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TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE

DE

CONCHYLIOLOGIE.

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IMPRIMÉ CHFZ PAüI. RENOUARD, RÜE GA R AK<’l F.RF. ,

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TRAITE ELEMENTAIRE

DE

CONCHYLIOLOGIE,

AVEC

LES APPLICA.TIONS DE CETTE SCIENCE

A LA GÉOLOGIE,

FAK G.-P. 1>ESB[AT£S,

CHKVAMER DELA LÈGION-d’hONNEUR » MEMBRE DE PLUSIEURS ACAD ET SOCIÉTÉS SAVANTES.

TOME PKEMIEPi.

'rw

c.

PARIS.

CROCHARD ET C'', LIBRAIRES-ÉDITEURS,

PLACE DE l’ÉCOLE-DE~Mi':dECINF., N. 1^.

1839.

.TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE

DE

CONCHYLIOLOGIE.

DÉFINITION DES MOLLUSQUÉS.

Animaux pairs , symétriques , mollasses sans squelette intérieur articulé, sans cerveau p - ment dit et sans moelle épinière. Système nerveux. Un anneau œsophagien composé de plusieurs gan- glions plus ou moins rapprochés, embrassant l’œ- sophage ou une partie des viscères. Respiration hranchiale , circulation simple et complète au moyen d’un ventricule et d’une oreillette. Sang blanc, contenu dans un système artériel et dans un système veineux. Organes de la digestion di- vers dans leurs ‘formes, mais consistant toujours en une bouche, un œsophage, un ou plusieurs es- tomacs, un intestin plus ou moins long, terminé par un anus diversement placé. Ils sont accompa- gnés de glandes salivaires, dans la plupart, et d’un organe biliaire dans tous. Génération dioïque, monoïque ou hermaphrodite. Organes des sens en général peu développés , si ce n’est le toucher. La

T. 1.

a DEFINITION DES MOLLUSQUES.

plupart n’ont point d’yeux, ont des plaques cor- nées à la bouche, et aucun n’a d’organe propre à l’audition.

Corps quelquefois nu, le plus souvent protégé par une coquille cornée ou calcaire. Coquille tan- tôt bivalve et articulée en chai'nière, tantôt uni- valve soit intérieure soit externe. Lorsqu’elle est univalve, sa cavité est simple ou en partie occupée )ar des cloisons régulières percées d’un siphon.

A.U moyen de Panalomie comparée des Mollusques , nous avons fait Y.oir que ces animaux, constituant un grand type dans le régne anim . devaient être divisés en deux grands embranchemens : le premîter comprenant tous les Mollusques acéphalés, le second les MoIIusqv '• cépbalés. D’après l’ordre méthodique que nous avons adc’"'* ' . jrdre qui est la conséquence des principes que nous avons dt /eloppés précédemment, nous traiterons d’abord des Mollusques ' 'éphalés.

MOLLUSQUES.

MOLLUSQUES ACÉPHALÉS.

CARACTERES. Auimaux mous, inarticulés, toujours fixés clans une coquille bivalve, sans tête et sans yeux, ayant la bouclie cachée , dépourvue de parties dures et pourvues de chaque côte d’une paire de palpes lamellaires, un manteau ample, enveloppant tout le corps, formant deux lobes libres ou réunis postérieurement; deux feuillets branchiaux entre le corps et le manteau. Circulation simple, un ventricule aortique et deux oreillettes. Anneau nerveux très étendu, embrassant toute la masse viscérale.

Coquilles toujours bivalves; les valves presque toujours articulées en charnière et tenues réunies par un ligament élastique.

OBSERVATIONS. Après avoir conçu la division des Mollu.sques à'peU“près de la même manière que nous l’avons présentée, La- marck, dans .ses derniers travaux, revint à une autre opinion et proposa d’établir, pour les Mollusques acéphales, une classe dans lerègne animal, ayant la même valeur que celle des insectes, des crustacés, etc. 11 donna aux animaux de celte nouvelle classe le nom de Conchifères, réservant le nom de Mollusques pour ceux de ces animaux qui ont une tête et qui sont pourvus d’une co- quille univalve. Nous avons développé les motifs qui ont déter- miné la plupart de zoologistes etnous-méme à rejeter celte nou- velle manière de voir de Lamarck et à adopter celle qui a servi de base à ses premières méthodes.

1.

4

MOIxrSQüES DYMÎAIRES.

Ce que nous avons dit px'écédemment sur l’organisation des Mollusques acéphalés, nous a conduit à les diviser en trois ordres principaux :

jo Mollusques dimyaires.

Mollusques monomyaires.

V Mollusques Bracluopodes.

MOLLUSQUES ACÉPHALÉS.

MOLLUSQUES DIMYAIRES.

CARACTÈRES. Animal régulier , symétrique, ayant les lobes du manteau tantôt réunis postérieurement, tantôt désunis dans toute leur circonférence, ayant toujours deux muscles principaux adducteurs des valves, Tun antérieur, l’autre postérieur. Une coquille presque toujours libre et régulière , quelquefois irrégulière et fixée. Un pied de formes diverses, soit pour ramper, soit pour filer un byssus.

OE.<iERVATiONS. Cette première sous-classe, établie par La- marck , doit être conservée, et nous avons dit pourquoi. Seule- ment les limites que le savant auteur des animaux sans vertèbres lui avait données n’étaient pas exactes, et une nouvelle étude de cette partie principale des Mollusques acéphales nous a fait voir de quelles familles et de quels genres celte première sous-classe devait être composée. Nous la partageons en deux ordres, d’après ce caractère important de la réunion ou de la désunion des lobes du manteau et chacun de ces ordres est lui-mémepartagé en deux sous-ordres , d’après ce caractère facile à observer de la régularité ou de l’irrégularité de la coquille.

Nous avons cherché autant qu’il nous a été possible à former des familles naturelles et le tableau de classification qui est placé

rH£m£l\£ VA3I1LLE. LES XUBICOLES. 5

à la fin des considérations générales sur les Mollusques indique Tordre que nous allons suivre dans Texposition des l’aniiiles.

PREMIÈRE FAMILLE.

Les Tubicolés.

CARACTÈRES. Animal allonge, clavilbnne, tronqué an- térieurement, enveloppé d’un manteau épais dont les deux lobes sont soudés dans toute leur longueur et prolongés postérieurement en deux siphons réunis eu une seule masse charnue, une fente antérieure dans la troncature du manteau; branchies étroites, allongées, flottantes dans lesi- phoii branchial; un pied petit, rudimentaire, dirigéen avant.

Un tube calcaire dans lequel est contenue une coquille bivalve, ou qui est insérée en tout ou en partie dans sou épaisseur. Coquille régulière, bâillante, à chaimièrc li- néaire simple, sans cuilleron dans les crochets.

GENRES. ^érrosoiry Cla^>agelle'y Gastvochhae.

OBSERVATIONS GÉNÉRALES. La faïuille dos Tubicolés a clé créée par Laniarck, dans son dernier ouvrage. Trompé par la valeur trop exclusive qu’il donnait à Texistence d’un tube calcaire indé- pendant des valves, ou en partie complété par elles, Lamarck avait réuni dans Tordresuivant six genresdans cette faniilledesTubîcolés.

Arrosoir^ Cla^a^elle^ Flstulane y Cloisonnai’re ^ Teredine , Tarct,

Lamarck avait entrevu depuis long-temps les rapports de ces divers genres, plusieurs avaient été rapprochés par lui dés 1808, dans les Annales du Muséum, lorsque, dans divers mémoires, il traita des coquilles fossiles des environs de Paris. Fondée sur un caractère trop exclusif, cette famille parut très naturelle à la plupart des auteurs, et elle fut adoptée par eux, sans éprouver de changemens notables. Parmi ces auteurs , nous citerons M. de Férussac (^Tableau Syst» des MolL^ et M. Laircillo [Fam. nal.

6

FRIMliRE FAMILLE.

du rêgn* an,). Cuvier n’avait point adopté l’îngénieux rapproche- ment de Lamarck , des arrosoirs et des clavagelles, Latreiile crut bien faire d’imiter en cela rauleur du Règne animal, et rejeta les arrosoirs de la classe des Mollusques pour les placer dans les An- nelides tubicoles, non loin des Amphitriies; M. de Blainville sen- tit bien que l’on devait séparer en deux séries, les genres intro- duits dans la famille des Tubicoles. Mais n’ayant pu sans doute , étudier leurs caractères d’une manière complète, il laissa entre eux quelque confusion. C’est ainsi qu’il transporta les Gastro- chênes, les Clavagelles et les Arrosoirs dans sa famille des Piloridés et les genres Teredine , Taret, Fistulane et Cloisonnaire , avec les Pholades , dans la famille des Adesmaccs.

Dans la première édition du Règne animal, Cuvier n’avait point admis le rapprochement des genres qui font partie de la famille des tubicoles de Lamarck. Quelques-uns de ces genres sont intro- duits dans l’ordre des Enfermés, dans le voisinage des Solens et des Pholades, et les Arrosoirs, comme nous venons de le dire, font partie des Annelides tubicoles. Dans la seconde édition du même ouvrage, Cuvier ayant eu l’occasion d’examiner un animal d’Ar- rosoir rapporté de la Mer-Rouge par M. Ruppell, abandonna sa première opinion, rapprocha les Arrosoirs des Fislulanes et des Tarets, sans adopter cependant la famille des Tubicolés.

Nous pensons que la réforme tentée par M. de Blainville d’une manière insuffisante et incomplète , doit être actuellement conti- nuée et nous nous appuierons, à cet égard, de plusieurs consi- dérations importantes.

Les mollusques acéphalés qui produisent un tube calcaire, ac- cessoii'e à leurs valves et destiné h les protéger se présentent sous deux formes différentes: dans les uns, la coquille, plus ou moins bâillante a les crochets prolubérans ; la charnière est sans dents cardinales, elle est dépourvue de ligament, et l’on trouve con- stamment dans l’intérieur des valves partant du sommet, des ap- pendices osseux, recourbés, plus ou moins longs qui s’enfoncent dans les parties molles de l’animal .Ces appendices, intérieurs com- muns à plusieurs genres, tiennent à une organisation qui leur est propre. Dans les autres tubicolés , ces appendices u’existent jamais; les coquilles sont bâillantes, mais elles ont un autre aspect et l’animal qui les habite a aussi des caractères particuliers. Le tube calcaire, servant d’enveloppe aux animaux des genres que nous avons mentionnés , est lui-même' lin accident de peu d’im-

LES TUBIOOL^S*

7

portance, puisqu’il existe ou n’existe pas dans certaines espèces selon les circonstances d’habitation. Ce tube ne peut donc être pris pour caractère essentiel et prédominant; aussi, pour nous, les ca- ractères des animaux, traduits par ceux do la coquille, sont beau- coup plus imporlans et nous les avons préférés. Ce sont ces motifs qui nous ont fait réserver trois genres seulement dans la famille des tubicolés et d’après lesquels nous avons rejeté les autres dans la famille des Pholadaires qui suit immédiatement.

Les genres qui appartiennent à la famille des tubicolés ont cer- tainement un gi*and intérêt pour l’élude. Nous voyons en effet le tube singulier des Arrosoirs présenter des caractères en appa- rence absolument étrangers à ceux des autres acéphalés. Il fallait toute la sagacité do Lamarck pour mettre ce genre à sa véritable place. Le savant professeur avait remarqué, vers la couronne des Arrosoirs, une impression tout-à-fait semblable h celle que pro- duirait une petite coquille bivalve parfailement régulière et dont le contour aurait été soudé dans l’épaisseur de la paroi commune. Dans les Clavagelies, dont Lamarck ne connut qu’un petit nombre d’espèces et justement celles qui, par leurs formes, s’éloignent le plus des Arrosoirs, il trouva une valve incrustée dans l’épaisseur du tiibe et l’autre libre dans la cavité intérieure, articulée en charnière avec la première et maintenue en place au moyen d’uu ligament. Depuis, les rapports des deux genres ont été pleinement justifiés non-seulement par la découverte d’espèces vivantes de Gla- vagelles, mais encore par laconnaissanced espècesfossilesproduisant de grands tuyaux claviformes et couronnés semblables à ceux des Arrosoirs. Ce qui caractérise les tubes de ces deux genres, c’est qu’ils sontcouronnésparunesortedecorolledont le bord aigu donnenais- sance àun grand nombre de peliis tuyaux, à travers lesquels passent desappendices de la partieantéi’ieuredumanleau.Dansles Arrosoirs, ces tubes sont simples, ils sont branchus dans les Clavagelies couron- nées; le troisième genre rapporté à la famille des tubicolés 'a été autrefois connu de Spcngler et caractérisé par lui , sous le nom de Gastrocliène. Ce genre a des rapports évidens avec les Clavagelies par certaines espèces qui se font un liibe libre, en massue, mais toujours dépourvu des épines tubuleuses propres aux deux pre- miers genres que nous avons cités. Dans ce genre gaslrocliene la coquille bivalve est complètement libre, c’est-à-dire q.ae les deux valves égales et très bâillantes sont contenues dans la cavité inté- rieure du tuyau et ne sont jamais soudées à une partie quelcon-

I^K^MIÈUE t'AMlLLE.

que des parois. On peut donc observer dans ces trois premiers genres celte série si remarquable de modifications des deux* valves insérées dans l’épaisseur du tube des Arrosoirs, une seule dans le tube des Clavagelles et enfin les deux valves libres dans les Gastrocbènes.

IN^ous terminerons par une dernière observation qui n’est pas sans intérêt, c’est que l’animal de l’Arrosoir, enveloppéd’un man- teau épais, ouvert à ses deux extrémités, a en réalité par cette dis- position et celle des organes intérieurs , une certaine analogie avec les Sa/pa, et dans l’ordre méthodique que nous avons adopté, il doit commencer la grande série des Mollusques acéphales.

GENRE PREMIER.

ARROSOIR. Asperyillum- (Brug-)*

PI. I. fîg. I, 2. 3.

CARACTÈRES GÉNÉiiiQüEs. Animal allongé, clavîforme, subcylindracé , enveloppé d’un manteau épais , ayant les deux lobes soudés dans tout leur contour, terminé antérieu- rement en un disque ayant au centre une fente longitudinale courte et étroite et postérieurement en deux siphons réunis ; palpes labiales longues etétroites-, branchies allongées étroites, se prolongeant dans le siphon branchial^ un pied rudimen- taire porté eu avant.

Tube calcaire conique, élargi antérieurement en un dis- que en forme de corolle , percé de trous , d’une fente cen- trale, et couronné au pourtour de petits tubes allongées et simples. Coquille bivalve, régulière, équivalve , subéquila- térale , incluse tout entière dans la paroi du tube.

SYXONYRIE GÉNÉRIQUE. Phallus marüius ; Lister, Rhum- pliius. Tubulus inarinus; Gualtieri. U Arrosoir^ le bran- don d'amour ; D’argenville. Serpula {^Penis') Linné. Genre , hréchîtes ^ Guettard. Genre arrosoir péni-

cillus ; Bruguières , Cuvier. Genre arrosoir aspergilluni ;

Lhb ïülilCOLÉbi

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Lamarck, Blaînvllle. Genre ar/thene arythmaa; Megerle, Ocken, Ruppel. Genre aquaria ,* Perry. Genre arrosoir; Clepsjrdra , Schumacker.

OBSERVATIONS. Le genre, très curieux, des Arrosoirs, est au- jourd’hui bien connu dans tous ses caractères zoologiques. Pen- dant long-temps les tubes singuliers , avec lesquels le genre a été institué, furent seuls répandus dans les cabinets des curieux, et c’est à M. Ruppell que l’on doit la découverte récente de l’animal et sa description anatomique.

Nous trouvons pour la première fois , un Arrosoir figuré dans Pouvrage de Lister [Synopsis Conchylioram^ pl. 548) sous le nom de Phallus marinas , dans le voisinage des dentales et des Vermets. A cette époque l’on confondait dans une môme classe tous les corps testacés, ce rapprochement de Lister n’a rien qui doive nous surprendre. Plus tard , Kumphius, dans son histoire d’Amboine , mit aussi les Arrosoirs avec les Serpules et lui con- serva le nom imposé par Lister. Gualtieri suivit l’exemple de ses devanciers en mettant comme eux l’Arrosoir parmi les Serpules et les Dentales. C’est à d’Argenville et à Favaniie, que l’on est re- devable du nom assez convenable d’Arrosoir imposé au -genre qui nous occupe.

Dès la dixième édition du Systema naturm^ Linné, rapporta le Phallus marinus de Lister à son genre Serpula et lui donna le nom de Serpula pcnis^ confondant sous celte dénomination , les espèces qui étaient connues de son temps. Depuis, Linné a con- servé les Arrosoirs dans les rapports qu’il leur avait d’abord assignés et les laissa dans la môme confusion synonymiqua. Nous passons sous silence la citation de plusieurs ouvrages qui n’ont été d’aucune utilité pour la connaissance plus exacte des Arrosoirs et de leurs rapports naturels : Bonanni , Klein , Lesser et d’autres ont mentionné le genre Arrosoir parmi les tuyaux marins, mais n’ont rien ajouté d’important à son histoire. Il en est presque de même de Martini, qub dans le premier volume de son Cor- chylien cabinet^ mentionna aussi le genre qui nous occupe sous le nom de Tabulas vcrmicularis en le comprenant , comme tous ses devanciers, parmi les Serpules et les autres tuyaux marins.

Dans Je recueil des mémoires divers de Guèllard publié en 1774) on en trouve un fort remarquable (t. a. p. i8) sur les tuyaux marins. Quoique sous cette dénomination vague et vicieuse ,

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PREMIÈRE FAMILLE.

Guettardj à l’exemple de ses devanciers, ait confondu des animaux fort différens, il racbèie cependant ce défaut en établissant parmi eux des coupes génériques assez naturelles au moyen desquelles il rectifie convenablement le genre Serpula de Linné. Il com- mence par adopter le genre Taret d’Adanson, il distingue les Cloi- sonnaires, il caractérise le genre Arrosoir, sous le nom de Bré- chile , Brechiies, il sépare les Vermets des Siliquaircs et des Ser- pules et il définit le genre Siliquaire de manière à le faire toujours reconnaître facilement; enfin, il propose sous le nom d’üpérole, un genre correspondant assez exactement à celui nommé plus tard Gaslrochène, par Spengler. Il est-fâcheux que ce travail re- marquable de Guettard soit tombé dans i’oubli, car il contient des observations qui, reproduites plus lard, ont acquis seulement alors la valeur scientifique qu’elles ont conservée.

Bruguières fut le premier qui apporta quelques modifications aux opinions reçues avant lui. Il fut aussi le premier, qui institua le genre Arrosoir dans son tableau systématique qui est au com' mencemenl du volume des vers de l’Encyclopédie. A l’article Arro- soir qu’il traita dans le môme ouvrage, il fit sentir la nécessité du nouveau genre et en fit ressortir les caractères principaux : Bru- guières s'aperçut bien qu’il s'éloignait des Serpules; mais n’ayant aucune connaissance de l’animal , il laissa indécise la question des rapports.

Dans ses premiers travaux, Lamarck se laissa entraîner a une opinion toiU-à-fait comparable à celle de Bruguières, mais cette erreur ne fut pas chez lui de longue durée , car dès 1807, il rec- tifia dans ses cours l’opinion qu’il avait eue d’abord, et la rem- plaça par celle dans laquelle il a persisté depuis. Par cette nouvelle manière de voir, Lamarck transportait le genre Arrosoir, du voi- sinage des Serpules et des Patelles, au commencement de la grande série desMolIusques aoéphalés, comprenant déjà ses rapports avec les Fisiulancs et les Tarets. Celleopinion de Lamarck ne fut alors admise que par un petit nombre de personnes parmi lesquelles nous devons citer M. de Roissy. Ce savant distingué saisit avec empressement les rapprochemens indiqués par Lamarck, les adopta dans l’ouvrage sur les Mollusques, qui fait partie du Buffon de Sonnini, et les appuya sur des observations plcinesde sagacité. La découverte que fou fit , aux environs de Paris, d’un genre inter- médiaire entre les Arrosoirs et les Fisiulanes, vint confirmer bien- tôt après les opinions de Lamarck qui furent successivement

LES TUBiCÛL£S«

11

adoptées par un grand nombr-e de Zoologistes. Cependant malgré les travaux que nous venons de citer, Pery en Angleterre , Mé- gerle en Allemagne et Schumacher en Danemark , donnèrent des noms nouveaux au genre Arrosoir de Bruguières. Le premier proposa le nom d’Aquaria, le second , celui d’Aritène et le troi- sième celui de Clepsydra. Il est de toute justice cependant de con- server au genre le nom que lui a donné Bruguières. Nous avons vu que Cuvier s’était constamment refusé à adopter l’opinion de Lamarck; il a fallu que M. Ruppel , au retour de son voyage dans la Mer- Rouge, fît voir à notre grand zoologiste, l’animal de l’Arrosoir pour le ramener à une opinion plus juste.

L’animal, rapporté par M, Ruppel, est figuré dans l’Atlas zoo- logique de son voyage dans le nord de l’Afrique ; cet animal est représenté dans un étatdecontraction, mais on couçoit cependant les rapports qu’il doit avoir avec le tube qu’il habite. Il est allongé claviforme, subcyündracé. Le manteau donlilest enveloppé con- stitue une des parties principales. Il est épais et semblable à un tuyau charnu, terminé du côté antérieur par une troncature lé- gèrement convexe et dont les bords sont aigus j l’extrémité posté- rieure est atténuée, et l’on y voit deux petites perforations qui ne sont autre chose que les ouvertures fortement contractées des si- phons postérieurs. Au milieu de la troncature antérieure , on aperçoit une petite fente courte et étroite, longitudinale qui cor- respond à celle qui se montre au centre du disque du tube. Ce qui est fort remarquable, c’est que, dans l’état de contraction, on n’a- perçoit aucune trace de tubes charnus ou de perforations corres-* pondant à ceux qui se montrent sur la surface intérieure de l’Ar- rosoir. Lorsqu’un lambeau du manteau a été enlevé , on trouve dans l’intérieur un animal dont l’organisation est tou t-à-fait com- parable à celle des Fislulanes et des Tarets. On remarque d’abord à la partie antérieure et médiane une petite masse abdominale , à la partie antérieure de laquelle est fixé un petit pied conique, tout- à-fait réduit à l’étal rudimentaire. Cet organe est placé en face de la fente du disque, et pour nous, celte fente représente celle un peu plus grande que l’on observe dans les Myes. Au-dessous du pied, en avant se trouve une petite ouverture buccale de cha- que côté de laquelle est une paire de palpes labiales allongées , étroites et lancéolées. Les branchies commencent de chaque côté de la masse abdominale, se réunissent au-dessous d’elle et se pro- longent dans une très grande partie du siphon branchial à la pa-

12

l*K£mKll£: FAMILLE.

roi duquel, elles se soudent. Les branchies, ainsi disposées, laissent derrière elles un canal assez large dans lequel Tanus vient aboutir. La partie postérieure de l’animal est divisée en deux siphons, mais réunis dans toute leur longueur et dont on aperçoit la sépara- tion à l’intérieur. Dans la contraction , ces parties sont courtes et épaisses, mais lorsque l’on sait avec quelle facilité s’étendent et s’amincissent les organes musculaires de la plupart des Mollus- ques, on comprend comment le manteau des Arrosoirs peut s’é- taler sur les parois d’une tube calcaire deux ou trois fois plus long que l’animal contracté. L’animal de l’Arrosoir est attaché à son tube dans l’endroit la petite coquille dont nous parlerons est insérée. Il est fixé par des muscles qui sont une modification des muscles adducteurs des autres Mollusques acéphalés : on com- prend qu’ils doivent avoir une forme et des rapports particuliers dans un animal dont toute l’organisation est assez singulièrement modifiée.

Le tuyau testacé dans lequel habite l’animal dont nous venons de parler est allongé, cyHndracé, légèrement conique, mince, fragile, tantôt lisse et quelquefois hérissé de grains de sable que l’animal y a agglutinés. Plusieurs auteurs ont pensé que l’extrémité rétrécie de l’Arrosoir se terminait à la manière desSerpules, et que cette terminaison servait à fixer TArrosoir sur les corps solides. Favanne et depuis lui Bruguières, s’appuyant sur l’opinion de M. Hwass, ont assuré avoir vu des Arrosoirs fixés et formant des groupes de plusieurs individus (Marvye, l’Art de conserver, pl. I, f. i3), tous termines postérieurement par une pointe contour- née irrégulièrement, à la manière des Serpules. Nous n’avons au- cun doute sur la véracité des auteurs qui disent avoir vu dans les collections des Arrosoirs terminés comme nous venons de le dire, mais nous avons la ferme conviction que leur bonne foi n été sur- prise par l’adresse des marchands qui ont su ajuster avec art des Arrosoirs sur l’extrémité antérieure de Serpules ou de Vermets adhérons sur une pierre. Celte manière de voir ne pourrait sup- porter un long examen, et l’on avait assez souvent l’occasion de voir bien conservée l’extrémité postérieure des Arrosoirs pour être convaincu qu’elle devait rester constamment ouverte, et la décou- verte que fit Savigny de l’Arrosoir de la Mer-Rouge fit cesser tout le doute qui pouvait encore rester. Dans cette espèce, en effet, on voit par les accroissemens successifs de l’animal des sortes d’entonnoirs calcaires invaginés les uns dans les autres, quelquefois

LÏS TOBlCOtés.

i3

au nombre de sept ou huit, comme Fa fait voir M. Ruppel. Les bords de ces entonnoirs découpés et plissés ressemblent à des man- chettes, d’où est venu le nom que l’on donne habituellement à l’espèce dont nous parions. L’extrémité antérieure du tube de l’Arrosoir présente un disque convexe, dont la surface est hérissée de petits tubes très courts que l’on voit pénétrer à l’intérieur. An centre du disque, on trouve une petite fente correspondant à celle que nous avons fait remarquer au manteau de l’animal; au point de jonction de ce disque avec le reste du tube, s’élève une sorte de corolle formée par une série circulaire de tuyaux plus gros et plus allongés que ceux du disque. Ces tuyaux sont simples dans la plu- part des espèces, quelquefois ils sont bifides. Au-dessous de cette corolle et sur la ligne médiane et dorsale, on aperçoit sur le tube, et incrustée dans son épaisseur, une petite coquille bivalve régu- lière et symétrique, dont les valves sont bâillantes et s’étendent régulièrement à droite et à gauche pour former une partie des pa- rois du tube. Si l’on casse le tube pour l’examiner à l’intérieur, on aperçoit dans l’intérieur des valves une impression un peu en forme de C, et qui est celle du muscle qui attache l’animal à son tube.

Savigny avait observé , et M. Ruppel a constaté un fait très sin- gulier que l’on observe quelquefois dans les Arrosoirs et les Fistu- lanes. On voit dans l’intérieur du tube de certains individus, une cloison transverse légèrement convexe et percée au centre, et il semble que cette perforation est trop étroite pour donner un libre passage au siphon de l’animal. On n’a point encore expliqué Futi- lité de cette cloison^ et l’on n’a pas cherché non plus à expliquer la manière dont s’accroît le tube de FAirosoir et de la plupart des autres Tubicolés- En examinant avec attention des ^ tubes d’ Arro- soirs, de Clavagelles et de Fistulanes, nous nous sommes aperçus que les stries d’accroissemens se montraient à la partie antérieure du tube avec une forme particulière et se manifestait aussi à la partie postérieure avec une autre forme propre, d’où nous avons conclu naturellement que si les siphons ajoutaient à la longueur du tube, la partie antérieure de l’animal devait également l’ac- croître considérablement. Mais comment concevoir cet accroisse- ment dans un animal complètement enveloppé d’un tube dans le- quel il n’existc aucune solution de continuité. Pour nous, nous supposons qu’au moment de FaccroissemenI , l’animal contracte ses siphons et produit au point de la contraction la cloison trans- verse perforée dont nous avons pailé. Il dissout ensuite le dis-

FREMIKRE FAMILLE.

14

que et la corolle qui couronne son tube; détache des parois, par le même moyen, la coquille sur laquelle il est attaché, et trouvant un point d’appui à son extrémité postérieure, pousse tout son corps en avant et toute sa partie antérieure reste à nu, jusqu’à ce qu’une nouvelle sécrétion en rapport avec son accroissement l’ait mis à l’abri du contact des corps étrangers. Celte dissolution d’une partie du tube teslacé ne paraîtra pas impossible à celles des per- sonnes instruites dans la physiologie des Mollusques, et qui savent que certains de ces animaux détruisent et absorben t les parties de leur coquille qui pourraient gêner leur accroissement , que d’au- tres jouissent de la singulière propriété de dissoudre les substances calcaires dans lesquelles elles s’enfoncent pour vivre.

D’après les observations de Rumpbius et particulièrement celles de Savigny et de M. Ruppel, les Arrosoirs vivent sur les plages sablonneuses, s’enfonceiit perpendiculairement dans le sable à la surface duquel elles font saillir l’espèce de pavillon qui termine le tube. C’est dans ce pavillon que l’animal dilate largement l’ouver- ture de ses siphons pour établir, par leur moyen et par les ouver- tures antérieures du manteau, un courant d’eau destiné à la respi- ration et à porter vers la bouche les particules alimentaires dont il se nourrit.

Le nombre des espèces inscrites dans le genre est peu considé- rable. Nous en connaissons cinq espèces , parmi lesquelles une est fossile , des environs de Bordeaux.

M. Defrance a cru pouvoir rapprocher au genre Aspergiîlum un petit corps fossile des environs de Paris : ce corps a à peine une ligne de diamètre, il est formé d’une petite calotte sur le bord externe de laquelle s’élève une rangée de petits tubes; la calotte n’est point percée de trous et elle n’a pas la fente médiane des Ar- rosoirs, enfin cette calotte ne se prolonge pas en un bube propor- tionné, pourvu de deux valves enchâssées, nous croyons que le corps, dont il est question, est l’opercule ou la partie antérieure ►d’une annelide tubicole.

Nombre des espèces :

5 Vivantes,

1 Fossile des environs de Bordeaux, mais encore dou- teuse.^

LIS TUBlCOLis.

ESPECES.

i5

Arrosoir de Java. Aspergillum Jaçanuuu Brug, planche i. fig. I. 2. 3.

A. 'vaginâ tercti attennatâ, lœvîgatâ, antlcè clavatâ^ disco mediocriter coU’ vexo, fimbrid latà circiimdato; tubulis apîcc bîjîdîs ^ 'vahns angustis , plants f 'vagînd continuis i unibonibus proeminentibus ,

Liuué. Sysî. nal. edit.deciai, l. a, p. 788.

Id, Mus. Ülric. t. a. p. 702. 434.

Serpula pénis, Lia. Syl. aal. p, 1267,

Gmél. p. 3744. 17 Serpula pénis,

Schrol. Einl. in Coucli. t. 2, p. 554. no 16.

Kumph. Amb. pl. 41. f. 7.

Valealyii, Amb. pl. 10. f. 89.

Gualt, Concb, pl. 10. f, M.?

Mari. Conch. i. pl. 1. f. 7,

Penicillus javanus, Brug. Encycl, mélh. p. 128. Syn. plur. exc,

Serpula aquaria. Dilwio. Cat. l. 2. p. io83. no 35.

Id. Brookes. lalr. to tbe stud. of Concb. pl. 9. f. 1 3o ?

Bowdich. Eléments of Conch. part, f, 126, 126 a,

Blainv. Malac. pl. 81. f. 2.

Aspergillum sparsum, Sow. GenJ of shells. 27; f. 3-5.

Desb; Lamk. An. S. V. éd. t. 7. p. ao, i.

Habite POcéan Indien.

%

La plupart des auteurs confondent plusieurs espèces avec celle- ci; mais il est très difficile de rectifier convenablement la synony- mie, parce que les descriptions sont incomplètes, et les figures mé- diocres ou mauvaises n’indiquent pas les vrais caractères spécifi- ques.

L’Arrosoir de Java se reconnaît à son tube conique claviforme; la coquille insérée est beaucoup plus haute que large ; son contour est simple , non saillant en dedans ou en dehors ; les sommets rap- prochés sont petits et seuls saillans ; les tubes du disque sont peu saillans, assez gros et peu nombreux, ceux de la circonférence sont longs, très rapprochés, souvent soudés latéralement; parve- nus à moitié de leur longueur, ils se bifurquent et quelquefois vers l’extrémité, chacune des bifurcations se divise encore en deux; la rimule centrale du disque est étroite, courte dans le centre, ses bords s’infléchissent en dedans et font saillie à l’intérieur.

iG PREMIÈBE FAMME.

Arrosoir de Lt^ognan. Aspergillum Leognanum* Hœnîng.

A, ^agînâ subclavatâ^ corpora aliéna agglutinante; disco tnbulis frequentibus ecliinatOf etiam corpora aliéna agglutinante , fimbriâ et fissura destituto,

Hœning. Lettr. à ses correspondants , f. 1.2.

Desli. Encycl, méth. vers. t. 2. p. 74» 3.

Fossile aux environs de Bordeaux.

Quand même on contesterait, comme Font fait quelques person- nes, l’existence de cette espèce à l’état fossile, on serait néanmoins obligé de reconnaître en elle des caractères spécifiques particuliers propres à la faire distinguer facilement des autres espèces connues. Le tube et la corolle sont agglutinans; le disque est convexe et hérissé de tubes presque aussi longs que ceux de la circonférence; les valves de la coquille sont sublriangulaires et leur insertion forme une dépression notable dans le tube. La fente du disque est à peine apparente. Ce qui a particulièrement excité le doute au sujet de cette espèce, c’est qu’un seul individu aurait été, jusqu’à présent, trouvé aux environs de Bordeaux, et aurait échappé, depuis plus de 3o ans, aux recherches assidues de M. Grateloup, et d’autres personnes qui mettent un zèle bien louable à la recherche des fossiles des terrains tertiaires de la Gironde.

GENRE DEUXIÈME.

CI.AVAGEI.I.1:. ClavageUa. (Larak.).

PI. r. fig. 4- ï4'

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Tubc calcaire , tantôt libre, tantôt inclus dans les corps sous-marins ; soit conique et ter- miné antérieurement par un disque , présentant au centre une rimule, et à la circonférence une couronne de tubes branchus; soit claviforme et hérissé en tout ou en partie de tubes spiniformes , simples : ce tube présente une valve in- sérée dans sa paroi, et une autre libre dans rintérieur.

Animal allongé claviforme , ayant les lobes du manteau réunis , très épais , prolongés postérieurement en deux si- phons réunis dans toute leur longueur ou une seule masse charnue cylindracée. Corps demi cylindrique pourvu de

I.ES TUmCOlES.

*7

cliaque côte d’une paire de branctiies étroites dont l’extrémité postérieure libre flotte dans le siphon branchial 5 palpes la- biales longues et étroites 5 un très petit pied rudimentaire antérieur placé en face d'une très petite fente du manteau.

SYKONY3UE GÉNÉRIQUE. Genre huccodes^ bnccodus ; G\xq\.~ tard. Fistulana pars\ Lamk, des anim, s, vert* Te~ red/o;Brocchi. Clavagelle clavagella; Lamk. Annales du Muséum* Desh. Blainv. Fer. So^v. etc., etc.

Le genre Clavagelle n’est pas moins intéressant pour l’étude des Mollusques acéphales que celui des Arrosoirs. Connu de La- marck, lorsqu’il publia ses mémoires sur les Coquilles fossiles des environs de Paris , il le confondit d’abord avec les Fistulanes et le proposa pour la première fois dans l’extrait du cours. Brocchî en. découvrit quelques espèces, mais il n’en reconnut pas les caractèi’es et les rapporta aux Tarts et aux Fistulanes, Caractérisé par La- marck dans son dernier ouvrage , le genre Clavagelle a été adopté depuis par tous les zoologistes. Tous ceux des auteurs, qui ont com- pris l’ingénieux rapprochement de Lamarck., ont mis les Clava- gelles à côté des Arrosoirs, au commencement des Mollusques acéphales , tandis que d’autres , entraînés par l’autorité de l’opi- nion de Cuvier, ont détruit les rapports naturels de ces deux gen- res, en plaçant l’un dans le groupe des Annelides Tubicoles et l’autre parmi les Acéphalés, Aujourd’hui le genre Arrosoir étant bien connu, il n’est plus permis de conserver une opinion que Cu- vier lui-méme a abandonnée dans la seconde édition du Règne animal.

En parlant des Clavagelles, dans son traité de Malacologie, M. de Blainville a jeté quelques doutes' sur la validité des carac- tères de ce genre ; il a supposé suffisamment constatées les obser- vations de Brocchi ; mais si M. de Blainville avait pris connais- sance de celles que nous avons publiées dans noire ouvrage sur les coquilles fossiles des environs de Paris , il aurait reconnu avec nous, la possibilité d’appliquer à toutes les espèces du genre, les caractères donnés par Lamarck, et dès-lors, il D’amait pas manifesté cette opinion qu’il faut reporter les Clavagelles parmi les Vénus irrégulières. Voici en quoi consistent les observations de Brocchi. Le naturaliste italien , ayant brisé plusieurs tubes de son Teredo echinata (Clavagella Brocchii , Lamk. , fut très étonné d’y trouver des coquilles de diverses sortes, d’abord la valve libre de la Cia-

T. I

1$

PREMliRE FAMIttE.

vagelle et souvent deux valves, soitd*une Saxicave, soitd*une Pé- tricole ou d’une Vénérupe. Brocchi supposa que le même animal pouvait produire des coquilles si diverses, et embarrassé lui-même de faits en apparence si contradictoires avec les principes de la science, il les abandonna à la sagacité des naturalistes sans cher- cher à léà expliquer. Ainsi Brocchi trouvait dans ses Clavagelles, tantôt üfre seule val^e, tantôt déni seulen^cnt, quelquefois trois.

Si fauteur italien avait eu connaissance de Certains faits relatifs aux Mollusques LithophageS) il n’aurait pas éprouvé d’embarras pour expliquer ses observations sur les Clavagelles. Voici les ob- servations d’après lesquelles nous essayons d’expliquer l’anomalie plus apparente que réelle >. signalée par Brocchi. Lorsque des ro- chers calcaires sont envahis par un grand nombre de Mollusques perforans , on rencontre assez souvent deux individus d’une môme espèce, de taille différente , contenus dans la même loge ; on observe aussi des espèces dilTérentes et de genres différens ren- fermés dans la même cavité pierreuse. C’est ainsi que nous avons vu des individus de Cypricardes Coralliophages, renfermés dans des Modioles Litliopbagesj nous avons vu également des Véné- rupes dans des Saxicaves, nous n’avons pas pensé pour cela qu’un mênïe animal a produire des coquilles aussi différentes; mais nous avons supposé que tous ces animaux Lithophages, vivant dans les mômes lieux, les œuf* d’une espèce avaient pu tomber dans la cavité d’un autre animal et lui avaient succédé. C’est ainsi qu’il a pu arriver à des œufs de Clavagelle de s’introduire dans une cavité pierreuse occupée par une Vénérupe ou une Saxicave. Cette Clavagelle, en se développant, a pu saisir, dans l’épaisseur de son tube j une seule ou les deux valves de la coquille étrangère, et le contraire a pu également avoir lieu, c’est-à-dire qu’une Vé- nérupe 3 tombée dans la cavité d'une Clavagelle, y a vécu et s’y est développée. Tant que Vénérupe a été d’un volume assez petit pour n’avoir pas besoin d’augmenter la cavité ëlle était renfer- mée, elle a vécu sans altérer la valve libre de la Clavagelle. Mais aussitôt qu’elle s’èst trouvée gênée, le premier obstacle qu’elle a rencontré a été la valve libre de la Clavagelle , et elle en a peü-à- peu opéré la dissolution au moyen de la sécrétion , acide de son raanleau. C’est cette manière qii’uneVénérupè ou une Coquille d’un tout autre genre Lithophages a pu se Irbùver datas le tube d’une Clavagelle, et cette explication simple et naturelle rend cbtn^te toutes lés singulières anomalies signalées par Brocchi.

LES TVBICOLÉS.

^9

Les premières observations, faites sur le genre Clavagelle, ofit toutes rapport à des coquilles fossiles et particulièrement à celles des environs de Paris. Les premières espèces signalées n’avaient pas autant que celle qu’on connaît aujourd’hui des caractères pro- pres à les rapprocher aussi intimement des Arrosoirs. Le premier, nous décrivîmes une espèce à tube allongé et couronné comme celui des Arrosoirs. Depuis, une espèce vivante a été représentée dans le Généra de M. Sovverby , et M. Rang , dans son Manuel de Conchyliologie, a annoncé avoir connaissance de deux autres es- pèces également vivantes. Il serait actuellement nécessaire de ras- sembler ces diverses espèces pour s’assurer si celles que l’on ren- contre quelquefois dans la mer de la Sicile doit constituer une es- pèce distincte des trois autres. Ëniin tout récemment de nouvelles espèces rapportées eu Angleterre ont été décrites par M. Broderip, dans les Mémoires de la société zoologique de Londres.

Nous avions signalé l’existence à Pauliac de notre Clavagelle couronnée. M. Rang la retrouva dans cette localité et se proposa, d’après de bons échantillons, de donner une figure et une descrip- tion de l’espèce; s’étant trouvé empêché , il confia ses maténaux à M. Des Moulins, qui publia dans le Bulletin de la société linnéenè de Bordeaux, une notice dans laquelle il essaya d’expliquer le mode d’accroissement de tube des Clavagelles. D’après la supposi- tion de M, Des Moulins, l’animal jeune n’aurait pas eu de tube, et cette partie ne serait sécrétée que quand l’animal est parvenu à tout son développement; mais dès que l’on trouve dans les mêmes lieux des individus de taille différente, on ne peut attribuer cette différence qu’à l’age, et cela seul détruit la manière de voir de M. Des: Moulins. L’explication que nous avons présentée au sujet des Arrosoirs, nous semble préférable, puisqu’elle rend exacte- ment compte de tous les faits relatifs à l’accroissement de la famille des Tubicolés.

Les Clavagelles sont des coquilles marines très voisines des Arrosoirs par les caractères. L’animal se garantit au moyen d’un tube plus ou moins allongé, dans la paroi duquel il incruste l’une de ses valves; cette valve saisie dans la paroi paraît être constama ment celle du côté gauche ; la droite reste libre dans rinlérieur du tube et elle est articulée à la première au moyen d’une char- nière sans dents , mais pourvue d’uu ligament extérieur, peu épais, semblable par sa structure et sa position à celui des autres coquilles bivalves. La valve adhérente, à la juger par son contour,

20

FREMIÉRE FAMltLE.

est plus petite que Tautre. Ces valves, selon les espèces, sont plus ou moins allongées et plus ou moins bâillantes lorsqu’elles sont rapprochées ; ou leur trouve à rinlérieur deux petites impres- sions musculaires arrondies, placées comme dans les autres Mol- lusques dimyaires et réunies entre elles au moyen d’une impres- sion palléale profondément sinueuse du côté postérieur. Cette disposition de la coquille annonce dans l’animal l’existence de deux Siphons allongés et postérieurs , semblables à ceux de l’Arrosoir.

Quoique depuis une dizaine d’années on connût des espèces vivantes de Clavagelles, on ne savait encore rien de l’animal de ce genre aussi intéressant que curieux. M. Audouin^ cependant, eut occasion d’examiner deux individus bien conservés dans la liqueur de l’espèce de la Méditerranée, mais il ne publia pas les résultats de ses recherches et se laissa devancer par M. Owen, auquel la science est redevable de travaux d’un grand intérêt sur divers genres de Mollusques. Un amateur zélé de conchyliologie, M. Cuming , avait rapporté un bel indivichi de Clavageile avec l’animal; il le remit à M. Owen, qui publia bientôt après, dans les Transactions de la société zoologique de Londres, une des- cription anotomique complète, accompagnée de bonnes figures. C’est à l’aide de ce travail de M. Owen que nous pourrons don- ner des détails sur l’animal des Clavagelles.

L’animal observé par M. Owen est celui du Clavagella lata de M. Broderip. Cet animal est subclavifbrme, subquadrangulaire lorsqu’il est contracté; son manteau se prolonge du côté postérieur en une masse subcylindrique épaisse, à l’intérieur de laquelle sont percés les deux syphons; cette masse charnue, constituant les si- phons-, est retirée à l’intérieur par un muscle à fibres rayonnantes, dont on voit l’impression médiocrement sinueuse sur l’intérieur des valves. Ce muscle est le rétracleur propre des siphons. Le côté antérieur du manteau est très épaissi et les deux lobes sont joints dans toute leur étendue, laissant seulement ouverte une très petite fenlelongiludinale correspondant à celle du disque du tube calcaire et, placée en face du pied rudimentaire de l’animal. Lorsque l’on a ouvert Je manteau de chacpie côté, et renversé en dessus sa partie antérieure , on aperçoit une masse abdominale subcylindracée à la partie moyenne et antérieure de laquelle s’élève un petit mame- lon. Ce mamelon est le pied resté rudimentaire. A la partie anté- rieure de celle masse abdominale, entre deux lèvres assez larges,^ on remarque l’ouverture de la bouche ; elle est accompagnée de

LES TUBICOLES.

21

chaque côté d^une paire de palpes labiales, longues et étroites,* garnies à Tintérieur-de lames très fines. La masse abdominale est particulièrement formée par la masse du foie et de Tovaire; elle est accompagnée de chaque côté d’une paire de lames branchiales dont l’extrémité postérieure, libre, vient flotter dans riniérieur de la cavité du siphon branchial. L’animal est pourvu de deux muscles adducteurs des valves. Ces muscles sont d’une médiocre étendue ; ils sont plus près du dos , et le postérieur est un peu plus grand que Tantériour. L’œsophage est étroit et assez allongéj il pénètre dans un estomac subglobuleux, petit, lequel est enve- loppé du foie ainsi qu’une grande partie de l’intestin.

D’après ce que nous venons d’exposer, l’analogie des Clava- gelles et des Arrosoirs est lout-à-fait incontestable, et il suffit, pour s’en convaincre bien mieux encore , de rapprocher les figures de l’Arrosoir de M. Ruppel de celles de la Ctavagelle de M, Owen. Cette ressemblance serait jdus grande encore , si l’on pouvait mettre en regard de celui de l’Arrosoir l’animal d’une Clavagelle de la section des couronnées.

Il est nécessaire, pour décrire convenablement les caractères des Clavagelles, d’établir parmi elles ü'ois groupes principaux. Dans le premier, nous plaçons les espèces tronquées antérieure- ment et couronnées d’épines. Ce sont les espèces les plus voisines de l’AiTOsoir. Dans le second groupe, nous comprenons les es- pèces ayant un tube lagéniforme pourvu d’épines tubuleuses sur les parois. Telle est le Clavagella cristaia Lamarck. Dans le troisième groupe enfin, nous réunissons les espèces perlbranies n’ayant point de tube spiniforme, tel que le Clamgelia Melitensis,

Dans les espèces du premier groupe , le tube est allongé , coni- que, médiocrement renflé à son extrémité antérieure. Au-dessus de ce renflement, il est subitement rétréci en une sorte de col et élargi ensuite en un disque dont le bord extérieur est couronné d’un assez grand nombre d’épines tubuleuses allongées et plusieurs fois dicholomes. Au centre du disque, on trouve une petite fente longitudinale; mais ce disque n’est point percé, comme dans les Arrosoirs, d’un grand nombre de petits trous. De l’extrémité su- périeure droite de la fente, on voit partir une espèce de suture qui vient descendre obliquement pour gagner l’exlrémilé du cro- chet de la valve incluse dans l’épaisseur du tube. Dans le second groupe des Clavagelles, le tube est court, en forme d’ampoule , quelquefois subcylindracé, quelquefois conique. Ce tube; arrondi

:42 rREJnèRî:

à son extrémité antérieure, est terminé à la postérieure par une ouverture simple ovalaire, comprimée latéralement. Prescpie toute la partie droite de la paroi de ce tube est hérissée d’un grand nombre de petits tubes spiniformes, simples, comparables à ceux des Arrosoirs et des ClavagelJes du premier groupe, mais placés d’une manière fort différente. Dans le troisième groupe des Clava- gelles, le tube, enfoncé dans l’épaisseur des corps sous-marins, tapisse la cavité habitée par l’animal. 11 est subitement dilaté an- térieurement en une poche ovalaire ou subquadrangulaire, com- primée latéralement et se terminant du côté postérieur en un tube assez étroit, allongé, subcylindracé et dont l’extrémité libre est évasée en entonnoir. Déjà Guettard, dans son Mén\oire sur les Tuyaux marins, avait eu connaissance d’un fragment de tube qu’il fit représenter ^1. 70, fig. 1 , dans le recueil de ses mémoires di- vers : ce fragment , provenant de la Méditerranée, est garni de trois manchettes foliacées, et il appartient sans le moindre doute au Cla^^agella Melitensis de M. Broderip. Guettard a compris ce fragment dans un genre auquel il donne le nom de Buccode , Buc- codus. Il est facile de concevoir que dans ces espèces perforantes, les tubes spiniformes ne peuvent exister. Il est à présumer cepen- dant, en se fondant sur une observation de Brocchi , que si le corps perforé pai* la Clavagelle n’est point compacte et laisse des lacunes, l’animal, en fermant ces lacunes par son tube, produira des épines tubuleuses.

Si l’on s’eu tenait uniquement aux caractères extérieurs du tube des Clavagelles , il serait possible , à la rigueur, d’établir un genre pour chacun des groupes ; mais si l’on porte son at- tention sur des caractères plus importans , ceux tirés de la co- quille , on trouvera de tels rapports entre toutes les espèces, qu’il deviendra impossible de les séparer en plusieurs genres. Dans les espèces couronnées, la valve libre est ovale oblongue, subnacrée ; rapprochée de la valve incluse, le coté postérieur est ti’ès bâillant J les impre.ssions musculaires sont petites, situées près du bord postérieur et réunies par une impression palléale dont la sinuosité postérieure est assez profonde. Dans le second groupe, la valve libre est absolument semblable pour les caractères; elle a seulement une tendance à s’élargir. Dans le troisième groupe en- fin, les valves sont beaucoup plus bâillantes, plus courtes posté- rieurement, et l’impression palléale offre de ce côté une sinuosité plus large mais beaucoup moins profonde. Quant à la charnière ,

ÎÆS TUBJ.COLÉS. 33

^lle offre très peu de différence dans les trois groupes , et c.es diffé- rences sont quelquefois meme assez difficiles à apprécier.

Le petit nombre de3 espèces connue^ nous permet de les distri- J^uer dans les trois gi’oupes de la maniè^'e suivante :

Clavagclla coronata.

Desh.

Clapagella bacillaris.

Desh.

Clavagclla echinata.

Lamk.

Clavagclla cristata.

Lamk.

Clavagclla Brongniarti.

? Desh.

Clavagclla Broccliii,

? Desh.

Clavagclla tibialis.

? Lamk.

Clavagclla aperta.

Sow.

Clavagclla Melitensis.

Brod.

Clavagclla lata.

Brod.

Clavagclla eîongata.

Brod.

Les Clavagelles habitent , les unes dans le sable de la même ma- nière que les Arrosoirs, les autres s’erifoncent dans les masses ma- dréporiques ou dans les calcaires tendres. Celles que Ton connaît à l’élât fossile sont propres aux terrains tertiaires. Parmi elles, nous citerons particuliérement le Clamgella coronata que l’on ren- cohtre dans tout le terrain Parisien.

Nous ferons quelques remarques sur quelques-unes des espèces mentionnées par les auteurs. Il est à présumer que le Clavagelîa cristata de Lamarck est un individu jeune du Clavagella echiriata» Nous supposons que le Teredo hacUlum de Brocchi a été établi sur un individu décoimonné de notre Clavügelîa bacillaris.

Nombre des espèces :

'4 vivantes, celles de la section.

7 fossiles, provenant toutes des terrains tertiaires.

ESPÈCES.

Clavagelle çourüunce. Clamgella coronata, Nob.pl. i.f. u.

Ç, vaginé ^ubcyliiidricd y elaugatâ, clavalà^ dUco complanato ^ antice tevml-» natdi fissura suhcentrali angustâ perfioraidy iuhuVis numçrosiSy ramosîs coronatâ ; vaîvts ovato^ohlongis , widitlafis.- Nob. Descrip. du coq, foss, de Paris, t, x. p. 8. r, pl. 3. f. 9, 10. Nob. Encycl. méth, vers, t. 2, p. 289, 2,

So.w. Min. Conch. pl. 480. f. i, a, 3,

niEMlÉKE FAMlliLB.

ixU

Rang, et Desm. Bulï, de la soc. d’hist. nat, de Bord, t, 3 , livr., f, i à 5,

Nûb. Lanick. An. s. v. , éd. » t. 6 , p. a3 , n“ i.

Habile Fossile aux environs de Paris dans les calcaires de Lisy et

de Meaux, dans les argiles de Londres à Barton, et dans les calcaires du Mcdoc , à Pauliac , à Saint-Estefe., à Blaye,

Dans les dernières localités mentionnées, cette espèce prend un plus grand développement qu’aux environs de Paris. Son tube est allongé, claviforme, atténué à son extrémité postérieure. Comme jusqu’à présent on ne connaît que le moule, on ne sait pas encore si cette extrémité se termine par un bord évasé, comme dans cer- tains Arrosoirs. Le collet qui sépare le disque de la partie. renllée du tube est peu prononcé. Au centre du disque, on aperçoit une fente longitudinale proportionnellement plus grande que dans les Arrosoirset la Clavagelle bacillaire. Son extrémité supérieure s’étend et se bifurque, et l’une des bifurcations descend à droite, l’autre est presque supérieure et dorsale ; elle est beaucoup plus étroite que la première et descend beaucoup moins bas. Les tubes spini- formes , dont le disque est couronné , sont nombreux. On en compte une vingtaine dans les plus grands individus; ils se bifur- quent et souvent chacune des branches se bifurque à son tour. Les valves sont ovales oblongues; celle qui est incluse est presque aussi grande que l’autre ; leur surface est lisse , mais ondulée transversalement par des accroissemens assez irréguliers; la valve libre est très aplatie; son crochet est à peine saillant; il est placé vers le tiers antérieur de la longueur; le bord cardinal est simple sans dent; les impressions musculaires sont petites, l’antérieure surtout; l’impression palJéale est légèrement creusée dans l’inté- rieur de la coquille et elle présente postérieurement une sinuosité profonde produite par le muscle rétracteur des siphons.

Les plus gi'auds individus de celle espèce ont près de i8 centi- mètres de longueur.

Clavagelle bacillaire. Clavagella bacillaris, ^oh, pl.i, f.Sàio.

C, tuho subredo, augustOy posticè vaginis foliaceis sivpe terminato; antice d'uco piano, fissoyspînis dichotomis coronato; ralvâ Vibevâ ovato-elongatà, tennissîma, depressd, margaritaced y alierd majore ; cardine edentido»

Nûb. Encycl. mcüi. vers., t, 2, p. 239, n*» 2.

Nob. Lam. An. s. v., éd., t. 6, p.aS, iio 2.

Teredo BaciUum ? Broebi , Coueb. foss. pl. i5, f. 6.

Extermîtatc posticali 'vaglnifera, hs\}ÇX^\\\\\va maDiculatuni. Philip, enumer.

LES a:UBlCOL£S.

Moll. Sicîl. p. X pl. I. iig. 3.

Clavagelia bacillaris» Philip, loc. cit. pl. x. f. z > a. b.

Habite Fossile eo Sicile.

Quoique celte espèce ait beaucoup d’analogie avec la précé- dente, elle se distingue néanmoins avec assez de facilité. Son tube est très allongé , claviforme ; son extrémité postérieure , légèrement comprimée , se termine par un bord renversé en pavillon de trom- pette, Dans plusieurs individus, trois ou quatre de ces pavillons sont implantés les uns dans les autres, de la même manière que dans VAspergillum vaginiferum» L’extrémité antérieure du tube , légèrement comprimée, après im étranglement court mais assez profond, se dilate en un disque aplati, au centre duquel se montre une petite fente courte et étroite, longitudinale, bi- furquée en j à son extrémité supérieure, La bifurcation du côté gauche est très courte et n’atteint pas le bord; celle de droite le traverse en y creusant une sinuosité profonde, et vient former une espèce de suture bifide sur le côté droit du tube. Le bord du disque s'amincit et il est couronné par douze ou quinze tubes spi- niformes qui se bifurquent presque immédiatement , et chacune des bifui’cations se divise à son tour en deux branches. Sur la paroi de l’extrémité du tube, et du côté gauche, ou aperçoit la valve de ce côté incrustée dans l’épaisseur de ce tube. Cette valve est pe- tite , subtriangulaire ; la valve libre est beaucoup plus grande , elle est ovale oblongue, peu profonde, nacrée, très bâillante posté- rieurement. Son cipchet est très petit et à peine saillant; la sur- face extérieure est lisse ou striée par des accroissemens fins et mul- tipliés. A l’intérieur , celte valve est peu profonde; on aperçoit de ce côté deux impressions musculaires fort petites; l’impression palléale est peu marquée, mais on voit cependant une sinuosité postérieure, peu profonde, indiquant la position du muscle ré- tracteur du siphon. Le bord cardinal est simple, linéaire; on y remarque une très petite nymphe pour l’insertion du ligament, et une légère dépression immédiatement au-dessous du crochet.

Les plus grands individus ont 34 centimètres et demi de lon- gueur.

Clavagelle élargie. Clamgella lata, Pl, i.f. 12. i3. i4*

C, camerâ rotundato-ûvatâ ; vàlvâ Uherâ y latiusculâ , substrigonâ ^ subcoii^ vexa, externâ concentriez rugosd , Intus nîtenie umbone subrotundato.

jFAM^LLE,

Brod. Trans. of zool, soc. t. i, p. 265. pl. ?o. f. 8. à lo. coq. ii à i6, animal.

Habite l’Océan de l’Inde et les iners iju^lrales.

Celte espèce a beaucoup d’analogie avec le Clamgella aperta de So^yerby. Elfe en a également beaucoup avec le Claç'.agella Meli- tensis. Son tube est court, subpyrifprme , dilaté en poche, et l’a- nimal preusp sa place dans l’épaiçseur des madrépores. La cavité qui contient les valves se rétrécît assez subitement en un tube court, comprimé latéralement et terminé par un bord fortement dilaté en entonnoir. Los valves ont une forme singulière; ej)les sont presque égalps, siibtriangulaires, nacrées intérieurement. La valve libre est chargée de stries irrégulières d’accroissement; son crochet est subterminal comme dans les huîtres ; lo bord cardinal pt simple pt il porte ja trace d’un ligament extérieur allongé. Les impressions musculaires sont très rapprochées du bord supérieur^ elles sont fort inégales 5 la postérieure est la plus grande. Le coté antérieur 4es valves est très baillant, il Tpst beaucoup plus que le postérieur, ce qui est Iput-à-fait le contraire dans les coquillles des autres acéphalécs. Le manteau ne laisse qu’une faible impres- sion : on en remarque une assez large dans la direction du bord antérieur; plie donne insertion à un muscle propi’e .du manteau.

Cette espèpe paraît tre^ raire. Elle a'70 à 80 millimètj'es de lour gueur; |a valve libre est longue dp 3o millimètres et large de 20.

GENRE TROISIEME.

GASTROCHESfE. Gastrochce^ia, Spengl.

Pi. a. fig. i-Ç.

caractères génériques, Animal cunéiforme, tronqué an- térieur.enient; les lobes du jxiârxieiiu réunis et percés au pentre de l.a à'un très petit trou pour le passage du pied ;

deux siphons réunis fort allongés, et pouvant rentrer en entier dans la coquille.

Tube calcaire claviforme , droit ou contourné , libre ou inséré dans les corps sous-marins , complet ou incomplet, tou- jours ouyert ^ l’extrémité postérieure qui pst retrççie; il contient à l’intérieur une coquille bivalve, équivalve, cunéi-

LES TÜBIÇOLES.

n

forme , très bâillante , à charnière simple et linéajre , à liga- ment extérienr droit ; jamais de cuillerons iptepnes dans les crochets.

SYNONYMIE GÉftÉaiQUE GexixàPholas pars ; Linné, -r— Vpé- rote^ Vperotus ; Gueltard. Gastrochœna; Spengler,

Fistiilane^ fistiilana ; Bruguières , Lamarct, Deshayes. Fistulana^ gastrochœna ; Laruarckj Cuvier.

OBSERVATioKs. Cherchant à appliquer, autant qu’il est en pops, pe principe de justice d’adopter les genres utiles d’après la daf-pdeleur publication , nous devons l'estituetr au célèbre Spengler un genre que la plu part des auteurs français, et nous-même â uneautre époque, avons inscrit dans la méthode sous le nom de Fistulane, Ce genre avait éié créé, dès 1783 , sous le noqi de Gastrochène , dan leiVorût acta Dantca, Spengler, en le créant, lui avait donné des carac- tères très naturels , et il est fâcheux que les auteurs qui en eurent connaissance ne l’aient pas aussitôt adopté. Linné avait malheu- reusement introduit la classe des Muliivalves, dans laquelle les auteurs qui vinrent après lui, et particulièrement Gmélin, entas- sèrent en asstz grand nombre, desanimaux qui n’ont entre eux au- cuns rapports. Aussi, lorsque Bruguières, dans r£/icyc/o7?éc?i'e, vou- lut réformer ce chaos , il fut obligé de créer plusieurs genres parmi lesquels se trouve celui des Fistulanes. 11 est à présumer que Bruguières n’eut point connaissance du travail de Spengler, car sa justice l'aurait porté à adopter le genre du savant danois, plutôt que d’introduire un double emploi lâcheux dans la science. Les communications scientifiques se faisaient alors avec lenteur, et nous ne sommes point surpris de l’ignorance pu était Bruguières des travaux de Spengler. Cependant, Spengler avait reproduit son genre dans lequel il place quatre espèces^ dans le tome 3 (1793) du Jqurnal d* Histoire naturelle de Copenhague, Une année avant que Lamarek publiât son premier essai de classification des vers testacés , Cuvier , dans son Tableau élémentaire, publié eu 1798, se fondant sur des caractères zoologiques, détruisit la classe des Muliivalves de Linné et de Bruguières, et distribua les genres qui y étaient compris de manière à les meUre en rapport d’après leurs véritables caractères zoologiqiies. Dans son premier Tableau méthodique, Lamarck entrevit que les Muliivalves con- tenaient trois sortes d’animaux diiférens ; aussi il forma un groupe pour chacun d’eux , et dans le premier nous trouvons les genres

28

rHEMlÈRE EÀMILLB.

appartenant à la classe des bivalves, et que, peu de temps après, Lamarck , dans son Système des animaux sans vertèbres, classa entre les deux séries des teNtacés bivalves.

Le genre Fistulane , introduit dans leurs méthodes par Cuvier et Lamarck, les autres auteurs l’adoptèrent aussi et c’est sous l’autorité de ces deux grands zoologistes, qu’au genre de Spengler fut substitué celui de Bruguières. Dans le BufFon de Sonnini,M. de Roissy, en adoptant le genre Fistulane, le rapprocha des Saxi- caves d’un côté , et des Arrosoirs d’un autre. Ces rapports sont très naturels, comme nous l’avons vu, et il est à peine nécessaire d’y apporter quelques changemens, quoique trente ans se soient écoulés depuis la publication de l’ouvrage que nous venons de mentionner. Les rechej'chcs de plusieurs savans , et notamment de M. Defrance aux environs de Paris , avaient fait découvrir le genre curieux des Clavagelles. Lamarck le rapporta d’abord au genre Fistulane dont il le sépara dans son cours de i8io. Le genre Fis- tulane se trouva donc réduit à un certain nombre de coquilles ren- fermées dans un tube calcaire, et ce fut seulement dans son der- nier ouvrage que Lamarck indiqua les espèces qui devaient faire partie de son genre Fistulane. Trompé par un caractère réelle- ment peu important, Cuvier, dans la première édition du Règne animal , adopta à-la-fois et le ge'nre Gastrochène et le genre Fislu- lane. Cuvier croit que dans les Gaslrochènes, il n’existe point de tube pour contenir la coquille; mais en cela il se trompe. Tous les Gaslrochènes qui percent les madrépores pour s’y loger, endui- sent leurs cavités d’une couche calcaire qui reste adhérente et ne s’aperçoit pas toujours facilement lorsque l’on extrait la coquille de la cavité qu’elle habite. Pour Cuvier, les Gaslrochènes seraient des Fistulanes sans tube ; pour nous, ce sont des Fistulanes dont le tube adhérent avait échappé à la plupart des observateurs. Cuvier place les Gaslrochènes entre les Pandores et les Byssomies, non loin des Solens, tandis que les Fistulanes sont mises dans le voisinage des Tarets. Dans ce genre Fistulane , et d’après le caractère d’un tube fermé postérieurement, Cuvier confond, avec une espèce de vraie Fistulane , plusieurs espèces de Tarets dont il n’avait vu sans doute que les tubes et non les coquilles.

Dans son Tx’aité des animaux sans vertèbres, Lamarck suivit l’exemple de Cuvier et reçut à-Ia-fois, dans sa méthode, un genre Fistulane et un genre Gastrochène. Préoccupé de l’existence du tube dans les Fistulanes, il ne compara pas les coquilles de ce

LHS TUBICOtis.

29

genre avec celles des Gaslrochènes, d’où est venu le double emploi que nous avons signalé depuis long-temps. M. de Blainville, dans son traité de Malacologie, M. de Férussac, dans ses Tableaux systématiques des mollusques , et M. Latreille dans ses Familles du règne amimal , tombèrent dans les mômes fautes que Lamarck. Quoique nos observations sur les Fjstulanes et les Gaslrochènes fussent publiées depuis assez long-temps , M. Rang, dans son Ma- nuel de conchyliologie, conserva les deux genres en les caractéri- sant à la manière de M. de Blainvîlle , tout en faisant sentir ce- pendant que l’un d’eux devait être supprimé- M, de Blainville en effet, avait reporté aux Gaslrochènes quelques-unes des Fistu- lanes de Lamarck, et n’avait réservé dans les Fistulanes qu’une seule espèce, Fistulana gregata, qui est pour nous un véritable Taret. Dans la seconde édition du Règne animal , Cuvier maintint les deux genres, mais il reconnut qu’il existait un tube dans les Gaslrochènes , et , par une conséquence naturelle , il aurait supprimer l’un des deux genres.

Depuis les observations que nous avons faites en 1824 ) lorsque nous décrivîmes les espèces de Fistulanes appartenant au bassin de Paris, nous fîmes observer qu'une môme espèce pouvait avoir un tube libre lorsqu’elle avait vécu dans le sable , et un tube inclus lorsqu’elle avait vécu dans l’épaisseur des corps sous-marins. Nous remarquâmes aussi en cassant les madrépores ou les calcaires tendres dans lesquels avaient vécu les Fistulanes, un tube très mince servant de paroi à la cavité et qui restait adhérent lorsque il avait été cassé pour extraire la coquille ; nous pouvions donc dire alors qu'en suivant rigoureusement les caractères donnés aux genres Gastrochène et Fistulane , une môme espèce pouvait être comprise dans l’un ou l’autre, selon qu’elle aura été observée plus ou moins complètement. L'inutilité de l’un des genres était dès-lors démontrée , et toutes les observations que nous avons été à même de répéter sur les espèces vivantes ou fossiles, nous ont de plus en plus confirmé dans notre opinion.

Les Gaslrochènes sont des coquilles marines dont les unes se forment un tube calcaire claviformé, libre, enfoncé dans le sable; d’autres ont la propriété de perforer les madrépores ou les cal- caires tendres, et de s’y loger à la manière des autres acéphales lilhophages. Quelques-unes de ces espèces ont accidentellement un tube libre lorsqu’elles vivent dans les sables loin des endroits contenant dçs calcaires tendres; dans les espèces litbophages, la

3o

PREMIÈRE famille.

cavité intérieure est constamment revêtue clW tube calcaire- plus ou moins épais , dont Textrémilé postérieure seulement est sail- lante ali-dehors. Dans les espèces à tube libre, celte extrémité J)oslérieure du tube est percée d’une ouverture étroite , ovale ou arrondie, simple. Dans les espèces incluses, l’ouverture du tube est généralement plus étroite, plus comprimée latéralement, et Ton voit ordinairement à l’intérieur deux petites ci*ôtes opposées qui indiquent la séparation des deux siphons postérieurs de l’a- nimal. Lorsque l’on ouvre le tube libre de certaines Fisiulanes, ori est surpris de trouver à i’inléi’ieur, vers le milieu de la lon- gueur, une cloison saillante percée dans le milieu d*une tente étroite : nous présumons que celte cloison est produite par i’a- ninial lors de son deimier accroissement. Ce que nous avons dit sur les Arrosoirs et sur les Clavagelles peut s’appliquer , à ce qu’il nous semble , à racci'oissemeiit des FisluIanes à tube libre ; quant à celles dont le tube est inclus, elles vivent et s’accroissent à la manière des Saxicaves, et l’on ne trouve jamais dans leur in- térieur la sîngulière cloison dont nous venons de parler.

Toutes les coquilles appartenant au genfe Gaslrochène se i*e- connaissent facilement et indépendamment du tube qui les ren- ferme : elles sont régulières, équivâlves , allongées , étroites, le bord cardinal est droit, simple, sabs dents et les valves sont maintenues au moyen d’un ligament extérieur allongé et peu épais; les crochets sont presque leFniinaux : la coquille est conséquem- ment très inéqüilatérale. Lorsque les valves sont réunies elles offrent au côté antérieur et inférieur un bâillement considérable, très élargi antérieurement, rétréci du côté postérieur et occupant les deux tiers, quelquèFois les trois quarts de la longtieur l'olaTe de la coquille. Cotte côquil le est toujours mince, transparente, fragile, et particulièrement cellè qui habile dans un tube libi*e. Si l’on compare la grandeur de la coquille avec celle du tube, on est obligé de croire que l’animai ne doit être recouvert qu’eh petite partie par sa coquille, et cependant lorsque l’on observe l’animal , ses longs siphons ainsi que les bords de son manteau par une contratililé très grande, rentrent en entier dans l’intérieur de la coquille.

L’animal des Gastrochènes est allongé, cunéiforme ; son coté an- térieur et inférieur présente une troncature semblable à celle de la coquille. Les lobes du manteau, médiocrement épaissis sur les bords, sont soudés postérieurement et prolongés de ce côté en

JÆS TtTBtCOlis. 3i

deux siphon^ presque égadx soudés dans toute leur longueur , mais ayant sUr les côtés une dépression qui indique l^endroit de leur jonctiotJ. C’est à celte dépression que correspondent les crêtes saillantes dans l’ouvertui'e postérieure du tube j les bords du manteau suivent le contoUr du bâillement de la coquille et se continuant sur le côté àntérieur en une membrane assez épaisse, ferrnènt presque erilifereraent côté antéi'ieur en laissant vers centre la Iroucaturè Une très petite düverlure sphirictéroïde pour le passage du pied. Ce pied ressemble beaucoup à celui des Pholades; il ést très court, épais, tronqué en un disque semblable à une ventouse ; il est à présumer que ranimai s^eii sert pour sd fixer aux parois de la cavité qu’il habité; bouche est profondé- ment cachée entre le pied èt le muscle adducteur antérieur; elle est petite, transverse, garnie de lèvres minces et étroites, pro- longées de chaque côté en une paire de petites palpes labiales lancéolées, finement striées à leur surface interne. On trouve de chaque côté du corps, deux branchies très inégales; détachées à la base du corps elles doivent flollèr dans l’intérieur du siphon branchial. La tnâssè abdominale est peu considérable et elle est en grande partie formée par le pied.

Le nombre dés éspecés connues dans le gedt’é Gastrochène n^est point encore considérable. En examinant les espèces comprises dans les genres Fislülâné ët Gastrochène des auteurs, genres que nous réunissons en un seul, suivant en cela la juste opinion de Spengler, on i-emarque plusieurs doubles emplois et d’autres er- reurs qui, quoique signalées par nous dans d’autres ouvrages, doivent encore être mentionnées dans celui-ci pour mieux assurer leur rectification.

Le Fùtuianà ciaçà de Lamarck àVaît déjà reçu de Spengler un autre nom spécifique qUè son antériorité doit faire préférer ; il fâtU donc rétablir cette espèce dans les catalogues sous le nom de Gastrockœna mumia. Nous ferons la môme observation pour le Fistulana lagenula ; Spengler lui avait dohné le nom de fistulana Cormhium que l’on devra lüi restituer.

La Fistulane cunéiforme et la Fistulane en paquet, sont de vé- ritables Tarets.

La Fistulane poire Lamk., pourrait bien être un doülilé emploi de la Clavagelle de Brocchi ; mais comme le tube seul est connu, il pourrait se faire qu’il contînt une Fistulane., et que ce fût un tube accidentellement libre du Fistulàna hians Brocchi.

32

PREMIÈRE FAMILIE.

Le nom de Fistulana hians ayant été imposé à plusieurs espèces^ nous pensons que, pour éviter toute confusion synonymique,il se- rait utile de supprimer entièrement ce nom de la nomenclature des Gastrochènes.

Les espèces fossiles sont particulièrement répandues dans les ter- rains tertiaires. Il en existe aussi dans les terrains secondaires et nous en avons reconnu les traces jusque dans le Quadersansteîn qui constitue la partie la plus inférieure du Lias ; l’on trouve aussi dans les coquilles épaisses de ces terrains, des perforations qui semblent appartenir à de véritables Gastrocbcnes. Il faudrait ce- pendant constater définitivement le fait par l’examen des coquilles, ou au moins de leur moule, et jusqu’à pi'ésent, nous n’avons pu faire changer nos présomptions en certitude.

Nombre des espèces :

Il Vivantes.

8 Fossiles.

Parmi les espèces , nous signalerons les suivantes :

Gastrochœna modiolina^ Lamk. Vivant dans l’océan d’Europe. Fossile en Italie, en Sicile.

Gastrochnœa giganlea. Vivant dans l’océan Indien. Fossile à Bordeaux et à Paris.

Gastrochœna ampullaria. Fossile à Paris , à Londres.

ESPÈCES,

Gaslrocbène momie. Gastrochœna mumia. Spengl. pl. 2. f.

I. 2. 3.

G, %'aoinâ tereti clavatâ^ recta, tennissîmâ, fragîli ^ testa 'valvîs elongatîs , auticè contortis, uncînatis , regularîter strîato-p 'Cicatis,

Upérote membraneux droit, Ouettard, Mém. div. 1774» 2, p. 128. no 4. pl. 71, fig. ir.

Gastrochœna. , Nov, act. dan. t. a, p. 174. f. i. 7.

Gastrochœna mumia, Id. Joiirn. d’hist. nat. Copenh, t. 3. pag. 20, pl. 2. f. I. I a.

Fav. Conclu pl. 5, f. K.

Eucycl.pl. 167. f. 17 à 28,

Chœna mumla. Schum. Essai classif. p. 94.

Fistulana^ Cîava. Lamk. An, s. v. t. 5. p, 435, n“ i. ^

. Blainv, Malac. pl. Si , f. 3.

LES TUBICOLKS.

33

FUlidana dam. Sow. Ocn. of sliells, iIq 27,, f, i-5.

hl. Dcsli. Encyd. métli. vers, t, 2. p. i/|0, ^

Id, Lamek. Au. s. v, 2®éJ. l. 6. p. 3o7 i.’

Haliite l’Océan de l’Inde,'

Le tube est libre comme celui des Arrosoirs , et il est souvent re- couvert de {çrainsde sable agglutinés à ses parois. îi est très mince , d’un blanc laiteux, et l’on observe, dans presque tous les individus, des rides transverses, circulaires, irrégulières sur l’extrémité an- térieure. Ce tube est droit, claviforme, quelquefois un peu courbé à son extrémité postérieure qui est la plus étroite. L’extrémité an- térieure est terminée en calotte demi sphérique. L’ouverture du tube n’est point comprimée, et elle n’est point bécarinée à l’inté- rieur comme dans la plupart des autres Gastrochènes. Dans son Généra of shells , M. Sowerby a rapporté une observation très in- téressante et dont ^ Aspergillum vaginifernm avait déjà donné un exemple. Comme M. SoTverby, nous avons vu, dans le tube du Gasirochœna muima, une cloison Iransverse percée au centre d’une fente ovale, et nous croyons pouvoir expliquer sa présence de la môme manière que dans l’Arrosoir.

Dans l’intérieur du tube , on trouve une coquille bivalve singu- lière. Elle est étroite, allongée, cunéiforme, très largement bâil- lante dans toute l’étendue du bord inférieur. Les valves sont minces, blanches, diaphanes. Leur extrémité anlorieui'e est al- longée et fortement recourbée de manière à former une sorte de capuchon au-dessus du bâillement des valves, lorsque celles-ci sont réunies. A partir du crochet, la surface extérieure des valves est partagée en deux parties presque égales par un sillon oblique. La partie supérieure et postérieure est plus transparente; on y voit des stries d’acci’oissement concentriques, disposées comme dans les Soicns. Sur la partie antérieure et inférieure , les stries sont transverses et les dernières bordent le bâillement des valvej. Les crochets sont très petits, à peine saillans, à peine dépassés par le côté antérieur. Ce coté, lorsque les valves sont réunies, forme une surface presque plane, dont le milieu se relève en une crête peu saillante. Celle surface est séparée du reste, sur les cot^s, par un angle obtus. Cet angle, ainsi que la surface antérieure, sont ornés de stries et de fins sillons rayonnans. La surface inté- rieure est lisse; l’impression musculaire postérieure est allongée; l’antérieure est petite et arrondie, et placée obliquement sur la partie courbée des valves. L’impression palléale forme une sinuo-

T. I. 3’

rnrMîKivK FAMUxr.

34

site postérieure étroite et pi'ofonde. Le bord cardinal est droit; il est simple dans la valve gauche. On aperçoit une petite dent ru- dimentaire sous le crochet dans la valve droite. Dans l’une et l’autre valve, un petit sillon extérieur sur le bord cardinal, indique la position du ligament.

Des valves, longues de 3o millimètres et larges de 6 , sont con- tenues dans un tube long do lo centimètres et large de lo milli- mètres à la base.

Gastrochène modioline. Gastwchœna diihia. Desli. pl. a.

lîg. 4* 5.

G, 'oaghiâ pyrifonni, contortâ, crassâ intus, ad aperturam hlcarinatâ; testa t\ . ovato^ohîongd, angttstâf transversîm striata ^ antice sînuatâ; natibus promînuUs latere antico hrci>îssîmo, ,

dubia. Tenu. Brit. zool, 1812. t. 4, pl. 47. f. 19.

Dacosla. Condi. brit. p. 234. n®58,

Mjtiius J 'Encycl. métli, pl. 219. f. 4, b, pessîma,

Pholas hians. Brocebi. Conch. foss. subap. p. 592, pl. ii, fig. T\,a,b» Mytilus amhîguusi Dilhv, Cat. t. i. p. 3o4. 9,

3Iya dubla» Donov, Coucb, t. 3. p, 108,

Dorset. Cal. p. 27, pl. i, f. ir.

Maton et Back. p, 33 ,

'tVood. Conch, p, 102. pl. 25. t 2. 3.

Pholüs Mans, Corlesi. Sag»i. Geol. p, 4o. n'* 4,

GasirochcBiia modiolina, Lamck. Auim. s. vert. t. 5. p, 447. ji*' 3.

Sow, Généra of shells. Gasirochœna, f, i. 2.

FîsUdana hîans, Besli* Encycl. mctli, vert, t, 2. p. i4i, 3. it/j'rt dnbia de Gerville, Cat. des coq. de la Manche, p. ii. n" i. Gastrochœna modiolina, Coll, des Cherres, Cat. des lest, du départ, du Fi-- nist. p. 9; n®.

