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Par Sésasriex GÉRARDIN (de Mirecourt), Ancien Chanoine du noble et insigne chapitre de Poussay; ex-Professeur d'Histoire naturelle de l'Ecole centrale des Vosges; attaché au Muséum d'Histoire naturelle de Paris ; l'un des coopérateurs du Dictionnaire &es Sciences naturelles, Membre de l'Académie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Dijon, et Correspondant de plusieurs Sociétés savantes. Le na'urel et les mœurs dépendent beaucoup des appétits, BUFFON, Disc. sur la nature des Oiseaux. TOME SECOND. A PARIS, cuez TOURNEISEN rsirs, RUE DE SEINE, N.° 12. 18306. ” Digitized by the Internet Archive . in 2011 with funding from | | ., University oflllinois Urbana-Champaign . http:/www.archive.org/details/tableaulmentO2gera AL | SV © \ l' PE Jalecture. L Page 4, ligne 17,genus 22, lisez: 6 ——— 22, édit. 10, gen. 54 , lisez : L 11 , édit. 10, lisez: 10 55 ——— 12, au-dessus, li- à "ter 79 ==—— 24, genus 109, li- SEZ! corse 161 ——— 20, platalea leu- corodios., gen. 80; liseze se, 2169 ——— 20, genus 87, li- E SE2 ! de. 171 ——— 5, la dangereu- sé se, lisez: dem ——— 27, ne sont gris à que dans, we 4 Fsez ME. L Vas. . 7 ‘179 ——— 19, genus 79, li- à LC CR CRRES à 191 ——— 2, Tringavaria- 14); "lSez:: 2. La, à PE DR 10, et ensernble er v automne ‘» Le APS mt l'sez ”...5. Ÿ 277 ——— 7, lapoule d’eau, 4 Lex: 5 4 1 J 286 —— 9, la foulque, NS : lisez : . " 3 812 ——— 32, après nauséa- Sn æ bonde , a- Q JOULEZ: se CEE Fautes d'impression à corriger * édif. 13. se 4 dans ce volume avant #9 41 Fa, sat édit. 13 “+ gen. 5g. pas À au-dessous, + AD , —_— “ s genius 103. platalea leucorodia ,gen. 42; genus 88. la fatale. FRET ne sont que gris dans. genus 88. Tringa squatarola. et partent ensemble en au< toirne. Les poules d’eau. les foulques. des tableaux, Æege-350, ligne dernière «ex 4 général com- me , lisez: . ——— 19, qui descend, Lisez: .... 21,Mergusmas, lisezchec em 12, d.{érre ; di- SEZ! se. : 2 + d’Endra- | gut,lisez: ——— 2, Coronofa, lisez: .… 18, du dessus , lisez: LE er PET 08 4 en général que comme. OR Ter des. qui s'étend. Mergus albellus. de terre. | d'Endraght. Coronala. His du dessous TABLEAU ÉLÉMENTAIRE D'ORNITHOLOGIE, OU HISTOIRE NATURELLE DES OISEAUX QUE L’ON RENCONTRE COMMUNEMENT EN FRANCE, SUITE DE L'ORDRE PREMIER. SECTION TROISIÈME. LES OISEAUX GRIMPEURS. P, RMI les nombreuses familles de la section des passereaux que nous venons d'examiner , nous avons remarqué le genre des sitelles, celui des grimpereaux et même celui des mé- sanges , qui ont l'habitude de grimper le long du tronc des arbres et de leurs branches, pour y chercher entre ou sous leur écorce des larves T. 2. 1 a TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ou des insectes qui y sont cachés, et dontelles font la principale partie de leur nourriture ; mais ceux dont il est ici question sont les grimpeurs par excellence. La nature,en les formant, les a organisés d’une manière analogueà cet exercice: elleleur adonné à tous des pieds courts, puissamment musclés ; quatre doigts épais, forts et nerveux, dont deux sont dirigésenavant et deuxenarriere; cesdoigts sont armés d’ongles solides, arqués et aigus, au moyen desquels ils peuvent s’accrocher fortement et en tous sens, au tronc ou aux branches des arbres, soit en montant, soit en descendant. Les deux doigts anterieurs sont unis ensemble et à leur base par une courte membrane. Parmi les genres d'oiseaux qui composent celte section, les uns ont le bec droit, la langue très-longue, extensible, ronde, ressemblant à un ver de terre, et garnie à son extrémité de petites pointes dirigées d’avant en arrière; les autres ont le bec arqué en en-bas, convexe en-dessus et comprime par les côtes. Cette section ne renferme que trois genres, savoir : celui des pics, celui des £orcols et celui des coucous. D'ORNITHOLOGIE. CA PREMIER GENRE. LES PICS. Les pics sont à juste titre les plus excellens grimpeurs que nous connoissions en France ; ils sont constamment attaches à l’écorce des arbres, contre laquelle il se dirigent en tous sens et dans toutes les situations. Ils ont la tête fort grosse, les muscles du cou épais et très-forts; le becdroit, en formede coin, carré à sa base, cannelé dans toute sa longueur et comme tronqué net à sa pointe : ce bec est d’une substance compacte, dense et très-solide; il est assez fort pour non-seulement entamer les écorces des arbres, mais encore pour percer leur tronc : leur langue, qu’ils peuvent darder à volonte, est ronde, susceptible de s’alonger beaucoup au-delà du bec , et son extrémité est armée de petites pointes courbées en arrière : leurs pieds sont courts, forts et musculeux ; leurs doigts, longs, épaiset nerveux, sont armés _ d'ongles très-crochus, solides et pointus : leur queue, composée de douze pennes étagées en coin, dures, roides et fléchies en dessous, leur sert de point d'appui dans les attitudes diffe- rentes qu ’1ls prennent en Scpins le long des arbres. & TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Les pics sont en général des oiseaux tristes etsolitaires, qui, occupés sans relâche du travail pénible qui pourvoitaleurexistence,méconnois- sent lesdélicesdu délassementetdurepos;ils igno- rent les doux ébats des autres habitans de l'air, et ils sont absolument étrangers à leurs melo- dieux concerts. Toujours inquiets et farouches, ils fuient toute espèce de société, et on peut dire que la nature leur a départ le genre de vie le plus labo- rieux, le plus dur et le plus malheureux. Quatre espèces de pics seulement se rencon- trent en France, où on les nomme vulgaire- ment hecques-bois, savoir : le pic-noir, le pic: vert , l'épeiche ou pic-varié, tt le petit épeiche. 10 LE PIC-NOTR. Picus martius. Lan. Syst. nat. édit, 13, gen. 22, Le pic-noir.Bais. Ornith. tom. 4 , pag. 221. ( Foyez la planche XVIT de cet ouvrage.) Ce pic, le plus grand de ceux que l’on trouve en Europe, n’est guère moins gros qu'une corneile; sa longueur, du bout du bec à l’extrémité de la queue, est de seize à dix- sept pouces ; son vol, de deux pieds quelques pouces, et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, s'étendent à la moitié de la longueur de sa queue. | Le dessus de la tête du mâle est, ainsi que l’occiput, d'un fort beau rouge; tout le reste du plumage, y compris D'ORNITHOLOGIE. 5 les ailes et la queue, est d’un noir foncé; l'iris est noir aussi ; le bec, qui a deux pouces et demi de longueur, est blanchâtre sur les côtés, et d’un cendré noirâtre en dessus et en dessous : les pieds, dont lé plus long des doigts postérieurs peut se diriger en avant Commé en arriére, sont couverts de plumes environ jusqu'a la moitié de leur longueur en devant; le surplus des pieds, les doigts, ainsi que les ongles, sont cendrés. La fémelle, dont le noir du plumage est moins profond que celui du mâle, n’a de rouge que sur lé derrière de la tête; quelque fois même elle n’en a pas du tout. . Le pic noir n’habite que les bois solitaires et vastes des montagnes, et on ne le trouve jamais que’trés-accidentel- lement dans ceux de la plaine. Cet oiseau, qui est un ennemi dangereux des abeïlles, dont il pérce les ruches, cause beaucoup de dégâts dans les forêts qu'il habite; car il creuse dans les arbres un trou si profond , que ceux-ci, affoiblis par cette excavation, sont en peu de temps brisés par les vents, ce qui oblige lé pic à se pré- parer une nouvelle retraite, qu’il choisit souvent dans des arbres sains, qu'il entame aussi bien que les arbres creux et dépérissans 1) ; il frappe des coups si forts, qu'ils se font entendre de tres-loin et qu’on seroit JEnte de les prendre pour dés coups de hache. 1) Nous sommes bien de l'avis de M. de Buffon, lorsqu'il dit que les gens soigneux de leurs foréts devroient employer. tous les moyens pour extirper la race de ces dévastateurs perfides. Pour juger des torts que ces’ o/seaux causent ‘aux forêts, il faudroit avoir été, comme nous, témoins de leurs dégâts ! aussi n’avons- nous plus été étonnés que le Pline français rapporte dans son ouvrage immortel, que M. Deslandes, dans son Essai sur la marine des anciens , se plaignoit de ce qu’il y avoit peu d’arbres propres à fournir des rames de quarante pieds de long, sans être percés de trous faits par les pics. 6 TABLEAU. ÉLÉMENTAIRE Toutes les fois qu'il entre dans son trou,ilpousse unesorte de sifflement ; il fait entendre aussi une espèce de craquement , qui dépend du frottement de son bec contre le boïs. La femelle du pic-noir ne pond que deux ou trois œufs blancs; elle les dépose au fond du trou qui sert d'habitation au couple. i L'espèce de cet oiseau est peu nombreuse, et les en- droits où on la rencontre avec plus de certitude, quoi- qu’assez rarement encore, dans le département des Vosges, sont les forêts de La-hutte près de Darnay, celles d’Erival et celles du Valdajol, non loin de Remiremont: encore n’en voit-on jamais qu’un couple dans une assez grande étendue de terrain, qu'ils ne quittent en aucune saison ; car tous ceux que nous avons reçus de ces deux derniers endroits surtout, soit pour notre cabinet, soit pour les galeries du muséum d'histoire naturelle de Paris, y ont été tués durant les froids les plus rigoureux de l'hiver, Les oiseleurs de Paris prétendent que cet oiseau ne se trouve pas dans les forêts des environs de cette immense capitale de l'Empire. 2.9 LE PIC-VERT- Picus viridis. Lin. Syst. nat. édit. 10, gen. 54. Le pic-vert. BRis. Ornith. tom.4, pag. 9. Le pic-vert est-a peu pres de la grosseur d’un geai; sa longueur totale, de l'extrémité du bec à celle de la queue, est d’un pied six lignes ; il a dix-huit pouces six lignes de vol, et ses ailes, étant ployées, n’atteignent pas tout-a-fait la moitié de la longueur de sa queue. Les plumes qui recouvrent le dessus et le derrière de la tête de cet oiseau sont étroites; elles sont cendrées à D'ORNITHOLOGIE. 7 leur origine, et d’un rouge vif et éclatant dans le reste de leur longueur, ensorte qu’étant couchées d’avant en arriere les unes sur les autres, il n’y a que cette dernière couleur qui paroïît, d'autant plus qu’elle est placée sur le nôirätre qui se trouve sur les côtés de la tête. De chaque côté de la mandibule inférieure du pic-vert on voit un trait d'un fort beau rouge. Tout le dessus de son corps , depuis l'occiput jusqu'aux couvertures de sa queue inclusivement, est d’un vert olivâtre; son crou- pion est d’un jaune teinté de cette couleur; sa gorge est d’un blanc jaunâtre ; le devant de son cou de même que sa poitrine , et ses flancs, est d’une couleur olivätre pale et qui paroît comme souillée; son ventre est d’un blanc olivätre , un peu lavé de jaune; ses jambes sont d’un blanc sale , varié de taches olivätres ; les couvertures du dessous de sa queue sont d’un blanc sale, lavé de jaunâtre , avec des raies transversales de couleurs brunes. Les petites cou- vertures du dessus de ses ailes sont du même vert que le dos : les moyennes, celles surtout qui sont plus proches du corps, sont d’un vert d'olive du côté extérieur et à leur extrémité ; les grandes, qui sont les plus éloignées du corps, sont brunes, tachetées de blanc des deux côtés. Les grandes pennes des ailes sont intérieurement brunes ; mais elles sont extérieurement variées de taches blan- châtres qui, sur quelques pennes, sont mêlées avec des taches olivâtres : les pennes moyennes , d'un vert d’olive du côté extérieur, sont variées, du côté intérieur , de taches transversales blanches sur un fond brun. Des douze pennes qui composent la queue, les deux du milieu sont les plus longues, etles latérales diminuent de lon- gueur à mesure qu’elles sont plus extérieures; le fond de la couleur de ces pennes est brun; les deux intermédiaires sont variées, des deux côtés, de vert olivâtre; les latérales le sont 8 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE seulement du côté extérieur, et les huit intermédiaires sont terminées de noir. L’iris est d’un brun aurore; le bec est partout noirûtre , a la base de la mandibule infé- ricure prés, qui est d’un jaune olivâtre; les pieds sont d'un verdâtre brun et les ongles cendrés. En été le pic-vert, qui n’habite que les bois, se pose souvent à terre près des fourmiliéres ; il alonge sa langue hors de son bec, et l’introduit dans l’intérieur ou la pose seulement sur la surface des fourmilieres ; les fourmis , qui he cherchent qu'a butiner, croyant avoir trouvé une bonne aubaine, accourent en foule sur cette espèce de ver, et trouvent la mort la où elles s’empressoient de chercher la vie. La nature a enduit la langue des pics d’une espèce de viscosité tenace dans laquelle les fourmis s’engluent, et quand l'oiseau juge qu'elle est suffisamment chargée de ces insectes , il retire sa langue dans son bec et il les engloutit tous. Ilrecommence plusieurs fois cette manœuvre, et c’est ainsi que, sans beaucoup de peine , ilse régale amplement. Il semble que le pic-vert doit être privé de cette res- source durant la saison rigoureuse , puisqu’alors toutes les fourmis disparoissent; mais au contraire il chasse avec bien moins de peine, et sa proie échappe bien moins à ses poursuites : il ouvre, dans ce temps, les fourmilières avec son bec et ses pieds; il s'établit au milieu de la brèche qu’il a faite, et la, tout à son aise, il avale ces insectes qui sont engourdis par le froid, sans épargner leurs larves dontil est très-friand , et qu’ilne peut prendre l'été, parce qu’étant immobiles et sans appétit, elles restent au centre de la fourmilière, et échappent ainsi à son avidité destruc- trice 1). 1) C’est sur ces fourmilières que nous nous sommes procuré les * D'ORNITHOLOGIE. | 9 Dans toutes les autres saisons de l’année, le pic-vert grimpe contre les arbres, qu’il frappe à coups de bec re- doublés :), et que l’on entend de très-loin ; il dépouille même assez souvent de toute leur écorce les arbres secs, et c’est au moment qu'il travaille ainsi, que le chasseur , qui le guette, le surprend ; mais souvent il se dérobe à ses poursuites en tournant autour d’une branche et en se tenant tapi contre le côté diamétralement opposé à l'ennemi qui cherche à le surprendre. Le pic-vert établit son nid au centre d’un gros arbre creux, et il choisit de préférence celui qui, comme les trembles, a son bois moins dur; il place ce nid à quinze ou vingt pieds de terre, et sans autre préparation que la vermoulure qui se trouve au fond du trou. La femelle pond quatre ou cinq œufs verdätres, tachetés de plus beaux pres pour notre collection , non avec des gluaux qui au- roient empêtré leurs plumés étles auroient tachées d’une manière presqu’ineffaçable , mais bien avec des lacets de crins quenousdispo- sions très-près les nns des autres autour de la fourmilière et à quatre pouces au-dessus du sol. Au moyen de ces piéges, nous avons pris, quand nous l’avons désiré , non-seulement des pics, mais plus d’une fois encore des perdreaux, qui venoient sans doute manger des larves de fourmis. Pour réussir dans cétte chasse , il faut tendre ses lacets le soir, parce que c’est dès la pointe du jour que les pics cher- chent à butiner. 1) Quelques auteurs ont écrit que le pic-vert surtout, après avoir donné un certain nombre de coups de bec contre un arbre, passoit subitement de l’autre côté pour voir s’il ne l’avoit pas percé. En supposant qu'effectivement il passât de l’autre côté de l'arbre qu’il vient de frapper, ne seroit-il pas plus naturel de penser qu’il ne fait ce mouvement que dans l'intention d’y saisir promptement les ;nsectes que ses coups auroient épouvantés , et qui seroient sortis de dessous l'écorce opposée pour prendre la fuite ? 10 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE points noirs : les jeunes qui en éclosent savent grimper long-temps avant de pouvoir voler 1). La femelle du pic-vert n’a pas ce beau rouge qui est piacé sur la tête du mâle, non plus que les deux traits de même couleur qui accompagnent les bords de la mandibule in- férieure de son bec : elle les a noirs. Cet oiseau, le plus connu des pics et le plus commun dans nos bois, s’y trouve en toutes saisons; néanmoins ils n’y restent pas tous, il en part plusieurs pour les pays méridionaux , sans doute. 3 L'ÉPEICHE, OU LE PIC VARIE. Picus medius. LAN. Syst. nat. édit. 10, gen. 59. Le pic varié. Bris. Ornith. tom. 4, pag. 38. ( Voyez la planche XVIII de cet ouvrage.) De la grosseur à peu près d’un merle, celui-ci a de longueur totale, du bout du bec à celui de la queue , huit a neuf pouces, et treize à quatorze pouces de vol; lorsque ses ailes sont ployées , elles atteignent à peu prés la moitié de la longueur de sa queue. L’épeiche a le devant de la tête, pres de la base de la mandibule supérieure du bec, d’un gris sale ; le sommet 1) On est généralement persuadé que le pic-vert est un oiseau tellement sauvage, qu’il est impossible de l’apprivoiser : nous pou- vons certifier le contraire, en citant l'exemple d'un couple que nous avons élevé dans notre enfance en les nourrissant avec des vers de fumiers découpés dans du lait, et mêlés avec de la mie de pain et des mouches. Ces oiseaux, qui avoient été pris fort jeunes, montroient une grande familiarité, et nous faisoient mème voir une sorte d’attachement. D’ORNITHOLOGTE. 11 noir avec une bande noire sur l’occiput, qui lui forme une espèce de coiffe qui se termine sur le cou par une pointe de même couleur, près de laquelle partent deux raies noires, une de chaque côté, dont la première, en remontant vers la base du bec, y forme comme une espèce de moustache, et la seconde, en descendant au bas du cou, y dessine une sorte de collier. É Le dessus du cou, le dos, le croupion et les couvertures du dessus des ailes sont d’un beau noir ; les plumes scapulaires sont blanches ; les grandes pennes des aïles sont brunes, et toutes les autres sont d’unnoir profond, tachées de blanc net et pur ; la gorge, le devant du cou, la poitrine et le haut du ventre sont d’un blanc jaunâtre ; le bas-ventre et les cou- vertures du dessous de la queue sont d’un rouge ponceau. Les quatre pennes du milieu de la queue sont noires, les latérales sont variées de noir et de blanc. L’iris est noir; le bec, les pieds et les ongles sont noirâtres. La femelle ne diffère du mâle qu’en ce qu’elle n’a point de rouge sur la tête. Lt: Le. pic varié se tient l’été dans les bois, et l’hiver on le voit fréquemment, dans les jardins et les vergers, grim- per le long des arbres, contre lesquels il frappe des coups de be@tplus vifs et plus secs que ceux du pic-vert. IL grimpe en montant et en descendant contre leurs bran- ches avec une facilité étonnante; ilest singuliérement aidé dans cet exercice par la nature même des pennes de sa queue, qui sont tres-roides et qui, étant fléchies au dedans, lui servent comme de point d'appui. Cet viseau, qui est très-répandu dans toute la France et même dans toute l’Europe, est fort défiant : du plus loin qu’il aperçoit quelqu'un, il se cache aussitôt derrière une branche, contre laquelle il demeure immobile. IL niche dans un trou d'arbre creux, et quelquefois l’en- LU 22 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE trée de son nid est à plus de vingt pieds d’élévation au- dessus du sol. h° LE PETIT ÉPEICHE. Picus minor. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 50. Le petit pic varié. Bris. Ornith. tom. 4 , pag. 41. C'est la plus petite espèce des pics et non la plus com- mune de ceux qui habitent, sinon toute la France, du moins les sapinieres des montagnes des Vosges, où elle est assez abondante 1). Cet oiseau, qui n’est pas plus gros qu’un moineau, a cinq pouces sept lignes de longueur du bout du bec a l'extrémité de la queue, et neuf pouces deux lignes de vol. Le somimnet de sa tête est roussâtre en devant et en arriere ; le milieu est d’un rouge éclatant ; locciput et le dessus du cou sont noirs; le dos et les plumes sca- pulaires sont de cette derniere couleur , maïs elles sont rayées de larges bandes transversales blanches; les . couvertures du dessus de la queue sont noires; la gorge et le devant du cou sont roussâtres; la même couleur, mais d’une nuance plus claire, s’étend sur le reste du des- sous du corps; elle est néanmoins variée sur la poitrine de quelques taches noires, et sur les côtés, de lignes de cette même couleur disposées suivant le sens des plumes; les couvertures du dessus des ailes sont noires, les grandes seulement sont variées de blanc; les pennes des aïles sont noires, tachetées de blanc roussâtre; les quatre du mi- 0 1) Au rapport de plusieurs ornithologistes recommandables , le petit épeiche est fort répandu dans toutes les régions du nord, telles que la Russie, la Laponie et la Sibérie orientale. D’ORNITHOLOGIE. 13 lieu de la queue sont également noires, et les latérales sonf variées de noir et de blanc. L'iris est de couleur de noisette ; le bec, les pieds et les ongles sont noirâtres. Outre que la femelle n’a point de rouge sur la tête, c’est que tout ce qui est noir dans le mäle est chez celle d’un brun mal teint et comme effacé. Cet oiseau se tient presque toujours dans les bois ; il a les mêmes habitudes que ses congénères ; il niche comme eux dans un trou d'arbre qu'il dispute quelquefois aux mésanges ; sa ponte est de quatre ou cinq œufs. d’un blane rougeàtre , marqués de zones et de taches d’un brun noir, plus abondantes vers le gros bout. Il vient souvent pendant l’hiver visiter nos vergers, où on ne le voit guéresalors grimper qu’autour du tronc, sans jamais s'élever fort haut sur les branches. En toute saison et dans tous les lieux qu’il habite, ce pic est celui de tous qu'on approche et qu’on surprend le plus diflicilement. DEUXIÈME GENRE. LES TORCOLS. Nous n’avons dans ce genre qu’une seule espèce, qui, quoique répandue dans toute la France, n’y est cependant pas très-nombreuse ; cetie espèce est le zorcol ordinaire connu sous les noms vulgaires de £orticoli où de tour- licou. | Ses caracteres consistent dans un bec très- court, dans quatre doigts, dont deux sont placés en ayant et les deux autres en arrière; dans 14 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE une langue très-longue, extensibleet ronde , ui ressemble à un ver de terre, et enfin dans les pennes de sa queue, qui, au lieu d’être roides, comme celles despics, sont au contraireflexibles. LE TORCOL'ORDINAIRE. Yunx torquilla. LAN. Syst, nat. édit. 13 , gen. 58. Le toreol. Bris. Ornith. tom. 4, pag. 4. ( Voyez la planche XVIII de cet ouvrage.) Cet oiseau n’est guères plus gros qu’une alouefte; sa longueur, mesurée du bout du bec à celle de la queue, est de six pouces et demi; son vol de neuf pouces six lignes, et ses aïles, étant ployées, s'étendent au tiers de la longueur de sa queue. Le torcol a tout son plumage mélangé de gris, de noir et de tanné ; ces diverses couleurs sont disposées par bandes et par ondes opposées entre elles, avec des teintes plus sombres qui produisent le plus riche effet. Les pennes des ailes sont brunes, marquées sur le côté extérieur de taches carrées, qui sont d’un roux clair. Tout le dessous du corps de cet oiseau est d’un fond gris blanc, qui néan- moins est teinté de roussètre sous le cou, avec de petites zones noires sur la poitrine , qui s’éclaicissent sur l’esto- mac; le ventre et les jambes sont d’un blanc sale, mêlé d'un peu de roussâtre et varié de quelques petites taches noirâtres. Les pennes de la queue , qu’il épanouit en vo- lant, sont d’un gris clair, varié de bandes transversales noirätres, de petites lignes en zigzags et de taches de la même couleur. L'iris est jaunâtre, le bec d’une couleur de plomb clair; les pieds et les ongles sont grisâtres. ‘ D'ORNITHOLOGIE. 15 La femelle a tout le plumage d’un ton de couleurs plus foible que celles du male. Elle pond dans un trou d'arbre creux, sans construire de nid , et sans autre préparation quüe celle de gratter avec son bec et ses ongles la poussière Vermoulue qui s'y trouve : elle dépose sur ce lit peu recherché huit à dix œufs d’un blanc d'ivoire. Tout le temps que dure l’incubation , le mâle apporte pour nourriture à sa femelle des fourmis , ainsi que les larves de ces insectes. | Cet oiseau de passage nous arrive en mai et nous quitte dès la fin d'août. Il voyage seul , vit seul, et il ne contracte d'autre société qu'avec sa femelle; encore ne dure-t-elle que le temps nécessaire pour la propagation de son espéce. Quoique les pieds du forcol soient conformés comine ceux des pics, néanmoins il ne grimpe pas comme eux, il:est même rare qu'il se perche; il se tient le plus ordi- nairement à terre, y cherchant des fourmiliéres dans lesquelles il darde comme eux, sa langue, et il la retire lorsqu'elle est suffisamment chargée des fourmis qui se prennent dans le gluten dont cet organe est enduit, et il se régale en les avalant. Chez nous le torcol semble préférer pour se percher quelque arbre isolé au milieu d’une haie 1); néanmoins, sur la fin de l’été, on le trouve, et toujours seul, piéton- nant dans les petits sentiers qui traversent les champs de . : : mp 1) Le torcol paroïît se plaire de préférence, dit-on, sur les peu- pliers; et, ce qui semble confirmer cette opinion, c’est qu’en Italie, où on ne voyoit, à ce qu’on assure, que peu ou point de ces oiseaux avant qu’on n’y eût multiplié les plantations de cette espèce d’arbres , ils sont aujourd’hui très-abondans ; et ils pla- cent volontiers leurs nids sur ces arbres, dont on a formé de belles allées. 16 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE blé, d’orge et d’avoine. Il est alors si gras, que lors- qu'on en a tué un, sa graisse, en fondant par la cha- leur, pénètre à travers de sa peau, se répand sur ses plumes et les colle ensemble. Aussi, dans cette saison, le £orcol est fort recherché des friands, qui le regardent comme un mets extrêmement délicat. Le cri de cet oiseau est un sifflement aigu et prolongé, par lequel on le distingue facilement de toutes les autres espèces; mais ce qui le fait plus particulièrement re- marquer, c’est l'habitude ( ce qui lui a fait sans doute donner le nom qu'il porte) de tourner et de tordre son cou, de côté et en arriere, d’un mouvement lent et ondu- lant, qui tient en quelque chose de celui des serpens : il renverse sa tête de manière que son bec se trouve relevé paï dessus le dos, ayant en même-temps les yeux à de- mi fermés ; ce mouvement ne paroît être occasioné en lui que par la surprise ou l’effroi que lui imprime la vüe de tout objet nouveau. | On est persuadé qu’on ne peut nourrir en cage de jeunes forcols, à raison de la difficulté de leur procurer les alimens qui leur conviennent. Cependant notre esti- mable collègue et digne ami Willemet, professeur d’his- toire naturelle de la ci-devant école centrale du départe- ment de la Meurthe, lui qui s’est occupé toute sa vie, par forme de délassement, du plaisir d'élever toutes sortes d'espèces d'oiseaux de la ci-devant Lorraine, nous a assuré avoir nourri des torcols pendant plusieurs mois, avec des larves seules de fourmis. D’après ce fait, que nous avions avancé comme constant dans un de nos cours d’orni- thologie , un élève dont la passion dominante étoit l’éduca- tion de toutes sortes d'oiseaux qu'ilpouvoit se procurer, afin d’en étudier les mœurs autant que la captivité le permet, a nourri chaque année plusieurs forcols auxquels, il don- D'ORNITHOLOGIE. 17 noit pour première nourriture des larves de fourmis, ef ensuite de la pâtée de cœur de bœuf ou de mouton mêlé avec de la mie de pain détrempée à l’eau. TROISIÈME GENRE. LES GOUCOUS. . Le bec des coucous est médiocrement long, très-peu arqué, arrondi à sa base, où l’on voit un rebord saillant qui entoure les narines : ce bec est terminé par une pointe un peu cour- bée en en-bas. | La langue de ces oiseaux est longue, ver- miforme et extensible, comme celle des deux genres précédens; ils ont aussi, comme eux ;, deux doigts en avant et deux en arrière. | Leur queue, toujours longue, affecte diffé- rentes formes , suivant les différentes espèces : dans les unes , elle est ronde, et dans les autres elle est pointue; mais elle est carrée dans la seule espèce que l'on trouve en France, et qui est celle du coucou ordinaire. LE COUCOU ORDINAIRE, Cuculus caud4 rotundatä& Lin. Syst. nat, édit. 13, gen. 57. Le coucou. BR1S. Ornith. tom. 3, pag. 105. ( Voyez la planche XVII de cet ouvrage.) Le coucou est un oiseau de passage qui, tous les ans, ÿ = 2: 2 19 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE arrive en France au printemps ; et la quitte à la fin de l'été. Il n’est pas moins intéressant par sa seule histoire que par les fables absurdes dont l'ignorance, ou au moins le défaut d'observations suivies, l’a chargée. Nous tracerons d’abord le signalement de cet oiseau; puis nous esquisserons, le mieux qu'il nous sera possible, l'histoire de ses mœurs et celle de ses habitudes, en sépa- rant le vräÿ du merveilleux qu’on s’est plu à y ajouter. Les limites que nous nous sommes prescrites dans cet ou- vrage , nous forceront cependant de passer sous silence une foulé de fables apocryphes, qui présentent d'autant moins d'intérêt qu’elles ont été enfantées par l'ignorance ou par la supérstition , et que le bon sens seul réprouve ; d’ailleurs en Les rappelant 'ici nous craindrions qu'elles ne laissassent quelque impression défavorable aux progrés de l'histoire naturelle , dans l'esprit des personnes qui ignorent ces absurdités. | Le coucou a de longueur totale, mesuré de l extrémité du bec à celle de la queue, treize à quatorze pouces, et vingt-deux pouces et demi de vol. Lorsque ses aïles sont ployées, elles atteignent, à deux pouces rs VE de sa queue. . Le coucou à tout le dus de la tôte = Fe derrière du cou et le dessus du dos, d’une couleur cendrée assez bril- lante ; les grandes couvertures de ses ailes sont brunes . tachetées de roux et terminées de blanc; les petites sont d’un cendré foncé, ainsi que les deux premières pennes de l’aile, qui ont leur côtéintérieur taché de blanc rous- sàtre; les six pennes suivantes sont brunes , terminées de blanc et tachées de roux des deux côtés. Sa gorge et le devant de son cou sont d’un cendré moins foncé que le dos; sa poitrine, son ventre et tout lesdessous de son corps, sont d’un blancsale, rayé transversalement de brun. D'ORNITHOLOGIE. <3 Les plumes qui recouvrent le haut de ses jambes, à partis de leur insértion avec le corps, tombent de chaque côté én forme dé manchettes sur le tarse, qui est garni extés “ieurement de plumes cendrées, jusqu'à la moitié de sa longueur. Sa queue, composée de dix pennés coupées carrément, est noirâtre, terminée de blanc ét semée de quelques taches blanches. La plus extérieure de ces pénnes, de chaque côté, est rayée transversalement de cetté deri rüére couleur; l'iris ést noisette , et le plus souvent jaune les coins de la bouche sont d’ün jaune orangé, et le bee ést noir ; les pieds, ainsi que les ongles, sont jeunätres: : ILest peu d'oiséaur qui, comme le coucow, soient suscep: #ibles d’autant de variations dans les nuances et }x distria bution des couleurs de leur plumage. Parmi un grand ombre d'indiviaus que nous avous dans notre cabinetz ñon-séulement les femelles diffèrent des mâles, mais les mâles eux-mêmes sont tellement dissémblables entr'eux qu’on seroit tenté deles prendre pour des espèces différentes. Il y en a dont le fond de la couleur est d’un jaune sateÿ teinté de roux, avec un très-petit nombre de raies trassver- sales brunes ; d’autres sont d’un gris de perle en-dessus ét en-dessous du corps, lequel est traversé, surtout sur Ja gorge, la poitrine et le ventre, de lignes en zigzags d’un brun foncé et presque noir. ; | Le vulgaire s'imagine . qu’à l'approche de Fhive er le coucou se retire dans un arbre creux, et que la, après avoir fait une amiple provision de grains de blé et s'être dépouillé de ses plumes pour s’en envelopper 1), il y passe, _1) Le bons sens indique ici plusieurs contradictions qu’il est hon- teux de ne pas apercevoir. D’abord, un animal qui est erigéurdi ä-t-il besoin de provisions d’alimens? ( Le coucou d’ailleurs ‘est un oiseau insectiyore et nullement gradivore. } Et peut-on croird Te 2, CE 20 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE engourdi, la saïson rigoureue , à la manière des Loir$: D'abord la différence du degré de chaleur du sang, dans lun et l’autre de.ces deux animaux, re end la parité d’en- gourdissement impossible. En second lieu, nous défions tous ceux qui onttrouvé desloirs engourdis, d’oseraflirmer qu'ils ont jamais rencontré des coucous dans la même torpeur. ILest dans l’ordre &es possibilités qu’on ait découvert une fois et peut-êtremême deux fois, depuis nombre desiéeles, des coucous. dans quelque creux d’arbre; mais ce n’a ja- mais pu être plus tard qu’à l'automne, époque où, par exem- ple; un coucou blessé par quelque accident, ou éclos trop tard , et se trouvant conséquemment trop foible pour oser entreprendre un long voyage 1), n'ayant pas eu d’ailleurs ässez detemps pour muer, n'étant pas suffisamment garni de plumes, et se trouvant par conséquent plus susceptible des impressions froides de l'atmosphère, se seroit retiré dans ce trou pour s’en garantir. Mais il n’auroit pas tardé à périr de froïd'autant que de faim, lorsque les rigueurs de l'hiver se seroient fait sentir. Il.a donc: été trouvé accidentellement dans ces circonstances : il étoit environné de quelques plumes que la pousse des nouvelles avoit fait tomber pendant la mue ; et bientôt la tradition du père à son fils, qu'il recevroit plus de chaleur des plumes qui seroient détachées de sôn corps, que si elles y étoient adhérentes ? En a-t-on jamais vu d’engourdis, dépouillés de leurs plumes, et munis de provi- sions d’une nourriture quelconque ? 1) Les coucous font de longs voyages outre-mer, dit-on; on les voit passer deux fois chaque année dans les îles grecques de YArchipel, et toujours seuls de leur espèce , au milieu d’une nombreuse compagnie de iourterelles, dont ils paroissent être Les cheis : aussi les naturels du pays les nomment-ils #i$on0- Kraclrs qui veut dire conducteurs de tour'erelles. 1. _.—. D’'ORNITHOLOGIE. 21 et successivement de bouche en bouche , a confiné tous les coucous dans des creux d’arbres, environnés de leurs plumes pour y passer l'hiver. En oübliant que celui que nous supposons gratuitement avoir été trouvé, étoit transi de froid , on a supposé que tous s’engourdissoient, et on n’a pas tiré la conséquence naturelle qu’en cet état ils : n’avoient pas besoin de nourriture. C’est ainsi que les erreurs populaires, basées sur l’igno- rance, surtout en histoire naturelle, se sont propagées de génération en génération, et elles subsisteront d’autant plus long-temps dans certains départemens , que nous avons la certitude que dans quelques-uns on regardoit, du temps même des écoles centrales, l’étude de l’histoire naturelle comme une superfluité et même comme une inutilité 1 ); on la faisoit sottement consister dans l’art d’embaumer des araignées. À ces erreurs populaires qui concernent le coucou, on a ajouté un fait qui, s’il étoit vrai, seroit un crime aux yeux des hommes même les moins susceptibles de déli- catesse. On a prétendu que non-seulement il ne faisoit point de nid; mais qu’il alloit pondre dans celui d’un autre oiseau, aprés en avoir mangé les œufs 2), et qu’à peine le petit coucou étoit-il éclos, qu’il cherchoiït à dévo- rer la bonne mére qui l’avoit adopté comme son enfant. Le coucou, à la vérité, ne fait pas de nid; la femelle va pondre dans celui de quelque autre oiseau, comme de 1) Telle étoit surtout l’opinion de certains pygmées orgueilleux et jaloux , qui se croyoient les dignes émules des Descartes et des Newton. 2) Ceux qui prétendent que Le eoucou mange les œufs des autres oiseaux, disent que le mäle seul est coupable de ce forfait : la femelle, en pondant dans le nid d'autrui sans y commettre de larcin, doit donc déjà paroître moins eriminelle à nos yeux. 22 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE merle, de fauvette, de rouge-gorge, de rouge-queue, de rossignol, de, lavandière, de linotte, de pouillot, de roitelet, de troglodyte, etc. Que le coucou ne fasse point de nid, cela n’est nulle- ment contraire aux vœux de la nature , puisque, s’il faisoit un nid, ce seroit afin que la femelle y pondît et y couvât ses œufs : or, ii lui est impossible, d’après sa conforma- ton physique, de couver; elle ne doit donc point cons- iruire de nid. e Cette impossibilité de ceuver lui vient de ce que son sternum est un os large et épais qui se continue depuis la poitrine jusqu'aux jambes, et qui empêche conséquem- ment la communication de la chaleur du sang qui est si né- cessaire pour l'incubation; d’ailleurs elle écraseroitses œufs, dont la coque est très-mince, par la seule pression de ce même os: ila donc fallu, pour la propagation de son espèce, que lanature lui donnàt l'instinct d'aller pondre dans le nid d’un autre oiseau qui, comme lui, vivoit d'insectes 1). On a prétendu que le coucou ne faisoit jamais qu'un œuf; que la femelle n’en déposoit qu’un seul dans le nid de l'oiseau qu'elle avoit choisi: cela est possible ; mais nous avons disséqué une de ces femelles, que nous avions tuée en l’attirant à la portée du e@oup de fusil au moyen de son chant que nous imitions, et nous lui avons trou- vé, tant dans les ovaires que dans l’ovi- ductus , trois œufs, dont le plus avancé, que cette femelle auroit sûrement pondu dans la journée même ou au plus tard le lendemain , n'étoit guère plus gros que celui d’une aiouetle, et presque parfaitement rond; le fond de sa A 1) C’est de là , sans doute, que sont venues quelques plaisanteries dont certains maris se fàchent quelquefois, D'ORNITHOLOGIE. 25 couleur étoit un blanc sale, marqué de points rougeûtres et de quelques lignes noires disséminées sans ordre. On a reproché enfin au coucou, que son petit, aussitôt qu'il en avoit la force, égorgeoit les enfans de sa mére nourriciére, qui étoient ses frères adoptifs, et qu'il n'é- pargnoit pas même celle de qui il tenoit le jour 1). Si ceux qui ont avancé ces faits se fussent donné la peine d'observer ces jeunes oiseaux, qui ne sont qu'insectivores et nullement carnivores, ils se seroient convaincus qu’ils n’avoient,ace moment surtout, ni la force ni Les facultés nécessaires pour commettre un tel forfait. L'histoire naturelle des mœurs et des habitudes du cou- cou, dépouillée de toute espèce de fables controuvées, se réduit donc à dire qu'il est un oiseau de passage qui nous arrive au printemps, qui ne Chante guéres que per- dant le temps que durent ses amours, et qui nous quitte de bonne heure en automne ; que s’il nous reste quelques infirmes qui n’ont pu suivre la route de leurs semblables dans leur émigration, les premiers froids les font bientôt périr; que le coucoune construit point de nid , à la vérité, et nous en avons indiqué la cause ; que la femelle va pondre son œuf ou ses œufs dans un ou plusieurs nids de petits oiseaur qui se nourrisent d'insectes et de vers; que dans le nid qu’elle a choisi pour sa ponte le jeune coucou, qui est éclos de son œuf, vit paisiblement avec 1) Nous avons rencontré, étant en promenade avec nos élèves dans un bois pour herboriser, un dénicheur d’oiseaux qui venoit de prendre un nid de fauvette, dans lequel il se trouvoit trois jeunes de cet oiseau et un coucou. Le volume de ce derrier occu- poit autant de place que les trois autres. Ils paroissolent tous quatre vivre ensemble en aussi bonne intelligence, quoiqu'ils fussent déjà grands , que des enfans bien éduqués qui ont sucé avec le lait des principes de paix et de concorde. 24 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ses freres adoptifs ; et qu’enfin la foiblesse de son bec lui rend impossible l'attentat qu’on lui prête contre les jours de ses freres, et encore moins contre ceux de sa mére nourriciere. M. Loitinger, médecin à Saarbourg, que M. de Buffon cite fréquemment dans son ouvrage avec l'éloge qui est dû à ce savant distingué, a fait, dans une brochure intitulée Histoire du coucou d'Europe, imprimée en l'an 3, chez Levrault, à Strasbourg, des observations fort importantes sur cet oiseau, qu'il a suivi avec cette constance qui caractérise un vrai savant et un ami zélé des intérêts de la science. Elles nous ont paru trop intéressantes pour ne pas les rapporter ici, au moins sommairement. D'abord :il assure , d'apres ses propres observations, et contrairement à ce que quelques auteurs avoient avancé relativement à l'union du coucou mâle et femelle, qu’au contraire des caïlles qui ne se fixent l’une à l’autre que momentanément, ces oiseaux demeurent appariés au moins jusqu'a ce que leur petit ait assez de forces pour quitter le nid étranger qui lui servit de berceau, et venir les retrouver et se joindre à eux, afin de faire en- semble leur long voyage. | Le même auteur donne comme un fait certain, parce que plus d’une fois, dit-il , il en a été témoin , que des que le coucou femelle a fait sa ponte dans un nid quelconque , on entend constamment le chant du pére et de la mere dans les environs de ce nid. Il ajoute que l'œuf ou les œufs du coucou sont d’un blanc sale, marqués çà et la de taches brunàtres et irré- guliéres; qu'ils sont presque ronds et plus gros que ceux de l’écorcheur; que leur coque est fort mince, ce qui est cause qu'il faut moins de temps au jeune coucou pour D'ORNITHOLOGTIE. 25 éclore; et enfin que cet œuf ou ces œufs ne se trouvent jamais au milieu des autres œufs de la véritable mére , mais toujours à côté et sur les bords du nid, et que c’est le père ou la mère coucous qui vient fréquemment les dis- poser ainsi, lorsqu'ils ont été dérangés : ce qui supposeroit que cet oiseau n’abandonne pas le soin de sa progéniture, quoiqu'il en ait confié l’espoir à une mére étrangére. M. Lottinger donne comme un fait constant, et toujours d’après ses propres observations, que quand le jeune coucou est éclos, ses vrais parens viennent plusieurs fois par jour le visiter, jusqu’à ce qu'il soit assez fort pour quitter le nid et aller les rejoindre. Depuis 1776 jusqu’au 16 juin 1787, M. Lottinger dit avoir eu occasion de découvrir dix nids, soit de rouges- gorges, soit de pouillofs , de pies-grièches , etc., dans les- quels des coucous avoient pondu. Il faut convenir que M. Lottinger a été heureux dans ses recherches, et qu’il a été bien servi par les hommes qu'il avoit choisis pour le seconder. Ce qui nous étonne, mais ce que nous nous garderons cependant de révoquer en doute , surtout d’après une auto- rité aussi digne de notre confiance que celle de M. Lottinger, c’est que ce savant assure qu’aussitôt que le jeune coucou est éclos , s’il existe encôfe dans le nid des œufs de l'oiseau hospitalier, le pére ou la mére du nouveau-né ne manque jamais de les jeter dehors et souvent au loin du nid, afin que leur propre enfant s’y trouve seul et plus commodément :il assure même que , si tous les œufs éclosent en même temps, les pére et mère du jeune coucou jettent également hors du nid les nouveau-nés de la mére légitime, et qu'il en a trouvé plusieurs fois qui étoient étendus morts de froid et de faim autour du nid d'un rouge-gorge, d’un pouillot, etc. ; qu'alors le jeune coucou occupoit seul le nid, où il] se trouvoit fort à l'aise. 26 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Moins heureux que M. Lottinger dans les recherches que nous avons faites, et que nous avons fait faire pen- dant plus de trente ans, de nids qui continssent un ou plusieurs œufs de coucou, il nous a été impossible d’en découvrir un seul; et dans ce laps de temps on nous a apporté un seul nid de rouge-gorge que le hasard avoit fait découvrir, et qui contenoit six individus, savoir, cinq petits rouges-gorges et un jeune coucou: celui-ci occupoit le milieu du nid , et ses frères adoptifs étoient rangés autour de lui; tous paroiïssoient vivre dans la meilleure intelligence, et cela depuis long-temps, car les pennes des ailes des jeunes rouges-gorges commençoient à poindre. Le second nid que nous avons vu, contenant un jeune coucou, est celui de fauvette, que nous avons rencontré étant à la promenade avec nos élèves , et dont nous venons de rapporter l'histoire dans la note au bas de la p. 23. SECTION QUATRIÈME. LES GALLINACÉS. Cette quatrième et dernière section de l’ordre des oiseaux fissipèdes proprement dits, ren- ferme ceux de ces animaux qui, presque Lous , sont pesans, et se nourrissent ordinairement de grains, quoique la plupartsoient omnivores. Ce sont en général des oiseaux pulvérateurs , c’est-à-dire, qui ont l’habitude de gratter avec leurs pieds la poussière; la terre et même les tas d’ordures, dans lesquels ils cherchent les ahimens qui leur conviennent, D’'ORNITHOLOGIE. 27 C’est parmi eux que nous avons pris nos oiseaux de basse-cour ,que, de temps imme- morial, l’industrie humaine, stimulée par le grand mobile de l'intérêt personnel, a su ré- duire à l’état de domesiicité. On reconnoit les gallinacés à leurs pieds qui, outre qu'ils sont courts, sont encore armés, dans les mäles de la plupart des espèces, d’un éperon pointu; et à leurs doigts qui sont réunis, à leur base, par une courte membrane, et qui sont dentelés sur leurs bords. Mais leurs caractères les plus tranchans consistent dans la voussure de la mandibule supérieure de leur bec, qui est légerement arqué, et dans leurs narines recouvertes d’une pièce charnue; la plupart d’ailleurs ont en outre un ou plusieurs appendices ou des caron- cules charnues, soit autour de la base du bec, soit autour des yeux seulement. Cette section est composée de sept genres, dont un seul se sous-divise en plusieurs petites tribus. Parmi les espèces que ces genres ren- ferment , les unes ne sont que de passage périodiquement annuel ou seulement acci- dentel dans la plupart de nos départemens; les autres, quoiqu’exotiquesetoriginaires des con- ünens lointains, se sont néanmoins naturalisés 28 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE chez nous , au point d’y vivre en domesticité, et de s’y multiplier comme dans leur pays natal. Ces sept genres sont celui des pigeons, celui des trétasou cogs-de-bruyères , celui des paons , celui d:5 faisans, celui des pintades, celui des dindons et celui des outardes. PREMIER GENRE. LES PIGEONS. Les caractères particuliers au genre des pigeons (qui, par la légèreté de leur vol, d’un côte, et par leurs habitudes, de l’autre, semblent faire la nuance par laquelle on passe, comme insensiblement, des passereaux aux 2allinacés proprement dits), consistent dans un bec droit, dont le bout de la mandibule supérieure est un peu renflé et courbé; et dans des narines à demi- couvertes par une membrane épaisse et molle. Tousles pigeons vivent uniquement de grains ousemences dures, qu’ils avalent sans les casser. Ils ne font, à chaque ponte, que deux œufs et conséquemment deux petits, dont un est presque toujours mâle et l’autre femelle; mais, pour compenser ce petit nombre, la nature a voulu qu'ils fissent plusieurs pontes chaque année, Le mâle se charge du soin de couver D'ORNITHOLOGIE. 29 alternativement avec sa femelle ; 1s nourrissent l’un et l’autre leurs petits en leur dégorgeant les graines qu'ils ont deja avalées, afin qu'étant macérées et ramollies dans leur jabot, l'estomac dé leurs enfans puisse les moudre et les digérer plus facilement. L'histoire des pigeons présente d'autant plus de difficultés et même d'obscurilés, qu’étant * une des races d'animaux les plus anciennement domestiques chez nous, elle est aussi une de celles qui se sont le plus multipliées, le plus mêlées et le plus altérées ; et c’est ainsi qu’elle a nécessairement produit un plus grand nombre de variétés différentes. Il est hors de doute que l’homme seul ne soit l’auteur de toutes ces races esclaves, qu’il a d'autant plus perfectionnées pour son profit, qu'elles sont plus dégénérées et plus viciées quant à leur nature primordiale. Si nous voulions donc donner ici un précis exact de l’histoire des pigeons , il faudroit re- passer -en revue toutes les races étrangères que lon a introduites en France, les différens mé- langes que l’on en a faits avec d’autres races , le produit qui en est résulté, puis encore le produit de ce nouveau résultat avec d’autres espèces ; ainsi de suite à l'infini. Or toutes ces nuances imprimées par la 30 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE servitude , et que l’on ne peut saisir avec préci» sion, parce qu’elles sont le fruit de nos fantai- sies, présentent rarement des caractères constans où des limites certaines entre elles : elles offrent donc une confusion qui ne permet pasde distin- guer les traces des variétés naturelles ; en sorte que la conclusion de leur examen feroit, comme pour la race des chiens, l'histoire de l’art de l'homme, plutôt que celle de la nature r). Pour éviter cet embarras, dont certainement il nous seroit difficile et, disons-le franchement, impossible de nous tirer, nous nous bornerons ici à reconnoître, avec les plus célèbres natu- ralistes, à la tête desquels nous placons à juste titre l’immortel Buffon , trois espèces de pigeons seulement, que nous croyons, avec lui , être la souche primitive et originelle de toutes les variétés accidentelles ou artifi- cielles de ces animaux. 1) L'histoire de toutes les variétés de pigeons, comme , de celles des chiens et des chevaux, que l’intérèt de l'homme à formées pour son avantage , seroit une entreprise aussi fastidieu- se, qu’elle nous paroît impossible ; car quel homme pourroit se flatter de trouver seulement des expressions qui indiquassent avec certitude tous les produits des mélanges de plusieurs mil- liers de générations eroisées ? D’ailleurs ce travail seroit en pure perte pour la science. On se convaincra de l'impossibilité d’une telle entreprise ,en jetant seulement les yeux sur l’appendice alpha- bétique des races pures dés pigeons les plus généralement connues, avec lesquelles on peut produire des variétés, qui se trouve à la £a de ce volume. D'ORNITHOLOGIE. 3x Néanmoins nous donnerons à la fin de l’his- toire des pigeons, en nous renfermant tou- jours dans les limites étroites que nous nous sommes prescrites pour cet ouvrage, la liste no- minative seulement des variétés que cet illustre auteur a rapportées dans son ouvrage 1). Les trois espèces de pigeons que nous re- gardons comme la souche primitive de toutes les variétés, soit accidentelles, soit artificielles, que l’on trouve en France, sont le 2iser ou pigeon sauvage où fuyard, le ramier et la courterelle. [e) 1. LE BISET, OU PIGEON FUYARD. Columba domestica. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 104. Le biset. BRIS. Ornith. tom. 1, pag. 82. ( Voyez la planche XIX de cet ouvrage.) Le biset 2) est de la même espèce et de la même taille 1) Nous croyons ne pouvoir mieux faire que d'inviter ceux de nos lecteurs qui désireroient avoir de plus amples connoissances sur les différentes espèces de pigeons reconnues comme races parles ama- teurs plutôt que par les naturalistes , à recourir sur ce point à l’his- toire naturelle de Buffon. 2) Les hommes curieux d’élever des pigeons par des motifs d'intérêt personnel , plutôt que dans les vues d’en étudier l’his- toire naturelle, donnent le nom de bisets ou de fuyards à tous les pigeons qui vont chercher leur nourriture dans les cam- pagnes , et ils réservent celui de pigeons domestiques pour ceux que l’on tient en volières et qui ne se répandent jamais dans les champs. 32 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE que les pigeons qui, avant la révolution, peuploient nos colombiers des campagnes, et que l’on y nommoïit fuyards et plus vulgairement, du moins dans certains départe- mens tels que celui des Vosges, pigeons sauvages : ce sont absolument des bisets qui, trouvant plus de commodités pour la vie dans les habitations particulières que l’homme a eu l’industrie de leur préparer, se sont à demi domes- bicisés ; nous disons à demi domesticisés , parce qu'ilarrivoit assez fréquemment qu’à l'approche de la belle saison quel- ques couples prenoient leur essor pour tout le temps de leurs nichées. Ils alloient établir leurs nids dans des trous de rochers, d'arbres ou de murailles ; puis ils revenoient au colombier , où ils trouvoient avec une nourriture abon- dante un abri contre les rigueurs de l’hiver. Le biset et notre fuyard sont donc absolument de la même espèce, de la même forme et de la même gran- deur ; si le biset est d’une couleur plus bise ( d’où , sans sans doute, il a tiré son nom) que notre fuyard, cela ne provient sûrement que de ce que la domesticité, em pesant sur ce dernier jusqu'a un certain point, a influé sur la couleur de son plumage 1). 1) Lorsqu’en philosophe on réfléchit sur les merveilleux ré- suitats de l’industrie humaine , on ne peut qu'être saisi d’admi- ration à la vue d’une multitude d’espèces de prodiges qu’elle a opérés, et la familiarisation , si on peut s'exprimer ainsi, du, biset en est un qui doit nous étonner : car que l’homme soit venu à bout de domesticiser de gros oiseaux pesans , tels que des paons , des dindors ou des cogs, rien én cela ne doit nous surprendre ; mais qu'il soit parvenu à rendre domestiques dans sa demeure des oiseaux à vol légér, comme des pigeons, il faut convenir qu’il lui a fallu un art tout particulier. A la vérité, le pigeon, et surtout le bise, n’est point un domestique esclave ,* comme nos chevaux et nos chiens ; il n’est qu’un captif volontaire, qui peut, quaud il lui plait, s'éloigner de nous, en fuyant dans D’'ORNITHOLOGIE: Le cendré tirant sur le bleu, ou la couleur bise, est 3 ot celle qui domine sur le plumage de notre biset; sa gorge, changeant, suivant l'incidence de la lumiere , du vert au cramoisi doré, offre l’éclat et les reflets du cuivre de rosette; le bas du dos et du croupion est couvert de plumes blanches; les ailes et la queue sont cendrées, mais les ailes sont traversées par une double bande noire ; l'iris est d’un brun rouge, le bec d’un rouge pâle ; les pieds sont d'un rouge vif, et les ongles noirs. Le biset se perche , ainsi que notre pigeon de colom- bier , tandis que les espèces factices, si on peut s’expri- mer ainsi, qui sont ceux des voliéres, ne se perchent jamais. On sait que toutes les races de pigeons en général, et les mâles surtout, -*ont la faculté d’enfler par l'air qu'ils aspirent leur jabot considérablement, et surtout lorsqu'ils se trouvent en présence de quelques femelles autour des- quelles ils font ce qu’on appelle la roue. Nous observerons cependant ici que la femelle a la même faculté que le mäle de dilater son jabot, quoique d’une maniere moins sensible, M° Péraultremarque à cette occasion, que ce gonflementa rapport à lanourriture que les pigeons avalent pour la porter à leurs petits; il pense, et nous pensons de même , que si elle y étoit serrée et comprinée, elle s’y digéreroit et s’y aitéreroit, puisque le mouvement de compression estune des causes principales de la digestion ; or: dans le cas présent, la digestion ne peut s’opérer, à raison du volume d'air contenu en même temps que les alimens dans ce jabot. les forèts, sans que nous puissions nous ÿ opposer ; et cependant il n’est pas moins pour nous un hôte qui, sans ètre dispendieux, xaous forme une branche lucrative de l’industrie agricole. "3, 3 34 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Quoique le biset vive en liberté, son plumage varie néanmoins quelquefois, et ce sont ces variétés qui ontété prises, par quelques ornithologistes, pour des caractères qui déterminoient des espèces différentes, et qu'ils ont nommées, pour ceite raison, pigeons de montagnes et pigeons de roche ou rocherays, suivant les lieux où ces oiseaux avoient fait leurs nids au moment où ils les ont observés. à Le biset nous arrive par troupes trés-nombreuses , sur- tout dans les départemens de Saône et Loire, de là Côte- d'Or et dans celui des Vosges, du 20 au 25 février ; il s'établit dans les bois, où il fait son nid dans un creux d'arbre : la femelle, qui fait deux couvées par an, l’une au printemps et l’autre en été, pond à chacune deux œufs parfaitement blancs, d’où il éelôt deux petits dont l'un est, comme nous l'avons dit, ordinairement mâle et l’autre femelle, Cet oiseau, qui se plaît particuliérement dans les solitudes les plus reculées et les pius épaisses des forêts, dans les rochers arides et sourcilleux, nous quitte du 20 au 30 octobre pour retourner du côté du midi ; et il se répand jusqu’en Afrique. , Le biset, comme toutes les espèces de pigeons, boit de suite et sans relâche , ayant la tête plongée dans l’eau, jusqu’à ce qu'il ait avalé toute celle dont il avoit besoin. (e 2. LE RAMIRE Columba palumbus. Lin. Syst. nat. édit. 13, g. 104. Le pigeon ramier. Bris. Ornith. tom. 1, pag- 80. Le ramier est à peu prés de la grosseur de la corneille D'ORNITHOLOGIE. 35 mentelée 1) ; ila, du bout du bec à celui de la queue , dix-sept pouces et demi, et vingt-neuf pouces de vol; ses ailes, étant ployées, s'étendent à deux pouces près de l’extré- mité de la queue. Le dessus de sa tête est d’un cendré foncé ; le derrière et les côtés de son cou sont d’un vert doré , changeant en bleu ou en couleur de cuivre de rosette, suivant qu'ils sont frappés par les rayons de la lumiere : au milieu de cette couleur brillante se trouve placée ure bande blanche qui est oblique et qui y forme comme un demi-collier. Le haut du dos, les couvertures du dessus des ailes, sont d’un cendré brun; le bas du dos , le creu- pion et les couvertures du dessus de la queue, sont d’un cendré elair ; la gorge est cendrée ; le devant du cou et Ja poitrine sont d'une belle couleur vineuse; le ventre, les flancs et Les jambes , de même que les couvertures du dessous de la queue sont d’un gris blanc ; les grandes pennes des ailes sont brunes, bordées extérieurement de blanc ; les moyennes sont d’un gris brun, et le bord exté- rieur de aile est blanc ; la queue est en dessus d’un cen- dré foncé, terminée de noiratre ; l'iris est d’un jaune pâle, et le bec jaunâtre : la membrane qui couvre les narines est rouge; elle est couverte d'une espèce de poussière fari- neuse de couleur blanchâtre: les pieds sont rouges , et garnis de plumes jusqu’a l’origine des doigts, qui sont de la même couleur, et les ongles noirs. Quoique l’on voie fréquemment dans le département des Vosges, ainsi que dans plusieurs autres, des ramiers en 1) Nous remarquerons que l’on rencontre dans nos forêts une autre espèce de.ramier bien plus petite que celle dont il est ici question ; mais nous sommes persuadés qu'on ne doit attribuer la différence qui se trouve eutre la taille de l’un et celle de l'autre, qu'à l’influence du climat dans lequel elle a pris naissance. 3 * 36 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE toutes saisons et même pendant l'hiver 1}, il n’est pas moins vrai de dire cependant qu'ils sont des oiseaux de ‘passage, qui nous arrivent au commencement du prin- temps et nous quittent en automne. A leur arrivée ils se jettent dans les bois; ils y vivent, suivant la saison, de glands et de faines, dont ils sont fort avides, ainsi que de différentes espèces de graines et de pousses de diverses plantes, surtout de celles du blé : ils s'abattent, et avec le plus vif empressement. sur les mois- sons que le vent et la pluie ont versées, et y ils causent beaucoup de dommage. Peu de temps apres leur arrivée , les ramiers s’apparient; le mâle et la femelle se demeurent fidèles pendant la belle saison , peut-être même le sont-ils pendant toute leur vie. Ils construisent leur nid sur les arbres de haute futaie ; ils le composent de buchettes ; ils lui donnent une forme aplatie, et le font assez grand pour contenir le mâle et la femelle : leur ponte, qui a lieu deux fois par an, est de deux ou trois œurs parfaitement blancs, que le mâle couve alternativement avec sa femelle; ce qui a lieu pour toutes les espèces du genre des pigeons. Le ramier a un roucoulement beaucoup plus fort que 1) On voit à Paris, dans le jardin des Tuileries, ainsi que dans les Champs-Élysées , plusieurs couples de pigeons ramiers , qui, chaque année , nichent sur les arbres les plus élevés de ces magnifiques promenades publiques. Ces oiseaux paroissent être tellement familiarisés avec le bruit et la vue de l’homme, que la grande affluence de monde.qui parceurt en tout temps ces lieux enchanteurs ne les effarouche nullement : ils y restent même tout l’hiver , ou au moins une partie de cette saison ; car, depuis quelques années , noùs en. avons remarqué , aux mois de janvier et de février , qui se tenoient perchés à la cime des plus grands arbres. D’'ORNITHOLOGIE. 37 celui du biset, et que l’on distingue de trés-loin , sur- tout dans le temps de ses amours. On a remarqué que , lorsqu'il veut pleuvoir, ces oiseaux se taisent, et qu'on ne les entend presque jamais l'hiver. Leur chair, et surtout celle des ramereaur (on nomme ainsi leurs petits), passe pour être un fort bon mets : aussi, peu de temps aprés leur naissance, on en voit une grande quantité sur les marchés de Paris, que des dénicheurs d'Orléans ou des environs y apportent, aprés les avoir engraissés en leur soufflant, dit-on, avec la bouche, pendant huit ou quinze jours, des grains de millet dans le gésier. 4. LA TOURTERELLE. Columba turtur. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 104. La tourtelle. BRis. Ornith. tom. 1, pag. 92. ( Voyez la planche XIX de cet ouvrage. ) Nous n'avons en France, strictement parlant, qu'une seule espèce de tourterelle, qu'on y nomme vulgairement tourterelle des bois; néanmoins on rencontre, dit-on, quelques individus de cette race qui ont un collier, et d’autres qui en manquent : des ornithologistes ont conclu de la que c’étoient deux espèces distinctes et bien tranchées. Sans révoquer en doute cette assertion, nous nous contenterons de dire que, quelques soins que nous nous soyons donnés pour rassembler ces deux va- riétés, nous n’avons jamais pu y parvenir. La lourterelle est un oiseau de passage, qui ne nous arrive que vers la mi-mai, du moins dans les Vosges, où le froid est bien plus àpre et plus long-temps prolongé qu'a Paris; elle nous abandonne de bonne heure à la fin de l'été. 38 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Sa longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue, est de onze pouces ; son vol d’un piéd huit pouces, ét ses ailes, quand elles sont ployées, s’étendent aux trois quarts de la longueur de sa queue. Le dessus de la tête de cetoiseau et le haut dé son cou, en arrière, sont de couleur cendrée; le bas du derrière du cou, le dos, le croupion et les couvertures du dessus de la queuesont bruns; un mélange de brun foncé et deroux varie les couvertures des ailes : une belle couleur vineuse est répandue sur le cou et sur le haut de la poitrine ; lé bas de cette partie est d’un gris brun, ainsi qué les côtés : lé ventre , les jambes, ainsi que les couvertures du dessous de la queue, sont blancs. Une large tache d’un beau noir, coupée obliquement par des raies blanches, part de chaque côté du cou et se dirige d'avant en arriére, en formant sur cette partie une espèce de démi-collier. Les pennes des ailes sont brunes, bordées extérieurement de blan- châtre; celles de la queue, à l’exception des deux du milieu , sont d’un gris brun en dessus ef noirâtre en des- sous; la plus extérieure de eéhaque côté, a ses barbes blanches en dehors. Une peau nue et rougeâtre entoure les yeux; l'iris est jaunâtre; le bec d’un brun bleuitre; les pieds sont rouges et les ongles noirs. Aussitôt que la tourterelle est arrivée dans nos contrées, elle s'établit dans les forèts les plus solitaires et les plus sauvages ; là elle construit son nid au sommet d’un arbre le plus élevé : ce nid est composé de buchettes, comme celui de ses congénères; ces buchettes sont disposées à claire-voie , tellement qu'on aperçoit, à travers et du pied de cet arbre, les deux œufs blancs que l'oiseau couve, et dont la femelle partage le soin de l’incubation alternative= ment avec son mâle. La tourterelle, dont le mâle et la femelle se restent cons- D'ORNITHOLOGIE. 5) tamment attachés , est spécialement offert comme le mo- déle de la fidélité conjugale ; on dit même que l'attache- ment réciproque de ces deux époux est si tendre et si profond, que la perte de l’un entraîne celle de l'autre par l’ennui et le chagrin qu'il en ressent. Les tourterelles n’ont pas été prises seulement pour le modéle de la fidélité conjugale ; mais on les a aussi re- présentées comme l’emblème de la Volupté, ne vivant, pour ainsi dire, que de caresses. Les poëtes eux-mêmes, pénétrés de cette idée , les ont chargées du soin de faire voler dans les airs le char de Vénus, qu'elles conduisent en se caressant. | Cette opinion emblématique est sans doute fondée sur ce que les tourterelles sont de tous les animaux ceux qui paraissent les plus ardens, dont tous les gestes, lés mou- vemens et la contenance semblent annoncer le sentiment de la volupté. Il n’est que peu de personnes, sans doute , qui n'aient été témoins du roucoulement , des passes et des eour- bettes du mâle en présence de sa femelle, et de leurs ca- resses réciproques, qui ont quelque rapport extérieur avec des baisers ; et c’est sûrement pour cette derniére raison que les éourterelles nous ont paru les plus voluptueux de tous les animaux : cependant ni les gestes du mâle en présence de sa femelle, ni leurs caresses réciproques, ni leurs invitations mutuelles à s'occuper du soin de la cons- truction de leur nid et de jouir par anticipation du plai- sir d'y caresser leurs enfans, n'offre rien de partieulier que ne présentent également toutes les espèces de pi- geons. A l’arriére-saison les fourlerelles se répandent dans les champs de blé et d'avoine nouvellement moissonnés, mais plus particuliérement dans ceux de navettes , où elles 40 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE trouvent une ample récolte de grains dont elles font leur nourriture ; aussi sont-elles fort grasses dans cette saison : c'est là qu'elles se réunissent en troupes composées de plusieurs péres et mères avec leurs petits; qu’elles se disposent pour leur voyage lointain ; il ne nous en reste aucune pendant l'hiver. On élève en France plusieurs espèces de tourterelles étrangeres; c’est surtout chez les oiseleurs de Paris qu'il faut chercher les belles variétés de ces charmans oiseaux. Il s’en trouve de parfaitement blancs et qui ne sont que de la taille d’une grive ordinaire , ayant les yeux d’un rouge vif et brillant ; d’autres sont bruns; et quelques espèces sont d’un rouge tirant sur le terreux. Mais la plus commune et la plus généralement répan- due de ces tourterelles étrangères , que nous pouvons maintenant regarder comme indigene de la France, puisque chaque mois elle y pond et s’y propage, c’est la‘tourterelle grise de l'ile de Luçon, dont le plumage est d’un gris élair sur tout le corps, a l’exception d’une teinte vineuse qui est répandue sur la poitrine etsur le ventre. Les grandes pennes de ses ailes sont noires, et les petites, de même couleur, sont bordées de fauve; les couvertures du dessus de sa queue sont noires aussi, et celles du dessous de cette partie sont blanches. Un joli collier noir se dessine agréa- blement sur son cou, de chaque côté de sa gorge, et se dirige d'avant en arriére, un peu au-dessous de l’occiput. Cette espèce a l'iris et ke bec d'un rouge de carmin, les pieds d'un rouge vineux, et les ongles noirs : elle est bien plus petite que notre tourterelle. Le roucoulement du mâle, surtout pendant l'été, est une espèce de cri plain- üf, dont la continuité, qu’il n’interrompt que pour prendre de la nourriture, a quelque chose d’ennuyeux et même d’insupportable. D’'ORNITHOLOGIE. 41 Les races principales des pigeons domestiques , avec les- quelles on peut faire et avec lesquelles on a fait en effet toutes les variétés secondaires, se reduisent à quinze 1), savoir : 1,° Les pigeons grosses- gorges . . . . . . . Ils sont ainsi nommés, parce qu'ils ont en effet la faculté d’enfler prodigieusement leur jabot, en aspirant et en y re- tenant l’air. 2.° Les pigeons mondains. Ilssont les plus recomman- dables par leur fécondité; ils sont un peu plus forts que le , biset ; ils produisent presque ‘pendant tous les mois de l’année. 3,° Les pigeons romains. Ils sontaussitrès-féconds; ils n’ont point de huppe: ce sont les plus gros pigeons domesti- ques : on les nomme aussi sim- plement pigeons pattus. 4° Les pigeons nonains. C’est une des races moyen- . nes, et même des petites, que l'on reconnoît à l'espèce de demi-capuchon, composé de : plumes redressées, qu'ils por- tent sur la tête, et qui leur 1) Cette liste des variétés principales de pigeons domestiques est extraite des Œuvres. de M, de Buffon, « TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ee, ° 5. Les pigeons paons. . 6." Les pigeons cravattes. descend le long du cou, en forme de cravatte, jusque sur sur la poitrine. La maniere dont ceux-ei relèvent et étalent leur queue, comme le paon ou le dindon, leur a fait donner le nom qu'ils portent. C’est une des plus petites es- pèces, qui n’est guères plus grosse qu'une fourterelle.. La différence qui la distingue des | pigeons nonaïins, consiste en ce 7.9 Les pigeons coquilles hollandaises . . . . 8.” Les pigeons hirondelles. qu’elle n’a pas, comme eux, de demi-capuchon sur la tête et sur le cou ; qu’elle n’a précisément en place qu'un bouquet de plumes qui sem- blent se rebrousser sur la poi- trine et sous la gorge. Ils ont derrière la tête des plumes arebours, qui leur for- ment comme une espèce de coquille : ils sont aussi de pe- tite taille. ” Ils ne sont pas plus gros non plus que des tfourterelies. Leur corps est tres-alongé; tout le D'ORNITHOLOGIE. 43 9.° Les pigeons carmes. . 10.0 Les pigeons heurlés. 11.0 Les pigeons-tambours ou glou-glou. dessous, ainsi que la tête et la queue, sont blancs. Le reste du dessus du corps est toujours d’une seule et même couleur. Ceux-ci sont très-pattus ; leurs pieds sont trés-courts, et les plumes qui les recouvrent sont fort longues. Une petite huppe, terminée en pointe, est placée derrière leur tête. Ils ont tout le dessous du corps et des ailes blanc, et le dessus toujours d’une autre couleur, mais uniforme. Cette espèce, de la grosseur des pigeons mondains, a tout le corps blanc, à l'exception de la queue, qui est constamment de la même couleur qu’un trait qui, comme d’un coup de pin- ceau, marque le dessus du bec jusqu’au milieu de la tête. Plus gros que les pigeons carmes, les glou-glous, qui sont fort bas de jambes cttres- paftus, tirent leur nom de ce son , glou-glou , qu'ils répétent souvent, surtout lorsqu'ils sont prés de leur femelle. 44 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 12.° Les pigeons suisses. . 15.° Les pigeons culbutans. 14.9 Les pigeons tournans. 15° Les pigeons polonais. Ceux-ci ne sont pas plus gros que le biset. On les reconnoît en ce qu'ils ont souvent deux rubans sur les ailes , lesquels sont toujours de la même cou- leur que le plastron. Ils se reconnoissent surtout en volant; car ils tournent sur eux-mêmes comme un corps que l’on jetteroit en l'air et qui retomberoit au point d’où il seroit parti. Ils sont aussi du nombre des plus petites espèces de pigeons. Cette espéce tourne en rond lorsqu'elle vole, et bat si fort des ailes, qu’outre qu’on l’en- tend detres-loin, c’est quesou- vent elle se rompt des plumes par une sorte de mouvement convulsif. Ils ont le bec trés-gros , trés-court , les yeux bordés d’un large cercle rouge , et les jambes fort basses. La premiére race, celle des pigeons grosses-gorges, est composée de treize variétés, qui sont: D'ORNITHOLOGIE. 45 1°. Le pigeon grosse-gorge, soupe-de-vin. jme. n°147 ES 5257. _. . . . Chamois panaché. blanc comme un cygne. pattu , à longuesailes se croi- sant sur la queue. gris doux panaché. gris de fer, gris barré et à rubañs. | gris piqué et comme argenté. jacinthe, d’un bleu ouvragé en blanc. couleur de feu, dont chaque plume, terminée par une barre noire, est marquée de deuxautres barres, {une bleue, et l’autre rouge. couleur de bois de noyer. couleur de marron, ayant la gorge et les pennes des ailes blanches. maurin , d’un beau noir ve- louté, avéc les pennes de Vaïle et la gorge blanches. ardoisé , ayant la gorge, ainsi que les pennes des ailes, blanches. La seconde race, celle des pigeons mondains , renferme trois variétés, que nous partageons en sous-variétés, savoir : 6 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE f re 1. VARIÉTÉ. LA bagadais, ... .. à Ilestaussi gros qu'une Epctite poule ; son bec est courbé et crochu; il Kest surmonté d'un tu- Bbercule en forme de #inorile, et ses yéux ont Aune seconde paupiére écharnue et rougeûtre, “qui, dans la vieillesse , stombe sur les yeux. 2°, VARIÉTÉ, Lesw pigeons), pigeon espagnol. . mondains. | É JIlest de la taille d’une Éorosse poule, sans mo- Hrile au - dessus du bec, Bqui est droit; sa pau- Épière charnue est moins ésaillante. e 7 Pis J. VARIÉTE. à £ Le pigeon EUrC. . À Ilesttrès-gros, pattu, Éhuppé, bas de jambes set large de corps:ilaune excroissance charnue fau-dessus cu bec, et un ruban rouge quis'étend du bec autour des yeux, SOUS-VARIÉTÉS. Le gros mondain oufLe bagadais blanc, le noir, le rouge et le minime. Il n’y a qu'une seule espéce. Le pigeon Lure mi- nime, gris defer, gris de Jin, eha- mois et soupe-de- vin. D'ORNITHOLOGIE. 47 / . A . > La troisième race, celle des pigeons romains , contien trois variétés , savoir : | < 1.* Le pigeon romain. . . . noir. EN EL — L. . mme PTDNAENLNE D à. . … : . tachiété. La quatrième race, celle des pigeons nonains, comprend cinq variétés, savoir : 1." Le pigeon nonain, . . . soupe-de-vin. AMOR IP EL EUE Re. — rouge pagarhé. D CPR ET 11. .. chamoïs panaché. PO Or... L'. : mad, qui est noir;avec la tête et le bout des ailes blancs. Re 1, - à parbntement blanc. La cinquième race, celle des pigeons paons, ne ren- ferme que deux variétés, savoir : 1." Le pigeon paon. . . . . tout blanc. Rue 2.0, . blinc;avecés fêteetla queue noires. La sixième race, celle des pigeons cravattes, renferme huit variétés, savoir : Ù 1. Le pigeon cravatte. . . soupe-de-vin. M EL EE «ci ce chamcs, RUE ts ét. pañaché. Me LE tn LL à: TOUS, Mess ss ss se + gris. M Ds HR.) -“toutblant. PO CAN DES | 'T ONE BOUT RO NI ER RG 7 ayant Île manteau noir. 48 TABLÉAU ÉLEMENTAIRE La septième race, celle des pigeons coquille-hollandaise , contient quatre vafiétés, Savoir : 1. Le pigeon coquille-hol- | landaise . . . . . . . blanc, à tête, queue et bouts : des ailes noirs. ——— à tête, queue et bouts des ailes bleus. 3... DIN 0. ue . ——"AE EE des ailes rouges. Bee nues ee + ee + « ———à tête, queueetbouts des ailes jaunes. La huitième race, celle des pigeons hirondelles, com- prend aussi quatre variétés, savoir : 1. Le pigeon hirondelle. . à corps blanc; à tête, cou et queue noirs. DEAPIINUN MST AS ie DAS Un one a tête, cou et queue rouges. De. ses se. eee ————— à tête, cou €t “ queue bleus. Le ee ———— a tête, cou et queue jaunes. La neuvième race, celle des pigeons carmes, renferme aussi quatre variétés, savoir : 1. Le pigeon carme. . . . qui a le dessus du corps gris de fer , le dessous du corps et des ailes blanc. 3,° ..: .. quia le dessus du corps cha mois, le Gessous du'corps et des ailes blanc. 5 Etc te ET . . »« à qi ale dessus du corpssoupe- D'ORNITHOLOGIF. 49 de-vin ; le dessous du corps et des aïles blanc. 4e... ..... . qui ale dessus du corps gris doux ; le dessous du corps ét des ailes blanc. La dixième race, celle des pigeons heurtés, est égale- ment composée de quatre variétés, savoir : 1.*, Le pigeon heurté. ... à front et queue noirs. rare » à .-. à front ‘et queue bleus, HD, ae, 5, , . à front ét queue jaunes. : HN 0ù .". 4. : .: sa front et queue lorangés. La onzième race, celles des pigeons fambours, ne con tient qu’une seule espèce. La douzième race, celle des pigeons suisses, renferme trois variétés seulement, savoir : 1.", Le pigeon suisse. . . . . à fond du plumage blanc sa tiné, panaché de rouge et a plastron d’un rouge rem: bruxi. DEN. LD, V3 5. "à fond du plumage blanc sa- tiné, panaché de: bleu et à plastron.d’un rouge rem- bruni. 3... ....... 4. à fond de plumage blanc sa- tiné, panaché de Jaune et à plastron d’un rouge rem- bruni, Es 24 2 #o TABLEAU ÉLÉMENTAIÏRE La treizième race, celle des pigeons culbutans, com- prend aussi trois variétés, savoir : 1.*, Le pigeon culbutant . . brun. PIN UE Dihe cs AI ENTRE DELL LR ES MONET varié de Tous Et La quatorzième race, celle des pigeons fournans, ne renferme qu'une seule espèce, qui est communément grise , avec des taches sur les aïles. . La quinzième race, eelle des pigeons polonais, est com- posée de cinq variétés, savoir : 1."*, Le pigeon polonais. . . noir. DUT TR TR do are ENS CCS PNR BUT T Re fic SGD CHAMIOS M NÉE dell d'OS MIQHEtE BÉONSÉ sr LOUE Lot he Tels sont eu général les éclaircissemens que nous avons recueillis dans l'ouvrage de l’immortel Buffon : nous avons rassemblé ici ce qui y est disséminé sur les différentes races de pigeons, pour en former ce tableau méthodique, qui d'un coup d'œil fait connoître les travaux de cet illustre naturaliste sur une matière aussi ingrate. On conçoit que, d’après les nouveaux mélanges qui se font chaque jour parmi ces animaux, ce tableau ne peut guère qu'in- diquer approximativement le premier mélange de quel- ques variétés. D'ORNITHOLOGIE si DEUXIÈME GENRE, LES TÉTRAS. Nous avons réuni dans le genre des Létras plusieurs espèces d'oiseaux pulrérateurs 1) dont le vol est très-pesant, mais qui sont d’une légèreté et d’une vitesse extrêmes à la course. Tous sont d’un naturel sauvage, et ils sont très-recherchés pour les tables. Leur forme est épaisse ; et leur queue, composée de dix-huit pennes situées horizontalement , est fort courte, Is ont tous au-dessus de l’œil un espace dégarni de plumes, et qui est revêtu d’une peau nue, ordinairement de couleur rouge. Nous avons sous-divisé ce genre en trois tribus, dont nous avons tire les caractères, soit de la nudité ou de la non nudité du tarse, soit de. la forme differente des appendices qui accompagnent leurs sourcils , soit enfin de la présence ou de l’absence de l’ergot à ce même tarse. 4 1) On nomme ‘oiseaux pulyérateurs ceux qui non-seulement grattent la terre avec leurs pieds pour y trouver des alimens, mais qui éprouvent une sorte de délice à se vautrer dans !a poussière , sur-tout pendant l'été, L* ko TABLEAU ÉLÉMENTAIRE PREMIERE TRIB U: Les oiseaux qui composent celle première tribu , et qui sont les £étras proprement dits , ont pour caracières distinctifs un bec en cône courbe, des Larses garnis de plumes et point d’ergots : les uns d’ailleurs ont la queue pleme, et les autres l’ont fourchue. Cette tribu renferme six espèces , savoir : le grand coq de bruyère , Ve petit cog de bruyère à queue fourchue, la gélinotte , le ganga , l’at- casas , et le lagoypède des Alpes. A 1, LE GRAND COQ DE BRUYÉRE. ms Fetrao urogallus. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. Le coq de bruyère. Bris. Ornih. tom. 1, pag. 182. ( Foyez la planche XIX de cet ouvrage.) Cet oiseau est à peu prés de la grosseur du paon; sa longueur, de l’extrémité du bec à celle de la queue, est de deux pieës neuf pouces; son vol de trois pieds ; et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, ne s’étendent guères au-delà de Porigine de sa queue. Sa tête et son cou, si néanmoins on excepte le devant et le bas de cette dernière partie, sont d’un cendré varié de trés-petites raies transversales noirätres : sa gorge est noire; ses plumes scapulaires et les couvertures de ses ailes sont rayées transversalement et en zigzags de brun et de roussätre ; son dos, son croupion et les petites cou- vertures du dessus de sa queue sont rayés aussi transversa- D’'ORNITHOLOGIE: 55 lement de cendré et de noirâtre ; les grandes couvertures de cette même partie sont d’un cendré noirâtre, termi- nées de blanc; le bas du cou, en devant , est d’un beau vert de canard ; sa poitrine, son ventre et ses flancs sont d’un brun noiràtre, varié de quelques taches blanches ; les couvertures du dessous de sa queue sont tachées de noir et de blanc; les jambes sont brunes, variées d'un peu de blanc, et les pieds sont couverts de plumes jusqu'a l’origine des doigts, maïs dans la partie antérieure seule- ment; ces plumes qui recouvrent les pieds et les doigts sont décomposées et ressemblent a du duvet: les pennes des ailes sônt brunes; une partie des moyennes est variée de brun et de roussàtre vers leur extrémité; celles de la queue , qui est arrondie, sont noires; cependant il s'en trouve quelques-unes qui sont irréguliérement tachées d’un peu de blanc. Une espèce de sourcil ou de mem- brane papillaire, qui, surtout dans le tems de l'amour, est de couleur écarlate, se trouve placée au dessus de l'œil. L’iris est d’un gris brun; le bec, qui est fort et tranchant, est d’une couleur de corne blanchätre; les doigts sont bruns et garnis de chaque côté d’une rangée d’appendices écailleux et les ongles sont noirs. La femelle de cet oiseau, qui gratte la terre comme tous, les pulvérateurs, est beaucoup plus petite que le mäle; elle ne lui ressemble en rien pour le plumage, car le dessous de son corps est varié, ainsi que sa tête et son cou, de roux, de noir et de cendré; sa gorge est rousse; sa poi- trine est rayée de noir sur un fond d’un roux pale, et chaque plume est terminée de blanc; son ventre est cen- dré; les pennes de ses aïles ne différent en rien de celles du mâle, mais celles de sa queue sont rousses, rayées transversalement de noir ; son bec et ses pieds ressemblent a ceux du mâle. 54 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE On trouve le grand coq de bruyère sur les montagnes des Alpes, et très-fréquemment dans la forêt communale d'Epinal, où il niche; mais plus abondamment dans les bois qui environnent Gerardmer et Bruyeres, dans le département des Vosges 1). Cet oiseau s'y nourrit des feuilles et des sommités du sapin, du genièvre, du bou- leau , du coudrier, du mirtyle (vaccinium myrtitlus. Lin. }, et des fleurs ainsi que des feuilles du blé-sarrasin qui est trés-abondant dans ces contrées montueuses. On prétend que lorsque cet oiseau à mangé une trop grande quantité de baies de genievre, alors sa chair, qui, en tout temps passe pour un mets excellent, et qui par cette raison est tres-recherchée, contracte un goût désa- gréable. Quoi qu'il en soit, le grand coq de bruyère ne se vend sur les lieux et aux gourmands jamais moins de douze à vingt-quatre francs 2). Un seuil mâle suffit à plusieurs femelles ; il entre en chaleur dès le mois de janvier. Il se tient alors sur quel- 1) On prétend que lorsque les hivers sont rigoureux, le coq de bruÿère se montre sur, les plus hautes montagnes de quelques iles de la Grèce , et mème de celles qui sont situées plus au midi , telles que l’ile de Milo; qu’il les quitte dès que la tempé- rature devient plus douce. Il seroit aisé d’en tuer ; maïs les Grees ne font point de cas de cet oiseau, qu'ils appellent agrio gallo, coq sauvage. 2) Nous avons vn dans notre département, où la gourmandise est le grand mérite de certaines personnes, d'autant moins fortunées cependant , qu’elles ont une famille plus nombreuse, ne pas rougir d'acheter sur les lieux mêmes 21 liv. un de ces oiseaux pour s’en régaler avec leurs amis. Certes, il faut que l'empire de la gloutonnerie ait bien de l’ascendant sur l'ame de quelques individus de l'espèce humaine, pour les déterminer à des actes si contraires à la saine raison et aux règles d’une sage économie domestique. D'ORNITHOLOGTIE. 55 que gros arbre et en parcourt incessamment les branches; il est dans une agitation continuelle; ses yeux étincelans brillent du feu qui le dévore ; il releve et épanouit sa queue, comme celle du dindon; les plumes de sa tête se hérissent et lui forment une espèce de huppe. Dés la pointe du jourses exercices violens commencent, et il jette à ce moment un cri perçant , des clameurs aiguës et retentissantes qui ne ressemblent pas mal au bruit que fait une faux lorsqu'on laiguise : ce cri est le signal d’appêl , auquel les femelles s’empressent de ré- pondre et de se rendre; elles se tiennent quelquefois-au nombre de ou huit au-dessus de larbre qui est comme le trône de leur souverain , et elles attendent qu'il veuille bien en descendre , ce qui arrive fréquemment, pour satisfaire ses désirs. C’est à l'instant où ,cet oiseau, tra@sporté par le sen- timent fougueux du feu qui le consume, ne voit que les objets qui l’attisent, que le chasseur le guette pour en faire sa victime ; il profite du moment où il pousse un de ces cris aigus, pour s’avancer d'arbre en arbre jusqu'a ce qu’il soit parvenu à portée du coup qui lui donne la mort : en tout autre temps il est si farouche et si sau- vage que c’est toujours par hasard que l'on rencontre dans la forét ceux que l’on y tue. Les femelles du coq de bruyère pondent de cinq à dix œufs blancs, tachetés de jaune ; elles les déposent, sans aucune autre préparation , simplement sur la mousse, en un lieu sec ,et afin de les dérober à lawue , lorqu'elles les quittent pour aller chercher de la nourriture , elles les recouvrent de mousse ou de quelques feuiiles 1). 1) En l’an VIIL, le 23 du mois de février, nous trouvèmes ; ; 56 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Le male ne prend pas plus de part à la couvée que n6 le font tous les oiseaux de ce genre, et en général tous les mâles des animaux polygames : mâles aussi les chasseurs , ceux qui désirent surtout de ne pas en détruire l'espèce, ont grand soin de ne poursuivre que les mâles ét de mé- nager les femelles. Aussitôt que les petits:, que l’on nomme dans les Vosges grianos, sont nés, ils suivent leur mère dans la forêt ; elle les conduit, avec beaucoup de soin et de vigilance, vers quelques fourmillieres où ils trouvent dé crysalides de fourmis dont ils font leur premiere nourriture : c'est alors que les dénicheurs, sans réserve, apres av@epic leurs dé- marches et apres avoir attendu quelquefois, mais rare- ment, qu'ils aient acquis un certain accroissement, les prennent avec des lacets de crins qu'ils disposent autour de la fourmillière qu'ils ont remarquée que ces oiseaux fréquentoient le plus souvent. Cette petite famille ne se sépare qu'au printemps suivant. dans la forêt un de ces nids; il ne contenoit que huit œufs, que nous primes avec les plus grandes précautions : nous les confämes a une poule qui couvoit à la campagne d’un de nos amis, après lui avoir enlevé ses œufs. Au bout de cinq jours d’incubation, tous les petits éclorent dans les vingt-quatre heures. Un domes- tique, qui se chargea de leur éducation, leur fournissoit chaque jour des larves ( que l’on appelle improprement œufs de fourmis }: ils ne vécurent ainsi que quelques jours, et moururent succes- sivement les uns après les autres, à l'exception de deux qui, après un mois, subirent le mème sort. D'ORNITHOLOGIE. 57 2° LE PETIT COQ DE BRUYÈRE À QUEUE * | FOURCHUE. * Tetrao tetrix. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. Le coq de bruyère à queue fourchue. BRis. Ornith. tom. 1, pag. 100. Celui-ci, que les ornithologistes ont nommé successi- vement coq de bouleau, petit coq sauvage, petit coq de bruyère, faisan noir, faisan de montagnes, et qu'ils ont pris quelquefois pour une perdrix et souvent pour une gelinote, est reconnu aujourd'hui pour être un {efras, un petit coq de bruyère ; il estun peu plus gros qu’un faisan, et sa longueur , du bout du bec à celui de la queue, est de deux pieds quatre pouces. Sa tête, son cou, le bas de son dos et son croupion sont noirs avec des reflets violets et verts, d’autant plus vifs qu’ils sont frappés d’un plus grand éclat de lumière. Le haut de son dos et sa poitrine sont noirs, et les plumes qui revétent ces parties sont bordées de noir violet : son ventre, ses flancs, les couvertures du dessus de sa queue, ainsi que ceiles de ses ailes, sont noirâtres; quelques-unes néanmoins, celles surtout qui avoisinent l'épaule, sont blanches : les jambes sont variées de brun et de blanc; les pieds sont couverts, jusqu’à l'origine des doigts, de plumes décomposées et qui ressemblent à du duvet; ces plumes sont variées des mêmes couleurs que celles des jambes. Les grandes pennes dés ailes sont brunes, et leurs üges sont blanchâtres; les moyennes au contraire sont blanches et leurs tiges brunes. Les pennes de la queue, au nombre de dix-huit, sont d’un roir violet ; les quatre 53 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE intermédiaires sont obtuses, égales ou plus courtes que les couvertures blanches qui sont au-dessous ; les sept extérieures, de chaque côté, sont plus longues de quatre pouces que les intermédiaires ; elles sont étagées du dedans en deñors, fléchies et contournées par le bout en forme de faucilie, ce qui rend la queue trés-fourchue. L’œil est ombragé par une membrane papillaire et glanduleuse en forme de croissant, d’un rouge fort vif et proportienné- ment plus grande que dans l'espèce précédente. L'iris est d’un gris brun; le bee est noir; les pieds sont dépourvus d’éperons; les doigts sent bruns et garnis de chaque côté d'appendices écailleux, en forme de dentelures, et les ongles noirâtres. La femelle, de moitié plus petite que le mâle, a la queue moins fourchue ; tout son plumage est varié de petites raies transversales noires sur un fond roussâtre; sa poitrine et son ventre sont teintés de grisâtre; sa gorge est blanchäâtre; les grandes pennes de ses ailes sont brunes, les moyennes blanches, terminées de brun, rayées trans- versalement de noir et bordées de blanc à l’extrémité ; celles de la queue sont rousses, rayées transversalement de noir ; elles sont disposées comme celles du mâle, au- quel du reste celle-ci ressemble. Non-seulement le plumage de la femelle de cette espece düfère de celui du mâle, lorsque l’un et l’autre sont par- venus à leur entier accroissement ; mais les mâles du grand comme du petit tetras , lorsqu'ils sont encore jeunes, con- servent la Couleur de leur mére jusqu'a la première mue, qui a lieu au commencement de l’automne, et à mesure qu'ils avancent en àge ils prennent une plus forte nuance de bleu; ils sencurrissent l’un el l’autre des mêmes alimens. Le petit tetras vole le plus souvent en troupe et se perche sur les arbres comme le faisan. D'ORNITHOLOGIE. 59 11 entre en amour vers la fin de l’hiver, et c’est à cette époque que, dés l'aube du jour, les mâles se rassemblent, quelquefois au nombre de plus de ceñht dans les bois, aux endroits les plus écartés, les plus déserts et toujours voi- sins de quelques marais. La, ils se livrent entre eux des combats à outrance, à la suite desquels les vaincus pren- nent la fuite, tandis que le vainqueur, fier de sa victoire, se proméne d’un air audacieux, sur un tronc d'arbre, d'où, l’œil enflammé, les plumes hérissées et la queue relevée en éventail, il appelle par un cri aigu, que l’on entend d’une demi-lieue, les femelles, qui accourent au rendez-vous. Là, chacune attend complaisamment le moment de ses caresses, et lorsqu'elles sont fécondées , elles se retirent les unes d’un côté et les autres de l’autre, pour aller pondre, sans autre préparation de nid que la mousse qui se trouve au pied de quelque arbre dans le taillis. La ponte varie de sept a douze œufs, d’un blanc sale, marqués de lignes et de points rougeâtres : ces œufs sont moins gros que ceux de poules. Dans plusieurs contrées du nord on prend aux filets le petit tetras, qu’en moins de huit jours on parvient à apprivoiser au point d’en faire des oiseäux de basse-cour ; ce*qui n’a jamais eu lieu pour le grand letras, qui, refu- sant de prendre aucune espèce de nourriture lorsqu'il se voit esclave, ne tarde pas à mourir de chagrin d’avoir perdu sa liberté. Il n’est point douteux que ce coq de bruyère ne se ren- contre, instantanément à la vérité, sur plusieurs mon- tagnes des Vosges, puisqu'on y en tue quelquefois; mais il est trés-certain qu'il n’y est qu'un oiseau de passage : car nous avons interrogé sur ce point plusieurs anciens chasseurs de ceux qui en avoient tué; et tous nous ont 60 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE assuré qu'ils étoient d'autant plus convaincus qu'ils ne ni- choït pas dans nos montagnes, que jamais dans le tempe de la ponte du grand letras on n'y voyoit celui-ci et encore moins ses jeunes. 11 paroît se complaire davantage sur les Alpes suisses et sur les montages du département de l’Ain. 5 LA GÉLINOTTE. Tetrao bonasia. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La gélinotte. BRiS. Orn. tom. 1, pag. 191. ( Voyez la planche XIX de cet ouvrage, ) La gélinotte est un peu plus grosse que notre perdrix grise ; sa longueur , depuis l'extrémité du bec jusqu’à ceile de la queue, est de quatorze pouces , et elle a prés de vise once de vol; lorsque ses ailes sont ployées, elles ne s'étendent qu’au quart de la longueur de sa queue. La tête de cet oiseau est couronnée par une espèce d’ai-. grette, qui à la vérité est peu sensible; la partie supé- rieure de son bec est couverte, à sa base , de petites plumes noires : on voit au-dessus de chaque narine une tache blanche, et ‘deux autres de même couleur au-des- sous; il y en a une qui est située entre l’œil et le bec, et l’autre,est placée derrière l'œil; cet organe est de plus entouré d’un cercle de couleur écarlate, formé par une espèce de peau glanduleuse. Le dessus du corps est traversé dans son entier de stries brunes, noiràtres, roussätres et cendrées; la gorge est noire dans le màle et grisätre dans la femelle ; les plumes qui recouvrent le devant du cou sont rayées de noirâtre et terminées de blanc sur un ford roux; tout le dessous du corps est varié d’un mélange de blanc sale et de brun: D’'ORNITHOLOGIE. Ga les flancs sont aussi d’un blanc sale; mais ils sont légèrement teintés de roussâtre ; toutes les pennes de la queue, à lexception des deux intermédiaires , sont traversées par une large bande noire placée vers l’extré- mité. L'iris est rougeûtre ; le bec, qui:est court, est noi- râtre ; les pieds sont revêtus en devant, et jusqu’à Ja moi- tié de leur longueur seulement, d’une espèce de duvet formé par des plumes eflilées et comme décomposées, qui sont de couleur grisâtre ; les ongles sont noirs. La gélinotte qui passe pour un excellent sibier , et dont les friands font le plus grand cas, habite les bois qui sont au pied et sur le penchant des hautes montagnes du département des Vosges et de celles des Alpes 1); elle s'y nourrit en été de baies et de fruits sauvages , et en hiver elle mange des chatons de bouleau , des sommités dè sapins et des baies de genièvre. Cet oiseau fait son nid à terre , parmi les touffés de bruyéres, ou sous des branches basses de coudrier : la femelle pond de quinze à vingt œufs, qui sont un peu plus gros que ceux de pigeons; elle les couve pendant trois semaines, et on prétend que @e ce nombre d'œufs il n’éclôt que sept ou huit petits, qui courent aussitôt qu’ils sont nés. Les autres œufs sont inféconds, La gélinotte est un oiseau d’un naturel peu: défiant : aussi tombe-t-il facilement dans les piéges que le chasseur lui a tendus; s'il a le vol pesant, il en est bien ample- ment dédommagé par la vitesse étonnante avec laquelle il court. ESA 240,7 2° LMP NA ÉTO RnaPn D a ee I SRNNEERENR 1) La gélinotie ne se rencontre pas seulement dans nos con- trées européennes, telles que la Silésie et la Pologne , mais elle habite encore la vaste étendue de la Sibérie; et son espèce s'étend « , LI . jusque vers le pole ärctique. 62 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Oo L/ LE GANGA. Tetrao alchata. Van. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La gélinotte des Pyrénées. BRis. Ornith. 1. 1, p. 195. , \ Si nous avons placé ici le ganga, comme indigéne du sol français, ce n’est que parce qu’il paroït quelquefois, quiiqu’assez rarement, sur les montagnes des Pyrénées. Orientales, ainsi que dans quelques autres parties méri- dionales de la France. Cet oiseau , que M. de Buffon a nommé ganga, et Bris- son gélinotte des Pyrénées , est le même que celui que Belon a appelé perdrir de Damas ou de Syrie, et Edwards petit coq de bruyère. à deux filets à la queue. Nous ne savons absolument rien de ses mœurs ni de ses habitudes, sinon qu'il est un oiseau granivore; qu'il se plait dans les terrains incuites et stériles ; qu'il vole en troupes quelquefois assez nombreuses; quil ne cons- truit point de nid ; que la mousse qui recouvre la terre lui suflit pourffaire sa ponte; que le mâle enfin ne partage pas avec sa femelle le soin doux et en même temps pénible de l’incubation ; au reste il a cela de com- run aveé tous les oiseaux gailinacés, dont les mâles sont polygames 1). . Le ganga est a peu pres de ia taille de notre perdri£ grise; il a environ treize à quatorze pouces de longueur de l'extrémité du bee à celle de la queue; le tour de ses 1) On emploie la dénomination Ge polyzames ; comme nous ’avons déjà dit ailleurs, pour désigner des hommes on des ani- aux qui ont plusieurs femmes ou plusieurs femeiles : on emploie la même épithète pour désigner ue femelles où d’autres anr- maux femelles qui vivent avec plusieurs maris on plusieurs mâles. La D'ORNITHOLOGIE. 63 yeux n’est point environné de cette espèce de membrare qui, dans la plupart de nos gallinacés, leur forme une sorte de sourcil, qui est le plus ordinairement d’une cou- leur rouge. à Le dessus de sa tête, de son cou et de son dos est un mélange de diverses teintes de jaunâtre, d’olivètre, de noir, de brun et de roux; les couvertures supérieures de ses ailes sont marquées des mêmes couleurs , avec cette différence que ces teintes y sont distribuées par taches; lés pennes des ailés, qui sont fort longues, ont leurs tiges noires ; le croupion ést rayé transversalement de roux et de noir ; la queue, qui est cunéiforme ou taillée en coin, est de couleur fauve, rayée transversalement de brun ; l'extrémité de chaque penne est noire : les deux du milieu, qui sont fort étroites dans la partie qui excède les autres en longueur , sont une fois plus étendues qu’elles, tandis que les pennes latérales de cette même partie vont tou- jours en diminuant de longueur, à mesure qu’elles sont plus extérieures; Ce qui est un caractère tranchant, et qui fait facilement distinguer ce gallinacé de tous ses eon- génères. Il a les joues d’un jaune rougeûtre , la gorge noire et le devant du cou olivâtre; trois bandes trans- versales, en forme de collier, dont deux noires et une rousse au milieu , sont placées sur le devant de son cou. On voit sur la poitrine du mâle une espèce de plaque noire, disposée en croissant et qui lui tient lieu de hausse-col; tout le reste du dessous de son corps est blanc. L'iris est de couleur de noisette ; le bec-et les pieds sont cendrés et les ongles noirs ; le devant des pieds est recouvert d'un duvet blanchâtre , composé de trés-petites plumes efilées. La femelle a les nuances de son plumage beaucoup plus pales, plus lavées et plus variées de taches que celui du mâle; elle est de même taille ct de même grosseur que “ 64 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE lui; maisles deux pennes intermédiaires de sa queue sont de beaucoup moins longues que celles du màle: elle en diffère encore en ce qu’au lieu du hausse-col noir qui se trouve sur la poitrine de celui-ci, on ne voit sur celle de la femelle que trois bandes de même couleur, qui lui embrassert le cou en forme de demi-collier. 5° L'ATTAGAS. Tetrao lagopus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La gélinotte hupée. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 209. C'est sur les plus hautes montagnes de la France, telles que celles des départemens de l'Hérault et de l'Isère, et plus particuliérement sur la cime la plus élevée de celles des Alpes et des Pyrénées, que l’on rencontre la!lagas : la, il se nourrit d'insectes et des différentes graines que les vents, après la maturité des plantes, disséminent sur la terre. L Cet oiseau, plus gros que notre perdrir, se fait remar- quer par les deux beaux sourcils couleur de feu dont ses yeux sont surmontés, et qui donnent à sa physiono< mie un air distingué; ces sourcils sont formés par l’expan- sion d’une espèce de membrane charnue, qui est arrondie et découpée par de dessus, et qui, en s’élevant, dépasse - le sommet de la tête; il a Les narines recouvertes par de petites plumes effilées qui produisent un très-bel effet. Le plumage de l’attagas est un mélange de roux, de noir et de blanc, symétriquement distribués et agréable- ment répartis. La femelle diffère du mâle, en ce qu'elle n’a pas ces belles plumes noires, pointillées de blanc, qui forment sur la tête de celui-ci une huppe, et sous son beé une espèce de barbe : les couleurs de son plumagé D'ORNITHOLOGIE. 65 sont d’ailleurs beaucoup moins vives. La queue de laffagas est un peu plus lougue que celle de la perdrir; elle est composée de seize pennes noires, à l'exception des deux du milieu, qui sont de méme couleur que celles qui recouvrent le dos. L'iris de cet oiseau est d'un beau rouge vifet éclatant ; son bec et ses ongles sont noiràtres, et ses pieds, de couleur brune, sont revêtus de plumes dans toute leur longueur, jusqu'a l’origine des doigts, qui sont gris bruns et bordés d'une membrane dentelée. C'est au commencemeut du printemps que les attagas se recherchent et s'accouplent. La femelle établit son nid à plate terre; elle le cons- truit de mousse et de feuillages : elle pond et couve dans ce nid, qui n’est point un de ces chefs-d'œuvres de l’art admirable avec lequel certains oiseaux fabriquent le leur, de dix-huit à vingt œufs blancs, pointillés de brun rouge et qui sont tres-aigus par les deux bouts. s L’attagas est un oiseau naturellement criard, dont le ‘cri, à la vue d’un chasseur eu d’un oiseau de proie, devient si aigu et si perçant qu’on d'entend de très-loin. Il a le vol aussi lourd que sa course est légère : aussi on ne peut qu'être étonné en voyant des bandes d’attagas , qui forment des compagnies comme celles des perdrix, courir à travers les touffes épaisses et serrées des bruyéres avec autant de facilité que ces dernieres le font dans des champs qui sont a découvert. On prétend que les attagas se creusent des terriers sous la neige qui couvre, durant une partie de l’année, la plupart des hautes montagnes qu'ils habitent. Cela doit nous pa- roître d'autant moins étonnant que, dans nos plaines des Vosges, qui chaque hiver sont couvertes de plusieurs pieds de neige, on rencontre de même des compagnies toutes entières de perdrix qui sont gitées dans de semblables ter- # 2 5 66 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE riers, et on couçoit qu’en usant de cette précaution, c’est autant pour se mettre à l’abri du vent que pour entretenir par leur contact mutuel un certain degré de chaleur. Au reste, tous les gallinacés sauvages , n’habitant pour lordi- naire que des contrées souvent couyertes de neige, sont forcés de la gratter avec leurs pieds, et d’y creuser des trous pour irouver au dessous les plantes qui font leur unique nourriture dans ce moment de détresse. 6°: LE LAGOPÈDE DES ALPES. 4 Tetrao lagopus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La gélinotte blanche. Bris. Ornith. tom. 1 , pag. 216. Le lagopède , moins gros que le pigeon, a, du bout du bec à l'extrémité de la queue, quinze pouces de longueur environ, et deux pieds de vol : son bec court est de couleur noire, et sa mandibulesupérieure est un peu arquée. Le mâle se distingue de sa femelle par une raie noire qui , partant de chaque côté du bec, s'étend et se dirige au- dela de l'œil, qui est entouré d’une large membrane char- nue, festonnée dans son contour et qui est d’un rouge très- vif de même que l'iris de ses yeux. La femelle a bien aussi une membrane autour des yeux, mais elle est plus petite et infiniment moins colorée que celle du mâle. On dit que le lagopède a deux espèces de vêtement. (Ne l'ayant jamais vu dans son état sauvage et aux diverses saisons de l’année, nous ne pouvons en dire que ce que les ornithologistes nous en ont appris ). Le premier de ces vêtemens, qui est pour le printemps et l'été, est noir, semé de taches rousses assez-grandes ; il est mêlé de quelques plumes noires, dont le bout est blanc. La poitrine, le ventre, les côtés, ainsi que les D'ORNITHOLOGIE. 67 couvertures du dessous de la queue, sont rayés alterna- tivement de noir et de fauve, et les pennes des ailes sont blanches. Les jambes et les pieds sont revêtus d'un duvet long, soyeux et d’un blanc roussâtre; la partie du derrière des uns et des autres est nue et de couleur de plomb : néanmoins le duvet qui recouvre les pieds est sensiblement plus court et plus épais que celui qui revêt les jambes; les ongles sont noirs. Le second vêtement, qui est celui d'automne et d'hi- ver, consiste, ditggn, dans des plumes d’une blancheur éblouissante ; cette couleur s'étend sur la tête, sur le cou, les ailes et sur tout le ecrps, à l’exception des six pre- mières grandes pennes des ailes, qui sont noires, et de la queue, qui est composée de quatorze pennes, formant entre elles deux rangs, dont le supérieur est d’un blanc pur , tandis que l’inférieur est noir, terminé de blanc. Cet oiseau pulvérateur est lourd; mais la nature l’a dédommagé; ainsi que tous ceux de sa tribu, de la pe- santeur de son vol par la légèreté ‘de sa course. IL vit, pendant l’hiver, dans les forêts situées 4 la cine des plus hautes montagnes des Alpes et des Pyrénées 1), où il est fort commun. Là il forme une douce société qui n’est composée que du père, de la mére et de six jusqu’à dix enfans , qui ne se séparent qu’au printemps, pour se réu- 1) Nous avons vu chez un naturaliste de nos amis un /a gopède qu'il nous a assuré avoir tué Iüi-mème sur le Donon, qui estune des plus hautes montagnes des Vosges, Depuis cette é»oque nous avons employé tous les moyens pour découvrir quelques-un; de ces oiseaux sur ces mèmes montagnes; mais nos soins €t nos d'mar- ches auroient été en pure perte , si nous n’en eussions été sou- vent récompeusés par la rencontre de quelques autres espèces rares, 6* 68 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ir par couple comme les perdrix, et former de nouveau, avec leur progéniture, une union intime. Durant l'hiver les lagopèdes se creusent sous la neige, comme les attagas dans les lieux solitaires et inaccessibles qu'ils habitent, des trous dans lesquels ils demeurenttran- quilles. Au printemps ils descendent sur le penchant de la montagne, où chaque couple gratte un creux circu- laire d'environ huit pouces de diamétre , soit au bas d’un rocher, soit au pied d’un arbre, et sans autre pré- paration la femelle y pond de six a dguze œufs d'un gris roussàtre, tachetés de noir. Pendant tout le temps de l’incubation, qui est tou- jours de trois semaines, le mâle, modele de la fidé- lité et des attentions conjugales, contrairement à ia plu- part des gallinacés , rôde sans cesse autour du nid et apporte de la nourriture à sa compagne chérie, avec la- quelle cependant il ne partage jamais les soins pénibles de l’incubation. DEUXIEME TRIBU. . Cette seconde tribu renferme cinq espèces, dont les unes sont constamment sédentaires en France, et les autres n’y sont que de passage. Ces espèces sont, 1.° la perdrix grise; 2° la petite perdrix grise ; 3.° la perdrix de mon- tagne ; 4 la perdrix rouge d'Europe ; 5.° la bartavelle. Ces oiseaux ont pour caractères particuliers un bec en cône courbe, une tête denuee de membranes charnues, des sourcils rouges, des tarses nuds, un ergot obtus aux pieds du mâle, et une queue très courtes D'ORNITHOLOGIE. 