irs -^ i\ LIBRAIRIE ALAIN BRIEUX 48, rue Jacob . 75006 PARIS Tél. 260.21.98 Inv. No^i&.X 19.3? Case No Digitized by the Internet Archive in 2011 with funding from University of Toronto http://www.archive.org/details/traitdesmembraOObich TRAITE DES MEMBRANES IMPRIMERIE T)E PLASSAN, BUE DE VAI'CIIUBD, X° 1$- TRAITE DES MEMBRANES EN GÉNÉRAL, ET DE DIVERSES MEMBRANES EN PARTICULIER; PAR XAV. BICHAT. 1)65 SOCIETES DE MÉDECINE , MÉDICALE ET PHILOMATIQIE DE PARIS; DR CELLES DE BRUXELLES ET DE LYOS. NOUVELLE ÉDITION, REVUE ET AUGMENTÉE DE NOTES PAR M. MAGENDIE, DE L'ACADEMIE DES SCIENCES, MÉDECIN DF. l'hÔPITAL DE LA SALPKTBIKRK , P.tC. PARIS, MÉoi icnon-Marvi*, libraire pour la partie de MÉDECINE, RUE DO JARDINET, H* l5. Gabon, libraire, rtje de l'Ëcole-de-MÉdecine, h" 10. ntpf.llif ISON , CEI VI 18:-!-. MONTPELLIER. t HAISOS . c;ivliE-hfr. Lui \ MON PERE ET MOIN MEILLEUR AMI J.-B. BIGHAT, D. MÉDECIN. XAV. BICII AT. AVERTISSEMENT SUR CETTE ÉDITION. Le Traité des Membranes a brillé un moment dans la science et n'y est pas res- té : F Anatomie générale et les Recherches physiologiques le laissèrent bientôt en arrière; mais cet ouvrage sera toujours un monument biographique des plus cu- rieux. Quel médecin débuta jamais dans la carrière par un travail aussi neuf et aussi spirituel, où se rencontre l'alliance bien rare d'une imagination active et de l'esprit d'observation ? Ce qui frappe en ouvrant ce livre, c'est la candeur du jeune auteur : il convient d'abord qu'il doit la première idée de son ouvrage à son illustre maî- tre , M. Pinel ; mais par la manière dont il étend et féconde cette idée, il Ylij AVERTISSEMENT montre assez qu'il était en état de ne la devoir qu'à lui-même. Toutefois le Traité des Membranes, par le grand nombre de vues hasardées et même d'erreurs qu'il contient, le peu de sévérité des déductions, l'espèce d'en- traînement qui emporte l'esprit de l'au- teur bien au-delà de ce qu'avoue une saine logique, n'est pas un livre qu'on doive mettre sans précaution entre les mains des étudians; mais il sera toujours lu avec un vif intérêt et un plaisir réel par le médecin philosophe qui veut connaître toutes les phases d'un grand talent. La jeunesse de l'auteur, son imagination brillante, son besoin de rapprochemens, souvent plus nouveaux et inattendus que vrais, expliqueront à chacun les défauts de l'ouvrage ; mais qui refuserait de ren- dre hommage au jeune génie plein de force et d'enthousiasme qui va répandre une clarté nouvelle sur l'anatomie, la physiologie et la médecine? Aujourd'hui un Traité des Membranes SUR CETTE ÉDITION. \\ devrait comprendre une histoire exacte et expérimentale, i° de leurs propriétés physiques durant la vie et après la mort ; 2°. De leur composition chimique et de leur manière de se comporter avec la foule des réactifs connus; 5°. Des propriétés qui ne peuvent se rapporter ni aux propriétés physiques , ni aux chimiques, et qui seraient pure- ment dépendantes de l'état de vie; 4°. Des altérations qu'elles éprouvent dans les maladies, en faisant toujours avec discernement et sans préjugé la part de ce qui est physique ou chimique, de ce qui est simplement vital. En réunissant ces diverses sources de connaissances , on aurait un livre fondamental de toute la médecine. Pour faire un semblable ouvrage , il fau- drait une somme d'instructions variées, bien difficile à rencontrer aujourd'hui, et qui ne pouvait exister du temps de Bichat, puisque les sciences où on les X AVERTISSEMENT aurait puisées étaient beaucoup moins avancées qu'elles ne le sont maintenant. L'édition du Traité des Membranes étant épuisée, le libraire m'a sollicité de placer quelques notes à celle qu'il se proposait de publier. J'y ai consenti, non dans l'intention de mettre l'ouvrage au niveau de la science , il aurait fallu le refaire entièrement, mais avec le désir de signaler quelques-unes des plus graves erreurs qui s'y trouvent, et surtout de redresser la description fautive de l'a- rachnoïde que l'auteur a donnée. Il était d'autant plus urgent de faire ces corrections, que l'arachnoïde a pris, en- tre les membranes, une grande impor- tance, à raison de ses rapports avec le fluide céphalo-spinal que j'ai récemment décrit, et qui joue un rôle si important dans les fonctions du système nerveux. C'est seulement sur ce point que mes notes ont quelque extension et auront peut - être une certaine utilité , puis- que la considération du fluide contenu SUR CETTE ÉDITION. XJ dans les ventricules du cerveau et dans la cavité sôus-arachnoïdienne devient une des questions les plus intéressantes de la physiologie et de la pathologie. i" septembre 1827. MAGENDIE. i\nii\inm\viuHi»uim\«m\\nuM\uumnHin»iv«Hi\m» PRÉFACE. J'ai inséré quelques réflexions sur les membranes dans les Mémoires de la Société médicale : elles étoient le précis d'un travail plus étendu, sur lequel je voulois consulter l'opinion des savants, avant d'en hasarder la publication. Des hommes dont le jugement est pour moi d'un grand poids, les accueillirent avec un intérêt qui m'enhardit aujourd'hui à mettre au jour ce travail. Personne ne l'avoit encore entrepris, quoique la médecine et la physiologie puissent en retirer des avantages marqués. Le vide réel qu'il me paroît remplir ; diverses expériences qu'il contient, et d'où peu- vent naître, je crois, d'utiles résultats; quelques vues propres peut-être à éclai- rer la théorie des forces vitales et de leurs sympathies; plusieurs faits anato- XIV PREFACE. miques nouveaux qui s'y trouvent expo- sés, m'excuseront, je l'espère, aux yeux des savants, de surcharger encore d'un traité une science où l'on a déjà tant écrit, et où ce qui est à retrancher sur- passe sans doute ce qui reste à ajouter. NOTICE HISTORIQUE SITR LA VIE ET LES TRAVAUX DE MARIE-FRANÇOIS-XAVIER BIGHAT, PAR M. HUSSON. Lue a la Société médicale d'émulation, le 10 fructidor an 10. Marie-François-Xavier Bichat naquit à Thoi- rette, département du Jura, le i4 novembre 1771, de Jean -Baptiste Bichat, docteur en médecine, et de Marie-Rose Bichat. Au sortir de l'enfance, ses parents l'envoyè- rent au collège de Nantua , pour y faire ses humanités. L'amour du travail, son respect pour ses maîtres, son attachement pour ses condisciples, firent alors du jeune Bichat un de ces sujets précieux qui laissent entrevoir quels seront dans la suite la moralité et le XVJ NOTICE HISTORIQUE mérite de celui qu'on admire déjà comme élève. En 1788, il entra au séminaire de Saint- Yrénée, à Lyon, pour y terminer ses études par son cours de philosophie. Bichat se distingua constamment dans les deux maisons où il fut élevé, par sa douceur, sa modestie et ses succès. Il remporta chaque année des prix au collège de Nantua, et soutint à Lyon des exercices publics sur la physique ot les mathématiques avec la plus grande dis- tinction. La révolution paralysant ensuite tous les genres d'instruction , Bichat quitta Lyon . re- vint dans sa famille, et reçut de son père les premiers éléments de l'anatomic; mais son goût prédominant pour les mathématiques le reporta à Lyon, où il continua à les étudier, en même temps qu'il suivoit le cours d'anato- mie et les visites du grand hôpital. Enfin , la tourmente révolutionnaire transformant cette brillante cité en un vaste champ de désolation et de mort , il vint chercher dans l'école de l'immortel Desault un abri contre la persé- cution qu'éprouvoient alors les jeunes gens de son âge. Bichat arrive à Paris en 179Ô. Dépourvu de SUR XAV. BICHAT. xvij loute espèce de recommandation , livré à lui- même, et uniquement occupé de se soustraire à la réquisition, dans laquelle il étoit compris, il fréquente les leçons de Desault, et, après un mois de séjour à Paris, il est enfin remar- qué par cet homme célèbre. Bientôt il est ad- mis à faire quelques pansements dans l'Hôtel- Dieu; ensuite il lit dans l'amphithéâtre, où se faisoient les leçons cliniques les observations des malades dont il suivoit la cure, et partout se fait distinguer par son zèle et sa modestie. Ses observations étoient rédigées avec tant de méthode, tant de précision, tant de clarté, que Desault voulut rapprocher de lui un talent dont il prévoyoit l'étendue , et qui pouvoit servir si puissamment un art que lui-même cultivoit avec tant d'éclat. 11 admit Bichat chez lui, l'adopta, et depuis cette époque Bichat lut associé à ses travaux et à sa gloire. Telle est l'origine de la réputation de notre confrère, origine doublement honorable, puis- qu'elle s'appuie également sur le mérite de l'é- lève et sur la justice du maître. Bichat ne put jouir long-temps de la bien- veillante amitié de Desault : la mort enleva ce grand homme eu 1 795, et laissa à son élève les regrets de la perte d'un père adoptif, en même Xviij NOTICE HISTORIQUE temps que la tâche honorable de remplir ses intentions par la publication des matériaux accumulés dans son Journal de chirurgie. Depuis long-temps Desault formoit le projet de rassembler dans un cadre régulier et mé- thodique toutes les découvertes dont il avoit enrichi la chirurgie; il vouloit refondre son journal, en retrancher tous les faits isolés, con- server ceux dont l'ensemble pût fournir des inductions générales ; en un mot , il vouloit créer un code de doctrine chirurgicale. Asso- cié par lui à cette entreprise, Bichat remplit dans cette circonstance la fonction difficile de rendre les idées de son maître, et on doit s'é- tonner de tout ce qu'il osa entreprendre à cette époque. Il se livroit avec une ardeur indicible aux travaux de l'enseignement, préparoit lui- même ses leçons, dirigeoit les études anatomi- ques de cent élèves, et publioit en même temps les œuvres chirurgicales de son maître. Toutes ces occupations ne l'éloignèrent ja- mais de ses amis : il sentoit au contraire davan- tage le besoin d'oublier auprès d'eux les fatigues d'une vie aussi active, et c'est à ce besoin que remonte l'époque de la formation de la Société médicale. Alors on vit éclore parmi quelques élèves de SUR XAV. BICHAT. XIX. l'École de médecine le noble projet de se réu- nir, de se communiquer le fruit de ses recher- ches, de rendre plus sensible par la discussion ce que les leçons des professeurs pouvoient présenter de difficile, de répéter les expérien- ces tentées déjà par les physiologistes les plus habiles. Ce projet, aussitôt exécuté que conçu, eut peu de partisans plus zélés que Bichat ; et c'est à lui que la Société médicale d'émula- tion doit la rédaction des règlements qui firent si long-temps sa gloire , et l'impulsion éton- nante imprimée aux esprits de tous les mem- bres qui la composèrent dans les premiers temps de sa formation. La Société médicale peut , avec quelque raison, s'enorgueillir d'avoir été la première dépositaire des travaux qui ont immortalisé notre confrère. C'est dans les Actes de notre Société que nous retrouvons ses premières vues sur les membranes et sur la distinction des deux vies; c'est là que Bichat commença à prouver que son génie devoit franchir les bornes auxquelles il nous est si souvent diffi- cile d'atteindre. Je ne vous entretiendrai point des modifications qu'il apporta à la confection du trépan, ni du procédé nouveau qu'il in- venta pour la ligature des polypes ; il ajoutoit b XX NOTICE HISTORIOLJ. lui-même peu d'importance à ces objets : toute son attention se portoit sur la physiologie; et son Mémoire sur la membrane synoviale des ar~ ticulaiiônSj chef-d'œuvre de logique, de préci- sion, de méthode analytique, donna une juste mesure de tout ce que Biehat pouvoit entre- prendre. Notre confrère; le professeur Pinel, avoit en- visagé les phlegmasies d'une manière inconnue jusqu'alors aux auteurs des systèmes nosolo- giques. L'observation des phénomènes morbi- flques l'avoit conduit à classer ces phlegmasies d'après les caractères des affections organiques. Il pensoit que ces affections étant variées . la structure des parties membraneuses n'étoit pas, identique. Biehat confirma, dans sa Disserta- tion sur les membranes, les vues et l'observation du professeur Pinel; et ici nous devons admi- rer le mutuel concours de l'anatomie et de la médecine : l'une trouve au lit du malade ce que l'autre confirme dans ses recherches sur le cadavre; celle que l'on dit plus conjecturale précède pour ainsj dire la certitude que la se- conde jette sur cette belle théorie des inflam- mations. Nous devons l'avouer, messieurs . il y a plus de mérite à pressentir, d'après la di- versité de nos maladies , la différence dans SUR XAV. BICHAT. XX j l'organisation de nos parties , qu'il n'y a de difficulté à classer nos affections d'après la connoissance parfaite de ces mêmes parties : aussi la science devra plus, dans cette cir- constance , à l'observation première du profes- seur Pinel, qu'aux recherches anatomiques de Bichat. Le travail sur les membranes , qu'il inséra dans le deuxième volume de nos Actes, n'étoit que le précis du grand ouvrage qu'il publia bientôt sur le même sujet. Il ne l'entreprit qu'en multipliant sur lui - même des expé- riences souvent dangereuses , en faisant de nombreuses ouvertures de cadavres, et en se livrant à l'observation attentive des phénomè- nes morbifiques. C'est alors qu'embrassant l'art dans sa totalité , il commença à s'adonner à la médecine : il sentoit que la chirurgie, illustrée par les chirurgiens du dernier siècle, ne lui offroit plus un champ assez vaste; la méde- cine, au contraire, plus cultivée depuis que les connoissances positives étoient devenues plus générales, surtout depuis l'époque où, pour la première fois en France, le professeur Cor- visart avoit fondé son école clinique ; la mé- decine, dis-je, présenta à l'imagination tou- jours ardente de Bichat un nouvel aliment, XXlj NOTICE HISTORIQUE à son génie de nouveaux moyens de se si- gnaler. Le Traité des Membranes fixa sur notre col- lègue les yeux de tous les savants : on n'avoit rien vu depuis.les Traités des Glandes et du Tissu muqueux , parBordeu, qui pût être comparé à cet ouvrage; et l'admiration qu'il inspira à ses confrères ainsi qu'à ses élèves , pénétra jus- que dans l'Institut national *. C'est dans son Traité des Membranes que l'on trouve le premier jet de toutes les vérités que, par la suite, il a développées dans ses Recher- ches physiologiques sur la vie et la mort , ainsi que dans son Anatomie générale; c'est dans cet ouvrage qu'existent essentiellement les pre- mières traces de la méthode qu'il suivit dans tous les autres, et qu'on trouve reproduites les premières idées qui le conduisirent à la dis- tinction des deux vies ; distinction qu'il avoit déjà fait pressentir dans un Mémoire particu- lier sur les organes symétriques. * On sait , à cet égard , que , dans un rapport ver- Lai fait à la classe des Sciences physiques, le pro- fesseur Halle rangea cet ouvrage parmi ceux qui pouvoient mériter les honneurs de la proclamation à la fête du i° vendémiaire. SDR XAV. BICHAT. XXllj Alors on vit paroître une critique amère et peu modérée de la production la plus éton- nante qu'ait faite peut-être en médecine un homme de 27 ans. Bichat, dans cette circon- stance, n'affecta ni ressentiment ni mépris; il se plaignit sans aigreur de la mauvaise foi et du fiel de la critique *, et trouva dans l'étude l'oubli de cette injustice. Cependant il méditoit une réponse digne de lui, digne de la science. Il pensa que, dans l'état actuel de la physiologie , la méthode ex- périmentale de Haller et les vues grandes et philosophiques de Bordeu étoient les seuls guides à prendre; il suivit ces modèles, et pu- blia ses Recherches sur la vie et la mort. * « Je n'ai point essayé de dissiper des doutes mis »en avant sur quelques fails anatomiques que j'ai «publiés dans mon Traité des Membranes , je ren- » voie à l'inspection cadavérique ceux à qui on a fait » naître ces doutes : quant à ceux qui les ont fait » naître , cette inspection leur est inutile ; ils ne peu- » vent avoir oublié que j'ai disséqué avec eux , et que »je leur ai montré ce qu'ils me reprochent de croire «avoir trouvé et de n'établir que sur des conjec- tures. » Recherches physiologiques sur la vie et la, mort, par Xav. Bichat, préface, pag. iij. XXIV NOTICE HISTORIQUE La Société médicale peut encore réclamer une espèce de droit de propriété sur cet ou- vrage. En effet Bichat avoit, dans son Mémoire sur les organes symétriques, deuxième volume de nos Actes, établi la différence des deux vies animale et organique, distinction qui dès-lors lui fraya une route nouvelle, et fixa irrévoca- blement ses idées sur la nature des phénomè- nes de l'homme vivant. Ce trait de lumière frappa tous les physiologistes : quelques-uns crurent trouver dans Buffon, Bordeu et Gri- maud des idées analogues; d'autres lui repro- chèrent ouvertement de les avoir empruntées d'eux; et enfin, lorsque ses Recherches sur ta vie et la mort parurent, les envieux, se condam- nant au silence, n'eurent que la triste res- source, en admettant ses principes, de lui contester cette découverte. C'est ainsi que , toujours supérieur à l'intrigue, il la maîtrisa toujours , en opposant à ses clameurs ou à ses menées la candeur du vrai mérite , et la noble persévérance de l'homme , qu'elle ne peut troubler. Au milieu de tous ses travaux, Bichat ne négligeoit pas son occupation favorite, l'ensei- gnement. Son école, chaque jour plus nom- breuse, formoit des élèves qui répandoient sa SUR XAV. BICHAT. \W doctrine, répétoient ses préceptes, et établis- soient sur les fondements les plus solides, la reconnoissance et l'estime , la réputation de leur jeune maître. Bichat méritoit cette ré- compense; elle fut toujours pour lui la source des sentiments les plus doux ; et c'est faire l'éloge de son cœur que d'avouer quelle a beaucoup contribué à soutenir son zèle dans les travaux rebutants auxquels il se livroit. Ses leçons n'étoient point une occupation méca- nique, dans laquelle le professeur s'empresse de s'acquitter des engagements qu'il contracte avec ses disciples; elles n'étoient pas non plus un passe-temps stérile , une conversation pé- riodique et fastidieuse ; elles présentoient au contraire l'image du commerce réciproque de l'amitié instruite et de l'amitié qui cherche à s'instruire : doit-on s'étonner qu'elles aient eu pour lui des charmes, et qu'elles lui aient fourni les moyens d'exécuter son immortel ou- vrage de YAiiatomie générale? Jusqu'alors hérissée des minuties scolasti- ques , l'anatomie rebuta trop souvent par sa sécheresse les jeunes gens destinés à l'étude de l'art de guérir. Nous ne pouvons même aujourd'hui nous rappeler sans un senlimenï pénible toutes ces divisions multipliées , ces XXVJ NOTICE HISTORIQUE descriptions fatigantes, ce langage apprêté et souvent inintelligible , qui constituoit alors la science anatomique. Bichat. sortit le premier de la route commune; il présenta l'anatomie sous un point de vue nouveau, étudia l'orga- nisation générale de l'homme dans les tissus simples qui le composent, divisa l'économie vivante en plusieurs systèmes; et en pressant les faits , en rapprochant l'observation de l'ex- périence, il recula les limites de la science, et s'éleva à lui-même un monument qui éter- nise sa gloire. Il est difficile , en lisant cet ou- vrage, de ne pas retrouver à chaque page les traces du génie qui animoit chacune de ses productions : toujours des applications utiles, des vues grandes, des points de pratique dis- cutés avec toute la maturité de l'âge; enfin, des aperçus qui, dans la suite, seroient deve- nus des vérités fondamentales. Bichat composa et publia son Anatomie gé- nérale dans l'espace d'une année : c'étoit pen- dant la nuit qu'il confioit au papier les vérités qu'il nous a transmises. Croira-t-on que jamais il ne copia une seconde fois ce qui devoit le lendemain être soumis à l'impression? Croira- t-on surtout que les deux derniers volumes aient été composés avant les deux premiers ? SUR XAV. BICHÀT. XXVlj Tout chez lui étoit extraordinaire; et certes cette espèce d'abus de facilité naturelle prou- voit en même temps une imagination ardente qui ne peut s'astreindre à aucune règle, et un génie supérieur devant lequel un plan préli- minairement conçu se déroule sans omettre le moindre détail. \JAnatomie générale étoit à peine publiée lorsqu'il fit paroître deux volumes de YAnato- mie descriptive. Riche de faits, dégagé du luxe stérile des divisions et subdivisions , cet ou- vrage offre un tableau exact et précis de l'as- pect extérieur des organes, des considérations étendues sur les tissus particuliers qui les con- stituent, et des recherches nombreuses sur les propriétés de chacun d'eux. Le nombre prodigieux de cadavres qu'il a examinés pour faire cet ouvrage, les expérien- ces multipliées qu'il tenta sur les animaux vi- vants pour observer de plus près la nature dans ses douleurs, ses désorganisations et ses crises, lui firent naître l'idée d'enseigner l'anatomie pathologique. Toujours lui-même, toujours supérieur aux obstacles, il voyoit dans un fait le germe de mille vérités , et l'instant où on le croyoit oc- cupé de la recherche qu'il avoit méditée, étoit XXVlij NOTICE HISTORIQUE celui où son attention se fixoit»sur les consé- quences de ce qu'il venoit de trouver, et sur mille objets accessoires. C'est ainsi que pour lui un travail en appeloit un autre, et que tout, dans sa doctrine, porte l'empreinte de cette succession d'études et de cet enchaînement d'idées, qui supposent une tête forte et gran- dement organisée. Une circonstance infiniment favorable se- conda le projet qu'il avoit , de faire un cours d'anatomie pathologique. Nommé médecin de l'Hôtel-Dieu , il trouva dans cet hôpital toutes les facilités que pouvoit désirer l'activité de son imagination , la bienveillance de ses con- frères , le zèle obligeant de ses collaborateurs, et un très -grand nombre de malades. Tous ces moyens , en redoublant son zèle , alimen- taient chez lui le besoin de faire tout concou- rir à son instruction et à l'accroissement de la science. On sait qu'il ambitionnoit comme une fa- veur d'être chargé du service des autres mé- decins ; qu'il recherchoit chaque jour dans la froide dépouille de l'homme les causes du trouble dont il n'avoit pu enchaîner les fu- nestes effets ; qu'il avouoit avec candeur les erreurs qu'il pouvoit commettre , et que , dans SUR XAV. B1CIIAT. XXIX la multitude de faits dont il étoit témoin , il n'en laissoit échapper aucun dont il n'eût étudié les rapports et prévu les conséquences. Cette étude , bien capable sans doute de sa- tisfaire l'esprit , ne soulageoit point son cœur. En effet , c'est peu pour une âme sensible de connoître et d'apprécier les ravages de nos nombreuses maladies ; il faut au moins qu'elle se console par l'idée de la possibilité du sou- lagement dans nos maux. Toujours placé entre la mort et les douleurs , Bichat devoit .natu- rellement chercher à éloigner les approches de l'une, et à calmer les atteintes des autre*. 11 espéroit trouver ces moyens dans la ma- tière médicale; et comme pour lui la meilleure méthode d'apprendre étoit celle d'enseigner , il commença un cours de matière médicale , dans lequel il développa les plus belles vues, les idées les plus fécondes et les préceptes les plus solides. Qui peut calculer jusqu'où notre confrère eût étendu ses recherches ? qui peut prévoir que! eût été le terme de sa gloire , si la mort ne fût venue arrêter le cours d'une existence à laquelle se rattacheront toujours les souve- nirs de toutes les vertus aimables et de la mo- XXX NOTICE HISTORIQUE destie , qui chez lui s'identifioil avec le mérite? Chaque jour lui ofïroit de nouveaux triomphes, chaque jour il reculoit les bornes de l'art , et bientôt sans doute il eût surpassé les hommes célèbres qui l'avoient précédé dans la carrière qu'il a éclairée d'une manière si brillante. Bichat, livré au genre de vie le plus fatigant, portoit depuis long-temps le germe de l'atteinte funeste à laquelle il succomba. Sans cesse dans son laboratoire d'anatomie ou dans les salles de l'Hôtel-Dieu , il puisoit dans l'atmosphère les éléments d'une destruction prochaine. Oc- cupé, le 19 messidor, à examiner les progrès de la putréfaction de la peau , une odeur in- fecte s'élevant du vase où il la faisoit macérer, éloigna de lui les élèves, compagnons ordinaires de ses travaux; il eut seul la témérité de pour- suivre ses recherches dans un endroit bas et humide. En sortant de son laboratoire , il fit une chute sur la totalité du corps; des synco- pes en furent la suite, et quelques jours après se déclarèrent tous les symptômes d'une fièvre ataxique. Je fus témoin des soins vraiment ma- ternels que lui prodiguoit l'estimable veuve de son maître , j'ai vu sa tendre sollicitude ; et, deux jours avant sa mort, cette femme SUR XAY. BICHAT. XXXJ respectable, ranimée par l'apparence de quel- ques symptômes rassurants, s'applaudissoitdes lueurs trompeuses d'une convalescence pro- chaine. Son espoir s'évanouit clans la même journée ; un redoublement violent vint dé- truire tout le calme qu'avoit fait naître dans nos esprits l'état à peu près satisfaisant où nous avions vu Bichat , qui succomba le 5 thermi- dor , quatorzième jour de sa maladie. Telle fut la fin d'un homme qui , à trente- un ans , avoit déjà obtenu des succès et en- trepris des travaux qui eussent immortalisé plusieurs savants. Frappé à l'âge où le feu de l'imagination , la vivacité du génie , l'activité de la constitution , sont dans toute leur force, de quoi n'eùt-il pas été capable lorsqu'une longue expérience , l'observation de plusieurs années et la maturité de l'âge , auroient recti- fié ce que lui-même auroit pu blâmer dans ses ouvrages, ou étendu encore la sphère déjà immense des découvertes et des applications utiles qu'il avoit faites ? Si , après avoir rappelé à la Société tous les titres de Bichat à l'estime et à la considération publique , nous nous arrêtons aux qualités qui le firent chérir de tous ceux qui le connurent, XXXÎj NOTICE HISTORIQUE nous sentirons davantage l'étendue de la perte que nous avons faite. Il fut bon fils , ami sin- cère , homme probe ; sa modestie lui faisoit redouter, moins pour lui que pour ses librai- res , le non-succès de ses ouvrages ; peut-être cette vertu alloit-elle chez lui jusqu'à la timi- dité. Son caractère toujours égal , toujours franc, toujours généreux, supportoit sans im- patience l'injustice et même l'injure. On ne le vit point mendier bassement des louanges , ambitionner des places, accumuler des titres; il ignoroit ce commerce honteux des réputa- tions de journaux , cette espèce de courtage littéraire , dans lequel les éloges semblent être une restitution usuraire de ceux qu'une partie contractante a reçus antérieurement. Etranger aux petites passions , il en fut quelquefois la victime; son inaltérable douceur, la candeur de son âme , cherchoient souvent à excuser les torts de ses envieux. 11 avoit, dans le commerce habituel de la vie, une bonté, une douceur qui lui attachèrent invariablement plusieurs d'entre nous. 11 eut aussi parmi les personnes les plus distinguées de notre art des admirateurs zélés, des amis sincères. Les désigner ici, c'est honorer sa mémoire; et l'estime affectueuse SI?, XAV. B1CHAT. XXXllj que lui portèrent MM. Corvisart, Lépreux. Halle , Thouret , Pinel , Leroux , est sans con- tredit une preuve du mérite supérieur de notre confrère. Le premier vient d'employer l'influence que lui donne la place éminente qu'il occupe, pour appeler l'attention du gouvernement sur la récompense qu'il mérita. L'amitié , dans cette circonstance , se montra doublement attentive, puisqu'elle a obtenu que le maître et l'élève seroient également honorés par un monument qui, en rapprochant leurs noms, les trans mettroit ensemble à la postérité. Et nous aussi nous pouvons élever à la mé- moire de notre collègue un monument qui perpétue parmi nous jusqu'au souvenir de ses traits. M. Giraud , au milieu des larmes que lui arracha la mort de son ami , a pris soin de conserver l'empreinte de la figure de Bichat. Si parmi les Sociétés savantes auxquelles il a appartenu, il en est une qui doive s'empresser de placer son buste dans le lieu de ses séances. c'est sans contredit celle qu'il a fondée, dont il a rédigé les règlements, et à laquelle il a fait hommage de ses premiers travaux. Je demande que la Société souscrive pour XXXIT NOT. U1ST. SUR XAV. BICHAT. un des bustes de Bichat , et qu'il soit placé dans cette salle , comme un monument de l'estime que la Société lui portoit , et comme un ga^e de l'union qui doit animer tous les membres qui la composent. La Société médicale a arrêté, dans sa séance extraor- dinaire du 16 fructidor, que le buste de Mar.-Fr.-Xav. Bichat seroit placé dans le lieu ordinaire de ses séances TRAITÉ DES MEMBRANES EN GENERAL. ARTICLE PREMIER. Considérations générales sur la classification des membranes. I. Les membranes n'ont point été jusqu'ici un objet particulier de recherches pour les anatomistes. Ce genre d'organes , disséminé pour ainsi dire dans tous les autres, concou- rant à la structure du plus grand nombre, ayant rarement une existence isolée, n'a jamais été isolément examiné par eux. Ils en ont asso- cié l'histoire à celle des organes respectifs sur lesquels elles se déploient. Le péricarde et le cœur, la plèvre et le poumon, le péritoine et les organes gastriques, la sclérotique et l'œil, le gland et sa muqueuse enveloppe, les intes- i '2 DIVISION GENERALE tins et leurs tuniques fongueuses, appartien- nent toujours au même chapitre, dans leurs ouvrages. C'est, pour la description, la marche la plus simple et sans doute la meilleure; mais, en la suivant, les anatomistes, frappés de la différence de structure des organes, ont oublié que leurs membranes respectives pouvoient avoir de l'analogie ; ils ont négligé d'établir en- tre elles des rapprochements, et c'est là un vide essentiel. II. La science manque ici de ces considéra- tions générales qui précèdent, dans nos livres^ anatomiques, le traité de chaque système or- ganique, tels que les systèmes nerveux, vascu- laire, musculaire, osseux, ligamenteux, etc.; considérations qui forment la plus belle partie de l'étude de la structure animale, et qui nous montrent la nature, uniforme partout dans ses procédés, variable seulement dans leurs ré- sultats, avare des moyens qu'elle emploie, pro- digue des effets qu'elle en obtient, modifiant de mille manières quelques principes géné- raux, qui, différemment appliqués, président à notre économie et en constituent les innom- brables phénomènes. III. Haller, qui. sous le triple rapport de l'érudition, des expériences et de l'observation, HES MEMBRANES. 3 semble avoir épuisé chaque point d'anatomie. n'a fait pour ainsi dire qu'effleurer celui-ci. Il n'établit dans son article Sur les membranes en gênerai aucune ligne de démarcation enlreelles. Une texture analogue les confond toutes; elles ne sont à ses yeux qu'une modification de l'or- gane cellulaire, qui lui fournit une base com- mune, toujours facile à ramener à son état pri- mitif. Cette opinion, vraie sous un rapport, sera évidemment prouvée fausse sous plusieurs dans la suite de cet ouvrage. Ici , la moindre réflexion suffît pour concevoir que ces organes doivent différer, non-seulement par la manière dont est arrangée, entre-croisée, la fibre qui les forme, mais encore par la nature de cette fibre elle-même; qu'il y a entre eux différence de composition comme de tissu. Cette com- position pourroit-elle être en effet la même dans des parties que distinguent leur confor- mation extérieure, leurs propriétés vitales, leurs fonctions? IV. Plusieurs médecins célèbres ont conçu cette vérité depuis Haller; ils ont senti que, dans le système membraneux, diverses limites étoient à établir entre des organes jusqu'ici confondus. L'observation des caractères extrê- mement variés que prend l'inflammation sur 4 DIVISION GENERALE chaque membrane leur en a surtout indiqué la nécessité; car souvent l'état morbifique, plus que l'état sain , développe nettement la différence des organes entre eux, parce que dans l'un, pius que dans l'autre cas, leurs forces vitales se montrent très-prononcées. M. Pinel a établi d'après ces principes un judicieux rap- prochement entre la structure différente et les différentes affections des membranes : c'est en lisant son ouvrage, que l'idée de celui-ci s'est présentée à moi (1), quoique cependant plu- sieurs résultats s'y trouvent, comme on le verra, très-différents de ceux qu'il a énoncés. Y. Lorsqu'on embrasse d'un coup d'œil gé- néral toutes les membranes de l'économie or- ganique, il semble que la classification doit en être très-composée, tant par rapport à leur étonnante multiplicité, qu'à cause de leur ap- (1) On aime à voir un jeune homme, plein de force et de talent, rendre un candide hommage au savant modeste qui l'a précédé dans la carrière et qui en a ouvert les voies; bien différent de ceux qui , pour faire un peu de bruit , n'ont pas craint d'empoisonner la vieillesse de l'homme vénérable dont la bonté les avait sortis de l'obscurité à la- quelle leur médiocrité native les condamnait. nLS MEMBRANES. D parente variété dans chaque région. Ce n'est point exagérer la proportion des membranes internes avec la peau, que de la fixer de 8 : 1 ; et s'il étoit possible de les rassembler toutes en une même surface, peut-être aucune n'offri- roit-elle un aspect exactement semblable à ce- lui des autres. Cependant, pour peu qu'on ré- fléchisse à leur structure et à leurs fonctions, on voit bientôt que plusieurs se rapprochent, et que, quoiqu'une conformation extérieure différente semble les distinguer, cette différence n'est cependant que dans la forme , et nullement dans le fond de leur organisation. VI. 11 faut donc fixer avec précision quelles membranes appartiennent à la même classe , quelles sont celles qui s'isolent ou se rappro- chent entre elles : or, observons ici que les ca- ractères de nos divisions ne doivent point être fondés sur des attributs extérieurs , étrangers pour ainsi dire à la nature de l'organe, mais bien sur cette nature elle-même. Ce n'est que sur l'identité simultanée de la conformation extérieure, de la structure, des propriétés vi- tales et des fonctions , que doit être fondée l'attribution de deux membranes à une même classe. Laissons à d'autres sciences les méthodes artificielles de distribution; ce n'est que paj 6 DIVISION GÉNÉRALE les méthodes naturelles que nous pouvons être conduits ici à d'utiles résultats. VII. En classant les membranes d'après ces principes, nous pouvons, je crois, les rapporter à deux divisions générales : l'une comprendra les membranes simples, l'autre les membranes composées. J'appelle membranes simples celles dont l'existence isolée ne se lie que par des rap- ports indirects d'organisation avec les parties voisines : une membrane composée est celle qui résulte de l'assemblage de deux ou de trois des précédentes, et qui en unit les caractères sou- vent très-différents. VIII. On peut distribuer dans trois classes générales les membranes simples. La première est celle des membranes muqueuses _, dont j'em- prunte la dénomination du fluide qui en hu- mecte habituellement la surface libre, et que fournissent de petites glandes inhérentes à leur structure (i) ; elles revêtent l'intérieur de tous (1) Il est fort douteux que ce soit les petites glandes dont parle Bichat, qui fournissent seules le mucus qui se voit sur la surface des membranes mu- queuses ; il est beaucoup plus probable que cette sé- crétion s'effectue par tous les points de la surface de la membrane. DES MEMBIl.WLS. les organes creux qui communiquent à l'exté- rieur par les diverses ouvertures dont la peau est percée : telles sont les cavités de la bouche, de l'œsophage, de l'estomac, des intestins, de la vessie, de la matrice (1) ; les fosses nasales, tous les conduits excréteurs, etc. . . . Dans la seconde classe se trouvent les membranes sé- reuseSj caractérisées aussi par le fluide lympha- tique qui les lubrifie sans cesse, et qui, séparé par exhalation de la masse du sang, diffère en cela du précédent, qui s'en échappe par voie de sécrétion (2). Ici se rangent le péricarde, la plèvre, le péritoine, la tunique vaginale, l'a rachnoïde, la membrane synoviale des articu- lations, celle des coulisses des tendons, etc — Enfin, la troisième classe comprend les mem- branes fibreuses, que leur texture fait ainsi dé- nommer, qu'aucun fluide n'humecte, que com- pose une fibre blanche analogue aux tendons, et auxquelles se rapportent le périoste, laçlure- (1) On regarde aujourd'hui comme très-douteux que l'intérieur de la matrice soit tapissé par une membrane muqueuse. (2) Cette distinction est difficile à établir, et re- pose eu fraude partie sur une idée hypothétique sur laquelle nous reviendrons. 8 DIVISION GÉNÉRALE DES MEMBRANES. mère, la sclérotique, l'enveloppe du corps ca- verneux, les aponévroses, les capsules articu- laires, les gaines tendineuses, etc. Je n'expose aucun des caractères de ces membranes pour appuyer la division indiquée ci-dessus; leur description servira à établir toutes leurs diffé- rences, et par là même à prouver la justesse de la démarcation établie entre elles. IX. Chacune des membranes simples précé- dentes concourt en diverses parties à former les membranes composées, que je divise en fîbro-séreuseSj sëro-muqueuses, fibro-muqueuses. X. Outre les membranes simples et compo- sées dont je viens de parler, il en est encore plusieurs qui, ou entièrement inconnues dans leur organisation, ou connues, mais isolées, existant seules de leur espèce, ne peuvent faire partie d'une classification quelconque. XI. Enfin, les membranes accidentellement développées dans l'état morbifique, telles que la pellicule des cicatrices, la poche membra- neuse que forment les kystes, etc.. méritent aussi de devenir l'objet de nos recherches, soit par elles-mêmes, soit par leur analogie avec les membranes naturelles. MEMBRANES MUQUEUSES. 9 ARTICLE II. Des Membranes muqtieuses. § I". De l'étendue, du nombre des membranes muqueuses. XII. Les membranes muqueuses occupent, comme nous l'avons dit, l'intérieur des cavités communiquantes avec la peau par ses diverses ouvertures : leur nombre, au premier coup d'œil, est très-considérable; car les organes au- dedans desquels elles se réfléchissent sont très- multipliés. L'estomac, la vessie, l'urètre, la matrice, les uretères, les intestins, etc., etc., empruntent, chacun, de ces membranes une partie de leur structure; cependant, si on con- sidère que partout elles sont continues, que partout on les voit naître, en se prolongeant, les unes des autres, comme elles naissent pri- mitivement de la peau , on concevra que ce nombre doit être singulièrement limité. En effet, en les envisageant ainsi, non point isolé- ment dans chaque partie, mais en même temps sur toutes celles où elles se continuent, on voit qu'elles se réduisent à deux surfaces générales, dont toutes les autres sont des portions. XIII. La première de ces deux surfaces, 10 MEMBRANES pénétrant par la bouche, le nez et la face anté- rieure de l'œil, i° tapisse la première et la se- conde de ces cavités, se prolonge, de l'une, dans les conduits excréteurs des parotides des glandes sous-maxillaires ; de l'autre, dans tous les sinus, forme la conjonctive, s'enfonce dans les points lacrymaux, le canal, le sac nasal, et se continue dans le nez ; 2° descend dans le pharynx et y fournit un prolongement à la trompe d'Eustache, qui de là pénètre dans l'o- reille interne et la tapisse, comme nous le ver- rons ; 5° s'enfonce dans la trachée-artère, et se déploie sur toutes les voies aériennes; 4° pénè- tre dans l'œsophage et l'estomac; 5° se propage dans le duodénum, où elle fournit deux pro- longemens, destinés, l'un au conduit cholédo- que, aux rameaux nombreux de l'hépatique, aux cystiques et à la vésicule; l'autre, au pan- créatique et à ses diverses branches; 6° se con- tinue dans les intestins grêle et gros, et se ter- mine enfin à l'anus, où on la voit s'identifier avec la peau. XIV. La seconde membrane muqueuse gé- nérale pénètre dans l'homme par l'urètre , et de li se déploie, d'une part, sur la vessie, les uretères, les bassinets, les calices, les mame- lons et les conduits capillaires qui s'ouvrent à Ml ol El SES. 1 l leur sommet ; de l'autre part , elle s'enfonce dans les tubes excréteurs de la prostate, dans les conduits éjaculateurs , les vésicules sémi- nales, les canaux déférents et les branches mille fois repliées qui leur donnent naissance. Chez la femme, cette membrane s'introduit par la vulve, et, pénétrant d'un côté par l'urètre, se comporte, comme dans l'homme, sur les or- ganes urinaires; de l'autre côté, on la voit en- trer dans le vagin, le tapisser, ainsi que la ma- trice, les trompes, et se continuer ensuite avec le péritoine par l'ouverture de ces conduits. C'est le seul exemple, dans l'économie, d'une communication établie entre les surfaces mu- queuses et les séreuses. XV. Cette manière d'indiquer le trajet des surfaces muqueuses, en disant qu'elles se pro- longent, s'enfoncent, pénètrent, etc., dune cavité à l'autre, n'est point sans doute conforme à la marche de la nature, qui crée dans chaque organe les membranes qui lui appartiennent, et ne les étend point ainsi de proche en proche; mais notre manière de concevoir s'accommode mieux de ce langage, dont la moindre réflexion rectifie le sens. XVI. En rapportant ainsi à deux membranes générales toutes les surfaces muqueuses, je suis 12 MEMBRANES non-seulement appuyé sur l'inspection anato- mique, mais encore l'observation pathologique me fournit et des points de démarcation entre elles deux, et des points de contact entre les diverses portions de membranes dont chacune est l'assemblage. Dans les divers tableaux d'é- pidémies catarrhales tracés par les auteurs, on voit fréquemment l'une de ces membranes être affectée en totalité, l'autre au contraire rester intacte; il n'est surtout pas rare d'observer une affection générale de la première, de celle qui se prolonge de la bouche, du nez et de la sur- face de l'œil dans les voies alimentaires et les bronches. La dernière épidémie observée à Pa- ris, dont M. Pinel a été lui-même affecté, por- toit ce caractère; celle de 1761, décrite par Razous, le présentoit aussi; celle de 1702, dé- crite dans les Mémoires de la Société d'Edim- bourg, fut remarquable par un semblable phé- nomène : or, on ne voit point alors une affection correspondante dans la membrane muqueuse, qui se déploie sur les organes urinaires et sur ceux de la génération. Il y a donc ici, i° ana- logie entre les portions de la première par l'u- niformité d'affection ; a0 démarcation entre les deux, par l'intégrité de l'une et la maladie de l'autre. MUQUEUSES. K> XVII. On voit aussi que l'irritation d'un point quelconque d'une de ces membranes détermine fréquemment une douleur dans un autre point de la même membrane qui n'est pas irrité. Ainsi le calcul dans la vessie cause une douleur au bout du gland (1); la présence des vers dans les intestins, une démangeaison au bout du nez, etc., etc.... Or, dans ces phénomènes purement sympathiques, il est infiniment rare que l'irritation partielle de l'une de ces deux membranes affecte douloureusement une des parties de l'autre. XVIII. On doit donc, d'après l'inspection et l'observation, considérer la surface muqueuse en général comme formée par deux grandes (j) Bichat a fort souvent, dans son étonnante activité d'esprit, et au milieu des aperçus les plus justes, laissé échapper des assertions qu'il lui aurait été difficile de prouver. Ici , par exemple , quelle preuve avait-il que c'était seulement l'irritation de la muqueuse de la vessie qui réagissait sympathique- ment sur la muqueuse du gland? Il est d'observa- tion , au contraire , que la douleur des calculeux se fait ressentir dans la totalité du gland, et non point exclusivement à sa surface. La même remarque peut être faite relativement à l'action des vers intestinaux. l4 MEMBRANES membranes successivement déployées sur plu- sieurs organes, n'ayant entre elles de commu- nication que par la peau, qui leur sert d'inter- médiaire, et qui, se continuant avec toutes deux , concourt ainsi avec elles à former une membrane générale partout continue , enve- loppant au-dehors l'animal, et se prolongeant au-dedans sur la plupart de ses parties essen- tielles. On conçoit qu'il doit exister des rap- ports importants entre la portion intérieure et la portion extérieure de cette membrane uni- que : c'est aussi ce que d'ultérieures recherches vont bientôt nous montrer. § II. Organisation extérieure des membranes muqueuses. XIX. Toute membrane muqueuse présente deux surfaces : l'une adhérente aux organes voisins; l'autre libre, hérissée de villosités , toujours humide d'un fluide muqueux. Cha- cune mérite une attention particulière. XX. La surface adhérente correspond pres- que partout à des muscles. La bouche, le pha- rynx, tout le conduit alimentaire, la vessie, le vagin, la matrice, une portion de l'urètre, etc., présentent une couche nuisculeuse, embras- sant au-dehors leur tunique muqueuse , qui MUQUEUSES. 1 H est en dedans. Cette disposition coïncide par- faitement dans les animaux à panicule charnu avec celle de la peau , qui d'ailleurs se rap- proche de si près, comme nous le verrons, de la structure des membranes muqueuses, et qui, comme nous l'avons vu , leur est partout continue. Dans l'homme, l'organe cutané pré- sente encore çà et là des traces de ce muscle extérieur, comme on le remarque au peaucier, au palmaire cutané, aux occipitaux frontaux, à là plupart des muscles du visage, etc.... Cette disposition des membranes muqueuses fait qu'elles sont agitées de mouvements habituels de contraction et de dilatation , qui favorisent la sécrétion qui s'y opère, et les diverses autres fonctions dont elles sont le siège. XXI. L'insertion de cette couche musculeuse ne se fait pas immédiatement à la face externe des membranes muqueuses , mais bien , selon Albinus, à une couche dense de tissu cellulaire, que tous les auteurs anciens ont décrite, à l'es- tomac , aux intestins, à la vessie, etc. , sous le nom de tunique nerveuse 3 mais qui, bien exa- minée, ne présente aucun caractère analogue à celui qu'indique ce nom. L'expérience de l'insuf- flation par laquelle on la ramène à son état pri- mitif n'est point aussi facile qu'Albinus et au- l6 MEMBRANES très l'ont prétendu : c'est ce qui m'a fait soup- çonner que peut-être sa nature n'étoit pas cel- lulaire; qu'elle étoit probablement de texture fibreuse, formée par l'assemblage et l'entre- croisement d'une foule innombrable de ten- dons extrêmement déliés et à peine sensibles , offrant des points d'origine et de terminaison à toutes les fibres charnues de la couche mus- culeuse, lesquelles, comme on le sait, ne décri- vent jamais des cercles entiers, mais bien des segments plus ou moins étendus de cette cour- be. J'avoue que ce soupçon, quoique assez vrai- semblable, n'est fondé sur aucune expérience décisive et rigoureuse. XXII, Quelle que soit, au reste, la nature de cette membrane intermédiaire à la muqueuse et à la musculeuse, elle a évidemment une tex- ture dense, serrée, qui lui donne une rési- stance très-analogue à une des couches fibreu- ses. C'est d'elle que l'organe reçoit sa forme; c'est elle qui maintient et assujettit cette for- me : l'expérience suivante le prouve. Prenez une portion d'intestin; enlevez -lui dans un point quelconque celte couche, ainsi que la sé- reuse et la musculeuse; soflluez-la ensuite, après l'avoir liée inférieu rement : l'air déter- mine en cet endroit une hernie de la tunique MUQUEUSES. 1 7 muqueuse. Retournez ensuite une autre por- tion d'intestin; privez-la, dans un petit espace, de sa membrane muqueuse et de celle-ci, l'in- sufflation produira sur les tuniques séreuses et musculeuses le même phénomène que dans le cas précédent elle a déterminé sur la muqueu- se : donc c'est à cette couche intermédiaire qu'il doit sa résistance aux substances qui y tendent. Disons-en autant de l'estomac, de la vessie, de l'œsophage, etc. XXIII. La surface libre des membranes mu- queuses, celle qu'humecte habituellement le fluide dont elles empruntent leur nom, pré- sente deux espèces de rides ou de plis. Les uns, inhérents à la structure de ces membranes, s'y rencontrent constamment, quel que soit l'état de dilatation ou de resserrement de l'organe : tels sont le pylore, les valvules conniventes des intestins grêles, celle de Bauhin, etc.... Ces plis sont formés non-seulement par la membrane muqueuse, mais encore par la tunique inter- médiaire dont nous avons parlé, qui prend ici une densité et une épaisseur remarquables et qui assure leur solidité. XXIV. Les autres plis sont .pour ainsi dire accidentels, et ne s'observent que pendant la contraction de l'organe : tels softt ceux de l'in- 2 ÎO MEMBRANES térieur de l'estomac, des gros intestins, etc. Dans le pins grand nombre des cadavres hu- mains apportés dans nos amphithéâtres, ces plis dont on parle tant pour l'estomac ne sont point susceptibles d'y être aperçus, parce que, le plus communément, le sujet est mort à la suite d'une affection qui a altéré en lui les forces vitales, au point d'empêcher toute action de ce viscère; en sorte que, quoiqu'il se trouve fré- quemment en état de vacuité, ses fibres ne sont nullement contractées. XXV. Dans les expériences sur les animaux vivants, au contraire, ces plis deviennent très- sensibles; et voici comment on peut les démon- trer. Faites copieusement manger ou boire un chien ; ouvrez-le à l'instant, et fendez l'estomac le long de la grande courbure : aucun pli n'est alors apparent; mais bientôt il se contracte; ses bords se renversent, toute la surface mu- queuse se couvre d'une infinité de rides très- saillantes, en forme de circonvolutions. On ob- tient le même résultat en arrachant d'un ani- mal récemment tué l'estomac: en le distendant par Yr.'ir et l'ouvrant ensuite , ou bien encore en le fendant tout de suite dans son état de vacuité et en le tiraillant en sens opposé par ses bords, il s'étend, ses rides disparoissent, et Ml'QUECSES. 