Gastrochœna modiolina, Boucli, Chanlcreaux. Cat, des Moll, du Boulon,

p, 8, 4;

Desh, Lamk. Air. s. vert. , edit. t. 6, p, 49, 3.

Habite dans l’Océan européen. Fossile en Italie, en Sicile , etc,

Kous avions d’abord pensé qu’il serait utile de conserver à cette espèce le nom de Gastrockeena Mans / mais nous étant aperçu que ce nom entraînerait avec lui quelque confusion synonjmique, nous avons préféré celui donné par Peniiant, parce qu’il est le plus an- cien. Nous ratlâclions à celte espèce, comme on peut le voir par notre synonymie , plusieurs de celles des auteurs. Si l’on s’en rap-

LES TUniCOLES.

35

portait trop à la li^nre tlii Pholas hians tic Brocchi, on pourrait ne pas admettre avec nous Tidcntità do l’espèce fossile et de la vi- vante 5 mais dès que l’on est prévenu que la figure de l’auteur ita- lien représente une variété plus étroite , on np peut plus avoir de doute à ce sujet.

Le tuBe du Gastrochène modioliuc est allongé, pyriformej assez épais, souvent rugueux ; le plus ortlinairemcnt' il est inclus dans répaisseur des huîtres ou d’autres coquilles épaisses.* Il s’enfonce aussi dans les pierres calcaires. L’ouverture de ce tube est très ré- trécie, un peu comprimée latéralement, et l’on trouve, à l’inté- rieur , sur les parois les plus larges et les plus rapprochées, deux carènes opposées, indiquant la séparation des siphons.

La coquille est hianclie, diaphane, ovale, allongée, très inéquila- térale ; les valves rapprochées, leur bâillement occupe près des trois quarts de la longueur totale. La surface extérieure est couverte de stries transverses, fines, irrégulières; la surface intérieure est lisse, et l’on aperçoit deux impressions musculaires inégales. L’antérieure est fort petite et placée vers l’extrémité antérieure du bord cardi- nal ; la postérieure est plus grande , arrondie ; elle est placée dans l'angle obtus que forme l’extrémité postérieure du bord cardinal, en se joignant au bord postérieur. L’impression palléale présente une sinuosité postérieure triangulaii'c et peu profonde. Les cro- chets sont médiocrement sailians, subcordiformes , très rappro- chés, et l’on remai’que en avant d’eux un petit enfoncement lunu- laire. Le bord cardinal est droit, simple ; quelquefois l’impression musculaire antérieure y produit une petite callosité , surtout dans les vieux individus. Un sillon extérieur, presque aussi long que le bord, donne insertion à un ligament externe, étroit et allongé, les crochets sont dépassés par un bord antérieur très court, for-? niant une sorte d’oi'eillette triangulaire, qui, lorsqu’elle est jointe à celle de la valveopposéo, forme le bord anterieur arqué de l’ou- vertui’e de la coquille.

Les valves ont 20 millimèti’es de large et 9 de longueur.

Gastrochène géant. Gastrochœna gigantea, Desb. planche 2,

fig. 6. 7. 8.

G, 'vaginâclavatà, închisà, ad aperturam crassâ, bîcarlnatâ. Testa ^ ovatp ohlongâj teniUj frag'dl, eleganter striato^lamellosd, 'valde hiante; inarginc antico recto, umbonibiis non tenninaUbus.

FisUdana glgantea. Desh. Kncyi, méth. vers, l. 2. p, 142. n“. 5,

3^

3G

TREMIKRE FAMTLT,E.

Habile les mers de Pliidc, la mer Rouge, dans les masses madréporiques.

Fossile en Égyple (Lefèvre).

Il existe tant de ressemblance entre cette espèce et la fossile des environs de Paris, à laquelle nous avons donné le nom de Fistulana 'proifignyi^ que Tou serait porté à les confondre, si Ton ne faisait une minutieuse attention à tous leurs caractères. Leur étude, sur un plus grand nombre d’individus, nous porte actuellement à les séparer. Ce Gaslrochène est le plus grand du genre ; son tube est toujoui's inclus dans Tépaisseur des masses madréporiques; il est mince , fortement attaché aux parois de la cavité dont il revêt les parois. II s’épaissit vers son extrémité postérieure, et il se termine par une ouverture ovale munie à finlérieur de deux crêtes laté- rales qui lui donnent de la ressemblance avec la forme d’un buit(8) de chilFre. Cette extrémité du tube fait quelquefois saillie en de- hors, La cavité est ovale , oblongue, pjriforme ; elle contient une coquille bivalve régulière , subeuoéiforme, mince, blanche, trans- parente , très bâillante en avant. C’est principalement lorsque les valves sont réunies qüe ce bâillement paraît dans toute son éten- due. Une valve, prise isolément, est subtrapézoïde , ovalaire, ayant son extrémité postérieure un peu en bec. Le bord cardinal est presque droit ; il est simple , plus étroit sous le crochet, et un peu onduleux dans cet endroit. La surface extérieure est couverte de stries sublamelleuses , rapprochées, assez régulières, et qui sui- vent exactement les contours. Le crochet est court, peu saillant, et son extrémité vient s’appuyer sur le bord cardinal. Ce sommet est placé presque à Texlrémité antérieure; il est dépassé cepen- dant par une petite portion du côté antérieur, comme dans les Modioles. Ce qui distingue le plus essentiellement celte espèce de la fossile, c’est que le côté antérieur est presque deux fois plus allongé dans cette dernière. A l’intérieur, la coquille est d’un blanc luisant , et il faut faire miroiter la lumière sur cette surface pour bien voir les impressions des muscles et du manteau. L’impression du muscle antérieur est étroite et s'allonge presque parallèlement au box'd de la troncature. La postérieure est grande, ovale, sub- trigone , et l’impi ession palléale offre une profonde sinuosité dans laquelle est inséré le muscle rétracteur des siphons. Cette belle es- pèce a 5o millimètres de long et 23 de large. Nous avons vu des individus plus grands.

DEUXIEME FAMILLE I LES PHOLADAIRES.

37.

DEUXIÈME FAMILLE.

Les Pholadaires. Lamk»

CAiiACTiiRÊs. Animal claviforme, ou vcinniforme; les lobes du manteau re'unis, si ce n’est antérieurement, pour le passage d’un pied court et tronqué, prolongés en arrière,’ en siphons toujours réunis. Branchies étroites, prolongées dans les siphons, et libres à leur extrémité.

Coquille très bâillante de chaque côté, libre ou contenue dans un tube calcaire; charnière sans ligament, des apo^ physes dans les crochets.

GENRES. CloUonnairCy Tarât ^ Téi'édme, Pholade,

OBSERVATiOîvs. Tous les auteurs n’ont pas également senti la va- leur des caralères distinctifs de la famille précédente et de celle-ci. Lamarck, lui-méme , en les créant , ne les sépara pas d’une manière convenable. En effet, danslaPhilosophie zoologique, Ton trouve, pour la première fois , la famille des Pholadaires, elle est composée de quatre genres : Pliolade, Taret, Fistulane et Arrosoir. Il ne la rectifia pas dans l’extrait du cours, mais y ajouta un cinquième genre, celui des Clavagelles. Lamarck, plus lai’d, sentit bien quo sa famille des Pholadaires devait être rectifiée ; mais il ne reconnut pas l’ensemble des caractères qui seuls peuvent la distinguer, et dans son dernier ouvrage, il la réduisit à deux genres seulement : les Pliolades et les Gaslrochènes. Nous avons vu, en traitant du genre Gaslrociiène , le double emploi fait par Lamarck, et nous avons donné la preuve, non - seulement qu’il fallait réunir ces deux genres Fistulane et Gastrochène , mais ^encore les rapprocher des Clavagelles plutôt que des Pholades. Quant aux deux genres Taret et Térédine , compris , par Lamarck, dans la famille des Tu- bicolés, nous observerons bientôt, dans leurs coquilles, tons les caractères principaux do la famille des Pholadaires.

Cuvier, dont la classification est fondée d’après d’autres vues que celles de Lamarck, a fait , dans la première édition du Règne

38

DEUXIÈME FAMILLE.

animal, une grande famille des Enfermées j pour tous ceux des Mollusques dont les lobes du manteau sont réunis dans presque loulc leur étendue. Les genres Phpiade , Taret et Fülulane, sont placés à la flu de cetfe famille, à la suite des Myes et des Solens.

Dans l’arrangement de la famille des Plioladaires, M. de Férus- sac a été moins heureux que ses prédécesseurs^ car, après avoir adopté les deux genres Pholadc et Gastrochène, il y ajoute, par analogie avec ce dernier, les genres Saxicave et Hyalclle. Sans doute, ces deux genres oui des points de contact avec les Gastro- chênes, mais ils doivent former un petit embranchement latéral destiné à joindre le groupe des Tubicolés à celui des Lithophages.

Dans ses familles naturelles, Laireille saisit un peu mieux les caractères dos genres dont nous nous occupons, mais les exagéra, selon nous, en réduisant la famille des Pholadaircs au genre Pho- lade seul, et en comprenant, d’une part, les Gastrochènes dans la famille des Solénides, elles autres, dans cèlle des Teredinites, re- présentant exactement celle des Tubicolés de Lamarck.

Avant la publication de l’ouvrage de Latreille , nous avions déjà indiqué, dans notre ouvrage sur les Fossiles des environs de Paris, ainsi que dans le Dictionnaire classique d’histoire naturelle, les changemens importans que l’on devait faire subir à ces deux fa- milles des Tubicolés et des Pholadaires. M.,[de Blainvillo suivit nos indications dans son Traité de Malacologie, et néanmoins, contrairement à notre opinion, il laissa encore quelques genres dans des rapports peu naturels. En proposant des changemens aussi cousidéi'ables dans la famille des Pholadaires, M. de Blain- ville trouva convenable de lui imposer un autre nom, et proposa celui d’Adosmacées qui, exprimant le caractère principal do la la famille (a^tap-cç sans ligament) , aurait été préférable si , par son antériorité, le nom donné par Lamarck ne devait être préféré. M. de Blainvilie proposa de mettre cinq genres dans sa famille des Adesmacées, Ce sont les suivans : Pholade, Teredine, Taret, Fis- tulane et Cloisonnaire. Le genre Fislulane se retrouve ici, parce que M. de Blainvilie ne Fa pas compris de la même manière que Lamarck et les autres auteurs. Il lui a donné pour type le Fistu- lana gregatay qui n’est point une Fislulane ou un Gastrochène, mais un véritable Taret. Aussi , il suffît de supprimer ce genre P^is- tulane de la famille qui nous occupe pour la rendre complète et naturelle.

Cuvier, dans la dernière édition du Règne animal, ne tira au-

LES FQOL.\DÂIR£S.

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cun parti de ces indications, et se contenta d’ajouter à sa famille des Enfermées les genres Gastrochène et Teredine dont il n’avait pas parlé précédemment.

Quant à M. Rang, différant en cela de ses pi'édécesseurs , dans son Manuel de Conchyliologie, il réunit en une seule, sous le nom de Tuhicoîésy les deux familles dont nous venons de parler, et, aux genres déjà mentionnés , il en ajouta un autre sous le nom de Jouannetia pour un petit démembrement peu nécessaire, selon nous, des Pholades subglobuleuses et coralliophages. M. TiuHon avait aussi proposé un genre pour être ajouté à la famille des Pho- ladaires. Ce, genre, décrit et figuré dans le Généra of shells de M. Sowerby, ne peut être accepté, car il présente tous les ca- ractères distinctifs des Pholades , et se joint à ce dernier genre par plusieurs nuances insensibles.

Nous le répétons, la présence d’un tube n’est point le caractère essentiel pour les genres de la famille dont nous nous occupons, cette partie accessoire, existant ou non selon certaines circon- stances, soit individuelles, soit spécifiques. Le caractère prédomi- nant dans les Pholadaires, c’est l’existence, dans tous les genres de ce groupe, de cuillerons implan tés dans l’intérieur du crochet; c’est aussi l’absence constante d’un véritable ligament destiné à tenir en rapport les deux valves d’une môme coquille. Ces caractères sont d’accord avec Ceux des animaux, et c’est de celte manière que doivent être établis les groupes naturels dans une bonne méthode.

Vivant dans la Méditerranée , le genre cloisonnaire est ac- luellement mieux connu. Le tube seul existe dans plusieurs collections; mais, d’après la nature et les caractères de celte partie, il est certain, pour tout zoologiste familiarisé avec les études do la conchyliologie, que ce genre ne peut être placé loin des Tarets. Quant au genre Teredine, bien connu aujour- d’hui , depuis que nous en avons développé les vrais caractères , malgré sa singularité, il doit rentrer dans la famille des Phola- daires, montrant le passage évident entre les Tarets et les Pho- lades.

Les animaux de la famille des Pholadaires so reconnaissent à la longueur do leurs siphons ordinairement réunis; à l’étroitesse do leurs branchies , fiotlantos à leur extrémité postérieure dans l’inté- rieur du siphon branchial. Le pied est très court, tronqué, et une fente peu considérable du manteau lui donne passage. Les muscles adducteurs des valves sont d’un médiocre volume, et celui du côté

DKliXlÈME FAMILLE.

4o

antérieur vient s’appuyer sur les callosités cardinales de la co- quille. Les coquilles sont quelquefois libres, quelquefois insérées à rextrémité d’un tube, ou retenues dans son intérieur. Toutes ont le bord cardinal contourné en dedans, et ce n’est que par ce point du bord que les deux valves se touchent. A riulérieur des crochets, on observe constamment des appendices osseux courbés, plus ou moins élargis , auxquels on a improprement donné le nom de cuil- lerons. Dans presque tous les genres, il existe une ou plusieurs pièces postérieures , destinées à cacher et à garantir le bord cardi- nal et les parties molles de l’animal qui le dépassent.

Les genres de la famille des Pboladaires sont tous marins et se mettent à l’abri, les nus en s’enfonçant dans les argiles, ou sous les vases durcies, les autres dans la pierre, et quelques-uus atta- quent les bois plongés dans la mer et les détruisent avec rapidité.

GENRE QUATRIÈME. .

CXiOlSOM’STAIRE, Septaria. (Lamk.}»

PL 2. fig. 9, 10.

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal allongé, cylindracé, ayant les lobes du manteau réunis, terminés postéz'ieurement en siphons courts, portant à la base deux palettes osseuses apla- ties ; opposées et destinées à fermer l’extrémité postérieure du tube , l’extrémité antérieure protégée par une coquille courte, aiTOudie , semblable à celle des Tarets,

Un tube testacé très long , conique , ouvert à sou extrémité antérieure, terminé postérieurement par deux trous sur les- quels sont fixés deux tubes grêles, subarticulés.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Sole/i arenariits ^ Rumpliius. Tuhidus radiciformis ; Lesscr. Tabulas verniicalaris ; Sebao Serpida arenaria; Linné. Genre Caphe^ Kaphus ; Guet- tard. Serpula polyîhalamia; Linné. 7eredopaUas;V,yQV, Hom., Dilbvyn. Genre FurceUe^ Fnrcella; Lamarck. Syst. des a. s. vert. 1801, p. io4- Obs, Genre Clolsonnalre ^ Septaria ; La- niartkf Anim. s. vert. 1818. Blainville , Férussac, etc» 1

LES l’iïOLADAIBES f

4i

OBSERVATIONS. On doit la connaissance du genre curieux des Cloi- sonnaires à Rumphius, et cet auteur reconnut à cette époque la res- semblance de la coquille qu’il nomma Solen arenarius^d^yGC. lesTarets. La figure de Rumphius est assez complète pour faire connaître les caractères principaux de la coquille singulière et gigantesque, pour laquelle Lamarck a proposé son genre Cloisonnaire. Dans son pe- tit traité desTubes marins, Klein a formé un genre particulier pour la coquille de Rumphius, à laquelle il conserve du reste le nom de Solen arenarius, Ebeinslreit a également mentionné celte co- quille dans le muséum Richterianum. Lesser, dans sa Testaceothéo- logie, ne l’a point oubliée et lui a donné le nom de tuhulus radici-- foimisj geniculatas ramosus; mais ces auteui's n’ont point compris, comme Pallas, la nature du genre qui nous occupe. Pallas , en eifet, à la page i4o àetesMiscellanques zoologiées, publiées en 176G, dit positivement que le Solen arenariiis de Rumphius ne diffère en rien du Teredo namlis, si ce n’est parce que son tube, au lieu de s’enfoncer dans le bois , vit dans le sable. Pallas ajoute qu’il adopte l’opinion judicieuse de Rumphius, auquel on doit, commja^ nous l’avons vu , le premier rapprochement de son Solen arenarius avec les Tarets; mais Pallas va plus loin, et il est persuadé que le Serpula pénis de Linné, dont on a fait depuis le genre Arrosoir, est très voisin des Tarets , et particulièrement de l’espèce figurée par Rumphius.

Dans la dixième édition du Systema naturœ^ ainsi que dans le muséum de la princesse Ulrique, Linné avait confondu, sous le nom de Serpula arenaria^ des choses entièrement distinctes. Les unes appartiennent actuellement au genre des Vermets, les autres aux Serpules, et enfin le Solen arenarius aux Mollusques. Depuis, Linné a rectifié sa Synonymie et a distingué la coquille de Rum- phius sous le nom de Serpula polythalamia. Martini ne lui a pas conservé ce nom, lorsqu’il l’a mentionnée dans son Conchylien ca- binet; confondant dans un seul genre toutes les Serpules, l’Arro- soir et la coquille de Rumphius, il lui donna le nom de Tuhulus vcrmicularisj et fit avec lui deux espèces : Tune, pour l’extrémité postérieure ; l’autre, pour un tronçon de l’cxlréniilé antérieure. C’est à cette seconde espèce que Martini rapporte la bonne figure donnée par Seba, dans son muséum. Celle figure de Seba, moins complète que celle de Rumphius, est cependant très bonne; elle donne une idée exacte de la grandeur que peuvent acquérir les individus de cette coquille. Outre les ouvrages que nous vepons de

D£DXiè]|E vmittt,.

4a

citer, nous devons mentionner encore les mémoires do Guettard, dans lesquels ce savant naturaliste, dès *774? proposa, pour ce Solen arenarhis^ un genre particulier qu’un nom fort peu scien- tifique sans doute fit oublier; il proposa pour son genre le nom de Cupbe, Kuphus, Plus tard, en 1801, dans son Système des animaux sans vertèbres , Lamarck, dans une note à la page io4j proposa un genre Furcelle, Furcella, pour le môme Solen arenarius, dout lui-mème fit dans son dernier ouvrage le genre Cloisonnaire, et le plaça, comme nous l’avons vu, dans la famille des Tubicolés. Depuis cotte époque, il a été adopté par la plupart des zoologistes, et nous avons vu les légères modifications qui ont été apportées récemment dans ses rapports avec les genx'es environnans.

Jusque dans cesderniers temps l’animal était l'esté inconnu. Un naturaliste de Marseille, M. Mathéron en a découvert une espèce dans la Méditerranée, et il a publié sur cet animal une notice inté- ressante dans les tomes i et 11 des Annales des Sciences et de rindusU'ie du midi de la France. Trouvé à l’état fossile dans les fouilles que l’on fit pour établir le bassin de carénage , le genre Cloisonnaire a été observé depuis à l’état vivant, non loin de Mar- seille; l’espèce recueillie dans la Méditerranée ii’esl pas la même que celle de l’Inde figurée par Rumpbius; elle est plus petite , et nous ignorons si le tube est pourvu de deux calamules singu- lières , observées par llumphius dans son Solen arenarius.

D’après M. Malhéron, l’animal de la Cloisonnaire de la Méditer- ranée est loul-à-fait semblable à celui du Taret. Pallas, comme nous l’avons vu, a eu la même opinion. Il est allongé, tubuleux, cylindrique; les lobes du manteau réunis forment un tuyau charnu, dont l’extrémité postérieure se prolonge en deux siphons étroits grêles et assez allongés; l’cxlrémilé antérieure ducoi*ps, la bouche, le pied, une partie de la masse viscérale sont protégés par une co- quille très courte, subglobuleuso, baillante de chaque cété, sem- blable, par ses caractères principaux, à celle des Tarels; les valves sont appuyées l’une contre l’autre, mais non réunies par une charnière articulée ou par un ligament. Dans leur intérieur on voit des cuillerons allongés , étroits et aplatis comme dans les Tarels.

Le tube calcaire, dans lequel sont coalcnns la coquille et l’animal, est allongé, subcylinclracé, d’un diamètre moindre à son extrémité postérieure qu’à l’antérieure; dans l’espèce de l’Inde, ce tube, dout

LES PHOLAPAIIVES.

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on a vu des individus de près de quatre pieds de longueur, a un épaisseur assez considérable pour lui assurer une grande solidité ; il est tantôt droit, tantôt contourné plus ou moins , selon les obstacles que l’animal a rencontrés pendant son développement; la surface extérieure est presque lisse, elle est marquée d’accroissemens trans- verses et quelquefois de renflemens successifs, compai’ables à ceux d’un intestin ; à l’intérieur, les accroissemens sont indiqués par des rides saillantes, Iransverses, en segmens de cercle ; elles sont irré- gulièrement espacées. A son extrémité postérieure, le lest du tube s’épaissit beaucoup, et la cavité simple se partage en deux tuyaux cylindriques, dont l’entrée intérieure est séparée par un éperon saillant; ces deux tuyaux, soutenus latéralement par des cloisons, sont contenus dans l’exirémilé du tube, et leur terminaison exté- rieure vient saillir au-debors; ces tuyaux donnent passage aux deux siphons de l’anima’. Lorsque la Cloisonnaire est bien complète, les deux tuyaux fe prolongent en deux calamules divergentes, subarliculées, longues de cinq à six pouces; ces calamules revêtent les siphons charnus de l’animal dans toute l’extension qu’ils peu- vent prendre. Les deux siphons, très contractiles, peuvent rentrer entièrement dans l’intérieur du tube, et lorsqu’ils sont ainsi retirés, l’animal peut clore l’ouverture de son tube, au moyen des deux petites palettes calcaires figurées par M.Mathéron, mais que Rurn- phius n’a pas connues ; ces palettes, semblables à celles des Tarets, sont placées de même dans l’animal et remplissent les mômes fonc- tions; nous en reparlerons en traitant des Tarets: L’extrémité an- térieure du tube s’amincit, et, jusqu’à présent, les morceaux répan- dus dans les collections ont celte extrémité ouverte ; Rumphius cependant et, après lui, Martini ont fait figurer des individus chez lesquels cette partie est fermée par une calotte convexe en dehors. M. Malhéron a vu aussi dans l’espèce de la Méditerranée des indi- vidus fermés. Il est à présumer que le tube des Cloisonnaires, comme celui des Tarets, est fermé lorsqu’il est parvenu à tout son développement, et qu'il reste ouvert pendant les accroissemens de l’animal.

A mesure que l’on a une connaissance plus exacte du genre Cloisonnaire, sa ressemblance avec les Tarets devient de plus en plus évidente; il n’en diffère que par deux caractères : l’existence des calamules des siphons et la manière de vivre: ces deux carac- tères tiennent peut-être à quelques différences d’organisation qu’il faudra chercher particulièremeat dan$ l’espèce des Indes. Toutes

DEUXIEME FAMILLE .

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les personnes qui vivent près de la mer, connaissent les ravages que font les Tai'ets dans les bois plongés dans la mer ; les Cloisonnaires s'enfoncent dans le sable dans une position perpendiculaire, l'ex- trémité antérieure du tube en bas , la postérieure en haut , de ma- nière à permettre la saillie des siphons ou des calamules au-dessus de la surface du sable.

On ne connaît encore que deux espèces de Cloisonnaires. ESPÈCES.

Cloisonnaire des sables. Septaria arenaria, Lamk.

*5. 'vaginâ maxïmâf terete cyVindraceâ^ alha^ dîversi modo contorta, radïaiim crystalllnâ^ ad cxlremilaiem posticatn septâ longîtiidinali intîis bîpartUâ^ calamuUs ducibus siibarticulatîs terminatd j intîis dissîpimentls hinc con^ vexis indè concavis interruptâ.

Serpula arenaria. Lin. Sysl. naU ed. lo. p. 787.’ syn. plur. exclus.

Setpula arenaria. Lin, Mus. Ülr. p. 700. n®, 43a.

Scrpida poîytfialamîa^ Lin. Sysl. nat. cd. 12. p. 1266.

List, Synop, Manlissa marin, Conch, pî, i. fîg. 3.

Solen arenarius , Kumph.Mus. amb. pl. 4i« f. P* H.

Seba^ Mus. t. 3, pl. 94. {tubi duo majores),

Solcn arenarius, Geuus iT. Klein, de tub. marin, p. 3,

Solen corallorum corrugatus, Klein, de lubuli. p. 5, pl. i. f. 3.

*y^r/7«/a Pallas, Spic, Zool. p. 140.

Martini. Conch. 1. I, p. 4o- ph i-f* 6. p. 46. pl. i. f. ir.

Scrpula poljthalamia, Sclirol, Einl. t. 2. p. 549, no. 12.

Serpula, no, 4, Schrol. Einl, t. 2. p. 557,

Eav. Conch. pl. 5. f. N. figure réduite.

Serptda poîythaîamia. Gmel, p. 3742. Hq. 1 3.

Serpula anguîna.y^r, B. p. 3743. u®. 14.

Teredo gtganteus,S\xli\y, Home. Xrans. phil. 1806, p, 276. pl, 10 et n;

f. I. à 7. . ,

Teredo gigantea, Dillw, Cal. t, 2. p, 1087. Uq,' i.

Septaria arenaria. Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 43?. n®. i.

Septaria arenaria, Blainv. Malac. p. 58 1.

Desli. Encycl. mélh. vers, l, 2. p, 247.

Desh. Lamk. An. s, v. édit, t, 5, p. 33,

Habile l’Océan de l'Inde, dans le sable, cnlre les racines des Mangliers, (Lamarck).

Nous avons vu, en traitant des généralités de ce genre) que

LËS PROLABATRËS;

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l’espèce qui lui sert de type, connue depuis lonfj-tenips, a été le sujet de plus d’une errem* de la part des auteurs qui ont eu occa- sion de la mentionner. Outre les vacillations de Linné et la déter- mination rigoureuse et précise de Pcilas, nous remarquons que la plupart des naturalistes ont fait deux espèces pour les deux mor- ceaux de la meme coquille, représentée par Rumphius, Klein, le premier, a donné ce mauvais exemple , et il a poussé la distinction jusqu’à ce point, non-seulement d’établir deux espèces, mais même deux genres pour deux morceaux de coquille, au sujet desquels Rumphius ne laisse pas la moindre incertitude. Martini , Schroter, Gmelin et d’autres ont adopté cette en'eur que Dillwyn, le premier, à ce qu’il nous semble , a su éviter dans sa synonymie. Gmelin ne s’est pas contenté du double emploi que nous venons de signaler chez quelques-uns de ses précédesseurs ; il a compris une partie de la synonymie dans son SeTpuîa anguîna et en a fait la variété que nous avons signalée.

Plusieurs zoologistes ont pensé qu’il était convenable de rendre à la coquille, qui nous occupe, le nom que Linné lui-même lui a im- posé dans la douzième hàiûonàn Sjstemanatarœ, Pour ces zoologis- tes, cette espèce devrait être décrite sous le nom de Septaria Poly- thàlamia; mais si, comme c’est une règle invariable , nous prenons pour spécifique le nom le plus anciennement donné, nous aurons plusieurs motifs pour conserver à la Cloisonnaire le nom que La- marck a préféré pour elle, Rumphius, antérieur à Linné, a désigné Je premier la Cloisonnaire sous le nom de Solen arenarius, et nous puisons, dans ceux des ouvrages de Linné qui sont antérieurs à la douzième édition, des motifs suflisans pour légitimer cette nomina- tion , puisqu’il l’avait adoptée aussi bien dans la dixième, que dans le musée de la princesse Ulrique.

Le tube d’une Cloisonnaire a souvent plus de trois pieds de lon- gueur, et à la base il a près de deux pouces de diamètre. Ce tube, la seule partie connue de cette espèce est blanc, un peu transpa- rent , très épais et très pesant. Il est conique, cylindrique, augmen- tant de diamètre très insensiblement ; toute sa surface extérieure est couverte de rides irrégulières , résultant des accroissemens. Dans certains individus, ce tube est à-peu-près droit, dans d’autres, il est subitement coudé et irrégulièrement contourné à la manière des Tarets ; à l’intérieur, la cavité du tube est plus fisse , cependant on retrouve de ce côté des traces de l’irrégularité des accroissemens qui se traduisent en grosses rides transverses carénées^, occupant ordi-

mVXlànE FAMILLE.

nairement la moili6 ou les trois quarts de la circonférence. Tous les individus que nous avons vus jusqu’à présent do cotte Cloison- naire avaient le tube aminci et ouvert à l’exlréinilc antérieure qui est aussi lapins largo 5 l’extrémité postérieure pi-ésente, comme dans la plupart des vieux Tarets, une cloison longitudinale qui par- tage en deux tubes presque égaux , celte portion do la cavité in- térieure. Ces deux tubes, ainsi réunis, occupent quelquefois une longueur de huit à dix pouces. A celte partie, ainsi divisée, s’a- dapteraient, d’api'ès Rurnpbius , deux tubes calcaires qui vont en divei’geant, qui semblent subarliculés, étant formés de pièces sur- ajoutées et qui s’abouchent, en s’y sondant, à l’extrémité des tubes intérieurs dont nous avons précédemment pai'lé. Si l’on casse un tube de la Cloisonnaire des sables, la cassure n’est point esquilleuse comme celle des Tarets ordinaires et celle des autres tubes testacés; elle se fait assez nettement en travers, et l’on aperçoit, avec surprise, que la matière calcaire est cristallisée en aiguilles rayonnantes.

Cloisonnaire de la Méditerranée. Septaria MetUterranea, Math. pL a. f.9. 10.

s, vaginâ teretlçyündraceâ ivregiilarîter contortâ^ postice Indiiobus tubuUs termînatâ; testé subgiobiilosd , teredinîformi^ utrînque hiaritej tenue et arcuatlm siriatât întus ossiculis cardlnaUbiis prœdltâ,

Cloisonnaire delà Méditerranée Malhéron. Mém, sur la Cloisonnaire, Ann, des SC. et deVindust, du midi de la France, 1. 1, p. 77, et t. a p. Sia. planche i.

Habite la Mcdîlerrance. Fossile dans les terrains récens des environs de Marseille,

Il est évident, d’après les observations de M. Mathéron, que la coquille qu’il a décrite sous le nom de Cloisonnaire de la Méditerra- née^ a tous les caractères des Tarets. En serait-il exactement de même pour l’espèce précédente? c’est une question qui restera in- décise jusqu’au moment sera connu l’animal du Septaria arena- ria. Quant à celui de la Cloisonnaire de la Méditerranée, il ne diffère en rien de celui des Tarots, si ce n’est qu’il a l’iiabiliule de vivre enfoncé dans le sable. Cette espèce est toujours beaucoup plus petite que celle de l’Inde; son tube est allongé, cylindracé, conique, d’un blanc roussâtre, très rarement droit, presque tou- jours irrégulièrement contourné et boursouflé, ce qui le fait

IBS PHOLADAIRBS.

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rcssembier au gros intestin des mammifères. Son extrémité postérieure se divise en deux tubes étroits , soutenus , dans l’in- térieur du tube commun , par une série do cloisons résultant des accroisseinens. Ces tubes ne sc prolongent pas en dehors par des tuyaux subarticulés , comme dans l’espèce précédente. Dans ce tube, ordinairement fermé à spn extrémité antérieure, on trouve une coquille bivalve très courte, assez mince et fragile, tout-à- fait semblable à celle des Tarets. Les deux valves s’appliquent l’une contre l’autre sans être articulées en charnière; elles sont très lar- gement bâillantes des deux côtés , et l’on trouve dans leur inté- rieur, insérés dans la cavité du crochet, des appendices recourbés en forme de cuilleron. Entre cette coquille, l’animal porte, à son extrémité postérieure , une paire de palettes triangulaires , apla- ties, lout-à-fail semblables à celles du Teredo na9alis. D’après les fragmens que nous possédons de celte espèce, les grands individus ont pu avoir jusqu’à i pied ou i5 pouces de long, et 6 à 8 lignes de diamètre à l’extrémité antérieure.

GENRE CINQUIÈME.

TARET. Tcrcùo,

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal vermiforme : manteau tubuleux , terminé posterieurement par deux siphons iné- gaux; une petite ouverture antérieure pour le passage d’rn pied court et tronqué; branchies en ruban dans presque toute la longueur du manteau; anus en avant des branchies; un anneau musculaire , à la base des siphons , il fixe Tani- mal à son tube et donne insertion à deux palettes latérales.

Coquille épaisse , globuleuse ou annulaire , équivalve , ré- gulière, largement ouverte de chaque côté, point de char- nière , point de ligament , un cuilleron dans les crochets. Cette coquille est contenue dans un tube calcaire flexueux, conique, toujours ouvert postérieurement, clos à sa partie antérieure dans l’age adulte ; ouverture postérieure divisée en deux par une cloison médiane. Deux palettes calcaires

DF^UXïfeME famille;

48

simples ou dentelées destinées , à fermer l’ouverture des si- plions.

SYKONYMiE GÉNÉRIQUE. Tentliredo ; Aristote. Teredo ; Pline. XilophagusiV\\xi^,— Branca délia «rtPe;Vallis- nieri. Llgniperda ; Sellius. Taret^ Teredo ^ Adanson, Linné, Bruguière 5 Lamarck, Cuvier , Blainville, etc., etc.

Le Taviev I Guettard. Genre Upérode; Pars. Guettard. Fisiulane; Cuvier, Blainville.

OBSERVATIONS. Il est peu de genres qui offrent autant d’intérêt que celui- ci, non-seulement parce qu’il a été connu des anciens et mentionné par eux d’une manière non équivoque, mais encore parce que, envahissant les constructions maritimes, il est devenu l’un des plus redoutables ennemis des navigateurs. La Hollande surtout, menacée par la rupture de ses digues, partout détruites par les Tarets, les redoute comme le plus dangereux des fléaux.

Les anciens, et Aristote lui-même, donnaient le nom de Ten~ thredo à la plupart des animaux qui perforent le bois, ou qui se creusent des galeries plus ou moins profondes dans l’épaisseur des corps durs, lis confondaient ainsi, avec des animaux marins de plu- sieurs classes , plusieurs espèces de larves d’insectes. En parlant des mêmes animaux, Pline conserve cette confusion. Il est à pré- sumer que le mol Teredo, appliqué aujourd’hui aux Tarets pro- prement dits, n’avait point autrefois celte signification. Chez la plupart des peuples anciens, aussi bien que chez les Romains, ou avait la persuasion que les maladies des os, que l’on connaît au- jourd’hui sous le nom de carie ^ étaient occasionées par un ver rongeur , et c’est à cet être imaginaire que dans l’origine on appli- qua lo nom de Teredo, Par extension, ce nom a été appliqué à plusieurs animaux , comme nous l’avons vu tout-à-l’heure ; mais , quand au milieu de ces animaux on voulait eu désigner un en particulier, il recevait une épithète caractéristique, et c’est ainsi que Pline désigne le Tard proprement dit, par le nom de Tetedo xilophaga. Peut-être que si le Tavet n’eÛL point été si redoutable aux constructions maritimes, les anciens ne l’eussent point mention- né ; car c’est toujours à l’occasion des dégâts qu’il a causés, que l’on trouve aussi bien dans Aristophane et dans Ovide, que dans Pline et Vitruve, des preuves non équivoques que les anciens ont connu ce mollusque destructeur. Ce serait donc bien à tort, comme on

I,KS rdOTADAlRFS.

4y

J’a proLenJu vers le milieu du dernier siècle , que l’on croirait à Tenvahissement tout récent du Taret rapporté, disait-on, de rindo par la navigation moderne. Le Taret existait dans les mers d’Eu- rope avant la navigation de Tlnde, et on en a la preuve indépen- damment du témoignage des anciens. On trouve le Tarot à l’état fossile, dans les terrains tertiaires de l’Europe appartenant à la troisième période, et comme ces terrains ont été déposés avant que l’homme existât , nous pouvons avoir par la preuve la plus irrécusable que le Taret n’a point été apporté récemment dans nos mers.

Dans les ouvrages des naturalistes du seizième siècle et du com- mencement du dix-septième, à peine si le Taret s’y trouve men- tionné, Aldrovande, qui avait compilé avec tant de soin tout ce que l’antiquité nous a légué de ses écrivains, ne pouvait pas laisser échapper ce qui a rapport au Taret; mais, trouvant à ce sujet beaucoup de confusion, et n’ajant aucun guide certain pour la dissiper, il la laissa subsister tout entière dans son ouvrage. En 1715, Valisnîeri publia son Recueil de diverses observations d’his- toire naturelle ; il y mentionna le Taret ; il le nomma Branca délia nave. Branca signifie la pierre du martyr , et l’on conçoit facile- ment le sens que l’auteur italien appliquait aux manœuvres d’un animal qui attaque les vaisseaux et les détruit.

Déjà, à plusieurs reprises, on avait signalé, comme capable de détruire les bois plongés dans la mer , une Annelide que l’on ren- contre quelquefois dans les galeries qu’elle s’y creuse. Deslandes, en 1720, dans un mémoire publié dans rhisloire de l’Académie , avança ce fait qui alors ne reçut point de contradiction, que le tuyau duTaret est formé parcetteAnnelide,eten est constamment babité. Mais il ne fallait qu’un bien petit nombre d’observations pour dé- truire les assertions de Deslandes, et bientôt elles furent assez nom- breuses. Roussel, Massuet et l’auteur du Muséum Hoffmannianum, Léopold Frisch, publièrent, sui leTarel, des ouvrages qui, par un singulier concours, parurent dans la meme année, en 1723. Les observations contenues dans ces ouvrages ont toutes un but commun, celui de faire connaître le Taret dans ses diverses par- ties et sa manière de vivre. On concevra que ces ouvrages du- rent élre bien accueillis, puisqu’ils furent publiés dans le temps l’on venait de constater les dégâls des Tarets dans les pilotis des digues des Polders.

Ces ouvrages, que nous venons de citer, étaient incomplets sous

T. I. A*

5o

DEUXIFME FAMÏLIK.

le rapport scientifique. Les personnes qui s’étalent jusqu’alors oc- cupées du Taret, lui avaient donné le nom de ver de mer, de phaga; mais elles n’avaient point reconnu !a nature de ce ver et ses rapports avec d’autres animaux analogues. Sellius fut le premier qui donna un traité complet sur le Taret. Ce livre, plein d’érudition , parut en 1^53 , sous le titre de Ilisloria naturalis Te- rcdinis seu xilophagi marîni. L’auteur a eu le mérite , avant Adan- son , de déterminer rigoureusement la nature du Taret et d’indi- quer, avec justessé, sa place dans la classe des Mollusques. Les historiens qui se sont occupés de cette matière, ont eu le tort d’at- tribuer à Adanson le méiile d’avoir, le premier, déterminé les rapports des Tarais. Mais le mémoire d’Adanson ne fut publié qu’en 175g, dans les mémoires de l’Académie, six ans après la publication de l’ouvrage de Selüus. En rétablissant ainsi les faits, nous sommes loin de contester au travail d’Adanson son importance ; la question y est plus nettement posée et résolue, d’après une com- paraison plus approfondie des divers animaux. On retrouve, dans le Mémoire d’Adanson, la netteté, la précision qui caractérisent la plupart de ses travaux. Ce mémoire n’est pas le seul de ses ou- vrages où il ait parlé du Taret. Déjà, en 1757 , dans son voyage au Sénégal, ce naturaliste avait placé le Taret dans le voisinage des Pholades.

En nous astreignant à l’ordre chronologique rigoureux, nous aurions déjà mentionner quelques-uns des travaux de Linné; mais il nous a paru plus convenable d’examiner , dans leur en- semble, les opinions du célèbre professeur d'Upsal.

Ce n’est pas sans raison qu’Adanson reproche à l’auteur du Sys~ tema natarœ^ sa première classification du Tarot. On trouve en ' effet, dans la première édition du Fauna stwcica, 1746, le Taret compris dans le genre Dentale, à titre d’espèce de ce genre < Ce rap- prochement est extraordinaire de la part de Linné, qui connais- sait cependant l’ouvrage do Sellius. Mais alors , il ne faisait que répéter ce qu’il avait déjà préparé deux années auparavant, dans la quatrième édition du Sfstcma natum, l’on trouve, p. 100 , parmi les Dentales, le Taret et l’Arrosoir. Dans les éditions sui- vantes, jusqu’à la dixième, Linné conserva la môme opinion sur les Tarets. Mais alors, plus éclairé par le mémoire d’Adanson, il introduisit dans sa mélliode un genre Taret, dont il fixa la place à la fin des vers intesLinaux, à la suite des Sangsues et des Mixi- nes , avant le tort , malgré les observations cl’Adanson , de consi-

I,rs PHOIADAÎRES.

dorer les valves comme des macJioiros. Plus lard, tians la douzième édition àa Systema naturcv , il détacha le genre Tarel des vers testinaux et le transporta dans la classe des Toslacés sans spire ré- gulière, à la suite des Patelles, des Dentales et tles Serpules.

A l’exemple d’Adanson, Guetlard, dans le tome 3 de ses mé- moires divers , a adopté le genre Tarel, auquel il donne le nom de Tarier, Mais, abusé sur la valeur des caractères do ce genre , il no pense pas qu’il doive se rapprocher des Pholades, et le con- serve parmi les Serpules et autres tubes tcstacés, soit vivans, soit fossiles.

Dans le tome 2 du Journal d’Histoire naturelle de Copenhague, (1792), Spengler donna un mémoire sur les Pholades et les Ta- rots; il adopta entièrement l’opinion d'Adanson, et distingua parmi les Tarels plusieurs espèces que l’on confondait en une seule. Walch, dans Natiuforscher , avait fait connaître l’espèce singulière à laquelle Lamarck donna le nom de Fistidana gregala^ Spengler, ne se laissant point séduire par les apparences exté- rieures, reconnut le premier, dans celte espèce, un véritable Tarel auquel il iirqxisa le nom de Teredo nuclvorus. Depuis le tra- vail de Spengler, tous les zoologistes, à l’exception des imitateurs de Linné, adoptèrent définitivement l’opinion d’Adaiison ; et Bruguière d’abord , puis Cuvier, Lamarck, donnèrent chez nous cet exemple. Depuis cette époque , le genre Tarel n’a subi que de faibles modifications , soit dans sa composition , soit tlans ses rap- ports. Bruguière admettait encore la classe des Mullivaives : les Tarets s’y trouvent à côté des Pholades, des Oscabrions, etc. Cu- vier, dans son Tableau élémentaire, eut le mérite de 'faire dispa- raître de la méthode celte classification artificielle , et il transporta les divers genres des Mullivaives, les appelaient leurs rap- ports naturels ; et c’est ainsi que les Tarets et les Pholades se trou- vèrent placés dans la classe des Mollusques acéphalés. Lamarck, qui d’abord , dans son premier Essai des Mollusques , avait adopté les mullivaives de Bruguière et de Linné, se réforma bientôt après, et comprit les Pholades et les Tarels dans ses Mollusques acéphalés conchyliferes; mais alors, n’appréciant pas à leur juste valeur les caractères du tube des Tarels, et considérant ce lu!)e, aussi bien que celui des Fistulanes, comme une valve exagérée dans son développement, il fit un petit groupe de ces deux genres que nous venons de mentionner. Il les mit au commence- ment de la seconde grande division, comprenant toutes les co-

4^

52

DEUXIK.ME FA3Ï1LLE.

quilles iuéquivalvos, tandis que les Pliolades terminent. la pre- mière division J contenant les coquilles cquivalves. M. de Roissy, dans le Bufion de Sonuini, n’a point adopté entièrement la der- nière classification de Lamarck ; il met en rapport les trois genres Arrosoir, Fislulane et Tarot, et les sépare des Pholades par un petit groupe contenant les genres Pelricole et Saxicave , dont La- marck a fait depuis la famille des Liihophages. Lorsqu'on 1809 Lamarck publia sa Philosophie zoologique, il proposa, pour la première fois, le groupement des Mollusques en familles natu- relles; et revenant à des idées qui se rapprochent beaucoup plus de celles d’Adanson , il mit les Tarets, ainsi que les Pholades , dans sa famille des Pholadaires. Ces rapports restèrent les memes dans le livre qu’il donna en 1811 , sous le titre de Cours fait au Muséum. Celte opinion, que Lamarck conserva pendant long- temps, sur le rapport des Tarets, fut encore modifiée par lui, lorsqu’il publia ses Animaux sans vertèbres ; il partagea, comme nous l’avons déjà dit, celle famille en deux parties, dont la prin- cipale devint pour lui la famille des Tubicolés. Les Tarets se trou- vèrent entraînés dans cette nouvelle famille, uniquement parce qu’ils ont un tube; car, si Lamarck eût voulu donner à la coquille et à son animal , la valeur qu’ils méritent dans l’appréciation des rapports, il est certain qu’il aurait conservé les Tarets à coté des Pholades, comme nous proposons de le faire aujourd’hui. La- treille a Lien senti que les Tarets devaient être séparés de la fa- mille des Tubicolés de Lamarck j mais, au lieu de les réunir aux Pholades, comme cela paraissait si naturel, il en fît une fa- mille à part, sous le noui de Terediniles, dans laquelle il com- prend les Tarets, les Teredines et les Clavagelles. M. de Blainville rendit beaucoup plus naturels les rapports des Tarets , en les rap- prochant définitivement des Pholades, dans sa famille des Ades- macés. Nous ne ferons, au sujet de celte famille des Adesmacés de M. de Blainville, que deux remarques: la première, c’est qu’il existait déjà la famille des Pholades, dont Je nom eût été préfé- rable, à cause de son antériorité; la seconde, c’est que, sous le nom de Fislulane, M. de Blainville introduit un genre qui n’est autre chose qu’un dédoublement inutile du genre Taret lui-mème ; nous disons inutile , parce qa’il contient la Fislulane en paquet de Lamarck, laquelle, comme nous l’avons vu, n’est autre chose qu’un Taret. Enfin , pour terminer l’hisloire de ce genre curieux et important, nous dirons que Cuvier, dans les deux dernières

LKâ l>H0L4ÜAiR£S. 53

édiiious du Règne animal , a compris les Tarets dans sa famille des Enfermées, et les a rapprochés des Pholades.

Le Tarel est un animal allongé et vermiforme, et Ton comprend que des zoologistes, peu habitués à déterminer les rapports d’a- près l’ensemble des organes, ont pu être trompés sur sa nature- Nous avons vu, en traitant l’anaiomie générale des Mollusques, que les Mollusques acéphalés étaient enveloppés d’une peau for- mant deux lobes, à laquelle on a donné le nom de manteau. Ces lobes, souvent désunis, sont quelquefois réunis dans di- vers points de leur étendue. Dans le Taret, ces lobes du manteau se soudent intimement, s’allongent et constituent un véritable tuyau charnu , terminé antérieurement par une coquille globu- leuse sur le bord de laquelle ils s’attachent , et postérieurement eu deux petits siphons presque égaux, à la base desquels s’insère de chaque côté, à droite et à gauche, une paire de palettes calcaires dont la forme et les accidens extérieurs diffèrent selon les espèces. La coquille globuleuse dont nous avons parlé, est formée de deux valves qui , échancrées largement à leur partie antérieure, laissent passer , par cette ouverture , un pied court et tronqué, en forme de ventouse, semblable à celui des Pholades et des Gaslrochènes. Lorsque l’on a détaché l’animal de sa coquille , lorsqu’on i’a sorti du tube calcaire dans lequel il est contenu, si on fend le manteau dans toute sa longueur, on trouve, pn allant d’avant en arrière, les parties suivantes : Immédiatement en avant du pied et du

repli antérieur du manteau, so trouve , dans la ligne moyenne , une petite fente Iransverse, garnie d’une lèvre supérieure et d’une lèvre inférieure : c’est l’ouverture de la bouche. En suivant les lèvres de la bouche , on les voit se continuer de chaque côté du corps, s’élargir et devenir de véritables palpes labiales, adhé- rant, dans presque toute leur longueur , aux parties latérales du corps. 3” Le corps est très court ; il est formé par la masse des vis- cères qui consistent en un foie, un ovaire, dans l’épaisseur des- quels 011 trouve un estomac médiocre et les ciicouvoliuions de l’intestin. ïl® chaque côté de l’extrémité postérieure du corps, commencent à paraîlie les feuillets branchiaux qui forment deux bandes parallèles fort allongées, que ion voit s’étaler dans une grande partie de la longueur du tube charnu que forme le man -, teau. C’est au point d’insertion de ces branchies sur le corps, que se trouve, dans la ligue médiane et dorsale, le cœur, composé d’un ventricule et de deux oreillettes symétriques. Le ventricule

su

DEÜXIKMË FAMILLK.

est traversé par le rectum qui , se prolongeant très haut devant les branchies, vient so terminer à leur extrémité postérieure en une petite ouverture qui est celle de l'anus.

D'après ce que nous vouons de rapporter, il est évident que le Taret ne diffère des Pholadcs que par l'allongement considérable du manteau, dont les lobes soudés ont la forme d’un véritable tuyau. Le manteau sécrète, dans presque toutes les espèces^ im tuyau calcaire qui le garantit, et dans lequel l’animal finit quel- quefois par se clore entièrement à la manière des Gastrochènes. Ce tuyau représente, pour nous, les pièces dorsales des Pholadcs qui, exagérées et réunies, enveloppent tout l’animal et servent à le protéger,

La coquille des Tarets est fort singulière. Elle est très courte, très bâillante de chaque côté, et se réduit quelquefois en un cercle osseux destiné à soutenir les parois du manteau. Dans le plus grand nombre des espèces, les valves sont sublrapézoïdes, et elles res- semblent à la partie antérieure d’une Pbolade bâillante, que l'on aurait séparée du reste, en coupant transversalement la coquille en deux. Les valves sont réunies à la manière de celles des Pbo- lades; elles n'ont point de charnière articulée et point de liga- ment; mais on trouve en dedans, en partant de l’intérieur des crochets, un petit cuilleron plus ou moins long, selon les es- pèces , et tout-à-fait semblable , quant à la position et aux usages, à celui des Pbolades. Dans la plupart des espèces , celle coquille présente un sillon médian en forme de ceinture, vers lequel abou- tissent des stries , ordinairement crépues , très fines et très élé- gantes.

L’animal et la coquille, que nous venons de décrire, sont con- tenus dans un tube calcaire, plus ou moins épais, qui revêt les 2^arois des galeries que l’animal se creuse dans le bois. Ce tube cal- caire n’existe pas au même degré d’épaisseur dans toutes les es- pèces, et il y en a môme quelques-unes qui en sont dépourvues, ou chez lesquelles du moins il est seulement membraneux. Quand , par suite de la désagi'égalion complète du bois dans lequel les Tarets ont vécu , on parvient â obtenir des tubes entiers , ils sont toujours blancs, épaissis à l’extrémité postérieure, et beaucoup plus minces à l’extrémité antérieure, extrémité occupée par la coquille. Presque toujours , les tuyaux des Tarots suivent le sens dos fibres ligneuses, mais l’animal se dévie avec la plus grande facilité, aussitôt qu’il rencontre un obstacle, Lorsque, dans leur marche, les Tarets se

LES l’UOLAliAÏREi;.

00

rencontrciUj ils ne sc corrodent pas les uns les autres, ils se con- tournent, et quand il y en a un grand nombre, ils s’enebevôtrent dans plusieurs sens et deviennent très iiréguïiers. Lorsque lesTa- rels attaquent des portions de bois dans lesquelles il existe des noeuds ou des tronçons de branches, ils se rencontrent sous des angles différens, et il devient alors presque impossible de suivre leurs galeries et de reconnaître la manière d*êlre d’un seul indi- vidu. L’extrémité postérieure du tube commence toujours à la surface extérieure du bois, et cette extrémité, ordinairement un peu saillante, se reconnaît aux deux trous dont elle est perforée, de la même manière que dans les Cloisonnaires. C’est par ces trous que l’animal fait saillir au-dehors les siphons qui le terminent postérieurement. Si, dans les vieux individus du Taret, on casse le tube à son exirémité postérieure, ou voit que le trou des si- phons, d’abord simple, se bifurque absolument de la même ma- nière que dans les Cloisonnaires, et, par une coupe longitudinale, on voit que cette exirémité, destinée aux siphons, est remplie de cloisons obliques qui résultent de l’accroissement intérieur de cette extrémité du tube. L’extrémité antérieure a les bords ordinaire- ment minces et tranebans; elle est ouverte, et son contour est circulaire; mais il arrive souvent, sans que cela paraisse dépendre de l’âge , que celte extrémité est fermée en calotte hémisphérique, ainsi que dans les Fislulanes, et c’est un tube clos de cette manière que Lamarcka nomme Fistiilana corniformis Azx\s sa collection . Nous avions cru que le Taret ne se fermait que lorsqu’il était parvenu à tout son développement; mais dos observations ultérieures nous ont démontré que, dans quelques espèces, l’animal encore jeune se clôt dans son tube. Il faut dès-lors admettre aussi qu’il jouit do la propi'iélé de dissoudre la partie de son tubcj qui gênerait son développement.

En observant la manière de vivre d’un animal comme celui que nous venons de décrire, on s’esl demandé comment il parvenait à pénétrer dans les bois les plus durs ; et la première explication qui s’est présentée, a été de supposer que l’animal corrodait le bois avec ses valves, de la même manière que le font les insectes xilo- phages avec les ïbrtes mandibules dont ils sont armés. Par suite de celte première comparaison , on a prétendu que les Tarels s’en- IbnçaieiU dans le bois pour s’eu nourrir, llcstc à savoir maintenant si ces opinions sont justes et doivent être acceptées sans contrôle. Nous lèrons observer d’abord qite les valves des Tards, dans le

56

DEUXIÈME famille.

plus grand nombre des espèces, sont très minces et très fragiles, et , d’après l’essai que nous en avons fait , elles sont incapables de résister à i’e/Fort nécessaire pour détacher les fibres d’un bois dur comme le chêne, par exemple. Dans les jeunes comme dans les vieilles coquilles , se montrent toujours bien conservées et sans usure , ces stries fines et délicates qui disparaissent sous de très faibles froltemens. On a prétendu que l’ouverture antérieure de la coquille était très favorable pour user le bois et en emporter des fragmens, comme le ferait une tarière mise en mouvement. Nous contestons que les valves soient disposées réellement comme on le prétend , nous croyons même que leur forme est très défavo- rable à l’usage qu’on leur suppose, quand on pense -surtout que les accroissemens de la coquille ont lieu continuellement sur ses bords, quand on réfléchit que le bâillement, dont il est ques- tion , est constamment rempli par le pied de l’animal. D’un autre côté, il faudrait que l’animal pût faire des mouvemens rapides de torsion sur lui-même pour taroder ; il faudrait de plus qu’il eût un point d’appui au moyen duquel il pût pousser sa coquille en avant avec une force assez grande pour vaincre l’obstacle qu’il cberclie constamment à détruire. Mais ces conditions né- cessaires pour taroder n’existent pas dans Je Taret. C’est un ani- mal mou, dont le tuyau est diversement contourné; il n’est at- taché à ce tuyau que par son extrémité postérieure, et l’on ne trouve , dans son manteau , ni des muscles, ni des leviers capables de pousser la coquille en avant. Enfid^ les divers contournemens du tube s’opposent à ce que l’animal puisse taroder par des mou- vemens de torsion sur lui-inôme. Nous sommes donc parfaitement convaincu que le Taret pénétre dans le bois par un tout autre moyen que celui que l’on suppose et qui a servi jusqu’à présent à expliquer sa manière de vivre. Quels moyens un animal si faible einploie-t-il pour vaincre des obstacles si puissans? Nous l’igno- rons .entièrement.

Ou a prétendu aussi que le Taret rongeait le bois pour s’en nourrir. Celte assertion u’est pas plus soutenable que celle que nous venons de combattre. Il faut se souvenir que les Tarets, comme les autres Mollusques acéphalés, ont la bouche entièrement nue ; elle est constamment dépourvue d’une partie dure quel- conque, propre à broyer une matière aussi dure que le bois, quand même la coquille serait parvenue à le réduire en très pe- tits fragmens. Aussi, ces animaux se nourrissent-ils uniquement,

LES rüOLADAlRES.

67

soit des animaux microscopiques contenus dans l’eau , soit des par- ticules résultant de la décoiuposilion des animaux et des végétaux, qui s’y trouvent constamment suspendues. Toute leur organisa- tion est préparée pour ce genre de nourriture, et lorsqu’on ouvre leur estomac, ce sont toujours ces détritus qu’on y découvre et non pas ceux du bois qu’ils perforent. D’ailleurs, les siphons qui ter- minent l’extrémité postérieure du manteau, ont des usages bien dé- terminés chez les Mollusques qui en sont pourvus, et leur présence chez les Tarets indique assez de quelle manière ils se nour- rissent.

Le genre Taret se rencontre à l’état vivant dans presque toutes les mers, et tout nous porte à croire que ce sont des espèces diffé- rentes qui habitent les diverses contrées. Comme partout ces ani- maux ont la mémo apparence, les naturalistes voyageurs ont cru reconnaître partout notre teredo navalis y et, trop si\rs de l’avoir reconnu , ils ont toujours négligé de rapporter ceux qu’ils ont ren- contrés. Aussi il existe, dans la synonymie de celte espèce, une con- fusion qu’il sera difficile de faire disparaître. Bien que l’on ne cite encore maintenant qu’un petit nombre d’espèces vivantes du genre Taret, nous ne doutons pas que le nombre ne s’en augmente con- sidérablement, lorsque les observations seront dirigées vers ce genre intéressant, II est à présumer que certaines espèces attaquent de préférence des bois d’une nature particulière; il serait curieux du moins de s’assurer si le Teredo clava de Linné [Fislulana gregata^ Lamk.) est le seul qui chCsisse , pour s’y loger , des fruits à parois épaisses et dures telles que les cocos. Celte manière de vivre de cette espèce a été également propre à quelques autres que l’on connaît à l’état fossile seulement et que l’on rencontre particulière- ment dans les terrains tertiaires de la Belgique.

Les Tarets fossiles sont assez rares. Ils so trouvent particulière- ment dans les bois passés à l’éiat de liguites ou qui, complète- ment pourris, ont laissé les tubes enchevêtrés et formant des pa- quets. On trouve également des Tarets dans ce que l’on nomme vulgairement du bois pétrifié, c’est-à-dire devenu entièrement si- liceux. Ces bois siliceux à Tarets se rencontrent quelquefois dans les alluvions de la Seine ; mais nous ignorons absolument s’ils pro- viennent de terrains tertiaires ou de terrains plus anciens. On a cm pendant quelque temps , et nous avons partagé celte croyance, que les Tarets fossiles ne descendaient pas au-dessous du terrain tertiaire; actuellement nous avons la preuve acquise qu’il est des

58

DEÜXIÈMÜ VAMILLE.

espaces qui descendent dans les formations crétacées, et qui leur sont propres. Ce fait se reproduit aussi bien eu Amérique qu'en Europe , et il ne permet plus le moindre doute. Dans ie plus grand nombre des espèces fossiles , on ouvre inutilement les tubes qui pa- raissent les plus entiers, on n’y trouve jamais la moindre trace de la petite coquille bivalve qui fait partie essentielle duTaret. Cette absence de la coquille paraît si constante, que plusieurs personnes ont supposé que cos espèces de Tarels étaient naturellement dé- pourvues d’une coquille; mais il nous semble que c’est se hâter de conclure en présence d’un trop petit nombre d’observations. Dans ces Tarets fossiles, et particulièrement dans ceux de Belgique, on trouve assez fréquemment dans les tubes, les palettes calcaires attacbées à l’extrémité postérieure de l’animal ; et ces palettes ont, dans ces espèces, des caractères tout particuliers : cc sont de petites cupules infondibuliformes, un peu comprimées latéralement, ou- vertes du coté évasé , terminées au centre par un pédicule, et ces petits entonnoirs sont insérés les uns dans les autres, au nombre de douze ou quinze pour chaque palette.

D’après ce que nous venons d’exposer sur le genre Taret, il est facile maintenant d’apprécier ses rapports naturels, et de le classer d’une manière convenable dans la méthode. Ses analogies nom- breusesavec lesPhoIades sont déjà manifestes ; mais elles ressortiront bien plus encore lorsque nous atn’ons examiné les Teredines et les coquilles du genre Pholade , qui ont aussi la propriété de perforer le bois. Parmi ces coquilles, il en est une qui, par sa forme, a beaucoup d’analogie avec les Tarets; et M. Soiverby, dans son Généra of sheîlsy a cru uécessaii*e de faire, avec elle, un genre particulier, sous le nom de XHophaga, Pour plusieurs raisons, nous croyons ce genre inutile : parce que, s'il a la propriété de per- cer le bois et d’y creuser des galeries assez longues sans sécréter de tube , il y a de véritables Tarets qui sont dans le même cas; si, au contraire, les caractères du genre sont pris dans la forme particu- lière de la coquille , nous trouvons en elle tous les caractèi’es d’une véritable Pholade à valves très courtes, de forme globuleuse, mais ayant les crochets garnisà l’extérieur de deux pelilespièceseu forme d’écusson ; aussi, selon nous , le genre dont il est question doit-il être placé, comme section, parmi les Pbolades qui percent le bois.

Nombre des espèces :

6 vivantes. i4 fossiles.

LKS rUOLADAIUKS.

59

Ces nombres d’espèces sont loin d’ètrc défiaitifs. Nous n’avons pu malheureusement examiner la plupart de celles que nous comp- tons, et parmi les fossiles, nous ajoutons celles figurées dans l’ou- vrage de Burtin.

Les Tarets fossiles se rencontrent particulièrement dans les ter- rains tertiaires. II y en a quelques-uns cependant dans les terrains crétacés, et nous n’en connaissons aucun exemple authentique dans les terrains Jurassiques.

Nous connaissons une espèce dans la craie inférieure de la Cham- pagne (terrain néocomien).

Nous en connaissons une autre dans les terrains crétacés supé- rieurs de Maestrich.

Il y en a deux espèces dans les craies inférieures de TAmérique.

Nous eh connaissons actuellement deux propres aux terrains ter- tiaires de Paris , dont l’un , Teredo Burlini , se trouve aussi dans les terrains du même âge de la Belgique. Il y en a au moins cinq es- pèces avec le précédent dans les terrains tertiaires de Belgique, appartenant à Pépoque parisienne.

Enfin, nous pouvons citer aussi une espèce qui est très proba- blement le Teredo namlis^ dans le terrain tertiaire d’Italie. Il en' existe une qui est probablement la même que la précédente , dans le crag d’Angleterre.

Nous connaissons encore deux espèces trouvées dans des bois fossiles recueillis dans les alluvions de la Seine.

Parmi ces espèces, nous signalerons particulièrement les deux suivantes :

Taret commun. Teredo navalis. Lin. Vivant dans les mers d'Europe; et fossile en Italie, en Sicile, en Morée et pro- bablement dans le crag d’Angleterre.

Taret de Burtin. Teredo Burtini, Desh. Fossile dans le ter- rain tertiaire inférieur de la Belgique , et aux environs de Paris.

ESPÈCES.

Taret commun. Teredo namlis, pi. 3. f. i à g.

T* tubo ieretîuscuîof irregularîter contorto ^ solldo, aîbo ; palmulis sîmplîci^ bus, supernètruncatis. Tesid suhgîobtdosâf hiantissimd , dtnsîssîmè nuissîmeque serrât O'Strîatd.

Valisuieri. Hisl. nal. t, a. pl. 4.

6o

DEUXIÈME EABIILLE.

Massuet. Recherch. intér. sur les vers à tuyau, pl. i. f. r. 2.

Friscli. Mus. Hoffmanniauum.’pl. i. pl. 2, f. 9. pl. 3, f. 19. ao. pl. 4, f. a. 5. 6. Sellius. Hisl. cat. Teredînis, pl. i, f. 1. 5. pl. 2. f. i. 2, 3. 5. 6. Teredo navalis,

Denlalinm, Liuné. Fauna suec, édit.p, 38o. 1829.

An eadem specics? Adanson Descript. d’une nouv. espèce de ver observée au Sénégal. Mém. de l'acad. 1 759. pl. 9. f. 1, 7.

Le Taret, Adans. “Voyage au Sénégal, p, 263. pl. 19. f. i,

Teredo navalîs, Lînu» Sysl. nat, 10® édit. p. 65i, 2,

Id, Syst nat, 12® éd. p. 1167, 807. *

Gueltard. Mém. divers, t. 2. pl. 69. f. 4. 5.

TcrdiA? d’Acosla. Eril. Conch. p. ar.

Pholas teredo, Mull. Prodr. 3o34-

Pholas teredo. Fabricius. Fauna groenlendica, p, 427. 426.

Schrœl, Einl. t. 2, p, 57a,

Teredo navaîis, Kammerer. CaR. de Rudolslat, p, 6. pl. i.

Teredo navnlis.Kâvsleo. Mus. Leskeanum, t. i. p, 3o8,

Teredo batavus, Spengl. Mém. de la soc, d’kist, nat, de Copenh. p. io3* 14. pl. 2. f. 7.

Penu. Prit, Zool. 4. p. 367.

Teredo jiavalïs. Omel. Syst. nat. p. 3747* n i, Teredo utriculus. Guiel. loc. cit. 2,

An eadem spec.? Encycl, mélh. pl. 167. f. r. 2. Copiée d'Adanson,

Teredo 'vulgarh, Lamk. Syst. des an. s. v. p. 128.

Teredo navalis de Roissy. Biiff. inoll, t. 6. p. 459. pl. 432. f, 5.

Mont. Test, brit. p. 527.

Donov. t. 5, pl, 145.

Dorset. Catal. p. 60. pl. 18, f. 21.

Teredo navalis. Burow, p. 166. pl. aa, f, 4,

Dillvv. Cal, l. 2. p. 10S9, 2.

Teredo utriculus, Ibid, 3.

Brook. Intr. of Coneb. p. 143.

Teredo navalîs. Lamk. au. s. t. 5. p. 44u. x,

Blainv. Malac. p. 679. pl, 8x. f. 6.

Gervîl. Cat. des coq, de la Manche, p, 55,

Pay. Cat. des moll, de la Corse, p. 26. 3o.

Schum. Essai d’une classificalion. p. 94*

Delle Cliiaje. Mém. sur les an. s. v. du royaume de Naples, t. P- 32, pl. 54. f. 6. 7. 8.

Blainv, Dict. des sc. ual. t. Sa. p, 267,

. <r'

LES PflOI.ADAlRES.

6l

Mfiuke. Syn* iHÛll». moll. p. 12a.

Desh. Encycl. méth. vers t. 3. p, roo3, r,

Pliil. Eniim. inoll. Sic.p. 2, 11° i.

Seacchi. Cal. Conchyl, regni neap. p. S .

Guérin. Icon. ilu régn. an. moll. pl. 33. f. 2. Copiée de M. de Blaiuville.

Sow. Généra of shells. Teredo, f. 7,

Fossiîis, Teredo navalis, Broccli. Conch. foss. subap. p. 2oq,

Sow, Min, Conch. pl. 102. f. 5. 6. 7. ?

Habile les mers d’Europe; fossile en Italie d’après Brocchî, cl dans le crag d’Angleterre d’après Sowerby.

Nous douDons ici une synonymie très étendue du Teredo navalis de Linné, ou plutôt nous restituons à Selliiis l’origine scienlifîque du Taret commun, en rangeant, sous celte dénomination, tout ce qui, dans les auteurs, nous paraît avoir quelque chose d’ana- logue. Linné, comme nous l’avons vu, plaça d’abord les Tarels parmi les Dentales; plus tard, il adoptai le genre; mais en admet- tant l’espèce de Sellius dans sa nomenclature, il la caractérisa d’une manière si vague et si incertaine, qu’il ne serait pas étonnant que plusieurs espèces fussent confondues sous le nom de Teredo navalis. Nous pouvons même ajouter que les auteurs, qui ont eu occasion de traiter du genre Taret, auraient pu rapporter successivement toutes les espèces au Teredo navalis ^ et, en suivant les principes que nous nous sommes imposés pour la nomenclature , nous au- rions définitivement rejeté l’espèce linnéenne , si nous n’avions été guidé par l’ouvrage de Sellius, contemporain de ceux de Linné. En conséquence de ce que nous venons de dire, nous prendrons , pour type du Teredo navalis^ l’espèce décrite par Sellius. Nous supposons que le Taret qu’Adanson a décrit , dans son Histoire na- turelle du Sénégal, ainsi que dans les Mémoires de l’Académie des sciences, doit constituer une espèce différente de celle de Sellius. Cependant, comme nous n’avons pas eu occasion d’examiner cette espèce du Sénégal , nous suivrons , à cet égard , l’opinion commune des conchyliologisles qiu la rapportent au Teredo navalis. On trouve, dans l’ouvrage de Kammerer, la figure d’un groupe assez considérable de tubes de Tarets; Gmelin a cru devoir faire de celle figure une espèce distincte du Teredo navalis. H lui a donné le nom de Teredo utriculus. Spengler, dont les travaux sur les co- quilles sont si remarquables, fit un travail sur les Tarets, dans le- quel il reconnut distinctement quatre espèces, en employant, comme caractère distinctif, les palettes qui servent à fermer l’extrémité

62 B.ErxrèMr. famiixf.

postérieure du tube^ mais, n\'iyant point de fjuide assuré pour re- connaître l’espèce linnéenne, il imposa son nom à un Taret dont les pièces operculaires sont subarlicidées ; et il a donné le nom de Teredo hatavus , à l’espèce de Massuel et de Sellius, espèce que nous prenons, avec plus de raison que Spengler, pour type du Teredo navalis. Nous n’avons pu vérifier si les Tarets cités par di- vers auteurs appartiennent réellement à l’espèce de Linné ou à celle de Spengler. II est bien à présumer qu’en faisant les cata- logues des espèces de localités différentes , on aura inscrit , sous un nom commun, des choses que l’oii distinguerait si elles pouvaient être réunies et comparées soigneusement.

Le Teredo navalis se renferme dans un tube calcaire assez mince, diversement contourné , selon les accidens du bois qu’il perfore, ou selon le plus ou moins grand nombre d’individus qui s’accumulent dans un espace rétréci. Le tube se boursoufle fréquemment, de- vient très irrégulier, comme dans la figure de Kammerer, lorsque les Tarets sont amoncelés dans un môme moixieau de bois. En vieil- lissant, l’extrémité postérieure du tube s’épaissit , et la partie , des- tinée à recevoir les siphons, se divise en deux par une cloison mé- diane. Les palettes ont assez la forme de raquette ; leur extrémité élargie est subquadrangulairc, tronquée en avant, et quelquefois un peu creusée sur ce bord , ce qui rend les angles plus aigus et. plus saillans. La coquille est de laüle médiocre. Lorsque les valves sont réunies, elle est arrondie et à-peu-près de la grosseur d’un pois. Celle coquille offre, à la partie antérieure, un très large bâillement, les valves étant écbancrées de ce côté très profondé- ment, et cette échancrure formant un angle presque droit. La sur- face extérieure se distingue en deux parties : l’une postérieure, très courte , est lisse ; l’autre est chargée de sli’ies très fines, d’une admirable régularité, très finement crénelées, et suivant exacte- ment le contours de l’ouverture. Le bord cardinal est comme rongé, aplati, et il est dépourvu de bi callosité que l’on trouve sur les Pbolades, ainsi que des pièces accessoires qui caractérisent ce der- nier genre. Dans l’intérieur des valves s’élève un cuilleron très grand, aplati, fort étroit et pointu à son extrémité libre. Ce cuil- leron est légèrement contourné dans sa longueur, et il est plus grand en proportion que celui des Pbolades. Le tube de celte es- pèce a quelquefois plus de deux décimètres de longueur.

LES PHOLAOAIRES.

63

GENRE SIXIÈME.

TXBXBINE. Têredùia. (Lanik.)

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES- Animal jnconnu.

Coquille globuleuse , équivalve , rc%ulière, a crochets sail- lans couverts par une pièce dorsale ( écusson ) , ovalaire , mé- diane; point de ligament; des cuillerons épais dans les cro- chets. Cette coquille extérieure fixée à l’extrémité d’un tube conique , ouvert postérieurement.

OBSERVATIONS. Lauiarck avait d’abord compris le genre qui va nous occuper parmi les Fistulanes, lorsqu’en 1806, il com- mença à publier ses mémoires sur les Fossiles des environs de Pa- ris. Ce ne fut qu’en 1818, dans le tome v de ses Animaux sans vertèbres, qu’il pensa à créer, pour le Fistulana personata, un genre particulier auquel il donna le nom de Teredine. Il l’intro- duisit naturellement dans sa famille des Tubicolés, ou il est dans des rapports naturels, entre les Cloisonnaircs et les Tarets. De- puis cette époque, ce genre a été généralement adopté, et il a en effet des caractères assez importans pour être conservé dans une bonne méthode. Les premiers auteurs qui se sont occupés de ce genre, et M. Férussac d’abord, l’ont maintenu dans la famille des Tubicolés; M. de Blainvillo, dans son Traité de Malacologie, est le premier qui l’en ait tiré pour le joindre aux Pholades et aux Tarets, dans sa famille des Adesmacés. Bientôt après, dans le Dic- tionnaire classique , nous avons fait voir que ce genre avait d’a- bord plus de rapports avec les Tarets qu’avec les Gastrochènes, et dès-lors , nous l’avons rangé dans la famille à laquelle nous avons conservé le nom de Pholadaire. Convaincu des rapports de cette coquille avec les Tarets, M. Sowerby , dans le Minerai conchology^ proposa de réunir le Fistuîana personata aux Tarets proprement dits, et nous pensons que cet auteur a changé d’opinion , puisque nous trouvons le genre Teredine dans le Généra oj skeîîs qu'il publie.

La coquille des Teredines est certainement une des plus singu- lières que Ton puisse imaginer. Elle est, comme les Tarets, formée de deux parties ; un tube calcaire à l’extrémité antérieure duquel

DKUXli^ir F.4;«ÏU:E.

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est soudée et inlimement unie, clans une position tout-à-fait im- mobile , une coquille bivalve, régulière et symétrique , semblable à celle des Tarels, mais portant sur les crochets un écusson assez large, seinblable à celui de certaines Pliolades. Ainsi, la Teredine offre cette combinaison remarquable des caractères propres aux Tarets et aux Pholades. Lorsque Ton examine attentivement une Teredine d’un certain volume , on est surpris do lui trouver une épaisseur aussi considérable, et de voir que la cavité que l’animal a habiter en dernier lieu , était devenue très petite et fort irré- gulière. Dans ces individus, nous avions remarqué que le tôt est formé de couches concentriques, k stries rayonnantes, comme si elles eussent été le résultat d’une cristallisation. Ces observations nous avaient Fait poser la question suivante : les Teredines étaient- elles, pendant la vie de l’animal, dans l’état nous les voyons, et les valves avaient-elles l’immobilité qu’elles ont actuellement. Nous nous adi'essions cette question , pensant que des infiltrations calcaires, faites pendant la fossilisation, avaient pénétré dans le tube, sous forme de couches concentriques, et que c’étaient ces couches qui avaient rendu la coquille immobile à l’extrémité du tube. Mais il restait une explication fort embarrassante, relative- ment à la présence constante, dans tous les individus, de ces cou- ches d’infiltration; et bientôt nous eûmes occasion de faire des ob- servations qui nous éclairèrent entièrement au sujet du genre Te- redine. Déjà plusieurs fois, on avait représenté des individus de Teredines, terminés postérieurement par une portion de tube d’un calcaire noirâtre et subcorné; nous pensions d’abord que quelque marchand, industrieux à se créer des objets rares pour son com- merce, avait eu l’art de joindre deux corps qui n’avaient d’autres rapports que ceux que l’industrie mettait momentanément entre eux; mais, après avoir visité Courlagnon , et examiné, avec toute l’attention qu’elle mérite, l’intéressante et précieuse collection de M. Arnoud de Châlons, nous avons reconnu que cette extrémité noirâtre et subcornée était bien celle des individus entiers de la Teredine; nous avons reconnu aussi, dans des individus mutilés, comment les couches de la portion blanche , de la Teredine, vien- nent s’intercaler entre celles de la portion subcornée. Enfin , après l’étude de divers fragmens du tube de la Cloisonnaîre formé , comme nous l’avons dit, d’un tôt à stries rayonnantes, très épais et souvent très irrégulier, nous avons été convaincu que le tube de la Teredine n’avait subi d’autre altération que celle résultant de

LES PaOT.AnATEF-S.

Gfî

Ja fossîlisaûon. A cos observations, nous en ajouterons encore une qui n’est point sans inlérôl : nous avons observé, dans la collection de M. Arnoud, une valve de Teredine très jeune, et cette valve est libre , isolée et sans aucune connexion , avec un tube quelcon- que; mais, ce qui nous a surtout surpris, c’crt que celle valve, pour sa forme et ses caraci(:res, a la plus grande ressemblance avec celle du Xilophaga dorsalis de M. Sowerbj. La coquille bivalve, fixée à rextrémité du tube , a , comme on le voit, une certaine res- semblance avec celles des-PhoIades et des Tarels. On voit, par les stries fines et subgranuleases de la surface , que , pendant une épo- que de la vie de l’aniiual, celle coquille était très baillante anté-- rieurement, mais que, plus tard, cet espace a été rempli par l’a- nimal, comme cela a lieu aussi dans un asstz grand nombre de Plioîades. Les valves ont des crochets prolubérans, opposés, sub- cordiformes; elles ont une petite duplicaiure postérieuic sur la- quelle vient s’insérer une pièce subquadrangulaire, plus ou moins régulière , et qui n’est autre chose que fécusson postérieur des Pholades, La coquille était aussi très bâillante postérieurement, mais tous les intervalles ont été remplis, et ses contours soudés sur l’extrémité antérieure du tube. Dans cette mémo coquille, nous avons trouve un bord cardinal arrondi et semblable à celui des Pholades ; nous y avons également vu, partant de rintérieur du crochet, un petit ciiilleron étroit et recourbé, semblable à ce- lui des Tarels et des Pholades. Lorsque l’on casse une Teredine vers la coquille, on voit, malgré répaississement considérable de toutes Jes parties, les deux petits cuillcrons recourbés l’un vers l’autre, mais souvent épaissis et mamelonnés par plusieurs couches calcaires qui la revêtent. Le tube des Teredines est en proportion plus gros et beaucoup plus court que celui des Tarels, Lorsqu’il est entier, son extrémité postérieure est terminée, comme nous le disions, par une portion d’un brun corné. Cette portion est ou- verte par un trou arrondi qui est presque toujours simple, mais qui, chez certains individus, offre une disposition toute particu- lière. On y voit en effet six crêtes longitudinales, saillantes, très aigues, espacées avec une extrême régularité, et divisant le con- tour en six arceaux réguliers, sous-divisés ensuite par une petite crête médiane qui règne dans le fond de chacun d’eux. Cette dis- position ne ressemble en rien à ce qui est déjà connu des genres des deux familles qui comprenueut les mollusques Tubicoles.

Les Teredines ne sont connues qu’à i’élat fossile. On en a observé

T. I. 5*

66 DErSIKME FAMUXE.

une dans les terrains de craie inférieure de Saint-Paul-Trois-C bâ- teaux J il y en a une autre, plus généralement répandue dans ]es collections, qui est propre aux terrains tertiaires do Paris. Celte dernière avait l’habitude de s’enfoncer dans le bois à la manière des Tarots : aussi, c’est dans les terrains à lignites des environs d’Epernay et de la montagne de Reims qu’on la rencontre le plus habituellement. Nous avons eu dans les mains des morceaux de bois fossiles pétris de Teredines tellement pressées les unes contre les autres, qu’il ne restait plus entre elles le moindre intervalle , et néanmoins , on apercevait sur elles des restes évidens de la trame fibreuse du bois qu’elles avaient perforé.