69 1° LA PERDRIX GRISE.. Tetrao perdrix. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La perdrix grise. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 219. La perdrix grise, qui s'est répandue d’un pôle à l'autre dans toutes les parties de l'Europe 1), est si commune en France, et elle y est si généralement connue, qu'il semble- roit presque inutile de la signaler ici. Cet oiseau a, du bout du bec a l’extrémité de la queue, un pied sept lignes de longueur, et dix-huit pouces six lignes de vol; lorsque ses aïles sont ployées, elles s'étendent à un pouce au-delà de l’origine de sa queue. La perdrix grise a le front, les côtés de la tête, ainsi que la gorge, d'un roux clair ; le sommet d’un brun rous- sätre, marqué de petites lignes longitudinales jaunâtres. On voit au-dessous de chaque œil une petite excroissance de chair qu, dans le mâle surtout, est d’un beau rouge. Un mélange de cendré, de roux et de noir, est agréa- blement disposé par raies transversales sur la partie supé- rieure du cou ; les mêmes couleurs sont répandues et de la même manière sur le dos , sur le croupion et sur les couver- tures du dessus de la queue, avec cette différence ce- pendant que chacune des plumes qui revêtent ces der- nières parties est bordée d'une ligne transversale, étroite et rousse. Le bas du cou est, de même que la poitrine, 1) M. de Buffon prétend qu'il west pas vrai que la perdrix grise soit également commane dans toutes les contrées de l’Eu- rope ; il dit même qu'elle fuit avec le plus grand soin la grande chaleur , comme le froid excessif, et que les départemens de la France où elie est le plus.sbondante sont ceux qui sont les plus tempérés. 7° TABLEAU ÉLÉMENTAIRE d'un cendré bleuâtre, varié transversalement de noir, avec quelques petites taches rousses. On voit sur le bas de la poitrine du mäle adulte une large baude d’un rouge marron en forme de fer-a-cheval ; les plumes des flancs sont de la même couleur que celles qui recouvrent la poitrine, mais elles ont de plus qu’elles leurs tiges blan- châtres, et chacune de ces plumes est terminée par une large bande transversale rousse. Le bas du ventre est d’un bianc jaunâtre ; les jambes, ainsi que ies couvertures du dessous de la queue sont roussâtres, variées transVersa- lement de noir : chacune des plumes a dans son milieu une ligne blanchàâtre qui suit la direction de la longueur de sa üge; une semblable ligne ct de même couleur , néanmoins d’un blane plus roussàtre, est disposée de la même manière sur chaque plume des couvertures de l’aile et sur les scapulaires, qui d’ailleurs sont variées comme le dessus du corps, mais elles ont de plus de grandes taches rousses. Les couvertures du dessous de l’aile sort blanches ; les pennes de cette partie sont d’un gris blane en dessous, et en dessus les grandes sont brunes, rayées transversale- ment de blane roussätre et les moyennes de brun, de roux et de blanc roussâtre. Des vingt pennes qui composent la queue , les sept exté- rieures de chaque côté sont rousses , terminées de cendrée, et les six du milieu sont variées de même que le dos. L'iris des yeux est d’un brun rouge; le bec, les pieds et les ongles sont d'une couleur plombée, et à la partie posté- rieure du pied du mâle on voit un ergot obtus. Les perdrix se tiennent toute l’année par compagnies composées du pére, de la mère et des enfans seulement ; elles ne se séparent, et toujours pour s’unir par couples, que vers le mois d'avril. C'est au moment que se fa t cette séparation d'une famille qui jusqu'alors a vécu en paix, D'ORNITHOLOGIE. 1 qu’il s'élève de grandes discussions et de fortes querelles entre les enfans ; les mâles, et même souvent les femelles, se livrent entre eux des combats tres-vifs qui ne se ter- minent que lorsque les pariades sont assorties : alors chaque couple abandonne sa famille et s'éloigne pour ne plus s'oc- cuper que du soin de reproduire son espèce. Les blés ou les prairies sont les endroits que les per- drix préferent pour leur ponte: la, sans autre préparation que quelques brins de paille ou de foin semés comme’au hasard dans un creux, tel que celui qu'auroit fait l'em- preinte du pied d'un cheval, la femelle, que l’on nomme chanterelle, dépose sur cette espece de litière de quinze à vingt œufs jaunèâtres. Tout le temps que dure l’incubation, dont le soin est confié à la femelle séule , le mâle, comme pour l’avertir des dangers qui la menaceroïent ou ‘pour veiller à ce qui pourroit l’inquiéter, rôde sans cesse autour du nid. Aussitôt que les petits, qui en naissant courent et mangent seuls, sont éclos, le pére et la mére partagent ensemble le soin de les conduire dans les endroits où ils doivent trouver leur nourriture , et ils les avertissent par un cri particulier du danger qui les menace: dans ce cas, les petits se blotissent par terre de manière qu'il est presque impossible de les découvrir. Dés qu'ils sont en état de voler, le même cri de la mére , à la vue du moindre danger , les avertit de fuir, et ils prennent en- semble leur essor en filant en ligne droite dans les airs à la hauteur seulement de cinq ou six pieds. Ils ont le vol si brusque qu’on peut reconnoître et distinguer, même pendant la nuit la plus obscure, une compagnie de per- drix qui prend sa volée, par le bruit que font ces oiseaur avec leurs ailes. La perdrix est un oiseau d’un nature} doux , sociable, sus- è 72 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ceptible même d'une sorte d'éducation, d'où on doit con- clure qu’il ne seroif pas difficile d’en faire un oiseau do- mestique et de l’introduire dans nos basses-cours : il ne s'agiroit pour cela que d'employer les moyens que nous avons vu mettre en usège par un ci-devant religieux de la chartreuse de Beauserville pres de Nanci, département de la Meurthe. On lui apporta, en 1769, une couvée de perdreaux qui n’étoient âgés que de quelques jours ; il les éleva sans poule , avec des précautions , qu’à la vérité tout le monde n’auroit ni le loisir ni la patience de prendre : il les tenoit chaudement dans une petite caisse, qu’il avoit garnie a cet effet d'une peau d'agneau ; il ne les en fai- soit sortir , lors de leur premiere enfance, que dans un endroit chaud où il avoit répand® sur le plancher des laryes, que l’on nomme vulgairement œufs de fourmis , qu’il méloit avec du terreau sec, afin de procurer à ces petits animaux le plaisir de le gratter avec leurs pieds pour y chercher leur nourriture. Devenus plus forts, et lorsque le temps nr’étoit point nébuleux, il les sortoit dans le petit jardin de sa cellule, et là, ces charmans petits hôtes passoient une partie de la journée; puis il les faisoit rentrer dans leur caisse vers le déclin du jour. Il avoit pris la précaution de répandre, avant leur sortie dans le jardin, des grains de millet, qu'ils savoient fort bien trouver; enfin, il leur donna, dans un endroit à couvert de la pluie, une gerbe de blé, une d'orge et une autre d’avoine, qui leur servoient de retraite et de pâture. Cette aimable petite familie devint si apprivoisée avec son pere nourricier , que non-seulement elle le suivoit , comme le feroit un chien, mais que, lorsqu'il s’asseyoït dans son jardin, aussitôt chaque individuse disputoit le D'ORNITHOLOGIE. 73 plaisir d’être un des premiers sur lui; ils ne craignoient et ne fuyoient pas même à la vue des étrangers qui ve- noient fréquemment visiter ce religieux , dont la société, fort agréable, étoit tres-recherchée. Après l’hiverle moment de la pariade arriva: des que- relles s’élevérent parmi les mâles ; mais on remarqua que, l'éducation ayant adouci leurs mœurs, leurs combats étoient moins fréquens et moins opiniàätres. Quand les couples furent assortis, ce religieux les distribua à ses amis, et ne se réserva que celui dont le mâle lui avoit constamment donné des preuves du plus tendre attache- ment. Pour faciliter la nichée de ce couple privilégié, il avoit eu la précaution de semer avant l'hiver un petit carré de blé dans son jardin, où ces oiseaux pouvoient se retirer. La femelle y fit sa ponte ket pendant tout le temps que dura l'incubation, nous avons vu le male rôder sans cesse au- tour de ce petit champ , avec un air d'inquiétude; et lorsqu'on s’en approchoïit de trop près, fut-ce mème son hôte hospitalier, il accouroit, la tête haute, les ailes à demi étendues, et le corps fort relevé, d’un air menaçant et paroissoit disposé à sauter à la figure de celui qui auroit touché au blé qui renfermoit les objets les plus chers à son cœur 1). © 1) On nous pardonnera, sans doute, ces détails minutieux; et on nous les pardonnera d'autant plas volontiers, du moins nous l’espérons, Lorsqu'on voudra bien se rappeler qu’en rédigeant ce Tableau d’Ornithologie pour la jeunesse seule , notre intention a été de lui indiquer des moyens d’occupations agiéables qui, en fixant les désirs de son cœur, y fermeront l'entrée à une foule d’autres passions qui n’ont que trop souvent des suites funestes, 74 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 2. LA PETITE PERDRIX GRISE. Tetrao perdrix damascena.T1N.Syst.n. éd. 13,g.103. La perdrix de Damas. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 223. Cette espèce de perdrix, qui est plus petite que la per- drix grise, n’est que de passage en France, et ce pas- sage, qui est trés-momentané, n’a ordinairement lieu, du moins dans certains départemens , tels que celui des Vosges et celui de Seine et Marne, que du commence- ment d’octobre jusqu’à la mi-novembre, et quelquefois, mais rarement, plus tard : il n’est pas tellement régulier que l'on puisse assurer qu'il est annuellement pério- dique 1); car, après avoir consulté sur ce poiñt un grand nombre d'anciens chasseurs, tous nous ont assuré que ces sortes de passages, qui sont toujours extrême- ment nombreux, n'avoient lieu qu'en certaines années dans les Vosges, et que quelquefois on étoit deux ou trois ans sans ÿ voir de ces oiseaux. Ne seroit-il pas possible que ces mêmes chasseurs se fussent trompés sur les époques de ce passage, attendu qu'il ne dure qu’un jour au plus? Ce qui détermineroit notre opinion sur ce point, c'est que , la veille du jour où nous vimes un de ces passages, nous chassions dans la même plaine, que nous battimes dans toute son éten- due et avec d’excellens chiens sans rencontrer ces vaga- bondes; et que le lendemain de leur rencontre nous 1) On prétend qu’on trouve fréquemment et en grand nombre cette perdrix sur les sables brülans de Egypte, où.elle est connue sous le nom de Æalta "et qu'on eu voit beaucoup pendant l’au- tomne au nord de la Tu quie. D'ORNITHOLOGIE.. 75 revinmes à leur poursuite au nombre de quatre chasseurs , et nous n’en trouvèmes plus un seul individu. Un de nos compagnons de cette battue inutile, et qui est digne de foi, nous assura qu'il avoit vu en mars de semblables passages et qui étoient d'aussi peu de durée. Le dernier passage de ces oiseaux, que nous avons ren- coutré étant à la chasse dans le courant de novembre 1786, étoit si nombreux, que nous pouvons assurer qu'il étoit composé de plus de deux cents individus : c’étoit sur le sommet d’une petite montagne de la partie agricole du département des Vosges, près de Mirecourt, où il occu- poit une étendue immense dans des champs de blé nou- vellement récoltés. Les chiens formerent sur les premiers de la bande plusieurs arrêts de suite, toujours en filant, parce que le gibier ne tenoït pas, et plusieurs fois nous coupèames en vain les chiens, parce que toujours ces per- drix, sur lesquelles ils pointoient leurs arrêts, partoient bien au-dela de la portée du coup de fusil. ‘ Cet exercice pénible d’une poursuite inutile auroit duré toute la journée, et en pure perte de temps, si un de nos compagnons de chasse ne fût allé se mettre en embuscade , en ävant de la compagnie, derrière un buis- son , où il attendit que nous dirigeassions ces vagabondes. Son stratagème lui réussit, il en tua deux ; et c’est d'après ces individus que, comparativement avec notre perdrir ordinaire, nous signalons cette espèce. La petite perdrix grise est non-seulement plus petite que notre perdrir ordinaire, mais son plumage, comparé avec le sien, est sensiblement plus pälé et plus jaunàtre ; elle lui ressemble d’ailleurs en tous points, et surtout pour la distribution des nuances du plumage, à la ‘couleur prés qui est, comme nous venons de le dire, moins foncée, L’iris de sés yeux est d’un brun rouge ; son bec, 76 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui est beaucoup plus alongé que celui de la perdrix grise, est jaune, ainsi que les pieds et les doigts, dont les ongles sont bruns, 3° LA PEDRIX DE MONTAGNES. Tetrao montanus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 103. La perdrix de montagnes. Bris. Ornith.t, 1, p.224, Quoi qu’en disent les différens chasseurs et les oïseleurs que nous avons consultés à l’occasion de cette perdrix, qui se rencontre fréquemment sur les montagnes des Vosges, où elle se tient mêlée avec la perdrix ordinaire; quoiqu’ils prétendent que son bec et ses pieds rouges ne la séparent pas de l'espèce de la perdrix grise, et qu'ils attribuent cette couleur rouge à quelque jeu accidentel de la nature, tel que celui qui produit des merles à plu- mage blanc, nous sommes convaincus qu’elle en est. une race distincte, qui a constamment le bec, l'iris des yeux, les pieds rouges, et les ongles brun marron. Nous fondons notre opinion sur ce point, en ce qu'’a- près avoir examiné avec le plus grand soin, mesuré et comparé plusieurs individus de cette espèce ayec notre perdrix grise, nous leur avons toujours trouvé non-seu- lement le même, caractère distinctif dans la couleur .du bec, des pieds, elc., mais nous avons encore remarqué qu'ils étoient moins gros que celle-ci; eeux qui parmi eux nous paroissoient les plus longs, n’avoient du, bout du bec à l'extrémité de la queue que dix pouces ‘huit à neuf lignes, tandis que la perdrix grise a toujours un piest sept ou huit lignes. de longueur. Le plumagerd'älleurs de l'oiseau dont il est ici questioæ est sensiblement, différent : uue couleur jaunätre est » D'ORNITHOLOGIE. 77 répandue sur toute la partie inférieure de son corps, jusques et y compris les couvertures de sa queue, tandis que dans la perdrix grise ces mêmes parties sont d’un gris bleuâtre; sa gorge est roussàtre ainsi que le dessus de sa tête et de son cou; le dessus de son corps est revêtu de plumes d’un brun clair, terminées de brun plus foncé, et les sept pennes extérieures de sa queue sont de même couleur que les plümes du dos, tandis que les intermé- diaires sont d’une teinte plus rembrunie. Nous sommes donc fondés a regarder la perdrir de montagnes comme une espèce distincte, séparée, et non comme une simple variété et moins encore comme.ure variété accidentelle de la perdrix grise, dont elle paroïit d’ail- leurs avoir les mœurs et toutes les habitudes. Ce qui vient à l'appui de notre opinion, c’est qu'en tout temps on ren- contre sur nos montagnes la perdrir grise, tandis qu’on n'y trouve celle-ci qu'a la fin de l'été et durant Pautomne ; ce qui fait présumer qu’elle niche dans d’autres régions, et qu’elle n'est chez nous que de passage périodique : aussi nous ne pouvons rien dire de sa ponte, parce que nous ne la connoissons pas. L2 “ h LA PERDRIX ROUGE D'EUROPE. Tetrao rufus. LAN. Syst. nat. édit, 13, gen. 102, La perdrix rouge. Bis. Ornith, tom. 1 , pag. 236, La perdrix rouge est un oiseau assez commun dans quelques départemens de la France, tels que ceux de la Côte-d'Or, de Saone-et-Loire , et surtout dans les dé- partemens méridionaux. Elle s’apprivoise plus aisément qu'aucune autre espèce 1); sa taille est d'un cinquième ————————————_—_—— 1) Tournefort, dans son Voyage du Levant, nous dit avoic 18 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE plus forte que celle de la perdrix grise ; l'iris de ses yeux, son bec, ses jambes, ses doigts sont rouges, et ses ongles bruns. Cette perdrir , qui a un petit ergot obtus à chaque pied, dont la plante est d’un jaune sale, a le cou, la poitrine, le croupion , ainsi que le dehors des jambes, de couleur de frêne. Sa tête, de même couleur, est ceinte d’une bande blanche; le bas de son cou et son dos sont teintés d’une couleur brune jaunâtre; le dessous de son menton ,si on peut pari. r ainsi, est blanc jusqu'au mi- lieu de sa gorge : néanmoins il se trouve à l'angle des mandibules du bec une tache noire, et l’espace blane du menton et de la gorge est entouré par une espèce de collier qui est noir aussi. Les plumes des flancs sont joli- ment colorées de noir, de jaune pâle et de rouge brun, amalgamés avec du cendré. Cette espèce de perdrix. quoique susceptible de s’apprivoi- ser lorsqu'elle est en domesticité, passe néanmoins pour avoir un caractère moins social a l'égard de ses sembla- bles, que la perdrix grise, lorsqu'elle est en liberté. On prétend même que, quoique la famille entiére paroisse ailer toujours de compagnie, depuis l'instant de sa nais- sance jusqu'a celui de la pariade , où alors chacune d'elles s'accouple par paires, cependant tous les individus de la même famiile se plaisent a vivre solitaires dans les lieux vu dans l'ile de Scio des gens qui élevoient des perdrix ronges, et qui les menoient päturer à la campagne , comme on fait en France des troupeaux de moutons ou de dindons ; et il ajoute que, près de Grasse, en Provence , il avoit vu un homme qui, non- seulement conduisoit un de ces troupeaux, mais qui en prenoit à Ja main un ou plusieurs individus; qu’il les caressoit, puis les remettoit à terre, pour en prendre d’eutres et les caresser de même. D'ORNITHOLOGIE. 79 montueux et pierreux, dans les buissons ou les bruyeres, et toujours à une certaine distance les uns des autres, au point que lorsque le chasseur qui les guette les fait lever , ils ne partent jamais tous ensemble ; et si accidentellement plusieurs se lévent en même temps, ils se séparent bien vite, et l’un dirige son vol d’un côté, tandis que l’autre le dirige de l’autre. Or, d’après cette espèce d’insociabilité, il est facile de conclure que ccs perdrix ne réclament jamais , puisque le reclain de la perdrix grise est le signal de son rassemblement avec sa famille. Les perdrix rouges diffèrent encore des grises, en ce qu’aus- sitôt que les femelles sont fécondées, les mâles les quittent et leur abandonnent le soin de l’incubation comme celui de eonduire leurs petits lorsqu'ils sont éclos. Elles se re- tirent dans des trous de lapins, ou bien elles se perchent sur des arbres, dans le cas où quelque danger les mt- nace. Nous avons été plus d'une fois étonnés de la prodi- gieuse quantité de ces oiseaur, absolument étrangers aux Vosges, que l’on voit dans les marchés de Paris, surtout a l’arriére-saison. G° LA BARTAVELLE. Tetrao rufus. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 105. La perdrix grecque. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 41. ( Voyez la plan che XX de cet ouvrage.) Cet oiseau , auquel on a aussi donné le nom de per- drix grecque, parce qu’elle est fort commune dans ces contrées , a beaucoup de rapports de similitude avec la per- drix rouge : on l'en distingue néanmoins par sa grosseur, Bo TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui est du double plus forte que celle de la rouge, Elle a le dessus du corps cendré, la poitrine d’un brun terne et le ventre d'un rougeûtre clair; elle porte sur la gorge une grande plaque blanche , au dessous de laquelle on voit un demi-collier noir et étroit ; toutes les pluines qui recouvrent les côtés de son corps sont marquées d’une double raie noire; les pennes intermé- diaires de sa queue sont d’un gris cendré; et les latérales, de la même couleur dans leur premiére moitié, sont rousses dans le reste de leur longueur : elle est d’ailleurs en tout semblable à la perdrix rouge. C’est dans les lieux les plus élevés et parmi les rochers que ia bartavelle se plait; elle y demeure presque cons- tamment, et n’en descend, pour se rendre dans la plaine, qu'au moment de sa ponte, qu’elle fait sans autre pré- paration de nid que quelques feuilles sèches et quelqües herbages qu’elle arrange fort négligemment : la femelle pond sur ce lit de huit à quinze œufs à peu prés gros comme un petit œuf de poule ; ils sont blancs, pointillés de rougeûtre. - La bartavelle est très-ardente en amour; les mâles , dans ce moment, se battent entre eux avec un acharne- ment qui étonne. Quoique d’un naturel très-sauvage , ils sont alors tellement transportés et enivrés de désirs, que lorsqu'ils entendent le cri d’une femelle ils ne voient ni ne fuient l’oiseleur qui les guctte. On assure même qu'il ieur arrive quelquefois de se poser sur lui, lorsque ; pour leur tendre un piége, il leur présente une femelle privée ou bien un mâle, sur lequel ils accourent pour le combattre. La bartavelle n’est pas fort commune en France ; on ‘ne la rencontre guères que sur les hautes montagnes de nos départemens méridionaux , d’où elle ne descend dans D'ORNITHOLOGIE. 8: la plane que vers l’automne pour chercher un abri dans les bruyeres et les broussailles des petits bois. On a essayé en vain de l’acclimater dans l'intérieur de la France, où vivent les perdrir rouges; toujours elle y a péri, ou bien , lorsqu'elle en a trouvé l’occasion, elle est retournée dans son pays natal. Cette perdrix passe pour un excellent gibier, qui, pour cette raison , est fort recherché; on lui donne la préfé- rence sur la perdrix rouge. Quelques auteurs anciens ont rapporté que cette grosse perdrir s’apariôit avec la poule ordinaire, et que de ce mélange il résultoit des india féconds. Ce fait peut être vrai; mais n’ayant pas été à même de le constater par nous-mêmes, nous n’inclinons ni pour l'aflirmative ni pour la négative. # TROISIEME TRIB U. La troisième tribu du genredes tétras se distingue des deux précédentes, en ce que la caille , qui est le seul oiseau qu’elle contient, et qui est de passage annuel et périodique dans toute l'étendue de la France, a pour caractères distinctifs et particuliers le tarse nu , une tache nue aussi derrière l'œil et sans rouge; le bec en cône courbé ; la tête dénuée de membranes charnues, et la queue courte. 82 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE LA CAILLE. Tetrao coturnix. LIN. Syst. nat: édit. 13, gen. 103. La caille. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 247. ( Voyez la planche XX de cet ouvrage.) La caille a beaucoup de rapports avec la perdrix ; elles sont l’une et l’autre des oiseaux pulvérateurs, à ailes et queue courtes, et qui sont trés-vites à la course. Néan- moins, il y a entre elles suffisamment de dissemblances pour avoir déterminé tous les ornithologistes à en faire deux espèces distinctes et séparées. En effet, outre que leur voix est différente, c’est que la caille est bien plus petite. que la perdriz; elle n’a pas, come elle, de fer à cheval sur la poitrine, non plus que la peau rouge dégarnic de plumes qui se trouve derrière l'œil de la perdrix, et qui, dans la caille, est d’un blanc jaunâtre et peu sensible, La caille est, comme nous l’avons dit dans l’énoncé des caracteres de cette tribu, un oiseau de passage qui nous arrive au printemps, dans le courant de mai, et qui nous abandonne en septembre, ou au plus tard au commen- cement d'octobre 1). 1) Le passage des caïlles sur les côtes de l'Égypte a lieu, dit-on, au mois de septembre : à cetie époque, elles y arrivent en troupes si nombreuses, que souvent la petitesile de Tamièh en est toute couverte, Les habitans du pays en prennent alors une si grande quantité qu'il les vendent au plus bas prix, par la raison que les Mahométans ne se nourrissent jamais d’animaux qu’ils n’aient saignés eux-mêmes. Aussi, dans le temps du pas- sage , les capitaines des vaisseaux nourrissent-ils leurs équipages avec des cailles, qui, quoiqu’excessivement grasses, n’ont ce- pendant pas, à ce que l’on prétend, le fumet de celles que lon mange en Europe. . D'ORNITHOLOGIE. 83 Il est à présumer que c’est plutôt pendant la nuit que durant le jour que les cailles prennent leur essor ef qu’elles font leurs volées d’émigration ; il est même à présumer que ce n’est qu'a la faveur des ténebres qu’elles se rendent dans nos contrées, car aucun chasseur de bonne foi ne peut affirmer qu’il a vudes bandes de cailles se rabattre dans les endroits où on les trouve, même en abon- dance, quoique la veille il n’y en existàt pas une seule. Plusieurs voyageurs assurent qu’au moment de J’émi- gration des cailles outre mer, il en tombe quelquefois sur les bâtimens qui naviguent, des troupes entieres, telle- ment excédées de fatigues, qu’elles s’y laissent prendre à la main, et que souvent un coup de vert contraire à leur, marche, et qui s'élève à l’improviste, les précipite dans les flots. Il en périt donc chaque année un grand nombre; et, ce qui est bien fait pour étonner , c’est qu'outre ce moyen de destruction, on leur tend de toutes parts des pièges au point que lespèce devroit en être entiere- ment anéantie : néanmoins leur nombre est toujours si considérable, que, dans l'ile de Caprée, à l'entrée du golfe de Naples, on en prend, dit-on, une si grande quantité, que, du produit de la chasse qu'on en fait, on forme le principal revenu de l'évêque de cette ile, qu’on appelle pour cette raison l’évêque des cailles. Les cailles n’ont pas les mœurs douces et sociales de la plupart des autres oiseaux, et en particulier de la per- drix ; jamais elles ne s’apparient comme elles, ou du moins le mâle ne reste avec sa femelle que le temps né- cessaire pour éPéPEr sa fécondation ; puis il retourne instantanément à une autre femelle , lorsque l’occasion qu il recherche avec ardeur s’en présente, et puis de celle-ci à une autre, tout le temps que dure son séjour parmi nous. 6 * 84 TABLÉAU ÉLÉMENTAIRE Pressée de suite par le besoin de pondre, la femelle gratte simplement la terre avec ses ongles, et elle cons- truit dans i’enfoncement qu’elle a fait, soit au milieu des blés, soit dans les prairies, un nid qu’elle compose, sans art et sans beaucoup d’apprêts, d’herbes et de feuilles séches; elle y pond de quinze à vingt œufs fort gros, proportionnément à sa taille, et qui sont d’un fond de couleur grisätre, mouchetés de brun. Les petits, qui en sortent, aussitôt qu'ils sont éclos, sont en état, comme les perdreaux , de courir et dé suivre leur mére pour cher- cher leur nourriture. 6734 La caille a sept pouces six lignes de longueur , mesurée du bout du bec à celui de la queue, et quatorze pouces de vol; ses ailes étant ployées ne dépassent guëre l’ori- gine de sa queue ; ses trois doigts antérieurs sont joints ensemble , jusqu’à la premiere articulation , par une courte membrane. | La partie supérieure de sa tête est variée de noïr et de roussàâtre; elle est marquée de trois bandes longitu- dinales étroites et blanchâtres, savoir , une qui passe sur le sommet de la tête, et une de chaque côté au-dessus des veux. Les plumes qui couvrent la partie supérieure de son cou, son dos et son croupion, de même que ses plumes scapulaires, ont chacune dans leur milieu une bande longitudinale jaunâtre qui s'étend le long de leur tige; tout le reste est varié de noir, de roux et d’un peu de gris. La gorge, le ventre, les jambes et les couvertures du dessous de la queue, de même que celles du dessous des ailes, sont d’un blanc jaunâtre. La partie inférieure du cou et la poitrine sont d’une couleur roussûtre, variée de petites taches noirâtres; et chaque plume a dans son milieu une pétite ligne longitudinale trés-étroite, d’un blanc jaunâtre. Les plumes des flancs sont rousses , avec D'ORNITHOLOGIE. 85 quelques petites taches noirâtres, et une bande longitu- dinale blanche qui s'étend le long de leurs tiges. Les cou- vertures de l'aile sont d’un brun roux; elles ont aussi dans leur milieu une ligne longitudinale étroite, de couleur jaunàtre. Les pennes des ailes sont grises en dessous, et en dessus elles sont d’un gris brun : leur côté exté- rieur est varié de bandes transversales roussâtres ; celles de la queue sont noirâtres, rayées transversalement de roussätre. L'iris de’ l'œil est de couleur noisette; le æ. cendré, et les pieds, ainsi que les ongles, sont de eur de chair. La femelle différe du mâle, en ce qu’elle n’a point, comme lui, de tache noirâtre sur la partie’ inférieure du cou, à la poitrine et sur les plumes de sesflanes, et en ce que le roux de son plumage est beaucoup plus vif dans ces mêmes endroits. Outre son cri ordinaire, que tout le monde connoît, qui est trés-éclatant, et que l’on entend de fort loin, la caille mâle, a un autre cri plus faible que l’on pourroit rendre par ces monosyllables : ouin, onin, et qui est celui d'appel; celui de la femelle est plus doux: on ne l’entend que lorsque l’on est prés d'elle ; il consiste en ces deux monosyllables: cri, cri, que l'on contrefait avec une sorte de sifflet, dont nous parlons à la fin de cet ouvrage à l’article aviceptologie. Aussitôt que les màles, qui, comme nous venons de le dire, sont tres- ardens, entendent ce cri, ils accourent avec précipita- tiôn, en filant à travers les grains ou les prairies, où ils trouvent chemin faisant une barriére insurmontable dans le filet que le tendeur leur a opposé, et qui les retient captifs, 86 TABLEAU ÉLÉMENTAIRFE TROISIÈME GENRE. LES PAONS. Les paons ont pour caractères distinctifs le bec en cône courbe, la tête dénuée de mem- branes charnues, mais ornée d’une "Pc aigrelle composée de vingt - quaire plu droites à tuyau ébarbé, et garnies de barbes à leur sommet seulement ; les pieds nus et ergotés, et les couvertures supérieures de la queue très-prolongées et beaucoup plus longues * que les pennes même de cette partie. Ces pen- nes sont composées d’un tuyau garni des deux côtes de longues barbes désunies ,et terminées par d’autres barbes adhérentes les unes aux autres ; elles sont ornées de longues franges dans leur contour, et forment un épanouis- sement arrondi, marqué dans son milieu d’une tache en forme d'oeil. Quoiqu’etranger à la France, puisqu'il est originaire des Indes, et particulièrement de Guzzaratte, le paon ordinaire néanmoins s’est tellement naturalisé parmi nous, ainsi que plu- sieurs oiseaux de cette quatrième section, qu'il y pond et s’y propage chaque année ; ce qui nous autorise à le ranger, de même que D’ORNITHOLOGIE. 87 les faisans , le dindon et la pintade, parmi les oiseaux actuellement indigènes de la France. LE PAON ORDINAIRE. Pavo cristatus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 98. Le paon. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 9. ( Voyez la planche XX de cet ouvrage. ) Si on le considère dans son ensemble, le paon mâle est, sans contredit, le plus beau des oiseaux qui habitent la France; il réunit la grandeur, l'élégance dans les formes à l'éclat du plumage. « Il semble , comme le dit l’incom- « parable Buffon, que la nature à broyé en sa faveur les « pierres précieuses pour en former des couleurs qui « servissent a peindre son plage ; on diroit que c’est « pour lui seul que cette mére commune de tous les « êtres a chargé sa palette, et que de sa surabondance . « elle a embelli les autres oiseaux qui partagent avec « lui quelque chose de son vêtement. ? % Le paon est de la grosseur d’un dindon de moyenne taille ; sa longueur, mesurée de l'extrémité du bec à celle de la queue, est de trois pieds huit pouces, et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, s'étendent à cinq pouces au- dela de l’origine de sa queue. Sa tête, sa gorge, son cou et sa poitrine sont d’un bleu éblouissant, changeant en vert avec des reflets dorés. L’œil est placé entre deux bandes bläfiches transversales, dont l’une, supérieure , est plus longue et plus étroite que Fautre. “Mraigrette qui orne le dessus de sa tête est composée de vingt - quatre plumes, qui ont leurs tuyaux garnis, dans toute leur longueur , de barbes rares , tres-courtes 88 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE et noirätres; ces mêmes tuyaux sont terminés par de plus longues barbes du même vert que le dessus de la tête. Son dos et son croupion sont revêtus de plumes d’un vert doré à reflets de couleur de cuivre de rosette ; un cercle d'un noir de velours termine et borde cha- cune de ces plumes ; elles imitent, par leur position, l’'arrangement des écailles de poissons. Les couvertures du dessus de sa queue sont trés- nombreuses, fort longues et partagées en plüsieurs rangs, placés au-dessus les uns des autres; les plus longues: de €haque rang, qui ont jusqu’à quatre pieds quelques pouces, en occupent le milieu, et les latérales vont en diminuant de longueur par degrés : toutes ont leurs tiges blanches, garnies, dans toute leur étendue et de chaque côté, de longues barbes désunies, d’un vert a reflets de couleur de cuivre de rosette. À l'extrémité de ces plumes ces mêmes barbes se réunissent et forment un épanouissement qui est entouré de barbes semblables a celles qui accompagnent le tuyau dans sa longueur. Sur le centre de cet épanouissement il se trouve une tache que sa forme a fait comparer à un œil ; cette tache, qui est d’un noir violet, a le moelleux du velours; un cercle changeant en bleu et en violet l'entoure, et il est lui-même enfermé entre deux cercles de couleur d’or , mais d’un or changeant et à reflets. Les plumes du dernier plan des couvertures, qui n’ont aucune tache , se terminent par un épanouissement d’une couleur sombre, et leur bout est comme coupé carré- ment. . La gorge et la poitrine sont d’un bleu d’azur le plus éclatant ; le ventre et les flancs sont d’un vert foncé noï- râtre, et mêlé de quelques légères nuances dorées. @E : charmant oiseau a les jambes d’un fauve clair, les couver- tures du dessous de la queue, d’un gris brun, de même D'ORNITHOLOGIE. 89 que les pennes de cette partie, qui sont légérement éta- gées du centre sur les côtés. Les petites couvertures du dessus des aïles et les plumes scapulaires sont variées de fauve et de noiràtre, mêlés à une légère teinte de vert doré qui est répandue sur les petites couvertures seulement; les moyennes sont d’un bleu foncé, changeant en vert doré; et les grandes, les plus éloignées du corps, sont roussàtres. L’aile est composée de vingt-quatre pennes, dont les dix plus extérieures sont rousses, et les autres noirâtres, tres-légérement embellies de vert doré du côté extérieur. L'inis est d’une couleur aurore; le bec est blanchâtre ; les pieds et les ongles sont gris. Lemäle aun ergot à chaquepied. La femelle, que l’on nomme paone, est plus petite que le mâle, dont elle différe surtout en ce que les couver- tures du dessus de sa queue sont si courtes, que les pennes de cette partie les dépassent : elles n’ont pas d’ailleurs cette belle tache en forme d’œil qui est placée sur celles du mâle. Tout le plumage de celle-ci en dessus du corps n’est que d'un brun cendré, de même que l’aigrette du sommet de sa tête, qui a seulement quelques points de vert doré. Elle a la gorge blanche, etles plumes du cou et de la poitrine vertes : ces dernières sont terminées de blanc. Un seul paon mâle suffit pour féconder cinq ou six fe- melles, dont chacune pond de huit à douze œufs, gros comme ceux de dindon; ils sont blancs, tachetés de brun. Elle ne les pond pas de suite; elle met ordinairement trois ou quatre jours d'intervalle entre l'un et l’autre. | Lorsqu'on élève des paons dans une basse-cour, bien- tôt, à la manière de certaines gens, ils veulent dominer partout ; ils s’y rendent les maîtres au point de se faire, sinon respecter, du moins craindre par le reste de la volaille, 36 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui n'ose plus prendre sa nourriture que lorsque céux-ci sont repus. Quoique les paons aïent beaucoup de peine à voler, néanmoins ils aiment à se percher sur les combles les plus élevés des maisons, dont ils endommagent beaucoup la couverture, ou bien sur la cime des plus grands arbres qui se trouvent a leur portée: c'est de là que souvent ils poussent des cris si rauques, si aigres et si désagréables , qu’on en estincommodé et même de tres-loin : nous l’éprou- vons de la part de ceux qui sont enfermés dans le grand bassin du Jardin des Plantes, au moment même que nous sommes occupés de l’histoire de ces oiseaux, que la nature a autant disgraciés du côté de la voix, qu’elle les a favo- risés du côté du plumage. On a prétendu que lorsque le paon faisoit entendre fréquemment son cri, c'étoit une annonce certaine de pluie : certes cette observation nous paroît un peu hasar- dée; car depuis quinze jours ces oiseaux ne cessent de crier, surtout vers le soir, et cependant nous n’avons pas cessé d’éprouver des chalcurs considérables, avec un temps tres-serein. QUATRIEME GENRE. LES FAISANS. Le seul nom de cet oiseau rappelle sans doute son origine : on sait que ce furent les Grecs qui, en revenant de la conquête de ‘la Toison-d'Or, le rapportèrent des bords du Phase dans leur patrie. C’est de là que la race s'en répandit bientôt de proche en proche, D'ORNITHOLOGIE. 91 aborda en France, el parvint desuite jusqu'aux extrémités de l’Empire , où elle vit aujourd'hui, et s’y propage en domesticité comme si elle étoit en liberté dans son pays natal. Nous signalerons dans ce genre deux espèces de faisans : la première est celle du fuisan ordinaire, qui vit en France depuis un grand nombre d’années ; la seconde espèce est le fu- san doré de la Chine ou faisan tricolor huyrpé', qui n’y est introduite que depuis peu detemps, il sy propage néanmoins, quoiqu'avec plus de soins, de même que le fuisan ordinaire. Il est facile de reconnoïitre le genre des faisans à leur bec en cône courbé; à leur tête , dénuée de membranes; à l’espace sans plumes qui occupe chaque jone; à la huppe soyeuse qui orne leur tête; à leurs pieds nus, armés d’un ergot court et pointu dans le mâle; etenfin à leur queue longue,terminée en poinie, et dont les deux pennes intermédiaires recou- vrent les latérales, qui sont plus courtes. à I. LE FAISAN ORDINAIRE. Phasianus colchicus. Lix. Syst. nat. édit. 13, g. 107. Le faisan. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 226. ( Voyez la planche XX de cet ouvrage. ) Ce bel oiseau, de la grosseur à peu pres du coq ordi- naire ; a de longueur totale, mesuré du bout du bec à 92 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE celur de la queue, deux pieds dix pouces six lignes; sa queue seule a un pied huit pouces quatre lignes de lon- gueur, ét son vol est de deux pieds six pouces. Lorsque ses ailes sont ployées, elles ne s'étendent gutres au-delà de l’origine de sa queue. Deux piéces d’une substance membraneuse et de cou- leur d'écarlate sont placées autour de chaque orbite : c’est dans leur milieu que se trouvent les yeux. Au-dessus des oreilles du mâle, on voit deux bouquets de plumes d’un vert doré, qui, dans le temps des amours, se relèvent de chaque côté de la tête. Le sommet de cette partie, la gorge et l’origine du cou, la plus prés de la tête, sont dun vert doré, susceptible de chatoyer en bleu foncé et en violet éclatant; le reste du cou, la poitrine, le haut du ventre et les flancs sont couverts de plumes d’un - marron pourpré tres-brillant. Toutes ces plumes sont bor- dées a leur extrémité par une bande transversale d’un noir de velours qui se change en violet fort éclatant, suivant l'incidence de la lumicre. Celles du cou sont échancrées en cœur par le bout, et leur bordure noire remonte jusque vers l’origine de la plume, en suivant la direction de cette échancrure. Les plumes scapulaires et celles qui couvrent le dos sont brunes dans leur milieu, bordées de marron pourpré, avec une bande blanchâtre, placée dans le brun, et qui est parallele à la circonférence de la plume; celles du croupion , ainsi que les couvertures du dessous de la queue, variées dans leur milieu de roussätre et de brun, sont bordées d’une couleur marron pourpré, légèrement teintée de vert doré : ces dernitres semblent se terminer en autant de filets minces et déliés. Les plumes de la partie inférieure du dos et celles du croupion sont aussi échancrées en cœur a leur extrémité. Le bas-ventre, les jambes et les couvertures Le D’ORNITHOLOGIE. : 93 du dessous de la quewe sont d’un roussitre teinté de brun : les petites couvertures des ailes sont variées de brun et de blanc roussätre ; les grandes sont teintes des mêmes ceuleurs dans leur milieu; ensuite elles sont d’un gris tirant sur lc fauve, et les plus grandes sont berdées de chaque côté de marron pourpré. Les grandes pennes de l'aile sont d’un gris brun, varié de bandes transversales d’un blanc roussitre. “ à La queue, composée de dix-huifpennes, a celles du milieu d’un gris olivätre, varié de bandes transversales noires ; elles sont bordées d’un marron pourpré, plus clair que ce- lui du croupion: celle qui les suit de chaque côté est de même couleur, avec une bordure intérieure brune : les quatre suivantes, aussi de chaque côté, sont variées de gris olivâtre et de brun ; elles sont de plus rayées transver- salement de noir, et bordées extérieurement de marron pourpré. Enfin les trois plus extérieures, toujours de chaque côté, sont variées de brun et de roussâtre, bordées égale- ment en dehors de marron pourpré. Les deux pennes du milieu de la queue sont de beau- coup plus longues que les latérales, qui toutes diminuent par degrés, en longueur, jusqu’à la plus extérieure de chaque côté, qui n’a que trois pouces. L'iris de cet oiseau est jaunàtre; son bec est d’une couleur de corne pâle; ses pieds etses ongles sont gris brun ; un ergot, qui, quoi- que très-court, est très-pointu, occupe le dedans de chaque tarse. La femelle du faisan ordinaire est un peu plus petite que son mâle; la couleur générale de son plumage n'est qu'un mélange de brun, de gris, de roussâtre et de noi- râtre ; sa queue est semblable à celle du mäle ; dont le tour des yeux, dénué de plumes, est receuvert par de petits mamelons charnus, d’un rouge assez vif, 94 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Quoique les faisans soient devenus, par l’industrie de l'homme, des oiseaux domestiques dans nos climats, ilsne le sont néanmoins pas au point que leur naturel sauvage et farouche ne leur fasse préférer les faisanderies 1) à nos basses-cours, où ils nichent cependant. Leur ponte est ordi- pairement de douze à quinze œufs plus petits que ceux de poule; ils sont d’un gris verdàtre, marquetés de petites taches brunes. * Ces oiseaux , lorsqu'ils vivent en liberté, se plaisent dans les forêts, surtout dans celles qui sont humides. On en trouve dans plusieurs iles du Rhin , ainsi que dans les forêts de la ci-devant province de Touraine. On en voyoit également, avant la révolution française , dans un vallon des montagnes des Vosges que l’on nomme la vallée des charbonniers ; mais, soit à raison de l’abattis considérable de sapins que lon a fait dans ce vallon, soit à raison des nombreux coups de fusil que la liberté avoit trop légèrement auto- risés, il paroît qu'ils gnt abandonné aujourd’hui ces riantes contrées, jusqu'alors aussi tranquilles qu’elles pa- roissent aujourd'hui bruyantes 2). | Les faisans sont si farouches, que non-seulement ils fuient à la vue d’un homme qu'ils entrevoient, mais que, passé le temps de leurs amours, ils s’évitent entre eux. Quoique ces oiseaux se nourrissent de toutes sortes d’her= bages et de plantes potageres, cependant ils préferent le 1) On nomme faisanderie une enceinte murée placée dans la forèt, et dans laquelle on élève les farsans. 2) On dit qu'il existe certains pays , au nord de la Turquie, où les faisans sont si communs, que les fermiers, ainsi que les autres habitans de la campagne, les élèvent comme des poules , et les vendent aux marchés des villes de même que les paysans apportent aux nôtres de Ja volaïlle. D’'ORNITHOLOGIE. 92 froment etles œufs de fourmis. Aussitôt que leurs petits sont éclos, ils commencent à courir , comme le font tous ceux des gallinacés. 2.° LE FAISAN DORÉ, OU LE TRICOLOR HUPPÉ _ DE LA CHINE. L) Lo Phasianus pictus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 101. Le faisan doré, ou le tricolor de la Chine. Bris, Ornith. tom. 1, pag. 270. Quoiqu'il soïît reconnu par tous les physiologistes que le climat influe sur le plumage des oiseaux comme sur le pelage des quadrupèdes, nous signalons néanmoins ici un oiseau originaire de la Chine, et introduit en France déjà depuis un certain nombre d’années 1), où il pond et se reproduit comme dans son pays natal , et y conserve néan- moins tout l’éclat des couleurs vives dont la nature s'est plue à le parer; elles s’y maintiennent au point que récem- mént nous avons comparé des individus nés à Paris avec d'autres que Péron, ce naturaliste aussi infatigable pour les recherches des productions de la nature qu’il est pro- fondément versé dans leur connoissance , a rapportés vi- 1) Nons voyons tous les jours à Paris et dans ses environs des oiseleurs qui s’occupent de l’éducation du faisan doré de la Chine ; il niche etpond chez eux comme sil étoit dans son pays natal, de manière qu'aujourd'hui cet oiseau, jadis fort rare et très-recherché par les amateurs de la belle nature , y devient commun. Il n’en est pas pour cela meilleur marché ; car un de ces oiseleurs nous disoit encore, il n’y a que quelques jours, qu’il n’en livroit jamais un couple vivant à moins de deux cent qua- rante francs, 96 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE vans de son voyage à la Nouvelle-Hollande ét à l'ile de France 1), et nous n’avons remarqué entre les uns et les autres aucune différence sensible dans les nuances de leur plumage. La beauté de l'oiseau dont il est ici question est si frappante , qu’on est tout émerveillé lorsqu'on le voit pour la première fois ; il est même en quelque sorte impos- sible de ne pas l’admirer encore toutes les fois qu'on se trouve à portée de le considérer. | | Le nom de fricolor qu’on lui a donné indique que son plumage n’est cependant qu’un composé de trois couleurs, qui sont le jaune doré, le rouge et le vert; mais ces cou- leurs, qui ont l'éciat le plus vif et le plus éblouissant , sont distribuées de manière à produire un effet enechan- teur. Le faisan de la Chine est moins gros que le faisan ordi- naire ; mais sa forme plus eflilée présente quelque chose de plus svelte et de plus élégant ; il a la queue beaucoup plus longue à proportion, et il est bien plus haut monté sur jambes que lui. Le sommet de la tête de ce magnifique oiseau est sur- monté d’une huppe superbe qu'il releve à volonté. Cette huppe est composée de plumes longues de trois pouces au moins, qui sont semblables à des crins; elles sont douces. et lustrées comme de la soie; leur couleur est un beau jaune doré trés-vif, et elles s’inclinent d’avant en arrière en partant du sommet de la tête, et retombant C2 1) Tout le monde peut voir, à la ménagerie du Muséum du Jardin des Plantes, ces charmans ozseaux , qui vont ètre incessamment transférés, avec une multitude infinie d’autres espèces d’orseaux , dans une volière immense dont l’élégante construction s'exécute en ce moment, D'ORNITHOLOGIE 97 sur le haut du cou, où elles recouvrent d’autres plumes, également douces au toucher, qui sont lustrées, fort larges et coupées carrément : ces plumes sont d’une belle couleur orangée , et elles sont traversées par une barre d’un noir de velours. Lorsqueloiseauesten repos, cesmêmes plumes s'étendent jusque sur la moitié du dessus du cou, qu’elles recouvrent en. arrière et sur les côtés; mais lorsqu'il éprouve quelques passions violentes, telles que celles de l'amour ou de la colère, alors il les redresse, et en les étalant il s’en forme une espèce de panache dont il s'entoure le cou et se couvre le dos : ce qui ne ressemble pas trop mal aux fichus nommés pélerine dont récemment les femmes vien- nent d’accréditer , pour un instant sans doute, la mode. Des plumes plus petites, d’un vert foncé , à reflets do- rés, terminées par un bord noir et coupées aussi carrément, couvrent le bas du cou, d’où elles s'étendent sur le dos en glissant les unes sur les autres, quand l'oiseau fait quel- que mouvement, comme les longues plumes qui sont au - bas du cou du cog. ù Celles qui revêtent le dos et le croupion sont longues, douces au toucher, et de couieur d’or. Les couvertures du dessus de la queue, qui sont fermes et très-longues, di- vergent de chaque côté de cette partie: elles sont aussi de couleur d'or depuis leur origine jusqu'à la moitié de leur longueur, et d’un rouge-trés-vif et fort éclatant dans le reste. Toutes les parties inférieures du corps, depuis et y compris la gorge, sont d’un rouge d’écarlate jusqu'auprès des jambes, qui sont brunes. Les plumes scapulaires sont d’un bleu foncé ; à reflets violets ét cuivreux. Toutes les pennes de l'aile sont brunes , variées de roussätre , et celles de la queue sont d’un brun marron, L'iris est d’un jaune 3, 4, d 7 98 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE vif et foncé ; Le bec, les pieds et les ongles sont d’un jaune pâle. Le plumage de la femelle est entièrement d'un gris de fer , nué et ondé de roussâtre et de noir. Elle pond au prin- temps des œufs qui sont d’un rouge de brique. Ii n’est guere possible dedistinguerlesjeunes mâles d'avec des femelles, dont ils ont le plumage jusqu’à la seconde année de leur âge : c'est à cette époque seulement qu'ils commencent à prendre leurs belles couleurs. On prétend que, Se les femelles sont âgées de cinq ou six ans, elles quittent leur vêtement pour reprendre successivement celui du mâle, à mesure qu’elles avancent en âge. Ce travestissement leur attire souvent des que- relles avec les mâles, quiles maltraitent : d’où on pourroit conclure, avec beaucoup de probabilité, que ceux-ci, du moins dans cette espèce, ne tgeconnoissent leurs fe- melles que par la couleur de leur plumage. CINQUIEME GENRE. LES PINTADES. Les caractères distinctifs et particuliers au genre des pintades consistent en ce que leur bec est en cône courbe; qu'elles n’ont point d’ergots ; qu’elles portent de chaque côté de l'ouverture du bec une membrane charnue, et sur le sommet de la tête une protubérance os- seuse et conique; enfin en ce que leur tête et le haut de ieur cou sont dépourvus de plumes, D'ORNITHOLOGIE. 99 et sont seulement garnis, sur le derriere de celte partie, de poils roides et noirs. La pintade commune , originaire de la Guinée, de la Côte-d'Or, du Sénégal, de la Syrie, du Congo, etc. , est le seul des oiseaux de ce genre que l’industrie humaine a trans- porté de l’Afrique jusque dans les basses-cours de toute la France, et même dans celles du département des Vosges, ou, malgré la tem- pérature presque toujours froide de ces con- irées , elle vit et s’y propage comme si elle étoit dans son pays natal. LA PINTADE COMMUNE. Numida meleagris. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 102. La pintade. Bris. Ornith. tom. 1, pag. 176. { Voyez la planche XXI de cet ouvrage. ) La pintade, que quelques ornithologistes ont nommée perdrix de Terre-Neuve, est de la grosseur d’une forte poule; c’est un oiseau pulvérateur qui cherche dans la poussière, où il se vautre avec une sorte de volupté, un remède contre les insectes qui l’incommodent. Sa longueur , du bout du bec à celui de la queue, est de vingt-deux pouces, et ses ailes ployées dépassent d’un pouce l’origine de cette derniere partie. Ses joues, dénuées de plumes, ainsi que toute sa tête et le haut de son cou, sont d’un bleu céleste dans le mile ,; et rouges dans la femelle. La protubérance qui s'élève au-dessus du front de cet 1 * 4 100 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE oiseau est un peu aplatie sur les côtés, légèrement inclinée en arriere , et couverte d’une peau d’un bleu rougeâtre, qui cependant varie dans les différens individus du blanc au rougeàtre, en passant par le jaune et le brun; sa subs- tance intérieure est comme celle d’une chair endurcie et calleuse , et la peau qui la recouvre est sèche et ridée. Les membranes pendantes à côté du bec sont bleuûtres, bordées de rouge vif dans le mâle; elles sont entierement de cette dernière couleur dans la femelle. En arrière de ces barbillons, on voit sur les côtés de la tête la très- petite ouverture des oreilles, qui, dans la plupart des autres oiseaux, est ombragée par les plumes. La peau qui revêt le haut du cou est d’un rougeâtre veiné de bleueûtre; cette peau est couverte de poils noirâtres, dont la direction est vers la tête; ces poils, examinés a la loupe, ne paroïissent autre chose que de véritables plumes ; celles qui entourent le bas du cou sont d’un cendré violet. Le noir, le blanc et le cendré sont les trois couleurs du plumage de cet oiseau; le noir en est le fond; le blanc est répandu par gouttes ou par taches rondes, plus larges sur les grandes pennes de l'aile et sur celles de la queue , que nulle partaïlleurs sur le reste du corps ; le cen- dré coupe par petites raies tout le fond noir. La queue courte, comme celle des perdrir , est un peu arquée et arrondie, et la pintade la porte penchée vers la terre. L'iris de ses yeux est rougeûtre ; son bec court est rouge à sa base, et de couleur de corne à son extrémité ; les pieds et les ongles sont d’un gris brun. Cet oiseau pond, dans nos contrées, de quinze à dix- huit œufs, qu’à raison du peu d’attachement que cet ani- mal montre pour sa progéniture, on est obligé de faire couver par des poules. Ces œufs, lorsqu'ils sont encore chauds, immédiatement après la ponte , sont rouges, et D’'ORNITHOLOGIE. 101 en se refroidissant ils prennent une teinte de couleur de rose : ils passent pour être fort bons à manger. Le cri de la pintade est si aigre et tellement insuppor- table, que, malgré la bonté de la chair de cet oiseau, qui passe pour être infiniment supérieure à celle de toute autre espèce de volaille, on renonce à en élever; d’ailleurs elle est très-méchante, et maltraite toutes les autres vo- lailles de la basse-cour. Dépuis que la pintade est introduite en Europe, on a remarqué un changement, une variation sensibles dans la couleur de son plumage, et on ne doit attribuer ces changemens , que tous les oiseaux de basse-Cour ont éprou- vés par le même motif, qu’à la domesticité et à la servi- tude qui pesent sur eux. Il s’en trouve donc dans le plumage desquelles il s’est mélé beaucoup de blanc; d’autres qui sont d’un gris de perle clair, en conservant toujours leurs mouchetures ; on en voit enfin chez les oiseleurs de Paris, qui sont par- faitement blanches, et d’autres qui sont grises avec la poitrine blanche seulement : d'où on a voulu établir des races différentes ; mais ce n’est qu’une seule et même espèce, qui , sielleétoit en liberté, et, si elle se retrouvoit dans son pays natal, reprendroit , peut-être des la premiere mue, la couleur noire de son plumage. SIXIEME GENRE. LE DINDON ET LE COQ. Nous avons réuni dans un seul et même genre les deux espèces d'oiseaux exoliques les plus anciennement domestisés chez nous. L'une 102 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE et l’autre vivent principalement de grains, quoiqu'elles soient omnivores 1). Elles sont la base fondamentale de nos basses-cours. Elles font l’une et l’autre, à chaque couvée, une grande quantité de petits, sans pour cela construire de nid ; et ce m'est sans doule que parce que l’industrie humaine, dans la vue d’un plus grand intérêt, en se chargeant pour elles de ce soin, les a habituées à s’en dispen- ser : où bien, si elles pondent sans qu'on s'en apercoive, c'est toujours à plate terre, par la raison seule que la mere n’a pas la peine, ainsi que celle de tous les gullinacés, de nourrir ses petits nouvellement nés; car aussitôt qu'ils sont éclos, 1ls sortent de dessous leur mère, et la suivent courant cà et là, et ramassant la nourriture qui leur convient. L'une et l’autre espèce a pour caracteres communs Îles trois doigts antérieurs joints ensemble par une courte membrane qui ne s'étend que jusqu’à la première articulation ; le bec en cône courbe, et un ergot à chaque. pied du mâle. Dans le dindon, qui de tout temps fat lem- blème du sot enorgueilli , la tête, dénuée de plumes, est couverte de papilles; des barbil- 1) On a donné le nom d’omnivores aux animaux qui s’accom- modent pour nourriture de toute espèce d’alimens. D'ORNITHOLOGIE.: 103 lons charnus lui pendent sous le cou; il a à l’origine de la base supérieure du bec une espèce de cône flasque , qui se prolonge à la volonté de l'animal , qui est remarquable d'ail leurs par une touffe de crins assez longs qu'il porte sur la poitrine, et par sa queue qu'il a la faculté de relever pour en faire ce qu'on appelle la roue. Le cog a pour caractères particuliers des joues également nues; une crête charnue ou une huppe composée d’un nombre plus ou moins considérable de plumes sur la tête ; deux barbillons, de même nature que sa crête, qui pendent de chaque côté de la base infé- rieure de son bec; et enfin les pennes de sa queue forment deux plans verticaux adosses l’un contre l’autre. I. LE DINDON. Meleagris gallo pavo. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 99, Le dindon. Bras. Ornith. tom. 1, pag. 158. ( Voyez la planche XXI de cet ouvrage.) Originaire d'Amérique 1), le dindon, le plus gros de nos oiseaux de basses-cours, a, de l'extrémité du bec à 1} Quelques ornithologistes prétendent que la race du dindon, apportée d’abord du Mexique et du Yacathau en Espagne, étoit 104 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE celle de la queue , trois pieds quatre pouces de longueur, et quatre pieds cinq pouces de vol; ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, ne s'étendent gueres au-delà de:l'origine de sa queue. Sa tête et la partie de son cou qui en est la plus voi- sine, sont dénuées de plumes, et couvertes seulement d’une peau toute garnie de mamelons charnus , d’un rouge vif, excepté cependant ceux qui sont sur le sommet de la tête et sur la partie supérieure du cou; ceux-la sont variés de blanc, de bleu et de rouge. Au-dessus de la base de la mandibule supérieure, on voit un appendice charnu , une espèce de caroncule rouge , de forme comique, qui, lorsqu'elle est contractée, a tout au plus un pouce de longueur, mais qui peut s'étendre jusqu’à trois pouces et plus : alors elle couvre le bec en partie, et elle pend de plus d’un pouce au-dessous. Le male a au milieu de la poitrine un petit faisceau de. poils roides, longs de six pouces, et qui ressemblent assez aux crins de la queue d’un cheval; on voit rarement des femelles qui aient la poitrine garnie de ces crins. Quoique le dindon varie en couleurs comme tous les autres oiseaux domestiques, cependant le plus grand nombre est noir, et ces dindons noirs ont sur leurs plumes un certain lustre de vert, qui est d'autant plus apparent que ces plumes s’approchent davantage du‘ croupion, sur 1equel on aperçoit aussi, suivant l'incidence de la lumiere, les belles couleurs de la gorge du pigeon. Celles qui couvrent la partie supérieure du dos et le dessus des: ailes sont comme coupées carrément par le bout. La queue est com- posée de dix-huit pennes, que l’animal relève à volonté passée en Angleterre, d’où elle fut successivement introduite en France, et de suité jusque dans les régions septentrionales, ea l’année 1525 ou 1526, D'ORNITHOLOGIE. 105 et dans une direction perpendiculaire ; il l'étend alors, et en forme une espece d’éventail qui a les trois quarts d'une circonférence de cercle. L'iris est de couleur brune ; le bec, les pieds et les ongles sont noirs. Le mâle, qui suflit à plusieurs femelles, porte à la partie postérieure de chaque pied un ergot trés-court et obtus. La femelle diffère du mâle en ce qu’elle n’a point d’er- gots et que sa caroncule est beaucoup plus petite et plus courte que la sienne: elle n’élève point non plus, comme lui, sa queue pour en former la roue. Quoiqu'’elle soit seule chargée du soin de sa progéniture, dont le mâle s'in- quiete ordinairement fort peu, cependant nous avons vu un jeune dindon mâle, par suite sûrement de sa stupide imbécil- lité, conduire des dindonneaux dont la mère étoit morte. Lorsque les jeunes dindons viennent d’éclore , leur tête est garnie d’une espèce de duvet d’une couleur blanche sale, qu'ils conservent six semaines ou deux mois; ce n’est qu’à cette époque que leurs barbillons commencent a se développer, et ce développement est un temps eri- tique qui, comme celui de la dentition des lionceaux, en fait périr un grand nombre. HAE: COQ: Phasianus gallus domesticus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 101. Le coq et la poule. Bris. Ornith. tom. 1 , pag. 166. ( Voyez la planche XXI de cet ouvrage.) Il y a dans l’espèce du coq, que tout le monde connoît, une multitude de variétés 1) qui paroissent toutes issues 1) Si on désire de connoître-ces diverses variétés, on peut 106 : TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de la même souche originelle, quisont le coq et la poule do- mestiques , puisque toutes les différences qui les distinguent entre elles, se trouvent quelquefois réunies dans le même individu. La queue, dans toute la race de ces oiseaux, est dune forme tout-à-fait singulière, au point que sa position seule pourroit servir de caractère propre à les faire dis- tinguer de tous les autres gällinacés : cette queue, qu’ils por- tent droite, est composée de quatorze penpes, dont sept sont inclinées d’un eôté et sept de l’autre, de façon qu’elles forment ensemble un angle trés-aigu. À Le coq et la poule ont les ailes si courtes qu'ils n’en font presque jamais usage pour le vol, si ce n’est lorsqu'ils s’'élancent de haut en bas, et dans ce cas elles ne servent qu’à empêcher l'accélération trop précipitée de leur chute. Ces oiseaux sont si généralement connus , que leur . signalement nous paroît ici presque superflu; d’ailleurs ils varient tellement en couleurs qu'il seroit difficile de pou- voir l’esquisser : seulement nous observerons que les cou- leurs sont très-vives dans les mâles; qu'il s’en trouve de plus grands les uns que les autres; qu'ils portent sur le front une crête membraneuse , dentelée en scie ; deux membranes charnues et pendantes, de chaque côté de la base du bec; sur la gorge et au-dessus des oreilles, une eau nue qui est d’un trés-beau blanc. L'iris est rouge; le bec, les pieds et les ongles sont tantôt jaunes et tantôt noirs. Que pourrions-nous faire de mieux pour signaler les mœurs du coq, que de rapporter ici ce qu’en dit si agréa- consulter les Œuvres de M. de Buffon, dans lesquelles on les trou- vera développés avec cette précision qu caractérise son gémie à jamais immortel. D'ORNITHOLOGIE. 107 blement Mauduyt, dans l'Encyclopédie méthodique P« Le ç « « coq, dit ce savant ornithologiste, a le corps plein, la démarche lente et posée; il porte le cou relevé et la tête haute; son regard est vif et animé; il a l'air fier, indépendant, sans avoir rien de menaçant ni de farouche. C’est un étre confiant dahs son courage et dans ses forces, qui connoît son prix, sans dédain pour les autres : certain de sa supériorité et des droits qu’elle lui donne, il sait les maintenir dans tout ce qui est important, ets’en relacher sur ce qui n’y sauroït porter préjudice. Despote et amant au milieu d'un sérail nom- breux, il est mari attentif et pere tendre. Les poules et les petits qu’elles conduisent, sont devant lui un peuple qui doit obéir, mais qui doit être gouverné avec dou- ceur , auquel sa propre foiblesse et les forces de son souverain consacrent de sa part les égards et les atten- tions de la société, en le chargeant en même temps de de tout ce qui concerne sa sûreté; Ne voulant que des alimens propres à entretenir ses forces, sile coq trouve un mets délicat, sans en rien prendre pour lui, son cri en avertit les poules et les petits, quiaccourent à la voix d’un maître qui appelle, d’un mari et d'un père qui invite ; il partage entre les mères et les enfans, en répondant par des accens doux et bas à ceux que sa famille fait entendre autour de lui. Il défend sa progé- niture soit en attaquant, soit en la défendant contre les ennemis qui pourroient lui nuire ; ii combat, il repousse les animaux étrangers ; il agit en maitre avec les oiseaux de la basse-cour, et il les éloigne des poules. Mais il s'irrite surtout à l'approche d'un de ses sen- blables : aussitôt qu’il l’aperçoit, l'œil en feu, les plumes hérissées , il court à lui et lui livre un combat aui ne cesse que par l'abandon de ses forces ou la retraite L 108 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE « du nouveau venu. Vainqueur, il se redresse, frappe « ses flancs de ses ailes et chante à deux ou trois re- « prises 1); c’est de lui qu'il est dit: aime, combat, e triomphe et chante sa victoire ?. Le mâle differe de la femelle par les deux plumes du milieu de sa queue, qui sont très-longues et courbées en arc; par celies du cou et du croupion qui sont longues ct étroites, et par les ergots qu’il a aux pieds, tandis que la femelle en est tout-a-fait dépourvue. SEPTIÈME GENRE. LES OUTARDES. Les outardes sont des oiseaux pesans ; qui volent très-peu, et qui ne se servent , pour ainsi dire, de leurs ailes que pour accélérer leur course. Elles ont trois doigts devant, dé- nués de membranes, et point de doigt de der- riere , non plus que d’ergots. Leur bec est en cône courbé, et semblable à celui des galli- nacés ; leurs jambes 2) sont denuées de plumes dans leur partie inférieure. 1) Dans piusieurs cantons de la ci-devant Lorraine, notre pays natal, où les préjugés qu’enfanta l’ignorance sont encore en crédit, lorsque les cogs chantent aux approches de Noël, les habitans superstitieux des campagnes et la plupart de ceux de certaines villes sont persuadés que ces oiseaux, organes de la divinité, ont été chargés par elle d’annoncer l’anniversaire de la nais- sance du Messie. 2) La jambe dont il est ici question est la partie que l’on nomme vulgairement et improprement la cuisse. D'ORNITHOLOGTE. 109 Ce dernier caractère, s’il fixoit seul l’atten- tion de l’ornithologiste , le détermineroit sans doute à placer les outardes dans l’ordre des oiseaux fissipèdes de rivage ; mais la forme de leur bec , leur port massif, leurs doigts forts, courts, leurs ongles convexes par dessus et concaves par dessous , nous obligent à les ranger parmi les ga/linacés, avec d’auiant plus de rai- son, qu'elles se nourrissent de même et des mêmes alimens. Nous pourrions seulement observer ici qu'il sembleroit que la nature, en créant les ou- tardes , auroit établi, par cette nuance, le passage insensible des ga/linacés aux oiseaux de rivage. Nous ne connoïissons en France que deux espèces d’outardes, savoir : la grande, et la petite. L’on nomme cette derniere cannepe- lière. 1° LA GRANDE OUTARDE. Otis tarda. LiN.Syst. nat. édit. 13, gen. 95. L'outarde. BrRis. Ornith. tom. 5, pag 18. V5 tr T ne ( Voyez la planche XXI de cet ouvrage. ) Cet oiseau, l’avant-dernier, non-seulement de la sec- tion des gallinacés, mais encore de l'ordre des oiseaux fissipèdes proprement dits, a trois pieds de longueur de io TABLEAU ÉLÉMENTAIRE l'extrémité du bec à celle de la queue.( cette dimension n’est pas toujours constante; elle varie d’un individu à l’autre ). La partie du bas de ses jambes qui est dégarnie de plumes à quinze lignes de long, et ses pieds ont six pouces de hauteur ; son vol est de six pieds huit pouces; lorsque ses aïles sont ployées, elles s'étendent aux deux tiers environ de la longueur de sa queue. L’oufarde est un oiseau granivore, qui vit également d'herbes et de ces gros vers de terre que, pendant les derniers jours du printemps surtout, l’on voit fourmiller le matin dans nos jardins. Lorsque les rigueurs de l'hiver ont anéanti ces animaux , l'outarde est réduite à la nécessité de se nourrir de l'écorce des arbres. Dans le temps äes amours, le mâle, qui pàture auprés de sa femelle, interrompt fréquemment cet exercice pour faire la roue autour d’elle. Cet oiseau ne construit point de nid; il se contente de gratter la terre avec ses pieds, et la femelle dépose ses œufs dans cette cavité; elle les couve pendant trente jours. Ces œufs sont de la grosseur de ceux d’une ote; Isur couleur est d’un brun clair olivätre, marquée de taches d’un brun plus foncé. C’est ordinairement dans les seigles qui approchent de leur maturité que l’outarde établit sa ponte; on pré- tend que, lorsque quelque danger semble menacer ce gage précieux de sa tendresse , elle prend ses œufs sous ses ailes et qu'elle les transporte ailleurs, où elle s'imagine qu'ils seront plus en süreté. Si, ayant quitté sa couvée pour aller chercher de la nourriture , elle s'aperçoit, a son retour, qu'on y ait touché, on prétend aussi qu'elle l'abandonne pour toujours. Nous ne garan- tissons pas ce fait, que nous avons emprunté d’autrui. Lorsque l’on chasse l’oufarde, elle court, dit-on , si x D'ORNITHOLOGIE. Y\11 vite. en battant ses flancs de ses aïles, qu’en un instant elle disparoît, aprés avoir parcouru un trés-grand espace de terrain sans s'arrêter. Quoique naturellement timide, sauvage et même fa- rouche, cet oiseau s'apprivoise néanmoins si.on a eu l’at- tention de le prendre jeune ; il s’habitue même trés-bien, ajoute-t-on, àa-vivre dans les basses-cours avec les autres volailles. I1 passe pour être un gibier excellent, et on prétend que les gourmands, malgré sa haute réputation dans les fastes de leurs délices, mettent cependant une grande différence entre la saveur de son corps et celle de ses cuisses, qu'ils préférent. | La tête, la gorge et le cou de l’oufarde, sont d’une couleur cendrée claire : de chaque côté de la mandibule inférieure, et de sa base, naissent de longues plumes efli- lées, à barbes longues et désunies, qui sont aussi d’un cendré clair; là, ces plumes forment comme une espèce de barbe ou de moustaches qui ont à peu prés trois pouces. de longueur. Le tour des yeux est d’un blanc roussètre ; tout le dessus du corps, les plumes scapulaires et les couvertures du dessus des ailes, sont variées de brun noï- râtre et de fauve, disposés par taches et par bandes trans- .Yersales sur un fond roussâtre. La poitrine, le ventre, les flancs et les couvertures du dessous de la queue, sont d'un blanc tres-foiblement lavé d’une teinte fauve. Le duvet de toutes les plumes, si on en excepte les pennes du bout de l'aile, est d’un rouge qui tire sur la couleur de rose vif. L’aile est composée de vingt-six pennes, dont les barbes extérieures des troisième, quatrième , cin- quième et sixième, deviennent subitement plus courtes et plus étroites à l'endroit où elles sortent de dessous les couvertures : les neuf premieres sont noirâtres ; les sept suivantes sont mi-parties de blanc dés leur origine, et 112 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE mi-parties de noiràtre dans le reste de leur longueur ; les dix-septième et dix-huitième sont blanches, tachetées de noiratre et de roussètre sur le dernier tiers de leur lon- gueur ; les autres sont blanches à leur origine, et variées de brun et de noirâtre dans le reste de leur étendue. La queue, composée de vingt pennes, est en dessus variée de bandes transversales noirètres et étroites sur un fond rous- sètre ; le dessous est marqué de larges bandes transver- sales de la même couleur, sur un fond blanchätre ; et de l'un et de l’autre côté elle est terminée de gris blanc ; l'iris est orangé , le bec d’un gris brun; le bas des jambes et les pieds sont cendrés, couverts d’écailles fort petites ; les ongles sont gris. La femelle, de près de moitié plus petite que le mâle, n'a point de longues plumes ou d’espèce de moustaches aux coins du bec; sa gorge et les côtés de sa tête sont bruns; le dessus de sa tête et de son cou est varié des mêmes couleurs que le dos. On voit un grand nombre d'outardes dans les dépar- temens de la Marne, de l’Aiïsne et de l’Ille et Vilaine. On est quelquefois plusieurs années sans en voir dans le département des Vosges, et c’est presque toujours dans la partie agricole : cependant on en tua un assez bon nombre lan dernier dans les montagnes qui avoisinent Remiremont; on nous assura même que plusieurs de ces montagnards qui en avoient tué une grande nombre, en avoient fait de la soupe, comme ils en font quelquefois avec des lièvres, D'ORNITHOLOGIE. 115 0 2° LA PETITE OUTARDE, OU CANNEPÉTIÈRE. Ouis tetrax. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 05. La petite outarde. BR1S. Ornith. tom. 5, pag. 24. La cannepétière, bien plus rare encore en France que la grande outarde, se rencontre néanmoins dans quelques départemens , où elle arrive en petit nombre chaque année vers la fin d'avril, et d’où elle part aux approches de l'hiver : tels sont ceux d’Eure et Loir, de l’Aisne, de la Sarthe et de la Seine Inférieure. Aux deux époques annuellement périodiques de son arrivée chez nous et de son retour vers le midi, il en paroît instantanément, à la vérité. dans les Vosges, qui sont la ligne que suivent la plupart des oiseaux dans leurs migra- tions du midi au nord, et du nord au midi réciproque- ment; et c’est d’apres un individu de notre cabinet, tué dans ce département, que nous signalons ici la petite outarde. Elle n’a guëre que dix-huit pouces de longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue; elle est à peu prés grosse comme un chapor, et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, s'étendent un peu au-delà des trois quarts de la longueur de sa queue. Elle n’a, comme la grande outarde, que trois doigts seulement en avant de chaque pied, sans aucune apparence de doigt de derrière ; le bas de sa jambe est dénué de plumes, et son bec est conformé de même que celui de tous les gallinacés. Le sommet de la tête de la petite outarde est noir , marqué de petits traits longitudinaux roussâtres ; les côtés de cette T. 2. 3 114 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE partie sont d’un roussätre trés-clair, variés de taches longitudinales noirâtres. Tout le dessus de son corps, à partir du cou, jusques et y compris les couvertures supérieures de sa queue, est agréablement varié de lignes noires, fauves et roussâtres, qui sont disposées en zigzags, et parmi lesquelles il se trouve trés-pex de blanc. {Des vingt-sept pennes dont l'aile est composée, 1 s six plus voisines du corps sont variées des mêmes couleurs que lui en dessus, avec celte différence cependant que ces couleurs sont distribuées sur ces pennes par bandes beau- coup plus larges; la penne suivante est variée, dans son milieu , de bandes transversales, fauves et noirâtres, dis- posées aussi en zigzags ; les dix pennes qui suivent sont parfaitement blanches, ainsi que les six avant-derniéres, mais celles-ci sont marquées, vers leur extrémité, d’une large bande transversale noirâtre ; les quatre plus exté- rieures enfin , qui sout les premieres grandes pennes de l'aile, sont blanches à leur origine, et noirâtres dans le reste de leur longueur. La queue est formée de dix-huit pennes, dont les quatre du milieu sont fauves, marquées de bandes noiràtres , et les latérales sont blanches, marquées des mêmes ban- des; mais elles sont de plus traversées d’une autre bande plus large et de la même couleur vers leur extrémité, La gorge, d’un roussàtre très-clair, varié de petites taches longitudinales noirâtres, est ceinte, vers la poitrine, d’un petit collier blanc qui remonte des deux côtés en s’éten- dant vers le derrière de la tête : un peu plus bas que ce collier, et près de la poitrine, qui est noire, avec quelques taches rousses, on voit une bande noire qui suit la direction de ce collier. Tout le reste du dessous du corps est blanc : seulement D'ORNITHOLOGIE. 115 on y aperçoit quelques raies transversales, noïres sur les couvertures du dessous de la queue. Le bec est d’un gris brun; l'iris des yeux d’un jaune orangé; la partie des jambes au-dessus du tarse, qui est dégarnie de plumes, comme dans les oiseaux fissipèdes de rivages, est grise de même que les ongles et les pieds, qui sont recou- verts de petites écailles. La femelle differe du màle,en ce que le dessus de sa tête, ainsi que son cou, sont variés de noir et de rous- sàtre ; que sa gorge et sa poitrine sont d’un blanc rous- sàtre. Cette dernière partie est de plus variée de bandes noirâtres : elle en differe encore en ce que les taches du dessus de son corps sont plus grandes, et enfin en ce que les pennes de sés ailes, celles qui sont blanches dans le mâle, sont chez elle rayées transversalement de noirûtre. Dans l’un comme dans l’autre, le duvet qui se trouve au- dessous des plumes est de couleur de rose. Le mâle de la petite outarde n’a pas, comme celui de la grande, ces deux touffes de plumes soyeuses qui lui pendent de chaque côté du bec en forme de moustaches. C’est vers la fin de juin que la femelle de la petite ou- tarde pond de trois à cinq œufs d’un beau vert luisant. Les petits qui en éclosent, et que la mére conduit au pâturage, comme le font tous les gallinacés, ne com- mencent à voler qu’au mois de septembre; avant cette époque, au moindre bruit qu'ils entendent ils se blot- tisent contre terre, de manière à se laisser écraser plu- tôt que de prendre la fuite. La petite outarde est naturellement craintive et volon- tiers soupçonneuse : aussi à la moindre apparence de dan- ger elle part, et d’un vol rapide, en rasant la terre, elle s'éloigne en un clin d'œil de trois cents pas et plus de 8 * 116 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE l'endroit d’où elle a pris son essor; et lorsqu’elle se pose, elle fuit si vite en piétonnant, qu'un homme à la course ne pourroit l’atteindre. La chair de cet oiseau, qui est noire, passe pour un mets des plus exquis : aussi, par cette raison, elle est très- recherchée des amateurs de friandises. FIN DU PREMIER ORDRE. D'ORNITHOLOGIE. 117 ORDRE SECOND. LES FISSIPÉDES DERIVAGES. Lrs Jissipèdes de rivages sont amsi nom- més, parce qu'ils ne fréquentent que le bord des eaux pour y chercher des poissons, des repules, des insectes ou des vers, dont ils se nourrissent. Ceux qui ont le bec fort vivent de pois- sons et de reptiles; ceux, au contraire, qui ont le bec foible se contentent d’in- sectes et de vers. Quelquefois ils entrent dans l’eau, sans néanmoins se mettre à la nage; ce qu'ils ne pourroient faire, puis- qu'ils ne sont pas palmipèdes 1), comme les otes ou les canards. La nature les a conformés d’une ma: 1) On nomme palmipèdes les oiseaux dont les doigts sont garnis de membranes fendues , festonnées ou entiéres, qui leur servent comme de rames dans leur navigation sur les eaux. 118 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE nière analogue au genre de vie auquel elle les avoit destinés, en ieur donnant non- seulement des pieds fort longs, accompa- pagnés de trois doigts en avant, tous sé- parés les uns des autres, au moins jusqu'à la première articulation, et un pouce en arrière, qui manque dans quelques espèces; mais encore des jambes dont la partie in- férieure est plus ou moins dégarnie de plumes au-dessus du calcaneum 1); une queue courte, et un cou dont la longueur est toujours proportionnée à la hauteur du tarse. Elle a fait plus en leur faveur ; elle a pourvu la plupart des espèces de demi-mem- branes qui unissent leurs doigts à leur base seulement, afin qu’elles se soutinssent plus facilement sur la vase. Parmi les oiseaux de rivages, les uns ont un pouce, et les autres n'en ont point ; mais tous étendent en volant leurs jambes en arrière, afin, sans doute, de 1) Ce que nous nommons ici calcaneum devroit s’ap- peler le genou, si ce que nous désignons sous le nom de jambe étoit en effet ce que le; vulgaire connoît sous la dénomination de cuisse. D'ORNITHOLOGIE. 119 faire contre-poids à leurs parties antérieu- res, qui sont fort longues. Il n’est aucune espèce d'oiseaux de ce second ordre qui soit constamment séden- taire dans un département quelconque de la France. Les uns y sont seulement erra- tiques, les autres y sont de passage an- nuellement périodique, et enfin quelques- uns n’y sont que de passage tres-accidentel et souvent fort rare. | Nous avons divisé cet ordre en trois fa- milles. Dans la première, nous avons placé les oiseaux de rivages à bec long et fort; dans la seconde, ceux qui ont le bec long et foible, mais aplati horizontalement à son extrémité ; dans la troisieme, ceux qui ont le bec grêle, rand, fort ou foible , plus ou moins long, plus ou moins droit ou courbé. PREMIÈRE FAMILLE. Les oiseaux fissisèdes de rivages qui com- posent celte première famille ont pour caràc- ières généraux, comme nous venons de le dire, un bec long et fort; une partie de la 120 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE jambe dégarnie de plumes au-dessus du ca/- caneurm ; des demi-membranes à la base des trois doïgts antérieurs, et un doigt postérieur, que l’on nomme le pouce. Cette fanulle ne renferme que le seul genre des 2érons. GENRE. LES HÉRONS. Tous les Zérons ont le corps grêle, efflan- qué , aplati sur les côtés; les ailes amples, con- caves, musculées, et conséquemment très-pro- pres à les soutenir fort élevés dans les airs et durant un vol d’un long trajet. Leur queue est - courte; leur cou, fort long ; est peu couvert de plumes à sa partie postérieure : ils ont les narines en forme de lignes longues, étroites, et les jambes fort hautes. Nous sous-divisons ce genre en trois tribus, d’après la conformation différente de leur bec ou bien de leurs pieds. Il s’en trouve parmi eux quelques-uns qui ont la voix très-forte. PREMIÈRE TRIBU. Cette première tribu est composée des hérons proprement dits, dont le bec est épais à son origine, long , fort , et allant en diminuant de sa D'ORNITHOLOGIE. 121 base à sa pointe, qui est très-aigué ; 1ls ont le doigt du milieu denté en scie à son bord in- térieur ; leurs yeux, entourés d'une peau nue, paroissent comme implantés dans la base même du bec : ce qui donne à ces ciseaux un air Lort stupide. - Cette tribu renferme onze espèces, savoir : le kéron commun, le héron blanc, le héron montagnard , le héron pourpré, le AZérorn- garzette - blanche , Vaigrette,, le longios , le crabier-gentil, le butor ordinaire, le butor roux , et le bihoreau. 1° LE HÉRON COMMUN. Ardeacinerea. TAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le héron commun. Bris. Ornith. tom. 5 , pag. 392. ( Voyez la planche XXII de cet ouvrage. } Le héron commun a, du bout du bec à celui de la queue, deux pieds dix pouces, et quelquefois trois pieds de longueur; son bec a cinq pouces cinq lignes; la partie nue de ses jambes, au-dessus du calcaneum, est de trois pouces trois ou quatre lignes, et son vol est de cinq pieds. Lorsque ses ailes sont ployées, elles dépassent un peu l'extrémité de sa queue. L'espace qui se trouve entre l’œil et le bec n’est point couvert de plumes, mais seulement d’une peau qui est d’un jaune verdâtre : ce bec va en diminuant de-la base à la pointe. La partie antérieure du dessus de la tête de cet oiseau 122 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE est revêtue de plumes blanches; celles de ces plumes qui sont les plus éloignées de la base du bec sont longues et étroites. A la suite de ces premières plumes, il s’en trouve sur le sommet de la tête qui sont noires, et qui forment une espèce de huppe qui, lorsque l'oiseau n’est agité d'aucune passion violente, lui retombe en arrière sur le cou, de chaque côté de sa partie antérieure. D’autres plumes, longues et étroites comme celles qui recouvrent Focciput, se disposent en manière de panaches sem- blables à celles que l’aigrette porte sur le dos. Au haut de la poitrine on voit une large bande transversale noire , accompagnée d’une autre de même couleur, qui s'étend longitudinalement de chaque côté sur le bas de la poitrine, ainsi que sur le ventre. La gorge, le devant du cou et tout le dessous du corps sont d’un blanc mou- cheté de noir. Tout le dessus du corps , le derrière, ainsi que les côtés du cou, les plumes scapulaires et les cou- vertures supérieures des ailes, sont d’un gris bleu. Leur bord extérieur est blanc dans toute sa longueur , jusqu’au ph de l'aile qui est roussètre. Des vingt-sept pennes dont l'aile est composée, les vingt extérieures sont noiràtres, et les sept autres sont d’un cendré brunâtre, qui s’éclaircit davantage à mesure que ces mêmes pennes sont plus voisines du corps : celles de la queue sont d’un cendré qui brunit vers leur extrémité. L'iris du héron commun est jaune; la mandibule inférieure de son bec est jaunâtre, et la supérieure, d’un jaune ver- aâtre , est noire à son extrémité. Chacune de ces mandi- bules est armée de dentelures qui sont dirigées d’avant en arriere, et qui sont trés-propres à retenir le poisson que cet oiseau saisit, et qui, sans cette précaution tou- jours admirablement prévue par l'artiste immortel de la nature, en glissant, lui échapperoit. Ses pieds, ainsi que D'ORNITHOLOGIE. 125 la partie nue de ses jambes, sont d’un vert tendre; ses doigts, de la même couleur, sont trés-longs; celui du milieu est armé .d’un ongle creusé dans son milieu, et qui est trés-aigu à sa pointe : la tranche de cet ongle, qui est saillante du côté intérieur, est dentelée de manière à lui servir comme d’une espèce de crampon pour s’accrocher aux racines qui sont enfoncées dans la vase. Cet ongle, de même que ceux des autres doigts, sont de couleur noirâtre. « Le bonheur n’est pas également départi à tous les a P 5 P êtres sensibles, dit M. de Buffon. Celui de l'homme vient de la douceur de son ame, et du bon emploi de ses qualités morales : le bien-être des animaux ne dé- pend, au contraire, que des facultés physiques et de l'exercice de leurs facultés corporelles. Mais si la nature s'indigne du partage injuste que la société fait du bonheur parmi les hommes, elle-même, dans sa marche rapide, paroît avoir négligé certains animaux qui, par imperfection d'organes, sont condamnés à endurer la souffrance, et destinés à éprouver la pénurie : enfans disgraciés, nés dans le dénuement pour vivre dans la privation , leurs jours pénibles se consument dans les inquiétudes d’un besoin toujours renaissant; souffrir et patienter sont souvent leurs seules ressources; et cette peine intérieure trace sa triste empreinte jusque sur leur figure, et ne leur laisse aucune des grâces dont la nature anime tous les êtres heureux. Le héron nous présente l’image de cette vie de souffrance, d’anxiété , d'in digence : n’ayant que l’embuscade pour tout moyen d'industrie, il passe des heures , des jours entiers à la même place, immobile au point de laisser douter si c’est un être animé. ? Ji n’en est pas moins pour cela un oiseau erralique, 154 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE que l’on voit, en tout temps et en toutes saisons, paroître et disparoître sur les bords de la plupart des étangs et des rivières de l'intérieur de la France, selon qu’il y trouve ou n’y trouve plus de nourriture 1). Les hérons entreprennent de très-longs voyages, et lors- qu'ils prennent leur essor, ils se perdent quelquefois dans les nues. Ils étendent alors leurs pieds en arrière; ils renversent leur cou sur leur dos, de manière qu’en les regardant perpendiculairement dans les airs, ils paroissent mavoir point de tête. On conçoit comment, au moyen de leurs grandes ailes concaves, ces oiseaux peuvent s’éclip- ser en quelque sorte dans les nuages et se soutenir sans peine dans leurs longs trajets 2). Le héron est un oiseau ombrageux qui paroît s’inquié- ter et s’alarmer de la moindre apparence de danger ; il — 1) Lorsqu'un héron est réduit en captivité, il peut y subsister au moins quinze jours sans vouloir y prendre aucune espèce de pourriture, tant est profond le sentiment de son esclavage ! il y - périt toujours (à moins qu’il wait été pris fort jeune ) consumé de langueur , et il y meurt sans plainte comme sans regrets. 2) Notre ancien ami et estimable collègue Willemet , ex-pro- fesseur d'histoire naturelle à l’école centrale de la Meurthe, nous a dit avoir vu un héron tué et envoyé de Saint-Diez, dépar- tement des Vosges, à Nancy , qui portoit à une de ses jambes cinq anneaux de cuivre avec les inscriptions suivantes, qui semblent annoncer que cet oiseau auroit été pris et relâché cinq fois. Sur le premier anneau étoient gravées ces lettres et ces dates, €. W.F. R. B. O. À. 1731, n.° 73. Sur le second de ces anneaux, on lisoit C. M. Z. B. O. 1745 , n.° 96. Sur le troisième, C. E. M. À. C. Z. B. O. 1762, n.° 44. Sur le quatrième étoient empreintes ces lettres, C. F. C. A. M. Z. B. O. 1763, n.° 88. Sur le cinquième enfin, F. V. P. I. M. 1765, n.° 50. Ne nous ayant donné aucune explication même présumée de ces lettres , rous en abandonnons l'interprétation aux plus érudits que nous dans cette partie, D'ORNITHOLOGIE. 125 fuit de trés-loin l'homme, quine peut guëre s’en rendre le possesseur qu’au moyen des détours de la ruse et de la feinte. Toujours il vit solitaire, et s’il se réunit instantané- ment chaque année, ce n'est jamais qu'avec sa femelle, parce que le besoin impérieux de la propagation de son espèce le force à contracter cette alliance. Alors ils construisent, de compagnie, leur nid au sommet d'un arbre le plus élevé des forêts. Ce nid est vaste; il est extérieurement composé de buchettes et d'herbes sèches; le dedans est garni de plumes et de’ jones ; la femelle pond dans ce réduit, qui n’est point un chef-d'œuvre de l'art, quatre ou cinq œufs oblongs, d'un bleu verdàtre et sans taches. On voit beaucoup de hérons dans toute l’étendue des hautes et basses Vosges, où on les rencontre en toutes les saisons sur le bord des étangs et des rivieres, et plus par- ticuliérement le long de la Moselle, où ils sont plus abondans en automne et en hiver. La , ils saisissentles petits poissons et les grenouilles qui passent à leur portée, et qu'ils aperçoivent avec d'autant plus de facilité que les eaux de ces contrées sont limpides comme le cristal de Madagascar : ils les avalent tout entiers. 2° LE HÉRON BLANC. ÆArdea alba. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le héron blanc. BrRis. Orniih. tom. 5, pag. 428. Cet oiseau est l’espece de héron qu’Aristote a signalée sous l’épithète de leucos, qui indique, en effet, la cou- leur de son plumage, qui, étant parfaitement blanc, à engagé quelques ornithologistes à le ranger parmi les 126 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE aigrettes, quoiqu'il n'ait ni la huppe de celles-ci, ni les belles plumes effilées qui flottent sur leur dos. Le héron blanc est à peu prés de la taille du héron commun ; ses jambes sont encore plus hautes, et son cou par conséquent plus long que le sien. On voit autour de ses yeux et sur la base de son bec, qui est d’un jaune de safran, une peau nue de couleur verte et bordée de jaune. L'iris de ses yeux est d’un jaune de citron; la par- tie nue de ses jambes, ainsi que ses pieds et ses doigts, sont d’un beau vert de pré durant la vie de lanimal ; mais cette couleur se change apres sa mort et elle passe au brun noir, surtout dans les individus empaillés depuis quelque temps : les ongles sont de cette dernière çou- leur. L'espèce du héron blanc, quoique tres-rare en appa- rence dans plusieurs contrées de la France, n’en est pas pour cela moins abondante que celle du héron com- mun; et quoique quelques auteurs l’aient exclusivement confinée en France, sur les côtes du département de l’Ille et Vilaine, il n’en est pas moins vrai de dire qu'on en voit, et même assez fréquemment, sur quelques rivières et sur plusieurs étargs du département des Vosges. C'est dans ces contrées que nous avons remarqué que le héron blanc étoit bien moins sauvage et beaucoup moins défiant que le héron commun ; car , de trois individus que nous avons tués dans l’espace de dix ars, le premier et le dernier étoient en embuscade dans des roseaux qui garnissoient les bords de deux étangs différens. La, sur- pris par le chien qui les tenoit en arrêt, le dernier sur- tout fixoitatientivement cet animal sans paroître s’en émou- voir ni le redouter beaucoup : l’un et l’autre se laissèrent approcher d'assez près pour recevoir, avant qu’ils n’eussent essayé même de prendre leur vol, le coup fatal qui ieur donna la mort. D'ORNITHOLOGIE. 127 3° LE HÉRON MONTAGNARD. Ardea monticola. La PEYROUSE. Tabl. méth. des Ois. , pag. 44. Picot la Peyrouse nous a donné, dans lPEncyclopécie méthodique , in-4°, une description si exacte de cet oiseau, qu'il nous semble ne pouvoir mieux faire que de la trans- crire ici mot à mot, en y ajoutant que quoique ce sa- vant recommandable sous tous les rapports, dise que ce héron n’aencore été observé qu'aux Pyrénées, cependant en l'an VI on nous l’envoya, pour notre cabinet de Gérard- mer , dans les montagnes des Vosges, où il venoit d’être tué sur un des lacs de cette grande commune, et à notre arrivée à Paris nous nous sommes estimé heureux d’avoir eu l’occasion de l’offrir à un ornithologiste recommandable qui parut le désirer. Nous ajouterons encore à la description suivante, qui est de la plus grande exactitude, que l'iris des yeux du héron montagnard est jaune ; ses ongles sont bruns noirs: et, ce qui peut donner un nouveau prix à cette même description, nous dirons encore que le chasseur qui ta cet oiseau nous assura qu’il paroiïssoit bien moins sauvage et moins défiant que le héron commun; qu'aussitôt qu'il avoit aperçu ce héron, il s’étoit enfoncé dans le bois qui borde ce lac, et que la il s'étoit coulé furtivement de sapin en sapin afin de le surprendre : il ajouta que cet oiseau n'avoit pris son essor que lorsqu'il avoit vu son ennemi entièrement à découvert, et qu'ayant les yeux tournés de son côté, sans qu'il eût changé cette posi 128 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE tion de tête, il avoit soupçonné que déja depuis long- iemps ce héron l’avoit aperçu dans le bois, sans s’en être effarouché. « Le héron montagnard, dit La Peyrouse, à l'endroit cité, a trois pieds de long depuis le bout du bec jus- qu’à celui de la queue; son bec a pres de six pouces de long ; les aïles déployées ont quatre pieds cinq pouces. « Le héron montagnard à le front noir, le dessus de la tête et du cou rougeätres; les plumes du dessus du corps sont brunes, bordées de rougeûtre; la gorge, d’un blanc roussàtre , est marquée par des taches noires qui augmentent de longueur en se rapprochant de la poitrine, laquelle est brune, rayée de rougâtre; les flancs sont d’un cendré obscur; le ventre est blanc , ainsi que l'intérieur des cuisses. « L'aile est composée de vingt-huit pennes, la queue de douze; elles sont noires ; le bec est brun, agréable- , ment mêlé de jaune; l’espace nu autour de l'œil est d’un jaune verdàtre; la partie nue des jambes est d’un jaune citron , le dessus des pieds est noirâtre, et le dessous est jaune. Le mâle ne diffère de sa femelle que par une petite huppe rougeàtre ?, h° LE HÉRON POURPRÉ. Ardea purpurea. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le héron pourpré huppé. Bris. Ornith. t. 5, p. 420. Quoique plus rare en France que le précédent , le héron pourpré y paroît néanmoins quelquefois , et il semble qu’il s'échappe alors momentanément de dessus les lacs de D'ORNITHOLOGIE. 129 la Suisse pour venir, en automne, chaque année, passer quelques jours de vacances sur ceux des montagnes des Vosges, ses voisines. Les chasseurs qui nous ont procuré cet oiseau nous. ont aussi assuré qu'ils en avoient rencontré jusqu'a trois, eh même temps sur le lac de Retournemer 1), où ils se. tenoient éloignés l’un de l’autre de maniére à former autour de ce lac un triangle équilatéral, comme si on eût conduit une ligne droite, dont chacun auroit été le point donné. Ce héron, mesuré de l’extrémité du bec à celle de la queue , a deux pieds neuf pouces de longueur, et quatre. pieds onze pouces d'envergure ; son bec a cinq pouces de. long, et la partie nue de ses jambes, au-dessus de l’arti- culation de celle-ci avec les pieds, est de trois pouces, quelques lignes : quand ses ailes sont ployées, elles dé- passent d’un pouce ou deux l’extrémité de sa queue; la. partie nue de ses jambes est d’un gris brun, de même que ses pieds, ses doigts et ses ongles. C’est d'apres l'individu que nous avons possédé plusieurs années dans notre collection, que nous traçons ici son signalement : nous ne parlerons ni de ses mœurs ni de ses habitudes, parce que nous n’avons jamais eu l’occa- sion de les observer 2). SO ST OO SITE TT 1) Retournemer est un des trois lacs intéressans et curieux de Gérardmer , dans les plus hautes montagnes des Vosges: ces lacs sont dignes de remarque, soit à raison de leur vaste étendue et de leur profondeur considérable , soit à cause de la quantité de poissons de différentes espèces qu’ils nourrissent, et parmi lesquels on distingue des truites saumonées , ainsi que des brochets mons- trueux. On y pèche aussi une sorte de perche connue sous le nom d'Aurlin , qui est fort recherchée. 2) Le Aéron pourpré coustruit . dit-on, un nid très-vaste sur T. 2. 9 130 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Les plumes qui recouvrent le sommet de la tête du héron pourpré sont d'un cendré noirûtre ; il a le dessus du cou de la même couleur , mais elle est sensiblement plus claire et variée de petites lignes noirâtres ; des taches de couleur roussàtre sont disséminées sur le devant du cou, ainsi que sur la poitrine, dont le fond est cendré : cette derniére couleur, sans aucun mélange , se répand sur le ventre, les flancs et sur les jambes; elle s’éclaircit insen- siblement par des nuances qui passent au blanc sur les couvertures inférieures de la queue, dont les pennes sont d’un marron pourpré, ainsi que tout le dessus dü corps. à l'exception des pennes des ailes, qui sont d'un brun noirâtre. La mandibule supérieure du bec de cet oiseau est d’une couleur jaunâtre, depuis et y compris sa base jusque vers la moitié de sa longueur, dont le reste est verdâtre; la mandibule inférieure est entièrement jaune. L'iris de ses yeux est d’un jaune aurore. Le héron pourpré a cela de commun avec ses congé- néres, de n’adopter, pour ainsi dire , aucune patrie que durant le temps nécessaire à la propagation de son espèce ; tous les pays lui sont indifférens, pourvu qu'il y trouve les alimens qui lui conviennent; et lorsqu'il a épuisé le bord des eaux qu'il vient de fréquenter, alors il se porte en avant, ou il retourne sur ses pas, suivant qu’il espere y rencontrer l'abondance: on ne doit donc pas être sur- pris de ce que M. Pennant nous assure, qu’on le trouve un arbre le plus élevé de la forêt , avec de petites branches re- couvertes de laine et de plumes. Sa ponte , que nous ayons vue chez un de nos amis, est de quatre ou cinq.œuis alongés et d’un bleu verdätre. D'ORNITHOLOGIE, 131 sur les côtes de la mer Noire, sur celles de la mer Cas- pienne, comme sur les grands lacs de “la Tartarie, sur les rivages de l’Irtisch, ainsi qu’en Suisse, en France et en Italie. Néanmoins, quelques auteurs prétendent qu’il ne s'avance jamais vers le nord au-delà du cinquantième degré de latitude. |: 5° LE HÉRON-GARZETTE-BLANCHE. Ardea candida minor brissoni. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le petit héron blanc. Bris, Ornith. tom. 5, pag. 438. Dessinée sous un moindre module, la garzetle blanche a toutes les proportions, le port et le vêtement de notre héron blanc. ? Cet oiseau, comme tant d’autres, a fait parmi les orni- thologistes un sujet de discussion relatif au rang qu’il de- voit tenir, dans leurs méthodes, parmi les oiseaux de rivages. Brisson l’a rapporté à l’espece de l’aigrette, dont il a fait une variété sous le nom de pelit héron blanc. Aldro- vande, qui le premier l’avoit observé , le sépara de l’ai- grette, d’après des caractères très-nettement exprimés. Enfin , quelques ornithologistes modernes n’ont envisagé la garzette blanche que comme une simple variété du cra- bier blanc à bec rougs. Toutes ces opinions différentes, en laissant toujours pour résultat l'incertitude, loin de hâter les progrès de l’orni- thologie , ne font qu’en retarder la marche , et nous croyons devoir en attribuer la cause au défaut d’obser- vations suivies avec constance : car, si, au lieu de tracer 9 * 132 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dans des cabinets la description des individus qui y sont placés sans action, sans vie, sans mouvement, et qui pour l'ordinaire se déforment et se défigurent, soit par la des- siccation , soit par la main souvent peu habile de l'artiste qui Les a empaillés, on parcouroit au moins les campagnes des pays que l’on habite; si on s’appliquoit à bien observer les mœurs, les habitudes, ainsi que les facies des oiseaux que la nature y a disséminés, bientôt le nuage qui couvre encore quelques parties de l'histoire naturelle, et surtout de l’ornithologie, se dissiperoïit pour faire place à des données certaines. Avantageusement placés sur la ligne que presque tous les oiseaur de la France suivent, chaque année , dans leurs émigrations périodiques, nous avons été assez heu- reux pour trouver les moyens d’observer ces animaux, autant qu’il nous a été possible, pendant un grand nom- bre d'années; et si notre cœur éprouve aujourd’hui des regrets, le plus amer est celui que les circonstances ne nous aient pas permis de stationner quelque temps sur tous les points de la France, afin d’y suivre et d’y étudier scrupuleusentent les oiseaur qui en fréquentent les côtes. Quoi qu'il en soit, nous avons vu ct observé chaque année, sur le grand étang de Biécourt surtout, lorsqu'il existoit avant la révolution, des garzeftes blanches qui y passoient ordinairement une partie de l'automne, d’où elles disparoïssoient pour se diriger Vers le midi. Un na- turaliste instruit 1) nous assura tenir de M. de Saus- sure qu’à cette époque la garzelte blanche séjournoit quel- que temps aussi sur les lacs de la Suisse. D'ailleurs on lit dans l'Encyclopédie méthodique, à l’arücle garzeite 1) M. Æ'acker, suisse, du canton &'Underwa:d. D'ORNITHOLOGIE. 135 ‘blanche, part. ornithol., que Mauduyt a vu un de ces oiseaur qui avoit été tué à Fontainebleau. Un de nos amis de la Côte-d'Or, en nous faisant voir un de ces oiseaux tué dans la ci-devant Bourgogne, nous assura , il y a peu de temps, qu'il n’étoit pas fort rare dans ce département, non plus que dans celui de Seine et Marne ( ci-devant Brie-sur-Hyéres ). La garzette blanche, que nous pourrions nommer le petit héron de France, a vingi-trois pouces de longueur de l’extrémité du bec à celle de la queue; son bec, la peau nue qui en recouvre la base, celle de la partie nue de ses jambes, ainsi que ses pieds , ses doigts, ses ongles et Viris de ses yeux, sont d’un noir qui paroît d'autant plus pro- fond, qu'il contraste davantage avec le plumage de son corps, tant en dessus qu’en dessous, qui est du blanc le plus éclatant : toutes ces parties sont absolument conformées comme dans le grand héron blanc, dont celui-ci différe par des mœurs plus gaies en quelque sorte, ou du moins plus sociales ; car il est rare d’en rencontrer un qui ne vive de compagnie avec quelque autre de son espèce. . G! L'AIGRETTE. Ardea nivea. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. L’'aigrette. BRIS. Orn. toim. 5, pag. 31. ( Vayez la planche XXII de cet ouvrage. ) Si on a donné à cet ciseau le nom d’aigrefte, ce,n’a été, sans doute, qu'a raison de l’usage en panaches que nos belles font de ces plumes lorgues , douces et soyeuses que l’on voit flotter sur le dos de cet animal, pour en crner leur tête et faire remarquer, d’après l’ondu- 134 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE lation qu’elles leur impriment, les agréables mouvemens dont elles-mêmes sont susceptibles. Quoi qu'il en soit, il n’èst pas moins certain que Pai- grette n’est autre chose qu’une espèce de héron qui, quoi- qu'assez rare en France, se trouve cependant quelquefois dans les départemens de la Côte-d'Or et des Vosges. D'après un calcul approximatif d’observations cependant faites avec soin dans ce dernier département , nous estimons que l’aigrette n‘ÿ paroît qu’une fois dans quatre ans 1). Cet oiseau erratique, qui vit au bord des eaux, a dix- neuf pouces de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue, et près de trois pieds de vol. Son plumage est entierement d’un blanc de neige tres-éclatant : om voit, dans quelques individus, sur le sommet de la tête, trois ou quatre plumes longues, flexibles et douces au toucher, qui sont roulées les unes dans les autres et dirigées d'avant en arrière. Nous avons vu plusieurs aigrettes qui avoient 1) Au rapport des voyageurs, les aigrettes sont fort communes aux îles Malouines, comme sur les bords de la mer Caspienne et sur ceux de Ii mer d'Azof, où les Russes, ainsi que les Tar- tares, leur font la guerre à cause de leurs plumes, dont ces peuples forment de magnifiques panaches. M. Bruce, dans son Voyage en Nubie, dit que l’aigrelte est fort commune eu Egypte et en Syrie, où on la nomme Vackés. fl assure en avoir vu beiu- coup le long des cataractes du Nil. Le P. Tachard, dans son Voyage à Siam , fait mention de cet orseau, comme vivant en grand nombre sur les arbres de cette île ; il dit que la blancheur de leur plumage , mêlé dans le vert des arbres, sembloit en être la fleur. Les rencontres que lon fait de cet oiseau en différens climats , èt où il est partout le même , prouve que les fissipèdes de rivage sont absolument erratiques, et qu’ils n’ont d’autre patrie que celle qui leur fournit pour le moment le nourriture dont ils ont besoin, D’ORNITHOLOGIE. 135 cette même partie de la tête recouverte de plumes sem- blables à celles qui revêtent le corps. Dans les unes comme dans les autres il part de chaque épaule des plumes fines, déliées, qui se prolongent de ce point sur le dos et jusqu’au-delà de la longueur de la queue; de la tige de ces plumes souples, légères et élas- tiques, partent , par paires, et à peu de distance l’un de Vautre, des filets très-fins, longs de deux ou trois pouces, aussi doux que de la soie, et qui, vers les deux tiers de leur longueur, se subdivisent en d’autres filets qui ‘eux-mêmes sont plus courts et plus déliés encore. Entre l'œil et le bec de ce joli héron on remarque un espace dégarni de plumes et qui est recouvert d’une peau d’un beau vert; l'iris de ses yeux est d’un jaune päle; son bec noir; la partie de ses jambes qui est sans plumes, est d’un noir verdâtre, de même que les pieds et les doigts, qui sont garnis d’ongles noirs 1). 2 —— 2 ———— ——————————]———————————————————" ———— — — "À? 1) D’autres voyageurs prétendent que, parmi le grand nombre d’aigrettes que l’on remarque surtout dans la partie basse de VÉgypte , toutes n’ont pas les pieds de mème couleur; que les unes les ont noirs, d’autres , verdâtres; et enfin que quelques-unes les ont jaunes. Nous pensons que cette variation de couleurs dans les pieds de cet oiseau pourroit bien n’êtro que le produit de l’âge ou du sexe. On dit que les Français résidant en Egypte LEE à cet ozseau l’épithète de garde-bœuf, parce qu’en effet il paroïît rechercher avidement la compagnie de ces animaux, comme les bergeron- netles recherchent dans nos climats celle des moutons, et qu’il st si familier avec ce ruminant , quil: n’est pas fort rare de le voir se poser sur son dos. 336 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 7. LE BLONGIOS. Ardea minuta. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Lé blongios de Suisse. Bris. Ornith. tom. 5, p. 497. ( Voyez la planche XXII de cet ouvrage.) Cét oiseau, la plus petite espèce du genre des hérons, n’est guere plus gros qu'un rale; sa longueur, du bout du béc a éélui de la queue, qui est très-courte , est de ‘tréize pouces neuf lignes, et son vol est d’un pied sept ‘pouces. Tout le dessus de sa tête, ainsi que celui de son dos, “fés pennes de ses ailes et celles de sa queue, sont noirs, avec des refléts vérdâtres plus ou moins éclatans, suivant -l’incidence de la lumiére ; son cou, son ventre et le des- sus de ses ailes sont d’un roux lavé d’une teinte marron, mêlée de blanc et de jaunàtre. L’iris de ses yeux est de couleur -citrine ; son bec, dont la base n’est point aussi dégarnie de plumes que dans les espèces précédentes, est vVérdâtre, ainsi que les pieds ét les doigts, qui sont armés d’ongles bruns. | Ilse trouve quelques individus dans cette espèce, dont ‘les couleurs sont moins vives, moins foncées et chez les- “quels les plumes du dos sont frangées de roussâtre ; mais nous pensons qu’on ne doit attribuer cette différence qu'a l’âge ou bien au sexe. Cette espèce de héron est trés-commune sur les petits étangs des hautes Vosges, où elle se tient volontiers, cou- verte par les grands herbages qui environnent leurs bords. Nous croyons qu'ils nous arrivent des lacs de la Suisse, D'ORNITHOLOGIE. 137 dont nous ne sommes pas fort éloignés 1). Nous ignorons si cet oiseau se trouve dans quelque autre contrée de l’in- térieur de la France; nous savons seulement qu'on ne le voit à Paris que dans les galeries du Muséum, ou bien dans les cabinets de quelques curieux : aussi nous sommes- nous crus heureux d’avoir eu l’occasion d’en offrir quel- ques-uns à des ornithologistes distingués, auxquels nous n'avons demandé en retour que leur estime, dont nous se- rons toujours très-jaloux. S° LE CRABIER-GENTIL. Ardea erythropus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le crabier roux. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 468. ( Voyez la planche XXII de cet ouvrage. ) C’est absolument d’après le témoignage de M. de la Peyrouse, qui est bien digne de notre estime et de notre confiance, que nous plaçonsici, comme un oiseau parois- sant quelquefois dans les contrées méridionales de la France, le crabier dont il est question dans cet article. Aldrovande, et M. de Buffon lui-même, ont fait de cet oiseau trois espèces, qu'ils ont signalées sous le nom de crabier marron, crabier roux, et sous celui de guacco. M. de la Peyrouse, ayant réduit ces trois espèces en une 1) Ce petit kéron paroît être l’espèce de ce genre d'oiseaux dont les migrations sont les plus lointaines : on prétend que non- seulement on l’a rencontré plusieurs fois en Égypte, mais qu'il paroît encore que la race s’en répand depuis les climats brü- lans de la Syrie et de V’Arsbie jusqu'aux régions glacées de la Sibérie. 1358 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE seule , sous le nom de crabier gentil, notre respect particulier pour les lumieéres de ee grand maître nous a portés à en adopter l'opinion : aussi, pour lui donner un témoignage public de notre estime , nous nous garde- rons bien de rien changer à la description que ce savant distingué a faite de cet oiseau, et qu’il a consignée dans la partie ornithologique du Dictionnaire Encyclopédique, par ordre de matières. « Ce erabier, dit-il, a dix-neuf pouces de long du bout « du bec à celui de la queue ; son envergure est de deux « pieds quatre pouces ; le bec a trois pouces six lignes: « le dessus de la tête est varié de noir et de jaune ; il est « Orné d’une sorte de panache flottant sur le dos, com- « posée d’environ dix plumes étroites d’un blanc sale, li- « serées de noir : le cou, la poitrine et les couvertures su- « périeures des ailes sont d’un jaune pâle ; le dos en entier :« est d’un marron ciair , tout le reste est d’un blanc de « neige : le bec, depuis sa naissance jusque vers sa moi- « tié, est d'un bleu d'azur trés-vif, qui ne paroït plus « sur oiseau lorsqu'il est mort; il est noir vers sa pointe, « quiest trés-acérée; les jambes et les pieds sont couleur CA] de chair; les articulations et les plis ont une teinte « Jaune.: « Le crabier-gentil ne paroît point avoir une affection « marquée pour certains climats i); on le trouve en 1) Quelques préteadus observateurs de la nature, tels qu’il s’en trouve beaucoup dans certaines communes des Vosges,. ont cru y avoir rencontré le crabter-gentil ; mais ce n’étoit qu’uae variété du blon;rios ; et nous sommes presque certains, d'après les renseignemens que ncus avons puisés près des plus anciens chussenrs de ce département, que jamais on ny voit ce petit héron, D'ORNITHOLOGIE. 139 Europe sur les montagnes et dans les plaines, sur « le bord des eaux douces, salées, vives et dormantes, « dans les pays froids et dans les pays chauds. La faim, « la frayeur lui font pousser un cri rauque et fort. [tient « habituellement sa tête enfoncée entre les épaules, et « Cette attitude lui donne un air stupide et maussade. Mais « qu'il soit tourmenté par la crainte ou pressé par quel- « que besoin , il déploie son long cou; il agite et fait « flotter avec gràce ce long et beau panache dont il est « décoré : on ne le reconnoît plus, tant il a l'allure fière « et le port noble. Ce crabier est inquiet, hardi et cou- « rageux ; il attaque son ennemi avec impétuosité, et le « frappe avec force : il fait de profondes blessures avec « son bec, qui est aussi perçant qu'une alêne. ? Si nous nous en rapportons à l’art, l'iris des yeux de cet oiseau, que nous n'avons jamais vu qu'aux galeries du Muséum national de Paris, est de couleur jaunûtre; mais ‘il auroit pu se faire que, manquant d’yeux d’émail par- faitement semblables à ceux de l'individu vivant, au mo- ment qu’on le travailloit, on lui eñ eût substitué de disparates : c'est pourquoi nous ne garantissons pas cette couleur 1}. : A LR JUL 2 Chinon D08 : LD Con Lo 1) On nous saura gré , sans doute, de puiser dans les orni- thologistes les plus dignes de confiance , plutôt que de les passer sous silence , les descriptions de quelques oiseaux de rivage, et surtout celles de certains palmipèdes, qui ne fréquentent que nos côtes maritimes, et que pour ætte raison nous n’a- qons pas été à portée d'observer nous-mémes, 140 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE O.” LE BUTOR ORDINAIRE. Ardea stellaris. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le butcr. BR:s. Ornith. tom. 5, pag. 444. ( Voyez la plenche XXII de cet ouvrage. ) Le butor et le héron ont entre eux des différences si marquées, que, sans la forme du bec de celui-ci, que nous avons pris pour type principal dans la classification des oiseaux, et qui est absolument conformé de même que celui du héron, nous aurions été tentés de placer ces deux oiseaux dans des familles différentes ; mais, outre que les ornithologistes qui méritent le plus toute notre estime etnotre confiance, n’en font qu’: n seul et même genre, la conformité d’ailleurs des habitudes de l’un et de l’autre nous a encore déterminés à ne pas les séparer. Le butor a deux pieds cinq pouces de longueur de l'ex- trémité du bec à celle de la queue; son vol ou son en- vergure est de troïs pieds dix pouces; et, lorsque ses aïles sont ployées, elles s'étendent jusqu’au bout de‘la queue, qui est très-courte, comme dans tous les oiseaux de rivages ; ses jambes sont proportionnément plus courtes que celles du héron; son corps est aussi plus ramassé, plus charnu -et plus fourni. Les plumes du devant et des côtés de son cou sont plus longues et plus larges. D'ailleurs un trait particulier qui caractérise les butors en général, consiste en ce que la partie supérieure de leur cou, depuis l’occiput jusqu'aux épaules, est dégarnie de plumes : là, elle n’est revêtie que d’une espèce de duvet d’une couleur ordinairement plus foncée que le piumage de Poiseau, en sorte qu’il semble avoir été plumé tout le long de cette partie. e D'ORNITHOLOGIE. en Les plumes qui recouvrent le sommet de la tête du butor sont d’un brun marron foncé, à reflets verts et vio- lets ; elles sont longues, larges, et retombent en flottant sur la nuque du cou, où commence le duvet dont cette: partie est revêtue : ces mêmes plumes sont susceptibles d’être relevées à la volonté de l'animal, qui peut s’en former une espèce de huppe qui, vue au soleil, est fort éclatante. C'est surtout lorsqu'il est agité par quelque: mpoihdet de colère qu'il relève davantage cette huppe. Les côtés de la tête sont couverts de plumes de couleur roussâtre. De l’origine de la mandibule inférieure du bec de cet. oiseau, il part une bande longitudinale brune qui s’étend: jusqu’à sa gorge : le fond de son plumage sur la partie supérieure du corps est d’un brun fauve, traversé par des lignes noirâtres ; d’autres lignes longitudinales rousses couvrent le fond blanchätre de la partie supérieure du devant du cou, ainsi que le fond de couleur fauve de sa partie inférieure. La poitrine et le ventre Sont d’un fauve clair, semé de taches longitudinales noirâtres ; les. côtés, coloriés de même, sont rayés transversalement. Les pennes des ailes sont roussâtres, rayées en zigzags par des bandes transversales noirâtres et terminées de noir. Des douze pennes qui composent la queue, les deux du milieu sont noirâtres, bordées de couleur roussâtre, et les latérales sont d’un fauve clair, varié irrégulièrement de tache iratres. L'iris des yeux est jaunâtre dans quelques individus, et rougeâtre dans d’autres. Le bec, de même forme que celui du héron, est tellement fendu au-dela dés yeux, qu’on diroit que e:s orzanes de la vue sont situés sur la mandibuie supérieure rHle-même . c:tte mandibule est brune, et l’inférieure est ‘un brun ver- dâtre. Les pieds sont d’un vert jaunàtre, de même que # 142 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE la partie nue de la jambe; et les ongles, qui sont exces- sivement longs, sont bruns. | Outre que les mäles sont plus gros que les femelles, celles-ci ont encore les couleurs du plumage moins fon- cées, et les plumes du cou, de même que celles de la poitrine, plus courtes. Le butor est un oiseau sauvage, défiant et très-fa- rouche; il est en même temps patient, courageux et pré- voyant; il habité les marais et le bord de presque tous les étangs de la France, sur lesquels il ne cherche pas, mais il guette patiemment sa proie, qui consiste en rep- tiles, grenouilles et poissons, dont il fait une grande des- truction : la, il use de toutes sortes de précautions pour se rendre inabordable et pour ainsi dire invisible, en se tenant dans des touffes de roseaux, au-dessus desquels il tient sa tête élevée, afin de découvrir dé toute part son ennemi sans en être aperçu. Si d'un côté il est difficile d'atteindre cet oiseau, de l'autre auSsi, lorsqu'on y est parvenu et qu’on l’a blessé, alors il développe son courage ; il attend de pied ferme le chasseur ou le chien, et il les frappe à coups de bec si violens , que souvent ils pénétrent à travers les vêtemens du premier, mettent en fuite le second, et il fait à l’un et à l’autre des plaies souvent très-profondes. Quel- quefois il se renverse sur le dos, et dans cette attitude il se défend des ongles autant que du bec; on prétend même qu'un instinct secret l’avertit de viser out aux yeux de son ennemi, et on conçoit combien ses coups peuvent être dangereux sous ce rapport. - Le butor a deux sons de voix : l’un, dont il fait usage toute l’année, et qu'il répète en volant, consiste dans les deux monosyllabes cob, cob; l’autre est un son plus fort et beaucoup plus retentissant, qui tient du mugissement D'ORNITHOLOGIE. 143 du taureau, que l’on entend quelquefois à une demi-licue de distance. Ce cri a quelque chose d’effrayant, surtout lorsqu'on l'entend dans les ténèbres. de la nuit. Ce n’est tependant que l'expression de son amour, à laquelle l'ignorance populaire à souvent appliqué des contes ri- dicules , ainsi que des fables d’une absurdité révoltante 1}. 1) En 1776 l'hiver fut si rigoureux que toutes les rivières et tous les étangs furent gelés à une profondeur considérable. Un des étangs des Vosges le fut au point que les paysans d’un vil- lage qui est situé de lautre côté, pour abréger de beaucoup leur chemin , le passoiént non-seulement à pied, mais qu’ils ne balancoiïient pas, dit-on, de le traverser avec des voitures char- gées de sacs de blé. À cette époque, un jeune homme, fils unique d’un des plus riches cultivateurs de cette commune, s’étant livré, dans le village voisin et diamétralement opposé au sien , aux plai- sirs du carnaval , revint seul du côt& de la maison paternelle, dans la nuit un peu avancée, en abrégeant son chemin par la route glacée qu’il avoit prise pendant le jour : mais, dévoyant sans doute de la ligne directe, il passa probablement sur une source dont les eaux étoient peu congelées, s’y enfonça, et disparut. Ce fut en vain qu’on le chercha de toutes parts ,.-et qu’on essaya de découvrir ses traces sur la neige dont la terre ainsi que lé- tang étoient couverts: une neige nouvelle, abondamment tombée durant toute la nuit sur l’ancienne, les eut bientôt effacées. Les recherches de ses parens furent donc superflues jusqu’au mois de mars , époque à laquelle, après la fonte des glaces, on retrouva près de la bonde de cet étang le cadavre de ce malheureux , que sa famille reconnut et fit inhumer. > À la fin d'avril ou au commencement de mai de la même année, un butor mâle s’abattit sur cet étang , et s’avisa d’y chanter gros- sièrement ses amours : bientôt il fut entendu et remarqué dans tout le voisinage ; et, plutôtencore, l'ignorance populaire du canton ne balença pas de convertir en chants lugubres et plaintifs de Vautre monde les accens amoureux , quoique grossiers, de cet p.seau. Tous les oracles campagnards furent consultés aussitôt ; La 144 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Les butors mâle et femelle font de concert leur nid sur une touffe de joncs au milieu des roseaux ; ils em- ploient à sa construction des herbages secs seulement. Quelques personnes prétendent qu'ils en garnissent l’in-* térieur de crins, de laine et même de plumes : nous avons vu plusieurs de ces nids, et toujours ils n’étoient com- posés extérieurement que de roseaux secs avec des her- bages desséchés, et l'intérieur ne contenoit que ces der- niers. La femelle pond dans ce nid quatre ou cinq œufs qui sont d’un gris verdâtre. La chair de cet oiseau, lorsqu'on a eu soin de la dé- pouiller de sa peau, a la réputation de tenir un des pre- miers rangs parmi les mets déicats. D —————————————— —— on mit de tous côtés leurs lumières à contribution; et, d’une voix unanime , il fut conclu qüe ces cris étoient l'expression dou- loureuse de lame du défunt noyé, qui réclamoit pour sa félicité dans l’autre monde les prières et la piété des vivans. A l'instant mème , les autels, accaparés de toutes parts, sufñfi- rent à peine pour les sacrifices expiatoires , dont le salaire fut géné- reusement acquitté. On se doute bien que la renommée aux cent bouches , répandant au loin ce prodige effrayant , le travestit de miile chimériques manières : partout il glaça d’effroi tous les cœurs ; et il ne se trouva aucuu mortel des environs qui osät doré- navant approckier de ce lieu formidable, Un chasseur allemand, moins crédule que ne l’est ordinai- rement le peypie de sa nation, instruit du prodige, en devina bientôt la cause; il partit, résolu d'exorciser d’un coup de fusil le revenant ; il ne quitta ces lieux tant vantés qu'après en avoir rapporté le cadavre de l'oiseau qui les avoit rendus fameux daus l’histoire du pays , et il nous en fit hommage pour notre cabinet. D'ORNITHOLOGIE. 1 En PL 10° LE BUTOR ROUX. Ardea soloniensis. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le butor roux. Bris: Ornith. tom. 5, pag. 458, Ce bulor, de petite taille, est un peu plus gros qu’un rale : il n’est pas fort commun ; il se rencontre néanmoins encore assez souvent sur la plupart de nos étangs des Vosges, ainsi que sur ceux des départemens des haut et bas Rhin 1). Le sommet de la tête de cet oiseau est noir, et tout le reste de cette partie, de même que la gorge et le cou, est roussàtre, ou, pour mieux dire, de couleur de rouille ; son dos, ainsi que ses plumes scapulaires et les couvertures du dessus de sa queue , est noirûtre ; son croupion est blanc ; le dessous de son corps est roussätre, et sa queue est noirâtre; il a l’iris jaune, la mandibuie supérieure du bec d’un brun noir, et l’inférieure de coù- leur de corne; ses pieds, de même que la partie nue dé ses jambes, et ses ongles, sont bruns. 11. LE BIHOREAU, pe | Ardea nycticorax. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. Le bihoreau. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 226, ( Voyez la planche XXI de cet ouvrage. ) La plupart des ornithologistes ont désigné le bihoreaw sous le nom de corbeau de nuit, à raison , sans doute, 1) On lit dans les Œuvres de M. de Buffon, ainsi que dans T 2 10 146 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de l'espèce de croassement qu’il fait entendre lorsque le jour abandonne l'horizon; ce cri rauque, et qui est trés- fort, a quelque rapport avec le bruit que produisent les efforts d’un homme qui vomit. Cet oiseau est un héron de moyenne taille, dont la tête et lé cou sont proportionnément plus gros que dans toutes les espèces de hérons dont nous venons de parler ; ses jambés sont aussi moins longues, et son corps est plus épais et plus fourni que le leur. Le bihoreau a un pied huit pouces de longueur de lex- irémité du bec à celle de la queue, et trois pieds deux pouces de vol ; lorsque ses ailes sont ployées, elles s'éten- dent jusqu’au bout de sa queue. Tout le dessus de sa tête est couvert de plumes noires à beaux reflets verts; de la base des mandibules de son bec, il part une bande courte et étroite de couleur blanche, qui s'étend de chaque côté sur les joues, jusqu’à l'œil ; le beau noir dont sa tête est parée se prolonge en pointe sur le haut de son cou, dont la partie supérieure, ainsi que les côtés, sont d’un blanc cendré; un beau vert de canard, ou plutôt un noir à reflets verts est répandu, sur le haut de son dos et sur ses plumes scapulaires ; tout le reste de la partie supérieure de son corps est d’un cendré clair ; sa gorge, le devant de son cou et le dessous deson corps sont entièrement d’un blanc pur, aux côtés près, qui sont cen- drés, ainsi que les couvertures des ailes, dont le pli est blanc; les pennes de ces parties et celles de la queue l'Encyclopédie méthodique , à l'article butor, que cette.espèce qui passe pour être indigène des environs de Bologne, est. pro- bablement la même qui, suivant la conjecture de M. Salerne , se voit quelquefois en Sologne , où on le connoïît sous le nom vul- saire de quoimeau. D'ORNITHOLOGIE. 147 sont également cendrées ; l'iris est d’un jaune orangé; le bec , d’un vert jaunâtre à sa base, est noiràtre dans le reste de sa longueur ; la partie nue des jambes, de même que les pieds, sont d’un vert jaunâtre , et les ongles d'un brun foncé. Cet oiseau, qui est bien moins haut monté que toutes les autres espèces de herons, et qui a le cou beaucoup plus court que le leur, se distingue particulièrement par trois plumes étroites , longues d’environ cinq pouces, ter- minées par une pointe fort aiguë, d'un très-beau blanc, à barbes égales en longueur des deux côtés; elles sont inclinées et un peu recourbées du côté de la partie inté- rieure du tuyau : ces plumes, qui partent de l’occiput , lui formentune huppe élégante ; elles paroïssentcomme roulées etenfermées les unes dans les autres, de telle sorte que cette huppe ne semble être composée que d’une seule plume, à moins que l'oiseau ne les écarte, ce qui dépend de sa volonté, Le bihoreau se tient soigneusement caché pendant le jour, et ce n’est guére qu’a‘la nuit tombante qu’il se met en mouvement pour voyager ; il fréquente également les bords de la mer comme ceux des eaux douces. Cet oiseau erratique cherche sa nourriture autant sur la terre que le long des eaux ; il vit indifféremment de sau- terelles et de grillons, de limaces et de scarabés, de gre- nouilles et de poissons. La femelle différe du mâle, en ce que non seulement elle n’a pas, comme lui, de huppe sur la tête, mais en- core en ce que son plumage est entièrement gris. Sans être très-commun dans le département des Vosges, de même que dans la plupart des départemens de l'intérieur de la France, le bihoreau y paroit néanmoins chaque année ; car des chasseurs complaisans nous en ont procuré plu 10 * 148 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE sieurs pour notre cabinet, qu'ils avoient tués sur les bords de la Moselle, dans les environs d’Epinal. Il paroît que cet oiseau se plaît davantage sur les côtes de la ci-deyant Bretagne, où il vit, dit-on, dans Les rochers 1). DEUXIEME TRIB U. Nousavonsrenfermé dans cette seconde tribu les oiseaux du genre des Zérons , dont le bec est gros, long, pointu, droit et lisse : ils ont tous l'oeil plus éloigné que le leur de la base du bec; ce qui leur donne un air moins stupide qu’à ceux de la tribu précédente. | Celui du milieu de leurs trois doigts anté- rieurs est joint aux deux de chaque côté par une membrane qui s'étend au moins jusqu’à la première articulation , et l’ongle de leur doigt est sans dentelures. Cette tribu contient trois espèces, dont deux sont périodiquement de passage et même quel- que temps sédentaires , chaque annee, dans cer- tains départemens, tandis qu'elles ne parois- 1) Le bihoreau niche en effet dans les rochers ; sa ponte est de trois ou quatre œufs tirant sur le verdâtre ; son nid a Ja même forme que celui du héron pourpré. Cette espèce, qui est de passage, s’est rencontrée, suivant quelques voyageurs, en Amé- rique, près de New-Yorck, ainsi que dans diverses contrées de l'Asie, dans les déserts des monts Urals, près de la mer Cas- pienne, comme en Chine et en Syrie; mais on.a observé qu’elle ne se trouvoit pas dans les régions septentrionales. D'ORNITHOLOGIE. 149 sent dans d’autres que très-rapidement pour les traverser. Ces trois espèces sont la cizogne blanche , la cigogne noire, et le maguari : ce dernier ne paroit que très-rarement en France, et ce n’est sans doute encore que lorsqu'il s'y est égaré. F LA CIGOGNE BLANCHE. Ardea ciconia. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. * La cigogne blanche. Bris. Ornith. tom..5 , pag. 565. ( Voyez la planche XXIII de cet ouvrage.) Cette espèce de cigogne a de longueur, du bout du bec à l'extrémité de la queue , trois pieds et demi; son bec est long de sept pouces dix lignes, et la partie nue de ses jambes présente un espace de cinq pouces; ses pieds, qui sont fort élevés, sont revêtus d’écailkes hexa- gones, d'autant plus étroites qu’elles se rapprochent plus des doigts, dont l'intérieur est uni à celui du milieu, jusqu’à la premiere articulation , par un rudiment de membrane qui s'étend davantage sur le doigt extérieur. La queue de cet oiseau n’a guères que huit pouces de long ; lorsque ses ailes sont étendues, elles ont six pieds quel- ques pouces d’euvergure, et quand elles sont ployées elles ne dépassent pas la queue. Tout le, plumage de cette cigogne est d’un très-beau blanc, excepté les plumes scapulaires et les grandes cou- vertures des ailes, qui sont noires , et dont quelques- unes sont à reflets violets ; les pennes de l'aile , qui sont au nombre de trente-deux, sont aussi noires , et quand :50 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE l'aile est ployée, celles de ces pennes qui sont les plus voisines du corps sont aussi longues que celles qui en sont les plus éloignées. Le tour des yeux de cet oiseau est dé- pourvu de plumes, et a leur place il est entouré d’une peau noire; l'iris est rougeûtre; le bec, la partie nue des jambes, les pieds, ainsi que les ongles, qui sont larges, plats et mousses, sont d’un rouge assez vif; les plumes de la partie inférieure du cou sont longues, étroites, et flottent par devant sur la gorge. La cigogne est un oiseau de passage qui traverse , chaque année, a la fin de mars ou au commencement d'avril, tout le département des Vosges, pour se rendre dans ceux des haut et bas-Rhin; quelques couples jadis s’ar- rêtoient dans certaines communes du département des Vosges, où ils nichoient sur le faite de quelques tours de vieux châteaux des long -temps abandonnés : mais depuis, et surtout durant la révoiution, la liberté illimitée du port d'armes les ayant rendues les victimes de cet événement à jamais ineffaçable du souvenir des Français, les cigognes ont absolument quitté ces contrées, où elles ne s'arrêtent plus yuères que le temps nécessaire pour y prendre, à la hâte, leur nourriture. Arrivées dans la ci-devant Alsace, les cigognes blanches y établissent leurs nids au haut des tours, des clochers, et même des cheminées , dans des endroits qu’on leur a préparés expres ; le même couple revient chaque année au même lieu, et s’il trouve son nid détruit, il le reconstruit de nouveau, tôujours à la même place, avec des brins de bois et des herbages secs, entassés confusément et avec pro- fusion : la femelle y pond deux ou trois œufs, un peu moins gros que ceux de l'oie, et qui sont d’un blanc jauntre; le mâle et la femelle les couvent alternativement, etla durée de lincubation est ordinairement d'un mois. D'ORNITHOLOGIE. 151 Rien ne paroissoit plus étonnant autrefois, aux étrangers surtout, que de voir, à Strasbourg, les cigognes traverser des rues entières et à la hauteur des maïsons, tenant sou- vent dans leur long bec un poisson ou un serpent qui pendoit de chaque côté, et qu’elles portoient à leurs petits ; elles étoient alors aussi familières ets’effarouchoient aussi peu que les moineauxr que nous voyons dans nos rues. Lorsqu’a l'arrière -saison les premiers froids forcent ces oiseaux de disparoître des contrées où ils ont passé Vété 1), ils repassent de nouveau dans les Vosges, où ils ne font qu’un séjour fort court; ils s’y abattent alors dans les prairies humides pour y chercher leur nourri- ture , et le soir ils se retirent sur les chênes les plus élevés de la lisière des bois : c’est à ce moment que les chasseurs, qui en ont épié la marche, vont les surprendre; ils pré- tendent qu'ils peuvent en tuer plusieurs de suite sur le le même arbre, avant que la bande ne s’en éloigne 2). 1) Les cigognes, qui abandonnent la France pour se transporter dans des contrées lointaines plus tempérées et quelquefois brü- lantes, y passent tout le temps de notre saison rigoureuse : là, elles jouissent d’une tranquillité parfaite, attendu qu’elles sont des oiseaux sacrés chez diflérens peuples , et surtout chez les Orien- taux. On se tromperoit cependant si on considéroit la vénération que l’on porte à cet animal comme un acte purement superstitieux ; car il est au contraire le fruit d’un intérèt politique , puisque les c:gognes sont pour ces pays d’une uulité réelle , à raison de la guerre à mort qu’elles font aux serpens, aux crapauds, aux lézards et à une infinité d’autres reptiles qui abondent dans ces contrées, qui, sans leur secours , en seroient bientôt infes- tées : c’est sans doute par ce motif qu'il étoit autrefois défendu en Alsace, sous des peines graves, de tuer un de ces oiseaux. 2) On ne doit pas considérer l’émigration annuelle et périe- 182 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Au moment du départ, toutes les cigognes d’un pays s’assemblent et se recherchent ; elles attendent alors ; pour l'entreprise de leur voyage, qu'il s'élève un vent du nord; elles prennent leur essor, et dans un clin d’œil elles se perdent dans les nues pour se diriger vers des pays plus méridionaux et même jusqu’en Afrique. Dans leur vol tres-élevé et long-temps soutenu, les cigognes portent toujours la tête en avant et les jambes étendues en arrière, afin de faire contre-poids avec les parties antérieures de leur corps, qui sont trés-alongées ; il n’en est pas de même lorsqu'elles marchent, car elles portent au contraire leurs jambes trèés-en avant 2). DB = à LE CREED RDA I ERREUR D CRE dique des cigogres vers des pays plus chauds comme de nécessité absolue , puisqu’en leur fournissant dans les pays froids, et même durant les rigueurs de lhiver , les alimens dont elles ont besoin, elles y subsistent sans en paroïître incommodées. On a Îa preuve de ce fait, non-seulement dans celles qui vivent et qui ont vécu au Jardin des Plantes de Paris, mais aussi chez plusieurs particu- liers qui dans les départemens en nourrissent par pure curio- sité; mais on conçoit que ces oiseaux en liberté, ne se nour- rissant que d'insectes et de reptiles, seroient réduits à mourir de faim chez nous lorsque la terre, couverte de neige, cette proie dérobe à leurs recherches. 1) Lorsque les cigognes traversent un pays, c’est presque tou- jours dans les nuages , et il seroit impossible de s’en douter, si on ne les apercevoit pas quelquefois ; car, bien différentes des grues et des oies sauvages, qui crient beaucoup en voyageant dans les airs, celles - ci gardent le plus profond silence dans toute leur route. D'ORNITHOLOGIE. 153 2° LA CIGOGNE NOIRE. Ardea ciconta nigra. LAN. Syst. nat. édit. 10, g. 84. La cigogne brune. BRIS. Ornith. tom. 5, pag. 362. Beaucoup moins commune dans le département des Vosges que la précédente, la cigogne noire, qui estabondante dans les Alpes, vient cependant, chaque année , à des époques périodiques, nous visiter, quoique toujours en plus petit nombre que la cigogne blanche 1). Cet oiseau , que l'on devroit nommer plutôt cigogne brune que cigogne noire, a, du bout du bec a celui de la queue, deux pieds neuf pouces et demi, et cinq pieds et demi d'envergure; lorsque ses aïles sont ployées, elles s’étendent aux deux tiers de la longueur de sa queue. La partie supérieure de sa tête est brune, avec des reflets verdâtres et dorés; sa gorge et son cou sont couverts de plumes brunes qui, dans quelques individus, sontterminées par une petite tache blanchâtre : outre que cette tache n’est point constante dans tous, c’est que, lorsqu'elle se rencontre dans quelques - uns, elle affecte des formes différentes. Tout le dessus du corps de cette cigogne est brun, du même brun que la partie supérieure de sa tête, et il est 1) Lorsque la cigogne noire traverse ,au moment de sa double émigration annuellement périodique , le département des Vosges, elle ne s’y arrête jamais que le temps nécessaire pour y prendre un peu de nourriture ; puis elle continue sa route au printemps vers le nord, et en automne vers le midi : elle s'élève alors à une telle hauteur dans les nues, qu’elle échappe aux yeux les plus clair yoyans. 154 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE enrichi des mêmes reflets; ces reflets manquent aux couvér- türes du dessus de la queue, qui nesont que d’un brun mat. Des trente-deux pennes brunes qui forment son aile, les vingt qui sont plus voisines du corps brillent de reflets verts et violets; sur celles-ci c’est le violet qui domine le vert, tandis que , sur les dix pennes les plus extérieures, c’est au contraire le vert qui l’emporte sur le violet. La queue, qui est en pointe décroissant du centre sur les côtés, est aussi de couleur brune a reflets verdâtres. Tout le dessous du cerps de cet oiseau est d’un blane pur et sans aucune apparence de tache quelconque; le bec est d'un gris verdäire à sa base et blanchâtre dans tout le reste de sa longueur; FPiris des yeux, qui sont entourés d’une peau nue, d'un rouge tres-vif, est lui-même rougeäûtre ; dans certains individus la partie des jambes qui est dé- garnie de plumes, est d’un rouge obscur, ainsi que les pieds et les ongles, et dans d’autres ces mêmes parties sont d’un rouge verdàtre ; niais dans tous les ongles sont larges, plats et obtus. La cigogne noire, loin d’être un oiseau social, comme la blanche , qui semble rechercher la compagnie des hommes , au milieu desquels elle se plait à vivre, au sein même des cités les plus tumultueuses , paroît au contraire fuir le voisinage de nos habitations pour se concentrer sur des marais écartés dans les forêts les plus solitaires.” C'est ordinairement sur les sapins les plus élevés des. Alpes 1} que la cigogne noire établit son nid; elle choisit 1) Cette espèce de cigogne est commune, surtout dans les Alpes suisses. Nous l'avons vue souvent, sur le bord des lacs de ces. contrées, s’y tenant immobile plusieurs heures de suite, en atten- dant patiemment quelque proie qui passat à sa portée : ce n’est pas cependant qu’elle vive, comme le Aéron et le butor , aux D'ORNITHOLOGIE. 155 toujours pour cette importante opération l'endroit le plus fourré et le plus sauvage des bois : la femelle pond dans ce réduit, grossièrement fabriqué avec des buchettes et quelques herbes marécageuses desséchées, deux ou trois œufs de même forme et de même couleur, quant au fond, que ceux de la cigogne blanche ; maïs ils sont, de plus que les siens, marqués de taches brunes peu nombreuses. Cet oiseau, triste et solitaire, fréquente aussi les bords des lacs isolés et déserts, où il guette sa proie, qui con- siste dans de petits poissons, des grenouilles et des rep- tiles, et lorsque ceux-ci lui manquent, elle s’accommode très-bien de sauterelles, de scarabés et d’autres insectes, a la poursuite desquels il met un temps assez considérable à travers les grosses touffes d'herbes qui se trouvent au bord des eaux ou bien dans les forêts. DuLE MACÇUARI. Ardea maguari. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. La cigogne d'Amérique. BRis. Ornith. t. 5, p. 369. Quoiqu’originaire des contrées brülantes de l'Amérique, le maguari se montre néanmoins quelquefois, quoiqu’assez rarement, dans les contrées septentrionales de l'Europe dépens de sa patience; car quelquefois nous l’avons observée aussi volant sur les eaux de ces mêmes lacs, dans lesquelles nous l'avons vue se plonger pour y saisir un poisson qu’elle emportoit dans son bec sur les bords, afin de le dépecer lorsqu'il étoit trop gros , ou bien elle l’avaloit en entier lorsque sa taille n’étoit pas dispropor= tonnée avec l'ouverture de son gosier. 156 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE et même en France; car, outre que l’on voit dans le muséum d'histoire naturelle de Nancy, département de la Meurthe , la dépouille mal conservée, et tout aussi mal préparée, d’un de ces oiseaux que l’on tua dans les en- virons de cette commune, c’est que déja plus de huit ans avant que celui-ci n’eût été remarqué dans ce dépar- tement, nous possédions dans notre cabinet deux ma- guaris que des chasseurs amis de la science 1) avoient tués dans une prairie marécageuse, non loin de Mirecourt, dans le département des Vosges. Ces oiseaux, dont nous ignorons absolument les mœurs, que nous ne pouvons que soupçonner d'aprés l’analogie de leur conformation, sont de la taille de la cigogne blanche ; leur bec droit et pointu est long de neuf pouces quelques lignes : du vivant de ces animaux, il étoit ver- dâtre à la base et bleuâtre à la pointe ; mais il est devenu tout brun par l'effet de la dessiccation. Tout le dessus du corps du maguari, depuis la tête jusqu’à la queue inciusivement, est revêtu de plumes d’un blanc éclatant ; elles sont longues et pendent jusqu’au bas du cou, qui, aw lieu de plumes, est garni d'une peau rouge, ainsi que le tour des yeux. Cette peau de la gorge, dans son état de fraîcheur , paroissoit susceptible d’une grande dilatation, et sembloit pouvoir devenir une poche destinée a quelque usage que nous ignorons. Les pennes, ainsi que les grandes couvertures des aïles de cet oiseau, sont d’un brun noir à reflets verts ;, l'iris de ses yeux est d’un blanc argenté, et la partie nue 1) MM. les ci-devant marquis de Beffroy et de Guillermy , à la mémoire desquels notre cœur reconnoiïssant paie volontiers un. tribut public de gratitude , à raison des soins qu'ils se sont donnés pour nous procurer des oiseaux rares, D'ORNITHOLOGIE. 157 de ses jambes , ainsi que ses pieds et ses doigts , sont d’un J ) q P 5 beau rouge; ses ongles, qui sont larges, plats et obtus, à peu près comme ceux de quelques familles de singes, sont d'un rouge brun. TROISIEME TRIB U. La troisième tribu du genre des Zérons ne contient qu’une seule espèce , qui est la grue ordinaire. | La grue est un oiseau de passage qui, quoi- qu'originaire des contrées du nord, s'arrête néanmoins, quoique très-instantanément, dans certains départemens de la France, Ses carac- tères généraux et particuliers consistent dans un bec moins long que celui des 2‘rons : ce bec d’ailleurs est plus droit; 1l est pointu, denté à son extrémité, et lisse dans tout le reste de sa longueur. Une partie de sa tête est dénuée de plumes; les pennes de ses ailes qui sont le plus pres du corps, sont prolongées et recourbées en forme de lame de faux, et elles se relèvent au-dessus du croupion ; tous ses doigts sont séparés les uns des autres, à l'exception d'une petite membrane, qui lie celui du milieu avec lextérieur; et les ongles qui les terminent sont sans dentelures, 158 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE LA GRUE ORDINAIRE. Ardea grus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 84. La grue. BRIS. Ornith. tom. 5, pag. 374. ( Voyez la planche XXIIT de cet ouvrage. ) De tous les oiseaux voyageurs la grue est un des plus grands; sa longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue, est au moins de quatre pieds , et elle est grosse comme un dindon; son vol, qui est un des plus élevés et des plus soutenus, lui fournit le moyen d’entreprendre les voyages les plus lointains. Quoiqu'originaire des pays du nord, elle visite égale- ment les régions tempérées, et s'avance jusque dans celles du midi. On la voit en Suede, en Ecosse, en Podolie, en Volhinie et aux iles Orcades, comme dans l'Inde, l’'Éthio: pie et la haute Égypte ; néanmoins ce n’est jamais à la même époque. Au printemps elle quitte les régions brüû- lantes du midi pour venir habiter celles du nord; et lors- qu’en automne les rigueurs du froid se font sentir, elle quitte et abandonne ce pays pour passer agréablement l'hiver dans les contrées méridionales. C’est à ces deux époques que l’on voit chaque année des grues traverser en bandés quelquefois assez nom- breuses plusieurs de nos départemens intérieurs; il n’est point d'années que l'on n’en rencontre plusieurs, soit au printemps, soit en automne, qui s’abattent sur nos plaines humides du département des Vosges, comme dans nos champs nouvellement ensemencés, où elles trouvent des insectes, ainsi que du grain non encore germé, dont elles se nourrissent également. D'ORNITHOLOGIE. 159 C'est dans ce moment que le hasard les fait rencontrer par quelques chasseurs, qui, en usant même des plus grandes précautions pour les surprendres n’y parviennent encore que très-difficilement ; ear lorsque ces oiseaux se rassemblent dans certains cantons, soït pour y pâturer, soit pour y passer la nuit, ils ont la précaution d’étabbr entre eux une sentinelle, qui veille toujours la tête haute et élevée, tandis que les autres dorment ayant la tête cachée sous l'aile; et, à la moindre apparence de dan- ger , le factionnaire sonne l'alarme, et tous spontanément cherchent aussitôt leur salut dans la fuite. La grue a le port droit et la figure élancée; le devant de sa tête, en dessus, n’est garni que de petites plumes noirâtres , qu’en n’y regardant pas de trés-prés on prendroit pour une sorte de poils ; le sommet de sa tête est couvert d’une peau rougeûtre , semée de quels ques plumes qui ne sont pas assez nombreuses pour empêcher qu’on ne voie cette peau; celles de l’occiput , qui sont d’un brun noiratre, tombent en arriére, et se prolongent en forme de camail pointu sur Le haut du cou : derrière et de chaque côté de l'œil on voit une large bande blanche qui, en traversant les joues, s'étend jusqu'a l’origine du cou. Le bas des joues, de même que la gorge, est d'un gris brun; le haut et les côtés du cou, en avant, sont d’un cendré bruu; le reste de cette par- tie, ainsi que tout le plumage , est d’un cendré clair, excepté cependant les grandes pennes des ailes, qui sont totalement noires. Les moyennes, qui ne sont noires que du côté intérieur, et les plus voisines du corps, que nous avons dit se relever et se recourber en forme de faulx, sont aussi noires. Les pennes de la queue sont brunes, cendrées et terminées de noir. L’iris des yeux estrougeàtre. _ Le bec, dont Les bords sont dentelés vers la pointe, est 160 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE d'un noir verdatre. Le bas des jambes, les pieds, ainsi que les ongles, sont noirs. La grue est un oiseau susceptible de s’apprivoiser aisé: ment, surtout lorsqu'elle est prise jeune : on prétend qu'au Japon on la dresse à toute sorte d’exercices , et qu’on l’apprend même à danser. Sa chair passe dans cer- tains pays pour être un fort bon mets. Il est à présumer que les grues , comme les cigognes , font deux nichées par an : la premiére, qui est en hiver , a lieu lorsque ces oiseaux habitent le midi; et la seconde, en été, lorsqu'ils résident dans le nord. Nous ne savons rien de ce qui est relatif a la ponte de la grue, sinon que la femelle ne fait que deux œufs, qui sont de couleur bleuûtre. SECONDE FAMILLE: Nous n'avons compris dans cette seconde famille qu’un seul oiseau fissipède de rivages, qui, à raison de ses caracières particuliers et distinctifs , forme à lui seul un genre dans cette famille : c’est la sparule blanche. Son bec, long et foible, est aussi large à sa base que sa tête; il est droit, aplati horizon- talement, et son bout se dilate en s’élargissant et en s’arrondissant en un disque qui a la forme d’une spatule : ce qui lui a fait donner le nom qu'il porte. Ses doigts, unis à leur base seu- lement par une portion de membrane, en sont légèrement frangés jusqu’à l'extrémité, D’'ORNITHOLOGIE. 161 Quoique ce genre d'oiseaux semble ne fré- quenter que les marécages de nos côtes mari- times, et qu'il paroisse absolument étranger aux départemens de l’intérieur de la France, cependant on en a vu, on en a même tué plu- sieurs sur quelques-uns des grands étangs des Vosges avant leur desséchement ; car c’est de l'étang de Biécourt, qui existoit jadis entre Mi- recourt et Neufchâteau, que , la première année de la révolution , nous nous sommes pro- curé le seul individu qui existoit dans notre cabinet , et que des paysans, après avoir fait de la soupe d’une première qu’ils avoient tuée et qu'ils trouvèrent détestable , nous vendirent celte seconde, par la seule raison qu'ils n’a- voient pas jugé que Ja première fût un mets digne de leur estomac. GENRE DES SPATULES. LA SPATULE BLANCHE. Platalea leucorodios. Lin. Syst. nat. édit. 13, g. 80. La spatule. Bris. Ornith. tow. 5, pag. 352. ( Voyez la planche XXIV de cet ouvrage.) On ne peut qu'être étonné du peu d’accord qui a régné parmi les ornithologistes anciens sur la classification mé- thodiue de ce genre d'oiseaux, malgré Le caractère tran- h ‘3, 31 162 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE chant que son bec singulier présentoit à leurs regards atten- tifs ; on est également surpris des noms différens qu'ils lui ont appliqués. Les uns l’ont placé parmi Les hérons, et lui ont donné le nom de héron blanc; les autres en ont fait un pélican, etc., quoiqu'il différât également de tous par ses seuls caractères extérieurs : il y en a qui l’ont appelé cuiller, et d’autres qui lui ont donné le nom de palette ; cette dernière dénomination paroît plus aualogue à la forme de son bec. Quoi qu'il en soit , nous persons qu'aucun nom ne con- vient davantage à cet oiseau que celui de spatule, parce qu'il désigne la forme de son bec, et parce que Brisson, Buffon et tous nos savans ornithologistes modernes 1), que nous regardons comme les premiers maîtres, que nous prendons toujours, et avec inclination, pour nos guides, le lui ont conservé. La spatule blanche est à peu près de la grosseur du héron commun ; sa longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue ;‘est de deux pieds huit pouces ; son bec, d’une substance peu ferme et flexible comme du cuir, a six pouces cinq lignes de longueur sur sept lignes de largeur dans le milieu de son étendue; le bout de la mandibule supérieure est un peu crochu; la couleur de ce bec singulier est jaunâtre dans toute son étendue : quelquefois cependant cette même couleur est nuée de rouge à l’extrémité de cet organe , où une espèce de rainure noire forme une sorte de bourrelet relevé, qui entoure l'espèce de palette qui le termine et qui a vingt-trois lignes dans son plus grand diamètre. La base de ce bec est aussi large que le devant de la tête; quuique ce bec soit d’une substance si DD D 1) MM. Curier et Geoffroy, dont les lumières font honneur à notre siècle. D’ORNITHOLOGIE. 163 foible que l'oiseau ne pourroit serrer le doigt que légere- ment, cependant il le fait claquer d’une maniere fort sen- sible, comme les cigognes, en faisant mouvoir rapide- ment l’une contre l’autre les deux pièces dilatées qui le terminent. Le vol de cet oiseau est de quatre pieds quatre pouces. La spatule blanche à la gorge, ainsi que le tour des yeux, dénués de plumes; ces parties sont recouvertes d'une peau nue, noire. Tout son plumage, tant en dessus qu’en dessous , est d’un Flanc qui paroît d'autant plus éclatant, qu'il contraste davantage avec le noir de Pextrémité des grandes pennes de ses ailes. Les plumes qui cou- vrent le derrière de sa tête sont étroites et longues d’en- viron quatre pouces ; elles forment une huppe bien fournie qui lui retombe sur le haut du cou, qui est moins long que celui du héron. L'iris des yeux de cet oiseau est rougeûtre ; la partie nue de ses jambes et ses pieds, qui sont moins hauts que ceux du héron, est d’un gris brun, ainsi que ses doigts. Ses ongles sont noirs. La spatule habite , comme nous l'avons dit, les bords de la mer 1); elles s’y nourrit également de coquillages, de poissons, comme de vers et d'insectes aquatiques. Lors- que quelques-unes se répandent dans l’intérieur des terres, ce n’est jamais qu'accidentellement, et le séjour qu’elles y font n’est que très-momentané. 1) D’après les observations de M. Baiïllon , il paroïit qu’il P , P q y a deux espèces de spaiules , qui passent ordinairement sur les côtes de la ci-devant Picardie aux mois de novembre et d'avril. L’une de ces spalules, qui est la commune, est d’un blanc fort éclatant et n’a point de huppé ; l’autre est plus petite, et offre quelques disparités dans les couleurs de son plumage et de son bec. Ces oiseaux se nourrissent de petits poissons, mais plus par- : P P P ticulièrement de chevrettes et d’autres insectes aquatiques. 147 164 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE C’est toujours sur les arbres les plus ‘élevés des forêts qui avoisinent les côtes maritimes, que ces oiseaux font leur nid; il le composent de buchettes, comme celui du héron ; et la femelle y pond ordinairement trois ou quatre œufs, dont nous ne connoiïssons ni la forme ni la cou- leur. Suivant Belon et M. de Fontette, la spatule est susceptible de vivre en domesticité, et d'y devenir un oiseau de basse-cour, lors même qu’elle\est prise aduite. Le premier de ces auteurs nous assure que Klein en a long - temps conservé une dans son jardin, quoiqu'elle eût l'aile cassée d'un coup de feu; et le second rapporte qu’elle se rend familière dans les basses-cours. TROISIEME FAMILLE. Tous les oiseaux de rivages qui forment cette troisième famille se reconnoissent en ce qu'ils ont le bec grêle, ordinairement rond, et plus ou moins long et foible. Dans les uns , il est comprimé horizontalement , et tantôt recourbé en en-haut , et tantôt en en-bas; dansles autres, il est renfle par le bout, uni ou raboteux : dans ceux-ci, 1l est obtus et lisse ; et enfin dans ceux-là , 1l est droit et comprimé par les côles. | Cette famille renferme cinq genres , savoir : celui de lavocette, celui des pluviers, celui des vanneaux , celui des bécasses , et celui des râles. Nous avons divisé la plupart de ces gen- D'ORNITHOLOGIE. 1635 res en petites tribus, surtout d’après la confor- mation différente de leur bec. PREMIER GENRE. L'AVOCETTE, Le genre de l’avocette porte un caractère de bec non moins frappant que celui de la spa- tule : ce bec est grèle, rond, foible , long , un peu comprimé horizontalement à sa base, et recourbé en en-haut , de manière que sa pointe regarde le ciel. Quoique cet oiseau ait les pieds entièrement palmes, il tient néanmoins aux fissipèdes de rivages par tout le reste de sa conformation , ainsi que par ses habitudes : on peut et on doit le considérer ici comme une exceplion à la règle générale d’après laquelle nous avons rangé tous les oiseaux. Nous avons classé tous ceux qui ont Îles pieds palmés dans le grand ordre des oiseaux nageurs ; cependant , la plupart des orni- thologistes, et M. Cuvier lui-même, dont nous avous plus particulièrement adoplé la méthode pour ce Tableau élémentaire, pla- cant l’aocette an nombre des /issipèdes de rivages , nous nous garderons bien de lui assi- guer un autre rang. 166 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE L'AVOCETTE. Recurvirostra avocetta. Lin. Syst. nat. éd. 13, g. 89. L'avocette. BRIS. Ornith. tom. 6, pag. 538. ( Voyez la planche XXIV de cet ouvrage. } De tous les oiseaux qui composent ce Tableaw élémen- taire d’ornithologie, il n’en est aucun que l’on réconnoissé plus facilement que l’avocette , à raison de la conformation singulière de son bec, dont la courbure , dirigée vers le ciel, décrit une portion de cercle, et dont l'extrémité dépasse en hauteur le sommet de la tête. Ce bec n’est point, comme celui des autres aiseaux, d’une nature de corne, maïs il est d’une substance comme membraneuse, surtout à son extré- mité:ilest mince, foible, compriméhorizontalement, etinca= pable de soutenir aucun effort et de devenir à l'oiseau qui le porte une arme défensive ou offensive dans l’occasion ; il ne peut même lui servir pour saisir une nourriture qui auroit quelque solidité ; il peut tout au plus lui être propre à fouiller dans un limon liquide ou dans l’écume des flots, où il ramasse de petits vers mous, ou DAER du frai de poissons ou de grenouilles. L'’avocette , un peu plus grosse que le pluvier doré, a un pied cinq pouces de l'extrémité du bec à celle de la queue: ses jambes sont longues de sept a huit pouces , et son cou est d’une longeur proportianneé à la hauteur de ses jam- bes. Ce caractère seul suffiroit, sans doute, pour lefaire exclure de l'ordre des palmipèdes ou oiseaux nageurs, qui tous ont les jambes et les pieds trés-courts. Tout le plumage de Pavocette, en dessus du corps, estun mélange de hachures noires et blanches, et tout le dessous, D'ORNITHOLOGIE. 167 au contraire, est d’un blanc de neige, sans aucune autre espece de teinte , de même que la queue : elle a la tête bien arrondie ; l'iris des yeux de couleur aurore ; les pieds bleus, et le bec, ainsi que les ongles, noirs. Le plumage de l’avocette, cependant, tel que nous le décrivons ici, au rapport d’ornithologistes recommandables et qui ont été à portée de l’observer dans les différens âges de sa vie, est celui de loiseau adulte; celui du premier âge est, selon eux, entièrement gris. Nous sommes d’au= tant plus portés 4 adopter leur opinion, qu’en effet, lors de son passage en automne dans nos départemens inté- rieurs, on voit plusieurs individus dont les plumes scapu- laires , qui sont les dernières à quitter la livrée de l’enfance, sont encore grises, et les pieds, qui sont d’un fort beau bleu après la premiere année, sont dans ceux-ci d’un bleu livide. Quoiqu'il semble que ce ne soit que sur nos côtes ma- ritimes, et plus particulièrement sur celles des départemens de la Somme et de la Vienne, que l’on rencontre cet oiseau en plus grande abondance, dans le moment surtout de son double passage, dont le premier a lieu en mars et le second en septembre , cependant il s’en échappoit quelques- uns jadis, chaque année, qui s’avançoient fort au loin dans les terres; ear nous avons vu souvent de ces oiseaux sur les étangs de Biécourt et de Puissieux, dans la partie agricole du département des Vosges, lorsqu'ils n’étoient point desséchés : mais leur apparition n’y duroiït que quel- ques jours. L'avocette est un oiseau très-vif, trés-alerte, que l’on voit courir avec une rapidité étonnante sur le bord des eaux, dans lesquelles elle entre quelquefois à plusieurs pouces de profondeur , au moyen de ses jambes plus élé- vées que Les eaux qu’elle visite; elle se met aussi quel- 168 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE quefois, mais rarement, à la nage, ses pieds entièrement palmés lui fournissant le moyen de parcourir des eaux plus profondes. L'espèce de l’avocette n’est nulle part très-abondante; néanmoins Salerne , dans son Ornithotogie , pag. 360, nous assure positivement que rien n’est plus commun que cet oiseau sur les côtes du ei-devant Bas-Poitou, où il dit que; dans la saison des nichées, les paysans vont à la recher- che, de ses œufs qu'ils prennent par milliers pour s’en régaler. Elle paroît être d’un caractère aussi inconstant que fin et rusé : car, d’un côté , elle ne fait que pa- roître et disparoître aussitôt du même lieu qu’elle fré- quente ; d’un autre côté, elle se méfie des piéges qu'on lui tend, et sait les éviter au point qu'on a fait en vain des tentatives pour l’y surprendre 1). DEUXIEME GENRE. LES PLUVIERS. Il est aussi facile de reconnoître et de dis- tinguer les pluviers que l'avocette, et de les séparer de tous les autres oiseaux de TiWages s en ce qu'ils n’ont que trois doigts en avant,.et qu'ils n’ont point de pouce : leur bec d’ailleurs est droit, un peu renflé par le bout , et d’une 1) C’est ordinairement sur les bords sablonneux de la mer que, sans aucune autre préparation qu’un petit enfoncement que cet oiseau prépare en grattant le sable avec ses ongles, la fentelle pond quatre œufs de couleur grisätre, lavée d’olivâtre , et marqués de quelques taches brunes. D'ORNITHOLOGIE. 169 grandeur médiocre dans les uns ; il est tres- long , cylindrique et un peu courb£ en en-bas dans les autres ; et enfin il est long, rétrécl , comprimé verticalement, et comme creuse dans son milieu chez d’autres : aussi, pour établir un ordre plus méthodique dans ce genre , nous l'avons divisé en trois tribus. PREMIÈRE TRIBU. Les ciseaux fissipèdes de rivages que nous avons fait entrer dans cette première tribu, ont pour caractères particuliers un bec grêle, droit, médiocrement long, et un peu renflé par le bout ; celui du milieu des trois doigis antérieurs uni à sa base avec l’extérieur par une trés-courte membrane. Ceite tribu n’est composée que de qualre espèces, savoir : ie pluvier doré, le pluvier à collier, le grand pluvier ou courly de terre , et le guignard. © 1. LE PLUV:ER DORÉ Charadrius pluvialis. Lin. Syst. nat. éd. 13, Le pluvier doré. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 47. ( Voyezla planche XXIV de cet ouvrage. ) Si l'amour de la société et le plaisir d'être unis ensemble se manifesta jamais dans quelques espèces d'oiseaux, on peut 170 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dire que ce fut plus particuliérement dans celle du pluvier doré : aussi ne le voyons-nous jamais dans nos contrées qu’en bandes nombreuses, quelquefois composées de plu- sieurs centaines d'individus. Ce n'est qu’en automne et durant les pluies de cette saison que les pluviers dorés passent quelque temps en France, dans les terrains bas, humides et marécageux. La, toujours en mouvement, on les voit courir à terre, frappant le sol de leurs pieds tré- pignans, afin d’en faire sortir les vers dont ils font leur principale nourriture. Ces oiseaux, d'une propreté rare, ont le plus grand soin de courir tous Les matins a l’eau pour se laver les pieds et les parties voisines, que le limon du sol a maculées dans leur chasse. On conçoit que le séjour de ces oiseaux vermivores doit être d'autant plus court dans le même lieu que la bande en est plus nombreuse, parce qu'ayant bientôt détruit tous les vers d’une prairie, dont ils sont très-avides, ils sont forcés de l’abandonner , quelquefois avant vingt-quatre heures, pour en chercher d’autres qui sont encore riches de cette espèce de nourriture. On voit beaucoup de pluviers dorés du côté de Montreuil- sur-Mer, ainsi que dans les prairies humides des dépar- temens de la Meuse et des Vosges, surtout a l’arrière-saison. Ils y demeurent ordinairement jusqu'aux premieres gelées, qui font disparoître les vers; ce qui les oblige à aller chercher des climats plus doux et plus tempérés : ils disparoissent donc jusqu’au printemps suivant, quinous Les ramène, et toujours en bandes nombreuses, qui ne font alors que traverser la France, pour se rendre dans des con- trées plus septentrionales, où ils vont nicher : leur ponte est ordinairement de quatre œufs, qui sont d’un cendré ali vâtre, mouchetés de noiïr et fort pointus. D'ORNITHOLOGIE. 171 Au moment de leur passage, d'automne surtout, on détruit, soit avec des filets d’une forme particulière, soit à coup de fusil , beaucoup de ces oiseaux, qui sont à ce moment fort gras et dont la chair a, malheureusement pour eux, la dangereuse réputation d’être un mets très- délicat. Le pluvier doré est de la grosseur d’une fourterelle ; sa longueur, du bout du bec à celui de la queue, est de dix pouces trois lignes ; son vol d’un pied six pouces huit li- gnes ; et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, atteignent l'extrémité de sa queue. Le plumage de cet oiseau varie suivant les saisons. Au printemps, lorsque le feu de l'amour en anime les nuances, celui du mâle est, en dessus du corps, d'un beau jaune doré, sans aucun mélange; et en dessous il est de la même teinte amalgamée avec du noir : cette derniére couleur est quelquefois pure , sans mélange de jaune dans le vieux mâle. En automne, au contraire, le fond du plumage en dessus est d’un brun noirâtre, tacheté de jaune et de gris blanc, ainsi que les côtés de la tête , le cou et les flancs, qui néan- moins sont d'un ton plus pàle : le pluvier a alors les grandes pennes des ailes noirâtres , celles de la queue rayées de cette couleur et de jauxe sombre; le milieu et lie reste du ventre est d’un blanc sale. Les femelles ont les couleurs du plumage moins vives, et les jeunes ne sont gris que dans le premier âge : ils ont tous l'iris des yeux d’un rouge obscur ; le bec, ainsi que la partie nue des jambes, le tarse, les doigts et les ongles, noirs. Ils manquent absolument, comme nous l'avons dit, de doigt postérieur ou de pouce. à 172 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 2. LE PLUVIER À COLLIER. Charadrius hiaticula. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 88. Le petit pluvier à collier. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 63. Cet oiseau est à peu près de la taille de l’alowette ordi- naire; sa longueur, prise de l’extrémité du bee à celle de la queue, est de six pouces neuf lignes ; son vol est de onze pouces; et lorsque ses aïles sont ployées, elles atteignent l'extrémité de sa queue. Le pluvier à collier est un oiseau solitaire qui se plaît sur le bord des rivières graveleuses et sur les rivages de la mer; il court avec une vitesse extrême sur la grève, et ne fait que de trés-petits vols, qu'ilaccompagne to ujours d'un cri assez perçant. On le connoît, dans certains départemens , sous les noms de gravière ou de criard, et dansles Vosges, sur ies bords de la Moselle, qu'il fréquente exclusiventent, sous celui de lambiche. La feinelle de cet oiseau ne construit point de nid; elle se contente de gratter un peu la grève avec ses pieds, et elle pond dans cette petite cavité trois ou quatre œufs d’une couleur cendrée, mouchetés de noiràtres, d'autant plus difiiciles à apercevoir, qu’on les prend volontiers pour de petits cailloux, ce qui nous est souvent arrivé sur les bords de la Moselle, dans les Vosges. Aussitôt que les petits sont éclos, on les voit courir sur cette même grève avec une vitesse qui, conjointement avec la couleur grise de leur plumage, les feroit volontiers prendre pour de jeunes souris. : La tête de cet oiseau présente un front blanc, un ban- deau noir sur le sommet, suivi d’une calotte brunâtre qui D'ORNITHOLOGIE. 175 s'étend jusque sur la uwque ; au-dessous de l'œil on voit une bandelette noire qui part du bec en traversant les joues: la gorge , qui est blanche , forme un collier de cette couleur qui entoure le cou; au-dessous du blanc de la gorge il y a sur la poitrine un plastron d’un beau noir qui, en cou- vrant les côtés, s’étend et borde en arrière le collier blanc. Tout le dessus-du corps est d’un brun clair, excepté le croupion qui est blanc; les grandes pennes des ailes sont noires, bordées intérieurement de blanc, et celles de la queue sont d’un brun foncé; les latérales de cette partie sont entièrement blanches, etles autres sont plus ou moins marquées de cette couleur, à l'exception des deux inter- médiaires. Tout le reste du dessous du corps est d’un trés- beau blanc. L'iris est &’un brun rougeûtre ; la base du bec est orangée et noire dans tout le reste de sa longueur; les pieds sont aussi orangés et les ongles noirs. 2. LE GRAND PLUVIER, OU COURLIS DE TERRE. Charadrius ædicnemus. LAN. Syst. nat. édit. 13, 8.0. Le grand pluvier. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 56. Cette espèce paroît en France, au printemps, dans les départemens de la Somme , du Loiret, de l'Eure-et-Loire, de la Marne, de la Côte-d'Or et des Vosges; et c’est dans cette saison surtout , ainsi qu'en automne, qu'il fait enten- dre, pendant la nuit, son cri souvent répété, turrlui, turrlui. À l’époque du départ, qui a lieu pendant les pre- mières pluies d'automne , les grands pluviers se rassemblent, non dans des plaines humides et marécageuses, comme le pluvier doré, maïs sur des terrains élevés. secs et sablon- 134 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE neux. Ils sont si naturellement craintifs, que, tant que le soleil est sur notre horizon, ils demeurent immobiles et ne prennent leur essor qu’à l’entrée de la nuit, pour se répandre de tous côtés, en volant rapidement et en pous- sant leurs cris. S'il arrive qu’on les fasse lever pendant le jour ,ils ne font alors qu’un vol d’un trajet court; puis, aussitôt qu'ils sont reposés , on les voit courir dans la plaine aussi vite qu’un chien 1). Cet oiseau, que l’on a nommé courlis de terre, sans doute à cause de son cri, qui est assez semblable à celui des vrais courlis , se nourrit d'insectes, de limaçons, et même de jeunes lézards ou de petites couleuvres. Ce pluvier, de la grosseur d’une petite poule de moyenne taille, a quinze pouces neuf lignes du bout du bec à celui de la queue, et seize pouces deux lignes de l'extrémité du 1) D’après l’habitude qu’a cet oiseau de voyager seulement pen- dant la nuit, et de crier beaucoup durant ses courses nocturnes, 1l sembleroit que sa vue seroit conformée comme celle des engou- levents ou des oiseaux de proie nocturnes , qui voient très-bien de nuit, tandis qu’ils sont éblouis par la clarté du jour. Mais on se tromperoit, si on plaçoit le grand pluvier dans la classe des oiseaux myopes; car il west nullement douteux que, pendant le jour, il distingue parfaitement bien le chasseur qui le guette, et qu’il sait soigneusement en éviter l’approche. Ses grands yeux d'ailleurs sont une preuve incontestible qu'il voit très- bieu de jour , et que s’il ne voyage que pendant la nuit, c’estharce que sa timidité extrème lui fait. éviter les regards des hommes, dont il redoute la présence : cela est si vrai , que s’il entre quel- qu'un dans une chambre où on tient de ces ciseaux renfermés, ils fuient avec une si grande peur qu’ils se heurtent contre tout ce qu’ils rencontrent, et que souvent mème ils se brisent la tête contre quelques corps solides qui se trouve sur leur passage. D’ORNITHOLOGIE. 175 bec à celle des pieds ; son vol est de vingt-six pouces six lignes; et quand ses aïles sont ployées, elles sé- tendent jusqu'aux deux tiers de la longueur de sa queue. Cet oiseau nous arrive au printemps, et nous quitte en automne. Sa tête, qui est grosse et ronde, est couverte, ainsi que le dessus de son cou et de son corps, de plumes brunes, marquées de traits noirîtres qui se dirigent suivant la lon- gueur de leurs tiges; le dessous, nué de même, est d’une teinte plus pàle, à l’exception du haut de la gorge, du ventre et du bas-ventre, qui sont d’un blanc jaunûtre ; deux traits de blanc roussàtre passent, l’un au-dessous, et l’autre au-dessus des yeux; une bande blanchâtre tra- verse les pennes de l'aile, qui sont noires. Des douze pennes qui composent sa queue, les six intermédiaires sont rayées transversalement de brun , et les six collaté- rales sont blanches, rayées de noirâtre, bordées de plus ou de moins de noir à leur extrémité. L'iris des yeux, qui sont grands, est jaune, de même que la partie nue des jambes, le tarse et les doigts : ces derniers sont termi- nés par des ongles noirs. Le grand pluvier ne fait point de nid; il se contente, comme le pluvier à collier, de gratter la terre avec ses pieds; et la femelle pond dans cette petite cavité deux ou trois œufs de la grosseur de ceux d’une petite poule ; ils sont blancs cendrés, et marqués de taches de brun oli- vâtre foncé. Le mâle tient fidelle compagnie à sa femelle tout le temps que dure l’incubation, et il partage seule- ment avec elle le soin de l'éducation de ses petits. 176 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE h”. LE GUIGNARD. Charadrius morinellus. Lin. Syst. nat. éd. 13, g. 88. Le petit pluvier. Bris. Ornich. tom. 5, pag. 54. ( Voyez la planche XXIV de cet ouvrage. ) Brisson n’a sans doute nommé cet oiseau petit pluvier , que par comparaison avec le grand ou même avec le pluvier doré; car il est plus petit que lui, et n’a guëre que huit pouces et demi de longueur, mesuré de l'extrémité du bec à celle de la queue. Il a le dessus de la tête d’un noirâtre brun ; le devant de cette partie est couvert de plumes grises, entourées de blanchâtre; ses joues sont maculées de taches grises et blanches. Le devant du cou et la gorge du mèle sont d’un gris ondé ; la, cefte couleur est arrondie de manière à lui former une espèce de plastron. Sa poitrine est rousse ; son ventre est noir, et son bas-ventre blanc, ainsi que le dessous de sa queue. Les plumes de ces deux dernières parties sont souvent nuées de roussâtre et de noir par quelques plumes qui y sont méêlées, et qui sont de cette couleur. Tout son manteau est de fond gris brun, foiblement lustré de vert; chaque plume du dos, ainsi que les pennes moyennes de l’aile. sont bordées et comme encadrées dans un trait de couleur rousse ; le croupion et les couvertures du dessus de la queue sont bordées de même, mais le fond de leur couleur est gris. Les pennes des aïles sont aussi grises ; cependant les unes sont bordées de roussâtre, tandis que les autres le sont de blanc : les quatre pennes intermédiaires de la queue sont également grises, mais bordées de brun; les latérales, de même couleur, sont terminées de blanc, et les deux (D'ORNITHOLOGIE. 177 plus extérieures sont bordées en dehors de cette couleur. L'iris est brun, äinsi que les pieds ; le bec et les ongles sont noirs. Outre que la femelle n’a point de plastron comme le mäle, elle en diffère encore par sa tête, qui est blanche, mélée de gris brun et de jaunâtre ; par Le dessous de son corps, qui est d'un blanc ; jaune ; et enfin par les pennes de sa queue, dont les deux intermédiaires sont brunes ) tandis que toutes les autres sont blanches. Les guignards vont par bandes quelquefois assez nom- breuses, qui sé répandént dans nos contrées les plus septentrionales ; ils ne paroissent néanmoins qu’'instanta- nément, au mois de mars ét au commencement de sep- *tembre, dans la partie imontueuse des Vosges, d’où ils disparoïssent.absolument : ils y vivent d'insectes, de vers et dé petits coquillages terrestres. Ces oiseaux, dont la chair passe pour être plus délicate ét plus sueculente que celle du pluvier doré, sont iudo- Fens et stupides : aussi profite-t-on dans certains pays de leur imbécillité pour leur tendre des piéges, dans lesquels ils donnent sans la moindre défiance. DEUXIEME TRIBU. La seconde tribu du genre des pluviers ñe renferme que la seule espèce de l’échasse , dont les caractères particuliers consistent en ün bec trés-long , cylindrique, courbé en en- bas, et un peu renflé vers le bout ; dans des tarses longs ei grèles; et enfin dans ladhérence du doigt du milien au doigt extérieur, qui y T: 2, 13 178 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE est uni par une courte membrane qui les bordé légèrement. L’échasse manque de pouce. L'ÉCHASSE. Charadrius himantopus. LiN. Syst. n. éd. 13, g. 88. L'échasse. Bris. Ornith. tom.5, pag. 33. { Voyez la planche XXV de cet ouvrage. ) Les jambes excessivement longues de l’échasse, qui permettent à peine a cet oiseau de prendre à terre sa nourriture, paroissent être les restes de ces dessins mal assortis et disparates des grands projets de la nature, qui, en essayant les forces de sa puissance , et en ébau- chant le plan immense de la forme des êtres, choisit d’a- bord les plus belles, pour passer ensuite à des composi- tions moins symétriquement régulières, et qu’elle n’a laissé subsister que pour nous donner une idée de ses vastes projets. JI1 semble qu’en jouant avec sa puissance , elle se soit plu à retracer dans les oiseaux les difformités, du moins qui nous paroissent telles, des mammiféres, et que l’é- chasse ait été choisie tout exprès pour être aux oiseaux ce que le kanguroo est aux quadrupédes. En effet ses jambes, trois fois longues comme son corps, qui est à peine gros comme celui du pluvier doré ; ces mêmes jambes, si disproportionnées, si grêles, si foibles , tou- jours fléchissantes , terminées par trois doigts seulement qui paroissent trop courts, cu égard à la longueur du tarse , et supportant mal un corps qui toujours chancelle , nous offrent une sorte de monstruosité qui, loin d’accé- lérer la course de cet animal, ne feroit que la retarder. D'ORNITHOLOGIE. 179 s'il n’en eût été dédommagé par de longues aïles qui lui fournissent un vol élevé et long-temps soutenu. L'échasse , mesurée de l'extrémité du bec à celle de la queue, a plus d’un pied de longueur; son vol présente une envérgure de deux pieds trois pouces ; et lorsque ses ailes sont ployées, elles dépassent la queue de plus de deux.pouces. La partie antérieure de sa tête, sa gorge, son Co, le bas de son dos, son croupion, sa poitrine, ses fläncs et son ventre, jusques et y comprises les couvertürés dü des- sous de sa queue, sont d’un-bianc d’autant plus éclatant qu'il contraste davantage avec le reste du plumage, qui est entièrement d’un noir à reflets verts, si on en excepte néanmoins les couvertures du dessus de la queue et les pennes de cette partie, qui sont d’un gris blanc. Son bec, long de deux pouces dix lignes, est noir, cylindrique, un peu aplati par les côtés vers la pointe, et plus long que la tête. L'insertion de ce béc sur la base d’un front rélevé, fait paroître la tête beaucoup plus ronde qu’elle ne l’est en effet. L’iris des yeux est rouge, ainsi que la partie nue des jambes, les pieds et les doigts, qui sont terminés paf des ongles noirûtres. La femelle ne diffère de son mäle qu’en ce que la cou- leur noire, qui est répandue sur son plumage , est beau- coup moins profonde, et que le blanc de son cou est moins pur et plus lavé. Nous ignorons les mœurs comme les habitudes de l’é- chasse, quoïqu'éelle soit également répandue sur toutes nos côtes maritimes, et qu’elle fréquente encore quelquefois certains marais de l’intérieur de la France, où toujours il est vrai de dire que cet oiseau est fort rare : nous sa- vons seulement qu'il cherche sur le bord de ces éaux X 12 180 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE sa nourriture, qui consiste.en insectes et en vermisseaux aquatiques. TROIÏSTEME TRIBU. Dans cette troisième tribu du genre des plu- viers, nous avons placé d’hzitrier : il est le seul de cette tribut qui fréquente nos côtes maritimes de France. Ses caractères distinctifs consistent en un bec long, rétréci, terminé en coin et comme comprimé horizontalement entre les narines et son extrémité; en sorte que sa pointe, qui est mousse , semble dirigée vers le ciel, plutôt que parallèle à la terre. Celui du milieu de ses trois doigts antérieurs, qui ne sont point accompagnés de pouce, est uni avec l'extérieur , jusqu’à la première articulation , par une courte membrane qui forme autour de chaque doigt une petite bordure. L'HUITRIER. Hoœmatopus osiralegus. Lin. Syst. nat. édit. 13, g. 90. L'huitrier. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 38. ( Voyez la planche XXV de cet ouvrage.) Ce n'est pas toujours sur des sites rians, dans des re traites enchanteresses, que la nature a placé la grande fa- mille des oiseaux : si elle à départi aux uns laimable so- ltude de nos forêts ombragées, où bien le verdoyant D'ORNITHOLOGIE.- 185 tapis de nos campagnes , elle en a aussi confiné d’autres sur des écueils isolés, contre lesquels l'Océan en fureur vient souverit briser ses flots écumeux et toujours mugissans : ou sur ces plages pelées que la vague or de lä mer ne cesse de disputer au continent. |! : ) HOVS A9! Tel futle partage de l’oisecu de rivage dontil est ici question: c’est dans ces lieux formidables aux humains et toujours dé- serts qu'il est forcé de chercher sa subsistance, sa sécurité, et jusqu’aux plaisirs même de l'amour. C’est sur ces bancs que le nautonnier redoute , sur ces récifs découverts , qu’en suivant sur la grève le reflux dé la mer, il cherche parmi ses sables humides des vers marins, des pätelles » des étoiles, des crabes et surtout des huîtres , dont il fait sa principale nourriture, et qu'il a l'instinct ainsi que la force de détacher , de soulever et d’arracher de dessus les rochers avec son bec, dont la coupe carrée forme un tranchant très-propre pour le succés de ses entreprises 1). L’huitrier, sans être fort commun sur nos côtes mari- times de France, fréquente néanmoins celles dés dépar- temens de la Charente et de la Somme; on prétend même qu’il niche quelquefois sur le sable qui est hors de lat teinte des eaux dans ce dernier département. C’est surtout dans le temps où es pêcheurs de ces contrées sont occupés à prendre la marée qu'ils font passer. à Paris et dans les départemens circonvoisins , que l’on voit une plus grande quantité d’'huitriers sur les rivages de nos mers ; ils ne manquent pas de les 1) Nos citadins maritimes prétendent que l’Auîtr'er a, le bec d’une nature de corne si solide , et que les muscles qui font mou-. voir cet organe sont si forts, qu'il peut avec cet instrument rompre et briser des fragmens de pierres calcaire pour en extraire les petites folades qui sont renfermées dans leur intérieur. 182 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE visiter chaque jour, parce que souvent, lorsque le reflux a laissé à découvert ces dunes qui sont restées à sec, ils y trouvent les filets de ces pêcheurs , qui sont remplis de poissons: |ils les entament alors à coups de bee;.et, apres leur avoir déchiré le ventre pour en extraire Les eoquil- lages que ces animaux ont avalés, ils les mutilent: de ima- niére à ne pouyoir plus être exposés en vente; ce qui fait un tort notable à ces pêcheurs. | Sans autre préparation de nid qu’une petite bat pratiquée sur le sol des dunes jonchées de coquillages, que la femelle gratte avecses pieds, elle y pond quatre ou cinq œufs d'un jaune olivatre, tachetés d’une couleur noire pourprée, qu’elle ne couve, durant vingt-un jours, que depuis les trois heures de l'après-midi jusque vers lesneuf heures du lendemain matin, laissant, dit-on, à la chaleur du soleil, durant lereste du jour, le soin de les échaufier. A peine les petits sont-ils éclos, qu'ils quittent le nid , et qu’on les voit se traîner sur le sable ; peu de jours aprés; ils sont en état de eourir déjà fort vite, et, à la moindre apparence de danger, ils savent si bien se cacher dans les touffes d'herbages, qu'ilestpresque impossible de les y trouver... . L’huitrier est à peu près de la taille de la corneille; sa longueur totale, depuis l'extrémité du bec jusqu’à celle de la queue,est de seize pouces ; ila deux pieds septpouces et demi de vol ou d'envergure; et lorsque ses ailes sont ployées , elles s'étendent jusqu'aux trois quarts de la longueur de sa queue. Son bec, long de serie pouces, est d’un beau rouge, de même que ses paupières. L'iris de ses yeux est d'un jaune doré. Il a les jambes fortes et épaisses, et ses pieds sont remarquables par la peau rude et écailleuse qu: les recouvre; ils n’ont guëre plus de deux pouces de hau- teur, prise de la partie nue des jambes jusqu'a la base de D'ORNITHOLOGIE. 183 ses trois doigts. Toutes ces parties sont d'un rouge de co- rail, et les ongles sont noirâtres. Cet oiseau, sans avoir les pieds palmés, peut cependant se mettre à la nage, ou, pour mieux dire, comme il ne craint pas les flots, il se laisse quelquefois entrainer et balotter sur leur surface , ayant cependant la faculté de regagner la terre lorsque cela Lui convient. L'huitrier a la tête, le cou, la gorge, le haut du dos, ainsi que les plumes scapulaires, d’un très-beau noir : on voit au-dessus de chacun de ses yeux une tache blänche * et au-dessoiüs de,sa gorge une bande étroite, d'un fort beau blanc, qui y forme une espece de demi-collier. Le bas de son dos, son croupion, sa poitrine, ainsi que tout le dessous de son corps, sont d'un blanc très-éclatant ; et c’est sans doute à cause du mélange de ces deux couleurs que, dans quelques paÿs, oh a dünné à cet oiseau le nom de pie-demer, quoiqu'il diffère esbenielléRiéntl dé ct oiseau, ne fût-ce même qu'a raison de la différence de la longueur de sa queue, qui; dans l'individu dout nous parlons, n’a que quatre pouces, tandis que dans la pie ordinaire elle est d’une longueur considérable. On. a peut-être. bien. aussi donné a l'huitrier lé ‘hôm de pie, à cause de son babil continuel et des cris pérçans qu'il ne cesse de faire entendre, soit en volant, soit quand il est en repos 1). Ses ailes, d’un noir brun, sont coupées par une bande blanche que forme l'extrémité de leurs grandes couvertures, qui sont de cette couleur. Les pen- 1) Les chasseurs aux oiseaux d'eau ou de rivages sur les bords de la mer redoutent, dit Mel éénitre de l'Auftrier, parce qu’à Vaspect de l’homme il redouble ses clameurs, qui sont un cri d'alarme pour les autres oïseaux et le signal certain de leur fuite. \ 364 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE nes de la queue sont blanches, terminées -de noir;.et ce noir s’ävance d'autant plus haut, que ces ns CE -Pius voisines des fi tre CRIER) 2) LA TROISIEME GENRE. LES VANNEAUX. Les oiseaux du genre des vanneaux onb'pour caractères genéraux trois is en avant, eétun pouce si court qu'il nappuie que peu ou point sur laterrelorsqu’ils marchent. Lesespèces qui composent ce genre ayant une conforma- tion de bec différente, nous avons saisi.ce ca: ractère pour le diviser en quaire tr ibus. PREMIERE TRIB U. La première tribu:du genre des vanneaux oïire pour caractères particuhers un bec droit, renflé par le bout, et des narines petites ; trois doigts en avant, séparés dans les uns et réunis dans les autres par un rudiment de membrane. Cette tribu renferme trois espèces, qui.sonL le vanneau ordinaire, le vanrieau suisse, et le vanneau pluvier. é PAR D'ORNITHOLOGIE. ‘18: Le LE VANNEAU AAA AIRE Tringa aan LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 85. Le vanneau. Bris. Ornith. tom. 5 , pag 94. ie +2 (Voyez la planche XXV de cet ouvrage.) Cette espèce de vanneau est à peu près de la grosseur du pigeon biset ; il a, du bout du bec.à celui de la queue, un pied et demi de longueur, et deux pieds quatre pouces d'envergure : lorsque ses ailes sont ployées , elles atteignent l'extrémité de sa queue. * Le nam de vanneau a, Sans doute, été donné à cet Fume à raison du bruit qu'il fait ee ses ailes en volant, «et: qui approche un peu de celui que fait un instrument aratoire nommé van, dont les cultivateurs se servent pour-épurer leurs grains. Dans quelques çontrées qu'il fréquente, il n’est connu .que sous le nom de dix-huit, parce que ces deux monosyllabes , prononcées lentement , expriment fort bien son cri, qu'il fait surtout entendre lorsqu'ilprend son essor pendant la nuit. Le vanneau est un oiseau de passage qui arrive dans nos contrées, en grandes bandes, dès la fin d'avril, et nous quitte au commencement de l’automne. Cet oiseau a les ailes trés-fortement musculées; aussi s’en sert-il avantageuse. ment pour son vol , qu'il soutient long-temps de suite dans les airs , et quelquefois à une élévation considérable. | À son arrivée parminous, on en voit des bandes nom- breuses dans les prairies humides, ou bien dans les blés verts, lorsqu'une petite pluie surtout vient de les arroser : là, ils sont occupés à saisir les vers qu’en frappant du pied contre terre ils en ont fait sortir, et c'est leur prin- cipale nourriture. 186 TABLEAU ÉLEMBNTAIRE Lorsque, pendant la nuit, lesvanneaux cherchent à bu- tiner, ce n’est plus en Hapfant le sol de leurs pieds qu'ils en fontsortir les vers;ils se contentent de parcourir l'herbe: ils ont le tact des doigts assez fin pour les sentir, lorsqu'ils sont sortis à la fraîcheur, et ils les saisissent avidement pour les dévorer ; ils vont ensuite à l’eau pour se laver le bec et les pieds. Toujours gaï, le vanneau bondit légèrement dans les airs, folàtrant ét s’y jouant de mille manières, ou bien il par- court iñcessamment la prairie , soit en filant rapidement, soit par de petits vols coupés. Il a la vue si perçante qu’on ne le surprend que très-difficilement; et ce qui nous à toujours étonné , C’est que sans arme, et surtout si l’on est à cheval, il se laissé approchgr à peu de distance , tandis qu'il fuit de trés-loin, dès qu'il aperçoit un homme armé. | , Quand la première chaleur du printemps se fait sentir, les vamneaur , qui ont vécu jusqu’à cette époque en bandes nombreuses, se séparent par couples et se retirent chacun de leur côté; ais au préalable les mäles se li- vrent entre eux des combats à out dont la récom- pense au vainqueur est la femelle qui est restée témoin de leurs cartels 1). F4 VAE Is chosissent, pour placer leur nid , un petittertre élevé au-dessus du niveau de la prairie humide qu'ils fréquen- tent 2). La femellepond ; daris un petit rond qu’elle a fabri- 1) Presque tous les mâles des oiseaux de rivages , ainsi que ceux des gallinacés , se livrent entr’eux de £es sortes de combats, dans le temps des pariades ; et la femelle ou les femelles qui en sont la cause semblent s’enorgueillir trènquillement en voyant quelquefois couler le sang pour leurs beaux yeux. 2) La ponte du vazreau se fait en avril ; elle est ordinarement D'ORNITHOLOGTE. 187 qué dans lherbe, trois ou quatre œufs d’un vert sombre, tachetés de brun. | Aussitôt que les petits sont éelos ; ils sortent du nid et courent dans l'herbe en suivant leurs père et mère. Ilnous est arrivé souvent, lorsque nous allions chasser aux bé- cässines, sur les bords des grands étangs de la ci-devant Lorraine | de trouver dars l’herbe , sans les chercher ; de ees couvées de jeunes vanneaux que la sollicitude du pére et’ de la mére , inquiétés de notre passage, prés de leur petite famille, nous déceloient par leurs cris d'alarme, et plus encore par les tours et les détours qu’ils ne ces- soient de faire au-dessus de nous, et qu'ils rapprochoient davantage de matre tête à mesure que nous avancions plus prés du fruit précieux de leur amour. Il nousest arrivé souvert aussi de trouver une nichée en- tière dont tous les petits étoient blottis l'un contre l'autre ; mais lorsquenous voulions les saisir de la main, a l'instantils disparoissoient de tous côtés , avec une telle promptitude, ssible Cénie atteindre aucun sans le secours qu'il due: Los o anneau a le dessus de la tête d’un noir à reflets mé- talliques qui M en en vert et en couleur de cuivre de rosette : l’occiput est orné d'une belle huppe - composée de cinq ou six plumes longues, étroites, un peu recourbées en haut à-leur extrémité; elles sont noires, et les plus longues ont plus de trois pouces : ses joues sont roussà- tres , variées, au-dessus des yeux, de petites lignes longi- composée % quatre œnfs olivâtres et mouchetés de brun. Pour les déposer , la femelle se contente de rassembler d: ans les prairies, Où dans les sillons d’un champ près dés eaux , quelques sramèns secs. Les œufs de anneaux sont très-délicats, Les Hollandais riches des font rechercher pour leur table. { 188 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE tudinales noirâtres ; au-dessous de l'œil, il passe une ligne de même couleur, qui se termine derrière la tête. Le haut du cou en arrière est d’un cendré à reflets verdâtres; le dessus du dos, ainsi que Le croupion, sont d’un vert doré; les plumesscapulairessont de eette même couleur: mais l’extré- mité de la plupart des petites couvertures est de couleur de cuivre de rosette ; et les grandes sont bordées de blanchàtre a leur extrémité; les petites.et les moyennes couvertures des aïles sont d'un noir verdätre qui change en violet sombre ; les grandes , qui sont les plus éloignées du corps, sont noires , à reflets d’un vert doré. Des vingt-sept pennes qui composent l'aile ‘les quatre premières sont noires, terminées de gris blanc; les six suivantes ne sont noires que sur leur bord extérieur, et les douze suivantes sont blanches à leur origine et noires dans le reste de leur lon- gueur. Les dix pennes du milieu de la queuesont blanches, depuis leur origine jusqu’à la moitié de leur longueur , et le reste est d’un beau noir, bordé de blanchàtre par le bout : la penne la plus extérieure de dec côté est en- tiérement blanche, à l'exception d’une grande tache noire qui se trouve placée vers l'extrémité du ME bterieur. La gorge est blanche, le devant du cou A d’un noir lustré de verdâtre ; la poitrine et tout le dessous du corps, ainsi que les jambes, sont d'un beau blanc; les couvertures du dessous de la queue sont d’un rouge baï. L’iris est brun ; le-bec. et les ongles sont noirs; la partie nue des jambes, ainsi que les pieds, sont d’un brun rougeûtre. La femelle, un peu plus petite que le mâle, a les cou- leurs moins vives que les Signes: sa huppe, d’ailleurs, est bien plus courte. Cet oiseau, qui est répandu dans toute la France; est facile à nourrir en domesticité avec du cœur de bœuf haché. On le nourrit encore plus facitement en le lächant D'ORNITHCLOGIE. 18) dans un jardin oubien dans un verger , où il se nourrit de vers et dé limaçons qu’il y trouve en abondance. C’estvers la fin de juillet queles jeunes vanneauxmuent, et ce n’est qu'a cette époque qu'ils prennent les belles nuances de leur plumage. Peu de temps après, tous les vanneaurx du voisinage, jeunes et vieux, se rassemblent et forment sou- vent des bandes de plusieurs centaines, que l’on voit planer dans les airs, qu’ils obscurcissent quelquefois, ou bien errer dans les prairies. Vers la fin de septembre ou au commen- cement d'octobre, ils sont d'une graisse extrême, parcequ’a cette époque ils trouvent une plus abondante nourriture dans les vers que l’humidité des prairies y entretient ; mais lorsque les premiers froids forcent ces insectes à s’enfoncer plus avant dans la terre pour se garantir de leur rigueur, alors les vanneaux, qui ne trouvent plus la nourriture qui leur convient, sont obligés d’aller au Loin la chercher'dans les pays plus méridionaux 1). . ï. 2. LEUN ANNEAU SUISSE. 2$ Tringa helvetica. Vi1N. Syst. nat. édit. 13, gen. 83. Le vanneau suisse. BRIS. Ornith. tom. 5, pag. 107. On ne sait trop pourquoi on a donné à cet oiseau la dé- nomination de vanneau suisse, qui pourroit induire à er- 1) Dans quelques départemens intérieurs de la France, où il se trouve surtout de vastes prairies un peu marécageuses, on y piend une grande quantité de vanneaux , soit avec le filet à mi- roir, soit avec le traîneau de nuit, que lon fait suivre par des torches allumtes, dont l'éclat, en les éveillant , les étourdit au point de se laisser couvrir et prendre dans ce filet, 190 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE reur, en faisant peut-être supposer qu'il est exclusivement propre aux cantons helvétiques, tandis que, d'aprés des renseignemens recueillis avec soin, nous avons la certitude qu'ilest plus commun lors de ses passages, périodiquement annuels, au printemps eten automne, sur certaines prairies humides des hautes Vosges, qu'il ne le fût jamais, et en: quelque temps que ce soit, dans aucun des cantons de la Suisse. Ce vanneau est à peu près de la grosseur du vanneaw ordinaire : tout le dessus de son corps est varié transver- salement de raies blanches et de raies d’un brun noiïrâtre : et c'est probablement à raison de cette bigarrure de son habillement, qu'on lui a donné l’épithète de suisse. Il a le sommet de la tête blarchâtre , tacheté de noir; lesjoues, le devant du ceu, la poitrine, le haut du ventre et les flanes, tantôt noirètres et tantôt d’un noir profond : le bas- veutre et les jambes sont d’un assez beau blanc; les pennes des ailes sont variées de brun noirâtre et de blanc; la queue est composée de douze pennes blanches, dont les deux du milieu sont rayées transversalement de brun noirâtre; les latérales sont aussi rayées de la même cou- leur, mais seulement du côté extérieur, et elles ne Le sont intérieurement qu'a leur extrémité. L’iris est brun ; le bec, la partie nue des jambes, ainsi que les pieds et les ongles, sont noirs. Cet oiseau, qui ne niche pas en France, quoiqu’à de certaines époques de l’année il soit répandu dans toutes ses parties, re se réunit pas en troupes nombreuses comme le venneau ordinaire; on ne le voit guëére qu’en société du mâle et de la femelle, ou toat au plus de leurs enfans. D'ORNITHOLOGIE. 191 39 LE VANNEAU PLUVIER. Tringa variata. Lin. Syst. nat. édit. 13 , gen. 87. 4 - Le vanneau gris. BRIS. Ornith. tom. 5, pag. 100. Cette espece, ayant le pouce très-court, se rapproche par-là du genre des pluviers qui n’en ont point : il manque comme eux d’aigrette sur la tête; ce quia été un nouveau motif pour que des ornithologistes le rangeassent dans la famille des pluviers, tandis que d’autres Le placent au nom- bre des, vanneaux. M. de Buffon, pour mettre fin à cette discordance parmi les auteurs, et trancher'toute difficulté relative à cet oi- seau , a pris un terme moyen dars sa dénomination ; il l'a appelé vanneau pluvier , et nous lui conservons, par respect surtout pour la mémoire de ce grand homme, le nom qu’il lui a appliqué, quoique sur les marchés de Paris ce vanneau ne soit encore connu aujourd'hui que sous celui de pluvier. Plus gros que le pluvier doré, le vanneau pluvier a le bec proportionnément plus long et plus fort que lui; il a de lon- gueur totale , depuis l'extrémité du bec jusqu’à celle de la queue, dix, pouces et demi; son vol est d’un pied dix pouces, et quand ses ailes sont ployées, elles dépassent la queue de quatre lignes. Sa tête, le derrière de son cou et tout le dessus de son dos, sont d’un gris brun , ct chacune des plumes qui recouvrent ces parties, est bordée de blanchâtre; sa gorge est blanche : le devant de son cou, sa poitrine, et le haut de son ventre sont variés de blanc et de brun rei- » 195 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE râtre ; son bas-ventre est tout blanc, ainsi que ses jambes, ses flancs , et les couvertures du dessous de sa queue. Les pennes de ses ailes sont d’un brun noirâtre; ellessont mar - quées d’une tache blanche qui est placée auprès de leur tige, vers les deux tiers à peu prés de leur longueur. Les trois qui sont les plaæs voisines du corps sont d’un gris brun ; les pennes de sa queue sont blanches, rayées trans- versalement de noirûtre. L’iris de son œil est couleur de noisette ; son bec et la partie nue de ses jambes, de même que ses pieds et ses ongles, sont noirâtres. Cette espèce de vanneau ne se rencontre pas seulement sur les bords sablonneux de nos côtes maritimes, elie se répand souvent fort loin dans l'intérieur de la France ; et quoiqu'on le voie fréquemment de compagnie avec les pluviers dorés, il ne forme pas moins de petites bandes a part, que lon trouve quelquefois pendant l'hiver. DEUXIEME TRIBU. Cette seconde tribu du genre des vanneaux ne renferme que la seule espèce de £ourne- pierre qui fréquente nos côtes maritimes de France : cet oiseau présente pour caractère particulier un bec comprimé horizontalement, plutôt courbé en en-haut que droit, épais à sa racine, en. diminuant insensiblement vers sa pointe, qui esl assez aiguë, D'ORNITHOLOGIE. 193 LE TOURNE-PIERRE. Tringa interpres. LaN. Syst. nat. édit. 13, gen. 83. Le coulon-chaud. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 13». ( Voyez la planche XXV de cet ouvrage. y ez la pi 8e.) Le nom seul de cét oiseau annonce qu'il a l'habitude de retourner les pierres qui se trouvent sur le bord de l’eau, pour chercher et prendre dessous les vers et les insectes qui y sont cachés, et pour en faire sa principale nourri ture. La dextérité avec laquelle cet oiseau, qui n’est guëre plus gros qu’un merle, retourne, dit-on, des pierres de deux ou trois livres de pesanteur , sans autre secours que la seule mandibule supérieure de son bec, suppose en lui une force musculaire qui est bien faite pour étonner. On conçoit que, pour exécuter une semblable manœu- vre, il étoit nécessaire que la nature le pourvüt d’instru- mens analogues au genre de vie qu’elle lui destinoit: aussi elle n’a pas donné au tourne-pierre un bec grêle et mou comme celui de la plupart de ses congénères ; il est, au contraire, d’une substance cornée trés-dure : sa base est fort épaisse ; il est long d’un pouce à peu prés, et il va en diminuant insensiblement de grosseur depuis sa racine jusqu’à sa pointe, qui est aiguë : à la force et à la forme de ce bec, dont l'extrémité est plutôt dirigée vers le ciel, qu’elle n’est droite et parallèle à l'horizon , pour faire plus certainement l'office de levier, elle a ajouté des pieds courts, épais et nerveux. Le tourne-pierre, qui ne fréquente que nos côtes maritimes, et particulièrement celles du département de la Somme, où il est connu sous le nom vulgaire si 2. 13 194 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de bure, n’a que huit pouces trois lignes de longueur, depuis le bout du bec jusqu’à celui de la queue; son vol est de quinze pouces et demi, et lorsque ses aïles sont ployées, elles sont au niveau de l’extrémité de sa queue. É Le tourne-pierre, que plusieurs auteurs nomment cou- lond-chaud , ressemble assez, quant au vêtement, au pluvier à collier : il a le somment de la tête couvert de petites plumes noïres bordées de blanc; son front est d’un noir pur ,et l’occiput, ainsi que le derrière du cou sont blancs ; ses joues sont d’un beau noir, et d’autant plus moelleux, qu'il est relevé par une tache blanche située entre le bec et l'œil. Le devant de sou cou est noir, et les côtés de cette partie sont du même noir que celui des joues; le haut de son dos, ainsi que ses plumes scapulaires sont teints d’un mélange de. couleurs brune, roussâtre et noire, dont il serait difficile d'analyser l’arrangement et la dis- tribution ; Le bas du dos et le croupion sont blancs, ainsi que la gorge; la poitrine, le ventre, le haut des jambes, les flancs et Îes couvertures du dessous de la queue. Les grandes couvertures du dessus des ailes; celles qui sont plus voisines du corps, sont d’un brun foncé du côté extérieur : elles sont bordées de blanc du même côté et terminées par une frange plus large et de même cou- leur; ces couvertures sont intérieurement variées de gris brun, de noirâtre et de couleur ferrugineuse: les moyennes et les petites couvertures sont variées de même que les grandes, et les pennes des aïles, ainsi que celles de la queue le sont de brun et de blanc. L'iris des yeux de cet oiseau estnoir, de même que son bec : la partie nue de ses jambes, ses pieds et ses doigts, dont les antérieurs sont séparés les uns des autres, sans la moindre apparence de membrane entre eux, sont d’ua jaune orangé; ses ongles sont d’ug brun noir, D’ORNITHOLOGIE. 295 Nous né pouvons rien dire de la ponte du fourne-pierre, sinon que nous avons vu, cette année ( 1805),chezun de nos amis à Macon, deux œufs seulement de cet oiseau, qui sont d’une couleur verdâtre , tachetés de noir; il nous a assuré qu’il les avoit reçus d'Amérique, et que de quatre qu’on lui envoyoit, il s’en étoit rompu deux; il nous fit voir une note relative à ces œufs ( cet ami se borne à une collection de nids et d’œufs d'oiseaux), dans laquelle on lui mandoit que le fourne-pierre ne construisoit point de nid, mais que la femelle se contentoit d’une petite cavité qu'elle s’étoit creusée en grattant le sable. TROISIEME TRIBU.. Nous avons placé dans la troisième tribu du genre des vanneaux le combattant ou paon de mer , qui est aussi seul de son espèce: il a pour caractère particulier un bec aussi long que la tête, un peu épais à sa base , légèrement courbé en en-bas , et foiblement rentlé vers son extré- mité. LE COMBATTANT , OU PAON DE MER, Tringa pugnax. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. Le combattant , ou paon de mer. BRis. Ornith. tom. D, pag. 240. ( Voyez la planche XXVI de cet ouvrage. ) Cet oiseau, auquel on a donné trés-improprement , eton me sait trop pourquoi, le nom de paon-de-mer , que nous 13 * 196 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Jui donnons pour nous conformer à l’usage dés long-temps reçu, sans intention néanmoins de le lui conserver, arrive, chaque année , sur nos côtes maritimes de France, dans le courant du mois de mars ou d'avril; il n’y séjourne que l’espace de deux mois tout au plus. | Les ornithologistes ne sont point d'accord sur les contrées d’où il nous arrive; cependant, il paroît plus probable que c’est du nord 1): on a seulement la certi- tude qu'il en passe un grand nombre sur les côtes d’An- gleterre, où ils fent leur ponte chaque année 2). Ces oiseaur sont remarquables par les combats à ou- trance, quelquefois très-longs, et ordinairement sanglans, qu’a chaque renouvellement de printemps ils se livrent entre eux, soit corps à corps, soit en troupes, pour la seule possession des femelles, dont le nombre est moindre que celui des mâles; et c’est tou;ours en leur présence que ces luttes, qu’elles animent par un petit cri, s’exécutent. Elles sont placées là comme le prix de la victoire, dont les vain- queurs s'emparent aussitôt, tandis que les vaincus, hon- teux de leur défaite, prennent la fuite; mais il arrive assez fréquemment que quelques femelles isolées les avertissent par leurs cris, et conformément à la sensibilité qui carac- 1) On dit que les combattans sont communs non-seulement en Suède, en Daremarck et en Norwège, mais qu’on les trouve encore en abondance dans les marais du nord de la Russie et er Sibérie. 2) Ces oiseaux ont cela de commun avec la plupart des oiseaux de rivuges, de ne point construire de nid, mais de se contenter seulement de gratter la terre avec leurs pieds pour y former un petit creux dans lequel la femelle pond trois où quatre œufs de couleur cendrée, et parsemés de taches d’un brun rougeûtre : ces œufs passent pour être un fort bon mets ; aussi les personnes à l’aise les font-elles rechercher avec soin pour leur table. D'ORNITHOLOGIE. 197 térise ce sexe, qu’elles leur font bientôt oublier leur disgràce , à moins cependant que quelque antagoniste plus vigoureux ne se présente pour leur disputer et leur enlever encore l’objet de leurs désirs et le sujet de leurs tour- mens. Les combattans sont à peu près aussi gros que le cheva- lier commun , mais ils sont moins haut montés que lui. II seroit d'autant plus long et d’autant plus difficile d’entre- prendre de décrire: ici le plumage de ces oiseaux, que, dans un grand nombre d'individus comparés ensemble, il est rare d’en trouver deux qui l’aient parfaitement sem- blable : tout ce que nous en pouvons dire de mieux, c’est que la couleur dominante du dessus du corps, des ailes et de la queue, est un mélange de gris, de brun, de mar- ron, de roux, de pourpré, de noir et de violet qui cha- toie en rouge de cuivre de rosette et en verdâtre doré. Toutes ces différentes couleurs sont distribuées, tantôt en masses plus ou moins cons'dérabies , et tantôt en raies for- mant des zigzags et des hachures ; le ventre et tout le des- sous du corps sont blancs. Les combattans màles sont surtout remarquables par des espèces de caroncules charnues qui leur croissent, au printemps , autour de la base du bec, comme sur le dessus de la tête, et plus particulièrement par une sorte de fraise qui est formée d’un grand nombre de plumes longues, fortes, serrées les unes contre les autres, qui, à la même époque du printemps, leur pousse sur le cou et y fait l’effet d’un plastron, ou, pour mieux dire, d’un vrai bouclier trés-propre à parer les coups que ces champions se portent réciproquement. C’est particulièrement la différence des couleurs de cet ornement qui est cause de la dissemblance des combattans entre eux. Ce beau panache, ainsi que les caronçules de la base du bec ne durent pas toujours. Une 198 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE mue particulière, qui a lieu vers la fin du mois de mai, détruit absolument le premier, ainsi que les caroncules, qui n’existent que jusqu’au moment où les jouissances en ont épuisé les sucs: alors elles s’obliterent et disparoissent entiérement comme leur belle criniére. | Le plumage de la femelle varie beaucoup moins que celui du mâle; elle n’a pas, comme lui, de caroncules autour du bec, ni cette belle collerette dont il est momen- tanément paré; elle est d’ailleurs sensiblement plus petite. Sa tête, sa gorge, son eou, sa poitrine, et tout le dessous de son corps sont blanes; le dessus est un mélange de plumes brunes et de plumes blanches ; les grandes pennes de | ses ailes sont entièrement brunes. L'un et l’autre ont l'iris de couleur de noisette; le bec, la partie nue des jambes, les pieds, ainsi que les doigts, sont de couleur grise et les ongles bruns. Nous présumons, d’après les recherches que nous avons faites sur la ponte de cet oiseau, qu'il ne niche que dans les marais ou sur leurs bords, en Sibérie et en Russie. QUATRIEME TRIB U. Les oiseaux qui composent ceite quatrième et dernière tribu du genre des panneaux se reconnoissent par un bec menu, de moyenne longueur, droit, ou un peu incliné en en-bas, ohtus et lisse. * Cette tribu comprend dix espèces, savoir : le bécasseau, la guignette , le chevalier ordi- naire, le chevalier aux pieds rouges, le che- valier varié, V'alouette-de-mer ordinaire , Va- D'ORNITHOLOGIE. 199 louette-de-mer à collier ou cincle, la maubéche commune, la maubéche tachetée , et la mag: béche grise. G- 1. LE BÉCASSEAU. Tringa ochropus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. Le bécasseau. Bris. Ornith. tom, 5., pag. 177. Sous ce nom spécifique de bécasseau , plusieurs auteurs ont compris un genre entier, composé des plus petits. oi- seaux de rivages, qui ont, à la vérité, quelques rapports extérieurs avec la bécasse, mais qui en différent essen- tiellement par la taille , et surtout par les habitudes naturelles. Mais nous restreignons ici, avec M. de Buffon, le nom de bécasseau à la seule espèce qui est assez généralement connue en Frauce sous le nom vulgaire de eul-blanc 1). Le bécasseau est un oiseau de rivages qui, à la fin de l'été et durant l'automne surtout, fréquente le bord des étangs , des rivières et des ruisseaux paisibles et solitaires, particulièrement ceux qui, comme la Saône, le Rhône, la Seine et la Moselle , sont peu couverts de plantes ; cepen- dant on le rencontre quelquefois, maïs moins fréquemment, sur les bords de la Meuse et sur ceux du Madon, dans les Vosges, malgré que ces deux riviéres soient trés-garnies à leur surface de nénuphars et de roseaux, Durant l'automne EE ! 1) On lui donne aussi dans différentes contrées de la France les noms de pied-vert , de pivette et de sifalson. Dans les Vosges ; le bécasseau n’est connu que sous le nom de bécassine à eul- blanc. 2500 - TABLEAU ÉLÉMENTAIRE il est assez abondant dans le département de la Côte-d'Or, sur les graviers de la rivière nommée Ouche. Le bécasseau fait sa principale nourriture de vers, de moucherons. et d’autres petits insectes sans élitres, qu’il attrape à la course ou bien au vel. Cet oiseau court lége- rement et avec grâce sur la grève, en balançant souvent sa queue. Toutes les fois qu'il prend son essor, il jette un petit cri qui est tres-connu des chasseurs, devant lesquels il s'enléve, non pas en filant, mais en frappant l’air de ses ailes par des bonds détachés. Quoiqu'il passe une partie de l’été chez nous, il est presque certain qu’il n’y niche pas. | - Après avoir consulté les ornithologistes qui ont voyagé dans les diverses contrées du glebe, il nous a paru assez probable que le bécasseau, que l’on rencontre non-seule- ment dans l'Amérique septentrionale, mais aussi en Russie, en Sibérie et en Islande, étoit le même oiseau que l’on retrouve en Egypte comme chez nous; ce qui prouveroit incontestablement que les oiseaux de rivages n’ont, stricte- ment parlant, aucune patrie ni aucune demeure fixe, et que le lieu actuel de leur résidence est celui où ils trouvent des alimens et toutes les autres commodités de la vie. Le bécasseau est un peu moins gros que le pluvier doré; il a huit pouces et demi de longueur, depuis l'extrémité du bec jusqu’à celle de la queue, et quinze pouces neuf lignes de vol : quand ses ailes sont ployées, elles s'éten- dent, à peu de chose près, jusqu’à l'extrémité de sa queue. Tout le dessus de son corps est, généralement parlant, couvert de plumes brunes, bordées de blanchètre; celles qui revêtent la tête et le derrière du cou sont d'un brun cendré , mais sur le dos elles sont d’un cendré rous- sâtre, marquées de petites gouttes blanchâtres sur leurs bords. On voit sur chaque joue deux bandelettes : la pre- D'ORNITHOLOGIE. 201 mière, qui est la plus élevée, est blanche; la seconde, qui est au-dessous, est d’un gris brun. Sa gorge ; le devant deson cou et le dessous de son corps sont blancs; le cou est cependant maculé de petites taches longitudinales de couleur brune cendrée ; les cinq premières pennes de ses ailes sont entiérement d’un brun noirâtre, et les suivantes sont d’un brun cendré, mouchetées extérieurement de blanchâtre, Sa queue, composée de douze pennes, a les deux du milieu coupées transversalement par des bandes blanches sur leur fond , qui est d’un brun noirûtre; les dix collatérales sont blanches, traversées, à leur extrémité seulement, de larges bandes de ce même brun noirûtre. L'iris est couleur de noisette; le bec est d'un vert obscur, et comme pointillé d’une couleur moins foncée; la partie nue des jambes, ainsi que les pieds et les doigts, sont ver- dâtres, et les ongles noirs. Il n’y a entre le mâle et la femelle aucune différence , soit dans la taille, soit dans les teintes et la distribution des couleurs. 2 LA /GUIGNETTE. Tringa hypoleucos. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. La guignette. BRis. Ornith. tom. 5, pag: 183. Il se trouve entre la guignette et le bécasseau tant de ressemblance , qu’on pourroit dire que celle-ci n’est qu’un bécasseau plus petit; car elle n’a que sept pouces et demi de longueur , depuis le bout du bec jusqu’à l'extrémité de la queue, tandis que le bécasseau, mesuré de même, a kuit pouces et demi. M. de Buffon signale, dans le peu de lignes suivantes, ds TABLEAU ÉLÉMENTAIRE cet oiseau de la manière la plus précise :,4 Sa gorge, dit- « il, et son ventre sont blancs; sa poitrine est tachetée de « pinceaux gris sur blanc ; son dos et son croupion sont « gris sans mouchetures, mais ils sont légérement ondés « de noirâtre, avec un petit trait de cette couleur sur la « côte de chaque plume, et dans le tout on aperçoit un « reflet rougeûtre. ? Nous nous contenterons d'ajouter à cette descrip- tion que les pennes des ailes sont brunes, avec quelques taches blanches qui sont semées sur l'intérieur de la plume, ce qui est cause au’on ne les aperçoit que lorsque l’aile est étendue; que la queue est variée de noirâtre, de gris brun et de blanc en dessus; enfin , que l'iris est de couleur de noisette ; le bec brun. La partie nue des jambes, les pieds, les doigts et les ongles, sout d’un brun verdâtre. La seule différence qui se trouve entre le:mäle et la femelle, dans cette espèce, consiste en ce que le trait noï- rätre de la côte des plumes et la petite ligne transversale de même couleur, qui sont simples dans le mäle, sont, doubles dans la femelle. 2 La guignelte arrive au printemps, et en abondance dans le département des Vosges; elle y fréquente de préfé- rence les bords sablonneux de la Moselle, où elle pond, à plate terre, dans un petit creux que la femelle a pra- tiqué, en grattant le sable avec ses pieds, entre les cail- loux. Là, elle dépose quatre ou cinq œufs d’un blane sale, semés de très-petites taches noirâtres, et qu'il est d'autant plus difficile d’apercevoir, qu’on les prend ( c’est ce qui nous est souvent arrivé) pour de petits cailloux. | À peine les petits sont-ils éclos qu'ils quittent le réduit qui les vit naître, etils courent sur la gréveavecune vitesse extrême ; on les prendroit volontiers pour de petits jeunes. de souris. Ce seroit en vain qu’on chercheroït alors à les D'ORNITHOLOGIE. 203 découvrir, car, à la moindre apparente de danger, ils se blotissent à terre, ordinairement entre des cailloux, et on passe souvent dessus leur corps sans qu'ils remuent. Jamais nous n’aurions pu découvrir cette ruse et cette manœuvre, sans le secours d’un petit gardien de chevaux, que l’on nomme dans les Vosges pâtureau. Cet enfant, de dix à onze ans, étoit plein de zèle pour l'étude de la nature en général , dont il ne cessoit d’admirer les productions : il aimoit surtout la botanique , les insectes et les oiseaux, aussi observoit-il les mœurs et les habitudes de ces derniers, etavoit-il grand plaisir à nous en rendre compte; il nousa fait souvent des observations judicieuses dont nous avons profité avec plaisir : c’est lui qui nous a conduits sur de petits jeunes guignelles, cachés entre des cailloux. C’est particulièrement à cet oiseau que l’on applique, dans ces contrées montueuses, le nom vulgaire de lam- biche, quoiqu'on le donne également au petit pluvier à collier. La guignette est un des premiers oiseaux qui, dés la fin de l'été, quitte le département des Vosges pour n’y re- paroître que le printemps suivant. 3° LE CHEVALIER ORDINAIRE. Tringa equestris. LATHAM. Syst. Ornith. gen. 73 Le chevalier. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 188. ( Voyez la planche XX VI de cet ouvrage. ) Il paroît, ou que Linné n’a pas connu cette espece de che- valier, ou bien qu'il l'a confondue avec quelque autre espèce, puisqu'on ne trouve dans son Systema naluræ aucune phrase qui l'indique, 204 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Il paroît aussi que, comme le remarque Bélon , à lavue de cet oiseau , monté sur de hautes jambes , comme s’il étoit à cheval, les Français surtout se sont bien vite déter- minés à le nommer chevalier, épithète que l’on auroit pu appliquer avec plus de justesse et d’exactitude à d’autres oiseaux de rivages bien plus haut montés que lui. Quoi qu’il en soit, la chair du chevalier ordinaire, qui se nourrit d'insectes et de vermisseaux, est un mets que l’on estime autant qu'il est rare , car l’espece n’en est nulle part fort abondante; et c’est sans doute ce qui, aux yeux des friands , ajoute encore à sa valeur intrinsèque, s’il est permis de s'exprimer ainsi. La longueur du chevalier commun, mesuré du bout du bec à l’extrémité de la queue , est presque d’un pied; il paroît bien plus gros qu'il ne l’est en effet, parce qu'il a, comme tous ses congénères , le corps fort garni de plumes. Cet oiseau, qui se trouve le plus ordinairement sur les bords de la mer, fréquente néanmoins nos rivières et nos étangs de la ci-devant Lorraine, où on le voit de loin occupé à chercher des vermisseaux dont il se nourrit : c’est surtout sur le bord des étangs et des riviéres des hautes et basses Vosges qu'on le rencontre le plus fréquem- ment. Il est si défiant et si craintif, qu'il ne se laisse ap- procher que trés-rarement ; on peut même dire qu'on ne le surprend jamais que par la ruse, encore faut-il qu’elle soit bien combinée. Un mélange de gris blanc et de roussâtre, disposés en maniere de frange sur toutes les plumes, compose son vêtement ; il faut cependant en excepter le dessus de la tête, qui est finement pointillée de ces deux couleurs qui, de la, s'étendent sur l'aile dont elles bordent les petites plumes; les grandes sont entièrement noirâtres; tout le D'ORNITHOLOGIE. 203 dessous de son corps, ainsi que son croupion , sont blancs : il a l'iris des yeux couleur de noisette foncée, entouré d’un cercle d’un jaune doré; la partie nue de ses jambes, sespieds, ses doigts et son bec, sont d'un cendré noirûtre, et ses ongles sont de cette dernière couleur. Nous présumons bien que cet oiseau ne niche pas dans nos contrées; c'est pourquoi nous ne pouvons parler, ni de sa ponte, ni de la couleur ou du nombre de ses œufs. Nous aurions bien désiré connoître le pays où il propage son espèce; mais en vain avons nous consulté plusieurs auteurs sur ce point , il n’en est aucun qui en fasse men- tion. h® LE CHEVALIER AUX PIEDS ROUGES. Tringa gambetta. Lin. Syst. nat. éd. 13, gen. 87. Le chevalier aux pieds rouges. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 193. Celui-ci a, du bout du bec à l'extrémité de la queue , onze pouces de longueur environ et dix-sept pouces de vol; ses ailes étant ployées, atteignent l’extrémité de cette partie. Les plumes qui revêtent sa tête, le dessus de son cou et la totalité de son dos sont brunes dans leur milieu, et grises sur leurs bords ; le croupion est blanc ; sa gorge, le devant de son cou, et tout le dessous de son corps sont blancs aussi, mais ils sont légérement ondés de gris et de roussâtre sur le milieu de chaque plume qui recouvrent la poitrine et le devant du cou : les couvertures du dessus des ailes sont de couleur brune dans leur milieu , bordées de gris, et terminées de blanc pour la plupart des vingt. cinq pennes dont l’aile est composée ; les cinq plus voisines 206 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE du corps sont brunes, bordées extérieurement, et en des- sous de gris; les autres sont noiràtres k bordées de blan- châtre en dehors; la queue, qui est étagée du milieu sur les côtés, est composée de douze pennes d’un fond gris brun , rayées transversalement de noirâtre , et terminées de blanc; l'iris est d’un jaune verdètre; le bec est rouge à sa base, et noirätre dans tout le reste de sa longueur; la partie nue des jambes, les pieds et les doigts sont rouges, et les ongles noirs. Cet oiseau fréquente les bords de nos rivières, de nos étangs,. comme nos marais et nos prairies humides et basses dans les départemens des Vosges, de la Haute-Saône, du Loiret et du Pas-de-Calais ; dans ces deux derniers, il est connu sous les noms vulgaires de gambette et de cour- rier; il s'y nourrit de vers, de vermisseaux et d’autres insectes ; il est bien plus haut monté que la guignette : c’est un oiseau qui ne se voit dans nos contrées qu’en hiver; il y arrive en automne et en part au printemps. Le chevalier aux pieds rouges est beaucoup plus rare dans la ci-devant Lorraine, que le chevalier commun ; l’un et l’autre n’y sont que de passage ; ils l’abandonnent tous deux aux approches de la belle saison, pour se porter vers des régions sans doute plus tempérées et plus chaudes, et, dit-on, dans les deux continens. C’est dans ces pays, sans doute, que le chevalier aux pieds rouges va faire sa: ponte qui, au rapport de quelques voyageurs, consiste en trois ou quatre œufs blanchâtres tachetés de rouge. La voix de cet oiseau, qui se rapproche beaucoup de celle du bécasseau, n’est nullement désagréable. On voit des individus de cette espèce qui varient dans les teintes de leur plumage; maïs nous croyons qu'on ne doit attri- buer cette différence, qui est assez légère, qu'a l’âge; car nous l'avons rencontrée dans des mâles, comme dans des femelles, D'ORNITHOLOGIE. 207 PA 5 LE CHEVALIER VARIE. Tringa littorea. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. Le chevalier cendré. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 203. Parmi les ornithologistes, les uns ont désigné cet oiseau sous le no de chevalier noir 1), d’autres sous celui de chevalier cendré 2) et enfin il y en a qui, par une mé- prise impardonnable, l’ont appelé héron blanc 3). Il nous paroïît bien plus naturel de le présenter ici sous l’épithète de varié, que lui donne l’immortel Buffon, d’au- tant mieux que son plumage est effectivement varié de gris, de noirâtre et de roux, dans une proportion presque égale ; car la couleur noiràtre couvre tout le dessus-de la tête et du dos, dont chaque plume est bordée de roux : le fond des plumes des aïles est de cette même couleur noirâtre, et chacune d’elles est frangée ou de blane ou de roussätre ; tout le devant du corps est un mélange de rous- sàtre et de noirâtre amalgamés avec du gris. Le chevalier varié, qui est de la même taille que le chevalier aux pieds rouges, a, comme lui , l'iris d’un jaune verdätre; la partie nue des jambes, les pieds, Les ongles, ainsi que le bec, sont noirs; il est moins haut monté que le chevalier aux pieds rouges. Cet oiseau, qui est de passage annuellement périodique sur la plupart de nos côtes maritimes de France, y arrive de quelques pays lointains que nous ignorons, et où il a fait sans doute de bonne heure ses petits ; car il en ra- mene sur nos côtes, avant le printemps, qui sont encore 1) Belon. 2) Brisson, 3) Albin, 208 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE- fort jeunes ; et lorsqu'on prend cet oiseau à cette époque, il peut vivre en domesticité; il est même suceptible d’une sorte d’attachement assez familier 1). Toutes les fois qu'il a mangé des vers, qui lui souillent le bec d’une espèce d'écume glutineuse qui s’amalgame avec la terre, il court à l’eau pour le laver; et cette habitude lui est commune avec la plupart des oiseaur de rivages. 6° ; & L . L'ALOUETTE-DE-MER ORDINAIRE, Tringa cinclus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. L'alouette-de-mer. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 211. ( Voyez la planche XX VI de cet ouvrage.) La taille de cet oiseau est à peu prés la même que celle de l’alouette des champs ; et quelques rapports dans le plumage de l’une et de l’autre ont engagé les ornitho- logistes à nommer alouettes-de-mer certaines espèces du genre dont nous parlons, quoiqu’elles n’aient rien de commun avec cet oiseau que le nom seul. Leurs habi- tudes sont si essentiellément différentes, que ce seroit ms 1) Feu M. de Baillon, de Montreuil-sur-Mer, ce correspondant instruit, cet ami de l’immortel Buflon, a nourri dans son jar- din , il y a quelques années, un chevalier varié qui, dans le temps de sécheresse , à défaut de vers, se nourrissoit de scarahés, et même de pain macéré un jour dans de l’eau. Cet oiseau, dit M. Baillon, étoit devenu si familier, après quelques mois de domesticité , qu’il suivoit pas à pas mon jardinier lorsqu'il lui voyoit sa bèche, parce qw’il avoit appris, par son expérience , qu’au moyen de cet instrument , le jardinier arrachoit des plantes sous les racines desquelles il se trouvoit souvent des vers en abon- dance , et sur lesquels il se jetoit avec avidité. D'ORNITHOLOGIÏE. 209 tne erreur impardonnable de confondre ensemble ces deux oiseaux. | Celui dont ilest ici question, éstannuellement de passage quoique très-momentané ; au printemps et en aütomme.sur les côtes maritimes du département dela Somme , d’où il se répand au loin dans l’intérieur des terres, ét jusque dans le département des Vosges; là il paroiït toujours en bandes fort nombreuses que lon voit marcher sur là rive des étangs ou des riviéres ; en $eécouant incessamment la queue. Lorsqu'un chasseur a tué un de ces oiseaux, ceux qui lui survivent , au lieu de prendre la fuite , s'empressent au con- traïre de voltiger autour de son cadavre , comme pourlui rendre les derniers devoirs ; et ce témoignage d'affection de leur part, devient toujours funeste à quelques autres. L’alouette de mer ordinaire;, qui est un des plus petits oiseaux de rivages, a sept pouces trois lignes de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue , et tréize pouces quatre lignes de vol. Un mélange de brun et de gris forme toute la couleur de son plumage, sur la tête, sur le cou et sur tout le dessus du corps; on voit un trait blanc placé entre le bec et l'œil; sa gorge êt le devant de son cou sont blanchâtres, tachetés de brun; sa poitrine , son ventre, ainsi que ses côtés, sont blancs ; ses ailes sont variées de brun et de gris, et ses grandes pennes sont ‘brunes, terminées de blanc; toutes celles de la queue sont grises, à l'exception des deux du milieu qui sont d’un brun foncé du côté extérieur, etgrises du côté intérieur ; ces deux mêmes pennes qui se terminent en pointe, sont plus s grandes que les latérales, d'environ trois Bgnes. L'iris est brun ; le bec grêle, cylindrique, obtus, plus court, à proportion, que celui de la becassine, est noir ; la partie nue des jambes et les pieds sont noi- ‘râtres, ainsi que les ongles, Le-2 . , | 1.4 sl TABLEAU ÉLÉMENTAIRE On dit que les œufs que la fémelle de cet oiseau dépose au nombre de trois ou quatre, à plate terre sur la grève L sont trés-gros, eu égard à la taille de cet animal. Il ya toute apparence que l'alouette de mer ordinaire est un gibier peu recherché; car, quoiqu’on en voie beau- coup sur les marchés de Paris , au printemps et en automne, où on l’expose en vente avec d’autres oiseaux d'eau où de rivages, nous avons remarqué, pendant plusieurs années de suite, qu'elle ÿ demeuroit long-temps sans que personne l’achetat. 7. L'ALOUETTE-DE-MER A COLLIER, OU LE CINCLE. Tringa cinclus, pedibus Juscis. Lin. Syst. pat. édit. 1, gen. 87. L’aloueite- de-mer à collier. Brus. Orn.t. 5, p.216. On donne souvent à cet oiseau la seule dénomination de cincle, qui est dérivée du mot grec cinclos, dont Aris- tote s’est servi pour désigner le plus petit des oiseaux de rivages. | En effet, l’alouette de mer à cbr n’a que six pouces neuf lignes de longueur, du bout du bec à l'extrémité de la queue, ct un peu plus d’un pied de vol; lorsque ses ailes sont ployées, elles s'étendent jusqu'a l'extrémité de sa queue. Un peu moins haut monté sur jambes que l'alouelte de mer ordinaire, le cincle a absolument les mêmes couleurs, avec cette seule différence qu’elles sont beaucoup plus marquées, et que les pinceaux de son manteau y sont tracés plus nettement; il a de plus qu’elle un groupe de taches, D'ORNITHOLOGIE. 211 de là même couleur que celle du manteau, lesquelles sont dessinées sur sa poitrine. L'iris de ses yeux est d’un brun noir, de même que son bec. La partie nue de ses jambes, ainsi que ses pieds et ses doigts, sont bruns, ces derniers sont terminés par des ongles noirètres. Les mœurs de cet oiseau sont absolument les mêmes que celles du précédent , ils fréquentent ensemble les fnêmes lieux, et ils ont tous deux le même mouvement de vibration dans la queue. L'un et l’autre sont chez nous de passage au printemps, et ensemble en automne. Seu- lement l'espèce du cincle paroït être beaucoup moins nombreuse que celle de l'alouefie de mer ordinaire. 8° LA MAUBÈCHE COMMUNE. Tringa calidris. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 83. La maubéche commune. Bris. Ornith. tom. 5, p.226. Toutes les espèces de maubèches en général, tiennent lé, milieu , quant a la taille, parmi les petits oiscaux de ri- vages : moins haut montées qu'eux, elles ont aussi le Eee plus court ; et leur forme plus ramassée parait encore plus épaisse que la leur. Ce n’est guère que sur les bords de la mer que l'on encontre ces oiseaux qui y sont seulement de passage pé- riodique, chaque année , au printemps comme en au- tomne : aussi lorsqu'on en voit quelques-uns sur les marchés de Paris, ce n’est jamais que pendant ces deux saisons, et toujours ils y ont été apportés de nos côtes maritimes les plus voisines. Jamais ils ne paraissent sur le bord des eaux de l’intéiieur de la France, à moins 14% 212 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE que quelque accident majeur, tel qu’un ouragan, ne les ait forcés à s’y égarer instantanément. La rzaubèche commune a un peu plus de neuf pouces de longueur , mésurée du bout du bec à celui de la queue, et un pied cinq ou six pouces de vol; lorsqueses aïles sont ployées, elles dépassent sa queue de quelques lignes. Toutes les plumes qui recouvrent le dessus de son corps, depuis sa tête jusqu'au bas de son dos, sont d’un brun noirätre, bordées d’un brun marron clair ; celles qui re- vêtent le bas du dos, ainsi que le croupion, sont d’un gris brun, bordées d’un gris de souris , et marquées leur extrémité d’une petite bande transversale d’un brun noirätre : tout le devant et le dessous du corps, à partir du front, les joues comprises, sont d’un fort beau marron clair : les quatre pennes des ailes les plus voisines du corps, sont brunes; les suivantes sont d’un gris brun, bordées légèrement de blane, et les premières, qui sont les plus éloignées du corps, sont en-dessus et du côté extérieur seulement, d’un brun foncé. Toutes les pennes de la queue sont d'un gris brun , bordées extérieurement de même, à l'exception des deux intermédiaires qui sont sans bordure. 11 n’est aucune espéce de maubèches qui n’ait le bas de la jambe dégarni de plumes, et dans celle-ci ce bas de jambe est brun, de même que les pieds; dans toutes, le doigt du milieu est uni avec l'extérieur, jusqu’a la pre- mière articulation seulement, par une courte membrane. La maubèche commune a l'iris des yeux d’un brun clair; le bec noirètre, moins foncé à sa base, et les ongles d’un brun noir. D'ORNITHOLOGIE. 213 _,0 LA MAUBÈCHE TACHETÉE. Tringa nævia. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 87. La maubèche tachetée. Bris. Ornith. tom.5 , pag. 220. Cette maubèche diffère de la précédente, d’abord en ce qu’elle n’est pas aussi grosse qu’elle; en second lieu , en ce que la couleur brune cendrée qui domine sur le dessus de son dos et deses épaules, est variée par d'assez grandes taches dont les unes sont rousses, et les autres d’un noir violet. Les plumes qui revêtent son croupion sont d’un brun cendré, bordé de blanc dans le pourtour de chacune, leur pointe seule est liserée de noir; les couvertures du dessus de sa quêue sont d’un gris blanchâtre, uniforme dans la moitié de leur longueur, etalternativement rayées de cette couleur et de noirâtre dans le reste : le devant de sa tête, de même que ses joues, sa gorge et le devant de son cou sont pointillés de brun sur un fond blanc roussàtre. Sa poitrine et tout le dessous de son corps sont bruns , excepté les flancs et le haut des jambes ; les premiers sont bruns, tachetés de noir, et le second est gris. Les couver- tures du dessus de ses ailes sont un mélange de gris brun et de noirâtre, quelques unes sont bordées de blanc. Les premières pennes des ailes, celles qui sont les plus éloi- gnées du corps, sont d’un brun noïrâtre en dehors, et celles qui en sont les plus voisines sont d’un brun clair, bordées extérieurement de blanc. Les pennes du milieu de la queue sont de couleur cendrée, bordées de blanc ; les latérales sont d’un brun clair ayant leur tige blanche. J'iris des yeux est de couleur de noisette; le bec est noirâtre; la partie nue des jambes, de même que les pieds ,.sont verdàtres et les ongles noirs. 214 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Cette maubèche ne se trouve, ainsi que la précédente, axe sur les côtes maritimes de France , où elle est, comme elle, de passage. KO "EX MAUBÈCHE GRISE. Tringa grisea. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 85. La maubèche grise. BrRis. Ornith. tom. 5, pag. 333. ( Fzyez la planche XXVI de cet ouvrage. ) Creîte dernière espèce de maubèche est moins grosse que la commune, mais elle l’est un peu plus que la tachetée. Les plumes du dessus de sa tête et de son cou sont grises, bordées de blanchàtre : toutes celles du dessus de son dos sont du même gris, sans mélange; son croupion est aussi de cette couleur , mais il est d’une teinte un peu plus claire; chacune des plumes qui recouvrent cette derniére partie, est d’ailleurs bordée par un double trait, de couleur blan- che dans toute sa circonférence ; les couvertures du des- sus de sa queue sont blanches, coupées transversalement et longitudinalement par des bandes brunes. Sa gorge est entièrement d’un blanc pur; le devant de son cou, ainsi que sa poitrine et ses flancs sont de cette même couleur avec des zigzags bruns disposés parallelement à la circon- férence des plumes. Son ventre est aussi couvert de plu- mes blanches marquées, à leur extrémité, d'un trait longitudinal brun : tout le reste du dessous de son corps, y compris le haut de ses jambes et les couvertures du dessous de sa queue, sont d’un blanc pur : les grandes pennes de ses ailes sont d’un brun foncé, du côté exté- rieur, avec leurs tiges blanches; toutes les autres sont grises, bordées et terminées de blanc; les pennes de sa D’'ORNITHOLOGIE. 219 queué sont également grises , mais elles sont entourées par un petit bord de cette même couleur, qui seulement est un peu plus foncée. L'iris, le bec, la partie nue des jam- bes, les pieds et les ongles sont noirs. Cet oiseau ne se rencontre guëres que sur nos | plages maritimes. Cependant quelques partisans zélés de l’orni- thologie nous ont assuré qu'il faisoit, chaque année, des ‘apparitions courtes sur plusieurs étangs de l'intérieur de la France ; nous avons la certitude qu’on ne le voit jamais sur ceux des hautes et basses Vosges. QUATRIÈME GENRE. LES BÉCASSES. L'espèce de confusion que nous avons cru apercevoir parmi la plupart des petits oiseaux de rivages, nous a engagés à chercher en eux des caractères généraux qui nous parussent invariables , et d’après lesquels on püt classer d’une manière certaine tous les individus de cette troisième et dernière famille, dont le genre des bécasses fait partie, et nous croyons être parvenus à atteindre ce but. C’est donc d’après celle marche, qui jusqu’a- présent nous a semblé uniforme, que nous ran- geons dans le genre des hécasses les oiseaux qui, comme elles, ont pour caractères distinc- tifs trois doigts en avant et de médiocre gran- deur, avec un pouce en arrière : ce doigt exte- 216 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE rieur , Qui est composé de plusieurs articula- tons, est assez long pour appuyer à terre lorsque l'oiseau marche, et il se trouve alors de niveau avec les doigts antérieurs. Mais comme, dans les différentes espèces que ce genre renferme, il s'en trouve qui dif- férent essentiellement les unes des autres, pour ne point les confondre inconsidérément, nous avons eu recours à des caracières secondaires et particuliers, que nous avons tirés de la forme de leurs becs; ce qui nous a fourni le moyen de partager ce genre en quatre tribus. PREMIER TRIBU. Les oiseaux de cette première tribu ont donc pour caracières parliculers un bec menu, droit , tres-long , dont le bout est obtus et ra- boteux , et ne présentent nulle apparence de membrane entre les doigts. Cetie tribu renferme cinq espèces, toutes indigènes de la France, savoir : la bécasse or- dinaire, la bécassine, Va petite lécassine, Va drunetke et la bécassine de la Chine. La bécasse vit habituellement dans les bois; au lieu que les bécassines préfèrent les marais d’eau douce. D'ORNITHOLOGIE. 217 1 LA BÉCASSE CRDINAIRE. à Scolopax rusticola. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. La bécasse. Bris. Ornich. tom. 5 , pag. 292. ( Voyez la planche XX VII de cet ouvrage.) La bécasse est un oiseau de passage qui, chaque année, paroït et disparoit dans les plaines de la plupart des dépar- temens, à deux époques périodiques, savoir: en mars ou avril, et en septembre ou octobre: à ce dernier passage, elles sont chassées du sommet des hautes montagnes où elles ont passé l'été , par l'approche des premiers froids , et surtout par la neige qui commence à en couvrir la crête 1); en mars ou en avril, elles repassent pour se rendre sur les mêmes montagnes, afin d'y propager leur espece. À leur passage de septembre ou d’octobre , elles nous ar- rivent ordinairement une à une et jamais en troupe; en mars, au contraire, ou en avril, elles paroissent plusicurs ensemble, parce qu'alors c’est Le temps de leurs amours, et qu'il est rare de voir, à ce moment, une femelle qui 1) Le froid et la neige ne nous semblent pas être un motif suffisant pour déterminer les bécasses à quitter le sommet des monta- gues, qu'autant qu'elles n’y rencontrent pas, comme dans les plaines, ou du moins dans les plaines des Vosges, de ces en droits marécageux alimentés par des eaux souvent thermales dans lesquelles elles trouvent des vers et d’autres insectes aqua- tiques dont elles font leur principile nourriture : aussi avons- npus tué plusieurs fois de ces ciseaux au milieu de l'hiver, dans Je temps où la terre étoit toute couverte de neige, et à plus d’un pied g'épaisseur. 218 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ne soit accompagnée de plusieurs mâles. qui la courtisent, à moins que la pariade ne soit assortie déjà depuis quelques jours avant leur arrivée. Dans ce dernier cas, il est assez fréquent, du moins dans les Vosges, que la femelle, pressée par le besoin de pondre, et ne pouvant se résoudre à gravir les montagnes qui sont encore couvertes de neige, fait son nid dans les bois de ia plaine, y pond et y élève ses petits : aussi a-t-on remarqué que, dans les années où la neige de nos mon- tagnes étoit plus long-temps que de coutume à se fondre et à disparoitre, les nichées de bécasses étoient aussi plus abondantes dans la plaine de notre département. C'est toujours pendant la nuit, et rarement durant le jour que ces oiseaur voyagent, à moins que le temps ne soit nébuleux. À Icur arrivée, ils se répandent dars les bois, et ils préférent toujours ceux dont le sol est noirûtre, et dont la surface est couverte d’une grande quantité de feuilles se- ches : aussi la parité de couleur entre le plumage de la bécasse, le sol et les feuilles séches, fait qu’elle échappe facilement à la vue; on est même extrémement surpris quelquefois , lorsque, par le bruit qu’elle fait avec ses ailes, on est averti qu’elle vient de partir souvent sous les pieds, pour ainsi dire, sans qu'on ait pu l’apercevoir. Aussi le chasseur, qui la guëte pendant le jour, convaincu que, sans cette précaution, il ferait des démarches infruc- tueuses, a soin de se faire précéder d'un bon chien, qui, par son arrêt, l’avertit de se tenir sur ses gardes, et encore n’arrive-t-il jamais ou presque jamais, que l’homme, même le plus exercé dans cette chasse, découvre à terre une bécasse; et que toujours il est obligé de la tirer au partir. I sembleroiït assez que cet oiseau, avec de gros et grands yeux, devroit avoir l'organe de la vue exquis; cependant D'ORNITHOLOGIE, s1 on croit qu'il ne voit bien qu'au crépuseule, et il a cela de commun avec l’engoulevent et presque tous les oiseaux de proie nocturnes , dont la vue est offusquée par le trop grand éclat de la lumière; car pendant le jour , les bécasses se tiennent tapies à terre, comme nous venons de le dire; mais aussitôt que le soleil décline sur l’horizon , elles se mettent en course et voyagent dans les sentiers humides du bois, ou bien elles se dirigent au vol vers les sillons des champs , dans lesquels des eaux stagnantes contiennent des vers ou d’autres insectes qu’elles recherchent sur les bords pour en faire leur nourriture : Buffon croit que les bécasses discernent leurs alimens par l’odorat, plutôt que par les yeux. C’est dans ces lieux, fréquentés par les bécasses, que l’oiseleur attentif va reconnoître leurs traces, soit par la fiente qu’elles y ont disséminée , soit par les im- pressions que leurs pieds ont laissées sur la vase hu- mide; et la, il leur dresse aussitôt des embüûches; il y tend un lacet à pied, que l’on nomme, dans les Vosges, rejet, avec lequel il attrape ces oiseaux. Ce rejet consiste dans une branche de coudrier , fichée en terre par le gros bout, pliée en demi-cercle, et à l’ex- trémité supérieure de laquelle on a adapté un lacet de erins cordelés ensemble à plusieurs doubles, que l’on dis-, pose en rond sur d’autres petites branches arrangées en forme de quatre de chiffre, et qui sont susceptibles de se détendre au plus léger contact. La bécasse , en piétonnant, marche sur ce trébuchet; le ressort s'échappe, et l'oiseau se trouve suspendu en l'air par les pieds : ce n’est jamais qu'aux approches de la nuit que l’on tend ce piége, dont on fait la visite à la pointe du jour. ( Voyez-en la figure planche XXXVIIT du troisième volume de cet ouvrage.) La réputation que la chair de cetoiseau a acquise, comme 220 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE un mets délicat, est cause qu'on lui fait une guerre ouverts de plusieurs autres manières. Les braconniers, sur-tout ceux qui nesont point assez fer- tunés pour faire la dépense d'un bon chien, ow des diffé- rentes espèces de fileis qui sont toujours dispendieux, n'employent, pour prendre les bécasses, que la passée: ce piége consiste en ce que, quand on s'estaperçu qu'il y a des bécasses dans un bois taillis, on forme, dans une enceinte de quarante ou cinquante pieds, une petite haie de six pouces de hauteur, en laissant, de distance en distance, à travers cette haie, des ouvertures de la largeur du corps de l’oiseau, et on garnit chacune de ces ouvertures d’un lacet de crin ouvert en rond, dans lequel il se prend en piétonnant. Dans certains pays on chasse la bécasse avec un filet que l'on nomme pantière : ce filet consiste en une grande nappe, quelquefois de quatre-vingts pieds de longueur sur trente de hauteur: cette nappe est composée de mailles qui ont au moins un peuce et demi de diamètre; on tend ce filet avant la chute du jour , dans une clairiere du bois, entre deux grands arbres, où on a remarqué que se faisoit le plus ordinsirement le passage de ces oiseaux, qui, lorsqu'ils prennent leur essor pour se répandre dGans la plaine, se jettent à travers les mailles de ce filet, y passent leur tête et s’y engagent le cou. Dans les Vosges, on ne fait point usage dé la pantière, par la raison, sans doute, qu’elle est trop dispendieuse ; on se contente d'ytuer les bécasses à coups de fusil de deux manières, suivant leur double migration. En mars, par exemple, ou au commencement d'avril, tous les citoyens aisés, surtout ceux de la plaine, se rassem- blent en formant des sociétés quclquefoistrès-nombreuses, et partent ensemble un peu avant ka chute du jour, pour D’'ORNITHOLOGIE. 231 se procurer le plaisir de cette chasse, que l’on y nomme la passe : elle consiste à se tenir en embuscade, dans une clai- rière d’un bois, et d'y attendre, armé d’un fusil, ces oiseaux qui sont alors en amour ; et qui se chassent, pendant une heure seulement, et c’est toujours un instant aprés le cou- cher du soleil: ils crient en se chassant ; et, comme on les entend de loin, on se dispose à les tirer dans leur passage 1). Dans les montagnes de ce même département, on chasse les bécasses d’une autre maniere , et dans une autre saison ; on nomme cette seconde chasse la chufe aux bécasses ; elle consiste à former dans les boïs, qui abondent en sources d’une eau fort vive, de petits gués, en arrêtant, par le moyen d’une digue de terre, le courant d’un ruisseau ou d’une fontaine; ce qui forme bientôt une espèce de petit étang : tout prés de là on fabrique une loge de verdure, avec des branchages de hêtre ou de sapins, dans laquelle on attend les bécasses qui viennent au gué, soit pour y chercher des vers, soit pour s’y laver le bec et les pieds: c’est dans cè moment que, de cette loge, qui n’est éloi- gnée du gué que de quelques toises, on tue facilement et à la fois deux ou trois de ces oiseaux, lorsqu'ils ont le malheur de se trouver dans la direction du coup de fusil. 1) Cette chasse est d'autant plns amusante, que deux amis qui se sont occupés pendant tout le jour d’affaires quelquefois sérieuses , se joignent vers l’instant du coucher du soleil, partent ensemble, se placent près l’un de l’autre dans le bois , et peuvent y causer, sans gène, de ce qui les intéresse. Les bécasses n’en passent pas moins , pour cela, au-dessus de leurs têtes, en les avertissant de leur approche par leurs cris. Cette chasse en mars n’a de fatiguant, de mème que la sui- vante qui se fait en automne, que le chemin qu’on est obligé de faire, souvent dans une obscurité profonde, pour revenir à la maison, 2b0 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Cette chasse, qui n’est point fatigante à raïsôn de a proximité des bois dans ces contrées, Commence à sept heures du soir, à la fin de septembre , et elle dure jus- qu'aux premières gelées qui non-seulement font tomber les feuilles, mais forcent aussi les vers à s’enfoncer plus avant dans la terre. La bécasse est un oiseau si généralement connu, qu’il nous paroît presque inutile d’en donner ici le signalement, qui d’ailleurs seroit aussi difficile qu'il seroit long a tracer : qu’il nous suflise de dire seulement que le fond de son plu- mage est d’un gris brun obscur , haché confusément etsemé de tachesirrégulières de gris clair ; de blanc, de marron et de terre d'ombre: que la mandibule supérieure de son long bec en forme seule la pointe qui est arrondié et re- couverte d’aspérités ; que cet oiseau est gros Commé une perdrix ; que ses yeux, fort mauvais quoique gros, sont placés trés-haut et fort à l'arrière de la tête, ce qui est cause qu'il ne peut voir devant lui; que l'iris est de couleur de noïsette foncée; que son bec est d’un gris incarnat à sa basé et noirâtre à son bout; et qu'enfin, la partie nuë de ses jambes , ses pieds, ainsi que ses ongles, sont bleuà« tres. Cet oiseau fait son nid à terre et sans beaucoup d'art, comme presque tous ses congéneres ; il le compose de bu- chettes et de quelques herbages secs; il le place ordinai- rement contre un tronc d'arbre ou sous une grosse racine: la femelle y pond trois ou quatre œufs assez gros, d'un gris roussätre , ondés et marbrés de noirâtre : tout le temps que dure l’incubation, le mâle se tient couché près de sa femelle, et ils reposent mutuellement leur bec sur le dos lun de l’autre. Aussitôt que les petits sont éclos, ils courent Gans le bois; et à cette époque, il y a dans les Vosges des bra- conniers assez expérimentés et assez adroits pour trouver ces jeunes lorsqu'ils ne peuvent.encare voler; ils les at. trappent alors.vivans, à la main, ou bien il les tuent à coups de bâton. , Il n’est nullement Abuteux qu’il à existé une autre es2 pèce de bécasse d’un quart au moins plus grosse que celle-ci, et qui d’ailleurs lui ressemble parfaitement , soit quant au plumage, soit sous le rapport des mœurs : elle ne diffère de la précédente que par ses pieds qui sont d’un gris brun. Nous avons remarqué, en mars; avec plusieurs chas- seurs anciens; que leur passe, qui se fait toujours la dernière, étoit l'annonce certaine de la fin de celle de la bécasse ordinaire. 2. LA BÉCASSINE. Scolopax. ins. Lin. Pos nat. édit. 13, g. 86. La bécassine. BRiS. Ornith. tom. 5 , pag. 208. Un peu plus grosse que la caille, la bécassine a de lon- gueur totale, mesurée de l'extrémité du bec à celle de la queue ; dix pouces ; son bec seul, à la vérité, a deux pouces cinq ou six lignes de long, et son vol est à peu prés dé quinze pouces et demi; lorsque ses ailes sont ployées, elles dépassent un peu les trois-quarts de la longueur dé sa queue, | A la première ;vue, on seroit tenté de croire que Ia bécassine west que la bécasse ordinaire, dessinée sur un module beaucoup plus petit; mais en y regardant de plus prés, on est bientôt convaincu que ce sont deux espècés distinctes et nettement séparées; leurs mœurs et leurs habitudes d’ailleurs établissent, entre elles, une grande 224 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE sg disparité, et quoi qu'elles aient l’une et l'autre Ja tête carrée, les yeux élevés ettrés à l'arrière de cette partie ; leur bec , quoique proportionnément à leur'taïlle respec- tive, soit également long, il nous paroit impossible cependant de les confondre ensemble. D'ailleurs la béeassine ne fréquente pas les bois; elle se tient dans les endroits marécageux des prairies, ainsi que dans les trme et les oseraies qui bordent les rivières | I1 n’en seroit peut-être pas de même à l'égard de la pe- Lite bécassine ; c’est pourquoi nous pensons qué ; pour éviter la confusion qui pourroit régner entre Ces deux oiseaur , il convient d'indiquer la différenee qui se trouve dans leur plumage; ce que l’on verra ci-après: La bécassine ordinaire, dont ilest ici questions estremar-- quable par Le dessus de sa tête, qui, outre qu'il est noir, varié de petites taches fauves , est encore marqué de trois bandes longitudinales roussâtres , dont celle du milieu part de la racine du bec et s'étend jusqu'a l’occiput, tandis que les deux collatérales partent bien aussi du même point , mais elles passent immédiatement au-dessus des yeux. La bécassine a le dessous du cou, à l’endreiït de la racine du bec, blanc; la gorge fauve; la partie inférieure du cou varié de fauve clair:et de brun , la partie supérieure du corps; depuis la tête jusques et y comprises les plumes sca- pulaires, variée de noir et de jaune. Cette dernière cou- leur trace sur le dos quatres bandes longitudinales, qui sont disposées par paires de chaque côté. Le bas du dos ,;'ainsi que 16 croupion, sont d’un brun noirâtre, rayé transversale- ment de roussâtre ; les couvertures du dessus de la queue sont fauves, marquées en travers de bandes noirâtres ; la poitrine, le ventre, le haut des jambes ainsi que les flancs sont blancs : les couvertures du dessous dela queue, qui sont trés-longues, sont de couleur roussàtre, tachetées de noi hp [FL D'ORNITHOLOGIE. 2 ré 2 couvertures supérieures des ailes sont d’un brun foncé, bordées de blanc à leur extrémité. Des AÉRG ERe peaunes noirätres qui composent l'aile, les premières sont bordées de blancet les autres sont ter- minées par cette couleur; elles sont de plus rayées de noir et de roussâtre. La queue est formée de quatorze pennes noires, rayées transyersalement de bandes d’une couleur orangée foncée ; elles sont terminées par cette couleur ét quelquefois de blanc. Lirisest noisette; le bec, brun à sa base est noirâtre dans le reste de sa longueur ; la mandibule su périeure de ce bec dépasse l'inférieure; elle est ur peu renflée à son bout, qui est semé d’aspérités; la partie nue des jambes, aïñsi que les pieds et les doigts, sont verdâtres, et les ongles noirâtres. La bécassine est un oiseau solitaire qui se plait, comme nous l'avons déja dit, dans toutes les prairies basses, humides et marécageuses de la Franee, où elle est de passage annuel ; il ne nous en reste que quelques couples qui, pendant l'été, nichent dans nos marais. Ces oiseaux construisent leur nid d'herbes sèches; ils en garnissent l’in- térieur de plumes ; la femelle y pond quatre ou cinq œufs blanchâtres , oblongs et tachctés de roussâtre : ce nid est ordinairement placé , du moins sur les bords des étangs des Vosges, sous quelques grosses racines d’aune ou de saule. Le mâle de cette espèce ne se distingue de sa femelle, sui- vant quelques auteurs, qu’en ce qu'il est un peu plus gros qu'elle. Nous avons cherché à reconnoitre cette différence par la dissection que nous avons faite de plusieurs indivi- dus, et nous convenons de bonne foi qu’il nous a été impossible d'admettre cette remarque. On reconnoit facilement cet oiseau par un petit cfiassez perçant qu'il fait entendre en prenant son essor, et qu'il prolonge lors même qu'on l'a perdu de vue dans les nua- PEN 15 226 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ges ; ce cri se remarque assez fréquemment pendant lanuif, lorsque cette bécassine voyage dans les ténébres. La chasse la plus commune, celle que l’on fait le plus fréquemment aux bécassines, est au fusil, avec un chien couchant qui parcourt les marais ainsi que les bords, et surtout la queue des étangs; c’est une des chasses où, à l'arrière saison, on tire le plus fréquemment ; aussi un chasseur un peu adroit, qui s'amuse sur nos étangs des Vosges, qui sont ordinairement garnis de ces oiseaux, en tue-t-il souvent plusieurs douzaines dans un jour. On prend les bécassines ou à la passée comme les bé- casses, ou mieux encore avec le traîneau de nuit que l’on emploie pour les aloueltes ; lorsque l’on est assuré qu'il y a de ces oïseaux dans un marais, on le parcourt la nuit avec ce filet, et on les enveloppe de la même maniere que les aloueltes. 3° LA PETITE BÉCASSINE. Scolopax gallinula. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. La petite bécassine. BRis. Ornith. tom. 5, pag. 303. Celle-ci, qui n’est pas plus grosse qu’une alouette, n’a que huit pouces trois lignes de longueur, du bout du bec à celui de la queue ; elle est de moitié plus petite que la précédente. Son plumage d’ailleurs est plus brillant : on la reconnoît facilement, en ce qu’elle à le dessus de la tête d’un noir lustré et varié de petites taches fauves; elle est encore remarquable par deux bandes longitudinales jaunes, qui, partant du bec, passent au-dessus de chaque œil, et se dirigent vers l’occiput : son dos, ainsi que ses plumes scapulaires qui sont longues et soyeuses, sont variés de moir et de fauve; la couleur noire surtout est suscep- D'ORNITHOLOGIE. 227 tible de reflets qui châtoyent en un vert doré fort brillant, On voit sur les plumes scapulaires quatre bandes lon- gitudinales d’un fauve clair ; la queue qui n’est composée que de douze pennes, établit, entre la petite bécassine et la précédente, une disparité sensible; tout le reste de son plumage a beaucoup de rapports avec celui de cette bécassine ; son iris, son bec et ses pieds , ainsi que la partie nue de ses jambes, sont de même couleur que les siens. Cet oiseau, qui est bien moins commun que la bécassine ordinaire, reste presque toute l’année chez nous; il se tient caché dans les marais, et surtout au bords des étangs, où il se tapit, sous les joncs ou sous les plantes aquatiques; il est si difficile de le faire lever, qu’il faut presque marcher sur lui pour l’obliger à partir, et c’est delà qu’on lui a donné , du moins dans les Vosges, l’épithète de bécassine sourde, parce que l’on suppose qu’elle ne tient aussi obsti- nément son gîte que parce qu’elle est effectivement sourde $ mais ce motif nous paroît dénué de fondement : car, en lui supposant même cette infirmité de l’organe de l’ouie (infirmité dont on ne peut citer d'exemple dans aucune autre espèce d'animaux ), il faudroit donc encore supposer qu’il seroit également disgracié par la nature, du côté de la vue. C’est sur le bord desmêmes marais ou sur celui des étangs que cette bécassine fait son nid; la femelle y pond quatre ou cinq œufs oblongs, blanchâtres, tachetés de roussàtre , et dont la grosseur est proportionnée a la taille de cet oiseau. La chair de la pelite bécassine a malheureusement acquis au tribunal judiciaire des gourmands, la fatale réputation d’un mets plus délitat que celle de la précédente, et de-là ést née l’ardeur de certains chasseurs, avides d’une rétri- bution plus lucrative, à lui faire une guerre plus san- glante et plus cruelle. 15 * » 228 TABLEAU ÉLEMENTAIRE 4. LA BRUNETTE. Scolopax pusilla. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. La bécassine d'Angleterre. Bris. Ornith. t. 5, p. 309. Quoique Brisson désigne PAngleterre comme le pays natal de cette petite bécassine, et que Buffon lui-même, d'après Willugby, la donne comme exclusivement propre aux parties septentrionales de ces contrées; quoique d’au- tres ornithologistes, recommandables d’ailleurs, se con- tentent de faire de cet oiseau une simple variété de la pe- lite bécassine, cependant notre opinion est d'autant moins conferme avec celle de ces naturalistes ( en toutes autres circonstances nous les prendrons toujours pour nos guides etnos modèles), qu’en 1739, un vieux chasseur des Vosges, nous apporta une brunette, en nous assurant, à la vérité, que c’étoit la premiére de cette espèce ( et certes, c’étoit un grand pourvoyeur de tables des friands), qu'il tuoit depuis quarante ans qu’il s’'adonnoit à la chasse. Il nous ajouta qu’elles étoient deux, et qu’il avoit re- marqué (car, quoique sans instruction, cet homme savoit observer, et il observoit surtout les productions de la nature), que ces oiseaux ne se tenoient pas sur le bord de l'étang où il tua celui dont il est ici question, mais à plus de cent pas de distance de-là, dans les herbages d’une prairie voisine , ef même un peu élevée; il avoit remarqué aussi qu’ils filoient a terre avec une vitesse extrême devant son chien; qu’ils portoient la tête très -élevée dans leur course , laquelle ils interrompirent plusieurs fois pour se blotir contre terre ; il avoit remarqué enfin, qu’au partir, ces mêmes oiseaux, sans jeter aucun cri, s’étoient élevés d'abord perpendiculairement sur le point d’où ils avoient D’ORNITHOLOGIE. 229 pris leur essor, s’y étoient replongés comme un trait, et puis qu'ils avoient continué leur vol dans une direction droite et horizontale : ce premier mouvement fut cause qu'il manqua l'un d'eux. Le peu de mots descriptifs que Mauduyt donne de cet oiseau, en est un signalement fort exact, sinon qu'il lui accorde la taille de la petite bécassine, tandis qu’il est d'un huitième au moins plus petit; son cou et sa poitrine sont effectivement, comme le dit cet auteur , blancs, mouchetés de noir; le haut de son ventre est de cette dernière cou- leur, ondée de blanc; le bas de cette partie, ainsi que les couvertures du dessous de sa queue, sont d’un blanc pur : tout le dessus de son corps est d’un fauve diverse- ment bariolé de taches et de lignes blanches et noires; les pennes de ses ailes sont d’un brun bleuàtre : des douze pennes qui composent sa queue, les deux intermédiaires de cette partie sont brunes, marquées de quélques taches d’un brun plus foncé ; les latérales sont d’un brun clair et uniforme. L'iris des yeux de cet oiseau, tué de l’avant-veille, nous a paru bleuäâtre , ainsi que ses pieds et la base de son bec, qui, d’une longueur proportionnée à celui de la petite bécassine , est un peu recourbé en en-bas, et de couleur noïre dans tout le reste de sa longueur, de même que ses ongles. 5° LA BÉCASSINE DE LA CHINE. Scolopazx capensis. LiN. Syst. nat. édit. r3, gen. SG. La bécassine de Madras. Bris. Orn. tom. 5, p.308. Quoique les Vosges soient situées à une distance im- mense de la Chine, qui, au rapport de plusieurs auteurs, paroît être le pays exclusivement propre à l'oiseau dont L4 230 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE nous parlons ici, etauquel, pour cette raison, sans doute, on a donné l’épithéte sous laquelle on le désigne, cepen- dant on le rencontre également sur la plupart des étangs, de la partie agricole, comme sur ceux de la partie montueuse de ce département; car non-seulement nous en avons tué plusieurs fois sur l'étang de Biécourt dans les basses Vosges, mais on nous a encore envoyé quelques individus de cette même espéce, pour notre cabinet, dont les uns avoient été tués sur des marais tourbeux des environs de Plom- biéres, et les autres sur ceux de Certigny, situés sur les montagnes de ce même département. Cet oiseau un peu moins gros que la bécassine ordinaire, paroit d'abord en avoir le plumage; mais en y regardant de plus prés, surtout avec les yeux d’un ornithologiste serupuleux, on y aperçoit des différences hien sensi- bles. Sa tête, variée de fauve et de noirâtre, est remarquable par une raie fauve, bordée de chaque côté d’une autre raie brune; ces raies partent de la racine du bec, passent au milieu du sommet de la tête etse dirigent vers l’occiput; un peu plus bas une troisiéme raie blanche, qui passe au-dessus des yeux, tire son origne de la même base et se termine au même endroit : on voit de chaque côté de la commis- sure des mandibules du bec une autre petite raie grise qui se termine au-dessous de l’œil; la gorge est d’une couleur blanchâtre qui, sur le cou, prend une une teinte grise maculée de raies alternativement noirâtres et fauves: on re- marque sur le hautde la poitrineune espèce de petit plastron noir, et tout le reste du dessous du corps est blanc, le dessus est entièrement d’un fond gris, moucheté de jau- nâtre et de blanc, entrecoupé par des lignes noires fort étroites; la queue est composée de douze pennes D’'ORNITHOLOGIE. 2371 d’une couleur grise, rayées transversalement de noir et semées de petites taches roussâtres : cette béèassine a l'iris des yeux d’un brun clair entouré d’un cercle presque imperceptible de couleur jaunàtre; son bec, aussi long que celui de la brunette , est brun dans toute sa lon- gueur, ainsi que la partie nue de ses jambes et ses pieds qui sont sensiblement plus élevés que les siens ; ses ongles sont noiratres. DEUXIEME TRIBU. Cette seconde tribu, du genre des bécasses, est composée des diverses espèces de barges , dont les caractères particuliers se tirent de la forme de leur bec, qui est deux fois plus long que leur tête : ce bec, grêle, cylindrique, et plutôt recourbé en en-haut que droit, a le bout de sa mandibule supérieure obtus et lisse; le doigt extérieur est uni avec celui du milieu, jusqu’à la première articulation seu- lement, par un rudiment de membrane. Cette tribu contient quatre espèces, qui sont la barge commune, la barge aboyeuse, la barge rousse et la barge aux pieds rouges. Toutes les barges sont des oiseaux solitaires qui choisissent de préférence, pour leur séjour habituel , les marais salés, k5 © à TABLEAU ÉLÉMENTAIRE [a] 1. LA BABGE COMMUNE. Scolopax limosa. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. La barge. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 262. ( Toyez la planche XXVII de cet ouvrage.) Quoique les barges, dans le temps de leur migration, quia lieuen automne, paroissent confinées et circonscrites, pour ainsi dire, dans les marécages, les terres fangeuses, et dans les grèves limoneuses de quelques-unes de nos côtes maritimes , cependant, avant la destruction des grands étangs du département des Vosges, on en voyoit assez fréquemment à l’arrière-saison, ét particuliérement la barge commune sur celui de Biécourt, situé dans la partie basse et agricole de ce département. Nous avons la pres- que certitude que ces oiscauxr ne paroïissent jamais sur les lacs, non plus que sur les étangs de nos montagnes. Les barges se plaisent à plonger leur long bec dans la boue pour y chercher des vermisseaux, ou quelques plantes aquatiques dont elles se nourrissent : la nature a pourvu le bec de ces oiseaux d’une sensibilité exquise, au moyen de laquelle ils savent discerner à travers l’opacité de la fange les alimens qui leur conviennent. Ces animaux sont extrêmement timides, farouches, tristes ct mélancoliques; aussi à la moindre apparence de danger dont ils se croient menacés, ils cherchent bien vite leur salut dans la fuite. Lorsqu'en automne les barges font chez nous leur pas- sage momentané, elles se tiennent tranquilles, pendant le jour, dans l'épaisseur des herbages aquatiques, d’où elles ne sortent qu'aux crépuscules pour chercher leur subsis- tance; c'est dans ce moment que, surtout au clair dela D'ORNITHOLOGIE. 233 lune , on les entend pousser dans les airs où elles voya- gent en bandes, quelquefois très-nombreuses, des cris rauques et en même temps peu sonores que Belon a com- parés au bêlement étouffé d’une chèvre. Toutes les espèces de barges sont très-haut montées sur jambes, aussi les étendent-elles en arriére en volant pour suppléer à leur queue qui est fort courte, afin d'établir pär-là un contre-poids avec leurs parties antérieures, comme tous les oiseaux de rivages en ont l’habitude : elles se font surtout remarquer par la vitesse extrême avec laquelle elles courent sur la gréve des rivages de la mer. La barge commune a du bout du bec à l'extrémité de la queue, quinze pouces et demi à peu prés, et deux pieds de vol; ses longues jambes sont noires, ainsi que ses on- gles et l’ÿis de ses yeux; son bec, qui a quatre pouces de longueur , est rougeûtre dans sa plus grande partie, et noirâtre à son extrémité. Le plumage de cet oiseau est entiérement gris, excepté sur le front ét sur la gorge qui sont roussàtres; son croupion, de même que son ventre, sont blancs; les pennes les plus extérieures de ses ailes sont noirûtres , et les autres sont marquées d'une grande quantité de blanc; celles de la queue sont de cette même couleur noiràtre,, bordées de blanc. Il est très-probable que les barges, dont la chair passe pour -être un fort bon mets, se retirent en été dans des contrées froides et humides où elles font leur ponte , pour reparoître ensuite, en automne, durant quelque temps chez nous. | 254 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 2. LA BARGE ABOYEUSE. Scolopax totanus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. La barge grise. Bris. Ocnith. tom. 5, pag. 267. C'est probablement d'aprés le cri de cet oiseau qui, sans doute, a quelque rapport avec l’aboyement d’un chien, que les Anglais ont donné à cette barge le surnom de barker, qui signifie, en français, aboyeuse. Bien moins grosse que la précédente, cette espèce n’a guère plus de onze pouces et demi du bout du bec à l’ex- trémité de la queue. Quoiqu’elle n’habite ordinairement, dans le temps de son passage qui a lieu en automne, que les marais et les eaux stagnantes qui se trouvent sur les bords de nos côtes maritimes, il s’en échappe néanmoins chaque année un assez grand nombre dans la ci-devant Lor- raine, sur les marais salés de Vic et de Moyen- Vic, aujourd’hui département de la Meurthe, où eet oiseau est vulgairement connu sous le uom de petit corlieu. Le sommet de sa tête et le dessus de son cou sont d’un brun noiràtre, moins foncé sur les côtés ; tout le dessus de son dos, y comprises les couvertures de ses ailes, est d’un gris brnnâtre, varié de taches noires, moins grandes cependant sur les couvertures, dont chaque plume est bordée de blanc; tout le dessous de son corps, à partir du cou, èst d’un fond blanc, maïs ce blanc n’est pur que depuis le ventre jusqu'aux couvertures du dessous de la queue inclusivement : le cou et la poitrine ont toutes les plumes qui les recouvrent marquées d’une raie longitudi- nale brune dans leur milieu. Les grandes pennes des ailes sont un mélange de gris-brun et de blanc diversement dis- D'ORNITHOLOGIE. 255 tribués ; celles de la queue sont blanches, marquées de lignes transversales brunes. Cette barge a les yeux d'un marron foncé, le bec brun, la partie nue des jambes, ainsi que les pieds gris, et les ongles noirûtres. Lewin qui a figuré cette barge dans la planche 164. de son ouvrage, dit qu’elle pond dans les marais salans des côtes de l’Europe, et que ses œufs qu’il a aussi figurés, planche 56.°, n.° 2, sont gris, tachetés de brun. 3° LA GRANDE BARGE-ROUSSE. sien æœgocephala. Lin. Syst. nat. édit. 13, g.86. La grande barge rousse. BRis. Ornith. tom. 5, p. 284. Ce n’est que comparativement avec une utre espèce de barge rousse qui n’est que de la grosseur de l’aboyeuse, n'ayant que treize pouces de longueur du bout du bec à celui de la queue, que l’on a donné à celle dont nous par- Jons icile surnom de grande, parce qu’elle a quinze pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue; l’une et l’autre se trouvent dans le même temps à-peu- prés sur nos côtes maritimes, où elles arrivent en bandes quelquefois assez nombreuses, sans néanmoins jamais se mêler ensemble. Chaque plume qui recouvre le sommet de la tête de cet oiseau, ainsi que son cou et tout le dessus de son corps, est noirâtre, bordé de roussâtre : on remarque sur chacune de ses joues une bande d’un blanc roussàtre, qui part de la racine du bec, passe au-dessus des yeux et se dirige vers l’occiput : il a la gorge et le cou roux, tout le dessous de son corps est d’un blanc sale, rayé transversalement de noirâtre ; les grandes pennes de ses ailes, qui sont noires avec leurs tiges blanches, ont les 256 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE trois premieres traversées, vers le tiers de leur longueur, par une bande blanche qui contraste parfaitement bien avec le noir velouté qui termine ces mêmes pennes ; celles de la quèue sont noirâtres , marquées de lignes blanches aussi transversales. Cette barge a l'iris des yeux couleur de noisette; son bec d’un blanc roussàâtre depuis son origine jusques vers la moitié de sa longueur, est noir dans tout le reste; la partie pue de ses jambes, ainsi que ses pieds et ses doigts sont d’un verd rembruni, et ses ongles noirs. Nous regrettons de ne pouvoir donner-sur ces espèces d'oiseaux des renseignemens relatifs à leurs mœurs et à leurs habitudes qui, sans doute, sont différentes dans leur pays natal que chez nous, où ils ne paroïssent qu'instan- tanément ; la maniere de construire leur nid, leur ponte et l'éducation de leurs petits, offrent sûrement un intérêt dont nous aurions désiré pouvoir rendre compte, si nous eussions été à portée de les connoître. 4° LA BARGE AUX PIEDS ROUGES. Scolopax obscura. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. Cette derniére espèce de barge indigéne de la France dont Brisson n’a pas parlé, parce que, sans doute, il ne l’a pas connue, a été découverte dans les Pyrénées par Picot de la Peyrouse, cet habile observateur à qui l'histoire naturelle a l’obligation de plusieurs découvertes importantes, surtout en ornithologie. Un des caractères les plus frappans, et qui empêche de confondre cet oiseau avec aucun autre de son espece, consiste dans la couleur de ses pieds qui sont d'un rouge D'ORNITHOLOGIE. 259 de vermillon le plus vif et le plus éclatant, lequel semble se réfléchir sur la base de la mandibule inférieure de son bec, jusque vers le milieu de sa longueur, où cette cou- leur se perd, par une nuance insensible, dans le noir du reste de l'étendue de cette mandibule , comme sur la partie supérieure de cet organe. L’iris des yeux de cette barge est d’une couleur noisette sur laquelle le rouge des pieds semble aussi se réfléchir, et ses ongles sont noirs. Cette espèce, moins grosse que la berge commune, a environ treize pouces de longueur, mesurée de l’extrémité du bec à celle de la queue; la forme de l'organe de la mas- tication de cet oiseau présente un autre caractère qui le fait remarquer encore, c’est qu'outre qu’il est long de plus de deux pouces, il est encore arqué eñ en-bas près de son insertion avec la tête, puis ilse recourbe en en-haut vers son extrémité. Toutes les couleurs de son plumage consistent en un gris-cendré qui recouvre la partie supérieure du corps, et en un blanc de neige qui est répandu sur la totalité du dessous; les pennes de ses ailes sont brunes en-dehors et blanches en-dedans ; des douze pennes qui composent sa queue, les deux du milieu sont d’un gris cendré , comme le dessus du corps, et les cinq de chaque côté sont liserées et comme dentées sur leurs bords par une couleur blanche. Il est très-probable que cette barge n’est que de pas- sage momentané dans les Pyrénées, comme les autres es- péces le sont sur nos côtes maritimes et sur-tout dans quel- ques parties de l'intérieur de ce vaste empire. TROISIÈME TRIB U. La seule espèce que la troisième tribu du genre des bécasses renferme , la seule qui soit 258 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE indisène de la France, où elle n’est cependant que de passage momentané, est le courlis or- dinaire. Il s'arrête à peine dans quelques - uns de nos départemens intérieurs , tel que celui des Vosges, où il se tient sur les bords de la Moselle, ou bien auprès de quelques étangs. Son séjour est un peu plus prolongé dans nos contrees maritimes. Il offre, pour caractères particuliers , un bec arqué en en-bas , trois fois plus long que la tête; ce bec est foible, sans consistance, et comme émoussé à son extrémité; le doigt du mieu est réuni avec l'extérieur , jusqu’à la première articulation seulement, par une petite portion de membrane. LE COURLIS ORDINAIRE. Scolopax arquata. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 86. Le courlis. BR1S. Ornith. tom. 5, pag. 311. ( Voyez la planche XX VII de cet ouvrage.) Le courlis est un oiseau de rivage à cou et à pieds très- lonss : il est aussi gros qu’un chapon demoyenne taille; sa £S ; 14 y largueur , prise de l'extrémité du bec à celle de la queue, est d'environ deux pieds; ila plus de trois pieds de vol, et lorsque ses ailes sont ployées , elles s'étendent aux trois quarts de la longueur de sa queue: son bec, long de einq D'ORNITHOLOGIE. 239 ou six pouces, est courbé en arc en en-bas ; il est assez grêle, sillonné de rainures et terminé par une pointe mousse ; la substance qui compose cet organe estsitendre, que l'oiseau ne peut en faire aucun autre usage que celui de saisir dans la boue et la fange des marais des vers et d’autres insectes aquatiques et mous dont il fait sa prin- cipale nourriture; la mandibule supérieure de ce bec est brune et l'inférieure blanchâtre; l’une et l’autre sont noirâtres à leur extrémité. Le courlis a le cou nécessairement long, puisqu'il est fort haut monté sur jambes : on conçoit que sans cette proportion de longueur réciproque entre ces deux parties, l'oiseau n’auroit pu saisir les alimens propres à le sub- stanter; la partie nue de ses jambes , ses pieds, ainsi que ses ongles sont bruns; il a entre les doigts une petite portion de membrane qui ne s’étend pas plus loin que l'articulation de la premiere phalange. Le courlis posé à terre court avec une vitesse extrême, et il ne vole jamais qu’en troupe : sa chair paroît peu re- cherchée, à raison de la forte odeur de marais qu'elle exhale. Cet oiseau a l'iris des yeux d’un brun rouge; son plu- mage a de commun avee celui de presque tous les oiseaux de rivages, de ne présenter que des couleurs sombres plus ou moins tranchées, et presque toujours sans éclat. Les plumes du sommet de sa tête, celles de son cou sont brunes dans leur milieu et fauves sw les côtés; celles de sa gorge sont blanchâtres avec une petite tache d’un brun clair; tout le dessus de son corps est un mélange de brun, de fauve et de blanchâtre; sa poitrine et ses flancs sont d'un gris fauve; chacune des plumes qui re- vêtent ces parties est marquée dans son milieu et vers son extrémité d’une bande longitudinale qui a la forme d’un 240 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE fer de lance; toutes ces plumes sont en outre tranchées a leur sommet par des bandes transversales; les unes comme les autres sont de couleur: brune; le ventre et le croupion sont entièrement d’un blanc pur; tout le dessus du corps est un mélange de gris, de brun et de blanchätre. disposés par taches, qui paroissent enchàssées les unes dans les autres, et qui offrent à la vue le lustre de la soie; les pennes des ailes sont variées de bandes et de taches grises-blanchâtres, brunes et disposées ir- régulièrement, de maniere cependant qu’elles paroissent comme engrenées ensemble; les deux intermédiaires de la queue sont grises et les latérales blanches; toutes sont coupées transversalement par du brun. La femelle ne diffère du mâle qu’en ce qu’elle est plus pelite que lui : nous ignorons la mavière dont cet oiseau fait son nid, le nombre d'œufs que la femelle pond, leur forme et la couleur de leur robe (1. On ne voit guère de courlis que sur nos côtes maritimes. Il semble que cet oiseau aime de préférence les bords de la mer; car, au rapport des voyageurs, on le trouve dans tous les parages du Nord comme dans ceux des régions brülantes. Il est tres-probable que le courlis tire son nom du cri 1) On prétend, et nous ne pouvons pas garantir ce fait, que, pour construire son nid , le courlis ordinat;e, ramasse quelques herbages, qu’il dispose sur les bords inâccessibles d’un vaste étang ou d’une grande rivière ; que Ja femelle y poud quatre ou cinq œufs olivärres , tachetés de brun rougeètre, surtout vers le gros bout. & On prétend également que la chair de cet oiseau est peu esti- mée, quoique quelques personnes disent qu’elle a autant de fumet que celle de la perdrix. Le courlis marche bien plus vite qu'il ne vole : aussi la difficulté qu’il éprouve à prendre son essor est cause qu’on le tue facilement, D'ORNITHOLOGIE. . 241 qu'il fait entendre surtout pendant la nuit et qui semble exprimer ces deux monosyllabes. I seroit à desirer que tous les animaux en général eussent un son de voix particulier, et que l’homme püt le nommer : ce seroit un des moyens les plus sûrs de les reconnoître tous, et de reculer par la les bornes de la zoologie, dont les progrès ont coûté tant de peines et de travaux aux savans qui s’en sont oceupés. On seroit du moins assuré que le nom que chacun d’eux indiqueroïit seroit celui de la nature, puisqu'il seroit le mème pour tous les idiômes et pour toutes les langues des hommes qui peuplent les diverses contrées du globe : alors le seul instinct de cette même nature suffroit pour que les nations, même les plus grossières et les plus sauvages reconnussent et signalassent toutes les espèces qu’elles auroient eu occasion de voir et surtout d'entendre. QUATRIEME TRIBU. Cette quatrième et dernière tribu du genre des bécasses contient des oiseaux dont les ca- ractères particuliers consistent en un bec court, convexe dans toute sa longueur , comprime par les côtés, et terminé par une pointe aiguë , di- rigée en en-bas, et dans l’ongle du milieu des trois doigts antérieurs , qui est marqué d’une arêle dentée comme une scie. Nous ne connoissons de cette tribu que trois espèces d'oiseaux indigènes dela France;savoir, la perdrix-de-mer ordinaire, la perdrix-de-mer grise, et la perdrix-de-mer à collier. 5 | Q Er 14 1 sis TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 1° LA PERDRIX-DE-MER ORDINAIRE. Glareola austriaca. LAN. Syst. nat. éd. 13, gen. 00. La perdrix-de-mer ordinaire. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 141. ( Voyez la planche XX VII de cet ouvrage.) Cet oiseau de rivage qui, comme quelques-uns de ses congénères, n’a d’autres rapports avec la perdrix ter- restre que le nom, n’est guëre plus gros qu’un pinson d'Ar- dennes ; ses ailes, qui ont leur coupe en pointe comme celles des hirondelles , lorsqu’elles sont ployées, s’étendent jusqu’au bout de la queue. Cette espèce a le sommet de la tête, le dos, le crou- pion, les plumes scapulaires et les couvertures du dessus de la queue d’un gris-brun ; on voit de chaque côté de sa tête une tache blanche qui est placée près de ses yeux : sa gorge et son cou sont blancs; ils sont marqués d'une bande brune , encadrée dans un filet noir qui forme sur ces parties une sorte de collier; sa poitrine, ainsi que le dessous de son corps, sont blanchâtres ; les grandes pennes de ses ailes sont noirâtres et les moyennes d’un gris-brun; sa queue est de cette derniére couleur ; elle est un peu fourchue comme celle de plusieurs espèces d’hirondelles ; l'iris de ses yeux est rougeûtre : son bec, de couleur noîrâtre , assez court, convexe en dessus, com- primé par les côtés et courbé en en-bas vers sa pointe, qui ést aiguë , a quelque rapport avec celui des gallinacés ; et c’est probablement cette similitude, néanmoins peu exacte, de conformation qui a fait donner à cet oiseau le. nom très-impropre de perdrix : ses narines sont fort étroi- tes; elles sont obliquement placées à la base de l'organe D'ORNITHOLOGIE. 243 de la mastication : la partie nue de ses jambes, ses pieds, ainsi que ses doigts, dont celui du nuülieu est uni avec l’ex- térieur par une courte membrane, jusqu'à la première artiçulation seulement, sont jaunâtres, et ses ongles noi- rätres; celui du milieu des trois doigts antérieurs est re- marquable par une arête qui est dentée comme unescie. Cette perdrix de mer fréquente la gréve et surtout les bords sablonneux de plusieurs de ros côtes maritimes, ainsi que ceux du Rhin, surtout vers Strasbourg, où elle n’est que de passage annuellement périodique : on en voit assez souvent sur les bords également sablon- neux de quelques étangs, et plus particulièrement sur ceux de la Moselle, où elle ne fait que des apparitions ins- tantanées; nous ly avons vu plusieurs fois cependant, et toujours elle filoit avec une rapidité extrême, cherchant et ramassant par-Ci par-la des vermisseaux et d’autres insectes aquatiques, dont elle faisoit sa principale nourriture. Nous avons toujours remarqué, durant un certain nom- bre d’années, qu’on ne rencentroiïit jamais cet oiseau sur le bord des rivières, des lacs ou des étangs bourbeux, mais toujours sur ceux dont la grève étoit baignée par des eaux limpides. ; 0 2. LA PERDRIX-DE-MER GRISE. e . . . . e. . e ° . ° Ê 0 C2 . . . . . ° La perdrix-de-mer grise. Bris. Orn. tom. 5, p.141, Cette espèce, dont Linné n’a pas fait mentio» , et qui est à peu prés de la grosseur d’un merle, sc tient presque ha- bituellement sur les bords sablonneux de nos eôtes mari- times, où elle est de passage annuellement périodique : néanmoins il s’en écharpe quelques-unes, mais bien plus 16 * 24% TABLÈAU ÉLÉMENTAIRE rarement que la précédente, qui viennent visiter instan- fanément les bords de certaines riviéres de la ci-devant Lorraine 1). ï) On étoit sur le point d'imprimer cet article , lorsqu’à rotre retour d’un voyage de trois mois que nous avons fait pour ac- compagner son excellence monseigneur Francois ( de Neufchateau }). en qualité de secrétaire, dans sa sénatorerie de Dijon, d’où nous avons parcouru ensemble les trois départemens qui en dépendent ; savoir, Saône-et-Marne , la Côte-d'Or et Saôue-et- Loire. Parmi les divers renseignemens que nous avons été fort aises de nous procurer sur plusieurs espèces d’oiseaux qui fré- quentent ces contrées, nous avons été extrèmement satisfaits de découvrir, le 25 avril, chez un particulier de la petite ville de Charolies, départemeït de Saône-et-Loire, trois perdrix-de-mer grises qu’il venoit de prendre sur les bords de la petite rivière qui baigne les murs de cette ville, et qui étoient encore vivantes. Ce particulier , que nous ne connoissions nullement, s'amuse, les dimanches, à faire la chasse à toutes les espèces d'oiseaux, dont il fait un petit commerce. 11 nous offrit avec beaucoup d’'honnèteté ces trois perdrix-de-mer grises qu’il avoit appris à connoître d’un ancien médecin, sous le nom de gloriole, et nous en acceptämes volontiers une. Maïs ce qui nous intéressoit da- vantage, c’étoit de connoïtre la manière dont il prenoit ces oiseaux, et d'apprendre de lui s’ils paroissoient fréquemment dans ce pays. À la première question, il nous répondit complai- samment que c’étoit avec un ou plusieurs trémailliers de cailles ; que lorsqu'il s’apercevoit que cet oiseau étoit arrivé, 1l cherchoit à le découvrir, et que la pointe du jour étoit l’instant le plus propice pour cela, parce qu’il croyoit que la rosée, qui lui avoit beaucoup mouillé les ailes, l’empêchoit de s’envoler aussi faci- lement qu’il le feroit en plein midi; qu’alors il tendoit à une certaine distance de l’endroit où il avoit remarqué cet oiseau, un ou plusieurs de ses trémailliers, dans lesquels il le faisoit filer, au moyen d’un petit chien épagneul qu’il nous montra, et. qui étoit plein d’instinct, pour diriger ses différentes chasses. Quant à la seconde question, il nous assura que tous les ans, à la même époque, il prenoit pendant leur.pessage, qui ne LL D'ORNITHOLOGTIE. 215 Tout le plumage de cet oiseau consiste dans une couleur grise, teinte de roux sur les flancs etsur les petites pennes des ailes ; les grandes pennes de ces parties sont d’un brun noirâtre ; le croupion est blanc; le dessous du corps et la gorge sont blancs, teints de roussàtre. Cette derniere partie est remarquable par une espèce de collier qui est formé d'une ligne noire qui prend naissance à la base de la mandibule inférieure du bec, et qui, en parcourant chaque côté du cou, vient décrire sur la poitrine un demi- cercle. Sa queue , qui est très-fourchue , est composée de douze pennes dont les deux du milieu sont d’un gris-brun, et les latérales blanches à leur origine et brunes vers leur extrémité; les unes comme les autres, si on en excepte la plus extérieure de chaque côté, sont bordées en dehors de gris-brun. L'iris des yeux de cet oiseau est rougeàtre; son bec est rouge à sa base et noir dans tout le reste de sa longueur : la partie nue de ses jambes, ses pieds, ses doigts, ainsi que ses ongles, sont d’un rouge-brun. 3° LA PERDRIX-DE-MER A COLLIER. Glarcola torquata. Lin. Syst. nat. éd. 15, gen. 00. La perdrix-de-mer à collier. BR1S. Ormiih. tom. 2 à, pag. 145. Avant la destruction des grands étangs des Vosges, cette dernière espèce de perdrix-de-mer, indigène de la France, duroit que deux ou trois jours, et qui n’avoit jamais lieu en automne , plusieurs glorioles ; il ajouta même que plus les prin- temps étoient pluvieux, plus aussi on voyoit de ces oiseaux ; qui alors séjourpoient plus long-temps dans ces contrées. 346 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE et que l’on rencontre sur les mêmes rivages que les pré- cédentes , parcissoit très - fréquemment sur leurs bords, mais aujourd'hui on ne la voit plus que très- rarement dans ces contrées. Les occasions fréquentes que nous avons eu d'observer tout à notre aise cet oiseau chaque année, nous ont con- vaincus qu'il avoit à peu prés les mêmes habitudes que la guiguctte, que l’on nomme vulgairement lambiche dans les montagnes des Vosges, et avec laquelle plusieurs chasseurs la confondent inconsidérément, sans se donner seulement la peine de jeter un coup d'œil sur la dif- férence sensible qui se trouve entre le bec de ces deux OiseauT. | Cette perdrir de mer est rarement tranquiile : on ne la voit presque jamais qu'en mouvement et toujours en ag- tion : au moindre bruit qu'elle entend, et même d'assez loin, elle prend son essor d’abord à une petite élévation de terre ; elle se repose à quelques pas de la, puis elle court sur la grève avec une vitesse extrême: si on continue de la suivre, elle s'envole en s’éievant dans les airs où elle pousse des cris trés-perçans, que l’on pourroit rendre par ces deux monosyllabes rhul , rhul. Quelques ornithologistes prétendent que cet oiseau niche dans nos contrées; d'après leur assertion, nou avons fait rechercher son nid avec le plus grand soin pendant un assez grand nombre d'années, et cela a toujours étéin- fructueusement. La perdrix de mer à collier est bien moins grosse que la nrécédente; elle est tout au plus de la taïlle de l’alouette de mer. Le sommet de sa tête, le dessus de son dos, ses plu- mes scapulaires, les couvertures supérieures de ses ailes, ainsi que celles de sa queue et son croupion, sont d'un gris- brun : son cou et sa gorge sont d'un fort beau blanc; sa eut (es D'ORNITHOLOGIE. Ne poitrine et tout le dessous de son corps sont d’un blanc sale ; les grandes pennes de ses ailes sont noirätres et celles de sa queue d’un gris-brun. On remarque, de chaque côté de ses yeux, une tache b'anche, et au bas de son cou une bande brune peu large, à la vérité, et qui est disposée en rond à sa base, tandis que les côtés remontent jusqu’à la racine de la mandibule inférieure. L'iris de ses yeux est de couleur de noisette ; son bec noirâtre et la partie nue de ses jambes, ses pieds et ses doigts sont jaunâtres; ces derniers sont terminés par des ongles d’un brun marron foncé. CINQUIÉME GENRE. LES RALES. Les oiseaux que nous avons compris dans ce cinquième et dernier genre de la troisième famille qui termine l’ordre des oiseaux fissi- pèdes de rivages , présentent tous des habitudes différentes. Les uns, comme le rale d’eau, se tiennent le long des eaux, dans les marécages, parmi les jones et les glaïeuls, où 1ls vivent de vers et d’autres insectes aquatiques, sans que jamais ils parcourent, comme la plupart des oiseaux de cette famille , les bords sablonneux des rivières, des lacs ou des étangs; les autres, comme la narouette, habitent les prairies basses et humides ; les autres, au contraire, comme le réle de terre , n’approchent jamais à 248 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE des eaux ; ils se tiennent babituellement dans les prairies ou dans les champs ensemencés de gros grains. Les uns et les autres tirent leur nom de leur cri, qui est une espèce de râlement desagréa- ble : tous sont chez nous de passage , et 1ls nous - quittent aux approches de l'hiver. Is ont tous l'habitude de laisser pendre leurs jambes en volant. Les caractères généraux des réles consistent en ce qu'ils ont trois doigts antérieurs, très- longs dans quelques-uns , et médiocres dans d’autres : ces doigts sont lisses et sans aucune apparence de membrane entre eux ; ils ont.un pouce grand , et qu'ils appuient à terre en marchant; leur corps est aplati sur les côtés ; ious ont la queue courte et la tête petite. Nous avons partage ce genre en trois tribus, dont les deux premières tirent leurs caracteres distinctifs de la longueur respective des doigts et de la forme du bec des oiseaux qu'elles ren- ferment. Nous avons reserve la troisieme tribu de ce genre pour le merle d’eau, non qu'il ait les caractères du genre des räles , mais seulement pour lui prêter une place dans notre methode, en attendant que des ornithologistes plus 1ns- truits que nous lui aient assigné , d’après des / | ; % D'ORIMITHOLOGIE /:7 2%e caractères certains, celle qu'il doit réellement occuper ; car les uns l'ont rangé parmi le genre de 7nerles qui sont des passereaux dont :l n’a nullement les caractères ; et les autres l'ont placé plus méthodiquement , à la vérité, parmi les petites espèces d'orseaux de rivages, dont il se rapproche par certaines habitudes, mais dont il s'éloigne par des caractères essentiels. Ne pouvant, à coup sûr, entrer dans l'ordre des oiseaux nageurs, pour parer à tous les inconvéniens nous avons pensé qu'il conve- noit de le placer provisoirement _après les OISEAUX FISSIPEDES PROPREMENT DITS, et même apres les OISEAUX DE RIVAGÉS, en l’insérant dans la dernière tribu du genre des räles, qui est lui-même le dernier de cet ordre. PREMIÈRE TRIBU. Cette première tribu du genre des räles ven- ferme les espèces dont les caractères particu- lers se tirent de la longueur de leurs doigts comparativement avec ceux dé l’osseau qui seul est compris dans la seconde tribu de ce genre , ainsi que de la forme de leur bec. Cette tribu ne contient que deux espèces; savoir , le réle de terre ou de genét, et la marouette, qui ont pour caractères par- ticuliers les doigts de grandeur moyenne; un 250 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE bec pointu, médiocrement long, et dont le bout se dirige un peu en en-bas; leur corps d’ailleurs est comprimé par les côtés, et leur tête est petite 1.” LE RALE DE TERRE OU DE GENET. Æallus crex. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 03. Le râle de terre ou de genét. BRIS. Ornith. tom. 5, pag: 190. ( Voyez la planche XXVIHI de cet ouvrage.) De tous les oiseaux décrits par Linné, il n’er est aucun de mieux signalé que celui-ci, en ce que cet auteur l’a dési- gné particulierement d'aprés son cri, qui consiste dans les monosyllabes crex, crex, que cet oiseau fait entendre souvent dans les prairies humides qu'il habite dès le mois d'avril, jusqu'a la fenaison : à cette époque, lorsqu'il se voit chassé par la faulx du cultivateur, il fuit et se retire dans les champs d'orge et d'avoine; mais plus particulièrement dans ceux de pois ou de sarrazin. | Ce cri rauque que le räle répète fréquemment, et sur- tout le matin, à midi et au déclin du jour, a quelque res- semblance avec le bruit que l’on feroit si l’on passoit les doigts le long des dents d’un gros peigne : aussi les chas- seurs emploient -ils quelquefois ce moyen pour attirer cet oiseau vers le trépas qu'ils lui préparent. Lorsque l’on guette Le râle avec un chien-couchant, il fuit rarement au vol; il se contente seulement de pié- tonner devant lui avec une telle vitesse, que le meilleur chien se trouve souvent en défaut; car, outre que quel- » = D'ORNITHOLOGIE. 251 quelois, dans sa course rapide, il se blottit par terre, en laissant passer sur lai le chien qui s’emporte, il arrive encore fréquemment qu'il retourne sur ses pas, passe à côté, et souvent très-près du chasseur sans qu'il s’en doute: ce n’est jamais qu’à la derniére extrémité qu’il prend, au vol, son essor, et toujours il le fait si pésamment et en ligne si droite, qu'il échappe rarement à la mort. Cependant il arrive quelquefois qu’un ehasseur mal- adroit manque cet oiseau dont il a attention d'observer la remise, vers laquelle il se porte aussitôt; mais c’est presque toujours en vain qu’il y fait des recherches. Car déjà le rûle a piétonné à plusieurs centaines de pas de l’endroit où le chasseur l’a vu se reposer. On donne au rûle de terre différens noms , tels que ceux de râle doré, parce qu'en effet son plumage, de couleur ocracée, paroit comme doré lorsqu'on le voit aux rayons du soleil : on l'appelle aussi roi des cailles, parce qu’on est _persus.dé dans certains pays que cet oiseau, qui ÿ arrive et en part à peu près en même temps qu'elles, se met à _Jeur tête pour les conduire. Si nous voulions réfuter ici toutes les erreurs populaires, cet ouvrage élémentaire, déja trop volumineux, deviendroit ernuyant, tandis que notre intention n’a été que d'instruire la jeunesse en cher- chant à l’amuser. Le râle de terre n'est guère plus gros qu'une caille; mais 11 a le corps plus allongé qu’elle; il a neuf pouces et demi de longueur, et seize pouces de vol: lorsque ses ailes sont ployées, elles s'étendent jusqu'a l’extrémité de sa queue. Le dessus de sa tête, ainsi que le derriere de son cou, le dessus de son dos et son croupion sont revêtus de plumes noirätres dans leur milieu avec un bord d'une couleur grise-roussâtre ; ses plumes scapulaires, de même que les couvertures de sa queue, sont de cette derniére 252 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE couleur : il a la gorge d’un blanc roussètre , les joues, le devant du couet la poitrine d’un cendré-blanc ; le véntre blanc, légèrement teint de roussâtre; les flancs roux avec des raies transversales blanches ; les jambes fauves et les couvertures du dessous de la queue rousses , bordées lé- gerement de blanc : le fouet de l'aile est blanc, teinté foi- blement de roussätre : le côté intérieur des premières pennes de ses ailes est d’un gris-brun: toutes les autres sont fauves ; les pennes de sa queue, aussi d'un gris-brun, sont bordées de gris-roussätre. L'iris de ses yeux est rougeätre; la mandibule supérieure de son bec est d’un gris-brun et l'inférieure brune ; la partie nue de ses jam- bes, ainsi que ses pieds et ses doigts, sont bruns et ses ongles d'un gris-brun. : : Le rûle de terre arrive en France avec les cailles et nous quitte en même temps qu'elles, aprés avoir fait sa ponte, qui consiste en huit ou dix œufs d’un blanc tacheté de rou- geàtre, que la femelle place dans un petit enfoncement qu’elle trouve dans les prairies, et qu’elle se contente de garnir de quelques graminées desséchées. Les petits qui en éclosent courent aussitôt dans l’herbe des prairies à la manière des cailleteaux ou des perdreaux. Cetoiseau qui, en toutautre temps que celui deson départ, semble ne pas savoir voler, trouve réanmoins des forces à cette époque : il prend à cet instantson essor pendant la nuit, et, à l'aide d'un vent qui lui est favorable, il se porte rapidement d’abord dans les contrées mtridionales, d'ou il tente, dit-on, comme les cailles, le passage de la Méditerranée. La chair du rêle, qui, chaque année, est trés-abondant dans les hautes et basses Vosges, passe pour un mets très- délicat : aussi est-elle fort recherchée des zsourmands, à l'arrière -saison surtout, où cet oiseau est si gras, que D'ORNITHOLOGIE. 1 48% lorsqu'on en a tué quelques-uns, leur graisse se fond dans le sac du chasseur au point qu'elle colie ensemble, et par une couche huileuse, toutes les plumes qui recouvrent son Corps. 2° LA MAROUETTE. Rallus porzana. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 03. Le petit réle d’eau ou la marouette. Bris. Ornich. tom. 5 , pag. 155. ( Voyez la planche XXVIIZ de cet ouvrage.) La marouette, qui est la plus petite espèce de râle d’eau, est connue, dans la ci-devant Picardie, sous le nom de gérardine 1). C’est un oiseau stupide, triste, solitaire et tellement sauvage, que non-seulement le mâle ne se tient 1) Ce nom qui nous touche de près, et que l’on donne à la marouelte en Picardie, nous a engagés à faire quelques recher- ches relatives à son étymologie ; et en 1781 nous rencontrâmes chez M. le ci-devant marquis de Bassompierre, en Lorraine, un officier de cavalerie nommé M. de Péas, qui étoit des environs d'Amiens, et qui aimoit par passion l’ornithologie , dont 1l s’oc- cupoit avec succès et connoissance de cause. Il nous assura qu’en refeuilletant de vieilles notes recuéillies par un de ses ancêtres sur les ozseaux du pays , il y avoit trouvé que la maroueite ÿ portoit le nom de gérardine, parce que très-anciennement un M. de Gérardin avoit le premier fait remarquer cet oiseau, et que, pour en conserver le souvenir, on avoit trouvé qu’il étoit plus facile de le nommer gérardine que marouette, qui parois- soit un nom sauvage, en ce qu’il étoit étranger au pays. Ca 254 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE avec sa femelle que le temps nécessaire pour sa fécondation; mais que les petits même qui ont la facuité de nager et de plonger aussitôt qu'ils sont éelos, se séparent les uns des autres, abandonnent leur mére commune et vont cher- cher à vivre chacun de son côté, sans jamais se recher- cher, sinon dans le court instant que durent leurs amours. La marouelte est à peu prés de la grosseur d’une caille; mais son corps est beaucoup plus allongé que le sien; il est aussi beaucoup plus aplati sur les côtés : sa tête est sensiblement plus petite, et elle est bien plus haut montée sur jambes. Cet oiseau arrive de.trés-bonne heure dans certains dé- partemens de la France, tels que ceux de la Somme, dela Vienne, des Vosges et des Haut et Bas-Rhin : il se trouve en abondance dans les prairies basses et humides qui avoisi- nent les eaux des rivières ou des étangs ; il n’abandonne ces contrées que fort avant dans l'hiver : c’est la qu'il fait sa ponte, qui consiste en sept ou huit œufs d’un brun-clair, mouchetés de brun plus foucé. Son nid mérite de fixer l'attention d’un chbservateur, non pas à cause de l’art avec lequel il est construit; car ce n’est qu'une espèce de gondole ou de petite nacelle, formée par des roseaux entrelacés les uns dans les autres ; mais à raison de la sage prévoyance que la nature à ins- pirée à cet animal pour conserver sa progéniture : ce nid qui surnage sur la surface des eaux est amarré par un lien à un ou plusieurs roseaux, de manière qu'il peut s'élever ou se baisser suivant la plus ou moins grande crue des eaux. La marouelle a, eomme le râle d’eau, l'habitude de tenir quelquefois l'arrêt si ferme devant ke chien, qu'il nous est arrivé d'en prendre plusieurs à la main sous le nez de cet animal: mais aussi elle sait quelquefois se dérober devant D'ORNITHOLOGIE. 255 Jui avec une vitesse extrême, en piétonnant rapidement vers l’eau oùelle se précipite, nage, plonge, et nage même entre deux eaux. La chair de cet oiseau passe pour être un mets fort délicat, surtout à l’arrière-saison , époque à laquelle il ést trés-chargé de graisse. Sa longueur, du bout du bec à l'extrémité de la queue, est de sept pouces et demi; il a un pied six lignes de vol: tout le fond de la couleur de son plumage consiste dans une teinte d'un brun olivâtre, tachetée de blanchâtre, plus ou moins foncé sur différentes parties : sa gorge est cendrée, et cette même couleur s'étend sur le devant du cou, sur le haut du ventre et sur les jambes; il a le pli de l'aile bordé de blanc, l'iris couleur de noisette, le bec et les ongles d’un jaune-olivâtre ; la partie nue des jambes, les pieds, ainsi que les doigts, qui sont médiocrement longs, sont d'un brun nué de jaunûtre. DEUXIEME TRIBU. Le rale d’eau est la seule espèce indigène de la France qui forme cette tribu, à raison de ses caractères particuliers, qui consistent dans ses doigts très-longs; dans son bec, égale- ment allongé, obtus, et comme grossi à son extrémité; enfin dans la forme de son corps, qui est aplati par les côtés, et dans celle de sa tête, qui est petite. 256 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE LE RALE D EAU. Pallus aquaticus. Lix. Syst. nat. édit. 13, gen. 93. Le râle d’eau. Bris. Ornith. iom. 5, pag. 151. ( Foyez la planche X XVIII de.cet ouvrage.) . Cette derniere espèce de râle est, comme les deux pré- cédentes, de la taille à peu prés d’une caille ; mais elle a le bec beaucoup plus long que celui du râle de terre et de la marouectte. À La longueur totale de cet oiseau, prise de l'extrémité de son bec à celle de sa queue, est deneufpoucestrois lignes; son vol est d’un pied, et ses ailes, lorsqu'elles sont ployées, s'étendent à la moitié de la longueur de sa queue. Les plumes qui recouvrent le sommet de sa tête, le dessus de son cou, son dos, ainsi que son croupion, sont noiràtres, bordées tout autour d’un roux-olivâtre; ses plumes scapulaires et les couvertures du dessus de sa queue sont de même couleur et bordées de même : tout le des- sous de son corps, à partir de la gorge inclusivement, est d’un gris ardoisé, à l'exception de ses flancs qui sont noi- râtres, rayés transversalement de blanc, de son bas- ventre, ainsi que du haut de ses jambes, qui sont d’une couleur cendrée, terminée de fauve: les pennes de ses ailes sont brunes, bordées du côté extérieur de roux-oli- vètre, du moins celles qui sont les plus voisines du corps; celles de sa queue sont noires , bordées de brun-roux et d'olivâtre. L'iris de son œil est brun; son bec, qui a un pouce, cinq lignes de longueur, est rougeûtre prés de la tête et d’un brun-rouge dans tout le reste de sa longueur ; la partie nue de ses jambes, ses pieds, ainsi que ses dorgts et ses ongles, sont d’un rouge obseur, | D'ORNITHOLOGIE. 257 Le râle d'eau vit dans les marécages et au bord des eaux stagnantes, où on le voit souvent courir aussi vite que le fait le râle de terre dans les champs; il donne tout autant de peine que lui au chasseur , et la même impatience au chien qui la quête : il sait, comme la maroueftte, se dé- rober à la poursuite de ce quadrupède domestique, soit en rusant dans sa course rapide, soit en se jetant à l’eau où il nage et plonge parfaitement bien. Cet oiseau se trace de petites routes à travers les her- bages aquatiques et les roseaux, par lesquelles il passe cons- tamment pour revenir à son gîte : les montagnards des Vosges qui connoissent tres-bien ces chemins, pour attra- per ce râle, qui est fort commun sur leurs étangs, y ten- dent des lacets de crins au moyen desquelsils en prennent une assez grande quantité 1): on prétend cependant que sa chair est bien moins bonne que celle de la marouette, en ce qu’elle a une forte odeur de marais. Quoique ce soit un oiseau de passage qui rous arrive au printemps pour faire en été sa ponte, qui consiste en sept ou huit œufs assez gros, Jaunâtres , tachetés de brun, et que la plupart nous quittent en automne, cependant il nous en reste toujours quelques-uns qui passent avec nous les rigueurs de l’hiver : on les voit alors, et surtout pen- dant les plus fortes gelées, le long des sources chaudes, dans lesquelles ils cherchent leur nourriture. ‘ Nous avons essayé d'élever plusieurs individus de cette mm 1) On prend aussi les rédles d’eau en employant plusieurs filets que l’on nomme trémailliers, dont on entoure une certaine étendue d'herbages ou de roseaux; on bat toute la partie de étang ou du marais qui est en avant , et on dirige ainsi ces oiseaux vers les filets tendus , dans lesquels on.en attrape quelquefois beaucoup dans une seule battue, T5 5 17 256 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE espèce dans le temps de nos vacances de collège; mais nostentatives n'ont pas été couronnée s du succès que nous en attendions. En 1770, durant les deux mois de relèches de nos études, nous en passèmes les deux tiers au chäteau du père d’un de nos camarades de classes : une inclination réciproque et passionnée pour l’histoire naturelle serroit étroitement les liens de notre amitié; la terre de son pére, une saison des plus favorables pour donner un grand essor à nos plaisirs, nous fournirent tous les moyens de nous livrer particulièrement à l’étude de la botanique , comme à celle de l’entomologie et de l'ornitho- logie. Nous fimes alors une ample moisson d'insectes que nous embaumions soigneusement 1). Un père complaisant, qui adoroit son fils unique, ne savoit rien refuser à nos innocens plaisirs; et dés lors il nous fit exécuter toutes les espèces de piéges, dont nous puisions l’idée dans le Dictionnaire de Chomel ou dans la Maison fustique, que nous étudions ensemble chaque jour de congé dans notre collège durant l'été. Les trémailliers ne furent pas plus oubliés que les filets de toute espece, et avec ces trémailiers nous primes dans un petit étang plusieurs râles d’eau, et surtout de petits grébes; nous les nour- rissions les uns et les autres dans un grand cuvier à demi-rempli d’eau, avec des vers, des insectes et des débris de fruits; mais jamais nous ne sommes parvenus à prolonger la vie de nos râles d’eau au-delà de dix jours, tandis que nos grebes vivoient jusqu’aprés nos vacances. RER DER Re RPG UE SR EUR RECU OUNEE" OR E ." e 1) Nous pouvons encore faire voir, dans les tableaux de notre collection en ce genre, plusieurs individus que nous primes à ce moment heureux, dont il ne nous reste qu'un triste souvenir. D'ORNITHOLOGIE. 259 TROISIEME TRIB U. À yant réservé celte troisième tribu du genre des räles pour le merle d’eau, on pourroit soupconner que notre intention auroit eté de le placer dans l’ordre des o’seaux fissipèdes de rivages, ainsi que l'ont fait plusieurs or- nithologistes ; mais déjà nous avons observé qu'il ne pouvoit appartenir à cet ordre, puis- qu'il n’a aucun des caractères des oiseaux qui le composent : 1] a encore bien moins ceux des merles. Cependant, pour ne pas le laisser sans classe, nous avons preféré en faire la der- niere tribu de l’ordre des fissipèdes de rivages, avec lesquels il a infiniment de rapport, du moins quant aux mœurs et aux habitudes: elles en different néanmoins sensiblement, comme on le verra ci-après dans son histoire individuelle. Les caractères particuliers au merle d'eau consistent en ce que cet oiseau a le bec grêle, effilé et de médiocre grandeur; le corps plein et arrondi ; les jambes garnies de plumes jus- qu’au calcanéum ou os qui soutient le pied , que lon nomme vulgairement et impropre- ment le genou ; et les doigts tous séparés les ups des autres , sans aucune apparence de mem- brane entr'eux, avec nn pouce en arrière, * 17 260 TABLEAU ÉLÉEMENTAIRE Cette tribu ne contient que cette seule espece d'oiseau. LE MERLE D'EAU. Sturnus cinclus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 106. Le merle d’eau. Bris. Ornith. tom. 5, pag. 252. ( Voyez la planche XXVIII de cet ouvrage. } Personne ne fut jamais plus à portée que nous de suivre et d'observer les mœurs et les habitudes du merle d’eau, et conséquemment de fournir aujourd'hui des renseigne- mens circonstanciés sur cet oiseau. Avant le mois de germinal de l’an IV, nous ne le con- noissions que par les ouvrages de M. de Buffon ou de ‘quelques autres ornithologistes qui en ont parlé; mais la résidence que nous avons faite durant huit années à l’école centrale du département des Vosges, où nous professions l’histoire naturelle, nous a fourni plus d’une fois, en parcourant chaque année avec nos élèves ces intéressantes montagnes, l’occasion d’étudier les habitudes de cet oiseau, et à différentes époques de l’année. Au mois de thermidor de l'an V, désirant de visiter pour 1a premiére fois la chaîne des montagnes qui bordent, du midi à l’orient , le département qui nous donna naïssance, nous partimes d’'Épinal avec un petitnombre denosélèves, et nous dirigeàmes notre route , du midi de cette commune, par Remirement, vers l’orient, sur Saint-Diez. Dix jours seulement furent employés à ce petit voyage, tandis que plusieurs mois seroient à peine suffisans pour voir. avec l'intérêt qu'ils inspirent, les différens sites pit- toresques que ces monts entassés offrent aux regards atten- D'ORNITHOLOGIE. s6t tifs d’un amateur des beautés de la nature; il en faudroit bien davantage si l’on vouloit s'arrêter aux richesses natu- relles qu'ils présentent à chaque pas. La multiplicité d'échantillons précieux de minéraux et de végétaux 1) qu’on foule sans cesse sous les pieds, nous avoit fait oublier, pour ainsi dire, que notre but principah étoit d'y venir étudier les mœurs et les habitudes du merle d'eau, lorsque, près de la montagne nommée le Balon de Saint-Maurice, notre attention fut tout-à-coup réveillée a la vue d'un de ces oiseaux, qui étoit juché sur un quar- tier de granit, qui, en tombant avec rapidité de la mon- tagne, d’où il s’étoit détaché de la masse, s’étoit arrêté, dans sa course, au milieu d’un ruisseau d’une eau la plus Limpide, qui serpentoit, en murmurant dans sa course au pied de cette même montagne qu’une multitude d'arbres et d’arbustes de différentes espèces ombrageoït délicieuse= ment. Effarouché à notre approche, cet oiseau solitaire prit æ fuite et dirigea son vol le long du ruisseau, en rasant sa surface à la maniere des martins-pêcheurs. Cette simih- tude de vol nous fit illusion , et nous crûmes avoir aperçw non un merle d'eau , mais un martin-pécheur noir à plastrom blanc, et il en fallut moins dés lors pour exciter nos désirs d’eñ obtenir ia possession. Nous le poursuivimes donc avec autant d’ardeur que de précautions, et notre course ne fut pas de longue haleine ; car cet oiseau s’étoit reposé, à deux cents pas d’où il étoit 1) La collection presqne complète que nous en avons faite en - plusieurs voyages dans ces montagnes , a fixé Vattention parti- culière des savans de Paris les plus distingués ; ce qui est uu titre de recommandation en faveur de ces riches contrées, qui sont trop peu connucs. 262 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE parti, sur une pierre qui faisoit saillie dans le même ruis- seau, et au retour d'une de ses sinuosités. Des saules placés entre nous et lui nous en faciliterent l'approche à la portée du coup de fusil; mais au moment où nous allions lui dépêcher la mort, il se précipita au fond de Veau, et y demeura plus d’une minute. Le cristal limpide de ce ruisseau nous laissant aperce- voir la marche de cet oiseau sur les cailloux de son lit, nous permit de le-suivre jusqu'a l'endroit où, en sor- tant de cet élément fluide, il trouva le trépas. En le ramassant, nous reconnüûmes aussitôt qu'il n'’étoit point un martiu-pecheur, mais bien un merle d’eau fort gros, et d’une pesanteur étonnante, eu égard à sa taille. Ce premier succés stimula notre ardeur pour la pour- suite de ces oiseaux, et dans l’espace d’une lieue, en cô- toyant les bords du même ruisseau , nous en tuâmes plus de vingt, dont nos compagnons de voyage se régalérent; car ils trouverent qu’ils étoient un mets délicat. Jusque-la nous nous étions contentés d’en tuer un grand nombre, parmi lesquels nous pouvions choisir les plus beaux et les moins endommagés, afin de les embaumer et d’en faire part à nosamis, et surtout aux amateurs d’or- nithologie 1). Le lendemain de cette première rencontre, nous'che- _ minâmes vers Bussag, et le même jour nous parvinmes à Gérardmer , où les eaux qui sourdent des montagnes sont de plus en plus limpides et transparentes : c'est la aussi que ces oiseaux se trouvent en plus grande abondance; 1) À notre arrivée à Paris, une des premières jouissances de notre cœur a été de saisir l’occas on d'offrir avec plaisir à plu- sieurs ornithologistes estimables cet oiseau , qui manquoit à leur collection. D'ORNITHOLOGIE. 26% nous, résolûmes donc d’en suspendre le carnage, pour nous livrer à une occupation plus douce et moins cruelle, à celle d’en étudier les mœurs et les habitudes. Un buisson touffu de saules nous servit au gré de nos désirs : du milieu de ce verdoyant observatoire, nous sai- simes l’occasion de nous satisfaire complétement ; plus de dix de ces oiseaux vinrent se poser sur divers morceaux de granit qui s’élevoient au-dessus de l’eau , et qui se trou- voient disséminés à notre gauche et à notre droite : c’est là que nous eñmes le temps de vérifier les observations de M. Hébert, ainsi que celles de M. de Buffon, relati- vement au merle d'eau. L'un et l’autre disent que cet oiseau sauvage et solitaire est silencieux ; ils ont, sans doute, voulu dire qu'il n’a- voit pas un ramage comparable à celui du merle ordinaire : nous ignorons, à la vérité, s'il en a un qui lui soit particulier en d’autres temps; mais nous savons, pour l'avoir oui plus d’une foïs, qu'il n’est pas silencieux au point de ne jamais faire entendre sa voix. Nous sommes certains, au contraire, que toutes les fois qu'il se pose sur une pierre, ou qu'il est sur le point de se plonger dans l’eau, il jette un cri doux, filé, et que l’on entend même d'assez loin , pour nous avoir indiqué la présence de plusieurs individus que nous n’apercevions pas. Ce n’est jamais que sur la grève sèche des bords d'un ruisseau, ou bien sur quelque pierre élevée au-dessus de ses eaux que ces oiseaux se reposent: aucun ne se perche sur les branches voisines comme le martin-pécheur. Là, tranquilles et sans mouvement, l’œil fixé sur les cailloux brillans du fond de l’eau, ils épient leur proie, qui consiste en de trés-petits poissons ou en larves de libel- lules ( demoiselles) ou de quelques autres insectes aqua- tiques. Dès l'instant qu’ils en aperçoivent à travers le 562 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ristal {ransparent de ces ruisseaux, ils se précipitent dessus avec la rapidité de l’éclam On se tromperoit si l’on imaginoït que le merle d'eau nage ou plonge pour saisir sa proie qu'il poursuit, et qu'aussi- tôt qu'il l’a saisie, il reparoîït à.la surface de l’eau. Arrivé sur les caïlloux du fond de ces ruisseaux, ils’y promene avec la même gravité que lorsqu'il est sur le ri- vage. La montre à la main, nous en avons observé plu- sieurs qui sont restés une minute et plusieurs secondes au fond de l’eau: nous n’en avons jamais vu un seul qui des- cendit le courant ; tous dirigeoient leur marche sous- aquatique du côté de la source et souvent à une assez grande distance de l'endroit où ils s'étoient plongés. Nous avons remarqué, toujours guidés par les observa- tions de M. Hébert, que tout le temps que cet oiseau restoit sous l’eau , non-seulement il y tenoit ses ailes pendantes de chaque côté de son corps, et qu'il les agitoit sans cesse d’un petit mouvement de trépidation, mais aussi qu'il étoit en- vironné d’une multitude de bulles d'air, qui en s’échappant de son corps, et en se succédant rapidement les unes les autres, venoient s'éteindre à la sûrface, de la même ma- nière que cela arrive à certains insectes aquatiques que les entomologistes nomment hydrophiles et ditiques. De plusieurs centaines de ces oiseaux que nous avons scrupuleusement observés dans les Vosges, jamais nous n’en avons aperçu deux ensemble qui eussent l'air de for- mer entre eux une société. Quelquefois nous avons ren- contré deux individus posés sur la même pierre, ou sur le même quartier de rocher ; mais nous sommes certains que ce r’étoit-la qu'une rencontre fortuite, un lieu com- mun et accidentel de repos, puisque souvent l’une venoit d’en-haut et l’autre d’en-bas du ruisseau. Nous avons éga- lement remarqué que les ruisseaux , ainsi que les rivières D'ORNITHOLOGIE. 265 de ces contrées où ces oiseaux se trouvoient en plus grand nombre, “étoient ceux qui fournissoient le plus abondamment deocette espèce de truite noire à laquelle en donne la préférence pour les tables. Le merle d'eau se voit en quantité vers la source de la Moselle, dans les montagnes en avant de Bussand, tandis qu’on ne Le rencontre que trés-accidentellement à Épinal, qui n’est qu’à sept ou huit lieues plus bas, et bai- gné par laimême rivière : nous avons donc cru pouvoir en attribuer la cause à la cessation des montagnes dans Îes- quelles cet oiseau trouve un asyle sans trouble. Ce seroït en vain qu’on le rechercheroiït dans les autres rivières ou ruisseaux de la plaine de ce département : car, outre le fracas qui le feroit fuir, il ne trouveroit dans aucune cette linpidité cristalline des eaux des mon- tagnes qui lui permet d'y voir sa proie comme si elle y étoit à nu. Nous n'avons pas manqué , sans doute, de nous infor- mer près de plusieurs personnes si le merle d’eau étoit sédentaire ou seulement de passage dans ces mêmes mon- tagnes , et toutes nous ont assuré qu'il habitoit constamment ces charmantes contrées : nous avons eu d'autant moins de peine à nous en convaincre, : que jamais là les ri- vières, non plus que les ruisseaux, ne gêlent, du moins prés de leur source, quelque rigoureux que soient les hivers. | 591) Nous avons désiré savoir aussi dans quel lieu cet oiseau solitaire, qui ne forme de société, même avec sa femelle, que durant le temps nécessaire à l'éducation de ses en- fans, plaçoit son nid; et tous les montagnards que nous avons consultés sur ce point nous ont assuré que c'étoit, ou comme le martin-pêcheur, dans des trous que l’un et l'autre rencontrent tout pratiqués sur le bord des ruis- :66 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE seaux , ou bien dans de petites cavités de rochers, ouenfn dans des fissures de murailles situées pres des eaux. Un de nos élèves, fils d'un de ces hommes si intéres- sans pour l'humanité; qui dé temps immémorial s'occu- pent avec beaucoup de succés de la réduction de toutes espèces d’os fracturés, et qui sont presque universelle- ment connus sous la dénomination vulgaire d'hommes ou de médecins du val d’Ajol, nous procura ,:1l y a quelques années, au temps de la, ponte, plusieurs eouùples de: menles d’eau avec leurs œufs, sans qu'ils aient pu nous faire passer leur nid, parce qu'il ne consiste qu’en quel- ques brins d'herbes sèches et autres matières, menues et mollettes qu'ils placent confusément au fond du. trou qu'ils ont choisi, et sur lesquelles la femelle. dépose quatre et Le plus souvent cinq œufs d’un blanc de neige, sans tache. Ces œufs ont un pouce; de longueur et huit lignes de largeur à leur tiers le plus près du gros bout; ils diminuent ensuite insensiblement, et se terminent en une pointe qui n’a à son extrémité que deux lignes et demie de diametre. : Cet oiseau, qui n’habite guëre en France que les lieux escarpés des-smontagnes d’où jaillissent, en serpentant entre des rochers.de, granit, tels que ceux des Vosges, des eaux dont:la limpidité et la transparence le disputent a celle du cristal, de Madagascar, a sept pouces de lon- gueur de l'extrémité du bec à celle de la queue, et huit pouces et demi de vol ; son -béc, pris de la commissure des mandibules jusqu'a son extrémité, a neuf lignes de long sur deux et demi de largeur à sa base ; il est d’un noir brun, lisse, assez menu d’ailleurs, et un peu com- primé par le bout; ses narines, qui s’avancent jusqu’à la moitié de la longueur de la mandibale supérieure , sont caractérisées par un petit enfoncement qui se terminé en D’ORNITHOLOGTE. 