19 si on cesse de les distendre, elles se reforment alors sur-le-champ d'une manière manifeste. XXVI. J'observe, au sujet de l'insufflation de l'estomac, qu'en le distendant avec de l'oxi- gène, on ne détermine pas par le contact de ce gaz des rides plus prononcées, et par consé- quent une contraction plus forte qu'en faisant usage pour le même objet du gaz acide carbo- nique. Cette expérience présente un résultat assez semblable à ce que j'ai observé en ren- dant des animaux emphysémateux par diffé- rents fluides aériformes. Les grenouilles et les cochons d'Inde (ce sont les deux espèces choi- sies pour avoir un exemple dans les animaux à sang rouge et froid, et dans ceux à sang rouge et chaud) ne présentent que très-peu de diffé- rences dans leur irritabilité et dans leur sus- ceptibilité galvanique , soit qu'ils aient été soufflés par l'oxigène, soit qu'ils aient été gon- flés par le gaz acide carbonique, et que consé- quemment leurs muscles aient été en contact avec l'un ou avec l'autre, résultat différent de celui des diverses asphyxies. Ils vivent très-bien avec cet emphysème artificiel, qui finit peu à peu par se dissiper. L'emphysème avec le gaz nirreux est constamment mortel, et son contact semble frapper les muscles d'atonie. Distendu 20 MEMBRANES par lui, l'estomac, au bout de peu de temps, ne se contracte pas, et ses rides ne paroissent plus. Au reste, ici, comme dans tous les essais qui ont les forces vitales pour objet, on obtient des résultats souvent très-variables. XXVII. Il suit de ce que nous avons dit sur les replis des membranes muqueuses que, dans la contraction des organes creux qui tapissent ces membranes, elles ne subissent qu'une très- légère diminution de surface, qu'elles ne se contractent presque pas, mais se plissent au- dedans, en sorte qu'en les disséquant sur son organe en contraction, on auroit une étendue presque égale à celle qu'elles présentent pen- dant sa dilatation. Celte assertion, vraie pour l'estomac (1), l'œsophage, les intestins, ne l'est peut-être pas tout-à-fait autant pour la vessie, dont la contraction montre au-dedans des rides (1) Cette assertion est au contraire loin d'être exacte pour l'estomac; non-seulement la muqueuse de cet organe se plisse quand il revient sur lui-même, mais son épaisseur s'accroît d'une manière très-sen- sible; elle diminue beaucoup quand l'organe est même médiocrement distendu. Il est facile de véri- fier ce fait soit sur le cadavre, soit sur l'animal vivant. MUQUEUSES. J2I moins sensibles ; mais elles le sont assez pour ne point déroger entièrement à la loi générale. Il en est aussi à peu près de même de la vési- cule du fiel; cependant ici on trouve une autre cause. Alternativement observée dans la faim et pendant la digestion, la vésicule contient le double de bile dans le premier cas que dans le second, comme j'ai eu occasion de le voir une infinité de fois dans des expériences faites sur cet objet ou dans d'autres vues. Or, lorsque la vésicule est en partie vide, elle r.e se contracte pas sur ce qui reste de bile avec l'énergie de l'estomac lorsqu'il contient peu d'aliments, avec la force de la vessie lorsqu'elle renferme peu d'urine. Elle est alors flasque; en sorte que sa distension ou sa non-cjistension n'influent que légèrement sur les replis de sa membrane mu- queuse (1). (1) Il y a plusieurs erreurs dans ce paragraphe. D'abord ce n'est pas à raison de ia digestion que la vésicule diminue de volume quand l'estomac con- tient des alimens, mais bien à cause de sa distension, et de la pression, médiate qu'il exerce sur la vésicule. Ensuite la vésicule du fiel n'est pas conlrâciile chez les mammifères ; aussi , comme le remarque très- bien Bichat , elle est flasque quand elle contient peu 22 MEMBRANES XXVIII. Au reste, en disant que les mem- branes muqueuses présentent toujours, à quel- que différence près, la même surface dans l'ex- tension et le resserrement de leurs organes respectifs, je n'entends parler que de l'état ordinaire des fonctions, et non de ces énormes dilatations dont on voit souvent l'estomac, la vessie, plus rarement les intestins . devenir le siège. Alors il y a sans doute une extension et une contraction réelles qui, dans la membrane, coïncident avec celle de l'organe. XXIX. Une observation remarquable que nous présente la face libre des membranes mu- queuses, et que déjà j'ai indiquée, c'est que cette face est partout en contact avec des corps hétérogènes à celui de* l'animal , soit que ces corps introduits du dehors pour le nourrir ne soient point encore assimilés à sa substance, comme on le Voit dans le tube alimentaire. de bile; c'est une preuve évidente que ce n'est pas sa contraction qui a expulsé la bile de sa cavité. Au milieu des inexactitudes qui lui sont échappées, et qui tiennent en grande partie a la rapidité avec la- quelle il composait, Bichat montre le plus souvent un excellent esprit et toujours une grande candeur d'observation. MLOUEUSES. 25 dans la trachée-artère; soit qu'ils viennent du dedans, comme on l'observe dans tous les con- duits excréteurs des glandes, lesquels s'ouvrent tous dans des cavités tapissées par les mem- branes muqueuses, et transmettent au-dehors les molécules, qui, après avoir concouru pen- dant quelque temps à la composition des so- lides , leur deviennent hétérogènes , et s'en séparent par le mouvement habituel de dé- composition qui se fait dans les corps vivants. D'après cette observation, on doit regarder les membranes muqueuses comme des limites, des barrières, qui, placées entre nos organes et les corps qui leur sont étrangers, les garan- tissent de l'impression funeste de ces corps. et servent par conséquent, au -dedans, aux mêmes fonctions que remplit au-dehors la peau à l'égard des corps qui entourent celui de l'animal, et qui tendent sans cesse à agir sur lui. § III. Organisation intérieure des membranes m uq ueuses. XXX. 11 y a entre les membranes muqueuses et les autres cette*difFéretice essentielle sous le rapport de l'organisation intérieure, que tou- jours elles résultent de l'assemblage de plu- 2-| MEMBRANES sieurs feuillets, les séreuses, fibreuses, etc.. n'en ayant jamais qu'un. Ces feuillets ou cou- ches sont, au corps réticulaire près, les mêmes que ceux qui composent la peau, avec laquelle ces sortes de membranes ont la plus exacte analogie. Nous allons isolément examiner cha- cune de ces couches, l'épiderme, le corps pa- pillaire et le chorion, dans leurs attributs gé- néraux. Nous considérerons ensuite les modi- fications particulières qu'elles subissent dans diverses parties des surfaces muqueuses. XXXI. Tous les auteurs ont admis-lepiderme des membranes muqueuses; il paroît même que la plupart ont cru qu'il n'y a que cette por- tion de la peau qui descend dans les cavités pour les tapisser. ïlaller, en particulier, est de cette opinion. Mais la moindre inspection suffit pour remarquer qu'ici, comme à la peau, elle ne forme qu'une couche superficielle au corps papillaire et au chorion. L'eau bouillante, qui la détache de dessus le palais, la langue, le pharynx même, laisse ensuite apercevoir à nu les deux autres couches (1). (1) Le véritable épiderrae des membranes mu- queuses, c'est la couche (Je mucus qui les revêt; l'é- piderme de la peau est aussi une couche de mucus, MUQUEUSES. 25 XXXII. Cet épidémie est très-distinct sur le gland , à l'entrée de l'anus, de l'urètre , des fosses nasales, de la bouche, et en général par- tout où les membranes muqueuses commen- cent à se séparer de la peau. Il se démontre dans ces divers endroits par les fréquentes ex- coriations qui y surviennent, aux lèvres prin- cipalement par la dissection avec une lancette très-fine, qui sert à le soulever, par l'actiou de l'eau bouillante , l'approche d'un fer rougi , les épispastiques même , comme le prouve le procédé des anciens, qui, pour rafraîchir les bords libres du bec-de-lièvre, employoient ce moyen. XXXIII. Mais à mesure que l'on s'enfonce dans la profondeur des membranes niuqueuses, l'existence de cette enveloppe y devient plus difficile à constater; l'instrument le plus délicat ne peut l'y soulever. L'eau bouillante ne la dé- comme les analyses chimiques l'ont démontré. Il n'y a donc de différence entre l'épiderme proprement dit et la couche muqueuse qui revêt les membranes mu- queuses, qu'en raison de la consistance ; dans un cas ie mucus est demi-liquide, dans l'autre il est solide. Cette différence physique des deux épidermes est p ar- faitement appropriée à leurs fonctions respectives. 20 MEMBRANES lâche point, au moins dans les intestins, la vésicule du fiel et l'estomac, que j'ai soumis à cette expérience, soit lorsque la chaleur vitale les avoit abandonnés, soit lorsque, arrachés palpitants du ventre d'un animal , ils étoient encore tout pénétrés des forces de la vie. Mais ce que nos expériences ne peuvent faire, les inflammations l'opèrent fréquemment. Tous les auteurs qui ont écrit sur les affections des organes qui tapissent ces membranes, rappor- tent des exemples de lambeaux plus ou moins considérables, rejetés au-dehors par l'urètre, l'anus, la bouche, les narines, etc. Haller a re- cueilli un grand nombre d'observations sem- blables. Sans doute qu'alors la séparation de l'épiderme se fait à peu près comme on le voit dans les inflammations cutanées. Au reste, dans plusieurs cadavres morts avec des signes d'in- flammation sur les membranes muqueuses, et que j'ai déjà eu occasion de disséquer ou de faire disséquer, je n'ai pu encore observer cette séparation s'opérant, c'est-à-dire l'épiderme se soulevant dans un point, et restant encore adhé- rent aux autres, comme dans l'érysipèle. J'ai essayé sans succès de la déterminer par l'appli- cation d'un épispastique sur la tunique interne des intestins d'un chien. MUQUEUSES. 27 XXXIV. Cet épiderme est sujet, comme ce- lui de la peau, à devenir calleux par la pres- sion. Choppart cite l'exemple d'un berger dont le canal de l'urètre présentoit cette disposition, à la suite de l'introduction fréquemment répé- tée d'une petite baguette, pour se procurer des jouissances voluptueuses. On connoît la den- sité que prend cette enveloppe dans l'estomac des gallinacés. Dans certaines circonstances où les membranes muqueuses sortent au-dehofs, comme dans les chutes de l'anus, du vagin, de la matrice, dans les anus contre nature, etc.. quelquefois la pression des vêtements produit dans cet épiderme une épaisseur sensiblement plus considérable que celle qui lui est na- turelle. XXXV. L'épiderme est joint aux poils sur la peau, quoiqu'elle ne leur donne pas immé- diatement naissance. Quelquefois aussi on ob- serve des productions piliformes dans les mem- branes muqueuses. La vessie , l'estomac , les intestins, la membrane pituitaire, ont été, en diverses circonstances, le siège de ces excrois- sances non naturelles : Haller en cite divers exemples (1). (1) C'est probablement à la muqueuse des voies 28 MEMBRANES XXXVI. Cette enveloppe paroit avoir sur les surfaces muqueuses la même texture qu'à la peau,' à la finesse près, dans les lames dont elle résulte. C'est à cette finesse et par là môme à la dénudation des nerfs, qu'il faut sans doute rapporter la facilité qu'on éprouve à exciter dans la sensibilité diverses modifications re- marquables , lorsque , par les procédés galva- niques, on arme de zinc la surface muqueuse de la conjonctive, de la pituitaire, de la mem- brane interne du rectum ou des gencives, etc., et qu'on met en contact immédiat ou médiat ces métaux divers. L'épiderme se reproduit avec promptitude lorsqu'il a été enlevé. Dé- pourvu de toute espèce de sensibilité, il est, sous ce rapport, destiné, comme la peau, à garantir le corps papillaire très-sensible qui lui est sous-jacent. C'est à sa présence sur les mem- urinaires qu'il faut, rapporter les poils qui forment les caractères de la gravelle que j'ai nommée pileuse, et ceux qui se voient quelquefois dans certains calculs décrits par M. J. Cloquet. Mais alors pourquoi ces poils ne restent-ils pas implantés dans les buibes qui les ont produits? pourquoi se mêlent ils avec le dépôt salin de l'urine , dans quelques cas ,en quantité vraiment extra- ordinaire? (Yoy. Journal de Pltysiol. exp., Tom.VI.) MCQUECSES. 29 branes muqueuses qu'on doit attribuer la fa- culté qu'elles ont d'être exposées à l'air et même au contact des corps extérieurs, sans s'exfolier ni s'enflammer, comme on le voit dans les anus contre nature, les chutes de l'anus, etc. ... ; tandis que les membranes fibreuses et séreuses ne supportent jamais impunément ce contact: de là aucun danger, sous ce rapport au moins, d'ouvrir la vessie; de là, au contraire, le pré- cepte si justement recommandé de ne pas ou- vrir la cavité du péritoine, d'inciser, le moins possible, les capsules synoviales, etc J'ob- serve que l'existence de l'épiderme sur les mem- branes muqueuses est importante à considérer, par rapport à l'opinion de ceux qui , comme Séguin, les en croyant dépourvues, ont dit que la contagion se gagnoit toujours par le pou- mon , et non par la peau, que garantit , selon eux, cette enveloppe (1). XXXVII. A l'épiderme succède, dans l'orga- nisation de la peau, le corps muqueux ou ré- (1) Je l'ai déjà dit, le véritable épidémie des mem- branes muqueuses est la couche de mucus qui les revêt dans l'état sain, el qui ne diffère de l'épiderme ac la peau qu'en ce que dans les membranes muqueu- ses le mucus est visqueux, et que dans la peau il est 00 MEMBRANES 4iculaire, spécialement décrit par Malpighi, et généralement considéré comme le siège de la couleur des diverses races humaines. On le dé- crit comme une couche criblée de trous par le passage des mamelons nerveux. M. Sabattier indique la manière de le voir; Sœmmering l'a, dit-on, isolé de l'épidémie et du chorion sur le scrotum d'un Éthiopien : j'avoue que je n'ai encore pu l'apercevoir; M. Portai ne paroît pas avoir été plus heureux. XXXVIII. On distingue seulement une es- pèce de suc gélatineux, intermédiaire au corps papillaire et à 1'épiderme, et le plus communé- ment même il n'est pas apparent; jamais je n'ai pu non plus l'observer avec précision. En exa- minant attentivement la peau d'un uègre, j'ai vu, 1'épiderme étant enlevé, la surface externe du chorion teinte en noir, et voilà tout. Au reste, quels que soient et ce corps réticulaire et cet enduit muqueux , certainement ils n'exis- tent pas dans les membranes muqueuses, puis- qu'elles ne participent point à la coloration des sec et de forme membraneuse. Que leur membrane muqueuse se trouve accidentellement et durant un certain temps exposée à l'air, h; mucus se solidifie el prend les caractères de l'epiderme de la peau. MUQUEUSES. 3l téguments. L'ardeur du soleil, qui obscurcit ceux-ci dans les blancs , ne paroît point agir sur le commencement de ces membranes, ex- posées, ainsi qu'eux, à cette ardeur, comme on le voit au bord rouge des lèvres , etc. J'ai re- marqué plusieurs fois cependant, sur le palais des chiens soumis à mes expériences, des taches analogues à celles qui coloroient ça et là leur enveloppe extérieure (1). XXXIX. La sensibilité de la peau est due, comme on le sait, principalement au corps pa- pillaire; celle des membranes muqueuses, en- tièrement analogue à celle de la peau, me pa- roît tenir à la même cause. Les papilles de ces membranes ne peuvent être révoquées en doute; à leur origine, là où elles s'enfoncent dans les cavités, dans le commencement même de ces cavités, comme sur la langue, au palais, à la partie interne des ailes du nez , sur le gland , dans la fosse naviculaire , au-dedans des lè- vres, etc , l'inspection suffît pour les y dé- montrer. Mais on demande si , dans la profon- deur de ces membranes, ces papilles existent aussi. L'analogie l'indique, puisque la :ensibi- (1) Voir sur ce sujet les Expériences de M. Gau- tier, et ma Physiologie, Tom. III. 02 MEMBRANES lité y est la même qu'à leur origine; mais l'in- spection le prouve d'une manière non moins certaine. Je crois que les villosités dont on les voit partout hérissées ne sont autre chose que ces papilles. XL. On a eu sur la nature de ces villosités des idées très-différentes : elles ont été consi- dérées, à l'œsophage et dans l'estomac, comme destinées à l'exhalation du suc gastrique ; aux intestins , comme servant à l'absorption du chyle, etc.... Mais, i° il est difficile de conce- voir comment un organe, partout à peu près semblable, remplit en diverses parties des fonc- tions si différentes. Je dis à peu près semblable, car on sait que les villosités des intestins grêles sont plus prononcées que celles des gros, etc.. 2° Quelles seroient les fonctions des villosités de la membrane pituitaire, de la tunique in- terne de l'urètre, de la vessie, si elles n'ont pas rapport à la sensibilité de ces membranes? 3° Les expériences microscopiques si vantées de Leiberkuhn sur l'ampoule des villosités in- testinales ont été contredites parcelles de Hun- ier, de Cruikshank , et surtout de Hewsson. Je puis assurer n'avoir rien vu de semblable à la surface des intestins grêles , à l'instant de l'absorption chyleuse; et cependant il paroît M l'OLE USES. 35 qu'une chose d'inspection peut varier. 4" H est vrai que ces villosités intestinales sont accom- pagnées partout d'un réseau vasculaire, qui leur donne une couleur très -différente de la couleur des papilles cutanées; mais la non-ap parence du réseau cutané ne dépend que de la pression de l'air atmosphérique, et surtout de la crispation qu'il occasione dans les petits vaisseaux (1). Voyez, en effet, le fœtus sortant du sein de sa mère : sa surface cutanée est aussi rouge que celle de ses membranes muqueuses; et si les papilles étoient un peu plus prolon- (i) La rougeur de la peau du foetus lient surtout à la préseHce et à la température du liquide de Pam- nios. Quand on veut trop généraliser, il naît des ob- stacles difficiles à surmonter. Sans doute , il est bon et utile d'étudier les muqueuses comme une seule et même membrane étendue sur un grand nombre d'organes différens; mais dès qu'on pousse l'examen de la .-.tructure de cette membrane jusqu'à certains détails, on est arrêté par des différences très- tranchées. Dans la réalité, les membranes muqueuses diffèrent essentiellement, selon les organes et même selon les parties d'organes. La muqueuse de l'œso- phage ne ressemble pour ainsi dire en rien à celle de l'estomac ou du nez. La membrane de l'intestin grêle est tout autre que celle du gros intestin ou que 34 MEMBRANES gées, sa peau ressembleront exactement à la face interne des intestins (i). Qui ne sait, d'ailleurs, que le réseau vasculaire, entourant les papilles cutanées^est rendu sensible par les injections fines, au point de changer entièrement la cou- leur de la peau? XLI. Que, dans l'estomac, ce réseau vascu- laire exhale le suc gastrique ; que dans les in- testins il s'entrelace avec l'origine des absor- bants, de manière que ceux-ci embrassent les villosités : c'est ce dont on ne peut douter d'a- près les expériences et les observations des celle de la vessie; et ce sont précisément ces diffé- rences qu'il faut remarquer, bien pins que les ressem- blances, qui sont très-légères. Dans les animaux, les caractères sont encore plus opposés; la portion splé- nique de l'estomac du cheval est entièrement diffé- rente de la membrane de la portion pylorique du mê- me organe. Chacun des quatre estomacs des ruminans offre une disposition très-différente: ce sont donc ces dispositions particulières qu'il faut étudier si l'on veut savoir quelles sont les fonctions de chacun de ces organes. En général, les différences sont bien plus importantes à connaître que les analogies.^ (1) Cette comparaison est évidemment forcée et inexacte. l'QtEUSES. 55 anatomistes qui se sont occupés, dans ces der- niers temps, du système lymphatique. Mais cela n'empêche pas que la base de ces villosités ne soit nerveuse, et qu'elles ne fassent sur les membranes muqueuses les mêmes fonctions que les papilles sur l'organe cutané (i). Cette manière de les envisager, en expliquant leur existence généralement observée sur toutes les surfaces muqueuses, me paroît bien plus con- forme au plan de la nature, que de leur sup- poser en chaque endroit des fonctions diverses et souvent opposées. XL1I. Au reste, il est difficile de décider la question par l'observation oculaire. La ténuité de ces prolongements en dérobe la structure, même à nos instruments microscopiques, es- pèce d'agents dont la physiologie et l'anatomie ne me paroissent pas d'ailleurs avoir jamais re- tiré un grand secours, parce que quand on re- garde dans l'obscurité, chacun voit à sa manière et suivant qu'il est affecté (2). C'est donc l'ob- (1) Cette base nerveuse des papilles est une pure supposition que Bichat aurait été embarrassé de prou- ver par le seul genre de preuve qu'elle comporte , c'est-à-dire la dissection. (2) Quand on fait des recherches microscopiques, 56 MEMBRANES servation des propriétés vitales qui doit surtout nous guider : or, il est évident qua en juger d'après elles, les villosités ont la nature que je leur attribue. Voici une expérience qui me sert à démontrer l'influence du corps papillaire sur la sensibilité cutanée; elle réussit aussi sur les membranes muqueuses. On enlève l'épiderme dans une partie quelconque et on irrite le corps papillaire avec un stylet aigu : l'animal s'agite, crie, et donne des marques d'une vive douleur. On glisse ensuite par une petite ouverture faite à la peau un stylet pointu dans le tissu cellu- laire sous-cutané, et on irrite la face interne du chorion ; l'animal reste en repos, ne jette on ne regarde pas clans l'obscurité. On se sert d'un instrument qu'il faut connaître à fond avant de se mettre a l'œuvre : qu'un anatomiste, sans être phy- sicien, veuille employer le microscope, il sera la dupe de nombreuses illusious ; et s'il a l'esprit spé- culateur, il fera un système; mais qu'un esprit sage et réservé étudie avec soin le mécanisme du micros- cope, et qu'ensuite il applique l'instrument a la struc- ture des organes, il pourra obtenir les résultats les plus satisfaisans. 11 est facile, mais peu sage, de blâ- mer ce qu'on connaît peu ou point; c'est un détour de la vanité paresseuse. muqueuses. 3; aucun cri, à moins que quelques filets nerveux, heurtés par hasard , ne le fassent souffrir. Il suit de là bien évidemment que c'est à la sur- face externe de la peau que réside sa sensibi- lité, que les nerfs traversent le chorion sans concourir à sa texture, et que leur épanouisse- ment n'a lieu qu'au corps papillaire. Il en est de même aux surfaces muqueuses. XLIII. La longueur des papilles, leur forme même, varient dans les diverses surfaces mu- queuses ; leur aspect n'est point le même à l'es- tomac, aux intestins, à la vessie, à la vésicule du fiel, sur le gland, etc. ; ce qui coïncide très- bien avec la sensibilité propre à chaque organe, sensibilité prouvée par une foule d'observa- tions recueillies depuis Cordeu, qui le premier a fixé l'attention des physiologiste? sur les mo- difications particulières que subit cette pro- priété dans les diverses parties. XLIV. Les membranes muqueuses ont leur chorion comme la peau : il est épais au palais, aux gencives, dans la membrane pituitaire ; plus mince à l'estomac, aux intestins; peu dis- tinct à la vessie, à la vésicule du fiel, dans les conduits excréteurs. Il paroît fo/mé de cou- ches cellulaires condensées et fortement unies, comme à la peau. La macération développe 58 MEMBRANES cette texture d'une manière très-sensible. 11 y a, cependant cette différence, que dans lhydro- pisie le chorion cutané se soulève et se résout en cellules distinctes, que rempli t l'eau ; au lieu que rien de semblable ne s'observe, dans la même circonstance, sur le chorion muqueux. Cette différence dans l'état morbifique en sup- pose-t-elle une dans la structure? Non, car la membrane synoviale est ce rtainementdemême nature que les membran es séreuses, et cepen- dant elle ne participe point aux diathèses hy- dropiques qui souvent les affectent en tota- lité. 11 seroit curieux d'exposer à l'action du tan les membranes muqueuses, pour voir s» elles présenteroient les mêmes phénomènes que la peau. § IV. Glandes des membranes muqueuses. XLV. Outre la triple couche dont nous ve- nons de parler, les membranes muqueuses pré- sentent encore dans leur structure une très- grande quantité de glandes et de nombreux vaisseaux sanguins. Les glandes muqueuses existent dans toutes les membranes de ce nom, situées au-dessous de leur chorion, ou même dans son épaisseur; elles versent sans cesse par MUQUEUSES. 39 des trous imperceptibles une humeur mucila- gineuse, qui lubrifie leur surface libre, et la garantit de l'impression des corps avec lesquels elle est en contact, en même temps qu'elle fa- vorise le trajet de ces corps (1). XL VI. Ces glandes, très-apparentes aux bron- ches, au palais, à l'œsophage et aux intestins, où elles prennent le nom des anatomistes qui les ont décrites avec exactitude , sont moins sensibles dans la vessie, la matrice, la vésicule du fiel, les vésicules séminales, etc.; mais la mucosité qui en humecte les membranes dé- montre irrévocablement leur existence. En ef- fet, puisque d'une part ce fluide est à peu près de la même nature sur toutes les surfaces mu- queuses, et que, d'une autre part, dans celles où les glandes sont apparentes il est évidem- ment fourni par elles, il doit être séparé de (1) Bichat De donne aucune preuve que les glandes muqueuses soient les seuls agens sécrétoires de la mucosité; les observations directes sur la membrane muqueuse vivante montrent au contraire le mucus sortant de tous les points de la membrane. (Voyez ma Physiologie, Tom. II.) De même que l'épidémie, les ongles, les poils, le mucus se forme et s'accroît encore quelque temps après la mort. /\0 MEMBRANES même dans celles où elles sont moins sensibles. L'identité des fluides sécrétés, en effet, suppose l'identité des organes sécrétoires. Il paroît que là où ces glandes se cachent à nos yeux, la na- ture supplée par leur nombre à leur ténuité. Au reste, il est des animaux où, aux intestins surtout, elles forment, par leur multitude, une espèce de couche nouvelle ajoutée à celles dont nous avons parlé. Ceci est remarquable dans le palais de l'homme, dans les piliers du voile, etc. XLVII. Il y a donc cette grande différence entre les membranes muqueuses et les séreuses, que le fluide qui lubrifie les unes est fourni par sécrétion, tandis que celui qui humecte les autres l'est par exhalation. On connoît peu la composition des fluides muqueux , parce que dans l'état naturel il est difficile de les recueil- lir ; et dans l'état morbifîque, où leur quantité augmente , comme dans les catarrhes , par exemple, cette composition change probable- ment. Mais leurs fonctions dans l'économie animale ne sont pas douteuses. XLVIII. La première de ces fonctions est de garantir les membranes muqueuses de l'im- pression des corps avec lesquels elles sont en contact, et qui tous, comme nous l'avons ob- MUQUEUSES. 4I serve , sont hétérogènes à celui de l'animal. Voilà, sans doute, la raison pour laquelle les fluides muqueux sont plus abondants là où ces corps séjournent quelque temps, comme dans la vessie, à l'extrémité du rectum, etc., que là où ils ne font que passer, comme dans les ure- tères, et en général dans tous les conduits excré- teurs. Voilà encore pourquoi, lorsque l'impres- sion de ces corps pourroit être funeste, ces fluides se répandent en plus grande quantité sur leurs surfaces. La sonde qui pénètre l'urè- tre et qui y séjourne ; l'instrument qu'on laisse dans le vagin pour y serrer un polype ; celui qui, dans la même vue, reste quelque temps dans les fosses nasales ; la canule fixée dans le sac lacrymal pour le désobstruer, .celle qu'on assujettit dans l'œsophage pour suppléer à la déglutition empêchée , déterminent toujours sur les portions de la surface muqueuse qui leur correspond une sécrétion plus abondante du fluide qui y est habituellement versé. C'est là une des raisons principales qui rendent dif- ficile le séjour des sondes élastiques dans la trachée-artère. L'abondance des mucosités qui s'y séparent alors , en bouchant les trous de l'instrument, nécessite de fréquentes réintro- ductions, et même peuvent menacer le malade 4 2 MEMBRANES de suffocation , comme Desault lui-même l'a observé, quoique cependant il ait plusieurs fois retiré de grands avantages de ce moyen. XLIX. Il paroît donc que toute excitation un peu vive des surfaces muqueuses détermine dans les glandes correspondantes une augmen- tation remarquable d'action. Mais comment cette excitation, qui n'a pas lieu immédiate- ment sur la glande, peut-elle avoir sur elle une si grande influence (1)? Car, comme nous l'a- vons dit, ces glandes sont toujours sous-jacentes à la membrane, et par conséquent séparées par elle des corps qui l'irritent. Il paroît que cela tient à une modification générale de la sensi- bilité glanduleuse, qui est susceptible d'être mise en jeu par toute irritation fixée à l'extré- mité des conduits excréteurs. Les considéra- tions suivantes serviront à le prouver : i° la présence des aliments dans la bouche détermine la salive à y couler plus abondamment ; 2° la sonde fixée dans la vessie et irritant les uretères ou leur voisinage , augmente l'écoulement de (1) Le fait dont parle ici Bichat n'étant pas exact, son application n'a aucune valeur, bien que les rai- sons qu'il apporte soient excellentes sous d'autres rapports. MUQUEUSES. 43 l'urine; 3° il suffit souvent, pour faire contrac- ter cet organe de manière à surmonter les ob- stacles du canal . d'introduire à moitié une bougie dans celui-ci ; 4° l'irritation du gland et de l'extrémité de l'urètre détermine, dans le coït, la contraction des vésicules séminales et augmente l'action sécrétoire du testicule; 5° Fac- tion d'un fluide irritant sur la conjonctive oc- casione une abondante sécrétion de larmes; 6" en faisant des expériences sur l'état des vis- cères gastriques pendant la digestion et pen- dant la faim, j'ai observé que, tant que les aliments sont seulement dans l'estomac, l'écou- lement de la bile est peu considérable, mais qu'il augmente quand ils passent dans le duo- dénum, en sorte qu'on en trouve alors beau- coup dans cet intestin. Dans la faim, la vésicule du fiel est très-distendue; peu de bile coule dans les intestins. A la fin et même au milieu de la digestion, la vésicule contient la moitié moins de bile ; cependant elle devroit d'autant plus facilement se vider dans l'abstinence, qu'a- lors la bile qui s'y trouve est d'un vert foncé , très-amère, très-acre, et par conséquent très- susceptible d'irriter l'organe qui la renferme. Au contraire, dans le milieu ou à l'issue immé- diate de la digestion , elle est beaucoup plus 44 MEMBRANES claire, plus douce, moins irritante; il faut donc qu'il y ait pendant la digestion un autre sti- mulus : or, ce stimulus, ce sont les aliments passant à l'extrémité du cholédoque *. L. Concluons de ces nombreuses considéra- tions , qu'un des moyens principaux qu'em- ploie la nature pour augmenter l'action des glandes et pour déterminer celle de leurs con- * On a beaucoup disputé pour savoir s'il y avoit une bile critique et une bile hépatique, si l'une étoit d'une nature différente de l'autre , si leur quantité augmentait ou varioit, etc. Les opinions contraires et même opposées ont été appuyées sur des expé- riences nombreuses, faites sur les animaux vivants, comme Haller l'a très-bien fait observer. Ces expé- riences , quoiqu'au premier coup d'œil contradic- toires, ne le sont pas cependant, comme j'ai eu oc- casion de m'en convaincre , en les répétant aux di- verses époques de la digestion et pendant l'abstinence de l'animal , ce qu'on n'avoit point encore fait avec précision. Voici ce que j.'ai observé sur les chiens qui ont servi à mes expériences. i°. Pendant l'abstinence, l'estomac et les intestins grêles étant vides, on trouve la bile des conduits hé- patique et cholédoque, jaunâtre, claire; la surface du duodénum et du jéjunum teinte par une bile qui présente le même aspect; la vésicule du fiel très- MUQUEUSES. 4^ duits excréteurs ,^'est l'irritation de l'extrémité de ces conduits; et c'est à cela qu'il faut rap- porter la sécrétion abondante et l'excrétion des fluides muqueux dans les cas rapportés ci- dessus. C'est encore à cette susceptibilité des glandes muqueuses pour l'irritation de l'extré- mité de leurs conduits, qu'il faut attribuer les rhumes artificiels qu'on est parvenu à produire distendue par une bile verdâtre, amère, d'autant plus foncée et plus abondante, que la diète a été plus lon- gue. 20. Pendant la digestion stomacale, qu'on peut prolonger assez long-temps en donnant au chien de gros morceaux de viande, qu'il avale sans mâcher, les choses sont à peu près dans le même état. 5°. Au commencement de la digestion intestinale, on trouve la bile du conduit hépatique toujours jaunâtre, celle du conduit cholédoque plus foncée, la vésicule moins pleine, et sa bile devenant déjà plus claire. 4°- Sur la fin de la digestion et tout de suite après, la bile des conduits hépatique, cholédoque, celle contenue dans la vésicule du fiel, celle qui se trouve répandue sur le duodénum, sont absolument de la couleur de la bile hépatique ordinaire, c'est-à-dire d'un jaune clair peu amère. La vésicule n'est qu'à moitié pleine; elle est flasque, point contractée. Ces observations, répétées un très-grand nombre de fois, prouvent évidemment que telle est pendant 46 MEMBRANES par la respiration des vapeurs de l'acide mu- riatique oxigéné ; l'écoulement muqueux qui accompagne la présence d'un polype, d'une tumeur quelconque dans le vagin, de la pierre dans la vessie, etc.; la fréquence des fleurs blanches dans les femmes qui font un usage immodéré du coït; l'écoulement plus abondant du mucus des narines chez les personnes qui l'abstinence et la digestion la manière dont se fait l'écoulement de la bile. i°. Il paroît que dans tous les temps le foie en sépare une quantité très sensible, (|uantité qui augmente cependant dans la digestion. 2°. Celle qui e^t fournie durant l'abstinence se par- tage entre l'intestin, qui s'en trouve toujours coloré, et la vésicule, qui 'la retient sans en verser aucune portion par le conduit cystique, et où, ainsi retenue, elle acquiert un caractère d'âcreté , une teinte fon- cée, nécessaire sans doute à la digestion qui va suivre. 5°. Lorsque les aliments, ayant été digérés par l'esto- mac, passent dans le duodénum , alors toute la bile hépatique, qui auparavant se parlageoit, coule dans l'intestin, et même en plus grande abondance; d'une autre part, la vésicule verse aussi celle qu'elle con- tient sur la pulpe alimentaire, qui s'en trouve alors toute pénétrée. 4°- Après la digestion intestinale, la bile hépatique diminue et commence à couler eu partie dans le duodénum , et à refluer en partie dans MUQUEUSES. 4; prennent du tabac, etc. Dans tous ces cas, il y a évidemment excitation de l'extrémité des con- duits muqueux. LI. Les membranes muqueuses, par la con- tinuelle sécrétion dont elles sont le siège, jouent encore un rôle principal dans l'économie ani- male. On doit les regarder comme un des grands émonctoires par lesquels s'échappent sans cesse au-dehors les résidus de la nutrition , et par la vésicule, où, examinée alors, elle est claire et en petite quantité, parce qu'elle n'a encore eu le temps ni de se colorer, ni de s'amasser en abondance. Il y a donc cette différence entre les deux biles , que l'hépatique coule d'une manière continue dans l'intestin, et que la cystique reflue , hors le temps de la digestion, dans la vésicule , et coule pendant cette fonction vers le duodénum; ou plutôt c'est toujours le même fluide, dont une partie conserve toujours le caractère qu'il a en sortant du foie; l'autre va pn prendre un différent dans la vésicule. La diversité de couleur de la bile cystique, suivant qu'elle a ou non séjourné, a beaucoup d'analogie avec la couleur de l'urine, qui, plus ou moins retenue dans la vessie, se trouve plus ou moins foncée (1). (i) Bichat parle dans cette note beaucoup trop affirmativement sur la manièfe dont se fait l'écoulement de la bile; au milieu d'observations justes il y a plusieurs explications hasardées. 48 MEMBRANES conséquent comme un des agents principaux de la décomposition habituelle , qui enlève aux corps vivants les molécules qui, ayant con- couru pendant quelque temps à la composi- tion des solides, leur sont ensuite devenus hé- térogènes. LU. Remarquez en effet que tous les fluides muqueux ne pénètrent point dans la circula- tion , mais qu'ils sont rejetés au-dehors ; celui de la vessie, des uretères, de l'urètre, avec l'u- rine; celui des vésicules séminales, des con- duits déférents, avec la semence ; celui des na- rines par l'action de se moucher ; celui de la bouche, en partie par l'évaporation, en partie par l'anus, avec les excréments; celui des bron- ches, par l'exhalation pulmonaire, qui s'opère principalement par la dissolution dans l'air de la respiration, de ce fluide muqueux (1); ceux de l'œsophage , de l'estomac , des intestins , de (1) L'exhalation pulmonaire consiste principale- ment dans la vaporisation de la partie aqueuse du sang de l'artère pulmonaire. On peut augmenter à volonté celte exhalation en rendant plus abondante la sérosité du sang. ( Voyez ma Physiologie, Tom. II.) Le mucus ne pourrait point se vaporiser, si ce n'est dans la partie d'eau qui entre dans sa composition. MUQUEUSES. 49 la vésicule, du fiel, etc.. avec les excréments, dont ils forment souvent, dans l'état ordinaire, une partie presque aussi considérable que le résidu des aliments, et même qu'ils composent presque en entier dans certaines dyssenteries, dans certaines fièvres, où la quantité de ma- tières rendues est évidemment disproportion- née avec celle que l'on prend, etc. Observons à ce sujet qu'il y a toujours quelques erreurs dans l'analyse des fluides en contact avec les membranes dont nous parlons, comme l'urine, la bile, le suc gastrique, etc., parce qu'il est très-difficile , impossible même , d'en séparer les fluides muqueux. LUI. Si l'on se rappelle ce qui a été dit pré- cédemment sur l'étendue des deux surfaces muqueuses générales , égales et même supé- rieures à. l'étendue de l'organe cutané ;^si l'on se représente ensuite ces deux grandes surfaces rejetant sans cesse au-dehors les fluides mu- queux, on verra de quelle importance doit être, dans l'économie, cette évacuation, et de quels dérangements sa lésion peut devenir la source. C'est sans doute à cette loi de la na- ture, qui veut que tout fluide muqueux soit rejeté au-dehors , qu'il faut attribuer dans le fœtus la présence du fluide onctueux dont est s ;)0 MEMBRANES pleine la vésicule du fiel, le méconium engor- geant ses intestins, etc., espèces de fluides qui ne paroissent être qu'un amas de sucs mu- queux, qui, ne pouvant s'évacuer, séjournent, jusqu'à la naissance, sur les organes respectifs où ils ont été sécrétés (1). LIY. Ce ne sont pas seulement les fluides muqueux qui sont rejetés au-dehors, et servent ainsi d'émonctoires à l'économie; presque tous les fluides , séparés de la masse du sang par voie de sécrétion , se trouvent dans ce cas : cela est évident pour la partie la plus considérable de la bile ; vraisemblablement que la salive, le suc pancréatique et les larmes sont aussi rejetés avec les excréments, et que leur couleur seule les empêche d'y être distingués comme la bile. Je ne sais même si, en réfléchissant à une foule de phénomènes, on ne seroit pas tentéjd'établir en principe général que tout fluide séparé par sécrétion ne rentre point dans la circulation; (1) Ici Bichat ne s'aperçoit pas que ses expres- sions ne rendent pas ses idées. Un fluide onctueux ne peut éïre un amas de fluide muqueux ; le méco- nium est le résidu de la digestion qui s'opère dans l'estomac et les intestins du fœtus; celte matière ne peut être non plus un ama de mucus. MUQUEUSES. 5l que ce phénomène n'appartient qu'aux fluides séparés par exhalation, comme ceux des cavi- tés séreuses, des articulations, du tissu cellu- laire, de l'organe médullaire, etc. ; que tous les fluides sont ainsi excrémentiels ou récrémen- tiels, et qu'aucun n'est excrément récrémentiel^ comme l'indique la division vulgaire *. LV. Ce qu'il y a de sûr au moins , c'est que je n'ai pu parvenir à faire absorber par les lymphatiques la bile et la salive, en les injectant dans le tissu cellulaire d'un animal ; elles y ont constamment donné lieu à une inflammation et ensuite àundépôt(i). 2°. On sait que l'urine in- * La bile dans la vésicule, l'urine dans la vessie, la semence dans les vésicules séminales, sont certai- nement absorbées; mais ce n'est pas le fluide lui- même qui rentre en circulation : ce sont ses parties les plus ténues , quelques-uns de ses principes que nous ne connoissons pas bien, vraisemblablement la partie aqueuse, iympba tique; cela ne ressemble point à l'absorption de la plèvre et aulres membranes ana- logues , où le fluide rentre dans le sang tel qu'il en est sorti. (1) Il est vrai que souvent l'injection de la bile ou d'autre liquide, même de l'eau, peut donner lieu à des inflammations du tissu cellulaire; mais cela 52 MEMBRANES filtrée ne s'absorbe pas non plus et frappe de mort tout ce qu'elle touche, tandis que les in- filtrations de lymphe, de sang, se résolvent fa- cilement. 3°. H y a une différence essentielle entre le sang et les fluides sécrétés, sous le rap- port de la décomposition. Au contraire, sous ce rapport, les fluides exhalés s'en rapprochent beaucoup, comme la sérosité, etc. Mais cette discussion nous entraîneroit au-delà des bor- nes que nous devons ici nous prescrire; j'y re- viendrai dans un autre ouvrage. § VI. Système vascuiaire des membranes muqueuses. LVI. Les membranes muqueuses reçoivent un très-grand nombre de vaisseaux. La rou- geur remarquable qui les distingue suffîroit pour nous le prouver, quoique les injections ne le démontreroient pas. Cette rougeur n'est pas partout uniforme; moindre dans la vessie, les gros intestins, les sinus de la face, elle est très-marquée à l'estomac, aux intestins grêles, au vagin, etc. Elle dépend d'un réseau vascu- n'empêche pas qu'ils ne soient très-promptement absorbés, comme des centaines d'expériences me l'ont démontré. MUQUEUSES. 53 laire extrêmement multiplié, dont les bran- ches, après avoir traversé le chorion et s'y être ramifiées, viennent s'épanouir en se divisant à l'infini sur sa surface, y embrassant le corps capillaire, et se trouvant recouvertes seulement par l'épiderme. LVII. C'est la position superficielle de ces vaisseaux qui les expose fréquemment aux hé- morragies , comme on le remarque principa- lement aux narines , comme on le voit dans l'hémoptysie, dans l'hématémèse ou vomisse- ment de sang, dans l'hématurie ou hémorra- gie des voies urinaires, dans certaines dysen- teries où le sang s'échappe des paroies intesti- nales, dans les hémorragies utérines, etc. ; en sorte que les hémorragies spontanées, indépen- dantes de toute violence externe portée sur les vaisseaux ouverts, paroissent être une affection spéciale des membranes muqueuses ; qu'il est rare de les observer ailleurs que dans ces or- ganes , et qu'elles forment au moins un des grands caractères qui les distinguent de toutes les autres membranes (1). (1) I! n'est pas très-rare de voir de pareilles hé- morragies à la peau , à la surface du cerveau ; et l'utérus en offre un exemple régulier aux époques 54 MEMBRANES LVHI. C'est aussi la position superficielle du système vasculaire des membranes muqueuses, qui fait que leurs portions visibles, comme le re- bord rouge des lèvres , le gland , etc. , servent souvent à nous indiquer l'état, de la circulation. Ainsi dans les diverses espèces d'asphyxie, dans la submersion, la strangulation, etc., ces par- ties présentent une lividité remarquable, effet de la gêne qu'éprouve le sang veineux à tra- verser le poumon, et de son reflux vers les sur- faces, où le système des veines naît de celui des artères. LIX. J'ai déjà fait observer que dans le fœ- tus et l'enfant nouveau-né le système vasculai- re étoit aussi manifeste dans l'organe cutané que dans les membranes muqueuses; que la rougeur y é'«.oit la même : elle s'y trouve même encore plus marquée dans les premiers temps de la conception; mais, bientôt après la nais- sance, toute la rougeur de la peau semble se concentrer sur les membranes muqueuses , qui, auparavant inactives, n'avoient pas besoin d'une circulation aussi prononcée , mais qui , menstruelles, bien qu'il soit prouvé aujourd'hui que la cavité de l'utérus ne soit pas tapissée par une membrane muqueuse. MUQUEUSES. 55 devenant tout à coup le siège principal où se passent les phénomènes de la digestion, de l'excrétion de la bile, de l'urine, de la sali- ve, etc., doivent recevoir une quantité plus grande de sang. Au reste, l'exposition long- temps continuée des membranes muqueuses à l'air leur fait perdre souvent cette rougeur qui les caractérise, et elles prennent alors l'aspect de la peau, comme l'a très-bien observé M. Sa- battier. en traitant des chutes de la matrice et du vagin, qui, par cette circonstance, en out imposé quelquefois et fait croire à un herma- phrodisme. LX. Il se présente une question importante dans l'histoire du système vasculaire des mem- branes muqueuses, celle de savoir si ce systè- me admet plus ou moins de sang, suivant di- verses circonstances. Comme les organes au<- dedans desquels se déploient ces sortes de membranes sont presque tous susceptibles de contraction et de dilatation, ainsi qu'on le voit à l'estomac, aux intestins, à la vessie, etc., on a cru que pendant la dilatation les vaisseaux, mieux déployés, recevoient plus de sang, et que durant la contraction, au contraire, re- pliés sur eux-mêmes, étranglés pour ainsi dire, ils n'admettoient qu'une petite quantité de ce 6 6 MEMBRANES fluide, lequel reflue alors dans les organes voi- sins. M. Chaussier a fait une application de ces principes a l'estomac , dont il a considéré la circulation comme étant alternativement in- verse de celle de l'épiploon, lequel reçoit pen- dant la vacuité de cet organe le sang que celui- ci, lorsqu'il est contracté, ne peut admettre. On a aussi attribué à la rate un usage analo- gue , depuis Lieutaud. Voici ce que l'inspec- tion des animaux ouverts pendant l'abstinence et aux diverses époques de la digestion m'a montré à cet égard. LX1. i°. Pendant la plénitude de l'estomac, les vaisseaux sont plus apparents à l'extérieur de ce viscère que pendant la vacuité; au-dedans. la surface muqueuse n'est pas plus rouge, elle m'a paru même quelquefois l'être moins. 2°. L'é- piploon, moins étendu pendant la plénitude de l'estomac, présente à peu près le même nom- bre de vaisseaux apparents , aussi longs , mais plus ployés sur eux-mêmes que dans la vacui- té *. S'ils sont alors moins gorgés de sang, la * Ceci est une conséquence nécessaire de la dis- position du système vasculaire de l'estomac. En effet, la grande coronaire stomachique étant transversale- ment siluée entre lui et !'épiplooii, et fournissant des MUQUEUSES. 5j différence n'est que très -peu sensible. J'obser- ve, à cet égard, qu'il faut , pour bien distinguer ceci, prendre garde qu'en ouvrant l'animal le sang ne tombe sur l'épiploon qui se présente, et n'empêche ainsi de distinguer l'état où il se trouve. 3°. Je puis assurer qu'il n'y a pas de rapport tellement constant entre le volume de la rate et la vacuité ou la plénitude de l'esto- mac, que ces deux circonstances coïncident d'une manière nécessaire; et que si le premier organe augmente et diminue dans diverses cir- constances, ce n'est point toujours précisément en sens inverse de l'estomac (1). J'avois d'a- branches à l'un et a l'autre, il est évident que lors- que l'estomac se loge, en les écartant, entre les lames de l'épiploon, et que celui-ci, en s'appliquant sur lui. devient plus court; il est, dis-je, évident que les branches qu il reçoit de la coronaire ne peuvent éga- lement s'y appliquer aussi. Pour cela , il faudroit qu'elles se portassent de l'un à l'autre sans le tronc intermédiaire qui les coupe à angle droit : alors, en se distendant, l'estomac les écarteroit comme l'épi- ploon, et se logeroit entre elles; au lieu qu'il les pousse devant lui avec leur tronc commun, la coro- naire, et les fait plisser. (1) Le volume de la rate varie suivant une multi- tude de circonstances, et principalement suivant la 58 MEMBRANES bord fait, comme Lieutaud, des expériences sur des chiens pour m'en assurer; mais l'inégalité de grosseur, d'âge de ceux qu'on m'apportoil, me faisant craindre de n'avoir bien pu compa- rer leur rate, je les ai répétées sur des cochons d'Inde, de la même portée, de la même gros- seur, et examinés en même temps, les uns pendant que l'estomac étoit vide, lès autres pendant sa plénitude. J'ai presque toujours trouvé le volume de la rate à peu près égal, ou du moins la différence n'étoit pas très-sensi- ble. Cependant, dans d'autres expériences, j'ai vu se manifester, en diverses circonstances, des inégalités dans le volume de la rate et surtout quantité du sang que contiennent les vaisseaux san- guins. On peullaire varier ce volume du simple au dou- ble en augmentant artificiellement le volume du sang. Si on ouvre l'abdomen d'un animal vivant et qu'on prenne les dimensions de la rate avec un compas, et qu'ensuite on injecte une certaine quantité d'eau dans les veines, on voit les dimensions de la rate s'accroître graduellement. Une aulre cause influe aussi sur le volume de cet organe; c'est une contraction très-évi- dente qu'éprouve la rate particulièrement sous l'in- fluence de certaines substances , telles que la noix vomique, le camphre, etc., et par l'effet du contact de l'air. MOQUEUSES. 