Nombre des espèces :

2 fossiles.

1 de la craie inférieure de Saint-Paul-Trois-Cliâteaux, dé- partement de la Drôme.

I du terrain tertiaire de Paris.

ESPÈCES.

Teredine masquée. Teredina personata. pl. 2. f. ii. 12. i3,

r. iestâ glohosâ y terccHnem simulante ^ posticè scntatdy undijvè clausâ et insertd in extremitate tuhi teretiuscuU; tuba posticè attenuato exopevto; üperlurâ tuhi subcornedy aliquando simplicij aliqumdo carinis angustis et acutisy regularibas obstructd.

Fistulana perso/iata, Laoik, Aun.dumus. t, 7. p, 429. 4* et t. 12^ pl. 43. f. 6. 7.

Teredo ante nautœ. Sow, Min, Concli, pl. 102. f. 3.

Besli. Coq. foss. de Paris, t. i. p. 18. i. pl, i, f. 23. 26. 28.

Id, Eucycl. méth. vers. l. 3. p. io3i, i.

Lamk. Ao. s. v. t. 5. p. 438. i,

Blaiiiv. Malac. pl. 81. f. 5.

Sow. Gen. of sliells. Teredina, i, i à 4*

Desh. Lamk. An s. v, éd. t. 6. p. 34. n* t.

Habite...,, Fossile dans les terrains tertiaires de Paris, aux environs de Reims et d’Epernay.

Coquille fort singulière et qu’il est à peine nécessaire que nous décrivions , puisque c’est elle qui nous a servi à la description du genre. Elle est la seule, jusqu’à présent, que l’on cite avec certi- tude dans les lenains tertiaires; car, nous avons de très fortes rai-

LES FHOLADAIRES.

67

sons de croire que le Teredina hacillum de Laraarck, emprunté à Brocchi, n*est qu’une Clavagelle découronnée et dont les valves sont restées engagées a l’exlrémilé du tube. Nous avons mentionné ce fait très curieux d’une valve de cette Teredine encore jeune, trouvée tout-à-fait isolée par M. Arnoud qui, habitant Châlons , non loin de la localité les Teredines sont le plus abondantes, a recueilli une suite considérable de variétés de celte espèce. Une autre personne de Châlons, M. Drouay, connu déjà par un grand nombre de communications géologiques intéressantes, a re- cueilli la plus grande Teredine que nous ayons vue; elle a 127 mil- limètres de longueur, c’est-à-dire 4 pouces 8 lignes, et 27 millimè- tres de diamètre au sommet.

GENRE SEPTIÈME.

PHOXiABE. Pholas (Linné).

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal conîque , subcylin- dracé , à corps épais, les lobes du manteau réunis, si ce n’est antérieurement, pour le passage d’un pied court, large et tronqué; un petit lobe palléal dorsal ; les deux siphons réu- nis dans toutê leur longueur, palpes labiales allongées, étroites et pointues , branchies très inégales.

Coquille obronde, ovale ou allongée, mince, équl valve, très inéquilalérale, très bâillante, des callosités sur les crochets et couvertes par une ou plusieurs pièces testacées dorsales. Un cuilleron dans les crochets , point de ligament , remplacé par des expansions du manteau.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Pholas? titkenœus? Coucha longa} Rondelet. Donax swe dacty'lus mas; Belon. Pholas; Lister. Balanus et Üaetylus; Bonanni. Baille; Réauinur. Pholas; Linné et tous, les auteurs modernes.

Le mot générique de Pholade, appliqué par Lister et par Linné à un genre parli-^-ulier de Mollusques bivalves, a une origine beau- coup plus ancienne. En effet, les Grecs avaient un adjectif cooXaç qui signifie qui se cache , qui habite dans les trous ou les cavernes ,

G8

DEIÎXIKME PAMILLK.

et un substantif, pour désigner une caverne, un trou, un antre. Aussi, chez les anciens, le nom de 9o>.a; était appliqué in- distinctement a tous les animaux qui se cachent dans les trous ou les cavci’ues; mais aucun coquillage u’est mentionné particulière- ment par eux sous cette dénomination. Alhenæus nous paraît être le seul qui, en parlant d’une coquille qui perce les pierres, et d’un goût agréable, l’ait indiquée sous le nom de Pholas ; mais il est bien à croire que cette coquille d’Alhénée n’est aiilre que la Modioh Uthopiwgc des auteurs modernes. Les premiers auteurs qui écrivirent sur l’histoire naturelle au renouvellement des let- tres, employèrent le mot Pholas, mais ne furent pas toujours d’ac- cord sur son application. C’est ainsi que Rondelet , dans son Traité des poissons , appelle Pholas les Modioles lilhophages, et Coucha longa les véritables Pholades. Aldrovande, dans son Traité des ani- maux à sang blanc, adopte sans changement l’opinion de Rondelet, tandis que Bélon , sans que nous puissions en deviner Je motif, donne le nom de Pholas Tiwx Patelles, et préfère le mot de Donax ^we Daclflus mas pour les Pholades proprement dites. Gesner re- vient à l’opinion de Rondelet qui, à celte époque, paraît l’empor- ter sur celle des autres naturalistes. Cette nomenclature de Ronde- let et do Gesner subsista jusqu'au moment Lister, par les tra- vaux considérables de conchyliologie qu’il publia, imprima à cette science une nouvelle direction et la rendit plus facile et plus ra- tionnelle, par la manièi'e dont il la présenta. Lister fut le premier qui imposa aux coquilles qui nous occupent le nom qu’elles por- tent encore aujourd’hui. Il les distingua et en forma un groupe très naturel dans l’ouvrage qu’il publia sous le titre de Synopsis conchyllorunij en 1681. Peu de temps après Bonanni, dans ses deux ouvrages sur la conchyliologie, proposa le nom de Balanus pour les Pholades, et il croit que celui de Dactylus leur conviendrait également. Bonanni, qui aimait à se livrer à l’observation, avait déjà fait des remarques intéressantes sur l’habitude qu’ont la plu- part des Pholades, de s’enfoncer , soit dans la pierre, soit dans les argiles durcies, et d’y être enfermées sans en pouvoir sortir. Réau- mur, dont les immenses travaux l’ont rendu l’un des meilleurs ob- servateurs des temps modernes, s’appliqua, pendant quelque temps, à l’élude des mœurs des Pholades, et publia en 1712 , sur ce sujet intéressant, un mémoire que l’on trouve parmi ceux de l’Académie, Dans ce mémoire, Réauniur ne considère les Pholades que dans le but d’expliquer la nature du mouvement au moyen duquel elles

LKS FHOLADA.IRES.

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pénètrent, soit dans les couches d’argile, soit dans celles de cal- caire. Réaumur se figurait que les Pholades, auxquelles il donne le nom de Daille, ne pouvaient creuser les trous dans lesquels elles se trouvent, que pendant la mollesse de la matière qui, durcie par la suite, ne leur permettait plus de s’échapper de la prison qu’elles s’étaient faite. Il rapporte une expérience qui vient à l’appui de son opinion. Ayant placé une Pholade , extraite de son trou , sur une boue argileuse un peu épaisse, il la vit bientôt s’enfoncer et disparaître; mais il nous semble que ce fait ne prouve pas d’uno manière assez satisfaisante que les Pholades ne peuvent s’enfoncer que dans les matières molles. Si quelques espèces cherchent des matières de peu do consistance pour s’y loger, il y en a d’autres qui criblent de leurs trous les calcaires les plus durs.

Dans son voyage au Sénégal, Adanson consacre un genre Pho- lade, et il le place dans les conques muUivales, k côté desTaretsi Il rapporte deux espèces dans son genre pholade : à une il donne le nom de Juland, à l’autre celui de Tiigon. Cette dernière espèce n’est point une Pholade; elle avoisine les Myes, et Lamarck en a fait une Analine. Nous aurons occasion d’en parler plus lard.

Il est à présumer que Liuué comprenait les Pholades dans sa section des Concha, dans la première édition du Fauna sitecica. Nous voyons en effet plus lard , dans la quatrième édition du Sfs- tema natarœ , apparaître le genre Pholas h côté dés Moules et des Solens, dans le môme groupe que les Conques. Ce qui a droit de nous étonner , c’est que , dans la septième édition du Systema turœ J Linné ne mentionna plus le genre Pholas; nous le retrou- vons dans la dixième, faisant le commencement des coquilles bi- valves. Ce genre resta dans les mêmes rapports, dans le muséum de la princesse Ulricque, tandis que, dans la douzième édition du Systema naturœ ^ il fut compris dans la section des Mnltivalves. Schrœter, Gmeiin, Dill-wyn, et beaucoup d’autres auteurs, adop- tèrent, comme nous l’avons vu, cet arrangement de Linné; et c’est à Cuvier , ainsi qu’a Lamarck, comme nous l’avons déjà dit aussi , que l’on est redevable de la réforme de ce groupe peu natu- rel des Mullivalves de Linné. Olivi lui-même, qui eut occasion de faire sur ces animaux des observations intéressantes, adopta pour eux la classification de Linné. Dans sa Zoologie adriatique, il pré- tend avoir vu des morceaux de lave, long-temps plongés dans la mer, perforés par des Pholades et d’autres animaux lilhophages. Mais cette observation est aujourd’hui contestée, parce qu’elle éta>

BLÜX1ÈM£ FAMILLE.

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bÜrait une exception unique à une règle jusqu’à présent inva- riable : c’est (pic ïcs Mollusques peiroralcurs ne pénètrent jamais que clans les substances calcaires ou argilo-calcaires. On est aujour- d’hui d’autant plus convaincu de l’universalité de ce fait, que l’on sait que ce n’est pas par le frottement de la coquille contre les pa- rois du trou, que ce trou s’agrandit, mais que sa cavité est aug- mentée au moyen d’une sécrétion de l’animal, sécrétion pro- bablement acide, mais dont la nature n’est pas parfaitement connue.

Jusqu’au moment Poli publia son grand ouvrage sur les Mol- lusques des mers de Sicile, on ne connaissait pas d’une manière complète l’organisation des Pholades : leur coquille seule avait été étudiée. Poli donna une excellente anatomie de l’animal , et ce travail est assez parfait, puisque, depuis lors, l’observation n’a presque rien eu à y ajouter. Il est bien à présumer que ce travail de Poli a été d’un grand secours à Cuvier, pour réformer , comme il l'a fait, la classe indigeste des Multivalves et reporter les pholades parmi les Acéphales testacés.

Nous avons vu, en Iraiiaut de la famille des Pholadaires , les changemens peu nombreux qu’a subis le genre Pholade depuis la publication, en 1798, du Tableau élémentaire de Zoologie, par Cuvier. Tous les auteurs sont d’accord sur ce genre, non-seule- ment pour ce qu’il doit renfermer, mais encore pour la place qu’il doit occuper dans la série.

Les Pholades sont des animaux assez voisins des Tarets par leur organisation. Ces deux genres diffèrent surtout par les proportions dans le développement du manteau. L’animal des Pholades est cla- viforme, quelquefois siibcyliadracé, et il se termine postérieure- ment en un long tuyau charnu, subcylindracé, dans lequel sont réunis les deux siphons sous une môme enveloppe. Les lobes du manteau, minces et transparens dans une grande partie de leur étendue, s’épaississent au bord inférieur et antérieur, et se sou- dent dans presque toute leur longueur, ne laissant qu’une petite ouverture ovalaire à la partie antérieure , pour le passage du pied. Ce manteau se continue postérieurement pour former les deux si- phons dont nous avons pavié, et l’on remarque, dans son épais- seur, deux muscles plats et en éventail, destinés à retirer les si- phons vers l’intérieur de la coquille. Ces muscles s’attachent sur la surface interne de la coquille, et y laissent des impressions dont nous parlerons plus lard. Si l’on vient à fendre le manteau , de

LES PaOLADAlRliS.

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manière à en détacher les lobes en coirpant leur commissure, on aperçoit les parties suivantes en allant d’avant en arrière. Entre la masse abdominale et l’insertion de^ lobes du manteau, sous une espece de capuchon formé par lui , se remarque , dans la ligne mé- diane, une ouverture transverse ; cest celle de la bouche. Elle est pourvue de deux lèvres minces qui se continuent à droite et à gauche en une paire de palpes labiales allongées , lancéolées et soudées dans une partie de leur longueur sur les parties latérales du corps. La masse abdominale est assez grosse j elle est surmontée, à son extrémité antérieure, d’un pied court, large et tronqué, ayant un peu la forme d’une ventouse de Céphalopode. De chaque côté de la niasse abdominale, se trouve une paire de feuillets bran- chiaux. Immédiatement au-dessous de la masse abdominale, les branchies du coté droit se soudent a celles du côté gauche, dans une petite portion de leur longueur, se détachent ensuite, pour se continuer dans l’intérieur du siphon branchial. C’est vers l’ex- trémité postérieure du corps que Ton remarque un muscle très puissant, transvei'se, qui sert a rapprocher les valves de la co- quille. Outre ce muscle postérieur, il en existe encore un autre à la partie antérieure j mais ses fibres ^ très courtes, s’insèrent sur quelques points du bord cardinal et y laissent des impressions qu’on aperçoit facilement dans quelques espèces. Outre ces diverses parties , il en existe une autre toul-à-fait propre au genre Pho- lade, et qui consiste en un appendice plus ou moins grand du manteau, qui, de l’extrémité antérieure, so réfléchit sur le dos, couvre les callosités des crochets et sécrète une pièce postérieure à laquelle on est convenu de donner le nom d’écusson. Si l’on veut pénétrer plus avant dans l’organisation des Pholades, on voit que la cavité buccale aboutît, par un œsophage gros et court, à un es- tomac en forme d’ampoule entièrement enveloppé par le foie, et dans lequel la bile pénètre par un petit nombre de cryptes bi- liaires qui en percent les parois. C’est de la paroi supérieure de l’estomac , et au-dessus de sa grande courbure , que l’intestin prend naissance. Cet intestin, cylindrique et grêle, forme plusieurs grandes circonvolutions dans l’épaisseur du foie. Après ces circon- volutions, l’inlesiin se dirige vers la ligne médiane et dorsale; il est embrassé par le ventricule qu’il traverse , passe derrière le muscle adducteur postérieur, et se termine presque immédiate- ment en un anus flottant entre les branchies. Le foie est assez con- sidérable ; il constitue à lui seul presque toute la masse abdomi-

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DEUXIEME K.i?I!LLE.

«ale; J’ovaîro lui est accolé, et ce dernier oi'Qaiie ne prend un grand développement qu’au moment de ia ponte.

Comme dans tous les mollusques de la mémo classe, le cœur est parfailemeiit symétrique ; il est placé sur le dos, dans la ligne mé- diane, et il est composé d’un ventricule assez large et de deux oreillettes aplaties, triangulaires, qui s’ouvrent dans les feuillets Lrancinaux dont elles semblent la continuation.

Le système nerveux est assez considérable : un ganglion anté- rieur est placé au-dessus de la bouche, il fournit des rameaux fins et nombreux aux palpes labiales ; il donne aussi des branches viscérales parmi lesquelles une de chaque côté du corps descend vers le muscle adducteur postérieur, et vient coopérer à la forma- tion du ganglion nerveux postérieur. Celui-ci est beaucoup plus considérable, il envoie des branches au cœur, aux branchies, au manteau. Les filets du manteau sc divisent eux-memes : les uns se portent vers la commissure, les autres dans les siphons.

Le système musculaire des Pholades peut être divisé en deux parties bien distinctes : les muscles adducteurs des valves, les mus- cles propres du pied, et enfin deux muscles particuliers pour le mouvement des diverses parties du manteau. Nous avons parlé des muscles adducteurs. Ceux du pied consistent en deux petits fais- ceaux, dont une partie s’insère sur les ciiillerons, et l’autre dans la profondeur des crochets. De ce point d’insertion , ces fibres mus- culaires vont en s’épanouissant sur la surface de la masse abdomi- nale , lui forment une enveloppe solide , entre les fibres de laquelle viennent s’insérer celles du muscle propre du pied. Les fibres qui s’insèrent sur les cuillerons, traversent la masse abdominale, et contribuent à consolider les. divei's organes dont elle est composée. Tout le boi'd antérieur du manteau, toute la masse des siphons, sont formés de muscles à fibres courtes , et qui servent à l’allonge- ment ou à la contraction de ces parties. Les siphons surtout qui , lorsqu’ils sont contractés, sont courts et très épais, sont suscepti- bles d’un allongement très considérable pendant la vie de l’animal, et c’est alors que les parois s’amincissent, et que les fibres muscu- laires semblent glisser les unes sur les autres, pour fournir à l’al- longement considérable dont ces parties sont susceptibles. Dans la plupart des espèces, la coquille étant brûllanle, diverses parties de l’animal restent à découvert, mais elles sont revêtues d’un épi- derme assez solide^ subcorné, coriace, qui s’insère sur la coquille elle-même , et se prolonge sur toutes les parties dénudées de l’ani-

L£S rBOLÀDAlUES.

7^

mal* Il est un certain nombre d’espèces aussi qui présentent un autre phénomène dont il est nécessaire de parler, parce qu’on pour- rait commettre des erreurs s’il n’ciait pas suftisarament connu. On observe, dans la plupart de ces espèces, une troncature antérieure à laquelle correspond un bâillement considérable de la coquille. Celte troncature et ce bâillement persistent dans tous les âges; mais il arrive dans d’autres, qu’après avoir été bâillant jusqu’à un certain point d'accroissement, l’animal se modifie et continue la sécrétion de sa coquille en faisant cesser la troncature. Aussi, l’on voit les stries d’accroissement prendre une nouvelle direction et le bâillement de la coquille semble fermé par une pièce de rapport.

Presque toutes les Pholades ont une coquille mince , blanche et diaphane; presque toutes sont allongées, ovalaires, très bombées et subcylindracées. Les valves d’une même coquille ne se louchent quelquefois que par un petit nombre de points de leur circonfé- rence, étant largement bâillantes du côté antérieur et du côté pos- térieur. Quelques-unes cependant sont parfaitement closes à tous les âges, et leurs valves, plus rapprochées, sont fermées à la ma- nière de celles des autres concbifères. Toutes les Pholades sont équivalves , et presque toutes très inéquilalérales; elles sont pres- que toujours ornées, à l’extérieur, de côtes rayonnantes, qui sont plus particulièrement placées sur la partie antérieure, la posté- rieure restant constamment lisse ou presque lisse. Les crochets sont très protubérans; ils sont roulés vers l’intérieur et saillans au- dessus de la cavité interne des valves. Ces crochets sont garnis, à Textérieur, de singulières callosités que l’on ne rencontre dans au- cun autre genre. Ces callosités sont fermées par une lame cal- caire qui s’étale en dehors et se trouve soutenue par des petites voûtes qui vont en rayonnant du sommet à la circonférence. Cette lame et les arceaux qui la soutiennent , sont sécrétés par cet ap- pendice supérieur du manteau dont nous avons parlé , et qui se renverse, comme nous l’avons dit aussi, sur le dos de la coquille et couvre ses callosités. Celle portion charnue est garnie , sur son bord libre, de petits appendices quadrangulaires qui s’enfoncent, en forme de crochets, dans l’intérieur des arceaux de la callosité. C’est pour couvrir celle portion du manteau, que se trouvent au- dessus d’elle et sécrétées par sa surface supérieure , une ou deux pièces symétriques, calcaires j quelquefois subcornées, auxquelles on est convenu de donner le nom d’écusson. Lorsque l’animal çst

DlUXlisJE FAMILLE.

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mort, cette pièce se détache facilement du reste de la coquille, et l’on voit que sa surface interne est lisse , tandis que sa surface ex- térieure présente des stries d’accroissement qui lui sont propres. Outre celte première pièce des Pholades, on en trouve une se- conde dans un certain nombre d’espèces. Celle-ci s’étend sur le dos de la coquille , et sert à fermer l’intervalle qui sépare les deux valves dans la ligne dorsale et médiane. Ces pièces reçoivent des modifications assez notables, suivant les espèces ou on les observe. Quelquefois très petit, l’écusson se développe peu-à-peu et finit par embrasser, sous la forme d’une grande calotte, toute la partie supérieure et auléricure des valves. Quelquefois, il se prolonge aussi du coté postérieur, remplace la seconde pièce postérieure dont nous avons parlé, cl finit par s’emboîter sur toute la longueur du dos de la coquille. Dans ces espèces à longs écussons , et même dans quelques-unes dont l’écusson est d’une médiocre étendue, on voit les callosités cardinales se prolonger postérieurement en pe- tits crochets, lesquels s’engagent au-dessous de petites lames rele- vées au centre de l’écusson, de sorte que, par ce mécanisme, l’é- cusson reste attaché à la coquille , même après la mort de l’animal. Il est d’autres espèces chez lesquelles l’écusson a une forme très singu- lière. C’est particulièrement dans le Pholas orientalis et dans le PAo- îas clausa que l’on remarque cette disposition. Dans ces espèces, la callosité cardinale , au lieu de s’étaler sur les crochets et de s’y at- tacher, se relève à son extrémité postérieure , et c’est à celte ex- trémité que se trouvent deux pièces en petit capuchon, et qui semblent destinées a accrocher les valves rune à l’autre. La partie du bord dorsal , que l’on pourrait nommer bord cardinal , ne res- semble pas à celui que l’on voit dans les autres Mollusques con- chiféres. On n’y observe aucune trace de dent cardinale j une sur- face inégale et calleuse se remarque au point de contact des deux valves qui, comme il n’existe aucune trace de ligament, ne sont mainloDues en contact qu’au moyen des muscles de l’animal, et qui se séparent aussitôt que cet animal en a été retiré. Si l’on exa- mine leur intérieur, on les trouve lisses, polies, et l’on voit à la partie antérieure des callosités , quelques petites impressions qui sont celles du muscle adducteur antérieur. Une autre impression beaucoup plus grande, ovale, arrondie, se montre vers le bord dorsal , à-peu-près au tiers postérieur de la coquille. Celle impres- sion est celle du muscle adducteur postérieur. C’est de l’extrémité inférieure et antérieure de cette impression musculaire que l’on

LES rHOLADAlRES.

7^

voit partir une ligne remontant assez haut dans rintérieur des valves , se recourbant ensuite pour se diriger en arrière et en bas. Cette ligne, à laquelle on est convenu de donner le nom de sinus palléal postérieur, est le résultat de l’insertion du muscle rétrac- leur des siphons.

L’un des caractères les plus particuliers des coquilles' de la fa- mille des Phoiadaires, consiste en ce que, chez toutes, on trouve dans la cavité des crochets un appendice osseux parlant du sommet du crochet lui-méme, et auquel on donne le nom de cuilleron. Constant dans sa position , ce cuilleron ne l’est pas autant dans sa forme. Dans certaines espèces , il est subcylindracé et presque égal en diamètre à ses deux extrémités. Dans d’autres, l’extrémité libre s'aplatit et s’amincit ; elle s’élargit successivement et prend la forme d’un véritable cuilleron , à la surface duquel on aperçoit des stries d’accroissement. Ce cuilleron s’enfonçe, comme nous l’avons dit, dans l’épaisseur de la masse viscérale de l’animal; il est revêtu d’une duplicalure du manteau qui pénètre avec lui , et nous avons vu qu’il sert à donner attache à des fibres musculaires qui soutien- nent les organes digestifs avant de se rendre au pied. Nous avons dit ailleurs, en traitant de la théorie de la charnière, ce que nous pensions de ces appendices des Pholades , et comment nous pou- vions les rattacher aux dents cardinales des coquilles qui en sont pourvues , par une succession de modifications. Enfin , pour termi- ner ce qui a rapport à la coquille des Pholades, nous devons ajou- ter qu’il existe, dans quelques espèces, des pièces de rapport sou- dées à l’extrémité postérieure des valves et qui sont tantôt ongui- formes, comme dans le Pkolas clausa, tantôt infundibuliformes, comme dans le Phoîas papyracea. En apercevant ces modifications si notables des pièces des Pholades, nous concevons comment toutes, exagérées, soudées çnlre elles, elles ont enfin pris la forme du tube du Taret , et sont ainsi , d’accessoires qu’elles étaient , de- venues la partie principale de l’enveloppe générale de l’animal. Ceci n’est point seulement une théorie destinée à rendre compte de la présence du tube des Tarets. On voit te tube se former par de- grés, C'est ainsi, par exemple, qu’en prolongeant les appendices postérieurs du Phoîas papyracea ^ on a le tube des Teredines, et qu’il suffit ensuite d’ajouter aux Teredines , l’énorme écusson de quelques espèces de Pholades pour avoir le tube complet desTarets.

Comme nous l’avons dit, les Pholades sont perforantes et s'éta- blissent tantôt dans les argiles durcies, tantôt dans les calcaires

DEUXIÈME FAMILLE.

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plus OU moins durs. Quelques espèces, comme certains Gastro- chênes, se font, en vieillissant, un commencement de tube qui revêt la partie postérieure de la cavité qu’elles habitent. Lorsque nous traiterons de la famille des Lilhophages , nous examinerons d’une manière générale, la propriété dont jouissent certains mol- lusques de perforer les pierres, et nous verrons qu’il n’est plus pos- sible d’admettre l’opinion, jusqu’ici reçue parmi les zoologistes, que ces animaux perforent les corps durs par le frottement long- temps continué de leurs valves. Lorsque l’on recueille des Pho- lades pendant la nuit , on les voit répandre une lumière phospho- rescente assez intense, et si on les mange dans l’obscurité , la bou- che paraît en feu. Ces animaux ne sont pas les seuls mollusques qui jouissent de cette propriété; nous la ferons remarquer chez d’autres appartenant à différentes familles.

On trouve assez fréquemment, dans les couches de la terre , des traces évidentes de la présence des Pholades qui ont habité les an- ciennes mers au fond desquelles ces couches ont été déposées. Les géologues ont attaché une assez grande importance à ces traces de coquilles perforantes , parce qu’elles indiquent un séjour assez pro- longé de la mer dans les mêmes lieux. Lorsque , à la fin de cet ou- vrage, nous traiterons d’une manière spéciale de l’application de la conchyliologie à la géologie, nous tâcherons d’apprécier la va- leur de ces témoignages, et nous examinerons aussi ce qu’ils appor- tent dans la question des soulèvemens.

Nombre des espèces :

24 vivantes. i4 fossiles.

Jusqu’à présent , on n’a observé de véritables Pholades que dans les terrains tertiaires.

Parmi les espèces, nous citerons particulièrement celles qui ont leurs analogues vivans ou fossiles.

Phoias candidat vivante dans les mers d’Europe; fossile dans le crag d’Angleterre, dans les faluns de la Touraine et dans les terrains tertiaires de la Suède et du Danemark.

Phoias crispata , vivante dans l’océan d’Europe; fossile en Suède et en Nonvège.

Phoias sculata^ fossile aux envii’ons de Paris, dans les faluns de la Touraine , aux environs d’Angers et aux environs de Bordeaux.

DES FBOLADAIRES.

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Phoîas candlda i vivante dans les mers d’Europe ; fossile dans les terrains tertiaires récens de la Suède et de la Norwège-

Nous avons cité depuis long-temps le Pholas sculaia^ dans les différentes localités qui sont ici mentionnées. Dans un mémoire sur la géologie de la Touraine, M. Dujardin a décrit, sous le nom de Pholas dimidiata, la coquille que je regarde comme une simple variété plus grande de l’espèce des environs de Paris, Un nouvel examen comparatif ne nous laisse apercevoir que de si faibles dif- férences que, malgré l’autorité d’un savant dont nous aimons à respecter les opinions, nous persistons encore dans notre opinion d’autrefois. Nous n’avons pas cru donner ici la description et la figure de cette espèce , parce qu’elle a été déjà fidèlement représen- tée par nous dans notre ouvrage sur les fossiles des environs de Pa- ris, et la variété de Touraine , par M. Dujardin, dans le mémoire précité.

ESPÈCES.

Pholade crépue. Pholas crispata^ Linné.

P, testa ovaîi, hitte ohtusiore, hîantissimâ ; antlcè crîspato^strîatâ, postîcè  vigatâf sulco îongitudinali unico, suèrHediano cînctâ^ 'valvidis accessoribus destUutâ^

Liûné, Mus. ulric. t. i p. 469. ü® 8.

Phoîas crispata. Lin, Sysl, nat, p, iiii.

Soîen crhpus. Gmel, p. 3228.

List, Syoop. Couch. pl. 436.

List. Hist. anim. pl, 5, f. 38 et append, pi. 2. f. 7,'

Sibalt. Scotîa illuslr. p1« 20. f, i, 2. 3.

Schrot. Einl, iu Conch. f. 3. p, 54t, 6,

Billw. Gat. t. I. p. 40. Tl x i.

Olasfen. Isl. pl. 11. f. 4, 6,

Penn. Zool. brit. 4.pl, 40, f. 12.

Chemn. Goneb. 8. pl. 102. f. 872. 874.

Dacost, Brit. Conch. pl, 16, f. phoîas hïîrons',

Gerville, Cal. des coq, de la Manche, p. lo. 3.

Coll, des Cher. Cat. des test, du Fiuist. p. 9. i.

Bouchard-Chantereaux, Cat. dcsmoll. du Boulonnais, p, 7. n“ 3,

Schum, Nouy. sysl. de Conch. p, 96.

Encycl, pl. 169. f. 5. 7. Copiée de Chemnilz.

78

DEVXlilME FAMItLE.

Desh. Lamk. An. s. v. a* éd, l. 6. p, 46. 7.

Wood. General, Conch. p, 18. 5. pl. i5. f. 3. 4* *- Wood, Ind. lest, p, 9. Dq 5. pl. 2, f. 5.

Spcngî, Mém. de la soc. d’hisl. nat, de Copenh. t, a, p. 96.

Habile les mers d’Europe, la mer du nord, et se Irouve fossile dans les ter- rains tertiaires récens de la Suède et du Danemark*

Cette espèce est très remarquable par l’énorme bâillement de ses valves. Ces valves, en effet , ne se touchent que par deux points do leur circonférence, par les crochets et par le milieu du bord infé- rieur. Prise dans son ensemble , celte coquille est subcylindracée ; considérées séparément, les valves sont ovales, oblongues, subqua- drangulaîres , obliquement tronquées en avant; elles sont inéquî- latérales, moins cependant que dans les autres espèces. Leur sur- face extérieure est divisée en deux parties presque égales, par un sillon assez large qui descend un peu obliquement du crochet et aboutit uu peu au-dessous de la partie moyenne du bord inférieur. Ce sillon se répète, à l’intérieur des valves , en une côte peu sail- lante qui se termine sur le bord en une espèce de bouton assez épais; c’est le point du bord inférieur les valves se touchent. Tout le côté antérieur de la coquille, jusque ùn peu au-dessus du sillon médian , est occupé par des stries obliques et transverses qui suivent la direction de la troncature antérieure, et sur ces stries lamelleuses se relèvent, à des distances égales, des dentelures ai- guës qui semblent se succéder sur des lignes longitudinales qui parlent en rayonnant du crochet. Les bords de l’échancrure anté- rieure des valves sont eux-mémes garnis d’une rangée de ces den- telures. A l’intérieur, les valves sont d’un blanc opaque ; elles sont lisses et l’on y remarque, en avant de la charnière et sur le bord , les impressions musculaires antérieures, et à l’extrémité supérieure, tout près du boi'd postérieur, on voit l’impression musculaire pos- térieure qui est grande et arrondie. Les cuillerons sont d’un dia- mètre égal dans toute leur longueur; ils sont aplatis au-dessus, et se terminent, à leur extrémité libre, en une petite dépression oblongue, dépression qui est le résultat de l’insertion du muscle dont nous avons parlé. Le bord cardinal est très épais en devant; le crochet , recourbé sur lui-même, rentre dans l’intérieur des val- ves , et il est garni au dehors d’une callosité assez épaisse qui s’ap- plique immédiatement sur la surface , sans l’intermédiaire du tissu poreux. Cette callosité est lisse , elle est recouverte par le petit lobe du manteau ; mais celui-ci est recouvert d’un épiderme corné,

LKS PHOtADAIRES.

79

et il est toujours dépourvu de pièces accessoires que Ton rencontre dans les autres espèces.

Pliolade scabrelle. Pholas candida. Linné, pl. 3. fig. i3. i4.

P, testa ohîongâf anticè non rostratâ; undique costis strlîsque transversis, dentîcuîifens ornaiâ; vafvuUs duahus ; scttio in medio Uneâ depressâ hi- pariito,

Pholas candida. Lin. Syst. nat. p. un,

List, Syuop. Conch. pl, 436. f. 278.61 435, f, '»7g,

List. Hist. anim. pl. 3.f. Sg.

Encycl. pl. 168. f, ix,

Gualt, Concli. pl, io5, f. E?

Pennant, Zool. brit, pl. Sg. f, 1 1,

Chemn. Concb. 8. pl. lor. f. 861,’

Spengl, Mém. de lasc. d’hist. nat. deCopen.p. 90,

Schrot. Einl. in Concli, t. 3, p, SSg, 4*

Dillw, Cat. t. I. p. 36. Hq 4.

Wood, Gener, Concb. p. 79. 3, pl, 14. f, 3. 4.

Wood. Xnd. test, p. 8. 3. pl, 2, f, 3,

Desh. Encycl. mélh. vers. t. 3. p, 753. no 2.

Desb. Lamk, An. s. v. éJ, t, 6. p. 44» 3.

Gcrville, Cal. des coq. du départ, de la Manche, p, 10. 2.

Coll, des Cher, cat. des test, mar. du Finisl, p. 9. 2. Bouchard-Chantereau. Cat. des moi), du Boulonnais^ p. 7.n® 2.

Eossile. P/jo/tw cylindricus, Sow» Min. Concli. pl, 198. f, i. 2.

Habite l’Océan européen , et se trouve fossile dans les terrains tertiaires de la Suède et de la Norwège, ainsi que dans le crag d^Angleterre.

Coquille ovale, oblongue, transverse, înéquilatérale , obtuse antérieurement et rétrécie à Textrémité postérieure. Le côté anté- rieur est presque fermé, le postérieur est largement bâillant. Les valves sont très convexes, et lorsqu’elles sont réunies, la coquille est subcylindracée. La surface extérieure est rugueuse, âpre au toucher ; on j remarque des stries transverses , plus ou moins ré- gulières selon les individus, ordinairement assez écartées et rele- vées en lames courtes et fines. Ces lames deviennent plus saillantes et plus épaisses sur l’extrémité antérieure. Elles sont traversées par des stries longitudinales rayonnantes, parlant des crochets et for-

8o

DEUXIEME FAMILÎ.E.

niant, avec les premières, iin réseau à mailles quadrangulaires. Au point d’intersection de ces deux sortes de stries, il s’élève une pe- tite écaille qui devient une dentelure plus proéminente sur les stries longitudinales du côté antérieur. A l’intérieur, les valves sont lisses; le crochet, recourbé en dedans, est revêtu eu dehors d’une callosité peu épaisse, immédiatement appliquée sur lui, mais qui bientôt se relève pour se joindre avec la partie antérieure du bord cardinal. Cette callosité est recouverte par un écusson ovale, oblong qui semble formé de deux pièces soudées sur la ligne mé- diane; car cette ligne médiane est sensiblement déprimée. De la partie postérieure de la callosité, on voit sortir de l’intérieur des valves, et se diriger obliquement, une sorte de pli calcaire qui vient faire saillie au-dessus du bord; chaque valve ayant la même saillie, elles s’appuient un peu l’une contre l’autre, comme cela a lieu dans le Soleil 'vagina, par exemple. Le cuilleron qui se trouve dans l’intérieur des valves est très grêle et très étroit. II est cylin- dracé, et présente , à son sommet , une très petite impression.

L’intérieur des valves est lisse, et c’est avec peine que l’on y distingue les impressions musculaires. L’antérieure est petite, et s’appuie sur l’extrémité du boi'd cardinal ; la postérieure est ova- laire et très rapprochée du bord dorsal. Lorsque les valves sont réunies, on remarque entre elles , du côté du dos , un grand espace vide qui, pendant la vie de l’animal, est rempli par une petite pièce testacée , allongée , étroite , maintenue en place par les feuil- lets de l’épiderme. Celte espèce, très commune, ne devient jamais bien grande; elle a 5o et 55 millimètres de large , et 20 millimètres de long.

Pholade lîgamentine. Pholas ligamentina. Desh, pl. 3. fig.

II. 12,

P. testâ ovato^hlongâ^ angustâ, utrînque hîantissîmâ^ alha^ anticè truncatà; 'valvis tenuïssîmè irariiversîm lamellosîs; lamcllls undato^crispatîs ; ktw- bonibtis brevibuSf intus caîlo producto cockUarîformi; ossîcuUs internis bre- vissimîs.

Habite les mers d’Europe,

Coquille très singulière, et dont nous ne trouvons nulle part ni description ni figure. Par sa forme générale, elle se rapproche du Pholas crùpata, mais plus encore du Pholas callosa de Lamarck. Elle reste néanmoins distincte de ces deux espèces, et nous l’avons fait

LES PnOLADAÏRES.

8l

représenter, parce qu’elle offre un caractère remarquable à la charnière à laquelle on trouve des caillerons articulaires assez comparables a ceux des Lulraircs, par exemple. Lorsque les deux valves sont réunies, elles ne se touchent que par deux points de' leur circonférence. C’est le côté antérieur qui, néanmoins, reste le plus largement ouvert. Les valves sont subtrapt^zoïdales ; on voit, sur leur surface extérieure, un très grand nombre de fines lames très rapprochées, comme pressées les unes contre les antres, et qui sont finement festonnées, avec tant de régularité, que les angles des festons forment des lignes longitudinales qui des- cendent des crochets vers les bords. Cette structure se continue sur le milieu de la coquille, mais on voit les ondulations diminuer peu-à-peu, et les stries deviennent simples sur l’extrémité pos- térieure. Les crochets sont peu saillans; ils sont en partie ca- chés derrière une lame étroite qui ne les touche pas et qui est pour ainsi dire un rudiment de la large callosité que l’on trouve dans les autres espèces. Le bord cardinal est large et épais. Nous avons vu, dans le Pholas candida , une petite côte se contourner sur le bord cardinal , en sortant de la cavité du crochet, et venir se ter- miner en une sorte de dent articulaire. Nous avons vu, dans le Pholas coslala, celte côte changée en un bourrelet assez épais, terminée en une surface arrondie et raboteuse, par laquelle les valves s’appuient Tune sur l’autre. Ici, ce bourrelet a pris une exa- gération telle , qu’il vient s’étaler sur presque tout le bord cardinal et se projeter dans l’intérieur des valves, sous forme de grands cuillerons horizontaux, comparables à ceux des Lutraires, avec cette différence, cependant, qu’ils ne paraissent point encore con- tenir de ligament. Au-dessous de ces grands cuillerons, et dans la cavité du crochet, on trouve les appendices osseux propres à toutes les Pholades. Ils sont courts et épais , et paraissent réduits a l’état rudimentaire. L’intérieur des valves est lisse; l’extrémité anté- rieure se termine en une sorte de bec , et c’est sur la portion du bord cardinal, appartenant à ce bec, que l’on aperçoit l’impres- sion musculaire antérieure. L’impression postérieure est arrondie , et placée très près du bord dorsal. Nous ne savons si celte espèce a des pièces accessoires à la charnière. Les valves sont larges de 26 millimètres et longues de i3.

T. I.

82

DEUXIÈME FA3IILLE.

Pholade grande-taille. Pholas costata, pl»3. f. lo.

Ph, testa magnd^ ohîongo-ovatây costîs dcntatis elevatis undique striata; la- tere antlco rotundo ; scuto triangidarly std^paleUiformi^

Phoîùs costata. Lin. Syst. nat, lo* édit. p. 66g. n” ii. Lin. Syst, nat,

éd. X2.. p, iiii,

Guall. Concb, pl. io5. f. 9.

Sclirot. Einl. in Concli, t. 3. p. 537. 2 ,

Speng], Mena, delà soc, tl’hisl. nat. de Copenli. l. a. p. 86.

Encycl. pl. iGg. f. i. 2.

Dillw, Gat. t. I, p. 3G. 3,

'VVood, GCucr. Conch. p. 80. ü° 4. pl. i5, f. r.a.

Wood. Incl. test, p. 8. 4* pl. 2. f, 4.

Blainv. Malac. pl. gg. f, 6.

Sow. Gén, of shells. aS. pl, i.

Desh. Encycl. mélh. vei's. l, 3. p. 764. 3.

Desli,' Lamk, An. s. v. éd. t. 7. p. 44, 6,

Habile les mers d’Amérique,

Celle-ci est la plus grande espèce connue dans le genre Pholade. Nous avons vu des individus d*une taille presque double de celui que nous avons figuré. Celte coquille est mince, blanche et très bâillante d?«ns presque tous les points de sa circonférence ; les val- ves, en effet, ne se touchent que par la charnière et une très pe- tite portion du bord inférieur. Cette coquille est très convexe, cy- lindracée, obtuse et arrondie en avant, plus rétrécie à son extré- mité postérieure. Sa surface extérieure est ornée, dans toute son étendue, de cotes longitudinales , rayonnantes, partant des cro- chets. Ces cotes, en aboutissant sur les bords des valves, les ren- dent onduleux, festonnés à rexlrémité antérieure, et ils se répè- tent en creux dans l’intérieur des valves. Deux petites parties de la coquille restent lisses. C’est une sorte de lunule qui occupe rexlré- mité supérieure et antérieure et qui est circonscrite par la pre- mière côte de ce côté; la seconde, c’est un grand corselet lancéolé limité par la dernière côte. Les côtes qui couvrent la surface sont élégamment crénelées , et leurs interstices sont occupés par des stries transverses assez régulières. Les six ou sept premières côtes, qui sont sur lo côté antérieur , sont plus étroites et plus saillantes que les autres, et les crénelures que l’on y remarque sont plus ai- guës, et ressemblent assez à des écailles. Les crochets sont très proé- minens, fortement recourbés ; la callosité qui les rovét se relève

TROisïiîiE r.niiixE. xes sot^iîArfES. 83

sans les toucher et forme une lame épaisse, à rexlrémité postérieui’e (le laquelle se montre une duplicatiire profonde, terminée dcrrièi’e le crochet en une cavité conique assez profonde. Ces cavités , ainsi que celle duplicature, servent à recevoir les parties correspon- dantes d’une double pièce osseuse, épaisse , qui semble servir d’a- grafe pour assurer la réunion solide des valves. Sur la callosité vient s’appuyer un grand écusson triangulaire, patelliforme , dont le sommet est suhcentral. A l’intérieur, les valves sont d’un blanc laiteux. On remarque, sur la partie antérieure la plus épaisse du bord cardinal , à la base des callosités, une impression ovale , oblongue, étroite; c’est celle du muscle antérieur. Vers les deux tiers postérieurs de la coquille, et tout près du bord dorsal, se trouve rimprossion musculaire poslérlciire. Elle est étroite, ovale, tronquée antérieurement. En exauriuant la callosité cardinale , on voit sortir, de i’inléricur des crochets , uu bourrelet oblique, as- sez épais, se terminant pai’ une surface inégale. C’est par te point seul que les valves touchent à la charnière. De l’intérieur des cro- chets, naissent deux grands cuillerons qui s’élargissent rapide- ment. Ces cuillerons sont creusés en une large gouttière, et ter- minés postérieurement par un cul-de-sac en partie recouvert par une sorte de cloison.

Les grands individus ont 65 millimètres de long, et 17 centi- mètres de large.

TROISIÈME FAMILLE.

Les Solénacées. Lamk.

CARACTERES, Animal allongé, transverse; les siphons plus ou moins longs, réunis; lobes du manteau séparés an- térieurement pour le passage cFun pictl cylindroïcle allongé, terminé par un élargissement ou une troncature.

Coquille transverse, épidermée, bâillante aux extrémités.

Ligament extérieur ou subintéricur , charnière calleuse, ou pourvue de deux dents en crochets.

GENRES. Solemye, Solen ^ Soleciuie.

6^

TROISIÈME FAMILLE.

S4

OBSERVATIONS GENERALES. Lamai’ck Gst Ic premier qui ait créé cette famille. On la trouve pour la première fois dans la philoso- phie zoologique : elle renferme les six genres Glyciraère, Solen , Sanguinolaire, Pélricole , Rupellaire et Saxicave. Ce groupement de genres est certainement peunaturel ; Lamarckne tarda pas à s’en apercevoir, et, dans l’extrait du coursjil en détacha les trois derniers genres cités, pour en former sa famille des Lilhophages : il ajouta plus tard à celle des Soicnacées le genre Panopée, nouvellement créé par Ménard de la Groje. Dans cet ouvrage de Lamarck, la famille des Solénacées est donc composée de quatre genres, et quoique, pour cette époque, elle dût paraître naturelle aux yeux des personnes qui s’occupaient uniquement des Mollus- ques, cependant elle ne fut pas adoptée par Cuvier qui, il faut bien le reconnaître , avait fondé ses classîOcatious sur des prin- cipes différens de ceux de Lamarck. Cuvier, généralisant ce fait commun à un gi'and nombre de Mollusques d’avoir les lobes du manteau réunis, établit sur ce caractère une famille considérable, à laquelle il donna le nom de Mollusques acéphalés enfermés. Ces Mollusques, en effet, semblent enfermés dans les lobes du manteau, soudés dans presque tous les points de leur circonférence. Mais, ce groupe considérable de Mollusques petit être utilement divisé en familles, et celle des Solénacées reste nécessaire en la modi- fiant. Continuant toujours à perfectionner ses travaux, Lamarck , clans scs Animaux sans vertèbres, apporta encore des changemens dans sa famille des Solénacées ; il en écarta les Sanguinolaires poul- ies porter dans le voisinage des Tellines; et, dès-Jors, la famille qui nous occupe se trouva réduite aux trois genres ; Solen, Pano- pée et Glycimère. Cet arrangement dut paraître naturel tout le temps que l’on ne connût pas les animaux des Glycimères et des Panopées. Aujourd’hui qu’ils sont connus, il faudra refaire la fa- mille des Solénacées, et la réduire presque entièrement au genre Solen. Ce n’est pointainsi que M. deFérussac l’a comprise. Aux trois gem-es de Lamarck, il ajoute les deux genres Pandore et Sangui- nolaire, ce qui est loin de la rendre'plus naturelle. C'est à peine s’il est nécessaire de discuter la famille des Solenides de Lalreille. Il y fait entrer sept genres, parmi lesquels nous remarquons les Hyalelles et les Gaslrochènes, et nous pouvons ajouter qu’à l’épo- que où parut l’ouvrage de Lalreille, Familles naturelles du règne animal, personne n’ignorait les véritables rapports de ces genres.

Pans son Traité de Malacologie, M. de Blainvüle a donné )o

L£S SOLKNAGEES.

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nom de Pyloridées à une famille qui représente presque complè- tement celle des Enfermés do Cuvier. Vingt genres y sont l’assem-' blés, et parmi eux, dans Je voisinage des Mjes, nous trouvons les Solens et quelques-uns des démembremens de ce genre. Il est évi- dent que M. de Blainville a confondu, dans ses Pyloridées, des genres qui ont des caractères extérieurs très différens, et qui étaient assez connus , pour qu’il dût les séparer dans des familles de moindre étendue. Âinsi, le groupe des Myes, par exemple, est bien différent de celui des Solens , et celui-ci diffère d’une manière notable du groupe des Saxicaves , et surtout des Gaslrochènes. Depuis l’ouvrage de M. de Blainville, Cuvier, dans la seconde édition du Règne animal, a persisté dans la conservation de sa famille des Enfermés, et nous avons fait voir, en discutant , dans l’Encyclopédie méthodique, la valeur de ce groupe et des genres qu’il renferme, qu’il fallait conserver la famille des Solénacées, mais non lou!rà-fait telle que Lamarck l’avait instituée. Aujour- d’hui , on* a de nouveaux élémens pour discuter , d’une manière plus approfondie , et la famille et les genres qu’elle renferme.

Nous avions d’abord pensé qu’il iallaîL introduire, dans la fa- mille des Solénacées , les six genres : Glycimère, Solen , Solemye, Panopée,PboladomyeetSolecurte ; mais aujourd’hui, nous croyons nécessaire de réduire le nombre de ces genres , et nous proposons de conserver les trois genres Solen , Solemye et Solecurte. Nous fe- rons remarquer que dans les Glycimèrcs , les Panopées et pro- bablement aussi les Pholadomyes, l’animal so rapproche beaucoup de celui des Myes, non-seulement par la grandeur des siphons, mais encore par la petitesse rudimentaire du pied , pour lequel le manteau ne laisse qu’une très petite ouverture. Dans les Solens, au contraire, le pied est grand et il sort par une ouverture pro- portionnée du manteau , tandis que les siphons sont en proportion plus petits que dans les Myaires. Il est vrai que dans les Sole- curtes , le pied et les siphons ont des proportions bien différentes de ceux des Solens. Aussi , il sera peut-ôlre nécessaire, par la suite, d’établir, pour ce genre lui seul, une petite famille inter- médiaire entre celle des Solénacées et celle des Myaires; il faudra voir aussi si ce genre Solecurte ne se rattache pas aux Solens par quelques espèces avec les coquilles desquelles M. de Blainville a fait son genre Solelelline. Ce dernier genre nous paraît plus voisin des Tellines proprement dites , et des Psammobies que des Solens ; et, à considérer les rapports naturels, ce genre doit venir se pla-

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TROISIÈME FAMILLE.

cer comme un emljranchoment laîf^ral pour lier les Solens aux Tellines, Il nous reste à parler du (lenre Solernye. Ce genre a aussi une organisalion propt e ; car Icsliranchics ressemblent à des plu- mules étalées sur les parties latérales du corps, taudis que le' pied est toul-à-fait comparable à celui dès Solens, et les siphons sont fort courts. Quant à la coquille, elle est largement épidermée , ce qui a lieu aussi dans d’autres genres avoislnaus; mais ce qui la distingue le plus, o’est qii’elle a un ligament snbiulérieur , taudis qu’il est externe dans les aulrês genres de la ifiéme famille. Mais nous avons vu, en parlant du ligament dans les généralités, que la position de celte partie avait réellement peu d’importance pour la classification , et qu’il ne fallait considérer que comme carac- tère générique.

Les Solénacées ont une manière do vivre qui leur est particu- lière. Ces animaux choisissent les plages sableuses., et ils y creu- sent des trous perpendiculaires, quelquefois très profonds, dans lesquels ils se meuvent avec une grande rapidité, au moyen de leurs pieds. Ce pied a une disposition très appropriée à ses inou- vemens. Il se termine par une espèce de disque qui, lors de son élargissement, s’appuie sur les parois du trou cylindrique habité par l’animal, et c’est en s’appuyant sur ce disque, et en usant en- suite de la grande contractilité de son pied, que l’animal s’élève ou descend avec une extrême rapidité. Ces moeurs des Solens sont bien connues des pêcheurs qui savent avec quelle rapidité il faut saisir l’animal lorsqu’il vient faire saillir ses siphons à la surface du sable ou il est enfoncé.

GENRE HUITIÈME.

SOXiE&lirS. SoUmya. (Lanik.)

PI. 5. lig. i5.-i6-i7.

GXRAGTÊRiiS GENERIQUES, Animal ovale, tranverse; lobes du manteau réunies dans leur moitié postérieure terminés par un siphon court 5 pied prohoscldlforme , tronqué antc-- rieiiremeni par iiu disque frangé sur ses bords; une seule

LBS SOlÉNACÉES.

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braiicliie de chaque côté en forme de plumulc, dont les barbes sont isolées jusqu’à la base; anus terminal flottant à rcxtré- mité des branchies.

Coquille oblongue , transvei'se, cquivalve , inéquilatérale j obtuse à ses extrémités, et revêtue d’un épiderme épais qui la déborde de tomes parts ; charnière terminale à l’extrémité postérieure ; crochets non saillans 5 ligîiment extérieur inséré sur une nymphe oblique, subintérieure, en partie recouverte par le bord du corselet, et formant avec lui un sillon pro- fond 5 l’impression palléale large et simple.

OBSERVATIOKS. Le genre Soleihye a été figuré, pour la pre- mière fois, par Poli, dans son grand ouvrage sur les Mollusques de la Sicile. Il mentionne l’espèce de la Méditerranée sous le nom de Tellina to^ata. A-peu-près dans le môme temps, Bruguière fai- sait représenter la môme coquille , dans l’Encyclopédie , parmi les espèces du genre Solen. En étudiant celle coquille, Lamaixk s’a- perçut qu’elle ne devait rester ni dans les Tellines , ni dans les So* lens, et il créa pour elle un genre auquel le nom de Solemye est resté. Ce genre parut , pour la première fois, dans le tome v des Animaux sans vertèbres, et, entraîné par la trop grande valeur qu’il attribuait à la position du ligament , Lamarck plaça ce genre dans la famille des Mactracées , entre les Ongulines et les Amphi- desmes. 11 est vrai que Lamarck ne connut point l’animal de son genre , et l’on ne doit pas étro surpris que les rapports des Sole- myes aient été mal appréciés par lui et quelques-uns do scs succes- seurs. Nous voyons en effet M. de Férussac , dans ses Tableaux sys- tématiques, transporter le genre qui nous occupe dans sa famille des Myaires, à la suite des Analines, des Lutraires et des Myes. En admettant le genre dans la famille des Mactracées, Latreille sentit bien que ses rapports n’élaicnt point définitifs, et il fait en-' tendre qu’il n’était point à sa place. Dans son Traité de Malaco- logie, M. de Blainville a judicieusement rapproché les Solemyes des Solens , dans sa famille des Pyloridées ; mais déjà M. de Blain- ville avait pu s’aider, dans sa nouvelle classification, de la con- naissance de l’animal figuré et décrit par M. Delle Cliiaje, dans ses Mémoires sur les animaux sans vertèbres des mers de Naples et de Sicile. Depuis cette époque, on eut assez fréquemment l’occa- sion de se procurer l’animal de la Solemye , que l’on rencontre en

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TROISIÈME FAMILLE.

abondance dans la plupart des plages sableuses de la Méditer- ranée. C’est après avoir examiné un grand nombre d’individus que nous avons déterminé, d’une manière plus exacte, les rapports de ce genre. Depuis que, dans l’Encyclopédie, nous avons décrit l’animal, M. Philippi en a donné une fort bonne figure dans son Enumeratio molluscoriim Siciliœ, Mais, à l’exemple de M. Sovrerby, il a fait subir au nom générique un léger changement qui , à nos yeux , a trop peu d’importance pour valoir la peine d’élre discuté.

L’animal delà Solemye.est ovale, allongé et assez semblable, pour l’extérieur, à celui des Solens. Les deux lobes du manteau sont minces: ils tapissent l’intérieur de la coquille, viennent la déborder de toutes parts, tapissent aussi la large bande d’épi- derme qui fait saillie en dehoi's du têt, et se réunissent sur la li- gne médiane en laissant un écartement de près d’une ligne entre les bords de l’épiderme. Les lobes du manteau sont réunis entre eux dans les deux tiers postérieurs de la longueur de l’animal; mais dans le tiers antérieur, ils sont constamment désunis et laissent une large fente pour le passage du pied. Dans celle partie de leur con- tour, les lobes du manteau sont garnis de petites papilles courtes et écartées entre elles; le pied constitue la masse charnue princi- pale de l’animal. Il est allongé, subcylindracé, et il prend nais- sance vers le milieu de la longueur de l’animal : il se projette en avant. Lorsqu’il est contracté, il ne dépasse presque pas les bords de la coquille, et, dans cet état, son extrémité libre est obtuse et semble formée de deux lèvres rapprochées. On peut en effet écar- ter les deux parties dont le pied est formé, et l’on voit alors qu’il est subitement tronqué et terminé par une surface presque plane , circulaire, et dont le contour est finement frangé. Celte extrémité du pied se dilate en un disque h bords aigus, dont l’animal se sert d’une manière particulière pour s’enfoncer dans le sable. Lorsque l’on a retiré une Solemye du trou qu’elle habitait, et qu’on la met à plat dans un vase dont le fond est rempli de sable couvert d’uiic suffisante quantité d’eau do mer, on la voit bientôt étendre son pied , agiter vivement le sable pour le suspendre momentanément dans l’eau , et lorsque le pied est parvenu à une certaine profon- deur, l’animal le dilate en disque et se lient immobile. Pendant ce temps, le sable se dépose sur le clis(|Uo lui-méme, forme une couche autour de lui et devient un point d’appui assez solide au moyen duquel l’animal sc redresse perpendiculairement. Dans cette

LES SOLÉNACEES.

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position, il recommence la meme manœuvre , et, par les conli’ac- lions de son pied, il parvient ainsi à disparaître dans le sable en quelques minutes.

Entre le pied cl le manteau, sur la ligne médiane, on voit une petite fente triangulaire, transverse: c’est celle de la bouche. Elle est garnie, en dessus et en dessous, de petites lèvres très minces, étroites, que l’on voit se diriger de chaque coté de la masse abdo- minale , s’élargir un peu , et se terminer en une paire do palpes la- biales, longues et étroites , libres dans la plus grande partie de leur étendue. La masse abdominale est courte, et se termine en une sorte de lame longue , triangulaire , de chaque côté de laquelle viennent se placer les branchies. Celles-ci la dépassent bientôt et viennent se prolonger dans la cavité postérieure du manteau jus- qu’àl’origino du siphon. Ces branchies ne sont pas comme cellesdes autres Acéphales lamellibranches ; on ne peut les comparer exacte- ment qu’à uneplume dontlesbarbes^eraienl égales de chaque côté. Ces barbes sont librès et flottantes comme celles de la plume, et elles s’attachent aux vaisseaux branchiaux qui forment l’axe de chaque paire de branchies. C’est vers l’extrémité postérieure,, et entre les deux paquets branchiaux , au-dessus du muscle adduc- teur postérieur, que l’anus vient déboucher. Le muscle adduc- teur antérieur est aplati, forme la partie épaissie du manteau, au- dessus de la bouche et derrière le pied, et il s’insère sur la coquille dans le voisinage du bord dorsal. Le muscle adducteur postérieur est cjlindracé, et il vient s’insérer sur la coquille , immédiatement derrière les ciiillcrons de la charnière. Par une anomalie des plus singulières, la charnière, dans les Solemjes, au lieu d’étre située à l’extrémité antérieure de la coquille et de correspondre , comme cela a lieu ordinairement, à la position de la bouche, est placée à l’exlrémilé postérieure , ce qui n’avait pas été remarqué jusqu’à présent. Cette position de la charnière se trouve tout-à-fait inverse de celle des Solen vagina, Sillqua^ etc., chez lesquels la charnière est toujours lerminale et antérieure.

La coquille des Solemyes est très reconnaissable, non-seule- ment par ses caractères extérieurs, mais encore par ceux de sa charnière. Elle est ovale, oblongue, équivalve et inéquilatérale. Le côté antérieur est extrêmement long, le postéi’ieur est au con- traire très court. Toute la coquille est mince et fragile; son tôt, blanchâtre en dedans , paraît ne contenir que peu de matière cal- caire. Il est revêtu, à l’extérieur, d’un épiderme épais, d’un brun

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TROISIÈME FAMItLE.

foncé. Cet épiderme déborde constamment la coquille, et, par son étendue, auf^nienle au moins d’un tiers la cavité intérieure. Les impressions musculaires sont peu apparentes ; on les dis- tingue cependant en faisant jouer obliquement la lumière sur la surface inlerno des valves : l’antérieure est allongée, étroite le long du bord dorsal; la postérieure est arrondie. Une ligne peu profonde s’étend d’une impression à l’autre en suivant le contour du bord, et celte ligne est produite par l’insertion du manteau. Elle n’est point échaucrée postérieurement, et l’on conçoit qu’un siphon aussi court, terminant postérieurement l’animal, n’a pas besoin d’un muscle rétracteur très étendu pour rentrer dans la co- quille. La charnière présente des caractères plus particuliers. Cha- que valve porte , à sou extrémité postérieure, un ctiilleron oblique redressé, laissant entre lui et le bord, un sillon triangulaire pro- fond, dans lequel vient se placer un ligament large, peu épais, et dont une partie serait découverte, si elle n’éiait revêtue de l'épi- derme qui s’étend sur toute la coquille. On ne connaît encore que trois espèces appartenant à ce genre. L’une est de la Méditerranée, l’autre est des mers méridionales de l’Amérique , et la troisième provient des mers australes.

ESPÈCES.

Solcmye méditerranéenne. Solemya ?nediierranea» Lamk. pi. 3. f. i5. i6. 17.

s. testa ovalo-ohlongâ J iransversd ^ inequiîateraÜ , iertui , fragilisslmâ , epi-^ dermidc fusco iogatà , lincis pallidiovibns , longitudinalibus oniatd j nymphis Ugamenii subinteniUy bvcvîbusy obliquis.

Poli. Test. Q.p. 43. et vol. i. tab, i5. f. ao.

Soleii. EQC)d, pl. 225, f. 4.

Sow. Gen, of sbells, 7, f. 2.

Desb. Eucycl. mélh.vers. l. 3. p. 957.

Desb, Lamk. An. s. v. éd, t, 6. p. laS. 2.

Dette Cliiaje, Mèm. divers sur les animaux invertébrés des mers de Naples, t. 4. pl. G2. f. 10. II.

Habile la Méditerranée.

Nous nous sommes servi de l’animal de cette espèce pour la des- cription du genre; nous n’avons rien à ajouter à son sujet. Quand on pourra lui comparer ceux des autres espèces , il sera possible

LtS SOLANACÉES.

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sans cloute cio généraliser davantage les caractères que nous en avons lires. Quant à la coquille, elle se' distingue , par plusieurs bons caractères, des deux autres espèces du môme geni’e.

Elle est ovale, oblonguc, étroite, obtuse aux deux extrémités; elle est très incquilatérale. Le côté postérieur est extrêmement court , la charnière étant située à-peu-près sur le quart postérieur de la longueur totale. Les valves sont minces, aplaties et très fra- giles. Le tôt est revêtu, à fextérieur, d’un épiderme épais, dVm brun marron foncé, interrompu par de petites zones longitudi- nales rayoniianlos des crochets vers les bords. Ces zones sont d’un brun plus pâle, et elles résultent d’un amincissement assez notable dans l’épiderme. Cet épiderme déborde considérablement les val- ves, et constitue au moins un tiers de la capacité totale de la co- cjuille, lorsque l’animal y est contenu. Les crochets ne sont point proérainens ; cependant, au-dessous d’eux, le diamètre de la co- quille commence à diminuer, et bientôt les bords s’arrondissent pour former rcxirémité postérieure. La surface intérieure des valves est d’un blanc brunâtre terne, et l’on remarque , à chaque extrémité, vers le bord dorsal, une impression musculaire arron- die; la postérieure est plus petite que l’antérieure. Une ligne ru- gueuse, très voisine du bord inférieur, en suit le contour, et elle est produite par l’insertion du manteau. La charnière est singu- lière. Si l’on en croyait Lamarck, les deux valves seraient soudées entre elles en ce point ; mais il n’en est rien. Les valves se sépa- rent naturellement, et sans aucune fracture du tôt, lorsque l’on vient à rompre le ligament. Celui-ci n’est pas non plus interne, comme Lamarck l’avait supposé; il a toute la structure des liga- mens extérieurs , comme ceux des Solens , par exemple; seulement il est plus court et en proportion plus épais. La nymphe , qui , dans les Solens, est portée à l’extérieur, est ici rentrée obliquement dans l'intérieur dej valves, et le ligament s’y insère de la même manière que dans les autres genres delà môme famille. 11 y a cepen- dant celte légère différence, c’est que le rebord du corselet se relève à-peu-près à la haïUeiir du bord des valvesj et forme, avec la nym- phe, tth sillon triangulaire dans lequel le ligament est inséré et eu partie caché. Nous verrons par la suite une disposition analogue dans un grand nombre de genres appartenant à diverses familles.

Les grands individus de celle espèce ont 1 5 millimètres de long et 5o de large.

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TROISIEME FAMILLE.

GENRE NEUVIÈME.

SOIiEN*. Solcn (Linné).

PL 5. lig. 8. PL 6. fig. 1-9.

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal li'ès allongé, cylln- clroïde , ayant les deux lobes du manteau réunis dans toute leur longueur ou dans leur moitié postérieure seulement et terminés par deux siphons courts et réunis j branchies égales, séparées à la basej anus flottant; pied cylindrique, terminé par un empâtement.

Coquille très transverse, épidermée, bâillante aux extrémi- tés; charnière droite, linéaire, tantôt terminale ou sublermi- nale, tantôt médiane, présentant une ou deux dents fort saillantes, sans fossettes; ligament allongé extérieur,

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. 2wXr/v , Tuyeau, Solen^ Onyx ^ Doiiax ; Pline, Athénée. Solen; Rondelet, Gesner, Belon, Aldrovande , Lister. Solen; Linné , Chemitz, Cuvier, La- marck, etc. Vaginay Siliqua; Megerle. Solen^ Ensis^ Leguminaria^ Cultellus^ Siliquaria; Schumacker.

OBSERVATIONS. Le mot grec awXrv, signifie un canal, un tuyau, et ce mot a été employé pour désigner les tuyaux marins ou celles des coquilles bivalves, dont les valves, creusçes en gouttière, ressem- blent à un véritable tuyau lorsqu’elles sont réunies. Les anciens ont également employé les mots aulos^ donaxy onîx pour désigner des corpsallongés et creux comme certains roseaux, et par extension, les ont aussi appliqués aux tuyaux marins et aux coquilles auxquelles Pline a plus particulièrement appliqué le nom de Solen. Pline et Athénée désignent aussi ces coquilles par les noms de Dacfylus ou à'Unguis^ parce qu’elles ressemblent par leur longueur et leur forme aux doigts de la main et des parties détachées par leur forme et leur couleur ne manquent pas de ressemblance avec les ongles. Il est certain que les anciens connurent les coquilles qui appar- tiennent au genre Solen qui, par une exception bien rare, porte encore aujourd’hui le nom que nous a transmis l’antiquité. Il ne faut pas croire cependant que les auteurs de ranliquilé ont dîstin-

I.ES SOLANACÉES. 9^

gué nettement le genre qui nous occupe ; ils confondaient avec lui tous les corps auxquels pouvaient s’appliquer, avec plus ou moins d’exactitude, le nom de Solcn, ou l’un de ceux que nous venons de mentionner. Les auteurs qui, dès le milieu du seizième siècle, scrutèrent avec tant d’attention les ouvrages des naturalistes de l’antiquité, reconnurent facilement les Solens , et c’est ainsi que Rondelet en distingue deux sortes qu’il désigne sous les noms de Solen nias et Solen fœmina; bientôt après , il est imité en cela par Belon ; Gesncr suit leur exemple, mais il en ajoute une troisième espèce qu’il observa dans les mers de Venise. Aldrovande n’ajouta à ses prédécesseurs qu’une compilation plus étendue des anciens, et une nouvelle ligure de la nouvelle espèce de Gesner. Depuis celte époque, jusqu’en iG85 que Lister publia son histoire des Coquilles, rien d’important ne fut ajouté à Thistoire des Solens ; mais Lister, que dans le cours de cet ouvrage nous trouverons presque partout supérieur aux naturalistes de son temps , rassem- bla sans mélange tous les Solens qu’il connut, et jeta les premiers fondemens du genre que, beaucoup plus lard, Linné créa dans ses immortels travaux. Lister éloigna des Solens, celle des espèces ovalaires, que la plupart des auteurs rapportèrent plus lard dans ce genre; aussi l’on peut dire que Lister en est le vrai créateur, puisqueaujourJ’hui, après bien des vacillations, les concbyliologues reviennent aux limites que ce naturaliste a tracées. L’exemple de Lister fut suivi par Langius et par Guallieri; ce dernier va même jusqu’à séparer celle des espèces dont M. de Blainville a fait, il y a quelques années, son genre Solecurle. Jusqu’alors on connaissait fort peu l’animal des Solens, et sa manière de vivre; notre célèbre Réaumur, dans un mémoire très curieux, imprimé en 1712, parmi ceux de l’Académie des sciences, fit connaître les formes extérieu- res de l’animal, et apprit par quelles manœuvres, il sait creuser un trou dans le sable, et s’y mouvoir avec rapidité. Linné semble avoir ignoré ces observations de Réaumur, et n’avoir pas connu les figures assez parfaites de l’animal ; car dans les diverses édi- tions du Systema naturœ, il caractérise son genre Solen comme tous ceux de la classe des Bivalves par ces deux mots Animal as- cidia. A cet égard , on pourrait même blâmer Linné qui n’a pas su profiter des observations d’Adanson , consignées dans ses Coquilles du Sénégal, ouvrage que Linné connaissait, puisqu’il parut plu- sieurs années avant la publication de la douzième édition du Sys- tema natures* Adanson fit connaître deux espèces du Sénégal, l’une

94 TROISli^.ME PÀMIELE.

est un véritable Solen, l’autre doit être comprise actuollcmcnt dans le genre SolecUrle de M. de Blainville.

Si Linné est blâmable ne n’avoir pas profité des observations de Réaunun* et d’Adanson, il Test également ne n’avoir pas res- serré-son genre Solcn dans les limites que lui avait données Lister. S’il avait suivi toutes ces bonnes indications, il aurait évité la con- fusion qui régne dans son genre. Au lieu de réformer avec sagesse les erreurs de Linné, ses élèves et ses successeurs y ont constam- ment ajouté , jusqu’au moment ou Bruguière, Cuvier et Lamarck surtout, portèrent une réforme salutaire dans le genre oii Linné rassemblait des coquilles de cinq ou six autres genres différons. Si Bruguière eut l'avantage d’ôlre le premier réformateur du genre Linnéen , il fut aussi celui des naturalistes qui comprit le moins bien le rapport desSolens avec les genres environnans; il le place en effet entre les Mya el les Pinna, Il faut ajouter que Bruguière fut trop timide dans les changemens qu’il fit au genre de Linné, car sous le nom de Solens, on trouve dans les planches de l’encyclo- pédie avec les vrais Solens, les Sanguinolairos, les Psammobies et l’Anatine. Pour pouvoir réformer d’une manière heureuse le genre Solen de Linné, il était nécessaire de connaître Tanalomie des espèces dont les formes soûl le plus dislincles. Poli, dans son grand et magnifique ouvrage des Tesiacées de deux siècles, en donnant des anatomies très bien faites des principales espèces de Linné, mit les naturalistes à même d’améliorer le genre; mais malheureusement ses travaux restèrent long-temps ignorés des na- turalistes français J et ce ne fut qu’assez lard que Lamarck, dans ses ouvrages, mentionna les beaux travaux du naluralisie napoli- tain. Cependant, dès 1799^ dans les Mémoires de la société d’his- toire naturelle de Paris, Lamarck commence par séparer du genre les Sanguinolaires , et les met entre les Myes et les Giyci- mères. Dans le même temps, Cuvier, dans son Tableau élémen- taire de l’bistoire naturelle des animaux, réduisait aussi le genre Solen aux espèces ovalaires, tel que le Solen sirigilatus , et aux espèces très allongées, telles que le Vagîna. '^Y. de Roissy, dausJa continuation du Buffon de Sonnini , accepta sans changement les réformes proposées par Cuvier et par Lamarck , dans leurs pre- miers travaux. Quelques années plus lard, Lamarck apporta quel- ques modifications dans le genre qui nous occupe; il en retira les Analines, qu’il mit dans la famille des Myaires. Dans l’extrait du cours, Lamarck ne fit aucun changement, soit dans les rapports,

LES SOLIÉNACEES.

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soit dans la constitution du genre Solen. Cuvier n’a pas agit de môme, car, après avoir réduit les Solens de Linné comme nous Pavons vu, il comprend co genre dans sa famille des Enfermés, et, à titre de sous-genre, il y réunit les Sanguinoiaires de La- marck. Dans ses animaux sans vertèbres , Lamarck conserva le genre Solen en tçte de sa famille des Solénacces, et il y rassembla non-seulement les espèces allongées et dont l’animal est pourvu de deux siphons courts réunis , mais encore les espèces ovalaires dont l’animal a le pied linguifbrme et les siphons désunis dans une partie de leur longueur ; parmi les espèces ovalaires , il introduisit aussi des espèces dont l’animal a le pied comprimé , les siphons grêles et désunis dans toute leur longueur. M. do Blaiiiville , dans son Traité de malacologie, voulut réformer le genre Solen et le réduisit^ en effet, aux proportions que Lister lui avait données ; il proposa deux genres, l’un pour les espèces ovalaires et aplaties, il lui donna le nom de Solélelline ; l’autre, pour les espèces plus cylin- driques à pied linguiforme, il lui imposa le nom de Solécurte. De ces deux genres, dont nous avons discuté la valeur d’abord dans nos articles du Dictionnaire classique d’histoire naturelle, et en- suite dans l’Encyclopédie méthodique, un seul doit être conservé, c’est celui des Solecnrtes ; car, nous avons démontré que les Solé- lellines sont pour la plupart de véritables Psammohies et quelques- unes des Solens voisins du Legumen : c’est à dessein que, dans cette courte histoire du genre Solen , nous avons négligé de citer plu- sieurs ouvrages dans lesquels on trouve des changemens peu im- portans, la plupart des auteurs ayant adopté les idées de Lamarck. Quelques auteurs , tels que M. Schumacher, ont augmenté jusqu’à l’exagération le nombre des divisions génériques aux dépens des Solens de Lamarck.

Dans le dernier ouvrage de l’auteur que nous venons de nom- mer, on trouve , à coté des Solens réduits au Solen vagina, et quel- ques autres espèces, un genre Ensis pour les espèces longues et courbées à charnière terminale ; un genre Legumînaria pour les Solens à charnière submédiane avec une cote intérieure j un genre Cultellus pour les espèces larges, aplaties et courbées; et enfin un genre Siliquarm pour les espèces à charnière médiane sans côte in- térieure, tels que le Solen Domheyi de Lamarck. M, Megerle avant Schumacher avait aussi proposé plusieurs genres, entre autres un genre Vagina, un autre sous le nom de Siliqua et caractérisés de manière à ne renfermer qu’un très petit nombre d’espèces. On sen-

TROISIÈME FAMlttE.

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tira que dans notre manière d’envisajjer les genres et de les carac-' lériser zoologiquement, il nous est impossible d’accepter ceux que nous venons de mentionner.

En réduisant le genre Solen dans des limites plus étroites que Lamarck, en le ramenant à-peu-près à celle de Lister et de M. de Blainville, on trouve un ensemble satisfaisant dans les caractères de ces animaux, et dans ceux des coquilles ; les animaux sont allongés, cylindroïdes, quelquefois un peu aplatis. Ils sont formés comme les autres Conchyfères , d’une enveloppe générale, le manteau, d’un corps ou masse viscérale et d’un pied organe loco- moteur.

Lorsque l’on écarte les lobes du manteau d’un Solen, et que l’on incline en avant l’organe allongé et venniforme qui est con- tenu dans la partie antérieure de sa cavité, on aperçoit, vers le milieu de la longueur totale , et cachée profondément à la base de cet organe venniforme, une petite fente Iransverse, garnie en dessus et en dessous d’une petite lèvre membraneuse j c’est l’ou- verture de la bouche : elle est parfaitement symétrique et dans la ligne médiane de l’animal; de chaque côté, les lèvres se conti- nuent eu une paire de palpes labiales, longues et étroites, soudées entre elles à leur bord interne dans la moitié de leur longueur, et adhérentes dans celte partie de leur longueur aux côtés de la masse viscérale ; ces palpes labiales, de forme lancéolée, ont leur surface interne couverte de fines lamelles membraneuses, serrées et fort courtes. Si l’ou pénètre dans la bouche, on voit que c’est une petite cavité qui conduit immédiatement, au moyen d’un œso- phage très court et cylindrique, dans un estomac subglobuleux, sc terminant insensiblement en un intestin grêle qui fait d’abord deux courtes circonvolutions et qui en forme ensuite deux autres beaucoup plus grandes au moyeu desquelles l’intestin se porte d’abord d’avant en arrière, puis dans un sens opposé , pour se pla- cer dans la ligne dorsale et médiane, et se terminer un peu en avant du siphon anal et en avant du muscle adducteur postérieur, en un anus flottant entre les feuillets branchiaux : un foie peu vo- lumineux , distribué en petits lobes à la base du pied, et entre les faisceaux musculaires de cet organe , enveloppe une partie de l’es- tomac et de l’intestin : les px'oduits de la sécrétion de cette glande sont portés dans l’estomac au moyen de quelques cryptes biliaires qui pénètrent à travers les parois de la cavité stomacale.

Les organes de la circulation sont, dans lesSoIens, à-peu-près

LES 80LKNACEES.

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semblables à ceux des autres genres do Conchifères; ils consistent en un ventricule placé sur le dos de Tanimal, et embrassant l’in- testin qui semble passer à travers sa cavité : ce ventricule donne naissance à une aorte qui distribue le fluide nourricier dans toutes les parties du corps, d’oii il est repris par un système veineux gé- néral, qui le ramène aux branchies, dans lesquelles il pénètre pour rentrer dans le ventricule, au moyen de deux oreillettes triangulaires, aplaties, submembraneuses, parfaitement sembla- bles et symétriques. Les organes de la respiration consistent en une paire de branchies allongées et étroites, occupant la moitié postérieure de la longueur de la cavité du manteau. Les feuillets branchiaux naissent entre les palpes labiales de chaque côté du corps. A leur origine, ils sont étroits; ils s’élargissent bientôt , et leurs bords deviennent parallèles et ils se terminent postérieure- ment en une pointe courte qui aboutit à l’origine du siphon bran- chial. Ces organes respiratoires sont semblables, quanta l’organi- sation, à ceux des autres Mollusques conchifères.

Les organes de la génération ne diffèrent en rien de ceux des autres genres, et , comme nous l’avons dit dans les généralités ana- tomiques, ils consistent en un ovaire compris dans la masse com- mune des viscères, et placé à côté du foie. Cet ovaire, extrême- ment développé dans le temps de la ponte, se décharge d’abord par deux oviductes, dans les mailles des branchies, les œufs subissent une sorte d’incubation.

