cou. L'étude des pièces extirpées avait montré qu'il s'a- gissait d'un lym- phosarcome La malade muait difficile- ment la tête, le cou étant forte- ment de volume. En employant re- augmenté les ments surpéné- trants et des do- ses spéciales de radio-activité, le cou se dégagea peu à peu et la tumeur régressa sans que la peau, saine du reste, fût intéressée sérieusement. Il suffit de deux séries de quinze jours de traitement, à six semaines d'intervalle, pour obtenir une appa- rence de guérison très remarquable, là où au- eun autre procédé de traitement n'aurait, semble- t-il, obtenu au même titre un semblable résultat. Mais voici un cas plus intéres- sant peut-être. Il s'agit d'un ma- lade du D' Pé- reire, qui fut opé- ré cinq fois d’une tumeur du de- vant de l'épaule ; après chaque opération, la tu- meur s'obstinait à récidiver. Il s'agissait d'une tumeur à évolution gne » développée dans la région de l'épaule rayonne- Fig. 19. Fig. 19 et 20. — C Fig. 20. — Trois mois après, le mam complètement modifiée: elle n'est une dureté fibreuse. L'évolution m mali- Fig. 21. Fig. 21 et 22. en plusieurs tu- Fig. 24. — meurs. Fig. 22. — Etat trois mois après le Le D° Péreire nous confia le traitement de la sixième récidive, représentée par la figure 21. * Etude histologique faite par le Dr Gastou, de Paris, sur une coupe faite par le Dr Rozelaar, de Londres, Fig. 19. — Le mamelon est rétracté, la tumeur est en haut et à gauche du sein. Elle est rouge, tendue, prête à s'ulcérer. — Tumeur recidivante de Les sept tumeurs saillantes se détachent sur un fond épais, enflammé, infiltré de tissu malin. Les tumeurs furent chacune traitée à part par la 3 méthode du « feu croisé » et du filtrage moyen (2 à 3 dixièmes de millimètre de plomb), et très vite l’évolution aiguë dont elles étaient le siège fut | arrêtée ; puis les masses lentement se résorbèrent, si bien qu'au deuxième mois la guérison ap- parente était ob- tenue ; aucune récidive ne sem- ble développement. en voie de Enfin, des tu- meurs Sarcoma- teuses ouvertes par une large et Fig. 20. profonde ancer du sein gauche. inCi- sion chirurgica- le peuvent être elon est moins rétracté. La tumeur s'est {rès heureuse- plus apparente. A la palpation, on sent SL aligne semble arrêtée. ment modifiées par l'introduc- tion detubes de radium au centre même de la lésion. | Un large épulis (ostéo-sarcome de la mâchoire) | a entièrement régressé sous l’action du feu croisé. | Nous avons traité avec succès plusieurs cas de | mycosis fongoïde. Chez un malade du Professeur | De Lapersonne et du D' de Beurmann, malade qui était atteint mycosis fongoi- de de la pau- pière, les rayons du radium rent, sous la di- rection du D' De- de eu- grais, un effet très certain el rapide. NI: CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES. Résulte-t-il de tous ces faits que le radium doive considéré Fic être r 22. épaule. commeun moyen thérapeutique auquel il faille avoirtoujoursre- cours ? Non point certes, et il faut se garder des exagéralions; nous n'en sommes qu'à la période de lobservation des faits, et il serait mal avisé, dans un sens comme dans l’autre, de poser actuelle- ment des conclusions générales. Les faits que nous début du traitement. 912 A. BÉHAL — L'OEUVRE DE LA CHIMIE CONTRE L'OEUVRE DE LA NATURE venons de rapporter sont intéressants, il est vrai, | mais il faut savoir choisir les cas à traiter, et les résultats seront en rapport avec la sagacité et l'ex- périence du radiumthérapeute. Il convient toujours, lorsqu'on prend conscience de la haute valeur d’un traitement nouveau, de procéder avec discernement, alin d'éviter le risque de priver les malades d'un autre traitement qui aurait pu se montrer supérieur, et surtout du secours de la chirurgie. | C'est donc seulement après avoir pesé avec soin les diverses conditions dans lesquelles se présente une tumeur maligne qu'on peut se permettre de prendre un parti. Il ne faut jamais perdre de vue, en ce qui concerne le pronostie, que le radium, lorsqu'il agit, ne le fait que localement et qu'on ne lui reconnaît encore aucun rôle dans les infections générales et dans les métastases éloignées, et aussi qu'il ne doit être employé dans les grands cancers qu'avec prudence, afin d'éviter les toxémies qui pourraient se produire. Il ne peut avoir quelque | prétention que dans les cancers accessibles ou ren- dus accessibles, en tenant compte du pouvoir de pénétration des rayons. Enfin, il faut toujours son- ger à la possibilité des récidives. Mais il ressort des résultats que nous avons obte- nus que, lorsqu'une tumeur maligne ne laisse aucun espoir, soit par son siège, soit par son dé- veloppement, c'est-à-dire lorsqu'elle est hors de la portée de toute autre thérapeutique, on est autorisé à s'adresser au radium. C’est dans cet esprit qu'ont élé traités, non sans bénéfice évident, des cancers in- opérables des intestins, du rectum, de la prostate,etc. Lorsque le radium peut être conduit sur la tumeur à la faveur d’orifices naturels ou artificiels, il est rare qu'on n'obtienne un certain soulagement, soit que les douleurs diminuent, soit que les sécrétions et les hémorragies se tarissent. Dernièrement, MM. Guisez et Barcat ont obtenu l'amélioration d’un cancer de l’æsophage en con- duisant, au moyen d’un cathéter, un tube de radium « au contact de la tumeur. Le radium, dans bien des cas, pourra aider la chirurgie, soit que celle-ci « fasse la voie » au radium, soit qu'elle s’en serve pour compléter une opération ; et, dans cet ordre d'idées, on peut ima- giner toute une série de combinaisons. En matière de cancer, je considère le radium surtout comme un appoint destiné à renforcer la chirurgie, un procédé destiné le plus souvent à se combiner aux autres. Bref, à l'heure actuelle, certains des résultats que le radium a obtenus sur les tumeurs malignes ont été assez intéressants et probants pour éveiller très vivement l'attention du monde médical et pour permettre d'espérer plus encore dans l'avenir, lorsqu'on connaîtra mieux les techniques et qu’on possédera une plus grande quantité de radium. Mais là n'est pas la seule utilisation du radium. Les résultats que nous avons obtenus sur d’autres lésions, notamment les angiomes ou taches de vin saillantes, les chéloïdes etles eczémas rebelles, ré- sultats qui mériteraient un autre article, ont acquis aux rayons du radium droit de cité dans le domaine de la thérapeutique; et il est agréable de recon- naître que l'ensemble de cette question de la radium- thérapie (la merveilleuse découverte du radium par P. Curieet M"° Curie, la construction d'appareils perfectionnés, les applications thérapeutiques) est œuvre presque entièrement francaise. D' Louis Wickham, Médecin de Saint-Lazare, Directeur des recherches en Pathologie externe au ‘‘ Laboratoire biologique du Radium ”. L'ŒUVRE DE LA CHIMIE CONTRE L'ŒUVRE DE LA NATURE Il n'est pas sans intérêt, au moment où la Chi- mie fait de nouvelles conquêtes industrielles en reproduisant dans ses laboratoires des produits extraits jusque-là des plantes ou des animaux, de chercher quel contre-coup économique ces décou- vertes peuvent avoir sur les produits naturels. Le travail de synthèse industrielle fournit des corps qui tantôt sont identiques aux principes natu- rels, tantôt, au contraire, ne les rappellent que par une seule de leurs propriétés. Le chimiste est maitre de son travail; il dispose, 0 à volonté, de la chaleur et du froid, de l’eau et de la sécheresse; il est sûr d'aboutir en un temps déterminé avec des appareils de capacité voulue, avec une main-d'œuvre appropriée à une produc- Lion fixe. Combien il ea est autrement avec les produits végélaux; suivant que le soleil aura été plus ou moins avare de ses rayons, suivant que les pluies auront été plus ou moins abondantes, la quantité etla qualité de la récolte s'en seront ressenties et les produits obtenus ne seront point comparables. Une vigne ne fournit pas chaque année un vin de même teneur alcoolique, de même bouquet, ni de même valeur commerciale. | A. BÉHAL — L'OEUVRE DE LA CHIMIE CONTRE L'OEUVRE DE LA NATURE 913 Le travail naturel donne une production aléa- toire comme quantité et comme qualité. Les fac- teurs principaux en échappent à l'homme et ne sont point sous sa dépendance, De là découle cette conclusion que la fabrication synthétique des pro- duits naturels l'emporte, au point de vue de la sécurité de rendement, sur la fabrication natu- relle. D'autre part, les produits naturels sont d'autant plus chers que la production en est moins abon- dante, ou la demande plus active. Pour le produit chimique, c'est l'inverse qui se produit. Pouvant être obtenus en quantités indéfinies, ils permettent la réduction des frais généraux, l'emploi des appa- reils de grande capacité, la simplification de la main-d'œuvre, et les prix s’abaissent d'autant plus que la vente est plus grande. L'utilisation de cer- tains résidus concourt, de plus, à cet effet. L'obtention des produits naturels est sous la dépendance du temps. Certains proviennent de plantes annuelles, mais d’autres, au contraire, exigent un nombre d'années considérable avant de pouvoir donner des rendements rémunérateurs. Beaucoup d'arbres ne produisent des fruits que bien longtemps après avoir été semés et ne sont exploi- tables comme bois que plus tard encore. Le cam- phrier ne commence à être riche en camphre qu'à l'âge de quarante ou cinquante ans. L'obtention du produit synthétique est, au contraire, toujours très rapide, quelques heures ou quelques jours au plus. Elle est, en général, fonction du nombre des appa- reils et de la main-d'œuvre et peut être amenée pratiquement à un minimum de temps. Ainsi donc, avec le produit industriel, on peut compter sur une amélioration constante des rende- ments et un abaissement continu des prix, et par là encore l’œuvre de la Chimie l’emporte, pralique- ment, sur l'œuvre de la Nature. Mais le produit synthétique est-il identique au produit naturel? Oui et non. Oui, si l’on considère isolé de la plante l’un de ses constituants. Ainsi sont identiques l’alizarine synthétique et celle que l’on peut extraire de la garance ; l'indigotine et le produit retiré de l’indigo; la vanilline et le givre de la vanille ; la coumarine synthétique et celle que l’on peut retirer de la fève tonka. Non, si l'on compare le produit chimique synthé- tique à l'extrait naturel qui contient ce même prin- cipe. C’est qu'en effet il n’est pas d'exemple de corps naturels fournis par une plante où un animal qui soient constitués par un corps chimique à l’état de pureté. La nature nous offre toujours des mélanges à l'état complexe. Si, pour mettre au travail les cellules, le soleil est capricieux, celles-ci le lui rendent en faisant à côté, du travail principal de petits hors-d'œuvre, qui parfois, petits chefs- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. d'œuvre, deviennent ce qu'il y a de plus précieux dans le tout. La garance, en plus de l’alizarine, renferme de la purpurine, matière colorante comme l’alizarine, mais dont la teinte n'est pas la même. L'indigo naturel contient, à côté de l'indigotine, de l’indirubine et des matières colorantes indéter- minées. Dans la vanille, il y a environ 2 °/, de vanilline identique à celle que l’on fabrique à partir du gi- rofle; les 98 °/, qui restent ne sont pas unique- ment des matières ligneuses el inodores, mais aussi des substances qui concourent au bouquet total, et point n’est besoin d’être gourmet pour dis- tinguer une crème ou une glace parfumée à la va- nille d'une autre parfumée à la vanilline. On pourrait multiplier ces exemples et en tirer la conclusion que l'œuvre de la cellule est complexe, qu'à côté du produit que nous considérons comme utile: matière colorante, tannin, parfum ou alca- loïde, elle fournit des isomères, des homologues, des produits d’oxydations, des produits de réduc- tions, des éthers, dus à des réactions successives ou concomitantes. IT Mais voyons quel peut être le retentissement d'une fabrication synthétique sur l'avenir d’un pro- duit naturel. Le nombre de ces reproductions industrielles de constituants des plantes ou du corps des animaux n'étant pas très considérable, on peut vite les passer en revue. 1. Garance. — L'extrait Hinctorial de cette plante est un mélange d’alizarine et de purpurine, avec prédominance de la première de ces substances. Toutes deux étant produites à meilleur compte par la synthèse, la culture de la garance à été abandonnée. Ce ne fut point là un mal; à la place, on planta de la vigne, qui fut d'un meilleur rapport jusqu'au jour où commenca la surproduction du vin. 2. Indigotine artificielle et indigo naturel. — La majeure partie de l'indigo est constituée par de l'in- digotine, identique au produit synthétique; les quan- tités de matières accessoires que renferme l'indigo naturel ne paraissent pas offrir d'avantages dans la fixation de l’indigotine pure sur les tissus. Là, la lutte n’est pas terminée, et l'on ne sait encore si elle finira par l'établissement d'un équi- libre ou par la disparition d'un des deux concur- rents. Il est cependant vraisemblable que la culture des diverses plantes productrices d’indigo devra cesser à un moment donné, faute d'être suffisam- 929* 914 ment rémunératrice. Et cela montrera, une fois de plus, que les ressources de la Chimie sont pour ainsi dire inépuisables, tandis que celles de la Nature sont limitées. Sans doute, dans certaines industries, comme celle du sucre, on à pu, par la sélection, obtenir des betteraves de plus en plus riches en sucre, et, d'autre part, les méthodes physiques et chimiques ont permis une extraction de plus en plus com- plète de ce produit. Mais on apercoit facilement la limite des améliorations possibles. Au contraire, la méthode chimique peut, pour l'indigo, arriver à la perfection, et, l’indigotine étant pratiquement insoluble dans l’eau, le rende- ment en matière colorante peut être intégral. Les améliorations dans la culture des différentes plantes produetrices et dans le traitement du suc de ces plantes pour en réaliser l'extraction complète sans allérer la nature des principes tinctoriaux pourront-elles un jour faire rattraper à l'indigo de l'Inde l'avance que l’indigoline chimique prend de plus en plus ? Nous en doutons. 3. Campbhre nalurel et camphre srvnthetique *. — La question se pose encore de la même facon : Le camphre synthétique, à part son pouvoir rotatoire, est identique au camphre naturel et peut le remplacer dans toutes ses applications. Son apparition sur le marché a ramené au laux normal le prix du camphre naturel. Comme tous les produits chimiques, le prix de la production du camphre synthétique ira sans cesse en s'abaissant, et, lorsque les sacrifices nécessaires pour l'installation de toute nouvelle fabrication auront été amortis, il n’est pas téméraire de dire que le camphre synthétique tuera le eamphre naturel, Au contraire, dans toute culture, les frais les plus considérables résultent de la main-d'œuvre, et la poussée constante du prolétariat vers un avenir meilleur feront que le prix de cette main-d'œuvre s'accroîtra de plus en plus. L'utilisation des sous-produits, les améliorations constantes que l’œuvre chimique apportera à la fabrication du camphre Synthétique feront qu'il l'emportera sur le produit naturel. 4. Vanille et vanilline. — Ici la question se pré- sente autrement. Nous nous trouvons en présence d'un produit industriel qui n’est que l’un des cons- ! Dans les synthèses que nous venons d'envisager, les produits qui servent de point de départ : l'anthracène et la naphtaline, sont extraits du goudron dehouille, Dans d'autres, au contraire, comme le camphre, la vanilline, ce sont des produits naturels qui sont utilisés pour leur préparation : essence de térébenthine, essence de girofle, et ils entrainent uvec eux les aléas qui leur sont inhérents. A. BÉHAL — L'OEUVRE DE LA CHIMIE CONTRE L'OEUVRE DE LA NATURE tituants du produit naturel, et ne possède, par suile, qu'une partie de ses propriétés. La vanilline industrielle est bien, en effet, iden- tique à la vanilline que l'on peut extraire de la gousse de vanille et d'un grand nombre d'autres produits naturels. Mais la vanille utilisée en nature constitue un bouquet que ne donne pas la vanilline. Elle renferme, en effet, à côté de cette dernière, loute une série de produits odorants encore indéfinis chimiquement, mais qui concou- rent à lui donner cette finesse de parfum que la vanilline, corps pur mais unique, ne peut avoir, et que les bonnes espèces de vanille possèdent complètement. On peut, jusqu'à un certain point, dire qu'entre le parfum de la vanille et celui de la vanilline il y a la mème différence qu'entre un alcool de grains ou de betteraves bon goût et une fine champagne de marque. La vanilline est le parfum du prolétaire, la vanille celui du riche. Il s'ensuit qu'ici il n’y a plus lutte entre le produit de la nature et celui de l'industrie. Tous deux s'adressent à des consommateurs diffé- rents ; ils ne se font point concurrence et peuvent vivre l’un à côté de l’autre, comme il est facile de le démontrer. L'emploi de la vanilline ne s’est point, en effet, opposéau développement croissant de la production de la vanille’ ; tandis qu'en 1880 les colonies fran- caises exportaient 18.838 kilogs de vanille, la production était en 1890 de 50.231, en 1900 de 95.760 kilogs ; enfin, en 1908, elle atteignait 215.391 kilogs Ainsi, en vingt-huit ans, la produc- tion de la vanille a crù dans la proportion de 112; Quant aux prix, régis par la règle de l'offre et de la demande, ils varient chaque année : de 1880 à 1890, ils étaient en moyenne de %5 francs le kilog; de 1890 à 1900, de 33 fr. 60 ; de 1900 à 1908, de 46 fr. 50. Le prix moyen le plus bas a été 16 franes (1881, 1883, 1888), le prix le plus haut 60 francs (1901, 1902, 1907). Pendant ce temps, la vanilline, dont le prix était de 1.800 francs en 1880, s'abaissait progressive- ment pour atteindre le prix de 45 francs le kilog à l'heure actuelle. On voit nettement que ces deux produits ne rem- plissent pas le même but ; la production de la vanille va sans cesse en grandissant et son prix croit également ; la production de la vanilline va aussi en grandissant, mais son prix va sans cesse en s'abaissant et n'est plus aujourd'hui que le qua- rantième de ce qu'il était en 1880. 1 M. Haller, dans son Rapport de l'Exposition de 1900, a exposé les mêmes conclusions. su A. BÉHAL — L'ŒUVRE DE LA CHIMIE CONTRE L'OŒUVRE DE LA NATURE U15 5. Muse artiliciel et muse naturel. — Nous avons de leurs prédécesseurs. Le travail fait dans le labo- là encore un produit synthétique qui ne possède qu'une des propriétés du produit naturel, et, comme dans l'exemple précédent, il n'y a pas eu de concurrence commerciale. . L'exploitation industrielle des muses artificiels, dont la puissance odorante est cependant énorme, n'a pas eu de retentissement sérieux sur les cours du muse naturel. Le kilog de muse Tonkin était coté en 1882 : 3.400 francs ; en 1891 : 3.800 francs ; en 1902 : 3.200 francs : il esten 1909 de 3.500 francs. Ici, on ne peut p&s établir de comparaison entre la production des deux articles. Le muse naturel, résultat d'une chasse el non d’une culture ou d'un élevage, lend, croyons-nous, à se faire un peu plus rare, comme les fourrures, car l'appat du gain pousse les chasseurs à détruire sans réserve. Enfin, constatons que la synthèse de l'ionone, corps qui possède en partie le parfum dela violette, mais en partie seulement, n'a pas nui à la culture de la fleur, dont la production à été sans cesse en croissant, en même temps que les prix devenaient plus fermes. III Ainsi donc, quand le produit synthétique n'est qu'un succédané inférieur en qualité, il est sans influence sur le développement du produit naturel. Mais quand, au contraire, les deux concurrents ont des propriétés identiques, l’œuvre de la Chimie est destinée tôt ou tard à supplanter l'œuvre de la Nature sur le terrain commercial. L'effort chimique raisonné acquiert, en effet, chaque jour plus de valeur et finit par l'emporter sur les forces naturelles soumises à des fluctuations que l’on ne peut pas régenter. Toutefois, un facteur peut intervenir et modifier toutes les prévisions : c'est la politique, et nous en avons précisément un exemple en ce moment avee ce qui arrive pour la vanille et la vanilline. Pour protéger la vanille, ses importateurs ont sollicité des Pouvoirs publies l'imposition, sur la vanilline, d’une taxe de consommation de 220°/, ad valorem. Si elle était admise, la demande d’un droit aussi prohibitif et excessif serait de nature à révolutionner l'industrie chimique et ses répercus- sions Seraient incalculables. Laissant de côté, pour un instant, les consé- quences commerciales possibles, surtout au point de vue international, je n'envisagerai ici que quel- ques points plus élevés de l'éternel problème du travail intellectuel et du travail manuel. Les synthèses chimiques ne peuvent être entre- prises qu'après des séries de longues recherches, faites par des hommes éminents, utilisant non seulement leurs propres travaux, mais encore ceux ratoire doit ensuite être transporté sur le terrain industriel, et il faut aussitôt trouver de nouvelles compétences et faire des sacrifices pécuniaires considérables dont le résultat n'est rien moins que certain. Si l’on arrive ainsi au point de vue com- mercial à des résultats probants, l'inventeur devra rester sur la brèche pour améliorer son procédé el lutter commercialement contre ceux qui peuvent être trouvés par d'autres. Si le succès récompense de tels efforts, il a été mérité et il ne doit pas exciter de jalousie, d'autant plus que, souvent, il devient le point de départ de créations nouvelles par un sacrifice des bénéfices déjà obtenus. On ne comprendrait donc pas que, pour prolé- ger la récolte d'un produit naturel, un Gouverne- ment intervienne en frappant de droits plus ou moins élevés le produit synthétique et qu'il lésät les intérêts légitimes de l'inventeur et de l'exploitant. Si l'on entrait dans cette voie, on ne voit pas pourquoi on ne frapperait pas bientôt de taxes plus ou moins lourdes toutes les œuvres de l’art et de la pensée, où, souvent, le gain obtenu semble dispro< portionné avec l'effort fourni! I pourrait sembler naturel que, dans un état démocratique, on imposätces productions, produits de luxe au premier chef, qui ne semblent desti- nées qu'à des élites. Mais de telles mesures seraient redoutables pour la nation entière. Ce qui fait, en réalité, la fortune et le renom d’un pays, ce sont les œuvres de ses savants, de ses ingénieurs, de ses artistes. Tarir la source des bénéfices que ceux qui ont créé ont le droit d'attendre de leur création, ce serait risquer d'arrêter la production de ces œuvres elles-mêmes. À mon sens, je ne concois qu'une taxation légitime de certains produits natu- rels ; c'est celle qui a pour point de départ l'intérêt national. La protection du blé pour veiller à ce que la France puisse se suffire à elle-même et celle d'autres aliments aussi indispensables, sont choses admissibles. En dehors de ces cas exceptionnels, le Gouvernement ne doit intervenir que pour assurer l'essor de son industrie. Protéger la main-d'œuvre nationale, en permettant en France la fabrication des produits fournis par l'étranger, c'est développer la richesse du pays et contribuer à la tranquillité intérieure. Mais s'il se trouve qu'une culture de produits qui ne sont point indispensables à la vie de la nation n'est pas prospère, il n'y à qu'à la supprimer et la remplacer par une autre plus rémunératrice. La protéger par des droits qui lui donnent une existence précaire, c'est frapper la majorité au profit de quelques-uns et faire une œuvre antidémocratique. A. Béhal, Professeur de Chimie à l'Ecole supérieure de Pharmacie ce Paris. 916 E. ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ Les Glossines, ou mouches tsé-tsé, ont conquis en Biologie et en Pathologie coloniale une place de premier ordre depuis 1895. Elles sont connues des entomologistes depuis un temps beaucoup plus long‘; mais ce sont les remarquables travaux de Bruce”, au Zoulouland, qui ont attiré l'attention d'une manière formelle sur leur histoire et sur leur rôle dans la transmission des trypanosomiases africaines. L'intérêt qui s'attache à l'étude de ces mouches est double, à la fois d'ordre scientifique et d'ordre économique. Personne n’ignore aujourd'hui l'étendue des ravages que ces mouches redoutables exercent en Afrique, et les pertes énormes en hommes et en bestiaux que leurs piqüres occasion- nent chaque année aux nalions européennes inté- ressées à l'avenir colonial de ce continent. On peut dire que les tsé-tsés représentent l’un des pires fléaux contre lesquels devra pendant bien longtemps encore se heurter la civilisation dans les régions équatoriales et tropicales africaines. Comment vivent ces mouches; quel est leur rôle dans la transmission de trypanosomes pathogènes; y a-t-il quelque espoir d'arriver à les détruire et par quels moyens : ce sont là des problèmes à l’ordre du jour et qui ont attiré l'attention d'un nombre considérable de chercheurs. La Mission française qui fut organisée en 1906, par la Société de Géographie”, pour l'étude de la maladie du sommeil au Congo a orienté dans cette direction une bonne parlie de ses efforts. Ce sont les résultats obtenus par elle que je résumerai ici dans deux articles successifs : le présent, qui à trait à la biologie spéciale de la Glossina palpalis; l'autre, aux rapports que présente cette mouche avec les différents types de trypanosomes africains de l’homme et des animaux. IL — HABITAT. La Glissina palpalis est une mouche de couleur sombre, de8 à 10 millimètres de longueur, dont les ailes, au repos, sont repliées sur le dos l’une sur l’autre, comme les lames d'une paire de ciseaux 1 Wiedemann a fondé le genre et décrit la première espèce en 1830. ? J‘urther report on Tsetse Îy disease or Nagana in Zulu- land; Londres, 1896. # Cette Mission fut concue et organisée par M. Le Myre de Vilers, président d'alors de la Société; alimentée par les dons de souscripteurs diver<, parmi lesquels le Ministère des Colonies, le Gouvernement du Congo et d# l'Afrique Occi- dentale, les grandes Compagnies concessionnaires congo- laises, elle a été placée sous le patronage scientifique de l'Institut Pasteur et du Muséum. Les membres de la Mission, (fig. 1),et dont la trompe aiguë est dirigée horizon- talement en avant, à la face inférieure de la tête. Ces deux derniers caractères, celui de la position des ailes et celui de la trompe, sont communs à toutes les Glossines; les caractères qui permettent de différencier la palpalis des autres espèces du genre Glossina se rapportent en grande partie à des détails minimes de coloration; mais ces diffé- rences s'accusent bien davantage et se précisent lorsqu'on fait appel à l'examen des particularités biologiques saillantes de cette mouche. La palpalis est exclusivement africaine, comme toutes les Glossines. Son aire de dispersion (fig. 2) couvre deux larges bandes, l’une centrale, l’autre côtière, mais exclusivement occidentale. La bande centrale, qui se limite à l’est vers le 36° degré de lon- Fig. 1. — La mouche tsé-tsé. — 1. Glossina palpalis vue de dos, au repos. — 2. Larve au sortir de l'utérus. — 3. Pupe de Glossina palpalis. gitude et ne dépasse guère les grands lacs, s'arrête vers le nord au 7 parallèle, vers le sud ‘au 14°. Le long de la côte, la Glossine se rencontre depuis l'embouchure de la rivière Couanza, dans l’Angola, jusqu'aux abords du Cap Vert, point extrème de son extension. La limite de cette zone côtière vers l’in- térieur est marquée sensiblement par le 14° paral- lèle. Ainsi la mouche remonte d'environ 5° plus haut vers le nord dans la région du Soudan Nigé- rien que dans l'Afrique du Centre. Les caractéristiques climatériques de cette zone d'habitat sont d'abord une température assez constante, dont la moyenne oscille au voisinage de 95° C., et ensuite une humidité atmosphérique con- sidérable, constamment supérieure à 70 °/,. C’est le climat de la grande végétation forestière. En effet, la mouche se trouve localisée d'une manière presque constante sous les ombrages des futaies très denses qui se développent le long des rives des cours MM. les Drs Martin et Lebœuf, des troupes coloniales ; Rou- baud, agrégé des Sciences naturelles, et Weiss, aide-natura- liste, ont elfectué leurs recherches de 1906 à 1908 dans un laboratoire permanent installé à Brazzaville. ét. ous: tt dé ttotlbons — do. us à E. ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ d’eau et qui constituent la formation bien connue des « galeries forestières ». Il est exceptionnel de rencontrer la palpalis en régions découvertes; et, par là, sa biologie se distingue complètement de celle de ses congénères qui infestent les savanes soudanaises, telles que la Glossina morsitans. La palpalis est une mouche d'ombre, qui craint les steppes arides, ouverts au grand soleil. Dans une zone d'habitat donnée, le long des rives d'un cours d'eau boisé, la distribution de la mouche peut être très uniforme; d’autres fois, au contraire, on cons- tate que l'insecte ne se rencontre que par places; il fait défaut partout ailleurs. J'ai donné le nom 917 le plus généralement avec des changements impor- tants survenus dans les conditions hygrométriques de leur gite : les mouches s’écartent en saison sèche des petits cours d’eau dont le cours s'inter- rompt, simplement même lorsqu'il vient à se ralen- tir. Cette notion des gites temporaires nous amène, par suile, à concevoir l'existence de véritables migrations des mouches, corrélatives elles-mêmes des variations survenues dans le régime hydrogra- phique de certains territoires, suivant les saisons. Ainsi se manifeste également, sous une forme qui de gites à ces zones privilégiées où sta- tionne la Glossine. L'observation montre que ces gites sont avant toul dépendance des con- ditions de nutrition capables d'assurer à l'insecte sa tance : les mouches se groupent aux en- sous la subsis- droits où fréquentent à des heures régu- lières soit les gros animaux domestiques ou sauvages, soit les | | hommes qui viennent d'eux - mêmes, aux points d'eau, s'offrir DE LA à ses piqüres. C'est ainsi qu'on GLOSSINA PALPALIS observe plus particu- lièrement la Glossine au voisinage des gués Fig. 2. des cours d'eau, aux alentours des fosses à manioc, aux places de bain (fig. 3), aux sources où les gens des villages vien- nent puiser de l'eau, etc. Ces gites « au voisinage de l'homme » sont d’un intérêt tout particulier pour la prophylaxie de la trypanosomiase humaine. Certains gites se maintiennent toute l’année avec une constance très remarquable dans la fréquence des mouches qu’on y peut observer. Il en est ainsi, par exemple, sur les bords des grands cours d’eau dont le cours ne s'arrête jamais. Ce sont des gites permanents. D'autres fois, au contraire, les Glos- sines ne se rencontrent que pendant une partie de l’année et disparaissent dans l’autre; on peut cons- tater alors que cette disparition temporaire coïncide AIRE DE DISPERSION — Aire de dispersion de la Glossina palpalis. se précisera plus tard, la sensibilité toute partieu- lière de l'insecte vis-à-vis de certains facteurs cosmiques qui jouent un rôle important parmi les caractéristiques physiques de sa zone d'habitat. On arrive à des conclusions plus décisives encore en étudiant par la voie expérimentale l'influence de ces facteurs sur la nutrition et la reproduction de notre Glossine. IT. — NUTRITION. Toutes les espèces de Glossines se nourrissent exelusivementdesang,lesmälescommeles femelles; elles échappent ainsi à cette règle, presque géné- 918 E. rale chez les Diptèreshématophages, d’après laquelle les femelles seules sont douées d'appétits sangui- naires, tandis que les mäles vivent exclusivement de sues végétaux. Bien plus, la constitution de la trompe des tsé-tsés ne leur permet pas d'aspirer le Fi. 3. — Gite «x Glussina palpalis au voisinage de l'homme à Brazzaville (place de bains). liquide nourricier en dehors du torrent circulatoire : lorsqu'on présente à des Glossines à jeun du sang non coagulé dans un vase, elles sont incapables de l'ingérer : les mouches tsé-ts5 ponctionnent direc- tement les vaisseaux, et c'est la pression sanguine Jle-méme qui détermine l'ascension du liquide ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ dans leur trompe. Ce sont donc des Diptères étroi- tement adaptés à un régime parasitaire chez les Vertébrés, encore qu ils aient conservé vis-à-vis de leurs hôtes, par leurs allures, une indépendance absolue. Toutes les proies vivantes, pourvu qu'il s'agisse de Vertébrés, conviennent aux Glos- sines. Elles piquent aussi bien les Poissons, les Batraciens et les Reptiles, même les Cro- codiles, que les Mam- mifères ou les Oi- seaux. Le plus souvent, la piqûre durepeuet reste à peu près insensible. En moins d'une demi- minute, on voit l'in- secte gonflé de sang quitter la place et s'en- voler. D'autres fois, au contraire, un temps beaucoup plus long est nécessaire, et la réae- lion douloureuse pro- duite par la pénétra- lion de la trompe sous la peaw est infiniment plus violente; elle peut ètre suivie, ce exceptionnel, d'un processus inflam- maloire. alors qui est La quantité de sang qu'absorbe une Glos- sina palpalis au cours d'un seul repas est con- sidérable; elle peut at- teindre plus de deux fois le poids de lin- secte à jeun. L'abdo- men de la mouche re- pue est alors exagéré- ment distendu (fig. 4) et forme, surtout à la face ventrale, une : re énorme saillie teinte . — Ruisseau dit de la Glacière, énorme saillie en rouge par transpa- rence. Dans les conditions ordinaires, à la température de 25° C., la digestion de cette masse alimentaire est terminée au bout du troisième jour, et les mouches cherchent alors de nouveau à ingérer du sang. Lorsque la température s'élève, la digestion s'accélère légèrement jusqu'à 28° C.; au delà, elle E. ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSI £-TSE 919 se ralentit et ne tarde pas à s'arrêter complètement. Des Glossina palpalis repues, mises en étuve à la température de 35° C., ne tardent pas à mourir sans avoir épuisé l'absorption de la masse de sang qui remplit leur tube digestif. On voit donc que, pour le bon fonctionnement de leur appareil diges- tif, il faut à ces mouches une température voisine de 25° C. C'est précisément celle qui est réalisée dans la zone ombragée qu'elles fréquentent au bord des eaux. On peut, de même, apprécier l'influence sensible ‘exercée sur la marche des phénomènes digestifs par des variations dans les conditions hygromé- triques auxquelles sont soumises les mouches. En placant des Glossines dans des conditions diverses d'humidité atmosphérique, j'ai constaté que la durée de résistance des mouches à un jeüune absolu pouvaitatteindre, en air humide saturé, jus- qu'à treize jours à la température de 25° C.; en air sec, au contraire, les mouches, même fortement Fig. 4. — Position de la mouche pendant la piqüre. nourries avant le début de l'expérience, meurent en général au bout de vingt-quatre heures. La durée de résistance au jeüne des Glossines, dans un air constamment saturé de vapeur d'eau, est trois fois plus longue que dans l'air sec, et de sept à neuf fois plus longue que dans l'air normal. Tous ces faits expliquent suffisamment la localisation étroite de ces mouches au bord des eaux courantes et, par contre, leur disparition pendant la saison sèche des ruisseaux dont le cours s'interrompt. Ce sont des raisons physiologiques qui conditionnent leur loca- lisation géographique, donnée fort importante à retenir comme base de toute mesure d'action contre ces insectes. III. — REPRODUCTION. 1. Larve. — C'estsurtout par leur mode de repro- duction que les Glossines se différencient de la plu- part des Diptères piqueurs, en particulier de ceux auxquels elles sont le plus directement apparentées par leurs caractères généraux d'organisation, les Stomoxes. On sait, depuis les recherches de Bruce, en 1895, que les mouches tsé-tsé ne donnent pas naissance à des œufs comme à l'ordinaire, mais bien à des larves qui ont acquis dans le corps de la mère la Lotalité de leur développement; cette vivi- parité d’un type spécial, ou pupiparilé, a pu être suivie dans ses détails à Brazzaville chez la Glos- sina palpalis. L'élevage complet des mouches a été réalisé soit dans des cages de dimensions diverses, soit dans des tubes de verre, fermés par une bande de mousseline et dont on appliquait l'orifice, tous les deux jours, sur la peau d'un animal pour ali- menter les Glossines. Chaque femelle peut donner naissance, après un seul accouplement, à une grosse larve, tous les dix jours en moyenne, à la température de 25° C. La durée de la période de ponte, qui prend fin avec la vie de la mouche, est d'environ trois mois: pendant ce laps de temps, une dizaine de larves au maximum peuvent être produites : les facultés reproductrices des Glossines sont donc, comme on le voit, assez limitées; mais, comme les pontes se produisent toute l'année avec une régularité très grande, et que les produits, pendant leur vie larvaire, sont à l'abri des causes ordinaires de destruction, on con- coit que les mouches pourront très rapidement devenir très nombreuses dans les localités qu'elles infestent, si la nourriture leur est copieusement assurée. Les larves, ainsi que nous venons de l'indiquer, se développent entièrement dans le corps de la mère. Chaque œuf, lorsqu'il est mür, descend, en effet, dans l'utérus de la femelle, fécondé au pas- sage par les spermatozoïdes déposés par le mâle dans les réceptacles séminaux; comme la matura- lion des différents ovules est successive, et séparée par un intervalle de plusieurs jours, il ne parvient jamais qu'un seul œuf à la fois dans la cavité utérine, de sorte que deux larves ne peuvent venir au jour au méme moment. La larve, au sortir de l'œuf (fig. enfermée dans la cavité utérine, subit une mue et ne tarde pas à s'accroître d'une façon très rapide. Elle est entièrement blanche, plus ou moins trans- parente, complètement dépourvue d'appareils de mastication ou de progression. Vers la fin de sa vie intra utérine, qui dure de quatre à cinq jours à partir de l'éclosion de l’œuf, la région postérieure du corps apparait différenciée en deux protubé- rances chagrinées, d'un noir franc, beaucoup plus dures que le reste du corps, sur la teinte blanche duquel eiles tranchent vigoureusement. Ces protu- bérances caudales, vues de face, offrent un contour vaguement réniforme ; elles surplombent une cavité où s'ouvrent les orifices respiratoires au nombre de deux. Grâce à ces organes, une sorte de chambre à air est ménagée dans la région postérieure de l'utérus, dont les parois ne peuvent venir obstruer les orifices trachéens. Mais le trait d'adaptation le plus singulier des 1), toujours 920 E. larves de Glossines réside dans leur mode d'ali- mentation et dans les modifications très particu- lières de leur tube digestif. Ces larves sont, en effet, nourries, dans l'utérus, du produit de sécrétion de certaines glandes tubuleuses annexes de l'appareil femelle (fig. 5), dont le canal excréteur débouche à l'extrémité d’une pa- pille dorsale émanée de la paroi utérine. Cette papille se trouve juste à la portée de la bouche de la larve, qui peut ainsi féter directement le produit liquide qui lui est offert (fig. 6). Son pha- ryox est, en effet, pourvu d'une sorte de langue musculaire co- nique L, fonctionnant comme un piston destiné à aspirer la sécré- tion nourricière. On ne rencontre aucune trace de cette substance dans la cavité utérine; elle est donc ingérée au fur et à mesure, lorsqu'elle vient sourdre à l'ex- fig. 5. — Larve incluse dans l'utérus ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ ingestion. C’est là encore un des caractères les plus frappants de cette adaptation à la vie intra-utérine. La plus grande partie du produit nutritif s'accumule dans l'estomac larvaire, qui se transforme en un énorme sac, clos en arrière. Le rectum ne communique plus avec ce sac stomacal, auquel il est anatomiquement rattaché ce- pendant; il est, d'autre part, clos galement au voisinage de l'anus, ce qui empêche pendant toute la vie larvaire l'émission de pro- duits d'excrétion. Ces transformations impor- tantes de l'appareil digestif ne sont pas absolument spéciales aux Glossines. On les retrouve, d'après les observations de Pratt, de Berlese, chez d’autres Diptères très différents des Glossines par leuraspectextérieur et leur mode de vie, mais qui présentent abso- lument le même mode de repro- trémité de la papille qui fonc- lionne comme une véritable tétine. C'est un a/lailement intr'a- (vue dorsale). — L, corps de la larve; Pr, protubérances:; Ut, paroi utérine; C.C.al., CL.gl., conduits excréteurs des glandes nourricières; Æ.gl., ramifica- tions des glandes. duction que ces mouches. La tribu des Pupiparés comprend, en effet, des formes parasites des: utérin. On voit donc qu'une com- paraison très inattendue peut s'établir, au moins au point de vue physiologique, entre le mode d’ali- mentation des larves de Glossines et celui qu'on rencontre en particulier chez les Mammifères infé- rieurs, les Echidnés parmi les Monotrèmes, et les Marsupiaux, dont les jeunes tettent le lait mater- nel dans le marsupium cutané qui les abrite. Pour com- pléter l’analo- gie, le produit des glandes nourricières des Glossines femelles est Vertébrés à sang chaud pour la plupart, qui présentent également la faculté de donner naissance, dans la majorité des cas, à des. larves vivantes ayant achevé leur croissance. Ces parasites vivent en rapports plus ou moins constants. avec le corps de leurs hôtes, les uns pourvus d’ailes. comme les Hippobosques et capables de se déplacer librement d'un hôte à l’autre, les autres complète- ment aptères comme les Mélophages des moutons et les Nyctéri- bies des Chau- ves-souris et un liquide ne quittant comparable guère les ani- au lait non maux qui les seulementpar nourrissent. ses fonctions, Or il est très mais encore remarquable par sa consti- S.st de constater tution et sa Fig. = Coupe sagittale d'une larve incluse dans l'utérus. — B, bouche de la larve: que ces diffé- couleur Vuen :, langue; T, tétine; RUE fé cote nourricières; S.sl., sac rentes formes, grande quan- tité dans l'estomac de la larve, il offre une teinte d'un blanc vif, et se montre formé d’une petite quantité de matières grasses; mais il est beaucoup plus riche en matières albuminoïdes. La larve ne consomme pas ce lait au fur et à mesure de son quelque dis- semblable qu'elles puissent être les unes des autres et des Glossines, partagent toutes les mêmes propriétés reproductrices. Bien plus, ce qu'on connait de l'appareil génital femelle et de l'organi- sation larvaire des Pupipares montre des modifica- E. ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ 921 tions adaptatives et un mode de nutrition du pro- duit exactement comparables à ceux que nous avons décrits chez les Glossines. En particulier chez le Mélophage, Léon Dufour, Leuckart et Pratt ont signalé des glandes ramifiées annexes de l'appareil femelle qui sécrètent le produit dont s'alimente la larve, et Pratt a fait connaître, pour cette dernière, un appareil digestif, avec réservoir stomacal et langue pharyngienne, du mème type manifestement que celui des larves de Glossines. Des modifications semblables chez des êtres appartenant à des groupes différents, plus ou moins séparés les uns des autres, s'expliquent par un phénomène de convergence déterminé par des influences physiologiques identiques. Il est facile de se rendre compte, en effet, que les facteurs bio- logiques auxquels sont soumises les Glossines dans la Nature (température constamment élevée, nutri- tion sanguine abondante) se retrouvent identi- quement pour les Pu- pipares parasites, qui vivent également une température éle- vée et constante sur le corps de leurs hô- tes, mammifères ou oiseaux, et se nour- rissentexclusivement de sang comme les Glossines. La pupipa- rité est donc un pro- cessus de viviparité conditionné par certaines influences physiologiques assez précises. La perfection si remarquable du mode de nutri- tion des larves chez les Glossines s'accompagne, chez les femelles, d'une sensibilité extrême dans le fonctionnement de l’appareilreproducteur. L'entrée en gestation des femelles fécondées est, en effet, placée dans une certaine mesure sous l'autorité des centres nerveux de ces mouches, qui peuvent régler elles-mêmes le rythme de leurs pontes, soit en sus- à pendant la descente des œufs dans l'utérus où ils, doivent se développer, soit en expulsant prématu- rément les jeunes larves dont l’évolution a com- mencé à se produire. Lorsque les Glossines mères sont placées dans des conditions biologiques défa- vorables, elles retiennent leurs œufs dans les ovaires où ils ne peuvent être fécondés, ou bien, si elles sont déjà en gestation, elles se débarrassent de leur larve qui les épuise. Ce sont là des phéno- mènes d'une délicatesse très grande et qui per- mettent encore d'apprécier d’une nouvelle manière l'adaptation étroite de la GL. palpalis à son milieu. En effet, si, à 28° C., la ponte est encore normale, mais accélérée, à 30° C. il y a arrêt total de la pro- 1. — Aspects successifs offerts par une larve pendant la reptation. duction des larves; il en est de même si la mouche, qui vit normalement en air très humide, est placée en air constamment saturé : des changements très minimes survenus dans les facteurs normaux de sa zone d'habitat seront donc de nature à détermi- ner des modifications très grandes dans la marche des phénomènes reproducteurs. 2. Nymphe.— Lorsque la larve a terminé sa crois- sance, elle est expulsée de l'utérus, la partie posté- rieure en avant. Elle se déplace alors activement à la surface du sol, en déformant son corps (fig. 7), et ne tarde pas à s’enfouir soit dans la terre meuble, soit dans les crevasses ou les fissures de son sub- stratum. Aussitôt qu'elle a pu rencontrer une place favorable, elle s'immobilise, contracte ses tégu- ments, qui durcissent et prennent une teinte d’abord jaune, puis rougeûtre, et finalement d’un noir franc. A cet état la larve s’est transformée en un tonnelet nymphal ou pupe. La vie larvaire à l'état libre n'excède guère une demi-heure une heure au maximum, et pendant ce temps la larve ne prend plus aucune nourriture. Brumpt, qui, le pre- mier, en 1902, a eu l'occasion d'observer la ponte de la palpa- lis au lac Rodolphe, avait pensé que les larves pouvaient vi- vre pendant plusieurs jours dans le fumier d'hippo- potame ou d'éléphant avant|de se transformer : mais il s'agissait là, en réalité, de larves expulsées avant terme. Dans la Nature, comme l'ont observé Zupitza et Bagshawe, les pupes de la GI. palpalis se ren- contrent plutôt sur les troncs d'arbres, sous les écorces, que dans la terre. A cet état, les Glos- sines sont à peu près complètement à l'abri des atteintes de leurs ennemis. On connaît d’ailleurs peu de destructeurs attitrés, même des mouches adultes, qui échappent facilement par leurs teintes sombres, leur agilité et la puissance de leur vol aux attaques des animaux prédateurs. Existe-t-il done pour l'homme lui-même quelques procédés efficaces de destruction des Glossines, quelques moyens de lutter contre ces mouches et de prévenir l’envahissement par elles des centres habités? Nos recherches, faites au Laboratoire de Brazzaville, nous permettent de répondre nettement à cette question par l'affirmative, pour ce qui concerne spécialement la Glossina palpalis, qui, de toutes les Glossines, est celle qui vit le plus fré- quemment au voisinage de l'homme. à 3 922 E. ROUBAUD — LA BIOLOGIE ET L'HISTOIRE DES MOUCHES TSÉ-TSÉ Nous avons déjà fait voir quelle sensibilité pré- sentent les adultes à des variations légères de leurs conditions physiques de milieu : il suffit d’un arrêt du courant dans les ruisseaux pour écarter les mouches qui stationnent sur leurs rives. Les pupes elles-mêmes, en apparence bien protégées contre les influences extérieures, réagissent également d'une manière étroite, surtout à l'égard des actions thermiques. Dans les conditions ordinaires, la nymphose 1 “ lis. S. — Gile à Giossiues à offre une durée de trente-trois à lrente-cinq jours à 259 C. C’est là l'optimum thermique pour la vie nymphale. Si la température s'élève à 28° C. pen- dant seulement une semaine, il y à raccourcisse- ment notable de la durée nymphale (vingt-six à vingt-huit jours); mais, si cette même température exerceson action pendantuntempspluslong,lamort des pupes devient fatale : il en sera naturellement de même et plus rapidement encore si la moyenne dépasse 28° C. Ainsi s'annonce la nécessité d'une ombre continuelle pour les pupes. La conséquence il suffit d'éclaireir par un déboisement partiel les gites à pratique de cesexpériences est la suivante : palpalis pour détruire et écarter les Glossines à clairci par le, débroussaiïllement. coup sûr. Il suffit que le soleil vienne filtrer pen- dant quelques heures seulement jusqu'à la surface du sol pour rendre inhabitables les fourrés où les mouches abritent leur existence. La pralique du débroussaillement à été empiri- quement préconisée depuislongtemps commemoyen d'action contre les Glossines. Les données nou- velles acquises sur la biologie de la palpalis four- nissent un appui rationnel à cette mesure, et il esl à souhaiter que des instructions formelles viennent [11 Fr: La Faut 2 a Dre a LA organiser d'une facon méthodique la lutte contre ce dangereux diptère dans les territoires infestés : les fonctionnaires coloniaux, commandants de cer- cles et chefs de postes, trouveront dans les notions biologiques qui précèdent les éléments nécessaires pour faire œuvre réellement utile. Sans doute, le déboisement partiel des gîtes ne peut être pratiqué sur de vastes étendues du cours des fleuves et des rivières, surtout dans la région équatoriale, où la tâche est particulièrement diffi- cile en raison de l'exubérance de la végétation. Il faudra se borner à un débroussaillement conve- nable des gîtes dans les eentres fréquentés, au voisinage de l’homme et des animaux domestiques. GEORGES CLAUDE — L'OXYGÈNE INDUSTRIEL 9923 La figure 8 représente les conditions de déboi- sement nécessaires pour amener la disparition complète des Glossines d'un gîte au voisinage de l'homme. Dans un autre arlicle, nous étudierons le rôle des Glossines dans l'étiologie des trypanosomiases. E. Roubaud, Docteur ès sciences, Altaché à l'Institut Pasteur. L'OXYGÈNE L'industrie de l'air liquide a déjà à son actif des résultats incontestables et fort encourageants. Dès maintenant, tous les autres procédés d'obtention de l'oxygène ont pratiquement devant elle baissé pavillon; des usines importantes fonctionnent un peu partout, soit, pour ne parler que de mes pro- cédés, à Paris, Lyon, Marseille, Lille, Liége, Franc- fort, Gênes; d'autres fonctionneront bientôt Nantes, Nancy, Bilbao, Athènes, Glasgow, Hanoï, en Autriche el en Russie. Les appareils Linde, d'autre part, sont également très répandus. Avec l'économie des nouveaux procédés, avec la baisse de prix qui en est résultée, avec la facilité donnée par celte diffusion même à l'emploi de l'oxygène, les deux remarquables applications actuelles de ce corps, soudure aulogène et coupage des métaux, se sont développées avec une vigueur toute natu- relle, à mon avis, mais qui n'a pas laissé que d'étonner nombre d'incrédules. De cette vigueur, un fait éloquent donnera d'ail- leurs la mesure: cette industrie de l'oxygène com- primé appartient à la catégorie privilégiée des in- dustries qui voient leur débit, sinon leur chiffre d'affaires, doubler ou presque tous les ans. Aussi, -sans qu'aucune autre branche encore ait été tou- chée dans l'énorme domaine des applications pos- sibles de l'oxygène et de l'azote, cette situation permet d'ores et déjà de rémunérer largement les six ou sept millions qui ont eu foi dans nos pro- messes. On jugera par là de l'avenir et on me per- mettra la satisfaction de constater que j'étais assez bien inspiré dans les prévisions que je formulais au début de mes recherches — voici tantôt 10 ans, hélas! Telle est l'œuvre d'hier. Assurée, grâce à elle, d'une large existence, disposant désormais des res- sources nécessaires, la nouvelle industrie entre dès maintenant dans l'ère des grandes applications. A lei, il faut l'avouer, tout est encore à faire. A une exception près, dont nous dirons un mot tout à l'heure, la grande industrie ignoreencore l'oxygène. Les essais qui se sont poursuivis ces dix dernières ‘années sur la production de ce corps par la liqué- INDUSTRIEL faction de l'air n'ont pas eu le don de la convaincre : elle n'a voulu y voir que des essais, intéressants sans doute, mais parfaitement incapables de con- duire aux prix très bas qu'avec raison elle juge né- cessaires. A vrai dire, l'état de choses actuel n’est guère de nature, à première vue, à modifier cet état d'esprit de la grande industrie, car, si, d'aventure, elle à besoin de quelques mètres cubes d'oxygène pour sauver, grâce à la soudure autogène, quelque pièce de prix ratée à la coulée, couper ses plaques de blindage ou araser ses masselottes, cet oxygène, quoique fabriqué neuf fois sur dix à l’aide de l'air liquide, lui est en général livré à des prix bien éloignés sans doute des six ou sept francs d'antan, mais ne descendant guère au-dessous de la valeur encore rafraichissante de deux francs le mètre cube. C'est la vérité. Mais qu'on aurait tort de conclure ! Dans cette industrie de l'oxygène comprimé en tubes, le coût de la fabrication est assez peu de chose; les frais de manutention, de compression, de transport, l'amortissement de tubes lourds et coù- teux, longtemps immobilisés chez le client, sont, par contre, des facteurs importants, et, au surplus, le prix élevé se justifie ici par la nature des services rendus. Dans la grande industrie, au contraire, tous ces impedimenta disparaissent — on me pardonnerà d'anticiper sur les événements en parlant au pré- sent pour le plaisir de mes oreilles. Iei, l'oxygène est consommé sur place, au sortir même des appa- reils, à la pression atmosphérique. L'industriel ne se trouve en présence que d'appareils simples, ro- bustes, peu encombrants, d'une facilité de conduite extrême et qui doivent d’ailleurs, aux conditions de température inaccoutumées auxquelles ils fonc- tionnent,une puissance spécifique, une intensité de production dont il serait difficile de trouver l'équi- valent dans d'autres industries. On pensera sans nul doute que j'exagère. Les quelques personnes du monde industriel qui s'intéressent à cette question de la liquéfaction de l'air tiennent assez volontiers les appareils qu'elle met en jeu pour de simples joujoux de laboratoire. Je les surprendrai certaine- ment en leur disant qu'une modeste salle d'usine 924 de 20 mètres sur 30 abriterait intégralement un matériel capable d'une fabrication annuelle de cin- quante millions de mètres cubes d'oxyène pur, soit la production d’une usine à gaz capable d'alimenter Lyon ou Marseille — et Toulouse par sureroit! Or, une telle usine à gaz serait à proprement parler un monde au regard de l'usine d'oxygène dont je viens de parler, et c'est une véritable armée d'ouvriers qui s’y agilerait, alors que, dans notre cas, un per- sonnel infiniment restreint, 15 personnes par exemple, serait suffisant. Quelle caractéristique précieuse encore que celle-là à une époque où la main-d'œuvre devient si cavalière et où un motnou- veau, celui de sabotage, s’est fait, de la brillante facon qu'on sait, sa place dans notre langue — et dans notre industrie ! Ainsi, loin d’être des joujoux, les appareils de sé- paration fondés sur la liquéfaction de l'air sont avant tout des instruments propres à la grande, à la très grande industrie. Il serait temps qu'on voulüt bien l’admettre, et, l'admettant, qu'on se mit à l'œuvre pour utiliser cet admirable outil, l'oxy- gène à vil prix. Fort heureusement, on commence à s'en aperce- voir. La puissante firme métallurgique belge, la rivale de Cockerill, Ougrée-Marihaye, qui a dès le début témoigné à notre cause l'intérêt le plus éclairé, qui a accordé dans ses usines mêmes à nos appareils une large hospitalité, qui s'est ainsi mise à même d'en étudier au jour le jour le fonctionne- ment pendant trois années, vient de tirer de ses observations et de ses réflexions la conclusion la plus flatteuse qu’il nous était possible d'ambi- tionner ; elle vient de commander à la Société L'Air Liquide trois appareils de chacun 200 mètres cubes d'oxygène pur à l'heure, à l'effet d'étudier l’action d'une suroxygénation notable de l'air lancé dans l'un de ses hauts fourneaux. C'est, pour une simple expérience, plus de 3 millions de mètres cubes d'oxygène qui, chaque année, disparaitront dans la fournaise. D'autres applications d'enver- gure comparable sont également à l'étude en ce moment : c'est un début qui promet et qui est de nature à nous faire oublier les lenteurs du passé. C'est qu'en effet les conditions étaient vraiment peu encourageantes qui, par l'indifférence passée, étaient faites à ceux qui ont joué une partie ha- sardée en s’attaquant à ce problème de l'extraction de l'oxygène par liquéfaction de l'air, et qui, l'ayant gagnée, pouvaient pour leurs efforts une plus prompte récompense. A l’origine, espérer ils se sont fait traiter de fous — tout simplement — tant l'obtention de ces températures voisines de GEORGES CLAUDE — L'OXYGÈNE INDUSTRIEL — 200° avait coûté d'efforts aux physiciensde l’autre siècle, tant il pouvait paraître déraisonnable et chimérique de prétendre les transporter sur le ter- rain industriel. Pourtant, grâce à un labeur pro- longé pendant dix ans, — pendant quinze ans même, si l’on considère le cas du Professeur Linde, mais lui, du moins, avait d’autres cordes à son arc, — ils ont vu petit à petit toutes leurs prévisions se réa- liser, quant au côté technique du moins. Ils ont pu obtenir l'air liquide, d’abord goutte à goutte, — et ce fut un beau jour pour eux, après tous les échecs, tous les déboires, tous les découragements passés, — puis de plus en plus abondamment, de plus en plus économiquement. Cet air liquide leur a alors fourni l'oxygène, d'abord à grands frais par sa vaporisa- tion simpliste à l’aide de la chaleur ambiante, en- suite en faisant intervenir le principe fécond de la récupération du froid, enfin en mettant en œuvre le principe de la rectification, appliqué tout d’'a- bord par Linde, et qui, joint au fait de la liquéfac- lion anticipée de l'oxygène, m'a permis d'arriver simplement à la séparation intégrale de l’air traité en oxygène pur et azote pur. Je n'insiste pas sur tous ces points, sur lesquels les savants et aimables articles de M. Mathias ont édifié, mieux que je ne le saurais faire, les lecteurs de la 2evue. Enfin, les principes essentiels étant posés, ils ont pu se préoccuper de perfectionner petit à pelit, de meltre au point la construction des appareils eux- mêmes; ils sont ainsi arrivés à des types donnant toute satisfaction et qui, forts aujourd'hui d’une expérience vieille déjà de trois ans, ne subiront vraisemblablement plus dans l'avenir de modifica- tions essentielles. La technique actuelle est donc à la hauteur de tous les besoins, si énormes puis- sent-ils être. Quant à la puissance de production, des appareils de 1.000 mètres cubes d'oxygène pur à l'heure pourraient être réalisés aujourd'hui sans la moindre difficulté, qui fonctionneraient sous dix atmosphères seulement et produiraient pour chaque cheval-heure un mètre cube et demi d'oxy- gène pur. Quant au coût de l'oxygène ainsi pro- duit, un fait précis fixera les idées : nous avons, dans la circonstance ci-dessus indiquée, donné des garanties qui, pour des appareils de 200 mètres cubes à l'heure seulement, font ressortir le prix de fabrication du mètre cube, amortissement compris, à 3,2 centimes seulement, la force motrice étant comptée à 2 centimes le cheval-heure. Si l'on consi- dère que, pour obtenir ce mètre cube {d'oxygène, il faut comprimer, dessécher, décarbonater, liqué- fier, puis vaporiser et rectifier près de 6 mètres d'air, on arrive à cette conclusion, sans doute exempte de banalilé el qui eût en tout cas stupéfié en 1877 les enthousiastes témoins de l’ex- périence mémorable de Cailletet, que liquétier cubes GEORGES CLAUDE — L'OXYGÈNE INDUSTRIEL 995 6 mètres cubes d'air pour 3 centimes est une opé- | la fabrication du plomb par le procédé Ger- ration avantageuse ! Avec des appareils de 1.000 mè- tres cubes à l'heure, c'est 2,5 centimes qu'il fau- drait dire et moins encore avec la force motrice hydraulique. Avec de tels moyens d'action, com- ment peut-on ne pas encore être entré à corps perdu dans l'ère des grandes applications? Car, je l'ai déjà dit, jusqu'en ces temps derniers, c'était plutôt le scepticisme qui avait prévalu. Quel para- doxe en une époque si avide de progrès! Si nous nous reportons en arrière, au resle, combien plus encourageante en son temps fut la situation faite à l'industrie électrique, qui, dès ses premiers balbutiements, voyait les applications naitre à l'envi autour d'elle et ne pouvait s’en prendre qu'à elle-même de la lenteur de ses pro- grès! Je ne prétends pas sans doute comparer les deux choses, mais je ne voudrais pas non plus que des prophètes à courte vue s’avisassent d'expliquer cette différence de traitement en admettant que l'électricité industrielle correspondait effective- ment à une nécessité, tandis que l'oxygène indus- triel serait en quelque sorte une superfétation, puisque l'atmosphère le met gratuitement à notre disposition. Si de tels sceptiques pouvaient se rencontrer, je les invilerais à contempler l'insoutenable éclat d'un foyer de forge traversé par quelques mètres cubes d'oxygène à l'heure, à assister au spectacle bien plus impressionnant encore d’un bloc d'acier s’efondrant silencieusement en une rivière de feu sous le souffle tranquille d'un peu d'oxygène. Et je leur demanderais s'il est admissible qu'un corps aussi prodigieusement actif, qu'un corps capable de relever de milliers de degrés les températures de nos combustions, de provoquer ainsi toute une chimie nouvelle, capable d'augmenter de 40 °/, le rendement de réactions qui servent de base à d'énormes industries comme celle de la fixation de l'azote par l’are électrique, d'améliorer de 300 °/, peut-être la fabrication de l'ozone, de compléter en maintes circonstances des bilans calorifiques que l'emploi de l'air seul ne saurait équilibrer, comme dans la fabrication continue du gaz à l'eau, dans maux, elC.; qu'un corps qui peul, par surcroît, être produit désormais avec une facilité sans égale, en quantités illimitées, au prix de 20 ou 95 francs la tonne, moins cher que les cailloux, et en don- nant comme sous-produit cet autre corps précieux, l'azote; je leur demanderais, dis-je, s’il est admis- sible qu'un tel corps n'ait pas devant lui le plus beau des avenirs. Et ils acquiesceraient, certes, mais en s'étonnant d'autant plus de constater qu'en attendant, rien de tout cela n'existe encore. Or, la raison de cette surprenante abstention est simple; elle tient en un seul mot, et son énoncé même indiquera le but que je me suis proposé en écrivant cet article : si l'industrie se désintéresse de l'oxygène, c’est qu'elle l'ignore encore. Que de preuves surprenantes je pourrais donner à l'appui de ce fait! Nul doute que beaucoup des renseigne- ments que j'ai donnés ci-dessus ne soient pour elle de vraies révélations. Puissent-ils être assez con- vaincants pour l'orienter définitivement dans une voie féconde, dont la Société L'Air liquide, dans la mesure de ses forces, s'efforcera d'aplanir les difficultés. La situation acquise le lui permet déjà. Je l'ai dit, les quelques applications actuelles : soudure autogène, pierres précieuses artificielles, coupage des métaux, ont, malgré de multiples entraves, pris un développement vraiment remar- quable. Le chiffre des transactions qu'elles déter- minent atteint d'ores et déjà plusieurs millions par an dans notre seul pays. Grâce à cette heureuse circonstance, les promoteurs de celle nouvelle industrie, plus heureux que tant d'autres, ont eu le temps de voir tourner le vent et arriver l'époque des récoltes fructueuses. Les personnes ne sont rien, dira-t-on; le tout, c'est que le progrès avance. Grand merci. On me permettra d'être sur ce point d'un avis différent et de respirer l'air avec plus d'aise depuis que le navire à enfin pris le large. Georges Claude, Lauréat de l'Institut. trictions inutiles. Bien plus; pour faire rendre aux principes tous les effets dont ils sont capables, pour voir clairement tout ce qu'ils contiennent, il faut sou- 926 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 4° Sciences mathématiques Jouguet (E.), Zagenieur des Mines. — Lectures de Mécanique. La Mécanique enseignée par les au- teurs originaux. (Jeuxième partie : L'organisation de la Mécanique). — 1 vol. 1n-8° de 28% pages avec 31 figures. (Prix : 10 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. Nous avons eu l'honneur, déjà, de présenter aux lec- teurs de la /?evue générale des Sciences la première partie de ces lectures. Cette première partie était inti- tulée : La naissance de la Mécanique. Elle prenait, en effet, l'étude des mécaniques au moment où elle cesse d'être une collection de recettes techniques pour s'élever au rang de doctrine rationnelle; elle écoutait les premiers bégaiements de cette théorie, cherchant, dans les Questions mécaniques d'Aristote, à faire dé- river de la loi du levier les propriétés de tous les mécanismes, et à relier la loi même du levier aux principes dont se réclamait alors la Dynamique. Elle décrivait les tentatives faites par Archimède pour introduire dans l'étude de l'équilibre des solides et des liquides la rigueur à laquelle Euclide avait habitué les géomètres. Puis elle suivait les progrès de la science Jusqu'au moment où Galilée, Descartes, Huy- gens, Leibniz et les Bernoulli lui faisaient inaugurer l'âge adulte. La seconde partie des Lectures de Mécanique, que nous avons aujourd'hui sous les yeux, a pour titre : L'organisation de la Mécanique. Dès la première page, nous trouvons l'exposé, à tout jamais mémorable, des lois de la science du mouvement, tel que Newton l'a donné au livre des Principes. La netteté, l'ordre, la fermeté de cet exposé nous font, du premier coup, éprouver une impression profonde. La théorie qui s'exprime avec cette calme lucidité est, nous le sen- tons, sûre de marcher dans la voie de la vérité, dans la voie qui conduit aux grandes découvertes; elle a, maintenant, conscience de sa force, et elle le laisse voir; sa marche, nous le devinons, ne sera plus qu'un continuel progrès. Ce progrès, de quelle nature sera-t-il? Va-t-il se faire par une continuelle addition de vérités nouvelle- ment acquises aux vérités déjà reconnues ? Verrons- nous l'observation et l'expérience poser sans cesse de nouveaux problèmes, le mécanicien résoudre ces pro- blèmes, les solutions trouvées prendre rang à la suite des solutions données à de plus anciennes questions, en attendant qu'un nouvel apport de théorèmes vienne grossir cet empilement de propositions? Non pas. Une morte stalactite grossit de la sorte, parce qu'une nou- velle couche calcaire vient incessamment recouvrir de ses cristaux la concrétion des couches sous-jacentes. Mais la Mécanique croit à la facon d'un être vivant; la moindre parcelle de nourriture va renouveler quelque chose de la substance des organes les plus intimes; la solution de la moindre question vraiment nouvelle retentit jusqu'aux premiers principes de la Mécanique. Pour préparer l’aperception d'une vérité longtemps cachée, pour se garer d’une erreur dont le danger n'avait pas encore été soupconné, il faut, aux prin- cipes, faire subir d'incessantes retouches; il faut expli- citer des affirmations qu'ils renfermaient en puissance, accentuer des distinctions trop vagues, préciser des conditions sous-entendues, élargir par d'audacieuses sénéralisations des propositions que gênaient des res- ‘ Revue gén. des Sciences, 15 décembre 1908, p. 956. J vent changer l’ordre dans lequel ils se tenaient jusque- là, donner la primauté à ce que l'on avait regardé comme un corollaire, reléguer au second rang telle vérité que l’on avait mise au premier, placer en pleine lumière telle idée qui était demeurée dans la pénombre. Aussi, l'histoire qui nous retrace l'organisation de la Mécanique nous fait-elle assister à une lutte incessante ; sans cesse l'observation et l'expérience, posent au mé- canicien des questions nouvelles, et sans cesse, pour répondre à ces questions, le mécanicien est obligé de remanier de fond en comble le système scientitique qui lui en doit fournir les solutions. M. Jouguet a donné à deux des chapitres de son livre, et des plus importants, le titre que voici : L'ex- périence et le travail de l'esprit. Ce Utre, il aurait pu le donner à l'ouvrage tout entier, car il en exprime vraiment la pensée dominante. « Comme pour toute science physique, dit l’auteur (p. 26), les lois de la Mécanique résultent d'une élabo- ralion, par notre pensée, des données de l'expérience, et contiennent à la fois des éléments empruntés au monde extérieur et des éléments introduits par la forme même de notre esprit. Homo additus Naturæ, a dit Bacon en parlant de l'Art; cette formule est égale- ment vraie pour la Science. Faire le départ de ces deux sortes d'éléments est un problème assurément fort beau, mais aussi fort difficile, d'autant plus diffi- cile qu'une partie au moins de la forme de notre esprit a été déterminée par le monde extérieur et doit être, en définitive, rapportée à l'expérience. » La Mécanique résulte donc d'un confluent entre deux courants, celui qui naît de l'expérience et celui qui prend sa source dans notre esprit. Comme ces fleuves que la couleur différente de leurs eaux continue à distinguer après que leurs lits se sont réunis, les deux courants qui forment la Mécanique se recon- naissent au caractère particulier que chacun d'eux communique à la science. L'expérience y met la ué- cessité, et l'esprit humain la liberté. Toute théorie mécanique est contrainte de s’accorder avec tout fait d'expérience dûment constaté ; et de là une rigoureuse nécessité qui s'impose logiquement à la science. Mais toute théorie mécanique est une œuvre de l'esprit humain ; pourvu donc qu'il arrive à systématiser sans contradiction, sans omission, sans déformation, les enseignements de l'expérience, le mécanicien peut les grouper dans l’ordre qu'il lui plait, autour des prin- cipes qu'il lui a convenu de choisir; cel ordre et ces principes dépendent de son libre arbitre. Nécessité donc en la matière de la Mécanique, qui est l'apport de l'expérience; liberté en la forme de la Mécanique; qui est l'apport de l'esprit. de la nécessité découle l'unité; l'expérience impose à tous les mécaniciens les mêmes enseignements, elle leur fournit la même matière; par là, tous les méca- niciens sont tenus d'adopter une même Mécanique; pour résoudre un problème concret et bien déterminé, ils n'ont pas le droit d'offrir des formules différentes et de les prétendre également vraies. Et d'autre part, de la liberté découle la variété. Pourvu que tous les mécaniciens soient conduits à la même formule lorsqu'ils ont à résoudre un des pro- blèmes particuliers que leur pose l'expérience, il leur est loisible de parvenir à cette formule par les chemins les plus divers, à partir de principes très différents. Chacun d’eux est libre d'adopter sa Mécanique. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 927 Il y a donc une Mécanique unique et, aussi, une infi- nité de Mécaniques distinctes; en sorte que la Méca- nique, et plus généralement la Physique théorique, peuvent légitimement se parer de cette formule, qui à si souvent servi à délinir l'Art : L'unité dans la variété. Si l'on doutait, d'ailleurs, que la Mécanique ration- nelle püt être un art, il suffirait de parcourir les Lec- tures de M. E. Jouguet; la vue de ces chefs-d'œuvre produits par les mécaniciens des diverses Ecoles con- vaincrait bientôt que le Beau n'est que la splendeur du Vrai. P. Duurw, Correspondant de l'{nslilut de France, Professeur à l'Université de Bordeaux. 2° Sciences physiques Zvenneek (Professeur D'J.).— Les Oscillations élec- tromagnétiques et la Télégraphie sans fil. (Uu- ‘cage traduit de Pallemand par MM. P. BLANCHIN, G. Guérano, E. Picor, officiers de marine.) — 2 vol. iu-8° de 505 pages. Gauthier- Villars, éditeur, Paris, 1909. Lors de son apparition, la télégraphie sans fil a pu être considérée comme une simple illustration de l'étude générale des oscillations électriques. Mais, à mesure que s’étendaient ses applications, se créait une technique nouvelle, et na itle besoin d’étayer cette technique de bases théoriques sérieuses. L'emploi des puissances mises en jeu dans les stations à grandes portées, la recherche de procédés capables de per- mettre à des stalions désormais nombreuses de com- muniquer entre elles sans se troubler mutuellement, attiraient l'attention des physiciens sur des phéno- mènes sinon nouveaux, du moins peu étudiés, el sus- citaient nombre de travaux théoriques el de recherches expérimentales. Aussi, à l'empirisme du début se substiluait-il peu à peu une doctrine méthodique. Il faut savoir gré au D' Zenneck d'avoir exposé cette doctrine avec beaucoup de clarté en coordonnant les nombreux travaux théoriques etexpérimentaux récents, épars dans des publications très diverses. L'ouvrage du D° Zenneck constitue le traité théorique le plus complet et le plus sérieux qui ait été publié sur la télégraphie sans fil : aussi est-il appelé à figurer comme livre de fond dans la bibliothèque de tous les techniciens. L'ouvrage est divisé en deux volumes : le premier est consacré presque tout entier à l'étude des courants alternatifs de basse fréquence. ! L'auteur part, en effet, des relations établies pour les oscillations électromagnétiques lentes pour en déduire les relations relatives aux oscillations rapides, en tenant compte des changements produits par l'ac- croissement «le la fréquence. Ce premier volume peut èlre considéré, non seule- ment comme une introduction utile à l'étude des oscil- lations électriques, mais comme un véritable traité didactique capable de servir de base à l'étude appro- fondie des applications industrielles des courants alternatifs. Le second volume, qui est consacré à l'étude des oscillations électriques, débute par un chapitre sur les oscillations propres des oscillateurs ouverts, d’impor- tance capitale au point de vue de la télégraphie sans fil. On y trouve ensuile l'étude théorique des divers cas de résonance en haute fréquence : action d’une oscil- lation (amortie ou non) sur un résonateur; étude com- plète des divers couplages (inductifs et galvaniques) et des phénomènes qui prennent naissance dans les cir- cuits associés selon leur valeur (couplages làâches et couplages serrés). Le mécanisme de la propagation des ondes le long des fils et de la production des ondes stationnaires est longuement développé et illustré d'expériences frap- pantes et originales. Le D' Zenneck insiste, à plusieurs reprises, sur les propriétés du bolomètre, qui en font l'instrument de mesures, par excellence, pour les oscillations élec- trique<, et montre fout le parti qu'on en peut tirer pour le tracé des courbes de résonance en l’associant en couplage lâche avec un résonateur accordé. La fécondité de la méthode même de Bjerknes — que l'auteur à contribué à développer et à laquelle il a apporté de notables simplilications — ressort des nom- breuses et intéressantes applications qui en sont faites au cours des théories exposées. Les phénomènes relalifs à la télégraphie sans fil proprement dite sont étudiés à fond dans deux cha- pitres spéciaux qui constituent la partie la plus origi- nale de l'ouvrage. Sans insister sur les particularités de construction des appareils, variables avec chaque cons- tructeur, l’auteur y décrit méthodiquement el avec une grande clarté les dispositifs employés. Le Dr Zenneck s'est volontairement abstenu de l'emploi de l'analyse. Afin de se mettre à la portée d'un auditoire d'étudiants peu familier avec Ja Phy- sique mathématique, il s'est astreint, autant que pos- sible, à étudier les relations en s'appuyant sur des con- sidérations géométriques ou expérimentales. Une pareille méthode ne lui permettait pas d'exposer avec quelque rigueur la théorie de la propagation des ondes électromagnétiques. Aussi s'est-il borné à en résu- mer les résultats — seuls utiles à connaitre d’ailleurs pour les applications à la télégraphie sans fil — dans deux chapitres. L'un de ces chapitres, très court, qui traite du champ de l'oscillateur de Hertz, est inséré au cours de l'ouvrage (avant l'étude de l'émetteur en télé- graphie sans fil). L'autre est reporté à la fin du second volume et donne un complément intéressant d'électro- optique. Les développements mathématiques sont rejetés à la lin de l'ouvrage, dans une série de notes concises que le lecteur consultera avec fruit, en même temps que la bibliographie qui est fort bien faite el constitue une mine très riche de documents. Désireux, d'une part, de conserver dans les relations la symétrie qui existe entre les grandeurs électriques et magnétiques en faisant ressortir ce qui a trait aux oscillations électriques, d'autre part, de pouvoir faire des applications numériques, l’auteur à été conduit à suivre la méthode employée par Cohn, dont il a utilisé les notations, et qui consiste à n'introduire dans les formules générales aucun système de mesure déter- miné. Les formules sont d'ailleurs mises sous une forme qui permet de passer aisément pour les applica- tions, soit au systeme C. G.S., soit au système d'unités pratiques. De nombreux tableaux placés à la fin du second volume donnent les valeurs des constantes utiles à connaître (constantes diélectriques, potentiels explo- sifs, résistivités, etc.), ainsi que les relations dont on est appelé à faire un usage courant dans la technique de la télégraphie sans fil (coefticients de self-induction, capacités, résistance des conducteurs en haute fré- quence, décréments et couplages, etc.). Plusieurs de ces formules sont calculées numérique- ment et les résultats en sont disposés en barèmes clairs el faciles à consulter. L'édition francaise est une traduction à peu près littérale de l'édition allemande. Outre l'alourdisse- ment qui en résulte, cette méthode a conduit les tra- ducteurs à l'emploi de certaines tournures, et à l'intro- duction de néologismes qui déroutentun peu le lecteur (courants quasi stationnaires, condensance, etc.). L'adoption des notations mêmes qui sont employées dans l'édition allemande ne parait pas non plus très heureuse. Bien qu'un tableau de correspondance des diverses notations, placé au commencement de chaque volume, permette d'opérer les substitutions voulues, le lecteur est gêné quand il rencontre la lettre w pour désigner la résistance, la lettre p pour le coefticient de self-induction, la lettre L pour le travail, etc., ainsi que 928 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX de nombreuses lettres gothiques ou des signes con- ventionnels inusités en France. Ces légères critiques n’enlèvent rien au mérite qu'ont eu les traducteurs à entreprendre une œuvre aussi laborieuse et aussi difficile à mener à bien qu'une pareille traduction technique. Telle quelle, elle rendra service, non seulement aux spécialistes, mais encore à tous ceux qui s'intéressent à la question des oscilla- tions électriques. La traduction française de l'ouvrage de Zenneck est éditée par Gauthier-Villars : c'est dire qu'elle ne laisse rien à désirer au point de vue de l'exécution typogra- phique, tant comme texte que comme illustrations. C. Tissor, Professeur à l'Ecole navale. Post (J.), Professeur honoraire à l'Université de Gœttinque, et Neumann (B.), Professeur à la Technische Hochsehule de Darmstadt. — Traité complet d'Analyse chimique appliquée aux essais industriels. — Deuxième édition française entière- ment refondue, traduite d'après la 3° édition allemande par M. le D' L. Gaurier. — Tome Ier, 3e fascicule : Métaux. — 1 vo/. grand in-8° de 301 pages avec k4 figures (Prix 8 fr. 50). Hermann, éditeur, Paris, 1909. Nous avons déjà fait connaître — par l'analyse des fascicules précédemment parus — l'esprit qui à présidé à la rédaction de cet important ouvrage, où les auteurs, tout en s’efforcant de ne donner que les procédés d'analyse reconnus exacts et d’une application facile, ont mis en lumière les seuls facteurs qui permettent d'apprécier la valeur d'un produit. Des noms comme ceux des Professeurs A. Ledebur et B. Neumann, qui ont rédigé le présent fascicule, inspirent confiance. Ils connaissent les besoins de l'industrie et ils en parlent, non pas en tant que pro- fesseurs, car, s'ils font de l’enseignement technique, c'est précisément parce qu'ils ont un pied dans l'in- dustrie, ce qui n'est malheureusement pas toujours la règle dans nos écoles industrielles, Pour ce qui est de l’échantillonage des métaux en barres ou en lingots, les auteurs réagissent, avec raison, contre le procédé qui consiste à ne prendre que les angles opposés ou à prélever des copeaux au-dessus etau-dessous des barres à des extrémités opposées. Ces méthodes ne fournissent pas, en général, la composition moyenne réelle du métal. À ce propos, on trouvera des figures très suggestives donnant la répartition des éléments au sein du métal. On a cru devoir indiquer le voltage nécessaire à la marche de l'électrolyse, dans l'analyse électrolytique des métaux; ce supplément d’information, qui est donné dans le présent ouvrage, et aussi dans d’autres traités, est absolument superflu et peut même induire en erreur. Le nombre de volts aux bornes de l’élec- trolyte n’est pas, en effet, un facteur constant, puis- qu'il varie, non seulement pendant la durée de l’élec- trolyse, mais aussi et surtout avec la forme des appareils employés. L'indication de l'intensité par unité de surface de la cathode, pour un appareil donné, est le seul facteur nécessaire et suffisant. A propos du dosage de l’antimoine, le bain employé est du sulfhydrate de sodium et non pas du sulfure de sodium. Nous ajouterons que les auteurs n'ont peut-être pas toujours donné une place suflisante aux travaux faits en dehors de leur pays. L'excellent et savant traducteur a heureusement suppléé en partie à cette lacune. Ces petites réserves n’'enlèventrien à la valeur incon- testable de l'ouvrage qui doit figurer au premier rang de la bibliothèque de tout industriel soucieux de connaitre la valeur de ses produits. A. HozLanp, Chef du Laboratoire central des Usines de la Ci° française des Mélaux. 