59 dans la pesanteur de ce viscère, mais c'étoit in- différemment pendant ou après la digestion. Il paroît, d'après tout ceci, que si pendant la vacuité de l'estomac il y a un reflux de sang vers l'épiploon et la rate, ce reflux est moindre qu'on ne le dit communément. D'ailleurs, pen- dant cet état de vacuité , les replis nombreux de la membrane muqueuse de ce viscère lui laissant , comme nous l'avons dit plus haut , presque autant de surface et par conséquent de vaisseaux que pendant la plénitude, le sang doit y circuler presque aussi librement. Il n'a alors d'obstacles réels que dans les tortuosités, et non dans le resserrement , la constriction , l'étranglement de ces vaisseaux par la contrac- tion de l'estomac : or, cet obstacle est facile- ment surmonté. LXII. Quant aux autres organes creux, il est difficile d'examiner la circulation des orga- nes voisins pendant leur plénitude et leur va- cuité, attendu que les vaisseaux de ceux-ci ne sont point superficiels comme dans l'épiploon, ou qu'eux-mêmes ne se trouvent pas isolés comme la rate. On ne peut donc, pour déci- der la question, que voir l'état des membranes muqueuses à leur face interne : or, cette face m'a toujours paru aussi rouge pendant la con- 60 MEMBRANES traction que pendant la dilatation. Au reste, je ne donne ceci que comme un fait, sans pré- tendre en tirer aucune conséquence opposée à l'opinion commune. 11 est possible en effet que, quoique la quantité de sang soit toujours à peu près la même , la rapidité de la circulation augmente, et que par conséquent, dans un temps donné, plus de ce fluide y aborde pen- dant la plénitude ; ce qui paroît nécessaire à la sécrétion, plus grande alors, des fluides mu- queux. § VI. Variétés d'organisation des membranes muqueuses dans diverses régions. LX11I. L'assemblage de 1'épiderme, du corps papillaire, du chorion, des glandes et des vais- seaux , constitue , dans les membranes mu- queuses, leur intime organisation, qui pré- sente de très-grandes variétés dans les diverses régions où on les examine. Je n'indiquerai que les principales de ces variétés; car en aucun endroit ces membranes ne présentent le même aspect, et pour décrire toutes leurs différen- ces, il faudroit toutes les examiner. LX1V. Une de ces variétés, c'est celle qu'of- fre l'aspect des membranes muqueuses à leur origine, mises en parallèle avec celui sous lequel muqueuses. 6i elles se présentent dans la profondeur des or- ganes. Comparez, par exemple, la surface du gland, du bord libre de la face interne des lè- vres, des gencives, de la face interne des pau- pières , du commencement de l'urètre, de l'anus, de la vulve, etc., avec une portion quel- conque de la surface de l'estomac, des intes- tins, etc. : vous verrez, d'un côté, le corps pa- pillaire peu prononcé, n'offrant point la forme villeuse, l'épidémie épais, très-distinct et fa- cile à s'enlever, le chorion très-caractérisé, les vaisseaux un peu moins superficiels, les glan- des muqueuses très-multipliées , très-grosses surtout à la bouche; de l'autre côté, vous ren- contrerez des caractères presque opposés. On diroit qu'à leur origine les membranes mu- queuses ont une structure moyenne entre celle de la peau et celle de leur portion profonde. LXV. Une autre variété de structure non moins frappante, c'est celle qui se rencontre dans la portion de surface muqueuse qui ta- pisse les sinus. Presque plus de rougeur, té- nuité extrême, impossibilité de distinguer les trois couches dont nous avons parlé , point de glandes muqueuses sensibles, quoiqu'il y ait une sécrétion remarquable de mucosités : voilà les caractères de ces prolongements de la 62 MEMBRANES pituitaire, que l'on considère comme propres à augmenter l'odorat, mais qui ne remplissent pas cette fouction dans le sens où on l'entend communément. En effet, à l'instant où une odeur pénètre dans le nez, ayant l'air pour vé- hicule, elle ne peut tout à coup s'introduire dans les sinus, vu l'extrême rétrécissement des ouvertures par lesquelles ces cavités commu- niquent dans les narines ; mais peu à peu elle y pénètre, imprègne tout l'air qui y est conte- nu, et ne pouvant que difficilement en ressor- tir, par la même raison qu'elle y est difficile- ment arrivée, elle prolonge le sentiment, qui s'évanouit bientôt, sur la membrane pituitaire elle-même par le renouvellement de l'air. Ainsi la pituitaire est donc destinée à recevoir l'im- pression des odeurs, et ses prolongements dans les sinus à les retenir. LX VI. Je remarque à l'égard de la structure particulière de la portion de membrane mu- queuse qui tapisse les sinus, que celle du pro- longement qui se déploie dans l'oreille interne est absolument la même, à la différence près d'une finesse encore plus marquée dans le tis- su. Tous les anatomistes appellent cette mem- brane le périoste àé la caisse de l'oreille interne. Les considérations suivantes prouvent que ce MUQUEUSES. 63 n'est point une membrane fibreuse analogue à celle qui enveloppe les os, mais une couche muqueuse semblable à celle des sinus. i° On la voit évidemment se continuer avec la mem- brane pituitaire , au moyen du prolongement de la trompe d'Eustache. 2° On la trouve ha- bituellement humide d'un fluide muqueux , que ce canal sert à transmettre au-dehors, ca- ractère étranger aux membranes fibreuses, tou- jours inhérentes par leurs deux faces. 3° Au- cune fibre ne peut y être distinguée. 4° Sou ap- parence fongueuse, quoique blanchâtre; sa mollesse, la facilité avec laquelle elle cède au moindre agent dirigé sur elle pour la déchirer, sont un caractère que n'offre en aucun endroit le périoste. LXV1I. Je passe sur les autres différences de structure des membranes muqueuses dans leurs différentes régions, différences très-réel- les partout; j'observe seulement, i° que ces va- riétés les distinguent des membranes séreuses, dont l'aspect est partout le même, comme on peut le voir en comparant ensemble le péricar- de, le péritoine, etc. ; 2° que cette variété coïn- cide, comme déjà je l'ai fait observer, avec les différences qu'on observe dans la sensibilité de diverses portions de ces membranes : ainsi l'é- 64 HËMBRAïCES métique est un irritant pour l'estomac, et non pour la conjonctive ; la pituitaire perçoit ex- clusivement les odeurs; la surface muqueuse de la langue, les saveurs, etc. , etc. Au contrai- re, le contact de tous les corps sur les mem- branes séreuses mises à nu produit des phéno- mènes exactement analogues, comme nous le verrons. § VIII. Forces vitales des membranes muqueuses. LX'VIII. La sensibilité des membranes mu- queuses est un des grands caractères qui les distinguent des autres organes analogues. Cette force inhérente aux corps organiques, varia- ble dans chaque partie, prompte à se dévelop- per dans les unes sous l'influence du moindre excitant, difficile à être mise en jeu dans les au- tres, présente dans toutes, susceptible de pas- ser, par l'inflammation, de l'état le plus obs- cur au dernier degré d'intensité, cette force est remarquable ici par des caractères très-analo- gues à ceux qu'elle présente dans la surface cutanée, avec laquelle la surface muqueuse a, comme nous l'avons dit, de grands traits de ressemblance du côté de la structure. C'est à cette analogie de sensibilité qu'il faut rappor- ter une foule de phénomènes qui se déploient MUQUEVSES. 63 alternativement et flans un ordre inverse sur l'une et sur l'autre surface. Je vais successi- vement indiquer quelques-uns de ces phéno- mènes. LXIX. i°. Lorsque la température de l'air ambiant engourdit la sensibilité de l'organe cutané en resserrant son tissu, la sensibilité de la surface muqueuse reçoit un accroissement d'énergie remarquable. Voilà pourquoi , dans -l'hiver, dans les climats froids, etc., où les fonctions de la peau sont singulièrement bornées, toutes celles des membranes mu- aqueuses s'agrandissent en proportion : de là une exhalation pulmonaire plus marquée, les sécrétions internes plus abondantes, la diges- tion plus active, plus prompte à s'opérer, par conséquent l'appétit plus facile à être excité. 2° Lorsqu'au contraire la chaleur du climat, de la saison, etc., vient à relâcher, à épanouir la surface cutanée, on diroit que la surface muqueuse se resserre en proportion : en été, dans le Midi, etc., diminution des sécrétions in- ternes, de celle de l'urine, par exemple; len- teur des phénomènes digestifs, par le défaut d'action de l'estomac et des intestins; appétit tardif à revenir, etc. 5° La suppression subite • les fonctions de l'organe cutané détermine 5 66 MEMBRANES # souvent un accroissement maladif dans celle de l'organe muqueux. L'air froid , qui arrête la transpiration, produit fréquemment des rhumes, des catarrhes ; espèce d'affection que caractérisent surtout la sensibilité et l'action augmentées des glandes muqueuses. 4° Dans diverses affections des membranes muqueu- ses, les bains, qui relâchent, épanouissent la peau, produisent d'heureux effets. LXX. Les considérations précédentes éta- blissent évidemment l'influence des forces vi- tales de la peau sur celles des membranes mu- queuses ; d'autres, non moins importantes, dé- montrent la dépendance réciproque où la peau se trouve des forces vitales des mêmes mem- branes. i° Pendant la digestion, où les sucs muqueux pleuvent de toute part et en abon- dance dans l'estomac et les intestins, où les membranes muqueuses des viscères gastriques sont par conséquent dans une grande action, l'humeur de l'insensible transpiration diminue notablement, selon l'observation de Sanctorius; elle est en très -petite quantité trois heures après le repas : en sorte que l'action de l'or- gane cutané est visiblement moins énergique. 2° Pendant le sommeil, où toutes les fonctions internes deviennent plus marquées, s'exécu- MUQUEUSES. 67 tent dans leur plénitude, où la sensibilité des membranes muqueuses est par conséquent très-caractérisée, la peau semble être frappée d'une débilité manifeste, débilité qu'indique le froid dont elle est saisie lorsque l'animal reste à découvert , comme, pendant la veille , son défaut de susceptibilité pour les divers ex- citants, etc., etc. LXX1. Comme celle de l'organe cutané, la sensibilité des membranes muqueuses est es- sentiellement soumise à l'immense influence de l'habitude, qui, tendant sans cesse à émous- ser la vivacité du sentiment, dont elles sont le siège, ramène également à l'indifférence la dou- leur et le plaisir qu'elles nous font éprouver, et dont elle est, comme on sait, le terme moyen. LXXII. Je dis premièrement que l'habitude ramène à l'indifférence les sensations doulou- reuses nées sur les membranes muqueuses. La présence de la sonde qui pénètre l'urètre pour la première fois, est cruelle le premier jour, pénible le second, incommode le troisième, insensible le quatrième ; les pessaires introduits dans le vagin, les tampons fixés dans le rectum, les tentes assujetties dans les fosses nasales, la canule placée à demeure dans le canal nasal, présentent à divers degrés les mêmes phéno- 68 MEMBRANES mènes. C'est sur cette remarque qu'est fondée la possibilité de l'introduction des sondes dans la trachée-artère, pour suppléer à la respira- tion; dans l'œsophage, pour produire une dé- glutition artificielle. Cette loi de l'habitude peut même aller jusqu'à transformer en plaisir une impression d'abord pénible: l'usage du tabac pour la membrane pituitaire, de divers aliments pour la palatine, en fournissent de notables exemples (1). LXXIII. Je dis, en second lieu, que l'habi- tude ramène à l'indifférence les sensations agréables nées sur les surfaces muqueuses. Le parfumeur placédans une atmosphère odoran- te; le cuisinier, dont le palais est sans cesse affec- té de délicieusessaveurs, ne trouvent point dans leurs professions les vives jouissances qu'elles préparentaux autres. De l'habitude peut même naître la succession du plaisir à de pénibles sensations; comme dans le cas précédent elle ramène la peine au plaisir. J'observe au reste que cette influence remarquable de l'habitude (1) Celte règle souffre de nombreuses exceptions. Combien ne connaît-on pas d'exemples de sembla- bles contacts , d'abord presque insensibles , et qui sont devenus insupportables en se répétant! MUQUEUSES. 69 ne s'exerce que sur les sensations produites pas le simple contact, et non sur celles que donne la lésion réelle des membranes mu- queuses; aussi n'adoucit-elle pas les douleurs causées sur la vessie par la pression et même le déchirement que produit la pierre; sur la surface de la matrice par un polype, etc. LXX1V. C'est à ce pouvoir de l'habitude sur les forces vitales des membranes muqueuses , qu'il faut eu partie rapporter la diminution graduelle de leurs fonctions qui accompagne l'âge. Tout est excitant pour l'enfant, tout s'émousse chez le vieillard. Dans l'un, la sensi- bilité très-active des surfaces muqueuses ali- mentaires, biliaires, urinaires, salivaires, etc., concourt principalement à produire cette rapi- dité avec laquelle se succèdent les phénomènes digestif et sécrétoire; dans l'autre, cette sensi- bilité , émoussée par l'habitude du contact, n'enchaîne qu'avec lenteur les mêmes phé- nomènes. LXXV. N'est-ce point de la même cause que dépend cette remarquable modification de la sensibilité des surfaces muqueuses; savoir, qu'à leur origine, comme sur la pituitaire , la palatine, le gland, l'ouverture du rectum, etc., elles nous donnent la sensation des corps avec 70 MEMBRANES lesquels elles sont en contact, et qu'elles ne proeurent point cette sensation dans les or- ganes profonds qu'elles tapissent , comme les inlestins , etc. ? Dans la profondeur des orga- nes, ce contact est toujours uniforme : la vessie ne connoît que le contact de l'urine; la vé- sicule, que celui de la bile; l'estomac, que celui des aliments mâchés et réduits, quelle que soit leur diversité, à une pâte pulpeuse analogue. Cette uniformité de. sensation en- traîne la nullité de perception , parce que pour percevoir il faut comparer, et qu'ici deux termes de comparaison manquent. Aussi le fœtus n'a-t-il pas la sensation des eaux de l'amnios; aussi l'air, très-irritant d'abord pour le nouveau-né , finit-il par ne pas lui être sen- sible. Au contraire, au commencement des membranes muqueuses, les excitants varient à chaque instant; l'âme peut donc en percevoir la présence, parce qu'elle peut établir des rapprochements entre leurs divers modes d'ac- tion. Ce que je dis est si vrai, que si , dans la profondeur des organes, les membranes mu- queuses sont en contact avec un corps étran- ger et différent de celui qui leur est habituel, elles en transmettent la sensation à l'âme. L'algalie dans la vessie , les sondes qu'on en- MUQUEUSES. 71 fonce dans l'estomac, etc. , en sont un exemple. L'air frais, qui. dans une grande chaleur de l'atmosphère , est tout-à-coup introduit dans la trachée- artère, promène sur toute la sur- face des bronches une agréable sensation ; mais bientôt l'habitude nous y rend insen- sibles , et nous cessons d'en avoir la perception. LXXVI. Il est très-difficile d'indiquer exac- tement le caractère des forces toniques des membranes muqueuses (1), parce que, étant unies presque partout à une couche muscu- leuse , on ne peut guère distinguer ce qui appartient à la tonicité de l'une, de ce qui dépend de l'irritabilité de l'autre : ou bien , si les membranes muqueuses sont isolées, comme (1) Cette force tonique de Bicbat exprime des phénomènes de nature très-différente , tels que la simple élasticité des canaux qui reviennent sur eux- mêmes après avoir élé distendus; la propriété de se resserrer par la diminution de la masse des parois ; la contractilité musculaire, comme il arrive à l'urètre qui comprime la sonde par les contractions des re- leveurs de l'anus, ou par la contraction de la por- tion dite membraneuse , bien qu'elle soit réellement musculouse , d'après les dernières recherches de M. Amussat. 7^" MLilKRAÎftS aux narines , leur adhérence rend très-obscur- les phénomènes de leurs forces toniques. Ce- pendant l'action des conduits excréteurs sur leurs fluides respectifs; celle de la vésicule du fiel, des vésicules séminales, qui sont dépour- vues d'accessoires musculeux ; la contraction quelquefois spasmodique de l'urètre sur la sonde qui le pénètre , ne laissent pas de doute sur l'énergie de cette force tonique, semblable sans doute, dans ses diverses modifications , à celle qu'on observe dans l'organe cutané. § VIII. Sympathie des membranes muqueuses, LXXVI1. Je rapporte à trois classes générales, les sympathies des membranes muqueuses, comme celles de la plupart des autres organes. Dans la première classe se rangent les sym- pathies dans lesquelles l'irritation d'une partie quelconque de la surface muqueuse détermine dans une autre partie l'exercice de la sensibi- lité. Une pierre dans la vessie occasione une douleur au bout du gland; les vers des intes- tins excitent une démangeaison du nez. W hytt a vu un corps étranger introduit dans l'oreille affecter douloureusement tout le côté corres- pondant de la tête ; un ulcère de la vessie dé- MUQUEUSES. 70- terminer, chaque fois que le malade urinoit, une douleur à la partie supérieure des cuisses,, etc., etc. LXXVIII. Je rapporte à la seconde classe les sympathies où l'irritation d'un point quelcon- que de la surface muqueuse détermine dans un autre l'exercice de l'irritabilité: ainsi une impression trop vive sur la pituitaire fait éter- nuer; l'irritation des bronches fait tousser; les calculs biliaires déterminent des vomisse- ments spasmodiques , les pierres urinaires cau- sent la rétraction du testicule à l'anneau, etc., etc. Dans tous ces cas il y a contraction des muscles , déterminée par l'irritation des sur- faces muqueuses, loin de l'endroit où arrive cette contraction. LXX1X. La dernière classe des sympathies des membranes muqueuses renferme celle où l'irritation d'un point quelconque de leur éten- due détermine ailleurs l'exercice de la tonicité. C'est ici qu'il faut rapporter ce que nous avons dit plus haut sur l'action glanduleuse, aug- mentée par l'irritation de l'extrémité des con- duits excréteurs. Ainsi il est évident que l'augmentation des forces toniques de la paro- tide pour séparer la salive, de son conduit excréteur pour la transmettre lorsque l'ex- "4 MEMBRANES trémité de ce conduit est irritée par les ali- ments, les médicaments siliagogues , etc.; il est, dis-je , évident que cette augmentation est un phénomène purement sympathique. On pourroil caractériser chacune de ces trois clas- ses de sympathies par le nom de la force vitale qu'elle met en jeu , en appelant la première , sympathie de sensibilité ; la seconde, sympathie d'irritabilité; la troisième, sympathie de tonicité. LXXX. Cette manière de classer les sympa- thies, entièrement empruntée de l'état des forces vitales , dont elles ne* sont que des modifications irrégulières , que des aberra- tions encore inconnues dans leur nature , me paroît préférable à celle de Whytt, qui suit tout simplement l'ordre des régions , et même à celle de Barthez, qui, plus méthodique en ce qu'il les examine successivement dans les organes liés par systèmes, dans ceux qui sont isolés , dans ceux situés dans les moitiés symé- triques du corps, est cependant sujette, comme je le démontrerai ailleurs, à de très-graves inconvénients. § IX. Fonctions des membranes muqueuses. LXXXI. J'ai déjà examiné plusieurs fonc- tions des membranes muqueuses, je les ai ML'QUEISES. 70 considérées, i° comme un des grands émonc- toires de l'économie animale; 20 comme rem- plissant à l'égard des corps hétérogènes qui existent au-dedans de nos organes les mêmes fonctions que la peau à l'égard des corps exté- rieurs qui l'environnent; 3° comme facilitant le trajet de ces corps hétérogènes par le fluide muqueux qui les lubrifie. 11 me reste à exa- miner trois questions très-agitées dans ces derniers temps : celles de savoir, i° si les mem- branes muqueuses influent sur la rougeur du sang; 2° s'il s'y fait une exhalation; 5° si les absorbants en naissent, si l'absorption s'y obser- ve par conséquent (1). LXXXII. La rougeur remarquable de ces membranes ; l'analogie de la respiration , où (1) Les trois questions que Bichat va traiter ne seraient plus agitées aujourd'hui; la coloration du sang à travers les membranes est un phénomène physico-chimique qui peut avoir lieu partout, plus ou moins complètement, suivant l'épaisseur et la porosité des membranes. L'exhalation se voit aussi partout où il y a circulation; et quant à l'origine des absorbans et à la faculté d'absorption, on n'en peut douter, puisque les membranes muqueuses offrent des veines et des vaisseaux lymphatiques. 'jG MEMBRANES le sang se colore à travers la surface muqueuse des bronches; l'expérience connue d'une vessie pleine de sang , et plongée dans l'oxygène , où le fluide se colore aussi , ont fait penser que le sang n'étant séparé de l'air atmosphérique que par une mince pellicule sur certaines sur- faces muqueuses, comme sur la pituitaire, sur la palatine, sur le gland, etc., y prenoit aussi une couleur plus rouge, soit en s'y débar- rassant d'une portion de gax acide carbonique; soit en s'y combinant avec l'oxygène de l'air, et que ces membranes remplissoient ainsi des fonctions accessoires à celles des poumons. Les expériences de Jurine sur l'organe cuta- né, expériences adoptées par plusieurs phy- siciens célèbres, semblent ajouter encore à la réalité de ce soupçon. LXXX1II. Voici l'expérience que j'ai tentée pour m'assurer de ce fait. J'ai retiré par une plaie faite au bas- ventre une portion d'intes- tin que j'ai liée dans un point; je l'ai réduite ensuite , en gardant au-dehors une anse , qui a été ouverte et par où j'ai introduit de l'air atmosphérique , qui a rempli toute la por- tion située en deçà de la ligature. J'ai lié en- suite l'intestin au-dessous de l'ouverture , elle tout a été réduit. Au bout d'une heure . l'ani- MUQUEUSES. 77 mal ayant été ouvert , j'ai comparé le sang des veines mésentériqnes qui naissoient de la portion d'intestin distendue par l'air, avec le sang des autres veines mésentériques tirant leur origine du reste du conduit. Aucune diffé- rence de couleur ne s'est manifestée; la sur- face interne de la portion d'intestin distendue n'était pas d'un rouge plus brillant. J'ai cru obtenir un effet plus marqué en répétant avec l'oxygène la même expérience sur un autre animal ; mais je n'ai aperçu non plus aucune variété dans la coloration du sang. Comme sur les membranes muqueuses, qui sont ordinai- rement en contact avec l'air, ce fluide se re- nouvelle sans cesse ,- est agi|£ d'un perpétuel mouvement, et que dans l'expérience précé- dente il étoit resté stagnant, j'ai essayé de produire le même effet dans les intestins. J'ai fait deux ouvertures à l'abdomen , tiré par chacune une portion de tube intestinal , ou- vert ces deux portions , adapté à l'une le tube d'une vessie pleine d'oxygène, à l'autre celui d'une vessie vide; j'ai comprimé ensuite la vessie pleine, de manière à faire passer l'oxy- gène dans l'autre, en traversant l'anse d'intes- tin restée dans le bas-ventre, afin que la cha- leur y entretînt la circulation. L'oxygène a été 78 MEMBRANES ainsi plusieurs fois renvoyé de Tune à l'autre vessie, en formant un courant dans l'intes- tin; ce qui, vu sa contractilité , est plus difficile qu'il ne le semble d'abord. Le bas-ventre ayant été ouvert ensuite , je n'ai trouvé aucune diffé- rence entre le sang veineux revenant de cette portion d'intestin , et celui qui s'écouloit des autres. La position superficielle des veines mé- sentériques que recouvre seulement une lame mince et transparente du péritoine; leur volu- me, pour peu que l'animal soit gros, rendent très-faciles ces sortes de comparaisons. LXXX1V. Je sens qu'on ne peut conclure de ce qui arrive aux intestins à ce qui survient dans la membrane pituitaire, dans la palatine, etc., parce que, quoique analogue , l'organisa- tion peut être différente. On ne peut ici, comme aux intestins, examiner le sang veineux reve- nant de la partie; mais, i° si l'on considère que dans les animaux qui ont respiré pendant quelque temps l'oxygène , on ne voit point que la membrane palatine pituitaire soit plus rouge; 2° si l'on réfléchit que la lividité des diverses parties de cette membrane dans ceux asphyxiés par le gaz acide carbonique dépend, non du contact immédiat de ce gaz sur la membrane, mais du reflux vers les extrémités du sang vei- MUQUEUSES. -9 neux, qui ne peut traverser le cœur, comme l'a démontré Godwin pour la submersion , et comme il arrive dans tous les cas où le sang a éprouvé avant la mort de grandes difficultés à traverser le poumon; 5° si l'on remarque enfin que dans ces circonstances , le contact de l'air ne change point . après la mort , la li- vidité que donne le sang veineux aux membra- nes muqueuses, quoique la peau soit alors bien plus facilement perméable à toute espèce de fluide aériforme, on verra qu'il faut au moins suspendre son jugement sur la colo- ration du sang à travers les membranes mu- queuses , jusqu'à ce que des observations ultérieures aient décidé la question. LXXXV. Voici une autre expérience qui peut jeter encore quelque jour sur ce point. J'ai gonflé la cavité péritonéale de divers cochons d'Inde avec du gaz acide carboni- que, de l'hydrogène, de loxygène, et avec de l'air atmosphérique , pour voir si j'obtien- drois à travers une membrane séreuse ce à quoi je n'avois pu réussir dans une muqueu- se : je n'ai, à la suite de ces expériences, trouvé aucune différence dans la couleur du sang du système abdominal; il étoit le môme que dans un cochou d'Inde ordinaire , que 8<> MEMBRANP.S je luois toujours pour la comparaison (1). LXXXVI. Je crois cependant avoir remar- qué plusieurs fois, soit sur des grenouilles, soit sur des animaux à sang rouge et chaud, tels que des chats et des cochons d'Inde, que l'infiltration de l'oxygène dans le titfsu cel- lulaire donne, au bout d'un certain temps, une couleur beaucoup plus vive au sang que celle que présente ce fluide dans les emphy- sèmes artificiels, produits par les gaz acide, carbonique, hydrogène, et par l'air atmos- phérique; circonstances dans lesquelles la rou- geur du sang ne diffère guère de celle qui est naturelle. Mais , dans d'autres cas , l'oxy- gène n'a eu aucune influence sur la colora- tion du sang; en sorte que, malgré que beau- coup d'expériences aient été répétées sur ce point, je ne puis indiquer aucun résultat gé- néral. Il paroît que les forces toniques du tissu cellulaire et des parois des vaisseaux qui (1) Le phénomène que n'a pas pu voir Bicliat est cependant des plus apparens, chaque fois qu'on met à découvert une anse intestinale et qu'on la met en .contact avec du gaz oxygène, ou simplement avec l'air atmosphérique; quelques instans suffisent pour qu'il soit des plus ëvidens. MUQUEUSES. 8l rampent çà et là dans ce tissa reçoivent une influence très-variée du contact des gaz, et que, selon la nature de cette influence, les fibres, se resserrant, se crispant plus ou moins, rendent ces parties plus ou moins perméables, soit aux fluides aériformes qui tendent à s'é- chapper du sang pour s'unir avec celui de l'emphysème, soit à ce dernier fluide, s'il tend à se combiner avec le sang : ce qui déter- mine sans doute les variétés que j'ai observées. LXXXVII. Se fait-il une exhalation sur les surfaces muqueuses? L'analogie de la peau sembleroit l'indiquer, car il paroît bien prouvé que la sueur n'est point une transsudation par les pores inorganiques de la surface cutanée , mais bien une véritable transmission par des vaisseaux d'une nature particulière et continus au système artériel. LXXXVI1I. 11 paroît d'abord que la per- spiration pulmonaire qui s'opère sur la surface muqueuse des bronches, qui a tant de rapport avec celle de la peau , qui augmente et dimi- nue suivant que celle-ci diminue ou augmente, et dont la matière est vraisemblablement de la même nature; il paroît, dis-je, que la per- spiralion pulmonaire se fait , au moins en partie, par le système des vaisseaux exha- 6 H 2 MEMBP.ANES lans (1), et que si la combinaison de l'oxygène de l'air avec l'hydrogène da sang concourt à la produire pendant l'acte de la respiration , ce n'est qu'en très-petite quantité et pour la portion purement aqueuse ; il faut au reste observer, à cet égard, que la dissolution du fluide muqueux qui lubrifie les bronches dans l'air sans cesse inspiré et expiré , fournit une portion considérable de cette vapeur insensi- ble en été, mais remarquable en hiver, qui s'élève du poumon. LXXX1X. Le suc intestinal , que Haller a spécialement considéré , mais qui paroît être lui, à la plèvre, au péricarde et à toutes les membranes analogues. CX. Si telle est la marche de la nature . i° pourquoi , quel que soit l'âge auquel on examine le fœtus, trouve-t-on le péritoine et les membranes séreuses tout aussi développés que leurs organes correspondans? 2°. Comment se forment les replis nombreux de ces mem- branes, tels que le mésentère, 1 epiploon , etc. ? 5°. Pourquoi est-il des parties où elles n'existent pas . quoique ces parties soient ex- posées à un frottement égal à celui des parties où on les rencontre? Pourquoi, par exemple, la vessie en est -elle dépourvue sur les côtés, tandis que sa partie supérieure eu est tapissée? 'l°. Pourquoi ne se forme-t-il pas aussi des surfaces séreuses autour des gros vaisseaux du bras, de la cuisse, etc., qui impriment aux organes voisins un mouvement manifeste ? 5°. Pourquoi l'épaisseur des membranes sé- reuses n'augmente-t-elle pas là oùle mouvement est le plus fort, et ne diminue-t-elle pas là où il est le plus foible? Pourquoi, par exemple, l'épaisseur de la tunique vaginale égale-l-elle celle du péricarde? 6°. Comment, au-dedans. le frottement peut-il produire un corps orga- nisé, tandis qu'au -dehors il désorganise con- q6 membranes stamment l'épiderme ? Comment allier la tex- ture toute vasculaire-lymphatique des mem- branes séreuses avec la pression qui les produit? CXI.' L'impossibilité de résoudre ces nom- breuses questions prouve que ce n'est point à une pression mécanique qu'il faut attribuer et la formation des membranes séreuses , et le poli de leur surface ; que leur mode d'origine est le même que celui des autres organes ; qu'ellescommencentetsedéveloppentaveceux; que ce poli est un résultat manifeste de leur organisation , comme les villosités de la surface des membranes muqueuses dépendent de la texture de ces mêmes membranes. Que diroit- on d'un système où ces villosités seroient at- tribuées à la pression des aliments sur l'estomac, de l'urine sur la vessie, de l'air sur la pitui- taire, etc. , etc. ? CXII. Toute membrane séreuse est humide, à sa surface interne, d'un fluide presque iden- tique à la sérosité du sang, dans le premier genre de ces membranes , telles que la plèvre, le péritoine, etc., d'une nature analogue, mais un peu plus composée pour le second genre , qui comprend la synoviale des articulations, des gaines tendineuses, etc. Les orifices exha- SÉREUSES. Cp lants le versent sans cesse , et sans cesse il est repris par les absorbants. Sa quantité varie : simple rosée dans l'état naturel , il s'exhale en vapeurs lorsque les surfaces séreuses , mises à découvert, permettent à l'air de le dissoudre. 11 est plus abondant dans les cadavres , parce que, d'une part, la transsudation qu'empê- choient les forces toniques s'opère facilement alors par la chut* de ces forces, et remplace l'exhalation vitale, en transmettant mécani- quement, par leur pesanteur, les fluides des organes environnants aux diverses cavités sé- reuses; parce que, d'une autre part, cette même chute des forces toniques s'oppose à toute espèce d'absorption : de là la stase , l'ac- cumulation de ce fluide. On sait jusqu'à quel point augmente sa quantité dans les diverses hydropisies, notamment dans celle du bas- ventre. CXIII. Cette quantité ne varie-t-elle pas sui- vant les divers états des organes qu'enveloppent les membranes séreuses ? On a dit , il y a long-temps, que la synovie s'exhaloit en plus grande abondance dans le mouvement des ar- ticulations que dans leur état de repos. Je n'ai sur ce point aucune donnée fondée sur l'expérience ; mais je puis assurer avoir plu- 0,8 MEMBRANES sieurs fois observé sur les animaux vivants que l'exhalation de la surface séreuse du bas-ventre n'augmente point pendant la digestion, ou du moins que si elle est plus grande, l'absorption devient plus active , et qu'ainsi la surface du péritoine n'est pas plus humide que dans un autre temps. J'ai ouvert la poitrine de plu- sieurs petits cochons d'Inde , après les avoir auparavant fait courir long-temps dans une chambre pour accélérer leur respiration, et je n'ai point remarqué non plus une humidité plus grande sur la plèvre. CX1V. Quelle est la nature du fluide des cavités séreuses? Dans l'état pathologique, dans les diverses hydropisies . sa nature albu- mineuse est mise hors de doute par l'action du feu, de l'alcohol et des acides. Il est difficile de l'analyser dans l'état sain. Cependant Hewsson en ayant ramassé une cuillerée sur de grands animaux , a trouvé que sa composition étoit la même que celle du fluide circulant dans le système lymphatique, que celle de la sé- rosité du sang, c'est-à dire aussi albumineuse. Les essais de cet auteur , dont tout paroît confirmer les résultats , ont cependant besoin d'être encore répétés. CXV. Quant à l'humeur des surfaces ar- SEREUSES. 99 ticulaires et des gaines tendineuses, il paroît que , très-analogue à celle des cavités , elle en diffère cependant par la nature de l'albumine qu'elle contient. Voyez , à ce sujet , l'analyse qui en a été présentée dans les Annales de chimie. CXVÏ. Le principal usage de ce fluide, en lubrifiant les surfaces , est d'empêcher les ad- hérences, inévitable effet, sans lui, du frotte- ment qu'elles éprouvent. Ce frottement est continuel partout où se trouvent ces mem- branes. Comment les auteurs mécaniciens du siècle passé, qui dans l'économie organique ont tant attribué aux lois physiques , n'ont-ils pas imaginé de trouver dans ce frottement une des causes de la propagation de la chaleur animale? Comment ce frottement n'a-t-il pas été ajouté par eux à celui de la circulation? CXVII. La surface externe des membranes séreuses adhère presque partout aux organes voisins ; il est rare en effet de voir ces mem- branes isolées des deux côtés. L'arachnoïde £ la base du crâne, et quelques autres exemples, font exception. Cette adhérence des membranes séreuses à leurs organes respectifs est toute différente de celle des membranes fibreuses, Dans celle-ci, le passage des vaisseaux unit. l-OO MEMBRANES tellement les deux parties, que leur organisa- tion semble commune, et que l'une étant en- levée, l'autre meurt presque toujours, comme on le voit dans le périoste par rapport aux os, etc. Au éontraire * toute membrane séreuse est presque étrangère à l'organe qu'elle en- toure; son organisation n'est point liée à la sienne. CXVI1I. J'examinerai plus bas les preuves de la première assertion, relative aux mem- branes fibreuses. Voici celles de la seconde par rapport aux séreuses. i°. On voit très-souvent ces membranes abandonner et recouvrir tour à tour leurs organes respectifs. Ainsi les liga- ments larges, très-éloignés de la matrice dans l'état ordinaire , lui servent de membrane sé- reuse pendant la grossesse; l'intestin qui se distend emprunte du mésentère une enveloppe, qui le quitte lorsqu'il se contracte; l'épiploon est tour-à-tour, comme l'a très-bien observé M. Chaussier, membrane flottante dans le bas-ventre, et tunique de l'estomac. Souvent l'enveloppe péritonéale delà vessie l'abandonne presque en totalité ; le sac herniaire de ces énormes déplacements des viscères gastriques n'a-t-il pas primitivement servi à tapisser les parois du bas -ventre, etc.? Or, il est évi- SEREUSES. 10 1 dent que, puisque les divers organes peuvent exister isolément de leurs membranes séreuses, il n'y a nulle connexion entre leur organisation réciproque. 2°. C'est toujours un tissu lâche, facile à se distendre en tous sens , qui sert de moyen d'union, et jamais un système vascu- laire sanguin , comme dans la plupart des autres adhérences. 5°. L'affection d'un organe n'est point une conséquence nécessaire de celle de sa membrane séreuse, et réciproquement; souvent l'organe s'affecte sans que la mem- brane devienne malade. Par exemple, dans l'opération de l'hydrocèle. le testicule reste presque constamment intact au milieu de l'in- flammation de sa tunique vaginale : l'inflam- mation de la membrane muqueuse des in- testins n'est point une suite de celle de leur enveloppe péritonéale ; et réciproquement , dans les diverses affections calarrhales aiguës des organes à membrane muqueuse au-dedans et séreuse au-dehors , on ne voit point celle-ci s'enflammer, etc. En un mot, les affections des membranes muqueuses sont partout très- distinctes de celles des séreuses , quoique le plus communément toutes deux concourent à la formation du même organe. Il est évident qu'une ligne de démarcation si réelle dans les 102 MEMBRANES affections en suppose inévitablement une dans l'organisation ; la vie des membranes séreuses est donc entièrement isolée de celle de leurs organes correspondants. CX1X. Cependant il est des cas où ces sortes de membranes cessent de présenter cette laxité d'adhérence . et où elles deviennent tellement unies aux organes qu'elles tapissent, que le scalpel le plus fin ne sauroit souvent les sé- parer. Voyez la tunique vaginale sur l'albu- ginée, les deux feuillets fibreux et séreux du péricarde, la synoviale sur les cartilages, l'a- rachnoïde sur la dure-mère et autres mem- branes dont il sera question à l'article des séro-fibreuses , etc. Telle est la connexion de ces diverses surfaces, que plusieurs ont été prises jusqu'ici pour une membrane unique. Il n'y a cependant pas plus d'identité d'or- ganisation que là où les membranes séreuses sont plus foiblement attachées à leurs organes respectifs, comme on le voit au péritoine, à la plèvre, etc. § IV. Organisation intérieure, des membranes séreuses. CXX. Une couleur blanchâtre, reluisante, moins éclatante que celle des aponévroses ; une SEREUSES. 100 épaisseur variable , sensible sur le foie , le cœur, les intestins, etc., à peine appréciable dans l'arachnoïde, l'épiploon, etc; une trans- parence remarquable toutes les fois qu'on dé- colle ces membranes dans une étendue un peu considérable, ou qu'on les examine là où elles sont libres par leurs deux faces, comme à l'épiploon : voilà leurs premiers caractères de structure. CXXI. Toutes n'ont qu'un feuillet unique dont il est possible , aux endroits où il est épais , d'enlever des couches cellulaires», mais qu'on ne peut jamais nettement diviser en deux ou trois portions , caractère essentielle- ment distinctif de ceux des membranes mu- queuses. L'action d'un vésicatoire appliqué sur leur surface externe préliminairement mise à nu. par exemple, sur une portion d'intestin fixée au-dchors dans un animal vivant, n'y fait point, comme à la peau, soulever une pellicule sous laquelle s'amasse la sérosité. J'ai plusieurs fois fait cet essai. Quelle est la com- position immédiate de ce feuillet unique des membranes séreuses? CXX1I. Tout organe est en général un as- semblage, i° de tissu cellulaire, qui en est comme le moule , le canevas ; 2° d'une ma- ï O/4 MK.UBRANES tière particulière qui se dépose dans ce canevas, par exemple , de gélatine pour les cartilages , de gélatine et de phosphate calcaire pour les os, de fibrine pour les muscles, etc. ; 5° de vais- seaux apportant et rapportant cette matière de la nutrition ; 4° des nerfs. Ce qui rapproche les organes , ce sont donc l'organe cellulaire , les vaisseaux et les nerfs ; ce qui les distingue , c'est leur matière nutritive. Un os deviendroit muscle , si , sans rien changer à sa texture , la nature lui imprimoit la faculté de sécréter la fibrine et de s'en encroûter, au lieu de séparer et s'encroûter de phosphate calcaire. Or, les membranes séreuses ne paroissent point avoir à elles de matière nutritive distincte; elles ne sont point, sous ce rapport, un organe sui generis ; elles ne sont tissues que du moule, du canevas des autres, et non pénétrées d'une matière qui les caractérise. Toutes formées de tissu cellulaire, elles ne diffèrent de ce tissu dans sa forme commune que par un degré de con- densation, que par le rapprochement et l'union des cellules, qui se trouvent écartées dans l'état ordinaire. CXX1II. Voici sur quelles preuves repose la réalité de cette texture toute cellulaire , que j'attribue aux membranes séreuses : 1°. Il y a SÉREUSES. 105 identité de nature là où il se trouve identité de fonctions et d'affections. Or, il est évident que les usages de ces membranes et du tissu cellulaire relativement à l'absorption et à l'ex- halatioD continuelles de la lymphe sont abso- lument les mêmes , et que les phénomènes des diverses hydropisies leur sont absolument communs, avec la seule différence de l'épan- chement dans les unes et de l'infiltration dans l'autre. L'insufflation de l'air dans le tissu sous-jacent à ces membranes finit presque par les ramener à un état cellulaire, lorsqu'elle réussit et qu'on la pousse un peu loin. 3°. La macération , comme l'a très-bien remarqué Haller , produit toujours le même effet , mais d'une manière plus sensible encore. 4°- Les divers kystes, les hydatides, etc., dont l'aspect, la texture, la nature même, sont absolument les mêmes que dans les membranes séreuses , comme nous le verrons, naissent toujours au milieu du tissu cellulaire, croissent à ses dé- pens , et en soift tous formés. 5°. Aucune fibre ne se rencontre dans les membranes séreu- ses, caractère distinctif des autres organes, et analogue à celui du tissu cellulaire. CXXIV. D'après cette texture des mem- branes séreuses , il est évident que le système 106 MEMBRANES lymphatique entre essentiellement dans leur formation , qu'elles ne sont même vraisembla- blement qu'un entrelacement d'exhalants et d'absorbants ; car on sait que l'organe cellu- laire en est un assemblage; mais cette asser- tion , que dicte l'analogie . est appuyée encore sur des preuves directes. i°. Le fluide des hy- dropisies des diverses cavités varie en densité et en couleur : or, Mascagni a toujours observé que les lymphatiques de leur voisinage cônte- noient un fluide exactement analogue. 2°. Deux cadavres ayant un épanchement sanguin dans la poitrine ont offert au même auteur les absorbants du poumon gorgés de sang. 5°. Dans un homme devenu emphysémateux à la suite d'un empoisonnement, les vaisseaux étoient distendus par l'air. 4°. Injectés dans le bas-ven- tre ou dans la poitrine, des fluides colorés se retrouvent bientôt après , dit-on , dans les lymphatiques voisins avec la même couleur. J'ai répété souvent cette expérience ; le fluide injecté a été bientôt absorba, mais non la matière qui le coloroit, en sorte que cette matière, plus condensée après l'absorption, teignoit la surface séreuse, les lymphatiques étant transparents comme à l'ordinaire. Il faut choisir en général l'abdomen pour ces sortes SEREUSES. 10; d'expériences, parce que, très à nu sur le foie , les absorbants peuvent y être plus faci- lement examinés. Cette faculté absorbante se conserve quelque temps après la mort ; mais on doit avoir soin, pour en obtenir alors plus sûrement l'effet, de conserver l'animal, s'il est à sang chaud, dans un bain à peu près à sa température: j'ai eu plusieurs fois l'occa- sion de m'assurer de cette vérité, et d'obser- ver avec Cruikshanck que ce que dit Mascagni sur l'absorption des cadavres humains, quinze, trente, quarante-huit heures même après la mort^est au moins extrêmement exagéré *. * N'est ce point a la permanence de cette faculté absorbante après la mort, qu'il faut en partie attri- buer la vacuité du système artériel qu'on observe alors? Souvent, en effet, les artères contiennent encore une assez grande quantité de la portion fi- breuse du sang, ramassée en caillots, mais toujours la sérosité a disparu. Or, si, comme on l'a dit, la vacuité de ce système étoit entièrement due à un dernier effort pour pousser le sang dans le système veineux qui ne fait point de résistance 1 tandis que le sang de ce dernier système en trouve une très- grande dans la plénitude déterminée dans l'oreillette droite, par la non-action du poumon; si, dis-je, la vacuité des artères étoit toute due à une semblable lo8 ' MEMBRANES 5°. Voici une expérience qui me sert, chaque année , à démontrer les absorbants : je fais macérer pendant cinq à six heures le cœur d'un bœuf dans l'eau ; au bout de ce temps, la membrane séreuse de cet organe , qui ne laissoit apercevoir que difficilement les vais- seaux , en paroît couverte. 6°. Lorsque les membranes séreuses s'enflamment, on voit les lymphatiques sous-jacents distendus, comme cause, il semble que cette cause devroit s'exercer sur la portion fibreuse comme sur la sérosité; que, dans ce dernier effort, le sang devroit passer dans son état naturel, et tout entier dans le système vei- neux. Lors donc qu'on trouve des caillots dans le sy tème artériel , il est probable que les artères n'ayant point eu la force d'expulser tout le sang , celui-ci s'est décomposé ; que sa portion séreuse a été reprise par les absorbants qui s'ouvrent à leur surface interne, et que la fibreuse est restée , comme on le voit d'ail- leurs dans la résolution de la plupart des ecchymoses. î\ 'est-ce point là aussi ce qui arrive dans le cœur, lorsqu'il nous présente, après la mort , beaucoup de caillots fibreux et point de sérosité? Au reste, toutes ces idées sont des conjectures que d'ultérieures re- cherches doivent confirmer (1). (1) Ces phénomènes que Bichat cherche à expliquer, sont de pars résultats d'imbibitioD. SÉREUSES. 109 elles, par les globules rouges du sang, etc., etc. (1) CXXY. Il paroît donc démontré, i° que les absorbants s'ouvrent par une infinité d'orifices sur les membranes sérquses ; 20 que leurs ra- cines, mille fois entrelacées entre elles et avec les orifices des exhalants, concourent spéciale- ment à former leur tissu; 5° que la difficulté de distinguer les pores absorbants et exhalants sur leurs surfaces n'est point une raison d'en nier l'existence , cette difficulté tenant , et à leur extrême ténuité . et à la direction oblique avec laquelle ils s'ouvrent entre les lames de ces membranes: aussi l'obliquité de l'insertion du conduit de Warthon, du cholédoque même, en rend-elle l'inspection très-difficile, quoique ces conduits soient infiniment plus considéra- bles ; 4° que, d'après cette structure, il faut (1) Tout ce qui est inexact et même erroné dans cet article, tient à ce qu'à Pépoque où écrivait l'au- teur, toute absorption ou exhalation était attribuée à l'action vitale de prétendus vaisseaux nommés exha- lans ou absorbans ; on ignorait alors que ces phénomè- nes sont en très-grande partie physiques, et tiennent à la propriété d'imbibition , ainsi que je l'ai démontré par un grand nombre d'expériences. 1 ÎO MKMr.P.ANES regarder les membranes séreuses toujours dis- posées , ainsi que nous l'avons vu , en forme de sac sans ouverture , comme de grands ré- servoirs intermédiaires aux systèmes exhalant et absorbant, où la lymphe, en sortant de l'un, séjourne quelque temps avant d'entrer dans l'autre, où elle subit, sans doute, diverses préparations que nous ne connoîtrons jamais , parce qu'il faudroit l'analyser comparative- ment dans ces deux ordres de vaisseaux, ce qui est presque impossible , au moins pour le premier, et où enfin elle sert à divers usages relatifs aux organes autour desquels elle for- me une atmosphère humide. CXXVi. Entre-t-il des vaisseaux sanguins dans la structure des membranes séreuses? Ces vaisseaux sont très - nombreux autour d'elles, comme on le voit au péritoine, au pé- ricarde , à la plèvre , etc. ; ils rampent sur leur face externe, s'y ramifient: mais j'ai toujours douté qu'ils fissent réellement partie de. leur tissu , et même je suis presque convaincu du contraire: les considérations suivantes appuient mon opinion. i°. Dans les cas où ces vaisseaux sont injectés, on les enlève facilement avec le scalpel de la face externe de ces membranes, sans intéresser leur continuité ; ce qu'il est SEREUSES. 1 1 1 impossible de faire jamais dans les fibreuses ni les muqueuses. 2°. En examinant ces mem- branes là où elles sont libres par l'une et l'autre de leurs faces, aucun vaisseau sanguin n'y est sensible : l'arachnoïde à la base du crâne en fournit un exemple. 