Les organes de la locomotion dans les Solens, comme dans la plupart des Mollusques conchifères , se partagent en ceux qui sont propres à quelques parties de l’animal, et en ceux au moyen des- quels l’animal tout entier se déplace, L’animal est lié à sa co- quille par deux muscles adducteurs qui servent à fermer la coquille lorsque ses valves sont écartées; de ces muscles, i’un est antérieur et l’autre postérieur; ils n’ont pas la forme qu’on leur remarque dans le plus grand nombre des autres Concbyfères; le muscle antérieur, placé à l’extrémité de l’animal, tout près du dos, est allongé, aplati, a quelque ressemblance avec un coin fort allongé, et laisse sur les valves une impression située tout près du bord cardinal et qui lui est parallèle. Vu en dedans, ce muscle estèvidemmenl composé défibrés Iransversesetparallèles entre elles; le muscle adducteur postérieur est un peu plus court , plus ovalaire ; il s’étend depuis l’extrémité de la masse viscérale jusqi.e vers l’ori- gine des siphons , et sa limite se reconnaît facilement, parce que

T. I, 7^

TRorsibii: rAMiixr.

d8

Tanus vient cl6boncher immédiatement derrière lui. Dans l’épais- seur du manteau, on remarque d’autres faisceaux musculaires propres à cet organe; l’extrémité antérieure et tout le bord ven- tral du manteau sont épaissis, et cet épaississement est dii à un très grand nombre de petits muscles transverses qui sont desti- nés à tirer en dedans les bords libi’es de cet organe : ces muscles s’insèrent en dedans de la coquille, sur une ligne particulière dont nous parlerons bientôt. A l’extrémité postérieure, le manteau est plus épaissi que partout ailleurs ; cet épaississement se remarque particulièrement dans une échancrure triangulaire, peu profonde, dans laquelle la peau, très mince, est remplacée de chaque côté par un muscle à fibres rayonnantes, destine à faire rentrer à l’in- térieur de la coquille les siphons qui terminent l’extrémité posté- rieure de l’animal. Outre ces parties fibreuses, on trouve encore dans les siphons un système musculaire particulier , composé de fibres annulaires et longitudinales, et qui servent au mouve- ment propre de ces parties. Les organes de la locomotion , ser- vant à déplacer tout l’animal, consistent eu un pied, dont la forme est un peu variable selon les espèces ; le plus souvent il est cylin- drique, rarement aplati; il est gros, remplit une grande partie de la cavité intérieure du mabteau, et il est terminé, à son extré- mité antérieure, par une sorte d’empâtement, dont l’usage est tout- à-fait particulier au genre Solen et à quelques autres semblables. Cet empâtement peut prendre diverses dimensions, suivant que l’animal veut creuser le sable ou monter et descendre dans le trou cylindrique qu’il s'est creusé. Dans sa masse principale , cet organe locomoteur est composé d’un grand nombre de fibres charnues très solides et très coriaces , qui se réunissent et s’encUevétrenl vers Textrémilé libre du pied , tandis que vers la base, elles se sé- pai’ent en divers faisceaux, soitlongitudinaux, soit transverses, fais- ceaux entre lesquels une partie des viscères est contenue , et aux- quels Poli a donné le nom de muscles funiculaires. Enfin, l’eX'* trémité inférieure se bifurque de chaque côté de la masse viscérale, et se termine eu deux muscles assez grêles, qui viennent s’atta- cher obliquementà la coquille, au-dessous du bord dorsal, et à- peu-près vers le tiers postérieur de la longueur de ce bord, im- médiatement au-dessus du muscle adducteur postérieur. Il est fa- cile de concevoir la fonction des divers muscles dont nous venons de parler; Les adducteurs, comme nous l’avons dit, sont destinés à rapprocher les valves-, les muscles rayonnés des siphons font ren

LES SOLÉNACÉES»

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(rer ccs organes dans l’intérieur de la coquille ; .enfin , les muscles propres du manteau et des siphons ont pour usage de faire sortir ou de contracter ces parties sur elles-mêmes.

Quant au pied, les muscles dont il est formé lui donnent divers mouvemens. Cet organe peut s’allonger et sortir de la coquille dans une longueur égale presque à celle de la moitié de l’animal. Il se contracte , et peut rentrer entièrement dans l’intérieur de la coquille. Son extrémité libre devient conique et tranchante, d’au- tres fois, elle prend une forme sphéroïdale, et quelquefois enfin, cette extrémité ressemble à un disque aplati et supporté par une lige cylindrique; nous verrons tout-à-l’heure, en parlant des moeurs de ce mollusque, à quel usage sont destinées ces diverses modifications du pied.

Le manteau, comme nous avons déjà eu occasion de le dire,' détermine la forme générale de l’animal. Dans les Solens, il se présente sous la forme d’une gaine charnue à parois minces dans le milieu, consolidée sur les bords libres par les muscles propres du manteau dont nous avons déjà parlé , et sc confondant vers le dos de l’animal , soit avec la masse viscérale , soit avec les muscles dont il revêt les deux surfaces. Tantôt, selon les espèces, la cavité intérieure du manteau est en cylindre creux , tantôt elle est beau- coup plus aplatie , comme on peut en juger d’après la forme exté- rieure des coquilles : ainsi , cette cavité sera différente dans le *Sb- len vagina^ et le Solen le^umen^ par exemple. Dans les genres de la famille des Pholadaires , nous avons vu que les lobes du man- teau sont réunis dans une grande partie de leur étendue , quel- quefois même , on n’aperçoit jilus que quelques traces des ouver- tures qui font communiquer la cavité palléale avec le milieu am- biant, Dans plusieurs espèces de Solen , les deux lobes du manteau sont soudés par leurs bords libres, et ne laissent qu’une ouverture antérieure , subcirculaire , pour le passage du pied et les ouver- tures postérieures du siphon. En cela , ces espèces de Solen se rapprochent des Tarets et des Pbolades ; mais , dans d’autres es- pèces exlrémemeuL voisines, les deux lobes du manteau sont sépa- rés jusque vers le milieu de leur longueur^ et restent soudés par toute Textrémilé postérieure. Si toute l’organisation de ces deux sortes de Solen n’était absolument semblable , on pourrait cer- tainement se servir de ce caractère pour établir pour eux des genres qui seraient, aux yeux des anatomistes, plus acceptables dans une méthode que la plupart do ceux qu’on a essayé d’y intro-

7^

400

TROTSlblK rAl^IITXK.

duire d'après quelques caractèi'es de coquille. Dans presque toutes les espèces, les siphons postérieurs sont réunis dans toute leur lon- j^ueur ; cependant, une dépression latérale profonde indique qifils ne sont joints que par une petite partie de leur circonférence. Dans d'autres espèces, ces siphons sont disjoints au sommet, comme dans le Solen ensis ^ par exemple, et enfin, ces siphons sont dé- sunis dans presque toute leur lonfîueur, dans les espèces aplaties et à charnière submédiane, comme dans le Sofen lépxmen, ÎI ré- sulte de ce que nous venons d*exposer à cet égard , qu’il ne faut point îittacher trop de valeur à ces modifications du manteau ; qu’il faut seulement s’en aider pour la distinction des espèces et des genres; mais, pour déterminer la limite de ceux-ci , il faut scruter plus profondément dans l’organisation, et y chercher les vrais carac- tères zoologiques d’après lesquels les bons genres doivent être formés.

Pour terminer ce qui a rapport à forganisalion des Solens, il nous reste à parler du système nerveux qui, dans ce genre, pré- sente quelques faits intéressans. Poli est le premier anatomiste qui ait fait connaître le système nerveux d’un grand nombre de Mol- lusques acéphalés , mais il le décrivit et le figura comme un sys- tème de vaisseaux lactés, et Mangili, dans un petit opuscule de- venu très rare, fut le premier qui, en donnant l’anatomie d'une grande Mye , attribua au système nerveux ses véritables fonctions et reconnut rerreur dans laquelle Poli était tombé. Dans le genre qui nous occupe , le système nerveux est fort développé, il n’est bien connu que dans le Solen vagina; mais il est à présumer qu’il ne présente que des variations peu importantes dans les autres es- pèces. En examinant les bords libres du manteau à la face interne, on aperçoit, rampans sur la partie épaisse du bord, quelques pe- tits filets qui se réunissent en un tronc transversal , et bientôt cette branche principale vient aboutir de chaque côté du corps à l’angle inférieur d’un ganglion buccal , quadrangulaire; puis on découvre immédiatement au-dessus de la bouche , derrière les lèvres dont cette ouverture est garnie , le ganglion d'un côté, communiquant avec celui du côté opposé par une branche transverse qui part de l’angle interne des ganglions. De l’angle inférieur et interne de ces mômes ganglions, parlent des branches viscérales qui se por- tent à la base du pied , distribuent des branches aux organes in- terposés entre les muscles funiculaires et se terminent en filets qui se distribuent dans l’épaisseur même du pied. L’angle inférieur et postérieur des ganglions donne naissance à une grosse branche

LES SOLENACEES.

loi

nerveuse qui descend de chaque côté du corps , se porte en ar- rière vers le muscle adducteur postérieur, et vient se joindre à la branche opposée sur le centre même de ce muscle. Cette jonction se fait au moyen de deux petits ganglions ayant une commissure transverse, et desquels s’échappent, en divergeant, deux filets ner- veux assez considérables, don t les branches se distribuent en grande partie au manteau , et quelques-unes aux siphons, vers le sommet desquels elles pénètrent. On voit, par celte disposition généi’ale du système nerveux , qu’il est composé de deux masses gangiionaires principales, formant un anneau complet qui embrasse les vis^ cères dans son contour; mais il est à remarquer que, dans le genre qui nous occupe et par la disposition meme des organes principaux qui le constituent , l’anneau nerveux est moins étendu que dans la plupart des autres genres. Ici , en elFet, l’ouverture buccale est presque au centre de l’animal ; l’anus vers le tiers postérieur de la longueur, et toute la masse des viscères se trouve comprise dans co court intervalle.

Les Solens ont généralement une coquille mince et fragile. C’est dans ce genre que l’on remarque les coquilles les plus transverses connues; elles sont extrêmement larges et très courtes. Le bord inféi'ieur elle bord supérieur sont rapprochés et parallèles. Le bord antérieur, tronqué dans un certain nombre d’espèces , est toujours fort éloigné du bord postérieur. On peut distinguer ces coquilles en plusieurs groupes, celles qui ont la charnière terminale et celles dont la charnière est plus ou moins avancée sur le bord dor- sal. On serait disposé, sans doute, à établir deux genres pour ces deux sortes de coquilles, si l’on ne passait iusensiblemeui d’une forme à l’autre, et si les animaux des deux sections ne présentaient la plus grande analogie. Ceux des Solens qui ont la charnière ter- minale sont généralement cylindracés, tronqués en avant, arron- dis en arrière, bâillant de chaque coté , étant bien clos par le bord dorsal et le bord inférieur. Presque toutes ces espèces sont droites, et parmi elles, il y en a quelques-unes dont la charnière com- mence déjà à descendre vers le tiers antérieur du bord dorsal [Soien arnbiguus). Le Solen ensis , courbé dans sa longueur, n’a pas sa charnière aussi terminale que le Solen vagina; et son côté antérieur n’est pas aussi fortement tronqué. Dans le Solen cultet- lus ^ la coquille s'aplatit davantage, et la charnière est encore moins terminale ; enfin le Solen maximus de Gmelin , un peu plus aplati que le précédciil, a la charnière vers le tiers aulérieur du

102

TROISIEME FAMILLE.

bord dorsal 5 et cette espèce, très intéressante, devient ainsi le point de jonction des Solens allongés et à charnières terminales , avec ceux qui ont la charnière médiane ou submédiane : il faut suivre cette liaison on étudiant la série suivante : Soîen vagina, Solen cnsis , Solen arnhiguiis , Solen culleîîus ^ Solen pellucidiis ^ Soîen maximus y ei enfin Solen legumen. On admet encore dans le genre Solen, un petit groupe particulier de coquilles bâil- lantes et aplaties, toutes remarquables par une côte saillante à l’intérieur et qui semble destinée à servir de point d’appui à la charnière, et à donner plus de solidité à toute la coquille. Le 5o- îen radialus appartient à ce petit groupe, dans lequel nous con- naissons actuellement cinq espèces. Peut-être faudra-t-il établir dans la suite un genre particulier pour ces coquilles , si par ha- sard l’animal, qui nous est entièrement inconnu, vient à présenter quelques particularités dans son organisation. Enfin, il est un quatrième groupe qui se lie plus intimement aux autres Solens, que celui dont nous venons de parler, et dont le Solen Domleyanus de Lamarck et le Tagal d’Adanson peuvent donner de bons exemples. Ce groupe, dont fait partie aussi le Solen coarctalus de laMédilerra- née, renferme déjà sept à huit espèces, que l’on voit se lier d’une manière insensible au Solen Icgiunen, Si Atlanson , comme on ne peut guère en douter , a représenté fidèlement l’animal du Tagal , ou est obligé de reconnaître un véritable Solen dans cette es- pèce ; car il a un pied semblable à celui du vagina , et son man- teau, comme dans cette dernière espèce, se termine postérieurement eu deux courts siphons réunis dans toute leur longueur. Si nous étudions la cbaruièi’e dans les quatre groupes dont nous venons de parler, nous y observerons les modifications suivantes : dans le Solen vagina, la charnière est très simple; elle consiste en une seule dent cardinale sur chaque valve , ayant la forme de petites palettes ti’ansverses , dont la surface est lisse et parfaitement plane, qui s’appliquent l’une contre l’autre, et, dans le mouvement des val- ves , ont le même jeu que le gond d’une porte. Cette forme de charnière , que Linné a cru propre au Soîen vagina, se montre dans cinq ou six autres espèces, qui presque toutes , à cause de ce caractère , ont été confondues par les auteurs avec l’espèce lin- néenne. Dans d’autres espèces, allongées cl cyliudracées, la char- nière se compose de deux dents en crochets parallèles et très rap- prochées sur la valve gauche ; une petite dent, fort mince élargie sur la valve droite, glisse entre les deux dents de la valve opposée.

LES SOLEN AGEES.

io3

Ces espèces offrent encore, en arrière de la charnière, deux petits prolongeméiis très obliques qui se croisent et qui semblent être Fo- rigined’une troisième dent cardinaleque Fon observe dans quelques espèces ovalaires. Le petit crochet latéral dont nous parlons se montre particulièrement dans le Soîen legumen, et on en re- trouve une trace dans le Solen cosiatus de Say. Dans le Solen maximm ^ cette dent latérale postérieure se joint à la dent cardi- nale, et forme avec elle un V largement ouvert; on voit ainsi cette dent faire insensiblement partie intégrante de la charnière et devenir la seconde dent cardinale qui se montre dans le Solen Dombeyanus et les autres espèces du même groupe , sous la forme de deux crochets peu courbés et peu divergens.

Les impressions musculaires que Fon remarque à Finléideur des Soiens ont une forme qui coïncide avec celle des muscles dont nous avons parlé en décrivant l’animal; ces impressions sont rappro- chées du bord dorsal ; l’antérieure est très allongée, fort étroite, plus large à son extrémité postérieure qu à l’antérieure ; elle commence immédiatement au-dessous de la charnière, et dépasse un peu Fex- trémité postérieure du ligament. L’impression postérieure est ova- laire, beaucoup plus courte que la première et immédiatement au-dessus d’elle. On en trouve une plus petite sur laquelle vient s’insérer le muscle rélracteur du pied. L’impression palléale suit la direction des bords antérieur et inférieur de la coquille ; celte im- pression est fort intérieure; elle consiste en une ligne assez forte- ment imprimée qui, à l’extrémité postérieure des valves, s’infléchit en dedans peu profondément , et forme un sinus triangulaire, dans lequel s’insère le muscle rélracteur des siphons. Les impressions dont nous venons de parler présentent des modifications, lorsque Fon passe d’un groupe vers un autre ; c’est ainsi que l’impression musculaire antérieure devient de plus eu plus large, à mesure qu’on l’observe dans des coquilles plus aplaties et plus élargies. L’impression palléale elle-même change de forme dans cos espèces, et sa sinuosité postérieure ressemble plus à celle des Sanguînolaires et des Psammohies.

Les caractères spécifiques se rencontrent non-seulement dans la forme généràle et dans la disti’ibution des couleurs, mais en- core plus particulièrement dans la forme et les rapports des impres- sions musculaires, et dans l’impression du manteau. La charnière peut aussi fournir de bons moyens pour distinguer les espèces, mais comme les dents cardinales sont longues et fragiles, il est as-

TKÜlSliiMli FAMILLL.

Iü4

sez rare , dans nos collections , d’avoir ces parties bien conservées , et de pouvoir en faire une minutieuse comparaison.

Nos collections rassemblent actuellement un assez grand nom- bre d’espèces fossiles appartenant au genre Solen. Presque toutes se distribuent dans les terrains tertiaires, et quelques-unes d’entre elles sont les analogues d’espèces actuellement vivantes. Nous rapportons avec doute, au genre Solen, une coquille bi- valve fort singulière, provenant des terrains de sédiment infé- rieur de l’Eifel, et que nous a communiquée M. Félix Dujardin. Cette coquille a la forme d’un Solen; cependant, nous conser- verons du doute à son égard pour plusieurs raisons; c’est que nous ne pouvons on étudier la charnière, la coquille étant prise dans une pâte calcaire très dure, et parce que nous ne pouvons non plus étudier ses impressions intérieures, ne connaissant jus- qu’à présent qu’un seul individu de ce beau fossile. Ce qui nous porte encore à douter de la nature de l’espèce dont il est question, c’est que son côté antérieur n’est point aussi bâillant que dans la plupart des autres Solens. Parmi les coquilles appartenant aux Muschclkaîk , il y en a qui ont l’apparence de Solens ovalaires, assez rapprochés du Solen coarctalus pour la forme , mais beau- coup plus aplatis. Ces coquilles étaient très minces , et d’après des moules intérieurs que nous avons vus, nous serions tenté de les rapporter au genre Solen. Elles pourraient cependant appar- tenir aux Psammobies. Jusqu’à présent, aucune espèce de véri- table Solen n’a été rencontrée, soit dans les terrains créiacés, soit dans le grand système jurassique. 11 y a plusieurs espèces que nous devons signaler à l’attention des géologues.

Solen 'vagina, vivante dans les mers d’Europe; fossile en Morée, en Sicile et en Italie.

Solen siliqua, vivante dans les mers d’Europe ; fossile enNor- ivège et en Sicile.

Solen ensis, vivante dans les mers d’Europe ; fossile en Sicile .

Solen coarctatus , vivante dans les mers d’Europe ; fossile aux environs de Bordeaux , on Sicile et en Italie.

Solen legiunen^ vivante dans les mers d’Europe; fossile en Italie.

Solcîi Burdigaîcnsis , fossile aux environs de Bordeaux.

Nous mentionnons celte espèce, pour rectifier la détermination qu’eu donne M. de Baslerot , dans sou Mémoire sur le bassin ter-

LES SOLÉXACEES.

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tiaîre du sud-ouest de la France; il la confond avec le Solen va- gina,md\% elle s’en distingue parfaitement bien par la forme de ses impressions musculaires , et par la direction de sa troncature antérieure.

Solcn vaglnoïdes, fossile aux environs de Paris, à Vallogne et en Belgique.

Nous ajouterons une indication du nombre des espèces des véri- tables Solens que nous connaissons dans les trois groupes des ter- rains tertiaires ; six espèces dans le groupe supérieur ; trois dans le groupe moyen , et quatre dans le groupe inférieur.

ESPÈCES.

Solen silique. Solen siltqua. Lin. pi. 6. fig. i. 2. 3.

s. testa elongato-angustâ cyllndraceà, epidermide 'vîrescente îndutâ; latere antico arcuato , i^tràqtte cxtremitate hyante; cardine sînlstro bidentato altero unidentaio, dente lateraîi poireclo.

Lin. Syst. nat, éd. 10. p. 67a. 24.

Lia. Syst. nat. cd, la. p. rn3. 34.

Lin. Mus. Ulric, p. 473. i3,

Belon. De aqual. p. 414.

Kond. Hist. des pois. p. 3i.

Gessner. De aquat. p. 241.

Aldrov. De test. p. 628 et 52y.

Lister. Anim. angl. pl, 5. fig. 87.

Lister. Conch. pl. 4oy. fig. ^55.

Gualti. lud. pl. yS. fig. C.

Fennant. Brit. zool. 1812. t. pl. 4^. 4>

D’Acosta. Brit. conch. pl. 17. fig, 5.

Knorr. Vergn. t. 6. pl. 7. fig. i.

Born. Test, mus, Cœs. Vind. p. 24,

Chemn. Conch. t. 6. p. 44.

Schrot. Einl. t. 2. p, 624» pb 7- hg. 6.

Gmcl. Syst. nat, cd. i3. p. 3223. 2.

Olivi. Zool. adr. p. 97. 2.

Moutagu. Teslac. brit. p. 46,

Maton elTackel. Lin. Irans, t. 8, p. 43.

Dorset, Cat. p. 38, pl. 2. fig. 5.

Speiigler. Mém, de la soc, d’hist, nat, de Copenh. l. 3. p. 88. 4.

TROISIÈME FAMILLE.

io6

Wood, Genei\ Conch. p, n8. u** i, pU 2G,fîg, i, 2,

Dillw, Cat, t. I. p. 58.n°4.

Wood. Ind, test. pl. 3. fig, i.

I£ucycl. mélh. pl. 222. fig. 2.

Muller, Zool, danic* prodr, p, 245. 2957.

Desb. Eocycl. méth. vers, t. 3. p. gSg. 2,

Lamk. An. s. vert. éd. t. 6. p. 55. 4.

Fossîlîs, Testa majore crassa. Des terrains tertiaires de la Norwège.

Grande espèce que l’on rencontre en abondance dans presque toutes les mers d’Europe. Elle se distingue facilement du Vaginal que l’on trouve avec elle. Les lobes du manteau de l’animal ne sont réunis que dans la moitié postérieure de leur longueur, tandis que, dans l’autre espèce, ces lobes sont joints entre eux dans toute leur étendue. La coquille est allongée, étroite, cylindracée, d’un beau blanc laiteux à l’intérieur. En dehors, elle est revêtue d’un épi- derme épais, d’un vert brunâtre à l’extrémité antérieure, plus jaune à l’exlrémité opposée. La surface est divisée en deux parties distinctes, sous forme de deux très longs triangles accolés dans une ligne diagonale, de manière à former un parallélogramme très allongé. Les deux extrémités de la coquille sont bâillantes; les bords de l’antérieure sont arques , épaissis en dedans et faible- ment renversés en dehors. Les bords de l’extrémité postérieure restent minces et tranchans ; le ligament est allongé , étroit et for- tement fixé sur des nymphes peu saillantes ; sa longueur est à très peu près le quart de la largeur totale de 2a coquille; les crochets sont sans saillie; ils ne sont pas tout-à-fait terminaux, le bord antérieur les surmontant de quelques lignes. La charnière dis- tingue particulièrement cette espèce du Vagina. Sur la valve gau- che , il y a deux dents cardinales fort saillantes, en crochets, lais- sant entre elles un petit intervalle , dans lequel vient glisser une dent en forme de palette, appartenant à la valve droite. La char- nière porte encore une dent latérale postérieure sur chaque valve ; cette dent est placée au tiers de la longueur du ligament. Ces dents se croisent lorsque les valves sont rapprochées. Celte espèce est voisine du Solen ensis^ mais elle n’est jamais courbée dans sa longueur comme lui. Elle est droite et cylindracée , comme le va- gina, mais elle est en proportion plus longue et en diffère par la charnière.

Le plus grand individu que nous ayons jamais vu de cette es- pèce , a 19G millimètx'es de large , et 3i de long.

LES SOléNÀGÉES.

107

Solen gaîue, Solenvagina, Lin. pl, 6. fig. 4- 5. 6.

Testa lïneariy cyUndracea, recta, postice îalîore, latert antîco hianle, in* iiis marginato, cardine unidentato.

Lin. Syst. Lat. édil. 10. p, 672.

Liu. Syst. nai. cd. 12. p. 1 1 x3.

Rondelet. Hist« des pois. p. 3r,

GessDcr. Nomcnc. aquat. p. 241.

Aldroy. De teslac. . 529. lionan. Recr. part. a. fig. 57.

Lister. Conch. pl. 4i2. fig, i.

Réaiimur. Mouv. prog. des coq, Mém. de l’Ac. 1712. p^ i48.pl, 6. Rariora.Mus, Ecsleriaoi. pl, 22, Solen fœmina, ^

Gualt. Ind. test. pl. 95. fig. D.

D’Argen. Conch, pl. 27. fig. M?

Flancus. De Conch. min. notis. pl. 3. fig. 6.

Mai’vye. Art. de conserv, pl. 2, fig. 45,

Lin, Mus. Ulric, p. 472. la.

D’Argen. Zoomorphose. pl. 6. fig. G, H,

Chemu. Conch. t, 6. p. 36, vign. fig. G. H, et p. 40. pl. 4, fig, 27 et 276, exch plui\ s^non,

Pennant. Prit, zool. 1812. t, 4* pl* 49* ûg, i.

Boni. Mus. cæs. vind. p. 24.

Schrot. Einl, t. a. p. 623. exclus, plur, synon.

Gmel. Syst. nal. cd. i3. p. SaaS, i, exclus, plur, synon,

Roissy. Buf. de Sonnini Moll, t, 3, p. 4i8, pl. 69. fig. 3.

Spengler. Mém. de la soc. d’hist. nat. deCopen. l. 9. p. 82, n** i.

Wood. Geuer. Conch. p. iig. 11° 3. pl. 27. fig, i,

Monlagu. Test. p. 48.

Maton et Racket. Lin. ïrans. t. 8. p. 42.

Dorset. Cal, p, 28. pl. 4, fig, 8.

Diliw, Cat, t. I, p. 57, 1,

Blaiuv. Malac. pl. 79. fig. 2.

Brookcs, Introd. of Conch. pl. 2. fig. i3.

Sow. Généra ofshells. Genre Solen. fig. 2.’

Poli. Test, ulriusq. Sicil. t. i. pl. 10. fig. 5 à i5. et pl. ii. fig. 1 à 1 1.

Desh. Encl. méih, vers, t. 3. p. 959, i.

Payr. Cal. des An. et des Moll, de Corse, p. 26. 3i,

Turton. Test, hival. hrit. p. 79. pl. 6, fig. 4,

Lamck. Au. s. vert, édit, t, 6. p, 53, i, Varict, cxcl.

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TROISIÈME FAMILLE.

FossiUs» Broccbi, Conch, foss. subap. t. 2. p, 496.

Habite la Méditerranée, TOcéaa eurcpéeji, se trouve fossile eu Italie et en Sicile.

On connaît actuellement dans le genre Solen plusieurs espèces très voisines de celle-ci, mais que l’on en distingue soit par la forme générale, soit par la position de la charnière, soit enfin par la forme des impressions intérieures des muscles et du manteau. Le Solen gaine est une coquille qui est six fois plus large que longue; elle est allongée, étroite et de forme cylindracée lorsque les valves sont réunies : elle est un peu plus large du côté postérieur, et un peu moins convexe de ce côté que du côté antérieur. Ses crochets sont complètement effacés et viennent se terminer à J'ex- Irémité antérieure et supérieure du bord dorsal. Le bord anté- rieur est coupé obliquement et tombe sur le bord supérieur dorsal sous un angle de soixante-dix degrés. Ce bord est épaissi à l’in- térieur, et on remarque à l’extérieur une gorge assez profonde, correspondante à l’épaississement dont nous venons de parler. La charnière%est simple; elle porte une dent sur chaque valve , les- quelles s’appuient l’une sur l’autre , au moyen d’une surface plane et horizontale. Le ligament est allongé, étroit, très solide, et son étendue égale le quart de la longueur du bord dorsal. A l’inté- rieur, les valves sont d’un blanc rosâtre et l’impression musculaire antérieure est très étroite et placée parallèlement au bord supé- rieur. L’impression musculaire postérieure est également près du bord, mais elle est ovalaire et elle se confond avec l’extrémité su- périeure de l’impression palléale. Cette impression se remarque vers le milieu de la surface interne des valves; elle est beaucoup plus intérieure que dans la plupart des autres espèces ; elle est pa- rallèle au bord inférieur, et elle se creuse postérieurement en un sinus ayant un peu la forme d’un V. Lorsque cette coquille est re- vêtue de sou épiderme, elle est d'un brun verdâtre ou grisâtre; elle vient d’un blanc rosé, lorsqu’elle en est dépouillée. Les indi- vidus que l’on rencontre le plus ordinairement ont i4 centimètres de large, et 21 millimètres de longueur.

Solen vaginal. Solen 'vaÿinalis, Desb. pl. (>. fig. 7.

Tesid cîongato lineari, cjlindraceâ , subarcuatâ, ulroqiic latere ollusây margine antico obliquo coarctato^ intiis incrassnto ^ cardia lineari uni* dentato; impressione miiscidari anticây brevî ovatd^

LES SOLANACÉES.

109

Soïe7i 'oaghia^ Lamk. Ann. du mus. t. 7. p, 427. i, cl t. 12, pl, 43. Cg. 3,

Solm vagina, Var. b. Lamk, An. s. vert. t. 5. p, 45i. 11® r.

Solen vagina. Desh. Coq. foss. de env, de Paris, t, i. p. 25. i. pl. 2, fig. 20. 21,

Solen altéra, specîes. Desh. dans Lamk. Ann. s. vert. éd. t. 6. p. 53. I.

Habile.,. Fossile aux environs de Paris, aux environs de Valogne, dus les argiles de Barlon, en Angleterre, et en Belgique dans les sables tertiaires de l’époque pai'isieniie,

Lamarck regai-dait cette espèce comme l’analogue fossile du So~ îen vagina de Linné. Mais c’est une erreur de la part de ce grand zoologiste. Lorsque, dans notre ouvrage sur les fossiles des envi- rons de Paris, nous avons de nouveau donné la description de celle.coquille, nous avons fait sentir qu’elle devait changer de nom, et conslituei’ une espèce tout-à-fait à part. En étudiant avec quel- que attention ses caractères spécifiques, on reconnaît bientôt qu’elle se rapproche plus du Solen amhigaus que du Solen vagina. Elle est allongée , cylindracée , et sa longueur égale cinq fois seu- lement sa largeur. On voit par cela seul qu’elle est proportionnel- lement plus courte que le Solen vagina. Elle est sensiblement ar- quée dans sa longueur, ce qui la rapproche, à certains égards, du Solen ensis. Ses extrémités sont arrondies et obtuses; l’extrémité antérieure n’esi point tronquée de la même manière que dans le Solen vagina/ l’épaississement intérieur est beaucoup plus larp-e et la dépression extérieure, qui correspond à cet épaississement, est plus élargie et moins profonde. La charnière est simple et li- néaire ; elle porte , sur chaque valve , une seule dent cardinale en forme de palette. Le ligament était court, car les nymphes desti- nées à le porter ont à peine la sixième partie de la longueur du bord dorsal. Les impressions musculaires sont bien dillérentes de celles du Solen vagina. L’antérieure est ovalaire et la postérieure , un peu plus grande, est de la même forme : celte impression pos- térieure est placée un peu au-dessous du milieu de la longueur totale de la coquille. A l’extérieur, cette coquille est lisse dans la moitié antérieure de sa surface, et présente des rides nombreuses d’accroissement dans l'autre moilié de son étendue. Celte espèce, qu’il est rare de trouver entière, a 90 millimètres de long et 18 de large.

110

TROISIÈME FAMILLE,

Solen gousse. Solen legiiïnen. Lin. pl, 6. Cg. 8. 9. 10.

Testa eîongatâ lineari, depressâ , utroque latere ohtusâ længaîà sithepîder^ mlde /ucescente alho-roseâ , cardine centrait, hîdentato , dente aîtero h'iftdo.

Lin. Syst. nat. éd. 10. p, 672. 26.

Lin. Syst. uat. éd. 12. p. 1114. n°36,

Pennaut, Brit. zool, éd, t.4. p, 173.pl, 49. fig. 3.

D’ Acosta, Brit. conch. p, 238.

Lister. Coucb. pl. 42, fig. 264,

Plancus. de Concb, min. not. pl. 3. fig. 5,

Gualtieri. Ind. pl, pr. fig. A,

Klein. Tentam, ostrac. pl; ii, fig. 66,

Born. Mus. p, 20, pl. 2. fig. i, 2.

Chemn. Conch, t. 6, p. 49. pl. 45. fig. 32. 33. 34,

Scbrot. Einl, t,'2. p, 627.

Gmel. Syst. nat, éd. i3. p. 8224. 4,

Donovan, Brit, concb. t. 2. pl. 53,

Monlagu.Testac. brit. p. 5o.

Maton et Racket. Trans. lin. t, 8. p, 45.

Dorset. Cat. p. 29, pl, 4* Cg. 4.

Encycl. pl. 225. Cg. 3.

Olivi. Zool. adriat, p. 97. 4,

Poli. ïest.Sicil. pl, 2. fig. i5.

Spenglcr. Mém, de la soc, d’iiist. nat, de Gopenb, t. 3, p, gS, 7,'

Dillw. Cal. t, I. p. 60. 8.

Wood, Ind, lest, pl, 3. fig. 8,

Solecurtus Ugumetu Blainv, Maîac, pl. 80. fig. i.

Desb. Encycl. mélb. vers. t. 3. p. gfir, 7.

Desb. Expéd, sc. de Morée, Zool, p, 85, 7,

Payr, Cal; des Ann, et des Moll, de Corse, p. 27, 33.

Fossiîis, Testa majore» Des terrains tertiaires d’Italie.

Habite l’Océan européen, fossile en Italie dans les terrains subapennins.

Cliemnilz, le premier, a confondu cette espèce avec un autre Solen décrit par Adanson , sous le nom de Molan j la plupart des auteurs ont copié ChemnitZj sans s’apercevoir de l’erreur dans la- quelle il était tombé. C’est ainsi que Schrœter , Gmelin, Dillwinet d’autres ont propagé une erreur qui peut être nuisible, en cela que l’on croirait habitant du, Sénégal cet animal, qui, en réalité, ne s’y trouve jamais. Poli, le premier, a fait connaître les formes ex-

111

LES SOL^NACilES.

téricures de Panîmal du Soîcn legumcn, et si M. de Blainville, en établissant son genre Solécurte, s’élait souvenu de Fouvrage du naturaliste napolitain , il se serait facilement convaincu qu’il existe une très grande dilFérence entre cette espece et le Solen strigÜatus, et cet examen lui aurait évité de dire que l’animal de sou genre Solécurte est inconnuj puisque une description tros complète, une représentation très exacte, se trouvent dans Fouvrage de Poli. Comme on pouvait le prévoir, Fanimal du Solen legiimen dilFèx'e très peu de ceux des espèces du mémo genre. Il a un pied cylin- dracé , terminé par un disque dont Fanimal se sert pour se creuser un trou et s’y mouvoir avec agilité. L’extrémité postérieure du manteau est terminée en deux siphons courts et grêles, séparés dans la plus grande partie de leur étendue. La coquille est allon- gée, étroite, plus large à son extrémité postérieure qu’à l’anté- rieure. Elle est ovalaire, fortement déprimée et bâillante à ses ex- trémités; sa charnière est submédiane; les dents cardinales s’ap- puient sur une côte intérieure très courte et peu saillante; ses dents ont une disposition très singulière ; il y en a deux très rap- prochées sur la valve gauche; elles s’avancent l’une vers l’autre, comme si elles voulaient former un anneau ; mais elles laissent en- tre elles une petite fente dans laquelle vient glisser une dent aplatie en forme de palette, qui appartient à la valve droite. Outre ces dents, on remarque de plus, sur chaque valve, une dent en forme de stylet très oblique, et dont l’extrémité d’un côté se croise sur celle deFaulre, lorsque les valves sont réunies. Le ligament est court, fort solide, et il occupe le milieu de la lon- gueur du bord dorsal. Il s’insère fortement sur une nymphe très oblique, détachée du bord, ce qui lui donne de la res- semblance avec celle des Solemyes. Les impressions musculaires sont fort rapprochées, et toutes deux très près du bord dorsal. L’impression antérieure est ovale, lancéolée; elle s’étend depuis la côte cardinale jusque vers le milieu du côté antérieur. L’impres- sion postérieure est en proportion plus petite, et on la voit au niveau du sinus palléal postérieur. Cette coquille , mince et fra- gile, est d’un blanc rosâtre, sous un épiderme brun verdâtre. Les grands individus ont 22 millimètres de longueur, et 108 millimé- trés de largeur. Nous avons un individu fossile qui a i3 centimè- tres de large.

112

. TROISI^'.ME rA:\IlLLî:.

s olen rtrecl. Solen coarctaius, Gmel. pl. 5. fig. 8,

Testa alla clepressây ovato^oblongd îrregulanter transverslm striata^ în medîo coarctatdy utrmque hiante roiundatà^ cardlne subcentrali, bidentatOy altcro unîdentato»

Chemn. Gonch. l, 6. p. 6a. pl. 6. fig. 45,

Solen anathins LinnœU Schrot. fluscouch.p. i85.pl, 9. fig. 17.

Sclirot, Einl, t. 2. p. 635. 3,

Soien coarctatus, Gmel. Syst. nat, éd. i3, p.3227, 16.

Monlagu, ïestac. bril. p. 52,

Sohn ctdteîîus, Pennant. Brit, zooî, t. 4* pl* 4^. fig, aS. 2®éd, 18 ta. t, 4. p. 1 74. pl. 49* fig* antiquatus.

Donovan. Brit. sliell, l. 4* pl* ii4.

Solen antiquatus. Mat. etRack. Lin. Trans. l. 8.p, 46..

Chama-Soîeiu D’Acosta. Brit. Concb, p. 238,

Solen emargînatus. Spengler. Mém, de la soc. d’hist, nat. de Copen. t, 3. p, io5. 21,

Solen antiquatus. Wood. Gener. Conch. p. laS. 10. pl. 29, fig. 3.

Dillw. Cat, t. I. p. 64, 18, Solen coarctatus. excl, syn^

Solen antiqiiatus. Lamk, A. s. vert, t. 5. p, 454, i5.

Solen coarctatus, Lamk. A, s, vert, t. 5. p. 45*4. n'* 17.

Id. Desli. Encycl, mèili. vers. t. 3. p. 961. 9.

Id, Desli. dans Lanik. A. s. vert, édit, t, 6. p. 59, 17.

Philippi. Enum. moll. Sîcil. p. 6.n®6.

Fossilis, Solen coarctatus» Brocchi. Conch, foss, siibap, t. 2, p, 497, 5.

Id. Phil. Emim, moll, Sicil. p. fi, n*’ 5.

Habile l’Océan européen, fossile en Italie, en Sicile et aux environs de Bordeaux.

Quelques auteurs , corarae uous l’avons vu, ont confondu le Molan d’Adanson avec le Solen legumen ; quelques autres, au con- traire, et avec plus de raison, ont regardé l’espèce du Sénégal comme l’analogue de celle-ci. Nous pensons que l’une et l’autre de ces opinions doivent être rejetées , parce que le Molan d’Adanson constitue une espèce parfaitement distincte de toutes les autres. Schrœler, dans son Traité des coquilles d’eau douce commet une autre erreur que l’on a de la peine à concevoir de la pari d’un con- cliyologue aussi habile; car, il figure et décrit le Solen coarctatus sous le nom de Solen anatimis de Linné. Lamarck, en établissant les espèces de son genre Solen , a laissé échapper un double emploi qu’il nous est facile de rectifier actuellement. Son Solen antiquatus

I-KS SOLFNAC^ES.

ii3

est exactement la même espèce que !e Solcn coarctatns ^ tous deux inscrits dans la troisième section du genre. INpus avions d’abord pensé que cette coquille devait entrer dans le genre Soléourle; mais de nouveaux renscignemens , dans lesquels nous pouvons avoir confiance, nous font croire actuellement que cette coquille doit faire partie du genre Solcn, dans le voisinage du Tagal d’A- danson et du Soîen domhcyanus de Lamarck.

Le Soîen coarctatus est une coquille ovale, oblonguo , com- primée latéralement, toute blanche en dedans et en delioi's; son épiderme est d’un brun grisâtre, ne persiste que vers les bords, et surtout vers l’extrémité postérieure ; la charnière est subcen- irale ; le ligament est court, peu épais et d’une médiocre solidité; les crochets sont ü*ès petits, à peine saillans, et l’on remarque immédiatement au-dessous d’eux, sur le bord cardinalj deux dents parallèles, recourbées en crochets sur la valve droite, et une seule dent plus mince sur la valve gauche. Les impressions musculaires sontpeu écartées , la postérieure est la plus grande, toutes deux sont ovalaires; le sinus postérieur de l’impression palléale est large et profond , il remonte dans rintérieur jusqu’au niveau des dents cardinales. Comme l’indique son nom , cette coquille est comme contractée ou déprimée dans le milieu de ses valves. Les grands individus de cette espèce ont 20 millimètres de long et 5o de large.

GENRE DIXIÈME.

SOIiÉCUnXZ:. SoUcurlns (BlainvO- PL 6, fig; 11-16,

cahactères génériques, i Animal ovalaire, très épais; trop grand pour sa coquille; les lobes du manteau réunis dans leur moitié postérieure, et terminés de ce côté par deux si- phons très longs, inégaux, réunis dans presque toute leur longueur, branchies égales réunis, prolongées dans toute la longueur du siphon; pied linguiforme, très grand , ne pouvant rentrer entièrement dans la coquille.

Coquille ovale, oblongue , équivalve, équilatérale, égale- ment bâillante de chaque côté ; les valves ne se touchant que I. 8*

TROI.Sli-:ME FAIMITXE.

il4

par deux points de leurs bords, cliarnièi’c linéaire, pourvue d’une dent sur une valve, et de deux sur l’autre.

sYXONïJiiE GÉxÉRiQUE, Grand. ^ P».onclelet, Gessner, Aldrovande. Rondelet, Gessner, Aldrovande , Lis- ter.— Solen; Linné, Schroter, Cliemnitz , Gmelin, Dillwin, Wood, Spengler, Lamarck.

OBSERVATIONS. Le genre Solécurte, nouvellement institué par M. de Blainville dans son IraiLo de Malacologie, a pour type un animal qui fut connu des ancienssous le nom de Péloris.Oa trouve chez les Grecs plusieurs mots que l’on pourrait rapporter a l’ani- mal qui nous occupe. ITsXcî veut dire noir, rembrunie; TrsXwjii; veut dire grand , monstrueux ou admirable; enfin signifie boue , vase, argile à potier. Parmi ces dénominations, celle qui paraît le mieux convenir à l’animal du genre Solécurte, c’est TreXfûfii;, parce qu’en effet l’animal est monstrueusement grand par rapport à la coquille qu’il habile. Quelques commentateurs supposent que le nom de TreXwst; a clé appliqué à cet animal) parce qu’il ha- bite les fonds vaseux de la mer ; mais nous pensons que la première étymologie est bien préférable, à moins que l’on ne veuille ad- mettre , avec Rondelet, que c’est le cap Pelorura, on Sicilej qui a donné son nom à un animal qui habile son voisinage. Quelle que soit l’origine du mol par lequel les anciens ont désigné le genre qui nous occupe, il est pour nous hors de doute que le Péloris de Rondelet, de Gesner et d’Aldrovaude n’est autre chose que le Solécurte de M. de Blainville. Plusieurs zoologistes, en examinant la description et la figure de Rondelet, ont cru pouvoir le rap- porter au genre Lulraire de Lamarck (^Alactra luiraria, Linné), mais nous sommes loin de partager celle opinion. En effet, les Lutraires comme les Myes ont les lobes du manteau réunis dans presque toute leur étendue; elles ont une masse abdominale con- sidérable et un pied en général très petit. Les siphons sont réunis dans toute leur longueur et ne sont point disjoints à leur sommet. L’animal représenté par Rondelet a le manteau ouvert dans une grande partie de son extrémité antérieure; par cette ouverture passe un grand pied linguiforme énorme, et aucun autre Mol- lusque n’offre cet organe dans la môme disposition et dans la même propoi’tion. Un gros siplion de la grosseur du doigt termine l’ani- mal du côté postérieur , et ce siphon , à son sommet, est partagé

LES SOIÆNACEES.

Il5

en deux tuyaux inégaux* qui tous deux sont repi'ésentés dans la figure grossière donnée par Rondelet. Beion , dans son histoire dos poissons n’a' point appliqué la dénomination de Péloris au même animal que Rondelet; il croit que ce nom doit appartenir à un petit Mollusque des côtes de la Manclie, qui très probable- ment est le Macfra piperata de Linné. Après avoir donné la re- présentation de son Chama pelorisy Rondelet, à la page suivante, représente la coquille isolée de la même espèce, il lui donne le nom de Chaîna nfgra. II est à présumer que la coquille repi'é- sentée par ce naturaliste était devenue noire, parce qu’elle avait long-temps séjourné dans la vase après la mort do l’animal. Nous avons vu que Lister ii’avait point admis parmi les Solen le Chama pcloris de Rondelet , qu’il comprenait cette espèce dans une grande section de ses coquilles bivalves dans laquelle se trouve mélangé un grand nombre de genres. Guakieri imite Lister pour la sépa- ration des coquilles dont il est question, tandis que Linné les rassemble sous la commune dénomination de Solen. Adanson , si judicieux et excellent observateur, a connu le Chama péloris de Rondelet, et ne Ta pas non plus distingué des autres espèces de Solen.

Tous les naturalistes sans exception , qui adoptèrent le genre linnéen, y ont admis les mêmes espèces jusque dans ces derniers temps. M. de Blainville, voulant réformer le genre Solen de Lamarck , proposa à-Ia-fois un genre Solételline pour les es- pèces à charnière médiane ayant la coquille très aplatie, et un genre Solécurte pour les espèces dont la charnière est également médiane, et dont la coquille est plus étroite et généralement plus cylindracée. On trouve ce genre Solécurte pour la première fois dans le Traité de malacologie dont on est redevable au savant anatomiste dont nous venons de parler. Deux choses ont sur- prendre ceux des naturalistes qui ont voulu soumettre à un exa- men attentif le genre Solécurte de M. de Blainville : la première, c’est que M. de Blainville dit que ranimai de ce genre est inconnu. L’auteur cite trois espèces pour caractériser trois sections dans sou genre; de ces trois espèces deux sont de la Méditerranée, et toutes deux ont parfaitement bien été figurées par Poli', dans son grand ouvrage qui parut en 1790. L’une d’elles, Solen stri^ilatusj a été le sujet d’une très bonne anatomie faite par le savant napo- litain; la seconde observation, c’est que l’on trouve associées, dans le nouveau genre do M. de Blainville, des espèces qui n’ont

8^.

TROTSl^.ME FAMTtlP.

il6

entre elles que des rapports fort eloign^^s". On ne peut se faire une bonne idée du genre Solôcurto, qu’cn consultant farticlc qui le concerne dans le tome xnis du Dictionnaire des sciences natu- relles : les especes y sont distribuées en trois sections. Dans la première sont celles qui ont une cote à rintérieiir, celles-là sont de véritables Solens ; la seconde contient, à côté du Solen strigilatüs ^ un Soîen alhus qui n’est autre chose que le Caiididiis de RenieiT; enfin, dans la troisième section, nous trouvons les espèces cylindracées telles que le SoUn âOmheyi, le Caribeus et même le d’Adanson. Il nous paraît certain que, si M. de

Blainville eût consulté la description et la figure que donne Adan- son de cette dernière espèce , il aurait reconnu qu’elle doit rester parmi les Solens, et qu’elle n’a aucun des caractères des Solécurles. Il est impossible, ou doit le comprendre, d’introduire dans la science un genre aussi défectueux que celui de M. de Blainville; aussi nous le réduisons au Solen strigilatus et à quelques autres espèces qui lui ressemblent. Le genre ainsi réformé a un ensemble de caractères d’une valeur égale à ceux des Solens et des auires genres que nous admettons dans la grande série des Conchyferos ; ce genre n'aurait qu’une valeur très faible, s’il restait tel que M. de Blainville l’a proposé, puisqu’il faudrait prendre ses carac- tères dans des animaux et des coquilles très différens.

L’animal des Solécurtes est allongé, beaucoup trop grand pour sa coquille , dans laquelle il ne peut jamais rentrer en entier, quolfe quesoitla violencede ses contractions. Sa partiecentraleestrevélue d’un manteau dont les parois, très minces dans une partie de leur étendue, deviennent très épaisses et très charnues vers les bords. Les bords de ce manteau sont désunis dans toute leur moitié an- térieure; la partie ventrale et postérieure est réunie par une large commissure destinée à remplir l’intervalle que les valves laissent entre elles. Cette commissure est consolidée par deux muscles particuliers qui, sous forme de deux bandelettes, viennent se croiser sur la partie médiane de la commissure. Un très grand siphon épais et coriace termine postérieurement la cavité palléale. Ce siphon a environ deux pouces de longueur et se partage , à son extrémité , en deux tuyaux inégaux pour le diamètre et pour la longueur. Ces tuyaux ont une structure bien différente de celle du reste du siphon ; ils sont composés d’un petit nombre d’anneaux fibreux, à fibres transverses, et qui peuvent se détacher les uns des autres avec facilité, lorsque l’animal est mort. Sur le bord ex-

LES SOLÉNACÉES.

117

terne des derniers anneaux , s’élèvent des palpes tentaculaires ex- Il éuieiiieiit sensibles , qui servent à avertir l’animal du contact des corps qui rapprochent.

La bouche s’observe dans le sillon profond qui existe entre lo muscle adducteur antérieur et la hase du pied; cette bouche est médiane, symétrique, Iransverse : elle se présente sous la forme d’une fente assez étroite , garnie de chaque côté de deux petites lèvres membraneuses que Ton voit se continuer en une paire de palpes labiales, lancéolées et fixées sur la partie latérale du corps, dans la moitié de leur longueur. Ces palpes sont très mollasses j elles sont lisses d’un côté, ridées à leur face interne; elles ne sont pas lamelleuses de ce côté comme dans la plupart des conchyfères.' Au point du corps les palpes labiales se détachent , commencent à se montrer de chaque côté uue paire de feuillets branchiaux qui,' d’abord séparés , se réunissent bientôt à la base du pied et vont se prolonger jusqu’à l’extrémité du siphon branchial. Ces feuillets branchiaux sont étroits, presque également larges, et ils présenr lent, dans leur disposition, un caractère qu’on ne rencontre guère dans d’autres genres. Lorsque l’on ouvre le siphon branchial dans toute sa longueur , et lorsque l’on veut soulever la branchie, on la voit se détacher avec une extrême facilité, de telle sorte qu’il semblerait qu’elle est ajustée et seiüement posée dans la place qu’elle occupe ; cependant , en y faisant plus attention , on s’aper- çoit ([UC l’on ne peut détacher celte branchie sans rompre une membrane très mince. Lorsque la branchie est détachée , elle laisse ouverte une large fente qui fait communiquer alors le siphon bran- chiai avec celui qui reçoit les déjections de l’anus. Par ce procédé , on est convaincu que la branchie elle-mémc sert de cloison entre les deux siphons ; ce qui , nous le répétons , ne se montre dans au- cun des genres que nous connaissons. Le pied est énorme, et il a presque la forme et la grandeur de la langue humaine; il est co- riace, d’un rouge livide, et consolidé par des parois musculaires fort épaisses qui viennent se terminer en plusieurs faisceaux qui adhèrent dans l’intérieur de la coquille. C’est entre ces faisceaux musculaires que sont compris les principaux organes intérieurs de ranimai ; c’est-à-dire les organes de la digestion et ceux de la gé- nération. Un œsophage très court pénètre dans un estomac d’un médiocre volume ; de la paroi postérieure de l’estomac, s’échappe une première portion de l’intestin , dans laquelle se trouve con- tenu un stylet corné , dont Tusage est inçonnu, G’çst do l’extrémité

ii8

TROISIÈME FAMILLE.

inférieure de la gaine de ce stjlet que commence fintestin propre- ment dit; intestin qui est très grêle, très long, formant un grand nombre de circonvolutions , dont une grande partie est enveloppée des lobes du foie. Après ces circonvolulions , rinteslin gagne la ligne dorsale et médiane do l’animal , sc contourne sur le muscle adducteur postéi ieur, et se termine derrière lui par un petit pa- villon flouant , au centre duquel on remarque l’anus. Cet anus débouche dans le siphon anal et non dans la cavité commune du manteau , comme cela a lieu le plus ordinairement. Le foie est peu volumineux, il c^l verdâtre, il occupe toute la base du pied, et enveloppe une partie des organes de la digestion. Au moyen de deux ou trois grands cryptes biliaires, il verse immétlialement dans l’cstoniac les produits de la sécrétion. Les organes de la cir- culation sont semblables a ceux des autres concliyfères, et ne mé- ritent pas une description particulière. Les organes du mouve- ment consistent comme dans tous les autres conchyfères dimyaires en deux muscles adducteurs des valves et en muscles propres du pied et des siphons. Ces parties ne présentant pas de grandes dif- férences avec ceux que nous connaissons déjà dans d’autres Mol- lusques de la même classe, nous croyons utile de nous abstenir d’en faire ici une minutieuse description.

Les coquilles du genre Solécurle se distinguent facilement des Solens et de celles des autres genres avoisinans; elles sont allongées, transverses ; les valves sont convexes , et, lorsqu’elles sont rappro- chées, la coquille eït cyündracée. Elle est bâillante à ses extrémi- tés; les bords sont garnis d’un épiderme mince, mais large, des- tiné à couvrir les parties nues du manteau; la charnière est mé- diane, elle SG compose sur la valve droite d’une seule dent cardi- nale en crochet, et sur la valve gauche de deux dents également en crochet entre lesquelles s’interpose la dent delà valve opposée; il n’existe aucune trace de fossettes cardinales. Les valves sont main- tenues en contact au moyen d’un ligament très puissant qui oc- cupe la moitié postérieure du bord dorsal. Par son extrémité pos- térieure, ce ligament se confond avec l’épiderme, et il concourt à fermer le largo bâillement dorsal qui existe entre les valves lors- que CCS parties sont détruites. Les impressions musculaires sont ovalaires, elles sont peu écnriéps ; l’impression paliéalo est assez près du bord ventral. Son sinus postérieur est très profond, on le voit remonter jusqu’au niveau de la charnière. Outre les caractères dont noi>s venons de parler, il en est un autre qui n’est pas moins

LES SOLES ACÉES.

119

important, car nous le retrouvons sans aucune exception éur toutes les espèces, ce sont des stries obliques plus ou moins nombreuses qui descendent en ondulant du bord supérieur des valves, vers les bords antérieurs et inférieurs. Ce système de stries est bien connu dans le Soîcn strigiîatus, et nous le retrouvons sans exception dans toutes les vèritaldes espèces de Solécurtes.

D’après Poli , les Solécurtes habitent les plages sablonneuses à une médiocre profondeur; ils recherchent les mers tranquilles , et il est à présumer qu’il en existe un bien plus grand nombre d’es- pèces que celles qui sont actuellement répandues dans les collec- tions. En réunissant tout ce que nous connaissons sur ce genre, nous y comptons seulement six espèces ou vivantes ou fossiles; de ces espèces, cinq sont vivantes, et parmi elles, deux appar- tiennent à la Méditerranée; l’une d’elles, le Solecurtus strigila- tus ^ se rencontre aussi au Sénégal ; ces deux especes se montrent fossiles dans les terrains subapennins : en Italie, en Sicile et en Morée; et plusieurs variétés se trouvent dans le second étage ter- tiaire delà Gii-onde et de la Touraine. Les autres espèces vivantes, appartiennent à l’ocpan de l’Inde et à l’Amérique méridionale- L’espèce fossile , propre aux environs de Paris, a été confondue ])ar Lamarck, avec le Salen strîgilatus quoiqu’elle en diffère de la manière la plus notable. Ce genre ne s’est encore jamais montré dans les terrains crétacés ou dans les couches qui leur sont infé- rieures.

ESPECES.

Solccurle rose. Solecurtus strigilatus, Blainv.

s, tesld ovato ohlongâ^ convexâ ^ cylmdraccâ ^ tUroque lutcrc hia/Uo, rosedî albo biradiato, oblique striatdy strîis inscidptisy undidatU; cardine hïdtn^ talOy altevo umdentatOi

Chaîna pcîoris, Roüdelcf. Hist. des poiss. p, 6,

Chama nigra, Roudelet. Id, p. 8.

Id, Gessncr. Nomeucl. aqual. p, aSo cl a3t.

/J. Aldrov, Deteslac, p. 471 et 475.

Chama nigra, chama peloris, Jonston. De exuiig. aquat. pl. i4 .

Ronan. Test. part. 2. fig. 77,

Lister, Coiich. pl. 416,

Gualli, lud, testa, pl, yi. fig. G.

120

TROISIÈME FAMILLE.

Le Golar Adans. 6énég. pl, 19.

Solen stn^ilaUis. Lin*Svsl. nat. éd. 10. p. 673,

/</. Lin. luus.UlU'ic. p. 475.

jd.lXn. éd. 12. p. iii5.

Kiior. Vergn. t, 6. pl. 5. fig. 4.

Jd, Murray, Fuudani. Tcsl, aiiuuuil. Acad. l. 8. p. 147. pl. 3. fig, 7.

Id, Born. Mus. p, 26, 27.

Favauue, Conch. pl. 49. f. D. l.

Chemn. Concli. t. 6. p. 57. pl. 6. fig. 41. 42.

Speugler. Mém. delasoc. d’Uisl. nal. de Copeuh. l. 3. p. i6o. lü.

ËQcycl. métli. pl. 224. fij,. 3.

Schrot. Eiul. t. 2, p. Û29.

Gmel. Sysl, nat. éd. i3,.p. 3225. n'’ 7, exclus, varietate.

Olivi. Zool. adriat.p. 97. 5,

Poli. Tcslac. 1. 1. pl. 12.CI p!, r3,

>Yood. Gener. Concli. p. 127. 11” 12. pl. 3ü. fig, i,

Dillw. Cat, t, 1. p. G4. u" 17.

Laoïk. Ann. s, vert. t. 5. p. 435, 1 S.

V f. Solecuvtus slrîgilalus» Blaiuv, Malac. p. 668. p, 79!^ fig. 4.

Solen slrîgdatus, IJesb. Encycl. met. vers, t, 3, p. 962. lo.

Id, Payrcaud. Cat, des moll. de Corse, p. 28. 34.

Solen stri gilatus, Pliilippi. Enum.moll. Siciliæ, p. 5. 11° 5. Exclus, variel, p.

Testa füssiUs. Philip, loc. cit. pl. 0, 6,

Habile la MédileiTanée, les côtes d’Afrî(pie^ le Sénégal. Fossile eu Italie^ eu Sicile, en Morée, dans Télagc supérieur des lerraius tertiaires.

Une variété sc rcucoulrc également fossile aux environs de Dax et de Bor- deaux, dans les falluns de la ïouraiac, aux environs de Vienne eu Au- triche, dans le second étage des terrains tertiaires,

« Cette coquille est allongée, Iransverse, ovalaire ; ses valves sont Ires convexes, ce qui donne à la coquille une forme subcylindacéc, lorsque les valves sont réunies. Le côté antérieur et le postérieur sont trèsbaillans , et les valves ne se touchent réellement que par deux points opposés de leur contour, la charnière, une petite por- tion du bord inférieur ou ventral. La coquille est subéquilalérale, la charnière n*est pas tout-à-fait médiane ; en divisant la longueur de la coquille en cinq parties, la charnière serait vers les deux cinquièmes antérieurs. Les crochets sont à peine proéininens. Im- médiatement au-dessous dVux, Ja charnière présente sur la valve gaucho, deux dents cardiuajes, aplaties latéralement, un peu

LES SOLEWACEKS.

1^1

divergentes, et recourbées en crochet dans leur longueur; sur la valve droite, se montre une seule dent aplatie, qui , dans le rap- prochement des valves, s’interpose entre les dents cardinales de la valve opposée; le bord supérieur dorsal est peu épais, la partie la plus épaissie est occupée par une nymphe épaisse et saillan te sur laquelle le ligament prend une insertion très solide. Les bords sont simples et tranchans ; dans les individus bien frais, ils sont garnis d’une zone assez large, d’un épiderme mince, qui déborde beaucoup la partie solide du tôt, et qui est destinée, comme nous l’avons vu , à couvrir une grande partie de la surface nue du manteau. A l’intérieur, la coquille est lisse et polie, elle est d’un beau rose tendre, blanchâtre, vers l'intérieur des crochets. L’im- pression musculaire antérieure est placée immédiatement au- dessous du bord supérieur; elle est ovalaire, sublougitudinale , et elle se confond par son extrémité supérieure et postérieure avec une autre petite impression ovalaire, produite par un des petits muscles du pied. L’impression musculaire postérieure est située vers le tiers postérieur de la longueur totale ; elle est ovale , semi-lunaire et très rapprochée du bord supérieur. De son angle inférieur et anterieur part une ligue qui remonte d’abord paral- lèlement au bord , et qui étant arrivé au niveau du bord supérieur de l’impression musculaire antérieure, sc recourbe pour se re- porter de nouveau en arrière ; celte ligne est le résultat des mus- cles rélracteurs des siphons , et sa forme , ses proportions doivent être étudiées avec attention, parce qu’elles peuvent être d’un grand secours pour la distinction tles espèces. Le Solen slrigilatus esta l’extérieur d'une belle couleur rose, plus ou moins intense, suivant les individus ; sur cotte couleur, se dessinent deux rayons blan- châtres, divergens, qui partent du crochet. La surface extérieure présente, non-seulement des stries d’accroissement , mais encore un nombre plus ou moins considérable de stries onduleuses , fines, profondément empreintes, et qui se dirigent obliquement du bord supérieur des valves vers le bord inférieur, et quelques-unes vers le boi*d antérieur. Ces stries , comme nous le disions, sont variables pour le nombre. Dans les individus de la Méditerranée, elles varient de dix-huit à quarante , quelquefois davantage ; dans les individus fossiles de Bordeaux et de la Touraine, ces stries se multiplient quelquefois singulièrement sur l’extrémité postérieure de la coquille; et si à ce caractère il s’en était joint quelques au- tres, nous u’aurioas pas hésité a établir ^no espèce particulière pour

122

TROISIEME FAMILIR.

celte variété. Les grands individus ont 48 millimètres de longueur et 82 de large.

Solécurte blanc. Solecurtus cajidklus.T^QÛx*

Testa ovato^iransvcrsâ^ candîdâ et oblique tenue striata ^ in latere postico striîs dîvergentîbns, cardine dexlo hidenlato altero unidentato^sinu palld profundissîmo ^ conîco.

Varletas Soient strîgîlatî, Cbemn, Conch. t, 6. p. 60. pi, 6. fig. 43. Exclus, synonym .

Solcn strigdatiis. Var. Olivi. Zool. adrial.p. 97 el 99.

Soleil candidus» Renieri. Cat. des coq. deTAdriat.

Soleil strigüaius. Var, p. Philippi, Euuin. moll. Siciliæ, p. 5. 3.

Testa fossilis» Solen candidus» Brocchî, Coucli. foss, subap. t. □, p. 497, n** 4t

Id, Philippi. loc. cil. p. 7.

Habite la Méditerranée, se trouve fossile aux environs de Perpignan, en Italie el en Sicile, dansPetage supérieur des terrains tertiaires.

Celte coquille est toujours d’un moindre volume que le Solen strigilatusy et elle est en proportion plus large et plus courte: elle est ovale, oblongue, obtuse, et très bâillante à ses extrémités : le bord inférieur est parallèle au supérieur ; ses boi’ds sont simples dans toute leur étendue, et lorsque les valves sont réunies, elles ne se touchent que par deux points opposés de leurs bords, la char- nière et le bord inférieur ventral; la cliarnière est linéaire, le bord supérieur est très mince; une nymphe courte, dont la lon- gueur égale la sixième partie du grand diamètre de la coquille, est le seul point oii ce bord supérieur soit plus épais ; la charnière consiste sur la valve droite en deux dents cardinales, inégales et recourbées en crochet ; de ces deux dents l’antérieure est épaisse et conique, la postérieure est comprimée, plus oblique, et sublamel- liforme. Une seule dent aplatie et fragile se montre sur la valve gauche. A l’intérieur, les valves sont parfaitement blanches, les impressions musculaires sont à-peu-près de la même taille, elles sont en proportion plus écartées que dans le Solen strigUatus.^Wes sont ovales semi-lunaires^ et l’antérieure est plus oblique que la postérieure. L’impression palléale est encore plus profonde que celle de l’espèce précédente, mais elle n’a pas toul-à-fait la même forme; au lieu d’élre un segment d’un ellipsoïde très allongé, elle est beaucoup plus étroite au sommet et proportionnellement plus large à la base, ce qui provient de ce que la partie inférieure de l’impression est beaucoup plus rapprochée du bord; à l’extérieur.

LES SOLÉNACÉES.

123

cetle coquille est blaiiclie comme en dedans : on remarque vers le bord les restes d^un épiderme mince et caduc d’un brun grisâtre} les stries obliques sont très nombreuses, elles deviennent très fines sur le coté postérieur, ou elles sont disposées en divergeant comme celles du Liicina dwaricafa.

Nous avons quelques remarques a faire sur la manière dont cette espèce a été comprise par la plupart des auteurs. Chemnitz la donne comme une variété du Solen strigilatus y mais par une erreur peu pardonnable à un naluralisie de ce mérite, il rapporte dans la sy- nonymie de celte variété des espèces qui n’ont avec elle aucun rapport. Imitateurs serviles, la plupart des conchyliologues qui ont écrit depuis Chomniîz ont copié sa synonymie défectueuse. Shrœ- ter, Gmelin, Dilhvin méritent le reproche que nous leur adressons d’avoir négligé de vérifier la synonymie de Chemnitz. Celte inté- ressante espèce est plus rare que le Sohn strigiîalus, les individus que l’on rencontre le plus fréquemment ont 25 millimètres de long et 55 de large.

Solccurte de Lamarck, Solecurtus Lainarcldi. Desh.

Tcstâ elongato-transversây angustà, subeqmlateraHi, depressâ^ in medîo coarc-^ tatà^ tenuissime et oblique striatà; striîs postice suhdïvaricaiUy impressîone pallîi angtisiàf oblique ascendente,

Solen strlgilatiis. Lamk. Ann. du mus. t. 7. p, 4a8. 4. et t. 12. pl. 43.

Cg. 5. a. î>.

Id. Desh. Coq. foss. des environs de Paris. 1. 1. p. 27. 11° 6. pl.2. fig. 22. 23.

Solen parlsîensls. Desli. dans Lanik. Ann. s. vert. édit. p. 63. 4.

Habile...., fossile aux environs de Paris, et se trouve aussi à Valognes et en Belgique, dans l’élage Inférieur des terrains tertiaires.

Dans sa description des coquilles fossiles des environs de Paris, Lamarck a donné cette coquille comme une variété fossile du Solen strigilaius ; nous-meme, conduit par son exemple, avons adopté d’abord son opinion lorsque nous avons de nouveau décrit celte espèce dans notre ouvrage qui a pour objet l’examen des memes fossiles ; depuis, nous avons reconnu notre erreur, et nous nous empressons de la rectifier en consacrant à cette espèce le nom du célèbre naturaliste qui le premier Ta fait connaître. Cette coquille est toujours plus petite que les deux espèces qui précèdent, elle est ovale, üblongue, déprimée ; sa forme générale et sa taille se rap- prochent beaucoup des petits individus du Solen coarctatus. Comme

124 QÜATBlÈ.Mii FAMILLE.

celte dernière espèce, celle-ci est sensiblement arcjnée dans sa longueur ; elle est obtuse et très biiiilanle à ses extrémités j elle est .légèrement contractée et déprimée dans son milieu. Elle est plus inéquilatérale que le Solen candidus, et ses crochets sont un peu plus pointus et plus saillans. Le bord cardinal est fort étroit ; on trouve deux dents comprimées sur la valve droite ; une seule non moins comprimée sur la gauche ; les nymphes sont petites, peu saillantes : à l’intérieur, les valves présentent de petites impressions muscu- laires à-peu-près égales, ovales, semi-lunaires; mais ce qui distin- gue pai'ticulièremeut celte espèce de toutes ses congénères, c’est la forme toute particulière de son impression palléale ; elle est petite en proportion de la grandeur de la coquille: dans les autres espè- ces, une ligne transverse qui partagerait la surface interne des valves en deux parties égales, partagerait aussi le sinus palléal en deux cotés symétriques. Dans cette espèce, au contraire , la ligne qui passerait par Taxe du sinus palléal couperait très obliquement Taxe transvorsc, et passerait de Timpression musculaire antérieure dans l’angle inférieur et postérieur de la coquille. Cette obliquité du sinus ii’esL pas le seul caractère qu’il fournisse, il est plus étroit à sou entrée que vers le milieu de sa longueur ; quoiqu’il s’enfonce jusqu’au niveau de la charnière, ce sinus est réellement court, parce que l’iiuprossioii qu’il détermine s’arrête loin de l’extrémité postérieure do la coquille. Les stries , dont celte coquille est cou- verte, sont beaucoup plus fines et plus nombreuses que dans les autres espèces; elles sont onduleuses, très rapprochées sur l’extré- mité postérieure, et uu peu plus largement espacées suivie milieu et sur le coté anî'’ricur. Cette coquille serait li es commune si elle était moins fragile; le plus grand individu que nous ayons vu a i8 millimètres de longueur et 44 fie large.

QUATRIÈME EAMILLE.

Les Glycimerides. Dfish.

GAUACTEHES. Animal ovale, allongé, régulier, symétri- que, ayant les lobes dti manteau réunis clans la plus grande partie do leur éleycluc, et prçlongcg à rcJvtt’éuiilc posté-

J.T.9 GLYCtMHRTDES.

ia5

rieure en deux siphons très allongés, réunis sous une en- veloppe comnume; masse abdominale ovalaire, tcrmine'e par lin pied petit, et presque rudimentaire, en face duquel se trouve au manteau une fente étroite.

Coquille plus ou moins épaisse, très baillante du côté postérieure, charnière simple, calleuse, ayant quelquefois sur chaque valve une dent en crochet; ligament extérieur allongé, très épais, et inséré sur des nymphes saillantes et fort solides.

GENRES. GlfcimerCy Panopée^ Pholadomye,

observations cÉxfRAEES. Lcs trois genres que nous réunissons dans la famille des Glycimérides ont élé diversement distribués par les auteurs avant qu’ils eussent connaissance des animaux de la plupart d’entre eux ; c’est ainsi que Lamarck comprenait dans sa famille des Solénacées les deux genres Panopée et Glycimère. Cu- vier les rassemblait dans son groupe trop considérable des Enfer- més; etM. deBlainvilie les comprenait dans sa famille trop étendue des Pyrolidées. M. Valenciennes daus un ouvrage récemment pu- blié sur les Panopées a proposé de les réunir à la famille des Mjai- res. Sans doute que ces diverses opinions contradictoires en appa- rence apprécient cependant assez juste les rapports naturels des genres, dont il est question ; cependant il nous paraît plus conve- nable encore de proposer pour eux une petite famille à part, parce qu’ils offrent plusieurs caractères que ne présentent jamais ni les genres des Solénacées, ni ceux des Myaires; nous avons vu, en effet, que dans la première de ces familles, l’animal, en proportion de sa grosseur, a un pied très grand, et les siphons généralement courts. Le genre Soléciirte, qui pourrait faire exception sous ce rapport , conserve néanmoins le caractère d’un pied très largement développé. Dans les Myaires, l’animal a bien do la ressemblance avec celui des Glycimérides , mais les coquilles présentent, dans la charnière, des difïérencesdont il faut tenir compte sans leur donner néanmoins plus de valeur qu’elles ne méritent. Dans la famiile des Myaires, nous ne mettons que des coquilles à ligament inté- rieur; et ici, nous comprenons des animaux lies voisins des Myaires parleurs caractères généraux, mais ayant à leurs coquilles un ligament externe.

4 2G QtiTRliME FAMIILE.

Des trois genres que nous réunissons dans notre famille des Gly- cimérides, deux sont entièrement connus, ce sont les Pauopécs et les Glycimères; le troisième, établi depuis peu d*années par M. Sowerby, était généralement fort négligé : quelques espèces , fossiles rassemblés dans les collections, étaient réparties parmi les Lutraires et les Myes , ou étaient confondues avec les Cardites et les Buccards, et enfin, Lamarck en avait rapporté quelques-unes au genre Trigonie. La découverte d’une espèce vivante du genre Pholadomye a fixé enfin l’attention des conchyliologues sur ce genre intéi'essant , et après en avoir étudié les caractères sur un grand nombre d’espèces, nous pensons que ce genre peut être compris dans notre famille des Glycimères ; cependant , comme nous le verrons plus lard, les Pholadomyes, par le peu d’épaisseur de leur tel, ont beaucoup de rapport avec les Tiiracies et les Ana- tines, mais elles en diffèrent essentieliement par la position du li- gament. Nous ne pensons pas que les rapports que nous donnons aujourd’hui à ce genre soient définitifs, iis ne le deviendront qu’au moment l’animal sera connu.

Les animaux de la famille des Glycimères présentent plusieurs caractères communs: leur manteau est généralement épais; ses bords sont larges, fortement adhérens à la coquille sur laquelle ils laissent une impression profonde. Les siphons, qui terminent postérieurement l’animal, sont très allongés et fort épais; réunis sous une enveloppe charnue commune , ils peuvent prendre un allongement très considérable, et l’animal vivant profondément enfoncé dans lesable, sans quitter les profondeurs il se cache, se sert de cette grande extensibilité de ses siphons pour communi- quer avec le liquide ambiant et établir les couraus nécessaires à l’entretien de ses fonctions. Dans les Panopées, ces siphons ont un muscle rélracteur très court, mais très épais, qui laisse sur la co- quille une impression plus ou moins sinueuse, selon les espèces: ppus en connaissops une curieuse sous ce rapport, dans laquelle celle sinuosité est presque entièrement effacée. Dans les Glyci- mères les siphons sont en proportion plus courts, mais ils sont beaucoup plus gros. Au reste, cet animal n’est connu que dans un état violent de coulraction, et il est à présumer que, pendant sa vie, ses diverses parties jouissaient d’une grande extensibilité. La grande épaisseur des parois musculaires de ces siphons annonce que l’animal peut les allonger considérablement.

trs GIïCüïEniPES.

127

GENRE ONZIÈME.

OLTCIMÈRE. Glycîmcris» (Lamk.)

PI. 4.fîg. 1-2-3.

CARACTERES GÉNÉRIQUES. Animal ovalc , oblong , subcy- llndracé, partout d’un noir très foncé j lobes du manteau fermés dans presque toute leur circonférence. Une petite ouverture antérieure en face de l’extrémité de la masse abdominale ; deux siphons réunis sous une enveloppe commune, extrêmement épaisse, et présentant deux petites ouvertures à l’extrémité. Palpes labiales , grandes et détachées dans presque toute leur étendue. Pied petit , placé au sommet d’une masse abdominale considérable; branchies larges et flottantes dans la cavité du siphon branchial.

Coquille ovale , transverse , très baillante de chaque côté;

, charnière calleuse, sans dents, nymphes très saillantes pour un ligament extérieur bombé; épiderme très épais et débordant.

STNONYxRiE GÉNÉRIQUE. savcur clouceâtre*

Mja siliqua; Chemnitz. Cyrtodaria ; Daudin.

OBSERVATIONS. Lcs ancicDS donnaient le nom de Glycimères, en grec ^X'jxup.est^'sç , aux substances qui ont un goût douceâtre ou fade; plusieurs Mollusques comestibles furent indifleremnient dé- signés sous ce nom, et'Pline l’applique particulièrement à quelques coquilles bivalves que les auteurs du seizième siècle crurent recon- naître, soit dans lesMyes, soit dans les Lulraires. Rondelet, et après lui Gesnor et Jonston pensent que le Ckama glycimens de Pline est une coquille vivant en abondance dans l’Océan euro- péen , et que Linné a rapportée à son genre Mje , sous le nom de Mya arenaria;k celte espèce, Aldrovandeen ajoute deux autres: la première est VAnodonta cygnœa , la seconde est devenue le type du genre Panopée. La nomenclature linnéenne , ayant abandonné

128 OüATRïKHi: mrln.E.

le Chaîna glycimcns des anciens auteurs , Lamarck a repris ce mot , oublié et abandonné pour rappliquer à un genre que les anciens ne connurent jamais, et dont Linné lui-même ne fait pas mention. Lamarck n’a pas eu toujours la même opinion sur son genre Glyciniére: il rétablit d’abord dans les mémoires de la société d’histoire naturelle , en 1799, pour le Mya glycxmeris de Born , qui est une véritable Panopée. La mémo année , Daudin proposait sous le nom de Cyrlodaire, un genre ayant pour type le Mya siliqua de Cliemnilz, mais Lamarck, en pu- bliant , en 1801 , son Système des animaux sans vertèbres, trans- porta le nom Glycimères du Mya glycîmeris de Born , au Mya si- îiqiia de Chemnitz. Ce genre avait donc deux noms, celui de Daudin et celui de Lamarck ; mais les travaux de ce dernier zoo- logiste ayant prévalu, le genre de Daudin fut oublié , et celui de Lamarck adopté. M. Roissy le mentionne dans le Bufibn de Son- nini, et depuis il fut maintenu dans toutes les méthodes. Aucun zoologiste ne contesta la valeur de ce genre, mais tous ne furent pas d’accord sur la place qu’il devaitoccuperclans la série. Dans la clas- sification des Mollusques que Lamarck publia en 1801, avec cette sagacité qui caractérise ce grand naturaliste, il mit les Glycimères entre les Solens et les Myos. Lorsqu’il créa des familles natu- relles, dans sa philosophie zoologique, il entraîna les Glycimères dans la famille des Solénacées 5 mais comme cette famille est suivie de celles des Myaires , l’ordre des rapports ne fut véritable- ment pas changé. Cuvier, dans sa classification du règne animal, a constamment maintenu le genre qui nous occupe dans Ig voisi- nage deMyes.De tous les zoologistes, celui qui a été Je plus incer- tain au sujet des Glycimères est M. de Blainville: d’abord, dans son article Glyciraère du Dictionnaire des sciences naturelles, il suppose que l’animal est voisin de celui des Solens. M. de Blain- yilie maintient cette opinion clans son article Mollusques du même ouvrage, ainsi que dans son Traité de malacologie j mais en consultant les corrections et additions qui sont à la suite de cet ouvrage, on trouve, à la page 682, une note par laquelle M. de Blainville change d’opinion, et paraît entièrement convaincu c|ue le genre Glycimère doit être transporté dans sa famille des Sub- mylilacées , dans le voisinage des Bïullettes et des Anodonles. Pour appuyer cellenouvelle manière de voir, M. de Blainville prétend que le bâillement des coquilles n’a rien de commun avec celui que l’on observe dans celles de sa famille des Pyloridées. Mais clans les nou-

LES rrLYCtMEIVlDES. 1^9

velles additions et corrections, M. de Blainville revient sur ses deux premières opinions, et en propose une troisième qui con- siste à rapprocher les Glycimères des Solèmyes. Après ces contra- dictions dans un aussi savant anatomiste que M. de Blainville, les conchyliologues devaient éprouver de Tembarras pour placer le genre Glycimère, et il devenait nécessaire d’ajouter la connais- sance de l’animal a celle de la coquille, pour déterminer enfin les rapports naturels du genre. Pendant Je peu de temps queM. Au- douin a occupé la chaire de conchyliologie au Muséum d’histoire naturelle, il trouva , dans les collections, un bel individu de la Glycimère avec son animal conservé dans la liqueur ; il s’empressa de le faire dessiner, et il en fil une anatomie qu’il publia, en i 829, dans le vingt-huitième volume des Annales des sciences naturelles. Quelques années après, on sut que la Glycimère vit en abondance dans les plages sableuses du banc de Terre-Neuve ; etM. Caillaud qui en reçut des premiers, eut roblige'ance de nous communiquer cet animal intéressant. Depuis cette époque, les zoologistes ont pu établir convenablement et définitivement les rapports des Glycimères avec les genres qui l’avoisinent. M. Audouin conclut que le genre qui nous occupe est plus voisin des Myes que des Solens ; nous pensons que celle appréciation confirmative de l’opi- nion de Cuvier est plus juste que celle de Lamarck.