3° Sciences naturelles Levainville (Capitaine J.), Docteur de l'Université de Bordeaux. — Le Morvan. Etude de Géographie humaine. — À vol. in-8 raisin, avec 44 figures el cartes, 40 phototypies et 4 dessins Dors texte. (Prix : 10 fr.) A. Colin, éditeur. Paris, 1909. L'inventaire géographique et économique de nos « pays de France » se poursuit méthodiquement. Sous la direction de l’'éminent professeur de l’Université de Bordeaux, M. Camena d'Almeida, le Morvan vient d'être l’objet d'une excellente étude, scientifique et richement documentée, due à M. le capitaine Levain- ville. Il faut louer aussi les éditeurs qui ne négligent rien pour assurer la belle impression et l'illustration abondante et irréprochable de ce genre d'ouvrages. Le Morvan n'a pas eu d'existence historique à part, mais c'est un « pays » géographique bien individualisé, non seulement au point de vue du sol et du climat, mais encore sous le rapport des facteurs humains : les modes de culture, l'exploitation du sol, l'habitation, les relations sociales; car, « parmi les liens qui main- tiennent les groupements humains, il n’en est pas de plus solide que la communauté des occupations indus- trielles ou agricoles ». Le Morvan est un des pays dont Fustel de Coulanges a dit : « Rien n’a détruit ces unités vivaces dont les noms mèmes ont traversé les âges jusqu’à nous. » Les cuvettes sont caractéristiques de la topographie du Haut-Morvan. Les populations se sont groupées sur leurs fonds généralement fertiles. Les formes adoucies de la zone bordière, la topographie usée du Bas-Mor- van marquent l'existence de l’ancienne pénéplaine; mais, ce qui réunit indissolublement ces trois divisions naturelles, c’est le substratum paléozoiïque ou archéen du sol C'est à l’uniformité de son terrain que ce pays doit l’incontestable homogénéité de son économie et de son ethnographie. L'imperméabilité des terrains, l'altitude, imposent au Morvan le climat le plus excessif du bassin de la Seine; sa température moyenne est semblable à celle du Massif central et des Vosges, 99 environ, c'est-à-dire de 2 à 3° plus basse que celle des régions voisines. Les nuées traînent sur les som- mets la moitié de l’année; la hauteur moyenne an- nuelle de pluie est de 1,40. Cette quantité considé- rable s'explique par la situation topographique et aussi par la présence des forêts (42 °/, du territoire), qui attire la pluie et éloigne les orages à grêle. L'abondance des précipitations atmosphériques, l'imperméabilité des terrains dont la structure finale tend vers la pénéplaine, ont imposé au Morvan un réseau hydrographique très divisé et qui se complique encore d’une infinité de marais, d'étangs, de tour- bières. Sources, étangs, rivières forment un des traits fondamentaux du paysage. Dans son ensemble, « le Morvan est une immense éponge ». Toutes les rivières se déversent au début de leur cours dans un étang collecteur qui règle leur régime et les transforme en transporteurs pour le commerce des bois. Les mar- chands de bois ont eu raison des minotiers; seule, la petite meunerie, nécessaire aux habitants du pays, subsiste encore. Le floltage est presque le seul mode d'utilisation des rivières morvandelles, bien que, dans ces derniers temps, il ait baissé dans de très fortes proportions. De plus en plus, on emploie le chemin de fer pour le transport du bois. Au xx° siècle, l'étendue de la forêt morvandelle reste à peu près stationnaire. Les reboisements ba- lancent et même surpassent les défrichements. La forêt représente 75 ares par habitant (25 pour la France entière); sa densité est fonction de l'altitude et du substratum géologique; la propriété en est très mor- celée. Le châtaignier demeure une-exploitation acces- soire; les vraies richesses de la forêt sont les résineux, les chênes et les hêtres; ces derniers sont, par excel- lence, les arbres du grarit. L'exploitation se fait BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 929 encore, en partie, par furetage, c'est-à-dire que le bücheron n’abat que les branches qui ont atteint leur valeur marchande, gnais ce mode, adapté au bois de chauffage, disparaît à mesure que le bois de charpente prend de l'intérêt, de même que le hêtre tend à être remplacé par le chêne ou le sapin. Le climat, l'altitude reculent les époques de la végé- tation. Le sol est pauvre en éléments fertilisants, Des améliorations étaient nécessaires pour accroître Île rendement des cultures. La charrue brabant a permis des labours plus profonds. L'emploi de la chaux à facilité l'introduction du trèfle et du froment, l'amé- lioration du seigle et de l'avoine. La surface des terres labourées à peu augmenté, mais les moissons sont dix fois plus rémunératrices. L'augmentation des pâtures, l'amélioration des prés, l'introduction des prairies temporaires dans l’assolement ont permis, mème sur les communes les plus élevées du Morvan, l'élevage des bœufs du Charolais. Le sarrazin, la navette, l'orge tendent à disparaître. C'est l'élevage qui tient la pre- mière place dans la vie agricole du Morvandeau. Le cheval n'a guère d'importance, le mouton diminue de jour en jour, le bœuf à pris sa place et l'effectif des pores va toujours croissant. La petite propriété a toujours occupé une place importante el l’émiettement n’a fait que s'accentuer, allant parfois à l'encontre des prourès modernes, comme c’est le cas en matière d'irrigation. Le mé- tayage est la forme la plus courante pour la mise en valeur de la grande propriété; c'est celle qui rapporte le plus au propriétaire et à l’exploiteur. L'industrie est réduite à quelques tanneries, meu- neries et huileries. De [à l'importance des foires pour les approvisionnements, en même temps que pour la vente des produits agricoles. Ces foires se sont con- centrées, et aujourd'hui, grâce au développement des voies de communication, les achats tendent à se faire sur place, chez le paysan. La population est très disséminée, le hameau est l'unité de culture et le mode le plus usité de l’agglo- mération. Plus on monte, plus la dispersion est grande. Telle commune (Villapourçon) compte jusqu'à 46 hameaux. Il y a groupement sur les placages lia- siques et disséminalion sur les terrains anciens. La population est presque entièrement rurale : sur 124 communes, quatre seulement sont urbaines, avec un ensemble global de 15.102 habitants, soit 12 °/, du total général. La décroissance date de 1886; le Morvan suit l'exemple des régions agricoles dont aucune industrie n’est venue modifier les groupements : il se dépeuple rapidement. Nous n'avons fait qu'effleurer l'ouvrage, si richemeut documenté, de M. Levainville. On conçoit aisément l'importance de telles enquêtes, aussi scientifiquement conduites, pour l’exploilation rationnelle de notre pays. Lorsqu'elles seront plus nombreuses, il sera possible d'en tirer des vues synthétiques de la plus haute importance. PIERRE CLERGET, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce de Lyon. Calman (W. T.. — Crustacea du « Treatise on Zoology », édité par M. Ray LANKESTER. — { ro). broche de 346 pages avec 194 figures dans le texte. (Prix : 45 fr. 50.) Adam et Charles Black, éditeurs. Londres, 1909. Le grand Traité de Zoologie publié en Angleterre sous la direction de M. le Professeur E. Ray Lankes- ter, vient de s'enrichir d’un nouveau volume qui ne le cède en rien, comme importance et intérêt, aux huit autres déjà parus.-Ce volume est relatif aux Crustacés ; il sort de la plume très autorisée de M. Calman, assis- tant au British Museum et spécialiste du groupe. M. Cal- man est’connu pour la rigueur de ses observations et la fine perspicacité avecllaquelle il les interprète; il a établi un ordre nouveau pour les Anaspides, ces curieux Crustacés gammariformes découverts en Tasmanie par REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. M. G.-M. Thompson, et on lui doit un ensemble de vues fort originales sur la classification des Crustacés supérieurs où Malacostracés. Nul ne pouvait apporter à M. Ray Lankester, pour ce voiume, une collaboration plus efficace. Ce qui frappe, au premier abord, quand on examine l'ouvrage, c'est son caractère de modernité que rendent fort apparent le choix des figures, l'importance relative des chapitres et l'adoption des groupements systéma- tiques les plus nouveaux. Cet air de jeunesse est bien fait pour plaire et pour attirer des lecteurs à M. Cal- man ; ilme semble émaner directement du laboratoire où l’auteur à vécu, où il a fait ses découvertes et où il suivait chaque jour les progrès de sa science favorite. On ne saurait avoir un guide plus sûr et l'on n'en trou- vera guère de plus agréable, car M. Calman est clair, méthodique et intéressant. Les figures sont au nombre de 194, presque toutes excellentes et toutes parfaitement adaptées au sujet; elles sont empruntées aux meilleures sources et, dans l’ensemble, donnent une idée très juste des variations extraordinaires présentées par le groupe. Ainsi, bien que l'ouvrage de M. Calman soit essentiellement mor- phologique, il initie aux découvertes faunistiques, par les nombreuses et belles figures où il représente les formes abyssales, pélagiques ou parasitaires les plus curieuses. Les figures relatives à la morphologie externe sont en très grand nombre et toutes parfaites; celles consacrées au développement ne présentent pas une moindre valeur; mais la morphologie interne, ou ana- tomie, gagnerait à être mieux partagée sous ce rapport; les figures y sont bonnes, mais, à coup sûr, en nombre quelque peu réduit. Cette lacune me parait aisément explicabie. En homme qui connait les Crustacés pour en avoir poussé très loin l'étude, M. Calman sait parfaitement que la morphologie interne n'offre que peu d'importance pour la recherche des affinités dans le groupe et qu'à ce point de vue elle est subordonnée complètement à la morphologie externe, si complexe chez ces animaux, et si suggestive par les moditications ou la persistance de certains caractères archaïques. L'histoire d'une forme carcinologique reste pour ainsi dire écrite dans ses appendices, il suffit de savoir la bien lire; M. Cal- man est d’une extrème habileté dans cet art où il a eu pour maître, comme tous les carcinologues morpholo- gistes, le savant danois M. Boas, qui, dans un ouvrage mémorable, a su merveilleusement unir le don de syn- thèse au talent d’analyste le plus fin. Ainsi donc, la morphologie externe se trouve exposée de manière parfaite dans l'ouvrage qui, à ce point de vue, mérite d'être sur la table de tout étudiant et de tout chercheur. Je ne voudrais pas laisser croire que les paragraphes de morphologie interne sont traités avec une rigueur moindre; ils présentent la même netteté et, s'ils occupent une place plus réduite, c'est que leur importance, comme je l'ai dit, ne saurait être la même. Les paragraphes consacrés au développementnele cédent en rien à ceux qui précèdent; contrairement aux cou- tumes admises dans les traités classiques, M. Calman s'est longuement étendu sur l'histoire embryogénique des divers groupes des Cirrhipèdes, qui présente un si haut intérêt et une si grande variété; l'auteur a su pui- ser, comme il convient, aux ouvrages de Darwin, de Lacaze-Duthier, de Hoek, de Delage, de Gruvel, et il a fait sienne cette riche substance pour le grand profit du lecteur. L'ouvrage est divisé en 16 chapitres, dont le premier traite des caractères généraux de la classe, chacun des suivants d’un ordre de Crustacés, chaque chapitre com- prenant un tableau systématique du groupe, la défini- tion des caractères essentiels, un historique et une série de paragraphes consacrés à la morphologie (externe ou interne), au développement, aux habitudes, à la paléontologie, aux affinités et à la classification. Cette méthode me paraît excellente, car elle donne à chaque groupe sa physionomie propre et sa valeur, qui DD** 930 s'atténueraient forcément beaucoup si elles se trou- vaient noyées dans une étude générale de la classe. J'aurais même désiré que l'auteur la poussât plus loin, en insistant davantage sur les subdivisions de chaque eroupe et en indiquant les caractères biologiques ou morphologiques les plus notables des principales laumilles. Ce procédé fut jadis employé par Claus, dont l'ouvrage reste apprécié pour ce fait, encore que la lecture en soit plutôt pénible, M. Calman a dû y recou- vir dans une certaine mesure pour quelques groupes à formes très nettement distinctes : pour les Copépodes, par exemple, où les Branchiures (Argulides) sont l'objet d’un chapitre spécial à la suite des Eucopépodes, el pour les Cirrhipèdes qui réclamaient plus fortement encore un sectionnement semblable, Mais pourquoi ne pas avoir caractérisé les familles essentielles de chaque groupe? Avec sa limpidité remarquable et sa rigou- reuse méthode, l'ouvrage de M. Calman eût été parfait s'il s'était étendu quelque peu sur ce point, c’est-à-dire sur la zoologie pure. Le système de classification adopté dans le volume est le résultat des recherches les plus moilernes, no- tainment de celles effectuées par l'école danoise (Boas, Hansen) et par la jeune école anglaise (Calman, Borra- daile). Pourtant la dissociation complète du groupe des Phyllopodes est l'œuvre propre de M. Calman, qui l'a introduite, pour la première fois, dans son ouvrage. Je ne sais pas si les zoologistes l’accueilleront favora- blement, car elle place sur le même plan que les Cladoeères, c’est-à-dire au rang d'ordre, les Branchi- podides, Apodides et Limnadides qui, pourtant, se res- semblent et diffèrent des Cladocères par de nombreux traits fort importants. Mais les modilications les plus profondes, el aussi les plus sérieuses, sont celles introduites par l'auteur dans la classification des Eumalacostracés, qui sont répartis en quatre divisions : les Syncarrdes, formant l'ordre des Anaspidacés; les Péracarides, où les Schi- zopodes mysidiens sont réunis aux anciens Edrioph- thalmes pour consliluer cinq ordres (Mysidacés, Cn- macés, Tanaïdacés, Isopodes et Amphipodes); les Eucarides, qui comprennent les Schizopodes euphau- siens et les Décapodes; enfin les Æoplocarides, repré- sentés seulement par les Stomatopodes. En fait, le caractère essentiel du système est la dissociation totale, déjà proposée par M. Boas et par M. Hansen, de l'ancien groupe des Schizopodes, que les auteurs an- glais avaient enrichi par la découverte des curieux Anaspidacés. On doit estimer un système qui à pour garaut des autorités incontestables et qui offre l'avan- age de bien mettre en relief le résultat des recherches les plus récentes. Pourtant, il m'est difficile de croire qu'on fait une classification naturelle en réunissant les anciens Edriophthalmes aux Mysidacés; et, d'autre part, les aflinités des Crustacés décapodes sont multi- ples, euphausiennes et mysidiennes, ainsi que Pa vu M. Coutière, et comme je pense l'avoir établi en étu- diant les Pénéides des campagnes monégasques. Sans doute, les Schizopodes actuels représentent trois types fort distincts qui me paraissent les descendants d'un Lype très ancien duquel sont issues les diverses autres formes du Lype malacostracé. Mais qu'importent ces divergences de vues à propos d'un groupe qui garde encore bien des secrets! Le système proposé par M. Calman est bien fait pour attirer sur ce groupe l'attention des zoologistes el pour contribuer à en fouiller l'histoire, EL ce ne sera point là un des moindres avantages du volume publié par l'auteur. En fait, ce volume est l'œuvre d'un cher- cheur passionné qui a le don de communiquer sa ilamme sans cesser jamais d’être méthodique, clair el précis; par ce double caractère, comme par sa moder- nilé, il ne sera pas moins utile aux étudiants qu'aux travailleurs du laboratoire. E.-L. Bouvier, Professeur au Muséum, Membre de l'Institut, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4° Sciences médicales x (P.) et Capgras (J.), Médecins des Asiles d'alisénés de la Seine. — Les Folies raisonnantes. Le délire d'interprétation. — 1 vol. in-89 da 387 pages. (Prix : 7 fr.) F. Alcan, éditeur. Paris, 1909. Sous le nom de psychose chronique à base d'inter- prétations délirantes, ou plus brièvement de délire d'interprétation, MM. Sérieux et Capgras ont dégagé du vaste groupe des maladies mentales constitutionnelles une psychose systématique Chronique. Elle est carac- térisée par la multiplicité et l'organisation des inter- prétations délirantes, par l'absence ou la pénurie d'hallueinations, par la persistance de la lucidité et de l'activité psychique, par l'évolution, par l'extension progressive des interprétations, entin par l'incurabi- lité, sans démence terminale. Cette « folie raisonnante » esl constituée entière- ment par des :/lusions et des interprétations délirantes. Maleré la fantaisie, parfois étrange, de leurs fictions, les « interprétateurs » conservent une vivacité intellec- tuelle et une puissance de dialectique remarquables; ils restent capables de raisonner juste dès que leurs idées lixes ne sont plus en jeu. Leur langage et leurs écrits sont corrects; parfois même ils ont des qualités sty- lesques qui peuvent donner le change, non seulement à l'entourage, mais aussi aux magistrats. C'est à propos de ces malades que l’on entend surtout parler de « séquestration arbitraire ». Lorsque leur talent dialectique est mis au service de leurs conceptions délirantes, 1 n’est pas rare de voir celles-ci partagées par les personnes de l'entourage; de la sorte, certains de ces « interprétateurs » réus- sissent à faire des partisans convaincus. Par le groupement de leurs interprétations, ces malades échafaudent des délires divers où prédominent les idées de persécution, de grandeur, les idées mys- tiques, érotiques, hypocondriaques. La systématisalion de ce délire se prépare lentement, mais, une fois établie, elle devient inébranlable, étant servie par une activité intellectuelle qui ne désarme pas: Quelques-uns de ces malades, par la ténacité et l'acharnement de leurs réactions, se rapprochent des persécutés-persécuteurs; mais, chez ces derniers, en général, l'activité mentale converge vers une idée obsédante, sans proliférer exagérément. Le « délire chronique » à la première période, avec ses illusions, ses interprétations maladives, ses idées de persécution, peut ètre confondu avec le délire d'interprétation; mäis, dès le début de la seconde période, la présence des hallucinations auditives, lenaces, persistantes, dominatrices, lève tous les doutes. Pour déterminer la place du délire, d'interprétation dans le cadre des maladies mentales, les auteurs ont établi, dans les délires systématisés, la gradation Sui- vante : IL. Psychoses constitutionnelles fixes (Délire de revendication, délire d'interprétation). I. Psychoses intermédiaires ou combinées (Formes atypiques di- verses). IL Psychoses acquises, loxiques, démen- üielles (Délire chronique à évolution systématique, délires systématisés paranoïdes). La conception du délire d'interprétation en tant que psychose autonome, et surtout sa séparalion du délire de revendieation avec lequel il était confondu jusqu'à ce jour, constitue dans la psychiatrie contemporaine une nolion nouvelle. Cette notion est très bien exposée et défendue par MM. Sérieux et Capgras, non seule- ment à l'aide d'observations très consciencieuses, mais sous une forme claire et élégante, qui mérite d'être louée, Er Dr Il. Meicr, pers ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 931 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2 Novembre 1909. 40 SCIENCES MATHÉMATIQUES, — M. À. Denjoy présente ses recherches sur les ensembles parfaits discontinus à deux dimensions. — M. J. Bosler explique les orages magnéliques terrestres par l'action de champs magné- tiques créés par les tourhillons de matière chromo- sphérique entourant les taches solaires; s'il en est bien ainsi, les orages magnétiques seront difficiles à prévoir, car nous ne voyons qu'une moitié du Soleil et seules Les protubérances du bord sont bien visibles, — M, A. Pérot propose un nouveau mode de protection de l'argenture des miroirs employés en astronomie : il consiste à revêtir le miroir d’une couche extrêmement mince de celluloïd transparent, — M. P. Helbronner rend compte des opérations effectuées au cours de la septième campagne de triangulations géodésiques com- plémentaires des hautes régions des Alpes françaises. 20 SCIENCES PHYSIQUES, — M, Devaux-Charbonnel à essayé de réaliser une ligne téléphonique artificielle au moyen de deux résistances R reliées entre elles, à chacune de leurs extrémités, par une impédance Z el un appareil Z.. Ce dispositif est particulièrement appli- cable à l'étude et à la comparaison des appareils Lélé- phoniques au point de vue de leur emploi pour la téléphonie à grande distance, — M. de Forcrand à préparé les bicarbonates de Rb el Cs en saturant de CO? une solulion très concentrée de carbonate neutre et évaporant à froid dans une atmosphère de CO* en présence de P*0%. Les bicarbonates se déposent en beaux cristaux anhydres, inaltérables à l'air froid. L'auteur a mesuré leurs chaleurs de dissolution et de neutralisation. — MM. H. Le Chatelier et S. Wolog- dine ont étudié les neuf phosphures de fer décrits dans la littérature Cinq n'existent pas : Fe‘P, Fe‘P, Fe’p?, Fe'P*, Fe'*P', et quatre existent certainement : Fe’P, Fe*P, FeP et Fe*P*, quoique la composition des deux derniers ne soit pas établie d'une façon certaine, — M. H. Baubigny à vérilié que le sulfite d'Ag, chauffé en solution à 100°, se décompose presque Lotalement en dithionale et Ag métallique : 2Ag°S0? — Ag’S*0+ 2Ag, La même réaction à lieu avec les sulfites alcalins. — M. Darmois, par l'étude du pouvoir rotatoire de ses produits de distillation, a reconnu que l'essence de térébenthine francaise renferme un carbure à disper- sion forte lévogyre (pinène) et un carbure à dispersion faible lévogyre encore indéterminé. — MM. E. Kayser el E. Manceau ont reconnu que les ferments de la graisse des vins sont fous des bacilles trapüs, entourés d'une énveloppe glaireuse, anaérobies et ferments des sucrés. Ils se développent d'autant plus facilement dans les vins qu'il ÿ à moins d’acidité bre — M. C. Gerber a étudié la localisation des ferments protéolytiques dans le Vasconcellea quercilolia. Les nervures foliaires sont plus actives que le parenchyme; le bois de Ja racine et de la tige est actif et contient plus de présure que l'écorce et le libet; la moelle de la tige coagule le latex. _ 30 SCIENCES NAIURELLES. — MM. A. Calmette el C. Guérin ont constaté que le bacille tuberculeux d'origine bovine, cultivé par passages successifs sur bile de bœuf glycérinée, perd progressivement sa viru- lence pour les Bovidés el ne produit plus qu'une infec- tion générale d’allure typhique, sans lésions follicu- laires et non mortelle. — M. B. Collin à reconnu que la cullüre intensive avec suralimentation constante est capable de produire sur l'organisme des Infusoires tentaculifères (Acinétiens) de profondes modifications d'ordre morphologique et physiologique (formation d'une variété astyle, monstres doubles, ete.). M, Ph. Dautzenberg a étudié Iles Mollusques marins provenant des campagnes scientifiques de M, À, Gruvel en Afrique occidentale (1906-1909). La proportion des espèces européennes, surtout médilerrantennes, qui se pro- pagent le long de la côte océanique de l'Afrique est plus considérable qu'on ne le supposait. — M. W. Wietrzykowski a étudié le développement des Lucer- naridés depuis le stade planula; il est arrivé actuelle- ment jusqu'au stade à quatre lentacules. — M. Cr. Eisenmenger montre que, si l'origine du lac de Garde est une dépression tectonique remontant aux temps mésozoiques, si, plus tard, eurent lieu des mouvements divers comme la surrection et la dislocation du Monte- Baldo, il faut reconnaître que la configuration actuelle du lac de Garde est l'œuvre d'un très puissant surereu- sement glaciaire. Séance du 8 Novembre 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Eug. Fabry pré- sente ses recherches sur le module d'une série de Taylor. — M. X. Vessiot à éludié les groupes de ralio- nalité des systèmes d'équations différentielles ordi- nairés. — M, D. Gravé signale une identité dans la théorie des formes binaires quadratiques, à l'aide de laquelle on peut obtenir aisément tous les détails de l'analyse de Gauss. — M. Giacobini présente ses obser- vations de la comète de Halley, faites à l'Observatoire de Paris. — M. À. R. Hinks à déduit la masse de la Lune des observations photographiques de la planète Eros faites dans les années 1900 et 1904, Il trouve la valeur Ë = 81,53 Æ 0,049 pour le rapport de la masse de la Terre à celle de la Lune ; la constante de la nuta- tion deviendrait égale à 92134. — M. G. Bigourdan décrit un moyen de soustraire les horloges astrono- miques aux variations de la pression atmosphérique par l'emploi d’un appareil qui maintient automatique- ment la même pression dans l'enveloppe de l'horloge. 90 SciENcEs PuYSIQues. — M, H. Pellat décrit un pendule bitilaire de construction très simple, au moyen ducçuel on trouve immédiatement la longueur du pen- dule synchrone; après avoir éliminé les causes pertur- batrices qui agissent sur fui, il l'a utilisé à la mesure de g. — MM. C. Féry et C. Chéneveau on! observé pour une lampe à incandescence à filament de carbone la relation W= 4 T*,et trouvé que la fonction [= f(W), dans laquelle 1 représente l'intensité lumineuse, est de la forme exponentielle; pour une lampe à filament de tungstène, on à : W —= 4 T# et pour 1 = f (W) une fonction également exponentielle. — M. G. Claude à récupéré les vapeurs d'alcool où d'éther diluées dans d'énormes masses d'air (telles qu'elles se dégagent dans certaines industries) en les faisant passer, après compression, dans un serpentin où elles se refroi- dissent jusqu'à — 90°; elles se condensent presque totalement et le liquide est recueilli au bas de l'appa- reil. — M. L. Bloch a constaté que la phosphorescence de l’arsenic ne s'accompagne d'aucune ionisalion, ni de la formation d'ozone ; elle donne toujours lieu à la formation primaire d'As*0°, qui se décompose ensuite en As20% 610. — M. E. Rengade 4 déterminé la forme théorique des courbes de refroidissement des mélanges binaires. Elles se composent d'une droite et d'une hypérbole, se coupant en un point dit: point anguleux de solidification commençcante, ce point anguleux devenant de moins en moins netà mesure qu'augmente la proportion d'un des corps. — M. M. Delépine à 932 préparé deux séries d'iridosulfates de K, Na, TI et Ba, rouge-brun et verts, par double décomposition avec les iridosulfates d'ammonium correspondants. — M. A. Guyot décrit une nouvelle méthode de synthèse des aldéhydes aromatiques. Les éthers & 6-dicétoniques fixent sur l'atome de C cétonique « une molécule d'un phénol, d’un carbure où d’une amine aromatique ter- liaire pour donner un éther acidylphénylglycolique; celui-ci se scinde par H?S0* où KOH concentrés en don- nant l'aldéhyde correspondante. — M. Ch Mauguin à préparé à basse température les sels de Na des acéta- mide, propionamide et isobutyramide bromées; ce sont des corps très inslables, se décomposant avec détona- tion en NaBr et éthers cyaniques ; c'est une transposi- tion de Hofmann. — M. N. Danaïla, par oxydation des diméthylanilinisatines à froid, en liqueur acétique, avec le peroxyde de plomb, à obtenu des matières colorantes analogues au vert malachite. — M. H. Mas- son a trouvé, dans l'essence de girofle, outre les constituauts déjà connus, du salicylate de méthyle et deux aldéhydes de la série du furfurane, la-méthyl- furfurol et le diméthylfurfurol. — M. Sarthou à reconnu qu'il existe dans le lait une anaéroxydase soluble dans le lactosérum et dans l'eau et une catalase insoluble ; la caséine insoluble oxyde la paraphénylè- nediamine ï 30 SGieNcES NATURELLES. — M. E. Gley à constaté qu'on peut empêcher les accidents si violents que détermine l'injection sous-arachnoïdienne de sérum d'anguille ou de torpille en injectant dans le liquide céphalo-rachidien, en mème temps ou auparavant, une quantité déterminée de sérum antitoxique. — MM. E. Gley et V. Pachon ont observé que le cœur isolé d'un animal immunisé, fonctionnant en liquide Ringer- Locke, c'est-à-dire privé de l’antitoxine présente dans le sang circulant de l'animal intact, ne résiste en général guère mieux à l'action de latoxine que l'organe de lanimal non immunisé. — MM. A. Calmette et L. Massol ont reconnu que le sérum des Bovidés immunisés contre la tuberculose par injections intra- veineuses de bacilles cultivés sur bile de bœuf glycéri- née est doué d’un fort pouvoir précipitant vis-à-vis de toutes les tuberculines bovines. Cette réaction n'est pas due à la présence d'un anticorps. — M. Billon- Daguerre montre que les rayons de très courte lon- sueur d'onde des spectres de CO,CO?,H?S et SO*, ren- fermés à l'état raréfié dans des tubes en quartz, jouissent de propriétés microbicides intenses et sont applicables à la stérilisation des liquides. — M. J. Glo- ver a pratiqué, sur les élèves du Conservatoire, l'exa- men de la respiration par la radioscopie thoracique et l'analyse graphique des vibrations aériennes de la parole; on peut en tirer une application pratique au contrôle du travail vocal. Mie L. Chevroton el M. F. Vles ont chronophotographié le développement de l'œuf de loursin à intervalles écartés et l'ont pro- jeté ensuite à plus grande vitesse ; ils ont pu constater - ainsi une série de mouvements spéciaux des cellules précédant leur division. — M. P. Hallez à étudié le cycle biologique d'une forme voisine des Otoplana, le Bothriomolus constrictus, trouvé au Portel. La larve, éclose en avril, n'émigre pas ; le développement se fait lentement ; c’est en mars ou en avril suivant que doit se faire l'accouplement et la ponte; l'animal meurt aussitôt après. — M. Biot est parvenu à examiner le l'rypanosoma Lewisi à l'intérieur des vaisseaux mé- sentériques du rat vivant; il est animé de mouve- ments qui persistent mème après la mort de l'animal. MM. L. Maquenne et E. Demoussy ont reconnu que les rayons ultra-violets déterminent la mort des cellules végétales dans un espace de temps relativement court. Le noircissement des feuilles observé sur les plantes exposées à la lumière directe de l'arc est dû à la prédominance dans cette lumière des rayons ultra- violets et à la mort du protoplasma. — M. P. A. Dan geard a observé que le Chorella vulgaris, placé dans un flacon de culture, dessine en vert les endroits où ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES arrivent les radiations lumineuses les plus actives au point de vue de la fonction chlorophyllienne. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 2 Novembre 1909. M. Albert Robin a constaté, chez les prétubercu- leux et les phtisiques, par de nouvelles expériences pratiquées avec une technique nouvelle, la réalité de l'accélération des échanges respiratoires (augmentation de CO: produit, de l'O consommé total et de l'O con- sommé par les tissus: d'où diminution du quotient respiratoire), en même temps que de la diminéralisa- tion organique. — M. G. Weiss présente une commu- nication sur la production de la chaleur par les êtres vivants et la théorie de l’isodynamie alimentaire. La Revue publiera prochainement un article de l’auteur sur cette question. — M. E. Boïnet conseille de pres- cire l'opothérapie dans la sclérose surrénale de préfé- rence sous forme de capsules fraîches de mouton ou de veau, ou bien de poudre surrénale desséchée dans le vide où d'injections sous-cutanées de l'extrait total de la glande. La médication surrénale parait agir en déterminant une suractivité fonctionnelle, rétablissant la double action hypertensive et antitoxique des por- tions de capsules surrénales restées suffisamment saines. — M. le D' Nélaton:lit un travail sur deux observations de greffes musculaires employées à com- bler des cavités osseuses créées par l'évidement chi- rurgical dans le traitement de l'ostéomyélite. — M. le D' Tuffier communique une observation d'extraction d’une balle de revolver mobile dans le liquide céphalo- rachidien lombaire. Séance du 9 Novembre 1909. M. H. Wurtz est élu membre titulaire dans la Sec- tion d'Hygiène, Médecine légale et Police médicale. M. S. Pozzi montre qu'une cause fréquente de dys- ménorrhée et de stérilité chez la femme résulte d’une condilion anatomique qui consiste dans la forme conique du col, l'étroitesse de son orifice et une exa- gération de l’antécourbure normale de l'utérus. L’au- teur est intervenu chirurgicalement dans de nombreux cas de ce genre par une opération qu'il appelle « sto- matoplasie » par évidement commissural. La dysmé- norrhée est considérablement améliorée ou totalement guérie après cette opération ; quant à la stérilité, elle a disparu chez un quart des opérées après un laps de temps qui varie de deux mois à trois ans. — M. le D' Lowenthal lit un travail sur l’état sanitaire Com- paré des troupes des gouvernements militaires de Paris et de Berlin en 1902-1906. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 30 Octobre 1907. MM. Ed. Lesné et L. Dreyfus ont constaté que l'incoagulabilité du sang provoquée chez le lapin par l'extrait de sangsues n'empêche pas de réaliser des accidents anaphylactiques mortels avec le sérum de cheval. — MM. M. Weinberg et U. Mello ont observé que l'indice antitryptique du sérum des malades atteints de tumeur maligne est, en général, supérieur à Ja normale: tout en n'étant pas spécifique, l'épreuve antitryptique peut cependant orienter le clinicien. — M. CI. Regaud estime que le chondriosome des sper- matozoïdes est moins un matériel héréditaire qu'une partie de la cellule, jouant un rôle actuel de fixation et de concentration des substances ambiantes destinées à être consommées lors de la contraction du filament axile. — MM. A. Sartory et A. Fillassier ont examiné divers échantillons de fruits (raisins, fraises, groseilles), prélevés à l'étalage dans des rues fréquentées, et y ont trouvé des quantités considérables de bactéries, dont lusieurs pathogènes. — M. L. Blaizot a reconnu que a piqûre d'Argas persicus porteur de Spirochetes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 933 gallinarum communique aux jeunes poussins une maladie très grave; dans les passages directs, la viru- lence des Spirochètes s'accroit assez régulièrement avec l’âge des passages. — MM. H. C. Jacobaeus et E. L. Backman ont constaté que les modifications proposées par Bauer, Stern, Tschernogubov et Hecht à la réaction de Wassermann, sont bien inférieures à la - réaction originale. — MM. A. Gilbert el M. Villaret ontétudié les détails de la vascularisation artérielle de l’espace porte, qui est beaucoup plus fournie qu'on ne le décrit ordinairement. — MM. C. Mathis et M. Léger ont découvert dans le sang de la Poule domestique du Tonkin un Trypanosome très rare, qui ne parait pas pathogène; ils le nomment 17. Calmetter. — MM. P. Emile- Weil et G. Boye ont reconnu que les extraits d'organes n'agisscnt pas (ous de même sur le sang des hémophiles : les uns déterminent un retard constant de la coagulation (thyruide, rate, foie, pancréas), d'autres corrigent le retard de coagulation (sérum, lobe postérieur de l’hypophyse), Séance du 6 Ncvembre 1909. MM. A. Gilbert et A. Baudouin, par l'épreuve de la glycémie expérimentale, ont reconnu chez les diabé- tiques une élévation du coefficient glycémique; elle explique la glycosurie provoquée dans le diabète par l'alimentation hydro-carbonée. — MM. G. Guillain et G. Laroche ont mis en évidence, chez deux malades atteints d'hémorragie méningée, une iso-auto-sensibi- lisatrice, qui est apparue d’abord dans le liquide céphalo-rachidien, puis dans le sérum sanguin, et qui disparut du premier, puis du second lui-même, — MM. G. Guillain et J. Troisier ont étudié le liquide d’un hématome pleural traumatique; ils y ont constaté l’auto-agglutination des hématies, précédant leur des- truction hémolytique. — MM. P. Bouin et P. Ancel montrent que les Mammifères à ovulation spontanée possèdent deux variétés de corps jaune : périodique et gestalif, et que les Mammifères à ovulation non spon- tanée (provoquée par le rapprochement sexuel) pos- sèdent seulement le corps jaune gestatif. — Les mêmes auteurs démontrent, par une série de préparations, que la première phase de l’évolution de la glande mammaire au cours de la gestation (multiplications cellulaires) est déterminée par le corps jaune. — MM. L. Grimbert el R. Bernier ont reconnu que le corps qui prend nais- sance dans l'hydrolyse de l'urine normale par un acide minéral étendu est l'acide glycuronique. — MM. C. Mathis et M. Léger ont trouvé, dans le sang de la poule du Tonkin, un nouveau parasite, appartenant au genre Leucorytlozoon, dont les gamétocytes ressemblent à ceux du Leucocytozoun de la perdrix du Tonkin; ils en font toutefois une espèce différente, qu'ils nomment L. Caulleryi. — M.9J. Nageotte a mis en évidence, dans la gaine de myéline des fibres du système ner- veux central et des nerfs périphériques, des bâtonnets granuleux et des grains isolés appartenant à la caté- gorie des mitochondries, — MM. A. Rochaïx et L. Thé- venon décrivent une nouvelle méthode pour diffé- rencier le lait cuit du lait cru, basée sur la coloration violette que donne ce dernier avec le pyramidon en présence des oxydants. — M. E. Maurel a étudié l'influence de la voie d'administration sur la dose minima mortelle de nitrate d'aconitine pour la gre- nouille et le lapin. — M. L. Brasil signale la présence, au Muséum de Paris, d’une tête du A/esoplodon bidens échoué au Havre en 1825. — M. J. Georgewitch a découvert, dans l'appareil digestif d’une mouche de la Serbie, le Simulium columbacensis, un trypanosome nouveau, qu'il nomme Crithidia simuliæ. — M. E. Chatton a observé quatre nauplius doubles anadydynes d’Ophioseides Joubini.—M.G. Bohn a constaté sur un coralliaire fouisseur, le Veretillium eynomorium, que toute partie du pédoncule ou du corps qui vient de subir, par excitation, une extension considérable ac- quiert une sensibilité très grande (surtout géotropique), suivie d'une insensibilisation. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 22 Octobre 1909. M. F. E. Smith: Les amalqames de cadmium et la pile normale de Weston.Les amalgames de Cd peuvent être solides, liquides ou former un mélange de phases solides et liquides, la composition pour cent des phases dépendant de la température. Quand un amalgame liquide est refroidi au-dessous de, la température inf6- rieure de transition, le centre du solide résultant offre une haute concentration en Cd, la couche superfi- cielle une faible concentration. La diffusion tend à produire l'uniformité; aussi la force électro-motrice d'une pile contenant l'amalgame est instable pendant un temps très long. Quand l’amalgame estrefroidi len- tement à une température peu inférieure au point de transition, 1l suffit que la différence de concentration entre les parties interne et externe de l'amalgame soit faible pour permettre à la couche extérieure d'être un système à deux phases. La diffusion est lente et la force électro-motrice reste constante pendant un temps très long. Des amalgames d'une concentration uni- forme en Cd sont obtenus en trempant les amalgames complètement liquides à — 50°C. ; quoique non stables à l'origine, une diffusion rapide les rend à peu près uniformes en quelques jours, et leurs propriétés élec- tromotrices diffèrent notablement de celles des amal- games lentement refroidis. Mais, si on élève Ja température d'un tel amalgame jusqu'à ce que deux phases existent, un refroidissement subséquent ne restaure pas la condition uniforme et il en résulte un amalgame instable. L'expérience montre qu'on peut employer avec sécurité un amalgame à 12,5 °/, entre 129 et 60°C. et un amalgame à 10 °/, entre 0° et 51°C. — M. F. Soddy: La production du radium aux dépens de Purantum. La mesure de l'accroissement du radium dans (rois solutions uraniques puriliées il y a trois à quatre ans montre que celui-ci procède avec une vitesse proportionnelle au carré du temps ; il n'existe qu'un seul produit intermédiaire à longue vie entre le radium et l'uranium ; la période de vie moyenne de ce corps serait de 18 500 ans, d'après les observations faites sur la plus ancienne solution. Mais, d’après les données obtenues avec la plus jeune solution, cette période serait moitié moindre, ce qui conduit à admettre l'existence d'au moins un nouveau produit intermédiaire dans la série ; celui-ci, s'il existe, n'al- tère pas la loi de la vitesse de production du radium donnée plus haut. — Le même auteur à étudié Les rayons et produits de l'uranium X. I à observé l'appa- rition d’une faible radiation «, qui reste sensiblement constante alors que l’intense radiation $ diminue ; ce fait s'explique bien si le père du radium n’est pas le produit direct de l'uranium X. — Enfin, M. Soddy a étudié Ja production de l'hélium aux dépens de l'ura- nium el du thorium. L'hélium a été décelé dans quatre expériences avec Ur, troisavec Th et une avec les solu- tions de pechblende. Mais la vitesse de production n'a pu être déterminée par suite d’un accident d'appareil. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. MM. E. Hope et W. H. Perkin jun., en faisant réagir le bromocyclohexane et le 4-bromo-1-méthyleyclo- hexane sur le dérivé sodé du malonate d'éthyle, ont obtenu le cyclohexylmalonate et le 1-méthyleyelohexyl- 4-malonate d’éthyle. — MM. R. Meldola et J. G. Hay ont préparé le 2:3:5-trinitro-4-aminophénol par hydro- lyse ménagée de son dérivé acétylé ; il fond à 1450. Il se laisse facilement diazoter et son sulfate de diazonium, dilué avec de l’eau, se transforme en 2:3:à-trinitro- quinonediazide. — MM. J. T. Hewitt et F. B. Thole ont préparé la benzèneazobenzèneazodiméthylaniline, F. 190°; l'o-toluène-azo-0-toluèneazodiméthylaniline, F. 138°; le benzèneazobenzèneazophénol, F. 180°. Les 934 ACADÉMIES ET; SOCIÉTÉS SAVANTES composés diméthylaminés sont solubles en rouge dans H:SO* concentré et passent au bleu par dilution; le composé phénolique est-soluble en pourpre et s’hydro- lyse totalement par dilution. — MM. J. W. Walker et V. K. Krieble ont étudié l’action de traces d'alcalis sur la /-amygdaline et ont partiellement résolu la solu- tion racémisée obtenue. — M. Y. Shibata a étudié l'action du réactif de Grignard sur les éthers phtaliques et a obtenu des dérivés du phtalide, puis fréquemment du phtalane. MM. A. D. Mitchell et C. Smith ont fait réagir l'acélate mercurique sur les dérivés hydro- xyazoïques de la série du naphtalène. Le benzèneazo-f- naphtol n’est pas attaqué, tandis que le benzèneazo-«- naphtol est oxydé en dérivé 6f-dinaphtylique. Quand la position & est substituée, il se forme des mofñomercu- riacétates. — MM. F. Francis et O. C. M. Davis on constaté que les aldéhydes aromatiques réagissent avec les chlorures d'acides en présence de KCA7z aqueux pour former les dérivés acylés des cyanohydrines correspondantes R.CHO + R'COCI—Æ KCAz-+R.CH (0.COR').CAz HKCI. — M. À. J. Ewins, en faisant réagir PCF sur l'alcool pipéronylique, a vu le chlorure d'abord formé se condenser en une substance C'5H'#0%, F.360°. Par contre, PCF réagit sur le chlorure de pipé- ronyle en donnant le chlorure de 3:4-dichlorométhy- lène-dioxybenzyle, Eb. 1549-1569 sous 16 mm., que l'acide formique transforme en chlorure de 3:4-carbo- nyl-dioxybenzyle CO: 0?:CH*.CH?CI, FE. 570, — MM. T.S. Price et D. F. Twiss, en faisant réagir les thiosulfates d’alkyles avec l’iode à chaud, ont obtenu presque quan- titativement les disulfures correspondants : 2K0.S0*. SR 2H20 + LP = R°S? L2KHSO—H2HI. — MM. T. C. James et J. J. Sudborough ont étudié l’action de Br sur les cinnamates de méthyle et d'éthyle et celle des alcalis sur les dibromures des acides d- et J/-cinna- miques. — MM. G. G. Henderson et W. J. S. East- burn ont constaté que le d- et le /Z-pinène donnent la modification inactive du sobrérol quand on les oxyde avec l'acétate mercurique aqueux. Par cette réaction, on à pu déceler la présence de d-pinène dans une essence de térébenthine russe. — MM. J. Ch. Philipel F. B. Garner ont étudié l'influence des sels de sodium sur la solubilité des acides peu solubles. Plus faible est l'acide du sel de Na, plus grande est l'influence du sel sur la solubilité des acides benzoïque, salicylique, o-chlorobenzoïque et m-nitrobenzoïque. — M. G. T. Morgan et M! EF. M. G. Micklethwait, en condensant l'aniline et le chlorure arsénieux et traitant le mélange par un alcali aqueux, ont obtenu l’oxyde de triamino- triphénylarsine 0: As(C‘H#.AzH?)"; avec le camphre, on obtient l'acide tricamphorylarsinique (C:°H)*As(OH}°. — MM. H. F. V. Little, E. Cahen et G. T. Morgan déterminent As dans les composés organiques en les chauffant avec Na°0? et Na?COS, faisant bouillir l'extrait aqueux acidifié de la fusion avec KT et précipitant As à l’état de sulfure. Le précipité est redissous dans NaOÏ et la solution traitée par H°0%, Après acidification et ébullition, on répète la réduction avec KI, chasse I par ébullition, neutralise la solution arsénieuse et la titre par LE — M. J. Moir attribue la valence à la présence, en nombre variable, dans les éléments, d'un sous-élé- ment de poids atomique 1/112; la masse des éléments serait due à la polymérisation d'une entité consistant en un atome d'hydrogène moins l'agrégation ci-dessus. — M. B. M. Jones à éludié la cristallisation spontanée des solutions de carbonate de sodium et de thiosulfate de sodium, et construit les courbes de supersolubilité. — M. TT. P. Hilditch à observé que les composés pos- sédant deux liaisons éthénoïdes contiguës présentent une exaltation optique très marquée par rapport aux composés monotthyléniques ou saturés complète- ment. Les composés monoéthyléniques ont eux-mêmes un plus grand pouvoir rotaloire que les composés saturés, mais la différence est plus faible qu'avec les systèmes conjugués. Le groupe phényle en position à par rapport au carboxyle parait exercer une influence déprimante sur le pouvoir rotatoire. — Le même auteur a déterminé le pouvoir rotaloire des éthers dimentnyliques et des sels dibruciques des acides gras bibasiques, depuis l'acide oxalique jusqu’à l'acide sébacique. Les dérivés oxaliques présentent une forte exaltation, les dérivés maloniques et succiniques une dépression et les dérivés adipiques une exaltation. — MM. J. N. Pring et W. Fielding ont étudié la pré- paralion de quelques métaux réfractaires en exposant la vapeur de leurs chlorures volatils à l'action de fila- ments de carbone chauffés électriquement. Avec le chlorure de Tu, un dépôt de métal est obtenu entre M 1.200° et 1.500°; avec le chlorure de Mo,au-dessous de : 1.300° ; avec SiCl', entre 1.700 et 18509 ; au-dessus de ces températures, il se forme les carhures. Avec le chlo- M rure de Bo, le dépôt consiste toujours en carbure et se É forme entre 1.800° et 2.000. — MM. S.R. Best et J.F. Thorpe ont constaté que les composés à chaîne ouverte M ayant un groupe aminé en position y par rapport à un L groupe mnitrile se condensent,'par traitement avec À CEHSONa, en dérivés du pyrrol. Les cétones dérivées de ces derniers, qui ont un atome de C adjacent à l'Az doublement lié en dehors du noyau, tendent à passer, sous l'influence de l'eau chaude, en isopyrrols iso- M mères. — MM. R. W. Gray et F. P. Burt ont déter- L miné le poids d'un litre normal d'HCI; il est égal à M 1,63915. HCI a été décomposé par Al au rouge et l'hy- drogène recueilli el mesuré; on en déduit pour poids atomique de Cl la valeur 35,459 (0 — 16). Par une autre M méthode physico-chimique, les auteurs ont trouvé 35,461. — M. F. L. Pyman a constaté que la base M amorphe obtenue par Goldschmiedt dans la-réduction de la papavérine est la tétrahydropapavérine, donnant M paroxydation la 6 : 7-diméthoxy- 3 :4-dihydroisoquino- M line. La tétrahydropapavérine de Goldschmiedt est, en réalité, la 1:2-dihydropapavérine. — M. F. W. Gray am prouvé la présence d’un groupe OH dans les dérivés de M l'anhydracétonebenzile en préparant des dérivés acé- M tylés et des éthers éthyliques. Les dérivés acétylés, par hydrolyse, donnent des isomères des composés primi- tifs. — MM. J. C. Irvine et R. Gilmour, en conden- sant le glucose avec les composés aminés aromatiques, ont obtenu les formes isomères des glucose-p-tolui- dide, glucose-B-naphtylamide, glucose-p-phénétidide, glucose-o-carboxyanilide, toutes doutes d'une forte mutarotation. Exemple : «-glucose-p-toluidide, prismes anhydres, [als —+1810,9 à — 450, B-glucose-p-tolui- dide, aiguilles à 4 HO, [ajp—— 970,6 à — 450,2; plaques à 1/2 H°0, [aln = — 940,6 à — 470,3 — MM. A. E. Dunstan et F. B. Thole ont déterminé les courbes viscosité-concentration pour les systèmes binaires composés d'eau et d’alcools méthylique, éthy=. lique et propylique, puis d'acide acétique, à diverses, températures. Ils confirment les résultats des investi- gateurs précédents. — M. H. Wren a isolé la d-mandé- lamide et la d-benzoïine; elles ont des propriétés ana- logues à celles des dérivés lévogyres correspondants. La /-benzoïne et son éther méthylique se racémisent rapidement sous l’action de KOH; l’éther éthylique est partiellement, la carbanilido-/-benzoïne complètement racémisée par la chaleur. — M. S. Ruhemann, en faisant réagir les dérivés sodés des amides aromatiques sur le phénylpropiolate d'éthyle, a obtenu une série d'homologues de la dicétodiphénylpyrroline, substances d’une couleur allant du rouge sombre au noir, solubles dans les alcalis dilués en bleu, puis en jaune. — MM.A. Senier et A. Crompton, poursuivant l'application de leur méthode de synthèse de l’acridine, ont préparé la, 2:3:7:8-tétraméthylacridine et diverses Inaphtacridi- nes et quinacridines. Tous ces composés présentent une fluorescence marquée. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE ] Séance du 8 Juillet 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES — M. R. Hackel présente ses recherches sur la sommation élémentaire de cer- laines fonctions de la théorie des nombres. — M. £. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Muller : Contribution à la théorie de Grassmann. I]. Quelques théorèmes généraux. — M. F. Meissner à étudié la variation de l'élasticité de torsion de Ni, Fe et Ag avec la température. Le module de torsion subit une forte diminution à haute température (50 °/, pour Ag pur à 600, la variation étant linéaire), tandis que le décrément logarithmique augmente considérable- ment. À la température ordinaire, le module de torsion des fils minces est plus grand que celui des fils épais, le décrément logarithmique un peu moindre. 20 SGIENGES PHYSIQUES. — MM. J. M. Eder el E. Va- lenta : Mesures de longueurs d'onde dans la région visible des spectres d'étincelles. — M. Zd. H. Skraupa repris l'étude de l'ascension des solutions aqueuses dans les feuilles de papier buvard qu'on y trempe; on “peut distinguer sur ce papier deux surfaces successives d'imbibition : l'une par la substance dissoute, l'autre par de l’eau pure. Les acides forts, en concentration équivalente, donnent la même hauteur d’imbibition ; les bases fortes, à haute concentration, ont les mêmes hauteurs d'imbibition que les acides forts; à faible concentration, des hauteurs plus grandes. Pour les sels, les hauteurs d'imbibition varient suivant le degré de l'hydrolyse. — M. F. Ehlotzky à poursuivi ses recherches sur la formation des éthers de la glycérine avec les phénols; il a préparé ceux des 0- et p-chloro- phénols et du 1:3:6-chlorocrésol et leurs dérivés benzoylés. — M. O. Morgenstern, en condensant l'acide opianique avec la cyclohexanone, à obtenu un corps C#H#0?, formé par l'élimination de 2H°0 aux dépens des groupes méthylènes voisins du carbonyle dans la cyelohexanone et des O aldéhydiques de deux molécules d'acide opianique; avec l'acide LAC hydique, on oblient un composé analogue, C?#H#0*. Les mêmes condensations se produisent avec la dimé- thyléthylcétone. — M. V. Grafe a constaté que la matière colorante des fleurs de mauve peut se dédoubler en une partie soluble dans l’eau, et une partie inso- luble, mais soluble dans l'alcool absolu, cette dernière dérivant de la première, qui est un glucoside, par scission de sucre, H°0 et O?, et possédant la formule CH#05. Elle contient 20H et donne de l'hydroquinone, puis de la pyrocatéchine, par fusion avec KOH. — Le même auteur a constaté que le ?haseolus vulgaris, privé de CO?, ne peut utiliser les amino-acides comme source de carbone; ceux-ci exercent, d’ailleurs, une action nuisible sur les racines. — M. F. Weber a con- staté que le processus de la formation de graisse et de solution de l’'amidon dans les arbres à feuilles et à aiguilles est un phénomène périodique, qui n’est pas limité à l'automne. Le rôle de protecteur de la chaleur, qu'on à attribué à la graisse des arbres, n’a pas de fondement; c'est plutôt une forme de réserves plus stable que l'amidon. — MM. M. Bamberger et A. Landsiedl montrent que l'acide polyporique retiré par Stahlschmiedt en 1873 d’une espèce inconnue de ledor us est identique à l'acide observé en 4871 par Muller dans le P. rutrlans. 30 SGIENCES NATURELLES. — M. G. Bayer à constaté que l'alimentation thyroïdienne accélère notablement l'autolyse, en mème temps qu'elle diminue l’alcales- ‘cence du sang. — M. O. Stracker présente ses recherches sur le pli duodénal longitudinal chez l’homme et les animaux. — M. H. Ulbrich a étudié les sinus sanguins veineux de l'orbite du lapin et les à trouvés extraordinairement dév eloppés. Ce développe- ment favorise probablement les mouvements de l'œil; il représente peut-être aussi un équivalent des sinus cérébraux peu développés. — MM. J. Schaffer et EH. Rabl ont poursuivi leurs recherches sur le système thyréo-thymique de la musaraigne. Cet animal possède un thyrmus bilobé typique dans "le médiastin anté rieur, qui disparaît le plus souvent chez l'adulte; au voisinage de chaque lobe se trouve un tubercule lymphatique. Ni glande thyroïde se compose également de deux lobes, situés dans le sillon œsophago-trachéal. — M. P. Frôschel a étudié le lemps de présentation héliotro- … : Shi pique et reconnu que la loi hyperbolique est une loi physiologique générale. La lumière de la lampe en quartz à vapeur de mercure provoque encore des cour- bures héliotropiques après un éelairage de 1/1.200e à 4/2.000° de seconde. La lumière solaire directe induit aussi un fort héliotropisme sur les plantules d'Avena sativa après 1/2.000° de seconde d'action. La lumière du jour diffuse faible provoque encore l'induction de l'héliotropisme après 1/40° de seconde d'exposition. — M. F. von Hôhnel poursuit sa description des cham- pignons des tropiques récoltés à Java. — M. V. Vouk à observé sur les racines de Trlia de grosses lenticelles, composées d'un phelloderme lâche puissant et d'un liège poreux formé de couches hétérogènes, — MIS, Herzfeld a étudié la morphologie de T'écaille du fruit du Larix decidua Mill. La crista de l'écaille représente une hypertrophie de l'axe floral développée d'un seul côté. Séance du 14 Octobre 1909. 4° Sciences PuYsiQuEs. — MM. F. Emich el J. Donau décrivent un procédé pour la filtration de minimes quantités de liquides. De petits disques de papier à filtrer, dont le bord est graissé, sont placés sur un capillaire rodé et le liquide est filtré en établissant une faible contre-pression par en bas. Pour les pesées, on utilise la microbalance de Nernst. — M. C. Auer von Welsbach justifie sa réclamation de priorité sur M. Urbain à propos du dédoublement de l’ytterbium. — M. L. Kaluza a préparé deux nouveaux acides rho- daniques, dérivés de la pseudo-cumidine et de l'iso- hexylamine, ainsi que leurs produits de condensation avec diverses aldéhydes aromatiques. L'isohexyldithio- carbamate d'isohexylamine, traité par le chlorocarbo- nate d'éthyle, fournit COS et de l’isohexylsénevol, d'où l'on prépare l’isohexyl- et la diisohexylthio-urée, — M. E. Strecker a recherché la présence de la scutella- rine dans 350 plantes; seules, celles de la famille des Labiées en contiennent, et spécialement dans les feuilles et le calice. La lumière est nécessaire pour la formation de scutellarine dans les plantules de Scutel- laria: chez les plantes vieilles, on n'’observe plus d'action de la lumière. La scutellarine présente des migrations dans la plante et s'emmagasine finalement avec les réserves. 29 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zudereli a étudié la floraison des plantes herbacées; la transpiration la favorise légèrement, mais c'est surtout la lumière qui agit sur la floraison. Des épis de seigle sur lesquels on fait tomber subitement la lumière solaire directe fleu- rissent en quelques minutes. — M. O. Richter a con- staté que le sodium est un aliment nécessaire à Ja croissance des diatomées marines brunes des genres Nitzschia et Navicula; elles se développent surtout bien sur l’agar contenant, 1 à 2 °/, de NaCI ou de NaAzO*. Séance du 21 Octobre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. de Ball décrit les méthodes au moyen desquelles on peut déterminer le lieu d'un objet visible sur le disque du Soleil, de.la Lune ou d’une planète par rapport à l'équateur et un méridien fixé du corps céleste. Il donne une nouvelle solution de la détermination de la position d’un cratère lunaire. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Benndorf a étudié l'influence d'un certain nombre de facteurs sur lexac- titude de l’enregistrement dé certaines données rela- tives à l'air : courbe de potentiel, chute de potentiel, conductibilité spécitique. — MM. M. Kohn et F. Bum ont préparé les anhydrides des acides 2-méthylamino- 4-méthylamino- et 2-éthylamino-4-éthylamino-2 : 4- diméthylpentane-1-carboniques et étudié l’action de l’'oxyde d'éthylène sur eux. IIS ont préparé, d'autre part, par une nouvelle méthode, les amino-alcools dérivant de l'alcool de la diacétone et montré que les amino-lactones C'H*O2A7, C$H'O*Az et C'H'70?Az four- nissent des combinaisons à molécules égales avec l'acide picrique. ; 936 3° SGIENGES NATURELLES. — M. M. Holl a étudié la pre- mière circonvolution de transition du cerveau de l'Ateles; elle peut prendre des formes diverses et même manquer complètement; quelquefois, elle con- stitue une formation complexe avec le gyrus areuatus parietalis superior. — M. F. Steindachner décrit une espèce d'Ageneiosus (Pseudageneiosus), trouvée en trois exemplaires dans le Rio Parnahyba et le Rio Puty au Brésil; il la désigne sous le nom d’A. (P.) there- zinæ. — M. H. Molisch a constaté qu'en trempant des feuilles vivantes d'£lodea canadensis dans une solution à 0,1 °/, de MnCF et les plaçant au soleil, les feuilles se colorent peu à peu en brun par dépôt d'oxyde de Mn dans la membrane des cellules de l’épiderme superficiel; le phénomène n’a pas lieu à l'obscurité. Séance du 28 Octobre 1909. 19 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. von Siebenrock à étudié les substances employées pour sécher l'éther humide et reconnu que le sulfate de sodium générale- mentrecommandé dessèche très imparfaitement. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. KR. Poch envoie quelques renseignements sur son expédition dans le sud du Kalahari. ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES ET DES LETTRES DE DANEMARK Mémoires présentés en 1909. . M. A. Lehmann adresse une Note relative à un épiscotistère à miroirs. On sait que, dans certaines recherches d'Optique physiologique, la nécessité se présente de faire varier l'intensité de la lumière entre E Episcotistère à miroirs. — B, lampe: m, m, miroirs; E, E, épiscotistères: 1, 11, collinateurs du photomètre. ; des limites très larges. Une intensité 10° fois supérieure au minimum perçu par l'œil se prête, en effet, encore parfaitement à servir dans ces expériences, tandis que les intensités supérieures doivent être évitées, au moins pour les essais prolongés. Or, les multiples méthodes Jusqu'ici employées pour varier et mesurer les inten- sités lumineuses étaient toutes affectées d'un grave inconvénient : celui de ne pas permettre des variations bien considérables. L'auteur conseille d'utiliser dans le même but la réflexion multiple sur les miroirs de verre noir. Comme, en effet, un miroir pareil ne réflé- chit qu'un dixième de la lumière incidente, un système de six miroirs doit suffire pour affaiblir l'intensité lumi- neuse jusqu'à moins d’un millionième de sa valeur initiale, et probablement le nombre de miroirs qu'on peut employer est bien supérieur à six. La figure 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES représente la disposition d'un appareil basé sur ce principe : B est une lanterne sourde à bec Auer; la lumière qui sort par ses deux fenêtres est réfléchie par des miroirs de verre argentés mm vers les collimateurs 1, IT du photomètre. Devant ces derniers, sont disposés les épiscotistères à miroirs E E, se composant chacun de quatre miroirs verticaux, parallèles deux par deux « et faisant deux par deux des angles droits. La lumière est réfléchie comme l'indiquent les lignes pointillées. Les miroirs sont maintenus dans la position voulue par un ressort qui, appliqué du côté non réfléchissant, les presse contre un cadre métallique plan. Ces cadres étant fixés au support, on peut remplacer les miroirs par d’autres, sans en changer la position, ce qui entrai- nerait des divergences de réflexion. L'emploi combiné de miroirs métalliques et de miroirs de verre noir per- met de graduer l'intensité lumineuse, laquelle sera d'autant plus faible que le nombre des miroirs noirs par rapport à celui des miroirs métalliques est plus grand. Pour mesurer l’affaiblissement produit par un miroir noir, on enlève les deux miroirs ss de facon à envoyer la lumière réfléchie par m directement au col- limateur IT; en installant immédiatement devant ce dernier un épiscotistère d'Aubert, on affaiblit la lumière jusqu'à obtenir la même intensité lumineuse dans les deux moitiés du champ du photomètre. — Le mème auteur adresse un Mémoire sur deux états d'adaptation rétinienne à la lumière. La divergence frap- pante entre les résultats obtenus par M. Porter, dans : ses expériences sur le papillotement dû aux excitations iutermittentes de la rétine, et les résultats de ses propres recherches, faites indépendamment sur le même sujet, ne s'explique pas par les erreurs indi- viduelles aux expérimentateurs. Comme l’auteur le remarque très justement, les biologistes ont, en effet, bien tort, dans la plupart des cas, de qualifier d’erronés les résultats divergents d'un confrère, tant il est vrai que les observations fautives sont assez rares dans les laboratoires scientifiques. Les différences de résultats seraient dues, le plus souvent, à la diversité des con- ditions de l'expérience et à la: définition différente donnée par différents auteurs à une même notion. Dans le cas présent, les divergences s’expliqueraient par l'existence de deux adaptations différentes à la lumière du jour, se produisant respectivement sous l’action de la grande clarté du ciel et sous celle de la lumière dif- fuse de la chambre. Entre ces deux états, il y aurait cette différence que, dans le premier, les temps de fusion des impressions visuelles seraient plus courts que ceux de la rétine adaptée à l'obscurité, tandis que, dans l'autre, ils seraient plus prolongés. Il existe évi- demment, entre les deux conditions extrêmes, une multitude de stades intermédiaires. — M. C. Christian- sen adresse un Mémoire sur les récentes observations relatives aux rayons radio-actifs, mémoire essentielle- ment historique et où l’auteur rattache les déperditions d'électricité constatées par Coulomb, et surtout par Matteucci, aux phénomènes d'ionisation et où il résume les travaux modernes sur l’électroscope, travaux djoù résultent la nature radio-active de tous les corps et l'existence, dans l'atmosphère, de rayons présentant les mêmes caractéristiques que ceux qui sont émis par les corps dits radio-actifs. | ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE N° 23 15 DÉCEMBRE 1909 Revue générale D ences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Les médailles de la Société Royale de Londres. — Dans sa grande séance anniversaire annuelle du 30 novembre, la Société Royale de Londres a distribué comme suit ses cinq grandes médailles : La Médaille Copley à M. G. W. Hill, l'éminent savant américain, pour ses recherches d’Astronomie mathé- matique ; Les deux Médailles royales à M. A. E. H. Love, pour ses recherches sur la théorie de l’élasticité et les sujets connexes, et au major Ronald Ross, pour ses beaux travaux sur la malaria ; La Médaille Davy à sir James Dewar, pour ses recher- ches aux basses températures; La Médaille Hughes à M. R. T Glazebrook, pour ses travaux sur les étalons électriques. $ 2. — Art de l'Ingénieur Le prochain Congrès international des Mines, de la Métallusgie, de la Mécanique et de la Géologie appliquées. — Le Congrès inter- national des Mines, de la Métallurgie, de la Mécanique et de la Géologie appliquées qui s’est réuni en 1905 à l’occasion de l'Exposition universelle de Liége avait décidé, dans sa séance de clôture, d'accepter l’invita- tion de l’industrie minière et sidérurgique rhénane- westphalienne et de convoquer le prochain congrès dans cette région. Conformément à cette décision, le Congrès aura lieu à Dusseldorf dans la dernière semaine de juin 1910, sous la présidence des conseillers Kleine et Springorum. Le Congrès sera divisé en quatre sections, pour les- quelles le Comité d'organisation a tracé un programme scientifique provisoire des plus complets et sollicite des communications (en français, anglais ou allemand). Les délibérations et discussions seront complétées par des visites d'établissements scientifiques et industriels, ainsi que par des excursions géologiques dans les environs, qui promettent d'être des plus intéressantes en raison de l'énorme développement de l’industrie minière, métallurgique et mécanique dans la région. Pour de plus amples renseignements sur ce Congrès, REVCE GÉNCRALE DES SCIENCES, 1909. on peut s'adresser au Comité d’organisalion, 3-5, Jaco- bistrasse, à Dusseldorf. $ 3. — Physique La radioactivité de la matière ordinaire. -— Les expériences de M. Campbell", faites par un pro- cédé de mesure plus sensible que celui de Mr° Curie, avaient rendu probable l'existence, en dehors de l’ura- nium, du thorium et de leurs familles, d’autres élé- ments (tels que le plomb et le potassium) doués de propriétés radio-actives. MM. Elster et Geitel ® ont, à la vérité, fait voir que le plomb doit sa radio-activité essentiellement à une matière étrangère, identique au radium F. À Dans un récent Mémoire, MM. M. Levin et R. Ruer * continuent leurs recherches antérieures sur la radio- activité du potassium, en les étendant à la plupart des éléments chimiques. Les plaques photographiques dont ils se servent sont enveloppées de papier noir, la couche sensible n'étant recouverte que d’une seule couche de papier, sur laquelle sont posées des plaques de laiton de { millimètre d'épaisseur et d'une superfi- cie de # X # centimètres. Les matières en essai, placées sur des morceaux de papier de soie, sont posées sur des découpures carrées dé 1 centimètre de côté, au milieu de ces plaques de laiton. Les plaques photogra- phiques sont introduites et conservées à l'obscurité ; les poses sont continuées pendant environ six mois. Pour éliminer l'influence de quantités même minimes de lumière, les auteurs conservent chaque plaque dans la boîte de carton ayant servi à son emballage et à son transport. Comme, dans ces conditions, il est impos- sible de constater la moindre différence entre l’activité possible des composants du laiton et de ceux de l'air atmosphérique, les noircissements produits par les différentes matières sont réduits à l’activité possible du laiton comme zéro. Un avantage particulier de ce pro- cédé, c’est l'accumulation des effets, qui permet de se 4 Jahrbuch der Radioaktivitat, t. IV, p. 434, 4905. ? Physikalische Zeïitchrift, t. VII, p. 841, 1906; t. VIII, p.213; t. VIII, p. 716, 1907. 3 Physikalische Zeitschrift, t. X, p. 578, 1909. 23 938 limiter à l'examen de quantités minimes de matières. Sa sensibilité va jusqu'à un millionième de l’activité des rayons « du radium. Tandis que, dans la première série du système pério- dique des éléments, le lithium, le sodium, le cuivre, l'argent, l'or et les sels de ces métaux ne produisent pas de noircissement, tous les sels de potassium et de rubidium soumis à l'expérience agissent sur les plaques. Le nitrate de césium, ainsi que les sels d’ammonium, se montrent inactifs. Dans la seconde série du système périodique, les sels de magnésium, de calcium, de strontium, de ba- ryum, de zinc, de cadmium et de mercure sont inactifs, tandis que le béryllium semble posséder possiblement une activité spécilique très faible. Dans la troisième série, le bore, l'aluminium, l'yttrium, l'indium, le thallium n’'exercent aucune action sur les plaques. Les composés du lanthane renferment une émanation à décomposition rapide, dont l'identité avec celle du thorium ne saurait être rigoureusement démontrée. Dans la quatrième série, le carbone, ni sous la forme de charbon amorphe, ni sous celle de graphite, ne présente d'effets radio-actifs ; il en est de même du silicium, du titane, du zirconium et de l’étain. Ni l'oxyde de germanium, ni le germanium métallique ne permettent de reconnaitre les moindres effets sur la plaque. Quatre produits de cérium de provenances diverses présentent des activités très différentes, va- riant de 1/10 à 100 fois l’activité du potassium. Comme, cependant, la présence d'émanation de thorium se constate dans les produits les plus intenses, il n’y à aucune raison pour attribuer au cérium une activité individuelle. Les expériences sur des échantillons de plomb, les uns vieux d'environ cent ans, les autres pro- venant d'un aqueduc pompéien, confirment les ré- sultats de MM. Elster et Geitel au sujet de l'absence d'une activité propre. Dans la cinquième série, le phosphore, le vanadium, l'arsenic, le bismuth ne présentent pas de radio-acti- vité. Les auteurs ne sont pas en mesure d'établir avec sûreté si le noircissement produit par l’antimoine est dù à la présence de sels de potassium. Les composés de-niobium et de tantale, ainsi que ceux des terres rares, présentent des résultats incertains. Dans la sixième série, le soufre, le sélénium, le tel- lure, examinés à l’état élémentaire, ne donnent aucun effet; les composés de chrome, de molybdène et de tungstène se montrent également inactifs. Quant à la septième série, les halogènes, étudiés sous la forme de leurs sels de sodium, se montrent inactifs ; il en est de même des produits du manganèse. Dans la huitième série, le fer, le nickel, le cobalt ne présentent pas d'effets sur la plaque photographique. Aucun des métaux du groupe du platine ne noircit la plaque. Les effets constatés dans le cas de l’osmium et du ruthénium pulvérulents sont dus, semble-t-il, à une action chimique. Une expérience d'électricité. — La Société Italienne de Physique vient d'accorder une médaille à une intéressante expérience d'électricité’, imaginée par M. 1. Schincaglia, professeur de Physique à l’Institution Technique Royale d'Ancône. On sait que les courants induits dans le secondaire d'une bobine de Ruhmkorff sont susceptibles de prendre un potentiel suffisant pour produire dans l'air des décharges électriques d’étendue considérable. En donnant au courant lancé dans le primaire un certain potentiel, l'auteur réalise, par l'emploi d’un interrup- teur électrolytique convenable et d'un éclateur spécial en série avec le secondaire, une succession périodique de tous les phénomènes de la décharge. L'éclateur (fig. 4) se compose de quatre solénoïdes de fil de cuivre isolé, disposés en série et dont les deux 1 L'Æleltricista, n°35, 1909. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE extérieurs M, N, sont fixés, tandis que ceux du milieu A, B, repliés vers le bas, se terminent respectivement par une pointe S et un disque S/, distants au repos de quelques centimètres. Ces deux solénoïdes du milieu sont doués d'une mobilité suffisante pour pouvoir, avec un effort minime, exécuter des oscillations pendu- laires. Pour arriver d’une borne à l’autre du secondaire, le courant induit parcourt successivement les quatre spi- rales: trouvant une solution de continuité entre la pointe et le disque, il exécute, grâce au fonctionne- ment de l'interrupteur électrolytique, un mouvement oscillatoire qui donne à la décharge, dans l'intervalle extrêmement court d'une demi-oscillation, les aspects multiformes que lui attribuent les variations de la dis- tance explosive, du nombre d'interruptions et de l'intensité et de la force électromotrice du courant induit. M. Schincaglia a construit, à cet effet, dans son laboratoire d'électricité, l'interrupteur électrolytique à orifices représenté par la figure 2. Une boîte en bois renferme trois cuvettes à accumu- Fig. 1. — Appareil réalisant successivement tous les phé- nomènes de la décharge. — M,N, solénoïdes fixes; A,B, solénoïdes mobiles ; S, pointe; S', disque. lateurs contenant de l’eau acidulée à 40 °/,, où plon- gent trois lames de plomb R disposées le long des parois transversales et reliées par un fil de cuivre à une borne attachée au couvercle. A l'intérieur de chaque récipient, sont disposées deux grosses éprou- vettes de 24 centimètres de hauteur et de 5 à 6 centi- mètres de diamètre, au fond ou, mieux encore, aux côtés desquelles on pratique un petit orifice Q, dont le diamètre est intermédiaire entre un minimum de 14 et un maximum de 3 millimètres. Les petits cylindres de plomb P, à l'intérieur de ces éprouvettes, commu- niquent, à l’aide des tiges O, avec l'un de deux mor- ceaux de cuivre M, M! enchâssés dans une plaque de matière isolante. Ces deux morceaux de cuivre peu- vent être mis en communication au moyen de la fiche C. Les six éléments, qui tous sont construits de facon identique, peuvent être combinés entre eux en nombre quelconque. Cet interrupteur fonctionne avec un potentiel assez élevé en série avec le primaire, qui comporte encore une résistance réglable à la main, un plomb fusible et un simple interrupteur de courant. Ce dispositif permet d'obtenir au secondaire des dis- tances explosives très considérables avec de faibles intensités de courant, mais un potentiel assez élevé dans le primaire. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 939 RE — —_—_E_EE Dans la figure 1, il existe au commencement, entre la pointe et le disque, une distance de 10 à 45 centi- mètres. Pour amorcer les oscillations des solénoïdes intérieurs A B, il faut qu'entre Set S'il se produise, non pas une décharge explosive, mais seulement une décharge silencieuse en forme de panache. Au moment même où le courant est lancé dans le primaire, les solénoïdes M, À, d'une part et B, N, d'autre part, se trouvent chargés d'électricité à une différence de potentiel énorme, produisant une action de répulsion électrostatique très intense entre M et A et entre N et B, de façon qu'en K et K'!se forment des renflements très visibles. Grâce à la mobilité extrême de A et B, la pointe et le disque se rapprocheront ensuite à quelques cen- Fig. 2. — Interrupteur SÉco AE à orilices. — R, lame de plomb; P, cylindre de plomb; Q, orifice : O, tige de cuivre, MM, morceaux de cuivre: C, fiche de contact : B,V,V,' isolants. limètres de distance, de façon à former des décharges explosives qui diminuent la répulsion mentionnée ci- dessus. Or, en commencant la moitié rétrograde de leur oscillation, A Set B S'interrompent les décharges de facon à reproduire la répulsion qui augmente l'amplitude du mouvement pendulaire. C’est ainsi que la distance entre la pointe S et le disque S' subit des variations énormes : Au contact entre S et S', c'est- à-dire quand cette distance s’annule, il se produit un violent arrachement, comme si l'éclateur mobile subis- Sait de la part de la décharge une action mécanique ; lorsque, au contraire, la distance dépasse la longueur de 30 centimètres, les solénoïdes s'incurvent comme Je font voir les lignes pointillées de la figure 1. Le mouvement, une fois amorcé, s'entretient avec une régularité assez grande, parce qu'à ces actions il faut ajouter l'effet électrodynamique du courant induit qui, en se propageant dans les spirales en sens opposés, produit une répulsion. Ce dispositif permet de réaliser sans interruption aucune, et en succession rapide et périodique, toutes les formes possibles de la décharge dans l'air. D'autre part, cette expérience met en évidence cer- laines propriétés des interrupteurs électrolytiques el des courants induits de la bobine de RuhmkoriT, C'est ainsi qu'un simple galvanomètre vertical à très grande résistance, inséré dans le secondaire. pendant le mou- vement pendulaire de l'éclateur, oscille presque syn- chroniquement avec ce dernier, comme s'il était tra- versé par un courant continu, mais d’une intensité périodiquement variable. En mêtne temps se produit, aux orilices des éléments électrolytiques, en raison de la rapide variation de résistance dans le secondaire, un nombre d’interruptions fort variable aussi, et l'on entend des sons caractéristiques de timbre spécial et d'une hauteur variable suivant la distance qui sépare le disque et la pointe. Les solénoïdes peuvent être remplac: fils verticaux. par de simples $ 4. — Chimie Fabrication de la chaux sans installation Spéciale. — Cette opération mériterait d'être mieux connue et pratiquée plus souvent qu'elle ne l’est ae- tuellement. La proportion de houille employée n’est pas beau- coup plus considérable que quand on se sert de fours, mais la manutention des pierres et du combustible demande plus de temps. Par contre, on évite les frais de construction d’un four et on a la possibilité de réduire les transports au minimum. Les quantités respectives de houille et de calcaire à employer varient beaucoup suivant la composilion de l’une et l’autre de ces matières, beaucoup aussi suivant l'habileté du chaufournier. De toutes façons, il vaut mieux employer trop peu de houille que trop. Dans le premier cas, on aura une certaine proportion d'incuits qu'on pourra repasser à une fournée suivante ; dans le second, on peut avoir, surtout si la cuisson est vive- ment conduite, une fusion des silicates mélangés au calcaire, les matières fondues pouvant enrober une bonne partie de la chaux et en rendre ainsi impossible l'utilisation, Un wagon de houille de 10.000 kilogs sera souvent suffisant pour traiter 50 mètres cubes de Pierre calcaire. (Nous indiquons ces quantités à titre d'exemple, mais on peut traiter plus ou moins de matières.) Sur une aire circulaire de 5 mètres de diamètre, aplanie et légèrement tassée, on creuse. au centre, une cavité, circulaire aussi, de { mètre de diamètre et 50 centimètres de profondeur. On relie cette cavité avec la périphérie par un canal de même profondeur et de la largeur d’un fer de bêche (ce conduit servira à l'allumage). Dans cette cavité circulaire, on dispose un foyer pouvant prendre feu assez facilement, soit successivement : de la paille, du bois assez menu, puis des bûches ou rondins formant une voûte solide, Ceci fait, on étend sur toute l’aire une première couche de pierres plates, qui doit protéger la cavité du centre et le conduit contre les affaissements. On dispose ensuite des couches successives de houille et de calcaire, ces dernières devant être à peu près cinq fois plus épaisses que les premières On va en rétrécissant suffisamment pour donner à la masse une certaine solidité et on termine par une couche de calcaire. On recouvre le tout de pierres plates, puis de gazons et, en dernier lieu, de mortier de terre. On laisse un certain nombre d'évents, d’abord en bas du côté du vent, puis en haut du côté opposé. Pour allumer, on se sert d’une torche fixée au bout d'une perche, torche qu'on introduit dans le conduit d'allumage. Une fois le feu bien pris, on peut boucher tout ou partie des évents; et il est même bon de bou- cher les crevasses qui pourront se produire dans le revêtement externe. Suivant qu'on réduit plus ou moins l’aération, la cuisson peut durer de quelques jours à trois semaines ; quand elle est conduite lente- ment, on arrive à éviter la formation de loupes (en : empêchant la fusion des silicates). Ch. Groud. 940 S 5. — Géologie L'origine tectonique des tremblements de terre de Provence et d'Italie. — Ces deux srands cataclysmes qui ont affecté l’Europe méridionale paraissent avoir tous deux été des tremblements de terre d'ordre tectonique, c'est-à-dire dus à de très légers mouvements du sol. Beaucoup d'auteurs considèrent les tremblements de terre comme en rapport avec les éruptions volcani- ques; cette hypothése ne parait guère fondée; les éruptions volcaniques déterminent bien quelquefois des tremblements de terre; mais ceux-ci sont très locaux ; les plus grandes éruptions connues n'ont donné lieu qu'à des séismes peu importants. M. A. Lacroix a donné des renseignements probants, en ce qui concerne la Martinique, où l'éruption n'a pas été accompagnée de tremblements de terre violents. Il est à remarquer que le phénomène sismique de Messine n’a été connexe d'aucune éruption volcanique ; ni l'Etna, ni le Stromboli n'ont manifesté de recru- descence. En Provence, aucun volcan digne de ce nom n'existe dans la zone dévastée. On a fait beaucoup d'honneur au petit pointement basaltique de Beaulieu, en lui attribuant la cause du séisme; car c'est précisement l’un des points qui, dans la région sinistrée, a été le moins atteint. Il est très curieux de constater, au contraire, ainsi que M. Montessus de Ballore l'a fait remarquer depuis longtemps, que lesrégionsépi-centresdes tremblements de terre coincident avec des lignes tectoniques, c'est- à-dire avec de grandes failles. A Messine, a écrit M. Dongier, le mouvement sismi- que aurait eu son origine dans la faille qui sépare les terrains anciens, cristallins, de l’Aspromonte calabrais des monts Péloritains siciliens. Dans les Bouches-du-Rhône, il est remarquable que la ligne droite qui joint les localités les plus éprou- vées : Salon, Pelissanne, Lambese, Rognes, Puy-Sainte- Réparade, coïncide avec une ligne de faille, connue depuis longtemps et tracée en particulier sur la Carte géologique détaillée (Aix, n° 235; tracés de L. Collot). Une autre zone éprouvée : Mouries, Éyguières, Alleins, Charleval, La l'oque-d’Antheron, coïncide avec une seconde faille parallèle, également très nette”. J'ai donc pensé que la cause du séisme devait être cherchée dans un léger mouvement de ce compar- timent de l'écorce terrestre qu'est la Chaîne des Côtes, comprise entre les deux failles précitées; ce léger mouvement à ébranlé tous les pays voisins, à peu près comme un caillou que l’on jette dans une mare déter- mine dans l’eau une série d’ébranlements qui vont en se réperculant jusqu’au bord. Mais ces ébranlements ne se sont pas propagés d’une facon régulière ; ils ont rencontré deux massifs calcaires stables, qui ont, pour ainsi dire, fait écran et ont forcé les ondes sismiques à se resserrer dans l'espèce de cul-de-sac compris entre eux deux et à y devenir plus violentes. Ainsi furent détruits les villages de Saint-Cannat, Puyricard, Venelles, etc. Il me paraît bien certain que ce n'est pas le mouve- ment luimême qui a causé les dommages, mais Pébranlement qu'il a communiqué à tout le sol meuble autour de lui. Paul Lemoine, Chef des Travaux de Géologie au Laboratoire colonial du Muséum d'Histoire naturelle. $ 6. — Botanique La résistance desgraines de Légumineuses aux températures élevées. A la réunion 1 Pauz Lemoine : Sur les relations tectoniques du tremble- ment de terre de Provence. L. /. Avant, Soreuces.t. CXVIIT, 21 juin 1909, pp. 166-1618. Observations faites sur le tremblement de terre de Provence (11 juin 1909). Bull. Soc. Philom. Paris, 10, t. 1, 1909, 34 pages, 2 cartes. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de 1909 de la Société helvétique des Sciences naturelles à Lausanne, M. 0. Schneider-Orelli a exposé les resul- tats d'intéressantes expériences sur ce sujet’. Une observation faite au cours d une opération industrielle a été le point de départ de ses recherches. On sait qu'un des exemples les plus frappants de transport de graines par les animaux est offert par certaines espèces de Medicago. En effet, à l'aide de leurs nombreux piquants, parfois recourbés en forme de crochets. ces fruits se cramponnent si bien à la toison des moutons qui les frôlent en passant, qu'après la tonte ils s’exportent avec la laine et ils subissent les divers traitements par lesquels passe la laine avant le tissage. C’est ainsi que M. Schneider-Orelli constata que nombre de ces graines, après avoir bouilli dans un liquide pendant une heure et demie, n'avaient pas perdu leur faculté germinative. Ce fait l'engagea à étudier de plus près leur résistance aux températures élevées, soit dans l'air, soit dans l’eau. Il résulte de ces expériences que certaines espèces de Medicago possédent des graines extraordinairement résistantes, plusieurs de ces dernières ayant fourni des plantes normales après avoir été soumises à une température soit de 100° C. pendant dix-sept heures, soit de 120° pendant une demi-heure. Par contre, aucune des graines de luzerne en expérience n'a pu supporter, même pendant un temps très court, une température de 130°. En raison de leur extrême dureté, quelques-unes de ces graines ont pu résister à un séjour de sept heures et demie dans l’eau bouillante (98° C.), ou d’une demi-heure dans l'eau maintenue à 120° sous pression dans l’autoclave. Toutefois, la résis- tance diminue beaucoup dès que, par suite de rupture du tégument de la graine, l'eau à pu pénétrer dans l'intérieur de celle-cr. $ 7. — Zoologie La fourmi rouge de Ceylan.— Parmi les indus- tries observées chez les insectes, l’une des plus remar- quables est celle de la fourmi rouge ou fourmi fileuse (Œvophy la smaragdina). Très commune dans la région Fig. 1. — Ouvrière portant entre ses mandibules une larve fileuse. chaude des Indes, de Ceylan, de Malacca et jusqu'en Australie et en Afrique, l'OEcophylle fait son nid sur les arbres, au milieu des feuilles, de préférence sur 1 mangui r. Ces constructions se distinguent en ceci que la soie quiles tapis-e est empruntée à la larve. En effet, lorsqu'une première escouade d’ouvrières a réussi à rapprocher les feuilles (travail qui dure d'ordinaire une à deux heures), on voit les fourmis fileu*es accous rir d'un nid voisin, chacune avec une larve entre se 1 Archives des Sciences phys. et nat., 4e pér., t. XXVUI no 11, p. 480 (15 nov. 1909). \ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE mandibules (fig. 1), et, en promenant ladite larve d’une feuille à l’autre, se servir de la soie fournie par celle-ci pour former la toile qui maintient les deux feuilles. L'OEcophylle se sert done de sa larve non seulement comme producteur de matière première (la soie sé- Fig. 2. — Œcophylles occupées à rapprocher deux feuilles. crétée par les filières), mais encore comme d’une na- velte à tisser. Ces faits extraordinaires, uniques probablement dans tout le règne animal, ont été observés par Holland à Ballangoda, en 1895, et confirmés dès lors par Ridley, Green, Chun et Doflein. Une figure publiée récemment par ce deruier auteur (fig. 2) montre, entre autres, une rangée de ces insectes occupés à rappro- cher deux feuilles préalablement écartées. Disposées sur une ligne au niveau de l'interstice, avec toutes les têtes tournées du même côté, les fourmis se cram- ponnent à l’une des feuilles au moyen de leurs six on- gles, tandis que, tirant sur l’autre feuille au moyen de leurs mandibules, elles reculent peu à peu jusqu'à ce que les bords soient en contact Quelques fileuses ac- courues à la rescousse s'apprêtent justement à com- mencer leur travail. M. E. Bugnion, professeur à l'Université de Lau- sanne, qui a passé l'hiver dernier à Ceylan. a confirmé et complété ces observations et, au dernier Congrès de la Société helvétique des Sciences naturelles, il a . — Chaine d'Œcophyiles s'efforçant deux feuilles très éloignées. de rapprocher communiqué quelques faits nouveaux, résumés dans le dernier numéro des Archives des Sciences physi- ques et naturelles”. # Numéro du 15 novembre 1909, p.511 et suiv. Ainsi il a pu voir, outre les fourmis disposées sur un rang (telles que les figures Doflein), de véritables chaines d’OEcophylles tendues parallèlement d'une feuille à l'autre, travaillant d'un commun accord (fig. 3). Ces chaînes, qui apparaissent lorsque l’écartement d'une. feuille dépasse la longueur d’une fourmi isolée, sont formées de plusieurs individus (le plus souvent 5 ou 6) solidement accrochés les uns aux autres, cha- que insecte tenant au moyen de ses mandibules Ja taille de celui qui le précède. Cette taille, très fine, représente le premier segment abdominal. Dans le cas observé, l’interstice des deux feuilles, large de 3 à 4 cen- timètres, était rempli d'un grand nombre de ces chaînes, exactement juxtaposées, formant une sorte de dentelle vivante, de couleur jaunâtre. Ce spectacle, bien fait pour captiver un naturaliste, put, grâce à la position peu élevée du nid (2 mètres au-dessus du sol), être suivi sans peine de 5 heures après-midi à la nuit tombante. Etant retourné une der- nière fois auprès du manguier à 8 h. 1/2 du soir, M. Bugnion constata, à la lueur de sa lanterne, que les feuilles s'étaient un peu rapprochées, mais que les chaines d'OEcophylles tiraient encore, sans donner le moindre signe de lassitude. N'y a-t-il pas dans de tels faits, ajoute l'observateur, une sagacité, une intelli- cence du but à atteindre qui dépassent les limites de l'instinct ? $ 8. — Hygiène publique Les loges de concierge et les chambres de domestiques au point de vue de l'hygiène. — Il est regrettable de constater que, malgré les progrès de l’art de la construction et les louables préoccupations d'hygiène qui animent aujourd’hui les architectes, très peu de progrès aient été faits dans la disposition et l'aménagement de certaines parties de nos immeubles : nous voulons parler des loges de concierges et des chambres de domestiques. Cette question commence cependant à préoccuper les esprits et, depuis quelques années, ellea donnélieu à une série de travaux de MM. Pergod, Boureille, Juillerat, Tré- lat et Rey, les D'S Lucien-Graux et Henry Thierry, dont il est intéressant de donner un aperçu: Les maisons modernes, écrivent MM. Pergod et Boureille, possèdent des loges de concierge vastes, hautes de plafond, avec électricité, chauffage à la vapeur d'eau. L'ameublement de la pièce d'entrée, souvent installée par le propriétaire, est très conve- nable. Cette pièce est fréquemment un petit salon pour les personnes qui désirent écrire ou attendre. Mais, si la loge est confortable, elle n’est pas toujours salubre. L'air et le soleil y entrent rarement En géné- ral, l'ouverture de la loge donne sur une courette ou sur l'escalier, presque jamais sur la rue. La loge n’a donc le soleil qu'indirectement. Certaines loges ont le gaz ou l'électricité allumés le jour comme la nuit. Dans les maisons anciennes, la disposition des loges varie beaucoup. Comme dans les maisons neuves. elles sont la plupart du temps au rez-de-chaussée, quelque- fois même sur la rue. D'autres sont au niveau du sol, quand elles ne sont pas en contre-bas, et sur terre- plein, d’où une humidité permanente. D'autres encore n'ont pas la hauteur réglementaire, laquelle hauteur est amoindrie par une soupente où le lit se trouve installé, et, dans ce cas, il est même impossible de s'y tenir debout. Mais on en rencontre encore au fond des courettes et, au premier étage, dans un escalier privé de soleil. Très peu de loges anciennes comportent plus d’une pièce, qui sert de loge, chambre à coucher, salle à manger et cuisine. Parfois une petite construction en planches ou en briques, installée dans la'cour, sert de cuisine ; mais cela est une rareté. La nourriture est préparée à la hâte et cuite sur un petit fourneau à gaz installé sur une planche, dans un coin, dans un défoncement de mur ou dans la cheminée. 9242 sont éclairées et aérées sur des courettes La concierge y lave son Les loges de très ET dimensions. o linge et l'y fait sécher ; les murs sont très sales, parce que les locataires y jettent quantité de détritus. Lorsque les courettes sont vitrées, le concierge est protégé contre les malpropretés se étages supérieurs, mais n'a plus d'air ni de soleil. Par contre, ces cou- rettes vitrées donnent une grande chaleur en été et une température humide et glaciale en hiver. On concoit que, dans de telles conditions d'habita- tion, les concierges fournissent un tribut élevé aux maladies contagieuses, et tout particulièrement à la tuberculose. Or, la salubrité des loges est intéressante à un double aspect : santé de ceux qui en sont titulaires, santé de ceux qui habitent la maison. Si le concierge est tuber- culeux, il souille non seulement la loge, mais ses abords, porche, porte, couloirs, passages, etc., où le balayage se fait, bien entendu, à sec, soulevant les poussières et les bacilles. La ville de Paris à déjà essayé de réagir contre les inconvénients de voisinage du concierge avec les locataires, là où il lui était possible d'intervenir. Aïnsi, le règlement de ses: écoles oblige le concierge à évacuer de sa loge tout membre de sa famille ou lui-même, s'il est atteint d’une mala- die contagieuse. Mais on n'en est pas encore là dans les maisons particulières. On sait avec quelle facilité se propage la scarlatine, dontlessquamespulvérulentes peuvent volti- ger ou s'attacher aux objets, transporter le germe à distance. Les paquets et correspondances des locataires, que les facteurs déposent à plusieurs reprises au cours de la journée dans la loge, y sont manipulés par les concierges et leur famille. Ce sont des véhicules tout désignés. Que d'autres moyens de contamination offre la loge à chambre unique, en général, pour la maison! Les locataires sont obligés parfois d'entrer pour un rensei- “nement, et les bonnes y font des séjours et des conversations, dont l'oblig ation ne se fait peut-être pas sentir, mais qui n’en sont pas moins recherchées de part et d'autre. Si le concierge a des enfants, il est difficile que ceux-ci échappent aux épidémies du jeune âge ; ils favorisent alors la création du foyer dans la inaison. Pour les domestiques, situation analogue. Les do- mestiques sont tantôt logés, tantôt couchés seulement. Comme pour le concierge et l'employé, ce logement ou ce couchage est une part du salaire. Ordinairement, les domestiques sont logés dans une petite chambre, souvent mansardée, située au dernier étage de la maison. L'air y entre rarement. Le soleil y pé inètre trop ou trop peu. Un simple vasistas, quelque- fois une fenêtre, éclaire la pièce. Rien ne protège contre la chaleur ou le froid. La cheminée est absente. I n'y a ni jalousie ni persienne. Il y fait très froid l'hiver et très chaud l'été. Le e domestique n'y vient que tard le soir, pour s'y coucher, et n’y reparaît plus de la journée. Les meubles, fournis par le patron, sont des plus modestes. Un petit lit de fer, pour une per- sonne, une petite table en bois blanc, un bougeoir, un pot à eau, une cuvette et une chaise composent l’'ameu- blement. Le porte-manteaux est derrière la porte et formé souvent par des clous qui supportent les vête- ments. A l'Exposition de la tuberculose, au Grand-Palais, en 1905, se trouvaient représentées côte à côte une chambre de domestique ue le quartier des Champs- Elysées et une cellule de la pRÉON de Fresnes-les- Rungis. Cette dernière semblait beaucoup plus spa- cieuse et salubre que la chambre de domestique. Les domestiques peuvent être couchés et non logés. [ls restent, dans ce cas, dans l'appartement de leur patron. Ceci se rencontre surtout chez les petits com- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE merçants, les employés aisés, el dans certaines pro- fessions (médecins) où il est nécessaire que quelqu'un demeure constamment dans l'appartement. Quand l'appartement est suffisamment grand, domestique à sa chambre à elle — ce qui est rare. De fréquemment, elle couche dans l’antichambre, la salle à manger, la cuisine, sur un lit-cage que l’on range le matin dans un coin ou dans un cabinet de débarras. Lorsque la domestique couche dans la cuisine, elle se trouve dans de très mauvaises conditions d'hygiène. Si elle couche dans une vaste pièce de l'appartement, l'hygiène est respectée, mais la personnalité de l’indi- vidu est totalement supprimée, et de semblables choses ne peuvent être tolérées au nom de la salubrité. La situation est parfois pire, et l’on peut voir des domes- tiques coucher le soir dans la cuisine après avoir dis- posé leur matelas sous la hotte. Le caractère et la santé des domestiques se ressen- tent bientôt d'une pareille existence, et qui sont ceux qui en supportent les plus immédiates conséquences, sinon les personnes qui ont recours à leurs services? La collectivité tout entière est donc intéressée aux conditions dans lesquelles sont logés concierges et COR SRARES car, en dernier ressort, c’est sur elle que s'en fait sentir la répercussion. Il n est donc pas éton- nant qu'au moment où l’on à élaboré la loi de 1902 sur la santé publique, les hygiénistes se soient préoc- cupés de cet état de choses: ils sont parvenus à faire insérer dans la loi la disposition suivante, relative aux loges de concierge : Une loge de concierge ne pourra avoir, el ce, par excep- tion, une surface inférieure à 12 mètres ; les cuisines annexes à ces loges, qui seraient éclairées et aérées sur une courette, devront ètre munies, en plus du tuyau de fumée réglementaire, d'une cheminée de ventilation d'une section minima de 4 décimètres carrés et montant à 1 mêtre au-dessus de la partie la plus élevée de la construction, ou de tout autre dispositif assurant une ventilation équiva- lente. La cheminée de ventilation sera, autant que possible, contiguë au tuyau de fumée. En ce qui concerne les surfaces des cours sur lesquelles ces loges sont éclai- rées, elles ne peuvent être inférieures à 15 mètres superti- ciels et les vues directes ne pourront s'étendre à moins de 4 mètres et de 2 mètres pour les cuisines; les baies de croisées devront avoir un ensemble de section d'au moins un cinquième du sol de la pièce. Les loges servant à l'ha- bitation de jour et de nuit et pourvues d'un appareil de chauffage, fourneau ou calorifère, devront être ventilées. Malheureusement, la loi de 1902 n'ayant pas d'effet rétroactif, seules les maisons nouvelles, dont le plan à construire est soumis à l'examen des Services d'Archi- tecture et d'Hygiène, bénéficient de ces dispositions. A l'égard de ce qui existe, on n'a pris aucune mesure. On s'est occupé de l'avenir, mais pas du présent. Pour combler cette lacune, tout au moins en ce qui concerne Paris, M. Emile Massard, s'appuyant sur une autre disposition de la loi, vient de déposer devant le Conseil municipal la proposition suivante : « L'Administration est invitée à interdire l'habitation, en vertu de la loi de 1902 sur la santé publique, de toutes pièces non éclairées et aérées par une fenêtre, à proscrire les lucarnes dans les chambres à coucher situées dans les combles ou ailleurs, et à faire appli- quer rigoureusement tous les règlements d'hygiène aux logements occupés par les concierges, domestiques et employés couchés. » En outre, il a proposé que le Conseil émette le vœu : « Que les services compétents du Ministère de l’Inté- rieur et du Ministère du Travail accordent aux con- cierges et domestiques la même protection qu'aux autres travailleurs. » On ne peut qu ‘applaudir à cette initiative et sou- haiter que ces propositions soient adoptées et se géné— ralisent dans d’autres villes. FRÉDÉRIC HOUSSAY — LA FORME ET LA STABILITÉ DES POISSONS NOUVELLES SUR LA FORME ET LA Dans un précédent article”, j'ai étudié la résis- lance à l'avancement et la stabilité d'un certain type poisson, défini, quant à sa carène, par un cône de révolution à base antérieure, retaillé à l'avant par un dièdre à arète horizontale et à l'arrière par un dièdre à arête verticale, et, quant à ses nageoires, par une certaine disposition dont j'ai exposé le détail.Or, ce type est réel et repro- duit fidèlement celui de nom- breux poissons rapides, tels que les Squales ou les \ Truites; cepen- NS dant, il en existe un autre,que l’on peut concevoir comme une COM- pression latérale du précédent et qui est également fort répandu. L'insertion des na- geoires y est, d’ailleurs, tout autre et leur jeu, sans doute, doit être assez différent. Parmi ces poissons comprimés latéralement ?, il faut, au reste, tout de suite distinguer deux caté- gories : ceux qui sont faiblement comprimés, comme les Carpes, les Tanches, les Vieilles, dont la marche usuelle est assez lente, et ceux qui sont plus comprimés, comme les Daurades et les Thons, possédant une réputalion plus ou moins jusli- liée de grande vitesse. Laissant core une fois de côté les types par (Top spéciaux, comme les Con- gres, les Anguil- les, les Pleuro- nectes et les Raies, j'ai fait une étude minutieuse des deux catégories de poissons comprimés dont je viens de parler; j'y ai- relevé des faits nou- veaux et intéressants, qui m'ont d'ailleurs amené à en- Fig. 2: ‘ Carènes et poissons. Stabilisation par les nageoires. ltev. gén. des Sciences du 30 juillet 1909. ? J'emploierai toujours ce terme de comprimés latérale- ment, ou, plus brièvement, de comprimés, afin d'éviter une confusion avec les poissons plats, Pleuronectes el Raies. 943 EXPÉRIENCES STABILITÉ DES POISSONS revoir et à compléter ceux que m'avait déjà livrés l'étude du type non comprimé. I. — MODÈLES ARTIFICIELS DE POISSONS COMPRIMÉS. $S 1. — Construction des carènes. Fig. 4. — Modèle artificiel reproduisant la forme Daurade. — Modèle artificiel reproduisant la forme Carpe. d'abord que les poissons comprimés ont toujours des formes Observant courtes, comparables aux + formes x déjà étudiées, je ne construisis mes modèles qu'en une seule lon- gueur, celle de * 18 centimètres. Je voulus aussi conserver la mé- me surface au maitre - couple. Prenant pour point de départ un cône à section droite elliptique, au lieu d’un cône de révolution, j'adoptai les dimensions respectives suivantes : DEMI-DIAMÈTRE DE BASE SURFACE DE BASE R— 17um\|1 nR?= 7 X 289mm2 a—120m;:}—24;0m xah— xx 28$mm? a—9nm;:bh—32mm rab—7xx288mm? Cône de révolution. Type « Carpe». . Type « Daurade » Cela étant, je praliquai sur mes deux cônes comprimés les tailles horizonta- + les et verticales | et j'eus des carè- F nes fort analo- ; gues aux Corps } des poissons que + j'avais en vue et que reproduisent les figures 1 et 2. Modelées dans du bois de peu- plier très léger, je dus les lester fortement; ce lest, d’ailleurs, en raison de la compression, devait être plus efficace que sur les formes rondes. J'insiste sur ce point, afin qu'on ne voie pas dans une diffé- ! Dans mon précédent article, une erreur typographique indique 24 millimètres comme diamètre (ransversal: en réalité, c'est 34 millimètres, et 17 millimètres pour demi- diamètre. , ce PS rence de lestage une explication à la stabilité moindre dont je parlerai tout à l'heure, puisque ce serait tout le contraire de la réalité. $S 9 S = . — Construction des nageoires. J'établis les nageoires avec les mêmes tigelles d'acier, les mêmes plaquettes d'aluminium, les mêmes caoutchoucs et les mêmes dispositifs que j'ai suffisamment décrits dans mon précédent article. Parlons d’abord de celles que je laissai identiques à ce qu'elles étaient sur le type antérieur. L'anale demeura tout à fait sans changement, ainsi que la caudale, à ce détail près que j'arrondis la forme sur le modèle « Carpe » et que je l’effilai sur le modèle « Daurade ». La dorsale de ces poissons est ordinairement fort longue, unique et souple; je lui donnai la même longueur que dans la nature et, pour conserver sa souplesse, je la divisai en trois volets vibrant séparément. Les nageoires abdominales sont, chez les poissons qui nous occupent, ramenées presque à la même zone transversale que les pectorales; de plus, elles ont quitté la ligne latérale et sont descendues jusqu'au bord ventral du corps; elles sont plus rapprochées l'une de l’autre à leur arrière qu’à leur avant. Pour les construire, je plantai, vers le bord ventral de la carène, deux tigelles d’acier inclinées à 45° sur le plan de symétrie et distantes l’une de l’autre de 16 millimètres à leur base. Sur chaque tigelle, j'enfilai le bord roulé en tuyau d’un trapèze d'aluminium; la petite base du trapèze dirigée en arrière était battante : je la fixai à la carène par un caoutchouc, de facon à la rapprocher de la lame symétrique. Sous le ventre du modèle, j'avais ainsi établi une sorte de toit plus étroit à son arrière qu'à Aer. 3. — Insertion de la pectorale chez la Daurade. Fig. son avant,”"et l’étroitesse à l'arrière variait suivant lavibration des lames d aluminium ramenées par les caoutchoucs tenseurs. Les nageoires peclorales présentent, dans les deux!types que j'étudie, des ressemblances super- ficielles et des différences profondes. Dans les deux cas, leur insertion est transversale, et, d'après cela, FRÉDÉRIC HOUSSAY — LA FORME ET LA STABILITÉ DES POISSONS elles paraissent devoir exclusivement servir de rames ou de freins, ou tout au plus de gouvernails de profondeur pour la montée et la descente. Mais il faut distinguer radicalement entre les deux façons dont elles fonctionnent réellement. Dans le premier Fig. 4. — Reproduction artificielle de la pectorale du type Daurade. type : Carpe (Cyprinus), Tanche (Tinca), Vieille (Labrus, Crenilabrus), ete…, les pectorales souples sont susceptibles de mouvements très divers; elles servent effectivement, dans la marche lente, de rames qui peuvent faire avancer ou reculer, de gou- vernails pour monter ou descendre; mais, dans la nage filée qui suit un brusque coup de queue, elles sont collées au corps, autant dire supprimées el, sur le modèle qui représentait ce type, je n'en posai pas du tout. Dans le deuxième type, Daurade (Chrysophrys, Pagellus, ete.) ou Thon (7hyunus), la pectorale se comporte autrement. Dans le bassin de l'aquarium de Roscoff, j'avais longuement vu nager des Pa- gellus centrodentus et j'avais observé avec certi- tude l’étalement horizontal de leurs nageoires pec- torales; l'insertion semble mal se prêter à ce jeu. Cependant, si l'on place sur un poisson frais le doigt en avant de AB (fig. 3), la nageoire se redresse per- pendiculairement au corps; le bord AC demeure assez rigide et il semble que les rayons, plus souples en s'approchant de BC, sont susceptibles de fuir en arrière sous la pression de l’eau et de trans- former la nageoire oblique en une nageoire horizon- tale, mais non sans une certaine résistance qui aurait pour effet de faire toujours monter le poisson, ce qui n’a pas lieu. Pour en avoir le cœur net, j'ai disséqué la musculature de l'épaule; sans entrer ici dans tous les détails anatomiques, je puis donner les deux conclusions suivantes : 1° Les masses musculaires sont beaucoup plus importantes en avant qu’en arrière, ce qui exclut le rôle de rames; 2 Les masses antérieures Lirent la nageoire en avant de façon à l’amener perpendiculairement au corps, mais elles agissent surtout en tirant sur le point A et tendent à l’abaisser; en même temps, les masses postérieures Lirent presque exclusivement pour relever le point B. En sorte que, malgré l'appa- rence morphologique du poisson mort ou immobile FRÉDÉRIC HOUSSAY — LA FORME ET LA STABILITÉ DES POISSONS qui indique l'insertion en AB, le fonctionnement se fait comme si elle était en A'B’ et maintenue en cette position par deux tractions élastiques. Après ces constatations, je suis arrivé à imiter convenablement la pectorale, en position de nage filée, de la facon suivante : J'ai planté dans la carène, perpendiculairement au plan de symétrie, une tigelle d'acier AB (fig. 4), sur laquelle j'ai enfilé, comme d'ordinaire, le bord roulé en tuyau d'une plaquette d'aluminium taillée en la forme échancrée que ces nageoires affectent. Le sommet C battant était retenu par deux caoutehoues fixés par des fils 945 valent ces formes au point de vue de la résistance à l'avancement et quel est leur rendement quand elles marchent stables aux diverses vitesses. Je les ai étudiées avec le mécanisme que j'ai décrit dans mon premier article et, traitant les données de la même facon, j'ai obtenu pour le type Carpe et pour le type Daurade les deux courbes ci-jointes (fig. 5), qui expriment en abscisses les puissances du mécanisme moleur el en ordonnées les pourcentages de la puissance perdue par la résistance du poisson trainé dans l'eau‘. Pour avoir des termes de comparaison, j'ai T x le L à ; [ 0 l \ 1 ll 0 1 1 1 x 1 ( ! \/ FRE ! : | il s =, | ! 1 0 = -.+. 5 = [l ÈS ll HR NE l LS |! : i -Yle l ! ERA T- CE ERRS ñ l Chr oil EN POUR PRE CES 0 ! 1 CAE s LP SVR ; MEL TEA PTE l 40 ml 200 400 600 800 1000 1200 1400 1500 Fie. 5. — Courbes donnant les pourcentages de la puissance perdue par la resistance du poisson trainé dans l’eau (en 8 g P P P ordonnées) en fonction de la puissance du mécanisme moteur (en abscisses). — C, Carpe; D, Daurade ; Il &, veine inversée à bords souples ; VI «, poisson-type.— Le trait double indique les régions où les nageoires abdominales doivent ètre tendues. aux vis Det E, pour leur assurer une tension plus ou moins grande. II. —— RÉSULTATS DES MESURES ET DES OBSERVATIONS. $ 1. — La vitesse des poissons comprimés. J'ai éprouvé, pour stabiliser pendant la marche les deux sortes de poissons comprimés, des diffi- cultés extrêmement grandes, parce qu'il y avait, relativement à la tension des nageoires, un déter- minisme très précis dont je n'avais pas la moindre idée et qu'il m'a fallu découvrir par des tâlonne- ments répétés. Mais supposons résolue cette question, que je sais traiter un peu plus loin, et voyons ce que reproduit sur le même graphique les courbes des deux formes courtes précédemment éludiées : la meilleure, celle du poisson type (VL), la plus mau- vaise, celle de la veine inversée à bords souples {11,). Il faut observer que l'échelle horizontale est réduite de moitié sur celle du graphique de mon article précédent. La courbe fournie par la forme Carpe n'a rien que de très attendu. Aux faibles vitesses, elle est appro- ximativement aussi bonne que celle du meilleur poisson, mais elle perd rapidement sur celle-ci dès que la vitesse augmente; c’est une condition qui concorde bien avec l'éthologie de ces poissons, que tout le monde avus nager avec leurordinaire lenteur. en ee ee OR 1 Voir le numéro du 30 juillet 1909. Plus imprévue est la courbe de la Daurade, qui accuse un très mauvais rendement. Est-ce à dire que ces poissons sont nécessairement lents? Pas tout à fait, mais cela signifie que, pour fournir de la vitesse, ils doivent dépenser une grande puis- sance musculaire. Ont-ils à leur disposilion une pareille puissance? Des études que je fais à ce sujet et que je publierai d'ici peu, je puis déjà extraire ce renseignement que les Pagellus ont, en effet, une grande puissance musculaire; mais, à poids égal, elle est inférieure à celle de divers autres poissons, notamment de la Truite. Ces poissons, certainement, ne sont donc pas parmi les plus rapides et la vitesse leur coûte. Pourquoi d'ordinaire est-on porté à les considérer comme d'excellents nageurs? C’est, je pense, en raison de la forme effilée de leurs nageoires, qui fait songer aux ailes d'hirondelle et évoque des images de rapidité. Mais, comme je vais le montrer plus loin, le contour effilé des nageoires ne se produit nul- lement comme une condition de vitesse, mais comme une condition de stabilité. Si cette forme très comprimée n'a élé déterminée ni par la vitesse, ni par la facilité de stabilisation, à quel déterminisme physique peut-elle bien répondre? C'est un problème nouveau, survenu au cours de cette étude, qui se complique à mesure qu'elle s'étend. J'ai, relativement à sa solution, quelques idées, mais je préfère ne les exprimer qu'après leur avoir fait subir l'épreuve expéri- mentale. $ 2. — La stabilité des poissons comprimés. En placant des nageoires vibrantes sur mes premiers modèles de poissons et sur les cônes, j'avais donné aux caoutchoucs qui les rattachaient à la carène une certaine tension moyenne qui, par sentiment, m'avait paru convenable. Depuis, je l'ai mesurée; elle équivalait à une traction de 40 grammes. J'avais tout de suite obtenu un très bon résultat, sauf à de certaines vitesses bien déter- minées que j'avais appelées vitesses de stabilité précaire. La nolation que j'en avais faite sur mon qu'il d'un état exceptionnelet que presque en toutes circonstances graphique montrail s'agissait mon dispositif stabilisait absolument. Avec les poissons comprimés, ce fut tout autre chose. En les posant dans l’eaw et en les laissant immobiles, ils flottaient parfaitement droits. Mais, dès qu'on leur imprimail un mouvement, ils se couchaient sur le côlé el lraïnaient à la surface. Que si, par hasard, on arrivait à les faire marcher droit à une certaine vilesse, tout élail à recom- inencer en changeant le poids moteur. I fallut éludier méthodiquement la chose, et bientôt je reconnus que la tension des caoutchoucs attachant FRÉDÉRIC HOUSSAY — LA FORME ET LA STABILITÉ DES POISSONS f _4 ; - : $ les nageoires élail en question, mais comment » D'abord, au lieu de fixer d'une facon permanente les caoutchoues à la carène, je terminai ceux des pectorales et des abdominales par un fil attaché & une vis perforée à cet effet et, en lournant cette vis dans un sens ou dans l’autre, je tendais ou déten- dais avec facilité chaque caoutchouc. Cela me“ permit de multiplier les essais et de parvenir à régler convenablement les nageoires. ï Parlons en premier lieu des pectorales. Dans les type Carpe, il n'y en a pas sur mon modèle, pour les raisons que j'ai exposées plus haut : c'est très simple. Dans le type Daurade, il fallait avoir soin que les deux caoutchoucs attachés à la pectorale fussent également tendus quand la nageoire était horizontale, sans quoi le poisson montait ou descen- dait. Mais cette tension pouvait varier dans d'assez grandes limites, sans autre inconvénient qu'une perte de vitesse si elle était trop forte. L’optimum était donc de la tendre assez, sans trop, pour une vitesse moyenne, et elle pouvait rester ainsi pour. toute la série des mesures. Tout autrement en était-il des abdominales, dont la tension devait varier avec la vitesse. D'abord, je remarquai qu'à une vitesse donnée, la pectorale étant réglée, si les abdominales étaient trop lâches, le poisson tombait sur le côté et marchait à la sur- face; convenablement tendues, il filait parfaitement droit au niveau du fil qui le tirait; un peu trop tendues, le poisson marchait la tête inclinée en bas et la queue relevée, mais sans enfoncer ; beaucoup trop tendues, il remontait à la surface et marchait sur le flanc. La Carpe, dont les pectorales ne jouent pas pen- dant la nage filée, était plus sensible que la Dau- rade, mais les résultats étaient les mêmes. En fait, il n'y avait que deux tensions à donner : Lantôt les abdominales devaient être lâches, c'est-à-dire avec une tension nulle au repos, et le caoutchouc n’agis- sait que faiblement quand le battement de la nageoire l'y sollicitait; tantôt les abdominales de- vaient être tendues au repos par une force équiva- lente à 20 grammes. Le tableau suivant indique le rythme, en rapport vraisemblable avec les actions tourbillonnaires de l'eau, suivant lequel les abdominales devaient être tendues et détendues ; je l'indique pour la Carpe, où il est le plus précis ; celui de la Daurade suit à peu près : ABDOMINALES VITESSES A LA SECONDE 4 à 6 mètres. tendues. 3 à 4 mètres. läches. 1m,9 à 2m,9. tendues. Om,8 à Am, . läches. Entre la lension nulle et la tension forte, il y à une différence de 20 grammes, qui est lout à fait FRÉDÉRIC HOUSSAY — LA FORME ET LA STABILITÉ DES POISSONS O4T dans les limites de ce qu'un poisson de cette taille peut faire par les contractions des muscles de ses nageoires. S 3. — Stabilité précaire des poissons ronds et tension des nageoires. L'étude des poissons comprimés m'ayant obligé, sous peine de n'aboutir à rien, à préciser le rôle de la lension des nageoires dans la stabilité, j'en vins à penser que ce rôle, moins accentué chez les pois- sons arrondis, m'avait échappé dans l'étude que j'en avais faite et que, si je l'avais connu, j'eusse pu supprimer facilement les cas exceptionnels de stabilité précaire. Je repris alors les modèles qui m'avaient montré ce phénomène, à savoir le poisson (forme petite et longue, VI,, VL.), le cône (forme moyenne etlongue, IV:, IV,). Je supprimai aux nageoires pectorales et abdominales la fixation permanente descaoutchoues à la carène et rattachai chacun d'eux à un fil enroulé sur une vis, grâce à laquelle je pouvais à volonté augmenter où diminuer la tension. Aux points où primitivement les caoutchoucs étaient fixés en per- manence, je placai de petits ponts métalliques, d'abord pour avoir un repère qui indiquàt la ten- sion initiale, ensuite pour que le passage du fil ou du caoutchouc sous ce pont maintint la mème direction de traction. La forme courte de poisson, VI, était instable pour des poids moteurs compris entre 4100 et 100 grammes et pour des vitesses variant de 1,20 à 22,70 à la seconde, J'essayai d'abord de stabiliser pour l’état moyen de cet intervalle, c'est-à-dire pour un poids moteur de 250 grammes et une vitesse de 2 mètres à la seconde; j'y parvins en allongeant de 2 millimètres les caoutchoucs des pectorales et des abdominales, ce qui revenait à ajouter un supplément de 10 grammes aux 40 grammes de traction initiale. C'était très admissible. Pour les vitesses comprises entre 1*,20 et 2 mètres àlasecondeet cellescomprises entre 2mèêtreset2",70 à la seconde, je voulus voir s’il y avait lieu de réduire ou d'augmenter ce supplément de 10 grammes; je ne réussis pas la stabilisation. Elle était parfaite, au contraire, en laissant la même traction de 50 grammes pour toute la région de stabilité pré- caire. Pour cette forme encore, il n'y à que deux trac- tions possibles : 40 ou 50 grammes, sans état inter- médiaire, ainsi que je l'avais déjà vu pour les abdominales des poissons comprimés. Il n'en fut pas de même pour le poisson VI. Son instabilité avait lieu pour des vitesses comprises entre 1,50 et 22,30 à la seconde. L'intervalle se parlagea en deux autres. Entre1,50 grand et 1,90 à la seconde, je pus stabiliser avec une tension qui demeurail élastique, mais qui repré- sentait une force supplémentaire de 110 grammes ajoutée à la tension initiale de 40 grammes. C'est peu admissible comme contraction naturelle. En outre, pour des vitesses de 1",90 à 2%,30 à la seconde, j'étais obligé de remplacer les caoutchoues aux pectorales et aux abdominales par des fils rigides tendus raides, ce qui représentait une impossibilité musculaire. Donc le poisson court se stabilise facilement par des procédés comparables aux contractions muscu- laires ; le poisson long se stabilise par des procédés impossibles à comparer aux contractions museu- laires, mais enfin il se stabilise. Au contraire, j'ai absolument échoué dans tous Fig. 6. — Nageoire arrondie et nageoire efflée. mes essais sur les cônes. Ni la tension relächée, ni la tension accrue, ni la substitution des fils raides aux caoutchoues n'ont donné aucun résultat; il y a des vitesses pour lesquelles les cônes de forme moyenne et longue ne sont pas stabilisables par ces procédés. Y aurait-il à chercher d’autres combi- naisons? Je ne le nie pas; mais c'est un problème que je livre aux géomètres, et dont je n'entrevois même pas la solution. "y S 4. — Nageoires arrondies et nageoires effilées. Je pris facilement parti de mon échec relatif à la stabilisation des cônes; mais je ne pus admettre l'insuccès partiel relatif à la forme allongée de poisson, puisque enfin elle existe dans la Nature. Je remarquai alors que les grands volets arrondis par lesquels étaient, à dessein, représentées mes nageoires pectorales et abdominales, afin qu'elles fussent homologues et directement comparables à celles de la forme courte, étaient difficiles à raidir. Bien que tendues suivant AB et AC (fig. 6), larégion ombrée BDCE continuait à vibrer par le fait de son élasticité propre de lame métallique. D'un coup de ciseau, je supprimai cette zone et je réduisis la nageoire pectorale à sa région A BD C; elle prit alors l'allure naturelle que présentent les ‘ulerons des grands Squales. Je la remis, ainsi modifiée, sur la carène du poisson allongé sans rien changer aux abdominales. La stabilisation fut parfaite, avec la fension initiale de 40 grammes: la vitesse ne fut pas changée et resta remarquablement identique à ce qu'elle était : TEMPS AVEC NAGEOIRES .. l'OIDS MOTEURS arrondies effilées 200 grammes . 10,7 10",7 S00NEraMmmMeE UN SU 8",3 4001grammes." .… : - : ro 12 De la sorte, j'appris que les nageoires effilées sont une condition de stabilité et non de vitesse, puisque aussi bien et en outre, à des vitesses supé- rieures, la nagcoire arrondie fait très bon effet. OCTAVE DONY-HÉNAULT — OXYDASES ET. DIASTASES III. — ConcLusions. 1° La meilleure forme sfable, de résistance minima et de meilleur rendement, demeure la forme courte de poisson obtenue à l'aide des tailles inversées sur un cône de révolution ; 2° Toutes les formes de poissons se stabilisent à l’aide des nageoires. Sur les formes courtes, la stabilisation totale, quelle que soit la vitesse, peul toujours être obtenue par de légères tensions ou de faibles relâächements des nageoires paires. Sur les formes allongées, certaines vitesses exigent l'effile- ment des nageoires pectorales. Tous procédés simples et réalisés naturellement ; 3° La forme conique, à moins qu'elle ne soit courte, ne peut être stabilisée, à certaines vitesses, par aucun procédé comparable aux procédés simples de la Nature. Frédéric Houssay, Professeur de Zoologie à la Sorbonne OXYDASES ET DIASTASES On a coutume aujourd'hui d'attribuer à des «dias- tases respiratoires » le rôle physiologique éminent de présider, au sein de nos tissus, à l'oxydation des substances peu oxydables, destinée à libérer la chaleur et l'énergie nécessaires à l'organisme. L’in- corporation des « oxydases » au groupe des dias- lases est due, pour une bonne part, à Duclaux, qui, dans une magistrale synthèse des actions diasta- siques”, assimila les oxydases aux diastases clas- siques (diastases digestives, etc). Cetteconception séduisante nous satisfaisait plei- nement lorsque nous entreprimes, il y à plusieurs années, à l'Institut Solvay, les recherches sur l'oxy- dation organique que nous y poursuivons depuis lors. À mesure qu'elles avancaient, nous avons été amené à la rejeter, morceau par morceau, et nous croyons devoir la combattre aujourd'hui. C'est qu'ayant voulu retrouver dans les tissus l’« Wp—r- 1 Nous écrirons « Nombres » avec une majuscule pour marquer cette distinction. 962 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Nous voici de nouveau, on le voit, aux prises avec la difficulté rencontrée en commencant et il faut nous en féliciter, car l'auteur va être amené à en donner la solution sur cet exemple simple et concret. Nous con- seillons au lecteur l'étude du chapitre qui traite de ces racines 2° de l'unité : il n'aura pas de meilleure occasion de saisir, entre le nouveau domaine créé par M. Hensel et celui de l'arithmétique ordinaire, ce con- tact qu'il peut craindre de sentir lui échapper dans le reste de l'ouvrage. D'après ce qui précède, nous pouvons trouver un développement convergent qui, au sens ordinaire de l'analyse, représente un w et, dans «le domaine de p », un &. Jl ne peut être question de demander qu'il s'agisse du mème nombre dans les deux cas. La nouvelle convention établie par l'auteur consiste à faire correspondre à chaque w un &, d’une manière telle que toute relation algébrique (à coefficients rationnels) entre lesw ait aussi lieu entre les &, et inver- sement (d'où résulte évidemment qu'à deux w distincts correspondent deux à distincts). On peut toujours satisfaire à cette condition, et même elle ne détermine pas la correspondance cher- chée d'une manière complète, mais à une certaine substitution près, dont une puissance quelconque n'empêche pas le rapport en question de subsister. Il est clair qu'une telle substitution fera forcément partie du groupe de l'équation, tel qu'on le définit avec Galois. C'est cette convention que l’auteur va étendre au cas général. Il trouvera de même, dans le domaine d'un nombre premier quelconque p, des Nombres qui satis- feront, au sens nouveau{ce qu'on exprimerait en langage analytique ordinaire, en disant qu'ils satisferont « for- mellement »)à l'équation donnée. Entre ces Nombres et les racines proprement dites de l'équation, il établira une correspondance qui conserve toutes les relations rationnelles à coefficients rationnels. Une telle corres- pondance n'étant encore déterminée qu'à une puissance près d'une certaine substitution, on comprend, sans plus, que, dans le « domaine de p », les racines peuvent être réparties en cycles, el qu'on va ainsi pouvoir rendre à ce point de vue la théorie des nombres tout analogue à celle des fonctions. à Mais, pour rendre cette analogie complète, il faut encore triompher d'un obstacle important. Le nombre premier y de l'arithmétique ordinaire n'est pas néces- sairement, comme on sait, premier dans le corps algé- brique considéré. Mais il y a plus. La décomposition du nombre p en facteurs sera recherchée, non seule- ment à l'intérieur du corps en question, mais, en outre, suivant le module p (au sens défini plus haut). Dans ces conditions, une nouvelle décomposion peut se pro- duire : un nombre p, premier au sens classique, peut cesser de l'être (module p). Cette circonstance n'a d’ail- leurs lieu que pour des nombres très particuliers (ils doivent être pris parmi ceux qui figurent en facteurs dans le discriminant de l'équation). Mais, si p est un de ces nombres spéciaux, la mé- thode précédente devra être modifiée en conséquence. Les développements devront procéder non suivant les puissances de p, mais suivant celles du diviseur premier x qu'admet p: ce seront des Nombres-à-base 7, au lieu d'être des Nombres-à-base p. p est d’ailleurs (à une multiplication près par une unité dans le domaine de p) égal à une certaine puissance x° de x. M. Hensel: dit qu'un entier N est divisible par la puissance hîme du diviseur premier qui correspond à p (diviseur qu'il désigne par la notation p) si, dans le domaine de p, N'est divisible par xt. L’exposant de la plus grande puissance de g par lequel N est divisible n'est d'ailleurs pas nécessairement un multiple de e. De la notion de diviseur premier, on passe à celle de diviseur en général. On nommera ainsi un produit de puissances de diviseurs premiers, correspondant à des nombres p différents entre eux. Notre intention n’est pas de suivre l’auteur dans tous les développements auxquels il se livre dans cel ordre d'idées. Mais le lecteur un peu familier avec la théorie des corps algébriques ne peut manquer d'être frappé de l'identité qui existe entre les propriétés des diviseurs ainsi définis et celles des idéaux; et c'est en effet une nouvelle théorie des idéaux qui ressort, entre autres résultats, des principes de M. Hensel. Je ne sais si l’on n'arrive pas ainsi à la véritable origine de cette conception si profonde et dont l'acquisition à été une des plus difficiles conquêtes de la Science mathéma- tique. Ce ne serait pas là un des moindres mérites de ce livre si fécond en idées nouvelles et en points de vue originaux. JAcQUuEs HADAMARD, Professeur au Collège de France. 2° Sciences physiques Dunoyer (L.), Agrégé de l'Université, Préparateur au Collège de France. — Etudes sur les compas de marine et leurs méthodes de compensation. — Un nouveau compas électromagnétique. — 'hèse sou- tenue devant la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. La partie essentielle de ce travail est relative au nouveau compas électromagnétique, si remarqué dès les premières communications faites par l’auteur, et très original tant par son dispositif que par son mode de compensation. On sait qu'il repose sur le principe de l'inducteur terrestre, principe dont l'application possible en vue des compas avait été simplement signalée en Allemagne en 1901. L'idée nouvelle consiste d'abord à associer deux cerceaux de Delezenne soli- daires, animés d’un mouvement de rotation uniforme autour d’un axe vertical commun, et à disposer les plans de commutation rectangulaires entre eux, de manière à les faire coïncider respectivement avec l'axe longitudinal Ox et l'axe transversal Oy du navire. Par ce dispositif, qui constitue le transmetteur de l'appa- reil, il devient possible d'obtenir directement l’image du vecteur qui indique le cap au compas ©, et représente en même temps l'intensité du champ directeur H! à ce cap. Les galvanomètres, installés dans les deux circuits correspondants, et qui forment la seconde partie, appelée le récepteur, donnent, en effet, dans ces con- ditions, des déviations permanentes respectivement proportionnelles à H'sin?’ et H'cost'. Ces déviations se traduisent sur une glace dépolie sous la forme de deux longs traits lumineux rectangulaires entre eux et res- pectivement parallèles aux axes Ox et Oy. Si donc les deux circuits ont été, une fois pour toutes, réglés de manière à présenter exactement la même constante, le vecteur défini par le centre de la glace et le point de croisement P des deux traits lumineux représente le champ H' au cap considéré. Ainsi, d'une part, la rose gravée sur la glace permet de lire immédiatement le cap au compas. D'autre part, il suflit d'effectuer un tour d'horizon et de relever le lieu géométrique du point P pour obtenir le dygogramme elliptique relatif à la position assignée au transmetteur. La compensation de ce compas pourrait s'effectuer exactement à la manière ordinaire, au moyen des inèmes organes correcteurs. Mais la facilité même avec laquelle s'obtient le tracé du dygogramme a conduit M. Dunoyer à un nouveau mode de compensation pra- tique, très rapide et particulièrement ingénieux. C'est l'application, sous une forme toute nouvelle, d'un mode de compensation indiqué depuis longtemps, mais qui, avec les compas ordinaires, exige l'emploi, tou- jours délicat, souvent même impraticable, du déflec- teur de Lord Kelvin. Le principe consiste à assurer pratiquement la compensation en égalisant le champ directeur H!' à tous les caps. Le relevé de l’ellipse-dygogramme dispense de tout appareil spécial. La compensation consiste naturelle- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET 163 INDEX ment à améner d'abord le centre de l'ellipse à coin- cider avec le centre de la rose, et ensuite à égaliser les axes de l’ellipse. Au lieu d'opérer réellement cette compensation au moyen des correcteurs habituels, M. Dunoyer a eu l'idée curieuse de se dispenser de cette compensation « en réglant l'appareil de telle manière que ses indications soient équivalentes à celles d'un compas compensé ». Il suffit alors d'agir sur le calage des porte-balais et sur les résistances intercalées dans ies deux circuits galvanométriques pour ramener l’ellipse à un cercle. Un compas ainsi constitué présente le grand avantage d'être formé de deux parties nettement séparées, et de fournir ainsi aisément la solution du problème de la transmission à distance des indications d'un compas. Il devient possible ainsi d'obtenir, dans un blockhaus, les indications d'un compas installé à distance dans des conditions moins défavorables, c'est-à-dire dans une position où le champ directeur est suffisamment intense. De plus, ce compas semble, a priori, devoir être très stable au point de vue de la route, el ne pas être influencé par les inelinaisons du bäliment, car les dévialions des galvanomètres se trouvent affectées simultanément dans le mème rapport. En définitive, il paraît appelé à contrôler les indications des compas ordinaires de route et de relèvement, et sera même exclusivement utilisé dans les blockhaus et les sous- marins. Dans la première partie de son travail, M. Dunoyÿer a repris, sous une forme plus générale, l'étude des compas à rose immergée, ou compas liquides, qui ont l'avantage sur les compas secs de permettre des aiguilles de plus grand moment magnétique, très avan- tageuses dans fout poste où le champ directeur est faible, et qui offrent, d'autre part, le meilleur mode d'amortissement des oscillations de la rose dues aux vibrations de la coque. Il a précisé, en particulier, les lois de l'entrainement de la rose pendant les évolu- tions, entrainement dù à la liaison visqueuse que le liquide établit entre la rose et le navire. D'autre part, l'étude de la compensation quadrantale de ces compas l'a amené à développer une théorie nouvelle de l'action mutuelle du compas et des correcteurs de fer doux. Toutefois, les formules auxquelles il parvient ne se prè- tent pas aisément à la détermination numérique des divers coefficients qui y figurent. De plus, le rôle de l’action mutuelle, cependant non négligeable, des denx sphères n’a pas été envisagé. E. Haupté, Professeur à l'Ecole Navale Baillehache (C'° de), Zagénieur des Arts et Manu- factures, Ancien Élève de l'Ecole supérieure d'Elec- tricilé. — Unités électriques. — 1 vol. in-8° de 200 pages. (Prix : 6 fr.) Dunod et Pinat, éditeurs. Paris, 1909. L'auteur étudie les systèmes d'unités en général, les systèmes absolus, et, en dernier lieu, un système pra- tique. Il en dégage la conclusion qu'un système absolu n'offre pas un intérêt exclusivement scientifique, el qu'un système bien coordonné donne des combinaisons claires et fécondes, permettant toujours, si la nécessité s’en fait sentir, d'introduire une correction à la fin des opérations. Herz (D' W.), Professeur à l'Université de Breslau. — Les bases physico-chimiques de la Chimie analytique. Traduit de l'allemand par M.E. Parcrppr. — 1 vol. in-8° de 167 pages. (Prix: 5 fr.). Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1909. Le titre ne répond pas exactement à la teneur de l'ouvrage, qui est surtout un précis élémentaire de Chi- mie physique. Evidemment cette science joue un rôle capital en Chimie analytique, mais elle est avant tout la base de la Chimie générale. Aussi « les bases physico- chimiques de la Chimie générale » auraient mieux répondu, comme titre, au contenu de l'ouvrage. Ce que nous disons là ne diminue en rien la valeur du livre, qui est un exposé remarquablement clair des principes de la Chimie physique. Les formules mathé- matiques y sont réduites à leur plus simple expression, et des chapitres qui, ailleurs, trop souvent, manquent de clarté, comme les propriétés des colloïdes, les solu- tions solides, sont exposés ici avec un art didactique peu ordinaire. On sent le maître qui connaît les difficultés ; il se garde de les escamoter, mais il s'efforce de les appla- nir par la clarté de sa présentation. Cet ouvrage ne fait pas double emploi avec « Les prin- cipes scientifiques de la Chimie analytique », où Ostwald s'est plus spécialement limité aux réactions analy- tiques. Nous ajouterons, enfin, que le style clair et concis du traducteur, M. Philippi, rend la lecture de cet ouvrage des plus faciles. A. Hozraro, Chef du Laboratoire central des Usines de la Ci française des Métaux 3° Sciences naturelles Chudeau (R.), Chargé de Mission en Afrique occi- dentale française. — Sahara Soudanais. — 1 vol. 1n-8° de 326 pages avec 83 fiqures et cartes dans le texte et hors texte, dont une carte géologique en couleurs, 72 photographies et 2? photogravures hors texte. (Prix : 15 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1909. L'an passé, à pareille époque, je rendais compte ici mème de l'ouvrage de M. E.-F. Gautier sur le Sahara algérien, et j'annonçais l'apparition prochaine d’un deuxième volume, consacré par M. Chudeau au Sahara soudanais. Je viens d'achever la lecture de ce second volume, qui complète les publications de la Mission saharienne Chudeau-Gautier, et je suis beureux de constater tout de suite qu'il forme le digne pendant du précédent. Le plan en est cependant assez différent. Ses deux premiers chapitres (qui ont plus de 100 pages sont des monographies de pays, tandis que les cha- pitres suivants traitent de questions relatives à l’en- semble du Sahara. Au point de vue géologique, comme à beaucoup d’autres, il y à une opposition (rès nette entre la péné- plaine centrale du Sahara, formée de terrains anciens très plissés, et une longue bande située plus au sud, où affleurent des terrains relativement récents (depuis le Crétacé), restés sensiblement horizontaux ; ces derniers constituent les hautes plaines du Soudan. Les plisse- ments du massif central du Sahara sont antérieurs au dépôt des grès dévoniens ; il existait alors là, en effet, un massif montagneux comparable à la chaine calé- donienne d'Europe. Il y a d'ailleurs une symétrie très remarquable par rapport à la Méditerranée : Flamand et Gautier ont fait connaitre au Tidikelt des plisse- ments d'âge hercynien ; la correspondance des Alpes et de l'Atlas a été notée depuis longtemps. En Europe, la chaine calédonienne et la chaîne hercynienne accusent un certain parallélisme qui ne se retrouve pas au Sahara, où il y a croisement des plis anté-dévoniens et carbonifères. Comme, au surplus, il n'est pas certain que ces plis anté-dévoniens soient rigoureusement de même âge au Sahara et en Ecosse, il est sans doute préférable d'employer pour les premiers le terme de plissements saliarrens (ou saharides), qui a l'avantage de ne rien préjuger. Il est assez difficile de préciser l’âge des terrains cristallins plissés; on sait seulement qu'iis sont recou- verts par des grès du Dévonien inférieur restés hori- zontaux. La présence de graptolithes (trouvés bien plus au nord permet d'en attribuer une partie au Silu- rien, la base répondant sans doute à l’Archéen. L'âge dévonien et carbonifère des couches supérieures à pu être établi grâce à quelques fossiles. L'auteur indique l'extension de ces divers termes non seulement dans le Sahara proprement dit, mais iusqu'à l’Atlantique. 964 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX En général, les affleurements ont une orientation nord-sud ; cependant, au voisinage du Niger, les axes des plis font un angle de plus en plus grand avec le méridien et peuvent même devenir est-ouest; il y a donc un rebroussement des plis, qui coïncide précisé- ment avec la zone, parallèle à l'équateur, que devait envahir plus tard la mer du Crétacé et du tertiaire. Après avoir posé les bases géologiques de son étude, M.Chudeau aborde l'examen desrégions delapénéplaine saharienne, et, dès l’abord, il nous montre les avantages et les inconvénients de telle ou telle constitution géo- logique. Les deux formations qui dominent au Sahara, l’'Archéen et le Silurien, ont le défaut (particulièrement grave au désert) d'être imperméables; Peau ne peut que ruisseler à la surface, où le soleil a tôt fait de l'éva- porer. Ces formations cristallines correspondent donc à des régions particulièrement désolées et stériles, les tiniri et les tanezrouft, que les caravanes doivent franchir à marches forcées pour atteindre les points où des roches perméables (grès dévonien des Tassili, roches volcaniques d’In Zize) ont permis à l’eau de s’'accumuler à l'abri de l’évaporation. Ces tanezrouft et tiniri forment une longue bande qui vient s'intercaler entre l’Ahaggar et la plaine soudanaise. C'est par eux que M. Chudeau commence son étude régionale. Il envi- sage ensuite successivement l'Ahaggar, l'Adr'ar des Ifor’as et l’Aïr. Il m'est évidemment impossible de le suivre dans ces descriptions très documentées, dont chacune forme une monographie de la région considé- rée ; dans chaque cas, l'auteur étudie successivement l’orographie, lhydrographie, les points d’eau, les popu- lations, leur habitation, leur genre de vie, leurs cul- tures, leurs troupeaux, ete. Le chapitre consacré aux hautes plaines du Soudan est bâti sur le même plan. A l'inverse du Sahara pro- prement dit, cette longue bande, qui s'étend de l'Oua- daï à l'Atlantique, est constituée par des terrains restés horizontaux. Ce sont des grès et des argiles (grès du Tegama) attribués au Crétacé inférieur (attribution qui n’est peut-être pas suftisamment élablie), puis d'autres grès, orgiles, calcaires dont l’âge turonien et sénonien n'est pas douteux. Divers fossiles permettent de ranger dans l'Eocène et le Miocène d’autres formations sédi- mentaires. Quelques pages sont consacrées à l'extension de ces formations, que résume une carte géologique (1/5.000.000) du Sahara central et de. sa bordure sou- danaise. L'auteur à été amené à généraliser et à extrapoler assez largement ; mais il est bien évident que, dans un tel pays, ce mode de travail était de toute nécessité. Il a d'ailleurs mis à contribution tout ce qui avait pu être publié sur la région, de sorte que son ouvrage nous présente, en dehors des résultats nouveaux, une mise au point de nos connaissances sur ce pays encore peu exploré. Au surplus, cette remarque ne s'applique pas seulement à la géologie, mais à toutes les questions touchées dans l'ouvrage. Il est non moins évident qu'une telle synthèse ne pouvait être mieux faite que par celui qui a vu de ses propres yeux une grande partie des pays dont il parle, et qui est ainsi à même de faire un choix judicieux entre des opinions oppo- sees. Comme pour le premier chapitre, l'exposé géolo- gique est suivi d’une série de monographies de pays: Adr'ar” de Tahoua, Djerma, Tessaoua, Demagherim, Damergou, Mounio, Koutous, Manga, Kaouar, Fachi. Là encore, je me vois dans l'obligation de renvoyer à l'ouvrase lui-même. La météorologie du Sahara est encore bien peu connue ; une constatation 1mportante se dégage cepen- dant des observations rapportées par M.Chudeau. Dans la région algérienne et tunisienne, les courbes ther- miques présentent un seul maximum en juillet, parfois en août. Au sud du Sahara, ces courbes offrent deux maxima. Ce contraste s'explique par des différences dans le régime des pluies. Dans le bassin méditerra- néen, il pleut surtout pendant l'hiver; au Sahara, pendant l'été, d'où un abaissement marqué de tempé- rature et une moindre amplitude des variations diurnes. Les quantités de pluie varient beaucoup d’une année à l’autre. A Kayes, on a recueilli 525 millimè- tres d’eau en 190?, et 1.072 millimètres en 1905. A Tom- bouctou, la quantité de pluie a varié depuis une dizaine d'années entre 150 et300 millimètres. In Salah présente le même type climatérique que le sud de l'Algérie ; 1 parail en être encore de même pour les parties basses du Sahara. Par contre, sur les plateaux et les régions élevées, les pluies sont moins rares (Coudia, Ahaggar). Les orages sont en général assez brusques et localisés ; l'auteur en donne divers exemples, puis il examine les caractères de cette brume si fréquente au Sahara et qui n’est autre chose qu'une nuée argileuse. Les caractères de la végétation permettent de com- bler, sur cerlains points, les lacunes de nos connais- sances sur la mé'éorologie du Sahara soudanais. Je ne voudrais pas déflorer par un trop rapide résumé le chapitre que M. Chudeau a consacré à la géographie botanique ; il faut le lire tout entier. À mon avis, c’est peut-être la partie la mieux venue de tout l'ouvrage. Je m'empresse d'ajouter que le chapitre sur la géographie zoologique est également plein d'intérêt. Le sujet est trop vaste assurément pour être épuisé, et l’auteur est le premier à le constater; ce qu'il a voulu, avant tout, c'est poser les problèmes, et il y a pleinement réussi, ce qui ne l’a pas empêché, chemin faisant, de nous apporter une réponse sûre à beaucoup de questions pendantes. 