5°. Les vaisseaux changent fréquemment de rapport avec ces membranes. J'ai prouvé dans la note des pages 5o et 5^, que lorsque l'épiploon s'applique sur l'estomac dans sa plénitude, les vaisseaux qu'il contient entre ses lames ne remontent point avec lui sur ce viscère , à cause de la grande coronaire stomachique qui s'y oppose. Lorsqu'on injecte des cadavres affectés de hernies volumineuses . on ne voit point les vaisseaux rampants dans l'état ordinaire, sur la surface du péritoine qui correspond à l'anneau , se prolonger inférieu- rement sur le sac herniaire. Il ne paroît pas que les vaisseaux que l'on observe dans les ligaments larges de la matrice les suivent dans le déplacement considérable qu'ils éprouvent lors de la grossesse , etc. CXXVII. Je crois dbnc assez probable que les membranes séreuses n'ont point à elles des vaisseaux sanguins ; que ce qu'on appelle ar- tères du péritoine, de la plèvre, etc., ne sont I 12 MEMBRANES que des troncs rampants sur leur surface ex- terne, susceptibles de l'abandonner lorsqu'elles se déplacent, leur étant pour ainsi dire étran- gers, n'entrant point immédiatement dans leur structure , à laquelle les systèmes absor- bant et exhalant concourent presque seuls. Sans doute il existe des communications entre le système artériel et les membranes séreuses, au' moyen des exhalants; mais rien de précis n'est encore connu sur la nature , la disposi- tion, et même jusqu'à un certain point les fonctions de ces vaisseaux. § V. Forces vitales des membranes séreuses. CXXVIII. Il y a une très-grande différence entre la sensibilité des membranes précédem- ment examinées et celles des membranes sé- reuses; celles-ci, profondément situées , con- stamment hors du contact de tout corps étran- ger , ne jouissent que d'un sentiment obscur ; elles sont peu susceptibles de causer une im- pression douloureuse par leur irritation. Voilà pourquoi, lorsque dans un animal vivant on les met à découvert, et qu'on les irrite avec des agents chimiques ou physiques , l'animal SEREUSES. 1 1 3 reste tranquille (i); mais l'action de ces ex- citants, qui, flans l'état d'intégrité de ces mem- branes, n'est d'abord pas sensible, devient bientôt très-pénible, très-douloureuse même, pour peu qu'elles restent exposées à l'air. Ce phénomène n'y est point, au reste, exclusi- vement observable. Tous les organes blancs , les tendons, les ligaments, les cartilages, en un mot , toutes les parties que Haller a ap- pelées insensibles , ne font presque éprouver aucune sensation à l'animal par le contact des corps extérieurs, lorsque ce contact s'exerce dans leur état naturel, quand elles ont ré- cemment été mises à découvert ; mais si le séjour à l'air, ou d'autres causes, les irritent, les euflamment, elles deviennent d'une extrême sensibilité. (i) Il est assez fréquent de rencontrer des ani- maux, et même des hommes , chez qui les surfaces séreuses sont d'une exquise sensibilité; chez d'autres, au contraire, on les jugerait insensibles; car aucun contact, piqûre, etc., n'excite de devient sur les aponévroses d'un FIBREUSES. l4> blanc resplendissant. Toutes, lorsqu'elles sont desséchées, sont, comme les tendons, exposées aussi à la dessiccation, jaunâtres, demi-trans- parentes, élastiques; leur épaisseur est moyenne entre celle des membranes séreuses et celle des membranes muqueuses. CLXVIII. Ordinairement formées d'un seul feuillet, elles en présentent quelquefois deux, comme à la dure -mère; mais ils ne sont dis- tincts ici que dans quelques parties, à l'en- droit des sinus, par exemple : partout ailleurs, leur séparation est presque impossible. On dit communément que le feuillet interne forme, en se reployant , la faux , la tente du cervelet, etc. On conçoit, mais on ne démontre pas cette disposition. Je compareces prolongements à ceux qu'envoient dans l'interstice des muscles les aponévroses qui enveloppent les membres, avec la différence, i° que les premiers sont libres de tous côtés , et que. les autres , au contraire, fournissent de nombreux points d'attache ; 2° qu'a l'origine des uns , il y a un écartement de fibres pour les sinus, tandis qu'à celle des autres rien de semblable ne s'observe. CLXIX. Toutes ces membranes ont pour base commune une fibre d'une nature par- i/^2 MEMBRANES ticulière, dure, élastique, insensible, peu con- tractile , que la macération ne résout point , comme Haller l'a dit, en tissu cellulaire. Cette fibre, très-abondamment répandue dans l'é- conomie animale, est aussi le principe essen- tiel de la structure des tendons et des liga- ments, qui ne diffèrent des membranes fi- breuses, qu'en ce que cette fibre y est ramassée en faisceaux toujours parallèlement disposés, quelquefois entre-croisés ; au lieu que dans ces membranes elle s'entrelace en réseau mince et à large surface. Aussi la fibre nerveuse est- elle étendue en membrane sur la rétine, ra- massée en paquets allongés dans les nerfs ; aussi la fibre musculeuse forme-t-elle alterna- tivement et des faisceaux charnus dans les muscles locomoteurs, et des couches mem- braneuses sur l'estomac, la vessie, etc. La na- ture organique reste la même dans ces variétés de conformation. CLXX. C'est sans doute à cause de l'identi- té de nature entre la fibre des tendons, des li- gaments et celle des membranes fibreuses, que l'on voit toujours ces organes s'entrelacer et se continuer. On sait, i°que partout les ligaments et le périoste se réunissent ensemble; 2° que presque tous les tendons naissent de cette mcm- FIBREUSES. l45 brane ou s'y terminent; 5° que ces cordons blanchâtres et fibreux prennent encore leur in- sertion sur la sclérotique, sur l'enveloppe des corps caverneux; 4° que quelques-uns, comme ceux des muscles de l'œil, semblent se confon- dre avec la dure-mère. Cette continuité des ten- dons ne s'observe jamais sur aucun autre or- gane, et spécialement on ne la voit point sur les membranes séreuses et muqueuses. CLXXI. Si l'on rapproche maintenant cette observation de celle qui nous a montré pres- que toutes les membranes fibreuses continues les unes aux autres, on verra, i° que l'étendue de l'organe fibreux, considéré d'une manière générale , est bien plus grande que d'abord nous ne l'avions annoncé, puisqu'il faut y ajou- ter encore les ligaments et les tendons ; 2° que cet organe se tient partout, s'enchaîne, se lie, et forme un corps continu, dont le périoste est comme le centre, l'origine et la terminaison. CLXXII. Cette fibre fondamentale, base es- sentielle des membranes qui nous occupent, n'est pas disposée dans toutes de la même ma- nière. La sclérotique, l'albuginée, la dure-mère, etc., nous présentent un entre -croisement, qui, varié selon mille directions, paroît abso- lument inextricable: cet entre-croisement de- l44 MEMBRANES vient moins compliqué dans le périoste, ne se fait qu'en deux ou trois sens dans les aponé- vroses et les capsules fibreuses; il est nul dans les ligaments formés, ainsi qu'il a été dit, de fibres parallèles. CLXXIII. J'observe qu'il n'y a dans l'éco- nomie animale que trois fibres bien distinctes, i° celle qui nous occupe; 2° la nerveuse; 3° la musculeuse ; l'organe cellulaire n'étant point fibreux. Chacune, dans ses organes respectifs; savoir, les tendons, les muscles et les nerfs, est très-distincte , très-manifeste, parce qu'elle y existe isolément, et forme ces organes presque en entier; mais la nature ne peut-elle point les combiner deux à deux, trois à trois, etc.? N'est- ce point à cette combinaison qu'il faut attri- buer les propriétés de certains organes qui par- ticipent également à celles de ces trois fibres primordiales? On conçoit que, par cette com- binaison, je n'entends pas l'entrelacement or- dinaire des muscles avec les nerfs apparents qui s'y distribuent, de ces mêmes muscles avec leurs tendons, etc. CLXXIV. Quel que soit l'état isolé ou com- biné de ces trois fibres, elles sont évidemment bien distinctes dans leur nature, et il est im- possible d'admettre l'opinion d'une foule d'à- FIBREUSES. l/p natomistes qui, observant que les compressions intérieures changent quelquefois les muscles en un corps blanchâtre, dense et serré, ont cru la fibre musculaire identique à celle des tendons et par conséquent des membranes fi- breuses. Dans les muscles, la même fibre est, selon eux, alternativement charnue et tendi- neuse. Comment admettre unité de nature là où il y a différence d'organisation extérieure et intérieure, de propriétés vitales, de fonctions et même d'affections? Or, le moindre parallèle établi entre le tendon et le muscle démontre ces différences, sur lesquelles je ne m'arrête pas. 11 y a certainement moins d'analogie entre le muscle et le tendon qui reçoit son insertion, qu'entre celui-ci et l'os, qui, à son tour, lui fournit une attache dans l'adulte. CLXXV. Quelle est la nature de cette fibre blanche, base commune des membranes qui nous occupent? On l'ignore, parce qu'on ne lui connoît pas des propriétés bien prononcées; qu'elle n'en a, pour ainsi dire, que de néga- tives de celles de la fibre musculaire, que caractérise la contractilité, et de celles de la fibre nerveuse, que distingue la sensibilité; on la voit presque toujours dans un état passif. Au reste, c'est à elle que tout l'organe fibreux 10 l/j6 MEMBRANES doit cette force, cette résistance qui lui sont propres, et qu'on ne retrouve qu'en un petit nombre d'autres organes. Elle établit entre ceux où elle existe , et la peau , les cartilages , les membranes séreuses, etc., une différence de structure essentielle; aussi la division ordinai- re des organes en blancs et en rouges est-elle manifestement défectueuse, en ce que, dans la classe des parties blanches, on confond avec les organes fibreux, et ceux que forme seule- ment le tissu cellulaire, et ceux qui, étant de texture différente, n'ont point cette fibre pour base. CLXXVI. Cette fibre n'est pas développée également dans tous les âges; plusieurs mem- branes fibreuses n'en présentent, dans le fœtus, presque aucune trace. En considérant le cen- tre phrénique, plusieurs aponévroses et la du- re-mère même , dans les premiers mois , on y trouve l'aspect des membranes séreuses et une texture toute cellulaire; ce n'est que peu à peu que les fibres se développent, et finissent enfin par envahir, si je puis me servir de cette ex- pression, toute la membrane. GLXXVII. Le système vasculaire des mem- branes fibreuses est très-prononcé ; il pénètre leur tissu, entre évidemment dans leur com- FiURliUSEs. \t\- position. Souvent on voit les vaisseaux s'y ra- mifier à l'infini, avant de pénétrer dans l'or- gane qu'elles recouvrent. Quelques auatomis- tes les ont considérées, d'après cela , comme propres à activer la circulation, à suppléer ainsi à la force du cœur, qui doit être ralentie à leur surface; mais leur peu de contractilité , leur adhérence sur les parties où on leur a attribué cet usage, semblent évidemment l'infirmer. CLXXV1II. Il paroît certain qu'il y a un rap- port remarquable, quoique peu connu, entre la circulation de ces membranes et celle de l'or- gane qu'elles recouvrent. Si l'on détruit le svs- tèuie médullaire, l'os se nécrose; la circulation y cesse au-dedans; tout son système vasculaire semble se reployer au -dehors sur le périoste, qui devient alors rouge, épais, très-sensible, et finit par s'ossifier. L'expérience inverse, celle par laquelle, eu détruisant le périoste sur une partie considérable de l'os, avec la précau- tion de laisser des troncs essentiels, on déve- loppe une circulation plus active sur le systè- me médullaire, qui devient aussi osseux; cette expérience a eu, dit-on, du succès, faite par divers anatomistes vivants: elle m'a toujours présenté d'extrêmes difficultés, et jamais de succès. l/|8 MESfBRÀtfES CLXXÏX. Les membranes fibreuses ont-elles des nerfs? Diaprés la dissection, on peut ré- pondre que non : d'après plusieurs phénomè- nes de leur sensibilité, on peut assurer que oui. Mais ces phénomènes sont-ils irrévocablement liés à la présence de ces cordons médullaires, tels au moins que nous les voyons dans les au- tres organes? § V. Forces vitales des membranes fibreuses. CLXXX. Haller a placé parmi les organes insensibles les membranes fibreuses , parce qu'irritées par divers agents chimiques et mé- caniques, elles ne font éprouver à l'animal au- cune sensation douloureuse; mais j'ai déjà fait remarquer que cette propriété, restreinte par ce grand homme dans des bornes trop'étroites. a voit deux degrés très-marqués: l'un, où l'or- gane semble être le terme de l'impression qu'il reçoit; l'autre, où il rapporte cette impression au cerveau. CLXXX1. La sensibilité n'est qu'au premier deçré dans les membranes fibreuses; les divers excitants déterminent sur elles, dans leur in- tégrité, un effet analogue à celui des fluides qui y abordent pour leur nutrition: elles sen- FIBREUSES. l49 lent le stimulus, mais ne transmettent point ce sentiment, ou du moins ne le transmettent que très-confusément. Je compare cet état à celui d'une région devenue paralytique: cer- tainement la sensibilité organique subsiste dans cette région, puisque les fluides y circulent, puisque les sécrétions s'y opèrent, etc.; mais la sensibilité de relation y est éteinte. Les mem- branes fibreuses sont naturellement ce que les téguments de cette région deviennent acciden- tellement. Remarquons , au reste , qu'ici , comme aux membranes fibreuses, l'inflamma- tion exalte tellement la sensibilité organique, qu'elle se transforme dans ce cas en celle de relation, comme on peut l'observer sur le pé- rioste resté à nu, sur la dure-mère, qui s'ex- folie après le trépan, etc. CLXXXIi. Quoique, d'après un grand nom- bre d'expériences sur les animaux vivants . la sensibilité de relation semble nulle dans les membranes fibreuses et dans les organes ana- logues qui forment partie du corps fibreux, considéré en général, il est cependant un mo- de d'excitation qui la développe d'une manière remarquable dans les ligaments, avec lesquels elles ont tant d'analogie de structure. En effet, mettez à découvert une articulation sur un f50 MEMBKANES chien, celle de la jambe, par exemple; dissé- quez avec soin les organes qui l'entourent; enlevez surtout exactement les nerfs, de maniè- re à ne laisser que les ligaments ; irritez ceux- ci avec un agent chimique ou mécanique: l'animal reste immobile, et ne donne aucun signe de douleur. Distendez après cela ces mêmes ligaments, en imprimant un mouve- ment de torsion à l'articulation : l'animal , à l'instant, se débat, s'agite, crie, etc. Coupez enfin ces ligaments de manière à laisser seule la membrane synoviale qui existe dans cette articulation , et tordez ensuite les deux os en sens contraire : cette torsion cesse d'ôtre dou- loureuse (1). CLXXXIII. Il résulte de cette expérience, que j'ai souvent répétée, que les ligaments, in- (1) Cette expérience, à laquelle Bichat attachait une grande importance , n'est pas exacte ; je la ré- pèle tous les ans dans mes cours. Jamais elle n'a réussi » c'est-à-dire que la torsion des ligament après la dissection de l'articulation et l'enlèvement des nerfs, ne produit aucune sensation appréciable à l'animal. Les applications ingénieuses des résultats de celte expérience ne sont donc nullement fondées. FIBREUSES. I 3 1 sensibles aux agents qui les coupent, les déchi- rent, les désorganisent, le sont beaucoup à ceux qui les distendent au-delà de leur degré naturel. Ils ont donc leur mode de sensibilité de relation, et ce mode est analogue à leurs fonctions.* En effet, écartés par leur position de toute excitation extérieure qui puisse agir sur eux chimiquement ou mécaniquement, ils n'ont pas besoin, comme la peau, exposée à cette sorte d'excitation, d'une sensibilité qui en transmette l'impression. Au contraire, très- sujets à être distendus, tiraillés, tordus dans les violents mouvements des membres, il étoit nécessaire qu'ils avertissent l'âme de ce genre d'irritation, dont l'excès auroit pu, sans cela. devenir funeste à l'articulation. Voilà comment la nature accommode la sensibilité de chaque organe aux excitations diverses qu'il peut éprouver, à celles surtout qui deviendroient dangereuses, si l'âme n'en étoit prévenue; cai cette force vitale est l'agent essentiel qui veille à la conservation de l'animal. Remarquons . d'après cet exemple , qu'on ne doit jamais pro- noncer sur l'insensibilité d'un organe , sans avoir épuisé sur lui tous les moyens d'irrita- tion. Or, comme le dit Grimaud, qui peut connoîlre tous ces moyens? Qui peut savoir l52 MEMBRANES tous ceux avec lesquels la sensibilité propre des diverses parties se trouve spécialement en rapport? CLXXX1V. C'est à ce mode de sensibilité des ligaments et des capsules fibreuses , qu'il faut attribuer principalement, i° les douleurs vives qui accompagnent la production des luxations ; 2° celles plus cruelles encore que l'on fait éprouver aux malades dans les exten- sions propres à les réduire, surtout lorsque, comme dans les anciennes luxations, on est obli- gé d'employer des forces considérables; 5° les intolérables souffrances du supplice usité au- trefois en certains pays, et qui consiste à arra- cher, en les tirant à quatre chevaux, les mem- bres du criminel. Dans tous ces cas, lorsque les extensions commencent, elles sont insuffi- santes pour porter leur influence sur la peau et les nerfs , toujours lâchement disposés au- tour de l'articulation. Les ligaments seuls sont tiraillés, et peuvent être le siège des douleurs; mais si les extensions augmentent, tous les or- ganes voisins de l'articulation concourent à les produire. CLXXXV. C'est, sans doute, à l'insensibili- té des membranes fibreuses pour un mode d'excitation, et à leur seusibilité pour un autre FIBREUSES. I 53 mode, qu'il faut encore rapporter les résultats contradictoires qu'ont offerts les expériences de Haller, de Zinn, de Zimmerman , de Wals- torf, etc. d'un côté, de Lecat, de Lorri, de Bene- feld, de Schlithing , etc. de l'autre côté, sur la membrane dure- mère (1). CLXXXVI. Les forces toniques des membra- nesfibreuses deviennent très-manifestes, Tdans l'érection de la verge, dont l'enveloppe se dis- tend alternativement et se resserre, non par son élasticité et par l'effort mécanique du sang. mais, comme l'a observé Barthez, par une force qui lui est propre, et qu'elle reçoit du princi- pe vital (2); 20 dans le retour de la sclérotique (1) Les résultats contradictoires de la sensibilité des fibreuses existent dans la' nature. J'ai souvent vu, par exemple, la dure-mère d'une sensibilité très- vive, particulièrement au voisinage des sinus, et qui contrastait avec l'insensibilité complète du ceçveau , dont la surface est tout-à-fait insensible, comme l'a établi Haller. (2) Il est au contraire hors de doute aujourd'hui que l'éreciion de la verge est un phénomène de cir- culation. La distension de la fibreuse dépend de l'effort du sang, et son retour sur elle-même, de sa propre élas- ticité. (\ oyez ma Physiologie, art. Érection, tom. II.) l5/J MEMBRANES sur elle-même, à la suite de la ponction à l'œil hydrophtalmique ; 5° dans les phénomènes analogues que présentent le testicule lorsque l'engorgement dont il «avoit été le siège se ré- sout, les capsules fibreuses lorsqu'on évacue la synovie dans les hydropisies articulaires, etc. Je ne parle point ici de la prétendue contrac- tilité attribuée par Baglivi à la dure-mère, des oscillations que Lacase y a supposées, et qui étoient nécessaires à son ingénieux système. CLXXXV1I. Les membranes fibreuses jouis- sent d'une extensibilité évidente pour la dure- mere dans l'hydrocéphale; pour le périoste, dans le gonflement des os; pour les fibres ligamen- teuses, dans la vacillation des symphyses pu- bienne et i^chio-sacrée; pour les aponévroses, dans les engorgements divers des membres, et en général pour toute cette classe de membra- nes , dans les diverses tuméfactions de leurs organes respectifs. Lorsque le sac qu'elles for- ment s'agrandit, ce n'est point , comme celui des membranes séreuses, par le développement de leurs replis, mais par une extension réelle, par un allongement de leur tissu; et, ce qui alors est remarquable, c'est qu'elles ne dimi- nuent point, qu'elles augmentent même d'épais- seur. Cette observation est facile à vérifier sur fiMïîuses. iiS5 l'albuginée d'un testicule sqûirrheux, sur la sclérotique d'un œil affecté d'hydropisie. etc.; on diroit que l'extension devient une cause d'irritation, qui détermine sur ces membranes une nutrition plus active. CLXXXV1II. Cette extensibilité des mem- branes fibreuses est soumise à une loi constan- te ; elle ne peut s'opérer que d'une manière lente, graduée, insensible. Lorsqu'il se déve- loppe tout -à-coup dans les parties sous-jacen- tes une tuméfaction considérable, elles ne peu- vent aussi subitement se distendre, et il sur- vient alors ces étranglements si communs dans la pratique de la chirurgie, et qui ne résultent que d'un défaut de proportion entre l'extensi- bilité de l'organe cellulaire et celle des mem- branes fibreuses, l'une étant plus prompte, plus facile que l'autre à être mise en jeu. § VI. Sympathies des membranes fibreuses. CLXXXIX. Les sympathies de la première classe, celles où, à l'occasion de 1 irritation d'une partie, la sensibilité se développe dans une autre, sont remarquables sur les mem- branes fibreuses. i° lorsque, dans les périoslo- ÊféS qui n'occupent qu'une petite surface, la l56 MEMBV.ANES totalité du périoste de l'os resté sain devient douloureuse; 'i° lorsque, dans certaines ma- ladies de l'articulation de la hanche, le ma- lade éprouve, au genou qui est sain , une vive douleur; 5° lorsqu'à la suite d'une meurtris- sure, d'une piqûre du périoste dans un point quelconque, tout le membre devient doulou- reux, etc., etc. CXC. Les sympathies de la seconde classe, que caractérise la contraction de certains mus- cles par l'effet de l'irritation d'un organe éloi- gné, s'observent assez fréquemment dans les membranes fibreuses: i° la piqûre du centre phrénique cause dans les muscles du visage une contraction d'où naît le rire sardonique; 2° les déchirures des capsules fibreuses des ar- ticulations , la piqûre des aponévroses, la dis- tension des ligaments dans les luxations du pied , sont fréquemment accompagnées de mouvements spasmodiques dans les muscles des mâchoires , un tétanos très-caractérisé en est même souvent le résultat ; 5° une esquille osseuse, fixée dans la dure-mère, a déter- miné plusieurs fois des contractions convulsi- ves en diverses parties, etc., etc. CXCI. Enfin , on trouve dans les membra- nes fibreuses des sympathies de la troisième FIBREUSES. 1 57 classe, où, par l'irritation d'une partie, la toni- cité d'une autre éprouve des changements re- marquables, soit en plus, soit en moins. i\ La dUre-mère étant enflammée, l'inflammation, qu'accompagne toujours un excès des forces toniques, se manifeste au péricrâne, souvent sur la sclérotique, etc. 2°. L'irritation d'une étendue un peu considérable du périoste aug- mente manifestement les forces de l'organe médullaire, lorsqu'il devient le noyau d'un os nouveau, etc., elc. Au reste, plusieurs des phénomènes que je considère ici comme sym- pathiques, tiennent peut-être à un enchaîne- ment de fonctions encore peu connu, enchaîne- ment qui fait dépendre les affections d'un organe de celles d'un autre parfois très-éloi- gné. Avouons-le, le mot de sympathie est sou- vent un voile à l'ignorance où nous sommes des ressorts secrets que fait jouer la nature pour lier entre eux et coordonner les innom- brables résultats qu'elle obtient d'un très-petit nombre de causes (1). (1) Cette réflexion de Bichat est d'une extrême justesse ; mais notre esprit a tant besoin d'expliquer, de se rendre compte, ou, disons mieux, de s'abuser ï 58 MEMBRANES § VII. Fonctions des membranes fibreuses. CXCll. Il est beaucoup plus difficile d'assi- gner les usages généraux des membranes fi- breuses , que ceux des précédentes , parce quelles n'ont point entre elles des rapports aussi directs, et que des différences plus mar- quées en isolent les diverses espèces. Il faut donc considérer leurs fonctions dans les deux classes qui nous ont servi à les diviser. CXCIII. Nous trouvons d'abord dans la première les aponévroses. Celles d'enveloppe, i° ajoutent au membre une solidité qu'il ne pourroit emprunter de sa gaîne cutanée; 2° re- tiennent les muscles dans leurs places respec- tives, empêchent leur déplacement, leur four- nissent fréquemment des gaines partielles , comme on le voit au couturier; aussi, l'épais- seur eli densité des aponévroses est-elle par- tout en raison directe du nombre des mus- cles. Celle du bras est mince; on trouve à celle de la cuisse une remarquable épaisseur; au contraire, assez peu prononcée à la jambe, lui mémo , que bien peu de personnes peuvent s'a- vouer qu'elles ignorent quelque chose, et surtout quelque chose qu'il serait très-utile de savoir. FIBREUSES. l5() surtout en arrière, elle l'est beaucoup à l'avant- bras: 5° elles réfléchissent sur le membre le mouvement, favorisent en dedans le glisse- ment des muscles, au-dehors celui de la peau, qui, dans les frottements qu'elle éprouve, se déplace souvent; 4° elles déterminent la for- me extérieure du membre, qui varieroit sans cesse, à cause de la laxité de l'organe cuta- né; 5° elles favorisent la circulation veineuse par la compression exercée sur les diverses parties qui constituent le membre. Aussi, les varices rares dans les veines profondes qui ac- compagnent les artères , sont-elles extrême- ment communes dans les superficielles, qui se trouvent hors de l'influence de cette com- pression, que l'art imite dans l'application des bandages serrés , etc. CXCIV. Les usages des aponévroses d'in- sertion sont sensibles : par elles et par les tendons, la nature réunit dans un très-petit es- pace des attaches charnues, qui sur l'os occu- peroient une place trop considérable, et né- ceasiteroient une largeur qui gêueroit les mou- vements. CXCV. Je passe sur les fonctions des cap- sules articulaires et des gaines tendineuses ; elles sont d'une évidence trop marquée. J'obser- l6o MEMBRANES ve seulement, à l'égard des capsules, que leur entrelacement avec le périoste assure la soli- dité de leur insertion , parce que . dans les efforts de traction qu'elles éprouvent, le mou- vement se portant sur toute cette dernière membrane, s'y perd en partie, et la déchi- rure de l'attache fibreuse devient alors moins à craindre. CXCVI. Les membranes fibreuses de la se- conde classe, telles que le périoste, la sclé- rotique, l'enveloppe caverneuse, etc., ^garan- tissent leurs organes respectifs de l'impres- sion des parties voisines dans leur mouve- ment, de celle de* muscles spécialement, dont le frottement pourroit leur devenir funeste; 2° elles ont sur la nutrition de l'organe qu'elles recouvrent une influence essentielle, quoique nous ne connoissions point exactement le mode de cette influence, qui est surtout remarqua- ble dans le périoste, par rapport à l'os; 5° leur vie , essentiellement liée à celle de l'orga- ne , semble partout confondre ses phéno- mènes avec ceux de la leur; ce qui fait qu'il est en général très-difficile de déterminer ces phénomènes avec précision. Voyez, au reste, ce que j'ai dit , dans divers endroits de cet article , sur les usages de ces membranes. FIBREUSES. l6l § VIII. Remarques sur tes affections des membranes fibreuses. CXCVII. Wj a-t-il pas une ligne de démar- cation réelle entre les phlegmasies des mem- branes séreuses et celles des membranes fi- breuses? Peut-on rapporter à la même classe les affections inflammatoires du périoste, des capsules articulaires d'une part, de la plèvre, du péritoine, etc., d'autre part? L'essentielle différence qu'il y a, comme nous l'avons vu , entre les deux classes de membranes précé- dentes, sous le rapport de l'organisation ex- térieure, de la texture, des propriétés vita- les , des fonctions , etc. , ne doit-elle pas en établir une entre leurs affections? S'il est vrai que la différence des inflammations des mem- branes muqueuses et des membranes séreu- ses repose sur leur diversité de structure . pourquoi , ici où cette diversité est aussi prononcée , n'auroit - elle pas la même in- fluence? CXCVIII. On ne voit à la suite des inflam- mations du périoste, de la sclérotique, de l'en- veloppe caverneuse, et autres membranes fi- breuses, ni l'opacité, ni l'augmentation sensi- 1 i l6'2 MEMBRANES ble d'épaisseur, ni les membranes fausses ou artificielles, ni les adhérences, ni l'épanche- ment d'une sérosité trouble et lactescente, qui accompagnent les diverses affections inflam- matoires des membranes séreuses : ces deux inflammations peuvent-elles donc se ressem- bler par leur nature? CXC1X. M'a-t-on point attribué à certaines membranes fibreuses des caractères morbifî- ques qui appartiennent à des feuillets séreux qui leur sont essentiellement adhérents? Ainsi l'arachnoïde adhère intimement à la dure mère, la tunique vaginale à l'albuginée, etc. IN'a-t-on point, sous ce rapport, pris le change sur le siège de l'inflammation , dans la frénésie sur- tout? Voyez ce que je dis là-dessus à l'arti- cle de l'Arachnoïde. Il faudroit, je crois, ré- soudre ces nombreuses questions, avant.de réunir dans la même classe les inflammations des membranes séreuses et fibreuses. ARTICLE V. Des Membranes composées. CG. Nous venons d'examiner les membranes simples , que l'on peut rapporter, dans l'éco- COMPOSÉES. 1 63 nomie animale, à certaines classes générales. Souvent isolées, ces membranes se réunissent quelquefois, et de leur combinaison résultent des organes composés , qui prennent alors des caractères moyens à ceux de leur double base. En parcourant dans ses diverses parties cette combinaison , on y trouve des membranes , i° séro-fibreuses 3 s0 sera-muqueuses 3 5° fibra- muqueuses. Chacune va être l'objet de nos re- cherches. § I". Membranes fibro-séreuses. CCI. Les membranes séreuses et fibreuses ont une tendance manifeste à adhérer ensem- ble; dans le plus grand nombre des cas où elles sont juxta-posées, elles présentent ce caractère: i° l'arachnoïde se déploie, comme je le prou- verai plus bas , sur toute la face interne de la dure-mère; 2° la tunique albuginée emprunte de la vaginale le feuillet qui lui donne cet aspect lisse et poli qu'on y remarque au-de- hors; 5° la portion libre du péricarde est ma- nifestement séreuse au-dedans et fibreuse au- dehors ; des deux lames qui la forment, l'une se réfléchit sur l'origine des gros vaisseaux et l64 MEMBRANES sur le cœur, qu'elle embrasse; l'autre se con- tinue avec la tunique fibreuse de ces vaisseaux, et se perd en s'identifiant avec elle; 4° toutes les membranes synoviales sont tellement unies et aux capsules articulaires, là où elles existent, et aux gaines fibreuses des tendons, que toute séparation est presque impossible. C'est à 1a membrane unique, assemblage de ces deux lamés distinctes, dans les exemples précédents, que je donne le nom de ftbro -séreuse. CCII. Le développement de ces sortes de membranes paroit souvent ne se manifester qu'avec l'âge. i°. On sait que le péricarde, lâ- chement uni, dans l'enfant, au centre fibreux du diaphragme , lui devient . dans l'adulte , très-adhérent. 2°. Dans le fœtus de cinq à six mois , l'albuginée seule entoure immédiate- ment le testicule; entre lui et ia portion de péritoine qui dans la suite est destinée à former sa tunique vaginale , il existe un tissu lâche qui leur permet facilement de glisser l'une sur l'autre. 5°. La dure-mère et l'arachnoïde peuvent facilement s'isoler dans le premier âge. Le double feuillet du péricarde offre aussi , quoique moins sensiblement , cette disposi- tion. COMPOSÉES. 1 65 CCIII. Ces variétés d'adhérences tiennent- elles à ce que , dans leurs mouvements , ces organes, comprimant sans cesse les surfaces voisines, les forcent enfin de s'unir? Est-ce à cette cause mécanique qu'il faut attribuer la formation des membranes séro-fibreuses? S'il en est ainsi, i° pourquoi toutes les membranes ue se développent-elles pas de la même ma- nière? Pourquoi certaines sont-elles aussi bien formées dans le fœtus que dans l'adulte? 2°. Pourquoi la plèvre n'est-elle pas intimement unie au périoste des côtes , quoiqu'il y ait ici compression habituelle de la part du poumon sur deux surfaces séreuse et fibreuse? 3°. Pour- quoi les parties autres que les membranes fi- breuses ne contractent-elles pas avec les séreu- ses une semblable union quand elles sont en contact avec elles, et exposées à être compri- mées par des mouvements? etc., etc. CCIV. Ces diverses considérations , jointes à celles que j'ai présentées plus haut sur la prétendue origine mécanique des membranes séreuses, me paroissent évidemment prouver que cette manière de concevoir les opérations de la nature n'est point celle qu'en effet elle adopte, et que ces idées, toutes empruntées des lois physiques-, lie douent servir de base 1 66 MEMBRANES à aucune explication physiologique (1). La formation de ces membranes fibro-séreuses est donc, comme celle de toutes les autres parties, un résultat des lois organiques, aussi immé- diat, aussi direct, que les adhérences con- tractées par le périoste sur l'os qu'il recou- vre , et auquel il n'étoit, dans l'enfance, que très-foiblemeul uni. CCV. Au reste, l'étroite connexion des mem- branes séreuses et fibreuses est souvent essen- tielle aux fonctions de la partie. Sans elle , la membrane synoviale, plissée , froissée dans les violents mouvements des articulations, s'affec- teroil bientôt, et gêneroit ces mouvements. En général , on ne trouve d'étroites connexions , et par conséquent de membranes séro-fibreu- ses, que dans tous les organes qui ne sont pas susceptibles d'une très-grande dilatation, com • (j) Cette assertion est beaucoup trop exclusive; nous savons aujourd'hui qu'il y a un assez bon nom- bre de phénomènes de la vie qui s'expliquent par- faitement par les lois physiques. Ce qu'il faut blâmer et repousser, ce soûl les mauvaises applications des lois physiques aux phénomènes physiologiques, Bi- chal a complètement raison en repoussant l'explica- tion de l'origine mécanique des membranes séreuses. COMPOSÉES. l6" J me le cerveau , le testicule, , etc. ; mais là où l'organe est sujet à des variétés de volume très- marquées, comme à l'estomac, à la vessie, à la matrice, etc., elles auroient empêché les di- vers déplacements que doit éprouver, comme il a été dit, la membrane séreuse, pour s'ac- commoder à ces variétés : aussi cette mem- brane est-elle alors partout lâchement fixée au moyen du tissu cellulaire. § II. Membranes séro-muqueuses. CCVI. Il existe peu de membranes séro-mu- queuses dans l'économie animale. Lorsque ces deux membranes simples concourent à la pro- duction d'un même organe, elles sont presque toujours séparées par une couche intermé- diaire, ordinairement musculeuse, comme dans tout le conduit intestinal , dans la vessie, etc. La vésicule du fiel présente cependant à sa partie inférieure l'exemple d'une immédiate union. Mais, en général , jamais l'adhérence n'est tellement intime, que les propriétés ne restent distinctes. Ceci paroît tenir à ce que les membranes muqueuses, toutes cellulaires en dehors, du côté de leur chorion , ne sau- roient offrir des points d'insertion et d'adhé- rence assez fixes aux membranes séreuses, qui î()8 MEMBRANES à leur tour, formées aussi de tissu cellulaire . ne peuvent non plus servir d'appui ferme et résistant au chorion , qui tendroit à s'y fixer. Au contraire, les membranes fibreuses, d'un tissu plus dense, plus serré, offrent aux deux surfaces précédentes une base où elles se fixent et s'unissent intimement, comme nous l'avons vu dans les fibro-séreuses , et comme nous allons le voir dans les membranes fibro-mu- queuses (1). § III. Membranes fibro-muqueuses. CCV11. Ces sortes de membranes s'obser- vent, i° dans les uretères formées par un prolongement de la tunique fibreuse du rein, et par la continuité de la surface muqueuse de la vessie ; 2° dans le conduit déférent, évi- demment fibreux au-dehors et muqueux au- dedans; 5° la portion membraneuse de l'u- rètre présente une couche fibreuse, outre la muqueuse , qui la constitue spécialement ; 4° quoiqu en décrivant les membranes mu- queuses simples, j'aie beaucoup parlé de la pituitaire et de ses prolongements dans les (î) Il est évident, d'après les raisons même de l'auteur, que ce genre de membranes n'existe pas. NON CLASSÉES. 169 sinus, il est très-probable cependant qu'elle est une membrane composée du périoste, là plus fin qu'ailleurs, et de la surface, organe immédiat de l'odorat. 5°. Il en est de même, sans doute, de la surface qui tapisse l'oreille interne 6°. Les trompes de Fallope parois- sent être organisées aussi à peu près de même. CCVrIlI. Dans toutes ces parties, il y a une si immédiate adhérence entre la surface mu- queuse et la surface fibreuse , qu'on ne peut les séparer. Dans toutes, la première est la plus importante; c'est celle sur laquelle se passent toutes les fonctions de la partie; l'autre ne lui est, pour ainsi dire, qu'accessoire, des- tinée seulement à lui fournir un solide appui, à ajouter à sa force, à sa résistance, etc. ARTICLE VI. Membranes non c lassées. CCIX. Il y a plusieurs membranes que l'on ne peut rapporter à aucune des divisions pré- cédentes, qui ne sauroient même faire partie d'une classification méthodique , soit parce que leur nature est ignorée, soit parce que, quoique très-connues, elles existent isolé- ment . et sont seules de leur espèce. I7O MEMBRANES CCX. Doil-on classer parmi les membranes fibreuses la tunique moyenne des artères , ou la rapporter aux organes musculaires? La plupart des auteurs ont embrassé cette dernière opinion ; mais on sera tenté, sinon de la rejeter, au moins de suspendre son juge- ment sur l'identité des fibres de cette tuni- que avec les musculaires, si l'on considère, i° qu'elle n'a point l'extensibilité des mus- cles, qui se distendent, en s'aplatissant sans se rompre, lorsqu'ils sont soulevés par les tu- meurs sous-jacentes, tandis que bientôt celle- ci se déchire dans les poches anévrysmales, où elles sont tiraillées ; 20 qu'elle n'a point cette mollesse de tissu, cette souplesse, qui caracté- risent la fibre charnue; qu'elle est au contrai- re roide, dure, fragile même, si ce mot pou- voit s'appliquer à un corps mou ; 5° que cette tunique est coupée par un lien qui embrasse et serre l'artère sur sa tunique celluleuse , tandis qu'à un degré de constriction supé- rieur et même immédiat, le muscle n'est point divisé comme on peut le voir en étranglant par une ligature serrée une portion du tube intes- tinal: ce phénomène tient sans doute à la dif- férence de tissu, dont nous venons de parler; 4° que l'artère ne se contracte point sous fini- ]\0N CLASSEES. J ~ 1 pression des stimulants divers qui font entrer en action la fibre charnue pendant la vie, ou après la mort; 5° que l'action du muscle est soumise à l'influence nerveuse; que celle des artères eu est indépendante , au moins dans nos expériences, comme l'ont prouvé une foule d'essais , avec des excitants chimiques ou mé- caniques, et comme je m'en suis convaincu sur des chiens de grande taille, en armant de métaux et en mettant ensuite en communi- cation la partie supérieure de la mésentérique, dépouillée du péritoine, pour laisser à nu le réseau nerveux qui l'embrasse , avec une par- tie sous-jacente de cette même artère , ou avec sa surface interne, ou encore avec la tunique fibreuse immédiatement isolée de son entrelacement nerveux. CCXI. La remarquable contraction des ar- tères, dont le calibre s'efface au-dessus des collatérales dans la guérison de certains ané- vrysmes , à la suite des amputations, dans les vaisseaux ombilicaux après ia naissance , etc. , .prouve-t-elle une nature charnue? Aon , sans doute ; cela tient à une modification générale de la force tonique, en vertu de laquelle tous les organes tendent au resserrement et se res- serrent en effet quand la cause qui les disten- J 72 MEMBRANES doit cesse d'exister. L'alvéole s'effara en se resserrant , lorsque la dent est tombée. L'os régénéré qui contient un séquestre est très- distendu ; qu'on enlève celui-ci , il diminue bien vite. Le sinus maxillaire , énormément tuméfié dans les fongus, les ozènes, reprend son diamètre ordinaire , s'efface même lors- qu'une opération méthodique a extirpé la tu- meur, ou donné issue au pus. Jepourrois citer pour chaque classe d'organes , de semblables exemples; mais ceux-ci suffisent, parce que. tirés des parties qui offrent le plus de rési- stance, ils font concevoir aisément ce qui arrive à celles qui en ont moins, comme dans les di- verses cavités à la suite de l'évacuation des hy- dropisies , dans l'ouverture des dépôts situés loin des muscles, etc. (1). CGXII. Rien encore n'est donc moins prou- vé que la texture musculaire des artères, excepté cependant dans l'origine de l'aorte, de (1) Toutes les raisons que vient de donner Bich;it sur la non-contractilité des artères, sont excellentes; et, en effet, la lunique moyenne des artères est sim plument élastique, et cette propriété suffit pour fen- dre raison des fonctions des artères dans L'admirable phénomène de la circulation du sang, .NON CLASSEES. 1 "3 j la pulmonaire (1); peut-être pourrions-nous rapporter avec beaucoup plus de réalité leur tunique moyenne à la classe des membranes fibreuses , et il se pourroit très-bien que leur mouvement ne fût qu'un résultat, non de l'ir- ritabilité, mais des forces toniques, plus pro- noncées ici qu'ailleurs : ce qui revient à ce mode particulier de force vitale , qui , comme l'a pensé un auteur, semble chez elles tenir le milieu entre l'irritabilité et l'élasticité. CCX11I. Au reste, la tonicité et l'irritabilité sont absolument de même nature ; leur dif- férence ne consiste qu'en ce que les phéno- mènes de l'une sont insensibles , et que ceux de l'autre sont très-apparents; il n'y a entre elles aucune démarcation réelle ; elles se suc- cèdent et se confondent sans qu'on s'en aper- çoive. C'est l'irritabilité qui préside à la cir- culation dans le cœur, c'est la tonicité qui en (1) On sait aujourd'hui que dans les mammifères et les oiseaux, l'origine de l'artère pulmonaire et celle de l'aorte sont de même nature que le reste de ces vaisseaux, et par conséquent ne jouissent d'aucune contractilité musculaire, mais simplement d'élastici- té. Il n'en est pas de même dans les reptiles, où le bulbe de l'aorte est contractile h la manière des muscles. î ^4 MEMBRANES est le principe dans le système capillaire : en- tre ces deux extrêmes, on voit le mouvement décroître peu à peu, à mesure que les vaisseaux se divisent, jusquà ce qu'enfin il cesse d'être apparent. L'irritabilité est le maximum , la tonicité le minimum de la motilité organique, de ce mode de mouvement qui , constam- ment soustraite l'empire de la volonté, préside à tous les phénomènes digestif, circulatoire, nutritif, sécrétoire, absorbant, exhalant, etc., à tous ceux , en un mot , de la vie organi- que , de la vie qui compose et décompose sans cesse l'animal. L'une s'exerce sur les masses des fluides animaux, comme dans le cœur, l'estomac , la vessie , les intestins ; l'autre , sur leurs molécules très-divisées, comme pen- dant l'absorption, la nutrition, la sécrétion, etc. Il ne faut donc point considérer d'une manière isolée ces deux forces , mais bien comme s'enchaînant l'une à l'autre par une gradation insensible. Entre les muscles , siège essentiel de l'irritabilité , et les glandes , or- ganes dont la tonicité est très-caractérisée , il est d'autres parties où le mouvement tient le milieu : c'est le dartps, le corps caverneux, le mamelon, etc. 11 suit de tout cela que, pour se décider sur le mode du mouvement des ar- NON CLASSÉES. ^5 tères , il est inutile de disputer sur la texture des fibres de ces vaisseaux , puisque la nature n'a point exclusivement attribué aux muscles ce mode de mouvement. CCX1V. Mon objet n'est point ici d'exami- ner la question tant agitée par Haller, Weit- brett , Lamure, Jadelot, etc.. du mouvement pulsatoire des artères. J'indiquerai seulement deux expériences qui pourront servir à ceux que ce travail occupera encore. La première, c'est que j'ai remarqué en faisant, dans d'autres vues, la transfusion du sang artériel d'un ani- mal dans le système veineux d'un autre, que. pendant que le cœur du premier pousse du sang rouge dans une veine du second, celle- ci présente, peu après le même mouvement on- dulatoire , les mêmes vibrations que les artères exposées à nu , et dont la pulsation est alors , comme on le sait, moins facile à distinguer que dans l'état ordinaire, quoique cependant elle soit très-réelle. En touchant une autre artère et cette veine sans les regarder, il seroit très- difficile de les distinguer. Cette première ex- périence coïncide avec l'observation des mou- vements d'ondulation qu'acquiert la veine dans l'anévrysme variqueux. J'obtiens encore le même effet en mettant en communication sur ï ~6 MEMBRANES le même animal, par un tube recourbé, l'ar- tère carotide et la veine jugulaire. Il faut pren- dre l'un de ces vaisseaux à droite et l'autre à gauche; autrement, trop recourbé, le tube présenteroit un obstacle au sang (1). Le résul- tat de la seconde expérience est qu'en trans- fusant dans l'artère carotide d'un animal, et du côté opposé au cœur, le sang de la veine jugu- laire d'un autre, le premier de ces vaisseaux perd ses mouvements ondulatoires , et que la main qui le touche éprouve à peu près la même sensation qu'en s'appliquant sur une veine. CCXV. Ces deux observations , qui sont inverses l'une de l'autre , en nous montrant combien est grande l'influence du cœur sur le mouvement artériel, dans les gros troncs surtout, prouvent que la force propre de la tunique moyenne des artères y offre à la cir- (1) Cela n'est point mécaniquement exact : la courbure d'un semblable tube ne mettrait point sensiblement d'obstacle au cours d'un liquide quel- conque. Ainsi que la plupart des physiologistes de son époque, Bichat ne possédait pas les connaissances de mécanique nécessaires pour comprendre parfaite- ment de semblables questions. NON CLASSEES. 1 77 culation un secours actif moins puissant que ne l'ont prétendu certains auteurs , et que ce n'est que dans le système capillaire que l'influence des parois vasculaires sur le mou- vement progressif du sang devient extrême- ment prononcée et cause essentielle de ce mou- vement. Au reste , la première expérience est plus facile à exécuter que la seconde, qui ne réussit souvent qu'avec de grandes précautions, et dans laquelle le sang passe difficilement de la veine dans l'artère (i). CCXVI. Pour en revenir à la tunique arté- rielle moyenne, suspendons notre jugement sur sa classification; abstenons-nous également de la placer parmi les muscles et les membra- nes fibreuses, jusqu'à ce que d'ultérieures expériences nous aient acquis le droit de pro- noncer sur sa nature ; car d'elle seule doi- vent être empruntés, comme nous l'avons dil, les caractères des classes (2). (1) Les parois des veines étant aussi très élasti- ques, peuvent, si elles ne sont pas trop extensibles, remplacer les parois artérielles, et laisser produèv, le phénomène du pouls. (2) Il n'y a plus à suspendre son jugement; au- jourd'hui il est clairement prouvé que les parois ar- 1 2 î*]& MEMBRANES CCXV11. La même incertitude nous em- barrasse lorsque nous cherchons à classer la membrane interne des vaisseaux. Sa nature , encore peu connue, semble la dérober à toute division méthodique. Voici à quoi se réduisent sur elle nos connoissances anatomiques. CCXV111. Cette membrane, considérée d'une manière générale , et comme formant dans tous les vaisseaux qu'elle tapisse une surface continue, peut se rapporter à deux divisions principales : l'une correspond au sang noir et à la lymphe , l'autre contient le sang rouge. La première commence dans les divisions capil- laires du système veineux et absorbant, tapisse leurs innombrables ramifications , leurs ra- meaux et leurs troncs , est continue dans tous deux par l'ouverture , dans les veines sous- clavières du conduit thorachique. revêt l'oreil- lette et le ventricule droits, l'artère pulmonaire et toutes ses divisions. La seconde a son ori- gine dans le commencement des veines pulmo- lérielles n'ont rien de musculaire, et que la tunique moyenne est formée d'un tissu particulier, nommé tissu jaune ou élastique , dont les propriétés physi- ques et chimiques ont été parfaitement décrites par M. Ghevreul. NON CLASSEES. 