L’animal des est allongé , cylindracé, fort épais ; ses

extrémités sont obtuses, et la partie qui est recouverte par la coquille comprend à-peu-près les deux tiers de sa surface totale. Les lobes du manteau sont épais, musculeux sur les bords. Ces bords , en partie à découvert , sont garantis par un épiderme coriace, plus épais que dans la plupart des autres Mollusques de même taille, et se continuant avec celui de la coquille. En exami- nant le manteau, on trouve, à son extiémilé antérieure, une fente de quelques ligues d’étendue dans laquelle ranimai peut passer son pied. Lorsque les siphons sont contractés , ils sont épais et cylindriques, réunis en une seule masse charnue, très épaisse, au sommet de laquelle on trouve deux petites ouvertures qui commu- niquent avec la cavité intérieure des siphons. Si l’on coupe en travers ces siphons , on voit qu’ils sont inégaux et séparés dans toute leur longueur par une cloison longitudinale. Le plus petit, qui est le supérieur, est destiné à Tanns ; l’autre est destiné à rece- voir une partie des branchies. Lorsque, par une section longitu- dinale , on sépare les lobes du manteau , on trouve dans leur

y

QUATRIEME FAMILLE.

l3o

cavité une masse abdominale, oblongue, assez épaisse, à l'extrémité antérieure de laquelleeal implanléun petit piedconiqueetréduit à Téiat rudimentaire. Sur Ja ligne médiane, entre le muscle adducteur antérieur et la niasse commune des viscères , on trouve l’ouverture de la bouche profondément cachée et garnie de très grandes lèvi es qui se continuent, de chaque côié, en une paire de grandes palpes labiales, triangulaires, libres et très finement striées en leur face interne. Cette bouche pénètre dans l’estomac au moyen d’un œso- phage membraneux assez long. L’estomac, comme dans la plupart des A-céphalés , est une poche ovalaire , enveloppée par la masse du foie et recevant, par deux cryptes biliaires principaux, les produits de la sécrétion de celle glande. Vers l’extrémité postérieure de l’estomac, s’ouvre l’ouverture pylorique débouchant dans un intestin grêle, contourné en un assez grand nombre de circonvolutions très petites et irrégulières. C’esl après s’elre ainsi tortillé, qu’il se place dans la ligne médiane et dorsale de l’animal, et vient se terminer en un anus très court, à l’origine du siphon anal. Lorsque l’animal est contracté, ses branchies sont assemblées en un paquet plissé comme un jabot, situé à l’extrémité postérieure de la masse viscérale. Comme dans le plus grand nombre des Mollusques conchiferes, il y a deux feuillets branchiaux de chaque côté. L’extrémité anté- rieure de ces feuillets vient se placer entre les palpes labiales, tandis que leur extrémité postérieure flotte librement dans la cavité du siphon branchial.

La coquille des Glycimères est ovale, oblongue: elle est assez épaisse, et les valves rapprochées restent exlrêmemetil bâillantes à l’extrémité postérieure. Ce bâillement n’est pas le résultat d’une troncature comme dans les Myes et les Panopées; niais il com- mence vers l’extrémité antérieure et va en s’augmentant jusqu’à l’extrémité opposée. Le lest est épais, et il est constamment revêtu d’un épiderme d’un brun noirâtre, qui, dans les grands individus, déborde de près de deux lignes la partie calcaire. Les valves sont très inéquÜatérales, et , comme dans les Solémyes, c’est le côté postérieur qui est le plus court. La charnière est simple: son bord est calleux: elle se termine par deux nymphes très épaisses, sur lesquelles s’attache, avec solidité, un ligament extérieur, très épais , convexe , et dont l’extrémité postérieure se continue avec l’épiderme. A l’intérieur des valves , on trouve deux impressions musculaires fort écartées , dont l’antérieure est oblongue et triangulaire, tandis que la postérieure, placée louiprès du bord, est

LES GLYLIMEAIDES.

l3l

ovalaire et semble se confondre avec l’impression du muscle rétrac- leur des siphons. Ce muscle ne laisse sur la coquille qu’une échan- crure Ires courie, et l’on conçoit qu’il pouvait en eire ainsi chez un animal dont les siphons sont beaucoup Irop considérables pour pou- voir entrer jamais dans l’intérieur des valves. L’impression palléale, à la prendre depuis l’impression musculaire postérieure, est d’abord voisine du bord ventral ; elle y reste parallèle dans une partie de son étendue ; mais bientôt elle rentre obliquement pour gagner par le piuscourt chemin l’extrémité de l’impression musculaire antérieure.

Lamarck a compris, dans son genre Glycimère, plusieurs espèces qui ne peuvent y rester : l’une, Glycimeris arctica, est une véri- table Panopée; l’autre, Glycimeris margaritacea , est un fossile de Grignon , que nous avions pris d’abord pour ïine valve libre de Clavagelle; mais, après un nouvel examen de plusieurs valves, que nous avons fait avec M. Valenciennes, nous avons reconnu que cette espèce doit également être rangée dans le genre Panopée; ainsi, jusqu’à présent, il n’y a qu’une seule espèce de Glycimère connue, c’est la suivante :

ESPÈCE.

Glycimère siliqiie. Glycimeris siliqua, Lunik. pl. 4- fig. i. 2. 3.

Testa ovato-iransversâ , hiantissimà^ inœquilateraîi ; latere postico breviore , valvulis epîdermide nigerrimo indutis , intiis disco calloso incjassatis .

Mya siliqua, Spengler. Cat. rais, t, 3. p. 48.

Id. Chemn. Conch, l. 1 1. p. igti. pl. 198. f. 1934,

Favanne. Conch. pl. 62. f. EE.

Glycimeris incrassaia, Eamk. Syst. dosa, s, veit. p. ia6.

Cyrtodaria. Daudin. Bulletin des sc. nivôse an vu. aa.

Bosc. Hist, nal. des coq. t. 3. p. 5. pl. 17. fig. i. a.

Roissy. Buf. de Sonuini. t. 6. p, 428. pl. 70. fig. 3.

Mya picea, Wood. Gener. (ionch. p. 96. pl. 22. fig. 5.

Mya siliqua. Dillw. Cal. t. r. p. 49. 21.

Blainv. Malac. pl. 80. fig. 3.

Mya picea, Wood. Ind. lest, p, n. lo. pl. 2. fig. 10,

Glycimeris siliqua. Sow, Gener. ofshells. 8.

Laink. An. s. vert, t, 5, p. 458. 11** i.

Desli. Encycl. méth. vers. t. 2.p, 17 1.

Audouin. Ann. des sc. nat. t. a8. pl. 14. i5.

Desl). dans Lamk. An. s. vert, éd. i. 6, p. 69. n* i.

Habile dans les parties sableuses des côtes de Terre-Neuve.

9

QlTATRl^^Mü FAMILLE.

î32

Coquilie ovale allongée, iraiisverse, très bâillante et très iné- quilalérale. Sou côté postérieur est très court, les valves sont re- vêtues d'une coucbe épidermique fort épaisse, lisse ou obliquement striée, qui déborde quelquefois de près de deux lignes la partie calcaire du test; les crochets sont presque toujours décortiqués, ce qui donne à celle coquille quelque ressemblance avec celles des Muleltes et des Anodonles. Le bord cardinal est simple et sans dents J il est terminé, à rextréraité postérieure,, par une très grosse callosité qui n’est autre chose que la nymphe devenue très épaisse et très solide pour donner insertion à un ligament très puis- sant; ce ligament est extérieur, très bombé; il se continue, en arrière surtout, avec la partie de l’épiderme qui recouvre ranimai dans les endroits que la coquille laisse à nu. Les caractères intérieurs, dont nous avons parlé dans la généralité du genre, ayant éié empruntés a celle espèce, nous pensons qu’il est inutile de répéter ici ce que nous avons dit précédemment. Les grands individus ont 85 millimètres de large et de longueur.

GENRE DOUZIÈME.

FAM'O.fiÉE. Panopœa (Mén. de la Groje).

PI. 7. fig. 1-5.

GARACTÈKES généhiquës. Animai ovale, oblong, tron- qué antérieurement, prolongé du côté postérieur en deux longs siphons, réunis sous une seule enveloppe cylindracée, épaisse, ridée et ouverte à son extrémité postérieure par deux trous inégaux. Les lobes du manteau réunis dans toute leur étendue, si ce n’est dans la troncature antérieure, se montre une petite fente pour le passage du pied. Masse ab- dominale considérable , portant à l’extrémité antérieure un pied petit et rudimentaire. Feuillets branchiaux très inégaux. Coquille ovale, transverse, équivalve, inégalement bâil- lante sur les côtés. Charnière , ayant sur chaque valve , une dent côuique; nymphes épaisses et calleuses pour un liga-

LES PANOPÉES.

i33

ment extérieur bombé. Impression palléale écliaucrée pos- térieurement.

SYNOXYMiB GÉNÉRIQUE. Chatïia glycimevls; Aldrovande. Mya glycimeris; Born, Graelin, Dillw., etc. Genre Glycimeris ^ Lamk. 1799. Panopœa Ménard^ Lamk, Cu- vier, etc., etc.

OBSERVATIONS. Adrovande est le premier qui ait fait connaître, dans son traité des Testacés, un grand individu du genre Pano- pée , il lui donne le nom de Chama glycimeris. Celte espèce , re- produite par Lister, a été comprise par cet auteur Judicieux dans le voisinage des Solens et des Myes. Gualtieri Ta également figu- rée, et Born,sans donner d'importance à la position du ligament, a placé cette grande coquille dans le genre Mya sous le nom de Myn glycîmeris, Klein a essayé, dans son Tentamen astracologicœ , d’établir un genre Glycimère, mais il fut malheureux dans cette tentative, car il confondit dans son genre non-seulement le Chama glycimeris d’Adrovande, mais encore des Lutraires et desTellines. Comme nous l’avons dit déjà en traitant du genre Glycimère, Lamarck proposa de nouveau le genre de Klein dans les Mémoires de la société d’Histoire naturelle, mais uniquement pour l’espèce d’Adrovande, que Born avait mieux fait connaître par une ex- cellente figure. Cette dénomination de Glycimère, qui s’appli- quait si convenablement à la coquille d’ Adrovande, futdélournéo et appliquée au genre Sertodaire de Daudin ; aussi on ne peut qu’approuver M. Meynard de la Groye qui, en 1807, créa le genre Panopée, et donna la figuré d’une, espèce fossile dans les Annales du Muséum. Quelques années plus tard, dans sa Philo- sophie zoologique, Lamarck a adopté le genre Panopée et l’a placé parmi ceux de sa famille des Solénacées; depuis celle épo- que, les rapports du genre furent conservés les mêmes par La inarck dans ses différens travaux. Cuvier, n’attachant que peu de valeur à la position du ligament dans les coquilles, fit des Pa- nopées un sous-genre des Myes, et le comprit dans sa famille des Enfermées, entre les Glycimères et les Pandores. Dans ses ta- bleaux systématiques, M. de Férussac, tout en admettant les So- lénacées de Lamarck, y a introduit plusieurs genres que Lamarck plaçait ailleurs, de telle sorte que les Panopées s’y trouvent dans les memes rapports indiqués par Cuvier, entre les Glycimères et

I 34 QUATRIÈME FAMILLE.

les Pandores. La famille des Solénides de Latreiüe se rapproche, à quelques égards, de celle de M. de Férussac, mais il y met de plus les Hyalelles dans le voisinage des Panopécs, quoique ces Hyatelles ne puissent se distinguer des Saxicaves et des Bissomies. M, de Blainville a moins varié pour ce genre que pour celui des Glycimères; dans son Traité de Malacologie, il le comprend dans sa famille des Pylorides, entre les Solémyes et les Glycimères. L’animal des Panopées était resté inconnu , de sorte que l’on pou- vait encore conlesler, à certains égards, les rapports du genre.

II y a quelques années, le bâtiment de l’étal la frégate V Héroïne^ commandée par M. le capitaine Cécile, en croisière dans les mers delà pointe australe de l’Afrique , fit une station sur la côte Natale, à la baie des Tigres, et les oificiers, en visitant cette baie, virent à !a surface du sable saillir les siphons d’un animal mollusque; ils essayèrent d’arracher du sable cet animal, mais les siphons se rompirent, de sorte qu’ils se délermincrent à faire les fouilles nécessaires pour retrouver l’animal qui leur avait échappé. Ils virent que cet animal était une grande et belle espèce de Panopée dont ils trouvèrent plusieurs individus qu’ils curent soin de con- server dans la liqueur : Tun d’eux fut acheté par Je Muséum, pour sa collection zoologique, et M. Valenciennes le fit repré- senter avec exactitude et en donna les caractères génériques. Dans le même temps, un individu de la meme espèce fui commu- niqué à M. Qnoy, qui en envoya le dessin à M. de Blainville, qui s’empressa de le publier dans les Archives d’anatomie et de physiologie. M. Valenciennes ne se borna pas à faire connaître l’espèce vivante rapportée par M. Cécile, il joignit à son travail des recherches sur toutes les espèces connues dans le genre , et il en fît une très bonne monographie qui vient à la suite de son tra- vail anatomique. On trouve ce travail dans le premier volume des Archives de l’histoire naturelle.

L’animal de la Panopée est ovale oblong, il est épais, très charnu ; les lobes du manteau sont réunies dans toutes leur éten- due si ce n’est sur le côté supérieur oii ils laissent ouverte une petite fente pour le passage du pied. L’extrémité postérieure du manteau se teimine en deux siphons réunis en une seule masse cylindrique qui a au moins une fois et demie la longueur de la coquille : cette longueur est celle de l’animal contracté, mais il est à présumer que pendant la vie, ces parties peuvent acquérir une bien plus grande longueur. Lorsque l’on divise les lobes du

LUS l’ANOPÉES.

l35

manteau par une section longitudinale, on trouve dans leurs ca- vités une masse viscérale considérable , surmontée antérieurement d’un petit pied obtus et rudimentaire. A l’extrémité antérieure de cette masse viscérale , derrière le muscle adducteur anléiieur, se trouve l’ouverture de la bouche , ovale , transverse , accompa- gnée de lèvres minces et larges, qui se prolongent de chaque côté en une paire de grandes palpes labiales, dont la surface in- terne est chargée de fines lamelles membraneuses. De chaque côté du corps , se montre une paire do branchies dont les feuillets sont très inégaux. Les feuillets internes s’étendent depuis l’extrémité postérieure de l’animal , jusqu’à la base des palpes labiales. Les feuillets externes commencent un peu au-dessus de l’extrémité postérieure de la masse viscérale , et viennent se terminer, comme les autres, tout près de l’entrée du siphon branchial. A. ces détails que nous puisons dans la figure de M. Valenciennes, nous ajou- terons, d’après lui, que de chaque côté de la partie amincie et postérieure de la masse abdominale, à l’endroit oii l’intestin va s’engager dans le siphon , on voit les deux orifices des organes gé- nitaux : un antérieur, formant une petite ouverture ovale en- tourée d’une papille saillante, et par derrière, une seconde ou- verture plus grande, sans papille et sans bourrelet. L’œsophage, ajoute M. Valenciennes, est très court. Il se dilate en un estomac assez large, plissé intérieurement et comme divisé en plusieurs compartimons par les crêtes formées par les replis de la tunique in- terne. Cet estomac occupe la partie supérieure de l’abdomen, et l’intestin se contourne une dizaine de fois sur lui-méme avant de se plonger dans le siphon.

Les coquilles du genre Panopée sont généralement grandes et épaisses; elles sont ovalaires, presque toujours tronquées du côté postérieur; elles sont très bâillantes, mais beaucoup plus de ce côté postérieur que de l’autre. Dans toutes les espèces connues jusqu’à présent, la charnière est très simple; elle consiste en une seule dent cardinale , conique, étroite , courbée en crochet , dont l’ex- trémité est reçue dans une cavité correspondante. Une nymphe très grosse, calleuse, donne insertion dans un sillon profond à un ligament extérieur très épais, convexe, demi cylindrique. Pi’es- que toutes les espèces de Panopéessont suhéquilatérales; toutes sont très convexes, bombées, à crochets proérainens et opposés. A l’ex- ception d’une seule qui a quelques côtes longitudinales, toutes les autres espèces sont lisses, ou marquées de stries inégales d’ac-

i35

OUATKIKMK CAMILLE.

croissement. Dans riulérieur des valves, on trouve très écartées Tune de Taulre et placées aux extrémités du bord supérieur deux {iraudes impressions musculaires , ovalaires , et subtransverses. L’impression palléale laisse, dans l’intérieur des valves, des traces très profondes , ce qui annonce que le manteau a un bord muscu- laire fort épais, et qu’il est très adhérent à la coquille. Lorsque l’on a sous les yeux la plupart des espèces actuellement connues, soit vivantes , soit fossiles, on observe de très grandes différences dans la sinuosité postérieure de l’impression du manteau. La forme de celte impression peut donner de bons caractères pour distinguer les espèces. C’est dans l’espèce fossile des environs de Bordeaux que se montre la sinuosité la plus profonde dans l'impression pal- léale : cette sinuosité diminue dans l’espèce des environs de Paris ; elle est moindre encore dans celle d’Amérique, elle se trouve on proportion plus courte dans l’espèce de la Méditerranée ; dans la Panopée arctique , elle a presque disparu , et enfin elle est réduite à une inflexion à peine apparente , dans une espèce du terrain crétacé de la Touraine, à laquelle M. Dujardin a donné le nom du Panopcca cretosa.

D’après tout ce que nous venons de dire, il est facile maintenant d’estimer les caractères zoologiques des Panopées et de déterminer rigoureusement les rapports de ce genre avec ceux qui l’avoisinent le plus.llestévideritqu’ilse rapproche beaucoup plus des Myes que des Solens par l’animal surtout; il se rapproche extrêmement du premier de ces genres; et, certainement, si l’on s’attachait unique- ment à établir le rapport des Mollusques, sans tenir compte de la coquille, le genre Panopée devrait tMitrcr dans la famille des Myaircs. Mais la coquille étant une partie intégrante du Mol- lusque dont il est question, doit entrer pour quelque chose dans l’eslimatioa des caractères généraux, et c’est pour cela que nous comptons les Panopées au nombre des genres de notre famille des Glycimères-

On pouvait déjà présumer, d’après les caractères de la coquille, quelles sont les mœurs de l’animal qui l’habile ; on supposait, qu’à l’exemple des Myes et des Solens, les Panopées vivent profondé- ment enfoncées dans le sable , et les observations du capitaine Cé- cile et des officiers de son bord, ont changé en une vérité désor- mais acquise à la science , les prévisions des zoologistes.

Il y a quelques années qu’on ne connaissait encore qu’un petit nombre d’espèces appartenant au genre Panopée. Une seule vi-

lï.S 1‘ANOPÉES.

137

vante, de la Méditerranée, se trouvait dans quelques collections. MM. Quoy et Gaimard en firent connaître une seconde des mers australes; en passant dans ce genre le Mya nonvegtca de Spen- gler, devint la troisième espèce. M. Sowerby en fit connaître une quatrième; c’est celle dont l’animal a été récemment décrit par M. Valenciennes : c’est le Panopœa australis. Enfin , une cin- quièni.e espèce a été rapportée par M. d’Orbigny, des côtes de Pa- tagonie ; elle a été nommée Panopœa abhreviata , par M. Valen- ciennes. Â ces cinq espèces vivantes il faudrait, d’après M. Valen- ciennes, en ajouter dix fossiles ; ce qui porterait à quinze le nombre des espèces. Ce n’est pas ici qu’il convient de discuter la valeur de chacune dVIles; nous ajouterons seulement, que ce genre ne des- cend pas dans le terrain oolilique, comme l’a cru M. Roemer. Les tervains les plus inférieurs il se montre appartiennent à la craie moyenne; on le rencontre ensuite dans tous les terrains tertiaires. Dans ces terrains, les espèces y sont distribuées avec régularité et peuvent servir à les caractériser. Nous citerons les espèces sui- vantes ;

Panopœa intermedia. Desh.

Cette espèce , des argiles de Londres , figurée par M. Sowerby , est la même que nous avons découverte aux environs de Paris, et à laquelle M. Valenciennes a bien voulu donner notre nom.

Panopœa Meynardi, Desh.

Nous avons décrit sommairement cette espèce dans le Diction- naire classique, tome xiii, page 22. C’est celle à laquelle M. Va- lenciennes a donné le nom de Panopœa Basteroti, Elle est fossile aux environs de Dax et de Bordeaux , et ses fragmens ont été trou- vés dans les faluns de la Touraine. Cette espèce , ainsi que celle recueillie par M. Dubois de Moniperreu, dans les terrains ter- tiaires de la Volhynie, peuvent caractériser l’étage moyen des ter* rains tertiaires.

Panopœa Aldromndi, Lamk.

Habitant la Méditerranée, et , dit-on , les côtes d’Espagne. Cette espèce est la plus anciennement connue. Une de ses variétés , un peu plus petite, se trouve en abondance à l’état fossile en Italie , en Morée et dans les terrains récens de la Sicile.

i83

QUATKIÈME FAMILLE.

ESPÈCES.

Panopée d’Aldrovancle. Panopœa ÂklromndL Lamk. pl. 7.

fig* it

Testa magna J crassa^ ovato* transversa^ subœquilatera lœvigata^ utrmque hîante. Chama glYcimeris^ Aldrov, de Exang. p. 473. 474*

Bonan. Rec. part. 2. fig. 5û.

Lister. Concb. pl. 414. fig. a58.

Gualt.Iud, lest. pl. 90. fig. A.

Klein, Tent. ostrac, pl. i, fig, 72.

Born. Mus, pl. i. fig. 8. Mya glycimcris,

Chemn. Conch, t. 6. p. 33. pl, 3. fig. aS.

Sclu’ot. Einl. t. 2. p. 6tS. Mya. ii.

Mya glycimerîs, Gmcl, p. 3222. 17,

Donovan. Brit. shells. t. 4. pl. 142.

Spengler. Mém. de la soc, d’bist. nat. de Copenh. l. 3.p. 43. 11° 17,

Wood. Gener, Concb. p. 114. 11041. pl. 25. fig. r.

Panopœa Aldromndi, Ménard. Aon. du mus. t. 9. p. i3i. no i.

Mja glycimeris, Dillw, Cal. t. i. r, panopœa Aldromndi. Blainv, Malac. pl, 80. fig. 2.

Desh. Encyc, mélh. vers. t. 3. p. 698.

Lamb. An. s. vert. t. 5. p. 457. i.

Wood. Ind. test. p. i3, 4r. pl. 3. fig, 41.

Pbilippî, Enum, moll, Sicil, p. 7. pl. 2. fig. 2,

Valenciennes, Archives du mus. t. r. p. 33.

Testa fossiUs, Panopœa Faujasî. Ménard. Ann. du mus. t. 9, p. i3i.n02. pl. 12.

Mya panopœa. Broccbî. Conch. foss. subap. t. 2. p. 538. 4.

Panopœa FrtKyaii. Vaîenc. Arcb.du mus. t. i. p. i3.

Habite la Méditerranée et les côtes d’Espagne, d'après Lister. Elle se trouve fossile dans le Plaisantin, en Sicile et en Morée.

Cette coquille est Tune des plus grandes bivalves connues; elle est ovale, transverse, obtuse à ses extrémités. Elle est presque iné- quilalérale , et ses valves convexes ont des crochets saillans et op- posés. Le côté postérieur est généralement un pou plus étroit que ranlérieur, et son bâillement est bien plus considérable que celui du côté opposé. Le bord cardinal est presque droit; il offre, sur chaque valve, et immédiatement au-dessous du crochet, une dent

L£S FANOPEES.

i39

cardinale, conique, l'edressée, un peu recourbée dans sa longueur, et légèrement comprimée laiéralement. A côté de celte dent, se trouve une fossette peu profonde, dans laquelle vient se placer le sommet de la dent opposée, lorsque les valves sont réunies. La surface extérieure est lisse et marquée de sillons irréguliers d’ac- croisseraens. A fintérieur, les valves sont blanches, quelquefois un peu rosées vers le centre. Dans les vieux individus , l’impression palléale est profondément empreinte dans répaisseur du test, et le bord, fortement épaissi eu dedans, ressemble à un gros bourrelet un peu déprimé. La sinuosité postérieure de l’impression du man- teau est triangulaire , obtuse au sommet ; et si l’on fait passer une ligne qui partage ce triangle en deux parties égales, celte ligne di- visera la coquille transversalement en deux moitiés presque égales. M. Valenciennes a distingué une variété principale, dont les valves, plus larges et plus quadrangulaires, sont beaucoup plus înéquilalérales. Dans cette variété, c'est le côté postérieur qui est le plus court. Nous pensons que l’on doit considérer comme autant de variétés les individus fossiles pour lesquels M. Majnard de la Groye a fait sou Panopœa FavjasL Généralement plus petits, ces individus sont aussi plus minces que ceux que l’on a vivans. M. Valenciennes les distingue particulièrement parce qu’ils n’ont pas celte troncature oblique qu’on remarque sur le côté antérieur des vieux individus vivans. Mais si l’on étudie les stries d’accrois- sement de ces vieux exemplaires , on s’aperçoit [bientôt que, dans le jeune âge, cette troncature n’existe pas. Nous avons des individus fossiles de diverse taille, et parmi eux, il s’en trouve un qui, appliqué sur un grand individu vivant, offre, dans le contour de ses valves, la môme forme et les stries d’accroissement de ce grand individu. Nous avons observé, parmi les fossiles rap- portés de Ja Morée par M. Virlet, un très grand fragment de Pa- nopée, qui annonce que la variété fossile acquiert une taille et une épaisseur aussi gi’andes que dans la variété vivante. Les individus de taille moyenne ont i3 centimètres de long et 23 centimètres de large. Lorsque les valves sont réunies, la coquille a 90 milli- mètres d’épaisseur.

Panopée de Ménard. Panopœa Menardi, Desli, pl. 7. lîg. 2. 3.

Testa ovato’ohlonga iransvcvsa^ inœqiiilatera antice latiore, obliqué suhtrun^ cata, mx hiautc^ postice rotundata, kîantissima^ 'valvis ad apicem irregii- lariter pîicatïs ; sînu palîii profundissîmo.

l4o (JUATRIÈME VAMILLK.

Desh. Dict. class. d’hist, nat. t. i3. p, 22. i8a8.

Panopœa BasterotL Valenc; Arch. du mus. t i, p, ai.pl. 6. fig. a. a. b.

Habite fossile aux environs de Bordeaux et dans les fatuns de la Touraine» Nous avions depuis long-temps donné une description sommaire de celte espèce dans le Dictionnaire classique d^histoire naturelle , lorsque M. Valenciennes lui imposa un autre nom que nous ne pouvons accepter, puisqu’il en existe un autre antérieur de plus de dix ans. Cette coquille se distingue avec la plus grande facilité de toutes les autres espèces du même genre ; elle est ovale, oblongue, Iransverse, inéquilaiérale ; son côté antérieur est le plus court : ce côté, dans les vieux individus, est plus large et plus dilaté que le postérieur. L’extrémité postérieure est arrondie ; elle est fortement bâillante, tandis que sur le côté antérieur, l’écartement des valves est beaucoup plus étroit. Les crochets sont assez saillans; ils sont opposés et peu inclinés en avant. Le bord cardinal est droit; il offre à chaque valve une petite dent cardinale, étroite et compri- mée ; la nymphe est grande, épaisse, et en proportion plus allongée que dans le Panopœa Aldromndi; elle est moins subitement tron- quée à son extrémité antérieure. L’impression musculaire anté- rieure est plus longue et plus étroite que la postérieure; la sinuosité palléale est très profonde, car, si l’on fait tomber une ligne per- pendiculaire depuis le crochet jusqu’au bord inférieur, cette ligne rencontre le sommet de celle sinuosité; celle espèce reste toujours d’une taille beaucoup plus petite que la Panopée d’Aldrovande et sa variété fossile. Son lest est en proportion plus mince ; aussi, il est fort difficile d’avoir bien entière cette coquille, rendue très fragile par la fossilisation. Le plus grand individu que nous ayons , et qui est aussi un des plus grands connus, a 60 millimètres de long et i3o millimètres de large; lorsque les valves sont réunies, la co- quille a 4s millimètres d’épaisseur.

Panopée intermédiaire. Panopœa iniermedùu Desh. pl. y.

fig. 4- 5.

Testa ovatOy transversa angusta , inœquilatera; utroque latere obtnsa^ postice hianiissima, ad apteem îrrcguîariter plicata,

Corbuîa dubia. Desh, Coq. foss. de Paris, t, i, p. 59, n” 2 1. pl. 9, fig. i3, il.

Mya intermedia, Sow. Min, Conch, pl, 4*9. f»g. 'i*

Eadem spccîes? Mya plicata, Sow. loc. cit. fig. 3.

Eadem specîes? Panopœa Faujasi, Sow. Min. conch. pl. 60a. fig. 1. 2.

Panopœa. Deshayesii. Yalenc. Arch. du mus, t. i. p. 20. pl, 4. fig-

LES GLYCiaiERlDtS. l4l

Habile... fossile aux euvirous de Paris, et se trouve aussi eu Angleterre, dans les argiles de Loudres.

Nous avons indiqué autrefois cette espèce d’après un seul frag- ment qui, encroûté et privé de dents cardinales, nous avait paru appartenir à cette section des Corbules, dans laquelle la dent cardi- nale a beaucoup de ressemblance avec celle des Mj'es ; mais depuis long.-temps nous avons rectifié l’erreur que nous avons faite , lors- que nous eûmes découvert, dans la riche localité de Chaumont, un individu complet de la même coquille, et qu’à force de soins et de précautions, nous sommes parvenu à le vider complètement du sable qui le remplissait. Nous possédions cette belle espèce de- puis plusieurs années, lorsque M. Sowerby, l’ayant rencontrée dans les argiles de Londres, en donna une figure, sous le nom de Mya intennedia. Plus lard , M. Sowerby reproduisit un individu uu peu plus grand de la même coquille, et le confondit avec le Panopœa FaiijasiL M. Valenciennes, dans sa monographie des Pa- nopées, voulut bien donner notre nom à cette curieuse espèce de Panopée , et nous sommes très flatié de l’honneur qu’il a voulu nous faire; mais, uous étant imposé la règle rigoureuse de con- server aux espèces le premier nom qui leur est donné, nous ren- dons à celle-ci la dénomination que, le premier, M. Sowerby lui imposa.

La Panopée intermédiaire est une coquille ovale oblongue; elle est, en proportion, l’espèce la plus étroite; elle est iuéquilalérale, et sou côté antérieur est toujours le plus court. Les crochets sont médiocrement protubérans; ils sont opposés , et, immédiatement au-dessous d’eux, on trouve, sur le bord cardinal, une dent très comprimée, et à côté une fossette plus éli'oile et plus profonde que dans les autres espèces. Le bord supérieur est droit; la nymphe est petite , courte , peu saillaute , ce qui prouve que , dans cette es- pèce, le ligament n’avait pas tant de solidité que dans les autres. L’im- pression musculaire'antérieure est très allongée, comme celle des Pholadomyes ; la postérieure est ovale obroiide. La sinuosiTo pos- térieure du manteau est triangulaire , assez large, et remonte dans l’intérieur des valves jusqu’au milieu de leur longueur. Cette co- quillea45 millimètresde longueur, 90 de largeur, et 35 d’épaisseur.

QUATRIEME FAMILLE.

ii2

GENRE TREIZIÈME.

PHOIiADOMlTE. Vholadomya. (6ow.)

PI. 4. fîg. 4 h 10. PI. 5. fig. I à 6.

CARACTÈRES GÉTfÉRïQüES. Animal inconnu. Coquille mince, transverse, ventrue, cordiforme, ëquivalvc, inéqui- latërale, bâillante des deux côtés 5 côté antérieur le plus obtus et le plus court; charnière simple, linéaire, sans dents 5 une petite inflexion sur le bord cardinal; deux petites nymphes donnant insertion à un ligament extérieur; impression palléale sinueuse postérieurement.

SYNONYMIE GENERIQUE, CoHcha mgata ; Moscardo. Cardites^ Grew. Conchîtes ; Langius, Bajerus,

Wolfart, Mjacites^ Donacites; Schlotheim, Rrüger. Phn- Jadites; Kriigcr, Lutraiia ^ Mactra ^ Mya ^ Cardita^ Phola- domya; Sowerby. Lamk. Amphidesma^

Lutrarla^ Pholadomya; Zieten. Lysianassa^ Pholadomya ; Munster, Goldfuss- Lyslanassa, Myopsis ^ Gresslyn y Platy- mya^ Arcomya; Agassiz. Pholadomya; Sow,, Nob,, etc.

OBSERVATIONS. - Le premier indice que nous trouvons du genre Pholadomye, c’est dans un ouvrage peu estimé, avec juste raison , des naturalistes. Cet ouvrage a pouf litre : Museo Moscardo ; il a été publié à Padoue, en i656. A la page i83, on trouve, à côté d’un moule d’Isocarde, une autre coquil le fossile que l’auteur nomme Coucha rugata; elle a toute l’apparence de l’une des espèces de Pho- laiÏQmyes les plus répandues dans la partie supérieure des terrains jurassiques, Listei- et Grew, en Angleterre, l’un dans son Synopsis Conchyliorum , l’autre dans le Muséum de la Société royale, ont figuré des espèces qui appartiennent certainement à ce genre; de- puis, il n’est guère d’Orycthographe qui n’en ait fait représenter quelques espèces, sous le nom de Cardite ou de Musculite, gé- néralement adopté pour désigner la plupart des coquilles bivalves fossiles. Linnèn’introduisitaucune de ces pétrifications dans son Sys- tema naturœ ; aussi , on ne les trouve dans aucun auteur systématique

LES GLYGIMERIDES.

143

jusqu’au momenX on commença à sentir l’importance de l’étude des fossiles, et c’est à Lamarck et à Cuvier que l’on est redevable des premières recherches importantes et vraiment utiles sur les corps organisés fossiles; mais, à cette époque-là même, il était presque impossible de caractériser avec exactitude le genre qui nous occupe : aussi, on en trouve le petit nombre d’espèces alors connues réparti dans dilFérens genres. Les unes étaient rapportées par M. Sowerby aux Myes , aux Mactres, aux Lulraires, aux Car- dites : en cela , l’auteur anglais suivait les indications de M. Bron- gniart. Lamarck lui-meme, trompé par l’apparence, rangea parmi les Trigonies quelques-unes des espèces du genre Pholadomye ; enfin, par un hasard des plus heureux, on découvrit une espèce vivante, et, dès-lors, on put caractériser convenablement le genre et y rapporter par analogie les espèces fossiles qui en dépendent. Cette coquille précieuse et des plus intéressantes a été découverte à l’île Torlola par M. Nicholson. Deux individus seulement sont connus dans les collections , et il en existe une valve dans celle du Muséum d'histoire naturelle de Paris. Cette espèce a été décrite et figurée pour la première fois par M. Sowerby dans son Généra of shells.

Depuis celte époque, M. Agassiz dans un travail fort remar- quable qu’il a publié, en 1842 , sous le litre à'Eludes critiques sur les mollusques fossiles, a donné une monographie du genre Pho- ladomye dans laquelle il a ajouté deux espèces vivantes, toutes deux de la Caspienne, et rapportées toutes deux au type des Cardium par M. Eichwald, dans son Fauna CaspiO’-Caucasia.

L’animal n’est point encore connu. Toutes les coquilles sont très minces, et l’on peut juger de leur peu d’épaisseur dans les es- pèces fossiles elles-mêmes, car les moules intérieurs ont conservé avec une grantle netteté les côtes et les tubercules, qui se répètent toujours à l’intérieur des coquilles lorsque leur test est mince. La charnière est très simple ; elle est sans dents. On remarque seule- ment sur le bord, immédiatement au-dessous du crochet, une lé- gère dépression , oîi devraient se trouver les dents cardinales, s’il en existait. Sur le côté postérieur, se montre une nymphe pe- tite, peu saillante, creusée en- dehors et à la base d’un petit sillon dans lequel s’insère un ligament extérieur. En examinant des moules bien conservés, ou mieux encore la coquille vivante elle-même, on trouve, à l’intérieur des valves, deux impressions musculaires fort écartées; l’antérieure ovalaire est quelquefois

i44 QrATBJÈME FAMILLE.

étranglée dans le milieu; elle descend, le long du bord antérieur, et très près de Textrémité des valves. L’impression musculaire posté- rieure naît un peu au-dessous du bord supérieur, et à une petite distance de l’extrémité de la coquille : celte impression est obronde ou ovalaire. On ti’ouve aussi, dans l’intérieur de ces coquilles, une impression palléale rapprochée du bord inférieur , et qui rentre a l’intérieur sous forme d’un sinus profond, lorsqu’elle est parvenue à l’extrémité postérieure de la coquille. Cette sinuosité de l’impres- sion palléale indique, comme on le sait déjà , que l’animal est ter- miné postérieurement par des siphons, et l’on peut présumer, par le bâillement considérable des valves du côté postérieur, que les siphons sont considérables. Presque toutes les Pholadonijes sont des coquilles ventrues, cordiformes, à crochets proémiiiens, op- posés et très rapprochés. Le plus grand nombre des espèces sont très inéquilalérales, et c’est côté antérieur qui est toujours le plus court. Toutes les espèces sont plus ou moins bâillantes; Je bâillement antérieur est toujours plus petit que celui du côté op- posé; ces deux bâiilemens ressemblent assez à celui des Panopées, des Mjes ou des Lulraires. D’après ce que nous venons d’exposer, on peut déjà établir les rapports du genre d’une manière assez na- turelle; il se rapproche évidemment des Panopées par l’ensemble de ses caractères; mais, par la nature de son test et sou peu d’épaisseur, il a de l’analogie avec les Pholades, mais surtout avec les Anaünes.

Depuis quelques années que l’on s’occupe avec tant d’activité, en Europe, à étudier les fossiles répandus dans les couches de la terre, les auteurs ont ajouté un grand nombre d’espèces à celles anciennement connues. Ce genre est donc important pour les géo- logues, car il n’est presque point de terrain fossilifère il ne soit représenté par quelques espèces; et la plupart d’entre elles se dis- tribuent avec régularité dans les différentes formations, et peuvent servir à les caractériser. A force de soins, nous sommes parvenu à en rassembler, plus de cent vingt espèces, et nous sommes loin de posséder toutes celles qui sont mentionnées par les auteurs. Nous sommes convaincu que des recherches plus étendues ajouteront encore un gi’and nombre d’espèces à ce genre, et qu’elles seront doublées, d’ici à quelques années. Déjà M. Agassiz en a ajouté un bon nombre qui ne nous étaient point connues , et il a recti- fié plusieurs erreurs qui s’élaient glissées dans la nomenclature. M. Agassiz compte ii3 espèces de Pholadomyes , et si nous ajou- tons celles qu’il n’a pas mentionnées dans sa monographie, nous

LES GLYCIMEIllDÈSi

i45

pouvons porter à 172 au moins le nombre des espèces que nous connaissons actuellemenl; il est vrai que dans ce nombre sont comprises des coquilles dont M. Aqassiz fait des genres à part sous les noms de Myopsis et de Goniomya ou Lysianassa de M. de Munster.

On a cru pendant assez long-temps que les Pholadomyes man- quaient aux terrains tertiaires. M. Sowerby en a signalé une qui appartient aux argiles do Londres. Cette même espece a été re- trouvée depuis dans les sables inférieurs du bassin de Paris, aux en- virons de Laon , et M. Agassiz mentionne deux autres espèces dans les terrains tertiaires supérieurs de FAIIemagne.

Les terrains crétacés supérieurs ne contiennent jusqu’à pré- sent qu’un petit nombre de Pholadomyes 5 elles deviennent plus abondantes dans les couches inférieures de ces terrains, cou- ches désignées par les géologues sous le nom de terrains néoco- miens. Elles se montrent en plus grande abondance dans la série des terrains jurassiques, etily a des espèces qui peuvent carac- tériser chacun des étages de cette grande série. Il en existe encore plusieurs dans le terrain que les géologues allemands ont nommé Muschelkalk. Au-dessous de cette formation, le genre Pholado- mye paraissait manquer; mais MM. de Verneuil et d’Arcbiac> dans leur excellent mémoire sur les fossiles des dépôts anciens des bords du Rhin, onldécril une coquille qui appartient au genre qui nous occupe ; MM. Sowerby et Goldfussen ont égalementmenlionné chacun une espèce dans ces terrains ; de sorte qu’il est bien con- slalé que le genre Pholadomye est du petit nombre de ceux qui passent à travers toutes les formations,' et vit encore aujourd’hui.

Nous ne pouvons, donner ici la liste complète des espèces d’un genre aussi nombreux que celui des Pholadomyes. Sans doute, il eût été plus intéressant de les trouver distribuées dans l’ordre géo- logique; mais l’étendue de cet ouvrage ne nous permet pas une aussi grande extension. Aussi, nous nous contenterons d’indiquer les principales espèces caractéristiques des terrains, en empruntant à l’excellente monographie de M. Agassiz plusieurs renseignemens d’un grand intérêt. Nous n’admellons pas toutes les opinions de M. Agassiz, et nous rejetons plusieurs des genres qu’il a proposés, qui, selon nous, présentent tous les caractères des Pholadomyes, Il faut dire qu’il y a peu de genres aussi difficiles que celui-ci et dont la synonymie soit plus embrouillée: plusieurs espèces, fondées sur des individus mal conservés, représentées par des figures très

10*

T. I.

i46 quatrième famille.

médiocres, sont devenues les types sur lesquels se sont d’abord ap- puyés les géologues pour reconnaître difFérens terrains; et il est souvent arrivé à ces personnes peu habituées aux éludes zoologi- ques, de se contenter d’approximations inexactes ; c’est de cette manière que, sous un môme nom, on trouve aujourd’hui plusieurs espèces rassemblées, et qu’il est très difficile de remonter à la source de Terreur pour la réparer. C’est ainsi que je remarque dans les au- teurs cinq espèces, au moins, sous le nom de Fholadomya murchis^ soni ; sous le nom de Pholadomya amhigua, M. Soiverby confond, je le crois , deux espèces j M. Goldfuss représente sous ce nom deux espèces qui sont différentes de celles de Sowerby ; M. Zieten donne encore un Amhïgua qui est également différent de celle des deux auteurs que nous venons de mentionner; enfin, M. Rœmer représente un Amhigua qui a beaucoup de rapports avec une de celles de Sowerby, mais qui pourrait bien encore con- stituer une. sixième espèce. Ces deux exemples suffisent pour donner une idée de la confusion qui règne dans la synonymie des Phola- domyes. Nous pourrions facilement en ajouter beaucoup d’autres; mais un le! travail neserait pas ici à sa place: il doit entrer comme élément d’une bonne monographie. Une autre difficulté se pré- sente : elle est inhérente à la nature môme du sujet, puisqu'elle résulte de la variabilité des espèces et des altérations qu’elles ont subies par le fait do la fossilisation. Les Pholadomyes sont des co- quilles très n\inces ; on les trouve dans des terrains de sédiment qui formaient des boues argileuses ou calcaires avant leur solidification. Pour peu que ces terrains aient subi des compressions des dé- rangemena pendant que leurs couches étaient encore molles, des coquilles aussi fragiles que les Pholadomyes ont été comprimées ou étirées dans divers sens, et il est quelquefois difficile de rencontrer quelques individus dont la forme naturelle n’ait subi aucune alté- ration. Aussi, il pourrait arriver qiTune même espèce devînt l’oc- casion de plusieurs aux yeux d’un zoologiste, même exercé, dans i’impossibiliic ou il serait de reconnaître des formes accidentelles et de les rapporter à leur type naturel. Aussi, pour entreprendre une bonne monographie du genre Pholadomye et donner une distribution des espèces exempte d’erreurs graves, il faut être en- touré de très nombreux matériaux, et, malgré nos efforts, nous ne pensons pas en avoir encore assez pour entreprendre un travail complet sur ce genre.

Tous les zoologistes ne sont point d’accord sur l’étendue desca-

lES GLTCI31ERIDES.

147

ractères qu’il convient de donner au genre Pholadomyc. Ceux que nous avons exposés en (ête de cet article, et qui résultent pour nous de l’observation de deux espèces vivantes et des impressions très nettes d’un assez grand nombre d’espèces fossiles, permettent d’introduire dans le genre un assez grand nombre d’espèces qui en sontrejêtées parquelques auteurs. Il estcertain que, quels que soient les caractèresextérieursd’une coquille bivalve, toutes les fois qu’elle sera mince, bâillante, que sa charnière sera simple et sans dents, que l’impression palléale sera sinueuse du côté postérieur, celte co- quille sera pour nous une Pholadomye. Si nous prenons actuelle- ment le genre Lysianassa deM. de Munster, 3Iyopsîs , Platymya, ' ainsi qu’une -partie du genre Jrcomya de M. Agassiz, nous cher- cherons en vain les caractères qui les distinguentdes Pholadomyes, à moins que l’on ne prenne ces caractères dans des accîdens exté- rieurs, qui pour nous n’ont aucune valeur. Nous remarquons d’abord que M. Agassiz n’admet dans le genre Pholadomye que celles des espèces qui ont des côtes longitudinales ; et les difFérens genres de ce naturaliste que nous venons de mentionner sont desti- nés à réunir des coquilles qui ont tous les caractères des Pholado- myes, mais qui n’en ont pas les côtes longitudinales. Il semblerait, d’après cela, que M. Agassiz a fondé des genres, non plus d’après une appréciation des caractères zoologiques des coqtiilles, mais d’après des formes extérieures, essentiellement variables dans la plu- part des genres. Dans la nature actuelle, où, nous cherchons des termes de comparaison, nous trouvons des coquilles habitées par des animaux d’un même genre, ayant des caractères génériques semblables, et qui cependant sont tantôt lisses, tantôt striées trans- versalement, ou garnies de côtes longitudinales. Le grand genre Cardium^ par exemple, nous présente tous ces accidens ; il en estde même chez lesLucines, lcsVeuus,les Pétoncles, etc., etpersonnen’a jamais songé à démeinbrerces genres uniquement d’après le caractère des côtes longitudinales ou lransverses,ou le poli extérieur des co- quilles. Ce que M, Agassiz ne ferait certainement pas dans le genre B ucarde, pourquoi le fait-il dans le genre Pholadomye? Il nous sem- ble que la zoologie n’esl une science vraiment philosophique qu’au- lanl que ses diverses parties sont coordonnées d’après les mêmes principes, et que la subordination des caractères des familles et des genres doit résulter d’une règle invariable et inflexible. Pour nous, nous ne voyons aucune difficulté à admettre dans le genre Phola- domye des espèces lisses ou des espèces à côtes, soit transverses, soit

lO’

l48 QUATRIÈME TAMILLE.

longiluclinaies; nous croyons môme que l’on doit y introduire des espèces aplaties et transvei ses, aussi lisses que celles qui sontcy- lindracées ou cordiformes; il nous suffit, en un mot, qu’une co- quille nous offre les caractères que nous avons assignés au genre, pour qu’elle y trouve sa place : en agissant autrement, nous croi- rions manquer de tact et à ce que l’observation nous enseigne. Dans tous les grands genres, la nature est prodigue dans la variété des formes et des accidens : que l’on considère les genres Lutraire et Mactre réunis, les Lucines, les Bucardes, lesMulettes, les Huîtres, les Limes, les Peignes, les Avicides, etc., et l’on verra avec quelle facilité la nature se joue, en s’appropriant les formes les plus di- verses sur des types constans d’organisation. ÎVous considérons, nous, le genre Pholadomye comme l’un de ces grands types à mo- difications nombreuses dans les formes extérieures, mais à caractè- res essentiels constans. C’est ainsi que les espèces du genre Lysia- nasse de M. de Munster constituent pour nous un petit groupe de Pholadomyes qui, au lieu d’avoir des cotes longitudinales ou Irans- verses, les ont en forme de chevron plus ou moins ouvert. Ce qui nous détermine à ranger ces coquilles parmi les Pholadomyes, c’est qu’ellesont la charnière simple et sans dents, comme les autres co- quilles du môme genre, et qu’elles sont bâillantes, exactement comme le , sont toutes les Pholadomyes. Nous cherchons en vain dans les planches de M. Agassiz quels doivent être les caractères de son genre Myopsis. Nous avons sous les yeux un assez grand nombre de coquilles de ce groupe, et nous trouvons sur des moules bien conservés l’impression d’une charnière simple réunissant les valves bâillantes d’une coquille très mince dont on aperçoit diffi- cilement les impressions musculaires et l’impression palléale, par- ties que nous avons vues cependant telles qu’elles existent dans lo genre Pholadomye. Nous avions d’abord pensé que M, Agassiz avait établi son genre Arcomye pour des coquilles singulières qui devaient avoir à la charnière un caractère tout particulier, qui con- siste en une côte oblique appartenant à la valve droite. Ce carac- tère qui se représente dans quelques espèces du genre Jrcomya se montre aussi dans des coquilles iloiU les formes sont très différentes et avec lesquelles M, Agassiz a lait ses genres Cero/nya el Gresélya» Nous ne voyons dans la plupart des espèces du genre Arcomya qu’un double emploi des Pholadomyes, car nous y retrouvons l’impression d’une charnière simple dans des coquilles bâillantes, minces, inéquiiatérales, comme les autres Pholadomyes. Quant au

LES GLYCI?lElUJ)liS.

i49

gcni e Plafymya^ il paraît se distinjjuer un peu mieux des Phola- domyesj par ce caractère qui, pour nous, n’a pas une grande va- leur, mais qui, à la rigueur, peut être pris eu considération: il consiste en une cote oblique intérieure dans chaque valve, parlant de charnière et allant mourir insensiblement vers les im- pressions musculaires postérieures. Ces côtes, que l’on retrouve dans plusieurs genres à coquilles très minces, et notamment dans plusieurs espèces de Solens, pourraient indiquer un genre particu- lier s’il y avait à la charnière des traces évidentes d’un caractère plus important qui accompagnât celui-là. Dans les Plalymja la charnière était simple et sans dents comme dans les Pholado- myes, et ce motif nous paraît suffisant pour joindre encore ce genre à tous ceux que nous avons mentionnés.

Nous donnons ici le nombre et la distribution des espèces.

Trois espèces vivantes: une des petites Antilles ; deux de la mer Caspienne.

Trois espèces tertiaires : deux du terrain tertiaire supérieur d’Allemagne ; une du terrain tertiaire inférieur du bassin de Paris et de Londres, Pholadomya margaritacea^ Sow.

Vingt-et-une espèces dans la craie: neufdans la craie supérieure etglauconieuse ; six dans la craie moyenne ou grés vert; et six dans le terrain néocomien.

Parmi ces espèces, nous citerons les Pholadomya u/n^o/za^«,Desh., decussata, Agass., qui sont propres à la craie supérieure, les PAo/a- domya aodulifera^ Munst., Æj/nareX*», Pusch., qui sont propres aux grés verts de la Hongrie, de la Scanie, de Quedlinbourg ; enfin les Pholadomya langii et ncocomensis^ qui sont propres aux terrains néo- comiens de la Suisse et de la France.

Quaranle-el-une espèces dans les terrains portiandiens du Kim- meridge-CIay et du Coral-Rag.

Parmi ces espèces, nous citerons : le Pholadomya donacina de Votz, qui caractérise le Porlland, en Suisse, en Allemagne et en France; Vacuticostatay Sow., qui est propre au Kimmeridge en France, en Allemagne, en Angleterre et en Suisse.

Le Pholadomya cancellata se trouve à-la-fois dans le Porlland et le Coral-Rag supérieur, en France, en Allemagne et en Suisse ; en- fin le Pholadomya ovalist Sow., se trouve en môme temps dans la Porlland et le Kimmeridge-Clay, en France, en Allemagne et en Angleterre.

Vingt-huit espèces dans le terrain oxfordien.

j5o QUATRIEME FAMItLE.

Le Pliolaiomya œqualisy Soiv., ainsi que le Pholadomya angus^ tata du môme auteur caractérisent ce terrain en France, en Alle- magne et en Angleterre.

Quarante-quatre espèces dans la grande colite, l’oolite inférieure et Je lias. Parmi ces espèces nous devons signaler :

Le Pholadomya producfa, Sow., qui se trouve à-la-fois dans la grande colite et foolite inférieure d^Angleterre et de France.

Le Pholadomya Jîdiculay que Ton rencontre plus spécialement en France, en Allemagne et en Angleterre, daasl’oolile inférieure.

Le Pholadomya semicostata. Desh., que l’on rencontre plus spé- cialement dans le lias, en France et en Angleten’e.

Il y a plusieurs espèces qui passent dans les divers membres de cette formation.

Le Pholadomyarcticulafay qui passe du lias supérieur dans l’oo- lite inférieure.

Et \e Pholadomya fidicuîa, qui remonte de l’oolite inférieure dans la grande oolilc.

Dix-neuf espèces dans le muschelkalk. Nous citerons seu- lement :

Le Pholadomya jnusculoides àe Schlolheim,que l’on trouve dans tous les lieux se montre cette formation.

Trois espèces dans la formation paléozoïque inférieure, com- prenant le Carbonifère, leDevonien et Je Silurien : ces trois espèces sont :

Le Pholadomya cuneata, Sow., qui est propre aux terrains car- bonifère et silurien de l’Angleterre; et \e Pholadomya mimsferi, Verneuil ; Radiata Go/<^qui se rencontrent dans le terrain dévo- nien de TEifel,

En terminant ce qui a rapport aux généralités du genre Phola- domye, nous devons ajouter que nous sommes heureux de par- tager l’opinion de M. Agassiz sur le soin et la rigoureuse exactitude qu’il faut apporter à la détermination des espèces fossiles, surtout dans un genre aussi difficile que celui-ci. De cette détermination résulte, en effet, comme conséquence d’une haute importance, la distribution exacte et véritable des espèces dans les couches de la terre. Revenons aux espèces qui nous ont servi d’exemple d'une grande confusion de synonymie, et que nous avons signalées pré- cédemment. Admettons pour un moment, sous les noms de Phola~ domya Murchissoni oi ambigua , les ou six espèces que l’on a confondues dans chacune d’elles, ctaussitôt nous allons voir passer

LES GLYCIMEUIDES.

i5x

ces espèces dans presque tous les terrains; ce seront autant d’erreurs qui se seront propagées sous le manteau d'une zoologie sans criti- que : Que l’observation et la critique, se prêtant un mutuelappui, fassent rentrer ces espèces dans leurs véritables limites, et nous les verrons restreintes à un petit nombre de couches terrestres.

Voici une autre^ observation qui nous est suggérée par les cou- pures artificielles, selon nous, que M. Agassiz a fait subir au grand type des Pholadomyes. L’étendue des genres n’est point une chose indifférente, même au point de vue de l’application de la zoologie à la géologie, et nous allons en trouver un exemple remarquable dans le genre qui nous occupe. Tel que l’a restreint M. Agassiz, le genre Pholadoraye commence au lias, et remonte à travers toutes les formations, il laisse des espèces en plus ou moins grand nom- bre, et se montre encore dans les mers actuelles. Ajoutez à ce genre les espèces lisses et ovalaires dont M. Agassiz a fait son genre Myop~ jij, et a l’instant meme vous voyez le genre PboUdomye pénétrer dans les couches qui sont sous le lias, et s’avancer jusque dans le terrain silurien le plus inférieur. Si , comme nous le croyons et comme nous l’avons déjà dit, le genre Myopsis est artificiel et doit rentrer dans celui des Pholadomyes, il n’est point indifférent, comme on le voit, que celte réunion se fasse, puisqu’il en résulte ce fait intéressant que le type si remarquable des Pholadomyes est du petit nombre de ceux qui ont assisté pour ainsi dire aux pre- miers phénomènes de la création des êtres, et ont persévéré à tra- vei's toutes les phases qu’a éprouvées notre globe terrestre, et ont pu s’approprier aux conditions actuelles d’existence. Si l’on ajoute en- core au genre Pholadomye les Lysianassa les Plaiymia et la plus grande partie des Arcomya^ la distribution du genre éprouvera d’autres changemens encore ; il prendra plus d’importance dans des couches il paraissait en avoir beaucoup moins. La distribu- tion géographique, elle-méme, subira des modifications importantes selon que l’on aura accordé au genre plus ou moins d’étendue.

ESPÈCES.

Pholadomye blanche. Pholadomja candida, Sow. PI. 4* fig.

4. 5. 6.

Testa ovato^transversâ^ inflatâ^ suhcylindvaceâ y tenuîyfragilly hîaîînây can~ àidà^ inœquîlatcraU'j laterc antîco hrevissimo; '\)ahis costidis 'variànlibus y stries transçersis clalhratis; cardine angustOj subinftexOysimpUci »

i52

QÜATUlbiE FAMILLE.

Sowerhy. Généra of shel(5. Genre Pholadomya.

Beeve. Concb. syst. t. i. p. 5o. pl. 32.

Desb. Encycl. inclh. vers, t. 3. p. 356.

Agassiz. Eludes cril. sur les Moll, foss, p. 6a. i.

Habile l’ile Torlola.

Espèce rare et curieuse, la première vivante qui ait été connue : elle est ovale, transverse, obtuse à ses extrémités, très convexe, et subcylindracée dans le milieu. Les crochets sont peu saillans, opposés; ils se touchent, et celui de la valve gauche est percé de manière à recevoir celui de la valve droite qui peut ainsi se mouvoir davantage. Lorsque les valves sont rapprochées, elles laissent entre elles un bâillement assez considérable aux deux extrémités de la coquille. Celui du côté postérieur est plus considérable queTanté- rieur, La coquille est très inéquilatérale, les crochets élani placés vers le quart de la longueur totale; aussi le côté antérieur est très court, et, vue de ce côté, la coquille est cordiforme. La surface extérieure est ornée de douze à quinze côtes longitudinales qui descendent en rayonnant des crochets, et viennent aboutir sur toute la longueur du bord inférieur. L*extrémité antérieure et le côté postérieur restent lisses. Des stries transverses d’accroissement irrégulières traversent les côtes longitudinales, et les découpent en grosses granulations obtuses et subquadrangulaires. Le test est tellement mince que ses accidens extérieurs se reproduisent assez exactement à Tinlérieur. Le bord cardinal ou supérieur est linéaire. On remarque, immédiatement au-dessous des crochets, une légère inflexion à la place seraient les dents cardinales si elles exis- taient. En arrière du crochet, se relève une nymphe d’une mé- diocre épaisseur, mais assez longue et donnant insertion à un li- gament externe. La surface intérieure laisse voir deux impression s musculaires, dont l’antérieure, fort élrgite, descend sur presque toute la longueur du bord antérieur de la coquille. L’impression postérieure est obronde; l’impression palléale montre une large sintiositq postérieure qui ne pénètre guère que jusque vers le tiers de la longueur totale. Cette coquille mince, transparente comme celle des Anatines, a un reflet subnacré. L’individu figuré par M. Sewerby a 4o millimètres de long et 8o de large.

hhs GLYCiMüKIDËS.

l53

Pholadornye à côtes nombreuses. Pholadomya multlcostata, Agassiz. PL 4* fig* 7- 8.

Testa ovato-iransversà, a/iticè latîore, InœquUatcraliy cost'is angustîsj inœqiia- VihiLSy radiatîs ornatà; latere antico hreviorcyobtuso, postico acutliuculo; umbomùus approximatUy magnis,

Rœraer. Pelr, p. i3i. 14. pl. 9, f. i5. Ph» acuticosta,

Bronn. Lelh. Geogn. pl. a8, f. 18.

Goldf, Pelr. (. 2. p. 271. pl, 4.

Agassiz. Éiuü. crit. sur les moll, foss. p. S2, pl. 2. f. 3. 4. pl. 3. f. 10, Pb, muîticostata.

Habite.... fossile dans les marnes et les argiles du Kimmeridge-Clay, en France, en Allemagne et en Angleterre.

Jusqu’à présent, cette espèce ne s’est rencontrée que dans la for- mation kiinméridienne qui forme, comme savent les géologues, la partie supérieure des terrains jurassiques. Celte espèce peut servir à caractériser les couches dont il est question; car, jusqu’à pré- sent, elle n’en a pas dépassé les limites. Nous ne connaissons que le moule intérieur; mais nous savons, par l’exemple de la Pholadornye vivante , que ce moule reproduit les accidens extérieurs avec assez de fidélité. Cette coquille est ovale, Iransverse, très renflée dans le milieu et du côté antérieur, plus amincie et plus pointue du côté antérieur. Les crochets sont grands et saillans; aussi, vue de face du côté antérieur, celle coquille est cordiforme. De ces cro- chets partent en rayonnant vingt-quatre à trente côtes, qui se portent, quelques-unes sur le côté antérieur, et les autres viennent aboutir sur le Lord inférieur des valves. Il n’y en a Jamais sur le côté postérieur qui reste lisse. Ces côtes sont inégales pour le vo- lume et pour leur écartement. Les trois ou quatre plus grosses sont fort écartées , et occupent le ventre de la coquille ; celles qui sont sur le côté antérieur sont plus petites et plus rapprochées; mais, depuis l’extrémité antérieure jusqu’à la postérieure, les côtes se multiplient rapidement, mais elles s’amoindrissent à mesure que leur nombre s’accroît , et elles disparaissent insensiblement vers l’extrémité postérieure. Les côtes dont nous venons de parler sont minces et étroites ; elles ressemblent à des crêtes tranchantes posées sur une surface lisse. Quoique nous ayons des moules intérieurs de cette espèce empreints dans une pâte très fine, nous ne trouvons sur eux aimune trace des caractères intérieurs que peuvent fournir

l54 QUATRIÈMK FAHltLË.

les impressions musculaires et celles du manteau. Cette coquille a 6o millimètres de long et 38 de large.

Pholadomye donaciforme. Pholadomya donaciformis. Desh, PI, 4* fig. 9- 10.

Testâ transversdj ovato^suhtrîgonâ jinœquiïateraîijventricosâ y ohîîquè trun~ catâ , transvevslm siîlcaiâ.

An eadem specîes? Amphidesma donaciforme» Zieten, Pétrif, du Wurt, p. 84. pl. 63, f. a.

Lutraria donacina. Rœmer. Pétrif. du Wurt. p. 12 t . n. 2. pl. 9. f. 14.

Habile.... fossile dans le lias supérieur en Lorraine, en*Bourgogne, en Al- lemagne , en Angleterre.

La 6gure de M. Zieten ne s’accordant que très imparfaitement avec l’espèce que nous avons fait figurer, nous no la mentionne- rons qu’avec beaucoup de doute. M. Zieten renvoie à une figure de l’ouvrage de M. Philips (pl. 12. f. 5). La figure de M. Philips a bien quelques rapports aussi avec notre espèce, mais elle s’çn distingue néanmoins par de très bons caractères; et nous sommes loin de partager l’opinion des deux auteurs que nous venons de citer, au sujet du genre dans lequel ils placent leurs espèces; car il n’offre rien ni dans sa forme, ni dans ses auU'cs caractères, qui s’accorde avec ce qu’on connaît du genre Ainphidesrae. La coquille à laquelle nous donnons le nom de Pholadomye donaciforme est transverse, ovale, oblongue, tronquée antérieurement et extrêmement iné- quilatérale ; ce qui détermine quelque ressemblance en tre sa forme et celle de la plupart des Donaces, Le côté antérieur est extrêmement court; il est aplati et il dépasse à peine les crochets. Ceux-ci sont grands, cordiformes, opposés et peu inclinés antérieurement. Le côté postérieur s’atténue assez rapidement: il est cunéiforme, ar- rondi, et, dans les individus qui n’ont point été comprimés, on voit de ce côté un bâillement semblable à celui des autres Phola- domyes. Toute la surface extérieure est chargée de gros sillons transversGS, simples, arrondis. Dans la plupart des individus, les sillons s’amoindrissent vers le corselet et vers la lunule, de sorte que ces parties restent lisses. Nous avons un individu qui vient des lias supérieurs des environs de Bourmon , dans la Haute-Marne ; il a conservé une portion de son lest, et il est plus mince qu’une feuille de papier très fin. Outre les sillons dont nous avons parlé, on trouve encore, à la surface, quelques stries très lines d’accrois-

LES GLYCIMERIDES.

l55

sement que Ton aperçoit à i’aide d’un fort grossissement. Cette es- pèce, parfailèment caractéristique des couches supérieures du lias, a 25 millimètres de long, et 4^ de large.

Pliolaclomye sémicostulee. Pholadomya semicostaia. Desh. PL 5. fig. 6,

Testa oi^ato’transversd y In mcdlo turgîdà.postich 'siihnrcuatâ , înœquîlatevaliy in medio qttadrî costatâ^ costîs divaricatîs ^ nodulosisf latere antico breviy ohtuso; umbonîbus turgtdîs ^ decussatis.

Habile.... fossile dans les lias de la Lorraine.

Coquille ovale, transverse , ayant le bord supérieur droit et le bord inférieur régulièrement arqué en demi-cercle , de sorte que sa projection géométrique ressemblerait assez exactement à un demi-cercle. Cette coquille est très enflée dans le milieu, elle est très inéquilatérale. Le côté antérieur occupe à peine le tiers de la longueur totale; le côté postérieur s’amincit assez l’apidement , et , à l’extrémité de ce côté, les valves sont bâillantes, les crochets sont grands et cordiformes, opposés et très rapprochés. De leur sommet partent quatre côtes longitudinales, écartées, qui descen- dent en rayonnant et aboutissent au milieu du bord inférieur , de sorte que tout le côté antérieur, et presque toute la moitié posté- rieure de la coquille restent lisses. Sur les crochets, se montrent des stries d’accroissement iransverses; ces stries, en découpant les côtes, établissent un treillis assez gros et assez régulier. Nous avons fait représenter celle espèce , à cause de sa forme; car nous ne sa- vons jusqu’à présent si , par son abondance , elle peut concourir à caractériser la formation basique dans laquelle nous ne l’avons vue que rarement aux environs de Nancy.

Cette coquille est longue de 5o millimètres, large de 75 et épaisse de 4o-

Pholadomye ombonelle. Pholadomya umbonata^ Desh. PL 5.

fig. I.

Testâ siihmargarîtaceây ingond, transversîm împîicatd, costuUs hngiiudina- libus ySiibgranosis ornatà; umbonibiis eîalisj magnis, covdatisi lattre antico brevîssimo , postîco depresso, obtuso.

An eadem} Pholadomya nuda^ Agassiz. Elucl. sur les molli foss. p. 64. 11. i3. pl. 2., b. f, 9. 10. II.

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QUATUIÈME 1-AMlLLE.

An trigonla arcuaia"^ Lamk. Aiiim. s. vert. cdit. t. 6. p. 52i. n. r6. Habite.... fossile dans le sable vert, en I^eleique.

Nous devons la connaissance de celte espèce h noire ami, M. Du- cliaslel qui, comme on le sait , s’est livré pendant de longues années à la recherche des fossiles des terrains crayeux de la Belgi- que : cette coquille a de l’analogie avec le Pholadomya margari- tacea qui est propre aux terrains tertiaires inférieurs ; cependant, elle s’en distingue constamment : elle est sublriangulairc, presque aussi longue que large ; il y a môme une variété courte, dont les deux dimensions sont égales; elle est très inéquilatéraie, tronquée du côté antérieur : ce côté, aplati légèrement , se relève dans le milieu il est comme pincé. La coquille est légèrement aplatie de chaque côté ; elle est cependant subcordiforme et sa partie la plus ventrue est du côté antérieur; Je côté postérieur est dé- primé, il est arrondi et forme avec le côté inférieur une cour- bure uniforme ; le côté supérieur est occupé par un grand cor- selet lisse, lancéolé, dont la surface est circonscrite par uc angle peu marqué. Les crochets sont très grands, ils se relèvent considérablement et dépassent de beaucoup le bord supérieur des valves; ils sont opposés, pointus , rapprochés, cl a leur sommet, naissent dix à douze côtes grêles rapprochées, granuleuses, qui des- cendent en rayonnant jusque sur le ventre de la coquille , et dis- paraissent insensiblement sans atteindre le bord inférieur. Outre ces côtes, le test présente encore des plis iransverses, nombreux et assez réguliers entre lesquels se montrent des stries fines d’accrois- sement; ces plis et ces côtes disparaissent presque complètement sur les deux extrémités de la coquille. Nous avons vu un individu chez lequel il reste uue grande partie du test ; ce test, aussi mince qu’un papier fin, est subnacré et brillant. La longueur de cette espèce est de 45 millimètres et sa largeur varie de 45 à 5o; son épaisseur est de 3o millimètres.

Pholadomye rétuse. Pholadomja refusa. Desh. PI. 5. fig. 2. 3.

Testa ovafo^ohlongd^ inœquilaterali^ anticc hrevissimà, obtusàyposticè dilatatâ^ infernè arcuatd, ventricosâ ^ corai otmiy transversim plicatâ y costis angus^ tlsy îongitudinalibtis , decussatà,

Tholadomya cancellata. Agassiz. Etud, sur les Moll. foss. p. 128. 70.

pl, 7, e. f, 4-9.

Habite.. .7 fossile dans le coral-rag supérieur.

Cette espèce se rencontre assez communément dans les couches

LFS GLYCIMERIDES.

167

supérieures du coral-ragj elle est ovale, oblongue, légèrement courbée dans sa largeur; elle est extrêmement inéquilatérale; ses crochets sont presque terminaux comme ceux des Modioles et à peine dépassés par un côté antérieur fort court ; le côté posté- rieur est dilaté dans les vieux individus; il s’amincit assez rapide- ment, et il est toujours bâillant; le bord supérieur ou cardinal offre constamment un grand corselet lancéolé, lisse, qui s’étend depuis les crochets, jusqu’à l’extrémité postérieure. Ce corselet est nettement séparé du reste de la surface par un angle assez aigu. Les crochets sont grands, opposés et fort aigus; de leur sommet partent en rayonnant huit à dix côtes longitudinales, très étroites, qui ressemblent plutôt à des angles surbaissés qu’à des côtes; elles sont traversées par des plis Iransverses plus ou moins réguliers selon les individus , généralement assez gros et disparaissant sur le côté antérieur ainsi que sur le postérieur; ces plis, plus réguliers sur les crochets, forment avec les côtes longitudinales un treillissement assez régulier et qui ne manque pas d’élégance. La forme de celte espèce rend assez difficile la mesure de sa longueur si l’on fait tom- ber perpendiculairement une ligne des crochets au bord infé- rieur; cette ligne est beaucoup plus courte que celle qui mesure- rait le côté postérieur; la largeur des grands individus est de 5o millimètres.

Pholadomye petite lyre, Pholadomya fidicula, So-w. PI. 5. fig. 3 .

TeHâ ovalO’^tvansvcrsâ ^ inœquiîateraU, anticè brevlssîmâ, longitudinalîter multicostellald' coslulh aliquantîsper uudulatîs , ohtusis; îatere postico ob-^ tuso^ hiante,

Sow. Min. Conclu pi. aaâ.

Bronn, Lelhœa geogn. t. i. p. 38a. pl, ao. f. i8.

Agassiz. Elud. ciit. sur les Moll. foss. p. 60. ii. pl. 3,- e, f. 10 à i3.

Habite..;, fossile dans l’oolite inférieure, en Normandie, en Lorraine, en Allemagne et en Angleterre.

Avant que M. Sowerby n’eût établi son genre Pholadomye, il avait réparti, comme nous l’avons dit, différentes espèces dans les Cardiles et les Lutraires. Lorsque plus lard il rassembla dans son nouveau genre toutes les coquilles qui pouvaient y entrer, il s’y trouva un Cardita lyra et un Lutraria lyra. L’une de ces deux es- pèces devait nécessairement changer de nom, et c’est pour celle-ci, autrefois Lutraria lyra que M. Sowerby a proposé celui à^Phola-

l58 QUATRiiHE FAMIttE.

domya fidlcuîa cpie nous avons adopté. Nous pensons que c’est cette espece que Lister a figuré dans son Synopsis conchyliorum (PI, 509, fig. 63); sa coquille vient du Languedoc, mais nous ignorons dans quelle partie de cette province française elle a été recueillie. Plusieurs especes ont été confondues avec celle-ci par la plupart des auteurs qui en ont parlé; c’est ainsi que la coquille, figurée sous le uomàePh.Jidicuîa par Rœmer, constitue une espèce très distincte de celle du naturaliste anglais ; il en est de mémo de celle de Goldfuss qui diffère également de celle de Rœmer et de celle de Sowerby : enfin le fidicula de M. de Ziélen est encore différente des deux précédentes. Voilà donc quatre espèces qui portent un même nom, et parmi elles une seule, celle de Sowerby, doit le conserver. Cette coquille est ovale, Iransverse, son bord inférieur est arqué régulièrement, le supérieur l’est aussi, mais à un bien moindre degré; elle est très inéquilalérale, obtuse aux extrémités ; le côté antérieur est très court, et il est à peine du quart de la lon- gueur totale. Du sommet de ses crochets parlent en rayonnant un grand nombre de petites côtes longitudinales, obtuses, quelquefois rendues onduleuses par des accroissemens Iransverscs, elles s’arrê- tent brusquement de chaque côté, de manière à laisser lisse tout le côté postérieur et une portion notable du côté antérieur; les crochets sont très sailians, cordiformes, opposés et très rapprochés, la coquille est ventrue, subcylindracéc dans le milieu et fort bâil- lante du côté postérieur. Cette espèce est constante dans Toolite inférieure, elle peut servir à caractériser cette formation; les grands individus ont 55 miliimèU'es de long et 90 de large.

Pholadomye treillissée. Pholadomya decussata, Agassiz, PI. 5.

fig- 5-

Testât ri oxfndf veniricosâf cordiformî^ in(tquîlaieraU,anticctruncatâ,pîanU“ latâ^postlcèobtusâ^infernè arcuatâ; lateré antico bîcatînato ; vahis Ion-- gîtudinaîlter costatis , transveî'sim plicîs obsoletîsy decussatis.

Agassiz. Etudes crit. sur les Moll. foss. pl. 4. 5g. 9.

Habite... fossile dans la craie (grès verlj en France et en Angleterre.

Cette coquille se rencontre assez abondamment dans diverses localités du département de la Sarllie et d’Angleterre dans Je sable vert; elle est très enflée; ses crochets sont grands et cordiformes, opposés et à peine infléchis sur le côté antérieur. La coquille est extrêmement inéquilatérale ; son coté antérieur très court , est

tES GLYCTMERIBES.

iSg

tout-à-faitaplali, et la carène obtuse qui le circonscrit en dehors est la partie la plus épaisse de toute la coquille; cette carène con- tient, en dedans de Tespèce qu’elle circonscrit, un angle peu sail- lant, et limitant un espace lunulaire très grand et presque plat; le côté postérieur de la carène est suivi d*une faible dépression longitudinale, et c’est après elle que commencent à se montrer quatre à six côtés longitudinales, partant en rayonnant des cro- chets et aboutissant au bord inférieur. Toute la surface est découpée plus ou moins profondément par des plis transverses qui se montrent particulièrement sur les parties les plus saillantes du test; Tangle antérieur, la carène et les côtes sont divisées par ces plis qui deviennent obsolètes dans les intervalles; l’entrecroisement des plis et des côtes produit à la surface un Ireillissement assez gros- sier, qui a valu à l’espèce le nom que lui a donné M. Agassiz. Les individus de taille moyenne ont yS millimètres de large, 70 de long et Go d’épaisseur.

GENRE QUATORZIÈME.

CEROMTE. Ceromya, (Agass.)

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES.— Animal incoiinu.

Coquille ovale ou cordiforme , très inéqullatérale , inequi- valve; la valve droite un peu plus grande que la gauche; crochets plus ou moins grands , rapproches, opposes; test très mince; impressions musculaires peu saillantes : la postérieure arrondie ; Impression pallcale largement sinueuse du côté postérieur; charnière simple et sans dents; une côte si- nueuse , et remontant obliquement de rhitérieur sur le bord cardinal de la valve droite; ligament très probablement in- térieur.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Isocardia. Woltz, Rœmer, Gold- fuss, etc. Ceromya et Gresslya, Agassiz,

Lorsque nous avons exécuté les travaux préparatoires pour cet

l6o QUAXRlfeME FAMILLE.

ouvrage, nous avons reçu l’opinion des palœontologistes et des conchyliologLies , et nous avons rangé, parmi les Isocardes, les coquilles avec lesquelles M. Agassiz a formé plus lard le genre Céromye : nous avons adopté ce genre, en y apportant cependant quelques modifications. Eclairé par les observations du savant zoo- logiste dont nous venons de parler, conduit aussi par la comparai- son du moule en plâtre de Flsocarde vivante avec les moules natu- rels du nouveau genre de M. Agassiz, nous avons été bientôt convaincu de la validité de ses caractères , et nous l’avons admis dans les rapports que lui indique M. Agassiz, c’est-à-dire dans le voisinage du genre Pholadomye. M. Agassiz restreint son genre Céromye aux seules espèces très enflées et cordiformes dont les crochets sont généralement grands et opposés, comme dans quel- ques-unes des Pholadomyes les plus épaisses-, et il rejette dans un autre genre, auquel il donne le nom de Gresslya, des coquilles qui ne dificrent des premières que par leur forme générale, qui est plus oblongue et moins cordiforme. Sans doute M. Agassiz n’aura pas connu des formes intermédiaires entre les deux genres qu’il a pro- posés, et il est probable que, s’il les avait eues sous les yeux, il au- rait supprimé l’un de ces genres.

Toutes les coquilles que nous réunissons dans le genre Céromye sont connues à l’état fossile seulement, et presque toutes appar- tiennent à la grande série des terrains jurassiques. Elles offrent même ce fait assez singulier, qu’on ne connaît jusqu’à présent que leur moule intérieur, et que c’est d’après lui seul que l’on peut caractériser le genre; mais l’on peut juger d’après lui, aussi bien que d’après les empreintes, que les coquilles, quoique parvenant quelquefois à de grandes tailles, étaient formées cependant d’un tôt excessivement mince, dont les valves i*éünies par un ligament peu puissant, ont souvent été dérangées, et c’est à la suite de ces dérangemens que souvent on a pu observer des impressions très nettes de la charnière. Lorsque les valves n’ont pas été dérangées, on s’aperçoit qu’elles n’étaient point parfaitement égales, et que l’une d’elles, celle du côté droit, était un peu plus grande que l’autre. Malgré la finesse de la pâte calcaire qui le plus souvent a rempli ces coquilles, on n’aperçoit que très dilficiiemeut les im- pressions musculaires et l’impression du manteau. Ces parties sont cependant indiquées, faiblement à la vérité, sur un grand individu du Ccrojnya exçentrica, et elles ont la plus grande analogie avec ce qui se voit dans les Pholadomyes, c’est-à-dire, que l’impression

LES OITCIMEUIDES.

1 (>1

musculaire anlérieurc osi. allonf^ée cl éiroite, le long du bord anlé- rieur de la coquille, tandis que la postérieure, rapprochée du bord supérieur, est presque circulaire. L’impression palléale suit le bord inferieur des valves à une petite distance, et se reploie en arrière pour former une sinuosité postérieure fort large, arrondie et peu profonde. Ce qui distingue particulièrement le genre qui nous oc- cupe, c’est la disposition de la charnière, dont on ne peut se faire, du reste, une juste idée qu’en on prenant une empreinte sur un moule bien net et bien conservé. Sur le moule, on aperçoit que le crochet de la valve droite a un sillon profond qui prend son ori- gine vers l’impression musculaire postérieure, s’avance oblique- ment, s’approfondit sous le crochet, et enfin se termine au-dessous de lui. Ce caractère se montre idenliqucment semblable dans les coquilles nommées Gresslyes par M. Agassiz. Lorsque, au moyen de l’empreinte, on a remis en saillie ce qui était en creux dans le moule , on voit que celle valve droite était munie d’une côte obli- que, à peine saillante à son origine, mais s’épaississant à mesure qu’elle s’avance vers la charnière, sur laquelle elle se place sous la forme d’un S italique très allongé, dont la convexité est en dehors. Sur la valve gauche , le bord cardinal est simple, mais il se relève un peu vis-à-vis de la cote de la valve droite, et il nous paraît probable qu’étant légèrement concave, il a s’appuyer en dedans, à la manière du cuilleron des Myes, et non contre l’autre valve, comme cela a lieu dans les Pboladomyes. Dans tous les moules que nous avons été à mémo d’étudier, if nous a été impossible d’a- percevoir la moindre trace du ligament, de sorte que ce caractère essentiel du genre manque absolument ; mais nous supposons qu’il a être placé, soit partie à rinlérieiir et à rexlérieur, comme dans les Thraciesjsoil loul-à-faità rintérieur, comme dansions les autres genres dont les valves sont inégales (Mye, Corbule, Pandore, Périplôrae, Anatine, etc.), li suit, de ce qui précède, que nous considérons le genre Céroniye comme un type intermédiaire entre la famille des Glycimérides et celle des Myaires.