267 rond vers la pointe, et qui a une ligne de largeur ; ses paupières sont blanches, et l'iris de ses yeux est d’un gris de perle. * Tout le dessus de son corps, y compris la tête, à partir de la base de la mandibule supérieure jusqu’à l'extrémité de la queue, est d’un brun noirâtre, plus foncé dans le male que dans la femelle, qui, à cette nuance prés, res- semble parfaitement à son mâle: néanmoins, le brun du sommet de la tête, qui s'étend de cette partie jusqu’au bout de la queue, passe au noir par des nuances insensibles jusqu’à l'extrémité du corps, où cette derniére teinte de- vient plus profonde, sans cependant approcher de la couleur noire du plumage du merle ordinaire : toutes les couver- tures de ses ailes prennent également une teinte de brun plus foncé, a mesure que cette couleur devient plus voisine des pennes, qui sont au nombre de six et presque noires ; ses ailes ployées s'étendent jusqu’à l’origine de la queue. Elle est composée de douze pennes d'égale longueur, et n’z que seize lignes d’étendue. La gorge, à partir des plumes de la base de la man- dibule inférieure, le devant du cou et la poitrine sont d’un trés-beau blanc qui tranche parfaitement bien avec les couleurs obscures des parties supérieures, et qui forment ensemble une ligne de démarcation depuis les angles du bec jusqu’à l'insertion des ailes avec le corps : le ventre est d’un assez beau roux qui coupe brusque- ment le blanc de la poitrine, et qui se perd, par une nuance insensiblement dégradée, dans le brun noir des côtés du corps jusques et y compris les couvertures du dessous de la queue; les jambes, que l’on appelle im- proprement les cuisses , sont garnies de petites plumes déhées, de même couleur que le dessous du corps, et ces plumes ne laissent entr’elles et le calcanéum, que 260 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Jon nomme le genou, qu'un tres-petit espace vide; le Éarse, qui a un pouce de longueur, est de couleur de corne, ainsi que les “doigts, dont le plus long, celui du milieu, a sept lignes et demie, et les deux collatéraux trois; ils ne sont réunis par aucune apparence de mem- brane; ils sont tous terminés par des ongles courts et de même couleur 1). On nous pardonnera, sans doute, notre prolixité en faveur du désir que nous avons eu de ne rien laisser à désirer sur la connoïissance d'un oiseau d’autant plus in- téressant, qu’il est moins connu dans presque toutes les parties de l'empire français. Ÿ 1) Pour éviter toute équivoque que la dénomination de cet oiseau présente , appuyée surtout de la couleur obseure de son plumage, qui pourroit faire croire qu’il est un rnerle, il convien- droit peut-être mieux qu'on le nommät, avec Linné, c/nclus, ex y ajoutant wiger pectore aibo, le cincle noir à poitrine blanche. FIN DU SECOND ORDRE, D'ORNITHOLOGIE. 169 ORDRE TROISIÈME. LES OISEAUX NAGEURS 4 OU PALMIPÈDES. Pinuti immense peuplade des habitans de Pair que la nature a disséminés sur la surface du globe, il semble quelle ait tracé une ligne de démarcation, au moyen de laquelle il est, pour amsi dire, impos- sible de confondre les individus d’an ordre avec ceux d’un autre, quoique ce- pendant lon passe, comme nous lPayons déjà remarqué, des uns aux autres par des gradations et des nuances pour ainsi dire insensibles. Sans parler ici de la variété du plumage des orseaux qui, dans quelques espèces, quelquefois même dans des familles en- uéres, brille des couleurs les plus vives et 270 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE les plus éclatantes, tandis que, dans d’autres, il n'offre à la vue que des teintes sombres et obscures, qui dans la plupart sont le symbole de leur caractère : sans nous arré- ter à leur nourriture, dont la différence en établit une sensible dans leurs mœurs; sans exposer ici de parallele entre la voix de ceux dont les doux accens et la tendre mélodie pénètrent lame de sensations déli- cieuses , tandis que d’autres sont tout-a-fait silencieux , et ne nous inspirent de ce coté-là qu'un intérêt médiocre, ou bien déchirent le tympan de nos oreilles par des cris durs, rauques et désagréables, que souvent ils entourent du voile funèbre de la nuit : qu'il nous suffise, pour les distinguer, de jeter seulement un coup d’œil attentif sur les éiémens différens qu'ils habitent. Dans le partage général que la nature a fait de son vaste domaine à chacun de ses enfans emplumés, elle a donné aux uns la ierre et l'air pour domicile; elle a envoyé les autres cingler sur la surface de londe, tandis qu’elle a réservé à des espèces inter- médiaires les confins de ces trois élémens. D'ORNITHOLOGIE. 271 Les oiseaux dont nous allons parler sont les seuls qui, à leur domaine établi sur Ja ierre el dans Pair, réunissent la jouissance de l’eau : ce dernier asile est leur élément favori ; ils voguent sur les flots, souvent écumeux , avec plus d’aisance et de sécurité que l’Atrondelle vagabonde ne le fait au milieu du fluide aérien. Sans se constituer en frais de déplace- ment sensible, ils trouvent sans peine une nourriture abondante dans une proie qui ne peut leur échapper : pour la saisir , les uns ont besoin de se plonger, tandis qu'il suffit aux autres de voguer sur la'surface de onde pour y immoler un grand nombre de leurs victimes. Fous s’établissent sur cet élément mobile; ils s’y rassemblent en bandes nombreuses, ct y vivent en paix et dans nne intelligence exemplaire; ils ne quittent instantanément ce séjour de délices que pour s'occuper du soin plus délicieux encore de leur progé- piture, avec laquelle bientôt ils viennent partager sur les flots une félicité, que les soucis hideux d’une basse jalousie ne troubla jamais. UT S S 272 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE La forme du corps des animaux dontnous allons parler, leurs doigts garnis de larges membranes indiquent d'une manière non équivoque leur aptitude pour la naviga- tion, et font connoiître, à la première vue, qu'ils sont habitans nés de l'élément li- quide. Ce corps bombé et recourbé en arc sem- blable à la carêne d’un vaisseau , ce cou relevé sur une poitrine large et saillante en représente la proue; cette queue courte et terminée en pointe fait l'office de gouver- nail; leurs jambes petites et eachées dans l'épaisseur des plumes, leur tarse court et presque toujours comprimé par les côtés, en fendant l’eau, favorisent leur natation, comme les membranes placées entre leurs doigts, en faisant l'office de rames, en ac- célèrent la rapidité. Le plumage de ces oiseaux est non- seulement épais, serré et garni d’un beau duvet; mais le suc huileux qu'ils extraient des glandes de leur croupion, et dont ils enduisent leurs plumes, est encore une sorte de vernis, une espèce de goudron D'ORNITHOLOGIE. 223 qui , en les préservant de lhumidité, reud leur plumage lustré et imperméable à l'eau. Fels sont en général les moyens que la nature a départis aux oiseaux nageurs pour faciliter leur navigation continuelle; telles sont les ressources abondantes que lordonnateur suprême leur a fournies pour leur subsistance : aussi leurs habitudes sont- elles assorties avec ces facultés, . Es ne se plaisent nulle part ailleurs que sur l’eau; et sil leur arrive quelquefois de se poser sur la terre, ils sy regardent comme perdus, égarés, ou comme dans un séjour qui leur est tout-à-fait étranger : le moindre choc, et la plus petite aspérité qu'ils y! rencontrent, blessent leurs pieds rätollis par la longue habitude qu'ils ont de ne voyager que sur une surface toujours humide; aussi semblentAls tous clocher en marchant, et, bientot fatigués d’un exercice qui leur est si pénible, ils s'empressent de regagner le séjour chéri qui est pour eux un lieu de repos, de plaisirs et de tranquillité. Leur vie est bien plus douce et moins pénible que celle des oiseaux terrestres ; re, 18 x x 294 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ils emploient d’ailleurs bien moins de forces pour leur natation que ceux-ci n’en met- tent en usage pour l'exécution de leur vol; ils y rencontrent, comme nous venons de le dire, leur nourriture en abondance, et quel- quefois même sans la chercher: ils la pren- uent sans peine, et la saisissent sans fatigue. Aussi cette vie si commode leur donne- t-elle des mœurs plus douces et plus inno- ecntes : un amour mutuel les rassemble ; ils vivent en paix; jamais la tranquillité de leur séjour ne fut troublée par des rixes, et jamais aucun d’eux ne victima ses sem- blables. Les palmipèdes vivent , généralement parlant, de poissons et d’autres produc- tions aquatiques, soit végétales, soit ani- inales : néanmoins ils diffèrent tellement entre eux, soit quant à la conformation de leur bec et de leurs pieds, soit par rapport à leurs habitudes naturelles, que, pour mettre le plus de précision qu’ilnous a été possible dans la division que nous en avons faite, nous avons pensé qu'il étoit nécessaire de les partager en cinq familles, D'ORNITHOLOGIE, 27 LEL PREMIÈRE FAMILLE. Les oiseaux que nous placons dans cette pre- mière famille des zageurs ou palmipédes ap- partiennent autant aux oiseaux de rivages qu'aux nageurs; Car, comme les premiers, ils ont une partie de la jambe 1) au-dessus du genou degarnie de plumes; 1ls sont de même montes sur des tarses fort eleves; et leur bec, quoiqu'un peu plus court que celui des räles, est néanmoins conforme de même. . Mais, d’an autre côte, ilsontles doigts garnis de membranes simples ou festonnées ou enfin à demi-fendues ; tous ont un pouce bien distinct et bien séparé : d’ailleurs ces oiseaux nagent et plongent parfaitement bien. Ils appar- 1) Nous avons déjà dit, et nous aimons à le répéter encore, que la partie de l’osseau que nous nommons ici l:1 jambe est ce que l’on appelle vuigairement la cuisse , et que ce que nous désignons sous le nom de tarserest ce que l’on croit être Ja jambe. Or, en examinant le. squelette de la planche 7, on y verra, la cuisse j,j, composéé d’un seul 05 que l’on no:ame /é- mur. qui est toujours dans l’intérieur. de cet animal; tandis que la partie qui est la première visible à l'extérieur du corps, et que l’on appelle improprement la cuisse, est la jambe, com- posée d’un tibia et d’um commencement de péroné k, k. Ce que vous nommons, encore très-improprement , le gerzou, 1,1, ést donc le czlcaneum ; et le véritable genou 2, 2 est la partie ployante d'avant en arrière qui sort quelquefo s immécliatement du corps de {’orseau. j 18 * 376 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE liennent donc aussi aux palmipèdes , et ils leur appartiennent avec d'autant plus de rai- son, que, comme eux , is n'ont d'autre séjour que les eaux , sur lesquelles on les voit voguer continuellement. Nous pensons donc que l’on doit considérer les oiseaux qui composent cette premiére fa- mille comme la nuance intermédiaire, le pas- sage insensible des oiseaux de rivages aux palmipèdes; et nous aurions pu les placer indifféremment , soit à la fin de l’ordre des oiseaux de rivages,soit, comme nous le faisons, au commencement de celui des oiseaux na- LeEUTS, : | Ce qui nous a déterminés à les placer à la tête de ces derniers, c’est, non-seulement leur habitude de nager on de plonger continuelle- ment ; mais ce sont encore les larges membranes de leurs doigts qui favorisent leur natation continuelle , et qui ne se rencontrent , du moins aussi développées, dans aucune des espèces d'oiseaux de rivages. D'ailleurs une méthode n’est point un ta- bleau infaillible de la nature; elle est seulement une invention ingénieuse de l’art, et presque toujours arbitraire : il importe donc peu qu’un oiseau y occupe telle ou telle autre place, pourvu que ses caractères distinchfs se D’'ORNITHOLOGIE. 277 trouvent en harmonie avec ceux de ses conge- néres. Cette famille renferme trois genres, savoir : celui de la poule d'eau, celui de la foulque où morelle, et celui du grébe. PREMIER GENRE. LA POULE D'EAU. On a donné à ce genre d'oiseaux le nom de poule d’eau , à raison du rapport géneral, quoique cependant très-éloigné , et de la ressem- blance de sa forme, dans laquelle on a cru irouver de la similitude avec la poule propre- ment dite. La poule d’eau compose donc un genre d'oi- seaux nageurs qu'on reconnoît aux caracteres suivans,savoir : troisdoists devantetun derriere, tous garnis, et dans toute leur longueur, demem- branes fendues, simples et étroites ; un bec droit et pointu, comprime par les côtes; la partie du bas de la jambe dégarnie de plumes; et enfin une plaque nue, cartilagineuse et comme cornée , située sur le front , à l'origine du bec: celte plaque, blanche en toute auire saiSOn , rougit au printemps. Le genre de la poule d’eau est composé de trois espèces seulement indigènes de la France, \ e78 À TABLEAU ÉLÉMENTAIRE savoir : Ja poule d'eau proprement dite, Va pe- tite poule d'eau et la grinette. 1. LA POULE DEAU PROPREMENT DIRE. Fulica chloropus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. gr. La poule d’eau. Bris. Ornith. tom. 6, pag: 3. ( Voyez la planche XXIX de cet ouvrage.) La poule d’eau est de la grosseur a peu prés d’un pigeon ordinaire ; sa longueur, mesurée du bout du bec a l’extré- mité des ongles , est de quatorze pouces six lignes; son vol d’un pied sept pouces, et ses aïles , lorsqu'elles sont ployées, s'étendent jusqu'aux deux tiers de la longueur de sa queue. Le corps de cet oiseau, comprimé par les côtés, est en dessus d’un brun verdâtre; sa tête, sa gorge, son ccu et sa poitrine sont d’un noir ardoisé ; son ventre, le haut de ses jambes , ainsi que ses flancs, sont d'un cendré noi- râtre, mêlé de quelques nuances de blanc vers l’extré- muité des plumes , surtout sous le ventre. On voit sur quelques plumes des flanes une large tache blanche qui s'étend le long de la direction de son tuyau: ce caractère n’est cependant pas constant dans tous les individus. Il s’en trouve dans lesquels il manque absolument, tandis qu'il est plus ou moins sensible dans d’autres , et nous croyons qu'il peut être occasionné par l’âge plutôt que par le sexe; les couvertures latérales du dessous de la queue sont blanches, et celles du milieu sont noires; l'aile est bordée d’une ligne blanche; les pennes dont elle est composée sont d’un brun fort brillant, et la queue est d’un brun sombre. La membrane qui de la base du bec s'é- D'ORNITHOLOGIE. 279 tend sur le front, est d’un rouge foncé; la racine du bec est de cette même couleur, mais sa pointe est d’un vert jaunètre ; Viris des yeux est d’un brun rouge : un cercle de cette derniére couleur, et qui n’est large que d’une ligne à peu prés, entoure le haut de la jambe à l'endroit où elle commence à être dégarnie de plumes. Les doigts, verdàtres et fort allongés, sont garnis, dans toute leur longueur et dans leur pourtour, d’une peau membr:- neuse qui a à peu prés une ligne de largeur; ces doigts sont tous terminés par des ongles verdâtres. Lorsque l'oiseau vole, il tient toujours ses pieds pendans comme les râles. Cette poule d'eau se trouve particulièrement, durant l'été, sur le bord des riviéres, des lacs, des étangs et des ruisseaux de la plupart des départemens intérieurs de la France : on la rencontre en tout temps dans les jones qui bordent ceux des montagnes des Vosges ; eile en descend quelquefois pendant l'hiver pour se répandre sur ceux de la plaine, dont la plupart ne gélent que lorsque le froïd est excessivement rigoureux, à raison , sans doute, des sources abondantes qui les alimentent, et qui le plus souvent sourdent dans le fond du plus grand nombre de ces étangs. Ainsi, sans être un oiseau de passage, on peut dire que cette poule d’eau ne fait, du moins dans les Vos- ges, que des émigrations instantanées des montagnes dans la plaine , et de la plaine dans les montagnes réci- proquement. Cependant , par respect pour des auteurs infiniment recommandables, tels que les Adanson, les Pallas, les Gmelin , les Sloare, les Cook, etc., nous nous garderons bien d'assurer qu’elle est constamment sé- dentaire dans le pays qui la vit naître, puisque les uns l’ont cbservée au Sénégal, les autres en Sibérie; ceux-ct 20 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE à la Jamaique, et ceux-la dans la nouvelle Zélande + tous conviennent qu'ils n’en ont jamais rencontré dans ces régions diverses qu’un petit nombre. D'ailleurs, outre que ces mêmes auteurs ne font nullement mention de ses émigrations , il pourrait se faire aussi que ce ne, fût pas la même espèce que la nôtre, ou qu’elle se trouvât-la même, sans pour cela passer d’un climat dans un autre. Durant le jour eet oiseau se tient soigneusement caché dans les roseaux, et ce n’est qu’au crépuscule du sci qu’il commence à se promener sur l’onde , où nous avons plus d’une fois remarqué que tous ses mouvemens étaient circulaires, et qu’en nageant il frappoit sans cesse l’eau de sa queue : dans le cours de sa natation , il se reposoit sou- vent en appuyant son cou sur les joncs, les roseaux où sur les larges feuilles du nénuphar qui abonde sur tous les étangs et sur la plupart des rivières des Vosges, dont il faut excepter cependant la Moselle quiest sans herbage. Ji vit de petits poissons et d'insectes qu'il attrape en voguant sur l’eau des rivières ou des étangs seulement ; car jamais il ne fréquente les marais ou les eaux maré- cageuses. La poule d’eau proprement dite construit son nid avec des jones et des roseaux qu’elle amoncelle en grande quantité, en les entrelaçant les uns dans les autres ; elle place ce nid au bord de l’eau, où elle le cache avec le plus grand soin dans l’épaisseur de ces végétaux. La femelle, un peu plus petite que son mâle, a les couleurs de son plumage beaucoup plus foibles que lui, et la gorge’blan- che : elle pond dans ce réduit flottant des œufs à ‘fond blanc, tachetés irrégulierement de brun rougeàtre: elle fait jusqu’a trois pontes par an. La premiére est ordinai- rement de sept ou huit œufs , etles autres sont moins rom- breuses à mesure qu’elles sont plus tardives. Lorsque cette D'ORNITHOLOGIE. | 282 bonne petite mére quitte ses œufs le soir pour se pour- voir de, quelque subsistance, elle a le plus grand soin de les couvrir d’herbages qu’elle détache du bas du nid, soit pour les dérober à la vue, soit, plus probablement, pour entretenir la chaleur qui leur est nécessaire. À peine les petits qui en éclosent ont-ils vu le jour, qu'ils se jettent à la nage pour suivre leur mére, qui leur apprend à cher- cher leur nourriture sur les eaux; et tous les soirs elle les ramène dans leur berceau où elle les place affectueu- sement sous elle, soit pour les garantir de la froide hu- midité des nuits, soit pour les réchauffer au sortir de l'eau qu'ils ont parcourue tout le jour. Ces soins de la tendresse maternelle se prolongent jusqu’à ce que les petits soient devenus assez forts pour n’en avoir plus besoin, et pour se pourvoir eux-mêmes de nourriture. C'est alors seulement que la mére les abandonne à eux- mêmes pour s’occuper de nouveau du soin de leur donner des freres. Ce qui nous a souvent étonnés , c’est qu'après avoir vu de loin une couvée de jeunes poules d'eau qui suivoient leur mére, et après avoir observé le lieu où elles fai- soient leur retraite aussitôt qu’elles nous apercevoient, quoi que nous les cherchassiens la avec un excellent chien couchant, jamais nous n’avons pu en découvrir un seul, pas plus que leur mére. Quelques auteurs prétendent que le même couple de ces o7seaur fait toujours son nid dans le même endroit : c'est ce qu'il nous a été impossible de constater. A la vé- rité, nous avons trouvé dans le même canton des nids de poules d’eau : mais qu’elles soient les mêmes que celles qui avoient niché là les années précédentes , c’est ce qu'il nous est impossible d'assurer. On peut prendre les poules d'eau de deux manières : la 46» TABLEAU ÉLÉMENTAIRE première consiste en ce qu'après avoir observé les lieux qu’elles fréquentent de préférence, on les entoure, dès le crépuscule du soir, de perches que l'on jette sur l’eau entre les roseaux, et que l’on dispose de manière à y former une avenue à l'entrée de laquelle on place, le long d’un cordeau tendu roide, une grande quantité de lacets de crin, à nœuds coulans, et qui soient distans d’un pouce ou deux de la surface de l’eau. Ces oiseaux, en voyageant , ne peuvent approcher de ces lieux qu'ils aiment, à cause des perches qui en obstruent le passage ; ils sont donc forcés de retourner à l’entrée de l’avenue, et la ils rencontrent les lacets. dans lesquels ils s'engagent le cou et ils y demeurent suspendus. La seconde maniere est d'entourer ces lieux de plusieurs trémailliers semblables à ceux que l’on emploie pour les cailles, et que l'on dispose de sorte que la moitié de ces filets soit dans l’eau, et l’autre moitié hors de l’eau: ce moyen, quoique plus dispendieux, est beaucoup plus sûr que l’autre. 2° LA PETITE POULE D EAU. / Fulica fusca. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. or. La petite poule d’eau. Bris. Orn. tom. 6, pag. 6. ‘À n’en juger que par l’épithete de petite, et par celle de poulette que l’on donne dans quelques contrées de la France à l'oiseau dont il est ici question, on seroit tenté d’abord d'imaginer qu'il est sensiblement plus petit que le précédent, et on se tromperoit; car ses dimensions sont si peu disparates de celles de la poule d’eau ordinaire, qu'il faut y regarder de trés-près : il est même nécessaire de les avoir toutes deux sous les yeux pour en aperci- voir la différence. D'ORNITHOLOGTE. 283 Quoiqu'elles habitent l’une et l’autre les mêmes lieux, on assure qu'elles ne contractent cependant jamais d union ensemble, malgré la similitude de leurs mœurs ét de leurs habitudes : c’est là un fait sur lequel il nous est impossible de prononcer, malgré les soins que nous nous sommes donnés pour le constater. Tout ce que nous pou- vons donner comme certain, c’est que, d’après ce qu’en disent plusieurs ornithologistes , et ayant été à portée d'observer ces oiseaux au moment où, le soir, ils sortoient de leurs retraites pour voguer sur l’eau, nous avons re- marqué sur quelques petits étangs des Vosges montueuses, où ils sont abondans, que chaque espèce ne formoit pas seulement des bandes à part, mais qu'elles avoient même l'air de se fuir et de s’éviter. La petite poule d'eau a le dessus de la tête, du cou et du corps, d’un brun verdâtre, ainsi que les pennes de la queue, à l'exception de la plus extérieure de chaque côté, qui est blanche. Tout le dessous de son corps est d’un cendré lavé de bleuûtre , ou, pour mieux dire, d’une couleur d'ardoise peu foncée; chacune des plumes qui recouvrent ces parties est bordée de blanc vers son ex- trémité, et les couvertures du dessous de la queue sont noires; le bord extérieur de l'aile est frangé d’une ligne blanche ; les pennes qui composent cette partie sont noi- râtres. L'iris des yeux de cet oiseau est rouge, ils sont surimontés d’une espèce de paupière blanche ; la mem- brane, qui de la base du bec s'étend sur le front, est d'un jaune verdûtre ; le bec, la partie nue des jambes, ainsi que les doigts et les membranes qui les bordent sont de cette même couleur, et les ongles brunûtres. 284 TABLEAU EÉLÉMENTAIRE 3° LA GRINETTE. Fulica nœvia. VAN. Syst. nat. édit. 13, gen. ot. La poule sultane tachetéc. Br1s. Ornith.t1.5 , pag. 558. Nous doutions fort que cet oiseau, que plusieurs orni- thologistes ont placé, avec Brisson , dans la famille des poules sullanes, et qu'Albin a publié avec une figure très- mal coloriée , sous le nom de petite poule d’eau , se trouvât nulle part ailleurs qu’en Italie ou en Allemagne, etnous étions intimement convaincus qu'il étoit étranger à la France. Néanmoins, en 1787, un de nos amis 1) qui étoit assez généreux pour consacrer quelquefois des journées entières au plaisir de la chasse, dans la seule intention d'enrichir notre cabinet de quelques espèces nouvelles, nous apporta, au mois de septembre, une grinette que nous reconnûmes, d’après les planches coloriées de Frisch , pour être l'oiseau que M. de Buffon a désigné aussi sous le nom de grinette, comme une poule d’eau. Depuis l’époque où nous avions reçu cet oiseau , jus- qu'à la fin de l'an VII, nous étions presque convaincus que ce palmipède, qui avoit été tué sur le grand étang de Biécourt dans les basses Vosges lorraines , n’y étoit, comine tant d'autres qu’on y a souvent rencontrés, qu'un 1) M. le chevalier de Guillermi , ancien capitaine-commandant au régiment ci-devant Champagne infanterie, retiré du service après la guerre de Corse, comblé d’honneurs et surtout de blessures qui sont la récompense glorieuse qui atteste le courage de ces hommes magnanimes dont nous avons aujourd'hui tant d'exemples sous les yeux, et qui, en travaillant au salut de leur patrie, parcourent la carrière de la gloire dans laquelle ils cucillent des lauriers immortels. D'ORNITHOLOGIE. 285 individu isolé, qui, par quelque accident , s'étoit égaré de sa route. Mais pendant les vacances de lan VIT, en parcourant les montagnes des Vosges , nous tuimes deux grinettes, la première sur un très-petit étang, près de Xertigny, et la seconde sur un des lacs de Gérard- mer : d’où nous conclûmes que cet oiseawétoit au moins de passage en automne dans nos contrées. Nous ne dirons rien autre chose de ses mœurs que nous ne connoissons pas , sinon que, contrairement aux deux espèces précédentes , la grinette.ne se tient pas , comme elles, cachée pendant le jour dans les herbages aquatiques et les roseaux qui bordent les lieux qu’elle habite , mais qu’elle vogue à découvert au milieu des lacs et des étangs: c’est ainsi du moins que nous avons vu les deux que nous avons tuées. L’une et l’autre plon- geoient fréquemment ; elles se tenoient même assez long- temps sous le fluide aqueux , et nageoïent ainsi entre deux eaux jusqu’à une distance assez considérable de l'endroit où elles s’étoient enfoncées. Cetoiseau, qui est à peu prés de la taille du râle de genét, a le bec d’un vert jaunâtre ; la plaque ou membrane qui de la racine de cet organe s'étend jusque vers le milieu du sommet de la tête, est d’un jaune aurore ; l'iris des yeux , d’un brun rougeâtre ; la partie nue des jambes, roussâtre ; les pieds et les doigts, ainsi que la petite membrane qui les entoure, sont de même couleur que le bec, et les ongles d’un brun marron. Toutes les plumes qui revêtent le dessus du corps de la grinetie sont d’un brun noirätre , variées et bordées de roussätre ; les pennes de ses ailes sont de même couleur, et variées de même, mais elles ne sont pas bordées ; celles de la queue sont toutes de la même couleur , à l’excep- tion des deux du milieu qui sont bordées de blanc: la 386 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE gorge est d’un gris bleu d’ardoise, et le devant du cot d'un verdàtre obscur, tacheté de noir, de même que li poitrine ; tout le reste du dessous du corps, jusques et y compris les couvertures du dessous de la queue, est rous- sètre : seulement les côtés ou les flancs, qui sont du même fond de couleur, sont de plus rayés transversalement de blanc et de brun. DE UXIÈME GENRE. LA FOULQUE OU MORELLE. Les caractères particuliers aux oiseaux de ce genre consistent dans quatre doigts, trois de- vant et un derrière, garnis dans toute leur longueur de membranes fendues et festonnées ; dans un bec en cône aplati par les côtes; dans une plaque cartilagineuse qui, de la base du bec, s'étend en arrière jusque vers le milieu du sommet de la tête, et enfin dans une partie du bas de la jambe, qui est dégarnie de plumes. Ce genre ne contient que FR, espèces indi- gènes de la France, savoir : la fou/lque où mo- relle ordinaire, et la racroule. 1. LA FOULQUE GU MORELLE ORDINAIRE. Fulica atra. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. Or. La fouique ou morclle. Bris. Ornih. tom. 6, p. 29 ( Voyez la planche XXIX de cet ouvrage.) Cet oiseau est de la grosseur d’une petite poule ; tout son plumage est d'un gris bleuûtre ou de couleur d'ar- D'ORNITHOLOGIE. 387 doise : seulement la tête , les joues et le cou, tant en dessus qu’en dessous, sont d’un beau noir qui se perd vers le milieu de cette dernière partie, par une nuance insensible , dans le gris bleuâtre du reste de son plu- mage; le bas de ses jambes, qui est dénué de plumes, est entouré d'un cercle jaunûtre, et le pli de l'aile est marqué, sur son bord le plus extérieur, d’un trait blanc que l'on ne peut apercevoir lorsque l'aile est appliquée contre le corps, parce qu’alors les plumes des côtés du bas du cou le cachent en le recouvrant. Le bec de cet ozseau est taillé en cône aplati par les côtés; il est ordinairement d'un blanc jaunâtre , et sa pointe est d’un blanc assez pur ; il devient rougeàtre dans le temps des amours, ainsi que la membrane épaisse et nue qui de la racine du bec lui couvre tout le devant de la tête jusque vers le milieu de son sommet; cette plaque est taiilée en forme d’écusson, et dans tout autre temps que celui des amours elle est blanche : l'iris des yeux est rougeàtre; les pieds, qui sont aplatis par les côtés, sont noirs, ainsi que les doigts, qui sont longs et demi-palmés, ou garnis de membranes fendues et fes- tonnées, sans aucune adhérence entre elles : les ongles sont de même couleur. La foulque passe la plus grande partie de la journée sur l’eau , où elle se cache dans les joncs et les roseaux jusqu’aprés le déclin du soleil sur notre horizon ; elle ne va que trés-rarement à terre, et lorsque cela lui arrive elle y paroït tellement hébétée, que souvent on l’y attrape à la main. Ce n’est jamais que la nuit qu’elle prend son essor pour passer d'un étang à un autre, et on soupçonne avec beaucoup de probabilité que cette habitude de voya- ger dans les ténébres lui est impéricusement commandée par la foiblesse de sa vue, qui est blessée, sans doute, par le trop grand éclat du jour, ” 288 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Cet oiseau reste durant la plus grande partie de l’année sur nos lacs et nos étangs, du moins sur ceux du dépar- tement des Vosges; cependant leur nombré y est moins considérable en hiver qu'a l’arrière-saison , où ces animaux, aprés avoir quitté avec leurs nombreuses familles les petits étangs, se rassemblent sur ceux qui sont plus con sidérables. C'est la qu’on leur fait une guerre ouverte ; et voici comme on s’y prend. Plusieurs nacelles chargées d’un chasseur, au moins, qui se tient a l’avant du bateau ; tandis qu’un rameur est à l'arrière pour le diriger, partent ensemble de divers points de l'étang en battant les roseaux d’où ces oiseaux prennent, à peu de hauteur, leur essor , et passent sur la tête des chasseurs pour se rendre au milieu de létang ; la commence le premier feu, qui en abat souvent un grand nombre. | Après ce prélude de fusillade, toutes les nacelles s’at- tendent à la ligne de démarcation, où les jones, en finis- sant, laissent entre eux un grand espace d’eau sur laquelle on voit à découvert une multitude innombrable de foulques. À un certain signal convenu, toutes les nacelles cinglent ensemble vers un centre commun, dans lequel ils circonscrivent étroitement ces timides créatures, qu'ils assaillent de toutes parts. Celles qui échappent aux coups mortels s’empressent de chercher leur salut dans la fuite ; mais comme leur vol n’est point élevé, et que l'éclat du jour le leur rend pénible, elles se contentent de tourner en parcourant au vol les bords de l'étang, où elles trouvent une mort assurée dans d’autres chasseurs qui se sont em- busqués tout autour. | Le carnage que, pour le seul plaisir barbare de détruire, on faisoit jadis de ces malheureux oiseaur, étoit si grand, que souvent sur l'immense étang de lIndre, dans le dé- D'ORNITHOLOGIE. 289 partement de la Meurthe, ou sur celui de Biécourt dans les basses Vosges, on remplissoit une nacelle des cadavres de ces innocentes créatures. Les foulques s’apparient dés le moiïs de mars ; et elles pondent en avril : elles établissent leur nid sur une grosse touffe flottante de roseaux secs, et la femelle y dépose de quinze à dix-huit œufs d’un blanc sale , et qui sont presque aussi gros que ceux de poules. Quelques dénicheurs vils et méprisables ont la cruauté de ravir à cette tendre mère ses œufs, lors même qu'ils s’aperçoivent au travers de leur coquille que la chaleur de Pincubation y a développé le petit souvent prêt à éclore 1). | "Aussitôt que les foulquions voient Ja lumière , ils se jettent à la nage, et suivent leur mére, qui les instruit à chercher leur nourriture, ét qui n’a d'autre soin que celui de les réchauffer le soir, en les rassemblant sous ses ailes. Mais la plupart d’entre eux trouvent dans le buzard un énnemi aussi cruel que l'homme, et qui en détruit une grande quantité. ea à 11 est très-probable que la foulque , quoique mauvaise voilière , fait cependant de fort longs voyages ; car, au rapport de plusieurs ornithologistes recommandables , on la trouve dans toute l’Europe, depuis l'Italie jusqu’en 1) En Hollande les paysans vont à la recherche des œufs de foulques, qu’ils vendent dans les marchés, parce que ces œufs passent pour un mets fort délicat ; mais ils ont soin de ne prerdre que ceux qui sont frais, et pour en être assurés , ils ne dénichent que les pontes qui ne sont encore que de dix à douze œufs : ils sont certains par là que ces pontes n’étent pas complètes, _elles n’ont point encore été soumises à la chaleur de l’incuLa- tion qui leur communique une sorte de fermentation qui met ces œufs hors d'état d’ètre mangés, A 29 290 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Suede, et de l’Asie jusqu’au Groenland : plusieurs d’entre eux l’ont remarquée , les uns en Sibérie, les autres en Perse, en Chine; ceux-ci à la Jamaïque , et ceux-là à la Louisiane comme à la Caroline. ES Le) 2. LA MACROULE. Fulica aterrima. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 9t. La grande foulque ou la macroule. Bris. Ornith. iom.6, pag. 25. Cette espèce ne diffère de la foulque ordinaire qu’en ce qu’elle est un peu plus grande qu’elle ; elles ont lune et l'autre les mêmes habitudes, elles se trouvent souvent mêlées ensemble dans les mêmes lieux, elles nichent de la même maniere et aux mêmes époques : en sorte que, vues séparément , on ne pourroit décider, au premier coup-d’œil, lequel de ces deux oiseaux est la foulque or- dinaire ou la macroule ; cependant en y regardant de plus près, et en les comparant surtout l’une avec l’autre, on voit que le bec de la macroule est sensiblement plus long; que la membrane festonnée qui entoure ses doigts est à peu près du double plus large que celle de la foulque or- dinaire. D'ailleurs la plaque cartilagineuse qui couvre le front de cette derniére, devient rouge dans le temps de ses amours ; celle de la macroule , au contraire , reste toujours blanche. , Un autre caractère distinctif, et qui n’est pas moins frappant, consiste en ce que le cerele qui entoure le bas de la jambe de la foulque ordinaire est d’une couleur jaunâtre , tandis que ce même cercle est rouge dans la macroule. , Ces deux oiseaux ont le plumage de la tête et du cou. D'ORNITHOLOGIE. +91 d’un fort beau noir; celui du dessus et du dessous du corps, d’un cendré bleuâtre ; néanmoins nous avons fait une remarque que tout le monde peut facilement cons- tater, c’est que toutes les teintes du plumage de la ma- croule sont bien plus fermes et plus prononcées que celles de la foulque ordinaire, et qu'enfin elle n’a pas la tache blanche que l’on voit sur le pli de Paile de cette derniere. TROISIÈME GENRE. LES GRÉBES. On reconnoît facilement les ciseaux du genre des grébes à la coupe informe de leur corps allongé , renflé en devant et déprimé en arrière; à leur cou long ; à leur bec droit et pointu; à leurs ailes courtes, restreintes en tout sens ; à ja touffe de plumes eftilées qui leur tient lieu de queue; et enfin à leurs pieds courts, à demi- rentrés dans le ventre, placés à l'extrémité du corps, aplatis sur les côtes, tranchans sur les faces, terminés par quatre doigts, dont les trois antérieurs sont liés à leur base seulement par une membrane non festonnée, et qui est à deimi-fendue entre chacun d'eux. Cette même membrane , qui est arrondie à son extrémité, entoure chacun des doigts. Les srébes d’ailleurs ont les ongles larges et aplats , à peu près comme ceux des singes; leur 19" 202 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE plumage est brillant et satiné: celui surtout qui revêt le-devant de leur corps est estimé comme uñe belle fourrure, qui, suivant l'expression de l’immortel Buffon, « a la moelleuse épais- 5 seur du duvet, le ressort de ‘la plaies et le # lustre dé la soie ss. Nous connoissons en France six espèces de grébes, qui y sont sédentaires ou bien acci- dentellement de passage. On donne assez vul- gai irement à tous, quoique très-improprement , nom de plongeons. Ces six espèces sont : le grébe commun, le petit srébe , le grébe huppé, le grébe cornu, le petit srébe cornu et'le castagneux de ri- vzére. Le 1° LE GRÈBE COMMUN. CO Colymbus urinator. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 75. ‘ Le grébe commun. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 54. ( Voyez la planche KXIX de cet ouvrage.) 4 ; Ce grébe, un peu plus gros que la foulque, a, du bout du bec à celui du doigt du milieu, près de vingt-deux pouces de longueur. Tout le dessus de sa tête, desoncou et de son corps est d'un brun foncé et lustré; ses joues k le devant de son cou, et surtout sa poitrine ; ainsi que le dessous de son corps, sont d’un blanc argenté, brillant et satiné : c’est la partie qui recouvre la poitrine, que l’on emploie particulièrement commeune fourrure charmante , D'ORNITHOLOGIF., 293 dont les longs brins n’ont pas seulement le lustre de la soie, mais dont le tissu trés-serré et très-ferme se couche de manière à ne former qu'un ensemble , une surface unie, glacée et luisante, qui est imperméable à l’eau. Les plumes qui recouvrent le corps de tous les individus de cette famille en général ne ressemblent en rien à celles qui revêtent eclui des autres oiseaux ; elles-sont toutes décomposées , unies, soyeuses, et paroissent plutôt une sorte de poil, ou, pour mieux dire, une espèce de soie que des plumes; mais c’est particulièrement dans le genre des grébes que ces brins soyeux ont le lustre le plus brillant , et l'éclat de la soie la plus moelleuse. L’aile du he dont il est 1ci question , de même que celle de tous ses congénères, paroît courte en compa- raison dela masse de son corps, et lorsqu’elle est ployée, les plumes soyeuses dont elle est recouverte se confondent avec celles du corps, de telle manière qu'on seroit tenté de croire, en voyant cet oiseau nager , qu'il manque absolument d'ailes; néanmoins chacune d'elles est com- posée de trente pennes qui, lorsqu'elles sont ployées, sont brunâtres, traversées dans leur milieu d’une large bande longitudinale , blanche , formée par la réunion des couches | de la partie intérieure de chaque penne qui est de cette même couleur. Cet oiseau a le bec droit et pointu, la mandibule su- périeure brune, et l'inférieure rougeàtre , terminée de blane à sa pointe : on voit à la commissure des deux man- dibules un petit espace recouvert d’une péau nue, de couleur rouge, et qui s'étend de-la jusqu’au dessous de l'œil, dont l'iris est d’un cendré légérement teinté de rougeàtre; les pieds qui sont largement aplatis sur les côtés, sont recouverts d’écailles bidentées ; ils sont d'un brun rougeûtre , ainsi que les doigts et les membranes 204 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui les entourent ; les ongles qui sont larges et plats sont bruns , terminés de blanchètre. Il est certain que l’élément favori des grébes est l’eau, et que jamais ils ne doivent fréqueriter la terre; car nous avons eu un de ces oiseaur Vivant que nous avons nourri quelques jours dans un cuvier rempli d’eau, dans la seule intention d’en étudier les mœurs , et nous n’avons re- marqué que deux choses importantes : la première qui nous porte à croire qu'il ne peut marcher sur la terre, c’est que toutes les fois que nous le sortions de son cuvier pour le poser sur le pavé à carreaux de la pièce qu'il oc- cupoit, à la moindre aspérité qu’il y rencontroit, il faisoit une culbute sur sa tête. La seconde remarque que nous avons faite , c’est que quand on s’approchoït de son euvier, il se plongeoït aussitôt dans le fond , où il se tenoit plusieurs minutes de suite sans reparoiître à la surface, et lorsqu'il y revenoit et qu'il apercevoit quelqu'un, il se replongeoiït de nouveau: nous lui avons fait faire dix fois de suite cet exercice dans moins d’une demi-heure. La chair de ce grêbe , ainsi que celle de toutes les especes de ce genre, quoique chargée de beaucoup de graisse , n'a pas la réputation d'un mets fort délicat; ellea, dit-on, une forte cdeur de poissons marécageux : ce qu’il y a de certain, c’est que le plumage de cet oiseau exhale une sorte d’odeur musquée et désagréable, même après plu- sieurs années qu'on l'a embaumé. Nous croyions quil ne nichoit pas en France, cepen- dant nous n’osions pas l’affirmer; nous étions aussi per- suadés , seulement d'aprés l’assertion de quelques ornitho- logistes qu'il ne se trouvoit que sur les lacs de Genève, de Constance ou sur les bords de la mer; mais nous avons été détrompés sur ce point lorsqu’en l'an VI, au mois de fructidor, un pécheur nous apporta pour notre col- D'ORNITHOLOGIE. 295 Jection, un de ces individus mâle qu'il avoit attrapé avec une sorte de lacet à nœud coulant sur le lac de Gérardmer, dans le département des Vosges, et il nous assura qu'il y en avoit vu et même pris déja plusieurs. Or que cet oiseau ne paroisse dans les Vosges qu’acci- dentellement , et encore quand il s'y est égaré de sa route, il n’est nullemeut improbable qu’il ne puisse, par de semblables motifs, y revenir encore : et cela nous suffit pour qu'il trouve place dans ce tableau élémentaire qui ne contient pas seulement l’ornithologie générale de la France, mais celle des Vosges en particulier ; cegrébe, d’ailleurs, outre qu’il fréquente la plupart de nos côtes maritimes , paroît assez souvent , dit-on , sur plusieurs étangs du département de la Côte-d'Or: en effet, nous en avons vu plusieurs cette année dans la collection d’un ornithologiste de ce département, extrêmement zélé, et qui prépare les oiseaur avec beaucoup d'adresse et de propreté ; il nous a assuré que tous ces grêébes avoient été tués sur différens étangs de la Côte-d'Or. 2° LE PETIT GRÉPE. Colymbus obscurus. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. :5. Le petit grébe. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 56. Quoique Buffon , ainsi que plusieurs autres ornitholo- gistes , indiquent la mer comme le séjour exclusif de cette espèce de grébe, il n’est pas moins certain cepen- dant qu'il existe sur les lacs comme sur les eaux limpides de plusieurs étangs des montagnes des Vosges, soit qu'il y arrive immédiatement de la mer, ce qui seroit diflicile à constater , soit, et c’est ce qui paroît plus vraisemblable, 296 TABLEAU ÉLEMENTAIRE qu'ilvienne du lac de Genève ou de ceux de la Suissé ;, qui re sont pas fort éloignés de la. Quoi qu’il en soit, cet oiseau n’est pas très-rare .dans les Vosges, on pourroit même dire qu'il y estassez commun; car nous l'avons non-seulement tué plusieurs fois sur des “étangs que l’on pourroit regarder plutôt comme des.cra- paudières, que comme des réservoirs à poissons, dans le voisinage de Bussang et de la Bresse. Maïs ily a trois ou quatre ans qu’en herborisant sur les bords de la Mo- selle, a deux lieues plus bas qu'Epinel, nous nous arré- tâmes avec un pêcheur qui jetoit son épervier dans un de ces réservoirs d’eau sans écoulement , etqu'ils nomment des mortes ; nous avions l'intention d'y ramasser quelques insectes aquatiques. Cet homme lança son filet sur un petit grébe qui étoit caché dans les herbages de ces eaux croupissantes; aussitôt qu'il se vit circonserit par le filet, loin de plonger en dessous pour s'en échapper, il grinpa au contraire contre ses mailles jusqu’au dessus : nous le primes vivant, et afin d'en étudier les mœurs plus a notre aise, nous le conservèmes quelque temps à la maison , comme nous avions fait du grèbe commun , dans un pctit cuvier rempli d’eau, en lui donnant pour nourriture des débris de fruits dont il s’accommodoit très-bicn. Son air d’une gaieté constante, sa singuliére propreté , et sur-tout la promptitude à exécuter ses di- verses évolutions, la rapidité avec laquelle il se plongeoit au-fond de l’eau étoient très-amusantes. Mais une petite infidélité de sa part l’engagea à déserter son cuvier : hospitalier , et nous nous déterminèmes, en conséquence de cet acte, si naturel cependant aux êtres que l'Eternel a créés pour être libres, à le faire briller dans notre cabinet à côté de ses congénères, pour n’avoir plus à craindre sa désertion, D'ORNITHOLOGIE. . 297 Cette petite espèce de grébe n’a guère que huit pouces €t demi de longueur depuis l’extrémité du bec jusqu’à celle du eroupion , et un peu plus d'un pied de vol : sa tête et le dessus de son cou sont d’un brun très-sombre, à reflets, d’un vert plus ou moins brillant, suivant l’in- cidenee des rayons de la lumière ; et, suivant cette même incidence, l'iris de son œil qui est brun, : présentoit, de son vivant, des reflets d'un rouge doré. Son bec noir est revêtu d'une peau rouge qui est située aux angles de la commissure des deux mandibules : le dessus de son corps est d’une couleur brune, tachetée de verdtre , et son croupion est roussätre. Tout le devant de son corps, à partir de ses joues jusqu'a sa gorge inclusivement, est d'une couleur aurore tirant sur le ponceau; elle est assez brillante; son ventre et ses côtés sont gris, ta- chetés d’un brun noiraâtre ; la partie nue de ses jambes, ses pieds, de même aue ses doigts et leurs membranes, sont d'une couleur de chair mêlée d’un rouge de cerises. On remarque une dentelure très-sensible sur la tranche extérieure de son tarse. 3. LE GRÈBE HUPPÉ. Colymbus cristatus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 7°. Le grébe huppé. Bris. Orniih. tom. 6, pag. 38. Celui-ci que l’on ne rencontre que trés-rarement sur quelques rivières , lacs ou étangs :de l'intérieur de la France, est beaucoup plus gros que le grébe commun ; ïl a, de l'extrémité du bec à celle du doigt du milieu, vingt-cinq pouces; son vol est de plus de deux pieds et demi, ct lorsque ses ailes sont ployées , elles s'étendent jusqu’au croupion. 298 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Tout le dessus du corps de cet oiseau, depuis la tête jusqu'a l'extrémité du croupion inclusivement, est d’un brun qui, quoique sombre, n’en est pas moins brillant ; tout le dessous, à partir de la base de la mandibule inférieure , est d’un très-beau blanc argenté et soyeux ; les côtés de sa tête sont de cette même couleur, et elle s'étend jusque vers l’occiput, en sorte que ce blanc ne laisse sur le sommet de la tête qu'un espace assez étroit, de couleur brune. Entre le bec et l'œil on voit un autre espace qui est dégarni de plumes , et qui, à leur place , est recouvert d’une peau d'un rouge in- carnat. Les plumes du sommet de la tête de ce grébe sont un peu plus longues que les autres; elles se dirigent d'avant en arrière, et la ell:s forment une espèce de petite huppe que l'oiseau peut relever ou abaïsser, suivant les différentes sensations qu'il éprouve. De chaque côté de sa gorge il se trouve aussi une petite touffe de plumes qui sont un peu plus longues que les autres. L’aile est composée de pennes dont les premières sont brunes, et les autres mi-parties de brun et de blanc, ou entierement blanches, ce qui fait paroître l'aile tachetée de cette derniére couleur, lorsqu'elle est ployée. L'iris est jaune; la mandibule supérieure, d’un brun noirâtre en dessus, est rouge sur les côtés; l’inférieure est en- tiérement rouge, à l'exception de sa pointe qui est noire. Les pieds , les doigts et leurs membranes sont d’un brun rougeâtre , et les ongles noirâtres marqués d’une tache blanchätre à leur extrémité; la partie nue des jambes est de la même couleur que les pieds. Les ornithologistes observateurs qui, à raison de leur résidence sur nos côtes maritimes, ont été à portée d'ob- server et de suivre les mœurs et les habitudes de cet : D'ORNITHOLOGTE. * 299 oiseau , prétendent qu'il ne niche guère que dans la Manche, sur Jes eaux de laquelle il construit un nid flottant qu'il compose de végétaux aquatiques, secs, tels que l’hattone, le ménianthe ou le nénuphar, et que la femelle y pond quatre ou cinq œufs de la grosseur à peu prés de ceux de pigeons, et parfaitement blancs comme les leurs. | h° LE GRÉBE CORNU. Colymbus cornutus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 55. Le grébe cornu. BRIS. Ornith. tom. 6, pag. 45. Üne touffe de plumes noires de dix lignes de long à peu près, et qui est placée sur le sommet de la tête de cet oiseau, se dirige en arriére , en se Séparant #2 deux faisceaux qu'il peut relever au gré de ses desirs. On a sans doute comparé ces deux faisceaux à des cornes, et de-là on a appliqué à ce grébe l’épithète de cornu. Indépendamment de ces deux appendices, sa tête est encore entourée de plumes fines , longues et soyeuses qui retombent en bas , suivant la direction du cou, et paroïssent enfler considérablement cette partie, sur la- quelle elles flottent en forme de crinière coupée en rond. Cette espèce de chevelure est rousse à sa racine, et noire à sa pointe; ce qui donne à cet oiseau une physionomie tout-àa-fait étrangère. Tout le dessus de san corps est brun, et le dessous est, comme dans toutes les espèces de ce genre, d’un blanc soyeux et argenté, maïs qui est plus brillant que celui de tous ses congéneres; seulement les côtés du ‘corps sont bruns roussätres, et les ailes sont d'un brun marqué d'une large tache blanche. 300 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Ce grébe, un peu moins gros que le commun, x de longueur totale ; mesuré de l'extrémité de son bec à celle de son croupion, un pied et demi, et plus de deux et demi de vol : quand ses ailes sont ployées , elles atteignent l'extrémité de son corps. Cet oiseau a l'iris rouge; la mandibule supérieure du bec, brune en dessus et rougeàtre sur les côtés ; l'infé- rieure de cette dernière couleur dans toute sa longueur, à l'exception de la pointe qui est blanchätre. La partie nue de ses jambes, ainsi que ses pieds , ses doigts et les membranes qui les entourent, sont rougeâtres du côté intérieur , et de couleur d’ardoise du côté extérieur ; ses ongles sont bruns, bordés de blanchâtre à leur extré- mité. | En plaçant ici ce grêle parmi les oiseaux que l’on ren- contre ‘iême accidentellement dans la ci-devant Lorraine, nous prévenons que nous ne l’f avons jamais vu vivant, et que ce n’est que sur le témoignage d’un de nos amis qui possède une petite coilection d’oiseaux parmi lesquels celui-ci se trouve, que nous nous sommes déterminés à le placer dans ce tableau des oiseaux indigènes de la France. Cet ami digne de notre confiance nous a assuré tenir cet individu d’un chasseur qui lui avoit certifié qu'il Pavoit tué sur un de nos étangs. Dans ce cas, il est a présumer que ce grébe s’étoit échappé du lac de Genève 1), ou bien, de dessus quelques-uns de la Suisse d’où il étoit venu visiter les Vosges, comme cela arrive souvent à plusieurs autres espèces de cés contrées qui les avoisinent. 1) Ces orseaux sont particulièrement abondans sur le lac de Cenève : c’est de là surtout que l’on fait passer à l'étranger, comme une très-belle fourrure, beaucoup de peaux de cette espèce de grébe, qui se vendent un prix assez considérable. D'ORNITHOLOGIF: 301 5° LE PETIT GRÊBE CORNU. Colymbus auritus. LAN. Syst. nat. édit: 13, gen. 55. Le grébe à oreilles. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 50. Ce grébe est un peu plus gros que le castagneux ci- après ; tout le sommet de sa tête et le haut de son cou sont revêtus de plumes fines, douces, soyeuses , allongées, et d'un brun verdàtre ; le bas des joues, ainsi que le haut du cou et la gorge, sont garnis de plumes renflées, et de même couleur que celles du sommet de la tête, sans néanmoins être coupées et disposées en criniére , comme dans l'espèce précédente ; tout le devant du corps est d’un beau blanc argenté; les côtés ou les flancs sont roussàtres; les jambes grises ; les ailes d’un brun noir, mar- quées tout le long de leur pli d’un trait blanc et d’une large tache de même couleur dans leur milieu. Nous avons possédé dans notre collection deux ou trois individus de cette espèce, qui avoient quelques taches blanches de chaque côté de la tête, à l’origine du cou. L'iris des yeux de cet oiseau est, dans tous, d’un brun rougeâtre ; son bec est noirâtre à sa base, et d’un blanc sale à son extrémité; ses pieds , ainsi que la partie nue de ses jambes, ses! doigts et les membranes qui les bordent, sont d’un brun verdûtre. Ce qui caractérise davantage ce grébe, qui ne se trouvé pas seulement sur nos côtes maritimes, mais qui est presque aussi commun que le castagneuxr, sur certaines eaux stagnantes de quelques départemens de l'empire français, ce sont deux pinceaux eflilés de plumes longues qui ‘sont placés de chaque côté, et qui prennent naissance autour de l’œil en partant de l'orbite et se di- ño2 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE rigeant en arrière; ils s’'épanouissent. sur les côtés de la tête, et semblent y indiquer lorifice du méat auditif. Chaque faisceau de ces plumes est partagé en deux parties, dont la supérieure est d’un jaune tendre, et l’inférieure d’une couleur rousse. Il y a apparence que le petit grêbe cornu que l’on trouve sur plusieurs eaux stagnantes des départemens des Haut et Bas-Rhin, sur celles de Saône-et-Marne, et plus rare- ment sur les lacs des montagnes des Vosges, où il ne fait que des apparitions de peu de durée, y arrive à certaines époques de l’année des montagnes de la Suisse où cet oiseau est fort commun sur toutes les eaux stagnantes que l’on trouve depuis le+lac de Genève jusqu'à ceux d'Yverdun et de Morat. C’est dans ces contrées enchan- teresses que nous nous sommes procuré un grand nombre d'individus de cette espèce, soit pour nous, soit pour nos amis. C’est là que nous croyons qu'il niche , sans néanmoins en avoir la certitude. G° LE CASTAGNEUX DE RIVIÈRE. Colÿmbus minor. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 5. Le grébe de rivière, ou le castagneux. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 50. ( Voyez la planche XXIX de cet ouvrage.) Cette dernière espèce du genre des grébes n’a que neuf pouces de longueur de l'extrémité ‘du bec à celle du croupion. Tout le dessus de son corps est d’un brun teinté de fauve, a l'exception du bas du croupion qui est blanc : les côtés de sa tête et le Gevant de son cou sont d'un grisatre fauve ; sa gorge est d’un blanc sale; la poi- trine et le haut de son ventre sont, dans beaucoup d’in- D'ORNITHOLOGIE. 303 dividus, d’un blanc argenté, et gris dans la plupart. Les pennes des ailes sont d’un gris brun, plus ou moins mar- quées de blanc les unes que les autres : ce qui paroît de cette couleur, lorsque l'aile est ployée , forme sur son bord extérieur une raie oblongue. L'iris est de couleur de noisette ; le bec est d’un brun fauve dans toute sa _ longueur; sa pointe seule est blanchàtre. La partie nue des jambes, les pieds, les doigts et les membranes dont ils sont bordés, sont d’un brun verdètre, et les ongles qui sont trés-plats et obtus à leur bout, sont bruns , bordés de blanchâtre. De toutes les espèces de grébes, celle-ci est la plus commune ; elle se trouve sur toutes les rivières comme sur tous les lacs et les étangs de l’intérieur de la France, et particuliérement sur ceux des Vosges où elle abonde; elle y vit de petits poissons et de jeunes écrevisses. Le casta- gneux construit son nid de roseaux, et dans les roseaux ; il le place sur l’eau, où il est porté sur sa surface de maniere qu'il est susceptible de s'élever ou de se baisser süivant la crue de ce fluide. Les œufs que cet édifice flottant renferme sont à peu pres de la grosseur, et tiennent beaucoup de la couleur de ceux de la perdrix grise. Quant à leur nombre, il nous seroit diflicile de l'indiquer exac- tement; car de plusieurs nids que nous avons trouvés , les uns en contenoient six et d’autres huit, neuf et même dix. Nous avons la certitude qu'aussitôt que les petits sont nés, ils se jettent à la nage et suivent leur mére. En désignant les oiseaur qui composent ce genre, sous leur véritable nom, sous celui de grêébes, nous les avons sans doute rendus méconnoissables pour quelques dé- partemens, et surtout pour eelui des Vosges où on ne les nomme généralement et vulgairemrent qué plo ICONS 304 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Cette erreur n'auroit sûrement pas eu lieu , si on s€ fût donné la peine , non pas d'étudier l’ornithologie, (on peut, et cela n'arrive que trop souvent dans quelques départemens quenous connoissüns, regarder cette science comme infiniment superflue et comme n’étant d'aucune utilité, sinon pour apprendre à distinguer les oiseaux dont la chair est bonñe à manger , d'avec ceux qui ne va- lent rien ), mais seulement d'ouvrir un livre qui traite de ces animaux , Ou bien dejeter un coup d’œil sur quel- ques gravures exactes, telles que celles de l’ouvrage de Buffon qui se trouve dans toutes les bibliothèques, dans celles mêmes qui ne servent que d’ornement : alors en examinant les pieds de ces deux genres d'oiseaux, on auroit vu que les membranes des grébes ne font”que border leurs doigts, tandis que celles des plongeons em- brassent et lient ensemble les trois doigts antérieurs , comme dans les canards et les oies, SECONDE FAMILLE. Nous avons placé dans cette seconde famille, en suivant toujours la méthode de M. Cuvier, un genre d'oiseaux dont le caractère général est facile à saisir, puisqu'il ne consiste qu’en ce que leurs quatre doigts sont unis et lies en- semble par une seule et même membrane. | Cette famille ne contient qu’un seul genre ; qui est celui des pélicans. D'ORNITHOLOGIE. 305 GENRE UNIQUE. LES PÉLICANS. Ces oiseaux , quoique plus parfaitement pal- més qu'aucun de ceux qui composent ce troi- sième ordre, nagent cependant beaucoup moins qu'aucun d’eux ; ils ont même l’habitude de se percher sur les arbres. Les caractères particuliers aux espèces de ce genre consistent en ce que les unes, comme les pelicans proprement dits, ont le bec long, aplati en dessus. La base de ce bec , dénuée de plumes, est revêtue d’une peau nue. Au-dessous et le long de la mandibule inférieure, 1l se trouve un sac extensible, qui se dirige du bout du bec, à deux pouces près de son ex- trémite , jusque sous la gorge; la mandibule supérieure est terminée par une dent ou croc très-fort, dont l’usage paroïît être de saisir en l’accrochant l'extrémité de la mandibule in- férieure, et de la tenir exactement fermée lorsque le sac qui est en dessous est rempli de provisions. Les autres , comme le cormoran et le fou de Bassan ,ont le bec sensiblement plus court, comprimé et crochu par le bout, la queue longue ; roide et inégale, tandis qu'elle est courte dans les pélicans proprement dits. T2, 20 306 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Ce genre ne renferme que quatre espèces, qui sont le pélican proprement dit , le pélican brun, le cormoran et le fou de Bassan : elles fré- quentent toutes la plupart de nos côles mari- times , etires-accidentellement l’intérieur de la France. 1° LE PÉLICAN PROPREMENT DIT. Pelecanus onocrotalus. Lin. Syst. nat. édit. 13, 6.72. Le pélican. BR1s. Ornith. tom.6, pag. 519. ( Voyez la planche XXX de cet ouvrage.) Le pélican est pour le naturaliste observateur un des oiseaur d'eau qui lui présente le plus d'intérêt, soit à raison de sa taille gigantesque , soit par rapport au sac membranmeux qu'il porte sous son long bec, soit enfin relativement aux fables que les anciens ont débitées sur son compte, et qui conservent encore du crédit chez le peuple. Cet oiseau, qui est plus grand que le cygne, a cepen- dant les jambes infiniment plus courtes que lui; il a cinq pieds quelques pouces du bont du bec à celui de la queue; l'envergure de ses ailes, qui est de onze pieds au moins d’étendue , lui donne une extrême facilité pour se tenir long-termaps en l'air, et s’y balancer avec une légé- reté telle qu'il semble ne pas bouger de place, si ce n’est au moment où, avec la rapidité d'un trait qu'un bras vigoureux auroit lancé, il fond sur sa proie qu'il en- gloutit dans son vaste sac, et qu'il va ordinairement dé- D'ORNITHOLOGIE. 307 vorer à son aise et digérer à loisir sur la cime d’un rocher escarpé 1). Tout le plumage du pélican , s’il est surtout un vieil individu , prend une belle teinte de rose tendre, et comme trarsparente; ce qui semble communiquer à ses plumes blanches le lustre d’un vernis ; celles du cou ne sont qu’un duvet court, et celles de la nuque, quisont plus allon- gées, forment une espèce de crête ou de petite huppe. Sa tête est aplatie sur les côtés; ses yeux, petits et d'un gris jaunâtre, sont placés dans deux larges joues dé- nuées de plumes et revêtues d’une peau nue de même couleur que le bec; sa queue est composée de dix-huit pennes; son bec est d’un gris jaunâtre ou rougeûtre avec des traits de rouge vif sur le milieu et vers l'extrémité. Ce bec, aplati comme une large lame, est relevé en dessus dans toute sa longueur par une arête, et se ters mine par une pointe en croc. Nous avons particulièrement examiné ce croc dans plusieurs individus que les estimables Péron et Lesueur 2) 1) C’est toujours le soir et le matin que {e pélican se met en quête pour pècher, parce que c’est à ce moment sans doute que le poisson est le plus en mouvement . On voit alors cet oiseau raser la surface de l’eau, tomber perpendiculairement sur sa proie, la saisir, se relever, filer un instant et retomber encore *). 2) Ce sont les seuls de plusieurs naturalistes voyageurs ans l'expédition du capitaine Baudin, qui, comme nous l’avons déjà dit, avec les apparences d’une faible santé, ont résisté aux fa- *) Des voyageurs ont 6bservé dans la Haute-Égypte le vol du pélican sur le Nil, et ils ont toujours remarqué, disent-ils, que cet oiseau, qui est assez commug dans toutes ces contrées, battait des ailes à plusieurs reprises, qu'ensuite 1l planait en filant, et recommencait à battre des ailes, ct qu'ainsi sa course se Partagoait entre un filé droit et un battement d'ailes alteruawfs, jusqu'à ce qu son vaste sac fût sufisamment rempli. 20 * 308 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ont rapportés de leur expédition à la Nouvelle-Hollande, et il nous a semblé que ce croc qui a une sorte de mo- bilité, étoit susceptible de s'appliquer intimement contre le bout de la iiandibule inférieure, afin de la tenir non- seulement fermée, mais encore pour partager son poids, lorsque le sac qui est au dessous de cette mandibule se trouve rempli d’alimens lourds. Ce bec qui a neuf à dix pouces de longueur, est un peu courbé au bout, et il a neuf pouces de circonférence à l'endroit de son insertion avec la tête; la mandibule in- férieure de ce même bec ne consiste qu’en deux branches flexibles qui se prêtent à l’extension de la poche mem- braneuse qui y est adhérente, et qui-pend au-dessous comme un sac en forme de nace; cette poche peut con- tenir vingt pintes au moins de liqueur. Toute la face du pélican est d'une couleur bleue obscure, et cette même couleur s'étend, à un pouce prés , au- delà de l'œil. Le derrière de sa tête et de son cou n’est revêtu que d’une espèce de duvet qui est entièrement blanc ; les pennes de ses ailes sont bleuûtres, et celles de sa queue sont noires; cet appendice est court, et son ex- trémité est coupée carrément. GP ec oo tigues sans cesse renouvelées, et aux influences perfides des con- trées lointaines qu’ils ont parcourues avec un dévouement géné- reux qui caractérise des hommes zélés qui ne redoutent aucun danger pour reculer les bornes de leurs connaissances. Les amis de la science, à l’aspect des richesses dont ces savans viennent d'enrichir les galeries du musénm, n’ont à regretter que plusieurs compagnons de leur long voyage, qu’une mort prématurte enleva trop tôt aux progrès des sciences naturelles. Ces collec- tions sont d'autant plus précieuses que Peron les a faites avec ce discernement qui atteste ses lumières , et que le pinceau habile de Lesueur a immortalisé des teintes qui ne sont qu'éphémères dans plusieurs animaux lorsqu'ils sont sortis de l’élément liquide. D'ORNITHOLOGIE. 309 Le pélican doit d’autant mieux exceller dans la fata- tion, qu'il a les pieds entièrement palmés, c’est-a-dire , que les trois doigts antérieurs sont réunis et liés ensemble avec son pouce par une seule membrane qui est de couleur jaune ou rouge, suivant l'âge de l'animal ; ses pieds, ses doigts et ses ongles sont de la même couleur. Quoique le pélican paroisse plutôt appartenir aux climats chauds qu'aux régions froides du globe , et se tenir de préférence sur les bords méridionaux du Danube ; cepen- dant il n’est pas tellement confiné dans ce pays, qu'il ne lui arrive quelquefois de s’en éloigner pour s’avan- cer, même assez loin, dans l'intérieur de la France 1}; car, non-seulement on en a tué dans la ci-devant pre- vince du Dauphiné, mais encore sur la riviere de Saône: on prétend même que les dépouilles de deux individus que l’on voyoit aux galeries du Muséum, venoient de ces deux départemens. 1) Le climat de ia France est si peu contraire au pélican, qu’à ce moment on voit dans le bassin du clos des buffles, au jardin des Plantes, un de ces oiseaux que Sa Majesté llmpératrice a donné au muséum quelque temps avant son départ pour être eouronnée reine d’ltalie, et déja depuis plus d’un an il vivait dans la ménagerie de la Malmaison. Cet oiseau, que l’on nourrit de jeunes carpes placées dans un cuvier près du bassin, semble toujours dormir sur le bord de l’eau, où il se tient couché , le bec tourné sur le dos, et caché dans une des grandes couvertures de ses ailes; quel- quefois, mais rarement, il se tient debout, et c’est toujours sur un pied. Il a Je bec et la poche du dessous de cet organe d’un jaune de paille, terminé par un croc de couleur rouge de cire d’Espagne; les pieds d’un blanc jaunâtre , et les yeux d’un rouge-pourpre. La totalité de son plumage est d’un blanc jaunêtre, à travers lequel on voit à l’origine des plumes une teinte de rose ; son sac mem- braneux est peu apparent, 3:e TABLEAU ÉLÉMENTAIRE . Un chasseur qui méritoit toute notre confiance nous aassuré, 1] y a plusieurs années, qu’il avoit tué en 1774 un pélican sur le grand étang de Biécourt , situé entre Mireeourt et Neuf-Château , et qu'il en avoit envoyé la dépouilie à M. de Buffon, après qu’il eut extrait du corps de éet oseau tous les intestins, et qu'il les eut remplacés par divers aromates desséchés et saupoudrés de poivre, d’alun et de camphre 1 }. Nous nous gardérons bien de révoquer en doute un fait. d'autant plus possible , que nous avons eu de ce même étang des oîsecux que plusieurs ornithologistes assuroient ne fréquenter jamais la France; mais ce que nous pouvons -certifier; c'est que cette même dépouille, si elle a existé aux galeries du muséuwim du temps de M. de Buffon , en 4 été exclue ‘depuis leur érganisation nouvelle. Au reste, un ornithologiste du département de la Meurthe possède dans sa collection un péhcan qu'il a vu tuer lui-même sur l'étang de l'Indre, dans le même département. .: Nous ne pouvons passer ici sous silence ce que disent äu pélican Sonnerat et 'le pere Labat. Le premier nous ‘apprend que cet oiseau ne se donne pas la peine de cons- truire un nid, que la femelle dépose tout simplement ses œufs à plate terre sur le bord des eaux, et que c'est là qu’elle les couve. ; Le second, dans le. VITI® volume de son nouveau ‘voyage aux flés de l'Amérique, confirme cette assertion, en rapportant qu'il a trouvé jusqu'a cinq œufs sous une femelle de pélican, qui, lorsqu'il passoit prés d’elle, -sans se léèver de dessus ses œufs , se contentoit de lui 1) On verra à la tête du recueil de planches de cet ouvrage lama- nière dont où peut et un doit préparer la dépouille des wiseaux pour les envoyer au loin. D'ORNITHOLOGIE. 311 donner quelques coups de bec, comme pour lavertir de se détourner. Ilajoute qu'un jour il prit deux jeunes de cette couvée, qu’il les attacha ensemble avec une ficelle, parle pied, à un piquet, et qu’ainsi il pouvoit chaque jour se procurer le plaisir d'examiner la tendresse et les soins de la mère a leur apporter une ample provision de nourriture dans son vaste sac, qu'elle dégorgeoïit pres d'eux. Il dit qu’à la fin ces deux individus étoient devenus si familiers avec lui, que non-seulement ils permettoient qu'il les touchât, mais qu'ils prenoient même de sa main quelques petits poissons qu'il leur présentoit : il ajoute que ces oiseaux étoient si malpropres que , malgré leur grande familiarité , et le vif désir qu’il en avoit , il ne put jamais se déter- miner à les emporter avec lui. La chair du pélican est un mets si détestable, elle a un si mauvais goût, qu'on ne peut qu'être frappé d’éton- nement en voyant Moise l’nterdire aux Hébreux comme eelie d'un animal immonde. 2° LE PÉLICAN ERUN. Pelecanus fuscus. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 52. Le pélican brun. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 524. ( Voyez la planche XXX de cet ouvrage. Quoique l’on prétende que le pélican brun se trouve dans les mêmes contrées et dans les mêmes endroits que le précédent, avec lequel il forme une société intime , nous ne pouvons rien assurer de positif sur ce fait, n’ayant pas été à portée de nous en instruire par nous-mêmes. Qu'il nous suffise donc de dire , à l’occasion de cet oiseau, que M. de Buffon prétend qu’il n’est qu'une va- 312 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE | riété du pélican proprement dit, ou peur mieux dire , ua individu de la même espèce, jeune, et qui n’a point en- core atteint l’âge où les adultes acquièrent la couleur et la beauté du plumage que nous leur voyons. Cela nous paroît d'autant plus probable , que la même différence se trouveentre le plumage du cygne adulte, qui est du blane le plus pur, tandis que celui des jeunes reste jusqu'a la premiére mue, d’un gris uniforme , et plus foncé que celui des cendres. D'ailleurs, si nous nous en rapportons aux Mémoires de l'Académie des Sciences, tom. IT, pag. 144 et suivantes, où il est fait mention de ces oiseaux, il y est dit que les uns avoient tout le plumage blanc , à ‘exception des ailes, dont quelques pennes étoient de cou- leur de chair, tandis que les autres étoient grises ou noires, parce qu'elles n'avoient point encore mué. Cette hypothèse nous paroît d'autant plus probable qu’en effet le pélican brun est sensiblement plus petit que le pélican ordinaire avec lequel il demeure au moins pen- dant une année, comme cela arrive chez la plupart des autres espèces d'oiseaux dont les enfans conservent la livrée de leur naissance jusqu'a leur première mue, et ne se séparent de leurs pére et mère qu’à l’époque où, après une année , ils s’aparient pour former une nouvelle union intime dont le but est la reproduction de leurs semblables Parmi les fables que l’on a débitées sur le compte du pélican, nous ne devons point oublier qu’il n’est pas rare de voir encore aujourd'hui, même dans la capitale , où plus particulièrement qu'ailleurs les ta- lens et les grandes lumières se trouvent à côté de l'ignorance la plus crasse et du fanatisme le plus nau- séabonde , qui représentent le pélican se béque- tant et se déchirant la poitrine afin d'en faire ruis- D'ORNITHOLOGIE 319 seler le sang dont le vulgaire croit qu'il nourrit ses petits. On a ajouté à cette fable un merveilleux plus ridicule encore : on a prétendu que cet oiseau, aipsi que le phénix de la fable, lorsqu'il étoit parvenu à un certain terme de vieillesse ou d'infirmités, construisoit lui-même un bûcher sur lequel il se brüloit. Nous nous rappelons que dans l’église même des cordeliers de la ville qui nous donna le jour, on voyoit deux tableaux de l’histoire fabuleuse du pélican, dont l’un représentoit cet oiseau s'ouvrant affectueusement la poitrine pour alimenter de son sang sa progéniture; sur l’autre on voyoit un vieux pélican qui se bràloit sur un bûcher artistement pré- paré. Ces deux tableaux imposteurs décoroient les deux côtés de l’autel principal, et il n’a rien moins fallu que la révolution pour soustraire a la crédulité du peuple des témoins mensongers de l'erreur , et qui devoient lui être d'autant moins suspects qu'ils siégeoïient dans un licu saint : c’est ici un des points de vue sous lesquels la ré- volution doit être supportable aux amis de la vérité. 3 LE CORMORAN. Pelecanus carbo. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 72. Le cormoran. BRis. Ornith. tom. 6, pag. 511. ( Voyez la planche XXX de cet ouvrage.) Le cormoran est un oiseau du petit nombre de ceux qui ont les quatre doigts liés ensemble par une seule et même membrane. Nous ne le plaçons cependant dans la série des espèces indigènes de la France, que sur le té- moignage de quelques habitans de nos côtes maritimes, 514 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui nous ont assuré qu'il ÿ paroissoit fréquemment 1 ). Au reste, d'après le témoignage de M.- Hébert, il est à présumer qu'il paroît quelquefois dans l'intérieur de la France sur les rivières de plusieurs de nos départemens du centre, puisque cet auteur recommandable , et que M. de Buffon cite souvent avec éloge, assure par une de ses lettres, en date du 27 janvier 1779, qu’on lui apporta a cetie époque un cormoran que l’on venoit de tuer sur un saule planté au bord de la rivière d'Ouche qui coule dans le département de la Côte-d'Or. Le cormoran est à peu près de la taille d'une oe;ila, du bout du bec à celui de la queue , deux pieds sept pouces et demi de longueur , et plus de quatre pieds d'envergure; lorsque ses aïles sont ployées , elles dé- passent d’un pouce l’origine de sa queue. Son bec est droit. et cylindrique; il se termine par une espèce de croc trés-courbé et tres-fort. On voit entre l’œil et cet organe un espace dénué de plumes et qui est recouvert d'une peau noirâtre. | Il a le haut de la gorge dégarni aussi de plumes, et cette partie est revêtue également d'une peau nue de couleur noirûtre , teintée de jaunätre : cette peau est sus- ceptible d’une extension telle que, conjointement avee 1) On nous pardonnera sans doute les erreurs que nous pourrions commettre, et que cependant nous nous efforçons d’éviter , à l’oc- casion des oiseaëx maritimes, en faveur de notre résidence habi- tuelle , qui, étant trop éloignée des ports de France, ne nous a pas permis de nous transporter sur les lieux, et d’y habiter suf- fisamment de temps pour étudier les mœurs de ces animaux, comme notre position , avantageusement placée sur la ligne même qui conduit chaque année les oiseaux fissipèdes du midi au nord, et du nord au midi réciproquement, nous a procuré les moyens d’é- tudier tous ceux qui ne sont pas exclusivement maritimes. D’ORNITHOLOGIE: 315 la similitude de conformation de ses pieds ; les ormithos logistes n’ont pas balancé de placer cet oiseau parmi les pélicans. | | ME Le sommet de la tête et le haut du cou du cormoran sont couverts de plumes fines, longues et soyeuses, d’un vert obscur, et terminées de blanc; il porte sur la gorge une espèce de plastron blanc qui contraste assez bien avec la couleur noire verdàtre du reste de son plumage. La partie supérieure de son dos présente des reflets de cuivre de rosette, et les pennes de ses ailes, qui sont de même couleur, brillent de reflets rougetres : des quatorze piumes roides qui composent sa queue, les deux du mi- lieu sont les plus longues, ot les latérales vont en di- minuant toujours de longueur à mesure qu’eiles s'éloignent des deux intermédiaires ; elles sont toutes de couleur brune. La femelle est sensiblement moins grosse que son mâle, dent elle diffère d’ailleurs en ce qu’elle est entiérement noire, sans mélange d'aucune autre couleur. Le plumage noirètre du cormoran lui a fait donner par quelques auteurs le nom de corbeau de mer, de cor- beau chauve, quoiqu'il n’ait absolument rien de commun avec cet oiseau, pas même le noir du plumage qui dans celui-ci est, comme nous venons de le dire, d’un vert noir, tandis que dans le corbeau il est d'un noir profond et très-prononcé. L'iris de ses yeux qui sont placés très- prés de la commissure des deux mandibules de son bec, est verdâtre : ses paupieres sont piquetées de points blancs violets ; son bec est d’un brun cendré; ses pieds, qui sont larges et aplatis latéralement, ainsi que ses doigts et les membranes qui les entourent, sont d'un noîr profond, de même que scs ongles, dont cclui du tilieu est denté intérieurement comme une scie, 316 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Quoique le cormoran aït les quatre doigts réunis dans une seule et même membrane, il se perche néanmoins plus fréquemment sur les arbres, qu'il ne nage sur la surface des eaux, il est peu d'oiseaux qui soient meil- leurs navigateurs que lui; il en est peu aussi qui soient plus grands destructeurs de poissons ; il les prend au fond de l’eau, soit en y plongeant soit en nageant entre deux eaux; et on prétend que lorsqu'il n’a pas saisi un poisson par la tête, il revient aussitôt sur la surface de l’eau, que la il le lance en l'air, et qu'il a l'adresse de le saisir de telle manière que la tête entrant la pre- miere, les nageoires et surtout la dorsale, se couchent sur le dos et ne peuvent füire obstacle à l’intromission de cet habitant des ondes dans le vaste gosier du cor- moran. Un seul de ces oiseaux, dit-on encore, est eapable de détruire tout le poisson d’un étang en trés-peu de jours ; heureusement qu'il se plaît davantage sur le vaste océan que sur les eaux douces où il ne paroît pres- que jamais; car il les auroiït bientôt ruinées de fonä en comble. Il semble que c’est particuliérement en Sibérie que niche le cormoran, car Gmelin, dans son voyage vers ces con- trées, tom. I, pag. 244 , rapporte que les habitans de ce pays croient que les arbres sur lesquels cet oiseau place son nid deviennent secs. Le même Gmelin ajoute qu'il a effectivement remarqué que tous ceux sur lesquelsil avoit vu des nids de cormoran étoient desséchés. Peut-être aussi, dit-il, ces oiseaux ne choisissent-ils pour placer Pédifice qui doit servir de berceau à leur progéniture que ces sortes d'arbres. Un autre voyageur dit que les œufs du cormoran sont blancs et aussi gros que ceux de poule, mais qu'ils sont un mets aussi désagréable que sa chair. D'ORNITHOLOGIE. 317 Le cormoran est un oiseau lourd et paresseux qui ne se donne de mouvement que lorsqu'il a faim ; car quand il est rassasié il demeure dans une inaction presque conti- nuelle, ce qui lui procure beaucoup de graisse; mais sa chair, à raison de la forte odeur de poissons dont elle est imprégnée , est, dit-on, un mets détestable. h. LE FOU DE BASSAN. Pelecanus bassanus. Lin. Syst. nat. éd. 13, gen. 72. Le fou de Bassan. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 503. ( Voyez la planche XXX de cet ouvrage.) Ce n’est pas parce que cet oiseau habite constamment ou même périodiquement, à certaines saisons de l’an- née, nos côtes maritimes, que nous le plaçons parmi les espèces indigenes de l'empire ; nous savons au contraire qu'il se tient habituellement sur les rochers de l'ile de Bassan , dans le petit golie d'Édimbourg ; mais c’est parce que des personnes dignes de confiance assurent qu'il paroît quelquefois sur les côtes des ci- devant pro- vinces de Bretagne et de Picardie, surtout quand il y a été jeté par queiques coups de vent, lesquels en ontporté, disent quelques auteurs, jusqu’aux environs de Paris, que le fou de Bassan doit trouver place dans ce tableau d’ornithologie de la France, au moins comme un oiseau qui y fait quelquefois des apparitions, n’y fussent- elles même qu'accidentelles. « Ce fou est a peu pres de la grosseur d’une oie ; ila soixante un pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue, et cinq pieds trois pouces d'envergure. Tout son plumage est blanc, à l'exception de l’occiput qui à une teinte jaunûtre, et des grandes pennes des ailes 318 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qui sont d’un brun pius ou moins noirâtre; son bec qui a six pouces de longueur, et qui est susceptible d’une grande dilatation, est de couleur bleuâtre ; la base des mandi- bules est environnée d’une peau nue d’un bleu foncé ; elle de l’origine de la mandibule supérieure remonte jus- qu'aux yeux, dont l'iris est jaunâtre ; les pieds, qui sont largement palmés, sont noirs, ainsi que la membrane qui lie les quatre doigts ensemble ; les ongles, dont les deux du milieu ont pres de quatre pouces, sont de la même couleur que les doigts. On remarque sur le pied et le long de cêtte partie un trait de couleur bleuâtre qui, a l’origine des doigts, se divise en quatre parties dont chacune des branches se dessine sur tous. Cet oiseau passe pour étre d’une stupidité étonnante et peu commune chez le reste des animaux de cette classe. Sa chair, à raison de la forte odeur de poisson qu'elle conserve , même long-temps après sa mort, est non-seu- lement un mets détestable, mais on prétend encore qu'elle a quelque chose de fétide à l'excès. Cependant on assure que celle des jeunes, qui sont toujours fort gras , rest pas trop mauvaise, et c’est pour cette raison que dans l'ile de Bassan où cet oiseau niche dans des trous de ro- chers, les habitans sont assez téméraires pour exposer leur vie à la recherche de ces jeunes, en se suspendant à des cordes, et en descendant le long des rochers pour les dénicher. Un de nos amis nous fit cadeau, en 1784, de la dé- pouille préparée par feu Bœcour de Metz, d’un fou de Bassan pour notre cabinet. Cet oiseau y répandoit une si mauvaise odeur que nous fûmes obligés de l’enfermer à part sous une caisse carrée de verre, dans laquelle , pour empêcher encore l’edeur de s’exhaler, malgré que cette caisse fût bien lutée, nous fûmes obligée d'en- D'ORNITHOLOGIE. 319 fermer des aromates pris dans un pot pourri, et même d’y ajouter de l’ambre; et lorsqu’à notre départ pour la capitale nous délutämes ce récipient , l'odeur qu'il renfermoit nous parut désagréablement suffo- cante. TROISIÈME FAMILLE. Quoique les oiseaux dont nous avons com- posé cette troisième famille soient tous de haute mer, et que les navigateurs les voient dans toutes les plages , ils ne laissent pas néanmoins de faire chaque année, au moyen de leur vol étendu , des apparitions passagères dans plu- sieurs de nos départemeus intérieurs. Cette famille renferme deux genres; savoir, celui des Zirondelles de mer, et celui des rrau- ves. Leurs caracteres généraux consistent dans un bec sans dentelures ; dans le bas de leurs jambes , dégarni de plumes ; dans leurs pieds courts, et dans la disposition de leurs doigts, dont trois sont dirigés en avant, et réunis par une seule membrane , avec un pouce libre séparé. 32e TABLEAU ÉLÉMENTAIRE PREMIER GENRE. LES HIRONDELLES DE MER. Les hirondelles de mer ont pour caracteres particuliers le bec long, droit, pointu , aplati par les côtés, et dont les deux mandibules sont d’égale longueur ; leurs jambes sont courtes, comme nous venons de le dire, et leurs pieds sont forts petits. Leurs ailes , au contraire, sont très-longues ; elles sont échancrées , et leur queue est fourchue. | C’est probablement d’après la forme de leur queue, et d’après celle de leurs pieds courts, que l'on a donné à ces oiseaux le nom d’zi- rondelles avec l'addition de mer , afin de ne pas les confondre avec les Lirondelles propre- ment dites. D'ailleurs la seule inspection de leurs pieds empêcheroit toute espèce de méprise à cet égard. Le corps des hirondelles de mer est, comme celui de tous les oiseaux nageurs, recouvert d’une grande quantité de plumes garnies en dessous d’un duvet épais qui les garantit des influences humides de l’élément liquide qu’elles habitent. Ces oiseaux vivent de poissons qu'ils attrappent en rasant Ja surface de l’eau, comme D'ORNITHOLOGIE. 521 aussi d'insectes qu'ils saisissent dans les airs, où leur vol est presque continuel ; car ils ne se reposent que peu ou point à terre, leurs pieds étant trop courts, et ils ne nagent guère davantage. Les hirondelles de mer se répandent à l’ar- rière-saison dans l’intérieur des terres. C’est à la fin de mars et au commencement d’octobre surtout , qu'on en voit une grande quantité dans le département des Vosges. Au moment de ces deux passages annuellement périodiques, il en paraît beaucoup sur nos rivières, nos lacs et nos étangs, au-dessus desquels on les aperçoit se jouant dans l'air, et le traversant en tout sens par mille évolutions diverses, et répétant sans cesse des cris aigres, très-percans et qui sont insupportables. Nous connoissons seulement quatre espèces d’Airondelles de mer qui fréquentent nos côtes, et dont la plupart s’avancent dans l'intérieur des terres ; savoir, la grande hirondelle de mer, ou le pierre-garin, la petite hirondelle de mer, la guifette , et la guifette noire, ou l’épou- cantail. | 322 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE (9) I. LA GRANDE HIRONDELLE DE MER, OU LE PIERRE-GARIN. LL Éterna hirundo. Lan. Syst. nat. édit. 13, gen. La grande hirondelle de mer. Bris. Ornithr. tom. pag. 203. 77 6 J ( Voyez la planche XXXI de cet ouvrage.) Cétte première éspéce d'hirondelle de: mer est à peuprés dé la grosseur du pigeon bisel ; elle a, de l'extrémité du bec à celle de la queue; quinze pouces neuf lignes de longueur ; son vol est de vingt trois pouces, et quand ses ailes sont ployées , elles dépassent la queue de quinze lignes à peu prés. | Le sommet de la têté dé cet oiseau est ombragé d'une éspècé dé calotte d’un beau noir, qui se prolonge en poiufe jusqué sur le derrière du cou; son dos, ses plumes scapulaires , les couvertures supérieures de ses ailes ,son croupion, ainsi que les pennes de sa queue, sont d’un joli gris de perle ; tout le dessous de son corps, à partir de sa gorge inclusivemént, jusques et y compris les couvertures du dessous de sa quéue, sont d'un blanc pur et éclatant. Les ‘premières pennes dé ses ailes sont du même gris que lé dés; les autres, de même couléur, sont: intérieurement bordées de blanc, tandis que les premieres le sont de noir; sa queue est très-fourchue ; l'iris de ses yeux est d’un jaune aurore; son bec rouge, ainsi que la partie nue de ses jambes ; ses pieds, ses doigts et leurs membranes, de même que ses ongles, sont noirs. C’est au retour du printemps que le pierre-garin arrive sur nos côtes maritimes, et que de la il se répand dans plusieurs de nos départemens intérieurs, où il ne fait à D'ORNITHOLOGIE. 323 la vérité, qu'une apparition de peu de durée : tels sont ceux du Loiret, du Haut et du Bas-Rhin, et particu- liérement des Vosges, où ces oiseaux sont quelquefois en bandes fort nombreuses soit sur la rivière de Moselle, soit sur les lacs et les étangs de ces contrées. Les mouvemens vifs, les évolutions subites qu’ils exé- cutent alors dans les airs prouvent que ces animaux sont d’une légereté extrême : aussi les voit-on souvent, d'une grande élévation, se précipiter tout à coup dans les eaux! y plonger, y saisir le poisson qu'ils y guettent, et en un clin d'œil, se retrouver à la même hauteur d’où on les a vu partir. Les pierres-garins , comme toutes les autres hirondelles de mer en général ; paroissent fréquemment se heurter l’une contre l’autre dans leur vol. Témoins plus d’une fois de ces chocs mutuels , nous les regardions comme des accidens occasionnés par l’espèce d’étourderie qui semble caractériser ces oiseaux ; mais ayant eu plusieurs occasions de tuer de ces animaux au moment où ils ve- noient de pêcher, nous avons vu hors de leur bec une partie de la queue d’un poisson qui en dépassoit les man- dibules, souvent même de plusieurs pouces de longueur : d'où nous avons conclu, et cela paroiït trés-probable , que lorsqu'ils se heurtoient ainsi l’un contre l’autre ; c'étoit par le seul motif de la gourmandise , et dans l’in- tention de ravir la proie dont ils apercevoient un échan- tillon hors du bec d’un de leurs semblables , à la manière à peu près dont les poules poursuivent celles qui ayant saisi une substance nutritive trop volumineuse pour être avalée à l'instant toute entière, la tiennent dans leur bec quelques minutes en parcourant la basse-cour , pour ne pas se la voir ravir par les autres poules. Nous avons essayé d'élever dans le jardin de botanique 21Y 2ah 324 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de notre école centrale une grande hirondelle de mer qu'un élève avoit tirée d’un coup de fusil qui ne lui avoit coupé que les trois premieres pennes extérieures de l’aile très-prés de leur origine ; mais cet oiseau, dont les cris étoient insupportables la nuit comme le jour , n’y vécut que trente-six heures, soit a raison du défaut de nourriture convenable , soit à cause de la privation du plaisir de prendre ses ébats dans les airs; car nous nous sommes -assurés par le dépouillement que nous en avons fait afin de le monter pour notre collection , qu'il n’avoit reçu aucune blessure dans le corps. On a prétendu que le pierre garin nichoït dans les Vosges, mais nous sommes certains du contraire; nous tenons d’ailleurs d'un ami qui a observé en naturaliste cet oiseau sur les bords de la mer, que c'étoit la par- ticuliérement qu'il faisoit sa ponte à nu, dans un petit creux sur le sable. Elle consiste en deux ou trois œufs fort gros, eu égard à sa taille; ils sont d’une couleur grisaätre, quelquefois teintée de vert; les petits qui en éclosent passent pour être un fort bon mets. Ce même ‘ami nous a assuré qu'au moment de leur naïssance ces nouveaux nés étoient entierement couverts d’un duvet gris de cendre , à l'exception de la tête et du dos qui étoient un peu maculés de noir. Peu de temps apres qu'ils sont sortis de leur coquille, ils se jettent à la nage, et ils ne reviennent dans leur nid que pendant les premieres nuits de leur naissance, afin de recevoir sous les ailes mater- nelles la chaleur dont ils ont encore besoin pour hâter leur premier accroissement. | La manière, dit-on, dont le pére et la mère de ces jeunes oiseaux les nourrissent, est digne de l'attention d’un observateur ; ils ne leur apportent pas bec à bec leur nourriture , qui consiste en petits poissons ; mais du as D’ORNITHOLOGIE. 32 haut des airs ils la dégorgent sur eux tandis qu'ils se proméenent sur l’eau, et dans ce moment on croit voir une pluie de poissons qui, à raison de la gloutonnerie dont ces petits êtres sont déja susceptibles, excitent parmi eux des querelles qui paroissent mélées de colère. 2° LA PETITE HIRONDDELLE DE MER. Sterna minuta. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 77. La petite hirondelle de mer. Bris. Orn. t. 6, p. 206. Cette petite espèce, tout aussi criarde et aussi vaga- bonde que la précédente, n’est guere plus grosse qu’une alouetle; sa longueur, du bout du bec à l'extrémité de la. queue, est de huit pouces neuf lignes, et elle a plus d’un pied et demi de vol. Le devant de sa tête, près de la base du bec, est blanc; le dessus, le derrière de cette partie et le haut de son cou sont noirs; ce noir du sommet de la tête s’avance en pointe sur le front. De la base du bec il part une raie noire qui, passant au-dessus de l’œil, va se réunir et se confondre dans cette même couleur du derrière de la tête. Tout le reste du dessus du corps, depuis le haut du cou jusqu’au croupion inclusivement, est d’un beau gris de perle ; le devant et le dessous du corps , depuis la gorge jusques et y compris les couvertures du dessous de la queue sont entiérement d’un blanc pur et éclatant. Les trois premières pennes de l’aile sont noi- râtres , bordées intérieurement de blanc; les autres sont cendrées en dehors et blanches en dedans; les pennes de la queue sont blanches; les deux intermédiaires sont les plus courtes, et les latérales vont en augmentant de 326 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE longueur, ce qui rend la queue très-fourcue. L'iris des yeux est de couleur de noisette; le bec, rouge dans toute sa longueur, est terminé par une pointe noire; les pieds, les doigts , ainsi que leurs membranes, sont éga- lement rouges, et les angles noirûtres, Cette petite espèce d’hirondelle de mer se trouve avec ses congénéres ; elles fréquentent ensemble nos côtes mari- times, et se répandent l’une et l’autre également, à cer- taines époques de l’année, sur les rivières , les lacs et les étangs de l'intérieur de la France ; elles arrivent chez nous au printemps et nous quittent aux approches de Phiver. Les pêcheurs de nos eûtes maritimes ont une manière particulière et fort amusante de prendre les hirondelles de mer, et celle surtout dont il est ici question : elle consiste à faire flotter sur la surface de l’onde une es- pèce de croix de bois, au milieu de laquelle ils ont atta- ehé un petit poisson qui reste à découvert ; ils garnissent les branches de cette croix de gluaux. Lorsque les hi- rondelles de mer tombent sur cette proie, elles s'empé- trent les ailes dans les gluaux, et ne peuvent plus, à raison de cet obstacle, reprendre leur essor dans les airs : alors elles tombent à la mer où on les ramasse. Nous avons essayé deux fois ce piége sur un petit lae des montagnes des Vosges, sur lequel il se trouvoit en- semble une multitude d’hirondelles de mer et de mouettes. La premiére fois nous prîmes deux mouettes, une seule hirondelle de mer, et il nous en échappa trois ; la seconde fois il nous fut impossible d'attraper un de ces oiseaux, malgré que le poisson que nous leur présentions pour appât fût en pleine vigueur; car nous ne l’avions fixé sur ee petit édifice flottant qu'au moyen de deux fils retors qui passoient l’un à travers de la nageoire caudale, et D'ORNITHOLOGIE. 827 l'autre à travers des deux nageoires pectorales que nous avions percées avec une aiguille. ( o F 3. LA GUIFETTE. Sterna nœvia. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 77. L'hirondelle de mer tachetée. Br1s. Ornith. tom. 6, pag. 216. Guifette est le nom sous lequel on connoît sur nos côtes maritimes de la ci-devant Picardie l’hirondelle de mer ta- chetée, de Brisson ; la grosseur de cet oiseau est à peu pres celle d’un merle ; il a dix pouces six lignes de longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue , et deux pieds un pouce de vol : lorsque ses aïles sont ployées, elles dépassent la queue de plus d’un pouce. La base de la mandibule supérieure de son bec, ainsi que son front, sont d’un gris de perle, et chacune des plumes qui recouvrent ces parties est bordée de reussâtre; le sommet de la tête , l’occiput et le haut du cou sont noirs, bordés de gris cendré; les plumes du dos sont brunes , bordées de roussàtre ; son croupion et les couvertures du dessus de sa queue sont d’un cen- dré blanc ; ses plumes scapulaires sont d’un joli gris frangé de roussâtre, et variées de grandes taches brunes : on voit derrière chaque œil une tache noirâtre d’une grandeur remarquable. Tout le dessous de son corps, depuis la gorge jusqu'aux couvertures de la queue inclu- sivement , est blanc; les grandes pennes de ses ailes sont d’un gris blanc en dehors, et d’un cendré foncé en dedans; les moyennes sont de ces mêmes couleurs, avec cette diffé- rence qu’elles sont bordées et terminées de roussàtre ; toutes celles de la queue sont d'un cendré clair, à l’exception 328 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de la penne la plus extérieure de chaque côté, qui est blanche ; elles sont toutes bordées de blanc roussâtre à l'extrémité; ia queue, dans cette espèce , n’est pas a beau- coup prés aussi fourchue que celle des précédentes; l'iris de son œil est de couleur de noisette; son bec est d’un brun noiràtre; ses pieds, ses doigts, ainsi que leurs membranes, sont d’un gris verdâire, et ses ongles noi- râtres. La guifette est plutôt insectivore que piscivore : aussi ne va-t-elle que rarement à la mer; elle se contente de vagabonder dans les airs, où elle fait une ample moisson des alimens qui lui conviennent; elle n’a pas non plusce cri aigre, déchirant et sans cesse répété du pierre-garin. La femelle ne se contente pas, comme celle de ce der- nier , de gratter un peu le sable avec ses pieds pour y déposer ses œufs; elle se donne la peine de faire avec de la mousse et d’autres herbages secs, sur le bord de l’eau, ou bien sur le sommet de quelque petit tertre élevé, un nid dans lequel elle pond ordinairement trois œufs d’un gros volume, eu égard à sa taille ; elle couve ces œufs avec une grande constance pendant dix-sept jours, au bout desquels il en éclôt des petits qui ne sont en état de voler qu'après le premier mois de leur naissance. La guifette paroît ordinairement, et se répand au loin chaque année, au printemps et en automne , dans l’inté- rieur des terres de plusieurs départemens de la France , soit au moment où elle arrive sur nos côtes maritimes , soit lorsqu'elle les abandonne aux approches de lhiver. D'ORNITHOLOGIE. 329 L° LA GUIFETTE NOIRE, OU L'ÉPOUVANTAIL. Sterna fissipes. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 77. L'hirondelle de mer noire, ou l'épouvantail. BRis. Ornith. tom.6, pag. 211. ( Voyez la planche XXXI de cet ouvrage.) Cette espèce qui a beaucoup de rapport avec la pré- cédente, n’a sans doute mérité son nom d’épouvantail qu’a raison de la teinte rembrunie d’un cendré noiràtre dont sa tête, son cou, son dos et son croupion sont peints; ses ailes, ses plumes scapulaires, ainsi que les couvertures du dessus de ses ailes de même que celles de sa queue, sont d’un assez joli gris de perle. Elle a toutes les parties du dessous du corps, savoir ; la gorge, le bas du cou, la poitrine, le haut du ventre, ainsi que les côtés , d’un cendré trés-foncé, et même plutôt noirâtre que cendré; son bas-ventre et les couvertures du dessous de sa queue sont d’un blanc pur et assez éclatant ; les pennes de sa queue sont brunâtres , à l’exception de la plus extérieure de chaque côté qui est d’un gris blanc. De ces deux pennes extérieures aux deux du milieu qui sont sensiblement plus courtes, toutes les intermédiaires vont en diminuant de longueur , de maniëre à rendre la queue trés-fourchue. L'iris est d’un brun presque noir ; le bec et les ongles sont noirs, la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes, qui sont trés-échancrées, sont d’un rouge obscur. L’épouvantail se rencontre fréquemment sur nos côtes maritimes de la ci-devant Picardie; elle est un peu plus grosse que ia petite hirondelle de mer ; elle se trouve aussi dans plusieurs départemens de l’intérieur ; on nous 330 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE a même assuré qu’elle faisoit son nid dans les roseaux de quelques étangs des hautes et basses Vosges : c’est ce que nous n'avons pu découvrir; on a ajouté que la femelle y pondoit quatre ou cinq œufs d’un vert sale , variés de taches noirâtres. Quoique nous n’ayons pu nous assurer du fait de la ponte de cet oiseau dans les contrées dont nous venons de parler , nous avons cependant observé que dans le temps de son double passage il y est infini- ment plus rare que le pierre-garin. La guifette noire n’a rien de lugubre ni d’épouvan- table que la couleur de son plumage, dont la nature semble l'avoir dédommagée sous le rapport de ses mœurs ; car elle est trés-gaie; on peut même dire que ses tours et ses détours variés de mille manières dans la plaine fluide des airs procurent un spectacle fort agréable. Vivant, comme la précédente, plutôt d'insectes que de poissons ; cette espèce de nourriture qu’elle ne peut saisir qu'au vol, lui commande impérieusement ces diverses évo- lutions qui procurent du plaisir lorsqu'on les lui voit exécuter. DEUXIÈME GENRE. LES MAUVES. On a long-temps confondu sous cette deno- mination générique de mauves les mouettes avec les soëlands. À la vérité, si pour carac- tères distinctifs on se bornoïit seulement aux mœurs et aux habitudes de certains oiseaux , on confondroit souvent de même des espèces très-eloignées : aussi ne doit-on considerer les mœurs et les habitudes des animaux en général D’'ORNITHOLOGIE. 532 comme des caractères secondaires auxquels on est quelquefois obligé d’avoir recours; mais il faut bien se garder de les admettre comme decisifs. On convient en général que Îles mouettes, ainsi que les 2oë/ands, sont des oiseaux läches, voraces et criards à l’exces, qui fourmillent sur les rivages de la mer, où ils se nourrissent de toules sortes de poissons, ainsi que de ca- davres et même de chair corrompue. On sait que les uns comme les autres ont lé port ignoble, une physionomie abjecte; qu’ils sont tous cruels et sanguinaires ; qu'ils ont le bec tranchant et crochu , et que tout convient à leur insatiable gloutonnerie ; qu'ils s'accommodent également de la chair comme du sang et même des os du poisson frais comme du poisson pourri, des alimens sains comme de ceux qui sont en pu- tréfaction 1). 1) On lit dans l’ouvrage immortel de M. de Buffon une note de M. Baïllon père, de Montreuil-sur-Mer, où cet estimable natu-+ raliste, dont la mémoire sera à jamais chère aux amis de la science, s’exprime ainsi à l’occasion de la gloutonnerie vorace des mauves , dont ce savant distingué a nourri chez lui plusieurs espèces : « J'ai » souyent donné à mes mouettes , dit-il, des buses , des corbeaux , » des chats nouveau - nés, des lapins et autres animaux, ainsi » que diverses espèces d'oiseaux morts ; ils ont été dévorés avee » autant d’avidité que les poissons. J’en ai encore deux qui avalent » très-bien des élourneaux , des aloueltes de mer, sans leur ôter » uneseule plume. Leur gosier est un gouffre qui engloutit tout, elc.» 339 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Les uns comme les autres ont le bec com- primé par les côtés; la mand'bule supérieure de ce bec est arquee , tandis que l’inférieure pre- sente en dessous et vers sa pointe un angle sail- lant. Is ont tous la queue pleine et les jambes élevées ; tous ont les trois doigts de devant réunis dans une seule membrane ; leur pouce est court et séparé ; leurs ailes sont tres-longues ; tous enfin se tiennent en troupes nombreuses sur le rivage de nos côtes maritimes, et lorsqu'ils s’avancent dans l’intérieur des terres, c’est un présage de mau vais temps. Mais cependant, pour éviter la confusion qui a régné jusqu'à présent entre ces oiseaux, nous conviendrons de nommer, avec M. de Buffon, goëlands les mauves dont la taille excède celle du canard ordinaire , et mouettes toutes celles qui sont au-dessous de cette taille. Le:/abbe, que nous avons placé parmi les mouettes , a le bec cylindrique, le bout de la mandibule supérieure crochu, et celui de l'inferieure arrondi. Ce genre renferme six especes seulement, qui sont annuellement de passage sur les côtes mari- iimes de l'empire francais; savoir, le goëland à manteau gris, le goëland varié ou le grifard, la grande mouette cendrée, la petite mouette cendrée, la mouette rieuse et le labbe ou slercoraire. D'ORNITHOLOGIE. 333 1° LE GOELAND A MANTEAU CRIS. Larus glaucus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 76. Le goéland cendré. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 160. ( Voyez la planche XX XI de cet ouvrage.) Cette espèce de mauve est fort commune, et paroît en bandes nombreuses sur la plupart de nos côtes maritimes, surtout dans les mois d'octobre, de novembre et. de décembre; on les connoît dans ces contrées sous les noms vulgaires de gros miolards ou de bleus manteaux. On voit de ces oiseaux vivans à la ménagerie du mu- séum impérial de Paris; ils ont tous un air triste, une physionomie ignoble, surtout lorsqu'ils sont en repos ; quand ils sont repus ils se retirent dans un coin, où ils demeurent immobiles, au point d'y paroître des oiseaux empaillés. Malgré la mauvaise réputation qu'ils ont d’être des animaux voraces et fort gloutons, que la nature semble avoir destinés à nettoyer les rivages de la mer des débris de cadavres dont la putréfaction pourroit vicier l’atmos- phère , on a cependant remarqué que ceux qui vivent dans le grand bassin du jardin des plantes se contentent de peu ; ils nous ont même paru ne prendre jamais au-delà de leur besoin : nous pensons qu'il pourroit bien se faire aussi qu'étant désailés, et ne pouvant conséquemment se donner ces grands mouvemens auxquels ils se livrent lorsqu'ils sont en pleine liberté, leur appétit fut di- minué en proportion du repos auquel ils sont forcé- ment réduits : aussi sont-ils tous d’une maigreur extrême (on prétend qu'ils ne sont pas plus gras lorsqu'ils jouis- sent de leur entière liberté); ils ne font pas entendre non plus ces clameurs déchirantes , ces cris aigus sans 334 TABLEAU ÉLEMENTAIRE cesse répétés, et par la mème insupportables, que l’on dit qu'ils poussent dans les airs lorsqu'ils y voguent librement. La chair de ce goëland , comme celle de tous ses con- généres, est dure , coriace, et doit être nécessairement un fort mauvais mets. Cela n’empèche pas cependant qu'au temps de carème on ne vende de ces oiseaux sur les marchés de Paris, où nous avons vu, cette année encore, des personnes acheter cette détestable denrée pour s’en nourrir dans ce temps de mortification. Quoi qu'il en soit, le goeland à manteau gris a prés de deux pieds de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue; tout son plumage est d’un assez beau blanc, à l'exception de son dos et de ses épaules qui sont d'une | belle couleur gris de perle; les grandes pennés de ses ailes ont aussi des espèces d’échancrures noires : du resté cet oiseau est parfaitement blanc. Ce goëland, qui a près de deux pieds de longueur de V'éxtrémité du bec à celle de la queue, a l'iris des yeux jaune; les pieds d’une couleur de chair livide; le beë d’un jaune presque orangé, avec une tache rouge au ren- flemént ou à l’angle que forme en dessous sa mandibule inférieure ; ses ongles sont bruns. La femelle de cet oiseau ne différe du màle qu'en ce qu’elle est un peu plus petite que lui; elle lui ressemble d’ailleurs sous tous les autres rapports. [e) 2°. LE GOELAND VARIÉ, OU LE GRISARD. Larus nœævius. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 76. Le goéland varié, où le grisard. Bris. Ornith. tom.6, pag. 167. Cet oiseau que l’on voit en grand nombre sur presque toutes nos côtes de l'Océan, et qui, dans le temps de la r, D'ORNITHOLOGIE. 