11 y a dans ces pages une foule de remarques Judicieuses, par exemple au sujet des noms de plantes, des insectes, des tanezrouft, des batraciens, ete., etc. Pour ce qui est de l’ethnographie, l’auteur s'élève contre l'emploi exclusif de la linguistique comme base de classification ; c'est à l'anatomie qu'il faut recourir. À ce point de vue, il est facile de distinguer, au Soudan, deux types principaux : l'un, massif et lourd, à cheveux crépus; l’autre, plus fin, plus élancé, à cheveux très bouclés, mais ne formant pas toison. L'auteur nous indique rapidement l'extension de ces deux types, puis il complète (et corrige à l'occasion) les données que nous possédions déjà sur les louareg. L'hydrographie ancienne forme l’objet d’un chapitre que l’on peut qualifier de tout nouveau et qui sera lu avec une attention particulière par les géologues et les géographes. En effet, l'hydrographie du Sahara, dans son état actuel, est récente : le dessin des cours d’eau date d'hier et les preuves abondent des remaniements importants et de captures. Ainsi s'expliquent, en parti- culier, ces immenses (allols, larges et profondes vallées, qui ne contiennent plus qu'un filet d'eau. L'existence d'une mer quaternaire à Tombouctou est un fait qui nous eût semblé bien extraordinaire il y a quelques années et qui est établi désormais sur des bases solides. L'Oued Saoura (qui s'écoule maintenant vers le nord) venait se jeter dans cette mer qui recevait égale- mentle haut Niger. Vers l'ouest, le bassin de Tom- bouctou communiquait peut-être avec l'Atlantique, au nord du Sénégal, tandis que, vers l'est, il était en relation avec le bassin d'Ansongo et celui du Tchad. Un comprend aisément que la disparition d'une pareille nappe d'eau ait pu avoir une influence considérable sur le climat du Sahara. L'auteur discute également la question du Tehad et du Babr el Ghazal, mais il ne lui semble pas possible de conclure d’une façon positive; les données certaines sont encore trop fragmentaires, et l'hypsométrie de la région trop peu connue. C'est une opinion courante que le désert gagne de plus en plus vers le sud. Il importe de savoir ce que vaut une telle affirmation, car, si elle était démontrée, elle enlèverait toute raison d'être aux efforts considé- rables qui sont faits actuellement pour tirer parti de nos possessions soudanaises. Cette constatation peut être exacte si l’on ne considère qu'un petit nombre d'années, mais elle est controuvée si lon embrasse une période assezlongue.M.Chudeaunous prouve nettement BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX que la décadence évidente de certaines villes ne tient point à une sécheresse croissante, mais à des circons tances diverses d'ordre humain, dont certaines pour- ront être ou sont déjà modifiées (insécurité du pays, ete.). L'étude géologique montre. au contraire, qu'à une date relativement récente, le désertétait bien plus étendu qu'il ne l’est maintenant; en ellet, du Tchad à l'Atlantique s'étend une bande limitée au nord par le quinzième parallèle, dans laquelle abondent les ergs morts, les dunes fossiles, c’est-à-dire des dunes profondément altérées et recouvertes désormais par la végétation. Cette constatation est bien certaine- ment l’une des plus importantes que nous ait procurées la Mission Chudeau. Sous le titre général de « Quelques questions tech- niques », se trouvent groupées les observations con- cernant les roches, la latérite, les salines, les agents désertiques. Je n'ai malheureusement plus la place d'insister sur ces questions; je me borne à constater que l'auteur conteste l'importance qui à été souvent attribuée au vent comme agent d’érosion. Le dernier chapitre, qui peut servir de conclusion à l'ouvrage, concerne le commerce saharien et trans- saharien. Pour ce dernier, il faut tenir une juste mesure entre les exagérations en sens contraire. Néanmoins, l'évaluation que donne l auteur (3 millions) est encore inférieure à celle de Foureau. Jamais un tel commerce ne pourrait alimenter un chemin de fer! M. Chudeau dit qu'il y aurait de quoi charger un train de marchandise chaque «année ! Le commerce saharien est plus considérable (sel, grains, etc.), mais encore plus difficile à évaluer. Quant à son avenir, il est évi- demment bien faible. Je n'ai pas la prétention d'avoir même indiqué tout ce qu'il y a d’intéressant dans l'ouvrage de M. Chudeau sur le Sahara soudanais; mais je serais heureux si j'avais pu engager quelques personnes à le lire. Je suis convaincu qu'en fermant l'ouvrage, elles applaudiront à la decision de l'Académie des ciences, qui vient d'attribuer à l'auteur le prix Saintour. D'ailleurs, la Société de Géographie avait déjà cou ronné, il y a deux ans, le hardi voyageur, le premier géologue professionnel qui ait traversé le Sahara. Bis repetita placent! L. l'ERVINQUIÈRE, Chef des Travaux du Laboratoire de Géologie à la Sorbonne. Bateson (W.), Professeur de Biologie à l'Université de Cambridge. — Mendel's principles of Heredity. — 1 vol. in-8° de 396 pages avec figures et planches en couleur. (Prix : 45 fr.) Cambridye, University Press, 1909. Le but de ce livre, magnifiquement édité et illustré, et dont le fond est digne de la forme, est de donner un compte rendu succinct des découvertes sur l'Héré- dité, faites depuis l'application de la m thode mendé- lienne de recherche. Hepuis que les Mémoires de Mendel, si longtemps oubliés, ont été remis en lu- mière, les phénomènes de la transmission, jusque-là d’une irrégularité proverbiale, sont devenus d'une clarté et d'une simplicité inattendues, et le champ de travail qui a été ouvert, déjà riche en récoltes, l’est encore bien plus en promesses. Bateson avait publié, en 1902, une traduction anglaise des Mémoires de Mendel, accompagnée d'un bref som- maire du mendélisme, destiné surtout à répordre aux attaques, injustifiées d’ailleurs et bien oubliées aujour- d'hui, de Weldon, un des chefs de l’école biométrique. Depuis cette publication, un nombre considérable de faits nouveaux ont été acquis; des hypothèses provi- soires, comme ceile de la décomposition des carac- tères, ont ju être abandonnées, et ont été remplacées par des explications définitives; aussi le nouveau livre de Bateson vient bien à son heure, et permettra aux bio- logistes de se mettre faci ementau courant de la ques- tion de l'Hérédité, qu'il est trop souvent pénible d'étu- dier dans les mémoires originaux, en raison des 965 nomenclatures conventionnelles qui varient d'un auteur à l’autre. Le mendélisme intéresse aussi bien les systématistes qui recherchent les limites de la varia- bilité spécifique, que les morphologistes qui recons- truise it les phylogénies, les physiologistes qui étu- dient l'interaction d's éléments du corps, les cytolo- gistes qui veulent comprendre les phénomènes de la maturation, et plus encore les éleveurs praticiens qui doivent baser leurs opérations sur les propriétés des déterminants de caractères. Le livre de Bateson est divisé en deux parties : dans la première, après avoir défini les règles de Mendel, dont la plus importante est la disjonction des détermi- nants lors de la formation des gamètes des hybrides, il passe en revue un grand nombre des travaux qui se sont succédé sur la question, de 1900 à 4908 ; il étudie en particulier les caractères composés (tels que les crêtes des Coqs, l'hétérostylisme des Primula, les fleurs de WMarthola), qui sont en rapport avec plusieurs paires de déterminants; puis l'hérédité des couleurs chez les Souris, Giroflées, Orchidées, Pigeons, Poules, Primula, ete.; puis les caractères couplés, dont l'expression somatique varie suivant le sexe du por- teur ou des gamètes (Canaris, Poules soyeuses, cornes dans certaines races de Moutons, fleurs doubles de WMatthiola, croisement de l'Avraxas grossularrata avec sa variété lacticolor, ete). Des chapitres spéciaux sont consacrés à l'Hérédité chez l'Homme (notamment pour la couleur des yeux et des cheveux, la brach\dactylie et diverses affections, comme la cataracte présénile, la cécité nocturne, le daltonisme), à l'examen des cas qui ne suivent pas rigoureu-ement les règles de Mendel (irrégularité de dominance, anomalies numériques, fusion des carac- tères chez le mulätre), aux conceptions théoriques sur les caractères-unités, tels qu'on est amené à les con- cevoir pour donner une explication adéquate aux faits expérimentaux. : La seronde partie comprend une notice biogra- phique très détaillée sur Mendel, et la traduction de ses deux Mémoires sur le /’sum et sur l'Hieracium. un voit, d'après ce résumé forcément très sec, l'intérêt considérable de ce livre, qui n'épuise cepen- dant qu'une partie du sujet, puisque Bateson a laissé délibéément de côté ce qui n'était pas mendélien, c’est-à-dire les Æalbrassen et Mrttelrassen de De Vries, ce que j'ai appelé les mutations oscillantes, qui ne le cède t pas en nombre aux mutations fixes Il en par- lera sans doute plus complétement dans un nouveau livre qu'il annonce sur la nature de la Variation et les changements que les travaux dérivés des idées mendé- liennes ont apportés aux théories courantes de l'Evolu- tion. Comme il est naturel, les faits expérimentaux tien- nent dans cet exposé la plus grande place, el la partie théorique est réduite au strict indispensable : Bateson admet l'existence, dans le plasma germinatif, de carac- tères-unités (ce que j'ai appelé des déterminants), séparahles et indépen:lants; l'effet de ces caractères- unités est de produire dans les cellules somatiques cer- taines réactions, d'amener dans la peau, par exemple, la formation d'un chromogène, ou celle d’une tyrosi- nase, qui peuvent réagir l’un sur l’autre pour donner du pigment. l'eut-être ces déterminants correspondent-ils chacun à un chromosome, mais rien ne le démontre avec cer- titude; la séparation des déterminants homologues, chez les hybrides, se produit peut être au début de l'ovogénèse, lors de la réduction numérique. kien que Bateson soit un partisan plus que üède de la théorie chromosomienne de l'Hérédité, il reconnaît néanmoins qu'il y a un accord surprenant entre la manière d'être des chromosomes, révélée par les études des cytolo- gistes, et ce que peuvent nous faire supposer les théo- ries menidélienn:s. La dominance d’un déterminant sur son homologue récessif est considérée comme le résultat de la pré- 966 sence de quelque chose vis-à-vis de son absence : ainsi les graines rondes de Pois ou de Maïs doivent leur forme à la présence d'un facteur qui possède le pouvoir de transformer en amidon la majeure partie des réserves; si ce déterminant est absent, la réserve sucre reste telle, et la graine se ride ‘caractère dominé) en séchant. Un albinos est un organisme dans lequel manque un ferment responsable de la production du pigment. C'est une vue intéressante et originale, mais qui paraît difficilement applicable à la majeure partie des couples de déterminants, comme Bateson le reconnaît lui-même. La disjonction des déterminants ne se produit pas exclusivement dans les cellules sexuelles; elle peut s'opérer aussi lors de la division des cellules somatiques (variation par bourgeons chez les plantes). ’ 3 L'atavisme est expliqué comme un retour à la somme totale des facteurs caractéristiques de quelque type ancien (c'est l'explication que j'ai donnée en 1904, indépendamment de Bateson), retour qui peut se produire par l'addition de facteurs qui exis- tent isolément dans l’un et l’autre parents (atavisme par croisement, comme dans l'exemple classique du Pigeon de roche, obtenu par Darwin en croisant deux races très différentes). Quant à l'influence du mendélisme sur les théories de l'Evolution, il n'y a rien dans les idées nouvelles qui aille à l'encontre de la doctrine darwinienne de la formation des espèces par préservation des races les plus favorisées, mais il est certain que la conception de la transformation graduelle de masses d'individus par l'accumulation de changements impalpables est inadmissible; la conservation de tous les caractères nouveaux, sans danger d'affaiblissement par croise- ment avec le {type resté normal, permet de comprendre que des variations utiles sont foujours présentes quand elles deviennent indispensables, ce qui aidera peut-être à comprendre le phénomène, qui n’est peut- être qu'un épiphénomène, de l’Adaptation. Une biblio- graphie considérable, mais qui n’est cependant pas tout à fait complète, termine | ouvrage ; est-il utile de dire que les noms français y brillent par une absence presque complète? L. Cuéxor, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy- 4 Sciences médicales Harter (D' André), Préparateur d'Anatomie patho- logique à la Faculté de Médecine de Nancy. — De la Blastomycose humaine. (7hèse de la Facullé de Médecine de Nancy.) — 4 vol. in-8° de 222 pages. Crépin-Leblond, Nancy, 1909. La question des Blastomyeètes pathogènes, dont je signalais, dans le numéro du 30 août 1901 de cette Revue, Vintérèt et la complexité, a suscité, depuis cette époque, de nombreux travaux. Elle est loin pour- tant d’être résolue. L'accumulation fnême des maté- riaux en rend la solution plus laborieuse, et les méde- cins à qui il importe de s'en faire uné' idée claire et précise, ont quelque peine à s'orienter dans ce dédale. On saura gré à M. Harter d'avoir fourni, dans sa thèse, un répertoire méthodique des observations classées sous le: titre de Blastomycose. Ce volumineux Mémoire contient un index bibliogra- phique de 175 numéros. Ce n'est pas toutefois une simple compilation. L'auteur s'est vite apercu que la blastomycose (n’aurait-il pas dit plus justement les blastomycoses?) présente des caractères pathologiques variés, et qu'elle est due à un ensemble hétérogène de Champignons unis moins par des affinités naturelles que par un mode commun de végétation. Il souhaite que chaque observateur étudie de son mieux chaque micro-organisme isolé, recherche Îles caractères morphologiques précis, étudie le mode de reproduc- Lion du parasite, et se place dans les mêmes conditions que ses devanciers. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX M. Harter donne l'exemple de la méthode qu'il pré conise. il consacre àun cas de blastomycose généralisée, terminée par la mort, la première partie, divisée en sept chapitres : 1. Observation clinique, 2. Autopsie, 3. In!er- prétation de certains faits cliniques par les lésions trouvées à l'autopsie, 4. Etude des frottis, des cultures et des inoculations faites avec le matériel provenant de l'autopsie. — Examen histologique, 5. Caractères mor- phologiques du Blastomycète, 6. Caractères cytologi- ques, 7. Etude expérimentale. ? Après avoir mentionné, dans la deuxième partie, diverses observations de blastomycoses, localisées ou généralisées, il consacre la (roisième partie à une étude générale, dans laquelle il critique les données antérieures à la lumière de sa propre expérience. II arrive ainsi à fournir d'uliles indications pour le diagnostic différentiel entre la blastomycose, les mycoses différentes, la tuberculose, etc. Il termine par un parallèle entre la blastomycose et le granulome coccidioïdal. Cette monographie sérieuse, illustrée de six planches, sera consultée avec fruit. P. VGILLEMIN, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. D'° Baradue (de Châtel-Guyon), Félix Bernard (de Plombières), M. E. Binet (de Vichy), Cottet (d'Evian), Furet (de Brides-Salins), Piatot (de Bourbon-Lancy), Sersiron (de la Bourboule), Simon (d'Uriage), Tardif (du Mont-Dore). Clinique hydrologique. — 1 vol. 1n-8° de 636 pages, avec index analytique et alphabétique. Masson el Cie, éditeurs. Paris, 1909. Ce volume, dû, comme on voit, à la collaboration étroite d'hydrothérapeutes réputés, est d'essence rigoureusement clinique. Les acquisitions, même les plus récentes, de la Chimie physique (cryoscopie, ioni- sation, radio-activité, état colloïdal), si suggestives qu'elles soient, nous laissent pressentir bien plus qu'elles ne nous révèlent le secret de l’action des cures hydro-minérales. A l'heure actuelle, le seul réactif intéressantet sûr pour le médecin est le réactif clinique, le malade. C’est en observant à la lumière de la physio- logie les réactions du malade au contact de la médi- cation hydrominérale que les auteurs se sont efforcés « de reconnaître ces affinités électives que la nature « a établies entre les états morbides et les eaux, et « auxquelles correspondent autant d'indications clini- « ques ». Les deux premiers chapitres rappellent brièvement, mais clairement, les généralités préalables, physico- chimiques et cliniques, indispensables à l'exposé de l'hydrothérapie. Adoptant ensuite un plan rigoureuse- ment concret et parfaitement clinique, les auteurs, renversant l’ordre habituellement suivi, partent du malade pour remonter à la station indiquée et font, à l’occasion de chaque espèce clinique, l'inventaire raisonné des ressources que la thérapeutique hydro- minérale met à la disposition du médecin. Ils passent ainsi successivement en revue les indications hydro- logiques essentielles relatives aux rhumatisants, aux neuro-arthritiques, aux goutteux, aux diabétiques, aux obèses, aux rachitiques, aux scrofuleux, aux lympha- tiques, aux anémiques, aux chlorotiques, aux paludéens, aux pneumopathes, aux cardiopathes, aux dyspeptiques, aux entéropathes, aux hépatiques, aux urinaires, aux génitaux, aux névropathes, aux syphilitiques. Se contrôlant les uns les autres, les collaborateurs ont parfaitement réagi contre la tendance invincible qu'isolé aurait eu chacun d'eux d'étendre indûment les indications de la station où il a longtemps pratiqué. Comme forme et comme fond, aucune œuvre hydro- logique francaise ne nous parait actuellement com- parable à cet ouvrage. j è D' ALFRED MARTINET, Ancien interne des Hôpitaux de Paris. dl ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 967 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 15 Novembre 1909. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux démontre la proposition suivante : «Si l’on a déterminé une première famille de surfaces admettant comme normales toutes les droites d’un complexe, on saura déterminer toutes les surfaces dont les normales sont les droites du complexe », et il la relie à quelques autres, relatives aux congruences de courbes. — M. N.-E. Nôrlund présente ses recherches sur les équations aux différences finies. M. G..-A. Miller à étudié les groupes engendrés par deux opérateurs dont chacun transforme le carré de l’autre en sens inverse. = M. Idrac à observé la planète Mars pendant la der- uière opposition, à l'Observatoire de Meudon, et en a pris également quelques photographies. Des détails qui sont invisibles ou peu visibles pour l'œil apparais- sent nettement avec la plaque photographique ordi- naire, sensible seulement aux rayons du bleu à l'ultra-violet. — M. E.-M. Antoniadi a dressé une carte de la planète Mars d'après des observations faites récémment à l'Observatoire de Meudon. Celles-ci ne confirment pas l'existence d'un réseau géométrique de lignes droites, S'entrecroisant dans tous les sens. — MM. A. de La Baume-Pluvinel et F. Baldet ont pris des photographies de la planète Mars avec l'équatorial de la Station du Pic du Midi. Presque tous les détails observés à la lunette peuvent s'identifier surles clichés. — M. A. Angot signale l'enregistrement, au Parc -Saint-Maur, le 10 novembre, d'une perturbation micro- sismique de grande importance, dont l’épicentre serait distant de 8.700 kilomètres. 20 SCIENCES PHYysIQuEs. — M. Audouin présente les observations magnétiques faites par la Mission Tilho dans l'Afrique centrale. — M. de Beauchamp signale que le barrage électrique de la Vienne, constitué par une série de paragréles formés de lames de cuivre élevées aboutissant à des nappes d’eau, a parfaitement fonctionné pendant l’année 1909. — M. G. Gouy montre que l'effet global de l'électrisation sur la tension de vapeur d'un liquide, qui est en général une augmen- lation, se décompose en deux effets: l’un, dû à la charge, qui est une diminution; l’autre, dû à la pola- risation diélectrique, qui est une augmentalion. — M. A. Grumbach a reconnu qu'un corps soluble non conducteur peut modifier l'électrisation de contact à la surface de séparation d'un électrolyte et d'une paroi non conductrice. — M. V. Karpen propose d'employer pour la transmission, en téléphonie ordinaire, des ondes régulièrement entretenues, de fréquence déter- minée et unique, produites soit par l’are chantant, soit par des alternateurs de haute fréquence. Cela permettrait d'augmenter la distance et de réaliser la téléphonie multiple. — M. A. Léauté a constaté que des décharges oscillantes de grande fréquence très brusques peuvent produire sur des fils métalliques des effets destructifs considérables, alors même que leur énergie est faible, — M. G. de Moncetz donne la formule d'un sensibilisateur chromatique pour le rouge extrème et l& commencement de l'infra-rouge, contenant du bleu d'alizarine bisulfité, de la nigrosine B, du pinacyanol, AzH® et de l'alcool. — M. P. Gaubert a obtenu par addition d'acide phtalique hydraté à une vieille solu- tion aqueuse de physostigmine un corps dont la belle {luorescence rouge dépasse celle de toutes les substan- ces connues. — M. G. Meslin a obtenu, en mettant en suspension des cristaux de sidérose dans CS? où dans l'aniline, des liqueurs mixtes douées d'un dichroïsmt magnétique bien supérieur à celui des autres liqueurs. — M. W. Broniewski a déterminé les courbes de conductivité, du coeflicient de température de la résis- tance et de’ force électromotrice de dissolution des alliages aluminium-cuivre, qui le conduisent à admettre l'existence de quatre composés AFCu, AlCu, AlFCu* et AlCu*. — M. A. Buguet à déterminé les points de congélation de mélanges variés de corps organiques, ce qui lui a permis d'établir la formation de composés d'addition. — M. de Forerand, en évaporant au bain- marie des dissolutions étendues de bicarbonates alca- lins, a obtenu des cristaux répondant aux formules : 5 (K°CO* + 1,5H20) + 4 KHCO* ; 3 (Rb?CO* — 1,5 H20 +2 RbHCO® ; 5(Cs?CO0* + 3,5 H°0) +2 CsHCO*; 5 (Cs°CO* + 2H°0)+2CsHCO0*. Il à pu reproduire les mêmes composés en partant de dissolutions étendues de carbo- nates neutres. — M. H. Baubigny à constaté que, dans la décomposition du sulfite d'argent en solution par la chaleur, 89,84 °/, du sulfite donnent du dithionate et 10,16 °/, du sulfate. La lumière a les mêmes effets que la chaleur. — M. V. Auger montre qu'un composé quelcosque de formule SnBr‘—4se comporte à la fusion comme un mélange ; par un léger relroidisse- ment, il se dépose des cristaux dont la composition n'est pas celle de la masse fondue. — M. P.-J. Tarbou- riech, en déshydratant l’ox\cyelohexyldiméthylear- binol. a obtenu un hydrocarbure C’u'5, Eb. 76° sous 19 millimètres, et une cétone C'H!0, donnant deux oximes isomères, F. 83° et F. 459, — M.F. Grandjean a constaté que les zéolithes déshydratées absorbent facilement AzH®, 1,S, Hg, HgCI®. Ces substances s'orien- tent sur le réseau des cristaux et interviennent dans les propriétés optiques du mélange homogène. — M. Ed. Heckel a observé que les plantes à coumarine, sous l'influence des anesthésiques ou du gel, dégagent très rapidement l'odeur de ce corps. Ce phénomène est accompagné de plasmolyse. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. L. Lapicque propose une nouvelle théorie de l'excitation électrique, où inter- vient non seulement la perturbalion au voisinage de la membrane cellulaire, mais encore son retentissement par diffusion à distance de la membrane. — MM. R. Anthony et W. B. Pietkiewicz montrent que le muscle erotaphyte joue un rôle essentiel dans la pro- duction de la crête sagittale qui caractérise le crâne de certains animaux à muscles masticateurs puissants, dans le modelage et l’écartement du zygome, dans le modelage de la mandibule, dans l’évolution de l'encé- phale par la pression qu'il exerce sur la boîte cra- uienne. — M. A. Gruvel a reconnu que les conditions biologiques particulièrement favorables (température de l'air et des eaux, abondance de nourriture dans les fonds comme à la surface) ont permis le développement, sur les côtes de Mauritanie, d'une faune marine inté- ressante autant par la diversité des espèces que par le nombre des individus. — M Ed. Heckel à constaté que les tubercules mutés de Solanum maglia apparte- nant à la quatrième génération, récoltée cette année, se sont parfaitement maintenus et se confondent de plus en plus avec les formes connues de S. tuberosum cultivé. Toutefois, on observe de nombreuses variations de forme etde coloris des tubercules. — M.F. Guéguen a observé la formation de véritables selérotes chez le Mucor sphærosporus, à la suite du cloisonnement du thalle en articles multipliés. — MM. A. Trillat et Sau- ton ont reconnu que l'action des gaz putrides provenant de la putréfaction animale et végétale et de la respira- tion sur la vitalité.des levures consiste dans une accélé- 968 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ration du développement à faibles doses et dans un retard à haute dose ou lorsque l’action est prolongée. — M. Baudran à observé que le bacille tuberculeux cultivé sur un milieu au fer est fortement altéré et atiénué; sur un milieu au manganèse, il est également altéré, mais les animaux injectés succombent très rapi- dement. — M. Deprat a déterminé un grand nombre d'échantillons de roches recueillis au Tonkin, ce qui lui permet d'établir l'existence dans ce pays d’une série de formations éruptives et métamorphiques, avec grande fréquence des types de lamiuage. Séance du 22 Novembre 1909. M. Eug. Simon est élu Correspondant pour la Sec- tion d'Anatomie et Zoologie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux pour- suit ses recherches sur les congruences de courbes et sur les surfaces normales aux droites d'un complexe. — M. J. Haag recherche si l'on peut trouver deux familles de Lamé composées des mêmes surfaces placées dans des positions différentes et donne plu- sieurs théorèmes sur ce sujet. — M.S. Carrus présente quelques remarques sur l'intégration des équations aux dérivées partielles d'un ordre quelconque, mais linéaires par rapport aux dérivées d'ordre le plus élevé. — M. M. Riesz communique ses recherches sur les séries de Dirichlet et les séries entières. — M. Bor- relly adresse ses observations de la comète de Halley faites au chercheur de comètes de l'Observatoire de Marseille. 29 SCI*NCES PHYSIQUES. — M. Lecoq de Boisbaudran communique ses observations sur diverses bandes des spectres du baryum et de l'aluminium, d’où il résulte que ces bandes dérivent de fortes raies qu'on observe à haute température. Les moyennes pr:portionnelles des bords droits des bandes concordent avec celles des raies. M. A. Dufour à retrouvé, pour les bandes à arêtes dégradées des vapeurs de fluorure de calcium, des dissymétries d’intensités de quelque comp :santes magnétiques; dans certains cas, on constate une dissymétrie de netteté entre les composantes circu- laires de sens différents, dissymétrie liée au sens du champ magnétique. Les doullets magnétiques fournis par les arêtes de la plupart de ces bandes admettent l'arête génératrice comme axe de symétrie de posi- tions, sauf dans un cas. — M E. Caudrelier expose une théorie, relative à l’étincelle de décharge des inducteur-, consistant à faire jouer aux électrodes le rôle d'un condensateur percé, qui pourrait tout à la fois accumuler des masses d'électricité sur des arma- tures et livrer partiellement passage au courant. — M. G. Claude propose. pour dessécher l’air destiné à être liquéfié, de lui ajouter une quantité d'alcool à peu près égale à celle de l’eau q''il renferme: ce der- nier entraine sous la forme liquide, au cours du refroi- dissement, la totalité de l’eau. — M. B Szilard pré- sente un appareil destiné aux mesures radio-actives, basé sur le principe de l’électroscope. mais dans lequel le système indicateur (feuilles d’or) est remplacé par un index rigide. — MM. de Broglie et Brizard conlir- ment le fait que le bouleversement moléculaire dû à une réaction chimique, quand il n'entraine pas de phénomènes tels que haute température, barbo- tage, ete., n'a pas tendance par lui-même à produire l'ionisation du gaz environnant — M. J. Meunier à recherché les conditions nécessaires pour que le platine se maintienne incandescent dans l’intérieur d'un brûleur Bunsen : il faut qu'il soit recouvert d'une trace de substances salines. — M H. Dautriche à étudié le fonrtionnement des explosifs de sûreté au nitrate d'ammoniaque en présence du charbon, du papier et de la paratfine. L'oxygène que ces expl: sifs dégage brûle le poussier de charbon en formant CO. En ce qui concerne la paraffine, la combustion aug- menle avec le diamètre des cartouches — MM. A. Guyot el A.Gry,encondensant avecle gaïacol un éther mésoxalique ou «$-dicétonique quelconque, ont obtenu des éthers p-oxy-m-méthoxyphényl-tartroniques ou glycoliques, qui se transforment quantitativement en acide vanilloylcarbonique par oxydation. Ce dernier, par catalyse à chaud avec la diméthyl-p-toluidine, se dédouble en vanilline et CO*. — M. M. Guerbet a isolé, des produits huileux provenant de la réaction de Moutgollier sur le camphre, le bornylënecamphre C*H#O, F. 930, [«h —+69,2, et le boruyleamphre, EF. 77,5, — MM. A. Goris et M. Mascré ont retiré de la Primula olticinalis deux glucosides : la primevé- rine, F. 1720-1739, [«]n — — 609,24, et la primulavérine, F. 1600-1010, [ain ——66°,86, et un ferment qui les dédouble, la primevérase. — M, C. Gerber a constaté que l'existence de présures est un fait général chez les Basidiomycetes ; ces présures sont oxyphiles et calci- philes. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. Marage, en faisant agir un très faible courant électrique sur des larynx enlevés à des chiens immédiatement après leur mort, est parvenu à faire contracter les différents muscles; si, à ce moment, on fait passer un courant d’air sous une pression voisine de 200 millimètres, le larynx se met à aboyer comme si le chien était vivant. Pour l’auteur, le larynx à une influence prépondérante dans la for- mation des voyelles: la cavité buccale ne sert qu’à les renforcer ou à les transformer. — M. Y. Delage à reconnu que les charges électriques et le courant élec- trique, si l'on écarte ses effets électrolytiques, ne sont pas des agents de parthénogénèse. L’électrolyse est un agent faible, par les acides et alcalis dont elle déter- mine la formation. De minimes quantités de sels métalliques, le formol, l'alun, sont des agents très actifs; l'hydrate de fer colloïdal à doses presque infini tésimales est assez actif. — M. L. Bull à étudié par la chronophotographie le vol de l'Agrion. Les trajectoires des ailes constituent une figure en forme de 8. Le corps de l'insecte décrit au départ un trajet sinueux dont les portions ascendantes correspondent aux .phases d'abaissement des ailes et les portions descen- dantes à celles de leur relèvement. —- M.J. Comandon est parvenu à cinématographier, à l'ultra-microscope, des microbes vivants et des granulations mobiles du sang; ces vues cinémalographiques permettent de faire des numérations d'éléments, impossibles à l’ob- servation directe. — M. E. L. Trouessart à reçu de la Chine occidentale un représentant nouveau de la famille des Hérissons, mais qui en diffère par ses formes légères et son pelage dépourvu de piquants. Il se rapproche de formes tertiaires et l’auteur le nomme Neotetracus sinensis. — M. Baudran a extrail du corps des bacilles de Koch une endotoxine tuberculeuse de nature albumosique. — M. H. Lecomte eslime qu'il y a lieu de rétablir la signification primitive des termes pédonceule et pédicelle; enez un très grand nombre de plantes phanérogamiques angiospermes, le pédicelle porte une articulation, qui marque le lieu d'origine véritable des parties de la fleur, et dont toute étude doit tenir compte. — M. A. Lacroix signale l'exis- tence, dans les pegmatites de Madagascar, de la r/o- dizite, boroaluminate de glucine et d’alcalis : 6B*0*. 310%. 4GI0. 4(Li, K, Na, H}°0. — M. J. Boussac à étudié le Nummulitique des Alpes orientales. Il dis- tingue, dans la nappe de Bavière, deux zones sédimen- taires : une zone septentrionale, où le Priabonien ou l'Oligocène sont transgressi's, et une zone méridionale où la série débute par le l'utécien. ACADÉMIE DE MÉDECINE ; Séance du 16 Novembre 1909. M. le Président annonce le décès de M. Jacquemin, associé national. M. Le Dentu présente une observation de tumeur inflamm toire du ventre, située sur le côlon transverse, sans obstruction aiguë où chrortique, simulant une tu- meur cancéreuse. Le malade, traité par le repos absolu au lit, les larges cataplasmes tièdes ou la glace, € ACADEMIES ET SOCIETES SAVANTES aussi par les laxatifs, avec une alimentation légère, se remit progressivement, après plusieurs rechutes, Il mourut ultérieurement à la suite d'accidents d'urémie chronique. — M. ÆE. Delorme présente quelques re- marques sur la prophylaxie de la lièvre typhoïde. En- démique et épidémique surtout dans les villes du midi de la France, la lièvre typhoïde fait subir à la population civile et militaire des pertes cruelles, regreltables et évitables. Dans la genèse des endémieset desépidémies typhoïdiques, l'influence des porteurs chroniques, latents où sains, de bacilles est minime. La cause la plus immédiate de cette endémo-épidémicité réside dans la pollution de l'eau de boisson. L'Académie doit demander aux Pouvoirs publics qu'en raison des dan- gers qu'elles font courir à leurs habitants les villes de Marseille, Toulon, Aix, Avignon, Alais, Nice, Nimes, Montpellier, Béziers, Carcassonne, Castres, Narbonne, Perpignan, Pau, puis Lunéville dans l'Est, Brest el Lorient dansl'Ouest, soient mises en demeure : 4° d'ins- crire en toute première ligne dans leur budget et de commencer à très bref délai l'exécution des travaux destinés à assurer à leur eau d'alimentation un degré de purelé satisfaisant aux exigences actuelles de l'hygiène; 2 de poursuivre vis-à-vis des fosses d'ai- sance et des puits les améliorations réclamées par la loi sur la santé publique, d'installer des égouts et d'amé- liorer la voirie. Séance du 23 Novembre 1909. M. E. Metchnikoff présente ses recherches sur les diarrhées des nourrissons. Il à reconnu, par l'examen des déjections et l'expérimentation sur le singe et le lapin, que c'est le Bacillus proteus, généralementinof- lensif pour les adultes, qui joue le rôle pathogène dans les diarrhées infantiles, Il ne se rencontre que rare- ment dans le lait cru. Mais il se trouve à la surface des raisins, des radis, de la salade, des fromages mous. Cousommés sans être préalablement désinfectés, ces aliments introduisent dans le tube digestif des per- sonnes qui les mangent des quantités de Pacillus pro- teus. Le Contact prolongé de ces personnes avec les nourrissons suffit pour contaminer ceux-ci avec le mi- crobe malfaisant. SOCIETE DE BIOLOGIE Seance du 13 Novembre 1909. M. CI. Gautier décrit un mode d'application de la réaction d'Ehrmann à la mise en évidence de l'adré- naline dans les surrénales de la grenouille, — M. F. de Gasperi, au cours de recherches sur la putréfaction de la pintade, a isolé trois microbes anaérobies nouveaux : le Bacillus parabilermentans sporogenes, atlaquant à la fois les albuminoïdes et les hydrates de carbone: le Coccobacillus saccharolyticus, attaquant les hydrates de carbone et les peptones, et le Æ. saccharolermen- tans, ne fermentant que les sucres. — MM. E, Gaucher, £. Joltrain et L. Brin ont appliqué le séro-diagnostic à la recherche du mycosis fongoïde, en se servant d'un antigène obtenu par extraction à l'alcool de la poudre de tumeur mycosique broyée et séchée. La réaction a été très nette dans plusieurs cas d'affections inycosiques, nulle dans les autres affections. — MM. P. Ancel et P. Bouin esliment que laglande interstitielle de l'ovaire des Mammifères à ovulation non spontanée et les corps jaunes périodiques des Mammifères à ovulation Spon- lanée sont des formations homologues, correspondant à la glande interstitielle du testicule chez le mâle. Le corps jaune gestatil existe chez tous les Mammifères femelleset n'a pas de représentant chez le mâle, — MM. Chauffard, Boidin el Laroche ont provoqué de l'anaphylaxie chez le cobaye par l'injection de liquide hycatique. Les ani- maux anaphylactisés, réinjectés sept jours plus tard par voie intracérébrale, n'ont plus réagi. — MM. Worms et Pigache montrent que la (hyroïdectomie détermine des lésions profondes de dégénérescence du thymus : atrophie précédée par une phase de congestion de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1009. 969 courte durée. — MM. Ch. Achard el H. Bénard ont constaté que, chez les sujets morphinomanes ou sim- plement morphinisés, les globules blanes deviennent plus lolérants in vitro pour le poison; c'est le contraire qui à lieu chez les tuberculeux. On peut baser sur ces faits un leuco-diagnostic. —- M. J. Nageotte présente un nouveau microtome universel et un appareil à con- gélalion pour les grandes coupes. — MM. L. Babonneix el P, Harvier ont examiné la moelle d'un chat mort de tétanie aiguë; ils ont observé des lésions cellulaires des cellules cordonnales principalement, et aussi radicu- laires, la dégénérescence des faisceaux radiculaires et racines antérieurs, puis des cordons antéro-latéraux. — M. D. Jacobson recherche le bacille de Koch dans les crachats en les traitant par l'antiformine, qui dis- sout lous les autres éléments, puis par la ligroïne, qui réunit tous les bacilles de Koch, — M. G. Bohn montre qu'une modification de forme ou de position de la cel- lule suflit à détruire son équilibre chimique et à pro- voquer des phénomènes de sensibilisation, d'ailleurs transitoires, suivis d'une phase de désensibilisation. — MM. A. Gilbert el E. Chabrol, en réalisant expéri- mentalement l'hypertension portale, ont reproduit diverses variétés de paneréatites. L'hyperémie soudaine provoque l'infareltus associé à la stéatonécrose; la con- gestion passive favorise, au contraire, le développement de la sclérose. — M. J. Georgeviteh a observé le déve- loppement du Crithidia simuliæ chez les simulies ; il a trouvé d'abord des formes en anneau, ressemblant aux piroplasmes, passant à des formes rondes, qui corres- pondraient aux Leishmania, pour aboutir aux stades grégariniens de Léger. — M. M. Mirande signale la présence de némalocécidies, dues à l'Æeterodera radi- cicola, chez deux plantes nouvelles : le ÆRhinanthus major el l'Odontites rubra.— MM. A. Gilbert et M. Vil- laret ont reconnu que l'artère hépatique ne limite pas son domaine à l'arbre biliaire, du moins chez le chien; il semble qu'elle envoie du sang oxygéné à la péri- phérie du lobule et contribue à fournir le réseau nutritif du système sus-hépatique. — M. F. Guéguen à étudié le développement des chlamydospores du Mucor sphaerosporus Hagem et leur structure en milieu fixe el en milieu agité. — M. Ch.-A. François-Franck décrit un procédé d'évaluation de la pression minima et de la pression maxima avec la sphygmomanométrie radiale localisée. — MM. A. Calmette et L. Massol ont constaté que la quantité d'alexine fixée dans la réac- tion de Bordet-Gengou est sensiblement proportion- nelle aux quantités d'antigène et d'anticorps mis en présence ; pour affirmer qu'un sérum ne contient pas d'anticorps, il faut l'essayer en présence de ‘doses variables d'alexine. Lorsque la quantité d'anticorps est en excès sur l'antigène, il n'y a plus de fixation; l'excès d'antigène n'est pas aussi redoutable que l'excès d'anticorps. — M. FX. Bezançon el H. de Ser- bonnes ont étudié le pouvoir antagoniste du sérum normal vis-à-vis de l'hémolyse; ils montrent qu'il est soumis à l'influence de divers facteurs, comme la durée du temps de contact et la teneur du mélange en eau physiologique. Séance du 20 Novembre 1909. M. CI. Gautier a observé que les tissus de la surré- nale de la grenouille ou les extraits de cet organe donnent la réaction d'Ehrmann, preuve de la présence de l’adrénaline. — MM. P. Aubert, P. Cantaloube et E. Thibault signalent une épidémie de fièvre de Malte, ayant sévi sur la commune de Saint-Martial (Gard) et ayant entrainé 6 décès sur 106 cas observés, Elle paraît provenir de la consommation du lait de chèvres infee- ltées par le Microceocus melitensis. M. FX. Vles pré- sente un nouveau système de micromètre oculaire à vernier intérieur. — M. A. Guillemard à constaté que les bactéries offrent une résistance très variable à la pression osmotique, depuis le Æ. Megatherium, sen- Sible à 0,7 mol. Na CI, jusqu'au Staphylococcus, végé- lant encore avec 3.5 mol. Par ce caractère, l'auteur à ACADÉÈMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES pu différencier le B. Friedlanderi du B. lactis aero- genes, considérés comme identiques par Grimbert et Legros. — M. J. Georgévitch a éludié le système digestif du Simulium columbhacensis ; cette mouche semble sücer et piquer les animaux de là même ma- nière que les Anopheles. — M. J. Nageotte indique une nouvelle méthode de coloration de la myéline, sans chromage préalable, dans les coupes grandes et petites du cerveau obtenues par congélation. — M. Laignel-Lavastine à observé, après la mort, dans les fosses näsäles la température de 53°, Et dans le recluin des températures de 506, et 590. MM. M. Düyon et C1. Gautier ont reconnu que l'extrait de gui, injecté brusquement à haute dose dans les veines, provoque l’incoagulabilité du sang; l’action est pissagère; il Se produit en même lemps un élat de pseudo-narcüse. Zn vitro, l'extrait de gui est sans action sur la coagulation. — MM. F. Bezañçon ct H. de Ser- bonnes ont constaté que la réaction de fixation est très irrégulière dans la luberculose ; on ne peut guère se fier à la plus où moins grande netteté de ces réactions pour porter un profostic favorable. —M. J. Carougeau a isolé des nodosités juxta-articulaires d'une Malgäche un pärasile qui paraît rentrer dans le getire Disco- myces; les essais de culture ont été sans résultat etles inoculations négdtives. — MM. Chevrier, R. Bernard et Sorrel oùt observé chez neuf malades une forme fruste de l’ictère post-choloroformique, caractérisée par une choléiiie post-chloroformique constante, in- tense et précoce. - 559 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 9 Novembre 1909. M. R. Brandeis à observé chez un enfant de cinq ans et demi une tumeur de la région carotidienne, caractérisée par une transformation myéloide aleucé- mique des ganglions Cervicaux. — MM. Ch. Mongour et R. Brandeis ont observé un liquide céphalo-rachi- dien clair à la période pré-agonique d’une méningite cérébro-spinale à méningocoques à longue évolution, — MM. A. Lancien el L. Thomas ont constaté, sur une trentaine de végélaux divers, que les plantes ne con- tiennent ni sels actifs, ni émanalion en solution dans leur suc cellulaire. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séähte du 12 Novembre 1909. M. V. Auger à étudié deux modes de préparation du gaz IH, proposés par Mène el par Gladstone, et qui con- sistent à faire réagir à douce température l’iode sur le sullite où l'hyposulfite de sodium cristallisés. Il montre qu'aucun de ces procédés n'est susceptible de fournir le gaz 1H, et qu'ils doivent être éliminés des traités de Chimie minérale. Après avoir étudié le procédé indiqué en 1890 par Lepsius, il donne comme proportions con- venables, pour obtenir le gaz IH, 2 mol. PO‘HS crist. + 1 mol. IK en chaüffant progressivement jysque vers 250, Pour obtenir une solution à 56 °/, de [H, où peut chauffer 2 mol. de PO*H* aqueux à 60° B. avec 1 mol. KI. Les rendements dans les deux cas sont très voisins de la théorie. — M. Ch. Moureu signale que l'iodure d'ammonium commercial renferme parfois du sulfate, et que ce dernier est réduit en sulfure sous l'influence de l'acide iodhydrique; c'est ce qui a lieu lorsqu'on emploie de l'iodure impur dans la détermination des groupes méthylaminés par la méthode de Zeisel. — M. M. Delépine à préparé des iridodisulfates de potas- sium, de sodium, de thallium et de baryum. Comme pour les sels ammonjiacaux, il y a des sels rouge-brun el des sels verts; les premiers se forment en milieu alcalin, les seconds en milieu acide où bien jusqu'à concurrence d'une certaine dose de base. Les sels de polassium ont fourni là série : HO(H20)Ir(SO“#)R2/8H4/5; … RA/3H2/2 K4/3(A2H4)1/6111/2;: K5/3H1/5 :; K® et [lrOH}{S0!}]K7/3112/3, qui montre combien sont compliquées les formules de ces sels. Le passage des sels bruns aux sels verts par action des acides el inverserment des sels verts aux bruns par action des bases est un véritable phénomène de lautomérie minérale dû au changement de -(H*0)0H en -(HOŸH acide. — M. L. Maillard expose quelques remarques au sujet d'utie note toute récente de MM. A. Wahl et P. Bagard, qui ont réalisé une nouvelle syn- thèse de l’inditubine en condensant lé chlorure d'isa- tine avec l’oxinäol : ils en déduisent qué l'indirubine possède bien la constitution de l'indogénide £ de Baeyer. Celte conclusion des auteurs est inattaquable, si l’on admet comme cerlain que le noyau pyrrolique, lors de la formation des colorants indigotiques, ne sau- rait subir de tränspositions avec passage de la subistitu- tion «& à la substitution 5. Or, des faits observés autrefois par M. Maillard serdient de nature à ébranler cette conliance en la fixité de la structure oxindolique : la constitution de l'indirubine ne paraît päs définitivement démontrée, malgré l'intéressante synthèse de MM. Wahl et Bagard. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 24 Juin 1909 (fn). M. R. D. Kleeman communique une série d’expé- riences destinées à montrer si les rayons y secondaires sont polarisés; le résultat semble être nettement positif, mais l’auteur désire confirmer par d’autres mé- thodes ces recherches préliminaires. — M. À. D. Waller a déterminé le pouvoir comparatif de l'alcool, de l’éther et du chloroforme d'après leur action sur le muscle isolé, en l'espèce le muscle sartorius dé la gre- uouille. Voici quelles sont les quantités physiologi- quement équivalentes de ces trois corps : EN EN EN MOLÉCULES POIDS VOLUME Alcool 100 100 100 . Ether. RES 12 19,3 21,3 Chloroforme . . . l 2,6 1,4 — M. C. H. Martin et M! M. Robertson ont étudié les formes parasites qu'on trouve dans l'intestin de la poule; ils décrivent : 4° une forme identique au Trypa- nosoma eberthi Kent, caractérisée par un corps plutôt allongé, une membrane ondulante bien marquée, le long du bord de laquelle court un flagellum partant de l'extrémité antérieure de l'animal pour se terminer librement à l'extrémité 1 Trichononas, plus massive que la précédente et s’en distinguant pär trois longs flagelles partant de lex- trémité antérieure; 3° une forme A/onocercomünas, ressemblänt grossièrement à un œuf, avec un cytos- tome bien marqué, au voisinage duquel partent quatre longs flagelles. Les auteurs ont observé d'autres formes. de transition et ils sont enclins à supposer que les *irois formes dérivent les unes des autres. Communications reçues pendant les vacances (suite). M. W. A. Osborne : L'élasticité des ballons de caout- chouc et des viscères creux. L'auteur arrive aux con- clusions suivantes : 4° Quand un ballon en caoutchouc présente de la rigidité initiale, la pression pendant le gonflement augmente rapidement d’abord, puis dimi- nue et tend à rester constante jusqu'à ce que la limite élastique soit atteinte; 2° Au dégonflement, un tel ballon montre une hystérèse marquée; rarement la pression augmente au dégonflement; 3 Si on abolit la rigidité iniliale en gardant le ballon gonflé pendant quelque temps, puis en le dégonflant rapidement, lors d'un nouveau gonflement la pression s'élève conformé- ment à la règle suivante : si l'on porte en coordonnées la pression et le rayon, on obtient une hyperbole rec- tangulaire, satisfaisant à l'équation : (r—a) (p — b) — +, où 4 est vsisin comme ordre de grandeur du rayon inilial et D est une constante plus grande que p. La postérieure; 2° üne forme : a La La ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 974 facon de se comporter d'un tel ballon est très éloignée de celle d'une sphère en malière parfaitement élastique et isotrope; 4° Quand la limite élastique est atteinte dans un ballon de caoutchouc, la pression est une fonction linéaire du volume; 5° Un viscère creux à peu près sphérique, tel que la vessie, ne montre pas de rigidité initiale el ne donne jamais de chute de pres- sion quand son volume s'accroit. Quand la limite élas- tique est atteinte, la pression n'est pas une fonction linéaire du volume ; 6° Pour la vessie d'un gros chien, on a trouvé que l'équation (1 —a)(p — b) = ce est satis- faite ; dans ce cas, aest praliquemunt nul; mais, comme pour le ballon de caoutchouc, la façon dont elle se comporte n'est pas celle d’une substance parfaitement élastique et isotrope. — M. W. J. Young à étudié le phosphate d'hexose formé par le sue de levure aux dépens de lhexose et du phosphate. Noici ses conclu- sions : 1° Le composé formé pendant la fermentation accélérée du glucose, du fructose et du mannose par le suc de levure, en présence d’un phosphate soluble, est le sel d'un acide qui possède probablement la for- mule CSH'0{PO‘H?} et qui peut être isolé par préci- pitation de son sel de plomb; 2 L'acide libre s'obtient en solution en décomposant ce sel de plomb par H°S; 3° Cet acide est très instable et se décompose rapide- ment ayec le temps, ou lorsqu'on l’éyapore, même à température ordinaire, dans le vide ou sur l'acide sul- furique, en donnant une substance réductrice et de l'acide phosphorique ; # Il réduit la solution de Febling après quelques heures à froid, rapidement à chaud; 1l ne donne ni osazones, ni hydrazones; 5° On n'a noté aucune différence entre les acides hexosephosphoriques ou leurs sels, qu'ils dérivent du glucose, du fructose ou du mannose; 6° En hydrolysant l'acide par ébulli- tion, de l'acide phosphorique est mis en liberté et il se forme du fructose. On n'a pu identifier aucun autre hexose, mais la solution, après hydrolyse, est toujours moins lévogyre qu'une solution de fructose pur de même pouvoir réducteur; 7 L'auteur à préparé les sels de Ph, Ba, Ag, et Ca de cel acide. Séance du 4 Novembre 1909. M. H. C. Pocklington : Les dimensions et la fonction des canaux de Mars. La nature du lit des canaux de Mars est conjecturée d’après la valeur de Lowell pour la vitesse du flux qui les parcourt; l’auteur calcule ensuite la profondeur d'après les formules techniques, en supposant que les canaux sont horizontaux et char- rient de l'eau d’un pôle à l’autre. La profondeur est de 500 pieds si les canaux sont aussi étroits que pos- sible, et de 370 pieds s'ils sont larges de 4.500 pieds. L'auteur détermine la quantité d’eau nécessaire pour remplir les canaux. Pour trouverlafonction des canaux, l'auteur admet que leur arrangement est le plus économique; il en déduit que ce sont essentiellement des lignes de communication, quoiqu'ils puissent aussi servir pour transporter de l’eau d'irrigation. — Lord Rayleigh présente quelques réflexions sur la percep- tion de la direction du son. a montré que cette per- ception dépend d'une différence de phase aux deux oreilles et que le son est jugé être du côté où la phase est en avance. MM. Myers et Wilson ont accepté le prin- cipe de cette explication, mais en en modifiant l’appli- cation. Pour eux, le son entrant par une oreille est transmis à l'oreille opposée à travers les os de la tête, et les deux séries d'ondes recues à chaque oreille, directement el par conduction osseuse, se rencontrent venant de directions opposées, ce qui produit un ren- versement de phase. L'auteur critique cette conception et montre que le choix entre les théories proposées dépend d'une idée préconçue sur la façon dont les nerfs agissent. — MM. J.-C. Chapman et H.-L. Porter ont étudié les propriétés physiques des feuilles d'or à haute température, À mesure que la température s'élève, on constate que la feuille s'allonge, puis la longueur reste constante pendant quelque temps, et finalemen la feuille se contracte rapidement: cette contraction, qui à lieu vers 3409 C., est accompagnée d'une augmentation de transparence. Cette contraction est probablement due au fait que la rigidité de la feuille décroit plus rapidement que la tension superlicielle quand la température s'élève. — M. R. J. Strutt à constaté qu'un spécimen d’autunite, minerai urani- fère, placé dans une chambre tout à fait noire, présen- tait à l'œil bien reposé une luminosité marquée. Cette luminosité est indépendante de l’exposition préalable à la lumière ; elle disparait par perte de l’eau de cris- tallisation. — Le même auteur a poursuivi ses recher- ches sur l'accumulation de lhélium pendant périodes géologiques. Il mesure l’âge des minéraux d’après le rapport de l’hélium à la matière radio-active qu'ils renferment. Ses recherches ont porté sur les minerais de fer des couches sédimentaires; il trouve pour ceux-ci un âge d’une {trentaine de millions d’an- nées. D'après d'autres expériences, la production annuelle de l'hélium par gramme de thorianite est cer- tainement moindre que 3,7 X 10 —Scentimètres cubes; la quantité trouvée dans un échantillon de ce minéral n'a pu cerlainement s’accumuler en moins de 240 mil- lions d'années. — Sir D. Bruce, MM. A.-E. Hamerton, H.-R. Bateman et F. P. Mackie communiquent leurs observations sur le développement du Trypanosoma gambiense chez la Glossina palpalis. Le 5 mars 1909, 60 Glossines furent capturées et placées dans deux cages. Elles furent nourries sur deux singes infectés de trypanosomiase pendant deux jours, puis conservées pendant trois jours pour faire disparaitre le transport mécanique. Les cinq jours suivants, elles furent pla- :6es sur un singe Sain, puis dans chaque période suc- £ ve de cinq jours environ sur un nouveau singe sain, jusqu'au bout de quatre-vingt-six jours où l’ex- périence prit fin. Le résultat fut que les deux premiers singes restèrent en bonne santé, mais que tous les autres s'infectèrent de Trypanosoma gambiense. Les mouches sont donc devenues infectantes dix-huit jours au plus tard après leur première alimentation sur un animal infecté. Par des dissections, les auteurs ont reconnu que, sur les 60 mouches, une seule s’est mon- trée infective. Une goutte de fluide prise dans l'intes- tin de cette mouche à la fin de l'expérience et injectée sous la peau d’un singe a produit la maladie du som- meil après une période d'incubation de huit jours. — Les mêmes auteurs signalent la présence d'un Trypa- nosome chez l'éléphant d'Afrique. I a une longueur moyenne de 48,5 microns, une membrane ondulatoire bien développée et un flagellum libre. I ressemble beaucoup au Tr.soudanense, mais les auteurs le nom- ment provisoirement 7r.elephantis. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 12 Novembre 1909. M. P. V. Bevan a étudié le spectre d'absorption de la vapeur de potassium par la méthode de Roscoe et Schuster, modifiée par Wood. Le caractère le plus frappant de ce speclre est l'apparition des lignes de la série principale; aucune des lignes des deux séries associées n'apparaîl, mais on observe des spectres cannelés additionnels qui ne sont pas représentés dans les spectres d'émission. Dans la région invisible apparaît un spectre cannelé dans le rouge, présentant des bords définis des bandes vers l'extrémité violette du spectre. On à déterminé les rapports des longueurs d'onde de ces bords définis avec celle du premier membre de la série principale ; les valeurs trouvées se rangent dans le même ordre que les rapports corres- pondants déduits des mesures de Wood sur labsorp- ion du sodium. L'auteur considère ce fait comme le signe d’une: connexion entre le spectre cannelé et la série principale de lignes. La dispersion anomale s’oh- serve sur les quatre premiers membres de la série principale; elle va en décroissant rapidement. Un observe une grande différence entre les propriétés des lignes principales dans le spectre d'absorption et le les 972 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES spectre d'émission; cela tient probablement à la diffé- rence d'état moléculaire de la vapeur métallique, qui est à une température bien plus basse dans le premier cas. — M. J. S. Dow recherche Jes principes physio- logiques qui sont à la base du photomètre à papillotte- ment. Dans ce but, il s'est demandé s'il est soumis à certains effets, comme le phénomène de la tache jaune et celui de Purkinje, qui sont une cause d'incertitude dans la photométrie hétérochromatique par les instru- ments à égalité d'éclat. Quelques expériences mon- trent que ces effets se produisent, mais d'une facon beaucoup moins marquée. L'auteur explique la chose en admettant que les bâtonnets de la rétine recoivent l'impression lumineuse plus lentement que les cônes, mais aussi la conservent plus longtemps; celte parti- cularité, peu importante pour les photomètres ordi- naires, peut jouer un rôle dans les RD REUES à papillottement. On peut imaginer que l'effet de papil- lottement est dû à deux portions distinctes, reçues par l'intermédiaire des bâtonnets et des cônes respective- ment. — M. E. Green présente un spectromètre pour la perception des couleurs. Il consiste en un spectro- mètre ordinaire avec un seul prisme, pourvu de deux tambours de longueurs d'onde actionnant deux obtu- rateurs placés dans le plan focal de loculaire. Au moyen des oblurateurs, une partie quelconque du spectre peut être observée à volonté et la longueur d'onde des bords de la plage en observation est lue sur les tambours. Cet instrument s'applique à l'essai de Ja cécité des couleurs. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2 Octobre 1909 MM. T. Kametaka el A. G. Perkin ont extrait la carthamine des fleurs de Carthamus tinctoria au moyen de la pyridine et de l’eau. Après une longue purilica- tion, elle forme des aiguilles rouges, iridescentes, se décomposant vers 2280-2300, de formule G!5H#407. — Mie S. M. Baker expose une théorie d’ après laquelle, s'il existe une attraction suffisante entre les autres atomes joints à un atome d’Az et celui avec lequel il est doublement lié, il y a deux isomères possibles : l'isomère ex, où les autres atomes sont groupés en rond autour de la double liaison, et l'isomère ex ou symétrique. Cette théorie a été étendue aux composés du P et du S, et dans quelques cas du CG. — M. E. R. Watson estime que la décoloration à la lumière d'une couleur azoïque est due à l'oxydation de cette partie de la molécule qui contient les groupes hydroxy et aminés, et que la fixité d'une telle couleur serait augmentée en introduisant dans la partie phénolique ou arylaminée d’autres groupes qui réduiraient la ten- dance à l'oxydation. — M. D. L. Chapman et P.S. Mac Mahon ont constaté que le gaz brun résultant de l'action de loxyde nitrique et du chlore empêche l'union de Clet H à la lumière; l'oxyde nitreux agit seulement comme un diluant dans cette réaction. — M. J, A. N. Friend à déterminé de peliles quantités de fer ferreux par le permanganate de potassium en présence de HCI de concentration inférieure à m/4 en ajoutant de 4 à 2 grammes de sulfate manganeux. — M. R. Gilmour à constaté que la facon dont se com- portent optiquement les glucose-phénylhydrazones les rapproche des glucose-anilides, glucose-p-toluidides et autres composés possédant la structure y-oxydique. Les glucose-phénylhydrazones posséderaient donc la méme slructure el n'exisleraient que sous deux formes stéréo-isomères inconverlibles, ayant des ro- tations {x}, de + 2249 et — 87. — M. J. Knox a trouvé que le sulfure de bismuth précipité sec se dissout dans les solutious de sulfures de K et Na d'autant plus fati- lement qu'elles sont plus concentrées ; l'addition d'hy- drates alcalins augmente encore la solubilité. Le rioxyde de bismuth se dissout légèrement dans les hydrates alcalins. — Ml: K. M. Jackson et M. A. Neville, par action des amines correspondantes sur le [ tartrate d’éthyle à 1509, ont préparé les tartaro-di-0- anisidide, F. 4809, [&}n —1559,7; lartaro-di-p-anisidide, F.250° avec décomposition, [æh — 204; lartaro-di-p- xylidide, K.2090, [xls — 149%; tartaro-di-m-4-xylidide, F.1790, [ain — 200°,5. — M. E. Knecht et Mlle EX. Hib- bert décrivent un procédé volumétrique pour la déter- mination du tungstène. L'acide tungstique est réduit par Zn et HCI en dioxyde de Tu, donnant une solution brun clair en présence d’un excès d'acide; en ajoutant une solution d'un sel ferrique, le dioxyde est oxydé en trioxyde. La fin de la réaction est indiquée par la dis- parition de la couleur bleue intense du composéinter- médiaire correspondant au pentachlorure de tungstène. — M. J. Knox décrit un procédé de détermination volumétrique du mercure dans une solution de nitrate mercurique par le thiocyanate, et de l'argent en pré- sence du mercure basé sur la solubilité de AgCIl dans KCAz. — M. H. J. S. Sand montre que, dans l'analyse électrolytique des alliages de cuivre et d’étain, tout le cuivre peut être précipité de la solution bouillante avec un potentiel auxiliaire de 0,6 volt; seule, la présence de chlorures exerce une influence retardatrice. — M. E. Knecht a constaté qu'on peut déterminer exac- tement les perchlorates par réduction avec le chlorure tilaneux et titration en retour de l'excès de ce dernier avec l’alun de fer, en employant le thiocyanate de K comme indicateur. Il faut employer le chlorure tita- neux à l’état concentré et acidifier fortement avec un mélange d'acides sulfurique et oxalique. — MM. G. Barger et G. S. Walpole ont réalisé la synthèse de la p-hy ‘droxyphényléthylamine, principe actif de l'ergot: 1° en nitrant la benzoylphényléthylamine, réduisant le composé p-nitré, remplaçant Az? par OH au moyen de la diazo-réaction et saponifiant le groupe benzoyle ; 2° en préparant la p-méthoxyphénylpropionamide avec l'anisaldéhyde, appliquant la réaction de Hofmann et éliminant le groupe méthyle. — M. W. B. Tuck a étu- dié le spectre d'absorption des composés hydroxy- azoïques et confirme ses conclusions précédentes sur la structure de ces corps. — M. F. L. Pyman à cons- taté que les 1- -benzyltétrahydroisoquinolines subissent simultanément une oxydation et une scission sous l'influence de l'acide sulfurique dilué chaud et Mn0°, en donnant l’aldéhyde correspondant au groupe ben- zylique substitué et un produit de dégradation basique. — MM. J. Holmes et P. J. Sageman ont étudié les changements de volume qui se produisent en mélan- geant l'iodure de méthyle avec l'alcool éthylique, l’'al- cool -propylique et l’acétone. Ils concluent que l’acé-. tone est agrégée comme les alcools primaires normaux et que CHI “possède deux fois cette complexité. — MM. B. H. Buttle et J. T. Hewitt ont étudié la cons- titution des polynitrophénols en solution alcaline d'après les spectres d'absorption: le2 : 6-dinitrophénol donne des sels o-quinonoïdes ; le 2: 4-dinitrophénol plutôt des sels p-quinonoiïdes. L'acide picrique est presque complètement ionisé en solution aqueuse. — MM. T. S. Price el D. F. Twiss, par hydrolyse des alkylthiosulfates sodés correspondants, ont obtenu les o-,u- el p-nilrobenzylmercaptans, F. 290,5, 140 et 529,5; l'oxydation par l'iode donne les disulfures correspon- dants. — M. A. W. Gregory indique une méthode colorimétrique pour la détermination de petites quan- tités de vanadium, basée sur la coloration violette, puis : orange permanente, que prend une solution de vana- dium dans H?S0! concentré ajoutée à une solution de strychnine dans le même acide. — MM. K. J. P. Orton et W. J. Jones montrent que, dans la chloruration (et la bromuration) des acylanilides, les chloroamines Ar.AzCl.Ac ne sont pas un stade intermédiaire, en ce sens qu'elles sont primitivement formées et se changent en chloroacylanilides par un réarrangement intramo- léculaire. La substitution de H dans le noyau benzé- nique des anilides résulte d'une action directe de Cl (tou Br) et de l'amide. Dans la conversion d'une chloro- amine en anilide isomère sous l'influence de HCI, dont la présence est essentielle, la chloroamine réagit ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES » 973 d'abord avec HCI, suivant le schéma Ar. Az CI. Ac + HCI_2= Ar. AzH. Ac + CE; puis CI libre et l'anilide réa- gissent. — MM. T. S. Price el L. M.Jones ont préparé lesdiséléniuresde benzyle, F. 92-939, et de nitrobenzyle, 0- F.103°,5, m- K.106°, p- F.107°,5, au moyen des sélé- nosulfates correspondants, soit par l’action de I, soit par électrolyse. Ces corps se décomposent à la lumière avec dépôt de Se. — MM. D. R. Boyd et H. S. Knowl- ton, en faisant réagir AzH'OH sur l’éther glycide-o- tolylique : d CH.CH*.OC717 Oo | Ncre Eb. 1434°,5 sous 14 mm., ont obtenu: l'alcool f-amino- fl-o-tolyloxyisopropylique, F. 580-60°; la dihydroxy-di- o-tolyloxydipropylamine, F. 117,5, et la trihydroxy- tri-o-tolyloxytripropylamine, F.830-84°. — MM. D. k. Boyd et E. R. Marle ont préparé, par l'action de KOH sur l'épichlorhydrine en présence de monophénols : l’'éther glycérol-dithymylique OH.CH (CH°.0.C!H'*}, E. #19°,5-420, et l'éther glycide-thymylique, Eb. 158 sous 16 mm. — M. G. Senter à déterminé les vitesses de réaction des acides bromoacétique, «-bromopropio- nique et «-bromobutyrique et de leurs sels de sodium avec l'eau et avec les alcalis ; avec l’eau, elles croissent régulièrement dans la série; avec NaOH, elles dimi- nuent. — MM. J. Wade et H. Finnemore ont constaté que l'éther ordinaire est résoluble en deux constituants physiques par un fractionnement soigné. Le plus vola- til est un mélange binaire d’éther et d'eau, ayant un point d'ébullition constant et minimum: 34°,15 et con- tenant environ 13 °/, d'eau. L'autre est approximative- ment de l'éther pur; il bout à 34°,50. Mais, en présence d'alcool, le point d'ébullition peut s'élever jusqu’'à.34°,73 et de l'alcool passe avec l'éther. — M. Al. Ch. Cum- ming propose une nouvelle méthode pour la mesure de la tension de vapeur, basée sur la mesure de la tem- pérature à laquelle la rosée apparait sur un cylindre d'argent refroidi lentement dans un vase clos conte- nant une solution d'un hydrate. Séance du 4 Novembre 1909. M. J. F. Thorpe décrit une méthode qui permet de transformer complètement l’aè-dicyanobutane (adipo- nitrile) en 1-imino-2-cyanocyclopentane. — MM. M.O. Forster et Ch. $S. Garland concluent, d'une étude des composés dérivés de l’aminocamphre et du méthylamino- camphre par copulation avec les sels de diazonium, que les composés diazoaminés aliphatiques-aromatiques doi- ventêtrereprésentés par l'expression X.A7:Az.AzH.C5H®, l’atome d H du noyau lriazénique prenant une position de stabilité plus grande au voisinage du groupe phényle qu'au voisinage du radical alkylique X. —M.H. M. Daw- son et M!e M. S. Leslie ont étudié la réaction de l'iode sur l’acétone. A la température ordinaire, la réaction est très rapide, quoique incomplète, ce qui indique un changement réversible. Dans les solvants inertes, la vitesse de la réaction diminue. En solution aqueuse acide, la vitesse de disparition de l’iode est constante en présence d’une grande quantité d’acétone. — MM. A. Senier et F. G. Shepheard ont préparé une série d’arylidène- et de naphtylidène-amines présen- tant le phénomène de la phototropie. En outre, ces bases colorées prennent une couleur plus foncée par chauffage et plus claire par le refroidissement, qui a été poussé Jusqu'à la température de CO* solide. Les au- teurs proposent de désigner ces variations de couleur, qui sont réversibles, sous le nom de {hermotropie; ils les attribuent à une variation du mode d'agrégation des molécules. — MM. H. O. Jones et H. S. Tasker, en faisant agir le chlorure d’oxalyle sur divers merca- ptans ou leurs sels métalliques, ont obtenu les éthers de l’acide dithio-oxalique (éther méthylique, F.829,5- 83°,5; phénylique, F.119°-1200). Ces éthers, par ébulli- tion avec KHS alcoolique, fournissent le dithio-oxalate de potassium (KSCO}, qui donne une coloration intense avec les sels de Co et de Ni. — MM. H. S. Tasker el H. ©. Jones, par action du chlorure de phosphoryle sur le phénylmercaptan, ont obtenu le trithiophosphate de triphényle, K.145°. Avec le chlorure de thionyle, il se forme du disulfure de phényle et SO*; avec le chlo - rure de nitrosyle, on obtient une brillante coloration rouge (probablement due à un éther thionitreux), qui disparait graduellement avec dégagement d'oxyde ni- tique et formation de disulfure d'alkyle. — M. A. G. Perkin à extrait des fleurs de l’Æ/ibiscus sabdarilla 0,36 2/, d'un mélange de trois matières colorantes jaunes; la principale, CHOS, est identique à la gossy- pétine, dont l'ancienne formule doit être abandonnée ; la seconde est la quercétine ; la troisième est nouvelle et a reçu le nom d'hibiscétine, F.340°. — MM. O. Bau- disch, G. S. Hibbert et W. H. Perkin jun., en rédui- sant l'acide 4-hydroxy-0-toluique par Na et l'alcool, ont obtenu les deux acides e/s-etles deux acides {rins-1-mé- thyleyelohexane-4-01-2-carboxyliques; la réduction de l'acide 6-hydroxy-0-toluique donne un mélange des acides eis- el trans-1-méthyleyclohexane-6-0l-2-car- boxyliques. — MM. A. N. Meldrum et W. H. Perkin jun. eu réduisant l'acide 5-hydroxy-m-toluique par Na et l'alcool isoamylique, ont obtenu l'acide trans-1-mé- thyleyclohexane 5-ol-3-carboxylique, qui est transformé en acide cs par distillation et hydrolyse de la lactone résultante. — MM. A. Ch. Sirkar et J. M. Dutta ont trouvé qu'en solution neutre ou légèrement acide à 85° la réaction entre le permanganate de potasse et le sul- fate de manganèse est la suivante : 3MnSO* + 2KMn0O* + 200 = 5 Mn0? + K?S0* + 2H#S0*. En solution acide à 100, l'acide réagit sur Mn0* formé d'après l’équa- tion : 2Mn0? + 2 H?S0' — 2 MnSO' + 2 H°0 + 0°. Le sul- fate de manganèse reformé réagit sur une nouvelle quantité de permanganate, et le cycle continue tant que la solution reste acide. — MM. H. D. Gardner et W. N. Haworth ont étudié la condensation au cyana- célate d’éthyle sodé avec un certain nombre de cétones. SOCIÉTÉ ANGIAISE DE CHIMIE INDUSTRIELLE SECTION DE LONDRES Séance au 3 Mai 1909 (suite). MM. C. Beadle et H.-P. Stevens décriventune nou velle machine pour l'essai mécanique du caoutchouc, L'échantillon à examiner est étiré horizontalement, au moyen d’un chariot tiré par un câble qui s'enroule sur une poulie et se termine par un récipient métallique dans lequel on fait arriver de l’eau. Le poids tenseur augmente régulièrement; quand la rupture se produit, un dispositif automatique arrête l'écoulement de l’eau, et l’on n’a plus qu'à peser le récipient. En même temps, l’élongation est mesurée par un indicateur glissant sur une échelle et qui s'arrête également au moment de la rupture. Les auteurs ont également fait construire une machine qui pratique, pour les essais, dans des feuilles de caoutchouc vulcanisé, des disques de 10 millimètres de diamètre percés d'un trou de 5 millimètres de diamètre. Les essais ont donné les résultats suivants : TENSION DE RUPTURE en grammes par mm* ELONGATION A LA RUPTURE longueur primitive —1 Pneumaliques de voitures . 610 4,4 Caoutchouc de plantation non MULGAUIS CINE RECU 216 2,3 Caoutchouc de plantation vul- CHA MEMET EPA RS PRE PRE 635 6,6 ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 22 Juillet 4909. M. M. Planck rend compte du cours qu'il a fait aux mois d'avril et de mai de cette année, notamment sut 974 le principe de relativité, à la Columbia University de New-York. Ce principe, en vertu duquel il est ahsolu- ment impossible de démontrer le mouyement d'un corps individuel dans l'espace vide, même dans le cas où il émettrait des rayons lumineux, a fait ses preuves dans toutes les tentatives de vérification jusqu'ici faites et par conséquent semble jouer un rôle fondamental en Physique. — M. Rubens présente un mémoire de M. E. Regener, assistant à l'Institut de Physique de l'Université de Berlin, sur /e dénombrement des parti- cules « à l’aide de la scintillation et sur la grandeur de ja quantité élémentaire d'électricité. La scintilla- tion du sulfure de zinc exposé à l'influence des rayons x, découverte par Sir W. Crookes, suggère l'hypothèse que toute particule & incidente produirait un point lumineux, dans des conditions convenables. Si cette hypothèse était fondée, l'observation des points lumi- neux permettrait de déterminer le nombre de parti- cules + émises chaque seconde par un produit de polo- nium. Les expériences résumées dans un mémoire que l’auteur à présenté l’année dernière à la Société alle- mande de Physique avaient rendu cette facon dé voir extrêmement vraisemblable. Dans ses nouvelles expé- riences, M. Regener élimine toute incertitude en sub- situant à l'écran de sulfure de zinc une mince plaque de matière homogène (diamant) et en employant un microscope d'intensité lumineuse particulierement grande. Le dénombrement est étendu à un nombre aussi grand que possible de particules; les mesures de la quantité d'électricité transportée par ces rayons sont faites dans le vide le plus avancé possible. En sup- posant qu'une particule « porte deux quantités élémen- taires, on retire de ces expériences, pour la quantité élémentaire d'électricité, la valeur de 4,79 Pl 0 En unité électrostatique. Séance du 29 Juillet 1909. M. A. Penck rend compte.des observations qu'il à faites au Kilauéa, vers la fin de février de celte année. Lors de sa visite, il a trouvé le Halémauma, au centre du Kilauéa, rempli, jusqu'à environ 400 mètres au-des- sous du bord supérieur du cratère, de lave liquide, se déplaçant du milieu du lac du cratère vers les bords, où elle entrait sous les couches surplombantes de lave solide. La lave liquide entrait en bouillonnement, avec une parfaite régularité, 16 fois par dix minutes, dans la partie septentrionale du Lac, en formant une fon- taine de lave de 6 à 10 mètres de hauteur, dite le « OÙ Faithful ». Tout autour du Halémauma, le fond du Kilauéa est rempli de courants de lave solidifiée présentant par-c1, par-là, des gonflements et que tra- versent de profondes crevasses. Les parois du Kilauéa s'élèvent en gradins distinctement perceptibles sur ce fond rempli de lave, les couches individuelles s’abais- sant suivant le sens de rotation des aiguilles de montre, de façon à produireune disposition spiralée particulière. Les parois elles-mêmes se composent de basalte cou- ronné de tufs peu compacts, faisant croire à une phase antérieure de l’activité du volcan, phase caractérisée par l’éjection de scorieset de cendres. — M. Martens présente un travail de M. L. Grunmach, professeur à Ecole Polytechnique de Charlottenbourg, sur des apparerls, basés surune nouvelle méthode, pour mesu- rer les secousses sismiques de période minime. Ces appareils, construits par M. P. Stückrath, à Friedenau, servent a mesurer, soit les valeurs maxima de l’accé- lération, suivant trois directions perpendiculaires (ap- pareils à trois pendules), soit les déplacements hori- zonlaux des particules d’un rocher sur lequel l'appareil (pendule horizontal) se trouve placé. Ce dernier appa- reil est pourvu d’un enregistrement micro-photogra- phique, pour les observations faites au jour, et d'un enregistrement magnéto-inductif, pour lès mesures à faire aux endroits inaccessibles, Ces dispositifs sont assez sensibles pour mesurer les vibrations de rochers de période minime que provoque la chute des eaux dans un barrage, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 21 Octobre 1909. M. E. Warburg donne lecture d'un Mémoire sur | l'analyse (hermo-dynamique des effets photo-chi- miques, mémoire où il présente la démonslralion thermo-dynamique du théorème suivant : La décom- position photo-chimique d’un gaz cesse lorsque les con- centrations des produits de décomposition sont deye- nues les valeurs d'équilibre thermiques correspondant à la température du rayonnement employé. : Alfred GRaDeNwrtz. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du ? Juillet 1909. M. S. Hilpert donne lecture d'un Mémoire sur es relations qui existent chez les composés de fer entre la constitution chimique et les propriétés magnétiques. Comme c’est la molécule et non pas l'atome qui fait fonction de véhicule des propriétés ferro-magnétiques, les modifications chimiques doivent influer beaucoup plus fortement que les variations de température et d'autres facteurs extérieurs sur les propriétés magné- tiques du fer. C’est ainsi que l'alliage du fer avec d’autres métaux, lorsqu'il conduit à la formation de composés, suffit pour éliminer les propriétés magné- liques aux températures ordinaires. Aussi le fer ordi- naire doit-il constiluer un complexe de composants non ferro-magnétiques en eux-mêmes, que les réac- tions chimiques, ainsi que les températures élevées, détruisent facilement. Cette hypothèse vient d'être confirmée par la production d’alliages ferro-magné- tiques se composant d'éléments para-magnétiques et dia-magnétiques. L'auteur a étudié, du même point de vue, une autre classe de corps, les oxydes ferro- magnétiques, en se bornant proyisoirement au côté chimique du problème. Dans le cas des ferriles (sels de l’acide ferrique) de l’oxyde de cuivre et des mo- noxydes de cobalt et de fer, précipités, même d’une solution aqueuse, à l'état fortement magnétique, l'on ne saurait méconnaître un certain parallélisme entre la couleur et les propriétés magnétiques. La structure cristalline, tout en modiliant les propriétés magné- tiques (surtout la rémanence), n’est aucunement une condition nécessaire de la présence de magnétisme. Après avoir démontré que l’oxyde ferrique, en tant qu'acide, fournit des composés ferro-magnétiques, il s'agissait de savoir si, à l'intérieur d’une molécule ferro-magnétique, l'on peut provoquer des modifica- tions chimiques dans lesquelles le véhicule proprement dit de ces propriétés resterait inaltéré. Or, ce fait est confirmé pour deux réactions (conversion de l’oxyde ferreux du ferrite en oxyde ferrique et réaction ana- logue chez le ferrite de cobalt). — M. J. Würschmidt étudie les décharges discontinues dans ‘les tubes à décharges. Les recherches de M. N. Hehl!, d'une part, et de M. H.-A. Wilson*, d'autre part, ayant élucidé simultanément les lois qui régissent, dans le cas des décharges continues, l’effluye bleuâtre entourant la cathode, l’auteur étudie la relation entre la longueur de cette enveloppe et le nombre de décharges par seconde, dans le cas des décharges discontinues. De nombreuses expériences donnent comme résultat que le produit de cette longueur par le nombre de décharges est constant dans un certain intervalle. La durée de chaque décharge se trouve croître à mesure qu'aug- mente la capacité insérée en parallèle, tandis que les angmentations de la distance explosive d’un éclateur inséré en dérivation n'entrainent pas de variations considérables. — MM. E. Gehreke et G. Leithäuser donnent lecture d’un Mémoire sur /es copies de réseaux de diffraction à surface métallique. Ms ont constaté que les copies existant dans le commerce peuvent être converties en réseaux à réflexion métallique, en les 1 Thèse inaugurale, Erlaugen, 1902. ? Phil. Mag. (6), t. IV, p. 608, 1902. ACADÈMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES garnissaht dans un vide convenable, par projection cathodique, d’un mince enduit mélallique uniforme, de platine, par exemple. Les réseaux ainsi préparés sont équivalents, quant à leur intensité luinineuse, aux réseaux gravés dans une épaisse plaque métallique. Les expériences préliminaires avaient, en effet, prouvé qu'avec cerlaines précautions un miroir métallique et uniforme se conserve, même sur les couches les plus altéräbles, de gélatine, par exemple. Comme les pro- priélés optiques d'un réseau ne souffrent pas le moins du monde par là précipitabon du platine, le seul fac- teur thodifié étant l'intensité lumineuse, il ne paräîl pas itipossiblé de prodtire, d'un seul réseau ofiginal de quälilé excellente, un grand nombre de copies identi- ques à pouvoir réflecteur métallique. pour les réunir en un seul grand réseau dépassant l'original par son intensité et son pouvoir de résolution. — M. W.Nernst adrésse un thémoire sur l'analyse thermodynamique de certaines propriétés de l'eau. L'auteur à fait remär- quer, il y à déjà quelque temps, que les écarts que présente la vapeur d'eau avec la loi d'Avogadro et les lois des gaz en général, écarts se manifestant aux pres- sions élevées, semblent être dus à la formation de molécules doubles, c’est-à-dire à l'établissement de l'équilibre (H°0)*Z=2H°0. Sur la base de cette hypo- thèse, M. Nernst, en collaboration avec M. Herbert Levy (auteur d’un Mémoire homonyme présenté à la même séance), établit une équation d'état qui repré- sente parfaitement les déterminations antérieures de la densité et de la chaleur spécifique de la vapeur d'eau. Les principaux résultats de ces deux Mémoires sont les suivants : Les tableaux calculés sur la base de l'équation d'état donnent probablement la densité de la vapeur d'eau avec plus de précision que les mesures directesindividuelles. L'équation de Clausius-Clapeyron permet de développer une formule de la tension de la vapeur d’eau, formule qui, dans l'intervalle de 0 à 100°, concorde parfaitement avec les observations. La cha- leur moléculaire de la vapeur d’eau idéale, c'est-à-dire suffisamment diluée, se trouve être de 8,19 à la tempé- rature de 40°. La chaleur de vaporisation de Peau dans” l'intervalle mentionné ci-dessus est cäleulée avec une précision qui, paraît-il, va jusqu'à de petites fractions d'un pour mille; elle concorde, du reste, très bien avec les mesures directes de M. Henning. La chaleur de vaporisation de la glace à 0° (12.178 calories) est, semble-t-il, exacte à de petites fractions d'un pour mille près. La formule représentative de la tension de vapeur de la glace, — que les auteurs déduisent de cette valeur, de concours avec la tension de vapeur, très exactement donnée à 0°, et Fallure, connue avec une sûreté satisfaisante, des chaleurs spécifiques de la glace et de la vapeur d'eau, — semble être valable jus- qu'à des températures très basses. La « constante chimique » de la vapeur d’eau se trouve être de 3,65, tandis que la valeur approximative autrefois déduite par une voie toute différente était de 3,6. L'équation de la tension de vapeur de l’eau liquide, établie à l’aide du théorème thermo-dynamique de Nernst, est, * semble-t-il, susceptible au moins d'orienter les recher- ches jusqu'aux températures les plis basses, tout en renseignant d'une facon approximative sur l'allure de la chaleur spécifique de l’eau liquide à ces tempéra- tures. La théorie rend un compte parfait du minimum de chaleur spécifique que présente la vapeur d’eau aux pressions pas trop petites. lorsqu'elle est chauffée à pression constante. I1 semble, du reste, que l'allure de la chaleur spécifique de l’eau liquide soit tout analogue. Il serait désirable d'étudier à ce même point devue uo liquide non associatif, dont l'analyse thermo- dynamique serait évidemment considérablement plus simple. Mémoires reçus pendant les vacances. M. Robert Pohl : Sur l'effet photo-électrique du platine et du cuivre en lumière ultra-violette pola- risée, Dans les thiroirs de platine et de cuivre, produits par projection cathodique suivant le procédé de M. G. Leilhäuser, ol constate une influence très marquée, sur le nombre des électrons émis, de l'äzimut aussi bien que de l'angle d'incidence de la lumière ullra- violette polarisée. D'autre part, la distribution des vitesses se montre sensiblement indépendante de l'état de polarisation. Quand la lumière est polarisée paral- lèlement au plan d'incidence, il y à proportionhalité entre le courant photo-électrique et l'absorption de la lumière, calculée par les constantes optiques. Il en est de mème de là lumière polarisée verticalement au plan d'incidence, quant au flux lotal et non päs seulement pour les composantes calculées perpendiculairement à la surfice, à l'inverse des observations relatives aux iétaux alcalins liquides, sensibles dans la région de la lumière visible. Le facteur de proportionnalité est identique, dans les deux positions principales de l'azimut, pour différents angles d'incidence, à l'inverse de ce qui à lieu pour les métaux alcalins. D'une façon générale, on peut caractériser la différence entre les métaux liquides, sensibles dans la région visible, et les surfices métalliques solides, sensibles das la région ultra-violette, en disant que les électrons, étant«libres » dans le premier cas, suivent le vecteur électrique, tändis que, chez ces dernières, la lumière ultra-violette est absorbée par des électrons « liés ». M. J. Würschmidt La prétendue capacité des tubes à décharges : Les recherches résumées dans ce Mémoire font voir que là prétendue capacité des tubes à dé- charges (à savoir la quantité d'électricité réduite au potentiel de décharge qui passe pendänt chaque décharge) ne correspond pas du tout à la définition générale de cette notion. Elle est délerminée par la disposition en parallèle de capacités données; dans les tubes d’un certain type, cette «capacité » dépend de la résistance intercalée entre le tube à décharges et la source d'électricité, cette dernière étant indifféremment une mächine à influence ou une pile galvanique. Dans l'air humide, elle est plus grande que dans l'air sec ou dähs l'hydrogène. Lorsque les capäcités disposées en parallèle sont suffisamment grandes par rapport à celle du tube à décharges, le nombre de décharges passänt pär seconde dans le tube est inversement proportionnel à la capacité disposée en parallèle. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 25 Septembre 1909. 1° Sciences MATHÉMATIQUES. — M. W. Kapteyn pré- sente au nom de M. M. J. van Uven: l'echerche des fonctions qui peuvent être obtenues par une itération infinitésimale ; contribution à la solution de l'équation fonctionnelle d'Abel. L'auteur cherché à trouver une expression pour l'itération &, (x) de l'ordre n — 1 d'une fonction (x), ayant une signification détermi- née pour toutes les valeurs réelles de Pindice » d'ité- ration. À cet effet, il déduit une forme modèle à trois constantes arbitraires. 20 Soiencrs Paysiques. — M. W. H. Julius: Conse- quences régulières de la réfraction irréquiière dans le Soleil. À cause de la réfraction anormale dans les gaz du Soleil, les phénomènes connus sous les noms de taches, de protubérances, de facules, de foceuli ne sauraient être des images optiques,dans Île sens ordi- naire, d'objets lumineux correspondants. Si l'on veut tirer des conclusions de la distribution de la lumière dans une prétendue image du Soleil, il faut qu'on prenne comme base l'étude des conséquences de la réfraction. Supposons que le Soleil soit une masse de matière incandescente, enveloppée d'un mélange de gaz. Alors les gradients de densité dans cette atmo- sphère, tant soit peu égaux à ceux qui se présentent dans l'atmosphère terrestre, feront courber les rayons de lumière, les rayons de courbure ne formant qu'une petite fraction, 1/50 par exemple, du rayon de la pho- tosphère. Gette considération montre que l'influence 976 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de la réfraction sur l'image du Soleil doit être très con- sidérable. En effet, on peut — en se basant sur les lois connues du mouvement de la lumière à travers des milieux de densité optique à variation continue — prédire quels changements on observera sur la source sphérique de lumière comme écran, aussitôt qu'il se produira dans une couche de gaz placée devant cette source une raréfaction ou une condensation locale. Cela mène facilement à la connaissance du rôle joué par l'atmosphère solaire comme système optique. Une raréfaction placée excentriquement devant le disque solaire se présente obscure vers le côté du limbe et éclairée vers le côté du centre du disque; au con- traire, dans les mêmes circonstances, une condensation se montre éclairée du côté du limbe el obscure vers le centre du disque. L'auteur à démontré la généralité de ces résultats à l'aide d'expériences très simples. A la température de 159, la densité d’une solution saturée de AzH'Cl est égale à celle d'un mélange de 78 °/, de glycérine pure et de 22 °/, d’eau. Ainsi une goutte de l’une de ces deux matières reste suspendue dans l'autre très longtemps pour s'y dissoudre enfin. La grande viscosité de la glycérine est la cause du fait que des courants trop rapides ne s’y présentent pas. Or, la solution de glycérine et la solution de AzHCI ayant respectivement pour la lumière jaune les indices de réfraction 1,44 et 1,38, on peut imiter, à l’aide de ces deux liquides, la réfraction anomale dans l'atmosphère solaire, la source de lumière étant une pièce de verre mat illuminée intensivement par un arc électrique de 3 ampères. Si le vase contient une solution de glycé- rine, les gouttes de sel y représentent des raréfactions ; au contraire, si le vase contient une solution de sel, les effets d'ombre sont renversés. Ces expériences induisent l’auteur à attribuer l'obscurité des taches solaires entièrement à la réfraction. Si la matière dans les taches solaires est en mouvement tourbil- lonnaire, — ce qui est très probable, surtout après la découverte par M. Hale de l'effet Zeeman dans ces points, — la densité doit être un minimum dans le noyau, pour s'accroître, mais loujours avec un gra- dient de plus en plus petit, en allant vers l'exté- rieur dans le domaine de circulation environnant. Dans le cas d'une pareille variation de la densité, la réfraction cause infailliblement l'apparition d'une ombre et d'une pénombre, la ligne de séparation entre ces deux parties, ordinairement très distincte, étant dans un certain sens l'image du limbe ou plutôt de l'horizon du Soleil. Si lon remarque, de plus, que la lumière à la proximité des raies d'absorption est réfractée considérablement, à cause de la dispersion anomale, celte distribution de la lumière dans le domaine de la tache fait trouver en même temps les principales propriétés remarquables par lesquelles le spectre des taches solaires se distingue du spectre moyen du Soleil, c’est-à-dire l'élargissement et l'asy- métrie récemment coustatées des raies des taches. Au commencement de 4909, M.J. Evershed, de l'Observa- toire de Kodaikanal, à découvert une propriété géné- rale importante du spectre des faches : une asymétrie systématique des raies, qu'il ne pouvait expliquer qu'en supposant que la matière à l'intérieur de la tache soit animée d’un mouvement radial, hypothèse en conflit avec des résultats bien confirmés de M. Hale. Ce conilit des résultats de ces deux expérimentateurs excellents disparaît entièrement si l’on considère la distribution de lumière dans une tache solaire comme la consé- quence de la réfraction. Même dans le spectre moyén du Soleil se manifeste l'influence de la réfraction ano- male. Les raies de Fraunhofer ne sont pas exclusive- ment les conséquences de l’absorplion : ce sont des raies d'absorption, enveloppées par des bandes de dis- persion. En complétant de celte manière l'interpréla- tion de Kirchhoff, on trouve en même temps que les raies de Fraunhofer plus faibles doivent être asymé- triques, élargies principalement vers le côté du rouge. De plus, on en déduit que cet élargissement asymé- tique doit être plus fort dans le spectre du limbe que dans celui du centre du disque solaire. Un déplace- ment de la plupart des raies de Fraunhofer, pas trop large vers le rouge et bien plus grand au limbe qu'au centre, à été constaté en effet par MM. Jewell, Halm, Hale et Adams, Fabry et Buisson. Ils expliquent le phénomène par l'hypothèse qu'une pression de 5 à 7 atmosphères règne dans la couche renversante. La théorie dela réfraction rend superflue cette hypothèse, En effet, la densité moyenne dans l'atmosphère solaire doit être beaucoup moindre. — M. P. van Romburg : Sur la nitration de la diéthyl-auiline. — M. A. P. N. Franchimont : Sur les carbonales alkylés de soude. — M. Franchimont présente au nom°de M. ©. de Vries Sur la réduction anomale d'un composé uilro-aromatique par l'étain et l'acide chlorhydrique, el sur un cas remarquable de dimorphie. — M. J. D. Van der Waals présente aux noms de MM. J. Timmer- mans et Ph. Kohnstamm : Sur l'influence de la pres- sion sur la miscibilité de deux liquides. 1. Résumé de recherches expérimentales antérieures. 2. Considéra- tions théoriques. 3. Recherches de Van der Waals. 4. But de l’investigation. 5. Méthode. 6. Résultats. 7. Ré- sumé des formes possibles de la ligne des points de plissement. 8. Classification des systèmes examinés. — Ensuite M. Van der Waals présente au nom de M. A. Smits: 1° La représentation dans l'espace P, T, X du système éiher-anthraquinone ; 2 Sur des lignes de lusion récurrentes. — M. A. F. Holleman présente aux noms de MM. A. Smits et J. P. Wuite : Sur le sys- tème eau-sulfate de soude. — Ensuite M. Holleman présente au nom de M. F. E. C. Scheffer: Sur des équilibres hétérogènes de compositions dissociantes. 30 SciENCES NATURELLES. — M. W. Burck: Contribution à laconnaissanre de la sécrétion de l'eau dans les plantes. — M. EF. A. FE © Went présente au nom de M. J. Kuy- pers: L'influence de la lempérature sur la respira- tion des plantes. Les résultats de l’auteur sont : 4° La théorie de Blackmann s'applique à la respiration en ceci que la loi de Van’tHoff-Arrhenius est de rigueur de 0° jusqu'à 20° ou 25°, que le maximum se déplace avec le temps de l'observation, que la régression à 40°, 43°, 50est logarithmique durant la germination ; 2° Le cours de la respiration dépend étroitement du carac- tère de la nourriture de réserve. — Ensuite M. Went présente au nom de M.Th. Weevers: La signification physiologique de quelques glucosides. — M. L. Bolk présente au nom de M. C.P. van Valkenburg : La surface et la structure de l'écorce cérébrale d'une idiole mierocéphale. — M. H. Zwaardemaker présente au nom de M. F. 9. J. Buytendijk : 1° Sur les variä- tions du sérum du sang du requin durant la mort par perte de sang; 2 Sur la constitution de l'urine du requin durant la diurèse normale et intensifiée. — M. S. H. Koorders : 1° « Beilrag zur Kenntniss der Flora von Java » (Contribution à la connaissance de la flore de Java), n° VII-XIT; 2 « Die Tropensumpl- flachmoor-Natur der Moore des produktiven Carbon von Herrn H. l'otonié, nebst der Vegetalionsschilderung eines rezenten tropischen Wald-Sumpfflachmoores. — M. H. C. Prinsen Geerligs : « Cane sugar and ils manufacture » (Le sucre de canne et sa fabrication), avec une traduction japonaise. P. H. SCHOUTE- EEE Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris — L. MARETHEUXx, imprimeur, 1, rue Cassette. 20° ANNÉE N° n 30 DÉCEMBRE 1909 Revue générale Res oSCrenc pures el appliquées Directeur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 18, rue Chauveau-Lagarde, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue ront complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Mathématiques La Société mathématique de Calcutta. — Une Société mathématique vient de se fonder à Cal- cutta, sous les auspices non seulement de membres de l’enseignement mathématique, mais aussi de magis- trats, d'ingénieurs, de commerçants, dont les noms in- diquent en très grande majorité une origine indigène. Cette Société vient de faire parvenir en Europe le pre- mier numéro de son Bulletin, daté d'avril dernier. Or, le contenu de ce premier fascicule est bien digne d'attention. Notons d'abord qu'il se termine par des revues bibliographiques fort bien documentées et tout à fait au courant de l’état actuel de la Science. On y mentionne, en particulier, avec le soin qu'elle mérite, la récente démonstration d’un théorème de Waring' par M. Hilbert. Mais il convient surtout d’insister sur les articles originaux, au nombre de trois. Celui qui est signé C. E. Cullis appartient au domaine de la Géométrie ana- lytique classique : la surface cubique qu'il étudie occupe cependant une place à part, par la relation qu'elle offre avec l'un des faits les plus curieux de la Géométrie de situation. Celui de M. Ganesh Prosad est une contribution aux recherches si actuelles sur l’ana- lyticité des solutions des équations aux dérivées par- telles. Enfin, pour être plus élémentaire, l’article de M. Syamadas Mukhopadhyaye n’est ni le moins curieux, ni le moins suggestif des trois. L'auteur, partant d’arcs de courbes tout à fait quelconques (à des hypothèses très générales près), donne au théorème de Rolle des généralisations remarquables par leur simplicité et leur caractère géométrique, à commencer par les deux suivantes : 1° Tout arc convexe qui est coupé par un cercle en quatre points contient au moins un sommet (point où le cercle osculateur à un contact du 3° ordre?) ; 1: Tout entier positif est représentable par une somme de puissances nèmes d'entiers positifs, le nombre de cesentiers restant inférieur à une limite qui dépend seulement de l’ex- posant ». ? Pour les courbes convexes fermées, on peut ainsi établir l'existence de quatre sommets au moins. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, 2° Tout arc convexe qui est coupé par une ellipse en six points contient au moins un point sextactique (point où la conique osculatrice, supposée en l'espèce une ellipse, a un contact de 5° ordre). Les comptes rendus des séances nous annoncent, d’ailleurs, des communications consacrées aux courbes de Jordan sur les surfaces de Riemann, aux détermi- nants infinis, etc. On le voit, les mémoires insérés dans le fascicule dont il s’agit présentent une nouveauté et un intérêt qu'on ne rencontre pas toujours dans les publications similaires d'Europe. Les auteurs — et les indigènes ne se sont pas montrés les moins sagaces — se sont adressés à des questions importantes et n'ont pas reculé devant des problèmes difficiles. Les formes retentissantes et souvent redoutables sous lesquelles s’est manifesté récemment le réveil de l'Asie et, en particulier, de l'Inde, ne doivent pas faire perdre de vue l’activité pacifique par laquelle ce pays montre aussi sa tendance à vivre de sa vie propre et à prendre sa place au soleil. Gette forme d'activité a droit, elle, à toute notre sympathie, et c'est avec un plaisir exempt d’arrière-pensée que l’on peut en signaler les effets. $ 2. — Physique Sur le sens des courants thermo-électri- ques.— M. Bruno-Joseph Thomas a récemment publié, dans le Bulletin de l'Académie des Sciences de Bel- gique', un Mémoire ayant pour litre : « Lois régissant le sens des courants thermo-électriques. Cause des inversions ». Il a cherché à établir notamment les lois suivantes : « 4° Quand on établit une différence de température entre les deux soudures d’un couple thermo-électrique, le courant qui prend naissance va de la soudure chaude à la soudure froide par l'élément électrique- ment le plus conducteur, si le produit du coefficient de conductibilité électrique de cet élément par le coefficient de conductibilité calorifique de l’autre élé- ment est supérieur au produit du coefficient de con- 1 Bulletin de l'Académie des Sciences de Belyique, 1909, n° 8, page 903. 24 978 ductibilité calorifique du premier élément par le coef- ficient de conductibilité électrique du second; « 2° Si le premier produit est inférieur au second, le courant va de la soudure chaude à la soudure froide par l'élément électriquement le moins conducteur; « 3° Si les deux produits sont égaux, aucun courant ne se manifeste. » Bien que la rédaction de la fin de ce Mémoire soit de nature à inspirer de la méfiance au lecteur et que l'on s'étonne de voir un travail recu sous une telle forme par une Académie, il m'a semblé utile d'exa- miner avec soin le fond même du travail, parce qu'il traite une question importante. Pour établir les lois énoncées ci-dessus, M. Thomas a utilisé les résultats qui ont été obtenus par divers physiciens et quil a trouvés dans des mémoires parfois déjà anciens. Remarquons tout d'abord que les conductibilités élec- triques et calorifiques et les pouvoirs thermo-électri- ques des métaux varient considérablement avec le degré de pureté des échantillons étudiés. Pour vérifier les relations énoncées, il était donc indispensable de déterminer sur les mêmes échantillons les conductibi- lités électriques et thermiques et les pouvoirs thermo- électriques. L'important Mémoire de W. Jaeger et H. Diesselhorst' renferme un grand nombre de résul- tats de mesures faites avec la plus grande précision et utilisables pour le but que nous poursuivons. Mais nous allons, au préalable, donner aux règles énoncées par M. Thomas une autre forme, qui permettra de les rattacher à une des lois les plus importantes de la théorie des électrons. Désignons par les lettres e et c respectivement les conductibilités électrique et calorifique des deux métaux et affectons de l'indice 1 les lettres qui se rapportent au métal électriquement le plus conduc- teur, l'indice 2 caractérisant l’autre métal. Si l’on a : Cle > Cey) c'est-à-dire : le courant thermo-électrique ira, d'après M. Thomas, de la soudure chaude à la soudure froide à travers le métal électriquement le plus conducteur, c'est-à-dire le métal désigné par /, tandis que l'inégalité : CiCo L Ceyy ou : Ce Ci CIC permettrait de prévoir un courant thermo-électrique allant de la soudure chaude à la soudure froide à tra- vers le métal électriquement le moins conducteur, c’est-à-dire le métal appelé 2. Ces deux règles peuvent être résumées en une seule, comme suit :. Le courant thermo-électrique va de la soudure chaude à la soudure froide, à travers le métal pour lequel le C : rapport = est le plus petit. Ce dernier énoncé a l'avantage de rattacher la règle à la loi de G. Wiedemann et Franz. Il reste à vérifier le nouvel énoncé, à l’aide des ré- sultats de W. Jaeger et H. Diesselhorst. A cet effet, nous avons dressé le tableau I qui suit : la première colonne contient la liste des métaux dans l’ordre des DER G " ge valeurs décroissantes de =, la deuxième la composition e exacte de ces métaux, la troisième les valeurs du rap- port- à 18° et enfin la quatrième les forces électro- e motrices thermo-électriques. D — 1 Wissenschaftliche Abhandlungen téchnischen ÆReichsanstalt, volume 3, page 269, der physikalisch- Berlin, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE TABLEAU I. F.E.M. thermo- Ê COMPOSITIONS électriques MÉTAUX NCA en microvolts chimiques à 180 et par rap- port au cuivre —_—___——…—_—_ | Bismuth . pur. 96% + 73,3 99,55Fe; 0,1C; 0,2Si; Fed or P EO 838 | us 7e 7) 0,1 Mn. ( ? Palladium. pur. 154 + 11,5 Platine . pur. 153 + 6,1 Etain . . pur. 735 + 2,6 Plomb . pur. 715 + 2,9 QAR Fos pur. 709 0 Cadmium . pur. = 706 — 0,6 AT (97,0 Ni: 1,4Co; 0,4 si Nickel . .}" 4 6Mn:0,1Cu: 0,18i$ 099 + 22,3 Argent pur 999,8. 686 0 Zinc pur. 672 — 0,1 Cuivre ur. 671 0 Aluminium| 99A1: 0,5Fe; 0,4Cu. 636 + 3,2 A la simple inspection de ce tableau, on constate que les couples suivants, solamment, font exception aux règles énoncées par M. Bruno-Joseph Thomas : er-palladium, fer-platine, fer-étain, fer-plomb, fer-or, fer-cadmium, fer-nickel, fer-argent, fer-zinc, fer-cuivre, fer-aluminium, nickel-cadmium, nickel-or, nickel- plomb, nickel-étain, nickel-platine, nickel-palladium, aluminium-cuivre,aluminium-zinc, aluminium-argent, aluminium-cadmium, aluminium-or, aluminium-étain. Les exceptions signalées ne peuvent être attribuées à des erreurs dans les mesures. Considérons encore le couple thermo-électrique bis- muth-antimoine. Lorenz ‘a obtenu les valeurs consi- gnées dans le tableau suivant; ses mesures ont été exécutées par une méthode qui peut être considérée comme une des plus exactes : à Oo € Antimoine: CM EN PR UNE 2011 BiSsrouthe Re ET CI Te 1830 Lorenz n’a pas déterminé les forces électromotrices thermo-électriques des métaux qu'il à étudiés, mais nous savons que le courant va, dans le couple bismuth- antimoine, de la soudure chaude à la soudure froide à travers l’antimoine. La règle précédente exigerait le contraire. Thomas a considéré le couple bismuth-anti- moine (page 909 de son travail); il n'a pas trouvé que cet élément thermo-électrique faisait exception, parce qu'il a utilisé des valeurs des conductibilités électriques et thermiques que l’on ne saurait admettre. En effet, si l'on accepte les valeurs adoptées par M. Thomas, on trouve pour l’antimoine : = 0643, [on et pour le bismuth : 1445, Ca soit * cs Ca m le En terminant, je ferai remarquer que, déjà en 1900, Jaeger et Diesselhorst? ont cherché à établir par leurs mesures une relation entre les pouvoirs thermo-élec- triques des métaux et les écarts que ceux-ci présentent par rapport à la loi de G. Wiedemann et Franz. Ils ont 1900: et Sitzungsber. der Akademie der Wissenschallen zu Berlin, 1899, page 719. J L i Wicdemann Annalen der Physik, t. XIU, 1884, p. 422. ? Loco citato, page 398. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 9 fait observer que l'on trouve les forces électromotrices thermo-électriques les plus élevées pour les métaux qui s'écartent d'une manière notable de la loi de Wiede- mann-Franz et de celle de Lorenz : celle-ci est, comme on sait, une généralisation de la précédente. Toutefois, le premier tableau, que nous avons reproduit ci-dessus, montre que cette règle n'est pas générale. Edmond van Aubel, Professeur à l'Université de Gand. $ 3. — Chimie - La Table internationale des Poids atomi- ques. — Le Comité international des Poids atomiques, composé de MM. F. W. Clarke, W. Ostwald, T.E. Thorpe et G. Urbain, vient de présenter son Rapport sur les déterminations publiées en 1909 et qui sont relatives aux éléments Cl, Az, C, I, Ag, P, As, Cr, Te, Hg, Pd, Kr et Xe. I lui à paru qu'il n'y avait pas lieu d'apporter de grandes modifications à la Table internationale arrêtée à la fin de 1908 et que nous avons publiée dans notre numéro du 15 février 1909 (p. 102). Voici les seuls chan- gements qui ont été reconnus nécessaires : Le poids atomique du chrome, qui était de 52,01, à été arrondi à 92. Celui de l’arsenic a été fixé à 74,96, d'après les travaux de Baxter et Coffin. Ceux du krypton et du xénon deviennent 83,012 et130,70, d'après les détermi- nations de Moore. Les variations de la valence des éléments avec le volume aux très hautes pressi ions. — Il y à quelques années, au cours d'expériences sur le point de fusion du carbone, M. A. Ludwig avait noté la cessation de la conductibilité du carbone au cours de la fusion sous une pression gazeuse élevée et l'avait attribuée au passage d'une forme moins dense du car- bone à la forme plus dense du diamant‘. Par suite de l'élévation de la température d'inversion, plus de 3.000°, et de la pression extrème nécessaire, une étude plus complète de ce phénomène fut impossible, et l’auteur dut se rejeter sur des substances plus faciles à fondre. Le bismuth lui parut particulièrement propre à des recherches du même genre, non seulement à cause de son bas point de fusion (265°), mais aussi vu l'augmentation de densité relativement importante (3 2/9) qu'il présente à la fusion. Voici les observations d'un haut intérêt que M. Ludwig vient de faire sur ce corps*. Le métal employé contenait 99,6 °/, de bismuth et des traces d'antimoine, de cuivre, de plomb et de fer. Un creuset renfermant le métal préalablement fondu était introduit dans une bombe à pression et soumis en quelques secondes, avant qu'un refroidissement pro- noncé püt se produire, à une pression très élevée et égale, pendant la durée de laquelle les joints de l’appa- reil restaient absolument étanches. Dans ce but, on employait un accumulateur hydraulique, à poids ajustables, en combinaison avec une presse à huile de 300 tonnes. Lorsqu'on soumet le bismuth fondu à une pression supérieure à 17.000 atmosphères, puis qu'on le laisse refroidir, en diminuant graduellement la pression, vers 3.000 atmosphères le piston se détend brusque- ment, montrant que le bismuth s'est soudainement di- laté. Il s’est donc formé aux hautes pressions une modi- fication du bismuth de volume moindre, par conséquent de densité plus élevée qu'à la pression ordinaire; mais cette modification dense est peu stable et retourne rapidement à la modification commune, par une sorte d’explosion, quand la pression s'abaisse. Il y a là une analogie avec l’antimoine explosif. Dans l'impossibilité d'obtenir cette modilication OR ? Zeitschrift fur Elektrochemie, t. VII, p. 273-281 (1902). = Journal of the American Chem. Soc., t. XXXI, p. 1130- 4136 (1909). : instable à la pression ordinaire, l'auteur a essayé d'en préparer un composé plus stable, dans les conditions mêmes où elle se forme, et il s'est adressé à l'oxyda- tion par décomposition de l’eau au moyen du bismuth fondu. Voici comment il opère : Le bismuth fondu est porté à la température de 280° dans le cylindre en acier-nickel de la bombe, puis recouvert d'un plongeur en magnésie mouillé avec de l'eau; en quelques secondes, on ferme la bombe et on la soumet à une pression de plus de 10.000 atmosphères. Un gaz se dégage avec un bruit semblable à un coup de fusil, mais la bombe résiste. Le cylindre est ramené à la température ordinaire, la pression abaissée et le gaz s'échappe. En enlevant le contenu de la bombe, le bismuth apparaît recouvert d’une masse brun-noir, qui à été enlevée et analysée : sa composition corres- pond à celle d'un monoxyde de bismuth, de formule Bi O. Ainsi, dans la modification dense du bismuth qui se forme sous les très hautes pressions, la diminution de volume s'accompagne d’une variation de la valence: le bismuth ordinaire trivalent devient bivalent et donne par oxydation le monoxyde BiO, encore peu connu, au lieu du trioxyde Bi*0# qui se forme dans les condi- tions habitnelles. Pour s'assurer si ce phénomène est général, M. Lud- wig à entrepris des expériences semblables sur l’anti- moine et l'aluminium. Oxydé dans des conditions identiques, l’antimoine à donné, sous une pression de 6.000 atmosphères, un monoxyde SbO, et l'aluminium un Corps blanc, qui n'a pu être analysé, mais qui diffère de l’alumine ordinaire, qu'il donne par oxyda- üon, et auquel l’auteur n'hésite pas à attribuer la com- position AÏO. Voilà donc deux autres éléments triva- lents qui se comportent comme bivalents sous des pressions considérables. M. Ludwig se propose de continuer ces expériences sur d'autres éléments bi et quadrivalents. Si la géné- ralité des faits qu'il a constatés se confirmait, il en résulterait des conséquences très importantes pour la théorie atomique. $ 4. — Botanique Les formations botaniques des maquis de la Corse. — Schimper avait émis l'idée que les ma- quis, groupe de formations fort important de la végé- tation méditerranéenne actuelle, ne constituent pas des formations autonomes, mais représentent seulement le sous-bois d'anciennes forêts méditerranéennes actuel- lement détruites. M. John Briquet, conservateur du Musée botanique de Genève, a soumis cette théorie à un examen serré, dont il a exposé les conclusions à la dernière réunion de la Société helvétique des Sciences naturelles, à Lausanne‘, et dont on trouvera le détail dans un onvrage général sur la flore de la Corse, actuel- lement à l'impression. L'auteur a fait d'abord une étude des caractères éco- logiques des essences dominantes des maquis, puis a suivi des forêts en Corse à tous les stades de leur déve- loppement, travail qui lui a été beaucoup facilité par l'Administration française des Eaux et Forêts. Il donne, en commencant, un aperçu synoptique des formations étudiées. La si/ve comprend, en Corse, les quatre sous-groupes de formations suivants: 1° Ju- risilve (Laubwald à feuilles persistantes : chènaie à Quercus suber et à Q. ilex); 2° Déciduisilve (Laubwala à feuilles caduques : chènaie à Quercus lanuginosa, châtaigneraie et hêtraie); 3° Conisilve (Nadelwald : pineraie à Pinus pinea, P. pineaster et P. larieio, sapi- naie); 40 Ripisilve(Auenwald : aulnaie, oseraie et tama- ricaie). La brousse comprend les trois sous-groupes de for- mations suivants : 4° A/aquis (brousse à feuilles persis- 1 Archives des Se. phys. et nal., #° sér., t. XXVIIT, n° 41, p- 458 (15 nov. 1909). antes : haut maquis, cistaie, halimiaie, buxaie); 2° Tham- née (brousse à feuilles caduques : vernaie, berbéridaie, junipéraie, rhamnaie, génistaie); 3° Ouédee (brousse à sous-sol périodiquement inondé : nériaie). Les conclusions tirées par M. Briquet de ses recherches sont les suivantes : Au point de vue écolo- gique, le maquis n’a aucun des caractères d’un sous- bois. Les essences qui le composent ont, dans leur grande majorité, un caractère d’'héliophilie prononcé, et non pas de scotophilie. En fait, le maquis ne se pré- sente comme sous-bois qu'à titre temporaire, là où l'homme a dérangé l'équilibre écologique de la silve. La silve méditerranéenne laissée à elle-même exclut le maquis spontanément, rapidement et sûrement. Les forêts de durisilve et de conisilve purement méditer- ranéennes ne comportent à l’état vierge aucun maquis en sous-bois. Silve, maquis et guarigue sont des forma- tions parallèles, à genèse indépendante, répondant à des conditions de développement différentes. En revanche, la proportion du terrain occupé par ces trois groupes à été dérangée par l’homme (feu et pacage), de telle sorte que le maquis et la garigue ont pu, dans la suite des temps, prendre un développement énorme par rapport à la silve, alors que primitivement cette dernière devait prédominer, ce qui, pour la Corse en tout cas, est attesté historiquement. $ 5, — Zoologie Le VII: Congrès international de Zoologie. — Sur l'invitation du Ministère autrichien des Cultes et de l’Instruction publique, le Congrès international de Zoologie tiendra sa 8 session à Graz (Styrie) du 15 au 20 août 1910. Non seulement tous les zoologistes sont invités à y prendre part, mais encore les amis des Sciences naturelles, dames et messieurs. Le programme provisoire prévoit cinq grandes séances plénières, le matin, réservées à des conférences d’inté- rèt général, et l'après-midi des séances de sections, où seront surtout faites des démonstrations dans les labo- ratoires d'Histoire naturelle de l'Université. Des excur- sions auront lieu aux environs de Graz, et, à l'issue du Congrès, une excursion à Trieste et sur la côte dalmate jusqu'aux bouches de Cattaro. Pour tous renseignements, s'adresser au Comité d'organisation, 2, Universitätsplaz, Graz. Le Mosquero. — On désigne sous ce nom, dans certaines régions du Mexique, le nid d’une araignée, qui est couramment employé dans les habitations comme piège à mouches. Cette coutume, dont l’ori- gine doit remonter à une époque assez reculée, s'est conservée parmi les descendants des Indiens taras- ques qui habitent le Michoacan. M. L. Diguet a eu l'occasion de l’observer au cours d’une Mission au Mexique et il a rapporté sur le mosquero et l’araignée qui le produit des renseignements des plus intéres- sants ’. A la saison des pluies, les maisons des villages sont envahies par une grande quantité de mouches et d’'in- sectes: pour s’en débarrasser, les indigènes vont cueillir, dans les endroits boisés des montagnes, les rameaux de l'arbre portant le nid de l’araignée, puis ils le suspendent au plafond de leurs appartements. L'araignée du mosquero, qui vient d'être décrite par M. Eug. Simon ? sous le nom de Cœnothele gregals, appartient à la famille des Dictynidées; c'est un ani- mal aux formes massives et trapues, de petite taille, mesurant à peine 4 ou 5 millimètres. Vivant constam- ment en recluses dans un nid qui à été édilié surtout en vue de l'élevage de la progéniture, les Cœnothele sont d'une allure assez lente; elles ne sortent de leur 1 Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation, t. LVI, p. 368 et suiv. 2 CR. Acad, des Sc. 1909, p. 736. de Paris, numéro du 15 mars CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE repaire que pour l’abandonner définitivement et le laisser aux jeunes qui le conservent pour l'hivernage. On rencontre habituellement leurs nids sur les chênes. qui croissent à une altitude voisine de 2.500 mètres, en particulier le Quercus polymorpha dont les rameaux touffus et contournés se prêtent à merveille à l'agence- ment d'une nidification qui rappelle celle des chenilles. processionnaires. Ces nids sont de dimensions variables : ils peuvent couvrir jusqu'à 2 mètres carrés. Ils sont constitués extérieurement par une enveloppe composée de deux sortes de fils : les uns, sécrétés par les filières, forment les câbles qui, s'étendant d'une branche à l’autre, maintiennent l'édifice; les autres, dits cala- mistrés, plus mous et franchement agglutinants, servent à capturer les proies. L'intérieur de cette poche est rempli par un lacis de fils inextricablement enche- vêtrés, entre lesquels de nombreuses alvéoles et gale- ries sont ménagées, ce qui donne à la masse un aspect spongieux. La surface du nid, comme la partie intérieure, est toujours d'une propreté remarquable, car la colonie comprend en commensalité un très petit coléoptère- lathridide, le Corticaria nidicola Grouv., long environ d’un millimètre, qui se rencontre en très grande abon— dance dans toutes les parties du mosquero. Le rôle social qui paraît incomber dans la communauté à cet infime commensal est de faire disparaître tous les détritus qui finiraient à la longue par encombrer ou souiller les galeries. Le mosquero s'accroît concentriquement, pour ainsi dire, après chaque capture ; lorsqu'un insecte est venu se faire prendre, il est immédiatement saisi et recou— vert de toile par l'araignée, qui en fait alors sa proie; le Corticaria vient ensuite et bénéficie des restes du cadavre, qu'il fait progressivement disparaitre, laissant ainsi une place vide qui devient une nouvelle alvéole qu'occupera ensuite l’hôte du logis. Dans la nombreuse colonie du mosquero, le commen- salisme ne s'arrête pas au minuscule coléoptère : on y rencontre encore une araignée errante de la famille des Drassides, le Pæcilochroa convictrix Simon, qui. trouvant apparemment une existence facile et bien. assurée, s’est fait l’hôte du logis. Cette dernière espèce doit, selon toute vraisemblance, bénéficier en temps. courants des captures journalières; mais si, pour une cause quelconque, les vivres habituels viennent à man- quer, il est probable qu'elle doit avoir recours pour son alimentation aux Cænothele qui lui donnent asile. La région et les conditions climatériques sous les- quelles vivent les Cœænothele présentent une nouveauté au point de vue biologique : toutes les araignées sociales qui ont été jusqu'ici décrites habitent des loca- lités chaudes et désertiques; l'espèce qui a été étudiée par M. Diguet se rencontre, au contraire, dans une région élevée, par conséquent assez froide, et, de plus, très humide pendant une partie de l'année. De telles conditions peuvent se rencontrer facilement dans les habitations ; c'est done la cause qui a permis l'emploi de ces intéressants animaux dans les usages domes- tiques. Le mosquero, quoique n'exhalant pas d'odeur bien appréciable, n'en exerce pas moins, cependant, une très notable action sur les mouches, car, si l’on recouvre complètement ces nids d’une enveloppe de papier, on constate que les mouches viennent s'y fixer en abon- dance, ce qu'elles ne font pas sur un papier placé à côté dans les mêmes conditions. Quoique de faible taille, l’habitante du mosquero s'attaque à des proies beaucoup plus volumineuses que la mouche domestique; on à pu constater que des guêpes, des Tabanidés et même des æstres s'étaient capturés et avaient servi de pâture. Aussi dans les corales où l’on enferme les chevaux et, en général, les bestiaux, a-t-on coutume, dans les villages du Michoa- can, de placer souvent des mosqueros, alin de préserver les animaux des piqüres des insectes ailés. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE En somme, la nidification du Cœnothele se présente à bien des points de vue comme une nouveauté digne d'intérêt. $S 6 — Géographie et Colonisation La carte internationale du monde au mil- lionième. — Depuis longtemps, on a agité la question de l'exécution d'une carte internationale de la Terre, donnant une représentation de tous les pays avec le même méridien central, la même échelle, les mêmes notations. Tous les Congrès internationaux de Géogra- phie, depuis celui de Berne en 1891, ont émis des vœux dans ce sens. Le dernier en date, celui de Genève en 1908, avait mème rédigé un avant-projet et exprimé le désir qu'une Conférence internationale tranchàât définitivement la question. Sur l'invitation du Gouvernement anglais, cette Con- férence s’est réunie à Londres le 15 novembre; elle comprenait des délégués de France, d'Angleterre, d'Allemagne, d'Autriche, d'Espagne, des Etats-Unis, du Canada et de l’Australie. La France y était représentée par M. Vidal de la Blache, professeur à la Sorbonne, M. Ch. Lallemand, directeur du Nivellement général de la France, et le commandant Pollacki, du Service géographique de l'Armée. Dans sa séance de clôture du 20 novembre, elle a arrêté les bases essentielles de la nouvelle carte. Le premier méridien choisi est celui de Greenwich, pour la raison qu'il est employé sur toutes les cartes marines et qu'il est le plus répandu. L'échelle sera celle du millionième, soit un millimètre par mètre. Les cotes d'altitude et de profondeur seront en mètres. Le relief sera figuré par des courbes de niveau dis- tantes de 100 mètres pour les faibles altitudes et à in- tervalles plus éloignés pour les hautes altitudes jusqu'à 7.000 mètres ; au delà, il n'y aura pas de courbes de niveau. Les intervalles entre les courbes seront colo- rés par des (eintes d'intensité croissante, d'abord vertes, puis brunes, comme celles qui sont en usage sur les cartes anglaises de Bartholomew; au delà de 7.000 mètres, il n’y aura que du blanc. Les mers seront en teintes bleues, se foncant avec la profondeur. Les notations seront partout les mêmes, pour les fleuves et les rivières, leur navigabilité, les routes principales et secondaires, les chemins de fer en exploitation et en construction, les lignes télégraphiques, etc. Les noms seront en caractères latins, dans la forme adop- tée par leur pays d’origine; des règles spéciales seront iracées pour transcrire les noms des autres langues en caractères latins. La projection adoptée est d'un type polyconique choisi de manière à fausser le moins possible les dimen- sions réelles et à faciliter le raccordement des diffé- rentes cartes. Chaque carte comprendra, jusqu’au 60€ pa- rallèle, 6 degrés en longitude et 4 degrés en latitude; à partir du 60° parallèle, en raison du rétrécissement des fuseaux, 12 degrés en longitude. Il s’agit, on le voit, d'une œuvre considérable, qui est appelée à rendre les plus grands services; il faut espérer que chaque pays en entreprendra bientôt l'exé- cution, pour la part qui le concerne. $ 7. — Sciences médicales Transmission expérimentale de la para- lysie infantile au singe. — On a quelque peine à admettre a priori que les maladies systématisées du système nerveux central puissent relever du parasi- tisme microbien. Tous les neurones étant, au moins en apparence, équivalents les uns aux autres, de même constitution, de même composition, on ne saurait concevoir que des germes se développent dans les cornes antérieures, à l'exclusion des cornes posté- rieures, dans les cordons latéraux plutôt que dans les cordons postérieurs de la moelle épinière. Dans la 981 paralysie infantile, par exemple, la lésion anatomique est localisée dans les groupes des grandes cellules ramifiées des cornes antérieures de substance grise de la moelle épinière, les autres parties du système ner- veux central étant ou tout au moins pouvant être en général absolument saines. Or, on vient précisément d'établir qu'il est possible de réaliser expérimentalement chez le singe les lésions et les symptômes de la paralysie infantile. Ce sont d'abord Landsteiner et Popper qui, les premiers, en injectant, dans le péritoine d'un Cynoce- phalus hamadryas et d'un Macacus rhesus, une émul- sion de moelle épinière provenant d’un enfant ayant succombé à la suite d’une poliomyélite typique (para- lysie infantile), ont fait apparaître, chez ces animaux, après une incubation de dix-sept jours, une paralysie localisée aux membres inférieurs, et ont constaté à l’autopsie des lésions inflammatoires et dégénératives de la substance grise de la moelle et du cerveau. Ce sont ensuite Knæpfelmacher, Flexner, Leiner et Wiesner qui répètent avec le mème succès les expé- riences, ces deux derniers auteurs réussissant à transmettre la maladie en série aux singes. Ce sont encore Krause et Meinike qui auraient provoqué des paralysies chez le lapin à la suite d’inoculations de suc de rate, de cerveau et de liquide céphalo-rachidien provenant de sujets atteints de poliomyélite. Landsteiner et Levaditi publient le résultat d’une tentative intéressante faite sur le chimpanzé. Des frag- ments de moelle dorsale et lombaire, recueillis à l’au- topsie pratiquée à Vienne le 8 novembre sur un enfant atteint de poliomyélite typique, mort le 6, sont reçus à Paris le 10 novembre. La récolte avait été faite asep- tiquement; ces fragments furent triturés dans 20 cen- timètres cubes d’eau salée, et l’'émulsion fut injectée, à la dose de 5 centimètres cubes, dans le péritoine d’un chimpanzé femelle. Le 17 novembre, soit 7 jours après l'injection, on trouve le chimpanzé couché, la tête penchée, la bouche ouverte, les gencives couvertes de sang coagulé, incapable de se déplacer, malgré ses efforts. On note une paralysie complète du pied droit, et une paralysie presque complète de la jambe gauche. L'animal meurt dans la nuit du 17 au 18; l'examen est pratiqué le 18 novembre. La substance grise de la moelle, dans toute son étendue, est nettement hyperé- miée; les méninges sont congestionnées; le liquide céphalo-rachidien est trouble et riche en leucocytes. A l’examen microscopique, on constate des nodules inflammatoires riches en globules blancs polynucléaires en partie détruits; dans la région lombaire, il y a dis- parition presque complète des cellules nerveuses, réduites à l'état de vestiges; ces cellules sont frag- mentées et dissociées par des leucocytes mono- et polynucléaires. Avec une émulsion de la moelle de ce chimpanzé, on pratique une inoculation dans le cerveau et dans le péritoine de deux Macacus cynomolgus; les deux ani- maux se paralysèrent après une inoculation de cinq jours; l'examen microscopique de la moelle lombaire montra les lésions typiques de la poliomyélite. Voilà des faits intéressants; ils conduiront à des conclusions importantes, sans doute, quand ils auront été multipliés et méthodiquement analysés. $ 8. — Sciences diverses Un nouveau périodique. — Le 1°: janvier parai- tra le premier numéro de la Technique Aéronautique, revue générale des Sciences appliquées à la Locomo- tion aérienne. Cette revue bi-mensuelle, dirigée par le Lieutenant-Colonel Espitallier, compte notamment dans son Comité de rédaction MM. Appell, Painlevé, Lecornu, Commandant Renard, Marchis, Commandant Roche. 4 C.R. Soc. de Biologie du 21 novembre 1909, p. 592-594 g I 982 ERNEST SOLVAY — PHYSICO-CHIMIE ET PSYCHOLOGIE PHYSICO-CHIMIE ET PSYCHOLOGIE Cette étude doit être considérée comme faisant suite, dans une direction importante, à l’article intitulé Physico-Chimie et Biologie, qui a paru dans cette Revue le 30 juin 1908 et auquel il peut y avoir utilité pour le lecteur à se reporter. Trois hypothèses fondamentales sont indispen- sables, selon nous, pour servir de base à la Psycho- logie physico-chimique : une hypothèse chimique, une hypothèse électrique et une hypothèse neuro- épaphéique. I. — HYPOTHÈSE CHIMIQUE. Il y a lieu d'admettre d'abord que toute réaction de départ d’un être vivant quel qu'il soit, être vivant initial ou être vivant engendré, être vivant animal ou être vivant végétal, est fondamentale- ment une oxydation de carbone. A ce point de vue, l'être vivant végétal est plus compliqué que l’être vivant animal, puisqu'il s’est introduit dans la réaction initiale, grâce à l'intervention spécifique- ment appelée d’une énergie externe, en plus du phénomène fondamental de l'oxydation du carbone constitutif du milieu interne, l'épiphénomène, ayant fini par prédominer, de la réduction de l'acide car- bonique externe. L'être végétal n'ayant que des rapports éloignés avec la psychologie, nous ne nous en occuperons pas dans cette étude, afin de porter toute notre attention sur l'être animal qui, au contraire, est apte à acquérir un extrême déve- loppement psychique. Il y a lieu d'admettre ensuite que tout se passe énergétiquement, dans la réaction qui constilue l'être vivant envisagé à un stade quelconque de son évolution, comme si l'oxygène externe se portait uniquement et exclusivement sur le carbone consi- déré comme s'étant libéré de ses combinaisons avec les autres éléments du tissu au moment même de l'oxydation de celui-ci. Il résulte immédiatement de cette hypothèse que la réaction vivante — réaction qui, en atteignant un degré élevé de complexité, peut arriver à se mouvoir, à penser et à s'exprimer — doit être con- sidérée comme n'étant au fond qu’une oxydation de carbone qui s’effectuerait dans des conditions exceplionnelles de température : 40° C. environ, au lieu de la température habituelle extrêmement élevée de cette réaction. Mais comment expliquer le fait de cette combus- tion à basse température, contraire, en apparence, à l’une des données les plus fondamentales de la Chimie? La contradiction n’est vraiment qu'appa- rente et le phénomène se ramène à un fait d'ordre courant si, conformément aux vues développées dans l'article rappelé ci-dessus, on admet enfin que, dans le tissu animal incessamment formé aux dépens des matériaux alimentaires, — grâce à un nombre considérable de réactions ou échanges internes préparatoires dont nous n’avons nullement à nous occuper ici, — tissu animal qui va subir l'oxydation, tout ce qui n’est pas le carbone lui- même, donc toute la série des corps simples géné- ralement désignés sous le nom d'éléments biogé- niques, sont des thermo-catalyseurs du carbone, c'est-à-dire des éléments destinés non pas à accé- lérer l'oxydation, mais bien à abaisser la tempé- rature d’oxydation de ce corps. C'est la présence, par surcroît, de catalyseurs spéciaux qui permet- trait à une telle réaction d'effectuer, en outre, la réduction de l'acide carbonique externe — carac- téristique de la vie végétale — en faisant spécifi- quement appel à une énergie également externe. Le tissu de tout être vivant doit donc nécessaire- ment renfermer un assez grand nombre de corps simples en dehors du carbone pour que ce dernier puisse s'oxyder à environ 40°. Mais on concoit que la quantité agissante de chacun de ces corps simples par gramme de tissu doive s'évaluer ici, non en milligrammes, mais vraisemblablement en mil- lièmes ou millionièmes de milligramme, puisqu'il s'agit d'actions catalytiques, et l'on concoit de même que la nature, le nombre, les quantités agis- santes, le rang d'introduction, l'ordre d'association de ces corps dans le tissu puissent varier à l'infini et, par conséquent, donner lieu, dans chaque cas, non seulement à des températures de réaction diffé- rentes, variant nécessairement par millièmes ou millionièmes de degré, mais encore à des réactions différenciées auxquelles correspondent des êtres individuels différents. Ce qui caractérise les espèces, les races, les individus et jusqu'à l'individu lui- même à des moments différents de son existence : éveillé ou plongé dans un sommeil tranquille, calme ou excité, sain ou malade, ce seraient la nature, le nombre, la proportion, l'ordre d'associa- tion et l’ordre topographique dans le tissu à oxyder, des thermo-catalyseurs du carbone. Chaque état, quel qu'il soit, de l'être vivant en général, et se différenciant si peu que ce soit d’un autre état, ne fût-ce même que d'une manière purement psychique pour un même individu considéré à des périodes de temps différentes, aurait sa représentation chi- mique fondamentale spéciale, entendue à la facon qui précède et qu'un procédé d'analyse infinité- ERNEST SOLVAY — PHYSICO-CHIMIE ET PSYCHOLOGIE simal extrêmement délicat pourrait déceler; et, pour ce qui concerne les espèces, il est même vrai- semblable qu'une fine analyse, effectuée par les procédés courants, de l’œuf ou de ce qui repré- sente l'œuf chez les animaux inférieurs, suffirait à déceler leur différenciation chimique, en compre- nant celle-ci à la facon qui précède. II. — HYPOTHÈSE ÉLECTRIQUE. Au point de vue électrique, il y a lieu d'admettre, ainsi que nous l'avons fait dès 1893", que toute par- ticule de tissu à grande oxydation, telle qu'une fibre musculaire, est nécessairement reliée à un filament nerveux, ou plus exactement à un cylindre- axe de filament nerveux, ayant commencé par n'être rudimentairement qu'un simple point cata- lytique odogénétique dans l'embryon ou dans le fœtus et ayant fini, en se multipliant linéairement à mesure de l'accroissement de l'organisme, par devenir filiforme. La résistance électrique du fila- ment devant nécessairement augmenter avec son propre accroissement linéaire, il joue le rôle de conducteur d’une fraction qui devient ainsi de plus en plus réduite de l'énergie produite sous forme électrique par la particule en voie d’oxydation, pen- dant que des courts-circuits odogénétiques com- pensateurs se forment au sein de cette particule pour assurer la constance nécessaire de l’écoule- ment de la totalité de l'énergie. De telle sorte que toute fibriile musculaire, en voie d'oxydation continuelle mais nécessairement variable, avec son filament nerveux centripète allant au cortex par la moelle et son filament ner- veux centrifuge allant du cortex par la moelle au plasma oxydant baignant la fibrille même, consti- tuerait un circuit électrique constamment fermé dans lequel circulerait — peut-être électrolytique- ment ou microphoniquement — une très minime fraction de l'énergie d’oxydation du carbone de son tissu. Un animal supérieur, l'homme notamment, ren- fermerait donc ainsi des milliers ou des millions de circuits électriques fermés passant par le cerveau et parcourus chacun par un courant de force électro- motrice à peu près uniforme et d'intensité variable, représentant une fraction extrêmement petite, mais déterminée pourtant, de l'énergie courante d'oxy- dation de la fibrille musculaire dont il émane. Par conséquent, la valeur de chacun de ces courants serait à tout instant fonction à la fois de l’assimi- lation et de la désassimilation, de l'oxydation et du dépôt qui se produisent dans la fibrille muscu- 1 Du Rôle de l'Électricité dans les Phénomènes de la Vie animale. Bruxelles, Hayez. 983 laire d’où il part, puisque les uns correspondent aux autres. Et, si l’on envisage l’ensemble des cou- rants dans l'organisme tout entier, il y aurait ainsi un état de répartition générale de leurs valeurs relatives, qui serait la représentation exacte de la réaction chimique totale vivante dans son état actuel; l’état le plus uniforme d’oxydation, qui cor- respond au sommeil paisible, constituerait ce que l’on peut appeler l’état normal de la réaction vivante. Évidemment, en envisageant les choses de la facon qui précède, nous semblons admettre que tous les circuits électriques sont distincts les uns des autres et sans communication entre eux, ou bien n'ayant entre eux que des communications d'importance absolument invariable, ainsi que cela a vraisemblablement lieu dans la moelle. Si pour- tant, à un endroit déterminé de leur parcours, i existait entre eux des communications dont la valeur püt varier, il en résulterait des fluctuations qu'il faudrait examiner de près. Or, précisément, c'est ce qui se produit à l'endroit du cerveau où l’on voit, dans la substance grise, chacun des circuits dont nous venons de parler pré- senter, sous forme de neurones et de leurs dévelop- pements, des aspérités extrêmement mobiles parais- sant pouvoir brusquement soit se prolonger en appendices, soit se pelotonner en forme de perles. III. — HYPOTHÈSE NEURO-ÉPAPHRÉIQUE. Il y a donc lieu, à cause de ce fait frappant en concordance avec les nécessités que nous recher- chons, d'admettre, comme troisième hypothèse fon- damentale, que toute excitation — soit externe et arrivant au cerveau par l'intermédiaire des organes des sens, soit interne et provenant alors d'excita- tions externes antérieures musculairement fixées par dépôts assimilateurs correspondants et pouvant dès lors renouveler leur action par la simple oxy- dation courante de ces derniers — accroît la con- ductibilité nerveuse et que, lorsque les neurones se prolongent au lieu de se perler, c’est pour faire face à la nécessité qu'il y a d'établir des voies de con- duction qui puissent faire dévier dans d’autres circuits le surcourant nerveux qui provient de la suroxydation momentanée provoquée par l'excita- tion : les contacts fugitifs (que nous avons appelés épaphées) qui se produisent entre les appendices des neurones excités et voisins créent ainsi les voies de conduction nécessaires. Tel serait le mécanisme intime de la variation successive incessante, neuro-épaphéiquement pro- voquée pendant les périodes d’excitation de l’orga- nisme, de l'état de répartition générale de la valeur relative des courants dans l’ensemble des circuits plasmo-neuro-musculaires. La mobilité neuro-épa- de) (2) EE ESNEST SOLVAY — PHYSICO-CHIMIE ET PSYCHOLOGIE phéique serait extrême, et donnerait lieu à des états successifs de répartition générale des épaphées dans la substance grise, qui seraient exactement aussi complexes que les états de répartition des exeita- lions sensorielles elles-mêmes sur les ramifications infinies du système nerveux à l'endroit des sens. Le dépôt assimilateur, dans chaque fibrille musculaire, étant fonction aussi bien de la valeur du courant que de la valeur de l'oxydation, celle-ci générant celui-là,on concoit que les fibres musculaires, dans tout l'organisme, porteront topographiquement des traces matérielles persistantes provenant à la fois de chaque répartition générale sensorielle de l'action excitatrice passagère et des états correspondants de répartition générale des courants et de loxyda- “tion, quels que soient le nombre et la rapidité de succession de ces états différenciés. Le muscle se cliche ainsi chaque fois différemment, matérielle- ment, profondément, en raison exacte de l'excita- tion immédiate ou médiate, après que celle-ei s’est elle-même clichée, mais seulement épaphéique- ment et fugacement, dans le commutateur-cerveau. Chaque cliché musculaire distinct, matériel et per- sistant, peut donc représenter un état de passage de l'excitation sensorio-neuro-cérébrale continue que nous appelons a pensée, et qui pourrait être exactement traduite sous cette forme continue si l'on pouvait réaliser et fixer la cinématographie de ces clichés plus directement et mieux que ne la réalise l'organisme lui-même par la parole et l'écri- ture. Le cerveau estle carrefour, et le tissu à grande oxydation est la table d'impression où d’'incrusta- tion de la pensée : la mémoire est dans le muscle et la pensée sort du musele où elle est originaire- ment produite par la variation topographiquement -complexe de l'oxydation de son carbone provoquée par l’excitalion immédiate ou médiate de com- plexité équivalente des extrémités infimes et épa- nouies des prolongements nerveux qui achèvent le -muscle en constituant les sens. Les espèces, les races, les individus pensent en raison de leur sys- tème musculaire et de l'épanouissement sensoriel et épaphéique du système nerveux qui l’achève, el en raison de la nature, du nombre, de la proportion, de l’ordre d'association et de l'ordre cyto-topogra- -phique des thermo-catalyseurs de leur carbone à oxyder,etpar conséquent aussi de l’ordre cyto-topo- graphique de celui-ci même. IV. — CONCLUSION. Comme on vient de le voir, pour la Psychologie si mystérieuse encore, psychologie néant, pour- rait-on dire, malgré les progrès de la Physiologie d'où elle part et qui, quant à'elle, est devenue fran- chement physico-chimique, une théorie appuyée sur trois hypothèses fondamentales, moins auda- cieuses que bien d'autres hypothèses modernes généralement tolérées et qu'il s’agit d’ailleurs d’af- firmer ou d'infirmer, permet d'expliquer toutes les circonstances principales qui la caractérisent. On peut dire que tout se passe dans les phénomènes psychologiques comme si les hypothèses et la théorie précédentes exprimaient la réalité. Et, au moment où la généralité de la conception qui fait résider la Physico-chimie à la base des phénomènes généraux de l'Univers s'impose de plus en plus aux investigations de dernier ressort des esprits péné- trants, il est permis de ne plus exclure le psychisme individuel et social de son champ d'action et d’es- compter que les hypothèses que nous venons de formuler — comme tant d’autres qui furent aussi d'abord simplement explicatives avant d’être dé- montrées — pourront s'appuyer de faits probants nouveaux qui en amèneront finalement l'adoption; dans l’état actuel de la science, elles constituent par elles-mêmes tout un PROGRAMME DE RECHERCHES, que l’on pourrait résumer de la manière suivante : 1° Démontrer, par des recherches originales, que la température d'oxydation du carbone baisse lorsqu'il est préalablement associé à des éléments dits biogéniques que nous appelons des thermo- catalyseurs ; chercher à établir une loi des chutes de la température d'oxydation du carbone en fonc- tion du nombre, de la nature, de la proportion des susdits éléments, l'hydrogène el l'azote figurant dans le composé devant être considérés comme énergétiquement aussi saturés dans les ingesta qu'ils le sont dans les excreta; 2 Définir la partie du tissu des êtres vivants, à tous les degrés de leur hiérarchie, qui doit étre essénlielle et comparable au point de vue thermo- catalytique ; 3° Définir les meilleurs procédés d'analyse pour déterminer le nombre, la nature, la proportion et l’ordre topographique des thermo-catalyseurs du carbone dans la partie considérée comme essentielle et comparable du tissu de tous les êtres vivants; 4 Différencier l'être animal de l'être végétal par les caractéristiques de leurs thermo-catalyseurs respectifs ; 5° Différencier les espèces par les caractéristiques de leurs thermo-catalyseurs respectifs ; 6° Différencier les races par les caractéristiques de leurs thermo-catalyseurs respectifs ; 1° Différencier l'individu à différents âges ou -dans différentes conditions de vie par les variations des caractéristiques de ses thermo-catalyseurs : 8° Chercher à prouver que le nerf conduit élec- triquement lorsque le courant est approprié, c'est- à-dire provient de l'oxydation du tissu même auquel il est relié, oxydation s’effectuant à la tem- LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 985 pérature biogénique, et qu'il y a ainsi circuit élec- trique : muscle, nerf, centres, plasma oxydant ; 9° Chercher à établir un parallélisme entre le nombre de combinaisons possibles et différenciées d'actions des sens, le nombre d'états différenciés de la répartition générale dans l'organisme tout entier du courant électro-nerveux et le nombre d'états différenciés de la répartition générale dans l'organisme tout entier des thermo-catalyseurs du carbone ; 10° Définir au point de vue fonctionnel l’épa- phéisme cérébral. Je consacrerai une somme de cinquante mille francs à récompenser les travaux ayant trait à ces dix questions qui seront adressés avant le 4°" jan- vier 1914 à l'Institut Solvay (Physiologie), à Bruxelles. Ces travaux pourront être rédigés en français, en allemand, en anglais ou en italien. Is seront soumis à l'appréciation d'une Commission de trois membres désignés par la Direction de cet Institut; cette Commission décidera de l'octroi des récompenses. Ernest Solvay. LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES EN TURQUIE, ROUMANIE, CRIMÉE ET BULGARIE (SEPTEMBRE-OCTOBRE 1909) La /tevue générale des Sciences, qui a consacré des monographies détaillées à plusieurs pays visités par ses croisières, n'a que rarement rendu compte de ces expéditions elles-mêmes. C'est qu'en général les voyages auxquels elle convie nos compatriotes ont pour but de leur faire connaitre l’état actuel des nations étrangères, non de gagner des contrées inexplorées ou d'effectuer des observations inédites. Nous ne saurions cependant passer sous silence, en raison des conditions particulières où elle s’est | accomplie, la croisière que nous avons récemment conduite en Turquie, en Roumanie, en Crimée et en Bulgarie”. La Roumanie, vers laquelle n'avaitencore élé dirigé aucun de nos voyages de louristes, devait surtout nous retenir. On sait qu'elle compte au- jourd'hui parmi les nations les plus prospères de l'Europe : l'extraordinaire rapidité de son dévelop- pement depuis son émancipation définitive de la tutelle ottomane, l'hérédité et l'éducation latines des Roumains, la haute culture d'un grand nombre d’entre eux, la diffusion de notre langue parmi les plus instruits, leurs sympathies marquées pour la France, tout nous incitait à les aller voir, à visiter leurs plus belles provinces, au moins comme pré- lude à une étude plus approfondie de leur pays. Ce qu'en une courte tournée nous en avons déjà aperçu réclamerait ici une longue description, si nous ne nous réservions de présenter quelque jour à nos lec- teurs un tableau plus complet de l'ensemble du monde roumain. Mais le remerciement que nous devons à la Roumanie pour la facon à la fois magni- fique et cordiale dont elle a recu notre caravane ne ! Chez les Latins, les Slaves, les Tatars et les Tures des Balkans, des Carpathes et de la Tauride, XL: croisière de la Revue générale des Sciences (14 septembre-11 octobre 1909). saurait être différé, el nous avons aussi à rendre grâces à diverses nations amies qui ont de même voulu, en nous fêtant, fêter et glorifier notre patrie. Sur toul notre parcours, souverains el gouvernants, habitants des villes ou humbles populations rurales nous ont témoigné de la facon la plus touchante leur sympathie pour la France. La brève relation que nous allons donner de notre voyage n'a d'autre but que de leur exprimer à tous la reconnaissance de la Æevue et de ses touristes. Rarement //e-de-France avait compté plus de passagers. Notre nombre s'élevait, en effet, à 206. Il comprenait des savants de spécialités diverses, des mathématiciens, des chimistes, des géologues, des biologistes, des médecins, des historiens, des juristes, des ingénieurs, des industriels, des dames. A leur intention, les trajets maritimes avaient été tracés à l'abri des côtes et réduits, par la multipli- cation des escales, à de courtes traversées. Cest ainsi que, partis de Marseille de grand malin, nous longions dès midi les montagnes boisées de la Corse et arrivions le lendemain en Campanie. Après nous être empli les yeux de la sereine beauté de la baie de Naples, toute ruisselante de lumière sous la chaude ardeur du jour, une longue flänerie dans les jardins de citronniers et les monuments d’Amalfi prolongea nos délices. La nuit nous suflit pour gagner l'infortunée Messine, une matinée pour explorer ses décombres. Deux heures plus tard, Ile-de-France nous déposait à Giardini, d'où nous nous rendimes en voiture à Taormine, et le surlen- demain nous abordions à Délos. 986 Entre temps, nous avions entendu une fine et substantielle conférence de M. Auguste Gauvain sur la Jeune Turquie, et M. Charles Diehl, résumant les grandes phases de l'histoire monumentale de Cons- tantinople, nous avait indiqué la meilleure manière de visiter cette grande capitale pour bien saisir l'enchaîinement des événements dont elle fut le théâtre depuis le vi° siècle jusqu'à nos jours. Un régal du même ordre nous attendait au berceau d'Apollon : M. Maurice Holleaux, directeur de l'École française d'Athènes, avait eu, cette année encore, la grande amabilité, dont nous le remer- cions, de s’y rendre pour nous en faire les honneurs. Ses savants commentaires ont grandement ajouté à l'intérêt, déjà considérable, qu'offrent pour tout visiteur les docks etles magasins de la ville antique, les demeures, parfois somptueuses, de ses riches né- gociants, les temples et sanctuaires de son téménos, ses statues archaïques, enfin le mobilier dela période hellénistique, dont une construction provisoire abrite en ce moment les restes. Tout notre après- midi fut, pour-notre plus grand profit, employé à étudier ces précieux témoins d'une suite de civi- lisations disparues, à admirer l’œuvre grandiose accomplie dans l'ile par l'Ecole francaise d'Athènes, grâce à l’intelligente munificence du duc de Loubat. Un petit arrêt au village pittoresque de Ténédos, célèbre depuis Ulysse, le passage, à marche lente, du détroit des Dardanelles et la perspective de débarquer le lendemain matin aux Iles des Princes rendirent les passagers indulgents à une conférence du signataire de ces lignes sur la Roumanie. Après une pleine matinée passée dans les bruyères de Prinkipo sous la toiture des pins, nous nous rembarquions, et deux heures plus tard //e-de- France défilait devant la rangée des mosquées et des minarets de Stamboul pour aller jeter l'ancre à Galata. IT À peine le navire parvenait-il en rade que deux collaborateurs de S. E. Halid Bey, préfet de Cons- tantinople, vinrent de sa part nous convier à un banquet improvisé en notre honneur. Avec joie nous nous rendimes à cette gracieuse invitation, profondément touchés de la pensée qui l'avait die- tée, charmés aussi de nouer amitié avec les plus hauts dignitaires de l’Empire Uttoman. S. E. Riffaat Pacha, ministre des Affaires étrangères, S. E. Talat Bey, ministre de l'Intérieur, S. E. B. Haladjian, dé- puté de Constantinople, ministre du Commerce et des Travaux publics, docteur en droit de la Faculté de Paris, S. E. Djavid Bey, ministre des Finances, le D'Riza Tewfik, député d’Andrinople, Ismaël Hakki Bey Baben Zédé, député de Bagdad, Suleiman Effendi, député de Beyrouth, le général Semi Pacha, LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES M.Mehemed Fouad Houloussi, député de Tripoli de Syrie, Midhat Bey, député de Salonique, Mohammed Ali Bey, député de Mossoul, Satvéty Zia Bey, direc- teur politique du « Yéni-Gazetta », ancien Conseiller d’État, M. Chevkett Djénany, maire de Bechiktache, personnages avec la plupart desquels le directeur de la Æevue générale des Sciences avait déjà eu l'honneur d'entrer en relation, vinrent témoigner par leur participation à cette fête les sentiments de la Jeune Turquie à l'égard de la France. La pré- sence de M. Bompard, ambassadeur de France, de ses principaux collaborateurs et de quelques émi- nentes personnalités de la colonie francaise ache- vait de donner à cette réunion son véritable carac- tère de manifestation courtoise envers notre patrie. C'était la première fois qu'en territoire ture ministres et autorités diverses de la Sublime-Porte se trouvaient rassemblés avec un si grand nombre de Francais et pouvaient s’entretenir librement avec eux des choses de la politique, des aspirations de la Jeune Turquie, des emprunts qu'elle a déjà faits et qu'elle entend faire aux doctrines et aux institutions libérales d'Occident. Ces aspirations mêmes s'étaient fait jour dans la révolution accomplie en Turquie, et plusieurs d’entre nous, qui connaissaient personnellement des membres du Cabinet ture actuel, en avaient été depuis long- temps informés. C'est que la plupart des ministres aujourd'hui au pouvoir ont fait leurs études en France et puisé dans nos Écoles, particulièrement à la Faculté de Droit de l'Université de Paris, cette passion du juste, ce sentiment profond et impé- rieux de la fraternité des hommes, de la liberté des croyances et de l'égalité de tous devant la loi que la philosophie francaise a proclamés principes universels et introduits dans la conscience des nations. L’hommage rendu à ce sujet à notre patrie au cours des toasts prononcés, l'admiration exprimée en retour aux vaillants réformateurs de la société ottomane nous firent sentir à tous la communauté de nos inclinations et la sincérité de nos sympathies réciproques. La Revue générale des Sciences remercie chaleureusement M. le Préfet de Constantinople et MM. les ministres présents d’avoir donné à ses touristes, dans la plus charmante des fêtes, l’occasion de constater et, si nous ne nous abusons, de contribuer à affermir cet accord. A la suite du banquet, des foules bariolées se rendaient à la prière, et il était particulièrement intéressant de pénétrer avec elles dans les mos- quées, illuminées ce soir-là pour le Ramadan. Intro- duits à Sainte-Sophie par plusieurs des hautes per- sonnalités qui venaient de les recevoir, les touristes eurent cette rare bonne fortune de contempler dans la majestueuse basilique de Justinien l’une des plus imposantes cérémonies de l'Islam. LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES Les jours suivants, la visite des beaux monu- ments de Constantinople, du vieux Sérail, des cime- tières d'Eyoub et de Scutari devait les occuper jusqu'au départ. //e-de-France s'engagea alors dans le Bosphore et y navigua à petite vitesse pour per- mettre à ses passagers d'admirer les rives célèbres du détroit. Le vapeur fit escale à Thérapia, rési- dence d'été de l'Ambassade de France, où M. l’am- bassadeur et M#° Bompard avaient eu la gracieu- seté de convier la Croisière. Une garden-party, un concert, un lunch dans cet éden de verdure au- dessus des eaux torrentueuses du Bosphore et des premiers coteaux de la mer Noire, l’affabilité des seigneurs du lieu et de leur entourage officiel, le plaisir, éprouvé par beaucoup d'entre nous, de retrouver des amis dans le personnel même de l'Ambassade et parmi ses invités de passage en Turquie, nous ont laissé à tous un souvenir ému et reconnaissant. M. l'ambassadeur et M*° Bompard poussèrent la courtoisie jusqu'à nous accompagner à bord d’//e- de-France, où nous recûmes leurs bons souhaits au moment même de notre départ pour la Rou- manie. Certains préparatifs faits dans ce pays pour nous recevoir étaient déjà parvenus à leur connais- sance. Hälons-nous cependant de dire qu'aucune nouvelle des dispositions prises à notre intention ne pouvait nous donner l’idée de la splendeur de la réception que nous réservaient les Roumains. III En une nuit nous gagnâmes Constantza. Tout le port, toute la flotte qu'il contenait, vaisseaux de guerre et grands navires de commerce appartenant à l'Etat, étaient pavoisés, et, sur les quais, où flot- taient réunis l’étendard de la Roumanie et le dra- peau francais, toute la ville était rassembiée pour nous acclamer. Avant accostage, M. le Commandant du Carol I*, puis M. l'amiral Alexandre Catueanu nous apportèrent à bord le salut de la Roumanie. Et bientôt, dans la foule alignée le long du port, nous distinguions les visages amis de : M. Anghel Saligny, inspecteur général des Services fluviaux et maritimes; M. le D' Constantin Istrati, profes- seur à la Faculté des Sciences de Bucarest, ancien vice-président du Sénat etancien ministre; M. Pierre Poni, doyen de la Faculté des Sciences de Jassy, président de l'Association roumaine pour l’avan- cement des Sciences, directeur de l'Agriculture, sénateur et ancien ministre ; M. Mrazec, professeur à la Faculté des Sciences et directeur de l'Institut de Géologie ; notre éminent collaborateur M. Georges Marinesco, professeur à la Faculté de Médecine de Bucarest, et M"° Marinesco; et d’autres person- nages du monde scientifique et du monde adminis- 987 tratif de Bucarest. Tous s'étaient imposé six heures de voyage pour venir à notre rencontre. Ils étaient accompagnés : de M. Alexandre-Emmanuel Laho- rary, ministre de Roumanie en France, qui, lui aussi, avait voulu être des premiers à nous accueillir; de M. Alexandre Bellio, membre du Comité roumain pourlaréception dela Croisière; du Prince Alexandre Ghika; de M. le Capitaine Després, attaché militaire à la Légation de France à Bucarest; de M. Delage, consul de France; de M. Coutant, directeur de la Banque commerciale de Bucarest; de M. le Maire de Constantza ; de M. Armand Naumescou, correspon- dant de l’Z{Justration; de M. Durand, rédacteur à l'Indépendance Roumaine; de M. Nicolas Patrescou et des principaux représentants de la presse. Autour de ces personnalités s'était groupée toute la popu- lation de la ville. Aussi est-ce par des vivats enthou- siastes que fut salué notre débarquement. Notre premier soin fut de visiter le port. Comme il comprend — outre 14 hectares d’avant-port — 60 hectares de bassins pour les navires et 118 de plates-formes pourlamanutention des denrées, nous ne pouvions le visiter utilement qu'avec le concours de ses ingénieurs. M. Casimir, sous-directeur des Voies de communication, M. Wenert, directeur des travaux, MM. les ingénieurs Bushila et Sava Sho- manescou s'employèrent avec une grâce parfaite à nous guider et à nous fournir sur l'outillage méca- nique les explications nécessaires; et leur chef même, M. l'Inspecteur général Saligny, prit la peine de nous exposer, avant toute visite, le plan et l’éco- nomie générale des installations. L'intérêt qu'elles présentent est considérable par cela mème qu'il consiste dans leur adaptation exacte aux besoins de la nation. Pays essentiellement agricole, et, de plus, forestier et minier, la Roumanie devait surtout s'inquiéter de faciliter l'exportation de ses céréales, de ses bois et de ses pétroles, et c’est de cette con- sidération qu'elle s'inspira dès que, mise en pos- session d'un débouché direct sur la mer Noire par l'annexion de la Dobroudja (1878), elle résolut d'agrandir et d'aménager pour son usage particu- lier le petit port turc de Kustendjé. Jusqu’'alors, ses produits destinés à l'embarque- ment maritime s'étaient vus obligés d'emprunter la voie sinueuse du Danube. Portés soit par eau, soit par terre jusqu'à Galatzi, ils étaient en ce lieu chargés sur de grands navires, qui avaient ensuite, pour gagner la mer, à descendre l’un des longs bras du Delta jusqu'à Sulina. Encore ce commerce se trouvait-il interrompu chaque hiver par la congéla- tion du fleuve, laquelle dure en moyenne quarante jours. Il n'était point douteux que la création d'un réseau de voies ferrées aboutissant à Constantza et la transformation de cette petite ville en grande cité maritime, largement outillée pour l'exporta- 988 LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES tion, apporteraient au commerce de la Roumanie des facilités nouvelles. L'art de l'ingénieur, le pro- grès de l’agronomie, l'accroissement de la popula- ton rurale et l'intelligente initiative du Gouverne- ment conspiraient à conquérir à la culture les steppes immenses du Baragan; on commencait à exploiter les épaisses forêts des Carpathes, à dé- couvrir, enfin, dans les collines subcarpathiques l’étendue, longtemps insoupçconnée, de leurs richesses souterraines. Après son intervention décisive dans la guerre russo-turque de 1877, la Roumanie sen- M. I. B. Cantacuzino, assisté de notre compatriote M. Guichard, ingénieur des ponts, à M. G. I. Duca, ancien directeur général des chemins de fer de l'État, et, depuis 1899, à M. l'Inspecteur général Saligny. Aux premiers, on doit surtout le creuse- ment de l’avant-port et d'une partie des bassins; au dernier, l’organisation actuelle des chantiers de construction, la spécialisation des plates-formes, leurs énormes réservoirs à pétrole, leurs silos et la savante machinerie de ces entrepôts. À ces ouvrages l’État roumain a consacré plus de quarante tait son unité et sa situation po- litique singu- lièrementaffer- mies, ses fron- tières délimi- tées, sinon au gré de son légi- time espoir, du moins aussi heureusement pour elle que le permettaient les circonstan- elle avait à sa tête le mo- narque, jeune encore, dont la clairvoyance et la bravoure lui avaient assuré ces bienfaits : une rare bonne fortune, qu'elle n’a ces- sé de ver, hom- mes d'État, ses hauts fonction- Ces; Se par a ? conser- ses fDoghemans Fig. 1. — Carte des régions visitées en Roumanie. millions, et, si fructueuses’est déjà montrée cette dépense qu'il n'hésite pas à affecter de nouveaux crédits à la poursuite des travaux. Même ceux d'entre nous qui, par profession, se trouvent être le plus au courant des progrès du génie civil et du mouvement Lac de CS — LARA GA économique en Shstrie ** Europe, ne pouvaient se douter, avant d’avoir visité le port de Cons- tantza, de la grandeur et de la portée de l'œuvre que nous y avons naires, ses administrateurs s'étaient recrutés, en |, tous admirée. Ce qui nous a le plus frappés, c'est grande partie, parmi cette élite de la nation qu'une {haute culture — acquise dans nos Écoles — avait pliée aux disciplines de la science. Dà- ment éclairé sur ses ressources et sa capacité d'action, tout le pays était mür pour la grande entreprise qui devait, en assurant son essor éco- nomique, décupler sa prospérité. En 1881, le Gou- vernement prit l'avis de Sir Charles Hartley, mem- bre de la Commission internationale du Danube, et le chargea du premier projet d'agrandissement et d'aménagement du port de Constantza. Remet- tant ce projet à l'étude en 1888, il fit alors appel à ses propres ingénieurs et commenca les tra- vaux, Ceux-ci furent successivement confiés à la méthode avec laquelle tout y a été prévu et organisé, l'ordre qui, pour la plus grande faci- lité des opérations, à présidé à leur distribution. L'exportation représentant environ 85 °/, du trafic du port, c'est aux installations qui la concer- nent qu'a été ménagé le développement le plus considérable. Chaque article, céréales, bois, pé- troles, exigeait un champ de manœuvre appro- prié, des magasins de conservation spéciaux, ainsi que des pro At particuliers d’adduction et de chargement. C’est le mérite des ingénieurs, princi- palement de M. l’Inspecteur général Saligny, de s'être ainsi posé le problème très complexe qu'ils avaient à résoudre. En l'étudiant jusque dans le LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 989 dernier détail, ils ont, de l'avis des hommes du métier, réalisé la perfection. Si net est, d'ailleurs, le résultat obtenu qu'il saute à tous les yeux. Nous ne saurions aujourd'hui donner une description, même succincte, des solutions adoptées. Disons seulement que, dès l’arrivée en rade, le voyageur ressent de la vue du port une très étrange impres- sion : derrière les bassins se dressent des construc- tions singulières : des groupes de tours rouges, semblables à des gazomètres, et, d'autre part, un édifice de proportions extraordinaires, couvrant 3.000 mètres carrés el dont la hauteur, qui est de 51 mètres, rappelle les célèbres maisons à vingt étages de New-York. Ce grand monument tout en béton armé est destiné à la réception, à la conserva- tion ef au bon entretien des céréales que le vendeur y entrepose, enfin au rapide chargement de celles que l’on exporte. Quatre grands magasins de cette sorte ont été prévus, comportant chacun 255 silos, avec une capacité globale de 140.000 tonnes. Nous avons assisté aux opérations qui s'y pratiquent : transports horizontaux de la marchandise par des bandes à courant continu; transports verticaux à l’aide d'élévateurs; pesée dans des trémies-balances inscrivant automatiquement le poids; ventilation intense au moyen d'une soufflerie pour enlever les poussières et empêcher le grain de fermenter. On évite ainsi les avaries qui gâtent si souvent les céréales en réserve, notamment la maladie du maïs, fléau de ces contrées, qui confère au con- sommateur la pellagre. ; Chaque magasin est outillé pour charger en bateaux, au moyen de bandes roulantes et de tubes télescopiques, jusqu'à 300 tonnes à l'heure, et rece- voir, d'autre part, même apport des wagons. Enfin, lorsque l’exportateur désire charger ses céréales dans les bateaux, sans stage dans le port, les wagons déversent ces denrées dans un tunnel, d'où des bandes sans fin les amènent à deux élé- vateurs spéciaux construits sur le quai pour le chargement direct des navires. Après nous être rendu compte de ces disposi- tions variées pour la manutention des céréales, nous primes le train pour une autre région du port, celle qui est affectée au pétrole. Tous les ser- vices sont, en effet, reliés par des voies ferrées, et environ 60 kilomètres de chemins de fer enlacent les bassins et sillonnent les plates-formes atte- nantes. Celles qui portent les installations pour le pétrole et ses dérivés méritent au plus haut point l'attention. Elles comprennent deux étages : l'un, à 33 mètres de hauteur, sur la falaise côtière où arrivent par six voies ferrées reliées à la ligne de Constantza les trains porteurs du précieux liquide; l'autre, au niveau du port et en commu- nicalion directe avec un bassin spécial, dit bassin à pétrole. Entre les six lignes de la station supé- rieure ont été établies quatre conduites de déchar- gement pourvues de branches latérales très nom- breuses où s'adaptent, d’une facon intermittente et à volonté, des tubes flexibles reliés aux citernes des trains. « Chacune de ces conduites, nous dit M. À. Saligny, est destinée à un produit spécial : benzine, pétrole raffiné, pétrole distillé et résidus. Chaque conduite peut donc décharger un train entier contenant le même produit. Elle est reliée à un réservoir de 700 mètres cubes, où les produits s'écoulent par simple gravité. » Ces produits sont recus sur la plateforme inférieure, dans vingt- cinq énormes récipients cylindriques d'une capacité de 5.000 mètres cubes. Chacun d'eux est affecté à une sorte unique de produit, et des mécanismes ingénieux préservent celle-ci de tout mélange. Quant aux résidus, une pompe les accumule dans quatre réservoirs spéciaux surmontés de couvercles immergés à l'eau, ce mode de fermeture atténuant grandement l'évaporation. Des réservoirs, les pétroles et succédanés sont, pour l'expédition, aspirés par des pompes qui les refoulent dans les citernes des navires. Ces bateaux mouillent alors entre les môles du bassin, dit bassin à pétrole, que, par précaution contre les risques d'incendie, une passe de 40 mètres, fermée par une porte flottante, isole de tout le reste du port. Les navires réduisent leur pression dans un bassin spécial, puis débarquent leur équipage avant de pénétrer dans le bassin à pétrole ; ils sont amenés et manœuvrés dans ce dernier au moyen de cabes- tans électriques. La manœuvre inverse en assure la sortie, de sorte qu'à aucun moment le personnel naviguant ne peut être exposé à un accident par le feu. Quant à l'importation, qui consiste principale- ment en charbons, fers laminés, tôles et rails, elle se trouve isolée dans une partie du port en con- nexion avec ses bassins propres. Toutes ces installations, y compris celles qui con- cernent l'exportation du bois, ainsi que les services de construction et de réfection, demandaient une force motrice considérable. Afin d'écarter les risques d'incendie, c'est à l'électricité qu'on à eu recours pour en commander la machinerie. Isolée des autres bâtiments, une usine électrique leur transmet l'énergie et leur fournit, ainsi qu'aux bureaux, l'éclairage nécessaire. Elle comprend actuellement quatre moteurs Diesel à pétrole brut, de 400 che- vaux chacun, accouplés respectivement à quatre dynamos à courant continu de 270 kilowatts. Le courant est fourni sous 440 volts, qui sont ulilisés en bloc pour la force et partagés sur trois fils pour l'éclairage. Cette admirable organisation a déjà fait ses 990 LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES preuves, et il n'est point exagéré de dire qu'elle occupe aujourd'hui le premier rang dans loutil- lage économique de la Roumanie. Pour en bien saisir l'importance, il convient remarquer qu'œuvre de l'Etat exploilée par l'Etat, le port de Constantza satisfait aux besoins de l'exportation sans grever les producteurs d'une trop coûteuse entremise. Par cela même qu'il existe avec l'oulil- lage si complet d'entrepôt que nous venons d'in- diquer, il oblige tous les exportateurs, présents el futurs, à recourir à ses installations; de sorte que la Roumanie peut aujourd'hui faire appel, pour l'exploitation pétrolière de ses Carpathes, à des capitaux étrangers sans avoir à craindre la forma- tion d'aucun trust : aucune société, si considérable qu'elle puisse être, n'aura intérêt à créer, pour se passer de l'Etat, une organisation analogue à celle qu'il a instituée et dont les avantages sont offerts à tous. Les aimables ingénieurs qui, en nous faisant visiter le port, nous donnaient ces explications n'avaient point oublié cette loi psychologique que l'attention même la plus captivée réclame une dé- tente : nous l'éprouvâmes tout à coup en pénétrant, aux accents de la Jarseillaise, dans la salle du festin que nous offrit la Direction des Services maritimes. Un excellent orchestre, accompagnant des virtuoses de la musique indigène, avait été installé en balcon autour de tables, somptueusement servies, où Roumains et Français, échangeant des politesses, préludèrent à l'établissement d'intéressantes et affectueuses relations. de 1\Y Après le banquet, un train spécial nous emporta à destination de Bucarest. Il longea d’abord les vallons de Trajan, retranchements fortifiés que les Daces, puis les armées romaines avaient construits sur plus de 70 kilomètres de longueur, pour défendre leurs posilions. À l'entrée même du pays, ces travaux d'art nous rappelaient la double ori- gine de la population actuelle : ils nous faisaient toucher à la source même de sa langue, de sa cul- ture et de sa formation latines. Et bientôt, fran- chissant les vallonnements, les pâturages marécageux qu'a laissés dans la Do- broudja la longue érosion de l’une des plus vieilles chaines montagneuses du monde, nous atteignions, à Cernavoda, sa falaise sur la vallée du Danube. M. Bratianu, président du Conseil des ministres, M. Värnar, préfet de Constantza, avaient eu l'ama- bilité de se rendre à la station et nous recûmes les mamelons, d'eux le plus gracieux accueil. De la gare même, nous avions sous les yeux une vue admirable sur les bras danubiens, la Balla et le plateau, plus lointain, du Baragan, et, devant nous, continuant la ligne du chemin de fer, l'une des merveilles de l’art de l'ingénieur : le pont Carol [°°, construit sur les plans et sous la direction de M. Saligny par les forges du Creusot, de Fives- Lille et de Seraing. Atteignant, avec ses chaussées, une longueur de 18 kilomètres, il franchit les bras danubiens et les marais intermédiaires, à 60 mètres de hauteur au-dessus des basses eaux. Avant d'y passer en chemin de fer, nous avons pu parcourir à pied sa première section, celle qui domine le Dunarea-Veche, et de cette longue galerie con- templer le magnifique panorama de la région. La traversée du Baragan fut pour nous une sur- prise. Au lieu du désert pierreux ou de la plaine de chardons que décrivent nos manuels de géogra- phie, nous défilions au milieu de terres gagnées depuis une quinzaine d'années à la culture des céréales et principalement du maïs. Profitant de l'établissement des voies ferrées qui relient Buca- rest à Constantza et à Braïla, le Gouvernement a, cà el là le long de ces lignes, foré des puits, rendu possible l'irrigation, planté quelques arbres et créé des villages où s’est porté le trop plein de la population réfugiée dans les vallées; et le sol, si longtemps aride et stérile, a été défoncé et ameubli par la charrue : alors est apparue l’extrème ferti- lité du limon noir qui recouvre cetle immense nappe de terre, et ont levé les moissons. Cette mise en valeur du Baragan, si bien servie par la création dela ligne et l'agrandissement du port de Constantza, contribue déjà, dans une large mesure, à l'accrois- sement des exportations. C’est l'une des œuvres les plus considérables de ces dernières années, l’une de celles qui font le plus d'honneur à la Roumanie. Dans presque toute cette contrée, le régime qui s'est établi est celui de la grande exploitation. Ce n'est guère qu'aux approches de Bucarest et à par- tir de Ciulnitza que la petite propriété devient fré- quente et les villages assez nombreux. Ils coupent de leurs petites maisons et de leurs grandes étables la monotonie de cette plaine uniforme qui enserre la capitale de tous côtés. V Il était près de huit heures du soir quand nous arrivaämes à Bucarest, et, malgré une pluie lorren- tielle — les averses, en ce pays, sont de vérilables déluges — une foule nombreuse nous attendait à la gare. Parmi les personnes venues au-devant de nous, nous trouvämes tout d'abord : M. le Préfet de police, M. Constantin Dissesco, professeur à la Faculté de Droit, sénateur gt ancien ministre, et Me Dissesco; M. le sénateur Nicolas Xénopol, directeur du Mouvement Économique; M. Victor LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 991 Babès, directeur de l’Institut de Bactériologie, et Me Babès; M. Niculæ Jorga, professeur à la Fa- culté des Lettres de l'Université de Bucarest, venu avec tout un groupe d'étudiants et d'élèves des écoles; M. Pascal, sous-directeur de l'Enseigne- ment professionnel au Ministère de l'Instruction publique ; M. Holban, directeur dela Æevistei Idea- liste; M.Vasile Alexandrescou, directeur de la Revis- tei Moderne; M. Saladin, président, et un certain nombre de membres de la Société de bienfaisance entre Français; MM. Manu Muscel, Durma, Mani- catide, Stanculesco, Abulescou, Stoenescou, Emil Girrleanou, Corneliu Moldoveanu,léniteseu,N. Pora, publicistes, et la plupart des principaux collabo- rateurs des journaux roumains. Nous n'aurons garde d'oublier ici M. Maurice Fain, négociant, l’un des hommes d'action dont la collaboration à l'Exposition roumaine, en 1906, a été le plus fé- conde et qui, en nous donnant tout son dévoue- ment, devait bientôt assurer à notre nombreuse caravane la bonne organisation des moyens de transport, du logement et de la table, dont elle a joui durant tout son séjour à Bucarest. Toute la ville était pavoisée, et cette délicate manifestation de l'autorité municipale et des par- ticuliers à notre endroit nous faisait de plus en plus sentir l’ardeur et l’unanimité des sentiments nourris dans les cœurs roumains à l'égard de la France. Les occasions d’éprouver cette bienveil- lance se succédèrent sans interruption. Au diner, auquel nous avions convié, parmi les Roumains, les autorités et nos amis personnels, parmi les Fran- cais en résidence à Bucarest, M. Blondel, ministre de la République française, et M. Prévost, chargé d'Affaires à la Légation de France, éclata un nou- veau témoignage de cette sympathie. Au dessert, un large rideau se leva, une scene apparut, remplie de tziganes et de paysans, en costumes, qui exécu- tèrent devant nous les danses traditionnelles du pays et nous firent entendre un concert des plus savoureux. Parmi ces virtuoses, dont le talent fut frénéliquement applaudi, il en est qui ignorent toute note de musique : ils naissent artistes, et, soit qu'ils chantent, soit qu'ils accompagnent sur des pipeaux ou jouent d’un instrument quelconque, c'est un merveilleux instinct qui les guide. Le Comité roumain pour la réception des Touristes de la Revue générale des Sciences”, qui les avait engagés, nous à ainsi rendus témoins de l’une des plus attrayantes curiosités du pays. 1 Ce Comité comprenait une centaine de personnes. Son bureau se composait de : MM. Pierre Poni, président; Dre Is- trati, secrétaire; Jean Lahovary; Anghel Saligny: C. Ali- manisteanou, Alexandre Bellio, Alexandre Ghika, Dr Mari- nesco, Dr Obrecio, Démas-Théodoru, Nicolas Xénopol, Dr Zaharia. Ce nous fut aussi une joie de voir arriver ce même soir dans la salle la colonie française de Bucarest. Nos compatriotes venaient nous offrir un vin d'honneur, tenant à nous témoigner, par cette démarche courtoise, leur attachement indéfectible à notre patrie. Ils se plurent à nous dire le charme exquis de la résidence en Roumanie pour des Francais, l’affabilité des relalions qui, depuis leur arrivée dans le pays, n’a cessé de le leur faire aimer, Les dames de la colonie francaise, accompagnées de quelques dames roumaines, apportèrent à leurs sœurs de France des souvenirs de Roumanie. Nous vimes alors s'étaler les plus beaux spécimens des arts domestiques indigènes, notamment des merveilles de broderies. On sait que les Roumains, qui tiennent des Byzantins une bonne partie de leur éducation artistique, excellent à composer des motifs d'ornementation aussi remarquables par l'originale et savante complication du dessin que par la délicate harmonie des nuances. Dans les campagnes mêmes, le goût de la fine et belle bro- derie est demeuré vivace, et il n'est point de paysanne qui ne cultive avec adresse cet art char- mant; leurs blouses, leurs gilets, leurs tabliers aux vives couleurs, les chemises aux larges man- ches, les vestes de leurs maris attestent chez toutes une véritable hérédité artistique. Jusque dans les moindres villages, si répandue est cette forme de la parure qu'elle constitue une véritable industrie nationale. Le Gouvernement l’encourage; il lui a fait large place dans l’enseignement donné aux jeunes filles, et il s'est appliqué à recueillir, à titre éducatif, tous les modèles dignes d'imitation. M. Spiru Haret, professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Bucarestet actuellement ministre de l'Instruction publique, a eu l'extrême amabi- lité d'offrir à chacun de nous, sous forme d'un superbe album en couleurs, les brefs de ces pré- cieux dessins. Nul doute que les doigts agiles des « Croisées » ne s’exercent à les copier. Portant sur elles les blouses, les chemisettes, les fichus reçus en cadeau à Bucarest et ayant sous les yeux la recette pour les fabriquer, elles ne tarderont pas à intro- duire dans nos modes quelque peu des élégances roumaines. Puisse cette grâce nouvelle leur faire à jamais répudier leur affligeant accoutrement actuel! VI Parmi les excursions autour de Bucarest inserites au programme du voyage, figuraient deux visites à deux industries d’un intérêt considérable pour la Roumanie. Nous devions nous rendre le même jour à la mine de sel de Slanic et aux exploitations pétrolières de Campina. Sel et pétrole abondent dans les Carpathes, localisés non dans la chaine 992 LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES cristalline, mais dans la zone des collines tertiaires qui escorte du côté de la plaine le haut rideau montagneux. Confiné dans les terrains éogènes, le sel occupe, dans les collines où on le rencontre, la partie haute, comprise entre 400 mètres et 600 mètres, et c’est à cette altitude que nous nous sommes élevés pour aller constater sa présence à Slanie. Un {train spécial nous fit traverser la plaine intermédiaire entre la Capitale et ces hauteurs, et, s'insinuant entre les coteaux boisés qu'égaient cà et là de petits chalets de paysans, il nous porta jus- qu'à la mine. Cette mine appartient à l'État. Elle est toute en profondeur, à 150 mètres au-dessous de la surface du sol. Un ascenseur géant y porte les ouvriers et, le soir venu, les ramène au grand air. En quelques minutes il nous descendit dans l'antre, 3t nous nous trouvâmes dans un monde de rêve, saisis par l'étrangeté du lieu, au fond d’une nef immense, sur le sol d'une cathédrale aux arceaux gigantesques, taillée dans un bloc de sel! Des lampes électriques, suspendues cà et là et entourées de halos blafards, projetaient leurs lueurs trou- blantes sur les parois rubanées de cette caverne des Mille et une Nuits, reflétaient leur image sur un sol de neige, sur une immense voûte de neige, sur des murs de neige, sur des piliers d'une blancheur scintillante, Des scies mécaniques et des pics ma- niés par une centaine d'ouvriers taillaient dans le sol des gradins, puis des pavés de sel veinés de gris ou de rose par des traces de combinaisons métal- liques. Nous enjambâmes ces degrés. Au delà s'étendait une table en fer à cheval de trois cents couverts, chargée de hors-d’œuvre, de flacons et de fruits; plus loin encore s'apercevait une troupe de musiciens. Le déjeuner était offert par M. Costi- nescou, ministre des Finances, et honoré de la pré- sence de M. Alexandridi, son chef de Cabinet, de M. Jipesco, secrétaire général du ministère des Finances, de M. Paul Arion, sous-directeur de la Régie des Monopoles de l'Etat, de M. Dem. Proto- popesco, sénateur, de M. Anghel, préfet du district de Prahova, et de M"° Anghel, de M. l'ingénieur Lucaci, directeur de la mine, de M. Sanesco, prési- dent du Conseil d'administration de la Régie des Monopoles de l'Etat, de M. le procureur Robesco et de M": Robesco, de M. Murgoci, assistant au Musée de Géologie de Bucarest, de M. Vasilesco Karpen, docteur ès sciences, professeur d’Electrotechnique à l'Ecole des Ponts et Chaussées de Bucarest, de M. C. Blattner, directeur de l'Agence de la Com- pagnie des Chemins de fer de l'Est, de M. Jean Kalindéro, membre de l’Académie roumaine, qui eut l’amabilité de nous offrir ses œuvres littéraires et pédagogiques, de M. Millo Bélis et des principales autorités et notabilités de la région. Par ces émi- nents compagnons, nous apprimes les phases qu'a jusqu'à présent traversées l’industrie du sel en Roumanie, les conditions des gisements, les pro- cédés d'extraction et l'importance tant du commerce intérieur que de l'exportation de cette denrée. La plus grande partie est consommée dans le pays ou expédiée par voie de terre en Bulgarie; le reste est chargé à Constantza pour des destinations diverses. La seule mine de Slanie expédie près de 80.000 tounes de sel par an, et, quant à son avenir, il semble qu'on doive être très optimiste, lant on est encore loin du fond: la sonde a foré, à partir du sol de la caverne, situé, comme nous l'avons dit, à 150 mètres au-dessous de la surface extérieure, un trou de 400 mètres de profondeur, qui n’a pas atteint la limite inférieure du gisement. C’est dire que de beaux jours sont encore réservés à l’exploi- tation. Ramenés au grand air, nous nous rendimes par chemin de fer dans la partie basse des collines, où s’opèrent l'extraction et la distillation des pétroles. Malgré un retard causé par le déraillement d’un wagon, nous arrivämes à temps à Campina pour y étudier cette grande industrie. Outre que ce district de petites collines plissées qui se terminent en escar- pements abrupts sur la plaine est par lui-même très pittoresque, il doit au travail de l’homme d'offrir dès l'abord un aspect géographique très particu- lier. Sur une étendue de plusieurs hectares, les sommets de ses anticlinaux sont hérissés d’écha- faudages et de cheminées : ce sont là les super- structures des puits forés dans la profondeur. Le pétrole afflue, entre 40 et 200 mètres d'altitude, dans les couches relevées du terrain pliocène où le refoule la nappe d’eau souterraine descendue de la montagne. On se rend compte de la disposition du sous-sol, d'où résulte cette localisation des hydro- carbures, en parcourant les vallées qui coupent les collines et sur les flancs desquelles se reconnais- sent, à divers niveaux, les élages géologiques. M. le Professeur Mrazec à eu la grande amabilité d'y conduire les géologues de la Croisière. À proximité des puits ont été créées, à Campina même, de grandes usines pour la distillation de l'huile minérale. Ces établissements et ceux de Ploesci sontles plus considérables de la Roumanie. Nous les avons visités sous la conduite de M. Cons- tantin Alimanestianu, ingénieur en chef des Mines, président de l'Association des industriels de Pé- trole et député au Parlement, de MM. Halaceano, et Alfred Gunther, directeurs de la raffinerie Steauna Romäna, de M. Georges Boamba, administrateur délégué, de M. Kirschen, ingénieur de cette Société, et de M. le docteur Creanga, secrétaire général du Ministère de l'Industrie. Nous avons pu suivre toutes les opérations depuis l'arrivée du liquide à l'usine jusqu'à la séparation des diverses espèces LOUIS OLIVIER — LA RÉCENTE CROISIÈRE DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 993 chimiques par ébullition à températures crois- santes, et au traitement des résidus. Nous avons vu naitre les benzines, les pétroles légers et les pé- troles lourds beaucoup moins inflammables ; nous avons assisté à la fabrication de la paraffine par le froid, enfin au chargement de tous ces produits dans les wagons-citernes qui les transportent. Actuellement, en plus de 127 petites exploita- tions, les grandes sociétés qui extraient le pétrole dans les Karpathes roumaines sont au nombre > #0.000°. — M. Tilho a constaté, au cours des opérations de la Mission Niger-Tchad, que la mé- thode de détermination des longitudes à terre par le transport du temps à l’aide des montres de torpilleur, est susceptible d’une grande précision. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Carpentier présente plusieurs modèles d’un baromètre isotherme, dû au marquis de Montrichard, et soustrait à l'influence de la température par deux enveloppes de verre entre lesquelles on a fait le vide. — M. H. Pécheux a déter- miné la résistivité et la thermo-électricité de quatre échantillons d'acier marchand. — M. A. Léauté mon- tre que, lorsqu'un fil fin est parcouru par une décharge de condensateur, l'augmentation que l’on constate dans la violence de l'explosion, quand on diminue la self-induction, est due à l'accroissement simultané de l'amortissement et de l'amplitude du courant; la fré- quence tend à produire un effet inverse. — -MM. Ch. Eug. Guye et V. Freedericksz ont constaté que Ag, Al et Fe ont un coefticient de frottement intérieur qui vaen diminuant à mesure quelatempérature s'abaisse ; pour Al, il est 274 fois plus faible à la température de l'air liquide qu'à celle de l’eau bouillante. IIne semble pas cependant qu'il tende à s'annuler au zéro absolu.—M.J. . A. Muller répond aux critiques que M. Boulouch a adressées à sa démonstration dela règle des phases. — M. G. D. Hinrichs indique une solution simple et géné- rale de l'équation de condition dans le calcul des poids atomiques. — M. A. Colson montre que la décomposi- tion du sulfate de soude par le noir de fumée, peu sen- sible au-dessous de 950, est rapide et uniforme à cette température, quelle que soit la proportion de charbon. Avec un excès de charbon, 70 °/, du sulfate sont décomposés en 20 minutes et la vitesse de la réaction augmente rapidement avec la température. — M. H. Baubigny propose un procédé de dosage de l'acide dithonique et des dithionates par fusion lente avec un nitrate et un carbonate alcalin et dosage par le baryum de l'acide sulfurique formé: — M. M. Delépine à constaté que le chloroiridate de K, précipité par AgAzO*, forme un précipité bleu qui passe au jaune et est formé finalement de chloroiridite d'argent Ir CI'Ag*. Le corps bleu est le chloroiridate IrCl'Ag?, instable, qui réagit sur l’excès de sel d'Ag ou sur lui-même pour donner le chloroiridite. Le nitrate de Tl donne un chloroiridate IrCITE, vert bleu très foncé. — M. G. Leser à préparé deux dérivés B-acétylés de. la dymé- thyl-1 : 1-cyclohexanone-3. L'un, qui bout à 110°- 1149 sous 13 millimètres, se condense avec CH*MgT pour donner un alcooltertiaire cétonique, C‘*H°°0*, F.880-899, que H?S0* déshydrate avec formation d'une diméthyl- tétrahydroacétophénone, Eb. 2070-208° sous 745 milli- mètres. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. G. Grandidier donne la description d’un oiseau nouveau de Madagascar, le Monias Benschr, se rapprochant des Rales et intéres- sant en raison de ses affinités avec les Fourmiliers sud- américains. — M. L. Roule à observé que les Amphi- biens du genre Euprocte sont localisés dans trois régions distinctes : Pyrénées, Corse et Sardaigne, séparées par la mer. Ils doivent être considérés comme les survivants d’une faune ancienne qui occupait autre- fois un périmètre plus étendu, dont les effondrements méditerranéens ont submergé la majeure part. — M. B. Collin donne les diagnoses préliminaires d’un certain nombre d’Acinétiens nouveaux ou peu connus. — M. A. Maige a observé, dans les étamines de l'Asphodelus microcarpus, un mode de formation des chromosomes se rattachant nettement au type de Strasburger et Grégoire, mais qui se caractérise par ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1023 l'apparition tardive de la division longitudinale posté- rieurement à la division transversale. — M. G. Perrin a constaté que la fécondation, chez les prothalles de Filicinées, est considérablement gènée dans les milieux à basse tension superficielle, contenant par exemple des sels biliaires. Il en déduit une nouvelle formule de bouillie cuprique contre le mildew.— M. J. Dumont a étudié les enduits de revêtement des particules ierreuses du sol, qu'on enlève par décapage à l'acide oxalique et AzH*. Ces enduits contiennent dix fois plus de matières humiques et cinq fois plus de matières argileuses que la terre totale. — M. H. Arsandaux estime que, dans les formations latéritiques à affleu- rement presque horizontal, il se produit une indivi- dualisation progressive du fer; cet élément chemine de bas en haut, sans doute en raison d'actions capil- laires, et vient s'insolubiliser à la surface. — M. L. Cayeux a constaté que, dans les minerais de fer ooli- thiques du Silurien de France, du quartz secondaire vient se substituer à la sidérose, en commencant par la surface, tandis qu'en profondeur le minerai s'en- richit en fer carbonaté. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 30 Novembre 1909. M. H. Vincent confirme le rôle pathogène du Pro- teus vulyaris dans les infections alimentaires, signalé par M. Metchnikoff. Dans un cas, associé au bacille d'Eberth, il a fortement aggravé l'infection typhoïdique. — M. P. Bar présente un Rapport sur les mémoires et ouvrages envoyés en 1909 à la Commission permanente de l'hygiène de l'enfance. — M. Vaillard insiste sur le rôle des porteurs de germes dans la propagation de la fièvre typhoiïde, d’après un certain nombre de statis- tiques, et sur la nécessité de lutter contre cette cause de contagion autant que contre la pollution des eaux de boisson. — M. Pottevin lit un travail sur l'épuration des eaux d'égouts par les lits bactériens. — M. le D' Chéron donne lecture d'une étude sur le traite- ment des salpingo-ovarites, fibromes utérins et selé- roses utérines, Séance du T Décembre 1909. M. Mosay est élu membre titulaire dans la Section d'Hygiène publique, Médecine légale et Police médi- cale. M. C. Gariel présente un Rapport sur un travail du D' Ménard relatif à certaines applications de la métro- radiographie à l'examen de l'organisme humain. L'au- teur montre que l’action du bain de développement peut modifier grandement la possibilité de voir certains détails d’une épreuve radiographique, alors que les conditions d'exposition sont les mêmes.— M. A. Chan- temesse à constaté, dans son service de typhiques du Bastion 29, que la contagion inter-humaine s'exerce avec une fréquence et une intensité remarquables. Pour lui, le coli-bacille est impuissant à engendrer la fièvre typhoïde. Il fait connaitre les résultats obtenus dans son service par la vaccination contre la fièvre typhoïde par la méthode de Wright: chez les sujets non inoculés, le nombre des cas a été deux fois plus consi- dérable et le nombre des décès trois fois plus élevé que chez les vaccinés. — M. F. Widal défend la spéci- licité du bacille typhique. — M. le D' Picqué lit un travail sur la méthode chirurgicale en médecine men- tale. — M. Mollereau donne lecture d'un travail sur la rage des rues. SOCIETÉE DE BIOLOGIE Séance du 27 Novembre 1909. MM. P. Abrami et Ch. Richet fils ont déterminé avec facilité, chez le lapin, un érysipèle hématogène en créant, au cours de la septicémie streptococcique expérimentale, un point d'appel minime au niveau de l'oreille. — MM. A. Laveran et A. Pettit ont trouvé dans le sang d'un mulot des environs de Paris un try- panosome nouveau, voisin du 77. Lewisi et du Tr. Duttoni, peu pathogène, qu'ils nomment Tr. Grosi. MM. H. Vincent el E. Combe ont diagnostiqué, par la précipitation du liquide céphalo-rachidien centrifugé avec un sérum spécilique, plusieurs méningites ménin- gococciques à liquide stérile et amicrobien. — MM. M. Doyon et C1. Gautier ont constaté que le sang rendu incoagulable par l'injection intra-veineuse d'extrait de gui empêche in vitro le sang normal de coaguler et reste liquide malgré l'addition de sérum normal. — M. P. Portier a étudié l'appareil respiratoire des larves d Oestre, constitué par le stigmate postérieur; par sa disposition, 11 empêche les corps gras d’obstruer les trachées de la larve. — M. A. Bauer a observé des lésions des ganglions rachidiens dans un cas de polio- myélite antérieure subaiguë de l’adulte, du type scapulo- huméral. — MM. C. Mathis et M. Léger ont trouvé, chez deux serpents aquatiques du Tonkin du genre Tropidonotus, un nouveau Trypanosome, présentant une grande et une petite forme, qu'ils nomment 77. Primeti. — M. Ch. Aubertin a réalisé la mort tardive chez le rat et la souris blanche après une séance uni- que d’anesthésie chloroformique ; à l’autopsie, les ani- maux présentaient : 1° des altérations viscérales pré- dominant sur le foie; 2° des phénomènes congestifs et hémorragiques généralisés. — MM. M. Breton, L. Mas- sol et J. Minet ont mesuré le pouvoir alexique au cours de divers états pathologiques, en particulier de la tuberculose pulmonaire. Il n'y a aucun rapport entre la marche de la maladie, le stade de l'évolution et le pouvoir alexique. Toutefois, le pouvoir alexique semble plus élevé chez les-fébricitants que chez les apyrétiques. — M. H. Gougerot montre que certains parasites dégé- nérés et vieillis sont dépourvus d’électivité colorante ; par habitude, on peut toutefois les reconnaitre encore à la teinte très pâle ou « ombre » qu'ils donnent avec les colorants acides. — MM. A. Calmette, L. Massol et M. Breton recommandent, pour la culture du bacille tuberculeux, l'emploi de milieux minéraux contenant la matière azotée sous forme d'asparagine ou de succi- nimide à raison de 2,5 gr. par litre. — M. A. Carini a trouvé dans le sang d’un ouistiti du Brésil, mort d'une affection non déterminée, une grande quantité d'hé- malies très altérées et des filaments très curieux sem- blables à des spirochètes. — MM. J. Jolly et P. Che- valier ont constaté que les parois des sinus veineux de la rate sont criblées de solutions de continuité étroites et régulières, limitées chacune par deux fibres circu- laires et par deux fibres-cellules. — M. A. Bergeron a fait le diagnostic de la tuberculose par la déviation du complément (méthode de Marmorek); il à obtenu 131 résullats positifs sur 133 cas de tuberculose cer- taine, et 68 résultats négatifs sur 7% cas de non-tuber- culose. — M. E. Maurel a étudié la diarrhée produite chez le lapin par l’arséniate de soude donné par diffé- rentes voies; par la voie hypodermique et par la voie veineuse, la diarrhée à apparu avec des doses moindres que par la voie gastrique. — MM. K. Landsteiner et C. Levaditi ont reconnu que la paralysie infantile est transmissible au chimpanzé et la poliomyélite aux singes inférieurs par injection de moelle dorsale et lombaire de malades morts de ces affections. L'agent pathogène semble se localiser de préférence dans les cellules nerveuses, dont il provoque la destruction. — MM. C. Levaditi et V. Stanesco indiquent un procédé de recherche des trypanosomes, des spirilles et des filaires dans le sang, consistant dans l'addition de ricine qui agglutine fortement les hématies et n'a aucune action sur les organismes parasites. — MM. Che- vrier, R. Benard et Sorrel ont éludié les moditica- tions de la résistance globulaire au cours des cholémies chloroformiques; dans certains cas, il y à diminution de la résistance, précoce et transitoire; dans d'autres, augmentation marquée le 5° jour. — M. V. Pachon présente un appareil de perfusion à température et pression constantes. — MM. Ed. Retterer el Aug. 1024 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Lelièvre ont observé que, dans la muqueuse utérine en rénovation, les cellules épithéliales donnent nais- sance, par amitose, à des éléments également épithé- liaux, qui ultérieurement se multiplient par voie mitosique. Séance du 4 Décembre 1909. M. C. Joyeux a pratiqué la vaccination antivariolique aux pays chauds avec du vaccin desséché mélangé avec de la gomme; il a obtenu un fort pourcentage de résultats positifs. — M. L. Camus à préparé les vaccins secs ulilisés par l'auteur précédent; il broie la pulpe avec une solution de gomme, la lamise soigneu- sement et la dessèche rapidement à une température peu élevée en l'étalant en couche mince sur une large surface. — M. Chr. Champy a observé, dans la cel- lule intestinale des Batraciens et d'autres Vertébrés à jeun, des filaments qui rentrent dans la catégorie des mitochondries. — MM. Ed. Retterer el Aug. Lelièvre ont étudié l’origine et les transformations des cellules qui, après le part, contribuent à la rénovation de la muqueuse utérine; il y a transformation des bourgeons épithéliaux en tissu conjonclivo-vasculaire, — M. G. Bohn, en portant, à de courts intervalles, une série d'excitations semblables sur un organisme, a observé trois cas : 4° les effets vont constamment en croissant: 2 les effets croissent d’abord pour décroitre ensuite; 3 les effets vont constamment en décroissant. Il indique le déterminisme physico-chimique de ces réac- tions. — M. Ch. Achard, H. Bérard et Ch. Gagneux montrent que la présence de certains éléments cellu- laires dans l'organisme entretient dans les leucocytes l'aptitude à réagir aux produits de ces cellules, et leur absence entraine la perte de cette aptitude. — MM. H. Triboulet et Ribadeau-Dumas ont reconnu qu'il existe des entérites toxiques, provoquées par l'élimi- nation intestinale de toxines charriées par le sang. Le pronostic en est d'autant plus grave que la région par où se fait l'élimination est située plus haut dans le tractus digestif. — MM. J. Jolly et A. Carrau ont étudié le développement des ganglions lymphatiques des Mammifères. 1ls sont formés par l’anastomose d'un groupe de vaisseaux lympliatiques, suivie d’une modi- lication du tissu conjonclif situé entre ces vaisseaux et d’une pénétration des vaisseaux sanguins avec infil- tration Jymphoide. — MM. S. Bonnamour el L. Thé- venot ont provoqué expérimentalement chez le lapin, par injection intraveineuse d’adrénaline, un anévrisme disséquant de l'aorte. — M. L. Bory a étudié l’édilica- tion élastique dans les artères de l'embryon. La lame élastique interne est la couche élastique primordiale ; c'est aussi la source élastique du réseau de la tunique moyenne. — MM. P. Remlinger et O. Nouri concluent de leurs expériences que les microbes pathogènes du sol pe pénetrent pas à l’intérieur des plantes et que c'est seulement à la surface de celles-ci qu'ils peuvent ètre entrainés, en cas d'épandage, par exemple. — M. Ch. Porcher a reconnu l'absence de composés indo- logènes dans l’urine du nouveau-né. — M. A. Alexeieff signale l'existence d’une série de formes de passage entre le genre Bodo Ehrenberg et le genre Trypano- plasma de Laveran et Mesnil, — M. H. Gougerot à reproduit expérimentalement, par frottis de cultures pures de streptocoques ou de diplostreptocoques sur la peau du rat nouveau-né, des nodules cocciens simu- lant cliniquement el même anatomiquement les lésions papulo-nécrotiques bacillaires. — MM, G. Guillain et J. Troisier ont observé à Paris un malade atteint de fièvre de Malte caractéristique; il avait séjourné pen- dant l'été en Provence, où il a probablement pris la contagion. — M. $S. Mutermilch, en employant la méthode de filtration des sérums par les sacs de col- lodion, a mis une fois de plus en évidence Pidentité des opsonines normales avec l’alexine et des opsonines spécitiques avec les ambocepteurs. — M. H. Busquet a constaté que, chez les grenouilles ayant subi la des- truction de la moelle et chez les grenouilles mises en état de choc par un (raumatisme cranien, le curare, en injection sous-cutanée ou intra-vasculaire, met un temps considérablement plus long que chez les gre- nouilles normales pour manifester sa spécificité d'action toxique. — M. Parvu a observé que les substances du sérum des malades atteints d’échinococcose, décelables par la méthode de fixation en employant comme anti- gène l'extrait alcoolique de kyste hydatique, traversent les sacs en collodion. Elles sont strictement spécifiques el peuvent être nommées anticorps hydatiques. — MM. Laignel-Lavastine et P. Baufñe signalent un cas de septicémie à tétragène survenue au déclin d'une lièvre typhoide. — M. A. Bauer a observé, dans un cas de syndrome de Landry, des lésions des ganglions rachidiens, consistant dans une infiltration diffuse de nombreux lymphocytes dans le tissu conjonctivo-vas- culaire qui englobe les cellules des ganglions. — M. X. Marino décrit un procédé de culture des anaé- robies en aérobiose sur un mélange de sérum avec du bouillon chauffé à 100°. — M. Ch. Mantoux recom- mande l'emploi, pour l'intra-dermoréaction, d'une solution de tuberculine préparée au moment de l'usage en diluant avec du sérum physiologique la solution- mère de l’Institut Pasteur. — M. H. Roger a reconnu que la bile, sans être antiseptique, est capable de modilier la flore intestinale, de diminuer les putré- factions et surtout d'empêcher la formation des poisons putrides. — M. A. Therre a constaté que la cure ther- male de Vichy n’a aucune influence notable sur le lait de la chèvre en pleine période de lactation physiolo- gique. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séanre du 16 Novembre 1909. M. J. Monges montre que le traitement préalable des fèces par HCI permet d'en extraire plus de matières grasses qu'avec l’éther seul ; l'excédent de poids obtenu représente la totalité des savons alcalins et alcalino- terreux. — Le même auteur à reconnu que l'urobiline des fèces est d'origine intestinale et provient de la bili- rubine qui s'est transformée dans l'intestin. — MM. V. Audibert et F. Monges ont pratiqué avec succès l’au- tosérothérapie comme traitement des ascites récidi- vantes, surtout quand le taux des urines a baissé. On note rapidement de la polyurie et une sédation consi- dérable dans la marche de l’ascite. — M. C. Gerber a constaté que la présure est extrèmement répandue chez les Basidiomycètes; chez les Amanites, il semble exister une relation entre l’activité présurante et le degré de toxicité. En général, la région la plus active des champignons est la région sporifère, sauf chez les Amanites et les Polypores. Le degré de résistance à la chaleur de la présure varie suivant l'espèce considé- rée. — M. Ch. Livon a observé que l'extrait du lobe hypophysaire postérieur provoque la coagulation du sang in vivo chez le chien, tandis que l'extrait de lobe antérieur semble avoir une action antagoniste. — MM. Alezais et Peyron signalent, chez un anencé- phale, une immigration réduite et une différenciation incomplète des éléments cellulaires de la médullaire surrénale et une aplasie des paraganglions surrénaux et lombaires. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 19 Novembre 1909. M. L. Houllevigue adresse une communication rela- tive à /a condensation des vapeurs sur les surfaces sou- mises aux projections cathodiques. Si, après une expo- sition de quelques secondes seulementaux projections cathodiques, on soumet la lame impressionnée à des vapeurs de mercure, il se forme un petit nombre de grosses gouttes dans la région non impressionnée, un très grand nombre de goutkés fines dans la région impressionnée. Le dépôt de vapeur se fait dé telle sorte que la quantité lotale de vapeur condensée par ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1025 millimètre carré de surface est la même dans les deux | rose en suspension soit dans le sulfure de carbone, soit régions. La durée d’exposilion aux vapeurs de mercure est sans influence sur ie nombre des gouttes. Sur une épreuve microphotographique, on peut compter le nombre des gouttes et fixer ainsi le nombre des centres de condensation produits par les projections cathodiques. M. Houllevigue s’est demandé si la pro- duction de ces centres était une action spéciale des rayons cathodiques ou si elle était due au dépôt de métal. Pour le savoir, il suffit delimiter, par des écrans convenables, un étroit faisceau cathodique et de le dévier par un aimant. Les projections métalliques n'obéissent pas à l’action magnétique qui dévie les rayons, et l’on trouve que les centres de condensation sont encore moins nombreux-sur la plage frappée par les rayons cathodiques que dans l’espace à la fois exté- rieur aux rayons cathodiques et au dépôt métallique. Sur le trajet, non dévié, des projections, les centres de condensation sont très abondants. Le nombre de centres attribuables au dépôt est, toutes choses égales, proportionnel à la durée de sa production. M. Houlle- vigue tire de là le moyen de déterminer la masse métallique correspondant à chaque centre. Il lui suffit de prolonger assez la durée du dépôt pour obtenir un miroir d'argent continu, dont on évalue l'épaisseur moyenne par la méthode bien connue de l’ioduration. Sans rien changer au réglage, on à soumis une autre portion de la même lame à une action prolongée seu- lement pendant quelques secondes. On connait par conséquent le poids d'argent déposé par millimètre carré, qu'il suffit de diviser par le nombre des centres, relevé directement sur une microphotographie. On trouve ainsi qu'une de ces masses d'argent, supposée cubique, aurait un côté de l’ordre de S0uy. Chaque centre de concentration contient donc un nombre de molécules d'argent de l’ordre de 20.000.000. On est sur- pris de la grandeur du résultat, car on peut obtenir des couches d'argent de quelques millièmes de micron- mètre seulement. Il n’est pas vraisemblable que des masses aussi considérables que des cubes de S0uy de côté soient arrachées tout d’une pièce à la cathode et transportées telles quelles sur le verre. M. Houllevigue croit plutôt à une condensation de vapeur métallique émise par la cathode. — M. G. Meslin résume l’ensemble de ses recherches relatives au dichroïsme magnétique des liqueurs mixtes, c'est-à-dire à la pro- priété qu'elles présentent de transformer la lumière naturelle qui les traverse en un faisceau de lumière partiellement polarisé dont le plan de polarisation est, suivant le cas, perpendiculaire ou parallèle au champ magnétique qui est lui-même transversal par rapport au rayon. Les principales lois du phénomène sont les suivantes : {9° Le phénomène est susceptible d'être affecté d'un signe, suivant que la composante princi- pale est parallèle ou perpendiculaire au champ, ce qui permet de distinguer le dichroïsme négatif ; 2° Le signe du dichroiïsme dépend à la fois du liquide et des parti- cules cristallines qu'on lui a associées; ce signe peut être prévu par la règle suivante : on peut ranger tous les corps solides et liquides dans un ordre tel que l’association d’un solide et d’un liquide donne nais- sance au dichroïsme positif si la substance cristalline précède.le liquide et si, en même temps, elle est plus réfringente que lui; d’une manière générale, le signe est donné par celui de l'expression (N;— Ni) (ns — m), où a désigne l'indice etoù N désigne un numéro d'ordre dont il reste à préciser la signification; 3° Les sub- stances non cristallisées ou cristallisées dans le système cubique ne donnent jamais naissance à des liqueurs actives, ce qui met en évidence la nécessité d’une ani- sotropie; 4° Il existe des liqueurs qui offrent ce dichroïsme sans champ magnétique; le champ de la pesanteur est suffisant pour orienter les cristaux au sein du liquide et produire la dissymétrie en question. Ce. dichroïsme spontané, qui est présenté en particu- her par l'acide borique associé au térébène, est soumis à la loi de l'indice. Les liqueurs constituées par la sidé- - REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909. dans l’aniline, sont particulièrement sensibles au champ magnétique, à tel point qu'il suffit d’un petit barreau aimanté tenu à la main pour manifester le phénomène, lequel peut d’ailleurs être projeté dans ces conditions. — M. Ch. Féry: La mesure précise du grossissement vrai des instruments d'optique. Il existe plusieurs définitions du grossissement des instruments d'optique composés. En réalité, le bénéfice tiré d’un instrument consiste dans le fait que l’image rétinienne est plus grande avec cet instrument qu'à l'œil nu. C'est le rapport entre les dimensions des images rétiniennes dans les deux cas qui doit être considéré comme repré- sentant le grossissement vrai. l'auteur fait remarquer que, siune mire est pratiquement à l'infini, ce rapport est indépendant du foyer, qui peut alors être remplacé par une chambre noire ordinaire. La chambre est mise d’abord au point sur la mire ; on mesure les dimensions de l’image sur le verre dépoli. On interpose ensuite l'instrument devant l'objectif et, sans changer le tirage de la chambre, on met au point par le tirage de l’ins- trument ; on mesure la nouvelle dimension de l’image. Le rapport est le grossissement dont bénéficierait un œil infiniment preshyte. Cette méthode est absolument générale et s'applique aussi bien aux jumelles et appa- reils sans anneau oculaire. La méthode photographique peut donner une précision très grande par la facilité des mesures sur le cliché; mais, dans ce cas, il est bon d'interposer un verre jaune et d'employer une plaque orthochromatique annulantles effets de diffusion des rayons ultra-violets par l'air humide. De plus, on n'aura pas, en employant cette précaution, à se préoc- cuper des défauts d’achromatisme des instruments mesurés. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE FRANCE Séance du 26 Novembre 1909. M. Binet du Jassonneix communique les premiers résultats de ses recherches sur les propriétés magné- tiques des alliages du fer, du cobalt, du nickel et du manganèse avec le bore, et sur la variation de ces pro- priétés avec la température. A propos de cette commu nication, M. Ducru fait remarquer que, longtemps avant MM. Moissan et Charpy, le colonel Caron avait signalé le déplacement du carbone par le bore dans les fontes. — M. Darmois expose les résultats de ses recherches sur les essences de térébenthine. Après avoir fait remarquer que le pouvoir rotatoire d’un corps actif pour une radiation déterminée n'est pas caractéristique, il montre que la dispersion rotatoire est conservée dans un mélange des deux antipodes optiques; elle peut donc servir à caractériser le corps actif. L'étude des courbes de dispersion rotatoire des fractions obtenues en distillant une essence SU EN permet d'affirmer que la portion 155-163° fontie: deux corps et deux seulement. Le corps à for#e disr sion est le pinène. Le corps à faible dispex s'y lévogyre, est le même dans toutes les essences , = trouve en quantité notable. (L’essence FM isable: renferme environ 40 °/,.) Le pinène est «2° Ne il est possible de le purifier par congélatio allisa le pouvoir rotatoire et surtout la vitess/ 12 CIE : PRE : , essence de pin tion servent de critérium de pureté. ? 1 Fr d'Alep est celle qui fournit le pinène ® PIUS PUF: SOCIÉTÉ ROYALE Dr LONDRES Séance du 11 Novetbre 1909. MM. G. A. Buckmaster etJ- À- Gardner conee niquent leurs recherches stl la pi ee N d'oxyde de carbone dans le5429 normal etc sl Fr des animaux anesthésiés 4VeC le chloroforme. En re Desgrez et Nicloux ont irdiqué que le sang nee Le chiens de Paris contient environ 1,6 ce impr CO par litre, quantité qui s'élève à 2,5-0,7 er res cubes durant l'anesthésie chloroformiqueBtsloEtesen Das 1026 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES naient CO en faisant passer les gaz du sang sur 10° chauffé à 150° C. et mesurant l’iode mis en liberté par la méthode de Rabourdin. Les auteurs ont repris l'étude de cette question en déterminant CO par la méthode de Haldane avecle sang dilué,aprèss’être assurés qu’on peut ainsi déceler des quantités de gaz bien plus faibles que celles qui ont été observées dans le sang normal par les deux savants français. Ils ont reconnu que ni le sang du chat normal, ni le sang du chat anesthésié par le éhlo- roforme ne renferment une trace décelable d'oxyde de carbone. Ils ont trouvé également que la plus grande partie du chloroforme du sang se dégage avec les gaz extraits à 40° C. Ils estiment que l’iode libéré dans les expériences de Desgrez et Nicloux est dû, en partie, à la décomposition directe de I°05 par le chloroforme en vapeur existant dans les gaz du sang, et surtout au CO produit par l’action de ce chloroforme sur KOH solide que traversent les gaz du sang pour se débarrasser de CO°. — MM. G. W. Ellis et J. A. Gardner : L'origine et la destinée du cholestérol dans l'organisme animal. Vi : L’excrétion du cholestérol par le chat. Les auteurs ont déterminé la teneur en cholestérol des fèces de chats soumis à divers régimes — végétaux et animaux — à teneur connue en cholestérol. La tendance à con- vertir le cholestérol en coprostérol est plus grande que chez le chien. Le total du cholestérol et du coprostérol excrétés est moindre que la quantité ingérée avec la nourriture; le déficit moyen est de 50 à 60 °/,, sans considérer le cholestérol versé dans l'intestin par la bile. — M. H. C. Ross a étudié la vacuolation des pla- quettes du sang. Il a reconnu que la vacuolation des plaquettes du sang peut être produite expérimentale- ment par l’action d’un poison comme la morphine; elle est due à un abaissement du coefficient de diffu- sion, coïncidant avec l'approche graduelle de la mort. L'auteur en conclut que les plaquettes du sang sont des cellules, en l'espèce des fragments de leucocytes. — MM. H. G. Plimmer et W. B. Fry communiquent la suite de leurs expériences sur le traitement expéri- mental des trypanosomiases. L'antimonyltartrate de lithium, administré au rat en injections sous-cutanées, parait produire une guérison complète; les animaux ne meurent pas de maladie et, quand on les sacrifie à diverses époques, on ne trouve aucun trypanosome dans le sang ou les organes. L'antimonyltartrate n'a pas d'action préventive. Les antimonyllactates de Na ou de Na et Ca agissent moins rapidement. L'antimoine à l’état de division très fine, suspendu dans un milieu huileux, provoque également une disparition rapide des trypanosomes du sang. L’arsénophénylglycine donne aussi de bons résultats, mais moins rapides qu'avec les substances précédentes. Enfin les auteurs nt étudié l’action de ces diverses substances sur les jpanosomes 1n vitro; elle se range dans le même & re que l’action in vivo. — M. H. B. Fantham et Ne A. Porter : Les modes de division du Spirochæta ré@urrenüs et du S. Duttoni dans les organismes VIVäu/s. Les auteurs ont observé chez les Spirochètes à la fs la division longitudinale et la division trans- verse. Qhez les S, recurrentis et S. Duttoni, la division longitudiaïle s'observe le mieux quand il ÿ à peu d'organismeSdans le sang, à l'origine et à la fin de l'infection. L& corps est agité par des ondulations rapides; à unéextrémité se produit une fente, qui s'élargit graduel} ent. Des ondulations traversent les deux formes filé divergentes, qui arrivent à se trouver à 180° l’unékde l'autre et se séparent ensuite. La division transver$e est causée par des ondes qui vont des deux extrémités vers le centre de l'organisme (celui-ci agissant Comme un nœud), puis retournent aux extrémités; la fréquence des ondes augmente et bientôt la division a lieu du nœud. La division trans- verse a lieu surtout pendant la période aiguë de la EE Il Ja cependant des périodes où les deux Iormes de division apparaissent ensemble. Les obser- vations relatives à la périodicité ont été faites sur le sang périphérique de l'hôte. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 26 Novembre 1909. M. J. W. Nicholson a déterminé la résistance et l’'inductance effective d'une bobine hélicoïdale de grande longueur, composée de fil mince enroulé sur un cylin- dre dont le rayon est large par rapport à celui du fil. Par le moyen des coordonnées hélicoïdales, l’auteur obtient une solution, pour les forces internes et externes correspondant à une f.é.m. donnée, sous forme d’une série de Fourier dont il suffit de calculer les premiers termes. On en déduit la valeur du courant effectif à travers une section quelconque, et de là l’in- ductance et la résistance. Les résultats sont d’un carac- tère simple et peuvent s'exprimer en termes des fonc- tions ber et bei de Lord Kelvin. — M. W. A. Scoble a étudié les matériaux ductiles sous des tensions combinées. Les essais, qui ont porté sur des barreaux d'acier doux et des tubes d'acier et de cuivre soumis à la flexion et à la torsion, montrent que les lois de la tension maximum et de la déformation maximum ne s'appliquent pas aux matériaux ductiles. La loi de la différence de tension ou de la tension de cisaillement est approximativement exacte, tout en présentant quelques déviations. Si P‘est la plus grande tension, et P* la moindre, on devrait avoir P1— P* — constante; en réalité, on a P'— m P°— constante, où m, déduit des essais de flexion, est égal suivant les cas à 1,57, 4,37 et 1,26. 11 semble que m dépende surtout de la ducti- lité de la substance considérée et un peu du système de charge. — MM. W. Makower etS. Russ ont reconnu que, dans la transformation du radium B en radium C, ce dernier rebondit dans une direction opposée à celle de l'émission des rayons £. Le radium C n’est pas émis par une plaque active également dans toutes les directions ; une plus grande quantité est émise norma- lement à la plaque. La moitié du radium C projeté par une plaque est arrêtée par une couche d'air de 2,5 cen- timètres à une pression de 0,04 millimètre. Le rebon- dissement est donc considérablement moins actif qu'avec le radium A, où il s'accompagne de l'émission d'une particule x. — M. C. V. Burton estime que, malgré le principe de relativité, il est théoriquement possible de déterminer le mouvement du système solaire par rapport à l’éther d'après l'observation des éclipses des satellites de Jupiter. Il indique une méthode permettant de calculer les valeurs probables des com- posantes de la vitesse du Soleil par rapport à l'éther. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 Novembre 1909. MM. M. Barroweliff et F. Tutin ont cherché à résoudre la tropine et la 4-tropine par cristallisation fractionnée de leurs sels avec certains acides opti- quement actifs; ils ont reconnu que ces deux bases sont intérieurement compensées et que leur isomérie provient, comme le pensait Willstaetter, des positions relatives dans l’espace des groupes hydroxyle et méthy- lique. L’atropine a été résolue au moyen de son d-cam- phosulfonate; les sels des deux hyoscyamines stéréo- isomères ontpour/{x}rla valeur + 32°,1.—M.W.C.Mec. Lewis à poursuivi ses expériences destinées à vérifier expérimentalement l'expression de Gibbs pour l'adsorp- tion ; ses recherches ont porté sur l'aniline, la caféine, le sulfate mercurique et le glycocholate de sodium. — M. À. J. Allmand a constaté que les systèmes d’élec- trodes contenant Cu, Cu (OH}* et un alcali sont instables, par suite de la formation de Cu*0. Les systèmes sui= vants sont stables : a) Cu | Cu*O alcali; ) Pt pe alcali. L'auteur a mesuré les différences de potentiel de ces systèmes et en a déduit les produits de solu- bilité de Cu(O0H}° et Cu*0, la pression de dissociation de Cu*0 à la température ordinaire et la température à laquelle Cu‘0 se dissocie quand il-est chauffé dans ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1027 l'air : les nombres concordent avec ceux qui sont cal- culés d'autre manière. — Mie I. Smedley, en faisant réagir des proportions équimoléculaires de Br et de benzylidène-acétophénone en solution chloroformique, a obtenu des cristaux de dibromure, F. 1570-1589 (ren- dement 70 à 80°/,); en concentrant davantage la solu- tion, il se dépose des aiguilles blanches, FE. 13°, d’un dibromure isomère. Ce dernier, chauffé à 180, refroidi, dissous dans l'alcool et recristallisé, donne le corps fondant à 1570-1580, — MM. F. B. Power et Ch. W. Moore ont extrait du fruit de l'Æcbhallium elaterium, à côté d’un ferment hydrolysant les B-glucosides, un hy- drocarbure F. 68, un phytostérol C*H#O, F. 148°, une substance C*#H#0*(0H), voisine de l'ipuranol, un mé- lange d'acides gras, et la prétendue élatérine, dont le constituant lévogyre est nommé a-élatérine, et le cons- tituant dextrogyre, physiologiquement actif, est nommé B-élatérine, enfin du glucose. — M. J. C. Caïn à obtenu le 3-nitrodurène C‘H{(CH*)‘AzO® en diazotant le 3-nitro- 6-aminodurène en solution alcoolique et faisant bouillir jusqu'à ce qu'il ne dégage plusd’Az. Il se cristallise en cristaux incolores, F.76°. — M.B. Flurscheim expose une hypothèse d’après laquelle la masse atomique est entourée par une couche ou enveloppe d'éther, dans laquelle, par l’action des électrons libres à l’intérieur de l’atome, la forme d'énergie appelée affinité chimique est induite de la même facon que le magnétisme molé- culaire par les courants d'Ampère. L’affinité ainsi induite varie, pour les différents atomes, à la fois en qualité et en quantité. Sa quantité dépend de la capa- cité de l'enveloppe d'éther, qui est proportionnelle à la surface de l'atome non combiné et non comprimé; sa qualité est une fonction des charges électriques dans l'atome. Si ce dernier contient des quantités égales de charges négatives et positives, aucune affinité n’est induite (gaz inertes); si les charges positives ou néga- tives sont en excès, l’affinité induite prend une polarité correspondante. L'auteur développe longuement les conséquences de cette hypothèse. — MM. W. H. Perkin jun., R. Robinson et F. Thomas ont fait la synthèse de l’acide cotarnique en partant de la 5 : 6-méthylène- dioxy-1-hydrindone.—MM. P. F. Frankland et F.Bar- row ont préparé les formyl-, acétyl-, propionyl- et n-butyryl-bornylamines et ont déterminé leur pouvoir rotatoire dans l'alcool méthylique ét éthylique, l'acide acétique glacial et la pyridine. Ils ont ensuite préparé les benzoyl-, o-,m-et p-toluyl-, o-,m-et p-nitrobenzoyl- bornylamines et mesuré leur pouvoir rotatoire dans les mêmes dissolvants. — Ml: M. E. Dobson, MM.J. Ferns et W. H. Perkin jun. ont constaté que le pentane-adèe- tétracarboxylate d'éthyle réagit avec Na pour former le cyclohexanone-3 :6-dicarboxylate d’éthyle, qui, par hydrolyse et élimination de CO*, donne l'acide cyclo- hexanone-3-carboxylique, F. 739-759. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Communications recues pendant les vacances (suite). M. H. Finger : L'influence du milieu sur les raies des spectres d'étincelles. L'auteur a étudié, sur le conseil du Professeur Konen, les variations que subissent, au passage de l’ « étincelle à l'air » à l’ «étincelle en milieu liquide », les spectres de la plupart des élé- ments qui se prêtent à une investigation pareille. Le seul liquide employé est l’eau qui, sans offrir de décomposition gènante, présente la perméabilité néces- saire pour l'étude sur l’ultra-violet. Le fait le plus frappant, c'est que le spectre de l’air, qui invariable- ment accompagne l’étincelle à l'air, fait défaut dans l’étincelle passant en milieu liquide. Par contre, l’on observe, dans ce dernier cas, un spectre continu plus ou moins étendu, dont le maximum, de position diffé- rente suivant les éléments, peut s'étendre jusqu'à l’extrème ultra-violet. À côté de ce spectre continu, il se produit, chez certains éléments, le spectre renversé de M vapeur d’eau. D'autre part, les raies du spectre d’étincelles ordinaire se trouvent affectées de diffé- rentes manières. Dans aucun des spectres étudiés, l’on n'observe la moindre trace de raies d'hydrogène ou d'oxygène, ni de celles, toujours présentes, des sels dissous dans l’eau. Quant aux modifications des raies régulièrement disposées, on peut affirmer que les raies appartenant à des séries se comportent d'une facon identique par rapport aux modifications qui con- cernent l'étincelle produite en milieu liquide. D'une façon générale, on peut dire que le processus prend un caractère plus disruptif lors de l'immersion (éliminant l'air) de l’étincelle dans l’eau. Il se produit une décom- position du liquide aussi bien que des électrodes, le premier étant décomposé en H et O et partiellement vaporisé, tandis que ces dernières subissent une pul- vérisation variable suivant leur nature, en même temps que se forment des solutions colloïdales et que, chez certains éléments au moins, des processus chimiques, tels que l'oxydation, ont lieu. 1l est difficile de se rendre un compte exact de la production du spectre continu et des inversions qu'il détermine. Il est pos- sible que ce soit l'hydrogène et l'oxygène qui, aux pres- sions élevées de l’étincelle et aux grandes densités de courant, émettent la lumière continue, — M. H. Zahn : Yrucailite du fer aux vibrations rapides. Les expé- mences entreprises, sur le conseil de l'auteur, par M. Ganzlin, ont fait voir que la perméabilité s’accroit rapidement avec l'intensité du champ dans le cas des champs faibles, avec une aimantation constante aussi bien qu'avec les vibrations rapides ; après avoir atteint un maximum, elle diminue lentement. — M. F. Plog- meyer : Sur la formation des surfaces solides dans les liquides colloïdaux et les phénomènes photo-électriques auxquels elles donnent lieu. Comme M. Rohde l’a fait voir en 1906, les variations de la sensibilité photo- électrique des solutions aqueuses de fuchsine ou de violet méthylique sont dues à la formation d'une couche superficielle solide se composant de pigment solide. Les expériences de l’auteur font voir que la for- mation de la couche superficielle chez les pigments d’aniline est presque indépendante de la nature chi- mique du gaz en contact avec la surface. On doit donc écarter l'hypothèse que ce phénomène serait dû à la formation, sous l'influence de l'oxygène, d’une nou- velle matière, difficilement soluble. Toutes les in- fluences favorables à la vaporisation accélèrent aussi, bien qu'à un moindre degré, la formation de la couche superficielle. Les colloides inorganiques présentent une allure essentiellement identique aux pigments d’aniline; la membrane qui, dans les deux cas, finit par se former est photo-électrique dans le cas où le corps solide serait également photo-électrique. Les élec- trolytes accélèrent la formation de la membrane, qui, d'autre part, n’est pas toujours parallèle à la susceptibi- lité photo-électrique. La formation de la membrane est liée, dans tous les cas, à la nature colloïdale du liquide. — M. G. Franck: La mobilité des ions des atomes radio- actifs résiduels et la masse de l'ion gazeux. Malgré les nombreuses recherches consacrées, dans ces dernières années, aux ions gazeux, On n’a pas encore pu résoudre la question relative à la nature simple ou complexe de ces ions. Des investigations antérieures, il semblait résulter que la masse de la molécule primairement ionisatrice n’exercerait que peu d'influence sur la mobilité des ions, la masse des molécules d'air étant à celle des atomes radio-actifs en question à peu près comme { est à 7. C'est pour vérifier cette façon de voir que l’auteur étudie les ions radio-actifs dans l'air, l'hydrogène et l'azote. Comme la masse des molécules d'hydrogène est à l'atome radio-actif comme 1 est à 100, une influence possible de la masse de l'ion devait se faire sentir infailliblement dans le cas de ce gaz. Or, une ionisation superficielle approximativement unipo- laire, à ions radio-actifs, se réalise facilement en utili- sant les atomes résiduels découverts par M. Hahn‘ et # O, Haax : Phys. Zeitschr., t, X, p. 31-88, 1909; O. Hanx et L. Meirner : Verh. Phys. Ges.,t. XI, p. 55, 1909. 1028 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES . Mie L. Meitner. L'auteur utilise un produit de radio- thorium se trouvant à l'état d'équilibre vis-à-vis de son émanation, etc. L'une des plaques d’un condensateur (celle qui est chargée négativement) est exposée à l'air rempli d'émanation, de façon queles thoriums A, B,C se précipitent sur elle. Le produit ainsi obtenu, dont Factivité s'évanouit en 10,6 heures, donne, par choc en retour, les ions radio-actifs à charge positive du tho- rium D (d’une constante de trois minutes), et c'est sur ces ions que l’auteur fait les mesures, consistant sim- plement à déterminer le potentiel de courant alternatif auquel la plaque supérieure commence tout juste à être frappée par les ions radio-actifs\, c'est-à-dire à devenir active à son tour. Les résultats de ces expé- riences font voir que les mobilités ioniques des atomes résiduels, c’est-à-dire des atomes positivement chargés de thorium D dans l’air, l’azote et l'hydrogène, sont identiques, aux erreurs expérimentales près, à la mo- bilité des ions positifs du gaz environnant. Comme, dans le’ cas de l'hydrogène, le poids moléculaire du gaz environnant est de 2 et celui du thorium D de 208, la mobilité ionique est donc indépendante, entre ces limites au moins, de la masse de la molécule dissociée. Au point de vue de l’ancienne théorie, l'ion H° serait composé de vingt molécules au minimum. D'autre part, la théorie de M. Wellisch se trouve en désaccord immédiat avec les résultats de l'expérience. Lorsque en- fin, d’après les vues de Sutherland, l’on considère l'ion gazeux comme consistant en un atome chargé, on re- connait que la masse de l'ion radio-actif dans H° doit être 204 fois plus grande. Le résultat démontrant l'identité de mobilité des deux n'infirme point cette théorie, la masse de l'ion n’entrant que pour une part peu importante dans les équations de Sutherland. Dans un travail ultérieur, l’auteur se propose de discuter plus en détail les développements et déductions de cette théorie. — M. J. Schubert : Sur les différences entre l'état de l'air de montagne et lcelui de l'atmo- sphère libre. L'étude simultanée de la température et «du point de rosée représente et explique parfaitement les différences qui existent, quant à la tempéra- ture et à l'humidité, entre l'air de montagne et les couches d'altitude égale de l'atmosphère libre. L'au- teur déduit cette loi approximative très simple que, dans la montagne, le point de rosée moyen décroît de 0°,5 par 100 mètres. D'autre part, le point de rosée de l’air ascendant décroit, à l’état sec, de 02,17 par 100 mètres d'élévation. Les phénomènes que pré- sente l'atmosphère de montagne s'expliquent en admet- tant que l'air à 1.000 mètres d'altitude a été apporté par le vent de 870 mètres d'altitude ; à 2.000 mètres, de 1640 ; à 3.000 mètres, de 2.200 mètres d'altitude, de l’at- mosphère libre. Les récentes recherches ont, en effet, fait voir que l’atmosphère présente une tendance à for- mer des couches qui interrompent le jeu des courants ascendants et descendants. Là où la montée de l’air est empêchée, la diminution de température correspondant aux hauteurs croissantes se trouve réduite, de façon que les couches supérieures paraissent relativement chaudes ; elles paraissent aussi relativement sèches. Lorsque, cependant, l'air, arrivant latéralement sur les pentes des chaînes de montagnes, est poussé vers le haut, cette ascension forcée détermine une importante diminution de température, en même temps que de l'air plus humide s'élève vers des hauteurs plus grandes. Aussi l'air des sommets de, montagnes de- vient-il frais et humide. Alfred GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 4 Novembre 1909. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. M. W. Trabert a calculé la vitesse des ondes sismiques à diverses profondeurs au moyen des temps de parcours de Benndorf. La vitesse augmente d’abord rapidement jusqu’à une profondeur égale au cinquième du rayon terrestre, où.elle est de 11,7 kilomètres à la seconde, puis elle augmente très lentement jusqu'à 12,8 kilo- mètres au centre de la Terre. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Hann a étudié la météorologie du Pérou d'après les observations faites en diverses stations. En ce qui concerne la marche diurne de la pression atmosphérique, il a noté la décroissance régulière de l'amplitude de l'onde de pression semi-diurne avec la hauteur. La température moyenne annuelle au sommet du Misti (5.852 mètres) est de — 7°,9,ce qui, par rapport à Arequipa, fait une diminution de température avec la hauteur de 0°,63 par 1400 mètres, nombre qui concorde bien avec ceux qu'on observe sous les tropiques. La marche diurne de la force du vent au sommet de Misti présente deux maxima et deux minima; une diminution de pression barométrique correspond à une augmentation de la force du vent. — M. J. Salpeter a reconnu que la teneur de l'atmosphère en induction du radium peut s'abaisser de 20 °/, au-dessous de la valeur qui corres- pond à l'équilibre radio-actif avec l'émanation, sous l'influence du champ terrestre. — M. C. Hillebrand communique ses recherches sur l1 réflexion diffuse par les sources de lumière étendues et montre que le remplacement d'une surface lumineuse moyenne par un point lumineux n’est pas complètement justifié au point de vue de la quantité de lumière diffuse réfléchie. — MM. S. Zeisel et M. Daniek : Transformation de l'alcool isobutylique en aldéhyde «-méthylglycérique. — MM. R. Wegscheider et E. Späth, en ajoutant les anhydrides d'acides organiques aux aldéhydes en présence d'H?S0#, ont obtenu les diéthers d’hydrates d'aldéhydes. Ils ont ainsi préparé les diacétates des aldéhydes propionique, Eb. 184°-185°, et isobutyrique, Eb. 189, les dibenzoates de l’acétaldéhyde, FE. 700-740, et du chloral, F. 639-650, etc. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. Th. Becker, P.Stein et Villeneuve ont déterminé les Diptères rapportés du sud de l'Arabie et de l'ile de Sokotra par divers explorateurs. ERRATUM. — En reproduisant le texte de Nicole Oresme que la Revue a publié en son n° du 15 novembre dernier (pp. 866 seqq.), j'ai commis une faute de lec- ture: j'ai constamment lu les mots isvel, isvelleté, isvellement, signifiant rapide, vitesse, vite, et je les ai rapprochés du mot français svelte; j'aurais dû lire lies mots isnel, isnelleté, isnellment, qui ont le même sens et rappellent le mot allemand Sechnell. Je remer- cie M, Raveau qui a bien voulu me signaler cette erreur. P. Dune. ErRarum. — Dans la Revue du 30 novembre, page 898, 2° colonne, dans le petit tableau, lire : étiquette bleue, étiquette violette, au lieu de : étincelle bleue, étincelle violette. Le Direcieur-Gérant : Louis OLIvIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XX DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES (DU 15 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1909) I. — CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Astronomie et Géodésie. Barzraun (Jules). — La réunion du Comité interna- tional permanent de la carte du ciel. . . . . . . Brester (A.). — A propos de l'impossibilité des érup- MORSESDISTES EN EN NE CRU CU DEvaxLaY (G.). -— La précision des observations as- tronomiques Moreux (Th.). — La variation des latitudes . . . . . — L'observation systématique des trainées météo- DORE BONNE ot NE TE —LPIametneruteMEereure Te LENS CN La forme du Soleil À la recherche de la planète transneptunieune. . . . lehuitième satellite de Jupiter -. 1. : 2. Absorption de la lumière stellaire dans l'espace . . . Nouveaux éléments de la comète de Halley L'état actuel des travaux du nivellement général de la RO RE EM EE Ce ES er Botanique et Agronomie. CuerGer (Pierre). — Le prix du blé dans divers pays HOT AUTRE NE CS CR Grapenwirz (Alfred). — L'échauflement spontané des feuilles végétales vivantes. . . . . . . . . . . . Lurz (L.). — Contribution à l'étude des céréales. Le blé, l'orge et le seigle à l'état sauvage. . . . . . Rousser (H.). — La sélection de la betterave indus- LAON SRE RE NE NE LOST Set 50 6 La diffusion des engrais salius dans la terre . . . . . ESC RnS IT AlEUTOD EE EN RE ER CNE de Une nouvelle plante potagère : L'Ansérine amarante. MINOR EEVÉSELAIOUECONTOZO RE ER ET Ne Relation entre la forme des feuilles et la consomma- DIONRAPTIUTNIENE le cet NN NC La résistance des graines de légumineuses aux tem- ÉFALUITESNELEVÉ GS eee M CE CT Les formations botaniques des maquis de la Corse. . Chimie. BecunoL (H.). — A propos de la filtration des solu- HONSeOLIO Al ES MES 7. TT ENT ENTRE CLerGer (Pierre). — L'industrie électro-chimique en SUIS SEEN UN ie alto CITE — Les industries chimiques en Italie. . . . . . . . DEmozay (E.). — L'analyse des aciers à l’aide des ATOS RS BTOC TE ROC IE ro Mn € GrRaDpenwirz (A.). — L'analyse des aciers à l’aide des ÉDINOC ILES EL ET. ce Ce Gen Group (Ch.). — Fabrication de la chaux sans installa- MONS PECIRIOR EPA ee ne lances cl Janet (P.). — Le rendement des procédés de fabrica- DondeNsichaux/aZ0LÉC ER UE LL. Cine Moxp {Ludwig}. — La volatilisation des métaux lourds par l'action du monoxyde de carbone et son EPDICIUONANATSEMNIEILE RER REVUE GÉNÉRLE DES SCIENCES, 1909. Perir (P.). — L'azote assimilable des moûts et des Dire RENE ER ES ES TE RE Rousser (H.). — A propos du service de la répression JeSÉTAUTES M EMEA ER er CRU LS Era — Curieuse propriélé des solutions cellulosiques . . SaporTA (A. de). — L'extracto-ænomètre et le disque extracto-ænométrique de M. Dujardin. . . . . . Visxox (Léo). — Une théorie de la teinture Les effets photographiques des métaux . . . . . . . L'action de l'émanation du radium sur l'eau. . . . . La nouvelle Table internationale des HUE Aus NÉ Dr Les ICE A re Traitement électrique des minerais titanifères . . . . L'action de l'émanation du radium sur les éléments duFErONper du Carbone MEN ONE Les variations de la valence des éléments avec le volume aux très hautes pressions . . . . . . . . Distinctions et solennités scientifiques. GRADENWITZ (A.). — Le LXXXe Congrès des Natura- listes et Médecins allemands. . : =... à Elections à l'Académie des Siences de Paris . 4, 101, 149, 293, Académie Royale des Sciences de Berlin. . . . . . . BureauFdesLonoitudes NM UN 0: Distinction à un savant francais. . . . . Hommages à M. Metchnikoff. . . . . .. Election à l'Académie royale de Belgique . . . . . . Le jubilé de Darwin à Cambridge . . . . . . . . . . L'inauguration du monument de Brouardel HOMME TEIFAVOP AUTO AEENA PEU EU ere EUR Les Médailles de la Société Royale de Londres. . . . Electricité industrielle. CLERGET (P.). — Les chemins de fer électriques en SUIS S ES eV M ee Core Esraunié (E.). — Le problème téléphonique actuel en HAN CEE ERREUR ETES GhADENwiTz (A.). — L'emploi de l'électricité pour le GONE AS MST RME EM EE Le a MarcHanp (H.). — Expériences sur un haut-fourneau électriquélen Suède rec ne MErcapier (E.). — Le problème téléphonique actuel CHAR COMENT UN RER UE Turpain (A.), — Le problème téléphonique en France. La télégraphie sans fil appliquée à la navigalion. . . L'action courant alternatit sur les lampes au tan- CS RER EE a ut co RO ee La distribution de l'énergie électrique à bord des na- CEE PRES AT RAR AE LE Le SRE 103 525 241 241 345 613 613 613 653 653 937 1630 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES ‘influence de la lumière du jour sur la portée des stations radio-télégraphiques . . Expériences relatives à un nouveau générateur d'os- cillations à haute fréquence. Enseignement, Universités et Sociétés. Cnasoseau-Napras (Mne L.). — L'Institut Pasteur de TOKYO REC EE NE EE CT TEE — La Carnegie Institution de Ww ashington . pe Turpain (Albert). — A propos d'une candidature au Collège de France. . . . . . - - . . . . So OU Ecole coloniale d'Agriculture de Tuuis. . . . - . Personnel universitaire SO NU. oo Ecole Polytechnique La Société de Chimie physique La Socièté de secours des Amis des Sciences . . . . Géographie et Colonisation. Causner (E.).