Les Céromyes sont des coquilles bâillantes, un peu moins ce- pendantque la plupart du Pboladomyes; il y en a même quelques- unes qui sont closes, presque aussi exactement que les Isocardes. A les considérer dans l’ensemble de leur forme, on voit les Céro- myes passer insensiblement de la forme comprimée d’arrièie en avant des Héniicardes jusqu’à celle de coquilles oblongues et Irans- verses, comme celles des Venus, appartenant au sous- genre PuUastra

II*

I.

i62 QÜÂTRIÎÎME FAMILLE.

de Sowerby. A prendre les deux extrémités de la série, on pour- rait être disposé, cooiine M. Âgassiz, à y élabür deux genres; mais ii suÛilde voir le passage qui s’établit par les espèces cordiformes s’allongeant peu-à-peu, et arrivant enfin, par une série de modifi- cations aux espèces les plus iransverses, pour se convaincre que toutes les parties de cet ensemble sont liées d’uno manière intime ; et quand môme on aurait des termes plus isolés de la série, il sufliraii d’y trouver des caractères zoologiques de la même valeur pour les gi'ouper en un seul genre naturel.

D’après les observations de MM. Gressly et Agassiz, aussi bien que, d’après celles qui nous sont propres, les espèces du genre Ceromya vivaient de la même manière que les Pboladomyes, c'est- à-dire qu’elles s’enfoncaient dans la vase des rivages ou se dépo- saient des boues marneuses ou ferrugineuses. La fragilité de leur têt ne leur aurait pas permis de s’établir sur des fonds marins d’une autre nature ; leur coquille n’aurait pu long-temps résister au mouvement des cailloux et des galets. En réunissant , comme nous le faisons actuellement, les genres Céromye et Gresslyede M. Agassiz, on voit ce groupe se propager dans une assez grande épaisseur de sédimens inférieurs aux terrains tertiaires, depuis le grès vert jusqu’au lias. Les matériaux authentiques, que nous pos- sédons sur ce genre, nous permettent d’en présenter la distribution suivante :

2 espèces dans la craie :

Cewmya crassicornis, Agass, Grès vert du Saxonnais en 'Cha- blais (Savoie).

Ceromya ptcelonga, Desb. Ceromya neocomensis, Agass. Isocardia prœlonga. Desh. dans Leymerie, Mémoire sur les terrains crétacés de l’Aube; dans le néocomieu de la Suisse et de la France.

3 espèces dans le Porlland et le Kimmeridge-Clay :

Ceromya eïegans. Desh. Des environs d’Alençon.

Ceromya injlaia. Agass. De Suisse, d’Allemagne et de France.

Ceromya excenlrica. Agass. Très commune en Suisse, en Alle- magne et en France.

1 espèce dans i’Oxford-CIay ; elle n’est point décrite, et elle ap- partient au genre Gresslya de M, Agassiz, Nous l’avons recueillie au Vieux-Saint-Remy, département des Ardennes.

I espèce, non décrite dans la grande oolile, du Fresnoy, près Sedan.

4 espèces dans Toolile inférieure ;

LES r.LYCIMERIDES.

l63

Ceromya plicaia, Agass. De la Suisse.

Ceromya tenera. A^ass^,{fsocard(a. Sow.) D’Angleterre, de Suisse et de France.

Une espèce nouvelle très voisine de VExcentrica , el que nous avons recueillie dans Toolite ferrugineuse d’Hayenge.

Ceromya Gregarea ?Des\i.(^Gressiya Gregarea, Agass.?). Du môme lieu que la précédente.

3 espèces dans le lias, dont deux non encore décrites du lias moyen de la Lorraine,

Ceromya latior? Desh. {^Gresslya latior? Agass.). Du lias infé- rieur de la Lorraine.

En les considérant uniquement sous le point de vue zoologique, les Céromyes peuvent se partager en trois groupes d'espèces: les Isocar diforme s ayant les crochets divergens ; 2" les Bucardiformes à crochets opposés; 3” les oblongues, dont les crochets sont petits, la coquille allongée, et à peine cordiforme.

Céromye élégante. Cei'omya elegans, Nob, pl, 24* f. 3. 4* 5.

C. testa cordaidy depressd^ subcarinatd ; latere antico suhplano , postîcè i/t medio carînalo; 'valvis eleganter striatis; striis ohliquis^ in carinam laie» ralem conjunctîs; striis transversis decussatis.

Habile,. , fossile aux environs d’Alençon, dans l’oolile sableuse supérieure à la grande oolile, d’après M. Boblaye.

Espèce fort singulière qui, par sa forme générale, rappelle beau- coup celle des Bucardes de la section des Hémicardes. Elle est comprimée d'arrière en avant, tout-à-fait cordiforme, el la manière dont ses crochets se contournent sur le côté antérieur, nous avait fait croire d’abord qu’elle devait se ranger dans le genre Isocarde. Les observations de M. Agassiz, et la création du genre Céromye, nous a fait examiner de nouveau les caractères de toutes les es- pèces fossiles rangées parmi les Isocardes, et nous avons reconnu que celle-ci devait en sortir pour entrer dans le genre nous la plaçons actuellement. Le côté antérieur est à peine convexe; ce- pendant il se déprime un peu vers la circonférence, sur laquelle règne un angle obtus vers le bord inférieur des valves, plus aigu sur le crochet. Le côté postérieur est proéminent, surtout dans le milieu il est divisé , à la jonction des valves , par une careno assez aiguë qui descend depuis le bord cardinal jusqu’au bord inférieur des valves. Un angle à peine marqué, sur le côté posté-

i64 QDATBIKME FAWILLE.

ï U ur, liniile LUI rjrancl cspnce corcliforme netlcnunil circonscrit par une icgère dépression qui suit immédiatement le côté extérieur de l’angle. Les crochets sont grands et proéminens ; ils sont un peu clivergens, comme dans les Isocardes; ils ne sont pas parfaitement égaux, celui du colé droit étant un peu plus grand que l’autre; ils forment un peu plus d'un demi-lourde spire, et leur extrémité ne dépasse pas le plan du cdlé antérieur. On voit à la base du crochet delà valve droite, et du côté interne, un sillon étroit et assez profond, qui est, comme nous l’avons vu, le caractère propre au genre Céromye. Outre les particularités distinctives que nous ve- nons de mentionner dans cette espèce, elle se reconnaît encore par des stries très éléganlespar leur régularité; elles prennent naissance, en avant et en arrière, à une petite distance de la circonférence, et viennent se joindre obliquement sur l’angle en formant une série de chevrons emboîtés les uns dans les autres, depuis le sommet jus- qu’à la base. Par celle disposition, une partie des deux côtés de la coquille reste lisse, et il arrive assez souvent que les stries d’ac- croissement, non moins régulières que les stries divergentei, dé- coupent celles-ci en petits losanges d’une non moins grande régU" laiilé.

Les grands individus ont 4o millimètres de bailleur et ^7 milli- mètres de large.

Ccromye excentrique. Ceramya excentrîca. Agassiz. pl. 12 bis.

f. 1.2. pl. 24. f. i4'

C. leslâovato-tmvsversâ^ anticc cordütO’‘'vnitrlcosâ^poUicè depressây longi^ iudtnaîiter obsolète cordafâ; umhonihus magnh , oppositîs; latere antico îœvîgato.

Isocardia excentrica, yoMi in litterîs.

Id. Rcp.mer. Petrif. p. 106. i. pl. 7. f, 4-

Id. Broon. Letb. Geogn, t. i. p. 873. i.pl. 20. f. ii.

Ceromya exccntrica. Agassiz. Etudes crit. sur les Moll. foss. 2*livr. p. 2f? a. 11° I. pl, 8. 8 b. S c.

Habile fossile dans le calcaire do Porllaiid et le Kimmcridge-CIay, presque partout CCS terrains se mollirent en Suisse, eu Allemagne, en Angleterre et en France.

M. Agassiz a donné d’excellens rehseignemens sur cette espèce, dans ses études critiques sur les Mollusques fossiles, et nous ne

LES GLYOIMEIUUES.

l65

saurions trop engager les personnes qui font des études sérieuses sur les fossiles des terrains anciens, à consulter l’ouvrage que nous venons de citer.

Cette espèce présente un très grand nombre de variétés: elle est ovalaire, presque toujours tronquée en avant, très inéquila- térale et à valves plus bâillantes que dans la plupart des autres espèces. Le côté antérieur est très convexe, cordiforme ; le posté- rieur plus déprimé, aminci et subcunéiforme. Les crochets sont grands, presque terminaux, opposés, rapprochés et obliquement inclinés sur le côté antérieur qui est lisse. Le crochet de la valve droite est le plus grand, et le sillon oblique qui se voit à sa base est large et profond , surtout dans les grands individus. Ce qui rend cette espècp particulièrement remarquable, c’est que, malgré le peu d'épaisseur de son têt, il se décompose en plusieurs couches, dont les stries ont des directions différentes. On conçoit, d’après cela, comme le fait judicieusement observer M. Agassiz , que l’on pourrait facilement s’en laisser imposer par des apparences trom- peuses, et créer des espèces pour de simples modifications dans la conservation du têt de celle-ci. Lorsque la coquille est bien con- servée, et M. Agassiz en a fait représenter une dans un très bon état, elle est garnie de petites côtes longitudinales et rayonnantes, aplaties, assez larges, et que l’on voit descendre des crochets jus- qu’à la circonférence des valves. Le côté antérieur reste lisse, aussi bien quun espace lunulaire assez grand qui occupe la partie supé- rieure et postérieure de la coquille. C’est au-dessous de ces côtes, et dans l’épaisseur du lêt , qu’existent des stries obliques et diver- gentes que l’on remarque sur la plupart des moules intérieurs. Cette espèce devient très grande. Nous avons un individu qui a 12 centimètres de large et 95 millimètres de long.

Céromye agrégée. Ceromya gregaria, Nob, pl. 12 bis, f, 3. S.

C, testa ovato^oblongd y in medio 'vcntricosd^ anlich posticèque ohtusd- umbonibus minimU, approximatis, in lunuîam profundam incumbtntihus ; ‘valvh inœqualibus, tenuissimis, lœvigatis,

Grcsslya gregaria, Agass. Elud. cril. sur les Moll, foss, livr. pl. 12. f. i3 a. i5 ?

Habile fossile, irès coramuuément répandue dans Toolile inférieure et ferru# giiieuse d’Hnyange, près Thionville, des environs de Metz, et le pont Saint-Vincent, Nancy. Si celte espèce est identique, comme nous le sup-

l66 CINQUIEME FAMILLE.

posons, avec le Gnsslya ^regaria de M. Agassi?, elle se troaveraît égale- ment en Suisse, dans une position géologique semblable.

Celte coquille est assez variable ; elle est ovale oLIongue, un peu baillante et obtuse à ses extrémités; elle est très inéquilalérale , subtronquée en avant, et la position de ses crochets varie, ce qui donne des proportions assez différentes aux diverses variétés que nous avons établies dans respèce. Nous avons des individus dont les crochets sont presque terminaux, et d’autres ils sont situés vers le tiers antérieur de la coquille. Nous avons sous les yeux tous les degrés intermédiaires entre ces deux points exiiémes. La coquille est ventrue en avant, subcordiforme; son bord supé- rieur ou dorsal est convexe, et non rentrant comme dans plusieurs autres espèces. Le bord inférieui’ est lui-méme convexe, et l’extré- mité postérieure est un peu plus étroite que l’antérieure. Les cro- chets sont petits, opposés; ils sont contournés en spire d’un peu plus d’un demi-tour; ils s’inclinent obliquement au-dessus d’un espace lunulaire assez profondément creusé; la valve droite est toujours plus grande que la gauche , présente aussi à la base le sillon oblique qui caractérise le genre. Le tél était très mince , et nous n’en avons jamais aperçu le moindre vestige sur les 26 ou 3o individus que nous avons été à même d’examiner; il est probable qu’il était lisse, du moins les moules n’offrent aucune trace de côtes, soit longitudinales, soit transverses.

Les grands individus ont 5o millimètres de large et 37 milli- mètres de longueur.

CINQUIÈME FAMILLE.

Les Myaires.

CARACTÈRES. Animal ayant les deux lolies du inan- leau presque entièrement réunis , ne laissant qu’une petite ouverture pour un pied rudimentaire; siphons réunis dans toute leur longueur, pouvant rentrer en tout ou en partie dans la coquille.

LES ItfYAlRES.

167

Coquille équivalve, bâillante, quelquefois close; ligament interne, fixé sur un cuilleron perpendiculaire au bord car- dinal, ou sur une dent adnée qui le représente. Cette dent quelquefois détachée dans Tépaisseur du ligaineut.

GENRES. - MySf Corhule^ Neœi'a,

OBSERVATIONS GENERALES. La famille des Myaires a été proposée pour la première fois par Lamarck dans sa Philosophie zoologique ; il y réunissait alors les trois genres Mye , Panopée et Analine ; plus lard, dans l’extrait du cours, il réduisit cette famille aux deux genres Myeet Anatine,parce qu’il fit passer je genre Panopée dans la famille des Solénacées. Lamarck ne fît plus d’autres changemens dans cette famille, et il la maintint dans les mêmes rapports, dans tous ses ouvrages ; il la mit entre les Solénacées et les Mactracées, et c’est là, en effet, elle doit se trouver d’après l’eusemble de ses caractères. Cuvier, dans les deux éditions du Règne animal, réu- nit cette famille à celle beaucoup plus étendue, à laquelle il donne le nom d’Enfermés. M, de Férussac a pensé qu’il était convenable d’ajouter deux genres à la famille des Myaires de Lamarck, mais il n’a pas été heureux dans le choix qu’il eu a fait; il propose d’y faire entrer les genre Lulraire et Solémye. Nous avons vu que ce dernier genre appartient à la famille des Solénacées, et bientôt nous ferons voir que les Lutraires doivent dépendre de la famille des Mactracées. M. Laireille, dans ses Familles naturelles, a sup- primé le genre Solémye des Myaires de M. de Férussac, et a eu tort, selon nous, d’y conserver les Lutraires. Lorsque nous traite- rons de notre famille des Osléodesmes, nous exposerons d’une ma- nière plus complète que nous-ne pouvons le faire ici, les observa- tions qui nous ont conduit au démembrement du genre Analine de Lamarck et à la réforme de sa famille des Myaires.Trois genres nous paraissent avoir des caractères assez analogues pour être réu- nis actuellement dans la famille des Myaires; ce sont : les Myes, les Corbules et les Neœra.

Les animaux des trois genres, que nous venons de mentionner, ont les lobes manteau réunis dans une grande partie de leur étendue. On y remarque, vers l’extrémité antérieure, une petite fente pour le passage d’un pied rudiiiientaire ; les deux siphons réunis, plus ou moins prolongés terminent l’aniiiial du côté pos

i68

FA3ULLE.

térieur. Quoique souvent très allongés lorsqu’ils sont entièrement développés, ces siphons sont très contractiles et Tanimal peut les rentrer presque entièrement dans sa coquille. Dans ces trois genres, la niasse abdominale d*un volume relatif assez considérable porte à son extrémité antérieure un pied très petit, réduit à Tétât rudi- mentaire ; dans les Corbules , ce pied est un peu plus grand et la fente du manteau est un peu plus étendue. Si nous comparons ac- tuellement les coquilles, nous les trouvons plus ou moins bâillan- tes, presque toutes inéqnivalves, inéquilatérales ; la charnière les caractérise d’une manière toute particulière. Dans les Myes, un grand cuilleron de la valve gauche tombe perpendiculairement dans la cavité de la valve droite, dans laquelle se montre une ca- vité occupant une partie du crochet, et c’est sur ce cuilleron et dans cette cavité que s’insère le ligament. Aux dépens des Corbu- les, M. Turton a fait, il y a quelques années, son genre dont les espèces participent à-la-fois des caractères desMyes et des Corbules; elles appartiennent cependant à ce dernier genre. Les Corbules , dont nous connaissons actuellement cent vingl-et-une espèces, offrent un très grand nombre de modifications, parmi les- quelles celles du Corbula complanata et quelques autres espèces analogues, conduisent vers les Pandores.

Aux deux genres, Mye et Corbule, nous en ajoutons un troi- sième, créé depuis quelques années par M. Gray, pour un petit nombre d’espèces confondues parmi les Corbules, parce que le caractère principal avait échappé aux observateurs. On sait que dans les Corbules la dent cardinale de la valve gauche est saillante sur le bord , à la manière de celle des Myes ; cette dent est reçue dan une cavité de l’autre valve au fond de laquelle se fixe le liga- ment, Si on rompt par la pensée celte dent, et qu’elle reste néan- moins en place dans Tépaisseur du ligament, on aura le caractère au moyeu duquel M. Gray a séparé des Corbules le genre Neœra. Lorsque nous avons observé, pour la première fois, l’osselet des Analines, desPériplomes et de quelques autres genres voisins, nous les avons réunis dans une seule famille, parce qu’en effet tous ces genres offrent un ensemble de caractères qui les rapprochent; mais depuis on a trouvé un osselet mobile dans un genre qui ap- partient à la famille des Cbamacées. Un autre genre très voisin des Pandores a eu effet aussi ce caraclùi e singulier, de sorte que l’on ne pounait plus s’en servir aujourd’hui d’une manière aussi absolue, sans rompre des rapports naturels fondés sur un ensemble de ca-

LKS MYAIUES.

169

racl ères plus iœportans que celui dont nous parlons , pris isolé- ment; il en est de môme du genre Neœra qui conserve trop le faciès général des Corbulespour en être détaché et transporté dans la famille des Ostéodesmes.

Nous avions pensé a une autre époque que le genre Pandore de- vait être compris dans la famille des Mjaires. Notre opinion s’est modifiée depuis l’étude que nous avons faite sur le vivant des animaux de ce genre; nous avons trouvé dans ce dernier des diffé- rences suffisantes pour qu’il devienne le type d’une petite famille voisine de celle-ci.

Ce qui précède justifie le rapprochement des trois genres que nous rangeons actuellement dans la amille des Myaires; ils se lient par un ensemble de caractères qui ne permettent pas de les distribuer dans d’autres groupes.

Ce serait ici qu’il conviendrait de discuter la valeur des ca- ractères, à l’aide desquels quelques naiuralisiesont donné une très grande étendue à la famille des Myaires ; d’après eux , il suffit qu’un mollusque acéphale ait les lobes du manteau réunis dans la plus' grande partie de leur étendue pour qu’il soit introduit dans la famille des Myaires; il en résulte que celte famille, sous un nom emprunté à Lamarck, représenterait en réalité un groupe auquel Cuvier a donné le nom d’Enfermés. En conséquence du principe posé , Cuvier n’excluait de ce groupe aucun mollusque ayant les lobes de manteau réunis, tandis que les naluralisles, dont nous parlons, réservent quelques autres familles fondées sur d’autres caractères, quoique celui de la clôture du manteau leur soit plus applicable qu’à aucun autre. Dans cette extension, de la fa- mille des Myaires, il a fallu réduire à une moindre valeur des caractères qui, judicieusement employés par Lamarck, font con- duit à former de petites familles, il est vrai, mais qui du moins ont l’avantage d’étre plus naturelles. C’est ainsi que M. Agassiz , par exemple, dans ses éludes critiques, fait rentrer dans la fa- mille des Myes un grand nombre de genres dont les uns se rap- prochent des Panopées, les autres des Anaiînes, ce qui prouve que ce naturaliste ne tient aucun compte de la position du liga- ment dans les genres qu’il réunit.

M.D’Orbigny, dans sa Paléontologie française, a suivi cet exem- ple de M. Agassiz, il est même allé plus loin que lui, puisqu’il ras- semble dans la famille des Myaires les sept genres; Solen, Legiimi- naria, Panopœa, Pholadomya, Glycimeris, Mya et Lutraria. Ce

170 CINQUIÈME FAMILLE.

que nous avons dit du plus grand nombre de ces genres, dont nous avons déjà traité, doit suffire pour faire rejeter de la mé- thode naturelle de grandes familles dans lesquelles se trouvent évidemment plusieurs types très distincts; celui des Solens, par exemple, par la forme du pied, Ja position submédiane de la bou- che, la longueur relative des siphons, sera toujours nettement séparé de celui des Myes. En etfet , dans ce dernier groupe, la masse abdominale est grosse, le pied est rudimentaire, placé au sommet, la bouche est tout-à-fait antérieure, les siphons sont plus longs, etc., sans parler des différences que montre la disposition des branchies; maison ne passe pas brusquement d’ungroupeà faiilre, il se présente des modifications intermédiaires se rattachant, les unes au type des Solens, les autres à celui des Myes; et c’est poui’ marquer cet état transitoire qu’il est nécessaire d’établir autant de familles qu’il y a de degrés naturellement indiqués par un ensem- ble de caractères.

Nous avons déjà eu occasion de manifester notre opinion à l’égard de plusieurs des genres nouvellement proposés par M, Agas- siz, dans ses études critiques sur les Mollusques; ce savant les introduit presque tous dans la famille des Myes. D’après noire opi- nion, aucun de ces genres ne doit en faire partie, plusieurs doivent rentrer dans le genre Pholadomye , comme nous l'avons vu; d’autres devront se ranger dans la famille des Ostéodesmes, et c’est alors seulement que nous les mentionnerons pour en discuter la valeur.

Les Myaires vivent de la même manière que les Splénacées et les Glycimérides ; les animaux de cette famille s’enfoncent quelquefois en très grand nombre dans les sables des rivages et à une faible profondeur sous la mer. Chaque individu se creuse un trou dans lequel il est placé perpendiculairement, de manière à ce que l’ex- trémité des siphons vient affleurer la surface du sable. Ces animaux ont peu de mouvement, et il est à présumer qu’une fois sortis de la cavité qu’ils habitent, ils ont de la peine à y rentrer n’ayant qu’un organe faible et peu propre à creuser le sable.

LBS MYAIRES.

171

GENRE QUINZIEME.

MYE. Mya. (Linné.)

PI. 7, f. 6 à 8. pl. 8. f, I a. 4.

CARACTÈRES gènérïques. Animal ovalaire, plus ou moins épais ; les lobes du manteau ont les bords épais, réunis, et ne lais- sent qu'une très petite ouverture antérieure, pour le passage d’un pied rudimentaire conique; palpes labiales pointues, étroites et épaisses , deux ou trois feuillets branchiaux de chaque côté , courts, réunis à Ifw base.

Coquille subinéquivalve, ovale, oblongue, bâillante, charnière offrant sur la valve gauche un cuilleron saillant, horizontal, et sur la valve droite, une cavité également horizontale, correspon- dante; un ligament interne, fixé dans le cuilleron et dans la fos- sette ; impression palléale profondément échancrée du côté pos- térieur.

SYNONYMIE GENERKiUE. Le Tugon ; Adanson. Mya; Linné, Chemnitz, Schroeter, Dillwyn. Chanta d'Acosta. Mya[refor- matd)s Spengler, Bruguière, Lamarck, Cuvier, etc.

OBSERVATIONS. Le genre Mye, tel que Linné Ta circonscrit , u’a pas été connu des anciens, quoique Pline, au 35‘'chap. du livre 9 des animaux , dise que certaiues perles rousses et plus petites se trouvent dans des coquilles nommées Mya et qui habitent dans la mer, surtout vers le Bosphore de Thrace. Avant Linné , créateur du genre, Lister, dans ses animaux d’Angleterre, ainsi que dans son Synopsis cotichijlioruîn , a fait connaître, non-seulement une véritable Mye, mais encore quelques autres coquilles que Linné rangeait dans le môme genre. Une coquille, nommée Tugon par Adanson, et qui fut decouverte au Sénégal par ce célèbre naturaliste, présente aussi les. caractères de quelques-unes des Myes de Linné; mais il faut s’empresser de le dire, le genre Mya, tel qull est dans les 10® et 12® édit, du Syst&ma naiurœ, paraît plutôt un Incertœ sedis qu’un genre naturel, puisque, sur sept espèces, deux seulement appartien- nent aux Myes, telles qu’elles sont actuellement réduites; deux au genre

<7^ CINQUIÈMK FAJliLLE.

Unio de Spengler, et des trois autres , la première est une Perne, la seconde une Vulselle, et la troisième une Saxicave.

Loin de chercher à réformer le genre de Linné, les auteurs qui suivi- rent, Schroeter, Gmelin , Dillwyn, etc., y jetèrent une confusion dont la science n’est point encore entièrement sortie, en entassant, sous ce nom de Mye, un très grand nombre d’espèces de coquilles bivalves appartenant à des genres très divers. S’il était assez facile de se rendre compte des sept espèces contenues dans le genre Mya de Linné, la tâche devient rude quand il faut débrouiller les nombreuses espèces de Gmelin , dans les- quelles la synonymie est généralement très vicieuse. Il est certain que, dans cet état du genre, les zoologistes devenaient maîtres d’appliquer le nom, tantôt à un groupe d’espèces, tantôt à un autre : c’est ainsi que Dacosta, dans ses coquilles de la Grande-Bretagne, donne le nom do Mye aux coquilles que , plus tard , Spengler nomma f/nfo, tandis qu’il nomma Chama , un genre composé des Lutraires et de Myes proprement dites. Spengler qui , l’un des premiers, essaya de réformer plusieurs des genres de Linné , le fit en observateur aussi habile que profond, et no laissa , parmi les Myes, que les coquilles qui ont un cuilleron, tantôt projeté eu avant , tantôt placé perpendiculairement sur l'une des valves; mais il eut tort d’y comprendre aussi quelques coquilles à ligament extérieur, telles que la Panopée, par exemple. Spengler eut le mérite de séparer en genre particulier, sous le nom d’t/>n'o, les Mya pictorum et i/ar</an7^/ero, co- quilles d’eau douce qui n’ont avec les Myes aucun rapport, si ce n’est d’appartenir comme elles à la classe dos bivalves. Dans son travail sur le genre Mye, Spengler ne mentionne pas les Mya perna et valsella^ ce qui annonce qu’il ne mettait pas ces espèces dans son genre réformé.

En préparant les planches de l’Encyclopédie, Bruguières poussa la re- forme du genre Mya beaucoup plus loin que ne l’avait fait Spengler ; non- seulement il adopta le genre Unio, mais il reporta parmi les Mactres une partie des coquilles qui ont les cuillerons horizontaux ; il proposa un genre Perne pour le Mya pema, et reporta au genre Huître le Mya vulsella, parce que, dans cette coquille, il n’y a qu’une seule impression muscu- laire. En continuant la réforme de Bruguières Lamarck fut moins heureux , car il éloigne du genre, le Tugon d’Adanson, pour le mollre parmi les Anatines, dont il n’a pas les caractères, et joint aux Myes deux coquilles, dont l’une est une Corbule , et l’autre une espèce du genre Lyonsia de M. Turton. Aujourd’hui , il faut donc revenir au genre Mya, te! que Bru- guières Ta fait, pour avoir un groupe vraiment naturel. Réduit do cette manière , le genre qui nous occupe a été adopté par presque tous les cou- chyliologues modernes , et presque tous ont accepté les rapports que La-

Ï.ES MYAIHKS. 17*i

marck lui a imposés, soit qu’ils aient admis les Myaires, soit qu’ils aient préféré l’arrangement de Cuvier, dans lequel le genre Mye devient une véritable famille. Pour le prouver, il nous suffira de dire que, dans ce genre Mye, Cuvier range sept sous-genres dans l’ordre suivant : Lutraire, Mye, proprementdito, Analine, Solémye, Glycimère, Panopée et Pandore. S'il est vrai qu’entre les animaux de ces genres, il y ait quelque ressem- blance, il existe aussi des différences assez considérables pour caractériser de très bons genres naturels, surtout si aux caractères des animaux on ajoute ceux non moins importons des coquilles.

Des deux espèces de Myos, abondamment répandues dans les mers d'Europe, l’une est connue depuis long-temps dans ses caractères zoologi- ques. Baster le premier dans le second de ses Opéra sahseciva a donné une figure et une description satisfaisantes de l’animal du Mya arenana/Ia description de l'autre, Mya truncaiaj faite par nous dans l’Encyclopédie méthodique, nous permet de compléter les caractères zoologiques du genre.

Les animaux dos Mycs sont ovalaires, transverses, généralement com- primés de chaque côté. Les lobes du manteau, épaissis et fibreux sur les bords, sont réunis dans presque toute leur circonférence. Vers l’extrémité antérieure, on trouve entre eux une petite fente au moins aussi courte que celle des Panopées. L’extrémité postérieure du manteau se prolonge en un long siphon cylindrique, divisé en deux canaux inégaux par une cloison Iransverse : Lun de ces canaux , le supérieur, le plus petit , reçoit l’anus; le second apporte l’oau sur les branchies. Lorsque l’on ouvre le manteau dans sa longueur, on voit que sa cavité est eu partie remplie par le corps de l’animal et les organes do la respiration. Comme dans tous les autres Mollusques dimyaires, on tcouve la bouche profondément cachée entre la masse viscérale et le muscle adducteur antérieur. Cette bouche est trans- verse, médiocre et garnie de lèTOS assez larges, terminées de cliaque côté par une paire de palpes labiales, triangulaires , lamclleuses en leur face interne et détachées jusqu’à la base. Ces palpes labiales ne sont pas dans les mêmes proportions dans les deux espèces de Myes que nous avons pu observer. Dans le Mya inmcataj elles sont telles que nous venons de le décrire; dans le i/ya areuana , elles sont en proportion beaucoup plus grandes et plus épaisses. La masse viscérale est assez considérable; elle est ovalaire et elle porto, vers l’extrémité antérieure, un très petit pied coni- que, rudimentaire, et qui semble avoir été ajusté après coup au sommet de la masse abdominale : les deux espèces de Myes que nous connaissons présentent encore, dans leurs branchies, des différences assez notables. En effet, dans le Mya truncala, il y a de chaque côté, trois feuil- lets branchiaux très inégaux , réunis en dessous de la masse viscérale, et

174 CINQUIÈME FAMILLE.

dont l’extrémité libre vient Üotter à l'entrée du siphon branchial. Dans le Mya armarm^ on ne trouve que les deux feuillets branchiaux qui sont propres à la plus grande partie des Conchyfères lamellibranches. Les ani- maux desMyes offrent une particularité que ne présentent pas au môme degré la plupart des autres Mollusques si[)honifères. Les siphons sont très grands chez eux , et ils jouissent d’une telle contractilité, que l'animal peut les faire rentrer presque en entier dans sa coquille, et cela paraîtra d'au- tant plus singulier que, dans leur extension totale , ils ont souvent plus de deux fois la longueur de la coquille.

Les coquilles du genre Al ye sont parfailement caractérisées et très faciles à distinguer; elles sont généralement transverses, quelquefois subglobu- leusos, presque toujours inéquivalves , subéquilatérales , peu épaisses et cependant assez solides ; leur tèt étant serré et compacte: elles sont bail- lantes, les unes de chaque côté, les autres du côté postérieur seulement. Si on place la coquille complète dans la position normale que nous avons indiquée, on voit sortir, du milieu du bord supérieur do la valve gauche; un grand cuilleron qui se porte horizontalement dans la valve droite, il se trouve en rapport avec une cavité ayant à-peu-près la même forme que lui et occupant l’intérieur du crochet do la valvo droite. Ce cuilleron , ainsi que la cavité correspondante, donnent insertion à un ligament intérieur très puissant qui sert à maintenir les valves on contact. Le reste du bord supérieur est simple, tranchant, et no présente aucune as|)érité qui puisse concourir à consolider la charnière. Dans i&Tugon d’Adanson, le cuilleron de la valve gauche, au lieu de prendre une position horizoïUalo, s’avance obliquement à la rencontre d’un cuilleron opposé qui est également obli- que. Alais, malgré cette petite différence, nous ne voyons pas qu’il soit possible de séparer cette coquille des Alyes, pour la transporter parmi les Anatincs, comme Lamarck l’a fait. Les valves des Alyes ne sont point (mr- faitement égales; la valve droite a toujours le crochet plus proéminent que l’autre, et presque toujours son bord inférieur dépasse un peu celui de la gauche. L’impression musculaire antérieure est étroite, allongée et courbée le long du bord ; la postérieure est obronde ou subsemilunaire. L’impression palléale offre , du coté [iostérieur, uue sinuosité large et pro- fonde, dont le sommet remonte jusqu’au niveau de la charnière.

Les Aïyes sont des animaux qui vivent de la meme manière que les Pa- nopées, enfoncées perpendiculairement dans le sable. Les trous qu’elles se creusent ne sont pas aussi profonds que ceux des Solens, et elles occupent ordinairement en très grand nombre les plages peu profondes, sableuses ou vaseuses. Nous pensons que le nombre des espèces de ce genre est plus considérable qu’on ne le suppose* Les voyageurs, rencontrant dans des

LES MYATHES.

175

mers lointaines des coquilles peu diffi5rentes des nôtres, négligent de les rapporter; et il esta présumer qu’une comparaison minutieuse ferait dé- couvrir des caractères propres à les distinguer.

Quoique l’on ait cité un assez grand nombre de Myes fossiles appar- tenant à divers terrains, en réalité il y en a peu, parce que l’on a pris pour des espèces de ce genre des Panopées, des Pholadomyes et d’autres, dont on jugeait d’après les moules. Un examen plus attentif, des matériaux mieux choisis et plus nombreux , ont permis de faire une nouvelle distribu- tion des Myes fossiles , et il est résulté pour nous, de ces recherches, que les véritables Myes n’existent point dans les terrains secondaires, elles ne se montrent pas môme dans le bassin de Paris; elles se rencontrent seulement dans les terrains tertiaires réceos tels que le crag d’Angle- terre, et ceux plus nouveaux encore de laNorw^égc.

Dans le catalogue des fossiles de l’Angleterre, par M. Morris, on compte 13 espèces de Myes, distribuées dans divers terrains, mais en les exami- nant , avec une plus scrupuleuse attention , on s’aperçoit bientôt qu’il faut en rejeter le plus grand nombre, soit parmi les Panopées et les Thracies, soit parmi les Pholadomyes; après cette épuration du genre, il n’y reste plus que les Myes du terrain tertiaire. Il en est de même lorsque l’on examine les espèces du Minerai Conchoîogy.

Sur les six espèces vivantes que nous connaissons, nous en signalerons quatre à l’attention des Géologues.

r Mya arenaria, vivante dans l'Océan d’Europe, fossile en Islande et dans le crag d’Angleterre.

Mija tru7ïcata, vivante dans l’Océan d’Europe, fossile en Islande, en Norvège et dans le crag,

Myaovalis, vivante dans les mers d’Angleterre, fossile dans le crag {^fyapullus, Sow.).

Mya Tugon^ vivante au Sénégal , fossile en Morée, dans les terrains subaponnins.

Indépendamment des quatre espèces précédentes, qui sont à-la-fois vi- vantes et fossiles, il y en a cinq autres fossiles seulement, et qui , comme les premières, appartiennent aux terrains tertiaires supérieurs.

Mye tronquée. Mj'a truncata, Linné. PI. 8. f. i à 4-

M. testa ovalo^ 'vvntvîcosây postnius trimcatây alho^gnseâ lutesceiite' s'inu paUiilatOy vix cxcavato] dente caidînaliy ohH<iuè pusteriiis porrecto^ rolundalo, întegerrirno,

Mya truncata. Lin. Syst. nat. la. éd. p. ma. Gmcl. 3317. i.

r.i^nuibiR rAMitf.F.

176

Sthrûel. in Conch. t. 2. p. 600. 11° r.

Fabr. Faim. Groenl. p. 404. 406.

Linné. Fauu.Suec. éil, p. i5i5.n®ai2G.

Spengîer, Mem, de la soc. d'hisl. nat. de Cnpenli. l, 3, p, 28 5.

List. Concl», pl. 4^8. f. 269.

List. Hisl. anini. pl, 5. f. .36.

Guall. Conch. pl. 91. f. D.

Olaffsen, Isl, pl. ii. f. i. a.

Chemn, Conch. 6. t. i. f, i, a.

Olivi, Adriat, p. 95. 2.

Penn. Brit. zool. 4. pl. 41,

Encycl, p. 229. f. 2. a. b.

Dilhv. CnI. t. i. p. 42, a.

Brookes, Inlr. of. Conch. pl. i f. 10.

Desh. Encycl. met. vers. t. 2. p. 591,

/</. Lamk. an. s. v. 2®, éd, t. 6. p. 73. i.

Wood. Geo. Conch. p, 90. i. pl. 17. f. i.

/i/. Ind, tesf, p. 10. r, pl.

Goiild, Uep. inverl. of Massachiis. p. 42.

Môlier. Ind, moll. Groenl. p. ar.

Hanley. Discr. caf. p. 19.

(Foss.) Hiseng. Lelboca, siiec. p, 67,

Lyell. On thc proofs of a graduai rising of the land. p. 35, a.

S. Wood. Cat. of sbells from the crag. Ann. nat. hist. décembre 1840,

p. 245.

Habile les mers d’Europe, tempérées et septentrionales... fossile dans les terrains lerliaîres récens de la Norwége et dans le crag d'Angleterre.

Coquille ovale oblongue , incquilatérale, sensiblement inéquivalve; la valve droite est la plus grande; siibéquilalérale; lecdté antérieur arrondi, le côté postérieur plus court, est tronqué, et il laisse un large bâillement , par lequel sortent les siphons postérieurs de l’animal ; les crochets sont assez proéminens , un peu obliques; les bords sont minces, simples et tranchans; sur la valve gauche, s’avance horizontalement un large cuille- ron , dont la plus grande part!, est destinée â donner insertion au ligament des valves; sur le côlé postérieur de cecuilleron, on remarque un pli oblique, qui est probablement un reste des dents cardinales, qui se montrent sur la charnière des autres coquilles bivalves; sur la valve opposée, dans l'intérieur du crochet , se trouve une autre cuilieron, dont les bords sont saillans, et sur lequel s’attache également le ligament desvalves. La coquille

TT.S MVAinES. 177

d’un blanc grisâtre ou jaunâtre, sale en dedans. L’impression muscu- laire antérieure est allongée, étroite, et occupe presque toute la longueur du bord près duquel elle est située; l’impression musculaire postérieure est petite, ovale, obronde, et on la remarque à l’angle postérieur et supé- rieur des valves, tout près du bord de la troncature. L’impression palléale offre, du côté postérieur, une sinuosité large et peu profonde. Cette coquille a 60 millim. de large et 35 de long, A rextcrieur, lo Myatruncata est d’un blanc sale, grisâtre ou jaunâtre, etc.; l’on remarque, à la surface, des stries irrégulières d’accroissement , cachées vers lo bord inférieur, sous un épi- derme d’un jaune verdâtre, mince et aiduc ; du côté postérieur, cet épi- derme, fortement soulevé sur les bords de la troncature, devient plus épais, s’étend sur les siphons, et les revêt dans toute leur étendue. La figure que nous avons donnée do cette espèce représente cette disposition de l’épi- derme.

Mye tugon. Mya tugon* Desh.

jW. testa rotundaio^globosâ, tnœquîhierali^ postlcè truncatd hiante, stri/s longitudinaïibus transversisque decussatd, aîbà fiagili pellucldd^ ceqtii^ valvi.

Le Tugon, Adans. Voy, nu Séiicg. pl. 19. f. 2.

Mya anatina, Chemn. Condi. t, C. pl. a. f. i3 à ifi .

Srhrol. Einl, t. 2. p. 6i5, Mya, 4,

Mfa guinensh, S]ien§ier, Mém. de la soc. d’hi.st. nal. de Copenli. t. 3. p. 34. 9.

Gmel, p. 3221. ii.

Encycl. mélh. vers.pl. 229, f, 3. a. b.

nnatina,Woo{\, Gen. Conclu p. 9 1. 6.

Id, Dillw. Cal, t. i, p. fi.

Anatina ^ohulosa, Lamk. An. s. vcrl. I. 5,*p. '|fiî, *

Mya tugon. Desh, Encycl. mélh. vers. I, 2. p. 59'.*. 3.

Id, Deslu Lamk. An, s. verf, édit. t. 6, p. 79. 5.

Wood. Ind. test, n*» 6, pl. 2, f. fi.

Var. Slrüs exîUoribus. Mya glohosa, Wood. Gen. Conclu p, 6.^ pl. 21, f. 4.5. 6.

Id, Dillw, Cat. t. t. p. \ II*' 7.

Jd, Wood. Tncl. lesl. p, 10. 7. pl, 2, f, 7.

(Foss.) Myn ornnta, V.asi. foss. de Bord. p. 95. pl. 4. f. 22.

Desh. Kxpéd. sc. de Morée. ZooLp. 8S, n* ifi.

Habile le Sénégal... Foss. aux environs de Bordeaux , dans le 2*^ élage . tertiaire, et , en Movee, dans les terrains subapennin.':.

T. I,

CINQUIÈUF. FAMH.LK.

Coquille singulière, que l.anuirck rapportait à son genre Analinc, mais qui , par ses cararlèros, se rapproelio beaucoup plus des Myes. Nous de- vons ajouter cependant que nous la maintenons dans ce genre, temporaire- ment, car il serait possible que Tanimal présentât des caractères suffisans pour l’établissemeiU d’un genre particulier-

Cette coquille est arrondie, globuleuse, très renflée, équivalvo, et' très inéquilatérale ; son côté postérieur est extrépiement court ; il est subite- nieut rétréci , tronqué dans son milieu, et les valves offrent un bâille- ment ovalaire assez étendu, dans toute la longueur de la troncature. Les crochets sont assez grands, proéminens, et ils semblent inclinés du côté postérieur, à cause de leur obliquité extrême. Les bords sont minces et tranchans. Sur le bord supérieur, imniédiatoment au-dessous du crochet, se montre sur chqquc valve un cuilleron étroit et profond , sur lequel s’at- tache le ligament. Au lieu de s’avancer horizontalement dans rinlérieur des crochets, comme dans le Mya irancata, ces cuillerons prennent une position oblique, qui est réellement intermédiaire entre colle qu’affeelent les cuillerons des Lutraires et celui des Myes. La surface extérieure offre un assez grand nombre de petites côtes très menues, qui descendent obli- quement des crochets jusque sur les 'bords des valves. Ces côtes consti- tuent un réseau irrégulier par leur entrecroisement avec des stries trans- verses d’accroissement.

Cette coquille est d’un blanc laiteux, et l’on remarque en dedans une impression musculaire antérieure, longue et étroite, une impression mus- culaire postérieure, arrondie, immédiatement en arrière du cuilleron, et enfin, une impression palléalo qui paraît simple, mais qui, en réalité, est faiblement sinueuse dans toute la longueur de la troncature des valves.

Cette coquille , assez rare, a 35 millim. de largeur, 30 de longueur et 26 d’épaisseur.

GENRE SEIZIÈME.

CORBUI.Z:. Corbnla, (Brug.)

PL 7- f. 9 a. 1 1. pl. 8. f. D a. 9.

CAHACTKREs génériqves. Animal ovale , assez épais , les lobes du manteau réunis dans presque toute leur circonfé- rence , une ouverture antérieure très petite , pour le passage

LBS MTATRKS.

179

d’un pied rudimentaire en mamelon ; siphons réunis ^ com- plètement rétractiles; branchies courtes, inégales, soudées à la base.

Coquille inéquivalve, inéquilatérale , close ou peu bâillante; la valve gauche la plus petite , charnière ayant , sur chaque valve, une dent horizontale, conique, et à côté une fossette.

Ligament interne inséré sur la dent de la valve gauche et dans la fossette de la valve droite.

. SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Cardium , Walker. Mya, Montagu. Dilhvyn , de Gerville.T’eZ/f/za, Olivi , Brander, Brocchi. Erodona , Daudin, de Roissy. Jloldis .M.egexAe. Eivilia.Tnxiow , Thompson. Sphœ7iia,TlvLX\or).. Leiiiidiwn, Cristofori. Potamomya ^ Sowerby , Erycina{yxiX^.). Lamk.

OBSERVATIONS. Avant que Bruguières créât le genre Corbule dans les planches de l'Encyclopédie, plusieurs espèces, appartenant à ce genre , avaient été signalées par les zoologistes. Chemnitz en avait représenté une sans savoir à quel genre il devait la rapporter. Olivi en trouva une autre dans TAdriatique, et il la mit au nombre des Tellines, cherchant ainsi à se rapprocher de l’opinion de Linné, qui avait introduit la Pandore dans la douzième édition du Système de la nature, sous le nom do Tellina ine~ quivaîvis. Montagu , dans sa Conchyliologie britannique , décrivit l’espèce commune dans l’Océan européen, et la. plaça parmi lesMyes. Bruguières se rapprocha beaucoup de l’opinion do l’auteur anglais; car, en créant le genre Corbule, il le mit à la suite des Myes. Malheureusement cette opi- nion do Bruguières fut entièrement oubliée , et les naturalistes, après avoir long-temps tâtonné pour trouver aux, Corbules des rapports plus na- turels, ont été forcés de revenir à l’opinion de Bruguières, en y apportant de très légers changemens. Nous allons indiquer, do la manière la plus concise qu’il nous sera possible, les changemens que le genre Corbule a supportés dans sa classification : Bruguières n'ayant rien écrit sur son genre Corbule, nous devons croire que ce savant naturaliste aurait' justifié con- venablement les rapports qu’il établit entre les Corbules et les Myes. Lorsque Lamarck, après avoir prison rang des plus distingués parmi les botanistes, se livra à letudede la zoologie , et plus spécialement â celle des animaux sans vertèbres, la science ne possédait qu’un potit nombre de

12

t8o CINQUIEME FAinUÆ.

principes, résultant du pou d’observations cpi’elle avait acquises par les travaux des naturalistes. Aussi, Lamarck, dans son premier essai de classification , se contenta do partager les ^ïollusques bivalves en deux classes principales : la première comprenant les coquilles irrégu- lières, et la seconde les coquilles régulières. C’est à la fin de cette seconde division que Ton trouve les Corbules, parmi les coquilles inéquivalves, entre les Peignes et les Térébratules. Comme on le voit, Lamarck ne tenait alors aucun compte du nombre dosmuscles, caractère dont il se servit par la suite avec beaucoup d’habileté. Quelques années apres, dans le Sys- tème des animaux sans vertèbres , le célèbre zoologiste dont nous parlons, ■nlercala quelques gmires entre les Pandores et les Corbules, mais, au fond, n’apporta aucun changement notable dans les rapports du genre dont nous traçons rinstoire. .lusque-là, Lamarck avait eu soin d’associer les Pandores aux Corbules, mais M. do Roissy, qui probablement avait eu connaissance de l’ouvrage de Poli , transporta les Pandores dans le voi- sinage des Solens, et mit les Corbules entre les Cames et les Gryphées. Ce fiitâ-pcii-près à cette époque que Lamarck commença à apprécier la valeur caractéristique du nombre des muscles dans les Mollusques acé- phales; et Ton voit, dans sa Philosophie zoologique, qu’il utilisa ce moyen de classification , car on trouve les Corbules dans la famille des Camacées, dans laquelle sont rassemblés ceux des Mollusques diinyaires qui ont la coquille incquivalve, régulière ou irrégulière. Lamarck maintint la même opinion dans l’Extrait du cours. Cuvier fut le premier qui, selon nous, eut le mérite de revenir à un arrangement meilleur, et qui se rapproche beau- coup plus do celui de Bruguières que de celui de Lamarck. ^En effet , il comprend le genre Corbule a la fin do sa famille des Cardiacées, à côté des Mactres, et non loin des Myes qui commencent la famille suivante. La- marck, dans son Histoire des animaux sans vertèbres, saisit avec empres- sement les indications de Cuvier, et proposa enlin sa famille des Corbu- lées, composée des deux genres Corbulo et Pandore, et qu’il plaça entre les Maclracées et les Lithopbagcs. Voulant concilier deux méthodes dont les principes fondamentaux sont différons, M. de Férussac, dans ses Ta- bleaux systématiques des Mollusques , intercala maladroitement les Cor- bules parmi les Lithophages, de sorte que ce genre se trouve plus éloigné de ses rapports naturels que dans les classifications précédentes. Lalreillo eut au contraire le bon esprit d’imiter Lamarck, lorsqu’il donna sa Classi- fication des Mollusques dans ses familles naturelles du règne animal. M. de Blainville se rapprocha beaucoup plus do la manière de voir de Cu- vier. Dans le traité de Jlalacoiogie, le genre Corbule fait partie de la grande famille des Concbacées , il est singulièrement interposé , ainsi

LDS iMYAll^ES.

itil

que les Clüliios et les Splièiies, entre les ün^ulines et les Vénérupes.

Nous avons vu , dans les généralités sur la famille des Myaires , par quelles séries d’observations nous avons été conduit à apporter des clmn- gemens notables dans les rapports du genre Corbule. Lorsque l’on a un grand nombre d’espèces sous les yeux , on en trouve quelques-unes qui se rapprochent extrêmement des Myes, et qui servent à lier les deux genres. Parmi ces espèces, se trouvent celles avec lesquelles M. Turton a fait son genre Sphœnia. Quelques autres, telles, par exemple, que le Corbuïa corn,’- 2)Ia7îaîa de M. Sowerby, ont beaucou[) d’affînHé avec les Pandores , et montrent les rapports qui existent entre ce genre cl les Corbules. Enfin , comme dans plusieurs autres familles , il existe plusieurs Corbules qui jouissent de la propriété de vivre dans les eaux douces, et ce sont ces es- pèces qui , pourM. Sowerby, sont devenues le prétexte de son genre Pu- iamomya. Comme ou le comprend sans peine, nons réunissons aux Cor- bules ces deux genres que nous venons de mentionner.

Quoique dans la plupart des espèces, la coquille des Corbules soit parfaitemeul close, l’animal a cependant la plus grande analogie avec celui des Myes.

Nous avons eu occasion d’observer deux espèces vivantes de la Méditer- ranée, le Corbula Mcdiltiranea et le Corbula 7incleus ; la première appar- tient à la section des Corbules aplaties, la seconde à colle des Corbules subglobulcuses. Ces mollusques sont ovulaires, assez épais; les lobes du manteau sont inégaux comme les valves do la coquille ellû-mèmc : ces lobes, épaissis sur le bord, font saillie en dehors de la coquille, et cette partie saillante est niiiico et membraneuse. \ voir l’animal à Pœil nu, il semble que le bord du manteau soit simple; mais, en l’exa- minant à l’aide de la loupe, on voit que ce bord est découpé en une frange à lobes festonnés qui vont graduellement en diminuant de profondeur, depuis le milieu jusqu’aux extrémités. L’extrémité postérieure de ce man- teau se prolonge en deux siphons courts, gros, épais, inégaux, détaches au sommet et soudes dans le reste de leur étendue. Lorsque l’animal les fait sortir, ils se maintiennent dans une position constante, l’un par rapport à l’autre ; et si l’on fait passer une ligne [>ar leur axe, ces deux ligues se ren- contrent à la base en formant un angle droit. Le siphon inférieur, ou bran- chial, est très difierent de l'autre; non-seulement il est plus gros, mais son bord est découpe eu nombreux tentacules digilés qui se recourbent et forment uii véritalfie dôme au-dessus do rouvcrtui-e. Les digitations de ' tentacules sccroiscntsouventet laisseutenlre elles de très faibles espaces à travers lesquels l’eau, destinée û lu respiration, est, t>üur ainsi dire, tami

102 CINQUIÈME FAMILLE.

sée avant de pénétrer dans l’intérieur du manteau. Aussi l’animal, au moyen des tentacules très sensibles qui garnissent son siphon, est averti la présence des moindres corps étrangers. Ces tentacules sont en nombres pairs et symétriques ; les plus petits alternent avec les plus grands. Le si- phon anal est conique; son ouverture est rétrécie et faiblement festonnée sur son bord. Outre ces parties que nous venons de mentionner dans le Corbüla Mediterranea, il y a de plus, dans le nucléus, à la base des deux siphons, une série de très petits tentacules cylindriques qui se renversent en dehors, en rayonnant.

Les lobes du manteau sont réunis dans une grande partie de leur éten- due; ils sont séparés dans le tiers anlérieur de leur longueur pour donner passage à un pied petit, sublinguiforme , ou lancéolé, et dont ranimai se sert avec beaucoup d’agilité pour remuer le sable et s’y cnfoticor. Une fois qu’il a creusé son trou, il se tient dans une position perpendiculaire, la bouche en bas, et il vient ou^Ti^ ses siphons à la surface du sable. La niasse abdominale est assez grosse, et dans les Corbnles subglobulèuses elle oc- cupe presque toute la cavité la coquille. Si l’animal est contracté, son pied apparaît sous la forme d’un petit mamelon inséré sur la partie anté- rieure de cette masse viscérale. Pour voir la bouche, il faut détacher l’ani- mal de sa coquille, séparer les deux lobes du manteau et renverser en arrière le muscle abducteur antérieur derrière lequel se cache une petite fente buccale transverse, garnie d’une paire de petites lèvres qui se termi- nent de chaque côté en une paire de petites palpes labiales allongées et étroites, libres dans presque toute leur étendue, et chargées de fines la - melles à leur face interne. chaque côté du corps se trouve une paire de fouillets branchiaux ; ces branchies sont inégales, comme dans les Myés. L’antis est placé en arrière et se débouche, comme à l'ordinaire, dans le siphon anal.

Si nous examinons acUielIement les coriuiües, nous les trouverons sans exception, régulières, transverses, inéquivalvcs, ordinairement closes et rarement un peu bâillantes à l’extrémité postérieure. Presque toutes les espèces sont striées transversaeraent. On n’en connaît encore qu’un petit uombreayant des côtes ou des stries longitudinales. A prendre les Corbules les mieux caractérisées, on trouve à la charnière une structure toute parti- culière. Une grande dent pyramidale assez souvent courbée dans sa lon- gueur s’élève perpendiculairement sur le bord cardinal de la valve droite. Cette valve est toujours la plus petite. A côté de cette dent on trouve pres- que toujours une petite cavité. Sur la valve gauche, on remarque une échancrure profonde qui coupe carrément le bord cardinal et dans laquelle vient so placer la grande dent de la valve opposée. Sur le côté antérieur

LES MYAIKES,

iS’à

decette échancrure se relève une petite dent en crochet qui s’introduit dans une cavité correspondante de la valve droite. Le ligament placé à Tinté- rieur s’implante profondément dans Téchancrure de la valve gauche et sur la surface externe de la grande dent de la valve droite. On doit s’aperce- voir que ce que nous venons de dire sur la disposition cardinale dés Cor- bules pourrait s’appliquer presque sans changement au genre Mye. Cette charnière présente quelques modifications qu’il est nécessaire de connaître pour bien juger les rapports du genre qui nous occupe. La grande dent py- ramidale, d’abord fort épaisse, s’amincit dans quelques espèces dont le tèt est lui-méme peu épais. On la voit ensuite s’élargir, s’aplatir de plus en plus et finir par présenter la forme d’une lamelle triangulaire reçue dans une échancrure peu profonde de la valve opposée. C’est avec les espèces à charnière ainsi modifiée que M. Turton a fait son genre Sphône. Si Ton suit cette modification dans d’autres espèces, celte lamelle devient plus saillante, plus large, et offre la plusgrande ressemblance avec le cuilleron des Myes. A mesure que la dent pyramidale se modifie, la dent en crochet de la valve gauche éprouve aussi des changemens très notables. Elle s’a- moindrit peu-à-peu et finit par disparaître dans celle des espèces qui se rapprochent le plus des Myes par la forme do la dent perpendiculaire de la valve droite. Ce que nous venons d’exposer se rencontre dans les espèces subglobuleuses ousubcylindracées. Si nous examinons les espèces aplaties, nous trouverons des modifications qui les rapprochent beaucoup des Pan- dores : dans ces espèces, en effet, la charnière a une tendance à s’allonger vers l’intérieur des valves. La dent perpendiculaire, amincie, reste courte, et à la base elle est séparée du bord par une échancrure assez profonde. La valve opposée a toujours une échancrure profonde pour l’insertion du ligament, mais les côtés do cetto échancrure se prolongent en divergeant dans l’intérieur de la valve, et le côté antérieur se relève sous la forme d’une très forte dent cardinale, pour venir s’insérer dans Téchancrure de la valve opposée. L-es impressions tnusculaires sont fort écartées, elles sont d’une médiocre étendue et elles sont réunies par une impressicm palléalo rarement échancrée côté postérieur, mais laissant un large espace pour l’insertion du muscle réiracteur des siphons.

Le genre Erodone de Daudiu, adopté par deKoissy, dans le BuÜbndeSun- nini, est un double emploi de celui des Corbules, et pour s’en convaincre, il suffit de lire avecattenlion la description qu’ën donne le naturaliste dont nous venons de parler, dans les Suite au Buffon (tome vi, page 430 des Mollus- ques); peut-être que les deux esi)èce3 introduites par Laudin dans son genre, ne lui appartiennent pas ; mais le ^Jya Erodona doLamarck qui est une des coquilles de Daudiii, est une belle et grande Corbule assez voisine

1Ü4 Cli>yUIÈMt CAMILLE.

du Corbula yallica, comme nous nous en sommes assuré aulrelbis par i’exanren de l’échantillon de la collection de Lamarck.

Nous avons été en suspens sur la valeur du genre Ervilia de Turton. ÛJ. Recluz qui s’occupe avec distinction de Conchyliologie, et qui , depuis bien des années, rassemble les matériaux d’une Conchyliologie française, nous avait presque déterminé à conserver ce genre; néanmoins en exami- nant toutes les espèces vivantes et fossiles de Corbulcs, on en trouve parmi CCS dernières quelques-unes qui rattachent les Ervilies aux Corbules, mais en les laissant à Textrémilé du genre, vers les coquilles équivalves, puis- que en effet les Ervilies sont des Corbules sensiblement équivalves, ce sont des espèces plates qui se rapprochent du Curbula Mediterranea avec la- quelle M. Cristofori a fait le genre inutile (ju’il nomme Lentidium.

Les Corbules sont des animaux littoraux vivant dans le sable ou dans la vase, à une faible profondeur sous l’eau. 11 y a des parages elles pullulent eu abondance. Ce sont des coquilles répandues dans presque toutes les mers, mais leurs espèces sont plus nombreuses dans les climats chauds quo Mans ceux qui sont froids ou tempérés. Le nombre des espèces vivantes connues est déjà considérable, puisqu’il s’élève à 52, d’après M. Reeve et le Catalogue de Mlle Gatlow.

Parmi les espèces vivantes, on en trouve quelques-unes (jui ont leurs rcprésenlans répandus à l’état fossile dans les terrains tertiaires; ce sont les suivantes.

Corbula binghami {SYÎ\ii'om'à. rar/un) .Vivante dans l'océan Eu- ropéen.

Fossile dans le crag d’Angleterre, mais avec quelque doute, d'après M.S. Wood.

2. Corbula nucléus , Lamk. Vivante dans l’océan d’Europe.

Fossile en Italie, en Sicile, en Morée, en France, dans les terrains

subapeunins, dans le crag d’Angleterre et en Volhynie.

3. Corbula viedilerraiwa. Vivante dans lu Méditerranée.

Fossile en Sicile.

4. Corbula nudformis, Sow. Vivante dans les mers de rAïuérique centrale.

Fossile aux environs de Guayaquil (Guming).

Nous connaissons 69 espèces des terrains tertiaires.

29 dans le tertiaire inférieur.

•/

5 de l’Amérique septentrionale.

LES MYALRLS.

l85

1 8 dans le tertiaire moyen.

M dans le tertiaire supérieur.

Pour établir ces nombres ^ il a fallu examiner toutes cos espèces, en rectifier la nomenclature, et rétablir plusieurs d’entre elles , considérées à tort comme identiques avec d'autres espèces déjà connues.

Nous signalerons , dans le terrain tertiaire, plusieurs espèces dont la distribution n’est pas sans intérêt.

Corbula compîanata y Sow. On la trouve à-la-fois dans le bassin de Paris, en Touraine, aux environs de Bordeaux et dans lecrag d’An- gleterre.

2" Corbula carinata, Duj. (Jiugosa Basl.). Fossile en Toul-aine, à Bor- deaux et eu Püdolie.

3" Les espèces suivantes: Corbula rugosa, Lamk., Umboiiataj Desh., Longirostris , Desh. Sont fossiles aux environs de Paris et de Londres, dans le terrain tertiaire inférieur.

Le Corbula gallica, Lamk. Se trouve dans le bassin de Paris , eu Belgique et à Valognes.

Le Corbula striata, Lamk. Se rencontre dans les mêmes lieux que la précédeute et de plus à Angers.

G* Le Cor6u/a angulaia est commun dans le bassin de Paris, et M. Cailliauden a fait la découverte aux environs de Nantes, dans un ter- rain de l’époque Parisienne.

En passant des terrains tertiaires dans les terrains secondaires, le nom- bre des especes do Gorbules diminue rapidemen).; nous en comptons sept dans la formation crétacée, parmi lesquelles ou remaniuo le Corbula strialula qui est commun au Grès vert cl au Gault en Angleterre et en Allemagne. Nous avons du en écarter le Cprbula lanceoîata de M. Geinilz etle‘C'or6i//a caudata de Nilson, parce que la première est une Anatine et la seconde une Neœra.

Le Corbula alata, Sow. (dans Fiton Chalk. and Oxf. ooL), est la seule esi)cce que nous connaissions dans le terrain Weldicn.

0 espèces seulement sont mentionnées dans toute la série oolitique.

Le Corbula curiansata, Phil. York., se trouve à-la-fois dans le Corul rag et l’Oxford inférieur; les autres espèces Corbula punctum, Obscara, Depressa, Involuta, sont propres à l’oolite inférieure. Nous ne citons pas les espèces dcM. Bœmcr, elles nous paraissent douteuses.

Le Muschelkallc, d’après M. de Munster, aurait une espèce, le Corbula dubia.

Les terrains carbonifères ne sont pas dépourvus de ce genre ; deux es-

l86 CINQUIÈME FAMILLE.

pèces y sont citées , ce sont les Corbula similis , Phil. et Limosa , Flem.

Enfin , une seule espèce so montre dans les couches plus anciennes que les précédentes; le Corbula hennaM, Sovv., a été découvert en Angleterre dans le terrain Dévonien.

Comme on le voit, -1 6 espèces seulement sont distribuées dans toute la série des formations secondaires, tandis que 69 espèces sont propres au terrains tertiaires; si, à ces nombres, on joint celui de 52 espèces vi- vantes, on aura un total de 137 espèces- dans un genre on iFen comp- tait qu’un très petit nombre, il y a quelques années.

Il est à remarquer que le genre Corbule est du petit nombre de ceux qui parcourent toute la série des terrains ; les terrains siluriens seuls , les plus anciens de tous , n’en contiennent pas. II est curieux de voir le nombre des espèces s’augmenter peu-à-peu à mesure qu’elles sont dans des couches plus récentes, et enfin se multiplier tout-à-coup dans les terrain tertiaires. Nous voyons leur nombre s’acci’oître dans la nature actuelle, car il n’est aucune période tertiaire qui , à elle seule ^ en contienne autant que les mers actuelles.

Corbule ovulée. Corbula omlata, Sow.Pl.7. fig. 9. 10. 11.

6\ testd elon^to-ovatâ^ andcc rotimdatà^ posticè acumînatd, transvcr- sîmlenuàsulcatàf albdjUmbonîbiisroseo (inctis,

Sow. Proc. zoül. soc. i833. p. 36.

Reeve, Cuuch. icoh. pl. i. f. 7.

Habite Xipîxapi, Caraccas, Mazallau, etc. Amérique ceuîrale.

Nous avions pris cette espèce pour le Corbula Brythrodon de Lamarck, et c’est sous ce nom que nous l’avons fait représenter ; il est actuellement facile de rectifier celte erreur. La Corbule ovulée est une coquille assez grande, dont le tôt est épais et solide; elle est ovale, équilatérale, trans- verse, arrondie du côté antérieur, pointue, subrostrée du côté postérieur; la surface extérieure est Ornée de fins sillons peu appareils; lu charnière se compose, sm'Ia valve droite qui est la plus grande, d’une grosse dent en pyramide triangulaire un peu recourbée, età côté une fosseUe assez grande triangulaire dans laquelle se place la dent de la valve gauche. C'est danscelte fossette qu’est inséré le ligament; les crochets'sont petits, peu proéminens ; le bord des valves est simple, quelquefois très épais dans les vieux individus. La plus grande partie de la surface de cette coquille est blanche, passant insen- siblement au rose rougeâtre vers les crochets; unèzone pale delà môme cou

LES MY AIRES.

187

leur se remarque en dedans des valves, près du bord, sur la charnière. Cette coloration nous a trompe et nous a fait confondre celte espèce avec VErythrodon de Lamarck. Cette coquille a 46 millimètres de long et 26 de large.

Corbule noyau. Corbula nucléus. Lamk. PI. 6. fig. 7. 8. 9.

C, testa, glvboso^ trîgonâ , albâ, 'vel roseo purpured, 'valvd dexlrd transver slrn striata, subantîquatà, sinistrd lævïgatd , 'vel îongîtudina- litcry obsolète costellatd ; umbonibus magnîs, aîtero gibbosiori,

G/Vwflw/. Oper. post, l. n. p. 3i,pl. 20 f. i43.

Tellina gibba, Oliv. Zuol. adriaU p. loi.

Cardium striatum. Walker. Test minuta, rar. pl. 3. f,

Mya înœquîvaîvis» Monlagu. Tcsl, brit. p. 38* sup. pl. 26. f. 7.

Eucycl. mélb. pl. 280 4.

Peauant. Brit. zool. t. 4. p. x66.

Wood. Üniv. Conch. p. ii3.

Maton et Racket. Lin. trans. t. 8. p. 40. pl i. f. 6.

Dillw. CaI.t. I, p. 55,

Turlon. Conch, bril. p. 3g, pl. 3. f. 8 à 10,

Lamk, Anim. s. vert. t. 5. p. 496. 6.

Gerville. Cat. des Moll, de la Manche, p. 1 1. Mya inœquivalvis.

Sow. Généra of shells. f. i.

Payr. Cat, des Moll, de Corse, p. 32. 44.

Wood. Ind, lest, p, 3. f. 40,

Desh. Eucy. mélh. t. 2. p. S. n<) 2.

Desh. Expéd, scient, de Morée. Zool. p, 86, 10.

Desh. dans Lamk. An. s. vert. 2^ cd. ti 6. p. 139.

Philip. £num. Moll. Sicil. t. i. p. x6. uo. i. et ). 2. p.

Coll, des Ch, Cal. des MoU. du Finis, p. x5. 11° 1.

Buuch'Chaut. Cat. des Mol . du Boulouuais. p. i5.

Reeve. Conch. syst, t, i. p. 54. pl. 36. f. i.

Hanley. Desc. Cat. p. 46.

Corbula striata, Thonis. Rep. ou the faun. of Ireland. p, 263.

Corhuta nucléus, Forbes. Rep. ou œg. invert, p, 143,

Reev, Conch. icou. pl, 2. f, 10,

Fossilis, Corbula gibba. Brocchi. Conch, subap, t, u, p. 517. 11^. i5. Corbula rotundata, Sow. Min. Coucb. pl, 572, f. 4. ^

l88 CINQUIÈME FAMILLE.

Jn Corhula volhynîca, Eichw. Zool, spec. I. iv, p. 281. pl. 5. f, 5.

Pusclï, Pul. Paleout. p. 80. n" i. pi. 8. f. 8. a. h,

Corhula striata. S. AVood. Cal, of sliells ciag. Anti. nat, Aw, (décembrü 1840J, p. 24C. 11® X.

Habile tout l’océan d’Europe, depuis les mers de Norwége jus(jiie dans la Médilerrance* Elle es!’ fossile eu Sicile, dans le terrain snbiipennin de riialie^ de la Morée, de la France, de l’Algérie; elle est également dans le crag d’Angleterre,

Il faudra suivre l’exemple de quelques naturalistes et restituer à cette espèce le premier nom qu’elle a re^u. En 1784, Walker publia ses recher- ches sur les petites coquilles de l’Angleterre, et il donna à celle-ci le nom de Caràixm striaium. Celle dénomination a donc la priorité sur celle d’Olivi et de Montagu, et doit être préférée. Cette petite coquille est facile à distinguer parmi ses congénères; elle est subglobuleuse, subtriangulaire, presque équilatérale ; ses crochets sont grands et saillans, opposes, très rapproches ; celui de la valve droite plus grand que l’autre ; la surface ex- térieure de cette valve est régulièrement striée transversalement ; la valve gauche est souvent lisse; quelquefois sur le milieu de sa surface s’élèvent quelques petits plis longitudinaux, irréguliers pour le nombre et par leur disposition. Le côté antérieur est arrondi, le postérieur est tronqué îar- gemenl. Les valves sont lisses en dedans, l’impression musculaire anlé- rieure est ovale, semi-lunaire, très rapprochée du bord ; la postérieure est circulaire. L’impression palléale est écartée du bord, faiblement rentrée sur elle-même, au moment quittant le bord inférieur, elle va gagner l’impression musculaire postérieure ; la valve droite porte en avant du cro- chet une dent triangulaire, pointue, recourbée sur ellc-inômej en arrière de laquelle est creusée une fossette profonde le ligament est inséré ; sur la valve gauche, on voit en avant du crochet une cavité conique pour recevoir la dent do la valve opposée, et en arrière une dent oblique creusée en cuilleron. C’est dans ce cuilleron que le ligament vient s’implanter.

Cette coquille est assez variable dans sa forme et dans ses couleurs. Dans les vieux individus, la valve droite devient très convexe et plus courte en proportion que chez les jeunes. Ordinairement cette espèce est blan- châtre, lorsqu’on la dépouille de son épiderme. Il y a une variété rougeâtre sur les côtes de la Corse; on la rencontre aussi dans les mers d’Angleterre.

Cette espèce est longue de 1 2 millimètres et large do 1 4.

LES MYATRES. 189

Corbule aplatie. Corhida complanain. Sow» PI. 6. f. 5 à 8.

C. testa ovalo-suhquaâran^ularïy iransversâ^ mœqiiîlaterd^ (lepressà, Icevi- gatâ; umbonibus suhnuUis; dente 'lahœ dcxtrœ ioUdo conico ; sînîsfrœ depresso minore»

Sow. Min. Conch. pl. 362. f. 7. 8.

F.rycîna trigonn, Lamk. Ann. du Mus. t. 6, p. 4i3. 3.

Desh, Coq, foss. de Paris, I. i. p. 5o, 4* pU 7. f. 8. 9, i3. 14.

S. Wood.Cat. of sbells. crag, Ann. nat. hîs. 1840. p. 246,

Dujardif), Touraine» p. 256.

Desli. dans Lamk. An. s. vert, éd, t, 6. p; 142,

Habite fossile aux environs de Paris, dans les laluos de la Toiiraine|

aux environs de Bordeaux et dans le crag d'Angleterre.

Coquille des plus singulières à laquelle il faudrait restituer son premier nom. En effet, d'après l’échantillon de la collection de M. Defrance, La^ marck aurait connu une seule petite valve de celte espèce, et c/est elle qu’il a décrite d’une manière trop concise sous le nom tïErycina trigona. Cette espèce est très itiéqnivalve et inéquilatérale; le côté antérieur est le plus long, il est arrondi ; le postérieur est anguleux, il présente en arrière des crochets un espace aplati assez comparable au corselet des Donaces. Cet espace lancéolé est limité par un angle obtus qui descend obliquement des crochets et va gagner l’angle postérieur des valves. Comme dans les autres Corbules, la valve droite est la plus grande, elle est aplatie; son crochet est triangulaire, petit et à peine saillant. Sa cavité n’ost point profonde^ et c’est à son sommet que s’appuie la base large et épaisse d’une grosse dent qui s’avance en dedans, en se détachant du bord cardinal. En arrière do cotte dent, est creusée profondément, dans toute l’épaisseur du bord, une cavité profonde et étroite, destinée à recevoir le ligament et la dent de la valve opposée. Celle-ci, plus aplatie encore que l’autre, présente à la char- nière une cavité peu profonde, triangulaire, pour recevoir la dent de la valve opposée, et en arrière une dent très épaisse, triangulaire aussi, obli- que, et portant un sillon en guise de cuilleron pour recevoir le ligament. Les impressions musculaires sont assez grandes, circulaires; elles s'ejoN gnent par une impression palléale située loin des bords ctà'peine infléchie au côté postérieur de la'coquille. Toute cette coquille est lisse, à bords simples et aussi parfaitement close que les autres Corbules ; on pourrait y distinguer quelques variétés, et entre autreà celle de Bordeaux qui est plus

T9^ CINQUIÈME FAMIUtE.

étroi^. Les plus grands individus que nous connaissions viennent des fa- luns de la Touraine ; ils ont 26 millimètres de long et 40 de large.

GENRE DIX-SEPTIÈME.

NZŒRA (Gray).

PL 12 bis. Gg. 6 à 12.

CAEACTÈRES GENERIQUES. Animal iiiconnu. Coquille mince, transverse, inéquivalve, parfaitement close, à crochçts grands, opposés, presque égaux; la valve gauche est la plus grande, son bord cardinal est échancré au-dessous du crochet et en dedans, au-dessous de Téchancrure, il présente un petit cuilleron profond et oblique, bord cardinal de la valve dx’oite non échancré, un petit cuilleron spus le crochet, et en arrière une dent latérale très sail- lante et recourbée; impression palléale médiocrement échancrée en arrière; ligament interne, fixé dans les cuillerons, et contenant en avant un petit osselet cylindracé.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Teïllna Oüvi , Covhula impars.')

Les coquillesdu genre, dont nous allons nousoccupcr, étaient confondues avec les Corbules. M. Gray, le premier, en reconnut les caractères et établit pour elles un genre particulier dans Fédition anglaise du Règne animal! de Cuvier, publié par Grifith ; depuis, ce genre a été adopté surtout par les conchyliologucs anglais* la valeur et la constance desescaracièrcs justifient son adoption. Quoique très voisins des Corbules, les s’en distinguent nettement, etil est è présumer que ce genre aurait été proposé plustôL si Ton eut eu, dans les collections, des individus entiers. L’animal est inconnu, etil est à croire qu’il a de nombreuses analogies avec celui des Corbules. Quant à la coquille, elle est toujours plus mince que celle des Corbules; presque toutes les espèces sont très enflées, subglobuleuses, et terminées du côté postérieur en un long bec ; les valves sont inégales, mais, dans une moia- dre proportion que dans les Corbules; les crochets sont obliques, ils sem- blent dirigés en arrière; leur sommet, cependant, s’incline en avant;

LES MYAIUES.

la valve gauche est la plus grande, c'est la droite dans les Corbules.

r.a charnière consiste, sur chaque valve» en un très petit cuilieron qui s’enfonce obliquement, de sorte que ces parties restent fort écartés, lorsque les valves sont réunies. La partie du bord cardinal de la valve gaucho, qpi est’ au-dessus du cuilieron , présente une petite échancrure triangulaire ; elle n’existe pas sur la valvç opposée; mais o\\ trouve sur elle une dent latérale postérieure assez forte, large à la base, recourbée sur elle-même; entre elle et le bord existe une dépression, dans laquelle vient s’engager le bord simple de la valve opposée. Un ligament étroit vient s’insérer dans les fossettes du cuilieron, et dans son épaisseur en avant, comme dans lesLyonsia, se montre un très petit osselet subcylindrique et caduc.

Les impressions musculaires sont un peu différentes de celles des Cor- bules. L’antérieure est assez grande , superficielle, subcirculaire ou ova- laire , faiblement bilobée à son bord supérieur. L'impression musculaire poslériôurc est petite, elle est tout près du bord, et comprend une partie de !q longueur de la dent latérale. Cetïe impression est semi-lunaire, creu- sée et bordée en dedans par une côte oblique qui, partant du fond des crochets, vient s’évanouir à la base du bec postérieur des valves. L’impres- sion palléale n'est pas éloignée des bords des valves, elle eu suit les con- tours; parvenue à la base du bec, elle remonte en se courbant faiblement en dedans pour gagner l’impression musculaire |toslérieure.

Si l’on voulait attribuer à la présence d’un osselet dans le ligament une valeur caractéristique absolue, le genre Neœra devrait passer dans la fa- mille des Osléodesmes; mais alors, il faudrait y admettre aussi quelques autres genres qui , évidemment par rcnscmble de leurs caractères, ne peuvent y être introduits ; il faut donc subordonner ce caractère à tous ceux que présente le genre, et voir si , indépendamment do lui , il se rap- proche plus des Corbules que des genres do la famiHo des Ostéodesmes. Par la forme générale, par la nature de la coquille qui n’est point nacrée, par les impressions musculaires, par l’échancrure du bord cardinal de la valve gauche et surtout par la forme et la brièveté de Péchancrure posté- rieure de l’impression palléale, le genre Neœra appartient au type des Corbules, tandis qu’il se rapproche des Périplômes et des Anatincs uni- quement par les ciiillerons du ligament et le petit osselet qu’il contient. Il est certain que celte cliarnièrc différé d’une manière bien notable de celle de.s Corbules. On n'y voit plus cette grande dent relevée, s’enfonçant dans une échancrure pour recevoir le ligament; disparaît aussi la dent conique de la valve droite; on peut donc considérer le genre Neœra comme inter- médiaire entre les Corbules et la famille des Ostéodesmes, ce qui prouve , une fois de plus, que la nature ne fait rien de brusque, qu’elle sait nuan-

19*?. CINQUIÈME FAMIU-E.

cer à l’infini les coractèrcs des êtres, et les combiner de manière à déjouer tous les artifices de nos méthodes.

Parmi les espèces admises aujourd'hui dans les catalogues, il en est quelques-unes, telles que les Neœra Lata et Iridescens de M. Hinds , qui étant ovales, transverses, bâillantes de chaque côté, ne peuvent rester dans le genre on les a placées, elles doivent entrer de préférence dans le genre Syndosmyc de JI. Recluz; car leur charnière offre des dents la- térales, à la vérité peu apparentes à cause de l’extrôme ténuité du test, mais qui ressemblent à celles du genre en question ; il est un autre carac- tère qui rapproche aussi CCS espèces des Syndosmyes ; l’impression pal- léale , au lieu d’être à peine échîincrée comme dans les Neœra, offre une sinuosité très profonde qui envahit la plus grande partie de la surface in- terne des valves.

On compte actuellement dix-huit espèces vivantes dans ce genre et sept espèces fossiles ; ce sont des coquilles minces, fragiles, d’un petit volume qui , pour le plus grand nombre, habitent les régions profondes, sableuses ou vaseuses de la mer. D’après M. Forbes, il y a quatre espèces dans la Méditerranée , dont deux passent dans l’océan d’Europe, remontent jus- que dans les mers du Nord , et sont fossiles dans les terrains subapennins de la Sicile et de Tltalie ; les autres espèces ont été recueillies dans les mers de Chine, aux Philippines, â la Nouvelle-Guinée et dans les mers d’iVmérique; tout porte à croire que ce joli genre recévra encore de nom- breux accroissomens lorsque les naturalistes feront des recherches dans les mers profondes. Les deux espèces dont nous venons de parler sont le Tellina cuspidaia d’OIivi et notre Corhula costellaia , qui deviennent les Neœra cuspidala et costellala. Des cinq autres espèces fossiles qui nous sont connues, quatre appartiennent au bassin de Paris, la cinquième Neœra caudatUy Nob. Corbula caudata, Nilson, est de la craie supérieure (lu Nord ; elle se trouve également a ï\[acstricht cl à Cypli.