335 pêche des grands étangs, surtout de ceux de la ci-devant Lorraine, vient les visiter dans la seule intention d’y faire du butin +), a, de l'extrémité du bec à celle de la queue, vingt-un pouces de longueur et cinq pieds d’en- vergure. Tout le fond de son plumage est d’un blanc varié de brun ; cette dernière couleur est disposée de maniere qu’elle occupe le milieu de chaque plume qui revêtent la tète, le derrière du cou et le dessus du dos; les scapulaires, ainsi que les couvertures des ailes, sont hachées et mouchetées de gris brun, toujours sur un fond blanc; les grandes pennes de ces parties sont noi- râtres, et les couvertures du dessus de la queue sont rayées dé la même teinte que le manteau. La gorge et le dessous du corps sont d’un blanc sale. Le bec de cet oiseau est d’un noir peu profond; il est robuste , épais, et long de quatre pouces; l'iris de ses yeux ést gris; ses pieds, ses doigts, ainsi que les membranes qui les lient ensemble, sont blanchâtres dans certains individus, de couleur de chair dans d’autres ; ses ongles sont d’un gris brun. - On prétend que le goëland varié s’accommode facile- mént de la sérvitude, qu’il montre même, dans cet état, une sorte de familiarité dont on lui tiendroit volontiers LA L4 compte, si on ignoroit qu'elle ne lui est suggérée que par 1) Nous avons vu deux goëlands variés dans la collection d’un de nos amis du département de la Meurthe, dont le prémier y existoit depuis 1781, et le second venoit de lui arriver au mois de mars 1780 : cet ami nous pria mème de le lui empailler. L'un et l’autre avoient été tués sur le grand étang de l’indre , dans le mème département. 556 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE le sentiment d'une vile et basse gourmandise : car on sait qu'il se jette avec une sorte d’impétuosité sur des poissons que, quoique morts, il n’engloutit pas moins avec la vo- racité qui le caractérise , malgré qu'ils soient souvent aussi gros que son corps. La chair crue ou cuite des animaux, fraiche ou en putréfaction , peu importe , convient éga- lement à son appétit gourmand; lorsqu'il est rassasié, il se retire dans un coin reculé , et la il prend le temps de digérer a son aise. Il n’est pas fort rare de l’y voir des journées entieres la tête blotie dans la forte épaisseur de ses plumes, sans qu’il fasse le moindre mouvement. La femelle de cette espèce, comme celle de la précé- dente, ne differe de son mâle qu’en ce qu’elle est bien plus petite que lui. La chair de l’un et de l’autre est un mets détestable, qu’il est impossible de manger, à cause de la grande quantité d'huile fétide dont elle est im- prégnée. Il paroît que le pays natal du goëland varié est le Groenland ; car si nous consultons les pêcheurs de la baleine , ils nous disent tous que ce sont les premiers oiseaux qu'ils rencontrent dans ces parages lointains où ils suivent leurs vaisseaux avec la plus grande constance, dans l'espoir, sans doute, d’avoir bientôt à repaitre leur insatiable gloutonnerie de débris de cet énorme cétacée dont les pêcheurs , après l'avoir dépecé , abandonnent le cadavre à la merci des flots. D'ORNITHOLOGIE. 5 1 2 3. LA GRANDE MOUETTE GRISE. # | Larus argentatus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 56. la grande mouette cendrée. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 182. Ceite mouette, bien moins grosse et moins épaisse qu’un carard dosnestique , est presque aussi longue que lui ; elle a, du bout du bec à l’extrémité de la queue, dix-sept pouces , et trois pieds cinq pouces de vol ; lorsque ses ailes sont ployées, elles s'étendent de trois pouces au moins au-dela de sa queue qui est pleine, et non pas fourchue comme celle des hirondelles de mer, avec lesquellés beau- coup de personnes confondent les moueftes. Ta grande mouette cendrée que l’on nomme grandé riaule sur quelques-unes de nos côtes de France, a le sommet de la tête, le dessus du cou, le dos, les plumes scapu- laires, les couvertures supérieures des ailes et celles du dessus de la queue d’un cendré clair assez brillant ; sa gorge ; le bas de son cou, sa poitrine, le haut et le bas de son ventre, ainsi que les couvertures du dessous de sa queue, sont d’un blanc pur et fort éclatant ; seulement dans quelques individus le haut des jambes est varié de gris clair et de blanc ; les grandes pennes des ailes sont, dans la plupart, échancrées de noir; la queue est coinposée de douze pennes égales, qui sont dans quelques individus de mème couleur que lé manteau, ayant seulement leur ce té intérieur blanc ; dans presque tous, cette partie est d’un blanc de neige, terminée de noir ou bien de gris. Il est bon d’observer ici, afin de ne pas multiplier les espèces sans nécessité, que les couleurs du plumage de cet oiseau sont sujettes à beaucoup de variations , soit à raison TT. 22 4 322 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de l’âge, soit, peut-être, par rapport au sexe; car on saïf, d'après des observations scrupuleusement suivies, que ce n’est qu'a la suite de la seconde mue seulement que l’on peut prononcer sur la certitude des teintes du plumage de plu- sieurs oiseaux , et surtout de celui-ci ; car ayant cette époque on voit sur sa tête, commeé sur le dessus de son cou, des taches noires qui s’effacent successivement avec l’âge. Dans tous, les yeux sont noirs , ayant l'iris brunâtre; le bec , si on en excepte sa pointe qui est noirâtre, est d’un blanc sale ainsi que la partie nue des jambes; les pieds, les doigts et leurs membranes, de même que les ongles, sont d’un brun noir. Quoique cette mouette soit une de celles que l’on voit le plus rarement sur nos Côtes maritimes, il ne s’en échappe pas moins plusieurs qui se répandent dans l'inté- rieur des terres à une assez grande distance, et mêine jusque dans le département des Vosges. Cet oiseau est bien plus difficile à apprivoiser lorsqu'il se trouve captif, que les deux espèces précédentes : il est aussi bien moins carnassier qu’elles ; car on a remarqué dans ceux que l’on élevoit en domesticité qu'ils préféroient les vers de terre à la chair des animaux : ils sont d’ailleurs d’un caractère bien plus vif et moins mélancolique que celui des goëlands, il l’est cependant beaucoup moins que celui de la petite mouette cendrée. 0 LA PETITE MOUETTE CENDREE. Larus cinerarius. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 76. La petite mouette cendrée. BRIS. Ornih. t..6 ; p.498. Il suffiroit presque , pour signaler cette mouetle, de dire qu’elle ne diffère de la précédente que par sa taille D'ORNITHOLOGTE. 323 qui est beaucoup moins considérable, @uisqu’elle n’esf que de la grandeur d’un pigeon, ayant le corps bien moins épais que lui; sa longueur , prise de l’extrémité du bec à celle de la queue, est de treize pouces neuf lignes seulement; elle diffère aussi de la grande mouette cendrée, en ce que son bec est d’n rouge foncé ; ses pieds, ses doigts et les membranes qui les unissent sont d’un rouge souci, et ses ongles noirs. Cette mouette , une des plus petites de celles de ce genre qui paroissent en France, a toute la partie supé- rieure du corps depuis le dos jusqu'au croupion inclu- sivement, d’un joli cendré clair et perlé. Seulement on voit en arrière de chaque œil une mouche noire, et les grandes couvertures du dessus de ses ailes sont blanches ; une seule d’entre elles est marquée aussi d’une petite tache noire qui néaninoins mauque dans plusieurs indi- vidus ; le pli de l'aile est bordé de blane, et les deux pre- miéres pennes de cette partie sout de cette dernière cou- leur , bordées de noir dans tout leur contour ; la tête seule, la gorge et tout le dessous du corps , ainsi que les cou- vertures du dessus de la queue, sont d’un blanc de neige vif et éclatant ; la queue est composée de douze pennes qui sont également blanches ; l'iris de ses yeux est de couleur de noisette entouré d’un cercle brun rougeitre. Sur les côtes de la ci-devant Picardie on connoît cette mouette sous le nom vulgaire de petite miaulle; elle est au moins autant insectivore que piscivore , aussi l’appfi= voise-t-on facilement en la laissant en liberté dans un jardin où elle trouve à moissonner amplement plusieurs espèces d'insectes ; elle y trouve aussi des vers et de petits lézards dont elle s’accommode trés-bien. Lorsque les alimens lui manquent a cause de la saison 5» * + 22 À 324 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE rigoureuse de lhiver qui fait rentrer ces animaux dans les entrailles de la terre, dont la surface endurcie par les gelées ne Ilcur permet plus de sortir de leur re: traite, alors on y supplée par de la mie de pain humectée ; car après des observations toujours infiniment instruc- tives. puisées dans les écrits de feu M. Baïllon que l'in- comparable Buffon avoit tant de plaisir à citer souvent, nous avons nourri pendant dix-huit mois une de ces mouettes qui avoit été prise vivante dans le département des Vosges, à l’arriére-saison, époque à laquelle il en passe beaucoup dans ces contrées. Nous nous Contentèmes, durant le printemps, l’été et l’automne , de laisser courir dans le jardin cet oiseau qui y trouvoit abondamment de quoi vivre , et particulière- ment des limaçons dont il paroissoit très-friand; car nous l’avons vu plus d’une fois quitter prise avec un gros ver de rosée déja à moitié avalé, pour saisir avec un em- pressement extraordinaire un limaçon qu'il apercevoït dans le buis d’une plate-bande. En hiver nous lui donnions de la mie de pain dé- irempée avec de l’eau , et, plus conformément à son appétit, avec du lait. Nous avons remarqué que,, dans tous les cas, soit que cette mouette vive en liberté dans un jardin, soit qu’on la renferme durant les rigueurs de l'hiver, on doit avoir la plus grande attention de lui donner de l'eau dans laquelle elle éprouve du plaisir à se laver souvent, et surtout le bec. Cette petite mouette est d’une vivacité et d’une pétu- lance singulières ; elle estinfiniment moins méchante que la grande, elle a même de l’aménité et de la douceur dans le caractere. 4 D'ORNITHOLOGIE. 328$ e] 5° LA MOUETTE RIEUSE. Larus atricilla. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 6. La mouette rieuse à pates rouges. \BRis. Ornith:.t, 6, pag. 192. ( Voyez la planche XXXI de cet ouvrage.) Quoique cette mouelte paroïsse moins fréquemment sur nos côtes maritimes , que la plupart des autres es- péces, elle est néanmoins une de celles qui est le plus généralement répandue dans l’intérieur des terres 1), c’est l'espèce que l'on voit en plus grande abondance, lors des passages de ces oiseaux dans la partie mon- tueuse du département des Vosges où on ne la con- noit, ainsi que toutes ses congénères, que sous le nom impropre et vulgaire d’hirondelle de mer: cette dénomi- nation fautive n’auroit pas lieu, sans doute , si on faisoit attention aux rapports de dissimilitude de ces deux oiseaux. Car si on a donné à certaines espèces de mauves 1e nom d’hirondelles de mer, ce n’est que parce que l’on a re- marqué en elles des habitudes dans le vol, qui sont communes à quelques mawves, et qui ont du rapportavec celles des hirondelles ; on a également remarqué qu’elles avoient l’une et l’autre les ailes fort amples, la queue four- chue, et les pieds trés-courts; mais ces deux derniers ca- ractères ne peuvent pas convenir aux moueftes qui ont au 1) Quelques mouettes rieuses s’établissent sur les rivières, et même sur des étangs fort avant dans l’intérieur des terres ; elles y nichent mème quelquefois. Leur nid est formé de joncs et d'herbes ; leurs œufs, au nombre de cinq ou six, sont ver- dâtres , mouchetés de noir et très-allongés. 326 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE contraire les jambes assez élevées, et surtout la queue pleine. Quoiqu'il en soit, le cri de cette mouette, dans lequel on a cru distinguer quelques accens d’un éclat de rire , a fait donner à €et oiseau l’épithète de rieuse; au reste, cette dénomination ne doit être considérée que comme u) nom spécifique qu'il est nécessaire d'employer lorsque l’on veut distinguer les divers individus qui forment un genre quelconque. Le corps de l'oiseau dont il est ici question, paroît bien plus gros que celui d’un pigeon , mais il a plus d’ap- parence que de réalité ; car dans le fait, il ne doit cette grosseur factice qu’a la quantité de plumes fines doné il est revêtu , et l'illusion se dissipe lorsqu'on le dépouille de son vêtement. C'est cette quantité de plumes qui, jointe à la maigreur ordinaire de cette mouette, la ren- dent si légère au vol ; aussi la voit-on continuellement vagabonder dans les airs, à la surface de l’eau, y poussant des cris aigus et sans cesse répétés. La mouette rieuse a à peu près quinze pouces de lon- gueur de l'extrémité du bec à celle de la queue, et trois pieds de vol; lorsque ses ailes sont ployées , elles excè- dent de pres de trois pouces la longueur de sa queue. La tête, le front et la gorge sont noirâtres dans le mâle ; dans la femelle au contraire ces deux dernières parties sont cendrées et tachetées de blanc. Dans l’un et dans l’autre les yeux sont entourés de cette dernière couleur ; tout le dessus de son corps, depuis le dos jusqu’au croupion inclusivement , est d'une couleur de gris de perle; le dessous du corps, à partir du bas de la gorge, est entierement d’un blanc de neige pur et fort éclatant. On voit sur le pli de l’aile un trait blanc qui le borde : parmi les grandes pennes de ses ailes, les D'ORNITHOLOGIE. 527 unes sont entièrement noires, et les autres variées de noir, de cendré et de blanc ; celles de la queue sont toutes blanches ; l'iris est de couleur de noisette ; les paupieres sont d’un rouge de sang, ainsi que le bec, la partie nue des jambes, les pieds , les doigts et leurs membranes, cependant dans quelques individus ces mêmes parties sont noirâtres ; , mais dans tous , les ongles sont d'un rouge brun. Le long des rives de la Moselle où ces oiseaux abon- dent, surtout au moment de leur passage d’automne, nous leur avons souvent fait la guerre, non dans l’inten- tion de tuer pour le seul plaisir barbare de détruire, mais seulement pour en orner notre collection et ceiles de nos amis, et toujours nous avons remarqué que, lorsque nous en avions étendu un sans vie sur la grève, tousles autres se précipitoient en foule sur le cadavre de leur com- pagnon infortuné, comme pour lui rendre les derniers devoirs. Nous avons vu avec surprise que les coups de fusil, loin de les éloigner bar le bruit de leur explosion , sembloient leur donner plus de courage et de témérité pour voler autour et jusque sur le corps de ceux que notre espèce d'inhumanité avoit rendus les victimes de notre désir de nous instruire. 6 LE LABBE, OU LE STERCORAIRE. Larus crepidatus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 76. Le stercoraire. Bis. Orn. tom. 6, pag. 151.. é * j En rangeant ici le labbe parmi les mouettes, notre intention n’a pas été de le considérer comme une espèce de ce genre dont il approche beaucoup, à la vérité, par la coupe du corps, et surtout par la longueur des ailes ; 328 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE mais dont il diffère sensiblement par la forme du hec qui est presque cylindrique , sans dentelures, et dont la man- dibule supérieure est crochue, tandis que linférieure est arrondie ; nous avons voulu seulement éviter de multi- plier les genres, ce que nous avons fait toutes les fois qu’une espéce isolée se rapprochoit d’autres espèces sous plusieurs ra: ports comme celle-ci des mouettes. Des ornitho'!ogistes ont donné à cet oiseau, qui paroît quelquefois sur nos côtes maritimes, et jusque fort avant dans les terres, lorsqu’accidentellement il y a été poussé par quelques coups de vent impétueux , le nom de sfer- coraire, d'aprés l’intime persuasion où ilsétoient que cetani- mal se nourrissoit des excrémens que rendoient en volant les mouettes qu’ils poursuivoientavec acharneme :t, et qu'ils t urmentoient a coups de bec redoublés , jusqu'a ce qu’elles se fussent décidées à rendre ce dégoutant aliment quil saisissoit alors dans sa chute avec une dextérité étonnante. Pour détromper sur un fait aussi faux et aussi dépourvu de vraisemblance, il nous suflira sans doute de rapporter seulement ici une note de feu M. Baïillon, qu'il adressa dans le temps à M. de Buffon, à l'occasion de cet oiseaw, au moment où le Pline français s’occupoit de l'histoire de ce palmipède. v « Les mouettes, dit ce savant. et serupuleux observa- « teur de la nature, se font une guerre continuelle pour 4 la curée, du moins les grosses espèces etles moyennes; « lorsqu'une d’elles sort de l'eau avec un poisson au bee, « la premiére qui l’aperçoit fond dessus pour le lui « prendre; si celle-ci ne se hâte de l’avaler, elle est pour- « suivie à son tour par de plus fortes qu’elles, qui lui « donnent de violens coups de bec; elle ne peut les « éviter qu'en fuyant ou en écartant son ennemi. Soit « doue que le poisson la gêne dans son vol , soit D’'ORNITHOLOGIE. 32g « que la peur lui donne quelque émotion, soit enfin « qu’elle sache que le poisson qw’elle porte est le seul objet de sa poursuite, elle se hâte de le vomir ; l’autre « qui le voit tomber, le reçoit avec adresse et avant « quil ne soit dans l’eau; il est rare qu'il lui échappe. « Le poisson, continue ce.savant, paroit toujours blanc « en l’air, parce qu'il réfléchit la lumière, et il seinble, # à cause de la roideur du vol, tomber derrière la « mouetle qui le vomit, ces deux circonstances ont trompé « les observateurs. ? « J'ai vérifié le même fait dans mon jardin, ajoute le « même M. Baillon , j'ai poursuivi, en criant, de grosses « mouettes; elles ont vomi en courant le poisson qu’elles « venoient d’avaler ; je le leur ai rejeté, elles l’ont « tres-bien reçu en l'air, avec autant d'adresse que des chiens. ? Ii nous paroît superflu de remarquer ici ultérieurement que ce que M. Baiïlion rapporte des mouettes doit s’appli- quer à la guerre que le labbe fait avec une sorte d’achar- nement aux mouettes. espèce du laôbe dont nous parlons est à peu près de la grosseur d’un pigeon ; il a dix-sept pouces de longueur de l'extrémité du bec à celc de la queue, et trois pieds et demi de vol; tout son plumage est d’un brun obscur ; le dessous de son corps néanmoims diffère du dessus en ce qu'il est d’une teinte bien plus claire. Cet oiseau a , comme toutes les espèces du genre des mauves, les ailes très-grandes; l'iris de ses yeux est également brun, mais d’un brun plus marron, qui, selon l'incidence de la lum'ère , paroît rougeàtre; son bec est noir ainsi que la partie nue de ses jambes et ses pieds ; ces derniers, quoique conformés comme ceux de mouettes, sont ce- pendant moins forts; ses doigts qui sont aussi plus courts, 330 TABLEAU ÉLEMENTAIRE les membranes qui unissent les trois antérieurs, le pouce et les ongles, sont tous également noirs. Sa queue n’est pas tout à fait taillée comme celle des mouettes: elle en diffère en ce que les deux pennes du milieu sont un peu plus longues que les latérales, sans cependant les dépasser de beaucoup. Le labbe a dans la physionomie quelque chose qui tient beaucoup du facies d’un oiseau de proie, dont il paroît encore se rapprocher par les mœurs ; il a, comme lui, le-vol vif et toujours balancé; il sait tellement en di- riger la justesse qu’il ne manque jamais de saïsir en l'air les poissons que lui jettent les pêcheurs de harengs , et qui se gardent bien de le tuer, parce que sa présence est pour eux un indice toujours certain de celle des harengs qu'ils recherchent. | On ne voit guëres les labbes en bandes nombreuses sur . Ja mer, comme les mouetles ; ils y paroïissent tout au plus deux ou trois ensemble, et toujours ils y sont occupés à épier celles-ci qu’ils attaquent et qu'ils poursuivent avec acharnement et à coups de bec, jusqu'a ce qu’elles aient rendu, en le vomissant, le poisson qu’ils leur ont vu avaler et qu'ils saisissent promptement dans sa chute. On dit que le labbe compo:e son nid de gramens, et qu’il le place sur les rochers; que sa femelle y pond quatre ou cinq œufs roussàtres, et tachetés de noir : nous ne pouvons certifier ce fait que d’après le témoignage d'autrui. QUATRIEME FAMILLE. Le grand nombre d'oiseaux que nous avons renfermés dans cette quatrième famille des D'ORNITHOLOGIE. 331 palmipèdes ont tous pour caractères généraux et distinctifs un bec plus ou moins large, mais toujours denté comme une lime; une langue épaisse et charnue ; quatre doigts, dont les trois antérieurs sont joints ensemble par une mem- brane entière, et le postérieur séparé ; leurs ailes sont d’une médiocre grandeur , eu égard au volume respectif de leur corps. Ce sont tous des oiseaux qui se tiennent constamment sur les eaux de la mer, ou bien sur les eaux douces : ce dernier asile n’est au’accidentel pour la plupart d’enti’eux; car souvent ils n’y sont lancés instantanément que par quelques circonstances locales ou aceci- dentelles. Cette famille ne contient, comme la préce- dente, que déux genres, qui sont celui des canards et celu: des Larles. PREMIER GENRE. LES CANARDS. Ce genre renferme des espèces d'oiseaux que l'on distingue particulièrement par la largeur de leur bec, comparativement avec son épaisseur; car les uns, comme l'oie, le cygne, etc. , l'ont plus large qu’épais : mais de _ quelque forme que soit ce bec , il est dans tous 332 TABLEAU ÉLÉMÉNTAIRE ongluiculé et obtus à son bout. Dans tous , il est, comme nous venons de le dire, dentelé comme une Jime; dans tous, 1l est convexe en dessus, et aplati en dessous ; tous ont les jambes plus courtes que le corps; elles sont avancées versson milieu; tous enfin ont la partie inférieure de la jambe dégarnie de plumes. Vingt- ik uit espèces de Ge genre sont , ou con:- tamment sédentaires en France, ou régulière- ment de passage périodique, on enfin acciden- tellement égarées , soit sur nos côtes maritimes , soit dans la plupart de nos dépariemens inté- rieurs. Ces vingt-huit espèces sont : le cyzze do- mestique, le cygne sauvage, Voie dornestigue , l'oce sauvage, Yoie de Guinée, Voie bronzée , l’oce d’ Éey pte, le canard dom one) le canard sauvage , le canard musqué, Ve souchet , le chi peau ou riden, la bernache, le cravant, le mil- louin, le millouinau, \e pilet ou canard à lonoue queue, le tadorne, le garrot , le canard sif- fleur , le canard siffleur huppé, le morillon , le petit morillon , la macreuse , la double ma- creuse , la sarcelle commune , la petite sarcelle, et la sarcelle d'été. | D'ORNITHOLOGIE. 333 1° LE CYGNE DOMESTIQUE. Anas olor. Lan. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le cygne. Br1s. Ornith. tom. 6, pag. 292. ( Voyez la planche XXXII de cet ouvrage.) Chez tous les peuples et dans tous les temps, le cygne eut une réputation qui le rendit célebre; les poëtes le chantèrent , et le peintre immortel de la nature, Buffon, en le peignant , porta la derniere main aux tableaux qu’on en avoit tracés. Il le représente en souverain , régnant sur le domaine des eaux, avec cette grandeur, cette majesté et cette douceur qui fondent le véritable empire , celui de la tranquillité , du bonheur et de la paix- Doué de force , de puissance et de courage, le cygne sait vaincre quand il le faut, sans jamais attaquer; voguant tranquillement sur le cristal irrisé de l’onde, il voit sans émotion , et avec une sorte d’'indifférence , l'aigle, ce tyran redouté de l'air, planant sur sa tête; il l’attend sans crainte, ou bien il continue à voguer avec sécurité. Si ce fier ennemi, le seul qui ose l’attaquer, se présente au combat , il l’accueille sans paroître surpris de sa pré- sence ; un courage magnanime, caractere des héros, en- flamme peu à peu ses sens, il déploie sa vigueur, et fort de son courage, bientôt des coups précipités d’une aile vigoureuse engagent le combat, tandis que le tissu serré de son aile nerveuse oppose un bouclier solide aux armes tranchantes d’un ennemi féroce qui dans peu terrassé, s’en- fuit couvert de honte, et va chercher ailleurs à assouvir sa rage sur de plus faibles créatures. Le vainqueur au contraire retourne paisiblement au 354 TABLEAU ELÉMENTAIRE sein des peuplades nombreuses des hôtes palmipèdes, pour jouir para eux des douc.urs de la paix et du bonheur de la tranquillité. Paré de tous les dons qu’il reçut de la nature, sa beauté sans orgueil , ses formes sans contrainte, sa figure , ses grèces sans apprêt, sa douceur naturelle , ses contours enchanteurs , sa biancheur éclatante ,;- ses mouvemens flexibles, ses nobles attitudes ; tout dans le cygne inspire la volupté : il plait à tous les yeux, et anime en les dé- corant tous les lieux qu’il habite. Le cygne est sans contredit le premier des navigateurs ailés que la nature semble avoir projetés sur l’onde pour y donner aux humains l’idée et le modele de la naviga- tion; il est le plus grand et le plus puissant des oiseaux nageurs ; il vogue avec autant de facilité qu'il vole avec force et légéreté ; trop puissant pour que les autres oiseaux d’eau puissent lutter contre lui, il n’a point à dis- puter sa proie avec eux; défendu par sa grandeur et par l'épaisseur de son plumage , en état par la force de son bec et de ses ailes de parer et de porter les coups les plus redoutables qui soient au pouvoir des oiseaux, aucun ennemi ne semble fait pour troubler son repos. Le cygne a, du bout du bec à l’extrénuté de la queue, quatre picds trois pouces et demi de longueur, et sept picés trois pouces de vol; son bec a trois pouces et demi de longueur , et lorsque ses ailes sont ployées, elles s'étendent à peu prés jusqu'aux deux tiers de sa queue. Tout le plumage de cet oiseau est d’un blanc de neige le plus éclatant ; son bec est rouge, excepté le bout de la mandibule supérieure qui est noir, ainsi que l'iris de ses yeux; sur la base de sa mandibule supérieure, il s’é- lève un tubercule eharnu de même couleur; de chaque D'ORNITHOLOGTIE. 335 côté de la tête, entre le bec et l’œil, on voit un espace dégarni de plumes, et revêtu d’une peau nue de cou- leur noire et de forme triangulaire. La partie nue de ses jambes, ses pieds, ses doigts , ainsi que la membrane qui les unit ensemble, sont de couleur de plomb , et ses ongles noirs. Les jeunes cygnes apportent en naissant un plumage gris qu'ils ne quittent qu’à la premiere inue pour y subs- tituer ce vêtement blanc qu'ils n’abandonnent qu'a la mort. Ils se nourrissent, ainsi que les adultes, de grains, d'herbages et de poissons. La femelle construit son nid d’herbes sèches , sur des roseaux flottans ou bien sur le rivage; elle ÿ pond six à sept œufs fort gros et parfaitement blancs. On voit dans ce moment au bassin des bufles de la mé- nagerie du muséum du jardin des plantes, plusieurs jeunes cygnes qui y sont éclos au commencement de l'été; ils sont , aprés trois mois de leur naissance, déja aussi gros que de petites otes; tout leur plumage qui n'est qu’un duvet soyeux répandu sur toutes les parties de leur corps, est d’un beau gris cendré et uniforme. C’est un plaisir d’exa- miner ces jeunes navigateurs ailés s’exerçant à la natation dans le bassin , autour de leur bonne mère qui semble jouir d’une félicité parfaite, en voyant ses enfans exécuter mille évolutions différentes, et quelque fois fort bizarres. L'intérêt seul qui a déterminé l’homme à apprivoiser et a enfermer dans des basses-cours la plupart des oiseaux sauvages, n’a eu aucune part à la domesticité du cygne ; sa beauté seule et ses grâces ont engagé les hommes puissans surtout à en orner leurs habitations. Jaloux aussi de ces grâces et de cette beauté réelle, le cygne semble se complaire à fixer les regards, et à cap- tiver l'attention particulière des spectateurs. Ceux qui F 556 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE font aujourd'hui l’orsement du grand bassin du jardin des plantes, de celui de la partie de ce jardin à laquelle on a donné le nom de la Vallée Suisse ; tous ceux des grandes pièces d’eau des Tuileries, du Luxembourg, ete., s'approchent complaisamment des bords de ces réservoirs pour se faire admirer de plus près, et, à l’exemple de certains petits-maitres qui n’ont souvent rien de remar- quable que le vêtement, pour captiver un plus grand nombre de suffrages, ils affectent de développer plus de grâces, par mille mouvemens doux , ondoyans, et affec- tueusement étudiés. 1 ). Lescygnes ne sont pasde grands destructeurs de poissons ; quelques auteurs prétendent même qu'ils en sont les pro- tecteurs , en éloignant des étangs les hérons qui en sont les grands dilapidateurs , et qui redoutent le cygne. Cepen- dant M. Baillon assure que le cygne ne vit pas seulement d'herbes, de reptiles et d'insectes aquatiques, mais qu'il se nourrit aussi de graines, de petits poissons, et surtout d’anguilles. \ On prétend que les cygnes vivent plus de deux cents ans; ce terme de leur vie peut être exagéré, cependant ïl est universellement reconnu qu'ils vivent trés-longtemps. Parmi le nombre considérable de cygnes qui décorent les bassins de la Malmaison , On en voit d’autres cspèces qui, au lieu de ce blanc de neige éblouissant dont est 1) Le cygñne, quoique privé, aime néanmoins tellement sa liberté, que, si on le renferme ailleurs que dans un grand bassin, il paroît et il est en effet toujours triste ; il fait tous ses efforts pour s'envoler ; et si on n’a pas eu soin de le désailer, il ne mazque jamais de s’enfuir pour ne plus reparoître. D'ailleurs, si on le tient hors d’un bassin, l’habitude qu’il a d’être toujours dans l’eau est cause qu’il se blesse facilement les pieds sur la grève. D'ORNITHOLOGIE. 337 orné leur robe, sont couvertes de plumes d’un noir luisant, à l'exception de six pennes blanches qu'ils ont a chaque aile. La mandibule supérieure de leur bec est rouge , avec une bande transversale noirâtre vers la pointe; ils ont les pieds, les doigis, ainsi que leurs mem- branes, d’un gris foncé. C'est à MM. Péron et Lesueur, naturalistes voyageurs a la Nouvelle-Hollande dans l'expédition du capitaine Baudin , que l’on est redevable de cette espèce de cygne; ils en ont donné plusieurs individus morts a l’administra- tion du Muséum d'histoire naturelle, et on peut les voir dans ses galeries. o 2. LE CYGNE SAUVAGE. Anas cygnus. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 65. Le cygne sauvage. BRis. Ornith. tom. 6, pag. 288. Le cygne sauvage est, généralement parlant, moins gros que le domestique; cependant nous en avons vu de beaucoup plus gros que lui; sa longueur commune et or- dinaire est de tro:s pieds dix pouces, mesurée du bout du bec à l’extréinité de la queue; son vol est de six pieds trois pouces, et lorsque ses ailes sont ployées, elles dé- passent un peu la moitié de la longueur de sa queue. Tout son plumage est blanc , excepté dans son enfance où il est gris comme celui du cygne domestique ; on pré- sume seulement qu'il ne quitte cette premitre livrée pour se revêtir de la blanche, qu’à la seconde mue. L'iris de ses yeux est noir; son bec jaune dans la plus grande partie de sa lo’zu2ur, est noir à la pointe; il n’a pas de caroncules sur la base du bec, et l’espace compris entre cet organe et l’œil est revêtu d’une peau Jaune ; ses T'AS 23 338 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE paupieres sont de cette même couleur ; la partie nué de ses jambes, ses pieds, ses doigts, ainsi que les membranes qui les lient ensemble, sont d’un gris brun, et les ongles d'uu brun plus foncé. Les cygnes sauvages volent en troupes nombreuses ; ils aiment naturellement la société de leurs semblables. Ces oiseaux paraissent préférer les régions du nord à celles du midi, et c'est dans les premières qu’ils passent l’été et qu'ils se multiplient. Si quelque ennemi redoutable pour tout autre oiseau que pour le cygne, ose attenter à la vie de ses petits, il les rassemble a l'instant au tourde lui, et bientôt son courage en furie lui a donné la fuite ; si quelque chien s’'avise de s’'égayer aprés ses enfans, la mere vole à sa rencontre, et d’un coup de son aile vigoureuse elle le fait repentir de sa témérité : ce n’est pas à cette arme seule que le cygne doit souvent son salut ; quand un ennemi trop puissant, tel qu’un loup ou un renard, cherche à le surprendre, il se soustrait à ses attaques en se plongeant fort avant sous l'eau , et alors cet adversaire trompé s'enfuit honteux et confus. L'apparition momentarée du cygne dans quelques-uns de nos départemens intérieurs, est une preuve presque toujours incontestable de l’excès du froid qui régne dans les pays septentrionaux, qu'ils sont, par cette raison, forcés d'abandonner pendant l'hiver. | - _ Aussi dans ces momens de crise, il en arrive des bandes quelquefois très-nombreuses pres d'Angoulême, sur la riviere de la Charente; on en tua beaucoup en 1788 et 1709 dans la ci-devant Picardie sur la riviere de la Somme, ainsi qu'en Normandie, vers Chinon , sur la Vienne et sur la Loire, de même qu'aux environs de Chälons. Nous avons vu en 17806 des cygnes sauvages qui avoient été D’'ORNITHOLOGIE. 559 tués sur l'étang de Biécourt, département des Vosges; en l’an XI; on étoit étonné de la prodigieuse quantité de ces oiseaur que l’on voyoit pendant cet hiver exposés sur tous les marchés de Paris, et qui avoient été tués dans ses environs. ‘ En signalant ici en particulier le cygne sauvage, ce n’est pas que nous prétendions en faire une espece distincte du cygne domestique, quoique cependant il présente des caractères assez tranchans pour l’en isoler ; l’ab- sence de ses caroncules, la couleur de son bec pourroient bien autoriser cette séparation, mais nous préférons at- tendre des observations ultérieures, plutôt que de pro- noncer sur ce point important. Quoique Belon prétende qu’on servoit de son temps des cygnes dans les festins, et surtout chez les grands sei- gneurs, il n’est cependant pas moins vrai de dire que la chair du cygne sauvage, comme celle du cygne domestique, surtout lorsque les individus sont adultes, est noire, dure, coriace, et passe pour un fort mauvais mets : il pourroit bien se faire que celle des jeunes ne fût pas trop mauvaise, mais c’est Ce que nous ne pouvons assurer. Tous les ozseaux de cette nombreuse famille en général, ont au dessous des plumes extérieures qui revêtent leur corps, un duvet bien épais et bien fourni qui le garantit des influences perfides de l’eau. Dans le cygne ce duvet est particulièrement remarquable par sa finesse, sa mol- lesse extrême, et surtout par le vif éclat de sa blancheur ; aussi en fait-on des houpes à poudrer qui sont d’un Fon usage, et on en garnit des oreillers et des coussins 1). 1) L’inconstance des modes a introduit chez nos belles, au commencement de l’hiver dernier (1805), le duvet dù cygre , non- seulement en palatine, mais encore en fichus tout entiers de éette * 540 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE On a observé que lorsque les cygnes , soit domestiques soit sauvages, faiscient sauter autour d’eux l’eau en forme d'un brouillard épais, c’étoit une annonce de pluie; que quand, au contraire, ils se promenoient tranquillement sur l’eau, le corps à moitié plongé, c’étoitune preuve en faveur du beau temps. 3.” L’OI1E DOMESTIQUE. Anas anser domesticus. LIN. Syst. nat. édit. 13, g. 67. L'oie domestique. Bis. Ornith. tom. 6, pag. 265. Ce palmipède est une des plus précieuses conquêtes que l’industrie bumaine aït faites sur la nature , pour la convertir à son profit. L’oie est un de ces hôtes qui nous dédommage de l'hospitalité que nous lui accordons par des moyens qui sont pour nous de la plus grande utilité. Outre la bonté de sa chair et de sa graisse dont nous nous nourrissons avec une sorte de délice, elle nous fournit encore cette plume délicate sur laquelle la mollesse se complait à reposer. C'est l’oie qui nous gratifie de l’ins- trument qui transmet au loin les plus secrettes pensées de nos cœurs, comme les intérêts les plus chers de la société. C’est elle qui fournit aux hommes de lettres le moyen par equel ils font passer d’un pôle à l’autre, et conservent à la postérité le fruit de leurs veilles, comme celui de leurs méditations profondes. L'homme, en offrant à cet oiseau un asile , un traite- LÉ UT ne UE pes MEN NU néps ee Ge SES fourrure aussi élégante qu’elle est chaude et légère. À la vue de la multiplicité de cette nouvelle parure, on ne pent qu'être surpris du nombre de ces oiseaux qui ont été sacrifiés à ce genre de luxe. D’ORNITHOLOGIE. 341 ment et un genre de vie commodes, l’a facilement déter- miné à se fixer au nombre de ses domestiques, et c’est cette domesticité qui en a tellement changé les mœurs et surtout le plumage , qu’il nous est impossible d’en tracer ici un signalement exact. Au reste, tout le monde sait que l'oie domestique est à peu près de la grosseur d’un dindon, qu’elle a deux pieds, près de dix pouces de longueur, eteinq pieds huit pouces de vol; que ses ailes ployées atteignent les trois quarts de l’étendue de sa queue, et qu’enfin il y en a de par- faitement blanches, de cendrées, de brunes et de variées de différentes couleurs, symétriquement arrangées ou confusément réparties et sans ordre; toutes, de quelque couleur qu’elles soient, ont l'iris rougeûtre ; le bec, la partie nué des jambes, les pieds , les doigts, ainsi que leurs membranes, rouges, et les ongles noirâtres. La plus belle oie, ou du moins la plus extraordinaire que nous ayons jamais vue, et que nous n’avons pû nous procurer à quelque prix que ce fût pour notre cabinet, par la raison seule qu’elle appartenoit à un de ces paysans fortunés qui, étant incapable de se distinguer autrement, vouloit au moins avoir ce que ses pareils ne possédoient pas. Le front de cette ote étoit d’un blanc de neige, elle avoit le sommet de la tête, tout Le dessus du corps; les ailes et la queue comprises, d’un noir de jaïet à reflets violets, changeant en couleur de cuivre de rosette, suivant l'in- cidence de la lumiere; toutes les parties du devant et du dessous de son corps étoient d’un blanc de neige pur et éclatant , qui contrastoit admirablement bien avec les parties supérieures; ses yeux et ses pieds étoient de même couleur que ceux des autres oies, ainsi que son bec. 849 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Il est très-difficile de distinguer, par leur conformation extérieure, l’oie mâle de l’oie femelle, cependant on prétend que le mäle est plus haut monté sur jambes que la fe- melle ; qu'il a d’ailleurs le cou plus allongé qu’elle, et la voix infiniment plus forte. On voit sur certaines rivieres de la ci-devant Lorraine, telles que la Meuse , la Meurthe et le Madon dans les Vosges , de nombreux troupeaux d'oies qu’un gardien choisi par la commune fait paitre sur le bord des eaux qui sont environnées degazons, que ces animaux broutent a l'aise. On a grand soin de recommander à ces gardiens de faire éviter aux oies qu’on leur confie les grandes prairies ainsi que les grains en herbes, non pas seulement dans la crainte qu’elles ne les broutent de trop pres ; mais. parce qu’on est convaincu que leur fiente est un caustique qui brûle et qui détruit toutes les plantes 1 ); elles ne fréquentent aussi jamais les champs ensemencés qu’aprés leur récolte; c’est dans ce moment surtout que nourries des grains échappés de l’épi , elles prennent une graisse extrême 2). 1) C’est un préjugé populaire et erroné de croire que la fiente des oies est nuisible aux végétaux qu’on suppose gratuitement qu’elle brûle ; elle est au contraire un engrais très-fertilisant, et que, dans plusieurs pays , on ramasse avec le plus grand soin, 2) La passion des oies pour le grain est telle, que nous avons été témoins d’un fait que nous n’aurions jamais cru, si on nous l’eût raconté. Dans notre route pour venir résider à Paris, nous avons vu des oies d'un village près de Chälons-sur-Warne , où nous fûmes obligés de nous arrêter dans une auberge devant laquelle se tron- vaient des voitures chargées de blé, et sors lesquelles on avoit plare dans une claie de bois à voie claire plusieurs sacs de ce graïn; les _ D'ORNITHOLOGTE. 343 Moins cruels pour ces animaux , quoique la plupart n'aient pas été plus humains pour leurs semblables , les paysans de ces contrées n’imitent pas l’usage atroce des Juifs de Metz et de Strasbourg qui, pour les engrais- ser, et surtout pour leur enfler le foie, ont la barbare coutume de les mettre à la torture aprés leur avoir crevé les yeux. On trouve dans le Haut-Languedoc une espèce d'oies beaucoup plus grosses et plus fortes que nos oies ordi- naires : elles sont communément grises ou blanches; mais ce qui les rend particulièrement remarquablss, c’est une masse énorme de graisse qui leur pend sous le ventre, et qui traîne quelquefois à terre lorsqu’elles marchent ; on fait de ces oies des salaisons que l’on envoïe au loin, et qui sont fort estimées. h. L’O1E SAUVAGE. Anas anser. LAN. Syst. nat. éd. 13, gen. 63. L’oie sauvage. BRiS. Ornith. tom. 6, pag. 265. ( Voyez la planche XXXII de cet ouvrage. ) Un peu moins grosse que l’oie domestique, l’oie sauvage a, du bout du bec à celui de la queue, deux pieds huit pouces et demi de longueur , et cinq pieds sept pouces de vol; lorsque ses ailes sont ployées, elles s’étendent jusqu'aux trois quarts de la longueur de sa queue. L’oie sauvage est ordinairement plus maigre, et conséquem- ment plus légère que l’oie domestique. ——— otes les découvrirent, et à coups de bec redoublés percèrent les sacs de toutes parts, et s’en régaloient depuis long-temps quand on s’en aperçut. 344 TABLEAU ÉLEMENTAIRE Le plumage de cet oiseau , constamment le même dans tous les incividus , n’offre rien de fort brillant; tout le dessus de son corps, depuis le sommet de la tête, y com- pris les plumes scapulaires, les grandes pennes des ailes, le crou,ion et les pennes de la queue, est d’un cendré brun; seulement les plumes qu revêtent le haut du cou jusqu'aux couvertures du dessus de la queue, paroiïssent come frangées dans leur contour, d’un bord de cette couleur un peu plus clair que le corps de la plume. Toutes les parties inférieures de cet animal , à partir des joues, jusques et y comprises les couvertures du dessous de la queue, sont d’un blanc sale qui paroît lavé légère- ment d’une teinte roussâtre. L'oie sauvage a le cou plus allongé que Poie domestique; son bec aussi large qu’épais est aplati en dessous , et convexe en dessus ; il est noirâtre à sa base, et d'un jaune safrané dans tout le reste de sa longueur; la man- dibule supérieure est terminée par une espèce de croc noir; l'iris de ses yeux est rougeûtre ; la partie nue de ses jambes, ses pieds , ses doigts, ainsi que les mem- branes qui les unissent ensemble, sont d’un jaune orangé: et les ongles noirûtres. C’est ordinairement dans le mois de novembre que les oies sauvages arrivent en France ; on en voit alors dans les airs des troupes nombreuses qui se répandent sur diverses contrées pour y passer l'hiver jusqu’au retour du printemps, époque à laquelle elles disparoïissent absolu- ment de l'Europe tempérée pour se porter vers les ré- gions du nord. À leur arrivée on les voit dans les nues à une hauteur quelquefois si grande, que l'œil, lorsqu'on est averti par leur cri, a de la peine à les distinguer ; leur mou- vement paroit doux, et semble s'exécuter sans bruit et D'ORNITHOLOGITE. 345 sans action marquée; il se fait dans un ordre qui paroît combiné avec la résistance du fluide dans lequel elles na- viguent. Toute la troupe est ordinairement rangée sur deux lignes obliques qui forment un angle aigu en maniere de V , dont la pointe est dirigée en avant ; le chef qui conduit cette phalange aérostatique est placé au sommet de cet angle; il fend l'air le premier, et lorsqu'il est fa- tigué , on le voit, quand on veut se donner la peine de suivre quelque temps de l’œil ces oiseaux dans les nues , repasser à l'extrémité d’une des deux lignes, et céder sa place à celui qui le suit et qui fatigué à son tour, quitte son poste pour venir se placer après le premier qui conduisoit d’abord la bande. Ce n’est guères que dans les vastes plaines remplies de blé verd que ces troupes se rabattent, et elles y causent de grands dommages, surtout dans les hivers humides et pluvieux, parce qu’en pâturant ces blés elles les ar- rachent d’autant plus facilement que leurs jeunes racines n'adhèrent point encore suffisamment à la terre, etsurtout lorsqu'elle est endurcie par la force des gelées. C’est dans Ces champs, et particulièrement dans ceux qui sont éloignés des forêts, des haïes et des buissons, que ces oiseaux extrêmement craintifs , méfians et fa- rouches restent durant tout le jour, usant des plus grandes précautions pour éviter Le chasseur qui les guette, ou tout autre ennemi qui chercheroit à les surprendre 1}; il y 1) Les oies sauvages, lorsqu’elles sont éparses dans les champs, malgré leur extrème méfiance, ne paroissent pas craindre lPappro- che des chevaux ou des bœufs ; souvent même des hommes à cheval passent assez près d'elles sans qu’elles en soient eFaroichées : aussi quelques chasseurs emploient-ils ce stratagème pour les sur- prendre et les tirer : mais cette supercherie n’a jamais lieu deux t 346 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE en a toujours un qui est placé an centre de la bande, et qui, tandis que les autres pâturent, fait sentinelle , ayant le cou tendu, la tête élevée, et regardant de tous côtés. À la moiadre apparence de danger, il donne le signal par un cri particulier quiest celui d'alarme, et à l'instant toute la troupe prend sen essor et s'enfuit dans les airs. Ce n’est qu'a la chute du jour que les oies sauvages quittent les champs pour se rendre sur quelques étangs ou sur quelques rivieres qui se trouvent a leur portée , afin d'éviter par la les poursuites du renard qui ne manque jamais de venir pendant la nuit visiter les champs qu’elles ont fréquentés durant la journée 1). Au crépuscule du jour elles repartent de l’étang pour se rendre dans leurs champs favoris sur lesquels elles ne s’ibattent jamais sans au préalable en avoir parcouru de Pœil, et dans les airs, tout l’espace, afin de s'assurer qu'il n'ya pour elles aucun danger de s’y reposer. fois de suite; car cette bande intimidée par l’explosion du coup de fusil, devient si circonspecte , qu’elle s'enfuit aussitôt qu’elle voit s’approcher d’eile les mêmes animaux qu'auparavant elle ne redoutoit pas. 1) Nous avons vu plus d’une fois des rerards , surtout lorsque la terre étoit couverte de neige, être assez osés pour venir en plein jour visiter ces bandes d’otes |, dont l’œil fin les apercevoit, et elles ne manquoient pas de prendre la fuite. Nous vimes cepen< dant un jour ces o'es effrayées poussant dans les airs des cris de détresse au-dessus des champs qu’elles venoient d'abandonner, et sur lesquels elles tournailloient : nous cherchâmes à en découvrir la cause, et nous aperçümes de loin un rerard qui fuyoit à toutes jambes versle bois , tenant à sa gueule une oze qu’il avoit saisie dans la troupe. Armé alors de notre fusil, notre sang bouillonnoit de n’être pis près du bois pour puuir de son audace ce ravisseur , qui , aussitôt qu’il en approcha, reçut de la part d’nn autre chas- seur , qui sans doute le guettoit derrière un arbre, la punition de son forfait, D'ORNITHOLOGIE. 547 Autrefois les oies sauvages passoient l'hiver en si grand nombre sur l'étang de Biécourt, dans le département des Vosges, que souvent en prenant leur vol, elles obscur- _ cissoient l'air. C’étoit alors pour ce canton trés-agricole un véritable fléau ; pendant le jour , elles se tenoient en bandes de plusieurs milliers dans les champs en- semencés de blé, et les endommageoïient beaucoup avec leur bec tranchant. A la chute du jour elles quit- toient simultanément ces champs, et prenoïent leur essor avec tant de promptitude, qu’il occasionnoiït un bruit sem- blable à un explosion, et que l’on entendoit à une trés- grande distance. La troupe, après avoir fait plusieurs fois le tour de l'étang, s’y abattoit pour y passer la nuit, et à la naissance du jour elle se répandoït de nouveau dans les champs cultivés. C'étoit au moment de leur arrivée, et à celui de leur départ de létang , surtout lorsque l'atmosphère étoit chargée de brouillard, parce qu’alors elles étoient obligées de voler bas pour en visiter les bords, que des chasseurs. en embuscade derrière un buisson ou un gros poteau de clôture d'héritages, en tuoient quelques-unes. Depuis que cet étang a été desséché par suite de la révolution, on ne voit presque plus d’oies sauvuges, s'arrêter dans les Vosges. On se persuade que pour tirer les oies sauvages , il faut employer des balles ou des chevrotines, et c’est une erreur. L'expérience nous a appris que presque jamais on ne les tuoit roides, à moins qu'on ne les atteignit au cou ou à la tête ; or ce n’est guère qu’un hasard heureux qui dirige le plomb de ce calibre vers ces parties, tanäis que du plomb que l’on emploie l'hiver pour la chasse du lièvre, fourait davantage, et il est suffisant pour casser l'aile, le cou ou la tête à ces ciseaux. D'ailleurs nous sommes 348 TABLEAU. ÉLÉMENTAIRE certains qu'une oie sauvage peut recevoir une balle à travers le corps, sans pour cela discontinuer sa route 1 }; elle ne survit pas à cette blessure sans doute; mais le chasseur qui la lui a faite n’en est pas moins privé ; la chässe est infiniment plus certaine en faisant usage du plomb que nous venons d'indiquer. Nous sommes convaincus que c’est en vain que l’on tend des piéges à ces animaux pour les prendre; ils sont si rusés qu'ils savent Les éviter tous. Durant l’espace de cinq années que nous avons résidé près du plus grand étang de la ci-devant Lorraine, où les oies sauvages étoient extrêmement abondantes chaque hiver, nous avons essayé, soit dans les champs, soit sur l’eau, ou le long de ses bords, toutes les espèces de piéges indiqués par divers auteurs qui les donnent comme infaiilibles , et jamais nous n'avons pu nous procurer de ces oiseaux autrement qu'en les guettant le soir, et en les tirant a coup de fusil. annee 1) En 1778, nous abattimes dans la même soirée, et à l’instant de leur passage , trois oïes sauvages suxque!les nous n’avions cassé que les a les avec du plomb de lièvre : l’une des trois accompagnoit une bande très-nombrense, mais qui étoit trop élevée daus les airs pour que le coup de fusil püi l’atteiudre ; celle-ci voloit seule et infiniment plus bas que la troupe : elle reçut douc à son passage le coup qui la précipita à nos pieds. Quelques jours après, la cuisi- nière, en vidant cet ozseau qu’elle venoit de plumer et qui étoit d’une maigreur extrême, tira de son corps avec ses boyaux une balle qui tomba par terre , et qu’elle nous rendit comme l’instru- ment dont nous avions fait usage pour sa mort, tandis que nous ne l’avions tiré qu’avec du plomb de lièvre. Sa poitrine, perforée par cette balle, nous fit soupçonner d’après son état de maigreur quelle avoit reçu ce coup à plusieurs lieues de là. D’ailleurs nous tron- vâmes, durant le même hiver, une autre ote expirante sur la pelouse, dont la maigreur extrême nous convainquit que la balle qui l’avoit percée séjournoit dans sa poitrine depuis plusieurs jours. D'ORNITHOLOGIE. 349 Quelques auteurs ont consigné dans leurs écrits qu’on ne rencontroit jamais parmi les oies sauvages des oies qui, par la différence de leur plumage, indiquassent qu’elles eussent été autrefois domestiques. Cette assertion est d'autant plus hasardée que non-seulement nous en avons tué nous-mêmes parmi des bandes nombreuses de sauvages qui voloient dans les airs, dont le plumage étoit bariolé de diverses couleurs comme celui des oies domestiques, et dont la couleur du bec, des pieds et des membranes étoit la même ; mais nous avons vu un fermier d’un village voisin des bords d’un grand étang , perdre , au moment de l’arrivée des oies sauvages ,.a l'arriêre-saison , une troupe de plus de trente Jeunes oies qu’il avoit élevées, et qui s’étoient enfuies avec les sauvages, sans que jamais il les eût revues; lorsqu'il nous raconta ce fait, il ajouta qu'il y avoit trois ans qu’il étoit arrivé. Il joignit à cette histoire une autre qui nous parut étonnante , et que nous rapportons ici sans autre garantie que son auteur. Quelques années auparavant du récit de cette histoire , un de ses voisins, tailleur d’habits, avoit fait couver à une oie qu'il avoit achetée chérement, eu égard à sa modique fortune, dix-huit œufs qu'il avoit également achetés , et qui donnèrent chacun un oison. Ce pauvre homme calculoit chaque jour avec sa pauvre femme le profit qu'ils alloient tirer de cette heureuse couvée, lorsque tout à coup, à l’arrière-saison , leur joie se convertit en un chagrin mortel, de voir six de ces oisons prendre leur essor et s'enfuir avec les oles sauvages. Toute l’année se passa en lamentations sur la perte qu'ils avoient faite de leurs oisons, quand un beau jour, lors de l’arrivée des oies sauvages, une troupe de plus de vingt s’abattit devant leur maison , et entra sans beaucoup de cérémonies dans leur grange, dont ils fermérent 550 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE aussitôt la porte. A peine ces oies se virent-elles recluses que toutes se mirent à voler en faisant dans cette grange un fracas épouvantable ; le tailleur ne trouva d’autre moyen pour s'en rendre maître que d'inviter ses voisins à venir avec lui les assommer 4 coups de perches. Ce pauvre malheureux qui avoit pleuré ses oies désertées, se trouva amplement dédommagé de sa perte; il eut le bon esprit de remarquer que dans ce nombre dont il venoit de faire un grand carnage , quatre seulement étoient de ses oies fuyardes dont les autres étoient sûrement les enfans qu’elles avoient ramenés au lieu de leur naissance. D? L’O1E DE GUINÉE. Anas cygnoïdes. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. L'oie de Guinée. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 280. Quand nous plaçons ici cette belle oie, ce n'est pas que nous prétendions la ranger, strictement parlant, au nombre des oiseaux indigènes de la France, puisque nous savons qué son pays natal est l'Afrique, ainsi que toutes les autres terres méridionales de l’ancien continent. Mais, puisque cette oie se voit assez fréquemment chez les oise- lcurs de Paris où elle se propage; puisque plusieurs indi- vidus de cétte espèce vivent actuellement dans le grand bassiti du Jardin des Plantes de Paris, comme s'ils étoient dans leur pays natal, et qu’ils y vivent depuis plusieurs années, pourquoi désespérerions-nous d'en faire bientôt l'acquisition au profit de nos basses-cours, comme nous avons fait celle du paon, du dindon, du faisan, de la pin- tade , etc., dont les éspèces se propagent également depuis long-temps chez nous , et puisque comme elles, Voie de Guinée produit en domesticité ? D'ORNITHOLOGIE, 5 Le plumage de cet oiseau plus gros qu'aucun autre espèce d’oie, est d'un gris brun sur le dos, et d’un gris blanc sous le ventre, l’un et l’autre de ces deux gris sont nués de roussàtre. On voit sur la tête et au-dessus de son cou une teinte d’un roussätre brun qui est plus foncée la que partout ailleurs. Il porte sur la base de sa mandibule supérieure, une espèce de tubercule assez élevé 1}, et sous la gorge’, une sorte de poche qui est enflée et pendante 2), ce tubercule est d’un rouge vermeil, ce qui contraste assez bien avec le bec qui est d’une couleur noire ; ce bec d’ailleurs est comme celui de presque tous les individus de ce genre, dentelé sur ses bords; les pieds sont noïrs dans quelques uns LA] 1 et rouges dans d’autres; l'iris est aurore, et les ongles sont noirs. L'oie de Guinée a la voix forte et éclatante; elle porte toujours la tête très-élevée en marchant, ce qui lui donne un air distingué. Celles qui sont actuellement dans le grand bassin du Jardin des Plantes , sont familières au point qu’elles viennent prendre à travers la grille, et de. la main des personnes qui examinent les différentes espèces d'oiseaux qui ornent ce bassin , les morceaux de pain qu’on leur présente. On prétend qu'en domesticité l’oie de Guinée s’accouple avec notre oie ordinaire, et que les petits qui en résultent 1) M. Pallas , qui a vu en Russie un grand nombre d’o’es de Gui- née, dit que leur bec a souvent vers sa racine une excroissance charnue : or cet adverbe souvent prouve que cette excroissance n'existe pas généralement .ur le bec de tous les individus de cette espèce. 2) On dit que les soldats , ainsi que le peuple des colonies, re servent de cette poche pour faire des sacs à tabac qui contiennent jusqu’à deux livres de cette denrée, 352 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE tiennent le miiieu, quant à lataille, entre l’une et l’autre espèce ; ce seul avantage en seroit un pour nos basses- cours, quand même il ne serviroit qu'a procurer une race plus grosse. On dit aussi que les produits de ce mélange ont le bec et les pieds rouges de notre ot, et l'iris aurore. : 6° L’o1E BRONZÉE. Anas melanotos. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. L'oie de Sibérie ou de Moscovie. Bris. Ornith. 1. 6, pas 217 Quoique originaire de la côte de Coromandel dans l'Inde, en-deça du Gange , près du golfe de Bengale, il arrive cependant que cette oie se porte si loin de son pays natal, qu’elle vient nous visiter jusque dans linté- rieur de la France; car en 1774, on nous donna pour notre cabinet un individu mäle de cette espèce qui avoit été tué sur le grand étang de Biécourt, département des Vosges. Ce bel oiseau, de la grosseur de l’oie sauvage, à trois pieds quatre pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue, et cinq pieds six pouces de vol; lorsque ses ailes sont ployées, elles atteignent un peu au-delà des trois quarts de la longueur de sa queue; son corps est sensiblement moins épais, et son cou plus mince et plus allongé que ceux de l’oie sauvage. Tout le fond du plumage de son dos est noir, avec des reflets d’acier poli qui, selon l'incidence de la lumière , se changent en reflets dorés ou bronzés. Cette oie se fait surtout remarquer par une excroissance charnue, assex D'ORNITHOLOGTIE. 353 large, et qui s'élève en forme de crête sur la base de la mandibule supérieure de son bec. Le dessus de sa tête est noir , moucheté de blanc, ainsi que la partie supérieure du derrière de son cou, dont les plumes semblent frisées, et se diriger en arriére de cette partie. Tout le devant de son corps est bianc: seulement ce blanc prend une teinte grisâtre sur les côtés. Le bec de cet animal, la partie nue de ses jambes, ses pieds, ses doigts et leurs membranes, sont d’un jaune orangé, et ses ongles noirâtres; l'iris de ses yeux est d’une belle couleur aurore. Les pennes de sa queue qui est trés-étagée, sont de couleur noire, et celles des ailes d’un brun noirûtre. Suivant Latham , le pli de l’aile de cette belle oie est armé , dans le mâle et dans la femelle, d’un long et fort éperon : c’est ce que nous ne pouvons plus assurer au- jourd'hui, attendu qu'il y a trop long-temps que nous n’avons vu que le seul individu qui a servi pour cette description ; et dont, l'année suivante, nous fimes vo- lontiers hommage à quelqu'un qui méritoit à juste titre nos égards, et qui nous en témoigna le désir le plus vif; mais il seroit étonnant qu’en signalant cet oiseau aussitôt qu'il fut en notre pouvoir, comme nous avons toujours fait pour ceux que nous avons eus, OU que nous avons seu- lement vus, nous ayons emis un caractère aussi frappant que celui-là ; FBN L’OIE D 'ÉGYPTE. Anas ægyptiaca. Lin. Syst. nat. éd. 13, gen. 67. L'oie d Egypte. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 284. Moins grosse et moins haut montée que l’oie ordinaire, celle d'Égypte se reconnoît par sa tête blanche, ornée de EF." 24 554 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE chaque côté d’une tache rousse, au centre de laquelle l'œil est placé; cette même tache entoure la base de la mañ- dibule supérieüre du bec ; elle se prolonge sur l’occiput et sur le haut du cou, d’où elle descend jusqu’au milieu de cette partie, en prenant une teinte de brun marron. Le bas des joues est d’un blancsale, et la gorge, de même couleur, est tachetée de rouge bai. Le dos, ainsi que les plumes scapulaires sont ouvragées en zigzags, d’un cendré roussätre sur un fond marron bai, et le croupion, de même que les couvertures du dessus de la queue, est d'un beau noir. Les petites et les moyennes couvertures du dessus des ailes sont blanches, marquées à leur extrémité d’une bande transversale noire; les grandes, qui sont les plus éloignées du corps, sont noires, ainsi que les premières pennes de l'aile ; les suivantes ne sont noires qu'intérieu- rement; du cète extérieur, au contraire, elles sont d’un beau vert doré changeant en un violet éclatant ; le pli de l'aile est armé d’un éperon court et obtus ; les deux pennes du milieu de la queue sont d’un noir à reflets verts, et les collatérales noires sans reflets. Le haut du cou, en devant, est d’un beau bai clair; le bas de cette partie, ainsi que la poitrine et tout le dessous du corps, sont rayés transversalement en zigzags de brun sur un fènd roussâtre ; tout le reste du dessous du ventre est d’un blanc sale, à l'exception des couvertures infé- rieures de la queue qui sont lavées de fauve. Ce bel oiseau a l'iris des yeux blanchâtres, et les pau- pières rougeûtres; son bec est rouge dans toute sa lon- gueur jusqu’auprés de sa pointe, qui est noire. La partie nue de ses jambes, ses pieds, ses doigts et les membranes qui les unissent ensemble , sont rouges, et les ongles aoirâtres. Cette espece d'oie, quoiqu'’originaire d'Égypte, s'éloigne D’ORNITHOLOGIE. 553 néanmoins assez souvent de son pays natal, puisqu'au rapport de M. de Buffon, on en a tué sur un étang prés de Senlis ( département de Oise). On nous a assuré qu’on en avoit vu quelquefois sur nos rivières et sur nos étangs du département des Voges; mais nous ne garantissons pas cette assertion , d'autant mieux qu’elle nous a été transmise par des hommes sujets à voir ce qué d’autres plus zélés et plus instruits qu'eux ne voient jamais. Il existe plusieurs individus de cette espèce dans le grand et dans le petit bassin du jardin des Plantes de Paris, où ils vivent déjà depuis quelques années , mais jusqu'a présent ils n’y onf point propagé leur espèce. 8. LE CANARD DOMESTIQUE. Anas domestica. TAN. Syst. nat, édit. 13, gen. 67, Le canard domestique. Bris.Ornith. tom.6, pag. 308. L'homme, en cherchant dans son génie fécond les moyens de subjuguer les animaux, a trouvé celui de fixer parmi ses domestiques le canard dont il est parvenu à faire un captif volontaire, et dans lequelila rencontré des avantages précieux, qui en agrandissant son domaine, reculérent les limites de ses possessions, et le dédommagèrent ample- ment de ses soins, en même temps qu'ils le récompen- sérent avec usure des peines qu'il ne cessa de prodiguer a cet hôte familier. Le canard domestique est si généralement connu qu’il nous paroît inutile d’en tracer ici le signalement; cette tâche d’ailleurs seroit d'autant plus diflicile qu'il n’est presque aucun de ces oiseaux qui ait conservé sa livrée originaire qui est celle du canard sauvage, dont il est 24% 356 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE sans aucun doute, le descendant; car si on les apparie ensemble, les produits qui résulteront de cette union seront des individus féconds. Le canard dont nous parlons a cela de commun avec tous les animaux domestiques , que plus long-temps il a vécu avec les hommes , plus aussi il s’est éloigné de sa nature primitive, soit sous le rapport de ses mœurs, soit sous celui de la variété, souvent bizarre, de sa robe. Qu'il nous suflise donc de dire que l'iris des yeux de cet oiseau varie en couleurs suivant les divers individus ; que le bec est verdâtre dans les uns et rougeâtre dans les autres ; que la partie nue des jambes, les pieds, les doigts, ainsi que les membranes qui les unissent entre eux, sont dans tous d’un rouge orangé , et que les ongles sont noiratres. Nous ajouterons à ces considérations celle de la diffé- rence qui se trouve entre le mâle et la femelle, et qui les fait distinguer l’un de l’autre, quelle quesoitleur couleur: elle consiste en ce que le mâle a toujours les quatre plumes du milieu de la queue recourbées circulairement, et comme bouclées en en-haut, tandis que la femelle a ces mêmes plumes dirigées dans un plan horizontal , comme toutes les autres pennes de cette partie. Il est très-probable que l’homme qui connoissoit les avantages précieux qu'il pouvoit retirer du canard sau- vage s'il parvenoit à le domestiser, lui aura d’abord enlevé de ses œufs qu'il aura soumis à l’incubation au moyen d’une mére étrangère , et que les individus qui en seront éclos auront d’abord conservé cet air farouche , sauvage et toujours fugitifi): mais qu'après s'être appariés 1) Lorsqu'on élève des canards, mème anciennement domes- D'ORNITHOLOGIE. 357 dans les basses-cours, les produits qui seront résultés de ces unions successives seront devenus plus doux, et qu’en- fin, au moyen de bons traitemeus, il sera parvenu à leur faire oublier la liberté si chérie de leurs premiers parens ; qu'ils se seront familiarisés avec le séjour qui leur donna naissance , comme s’il eût été leur propre patrie, et qu'enfin ils auront perdu insensiblement l'idée d’un état qu'ils n’ont jamais connu. Tout le monde sait que l’on plume les canards de basse- cour, ainsi que les oies domestiques, deux fois l’année, aux mois de mai et de septembre ; on ne leur enlève que les plumes du cou et celles du dessous du ventre ; ces plumes qui sont réputées duvet grossier, servent à remplir les ts et les oreillers; mais il faut, avant de les employer a cet usage, leur faire subir un bain de chaleur dans un four, après en avoir tiré le pain : autrement elles courroient risque de se putréfier dans leurs tuyaux, et ne manque- roient pas d'être bientôt rongées par les miles ou les charansons qui en sont très-friands. tisés, à portée de quelques étangs, et qu’on leur permet d’en fréquenter les eaux , il est rare que l’exemple des canards sau- vages , avec lesquels ils se mêlent presque toujours, ne réveille en eux ce sentimeut intime de leur liberté, dont ils ne tardent pas à suivre l’impulsion au détriment de leur maitre. Deux fois nous avons été invités par un fermier de Biécourt à tächer de lui récupérer, au moins morts, de ces déserteurs qui, depuis six mois, avoient abandonné sa basse-cour , sans qu'il eût pa parveniz à les y faire rentrer. 358 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 0. LE CANARD SAUVAGE. ÆAnas boschas. LIN, Syst. nat. édit. 13, gen. 63. Le canard sauvage. BRIS. Ornih. tom.6, pag. 308. ( Voyez la planche XXXII de cet ouvrage.) Les canards sauvages sont sans contredit de tous les oiseaux, les plus rusés, les plus craintifs et les plus dé- Fans ; ils nous fuient constamment et se tiennent éloignés de nous le plus qu'il leur est possible , sur les eaux. Ces palmipèdes , originaires des contrées du Nord, ÿ'arrivent chez nous d’abord qu’en petites bandes, dés le mois de novembre, puis insensiblement ces bandes se grossissent au point qu’on est étonné de leur nombre. On reconnoît en l'air ces oiseaur à leur vol toujours fort élevé , au sifflement de leurs ailes , et au triangle aigu, en forme de V, qu'ils tracent en voyageant dans les. nues. Jamais ils ne s’abattent sur un étang ou sur une rivière sans qu’au préalable ils n’en aient fait plusieurs fois le tour, afin de s’assurer qu’ils n’y ont aucun ennemi à redouter, et c’est alors qu’ils se déterminent à des- cendre sur l’eau; mais toujours au large et loin de ses bords. La tandis que le gros de la bande est occupé à chercher sa nourriture soit au fond soit à la surface de l'onde. il y en a toujours un ou plusieurs qui veillent soi- gneusement au salut de la troupe ertière, qu’a la moindre apparence de danger ils avértissent de chercher leur salut dans la fuite. Les canards sauvages passent dans nos contrées, et toujours loin de nous, tout le temps que dure l'hiver ; ils se tiennent la plus grande partie du jour sur les eaux, D’'ORNITHOLOGIE. 359 et ce n’est jamais qu’aprés le coucher du soleil que, quand la tesre n’est pastrop couverte de neige, ils se répandent dans les champs ensemencés de blé , ainsi que dans les prairies afin d'y pâturer ; ils se jettent aussi dans les forêts où ils ramassent des glands dont ils se nourrissent; mais lorsque les rigueurs de l’hiver sont devenues àpres au point de geler entièrement les étangs et les rivières, alors ils se rabattent sur les sources qui ne gtlent jamais, et là ils trouvent à pâturer du cresson et quelques autres plantes aquatiques. Ils demeurent ainsi parmi nous jusque vers le mois de mars ou au plus tard d'avril, puis ils nous abandonnent pour retourner dans les régions du Nord d’où ils nous étoient venus. Cependant ils ne quittent pas tous la France; il en reste quelques - uns qui y nichent sur les étangs ou dans les bois; on en trouve même des couvées sur des mares situées au milieu des campagnes ersemencées de blé ou d'avoine ; leur nid est composé sans beaucoup d'art ni d'apprêts : il consiste dans quelques touffes de jones seu- lement ployés et coupés d’une manière convenable; la femelle y pond de dix à dix-huit œufs un peu plus gros que ceux de poule, et qui sont d’un blanc lavé d'une nuance de verdàtre. On prétend que quelquefois les cannes sauvages ne font point de nid dans les forêts, mais qu’elles s'emparent de celui de quelque autre oïseau, tels que des pies ou des corneilles , qui sont placés sur la cime de quelques grands arbres. Ce que l’on prétend encore, et qui paroît vraisem- blable, c'est que, soit qu’une canne aït fait sa ponte dans un nid étranger ou dans quelque creux d’arbre de la forêt, elle apporte les uns après les autres, dans son bec, ses petits aussitôt qu'ils sont éclos , et les dépose sur un étang à portée du bois: c'est là qu'elle leur donne l’é- 366 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE ducation analogue au genre de vie qu’ils doivent me- ner dans la suite. Lorsqu'ils sont encore fort jeunes, elle les rassemble le soir sur une touffe de jones, et elle les réchauffe sous ses aïles pendant la nuit pour en- suite les promener sur les eaux tout le jour dès l’aurore naissante. Ce qui nous paroît tres-probable relativement au transport que la canne mére fait de ses petits de la forêt sur quelque étang, c'est que nous avons trouvé plusieurs fois de ces nids qui ne contenoiïent que des œufs, et toutes les ïfois que nous sommes retournés ensuite les visiter, croyant y rencontrer des petits éclos, nous avons trouvé la maison vide, et tres-fréquemment nous avons vu sur des étangs plusieurs petites familles de canetons très-jeunes suivre leur mère à la nage, et cher- chant avec elle leur nourriture, quoigue nous ayons été sûrs qu'il n’y avoit point de nid dans ces mêmes endroits. Lorsque ces familles isolées de canetons ont atteint la moitié, ou un peu plus dé la moitié de leur croissance, ils sont tout couverts d’un duvet gris; les pennes de leurs ailes qui commencent à poindre ne leur permettent pas de voler encore, et à ce moment ou les nomme helebrans. C’est alors que les chasseurs en font une grande destruc- tion, parce qu'ils ont ia fatale réputation d'être un wets délicat. Pour leur donner la ekasse, qui presque toujours est un carnage de destruction , on fabrique dans les roseaux où ils se cachent pendant le jour, un abattis en forme d’avenue, large d’une ou de deux toises ; tandis qu'un ou plusieurs chasseurs se tiennent dans un bateau tran- quilles , au milieu de cette avenue, l’un tourné en avant et l’autre en arriére, d'autres chasseurs se mettent à l’eau, lorsqu'elle nest pas profonde , et battent les e D'ORNITHOLOGIE. 36. roseaux à droite et à gauche de l’avenue , et chemin faisant ils tuent plusieurs de ces innocentes créatures qui fuient toutes du côté de la tranchée où elles ren- contrent une mort inévitable dans l'arme des chasseurs de la nacelle. On recommence plusieurs fois ces battues, et il arrive presque toujours que tous ces jeunes canards cessent d'exister avant qu’ils n’aient connu les douceurs de la vie. C’est ordinairement le soir, à la chute du jour, qu’au bord d'une fontaine ou d’un étang, le chasseur passionné, im- mobile et souvent à moitié gelé, attend les canards adultes dans le gîte qu’il s’est préparé, en fabriquant un trou en terre qu'il a eu soin d’abriter par quelques fas- cines recouvertes de paille, de terre ou de jones. C’est . dans ce petit réduit qui n’est pas fort commode, qu'armé d’un fusil il gwette ces oiseaux qui, par le sifflement de leurs ailes , l'avertissent de leur arrivée. À peine les premiers sont-ils tombés sur l’eau, que le chasseur se hâte de les tirer, et c’est le moment le plus propice; car s'il attendoit que la bande fût plus nom- breuse, outre que quelques-uns d’entre eux pourroient l'apercevoir et sonner le cri d'alarme, c’est que la nuit tombant promptement dans cette saison ; il courroit les risques de ne plus distinguer la proie qu'il épie. Dans quelques départemens de la France, on fait aux canards une chasse fort amusante, et que l’on a nommée pour cette raison badinage. Elle consiste en ce qu’au inoyen d'un ou de plusieurs bateaux que l’on a couverts de ramées, ou mieux encore de roseaux verts, on s'ap- proche le plus lentement possible des canards digséminés ça et la sur la surface des eaux des étangs ou des lacs, er ramant sans bruit à l’arriére du bateau. Pour les rassembler on lâche un petit chien dressé à 362 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE cet exercice ; il file en silence et à la nage, vers ces oiseaux qu'insensiblement la crainte d'un ennemi fait fuir en se rapprochant les uns des autres; ce chien les dirige ainsi, sans qu’ils s’en doutent, du côté des bateaux, dont la verdure leur fait illusion. C’est à ce moment qu’on les tue Ge deux manieres, ou un à un et sans bruit, avec une forte sarbacane, ou bien en tirant sur la troupe lorsqu'elle est rassemblée à une distance trop grande pour que la serbacane puisse l’atteindre, avec un fusil de gros cali- bre, qui, en écartant le plomb meurtrier qu’il lance, tue ou blesse un grand nombre de ces animaux. Mais ce der- nier moyen ne peut avoir lieu qu’une seule fois; car les canards, qui ont une sorte de mémoire d’un danger quel- conque auquel ils ont échappé, reconnoissent le piége qui leur à fait illusion, et ils ont le plus grand soin d'en éviter de nouveau l’approche. On conçoit que cette chasse ne peut avoir lieu qu'au printemps, durant l’été et une partie de l’automne : nous Vavons vu exécuter d’une autre mañiére encore, et pen- dant l'automne seulement. On avoit fabriqué en terre, et sur le bord d’un des étangs de la ci-devant Lorraine, piu- sieurs trous que l’on recouvroit d'une espèce de toiture inclinée d'avant en arriere, et garnie en dessus et sur ses côtés de roseaux verts. Cette petite fosse, ainsi que sa toiture , étoient tellement disposées, qu’elles ne laissoient au chasseur, dont la tête seule surpassoit le sol, que la liberté de manier son arme. Les bords de cet étang étoient garnis tout autour d’une douzaine au moins de ces loges, contenant chacune un tireur, et elles étoient distantes l'une de l’autre de manière à ce que le plomb d’un chas- seur ne pût atteindre la lage de ses voisins, soit à droite, soit à gauche. Deux ou trois bateaux couverts comme nous venons de k D'ORNITHOLOGIE. 363 l'indiquer ci-dessus, et montés par d’autres chasseurs, parti- rent ensemble de la borde de l'étang, et se dirigérent sur des points différens , mais qui aboutissoient toujours à quel- ques loges. En raimant très-doucement et sans bruit, les na- celles, en s’avançant insensiblement, faisoient fuir devant elles tous les canards qui s’approchérent des cabanes. Ce fut alors que, placés entre deux feux, ces pauvres ani- maux furent en même temps assaillis, et par les chasseurs des cabanes, et par ceux qui montoient les bateaux. Les uns et les autres firent un feu nourri de leurs fusils 4 deux coups, et joncherent la surface de l’étang de cada- vres de ces oiseaux, que les nautonniers ramassérent à la fin de cette expédition sanguinaire. Dans plusieurs autres endroits, et surtout sur nos côtes maritimes, on prend une grande quantité de canards sau- vages , ainsi que plusieurs espèces d'oiseaux nageurs, au moyen de filets semblables aux nappes avec lesquelles on attrape les alouettes. Le chasseur, placé dans une hutte ou petite cabane qu'il a fabriquée en terre , peut à vo- lonté fermer ce filet, dont un par se croise sur l’autre à l’aide d’une corde qui tient à ses montures, et qui aboutit a Ja cabane du chasseur, qui sait attirer dans ce piége les canards sauvages qu’il aperçoit sur l'horizon, au moyen d’autres canards privés qu’il a dressés à appeler leurs semblables lorsqu'ils les entendent dans les airs. Souvent cette chasse pénible, dans laquelle on est exposé à toutes les rigueurs de la saison , est fort abondante ; elle ne se pratique jamais que pendant la nuit, ou bien au clair de la lune. Dans certains pays, lorsque la terre est couverte de neige, on surprend en plein jour les canards, ainsi que les oies sauvages , en s’affublant d’un peignoir ou d’un drap blanc, en se couvrant la tête d’un bonnet de coton et en 364 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE entourant son fusil d'un ruban de même couleur, en un mot, en se rendant blanc et le plus blanc qu'il est pos- sible, en déguisant même sa face par un masque de papier. Dans cet accoutrement le chasseur s’avance à pas mesurés et presqu'insensibles vers le gibier qu'il guette, et il le tire lorsqu'il se croit à portée de pouvoir l’atteindre. Ailleurs on prend quelquefois les canards ( ce moyen nous a réussi trois fois dans tout un hiver) avec des ha- meçons attachés à une ficelle de plusieurs brasses de lon- gueur , et que l’on a fixée par le bout à un piquet planté en terre; on garnit de tripailles de poulet ces hameçons, et on les jette ensuite dans l’eau céurante des fontaines que ces oiseaux fréquentent. Ces gloutons, en avalant les iripailles sans les màcher, puisqu'ils sont privés d’or- ganes propres à la mastication, avalent en même temps l'hameçon, qui, lorsqu'ils veulent partir, les arrête sur place, en s’acérochant, soit a leur gosier, soit dans leur estomac ; ils se débattent alors beaucoup, et souvent on les trouve le lendemain étendus morts sur la place. C’est surtout dans la ci-devart Picardie que l'on prend le plus de ces palmipèdes par des moyens ingénieusement combinés ; c’est de ces départemens maritimes que l’on apporte la plus grande partie des canards sauvages, ainsi que les autres oiseaur du même genre que l’on voit en si grand nombre pendant lhiver sur les marchés de Paris. Les chasseurs distinguent quatre variétés de canards sauvages, et nous croyons qu'ils sont fondés dans leur opinion. La premiére, qui est le canard sauvage le plus com- mun, a un pied neuf pouces six lignes de longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue, et deux pieds dix pouces de vol. Lorsque ses ailes sont ployées, elles n’at- [4 D'ORNITHOLOGIE. 365 teignent guère que la moitié de la longueur de sa queue. Tout le monde sait que ce canard a la tête, la gorge et une partie du cou d’un vert brillant à reflets violets. Au bas de cette couleur, on voit une espèce de petit col- lier blanc. Le dessus du corps, à partir du cou jusqu’au croupion, est rayé en zigzags de brun cendré et de gris blanchâtre ; le croupion est d’un noir susceptible de changer en un beau vert foncé : la queue, qui est composée de vingt pennes, a les quatre du milieu recourbées en demi-cercie en en-haut dans le mâle seulement ; elles sont d’un noir chan- geant en vert, et les collatérales sont d’un cendré brun, bor- dées de blanchâtre; on voit sur chaque aile une grande tache située aux deux tiers de leur longueur , et qui est formée par la réunion des grandes couvertures; cette tache est d’un beau violet, qui, selon l'incidence de la lumiere , se change en un vert doré trés-éclatant. Le bas du devant du cou, ainsi que la poitrine, sont d’un marron foncé ; tout le reste du dessous du corps est d’un gris blanc rayé en zigzags de cendré brun; l'iris des yeux est rougeàtre ; le bec est d’un vert jaunâtre, terminé par un croc noir situé au bout de la mandibule supérieure ; la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes sont d’un jaune orangé; les ongles des doigts antérieurs sont noirâtres, et celui du postérieur est marron. La femelle différe du mâle, en ce qu'outre qu’elle est un peu moins grosse que lui, son plumage est aussi moins brillant que le sien ; il est entièrement varié de brun sur un fond grisâtre : elle a bien, comme lui, une tache verdâtre sur l'aile; mais cette tache est plus nuée de violet. La mandibule supérieure de son bec est d’ailleurs rougeâtre, marquée de noir, tandis que l'infé- rieure est d'un rouge uniforme. La seconde espèce du canard sawwage, ou pour mieux 2 366 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dire la seconde variété, ne différe de la première qu’en ce qu'elle a deux pieds six pouces de longueur, et trois pieds neuf pouces de vol. La troisième variété, qui est à peu prés de la même taille que la seconde, diffère de l’une et de l’autre en ce qu’elle est entierement d’une couleur cend ‘ ayec la même tache brillante du dessus des ailes; , ses pieds, ses doigts, leurs membranes et les ongles: it en- tiérement noirs. La quatrième variété enfin est de même taille que les deux précédentes ; mais elle a le dos noir, tacheté de jaunâtre : toutes les autres parties de son corps sont abso- lument semblables a celies des deux variétés dernières que nous venons de signaler. [e) 10. LE CANARD MUSQUÉ Anas moschata. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le canard musqué. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 313. On a donné à ce canard l’épithete de musqué, à cause de l'odeur de musc qu'il exhale en effet, et qui est si forie, qu'il seroit impossible de manger la chair de cet oiseau, quoiqu’elle passe pour être un mets délicat, si au réalable on ne lui avoit coupé la tête, et surtout enlevé le croupion, dans les glandes duquel réside l'humeur musquée qui se répand de là dans tout le corps, et plus particuliérement dans la tête. Ce canard, quoiqu'originaire de la Guiane (les auteurs, ne sont pas d'accord entr'eux sur le pays d’où il nous a été apporté en France), s’est tellement naturalisé parmi nous, qu'il y vit et s’y propage comme dans son climat natal : il est même peu de paysans aujourd’hui D’'ORNITHOLOGIE. 364 qui n'aient quelques couples de cet oiseau parmi leur volaille, ne fût-ce que par une sorte d'ostentation dont ils sembloient ignorer l’empire avant la révolution. Ils les nomment canards d'Inde ou canards de Barbarie. Ces oiseaux sont trés-féconds, très-ardens en amour, et font plusieurs pontes par an. Q Le plumage du canard musqué est ordinairement d’un noir brun à reflets verdàtres et rougeätres sur le dos; il a sur les couvertures du dessus des ailes une large bande transversale blanche : on voit autour de ses yeux une peau aue semée de papilles d’un rouge fort vif : cette peau, en couvrant une partie des joues, s’étend derriere les yeux, et vient se renfler sur la racine du bec, où elle forme une caroncule saillante et demême couleur:Derricre la tête du mâle, on voit aussi un bouquet de plumes, qui se dispose en une sorte de huppe qui manque dans la femelle ; d’ailleurs celle-ci est un peu moins grosse que son mâle, et sa couleur est presque toujours d’un brun noiï- râtre; son plumage est aussi bien moins orné de reflets que celui du màle, et elle n’a pas comme lui de huppe sur la tête. Le canard musqué est beaucoup plus grand que notre canard ordinaire ; il est même le plus gros de ceux que nous connoissons; sa longueur, de l'extrémité du bec à celle de la queue, est de deux pieds un pouce et demi, et son vol de pres de trois pieds ; lorsque ses ailes sont ployées, elles ne s'étendent guére au-delà de l’ori- gine de sa queue. Le mâle, comme la femelle, sont fort bas de jambes, et ils ont tous deux les pieds très-épais: l'un et l’autre ont l'iris des yeux rougeûtre, le bec rouge, barré de bandes noires; la partie nue des jambes, les pieds, les doigts , ainsi que les membranes qui les 568 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE unissent ensemble, sont rouges, et leurs ongles gros sont blanchâtres ; k postérieur seul est crochu. Quoique ce canard ait la marche pesante, cela n°’em- pêche pas, dit-on, que dans l’état sauvage il ne se perche sur les arbres. Le son de sa voix est si grave et si profond, qu'on peut à peine l'entendre, à moins qu'il ne soit en colére. Cet oiseau est tres-fécond ; sa femelle produit de douze à quinze œufs tout-à-fait ronds et d’une couleur verdâtre pâle; sa ponte commence en avril, et de deux jours l’un elle fait un œuf qu’elle dépose sur de la paille qu’elle amoncelle pendant tout le temps que dure sa ponte; dont l’incubation est, dit:on, de trente-cinq jours. Quoique la couleur du plumage de ce canard soit ordi naireiaent, et toujours dans son état sauvage, d’un noir brun à reflets, néanmoins on voit un grand nombre d'in- dividus dans les basses - cours qui sont entièrement blancs ou mouchetés de diverses couleurs. On ne doit certainement attribuer cette mutation de livrée origi- nelle qu’à l’état de domesticité, dont le poids s’est déja appesanti sur ces animaux depuis qu'on les a introduits en France. Cette variation de couleurs paroïît sur les in- dividus que l’on voit dans le grand bassin du Jardin des Plantes, quoique la ils se trouvent, pour ainsi dire, comme s'ils étoient en pleine liberté. Le mâle de cette espèce s’'accouple avec l'espéce do- mestique ; et quoique des auteurs prétendent que les pro- duits qui résultent de cette alliance adultérine soient in- féconds entr'eux, nous avons la certitude qu'ils peuvent au moins se reproduire lorsqu'ils s’'apparient le mâle avec des femelles et les femelles avec des mâles domestiques. Nous certifions ce fait avec d'autant plus de confiance, D'ORNITHOLOGIE. 369 que plus d’une fois nous en avons été témoin dans la basse-cour d’un de nos amis fort zélé pour les intérêts de l’agriculture , et qui n’épargne ni peines ni dépenses pour se procurer les races les plus précieuses en tout genre. Nous avons mangé chez lui de cette espèce de canard, dont la chair n’avoit pas la moindre odeur de muse, par la raison, comme nous l'avons dit plus haut, qu'anssitôt qu’on J'avoit tué, on lui avoit coupé la tête et le crou- pion: on mous dit même qu'avant de le rôtir on avoit substitué à la place du croupion enlevé un gros oignon en dedans et à l'arrière de son corps. 11. LE SOUCHET. Anas clypeata. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. G3. Le souchet. BRIS. Ornith. tom.6, pag. 329. ( Voyez la planche XXXIT de cet ouvrage. } Dans l’intérieur de la France, où ces oiseaux novs arri- vent en bandes au commencement de l'hiver pour se dis- séminer sur nos étangs et ne les quitter qu’au printemps, on les nomme vulgairement rouges ou canards à large bec ; l'espèce n’est pas plus grosse que celle du canard domestique. Sa longueur , mesurée du bout du bec à celui de la queue, est d’un pied sept pouces, et son vol de deux pieds six; elle est particulierement remarquable par la forme de son bec large, épaté, arrondi et dilaté par le bout en manière de palette. Sa tête et la plus grande partie de sa gorge sont d‘un beau vert doré ; lebas de son cou, ainsi que le haut de sa poitrise, sont d’un blanc pur dans quelques individus, et d'un blanc tacheté de noirâtre dans d’autres. Cet oiseau à T. 2. 25 370 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE le dos, le croupion, de même que les couvertures du dessus ce la queue, d’un noir qui, selon l'incidence de la lumière, se change en vert; ses plumes scapulaires sont variées de noiràtre, de vert doré, de bleu cendré et de blanc ; le bas de sa poitrine est blanc; le reste du dessous de son corps est presque toujours d’une couleur marron foncé : cependant il se trouve des individus qui ont cette partie blanche, mouchetée seulement de taches d’un brun marron. Les couvertures du dessus de ses ailes sont d’un bleu tendre ; quelques-unes sont terminées de blanc, qui forme sur l'aile une bande transversale; enfin les der- nières couvertures, qui sont d’un beau vert bronzé, établissent sur chaque aile un miroir brillant de cette couleur. Les premières pennes de ces parties sont brunes ; les suivantes sont de même couleur du côté intérieur seu- lement, et d’un vert doré et éclatant du côté extérieur : celles qui les suivent sont aussi d’un vert doré ; mais elles _sont barrées et terminées de blanchâtre. Les pennes de la queue sont brunes, bordées aussi de blanchâtre ; elles se terminent toutes en pointe, et leurs couvertures infé- rieures sont noires. L'iris est d’un jaune foncé, le bec noir ; chacune des mandibules est garnie dans toute son étendue de dents assez longues, flexibles, et qui n’imitent pas trop mal celles d’un peigne. La partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes sont d’une belle couleur orangée, et les ongles gris. La femelle du souchet, un peu moins grosse que son mäle, n’a que des couleurs obscures d’un gris blanc rous- sätre, maillé et comme festonné de noirâtre ; du: reste, elle lui ressemble, si ce n’est que ses couleurs sont moins vives. Le souchet niche sur quelques-unes de nos côtes ma- D'ORNITHOLOGIE. 571 ritimes dans des touffes de jonc 1). On dit que le grand nombre de souchets que l’on voit pendant l'hiver sur les marchés de Paris ont tous été tués dans les marais qui s'étendent depuis Soissons, département de l'Aisne, jus- qu’a la mer. Cette espèce de canards abonde pendant l'hiver sur presque tous les petits étangs des montagnes des Vosges ; ils sont beaucoup plus rares sur ceux de la plaine ou de la partie agricole de ce département 2). En l’an VIIT, on en tua un si grand nombre sur les petits étangs de nossmontagnes, que chaque jour que dura cette saison rigoureuse, on en voyoit une étonnante quantité sur Les marchés d’Épinal, où on les donnoit à vil prix. + 19.9 LE CHIPEAU. Anas strepera. TAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le chipeau. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 339. Le chipean, auquel on a aussi donné le nom de riden, n'est pas aussi grand que le canard sauvage ; il n’a de lon- 1) On assure que le souchet niche à terre sur de grosses touffes de joncs ou d’herbages aquatiques ; ses œufs, au nombre de dix ou douze , sont d’un roux päle ; l’incubation est de vingt- huit à trente jours Les petits, èn naissant, sont couverts d’un duvet gris taché: ils prennent leurs belles couleurs à la première mue ; mais ces couleurs ne -devienneut éclatantes qu’à la seconde. A V’exception des ailes, la femeile du souclet a son plnmage sem- blable à celui de la femelle du canard domestique. : 2) Nous devons celui de notre collection à M. le tribun Del- pierre, notre compatriote , qui, long-temps avant la révolution, eut la complaisance de pourvoir notre cabinet d’un certain nombre d'espèces différentes d’orseaux. 2 * 372 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE gueur totale, mesurée de l'extrémité du bec à celle de Ia queue, qu’un pied sept pouces ; son vol n’est que de deux pieds cinq. Sa tête, le haut de son cou, sa poi- trine , son dos, aiusi que ses flancs, sont mouchetés, écaillés, comme festonnés et finement vermiculés de blanc sur un fond de couleur brune noire : son croupion, de même que les couvertures du dessus et du dessous de sa queue, sont d’un noir pur, et ses plumes scapulaires bru- nes, rayées transversalement de blanchâtre ; celles de ces plumes qui sont situées au-dessous sont d’un gris brun à Bords roussàtres dans quelques-unes : les petites couver- tures du dessus des ailes sont aussi d'un gris brun ; les moyennes de couleur marron, et les grandes, qui sont les plus éloignées du corps, sont d'un gris brun, avec cette différence que les plus voisines du corps sont ter- minées par un beau noir velouté; ce qui n’a pas lieu dans les autres. Lés premières pennes de l’aile ont leur bord extérieur d’un gris brun, et l'intérieur d’un gris cendré; les suivantes sont bordées en dehors d’un noir de ve- lours et terminées de blanc ; celles qui avo'sinent davan- tage le corps sont grises. Les pennes de la queue sont de cette dernière couleur , bordées en dehors et ter- rninées de blanc ; seulement les deux du milieu sont tout-à-fait grises, sans bordure. Il n’est aucune de ces pennes qui ne se termine en pointe, et qui n'aille en diminuant de grandeur du centre sur les côtés; l'iris des yeux est d’un brun clair; le bec noir : la partie nue des jambes, les pieds, les doïgis et :eurs membranes sont d'une couleur orangée, et les ongles noirâtres. La femelle à tout le dessus du corps revêtu de plumes brunes, bordées de blanc roussâtre ; elle n’a pas, comme son mèle, les côtés, ainsi que la partie du dessous du corps rayés transversalement; elle différe d’ailleurs de * D'ORNITHOLOGIE. 573 celui-ci, en ce qu’elle est plus petite que lui, et que son croupion , au lieu d’être noir, est d’une couleur grise en dessus et en dessous. C'est au mois de novembre que les chipeaux arrivent du nord sur nos côtes maritimes, qu'ils abandonnent au plus tard au commencement d'avril: on en voit alors une assez grande quantité dans les ci-devant provinces de Normandie et de Picardie, sur les côtes de la ci-devant Bretagne et sur celles du Poitou : durant le séjour qu'ils font dans ces contrées , il s’en échappe plusieurs qui s’enfoncent dans l’intérieur des terres, et même assez avant; car nous en avons tué quelques-uns sur l'étang de Biécourt, dépar- tement des Vosges, avant que cette belle nappe d'eau ne fût desséchée. | Nous avons remarqué que le chipeau étoit un oiseau craintif, bon nageur et excellent plongeur : son extrême timidité est cause qu'il se tient constamment blotti et caché dans les joncs pendant le jour, d’oùil ne sort qu'au crépuscule du soir pour chercher sa nourriture pendant la nuit. | On prétend que ce palmipède ne peut vivre long-temps en captivité, par la raison qu'il y refuse toute espèce de nourriture, même le froment et l’orge, qui sont l'aliment chéri de toutes les autres espèces de canards : nous croyons devoir attribuer, avec feu M. Baïllon, la répu- gnance qu'ont ces oiseaux pour ces grains, aux contrées Où ils ont pris le jour; car ils nous arrivent des marais du nord : et là ils n’ont pas dû connoître l'orge, et encore moins le froment , puisqu'il est impossible d'y cultiver ces deux plantes céréales si précieuses. Il n’est donc point étonnant qu'ils les refusent conme aliment dans un pays qui leur est étranger ct pour ainsi Gire inconnu. 374 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 13. LA BERNACRHE. Anas erythropus. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. La bernache. BR1s. Ornith. tom. 6, pag. 300. ( Voyez la planche XXXTÏI de cet ouvrage.) On sait que des erreurs enfantées par la crédulité de quelques ornithologistes anciens, qui ne voyoient presque jamais que du merveilleux, et qui se complaisoient à ra- conter ce qu'ils avoient eru voir, s’étoient acquis beau- coup de célébrité parmi un peuple quelquefois stupide et presque toujours ignorant, sur la naïssance ou la repro- duction de la bernache, de même que sur celle de la macreuse, que les savans des siècles reculés faisoient sortir d’un certain coquillage nommé conque anatifère- Cette erreur fut autrefois accréditée au point qu'un grand nombre d'auteurs contemporains ne rougirent pas d'avancer qu’ils avoient découvert que certaines espèces de fruits offroient dans leur organisation les rudimens de toutes les parties d’un oiseau, et que ces fruits, tombés dans la mer , s’y convertissoient ou en bernaches ou en macreuses. D'autres, non moins insensés, osérent écrire et publier qu'autour des vieux mâts, ou bien des débris flottans de quelques navires qui s’étoient pourris dans la mer, il crois- soit des espèces de champignons qui peu à peu se cou- vroient de plumes, et finissoient par devenir des oiseaux. Il s’en est trouvé d’autres enfin qui, sans recourir ni # des fruits ni à des débris de vaisseaux pourris, ont fait tout :-coup entr'ouvrir des coquilles, d’où lon voyoit sorür des palmipèdes tout formés, et auxquels il ne man- D'ORNITHOLOGIE. 375 quoit que de la grandeur, qu’ils acquéroient en très-peu de temps. Il y a même un auteur (Maier ) qui assure gravement, et sans rougir, qu'il a ouvert un grand nombre de ces coquilles, qu’il prétendoit être anatifères 1), et qu’il n'en a pas trouvé une seule dans laquelle il n’ait remarqué l'embryon d’un oiseau tout formé. De semblables erreurs sont trop grossieres pour se flatter d'obtenir quelques succès dans le siècle éclairé’ où nous vivons : aussi nous nous garderons bien de perdre du temps à les réfuter; ce serpi d’ailleurs insulter à nos concitoyens 2). Les bernaches , quoique PER ME des pays du Nord, savancent néanmoins quelquefois jusque sur nos côtes maritimes, surtout lorsque les hivers sont un peu rigou- reux ; elles pénètrent même, quoiqu’assez rarement, dans l'intérieur des terres : car, pendant les plus fortes gelées, non-seulement on en voit en vente dans les marchés de Paris; mais M. de Buffon assure qu’on en a tué dans la ci-devant Bourgogne , aujourd’hui département de la Côte-d'Or, où elles avoient sans doute été jetées par quel- ques coups de vent impétueux. Ces oise u ,; d’ailleurs, 1) Porte-carards. 2) Pour se former une idée de l’opinion erronée de Maier. il suffit de jeter seulement un coup d’æil sur son ouvrage, qu'il a tissu d’absuréités et mème de bêtises, et qu’il a intitulé : Tractatus de volucri, etc. Autore MA1ERo, archiatro, comite impertiali, etc.; Francofurti, 1629, in-12. M n'existe sans doute aujourd’hui en France aucun homme assez dépourvu de bon sens pour lire ce livre sans éprouver des spasmes nauséabondes. L'auteur, pour prouver la possibilité de la génération d’un oseau dans une coquille, y appuie ses raisonnemens faux de l’existence des sorciers et des loups-garoux , qu’il dit être émanés des astres. 376 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE peuvent bien supporter la température de notre atmos- phère, puisqu'on en voit dans le grand bassin du jardin des Plantes de Paris, qui y vivent depuis plusieurs années. La bernache est un peu plus grosse que le cravant, elle a près de deux pieds et demi de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue. Le devant de sa tète est blanc, avec deux petits traits noirs qui s’étendent de l'œil jusqu'aux narines. Du haut du cou, un domino noir lui retombe en rond sur le haut du dos et de la poitrine ; tout le reste dk dessus du corps est ondé de gris et de noir , avec une espèce de frange blanche. Le dessous est entièrement d’un beau blanc qui paroit comme moiré. Son bec, qui a environ seize lignes de longueur , est noir, avec une tache rouge de chaque côté ; ses pieds sont noi- sàtres, ainsi que ses doigts, les membranes qui les unis- sent , et ses ongles; elle a l'iris des yeux de couleur aurore. 14° LE CRAVANT. Anas bernicla. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 63. Le cravant. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 304. Le cravant, qui n'arrive aus:i sur nos côtes maritirnes qu'en hiver ,se reconnoît surtout par le son sourd et creux de sa voix, qui est une espèce d’aboiement rauque qu'il répète incessamment. Cet oiseau resse xble assez à l'oie par le port de sa têie qu’il tient haute en marchant, et par les autres propor- tions de sa faille. Il a la tête ainsi que le cou d’un brun noirètre, avec un demi - collier blanc assez étroit, qui Ii ceint la gorge : un gris cendré couvre tout son dos , ses flancs et le dessus de ses ailes, dont toutes les grandes D'ORNITHOLOGIE. 374 pennes , ainsi que celles de la queue, sont d’un brun noïi- râtre. Les couvertures supérieures de cet appendice sont aussi de cette dérnière couleur, excepté cependantles pennes latérales de cette partie, qui, comme leurs couvertures inférieures, sont blanches. L'iris de l’œil de ce palmipède est d’un jaune brunâtre ; son bec qui est percé a jour par deux grandes narines , est noirâtre , de même que ses pieds, ses doigts, les membranes qui les unissent, et ses ongles. Le cravant , que l’on peut nourrir en domesticité dans nos climats , puisqu'on en voit plusieurs aussi dans le grand bassin du jardin des plantes de Paris, paroïît être origi- naire de la Suède ; cependant on assure que quelques-uns de ces oiseaux remontent la Seine pendant l'hiver , et que l’on en a tué plusieurs fois dans les environs de cette ca- pitale. M. Baïlon prétend qu'avant l'hiver de 1740 le cravant n'étoit guëre connu sur les côtes de la ci-devant Picardie, mais que le vent du nord en amena a cette époque une si grande quantité que la mer en étoit toute couverte; ilajoute qu’ils se répandirent sur les terres ensemencées de blé qui n’étoiént point couvertes de neige, et qu’ils y causèrent un très-grand dégât, car ils en broutérent jusqu'a la racine. Les paysans désolés d’un tel fléau , résolurent de leur donner la chasse. Ces oiseaur étoient alors si acharnés à dévorer les blés, que, durant les premiers jours que ces paysans leur livroient bataille, ils en approchoïent d'assez près pour les tuer à coups de bâton ; mais cela n'en di- minuoit pas le nombre; car,il en sortoit à chaque instant de la mer des nuées qui achevérent de dévorer les grains. Le même auteur dit encore qu’en 1765 le vent du nord en jeta une si grande quantité sur la mer, que ses bords en étsient tout couverts; mais ils ne se répandirent 378 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE pas dans les champs, et heureusement ils repartirent peu de temps après leur arrivée, Il ajoute que depuis cette époque on en voit beaucoup sur la mer toutes les fois que Le vent du nord souffle, et c’est ce qui arriva plus particulièrement en 1776. 19.7 LE MILLOUIN. Anas ferina. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le millouin. BRis. Ornith. tom. 6, pag. 384. Le millouin n’est pas plus gros que notre canard do- -mesfique, mais sa forme est bien plus courte et plus ra- massée ; il n'a d'ailleurs que quinze pouces de longueur, mesurée de l'extrémité du bec à ceile de la queue, et dix- huit à dix-neuf pouces de vol. Ce palmipède arrive en automne en bandes nombreuses et toujours fort serrées, sur les étangs de plusieurs dé- partemens de l'intérieur de la France, et particulièrement sur ceux de la partie montueuse des Vosges, d’où il re- part aux premiers beaux jours du printemps. Plusieurs montagnards, en nous assurant qu’il restoit quelques-uns de ces canards sur leurs étangs pendant l'été, et qu'ils y nichoient, nous avoient promis de nous en procurer un nid avec les œufs; mais comme ils ont manqué à leur promesse, malgré le salaire honnête dont ils savoient que nous récompensions toujours ces sortes de soins officieux; nous sommes fondés à croire qu'ils se sont trompés, et qu'ils ont confondu le millouin avec quelque autre espèce de canards. L'individn qui va fournir cette description nous a été vendu vivant par un meñünier des montagnes, qui nous assura l'avoir pris durant les fortes gelées de lan VII, sur D'ORNITHOLOGIE. 379 le petit étang qui alimente d’eau son moulin, et qu'il y étoii attaché dans la glace par les plumes de son ventre, qui s’y étoient congelées. Quoi qu'il en soit, cet oiseau a la tête, la gorge et la moitié du cou d’un bai doré tres-beau et très-éclatant ; cette couleur se perd insensiblement dans le beau marron noir qui commence au milieu du cou, et qui s'étend jusque vers le milieu du ventre et sur le haut des côtés, passe sur le pli de l’aile, et se dirige en forme de domino au-dessus du dos : chaque plume, d’un marron foncé, qui revêt le milieu du cou jusqu'a la moitié du ventre, est bordée, celles d’en haut, d’une ligne droite de couleur baïe- dorée: celles d’en bas, d’une ligne blanchâtre: ce passagedes lignes baies aux lignes blanches est très-insensible, en sorte qu'il seroit impossible de dire où finissent les premiéres, et où commencent les secondes; tout le dessus du dos jusque vers le milieu de sa longueur, est blanchâtre, ou, pour mieux dire, d’un gris de perle finement vermiculé de petites lignes brunes ; le reste de cette partie est d’un brun noir ainsi que les couvertures, tant en-dessus qu’en dessous, de même que les pennes de la queue ; les plumes scapulaires et le ventre en entier sont d’un gris de perle aussi vermiculé de brun; les couvertures moyennes sont d’un gris d'ardoise, légèrement piquetées de gris de perle, Les plus grandes sont d’un grisblancliseré et vermiculé de brun ; toutes les pennes des ailes sont d’un brun cendré; l'iris est de couleur de noisette; la mandibule supérieure du bec est d’un cendré bleuâtre et noir a sa pointe; la man- dibule inférieure est de cette derniere couleur ; la partie nue des jambes , les pieds, les doigts et leurs mem- branes, sont de couleur plombée, et les ongles noi- râtres. En Bourgogne on nomme le millouin, rougeat , et cn 330 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Provence cataroux; son eri ressemble plutôt au sifflement d'un gros serpent, qu'a la voix d’un oiseau. On nous a assuré que le millouin étoit fort commun dans le département de la Côte - d'Or, où il arrive, dit-on , à la fin d'octobre par bandes de trente à quarante ; is ne forment pas en l'air, quandils volent, une espèce de V, comme les canards, mais ils y voyagent en pelotons serrés les uns contre les autres. Ils s’abattent sur les grands étangs, et ce n'est jamais qu'aprés en avoir fait en Pair plusieurs fois le tour; ils sont fort craintifs, et surtout fort méfians : aussi est-il très-diflicile de les surprendre et d’en tuer quelques-uns. 16° LE MILLOUINAN. Anas marila. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 63. . Le z , >» à . L Le petit morillon rayé. Bris. Ornith. tom. 3, pag. 107. Ce canard est de la taïlle du millouin ; il a de même que lui le cou recouvert d'nn grand domino ; mais ce domino est noir, à reflets verts cuivreux , coupé de même en rond sur la poitrine et sur le haut du dos; son manteau est également ouvragé et d’une manière agréable, de petites hàchures vermiculaires, noires, légérement tracées et dessinées sur un fond gris de perie ; ses épaules et son croupion sont cu- vragés de même; son ventre et son estomac sont d’un blane pur et assez éclatant. On voit sur le milieu du cou une trace légère et comme effacée d’un collier qui paroît avoir été autrefois roux. L'iris est de couleur de noisette; le bec, qui est plus court que celui du miliouin, est d’une couleur de plomb foncée; la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et les membranes qui les unissent en- D'ORNITHOLOGIE. 