1 "O, naires , les tapisse , ainsi que les oreillettes et le ventricule gauche, l'aorte, et ses bran- ches incroyablement multipliées. CCXIX. Ces deux surfaces communiquent sans doute à l'endroit où finissent les artères et commencent les veines; mais cela n'empêche pas qu'il n'y ait entre elles une ligne bien pro- noncée de démarcation, et qu'elles ne jouissent chacune d'un mode de sensibilité relative à l'espèce de sang avec laquelle elles sont en contact (1). CCXX. Cette manière d'envisager la surface interne du système vasculaire, en nous y mon- trant deux portions bien distinctes , dont l'une transmet sans cesse aux poumons le sang et la lymphe de toutes les parties, et l'autre reporte à toutes les parties le sang élaboré dans le pou- mon , nous conduit à considérer cet organe comme l'aboutissant général de la circulation, comme étant , avec tout le reste du corps . dans une réciprocité d'action continuelle ; lui seul correspond, sous ce rapport, à tous les (1) Cette idée est purement conjecturale. Trop souvent Bichat s'est livré ainsi a son imagination sans prendre la peine de vérifier ses aperçus par l'ex- périence. l80 MEMBRANES organes, puisque tous lui envoient, qu'il en- voie à tous l'aliment delà vie. La nature y con- centra l'une des limites de la circulation générale et distribua l'autre limite partout où il y a exhalation, sécrétion et nutrition; car c'est là, en dernière analyse . les fonctions qui termi- nent la circulation artérielle. Placé entre ces deux limites de la circulation , le cœur balan- ce , fait osciller sans cesse le sang de l'une à l'autre; et c'est, sous le rapport de cette posi- tion moyenne , qu'il mérite vraiment d'être appelé le foyer de la circulation. En se repré- sentant cette fonction sous l'idée vulgaire d'un cercle, on pourroit dire que l'un des pôles est dans le poumon, que l'autre se trouve dans toutes les parties , et qiu le centre est au cœur. CCXXI. La membrane interne des vaisseaux est remarquable à sa surface externe, par une adhérence celiuleuse avec la tunique moyenne, que l'on rompt plus vite , et dont le tissu cède et se distend moins facilement que dans les autres organes. Quelquefois cette membrane interne abandonne les autres tuniques, et em- prunte des parties voisines une enveloppe très- résistante : ainsi arrivée vers le trou déchiré postérieur, la jugulaire interne entre-croisc ; NON CLASSÉES. l8l ses fibres extérieures avec le périoste du crâne, et envoie sa tunique interne au-dedans des si- nus, qu elle tapisse, et avec les parois desquels elle forme une espèce de membrane compo- sée , dont la base fibreuse est empruntée de la dure-mère, et que l'on peut concevoir comme les membranes fibro-séreuses , fibro- muqueuses, elc. Cette facilité de la tunique interne des vaisseaux à s'unir avec la mem- brane fibreuse du crâne , ne pourroit-elle pas fournir un argument favorable à ceux qui croient que la tunique moyenne des artères est delà même nature que cette dernière classe de membranes? CCXXII. En dedans, la membrane interne du système vasculaire est sans cesse humectée d'un fluide muqueux , dont les sources sont encore ignorées, et qui la garantit de l'impres- sion du sang, avec lequel elle est en contact. On eonnoîl les valvules nombreuses dontest parse- mée, dans les veines et dans les lymphatiques, celte membrane interne. GCXXIII. Quelle en est la nature? ÎNous n'avons sur elle aucune donnée. Moins ex- tensible qu'aucune des membranes déjà dé- crites , elle se rompt au moindre effort dirigé sur elle, comme on le voit dans l'anévivsme, 102 MEMBRâJNES dans les ligatures appliquées sur les artères et fortement serrées. Son mode de sensibilité est encore peu connu. Il n'est point le même dans la portion qui correspond au sang rouge, que dans celle en contact avec le sang noir, puis- que celui-ci cesse d'être un excitant lorsqu'il arrive au ventricule gauche, qui, ne pouvant se contracter, détermine une stase sanguine dans le poumon . et par suite dans le système veineux (1). CCXX1V. Ce mode de sensibilité n'entre-t^il pas pour beaucoup dans la cause de la mort qui est l'effet subit de l'introduction d'un fluide aériforme , ou autre , dans les vaisseaux d'un animal? Cette expérience, très-souvent répétée ( i ) La nécessité d'un excitant pour que le cœur se contracte, n'est rien moins que prouvée; on voit cet organe dans les expériences se contracter à vide durant des heures entières. Dans les compressions des hémi- sphères du cerveau, la respiration ne se fait que d'une manière très-incomplète, et le sang circule noir pen- dant plusieurs jours ; donc le sang noir n'excite pas la contraction du ventricule gauche. On peut en acqué- rir la preuve dans toutes les hémorrhagies cérébrales qui compriment les deux hémisphères du cerveau; en ouvrant l'artère temporale le sang roule noir. NON CLASSÉES. 1 83 dans le système veineux, n'a point encore, je crois, été tentée sur le système artériel : c est ce qui m'a déterminé à voir si le résultat se- roit le même. J'ai poussé plusieurs fois dans la carotide d'un chien de l'eau fortement teinte en bleu du côté du cerveau (1); l'animal est mort au bout de deux minutes, en poussant des cris douloureux. Le cerveau , examiné à l'in- stant, ne m'a offert que quelques petits vais- seaux capillaires injectés çà et là et colorés par le fluide étranger, dont la plus grande partie étoit sans doute parvenue déjà au cœur en suivant le cours de la circulation. La même expérience , faite avec de l'eau pure, chargée d'une substance étrangère., n'est pas subi- tement mortelle. CCXXV. J'ai observé , à cet égard , qu'il est presque impossible de souffler de l'air avec (i) L'eau fortement teinte en bleu dont s'est servi Bichat, était sans doute une suspension d'indigo.. Or les globules de cette substance broyée, plus gros que ceux du sang, auront beaucoup bouché les petits vais- seaux, arrêté la circulation et causé la mort. La même chose sérail sans doute arrivée si Bichat eût employé un liquide visqueux . bel quo Fhiiilë , où simpiemen' du mercure, ] S^ MEMBRANES la bouche dans l'artère armée d'un tube , comme on le fait dans les veines , en le pous- sant même suivant le cours naturel du sang. Lorsqu'une artère est coupée en travers , il s'établit, si je puis m'exprimer ainsi, dans sa partie qui ne tient pas au cœur, un mouve- ment antipéristaltique , lequel fait jaillir le sang avec une force qu'on ne peut surmonter par les plus grands efforts de l'expiration , et qui, malgré eux, vous remplit la bouche de ce fluide. Il faut nécessairement adapter au tube fixé dans l'artère celui d'une seringue , au moyen de laquelle on pousse avec force l'injection (1). Cette observation confirme la (i) Si Bichat eût mieux connu le mécanisme de la circulation du sang, il n'aurait point attribué à un mouvement antipérif taltique des artères le phénomè- ne dont il parle. Dans ce cas, l'influence du cœur sur le cours rétrograde du sang, par le bout le plus éloi- gné du cœur de l'artère coupée, se fait sentir, soit au moyen des anastomoses volumineuses, et alors il peut y avoir saccade dans le jet du sang, ou pulsation si l'artère est simplement liée, soit au moyen des ca- pillaires, et alors l'écoulement du sang est uniforme comme le cours du sang dans les très-petits vais- seaux. NON CLASSÉES. 1 85 nécessité , déjà plusieurs fois prouvée par l'ex- périence, de lier l'artère en haut et en bas de son ouverture, dans l'opération de l'anévrysme. CCXXVI. Il seroit tout aussi difficile de dé- terminer le mode de tonicité de la surface in- terne du système vasculaire 5 que son mode de sensibilité ; mais l'existence de cette pro- priété est irrévocablement prouvée dans les petits vaisseaux . où la circulation , presque indépendante du cœur, ne présente qu'un mouvement oscillatoire, qui est souvent oppo- sé à celui de la circulation générale, duquel on peut à son gré changer la direction par l'application des stimulants, comme l'ont prou- vé les expériences de Haller, de Spallanzani, etc., et auquel évidemment président seules les formes toniques. CCXXVII. Les fonctions de cette membra- ne sont de former à l'artère une espèce d'épi- derme qui la garantit de l'impression du sang, comme celle des membranes muqueuses les protège contre les substances hétérogènes avec lesquelles elles sont en contact , de favoriser par son poli le cours de ce fluide , etc. CCXXYIII. Outre les membranes qui con- courent à former le système vasculaire , il en est plusieurs autres dont la nature , égale- I 86 MEMBRANES nient ignorée, ne permet pas de les ranger dans une classification générale : telle est celle qui tapisse le canal médullaire des os , et forme , par ses replis , l'organe où s'exhale , séjourne et s'absorbe la moelle; telles sont l'iris (i), la choroïde, remarquables, l'une par un mode de mouvement qui semble faire exception aux lois générales , l'autre par l'humeur noirâtre qui l'enduit et dont on ignore la source. CCXXIX. Enfin, quoique parfaitement con- nues , certaines membranes ne peuvent être classées , parce qu'elles existent seules de leur espèce: telles sont la rétine , épanouissement manifeste du nerf optique ; la pie-mère, qui résulte d'une très-grande quantité de vaisseaux ramifiés à l'infini sur la face externe du cer- veau, et unis les uns aux autres par un tissu cellulaire lâche , qui ne contient jamais de graisse . et qui devient le siège fréquent des infiltrations séreuses , etc. (j) L'iris est très -probablement un muscle; la choroïde est un lacis vasculaire analogue a la pre- mière, et la matière noire du sang exhalé par la choroïde: CONTRE NATURE. I 8^ AIITICLE VII. Des Membranes contre nature. CCXXX. Après avoir embrassé d'un coup d'œil général les diverses membranes naturel- lement développées dans l'économie organi- que , celles qui concourent aux fonctions de l'animal, soit en faisant partie des organes qui sont le siège de ces fonctions , soit en remplissant des usages isolés, il nous reste à examiner les membranes que l'état morbifi- que produit accidentellement , et parmi les- quelles on distingue, i° les kystes, espèce d'or- ganes membraneux qui contiennent tantôt une humeur séreuse, comme dans les hydro- pisies enkystées , etc., tantôt un fluide plus ou moins altéré et différent de ceux qui sont naturels, comme dans le stéatôme, etc., etc.; 2° la pellicule qui forme la cicatrice dans les déperditions de substances de la peau et des autres organes , etc. Ces deux membranes contre nature vont nous occuper. g tcr. Des Kystes. 0CXXX1. Quoique les diverses cavités mem- braneuses des hydropisies enkystées . des hy- )88 M F. M BU A NES datides , du sléalôme , du mélicéris, de lathé- rome , etc. , etc. , différent les unes des autres par divers attributs organiques , que leur densité et leur épaisseur varient: cependant assez de caractères leur sont communs pour pouvoir les rapporter toutes à la même classe: or , en examinant ces caractères communs . on voit qu'ils ont, avec ceux des membra- nes séreuses, une si exacte analogie, que l'on seroit presque tenté, sans le mode de dévelop- pement de ces membranes, de les confondre avec ces dernières. Voici quelles sont ces ana- logies , que l'on concevra sans peine , si l'on se rappelle les caractères qui distinguent les mem- branes séreuses. CCXXXII. Analogie de conformation. Les kystes forment tous des espèces de sacs sans ouverture, renfermant le fluide qui s'en ex- hale , ayant une face lisse , polie , contiguë à ce fluide, une autre inégale, floconneuse, con- tinue au tissu cellulaire voisin, etc. CCXXXII1. Analogie de structure. Toujours formés d'un seul feuillet, comme les mem- branes séreuses , les kystes ont tous, comme elles, une texture cellulaire que prouvent la macération et l'insufflation. Aussi naissent-ils constamment au milieu de l'organe cellulaire. CONTRE NATURE. 1 8p ordinairement là où il est le plus abondant. Peu de vaisseaux sanguins les pénètrent ; le système exhalant y est très-caractérisé. CCXXX1V. Analogie des propriétés vitales. Sensibilité de relation nulle dans l'état ordi- naire, très -prononcée dans l'inflammation; sensibilité organique toujours très-manifeste; tonicité que caractérise une contraction lente et graduée , à la suite de l'évacuation arti- ficielle ou naturelle des fluides contenus , etc., voilà les caractères des kystes; ce sont aussi, comme nous l'avons vu, ceux des mem- branes séreuses. CCXXXV. Analogie des fonctions. Les kys- tes sont évidemment l'organe secrétaire, ou plutôt exhalatoire du fluide qui est contenu. L'exhalation y devient surtout très-caractéri- sée quand, à la suite de l'évacuation de ces fluides , on n'a pas soin d'emporter la mem- brane, ou d'y exciter une inflammation ar- tificielle. L'absorption s'y manifeste dans la guérison spontanée des hydropisies enkystées, guérison à laquelle peut seule concourir cette fonction , CCXXXYI. Analogie d'affections. Qui ne sait qu'entre l'hydropisie de la tunique vaginale et l'hydropisie enkystée du cordon il y a la plus ] C)0 MEMBRANES grande analogie, que les moyens curatifs sont les mêmes, que les accidents ne diffèrent point, que dans toutes deux l'inflammation qu'on fait naître par l'injection d'un fluide étran- ger, du vin. par exemple, est de même nature. et détermine par un semblable mécanisme la guérison? Qu'on ouvre deux cadavres attaqués chacun d'une de ces affections , que l'on com- pare ensuite l'état des deux poches où le fluide est amassé, l'aspect est exactement le même; ôtez du kyste du mélicéris le fluide qui y est contenu , vous ne trouverez que peu de diffé- rence entre lui , les kystes hydropiques et les membranes séreuses. » CCXXXVII. Les considérations précédentes nous mènent à établir une parfaite ressem- blance entre les kystes et les membranes sé- reuses, dont ils partagent tous les caractères, et dans le système desquelles ils entrent essen- tiellement. Il est très-probable qu'il y a rap- port entre les unes et les autres, et que quand un kyste se développe et fournit une abon- dante exhalation, l'exhalation des membranes séreuses diminue: au reste, ceci n'est point appuyé sur des preuves directes. CCXXXVJ1I. Il se présente ici une question essentielle , celle de savoir comment se déve- CONTRE NATURE. 191 ioppcnt les kystes, comment une membrane qui n'existe point dans l'état naturel , peut naître, croître , et même acquérir un dévelop- pement très-considérable en certaines circon- stances. On résout communément ce problème de la manière suivante : il s'amasse d'abord un peu de fluide dans une cellule du tissu cellu- laire; la quantité de ce fluide augmente, dilate dans tous les sens la cellule, dont les parois se collent aux cellules voisines, et augmentent ainsi d'épaisseur. Peu à peu le fluide , séreux dans les hydropisies, blanchâtre et épais dans le stéatôme, etc. , augmente en quantité, presse en tous sens la poche qui le renferme, l'agran- dit, la comprime contre les organes voisins, et lui donne la forme sous laquelle elle s'offre à nous. Pùen de plus simple, au premier coup d'œil, que cette explication mécanique; cepen- dant, rien de moins conforme aux procédés de la nature. Les considérations suivantes ser- viront à le prouver. CCXXXIX. 1 °. Les kystes sont analogues . sous tous les rapports, aux membranes séreu- ses; comment donc auroient-ils un mode dif- férent d'origine que ces membranes, lesquelles ne se forment jamais, comme nous lavons vu, oar la comnression du tissu cellulaire? y0. Utté IQ2 MEMBRANES origine aussi mécanique, où tous les vaisseaux, pressés les uns contre les autres, doivent iné- vitablement s'oblitérer, ainsi qu'on le voit sur la peau devenue calleuse, s'accorde-t-elle avec les propriétés vitales, avec la fonction exhala- toire et absorbante des kystes , avec leur mode particulier d'inflammation? 5°. Comment, si les cellules , appliquées et collées les unes aux autres , forment ces sacs contre nature , le tissu cellulaire voisin ne diminue-t-il pas, ne disparoît-il pas même lorsqu'ils acquièrent beaucoup de volume? If. Comment leurs pa- rois ne sont-elles pas plus épaisses aux endroits de leur surface , où des points d'appui osseux facilitent davantage la compression de l'orga- ne cellulaire? 5°. Si, d'un côté, les kystes se forment par la dilatation que le fluide qu'ils renferment exerce sur le tissu cellulaire ; si , d'un autre côté, il est vrai, comme on n'en peut pas douter, que ce fluide soit exhalé par eux , il faut donc dire que le fluide préexiste à l'organe qui le sépare du sang. J'aimerois presque autant assurer que la salive préexiste à la parotide , etc. CCXL. Je crois que la conséquence immé- diate des réflexions précédentes , c'est que l'ex- plication commune de la formation des kystes CONTRE NATURE. 10)) est essentiellement contraire à la marche géné- rale que suit la nature dans ses opérations. Comment donc naissent et croissent ces sortes de poches? comme toutes les tumeurs que nous voyons végéter au-dehors ou se mani- fester au-dedans ; car il n'y a pour ainsi dire de différence entre ces deux sortes de pro- ductions contre nature, que dans la forme que chacune affecte. La plupart des tumeurs rejettent par leur surface extérieure le fluide qui s'y sépare. Le kyste, au contraire, exhale ce fluide par sa surface interne, et le conserve dans sa cavité. Supposez une tumeur fongueu- se en suppuration , se transformant tout-à- coup en cavité, et la suppuration se transpor- tant de la surface externe sur les parois de cette cavité , ce sera un kyste. Réciproque- ment , supposez un kyste superficiel dont la cavité s'oblitère, et dont le fluide s'exhale à sa face externe, vous aurez une tumeur en suppuration. CCXLI. Puis donc que la forme seule établit une différence entre les tumeurs et les kvstes, pourquoi la formation de ceux-ci ne seroit-elle pas analogue à celle des premiers? Or, a-t-on jamais imaginé d'attribuer à la compression la formation des tumeurs extérieures ou inté- i5 1 C)4 ME.MB i:\XES Heures? Il faut donc concevoir la production des kystes de la manière suivante : ils commen- cent d'abord par se développer et par croître au milieu de l'organe cellulaire par des lois très-analogues à celles de l'accroissement gé- néral de nos parties, et qui semblent être des aberrations , des applications non naturelles de ces lois fondamentales que nous ne connoissons point. Quand le kyste est une fois carac- térisé , l'exhalation commence à s'y opé- rer; d'abord peu abondante, elle augmente ensuite à mesure qu'il fait plus de progrès. L'accroissement de l'organe exhalant précède donc toujours l'augmentation du fluide exha- lé, de même que, toutes choses égales d'ail- leavs, la quantité de la suppuration d'une tu- meur est en raison directe de son volume. CCXLII. Cette manière de concevoir la for- mation des kystes me paroît bien plus confor- me aux lois de la nature que celle précé- demment exposée. Mais il resteroit à déter- miner le mécanisme précis d'origine et d'accroissement des kystes, et par conséquent de toutes les tumeurs. Arrêtons-nous là où commencent les causes premières. Connois- ons-nous le mécanisme de l'accroissement naturel de nos divers orgaues? Pourquoi vou- CONTRE NATURE. ICp loir deviner celui des productions contre nature qui s'y développe . lequel sans doute, comme je viens de le dire, tient aux mêmes lois? C'est beaucoup, dans l'économie organi- que, d'indiquer des analogies, de montrer l'uniformité d'un phénomène inconnu avec un autre, sur lequel tout le monde est d'accord. On auroit beaucoup fait, je crois, pour la science, si dans toutes ses branches on dé- montroit ce principe qui repose déjà sur un si grand nombre de faits ; savoir , que la na- ture , avare de moyens , est prodigue de ré- sultats; qu'un petit nombre de causes prési- dent partout à une multitude de faits, et que la plupart de ceux sur lesquels on est incer- taintiennentauxmêmes principes que plusieurs autres qui nous paroissent évidents. § II. Membranes des cicatrices. CCXLIII. Mon objet n'est point ici de con- sidérer les cicatrices dans les divers organes. de suivre les phénomènes de la réunion des os, des muscles des tendons. Ce travail, ébau- ché sur quelques points, à peine commencé sur le plus grand nombre, m'entraîneroit dans des recherches étrangères à un Traité des mem- 10,6 MEMBRANES branes, où doit seulement se trouver l'histoire de cette pellicule mince qui remplace , dans 'es plaies avec perte de substance, la portion de peau enlevée. CCXL1V. Toute plaie qui parcourt ses pé- riodes ordinaires présente, entre l'époque de sa formation et celle de sa cicatrisation, les phénomènes suivants: i° elle s'enflamme; 2°des bourgeons charnus se développent sur sa sur- face ; 5° elle suppure; 4° elle s'affaisse; 5° elle se recouvre d'une pellicule mince, rouge d'a- bord, mais qui devient ensuite blanchâtre. Parcourons successivement ces diverses pé- riodes. GÇXLV. Le temps de l'inflammation com- mence à l'instant où la plaie est faite ; il est le prompt résultat de l'irritation qu'a causé l'instrument, de celle que détermine le contact de l'air, des pièces d'appareil ou des objets environnants. Jusqu'alors à l'abri de ce con- tact, la plupart des parties comprises dans la solution de continuité ne jouissoient que de la sensibilité organique, que de celle en vertu de laquelle chaque organe se nourrit, s'ap- proprie les sucs et les rejette ensuite. Mais dès- lors ces mêmes parties , concourant à former la surface du corps, doivent jouir de la sensi- CONTRE NAIT HE. 1 97 bilité de relation, de celle qui transmet au cerveau les impressions reçues, et qui est si développée sur l'organe cutané. Or, j'ai prouvé plus haut que l'efï'et de l'inflammation sur tous les organes vulgairement appelés insen- sibles est de transformer en eux la sensibilité organique, qui est leur seul partage, en sen- sibilité de relation, dont ils sont privés dansl'état naturel. C'est là sans doute le premier avan- tage de ce temps de la cicatrisation des plaies. CCXLVI. Un autre avantage de l'inflam- mation dans le commencement des solutions de continuité , c'est de les disposer au déve- loppement des bourgeons charnus. On observe en effet que ce développement est en général en raison du surcroît des forces et d'action qu'imprime aux parties l'état inflammatoire. Alors chaque portion des organes divisés prend une vie nouvelle, se pénètre de plus de sensi- bilité et de tonicité, s'élève à une température supérieure, devient le centre d'un petit système circulatoire, indépendant de celui du cœur (1). C'est au milieu de ce déploiement de forces que naissent et croissent les bourgeons char- (1) Il aurait été difficile à Bichat de prouver celte assertion. I9S MEMBRANES nus, pour la production desquels les forces naturelles auroient été insuffisantes. De là la pâleur, la flaccidité de ces productions , lorsque ces diverses conditions s'affoiblissentou cessent. CCXLVII. Ce second temps de la formation des cicatrices, où le développement des bourr geons charnus présente les phénomènes sui- vants : de petits corps rougeâtres s'élèvent çà et là en forme de tubercules inégaux et irré- gulièrement disposés. D'abord plus ou moins éloignés, ils se rapprochent et s'unissent; des adhérences s'établissent entre eux, et bientôt il en résulte à leur superficie une membrane mince, partout continue, d'une étendue égale à celle de la plaie , recouvrant exactement et sans interruption les parties sous-jacentes, et leur formant une enveloppe nouvelle. CCXLVIII. Cette enveloppe n'est point en- core la cicatrice, qui doit être par la suite in- finiment plus rétrécie; c'est, pour ainsi dire, un épiderme provisoire , destiné à garantir la partie pendant le travail que prépare et forme celte cicalrice. Il ne diffère des membranes ordinaires qu'en ce que celles-ci sont lisses et partout uniformes, tandis que les bourgeons produisent ici une surface inégale et raboteuse. Cette inégalité des bourgeons et leur isolement CONTRE NATURE. 1 99 apparent semblent d'abord s'opposer à cette manière de concevoir le premier état des ci- catrices; mais l'expérience suivante ne laisse là-dessus aucun doute. Faites une large plaie sur l'animal; laissez -lui parcourir ses deux premières périodes ; tuez ensuite l'animal , enlevez la portion de chairs sur laquelle se sont développés les bourgeons; distendez-la du côté opposé, par un corps saillant, et de manière à ce que la surface bourgeonnée devienne très-convexe, de concave qu'elle étoit : les tubercules s'effacent alors ; la pellicule ti- raillée devient partout très-sensible; on la pren- droit pour une membrane séreuse enflammée. La simple dissection peut aussi démontrer cet état des parties. GCXL1X. 11 suit de là que Ces que les bour- geous sont réunis , tout accès à l'air sur la plaie se trouve fermé , et que ce qu'on dit communément du contact de ce fluide est inexact et contraire aux dispositions de Ja nature, qui sait, mieux que nous ne pou- vons le faire par nos appareils , mettre à l'abri la partie divisée, pendant le temps que se pré pare et s'opère le travail de la cicatrice. CCL. Lorsqu'on pousse ses recherches au- dessous de cette pellicule provisoire, on trouve 200 MEMBRANES les bourgeons formés de cellules remplies d'une substance blanchâtre, épaisse, comme larda- cée, et qu'il seroit bien-essentiel de soumettre à l'analyse. Cette substance ferme tout accès aux fluides étrangers qui tendroient à pénétrer dans les cellules , lesquelles ne peuvent être bien distinguées que par la macération. Quand on soufïle de l'air dans le tissu cellulaire d'un animal sur lequel on a fait depuis quelques jours une plaie, ces cellules ne se soulèvent point; les bourgeons restent les mêmes au milieu du boursouflement général du tissu cellulaire. J'ai plusieurs fois fait cette expé- rience , soit pendant la vie , soit après la mort de l'animal. CCL1. Quelle est la nature de ces bourgeons charnus? Les considérations suivantes prou- vent qu'ils appartiennent essentiellement à l'organe cellulaire. i°. Là où cet organe est le plus prononcé, comme aux joues, etc., les bourgeons charnus sont plus faciles à naître et les plaies plus promptes a se cicatriser. 2°. Trop dénudée de tissu cellulaire, la peau se recouvre difficilement de ces sortes de pro- ductions, et se recolle avec peine aux parties voisines : de là le précepte de ménager ce tissu dans la dissection des tumeurs. 5°. La macé- CONTKE NATURE. ^Ol ration ramène toujours à cette première base les surfaces des plaies , quand on y expose un cadavre qui s'en trouve affecté. 4°- La nature de ces bourgeons est partout la même , quelle que soit la diversité de l'organe qui les pro- duit, que ce soient un muscle , un cartilage , la peau, etc.; donc ils sont l'expansion, la pro- duction d'un organe qui se rencontre dans tous les autres: or, cet organe commun à tous, base générale de toute partie organisée, c'est le tissu cellulaire. CCLII. Les vaisseaux sanguins de l'organe s'allougent-ils, se développent-ils en vaisseaux capillaires sur la plaie que recouvrent des bourgeons? Je crois que la rougeur de ces productions tient moins à cette cause , qu'au passage du sang dans les exhalants et les absor- bants de la portion de tissu cellulaire qui les a formées par son développement. Voici les con- sidérations qui me le persuadent: i° le tissu cellulaire paroît n'être qu'un entrelacement d'absorbants et d'exhalants ; or, il se trouve ici tellement gorgé de sang, que nécessaire- ment ce fluide a dû passer dans ces deux genres de vaisseaux. 2°. Il y a une analogie complète entre les membranes séreuses enflammées et la pellicule rouge qui recouvre et forme en par- U02 MEMBRANES tie les bourgeons , sous les rapports de la cou- leur, du mode de sensibilité, de la texture cellulaire, etc. Or, l'absorption contre nature des globules sanguins paroît principalement colorer les surfaces séreuses enflammées, d'a- près les observations modernes, etc. 5°. Cette rougeur n'est que dépendante de l'inflamma- tion; elle cesse avec elle et la cicatrice blanchit: donc c'est un état contre nature, et non le dé- veloppement organique d'un ordre de vais- seaux qui ne devroient pas s'oblitérer, s'ils se formoicnt une fois. 4°- Comment le système sanguin peut-il s'étendre, se déployer en ré- seau là où primitivement il n'existe pas, comme sur les tendons, les cartilages, etc.? Or, cepen- dant on voit naître aussi sur ces organes des bourgeons rougeâtres, etc. Au reste, je propose ces réflexions sans y ajouter une importance plus grande qu'elles n'en méritent; mais quelle que soit l'influence du système sanguin dans la formation des bourgeons charnus, ils sont évidemment dus en grande partie au dévelop- pement de l'organe cellulaire. CCL11I. Voici donc ce qui arrive dans le second temps de la cicatrisation des plaies: le tissu cellulaire, en vertu de l'accroissement de forces qui s'est développé dans la première CONTRE NATURE. 203 période, s'élève en vésicules irrégulièrement disposées, qui se remplissent d'une substance blanchâtre peu commune, s'unissent à leur superficie, et forment ainsi la première pelli- cule. Mais comment cette première pellicule se transforme-t-elle en celle de la cicatrice? Suivons la marche de la nature ; nous la ver- rons, avant d'arriver à ce temps, passer par ceux de suppuration et d'affaissement. CCLIY. Le temps de suppuration n'existe point dans la cicatrice des os. dans celle des cartilages rompus, des muscles déchirés, etc., et en général dans la réunion de tous les or- ganes divisés , sans plaie extérieure. Il faut donc démontrer d'abord quel rapport se trou- ve ici entre ces cicatrices internes et celles des téguments extérieurs ; car un principe uniforme préside à toutes les opérations de la nature , quoiqu'elles paroissent diverses en apparence. CCLV. Lorsqu'un os est divisé , les deux premières périodesde sa réunion sontles mêmes que celles des cicatrices extérieures. Les bouts s'enflamment, puis se couvrent de bourgeons charnus. Dans le troisième temps , ces bour- geons , préliminairement réunis , deviennent une espèce d'organe sécrétoire ou plutôt ex- 204 MEMBRANES halant , qui sépare d'abord de la gélatine dont il s'encroûte, ce qui donne au cal une nature cartilagineuse, puis du phosphate calcaire, ce qui complète la disposition osseuse. Dans la cicatrice des cartilages , la gélatine seule est exhalée dans les bourgeons charnus; dans celle des muscles, c'est la fibrine; en un mot, le tissu cellulaire est la base commune de toutes les cicatrices des organes intérieurs , puisque sur tous les bourgeons charnus sont les mêmes; elles se ressemblent toutes par cette base. Ce qui établit entre elles une différence, c'est la matière qui se sépare et qui reste dans le tissu cellulaire; cette matière est en général la même que celle qui sert à la nutrition de l'organe, que celle qui y est habituellement apportée et exportée par le travail de cette fonction. Or, comme chaque organe de ce système différent a sa matière nutritive propre , chacun a son mode particulier de réunion. Nous connoîtrions les cicatrices des différents organes tout aussi bien que celle des os, si les substances qui nourrissent ces organes nous étoienl aussi con- nues que la gélatine et le phosphate calcaire. Le mode de développement des cicatrices in- térieures est en général analogue à celui de la nutrition , ou plutôt il est le même , avec la CONTRE NATURE. 205 seule différence , que le tissu cellulaire , s'éle- vant en bourgeons irréguliers sur les surfaces divisées , ne fournit point à la cicatrice une base moulée sur la forme primitive de l'or- gane. De là l'inégalité du cal, etc. CCLVI. Voilà donc en général ce qui se passe dans le troisième temps des cicatrices des organes internes. À l'extérieur, il se mani- feste des phénomènes à peu près analogues. La membrane qui recouvre les bourgeons char- nus devient aussi une espèce d'organe exhalant qui sépare du sang un fluide blanchâtre, qu'on appelle le pus; mais il y a cette différence, qu'au lieu de rester daus le tissu des bourgeons, de pénétrer , d'encroûter ce tissu , comme le tissu , comme le phosphate calcaire et la géla- tine dans les os, la fibrine dans les muscles, etc., il est rejeté au-dehors et devient étranger à la réunion : en sorte que dans les cicatrices in- ternes il y a exhalation, puis encroûtement du fluide séparé, et dans les cicatrices extérieu- res exhalation , puis excrétion de ce fluide. CCLVII. Au reste, une plaie extérieure qui suppure me paroît ressembler en tout aux surfaces séreuses lorsqu'elles se recouvrent . à la suite de leur inflammation , d'une exsuda- 2 06 MEMBRANES tion purulente. La pellicule mince qui tapisse les bourgeons charnus est en effet, comme je l'ai observé , de même nature que la plèvre ou le péritoine enflammés , c'est-à-dire essentiel- lement cellulaire. L'organe de la sécrétion ou plutôt de l'exhalation du pus est dans l'un et l'autre cas membraneux et parfaitement sem- blable. Le mécanisme de l'exhalation du pus sur la membrane préliminaire des cicatrices extérieures , me paroît avoir aussi beaucoup d'analogie avec celui de l'exhalation des fluides stéatômateux , qui s'opère dans les kystes. GCLVIII. Passons au quatrième temps des cicatrices extérieures, cà celui de l'affaissement. La suppuration épuise peu à pou cette sub- stance blanchâtre qui remplit les cellules des bourgeons. Alors ces cellules , d'abord très- gonflées , diminuent insensiblement de volu- me ; elles s'affaissent; la pellicule mince qui s'étoit déployée sur elles est moins tendue ; en même temps les bords de la division ne sont plus autant tuméfiés; il se dépriment; la cavi- té de la plaie s'efface ; le fond se met au ni- veau de la circonférence; un pus moins abon- dant s'en écoule , il est plus louable , bientôt la source en est presque tarie. CONTRE SATURE. 20' CCLIX. Je crois qu'à cette époque des plaies nos pansements sont en général plus nuisibles qu'utiles ; ils fixent sur les parties divisées une cause d'irritation qui y entre- tient un développement de forces vitales très- propre à entretenir la suppuration, tandis que. dans l'ordre naturel, l'équilibre ordinaire des forces tend à se rétablir et à la faire cesser. Telle est en effet la révolution qui s'opère dans toute plaie dont la guérison suit les périodes fixées par la nature. i°. Les forces vitales s'exal- tent d'abord par l'inflammation au-delà des bornes qui les circonscrivent dans l'état natu- rel de l'organe divisé; 2° elle^ restent station- nâmes à ce degré pendant la suppuration ; 5° elles diminuent peu à peu , et rentrent enfin dans leurs limites à l'époque de l'affais- sement. Or, si vous les excitez alors par l'ap- plication d'un irritant quelconque, de la char- pie , des médicaments , par exemple , vous empêchez leur décaissement , et la suppu- ration s'entretient par elles. J'ai déjà plusieurs observations de malades où une prompte cica- trice a été le résultat de l'exposition des plaies à l'air pendautce dernier temps. Je puis assurer aussi que de deux plaies faites sur le même 20 8 MBMBB.AN1ÎS chien , ou sur deux chiens différents, et dont l'une reste à nu , tandis qu'on' panse l'autre , sur la fin de la cicatrisation , la première se guérit bien plus vite que la seconde. Je sais que l'analogie est toujours un guide infidèle; mais au moins peut-elle servir à quelques inductions éloignées. CCLX. Le dernier temps de la cicatrisation des plaies est la formation de cette pellicule mince qui remplace en partie les chairs en- levées; voici comment elle est produite: la suppuration a épuisé en entier toute la sub- stance qui infiltrent les cellules des bourgeons; ces cellules , vides alors , s'affaissent , s'appli- quent les unes aux autres , et adhèrent entre elles par un mécanisme analogue à celui des adhérences si fréquemment observées dans les membranes séreuses ; car chaque cavité de l'organe cellulaire est en petit ce que sont en grand les diverses poches séreuses. CCLXT. De ces adhérences des cellules ré- sultent divers phénomènes. Tous les tubercu- les charnus disparoissent. et une surface uni- forme les remplace. Cette surface est une mem- brane très-mince, parce que l'épaisseur des bourgeons dépendoit, non des cellules, mais CONTRE NATURE. 20C) de la substance qui les pénétroit, et qui, ayant alors disparu par la suppuration, les laisse toutes seules. Cette membrane offre infiniment moins de largeur que la pellicule primitive qui recouvroit les bourgeons, parce qu'en s'évacuant les cellules sont revenues peu â peu sur elles-mêmes en vertu de leurs forces toni- ques, à peu près comme quand on donne issue aux fluides des cavités séreuses , elles se res- serrent et prennent une étendue infiniment moindre que celle qu'elles avoient pendant leur distension. Ce retour des cellules sur elles- mêmes, rétrécissant dans tous les sens leur diamètre , elles tiraillent de la circonférence au centre les bords de la division ; ceux-ci se rap- prochent , la largeur de la plaie diminue ; les mêmes bourgeons, qui dans le commencement occupoient souvent un espace d'un demi-pied de diamètre, comme, par exemple, dans l'opé- ration du cancer, se trouvent alors condensés dans une surface d'un pouce ou deux : en se rapprochant ainsi, leurs faces s'appliquent les unes aux autres, se collent, et la membrane de la cicatrice résulte de leur adossement. Voilà comment toutes ces chairs, dont le dé- veloppement nous étonnait, et qui paroisFoient 14 2 10 MEMRIIANES amplement réparer la perte de substance , ne sont plus qu'une pellicule rougeâtre tant que les lymphatiques sont gorgés de sang, mais à laquelle le retour de ce fluide dans ses pro- pres vaisseaux donne bientôt une couleur blanchâtre. CCLXI1. D'après ce mode d'origine de la membrane des cicatrices extérieures , il est facile de concevoir, i° pourquoi elles adhèrent intimement aux endroits où elles se trouvent, et n'ont jamais la laxité des téguments ; •i° pourquoi la peau se rapproche de toutes les parties voisines pour recouvrir la plaie; 3° pour- quoi elle se ride en se rapprochant ; 4° pour- quoi, là où elle prête le plus, la cicatrice a le moins d'étendue, comme aux bourses, aux aisselles, etc.; pourquoi, au contraire, elle en a davantage là où elle cède difficilement , comme sur le sternum, le crâne, le grand trochanter , etc.; 5° pourquoi l'épaisseur de toutes les cicatrices est en raison inverse de leur largeur. En effet, comme il n'y a tou- jours que la même quantité de bourgeons charnus pour les former, il faut que ce qu'elles gagnent en un sens, elles le perdent dans un autre : de là beaucoup de facilité à se déchirer CONTHE NATURE. 2 1 1 dans celles qui sont très-larges; 6° pourquoi elles n'ont point d'organisation régulière 5 ne partagent point les fonctions de l'organe cuta- né qu'elles remplacent; pourquoi il ne s'y fait point d'exhalation. En effet , l'agglutination des lames du tissu cellulaire a détruit son sys- tème exhalant , comme celui des membranes séreuses est anéanti par leurs adhérences réci- proques. Remarquons que ce phénomène est une preuve nouvelle que la membrane des kystes , où l'exhalation est évidente , ne se forme pas, comme on l'a dit, par l'adhésion mécanique ou inflammatoire des lames de l'organe cellulaire. CGLX1II. Je n'ai point comparé ces réflexions sur les cicatrices avec ce qu'ont écrit sur ce point Fabre, Louis, Hunter et autres. L'ex- posé de tous les phénomènes de plaies enflam- mées, en suppuration, ou dans l'état d'affais- sement, n'a point été présenté. Je renvoie aux auteurs qui ont traité cette matière ex professo: le lecteur, en les analysant, pourra juger lui- même en quoi les vues que je présente diffèrent ou se rapprochent de celles communément reçues, et quel degré de confiance elles ont droit d'inspirer à qui recherche moins une 2 12 MEMBRANES CONTRE NATURE. opinion qu'une série de faits enchaînés les uns aux autres (i). (1) Il y a sans doute quelques faits inexacts, quelques assertions hasardées dans la manière dont Bichat expose la formation des diverses cicatrices; mais nulle part on n'est plus à même de juger la nature de son talent spirituel et facile. TRAITE DE LA MEMBRANE ARACHNOÏDE. i\utvvvt\viinvkVUvi\vii»kvnvtv\iWtnvHvv»v«ttvvi\v»v»twvivvvt SECTION PREMIÈRE. Considérations générales. I. La triple enveloppe du cerveau n'a pas toujours été distinctement décrite par les ana- tomistes. L'arachnoïde et la pie-mère ne furent long-temps à leurs yeux qu'une membrane unique , mince assemblage de deux feuillets distincts quelquefois dans leur position, mais constamment identiques par leur nature : c'étoit la seconde méninge. II. On commença, au milieu du siècle passé, à soupçonner que chacune pouvoit avoir une existence isolée: la Société anatomique d'Am- sterdam s'en assura en 1 665 ; van Horne, peu de temps après , démontra séparément à ses 2l4 MEMBRANE élèves l'arachnoïde, qui depuis lors a toujours été considérée comme une membrane propre. Quelques anatomistes, Lieutaud en particulier, ont cherché dans ces derniers temps à repro- duire la manière de voir des anciens, et à ré- duireà deux les enveloppes cérébrales; mais les considérations suivantes me paroissent irré- vocablement fixer l'opinion à cet égard. III. i°. La pie-mère pénètre toutes les au- fractuosités dont elle revêt la surface; l'arach- noïde passe, sans s'arrêter, d'une éminence à l'autre, et souvent on la voit ou séparée par de grands intervalles de la pie-mère, ou simplement appliquée sur elle sans nulle com- munication. La base du cerveau et la moelle épinière présentent de fréquents exemples de cette double disposition. 2°. L'une, rougeâtre, toute tissue de vaisseaux , ne paroît destinée qu'à offrir aux troncs qui s'y portent une large surface où ils puissent se diviser à l'infini , avant de pénétrer dans la substance molle du cerveau, à laquelle ils communiqueroient, sans cela, de trop fortes secousses; c'est une couche celluleuse, plutôt qu'une membrane distincte- ment organisée : couche qui unit , soutient et entrelace les innombrables ramifications du système extérieur des vaisseaux sanguins encé- ARACHÎSOÏDE. A ! 5 phahques. L'autre, blanchâtre, mince, demi- transparenle , dépourvue de ce genre de vais- seaux , ne paroît qu'un composé des exha- lants qui iui apportent et des absorbants qui lui enlèvent l'humeur dont elle est sans cesse lubrifiée. 5°. La première n'est remarquable, à la suite des inflammations, que par sa rou- geur, effet du sang qui y aborde ; la seconde s'épaissit , devient opaque et d'un blanc plus foncé , se recouvre fréquemment de cette exsudation visqueuse , caractéristique des membranes séreuses en suppuration. 4°- Celle- ci , après avoir accompagné les vaisseaux et les nerfs jusqu'aux troncs qui les transmettent hors du crâne , se réfléchit visiblement sur la dure-mère, qui en emprunte, comme je le dirai, le poli qui distingue sa face interne: celle-là se perd bientôt sur les nerfs , et jamais on n'y voit une semblable réflexion. 5°. En en- levant l'arachnoïde, on détache aussi la pie-nu re qui adhère au nive audes circonvolutions , et c'est là sans doute ce qui en a imposé ; mai:- ce fait ne prouve pas plus l'identité des deux membranes , qu'il n'établit celle de la plèvre , du péricarde, du péritoine, etc., avec le tissu cellulaire qui leur est sous-jacent, et qui ac- compagne toujours ces membranes lorsqu'on 2l6 MEMBRANE les arrache de dessus leurs organes respectifs. IV. Ces rapides considérations , tirées de la forme extérieure, de la structure et des affections de l'une et l'autre membrane, suffi- sent, je crois, pour établir entre elles une li- gne réelle de démarcation , et admettre par conséquent l'existence isolée de l'arachnoïde; mais c'est peu d'avoir constaté son existence, il faut encore déterminer la nature, suivre le trajet et les rapports, assigner les fonctions de cette membrane. Or, sur tous ces points l'ana- tomie connue ne nous offre qu'un vide à rem- plir. V. Tous les organes importants , tous ceux qui sont agités d'un mouvement habituel , se trouvent enveloppés d'une membrane séreuse, qui leur sert de limites, les isole des parties voisines, favorise leur expansion et leur res- serrement alternatif par l'humeur qui en lu- brifie sans cesse la surface lisse et polie. Cette loi de conformation est universelle; le poumon qu'embrasse la plèvre, le cœur que revêt le péricarde; l'estomac, les intestins, le foie, la rate, etc., sur lesquels se déploie largement le péritoine; le testicule que recouvre la tunique vaginale, nous en offrent des exemples. Toutes ces membranes ont, comme je l'ai démontré, ARACHNOÏDE. .2 1*] les mêmes caractères de conformation , de structure , de fonctions et même d'affections morbifiques. Cette uniformité . bien reconnue dans la disposition extérieure de tous les orga- nes importants, m'avoit fait soupçonner depuis long-temps que le cerveau ne devoit point faire exception à la règle générale , et qu'une enve- loppe analogue en tout aux membranes sé- reuses des grandes cavités devoit , en le recou- vrant, remplir à son égard les mêmes fonctions que ces membranes à l'égard de leurs organes respectifs. Je crois que ce soupçon deviendra une réalité , si j'établis d'une manière évidente que, i° la nature intime, 2° la disposition extérieure , le trajet et les rapports, 3° les fonc- tions et les affections de l'arachnoïde , sont exactement les mêmes que celles des membra- nes séreuses. Ce traité a pour objet le dévelop- pement de ces diverses propositions. SECTION II. Déterminer la nature intime de l'arachnoïde. YI. La nature intime de la plupart de nos parties échappe presque constamment aux grossiers instruments de nos recherches; en sorte que pour déterminer avec précision quel 2 I 8 MEMBRANE rang un organe inconnu occupe parmi les res- sorts nombreux de notre machine, il faut le comparer à ceux dont la nature bien constatée ne laisse aucun doute dans l'esprit du physio- logiste, afin d'établir sur l'analogie ce que l'in- spection et la dissection ne peuvent nous four- nir. Cette méthode de suppléer par le raison- nement au défaut xles sens dans nos recher- ches sur l'organisation , est surtout applicable à l'arachnoïde, que son extrême ténuité dé- robe à presque tous nosinoyens mécaniques. Or, en procédant par cette voie, je prouverai, je crois, d'une manière évidente que par sa nature intime l'arachnoïde appartient à la classe des membranes séreuses , si j'établis , i°que sa texture sensible, 2° que ses proprié- tés vitales, 5° que ses fonctions connues, 4° °iu:' ses affections morbifiques, sont les mêmes que les leurs; car, semblable à elles par les résul- tats, les effets de l'organisation, comment pour- roit-elle être différente par l'organisation elle- même? § I". Caractères tirés de la texture. VII. Nous avons vu que toutes les membra- nes séreuses sont remarquables, i° par une surface lisse, polie, reluisante, humide de se- • ARÀCHNOÏDF. 2 1') rosîté, contiguë et jamais continue aux orga- nes voisins; 2° par une surface opposée tou- jours adhérente ; 5° par le petit nombre de leurs vaisseaux sanguins et la multitude des absorbants qui en naissent; 4° par la base essen- tielle de leur texture, qui est cellulaire ; 5° par leur transparence, lorsqu'on les a détachés : de là le nom de diaphanes sous lequel M. Piuel les désigne. "VIII. Examinez maintenant l'arachnoïde : vous y retrouverez exactement tous ces carac- tères, si vous fixez successivement votre atten- tion, i° sur sa surface correspondante à la dure- mère ; 2° sur celle qui adhère à la pie-mère ; 5° aux endroits où son système vasculaire peut le plus facilement être aperçu comme à la base du crâne, où elle est isolée par l'une et l'au- tre face, transparente, et ne peut nous pré- senter, comme lui étant propres, des vaisseaux sanguins appartenant à la pie-mère; 4° sur des lambeaux de cette membrane exposés pendant quelques jours à la macération ; 5° sur les en- droits où vous l'aurez décollée par une légère insufflation de la pie-mère qu'elle recouvre. La ténuité de l'arachnoïde s'opposeroit-eile au rapprochement établi entre sa texture et celle 2 20 MEMBRANE des membranes séreuses ? Mais qui ne sait que l'épiploon présente eneore moins d'épaisseur? § II. Caractères tirés des forces vitales. IX. Sensibilité organique, manifeste dans l'état ordinaire, susceptible dans les affections inflammatoires de se transformer en sensibilité de relation; tonicité d'abord peu apparente, mais cependant caractérisée par une foule de phénomènes ; extensibilité réelle , mais peu étendue : voilà les propriétés vitales des mem- branes séreuses. X. Telles sont aussi celles que m'ont démon- trées dans l'arachnoïde diverses expériences sur les animaux vivants. La pression d'un corps, l'action déchirante ou coupante du scal- pel, l'application de divers caustiques, ne pa- roissent exciter dans l'animal aucune sensation douloureuse. Mais la membrane s'enflamme- t-elle à la suite de son exposition à l'air un peu long-temps continuée, le contact d'un corps auparavant indifférent devient pénible , cruel même. Ici, comme dans une foule d'autres parties, la sensibilité inhérente à l'organe s'y trouve distribuée dans une trop foible propor- ARACHNOÏDE. 22 1 tion pour que cet organe devienne, dans l'état naturel, un agent de sensations vives, doulou- reuses ou agréables. Il faut que, par l'inflam- mation, la nature ait doublé, triplé même cette proportion, afin que cet effet soit produit Tel est en effet le mode de distribution des forces vitales; toutes les classes d'organes en sont iné- galement pénétrées. Les uns comme la peau, les muscles, etc., les possèdent au plus haut degré. Elles semblent languir et être assoupies dans d'autres, tels que dans les ligaments, les os, etc. Sous ce rapport, jamais il n'y a équili- bre de forces dans l'économie qu'entre les or- ganes de même classe. Mais cette inégale répar- tition n'est point arrêtée d'une manière im- muable; elle varie sans cesse. Il se fait une ré- volution habituelle dans les forces vitales; la nature peut les transporter en plus ou moins grande quantité sur telle ou telle partie, sui- vant les dangers qui la menacent. Souvent alors un organe d'une classe inférieure à celle de tous les autres, dans l'échelle ordinaire de la sensibilité, leur devient égal et même supé- rieur, jusqu'à ce que l'excès de vie ajouté à celle qui lui est propre, venant à s'évanouir, il se remette en équilibre avec les organes de sa classe. 111 MEMBRANE XI. L'absorption qui s'opère dans l'arach- noïde prouve sa tonicité , que caractérise en- core son retour sur elle-même à la suite de l'é- vacuation de certaines congestions aqueuses, sanguines, etc. Le volume prodigieusement augmenté de certaines têtes hydrocéphales , sans rupture de cette membrane, prouve son extensibilité. § TH. Caractères tirés des fonctions. XII. Les usages sensibles de l'arachnoïde sont, i° de séparer le cerveau d'avec les premiè- res enveloppes qui le renferment, et auxquel- les par son moyen il n'est que contigu ; de for- mer ainsi à ce viscère une limite membraneu- se, qui, rompant, pour ainsi dire, toute com- munication organique entre lui et les parties voisines, isole sa vie propre et les fonctions im- portantes qu'il remplit, de la vie propre et des fonctions moins essentielles de tout ce qui l'en- toure; i° d'exhaler et d'absorber sans cesse un fluide albumineux dont on trouve sa surface constamment humide, qui se dissipe en forme de vapeur sensible dans ies animaux sur les- quels on met le cerveau à découvert, surtout dans un temps froid, et qui, destiné à lubri- iRACHNOÏDE. 