Neœra cuspidée. Neœra ciispidata. Hinds. PI. 12. bis.

fig. 6. à 8.

N. testa ovato^ohlongày aihâ 'X^cî roseo-tlnctày memhranaccâ, fi-agUi y trausvers'im irreguloviter strintà ; lafere autîco tumîdof ohlxisOy postico îonge-rosirato dente cocUearlfoemt îniantOy obliquoyprofundo.

Te-Ulna cu.<pid(i!a. Olivi. Zool. Adrial. p. loi. pl. 4. f. 3, (ï7t)^)- Mya rostrota. SpcngW’r. Méni. de la Sor. d’Iii.U. nat. de Coponli. t, 3, p. i6.pl. 2. f. t6 ((793).

LES MYAIRES. 19^

Mya rostratu Chem. Conrb, I. ii. p. 19?»- 'ign. p. 1S9. C. D, Copiées (le Sjieng'er. (1790).

Id, Wood. général. Cottch. p. 97. 12.

id. Dillw. Cal. t. i p. 45. 9.

Id. Wood. Ind. testac. pl. 2. f, 12.

Anatina lûngîrostris» Lamk. Anim. s. verl, l. v, p. 463. iîo 4*

Corbula rostrata. Desh. dans Lamk. An. s. verl. 2* édit, t. vi, p. 78.

4.

Td. Hanley. Descr, Cat, p. 46,

Efycum cmpidata, Risso. Europe mérid. t. iv. p, 366,

Corhtda cui/7fVo/a.Philip.Enuni. Moll. Sicil, 1. 1. p.17, n** 2. pl. i. f, 19 et I, II. p. 12. 3.

Ncœra cttspîdata, Hiiids. proc. zool. soc. iS43. p. 76,

id, Forbrs. Report on lhe Ægean invert. p. i43. 1843.

Fossilis, Telllnacuspidata, Brocchi, Conch. foss. snbap., t. ii, p. 5i5, 1 3.

Habite la Méditerranée, dans une zone qui s'étend depuis 12 jusqu’à t85 brasses de profondeur; elle habile aussi les mers du nord, d'où nous l'avons reçue de M. Keilhan; elle e:»l fossile en Sicile.

Pour avoir négligé les indications de Spengler et de Cheranîtz, quelques naturalistes ont divisé. la Synonymie de cette espèce et en ont trans- porté la plus grande partie, au iVeœra C/imensîs de Gray, qui vient des mers de la Chine. Il ne faut pas oublier, en effet, que la coquille de Spengler est de la mer de Norvège, de Bergen , et que Chemnitz s’est contenté de copier les figures du naturaliste Danois. La des- cription et la figure de Spengler prouvent que l’-espèce peut acquérir un plus grand volume qu’on ne le croit ordinairement, et nous sommes con- firmé dans cette opinion par l’examen que nous avons fait, il y a quel- ques années, d’un très grand individu de la Sicile , presque aussi grand que celui figuré par Spengler.

Cette coquille est ovale, Iransverse, enflée et arrondie en avant, termi- née en arrière, par un long bec cylindracé, lorsque les valves sont réunies. Les crochets sont grands, très obliques, presque égaux; la surface exté- lérieure est finement striée en travers; les slries sont nombreuses, rap- prochées, obtuses et peu régulières; au côté postérieur des crochets s’élève un angle obtus, qui bientôt s’élargit pour embrasser toute la largeur du bec; le test est mince et fragile, translucide, tantôt d’un blanc jaunâtre , tantôt d’un blanc rose, pâle et pourpré. Le plus grand individu que nous ayons a 13 millim. de long et 25 de large; celui de Spengler a un volume double.

T. I.

SIXIÈME FAMILLE

194

Neœra costellée. Neœra costellata. (Forbes). PL 12 bîSj fig. 9 à 12.

iV. testà ovalo-^oblongà^ albây pellucidà, posticè longi^rostratâ, tvuîcèob- tusâ^ teuuîy //ag/A'; costeUis numeroshyradianübus inœqualibus ornatâ,

Corbula costellata. Desh, Exp, sc.de Murée. Zool. p. 86. ii. pl. 24. f. I, 2. 3.

Neœra costellata, Forbes. Report on OEge. inv, 1843. p, 143.

Hinds. Proc. Zool. soc. 1843. p. 77.

Habite la Méditerranée et FOcéan d’Europe, depuis 3o jusqu’à i85 bras* ses de profondeur, d’après M F orbes. Fossile en Italie, en Sicile, en Morée.

Très jolie petite coquille, que le premier nous avons fait connaître à l’é- tat fossile. Depuis, M. Forbes, à la suite de recherches d’un grand intérêt, a découvert le type vivant en faisant draguer à des profondeurs aux ^uelles il est difficile d’atteindre, etquenégligontd’cxplorerleplus grandnombre des naturalistes et des voyageurs. Cettecoquille estd’un blanc laiteux diaphane, si ce n’est vers les bords des valves elle est couverte d’un épiderme très fin et brunâtre. Ses valves sont très concaves et terminées postérieme- ment en un bec étroit, dont la longueur dépasse un peu le tiers du diamètre antéro-postérieur. Sa surface extérieure est ornée de f 2 ou 4 3 côtes longi- tudinales rayonnantes, qui vont graduellement en décroissant, et en se rapprochant d’arrière en avant; en aboutissant sur les bords, ces cotes y produisent des crénelures plus saillantes sur la valve droite que sur la gauche.

Il existe dans les sables inférieurs du Soissounais (Guise la Motte), une petite coquille un peu plus grande, qui a avec celle-ci la plus grande ana- logie; cependant on trouve à toutes deux des caractères coustans qui les distinguent.

Le Neœra costellata est une petite coquille qui a 5 millimètres de long et 8 de large.

SIXIÈME FAMILLE.

Les Pandores.

CAEACTÈBES. Animal aplati , ayant le manteau ouvert en

LES pandores. 195

avant, fermé dans le reste de son étendue et terminé en arrière par deux siphons courts, réunis et plissés; pied petit, comprimé, lancéolé ; palpes labiales étroites, plissées dans la moitié de leur longueur; deux feuillets branchiaux en tout, un de chaque côté du corps.

Coquille très aplatie , inéquivalve , la valve gauche la plus grande; impression palléale presque nulle, simple, éloignée des bords. Charnière ayant sur chaque valve une dent oblique pour l’insertion d’un ligament intérieur. Quelquefois un osselet court fixé au ligament.

GENRES. Pandora, Myadora.

OBSERVATIONS GÉNÉRALES. A Texemple de Lainarck et de tous les autres zoologistes, nous avions, autrefois, rapproché le genre Pandore des Cor- bules, et nous le comprenions dans la môme famille. Nous avons vu com- ment les Gorbules se rattachant à la famille des Myaires doivent en faire partie; les Pandores ne peuvent en être éloignées, et aujourd'hui que nous avons pu en étudier l'animal, nous croyons nécessaire de créer pour ce genre et celui des Myadores une petite famille qui, par quelques-uns de ses caractères, avoisine aussi celle des Osléodesmes.

Les deux genres Pandore et Myadore ont entre eux la plus grande ana- logie, et quoique l’animal de ce dernier ne nous soit pas connu, nous avons la conviction qu’il diffère à peine de celui des Pandores. Les coquilles sont très aplaties, généralement minces, inéquivalves, la valve la plus petite est celle du côté droit, souvent elle est plate, quelquefois elle est concave, jamais elle n’est convexe ; toutes deux sont nacrées, et ce caractère ne se montre pas dans les Gorbules; les valves sont très lisses en dedans, et l’on y distingue à peine une impression palléale; pour l’observer, il faut la cher- cher en dedans, loin des bords, vers le milieu de la surface interne ; elle est pou apparente, parce que les muscles du manteau sont en petit nom- bre, qu’ils ont peu de points d’insertion et ne constituent pas une ligne conti- nue, commedansla plus grande partie des autres mollusques.Cette impres- sion reste simple du côté postérieur; elle n’a pas même la sinuosité très courte des Gorbules, et cependant l’animal se termine postérieurement en deux siphons courts, à la vérité, mais qui peuvent rentrer complète- ment dans lu coquille lorsque l’animal les contracte. Néanmoins, dans quelques Myadores, on remarque une très petite échancrure à l’impression palléale. Les impressions musculaires sont petites, circulaires et toutes

SIXIKHE FAMitLE

196

deux rapprochées du bord dorsal. On conçoit que dans celles des espèces dont la forme est triangulaire, telles que certaines Myadores, ces impressions deviennent antérieures et postérieures. Dans les deux genres que nous réunissons, la charnière est à-peu-près la mèmej seulement dans les Mya- dores, le ligament porte un osselet attaché de la môme manière que dans les Neœra et les genres de la famille des Ostéodesmes. En présence de Tenserablede caractères par lesquels lesMyadores se rapprochent des Pan- dores, nous croyons que celui de l’osselet cardinal doit avoir une moindre importance et ne pas empêcher la réunion de deux genres que joignent toutes les affinités naturelles.

Nous ne pouvons caractériser cette famille que d’après l’animal du genre Pandore.

Cet animal est très aplati, son manteau est mince, à bords simples et sans tentacules ; il est ouvert en avant dans le tiers de son étendue; ses deux lobes sont soudés entre eux dans tout le reste de leur contour. Ce manteau se termine en arrière en deux courts siphons réunis, distincts au sommet. Les palpes labiales sont au nombre de quatre ; elles sont lancéo- lées, et leur surface interne est garnie de lamelles obliques dans les deux tiers de leur longueur. T.a masse abdominale est petite, et elle porte en avant un pied aplati ovale-lancéolé. De chaque côté du corps, l’animal présente un seul feuillet branchial, épais; parvenu à la base de l’abdomen, celui d’un côté se réunit à celui du côté opposé par le bord dorsal et ils descendent, en diminuant de largeur, jusque dans le siphon branchial, ils se terminent en une pointe aiguë.

Les animaux de celte famille vivent à peu de profondeur sous les eaux de la mer ; ils s’enfoncent dans le sable vaseux ils se tiennent perpen- diculairement, la bouche en bas et leurs courts siphons vers la surface du sable.

GENRE DIX-HUITIÈME.

PANDORE , ( Ptmdora Brug. ).

IM. 8, fig. ro, II,

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal ovale, oblong, très aplati, les lobeg du manteau réunis présentent en avant une petite fente pour le passage d un pied comprimé, ovale, lancéolé ; siphons réu- nis, courts, le branchial plissé, Fanal cilié et garni d’une mem-

LES 1»Al>DÜKKS.

ly?

brane en calotte percée au sotnmet; bouche i)etite; palpes labia- les allongées,' non soudées; une brancbie de chaque côté, se réu- nissant toutes deux au-dessous de la masse abdominale, et se prolongeant postérieurement.

Coquille très aplatie, nacrée, ovale ou subtrigone, inéquilaté- rale, inéquivalve; la valve gauche la plus grande; charnière ayant une dent cardinale, adnée sur la valve droite, et à côté, sur cha« que valve, une petite fossette pour l’insertion d’un ligament in- terne.

SYNONYMIE GENERIQUE. TeWiiay Linné, Gmelin, Dill- wyn, etc. Mya^ Pennant, Schvveiger. Hypogœa^ Poli. Solen^ Linné, Wood. Anomiay Gronovius.

Linné connut la coquille de la Pandore de la Méditerranée, et la rangea d’abord parmi lesSoIensdans la 10* édition du Systemaj puisdans le genre Telline, sous le nom de Tellina inœquivaîviSy dans la 1 édition du même ouvrage. A son exemple, presque tous les auteurs qui vinrent après lui mi- rent aussi celle espèce au nombre des Tellines; mais Bruguières en fit un genre dans les planches de VEncyclopédie méthodique, et lui imposa le nom de Pandore. Dans ses premiers essais de classification des Coquilles, pu- bliés dans les mémoires de la société d’histoire naturelle de Paris, Lamarck porta son attention sur des caractères négligés jusqu’alors, et ci*ut bien faire en rapprochant les Pandores des Peignes et des Térébratules, parce qu’elles ont les valves inégales. Il est évident qu’à cette époque, Lamarck n’attachait aucune importance au nombre des muscles dans les Mollusques acéphalés, ce qui l’entraîna à un arrangement non naturel. Quelques an- nées après, Lamarck remonta un peu ces genres dans la série et les plaça entre les Houlettes et les Anomies. Dans sa Philosophie zoologique, ainsi que dans l’extrait du Cours (1812), modifiant sa première opinion, il mit les Pandores dans la famille des Camacées. Cependant, depuis bien des an- nées, M. de Roissy, s’appuyant judicieusement sur les observations de Poli, a soutenu que les Pandores doivent être rapprochées des Solens, qu’il ne fallait point exagérer la valeur du caractère de l’inégalité des valves, et rompre, comme Lamarck, les rapports naturels pour satisfaire à ce caractère essentiellement variable et artificiel. Cuvier, dans le Règne animal, se rangea à cette opinion de M. de Roissy en la modifiant , ce que fît égale- ment Lamarck dans son dernier ouvrage.

SIXJÈME FAMILLE

198

Déjà à l’occasion du genre Corbule, nous avons parlé du dernier arran-* gemerit proposé par Lamarck, et nous avons fait remarquer qu’il y a moins d’analogie qu’on ne l’aurait cru, entre les deux genres de la famille des Corbulées de ce zoologiste. Cette opinion sera suffisamment justifiée par ce que nous allons dire des Pandores. La cavité qui existe entre les valves indique assez que l’animal de la Pandore est petit et très comprime latéra- lement. Quoique les valves soient inégales, cependant l’animal est sensi- blement symétrique ; il est ovale, oblong, et conserve exactement la forme de sa coquille ; ses bords sont minces et Iranclians, et le dorsal lui-même est plus mince que dans les autres mollusques. Le corps est enveloppé dans un manteau mince, transparent, dont les lobes sont réunis dans la plus grande partie de leur contour; en avant, ils laissent entre eux une feiife du tiers de la longueur totale, pour le passage d’un pied petit comprimé, ova- laire oif lancéolé.

Si l’on en croyait Poli, les siphons courts et réunis seraient garnis, dans tout leur pourtour, d’un rang de longs tentacules simples et filiformes ; les observations que nous avons faites sur la Pandore vivante de la Méditer- ranée, nous ont prouvé que Polfavail commis une erreur, justifiée d’ailleurs par la petitesse des parties et la difficulté de lesbien observer. Les siphons sont en effet très courts et peu apparens , réunis à la base, détachés au sommet; leur masse est comprimée latéralement. Le siphon anal est le plus petit, son extrémité est entourée d’unbord festonné irrégulièrement, creusé dans l’épaisseur de la partie charnue ; au-dessus règne un rang de courts tentacules espacés entre eux; ils ont à peine un quart de millimètre de longueur et im peu moins de diamètre ; ils sont implantés au point s’in- sère une membrane mince, circulaire, formant un court canal cylindracé, à bord simple et prolongeante siphon. Le siphon branchial offre une dispo- sition semblable ; un feston irrégulier, creusé obliquement et formant un plan assez large, sur lequel s’élève un rang de petits tentacules, mais eu moindre nombre que sur l’autre siphon ; la membrane terminale est plus épaisse, plus ample, et elle est régulièrement et profondément plissée; ces plis, par leur ampleur, leur disposition, rappellent ceux de la bourse d’une Quêteuse. Lorsque l’animal les dilate, ils se renversent au-dehors comme les pétales d’une fleur; s’il les contracte, ils se croisent d’une manière tellement exacte qu’ils ne laissent aucun intervalle entre eux.

Lorsqu’on a fendu le manteau de manière à en renverser les lobes à droite et à gauche, on voit au' centre de l’animal une masse abdominale médiocre, terminée par un pied coudé en avant. Si l’on suit le bord an- térieur du pied et de l’abdomen, si l’on relève le muscle adducteur anté- rieur, on trouve entre ces deux parties une petite fente buccale transverse,

LES VANDORES.

*99

dont les lèvres minces se continuent de chaque côté avec les palpes labia- les; celles-ci sont étroites, longues, lancéolées et garnies en dedans d'un grand nombre de lamelles très fines, obliques, mais qui laissent nu le bord inférieur.

L’appareil branchial se présente sous une forme spéciale qui est très analogue à ce qui existe dans les Lucines ; en effet, on ne trouve de chaque côté du corps qu’un seul feuillet branchial très épais, élégamment sillonné ; pan enus à la base de Tabdomen, ces deux feuillets se réunissent et se pro- longent, en passant devant Fouverture interne du siphon anal qu’elles fer-' menthorméliquemen. Lorsque l’on soulève l’extrémité libre des branchies, et qu’on l’examine en dessous, on y voit doux rangées seulement de per- forations, ce qui prouve qu’en effet une seule branchic existe de chaque côtéde l’animal. Cependant en dehors et à la base de chaque feuillet bran- chial, on trouve un petit prolongement que l’on pourrait considérer comme le second feuillet, mais avorté et considérablement réduit.

Le système nerveux est disposé de la môme manière que dans les autres mollusques acéphales siphonifères. Un ganglion postérieur placé à la face interne du muscle adducteur postérieur et donnant deux branches princi- pales pour les siphons et le manteau, deux branches pour les branchies, et enfin deux filets récurrens qui, passant à travers la masse abdominale, se terminent aux ganglions antérieurs placés au dessus de la bouche et réu- nis par un filet de commissure. Des ganglions labiaux parlent deux bran- ches qui se rendent vers l’extrémité du pied, pour se réunir en un ganglion dont les filets s’irradient dans toutes les parties de cet organe.

Toutes les coquilles actuellement connues dans le genre Pandore, sont petites ou d’un médiocrô volume, elles sont très aplaties, iiléquivalves, inéquilatérales; la valve gauche est toujours la plus profonde, la droite est aplatie, quelquefois même côneaveen dessus. Un pli assez semblable à celui des Tellines descend le long du bord dorsal et postérieur des valves ; il est plus marqué sur la gauche que sur la dfoite. Les crochets sont petits, com- primés, non proéminens, la charnière est fort simple : elle consiste sur la valve gauche, en une entaille triangulaire dans bord cardinal. Le bord antérieur de celle entaille est coupé perpendiculairement, et il se prolonge un peu en dedans par une petite saillie. Le bord opposé de l’échancrure est occupé par une cicatricule allongée, étroite, formant un ariglô de 45 degrés environ avec le bord antérieur ; le ligament s’insère sur celte cicatricule. La valve droite offre une grosse dent très comprimée, allongée, èt à côté d’elle, dans une direction oblique, une cicatricule semblable à celle de l’au- tre valve et recevant le ligament. Les impressions musculaires sont petites, l’antérieure subovalaire, la postérieure circulaire, toutes deux très rappro-

200

SIXIÈME FAMILLE

chées du bord supérieur. L’impression palléaie est simple, et il faut la chercher très haut dans l’intérieur des valves; elle consiste en une série de petites impressions musculaires, inégales, distinctes, rarement réunies^ Toutes les espèces sans exception sont nacrées en dedans, blanches en de- hors, un épiderme brunâtre très fin se montre vers le bord des valves, surtout chez les vieux individus.

On ne compte qu’un petit nombre d’espèces vivantes; treize seulement sont inscrites dans les catalogues; deux sont des mers d'Europe: une des mers du Nord, une de l’Amérique septentrionale; les autres se distribuent dans les mers de l’Amérique méridionale et dans l’Océan indien. On ne connaît que trois espèces fossiles : l’une est propre aux calcaires grossiers du bassin de Paris elle est très rare ; l’autre, non moins rare, appartient, aux terrains subapennins ; la troisième, enfin, découverte dans le crag, d’Angleterre par M.;S. AVood, est l’analogue incontestable du Pandoram- irala^ vivante encore dans les mers d’Europe.

Pandore rostrée. Pandora rostrata (Lamk. ). PI. 6, fig. 10, 11.

P. testa ovatch^hlongâ^ transversd^ iaœquilatecd, ontirè obtusà, posticè ros^ tratâ^ obtussUslmè bi-anguiatd ; dente cardinaii unico in valvâ dexfrà^ parvo, retmOy cum fovecold adjectà; in valvà sinistré ^ fosfeolis duabns,

Solen inœquivaîvis. Lin, Sysl, uai, vd. lo. p. 673,

Tellina inœqttivalvîs.l}t\, Syst.nat. éd. 12. p. iri8.

/d. Chenm. Conch. t. 6. p. ii5. pl. 1 1. f, jo6. a. b. c.

Mya incequivalvis, Penuant. brit. zool. t. K* p.» 166.

Gmel. Syst. nat, éd, i3. p, 3a33, exclus, plur, syno.

EiicycL niélb. pl. a5o. Pandora. {. t.

Telliua {hypogcea) inœquimlvis. Pol. Test, Sicil. l. i. p. 3g. pl. i5. f. 5. 6. 7. 9.

Lamk. Méoi. de la Soc. d'hist. nat. de Paris, t. i. p. 83.

Lamk. Sysl. des An. s. vert. p. i36.

Roissy. Bnf. MoU. t, 6. p, 4>9.

Schum. Nonv, syst.p. 114. pl.4. f 2.*

. Doiiov, Prit, shells, t. a, pl. 4 f.

Monlagu. Tesl. bril.'p. 75. iS.

WooQ. Gcner. Con**.b. p. 201. pl. 47. f. 2 .3. 4- . Dillw. Cat. t I. p. 8G.n® 3a.

Lamk. An. s. vert, t, 5. p. 498. 1.

Turlon. Couch.ins. brit. p, 40. ph 3. f. ii à i4. Pandora margaritnera

Gcrville. Coq. de la Manche, p. 17. 16.

LES PANDORES.

201

Blainv. Maiac. p. 563. pl. 78. f. 5.

Pa)'r. Cat. des moll.de Corse, p, 33. 11" 46.

Risso. Hisi. liât. Eur. mérid. t, 4. p. 373.

Croucb. Introd. to Lamk. Gouch. p. 9. pl. 5. f. 2.

Wood. Ind. lesl..pl, 5. f. 97.

SoW. Sjiec. Conch. Pandora. f. 7. 8. 9.

Sow. Geuera ofsbells. f. 1.2. 3.

Collard des Ch CaC des moll, du Fînisl. p. i5. r.

Desh. Encvl. liiéUi. l, 3.p. 697. u” r.

Hauley. Descr. Cal. p. 48,

Forbes. lleport on OEge. iavert. i843. p. 143.

Desh. dans Cuv, Kègiieau. tiouv. éd. Moll. pi. iio. 1. 3.

Catlow. Cat. moll.p. ii.u° ii.

Fossilis, S. Wood. Cal. of shells from lhe Crag. Aaii.nal. hist. décembre 1840. p, 247,

Habite TOcéaa européen, la Méditerranée. Fossile dans le Crag d’Angle- terre.

Coquille commune , fort connue de tous les conchyliologues ; c’est d’après son animal que nous avons caractérisé le genre. Elle est ovaie- oblongue, transverse, très inéquilatérale ; le côté antérieur est le plus court, il est obtus ; le postérieur so termine en un rostre court , assez large, limité par le bord dorsal des valves qui est concave, et par le bord inférieur qui est courbé en sens inverse. Un pli que l’on pourrait comparer à celui desTellines, quoique moins profond et plus régulier, est indiqué sur l’une et l’autre valve par deux petits angles très obtus qui descendent oblique- ment des sommets, La charnière se compose d’une seule dent comprimée sur la valve droite, et sur la gauclie, d’une fossette superficielle ou plutôt d’une cicatricule sur laquelle s’appuie la dent de la valve opposée. Sur l’une et l’autre valve se voit une petite fossette oblongue, droite, dans laquelle s’attache le ligament qui est complètement intérieur. Les deux valves étant réunies, lorsque l’on examine le bord dorsal postérieur, on voit que la valve droite s’infléchit brusquement et tombe à angle droit pour emboiter la valve gauche, à la manière du couvercle d’une boîte. Cette coquille est d’un blanc jaunâtre; au-dehors, elle est revôtue, vers les bords, d’un épiderme jaunâtre, quelquefois souillé de brun rougeâtre. Les grands individus ont 17 millimètres de longueur et 33 de large.

102

SIXIÈME FAMILLE

GENRE DIX-NEUVIÈME.

MIT AX>ORE , My adora (Gray).

(P!, 12 fig. i3 à r5).

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille ovale outrigone, inéquivalve, inéquilatérale; la valve gauche est la plus grande, elle est concave ; la droite est aplatie, rarement concave en dessus ; le côté antérieur arrondi, le posté- rieur un peu flexueux, le bord dorsal postérieur ayant une surface plane et lancéolée. Deux dents divergentes sur la valvè droite, deux dents inégales sur la valve gauche; les dents postérieures donnant insertion à un ligament interne dans l’épaisseur duquel existe un petit osselet caduc, oblong et aplati. Impressions musculaires petites et circulaires ; impression palléale simple ou faiblement éohancrée du côté postérieur,

OBSERVATIONS. Le genre Myadore a été créé par M. Gray dans le Ca- talogue synoptique des Mollusques du Muséum britannique, et reproduit dans la jKirtie des Mollusques de l’éditiort anglaise Règne animal de Cuvier, publié par Griffith?. On connaissait imparfaitement quelques espè- ces de ce genre, et presque toutes étaient confondues avec leé Pandores. Cependant M. Stntchbury, qui en découvrit deux espèces dans les îles de la Polynésie, les confondit d’abord parmi les Anatines, lorsqu’il les décrivit dans le t. v dir Zoological journal. Depuis, elles ont été rapportées à leur véritable genre par M. Reeve, lorsqu’enlSIi ce naturaliste donna le ^enre Myadora, dans son Vonchologia Iconica.

Les coquilles du genre Myadore sont très voisines de celles des Pandorés, et il ne faut pas s’étonner si elles ont été confondues avec elles; plusieurs affectent la forme des Pandores, qûûiqae généralement un pdu plus larges j les autres sont triangulaires, tontes ont les sommets petite, comprimés; el- les sont en généra! plus équilatérales que les Pandores; elles sont inéqui- aWes, cl c’est la valve gauche qai est également la plus grande et la plus profonde ; le côté antérieur est obtus, le postérieur est flexueux, quelque- fois subrostré ; la valve supérieure est plane, rarement concave en dessus. Lorsque les valves sont jointes, on trouve un méplat lancéolé sur le bord dorsal postérieur, et ce méplat résulte, comme dans les Pandores, de l’in-

LES PAKDOIVES.

2o3

flexion subite et à angle droit du bord de la valve droite qui vient emboîter le bord de la valve gauche. Dans la plupart des Myadores, la charnière con- siste en deux dents divergentes qui partent du sommet et suivent la direc- tion des bords; sur la valve droite, la dentantérieure est plus courte, plus épaisse; ces dents laissent entre elles une fossette triangulaire qui est occupée par le ligament, au devant duquel et dans son épaisseur, vient se placer un osselet oblong, aplati, qui se détache de la charnière, lorsque l’on ne prend aucune précaution pour ouvrir la coquille et en séparer les val- ves. Dans d'autres espèces plus voisines des Pandores, la charnière subit une légère modification. En effet, la valve gauche présente une dent an- térieure, oblique, très allongée ; du côté postérieur, on trouve une très pe- tite dent obsolète, peu apparente et plus courte que la première. Sur le bord postérieur, s’élève une cicatricule oblique sur laquelle le ligament s’attache. Sur la valve droite, on trouve en avant une dent courte assez épaisse, un peu dilatée à son sommet comme celle des Pandores, et du côté postérieur une cicatricule longue et étroite, semblable à celle de l’autre valve; le li- gament, comme dans les Pandores, se place sur les cicatricules et non dans la fossette triangulaire, mais de plus que dans ce genre, il retient dans toute sa longueur une pièce calcaire aplatie, allongée, comparable par la forme et la position à la pièce des Lyonsia. Les impressions musculaires sont petites, écartées, circulaires ; l’impression palléale, dans le plus grand nombre des espèces, est plus apparente que dans les Pandores ; elle forme une ligne continue placée très haut dans l’intérieur des valves, et on lui trouve une petite inflexion postérieure, ce qui annonce les muscles des si- phons plus grands et plus nettement détachés que ceux des Pandores; mais CCS derniers caractères ne se montrent pas au même degré dans toutes les espèces, car celles qui sont plus voisines des Pandores par leur forme et leur charnière, le sont aussi par l’impression ])alléa!e qui reste simple et formée de points détachés, résultant de l’insertion des muscles.

Les Myadores sont de petites coquilles naerées en dedans, d’un blanc jaunâtre en dehors; leur test est généralement plus épais et plus solide que celui des Pandores. Le nombre des espèces est peu considérable, M. Reeve en compte dix, nous en connaissons une onzième ; toutes sont vivantes, et ce genre ne possède aucune espèce fossile. Ces petites coquilles vivent à la manière des Pandores, enfoncées dans le sable vaseux, à une petite profon- deur sous l’eau; le plus grand nombre des espèces connues ont été recueil- lies aux îles Philippines par M. Cuming ; lesautres viennent des mers aus- trales.

SEPTIÈME FAJIILLE.

204

Myadore rostrale. My adora rostralis. Desh.jpl. Vibis^ fig.l3-i5).

M, testâ ovato-transversâ t ineequilaterâ^ antîce obtusà ^ hiante posticè ^ brcvî-rostratà^ alhât irregularlter obsolète transverslm sidcatâ ; cardinc

ossicuio angftstissimo, prcedito.

Habile....?

Cette espèce remarquable ne manque pas d’analogie avec le M\jadoT(h pandorœformis de M. Reeve; elle a égalemen|. de la ressemblance avec le Pandvra depressa de Sowerby, maiâ elle se distingue facilement de l’une et de l’autre espèce. Sa forme est ovale, transverse ; elle est obtuse et bâil- lante du côté antérieur. Ses crochets petits et comprimés sont le sommet d’un angle très ouvert, formé par les bords dorsal antérieur et postérieur; !e bord inférieur est régulièrement courbé ; le postérieur, arrivé à Tangle postérieur et supérieur, se prolonge en un bec étroit et court auquel abou- tit une faible inflexion qui, comme dans les Pandores, s’étend du crochet le long du bord supérieur et postérieur. La valve droite est plane, la gauche est concave, mais peu profonde ; toutes deux sont blanchâtres, sillonnées transversalement, mais les sillons sont larges, inégaux, irréguliers. La charnière est semblable à celle des Pandores, seulement on trouve attaché à la face interne du ligament un petit osselet étroit et mince. Cette coquille, longue de 16 millim., est large de 25.

SEPTIÈME FAMILLE.- Les Ostéodesmes. Desh.

CARACTÈRES. Animal ayant les lobes du manteau réunis dans la plus grande partie de leur longueur, laissant en avant une petite ouverture pour le passage d un pied étroit, quelquefois by^ssifère; siphons plus ou moins allongés et réunis en tout ou en partie.

Coquille régulière, inéquivalve, plus ou moins bâillante, mince et subnacrée. Charnière ayant un cuilleron sur chaque valve, re- cevant un ligament interne sur lequel est fixé un osselet cardinal.

Its OSTÉüDESMES.

ao5

GENEES. - Lyonsie, Ostéodesme^ Périplome ^ Anatiney Thracie , Myocarne.

OBSERVATIONS GÉNÉRALES. Dès 1822, M. Turton avait observé dans une coquille des mers d’Angleterre, Tin fait aussi nouveau qu'intéressant; il avait constaté dans le Mya Nonvegica, l'existence d’un osselet entière- ment isolé et fixé sur le ligament de la charnière ; en 1825, nous faisions une observation semblable sur plusieurs des Ânalines de Lamarck et sur le Mya soîemyalis de cet auteur, nous trouvions aussi un osselet isolé à la charnière de ces coquilles, avant que le travail de M. Turton nous futconnu. D’après l’ensemble de ces observations, nous avons senti la nécessité d’é- tablir une famille dans laquelle seraient réunies toutes les coquilles por- tant un osselet isolé à la charnière, et d’établir dans cette famille autant de genres que l’osselet présenterait de modifications, tant dans sa forme que dans sa position. Nous avons été conduit, par là, à réformer le genre Anatine de Lamarck, et à remettre eu évidence le genre Thracie de Leach, jusqu'alors oublié dans les ouvrages de conchyliologie. Nous avons égale- ment introduit le genre Périplome de M. Schumacher dans notre nouvelle famille, parce que nous avons observé le premier l’osselet triangulaire qui fait partie de la charnière ; enfin ayant vu dans le Mya soîemyalis un osse- let quadrangulaire, nous proposâmes pour cette coquille et quelques autres du même groupe un genre Osiéodesme, maisM. Turton, avant nous, dans ses Coquilles bivalves de la Grande-Bretagne, avait établi un genre Lyon- sm, que nous avons substitué au nôtre, à cause de son antériorité. Il existe un genre très singulier établi parM. Stutchbury, daus le t. v, du Zoological journal^ sous le -nom de Myochama. Nous ne le connaissons que d’après les figures et les descriptions données par les conchyliologues anglais, et nous pensons qu’il doit venir se ranger dans notre famille des Ostéodesmes ou dans son voisinage.

Tous les genres que nous venons de mentionnei’ ont un osselet à la char- nière. Dans les Lyonsies, cet osselet est une plaque sub-quadrangulaire, dont les deux bords les plus longs sont appuyés sut* des ciiiüerons obliques appliqués le long du bord supérieur et postérieur de la coquille ; la char- nière des Myocames offre un osselet semblable, mais ce genre de mollus- ques dimyaires est fixé par l’une de ses valves, de lu même manière que les Cames ou les Huîtres, et néanmoins l’impression palléale est sinueuse du côté postérieur, ce qui annonce que l’animal est terminé par des siphons. Voilà donc une coquille adiiérenle, irrégulière, qui contrairement aux prin- cipes qui ont servi de base à la méthode, viendrait s’intercaller au milieu de genres à coquille libre et régulière. Avant d’admettre une exception

septième famillk

aussi considérable que celle-ci, il faudra revoir ce genre avec toute l'at- tention qu’il mérite, et attendre que son animal soit connu avant de fixer définitivement sa place dans la série. Le genre Périplome de Schumacher a les cuillerons détachés du bord cardinal, saillans dans les valves, et l’os- selet est enclavé entre le cuilleron et le bord dorsal* Cet osselet est trian- gulaire, à angles arrondis, tandis que dans les Analines, l’osselet est tri- cusp.ide; deux branches s’enfoncent dans la cavité des crochets, la troisième se place en travers des cuillerons et est retenue par le ligament. Dans les Thracies, l’osselet est moins constant que dans les autres genres ; plusieurs espèces paraissent en manquer, mais nous l’avons trouvé dans celle qui habite les côtes de la Normandie; il est en demi-anneau et il embrasse les deux valves en arrière du ligament ; le ligament dans ce genre, a déjà une tendance à sortir de la coquille ; les cuillerons sont petits, et il y a un petit ligament extérieur; ces différences ne sont pas les seules, aussi il ne serait pas impossible que plus tard les Thracies sortissent de la famille des Os- téodesmes, d’après les caractères de Tanimal.

Nous connaissons actuellement l’animal de trois genres de la famille des Ostéodesmes : ce sont ceux des Lyonsies, des Anatines et des Thra- cies, Ces animaux offrent des différences génériques assez considérables, mais deux d’entre eux, les Lyonsies et les Anatines ont des caractères com- muns qui les rapprochent ; le manteau est fermé dans presque toute sa cir- conférence, une petite ouverture antérieure et inférieure donne passage à un pied grêle et cylindracé semblable à celui des Myes.

A l’extrémité postérieure, le manteau se termine en deux siphons réu- nis et courts dans les Lyonsies, plus allongés dans les Anatines, mais désu- nis dans toute leur longueur dans les Thracies. Les palpes labiales dans les trois genres sont longues et étroites, et les branchies offrent un caractère commun ; elles sont situées le long de l’animal comme les feuillets d’un li- vre complètement ouvert par le milieu; ces caractères communs des pal- pes et des branchies doivent-ils l’emporter à l’égard des Thracies sur ceux empruntésaux siphons, et d’après lesquels ce genre devrait sortir de la fa- mille des Ostéodesmes? Dans notre opinion, la science ne possède pas en- sède pas encore assez de matériaux pour coordonner ces caractères selon leur importance, et fonder des groupes naturels d’après leur emploi judi- cieusement fait.

Les coquilles ont entre elles plus d'analogie que leurs animaux; toutes sont minces, fragiles, plus ou moins baillantes, inéquivalves, et à l’excep- tion des Thracies, toutes sont nacrées à intérieur ; l’épiderme qui les re- couvre est extrêmement mince dans le plus grand nombre, et ne devient apparent que vers le bord des valves ; enfin, presque toutes les espèces ont

207

LES OSTÉODpSMES.

le dehors des valves garni de très fuies granulations. Tous les genres n’ont pas la même manière de vivre j les Anatines s’enfoncent dans le sable à peu de profondeur sous Teaii; les Thracies habitent les lieux vaseux, tandis que lesLyonsies préfèrent les endroits rocailleux, parce qu’elles se fixent sous les pierres au moyen de leur byssus ; enfin, les Myocames se fixent sur les autres coquilles, et notamment sur les Trigonies, à la Nouvelle-Hollande et à la Nouvelle-Zélande.

GENRE VINGTIÈME.

ZiTOlSrSlEi Lyonsia (Turton).

(Pi. 8, fig. 12, i3, i4)i

CARACxèRiis générïqües. Animal ovalaire, ayant les lobes du manteau réunis dans presque toute leur circonférence, laissant en avant et en dessous une petite fente pour le passage du pied ; pied petit, cylindracé, portant un byssus à la base; siphons très courts, réunis, si ce n’est au sommet; impression palléale à peine sinueuse postérieurement, donnant attache à un muscle rétracteur des siphons ; ceux-ci très courts et ciliés au sommet.

Coquille ovale, oblongue, transverse, inéquivalve, inéquilaté- rale, très mince, nacrée; imcuilleron étroit très oblique, appliqué contre le bord dorsal, recevant un ligament interne, large, sur lequel est attaché un osselet qùadrangulaire fort mince.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mfa^ Chemnitz , Muller ,Gme]in, Dillwyn, Wood. Amphidesma, Lamk. Pandorina ^ Scac- chi, Philippi. OsteodesmUy Desh. Corhula^ Bruguières. Periploma^ Rang.

OBSERVATIONS. Nous avoRS proposé un genre sous le nom d’Ostéo- desme à une époque l’ouvrage do M. Turton no nous était point encore connu. Publié en 1822, l’ouvrage du naturaliste anglais contient le genre Lymsia qui correspond en partie au nôtre, et que ses caractères doivent faire accepter dans la méthode. Néanmoins, notre genre Ostéodesme ré- formé par la séparation des Lyonsia que nous y confondions, peut être éga- lement conservé, comme nous le verrons bientôt.

La coquille qui a servi de type au genre de M, Turton, était connue de-

2o8

SEPTIEME FAMILLE

puis long-temps. Chemnitz l’avait décrite et figurée dans son grand ouvrage sous le nom de Mija Nonoegica. Peut-être Muller Ta-t il connue, et il se- rait possible qu’il l’eut inscrite dans son prodrôme de la zoologie danoise, sous le nom de Mya niiida. Gmélin, Dilwyn, Wood ont suivi l’exemple de Chemoitz , tandis que Bruguières, dans V Encyclopédie^ réformant le genre Mye et le réduisant à un petit nombre d’espèces, transporta celle-ci dans son genre Corbule, quoiqu’elle n’en eut pas les caractères. Lorsque Lamarck publia ses ^namaux sans vertèbres, les zoologistes durent être surpris de rencontrer le Mya Norwegica dans le genre des Amphidesmes. Il est vrai, comme nous le verrons plus tard , que ce genre paraît avoir été destiné par son auteur à recevoir celles des coquilles bivalves, qui ayant des carac- tères ambigus, ne pouvaient être admises dans des genres plus nettement caractérisés. Quelques années plus tard, M. Turton détacha des Myes le genre qui nous occupe, se fondant sur ce caractère singulier d’un osselet isolé, attaché à un ligament interne et faisant partie de la charnière; c-esoat des faits analogues que nous observâmes dans plusieurs des espèces d’Ajia- tines de Lamarck qui nous déterminèrent aussi à créer la famille des Os- léodesmes et le genre du même nom, en y rassemblant un plus grand nom- bre d’espèces que n’en connut le zoologiste anglais ; mais ces obsei^^ations- commencées en 1825 sont postérieures à celles de M. Turton, et nous euî abandonnons la priorité pour ce qui concerne le genre Lyonsia.

Jusqu’à présent l’animal de ce genre est resté presque entièrement m- connu. Depuis peu de temps, nous avons pu cous procurer un individu conservé dans l’alcool , et provenant de la Méditerranée. Cependant MM. Scacchi et PhiUppi l’ont vu vivant, et le premier de ces naturalistes^ en a fait un dessin de grandeur naturelle; une description très abrégée de' quelques parties extérieures a été publiée par les mêmes auteurs, dans les- des sciences na/ure//es de Londres (janvier 1840). Le pied elles siphons sont mentionnés, ce qui est insuffisant, selon nous, pour détermi- ner exactement la place d’un nouveau genre de mollusques dans la séri& méthodique.

Cet animal est étroit, ovale, transverse; il est enveloppé d’un manteau mince et transparent, dont les bords sont épaissis par une zône muscu- laire, assez large pour chaque côté ; les bords en sont soudés dans presque toute la circonférence ; une petite fonte antéro-inférieure subsiste pour le passage d’un petit pied subcylindracé ouconoïde un peu comprimé latéra- lement. En arrière, le manteau est terminé par deux siphons très courts soudés à la base, détâchés au sommet et pourvus, de chaque côté, d’un mus- cle rétracteur très court , faisant à peine saillie dans le manteau. Ces si- phons, par leur disposition, ont beaucoup d’analogie avec ceux des Pan-

LES ÜSTEÜDESMKS.

10(9

dores. Leur base, subitement plus épaisse, est séparée du sommet, non- seulement par ce changement subit d’épaisseur, mais encore par une ran gée de tentacules coniques placés au point do jonction des deux parties. Lorsque le'manteau a été ouvert, on trouve en avant une masse abdomi- nale peu considérable, un peu comprimée latéralement et portanten avant le petit pied dont nous avons déjà parlé. Ce qui nous a paru extraordi- naire dans le genre Lyonsia, c’est l’existence d’un byssus assez considé- rable fixé à la base du pied, exactement de la môme manière que dans les Byssomyés de Cuvier. Le pourtour de l’ouverture du manteau, par passe le pied^ est garni de courtes papilles charnues, obtuses, semblables à celles que l’on remarque dans la Solémye.

La bouche est petite, transversc, placée comme à l’ordinaire entre la base du pied et le muscle adducteur antérieur ; elle est entre deux levres assez larges qui se continuent de chaque côté en une paire de palpes très étroites, obliquement placées d’avant en arrière et de haut en bas. Sur la face in- terne de ces palpes, s’élèvent do fines lames peu obliques qui s’étendent d’un bord à l’autre. Ces organes ne sont point fixés par leur grand côté, comme cela a lieu chez beaucoup d’autres mollusques, mais i»ar le côté le plus étroit.

Les Branchies sont constituées par deux feuillets allongés, étroits, occu- pant de chaque côté toute la longueur de l’animal, depuis les palpes jusqu’à l’entrée des siphons. Ces organes ne sont point relevés l’un contre l’autre comme les feuillets d’un livre fermé, mais ils sont largement étalés,, exacte- ment de la mémo manière que les feuillets d’un livre ouvert. Cette dispo- sition n’est pas propre seulement au genre qui nous occupe, on la retrouve chez plusieurs autres, comme nous aurons occasion de le voir par la suite. Les branchies, dans les Lyonsia, se distinguent encore par l’épaisseur et la régularité des sillons transverses qui les couvrent; en cela elles se rap- prochent de celles des Analines.

Les muscles adducteurs des valves sont inégaux ; l’antérieur est allongé, étroit, aplati, ce qui le rapproche de celui des Solens et de la Solémye ; le postérieur qui est le plus gros est subcirculaire, et lorsque l’on met rani- mai sur le ventre, on voit à travers le manteau le rectum descendre le long du dos pour venir s’appuyer sur le milieu du muscle, en suivre le contour et aboutir à la partie supérieure du siphon anal.

Les coquilles du genre Lyon^ia se distinguent facilement par l’ensemble de leurs caractères; toutes sont ovales, étroites, transverses, régulières, subéquilalérales, inéquivalves, le test est mince, fragile, transparent, na- cré, brillant en dedans; en dehors, il est d’un blanc grisâtre ou jaunâtre, recouvert d’un épiderme qui paraît surtout vers les bords des valves.

aïo

SEPTIÈME FAMILLE

Toute la surface est couverte de stries très fines qui descendent des cro- chets à la circonférence : ces stries sont onduleuses, faiblement relevées, très étroites. Les valves sont inégales comme nous le disions, c’est la gau- che qui est la plus grande j les crochets sont médiocres, rapprochés ; le côté antérieur est arrondi, le postérieur se prolonge un pou en un bec assez large 5 closes dans la plus grande partie de la circonférence, les valves sont bâillantes dans toute la largeur du bec : ce bâillement ressemble à celui des Anatines; elles les ont aussi en avant, mais plus faiblement; il y a même quelques espèces qui ne le sont pas de ce côté.

Si Ton examine Tintérieur des valves, on éprouve beaucoup de peine pour apercevoir les impressions que l’animal y a laissées. Un individu mort et terni en dedans est préférable à ceux qui sont bien frais et bril- lans. On trouve en avant et tout près du bord supérieur une impression musculaire ovale, allongée, étroite, un peu courbée sur elle-mêmo et un peu en arrière, une autre petite impression près de la cavité des crochets ; elle résulte du rétracteur antérieur du pied. L’impression musculaire posté- rieure est subcirculaire, grande, située tout près du bord supérieur; elle s’étend jusqu’à la base du bec de la coquille. Une impression palléale à peine marquée, commence à l’extrémité de l’impression musculaire an- térieure, suit le bord des valves à une petite distance, et parvenue à l’ori- gine dû bec, s’infléchit faiblement en dedans pour recevoir dans cette échancrure un muscle court et large qui est le rétracteur des siphons.

Le bord cardinal est extrêmement mince, la portion de ce bord qui ap- partient au côté antérieur est un peu plus épaisse, elle s’arrondit en côto et vient se terminer brusquement sous le crochet. C’est à l’extrémité do ce bord que commence sur chaque valve un cuilleron très aplati, descendant obliquement le long du bord supérieur et postérieur. Quand les valves sont réunies, ces cuillerons, très rapprochés sous lo crochet, s’éloignent vers leur extrémité postérieure, et leur écartement présente la forme d’un V tronqué au sommet. Un ligament intérieur s'attache sur ces cuillerons , s’étend d’une valve à l’autre, et il donne insertion à un petit osselet aplati, triangulaire ou subquadrangulaire, qui, par le fait, est à cheval sur la charnière, puisque chaque moitié appartient à la valve qui lui correspond. Lorsque l’on détache les valves, il arrive souvent que l’osselet quitte les cuillerons et s’échappe, mais on le trouve en place dans les individus dont la charnière n’a point été rompue.

Ce que nous avons exposé sur le genre Lyomia^ rend assez facile à dé- terminer la place qu’il doit occuper dans la méthode générale ; par les si- phons de l’animal, il se rapprochedos Pandores ; par le manteau dont l’ou- verture pour le pied est petite^ il a de l’analogie avec les Myes et les Ana-

LES OSTÉODRSftlES.

an

tines; enfin, il se rattache à ce dernier genre par des caractères plus im- portans tirés de la forme des palpes et de la dispositian des branchies. Si nous nouàcn rapportons aux figures d’Analine données par M. Mitre dans le Magasin de zoologie, les palpes et les branchies auraient dans les deux genres la plus grande ressemblance, et c’est celte ressemblance qui doit déterminer le zoologiste ù faire entrer le genre- Li/o?iS2a dans la même fa- mille que les Anatines.

Tel que nous le réduisons actuellement, lo genre Lyonsia se compose d’un petit nombre d’espèces vivantes,, dont les principales sont de la Médi- terranée et de rOcéan européen j quelques autres proviennent des mers de l’Amérique septentrionale. Nous n’en connaissons aucune à, l’état fossile, quoique récemment M. A. d’Orbigny ait cru devoir ranger dans ce genre des coquilles fossiles des terrains ooliüques, pour lesquels M. Agassiz avait proposé le genre Gresslya, L’opinion do M. d'Orbigny paraîtra sans doute inadmissible aux personnes qui ayant des Lyonsia vivantes, auront re- connu la symétrie de leur charnière , symétrie qui n’existe pas dans les Gresshja; car il est évident que l’épaisseur un peu plus grande des cuille- rons de la valve droite dans les Lyonsia, ne peut être considérée comme l’équivalent de la côte épaisse qui exisUtit dans le crochet de la valve, du môme côté des Gresslya* Au reste, nous avons vu en traitant, du genre Ceromya pourquoi nous y réunissons les Gresslya*

Lyonsie corbuloïde. Lyonsia Noîwe^ica. Sow.

PI. 8. fig. 12; 13. 14.

testa ovato^-angustâ , oblongâ ^ transversâ , tenui , pclhicidâ ^ anticè clausây rotütufatâ, poslîcè late rostraiâ, hiante; stnis vacliantîbus tenuîs^ simîs imdiilatisornatà,

Mya iVonvc^/ca.Chemnilz.Concb. t. lo. p. 34ô, pl. ryo. f. 1667. i668.

Gmel. p. 3228.

An Mya nitida ? Muller. Zool. Dan, proclr. p. 245, n®^963.

Mya nitida? Fabricius. Mus. de la Soe. d’iiist, iial. de Copenhague, t. 4. part, p. 44, pl. 10. f. 10,

Mya Nonvcgjça, wood. Gener. Cpncli. p, 98. pl. 18. f. 4. 5.

Mya nitida. Wood. loc. cil. p, io3 ?

Mya Korwegica, Dillwyii. Cat. t, i. p. 48. 20,

Mya striata. Monlagii. Lin. Traus. t. ii, p. i88, pl. i3. f. i, A.

Id. Turton. Conch. dicl. p. io5. f. 99.

Mya Norwegîca, Turlon* loc, cil, p. 160. f. 100.

lyonsia striata Turton. Conch. brit.p. 35, i. pl, 3, f. 0, 7.

*4’

ai2

SEPTIÈME FAMILLE

Jnatiua Norwegica. Sow. Généra of shclls. f.

Id. Reeve, Conch. System, t. r. p. Sa, pl, 34. f. 2.

Amphidesma corbuloides, Lamk. An. .s. verf. !. 5. p. 49a. li.

Osteodesma corbu/oides» Desli. dans Lamk. An. s, verl. édit. t. 5. p. 85.

Lyonsia Nonvegica, Sow. Conch. Man. f. 4gt. 492.

Habite les mers d’Europe.

11 règne encore quelques incertitudes sur la synonymie de cette espèce, relativement surtout au Mya^nitida de Muller et de Fabricius. S’il était bien reconnu que Tespèce désignée par ces auteurs sous ce nom, est la même que le Mya Nonveyica de Chemnilz, dès-lors ce dernier nom de- vrait être changé, l’autre ayant sur lui l’avantage de la priorité. Si la figure que donne Fabricius du Mya 7iUida dans les Mémoires de la société d’his- toire naturelle, était meilleure, et si surtout ce savant zoologiste avait men- tionné dans sa phrase caractéristique l’inégalité des valves, la forme et la position des cuillerons de la charnière, le doute ne serait plus permis et l’espèce qui nous occupe devrait prendre le nom do Lyonsia 7iitida. C’est donc à tort, selon nous, que Wood, dans son General conckology^ a admis à-la-fois les Mya Norwegica et nüida. Quant au Mya siriata de Montagu, il est bien certain qu’elle appartient à l'espèce nommée parChemnitz ; il en est de môme pour VA7nphidesma co7'buloides de Lamarck, dont nous avons fait d’abord notre Osteodesma corbuloides.

Cette coquille est ovale, oblongue, transverse, étroite, subéquilatérale; le côté antérieur est airondi, le postérieur qui est un peu plus long se ter- mine en un bec large; ce bec offre une ouverture ovalaire assez large pour le passage des siphons. Cette ouverture ne manque pasd’analogie avec celle du Tugon d’Adansüii ; elle est la seule qui existe entre les valves ; les crochets sont gonflés , arrondis , mais peu protubérans. En avant, les valves sont égales, mais dans les deux tiers postérieurs de la longueur du bord inférieur, la valve gauche devient plus large que la droite et la dé- borde. Toute la surface extérieure est finement striée ; les stries sont sail- lantes, serrét's, onduleuses; elles semblent produites par un épiderme très fin et plissé.

Les grands individus de cette espèce ont 20 millimètres de long et 40 do large.

, . GENRE VINGT-ÜNIÊME.

oSTEiOBESME. Osteodesma (Desli.).

(Pl. cj. fig. 7. 8.).

LES OSTÉODESMES.

2i3

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal inconiiu.

Coquille ovale, oblongue, transverse, inéquilatérale, inéqui- valve et irrégulière, subnacrée en dedans, couverte d’un épi- derme subcorné en dehors et débordant les valves ; crochets protubérans peu saillans sur le bord cardinal. Impressions muscu- laires inégales : l’antérieure ovale obronde près du bord infé- rieur; la postérieure circulaire près du bord dorsal; impression palléale large, ayant uneinflexion postérieure triangulaire, étroite et oblique. Charnière ayant sur chaque valve un cuilleron linéaire, subcalleux, un peu saillant, adhérent au bord postérieur et don- nant insertion à un ligament intérieur, sur lequel est implanté un osselet allongé et étroit.

SYNONYMIE GENERIQUE. Anatimi^ Lfousia^ Gray* MjUy Lamk. Lyonsia{pars]y^Q\YQxby.

OBSERVATIONS. Depuis que nous avons été à même de connaître dans tous ses détails le genre Lyonsia de M. Turton, et qu’à l’examen des co- quilles nous avons pu joindre la connaissance exacte de l’animal, il nous a paru nécessaire de réformer notre ancien genre Ostéodesme dans lequel nous admellions les Lyonsia, et de le réduire à quelques espèces beau- coup moins régulières, dont les coquilles offrent des particularités, d’après lesquelles nous pensons que l’animal qui les a construites, a des caractères suffisans pour en constituer un bon genre ; dès-lors nous croyons devoir conserver à ce groupe le nom d’Ostéodesme qui lui convient autant qu’au genre Lyonsia.

Nous avons dit en commençant que l’animal est inconnu ; . cependant M. Gray dans une note critique, qui dans le n“25 àes Annales dliistoire naturelle de Londres, suit la notice de MM. Scacchi et Philippi sur le genre Pandorina; M. Gray, disons-nous, affirme avoir donné la description de l’animal du Lyonsia cuneata, qui pour nous est le type de notre genre Os- téodesme réformé. M. Gray renvoie au premier numéro de son Spicilegia zoologicaoii nous trouvons en effet la description succincte de la coquille et sa figure au trait, mais c’est en vain que nous cherchons la moindre indi- cation sur l’animal; il esta présumer qu’ayant élédécrit dans un autre ou- ouvrage, M. Gray aura cité celui-ci par inadvertance.

Par l’ensemble de ses caractères, æ genre tel que nous le réduisons ac-

StPTÏtfllK FAMILLE

2i4

tuellementse distingue avec facilité desLyonsia. Les coquilles qu’il renferme sont loin d’avoir la régularitédes autres genres qui l'avoisinent; sous ce rap- port elles ressemblent beaucoup aux Saxicaves les plus irréguliers. Néan- moins elles se distinguent nettement de ce dernier genre, et elles appartien- nent à noire famille desOstéodesmes; elles sont nacrées en dedans; en dehors elles sont revêtues d’un épiderme épais, subcorné, qui dépasse les valves, ce qui ne les empêche pas de montrer des sillons inégaux résultant d’accrors- semens irréguliers. Ces coquilles sont transverses, ovales, ou subtrigones inéquilatérales; quelques espèces sont inéquivalves ; quelques autres ont les valves égales ; elles sont assez minces, moins cependant que les Lyon^’a; le côté antérieur est obtus, quelquefois tronqué, ce qui rend la coquille très inéquilatérale et subtriangulaire. Lorsque les valves sont inégales, elles ne le sont pas de la même manière que dans les lAjonsia ; l’une d’elles, la gauche, est plus plate et un peu débordée par la droite, dans tout son con- tour. L’extrémité postérieure se rétrécit, s’amincit en coin, mais n’a jamais le large bec des Lyoîisia; à cette extrémité, la coquille offre un petit bâil- lement étroit, irrégulier, semblable à celui que l'on remarque au côté an- térieur ; les crochets sont renflés et prolubérans. En dedans, les valves pré- sentent deux impressions musculaires inégales; l’antérieure est la pins pe- tite ; elle est ovale et située tout près du bord inférieur, à son origine ; elle se trouve par conséquent bien plus en avant et en bas que celle des Lyon- sia; l’impression postérieure est semilunairc, placée très près du bord su- périeur, dans le milieu do l’espace qui sé^îare la charnière de l’extrémité postérieure. Une impression palléale voisine du bord inférieur de la co- quille, parvenue vers les deux tiers de la longumir de ce bord, s’infléchit sous la forme d’une petite sinuosité triangulaire. La partie de la coquille comprise entre celte inflexion et l’extrémité postérieure est fort large, ce qui annonce qu’ainsi que dans les Glycimères, les muscles rétracteurs des siphons se confondent avec un large bord musculaire du manteau.

La charnière ressemble beaucoup à celle des Lyonsia, et c’est d’après l’analogie de cette partie dans les deux genres que nous les avions d'abord confondus. La partie du bord cardinal située en dedans du crochet, offre sur chaque valve un cuilleron épais et oblique, mais moins que dansées Lyon- sies. Sur ce cuilleron s’insère un ligament intérieur assez large, à la sur- face duquel est fixé un osselet étroit, allongé, un peu rétréci à ses extrémi- tés ; il est convexe et un peu courbé dans sa longueur, il n’est point plat êl triangulaire comme dans le genre qui précède.

Par la comparaison attentive des coquilles des genres Lyonsîa et Os~ teodesma, on doit reconnaître avec nous qu'elles se distinguent nettement dans lelii^ caractères les plus importons, leur manière de Ÿivre confirme

LES OSTÈODESNES.

2x5

Jeur séparation ; en effet, nous avons vu que les Lyonsia ont un byssus au moyen duquel elles s’attachent aux rochers, sous les pierres; les Ostéo- desmes n’ont point de bj'ssus, et elles vivent dans les Alcyons comme l’a observé M. Cuming, pendant son voyage d’exploration sur les côtes de l’Amé- rique méridionale.

Nous ne connaissons encore qti’un petit nombre d’espèces d’Ostéodesmes, cinq seulement, toutes vivantes ; la plupart des côtes du üloxique dans le Grand-Océan.

Ostéodesme cunéiforme. Osteodesma cuneata. Desh.

PL 9. fig. 7. 8.

O, testa oblongây ciineaidy inœquîlaterà, irreguiari^ solidulây anlicè su6^ iruncatây rotundatây poslicè productd; vaivis inceqnaîibus y irregnlariter concentrict rugosis^ eptdvrmide corueo înerassatis, intîis margarhaccis ; cardine edentido^ ossiculo oblongo, angusio^ convexo prœdito,

Anatina cuneata» Gray. Spic. ZooL n'* i. p. 6. pl. 3. f. i4*

Osteodesma cuneata, Hnnley. Desc. Cal, p. 25.

Callow, Conch. Nom. p. 8. 3,

Habile les côtes du Pérou dans l’épaisseur des Alcyons.

Cette coquille singulière ainsi que le Mya solemyalis de Lamarck peut servir de type à notre genre Ostéodesme ; elle est oblongue, transverse, très inéquilatérale, sensiblement équivalve ; le côté antérieur court et tron- qué est la partie la plus épaisse de la coquille ; au côté postérieur, elle s’amincit progressivement en coin ; les crochets sont renflés et néanmoins peu proéminens au-dessus du bord cardinal. La partie antérieure du bord supérieur est assez épaisse $ cet épaississement s’arrête brusquement au- dessous ducrochet, etc’ est que commence dans chaque valve le cuilleron oblique et accolé le long du bord supérieur et postérieur ; le bord interne de ce cuilleron est aigu et saillant. Le reste delà circonférence de la coquille est mince et tranchant, et quand on la voit du côté du bord ventral, on s’a- perçoit qu’elle a des irrégularités comparables à celles des Saxicaves. Toute la surface intérieure est nacrée ; la surface extérieure est revêtue d’un épiderme d’un brun jaunâtre pâle qui s’épaissit assez promptement vers les bords des valves ; cet épiderme est lisse, subcoriié ; il se fendille et se détache des bords du têsl; il cache en partie un petit nombre de rides irrégulières, peu épaisses et transverscs.

Les grands individus ont 42 millimètres de large et 22 de long.

2(6

SEPTIÈME FAMILLE.

GENRE VINGT-DEUXIÈME.

^ÉRIPLOME, Periploma^ ScHUM PI. 8, fig. i5 à 19.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal incoiinii.

Coquille ovalaire inéquivale, iiiëquilatérale, subiiacrée, épaisse; le côté postérieur très court, un cuilleron oblique, étroit dans chaque valve, séparé du bord supérieur par un angle profond, dans lequel se place un osselet tiiangulaire; ligament fixédansles caillerons et sur l’osselet.

SYNONYMIE GENERIQUE. Corbula , Brug, , Mj'a , Dillwyn ? Anatina, Laink., Reeve, Catlow , Hanley, Osteodesma de Blainville.

OBSERVATIONS. Lc gcure Périplome a été proposé pour la première fois en 1817 par Schumacher dans son essai d’une classification des co- quilles. L’espèce qui sert de type au nouveau genre était connue de plu- sieurs conchyliologistes. Bruguières l’avait fait figurer dans l’Encyclopédie parmi les Corbules, et Lamarck, dans son dernier ouvrage, l'a comprise parmi ses Anatines, en quoi il a été imité par ])lusieiu*s naturalistes An- glais. Dès 18^8, dans un mémoire lu à la Société d’histoire naturelle, et qui devait faire partie du sixième volume de son recueil , nous avons été le premier en France à adopter le genre du naturaliste danois, et nous l’avons fait avec d’autant plus d’empressement que , par de nouvelles observations, nous pouvions y ajouter des caractères importuns qui avaient échappe à M. Schumacher, et qui sont les plus propres à déterminer les rapports naturels du nouveau genre. La dissolution de la Société d’histoire naturelle de Paris mit obstacle à la publicalion de notre mémoire, mais bientôt après nous trouvâmes occasion d’en répandre les matériaux essen- tiels dans plusieurs articles de l’Encyclopédie, et d’indiquer la composition de noire famille des Ostéodesmes dans les tableaux de classification qui accompagnent l’article Mollusques. A cette époque, le genre Périplome était , pour nous, comme il l’est encore aujourd’hui , voisin des Anatines , des Lyonsics et des Ostéodesmes.

Quoi(]ue déjà suffisamment caractérisé par le naturaliste danois, le genre

LES OSTÉODESMCS.

217

Périplome paraît avoir été mal compris par M. de Blainville : on voit, en effet, dans les dernières additions et Corrections au manuel de Malacologie, ijue son savant auteur attribue le nom d'Ostéodesmo au genre Périplome, ce dont on est assuré, puisqu’il cite pour type du genre VAnatina trapezoi- dalis deLamarckqui est aussi le type du genre Périplome de Schumacher; de plus, M de Blainville emprunte les caractères de l’animal de son genre àVÂnatinamyalis deLamarckqui est une véritable Thracio, comme nous le verrons bientôt. Ce que nous venons de dire doit suflire pour faire com- prendre les rectifications importantes que doit subir le genre Ostéodesme de M. de Blainville; c’est pour n’avoir pu les faire, ces rectiQcalions , que M. Scacchi a été conduit à proposer un genre Pandorùia pour une coquille qui appartient au genre Lyonsea de Turton, et que nous comprenions autre- fois darjs notre genre Ostéodesme. Enfin , nous le ferons remarquer ce n’est pas sans raison que nous avons dit ne pas connaître l’animal du genre Périplome, puisqu’en effet c'est celui d’une Thracio que M. de Blain- ville a décrit sous le nom d’Osléodesme ou de Périplome. Nous avons vainement cherché le genre Périplome dans la Conchyliologie systémati- que de M. Beeve, publiée en 1841 , c’est-à-dire plus de vingt ans après la création du genre par Schumacher, plus de dix ans après son adoption par noiis , qui , par la découverte de l’osselet cardinal , avions rendu ce genre indispensable dans un cadre générique complet. 11 est probable que M. Iteeve ne sépare pas les Périplomes des Anatines, si l'on en croit du moins le Conchologüt Nomenclator de M*'® Callow, fait sous les inspira- tions du naturaliste dont nous venons de parler. Cependant, dès 1835, nous avions présenté les caractères complets du genre, dans la nouvelle édition des j4mma«oc sans vertèbres de Lamarck. D’autres zoologistes, tant en Angleterre qu’on Amérique, ont adopté le genre, et M. Conrad, entre autres, a ajouté deux espèces a celle qui seule était connue dans quelques collections d'Europe.

Les coquilles du genre, dont nous nous occupons, so distinguent nette- ment de celles des autres genres de la même famille. Elles sont inéqui- valves, inéquiiatérales; l’inégalité des valves est plus considérable que dans la plupart des autres genres; non-seulement la valve droite, comme dans les Corbules, est plus profonde que l’autre, mais encore elle la dé- borde dans presque toute sa circonférence ; lescrocbeU sont petits, peu saillans, et viennent descendre très obliquement vers l’extrémité posté- rieure, où ils surmontent une sorte de corselet dans la largeur duquel les bords sont flexiKMix comme ceux des Tellinos; les crochets offrent de plus ce caractère remarquable d’être fendus dans toute l’épaisseur du test , ca- ractère que nous retrouverons, d’une manière plus évidente, dans le genre

2 1 8 SEPTIÈME FAMILLE.

suivant, celui des Analines.Les bords des valves sont simples; à Tintérieur, les valves sont subnacrées; la charnière est fort singulière, un cuilleron épais et étroit , prend son point d’appui sur une côte assez épaisse que Ton voit en dedans à la partie supérieure du bord postérieur; le cuilleron se projette en dedans, d’arrière en avant, en laissant entre lui et le bord dorsal , une échancrure étroite et profonde ; c’est dans cette échancrure que se place un osselet mobile, triangulaire, subéquilatéral, dont les angles sont mousses et arrondis ; les deux surfaces planes sont en contact, l’une avec le bord supérieur des cuillerous, l’autre avec le bord supérieur ou dorsal des valves; le contact de ses parties avec l’osselet laisse sur lui de petites empreintes dont la plus large résulte de l’insertion d’une petite portion du ligament ; cet osselet servant à-la-fois à compléter le cuilleron et de dent cardinale : le ligament est complètement intérieur.

L’impression musculaire antérieure est longue et très étroite, elle occupe le tiers antérieurdu bord supérieur, elle se prolonge en arrière en une ligne creuse qui se dirige vers la cavité des crochets, mais s’arrête avant d’y pénétrer. L’impression musculaire postérieure est petite, elle est subcircu- laire ou plutôt semilunaire ; on la trouve non loin de la charnière , près du bord. L’impression pallcale est très nettement marquée, elle se montre non loin des bords des valves, dont elle suit exactement les contours; sur la valve gauche qui est la plus petite , cette impression , ainsi que celle des muscles, est presque sur le bord lui-même; parvenue à l’extrémité postérieure et inférieure des valves, cette impression s’infléchit en de- dans et présente une sinuosité courte et triangulaire. Si l’on examine la cavité des crochets, on y trouve une petite cicatrice linéaire correspondante à la fente apiciale.

Les Périplomes sont des coquilles généralement plus épaisses que celles des autres genres de la famille des Ostéodesmes; néanmoins, ils ne peu- vent être éloignés des Anatines avec lesquelles ils ont les plus grands rapports ; cela ressortira avec évidence , si l’on compare les caractères principaux des genres pour en montrer les ressemblances et en signaler les diflérences. Dans les genres qui précèdent Lyonsie et Ostéodesme , le cuilleron est appliqué le long dp bord postérieur et le ligament recou- vert par un osselet cardinal plat; dans les Anatines, le cuilleron se déta- che, se porte en avant et entraîné avec lui l’osselet qui occupe le côté antérieur des caillerons. Ici, les caillerons se détachent aussi, mais la brièveté du côté postérieur et la manière dont il tombe, a déterminé la position spéciale du cuilleron laissant une échancrure entre lui et le bord supérieur, dans laquelle se loge comme un coin l’osselet de la charnière. Les Périplomes n’ont pas la coquille aussi bâillante que les Anatines; les valves

LKS OSTÉODESMES.

ai9

sont moins écartées que celles des Lyonsies, elles laissent voir seulement un faible écartement à leur extrémité postérieure. Dans les trois genres que nous comparons, le test est nacré, l’épiderme très fin et la surface souvent couverte de très fines granulations, tantôt éparses, tantôt en lignes longi- tudinales ; les impressions musculaires et du manteau ont, dans ces genres, la plus grande analogie. De toutes ces ressemblances, on peut conclure que le genre Périplome est réellement voisin des Anatines : il doit faire partie de la famille nous le plaçons.

Nous ne connaissons aucune espèce fossile que Ton puisse rapporter aux Périplomes, car nous ne partageons pas l’opinion de M. d’Orbigny qui , dans sa Paléoniologie française^ admet, dans ce gènre, quelques espèces connues seulement à l’état de moule et provenant du terrain crétacé et des terrains jurassiques, parce qu’elles n’offrent pas les principaux caractères du genre ; on effet les Périplomes vivans ont les valves très inégales ; dans les espèces fossiles en question, les valves sont sensiblement égales, comme dans les Anatines; dans le Périplome, le côté postérieur est plus court que dans les fossiles. Par la cavité que laissent les cuillerons , dans les moüles fossiles, on voit qu’elle n’a pas contenu d’osselet; on ne trouve aucune trace de cette partie importante : il est vrai que du côté postérieur au-dessous du crocliet les moules fossiles présentent deux impressions obliques, symétri- ques, qui résultent certainement d’une côte oblique et postérieure qui, dans la coquille entière, servait d’appui aux cuillerons; mais ce caractère nesuffit pas pour faire entrer ces coquilles dans les Périplomes , car il se retrouve identiquement semblable dans le genre Cochlodesmade M. Couthouy. C’est à ce genre que nous rapporterions de préférence la plupart des espèces de Périplomes fossiles de M. d’Orbigny. Ainsi, le genre Périplome se réduit en réalité à un petit nombre d’espèces AÛvantes des mers chaudes de l’Amérique.

Périplome inéquivalve. Periploma inœquimhis. Sow- Pl. 9. fig. 7. 8.

P. tepâ ovalo-quadratà, alhây iransversim irregnlarlter striata * posticè anguiatàf brev'tssimè subrostratâ^ 'valvâ dextrâ profimdâ^ majorîy sinhtrâ suhplamdatà ; umbonîbus minlmis inœqualibiis sithemarginaiis ; dente cachleari angusto^ preedito ossiculo trigono, pJanulato,

Corbula, Encyci. pl. 23o. f. 6 a. b.

Anatina trapezoides. Lamk. Anim. s. vert. t. 5. p. 46.',. 6.

Periploma inœquivahis, Sclitim. Essai d'unnouv. syst, de Conch, p, ii5. pl. 5. f. 1. a, b.

220

SEPTIÈME FAMILLE.

Osteodesma trapezoidahs, de I5lainv* Malac, nouv. ad, el corr, p. 66o« pl. 75. f. «.

Periploma trnpezoides- Dcslt. Ei»py. mélh. vers. t. 3. p. 733.

/i/. Desh. Lnmk. An. s. verl. 2*" cd. t, 6, p. 79 el 8f.

Periploma inœquUalvh. Sow. Conch. nian. f. 72.

Osteodesma trapeZOLdes,Cst\\o\\\Ç,Qx\ûi, nom. p. 8. ti" 8.

Periploma trapezoides,}\tsïi\ty . Dcsc. cat, p, 21.

Wood. Ind. lest, suppl. pl. lu. f. 3?..

Habile les mers du llrésil.

Coquille ovale subtrapézoïde, très inéquilatérale, le côté postérieur tron- qué presque perpendiculairement, très court, dépassant à peine la sailie des crochets et limité par un angle obtus plus apparent sur la valve droite. Les crochets sont petits, rapprochés, à peine saillans, inégaux, il présentent une petite fente dont on retrouve la cicatricule dans la cavité des crochets ; le côté supérieur est le plus long, il est à peine courbéj l’antérieur est obtus et arrondi ; l’inférieur est presque parallèle au supé- rieur; la surface extérieure des valves est couverte de stries obsolètes irré- gulières, résultant des accroissemens ; à l’aide de la loupe, on distingue aussi sur cette surface les granulations irrégulièrement éparses , mais nombreuses et quelquefois confluentes. A l’intérieur, la coquille est subna- crée; le bord interne postérieur, épaissi par une côte courte qui lui est pa- rallèle, donne insertion à uncuilleron étroit, épais, détaché du bord supé- rieur par un angle profond dans lequel se place Tosselel cardinal à la manière d’un coin. Cet osselet est triangulaire, il complète le cuilleron en donnant insertion à une partie du ligament, et il sert en même temps de dent cardinale, chacune de ses moitiés appartenant à chaque valve, l’im- pression palléale est très rapprochée des bords, surtout dans la valve gauche; elle offre, du côté postérieur, une inflexion triangulaire oblique et non sinueuse, comme la représente M. Sowerby dans son Conchoîogical Marnai. Cette coquille est assez épaisse, solide, différente en cela de celles des genres avoisinans : elle a 23 millim. de long et 28 de large.

GENRE VINGT -TROISIÈME.

ANATIBIEj', Anatina^ Lamk.

Pl. 8. Og.. 20 à 23.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale , transverse, en ve-

LE^ Of^tÉODESMES.

22t

loppé cVun manteau mince dont les lobes sont soudés dans toute leur circonférence, si ce n’est en avant et en bas, l’on voit une très petite fente pour le passage d’un pied petit et conique; bou- che petite, transverse, accompagnée de chaque côté d’une paire de grandes palpes étroites et striées en dedans; une paire de grands feuillets branchiaux de chaque côté du corps, ils sont presque égaux, se réunissent au-dessous de l’abdomen pour se prolonger dans le siphon branchial; deux siphons assez allongés, réunis et soudés dans toute leur longueur.

Coquille transverse, subéquivalve , bâillante de chaque côté, mince, fragile, nacrée; crochets fendus, fente close par une mem- brane ; un cuilleron perpendiculaire dans chaque valve, soutenu par une lame en arc-boutant. Un osselet tricuspide, caduc, placé à la partié antérieure des cuillerons, dans la plupart des espèces. Ligament interne dans les cuillerons et sur l’osselet lorsqu’il existe,

SYNONYMIE GENERIQUE. Megcrlc , Schuina- cher. Solefiy Linné, Gmelin, Chemnitz et Bruguières. Mya^ Spengler. Platrmya^ Cercomjay Agassizl

En créant le genre Anatine, Lamarck lui doqna pour type une coquille connue depuis long-temps, et que Linué, dès la 1 0'' édition du Systema na^ turcBy avait inscrite sous le nom de Solen Aîiatmim. Avant Linné, llum- phiuSjPetiver, Gualtieri eu avaient publié des figures plus ou moins fidèles, mais ils la confondaient avec des coquilles d'autres genres, dans la classe des Tcstacés bivalves. Gualtieri cependant la comprenait dans un genre à part avec quelques Solensâ charnière, médiane sous le nom de Concha soleniformis. C'est probablement il faut diercher l’origine de l’opi- nion de Linné, qui mit la coquille qui nous occupe dans son genre Solen; cette classification conservée parLinné dans tous ses ouvrages, fut adop- tée presque sans exception par tous les conchyliologues. Spengler cepen- dant, dès 1793, proposa une opinion meilleure dans un mémoire qui fait partie du volume de ceux de la Société d’histoire naturelle de Copen-.

1X21

SEPTIÈME FAMILLE

hague. Cet éminent naturaliste reconnaît au Solen ^na;mws la plupart des caractères des Myes et l’entraîne dans ce genre ; nous verrons bientôt combien était judicieuse celte manière d’apprécier les rapports de cette espèce. Néanmoins personne ne se rangea à l’opinion de Spengler, Bru- guières et tous les conehyiiologues de rAUemagne et de l’Angleterre don- nèrent la préférence à celle de Linné. Lamarck, .dans ses premiers essais de classiBcation des coquilles, ne çonnut pas la valeur des caractères géné- riques du Solen Anatinus. Ce fut en 1809 seulement, dans la Philosophie zoologique-j qu’il proposa le genre Anatine et l’introduisit dans la famille des Myaires , avec les genres Mye et Panopée.

Lamarck, comme Spengler, fondait son opinion sur les rapports évidens qui existent entre les Analines et les Myes ; les autres zoologistes se ran- gèrent à l’opinion de Lamarck tout en la modifiant; car Cuvier, tout en agrandissant le genre Mye , tout eu réduisant les Anatines en un sous- genre, mit néanmoins ce sous-genre dans le voisinage des Myes et des Lutraires, ce qui. fut ensuite adopté par Férussac, et un peu plus tard par M. de Blainville.

Le genre de Lamarck était créé depuis plusieurs années lorsque M, Me- gerle, dans h ^fagasîndeBeTÎinJ 1811, le proposa de nouveausous le nom d'Auriscalpiumj adopté en 1817 par M. Schumacher, mais actuellement rejeté de la nomenclature, la dénomination de Lamarck devant prévaloir par droit de priorité.

Lorsque Lamarck publia en 1 81 8 le cinquième Volume de ses Animaux sans verièbreSj on trouva réunies dans le genre Anatine dix espèces dont les caractères s’accordaient assez exactement avec ceux du genre. Néan- moins lorsqu’on examinant les Anatines de la collection de Lamarck, nous avons découvert cet osseletsingulier attaché auxcuillerons de la charnière, nous cherchâmes avec assiduité à nous éclairer sur la valeur de ce carac- tère, qui jusqu’alors avait échappé aux observateurs. Conduit par une série de faits nouveaux et intéressons, nous avons cru utile de réformer le genre Anatine et de le réduire aux trois premières espèces de Lamarck. La quatrième en effetqui nous parut être une Corbule, appartient au genre Neœra deM. Gray ; la cinquième est une Mye comme nous l’avons vu ; la sixième est le type du genre Périplome de Scliuniachor ; la neuvième ren- tre dans le genre Thracie de Leach, et la dixième que nous avons rappor- tée aux Corbules perforantes, en conservant cependant quelques doutes, n’ayant pas eu occasion d’examiner cette coquille avec tout le soin désira- ble ; quant aux espèces sept et huit, nous ne les. connaissons pas et nous regrettons de ne pas en trouver les figures dans le bel et utile ouvrage de M. Delessert.

LKS OSTÉODESMES.

233

La réforme dont nous venons de parler, proposée pour la première fois dans l’Encyclopédie, reproduite dans la nouvelle édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck, a été accueillie par le plus grand nombre des con- chyliologues ; cependant M. Reeve, en Angleterre, accepte bien le genre Thracie de Leach, démembré des Anatines de Lamarck; mais il laisse dans ce dernier groupe les Lyonsies et les Périplomes; nous persistons néanmoins à réduire le genre Ânatine comme nous venons de l’indiquer, tout en lui apportant quelques modifications devenues nécessaires par suite des progrès de la science.