38: semble , sont de couleur de corne ardoisée , ainsi que les ongles. La femelle du millouinan diffère tellement de son mâle, qu'a la première vue 1l n’est personne qui ne seroit tenté de le prendre pour une toute autre espèce : aussi plusieurs ornithologistes distingués d’ailleurs, sont-ils tombés dans cette méprise. Cette femelle a la tête brune, le cou d’un brun rou- geâtre, ainsi que le dessus du dos , jusq{’à la queue in- clusivement ; le ventre d’un blanc qui paroît d'autant plus éclatant qu'il contraste davantage avec les couleurs sombres des parties supérieures du corps. Son bec , dont la base est entourée d’un large cercle blanc, est noir dans tout le reste de sa longueur, ainsi que ses ongles; l'iris deses yeux est de même couleur que dans le mâle. Il paroît, d'aprés le rapport de plusieurs voyageurs instruits, que le pays natal du millouinan sont les contrées les plus septentrionales des deux continens. Nous pouvons, quoi qu'en disent quelques chasseurs vosgiens, d'autant moins assurer qu’on trouve ce petit palmipède fréquemment dans les Vosges, que, quelques soins que nous nous soyons donnés pour nous procurer un autre individu que celui que nous possédions dans notre collection , qui avoit été tué sur l’étang de Puysieux dans le même département, et qui avoit été extrêmement maltraité par le coup de fusil, il nous a été impossible d'y parvenir. Nous devons à la générosité d’un de nos amis le bel individu de notre collection , qu'il s’étoit procuré à Amiens, département de la Somme. 582 TABLEAU ÉLEMENTAIRE 17. LE PILET, OU CANARD A LONGUE QUEUE, Anas acuta. LIN. Syst. nat. édit. 13, g. 67. Le canard à longue queue. BRIS. Ornith. tom. 6, pag. 369. Cette espèce de canard est connue dans le départe- ment de la Somme sous les noms vulgaires de pilet ow de pennard. Son plumage, qui est fort joli, n’est cepen- dant que d’un gris tendre, ondulé de petits traits noirs régulièrement tracés; les grandes couvertures de ses ailes sont marquées de traits plus larges, alternativement d’un blanc de neige et d’un noir de jayet : ce qui forme un charmant contraste entre ces deux couleurs. Deux espèces de rubans blancs qui pendent de chaque côté du cou de cet oiseau lui impriment un caractere tranchant et trés-propre à le faire reconnoître sans courir les incon- véniens de la méprise, qui n’est que trop commune, surtout par rapport a certaines petites espèces d'oiseaux , tels que ceux qui composent la section des passereaux. La tête du pilet est fort petite eu égard à la grosseur de son corps; elle est de couleur marron; son cou est trés-long et trés-effilé ; sa queue, composée de pennes noires et blanches, est terminée par deux filets étroits que ce canard étend en volant, à la maniere des hiron- deiles. La femelle, qui a à la queue les deux mêmes filets que son mâle, en différe d’ailleurs par son plumage qui est taché de noir , sur un fond de roux brun; les couvertures de ses ailes sont d’un brun clair, bordées de gris, avec D'ORNITHOLOGTE. 383 une grande tache d’un beau jaune de paille , laquelle est entourée d’une bande blanche. L'iris des yeux de l’un et de l’autre est d’un brun rouge; leur bec, al'ongé, est noirâtre, ainsi que la partie nue de leurs jambes, leurs pieds, leurs doigts, les membranes qui les unissent en- semble et les ongles qui les terminent. Les pilets ne s’avancent guere dans l'intérieur .de la France qu'aux approches de Fhiver, et leur nombre s’y accroît à mesure que le froid devient plus vif et plus sensible. Avant la révolution, lorsaue l'étang de Biécourt, situé dans la partie agricole du département des Vosges, exis- toit encore , on voyoit régulièrement chaque année, durant cette saison rigoureuse, des bandes de pilets sou- ven! fort nombreuses. Néanmoins il est à présumer que tous les climats conviennent également à cette espèce de canard, et qu’il est commun aux deux continens; car, outre que Linné assure qu'il est fort abondant en Suède et même durant le froid des hivers les plus rigoureux, c’est que d’autres disent qu’on le voit également au Mexique et à la Louisiane , en Italie comme en Danemarck et en Angleterre. Le pilet semble faire la nuance éntre les canards et les sarcelles ; il paroit non-seulement avoir Le bec de ces der- nières, mais encore la distribution des couleurs de leur plumage, et beaucoup d’autres analogies. Les Allemands appellent ce palmipède canard- faisan , et les Anglois faisan de mer : c’est sans doute à cause des deux longs filets qui excèdent les pennes de sa queue. 384. . TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 18° LE TADORNE. Anas tadorna. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le tadorne. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 3/44. Le tadorne est un peu plus grand que le canard ordinaire, il est aussi un peu plus haut monté sur jambes que lui : du reste il lui ressemble assez quant au port, et même quant à la figure; cependant son bec est plus relevé que celui du canard , et les couleurs de son plumage ont quelque chose de plus éclatant. Il a la-tête et le cou, jusqu’à la moitié de sa longueur, d’un beau noir brillant à reflets verts; ce cou est entouré d’un collier blanc qui est placé au bas de cette partie ; sa poitrine est recouverte d'un beau plastron d’un jaune rouge, qui descend sur le dos où il forme une petite bande de même eouleur; le bas-ventre est teint du même jaune rouge; sur chaque côté du dos, au-dessous de l'aile, on voit une bande noire, qui est comme incrustée dans un fond blanc. Les grandes couvertures des ailes, ainsi que les moyennes et les pe- tites, sont noires, avec cette différence cependant que les dernières sont lustrées de reflets verts. Les pennes des ailes, celles surtout qui sont les plus voisines du corps, sont extérieurement d’un jaune rouge, et intérieurement blanches. La femelle de ce canard, sensiblement plus petite que son mâle, lui ressemble d’ailleurs parfaitement; ils ont tous deux le bec d’un rouge päle , terminé par un croc ou onglet noir, et le tour des narines de cette même couleur. À la base supérieure du bec on voit un petit tubercule saillant et de couleur rougeûtre; l'iris des yeux D’'ORNITHOLOGIE. 385 est marron; les pieds, les doigts et leurs membranes sont de couleur de chair, et les ongles bruns. Dans la ci-devant Picardie les fadornes arrivent en petites troupes sur les côtes, où, dès leur arrivée, ils se répandent dans les plaines de sable pour y chercher parmi les tariers des lapins un logewnent commode, afin d'y faire leur ponte. Ces oiseaux ne construisent point de nid dans ces trous; la femelle y pond ses premiers œufs à plate terre; mais lorsque sa ponte, qui consiste en dix ou douze œufs, est terminée, alors elle se dépouille d’un duvet blanc fort épais qu'elle a sous le corps, et elle les enveloppe de cette fourrure. Pendant les trente jours que dure l’incubation , le mâle se tient constamment aux en- virons de sa tendre compagne ; il ne quitte ce poste que pour aller à la mer chercher sa nourriture, et lorsque la femelle quitte le matin et le soir son terrier par le même motif, alors le mâle la remplace jusqu’à son retour. Aussitôt que les petits sont éclos, le père et la mére attendent le flux, afin que leurs enfans aient moins de chemin à faire, et alors ils les conduisent à la mer; si durant ce trajet la troupe voyageuse est surprise par quel- ques passans, le pére et la mère s’envolent aussitôt, et cette dernière affecte de tomber à cent pas de là : elle se traine sur le ventre les aïles pendantes, comme si elle alloit expirer. Le voyageur ou le chasseur qui s’en aper- çoit court dessus pour la ramasser; mais à son approche elle semble faire un dernier effort , et s'envole à la mer. Pendant ce temps les petits se tiennent blottis contre terre : là ils attendent que, le danger passé, la mére vienne les chercher; mais il arrive souvent aussi que le chasseur les a aperçus, et alors il revient à cux et les prend tous as. 26 386 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE | les uns après les autres, sans qu'aucun remue de sa place pour se mettre en devoir de fuir. Quoique les tadornes soient des oiseaux qui sembient plus pariculièrement répandus sur les côtes maritimes septentrionales, cependant ils paroissent encore, etmème assez fréquemment, sur les eaux des lacs et des étangs de l'intérieur de la France, et lorsqu’anciennement le grand étang de Biécourt dans les basses Vosges existoit, on y voyoit arriver des bandes nombreuses de cette espèce de canard 1 ), dont quelques couples y passoient la belle. saison et y nichoient dans un trou de quelque tertre élevé ; mais depuis le desséchement de cette superbe étendue d’eau, le fadorne est moins abondant dans le département des fVosges ; on ne l’y voit plus que sur les petites grenouillières disséminées ça et la dans les mon- tagnes, et ce qu'il y a de plus étonnant, c’est que ces oiseaux qui sembloient, avant la révolution , avoir adopté par prédilection les basses Vosges, ne paroissent même que rarement sur les beaux lacs de Gerardmer, dans. jes montagnes de ce département; ils semblent y pré- férer les petits étangs, qui ne sont dans la réalité que de grandes mares d’eau. 1) Peu de temps après leur arrivée, les fadornes ne forment plus de troupes ; on ne les aperçoit plus que par couples composés du mäle et de la femelle, qui ne se quittent plus , et qui semblent se suflire à eux-mêmes. Ces palmipèdes, pris jeunes , s’habituent facilement à: la domesticité ; ils vivent tranquillement dans les basses-cours, sans paroitre regretter leur liberté. D'ORNITHOLOGIE. 387 19. LE GARROT. Anas clangula, Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le garrot. BRis: Ornith. tom. 6 , pag. 416. Le plumage de cette petite espèce de canards est noir et blanc: sa tête est d’un beau noir à reflets verts, et cette même couleur s'étend et couvre 18 haut du cou ; au coin du bec, entre celui-ci et les yeux, il y a deux taches arrondies, une de chaque côté, du diametre de six à sept lignes, lesquelles sont d’un blanc d'autant plus éclatant que cette cou'eur contraste davantage avec le noir de la tête dans lequel elle est enchàssée. Tout le bas du cou, ainsi que le devant du corps, sont d’un blane pur; le dos, la queue, de même que les grandes pennes des ailes, sont noirs ; cependant la plupart de ces der- nières ont leurs couvertures blanches. L’iris des yeux est d’un beau jaune doré; le bec noir; la partie nue des jambes , Les pieds, les doigts , ainsi que les membranes qui les uuissent sont rouges et les ongles bruns. _ La femelle du garrot, un peu plus petite que le mâle, en différe sensiblement par les couleurs; car toùt ce qui est noir dans celui-ci est gris ou brun dans celle-la, et ce qui est blanc dans le mâle, est d’un gris de perle dans la feinelle, qui d'ailleurs n’a ni reflets verts sur la tête, ni cette belle tache blanche que l’on voitsur les joues du mâle. ; | Le garrot paroit assez fréquemment pendant l’hiver sur la plupart de nos étangs de l'intérieur de la France , où presque toujours il arrive en plusieurs petites troupes qui y séjournent jusqu'au printemps. Lorsqu'elles s’y abattent on les entend de loin, à raison du sifflement de 26 * 38 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE leurs ailes, qui est occasionné par la rapidité de leur vol. Moins défiant que les autres canards , le garrot est aussi moins criard qu'eux; ilne fait jamais entendre sa voix en prenant $on essor; il ne décèle cependant pas moins son Vol qui est toujours peu élevé, par le siffle- ment de ses ailes, comme nous venons de le dire. Ce canard a la réputation d’être un excellent plongeur qui va chercher jusqu’au fond de l’eau des coquillages , des petits poissons ou bien des grenouilles et, lorsqu'il vogue sur la surface unie de l'onde, il le ‘fait avec une gràce qui excite l'admiration des spectateurs. On lui re- * proche seulement ‘un excès de gloutonnerie, qui con- * sisté en ce qu’à défaut d'animaux aquatiques il avale très- bien dé petits quadrupèdes, tels que des souris; sa chair passe pour être un mets supérieur à celle de ses congé- nères. Le garrot fait son nid dans une touffe de gros herbages ‘ou bien dans les roseaux. Ce nid ne consiste que dans un amas assez négligemment arrangé d'herbes sèches, telles que des graminées : la femelle y pond huit ou dix œufs blancs, et'gros comme ceux d’une jeune poule ; les petits qui, après dix-huit jours d’incubation, en éclosent, se : précipitent aussitôt dans l’eau où ils suivent leur mére pour chercher eux-mêmes leur nourriture. Il suffit à leur prompt accroissement et a leur conservation que la mère les rassemble tous sous ses aïles à la chute du jour, pour leur faire passer ainsi chaudement la nuit. Cette espèce de canard seroit très-abondante dans tous es pays, sans la guerre à mort que leur font plusieurs oiseaux de proie, et le balbuzard en particulier. Dans une note de feu M. Baillon à M. de Buffon, cet infatigable observateur de la nature , qui a nourri en domesticité des garrots, dit que ces oiseaux sont de fort D'ORNITHOLOGIE. 389. mauvais marcheurs , qui se blessent les picds à la moindre aspérité du sol qu’ils rencontrent : aussi préfèrent-ils de, rester des journées entières couchés sur le ventre plutôt que de s’exposer à se blesser en marchant. Il dit aussi qu’ils sont d’un naturel très- colère, béquetant vigou- reusement les autres oiseaux de la basse-cour qui les attaquent; il ajoute que les garrots qu’il a nourris ont constamment refusé toute espèce de graines qu'il leur présentoit ; qu'ils ne mangeoïent qu’un peu de pain, et qu’enfin ils étoient d’une maigreur extrême. 20. LE CANARD SIFFLEUR. Anas penelope. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 65. Le canard siffleur. BRis. Ornith. tom. 6, pag. 391. Ce n’est point de la vibration précipitée de ses ailes contre l’air que ce canarda pris l’épithète de siffleur , mais bien du son aigu de sa voix qu’il fait entendre , surtout pendant la nuit, lorsqu'il voyage dans l’élément fluide. Plus petit que le canard domestique , le siffleur a de longueur totale , de l’extrémité du bec à celle dela queue, dix-huit pouces : son vol est de deux pieds et demi, et lorsque ses ailes sont ployées, elles atteignent à peu près l'extrémité de sa queue. Il a le sommet de la tête d'un roux clair ; le reste de cette partie de même que le haut du cou en arriere, d’une couleur marron , tachetée de noirâtre ; les côtés de sa tête sont de ia même couleur ; mais ils sont sans taches ; le bas de son cou, de son dos et de son croupion sont coupés transversalement en zigzags de traits alternativement noiïirâtres et bl.nchâtres ; ses plumes sca- pulaires sont rayées de même; les grandes couvertures 390 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de ses ailes sont d'un gris brun ; les moyennes blanches et les petites variées de blanchâtre et de cendré foncé ; celles du dessus de sa queue sont, les intermédiaires noires, bordées intérieurement de blanc, et les latérales noires avec des reflets d'un vert deré; les peunes des ailes sont d'un cendré brun, marquées extérieurement de deux plaques dont l’une est d’un noir profond et ve- louté, et l'autre d'un vert doré; ce qui. par‘la réunion de toutes ces pennes les unes sur les autres, forme sur chaque aile deux bandes de ces mêmes couleurs; les deux pennes int rmédiaires de sa queue sont de même couleur que celles des ailes, et les latérales sont grises, bordées de blanchâtre; ces deux pennes du milieu de la queue dépassent de cinq ousix Hignes celles des eôtés. Ce canard a la gorge, ainsi que le haut du cou de couleur desuie; le bas de cette dernière partie est d’un gris lavé d'une teinte de brun roussätre; la poitrine et le vestre sont d'un blanc pur et fort éclatant ; les côtés sont rayés en zigzags, de gris et de blanc qui alternent ; les couvertures du dessous de la queue sont d’un noir foncé; l'iris est de eouleur de noisette ; la mandibule supérieure du bec est bleuâtre , terminée par un croc noir; la base de la mandibule inférieure est aussi bleuâtre, et le reste noir; la partie nue des jambes, les pieds , les doigts et leurs membrancs sont de couleur plombée et les ongles noï- . râtres. L La femelle diffère du mâle en ce qu’elle a la tête, la gorge et le haut du cou tachetés de points noirâtres sur un fond bai rouge ; sa poitrine et son ventre sont blancs, et tout le reste de son plumage est gris; néanmoins cha- cune des plumes qui le composent sont plus ou moins largement bordées de bai rouge ; les plaques ou miroirs D'ORNITHOLOGIE. ; 392 qui traversent ses ailes sont beaucoup moins larges et moins vivement colorées que dans le mâle , auquel celle-ci d’ailleurs ressemble parfaitement quant au reste de sa conformation. Le canard siffleur arrive en bandes assez nombreuses dans la plupart de nos départemens intérieurs ; on en voit en hiver , chaque année , dans ceux de Seine et Marne, de la Somme et des Vosges ; ils quittent ces contrées des les premiers jours du printemps 1 ). Les canards siffleurs naissent gris, et conservent cette couleur jusqu’au mois de février, en sorte que durant ce laps de temps il est impossible de distinguer les mâles d'avec les femelles. Ce n’est qu’au mois de mars de l’année suivante que leurs plumes se colorent, et que l'amour donne aux mäles les belles couleurs qui les distinguent de leurs femelles. Ces palmipeèdes volent toujours par bandes ; on prétend qu'ils ne voient que pendant la nuit. Ils s’'accoutument tres-bien en domesticité , ils se font même remarquer dans les basses - cours par leur gaieté, comme par leurs caracoles variées de mille maniéeres. 1) Tous les canards siffleurs ne quittent pas cependant l’intérieur de la France au printemps ; il en reste parmi nous quelques couples qui construisent leur nid sur nos étangs : on voit ce nid flotter et nager librement entre les roseaux." La femelle y pond de huit à douze œufs blanchâtres, légèrement tachetés d'une teinte plus obscure. 394 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 21. LE CANARD SIFFLEUR YUPPÉ. Anas rufina. Lin. Syst. nat. éd. 13, gen. 67. Le canard siffleur huppé. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 398. Ce siffleur, plus grand et plus gros que le canard sauvage, se distingue par une huppe élégante qu'il porte sur le sommet de la tête, cette huppe est composée de plumes longues, eflilées et douces comme de la soie ; ces plumes sont d’un roux clair, et en cela elles ne représentent pas trop mal la coiffure en perruque dont nos élégantes s’affu- bloient la tête il y a quelques années. Le reste du dessus de sa tête, ainsi que sa gorge, sont de la même couleur que la huppe, seulement elle est un peu plus foncée; son dos est d'une couleur vineuse, et son croupion noir; les petites couvertures deses ailes sont blanches ; les moyennes et les grandes, cendrées. Il n'y a que les quatre premiéres pennes de l'aile qui soient noires en dehors et à leur bout; toutes les autres sont ou d'une couleur vineuse ou bien cendrée; les pennes de la queue sont de cette dernière couleur. Le cou, la poitrine, le ventre et le haut des jambes sont noirs; les côtés du corps d’un blanc lavé d’une teinte vineuse, et les couvertures du dessous de la queue sont d'un beau noir ; l'iris des yeux de cet oiseau est d’un beau rouge de vermiiion, de même que son bec, la partie nue de ses jambes , ses pieds, ses doigts et leurs membranes; ses ongles seuils sont noirs. La femelle de ce canard diffère de son mâle en ce qweile n’a point de huppe sur la tête; que son plumage est presque entièrement brun , sans aucun mélange de D'ORNITHOLOGIE. 503 couleurs brillantes, et en ce que son bec n’est que rou- geûtre. Ce superbe canard arrive en France en hiver, dans les années surtout où le froid est rigoureux: c’est un oiseau solitaire qui ne forme jamais de troupes comme la plupart de ses congénères. Jadis on en voyoit beaucoup sur le grand étang de Biécourt : aujourd’hui il ne paroît plus que sur les étangs des montagnes des Vosges qui gèlent d'autant moins qu'ils sont alimentés par des sources extrêmement abondantes dans ces contrées. Il est à présumer cépendant que cet oiseau paroît dans les environs de Paris; car en hiver il est exposé assez fréquemment en vente sur les marchés de cette immense capitale où tout abonde, et de tous les points de l'Empire. 29° LE MORILLON. Anas fuligula. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. Le morillon. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 406. ( Voyez la planche XXXIII de cet ouvrage. ) Le morillon est un joli canard, moins gros que le mil- louin ; il n’a de longueur totale, prise du bout du bec à l'extrémité de la queue, que quatorze pouces, et deux pieds un pouce de vol. 11 porte autour et à la base du bec de petites plumes noires mélangées de blanc ; le sommet de sa tête et le derriere de son cou sont d’un noir violet; le bas de cette partie est de couleur de rouille; son dos, ses plumes scapulaires, son croupion et les couvertures du dessus de sa queue sont noiràtres, et cette teinte présente, suivant l'incidence de la lumière, des reflets violets ; les couver- 394. ‘ TABLEAU ÉLÉMENTAIRE tures du dessus de ses aïles, excepté les grandes, sont d’un brun noirâtre nuancé de vert ; les premières pennes de son aile, c'est-à-dire, les plus longues ou celles qui sont les plus éloignées du corps , sont d’un brun noirûtre du côté extérieur, et terminées de même intérieurement : elles sont d’un cendré brun; les suivantes sont presque “entièrement blanches , terminées de brun noiràtre; celles enfin qui sont plus voisines du corps sont de cette même couleur, mais teintées de violet. La gorge est d’un noir violet et {a poitrine blanche, néanmoins les plumes qui recouvrent cette partie sont brunes à leur origine et terminées de blanc: en sorte que lorsqu'elles sont couchées les unes sur les autres, il ne paroit de la plume que l’ex- trémité qui est blanche ; tout le reste du dessous du ventre est de cette dernière couleur , excepté les flancs qui sont bruns tachetés de gris. L'iris des yeux de ce canard est d’un vert d’eau fort brillant ; son bec qui est large, est d’un beau bleu clair ; la partie nue de ses jambes, ses pieds, ses doigts et leurs membranes sont noirätres en dehors et rougeàtres en dedans, et ses ongles noirs. La femelle differe de son mâle en ce qu’outre qu’elle est un peu plus petite que lui, c’est qu’elle a encore le dos et les plumes scapulaires bruns, maculés de points. gris; ses côtés d’ailleurs sont d’un gris brun : du reste elle ressemble parfaitement à son mâle. Le morillon est une espèce d'oiseau dans laquelle on trouve des individus mâles qui ont les plumes du derrière de la tête trés-prolongées en forme de huppe, et d’autres qui les ont si courtes qu'on les aperçoit à peine. Jamais la femelle ne présente le moindre vestige de cetornement. Ce canard ne prend les belles couleurs de son plumage qu’à sa seconde mue, qui a lieu après la deuxième année de sa naissance. Dans son emance il est d’un gris comme D'ORNITHOLOGIE. 305. enfumé, et la longueur de la huppe des mâles paroît suivre la progression de leur àge , jusqu’a un terme donné ce- pendant; car nous avons tué plusieurs indivi.lus de cette espèce dans lesquels la huppe n’étoit presque pas visible , tandis qu’elle étoit trés-prolongée dans ceux surtout dont le plumage étoit orné des couleurs les plus vives et les plus briilantes. Quoique le morillon soit un oiseau maritime, il se trouve néanmoins sur la plupart des rivières, des lacs et des étangs de l'intérieur de la France, et notamment sur ceux des Vosges, où on a remarqué que e?s oiseaur étoient en général de trés-bons plongeurs, et capables de descendre a des profondeurs Considérables au fond de l’eau pour y saisir de petits poissons, de jeunes crustacés, des larves de ditiques dont ils sont trés-friands, ou bien des plantes aquatiques. Le morillon est bien moins sanvage dans l'état de liberté qu'aucune autre espèce de palmipèdes : aussi l'approche- t-on et le tire-t-on plus facilement qu'eux sur les rivières comme sur les étangs. On a remarqué qu'il étoit plus susceptible de s’habituer à là domesticité qu'aucun autre de ses congénères ; on prétend même qu'il oublie avec une facilité. étonnante l’idée de sa liberté, au point de devenir en peu de ten psun hôte très-familier qui connoit et sait distinguer bien vite les personnes qüi prennent soin de son éducation. Ce canard, dont on voit plusieurs individus dans le grand bassin du jardin des Plantes de Paris, semble être d’un caractère fort gai ;il y esttoujours en belle humeur ; on l'y voit bals d heures entières, puis venir pro- mener sa galcté sur la surface de l'eau où il fait mule tours et détours avec un cujoueinert sivgulier. 396 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 23. LE PETIT MORILLON. Anas fulizula minor. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 63. Le petit morillon. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 411. Outre que cette espèce qui semble n'êtfe qu'une va-. riété de la précédente , est plus petite , puisqu'elle n’a guëre qu'un pied de longueur du bout du bec à celui de la queue, elle est aussi plus rare sur nos étangs où on la trouve cependant quelquefois mêlée avec l'espèce commune ; Car c’est sur les étangs des montagnes des Vosges que nous nous somnies procuré, l’année derniére encore, plusieurs individus mâles et femelles de ce petit morillon, soit pour nous soit pour nos amis. A la premiére vue il semble qu'on seroit fondé à croire que ce canard n’est que le morillon ordinaire , dessiné seulement sous un moindre module; cependant, pour ne point s'y méprenüre, nous allons tracer son signalement d'après un individu que nous avons sous les yeux ; et si l’on compare les deux descriptions, on se convaincra fa- cilement que ce sont deux espèces distinctes, quoi qu’en disent quelques orrithologistes qui n’admettent pour cause de la différence de leur taille respective que quelques accidens qu'ils disent ne pas connoître. Nous regrettons que ces oiseaux ne nichent pas dans nos contrées vosziennes; Car nous eussions employé tous les moyens de nous assurer s'ils ne se mêlent pas quel- quefcis ensemble dans le moment des pariades. Nous sommes persuadés du contraire; cependant nous ne pou- vors pas donner ce fait comme constant. Quoi qu’il en soit, le petit morillona, comme le grand, ‘sur l'occiput, de longues plumes pendantes en arrière , D'ORNITHOLOGIE. 397 qui lui forment de même une huppe: cette huppe est, comme celle du morillon ordinaire, plus ou moins lon- gue, suivant les individus , par la raison que nous en avons donnée en parlant du précédent. Les plumes qui la composent sont d’un beau noir violet , ainsi que le cou, en avant et en arrière, le haut du dos et les plumes scapulaires ; les couvertures supérieures des ailes sont de couleur de châtaigne , avec cette différence entre elles que les moyennes , ainsi que les grandes , sont glacées légèrement de vert sombre ; celles du dessus de la queue sont d’un brun plus obscur et teintées de mème ; les pennes des ailes qui sont plus voisines du corps, sont également brunes, lavées de vert foncé; les suivantes sont blanches, terminées de brun, et les grandes extièrement brunes en dessus, et grisâtres en dessous; celles de la queue sont parfaitement semblables à ces dernières ; le haut de la poitrine est noirätre, et chacune des plumes qui recou- vrent cette partie vers le: bas, est frangée d’une couleur gris de perle ; le bas de cette même partie, ainsi que le haut du ventre et les flancs, sont de cette dernière teinte; le bas-ventre, les côtés et tout le reste du dessous du corps, y compris les couvertures du dessous de la queue, sont d’un brun de suie , néanmoins fort brillant; le bec est d’un cendré bleu foncé, terminé par un croc noir ; l'iris est d'un jaune éclatant ; la partie nue des jambes, les pieds, et les doigts sont d’un gris plombé, et leurs. membranes noires. ainsi que les ongles. 396 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 24. LA MACREUSE. Anas nigra. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. La macreuse. Bris. Orn. tom. 6, pag. 420. ( Voyez ia planche XXXI1I1 de cet ouvrage. ) f Nous croyons avoir suffisamment réfuté les fables ab- surdes que les anciens avoient débitées à l’occasion de la naissance des macreuses et des bernaches, en traitant ‘Thistoire de ces dernières au n.° 13 de ce genre, pour être dispensé de revenir sur ce point, dont la redite de- viendroit nécessairement fastidteuse. Nous nous bornerons donc à dire seulement que les macreuses habitent pour l'ordinaire les côtes les plus sep- tertriorales de notre continent , telles que la Suède, la Norwège, la Russie, etc.; que c'est dans ces contrées qu’elles nichent, et que ce n’est qu’en hiver qu’elles des- cendent sur nos côtes de France, d’où elles se répandent quelquefois jusque bien avant dans l’intérieur des terres; car il est peu d’hivers que l’on ne voie de ces oiseaux sur plusieurs petits étangs de la ci-devant Lorraine; maisils y montrent une si grande défiance qu'il est presque im possible de les approcher et de les surprendre. | On prétend que lors de leur apparition sur nos côtes maritimes, qui a lieu depuis le mois de décembre jusqu’en avril, les macreuses y sont en si grand nombre que la mer en paroit toute couverte, et c’est alors qu’on en prend chäque jour une étonnante quantité avec une espèce ae filets que les pêcheurs tendent sur le gravier , lorsque la marée est basse , et dans lesquels , quand la marée est remontée, les macreuses s'embarrassent le cou ou les pieds, et se noient entre deux eaux, lorsqu'elles plongent au ÿ D'ORNITHOLOGIE. 399 fond de la mer pour y attraper quelques coquillages dont elles font leur nourriture principale. Ces oiseaux qui passent pour être un mets de carême, ne doivent pas être fort réputés à raison de la bonté de leur chair, si nous en jugeons par ceux que l’on tue sur nos étanys des Vosges. La macreuse est fn peu plus grosse que le canard do- mestique, sa longueur , de l'extrémité du bec à celle de la queue , ‘est de près de deux pieds, et elle a prèsque trois pieds de vol ; lorsque ses ailes sont ployées, elles ne s'étendent guère au dela de la longueur de la queue. Le signalement de cet oiseau est d'autant plus facile à tracer , qu'il consiste en une teinte généralement noire, tant en dessus qu’en dessous du corps; seulement le noir qui recouvre la tête, la gorge et le haut du cou, est susceptible de reflets d’un vert assez brillant, selon l'in- cidence de la lumière; on voit derrière chaque œil une tache blanche , et les plumes qui revêtent la plus grande partie du corps, tant en dessus qu’en desscus, sont douces et lustrées comme de la soie ; il y a de plus sur chaque aile, et dans leur milieu, une bande transversale blanche qui a environ un pouce de largeur. 11 s'élève sur la base de la mandible supérieure du bec un tubercule charnu d’un assez beau rouge, leqeul paroit comme partagé en deux par une raie jaune; le bec est de cette dernière couleur sur les côtés, et noir dans son milieu ; le bout ou le croc de la mandibule supérieure est rouge; l'iris des yeux est d’un brun obscur, et leurs paupières sont jaunes ; la partie nue des jambes » les pieds, ainsi que les doigts, sont rouges en dehors, et d’un jaune de citron en dedans; leurs membranes , ainsi que les ongles, sont d’un très-beau noir. La femelle différe du mâle en ce que outre qu'elle est 400 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE un peu pluspetite que lui, tout ce qui est noir dans celui- ci est brun dans celle-là; du reste ils se ressemblent par- faitement. Cet oiseau ne paroît pas susceptible de soutenir un vol de quelque étendue ; des observateurs exacts ont remarqué que lorsqu'on en voit sur les eaux qui baignent nos côtes des bandes prodigieusement nombrewses, ils n’y font leur vol que de quelques toises, et toujours si près de la sur- face de l’eau que leurs pieds y. tracent deux sillons. Comment donc les macreuses peuvent-elles arriver au vol des bords de la mer sur nos étangs des Vosges ? c’est ce que nous ne pouvons comprendre. Fo 29° LA DOUBLE MACREUSE. Anas fusca. LAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 6). La grande macreuse. BRIS. Ornith. tom. 6, pag. 423. Cette macreuse qui habite pendant l'été les régions du Nord, comme la précédente, est beaucoup plus grande qu’elle, et son espèce paroît moins nombreuse ; elles arrivent ensemble sur nos côtes maritimes où elles se mêlent les. unes avec les autres; elles se répandent même, de compagnie, fort avant dans les terres, et jusque sur les petits étangs des montagnes des Vosges, dans les années surtout où le froid est rigoureux. Quoique ces deux espèces de canards aient à peu prés les mêmes habitudes , néanmoins on a remarqué que la double macreuse étoit d’un caractère encore plus sauvage et plus défiant que la macreuse ordinaire. | Ces deux oiseaut, d’ailleurs, différent entr'eux en ce que, comme nous l'avons déja dit, celle dont il est ici D'ORNITHOLOGIE. 407 question , est non-seulement plus grande que l'autre : mais elle a encore de plus qu'elle, à côté de l'œil, une tache blanche , et ses ailes sont bordées de cette même cou- leur : du reste leur plumage est parfaitement sem- blable. | Une autre différence , et qui n’est point à négliger, c’est que le tubercule qui se trouve placé sur la base de: la mandibule supérieure du bec de la double ma- creuse, est noir, tandis'que dans l’autre il est rouge ; les côtés du, bec , dans l’une et dans l’autre , sont jaunes ; le milieu est noir, de même que le reste de la longueur t de cet organe , et son croc est rouge. L’une et l’autre ont les yeux, la partie nue des jambes, les pieds, les doigts, leurs membranes et les ongles de cette dernière couleur. La femelle de la double macreuse diffère de son mâle ence que, comme dans la précédente , elle est un peu plus petite que lui; qu’elle n’a point de tubercule sur le bec, et que tout ce qui,est noir dans le plumage de celui-ci est brun dans celui de la femelle. Ces ozseaux montrent une telle défiance, que quelques précautions que l’on prenne pour les approcher, il est très-difficile et même presque impossible de les sur- prendre. 26. LA SARCELLE COMMUNE. LA ÆAnas querquedula. Lan. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. La sarcelle commune. Bris. Orn. tom. 6, pag. 423. Cette première espèce de sarcelle que nous de- vons d'autant mieux regarder comme indigène de la France , qu'elle y est constamment sédentaire sur nos lacs et sur nos étangs où elle niche dans les roseaux, n’est T. 2; 27 402 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE guère plus grosse que notre perdrix grise; sa longueur , du bout du bec à celui de la queue est de quinze pouces ;, et son vol de treize seulement. Ce joli petit canard est connu sous des noms vulgaires qui différent suivant les diverses contrées qu'il habite ; dans plusieurs de nos ci-devant provinces on le nomme trivialement garsette ; en Lorraine , en Champagne, et peut-être ailleurs encore, on l’appelle arcanette, en Pi- cardie gargancy, etc. Le plumage du mâle, sans être aussi brillant que celui âu canard ordinaire , n’est pas moins remarquable par les bezux reflets dont il est susceptible, selon l'incidence de la lumiere. Le sommet et le derrière de sa tête sont d’un noir d’autant plus agréable, que cette couleur est relevée par deux bandes blanches, une de chaque côté de la tête qui,des-joues, en se dirigeant en arrière, vont se réunir ensemble au bas de l’occiput, après avoir passé au-dessus des yeux; la gorge esf également noire; mais les joues, de même que le haut du cou, ont le fond de leur couleur d’un brun roussätre , et cette nuance est variée de lignes longitudinales, blanches. Les plumes scapulaires du milieu sont noirâtres, marquées d’une ligne blanche qui suit la direction de leur tige; celles des côtés sont cendrées , bordées extérieurement de blanc. Les petites et les moyennes couvertures des ailes sont aussi cendrées, mais sans bordure; les grandes sont de même couleur, bordées et terminées de blanc; ce qui forme sur chaque aile une bande transversale de cette der- niére couleur. Les premières pennes de ces parties sont d’un gris brun , borcées extérieurement de blanc ; les suivantes sont de la même couleur en’ dedans; en dehors, elles sont d’un vert doré très-brillant, et bordées de blanc; ce qui forme par la réunion de toutes ces D'ORNITHOLO.GIE. _ 305 pennes, deux bandes ou plaques ( que l’on nomme vul- gairement mitoirs), l’une dorée et l’autre blanche ; les pennes enfin qui sont les plus voisines du corps sont toutes d’un gris brun, légerement teintées d’un vert obs- cur et bordées de blanc en dehors. Les couvertures du dessus de la queue sont brunes, bordées de blanc sale ; les pennes de cette partie sont d’un gris brun ; bordées du même blanc que celui des couvertures. Le devant du cou et la poitrine sont d’un marron roux varié de lignes d’un brun clair ; le haut du ventre ainsi que les côtés sont blancs, avec cette différence que ces derniers sont rayés transversalement de noirâtre ; le bas-ventre et les couvertures du dessous de la queue sont d’un blanc sale tacheté de brun. La femelle, bien plus petite que le mâle, est couverte d’un vêtement plus modeste aussi que le sien, il ne con- siste que dans du gris et du brun amaigamés presque in- sensiblement l’un avec l’autre par des ondes peu distinctes ; sa gorge n’est pas non plus noire comme dans le mâle, et elle ne prend de miroir sur l'aile que lorsqu'elle est trés-avancée en âge ; ensorte que ces deux individus sont si différens l’un de l’autre qu’on les prendroit volontiers pour des espèces tout-à-fait disparates. Néanmoins, dans tous deux, l'iris est de couleur de noisette, entouré d’un cercle jaune; ils ont l’un et l’autre le bec noirâtre: la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs mem- branes d’un gris plombé, et les ongles noirs. Cet oiseau fait son nid que nous avons plus d’une fois observé sur les étangs du département des Vosges, dans quelque touffe d’herbages grossiers , au milieu des roseaux, ousur quelques grosses racines de saulequisont submergées; il est composé d’herbes sèches et de feuillages ; la femelle y | 27 * \ + 40% TABLEAU ÉLÉMENTAIÏRE pond au moins dix œufs un peu plus gros que ceux de pigeons : ces œufs sont d’un blanc sale , légèrement tachetés de bruÿ. On prétend que le mâle abandonne à sa femelle seule le soin de l’incubation et celui de l'éducation deses petits. Nous ne pouvons rien dire de positif sur ce fait, mais nous pouvons du moins assurer que lorsque nous avons rencontré soit des nids soit de jeunes couvées de ce pal- mipède sur l’eau , jamais nous n'y avons vu de mâles. Les sarcelles communes voyagent par bandes quelquefois fort nombreuses dans les airs, mais sans y garder, comme lés canards, d’ordre régulier : elles y volent confusément ct avec une légèreté extrême; on ne les voit guëêre plon- ger , par la raison qu’elles trouvent à la surface de l’eau la nourriture qui leur convient , laquelle consiste dans des mouches et autres insectes ailés, ainsi que dans plu- sicurs espèces de graines de plantes aquatiques que l’eau charrie à (sa surface. Le) 27°". LA PETITE SARCELLE. Anas crecca. Lin. Syst. nat. éd. 13, gen. 63. La petite sarcelle. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 436. ( Voyez la planché XX XIII de cet ouvrage.) Celle-ci est un peu plus petite que la sarcelle commune; sa longueur est de quatorze pouces, du bout du bec à celui de la queue, etson vol d’un pied dix pouces : les plumes qui recouvrent le sommet de sa tête sont d’un marron roux; cette teinte s'étend sur la moitié du derrière du cou où elle se termine par une bande d'un vert obscur. De chaque côté de la tête on voit une bande étroite d’un blanc roussètre qui part de la base du bec, passe sur les yeux en remontant vers le front, et se dirige en arriére D'ORNITHOLOGIE. 405 vers l'occiput ; au-dessous de cette bande on voit une assez large tache d’un vert doré, qui est placée derrière Vœil, et qui se prolonge de chaque côté le long du cou. Le haut du dos est de couleur roussâtre, rayé trans- versalement et en zigzags de lignes alternativement bian- châtres et noirâtres , ainsi que les plumes scapulaires dont quelques-unes cependant sont blanches en dehors, bordées d’un noir profond et veiouté; les couvertures du dessus des ailes sont toutes d’un cendré brun, avec cette différence entre elles que les plus proches du eorps sont bordées de blanchätre, et les iñtermédiaires termi- nées par une couleur fauve ciair qui trace sur J'aile une petite bande transversale de cette couleur ; les grandes pennes de l'aile sont extérieurement d’un brun cendré, seulement, les onzième et quatorzième sont noirûtres , bordées de blanc à leur extrémité ; les suivantes sont d’un beau vert doré, bordées dans toute leur longueur d’un noir velouté , et terminées de blanc ; enfin les pennes les plus proches du corps sont aussi de couleur brune cendrée, mais elles sont variées de blanc sale du côté extérieur ; celles de la queue sont brunes, bordées de blanchätre. Leurs couvertures sont d’un noirâtre changeant en vert doré, et le croupion, ainsi que le bas du dos, sont d’un brun varié de quelques lignes transversales, blanchätres ; les joues et le haut du cou sont de couleur marron; la gorge est brune; et le devant du cou, de même que la poitrine, sont variés de blanc et de roussâtre; il se trouve entre ces deux parties une tache noire; le bas de la poitrine et le ventre sont blancs, et les flancs rayés transversalement et en zigzags de blanc sale ct de noi- râtre. L'ris des yeux de cette sarcelle est grisätre; il est entouré d’un cercle d’une couleur jaune pâle; le bec et les ongles sont noirs; la partie nue de ses jambes, 565. L 406 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE pieds , ses doigts et leurs membranes sont d’un gris cendré. La femelle n’a d’autres couleurs dans son plumage que du brun et du roussâtre, variés, sur la tête et sur le cou, de blanchätre ; ses ailes sont colorées comme celles du mâle, et son bas ventre est tout à fait blanc: elle a aussi la mandibule supérieure du bec différente de celle du mâle ; celle-ci est d’un vert obscur parsemé de taches noires, tandis que l'inférieure est entièrement de cette dernière couleur ; ses pieds et ses ongles sont d’un gris brun. | Ceïte sarcelle passe toute l’année avec nous, et niche sur nos étangs ; elle y fait son nid, avec beaucoup d'art et de soins, parmi les joncs les plus touffus ; elle le construit de manière à ce que posé sur l’eau, il soit sus- ceptible de s'élever et de s'abaisser selon sa crue; la fe- melle y pond de dix à douze œufs d'un blanc sale, ma- ! culés légerement de points et de raies de couleur brunâtre ; ces œufs sont à peu pres de la grosseur de ceux de pigeon; c'est la femelle seule qui est chargée du soin de Fincubation, ainsi que de celui de l’éducation desa famille naissante, | ? 28° LA SARCELLE D'ÉTÉ. Anas circia. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 67. La saréelle d'été. Bris. Ornith. tom. 6, pag. 445. Cette dernière espèce du genre des canards indigènes de la France, est la plus petite de toutes; elle a à peine treize pouces de longueur, mesurée de l'extrémité du bec à celle de la queue, et vingt pouces de vol. Ce joli petit canard que l’on nomme vulgairement cri- guaré ou criquet à Montreuil-sur-Mer où il parait être D’ORNITHOLOGIE. 407 plus abondant que nulle part ailleurs, y arrive dés les pre- miers jours du mois de mars, et peu de temps aprés il s’aparie et fait son nid de suite dans des endroïts fangeux sur une touffe de jones ou de gros herbages qu'il garnit de graminées sèches et menues. La femelle pond dans cenid de dix à quatorze œufs d’un blanc sale, presque aussi gros que ceux d’une jeune poule; le temps que dure l’incuba- tion est de vingt-deux ou vingt-trois jours , aprés lesquels il éclot des petits qui sont tout couverts d’un duvet jaunâtre ; aussitôt qu'ils sont nés ils se jettent à l’eau où ils suivent leurs père et mére , en cherchant dans les herbages et dans la vase de petits vermisseaux. Les premières plumes dont ils se revêtent sont toutes grises, et on ne peut dis- tinguer les sexes qu’aprés l’année révolue, époque où les mâles, entrent en amour, et prennent les brillantes couleurs de leur plumage. Cette sarcelle a le Sommet de la tête, le dessus du con À le dos et le croupion d’une couleur cendrée brune; de chaque côté de sa tête on voit une bande blanche qui, partant de la base du bec, passe au-dessus des yeux et se dirige en arriére vers l’occiput ; la plupart des couvertures du dessus de ses ailes sont cendrées ; quelques-unes des grandes seulement sont terminées de blanc, et par leur réunion elles forment une bande transversaie de cette couleur ; les premieres pennes de l'aile sont brunes, bordées extérieurement de blanc; les suivantes le sont ictérieurement de brun; mais en dehors elles sont d’un vert doré, bordées d’un beau noir profond et velouté, et terminées de blanc; la queue est d’un cendré brun uniforme. Les joues ét la gorge sont d’une belle cou- leur de marron: le devant du cou et la poitrine sont roussätres, ct chacune des plumes qui revètent ces parties est bordée de brun; le ventre , ainsi que le reste du 408 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dessous du corps, est d’un blanc roussâtre; le bas-ventre - qui est de la même couleur, est cependant légérement maculé de gris. L’iris est de couleur de noisette, et le bec noir , de même que les ongles; la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes sont d'une couleur ardoisée. La femelle, un peu plus petite que le mâle , a tout le dessus du corps varié de cendré brun et de roussàtre ; le dessous est d’un blanc lavé de cette dernière couleur. La sarcelle d’été est de toutes les espèces de canards la mieux faite et celle qui a le plus de grâces; elle a une forme arrondie qui semble être le type de la beauté parmi ses congénères : d’un caractere vif et gai, on la voit presque toujours en mouvement, et elle ne fait pas une évolution qui ne soit pleine de gentillesse. Elle joint a toutes ces qualités une douceur extrême ; aussi est-il très-facile de l’habituer à la domesticité, et même de l'y familiariser bientôt; huit jours suffisent pour cela : on la nourrit en basse-cour avec du pain, du blé, de l'orge et du son; elle aime aussi beaucoup les mouches, les vers de terre, les limaçons et autres insectes qu’elle peut attraper; elle se plait à se baigner fréquemment; elle vit en paix avec tous les oiseaux de la basse-cour ; et s'il arrive que quelqu'un la tourmente, loin de se défendre elle fuit a tire d’aile , et après une petite course, elle reste étendue épuisée sur la terre comme si elle alloit expirer. Cette petite espèce se rencontre moins fréquemment que les deux précédentes sur les lacs et les étangs de l’Europe, aussi bien que sur les eaux de la mer Caspienne. D'ORNITHOLOGIE. 408 DEUXIÈME GENRE. LES HARLES. Le genre des karles est composé d'oiseaux palmipèdes qui ont pour caractères distinctifs un bec droit , presque cylindrique , étroit , on- guiculé, crochu à l'extrémité et dentele en forme de scie sur chaque bord des deux mandibules:ces dentelures sont inclinées d'avant en arrière. Le bas de leurs jambes est dégarmi de plumes, et le doigt postérieur n’est pas en- gagé dans la membrane qui unit les trois anté- rieurs. Nous ne voyons les Larles, dans quelques- uns de nos départemens intérieurs, que durant les plus fortes gelées, ce qui fait croire qu'ils nous arrivent des régions du Nord; ils ne se rabattent alors sur les-rivières , et particulière- ment sur la Moselle , dans les Vosges , que parce qu'au moment de leur apparition, presque tous les lacs et les étangs de ces contrées sont gelées. On sait que ces oiseaux sont d’excellens plon- geursquipeuventdemeurer long-tems sous l'eau; qu'ils nagent avec une promptitude extrême entre deux eaux, et qu'ils sont les seuls palmipèdes qui naviguent le corps entièrement Zio TABLEAU ÉLÉMENTAIRE submergé, ayant seulement la tête hors de l’eau. Les propriétaires des étangs redoutent leur arrivée , parce qu'ils savent qu’ils sont de grands destructeurs de poissons. è Nous ne voyous ordinairement en France que trois espèces de Aarles ; savoir, le Larle proprement dit, le harle huppé ct la piette. 1° LE HARLE PROPREMENT DIT. Mergus merganser. TAN. Syst. nat. édit. 13, gen. 68. Le harle cendré ou bièvÿre. BRiS. Ornith. tom. 6, pag. 294. (Voyez la planche XXXIV de cet ouvrage.) Ce harle est bien plus gros que le canard sauvage : il a vingt-six. pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue, et cincuante neuf pouces de vol ; lorsque ses aïles sont ployées, elles ne s'étendent qu’à la moilié à peu prés de la longueur de sa queue. Le sommet de la tête de cet oiseau est revêtu de plumes fines , longues et soyeuses, d'un vert foncé, suscep- tible de chatoyer en viclet et en vert clair, suivant lin- cidence de la lumiere. Ces plumes lui forment une sorte de couronne hérissée qui fait que sa tête paroît pius grosse qu’elle ne l'est en effet; le haut de son cou, tant en avant qu’en arriere , est de la même couleur que le sommet de sa tête, mais les plumes qui recouvrent cette partie n’ont que la losgueur ordinaire; le haut du dos et plusieurs des plumes scapulaires sont d’un noir de velours, ainsi que la plupart des pennes des ailes qui, lorsqu'elles D’ORNITHOLOGIE. hit sont ployées, paroissent coupées longitudinalement dans leur milieu par une raie blanche ; le bas du dos, le croupion et les couvertures du dessus de la queue sont joliment ouvragés en zigzags de blanc et de noir; la queue dont les pennes sont cendrées, à tige noire, est étagée du centre vers les côtés. Le reste du devant du cou, la poitrine, le haut du ventre et les côtés sont d’un blanc lavé de jaune rougeâtre dans quelques individus , et de blanc rose où chamoiïs dans d’autres; l'iris est rouge ; le bec, qui est dur et de substance cornée, est droit dans toute sa longueur; il est fléchi en en-bas à son extré- mité seulement, laquelle se termine par un croc dur et tranchant ; la couleur de cet organe est le noir dans sa partie inférieure et dans le milieu de la mardibule dü dessus, surtout vers le bout; les côtés et la base de ce bec sont d’un rouge plus ou moins vif, plus ou moins étendu, suivant les individus, mais le croc est toujours noir; la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes , sont d’un beau rouge, et les ongles d'un brun rougeëtre. La femelle, sensiblement plus petite que le mâle, pa- roît être un tout autre oiseau que lui, à l'aspect des cou- leurs de son plumage. Sa tête est bien, conmme celle du mâle, couronnée de plumes fines, longues et soyeuses ; mais au lieu d’être, de même que les siennes, d’un noir changeant en vert, elles sont d’un roux brun doré, et cette même couleur s'étend tout autour du haut du cou; sa gorge est absolument blanche et sans nuance d'aucune autre couleur ; le derriére de son cou, tout le dessus de son corps, jJusques et y compris sa queue, sont d’un gris cendré ; les côtés du cou sont d’un gris bordé de blanc sur chaque plume ; le devant et le dessous du cerps sont d’un blanc légèrement lavé de roussâtre ; le pli ou le haut de RE TABLEAU ÉLÉMENTAIRE l'aile est cendré , et l’extrémité de cette partie est noi râtre, marquée dans son milieu d'une large bande blanche ; la mancibule supérieure du bec est rougeâtre à sa base , ainsi que l'inférieure, tandis que le reste est brun, l'iris est de même couleur que celui du mäle; la partie nue des jambes, les pieds, les'doigts, leurs membranes, ainsi que les ongles , sont d’un brun rouge. Le harle nage, comme nous l'avons dit plus haut, le corps entièrement submergé, sa tête seule paroît au-dessus de l'eau ; il plonge à de grandes profondeurs pour aller saisir le poisson dont il fait une étonnante destruction ;M1 reste long - temps sous l’eau , et y parcourt un long espace avant de reparoitre à sa surface. Ea l'an VIT l'hiver qui fut fort rigoureux, nous amera dans les Vosge:, et surtout sur la Moselle, une si grande quantité de harles, que chaque jour les! marchés d’Epinal étoient garais de ces oiseaur qu’on avoit tués dans les environs; ils abondeèrent surtout sur la partie de la Moselle qui arrose le finage de la commune de Tavon, à deux lieues plus bas qu'Epinal. Un paysan tirailleur de celte commune en tua beaucoup durant cette saison, il en abattit même un jour jusqu’à trois d'un seul coup de fusil. La premiére fois qu’il vit ces oiseaux sur la Moselle, ils lui parurent si petits, parce qu’il n’aper- evoit que leur tête et leur cou, qu'il re daïgna pas perdre un coup de fusil pour un si mince gibier ; quelques jours aprés il se décida enfin à faire feu sur eux, etil nous assura que sa surprise avoit été extrême lorsqu'it wit- le volume de leur corps ; aussi tous les individus de choix qu'il nous a fournis soit pour notre cabinet soit pour celui de nos amis, n’étoient - ils blessés qu'a la. tête ou bien au cou, parce qu’il n’y avoit que ces parties qui excédassent la surface de l'eau lorsqu'il les tiroit. D'ORNITHOLOGIE. 415 [e] ? 23. LE HARLE HUPPEÉ. Mergus serrator. LIN. Syst. nat. édit. 13, gen. 68. Le harle huppé. Bris. Ornith. tom.6, pag. no. ( Voyez la planche XXXIV de cet ouvrage. } Quoiqu'originaire des régions du Nord , le harle huppé paroît néanmoins sur les rivitres , les lacs, et sur plu- sieurs étangs de l’intérieur de la France, dans les années surtout où les hivers sont rigoureux; aussi n'est-il pas rare de voir, à ces époques, beaucoup de ces oiseaux exposés en verte sur les marchés de Paris. On a remarqué que dans toutes les années où le thermomètre étoit descendu jusqu’au dixième degré au-dessous de zéro, il avoit paru un nombre de harles huppés, quelquefois très-considé- rable sur les lacs et les étangs de nos montagnes des Vosges. Au Groenland eù ces oiseaux abondent comme dans leur pays natal , les naturels de ces contrées leur font une guerre ouverte dans les mois d'août et de septembre, et cela dans l'intention de se nourrir de leur chair qui dans notre pays est un mets détestable. Ces peuples à demi sauvages choisissent ces mois pour - chasser avec des flèches, dit-on , le harle huppé qui en tout autre temps est un oiseau aussi rusé qu’il est farouche et méfiant, parce qu'alors la mue qui, en faisant tomber les pennes de ses ailes , lui occasionne toujours une espèce de maladie qui le rend stupide en quelque sorte, est. cause qu'il est beaucoup moins agile pour se dérober a leurs poursuites. L'épithète de huppé que l’on a spécialement donnée à ce harle, lui a été appliquée parce qu’au lieu de cette espèce 414 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE de toupet que l’on voit dans le précédent, il porte une huppe bien séparée de sa tête, et qui est com- posée de plumes fines , étroites, douces , soyeuses, ayant trois pouces au moins de longueur ; elles sont toutes d’un violet noir, changeant en vert doré, selon l'irci- dence de la lumiere; ces plumes partent de l’occiput et se dirigent en arrière sur le haut du éou. Le harle huppé est à peu près de la grosseur du canard sauvage; le sommet de sa tête, le haut de son cou et sa gorge sont de la même couleur que les plumes qui for- ment sa huppe. L'origine de son dos est d’un beau noir de velours lustré, tout le reste du dessus de son corps est varié de brun et de blanc sale, disposé par lignes qui se dirigent parallèlement entre elles, et toujours en zigzags. Les grandes pennes de ses aïles sont d’un brun noirâtre, variées, dans leur milieu, de noir, de brun, de cendré et de blanc; celles de sa queue sont brunes, bordées et variées de gris de perle. Au-dessous de sa gorge on voit une espèce de demi-collier blanc au bas duquel le reste du cou, ainsi que la poitrine, sont variés de noir, de roussâtre et de blanc; tout le reste du dessous de son corps est de cette dernière couleur , à l'exception des côtés de la poitrine dont chaque plume est bordée de noir. La mandibule supérieure du bec est d’un brun marron dans quelques individus, et d’un beau rouge dans d'autres ; l’inférieure est, dans tous, de cette dernière couleur. L'iris est d’un jaune aurore; la partie nuedes jambes, les pieds , les doigts , leurs membranes et les ongles sont rouges. | La femelle de ce canard differe de son mâle en ce que sa huppe, le sommet de sa tête et le haut de son cou, au lieu d’être d’un noir changeant en vert, sont d’un bai roux ; elle a la gorge blanche, le dos gris et le dessous D'ORNITHOLOGIE. 415 du corps d’un blanc teinté de roussàtre sur la poitrine. Du reste elle est, à peu de chose prés, semblable à son mäle, On dit que ses œufs sont aussi gros que ceux du canard, et qu’ils sont d’un blanc pur. Le harle huppé est, comme le précédent, un excellent plongeur qui va chercher à des profondeurs considé- rables le poisson qu’il aperçoit au fond de l’eau, et surtout des eaux qui sourdent de nos montagnes pour donner naissance à la belle rivière de Moselle, dont la limpidité est telle , surtout vers sa source où eile n’a point encore été troublée par une foule de rivières bourbeuses qui viennent yaboutir et s’y perdre, qu’on y aperçoitsur les cail- loux du fond, une truite à vingt pieds de profondeur lorsqu'elle y voyage en chassant avec la rapidité d’un trait. Cet oiseau a, comme tous ses congénères , la réputa- tion d'être un grand destructeur de poissons ; son bec armé de dents osseuses et trés-aigues, dirigées d'avant en arrière sur les bords de chaque mandibule, est très- propre à favoriser ses larcins. / 32 LE HARLE PIETTE. Mergus mas. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 68. La piette. BR1s. Oruith. tom. 6, pag. 243. | ( Voyez la planche XXXIV de cet ouvrage.) Des trois espèces de harles qui arrivent à certaires époques de l’année dans l’intérieur de la France, au mo- ment surtout où les hivers sont rigoureux, la piette est la seule qui ne manque presque jamais de venir nous visiter a cette saison dans les Vosges où elle est connue sous le nom vulgaire de religieuse, à raison sans doute de son 416 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE manteau et de sa coiffe noirs, et de sa mentonniere blanche. On assure qu'elle n’est pas moins commune dans la ci- devant Picardie que sur nos riviéres, et particulierement sur nos étangs de la ci-devant Lorraine. 4 La piette est un peu plus grosse que la sarcelle ordi- naire ; elle a, de l'extrémité du bec à celle de la queue; un pied quatre pouces de longueur, et deux pieds de vol; lorsque ses ailes sont ployées, elles s'étendent au tiers à peu près de la longueur de sa queue. Sa tête, sa gorge et son cou sont d’un tres-beau blanc, un demi collier noir placé sur le haut de cette dernière partie, imprime au blanc de sa gorge une forme de men- tonnière; de chaque côié de sa tête on voit une tache ronde d’un beau noir, susceptible de chatoyer en vert ; cette tache est d'autant plus apparente qu'elle tranche parfaitement bien avec le blanc de cette partie. C’est au milieu de cette tache qu'est placé l'œil qui est rougeätre , eutouré d’un cercle jaune. Une‘ belle huppe formée de plumes étroites ; douces , longues , soyeuses et variées de blanc et de vert noirâtre, se fait remarquer sur le sommet de sa tête; elle lui tombe élégamment sur le cou où elle contraste parfaitement avec le noir. Tout le dessus du corps de cet oiseau, depuis les deux tiers inférieurs du cou jusque vers le milieu du dos, porte sur un fond d’un beau blanc, trois bandes demi cir- culaires placées les unes au-dessus des autres, et qui laissent entre elles des interstices de.blanc se. coupant alternativement avec le noir profond et velouté de. ces mêmes bandes. Les plumes scapulaires , ainsi que les.cou- vertures du dessus des ailes, sont variées de noir et de blanc; les premières grandes pennes de l'aile sont no râtres; les autres sont d’un noir violet du côté extérieur, ; D'ORNITHOLOGIE. 417 et brunâtres du côté intérieur ; celles qui sont les plus voisines du corps sont cendrées, et le croupion est d’un beau noir de velours. Les pennes de la queue qui sont aussi cendrées , sont étagées de manière que cet appendice paroît arrondi. La poitrine et tout le dessous du corps sont blancs, à l’exception des flancs qui sont variés de brun foncé et de gris blanc, par petites raies disposées er zigzags. Le bec, la partie nue des jambes, les pieds, les doigts et leurs membranes sont d’un noir verdätre , et les ongles noirûtres. | La femelle, qui est un peu plus petite que le mâle, a tout le dessus de la tête, ainsi que le haut du cou, ex _arrière, d'un brun marron, et la gorge blanche ; le bas de son cou, en avant et en arrière , est d'un brun cendré, de même que tout le dessus de son corps, qui est blanc en dessous, excepté les flancs qui sont cen- drés ; les couleurs de ses ailes sont, du reste, distri- buées comme celles du mâle , avec cette différence qu’elles sont un peu moins vives; sa queue est cendrée , son bec noir, et ses pieds sont plombés. CINQUIÈME FAMILLE. Les oiseaux que nous renfermons dans cette cinquième et dernière famille des palmipèdes sont, à juste titre , les plongeurs par excellence; ils sont st habiles dans cet art; ils ont l’œil si vif et si percant, qu'à l'aspect de l’amorce d’un fusil qui s’enflamme , ils se soustraient au coup, en s’enfoncantsubitementsousleseaux ,avantmême que le plomb meurtrier quidevoit leur dépécher ‘T7, 2 » é 2 8 418 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE la mort , n’ait pu les atteindre ; mais, par contre- coup, ils sont sur la terre de forts mauvais mar- cheurs , ne pouvant par leur conformation, habiter que les eaux; leurs jambes , placées tout-à-fait à l'arrière du corps et presque entière- ment cachées dans l'abdomen , ne laissent pa- raître que des pieds en forme de rames, dont la position en dehors ne peutsoutenir leur corps que lorsqu'il est droit et perpendiculairement d’aplomb ; leurs ailes très- courtes d’ailleurs ne peuvent imprimer à leur corps le mou- vement nécessaire pour prendre à terre leur vol, et regagner par ce moyen leur élément naturel ; aussi évitent-ils autant qu'ils peuvent, les rivages, parce qu'ils sentent combien ils y sont étrangers. Cette famille ne contient que leseul genre desp/ongeons. On désigne assez généralement dans la plu- part des contrées de la France, sous le nom vulgaire et impropre de plongeons , tous les oi- seaux aquatiques qui , à la moindre apparence de danger , ont l'habitude de s’enfoncer sous l'eau :en sorte qu il est presque étonnant qu'on nait pas compris sous cette même dénomination les Aarles qui sont aussi d’excellens plongeurs; mais les oiseaux auxquels on applique le plus communément ce nom sont les srébes , et dans toutes les Vosges on ne connoît sous la dénomi- nation de plongeon que le seul castagneux. D'ORNITHOLOGIE. 419 Celte erreur ne vient , sans doute , que de ce qu'on ignore que les plongeons ont les trois doigts antérieurs réunis par une seule mem- brane et le pouce séparé, tandis que les casta- gneux , ainsi quetous les grébes , ont seulement les doigtsgarnis dansleur contour de membranes fendues. Cette dernière famille des oiseaux nageurs ne renferme que le seul genre des plongeons. GENRE UNIQUE. LES PLONGEONS. Les caractères particuliers au genre des plon- geons consistent dans un bec droit, pointu , comprime par les côtés etsans dentelures; dans des pieds déprimés et aplatis sur leurs faces la- térales, et dans une queue peu apparente et presque nulle. Nous neconnoissons, dans ce genre, que deux espèces indigènes de la France , savoir: le grand plongeon et le petit plongeon. 1. LE GRAND PLONGEON. Colymbus immer. Lin. Syst. nat. édit. 13, gen. 75. Le grand plongeon. BRis. Ornith. tom. 4, pag. 105. ( Voyez la planche XXXIV de cet ouvrage.) Le grand plongeon est, à peu de chose prés, de la grosseur de l’oie ; il a, du bout du bec à l'extrémité de 28 * d10 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE la queue , ou pour mieux dire, de l'extrémité dés doigts à celle du bec, deux pieds sept pouces et demi de lon- gueur, et trois pieds dix pouces huit lignes de vol. Quand ses ailes sont ployées, elles s'étendent jusqu’au bout du croupion ou de son apparence de queue. Ce plongeon est connu sur ies lacs de la Suisse sous le nom de studer , qui, dans l’idiome du pays , désigne la pesanteur de cet oiseau, et sa difliculté de marcher sur terre, quand, par quelque accident, il y a été jeté. Cet oiseau s'échappe qnelquefois des contrées helvé- tiques, et paroît instantanément sur les étangs des Vosges qui n’en sont pas tres-éloignées, et surtout sur les lacs de Gérardmer, lesquels gissent au centre des montagnes de ce département; c’est de la que nous en avons obtenu plu- sieurs, soit pour notre cabinet, soit pour ceux de nos amis. j Le grand Plongeon a le dessus de la tête et du cou d’une couleur brune; son dos, son croupion ainsi que ses flancs, sont revêtus de plumes d’un brun foncé, bordées d’une couleur cendrée ; les pennes de ses ailes sont brunes ; celles de sa queue sont de même couleur, bordées de blanc à leur extrémité; les joues sont variées de trés-petites taches blanches : on voit sur les côtés du cou une bande transversale d’un brun noir, et, au-dessous de cette bande, ces mêmes côtés sont variés de trés- petites taches noires et blanches; sa gorge, ainsi que le devant de son cou, sa poitrine et son ventre, sont d’un blanc soyeux fort éclatant ; seulement on aperçoit quel- ques taches brunes sur le devant du cou; les couvertures du dessous de sa queue sont variées de blanc et de brun. L'ris de ses yeux est rougeâtre ; son bec, ses pieds, ses doigts et ses ongles sont noirâtres; les membranes qui D'ORNITHOLOGIE: Act unissent ses doigts entre eux, sont de cette même couleur sur leurs bords, et blanchâtres dans leur milieu. Cet oiseau nage et plonge aussi bien qu'il vole mal : on dit que sur les lacs de la Suisse où il est fort abon- dant, il n’est pas rare de le voir nager entre deux eaux, sans reparoître a sa surface, pour y respirer l'air atmos- phérique, que quelquefois à plus de cent pas de distance du point d’où il étoit parti. On peut donc conclure qu’un nageur de cette force ne doit redouter aucun oiseau de proie; qu’il lui suffit, pour éviter sa griffe meurtriere, de l’apercevoir dans les nues pour se dérober à sa voracité, en se plongeant aussitôt au fond de l’eau, où son ennemi n’est nullement tenté d’aller le poursuivre. On seroit done porté à croire que ce plongeon n’a aucun ennemi. à redouter ; on se tromperoit cependant, car l’homme avide de sa dépouille , lui qui est le pius. rusé de tous les êtres créés, a trouvé dans son génie le moyen de se rendre le maître de cet oiseau, soit en lui présentant pour appât un poisson dont l’intérieur est garni d’hameçons qui tien- nent à une longue ficelle, soit en plaçant entre deux eaux une sorte de filets dans les endroits où les plongeons se rassemblent le plus communément, et dans lesquels ils trouvent la mort en s’y enfonçant pour chercher leur sub- sistance. 9° LE PETIT PLONGEON. Colymbus stellatus. LiN. Syst. nat. édit. 13, gen. 95, Le petit plongeon. Bris. Ornith. tom, 6, pag. 108. La longueur de ce palmipède, le dernier de cet ordre, prise du bout du bec à celui des doigts, est de deux pieds 42» TABLEAU ÉLEMENTAIRE un pouce et quelques lignes. Il a deux pieds onze pouces de vol, et lorsque ses ailes sont ployées , elles ne dépassent gueres l’origine de son apparence de queue. Tout le sommet de sa tête, le dessus de son cou et de son dos .sont d'un cendré noirâtre, entièrement maculés d’espèces de petites gouttes blanches ; on voit de plus sur chacune des plumes qui recouvrent son dos, deux lignes blanchâtres. Les grandes pennes de ses aïles sont brunes, et les moyennes d’un cendré brun ; ces derniéres sont marquées de deux lignes blanchâtres, placées en travers de ces pennes , une de chaque côté ; la queue qui est très-courte et presque nulle, est d’un cendré brun; elle paroît étagée du centre sur les côtés. La gorge est blanche, ainsi que le devantet les côtés du cou; mais ces derniers sont légèrement variés d’une teinte de gris de perle. La poitrine et tout le reste du dessous du corps sont d’un blanc pur et éclatant. Cet oiseau a l'iris des yeux de couleur de noisette; le bec d’un gris brun ; les pieds, les doigts, leurs membranes, ainsi que les ongles, bruns; seulement une teinte légère de rougeûtre s’étend sur le côté intérieur des pieds et des doigts. Le petit plongeon se trouve er tout temps et en toutes saisons sur nos Côt:s maritimes , comme sur quelques riviéres et sur un grand nombre d’étangs de l'intérieur de la France où il fait son nid qu'il construit d'herbes sèches; quoique son tissu soit assez lèche, néanmoins il est un peu recouvert, et fait avec assez d'art pour qu'il soit susceptible deflotter sur la surface de l’eau, dans les juarais, et sur les grands étangs ; la femeile pond trois ou quatre œufs d’unefgrme ovale parfaite, qui ressemblent # D’'ORNITHOLOGIE. 423 assez à ceux de l’oie; ils sont marqués de quelques taches noires. è M. de Buffon fait mention dans ses œuvres d’une autre espèce de plongeon qu'il ne signale autrement qu’en disant qu’il se trouve pendant l’hiver sur les côtes de Picardie où on le nomme cat-marin (ce qui signifie chat de mer ). On lui a sans doute donné cette dénomination, dit cet immortel auteur, à cause de la grande quantité de frai de poissons qu'il mange. Il y a beaucoup d'apparence que Linné, ainsi que Brisson, ne connoiïssoient pas cet oiseau, puisqu'ils n’en parlent ni l’un ni l’autre; et n'ayant jamais été a portée de le voir nous-mêmes, nous sommes forcés de passer ici sous silence sa description. Nous présumons bien que parmi les palni- pèdes , et surtout les palmipèdes marins qui fre- quentent exclusivement nos côtes, soit pe- riodiquement chaque année, soit accidentel- lement à raison de quelques coups violens de la tempête qui les y auront portés, nous en ayons omis quelques-uns : mais nous pen- sons aussi qu'on nous le pardonnera en faveur de notre éloignement de ces contrées, qui ne nous a pas permis de les observer et d’en suivre parüculièrement les mœurs. Notre but principal , d’ailleurs, n'ayant été que d'inspirer à la jeunesse qui se trouve trop éloignée de la capitaleet des lumières dont elle est le centre, le goût de l’ornithologie , et de lui Ge TABLEAU ÉLÉMENTAIRE apprendre le moyen de classer méthodiquement les animaux que comprend cette partie de l’his- toire naturelle ; on voudra bien ne pas nous sa- voir mauvais gré de quelques omissions Imvo- lontaires, que d’ailleurs on pourra rectifier dans l'ouvrage de l’immortel Buffon. FIN DU TROISIEME ET DERNIER ORDRE. D’ORNITHOLOGIE. 426 USAGE DANS LA PRATIQUE DE NOTRE MÉTHODE ORNITHOLOGIQUE. I se présente à nous un oiseau que nous n'avons jamais vu , et que, par celte raison, nous ne con- noissons pas;supposons, par exemple, que cesois le merle de roche. Comment nous sera-t-il pos- sible , parmi plusieurs centaines d'oiseaux, soit seédentaires , soit de passage annuellement pério- dique ou de passage purement accidentel, qui se rencontrentdans l'étendue de la France, detrou- vernon-seulement l'ordre dans lequel il doit en- trer, mais encore sa section, sa famille , son genre et son espèce ? Pour embrouiller encore davantage cette re- cherche , faisons intervenir iciune prévention fondée sur les habitudes de cet oiseau que nous supposons que l’on a vu plusieurs fois toujours solitaire au sommet de quelque rocher escarpé; sur la couleur de son plumage ; sur son carac- tère constamment farouche et sauvage quin'em permet l'approche qu’en usant de ruses et destra- tagèmes ; enfin sur la mélodie de ses accens qui retentissent au loin dès l’aurore naissante, qu'il 326 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE terrompt pendant le jour et qu’il recommence avec une ardeur nouvelle lorsque le soleil de- cline vers notre horizon. | Supposons encore que nous ayons éle à portée d'observer en silence ses differentes manoœu- vres ; que tantôt nous l'avons vu subitement sus- pendre son chant pour courir à terre avec la rapidité d’un trait, afin de saisir un vermisseau qu'il apercevoit au loin; que d'autrefois nous l'ayons observe lorsqu'il étoit perché sur un ar- buste pour y choisir les baies les plus saines dont il faisoit, ainsi que d'insectes , sa principale nourrilure. Toutes ces circonstances et quelques autres que nous pourrions ajouter encore, ne nous font-elles pas présumer qu'il est un oiseau d'un tout auire genre que celui du rnerle? Mais lorsqu'il est en votre pouvoir , si nous vou- lons le reconnoîïtre avec exactitude, commen- çons d’abord par mettre à part toute prévention à son égard ; occupons-nous seulement de rap- peler à notre mémoire les caractères distinctifs d’après lesquels nous avons partagé notre orri- Lhologie en trois grands ordres (si nouslesavons oubliés recourons à notre tableau synoptique), et parsuite de Ja comparaison que nous aurons faite des caractères généraux que présente cet individu, avec ceux de nos ordres, 1l nous ser | / D'ORNITHOLOGIE. 427 bientôt facile de décider auquel des trois il doit appartenir. Le premier ordre renferme, comme nous le savons , les oiseaux qui ont quatre doigts, dont trois sont diriges en avant , etlequatrième qu'on nomme le pouce est place en arrière; tous ces doigts sont séparés les uns des autres jusqu’à leur base , ou tout au moins jusqu’à la prémière arti- calation,et leurs jambes (que le vulgaire nomme les cuisses ) sont garnies de plumes jusqu'au ca/- carneum que nous avons appelé le genou. Le second ordre contient ceux de ces animaux qui , outre qu'ils ont les pieds conformeés à peu près comme les précédens ,ont encore pour ca- ractères tranchans une partie plus ou moins considérable de la jambe , au dessus du genou, dégarnie de plumes, ét une membrane plus ou moins considérable qui unit le doigt du milieu avec l'extérieur tout au plus jusqu’à la première articulation : nous avons nomme ceux - ci fissipèdes de rivages , et les premiers fissipèdes proprements dits. Le troisième ordre enfin est composé des palmipèdes ou oiseaux nageurs , dont les trois doigts antérieurs et quelquefois les quatre doigts sont garnis ou de membranes entières , ou de membranes fendues ; ce qui facilite leur navi- gation conlinuelle. 428 TABLEAU ÉLEMENTAIRE Or, l'oiseau que nous cherchonsà reconnoître a-t-il les doigts garnis de membranes entières ou de membranes fendues? non ; il n’est donc pas du troisième ordre ; il ne peut donc appartenir qu'au second ou bien au premier. . Pour qu’il appartint au second ordre, que faudroit-11? que, comme.nous l'avons dit, il eût Ra partie de la jambe au dessus du genou, dé- garnie de plumes :or, cette même partie , dans Pindividu que nous examinons , en est entière- ment garnie; 1l n’est donc pas de cet ordre:1l faut donc nécessairement qu’il soit du premier. Mais ce premier ordre est extrêmement com- pliqué; car pour s’y reconnoître, nous avons ete obligés de le diviser en sections ; puis nous avonssous-divisé les sections en familles , les fa- milles en genres, et enfin quelques genres en petites £ribus quirenferment les espèces. Au mi- lieu de cette complication qui, dans le fait, n’est qu'apparente, comment nous sera-L-il possible de déterminer la place qui convient à l'oiseau que nous désirons de connoître ? Essayons d’y parvenir; mais , au préalable, mettons en jeu toute l’attenlion dont nous som- mes susceptibles; car 1ci 1l nes’agit plus d’exa- miner les pieds ; 1ls ont joué leur rôle et nous pouvons les abandonner, pour porter nos re- gards quelquefois sur la forme et l'habitude en- D'ORNITHOLOGIE. 428 Lière du corps de l'animal , mais toujourssur la conformation de son bec. Souvent ce caractère n'est pas aussi tranchant que le sont ceux qui établissent les ordres : aussi n’y a-t-il guères qu’une longue habitude et l'œil perspicace d’unancien observateur qui saisissent à l'instant même les nuances souvent insensibles qui difiérencient la forme des becs ; or dans ce cas un jeune ornithologiste doit recourir aux. tableaux synoptiques, dans lesquels il trouvera souvent , même dans les caractères particuliers à chaque espèce , des secours qui faciliteront ses recherches; mais revenons à la distribution méthodique de notre premier ordre ! Cet ordre, celui des oiseaux fissipèdes pro- prements dits ; est sous-divisé d’abord en quatre sections ; la première contient les oiseaux de proie ou accipitres ; la seconde renferme les pas- sereaux; la troisième ,comprend les oiseaux grimpeurs ; la quatrième enfin est composée des gallinacés. L'oiseau que nous désirons de connoîtrese- roit-il de la section des gallinacés ? pour nous en assurer, voyons quels sont les caractères des oiseaux de cette section ! ! ! Tous les gallinacés en général sont des ani- maux pesans quise nourrissent presque unique- ment de grains; le nôtre au contraire est d’une 450 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE aille assez svelte ,et nous l'avons vu se nourrir de vermisseaux , ainsi que de petites baies. Les gallinacés ont la mandibule supérieure du bec légèrement arquée et comme voütée ; leurs narines , d’ailleurs , sont en partie recou- vertes d’une pièce charnue. Le bec de notre oi- seau est à la vérité arqué;maisil ne l’estque légè- rement,el 1} est comprimé par les côtés; iln’offre aucune apparence, aucun vesiige même le plus léger d’une pièce charnue qui recouvre ses na- rines. Du côté du bec il n’appartient donc pas aux gallinacés : ne leur appartient pas davan- tage du côtédes pieds; carles gallinacés ont tous les pieds assez courts, eu égard à leur taille; leurs doists sont dentelés à leurs bords, et ils sont de plus réunis à leur base seulement par un ru- diment de membrane ; plusieurs espèces d’ail- lurs nt, dans les mâlessur-tout, le £arse armé d’un éperon pointu : or rien deious ces carac- tères nese rencontre dans l'oiseau qui fait l’objet de nos recherches; ilne peut donc pas être de la quatrième section du premier ordre. Il est peut être de la première section de cet ordre? Voyons donc quels sont les caractères des oiseaux qu'elle contient / Les oiseaux de la première section de cet ordre sont les accipitres ou oiseaux de proie, dont les caracteres distinctifs se tirent de leur D'ORNITHOLOGIE. 431 bec crochu , ayant sa base revêtue d’une peau molle , à laquelle on a donné le nom de cire; de leurs narines qui, dans ceux qui sont pour- vus de cette peau, la traversent en la perçant ; de leurs doigts nus ou recouverts d'unduvet fn, et de leurs ongles acérés et très-crochus:or,onne trouve aucun vestige, aucune apparence de ces caractères dans notre oiseau; 1l n’est donc pas de la première section de ce premier ordre, auquel néanmoins nous avons la cerlitude qu'il doit appartenir. Puisqu’il n’estni de a première, ni dela qua- trième section ; il est nécessairement de la se- conde oùdela troisième. Assurons-nousd’ab5ord s’il ne seroit pas de la troisième, et, pour cela, voyons et analysons les caractères des oiseaux que cette section renferme } Les oiseaux que nous avons placés dans la troisième section sont les grimpeurs , qui ont pour caractères distinctifs et bien tranchés, deux doigts en avant et deux en arrière: or, sans nous donner la peined’enirer dans l'examen de la conformation de leur bec, nous sommes certains, par ce seul caraciere, que nolre oiseau ne peut appartenir à cette section: 1l est donc né- cessairement de la seconde, de celle des passe- reaux. Mais la section des passereaux est tellement 432 TABLEAU ELÉMENTAIRE étendue que nous avons été obligés de la parta- ger en Six familles : à laquelle de ces farnilles doit-1l appar tenir ? Pour le découvrir, examinons les bases sur lesquelles nous avons assis la distribution de ces mêmes fzmilles ! D'abord les oiseaux de la première ont pour caractères généraux et dis- iinclifs la mandibule supérieure du becéchan- crée vers son extrémité : or, notre oiseau a ce caractère ;ilest donc de cette première famille. Mais cette même farnille est sous-divisée en irois genres: dans lequel de ces trois genres al- Jons-nous le piacer ? | Pour le savoir , analysons et résumons encore lescaractères particuliersachacunde cessenres, et voyons ceux qui doivent se rapporter à l'in- dividu que nous désirons de classer ! Le premier genre est celui des pies-grièches dont les caractères consistent dans un bec com- prime par les côtés; dans la mandibule supe- rieure de cet organe, qui est crochue à son bout , et armée, de chaque côté, d’une petite dent : or le bec de notre oiseau est bien com- primé par les côtés ; mais il n’est ni crochu à sa pointe , ni armé de chaque côté d’une dent; il n'appartient donc pas à ce premier genre. . Le second genre de cette même famille est celui des gobe-mouches, qui ont le bec aplati D'ORNITHOLOGIE, 433 horizontalement et pointu; leur mandibule su- périeure, outre qu'elle est échancrée vers sa pointe , est encore garnie à sa base de quelques poils roides : or, la mandibule supérieure de l'osseau que nous avons en main, quoiqu’un peu échaucrée vers la pointe, n’a pas du tout sa base garnie de poils; son bec, d’ailleurs, n’est point apJati horizontalement; il est au contraire comprime par les côtés et légèrement arqué dans toute salongueur , caractères qui sont par- ticulicrs au genre du merle et non à celui des gobe-mouches ; notre oëseau est donc de ce troi- sième genre :ilest donc un 7nerle. Mais dans le genre des z2erles il se trouve des oiseaux auxquels nous avous donné le nom de grives et d’autres que nousavons appelés simple- ment merles. Les premiers sont ceux qui ont le crivele ; les seconds au con- 5 traire sont ceux dont le plumage est colore parde pl umage tachete ou grandes masses; or le plumage de notre oiseaux est coloré de cette dernière manière-s1l est donc uu nerle proprement dit ; 1 nous suffit alors de lire attentivement la description de nos dif- férentes espèces demerles, et, à coupsür, nous irouverons celle que nous cherchons. C’est de cette manière que l’on doit procé- der pour la connoissance et la classification de toutes les espèces d'oiseaux qui nous sont InCcon- VAR" 29 434 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE nues. Si la marche à suivre a été longue à dé- crire, C'est afin qu'en en suivant tous les degrés , elle guide avec certitude un jeune or- nithologisie qui désire s'occuper avec fruit .de l’histoire des oiseaux de son pays; mais l'usage la lui simplifiera bientôt, et l’habitude réduira, dans peu de temps, à un pelit nombre tous ces degrés. C’est 1e1 le cas de dire, en terminant cet ou- vrage, que si nous avons élé assez heureux pour être de quelque utilité à la jeunesse que nous avons eue en vue en le commençant , nous en irouverons dans notre cœur une douce récom- pense. Fin du Tableau ornithologique de la France. D'ORNITHOLOGIE. 435 APPENDICE (G) = à DIFFÉRENTES RACES DE PIGEONS CONNUES, SOIT EXOTIQUES SOIT INDIGÈNES, DISPOSÉ DANS UN ORDRE ALPHABÉTIQUE, Avec un précis abrégé de leur histoire. Genre 104, de Linxé, édit. 13, de GMELINN ; et, de notre méthode , le premier des gallinacés. Lourrs les races de pigeons ou tourterelles ont pour caractères généraux et distinctifs un bec droit, foible et grêle, dont le bout de la man- 1) Nous ne nous sommes déterminés à donner cet appendice , qui est absolument étran er au plan de cet ouvrage,que parce que nous y avons été engagés itérativement par plusieurs de nos amis qui ont pensé qu’à raison du nombre de personnes qui se procurent le plaisir innocent d’élever des pigeons et des tourterelles des pays étrangers , il ne seroit pas hors de propos d’esquisser au moins leur histoire. En cédant volontiers aux instances qui nous ont été faites à ce sujet, nous n’avons pas voulu cependant traiter de ces orseaux d’une manière méthodique ; il nous a paru suffisant d’en parler seu- lement dans un ordre alpabetique. ù 29 * 436 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dibule supérieure est un peu renfléet courbé ; des narines oblongues, à demi couvertes d’une membrane plus ou moins épaisse et toujours molle; des pieds courts ordinairement rouges , et enfin des doigts séparés les uns des autres jus= qu’à leur base. Toutes senourrissent également de graines ou semences dures qu’elles avalent sans les casser. 1} n’en estaucune qui ne vive en monogamie , et qui ne fasse , à chaqueponte, plus de deux œufs que le mâle et la femelle couvent allernative- ment chaque jour , et à des heures périodique mentrégulières. Lorsque leurs petits sont éclos, ils leur dégorgent dans le bec les graines qu'elles- mêmes ont d’abord avalées, afin qu’étant ma- cérées et ramollies dans leur jabot , l'estomac de leurs enfans puisse plus facilement les digérer. La seule différence que nous avons admise dans la distribution que nous avons faite de ces oiseaux par ordre alphabétique , consiste dans les peunes de la queue qui sont toutes égales et de moyenne longueur dans les uns, tandis que dans les autres elles sont beaucoup plus longues et cunéiformes ou taillées en coin. | Cette différence nous a fourni l’occasion de diviser en deux tribus la section des pigeons, ainsi que celle des courierelles. D'ORNITHOLOGIE. 337 SECTION PREMIÈRE. LES PIGEONS. Columbæ. Lin. PREMIÈRE TRIBUW. Pigeons dont les pennes de la queue sont égales et de moyenne grandeur. 1° LE PIGEON A AILES BLANCHES DES INDES. Columba leucoptera. Lax. La longueur de cette première espèce de pigeons qui n'est pas plus grosse que notre tourterelle, columba turtur , Lin. : est de huit à neuf pouces, en la mesurant de l'extrémité du bec à celle de la queue. | Le sommet de sa tête, ainsi que le haut de son cou et le dessus de sûn corps, sont fauves; son ventre et son crou- pion sont cendrés ; les pennes de ses ailes sont noires; les intermédiaires de sa queue sont brunes et la plus extérieure dé chaque côté est cendrée, terminée de blanc ; ses joues, sa gorge et sa poitrine sont d’un roux tirant au fauve. On voit, de chaque côté des joues, au dessous des oreilles, une raie noire qui part de la base du bec et se dirige vers l’occiput ; les plumes situées au dessous de cette raie sont susceptibles de reflets brillans d’un vert doré qui cha- toyent en violet. Une peau nue et d’une couleur bleue, en- toure les yeux de cet oiseau, dont l'iris est fauve ; ila le bec noir; les pieds rouges et les ongles bruns. Ce pigeon a dans la queue un mouvement de vibra- tion de haut en bas, comme la bergeronnette grise, molacilla cinerea , Liu. : on le trouve aux Indes, ainsi 438 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qu'aux environs de Carthagène , dans l'Amérique mé- ridionale. 2° LE PIGEON A BEC COURBE. Columba curvirostra. Lax. Latham dans son systémeornithologiqueparle d'une espèce de pigeon que l’on trouve à l’île de Tanna, laquelle a sept pouces et demi de longueur de l’extrémité du bec à celle de la queue : il dit que le dessus de son dos et les couvertures de ses ailes sont d’une couleur baie dorée , traversés par deux bandes jaunes; que le dessous de son corps est d'un vert jaunâtre; que les pennes intermédiaires de sa queue, qui est arrondie, sont vertes, et les latérales cen- drées, toutes coupées transversalement par une bande noire, et qu’enfin les couvertures du dessous de sa queue sont blanches. Ce qui rend ce pigeon plus remarquable, ajoute-t-il, c’est la forme de son bec qui, à son sommet, est fort re- courbé en carène, puis il s’abaisse brusquement à sa-pointe qui est très-aiguë; la base ou l’origine de ce bec est rouge et le reste jaune. Le même Latham dit encore que l’on rencontre dans le même pays une variété de cette espèce, qui a le dos et les grandes couvertures des aïles vertes. 3° LE PIGEON A CRAVATTE. Columba turbita. Lax. Parmi les nombreuses variétés que Linné a faites de notre pigeon biset ou fuyard, columba domestica , Lin. ; celle-ci est la dixième, et cet auteur l'a notée F : 1). D'ORNITHOLOGIE. 439 Le pigeon à cravatte estune des plus petites espèces, puis- qu’elle n'est pas plus grosse que notretourterelle, columba turtur, Lin. avec laquelle ii produit des métis. Ce pigeon est particulierement remarquable par une touffe de plumes qui se rebroussent sur sa gorge etsur sa poitrine : on ne voit pasle moindre vestige de huppe sur le sommetde sa tête, ni de capuchon sur son cou. Les couleurs les plus ordinaires de cette espece sont celles que nous avons désignées dans les variétés de notre sixième race, tome II, page 47. 4.° LE PIGEON A CRINIÈRE. Columba jubata. Lx. Linné ne signale pas autrement ce pigeon dontil a fait sa dix-neuvième variété de l’espèce domestique sous la note V :v) qu’en disant qu’il porte sur sa tête une huppe qui lui pend du sommet de cette partie, en forme de criniére. 5° LE PIGEON À POITRINE POURPRE, D'EIMEO. Coluriba Eimensis. Lan. Ce pigeon a quatorze pouces de longueur du bout du bee à celui de la queue ; son front est de couleur vineuse, de même que sa gorge, dont le bas, ou pour mieux dire, le haut de la poitrine est marqué de deux bandes trans- versales, la première de couleur pourpre et la seconde jaune ;ses joues sont noiràtres ; il a le sommet de la tête et le haut du cou bruns ; les côtés de cette derniere partie sont d’un rouge bai, qui passe insensiblement au pour- pre; son bec et ses ongles sont noirs. 440 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE G.° LE PIGEON A QUEUE ANNELÉE , DES ANTILLES. Cofumba caribæa. Tax. On trouve cette espèce aux Antilles, entre l'Amérique méridionale et l'ile de Porto-Rico, proche la ligne; on la rencontre également à la Jamaïque. Ce pigeon est de la grosseur à peu près de notre ramier ; sa longueur, du bout du bec a l'extrémité de la queue, est de quinze pouces. Ce gallmacé qui est d'un naturel sauvage et même farou- che, a le devant du cou et la poitrine d’un rouge pour- pré, le dessus du cou de cette même couleur, mais suscepti- ble de chatoyer en vert; son dos, ainsi que son croupion et les couvertures supérieures de sa queue sont d’un bleu de ciel : il a les ailes brunes, la queue bleuâtre, coupée par une large bande transversale noire, et le ventre blanc: l'iris de ses yeux est d'un rouge de cire d’Espagne; son bec de cette même couleur à sa base et verdâtre dans tout le reste de sa longueur, est surmonté d'une membrane gonflée qui se partage en deux gros tubercules qui re- couvreni ses narines : ses pieds sont de même couleur que la base de son bec, et-ses ongles d’un brun rouge. On dit que sa chair est un mets exquis. 7.0 LE PIGEON A TÊTE BLANCHE DE LA JAMAÏQUE:. Colurmba leucocephala. Lax. Celui-ci, que l’on trouve à la Jamaïque, à Saint-Do- mingue et aux iles de Bahama, où il se tient en bandes nom- breuses, y niche dans les rochers, et s’y nourrit de plu- sieurs espéces de baies, surtout de celles du caïfñer, caffea arabica, Lin. D'ORNITHOLOGITE. 441 Quoique sa chair soit bonne à manger, néanmoins elle n’a pas toujours la même saveur; cette qualité varie du doux à l’âmer, suivant ls saisons, où pour mieux dire, suivant les diverses espèces d'alimens que chacune d’elles offre à sa nourriture actuelle. | Ce pigeon est à peu prés de la même taille qué notre . pigeon domestique, columba domestica , Lin. , ayant dix pouces et demi de longueur du bout du bec à celui dé la queue. Tout le dessus de sa tête est blanc, entouré d’une bande rouge dont là couleur est susceptible de varier, suivant l'incidence de la lumière ; son cou chatoye dans les nuances du vert au bleu, avec des reflets de cui- vre de rosette; tout le reste du dessus et du dessous de son corps est d'un brun cendté bleuâtre ; les pennes de sesai- les sont brunes, ainsi que celles de sa queue : une peau blanche entoure ses yeux qui ont l'iris rouge : ses pieds sont de cette même couleur, ainsi que son bec dont l'extré- mité seule est blanche ; il a les ongles gris. 8. LE PIGEON A TÈTE GRISE, D'ANTIGUE. Lu Columba albicapilla. Tax. On trouve dans l'ile de Panay, l’une des Philippines, ainsi qu'aux îles de Luçon et d’Antigue, deux variétés de pi- geons, dont les différences soit si légères qu’on doit les regarder comme une seule et même espèce. La premiere qui a été représentée dans l'ouvrage de Son- nerat, planche LXIV, pag. 109, est de la taille de notre ramier ; columba palumbus , Lin. ; tout le dessus de sa tête est revêtu de plumes d'un gris-de-perle; son eou est d’une teinte légère de lilas, les couvertures de ses ailes sont d’un verdtendre, bordées d’une raie jaune; les grandes pennes Êf2 TABLEAU ÉFÉLÉMENTAIRE de ces partiessont noires , de même que celles de Ja queue : tout le devant et le dessous du corps de cet oiseau sont d'un vert jaunâtre pâle ; seulement la poitrine est marquée d’une large tache d’un jaune vif, et les couver- tures du dessous de la queue sont d'un brun rougeàtre. La femelle de cette premiere variété differe de son mäle, en ce que le sommet de sa tête et tout le dessus de son corps, sont d’un vert bleuâtre, tandis que le dessous est d’un vert jaunâtre : elle a les pennes des ailes noires, bordées de jaune. L'un et l’autre ont le bec court et de couleur grise; les pieds sont d’un rouge violet dans le male , et gris dans la femelle. La seconde variété, qui n’est que de la taille de notre biset, columba domestica, Lin., a le sommet de la tête d’un gris de perle , coupé brusquement sur la nuque par une couleur d’un brun rouge, susceptible de reflets changeans en couleur de cuivre de rosette, suivant l'in- cidence des rayons lumineux qui la frappent ; son cou et ses côtés sont du même brun que celui de la nuque; les petites couvertures de ses ailes sont d’un vert d'autant plus brillant qu'il prend, suivant le jour dans lequel on l’aperçoit, un éclat métallique. Ce pigeon a les grandes pennes des ailes, ainsi que celles de la queue, noires ; son ventre et ses flancs sont d’un gris sombre; il a l'iris des yeux jaune, le bec et les pieds d’un rouge de brique, et les ongles d’un brun obscur. 9 LE PIGEON A TÊTE POURPRÉE ET POITRINE ORANGÉE, DE JAVA. Columba purpurea. Lin. Aux iles de Java, dans la mer des Indes, entre les îles D'ORNITHOLOGIE. 443 de Sumatra, de Banca, de Bornéo, de Madure, de Bal et la terre d’Endragut, on trouve cette espèce de pigeon qui est de la grosseur de notre biset, columba domestica , Lin. , ayant neuf à dix pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle dé la queue. Ce gallinacé est “particulièrement remarquable par la couleur verdàtre dont est teint tout son plumage, à l’ex- ception du sommet de sa tête et de son cou, qui sont d’un pourpre pâle ; des pennes de ses ailes qui sont brunätres, et enfin de sa poitrine qui est d’un jaune orangé fort éclatant. Cet oiseau dont les couvertures inférieures de la queue sont d’un rouge d’écarlate, a l'iris des yeux jaune, et le bec de cette couleur dans quelques individus, et noir dans d’autres. 10. LE PIGEON AUX AILES ROUGES. Coluimba erythroptera. Lan. La longueur de ce pigeon, mesuré du bout du bec à celui de la queue, est de neuf pouces et demi. Son plu- mage est presque entierement noir, excepté son front et ses sourcils qui sont blancs ; le haut de son cou , ses épaules et les couvertures de ses ailes qui sont d’un rouge très- éclatant ; les pennes de sa queue sont d’une couleur cendrée depuis leur origine jusque vers le milieu de leur longueur , et noires dans tout le reste. La cou- leur de son bec varie suivant les divers individus ; les uns ont cet organe jaune et les autres noir; l'iris des yeux est dans tous d’un brun rouge, et leurs pieds sont bruns. C’est a l'ile d’'Eiméo, dans la mer du Sud, que l’on trouve cette espèce de pigeon qui renferme deux autres 44% TABLEAU ÉLÉMENTAIRE variétés : la premiére, originaire de l'ile d’Otahiti, a la gorge et la poitrine blanches, les sourcils d’un rouge bai, et les pennes des ailes et de la queue noiràtres. La se- conde, que l’on trouve à l'ile de Tanne, a tout son plu- mage d’un noir rougeàtre , excepté sa poitrine et ses sourcils qui sont blancs, avec les pieds rouges. 11.7 LE PIGEON A VENTRE BLANC DE LA JAMAÏQUE. — Columba jamaïcensis, Lan. Cette , espèce quia neuf pouces de longueur de l’extré- mité du bec à celle de la queue, se tient sur les arbres des forêts de la Jamaïque; il s'y nourrit de plusieurs espèces de baïes que la plupart de ces arbres produisent; il fait entendre fréquemment , à travers leur feuillage agréa- blement varié, une voix rauque et lugubre qui imprime à l’ame un sentiment de tristesse; on dit qu’on se dédom- mage du désagrément de sa voix par le fumet de sa chair qui passe pour un mets exquis. , Cepigeon a le sommet de la tête et le dessous du corps d'un blanc fort éclatant ; le haut du cou varié de bleu et de pourpre; le dos etle croupion d’un brun pourpré, les pennes de la queue bleues , terminées par une ligne transversale, blanche. On voit sur son bec qui est rouge, ainsi que ses pieds, un gros tubercule blanchâtre et fari- neux qui recouvre ses narines. L’iris de ses yeux est blanc, et ses ongles sont bruns. D'ORNITHSLOGIE. 345 Le) 12. LE PIGEON BARTAVELLE. Columba tetraoïdes. Lrx. Scopoli, an. r, pag. 125, n.0 180, fait mention d’une espèce de pigeon dont il ne désigne pas le pays natal; il se contente de dire seulement qu'il est de la taille de la perdrir nommée bartavelle (voyez ce que nous avons dit de cet oiseau à la page 79, n° 6, de ce vol. ), dont il a le port. Il ajoute que sa tête et son cou sont revêtus de plumes noires, bordées de blanc. 13. LE PIGEON BISET, FUYARD, OU DOMESTIQUE. Columba domestica. Lis. Nous n’'ajouterons rien ici à ce que nous avons dit de ce gallinacé, de ce vol., pag. 31, n.° 1. 14° LE PIGEON BLANC, MANGEUR DE MUSCADE, DE LA NOUVELLE GUINÉE. Columba alba. Tax. Cette espèce A de taille moyenne, a la tête, le cow, la poitrine , le ventre et les jambes blancs; la première moitié des pennes de ses ailes, les trois quarts de celles de sa queue sont de cette même couleur , et le reste est noir. Il à l'iris des yeux jaune ; son bec et ses pieds sont d’un gris clair. Ce pigeon habite la nouvelle Guinée, dans l'océan oriental, à l’est des Moluques ou la terre des Papous: 416 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Lailsenourrit denoix muscades, myristica moscata, Lin. ; dans le temps de leur maturité. Une particularité est assez remarquable dans cet oiseau, et elle nous a été transmise par plusieurs voyageurs , permi lesquels nous citerons Sonnerat. Ils prétendent qu'il avale les noix muscades tout entières, et que n’en pouvant digérer que l'enveloppe extérieure, il en rend les amandes comme il les a avalées, sans que celles-ci aient éprouvé la moindre altération dans son estomac, et que lorsque ces amandes tombent sur un terrain propice à leur germination, alors il en résulte autant de muscadiers. C’est ainsi que les corbeaux de nos contrées sément çà et là dans les campagnes les noyers, juglans regia, Lin., non pas en rendant les noix qu'ils ont avalées, mais en échappant celles qu'ils viennent de voler sur nos arbres, à l'arrière-saison, et qu’ils emportent au bout de leur bec. 15.7 LE PIGEON BLEU DU MEXIQUE. Columba cærulea. Lan. C’est dans l'empire du Mexique que l’on trouve le pigeon dont il est ici question; il est de la taille de notre pigeon biset, columba domestica, Lin.; son plu- mage est entièrement bleu, à l'exception néanmoins des couvertures supérieures de ses ailes et du dessous de son corps qui sont rouges. Il a l'iris des yeux, le bec et les pieds de cette même couleur, et les ongles d’un brun rouge. D'ORNITHOLOGIE. 447 10.° LE PIGEON BRUN, DE CARTHAGÈNE. Columba fusca. Lan. Jacquin fait mention dans son ouvrage intitulé : Bey- træge zur Naturkunde , etc., pag. 33 , n. 27, d’une espèce de pigeon qu'il dit avoir trouvé à Carthagene, dans l'Amérique méridionale , sur la côte de Terre-Ferme ; mais la description qu’il en donne est si succincte, qu’on se croit autorisé à lui faire un reproche sur sa parcimo- nie dans les termes. Cet oiseau, dit-il, n’est que de la taille de notre tour- terelle, columba Eurtur. Lin.; tout son plumage est brun, à l’exception de son cou et de sa poitrine qui sont on- dulés de noir et de blanc; il a les yeux noirs. | 7. LE PIGEON BRUN DE LA NOUVELLE-ESPAGNE, Columba nævia. Lax. Fernandez a indiqué une espèce de pigeon qu'il dit être de la taille de notre biset, columba domestica, Lin.; il lui assigne pour demeure habituelle les forêts des contrées froides de la Nouvelle-Espagne, dans l’Amé- rique septentrionale. La description qu'il donne de ce gallinacé n’est pas plus satisfaisante que celie que Jacquin a tracée du pré- cédent. Il se contente de dire que cet oiseau est d’un brun tacheté de noir, ayant les pennes des ailes et de la queue brunes; la poitrine et le ventre d’un fauve clair, ci les couvertures du dessous de la queue cendrées. 448 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 19.” LE PIGEON CAVALIER. Columba eques. Lan. Linné a désigné, dans son Systema naturæ, edit. 13, à notre biset, columba domestica , Lin., dix-neuf variétés qu’il a indiquées par les lettres de l'alphabet; celle dont il est question est notée dans cet ouvrage V. s. Ce pigeon ne doit être considéré ici que comme une variété tertiaire, puisqu’au rapport des ornithologistes les plus recommandables, il n’est que Îe produit du pigeon grosse gorge, columba guflurosa , Lin. ( voyez cette espêce ci-après, n.° 39, pag. 462), et du pigeon messager, co- lumba tabellaria, Lin. ( voyez aussi cette espèce ci-après, n.° 42, pag. 464) qui eux-mêmes ne sont que des variétés du biset, columba domestica, Lin. Le pigeon cavalier doit donc participer du pigeon mes- sager et du pigeon grosse-gorge. En effet il porte sur les narines, comme le premier , des tubercules fort épais et farineux, et, comme le second, il a la faculté de gonfler son jabot par une grande quantité d'air. Quant à son plumage on ne pourroit le désigner qu'individuellement, puisqu'il doit tenir de celui des auteurs de ses jours : or, que l’on voie à la 45° page de ce volume les variétés du plumage de l2 race des pigeons grosse-gorge, et on sera convaincu de la difficulté qu'il y auroit à désigner exac- tement celui du pigeon cavalier. 19.” LE PIGEON COURONNE DE POURPRE, DE LA MER DU SUD. Columba purpurata. Lis. Dans les îles de la mer du Sud situées entre les tro- D'ORNITHOLOGIE. 439 piques , on trouve une espèce de pigeons de la grosseur à peu près de notre tourterelle , columba turtur, Lin., elle n’a que neuf pouces de longueur de l’extrémité du bec à celle de la quete. Cet oiseau qui se nourrit de ba- nanes, musæ, Lin., est susceptible de s’apprivoiser au point de s'attacher affectueusement , et d’être fort agréable aux personnes qui se livrent au plaisir innocent de soigner son éducation. | | La couleur dominante du plumage de ce pigeon est un beau vert en dessus du corps, et. un vert cendré en dessous. Il a le front et une partie du sommet de la tête d’une belle couleur pourpre qui, dans quelquesindividus, est entourée d’une ligne jaune ; le reste du dessus de sa tête et le haut de son cou sont d’un cendré verdâtre ; les pennes les plus extérieures de son aile sont noires, bor- dées en dehors de vert; néanmoins les deux premières sont sans bordure ; les plus voisines du corps sont aussi noires, mais elles sont{bordées extérieurement de jaune. Les pennes de la queue , quoique d’égale longueur, sont toutes terminées en pointe; elles sont noires aussi, mais bordées de vert du côté extérieur , et marquées d’une barre transversale qui se trouve interrompue dans le milieu de cet appendice. Cet oiseau a le bec jaunûtre, quelquefois noiràtre; l'iris des yeux jaune ; les pieds rudes, noirs, et terminés par des ongles de cette dernière couleur. 450 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 20:° LE PIGEON COURONNE DES INDES OU LE GOURA: Columba coronota. Lan. Quoique cet oiseau soit aussi gros que le coq de la plus forte taille, et quoique Brisson l'ait rangé parmi les faisans, il men est pas moins une véritable race du genre des pigeons ; il en a le bec, la tête, le cou, les jambes, les pieds, les ongles, la voix, le roucoulement, en un mot, lés mœurs, comme les habitudes corporelles. Malgré que plusieurs ornithologistes et M. de Buffon lui-même désignent l'ile de Banda, l’une des Moluques sous la ligne, comme le pays natal de ce pigeon, on a la certitude aujourd’hui qu'il ne se trouve , du moins dèns son état de liberté, due dans la Nouvelle - Guinée qui est située à l'est des Moluques dans l'Océan oriental, où on le nourrit en basses-cours, à peu pen comme nous nourrissons nos poules. Sion le trouve al’ile de Banda, c’est parce Rss a été ‘transporté de la Nouvelle Guinée, comme ceux que Mauduyÿt dit avoir vu en Hollande, et même à Paris chez M. le prince de Soubise qui possédoit cinq de ces oiseaux vivans, les- quels, ne mèles et femelles, n’ont Jamais reproduit leur espèce ni à Paris nien Hollande : ce qui nous paroïît plus étonnant encore, c’est qu’au rapport de Sonnerat , cette même espèce n’a jamais niché aux Moluques. Ce- pendant nous sommes convaincus que si quelques oise- leurs, tels qu’il y en a plusieurs à Paris, se donnoient la peine de soigner ce pigeon, comme ils le font pour un grand nombre d'oiseaux des contrées les plus chaudes, ainsi que pour ceux qu'ils oùt tirés des régions les plus froides, ils parviendroient à le faire nicher chez nous , comme ils D'ORNITHOLOGIE, 45 l'ont fait pour ceux-ci, et alors ils auroient procuré à nos basses-cours un hôte bien précieux. On voit aux galeries du muséum d'Histoire naturelle de Paris deux individus de cette espece ; très-bien em- paillés , et c’est d’après eux que nous en traçons ici son signalement. Ce pigeon qui, comme nous venons de le dire, est de la grosseur d’un très-grand coq, est d'une forme beaucoup plus allongée que la sienne. La couleur dominante de son plumage est d’un cendré bleuâtre qui prend une teinte beaucoup plus foncée sur les grandes pennes des ailes et sur celles de la queue; les pennes moyennes des ailes sont d’un blanc éclatant du côté extérieur, en sorte que lorsque cesinstrumens du vol sont ployés, la réunion du blanc de ces pennes y forme une bande longitudinale, d'autant plus apparente qu'elle contraste davantage avec la couleur obscure du fond de ces parties. Il a le haut et le bas du cou d’un marron pourpré qui, à l’origine de la poitrine, forme une espèce de collier d’un pouce et demi de largeur au moins. Cette mème couleur se répand sur les couvertures supérieures des ailes. Mais ce qui rend ce pigeon plus remarquable, c’est la superbe et singulitre huppe qu’il porte sur la tête; elle est composée d’une touffe de plumes frisées, à barbes désunies, longues de six pouces au moins, et de même couleur que celles du fond du plumage. Cette magnifique huppe est susceptible de s’abaisser ou de se relever à la volonté de l'animal. Dans l’état de repos elle tombe de chaque côté de la tête où elle forme sur la nuque une sorte de croissant; mais quand l'oiseau la relève et l’étale, elle présente une pompeuse aigrefte disposée sur un plan demi-circuläire. | 36 * 552 TABLEAU EÉLÉMENTAIRE Le bec de ce pizeon est brunâtre dans toute sa lon- gueur , excepté la pointe qui est grisätre; de la base de son bec il part de chaque côté , sur les joues , un trait d’un noir de velours qui, en se dirigeant vers l’occiput traverse les orbites des yeux dont l'iris est d’un brun rouge; ses pieds sont gris, recouverts de petites écailles très-rapprochées , et ses ongles bruns. 