— Le développement économique de la République Argentine. . . . . . . Cuerçer (Pierre). — Les récents progrès de la naviga- tion‘sur le"Rhin Supérieur : - : «+ - = + =. - — L'exode montagneux en France . . . . . . . . . — L'essor économique du Dahomey . . ReceLsrerGer (Gustave). — La Mission forestière Aug. Chevalier en Afrique occidentale EC — L'exploration du D' Sven Hedin au Tibet. . - — L'Expédition antarctique du lieutenant Shack- ou Der EUR CARRE oO 5 à Ve La culture du coton en Asie-Mineure . . . - . . L'Institut de Biologie agricole d'Amani (Afrique orien- tale allemande) . l La carte internationale du monde au millionième . . Géologie et Paléontologie. LEMOINE (Paul). — Les publications du Service gé0'o- gique de In 10 Chine EN EN EE it origine HÉCIORIQRE des tremblements de terre de Provence et d'Italie "Nu NN Rousser (H.). — Le Service des Mines en Indo-Chine. Mathématiques. La théorie des équations intégrales. . . . . . . 2 € La Société mathématique de Calcutta . . . . . . . . Mécanique et Génie civil. Cnagoseau (A... — Le voyage du Clermont . . : . . CLercer (Pierre). — L'état actuel de la batellerie en TAN CE EU NES PARU OUI CHERE TE A — L'industrie minérale et la production métallur- gique de la France en 1906 et 1907. . . . . — Les progrès de la circulation urbaine . . . . . . — L'état actuel des chemins de fer francais . . . . Les navires à propulsion électrique : A propos du vol des oiseaux . . . . . - . - - Une revision des lois fondamentales de la malière et JE LÉNERTIE RENE CIE ENT RENE LetransportiÜu pétrole CCD Le prochain Congrès de l'Association internationale pour l'essai desimatériauxe ts A SN AT Un appareil. à miroir pour mesurer les variations élastiques de longueur. . . . . . : . . a Exposition internationale de locomotion aérienne . . La transformation de l'énergie solaire en puissance MÉCADUNIE ER EC oral: eee Le Laboratoire d E:sais du Conservatoire national des ATtS et METIERS EN PP EEE Congrès international des Mines, de la Métallurgie, de la Mécanique et de la Géologie appliquées. . . . Météorologie et Physique du Globe. Devaxcay (G.). — Les marées de l'écorce terrestre. . Observations, en ballon libre, de la radio-activité atmosphérique . . . . . . . . . Le Service météorologique de l'Exposition aéronau- tique de Francfort. . . . . . 566 830 390 940 481 198 977 Nécrologie. Arraus (M). — Le Professeur Th. W. Engelmavnn. . . BAILLAUD ( eg — Simon Newcomb. . . . . . . CauLLiERy (M:). — Anton Dobhrn.. DENIRER (J-) UE TAHaMY- MN CEE HALLER (A.). — Georges Arth =" L 'Bouveault EE ER TEEN Lewourr (P.). — Julius lhomsen . . . Perir (P.). — Emile Christian Hansen . SÉRIKUX (P.). — Cesare Lombroso . . Weiss 0WalthertRitz 2 Ernest Besnien 57 eus PR PE NET Henride Parville”s%. (225 RO EN NMRENNERE Physique. AuseL (Edm. van). — Sur le sens des courants thermo- ÉLECITIQUESS NP NE EN EL ET RE BecunoLp (H.). — A propos de la filtration des solu- tions icolloidales LP RE ME CITE GRaDEenwirz (A.). — La première solution réelle du problèmerdena télEVisION CNRC ER Sur les gaz formés dans les tubes à décharge . . L'actinium C, nouveau produit éphémère de l'acti- DIU ER à 5 Pen ve Ceeute 0 le NC CURE EE La charge spécifique des ions émis par les corps chautés ME STE ET TE EE Recherches diélectriques sur le mica LC La contraction de volume et le pouvoir de réfraction. Unetbalance voltaméirique RME Ce Résistances photo-électriques pour la transmission télégraphique des photographies et documents PLADHIQUES ENS ER E Le problème de la conservation de la malière Les rayonnements métalliques ; TRS Aimants permanents en cuivre sensiblement pur ve La théorie des serres Les chaleurs spécifiques des DUO EU es La vitesse de propagation des rayons acoustiques à courte NlonpueuTe don de: CCR La décharge d électricité à partir du charbon incan- descent VAN ere ESA Les rayonnements des huiles siccatives L'unification des unités lumineuses . . . . . . . . . Les propriétés électriques et nptiques du sélénium DAS EALIQUE AMEN TE EE EEE Une nouvelle méthode de recherche de la chlorophylle, avec application possible aux corps du système planétaire La Thermodynamique des mélanges de solutions hi- naires\et NOMOPÉNES EN NE RE Les limites de sensibilité des piles thermo électriques. L'amortissement des ondes da mereure . . . . . . . La conductibilité spontanée de la vapeur non lumi- meuse de SOdItUNN E N E CETICE Comité international des Tables annuelles physics chimiques RE L'échelle des longueurs d'onde . . . . . . . . . . . Photographie d° éclairs ou d’étincelles . . . . . : . . Les vitesses initiales des électrons énendres par la lumière ultra-violette . . . . . . . . . La radio-activité de la matière ordinaire Une expérience d'électricité Sciences médicales. CHER (Louise). — L'Institut Pasteur de TOKYO TE Eee EN ER CU IC PER GraDexwirZ (Alf.). — Le rappel à la vie, en cas de mort apparente, à l'aide des courants électriques. Ourvier (Louis). — L'abstention des médecins rou- mains au Congrès international de Médecine de Budapest LME PE ER ERE Les dangers du ferrosilicium . . . : . . . + . : . . La stérilisation de l'eau et des liquides par les rayons ultra-violets CM La distribution de la longévité en Angleterre et dans lePays de Galles EN NN OR Un nouveau procédé de radiothérapie . . . . . . . . Rachianesthésie générale . . . . ... . . . . . : . . Les loges de concierge et les chambres de domestiques au point de vue de l'hygiène . . : . . - . . - Transmission expérimentale de la paralysie infan- tile au singe. . . TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1031 Zoologi n 1 ‘ ie. Appareil thyroïdien et sels de calcinm : 833 LEE CC CTP RER EE De la fréquence des Apae cardiaques chez la « souris S63 DEMIKER (J.). — La déconverte de deux squelettes L'effet de la lumière sur les matières colorantes ‘du néanderthaloides dans le bassin de la DOSEBOsE 56 sang et les corpuscules rouges NO ER os ve GHE) — Le plus vieil ossement humain. pab La fourmi rouge de Ceylan . 940 La protection du castor du Rhône. 152 | Le VIlk Congrès nets de Zoologie. . . : . . 980 Sur le centre de la polypnée. . . 203 | Le mosquero 980 L'alimentation du paysan finlandais . 20% RACE e DER A NL CS L'examen, de Late du galvanomètre à corde, ‘des cou- rants du nerf vague. R7 LS AU RS : AE Un troisième ton du cœur. 391 Sciences diverses. Sur le diabète pancréatique. 437 Les Jardins zoologiques à l'étranger. 481 CLERGET (P.). — Le mouvement de la popalsgon fran- La perception des signaux de chemins de fer. , 529 caise en 1908 . . 616 La production du suc PARCÉARARE sous l'influence de Souscription internationale pour l'érection d'un monu- la sécrétine. À RENE 129 MONA SJ NaTE y NN VOS ER URENEr 57 II. — ARTICLES ORIGINAUX Astronomie, Météorologie Rue (A.). — La prévention de la cécité en Re et Physique du Globe. Wicknau (Louis). — L'action 2 thérapeutique du radium : c 5 02 BRESTER (A.). — L' hypothèse des éruptions solaires. 495 SRs OLCENCEE Brunues (Bernard). — L'évolution des dépressions ba- A AUS et et les règles SE prévision de M. Guil- Géographie et Colonisation. DunEeu (P.). — Un précurseur francais de Copernic : Nicole Oresme TES fe 866 | CLerGer (Pierre). — La navigabilité du Rhône. . . . 341 Moreux (Abbé Th.). — La elimatologie de la Pianète a Ozrvier (Louis). — La récente croisière de la Revue Mars . 68 générale des Sciences en Turquie, Roumanie, NorpMaNx (Ch.). — - Les idées nouv elles sur les vitesses Crimée et Bulgarie (septembre-octobre 1909). 985 relatives des diverses vibrations lumineuses dans l'éther intersidéral 350 SIEBERG (Aug). — L'inscription ‘instrumentale des Géologie, Minéralogie et Paléontologie. séismes et la Physique du Globe. 1'e parlie : L'en- registrement des tremblements de terre . = 58 — 2e “partie : Les causes des tremblements de terre . 117 BErrranp (Léon). — Le rôle des nappes de charriage TeISSERENC LE Borr (L.) — L'étude de la Météorologie dans la structure des Alpes occidentales et orien- intertropicale par les sondages aériens . . . . . 834 tales . Clone Ut) GEIKIE (Sir Archibald). = Darwin géologue : 730 GLANGEAUD (Ph.). — Albert Gaudry” et l'évolution du Botanique el Agronomie. monde animal. . . . . . 22h Jouroy (Général). — La loi de position en Géologie … 62: Maicre (E.). — Le problème du FE EEE et la Lacroix (A.). — L'éruption de l'Etna en Avril-Mai 1908. théorie des statolithes. . . . 215 17° parte : Les phénomènes éruptifs. 298 ZoLrA (D.). — Revue annuelle d'Agronomie 631 — 2° partie : Les produits de l'éruption . . . 363 REviz (J.). — Revue annuelle de Géologie. 1re partie. 414 On de DANS O Di Oo D Chimie. BÉgaAL (A.). — L'œuvre de la Chimie contre l'œuvre Mathématiques. de la Nature . : oo Donx-Héxaurr (Octave). — Oxydases et diastases . + 948 | Borer (Emile). — La théorie des ensembles et les pro- Escarp (Jean). — Les alliages industriels du chrome . 662 grès récents de la théorie des fonctions , . . . . 315 Gaugerr (P.). — Les recherches récentes de M. van Ponxcaré (H.). — Sully-Prudhomme mathématicien : 657 tHoff sur les dépôts océaniques. . . 814 GranenwirZ (Alf). — La EN AN MOE artificielle du dia- mant. . 701 : < th EE HuGOuNENQ (Lo — = L'hydrolyse fluorhydrique et la Mécanique et Génie civil. constitution des matières albuminoïdes . . 839 LaugcixG (E.). — Revue annuelle de Chimie physiolo- CuxNINGHAM (James L. — L'embarquement du charbon giqne. 1"° partie : Les principes immédiats orga- ant'imer. Let 26 niques. . . . : . - + 128 | Houssay (Frédéric). — ‘ Carènes et poissons. Stabilisa_ — 2° partie : Digestion, sang, échanges nutritifs Se LTD tion par les nageoires. 617 Maine (A). — Rèvue annuelle de Chimie minérale. 548 — Nouvelles expériences sur la forme et la stabilité MarcuanD (I.). — Les expériences récentes sur le des poissons . ; 943 traitement électro-thermique des minerais de fer. 443 | Leconnu He = Revue de Mécanique appliquée ; 30 MoreL (A.). — L'hydrolyse fluorhydrique et la consti- | Picarp (Emile) — Danpors sur le prix Osiris à tution des matières albuminoïides. . . 539 décerner en 1909. . . 570 Tammanx (G.). — Recherches métallographiques effec- Rexarn (Commandant Paul). — La résistance de l'air tuées à l'Institut de Chimie minérale de Güt- et les expériences de M. G. Eiffel . . . . - . .. 18 DUR PETER A ET : c- eA UT Chirurgie, Médecine, Hygiène. Nécrologie. ’ LÉTIENNE (A.). — Revue annuelle de Médecine . 367 | GLAxGEauD (Ph.). — Albert Gaury et l'évolution cu Roupaub (E.). — Le rôle des Glossines dans la trans- monde La ES pe 245 mission des trypanosomiases , Ÿ, uses -+ © 9595 | JanEn (Paul). d14 — La vie et les œuvres ‘de E. Mascart. : TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1032 Physiologie. Zoologie et Anatomie. , 15e RE Bouvier (E.-L.). — Les Crustacés marins comestibles. >oxnier (Pierre). — Les idées actuelles sur l'audition. 324 | Cauzrerx (M.). — Revue annuelle de Zoologie. 4e par- Freperico (Léon). — Revue annuelle de Physiologie. tie : Zoologie générale . . . . . PE s AN CRE 1x partie : Généralités NE TUS — 92e partie : Zoologie Spéciale cher AL ERE — 2e parie : Gene respiration, systèmes ner- . Se CE L.). — Le peu des places vides dans veuxyetmusculaire MSN CNT Ce 49 a Nature et l'origine des adaptations . . . . . . Gran (Pierre). — L'Electrisation de contact en Bio- ne Gravier (Ch.). — Des trécentes Ra océanogra- CCE CCS SD 00. DC ORAN O LE TS LS J4 PhIqQueS ten NOT rc EC TR EE No (1.-P.). — La loi de Magendie. Le temps physio- Fe GUIEYSSE -PELLISSIER (A). — Les différenuciations pro- pu LOBIQUEE RENÉE 7 otre RC NE toplasmiques et l’activité cellulaire. . . . . . . . NE (Pi = Re du sang . . - . . . . . 594 | Houssax (Frédéric). — Carènes et poissons. Stabili- ROMME (R.). — L'anaphylaxie . . . . . . . - Les D sation parles nageoires Me CC CEE Sovay (Ernest). — Physico-Chimie et Psychologie. 982 — Nouvelles expériences sur la ferme et la stabilité HES POISSONS EN Ne Et : piCRee (E.). — Revue annuelle d'Anatomie . . . . A Lo1sEL (Gustave). — Revue annuelle d'Embryologie. . Physique. Mesxiz (F.). æ Revue annuelle de Zoologie. 4'€ par- tie : "Zoologie générale." : SRE GLaupe (G.). — L'oxygène industriel . RS EU 923 — 2e partie : Zoologie spéciale. . . . . . . Me co Corron (A) — La publication des œuvres de Pierre Makiewicz (Romuald). — L'instinct de déguisement Cüries ee SON RE A An Re 2e 438 etle choix des couleurs chez les Crustacés . . . . Jawer (Paul). — La vie et les œuvres de E. Mascart. 515 RAPIDES — La biologie et l'histoire des Monches Lamorre (Marcel). — Expériences aux basses tempé- SC R REC NE ES) ace Ne EEE AE D AO ES SR VAUT US RTS — Le rôle des Glossines dans Ja transmission des — Thermométrie et calorimétrie aux températures HS PANOSOMIASES ES CE ITÉSIDASSES PME TE TT CO To os UE) Lorentz (H.-A.) — Le partage de l'énergie entre la Revues annuelles. matière pondérable et l’étner RENE Ur 1% è Maronanp (H.) — Les progrès récents de la télé- CAULLERY (1 )— Revue annuelle de Zoologie . . 845, graphie et de la téléphonie sans fil. . . . . . CNT donnee (Léon). — Revue annuelle de Physiologie. Marcus (L.). — Le premier Congrès international du 1re partie : Généralités . . . . . « - «+: osy «il 206 — 9e partie : Circulation, respiration, systèmes ner- RES NA RE Ur CiR ue RE LE os NP LE TI ee veuxlet MUSCUIAITE APS SEUE NE EE RCRE Maruras (E.). — Recherches sur le magnétisme ter- Laçuesse (E.). — Revue annuelle d'Anatomie. . . . - resire. . . . . FOOT NON SRE MOMENT AU © 482 | Lamine (E.) — Revue annuelle de Chimie physio- Pécneux (H.). — Résistivité et thermo-électricité des logique. 1re partie : Les principes immédiats orga- nickels et de leurs alliages usuels. Applications niques LU FN PEER AR É: industrielles CON. 0 FUMER HPLC ID DE OT PAONS NE ETES 111 — 2e partie : Diges'ion, sang, échanges nutritifs . . Ritz (W.). — Les spectres de lignes et la constitution É Leconxu (L.). — Revue de Mécanique appliquée . . . des atomes . . . . . MoN Eu To OU o A7 | Lérexne (A.). — Revue annuelle de Médecine . . . . Loisez (G.). — Revue aonuelle d'Embryologie . . . . Maine (A.). — Revue annuelle de Chimie minérale . Sciences diverses. MEsniz (M.). — Revue annuelle de Zoologie . . . S45, Réviz (J.). — Revue annuelle de Géologie. 1re partie . ! 1 = 9eiparties Mc see NO PROC IENIPRCRSE Corrox (A.). — Les progrès de l'Esperanto. . . 223 | Zorca (D.). — Revue annuel'e d'Agronomie . . - . . III. — BIBLIOGRAPHIE 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES Revuonr (Arnold) — Logique et Mathématiques. Mathématiques. Annéman (R. d’). — Exercices et leçons d'Analyse. . . — L'équation de Fredholm et les problèmes de Di- richlet et de Neumann. . . . . . - . . . . . . . S les groupes de matrices Autounxe (Léon) — Sur linéaires non invertibles . . . . . . . . . . . . Baume (René). — Lecons sur les Théories générales dell ADAlYSCRERRE Ce PC CRUE Bonez (Emile). — Eléments de la Théorie des Proba- 1 MN à 5 NM Po Eee Bournoux (Pierre). — Leçons sur les fonctions défi- nies par les équations différentielles du premier Let del AMAR = 207: DV OR NOM ECr PO S JO Cawror (Moritz). — Lectures sur l'histoire des Mathé- MAHAUERS te Ce Eric EU ei: NU Are et aux assurances sur la vie. . Fanny (E.). — Traité de Mathématiques générales . . Hexsez (K.). — Théorie des nombres algébriques Huyces (Christian). — OEuvres complètes. . . . . . Laïsanr (C.-A.). — Cours d'Arithmétique Lerguvre (L.-Charles), — Notions fondamentales de la Théorie des Probabilités MuzLer (Félix). — Guide à travers mathématique l'Eearix (Elie), — Cours d'Arithmétique. . . . . . . . ‘travers la littérature 462 187 961 139 90 Essai historique et crilique sur le nombre infini. Risser (René). — Etude sur l'établissement des tables de mortalité de population, mortalité profession- nelle, mortalité dans le cas d'invalidité . . . . . Rouse Bazz (W.) — Récréations mathématiques et problèmes des temps anciens et modernes. . . . ScuiLinG (Fréd.). — La photogrammétrie comme application de la Géométrie descriptive . . . . . THoMAE (J.). — Vorlesungen über bestimmte Integrale und die Fourierschen Reïhen . . . . . . . . . . Zorernt (L.). — Cours d'Algèbre. . . . . . . . . . . Astronomie, Géodésie et Météorologie. Axpoyer (H.) — Cours d'Astronomie. Astronomie pratique Axpré (Ch.). — Les planètes et leur origine Benruaur (H.-B.). — Les erreurs de la carte de France. Topographie d'exploration. . . . . . . . . . . . Errrez (G.). — Comparaisons graphiques des valeurs mensuelles, saisonnières et annuelles des princi- paux éléments météorologiques dans diverses sta- tions francaises pour l'année 1905. . . . . . . . FLammanioN (Camille). — La p'añète Mars et ses con- ditions d'habitabilité Hace (G. Ellery). — The stuldy of stel'ar Evolution. An account of some recent methods of astro-phy- sical research. . . TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1033 Hunt (H.-A.). — The climate and meteorology of Aus- tralia. Rainfall Map of the Commonwealth of Australia . . LEBEUr (A.). — 20e Bulletin “curonometrique de l'Ob- servatoire national astronomique et météorolo- gique de Besancon . Te MacxE (H.). — Die atmosphi ärische Elektrizilät À Messerscawrrr (J.-B.). — La détermination de la pesan- teur à la surface de la Terre Perrer (E.). — Navigation. (Instruments, Observa- tions, Calculs.) . SCHWEIDLER (E. von). ie ‘atmosphärische Elek - trizität . . NE TELE io Da CV OU Mécanique générale et Mécanique appliquée. ANDRADE (J.). — Chronométrie . . Degesson (C.). — Le chaullage des ‘habitatious. Etude théorique et pratique des procédés et appareils employés pour le chauffage des édifices, des mai- sons et des appartements . FarGue (L.). — La forme du lit des rivicres à ‘fond mobile . Che ÊX Dose Feyrey (Francois). — Les oiseaux artificiels. (L idée aérienne. Aviation.). . Joucuer (E.). — Lectures de Mécanique. La Mécanique enseignée par les auteurs originaux. 2 partie : L'organisation de la Mécanique . KeRsTEN (C.). La Construction en ‘béton armé. Guide théorique et pratique. Application à la con- struction en élévation et en sous-sol . . . : Paroque (J.). — Artillerie de campagne See Pranron pe Moxpésir (L.). — Fortification cuirassée. RATEL (C.). — Préparation mécanique des minerais. RauseNsEnGER (F.). — Théorie des canons à recul sur l'affût. Ets RENARD (Commandant Paul). 1e Aéronautique. Résaz (Jean). — Cours de Ponts métalliques SauvaGe (Kd.). — La machiue locomotive . Sornerx (J.-W.). — Les turbines à vapeur marines. Taris (Etienne). — L'automobile et les armées mo- dernes . . TRES RE Eu 0 D CU 2° SCIENCES PHYSIQUES Physique. AcuarD (F.) — Génératrices électriques à courant continu. . : BAILLEHACHE (Comte de). — Unités ‘électriques HET — Les nouveaux modes d'Eclairage BERTHIER (A.). arc, incandescence, vapeur de mer- Aectrique: È cute Bovuasse (H.). — : Cours de Physique, t. IV : “Optique. Etude des instruments . . - Brunues (Bernard). — La dégradation de l'énergie CAMPBELL qe Robert). Modern Electrical Theory . : Cawozsox (D. “0.1. — Traité de Physique. Dilfraction. Double réfraction et polarisation de la lumière. CLauve (Georges). — Air liquide. Oxysène. Azote Dune (P.). — Essai sur la notiou de Théorie PISE de Platon à Galilée . : Ewixc (J.-A.). — The mechanical produetion ‘of Cold. Hogart (H.-M.). — Génératrices électriques à courant continu. . . Jaxer (Paul). — — ravaux du Laboratoire central d'Elec- tricité. Recherches sur les Unités électriques fon- damentales. . . JEANS (J.-H.). — The mathematical Theory of Electri- city and cie : LOUGUININE (W.\. — Méthoiles de Calorimétrie usitées au Laboratoire thermique de l'Université de Moscou . MacLauriN (R.-C. i — The Theory of Light. A lreatise on physical Optics - MarIssE (Georges). — Le principe ‘de la conservation de l’assise et ses applications . Narauts (F.. — La régularisation automatique des générateurs électriques . . RiGur (Aug.). — La matière radiante et les ray ons ma- CUCUIUUESÉ RE ENT AS Ruamer (Ernst). — La téléphonie sans fil SaLer (P.). — Spectroscopie astronomique . 820 926 90 511 11 643 187 S20 329 187 371 228 330 965 330 643 511 Sarront (Giuseppe).— Technique pratique des courants alternatifs. 1° Exposé élémentaire et pratique des __ phénomènes du courant alternatif. . . . Scnukarew (A.). — Méthodes de Calorimétrie usitées au Laboratoire thermique de l'Université de NTOSCOU EN AS NE Ce Turrain (Albert). — La télégraphie sans fil et les appli- cations pratiques des ondes électriques Vax per WaaLs (J.-D.). — Cours de Thermodyn: imique appliquée à l'équilibre des SAR à phases gazeuse et liquide - Viwecer (H.). — Recueil de problé mes avec solutions sur l'électricité et ses applications pratiques. VIGNERON (Eugène). — Elecirostatique . . o VorGt ({W.). — Magneto und Elektro-Optik . : WEnniGkE (K.). — Les isolants en Electrotec hnique ZENNECK (J.). — Les oscillations électromagné sques et la télégraphie sans fil . HE CRC Chimie. ANDRÉ ABUS LATE): — Chimie agricole, t. I : Chimie végé- tale BARRAL (E.). — Précis d' Analyse chimique biologique, nee et clinique. Bavzuss (W.-M.). — The nalure of Enzyme action . BELTZER (K.). — La Chimie industrielle moderne, t. I: ludustrie chimique minérale. 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LAdECeMPre MORE 49 19 = NE LS 0 49 26 — A ee. à 95 DSjanvie MODE. © 96 16 — 2: 300 0 TER 145 23 — CN he de 146 30 — TOR CRT le 192 ( février M RE ee. 193 13 — NE ne Ce Dole le 235 Séances des CARRE LS LS AA Séances des Ne 1e Séances des Séances des Séances des | OO Séances des M OIOIMEIERINIAIN 20 février 4909 LEE PRE 235 21 — M 2 < 287 6 mars — AR EAN RE 288 13 — NT 336 20 _ ei, EST SS ÉOAEE 336 27 — = RP dE MEN 383 3 avril — Ant MEL 383 2% = À) KE MANS REIPOMES 429 4er mai —..; NORMES 469 8 — Æ EN EN EREREE 469 15 AO 4 HN 29 -- = PNR er RE 518 29 = — DE ONE 559 5 juin SR A Le 2 560 12 = NUL 5 CONTRE 606 19 — Le 507 26 — 1.2 1 LEA; MAURENERERE 619 3 juillet LL. 0 649 10 — RE MC CURE 682 17 — cr 721 24 — —) LR CRT 156 31 — RE - 193 23: octobre, Me AMENER NE 895 30 — — : 932 6* novembre .— . : LENS 933 13 — A. € 969 20 — =. nie 5 ÉREUPNE 969 21 — — 40 NE 1023 4Mdécembre, — 1e: ARTE 102% RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX 1er décembre 1908 : : . . . … 96 22 — a 96 D'MtévrIer. 21909 M NES 288 2 mars = rude LANMRUDIEPRARE 331 30 — CT ER 5 D 45 4 mai 4 CLOSE 518 8 juin = "sa ENTRE 607 DOTE NES | 121 21 — — jyve VC 194 9: novembre:t= "ue 970 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BUCAREST 1f#novembre 19082 SRE 50 3 décembre —, 7 L-U-N PRE 50 16 — = sd os RTS 193 28 mvier 1900 RER 236 al février EE . 336 12 mai CN 0 EE 608 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE 15" décembre A0 EE dl 19NANVIer AIDER 288 16" ÉÉVTLEE IT ON MN CENT 337 16 mars =, LH 384 20 avril M en 470 18 mai = 24 UNE 560 15 juin = 1 Le LOT 650 42 juillet Us MNT ERERE TE 751 16% novembre M/S 102% RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY 8-décembre 4908. RE 146 48 janvier AIDER 235 16 4 février == 0:91 MIRE 288 30 mars ES 410 18 mai M D 608 15 juin EL MANETTES 650 12 JUUIGÉ PNR EC TETE 194 Société française de Physique. ASSdécembre MIDS SRE 97 15 anvier 00 ER 193 5 TÉVLIEr. — AP NERRE 236 19 — 4 AVECS TERRE 289 5 mars A Pc 337 19 — LR ME AO 384 2 avril NON ARS 470 7| mai NU, SERRE 518 21 — CRT ES CN 519 4 juin — 608 2 juillet TE M LE 682 19 CnovempPre MERE 1024 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Société chimique de Paris. Séances des 11 décembre 1908 . — 8 janvier 1909 . Le 29 LS = — 12 février — ee 26 Re = — 12 mars — #f 26 ee) 3 — 2 avril = = 23 = _ — 14% mai — = 2$ 2 _ — 11 juin — 2 95 as — 9 joillet — = 23 Z= Æ — 12 novembre — = 26 Æ = Société Royale de Londres. Séances des 5 novembre 1908 . 2. 12 se Æ eu 19 —Æ ie ne 26 BE = = 30 Æ = — 10 décembre — .. — 14 janvier 1909 . d: 21 22 = ua 28 = fe, _ 4 février — — 11 = _ 4 1S = = As 23 Re = = 4 Inars — = 11 pe” LS LE 18 Le MS 2" 95 = = — 22 avril = =! 99 22 a — 6 mai — ss 13 DE 20 Le 20 = _— — 27 — — RL = 10 juin — 159) — 17 — — rare — 24 — NE PS se ES Comuwuuications recues pendant les vacances. 828, 896, AIO 4 novembre IL Séances des Société de Physique de Londres. Séances des 22 janvier 1909 . — 10 février — = — 26 — — — 12 mars — — 23 avril — — 14 mai — = de ue = = 95 ET E — 22 octobre — — 12 novembre — = 96 Ée _ Société de Chimie de Londres. Séances des 3 décembre 1908 . — 17 — — — 21 janvier 1909 . — 4 février — — 18 — € — 4 mars — = 18 25 Be = 95 = = = 4® avril —— — 5 mai — Fer 20 = D _ 3 juin ER T d KR 22 HE c D à de Communications recues pendant les vacances. . 933 Séance des 21 octobre 1909 . 972 — 4 novembre — 973 — 18 — —— 1026 Société anglaise de Chimie industrielle. SECTION DE BIRMINGHAM Séances des 17 décembre 1908 . MR RE ET — LOLTENTICL MAIDEN ER SN 67 — 11 mars — .. 562 — 18 — — 652 — fer avril — 159 SECTION CANADIENNE Séances des 49 novembre 1908 . . . . . . . . 497 — 220janvien AIR EN RS CES — 25 février — : EC AT SECTION D'ÉCOSSE Séances des 8 décembre 1908 . 197 — 16 février 1909 . 381 — 2 mars — 47% — 6 avril — 159 SECTION DE LIVERPOOL Séances des 13 janvier 1909 . 473 — 10 mars — 562 — 21 avril — 896 SECTION DE LONDRES Séances des 9 novembre 1908 . 147 — 1 décembre — . 197 — 4 janvier 1909 291 — 4er février — È 291 — Jer mars — x714, 562 — 5 avril — RATER DA — 3 mai — 614, 159, 973 — 7 juin — LÉREE 159 SECTION DE MANCHESTER Séances des 8 janvier 1909 . 294 _ 5 février — 387 — 7 mai — 159 SECTION DE NEWCASTLE Séances des 10 décembre 1908 . 198 — 11m févrien AIUI 387 SECTION DE NEW-YORK Séances des 22 janvier 1909 . < 474 — 19 février. — 2. in ee STATE — 19 mars Re a — 23 avril — 652 Q — 21 mai — 196 SECTION DE NOTTINGHAM Séances des 16 décembre 190S . 198 — 28 avril 1969 . 611 SECTION DE LA NOUVELLE-ANGLETERRE Séance du 8 janvier 1909 . 291 SECTION DE SYDNEY Séances des 44 octobre 1908 . 239 — 11 novembre — . 239 — 12 mai 1909 . 196 — 14 juillet _— 896 SECTION DU YORKSHIRE Séances des 9 novembre 1908 . 147 — 14 décembre — .. 198 — 18 janvier 1909 . 387 — 22 février. — 474 — 22 mars — 474 Académie des Sciences de Berlin. Séances des 22 octobre 1908 . 474 — 5 novembre — 475 — 12 — — 475 1038 Séances des Séances des Mémoires TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 19Mmovembre HOUR 415 26 — EEE GE 2 Ke es 9 EE 3 déceMmEreM ET. EN MNNTNE 475 10 — PEL SCT LR 415 11 —_ = Le rs Le Den 475 MAI ANVIET MOI ERP ENERRES" 475 1% — A LE ent DO 476 21 — SVM IPRE 476 % févricr ST PO Net ane LE 522 18 — — 522 4 mars Ed RENTE 523 18 — AO or DUREE 523 25 — — 523 Aer avril M IRENTIAENE 523 22 — — 562 29 — RE ee Loc lente 563 6 mai — 722 27 — RO ES EL 722 10 juin PER VERRE 122 17 — ST AE RE AE 123 8 juillet SR Co en 123 15 — ON OI DR CERE 123 22 — te DT 973 29 _— — 974 21 octubre — 974 Société allemande de Physique. 5 novembre 1908 . . 51 20 — = RE RU Ne EE) de D2 18 décembre... ee. 99 SAAJADVIE MIO EE EE 240 22 — SRE ATP REORE 341 19 février — 387 5 mars ol EN 431 19 — RC SON EE EC Re 5923 3 avril — 524 30 — _ 5e3 14 mai — 723 28 — un PR TUE LE Re RE 124, 974 recus pendant les vacances . 975, 1027 Académie des Sciences de Vienne. Séances des 29 octobre 1908 . . . 100 — 12 novembre — 100 el 19 En = 100 — SORTÉCEMATE ME BE ele 100 — 10 — — 100, 147 — 17 — M LD OS 147 Séances des AMejanvier LIDIL RER _— 14 — NOR CAN — 21 _— RE ER NS «0 _ £°, " AÉVriIe M=NNT ES — il — rs eee — 18 — EE id à — 4 mars M do ©: — Al _ TS REC _— 18 — RAS OC — 29 avril = AS RENTE — 6 mai ES 0 à — 13 — M — 21 — RTS 2 — 11 juin dir) HEC — 18 — = ls LEE — 2% — =, + CRTC = 4er JUNE RARE — 8 — — {4 NES — A4" 0oct0bre SON — 21 _ ne — 4 novembre — . . . =... 11e, Académie des Sciences d'Amsterdam. Séances des 31 "octobre AIS MERE mL — 28Mnmoyembre MERE RE — 2% "décembre "#0 tr — 02 janvier MODEMS — 27 février #7 VC NOR — 27 mars NET RER — 23 avril Re — 20 mai = TS EME TI — 26 juin Æ : ‘5 SÉRIE = 2HMSEDICMPNE SEE Académie Royale des Lincei. Séances de janvier 1909 février Académie royale des Sciences et des Lettres de Danemark. Mémoires présentés en 1909 . . . . 936 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XX DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES * A ABsORPTION. — Sur l'absorption sélective des corps DURS 50e NES TA ES MANTEAU ACADÉMIE. — Election à l'Académie des Sciences de Paris . . 2-0150101440 0984 2298520: Acwes. — Contribution à l'étude des dérivés alkylo- xylés des alcools, des acides et des éthers gras. Aciers. — L'analyse des aciers à l'aide des étincelles. 655, Acmnium. — L'actinium C, nouveau produit éphémère de l’actinium . ADAPTATION. — Le peuplement des places vides dans la Nature et l'origine des adaptations . . ADHÉSION. — Sur la pression d'adhésion (Haftdruck) . AÉROPLANE. — Stabilité transversale AR aéroplane au cours de ses girations . . . ArriQue. — La Mission forestière Aug. Afrique occidentale . . . — L'Afrique occidentale fruncaise. Action politique. Action économique. Action sociale . . . . — Le riz dans l'Afrique orientale allemande. — Magie et religion dans l'Afrique du Nord (La Société musulmane du Maghrib). AGENDAS. — Agendas pour 1909 ( Chimie, Electricité, Mé- canique, Conslruction, Mines et Métallurgie, etc.). AGENTS. — Les agents physiques usuels . . . AGRANDISSEMENT. Les meilleures conditions pour l'agrandissement photographique de RO QRIEL solides . . . AcroxouE — Revue annuelle d' Agronomie M2 £ Amants. — Sur le facteur d'auto- démagnétisation des aimants en forme de barreau. . . — Aimants permanents en cuivre sensiblement pur. Arr. — L'Air (Effets de son impurelé sur la santé) . . — La pAisiance de l'air, et les récentes M DÉTIENEeS de M. Eiffel à / — Airdiquiée. Uxygène. Azote. . . — Sur les différences entre l'état de l'air de montagne et celui de l'atmosphère libre . . ALBUMINOIDES. La production, sous l'action de la lumière, d'aldéhyde formique dans les corps albu- mincides — L'hydrolyse fluorhydrique et la constitution des malières albuminoïides . . AucaLorves. — Recherches sur la cinchonamine et certains autres alcaloïdes rares . . ALcoo. — Contribution à l'étude des dérivés alkyl- oxylés des alcools, des acides et des éthers gras. ALDÉHYDE. — L'aldéhyde acétique dans le vin? son origine et ses effets . . . — La ‘production, sous l'action de la lumière, ‘d’ aldé- hyde formique dans les corps albuminoïdes . ‘Chevalier en ALEURONE. — Les grains d'aleuroue ALGÈBRE. — Cours d’ Algèbre . . . ActmenraTroN. — L'alimentation du pay san finlandais. — L'alimentation et les régimes chez l'homme sain (GO ET OP na RS NP ET nc ALIMENTS. — Le régime alimentaire des malades. Con- sidérations pratiques sur les aliments et les boissons HÉNRER EI et sur l'hygiène de l'alimen- tation DRE +5 OP IRE OC 190 ‘ Les chiffres gras reportent aux articles originaux. ALLrAGES. — Les alliages industriels de Chrome . . . Arves. — Le rôle des nappes de charriage dans la structure des Alpes occidentales et orientales . AMALGAMES. — Les amalgames de cadmium et la pile normale de Weston. Auanr. — L'Institut de Biologie agricole ‘d'Amani (Afrique orientale allemande) . . Axonrissemenrs. — Nouvelle méthode pour déterminer les amortissements à l'aide des vibrations élec- triques non amorties : LT ROUE — L'amortissement des ondes du mercure . ANALYSE MATHÉMATIQUE. Lecons sur les générales de l° Analyse. ds — Exercices et lecons d’ Analyse (Quadratures. Equa- tions différentielles. Equations intégrales de M. Fredholm et de M. Volterra. Equations aux dérivées partielles du second ordre). . . ANALYSE CHIMIQUE. — Traité complet d'Analyse ‘chi- mique appliquée aux essais industriels. T. 1, 2° fas- GeuESe EE Me oc Le L4g T. I, 3e fase. Métaux . . — Précis d'Analyse chimique biologique, gique et clinique . . : — Cours d'Analyse quantitative : AxaenyLAxIE. — L'anaphylaxie. ANNEAUx. — Les anneaux de Nobili, les photographies colorées et les phénomènes de Hall dans les élec- théories patholo- trolytes. ANSéRNE. — Une nouvelle plante potagère: : l'Ansérine amarante. AxrmoroLowte. — Contribution à l'anthropologie ‘du Danemark APPAREILS. — Appareils de sauv etage à à oxygè ne liquide. Arc. — La rotation de l'arc électrique dans un ARE magnétique . d - ARITHMÉTIQUE. — Cours d' Arithmétique. à Armées. — L'Automobile et les Armées modernes Arkana. — Essai sur la tectonique de la chaine de l'Arrabida. . . ... à RS A EE Anniérés. — Les arriérés scolaires. . . ARTÉRIO-SCLÉROSE. — Artério-sclérose et Athéromasie. ARTiLLERIE. — La lutte d'artillerie navale et les brAIee, tiles chargés en explosif. - — Artillerie de campagne . me ASPuaLÈNE. — Le pansement à l'asphalène Le ASSIMILATION. — Essai sur l'assimilation photochloro- phyllienne du carbone Assise, — Le principe de la conservation de l’assise et ses applications. ASrRoNoMIE. — Cours d'Astronomie. ‘Astronomie pra- tique . : 5 ATHÉROMAS:E. — Artério-scléruse et Athéromasie . - Armospnère. — La couche isotherme de l'atmosphère et la radiation atmosphérique . ; AuprrIoN. — Les idées actuelles sur l'audition — L'audition morbide . . . Ausrraute. — The climate and meteorology of Aus- tralia. Rainfall map of the Commonwealth of Ars- tralia. . NA Pet ay tien) SU er ee MN D AUTOMOBILE, — L'automobile et les armées modernes. AUTRICHE. — Autriche et Italie. . ELLE PETER AvrArTION. — Les oiseaux artificiels (L'idée aérienne, Aviation). AzoTE. — L'azote assimilable des moûts et ‘des bières. 662 153 933 252 1040 BACILLES. \clion des bacilles acido-résistants sur 43 glucosides . — Les réactions électriques ‘de certaines bactéries appliquées à la recherche du bacille tuberculeux dans l'urine au moyen d'un courant électrique. BacréRIES. — Quelques effets des bactéries fixatrices d'azote sur la culture des plantes non légumi- neuses . — Le mécanisme de la dévitrification chez les ‘pac- téries dénitrifiantes indirectes. — L'Hillhousia mirabilis, une bactérie sulfurée géante . : UE BALANCE. — Une balance voltamétriqne 5 BALLON. — L'élasticité des ballons de caoutchouc et des:vistères Ceux RENE EM a BATELLERIE. — L'état acluel de la batellerie en France. BATTERIE. — Une batterie primaire à haut potentiel. Berry. — Le Berry (contribution à l'étude géogra- phique d'une région francaise) D DELLE A BÉRYL. — Béryl. . : SES Béton. — La construction en béton armé. Guide théo- rique et pratique. Application à la construction en élévalion et en sous-s'1 . . : BETTERAVE. — La sélection de la belterave industrielle. Bières. — L'azote assimilable des moûts et des bières. BioLoGie. — L'électrisation de contact en Biologie BLasromycose. — De la blastomycose humaine. BLé. — Le prix du blé dans divers pays depuis ATH | — Contribution à l'étude des céréales. Le hlé, l'orge et le seigle à l'état sanvage . 5 Bois. — Recherches sur les bois de la ‘Guyane. : BoraniQue. — Manipulations de Zoologie et de Bota- nique. — Recueil de l'Institut botanique Leo Errera (Univer- sité de Bruxelles). BRrésiz. — Catalogue de la Faune brésilienne. TJ. Les oiseaux du Brésil . ae DRE es MS BurEAU. — Bureau des L ongitudes. C Carcur. — Le Calcul des probabilités et son applica- tion à la théorie des erreurs, à la statistique et AUXIASSUTANCES SIITIAVIe NE CN RRT Caxeres. — Les Calibres-étalons à combinaisons « Johansson ». . CALORIMÉTRIE. — Méthodes de ‘calorimétrie usitées ‘au Laboratoire thermique de l'Université de Moscou. — Thermométrie et calorimétrie aux EUpéENres très basses . . Caxana. — La Colombie britannique. Etude sur la colonisation au Canada . . — Atlas of Canada. Railway map ‘of the Dominion of Canada. Cananres. — Les iles Canaries. Flore de l'Archipel . Cancer. — La fréquence relative du cancer chez des souris d'âge connu . . — L'action thérapeutique du radium sur le cancer : Canoxs. — Théorie des canons à recul sur l'affût . Caourenouc. — Une nouvelle machine pour l'essai mécanique du raoutchouc. . . Capacité. — Les coefficients de capacité etles attrac- tions ou répulsions mutuelles de deux conducteurs sphériques électrisés proches l’un de l'autre . . . CariLLarité. — La théorie statistique mécanique de la capillarité d d'or CansonE. — Essai sur l'assimilation photochiorophyl- lienne du carbone. . — L'action de l'émanation du radium sur les éléments du groupe du carbone. . . CARÈNES. — Carènes et poissons. ‘Stabilisation par les nageoires. CARNEGIE. — La « Carnegie Institution » de Was- hington. Sn Carte. — Les erreurs de la carte de France. Topo- graphie d'exploration . — La carte internationale du monde au millionième. Casron. — La protection du castor du Rhône. ! Cécrré. — La prévention de la cécité en France. . . . CecLuLe. — Contribution à la connaissance de la cel- lule nerveuse (La cellule nerveuse d'Helix po- malia) . CELLULOSE. — Curieuse propriété des solutions cellu- losiques ce MIO EU ce à 261 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CÉRÉALES. — Contribution à l'étude des céréales. Le blé, l'orge et le seigle à l’état sauvage. . . . . . CEYLAN. — La fourmi rouge de Ceylan. CnaLeur. — Sur la chaleur spécifique des corps solides ”.s PER NE SERRE Sur la relation qui existe eutre la tempé rature et le rapport des chaleurs spécifiques des gaz. . . Les chaleurs spécifiques des solutions. . La valeur absolue de l'équivalent mécanique de la chaleur en termes d'unités cleciqpee internatio- nales . : CaauBre. — Les loges de concierge et les chambres de domestiques au point de vue de l'hygiène Cuamp. — Expérience de cours démontrant l'existence d'un champ magnétique rotatoire . ALES CnamPriGNons. — Pathologie végétale : Maladies parasi- taires. Champignons. Bactéries . . — Flore des Champignons supérieurs de France les plus importants à connaître. CnanBon. — L'embarquement du charbon à à la | incr. CHaurrAGe. — Le chauffage des habitations. Etude théorique et pratique “des procédés et appareils employés pour le chauffage des édifices, des maisons et des appartements : Caux. — Le rendement des procédés de fabrication de la chaux azotée . : — Fabrication de la chaux sans installation ‘spéciale. CnEmiNs DE rer. — L'état actuel des chemins de fer francais 5 0 — La perception des signaux de chemins de fer . — Les chemins de fer électriques en Suisse. CHEVAUX. Les ancêtres Dessins des domestiques actuels. 3 Cnmmie. — Cours de Chimie inorganique te + — Revue annuelle de Chimie physiologique. L'e partie: Les principes immédiats organiques. . . SE 2e partie : Digestion, sang, échanges nutritifs : | Traité de Chimie analytique qualitative . . . Le VII: Congrès international de Chimie appliquée. Chimie agricole. I. Chimie végétale . . Revue annuelle de Chimie minérale. . . . . . Deuxième supplément au Dictionnaire de Chimie pure et appliquée de Wurtz. . . . . . La Chimie industrielle moderne, HAL chimique minérale. Métalloïdes . . Fondements et résultats de la Chimie végétale. pi Les matériaux chimiques des plantes . . . L'œuvre de la Chimie contre l'œuvre de la Nature. Les bases physico-chimiques de la Chimie analy- tique . CnLoROPHYLLE. — Une nouvelle méthode de recherche de la chlorophylle, avec application possihle aux corps du système planétaire. CoLéra. — Les variations dans la pression et la com- position du sang dans le choléra et leur rapport avec le succès de la transfusion saline hyperto- nique dans le traitement de cette maladie . CnoLesrÉROL. — L'origine et la destinée du cholestérol dans l'organisme animal. IL. L'absorption du cho- lestérol dans l'intestin et son apparition dans le sang — IV. La teneur en cholestérol des œufs et des poulets. . . — V. Action ivhibitoire du sérum des lapins nourris chevaux Industrie avec des aliments contenant des quantités va-. riables de cholestérol sur l'hémolyse du sang par la saponine PA D ES EP ee UE FRERE — VI. L'excrétion du cholestérol par le chat . Curoue. — Les alliages industriels de Chrome . CuroxovËrRiE. — Chronométrie . . . CiëL. — La réunion du Comité international perma- nent de la Carte du ciel CiNÉMATOGRAPHE. — Mouvements de précision à grande vitesse. Démonstration d'un nouveau système de cinématographe. . . . . . . CincuLariox. — Les progrès de la circulation urbaine. Cires. — Technologie et analyse chimique des huiles, BLAISSEMNEDICITES Pre ne CisAILLEMENT. — Sur la pression perpendiculaire aux plans de cisaillement dans les cisaillements purs finis, et sur l'allongement des fils chargés quand ils sontdbrdS bec cie à PS PU Ccermonwr. — Le voyage du Clermont . : Ccimar, — The climate and meteorology of Australia. Rainfall map of the Commonwealtn of Australia . Cunique. — Clinique hydrologique. . . . . . . . . . CoAGuLaTion. — La coagulation du sang. . 1020 26 139 939 345 529 654 827 44 4128 175 140 202 229 548 715 430 289 293 556 826 862 311 966 594 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Coeur. — Un troisième ton du cœur. . . : CozLèce. — À propos d'une candidature au Colle ‘we de HrAD Ce CoLLOÏDESs. — À propos ‘de la fltration des solutions colloïdales — Les propriétés ‘des sys stèmes colloïdaux. I. La pression oswotique du rouge Congo et d'autres colorants . 5 — La désinfection et la chimie des colloides. — Sur la formation des surfaces solides dans les liquides colloïdaux et les phénomènes RRRIE élec- triques auxqueis elles donnent lieu CocomBte. — La Colombie britannique. Etude sur la colonisation au Canada. . . Coukre. — Nouveaux éléments de la comète de Halley. — Le retour de la comète de Halley . CoupararTEeuR. — Un comparateur de longueurs ‘d'onde pour les étalons de longueur. . Compas. — Sur un problème relatif à l'induction magnétique et la question des compas de blockhaus. — Etudes surlescompaside marine et leurs méthodes de compensation. Ün nouveau come électro- magnétique . CONDENSATIONS. — La ‘condensation des vapeurs sur les surfaces soumises aux projections catho- diques . DD to BE Je EN SCT TE Mer ide CoxpucnmiLrré. — La conductibilité spontanée de la vapeur non lumineuse de sodium. — Les conductibilités thermiques de l'air et d' autres gaz à la pression atmosphérique. Coxoucriviré. — L'effet d'un champ magnétique sur la conductivité électrique de la flamme. : Coxco. — Notices sur des plantes utiles ou intéres- santes de la flure du Congo. . . — Etudes de Systématique et de Géographie bota- niques sur la flore du Bas-Congo et du Moyen- Congo. . CoNGRÈS. — Le 8e ‘Congrès des Naturalistes et Méde- cins allemands Le VIIe Congrès international de Chimie appliquée. 202, Le premier Congrès international du froid. Le prochain Congrès de l'Association internitio- nale pour l'essai °des matériaux. L'abstention des médecins roumains au Congrès iuternational de Médecine de Buda-Pesth. : Le prochain Congrès international des Mines, de la Métallurgie, de la Mécanique et de la Géologie appliquées — Le VIII Congrès ‘international de Zoologie. Conxassance. — La connaissance et l'erreur. . . . Consenvarorme. — Le laboratoire d'essais du Conser- vatoire national des Arts et Métiers. . Coxsrantes. — La mesure des constantes diélectiques par les oscillations d’ellipses ou de cylindres dans un champ de force. CoxsrRUGrION. — La construction en béton armé. Guide théorique et pratique. 2° parlie : Appli- sion à la construction en élévalion et en sous- SOLE : Corps. — Sur ‘les solutions périodiques d'un cas particulier du problème des quatre QUE — Fonctions du corps pituitaire. = Connozo. — L'ivoire végétal ou corrozo. : Corse. — Les formations botaniques des maquis ‘de la Corse. . . Correx. — Action de l'extrait du cortex adrénal. Corox. — La production du coton en Egypte. — La culture du coton en Asie Mineure. ë Coxox-roopre. — La fabrication du coton- poudre. : Cours. — Etude de quelques couples thermo-élec- triques . : Courants. — La ‘Technique pratique des courants alternatifs. T. 4er : Exposé élémentaire et pratique des phénomènes du courant alternatif. cho — L'action du courant alternatif sur les lames au tantale . — Les états instables ‘des courants électriques. — Le rappel à la vie, en cas de mort DRPATERE à l'aide des courants électriques. . Ode — Sur le sens des courants thermo- élec triques . Courses. — Sur certaines courbes gauches du sixième “rdre . . — Sur des courbes planes bicuspida' e< du quatrième ordre. — Sur les courbes planes du quatrième ‘ordre à deux poin s lecnodaux ou biflecnodaux. 391 Course .— La courbe plane du quatrième ordre à deux ou trois points de rebroussement et zéro ou un point double comme projection de la courbe gauche du quatrième ordre de première espèce. CRISTALLISATION. Sur la prétendue anomalie des vitesses de cristallisation. Û — La cristallisation spontanée de chloracétique et de ses mélanges lèue DPI date CROISSANCE. Les bases sance cellulaire. Crusracés. — L'instinct de ‘déguisement et ‘le choix des couleurs chez les Crustacés. — Les Crustacés marins comestibles. — Crustacea du « Treatise on Zoology » . l'acde mono- avec le naphta- d'une théorie de la crois- D Danomey. — L'essor économique du Dahomey. . . . Danewank. — Contributions à l'Anthropologie du Danemark ae DécuarGes. — Le gradient de potenti | dans les décharges lumineuses d'un point à un plan . — L'effet de l'air souflé sur la décharge par étin- celle d'un condensateur chargé pir une bobine d'induction ou un transformateur . — La décharge d'électricité à DATUT du charbon incandescent . — Sur un phénomène en relation ‘avec la ‘décharge de l'électricité par les conducteurs en pointe . . — Les décharges discontinues dans les tubes à décharges. MA NET Le délire d'inter- DÉLIRE. — Les folies raisonnantes. prétation.. DÉNITRIFICATION. — Le mécanisme de a dénitrification chez les bactéries dénitrifiantes indirectes . . Dépôrs. — Les recherches récentes de M. van ÉHof sur les dépôts océaniques. . . Déprressions. — L'évoluticu des dépressions ‘baromé- triques et les règles de prévision de M. Guilbert. DERMATOLOGIE. — Précis de Dermatologie . : Désinrecrants. — Méthode physico- chimique pour comparer la valeur antiseptique des désinfectants. Désinrecriox. — Recherches dans l: domaine de la désinfection . . ; — La désinfection et la chimie des ‘colloïdes . Drasère. — Sur le diabète pancréalique . . . Diamanr. — La production artificielle du diamant . Drasrases. — Oxydases et diastases . Dicuroïsue. — Le dichroïsme magnétique des liqueurs mixtes). …. Ê DICTIONNAIRE. — Deuxième ‘supplément au Diction- naire de Chimie pure et appliquée de Wurtz. DiÉLECTRIQUES. Recherches diélectriques sur MCE RO NEO LIRE 3 Dirrusion. — La détermination d'un coefficient par lequel on peut mesurer la vitesse de diffusion d'une couleur et d'autres substances dans des cellules vivantes et par lequel les bactiries et les autres cellules peuvent être différenciées Dipsacan. — Le dipsacan et l: dipsacotine, une nou velle matière colorante des Dipsac'es . Disrersion. — La dispersion magnétique rotatoire ‘dans la région infra-rouge du spectre. - DISTINCTION. — Distinction à un savant francais - Droir. — Le droit pur. le E Eaux. — Filtration, stérilisation et épuration des eaux potables et des eaux employées dans l indus- EE € — L'eau dans l'industrie. RAS EPS) ps — Analyse thermo- -dyuamique de certaines pro- priétés de l'eau . . . AE EcLains. — Photographie d'éclairs ou d'étincelles . Ecoe. — Ecole coloniale d'Agriculture de Tunis. — Ecole Polylechnique. . . De Ecorce. — Les marées de l'écorce terrestre. Exrer. — Expériences sur l'effet Joule-Kelvin, particu- lièrement à des températures basses. . . — Essai pour découvrir qUeMnEs effets élec tro- optiques . . < Ecvpte. — La production du coton eu Egypte : Erasricrré. — Un appareil à miroir pour mesurer les variations élastiques de longueur. . . . . . . 1041 330 463 975 898 103 205 241 554 609 189 "418 1042 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Ecasriciré. — Les limites élastiques du fer et de l'acier Exone. — L'exode montagneux en France. sous des variations cycliques de tension. . . — Utilisation de l'énergie emmagasinée dans l'élasti- CITÉ RE ELECTRICITÉ. — : L'emploi de l'électricité pour le dégel de la neige . __ The mathematical theory of Electricity and Ma- gnetism. . . 41980 : __ L'Electricité dévoilée . — Modern electrical theory. — Recueil de problèmes avec solutions sur l'Electri- cité et ses applications pratiques . — Die atmosphärische Elektrizität . . . — Le passage de l'électricité à travers les milieux gazeux . . — Due expérience d'électricité. : | Ececrrisation. — L'électrisation de contact en Bio- logie . A na Le Det pete PRE ES Eckcrko-cmME. — L'industrie électro-chimique en Suisse © ELECTRONS. — Sur l'hypothèse de l'existence d'élec- trons positifs dans les tubes à vide . — Sur la masse inerte des électrons en mouvement: — Les vitesses initiales des électrons cpecndres par la lumière ultra-violette. RON TES Ececrrosrarique. — Electrostatique ELECTRO -THERMIE. — Les expériences récentes sur le traitement électro-thermique des minerais de fer. Emanarion. — L'action de l'émanation du radium sur INECNTONCNE — Le spectre de l'émanation du radium EusryoLoGre. — Revue annuelle d Embryologie Eussiox. — Recherches au sujet de l'énergie d'émis- sion électronique . . . — La relation qui existe entre la température et le pouvoir d'émission des métaux . Exnosmose. — Le pouvoir dessiccateur de l'endosmnse. ExerGre. — Une revision des lois fondamentales de la malière et de l'énergie . __ La loi de distribution de l'énergie dans les sys- tèmes électriques. HEURE NT — La dégradation de l'Energie. — La transformation de l'énergie solaire en puis- sance m ‘canique . Exranrs. — [La pratique des maladies des enfants. T. 1. Iatroduction à la médecine des enfants. ExGrais. — La diffusion des engrais salins dans la terre . ENSEIGNEMENT. — L' Enseignement technique industriel et commercial en France et à l'Etrauger . Exzyue. — The nature of enzyme action. EPISCOTISTÈRE. — Episcotistère à miroirs . . Eouarron. — Sur l'équation fonctionnelle de Fredholm et quelques-unes de ses applications. . . — L'équation d'état de Van der Waals, dans le cas de l'élat solide . . . . RL ONE Dee — Dispositif électrique pour évaluer les formules et résoudre les équations . — La théorie des équations intégrales . CE — L'équation de Fredholm et les problèmes de Di- richlet et de Neumann . Equiciere. — Les lois de déplacement de l'équilibre et le principe de Le Chätelier. DEA Enneur. — La connaissance et l'erreur. . Erupriox. — L'éruption de l'Etna en avril- mai 1908. ire partie : Les phénomènes éruptifs — 2° partie : Les produits de l'éruption . — L'hypothèse des éruptions solaires. Esperanto. — Les progrès de l'Esperanto. Esrouac. — Diagnostic et traitement des maladies de l'estomac. Erazon. — Un comparateur de longueurs d'onde pour les étalons de longueur . — L'emploi des traits de longueur ‘d'onde comme lignes de definition sur les étalons de longueur Eruen. — Le partage de l'énergie entre la matière pondérable et l'éther . — Les idées nouvelles sur les vitesses relatives des diverses vibrations lumineuses dans l'éther inter- sidéral . : DAC dent Age ÉD NO Erxa. — L'éruption ‘de J'Etna en avril-mai 1908. lre partie : Les phénomènes éruptifs. -- — 2e partie : Les produits de l’éruption . . . . . . EroiLes. — Sur l'amas d'étoiles Messier 67. The study of stellar evolution. An account of some recent methods of astrophysical research. Evocuriox. — Albert Gaudry et l'évolution du monde animal . Expansion. — L'Expansion allemande hors d’ Europe (Etats-Unis, Brésil, Chantoung, Afrique du Sud) ExpépirioN. — L’ Expédition antarctique du lieutenant Shackleton . . . . ; ExpLosirs. — Les explosifs et leur fabrication : . | EXPOSITION. — ÉRDOS MONNIER ONE de locomotion aérienne . : 5 ExTRACTO orNOwÈTRE. — L'extracto-ænométre et le disque extracto-ænométrique de M. Dujardin . . F Fazux. — Etude sommaire des Mammiféres fossiles des faluns de la Touraine. . . Ho FauxE. — Catalogue de la faune brésilienne. I. Les oiseaux du Brésil . . . Fer. — Relations qui existent chez les composés ‘du fer entre la constitution chimique et les pro- priétés mignétiques. . FEnmenr. — Le lerment alcoolique du suc de levure. IV. La fermentation du glucose, du mannose et du fructose par le suc de levure. FErnosiLictun. — Les dangers du ferrosiliciuun . FEUILLES. — Le transport “de l'acide carbonique à tra- vers les feuilles . . . — Relation entre la forme des feuilles et la consom- mation de lumière 1 TRÈS — L'échauffement spontané des feuilles végétales vivantes - FILTRATION. — A propos ‘de la filtration des solutions colloïdales Se Faune. — L'effet d'un champ magnétique sur la con- ductivité électrique de la flamme . . Fieurs. — Recherches sur les couleurs et les pig- ments des fleurs, spécialement dans leurs rap- ports avec la génétique . FLore. — Flore analytique de poche de la Lorraine et des contrées limitrophes. . . . — Notices sur des plantes utiles ou intéressantes de la flore du Congo. . . — Les iles Canaries. Flore de l' Archipel | : FLORENCE. — Florence. ; FLuines. — Sur la pression intérieure des fluides . Forte. — Traitement chirurgical actuel des kystes hy- datiques du foie et de leurs complications. . . . Fouie. — Travail et folie . . . — Les folies raisonnantes. Le délire d° ‘interpré tation. Foncrioxs. — La théorie des ensembles et les progrès récents de la théorie des fonctions . . . ; — Lecons sur les fonctions définies par les équations différentielles du premier ordre . . Foxps. — Précis d'analyse des fonds sous- marins ac- tuels et anciens. . . Dr Forces. — Le calcul des forces électromotrices à l'aide des données thermiques. . . . . . . ° - . ForriFicATION. — Fortification cuirassée . . FossiLes. — Catalogue descriptit des fossiles nummu- litiques de l'Aude et de l'Hérault. 2° partie : Cor- bières septentrionales. Four. — Un nouveau produit du four électrique : le silundum . . . D — Réglage automatique d'un four élec trique à à résis- tauce. . . . ATEN ARS Four. — La fourmi rouge de Ceylan, 44 POI FRAUDES. — À RESpS du service de la répr ession des fraudes. — La répres sion des fraudes sur les produits ali mentaires. . . ETES Froin. — La production ‘mécanique du fini © PUS — Le If" Congrès ivternational du froid . . . . . + G GacvanouÈèrRe. — Un nouveau type de salvanomètre à vibration bifilaire. . . JT Gaz. — Contributions à la théorie des mouvements infiniment petits d'un gaz hétérogène . . . . . GéNérareurs. — La régularisation SHORAE des générateurs électriques . . . OMS — Génératrices électriques à c ourant continu. : — Théorie du générateur à courant alterne’ if. : GÉOGRAPHIE. — Géographie socidlet- 2 mc 00" — Revue de Géographie annuelle RE PU Got, OGIE. — Revuz annuelle de Géologie. 1° parte . — 22 partie. sen... AR BAS LUE — La loi de position en G° ologie 619 190 562 916 282 330 521 "44 618 414 A3? G2E _énistnl TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1043 GEorrorisme. — Le problème du géotropisme et la Sn — L'examen fonctionnel de l'intestin par théorie des statolithes. 245 e régime d'épreuve. 380 GLacr. — Phénomènes de la congélation des rivières JonisaTIoN. — L'ionisation produite | par une particule o. 795 Causes de la foruwation de la glace intérieure fu loxs. — La charge spécilique des ions émis par les viale . . 92 corps chaultés . ; 54 Grosses. — Le rôle des Glossines dans la transmis- — lonisation par le phosphore et phosphorescence 97 sion des trypanosomiases . PAC 956 — Les charges des ions dans les gaz et l'eflet de la — Le développement du 77 ypanosoma gambiense vapeur d'eau sur le mouvement ‘des ions négalifs. 195 chez la Glossina palpalis. : VAS ST 97 — les ions gazeux à charge double . 131 GLucosines. — Action des bacilles acido-résistants — Recherches relatives à la charge des ions gaze ux. 724 sur 43 glucosides . c ao — La OURS des ions des atomes radio-actifs rési- GLurex. — L'état physique du ‘gluten ; 34 duels et la masse de l'ion gazeux . i à Gorrre. — Recherches sur l'étiologie du goitre endé- À IsoLANrS. — Les isolants en Electrotechnique ; 282 mique 338 | Irarre. — Les industries chimiques en Italie. 691 GRAINES. — La peruiéabilité sélective des enveloppes — Autriche et Italie. 020) des graines de Æordeum vulgare . 431 IxODorbEA. — Ticks. A monograph of the Ixodoidea — Les ferments et la vie latente des graines au repos. 609 Part 1. Argasidæ RPC NE To eee ca 6 (13 — La résistance des graines de légumineuses aux températures élevées RES TUE 90 J Graisses. — lutroduction à l'étude des matières ; RTaSses . . . + 189 | Jannis. — Les jardins zoologiques à l'Etranger. 481 — Technologie et analyse ‘chimique des huiles, de — Les ennemis de nos jardins. TA graisses et cires . 7 | Jueité, — Le Jubhilé de Darwin à Cambridge. 613 GROSSISSENENT. — La mesure pr écise du grossisse- . | Jurrrgn. — Le huitième satellite de Jupiter. : . 201 ment vrai des instruments d'Optique 2.< joe JurassiQue. — Le Jurassique inférieur et moyen de Guyane. — Recherches sur les bois de la Guyane : 1019 la bordure nord-est du bassin de Paris. 513 H K 5 KayYprox. — Sur la réfraction et la dispersion du Haros. — Sur la théorie des halos. 821 krypton et du xénon et leur rapport avec celles Haur FOURNEAU. — Expériences sur un haut fourneau ù de l'hélium et de l'argon. . . 238 électrique en Suède. o 799 Kysres., — Traitement chirurgical actuel des “kystes Hérices. — Sur les hélices de sustentation. 384 hydatiques du foie et de leurs complications. 285 Hécrum. — Libération de l'hélium des minerais radio- actifs par le broyage . . 651 L Héréprré. — Mendel's principles of Heredity. : 965 HERMAPHRODITISME. — Existence de l'hermaphrodi- à : 4 PORTE tisme protandrique chez le Crepidula fornicata. 87 | LABORATOIRE. — Le Laboratoire d'essais du Conserva- ss toire national des Arts et Métiers . 161 Hexose. — Le phosphate d'hexo ee Le a =lnfiaence del température sur la perte pes ss Le ariation des latitudes - Me 2 par hystérèse dans le fer dans un champ rotatif. 562 BOUMORONES un RS REA graines de légumi- , HysréRésiGRAPnE. — Hystérésigraphe. KA neuses aux températures élevées 340 J Y pe Levure. — Le ferment alcoulique du suc de levure. IV. La fermentation du glucose, du mannose et du fructose par le suc de levure 827 ! : — Le phosphate d'hexose formé par le suc de levure aux dépens de l'hexose et du phosphate. 971 Hiuunrté. — Traité de technique et méthodique d-s LiGnrre. — Tourbe et lignile. Fabrication et em lois herch li ile À 551 E £ 91 recherches sur l'immunité . . 55 en Europe . . c — Le mécanisme de l’immunité (anticorps, antigènes Locomorive. — La machine locomotive So 187 et déviation du nent) : 1020 | Loce. — Les loges de concierge et les chambres de INDE. Annuaire des Etublissements français ‘dans domestiques au point de vue de l'hygiène . PNR l'Inde pour l’année 1908. . . . . . 333 | Locrque. — Logique et Mathématiques. Essai hsto- Iñpo-Caixe. — Les publications du Service géologique rique et critique sur le nombre infini . 124 de l'Indo-Chine. . . . + « . . + 390 | Lor. — La loi de position en Géolugie. 624 — Le Service des Mines en Indo-Chine. 480 — La loi de Magendie; le temps physiologique . 669 Ixvucrance. — Méthode pour comparer l'induct tance LoxGéviré. — La distribution de la longévité en mutuelle à la résistance an moyen des courants Angleterre et dans le Pays de Galles 5 568 alternatifs biphasés. 98 | Loxéueurs. — L'échelle des longueurs d'onde . . . . 862 Ixpucrion. — Iuduction électrostatique à travers des LonkaIxEe. — Flore analytique de poche de la Lorraine isolateurs solides. 795 et des contrées limitrophes . AE 92 IxpustRte. — Les dispositifs mécaniques des indus- Lumière. — Théorie de la lumière . 378 tries chimiques et métallurgiques. 513 — Absorption de la lumière stellaire dans l'espace. 4711 — Les industries chimiques en Italie. NT CE — L'effet de la lumière sur les matières co'orantes — La chimie industrielle moderne, t. 1. Industrie du sang et les corpuscules rouges. . . . HR 890 chimique minérale. Métalloides. , . 821 — Deux élats d' adaptation rétinienue àlalumière. : 936 Ixsrirur. — Recueil de l'Institut botanique Leo Errera. 319 | LuminesceNce. — Recherches sur la production d'une — L'Institut Pasteur de Tokyo. . . . 692 luminescence dans un récepteur à vide se mou- — L'Ilastitut de Biologie ere d'Amani (Atrique vant près d'un champ électrostatique . . . . . . 98 orientale allemande) SMEUY Le S64 Ixsrirurion. — La « Carnegie Institution » de W ashing- M OAI 900 INTÉGRALE. — Vorlesungen über bestimmte Integrale MabaGascaR. — Sertum madagascariense; étude sys- und, die Fourierschen Reihen. 887 tématique de deux collections de plantes récoltées INTELLIGENCE. — La naissance de l'intelligence. BUS CET à Madagascar . NT ETAT MaGxériSne. — The mathem: itical theory of Electicity and Magnetism — Recherches sur le Maynétisme terrestre . : — Relations qui existeut chez les composés du ter entre la constitution chimique et les propriétés magnétiques . Marapes. — Le régime alimentaire des malades. Con - sidérations pratiques sur les aliments et les bois- sons diététiques et sur l'Hygiène de l'Alimenta- toner Macanies. — La pratique des maladies des eufants, LL Introduction à la médecine des enfants . . . MammirÈRes. — Etude des Mammi'ères miocèues des sables de l'Orléanais et des faluns de la Touraine. — Etude sommaire des Mammifères fossiles des faluns de la Touraine Maouis. — Les formations botaniques des muquis ‘de la Corse ë 5 Manées. — Les marées de l'écorce terrestre . Mans. — La climatologie de la planète Mars. — La planète Mars et ses couditions d'habitabilité. — Les dimensions et la fonction des canaux de Mars. Mascarers. — Sur les mascarets dus aux marées : MarnÉmATIQUES. — Lectures sur l'histoire des Mathé-, matiques . Frot dus : — Traité de Mathématiques générales , : — Guide à travers la littérature mathématique . — Logique et Mathématiques. Essai historique et critique sur le nombre infiui CPE ne — Sully-Prudhomme mathématicien. . . Manëne. — Le partage de l'énergie entre la matière pondérable et l'éther . . — Uue revision des lois fondamentales de la matière et de l'énergie . . È — Le problème de la conservation de la matière . Marrices. — Sur les groupes de matrices linéaires non invertibles . - - MÉCANIQUE. — Revue de ‘Mécanique appliquée . es — Lectures de Mécanique. La Mécanique enseignée par les auteurs originaux. HApERENIOn de la Mécanique . . MépaiLre. — Les médailles ‘de la Société. Royale ‘de Londres. . . DES MÉDECINE. Revue annuelle ‘de Mé. Jeciné : Mépicamenr. — Les médicaments usuels. Mécawxces. — Contribution à la théorie des mélanges binaires Me ere MOUSE 148, — Contribution à la théorie des ‘mélanges binaires. XIV. Condensation rétrograde double . . me Mer. — Géographie sociale. La mer. CRIE EX à inachines à MercERISAGE. — Le mercerisage et les merceriser . . YA Mercure. — Le diamètre de Mercure DCR Mesure. — Mesures et instriments de mesures élec- trotechniques. MÉTALLOGRAPHIE. Recherches métallographiques effectuées à l'Institut de Ch'mie minérale de Gôt- tingeu . MérALLURGIE. — L' ‘lodustrie minérale et la production métallique de la France, en 1906 et 1907. — Guide pratique du Chimiste AN et de l'essayeur . — Manuel du chimiste métallurgiste pour l'industrie des métaux autres que le fer . - ; — Expériences de laboratoire en Métallurgie . ; Miraux. — Les effets photographiques des métaux. . — L'état amorphe des métaux. — Expériences photo-électriques sur Îles métaux alcalins. : — Industrie des métaux secondaires et des terres rares . — Une détermination approximative des ‘points d'ébullition des métaux. — La volailisation des métaux lourds par l'action du A de carbone et son app'ication indus- tielle. Méréonr. — L'observation systématique des trainées météoriques persistantes MéréonoLocre. — Comp: raisons graphiques des val urs mensuelles, saisonnières et annuelles des princi- paux éléments météorologiques dans diverses sta- tious francaises pour l'année 1906. . . The climate and meteorology of Australia. Rain- fall map of the Commonwealth of Australia . . - Le Service météorologique de l'Exposition aéro- nautique « e Francfort. . . re QC Te Nalional Antaretic Ex} edition 101-1904) ; Mcleo- rology. Part I. Physical observations. . . . 188 / TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES MéréonoLoGiE. — L'étude de la Météorologie inter- tropicale par les sondiges aériens. . Meuse. — Etude sur la vailée lorraine de la Meuse. Mica. — Recherches diélectriques sur le mica. ; Micro-RALANCES. — Micro-balances sensibles et nou- velle méthode pour peser de faibles quantités. . Mixekrais — Les expériences récentes sur le traite- ment électro-thermique des minerais de fer . — Préparation mécanique des mineruis. — Traitement électrique des minerais titanifères . Mixes. — Le Service des Mines en Indo-Chine. MoxuuEenr. — Souscription internationale pour l’érec- tion d'un monument à E.-J. Marey. — L'inauguration du monument de ‘Brouardel . Monr. — Le rappel à la vie, en cas de mort appa- rente, à l'aide des courants électriques . Morvan. — Le Morvan. Etude de géographie humaine. MosquEro. — Le Mosquero . . Moreur. — Le moteur Diesel à combustion intérieure. Moucnes. — La biologie et l'histoire des mouches Tsé-tsé . ; Mouis. — L'azote assimilable des moûts et des ‘bières. Musezes. — L'innervation réciproque des muscles an- tagonistes. XII. Les réflexes proprioceptifs. . Narpes. — Le rôle des nappes de charriage dans la structure des Alpes occidentales et orientales . . Narure. — L'œuvre de la Chimie contre l'œuvre dela NALUTE RENE NICE ENT ICE RC EUR MAL 0: 5 0 NAviGABILITÉ. — La navigabilité du Rhône. . . .. NaviGarioN. — La télégraphie sans fil appliquée à la navigation MC Aee free fie Me Me IE POS — Les récents progrès ‘de la navigation sur le Rhiu supérienr. . . — Navigation. (Instruments. ‘Observations. Calculs). Navires. — Les navires à propulsion électrique. . . — La distribution de l'énergie électrique à bord des navires. . . NEIGE. — L'emploi de l'électricité pour le dégel de la neige. Ms he IE Not EEE — Enlèvement de la neige dans les villes. : : : . . NÉoN. — Sur une propriélé curieuse du néon. . . . . Nerr. — L'examen, à l'aide du galvanomètre à corde, des courants du nerf vague . : — Sur les nerfs du faisceau atrio-ventriculaire. NickeLs. — Résistivité et thermo-électricité des nic- kels et de leurs alliages usuels. Applications industrielles: tres LS METEO RIRE NIVELLENENT. — L'état actuel des travaux du nivelle- ment général de la France. . . Nowsre. — Logique et Mathématiques. “Essai histo- rique et crilique sur le Nombre infini . : — Théorie des nombres algthbriques . NORMANDIE. — Les paysans de la Normandie orientale Etude géographique sur les populations rurales du Caux et du'Bray, du Vexi: normand et de la vallée de la Seine. NUAGES. — Sur les fréquences de l'état ‘journalier moyen des nuages du ciel.à Batavia. . . . . . . [o) Omsecrirs. — Un appareil pour mesurer le pouvoir définissant des objectifs. OsFRVATIONS. — La précision des observations astro- nomiques. . . . . OBSERVATOIRE. Vingtième Bulletin chronomomé- trique de l'Observatoire natioual astronomique, chronométrique et météorologique de Besançon. OcÉAnoGraPaie. — Les récentes recherches océano- graphiques en Norvège. Ov£ur. — Sur des corrélations d'odeur, en rapport avec des expériences de M. J. Hermanides . . : — Sur l'œil des ois-aux et le rôle du peigne. : — La publication des œuvres de Pierre OErL. OEUVRES. Curie Oiseaux. — A propos du vol des oiseaux. . . . . . — Sur l'œil des oiseaux et le rôle du peigne . . . ONves. — Théorie de la propagation des groupes d'ondes dans les milieux dispersifs. . . : — L'amortissement des ondes du mercure. — La télégraphie sans fil et les Css pra- tiques des ondes électriques. : ; S34 46% DD 826 443 643 863 480 57 653 802 928 980 236 916 199 340 159 683 438 54 683 237 198 881 TABLE ALPHABÉTIQUE DES OrPrique. — The theory of light. Optics. . — Cours de Physique, t. LV. Optique. Etude des ins- trumen!s , . re — Magneto und Elektro- -Uptik . = — La mesure précise du gr ossissement vrai des ins- truments d'Optique . Or. — Propriétés physiques des feuilles d'or à haute température . . Oraces. — L'électricité de la pluie et son origine ‘dans les orages avec tonnerre. Or1oN. — Sur l'origine de certaines lignes dans le spectre de = Orion (Alnitam). Orruorénre. — L'Orthopédie indispensable (Tubereu- loses externes, Déviations, etc.). . OSCILLATIONS. — La production d'oscillations électri- ques régulières dans les circuits clos et une mé- ade d'essai des récepteurs radiotélégraphiques. — Ex ériences relatives à un nouveau générateur d'os:illations à haute fréquence. . — Les oscillations électromagnétiques et la télégr ra- phie sans fil. CNE A treatise on physical Oss MENT. - Le plus vieil ossement humain. . . OsréoLoote. — Musée ostéologique. Etude de la faune quaternaire. Ostéométrie des Mammifères . Oxypases. — Oxydases et diastases. "OXYGÈNE. — Appareils de sauvetage à oxyg gène liquide. — L'oxygène industriel. MONO LE NO? oO P Paxcréas. — La théorie de la sécrétion du pancréas. — La pro luction dusuc pancréatique sous l'influence de la sécrétine . . . — Observations sur l'urine dans les maladies du pancréas . PanaLysie. — Trausmission expérimentale ‘de la parte lysie infantile au singe . . SEE Parrüm. — Le parfum chez la plante. Se ParoLE. — La photograohie de la pirole. Application à la téléphonie . . . Panricece. — L'ionisation produite par une particule CA — Une réflexion diffuse des particules 2. — le dénombrement des particules & à l'aide de la scintillation et sur la grandeur de la quantité é6lé- mentaire d'électricité . . PATHOLOGIE. — Pathologie vésétale. Maladies ‘parasi taires. Champignons. Bactéries . Paysax. — L'alimentalion du paysan finlandais. P&éLLaGRe. — La pellagre. Perse. — La Perse d' aujourd’ hui | (Lran, Mésopotamie). Pesanteur. — La détermination de la pesanteur à la surface de la Terre . PEUPLEMENT. — Le peuplement les places vides ‘dns la Nature et l'origine des adaptations . PnÉNOMÈNES. — Les anneaux de Nobili, les photogra- phies colorées et les phénomènes de Hall dans les électrolytes . . . — Remarques sur le phénomène de Zeeman ! Puicosopute. — Les sciences RE ARES état actuel . . ICS NOMME — La philosophie moderne. . . PnosPhORESCENCE. — lonisation par le phosphore et phosphorescence . . Puoro-éLecrrique. — Sur l'effet photo- électrique ‘du platine et du cuivre dans la l'imière ultra-violette polarisée . . PHOTOGRAMMÉTRIE. Ares photogrammétrie comme application de la Géométrie descriptive. Pnorocrapuie. — Les effets photosraphiqnes des mé- (aux. — Les auneaux de Nobili, les photographies colorées et les phénomènes de Hall dans les électrolytes. — Photographie d'éclairs ou d'étincelles . PHOTOGRAVURE. — Sur la théorie des trames utilisées en photogravure . Leur PHOroMÈTRE. — Les principes physiologiques’ qui O0" t à la base du photomôtre à papillottement. ; Parite. — Traileiwent rationnel de la phtisie. . . Paysico-cHE. — Physico-Chimie et Psychologie . . PuysioLociE. — Physiologie végétale. ac : — Revue annuelle de Phy-io ogie. {re parti» : Géné- RON ENONENE — ?e parlie : C ireulation, respiration. systèmes. ner- veux et musculaire, . : Paysique. — Cours de Physique, co Etude des instruments . us IV : Optique. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1909, MATIÈRES Paysique. Traité de Physique. Diffraction. Double réfraction et polarisation de la lumière . . Pres. — Les limites de sensibilité des BIeE thermo- électriques — Les amalgames de cadmium et la pile normale de Weston. : PIROPLASMOSE. — Un remède contre la piroplasmose du chien (jaunisse maligne) et celle du bétail . PLANÈTE. — A la recherche de la HUE tri LAnnep its nienne . AMD T UN en à — Les planètes et leur origine : PLANTES — Maladies des plantes cultivées. non parasitaires. Il. Maladies parasitaires. : PLures. — Sur la durée des grosses pluies à Batavia. — The climate and meteorology of Australia. Rain- fall map of the Commonwealth of Australia . — L'électricité de la pluie et son CUBA dans les orages avec tonnerre . : oc : . L. Maladies PLurALISME. — Le pluralisme . . Porvs atomiques. — La nouvelle table internationale des Poids atomiques . . . . 102,243, Porssoxs. — Carènes et poissons. Stabilisation par les nageoires. . . — Nouvelles expériences sur la forme et la stabilité des poissons . POLARISATION. — Dispersion anormale de la polarisa- tion rotatoire magnétique . . . . . . . . . 51, — Polarisation et saccharimétrie. PoryÈnre. — Sur un groupe de polyèdres admettant des plans diagonaux, déduit de polytopes . Pocvexée. — Sur le centre de la polypnée . . Poure. — Nouvelle pompe à mercure automatique - Ponts. — Cours de ponts métalliques . Porurarion. — Le mouvement de la population fran- caise en 1908 . . PorruGaz. — Système silurique du Portugal. Etude de Stratigraphie paléontulogique. ui Porassium. — Le spectre d'absorption de la vapeur ‘de potassium POTENTIOMÈTRE. — L'emploi du potentinmètre sur les circuits à courant alternatif . PRESSION. — Sur la pression osmotique des solutions aqueuses de ferrocyanure de calcium. 1. Les solu- tions concentrées. . . . loi A OI — Mesures des petites pressions. — Les fluctuations de préshion rapides et | pério- diques . 9 — Les pressions osmotiques « ‘dynamiques », Prévision. — L'évolution des dépressions baromé- triques et les règles de prévision de M. Guilbert. Prisue. — Sur un prisme à interfér nces à surfaces planes et parallèles . . . Pnix. — Rapport sur le Prix Osiris à décerner en 1909. PKogagrcrrés. — Notions fondam ntales de la Théorie des Probabilités. nd 6 © — Éléments de la Théorie des probabilités. : Procèmes. — Récréations mathématiques et pro- blèmes des temps anciens et modernes . — L'équatiou de Fredholm et les PIOBIRAISE de Di- richlet et de Neumann . . : ProsecriLes. — La lutte d’ artillerie navalr et les pro- jectiles chargés en explosif . — La trajectoire d’un projectile de fusil dans l'air : Puoréines. — The general characters of the proteins . Paororcasma. — Les différenciations protoplasmiques et l'activité cellulaire. . . PeLsarion. — De la fréquence des puisations cardia- ques chez la souris . . PYRHÉLIOMÈTRE. — Le télescope pyrhéliométrique ‘et la mesure de la constante solaire , POS Racnraxesraésie. — La rachianesthésie générale. 860, Raorarion. — La théorie statistique de ja forme de la courbe d'oscillation pour la radiation émise par un corps noir. - . ; b RADIO-ACTIVITÉ. — Observations, en bal'on libre, de la ralio-activité atmosphérique NO ROP OT EE, _— Une nouvelle méthode de preparation des pro- duits de décomposition radio-actifs . — Sur la chaleur dégagée par les corps radio-actifs. — La radio-activité de la matière ordinaire. : RanroLocie. — Atlas de radiologie normale. . . : RADIOTÉLÉGRAPHIE. — Sur la radiotélégraphie dirigée : — L'influence de la lumière du jour sur la DURÉE des stations radio-télégrapiij"es. . . « . . . - . 21 1045 1016 = 252 561 189 266 863 193 1046 RADIOTHÉRAPIE. — Un nouveau prOGEdE de radiothé- TAPIE RC OR ue Technique radiothérapique. : - RantüM — L'action de l'éman: tion du radium sur HEART Dore e bnp — Le spectre de l'émanation du radium. - L’expulsion de la matière radio-active dans les transformations du radium . . . L'action de l'émanation du radium sur les éléments du groupe du carbone. . . : L'action thérapeutique du radium sur le cancer — La production du radium aux dépens de l'uranium. RaDiUMrHÉRAPIE. — Radiumthérapie. Rayons. — La réflexion et le rayonnement secondaire des rayons cathodiques lents La stérilisation de l’eau et des liquides par les rayons ultra-violets . ; Le passage des rayons de Kôntgen à travers les gaz et les vapeurs. er La vitesse des rayuns cathodiques émis par les substances exposées anx rayons y du radium . . La vitesse de propagation des rayons SCOUSHAUeS à courte longueur d'onde : Sur le manque de symétrie présenté par PÉTODE secondaires DRE à La transformation des rayons Ne: Recherches sur la conduction de l’é lectricité dans les vapeurs électro-négatives et sur les rayons A’. — Méthode de démonstration directe de Ja charge des rayons & . . . : La matière radiante let les ray ons ‘magnétiques . L'absorption des rayons homogènes par la matière, et sur la variation de l'absorption des rayons avec la vitesse . . . : RAYONNEMENTS. — Les rayonnements métalliques . : — Les rayonnements des huiles siccatives . . . . . RécréarTions. — Récréatious mathématiques et pro- blèmes des temps anciens et modernes . . . RérLexioN. — Le pouvoir de réflexion de l'alcool éthy- later : Rérnacriox. — La contraction de volume et le pou- voir de réfraction. . . — COnSATteRe régulières de la réfraction irrégu- lière dans le Soleil . , - . . .. RÉGIMES. L'Alimentation et les Résimes homme sain oubmala de EE ER — Le régime alimentaire des maladies. . . RÉPUBLIQUE ARGENTINE. — Le développement écono- mique de la République Argentine — Etude des prétendues scories et terres cuites de la série pampéenue de la République Argentine . RÉSEAUX. — Sur des réseaux quaüridimensionaux et leurs sections avec des espaces . . . . . . 148, — Les copies de réseaux de diffraction à surface métallique . . . ; RÉSISTANCE. — La résistance de l'air et les récentes expériences de M. G. Eillel . . . . Méthode pour comparer l' inductance mutuelle à la résistance au moyen des courants alternatifs biphasés 5 NC MORE MU EME résistances photo- électriques ‘pour la transmis- sion télégraphique des phofographies et docu- inents graphiques. , È La résistance à la rupture de la barre droite à à sec- tions multiples . . RE NCUEUE srivrré. — Résislivité et ‘thermo-électricité des nickels et de leurs alliages usuels. Applications industrielles . . . . PE TOTE Te Revce. — Revue de Mécanique appliquée CRE er po Revue annuelle de Chimie physiolosique, 1e partie: Les principes immédiats organiques . . » 2e partie : Digestion, sang, échanges nutritifs FRS les ‘chez Rhs — ltevue annuelle d'Embryologie AS RS RE — Revue annuelle de Médecine . . . ns CT Eee — levue annuelle de Géologie. 1re partie. be à vo — 2» partie . . AJeUEMe Ve. A — Revue annuelle de € himie minérale. RE — Revue annuelle d'Agronomie . . . . MAT — Revue annuelle de Physiologie. 