2 20 fier ce viscère, favorise ses mouvements, et prévient les adhérences qui en seroient le ré- sultat. XIII. Cet usage, que j'attribue à l'arachnoï- de, d'être l'organe essentiel de l'exhalation et de l'absorption alternatives des humidités cé- rébrales, se prouve par une foule de considé- rations et de faits dont voici les principaux : i9. La surface de l'arachnoïde mise à nu exhale visiblement dans un animal vivant ces humi- dités. En effet, étant essuyées exactement dans une partie quelconque de son étendue, elles y sont reproduites au bout de peu d'instants. D'aiileurs, pendant une assez longue exposition à l'air, et avant qu'elle ne s'enflamme, cette membrane reste humide : or, elle se sécheroit bientôt, si ce que ce fluide lui enlève par l'éva- poration ne lui étoit rendu par l'exhalation qui s'y opère. 2°. A cette exhalation correspond nécessairement une absorption , qui s'exerce non -seulement sur l'humeur lymphatique, mais encore sur des fluides étrangers. J'ai ou- vert le crâne d'un chien par le trépan, après avoir déchiré et enlevé les épais faisceaux char- nus qui le recouvrent sur les côtés. L'ouver- ture a été bouchée comme dans les expérien- ces de Lorry, par un morceau de liège que tra- 3 24 MEMBRANE versoit un tuyau de plume, au moyen duquel j'ai injecté dans la cavité du crâne un fluide légèrement coloré et à la température de l'ani- mal. L'appareil a été fermé ensuite. L'animal ne s'est point assoupi , a eu d'abord quelques légers mouvements convulsifs, est ensuite tombé dans l'abattement et dans une espèce d'impuissance de mouvement, quoique la pa- ralysie n'ait pas été complète. Je l'ai tué au bout de huit heures, et je n'ai retrouvé du fluide introduit qu'une très-petite quantité, qui étoit ramassée vers la base du crâne. La même expérience, tentée après la mort, ne m'a donné qu'un foible résultat, quoique l'animal eût été maintenu, par un bain chaud, à sa tem- pérature ordinaire. 5°. Dans les plaies de tête, il se fait fréquemment des épanchements sur l'arachnoïde, comme le prouvent l'opération du trépan et l'ouverture des cadavres. Or. sur un très-grand nombre de malades que Desault a eus à traiter, jamais il n'a pratiqué cette opé- ration, et cependant la plupart ont très-bien guéri ; donc chez ceux de ces malades qui av oient des épanchements (et il est impossible que sur le nombre plusieurs n'en aient eu), ces épanchements ont été absorbés, puisque le sang qui s'extravase, et que les lymphati- ARACHNOÏDE. 22b ques ne reprennent pas, finit toujours par oc- casioner des accidents , l'inflammation , les dépôts, etc. , etc. Qui ne sait d'ailleurs que dans l'opération même du trépan, lorsque le sang se trouve sous la dure-mère, il ne s'évacue ja- mais qu'en très-petite quantité, malgré la pré- caution d'inciser cette membrane, parce qu'il n'est point alors ramassé en foyer, mais dissé- miné sur toute l'arachnoïde? Or, la portion restante, lorsque le malade guérit, doit néces- sairement être absorbée. XIV. Je crois que, d'après les faits et les considérations précédentes, il est difficile de ne pas envisager l'arachnoïde comme l'organe essentiel de l'exhalation et de l'absorption cé- rébrales (1). Cependant une difficulté reste en- core : la dure-mère, suivant l'opinion conimu- (1) Un fait de la plus haute importance a échappé à Bichat , c'est l'existence du liquide que j'ai décrit et nommé céphalo-rachidien. Ce fluide sépare par- tout la pie-mère de l'arachnoïde, et forme une couche qui a quelquefois jusqu'à un pouce d'épaisseur. (V oyez mon Journal de Physiologie, Tom. VII, n° 1.) Tout ce qu'a dit Bichat de l'exhalation ne peut s'ap- pliquer qu'à la cavité de la memhrane arachnoïde, et non point à la surface du cerveau. i5 22Ô MI'MBKANE ne, correspond, comme l'arachnoïde, à la ca- vité cérébrale, où se répandent ces humidi- tés ; elle peut donc, comme elle, les fournir et les reprendre. Je montrerai bientôt que cette manière d'envisager la dure-mère n'est point conforme à sa disposition anatomique, et que sa surface interne, lisse et polie, n'est qu'un repli de l'arachnoïde; mais faisons abstraction de ce fait, qui lèverait toute difficulté, et rai- sonnons d'après l'opinion commune. XV. i°. La dure-mère est certainement une membrane fibreuse de la classe du périoste, de la sclérotique, etc., de l'enveloppe du corps caverneux, de la membrane albuginée, etc. Or, aucune de ces membranes ne remplit une fonction semblable a celle qu'on attribuerait ici à la dure-mère. Comment donc celle-ci, analogue en tout par son organisation aux au- tres membranes fibreuses, peut-elle en différer par les résultats de cette organisation? 2°. La dure-mère a partout la même structure; et ce- pendant ce n'est que par la portion correspon- dante à la cavité cérébrale qu'elle paraît être un organe exhalant. Pourquoi ne sépare-t-elle pas également de la sérosité , dans l'orbite où elle se prolonge, dans la fosse pituitaire où elle passe, sous la glande du même nom, après ARACHNOÏDE. 22^ avoir abandonné l'arachnoïde, qui en tapisse la face supérieure? Pourquoi, dans le canal ver- tébral, sa face externe, souvent trop isolée des organes voisins, comme l'interne, n'est-elle pas, comme elle, sans cesse humide d'une rosée lymphatique? Comment concilier cette uni- formité d'organisation avec cette différence de fonctions? 5°. Tous les fluides séreux de l'é- -conomie animale , qui lubrifient les cavités , sont fournis par une membrane unique, et non par le concours de plusieurs organes : comment celui-ci, semblable en tout aux au- tres par sa nature, auroit-il un mode différent d'exhalation ? 40. Comment conçoit-on qu'un fluide essentiellement homogène soit séparé du sang par deux organes si essentiellement différents sous le rapport de leur structure, que le sont la dure-mère et l'arachnoïde? Trouve- t-on un seul exemple dans l'économie vivante de deux organes de classe différente, concou- rant à produire le même fluide? 5°. La sérosité s'exhale dans les ventricules sans le concours de la dure-mère et seulement par l'arachnoïde, qui s'y introduit, comme je le prouverai. XVI. Toutes ces considérations m'ont dé- terminé depuis long -temps à considérer la dure-mère comme étrangère à l'exhalation et 228 MEMBRANE à l'absorption de la sérosité du cerveau , et à en regarder l'arachnoïde comme le siège ex- clusif (1). XVII. Rapprochons maintenant les fonc- tions des membranes séreuses de celles bien constatées de l'arachnoïde, et nous les verrons, i° isoler aussi leurs organes respectifs; 2° exha- ler sans cesse et absorber autour d'eux une humeur séreuse de même nature que celle de l'arachnoïde, et, sous ce rapport, entrer essen- tiellement comme elle dans l'ensemble du sys- tème lymphatique. § IV. Caractères tirés des affections morbifiques. XVIII. Les membranes séreuses sont remar- quables, i° parce qu'elles seules, avec le tissu cellulaire, sont le siège des hydropisies pro- prement dites, ou des hydropisies lymphati- ques; 2° parce qu'à la suite de leur inflamma- tion , leurs faces diverses contractent souvent (î) Bichat aurait dû s'altacher à prouver, par des faits et des expériences, que la partie de l'arachnoïde que revêt la dure mère , sécrète réellement comme le feuillet libre de cette membrane. AKACHNOÏD£. 229 ensemble des adhérences ; 3° parce que sou- vent alors elles s'épaississent, perdent leur transparence, deviennent blanchâtres; 4° parce que, dans ces cas, une exsudation visqueuse, adhérente à leur surface , difficile à enlever, forme leur suppuration. XIX. Un rapide coup d'œil jeté sur l'arach- noïde nous y montrera les mêmes caractères morbifiques. i°. Le sac qu'elle forme, et sur- tout sa portion plongée dans les ventricules, deviennent le siège fréquent des collections lymphatiques (1). 2°. A la suite des inflamma- tions du cerveau, Kaw-Boerhaave , de Haen, Boemer, etc. , ont fréquemment vu la face ex- terne de l'arachnoïde et la face correspondante de la dure-mère adhérer ensemble soit immé- diatement , soit au moyen d'une espèce de membrane artificielle, formée ici, comme dans le péricarde , la plèvre , etc. Lorsque , dans le trépan, la dure-mère a été divisée, la por- (i) C'est justement parce caractère que l'arach- noïde diffère des autres membranes séreuses; jamais les collections aqueuses des ventricules ne commu- niquent avec la cavité de c< fte membrane, comme je l'expliquerai en détail plus tard. 200 MEMBRANE tion d'arachnoïde' qui correspond à l'ouver- ture s'enflamme et adhère ensuite à la cica- trice. J'ai essayé dans un animal de détermi- ner, par une injection de vin sous le crâne, l'adhérence de cette membrane , comme on produit artificiellement celle de la tunique va- ginale dans l'hydrocèle ; mais l'animal n'a pu survivre que vingt-huit heures à l'expérience, et l'adhérence n'étoit point encore contractée. 5°. J'ai eu occasion d'observer quelquefois sur des cadavres morts de plaie de tête l'opacité de l'arachnoïde et son épaississement. Elle se condense alors, comme la plèvre, par des cou- ches ajoutées d'une matière lymphatique. Ce même phénomène , que l'ouverture des cada- vres offre chaque jour, s'observe aussi à la face interne de la dure-mère ; ce qui tient à la portion d'arachnoïde qui la tapisse, puisqu'il n'est jamais sensible à sa face externe. 4°- Quant à l'exsudation visqueuse que laisse échapper l'arachnoïde enflammée, elle est prouvée par un très-grand nombre de faits. Ce mode de suppuration est si commun dans les plaies de tète à l'Hôtel-Dieu, qu'il formoit un des grands arguments par lesquels Desault combattoit le trépan, toujours alors inutile, puisque cette couche épaisse, visqueuse, adhérente à la sur- ARACHNOÏDE. 23 1 face externe du cerveau (1), ne sauroit échap- per par l'ouverture. A peine peut-on l'enlever exactement avec le manche du scalpel sur le cadavre dont le cerveau a été mis à découvert. XX. Les nombreux rapprochements que je viens d'établir entre l'arachnoïde et les mem- branes séreuses en général, me paroissent suf- fisants pour répondre au problème que nous nous sommes proposé ci-dessus. En effet, puis- que d'une part la nature intime d'un organe quelconque est déterminée, quand on a dé- montré, i° sa texture, 2° ses propriétés vita- les, 5° ses fonctions, 4° Ie caractère qu'imprime son organisation à ses affections morbifiques ; puisque, d'une autre part, il est évidemment prouvé que sous ces quatre rapports essentiels l'arachnoïde est analogue aux membranes sé- reuses, je crois que sans crainte d'erreur nous pouvons établir, comme une conséquence de ce qui vient d'être dit, cette proposition géné- rale : Lï arachnoïde 3 par sa nature, appartient à la classe des membranes séreuses. (î) Cette couche épaisse, visqueuse, est le plus souvent hors de la cavité de l'atachnoïde, et est formée par la pie- mère siiflammée. 2.) 2 MÈMBRARI SECTION III. Déterminer le trajet et la forme de ï arachnoïde sur les organes qu'elle enveloppe. XXI. Nous avons démontré, dans le Traité des membranes en général, que toute surface séreuse représente un sac sans ouverture, re- plié et sur les organes auxquels elle appartient, et sur les parois de la cavité où se trouvent ces organes, fournissant à leurs vaisseaux une gaîne qui les accompagne, et ne s-'ouvrant ja- mais pour les laisser pénétrer : en sorte que rien n'est contenu dans la cavité qu'elle for- me, et que s'il étoit possiblcde l'enlever dis- tinctement par la dissection, cette cavité reste- roit dans son intégrité. XXII. Or, si l'on compare îflhintenant à cette conformation celle de l'arachnoïde, et que l'on suive son trajet, il est facile de dé- montrer, le scalpel à la main, que, de même que ces membranes, elle se replie et sur le cer- veau qu'elle embrasse sans le contenir, et sur la face externe de la dure-mère qu'elle tapisse, et sur les nerfs et les vaisseaux qui partent du cerveau ou qui s'y rendent, de manière qu'au- ARACNOÏDE. a33 cun de ces organes n'est contenu dans la cavi- té, que remplit seule l'humeur qui la lubrifie. XXIII. Pour suivre le trajet de cette mem- brane, considérons-la, i° sur le cerveau, 2° sur la moelle épinière, 5° sur la dure-mère, 4° dans les ventricules; car quoique partout continue, elle ne puisse s'isoler, cependant sa disposi- tion deviendra plus sensible en l'examinant à la fois sur un moins grand nombre de parties. De la connoissance partielle des diverses ré- gions de cette membrane résulteront des no- lions plus distinctes sur son ensemble. § V. Trajet de V arachnoïde sur le cerveau. XXIV. Considérée sur la convexité du cer- veau, l'arachnoïde y est très-sensible, surtout par l'insufflation. i°. Elle revêt l'un et l'autre hémisphère, fournit à chaque veine allant au sinus longitudinal supérieur une gaîne, qui se continue ensuite sur la dure-mère, embrasse à peu près de la même manière les corpuscules blanchâtres de Pachioni, qui se trouvent ainsi hors de sa cavité. 2°. Elle descend de l'un et l'autre coté sur la surface des hémisphères correspondante au sillon qui les sépare, tapisse 234 MEMBRANE le corps calleux, dont l'écartent les artères du même nom, et fournit aux veines du sinus longitudinal inférieur des enveloppes qui se réfléchissent ensuite sur la faux. XXV. De la convexité du cerveau , l'arach- noïde se porte en arrière et en devant. Voici son trajet dans le premier sens : 1° sa portion correspondante aux hémisphères se prolonge sur leurs lobes postérieurs qu'elle revêt, passe sur la rainure qui les sépare du cervelet, où elle est très-distincte, se déploie sur la partie supérieure de ce viscère > y fournit des gaines aux veines du sinus droit, descend sur sa cir- conférence, y accompagne plusieurs vaisseaux des sinus latéraux , et vient recouvrir sa face inférieure, où une large portion de son éten- due se trouve isolée vis-à-vis la rainure qui sépare ses deux lobes. 2°. Quant à la portion correspondante au corps calleux, elle se pro- longe aussi en arrière sur le cervelet , mais concourt auparavant à former autour des vei- nes de Galien une ouverture dont je parlerai bientôt. XXVI. D'après ce qui vient d'être dit, on conçoit le trajet de l'arachnoïde sur le cerve- let, les lobes potérieurs et la convexité du ccr- ARACHNOÏDE. 235 teau; mais comment se comporte-t-elle sur la base de ce viscère? Le voici : i° de la partie supérieure des hémisphères, elle s'avance sur les lobes antérieurs, les entoure, fournit une gaîne aux nerfs olfactifs , une autre aux nerfs optiques, laquelle se prolonge dans leur en- veloppe fibreuse, et ne se réfléchit sur elle que dans l'orbite. 2°. Elle embrasse, par sa portion qui descend du corps calleux, la tige pituitaire en manière d'entonnoir, dont l'extrémité s'é- panouit sur la glande du même nom. et se trouve séparée par elle de la dure-mère, qui s'enfonce dans la fosse et en forme le périoste. 5°. Elle entoure d'un canal transparent la caro- tide, à son entrée dans le crâne, se porte sous la protubérance annulaire, y est entièrement isolée, ainsi qu'au niveau de ses prolongements antérieurs et des rainures qui la bornent, four- nit en même temps des gaines à la troisième, quatrième, cinquième, sixième et septième paires. 4°- 0° la v°it se diriger sur les parties latérales du cervelet, sur le commencement de la moelle épinière, sur les prolongements postérieurs de la protubérance annulaire ; elle est entièrement libre à l'endroit de l'é- chancrure. accompagne dans ces espaces les ^36 MEMBTUNE quatrième, huitième, neuvième, dixième pai- res, recouvre la vertébrale, et se continue en- suite dans le canal vertébral, où nous l'exami- nerons. XXVII. Ces nombreux replis de l'arachnoïde à la base du crâne se voient facilement, lors- qu'après avoir mis sans secousse le cerveau à découvert, on le soulève avec précaution en avant et sur les côtés. Les diverses gaines pa- roissent alors plus larges du côté du cerveau, plus étroites vers la dure-mère , sur laquelle toutes se réfléchissent à l'endroit où elle est percée, pour laisser passer le nerf ou le vais- seau. L'optique et le moteur externe font ex- ception à cette règle. Toutes sont lâches, sans adhérence avec l'organe qu'elles entourent, se rompent très-facilement, surtout celles de la première et de la quatrième paires, ce qui sans doute a empêché jusqu'ici qu'on ne les ait. décrites avec exactitude, se trouvent presque toujours dépourvues de la pie-mère, qui dis- paroît insensiblement très-près du cerveau et du cervelet. ARACHNOÏDE. 2ù~ § VI. Trajet de l'arachnoïde sur (a moelle épinière. XXVIII. Nous venons de voir l'arachnoïde enveloppant, sans les contenir, le cerveau, ses nerfs et ses vaisseaux, se continuant ensuite en arrière et en devant sur la moelle épinère. Arrivée là , elle forme une espèce d'entonnoir par lequel est embrassé ce prolongement mé- dullaire, et qui descend jusque sur les faisceaux nombreux qui le terminent. Dans ce trajet , voici comment elle se comporte: i° libre du côté de la pie-mère, elle ne lui tient que par un petit nombre de faisceaux vasculeux (i); 2° elle (1) L'arachnoïde rachidienne tient à la pie-mère, non-seuleinent par de petits vaisseaux qui se trouvent ça et là dans son trajet, mais encore par une cloison cellulo-vasculaire qui règne sur la ligne médiane en arrière de la moelle et forme une séparation presque complète entre le côté droit et le gau- che de la cavité sous - arachnoïdienne. Cette es- pèce de médiastin s'étend depuis la hauteur de la troisième ou quatrième vertèbre cervicale jusqu'à l'extrémité inférieure de la moelle; au-delà il n'y a plus qu'une cavité unique qui contient le liquide céphalo-spinal et les nerfs de la queue de cheval. 2 58 MEMBRANE fournit sur les côtés , au niveau de chaque nerf qui s'échappe par le trou de conjugaison, une enveloppe conique , qui l'accompagne jusqu'au canal fibreux que lui fournit la dure- mère , et qui, au lieu de s'y introduire, se réfléchit sur la surface interne de cette mem- brane : cette réflexion est rendue très-appa- rente . en coupant à son origine ce canal fi- breux , lequel devient alors un trou bouché par l'arachnoïde, qui y est rendue sensible par sa transparence; 5° en devant et en arrière, l'arachnoïde envoie aussi à la dure-mère des gaines membraneuses qui s'y épanouissent, et contiennent les vaisseaux de la pie-mère, les- quels se trouvent, ainsi que les nerfs verté- braux , hors de la cavité que lubrifie la sérosi- té ; 4° inférieurement l'arachnoïde se termine par une foule de replis, accompagnaut jusqu'à leur sortie les nombreux faisceaux qui termi- nent la moelle épinière , revenant ensuite sur la dure-mère, et formant ainsi en bas un cul- de-sac qui empêche la sérosité de s'infiltrer dans le tissu cellulaire , et sans lequel on ue pourroit concevoir les hydropisies du canal vertébral. XXIX. dette disposition de l'arachnoïde dans le canal vertébral est rendue très-sensible de ARACHNOÏDE. 2 39 la manière suivante : enlevez au canal verté- bral sa portion osseuse antérieurement et pos térieurement * ; mettez ainsi à découvert la moelle épinière encore entourée de sa triple enveloppe ; incisez longitudinalement et avec précaution en avant et en arrière la dure-mère, qui sera ensuite repliée sur les côtés; soufflez en haut de l'air avec un tube entre la pie-mère et l'arachnoïde : celle-ci se soulèvera en totalité, abandonnera la pie-mère sur toute la moelle épinière, et vous aurez ainsi un tube distendu par l'air, fournissant à chaque nerf et vaisseau une gaîne aussi distendue, et dont les parois transparentes vous laisseront voir au milieu la moelle épinière, la pie-mère, le ligament den- telé , etc. Quelquefois cette expérience ne réussît que des deux côtés , et l'arachnoïde reste collée en devant et en arrière à la pie- * Dans cette préparation, il arrive un phénomène qui établit bien évidemment la contraclililé des liga- ments jaunes et inter-épineux. C'est une forte rétrac lion de la colonne épinière, qui se recourbe en demi cercle lorsqu'après l'avoir dépouillée de tous ses muscles, on enlève en devant la colonne qui résulte des corps de toutes les vertèbres, et par conséquent l'appareii ligamenteux antérieur. '^40 MEMBRANE mère On fait presque ainsi par insufflation ce que l'on pratique par la dissection , lorsqu'on enlève , sans l'ouvrir, le péritoine de dessus tous les organes qu'il recouvre (1). § VII. Trajet de l'arachnoïde sur la dure-mère. XXX. D'après ce que nous venons de dire, il est évident que la totalité de la masse cé- rébrale est embrassée par l'arachnoïde, comme le cœur, le poumon, le foie, la rate, etc., par leurs membranes séreuses respectives , avec cette différence qu'ici les replis sont plus nom- breux par rapport au nombre beaucoup plus grand de nerfs et de vaisseaux. Il me reste , pour compléter l'aualogie , à démontrer que de même que chaque membrane séreuse, après avoir tapissé son organe, se réfléchit (1) L'auteur aurait dû faire la remarque impor- tante que l'arachnoïde a des dimensions beaucoup plus grandes qu'il ne faut pour contenir la moelle épinière , et qu'ainsi celte membrane devrait être plissée durant la vie. Mais il n'en est point ainsi ; la membrane est séparée de la moelle par le liquide céphalo-spinal. (Voyez mon Mémoire sur ce liquide, Journal de Physiol. , ïom. VII. ) ARACHNOÏDE. 9.l\ I ensuite sur les parois de la cavité où il est con- tenu ; de même l'arachnoïde, après avoir re- couvert le cerveau et ses prolongements, re- vient sur la dure-mère, dont elle revêt toute la face interne. XXXI. Psous avons vu les gaines nombreuses qui accompagnent les nerfs et les vaisseaux jus- qu'à leur sortie ou leur entrée par les trous du crâne et du canal vertébral , se réfléchir ensuite et se porter sur la dure-mère; là ils s'unissent tous et forment une membrane gé- nérale , recouvrant et la dure-mère et ses pro- longements , tels que la faux , la tente du cer- velet , qui se trouvent ainsi hors de la cavité du crâne , formant avec la portion qui revêt le cerveau le sac sans ouverture , que j'ai dit être représenté par l'arachnoïde , laquelle présente ainsi une portion cérébrale et une portion crâ- nienne , comme la plèvre a sa portion costale et sa portion pulmonaire. XXX1L Cette manière d'envisager l'arach- noïde paroîtra sans doute paradoxale d'après l'opinion commune desanatomistes , etd'ap. es les difficultés que l'on éprouve ordinairement à isoler par la dissection ce feuillet interne de la dure-mère. Mais je crois que les réflexions 16 2^2 MEMBRANE suivantes lèveront sur ce point toute espèce de donte. XXXIII. Si l'on dissèque, dans une étendue quelconque, la dure-mère de dehors en de- dans , en enlevant successivement ses diverses couches , on remarque que toutes sont dis- tinctement fibreuses, excepté la dernière qui est celluleuse, sans aucune fibre transparente, et telle en un mot qu'on voit l'arachnoïde dans les endroits où elle est libre par ses deux faces. XXXIV. Dans le fœtus et l'enfant, l'arach- noïde est distincte de la dure-mère, à laquelle elle tient par un tissu cellulaire peu serré. En commençant à la disséquer, i° sur le cerveau , 2° le long d'une des gaines dont j'ai parlé, 5° à l'endroit de la réflexion de cette gaîne, 4° sur la dure-mère, on voit très-manifestement sa continuité sur tous ces points , et elle peut être suivie très- loin sur le dernier. L'adhérence augmente avec l'âge, mais la nature reste dis- tincte : aussi le feuillet séreux du péricarde, très-lâchement uni, dans le premier âge, au centre phrénique du diaphragme, lui devient- il par la suite étroitement lié; aussi le -même feuillet séreux et le feuillet fibreux du péri- carde , quoique très-fortement adhérents sur ARACHNOÏDE. 2^.) les côtés , sont-ils essentiellement différents l'un de l'autre. XXXV. 11 est des endroits où l'arachnoïde est très- distincte de la dure-mère : ainsi, comme je l'ai dit, après avoir fourni uneguîne à la tige pituitaire, elle s'épanouit sur la glan- de du même nom , tandis que la dure-mère, passant dessous , tapisse la selle turcique. Ces deux membranes se réunissent ensuite. XXXVI. Le poli de la surface interne de la dure-mère dépend évidemment de la présence de l'arachnoïde. En effet, i° si l'on examine un des conduits fibreux que fournit la dure-mère du canal vertébral à chacun des nerfs qui en parlent, d'un côté on voit l'arachnoïde se ré- fléchir , comme je l'ai dit , au lieu d'y pénétrer; d'un autre côté, si l'on ouvre ce conduit , on observe qu'il ne présente plus d'aspect poli et luisant. La dure-mère ne doit donc point à elle- même ces caractères , mais à l'arachnoïde qui la tapisse. 2°. Quelquefois l'arachnoïde pénètre en partie dans ces conduits, et se réfléchit au milieu : alors ils sont en partie lisses , en partie rugueux et celluleux au-dedans. 5°. On sait que la dure-mère né présente point cet aspect lisse et poli dans le canal vertébral , à sa face externe , quoique cette face soit souvent libre S>44 MEMBRANE et sans adhérences. 4°- ^e Poli qu'on remar- que sur certains organes n'est jamais produit que par des membranes séreuses. Ainsi le cœur, le poumon, le foie, etc., doivent leur surface luisante et polie au péricarde, à la plèvre, au péritoine; la surface interne des coulisses ten- dineuses, à la capsule décrite par Albinus, Jungken, etc.; les articulations, à la mem- brane que j'y ai démontrée : en sorte que ce caractère extérieur des organes indique tou- jours une membrane séreuse qui les enveloppe, soit d'une manière serrée, comme les capsules des tendons , la portion de tunique vaginale correspondante à l'albuginée, la membrane synoviale, etc.; soit d'une manière lâche, comme le péritoine , la plèvre , etc. La dure- mère feroit-elle donc seule une exception à cette loi générale de l'économie animale? Qu'on ne dise pas que la compression déter- minée par les mouvements du cerveau peut produire cet effet : j'ai montré ce qu'il falloit penser de cette cause mécanique et des effets qu'on lui attribue. XXXV11. A la suite des inflammations où la dure-mère présente un épaississement re- marquable, effet d'une espèce de membrane accidentellement produite là comme a la plè- A11ACHNOÏIÎE. 245 vre, etc., on ne remarque ce phénomène qu'à la face interne et non à l'e\terne : or l'inflamma- tion a été la même partout ; donc ce change- ment ne lui est point propre , mais à l'arach- noïde qui la tapisse. XXX VIII. La surface interne de la dure- mère est le siège évident de l'exhalation de la sérosité cérébrale , puisque si on la met à dé- couvert dans un animal vivant et que l'on es- suie cette sérosité dans une étendue quelcon- que , elle y est bientôt reproduite. Or, jecrois avoir prouvé évidemment plus haut qu'il ré- pugne à la structure de la dure-mère d'être l'organe de cette exhalation ; donc c'est l'arach- noïde réfléchie à la surface interne de cette membrane qui est cet organe. XXXIX. Tout tend donc à nous persuader que la dure-mère est recouverte en dedans par un feuillet séreux venant de l'arachnoïde. L'adhérence seule peut ici jeter des doutes fa- ciles à lever, si l'on considère que la conjonc- tive adhère aussi à la cornée , la tunique va- ginale à l'albuginée, la capsule du tendon à sa gaîne , etc. , et que cependant ou ne révoque pas en doute l'existence de ces membranes. Je crois donc pouvoir établir comme un fait ana- lomique bien constaté, que l'arachnoïde, sem- 2^6 MEMBRANE blable en tout aux membranes séreuses , a sa portion cérébrale et sa portion crânienne par- tout continues entre elles , séparées par la sé- rosité, et continues seulement par les gaines qui contiennent les vaisseaux et les nerfs aux endroits où ces nerfs et ces vaisseaux sortent du cerveau , ou y pénètrent. XL. Au reste, quand je dis, en décrivant le trajet de l'arachnoïde, que du cerveau elle se porte sur les nerfs, de là sur la dure-mère, etc. . cette expression n'est destinée qu'à s'accom- moder à notre manière ordinaire de concevoir. Sans doute elle se forme en même temps sur tous ces organes, et se développe sur tous dans les mêmes proportions. Si cette manière de présenter la disposition de l'arachnoïde ré- pugne, surtout par rapport à la dure-mère, changeons nos expressions; disons qu'elle em- brasse seulement le cerveau , qu'elle fournit aux nerfs et aux vaisseaux des gaines qui se ré- fléchissent sur la dure-mère, comme l'inspec- tion le prouve évidemment , et se perdent en- suite sur cette membrane . dont la face in- terne, essentiellement différente par son orga- nisation, du reste de sa substance, est entiè- rement semblable sous ce rapport à l'arach- noïde. C'est là le point essentiel que cette iden- ARACHNOÏDE. 2^ tité d'organisation entre la face interne de la dure-mère et l'arachnoïde , identité qui ré- sulte -évidemment des faits exposés ci-dessus. Quant à la manière de présenter la chose, elle est indifférente. Que la dure-mère change d'organisation au-dedans et prenne celle de l'arachnoïde, ou que celle-ci se prolonge pour la tapisser, c'est la même idée présentée sous deux phases différentes. § VIII . Trajet de V arachnoïde dans (es ventricules. XLI. J'ai renvoyé à un article particulier l'examen de l'arachnoïde dans les ventricules . parce que ce fait, encore inconnu, mérite une attention particulière. En effet, tous les ana- tomistes ont dit que la pie-mère seule pénètre dans ces cavités pour les tapisser, après y avoir donné naissance aux plexus choroïdes. Je soupçonnois depuis long-temps que cette as- sertion est fausse, d'après les considérations suivantes : i°. La membrane qui revêt les ven- tricules et leurs diverses éminences, présente le même caractère, la même texture apparente que l'arachnoïde (1) , quoique plus mince en- (1) Ce qu'on peut appeler la membrane des ven- 2/|8 MEMBRANE core que celle-ci; elle en a l'aspect lisse et po- li; elle recouvre les vaisseaux sanguins, sans en contenir sensiblement dans son tissu , qui se trouve, excepté aux plexus choroïdes, essen- tiellement différent de celui de la pie-mère; 2° une rosée lymphatique s'en exhale sans cesse et y est sans cesse absorbée ; 3° il y survient de fréquentes hydropisies; 4° à la suite des inflam- tricules est bien loin d'avoir les mêmes caractères que l'arachnoïde. D'abord elle n'est visible qu'en certain point, comme la partie latérale des ventri- cules latéraux, encore faut-il procéder de dehors en dedans, et enlever successivement par couches la matière médullaire pour arriver à une dernière lame mince, qu'on peut à la rigueur regarder comme une membrane, mais qui pourrait être aussi une lame médullaire mince, résistante et polie. Dans beaucoup de poinls des ventricules, tels que les commissures antérieures ou postérieures, l'aqueduc de Sylvius, le quatrième ventricule, etc., il est absolument impossi- ble de découvrir une membrane. Il est un point où l'on voit distinctement dans certains cas une apparence membraneuse , c'est a la partie postérieure de la commissure des couches optiques, particulièrement .s'il y a eu durant la vie une accumulation de sérosité qui a distendu le troisième ventricule et allongé la commissure. ARACHNOÏDE. 2 |t) mations , on v a trouvé souvent des exsuda- tions muqueuses semblables à celles de l'arach- noïde et des autres membranes séreuses . ca- ractère qui n'appartient point à la pie-mère. XLII. Ces premières considérations me por- toient à supposer les ventricules tapissés , com- me l'extérieur du cerveau , d'une sorte de membrane en forme de sac sans ouverture , semblable à toutes les autres mrmbranes sé- reuses , et que sa ténuité déroboit à nos dissec- tions. Une autre réflexion me confirmoit dans cette idée : souvent les hydropisies des ventri- cules existent isolément, l'eau du sac extérieur de l'arachnoïde n'étant point augmentée; or, s'il n'y avoit pas dans les ventricules une mem- brane différente de la pie-mère , l'eau qui s'y trouve épanchée refluerait bientôt au-dehors , en s'infiltrant par les prolongements de cette dernière membrane, qui , de la base du crâne, remonte dans les ventricules par de nom- breuses ouvertures de communication. Il faut donc que ces ouvertures soient bouchées du côté des ventricules par une membrane : j'exa- minai en conséquence l'endroit où ces prolon- gements extérieurs de la pie-mère viennent se confondre avec les plexus choroïdes, et je vis en effet une toile très- mince passant sur eux , *j5o membrane les empêchant ainsi d'être contenus dans les cavités cérébrales , et se perdant ensuite, sur les éniiuences voisines , telles que les couches des nerfs optiques, les corps cannelés, les hippo- campes , etc. XLIII. Je ne doutai plus dès-lors, i° que ce qu on avoit pris dans les ventricule© pour un prolongement de la pie-mère ne fût une véri- table membrane séreuse , tapissant les parois dé ces cavités, et se reployant ensuite autour des plexus choroïdes situés véritablement hors de la poche ( i ) ; 2° qu'il n'y eût ainsi au-dehors et au-dedans un organe exhalant la sérosité, lui servant momentanément de réservoir, et la transmettant ensuite dans le torrent circula- toire; 5° que si la dissection ne pouvoit pas (i) Il faut avouei que Bichat se décide un peu lé- gèrement sur la question qu'il cherche à approfondir, et qu'il se laisse facilement entraîner a son aptitude à généraliser; il aurait dû, ce semble, avant de con- clure comme il le fait , s'assurer si la membrane existe dans toute l'étendue des cavités du cerveau; mais au contraire, quelques lignes plus bas, dans le même paragraphe, il convient, avec sa bonne foi ordinaire , que la dissection ne l'a pas conduit dans ce cas pas à pas , et qu'il raisonne par analogie. ARACHNOÏDE. 20 1 nous conduire ici pas à pas, l'analogie y sup- pléoit au moins d'une manière évidente. Mais une Question restoit à résoudre : cette mem- brane a-t-elle une existence isolée , ou est-elle une continuation de l'arachnoïde , dont elle partage la nature? L'inspection décide cette question. XLIV. J'ai dit qu'après avoir tapissé le corps calleux . l'arachnoïde descend sur le cervelet ; mais , en s'y prolongeant , on la voit s'enfoncer dans les ventricules par une ouverture ova- laire, située entre ces deux parties. Elle y em- brasse d'abord , de tous côtés , les veines de Galien et leurs nombreux prolongements, qui, en recevant chacun une enveloppe , ne se trou- vent point contenus dans le trou, quoiqu'ils le traversent en tous sens. Elle se prolonge en- suite sous ces veines entre la glande pinéale et les éminences quadrijumelles , et se termine enfin dans le troisième ventricule , en formant un canal distinct (i). (1) Ici Bichat est tombé dans l'erreur : ce canal n'exisle pas; l'arachnoïde recouvre en effet les veines de Galien , mais elle se replie bientôt pour passer sur le cervelet : quelquefois seulement elle forme un petit cul -de -sac d'une ligne au plus de pro- 2 52 MEMBRANE XLV. Pour trouver ce conduit , il faut scier le crâne avec précaution , enlever très - légè- rement la faux, de peur que les secousses qu'on lui imprime ne se communiquent à la tente du cervelet , aux veines de Galieu et à la portiond'arachnoïdequi vient du corps calleux, ne déchirent cette portion et en même temps ne détruisent l'ouverture; ce qui arrive dans le plus grand nombre des cas où l'on n'a point ces attentions. Le cerveau étant à découvert , on soulève chaque hémisphère en arrière , en l'écartant un peu en dehors. Les veiues de Ga- lien paroissent alors sortant d'un canal qui les embrasse , et dont l'orifice ovalaire est très-ap- parent ( i ) . fondeur, el qui pourrait faire croire à 1 orifice d'un conduit. D'ailleurs un canal ne pourrait passer entre la glande pinéale et les tubercules quadrijumeaux; c;ir une lame médullaire, que je nomme la valvule de la glande pinéale, va du rebord de la commissure postérieure jusqu'à la glande , en remplissant tout l'intervalle compris entre ces parties et se confon- dant avec elles. (1) Ce qu'on voit alors n'est que l'enlrée du cul- de-sac dont j'ai parlé: avec la moindre attention, il est très-facile de s'en assurer. \n VCHNOÏDE. â5â XLVI. Quelquefois cependant les bords de l'orifice embrassent tellement les veines, qu'on ne peut les distinguer, et qu'on croiroit, au premier coupd'œil, qu'il y a continuité. Glis- sez alors un stylet le long de ces vaisseaux d'ar- rière en avant; quand il aura pénétré un peu , faites-le tourner tout autour; il dégagera les adhérences , et l'ouverture deviendra très-sen- sible (1). XLVII. Pour s'assurer que cette ouver- ture mène dans le troisième ventricule , il faut introduire un stylet crénelé , l'engager sous les veines de Galien, le pousser douce- ment; il pénètre sans peine (2). On enlève en- (1) Toujours vrai et d'accord avec lui-même, Bichat ne peut s'empêcher de remarquer que souvent on n'a- perçoit pas l'ouverture, et le moyen qu'il donne est bien propre à faire douter de son existence, car rien n'est si facile que de faire une apparence d'ouverture en faisant mouvoir un stylet autour des veines de Galien. (2) Ce moyen est encore très-défectueux? car il est évident qu'on fera, toujours un canal en poussant un stylet à travers des vaisseaux fins et déliés, comme ceux qui avoisinent les veines de Galien; et quand on vient à inciser sur le trajet, rien n'est si facile que de s'en laisser imposer. Encore Bichat convient-il ^54 MEMBRANE suite le corps calleux et la voûte à trois piliers , de manière à laisser en place la toile choroï- dienne ; on incise sur le stylet , et l'on voit que, dans tout son trajet, la membrane, lisse et polie, n'a point été déchirée pour le laisser pénétrer. Quelquefois on éprouve de la rési- stance, on ne peut même le faire parvenir : ce- la tient à ce que les veines qui viennent se dé- gorger dans celles de Galiens'entre-croisant en tous sens dans le canal, le rendent, pour ain- si dire , aréolaire et arrêtent l'instrument. 11 faut alors le retirer, et, pour démontrer la communication, verser dans le trou extérieur du mercure (1) , qui, par la position inclinée que quelquefois ou éprouve de la résistance, et que le stylet ne parvient pas; et la raison qu'il en donne est remarquable : les veines qui viennent se dégor- ger dans les veines de Galien , s'accroissent en tous sens dans le canal, et le rendent pour ainsi dire aréolaire, et arrêtent l'instrument. Il faut conveuir qu'un canal où des veines s'accroissent en tous sens jusqu'au point de le rendre aréolaire, ne ressemble guère h un canal. (1) Cette expérience ne prouve rien; car si ou a fait une déchirure avec le stylet, nu! doute que le mncure ne coulera dans le ventricule moyen; mais ARACHNOÏDE. 2J.) de la tête , parvient tout de suite dans le troi- sième ventricule. En soufflant aussi de l'air, il parvient dans le troisième ventricule, et de là dans les latéraux par les ouvertures antérieures, exactement décrites par Vicq-d'Azyr. Si on en- lève avant l'insufflation la voûte à trois piliers, et qu'on mette à nu la toile choroïdienne, elle se soulève chaque fois qu'on pousse de l'air. XLVIII. L'orifice interne de ce conduit de communication , caché dans la partie infé- rieure de cette toile choroïdienne, ne se voit que difficilement; et même si l'on verse un fluide dans le troisième ventricule, il ne res- sort pas au-dehors, parce que sans doute ses bords s'affaissent sur eux-mêmes et lui font obstacle (1 ). il faut pour cet essai que les parties soient intactes, et alors jamais aucune parcelle de mercure ne par- vient flans le ventricule, à moins d'une rupture. (1) Bichat convient que l'orifice interne du canal ne se voit que difficilement; il semble même ne l'a- voir jamais vu. Cependant si on peut suivre le canal membraneux, et si on peut y introduire un stylet , il ne doit pas être plus difficile de voir l'orifice interne que l'externe. Et comme pour donner des argu- >56 MEMBRANE XLIX. Il paroît donc, d'après ce qui vient d'être dit, i° que la membrane des ventricu- les, analogue par son apparence et sa nature à l'arachnoïde , en est un prolongement , et que le moyen de communication entre elles est le ca- nal dont j'ai parlé (1) ; 2° que ce prolongement, plus mince encore que l'arachnoïde déjà si lé- nue, se déploie d'abord sous le troisième ven- tricule (2) ; 5° descend en arrière par le cala- mens contre lui-même, poussé par son bon esprit, il remarque que si on verse un fluide dans le troi- sième ventricule, il ne ressort pas au dehors; sans doute , dit-il , parce que les bords de l'orifice s'aflais- sent sur eux-mêmes et lui font obstacle. Cette raison est la plus faible de toutes; car pourquoi les bords de l'orifice s'affaisseraient ils? d'ailleurs, lors des grandes accumulations de liquide dans les ventri- cules, on ne le voit jamais passer dans la cavité de l'arachnoïde : si le canal dont parle Bichat existait , le liquide accumulé devrait y pénétrer constamment. (1) Il est au contraire évident, par tout ce qui pré- cède, que si ia membrane qui se voit dans les ventri- cules ressemble par sa ténuité à l'arachnoïde, elle ne se continue pas avec elle. (2) Bichat décrit ici d'imagination , car il est im- possible de voir de membrane qui revête entièrement ARACHNOÏDE. 2J~ mus scriptorius dans le quatrième, qu'il re- vêt et où il bouche les ouvertures par lesquel- les pénètre la pie-mère pour apporter les vais- seaux (1) ; 4° se porte en devant à travers les deux trous de communication des ventricules latéraux, trous qu'on ne voit bien qu'en com- mençant la dissection du cerveau par sa base ; tapisse ces ventricules et leurs éminences; 5° se réfléchit sur les plexus choroïdes, bouche, tout le troisième ventricule ; dans certains cas seulement il existe une sorte de replis d'apparence membraneuse derrière la commissure des couches optiques. (i) Je n'ai jamais pu voir aucune trace de mem- branes dans PaqueducdeSylvius, ni sur la valvule de Vieuseus, ni dans le quatrième ventricule; encore moins voit-on une lame membraneuse qui fermerait «m bas le quatrième ventricule ; il y a au contraire h cet endroit une ouverture normale et libre par laquelle le liquide du rachis peut entrer dans les ven- tricules du cerveau, et réciproquement, par laquelle un liquide contenu dans les ventricules arrive dans la cavité sous-arachnoïdiennede l'épine. Cette ouver- ture est constante, et quelquefois assez large pour qu'on puisse y introduire une très-grosse plume. Je l'ai nommée entrée des cavités du cerveau. ( Voyrr mon Journal de Physiologie, tom. VII. ) 2 58 M FM F. P, .4 NE le long de la concavité des hippocampes, la communication qu'il y a entre ces cavités et l'extérieur, communication par laquelle s'in- troduit la pie-mère pour se continuer avec le plexus choroïde , lequel est principalement produit par le prolongement de cette même membrane, qui pénètre entre l'ouverture dé- crite ci-dessus et la voûte à trois piliers (1). L. D'après ce qui vient d'être dit, il est évi- dent que la membrane séreuse tapissant les ventricules est à l'arachnoïde ce qu'est au pé- ritoine celle de la cavité des épiploons , et que la plus parfaite analogie existe entre l'ouver- ture que j'ai décrite et l'ouverture située sous la vésicule du fiel, et qui mène à cette cavité. LI. On conçoit facilement par là un phéno- mène que l'ouverture des cadavres otFre quel- quefois. On trouve les ventricules très-disten- dus, leur cavité doublée, triplée même , et ce- pendant presque point de sérosité, tandis qu'il y en a beaucoup a la base du crâne. L'eau n'a (i) Bichat continue à décrire, poussé par le be- soin d'analogie; mais sa description ne se soutient point à l'inspection attentive des objets dans ieur état d'intégrité. ARACHNOÏDE. 2 0Q pu s'échapper par aucun endroit que par l'ou- verture dont j'ai parlé , le cadavre s'étant trou- vé couché sur le dos, la tête renversée (1). J'observe à ce sujet qu'un signe certain de la dilatation des ventricules, qui ne paroît pas toujours aisé à distinguer sur un cerveau non incisé, c'est la diminution des anfractuosités , repoussées alors en dehors , et le moins de sail- lie des circonvolutions , en sorte que la sur- face cérébrale est presque unie dans tous ses points. Ce signe ne m'a jamais trompé (2). LU. Je crois que, d'après tout ce qui a été dit dans cet article , il seroit difficile de révo- quer en doute l'analogie que présente l'arach- noïde avec les membranes séreuses par sa con- formation. Comme elles , on la voit se dé- ployant, et sur l'organe auquel elle appartient, (1) La remarque de Bicliat est juste, mais l'ex- plication est mauvaise. Le liquide, dans ce cas, s'é- chappe par l'ouverture du quatrième ventricule; et, si l'on y met un peu d'attention , on voit que le li* quide est entre la pie-mère et l'arachnoïde, et non point dans la cavité de cette dernière, lieu où il de- vrait se trouver d'après l'explication de notre au- teur. (2) Cette observation csi très-juste. 260 MEMBRANE et sur la cavité qui le renferme ; former un sac sans ouverture, où se ramasse la sérosité; em- brassant les nerfs et les vaisseaux, et leur for- mant des gaines qui les empêchent detre con- tenus dans ce sac; enfin s'enfonçant dans les ventricules et y formant un grand appendice analogue à celui qu'envoie le péritoine sous l'estomac et le colon, au-devant du pancréas et du duodénum, etc. LUI. ÎNous pouvons donc, sans crainte d'er- reur, résoudre le problème proposé au com- mencement de cet article , sur la confor- mation de l'arachnoïde , en établissant la proposition suivante : L 'arachnoïde 3 par sa conformation et son trajet, appartient à la classe des membranes séreuses (i). L1V. Mais nous avons vu plus haut que, par sa nature intime , l'arachnoïde doit être aussi rangée dans la même classe de membranes ; (i) Getle conclusion est juste, en en séparant tout ce qui a élë avancé par Bichat touchant l'introduc- tion de l'arachnoïde dans les ventricules. Mais la rectification de celte erreur étant faite, l'arachnoïde n'en présente que d'une manière plus apparente et plus régulière les caractères des membranes sé- reuses. ARACHNOÏDE. 26 1 nous pouvons donc prononcer avec certitude que l'arachnoïde, sous tous les rapports, est une membrane essentiellement séreuse. SECTION IV. Conclusion générale. LV. Les faits multipliés, exposés dans ce mé- moire, nous permettent de présenter ici quel- ques vues générales, qui n'en seront pour ainsi dire que les conclusions. Elles ont rap- port aux maladies et aux fonctions de l'arach- noïde. LVI. Il paroît que, dans l'inflammation du cerveau et de ses membranes , l'arachnoïde joue un rôle essentiel. C'est elle qui doit faire rapporter cette inflammation à celle des mem- branes séreuses ou diaphanes. Si la dure-mère participe à ces affections, c'est à cause du feuil- let interne qui la tapisse. Une expérience rend ceci très -manifeste. Mettez sur un animal la dure-mère à découvert, dans une étendue as- sez considérable de sa surface externe; inci- sez-la de manière à exposer aussi à l'air sa sur- face interne : celle-ci sera beaucoup plus vite enflammée que l'autre, car elle deviendra bien 2Ô2 MEMBRANE plus vite rouge, et surtout plus promptement sensible à l'impression des irritans extérieurs, qui est nulle pour l'animal, dans les premiers instante de l'opération (1). Sans doute que dans les inflammations du cerveau, la dure-mère ne tarde pas à s'enflammer aussi ; mais le siège primitif du mal paroît être dans l'arachnoïde. Ne sait- on pas d'ailleurs que ce n'est guère qu'à la surface interne de la dure-mère, qui est tapissée par elle , ainsi qu'à la surface du cerveau, qu'on observe l'exsudation purulente et les membranes contre nature , qui sont le résultat de ces inflammations? Au reste, il pa- roît, par l'observation des maladies, que l'in- flammation des membranes fibreuses, telles que la dure-mère, est beaucoup plus lente dans ses progrès que celle des membranes sé- reuses. L'inflammation du périoste, comparée à celle de la plèvre, en est une preuve. LY1I. Quoique les hydropisies de l'arach- noïde présentent des phénomènes analogues à ceux des autres membranes séreuses, et qu'on (1) J'ai déjà dit que ce fait, ainsi présenté d'une manière exclusive, n'est point exact ; souvent la dure- mère est d'une grande sensibilité, particulièrement dans le voisinage des sinus. AT'. ICHNOÏDB. 265 puisse alors la regarder comme un grand ré- servoir accidentellement plein de sérosité, in- termédiaire aux exhalants qui continuent leurs fonctions, et aux absorbants qui les ont ces- sées; cependant il se rencontre quelques dif- férences assez notables (i). i°. Dans l'hydropi- sie générale, où tout le système lymphatique est frappé d'atonie, où tout le tissu cellulaire s'infiltre , toutes les cavités se remplissent , celle-ci échappe presque constamment à la loi générale. 2°. L'hydropisie de l'arachnoïde est plus particulière à l'enfant, au fœtus; celle du péritoine , de la plèvre , de la tunique vagina- le, du péricarde, plus souvent observée chez l'adulte. Cela tiendroit-il , pour l'arachnoïde, à la concentration des forces sur la tête, dans (1) Dans le plus grand nombre des cas, ce que Bichat appelle bydropisie de l'arachnoïde, est tout simplement ou l'étal sain du liquide céphalo-spinal , ou l'augmentation morbide de ce liquide; et dan» l'un et l'autre cas le liquide n'est point contenu dans la cavité de l'arachnoïde, mais se trouve en rapport avec la face externe ou cérébro-spinale Ho son feuillet libre ou interne. Les accumulations de liquides, purulens ou autres, sont très-rares dans la véritable cavité de l'arachnoïde. 