21. LE PIGEON CUIRASSÉ, OU COQUILLE HOLLANDAISE. Columba galeata. Lax. Cette espèce est une de celies dont Linné a formé ses vingt variétés de notre pigeon biset, columba domestica , Lin. ; c’est la treiième qu'il a notée V. o. (Voyez ce que nous avons dit de ce gallinacé aux pag. 42 et 48 de ce volume. ) = Oo 22. LE PIGECN CULBUTANT. Columba gyratrix. Lan. Sa taille n’est guère plus forte que celle de notre biset, columba domestica, Lin. ; cet auteur en a fait la douzième variété de ce pigeon, qu'il a notée V. n.). Il vole tres-légèrement et fort long-temps. Aucune autre espèce ne s’éléve aussi haut que lui; néanmoins il retombe toujours sur lui-même comme un oiseau qui se- roit atteint du plomb meurtrier, ou bien comme un corps que l’on auroit jeté en l’air, et qui reviendroit au point d’où on l’auroit lancé. ( Voyez, quant aux cou- leurs de la robe de ce pigeon, ce que, nous avons dit à ls pag. 50 de ce volume. ) D'ORNITHOLOGIE. ATX 23°. LE PIGEON DE BARBARIE. Columba barbarica. Lax. Suivant Aldrovande , ce pigeon est originaire de l'ile de Crête, aujourd’hui Candie, et suivant Willugby , on ne le trouve qu’en Barbarie, dans l'Afrique septentrionale. Quoiqu'il en soit de l’opinion de ces deux autorités respectables, ce pigeon, dont Linné a fait sa septième variété de notre biset, columba domestica, Lin., et qu'il a notée V. h.), a le bec extrêmement court, de même que les pieds. Ses yeux sont entourés d’une large bande de peau nue, et recouverte d’aspérités à 1ramelons farineux. Tout son plumage est d’un bleu de ciel, avec une double bande transversale , noire sur chaque aile. Son bec, l'iris de ses yeux et ses pieds sont rouges, ainsi que ses doigts qui sont terminés par des ongles bruns. 24.° LE PIGEON DE CORO. Columba corensis. Lan. Jacquin , Beytr. p. 31 , n.° 25, a fait mention d’une espèce de pigeon qui habite près de la ville de Coro , dans la province de Vénézuela en Amérique. Il dit qu’on l'apprivoise très-facilement, surtout lorsqu'on a eu som de le prendre jeune ; il ajoute que l’on pourroit même en former dans le pays des colombiers, comme on fait en France de ceux qu’on y nourrit; ils seroient dans ces contrées une grande ressource, car on prétend que La chair de cet oiseau est un très-bon mets. 454 TABLEAU ELEMENTAIRE Son plumage, tant en dessus qu’en dessous du corps, est d'un gris agréable; les pennes de sa queue qui sont c’égale longueur , sont de cette même couleur. Ce que ce pigeon offre de plus remarquable , ce sont les plumes du haut de son cou qui y sont symétriquement rangées en forme d’écaiiles de poissons, et ses beaux yeux rouges, entourés d’une peau nue ponctuée de noir. 25° LE PIGEON DE GUINÉE. Columba guinea. Lax. C'est parmi les rochers escarpés de l'Afrique méridio- nale que l’on trouve ce pigeon qui est à peu prés de la taille de notre ramier, columba palumbus, Lin. La couleur générale de son plumage, tant en dessus qu'en dessous du corps, est d’un cendré clair, seulement les plumes qui revêtent son cou sont bordées de rou- geàtre, et ses épaules d’une couleur brune pourprée , susceptible de chatoyer en violet, suivant l'incidence de la lumiere. Cette même couleur brune pourprée se répète sur les couvertures des ailes, ainsi que sur les trois pennes les plus voisines du corps, qui sont ter- minées par une tache blanche un peu triangulaire. Toutes les autres pennes de l’aile sont noires, bordées extérieu- rement d’un beau gris de perle; celles de la queue sont d’un cendré foncé ; elles sont coupées à leur extrémité par une bande transversale noire. Le bec de cet oiseau est d’un brun noir; il est sur- monté, dés sa base, d’une membrane de couleur cendrée qui lui recouvre les narines; l'iris de son œil est orangé ; ses pieds sont d’un rouge pâle, et ses ongles bruns. D'ORNITHOLOGIE. 455 26.° LE PIGEON DE LA. MARTINIQUE. Columba martinice. Tax. Quoique un peu plus grande que notre tourterelle , columba turtur, Lin. , ce pigeon paroït néanmoins plus court, parce qu'il a une forme plus ramassée que la sienne ; tout le dessus de son corps, ainsi que son cou et sa poitrine, sont d’un brun marron glacé de violet, les grandes pennes de ses ailes sont de même couleur du côté extérieur et à leur extrémité, mais intérieurement elles sont rousses ; toutes celles de la queue sont de même couleur que le dessus du dos; le ventre et les couvertures inférieures de la queue sont d’un brun roussâtre, et Les flancs d’un roux plus prononcé. Cet oiseau, qui se trouve à la Martinique , a l'iris de l'œil d’un brun rouge; son orbite est entouré d’une mul- titude de mamelons d’un rouge fort éclatant; son bec et ses pieds sont de cette même couleur, et ses ongles gris. 27. LE PIGEON DE LA MER DU SUD. Columba pacifica. Lix. Latham, dans son Syn. 11, p. 653, n.° 2/4, a le pre- mier signalé ce pigeon qui habite plusieurs iles de la mer du Sud, et particulièrement celles des Amis. où Labillar- dière l'a retrouvé lors de son voyage à la. recherche de la Peyrouse. | Tout le dessus du corps de ce gallinacé est un mélange de gris et de brun, susceptible de reflets d’un vert brillant, comme un métal poli; il a les pennes des aïles brunes, 456 TABLEAU ÉLEMENTAIRE et celles de la queue d’un noir profond, chatoyant en vert; son menton est blanchâtre et sa poitrine d’une cou- leur grise, glacée de vineux ; il a les couvertures du dessous de la queue d’un rouge ferrugineux ; son bec noir est surmonté à sa base de tubercules de même cou- leur ; les pieds sont bruns dans quelques individus, et noirâtres dans d’autres. 28.° LE PIGEON DE LA NOUVELLE ZÉLANDE. Columba novæ Seelandie. Lan. La longueur totale de ce pigeon mesuré du bout dx bec à l'extrémité de la queue, est de dix-huit pouces. L’indication de son espèce instruit suffisamment du lieu de son origine , sans qu’il soit besoin de le répéter encore. Le’ plumage de cet oiseau offre une distribution de couleurs qui, quoique bizarre en apparence, ne laisse pas que de présenter à l’œil de l'observateur attentif un dessin fort agréable. Tout le dessus de son corps est d’un rouge foncé, et le dessous presque entièrement d’un blanc pur et éclatant; sa gorge, quoique de cette derniere couleur, est néanmoins susceptible de reflets verts plus ou moins éclatans, suivant qu’elle est plus ou moins di- rectement frappée des rayons de la lumiere; es pennes de ses ailes sont brunes, et celles de sa queue noires ; les couvertures du dessus de cet appendice sont bleues, celles du dessous sont d’un gris bleuâtre. Ce pigeon a l'iris des yeux rouge, leurs orbites sont entourés d’une peau de même couleur; son bec et ses pieds sont rouges aussi, et ses ongles d’un brun rougeûtre. D'ORNITHOLOGIE. 457 20.° LE PIGEON DE L’ILE-DE-FRANCE. Columba Franciæ. Lx. Sonnerat est le premier ornithologiste qui ait parlé de ce pigeon qu'il a fait figurer dans la relation de son Voyage aux Indes et à la Chine, tom. IT, pag: 176, pl. 101. J1 le représente dans des dimensions plus grandes que celles de notre ramier d'Europe, columba palumbus , Lin. : il dit que les plumes qui recouvrent sa tête , son cou et sa poitrine sont longues, étroites et terminées en pointe, et que, quoiqu’au toucher elles paroissent être autant de lames cartilagineuses, cependant elles ont l'éclat d’un métal poli. Le vêtement de cet oiseau, sur le dos, sur les ailes et sous le ventre, est d’un brun obscur; son croupion, ainsi que les pennes de sa queue sont d’un beau rouge de carmin ; il a le bec de cette même couleur, ainsi que les yeux dont les orbites sont entourés d’une peau nue d’un rouge foncé; ses pieds et ses ongles sont noirs. C’est à l'Ile-de-France que l’on trouve ce pigeon dont la chair passe dans le pays pour être un poison. 30.° LE PIGEON DE MONTAGNE, DE CAYENNE. L] Columba montana. Lan. Brisson , Ray , Sloan, Baw, Edward et Latham font mention dans leurs ouvrages d’une espèce de pigeon qui habite Cayenne et la Jamaïque. Sa longueur, du bout du bec à l’extrémité de la queue, est de huit pouces et demi. Tous ees ornithologistes disent que cet oiseau a le 458 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE port de notre perdrix, tetrao perdrix, Lin., et qu'il place sur un arbre peu élevé de la forèt son nid qu'il garnit intérieurement de coton et de poils d'animaux. Le dessus de son eorps est entièrement roux; sa gorge et sa poitrine sont de couleur incarnate ; il a les flancs et les couvertures du dessous des aïles jaunes; son ventre ainsi que les couvertures inférieures de sa queue , sont roussâtres; son bec est d’un brun roux; l'iris de ses yeux est rouge ,; ayant les orbites entourés d’une peau nue d’un rouge de sang ; ses pieds sont de cette même couleur, et ses ongles d’un brun rouge. 31.° LE PICEON DE MONTAGNE, DU MEXIQUE. Columba hoilotl. Las. On trouve au Mexique, une espèce de pigcon qui est à peu prés de la grosseur du pigeon romain, columba hispanica , Lin.; il a son plumage, tant en dessus qu’en dessous du corps, d’un roux pourpré; à l'exception néan- moins des petites couvertures deses ailes qui sont blanches; Piris de ses yeux, son bec et ses pieds sont d’un rouge fort éclatant, et ses ongles d’un brun marron. 32.° LE PIGEON DE NICOBAR. ÿ Columba nicobarica. Lan. Albin a décrit et donné le dessin d'une espèce de pigeon qu'il a nommé pigeon des iles de Nicobar (ou Nincombar, comme il les appelle). Ce pigeon est de la taille du ramier d'Europe, columba palumbus, Lin. Albin ajoute , et Brisson l’a répété après lui, que cet oiseau a tout le; plumage de la tête et de la gorge d'un noir changeant D'ORNITHOLOGIE. 159 en bleu; le cou et le dos variés de bleu, de rouge, de pourpre et de jaune sur un fond vert; que les plumes qui revêtent son cou sont longues, étroites et suscep- tibles des reflets iles plus brillans de cuivre de rosette , suivant l'incidence de la lumiére. Il dit que la poi- trine, le ventre, les flares et les jambes, sont dun brun marron , et les couvertures supérieures des ailes vertes; que toutes les pennes des aïles sont ur mélange de brun et de roux, excepté cependant les trois premiéres qui sont bleuûtres, et que toutes celles de la queue sont blanches ; il dit enfin que cet oiseau a le bec gris ; les pieds bruns en devant et jaunes en arriére , avec des ongles d'un brun noir. Suivant Mauduyt la description que les deux auteurs que nous venons de citer ont donnée du pigeon dont il s’agit ici, n’est point en harmonie parfaite avec la planche en couleurs qu’en a tracée ou esquissée, le premier de ces auteurs lui-même, quoique cependant Mauduyt prétende que cette planche ccincide parfaitement avec les cou- leurs du plumage de plusieurs individus de cette espèce qu'il a vus chez des curieux, soit à Paris soit en Hollande , et qui disoient les avoir reçus de l’Ile-de- Beurbon. Dans l'impossibilité où nous nous trouvons de cons- tater la vraie patrie de ces oiseaux qui, par la différence de leur livrée, paroissent n'être pas la même espece, neus avons pensé qu'il valoit mieux copier ici ce qu'en dit Mauduyt, afin d'éveiller l'attention des amateurs qui pourront s'assurer Gans la suite s'ils sont d’especes diffé- rentes, ou s'ils ne sent qu’une variété l'un de lautre, ou enfin si les auteurs qui en ont parlé se seroient trompés dans la description qu'ils en ont faite. 24 ER 797 - F 7 mparn T A £ ÿ « Celui que J'ai vu, dit Mauduyt ; Encyclop. méth. pag. 460 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE « 370, n’étoit guëre plus gros qu’un pigeon mondain, * ( Voy. ce que nous avons dit des mondains aux pag. 41 et 46 de ce vol.) La tête et le haut du cou étoient d’un vert « bleuâtre; la queue blanche ; l’extrémité des pennes de « l'aile brunäâtre ; le reste du plumage d’un vert à reflets « de cuivre de rosette, très-brillans; les pieds rouges. IL « avoit le long du cou de longues plumes étroites, comme « le pigeon de Nicobar. ? é 33.° LE PIGEON DE NORWÉGE. Columba Norwegica. Lin. Linné, a fait de ce pigeon sa sixième variété de notre biset, columba domestica, Lin. , qu’il a notée V. g.). On ne connoït ce pigeon que d’après ce qu’en a dit Schwenfeld, et qui n’est pas fort satisfaisant. Cependant une race aussi intéressante que celle-là , puisqu'il dit qu’elle est plus grosse qu'aucune de celles de nos pigeons domestiques , valoit bien la peine que cet auteur ne se bornât pas à nous informer seulement qu’elle est huppée, patue, et d’un blanc de neige. 34.° LE PIGEON DE ROCHE. Columba saxatilis. Lan. Celui-ci est la troisième variété de notre biset, co- lumba damestica, que Linné a notée V. c.) (Voyez à la pag. 51 de ce volume ce que nous avons dit de ce galli- nacé. } D'ORNITHOLOGIE. 461 Cd 35.° LE PICEON DOMESTIQUE, Columba domestica. Tax. Cette espèce n’est autre que le biset que nous avons dit, pag. 31 de ce volume, être la source originelle de toutes les races de pigeons, et que l’indusirie de l’homme a su réduire en domesticité. 36.° LE PIGEON DU MEXIQUE. Columba Mexicana. Lax. Dans les contrées froides de la Nouvelle - Espagne, on trouve une espèce de pigeon dont la couleur du plumage est entièrement brune, à l’exception de la poitrine et de l’extrémité des ailes, qui sont blanches; le bec, l'iris de l'œil, ainsi que les ongles, sont noirs ; une peau rouge entoure les yeux;les pieds sont de cette dernière couleur. 37.” LE PIGEON FOUNINGO BLEU. Columba Madagascariensis. Lan. C'est à Madagascar que l’on trouve cette espèce de pigeon quirenferme deux variétés. La première , que les naturels du pays nomment fou- ningo-mena-rabou, est un peu moins grosse que notre biset, columba domestica, Lin. ; elle à tout le plumage d’un bleu noir profond , excepté les pennes de la queue qui sont d’un pourpre violet fort-éclatant; l'iris de ses yeux, son bec et ses pieds , qui sont garnis de plumes jusqu’à l’origine des ongles, sont rouges. On voit autour des orbites une peau nue de cette même couleur, mais fort éclatante. La seconde variété que les mêmes insulaires appellent mattssou, est d’une taille semblable à celle de la pre- ME TABLEAU ÉLÉMENTAIRE mière. Son plumage, au lieu d’être d’un bleu noir comme celui de la premitre, est au contraire d’un vert olivâtre, plus foncé en dessus qu’en dessous du corps; les pennes de ses ailes sont noirûtres, bordées extérieurement d’une couleur d’un jaune de soufre. On voit sur le pli de chaque aile une tache rougeâtre qui paroît come éteinte; les pennes de la queue sont cendrées , et le bas-ventre, ainsi que les jambes, sont variés de taches vertes, jaunes et noirätres. Le bec et les ongles sont cendrés; l'iris est rouge, ainsi que les pieds qui sont garnis de plumes jusqu’à la base des ongles qui sent d'un brun noir. 38.° LE PICEON FRISÉ. Columba hispida. Lan. Linné a fait de ce pigeon sa neuvième variété de notre biset , eolwmba ‘domestica , Lin., qu'il'a notée V. .). Toutes les plumes qui revêtent le corps de cet oiseau que nous croyons originaire des régions glacées du Nord, sont trés-petites , blanches, frisées, et surtout celies qui sont placées sur le dos et sur les aïles. Son bec est brun; l'iris de ses yeux, de même que ses pieds, sont rouges, et ses ongles d’un brun rougeûtre. 39.° LE PIGEON GROSSE-CORGE. Columba gutturosa. Lan. Quoique toutes les espèces de pigeons aient la faculté de gonfler &’air leur jabot, surtout au moment eù les mâles font ce que l’on appelle la roue autour de leurs fe- inelles ; la race dont il est ici question, et dont Linné a fait sa seizième variété de notre biset, columba domestica; Lin., qu'il a notée V. r.), cette race, qui est constante, a cela de particulier que sa gorge est quelquefois si dé- D'ORNITHOLOGIE. 463 mésurément tendue, qu'elle est plus grosse que tout le reste de son corps. Ce pigeon est du nombre de ceux de nos colombiers qui sont de la plus forte taille. Nous ne répéterons pas ici ce que nous avons dit, pag. 45 de ce volume, des nuances de couleurs différentes de sa robe. 4O.° LE PICEON HUPPÉ. Célumba cristata. Lin. On donne communément ce nom aux pigeons qui ont les plumes de l’occiput plus longues que celles qui re- couvrent le sommet de la tête, et celles qui revétent le haut du cou; leur extrémité se dirige toujours en avant, vers les yeux. Mais comme il se trouve des pigeons huppés dans différentes races, dans des races même disparates qui se sont unies par quelque occasion fortuite, on ne doit pas prendre la dénomination de pigeon huppé dans une trop grande acctption , en lappliquant indistinc- tement à toutes les espèces d’oiseau de ce genre qui ont la tête ornée d’une huppe ; cette épithete ne doit s’appli- quer à la rigueur qu’à la seule race dont il est ques- tion, à celle qui a les pieds garnis de plumes jusqu’à l’o- rigine des doigts au moins, dont la couleur dominante du plumage est cendrée; à celle enfin dont Linné a fait sa cinquième variété de notre pigeon biset, columba do- meshica, Lin., qu'il a notée V.f. ). 41. LE PIGEON JAMBOO. Columba jambu. Lan. Dans la description que Marsden à faite en anglais, ét 464 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE que Parraud a traduite en français , de ce pigeon de Su- matra , il paroît que c’est une espèce de ramier bien plus petite que toutes ses congéneres. Ce gallinacé, dont le fond du plumage est vert, a le front de couleur de gérofle ; la poitrine et la gorge blanches; on voit sur les côtés de sa poitrine deux bandes, dont l’une est verte et l’autre de couleur canelle : elles s’é- lèvent de cette partie en se dirigeant vetrsles orbites des yeux dont l'iris est jaune, ainsi que le bec; il a les pieds verdâtres et les ongles d’un beau jaunûâtre. D'autres ornithologistes prétendent que ce n’est pas à Sumatra que l’on trouve ce pigeon, mais à l'ile de Java: ces mêmes auteurs présument que cet oiseau fait sa principale nourriture du riz dont ces îles abondent , et particulièrement celle de Java. 42.° LE PIGEON MESSAGER. Columba tabellaria. Law. Linné a fait de ce pigeon la quinzième variété de J'es- pèce de notre biset, columba domestica, Lin., qu’il a notée Via} Le pigeon messager ressemble beaucoup au pigeon turc, columba turcica , Lin. ; il en a la forme et les cou- leurs du piumage ( voyez ce que nous en avons dit dans ce volume, pag. 46); son bec, de longueur moÿenne ; est de couleur noirûtre ; ses narines sont couvertes d’une excroissance formée par deux gros tubercules blanchätres et poudreux; ses pieds sont rouges et ses ongles bruns. On a donné à ce pigeon ke nom de messager, parce qu’on prétend qu'autre fois on s’en ser voit de préférence D'ORNITHOLOGIE. 463 en Egypte pour porter des écrits d’un endroit à un autre. Cependant des voyageurs qui ont visité ces contrées assu- rent que les naturels du pays n’ont pas même d'idée de cet usage qui, sans doute, est aboli depuis long-temps. Au reste, comme l’observe M. de Puffon, ce seroit une erreur de croire que la faculté messagère soit une qualité exclusivement propre à l'espèce de pi£eon dont il est ici question ; 1! n’en est aucune autre au contraire que l'on ne puisse indistincteinent employer à rapporter d'une petite distance es objets légers , tels que des écrits qu'on leur aurcit attächés au pied. Pour cela ül sufliroit, lorsque l’on désireroit recevoir proinptement des nouvelles de deux ou même de trcis lieues de dis- tance, de prendre, apres la pariade bien étarlie, un mâle de pigeon, de le séparer de sa femelle, en lem- portant dans le lieu d’où l'on voudroit recevoir des nou- velles ; de lui attacher au pied un écrit qui les contint, puis de mettre en liberté dans les airs cet oiseau qui, à coup sûr, revienaroit avec une vitesse extrême vers l’objet de ses plus douces affections. et alors on Îe débarrasse- roit d’un message dont il n’auroit d'autre notion que celle de la‘gêne que cet écrit lui auroit occasionnée au pied. 43. LE PIGEON NONAIN. Columba cucullata. Lix. Cette espèce est‘encore une des variétés du biset, co- lumba domestica, dont Linné a fait sa huitième, qu'il a notée V , i); elle est une des plus agréables, soit par l'élégance de sa forme, soit par la mauiere dont les plu- mes du sommet de sa tête sont disposées (voyez ce que nous avons dit de cet oiseau, aux pag. 41 et 47 de ce vo- Te 2e 51 466 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE lume); nous n’y ajouterons autre chose, sinoa qu'il a Le bec tres-court. 9 44." LE PIGEON PAON. Columba laticauda. Tax. Le pigeon paon est la onzième variété du biset, eo- lumba domestica de Linné, qu'il a notée V. m.). ( Voyez ce que nousen avons dit aux pag. 42 et 47 de ce vol.). Nous observerons de plus à son occasion que le mâle ct la femelle ont également la faculté de relever leur queue qui, dans les plus belles espèces, est composée de trente-deux pennes, tandis que les autres pigeons n'en ont que douze. Plus les pigeons paons relèvent leur queue, et plus aussi ils portent leur tête en arriére, et souvent de manière que celle-ci touche l’extrémité des pennes de cet appendice. Lorsque le mäle fait ce que l'on appelle la roue, il éprouve dans tout son corps une sorte de trembiement qui paroïît être produit par la contraction violente de ses muscles. A5 LE PIGEON PATTU. Columba dasypus. Lx. On donne communément la dénomination de pattus à tous les pigeons qui ont les pieds garnis de plumes jusqu'à la base, et quelquefois jusqu'au bout des doigts. Il seroit sans doute difficile de décicer aujourd’hui à quelle espèce cette épithete convient davantage, à cause des mélanges sans nombre que Pona fait des races différentes de ce gallina- cé ; cependant, dans la supposition que l’on auroit conservé quelquesraces pures, nous croÿons quel: dénomination de D'ORNITHOLOGIE. 467 pattus ne peut convenir à aucun autre mieux qu’aux pigeons romains et aux pigeons tambours. ( Voyez ce que nous avons dit de ces deux races aux pag. 41, 43, 47 cet 49 de ce vol.). Linné a fait du pigeon pattu sa quatrième variété de notre biset, columba domestica, Lin., qu'il a notée V. e.). ‘ < AG LE PIGEON POMPADOUR. à Columba pompadora. Lan. Brow, dans ses Illus£. tom. 19, 20, a décritet même figuré cette espèce de pigeon qui n’étoit point encore connue; et qu'il a trouvée à l'ile de Ceylan. Cet ‘oiseau, dit l'auteur précité, se tient parmi les arbres des forêts de cette :le pyriforme, sur lesquels il place son nid. Quoiqu'il ne soit pas aussi gros que notre tour- terelle , columba turiur . lin. , néanmoins les insu- laires emploient toutes sortes de piéges, et surtout les gluaux pour le prendre, parce que sa chair, pour son malheur , a la fatale réputation d’être un nets très-délicaf: Le fond du plumage du pigeon pompadour est d’une couleur verdâtre , dont l'obscurité est embellie par l'éclat d’une belle couleur jaune répandue sur ses joues et sur sa gorge; à cette première couleur des joues et de la gorge qui produit le plus bel effet, il s'en joint d’autres non moins brillantes, sur diverses parties de son corps. Les couvertures du dessus de ses ailes, par exemple, sont d’un rouge pourpre extrêmement vif, et les grandes pennes de ces parties noires, bordées de jaune ; celles de la queue qui sont beaucoup plus longues que dans la plupart des espèces de ce genre, sont de même couleur que les plumes qui revêtent le corps; elles sont 31 * 68 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE terminées dans quelques individus par une bande trans- versale jaune. Le bec de cet o7seau est bleuâtre , de même que ses ongles; l'iris de son œil est d’un brun rouge, et ses pieds sont de couleur de chair. 47 LE PIGEON RAMIER. Columba palumbus. Lan. Nous n’ajouteronsrien ici à ce que nous avons dit anté- ricurement de ce gallinacé. ( Voyez son histoire, pag. 34 de ce vol. ). ; 48° LE PIGEON RAMIER CUIVRÉ, MANGEUR DA MUSCADES, DE LA NOUVELLE ZÉLANDE. Columba ænea. Lin. Var.: b. Nous ne séparons l'espèce dont il est ici question de celle du ramier des Moluques, ci après n.° 50, que parce qu'elle se trouve à la Nouvelle-Zélande et à l’Ile d’Ams- terdam dans la mer du Sud, tandis que celle du n.°, 50 hab te exclusivement les îles Moluques dans la mer des Indes, sous la ligne, et surtout parce que Linné en a fait une variété du ramier des Moluques, qu’il a notée V. bi}: D'ailleurs ces deux oiseaux , au rapport de Sonnerat quiles a observés sur les lieux mêmes, sont parfaitement serablables; ils ont les mêmes mœurs et les mêmes habitudes. Tout ce que nous dirons donc ci-après du ra- mier des Moluques peut et doit s'appliquer au ramier cuivré mangeur de muscades , de la Nouvelle-Zélande, D'ORNITHOLOGIE. 469 49. LE PIGEON RAMIER D'AMBOINE. Columba indica. Lix. Ce ramier, quin’est pas plus gros que notre tourterelle, eolumba turtur, Lin., n'ayant que dix pouces de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue , habite l'ile d’Amboine , une des Moluques. C’est un des oiseaux les plus agréables à la vue, quoi- que la couleur dominante de son plumage ne soit que pourprée, mais ce pourpre est relevé par des couleurs. différentes qui sont répandues sur diverses parties de son corps, où elles produisent un effet piquant, Le sommet de sa tête est bleuûtre, ses épaules sont d’un beau. vert ; la partie supérieure-de son dos est d’un vert doré, à reflets cuivreux ; le bas de cette partie, ainsi que. le croupion, sont cendrés. Il a le pli de l'aile d’un blanc maculé de vert ; les grandes pennes de ses ailes sont bru- nâtres, de même que celles de sa queue, dont cependant les deux, du milieu sont entièrement d'un noir profond. Il a tout le dessous du corps, depuis le ventre jusqu'aux couvertures de la queue inclusivement, d’un rouge bai assez. vif;son bec, l’irisde son œil et ses pieds sont d’un rouge d’é- carlate, ses narines et les membranes qui les recouvrent sont bleuâtres, etses ongles d'un beau rouge. Jacquin, Beytr. p.55, n.° 29, tom. 16, fait mention. dune variété de cepigeon quise trouve dans les mêmescon-. trées que lui, et qui a lescouverturesdesailes violettes; leurs grandes pennes sont vertes ; le croupion est bleu. Du. xeste cette variété ressemble parfaitement à l’autre, 450 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE bo LE PIGEON RAMIER DES MOLUQUES, Columba ænea. Lix.Var . a. Celui-ci est, comme nous l'avons dit plus haut. le même individu que celui du n° 48. Ils ne différent en rien l’un de l’autre que par les contrées qu’ils habitent ; il$ sont tous deux du double plus gros que notre rawier, columba: palumbus, Tin. Celui de n° 48 habite là Nouvelle - Zé- lande ainsi que l'ile d'Amsterdam, dans la mer du Sud; celui , au contraire, dont il estici question, ne se trouve qu'aux Moluques : ainsi le signalement que nous en allons tracer doit, sous tous les rapports, s'appliquer à l'autré espéce, Le pigeon ramier des Moluques à la tête, le cou , la gorge. la poitrine, le ventre et les jambes d’un beau gris de perle. lavé d'une teinte légère de pourpre; son dos, les couvertures de ses ailes, son croupion , ainsi que les couvertures du dessus de sa queue, sont d’un vert doré, susceptible de reflets brillans de couleur de cuivre ce rosette, suivant l'incidence des rayons de la lumière; les grandes pennes de ses aïles sont d'un gris cendré, ter: minées de vert doré ; les moyennes sont cendrées inté- rieurement ct extérienrement, elles sont d’un vert doré, et terminées de cette même couleur; celles e’sa queué sont aussi d’un vert doréen dessus; mais en dessous elles sont grises ; les côtés de son corps ou ses flancs sont d’un gris de perle, et les couvertures du dessous de sa queue sont d’une couleur de marron pourpré ; l'iris âe son œil est d'un rouge bai; ses pieds, qui sont garnis: de plumes grises jusqu’à la moitié de leur longueur, sont D’'ORNITHOLOGIE AE d’un jaune verdätre dans tout le reste; son bec etses ongles sont de cette derniére couleur. Ce pigeon se nourrit, ainsi que celui du n.° 48, des noix mûres du muscadier , mirystica moscata, Lin., et il a cela de commun avec le pigeon blanc de la Nouvelle- Guinée, n.° 14, ci-dessus , de ne pouvoir digérer que l’en- veloppe extérieure de ces noix : de sorte que ces fruits qui n’ont#éprouvé dans son gésier aucune altération ca- pable de porter attcinte à la plumule ou à la radicule de ces noix , sont et demeurent susceptibles de germer par- tout où le hazard les dépose dans une terre propice à leur accroissement. - Le} 1° LE PIGEON ROMAIN. Columba hispanica. Lax. Cette espèce, qui est la troisième des races principales des pigeons domestiques de notre méthode, avec laquelle nous avons dit, pag. 41 de ce volume, que l’on pouvoit faire toutes les variétés secondaires, est tres-féconde , et d’un excellent rapport, surtout dans les pays chauds ; elle ne multiplie pas autant, à la vérité, chez nous, mais ses petits n’en sont pas moins un exceilent manger. Le vulgaire nomyne ordinairement cette race pigeons paltus ; çlle n’a ni huppe sur l’occiput, ni tubercules sur le bec, ni ruban rouge autour des yeux, et c’est la plus grosse espece des pigeons domestiques. Quant aux couleurs de son plumage, nous en avons indiqué la diversité à la pag. 47 de ce vol, Linné a fait de ce pigeon la troisième variété de notre biset, columba domestica, Lin., qu'il a notée V. d. ). 472 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE B9° LE PIGEON SAUVAGE. Columba ænas. Laix. La longueur du pigeon sauvage, mesurée de l'extrémité du bec à celle de la queue, est à peu près de quatorze pouces. Toutes les plumes qui recouvrent son corps sont, ainsi que les pennes de ses ailes, d'une couleur4cendrée ; ces dernières sont marquées d’une bande transversale uoirâtre ; les pennes de sa queue sort également cendrées, mais elles sont noirâtres à leur origine : quoique le haut de son cou soit aussi cendré, il est néanmoius susceptible d'offrir, suivant l'incidence de la lumiere, des reflets d'un vert brillant ; sa gorge et sa poitrine sont de couleur vineuse; il a le bec d’un bleu noiràtre ; les yeux d’un brun rouge ; les pieds incarnats et les ongles noirs. C’est erdinairement dans des tours antiques, depuis long-temps aban‘'onnées, ou dans les fissures des rochers qui bordent les lacs ou le: rivières de l’Europe, de même que ceux de laSibérie, que l’on rencontre, en été, ce pigeon qui, aux approches de l'hiver, va chercher vers le midi des régions plus tempérées. 53° LE PIGEON TACHÉ. Columba maculata. Lin. . Willusby est le premier des ornithologistes qui ait parlé de ce pigeon , dent Gmelin , dans la traduction qu'il a faite du système de Linné, a formé la vingtième variété du biset , columba domestica, Lin. de cet auteur, et il l'a notée V. w.). Le même Willugby dit qu’on le trouve dins toute l'étendue de l'Europe et de l’Asie, et seule- ment en Barbarie dans l'Afrique ; il ajoute qu'il à quas D'ORNITHOLOGIE. 473 torze ou quinze pouces de longueur du bout du bec à celui de la queue; et que tout le fond de la couleur de son plumage est d’un beau blanc , excepté le front, qui est toujours de la même couleur que celle de la queue, qui est constamment différente de celle des plumes qui recouvrent le corps. Dans son état sauvage , ce pigeon ne fait que der pontes par an; elles ne sont composées que de deux œufs que le père et la mére couvent alternativement , des- quels il éclôt deux petits dont l’un est mâle et l’autre femelle. On élève une prodigieuse quantité de ces oiseaux en domesticité dans les contrées que nous venons d'indiquer, et alors le nombre de leurs pontes est de dix à onze chaque année. Quoique leur chair passe pour un mets délicat, on a cependant reconnu qu'elle étoit nuisible à certains tempéramens. 54° LE PIGEON TOURNANT OU BATTEUR. Columba percussor. Lan. Celui-ci est encore un de ceux dont Linné a fait une des variétés de notre biset, columba domestica, Lin. C’est sa dix-huitiéme , qu’il a notée V. t.). Ce que nous ayons dit de cette race de pigeon aux pag. 44 et 5o, nous paroît suflisant pour en donner une idée, 55.° LE PIGEON TURC. Columba turcica. Lan. Linné, en faisant descendre ce pigeon du biset, co- 74 TABBEAU ELÉMENTAIRE lumba domestica, Tin.,. en a fait la quatorzième va- riété de cette espèce: il l’a notée V. P-). Dans notreréthode ornithologique, au contraire, nous en avons fait une varitté du pigeon mondain que nous avons considéré comme formant la seconde des races issues du biset, columba domestica , Lin. , avee lesquelles nous avons dit qu’on pouvoit faire, d’après M. de Buf- fon, toutes les races secondaires. (Voyez aux pag. 41 et 46 de ce vol., ce qui a trait à cet oiseau.) / » BG LE PIGEON VERT D'AMBOINE. Columba aromatica. xx. Ce pigéon qui habite Amboine, l’une des îles Moluques en Asie, est à peu près de la grosseur de notre tourterelle commune, columba turtur, Lin. ; äl a dix pouces et demi de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue. Le sommet de sa tête est d’un fort beau gris; ses joues, le derrière de son cou , le dessus des pennes de ses ailes, son croupion, ses flancs, son ventre et ses jambes sont d’un vert d'olive; le bas de sa gorge et sa poitrine sont de cette même couleur, mais ün peu plus jaunâtre. Son dos et les couvertures de ses ailes qui sont les plus voisines du corps, sont d'un brun rouge; celles qui en sont les plus éloignées sont noi- râtres, terminées d’une couleur jaune pâle ; ce qui forme sur chaque aile une double bande, l’une jaunâtre et l’autre noirâtre;les grandes pennés de sonaïlesont noïresen dessus, bordées extérieurement de jaune, et grises en dessous; celles de la queue sont en dessus d’un vert d’elive, et en dessous elles sont noires, ternunées d'une couleur blanchätr ! D'ORNITHOLOGIE. 475 sale; leurs couvertures supérieures sont d'un blanc jau- nätre souillé. Le bec de ce pigeon est verdâtre ; l'iris de ses yeux est d’un brun rouge; ses pieds et ses ongles sont quelquefois gris et d’autres fois rouges. 57 LE PIGEON VERT DE LiÎLE SAINT-THOMAS, Columba Sancti- Thomæ. Lan. L L'île de Saint-Thomas, l’une des Antilles à l’est de Porto- Ricco, fournit unpigeon de la taille à peuprés de notre biset ,.columba domestica, Lin.;il est surtout remarquable par la peau nue, de couleur bleue, qui entoure ses yeux, dont l'iris est noir ; par son bec courbé, d’une couleur rouge de sang a sa base, et d'un bleu varié de blanc dans le reste de sa longueur; par ses pieds qui sont d’un jaune de safran , terminés par des ongles bruns. Tout le plumage-de ce pigeon , tant en dessus qu’en dessous du corps, est d’un assez beau vert, à l’exception des pennes de ses ailes et de celles de sa queue, qui sont ‘d'un vert brun. Les couvertures de ces dernières sont jaunes en dessous des pennes. 56.° LE PIGEON VERT DES PHILIPPINES. Columba vernans. Lax. Les Philippines nourrissent une espèce de pigeons qui n’est guère plus grosse que nôtre tourterelle, columba Eurtur, Lin. Ce gallinacé a le sommet de la tête d’un vert d'olive chseur ; sa gorge est de même couleur, et son cou est d’un rouge bai tirant au vineux; il a la poi- trine d'un bleu azuré; le ventre et les flancs d’un vert 76 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE d'olive un peu jaunâtre, et les plumes qui sont placées autour de l’anus, jaunes, les couvertures inférieures de 6a queue sont rousses et abs de aussi longues que les pennes de cet appendice. Tout le dessus du corps de cet oiseau est d’un vert d'olive. On voit sur les pennes de ses ailes une bande d'une belle couleur jaune de soufre, formée par l’ex- trémité de leurs couvertures, qui sont bordées de cette couleur; ces pennes sont noirâtres en dessus, cendrées. en dessous, et bordées aussi de jaune; celles de la queue sont cendrées en dessus et noiràtres en dessous. Ce pigeun a le bec, l'iris de l'œil, Les pieds et les ongles noirs. | 59° LE PIGEON VERT TACHÉ. Columba viridis maculata. Ein. La longueur de ce gallinacé mesuré du bout du bec celui de la queue, est d'un pied. Tout son plumage est d’un assez beau vert, à l'exception de son ventre et des couvertures inféricures de sa queue qui sont noires. Les. plumes qui revêtent son cou sont longues et étroites, et ses scapulaires sont marquées à leur sommet d’une tache d’un blanc sale. Les pennes de ses ailes et de sa queue sont egalemeut vertes, mais elles sont toutes bordées exté- rieurement de blanc sale. Son bec, l'iris de ses yeux et ses ongles sont noirs; ses pieds, revêlus à demi de plumes de même couleur que celle du dessous du corps, sont bruns. D'ORNITHOLOGIE. 477 G6o° LE PIGEON - VIOLET A TÊTE ROUGE, D'ANTIGUES. Columba rubricapilla. Li. Cette derniére espece de la premiére tribu des pigeons, et que Sonnerat a rapportée de l'ile Panay, l’une des Philippines , est de la grosseur de notre tourterelle, columba turtur, Lin. La distribution des couleurs de son plumage en fait un des plus beaux oiseaux de son genre; néanmoins toutes les plumes qui recouvrent son corps, tant en dessus qu’en dessous, y compris même les pennes de ses ailes et celles de sa queue , ne sont que noires, mais d’un noir si profond et si velouté qu’elles sont susceptibles des reflets les plus brillans qui chatoïent du violet au bleuâtre, suivant que ces plumes sont diversement frap- pées des rayons de la lumière ; et ce qui imprime un éclat plus brillant encore à ce noir, c’est le beau rouge des Fe] plumes courtes et fines qui revêtent le sommet de la tête de ce gallinacé. Un autre contraste non moins agréable à la vue, est le gris bleuàtre et lustré des plumes de son cou, du haut de son dos et de sa poitrine. Ce pigeon a l'iris de l’œil d’un rouge baï; ses orbites sont entourés d'une membrane charnue d’un rouge trés- éclatant; son bec et ses pieds sont gris, et ses ongles bruns. 478 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE * + DEUXIEME, TRI BU: 7 Pigeons dont les pennes de la quete sont plus grandes. et cunétformes, ow taillées en coin. 61° LE PIGEON A AILES NOIRES, DU CHIM. Coluriba melanoptera. Lan. Molina, qui est le seul auteur qui, dansson Hisé. Naf. du Chili, pag. 308, ait parlé de cette espèce de pigeon, n'en dit autre chose sinon: que toutes les plumes qui re- couvrent son corps sont livides ( cette expression est bien vague), avec les pennes des ailes noires; il ajoute l'avoir rencontré au Chilis G2° LE PIGEON DE PASSAGE, D'AMÉRIQUE. Columba migratoria. Lan. C'est à la Caroline et à la Louisiane , qu'au rap- port de Catesby , l'on trouve ce pigeon qui y voyage en troupes nombreuses; c’est dans ces mêmes contrées qu'il niche sur les arbres des forêts ; sa ponte. n'est ; comme celle de tous ses congénères , composée que de deux œufs que le mâle et la femelle couvent alter- nativement, et à certaines heures régulièrement pério- diques du jour. La nourriture habituelle de cet oiseau dans ces régions lointaines consiste en divers fruits, tels que ceux de l’'orme , de l’érable, du mürier, du hêtre, du tupelo. du chêne, etc. Ilmange aussi des grains de froment et de bié- sarrazin, mais jamaisilne touche au mais; lorsqu'il S'aVISC de se répandre dans les champs de blé ou de riz vert; D'ORNITHOLOGIE. 47ÿ il y cause un dommage trés-considérable ; sa chair’est ré- pute un mets déiicat. Ce pigeon , qui est de la grosseur de notre biset, co lumba domestica , Lin, a quatorze pouces de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue. Le sommet de sa tête, tout le dessus de son cou , de son corps, ainsi que sa gorge, sont d’un cendré brunûtre : cette couleur est maculée de noir sur les couvertures supérieures des aïles; les côtés de son cou sont susceptibles de reflets très- brillans qui chatoient en couleur de cuivre de rosette ; le devant de son cou et sa poitrine sont d'une couleur rousse qui, a mesure qu’elle se répand sous le corps, ÿ devient d'autant moins vive qu’elle approche davantage du croupion. Les plus grandes pennes de ses aïles sont noirâtres , bordées extérieurement de bianchâtre; les sui- vantes sont de la même couleur ; maïs sans bordure ; celles de la queue sont Œun gris blanc, à l'exception des deux du milieu qui sont d’un brun noirätre. Cet appen- dice est, ainsi que nous l'avons annoncé comme carac- tére distinctif de cette seconde tribu , beaucoup plus long que dans les autres espèces de pigeons, et les ailes sont dans la proportion de cette longueur. Le bec et les ongles sont noirs; l'iris de l’œil est orangé: les orbites sont entourés d’une peau nue d’une couleur rouge de sang ; les pieds sont d’un rouge moins profond. 65° LE PIGEON TOUROCCO. Columba macroura.. Lan. Le longueur totale de ce pigeon , mesuré du bout du ec à l'extrémité de la queue, est de douze pouces. C'est dans les contrées brülantes de l'Afrique , et surtout au Sénégal qu'on le rencormtre: La cou!eur dominante de 480 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE son plumage, en dessus du corps, à partir du sommet de 1a tête, jusqu’à l'extrémité des pennes de la queue, est ca- nelle : seulement l’origine de ses pennes est blanche. Tout le dessous de son corpsest d’une couleur blanchätre sale. son bec, l'iris de ses yeux et ses pieds sont rouges; la mem: rane qui recouvre ses narines est blanche, et ses ongles sont bruss : sa queue seule à six pouces de longueur. . 64. LE RAMIRET. Columba speciosa. Lin. Ce pigeon, que l’on trouve a Cayenne, et queles naturels de ces contrées lointaines nomment ramier pintade , est une espèce différente de celle du ramier d'Europe et du ramier d'Afrique ; ce motif a détermine Buffon à lui donner le nom de ramiret pour le distinguer de l’un et de l'autre. Ce joli gallinacé, dont les formes semblent tenir plutôt de celles de la fourtereile que du pigeon, est néanmoins une espèce decette derniere tribu; il est de la grossèur de notre bisek. | Tout le dessus de son corps, à partir du sommet de la tête jusqu'aux couvertures de la queue inclusivement, est d’un brun marron foncé; sa gorge, de même que le devant de son cou et sa poitrine ; sont d’un violet pour- pré, susceptible de chatoyer en rougeûtre ;, suivant l’in- cidence de la lumière. Chacure des plumes qui revêtent les côtés de son cou, le derriere et le devant de cette partie, ainsi que sa poitrine, est marquée dans son mi- lieu d’une tache blanche qui dans certains individus est grise et quelquefois fauve : ce qui pourroit bien n'être occasionné que par l’âge. Toutes celles qui recouvrent le ventre , les jambes et le dessous de l’origine de la D'ORNITHOLOGIE. AR queue sont d’un blanc lavé d’une couleur brune qui devient plus profonde sur leurs bords où elle se dessine en on- doyant. Les pennes moyennes de ses ailes sont brunes , et les grandes noirâtres, ainsi que celles de la queue. Le ramiret a l'iris, le bec et les pieds rouges ; ses on- gles sont bruns, et la membrane qui recouvre ses na- rines est blanche. | SECTION DEUXIÈME. TESTOURITRELLES Cola turtures Lan PREMIÈRE TRIBU. Tourterelles qui ont les pennes de la queue égales, et de moyenne longueur. 65° LA TOURTERELLE A COLLIER. Columba risoria. Yan. Var : a Cette tourterelle que l’on élève en voliere où elle pro- page tousles mois son espèce , et qui aujourd’huiest très- commune en France, paroît être originaire des climats de l'Inde. Elle est, comme on sait, un peu plus grosse que notre tourterelle de bois, columba turtur, Lin. ; tout le dessus de son corps est d’une couleur isabelle claire ; les pennes de ses ailes sont d’un gris brun, bordées extérieurement de blanchàtre ; celles de sa queue sont cendrées, terminées de blanc, excepté les deux intermédiaires qui sont en- tiérement cendrées; le haut de son couest entouré d’un beau collier noir, qui a à peu près deux lignes de largeur; le devant du cou et la poitrine sont d’un blanc lavé d'une teiite légère de rose ; le ventre, ainsi que les flancs, les CR 32 482 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE jambes et les couvertures du dessous de la queue sont blancs ; le bec de cet oiseau est d'un gris blanc à sa base, et noirâtre dans lereste de sa longueur; il a l'iris et les pieds rouges , et les ongles d’un brun jaunâtre. 66.° LA TOURTERELLE À COLLIER, DU SÉNÉGAL. Columba vinacea. Vax. Brisson a fait, d'après Linné, de cette tourterelle, de la suivante et decelle du n°. 81 ci-apres, trois espèces distinc- tes et séparées, tandis que MM. de Buffon et Mauduyt pensent qu’elles ne sont que des variétés d’une même es- pèce, etils étayent leur opinion sur deux faits: le premier c’est qu’elles se trouvent l’une et l'autre au Sénégal, dans les contrées brülantes de l'Afrique; le second, c’est qu’elles sont toutes trois de la même taille. N'ayant pas la prétention téméraire d’oser décider a la- quelle de ces déux opinions on doit adhérer, nous avons pensé qu'il convenoit de signaler ici ces trois individus , en suivant à leur égard l’ordre alphabétique que nous avons adopté pour le genre des pigeons. La tourterelle à collier a dix pouces de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue. Sa tête, son cou et sa poitrine sont d'une couleur vineuse ; un beau collier uoir d'environ trois lignes de largeur lui ceinutie haut du cou; elle a le dessus du corps, depuis le sominet de ia tête jus- qu'au croupion inclusivement, d'un gris brua , les pennes de ses ailes sont brunâtres , bordées de blanc sale ; toutes celles de la queue sont noires dans les deux premiers tiers de leur longueur , et grises dans lereste, excepté cependant les deux du milieu, qui soni d’un gris brun dans toute leur longueur. Le ventre, les flancs et les couvertures du dessous de La queue sout d’un blanc sale. Cette fourterelle D'ORNITHOLOGIE 453 a le bec noirâtre; l'iris des yeux d’un brun rouge ; les pieds rouges, et les ongles bruns. 67° LA TOURTERELLE A GORGE TACHETÉE, DU SÉNÉGAL. Columba Senegalensis. Lin. Cette seconde espèce qui habite les mêmes contrées que la précédente et qui est de même faille qu’elle, n’en est, selon MM. de Buffon et Mauduyt, comme nous venons de le dire, qu’une simple variété, et selon Linné et Bris- son , une espèce distincte et séparée. Elle a le sommet de la tête et le haut du cou d’un pourpre pâle; son dos et son croupien sont d’un gris brun ; les pennes de ses ailes d’un brun noirâtre , bordées de blanc sale; celles de sa queue sont noires dans les deux premiers tiers de leur longueur , et grises dans le reste, à l’exception néanmoins des deux pennes du milieu de cet appendiæ, qui sont d’un gris brun ; le devant de son cou, ainsi que sa poitrine, sont de couleur vineuse : on voit au bas du cou un beau collier noir qui tranche d’autant plus nettement entre celui- ci et la poitrine, qu'il forme entre l’un et l’autre un con- traste de couleurs trés-prononcées. Cet piseau a tout le des- sous du ventre d’un blanc sale; le bec noirâtre ; l'iris des yeux brun; les pieds d’un rouge pâle, et les ongles bru: nâtres. 68.” LA TOURTERELLE A TÊTE BLEUE, DE LA JAMAIQUE. Columba cyanocephala. T1x. On trouve à la Jamaïque, ainsi qu'à l'ile de Cuba qui est située à l'entrée du Golfe du Mexique, comme aussi dans 32 * 834 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE plusieurs autres contrées de l'Amérique, cette espèce de tourterelle, qui est presque aussi grosse que notre biset columba domestica, Lin. Elle a le sommet de la tête, le de- vant du cou et la gorge bleus; le haut de cette derniére partie est entouré d'une ligne circulaire, composée de plu- mes noires dont la plupart sont rayées transversalement de blanc : on voit sur chaque joue une bande blanche qui se dirige vers l’occiput, en passant sous l’œil de cet oiseau quia le derriere du cou, le dos , le croupion, les cou- vertures des ailes, et celles du dessus de la queue, d’un brun rougeûtre; les grandes pennes de ses ailes sont brunes, bordées de roussàtre, et celles de sa queue sont noirâtres : une belle couleur vineuse est répandue sur le bas de son cou et sur sa poitrine ; son ventre, ses flancs , ses jambes ainsi que les couvertures de sa queue sont de cette même couleur, mais tirant cependant davantage sur le roux. Le bec de cette tourterelle est rouge à sa base, et d’un cendré brun dans tout le reste de sa longueur; l'iris de son œil est noir de même que ses ongles, et ses pieds sont rouges. G9.° LA TOURTERELLE BLANCHE ENSANGLANTÉE. - Columba sanguinea. Yan. Sonnerat dans la relation de son voyage à la Nouvelle- Guinée a fait mention, pag. 51, d’une tourterelle qu'il a figu- rée planche 20 de son ouvrage. Il dit qu’elle est à peu prés dela taille de notre tourterelle commune , columba lurtur, Lin., et qu’elle habite l'ile de Luçon , l’une des plus con- sidérabies de l’Afrique. Le pluinage de ce joli gallinacé est entièrement du D'ORNITHOLOGIE. 485 blanc le plus pur et le plus éclatant, à l'exception d’une tache de couleur de sang qui est placée entre le bas du eou et le haut de la poitrine ; son bec est rouge, ainsi que ses pieds ; l'iris de son œil est d’un pourpre rou- geatre, et ses ongles sont d’un brun rouge. Oo 70. LEA TOURTERELLE BRUNE DE LA CHINE. Columba turtur. Lax. Var : d. Linnéa fait quatre variétés de notre tourterelle commune, qu'il a désignées sous la seule et même dénomination de colomba turtur ; savoir , La tourterelle commune, la tour- terelle de Portugal, la tourterelle grise de l'ile de Luçon (voyez ces variétés ci-après aux n.* 73,79 et 82), et celle dont nous parlerons ici, qu’il a notée V.d). La tourlerelle brune de la Chine est un peu moins grosse que celle qui habite nos forêts, dont elle a les mœurs et es habitudes ; elle voyage de même, et se trouve dans toutes les îles de l'Océan indien, dans celles de la mer du Suii, et plus particulièrement à la Chine. Le sommet de sa tête, son cou, son dos, sa poitrine et sa gorge, sont d’un gris lavé de brun ; seulement cette dur- nière partie est d’une teinte moins fonçée : de chaqiie côté de son cou, cet oiseau porte une sorte de demi-collii r, formé par la réunion de quelques plumes noires, tern :- nées de blanc. Les grandes couvertures de ses ailes so t brunes, de même que leurs pennes; les petites sont “e cette même couleur , mais elles sont frangées d'une ban.e * d’un jaunc tirant sur l’aurore; l'iris de ses yeux, son bec èt ses pieds sont rouges et ses ongles noirûtres. 436 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 71 LA TOURTERELLE COCOTLI. Columba minuta. Lix. Le cocoth que l'on ne doit regarder que comme une va- riété du cocotzin ci-après, est encore plus petit que lui; il n'a pas cinq pouces et demi de longeur, du bout du bee a l'extrémité de la queue , et il n’est à peu près gros que comme notre moineau france, fringilla domestica, Lin.: cette petite miniature dans le genre des pigeons, dont on voit quelques couples vivans à Paris où ils ont été apportés de Saint-Domingue, y niche dansdep etits paniers préparés comme pour les serins ; mais on dit qu’on n’est pas encore parvenu a trouver le moyen , etsans doute le degré de cha- leur nécessaire pour rendre leurs œufs féconds. La couleur dominante du plumage de cet oiseau, qui reste toujours plus joli qu'aimable ( car il a étéimpossible jusqu’à présent d'adoucir son caractère farouche et sau- vage }, est brune, si ce n’est le dessous de son corps, qui est d’un blanc roussâtre; les couvertures supérieures de ses ailes sont remarquables par sept taches de couleur d’acier poli, et qui en ont tout l'éclat; les pennes de sa queue sont cendrées à leur origine, noires dans leur milieu, et terminées de brun; les deux intermédiaires seules sont entiérement brunes, et la penne la plus en dehors de chaque côté est terminée de blanc. Cette tour- terelle roucoule comme toutes ses congénéres; mais on conçoit que ce duit être dans un degré proportionné à sa petite taille; elle a le bec, l'iris, les pieds et les ongles bruns, D'ORNITHOLOGIE. 487 e 72 LA TOUTERELLE COCOTZIN. Columba passerina. Lin. C’est dans les contrées chaudes de l'Amérique, et dans toutes les iles adjacentes à ce continent, jusqu’à la Ca- roline, que l’on trouve cette charmante petite tourterelle, qui n’est pas plus grosse que notre cochevis, alauda cristata, Lin. Sa longueur, du bout du bec à Fextrémité de la queue, n’est que de six pouces trois lignes. Elle se tient volontiers, et toujours en troupes quelquefois nom- breuses, dan: les broussailles des cantons montueux et pierreux des contrées que nous venons d'indiquer. Sa voix est plaintive comme celle de notre tourterelle com- munc, columba turtur, Lin. Son vol court, joint à la fatale réputation de sa chair délicate, est cause que les naturels du pays en font, par divers moye»s, une grande destruction. Le plumage de ce petit Sallinacé varie un peu, suivant la différence des climats qu'il habite. Quelques individus ont le sommet de la tête, le haut du cou et tout le dessus. du corps brun cendré ; le front et le dessous du corps d’une coulcur vineuse; le devant du cou et la poitrine tachés de brun; les pennes des ailes noirâtres à leur origine , rousses dans Île reste de leur longueur, et bor- dées extérieurement de eette première couleur ; les pennes de la queue sont aussi noirätres, à lexception des deux du milieu, qui sont d’un cendré obscur ; son bee, noi- râtre à son origine, est rougeâtre dans le reste de sa lon- gueur; l'iris de son «il est orangé, ses pieds sont rougeàtres; ses ongles enfin sont rioirätres. D'autres ont tout le dessus du corps pourpré ; les pennes des ailes et de la queue de même couleur, mäis cepen- 288 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dant plus obscure ; le bec, l’œil et les pieds sont rouges, et les ongles marron. Il s’en trouve enfin dont la couleur du plumage tient le milieu entre les nuances de celles des individus que nous venons d’inciquér ; mais tous, de quelques couleurs qu'ils soient, ont un plus ou moins grand nombre de taches sur les ailes; et ces mêmes taches, qui ont toujours la cou- leur de l’acier poli, sont plus ou moins vives , suivant les individus. 73 LA TOURTERELLE COMMUNE. Columba turtur, Tax. , Var: a. Nous croyons avoir suffisamment dévéloppé l'histoire de cette fourterelle à la page 37 de ce volume ; c’est pour- quoi nous y renvoyons. 74° LA TOURTERELLE DE CAMBAYE. Columba Cambayensis. Lx. Sonmerat parle dans son 2.® Voyage, pag. 180, de cette espèce de tourterelle, qu'il ne signale pas autrement qu’en disant qu’elle est de la taille de la nôtre ; qu'elle habite Cambaye, dans les États du grand mogol, au royaume de Guzarat, et que son plumage est presqu'entiérement gris, si ce n’est les pennes de ses ailes qui sont noires; les latérales de sa queue, qui sont mi-parties noires et grises; et enfin les plumes du devant de son cou, qui sont noires a leur origine, et roussätres dans leur dernier tiers ; en sorte que, lorsque ces plumes sont couchées les unes sur les autres, elles ne paroiïssent être que de cette der- nière couleur. Cet oiseau a le bec noir, l'iris des yeux, ainsi que les pieds, rouges, et les ongles bruns, D'ORNITHOLOGIE. 489 75. LA TOURTERELLE DE LA CÔTE DE MALABAR. Columba Malabarica. Van. De la taille de la tourterelle à collier , columba vinacea, Lin. Celle-ci se trouve au Malabar , qui est la partie oc- cidentale de la presqu'ile, en deçà du Gange; elle s'étend depuis le royaume de Baglana jusqu’au cap Comorin, l’une des plus belles contrées des Indes. Le sommet de la tête de cet oiseau, son dos et ses ailes sont d’un beau gris de perle; les couvertures moyennes de ses ailes sont maculées de quelques taches noires de forme ovale ; les pennes du milieu de sa queue sont de la même couleur que le dessus de son dos; seulement les latérales, une de chaque côté, sont noires dans les deux premiers tiers de leur longueur , et blanches dans le © reste ; son cou et sa poitrine sont d’un gris vineux, et son ventre est blane ; il aie bec, l'iris, ainsi que les pieds rouges, et les ongles d'un brun rouge. 706. LA TOURTERELLE DE QUEDA ( PETITE ). Columba malaccensis. Lan. Cette jolie espèce, outre la beauté de son plumage et la délicatesse de sa chair, est encore recommandable par l'élégance de ses formes, et surtout par la candeur de ses mœurs innocentes. Elle est un peu plus longue que notre moineau franc, fringilla domestica, Lin., mais ele n’est guère plus grosse que lui. Originaire de Queda, au royaume d’Asie, situé dans la presqu'ile au-delà du Gange, près du détroit de Ma- laca , cette fourterelle a été transportée à l'Ile-de-France, où elle vit en domesticité, et se multiplie en abondance. 40 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE Ce petit gallinacé seroïit encore une conquête à faire au profit de l’agronomie française. Cette tourterelle a le front, ainsi que la gorge, le dos et le croupion , couleur de gris de perle ; l’occiput et le der- riere du cou d’un gris plus foncé, et marqué de lignes trans- versales noires, les couvertures supérieures des ailes sont de même couleur que le dos; maïs elles sont terminées par une bande noire; les pennes des aïles, ainsi que les inter- médiaires de la queue, sont brunes; les latérales de cette dernierepartiesont brunes seulement danslestroispremiers quarts de leur longueur, et blanches dans le reste : les côtés de son cou sont aussi blancs ; mais ils sont coupés par une multitude de lignes noires très-rapprochées les unes des autres ; la poitrine et le ventre , également blancs, sont coupés de même par des lignes transversales noires, et les couvertures du dessous de la queue sont d’un blanc pur : la couleur principale du bec est noire , mais il est teint de jaune à sa base et à sa pointe; l'iris de l’œil est: jaune , de même que les pieds, et les ongles sont d’un brun jaunûtre. 77. LA TOURTERELLE DE SURATE. Columba Suraténsis. Lin. Surate, qui est la patrie de cette fourterelle, est situé aux Indes, dans les Etats du grand mogol , au royaume de Guzurate, non loin du golfe de Cambaye. C’est dans les forêts de cette île que se tient constamment ce galli- nacé, qui est de la taille de la tourterelle à collier , co- lumba risoria, Tin., et dont le plumage offre un coup d’œil agréable dans la distribution des coulcurs qui en font l’ornement. Le sommet de sa tête, le devant de son cou, sa pai- D'ORNITHOLOGIE. 391 trine, son ventre et ses jambes sont d’un gris vineux, - beaucoup plus pâle cependant sur la poitrine, sur le ventre et sur les jambes; le haut de son cou, près de Vocciput, est noir : cette couleur est coupée transversa- lement par une multitude de raies blanches : le bas de cette partie est également noir, mais il est coupé de même par des raies rousses ; son dos, son croupion et les pennes de sa queue sont d’un gris profondément sombre ; les cou- vertures supérieures deses ailes sont d'un gris de perle; et chacune des plumes qui les composent est marquée d’une raie longitudinale noire , placée dans leur milieu ; les pen- nes de’ ces parties sont aussi noires, et les couvertures du dessous de la queue d’un blanc pur. Cet oiseau a le bec noir, l'iris, ainsi que les pieds rouges, et les ongles d’un brun noir. 78.” LA TOURTERELLE DE SURINAM. Columba Surinamensis. Lin. Dans la relation de son voyage à la Guiane, Firmin dit, £. 2. pag. 165, qu’a Surinam, pays situé dans la Terre-Ferme de l'Amérique et qui est une colonie hollandaise qui s'étend le long de la rivière de ce nom, on trouve dans les forêts les plus écartées et les plus solitaires, une espèce de tourterelle qui a à peu prés dix pouces de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue; qu’elle niche deux fois par an sur les arbres les plus élevés, et que sa chair est un mets succulent et exquis. Il ajoute que tout le plumage de cet oiseau est cendré en dessus, et blanchâtre en dessous, ayant le gosier varié de vert et de noir; que les pennes les plus extérieures de ses ailes sont brunes ; les moyennes cendrées, et qu'enfin son long bec est bleu en dehors et rouge en dedans, 492 TABLEAU ÉLEMENTAIRE 79.° LA TOURTERELLE DU CANADA. Columba Canadensis. Lix. C’est dans les forêts de la nouvelle France, autrement le Canada, dans l'Amérique septentrionale, que se tient cons- tamment cette tourterelle, qui est un peu plus grosse que celle de notre pays. Le sommet de la tête du màle , le dessus de son cou et de son dos, les couvertures supérieures de ses ailes sont d’un gris taché de brun; les couvertures du dessus de sa queue sont cendrées, et son croupion est de même couleur; il a les pennes des ailes brunes, ainsi que celles de la queue; elles sonttoutes marqués de deux taches; l’une rousse, Pau- tre noirâtre, à l'exception cependant des deux du milieu qui sont sans taches, et de l’extérieure de chaque côté qui est blanche : sa gorge, le devant de son cou, ainsi que sa poi- trine, sont d’un gris obscur lavé de jaune ; son ventre ,ses flancs et ses jambes sont d’un blanc sale, et les couvertures du dessus de sa queue sont d’un blanc pur. Toutes les plumes qui revêtent le sommet de la tête de la femelle, le haut de son cou, le dessus de son corps, les couvertures supérieures de ses aïles, ainsi que le de- vant de son cou et sa poitrine, sont liserées de blanc jau- nâtre à leur extrémité : du reste elle est en tout semblable à son mäle ; ils ont l’un et l’autre le bec et l'iris des yeux noirâtres ; les pieds et les ongles noirs. 80. LA TOURTERELLE DU PORTUGAL. Columba turtur. Lan. Var: b. Linné, dans la distribution méthodique qu'il a faite du genre des colombes n'a considéré celle-ci que commes D'ORNITHOLOGIE. 493 une simple variété de notre tourterelle commune, qu’il a notée V. b.); cependant elle est bien plus grosse que celle qui habite nos forêts. La couleur la plus générale de son plumage en dessus du corps,depuis le sommet de la tête jusqu’au croupion inclusi- vement, et, en dessous, depuis la gorge jusqu’a l’origine des pennes de la queue, est d’un brun foncé. On voit vers le milieu de chaque côté du cou deux ou trois plumes d’un noir de velours, terminées de blanc, qui y forment une es- pèêce de demi-coilier : les petites couvertures de ses ailes sont du même noir, mais elles sont bordées de jaune; les grandes pennes des ailes sont noirâtres, bordées aussi ex- térieurement de jaune : toutes celles de la queue sont d’un brun clair, terminées de blanc ; les latérales seules sont bor- dées de eette couleur en dehors. Cet oiseau a le becet les ongles noirs ; l’iris d’un beau :jaune aurore et les pieds rouges. 81.° LA TOURTERELLE DU SÉNÉGAL, Columba afra. Y1x. Cette fourterelle estune des trois; savoir, celles des n° 66, 67 et celle-ci, dont MM. de Buffon et Mauduyt n’ont fait que des variétés d’une seule et même espèce : Linné et Brisson les regardent au contraire comme trois espèces distinctes et séparées. Dans un conflit d'opinions aussi respectables, nous ne pren- drons d’autre parti, comme nous l’avons déja dit, que celui detracer le signalement de ces trois oiseaux en laissant au lec- teur Le choix de l'opinion qui lui paroîtra la plus admissible. Le gallinacé dont il est ici question habite ,avec ceux des numéros précités, le Sénégal, dans les contrées brûlantes de l'Afrique. Il est de beaucoup plus petit qu'eux; sa taille ap- 404 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE proche de celle du merle ordinaire, turdus merula, Lin., n'ayant que huit pouces de longueur du bout du bec à l’ex- trémité de la queue. Cet oiseau a le sommet de la tête cendrée; le haut du cou et tout le dessus du corps, jusqu’au croupion inclusivement, d’un gris brun ; les couvertures des ailes de même couleur, marquées de quelques taches d’un violet azuré , et les pen- nes de ces parties brunes; toutes celles de la queue sont d’un gris brun, terminées de noirâtre en dessus, et blan- ches en dessous, excepté cependant les deux du milieu qui sont entiérement d’un brun noir, ainsi que la plus extérieure de chaque côté, qui est tachée de blanc à sa base et bordée de la même couleur en dehors; son bec et ses yeux sont rougeûtres ; ses pieds rouges etses ongles bruns. 82.° LA TOURTERELLE GRISE DE LA CHINE. Columba risoria. Lan. Var. : b. Linné a fait de cette fourterelle la première des variétés de celle à collier, sous la dénomination latine, qui est com- mune à toutes, de columba risoria; il a notée celle-ci V : b.) La tourterelle grise de la Chine est un peu moins grosse que celle de la Chine; elle a le sommet de la tête d’un beau gris de perle, teinté d’une couleur vineuse sur l’occiput : les plumes qui recouvrént le haut de son cou en arrière sont coupées et disposées en manière de cœur TENVETSÉ ; elles sont noires avec une tache blanche, de forme arrondie, sur chacun de leurs côtés ; son dos, son croupion, les pen- nes de sa queue, et les petites pennes de ces parties sont d’un brun noirâtre; les grandes pennes des ailes sont noires. Cette tourterelle a le tour des paupiéres blanc; le devant du cou, la poitrine, le ventre et les jambes d’un gris teinté de rougeûtre; l'iris de son œilest rouge, son bec et ses ongles sontnoirs, et ses pieds jaunes. D'ORNITHOLOGIE. 495 85°. LA TOURTERELLE GRISE DE L'ÎLE DE LUÇON. Columba turtur, Lan. Var: c. Celle-ci est une des quatre variétés que Linnéa faites de notre fourterelle commune , lesquelles il a désignées sous la même phrase latine de columba turtur; il l’a notée LT P Ce gallinacé habite, comme ses trois congénères, l’'Eu- rope, la Chine, les Indes, les îles de l'Océan indien, et celles de la mer du Sud: il voyage de même en troupes et niche comme elles sur un des arbres les plus élevés des forêts les plus sombres et les plus épaisses. Sa ponte est ordinaire- ment de deux œufs, parfaitement blancs. Toutes ces va riétés de même taille, ayant toutes un pied de longueur du bout du bec à celui de la queue, causent des dommages considérables dans les champs nouvellement ensemencés de graines et surtout de pois. La fourterelle grise de l’ile de Luçon a le sommet de 1a tête d’un cendré olivâtre; le front et le menton presque blancs ; les pennes des ailes brunes ; le devant du cou et la poitrine d'une couleur vineuse ; le ventre et les couver- tures du dessous de la queue d'un blanc sale ; les deux pennes du milieu de cet appendice entièrement brunes ; l'extérieur de chaque côté, bordée de blanc en dehors, et le bec noir. Du reste elle ressemble parfaitement à notre tourterelle commune. 84.” LA TOURTERELLE GRISE ENSANGLANTÉE. Columba cruenta. Lan. Sonnerat, dans la relation de son Voyage à la Nouvelle Guinée, à fait mention , pag. 51, pl. 21, de cette tourterelle 496 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE qu’il assure avoir trouvée à l’ile de Luçon, l’une des plus grandes et la plus septentrionales des Philippines dans l'O- céan oriental de l'Afrique. Cette tourterelle, dit-il, a huit pouces de longueur de l'extrémité du bec a celle de la queue ; le sommet de sa tête est gris; le haut de son cou est violet. On voit sur ses ailes, qui ont leurs pennes noires, cinq bandes transversales, dont trois sont grises, et les deux autres noires; les pennes de sa queue sont grises, terminées de noir. Elle a le devant du cou et la poitrine blancs. Cette dernière partie est remarquable par une tache d’un rouge de sang, qu'elle porte dans son milieu ; son ventre, ses flancs, ses jambes et les couvertures du dessous de sa queue sont gris ; son bec et ses ongles sont noirs; ses yeux sont d’un brun ferrugineux, et ses pieds d’un rouge violet. + 85° LA TOURTERELLE HYBRIDE. Columba risoria. Lan. Var: c. Celle-ci est la troisieme variété que Linné a faite dela tourtlerelle à collier, sous la seule et même dénomination latine de columba risoria ; il l'a notée V. c.) Quoique le pays natal de cet oiseau soit l'Inde et la Chi- ne, on l'élève néanmoins facilement en domesticité, dans toutes les parties de l’Europe,oùñhl propage également son espèce. Cette tourterelle est un peu plus grande que la commune, columba turtur, Lin. ; elle a ‘tout le dessus du corps d’un blanc rougeûtre, et le dessous d’un blanc pur : son crou- pion et les pennes de ses ailes sont d’un gris brun; toutes les pennes de sa queue sont cendrées ; seulement la plus extérieure de chaque côté estterminée de blanc; elle a le bec noirâtre; l'iris de l’œil, ainsi que les pieds rouges, et les ongles bruns. D'ORNITHOLOGIE. 497 86.° LA TOURTERELLE RAYÉE. Columba striata. Tax. Un peu moins grosse que la tourterelle commune , co lmba turtur , Lin., cette espèce n’a que neuf pouces et de- mi de longueur, du bout du bec à celui de la queue; ce charmant gallinacé se trouve aux Indes, à la Chine et dans la province de la Vénézuéla en Amérique méridionale. IL a le front d’un bleu clair; le sommet de la tête et l'occiput roussâtres ; le derriére du cou, le dos, ainsi que les couvertures des ailes d’un gris brun, rayés transversa- lement d’un grand nombre de petites bandes noires qui sont disposées en arc; les pennes des aïles sont d’un gris brun, plus foncé que celui du dos ; le croupion et les couvertures du dessus de la queue sont de même couleur que le dos; mais ilssont sans rayures : toutes les pennes de sa queue sont du même brun que celui des pennes des ailes, à l'exception de la plus extérieure, de chaque côté, qui est terminée de blanc; les joues et la gorge sont d’un beau bleu d’azur : une bande blanche partant de la base supérieure du bec se dirige vers les yeux qu’elle entoure ; les côtés du cou et du éorps sont bleuâtres, rayés de bleu foncé; tout le devant du cou , ainsi que la poitrine , le ventre etles jambes sont d’une belle couleur de rose, et les couvertures du dessous de la queue sont blanches. Cette fourterelle, dont les mœurs sont douces et aima- bles, a le bec bleuûtre; l'iris de l’œil d’un gris bleu; les pieds d’un rouge pâle, et les ongles bruns. 7.2 33 498 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE 87.” LA TOURTERELLE RAYÉE DE LA CHINE. Columba sinica. Lan. Le sommet de la tête de cette tourterelle qui est à peu près de la grosseur de celle à collier, columba risoria, Lin., est d’un gris de souris ; ses joues sont jaunes; les cô- tés de son cou sont de cette même couleur ; mais chacune des plumes qui les recouvrent, est terminée de rouge; on voit de chaque côté au bas des joues une bande d’un beau bleu qui les traverse; l’occiput, le derrière du cou, le croupion , ainsi que les couvertures du dessus de la queue sont bruns, rayés circulairement de petites bandes tran- versales d’un beau noir. Les grandes couvertures des ailes sont noires, bordées de blanc en dehors, les moyennes sont blanches, et les petites sont d’un brun clair, rayées transversalement a leur bout de blanc et de noir ; les pen- nes des ailes sont noires, bordées de blanc en dehors, et celles de la queue sont entierement d’un brun clair. La poitrine de ce joli gallinacé, son ventre, ses flanes, de même que les plumes qui revêtent ses jambes sont d'une couleur de rose pâle, son becest d’un cendré bleuûtre ; l'iris de son œil blanc; ses pieds sont rouges et ses ongles d'un blanc saie. 88. LE TUAVERT A CALOTTE NOIRE. Columba melanocephalu. Ein: _Le turvet à calotle noire habite aux environs de Batavia. Cette fourterelle est un peu plus petite que la nôtre : elle à tout le devant de la tête, les côtes et le bas du cou, tant en arriére qu'en avant. d’un gris bleuâtre; l’occiput noir et tout le reste de son plumage d’un vert fort bril- D’'ORNITHOLOGIE. 499 Jant : il faut néanmoins en excepter la gorge, et le bas- ventre qui sont d’un beau jaune , ainsi que les couvertures du dessous de sa queue, qui sont rouges. Son bec est noir à sa base, et jaune à son extrémité; l'iris de ses yeux, ainsi que ses pieds, sont rouges, et ses onglesnoirâtres. 80.” LE TURVERT COURONNÉ DE BLEU. Columba cyanocephala.. Las. Cette tourterelle, qui est de la même taille que la pré- cédente, se trouve à la Chine : son plumage est presque entièrement vert en dessus et rougeâtre en dessous; seu- lement le sommet de sa tète est bleu, et les pennes de ses ailes, ainsi que celles de sa queue, sont d’un bleu noir; elle à le bec, l'iris de l'œil et les pieds rouges ; ses ongles sont d'un marron pourpré. 00.” LE TURVERT D'AMBOINE. Columba viridis. Laix. C'est à l'ile d'Amboine, l’une des Moluques, . que l'on rencontre cette fourterelle qui est un peu moins épaisse que la nôtre , et qui n’a que huit pouces de longueur de l'extrémité du bec à celle de la queue. Son front et sa gorge sont cendrés ; l’occiput , le derrière de son cou, son dos, son croupion , les couvertures supérieures de sa quere, celles de ses aïles , de même que son ventre, ses flancs et ses jambes, sont d’un beau vert doré, susceptible des reflets les plus brillans de couleur de cuivre de rosette, suivant l'in- cidence de la lumière. Les pennes de ses ailes semblent être du même vertlorsqu’elles sont ployées, parce qu’étant bor- dées extérieurement de cette couleur, elle est la seule qui, "7 09 600. TABLEAU ÉLÉMENTAIRE dans cette position, soit apparente ; mais dans le fait elles sont entiérement noirâtres, à l'exception de cette bordure ; celles de la queue sont d'un vert bleu ; leslatérales de cette partie sont terminées par un beau jaune de paille et leurs couvertures inférieures sont d’un blanc verdàtre. Ce maguifique oiseau a le devant du cou d'un beau violet pourpré;le bec et les pieds rouges; l'iris des yeux de cou- leur aurore pâle et les ongles gris. O1. LE TURVERT DE JAVA. Columba Javanica. Lan. Cette dernière espèce de la premiere tribu des fourte- relles à pennes de la queue égales et de moyenne lon- gueur, habite l'ile de Java, dans la mer des Indes. Elle a à peu prés neuf pouces et demi de longueur du bout du bec à l'extrémité de la queue; la presque totalité de son plumage est d'un beau vert, si ce n’est sa tête, son cou et sa poitrine qui sont d'une couleur vineuse un peu rougeâtre ; ses tempes d’ailleurs, ainsi que son front, sont de cette même couleur , mais beaucoup plus pâle; les gran- des pennes de ses ailes sont brunes,et son ventre estnoirâtre. Ce gallinacé a le bec rougeätre, surmonté d'une membrane blanche et comme farineuse; l'iris de son œil, ainsi queses ongles, sont d’un brun rougeâtre, ct ses picds bruns, D'ORNITHOLOGIE. Set DEUXIÈME TRIRÆTDU. Tourterelles à queue longue et cunéiforme, ow taillée el COL/1. [e O2.” LA TOURTERELLE D'AMPOINE. Columba Æmboniensis. Lan. La fourterelle d’Amboine est à peu prés de la grosseur “de notre tourterelle commune, columba turtur, Lin.; elle a quatorze pouces de longueur du bout du bec à l'extré- mité de la queue, qui elle seule en a huit. Le sommet de satête, son cou, sa poitrine, son ventre, ses flancs, ses jambes et les couvertures du dessous de sa queue sont d'une couleur rousse ; le derrière de son cou.et les couvertures supérieures de ses ailes sont d’un brun foncé ; chacune des plumes qui les composent est bordée de roux ; le bas de son dos et de son croupion est de cette dernière couleur : elle a les pennes des ailes brunes ; celles de la queue d’un brun roux, ainsi que leurs couvertures inférieures ; les deux pennes du milieu de cet appendice sont les plus longues, et toutes les latérales vont en di- minuant de longueur à mesure qu’elles sont. plus exté- rieures ; son bec, ses yeux et sespieds sont rouges ,.et ses on- gles noirâtres. _ 95.° LA TOURTERELLE D'AMÉRIQUE. €Columba marginata. Lan. Edvvart a le premier parlé de cette tourterelle qu'il a nommée dans son ouvrage, t. 1, pag. et pl. 15, pigeon à longue queue. Cet oiseau, qui a prês de dix pouces de lon- gueur totale, est remarquable par son front et sa gorge qui sont d’un brun roussâtre, et par son occiput qui est $o2 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE d’un cendré bleu : on-voit sur le haut de chacune deses joues une tache noire qui est d'autant plus apparente qu’elle est placée sur un fond de gris de perle. Le derrière de son cou. le haut de son dos, ses plumes scapulaires ; ainsi que les couvertures supérieures de ses ailes sont d’un brun obscur ; le bas de son dos , son croupion et les couver- tures du dessus de sa queue sont d'un brun grisàtre; les _pennes de ses ailes sont d’un brun foncé, bordées exté- rieurement de roussàtre ; les deux du milieu de la queue qui sont les plus longues, sont noirâtres; les latérales qui diminuent de longueur à mesure qu’elles sont plus exté- rieures, sont cendrées et terminées de blanc ; toutes sont coupées par une bande noire qui les traverse; le devant de son cou etsa poitrine sont d’une couleur de rose tendre qui s’affoiblit insensiblement et s'amalgame avec le brun cendré qui colore le ventre, ses jambes, aimsi que les couvertures du dessous de sa queue; son bec est brunâtre, et l'iris de son œil est d’un roux obscur; ses pieds sont rouges et ses ongles noirs. o LA TOURTE. / 94: Columba carolintensis. Lis. Cotesby avoit désigné dans son ouvrage, t. 1 pag. ct planch. 24, cet oëseau sous le nom de fourterelle de la Caroline, et il paroissoit d’autant plus fondé dans l’adop- tion qu’il avoit faite de ce nom, qu’en effet c’est plus par- ticuliérement là que l’on trouve ce gallinacé, qui habite aussi le Brésil et Saint-Domingue; mais M. de Buffon qui a eu , sans doute, pour cela, des motifs que nous ignorens, a jugé plus convenable de le nommer la tourte. Quoi qu'il en soit, cette fourterelle n’est pas si grosse que la nôtre; elle a le front, le devant du cou et la poi- trine d'une couieur rougeàtre qui, dans le mâle surtout, est D'ORNITHOLOGIE. 508 susceptible de chatoyer en violet doré, suivant l'incidence de la lumière ; l’occiput et le haut du cou en dessus, sont d'un cendré obscur; le dos, ainsi que les couvertures des ailes qui sont les plus voisines du corps, le croupion et les couvertures du dessus de la queue sont de cette mènre cou- leur , mais cette couleur est lavée d'une teinte roussâtre ; les couvertures des ailés qui sont les plus éloignées du dos, ne sont que d’un cendré rembruni, sans au- cun mélange de roussàtre, seulement elles sont maculées de quelques taches noïrâtres; toutes les pennes de l'aile sont d’un cendré noirâtre et les plus grandes seulement sont bordées de blanchätre en dehors; les deux pennes du milieu de la queue sont d’un cendré brun; celles-ci sont sensiblement plus longues que les latérales qui vont toujours en diminuant de longueur , à mésure qu’elles sont plus extérieures ; ces dernieres sont variées de noir, et &e cendré. Cette tourterelle a le ventre, les flancs, les jambes et les couvertures du dessous de la queue roussätres ; son bec est noirâtre ; ses yeux noirs sont entourés d’une peau bleue; ses pieds sont rouges et ses ongles bruns. Oo 95.° LA TOURTELETTE. Columba capensis. Lan. Cette derniére espece ; dans lordre alphabétique que nous avons adopté pour indiquer les diverses races de pigeons ét de tourlerelles, soit exotiques soit indigènes, et qui,sont. lé plus généralent:t connues, settouve” au Cap de Bonne-Espérance. . .1.,, Elle n’est pas plus grosse qu'u ‘une alouette ordinaire, alauda arvensis ; Lin, ; sa tête, son cou, sa poitrine, son «dos , son croupion, les écuvertures supérieures de ses ailes, celles du dessdiffie: sa queue sont d’un gris brun; les pen- nes de ses ailes sont ruusses en dedans et brunes en de- hors et à leur bout; toutes celles de la queue dont les 804 TABLEAU ÉLÉMENTAIRE, ete. deux du milieu sont sensiblemeut plus longues et noires en dessous, sont d’un brun noirâtre ; la plus extérieure de chaque côté , et qui est la plus courte, est d’un gris brun ter- miné de noirâtre: on voit sur chacune des ailes de cet oiseaw une tache brillante et de couleur d'acier poli; sa gorge, ses côtés, ses jambes et Les couvertures du dessous de sa queue sont d’un blanc sale; ila le bec et les pieds rouges, iris et les ongles bruns. D'après l’exposé que nous venons de faire des diverses espèces de pigeons ou de tour- Lerelles , connues jusqu’à ce jour ; d’après les divers mélanges que l’mdustrie humaïne ou le hasard a faits des uns avec les autres depuis nombre de siècles ; d’après les produits de ceux- ci qüisesont alliés avec ceux d’autres mélanges mille fois répétés ; que l'on calcule, s'il est pos- sible , toutes ces variétés actuelles et que l'on essaye de leur donner un nom et surtout de leur assigner la place qui peut leur convenir dans la série des espèces du genre des pigeons! Nous avons donc pu imaginer quenous étions fondés àne pas croire quenous avancionsun par radoxe, lorsque dans, notre note de la page 30 de ce volume , nous avons dit que l’histoire de toutes les variétés actuelles des pigeons, de mème que celles des chiens et des chevaux, que Pinte- ‘rêt de l’homme avoit formées pour son avantage, seroituneentreprise,non-seulement fastidieuses mais absolument impossible. FIN. / TABLE MÉTHODIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. SUITE DE LORDRE PREMIER. TROISIEMNMÉE SECTION. LES OISEAUX GRIMPEURS. page : Premier genre. Les pics. 3 1e Lie ge noir. + js. ass Picus martius. Lin. VA de memes... : Picus viridis. Lan. 6 3. L’éneiche ou le pic varié. Picus medius. Lin. 10 4. Le petit épeiche. . . . . Picus minor. Lin. 12 Deuxième genre. LEs ToRCOLS. 13 Le torcol ordinaire. . . Yunæx lorquilla. Lin. 14 Troisième genre. Les coucous. 17 Le coucou ordinaire . . Cuculus caudà rotunda- tà. Lin. id. QUATRIÈME SECTION. LES GALLINACÉS. .. 26 Premier genre. LES PIGEONS, | 23 1. Lebisetoupiseon fuyard. Columba domestica. Lin. 31 806 TABLE DES MATIÈRES. DB TAMMIEEN NE - LT . Columba palumbus. Lin. 34 3. la tourterelle .!. . . :. . Columba turtur. Lin. 37 Races principales de pigeons domestiques. 41 Deuxième genre. LEs TÉrRAS. 51 Pærière tribu. Oiseaux à bec en cône courbé , à tarses garuis de plumes , et point d’ergots. 92 1. Legrand coq de bruyère. Tetrao urogallus. Lin. id. 2. Le petit coq de bruyère a queue fourchue. . Tetrao tetrir. Lin. 57 3. La géhinotte. . . . . . . Tetrao bonasia. Lin. Go 4. Le ganga. . . . . . . . . Tetrao alchata. Lin. 62 5. L'attagas . . . . . . . . . Tetrao lagopus. Lin. var. b.64 6. Le lagopede des Alpes . Tetrao lagopus. Lin, var. a. 66 Deux'èm- tribu. Oiseaux à bec en cône courbé , à tète dénuée de membranes charnues, ayant des sourcils rouges, des tarses nus , un ergot obtus aux pieds du mâle, et une queue très- courte. 68 » La perdrix grise” 7. Tetrao perdrir. Lin. 69 2. La petite perdrix grise. . Tetrao perdrix damasce- na. Lin. T4 3. La perdrix de montagnes. Tetrao montanus. Lin. 76 4. La perdrix rouge d'Eu- LT ONE ME ce Tetraorufus. Lin., var. a. 77 5. La-bartavelle . . . . . . Tetrao rufus. Lin., var. b. 79 Troisième tribu. OissAux à bec courbé, à tète dénuée de mem- branes charnues , ayant une tache nue derrière l’œil, et sans rouge ; le tarse nu, et la queue courte. 61 Lacaille : 3.14 . .. . Tetrao coturnix. Lin. 82 Troisième genre. LES PAONS. 86 Le paon ordinaire. . . . Pavo cristatus. Lin. 87 TABLE DES MATIÈRES. 307 Quatrième genre. Lxs raisans. 90 1. Le faisan ordivaire . . . Phasianus colchicus. Lin. 91 2. Lefaisan doré ou le tri- color huppé de la Ohine cvs. « Phasianus pictus. Lin. 95 Cinquième genres LES PINTADES. 98 La pintade commune . . Nuimida meleagris. Lin. 99 Sixième genre. L& DINDON ET LE COQ. 101 L 1. Le dindon. . . . . . . . Meleagris gallo pavo. Tin. 103 DS LEE ner ete ee 1 Phasianus gallus domes- Licus. Lin. 105 Septième genre. Les ourannes. 108 1. La grande outarde. . . . Ofis tarda. Lin. 109 2. La petite outarde ou can- nepétiere . . . . . . Otis tetrax. Lin. 113 ORDRE SECOND. LES FISSIPÈDES DE RIVAGES. 117 PREMIÈRE FAMILLE. LES FISSIPÈDES DE RIVAGES à bec long et fort, ayant une partie du bas de la jambe dégarnie de plumes ; des demi-membranes à la base des trois doïgts antérieurs, avec ur pouce en arrière. 119 Genre. Les uérows. 120 Première tribu. OISEAUX DE RIVAGES à bec épais à son origine , long , fort, et allant en diminuant de sa base à sa poinie, qui est très-aiguë ; doigt du milieu denté en scie à son bord 5o8 TABLE DES MATIÈRES. intérieur ; yeux entourés d’une peau nuc, et paraissant comme implantés dans la base même du bec. page 120 1. Le héron commun. . . Ardea cinerea. Lin. 121 2. Le héron blanc. . . . . Ardea alba. Lin. 125 3. Le héron montagnard . Ardea monticola. La Pey- rouse. 127 4. Lehéron pourpré. . . . Ardea purpurea. Lin. 128 5. Le héron-garzette blan- che. - . - . . j . - . Ardea candida. minor Brissoni. Lin. 131 L'aiprette. :. 2. ...../#rdea nivea. Tan: 133 Le blongios. . . . . . . Ardea minuta. Lin. 136 . Le butor ordinaire. . . Ardea stellaris. Lan. 140 6 7 8. Le crabier-gentil. . . . Ardea erytropus. Lin. 137 9 0. Le butor roux. . . . . Ardea soloniensis. Lin. 145 11. Le bihoreau. . . . . . Ardea nictycorax. Lin. id. Deuxième tribu. OISEAUX DE RIVAGES à bec gros, long, pointu, droit et lisse, dont l’œil est plus éloigné de la base du bec que dans les espèces de la tribu précédente , qui ont le doigt du milieu sans dentelures, et réuni aux deux collatéraux par une courte membrane. 148 1. La cigogne blanche . . Ardea ciconia. Lin. 149 2. La cigogne noire. . . Ardea ciconianigra. Lin. 153 3. Le maguari. . . . . . . Ardea maguari. Lin. 155 Troisième tribu. O1SEAU DE RIVAGES à bec moins long que celui des hérons, droit et pointu, dont une partie de la tète est dégarnie de plumes, et dont les pennes les plus voisines du corps se relèvent , en se courbant en lame de faulx, au- dessous du croupion; doigt du milieu uni à l’extérieur par une courte membrane; ongles sans dentelures. 157 La grue ordinaire. . . . Ardea grus. Lin. .. 158 LU DL TABLE DES MATIÈRES. 50$ SECONDE FAMILLE. LES FISSIPÈDES DE RIVAGES à bec long et foible, aussi large à sa base que la tête: l'est droit, aplati horizontalement, et son bout se dilate en s’élargis- sant et en s'arrondissant en un disque qui a la Jorme d'une spatule. 160 Genre unique. LES SPATULES. 161 La spatule blanche . . . Platalea leucorodios. Lin. id, TROISIÈME FAMILLE. LES FISSIPÉDES DE RIVAGES à bec gréle, ordi nairement rond, et plus ou moins foible. 164 Premier genre. L'AvOcETTE. 165 L'avocette. . . . . . . . Recurvirosta avocetta.L.. 166 Deuxième genre. Les PLUVIERS. 168. Première tribu. OisEAUXx FISSIPEDES DE RIVACEs à bec grêle, droit, médiocrement long, et un peu renflé par le bout. 169 1. Le pluvier doré. . . . . Charadrius pluvialis. Lin. id- 2. Lepluvier à collier. . . Charadrius hiaticula. Lin. 172 3. Le grand pluvier ou couriis de terre. . . Charadrius ædicnemus. L. 173 b'Legmignardrs.,. ... Charadrius morinellus. L. 176 % Deuxième tribu. Oiseau à bec très-long , cylindrique, courbé en en-bas, et un peu renflé vers le bout ; à tarse excessive- ment long et grêle. 177 L’échässe . . . . . . . . Charadrius himantopus. Lin. 178 Troisième tribu. Oiseau à bec long, rétréci, terminé en coin Bio TABLE DES MATIÈRES. ct comme comprimé entre les narines et son extrémité. 150 L'huitrier. . . . . . . . Hæmatopus ostralegus. Lin. id. Troisième genre. liEs VANNEAUX. 184 Première tribu. Oiseaux à bec droit, renflé par le bout, et des nerines petites. idem. 1. Le vanneau ordinaire. . Tringa vanellus. Jin. 185 2. Le vanneau suisse . . . Tringa helvetica. Lan. 189 3. Le varneau pluvier . . . Tringa variata. Lin. 191 Deuxième tribu. Oiseau à bec comprimé horizontalement , plutôt courbé en en-haut que droit, épais & sa racine , et diminuant insensiblenent vers sa pointe, qui €:t assez aiguë. 192 Le tourne-pierre. . . . Tringainterpres. Lin. 193 Troisième tribu. Oiseau à bec aussi long que la tête, un peu épais à sa base, légèrement courbé eu en-bas, et un peu renflé à son extrémité. 195 Le combattant ou paon Mis = tv SBPNCNNMEN Tringa pugnaz. Lin. id. Quatrième tribu. Oiszaux à bec menu , de moyenne longueur, droit, ou un peu incliné en en-bas, obtus et liss2. 198 1. Lebécasseau . . . . . . Tringa ochropus. Lin. 199 2. La guignette . . . . . . Tringa hypolcucos. Lin. 201 3. Le chevalier ordinaire. Tringa equestris. Latham. 203 4. Le chevalier aux pieds rouges. . . . « . « « Tringa gambetta. Lin. 205 5. Le chevalier varié. . . Tringa litlorea. Lin. 207 6. L’alouette de mer ordi- | maire. . . « . + - «+ . Tringa cinclus. Lin. 208 7. L’alouetté de mer à col- TABLE DES MATIÈRES. 511 lier ou le cincle. . . Tringa cinclus pedibus Jfuseis. Lin. 210 8. Lamaubêche commune. Tringa calidris. Lin. 211 9. La maubêche tachetée . Tringa nœvia. Lin. 213 10. La maubêche grise. . . Tringa grisea. 214 Quatrième genre. Les BÉCASSES. 215 Première tribu. OISEAUX DE RIVAGES, à bec menu, droit, très- long , dont le bout est obtus et raboteux, et qui n’ont aucune apparence de membrane entre eux. 216 1. La bécasse ordinaire . . Scolopazx rusticola. Lin. 217 2. La bécassine . . . . . . Scolopax gallinago. Lin. 223 3. La petite bécassine. . . Scolopax gallinula. Lin. 226 4. La brunette, . . . . . . Scolopax pusilla. Lin. 228 5. LabécassinedelaChine. Scolopax capensis. Lin. 229 Deuxième tribu. Oistaux DE RiIvAGESs, à bec gréle , cylindrique, deux fois plus long que la tête; ayant le bout de la man- dibule supérieure obtus et lisse, et plutôt recourbé en en-haut que droit; le doigt extérieur uni avec celui du milieu, jus- qu’à la première articulation seulement, par un rudiment de membrane, 291 1. La barge commune. . . Scolopax limosa. Lin. 232 2. La barge aboyeuse . . . Scolopax totanus. Lin. 234 3. La grande barge rousse. Scolopax ægocephala. L. 235 4. La barge aux pieds rou- ges. . . . . . . . . . Scolopar obscura. Lin. 236 Troisième tribu. OiSEAUX DE RIVAGES, à bec arqué en en-bas, foible , sans consistance , comme émoussé à son extrémité, et trois fois plus long que la tête , ayant le doigt du miliew joint a l'extérieur, jusqu’à la première articulation seulement, par une etite portion de membrane. 237 P P 7 Le courlis ordinaire . . Scolopax arquata.Lin. 238 512 TABLE DES MATIÉRES. Quatrième tribu. O1SEAUx DE RIVAGES à bec court, conrexe dans toute sa longueur , comprimé par les côtés, et terminé par une pointe aiguë qui est dirigéeen er-bas, et dont l’ongle du milieu des trois doigts antérieurs est marqué d’une arête dentée en scie. 241 1. La perdrix de mer or- dinaire.". . . . . . . Giareola austriaca. Lin. 242 2. Laperdex demérerise 2°." 70 60e 3. La perdrix de mer à collier. . : . . . . . Glareola lorquata. Lin. 245 Cinquième genre. Les RALESs. 247 Première tribu. OISEAUX DE RIVAGES , à bec poiutu, de médiocre grandeur , et dont le bout se dirige en en -bas ; ayant le corps comprimé par les côtés, la téle petite, et les doigts de médiocre grandeur. - 219 1. Le ràle de terre ou de penis. à +0." italus cret: Tin, 250 2. La maroucette . : . . . . Rallus porzana. Lin. 253 Deuxiime tribu. OiSEAY DE RIVAGES, à bec long, obtus et comme ; o ? grossi à sou extrémité, qui a le corps aplati par les côtés, la ète petite, et les doigts fort longs. 299 Le räle d'eau. . .... Rallus aquaticus. Lin. 256 Troisième tribu. OiseAU DE RIVAGES, à bec grèle, eMilé et de médiocre grandeur , ayant ie corps plein et arrondi , les jambes garnies de plumes jusqu’au calcaneum , et les doigts séparés les uns des autres, saus aucune apparence de membrane entre eux , avec uu pouce en arrière. : 299 Le merle d'eau. , , . . Sturnus cinclus.Lain. 260 F4 TABLE DES MATIÈRES. E ORDRE TROISIÈME. LES OISEAUX NAGEURS ou PALMIPÈDES. PREMIÈRE FAMILLE. Gi F 269 LES OISEAUX NAGEURS à ec droit et pointu , comprime par les côtés,etsurmonté, à sa base, d'une plaque nue, cartilagineuse: et comme cornée, qui s'étend sur le front, laquelle rougit au printemps, et reste blanche en toute artre saison : ces oiseaux onk£ Le bas de la jambe au-dessus du calcareum dégarni de plumes ; trois doigts en avant et un pouce en arrière, tous garnis, dans leur longueur, de membranes fen- dues, simples ou festonnées. Premier genre. Lrs pouLEs n'EAU. 1. La poule d’eau propre- ment dite. . . . . . Fulica chloropus. Lin. 2. La petite poule d’eau. . Fulica fusca. Lin. 3. La grinette. . . . . . . Fulica nævia. Lin. Deuxième genre. LES FOULQUES OU MORELLES. 1. La foulque ou morelle ordinaire... . . . . . Fulica atra. Jin. 2. La macroule . . . . . , Fulica atérrima. Lan. Troisième genre. LEs cRÈBES. 1. Le grêbe commun . . . Colymbus urinator. Lin. 2. Lepetitgrébe. . . . . . Colymbus obscurus. Lin. 3. Le grébe huppé. .'. . . Colymbus cristatus. Lin. 4. Le grêbe cornu. . . . . Colymbus cornutus. Lin. 5. Le petit grêbe cornu . . Colÿmbus auritus. Lin. 6. Le castagneux de ri- ” vitre. . .. : « . + « Colymbus minor.Län. 4} Te 2e 4 3 211 278 282 284 266 14 TABLE DES MATIÈRES. 1 DEUXIEME FAMILLE, LES OISEAUX NAGEURS à quatre doigts reunis dans une seule et méme mermnbrane. 304 Genre unique. LEs PÉLICANS. 305 1. Le pélican proprement dit.......... Pelecanus onocrotalus. 1. 306 2. Le pélican brun. . . . . Pelecanus fuscus. Lin. 311 3. Lecormoran.. . .« « « . Pelecanus carbo. Lin. 313 4. Le fou de Bassan . . . . Pelecanus bassanus. Lin. 517 TROISIÈME FAMILLE. LES OISEAUX NAGEURS a bec long, droit, pointu, aplati par les côtés; à ailes trés-longues, échan- crées ; à queue pleine eu fourchue ; à jambes cour- tes et à pieds petits, dont les trois doigts antérieurs sont réunis dans une seule membrane, et le pouce séparé. 519 Premier genre. LES HIRONDELLES DE MER. 320 à. La grande hirondelle de mer ou le pierre-ga- Tin se... + « « .« Sterna hirundo. Lin. 322 2. La petite hirondelle de : mer og 57 Sterne minrula Tin: 325 _ 3. Laguifette . . . . . . . Sterna nævia. Lin. 327 4. La guifette noire ou l'é- pouvantail. . . . . . Sterna fissipes. Lin. 329 330 Deuxième genre. LEs MAUVES. 1. Le goëland à manteau ... Larus glaucus. Lin, QG gris . e . » . . TABLE DES MATIÈRES. 515 z. Le goëland varié ou le GRIS ER ee Larus nævius. Lin. 334 3. Lagrandemouettegrise. Larus argentatus. Lin. 1) 321 bis. 4. La petite mouette cen- 2e 4 MNT e Larus cinerarius. Lin 322 bis. 5. La mouette rieuse . . . Larus atricilla. Lin. 325 bis. 6. Le labbe ou le sterco- 2 11 à a SPP UE Larus erepidatus. Lin. 327 bis. QUATRIÈME FAMILLE. LES OISEAUX NAGEURS, à bec plus ow moins large, mais toujours dentelé comme une lime, ayant une langue épaisse et charnue ; quatre doigts, dont les trois antérieurs sont joints ensemble par une membrane entière et le pouce séparé, avec des ailes de médiocre grandeur. 550 brs. Premier genre. LEs cANARDS. 231 bis. 1. Le cygne domestique. . Anas olor: Lin. 333 bis. 3. Le cygne sauvage. . . . Anas cygnus. Lin. 337 3. L’oie domestique. . . . Anas anser domesticus. L. 340 4. L’oie sauvage. . . . . . Anas anser. Lin. 343 5. L’oie de Guinée. . . . . Anas cygnoides. Lin. 350 6. L’oie bronzée. . . . : . Anas melanotos. Lin. 352 7. L'oie d'Egypte: . 2 Anas ægypfiaca. Lin. 353 8. Le canard domestique . Anas domestica. Lin. 355: 9- Le canard sauvage . . . Anas boschas. Lin. 358 10. Le canard musqué. . . Anas moschafa. Lin. 366 1) On a commis dans la pagination des feuilles 21 et 22 de ce volume une erreur dont on ne s’est aperçu qu’au moment où on à formé sa table. TABLE DES MATIÈRES. 516 31.4 Me SHeDEE Mimet". 2 Anas clypeata. Lin. 369 #tLe chipeaut,fesr.sne L Anas strepera. Lin. 371 213. Labemaehe 0j de Anas erythropus. Lin. 374 14Liesravant . . . 4. . Anas bernicla. Lin. 376 15, Éeluliomn, . |. 4.7. Anas ferina. Lin. 378 16. Le millouinan . . . .. . Anas marila. Lin. 360 17. Le pilet oucanard alon- due queue: CU Anas acuta. Lin. 382 18. iLestadorne,:. use ire Anas tadorna. Lin. 384 192 Le arentrs Ne Anas clangula. Lin. 387 20. Le canard siffleur. - . : Anas penelope.'Lin. 389 21. Le canard siffieur hup- pé : SUR NT RACE Anas rufina. Lin. 392 22. Le morillon. . . . . . . Anas fuligula. Lin. 393 33, Le peñi morillon. . . . Anas fuligula minor. Lin. 396 24.414 macreuse . 2." : Anas nigra. Lin. 398 25. La double macreuse . . Anas fusca. Lin. 460 26. La sarcelle commune . Anas querquedula. Lin. 401 27. La petite sarcelle. . . . Anas crecca. Lin. 40% 28. La sarcelle d'été . . . . Anas circia. Lin. 406 Deuxième genre. Les KARLES. : 40g 3. Le harle proprement 5 T'AS MU SE Mergus merganser. Lin. 410 2, Le harle huppé. . . ….. Mergus serrator.Lin. 413 3, Le harle piette. . . . . Mergus albellus. Lin. 415 TABLE DES MATIÈRES. 317 CINQUIÈMEÉ FAMILLE. LES OISEAUX PALMIPÉÈDES où NAGEURS, à bee droit, pointu, comprimé pur les côtes, et sans den- Lelures ; à pirds déprimes et aplatis sur les faces latérales, placés tout-a-fait & l'arrière du corps, et presqu'entiéren ent cachés dans l'abdomen; ay art les ailes trés-couries, et une queue presque nulle. | 417 Genre unique. LEs PLonexoNs. 419 1 Le grand plongeon. . . Colÿmbus immer. Lin. id. 2 Le petit plongeon. . . . Colymbus slellatus. Lin. 421 USAGE dans la pratique de notre Méthode orhitholosique. 425 APPENDICE.— Des différentes râces de pigeons connus ; soit exotiques soit indisènes ; dis- posées dans un ordre alj; habétique , avec ur précis abrégé de leur histoire. 435 Gen. 104 , de LiINNÉ; édit. 13 , de GMFLIN ; et de notre méthode , le premier des gäliiuacés. id, \ PREMIÈRE SECTION. LES PIGEONS , Columbæ, in. 437 PREMIÈRE TRIBV. Picroxs dont les pennes de la queue sont égales et de moyenne grandeur. idem. 1. Le pigeon à ailes blan- ches des Indes. . . . Columba leucoptera. Lin. id. 3. Le pigeon à bec courbé, Columba curvirostra. Lin. 438 54% xO. 31. 22 14. 25. . Le pigeon cavalier. . TABLE DES MATIÈRES. . Le pigeon à cravatte . . Le pigeon à criniere. . Le pigeon à poitrine . Columba Eimensis. Lin. id. . Lepigeon à queue anne- . Columba caribæa.Lin. 44o . Le pigeon à tête blan- pourpre d'Eimeo . lée des Antilles. . che de la Jamaïque. .- Le pigeon à tête grise d'Antgué :°. 1." Le pigeon à tête pour- prée etpoitrine oran- gée , de Java. . . .. Le pigeon aux aïles rou- PENDU a ede oc Le pigeon à ventre blanc de la Jamaïque. . Le pigeon bartavelle. . 19. Le pigeon biset, fuyard ou domestique. . . . Le pigeon blanc, man- geur de muscades de la Nouvelle-Guinée. Le pigeon bleu du Mexi- que Air ere 3,5 . Le pigeon brun de Car- ÉRASeNE Le u . Le pigeon brun de la Nouveile-Espagne. . . Columba eques. Lin. 448 . Le pigeon couronné de pourpre de lamer du Sul KE Columba turbita. Lin. 436 Columba jubata. Lin. 439 Columba leucocephala. … id. Columba albicapilla. Lin. 441 Columba purpurea. Lin. 442 Columba erythroptera. L. 443 Columbajamaicensts. Lin. 444 Columba letraoides. Lin. 445 Columba domestica. Tin. td. Columba alba. Lin. id. Columba cærulea. Lin. 446 Columba fusca. Lin. 447 Columba nævia. Lin. id. Columba purpurata. Lin. id. 20. A1 TABLE DES MATIÈRES. 319 Le pigeon couronné des Indes, ou le goura. Columba coronata.Lin. 450 Le pigeon cuirassé ou co- quille hollandaise. . Columba galeata. Lin. 452 . Le pigeon cuibutant . . Columba gyratrix. Lin. id. . Le pigeon de Barbarie. Columba barbarica. Lin. 453 . Le pigeon de Coro . . . Columba corensis. Lin. id. . Le pigeon de Guinée. . Columba Guinea. Lin. 454 . Le pigeon de la Martini- FRE + . . Columba Martinica. Lin. 455 . Le pigeon de la mer du M se Columba pacifiea. Lin. id. . Le pigeon de la Nou- velle-Zélande . . . . Columba novæ Sgelandiæ. Lin. 456 . Le pigeon de l'ile de France. . . . , . . . Columba Franciæ. Lin. 453% . Le pigeon de montagne, de Cayenne. . ... Columba montana. Lin. id. . Le pigeon de montagne, du Mexique. . . . . Columba hoiloël. Lin. 458 . Le pigeon de Nicobar. . Columba Nicobarica. Tin. id. . Le pigeon de Norwège. Columba Norwegiea. Lin. 460 . Le pigeon de roche. . . Columba saxatilis. Lin. id. . Le pigeon domestique . Columba domestica. Lin. 461 . Le pigeon du Mexique . Columba mexicana. Lin. 462 . Lepigeon founingo bleu. Columba Madagasca- riensis. Lin. id. . Le pigeon frisé. ; . . . Columba hispida. Lin. 462 . Le pigeon grosse-zorge. Columba gutturosa. Lin. id. . Le pigeon huppé . . . . Columba cristata. Lin. 463 . Le pigeon jamboo . . . Columbajambu. Lin. AGE . Le pigeon messager . . Columba tabellaria. Lin. 464 520 43. 44. 45. 46. 47- 48. 49. ST. 56. | 59. 60. . Le pigeon romain. . . : Le pigeon turc. . , . TABLE DES MATIÈRES. Le pigeon nonnaïin. . . Le pigeon paon. . . .. Le pigeon pattu. . . . . Columba cucullata. ain. Columbalaticauda. Lin. Columba dasypus. Lin. 465 466 id: Le pigeon pompadour . Columba pompadera. Lin. 467 Le pigeon ramier. . . . Le pigeon ran:ier cui- vré, miatigeur de muséades de la Nou- velle-Zélande . . . Le pigeon ramier d’Am- boine . Le pigeon ramier des Moluques . . . .. . Le pigeon sauvage . . . . Le pigeontaché. : : : . Le pigeon tournant ou Halte su les . Le pigeon vert d’Am- bomers si tas Le pigeon vert de Pile Saint-Thomas . . . . Le pigeon vert des Phi- lippires Le pigeon vert taché .. Le pigeon violet à tête Columba palumbus. Lin, LJ Célurnba indica. Lin. . Columba ænea. Lin.,var : &. . Columba hispanica.Lin. Columba ænas.: Lin. Colur1hamaculata. Ein. Columba percussor. Lin. . Columba turciea. Lin. Columba aromatica. Lin. Columba Sancti-Thomeæ. Lin. Columba vernans. Lin, Columba viridis macula- ta. Lin. 468 . Columba ænet. Lin., var : b.id, 469 470 471/ 472 id. 473 id. 474 475 id. 476 gouge d’Autigues. . Columba rubricapilla. L. 477 TABLE DES MATIÈRES. 522 DEUXIÈME TRIBU. f Picrows dont les pennes de la! queue sont plus grandes et cunéi- formes , ou taillées en coin. 478 61. Lepigeoun à ailesnoires, dueGhii. 5 4. Columba melanoptera. L. id, 62. Le pigeon de passage, d'Amérique. . ... Columba migratoria. Lin. id, 63. Le pigeon tourocco. . . Columba macroura. Lin. 479 GR NE TAmIEL . . ee - Columba speciosa. Lin. 480 SECTION DEUXIÈME. LES TOURTERELLES. Columbæ turtures, Lin. 481 PREMIÈRE TRIBU. TourTERELLES qui ont les pennes de la queue égales et de moyenne longueur. id. 65. La tourterelle à collier. Columba risoria. Lin. . Var. a. id. 66. La tourterelle à collier duéénégal.) 0: Columba vinacea. Lin. 482 67. La tourtereile à gorge tachetée du Sénégal. Columba Senegalensis. L. 483 68. La tourterelle à tête bleue, de la Jamaï- dues pie opus Columba cyanocephala. Y. id. 69. La tourterelle blanche * ensanglantée . .. . Columba sanguinea. Lin. 484 70. La tourterelle brune He la Chine... 4: Columba turtur. L. var. d. 485 71. La tourterelle cocothi. . Columba minuta. Lin. 486 72. La tourterelle cocotzin. Columba passerina.-Lin. 487 73. La tourterelle commu- He... . «+ « Columba furtur. Lin: 488 5292 TABLE DES MATIÈRES. var : a. Lin. 188 74. La tourterelle de Cam- BAYER I ie Columba Cambayensis. L.id- 75. La touterelle de la côte de Mal2bar. . . . .. Columba Malabarica. L. 489 76. La tourterelle de Queda Cpette Tr SUR . Columba Malaccensis. Lin. id. 77. LatourterelledeSurate. Columba Suratensis. Lin. 490 78. La tourterelle de Suri- no Le AIT Columba Surinamensis. L, 497 7 9e Latourterelle duCanada. Columba Canadensis. Lin. 492 80. La tourterelle du Portu- VS Ne Se Columba turtur. Lin.var. b. id. 81. La tourterelle du Séné- COUT LEE Columba afra. Lin. 493 82, La tourterellegrise de la Chine... ...... Columbarisoria. L, var. c. 494 83. La tourterelle grise de l'ile de Luçon. . . . Columba turtur. Lin. 495 84. La taurterelle grise en- sanglantée . . . . .. Columba cruenta. Lin. id. 85. La tourterelle hybride. Columbarisoria. L, var. c. 496 86. La tourterelle rayée . . Columbastriata. Lin. 497 87. La tourterelle rayée de la Chine. . . . . . . Columba sinica. Lin. 493 88. Le turvert à calottenoi- EE” biere lite Columba melanecephala. Lin. 89. Le turvert couronné de 11 10) EEE .<... Columba cyanocephala. Lin. 499 90. Le turvet d’Amboiïne. . Columba viridis. Lin. id. 91. Le turvert de Java . , . Columba Javanica. Lin, 5oo TABLE DES MATIÈRES. 523 DEUXIÈME TRIBU. TourTERELLES à queue longue et cunéiforme outaillée en coin. box 92. Latourtellc d'Amboïne. Columba Amboniensis. Lin. ide 03. La tourterelle d’Améri- que. « ... . . + + . . Columba marginafa. Lin. id. . 94. La tourte. . . : . , - «+ Columba Caroliniensis. L. 5o2 95. Latourtelette. . . . . . Columba capensis. Lin. 503 = FIN DE LA TABLE DU TOME SECOND. | PE ñ Ê RS Ai + shredinode tt jaD* RARES ÿ” FA UT L2) cs ; 1e Lo. 4 ES PRES ne. “nues res nel ppt y x HA | dut tee PR A Ÿ; L He: pod FE 4% ay RAT FRS ED sys Mae a dre rue 2 4 io NS He . “ “4 . . Dé À e a Nr 4 “44 : QT te x Er" e - . $ #. AA - Aire 4 ‘ > f F £ f | "7. r 4 z : + 7 5 = Reg 4 A de de. L2 ñ è Le : Le pe FRUE ae, ‘ LORS re vh L Ë » > , Fr d ce » L AE A ; È FL S + à . La h | [a : e DS AA TT ue 4 6 ; Len F D k 4 ef : k à à # 4 “ . Pa “ ” Le 4 se. a LA e » 2 . L ! 2e LE u La à » HS CPE , | La 2Y ME AN AS * ire ER. ONE, Er ES | A CARO CPE | 4 À 7 We ? ’ À ji F ee ARE à - dr ke , % Le Da ua, ah “ à L $ - ieii SR Là 14 UE Ru” ALT nie moe ns. A “eL Re Ka SALE … ! #4 D s + à A È ses A: PE" }. ÿ £. “ RES 4 er | Le ae je FA À: à LA ) A "à * , 4 . Ed n TE LA ae A6 } , : À A 7e re rh DE Le © A ÉD 0 ea Vie MES: D PS ECRES "e k - La Di 4 ASE 510 : : Le - LA Helhcs AT + = RE TS 2E P PIE aus ‘1 ra di À (DANSE ve L " NN 2 TO TERER | FAT TE nur et Fr Da D , A F + DE + .N%4 à ; NY A NY MONT FL ee s KZ NY 7 NE x, ES he A A KL : AR EUR FAR FAN * FF es + + + 4 & ASE ++ 4 6 ne à de + 4 à ESS + 4 + Ve à NU. 7 HT PET se SENIOR RER ER NDS NZ T'Y EN | 4 AUS EN FAR À EN TU HN 0 te AR LAN 00 Y& 4 ne + + SE NA sa NZ . NE “4 7 . NZ : AN D 0 #. 2 . a CA) Le ro ?,2 C4 CS . Ca }Q OÙ ær" Nes . vo" DA SR Cr . RU ; ges , d FE ” POSE : « » Là TE La C4 Rs <> ua # 42 CA # Fe Se Y* ss Ÿ* + EU # se a ÿ* + - + e NX 4. NZ SE LOC à NÉ à DA NA à NP où NY à NM 4 NP 4 NS ne NP RNB & NA à NU à NX ra NX % AN, FN TR pe AN UAN. 4 AN U Z2N PE HAN a AK AN + AN. Fe AN BON EN ax, se AN. “ AN se » » » « 7 L 2 « # . LA « Ld « + LA ’ « 4fe 4 AUS à ARS AUS QE AUD AUS en AUS «6 AUS à AUS 4e AUS + AUD ee AS + 49 + AUS de 0 + 45 LA + 6 CA CAC CA) DA ; D 'A de Ÿ RETE cv" à A - A À d'A S A 2 Ÿ: PL A vs ÿ % MELLE MER NE à ME à DU à DE à VE à NÉ à NE 4 NU a NU 2 NE 4 NÉE NUE NE 4 NE à PA ie RS à 1 RS 2 ORPI 20 CARS 4 COR 14 VRANENE 2 MS à M dr 2. AN ir? OEM ce) As ee A € à S OR © os de ES LR Le Ne s Es Hs er Le Te D ad 1 Mrs EN ON * PEUT 4 7 4” … EC à “744 2 BETX # Ÿ ds g* M Ÿ % ECO ss EX # ee” < OC 4 # RUE # “ CRE + y ne DEC Ke EE %# DE ss e NA 4 po en NA “+ NA “+ NY “4 NY ke NY ee Na AA D CR NA po Ca TA . Na 4% D N S% PCR w. É “ke € 4 po CA NA 1 NZ 4 NA + NA PIC GNT AN TAN TOUR AN TAN TAN GR ER TDR PUR FAN TAN AR TAN TAN TAN À « n Ve « , à n » «À,» san > A sd rte sn ete An ” Cr, An « «ob» s'e ! . U 104 Le UX + +. Se 2 + ne e LD? 4 < DER 0 PO < “re RQ De EE ne CC Le + DC ‘À + SE se DXe sa NE & à %e LNG L DL 4 : PEN MN PONS MIN ARS. ANS as à LAN 4 + de + 4 + Et + 4 SO # 4 3 3 FA # à < « L£ +. +. Le DO L # . ’ be 09 + HE. td -E ‘ + + ee DO y + LL KL > #, + (2 e L2 se DO 7 K 4 K NX + 4 2 N A X à & : Lu Y. K AS Pid D D SZ 5 N CORRE ET \ LA ÿ. fx NX HOT re ere ZX NZ | A + € 4R + 4 NZ HN LA NZ L7/ f LA see SO » » + é > DO » it + Q “n° Q Ÿ. ee Dos E eo + € “+ > y so OO Fa + fn “ * DO + DO ; Do PC 2 * es “1 LES Æ RS PE 2 Fe > » PAS PA + 5 Pt .Ÿ DE 1% DL É . A LE î PE US Ÿ NA NA NN 4 NE NU se NU 2 NU à NUE NU NU à NA NU SE à SAT NUS NUS NY k EN EN EN EN EN a ea EN TAN ANT AN a. X À AN. ZX 4 X tee NAT RE | t n'a A: Ph Do FE t: Sex 00 s'e 'e 'e PO c'e PO Q : Por . - x 00 20 4 # OA # ES 7 Le EU # < es # 5 # = LS + > # se # + RS DEA se ke si on + < ke É* 4 DE xs EC NU 2 NES NU à NES NUS NUS NUS NA UN CON UNS NZ à NE + Nes NE LME a NE à AN AN TAN AN AN F% CAR HONTE EN AN AN. FR? AS ÆN 7 AN AN À NS RE que SR à ss + 1 | PTS T 7 RAR PT ARR ETS 7 SRE AREAS LE SRE NE PROS CE PASS PART 7 ART 7 ARR Le ES EX ENYI®R le 6 nr PCR CAEN CO, | Aa CAR a Cl CNT? ” $ En cs # re Le ne # < “ C + ds 4 fs es : | \e RE AE Æ + 2 4 “+. Fe » & de # > << SE + “f < + 45 + j . 5 à. LA ce és. « : 2 K. se + < ns CA “ 2 N + 2 “te x + Fe + + DE & mis “fs + À rà e. PO NY “Æ SA is 2 A os B LOT THEN PR AS AN PRO ON 7$ ; HS Es A à A + AE à A + 8e à 8 à ds + SEL ML MEL DE Mi NE MEL NL NE. ù EN +) AK NRC RG EN 703 CN CN < - ! . + es à 4 + 6 + 1 + 4 à # + & NÉ Mo Ne. M 44. fe KE “+ Ÿ © . 2% + 455 + 2 + : & » 14 ROCCO LA » « 11 # e Ÿ L1 + && + & Ÿ ss À # re D » 4 Eé ç ” L4 Ep + 4 + 5 # < AR A Ne NES a ge AN TK ge AK ++ ES + En + Le + ES + 285 + 5 + 45 + 4 + NA à NA & NL à NB à NU à NU à NA à NU à SA LA 42 æ Se . AN ee te ds AN EAN EAN ne LS + 4e + Es + LE A + A + LD + LS + LD + sa ss Le. FAN © SAR LR es FAN se ee 4e + A + Je + A à OS à 4 à 49 + 4 + HE NY UNE I NE NET NU UNE CNY NUE NY | RS TS DNA Qu à ed a EN LE + + É FL + A + AS + A + LS + ED + À NÉ UNE, NUL NY, NU à NE SN à NA à NU à NU. AR TAN TAN ANR AN GNT AN TAN F5 #K | he; HO US VU DE OU CD. 4 4 à 0e 4 4 à 1 à 8 + 8 + + ns E SA UNE NY SN UNE UNE NE NU NU NE AN 7R LS AN RNRERNR TUN TANT ANRT AN, JÉe à à + 8 + e- + 4Ùs + 4e à A + LE + LE + N 22 cz NA à. Se ca NZ + eo NZ 2 NX SL XX sa NZ" + "x 4 s NN ee AN GR AN Ÿ AN * NX TK | + #8 + à + ‘4 + 48e + 4 à En + + 2% + LE à 2 6" < SH NU à NU à NA à NU à NU à NU 2 NUE ND à NU à AR TR AS AN NN Ne Ne 7 $ : 29 + Sy + SP EE Le + € + #8 + OU OR OR AR LL Se SA + NÆ ES SZÆ Ca SZ =" NA Se NA e NX + NZ po CN 2 SA NZ. 2 Fe AK, AN | LR Aux Re OO AS Fi AN ; 4 10: LB +48 +4 + LE + LE + D + LD + LE + € SE C + DE + 3 NA + Dre & < + je ne Le DL 4 De à DA à NA à AN AR A LE AN TAN ? ; 2 Be 4 + 18 + + & + DS M, Na Mu x PR ES +8 < + à à se es + CR LINE L NA LNU I NE SN | ARS AN A FAN. 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