1r° pe artie : Généra- lité s 5 © PREND NÉ EME - 22 partie : Circulation, respiration, sys 1 $ ner- veux et musculaire . . . : HE for e Revue annuelle de Zoologie. qre partie : Zoologie générale . . PT NS 9 LR 2 partie : Zoologie spéciale EE tee PSE — levue anuuelie d Avatomie. . . ENS KRuix. — Les récents progrès de la navigation sur le Rhin supérieur Mi TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 764 892 56 98 651 899 90? 933 645 RHONE. RIVIE Causes de la formation fluviale . . — La forme du lit des rivières à ‘fond mobile Rocars. — Les roches et les minéraux des roches . — Détermination des roches . . . RouGe. — Sur la formation du rouge de para. nitra- niline . RoumanE. — La récente croisière de la Hevue génér al des Sciences en Turquie, Roumanie, Crimée et Bulgarie (septembre-octobre 1909) . . — La navigabilité du Rhône. . — Phénomènes de la congélation des rivières. de Ja glace intérieure S SACCHARIMÉTRIE. — Polarisation et saccharimétrie . SanaRa. — Sahara soudanais . . . Saixre Croix. — La structure d'une île. Sainte. Croix. Antilles danoises . . Saxc. — La présence d'hémo- -agglutinines, d'hémo- apsonines et d'hémolysines dans le sang des ma- lades atteints de maladies infectieuses ou non. La coaoulation du sang . . Méthode pour la détermination du volume total du sang contenu dans le corps vivant. . . . L'effet de la lumière sur les matières colsrantes et les corpuscules rouges . La présence supposée d° oxyde de carbone dans le sang normal et dans le sang des animaux anes- thésiés avec le chloroforme . : . . NE — La vacuolalion des plaquettes du sang 2 Sc oriEes. — Etude des prétendues scories et terres cuites de la série PARARÉRNNE de la République Argentine . . . È ; Sécrérine. — La production du suc pancréalique sous l'influence de la sécrétine. . . . A Sécrériox. — Le mécanisme naturel pour évoquer la sécrétion chimique de l'estomac. . . . Séisme. — L'inscription instrameutale des séismes et la Physique du globe. 1'e partie : L'enregistrenr nt des tremblements de terre . . . ë — 2e partie : Les causes (les tremblements de terre. SéLénrom. — Les propriétés électriques et ones du séléninm métallique . . . L 2 Ser-inpucrance, — La méthode de Pirani pour la mesure de la self-inductance d'une bobine . . . Sens. — Le labyrinthe de l'oreille comme organe des sens mathématiques de l'espace et du temps Serues. — La théorie des serres. . . . : Senvice. — Les publications du Service géologique de InUo= Chine EEE SExEs. — La proportion des sexes produits par Îes blancs et les gens de couleur à Cuba . . . . 5x. — La per ion des signaux de chem ns de fente SILUNDUM. — Un nouveau produit du four électrique : le silundum SIGNA SISMOGRAPHE. — Principe ‘d’un Sismographe enregis- trant l'accélération absolue des tremb'ements (le LEO De M AE + — Les sismographes inodennes. 12000 Socréré. — La Société de Chimie physique FTERRE — la Société de secours des Amis des sciences . . — les Médailles de la Société royale de Londres . . — La Société mathémalique de Calcutta. . . . Sores. — Les soies artificiell.s. . . . . . ©: SoL viz. — La forme du Soleil. . . 5 — Le télescope pyrhéliométrique et in mesure de la consisnie solaire . . « CAES LS l'hypothèse des éruptions ‘solaires. : : | Sur la période solaire de trente-cinc années de M. Lockyer. s A propos de l impossibilité des éruptions solaires. Sur la nature des flocules d hydrogène sur le Soleil. Conséquences régulières de la réfraction irrégu- lière.dans le Soleil. . . - . . CNE Sozurion. — Sur la pression osmotique des so! tutions aqueuses de lerrocyanure de calcium. I. Les so'u- lions concentrées ... . . . Une relation simple entre la ‘densité et le degré de ‘“issociation des solutions salines aqueu-es . . A propos de la fillration des solutions colloïdales. Les chaleurs spécifiques des solutions. . . . . La Thermodynamique des mélanges de solutiuns binaires et homogènes . . . . Don _ Sur le mécanisme du spectre fl “absorption dis SU IUNS Sen ee OR LS CRIER TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1047 SOLUTION. — Curieuse propriété des solutions cellulo- TÉLÉVISION. — La première solution réelle du pro- siques TR NE Re ee 831 blème de la télévision. nn eat CT OT — Etudes sur les solutions coloïdales . 888 TEMPÉRATURE. — Expériences aux basses températures. SOS SON. — La perception de la direction du son - 971 | Teups.— La loi de Magendie. Le temps physivlogique. 669 Souris. — De la fréquence des pulsations cardiaques | TERRES. — Industrie des métaux secondaires el des chez la souris AT Ce UN UE DM es er LU 2 M ÉOSN| terres rares. . . . SCO RAS ie 512 SPECTRE. — L'effet de la pression sur le spectre d'arc. 98 | Tnéonème. — Sur un théorème de M. Painlevé. 198 — Le spectre de l'émanation du radium LR 98 | — Sur un théorème du calcul intégral dû à Gegen — Lesspectresdelignes et la constitution desatomes, 4%4 | bauer. rate ON OENTE DAS Te Ne DIT — Pouvoir rotatoire dispersif dans les régions visible Tuéonie. — La théorie des ensembles et les progrès et ultra-violette du spectre . ÉRETECOURe 238 | récents de la théorie des fonctions. Ne el Lot — Dispersion de l'eau pour le spectre ultra-violet. £ | — Essai sur la notion de théorie physique de Platon — Effet de la pression sur le spectre d'arc. II. Argent. ‘ à Galilée . DST CEA En = Te A SO ONE & — L'extrémité ultra-violette du spectre solaire . . . 416 | TnerMobyx AMIQUE. — Cours de Thermodynamique ap- — Influence de l'état des couleurs en solution sur | pliquée à l'équilibre des systèmes à phases gazeuse leur spectre d'absorption . RENE 401609 | CHIC T | DR ER RTE 13 — L'effet de la ;ressicn sur le spectre de bandes des | — Sur la déduction cinétique de la secoude loi prin- fluorures des métaux alcalino-terreux . 196 | cipale de la Thermodynamique . . . . . . . . . 448 — Le spectre de l'hydrure de magnésium Eu — La Thermodynamique des mélanges de solutions — Sur le mécanisme du spectre d'absorption des binaires et homogènes Sue tee de RUE 654 solutions . ne res = - - . - - - - 825 | TnerMo-éLECrRiCIrÉ. — Elude de quelques couples — Le spectre d'absorption de la vapeur de potassium. 471 DRENTOUEBIECTTIQUES EEE RES — L'influence du milieu sur les raies des spectres — Résistivité et thermo-électricité des nickels et de d'étincelles RE ET CU ue DA A UD leurs alliages usuels. Applications industrielles. ciciri SPECTROSCOPE. — Aclion da spectroscope à échelon et — Sur le sens des courants thermo-électriques. 917 les résultats obtenus sur la structure de la ligne THERMOMÉTRE. — Thermométrie et calorimétrie aux verte du mercure. AN pen 610 | températures très basses... à SPECTROSCOPIE. — Spectroscopie astronomique. . . 1017 | Tuynoïve, — Appereil thyraïdien et sels de calcium. Srinocuères. — Les modes de division du Spirochæta Tiger. — L'exploration du Dr Sven Hedin au Tibet. recurrentis et du Spirochæta Dutloui dans les lissus. — Eflet de la chaleur sur l’état électrique des CASE UV ANS PT NN ME TSE HISSUSAVIVAN ES RENE 561 SQUELErTE. — La découverte de deux squelettes néan- Tokyo. — L'Institut Pasteur de Tokyo. . . . . . . . 692 derthaloïdes dans le bassin de la Dordogne et TopoGrarnie. — Les erreurs de la carte de France. ADAOPDRIMIQÉREUS EN PENTIER 56 Hoposnabhie diexploration NN NN TE STATOLITHES. — Le problème dn géotropisme et la Tour8e. — Tourbe et lignite. Fabrication et emolois iHéonePdes etatolttes ORNE CRXEUTODE RER NT ER RE LOUE e 91 STÉRILISATION. — La stérilisation de l’eau et des liquides Traue. — Sur la théorie des trames utilisées en pho- par les rayons ultra-violets . A abo No Late Mo MOTS logravure. DRE ES NE CNRS LE : NET a 97 SrRATIGRArHIE. — Système silurique du Portugal. Etude TRavaIL. — Travail et folie . RS O0) de stratigraphie paléontolorique - + + «<< 426 | TREMBLEMENT DE TERRE. — L'Inscription instrumentale Suc. — La production du suc pancréatique sous des séismes et la Physique du globe. 1'e partie : l'influence della Sécretine.. RUN on 129 L'enregistrement des tremblements de terre. 5S Suisse, — L'industrie électro-chimique en Suisse. 479 — 2° partie : Les causes des tremblements de terre 44% — La Suisse au xx° siècle. Etude économique et — Principes d'un sismographe enregistrant l'accélé- sociale . Re EN OA Ut OU ere TS ration absolue des tremblements de terre 280 Surraces. — Sur la transformation continue et uni- — L'origine tectonique des tremblements de terre de univalente de surfaces en elles-mêmes. 388, 7196 Provence et d'Italie. SC TE ED D 94 0) — Les modèles de morceaux de surfaces minima. 722 | Tripcer. — La loi de la variation de la raie moyenne Sypurcis. — Les injections mercurielles intra-museu- d'un triplet . SR) Me Ur 2e LE ee 1100) laires daus le traitement de la syphilis . . . . . 1.020 | Trvpanosoma. — Le développement du Trypanosoma gambiense chez la Glossina palpalis. ©! . . . . . 971 TRYPANOSOMIASE. — Une nouvelle variété de trypano- T smiase daus l'île de Zanzibar. + da © 106 — Nouveaux résultats sur le traitement expérimental deSHÉCYPANOSOMIASES PIRE 338, 1026 TauLes. — La Table internationale des poids atomiques, — Le rôle des glossines dans la transmission des 102, 243, 979 HVBAnOSOMIOSES PR RE NN RO ES — Tables physico-chimiques annuelles. . . . . . : 615 | Tsé-rsé. — La biologie et l'histoire des mouches Tsé- — Comité international des Tables annuelles physico- RS Te EN DRE AE» 8 | CM CE CT IS chimiques. cs ce. - - . < 832 | Ture. — Sur les gaz formés dans les tubes à décharge. 3 — Etudes sur l'établissement des tables de morta- — Sur l'occlusion du gaz résiduel et la fluorescence lité de population, mortalité professionnelle, mor- des parois en verre des tubes de Crookes . DS talité dans le cas d'invalidité . . à... . . gs — L'occlusion des résidus gazeux dans les tubes à TECHNIQUE. — Précis de Technique chimique, à l'usage vide et la production des bulles gazeuses à la sur- des laboratoires médicaux. RO Re EU UE D COR ONE ner ess ee Een A CENT — Précis de Technique histologique et embryolo- — Les courants continus produits par un champ al- AO AE Re OU NN MIRE 859 ternatif dans les tubes de Geissler. Pa EE PE GS 3 — Technique radiothérapique . . . . . . 892 — Une nouvelle espèce de lueur dans les tubes à vide, 685 TeINTURE. — Une théorie de la teinture , - «<< . 567 | Tusercurose. — Le traitement pratique de la tubercu- TéLéaurocoriste. — Téléautocopiste isosynchrone IOSERPUIMOTALTEN EE MO EN 380 pour la transmission télégraphique des dessins et TunBines. — Les turbines à vapeur marines. 377 de l'écriture à distance, ainsi que tous autres gra- phiques tracés où imprimés . DO EE EL CUS TÉLÉGRAPHIE. — La télégraphie sans fil appliquée à la U DIU O M Re ee ee SRE ET) — Une théorie des récepteurs et transmetteurs hori- Uxirés. — Travaux du Laboratoire central d'Electricité. zontaux en télégraphie sans fil . . . . . . . . . 9238 Recherches sur les Unités électriques fondamen- — Les progrès récents de la télégraphie et de la télé- tales . rose le ME MMA x Paré 162 PHONE An AR MERE Vi... TAN — L'unification des unités lumineuses . 529 — La télégraphie sans fil et les applications pra- AUDI LES IC IEC TIQUE EN Re 963 tiqueskdesjondes électriques... . MM ST. | UNI VERSITFS Personnel universitaire. 152, 205, 729, 9$1 — Les oscillations électro-magnétiques et la télégra- Uranium. — La production du radium aux dépens de He SOS LR NRA ER NN EE CT) l'uranium. SNS LS LE Nr 933 TÉLÉPHONIE. — Le problème téléphonique actuel en Uranus. — Sur le mouvement d'Uranus. SN 410 MERE à Er CMOS TC ES 55, 201 Urine. — Les réactions électriques de cerlaines bac- — Les progrès récents de la télégraphie et de la téries appliquées à la recherche du bacille tuber- TOÉPHOMEIS ANS UNE Con 252 culeux dans l'urine, au moyen d’un courant élec- — La Téléphonie sans fil. 56 TIQUE ANDRE ec CRE PRE COS TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1048 V W Vazence. — Les variations de la valenee des éléments Wezwirscura. — Nouvelles observations sur les Wel- avec le volume aux très hautes pressions . . . . 979 WISCRIA NS CENT Ur NES CR COIN Vareur. — La conductibilité spontanée de la vapeur non lumineuse de sodium. . . . . . . . . «+ . . 198 Vecreur. — Sur des distributions de vecteurs sur une X SULfACES LM NS EAN EN 564 VENIN.—VACEIOn duMvenin CCC re 430 | XÉvox. — Surla réfraction et la dispersion du krypton Vériré. — La vérité scientifique, sa poursuite. . . . 6U4 et du xénon et leur rapport avec celles de l'hélium Vianpes. — Le développement économique de la Ré- étidel'arson ONE CAN EEE publique Argentine. L'agriculture, l'élevage et l'in- dustrie des viandes congelées. . . . . . . . . . 20% Vigrarions. — Les idées nouvelles sur les vitesses Z relatives des diverses vibrations lumineuses dans l'étherintersider al RE 350 | Zoococe. — Manipulations de Zoologie et de Bota- — La résistance qu'opposent les fils de fer aux vibra- DIQUER ST eme tee DCE OUR tions électriques rapides. - . . . . . . . . . . . 524 — Revue annuelle de Zoologie. 1re partie : Zoologie Viscères. — L'élasticité des ballons de caoutchouc et générales MES Re ui PTE PRES desdvisceresicreux NE E-r cee- 970 — 9° partie : Zoologie spéciale. . . . . - . . Vo. — A propos du vol des oiseaux . . . . . . . 54 — VIll: Congrès international de Zoologie . . . . 196 238 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS‘ A Abeille de Perrin, 757. Abel (0.), 343. Abelous (J.-E.), 288, 336, 383, 558, 560, 681, 682, 156. Abraham (H.), 193, 471, 719. Abrami (P.), 1023. Abramovicz (E.), 292. Abry (R.), 682. Achard (Ch.), 49, 96, 146, 235, 336, 383, 429, 469, 560, 607, 682, 121, 194, 969, 1024. Adhémar (R. d'), 335, 376, 1016. Agamennone ((G.), 432. Agnew (J.-W.), 239. Agulhon (H.), 516. Aimé (P.), 721. Alamartine (H.), 429. Alcock (Mile M.\, 686. Alessandri (C.), 432, 687, 896. Alessio (A.), 432. Alexander (J.), 387. Alexeieff (A.), 721, 1024. Alezais, 97, 288, 384, 560, 650, 157, 1024. Allan (J.), 387. Allemand-Martin (A.), 193. Allen (H.-S.), 430. Alliot (H.), 826. Allmand (A.-J.), 1026 Almagia R, 292. Alomar (J.), 235. Alquier (L.), 193. AÏty, 686. ND © 12 Amblard Armodeo (K.), 6 Ancel (P.), 336, 383, . 933, 969. Andel {M.-A. he Andérodias (J (J. Anderson Es Anderson ( Andouard (P. Andoyer (H. 4 Andrade (J.), 8 André (Ch.), André (E.), 794. André (G.), 94, 147, 229, André-Thomas, 650, 193. Andrew (J.-H.), 758. Angeli (A.), 432, 893. Angelucei (O.), 681. Anglada (J.), 430, 469. Angot (A.), 49, 95, 144, 933, 337, 466, 605, 648, 681, 826, 860, 893, 894, 967. Anthony (R.), 193, 967. Antoniadi (E M.) 967. Apsit (J.), 648, 794. Arctowski (H.), 48, 286. Argenlieu (T. d'), 334. Arlo, 560. Arloing (F.), 49, 96. 234, 606, 648. 1 Les noms imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. ïs a chiffres gras reportent à ces ar- icles Arloing (S.), 1021. Armand-Delille (P.-F.), Armstrong (H.-E.), 430. Arnaud (A.), 719, 895. Arnoux (R.), 233, 236. Arsandaux (H.), 89%, 1023. Arthus (M.), 428, 566. Artini (E.), 292. Ascoli (M.), 49. Astier (P.), 515. Athanasiadis (G.), 894. Athanasiu (J.), 50, 756. Aubaret (E.), 722. Aubaret (M.), 607. Aube] (Ed. van), 9179, 1021. Aubert, 468, 470, 560. Aubert (P.), 969. Aubertin (Ch.), 96, 649, 1023. Aubin (Eugène), 556. Auché (A.), 96, 721. Auché (B.), 518,194. Audibert (V.), 1024. Audouin, 967. Audouin (E.), 1017. Audrain (J.), 428. Auer von Welsbach (C.), 147, 935. Auger (V.), 411, 967, 970. Auld (S.-J.-M.), 291, 522. Austerweil (G.), 46%. Autonne (Léon), 286, 316, 820. Auwers (A.), 563. Aynaud (M.), 96, 235, 682, 721. 469, Azambuja (L. d'), 128 , 468, 826. B Babes (AL.), 236, 336. Babes (4. 5250, 193, 236, 336, 608, 895. Babinski (Dr), 429. Babonneix eh 384, 469, 757, 969. Backman (E.-L.), 895, 933. Baco (F.), 233. Bacot (A.), 561. Badonnel (V.), 381. Baeyer (O0. von), 99. Bagard (P.), 681. Bagros (M.), 517. Baillaud (B.), 727. Baïllaud (Jules), 526. Baillehache LE de), 963. Bain (Miie Al.-M.), 652. Baïnier (G.), 96. Baire (R.), 2 Bairstow (D. JE 685. Baker (J.-L.), 759. Baker (Mlle S.-M.), 972. Balbiano (L.), 32) Baldet (F.\, 967. Ball (L. de), 935. Ballet (G.), 468. Balthazard (V.), 144. Baly (E.-C.-C.), 51, 521, 685. Bamberger (M.), 935. Banerjee (S.-C.), 197. Bar (P.), 1023. Baradue, 966. Barbier (Ph.), 257. Barbieri N.-A.), 681. Bardier ( 682, 756. 192, 335, 342, 466, 893, E.), 288, 336, 383, 558, 560, 681, | Battelli (F | Bechhold | Baudisch ( | Bauer (A.), | Beauchamp (de), Bardon (L.), 48. Barger (| (G.) , 386, GLS € Barillé (A.), 192, Barkhausen | H.), 723. Barlow (Sir T.) , 685. 972° Barnes (H.-T.), ‘684, 685, 757 Barnett (E. de B.) 686. Barral (E.), 644 Barratt (J.-0.-W.), 757 Barrau (J.-A.), 147 Barre, 605, 720. Barrée (M.), 894. | Barrett (W.-H.), 611. Barriol (A.), 90, 787, 8 Barrow (F.), 1027. Barroweliff (M.), 1026. Barry-Barnett (E. du), Barthe (L.), 605. Barthet (G.), 96. Bashford (E.-F.), 757 Bassal (L.), 384. 87. 341. Bataillon (E.), 517, 559. Bateman HER 33 Bateson (W.), 965. Bather LE À , 695. 288, 336, Baud !E.), A 516. O.), 973. Baudouin (A: ), 49, 95, 8,1339/0157; 911. 129, 156, 895. Battez (G.), a 607, 649, 194. Baubigny (H.), 684, 931, 967, 1022, 539, Baudouin (M.), 233, 605. Baudran (G.), 968. 1023, Bauer (E.), 48, 143, 641, 648, Baufle (P.), Baume (G.), 95, 102%. 516. 1024. 146, 389, 559, 606, 721, 194, 4021 933. Baume-Pluvinel (A. de la), 335. Baur (J.), 194. Baur {V.), 194. Baxandall (F.-E.), 795. Bayard (P.), 334. Bayer (G.), 935. Bayer (O. von), 388. Bayeux (R.), 606. Bayliss (W.-M.), 637, 685. Bazy (L.), 156. Beadle (C.), 896, 973. 648, 967. Beauverie (J.), 285, 518, 892, , 606, 194. Béchamp (Dr H.), 29 | Becker (Th.), 1028. Béclère (H.), 384. 295, 484 à 286. 4, 286, 334, 382, 429, Becquerel (J.), 47, 14 #71, 611, 719, 755, 196. Becquerel (P.), 192, Béguet (M.), 649. Méhal | ue 94, 144, 147, 191, 9A à 915. Beilby (GT), 8271. Bell (M.), 611. Bellion (Mlle M.), Belloc (G.), 894. Bellot, 335. Belot (Em.), 94. Beltzer (K.), 821. 560, Bemmelen (W. van), 148, 564. Bénard (H.), 194, 969, 607. 1024. Bénard (R.,, 606, 1023. Benndorf (H.), 935, 195, 287, 1050 , 147, 474. 652. Bennett (H.-G. 3enson (Mie M.) Bérard (L.), 429. Berg (A.), 286, 606. Berger, 290. Berger (E.), 335. Bergeron (A.), 1023. Bergeron (J.), 33%. Berget (A.), 94, 143, 466. Bergh (R.), 641. Bergonié.(J.), 50, 96, 288, 470, 719. Berestrand (OE.), 94, au 195. Berkeley | (Comte de), 9 521 1602, Berlemont (G.), 651. Bernard | A°); 381. Bernard (K Le 966. Bernard (R.), 970. Bernardi (A.), 687. Bernier (K.), 607, 933. Bernstein (S.), 516. Berthaut (Général H.-B.), 714 Berthelot (A.), 720. Berthelot (D.), 48. Berthier (A.), 330. Berthon, 193. Bertillon (J.), 469. Bertin (E.), 193, 236. Bertin (L - Le 94. Bertini (E.), 432. Bertraud (G., 191, 236, 516, 606, 719, 122. Bertrand (l[éon), 153 à 4%0. Bertrand (L.-E.), 145. Besnier (E.), 511. Besredka (A.), 146, 756. Besson (A.), 286, 381, Besson (Louis), 821. Besson (P.) . 893. Best (S.-R.), 99, 239, 386, Beurmann (de), 287, 288, 199. Bevan (E.-J.), 147. Bevan (P.-V.), 971. Bezancon (F.), 969, 970. Bezdzik (A.), 292. Bialobjeski (T.), 681, 720. Bianchi (E.), 291. Bianchi (L.), 291, 687. Bickel (A.), 415. Bidot, 116. Biehler (A. von), 612. Bierry (H.), 96, 234, 382, 383, 384, 120) M124/%199: Bigeard {R.), 1020. Bigourdan (G.), 605, 931. Billard (A.), 48, 144, 199, Billard (G.), 682. Billon-Daguerre (A.), 286, 932. Binet (E.), 430, 966. Binet du Jas-oneix, 1025. Bion (J.), 856. Biot, 432. Birkeland (K.\, 94, 428, 558. Birkeland (R.), 516. Bispham (J.-W.), 339. Blaauw (A. -H.) 760. Blache (R.). Blaise (E.-E.). : Blaizot (L.), 895, 932. Blanc (G.), 47, 195. Blanc (G.-A.), 432. Blanchard, 560. Blanchetière (A Blanquies (Mile), 647. Blaringhem (L.), 48, 381, 383, 429 Blayac (J.), 381. Bloch (Eugène), 97, 286, 426. Bloch (Léon), 46,97, 335, 120, 931. Blondel (Dr), 287. Blondel (Georges), 891. Bloxam (W.-P.), 473. Bobes ($.), 50. Bochet, 236. Bode (G.), 240. Bodroux (E. ), 606. Bodroux (H.), 756 30eke (H.-E.), 562. Boeke (J.), 612, Boex-Borel (J.-H.), 557. 467, 648. 429, 649. 469, .), 193,518, 721, 156, 194. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Bobhn (G.), 96, 969, 1024. Bohr (Harald), 336, 381, 649, 824, 933, 143. Bobr (N. d, 130. Boïdin (L.), 146, 969. Boinet [E> 383, 429, 517, 560, 648, 650, 860, 932. Bois (D. WTB6. Boiteau (G.), 51. Boiteau (M.), 231. Boldingh (J.), 796. Bolk (L.), 796. Bommelen (K.-J. van), 148. Bondet, 720. Bonfigli (B.), 292. Boufigh (Mlle R.), 687. Bongrand, 194. Bonjeau (Ed.), 647. Ponnamoun(se); 288, 383, 151, 1024. Bonnet, 722. Bounet (P.), 648, 650. Bonnier (G.), 429. Bonnier (P.), 234, 324 à 328, 334, 428. 606.' Borcea (J.), 893, 894. Bordage (E.), 48, 95. Bordas (K.), 428, 1021. Bordas (L.), 48, 94, 234. Bordet (E.), 649. Bordier (H.), 892. Borel (E.), 345 à 324, 605, 78 Borel (F.), 192, 287. Borgo (A.), 292. Borrel (A.), 49, 95. Borrelly (A ), 719, 968. Bory (L.), 146, 233, 607, 1024. Bosler (J.), 381, 647, 931. Bottazzi (F.), 432, 687, S96. Bottomley ( W.-B.}, 685. Botlu (H.), 607. Bouasse (H.), 643. Bouchard (Georges), Boudier, 381. Boudouard (O ), 191, 192. Bouet (G.), 96, 429, 469. Bougault (J.), 47, 50, 233, 237, 468, 561. Bouin (P.), 336, 383, 429, 469, 933, 969. Boulaugier, 235, 470, 794. Boule (Marcellin), 47, 334, 516, 559. Boulouch, 793. Boulud, 649, 893. Bouman (Z -P |, 563. Bouquet de la Grye (A.), 334, 826 Bourdier (L.), 47, 50. Bourgade de la Dardye (E. de), 41. Bourgeois (Lt-Colonel), 511. Bourget (H.), 558, 606, Bourion (F.), 144, 471, Bourquelot (Em.), 755. Bourrey (Georges), 463. Boussac (J.), 466, 968. Boutroux (P.), 48, 9%, 191, 286, 376, 719. Bouty (Ed.), 604. 189. 681. Bouveault (L.), 44, 47, 191, 517, 559, 651, 722. Bouvier | E.-L.), 516, 647, S03 à SOS, 894, 930. Bouyssonie (A.), 48. Bouyssonie (J.), 48. Boveri (P.), 49, 470. Boyd (D.-R.), 973. Boyé (G.), 288, 383, 721, 895, 933. Boyer (Jacques), 43, 554. Boyet, 336. Boyle (Mile M.), 239. Boylston (H.-M.), 889. Bradford (J.-R.), 339. Bragg (W.-H.), 521. Branca (W.), 474. Brandeis (R.), 470, 722, 970. Branly (E.), 48. Brasil (L.), 933. Bratu (G.), 516. Brault (J.), 792. Braun (K.), 141. Bréguet (Louis), 384. Brester (A. ), 344, 495 à 502. Breton (M.), 49, 518, 1023, Brezina (E.), 688. Bridel (M. ), 159: Bridré | .), 288. Briges (J.-F.), 474. Brillouin (M.), 193. Brimont (E.), 121. Brin (L.), 969. Briner (E.), 559. Brissaud (EL. Brissemoret (A.), Brizard (L.), 558, 605, Broca (A), #8, 512. Brochet (A.), 51, 231. Brocq PA 192. Broek (A.-J. _P. van den), 200. Broglie (M. de), 467, 516, 539, 605, 608, 968. Brommer (A.), 612. Brouiewski (W.), 94, 967. Brouwer (H.-A.), 468, 196, 1022. Brouwer (L.-J.-E.), 388, 564, 196. Brown (Adrian-J.\, 430. Brown (H.-T.), 473. Brown (J.-C ), 473. Bruce (Sir D.), 339, 517, 157, 974. Bruckner (J.), 50, 193, 337, 608. Bruel (G.), 516. Bruhat (G.), 287. Brumpt (E.), 682, 721. Brunet (Louis), 92, 200, 52%, 612. Brunhes (Bernard), 43. 48, 393 à 406, 511, 602, 648, 789, S21. Bruyant (L.), 95, 96, 721. Büchner (E.-H.), 200, 796. Bucking (H.), 890. Buckmaster (G.-A.), 1025. Buguet (A.), 967. Buisson (H.), 335, 381, 468, 647, | Buitendyk (F.-J.-1.), 564. | Bull (L.), 968. | Bum (#.), 935. Bunau-Varilla (Ph.). 467, 605. Burali-Forti (C.), 291, 432. Burck (W.), 976. Bureau (E.), 143. Burgess (G.-H.), 467: Burk (W.). 148. Burke (Mile K.-A.), 521. Burt (F.-P.). 934. Burton (C.-V.), 99, 1026. Busignies (G.), 755. 1 Busquet (H.), 49, 145, 146, 235, 288,518, 607, 721, 756, 1024. Busquet (AA 286. Butler (C.-P.), 195. Buttle (B.-I1.), 972. Büty (de), 719. Buytendijk (F.-J.-J.), 976. 235, 429, 511, 724: 50, 334, 517, 895. 968. C Cahen (E.), 934. Caille (E.), 558. Cain (J.-C.), 99, 473, 1027. | Caldwell (K.-S.), 341. Callendar (H.-L.), 238. Calman (W. co ; 929. Calmels {Il.), Calmette (A), Ha 281, 119, 931, 932, 969, 1023. | Calmette (H.), 94 Calot (F.), 142. Calugareanu (D.), 50. Calvet (L.), 607. Cambi (L.), 432, 687. Cameron (A.-T.), de Cameron (W.), 522. Cammidge (J.), 757. Campbell (A.), 98, 562, 685. Campbell (Norman-Robert), 425. Campetti (A.), 896. Campredon (L.), 229. Camus (J.),49, 50, 191, 429, 51, 649, 650. Camus (L.). 606, 1024. Cantacuzène (J. . 193. Cantaloube (P.), 969. Cantor (Moritz), 43. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1051 Canu (F.), 234, 382. Chree(C:), 238: Crudeli (N.), 687. Cany, 335, 382. Christiansen (C.), 936. Cruveilher (L.), 607. Capgras (J.), 950. Chudeau (R.), 963. Cuboni (G.), 432. Capitan (Dr), 559, 649. Chwolson (D.-0.), 821. Cuénot (L.), 8 à 44, 47, 143, 146, 603, Carano (E.), 896. Ciamician (G.), 432, 687. 825, 966, 1021. rer 682, 721. Cirera (D.), 1022. Cuminal (L.), 515. Cardinaal (3), 611. Cirera (R. ), Cumming (Al.-Ch.), 973. Cardot (H.), 652. | Ciuca (M:), Le 936. Cunningham (James-P.), 26 à 30. Carhart (H.-S.), 685. Ciusa (R.), 687, 896. Cuthbertson (C.), 238. Carini (A.), 1023. | Clarke (G. jun), 197. Cuthbertson (M.), 238, Carlbaum (T.), 376. | Clarke (H.-T.), 521. Cyon (D: E. de), 230. Carnot (P.), 145, 146, 235. | Claude (Gevrges), 425, 518, 519, 558, Czuber (E.}, 462. Caron (M.), 468. | 928 à 925, 931, 968. Carougeau (J.), 970. Claude (H.), 146, 383, 650. Carpentier | (AIR), 467. | Clausmann, 651. D Carpentier (J.), 1022. Clément (L.), 860. Carrau (A. Ne 102%. Clément (P.), 681, 755, 193. Dabrowski, 793. Carré (P.), 143, 234, 235, 466. | Clerc (A.), 96, 146, 559, 649. Dafert (F.-W.), 688. Carrel ( al), 336, 383. Clerc (L.-P.), 97. Daïins (H.-H.), 614. Carrus ŸS. ), 286, 968. | Clerget (Pierre), 45, 54, 151, 294, 346, Daire, 755. Carulla (ŒE.J.-R }, 611. 392, 480, SA à 548, 569, 616, 655, Dakin (H.-D.), 686 Carvallo (J.), 233. | 656, 692, 716, 765, 929. Dalton (J.-P Caspari (Ed, ), 820, 887. | Clerici (E.), 432. Danaila (N.), 932. Castaigne (J.), 607. | Clewer (H.-W.-B.), 197, 686. Dangeard (P.), 143, 517, 932. Castel (I. du), 96. Cligny (A.), 381. Daniek (M.), 1028. Castellana (N:), 432, 896. Clough (G.-W.), 341. Daniel (L.), 233, 1022. Castelneau (P:), 19. Cluzet (J.), 38%. Dani-lopolu (D.), 50, 195, 236, 337. Castex (M. R.), 384. Cobb (J. W.), 611. Danne (J.), 192. Cauchoix (Al.), 285. | Cocksedge (H.-E.), 51. Danlony, 191. Caudrelier (E.), 468, 968. | Coggia, 719. Darbishire (A.-D.), 4 Caullery (M.), 830, S45 à S54, S33 | Cohen (E.), 759. Darboux (G.) LISE a 33, 334, 335, 967, à SS6. Coker, 340. 968. Caustier (E.), 205. Col, 558. Dareste de la Chavanne (J.), 287, 155, Caven (R.-M.), 611, | Colani (A.), 719. 756. Cawadias, 146. Colardeau (E.), 644, 715. Darier (J.), à 4, 792. Cayeux (L.), 1023. Colas (A.), 194: Darling (R.- Gi 340. Cazeneuve (P.\, 1,5, 192. Colin (A.), 468, 651. Darmois, 931,1025. Ceaparu (Mile V.), 650. Colin (E.), 428. Darwin (CRT 609. Cecioni (F.), 687. Colin (H.), 559. Darzens (G.), 290, 335, S94, 1021. Cerletti (U.), 292 687. Collie (J.-N.), 51, 413. Daublebsky von Sterneck (R.), 342. Cernovodeanu (Mle P.), 193, 755. Collin (B.), 517, 931, 1022. Daumézon (G.), 288. Chaboseau (A.), 862. Collin (R.). ENS 650, 194. Dautriche (H.), 968. Chaboseau-Napias (Louise), 693, 901. | Colomba (L.), 687. Dautzenberg (Ph.), 931 Chabrol (E.), 682, 756, 969. Colson (A.), 191, 287, 381, 467, 1022. David {P.), 648. Chalmers (S.-D.), 686. Comandon (J.), 968. Davies (H.), 196. Champy (Chr.) BEN 235, 121, 1024. Comas Sola (J.). 48, 144, 826, 1022. Davies (M. -J.-P.), 5 Chancel (K.), 5 Combe (E.), 1023. De SI. ) Chanoz (M.), 6, 286, 428, #93. Combes (R.), 335. ), 686, 934. Chantemesse (A.), 145, 192, 287, 427, | Comte (C.), 193. À 229, 473, 913 468, 1023. | Conor, 337, 384. Debesson (G. ASUS Chaplet (A.), 889, 1017. Conseil (E.), 383, 756, 793. Debierne (A.), 334, 468. Chapman (D.-L.), 197, 522, 972. | Constantino (A.), 896. Debré (R.), 539, 601, 682, 156. Chapman (J.-C.), 971. | Contardi (A.), 292. Defant (A.), 100, 594. Chappellier (A.), 383. | Conte (A.), 235, 682. Deflandre (C.), 145. Charabot (E.), 426, 857. Cooper (W.-F.), 603. Degrais, 517, 645. Charcot (J.), 429. | Cooper (W.-R.), 238. Dehaut (G.), 757, 895. Chardonnet (de), 683, | Copaux (H.) h 231, 281, 471. Deherme (Georges), 141. Charles-Roux (Francois), 189. Corbino (O M.); 681. Déjerine (A.), 650. Charpentier (A.), 70. Coruec (E.), 894. Déjerine (J.), 650. Charpy (G.), 286, 382, 6417. Cornet (Paul), 190, 465. Déjerine-Klumpke (Mm:), 793. Chartier, 607. | Costa ($S.), 757. Delachanal (B.), 47, 286, 287. Chassy (A.), 648. | Costantin (J.), 143. Delacroix (G.), 891. Chatelet (A.), Le: | Coste [(M.), 894. Delage (Y.), 4$, 234, 968. Chattaway (F.-D.), 197,341,473,522, 610. | Cotte (J.), 91. Delanoe (M.-P.), 193, 235, 288, 429, 559. Chatton (Ed.), 469, 607, 650, 933. Cottet, 966. Delbet (P.), 860. Chaudier (J.), 719. Cotton (A.), 48, 223 à 22%7,378,438 | Delbruck (K.), 723. Chauffard (A.), 383, 649, 969. | à 443,518, 755. Delcourt (A.), 384, 469. Chausse (P.), 288, 649. | Coudray (Dr), 235. Delebecque (A.), 1022. Chauveau (A.), 266. | Courcoux (A.), 192, 607. Delépine (M.), 41, 50, 286, 338, 471, 648, Chauvel, 49. Courmont (J. . 7192, 234,287, 382, 681,75. 719, 729, 194, 931, 970, 1022. Chauvenet (E.), 146, 468, 559, 720. Coutière, 336. Delgado (J.-F.-Nery), 426. Chazarain-Weteel (P.), 650. | Coward (H.-F.), 341. Delherm, 192, 429, 718. Chazy (J.), 143, 516, 605, 860. | Coward (Mie W.-E.), 388 Delille (A.), 145. Chéneveau (C.), 232, 931. Cowper- oo (S.), 474. Delore (X.), 335. Chéron (D'), 1023. Coyne (M.), 96, 194. Delorme (E.), 969. Chetwynd (L.), 339. Cranwell, D Delvalez (G.), 97. Chevalier (Aug.', 681, 793, 893. Craven, 336. Demangeon (A.), 858. Chevalier (J.), 193, 334, 649, 756. Crémieu (V.), 229, 467, 894. Demenge (Emile), 643. Chevalier (P.), 1023. Crespin, 95. Demerliac (R.), 429. Chevallier, 143. Crocco (G.-A.), 687. Demoll (R.), 559. Chevrier, 970, 1023. Crolbois (J.), 756. Demolon (A.), 143, 681. Chevroton (Ml!e L.), 288, 649, 932. Crompton (A.), 934. Demoulin (A.), 48, 191, 233, 558. Chiarini (V.), 432, 687. Crookes (Sir W.), 339. Demoussy (E.), 932, 1021. Chick (0.), 291. Cross (C.-F.), 1 AT: ” Démos (E. h 128. Chifflot, 233, 382. Crossley (A. W.), 99, 239, 387, 473, 521, | Dendy (A.), 652 Chillemi, 466. 610. Denham (W. + ), 652. S Chofardet (P.), 606. Crowther (J.-A.), 385, 684. Denigès (G.), 144, 191, 193, 233, 286. Choffat (Paul), 284. | Cruchet (R.), 191, 333, 825. Deniker (J. ÿ 2, 51 332, 615. 1052 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Denjoy (A.) Depéret (C Deprat, 968. Deprez (M.) Derrien ( e 192. Desaint (L.), 516. Desch (C.-H.), 197, 686. Desfosses (P.), 285, 718. Desguin, 432. Derlares À (H.), 194, 381, 428, 468, 719, 26. Despaux (A.), 229. Devanlay (G.), 242, 435. Devaux, 517. Devaux-Charbonnel, 234, Dhéré (Ch.), 96, 466. Dienert (F.), 330, 463. Dienes (Paul), 48, 334, 1021. Dienes (Me V.), 466, 1021. Dieulafoy (G.), 49, 517. Diguet (L.), 334. Dinescu, 558. Dintzl (E.), 342. 428, A7, 719, 755, 931, 1022. -) 289, 558, 931. Dixon (A.-L. h 151. Dixon (H.-B.), 341, 473 Dobbie (J.-J), 473. Dobson (M': M.-E.), 1027 Doelter (C.), 343. Dobrn (Anton), 829. Dominici, 606, 718. Donau (J.), 935. Doncieux (Louis), 645. Donder (Th. de), 286. Donnan (F.-G.), 522. Donovan (W.), 796. Dony-Hénault (Octave), 948 à 956. Dopter (Ch.), 518, 649, 682. Dorée (Ch.), 386, 412. Dornic, 155. Dorssen (S. van), 196. Douetteau, 560. Doumer (E.), 168, QE Doutté (Ed.), 718. Douxami ARS ), 514. Dow (J.-S.), 972. Doyon (M.), 96, 234, 235, 288, 336, 381, 384, 429, 469, 559, 560, 606, 607, 650, 910. 1023. Drach (J.), 47, 143, 466. Drago (C.), 432. Drago (E.), 292. Dreaper (W.-P.), 291. Drew (G.-H.), 828. Dreyfus (L.), 336, 560, 932. Droogleever-For Cuyn (A.-B.), 564 Drysdale (C.-V.), 238. Drzewiecki (D.), 7334, 826. Drzewina (Mile A.), 383, 384. Duane (W.), 598, 606, 683. Dubard (M.), 720. Dubois GE 388. Du Bois (H.-E.-J.-G.), 796. Dubois (R.), 641. Duboscq (0.), 144, 492; 334,50 Dubreuil (G.), 50, 14 5 146, 238, 326, 468, 518, 682, 721, 794. Dubreuil (L.), 47, 560. Dubrisay (R.), 381, 681, 793. Duchacek (F.), 516. Duclaux (E.-H.), 890. Duclaux (J.), 191, 334. Ducomet, 284. Ducrocquet, 718. Ducru, 1025. Duddell (W.), 238, 562. Dudgeon (L.-S.), 196, 562. Duffield (W.-G.), 98, 431. Dufour (A.), 94, 234, 286, 335, 470, 471, 605, 968. Dufour (Marcel), 410, 608. Dufour (R.), 193. Duhem (P.), 554, 866 à 8233, 927. Dulac (Jules), 46. Dumont (J.), 467, 1023. Dumont (Th.), 517. Dunlop (M.), 290. Dunn (F.-P.), 341. 191, 23%, 287, 381, 429, Dunod, 142. Dunoyer (L 10 331,963. Dunstan (A. Œ Ga 034. Duparc (L ), 140, 606. Dupérié (R.), 469, 649. Dupont (Ch.), 720. Dupont (G.), 559. Duvont (J.), 290. Dupré, 860. Durey, 718. Durig (A.), 342. Duruy (Cre V.), 1.020. Dutta (J.-M.), 973. Duval (H.), 755. Dybowski (J.), 145. Dyke (G.-B.), 385. E Eastburn (W.-J.S.), 934. Easton (C.), 564. Eberhardt, 120. Eckenstein (K.-E.), 518. Eder (J.-M.), 524, 935. Edgerton (J.-P.), 522. Edington (A.), 196. Edkins (J.-S.), 195. Edwards Co 758. Effront (J.), 14 Egerton (A.-C. 6. ), 239. Eginilis ( D.), 233, 334, 605, 647. Ehlotzky (F.), 933. Ehrenhaft (K.), 100, 343. Eitfel (G.), 43. Einthoven (W.), 388. Eisenmenger (Gabriel), 92, 934% Elias (C.-J.), 563. Elias (G.-J. }, 515 799! Ellis Le -W.) ), 412, 4026. Emich (F.), 935. Emile- Weil (P.), 288, 383, 721, 895, 933. Euwslie (B.-L.), 473. Engelmann (Th.-W.), 558 Enklaar (C. -J.), 759. Eredia (K.), 687, 896. Erfle (H.), 432. Escard (Jean), 662 à 669. Esmein (Ch.), 146. Estanave (E.), 14%. Estaunié (E.), 56. Esteva (G.), 286, 334. Etard cé DOUTE CL Etévé (A.), 394. ne (G.), 235, 470, 608, 794. Euler (H.), 856. Ewan (Th.), 197. Ewart (J.-C.), 821. Ewing (J.-A.), 188. Ewins Re 386, 934. EE (P. M \ pe F Fabre (G.), 286, 33%. Fabry (Ch.), 234, 381, 468, 647. Fabry (E.), 187, 931, 1022. Fabry (L.), 681, 720. Fagerholm (Erik), 554. Fantham (H.-B.), 1026. Fargue (L.), 1016. Farman (M.), 191. Fassin (Mile L.), 336. Faucon (A.), 95, 755. Faucon (M.-H.), 467. Faure (L.), 558. Fauré-Frémiet (E.), 287, 560, 681, 682. Faurot (L.), 286. Fauvel (P.), 518, 559. Fava (A.), 682, 756. Favre (J.), 893. Favre (M.), 287. Fayet, 337, 384. Federhofer (K.), 688. | Féry (Gh.), 193, 516, 648, Fehr (H.), 881. Feldzer (Mile), 606. Fenton (H.-J.-H.), 686, Fernbach (A.), 793. Ferns (J.). 1027. Ferraboschi (F.), 652. Ferrero (R.), 896. Ferreyrolles, 649. 233, 335, 382, 498, 461, 4710, 931, 1025. Feuillié (E.), 49, 50, 336, 559: Feyrey (Francois), 752. Fichot (E.), 679. Fielding (W.), 934. Fiessinger (N.), 193, 288, 336, 383, 599, 560, 682, 721. Filassier (A.), 145, 932. Findlay GR 521, 522, 686. Finger (H }), 1027. Finkelstein (Mie M.) ), 382. Fionemore (H.), 341, 973. Finzi (G.), 607, 650.” Fischer (E.), 123. Fischer (H.), 382, 647. Fischtenho!z qe A.), 518. Fitzgerald (E.), 5 Flaumarion bauiille), 676. Flaschner (O.), 249, 341. Flateau (E.), 123. Fleig (C.), 49, 429, 724, 894. Fleming (J.-A.), 385. Fleury (M. de), 469. Fleury (P.), 794. Fliche (P.), 144, 191. Florence (J.), 382, 681, 755, 793. Flurscheim (B.). 238, 686, 1027. Foa (Mile V.), 681. Fodor (A.), 719. Foix (Ch.), 383, 429, 607, 321: Fontenay (G. de), 143. Fontes (A.), 469. Forcrand (de), 647, 681, 931, 967. Forster (M.-0.), 239, 341, 413, 521, 973. Fosse (R.), 605. Fouard (E.). 50, 234, 338, 684. Fourneau (Emile), 641. Fournier (L.), 286, 381, 467, 648. Foveau de Courmelles, 468, 559. Fowler (A.), 827. Fox (J.-J.), 473. Foy, 143. Franchimont (A.-P.-N.), 976. Francis (F.), 934. Franck (GA 1027. Franck (J.), 431, 124. François (M.), 144. Francois-Franck (Ch.-A.), 50, 234, 559, 607. 682, 969. Frankland (P.-F.), 1027. Fraps (G.-S.), 652. Fraser (Mile M.-T.), 685. Fraser (Sir Th.), 430. Kréchet (M.), 143, 191, 466. Fredericq (Léon), 203 à 713, 743 à 250. Freedericksz (V.), 1022. Freundler (P.), 147, 191, 790. Friedlander (b.), 200, 292, 343. Friend (J.-A.-N.), 386, 522, 972. Frischauer (L.), 468. Fritsch (A.), GUS. Frobenius (G.), 523. Früschel (P.), 935. Frouin (A.), 49, 191, 605. Fry (W.-B.), 1026. Fubini (G.), 432, 687. Fujii (K.), 758. Fuller (W.-P.), 562. Furcht (M!!° M.), 688. Furet, 966. Fürstenau (R.), 100. G Gacogne, 468. Gagneux (Ch.), 1024. Gagnière-Hédon, 193. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1053 Gaillot (A.), 335. Gougerot (II.), 193, 287, 288, 336, 429, Gain (Edmond), 93, 192, 230, 648, 794, 121, 156, 194, 1023, 1024. H Galbrun, 191, 382, 1022. Gonget A.), 288. Galesesco (P.), 608$. Gouin (A. ), 146. Haag (J.), 334, 428, 968, 1022. Gambier (B.), 648. Goursat (E.), 144, 286, 335, 468. Haas (P.), 197. Gams (A.), 719. Goutal (E.), 428. Hackel (R.), 934. os (A.), 687. Gouy (G.), 233, 334, 155, 894, 967. Hadamard (J.), 191, 329, 317, 462, 962, Garde (G.), sis 606, 648. Graaff-Hunter (J. de), 520, 1016. Einer ere j 973. Grace (H.), 562. Hadfield (Sir R.-A.), 685, Gardner (J.- 472, 685, 1025, 1026. Gradenwitz (A.), 4, 52, 100, 105, 240, | Hadwen (S.), 828. Gardner (W. . 51. 342, 388, 432, 523, 563, 656, SOA à | Hagen (E.), 523. Re de Montcetz (A.), 233. 703, 7123, 124, 728, 164, 802, 936, | Hahn (O.), 341. Gariel (C.), 1023. 974. | Haiser (K.), 147, 343. Garland (Ch.-S.), 973. Gradinesco (A.), 156. Hake (C.-N.), 611. Garner (F.-B.), 934. Grafe (V.), 612, 935. Hale (G.-E.), 428, 601, 652, 685, 195. Garnier (Ch.), 650. Gramont de Guiche (A. de), 467, 720, | Hall (A.-D.), 685. Garnier (L.), 608. 1017. Haller (A.), 143, 144, 147, 515, 559, Garnier (M.), 50, 288, 649, 650. Grancher (Dr), 468 606, 648, 690, 794, 798. Garnier (R.), 516, 648, 1022. Granderye (L.-M.), *645. Hallez (P.), 191, 932. Peeion pue Grandidier (G.), 1022. | Hallopeau (H.), 894. Garrett (A.-E.), 40. prendieen (F.), "334 967. Halluitte, 428. Garrigou , 606. Grant (K.), 826. Hamburger (H.-J.), 148. Gascard (A.), 286. Grassi (B.), 687. Hamerton (A.-E.), 339, 757, 971. Gasperi (F. de), 969. Gravé (D). 931. | Hampshire (Ch.-H.), 610. Gatin (C.-L.), 426. Gravier (Ch.), 50, S4 à 89, 192, 559. Hamy (M.), 47, 719. Gatin-Gruzewska (Mme Z.), 286 Gray (A.-A.), 196. Hancu (V.), 756. Gaubert (P.), 94, 645, 7193, S14 à Gray (J.-A.), 651. Hann (J.), 1028. S19, 893, 967, 1021. uray (R.-W.), 386, 610, 934. Hanni (L.), 100. Gaucher (E.), 351, 969. Green (A.-G.), 759. Hanns, 285. BEUERER (1),-95,. 96, -1921383; "469; Green (E.), 972. | Hanriot (M.), 145, 191, 234, 287, 338. 682 Greenwood (H.-C.), 758. Hansen, 756. Gaudechon | (H.), 191, 647, 749, 756. Gregory (A.-W.), 912. Hansen (C.), 516. Éndachenr (Dr), 721: Gréhant (N.), 148. 650, 720. Ianson (E.-K.), 473. Gaujoux (E.), 235, 336, 383, 430, 649, | Greinacher (H. À 324. Harden (A.), 685, 827. 194. Grenet, 650. Hardy (W.-B.), 340. Gault (H.), 144, 466. Griftin (M.-L.), 291. Hariot (P.), 755. Gautier (A.), 145, 192, 232, 648, 651, | Griffiths (B.-M.), 896. Harrison (W.-J.), 195. 682, 720. Griffiths (Ch.), 681. Iarrop ( 687. Gautier (CI.), 49, 96, 193, 336, 381, 384, | Griffon (Ed.), 648. Harter (A.), 288, 966. 429, 469, 559, 560, 606, 721, 895, 969, | Grigaut (A.), 469. Hartley (E.-G.-I.), 99, 524, 652. 970, 1023. Grignard {V.), 287. Hartley (H.), 611. Gautrelet (J.), 337, 428, 410, 518, 607, | Grimbert (L.), 517, 607, 933. Hartley (W.-N.), 99. 194. Grossmann, 428. Harvier ( P.), 384, 169, 518, 969. Gay (L.), 516. 894. Groud (Ch.), 939. Hauchamp (L.), 603. Gebhard (N.-L.), 341, 522. Grumbach (A.), 967. Haudié (E.), 463, 963. Gebhard (Emile), 46. Grunmach | (L.), 974. Haug (E.), 48, 334, 516, 517, 558, 606. Gehrcke (E.), A3, 974: Gruvel (A. \ 967, 1021. Hauser (F.), 100. Geiger (H.), 795, 796. Gruyer, 288. Havelock (T.-H.), 237, 684. Geikie (Sir Archibald), 339, 530 à | Gruzewska (Mme Z.), 755. | Haworth (W.-N.), 341, 975. 332. Gry (A.), 968. Hawthorn (Ed.), 337, 410, 757. Geitler (J. von), 688. Guccione (A.), 518, 721. Hay (J.-G.), 011, 933. Gentil (L.), 467, 516, 605. Guéguen (F.), 146, 605, 649, 650, 967, Heape (W.), 338. Georgewitch (J.), 933, 969, 970. 969. Hébert (A.), 234, 426, 719. Géraudel (Em.), 336. Guépin (A.), 1 a Heckel (Ed.), 466, 967, Gerber (C.), 47, 95, 97, 193, 234, 988, | Guérault (P.), 55 | Hédon (E.), 429, 469. 331, 384, 428, 4170, 560, 650, 681, 756, | Guerbet (M. p 133 237, 334, 681, 968. Heim (K.), 234. 151, 193, 931, 968, 1024. Guérin (C.), 94 287, 719, 931: Heit, 516. Gernez (D.), 286, 428, 681. Guichard (C.), 428, 466, 7516, 558, 1022. Helbronner (P.), 558, 931. Gessard (C.), 558, 560. Guichard (M.), 41, 141, 382, 889. Hellebrand (E.), 342. Gèze (J.-B.), 334. Gnieysse-Pellissier (A.),, 366 à | Helmert (R.), 475. Giacobini, 931. cirire HORIEANR (F. von), 292. Giaja (J.), 234, 384. Guignard (L.), 681, 756. | Hemsalech | Es )» 335. Gignoux (M.), 94. Guillain (G.), 49, 933, 1024. Henderson | El ), 239, 522, 934. Gilbert (A.), 49, 95, 145, 384, 607, 649, Guillaume (Ch.-Ed.), 194. Henderson (l. is à, 561. 650, 682, 156, 933, 969. Guillaume (J.), 47, 48, 191, 605, 647, | Hendrick (J.), 759. Gill (H.-V.), 685. 648, 894. Henneguy (F.), 144 Gilling (Ch.), 99, 387. Guillemard (A.), 969. Ilenri (V.), 286, 720, 155. Gilmour (R.), 934, 972. Guillemard (H.), 605. | Henriot (E.), 382, 648. Gimel (G.), 47, 826. Guillemin (G.), 41. Henry (A.), 145, 192, 336. Girard (P.), 428, 467, 694 à 304. Guillemin (H.), 1020. Henry (L.), 41. Girard-Mangin (N.), 649, 682. Guilleminot (H.), 48, 144, 287, 604, 892. | Hensel (K.), 961. Giraud (J.), 382. Guillet (A.), 860. Henvel (G. -C.-J. van den), 344. Gittins (J.-M.), 239. Guillet (L.), 681, 889. Hepperger (J. von), 688. Glangeaud (Ph.), 245 à 251. Guilliermond (A.), 48, 382, 260, 607, | Herchfinkel (H.), 720, 755. Glasson (J.-L.), 521. 682, 755. Herelle (F. d'), S95. Glausserand, 469. Guilloz (Th.), 144, 146, 235, 288, 4170, | Heritsch (K.), 292. Gleditsch (Mlle E.), 558, 720. 650. | Hérouard (E.), 48, 191, 467 Gley (E.), 932. Guinchant (J.), 606, 793, S60. | Hertwig (O.), 723. Glover (J. b 932: Guiraud, 334. Herz (W.), 963. Anere (A ), 234. Guisez, 192, 429. Herzfeld (Mie S.), 935. Gobbi (E a 466. Gunn je A. h, 430 llerzig (J.), 688. Godeaux (L.), 343. Guntz (A.), Hesse (E.), 720. Godfrin (J.), 92. Guye (C. eo 44, 1022. Heurteaux (A.), S60. Gold (E.), 339. Guye (Ph.-A.), 893. Heuse (W.), 240. Goldsbrough (H.-A.), 197. Guyénot (E.), A 383, 469. Hewitt (J.-T.), 386, 686, 933, 972. Goldstein (M. 50, 236. Guyer (M.-F.), 4 Hewlett (R.-T.), 828. Gonnard (René), 890. Guyot (A.), ile, ge. 334, 381, 931, 968. Heydweiller (A.), 240. Goris (A.), 94, 156, 968. Gy (A.), 49. Heywood (H. Bryon), 329. 1054 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Hibbert (Mio E.), 291, 972. Hibbert (G.-S.), 973. Hibbert (H.). 290, 341, 473. Hickmans (Mile E.-M.), 522 Hicks (W.-L.), 386. Higgins (S.-H.), 291. Hildebrandsson (H.-H.), 558, 894. Hilditch (P.), 99. Hilditch (T.-P.), 239, 934. Hillebrand (C.), 1028. Hillebrand (K.), 524. Hilpert (S.), 974. Iimmelbaur (W.), 342 Hincks (A.-R.), LR 931. Hivorichs (G.-D.), 4 Hiorns (A.-H.), 562. Hirst (S.), 474. Hiadik (J.), 292. Hobart (H.-M.), 330. Hochreutiner (G.), 717. Hodgson (H.-H.), 51 Hœhnel (F. von), 343, 612, 935. Hænigschmid (O.), 612. Hoernes (R.), 100, 524 Hoff SL -J. van AE Holl (M 4, 688, < Hollard (A. Holleman à. -F. \, Holley (C.-D.), 474 Holmes (J.), Vo Holt (jun A.), 51. Hope (E.), 933. Hostinsky B.), Houllevigue (L.), 30. 148, 200. 3, Do8. à 948. Houston (R. A) ), 828. Howard (B.-F.), 291. Hübner (J.), ï Aa | Huchard H), 517 Hue (E.), 93. Huerre (J.), 559. Huerre (R.), 191, 234, 466. Hughes (L.-F.), ru Tuer (L.), 144, 648, 7 à 845. Hulton (H.-F.-E.), 759 Humphreys (T.-C.), 239. Humphries (H.-B.-P.), 610. Hunt (H.-A.) QE Huntly (G. EN ), Æ Huon, 337, 384. Hupka (E.), 123: Hurmuzescu (D Hurtley (W.-H ji Hutinel, 606. Huygens (Ch.), 139. Hyad (Al.), 652. Idrac, 967. Ibering (H. von), 190. Ihering (BR. von), 190. Ikonnikoff (P. 193. Imbert (A.), 757, 894. Inglis (IH), 686. Irvine (J.-C.), 386, 652, 934. Isaac (Mie F.), 521. Iscovesco (H.), 721, 751. Isherwood (P.-C.-C.), 473. Ivry (d'), 605. J Jackson (Miic K.-M.), 972. Jacobaeus (H.-C.), 895, 933. Jacobsen (J.), 860. Jacobson (D.), 969. Jacquemet (M.), 604. Jacquemin, 968. Jackel, 722. Jalaguier, 517. Jaloustre (Léon), 556, 680. James (T.-C.), 934. Janet (P.), 5, 462, 519, 574 à 593. 234, 647, 681, 229, 330, 319, 998, 516, 606, 1024. HoussaYy (F.), 466, 6417 à 624, { Jantsch (G : Jarkowski (J.), 429. Jarry-Desloges (R.), 893 Javal, 336. Javelle, 606, Javillier (M.), 237 Jeance, 468. Jeande!ize (P.), Jeannet (A.), 15. Jeans (J.-H.), 2 Jégou, 144. Jennings (H.-W.-K.), 7 Jentzsch (F.), 387. Jerusalem (G.), 68 Jervis-Smith (F.-J.), 98. Jianu (A.), 50. Johansson, 382. Joleaud Ex 335, 466. Jolibois (| Joily (J. \' 0. 6, Joltrain (E.), 235, 360, 96). Joly (A.), 466, 720. Joly (Hop), , 513. Joly (J.) Joly (L. TonckHeere R. Jones (B.-M.), 934. Jones (H.-0°.), Jones (L.-M.), 975. Jones (W.-J.), 341, 522, 686, 972. Jonescu-Mihaiesti (G.), 50, Jonnesco (Th.), 86 Jordan (F.-W.), 686 Jordan (H.), 56: Josué (0 Jouguet Joukowsky (Es Jourdy (E.), Jourdy (Général), 624 à 631. Jousset (A.), 650. Jowett (H Joyeux (C.), Juge (C.), 410, 757 Juillard, Jukes-Browne (A.-J.), Julin (Ch.), Julius (W.-H.), 97 Jullien, que Jumelle ( Jung, Sa Jung EYE 688. -Jungano (M.), 4 ‘ Jungfleisch (E.), 191, 233. Justin-Mueller, 4 Kalaboukoff (Mile L.), 192. Kaluza (L.), 935. Kametaka (T.), 972. Kapteyn (J:-C.), 648. Kapteyn (W Karpen (V.), 967. Karsten (Miie B.-J.), 2 Kay (F:=W.), < 386 Kayser (E.), Keating-Hart a 234. Keesing (A.), 148. Keilin (D. 721. Kelsch, 429, 649 Kempe (A Kenyon (J.), 611. Kermorgant, 192, 335. Kernbaum (M.), 334, 681, 720. Kerr (J.-G.), 685. Kersten (C.), 90. Kervily (M. de), 336. Kiebitz (F.) 82 Kilian (W.), Kimpflin ( Kipping (F.-S.), 196, 197, 239, 290, 472, 687. Kirmisson (E.) Kirpal (A.), 476. Kleeman (R.-D.), 385, 654, 970. Klein, 682, Klein (P.), 51, 290, 610, 973. re Klimont (J.), 342, Klimosch (K.\, 688. Kling (A.), 286, 428, 561, 719. Klipstein (E.-C.), 4174. Klobb (T.), & 8, 1021 Kluyver (J.-C.), 388. Klynens (J.), 603. Knecht (E.), 972. Knoll (F.), 141, 292, 476. Knowlton (H.-S.), 973. Knox (J.), 972. Koch (R:), 475. Kæbe (P.), 381, 558. Kæhler (A.), 234, 381, 517 Kœælbl (F.), 688. Kænigsberger (L.), 523. Kæpsel (A.), 563. Kohler (A.), 641. Kohlrausch (K.-W.-F.), 200 Kohn (M.), 612, 935. Fo Abrest (E.), 41,195, 232 654,155, Rene (Ph.), 344, 388, 611, 976. Kollmann (M.), 380. Kolossof (G.), 468. Kolowrat, 608. Koorders (S.-H.), 148, 388, 612, 760, 976. Korn (A.), 94, 143, 475, 648. Kürner (G.), 292. Kôütter (F.), 523. Kovessi (F.), 648. Kowalski (J. de), 191, Krasser (F.), 200. Kraus (R.), 557. Kranse (E.), 612. Krell, 290. Kremann (R.), 292. Krieble (V.-K.), 687, 934. Kronecker (H.), 652. { Kruppa (E.), 200. Kubart (B.), 524. Kuhnke (E.-A.-J.), 759. Kunckel d'Herculais (J.), 467. Kuypers (J.), 976. L Laar (J.-J. van), 388, 614, 759, 196. La Baume-Pluvinel (A. de), 143, 967. Labbé (H.), 517, 649, 650, 682, 155, 756. Labbé (Marcel), 232, 465, 121. Laborde (A.), 605. Lacassagne, 649. Lacroix (A.), 94, 144: 298 à 314, 362 à 366, 648, 860, 968. Ladenburg (E.), 240, 415. Lafay (A.), 860. Lafforgue, 682, 721. Lafont (A.), 607. Lagane (L.). 517. Lagarde, 95. Lagoanère (de), 49, 96. Lagrange (H.), 649. Lagrifloul, 50, 146, 649. Laguesse (E.), 682, 1004 à 1045. Laïgnel-Lavastine, 970, 1024. Laïué (E.), 281. Laisant (C.-A.), 90. Lallemand (Ch.), 384, 155, 793. Lamarcodie (G. de), 140, 330, 752. Lamb (S.), 562. Lambling (E.), 128 à 438,145,425 à 486. Lamotte (Marcel), 677, S08S à S14, S23 à 826. Lampa (A.), 688. Lampel (H.), 476. Lamplough (F.-E.-E.), 239, 611. Lancereaux (E.), 234. Lancien (A.), 194, 970. Landolph (F.), 755. Landolt (H.), 562. Landouzy (L.); 234. Landsiedl in ) 9807 Landsteiner (K.), 1021, 1023. Lang (W.-R.), 6 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1055 Langlois (J.-P.), 9 Lapersonne (de), 517. Lapicque (Mme L.), 96, 288, 156, 793. Lapicque (L. ), 48, 96, 235, 353, 518, 682, 156, 193, 967. Lapicque (M.), 235, 383. Lapie (G.), 233, 559. Lapworth (A.), 51. Larat, 469. Larguier des Bancels (J.), 720. La Riboisière (J. de), 647. La Rive (L. de), 144. Larmor (J.), 339, 385. Laroche (G.), 895, 933, 969. La Rosa (M.), 234, 287, 292 Larose (H.), ie 428, 467, Lassablière (P.), 146, 194. Lasseur (Ph. NS 9384 Lattès. (S.), 382. Laubry (Ch.), 336, 469, Lauby (A.), $26. Laufer LS ), 649, 156. Launay (L. de 334, 720. Loir ), 49, 191, 384, 607, 682. Laurent (0. ) 649. Lauricella (G.), 896. Lautier (R.), 721, 794. Laveran (A.), 48, 144, 381, 467, 560, 606, 649, 650, 681, 155, 826, 860, 1023. Lavergne (Gérard), 229, 330. Law (D.-J.), 474. Lazarus (Mie El.), 96, 518, 156. Léauté (André), 48, 191, 468, 967, Léauté (H.), 139. Lebeau (P.), 95. Le Bel (J.-A.), 191, 382. Lebesgue (H.), 681. Lebeuf (A.), 158, 881. Lécaillon (A.\, 95, 146, 648, 649, 650. Le Châtelier (H ), 38%, 647, 120 Lecomte (H.), 968, 1020. Lecoq de Boisbaudran, 968. Lecornu (L.\, 30 à 42, 253 Le Dantec (A.), 288. Le Dentu. 968. Lederer (E.-L.), 723 Leduc (A.), 233, 286, 381, 467, 516, 606. Lefebvre (L.-Charles), 90. Lefèvre (J.), 559. Legendre (R.), 50, 287, 153. #10, 649, 650. 1022. 287, 429, 607, ), 931. Léger (E.), Fr Léger (L.), 144, 192, 334; 468, 559, 719, 120. Léger (M.), 682, 721, 895, 933, 1023. Legueu (F.), 560. Lehmann (A.), 936. Lehmann (E.), 476. Lehwann (H.)}, 388. Leithäuser (G.), 974. Lejonne (P.), 383, 518. Lelieuvre (M.), 187, 282, 376, 820. Lelièvre (A.), 96, 145. 146, 235, 336, 384, 429, 469, 518, 560, 607, 649, 1024. Lelouche, 95. Lemaire (J.), 794. Lemaistre (J.), 49. Lematte (L.), 286. Le;Mée (J.), 143. Lémeray, 193. Lemoine (G.), 47, 429, 605. Lemoine (Mme Paul), 933. Lemoine (Paul), 391, 517, 606, 940, 1022. Lemoult (P.), 91, 434, 605, 793, 826, S60, 893 Lénard (P.), 196. Le Noir, 49, 191. Léonard (A.-G.-G.), 9 Léopold-Lévi, 49, 96, 4 234, 517, 518. Lepage (Ad.), 381, 382. Lépine (R.), 649, 893. Le,Play (A.), 96, 145, 381, Leriche (R.), 335. Leroide (J.), 605. Leroux (H.), 382, 605. Lesage, 860. Leser (G.), 1022. Leslie (M'e M.-S.), 97 560, 607. Lesné (Ed.), 336, 560, 932. Lesne (P.), 144. Le Sourd (L.), 49, 682. Lespieau (R.), 233, 290, Lessing (R.), 291. Lester AI -H), 381. Le Sueur (I.-R.) Létienne (A), TAS, 754, 825. Letulle (M.), 192, 517. Levaditi (C.), 96, 146, 383, 551, 650, 721, 1021, 1023. Levainville (J.), 928. Levallois, 517, 559, 561. Levi (E.), 291. Levi-Civita (T.), 291. Lévy (Herbert), 975. Lévy (L.), 234. Lévy-Bing (A.), 1020. Lévy- Franckel A. Lewis (E.- 552. Lewis (Se Sy ï 290. Lewis (W.-J), 685. Lewis (W.-C. Mc C.), 1026. Lewkowitseh (J.), 556, 759. Lhermitte (J.), 96, 518, 721. Lichtenstein (L.), 893, 1021. Lieben (Ad.), 688. Liebert (E.), 612. Liebisch (Th.), 523. Lindemann (R.), 240. Linossier (G.), 145, pe Linsbauer |K.), 292, Lippens, 145. Lippmann (A.), 384. Lippmann (G.), 143, 289. Lisbonne (M.), 193, "518. Little (H.-F.-V.), 944. Livon (Ch.), 97, 1024. Livon (J. fils), 151. Livon (J.), 384. Lloyd (P.-V.), 686. Lockyer (Sir N.), 385, 195. Locquin Re ), 123. Loeper (M.), 430, 559, Ë Loisel Gustav e), 266 à 281. Lokhtine (W.), 92. London (D.-M. van), Lorentz (11.-A.), 14 à: 26, Lorlat-Jacob (L.), 234. Louguinine ( W.), 90. Louis, 518. Louis (J. ), 518. Louïse (E.), 720. Lourdel, 429. Loutchinsky, 647. Love (A.-E.-H.), 385. Lovibond (J.=W.), 562. Lowenthal (Dr), 648, 932. Lowry (T.-M.), 197, 238, 685. Loyez (Mie M.), 193. Lubimenko (W .), 48. Lucas-Championpière (J.), 145. Lucien (M.), 146, 288, 410, 650, Luff (B.-D.-W.), 687. Lugeon (M.), 120. Lussana (K.), 235. Lutembacher, 650. Lutz (L.\, 235, 288, 380, 802, 824, 839 Lux (P.), 524. Lyle, 521. Lyon (Gaston), 93. 516. 239. ÿ3. 267 à 375, 196. 194. Mac Clelland (J.-A.), 685. Mac Combie (H.), 386. Macdonald (D.-P.), 239. Macdonald (H.-M.), 238. Mac Gillavry (Th.), 564. Mach (Ernst), 680. Machat (J.), 141, 792. 1019. Mache (H.), 602. Mc Kenzie (Al.), no 386, 610. Mackey (J.-F.), 387. Mackie (F.-P.), HN 971. M Saber (J.-S:), 196. 646, 560, 649, Maclaurin (R.-C.), 237, 318. Me Lellan (B.-G.), 37. Mac Mahon (P.-S.), 197, Mahaux (E.), 603. Maheu (J.), 607. Maige (A.), 1022. Maigre (E.), # Mailhe (A Maillard (L 522, 972. 5 à 232. , 520, 548 à 553, 641. 644, 681, 153, 970. Maillet RE 681, 719. Maire (R.), Maija | A. }, 6. Majorana (Q.), 291. Makower (W.), 651, 1026. Malassez, 50. Malfitano (G.), 428. Mallock A l 339, 520, 685. Manaud ( 383. M: PAR " , 931. Mauceaux (L.), 192. Mancini (Ernesto), 292, 432, 688, Maneng, 1022, Mangin (L.), 143, 144 Mantoux (Ch.), 428, 650, 896. 194, 895, 1024. Maquenne (L.). 678, 684, 932, 1021. Marage, 143, 334, 466, 968. Marais (H.), 95. Marbé (S.), 49, 336, 649, 650, 682, 151, 794. Marcelin (R.), 287. Marchal (P.), 381 Marchand (Em.), Marchand (H.), à 342, 799. Marchis (L.), 206 Marchoux, 235. Marfan (A.-B.) Marie (A.), 193, Marie (Ch. ), #8. Marie (P.), 469, 682 Marie (P.-L. Marinesco ( Marino (EF ), 1 384, 467, 893. 893. 413 à 451, 732 à 245. NÉE 514, 559, 825. 619, 149,892: 560, 721. 108 60S. © 24. Marle (E.-R.), 341, 522, 973. Marquis, 141. Marsden (E.-G.), Marsh (J..E.), 5 Martel (E.-A.), 4 Martens (Ad.), 416. 521, 7196. 1. 9, 517, 648, 720, 894. Martens (F.-F.), 342. Martial (R.), 892. Martin (C.-H.), 970. Martin (G.), 239, 34 Martin du Magny, 95. Martin-Lavigne (E.), 1019. Martinand (P.), 144, 793. Martinet (A.), 190, 3S0, 718, 859, 1020. Martinet (G.), 893. Mascarelli (L.), 896. Mascart (Jean), 671. Mascré (M.), 94, 968. Mason (A. $. }, 686. Massaglia (A.), | Massol (G.), EE Massol (L.), 49, 518, Masson (D°), 756. Masson (H.), 893, 932 Mathias (E.), 189,425, Mathieu (H.), 467. Mathis (C.), 682, 721, 895, 933, 1023. Matignon (C.), 41, 144, 286, 513. Matisse ((reorges), 188. Maublanc (A.), 891. Mauguin (Ch.), 932. Maurain (Ch.), 681. Maurel (E.), 192, 193, 235, 288, 682, 121, 895, 933, 1023. Mauriac (P.), 410. Maurice (H.), 466. Maury (E.), 558. Mauté (A.), 234, 383. Mauthner (J.), 688. Mawas (J.), 47, 96, 145, 336. May (0.-B.), 196. Mayer (A.), 50, 560. Mayet (Lucien), 556, 679. Mayor, 511. 966, ‘939, 969, 1023. 166, AS2 à 493 469, 518, 1056 Muzé (P.), 558. Mazzucchelli (A.), 681. Meerburg (J.-H.), 564. Meige (Henry), 333, 930. Meillère (G.), 234, 194. Meisels (E.), 342. Meissner (F.), 935. Meitner (Mile L.), 341. Meldola (R.), 611, 933. Meldrum (A.-N.), 973. Mello (U.), 895, 932. Ménard (Dr), 1023. Ménard (M.), 41. Menegaux (A.), 146, 335. Mengel (0.), 381, 516. Mercadier (E.), 55, 606. Mercanton (P.-L.), 893. Mercer (J.), 685. Mercier (J.), 517, 895. Mercier (L.), 47, 143, Merczyng (H.), 1021. Merle (P.), 381. Merlin | F:), 443: Merlin (J.), EE AE Mertens (F.), 3 Meslin (G.), &1, 266, 467, 605, 967, 1021, 1025. Mesnil (F.), 845 à 854, 877 à SS6. Messerschmitt (J.-B.), 511. Mestrezat (W.), 235, 336, 383, 430, 469, 518, 607, 649, 721, 194. Metchnikotf (E.), 969. Métin (Albert), 790. Meunier (F.), 48. Meunier (J.), 191, Meurice, S89. Meyer (E.), 100. 1021. 968. Meyer (F.), 192. Meyer (H.), 147, 612. Meyer (S.), 688. Meyer ü. } de Meyer (V.-I.), 606, 122. Meyère (A.), 1021. Meynier (J.), 559. Mezincescu (D.), 236. Mezincescu (0.), 193. Michel (Aug.), 48, 191, 233, 681. Michel (E.), 144. Michel-Lévy (Alb.), 559, 648. Micklethwait (Mile E.-M.-G.); 51 Miers (H.-A.), 521. Miethe (A.), 476. Miklausz (R.), 688. Mildbraed (J.), 723. Miller (G.-A.), 967. Miller (E.-V.), 239. Millochau (G.), 193. Millosevich (K.), 292, 896. Mills (W.-H.), 652. Minea (J.), 608. Minet (A.), 605. Minet (J.), 1023. Minkiewiez (R.), 48, 406 à 447,144 Mirande (M.), 681, 969. Mironesco (Th.), 608. Mitchell (A.-D.), 934. Moir (J.), Le Molengraaf (G.-A.-F.), 796. Molioa (Rodolfo), 318. Molisch (H.), 524, 926. Moll (J.-W.), 796. Mollereau, 1023. Molliard (M.), 286, 894. Monaco (Albert 1°" Prince de), Moscetz (G. de), 967. Mond (Ludwig), 164. Monges (F.), 1024. Monges (J.), 1024. Mongour (Ch.), 607, 970. Monnier (A.), 140. Monnier (H.), 380. Monod (Ch.), 145. Monod (O.), 193. Montangerand (L.) Montéli (J.), 96. Montessus (R. de), 233, 647. Montessus de Ballore (de), 443, 517, 647, , 934. 145, 381 , 605. -Nernst (W.), 387, Moutgomerie (H.-H.), 522. Monvoisin (A.), 48, 893, 894. Moody (G.-T.), 239, Moog (R.), 605. Moore (Ch.-W.), 239, 386, 1027. Moore (R.-B.), 51. Moore (T.-S.), 4173. Morancé, 381. Morat (J.-P.), 607, 669 à 635. Moreau (G.), 192, 468, 681. Moreaux (R.), 794. Morel (A.), 144, 648, 152, S39 à 845, 859. Morel (L.), 146, ne , 560, 650, 719, 756. Moreux (Th.), 3, 54, 68 à 8, 345, 602. Morgan (G.-T.), 51, 686, 934. Morgenstern (0.), 935. Morisani, 156. Mosny, 421, 895, 1023. Moss (E.-W.), 340. Motais, 468. Motet, 335. Mouchet (A.), 235. Mougeot, 718. Mouilpied (A.-Th. de), 341 Moukhtar (A.), 193. Moulin (H_), 471. Moulin (M.), 1021. Moulin (N.), 641. Mountain (H.), 473. Moureaux, 144. Moureu (Ch.), 95, 147, 384, 382, 194, 970. Moussu, 96, 145. Moutier (A.), 144, 192, 605. Mouton (H.), 889. Muir (M.-M.-P.), 386. Muller (E.), 200, 342, 935. Muller (K.), 329. Muller (H.-A.), 386. Muller (J -A.), 1022. Muller (N.-L.\, 612. Muller (P.-Th.), 188, 648. Muller (R.), 239. Muller-Breslau, 475. Mulon (P.), 50, 336, Munk, 723. Muntz (A.), 191, 287, 558, 719, 756. Muratet (L.), 518, 794. 191, 192, 237, 383. Murray (A.), 751. te (S.), 650, 682, 1024. Myller (A.), 466. Myller-Lebedef (Mme V.), 860. N Nadejde (G.), 608. Nagel RS 513. Nageolte (J.), 96,383, 518, 682, T 969, 970. Nalepa (A.), 524. Nausen (F.), 145. Nantet (A.), 146. Natalis (F.), 282. Nathan (Sir F.-L.), 291. Nattan-Larrier (L.), 49, 146, 384 Naudeau (Ludovic), 822. Nazari (V.), 292. Nègre (L.), 650. Nègre (M.), 193. )F, 933, Negrescu (V.-G. }, 892. Négris (Ph.\, 49, 558, 606. Nélaton, 932. Neovius (E.-R.), 475. Nepveu (Dr), 606, 894. 416, 975. Netter (A.), 287, 468, 559, 607, 682, 721, 156. Neumann (B.), 318, 928. Neuville (H.), 844. Neveu-Lemaire (M.), 145 Neville (M.-A.), 972. Newcomb (S.), 719. Newman (S.-H.), 386. Nicholson (J.-W.), 610, 1026. Nicklès (R.), 191, 465. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Nicloux (M.), 756. Nicol (J.), 339. Nicolardot (P.), 41, 290, 471, 519, 860. Nicolas (G.), 516. Nicoletti (O.), 687. Nicoll (F.), 99. Nicolle (C.), 192, 383, 681, 793. Nicolle (P.), 756. Niessl von Mayendorff (G Niskoubina (N.), 146. Nissenson (H. à 330. .), 642. Nobécourt (P.), 518, 757, 895. Noc, 470. Nogier qu 234, 287,681, 155. Noguchi (H), 336. Noica, 49. Nolf (P.), 594 à 600. Nordmann (Ch.), 350 à 364, 752, 860, 894, 1022. Nôrlund (N.-E.), 961. Norris (R. NV. JE 687. Nouri (0.), 1024. Noyons (A.-K.-M.), 148. Nubiola (P.), 235. Nuttall (G.-H.-K.), 603, 828. Nystrom (E.), 91 [e) Obregia (Al.), 193, 336. Ocagne (M. d'), 468. Occhialini (A.), 687. Oddo, 192, 382. Oddone (E. k 292 O Dell (G. E.), 195. Odier (R ie 468. Oechsner de Coninck (W.), 94, 96, 558, 641. Oehlert (D.-P.), 233. Olivari (F.), 896. olivier (Louis), 565, 116, 983 à 14001. Olmer (D.), 97, 560. Onnes (H. -K.), 564, 611, 796 OPA -). 688. Orlando (L.), 687. Ornstein (L.-S.), Orr QE Mae F.), Orth (J.), 522. Orton (J.-H.), 827. Orton (K.-J.-P.), 341, 522, 611, 686, 972. Osborne (W.-A.), 970 Oss (S.-L. vau), 611. Oudin (G.), 235. Outes (F -F.), 890. Owen (Mlle G.-E.), 521 Oxner (M.), 517, 605. P Pachon (H.). 286. ; Pachon (V.), 49, 50, 145, 146, 193, 235, 288, 469, 518, 606, 607, 121, 156, 932, 1023. Pacini (D.), 292. -), Padoa (u 687. Padova (R.), nu 719. Page (M.), 383 Pagniez (Ph.), 49, 518, 650, 682. Paillard (H.), 235. Paisseau (G.), 560, 757. Palomaa (H.), 790. Paloque (Lt _Gei J. ), 5114. Panisset (L.), 429, 516. Pannain (E.), 687. }, )s Pantanelli (E.), 432, 687. Pantel (J.), 48, 145, 145. Papin (E.), 96, Papin (F.), 95. Papin (L.), ? 648. Paraskevopoulos (P.-B.), 650. Parhon (C.), 50, 236. Pariselle FN 381. 720. Pariset, 49. :* Parisot (J.), 146, 235, 288, 470, 608, 650, 791. Parry (Mi: E.), 386. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1057 Parvu (M.), 49, 146, 336, 384, 517, 649, 650, 1024, Pascal (P.), 47, 233, 558, 755, 826. Pascalis, 147. Pastureau (J.), 290. Paterno (E.), 292, 651. Paterson (C.-C.), 610. Patterson (T. S.), 522. Paul (P.), so 469, #10, Pautrier de =M:), 650. S.-J.), 387. H.-H.-W.), 196. K.), 652. ) .), 287, 428, Pearson Pédebidou (J.), 120. Pedler (Sir A.), 473. Pekelharing (Mi: C. J.). 760. Pélabon (H.), 467. Pellat (IH), 48, 931, 1021. Pellegrin (J.), 516, 681, 1021. Pellin (P.), 193. Pellini (G-), 687, 896. Penck (A.), 974. Pérez (Ch.), 96, 337, 511, 558, 641. Périer (Ch.), 429. Perkin (A.-G.), 473, 414, 972, 973. Perkin (F.-M.), 197. Perkin (W.-H.), 386. Perkin ( W.-H. jun.), 239, 611, 652, 933, 973, 1097. Perkins (H.-A.), 233, 461, 516, 683. Pérot (A.), 48, 233, 931. Perret (E.), 855. Perrier (R.), 332, 647. Perrier de la Bathie (H.), 793 Perrin (Elie), 90. Perrin (G.), 1023. Perrin (J.), 289, 793, 860. Perrin (M.), 650. Perrot (E.), 46, 49, 558, 156, 192 Perrot (K.-L.), 95. Perroy, 895. Perry (J.-P.-H.), 474. bervinquière (L.), 284, 427, 965. Pesla (0.), 688. Pestalozza (U.), 896. Peter (K.\. 523. Petetin (J.), 518. Petit, 147. Petit (G.-E.), 605. Petit (P.), 801, 862. Petitmengin (M.), 92. Petri (L.), 687. Pettit (A.), 50, 681, 755, ne 1023 Peyron, 97, 288, 384, 550, 650, 1024. Pezzer (de), 43. Pfeffer (D.-W.), Philip (J.-G.), ie Philippe (L.-H.), 94. Phisalix (Mme M.), 381, 647, 751. Piarron À Mondésir (L. Joie Piatot, 966. Picard (Edmond), 190, 605, 652. Picard (Emile), 570 à 574, 641. Picard (F.), 794. Pickard (R.-H.), 522, 611. Pickering (S.-U.), 197, 686. Picqué (Dr), 1023. Pictet (A.), 382, 719. Piédallu (A.), 234, 467. Piéroan (H.), 48, 50, 96, ne 234, 429, 896. Pietkiewicz (W.-B.), 9 Pietschmann (V.), 68. Piettre (M.), 94, 192, 382, 467, 641. Pigache, 969. Pinard, 49. Pinat, 142. Pincherle (S.), 896. Piot-Bey, 649. Pirotta (R.), 687. Pirsson (L.-V.), 379. Pitard (J.), 792. Pizon (A.), 120. Be (P.), 294, 432. Planck (M.), 973. 467, 560, 606, 649, T5, 23% à | Plimmer (H.-G.), 338, 1026. Plogmeyer (F.), 1027. Plumandon (A.), 382. Püch (R.), 342, 936. Pochettino (A.), 6817. Pocklington (H.-C.), 339, 971. Pæschl (Th.), 688. Pogsenpohl (S. de), 649, 682. Pohl (R.), 975. Pobl (W.), 330. Poincaré (H.), 48, 143, 233, 381, 428, 558, 657 à 662, 893, 1022. Pointet (R.), 233. Poizat (L.), 19, 166. Polak (J.-J.), 148, 200. Polara (V.), 681. Policard (A.), 96, 146, 235, 288, 3: 36, 383, 650. Poll, 723. Poma (G.), 292 Pompeiu (D.), 681, 1022. Poncet (A.), 335. Pope (W.-J. je 196, 197, 386, 387. Popovici- Baznosanu (A.), 337. Porcher (Ch.), 429, 467, 516, 1024. Porter (Mie A.), 1096. Porter (H.), 473, 971. Portier (P.), Fe 336, 383, 384, 1023. Posejpal (V.), 334. Post (J.), 37 g 928. Posternak (S.), 719. Postma (O.), 148, 388. Potter (Ch.-J.), 198. Pottevin, 1023. Pouget, 335. Poujol, 429. Power (F.-B.), 239, 1027. Poyarkoff (E.), 145, 470, Poynting (J. HN 826. Pozzi B: 559, 932. Price (T- s’ 239, 644930720973: Priestley (J.-G.), 290. Pring (J.-M.), 934. Prinsen Geerligs (H Procter (H.-R.), 474. Proszynski | C: de), 289, 559. Proust (L.), 192. Prout (L.-B.), 561 Prud'homme (EL 195, 651, 890, 1018. Przibram (K.), 4 Puglisi (M.), 687. .) Ji C.), 976. , 6 Puisenx (P.), 647 HE Purvis (J.-E.), 1 Pyman (F. ne , 686, 934, 972. Q Queirel, 649. Quidor (A), 648. Quin (J. T.), 331. R Rabaud (Et.), 50. Rabl (I), 147, 935. Rabowski (F.), 145. Radcliffe (L.-G.), 387. Radu, 608. Rabnenführer (F.), 4175. Rajchman, 429, 649. Railliet (A.), 145, 192, 336, 559. Ramond (L.), 49, 146, 383, Ramon y Cajal. 652. Rawsay (Sir W.), 98, 386, 610. Rauc (À.), 146, 383, 121. Ranjard, 517. Ranzi (E.), 658. Rappin, 336, 756. Rateau (A.), 606, 719. Ratel (C.). 643. Rausenberger (F.), 181. Raveau (C.), 335, 384, 466, 604. Ravenna (C.), 681. 429, 469, 607. Ravigneaux, 1022. Ray (P.-C.), 290. Raybaud (L.), 560, 650, 893, 1021. Rayleigh (Lord), 98, 757, 971. Raymond (EF 95, vi 287. Razous ( Armand), 330. Razous (Paul), 330. Read 197. Rebière (G. ne Reboul (G.) AT: Recoura (A ; 166. Reeders (J.-Chr.), 611. Regaud (CI.), 49, 50, 95, 145, 146, 193, 235, 287, 336, 381, 429, 468, 518, 560, 607, 681, 721, 756, 194, 932. Regelspercer | (Gustave), 7, 297,341, 556, 717, 822. Regener (E.), 974. Reichenheim (O.), 240, 523. Remlinger (P.), 193, 235, 288, 1024. Rémy (L.), 47, 516, 1022. Réiny (de Nancy), 237, 470, 794. Kenard (Ct Paul), 3S à S4, 820. Reuaut (J.), 145. Rendle (A.-B.), 685. Rengade (E.), 467, 561, 631, 931, 1021. Renner (V.), 688. Rénon (L.), 145, 380, 559. Renouf {Mile N.), 239, 521. Repaci (G.), 384, 429, 559. Répelin, 1022. Repossi, 292. Résal (Jean), 329. Retterer (Ed.), 49, 96, 145, 235, 336,384, 129, 469, 518, 607, 649, 1023, 1024. Révil (J.), A14 à 423, 452 à 461. Rey (A.), 859. Reymond (Arnold), 424 Reynier (P.), 756. Reynolds (J.-E ), 99, 684. Ribadeau-Dumas (L.), 607, 1024. Ribot (A.), 560. Richard (Dr), 189. Richardson (H.-W.), 385. Richaud (A.). 116. Richelot L.-G ), 469. Richet (Ch.), 336, 517, 518, Richet (Ch. fils), 336, 1023. R'chon {L.), 650. Richler (O.), 935. Riederer (H.-S.), 474. Rieffel (H.), 143. Riesz (F.), 516, 1021. Riesz (M.), 606, 648, 968. Rieux, 49. Righi (Aug.), 644, 6 Rindieisch (R.), de Ringelmann (M.), 143, 468. Rios (L.-S. da), 896. Risser (René), 887. Ritz (W.), 474 à 135. Robertson (Mile M.), 970. Robertson (R.), 652. Robin (Albert), 932. Robinson (F.), 686. Robinson (F.-W.), 686. Robinson (L.-E.), 603. Robinson (R.), 48, 239, 341, 522, 1027. Rochaix ({A.), 192, 681, 933. Roche, 607. Rocques (X.). 234, 603. , 287, 681. 560, 607. Rodet Ge , 50, 146, 649. PÉCRES R.), 192. Roger (H.), 146, 235, 469, 607, 649, 650, 121, Roger (L.), 48. Rogers (L.), 430, Roïg (G.), 382. Romburgh (P. van), 612, 976. ltomer (E.), 64S, 719. Romme (R.),390,427,515, 530 à 544. Roques (X.), 720, 156. Rosati (A.), 687. Rosati (G.), 292. Rosenblatt (M.), 720 Rosenstiehl (A.\, 516, 755. Rosenstiehl (G.), 284, 683. KRosenthal (G.), 96, 607, 650. 1058 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 20. 1026. Rosenthal {P. ): 12 Ross (H.-C.), 472, Rossard, 41. Rossello (H.), 96, 121. Rossi (R.), 796. Rost, 894. Rothé (E.), 41. Rothschild (H. de), 518. Rothschild (M. de), Rouband (E.), 144 956 à 960. Roubinovitch, 560. Roule (L.), 1022 Rouse-Bali (W.), 554. Rouslacroïix, 560, 650. Roussanof (V.), 682. Roussel (J.), 381, 428. Rousset (Henri), 189, 203, 832, 889, 1017. Roussy ( A) 27103 Roussy (G). )A230: Rowell (HS), 341. Roy (P.), 428, 561. Royds (T.), 339. Ro enbant (Mike M.), Rozic (J.), 100. Rubens (H.), 24 Rubner (M.), 522. RUPeG tre (S.), 197, 290, 386, 934. Ruhmer (Ernst), 856. Rule (Al.), 341. Runnstrom (J.), Russ (C.), 828. Russ (S.), 651, 1026. Russell (Dr), 610, 686. Russell (AI. ), 238, 195. 49, 96, 146, 234, 517, 894. 169, 946 à 923, 244, 481, 822, 191, 237, 720 0, 475, 523. 9! 895. Rutten (L.-M.-R.), 760. S Sabatier (P.), 382, 520. Sahoïa (de), 559. Sabourin (Ch.), 154. Sabrazès (J.), 288, 469, 518, 649, 794. Sacerdote (P.), 1021. Sadler (C.- A): 521. Sageman {P.-J.), 972. Saget (P.), 234. Saint-Blancat, 41. Saint-Yves-Ménard, 606. Salebert, 518. Salet (P.), 1017. Salimbeni, 144. Salmon (P.), 192. Salpeter (J.), 1028. Saltykow (N.), 193, 826. Salway (A.-H.), 197, 610, 652. Sand (H.-J.-S.), 972. Sande Bakhuyzen (H.-ü. Sanielevici (S.), 606. Sannia (G.), 291, 432. Saporta (Antoine de), 729. Sarthou, 932. Sartori (G.), 140. Sartory (A.), 96, 145, 146, 235, 932. Sauton, 967. Sauvage (Edouard), 181. Sauvageau (C.), 96, 518. Sauveur (Albert), 889. Savès (A. ), 286. van de), 759. 169, 607, Savornin (J.), 49. Scala (A.), 687, 896. Scalia (S. 896. Scalinci (N.), 432. Schäfer (E.-A.), 895. Schaefer (CL.), 476. Schæffer (G.). 560. Schaffer (J.), 147, 935. Schechner (K.), 688. Scheffer (F.-E.-C.), Scheuer (0.), 893. Schidrowitz (P.), 197. Schilling (Friedrich), Schillinger (R.), 524 Schmidt (A.), 380, 976. 643, Schmidt (H.), 342. Schmidt (W.), 200, 476, 688. Schmiergeld (A.), 146. Schmutzer (P.), 148. | Schneider (Dr), 337. Schneider CR) ), 342. Schneider (W.), 5 | Scolbe (W.-A.), Schnitzler (J.), 320. Schokalsky (J. de), 648. 7 Schottky (F.), 415, 523, Schoute (P.-H.), 141, 118, 200, 388, 564, 612, 760, 916. Schrader (E.), 715. Schreinemakers (F.-A.-H.), 3% Schryver (S.-B.), 291, 789. Schubert (J.), 1028. Schukarew (A.), 90. Schulze (F.-E.\, 722. Schuster (A.), 238. Schwartz, 606, 722. Schweidler (E. von), 200, 602, 688. 1026. Scott (Al.), 290, 473, 652. Sehnal (J.), 517., Seidelin (H. Û 895. Seillière (G.), 235, 288, 469. Seligmann &. -G.), 338. Seller (J.), 96, 722. Sémat (L.), 468, 608. Senderens (J.-B.), 144 1021. Senier (A.\, 290, 341, 934, 973. Senter (G.), 973. Serbonnes (H. de), 969, 979. Sergent (Ed.), 146. Sérieux (P.), 89%, 930. Serra (A.), 432, 896. Sersiron, 966. Severi (K.), 143. Seyewetz (A.), 194, 382, 520, 719 ’ 466. | Seyler (G.-A.), 686. Seyot (P.), 648. Sézary (A.), 49, 518. Shattock (S.-G.), 348. Shaw (A.-N.), 684. Shaxby (J.-H.), 652. Shepheard (K.-G.), 290, 341, Sheppard (S.-E.), 609. Sherrington (C.-S.), 340, 685. Shibata (Y.), 934. Shutt (F.-T.), 473. Sicre (A.), 682. Sidersky (D.), 822. Siebenrock (E. von), 936. 973. Sieur, 192, 429. Sigmund (W.). 100. Silber (P.), 432. Silvestri (F.), 292, 432, 681. Simon (d'Uriage), 966. Simon, 288. Simon (Eug.), 334, 968. Simon (L.-G.), 50, 288. Simon (L.-J.), 290, 561, 722. Simon (R.), 121. Simond, 410, 560. Simonsen (J.-L.), sb Dee 611, 652. Simpson (G.-C.), Sinéty (R. de), 2er ! Sion (Jules), 857. Sirk (H.), 524. Sirkar (A.-Ch.), 973. Sitter (W. de), 388. Sizes (G.) , 516. Skiaver (S.), 238. Skrabal (A). ? 100. Skraup (Zd. SH 342, 416, 612; 935. Slatinéanu (A.), 50, 193, 236, 337. Slator (A.), 99. Sleeswyk (J.-G.), 344, 588, 564. Smedley (Mile J.), 197, 1027. Smiles (S.), 341, 521, 686. Smith pa A. SE 611. Smith (C de he Smith (F.-E.), 933. Smith (J. n 1 685. Smith (S.-W.-J.), 238, 386. Smith (T.), 562. 343, 344, | Sieberg (Aug.), 55 à 6S,117à1%8. Smith (W.), 474. Smits (A.), 196, 976. Smythe (J.-A.), 99 Snell (J.-F.), 197. Snow (A.-E.), 340. Soddy (E.), 933. Sohngen (N.-L.), 148. Solvay (Ernest), 982 à 985. Sorel (F.), 383. Sorrel, 970, 1023. Sothern (J.-W.), 311. Soulié (H.), 382. Soury, 41. | Southcombe (J.-E.), 562 Spaeth (E Spangberg ( Spehl, 432. Stanculeano, 608. Stanesco |V.), 721, 1023. Stanshie (J.-H.), 387. Stansfeld (H.), 610. Steele (B.-D.\, 826. .), 1028. A.), 520. Æ | Steensby (Phil. -H.-P.), | Stern (Mile L.), 288, 336, | Stuyvaert (M.), Stein (P.), 1028. Steindachner (F.), 612, 93. Stekloff (W.), 143, 191, 243, 466. Stépanoff (M.), 235. Stephenson (J.), 521. 129, 156, 895. Stevens (H.-P.), 896, 973. Stewart (S.), 474. | Stodel (G.), 286. Stoecklin (E. de), 94, 233, 517. Stok (J.-P. van der), 148, 343, 611. Stoney (G.-G.), 431. Stopes (M.-C.), 758. Stracker (0.), 935. Strakosch (S:), 100. Strauss Œ 192, 287. Strecker (E ïe 935. Strohl (J.), 559. Stroobant (P.), Struthers (R. d Strutt (R.-J.), 4 Struve (H.), Stumpf (K.), _. Sudborough dj. 4) Sudry (L. S 143, 382. Suner (A. Pi), 235. Svedberg (FRE Swarts (F. ), 4 Swinton AA 195, 431. Szilard (B.), 681, 720, 968. Szreter (1.), 647. 239, 341, 522, 934 T Taboury (F.), 606, 756. Tamman (G.), 407 à 413. Tammes (Mlle T.), 200. Tannhäuser (F.), 475. Tanon (L.), 429, 649. Tauret {Ch.), 647, 648, 719, 794. Tanret (G.), 338, 684, 722. Tarbouriech (P.-J.), 23%, 893, 967. Tardif, 966. Taris (Etienne), 228. Tasker (H.-S.), 51, 610, 973. : Tatlock (R.-R.), 197. Teisserenc de Bort (L.), 286, S34 à S39. Teissier (J.), 46, 649. Teltscher ae NEC Tenani (M.), ie 896, Teppaz va ), 143: Téréchine (S.), 563. Ter Gazarian (G.), 5 Termier (P.), 334, nu 558, 606, 648. Terroine (E.-F.), 146, 192, 267, 650, 1192 756. Theissen ns ), 100. Therre (A.), 682, 721, 393, 1024. D ot (L.), 193. Thévenin (A.), 93, Et 645. Thévenon (L. }, 93 1 Thévenot (L.) 268, 383, 1024. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1059 Thibault (E.). 969. Thibierge, S9,5. Thiesen, 99. Thiroloix (J.), 96. Thiroux (A.), 143. Thole (F.-B.), 686, Thomae (J.), SS7. Thomas (F-), 473, 1027. Thomas (I.), 290. Thomas VC. Mass, 410,018; 122, 194, 970. ions (W.), 686. Thompson (G.-W.), 474. Thompson (H.- 341, 522. Thompson (J.-1 Thompson (S.-P.), 239, 340. Thomson (R.-T. CAT. Thooris (A.), 29, Thornley (T.), 521. Thornton (W.-M.). 609. Thorpe (J.-K.), 99, 973. Thorpe (T.-E.), 341. Thoulet (J.), 48, 189, 233. 382 Thouvenot (M.), 648. Thouvenv (L.), 94, 606. Thovert (J.), 95, 286. Threlfall (R. 2, Tian (A.), 97, 560. Tieri (L.), 687. Tietze (H), 612, 688. Tiffeneau (M.), 193, 471. Tikhoff (G.-A.), 491. Tilho, 1022. Timmermans (J.), 976. Tinkler (Ch.-K.), 478. Tison (A.), 48. Tissot (C.), 647, Titherley (A=W.) ), 386, 522. Tixier (L.), 469, 560, 606. Todd (G.=W.), 821. Tombrock (W.), 759. Tommasina (Th.), 893. Tonelli (L.), 291, 432, 687. Tonnelat (E.), 142. Tornquist (A.), 475, 123. Toubeau (M.), 602. Touchet (Em.), 191. Touplain (F.), 28, 1021. 826. 933, 954. Touyéras (1 (M), 649, 650, 682. Townsend (J.-S.), 195. ARS ee 6). 687. Trabert ( W.), 1028. Trabut, To Trannoy (R.), 144. Traquair (J.), 387. Traube (J.), 51, 563. Traube-Mengarini (M.), 687. Traube-Mengarini (Mme), 896. Traynard (E.), 48. Tribondeau (L.), 50, 96, 288, 471 Tribot (J.), 335. Triboulet (IH), 288, 1624. Trillat (A.), 283, 287, 335, Trivelli (A.-P.-H.), 344. Trobridge (F.-G.), 387. Troisier (J.), 49, 383, 933, 1024. Trouessurt (E.-L.), 47, 968. Trousseau (A., 502 à 510. Truc, 469. Tsakalotos (D.-E.), 516. Tschermak (A. von), 292. Tscherning, 681. Tuck (W.-B.), 972. Tucker (W.-S.), 340. Tuffier, 234, 517, 932. Tur (J.), 793. Turk(M.), 342. Turnau (R.), 612 Turner (H. H. )la  Turner Qi E. S. Turpain (Albert), Turro (R.), 235. Tutin LE JE a 686, 1026. Tutin (H.), 1 Tutton (AE FR He 158. Tweedy (M.), 195. 967. 469, 650, 28. ), 521, 686. 94, 202, 887. ’ 607, 197, 239, 386. { 720, 856, 888; 928. Twiss (D. F.), 99, Twort (F.-W.), 5 Tzitzeica (G.), 611, 934, 972. 1. 381. U Ulbrich ( JAbre Urbain de 1 bn , 648, 681, 893. 681, Uven (M. J. van), HAT, 975. V Vacher (A.), 1018. Vaillant (P.), 466. Vaillard (L.), 468, 1023. Valckenier-Suringar (J.), 612. Valekenier-Suringar (L.), 564. Valenta (E.), 524, 935. 934 Valeur (A.), 25 Valkenburg (C.-P. vau), 976. Vallaux (Camille), 44 Vallier (E.), 605. Vallon, 860. Valude (E.), 468. Vandernotte (L.), 467. Vaney (C.), 682. | Vanstone (E.), 239 | Variot, 146. | Vaucher, 287, 288, 429. Vavon (G.), 516, 648, 1021. Vayssière (A.), 893. Vélain (Charles), 678. Veley (SRE 413, 652. Venturi (A.), 896. Vérain (M. } 650. Verdun (P.), 756. Verliac (H.), 560. VeHDOrEN de aga 717, 1020. Verne ({ M | Vessiot (E.), et 428, 931. Vetter (H.), 7349. Vialleton (L.), 859. Vidal de la Blache (J.), 464. | Vieillard (A.j, 49. | Vieweger (1.), 426. | Vigier (P.), 467, 469. Vigneron (REEEnS) CHERS Visnon Gr 331, 467, 516, 569. Vigreux (Heuri), 338. Viguier (P.-L.), 233, 649, 755. Vila (A.). 41. Villard (P.), 48, 94. Villaret (M.), 607, 650, 156, 933, 969. Ville (J.), 192. Villeneuve, 1028. Vincent (H.), 335, 382, 560, 721, 894, 1020, 1023. Violle (J.), 48. Viré (A.), 467, 618. à Vitry (G.), 517, 649, 650, 682, 755. Vles (F.), 14%, 649, 932, 969. Vodden (L.), 197. Voigt (W. 147, 617. Voisin (G.), 41. 895, | Voisin (R.), 469. Volterra (V.), 291, 432. Vorisek (A.), 796. Vosinaer (G.-C.-J.), 344. Vouk (V.), 141. Voyer (Ct), 821. Vries (H. de), 343. Vries {J. de), 19X. 343, 388. Vries (0. de), 976. Vuillernin (P.), 287, 966. Vulquin (E.), 48, 517. W Waals (J.-D. van der), 43, 1417, 199, 388, 564, 611. Waals jun. (J.-D. van der), 345. Wade (J.), 973. Waelsch (E.), 200. Wagner (À.), qe Wauner (T.-B. Wahl (A.), 192, 334, 520, 681. Wahl (B.), 612, Waidner (W.), 467. Walker (J.), 473, 687, 934. Wüullach (0.), : Wailler (A.-D.), 561, 910. Wallerant (F.), 516. Walpole (G. 387, 972, Warburg (E.), 974. Warburton (Cécile), 603. Warcollier (G s) 681. Wassmuth (A.), 100. Watson (E.-R.), 972 Watson (I1.-E.) 51, © 609. Watson (W.), 2 Watt (H.-E.) 3. Watteville (( C. de), 120. Weber (A.), 235, 384, 649, 650. Weber (F.), 935. Wedekind { (É. , 290. Weevers (Th.), 916. Wegscheider (R. \, 524, 1028 W ehnelt A.) Weill (A.), 235, 607. Weill (J.), 288. Weinberz (M.), 49, 146, 193. 383, 518, 895, 932. Weisgerber (F.), 718. Weiss (G.), 49, 30, 12, 221, 92%: (\\alU 4 Weiss (P.), 861. Weiss (V.) 688. Weizmann (Ch.), 687. Wellik (A.), 100. Wellisch (E.-M.), 795. Welsch (J.), 286, 381. Wenckebach(K.-F.), 344 Went (K.), 612. Went (F.-A.-F.-C.), 344 Wenzel (K.), 147, 343. Werbitzky (F.-W.), 649. Wernicke (Gustave), 789. Wernicke (K.), 282. W erstenstein COPSE West (G West | W.) 431. Westphal (W. ), 431, 72 Wheldale (Mile M.), 43 White (James), 822. White (Jean), 609. Wihiteley (Miie M.-A Wichmann (C. E.-A.), Wiekham (D' Louis), 517 942. Widal (F.), Widal (P.), 606. Wiedemann (E.), 123. Wiesner (J.), 100, 382,612. .), 99, 159. 50,517, 560, 64 473. 1, 645, 907 à 9, 1023. Wietrzykowski (W.), 931. Wildeman (E. de), Wilkie (J.-M.), 198, 759. Wilks {W. A.-R.), 686. Wilson (A.), 291. Wilson (E.), 195. Wilson (H.-A.), 561, Wilson (J.-G.), 472. Wilson (a. -T. \, 685. Wilson (R.-W.), 51. Wilson (W. } #27. Winkler (C.), 148. Winmill (T. . Winter (M.), 4° Wirtinger (W.) ; Wise (A.), 473. Witsenburg (E.-C.), 796. Wilz (Aimé), 187, Woeber (A.), 342 609, ,; 956, ND — Wolt (J.), 234, 382, 518, Wologdine (S.), 335, 641, Woltereck H. 48. Wowisch (F.), 34: Wood (J.-K. À Wood (T.-B.) Woodhouse (3. 0 686. Worms, 969. Worrall (Mlle E.), 522 Wren (H.), 934. Wright (A.), 610. 427, 603. 195, 826. 311, 1021. 193 931. 1060 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Wright (A.-M.), 239, 896. Wroczy DE (A.), 559. Wuite (J.-P.), 976. Wunsch (D.-F.-S.), 197. Würschmidt (J.), 974, 975. Wurtz (H.), 895, 932. Wuyts (H.), 382. Wyrouboff (G.), 561, 651. Y Yamanouchi (T.), 383, 470, 649. Yates (J.), 522. Yorke (W.), 157. Young (W.-H.), 143. Young (W.-J.), 827, 971. Yvon (P.), 49, 860. Z Zachariadès (N.), 893. Zahlbruckner (A.), 416. Zaha (H.), 524, 1027. Zahradnik (K.), 100. Zappa (G.), 432. Zaremba (S.), 605. Zeeman (P.), 199. Zeiïller (R.), 382. Zeisel (S.), 1028. Zambonini (F.), 292, 432. Zellner (J.), 200, 688. Zenneck (J.), 927. Zikes (H.), 524. Zunmermann, 475, 522. Zimmern (A.), 335. Zirkel, 91. Zitek (A.), 292. Zolla (D.), 631 à 642. Zoretti (L.\), 228. Zuckerkandl (E. dE 147 Zuderell nn Zunino 1e) ; Ve Zuylen SAS (Mne Hélène de), 4 Zwaardemaker (H.), 759, Zylstra (K.), 344. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselto. EURO OPA 1 ft Drpius 1 AET HR 164 { ï f ! }: 4 {! HV , À ; tee PU 3 fi} f 1 PTT AIDES Se | <= ae ù < FEES ! S ET nr Dee ss = SES ee ES de & = = D N = = = à Mars = Ses Dre. Re SN ES ñ } { Î Hi HA 1; fut, D = Len & VS OT nes" sg < Ÿ > rs none … È à . è "ES DR TE 37 Droni mens =" “ent : Sn ST