264 MEMBRANE ARACHNOÏDE. le premier âge, époque à laquelle la nature, obligée de perfectionner simultanément tous les organes de la vie de relation qui s'y trou- vent, semble négliger les autres parties, pour doubler le travail de la nutrition dans celle-ci? On sait en général que les premiers instants de l'existence sont, plus que tous les autres, sujets aux maladies de la tête. 5°. Une circonstance influe sans doute aussi sur la différence des hy- dropisies de l'arachnoïde, c'est qu'il y a beau- coup moins de vaisseaux absorbants, de ceux au moins qui sont sensibles dans nos prépa- rations, à la tète que partout ailleurs, comme l'ont prouvé les recherches des anatomisles modernes, italiens, anglois, et allemands. LMII. Je ne parle point ici de l'usage qu'a l'arachnoïde d'isoler le cerveau des organes voisins, et de rendre par là sa vie indépendante de la leur : j'ai envisagé ailleurs cette fonction générale des membranes séreuses. TRAITE Dli LA MEMBRANE SYNOVIALE I. Aucune partie de la physiologie des os n'a- bonde plus en hypothèses et moins en décou- vertes, que l'histoire du système synovial. Beaucoup de dissertations et peu de faits ; lon- gue série de principes supposés; court ensem- ble de preuves : voilà presque l'analyse des tra- vaux connus jusqu'à ce jour sur ce point. Les notions acquises jettent ici peu de jour sur celles à acquérir. 11 faut pour ainsi dire envisa- ger les choses sous un aspect nouveau : c'est ce que je vais essayer dans ce Traité^ qui a pour but de faire connoître, i° le mode par lequel la synovie est trausmise aux surfaces articu- laires; 2° la disposition générale de la mem- brane synoviale, agent essentiel de cette trans- mission ; 5° les dispositions particulières de cette membrane dans les diverses articulations. 266 MEMBRANE ARTICLE PREMIER. Du mécanisme par lequel la synovie est transmise aux articulations. II. Tout fluide différent du sang ne peut s'en séparer pour être ensuite transmis à un organe, que par un des trois modes suivants: i° par sécrétion, fonction caractérisée par l'exi- stence d'une glande intermédiaire aux vaisseaux sanguins, qui en apportent la matière, et aux vaisseaux excréteurs , qui en exportent le ré- sultat ; 2° par exhalation , fonction distinguée de la première par l'absence de cette grande intermédiaire, et par l'immédiate continuité du vaisseau sanguin et du conduit exhalant*; * Cette distinction entre la sécrétion et l'exhala- tion ne porte que sur les caractères sensibles et ob- servables à l'œil. Il est assez probable en effet qu'il existe aussi dans les glandes une immédiate commu nication entre le vaisseau sanguin et le conduit excré- teur, en sorte que la différence des deux fonctions ne paroît tenir qu'aux replis plus nombreux, à l'entre lacement plus compliqué des deux vaisseaux pour la sécrétion, à leur trajet plus court, à leur marche plus directe pour l'exhalation. SYNOVIALE. 267 3° par transsudation , phénomène purement physique, presque toujours cadavérique, rare- ment observé pendant la ue; simple transmis- sion d'un fluide par les pores d'un organe, vers lesquels il est mécaniquement déter- miné (1). Examinons quel. est de ces trois mo- des celui choisi par la nature pour déposer la synovie sur les surfaces articulaires. § Ier. La synovie est- elle transmise par sécrétion aux surfaces articulaires? III. Nous devons à Clopton Havers le systè- me qui place dans les glandes les sources de la synovie. Casserius, Dùlaurens, Séverin, Fa- (1) Bichat a eu malheureusement l'esprit imbu du préjugé que la condition de la vie excluait les phénomènes physiques; cette erreur a exercé une très-fâcheuse influence sur tous ses écrits. Ici, par exemple, il est aujourd'hui démontré que la trans- mission d'un fluide par les pores d'un organe est un phénomène physique général et commun à tous les tissus et a toutes les membranes, et qui se produit d'au- tant plus complètement que les parties sont vivantes. Ce phénomène est si général, qu'un physiologiste ingénieux, mais qui u'esî pas toujours assez en gardr: 26S MEMBRA.Nh brice d'Aquapendente , avoient confusément désigné ces organes dans les articulations. Cow- per crut aussi les y apercevoir, mais Havers en fît l'objet particulier de ses recherches, les dé- crivit dans les diverses articulations, les dis- tingua en deux classes, Tune principale, l'au- tre accessoire, leur assigna des caractères si évidents selon lui, qu'on ne peut les y mécon- noître. IV. Pelotons rougeâtres, spongieux, formés de membranes reployées sur elles-mêmes, si- tués tantôt en dehors, tantôt en dedans des articulations , toujours disposés de manière à être à l'abri d'une trop forte compression, ver- sant par des conduits en forme de franges le fluide qu'ils séparent : tels sont les caractères que tous les anatomistes admirent d'après lui, et dont Winslow, Haller, Monro, Albinus, Ber- tin, consacrèrent surtout la réalité dans leurs ouvrages. Y. Quelques anatomistes de ce siècle ont ce- contre les leurres de l'imagination, n'a pas craint de proclamer que celte propriété physique était l'élé- ment fondamental de la vie et le priucipe vital lui même. SYNOVIALE. 269 pendant jeté des doutes sur ces corps glandu- leux. Lieutaud les confond avec le tissu cellu- laire graisseux ; Desault ne les en distinguoit point. Tout m'a confirmé dans la même opinion, qu'une foule de considérations pa- roissent établir d'une manière indubitable. Je vais successivement exposer ces considérations. VI. Ces peletons rougeâtres ne se rencon- trent que dans certaines articulations. 11 en est plusieurs où leur existence ne peut être éta- blie que par supposition. Le plus grand nom- bre des capsules muqueuses des tendons n'en présentent certainement aucun, quoique Ha- vers, Albinus, Jungken et Fourcroy les admet- tent dans toutes, fondés sans doute sur l'ana- logie, et non sur l'inspection ; cependant la sy- novie se sépare également dans ces deux cas, et lubrifie les surfaces des articulations et des gaines tendineuses. Cette séparation est donc indépendante de l'action glanduleuse. VII. Si l'on examine les glandes synoviales les mieux caractérisées, telles que celle de la cavité cotyloïde, on n'y découvre aucune trace de ce parenchyme , inconnu dans sa nature , mais remarquable par sa structure, qui com- pose en général les glandes, et qui. les distin- 2*0 MEMBRANE guant de tout autre partie, forme leur vérita- ble caractère organique. VIII. Aucun conduit excréteur ne peut être démontré dans ces organes. Ceux en forme de frange , admis par Havers , sont imaginaires. Bertin lui-même a reconnu cette vérité, quoi- qu'il attribuât à ces corps une structure glan- duleuse. La transsudation des fluides injectés par les artères voisines de l'articulation ne prouve pas mieux l'existence de ces conduits, qu'elle ne l'établit dans la cavité des membra- nes séreuses, où elle a lieu également, et où ce- pendant il est bien prouvé qu'aucune glande ne verse l'humeur albumineuse qui lubrifie habituellement cette cavité. IX. L'insufflation résout entièrement en tissu cellulaire ces pelotons graisseux. La ma- cération produit le même effet. Lorsqu'une ébullition long -temps continuée et amenée par degrés en a enlevé toute la graisse, il ne reste qu'un amas de cellules affaissées les unes sur les autres, et semblables à celles du tissu cellulaire ordinaire. X. Le caractère glanduleux se prononce dan9 certains cas pathologiques par une tuméfac- tion. un endurcissement particulier, dont les SYNOVIALE 27I organes autres que les glandes, tels que les muscles , les tendons , etc. , n'offrent jamais d'exemple. Le foie , les reins, les organes sali- vaires, toute les glandes sensibles sont remar- quables par là. Telle est même la vérité de ce caractère, qu'il sert à indiquer des glandes que leur ténuilé nous dérobe dajns l'état natu- rel. Par exemple, l'existence des cryptes de l'estomac, de l'urètre, et de plusieurs autres membranes muqueuses , est fondée d'abord sur l'analogie des autres membranes de cette classe, mais principalement sur le développe- ment accidentel que ces cryptes acquièrent dans certaines maladies. Jamais au contraire les prétendues glandes synoviales n'offrent à l'observateur un semblable développement. Toujours, dans les maladies des articulations, un engorgement commun semble les identifier au tissu cellulaire voisin. Elles n'ont point, comme les autres glandes, des affections isolées de celles de ce tissu, sans doute parce qu'elles n'ont point une vitalité propre; parce que, simples prolongements du tissu cellulaire voi- sin, elles en partagent la nature, les proprié- tés, et doivent par conséquent participer à tous les états où il se trouve, comme lui à son tour 2^2 MEMBRANE doit immédiatement recevoir l'influence fle leurs affections. XI. Les considérations que je viens de pré- senter successivement forment, je crois, une somme de données suffisantes pour résoudre le problème proposé ci-dessus , en établissant la proposition générale suivante : La synovie n'est point transmise par sécrétion aux surfaces articulaires (1). Passons au second mode de transmission indiqué par les auteurs. § II. La synovie est-cilc transmise par transsudation aux surfaces articulaires ? XII. C'étoit une opinion anciennement re- (1) Si le sens du mot sécrétion est restreint à un appareil sécréteur glanduleux avec un canal excré- teur, il est évident que la synovie n'est pas sécrétée. Mais si on regarde comme organe sécréteur une dis- position organique dont le but est de séparer du sang un liquide destiné à des usages distincts, il est clair que la synovie est sécrétée, non-seulement par la membrane synoviale, mais aussi parles franges vasculaires dont il vient cPèlre fait mention dans le iexte. SYNOVIALE. U~3 eue, que la moelle des os longs suinte par les pores de leurs extrémités et par ceux des car- tilages qui les terminent , pour lubrifier les surfaces articulaires. Havers renouvela cette idée, oubliée à l'époque où il écrivoit, unit cette source de la synovie à celle qu'il a voit placée dans les glandes, et forma ainsi de cette humeur un mélange composé de deux fluides différemment transmis à l'articulation. La plu- part de ceux qui le suivirent, partagèrent son opinion sur ce point. Ceux mêmes , tels que Desault, qui rejetèrent l'existence des glandes articulaires, et par là même la sécrétion de la synovie, en admirent la transsudation, fondés sur les observations suivantes : i°. Un os long, dépouillé de ses parties molles , et exposé à l'air, laisse échapper par les porosités de ses cartilages un suintement graisseux , qui ne cesse que quand le suc médullaire est complè- tement épuisé. 2°. La compression mécanique de l'extrémité cartilagineuse d'un os long pro- duit momentanément le même phénomène. Ces faits, évidents pour l'os qui est mort, sont- ils aussi réels dans celui qui vit? Diverses con- sidérations que je vais exposer me conduisent à penser le contraire. XIII. La force vitale, dont l'effet est d'im- 18 2}4 MEMBRÀHE primer à tous les organes qu'elle anime un de- gré de ton suffisant pour résister à l'abord des fluides, laisse, en s'évanouissant, les fibres de ces mêmes organes dans une laxité qui les rend partout perméables. Aussi Ja transsudation n'est-elle presque plus aujourd'hui considérée que comme un phénomène purement cadavé- rique , qui , transformé ici en phénomène vi- tal, offriroit une exception manifeste aux lois de la nature, que caractérisent surtout la sim- plicité et l'uniformité. XIV. Le suintement graisseux a lieu dans l'expérience indiquée ci-dessus, non- seule- ment par les pores de cartilages, mais encore à travers ceux de toute la surface de l'os; en sorte qu'en raisonnant d'après ce qu'on ob- serve ici sur le cadavre, il est évident que pen- dant la vie l'os entier devroit être, pour ainsi dire, plongé dans une atmosphère de synovie; conséquence qui, prouvée fausse par la plus simple inspection, démontre la fausseté du principe dont elle découle. XV. Les articulations des cartilages du la- rynx sont lubrifiés, comme celles des os, par le fluide synovial ; et cependant ici toute trans- sudation de moelle est impossible, puiqu'elle n'existe point dans la substance des cartilages. XVI. La moelle est presque toujours intacte -SYNOVIALE. -2 - 5 dans les maladies qui, affectant les articula- tions, altèrent l'humeur qui les lubrifie. Réci- proquement la synovie ne prend point un ca- ractère différent dans les affections de l'inté- rieur des os, qui portent sur l'organe médul- laire leur influence spéciale. Une expérience m'a confirmé ce fait, que démontrent d'ail- leurs les diverses maladies des os. J'ai ouvert sur les côtés deux os longs d'un des membres postérieurs d'un chien , de manière à y faire parvenir un stylet rougi, qui, ayant été porté à plusieurs reprises, a détruit complète- ment les deux systèmes médullaires. La né- crose a été le résultat assez prompt de cette ex- périence , faite déjà par Troja , mais qui m'a offert un résultat qui lui est échappé ; c'est l'intégrité de l'articulation qui unissoit tes deux os nécrosés. Ce phénomène, constaté par plusieurs expériences, lève tous les doutes sur la non-transsudation de la moelle pour former la synovie. Ce fluide n'auroit-il pas en effet cessé d'humecter l'articulation à la suite de la destruction de l'organe médullaire, si cette transsudation étoit réelle pendant la vie? XVII. Desault, pour expliquer la manière dont la synovie se sépare du sang, ajoutoit à cette prétendue transsudation de la moelle un 276 MEMBRANE suintement fourni par toutes les parties conte- nues dans l'articulation , telles que les liga- ments capsulaires et inter- articulaires, les graisses internes, les cartilages, etc. Une com- paraison suffira pour apprécier cette hypothè- se. Que diroit-on d'un système où, pour ex- pliquer la production de l'humeur séreuse du bas-ventre, on en placeroit la source dans le foie, la rate, les intestins, et en général dans tous les organes de cette cavité? Sans doute on répondroit qu'un fluide identique par sa na- ture ne sauroit être fourni par des parties de structure si différente, qu'il est bien plus sim- ple d'en chercher la source unique dans l'uni- que membrane qui revêt tous les viscères gas- triques. L'application est exacte, et l'analogie complète pour la cavité articulaire. XVIII. Nous pouvons, je crois, sans crainte d'erreur, conclure de tout ce qui a été dit ci- Jessus, que la synovie n'est point transmise par transsudation aux surfaces articulaires (1). Je c 1) Il y a une raison plu» forte que toutes celles, d'ailleurs excellentes, que vient de donner Bichal; c'est que la synovie est un fluide dont la composi- tion chimique est très - différente de celle de la moelle. SYNOVIALE. 277 passe au dernier mode, indiqué pour la sépa- ration de la synovie. § III. La synovie est-elle transmise far exhalation aux surfaces articulaires ? XIX. La solution des deux problèmes pré- cédents semble naturellement amener celle de la question que nous nous proposons ici. En effet, voici deux données sur la certitude des- quelles on peut, je crois, compter : i° la sé- crétion , l'exhalation et la transsudation sont les seuls moyens par lesquels un fluide diffé- rent du sang peut être transmis à un organe; -2° la sécrétion et la transsudation sont étran- gères à la transmission de la synovie. Or, de ces deux données certaines ne peut-on pas ti- rer cette conséquence certaine aussi : l'exha- lation est le mode par lequel la synovie est ap- portée aux articulations? Mais ajoutons a ces preuves négatives des considérations qui éta- blissent positivement cette proposition. XX. Les rapports les plus frappants s'obser- vent entre la synovie et le fluide qui lubrifie les parois des membranes séreuses. i°. Rapport de composition. Ces deux fluides sont essen- tiellement albumineux ; l'albumine prédomine 2~S MEMBKAiNE y dans tous deux, quoiqu'un peu différente dans l'un et l'autre. Havers avoit déjà indiqué cette analogie; il savoit que ces deux fl uides sont coa- gulables par l'alcohoi, les acides, le calorique, sans connoître le principe auquel est due cette propriété (1). 2°. Rapport de fonctions. Tous deux sont destinés à lubrifier des surfaces où s'exerce beaucoup de mouvement, à diminuer le frottement qui en est l'inévitable effet, à préve- nir les adhérences funestes; tous deux sont dans le même état sur leurs surfaces respectives : c'est une rosée qui se répand sur ces surfaces, et qui bientôt y est reprise. 3°. Rapport d'affec- tions. L'inflammation tarit la source de l'un et l'autre, et détermine des adhérences plus com- munes dans les membranes séreuses, plus ra- res dans les articulations , où elles produisent l'a-nkylose ; tous deux sont sujets à des aug- mentations contre nature, qu'un mot commun désigne, celui dliydropisic. 4° Rapport d'absorp- (i^.De semblables rapprochemens étaient permis ii l'époque où écrivait Bichat; mais les progrès de l'analyse chimique animale ne les permettraient plus aujourd'hui. Nous savons en effet qu'il existe de grandes différences de composition entre la synovie et la sérosité. SMNOMALE. ^9 tion. Le système lymphatique est pour tous deux la voie par laquelle ils rentrent dans la circulation, après avoir suffisamment séjourné sur leurs surfaces respectives (1). XXI. Ces divers rapprochements, qui, à quelques différences près dans la composition, associent si visiblement la synovie à l'humeur des membranes séreuses, ne nous mènent-ils pas à cette conséquence bien simple; savoir, que ces deux fluides étant analogues sous tous les autres rapports, doivent l'être aussi par la manière dont ils sont séparés de la masse du sang? Or, c'est un point de physiologie aujour- d'hui généralement reconnu , que l'humeur des membranes séreuses y est apportée par ex- halation; donc nous sommes évidemment con- duits d'induction en induction à celle-ci, qui répond à la question proposée ci-dessus : La synovie est transmise par exhalation aux surfaces articulaires. Cette induction précise, rigoureuse, tirée de (i) Ceci est encore une erreur où personne ne tomberait plus. Chacun sait en effet que le système lymphatique joue un rôle très-restreint dans l'ab- sorption , et que cette fonction est essentiellement exercée par les veines. 280 MEMBRANE faits palpables et constants, deviendra, je crois, une vérité démontrée , si aux analogies précé- demment établies nous ajoutons celle de l'or- gane membraneux , siège essentiel de l'exhala- tion de la synovie. Nous allons nous occuper de cette membrane dans l'article suivant. ARTICLE II. De la Membrane synoviale, considérée en général. XXII. Nous avons vu , dans le Traité des membranes en général , toutes les grandes cavi- tés tapissées d'une membrane séreuse, qui for- me , par ses replis , une espèce de sac sans ou- verture , lequel embrasse et les organes et les parois de la cavité. Il existe dans toutes les ar- ticulations mobiles une membrane exactement analogue, dont les usages sont les mêmes , dont la nature n'est point différente, et que j'appelle synoviale, parce que ses parois exha- lent et absorbent sans cesse la synovie. § 1". Organisation extérieure de ta Membrane synoviale. XXI II. On doit donc concevoir toute mem- SYNOVIALE. 28l brane synoviale comme une poche non ouver- te , déployée sur les organes de l'articulation , sur les cartilages diarthrodiaux , sur la face interne des ligaments latéraux et capsulaires , sur la totalité des ligaments inter -articulaires lorsqu'ils existent, sur les paquets graisseux saillant dans certaines cavités articulaires, etc. C'est d'elle que ces divers organes empruntent l'aspect lisse , poli, reluisant, qui les caracté- rise dans ces cavités , et qu'ils n'ont point ail- leurs. De même qu'en disséquant exactement les organes gastriques , on pourroit enlever le péritoine, son sac restant intact ; de même on concevroit la possibilité de séparer et d'isoler cette membrane , sans les intimes adhérences qu'elle contracte en quelques endroits. Toutes les parties qu'elle embrasse sont hors de la ca- vité articulaire , quoique saillantes dans cette cavité , comme le poumon se trouve à l'exté- rieur du sac formé par la plèvre , le foie à l'ex- térieur de la poche péritonéale , etc. etc. (1). (1) Il y a dans celte description une grande erreur- de fait; la membrane synoviale n'existe ni sur les cartilages diarthrodiaux, ni sur les fibro cartilages inter- articulaires : quelque soin que l'on prenne x 12 8:2 MEMBRANE XXIV. On trouve la membrane synoviale dans toutes les articulations mobiles , dont le plus grand nombre n'ont qu'elle et des liga- ments latéraux. Ce qu'on appel communé- ment capsule fibreuse ne se rencontre qu'au- tour de quelques surfaces articulaires. Les connexions de l'humérus, du fémur, et de certains autres os dont les extrémités^ se joi- gnent pa; énarthrose , en offrent seules des exemples. On voit dans ces articulations deux enveloppes très-distinctes : l'une, fibreuse, est extérieure, et se trouve disposée en forme de sac ouvert en haut et en bas, embrassant par ces deux grandes ouvertures les surfaces des deux os, et se confondant autour d'elles avec le périoste , qui entrelace ses fibres avec les siennes. L'autre, celluleuses, qui est la membrane synoviale, tapisse la première à l'in- quelque préparation qu'en leur fasse subir, il est impossible d'y apercevoir la moindre trace de mem- brane : c'est bien le cartilage lui-même qui est lisse et poli pour se prêter aux frottemens multipli'és dont il est le siège. Les synoviales forment donc des sacs ouverts par les deux extrémités, et ne peuvent sous ce rapport être comparées aux véritables mem- branes séreuses qui forment des sacs sans ouverture. SYNOVIALE. 2 83 térieur. s'en sépare ensuite lorsqu'elle arrive vers les deux cartilages diarthrodiaux , et se réfléchit sur eux , au lieu de s'unir au périos- te. M. Boyer a indiqué cette disposition. XXV. Dans toutes les articulations gingly- moïdales, comme dans celles du coude, du ge- nou, des phalanges de la main, du pied, etc.. etc. , la capsule fibreuse manque absolument. Les fibres . au lieu de s'étendre et de s'entrela- cer en membrane , se ramassent en faisceaux plus ou moins épais, qui forment les ligaments latéraux ; on ne trouve plus que le feuillet in- terne des articulations énarthrodiales , c'est-à- dire la membrane synoviale , laquelle ne con- tracte non plus ici aucune adhérence avec le périoste , mais se réfléchit sur les cartilages. En la prenant à l'endroit de cette réflexion , on peut la détacher assez avant , et se convaincre ainsi qu'elle offre une organisation externe , toute différente de celle que présente d'abord à l'esprit l'idée d'une capsule articulaire. Cette disposition est extrêmement facile à aperce- voir par la moindre dissection : au genou, der- rière le tendon du crural et le ligament infé- rieur de la rotule ; au coude , sous le tendon du triceps ; aux phalanges , sous celui de l'ex- tenseur, etc. Tous les arthrodies ont aussi 284 MEMBRANE une organisation analogue , comme on le ver- ra dans l'article suivant : en sorte qu'on peut assurer que les capsules fibreuses n'existent que dans un petit nombre d'articulations; que presque toutes n'ont que des poches sy- noviales qui se déploient, se réfléchissent sur les surfaces osseuses, sans s'attacher autour d'elles , comme l'ont écrit tous h s auteurs (1). XXVI. J'ignorois , l'an passé , cette remar- quable différence des articulations, lorsque je publiai un Mémoire sur la membrane synoviale. Je l'ai constatée , cet été, par une foule de dis- sections. Quelques anatomistes étoient sur la voie de la découvrir, lorsqu'ils ont observé que diverses capsules paroissoient toutes for- mées du tissu cellulaire. C'est en effet la tex- ture de la membrane synoviale qui diffère es- sentiellement en cela des capsules fibreuses. Que l'on conserve, si l'on veut, le mot de capsule pour toutes les articulations; mais alors (1) Ce fait est au contraire très-contestable: l'exi- stence d'une lame synoviale sur les surfaces articu- laires cartilagineuses est impossible à démontrer, comme nous allons le voir en suivant l'auteur dans ses preuves. SYNOVIALE. 285 il faudra lui attribuer nécessairement des idées différentes. Comparez, par exemple, la cap- sule fibreuse du fémur à la capsule synoviale du genou, vous trouverez, d'un côté, i° un sac cylindrique à deux grandes ouvertures pour les extrémités osseuses , à plusieurs pe- tites pour les vaisseaux; 2° un entrelacement fibreux, semblable a celui des tendons, des aponévroses; 5° un mode de sensibilité analo- gue à celui de ces organes ; 4° l'usage de rete- nir fortement en place les os articulés, qui n'ont que ce lien pour affermir leur union. D'un autre côté, vous observerez, i° un sac sans ouverture; 2° une structure celluleuse, identique à celle des membranes séreuses ; 3° une sensibilité de même nature que la leur ; 4° la simple fonction de contenir la synovie et de la séparer , les os étant assujétis par de forts ligaments. XXVII. L'existence de la membrane syno- viale dans toutes les articulations où elle se trouve seule , est mise hors de doute par la plus simple inspection. Dans celles où elle est unie à une capsule fibreuse, on la distingue encore très-bien en différents endroits. Ainsi, au fémur , on la dissèque sur le ligament in- ter-articulaire . sur le peloton graisseux de la '2&ij MKMBP.ANE cavité cotyloïde, sur le col de l'os , aux endroits où elle abandonne la capsule fibreuse pour se réfléchir sur les cartilages, etc."; mais son adhérence à ces cartilages et à la face interne de la capsule pourroit élever quelques doutes sur sa disposition en forme de sac partout fer- mé que nous lui avons attribuée; il est donc essentiel de présenter quelques considérations propres à dissiper ces doutes. XXVIII. i°. Quelque fortes que soient les ad- hérences de la membrane synoviale , on par- vient à les détruire sans solution de continui- té par une dissection lente , ménagée avec- soin, et commencée à l'endroit où la membra- ne se réfléchit du cartilage sur là capsule (1) ; la macération long-temps continuée permet (1) J'ai essayé bien des fois de faire cette sépara- tion, et toujours je me suis convaincu que la syno- viale finit sur la circonférence du cartilage. En sup- posant que la membrane s'y étende, le moindre frottement des surfaces articulaires .suffirait pour ia détruire , puisqu'on voit dans certains cas les carti- lages eux-mêmes entièrement usés, bien que leur organisaiion physique les ronde propres à sup porter des pressions très-fortes et des frottemens répété-s. SYNOVIALE. ad^ aussi de l'enlever par lambeaux. 2°. A la suite de certaines inflammations, cette membrane prend une épaisseur et une opacité qui per- mettent de la distinguer de tous les organes voisins, de ceux même auxquels elle est le plus adhérente (1). 5°. Les bourses muqueuses des tendons sont tout aussi adhérentes que la membrane synoviale aux cartilages de leur gaîne et à cette gaîne elle-même; cependant tout le monde leur rcconnoît une existence isolée. 4°- 11 est des articulations à capsule fibreuse, qù les fibres écartées laissent entre elles des intervalles par où la synovie s'échap- peroit, si la membrane synoviale ne les tapis- soit. Lorsqu'on pousse de l'air dans l'articula- tion , on voit celle-ci se soulever à travers ces espaces, et présenter une texture toute diffé- rente de celle de la capsule. Berlin a fait cette observation ; mais il a cru que ces pellicules (î) A la suite de certaines inflammations, il se dé- pose dans l'articulation un fluule aibumîneuxconcres- cible, qui s'organise en fausse membrane et simule la synoviale épaissie; mais avec un peu d'attention on s'aperçoit facilement de la non-continuité de la synoviale avec la couche membraniforme qui revêt accidentellement le cartilage. •2 88 MEMBRANE étoient isolées , et n'a point vu qu'elles dépeiv doient de la continuité de la membrane, qui se prolonge sur toute l'articulation. 5°. Nous avons observé, à l'article des Membranes séreu- ses, que l'aspect lisse et poli que présente la surface des organes des cavités leur est tou- jours donné par ces membranes, et que jamais ils ne l'empruntent de leur propre structure : or, nous verrons que la membrane synoviale a la même texture que les séreuses ; donc il paroît qu'aux endroits où les organes articu- laires présentent ce caractère, c'est d'elle qu'ils le reçoivent, quoiqu'on ne puisse pas la dis- tinguer aussi bien sur ces organes que %à où elle est libre. D'ailleurs les articulations évi- demment dépourvues de cette membrane ne présentent point cet aspect lisse et poli. Telles sont les surfaces de la symphyse pubienne, de la symphyse sacro-iliaque, qui se trouvent, quoique contiguës, inégales, rugueuses, etc. Nous avons prouvé aussi que jamais cette forme organique n'est due à la compression. XXTX. Si l'on ajoute à ces diverses considé- rations l'analogie indiquée de la synovie avec le fluide séreux, analogie qui prouve celle qui existe entre les deux sortes d'organes d'où s'é- coulent ces fluides, on se convaincra facilement, SYNOVIALE. 289 je crois, que, malgré l'adhérence de la syno- viale sur divers points, elle doit être considé- rée d'une manière exactement analogue à cel- le des membranes séreuses , c'est-à-dire comme une véritable poche sans ouverture, partout continue et déployée sur tous les organes de l'articulation (1). D'ailleurs , n'avons-nous pas vu les membranes fibro-séreuses présenter de semblables adhérences , quoique l'existence isolée des deux feuillets qui les composent soit Généralement avouée? XXX. D'après l'idée que nous nous sommes formée de la membrane synoviale, il est facile de concevoir comment certains organes tra- versent l'articulation sans que la synovie s'é- chappe par l'ouverture qui les reçoit, ou par celle qui les transmet au-dehors. La membra- ne synoviale, alors réfléchie autour de ces or- ganes , leur forme une gaine qui les sépare du fluide et les isole de l'articulation. Aussi le (1) Encore une fois, la forme de poche sans ou- verture ne peul donc, d'après ce que nous avons dit, s'appliquer aux synoviales; ces membranes présen- tent, au contraire , deux larges ouvertures au moins, dont le contour est adhérent intimement à ia circon férence du cartilage articulaire. »9 y(J() MEMBRANE tendon du biceps n'est-il pas plus renfermé dans l'articulation du bras avec l'omoplate, que la veine ombilicale, l'ouraque , etc. , dans la cavité péritonéale. Avec la moindre atten- tion , on parvient à 1 isoler de la portion de membrane qui forme sa gaine. XXXI. Les considérations précédentes nous mènent aussi à trouver une identité parfaite entre les capsules muqueuses des tendons et les bourses synoviales. Dans l'exemple précé- dent , ces deux sortes de membranes sont évi- demment continues ; car la capsule de la cou- lisse bicipitale est de même nature que celle des tendons, qui en ont une isolée, comme les fléchisseurs, par exemple. § II. Organisation intérieure de ta membrane synoviale XXXII. Nous venons de voir que , par sa conformation extérieure, la synoviale appar- tient essentiellement à la classe des membra- nes séreuses ; elle doit aussi y être rangée par son organisation interne. Cette organisation est toute cellulaire, comme le prouvent la dissec- tion, l'insufflation, et surtout la macération. La poche qui forme les ganglions n'est évidem- SYNOVIALE. 291 ment qu'une production de l'organe cellulaire : or, on sait que cette poche exhale et contient un fluide semblable à la svnovie. Partout où la membrane synoviale est libre , elle tient en dehors à cet organe et se confond avec lui d'une manière si immédiate , qu'eu enlevant successivement ses différentes couches , on les voit se condenser peu à peu et s'unir enfin étroitement entre elles pour la former. De mê- me que dans les membranes séreuses , aucune fibre n'y est distincte. Elle devient transpa- rente lorsqu'on l'isole exactement des deux côtés, ce qu'il est aisé de faire au genou, dans une très-grande étendue. XXXIII. Je ne reviendrai pas sur les diver- ses preuves qui ont établi la structure ccllu- leuse des membranes séreuses ; toutes ces preuves sont applicables aussi à la synoviale , qui paroît n'être qu'un entrelacement d'ab- sorbants et d'exhalants. D'après cela , il est fa- cile de concevoir ce que sont les paquets rou*- geâtres et graisseux disséminés autour des ar- ticulations. Ils remplissent , à l'égard de cette membrane, les fonctions du tissu cellulaire abondant, qui enveloppe le péritoine, la plè- vre 5 etc., etc. C'est là que les vaisseaux san- guins se divisent à l'infini avant d'arriver à la '.{)'. MEMBRANE membrane où leurs ramifications, succesive- ment décroissantes, se terminent enfin parles exhalants (1). XXXIV. Si une rougeur remarquable dis- tingue quelquefois ces pelotons d'avec le tissu cellulaire; c'est que les vaisseaux y sont plus concentrés, plus rapprochés. Par exemple, à l'articulation de la hanche , dont la membrane synoviale, presque partout adhérente, ne cor- respond que dans Téchancrure de la cavité co- tvloïde à du tissu cellulaire, la nature y a en- tassé presque toutes les ramifications artérielles qui fournissent la synovie ; de là la teinte rougeâ- tre du paquet celluleux qu'on y rencontre (2). (1) Celte opinion, dénuée de preuves, n'a aucune valeur scientifique. Les opinions , même celles des hommes d'un grand talent, n'ont d'importance qu'eu ce qu'elles doivent porter à les vérifier par l'expé- rience, c'est-à-dire les transformer en faits, si elles sont confirmées; ou on les rejette comme des er- reurs, si l'expérience les démontre telles. {9.) Il est facile de se convaincre cependant que ces paquets contiennent de la synovie; si, après les avoir bien essuyés sur un animal vivant, on regarde leur surface avec attention , on en voit sourdre de la SYNOVIALE. 2QJ Au contraire, au genou, où beaucoup de tissu cellulaire entoure toute la face externe du sac synovial, les vaisseaux, plus disséminés, lais- sent à ce tissu la même couleur qu'à celui de la face externe des membranes séreuses, etc. Cette rougeur de quelques prétendues glandes synoviales, seul caractère qui les distingue , ne leur est donc pour ainsi dire qu'accidentelle ; elle n'indique pas plus leur nature glandu- leuse, qu'elle ne la prouve dans la pie-mère, où elle dépend de la même cause. § III. Forces vitales de 4a membrane synoviale. XXXV. La sensibilité organique est le seul partage des membranes synoviales dans l'état ordinaire, comme me l'ont prouvé plusieurs essais sur les animaux vivants , où ces surfaces ont été mises à nu et irritées par divers agents. Mais l'augmentation de vie qu'y détermine l'in- flammation, en exaltant cette sensibilité, la transforme en celle de la relation: c'est ce que synovie. Sur les cadavres, en les pressant légère- ment entre les doigts, on en exprime le même li fiuide. 2<)4 MEMBRANE l'on observe, i° dans les plaies où ces mem- branes sont exposées au contact de l'air ; 2° lors de l'irritation prolongée qu'elles éprouvent de la part des corps étrangers accidentellement développés dans l'articulation ; 3° dans les di- verses affections des surfaces articulaires, etc. XXXVI. Ce mode de sensibilité des mem- branes synoviales sert à confirmer ce que j'ai déjà établi plus haut ; savoir, que la plupart des articulations, les ginglymoïdales surtout , sont dépourvues de capsules fibreuses. En effet, j'ai fait observer que les capsules, ainsi que les ligaments latéraux, ont un mode de sensibilité de relation , qui se développe dans l'état sain par les tiraillements qu'on leur fait éprouver. Voilà pourquoi, si l'on met à découvert dans un animal une articulation ginglymoïdale, que l'on enlève tous les organes voisins, excepté la synoviale et les ligaments latéraux, et que l'on torde ensuite l'articulation, l'animal donne les signes de la plus vive douleur. Maiscoupe-t-on ensuite les ligaments, en laissant seulement la synoviale , la torsion n'est plus sensible , et l'on peut impunément distendre , déchirer l'arti- culation. Donc il n'y avoit point de capsule fi- breuse jointe à la synoviale. XXX VII. Cette expérience, facile à répéter f SYNOVIALE. 295 sur les membres antérieurs ou postérieurs , peut servir à y reconnoître partout les arti- culations où existe une membrane synoviale seule, et celles où s'y trouve jointe une capsule fibreuse. Celle-ci , étant de même texture que les ligaments latéraux, détermine les mêmes douleurs lorsqu'on la tiraille , comme le prou- vent d'ailleurs des expériences faites sur les ar- ticulations revêtues de ces capsules. XXXVIII. L'évacuation des hydropisies arti- culaires du genou, à la suite desquelles la mem- brane synoviale revient sur elle-même, l'ab- sorption habituelle de ces membranes , prou- vent leurs forces toniques , qui d'ailleurs n'ont rien de particulier dans leur développement. § IV. Fonctions de la membrane synoviale. XXXIX. La synoviale paroîtabsolumentétran- gère à la solidité de l'articulation ; les capsules fibreuses et les ligaments latéraux remplissent seuls cet usage. La surface lisse que les extré- mités articulaires empruntent de cette mem- brane favorise leurs mouvements ; elle peut même, sous ce rapport, aider à l'action muscu- laire : ainsi les portions de synoviale qui se trouvent au genou derrière le crural, au coude 2C)6 .MEAIBI'.AM-; sous le triceps , aux phalanges sous les fléchis- seurs , etc. , remplissent à l'égard de ces mus- cles les fonctions des bourses muqueuses; elles sont à leurs tendons ce qu'est à celui du psoas et de l'iliaque la poche cellulaire, qui la sépare de l'arcade crurale , etc. XL. Le principal usage de la membrane qui nous occupe est relatif à lasynovie; elleexhale par une foule d'orifices ce fluide, qui y séjourne quelque temps, et rentre ensuite par absorption dans la circulation. Ses parois sont donc le siège de l'exhalation, comme le rein, par exemple , est celui de la sécrétion de l'urine. Le réser- voir du fluide exhalé, c'est le sac sans ouver- ture qu'elle forme, comme la vessie est celui de l'urine venue du rein. Los vaisseaux excré- teurs de ce même fluide, ce sont les absorbants, qui les rejettent dans la masse du sang , comme l'urètre transmet au-dehors l'urine de la vessie. Il y a sous ces divers rapports , plus d'ana- logie qu'il ne le semble d abord , entre la sécré- tion et l'exhalation (i). XLT. Les phénomènes du séjour de la sy- (1) Je n'ai pas besoin de faire remarquer que celle comparaison est forcée et sans utilité. SYNOVIALE. 297 hovie dans ce réservoir membraneux sont re- latifs à elle-même ou aux surfaces articulaires. Les premiers consistent dans une altération particulière , mais inconnue , qu'elle subit entre les systèmes exhalant et absorbant. Les seconds concourent à faciliter les mouvements articu- laires. L'enduit onctueux et glissant que les surfaces reçoivent de la synovie est singulière- ment propre à cet usage. ARTICLE III. XLII. Après avoir indiqué en général la dis- position de la membrane synoviale, il faut en décrire le trajet sur les diverses articulations où elle se déploie. La forme générale indiquée ci- dessus reste toujours la même; c'est toujours un sac sans ouverture . embrassant les divers or- ganes articulaires. Mais, suivant que ces organes sont plus ou moins nombreux, plus ou moins rapprochés, écartés, etc., elle offre des variétés que nous allons rechercher, il n'est pas inu- tile, auparavant, de retracer rapidement la classification des articulations, afin de pouvoir distribuer nos descriptions plus méthodique- ment. XL11I. J'observe que je me servirai, pour 298 MEMBRANE exprimer chaque articulation, d'une expression composée du nom des os qui concourent à la former; ainsi, au lieu de cette expression : arti- culation de l'humérus avec l'omoplate , je dirai : articulation scapulo-kumêrale. Cela évitera des circonlocutions, et la nomenclature nouvelle, qui , dans plusieurs autres parties, surcharge de mots le langage anatomique, servira ici à l'en débarrasser. J'emploierai ici quelques- unes des bases adoptées par M. Chaussier. § I". Division générale des articulations. XL1V. Les articulations peuvent être envisa- gées sous un double point de vue : 1 ° dans l'or- dre de leur position à la tête , au tronc , aux membres ; 2° suivant l'ordre des classifications nombreuses auxquelles on les a assujetties. La seconde méthode me paroît préférable , parce qu'en rapprochant les unes des autres les arti- culations dont la structure est analogue , elle nous mettra à même de présenter, outre la description de leur membrane synoviale, quel- ques vues sur les rapports généraux de leurs fonctions. XLV. Toutes les articulations se rapportent à deux classes générales. La mobilité est le ca- SYNOVIALE. 299 ractère de la première , l'immobilité celui de la seconde. L'une appartient aux os locomoteurs des membres et du tronc, à certains os qui ser- vent aux fonctions internes, tels que la mâchoire et les côtes , etc. L'autre se rencontre spéciale- ment dans les os dont l'ensemble forme des cavités destinées à garantir des organes essen- tiels. La tête et le bassin en offrent un exemple. XLVI. La classe des articulations mobiles renferme deux genres, dont les caractères sont tirés des mouvements, tantôt faciles à exécuter en tous sens , tantôt bornés à certains. Ce sont les articulations , 1 ° mobiles et vagues ; 20 mo- biles et bornées. XLVII. Dans le genre des articulations mo- biles et vagues se trouvent trois espèces, dont le caractère se tire des surfaces osseuses qui les forment, et qui sont, ou contiguës et libres, ou contiguës et serrées les unes contre les au- tres , ou continues entre elles par une sub- stance intermédiaire. i°. La mobilité est l'apa- nage de la première espèce, toujours placée à la partie supérieure des membres , où elle re- tire de cette situation un double avantage. D'un côté, très-éloignée delà partie du membre immédiatement en butte à l'action des corps extérieurs, file échappe plus facilement aux JOO MEMBRANE luxations, auxquelles la dispose son peu de solidité. D'un autre eôté, elle peut imprimer au membre des mouvements généraux, qui suppléent à ceux des articulations inférieures, dont la solidité exclut la mobilité en tous sens. C'est l'articulation non-seulement des os qui la forment , mais encore du membre qu'elle meut en totalité. L'énarthrose du fémur et de l'hu- mérus est un exemple de cette disposition. 2°. La seconde espèce est remarquable par sa solidité; aussi la rencontre-t-on aux endroits du membre où s'exerce immédiatement l'effort des agents extérieurs, tels que le tarse , le mé- tatarse , le carpe, le métacarpe, etc. 5°. La mobilité et la solidité réunies caractérisent la troisième, qui se trouve dans les organes des- tinés , comme les vertèbres . au double usage de garantir une partie importante et de servir à la locomotion. XLYIII. Au genre des articulations mobiles et bornées se rapportent deux espèces caracté- risées aussi par les surfaces osseuses , qui sont, i° inégales, à éminences et enfoncements réci- proquement reçus les uns par les autres ; 2° uni- formes et à une seule direction. L'une, destinée à la flexion et à l'extension, occupe le milieu 'les membres , se trouve au coude, au genou , SYNOVIALE. )()1 aux doigts, etc. L'autre, plus propre à la rota- tion latérale , se voit à l'avant-bras, à la seconde vertèbre. XL1X. La classe des articulations immobiles renferme trois genres, caractérisés par le mode d'union des surfaces osseuses qui se trouvent, i° juxta-posées, 2° engrenées, 5° implantées. Le premier genre se rencontre là où le seul mé- canisme des parties suffît presque pour assurer la solidité des os. Ainsi les os maxillaires encla- vés entre les pommettes, lesunguis, l'ethmoïde, les palatins, levomer, lecoronal, sont soutenus plus par le mécanisme général de la face , que par les liens articulaires qui les unissent l'un à l'autre, et qui permettroient un facile déplace- ment. On trouve le second genre là où l'in- fluence du mécanisme général étant moindre, il faut que la solidité de l'articulation y supplée : ainsi les deux pariétaux sont fixés entre eux et par le mécanisme du crâne, dont tous les os s'arcboutent, et par leur engrenure réciproque. Enfin, le troisième genre s'observe là où le mé- canisme de la partie étant nul, la solidité de l'os est toute due à l'articulation. Les dents nous offrent un exemple de cette disposition. L. Le tableau suivant permettra d'embrasser .)02 MEMBRANE du même coup d'œil toutes ces diverses articu- lations. CLASSES. GENRES. ESPECES. û < •"" \ Mobiles : a h pq < ir. Immobiles Ire. à surraces contigncs et libres [Énarthrose ] 1er; ; II". Mobiles \ • r .■ \ a surfaces contigues et vagues; J et serrée* [Artbrodie.] IIP. à surfaces continues/ Amphiarthrosc.] ( V°- IIe. l à surfaces inégales. .1 nA Mobiles J L angulaire. J et bornées . i U • f à surfaces uniformes. Ginglyme latéral. Ier. à surfaces juxta-posées [Harmonie.] IIe. à surfaces engrenées [Suture.] IIIe. à surfaces implantées . .[Gompliose. j Ll. Plusieurs articulations du tableau que je viens de présenter ne doivent pas évidemment nous occuper, puisqu'aucune membrane syno- viale ne s'y trouve. La seconde classe nous est étrangère sous ce rapport, de même que la troi- sième espèce du première genre de la première classe : nous n'aurons donc à nous occuper que des énarthroses , des arthrodies . et des deux espèces de ginglymes. SYNOVIALE. 3o3 §. II. Articulations mobiles et vagues à surfaces libres. [Énarthrose.] LU. Cette espèce comprend deux variétés. Dans l'une, il y a i° mouvement d'opposition en tous sens, en arrière et en devant, en dedans et en dehors, etc ; 2° mouvement de circon- duction , assemblage de tous ceux-ci ; 5° mou- vement de rotation sur l'axe de l'os. L'humérus et le fémur sont les seuls exemples de cette va- riété. L'autre variété ne diffère de la précé- dente que parce qu'il lui manque le mouve- ment de rotation sur l'axe, tous les autres lui appartenant. Je range ici les articulations de la clavicule , de la mâchoire , etc. l" YABIÉTÉ. LUI. L'humérus et le fémur se ressemblent beaucoup par leurs articulations supérieures. Tous deux exécutent en tous sens des mouve- ments très-étendus, mais qui présentent cepen- dant une différence essentielle, et qu'on n'apoint envisagée d'une manière générale : c'est que la rotation et la circonduction s'y trouvent en rai- son exactement inverse. La rotation est très- 3o/| MEMBRANE étendue dans le fémur, et la circonduction ou mouvement en fronde, assez borné; l'humérus au contraire jouit d'un mouvement de circon- duction très-sensible , mais n'a qu'une foible rotation. La raison mécanique et les avantages de cette disposition sont faciles à saisir. LIV. Au fémur, la longueur du col, qui est le levier delà rotation, détermine beaucoup d'étendue dans ce mouvement, lequel supplée à la pronation et à la supination , qui manquent à la jambe, en sorte que toute rotation du pied est un mouvement de totalité du membre. A l'hu- mérus, au contraire , le col, très-court, rappro- chant de l'axe de l'os le centre du mouvement, borne la rotation, qui est moins nécessaire, à cause de celle de l'avant-bras ; le mouvement en dehors ou en dedans de la main n'est donc jamais ici communiqué que par une partie de membre. LV. Quant à la circonduction , ou mouve- ment en fronde, la longueur du col du fémur y est un obstacle. En effet , remarquons que ce mouvement est en général d'autant plus facile qu'il est exécuté par un levier rectiligne, parce qu'alors l'axe du mouvement est l'axe même du levier; qu'au contraire, si le levier est angulaire, îe mouvement devient d'autant plus difïicile, SYNOVIALE. )0:) parce que l'axe du mouvement n'est plus celui du levier, et en général on peut dire que la difficulté du mouvement est en raison directe de la distance de ces deux axes. Cela posé, ob- servons que l'axe du mouvement de circon- duction du fémur est évidemment une ligne droite obliquement dirigée de la tète aux con- dyles , et éloignée par conséquent en haut de l'axe de l'os par tout le col. Or, d'après ce qui vient d'être dit, il est évident que la diffi- culté de la circonduction sera en raison di- recte de la longueur du col, et par conséquent assez grande. A l'humérus, au contraire, le col étant très-court, l'axe de l'os et celui du mouvement sont presque confondus. De là la facilité et l'étendue de la circonduction. On pourroit fixer rigoureusement le rapport de ces mouvements par cette proportion : la cir- conduction de l'humérus est à celle du fémur comme la longueur du col de l'humérus est à la longueur du col du fémur; ce qui nous mène à déterminer de combien la circonduction du fémur est plus difficile que celle de l'humérus; il suffit , en effet, pour le savoir , de connoîlre l'excès de longueur du col du premier os sur ce - lui du second. Borelli, Keil , Sauvages , Hamber- 20 3o6 MEMBRANE ger, etc., eussent exprimé ceci par des formules mathématiques qui me paroissent inutiles. LVI. 11 est facile de sentir les avantages de cette étendue très-grande dans la circonduc- tion des membres supérieurs destinés à l'ap- préhension, et des bornes mises par la nature à celle des membres inférieurs , destinés à la station et à la locomotion. LV1I. Venons maintenant à la structure des deux articulations de l'humérus et du fémur; elles ont chacune une forte capsule fibreuse continue au périoste, dont elle naît, point de ligaments latéraux , beaucoup de tissu cellu- laire à leurs environs; leurs membranes syno- viales sont très-distinctes : voici comment elles se comportent à l'humérus. LVIII. Articulation scapulo-humcrale. i°. Elle tapisse la cavité glénoïde; 2° descend tout le long de la capsule , dont elle revêt la face in- terne, où la dissection de dehors en dedans la démontre; 5° se réfléchit sur la tète de l'hu- mérus, sur le col de cet os à sa partie interne , sur les tendons des sous-épineux, sus-épineux et sous-capsulaire ; elle est remarquable sur ce dernier tendon, qui perçant visiblement la cap- sule, setrouveroit dans l'articulation, sans celte SYNOVIALE. JO~ réflexion de Ja membrane synoviale. On rend sensible cette disposition, en incisant trans- versalement la capsule et elle entre ce tendon et celui du biceps : alors on voit ces deux mem- branes l'une fibreuse, l'autre cellulaire, s'é- carter et passer, la première derrière, la se- conde au-devant du tendon. /j°. Celle-ci des- cend dans la coulisse bicipitale, la tapisse jus- qu'à l'endroit où sort le tendon , se réfléchit sur lui, remonte en lui formant unegaîne qui l'embrasse delà même manière qu'on l'observe dans les capsules des gaines tendinenses, se continue ensuite avec la portion que nous avons vue tapisser la cavité glénoïde , et forme de cette manière le sac sans ouverture, représenté par toute cette classe de membranes. Au reste, il est facile de s assurer de sa réflexion sur le tendon du biceps, dans la coulisse bicipitale. et par la dissection , et par l'infusion d'un fluide quelconque, par exemple, du mercure, que soutient alors le cul-de-sac formé par cette réflexion. L1X. Articulation ischio- fémorale. Au fémur, la membrane synoviale i° tapisse ia cavité co- tyloïde, où elle devient très-manifeste sur le peloton graisseux que renferme son échancrun\ soit parla dissection, soit en soufflant le tissu 5o8 MEMBRANE graisseux; 2° se reploie sur le bourrelet et des- cend tout le long de la face interne de la cap- sule, à laquelle elle communique le poli qui la caractérise ; 5° l'abandonne et se réfléchit en bas sur le col du fémur, où un tissu très-lâche la sépare évidemment de l'os , qui se trouve là dépouillé de son périoste; 4° se prolonge du col sur la tête du fémur, dont elle revêt le car- tilage, et avec lequel elle contracte d'intimes adhérences; 5° quitte celui-ci, et, se prolon- geant le long du ligament inter-articulaire, lui forme une gaine très- facile à être séparée par la dissection, qui , de même que celle du tendon du biceps, empêche ce ligament d'être ren- fermé dans l'articulation , et se continue en- suite sur la cavité col) loïde, d'où nous l'avons supposé partir. LX. D'après ce qui vient d'être dit, il est évident que les deux articulations précédentes sont enveloppées chacune par un sac membra- neux à double feuillet, l'un fibreux, naissant du périoste des deux os articulés, et se con- fondant avec cette membrane, dont la nature est la même que la sienne; l'autre séreux ^ purement cellulaire , se réfléchissant sur ces os sans s'y attacher, et absolument étranger au périoste. Aussi le feuillet séreux du péri- SYNOVIALE. OO9 carde se refléchil-il sur le cœur, taudis que le fibreux se prolonge et se confond avec la tu- nique externe des gros vaisseaux. LXI. Quelques auteurs ont prétendu qu'il y avoit communication entre la capsule du ten- don du sus-épineux et l'articulation de l'hu- mérus. Je n'ai pu rencontrer cette disposition ; mais j'ai vu sur un cadavre apporté, il y a trois ans , dans mon amphithéâtre , un fait assez remarquable : ce sujet avoit au bras gauche une luxation ancienne , qui fut disséquée. On trouva la tête logée dans le creux de l'aisselle , entourée d'une capsule artificielle , dont l'as- pect , à sa face interne , étoit le même que celui de la membrane synoviale, qui se trouvoit hu- mide d'une humeur analogue à celle de cette membrane, et qui, comme la plupart des kystes, étoit probablement formée par les cellules rap- prochées du tissu cellulaire. La cavité de cette capsule communiquoit avec celle de l'articu- lation par la déchirure du ligament ombicu- laire et de la membrane synoviale. Cette dé- chirure étoit située inférieurement , et la sy- novie pouvoit ainsi alternativement passer de l'une à l'autre cavité. La cavité articulaire ne s'étoit point rétrécie , comme plusieurs auteurs l'ont dit, par le gonflement du cartilage. Je 3ïO MEMBRANE n'ai pu savoir la date de cette luxation , qui devojt être ancienne , puisque ce kyste avoit eu le temps de se former. Ce fait prouve au reste, et la possibilité de la réduction des luxa- tions anciennes de l'humérus, puisque la ca- vité étoit restée dans son état naturel; et la né- cessité d'exécuter dans cette réduction de grands mouvements pour détruire les attaches du kyste accidentel à la circonférence delà tête osseuse. IIe VARIETE. LXII. La deuxième variété des énarthroses diffère de la précédente, en ce que les articula- tions qui s'y trouvent classées n'exécutent point de mouvement de rotation. Pour en concevoir la raison , observons que dans toutes les arti- culations l'axe de la tête mobile est le même que celui de l'os : ainsi, à l'extrémité sternale de la clavicule, à l'extrémité métacarpienne des premières phalanges, la surface articulaire est traversée par l'axe même de l'os. Au contraire , au fémur et à l'humérus, cet axe fait un angle avec celui de la tête osseuse: or, il est évident que la rotation ne peut s'exécuter que dans ce dernier cas ; car c'est le seul où il y ait un levier de mouvement , levier que représente cet axe SYNOVIALE. 5l I de la tète osseuse et du col qui la soutient; tel est , par exemple , à la cuisse , l'axe du col et de la tête du fémur : 1 étendue de la rotation est en raison directe de la longueur de ce le- vier ; quand il diminue, elle devient moins sensible, comme à l'humérus; quand il dis- paroît, elle doit donc devenir nulle, comme aux articulations dont nous parlons. LXIII. Je range dans cette seconde variété les articulations de la clavicule avec le sternum du poignet, des premières phalanges du pied et de la main avec les os du métatarse et du métacarpe, de la mâchoire avec le temporal. En effet, à la rotation près, toutes ces articu- lations exécutent les mêmes mouvements que celles spécialement désignées sous le nom dV- nartliroses. Voici quelle est la disposition de leurs membranes synoviales. LX1V. Articulation temporo-maxillaire. L'u- nion du temporal avec la mâchoire ne doit point être envisagée sous le rapport des liens articulaires, comme on le fait communément. Cette espèce d'articulation est visiblement dé- pourvue d'une capsule fibreuse. Ce que les au- teurs ont indiqué sous ce nom n'est autre chose qu'une double membrane synoviale qui paroît continue, mais qui réellement est très- 3l2 MEMBRANE distincte. L'une de ces membranes se déploie, i° sur la fosse du temporal et son apophyse transverse; 2° sur la face supérieure du liga- ment inter-articulaire; 5° forme, en se por- tant de l'un à l'autre , la partie supérieure de ce qu'on appelle communément la capsule. L'autre embrasse, i° le condyle en arrière plus qu'en avant ; 2° la face inférieure du li- gament inter-articulaire ; 5° constitue , dans son trajet du premier à la seconde, la partie inférieure de la prétendue capsule. LXV. Il y a donc ici deux sacs adossés , sans communication de l'un avec l'autre, excepté dans les cas où la substance intermédiaire est percée, séparés, dans l'état ordinaire, par cette substance ou ce ligament, lequel n'est point continu avec cette double membrane , mais se trouve seulement soutenu par la manière dont il est embrassé par chacune. La circonférence n'est pas , comme on le dit, unie à la capsule; car jamais un corps fibreux ne se confond et ne s'identifie avec une membrane séreuse. Chaque sac synovial , arrivé à cette circonfé- rence, se reploie sur le ligament, et se propage ensuite sur l'une et l'autre face, en sorte que , sans l'adhérence qu'il y contracte, on conçoit la possibilité de l'enlever sans pénétrer dans les SYNOVIALE. 5l5 deux cavités. Au reste , le ligament articulaire est presque toujours fixé en dehors par un pro- longement fibreux, au moyen duquel il se con- tinue entre les deux membranes avec le pé- rioste du côté externe du condyle. Le reste de la circonférence continue aussi en devant, entre les deux points où elles se réfléchissent , avec les fibres aponévrotiques du ptérygoïdien ex- terne, se trouve libre dans les autres sens, et correspondant seulement à du tissu cellulaire et aux deux ligaments latéraux. La dissection convaincra facilement de cette disposition ana- tomique des parties , en montrant la réflexion de chaque membra ne, et sur le ligament moyen, et sur les surfaces articulaires, où elle n'a point de continuité avec le périoste, comme les cap- sules fibreuses. LXVI. Articulation sterno-claviculaire. Cette articulation a deux poches synoviales, n'a point non plus de capsule fibreuse. Les ligaments an- térieurs et postérieurs, l'inter-claviculaire, for- ment quelquefois en devant, parleur conti- nuité, une enveloppe analogue; mais souvent ils sont distincts et séparés. Alors on voit pa- roîlre dans leurs intervalles les membranes sy- noviales, qui s'élèvent en petites vésicules, sur- tout quand on agite fortement l'articulation en 5l4 MEMBRANE divers sens. D'ailleurs , la membrane synoviale supérieure se remarque toujours seule en de- hors, séparée par du tissu graisseux du liga- ment costo-claviculaire : voilà pourquoi le li- gament inter-articulaire, ne trouvant point là d'autres corps fibreux que le périoste, s'y at- tache, tandis qu'en devant, en arrière et en dedans, c'est aux ligaments qu'il se fixe; ce qui confirme une observation que j'ai développée plus haut, savoir, qu'aucune membrane sé- reuse ne sert d'insertion aux ligaments, aux tendons , etc. , mais que toujours ce sont les membranes fibreuses qui remplissent cet usage. LXVII. Des deux membranes synoviales de cette articulation , la première embrasse la fa- cette articulaire du sternum et la face sternale du ligament claviculaire; tapisse, en se por- tant de l'une à l'autre, la partie supérieure des ligaments antérieurs et postérieurs ; le tissu graisseux voisin du costo-claviculaire paroît quelquefois, comme je viens de le dire, entre les deux premiers et l'inter-claviculaire. La se- conde se déploie sur l'extrémité sternale de la clavicule, sur la partie inférieure des ligaments antérieurs et postérieurs, sur la face clavicu- laire du ligament inter-articulaire, qui se trouve vraiment ainsi hors des deux cavités, quoique SYNOVIALE. 3l5 concourant à les séparer. La réflexion en haut et en bas des deux membres synoviales est sensi- ble sur lui, en sorte qu'on voit très-bien que ce n'est point avec elles, mais avec les ligaments et le périoste, qu'il se continue. Au reste, ces deux membranes sont remarquables par la sécheresse habituelle où on les trouve sur le cadavre. LXV1II. Articulation radio -carpienne. L'ar- ticulation du poignet présente très-distincte- ment une membrane synoviale, qui, i° em- brasse en bas le scaphoïde, le semi-lunaire et le pyramidal, se distingue facilement à l'endroit où ces os sont unis par un tissu intermédiaire, entre le scaphoïde et le semi-lunaire surtout; 2° tapisse, en devant, en arrière et sur les côtés , les ligaments antérieurs, postérieurs et latéraux; 5° se réfléchit en haut sur l'extrémité du ra- dius et la face carpienne du ligament inter-ar- ticulairedu cubitus. Pour bien voir cette mem- brane dans l'endroit correspondant aux liga- ments , il faut les fendre dans un point quel- conque de leur adossement; le double feuillet se sépare alors sans peine. LX1X. Articulation mètacarpo-pkalangiennc. Cette articulation, commune dans la main , à chacun des doigts et des os du métacarpe , a 3 1 6 MEMBRANE beaucoup d'analogie avec celle du pied; il suf- fira donc, je crois, d'en décrire ici la mem- brane synoviale, pour avoir une idée de celle qu\ lui correspond au pied. Elle manque, comme à la clavicule , de capsule fibreuse. Les organes extérieurs qui la fortifient, sont, en arrière le tendon des extenseurs; en devant une couche fibreuse à direction transversale, sur laquelle passent les tendons fléchisseurs; de chaque côté un fort ligament. La membrane synoviale répond à tous ces organes et aux sur- faces articulaires. i°. Elle tapisse la portion du tendon extenseur correspondante à l'articula- tion, très-libre en haut, fortement adhérente en bas; en renversant ce tendon sur la con- vexité du doigt, elle devient très-apparente; on la voit, non point en naissant du périoste, comme les capsules fibreuses , mais lâche- ment unie au tissu cellulaire, et se reployant sur la face articulaire de l'os du métacarpe : en sorte qu'en la disséquant à ce repli , on peut la conduire, sans l'intéresser, jusqu'aux cartilages, où elle devient très-adhérente. 2°. Elle passe sur la face articulaire supérieure de la première phalange; 5° remonte ensuite en re- vêtant les ligaments latéraux et la couche fi- breuse antérieure, sur la face articulaire infé- SYNOVIALE. ô 1 7 rieure de l'os du métacarpe; mais, avant d'y parvenir, il est à remarquer qu'elle se déploie dans un petit espace sur la face antérieure de cet os, lequel concourt ainsi à agrandir les sur- faces articulaires en devant , et à favoriser par là même la flexion de la première phalange. LXX. Articulation carpo- métacarpienne du pouce. L'os du métacarpe du pouce est remar- quable par la mobilité qui le distingue essen- tiellement de l'os du métatarse correspondant, que caractérise une grande solidité d'articula- tion. L'usage de l'un , relatif à l'appréhension , celui de l'autre à la station, expliquent cette différence. L'articulation du premier appar- tient à la classe qui nous occupe actuellement. Elle paroît être pourvue d'une capsule fibreuse, naissant du périoste du trapèze et de l'os du métacarpe , mais ayant des fibres moins ser- rées que celle des énarthroses véritables , et laissant voir dans les intervalles qu'offrent ces fibres des portions de la membrane synoviale , laquelle embrasse les deux surfaces articulai- res , s'y déploie plus largement en avant qu'en arrière, revêt ensuite tout l'intérieur de la cap- sule fibreuse, dont la séparent cependant quel- ques petits paquets graisseux. 7)1 8 MEMBRANE § III. Articulations mobiles et vagues, à surfaces serrées. [Axthrodies.] LXXI. Plusieurs des articulations que j'ai rapportées à la deuxième variété de l'espèce précédente appartiennent à celle-ci dans la plupart des livres d'anatomie , dans celui de M. Boyer, par exemple ; cependant elles ont évidemment plus de rapport avec lès énarthro- ses, puisqu'elles en ont tous les mouvements . excepté la rotatiou, taudis que l'arthrodie n'est caractérisée que par le mouvement de glisse- ment qu'elle exécute , et auquel la réduit la disposition serrée des surfaces articulaires. Au reste, il auroit mieux valu sans doute en faire une espèce intermédiaire à l'énarthose et à l'arthrodie. LXXI1. J'ai pensé depuis long-temps que la meilleure division des articulations mobiles se- roit celle qui, fondée sur leurs mouvements , nous montreroit ces mouvements décroissant successivement de l'énarthrose la plus étendue à l'arthrodie la plus serrée, et par conséquent la plus voisine des articulations immobiles. D'après cette idée , telle seroit à peu près la di- vision ; SYNOVIALE. '9 CLASSES. MOUVEMENTS. EXEMPLES. I". 11" IIIe IV* i°. Opposition en tous sens. 2°. Circonduction. 5°. Rotation sur l'axe. 4°. Glissement. i°. Opposition en tous sens. 2°. Circonduction. 5°. Glissement. i°. Opposition en deux sens. 2°. Glissement. Glissement. ARTICULATIONS Scapulo-humérale , schio-fémorale. ARTICULATIONS Sterno-claviculaire , Temporo-maxillaire, etc. ARTICULATIONS Huméro-cubitale , Fémoro-tibiale, etc., etc. ARTICULATIONS Calcanéo-astragalienne , ! Peronéo-tibiale, etc. ] ] ] ] LXXIII. Dans cette série , méthodiquement distribuée, on voit la nature réunir tous les mouvements dans certaines articulations, les diminuer ensuite par gradation , en se rappro- chant des articulations immobiles* , et y arriver enfin réduite au seul glissement, qui souvent est à peine sensible. Il est même encore un in- termédiaire au glissement et à l'immobilité , c'est l'articulation de la symphyse pubienne , dont une partie est à surfaces contiguès, comme les articulations mobiles , et une partie à sur- faces continues , comme les immobiles. Cette articulation et celle de l'humérus peuvent dans ^20 MEMBRANE la série former les deux extrêmes de la mobi- lité. LXXIV. Je n'ai point adopté cette division , parce qu'en plaçant dans un cadre neuf des descriptions nouvelles aussi , l'attention fixée sur l'un est souvent de moins pour celle que l'on dirige sur les autres. LXXV. Revenons à nos articulations arthro- diales. Je les divise , comme les énarthroses , en deux variétés ayant chacune pour caractère général la disposition serrée des surfaces et le seul mouvement de glissement , mais distin- guées, l'une, parce que ce mouvement y est apparent, l'autre, parce qu'il y est ordinaire- ment insensible. Dans la première , je range les articulations, i° de la première vertèbre avec l'occipital ; 20 des vertèbres entre elles , par leurs lames articulaires; 5° du carpe; 4° du métacarpe ; 5° des divers os du tarse ; 6° de ceux du métatarse. A la seconde appartiennent les articulations de l'extrémité, i° numérale de la clavicule , 20 sternale des côtes , 5° supé- rieure du péroné. YAIUETE. LXXV1. Articulation occipito-altoïdiennc. Le sac synovial de cette articulation embrasse , SYNOVIALE. 521 i° les condyles de l'occipital, avec une petite portion de cet os en devant ; 2° la facette verté- brale correspondante: 3° en passant de l'une à l'autre , elle tapisse en devant un trousseau fi- breux descendant de l'occipital ; en arrière et en dehors, beaucoup de tissu cellulaire; en dedans , l'extrémité du ligament transversal , qui, sans elle, se trouveroit dans l'articulation; une partie du ligament latéral de l'apophyse odontoïde ; des paquets graisseux qui font sail- lie dans l'articulation , et qu'autrefois on pre- noit pour des glandes synoviales. Cette mem- brane est très -visible aux endroits de sa ré- flexion, à ceux des paquets graisseux du tissu cellulaire. Aucune capsule fibreuse ne se ren- contre ici. LXXVII. Articulation axoïdo - altoïdienne . Cette articulation, plus lâche que toutes celles des apophyses articulaires, dépourvue de cap- sule fibreuse, présente une membrane syno- viale très-distincte, et dont le trajet est celui- ci: i° elle se déploie sur la facette articulaire de l'atlas, dont elle tapisse non -seulement le cartilage, mais encore la circonférence osseu- se ; 2° on la voit descendre sur la facette de la deuxième vertèbre, qu'elle revêt de la même manière, en tapissant en devant un faisceau i\ .12 2 MEMBRANE fibreux qui descend de l'atlas; en arrière, beaucoup de tissu cellulaire ; en dedans , les ligaments de l'intérieur du canal vertébral; en dehors , l'artère vertébrale , qui , dans son tra- jet en cet endroit , en emprunte une enveloppe séreuse , analogue en petit à ce qu'on voit en grand dans l'aorte, qu'embrassent le péricarde, la plèvre et le péritoine, aux endroits où elle passe à leur niveau , et qui , sans cette dispo- sition, se trouveroit baignée par la synovie de l'articulation. Les auteurs ont désigné cette membrane synoviale sous le nom .de capsule , ainsi que la plupart de celles qui ont déjà été exposées; mais il est facile de voir que sa na- ture est toute celluleuse, et qu'elle ne s'attache point, comme on le dit, autour des surfaces articulaires , mais qu'elle s'y réfléchit sans nulle continuité avec le périoste. LXXVIII. Articulation vertébrale. La mem- brane synoviale n'a rien ici de particulier ; elle embrasse les deux faces articulaires , tapisse en passant de l'une à l'autre les organes voisins . et se trouve dans toutes , notamment au col et aux lombes, isolée en dehors des capsules liga- menteuses. LXXÏX. Articulation costo -vertébrale. Une Irès-foible membrane svnoviale embrasse d'une SYNOVIAI.F.. J2«) part la facette de l'apophyse transverse ; de l'autre , celle de la côte , et facilite leur glisse- ment réciproque. Beaucoup de tissu cellulaire l'entoure. LXXX. Articulation carpienne et métacar- pienne. L'articulation latérale du scaphoïde avec le semi - lunaire . de celui-ci avec le pyramidal , communique dans l'articulation de la première avec la seconde rangée , et cette articulation générale communique elle- même avec les articulations, particulières du trapèze et du trapézoïde , de ce dernier et du grand os , du grand os et du crochu , de ces divers os avec les os du métacarpe correspon- dants, et même de ces os du métacarpe entre eux. Une membrane synoviale commune se déploie en forme de sac sans ouverture sur toutes ces surfaces articulaires , et sur la face interne des ligaments multipliés qui les unis- sent. On peut , en enlevant avec précaution plusieurs de ces ligaments, la rendre sensible , parce qu'elle n'y adhère souvent que par un tissu lâche. On la distingue encore en les coupant tous avec elle, sur la convexité du carpe , et en renversant ensuite tous ces petits os ; sa face interne se voit ttrès-bien alors du côté opposé ; elle est aussi apparente sur le ,)2q MEMBRANE col de la tète du grand os , à qui elle sert de périoste. Les auteurs ont désigné cette mem- brane sous le nom de capsule; ils l'ont isolé- ment décrite pour chaque os , disant qu'elle n'existoit qu'en devant et en arrière , et qu'elle manquoit aux endroits de communication ; mais elle est évidemment partout continue. Les deux articulations du troisième avec le quatrième os du métacarpe ne communiquent point entre elles , et l'antérieure , isolée , a tou- jours une membrane synoviale qui lui est propre. Le pisiforme et le pyramidal ont aussi leur membrane propre. LXXXI. Articulation calcanco-astragalienne. L'astragale et le calcanéum s'unissent chacun par une double surface isolée. De là deux ar- ticulations : l'une , postérieure , n'est embras- sée que par une membrane synoviale mince , qui , après avoir tapissé le cartilage de l'astra- gale , descend en recouvrant en avant un li- gament intermédiaire aux deux articulations , en arrière beaucoup de graisse qui la sépare du tendon d'Achille , en dehors et en dedans des ligaments latéraux , avec lesquels elle con- tracte d'intimes adhérences , puis se déploie sur la facette du calcanéum , dont elle revêt non-seulement la partie supérieure , mais en- SYNOVIALE. ~20 core la circonférence , surtout en dehors. La seconde articulation des deux os astragale et calcanéum est commune aussi au scaphoïde. Sa membrane synoviale, i° revêt la facette de ce dernier os ; 2° passe sur un paquet grais- seux et sur un trousseau ligamenteux qui la séparent de la facette du calcanéum , et où elle est très - manifeste ; 3° se continue sur celle-ci ; 4° vient sur la face cartilagineuse de l'astragale correspondante aux deux précéden- tes ; 5° revient au scaphoïde , en tapissant les ligaments qui l'unissent à l'astragale. Les au- teurs ont désigné ces deux membranes sous le nom de capsules 3 et ont dit qu'elles s'atta- choient autour des surfaces articulaires, quoi- qu'il n'y ait là que réflexion et nullement in- sertion. LXXX1I. Articulation calcanéo - cuboidienne. Le sac synovial de cette articulation se déploie sur les deux surfaces articulaires; puis, en passant de l'une à l'autre , tapisse en haut des fibres ligamenteuses , desquelles on l'isole ai- sément et dont les interstices le laissent sou- vent apercevoir ; en bas , le ligament fila- menteux ; en dedans , un amas de fibres liga- menteuses et du tissu cellulaire intermédiaire au calcanéum , au cuboïde et au scaphoïde ; Ô2(i MEMBRANE en dehors , la gaîne synoviale du tendon du muscle long péronîer : en sorte qu'ici deux membranes de même nature se trouvent adossées. LXXXI1I. Articulation cunéo-scap/ioïdicnnc. Trois facettes entièrement taillées sur le sca- phoïde reçoivent les trois facettes supérieures des cunéiformes. Dans cette articulation géné- rale s'ouvrent les articulations partielles des cunéiformes. Une membrane synoviale com- mune se déploie ici , comme au carpe , sur toutes les surfaces articulaires et sur les liga- ments qui les unissent. LXXX1V. Articulation cunéo-cuboïdicnne. Le troisième cunéiforme concourt seul avec le cuboïde à cette articulation , qu'embrasse une capsule synoviale très -mince, recouverte en haut et en bas par des libres ligamenteuses , dans le reste c'ie son étendue par du tissu cel- lulaire. LXXXV. Articulations métatarsiennes. Le premier os du métatarse a une articulation isolée avec le premier cunéiforme ; des fibres ligamenteuses affermissent en haut et en bas cette articulation ; en dedans , ce sont les pro- longements du tendoui du jambier antérieur. Le sac synovial sedéploie sur foutes ces parliez. SYNOVIALE. )2 7 ainsi que sur les surfaces articulaires ; il ne correspond en dehors qu'à du tissu cellulaire. LXXXV1. La capsule synoviale de l'articula- tion du second os n'est qu'un prolongement de celle de l'articulation du scaphoïde avec les cunéiformes , prolongement qui se déploie , i° sur les faces correspondantes du second cunéiforme et du second os du métatarse ; 2° sur la facette inférieure et externe du pre- mier cunéiforme et la facette latérale du même second os métatarsien , en formant en bas un cul-de-sac qui retient la synovie ; 3° sur les ligaments supérieur et inférieur , moyen d'union de toutes ces articulations. LXXXVII. Une membrane synoviale isolée se déploie sur l'articulation du troisième os métatarsien avec le troisième cunéiforme , se prolonge sur les facettes contiguës du second et du troisième os métatarsiens, du troisième et du quatrième , et forme en ces deux endroits des culs-de-sac. LXXXVÏÏI. Les deux derniers os du méta- tarse ont , pour leurs articulations avec le cu- boïde et pour celle de leurs surfaces latérales et contiguës, une membrane synoviale unique, formant entre eux un cul-de-sac, déployée sur toutes les faces articulaires, et facile à dis 0'2& MEMBl'.ANE tinguer en plusieurs endroits , entre les liens fibreux qui l'entourent. IIe VARIETE. LXXXIX. Les articulations dont nous allons parler terminent, pour ainsi dire , la classe des articulations mobiles ; elles mènent aux immo- biles par une transition presque insensible , transition à laquelle est cependant encore in- termédiaire la symphyse du pubis , comme je l'ai dit plus haut. XC. Articulation acromio-claviculaire. Deux facettes obliques composent cette articulation, dépourvue de capsule fibreuse, fortifiée en haut par des fibres accessoires , partout ailleurs environnée du tissu cellulaire, et ayant une cap- sule synoviale mince, réfléchie sur les faces ar- ticulaires et sur les parties voisines. Cette cap- sule est double lorsqu'il existe un ligament in- ter-articulaire XCI. Articulation peronéo - tibiale. On ne trouve ici qu'une capsule synoviale, assez ap- parente, recouverte en avant et en arrière par des trousseaux ligamenteux, dont la sépare le tissu cellulaire, correspondant dans tous ses autres points ta ce tissu. SYNOVIALE. 329 XCII. Articulation sterno-costale. Aucune ar- ticulation ne présente plus obscurément que celle-ci la membrane synoviale. A peine peut- on distinguer quelques replis passant des fa- cettes du sternum à celles des côtes; peu et peut-être point de synovie s'y rencontre ; les surfaces sontinégales, raboteuses. Si cette mem- brane existe ici , cette articulation est vraiment la transition de celles qui en sont pourvues à celles que la nature en a privées. 5 IV. Articulations mobiles et bornées, à surfaces inégaies. [ Ginglyme angulaire. ] XCI1I. A cette espèce se rapportent les arti- culations, i° du genou, 2° du coude, 5° du coude-pied, 4° des phalanges entre elles, 5° de la tête des côtes avec le corps des vertèbres. Toutes se trouvent, comme les précédentes, dépourvues de capsules fibreuses , embrassées seulement par des trousseaux ligamenteux et revêtues d'une simple membrane synoviale, se réfléchissant des organes qui entourent l'arti- culation sur les surfaces articulaires , et ne s'in- sérant point, comme ont dit les auteurs, au- tour de. ces surfaces. Comme la plupart de ces articulations sont très-considérables, celle du J.)U MEMBRANE genou en particulier , on y distingue avec la plus grande facilité cette disposition anato- mique générale , jusqu'ici méconnue. XCIV. Articulation fcmoro-tibiale. Pour dé- crire avec exactitude la membrane synoviale de cette articulation , la plus apparente de celles de l'économie organique , supposons-la partir d'un point quelconque, et, de là, suivons son trajet sur les nombreux organes qui entourent et fortifient l'articulation. i°. En renversant de haut en bas le fémoral, on la voit libre dans un grand espace, recouverte seulement par beau- coup de graisse , ne s'attachant point , mais se réfléchissant au-devant des condyles , en sorte qu'on peut la disséquer jusqu'au bord du car- tilage , quoiqu'elle se réfléchisse bien au-delà , principalement sur les côtés , où elle parcourt un assez long trajet en dehors des condyles , lâchement unie à eux. 2°. De là elle descend intimement adhérente à la rotule dans le mi- lieu, très-lâchernent unie sur les côtés aux pro- longements aponévrotiques qui terminent le triceps , en sorte qu'en disséquant ceux-ci de haut en bas, elle devient très-apparente, et plus en dehors fixée aux ligaments latéraux. 7)°. Elle devient en bas postérieure au ligament inférieur de la rotule, et s'en trouve séparée SYNOVIAL!:.. 33 l par un paquet graisseux très-abondanl , saillant dans l'articulation, où il se trouveroit contenu sans elle ; là , elle envoie d'avant en arrière , à l'intervalle des deux condyles , un prolonge- ment improprement désigné sous le nom de ligament œdipeux : c'est un véritable canal qui peut recevoir un stylet entre ses parois affais- sées, et qui s'épanouit ensuite sur les condyles en se continuant avec la portion de membrane synoviale qui les tapisse. 4°- Elle se réfléchit sur la face articulaire du tibia , et sur les liga- ments semi-lunaires, qu'elle embrasse parleurs deux faces et leur circonférence interne , l'ex- terne n'en étant point revêtue , excepté au ni- veau du passage du poplité sur l'externe de ces deux ligaments, qui se trouvent ainsi hors de la cavité que lubrifie la synovie. 5°. Elle re- monte au-devant des ligaments croisés, est très- sensible sur eux , tapisse la graisse contenue dans l'intervalle des condyles, et qui est entiè- rement située hors de l'articulation. 6°. Revient enfin sur ces condyles après avoir préliminai- rement recouvert les tendons des jumeaux et du poplité, et s'épanouit sur la surface arti- culaire du fémur, en se continuant ensuite derrière les extenseurs, d'où nous l'avons sup- posée partir. Au reste , cette articulation . ma- 552 MEMBRANE nifestcment dépourvue de capsule fibreuse , est assez fortement assujettie par les teudons qui passent autour d'elle , les ligaments qui s'é- tendent de l'une à l'autre face articulaire, et l'épanouissement de l'aponévrose du triceps. Aucune n'est plus propre à donner une idée générale de la membrane synoviale, qui s'y trouve isolée dans de larges espaces, très-facile à distinguer dans tous les endroits où elle se réfléchit. XCV. Articulation humèro-cubitale. Pour dis- séquer exactement la membrane synoviale de cette articulation, il faut, comme dans le cas précédent , renverser de haut en bas le tendon des extenseurs. On la voit alors, i° s'étendre de la cavité olécrâne qu'elle revêt à l'apophyse du même nom, libre de toute adhérence, seulement recouverte par du tissu cellulaire graisseux et par quelques fibres accessoires ; 2° se prolonger dans la cavité sygmoïde, la tapisser, ainsi que la partie supérieure du rayon ; 5° descendre entre ces deux os , revêtir la partie interne du ligament annulaire, l'abandonner ensuite et se prolonger plus bas le long du col du rayon , sur lequel elle se réfléchit ensuite, en formant un cul-de-sac demi-circulaire ; on la voit facile- ment se prolonger au-delà du ligament annu- SYNOVIALE. 535 laire , en disséquant de bas en haut le court supinateur, qui recouvre ces parties; 4° re~ monter derrière les fibres ligamenteuses situées au-devant de l'articulation, desquelles la sé- pare un tissu graisseux , et dont les intervalles la laissent souvent voir; 5° se réfléchir sur la cavité coronoïde, et se porter ensuite à la cavité olécrâne , dont elle a été supposée partir. XCVI. Les deux articulations précédentes , essentiellement analogues , par leur mouve- ment , soit par la place qu'elles occupent dans le membre , soit par la disposition des organes environnants , présentent une différence assez remarquable. Leur flexion et leur extension se font exactement en sens inverse , en sorte que le mouvement, qui dans l'un se dirige en avant, est dirigé en arrière dans l'autre, et récipro- quement. La raison de cette disposition est fa- cile à saisir. En effet, tous les efforts un peu considérables , exécutés avec les membres su- périeurs, se font dans le sens de la flexion; c'est donc antérieurement que devoit répondre cette flexion , pour que les organes de la face pussent en diriger les mouvements; mais, d'un autre côté, remarquons que presque tous exer- cent une influence sur le tronc, et tendent à le porter aussi un peu en devant: si donc la ■ ).>4 MEMBRANE flexion de la jambe eût été dans ce sens, le poids du corps venant à faire ployer, au moindre effort , cette articulation , le centre de gravité eût été porté trop en devant, et au moindre effort la chute auroit eu lieu; au contraire, l'extension de la jambe bornant ses mouve- ments en devant, elle offre un solide appui, qui transmet, sans crainte de vacillations, le centre de gravité sur la base de sustentation. XCVII. Je me suis demandé aussi pourquoi, dans la demi - flexion , la circonduction est très-étendue au genou, très-peu au coude? C'est que les ligaments croisés , qui font les fonctions que remplit au coude l'olécrâne , unissent alors lâchement les surfaces articu- laires , au lieu que , plus serré contre elles, l'olécrâne , qui est le dernier centre de ces mouvements, les permet avec peine. Revenons à nos articulations. XCVI1I. Articulation tibio - astragalienne. Cette articulation est assujettie en avant par une couche fibreuse , descendant du tibia sur les côtés et surtout en dehors par de forts li- gaments , qui naissent des malléoles , dans divers points de sa circonférence , par plusieurs gaines tendineuses. C'est sur toutes ces parties que se déploie la capsule; , en même temps SYNOVIALE. J.).3 que sur la face de l'astragale , sur celles réu- nies du tibia et du péroné. Elle est très-dis- tincte dans l'intervalle des ligaments, environ- née là où ils manquent de beaucoup de tissu graisseux , lâchement unie en devant , forte- ment adhérente aux ligaments latéraux. XCIX. Articulations phalangiennes. Les pha- langes du doigt de la main et du pied s'arti- culent entre elles au moyen d'un double con- dyle , reçu dans une double cavité. Voici le trajet de leur membrane synoviale : i° elle est libre derrière le tendon extenseur , où on la voit en le renversant en bas ; elle en tapisse la partie postérieure ; 2° descend sur la face articulaire inférieure , en recouvrant les liga- ments latéraux ; 3° remonte à la supérieure , en passant sur un bourrelet ligamenteux trans- versalement situé au-devant de l'articulation ; 4° forme au-devant de la phalange supérieure un cul-de-sac très-étendu , qui embrasse près du tiers inférieur de sa face antérieure et fa- vorise singulièrement la flexion ; 5° revient sur les condyles de la face articulaire supé- rieure , et de là sur le tendon extenseur. C. Personne, je crois, n'a fait mention du bourrelet fibreux , à fibres transverses , dont il a été parlé plus haut ; libre par ses bords , 536 MEMBRANE il se fixe par ses extrémités sur les côtés de l'articulation , qu'il garantit de l'impression des fléchisseurs ; il se trouve embrassé par la capsule synoviale de ce tendon en devant , en arrière par celle de l'articulation. CI. Articulation costo-vertèbrale. Il est pres- que aussi difficile de distinguer ici la mem- brane synoviale, qu'à l'articulation sternale des côtes ; elle paroît exister cependant , em- brassant le sommet de la côte , les deux facettes vertébrales et le ligament moyen. Plusieurs ligaments la cachent. § V. Articulations mobiles et bornées , à surfaces uniformes. [Ginglyme latéral. ] CIL Cette espèce d'articulations a deux va- riétés ; dans l'une , deux facettes articulaires situées aux deux extrémités de l'os , servent à le faire rouler sur celui qui lui sert d'appui. Une seule facette se rencontre dans l'autre , ou , s'il en a deux, elles sont au même niveau. ltre VARIÉTÉ. CIII. Articulation atloïdo- odontoïdienne. Deux petites capsules synoviales unissent les facettes articulaires antérieure et postérieure SYNOVIALE. 33« lodontoïde avec les facettes correspondantes de l'atlas et du ligament transversal . tendu derrière cette apophyse. Aucune fibre ne for- tifie cette foible articulation , qu'on trouve toujours assez abondamment humide de sy- novie. II VARIETE. CIV. Articulation radio-cubitale. J'ai dit , en traitant de l'articulation du coude, comment se comportoit la capsule synoviale pour em- brasser la tête supérieure du radius. En bas , son articulation avec le cubitus présente une petite bourse synoviale déployée , i° sur l'cx- trémité cartilagineuse du cubitus et sur la face interne du col qui la soutient ; 20 sur la face cubitale du ligament inter-articulaire ; 5° sur le tissu graisseux , situé autour de l'articula- tion : peu de fibres accessoires existent ici ; la capsule synoviale se rencontre presque seule; elle est très-facile à distinguer. Le ligament inter-articulaire se trouve enchâssé entre cette membrane et celle du poignet , et ne leur est point continu par sa circonférence. F I N. 22 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES. Avertissement sur cette édition. Préface Notice historique sur Bichat. . pag. vij . xiij xv TRAITÉ DES MEMBRANES EN GÉNÉRAL, ARTICLE PREMIER. Considérations générales sur ta classification des membranes. Nécessité de considérer les membranes isolément de leurs organes respectifs. — Vide dans la science sur ce point. — Classification adoptée dans cet ou- vrage ,-8 ARTICLE II Des Membranes muqueuses. § Ier. De l'étendue, du nombre des membranes muqueuses. — Elles se réduisent toutes à deux sur- faces générales. — Trajet de ces deux surfaces. — 540 TABLE ANALYTIQUE Leur division établie sur l'anatomie et la patho- logie 9-i4 §11. Organisation extérieure des membranes mu- queuses. — De leur double face Rapports de l'ex- terne, — replis divers dans l'interne, dans la vacuité et la contraction des organes; — expériences diverses à ce sujet i4-2?> § III. Organisation intérieure des membranes mu- queuses. — Leur analogie avec la peau ; — leur épi- derme ; manière de le démontrer; sa nature; — expé- riences; — elles manquent de corps muqueux; — leur corps papillaire est formé par les villosités; base nerveuse de ces villosités. — Opinion commune prou- vée fausse. — Expérience. — Leur chorion. . 20-58 § IV. Glandes des membranes muqueuses. — Leur position. — Quantité variable de leur fluide ; - — causes qui excitent leur action ; — mode d'excitation. — Ex- périences. — Elles sont un des grands émonctoires de l'économie animale 58-52 § V S 'y stème vas cul aire des membranes muqueuses. — Sa position. — Ses différences dans le foetus et l'enfant. — La quantité de sang y varie-t-elle suivant la contraction ou la dilatation de l'organe ? — Diverses expériences sur ce point 52-6o g VI. Variétés d'organisation des membranes mu- queuses dans diverses régions. — i°. A leur origine ; 20 dans les sinus; — 5° dans l'oreille interne, tapis- sée, non par le périoste, mais par une surface mu- queuse. — Différence entre les membranes séreuses et muqueuses 60-64 § VII. Forces vitales des membranes muqueuses. — DES MATIÈRES. jl\l Sensibilité; — ses rapports avec celle de l'organe cu- tané ; — influence qu'elle reçoit de l'habitude. — Mode de cette influence. — Tonicité 64-72 § VIII. Sympathie des membranes muqueuses. — Division nouvelle des sympathies en celles, i° de sensibilité, 20 d'irritabilité, et 5° de tonicité. Exem- ples divers 72"/4 §. IX. Fonctions des membranes muqueuses. — Le sang se colore-t-il à travers leur surface ? — ■ Expé- riences diverses sur cet objet. — Exhalation et absorp- tion qui s'y opèrent, etc 74-84 § X. Remarques sur les affections des membranes muqueuses 84-86 ARTICLE III. Des Membranes séreuses. $ I". De ('étendue, du nombre des membranes sé- reuses. — Elles sont isolées. — Leur surface totale surpasse un peu celle des membranes muqueuses, et de beaucoup celle de la peau. — Conséquences. 86-89 § II. Division des membranes séreuses. — Leur classe est partagée en deux genres. . . . 89-91 g III. Organisation extérieure des membranes sé- reuses. — Sac sans ouverture, replié pour le passage des vaisseaux. — Elles ont deux portions distinctes. — Leur poli ne dépend pus de la compression. — Fluide séreux , — sa quantité, — sa nature. — Expé- riences. — Moyen d'union de ces membranes avec leurs organes. — Isolement de leur vitalité. . 91-102 5 IV. Organisation intérieure des membranes se- ^>42 TABLE ANALYTIQUE reuses. — Couleur. — Épaisseur. — Texture cellulaire et lymphatique. — Considérations et expériences qui le prouvent. — Les vaisseaux sanguins sont étrangers à cette texture. 102-112 § V. Forces vitales des membranes séreuses. — Sen- sibilité. — Sa division en organique et animale. — Application de cette division nouvelle aux surfaces sé- reuses. — Expériences. ■*- Tonicité. — Extensibilité, moindre qu'elle ne paroît d'abord. . . . 112-121 § VI. Sympathies des membranes séreuses. — Divers exemples des sympathies de sensibilité et de toni- cité 122-124 § VII. Fonctions des membranes séreuses. — Réser- voirs intermédiaires aux systèmes exhalant et absor- bant. — Elles isolent la vie propre de leurs organes respectifs. — Elles favorisent leurs mouvements. Elles sont étrangères à leur forme, etc. . . . 124-128 § VIII. Remarques sur tes affections des membranes séreuses. , 128-iJo ARTICLE IV. Membranes fibreuses. § Ier. De ('étendue, du nombre des membranes fi- breuses. • — ■ Leur continuité entre elles. — Organe fibreux considéré en général. — Le périoste est le centre de cet organe i3o-i35 § IL Division des membranes fibreuses. — Toutes peuvent se rapporter à deux classes. — Subdivi- sions 1 55-i 54 § III. Organisation extérieure des membranes fi- DES MATIÈRES. 54 3 brcuscs. — Caractères organiques généraux. — Ca- ractères organiques propres de chaque classe. i34-i4° § IV. Organisation intérieure des membranes fi- breuses. — Couleur. — Densité. — Feuillet unique, quelquefois double. — Fibre particulière, base com- mune de leur structure; attributs de cette fibre. — Vaisseaux. — Nerfs . 1^0-148 § V. Forces vitales des membranes fibreuses. — Sen- sibilité. — Modification particulière dans celle de re- lation. — Expériences pour le prouver. — Inductions. — Forces toniques. — Extensibilité ; loi qu'elle suit i48-i55 5 VI. Sympathies des membranes fibreuses. — Exemples pris dans les trois classes ci-dessus indi- quées 1 55-i 57 § VII. Fonctions des membranes fibreuses, consi- dérées dans la première et dans la seconde clas- se 1 58- 160 § VIII. Remarques sur les affections des membranes fibreuses 161-162 ARTICLE V. Des Membranes composées. § iK Membranes fibro-séreuses. — Leur développe- ment est souvent tardif; — remarques sur leur for- mation . 163-167 g II. Membranes séro - muqueuses. — Elles sont rares 167-168 § III. Membranes fibro-muqueuses. — Divers exem- ples 168-169 344 TABLE ANALYTIQUE ARTICLE VI. Membranes non classées. Remarques sur la tunique fibreuse des artères. — Sa na- ture ne paroît pas charnue. — Expériences à ce sujet. — Autres expériences sur le mouvement artériel. — Membrane interne du système vasoulaire. Elle forme deux snrfaces générales, dont le poumon est le cen- tre. — Sa nature. — > Ses forces vitales. — Expériences. — Ses fonctions. — Autres membranes qui ne peu- vent être classées 169-186 ARTICLE VII. Des Membranes contre nature. § I". Des Kystes. — Leur analogie avec les membranes séreuses. — Leur développement n'est point méca- nique. — Mode de ce développement. . . 187-195 5 II. Membranes des cicatrices. — Période inflam- matoire ; ses usages. — Bourgeons charnus, et leur membrane préliminaire. — Période de suppuration. — Son analogie avec certaines périodes des cicatrices où il manque. — Affaissement; inutilité des panse- ments à cetle époque. — Formation de la cicatrice; son mécanisme. — Conséquences diverses. ig5-ai2 DES MATIÈRES. 3/f5 TRAITÉ DE LA MEMBRANE ARACHNOÏDE. SECTION PREMIÈRE. Considérations générales. L'arachnoïde a une existence isolée de celle de la pie- mère. — Preuves. — Vide de l'anatomie sur ce point. — Aperçu général 215-217 SECTION II. Déterminer la nature intime de (arachnoïde. Des moyens de connoître la nature d'un organe quel- conque par analogie. — Analogie de l'arachnoïde avec les membranes fibreuses 217-218 § Ier. Caractères tirés de la texture. Identité sous tous les rapports 218-220 § II. Caractères tirés des forces vitales. — Expé- riences sur la sensibilité de l'arachnoïde. — Toni- cité 220-222 § III. Caractères tirés des fonctions. — Exhalation et absorption. ■ — Expériences diverses sur ces deux fonctions. — La dure-mère y est étrangère. — Preu- ves , 222-228 5 IV. Caractères tirés des affections morbifiques. — Hydropisies, inflammation, adhérences, suppuration de l'arachnoïde. — Analogie avec celles des mem- branes séreuses 228-23 1 346 TABLE ANALYTIQUE SECTION III. Déterminer le trajet et la forme de i arachnoïde sur les organes qu'elle enveloppe. § V. Trajet de V arachnoïde sur te cerveau. — Sa manière cTêtre sur ce viscère, sur le cervelet et à l'ori- gine des nerfs; gaines diverses qu'elle forme. 233-250 § VI. Trajet de l'arachnoïde sur la moelle épinière. — Sac qu'elle forme. — Ses replis. — Préparation pour la voir ' 237-240 § VII. Trajet de l'arachnoïde sur la dure-mère. — Comment elle se réfléchit sur cette membrane. — Preuves de cette réflexion 240-247 § VIII. Trajet de l'arachnoïde dans les ventricules. — Comment elle s'engage dans ces cavités. — Con- duit de communication. — Sa position. — Manière de la trouver et de la démontrer 247-261 SECTION IV. Conclusion générale. Conséquences diverses relatives aux affections de l'arach- noïde 261-264 TRAITÉ DE LA MEMBRANE SYNOVIALE. Division de ce Traité 26.) DES MATIÈRES. 547 ARTICLE PREMIER. Du mécanisme par lequel la synovie est transmise aux articulations. § Ier. La synovie est-elle transmise par sécrétion aux surfaces articulaires? — Preuves négatives tirées de l'anatomie, des expériences et de la patho- logie 267-272 § II. La synovie est-elle transmise par transsudation aux surfaces articulaires ? — Preuves négatives. — Expériences analogues à celles de Troja. . 272-277 § III. La synovie est-elle transmue par exhalation aux surfaces articulaires ? — Preuves affirmatives. — Analogie de la synovie avec les fluides exhalés, sous tous les rapports 277-280 ARTICLE II. De la Membrane synoviale^ considérée en générai § Ier. Organisation extérieure de la membrane sy- noviale. — Elle est la même qu'aux membranes sé- reuses. — Le plus grand nombre d'articulations est dépourvu de capsule, et n'a qu'une synoviale. — Adhérences de cette membrane; preuve de son exis- tence 280-290 § IL Organisation intérieure de ta membrane syno- viale — Elle est toute cellulaire. — Preuves. — Pe- lotons graisseux des articulations. — Leur nature et leur usage. . 290-293 5/|8 TABLE ANALYTIQUE § III. Forces vitales de ta membrane synoviale. — Sensibilité. — Expérieuces sur cette force. — Toni- cité 293-295 § IV. Fonctions de la membrane synoviale, par rapport, i° à la solidité de l'articulation; 20 aux mou- vements; 5° à la synovie 295-297 ARTICLE III. Des Membranes synoviales en particulier. § Ier. Division générale des articulations. — Classes. — Geures. — Espèces. — Considérations diverses. — Tableau des articulations 298-502 § II Articulations mobiles et vagues, à surfaces libres. [Enarthrose.] Division de cette espèce en deux variétés: î". Articulations scapulo-humérale et ischio- fémorale; — considérations sur leurs mouvements. — 20. Articulations temporo-maxiilaire, sterno-cla- viculaire, radio-carpienne, métacarpo-phalangienne, carpo-métacarpienne du pouce. . . . 3o3-3i7 § III. Articulations mobiles et vagues, à surfaces serrées. [ Arthrodies. ] — Considérations générales. — Division de ce genre en deux variétés : i°. Articu- lations occipito-atloïdienne, axoïdo-atloïdienne, ver- tébrales, costo- vertébrales, carpienne et métacar- pienne, calcanéo-astragalienne, cunéo-scaphoïdienne, cunéo -cuboïdienne , métatarsienne; ia articulations acromio-claviculaire, péronéo - tibiale , steroo-cos- tale 3i8-329 § IV. Articulations mobiles et bornées, à surfaces inégales. — [Ginglyme angulaire.] Articulations fé- DES MATIÈRES. 349 moro-tibiale , huméro-cubitale, tibio-astragalienne, phalangiennes , costo-vertébrale. . . . 329-336 § V. Articulations mobiles et bornées, à surfaces inégales. [Giuglyme latéral. ] — Division de celte espèce en deux variétés : i° Articulation atloïdo-odon- toïdienne; i° articulation radio-cubitale, . 356-337 FIS DE LA TABLE. ■•- s