Après avoir constaté l’existence d’un osselet cardinal dans ÏÀ7iaUna truncaia de Lamarck, nous avons cru, nous fondant sur les lois de l’ana- logie, que cette pièce existait aussi dans les autres e6i>èee3, et que si on ne la rencontrait pas dans les individus répandus dans les collections, cela dépendait de la manière dont ils avaient été recueillis et conservés; nous n’avions ou entre les mains VAnatina truncaia de la collection de Lamarck que quelques instans; les valves étaient fermées et retenues parun ligament intact, nous n’avons pu, lors de nos premières observations, apprécier les modifications qui résultent pour les cuillerons de la présence de l’osselet cardinal, mais lorsque plus tard les coquilles du genre Anatine devinrent plus communes dans les collections, nous reconnûmes bientôt à des signes certains que l’osselet cardinal ne devait pas exister dans quelques espè- ces, nous nous aperçûmes aussi que la fente des crochets n’était pas due à la présence de l’osselet, puisque celte fente se montre dans les espèces l’osselet manque ; enfin en détachant Fosselet, nous avons vu que ses bran- ches ascendantes venaient s’appuyer sur une petite lame dédoublée de' la base des cuillerons : il est résulté pour nous de ces observations quelques modifications dans les caractères du genre. Tels que nous les donnons ac- tuellement, ces caractères peuvent faire entrer dans le genre Anatine, et poury constituer un petit groupe assez distinct, les coquilles pour lesquelles M, Coulhouy en Amérique a établi le genre Cochlodesma. L’examen minu- tieux des caractères de ces coquilles nous conduira à la conclusion que nous avons d’abord posée.

Les Anatines sont à-peu-près équilatérales ; le côté postérieur un peu plus courtque rantérieur; il en est de même dans les Cochiodesmes ; les crochets sont naturellement fendus dans l’un et l’autre genre; cette fente apiciale est moins apparente et moins longue dans les Cochiodesmes. Dans ce dernier groupe, les cuillerons ne portent pas d’osselet cardinal comme cela a lieu dans plusieurs Anatines. Dans les deux sortes de coquilles que nous examinons, le cuilleron estappuyé sur une partie plus épaisse dubord postérieur; dans les Cochiodesmes, cet épaississement est plus considéra-

SEPTIÈME famille.

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ble que dans les Anatines proprement dites. On saitqu’indépendaminent de cet épaississement du bord qui donne attache au cuilleron , cette partie est encore soutenue dans les Anatines par un are-boulant mince et obli- que. Cet arc-boutant est l’un des caractères essentiels des Anatines; il se retrouve aussi, mais modifié et amoindri dans les Cochlodesnies; en effet, en cherchant dans la cavité des crochets, on y remarque une petite crête saillante suivant Tépaississement du bord postérieur et venant aboutinau- dessous du cuilleron. Kous retrouvons donc dans les Cochlodesmes tous les caractères essentiels des Anatines; cependant quelques différences sub- sistent entre les deux groupes; elles se montrent particulièrement dans les formes extérieures. Ainsi les Anatines sont des coquilles bombées, ven- trues, dont le test est très mince ; les Cochlodesmes sont plus aplaties, à eçoehets petits, et leur test nacré en dedans est plus épais proportionnelle- ment. Les Anatines, pour le plus grand nombre, sont largementbai^Iantes du côté postérieur; il en est quelques-unes cependant, et entre autres celle récemmentjdécritfi et figurée par JI. Mitre, dans le Maga:iin de zoologie^ qui ont déjà le côté postérieur plus fermé et moins baillant, se rapprochant beaucoup de celui des Cochlodesmes, qui par suite de l’aplatissement des valves, ifont plus de ce côté qu’une fente d’une médiocre largeur. A cet égard, ces coquilles forment l’extrémité d’une série d’espèces commençant par les plus ouvertes et se terminant par celles qui le sont le moins. Nous avons encore à comparer quelques parties importantes dans ces coquilles pour pouvoir porter un jugement définitif et complètement motivé au sujet de leur ressemblance ; l’impression musculaire antérieure des Anatines est située au-dessous du bord dorsal, à l’extrémité antérieure des valves; elle est assez étroite, courbée dans sa longueur, et un peu subsemilunaire; elle est placée de môme dans les Cochlodesmes, mais elle est un peu plus ova- laire ; l’impression musculaire postérieure est arrondie et placée près du bord supérieur dans les coquilles de l’un et l’autre groupe; enfin l’impres- sion palléale, dont la sinuosité postérieure est large et remonte dans l’axe transversc de la coquille, jusqu’à une ligne qui descendrait perpendiculai- rement en arrière des cuillerons, cette impression, disons-nous, est sem- blable dans les deux sortes de coquilles.

L’examen scrupuleux et approfondi auquel nous nous sommes livré, démontre que la somme des ressemblances l’emporte de beaucoup sur celle des différences; il faut même remarquer que les différences portent sur ceux des caractères qui ont la moindre importance, ceux empruntés à la forme extérieure, à l’épaisseur du test, au bâillement postérieur des val- ves, et enfin à la plus grande obliquité de la côte qui supporte le cuilleron. 11 nous semble que tout ce qui précède nous amène naturellement à cette

LES OSTÉODESMES. aaS

conséquence que le genre Cochlodesme doit rentrer dans celui des Anatines il peut néanmoins former un petit groupe d'espèces.

Jusqu’ici , ceux des naturalistes, qui se sont occupés du genre Anatine , ont manqué d’un élément important de discussion et de comparaison, la connaissance de l’animal de ce genre curieux. Aujourd’hui cette lacune est en grande partie comblée par les observations d’une personne instruite, M. Mitre, qui a publié le résultat de ses recherches sur l’animal d’une Anatine, dans le magasin de Zoologie de -ISii. Ce que nous allons dire de cet animal est emprunté au mémoire de ce naturaliste.

L’animal de l’Anatine est ovale, transverse, épais ; son manteau très mince est bordé d’une zone musculaire, étroite qui, en s’attachant à la co- quille, y laisse l’impression linéaire dont nous avons parlé. Les lobes de ce manteau sont soudés entre eux dans la presque totalité de leur circonfé- rence ; iis laissent en ayant et en bas une très petite fente pour le passage du pied. En arrière, cet organe se continue en une masse cylindracée, plus courte que la coquille , revêtue d’un épiderme plissé, brunâtre et creusée à l’intérieur de deux siphons réunis jusqu’au sommet et séparés entre eux, dans toute leur longueur, par une cloison membraneuse; toute cette partie de l’animal est charnue , musculaire , susceptible de s’allonger et de se contracter beaucoup. Cette contraction s’exerce prin- cipalement à l’aide de deux muscles rétracteurs, on fibres rayonnantes, faisant saillie dans les parois du manteau, et venant s’insérer sur la ligne sinueuse que l’on voit sur l’extrémité postérieure de la coquille. Lorsque le manteau a été ouvert, on voit la masse abdominale surmon- tée en avant d’un petit pied conique. De chaque côté du corps sont deux grands feuillets branchiaux , que M. Mitre compare à ceux des Myes et desTIiracies; mais ces organes ne sont point semblables dans ces deux genres , et malheureusement la description et les figures do M. Mitre ne peuvent décider, auquel les Anatines ressemblent le plus quant aux branchies. On concevra, sans peine, l’intérêt que peut avoir l’éclaircis- sement de l’incertitude, qui reste sur cette partie importante de l’animal de TAnatine; en effet, les feuillets branchiaux dans les Myes , les Lu- Iraires, les Mactres, etc., sont relevés le long du corps, Vmi contre Vautre^ exactement comme les feuillets d'un livre fermé, tandis que dans les Thracies, les Lyonsies , les Tellines, etc., les deux feuillets sont Vun à câié de Vautre comme les feuillets d’un livre ouvert. Ces dispositions, si différentes des organes branchiaux , entraînant avec clics des modifi- cations assez importantes dans d’autres portions de l’organisation ; il est facile de comprendre l’importance qu’il y a à éclairer cette difficulté , surtout pour établir définitivement les rapports du genre qui nous occupe.

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T. I.

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Si les branchies sont comme celles des Myes, les Anatines doivent , sans aucun doute, faire partie de la famille des Myaires, selon l’opinion de M. Mitre. Si , au contraire, comme nous le croyons , ces branchies sont comme celles des Lyonsies et des Thracies, le genre Anatine devra rester dans les rapports que nous lui assignons dans notre famille des Ostéo- desmes.

La bouche est une petite fente transverse, placée, comme à l’ordinaire, entre la masse abdominale et la surface inférieure du muscle adducteur antérieur ; elle est munie de deux lèvres qui se continuent de chaque côté en une paire de palpes labiales, longues et étroites, finement plissées en leur face interne. D’après M. Mitre, la bouche communicpie à l’estomac par un oesophage court et étroit ; l’estomac est en forme d’une poche, il donne naissance à un intestin grêle et cylindrique qui , sans faire de circonvolu- tions dans l’ovaire et le foie, se dirige immédiatement vers le dos de l’ani- mal pour gagner le muscle adducteur postérieur, se contourner sur lui et pénétrer dans le siphon anal .

Pour tirer le meilleur parti des documens publiés par M. Mitre, nous de- vons particulièrement rechercher si , en réalité, les branchies des Anatines, ressemblent plus à celles des Myes qu’à celles des Tliracies, nous trouvons cette phrase dans le mémoire de ce naturaliste qui, habitant Toulon, a pu voir des Thracies vivantes# et qui probablement pour les Myes , a été obligé de s’en référer aux descriptions qui on ont été publiées depuis quel- ques années. « Les Thracies, du reste dit-il , nous offrent absolument la « môme organisation de l’appareil branchial , comme nous avons -dn « maintes fois l’occasion de le vérifier nous mêmes sur l’animal de la « Thracio corbuloïde, » Il n’est donc presque plus douteux que les bran- chies des Anatines sont l’une à côté de l’autre, comme celles des Thracies et non l’une sur l’autre comme celles des Myes, d’où nous concluons que malgré lu grande ressemblance des Anatines et des Myes, ces deux genres n’appartiennent pas à la même famille mais à deux familles voisines, dont les rapports ne s’établissent pas seulement en ligne directe, mais encore par des lignes collatérales avec la famille des Pandores ; ainsi , en effet, par la longueur des siphons et par leur réunion; par la jonction des lobes du manteau ; la petitesse de l’ouverture palléale ; la forme et la grosseur du pied, les Anatines se rapprochent des Myes. Par tout ce qui tient au man- teau et au pied, par la forme et la position des branchies, les Anatines se rattachent aux Lyonsies et aux Thracies ; tandis que les Lyonsies, par la brièveté des siphons et leur séparation au sommet, se mettent en rap- port avec les Pandores et les Myadores, ce dernier genre se rattachant encore aux Ostéodesmes^par l’osselet de la charnière, rapport qui se

LES OSTÉODESMES.

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montre également à l’égard des Nœara do la famille des Myaires.

M. Agassiz, nous devons le rappeler, a proposé un assez grand nombre de genres nouveaux, pour des coquilles fossiles, provenant la plupart des terrains jurassiques et crétacés, et qu’il veut introduire dans la famille des Myaires î mais, comme nous l’avons vu, plusieurs d’entre eux ont besoin d’être réformés et réunis ; quelques autres appartiennent sans le moindre doute au genre Anatine , ce que nous tâcherons de prouver en examinant avec soin leurs caractères. Et d’aboixi que faut-il rencontrer sur le moule solide d’une coquille fossile pour acquérir la certitude que l’espèce appartient au genre Anatine ? Ce que nous avons exposé précé- demment, rond facile la réponse à cette question. Il faut trouver , sur les moules dont il s’agit, rempreînte de la côte postérieure, servant d’arc-boutant au cuilleron ; il faut do plus aporçevoir des traces de la fente des crochets. Ces traces se manifestent souvent par des cassures dans la région des crochets ; mais il sulïit quelquefois d’une petite portion de la fente conservée, pour la faire reconnaître, II faut encore trouver sous les crochets la cavité que les cuillerons ont laisser dans le moule , mais ce caractère, il faut l’avouer, n’est pas toujours facile à rencontrer môme sur les moules les mieux conservés, parce que souvent la matière des cuil- lerons est restée en place et s’ost durcie, ou bien la cavité a été remplie do la pâte calcaire dans laquelle la coquille a été enfoncée. Indépendamment de ces trois caractères principaux, il y en a quelques autres de moins importantes qui cependant ne doivent pas être négligés. Les Anatines sont des coquilles bâillantes, peu du côté antérieur, beaucoup plus du côté pos- térieur, les moules doivent donc reproduire ce caractère à moins que des compressions exercées sur eux, avant la consolidation des couches, les aient plus au moins déformés.

Avec ces élémens de comparaisons, voyons quelles sont les espèces de M. Agassiz qui devront rentrer dans le genre Anatine. Les Plaiymya rostrata et diîatata sont pour nous des Anatines, parce .que l’on y observe l’impression de la côte en arc-boutant, et que l’on y trouve la trace de la fente des crochets sur les individus bien conservés. Toutes les espèces de Cer- comija do M. Agassiz doivent, selon nous, entrer dans le genre Anatine; toutes celles que nous avons vues en bon état, offraient tous les caractères de ce genre, et, par analogie, nous pouvons avoir la même opinion à l’égard de celles que nous n’avons pas examinées, ou dont la conserva- tion était imparfaite.

Nous ne partageons pas l’opinion de M. d’Orbigny qui, dans sa Paléon- tologié française y indique, comme devant appartenir au genre Anatine , les Tellina dubia et corôu/^/ormîs de Rœmer , le Sanguinolâria lata de

SEPTIÈME FAMILLE.

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Goldfuss, ainsi que notre Phoîadomia soîenoides. De ces espèces, les trois premières sont pour nous des Thracies, et la quatrième a en réalité la forme générale des Analines ; mais aucuns des individus que nous avons eus sous les yeux n’offraient la moindre trace des caractères essentiels du genre, et en conséquence, nous avons placé cette coquille parmi les Phola- domyes, parce qu*elle nous a paru en avoir la charnière simple et sans dents.

Les Analines sont des coquilles marines, qui vivent enfoncées perpen- diculairement dans le sable ou dans la vase à de faibles profondeurs sous Teau; nous en comptons cinq espèces vivantes, qui toutes proviennent des mers chaudes de l'Amérique et de l'Inde. Les espèces fossiles sont plus nombreuses, mais ce ne serait pas sans courir le danger de commettre des erreurs involontaires, sil’on admettait, sans contrôle, toutes cellesquisont inscrites dans les catalogues. On applaudira au doute qui s’élève dans notre esprit, lorsque l’on se souviendra de la confusion qui naguère ré- gnait parmi les espèces d' Analines ; la réforme que nous avons proposée dans ce genre, ignorée de quelques personnes, auxquelles on doit des listes ou des catalogues de fossiles, nous laissent dans la plus grande incertitude au sujet des espèces mentionnées par elles.

M. Sismonda, dans son Synopsis methodica animalium inveriehratorum pedemontii fossiltujn , indique deux espèces d’Anatines des terrains ter- tiaires de l'Astesan : Tune d’elles est considérée comme l’analogue de l’Anatina rostrata. Deux autres espèces tertiaires sont mentionnées par M. S. W. Wood dans son catalogue des coquilles fossiles du crag d'Angle- terre, mais les zoologistes anglais conservent encore parmi les Analines des coquilles qui sont étrangères à ce genre, et rien ne peut nous douner la certitude que les deux espèces en question sont réellement des Analines. M. Philippi à également rapporte deux espèces tertiaires des terrains de la Sicile au genre Anatine ; mais il nous est assez facile pour celles-ci d’avoir une opinion, car l'auteur en donne une description et une figure; l’une d'elles, petite cl aplatie, dont une seule valve a été observée par l’auteur, n’est point une Anatine et nous paraît d'un genre encore incer- tain; l’autre espèce est une Thracio dont le cuilleron est un peu plus dé- taché et plus saillant que dans les autres espèces du mèine genre j elle manque de l’arc-boutant des cuillerons et de la fente des crochets; elle n’est donc pas une véritable Anatine.

M. d’Orbigny, dans sa Paléontologie française^ mentionne huit espèces (l’Anatines dans le terrain CTétacé. L’une d'elles, Aîialina Tîof/ana, est propre à la craie chloritée; les sept autres se distribuent dans le terrain néocomien ; mais il en est une, Anatîna Agassizi, qui se rencontre â la

LES OSTEODESMES.

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fois dans le terrain néocomien de la France et de la Suisse. Une espèce a été également mentionnée par M. d’Orbigny dans les terrains crétacés do l’Amérique méridionale.

Si l’on admet avec nous huit espèces de Cercomya jurassiques de M. Agassiz dans le genre Anatine , si l’on y ajoute le Sanguînoloria un- dulata de Sowerby, on aura neuf espèces dans cette série géologique, au- dessous do laquelle le genre est jusqu’ici démeuré inconnu, M. Agassiz , dans ses études critiques, distribue les neuf espèces en question de la manière suivante.

1. Anatina striata dans le Kimmeridge et le Portlandien.

3. du Calcaire de Portland. .

4 . du Coral rag.

2. de l’Oxford.

2. de rOolite inférieure.

L’une de ces deux dernières espèces est VAnatina undulata [sanguino- laria Sow.) M. Agassiz la rapporte à Toolile inférieure , tandis que M, Morris, dans son catalogue des fossiles de l’Angleterre, la range parmi les espèces de l’élage oxfordien; ceci prouverait peut être que l’espèce dont il s’agit sc trouve à la fois dans l’un et l’autre terrain.

Il résulte de cet invéntaire des espèces vivantes et fossiles du genre Anatine que l’on peut en admettre vingt-trois ou vingt-quatre espèces dans les catalogues.

f

Anatine subrostrée. Ânatina subrosirata (Lamk.).

PL 8, fig. 20 à 23.

A, testa ovato-transversây turgidulà, membranacea^ margaritaccâ ^

tenuhsimè et irregulariter stiatd , tenttissimè granulosà; umhonlhus tumidisy lœvigatis j latere antîco longiore y rotundato y /liante; poslîco Lreviore rostratOy rostro hiante dilatalo^

Roslrum anatis. Kumpb. Mus. Amb. pî. 45. f. O.

Peliver Amb. pl. 17. f. ii.

Solen anatinus» Lin, Syst. nat. ed, 10. p, 673. 3o.

Id, Liii. Mus. Ulric. p, 475. 18, ,

Id. Liii. Sys», i»at. ed. iq. p. iii5, 40.

Id. Cbemn, Conch. Cab. t. 6, p. 6a. pl. 6. f. 4^ à 48.

Jd. Sebroet. Einl. t. a. p. 63i,

Id. Gmel. p, 3225, 8.

SEPTIÈME FAMILLE

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id, Encycl. métli, pl. 228. f, 3.

Id, Wood. Gener, Conch. 128. pl. 3o. f. 2 à 4.

Id. Dillw. Cat, t. I. p. 65. 20.

Anatina subrostrata. Lamk. An. s, vert. t. 5. p. 463. 3.

Savigny. Ejtp. d'Égypte. Cotf, pl. 7. f, 8,

Solen anatinus. Wood. Tnd, test, pl. 3. f, r3,

Anatina subrostrata, Hauley. Desc. cat. p, 20.

Mya anatina, Oken.Lerhb. der Naturg. t. i. p. 223.

Desh. dansLamk. An. s. vert. édit, t. 6. p. 78. 11® 3.

Callow. Conch. nomencl, p. 8.

An eadem? Anatina hispîduïa, Cuv. Règne an. édit. t. 3. p. cSy.

Mitre. Magas. de Zool. 1844. pl..io2. io3.

Fossîlîs, Anatina rostrata Sismonda^Syn, mcth. p. 16?

Habite les mers de flnde. Fossile dans les terrains tertiaires de l’Italie?

Coquille ovale-oblongue , transverse, renflée, surtout vers les crochets; elle est inéquilatérale, et c’est le côté antérieur qui est le plus long; le bord supérieur ou dorsal est presque droit, l’inférieur ou le ventral est à peine convexe , et il est presque parallèle au dorsal. Ces deux bords sont réunis par un bord antérieur large, courbé en demi-cercle. Le côté posté- rieur se rétrécit subitement en un bec court et oblique dont l’axe, dirigé de haut en bas et d’arrière en avant, viendrait passer par le milieu du bord ventral, et former ainsi un angle ouvert avec Taxe longitudinal de la coquille. Cette extrémité n’est point tronquée mais arrondie; elle est très baillante, dilatée, les bords se trouvant renversés en dehors un peu à la manière du pavillon d’une trompette, caractère exagéré dans plusieurs figures , et notamment dans celles de Chemnilz e.l de TEncycIopédie. Le côté antérieur est baillant aussi, mais il ne l’est pas de la même manière que le postérieur. Les valves sont séparées par une fente étroite. La sur- face extérieure est couverte d’un très grand nombre de stries transverses, obsolètes, irrégulières, résultant des accroissemens ; de plus, si l'on exa- mine cette surface à la loupe, on la trouve, en avant et on arrière, chargée d’un grand nombre de fines granulations quelquefois déprimées au centre 5 ces granulations se multiplient sur le côté postérieur, mois elles s’arrêtent brusquement à l’origine du bec, de sorte que cette partie demeure en- tièrement lisse. Le cuilleron sc projette perpendiculairement dans l’inté- rieur des valves, en formant un angle droit avec le bord antéro-supérieur; il est étroit, profond et soutenu en dessous par une lame en arc-boutant, et du côté postérieur par un épaississement notable du bord dorsal.

Nous avons admis avec quelque doute, dans notre synonymie, VÂnaiina

LES OSTÉODESMES.

hispiduîa de Cuvier. Co n’est peut-être qu’une variété ayant le côté an- térieur plus étroit, et le bord ventral plus convexe. C’est également avec doute que, sur l’indication do M. Sismonda , nous avons cité cette espèce à l’état fossile ; il faudrait s’assurer do l’identité des individus fossiles avec les vivants par un examen approfondi de tous les caractères spécifiques.

Cette coquille est longue de 30 millimètres et large de 55.

GENRE VINGT- QUATRIÈME,

THKACIE , Thracia (Leach),

PI. 9. fig. I à 6.

CARACTÈRES gènÈriques. Animal ovale, manteau largement bordé, ayant les deux lobes réunis, si ce n est dans le tiers an- térieur où existe une ouverture pour le passage du pied. Deux siphons courts , désunis , un peu en massue ; bouche ovalaire ; palpes labiales étroites , foliacées , désunies , le long du bord dorsal et lamelleuses en leur surface interne; branchies très grandes; une paire ventrale, tombant dans la cavité du manteau, une paire dorsale remontant vers le dos. Pied petit , comprimé, lancéolé.

Coquille ovale-oblongue, transverse, inéquivalve, la valve droite étant plus profonde que Tautre ; subéquilatérale, légèrement bâillante à ses extrémités; charnière ayant un cuilleron saillant en dedans, oblique, portant un double liganjent, Tun interne, puissant; l’autre externe , beaucoup plus petit. Dans la plupart des espèces , un osselet demi-annulaire, attaché par le ligament àT extrémité antérieure du cuilleron. Impression musculaire an- térieure, grande, étroite, se continuant le long du bord; la pos- térieure subcirculaire , toutes deux réunies par ime impression palléale, dont la sinuosité postérieure est large et peu profonde.

SYNONYMIE GENERIQUE. Chaîna^ Petiver. Te/Z/wa^Pennant, PolijDelle Chiaje, Roemer, Goldfuss. Mja^ Donovan, Mon-

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tagu, Matton et Rackett, Dorset, Wood, Dillwyn, Turton, De Gerville. Rupicola, Fleurian de Bellevue? Anatina^ Lainarck, Turton, Cantraine, Lyell , Scacchi , Philippi , Thorp. Amphidesma , Lamarck, Fleming. Thracia ^ Leach, Deshayes , De Blainville , Rang , Sowerby , Forbes , Catlow , Hanley, Scacchi, Lovën , Gould, Swainson, Reeve, etc. Sanguinolaria^ Goldfuss. Corimya [Pars] y Agassiz.

OBSERVATIONS. La Synonymie générique qui précède prouve d’une manière incontestable que la plupart des conchyliologues n’ont pas reconnu les caractères du genre dont nous allons nous occuper. Cependant les coquilles qui en dépendent étaient bien connues, car Petiver en a déjà figuré une espèce dans son Gazophyllacimiy publié en 1764. Pennant, dans sa Zoologie britannique , signala une autre espèce appartenant au même genre, et il la rapporta au genre Tellina de Linné. En 1791, Poli en dé- couvrait une troisième espèce dans les mers de Naples , et la faisait con- naître d’une manière suflîsanle dans son grand ouvrage sur les Testaeês des deux Siciîes, Au commencement de ce siècle, dix ans après Poli, Donovan publiait sa Conchyliologie britannique , dans laquelle plusieurs espèces sont figurées et décrites; toutes sont rangées dans le genre Mya. Cette manière de les placer était certainement préférable , ces coquilles ayant en effet plus de rapports avec les Myes qu’avec Tes Tellines. Aussi l’opinion de Donovan fut acceptée de tous les zoologistes anglais, et pour s’en convaincre, il suffit de consulter les ouvrages des auteurs que nous avons signalés dans notre synonymie générique. La plupart d'entre eux conservèrent cette opinion jusqu’en 1828 , époque à laquelle M. Wood la reproduisit encore dans son Index testaceologicus.

Lîimarck, qui avait réformé d’une manière beiireuse le genre Mya de Linné , ne pouvait y introduire les coquilles dont nous nous occupons. Son genre Anatine, créé pour des c-oquillcs nouvelles, presque toutes inéqui- valves, portant un ligament intérieur sur des cuillerons projetés horizon- talement, a pu recevoir les Thracies avant que les caractères eussent été réformés par de nouvelles observations. I! est certain cependant qu’il ne se rendit pas un compte bien fidèle de la valeur des caractères de son genre, puisqu’après avoir compris une Thracie parmi les Anatines, il en range une autre dans son genre très indigeste des Amphidesmes. L’in- fluence de l’opinion de Lamarck se fit bientôt ressentir. En Angleterre, d’abord, nous voyons M, Turton qui, peu de temps avant, mettait les Thracies parmi les Myes les admettre toutes, sans exception, dans le

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genre Anatine. Il aurait pu arriver par une sorte de transformation, si M. Turton n’avait compris à côté des Thracies deux espèces qui ne leur appartiennent pas.

A cette époque, le genre Thracie était inconnu en Angleterre, quoi- qu’il eût été créé par un zoologiste anglais. Leach, son auteur, l’avait préparé pour un ouvrage qu’il n’a jamais publié, la mort l’ayant sans doute empêché. Mais Leach avait envoyé à M. Brongniart un exemplaire du Mya pubescenSj étiqueté de sa main sous le nom de Thracia pubescens. Lorsqu’on 1824 nous faisions des recherches sur les Anatines de Lamarck, nous observâmes la coquille de Leach, et nous y reconnûmes les carac- tères d’un bon genre ce qui nous le Gt adopter. Communiqué à M. de Blainville, au moment il préparait les travaux de son Traité de Malor- cologie, le savant zoologiste l’adopta à son tour et le plaça entre les Anatines et les Myes, dans sa famille des Pylcridées. Nous avions égale- ment communiqué à M. de Blainville les observations, à la suite desquelles nous avons cru nécessaire de fonder la famille des Ostéodesmes , mais M. de Blainville se trompa lorsque , dans les corrections et additions, publiées avec le dernier fascicule de planches, il voulut rectiGer les caractères du genre Thracie, et introduire dans sa méthode notre genre Ostéodesme. Nous ferons remarquer d’ahord que M. de Blainville avait admis r^nct^î’na Mijalis^ qui est une véritable Thracie , comme type des Anatines de Lamarck. Dans les corrections et additions, il supprime cette espèce d’entre les Anatines, et il l’indique comme le type de notre genre Ostéodesme. Nous avions choisi à notre genre des types très différens : l’un, le Mya solemyalis de Lamarck, l’autre, \e.Mya Nonoegica. Le genre Ostéodesme de M. de Blainville, inscrit dans les additions et cor- rections, est donc un double emploi des Thracies , et les caractères qu’il donne de cet animal, doivent être rapportés à ce dernier genre. Nous fîmes cesser cette confusion par la publication de divers articles dans le Dictionnaire classique d’histoire naturelle et dans l'Encyclopédie métho- dique. Depuis ce moment, le genre Thracie, fondé sur des caractères très précis, fut adopté de tous les conchyliologues, à l’exception cependant d’un très petit nombre, qui continuèrent à en confondre les espèces parmi les Anatines. Jusqu’ici nous n’avons cité aucun naturaliste qui ait décrit ou Gguré ranimai. M. de Blainville, le premier, en donna les caractères prin- cipaux dans son Traité de Malacologie. Quelques années après, M. Kiener, dans son Species général des coquilles vivanteSj publia la Bgure de l’animal de l’espèce de Thracie, que l’on trouve à Toulon ; et à peu près à la même époque M. Delle Chiajo , dans les planches encore sans texte, préparées pour la suite de ses Mémoires sur les Testacées des Mers de Naples, donna

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la figure d’une autre espèce de la Méditerranée, figure malheureusement très insuffisante, puisque l’animal n’est même pas sorti de sa coquille.

Le genre Thracie no se trouve pas seulement à l’état vivant j on le connaît également à l’état fossile, dans les terrains tertiaires, comme dans divers étages des terrains secondaires. Ceux des Paléontologistes qui ont eu occasion de rencontrer des vestiges de ce genre, en ont confondu les espèces, tantôt avec les Tellines, ainsi que Pont fait MM. Roemer etGoId- fuss ; tantôt avec les Sanguinolaires, comme on peut le constater d’après les excellentes figures de l’ouvrage de M. Goldfuss. Enfin, U. Agassiz, dans ses Etudes critiques sur les Mollusques fossiles, en a confondu quelques espèces dans un genre auquel il a donné le nom de Co^imya, Nous avons sous les yeux quelques-unes des espèces de M. Agassiz, et nous y retrou- vons les caractères des véritables Thracies. Ce qui aura induit en erreur le savant observateur , dont nous parlons , c’est qu’il aura comparé le moule en plâtre du Thracia corbuloïdes avec les Corimya qui ne sont plus connus que par des moules naturels, et cette comparaison ne lui aura pas permis de reconnaître l’identité des caractères, par une raison, que lui-même eut appréciée avec la plus grande facilité, s’il avait eu à sa dis- position le moule de plusieurs espèces de Thracies. 11 aui-ait alors reconnu dans ce genre un phénomène curieux, par lequel on voit le ligament passer de l’intérieur à l’extérieur par une suite de modifications dans la série des espèces , et justement le Thracia corbuloïdes est de toutes les espèces connues , celle qui a les cuillerons les moins saillans , et dont le ligament est devenu presque extérieur , tandis que les moules de Corimya ont appartenu à des espèces dont le cuilleron était beaucoup plus saillant, comme dans le Thracia decîivis, par exemple. Àussi la comparaison faite entre les Corimya et l’espèce de Thracie que nous venons de rappeler, ne laisse aucun doute sur l’identité des caractères génériques, ce qui nous a déterminé depuis longtemps à transporter parmi les Thracies plusieurs des espèces de Corimya de M. Agassiz,

Les coquilles du genre Thracie se reconnaissent avec facilité, elles sont généralement oblongues , transverses , obtuses et arrondies du côté anté- rieur, largement tronquées du côté postérieur; elles sont presque équila- térales, et toutes, sans exception, sont inéquivalves. Mais l’inégalité des valves n’est pas la même cpie dans les Pandores , car c’est la valve droite qui est la plus grande, tandis que c’est la gauche dans les Pandores, comme nous l’avons constaté. Presque toutes les espèces sont bombées, les crochets sont protubérans , opposés , très rapprochés ; il arrive même assez souvent que celui de la valve droite est échancré pour rece- voir cehii de la valve gauche. Le côté postérieur est circonscrit par un

LES OSTÉODESMES.

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angle obtus, simulant le pli irrégulier des Tellines. La surface extérieure est ordinairement recouverte d’un épiderme brunâtre, dans lequel est re- tenue une assez grande quantité de matière argileuse, ce qui donne à la plupart des espèces do ce genre une couleur d’im gris terreux. Celte sur- face extérieure n’est point lisse, elle est toute chargée d’un nombre con- sidérable de granulations que l’on peut comparer à celles des Anatines. Elles sont cependant beaucoup moins serrées et plus irr^lières. A l’in- térieur, les valves no sont point nacrées , elles sont d’un blanc jaunâtre, terne, et malgré leur peu d’épaisseur , on peut , à cause de cela, distin- guer plus facilement que dans les Anatines, les impressions du muscle et du manteau. Les bords sont simples, minces et tranchans; les valves réunies, les bords ne se joignent pas exactement sur toute la circonférence; un petit bâillement se montre sur toute la longueur du bord antérieur ; un autre existe dans la longueur du bord postérieur , et il est destiné à donner passage aux siphons. La charnière est très simple, elle consiste, sur chaque valve, en un cuillcron très obtus, peu saillant, qui s’avance dans l’intérieur des valves, et reçoit un ligament intérieur. Ce cuilleron se dé- tache plus ou moins, selon les espèces; dans quelques-unes, il prend à peu près la forme de celui des Anatines , et dans d’autres, il a disparu presque entièrement , et il présente alors la forme do nymphes , un peu plus rentrées , qu’elles ne le sont habituellement. Entre ces deux points extrêmes peuvent se ranger toutes les modifications, propres à les rattacher l'imo à l’autre, ce qui prouve, comme nous le disions d’abord, que dans ce genre très naturel, on voit le ligament passer de l’intérieur à rextérieur de la charnière. Dans la plupart des espèces, une côte peu épaisse et ob- tuse, après avoir servi d’appui au cuilleron, vient s’évanouir vers la limite do l’impression du muscle postérieur des valves, et nous retrouvons ce ca- ractère dans la plupart des espèces du genre Corimya de M. Agassiz, Indé- pendamment de ce ligament interne, porté dans l’intérieur des cuillerons, il y a encore un petit ligament externe très solidement attaché au fond d’un petit sillon, limitant en dehors le cuilleron interne. Enfin, dans plu- sieurs espèces , nous avons observé, attaché à l’extrémité antérieure du cuilleron, au moyen d’un appendice du ligament, un petit osselet, courbé en demi-anneau, et cylindrique dans sa coupe transverse. Dans les espèces on question, la présence de l’osselet so révèle par une petite impression spéciale, qui se montre dans l’intérieur des valves, et qui commence au point do contact do l’ossolèt avec les valves elles-mêmes. Mais ce carac- tère, ne se présentant pas dans les grandes espèces du genre, perd de sa valeur ; seulement il nous a guidé pour classer les Thracies dans notre famille des Ostéodesmes. Les impressions musculaires sont différentes

236

SEPTIÈME FAMILLE.

entre elles; l’antérieure est allongée, étroite, obtuse à son extrémité in-^ férieure ; elle est pointue à l’extrémité opposée, elle se courbe le long du bord antérieur, dont elle se rapproche, et elle descend jusque vers îe point, le bord ventral se continue avec Tantérieur. Cette impression s’étend beaucoup moins vers le dos que dans la plupart des autres coquilles, et en cela, elle a de l’analogie avec celles du plus grand nombre des genres de la même famille. L’impression postérieure se trouve tout près du bord supérieur, vers Textrémité postérieure des valves. Elle est subcirculaire ou un peu semi-lunaire ; elle se prolonge un peu en un angle arrondi à son extrémité supérieure, et ce prolongement est à l’impression du muscle rétracteur postérieur du pied. Le muscle rétracteur antérieur étant très étroit, forme la pointe de l’impression du muscle adducteur antérieur. I^e manteau laisse à l’intérieur des valves une impression comparable à celle des Myes ou des Corbules ; elle commence à l’extrémité inférieure du muscle antérieur , se place parallèlement au bord ventral , et parvenue vers l’angle postérieur, elle s’infléchit en dedans en une sinuosité large et peu profonde, et se termine vers le milieu de l’impression, musculaire postérieure. L’échancrure palléale varie selon les espèces; à peine creusée dans le Thracia puhescens , elle est un peu plus profonde dans le Corbu- loïdes; mais dans le Papyracea elle s’enfonce beaucoup plus dans l’inté- rieur des valves et s’avance jusque près de la hauteur de la charnière.

Toutes les espèces de Thracies n’ont pas les mêmes mœurs. Les unes s’enfoncent dans le sable ou la vase, les autres sont perforantes, comme le prouve la Tkracie rupicole, qui a servi de type au genre Rupicole de M. Fleuriau de BeUevue. Ace sujet, nous rappellerons que tout récem- ment un conchyliologue fort distingué , M. Recluz , dans une note publiée dans le Magasin de Zoologie, a revendiqué en faveur de M. Fleuriau de Bellevue, la priorité de la création du genre dont nous nous occupons. Malheureusement M. Recluz a découvert trop tard que le genre Rupicole do M. Fleuriau a identiquement les mêmes caractères que celui nommé Thracie plus tard par Leach. M. Fleuriau est le premier qui, en 4 803, ait publié de très bonnes observations sur les mollusques lithophages des environs de La Rochelle. Dans ce mémoire, l’auteur propose plusieurs genres, et un entre autres, qu’il nomme Rupicole, et dont les caractères, présentés mal- heureusement d’une manière incomplèle, s’accordent cependant avec ceux des Thracies; mais il faut savoir d’avance qu’il y a identité entre ces genres pour la reconnaître, La coquille perforante de M. Fleuriau , très rare, à ce qu’il paraît, a été connue de Lamarck, qui, d'abord, adopta le genre Rupicole, mais sans le. caractériser , dans l’extrait du cours. Plus tard, dans VHisloire d^s Animaux sans vertèbres , le genre Rupicole dis-

LES OSTÉODESMES.

287

parut, et la coquille de M. Fleuriau fut mentionnée parmi les Anatines, Placée dans ce genre, avec une phrase caractéristique très courte , sans synonymie, sans figure, il était impossible de deviner qu’elle dût appar- tenir au genre Thracie; aussi il fallut que M. Recluz eut occasion d’exa- miner cette coquille dans la collection de Lamarck, pour savoir à quel genre elle appartient. Mais, longtemps avant M. Recluz, nous avions res- tauré, pour ainsi dire, le genre de Leach , et dès 1825, nous lui avions acquis une véritable priorité. En effet, avant nous, les Rupicoles aussi bien que les Thracies, étaient complètement ignorées. On pouvait consi- dérer ces genres comme n’existant pas , puisque ni Tun ni l’autre n’a- vaient été figurés et suffisamment caractérisés. Ayant le premier retrouvé le genre de Leach, l’ayant caractérisé de manière à le rendre reconnais- sable à tous les zoologistes, c’est celui-là qui, dans notre opinion, doit rester dans la nomenclature, quoique, par le fait, il soit d’une création postérieure à celui de M. Fleuriau de Bellevue.

L’animal, dans son ensemble, conserve tous les caractères importans, qui distinguent les autres genres de notre famille des Ostéodesmes,

Le manteau, constitué comme dans tous les autres mollusques acéphalés dimyaires, a une cavité plus profonde pour recevoir, jusque dans la région dorsale, une portion très importante de l’organe respiratoire.

Deux siphons prolongent en arrière la partie postérieure du manteau. Ces organes subclaviformes , fort inégaux, sont disjoints dans toute leur longueur. Le siphon anal seul a son ouverture garnie d’un petit nombre de tentacules. Une troisième ouverture palléale, mais simple et sans saillie, existe au-dessous des siphons et s’ouvre dans la portion du manteau, cor- respondant à l’angle inférieur et postérieur de la coquille. Cette ouverture nous apparaît pour la première fois chez les mollusques acéphalés , et comme caractère zoologique, il s’ajoute à tous ceux qui font reconnaître le genre Thracie.

Les deux lobes du manteau, soudés dans presque toute la circonférénce; se détachent en avant et laissent une petite fente pour le passage du pied. On peut donc affirmer que dans le genre qui nous occupe , le manteau est percé de quatre ouvertures.

Les muscles adducteurs des valves sont très écartés; l’antérieur est ovale-aplati ; le postérieur est subcirculaire et très, rapproché du bord dorsal.

La masse viscérale est peu considérable, en proportion de la grandeur de la cavité de la coquille ; elle porte en avant un organe locomoteur d’un médiocre volume, aplati latéralement et en forme do langue triangulaire.

Essentiellement musculaire, le pied est creusé, à sa base, d’une cavité

238

SEPTIÈME FAfilILLE.

à parois assez minces, musculaires aussi , dans laquelle sont compris les principaux viscères. Le pied se meut au moyen de muscles rétracteurs ; un antérieur assez épais; un postérieur beaucoup plus mince. Tous deux se bifurquent on deux faisceaux égaux pour s’attacher à la coquille.

La bouche est en fente transverse , située entre la base du pied et le muscle antérieur. Les lèvres et les palpes dont elle est garnie, ressemblent beaucoup à celles des Lyonsies et des Anatines. Les palpes sont étroites , lancéolées, et libres dans presque tout leur contour.

Un œsophage assez long, étroit, commence à la bouche et termine à un estomac sphéroïdal, divisé en plusieurs poches par des crêtes saillantes à l’intérieur.

Le tube intestinal est assez allongé. Au sortir de l’estomac , il se con- tourne en un grand nombre de circonvohitions, au moyen desquelles il se porte d’arrière en avant, pour se recourber en sautoir autour de Testomac, gagner la région dorsale, traverser le péricarde, et enfin aboutir dans le siphon anal, après s’être recourbé sur la surface supérienre du muscle adducteur postérieur des valves.

Le foie, d’un volume assez considérable, enveloppe l’œsophagG , l’esto- mac et une portion notable de l’intestin. Dans son organisation intime, il est semblable à celui des mollusques, que nous avons déjà examinés, et il verse le produit de sa sécrétion dans l’estomac , au moyen de deux cryptes biliaires.

Les ovaires , peu considérables dans les individus que nous avons dis- séqués , étaient complètement vides, et nous ont offert un exemple de la structure fibreuse de leur enveloppe, Les ovidactes viennent s’ouvrir à une fente étroite , que l’on trouve au-dessous de la bratichie , de chaque côté de la crête que forme en arrière le muscle rétracteur postérieur du pied.

Les organes de la circulation ne diffèrent en rien d’essentiel de ceux des genres du môme groupe. Un ventricule aortique, symétrique, fusi- forme, embrasse l’intestin et reçoit, de chaque côté, une petite oreillette triangulaire, aplatie. Ces organes sont contenus dans un péricarde d’une médiocre étendue , formé d’une duplicature du manteau. L’aorte anté- rieure entre dans la masse des viscères ; une aorte postérieure est destinée à se distribuer aux parties postérieures de l’animal.

Les organes branchiaux sont tout à fait semblables à ceux dos Lyonsies et des Anatines ; ils sont constitués par quatre feuillets ; deux descendant dans la cavité du manteau ; les deux autres remontant dans la région dorsale. Tous deux nettement séparés au dehors par un sillon assez pro- fond, qui suit la ligne d’adhérence de ces organes.

Un organe dépurateur,-d’un aspect semblable à celui des Lyonsies,

LES OSTÉODESMES.

289

occupe un espace assez étendu, circonscrit par le péricarde, le muscle postérieur des valves et le muscle rétracteur du pied ; à parois épaisses , cet organe, creusé de deux cavités, est également divisé par un grand nombre de canaux irréguliers , au moyen desquels l’étendue des surfaces de sécrétion est considérablement augmentée.

Le système nerveux est semblable à celui des Lyonsies et de la plupart des autres mollusques acéphales dimyaires. Il est composé de quatre gan- glions communiquant les uns avec les autres, au moyen de nerfs récur- rens. Le ganglion branchial ou postérieur est le plus fort; on le voit à la surface du muscle adducteur postérieur des valves. Trois paires de nerfs en partent. La première se distribue aux siphons et aux muscles posté- rieurs du manteau; la seconde est branchiale; la troisième traverse la masse viscérale pour se rendre aux ganglious antérieurs. Ceux-ci, petits, cachés sous la lèvre supérieure, donnent naissance û une paire de nerfs antérieurs, destinés au muscle adducteur antérieur et au manteau. Quel- ques petits nerfs prennent naissance du môme ganglion , et se rendent aux lèvres et aux palpes. Enfin, deux nerfs considérables rentrent dans la masse viscérale et se terminent à un ganglion pédieux d’un médiocre Volume , de la circonférence duquel s’échappent , en divergeant , trois paires de branches nerveuses, qui so distribuent aux organes de la diges- tion, de la génération , et aux muscles du pied.

Quoique dans les Thracies, les siphons soient complètement isolés, on doit néanmoins rapprocher ce genre des Ânatines, chez lesquelles les siphons sont réunis dans toute leur longueur. Le caractère emprunté à la jonction et à la. disjonction des siphons, ne doit pas avoir ici une valeur absolue, et faire rejeter dans des familles différentes deux genres dont les rapports mutuels s’établissent, d’après l’ensemble do leur orga- nisation.

En admettant la Rupicole de M. Fleuriau de Bellevue au nombre des Thracies , ce genre renfermerait dix-neuf espèces vivantes , appartenant aux mers d’Europe pour le plus grand nombre. Quelques-unes passent de rOcéan dans la Méditerranée.

Quelques espèces des mers de l’Amérique septentrionale ont été signa- lées par les naturalistes de ce pays ; enfin il en est doux qui vivent dans les mers tropicales, Tune au Sôtjégal, l’autre dans le golfe du Mexique’. Dans l’état actuel de nos connaissances , on peut dire que les Thracies sont propres aux mers tempérées de l’hémisphère septentrional.

Les espèces fossiles du genre Thracio sont assez nombreuses , elles se distribuent' dans les terrains tertiaires ainsi que dans les terrains secon- daires. Les renseignemens que fournissent, à leur égard, les traités de

SEPTIÈME FAMILLE

2/(0

Paléontologie, tels que ceux de M. Pictet et de M. Geinitz sont très in- complets. M. Geinitz confond quelques espèces avec les Lyonsies, et ne mentionne au genre Thracie qu’une seule espèce vivante, pour servir d’exemple. M. Piclet cite dans la craie de TAIIemagne, les deux espèces décrites par M. Rœmer, et il ajoute quelques espèces tertiair es des terrains de la Sicile et de l’Italie, ainsi que du Crag d’Angleterre.

Dans sa Paléontologie françaisej M. d’Orbigny fait connaître une seule espèce de Tlu-acie du terrain crétacé. Mais ce naturaliste nous semble avoir mal compris les caractères du geyre Periploma de Schumacher.

Nous avons dit, en traitant de ce genre, que nous rapprocherions les Periplomes de M. d’Orbigny des Cochlodesmes de M. Coulhouy. Nous avons eu depuis occasion d’observer en nature l’une des espèces de M. d’Orbigny, et nous la rangerions de préférence parmi les Thracies; c’est le Periploma Robinaldina.

Les deux espèces figurées par M. F. A. Rœmer {Die Versieinerungen des Norddeutschen Kreidegebirges^ liv.), quoique d’une manière peu satisfai- sante, paraissent cependant appartenir au genre Thracie. Sous le nom de Tellina fncer/a, le même M. Rœmer, dans son ouvrage sur le Terrain oolitique^ a fait connaître une véritable Thracie, que nous avait montrée autrefois M. Vol iz, qui l’avait recueillie aux environs de Porrentruy. Une autre espèce Tellina corbuloides ^ provenant du Coral-rag, nous paraît aussi dépendre du genre Thracie. Il pourrait se faire que le Tellina ru- gosa fût aussi une Thracie. Mais nous conservons des doutes à son égard.

Presque toutes les espèces du genre Corimya, de M. Agassiz, sont de véritables Thracies ; il est fâcheux, en vérité, qu’un naturaliste, dont les travaux inspirent généralement une très grande confiance, commette des erreurs comme celle-ci, produise un genre nouveau, entièrement inutile, et jette ainsi de l’incertitude dans une science, qui ne peut être utile à la Géologie que par la détermination rigoureuse des genres et des especes.

M. Puschjdans sa Paléontologie polonaise, donne le nom d' Amphidesma securiforme y à une coquille qui n’est point de ce genre; elle se range aussi parmi les Thracies. Il en est de même pour deux espèces figu- rées par Sowerby , dans le Minerai conchologijj l’une sous le nom de Lulraria cariniferay l’autre sous celui de Mija depressa. M. Goldfuss, en reproduisant les deux espèces jurassiques de M. Rœmer, les conserve, à son exemple, parmi les TcUines; une troisième espèce' des Tellines de Goldfuss pourrailbicn aussi appartenir aux Thracies, c’est le Tellina lata; la forme générale est assez bien celle des Thracies, cependant nous con- servons des doutes à son sujet.

Quant aux espèces des terrains tertiaires, nous en connaissons dans les

LES 05TÉ0DESMES.

trois étages; dans l'étage supérieur, nous avons signalé, en Moréo, lo Tlmicia pubescens; cette espèce se montre aussi en Sicile, mais elle est accompagnée de deux .autres espèces qui vivent encore dans la Méditerranée, Thracia convexa et papijracea, M. Sismonda cite deux de ces espèces dans les terrains subapennins du Piémont, ce sont les Thraeîa pubescens et paprjracea. M. S. W. Wood , dans son catalo- gue des coquilles fossiles du crag d'Angleterre, inscrit trois espèces, et il constate que deux d’entre elles vivent encore dans les mers de l'Eu- rope , ce sont les Thracia pubescens et conr^^n , celle dernière avec quel- que doute à cause de la mutilation des échantillons. Nous connaissons une espèce dans les terrains moyens des environs de Bordeaux ; elle a son analogue vivant au Sénégal; elle a été décrite par nous sous le nom de Thracia plicata; enfin, dans les sables moyens de Damerie, nous avons trouvé autrefois une valve entière d’un Thracia^ qu’un accident a détruite avant qu’elle ne fût décrite et figurée ; mais ce fait constate le genre dans les terrains tertiaires inférieurs; il serait bien mieux établi encore , s’il est vrai, comme le croit M. Morris [Cat. des foss. de la Grande-Bretagne), que le Lutraria oblata de Sowerby (A/m. conch., pl, 534 , f. 3) est une véritable Thracie, car cette espèce se trouve à la fois dans le London -Clay et dans les argiles de Boom , d’après M. Nyst.

Nous comptons actuellement vingt-six espèces fossiles, parmi les- quelles nous en remarquons quatre qui, dans les terrains tertiaires, ont leurs analogues vivants, et déplus, dans ces derniers terrains, quatre espèces qui n'ont plus de représentants dans la nature actuelle. Sur ces quatre espèces , deux sont propres au terrain tertiaire supérieur de la Sicile ; M. Philippi les a fait connaître le premier ; la troisième a été fi- gurée par MM. Sedwich etMurchisson dans leur beau mémoire sur les Alpes autrichiennes; ils lui ont donné le nom de Lutraria cmvexa. Comme il existait déjà un Thracia coiivexa, nous proposons pour cellç-ci le nom de Thracia i/wrc/u'ssonf, -voulant attacher le nom du savant géo- logue à cette espèce intéressante. La quatrième enfin provient des ar- giles de Londres , du terrain tertiaire inférieur, ainsi que nous l’avons déjà dit.

Sept espèces sont distribuées dans le terrain crétacé; sur ce nombre, ‘trois appartiennent au terrain néocomien.

Toutes les autres espèces, au nombre de quinze, se répartissent d’une manière assez égale dans les divers étages de la grande série des terrains jurassiques.

Trois espèces se trouvent dans le Portland.

T. I. i6*

9-4

SEPTIÈME FAMILLE.

Une dans le Kimmeridge.

Quatre dans io jurassique moyen.

Trois dans roolile inférieure.

Deux passent de l’oolitedans le lias supérieur.

Deux enfin sont propres au lias.

Si, à la suite de ce dénombrement des Thracies, nous en faisons le total,- nous trouverons quarante-cinq espèces dans un genre l’on on comptait à peine quelques-unes, il y a peu d’années. Yingt-six espè- ces sont fossiles.

Nous pouvons signaler à l’atlenlion des géologues les espèces sui- vantes :

^ . Thracia pubescens. Vivante dans les mers de l’Europe.

Fossile dans les terrains tertiaires supérieurs du Piémont , de la Sicile, de la Morée, dans le crag anglais, ainsique dans les terrains récents de la Norwége, à üdewalla.

2. Thracia convexa. Vivante dans les mers de l’Europe.

Fossile dans le crag d’Angleterre.

3. Thracia papyracea (Phaseolina). Vivante dans les mers de l’Eu- rope.

Fossile en Sicile et en Italie.

A. Thracia plicala. Vivante au Sénégal.

Fossile dans les terrains tertiaires moyens des environs de Bor- deaux.

6. Thracia gibbosa d’Orb,, propre à la craie du midi de la France.

6. Thracia PAtlippt, Rœmer.

Thracia elongata.

Toutes deux découvertes dan^ la craie chloritée de l’Allemagne.

7. Thracia Nicoleti.

Espèce abondante dans le calcaire jaune du terrain néocomien,

8. Thracia Tellinoides ^ Desh.

C’est le Corimya lala de M. Agassiz. Nous avons été obligé de changer le nom proposé par ce savant , parce qu’il y avait déjà dans Goldfuss une coquille de ce nom parmi les Sangui- nolaires; mais qui devant rentrer dans le genre Thracie au- quel elle appartient , entraîne avec elle le nom de Thracia lata ; le Thracia iellinoides est particulière au terrain Portlandien.

9. Thracia pinguis [Corimya pingnis , Agass.) est une espèce ca- ractéristique de rOxfordien.

1 0. Thracia frearsiam d’Orb.

LES OSTÉODESMES. 2 43

Cette espèce très intéressante a été décrite par M. d’Orbigny dans le bel ouvrage sur la Russie, qui fait tant d’honneur à MM. Murchisson et de Verneuil ; elle paraît assez commune dans le terrain jurassique des environs de Moscou.

1 1 . Thracia Gresslyi , Desh.

M. Agassiz a donné le nom de Corimya elongata à cette espèce en 1845. En l’introduisant parmi les Thracies, i! a fallu changer son nom puisque M. Rœmer, dès 184'!, avait fait connaître une autre espèce sous la dénomination de Thracia elongata. Ce Thracia Gresshji est très caractéristique de roolile inférieure.

Thracia aîta.

Thracia glabra,

Thracia lata.

Toutes trois offrent cette particularité de passer de Toolite infé rieure dans les couches supérieures du lias.

1 3. Thracia Agassizi^ Desh.

Celle-ci est propre au lias. M. Agassiz Ta fait connaître sous le nom de Corimya triincata; mais en passant dans le genre Thracie, elle a prendre un autre nom, parce qu’il existait déjà deux autres espèces sous ce nom de Truncata. En attri- buant à celle-ci le nom du savant qui l’a fait connaître le premier, nous ne rendons qu’un bien faible hommage à son mérite.

N

Thracie corbuloïde. Thracia convexa. Desh.

PI. 9. fig.l. 2. 3.

T. testa ovato-transversâ ^ injlatâ, griseâf înaequivalvi ^ iiiasquîlatera ^ posticè hîsinuatâ; umbonibus magnis , dextro marginato ^ •valvulis hiantibus utroque îatere.

Mya deelms. Donovan. Brit. shells. pi. 82*

Mya convéxa, Wood. Geo* cooch. p. 9a. a** 3. pl. 18.

Mja deelms. Var. Dillw, Cat. t, i p. 43. a? 4.

Mya convexa.TofXoa. Goneb. dict. p. xoo.

Anatina convexa, Xurt. Coneb. bril. p. 44«

Thracia corbuloides. Desb. Dicl« class. d’hist. aat. t. i6. Atlas* 6^ livr.

pl. 14. f. 4.

Eadetn, Blainville. Malac. p. 565. pl. 76. f. 7.

16*

SEPTIEME FAMILLE.

2 fri

j}/)'a co/ivexa. Wootl. Ind, lest. p. lo. 3. pl. 2. f, 3.,

Tkracia corbtiloides, Dûsh. Encyc. mélh. vers. t. 3. p, loSy. 4.

Kiener. Spec. des coq. pl. 2. f, r.

Desli. dans Lamk, An. s. vert. cd. t. 6, p. 83. i.

Philippi, Ennm. Moll. Sic. t. 2. p. t6-

Amphidesma convcxnm, Fleming, Brit. anim. a* éd. p, 43i.

llanley. Desc. cat. p. aa.

Id, in Woüd. Ind, test, siippl. pl. 9. f. 20,

Callow. Conch. nom. p, 8.

Sowerhy, Conch. man, f. 98.

Thracia corbtiloides. Scacclii, Cat. conch, regn. neap. p. 6.

Thracia coHvexa. Thomp. Rep. on the fauna of Irel. p. 263.

Lovèn. IiiJ. moll. scand. p. 46. Sao.

Possilis, S, W. Wood. Cat. foss. crag. nat. hisl. mag. (décemb, 1840). p. 45. 2.

Philippi. Enuin. moll. Sic. t. 2.p. 18, n* 5.

Habite Oran , la Sicile, Toulon , les mers d’Angleterre, Fossile en Sicile * et en Augletcrrc,

Lorsque nous avons décrit cette espèce sous le nom de Thracia corbu- Içides , nous n'avons pas reconnu son identité avec le Mya convexa de Wood , qui habite sur les côtes de l’Angleterre ; depuis, nous avons pu comparer les figures d’individus provenant des deux mers et, en recon- naissant qu’ils appartiennent à une même espèce, nous avons aban- donner notre nom spécifique et adopter celui qui avait été proposé long- temps avant nous.

Il était assez difficile de rétablir une bonne synonymie à cette espèce, non seulement parce qu’elle est variable dans ses formes, mais encore parce que les figures ne représentent pas ceux des caractères qui sont le plus distinctifs et qui sont à l’intérieur des valves. Mentionnée et dé- crite un assez grand nombre de fois, cette coquille se distingue assez facilement de toutes ses congénères. Elle est ovalaire, presque équila- térale, mais le côté postérieur est toujours plus allongé que l’antérieur, les valves sont bombées, ou, comme elles sont minces , leur cavité in- térieure est profonde; le côté antérieur est obtus, presque demi-circu- laire; le côté postérieur , plus étroit, est tronque perpendiculairement à l’axe transverse; lorsque- les valves sont rapprochées, elles laissent en avant un petit bâillement étroit, niais en arrière , il existe sur toute la hauteur de la troncature. De ce côté postérieur , on remarque une double sinuosité qui produit , sur le bord des valves , une inflexion irrégulière,

LES OSTEODESMES.

243

assez comparable à celle des Tellines ; les crochets sont grands et protubérants ; celui de la valve gauche est entier, tandis que celui de la valve droite est toujours échancré pour recevoir la saillie du cro- chet du côté opposé; la surface intérieure est blanche, brillante; on remarque ,tout près du bord antérieur, une impression musculaire assez étroite, descendant près du bord ventral. En arrière, tout près du bord dorsal et non loin du postérieur, on trouve l’impression musculaire postérieure; elle est subcirculaire, un peu prolongée en avant, parce qu’elle se confond avec l’impression du muscle rétracleur du pied. L’im- pression palléale part de l’extrémité du muscle antérieur, se place au bord ventral de la coquille , et parvenue vers l'extrémité postérieure , elle s’infléchit en dedans pour faire une sinuosité large et peu profonde. A l’extérieur, celte coquille est grisâtre, et si on l’observe sous un faible grossissement, on s’aperçoit qu’elle est toute couverte de ponctuations très serrées, qui la rendent rugueuse sous les doigts. Nous avons con- staté depuis longtemps que cette coquille a son analogue fossile dans les terrains récents de la Sicile. Dans son premier volume sur les Mollusques de la Sicile , M. Philippi avait d’abord contesté ce fait, mais plus tard , il en a reconnu l’exactitude, lorsque, huit années après , il publia le se- cond volume de l’ouvrage que nous citons.

GENRE VINGT-CINQUIÈME.

MTOCAME. Myochama. (Stulchbury.)

Pl. 3 bis, fig. 12. x3.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal irrégulier, ayant les lobes du manteau très inégaux , soudés dans Une grande partie de leur circonférence et prolongés en arrière en deux siphons courts, égaux, complètement séparés dans toute leur longueur. Deux tentacules très courts , opposés sur le bord du siphon branchial , quatre tentacules également très courts sur le bord du siphon anal.

Coquille adhérente, irrégulière, inéqui valve, subéquüatérale

SEPTIEME FAMILLE.

246

la valve droite adhérente par toute sa surface, aplatie ou con- vexe , selon la forme des corps sur lesquels elle s* appuie ; valve gauche, grande, profonde, en forme de cabochon; deux im- pressions musculaires, écartées; Tantérieure plus grande ova- laire, la postérieure circulaire; impression palléale terminée postérieurement eu une sinuosité peu profonde et assez large. Charnière constituée sur la valve droite en une fente profonde, triangulaire , contenant le ligament , à la surface interne duquel est attaché un osselet trigône ; sur la valve gauche un cuilleron triangulaire, renversé dans la cavité du crochet donnant inser- tion au ligament.

OBSERVATIONS. G’est avcc quelques doutes que nous introduisons ce genre singulier dans la famille des Ostéodesmes ; nous y sommes entraîné par la présence d’un osselet cardinal , détaché dans le ligament, ainsi que par la sinuosité postérieure du manteau et la présence de deux siphons, séparés dans toute leur longueur. Tous les autres caractères tendraient à repousser ce genre de la famille nous le plaçons provi- soirement.

Le genre Myocame a été institué par M. Slutchbury, dans le 5* vo- lume du Zoological Journal. Ce naturaliste en expose brièvement les caractères et en donne une Bgure de grandeur naturelle, qui laisse à désirer une connaissance plus exacte de la charnière. Trois exemplaires seulement d’une seule espèce de ce genre étaient connus dans les col- lections de l’Angleterro et n'en sont point sortis. Aussi la figure de M. Slutchbury a été successivement reproduite par M. Sowerby dans son Gênera of shells , par M. Reeve dans son Conchologia iconica^ et enfin par M. Sowerby le jeune dans son Mamwl de Conchyliologie. Ces auteurs répétèrent avec non moins de scrupule les caractères du genre, tels que leur auteur les publia pour la première fois ; de sorte que contrairement a ce qui a Hou le plus ordinairement dans la science, les publications successives dont nous venons de parler n’ont rien ajouté la connaissance du gonro. Déjà nous nous proposions de nous servir de ces matériaux incomplets, lorsque M. Cuniing nous communiqua un exemplaire très bien conservé du Myochayna anomioides. Les valves de cet exemplaire étaient maintenues fermées par la contraction de l'animal. Voulant en étudier les caractères intérieurs , mais dans la crainte de briser les moindres parties, nous le fîmes macérer dans de l'eau , et

LES OSTEODESMES.

2^7

nous eûmes le plaisir de retrouver des parties assez considérables de l’animal, qui, ramollies, nous présentèrent les caractères que nous avons exposés. Nous ne pûmes découvrir aucune trace des branchies, des palpes labiales et même du pied ; mais les muscles adducteurs étaient dans leur intégrité, ainsi que les siphons, les muscles fétracteurs de ces organes et une portion assez considérable du bord postérieur du man- teau. Si le pied eût été épais et fibreux , ainsi que cela a lieu dans les Venus, par exemple , nous en aurions probablement trouvé des restes ; car il est à remarquer que ce sont principalement les parties fibreuses de l’animal qui ont été conservées. D’ailleurs les personnes, qui reçoivent des mollusques desséchés dans leurs coquilles, savent très bien, que le pied est une des parties qui so conservent le mieux.

Les siphons sont petits, complètement séparés; ils sont d’un beau jaune orangé, et quoique contractés, ils ont à peu près le quart du dia- mètre antéro-postérieur de la coquille. Le siphon branchial est un peu plus large que l’anal, mais il est de la même longueur ; il reste du même diamètre dans toute sa longueur; son ouverture est large, simple, sur- montée de deux tentacules très courts , opposés , à base large. Le siphon anal se termine en un sommet obtus, en une sorte de calotte, percée au centre d’une petite ouverture, sur la circonférence de laquelle s'élèvent quatre tentacules très petits et obtus. Les lobes du manteau sont circonscrits par un muscle orbiculaire extrêmement mince; ils so réunissent et laissent en avant une fente courte et étroite pour le passage d’un pied, probablement réduit à l’état rudimentaire.

A voir la coquille , on la prendrait pour une petite Anomie à valve supérieure très convexe ; mais lorsqu’on vient à étudier cette coquille , on s’aperçoit bien vite qu’elle s'éloigne très considérablement des Ano- mies par tous ses caractères. Elle est très inéquivalve, subéquiJatérale ; la valve droite est aplatie ou convexe, ou concave, selon la forme du corps sur lequel elle adhère; elle s’attache plus particulièrement et par une prédilection singulière à la surface des Trigonies ou des Pétoncles. Par conséquent, s’appuyant sur une surface convexe, cette valve est concave en dehors et convexe en dedans. A l’exception du bord cardinal, elle est adhérente par toute sa surface; elle prend l’empreinte dos moindres accidents de la coquille à laquelle elle adhère, et ces accidents se répètent fidèlement sur la surface de la valve gauche. Ce phénomène se reproduit dans les huîtres et plus particulièrement chez les Anomies. La valve gauche est très profonde et elle ressemble a un petit cabochon dont le sommet rentrerait vers le bord. Le crochet de cette valve est grand, protubérant, courbé sur lui-même, et son sommet s’incline vers Tinté-

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SEPTIEME FAMILLE.

rieur de la coquille. Les bords des deux valves sont minces, tranchants, irréguliers, de manière à s’adapter au contour des corps étrangers sur lesquels vit l'animal. L’intérieur des valves est nacré; on y remarque deux petites impressions musculaires, inégales ; l’antérieure occupe pres- que toute la longueur du bord antérieur ; elle est ovale , tandis que la postérieure, plus petite, est circulaire. Une impression pailéale fort courte se détache de l’impression musculaire antérieure, s’avance pa- rallèlement au bord ventral et produit en arrière une petite sinuosité triangulaire , dont l’extrémité supérieure vient aboutir au muscle postérieur.

La charnière est étroite , le crochet de la valve droite est fortement incliné en dessous, et le bord cardinal est fendu dans toute sa hauteur à peu près de la même manière que dans le genre Sphœnia de Turton ; seulement cette échancrure est plus profonde, et les bords en sont plus épaissis et plus larges. Le ligament est contenu dans cette fente et il porte sur sa face interne un petit osselet triangulaire , semblable à un coin , remplissant la fente qu’il a faite. La valve gauche présente au dessous du crochet une impression, comparable à celle de la même valve des Myes, une surface triangulaire, dont le pourtour est circonscrit en une sorte de petit cuilleron , destiné à recevoir le ligament.

Par les observations que nous venons de rapporter, nous possédons quelques moyens de plus, pour juger le genre et déterminer ses rapports. Dans tous les animaux que nous connaissons et dépendants de notre famille de Mésodesmes , les lobes du manteau sont réunis dans presque toute leur circonférence ; chez la plupart d’entre eux , les siphons sont désunis et ordinairement assez courts. Le seul genre Anatine, d’après les faits rapportés par M. Mitre , a des siphons réunis de la même ma- nière quo les Myes et les Lutraires ; par conséquent le petit nombre de caractères connus de l’animal du genre Myocame ne s’oppose pas à son introduction dans la famille des Osléodesmes ; mais il faut ajouter, que d’autres caractères plus importants nous sont inconnus, et qu'il se pour- rait faire, qu’ils fussent d’une telle valeur, qu'ils rendissent nécessairés la c,réalion d'une petite famille pour le seul genre Myocame. Cette fa- mille se trouverait egalement juslifiée par cette singularité si remar- quable d’un mollusque acéphalé dimyaire, adhérent, irrégulier et pourvu de deux siphons. Nous verrons plus lard d’autres genres appartenant à la même classe; mais chez les uns , tels que les Cames, le manteau ne fait plus saillie en dehors de la coquille, il est simplement perforé. Dans un autre genre, celui des Elhéries, on trouve aussi un animal dimyaire dans une coquille adhérente et irrégulière ; mais chez lui les deux lobes

LES OSTÉODESMES. ^49

du manteau sont désunis dans leur circonférence, ce qui lui donne infi- niment de ressemblance avec celui des ünio et des Anodontes.

Si l’on voulait suivre à la rigueur les principes de la classification qui ont guidé Lamarck et d’autres conchyliologistes , on devrait faire du genre Myocame non seulement une famille, mais même un ordre, de ma- nière à rendre symétriques, en quelque sorte, les diverses parties de la classification et introduire dans la longue série des mollusques acéphalés, ayant les lobes du manteau réunis , deux divisions principales ; l’une contenant ceux h siphon; l’autre contenant ceux à perforation, et dans l’un et l’autre de ces ordres, on établirait deux sous-ordres ; l’un pour les coquilles régulières , et l’autre pour les coquilles irrégulières. De cette manière le genre Myocame serait aux mollusques siphonés ce que les Cames sont pour les mollusques à manteau perforé. Mais avant de décider cette question, il est nécessaire de poser bien nettement la limite entre les doux ordres que nous venons de désigner, et il est nécessaire également de connaître plus complètement l'organisation de l’animal du genre dont nous venons de nous occuper.

Pendant longtemps on ne connut qu’un petit nombre d’individus d’une seule espèce appartenant au genre Myocame. Des recherches qui se sont faites dans les mers australes y ont fait découvrir deux autres espèces; c’est à M. Cnming que nous devons la communication de ce fait intéressant. Jusqu’ici on ne connaît aucune trace de ce genre à l’état fossile.

Myocame anomioïde. Myochama anomioides ^ Stutchbury. PL 8 bis. fig. 12, 13.

M. testa roscâ^ 'vcl poUide fiavâ^ tenui frngili ^ costis prorninentiùus radianùbus àichotornis ornatâ^ valvâ 'valdh convexâ; um-

bone extra apicem 'valvœ alterœ prodiicto^ epidermide tenuiindntâ.

Slutchbury. On Iüw ucwgener. Zool. jourii. t. 5. j». 75, pl. suppl. 4^» f. I à 4*

Sowerby, Gen. of sbells. n* 3a. f. i à 4.

Id. Coiich. man, p. 196. f. 7?. 74*

Reeve, Coueb. syst. t. i. p. 57. pl. Sy,

Callow. Coneb. nomencLp. la.

Tout ce que nous avons dit jusqu’ici du genre est emprunté à cette seule espèce connue. Nous n’avons donc presque rien à ajouter pour qu’elle soit caractérisée. La valve gauche très concave est ornée de côtes

25o

SEPTIÈME FAMILLE.

longitudinales et rayonnantes, qui se bifurquent à une petite distance du crochet. Ces côtes peu régulières sont rayonnantes; comme la coquille est fort, mince, elles so répètent à l’intérieur principalement vers le bord, et les interstices des côtes sont occupés par une ligne d*un rose plus intense. T a surface est revêtue d'un épiderme mince et trans- parent . probablement caduc; dans les figures publiées nous n'en aper- cevons aucune trace. La valve droite paraît beaucoup plus lisse que la valve gauche ; c’est à peine si l’on distingue quelques traces des côtes très prononcées , qui sont sur la valvè gauche. D’après la figure de M. Stutchbury, le plus grand individu de Myochama a 20 millimètres de long et 25 de large,

GENRE VINGT-SIXIÈME.

CAR1>ILIE. Cardilia^ (Deshayes.)

Pl. 8 bis, fig. 1 6 à ig.

I

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille ovale oblongue, longitudinale, gonflée, cordiforme, à crochets saillants , inclinés obliquement en avant. Charnière étroite, portant dans le milieu un cuilleron profond, très saillant, dans lequel s'attache un ligament intérieur. Deux dents cardi- nales saillantes , courbées , séparées par une fente profonde sur la valve gauche et attachées au bord antérieur du cuilleron ; une seule dent étroite, courbée , sur la valve droite, destinée à se placer dans la fente qui sépare les dents de la valve opposée. Impression musculaire antérieure, ovale , obronde , aplatie, peu apparente; l’impression postérieure sur une lame saillante, horizontale, fixée sur la paroi; impression palléale simple. Test mince , fragile , blanc , sillonné sur le côté postérieur.

SYNONYMIE GENERIQUE. /socartZm (semisulcata), Lamarck. Cardilîa^ Deshayes, Gray, G. B. Sowerby. Hemycy- closiera, Bronn.

LES OSTEODESMES.

35i

OBSERVATIONS. Nous avoüs observé autrefois ^ dans la collection de M. Michelin, une coquille fossile des environs de Senlis ; elle nous offrit des caractères si particuliers , que nous voulûmes constituer pour elle un genre distinct, que nous inscrivîmes , dans la collection de cet amateur distingué, sous le nom d' Uemicycîodonta. Lorsque nous eûmes connaissance du genre Periplome de M. Schumacher , nous pensâmes que la coquille fossile dont nous parlons devait en faire partie ; mais , à la même époque, M. de Hann nous ayant communiqué le dessin d’une valve d’une coquille vivante, ayant tous les caractères de l’espèce fossile des environs de Paris , nous reconnûmes enfin la nécessité do notre nou- veau genre. M. Michelin se chargea de le faire connaître dans une feuille détachée, représentant quelques objets précieu.v de sa collection. Lorsque, en 1 835 , nous fîmes des additions à la Conchyliologie de Lamarck , noos retrouvâmes , sous le nom d'isocardia semisulcata , la coquille dont M. de Hann nous avait communiqué une figure. Et c’est alors qu’aban- donnant notre premier nom générique , nous proposâmes celui de Car~ düia. II nous était devenu facile alors de le caractériser d’une manière plus complète ; etbientôtaprès.grâceauxcommunicationsd’un voyageur fort instruit , M. Martin, à celles de M. Barthélemy , le savant conser- vateur du musée de Marseille , et enfin à celles de M. Guming, dont le nom est toujours prononcé avec reconnaissance par tous les amateurs de conchyliologie , nous avons eu dans les mains des matériau:! suffisants pour mieux connaître encore le genre , et en confirmer les caractères en y ajoutant plusieurs espèces que nous avons décrites et figurées dans le Magasin de zoologie,

M. Michelotti, qui s’est occupé avec un soin scrupuleux de l’étude des fossiles du Piémont, et qui a publié à leur sujet quelques bons travaux, nous a communiqué une coquille fossile de l’Aslesan , à la- quelle nous avons reconnu tous les caractères de notre nouveau genre. Nous y comptons actuellement 3 espèces vivantes et 2 espèces fossiles.

Les Cardilies sont de petites coquilles minces , blanches, longitudi- nalement oblongues . par elles avoisinent quelques coquilles de la famille des Cardiacés ; elles sont bombées , cordiformes , et , par cette forme extérieure, elles se rapprochent soit des Bucardes, soit des Iso- cardes; cette forme seule justifie l’opinion de Lamarck. Si une espèce est lisse , les autres présentent des sillons réguliers et élégamment crénelés sur le côté postérieur. Les crochets sont grands et proémi- nents ; ils sont inclinés en avant, contournés en spirale à la manière de ceux des Isocardes ; les bords sont simples dans l’espèce lisse ; ils sont pourvus de crénelures dans toute la partie de leur circonférence

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SEPTIÈME FAMILLE.

viennent se terminer les côtes rayonnantes de l’extérieur. Jusqu’ici , n'ayant vu que des valves délacliées et jamais un seul individu entier, il nous a été impossible déjuger, si les valves sont égales comme dans les Bucardes , ou si elles sont inégales ainsi que dans les Anatines et les autres genres de la môme famille.

l.a surface intérieure est lisse , très concave; on y aperçoit difficile- ment l’impression musculaire antérieure , commençant au dessous de la charnière et s’allongeant le long du bord antérieur. Cette impression est ovale, étroite , plus large à son extrémité inférieure qu’à la supérieure. Une impression palléale , à peine marqftée , so détache de l’extrémité inférieure du muscle , se place aune faible distance du bord , en suit la circonférence, et vient aboutir à une impression musculaire postérieure dont la forme et la disposition sont tout à fait particulières au genre qui nous occupe. Nous verrons plus tard , dans les Cucullées , l'impression musculaire postérieure s’appliquant en partie sur une lame saillante dans l’intérieur des valves. Mais, dans les CardiÜes , cette impression est en totalité sur une lame horizontale , mince , triangulaire , qui . parlant du sommet intérieur des crochets , vient se terminer à peu près au tiers supérieur du bord postérieur delà coquille. On remarque sur cette lame des stries d’accroissement, semblables à celles que l’on rencontre dans les autres impressions musculaires. D’ailleurs, on chercherait vainement au dessus de cette lame les traces de l’impression musculaire; la ligne étroite de l’impression palléale se continue sans interruption jusqu’à la lamelle en question. Il est donc certain que c’est sur elle que s’attache le muscle postérieur. Par sa présence et par sa position , cette lame donne à ce muscle beaucoup plus de force, sans en augmentër le volume ; car ses fibres , plus courtes , sont d’une égale longueur ; elles s’insèrent sur un plan perpendiculaire à leur direction , au lieu de le faire sur le plan très oblique que présenterait sans cela la surface postérieure do la coquille, sur laquelle le muscle s’attache ordinairement.

La charnière est extrêmement singulière ; elle ne ressemble en rien à celles des autres genres connus ; il semblerait que toutes les parties d’une charnière pliis,étendue ont été concentrées et réunies sur un seul point ; car les dents cardinales, au lieu de sortir du bord cardinal lui- même , sont insérées sur le bord antérieur du cuilleron. Cette charnière se compose principalement d’un cuilleron interne, saillant, à la manière de celui des Anatines ou des Lutraires. La surface se divise en deux por- tions bien distinctes, par une petite crête oblique, La portion posté- rieure reçoit un ligament interne, tandis que l’antérieure donne insertion à une ou deux dents cardinales, saillantes, courbées en crochet, et dont

LES OSTÉODESMES.

‘lO'A

Tuiieest quelquefois bifide. Sur la valve gauche, les deux dents cardi- nales sont séparées par une fente étroite et profonde, dans laquelle se place une dent médiocre de la valve opposée. La structure insolite de cette charnière se refuse à une description bien complète , d’autant plus que chaque espèce offre quelques modifications. Il est à présumer que cette charnière ne portait en elle aucune pièco accessoire, comparable à celle des Analincs , des Lyonsies ou des Thracies. Celte absence des pièces détachées de la charnière devrait faire ranger le genre Cardilie de préférence dans la famille des Mactracées. Cependant , par la struc- ture du test , par son peu d’épaisseur , nous préférons mettre les Car- dilies à côté des Anatines , en avouant toutefois, que ce genre n’est pas plus à sa place dans une famille que dans l’autre.

En effet , si l'on examine les caractères que nous avons inscrits en tête de la famille des Ostéodesmes , si l’on examine aussi ceux de la fa- mille suivante , des Mactracées , on s’apercevra que notre nouveau genre se soustrait à l’applicalion rigoureuse des caractères distinctifs de ces familles. Dans cette circonstance , il eût été peut-être préférable de créer une famille à part, pour placer un genre si différent de tous ceux que nous]connaissons : mais il nous a semblé; que les documents que pos- sède la science ne sont pas encore assez complets pour permettre une création de ce genre. Lorsque l’animal des Cardilies sera connu , on aura le moyen de porter un jugement sur sa valeur et sur la place qu'’il doit occuper dans la série.

Tous les animaux des deux familles dont nous venons de parler sont terminés en arrière par doux siphons tantôt réunis, tantôt disjoints dans toute leur longueur. L’existence de ces organes est constatée par la pré- sence , sur l'intérieur de la coquille , d’une inflexion plus ou moins pro- fonde dans fimpression du manteau. Dans les Cardilies, l’impression pal léale reste simple; elle est simple aussi dans les Bucardes, et cepen- dant , chez ces animaux les deux siphons existent encore, mais, il faut le dire , excessivement raccourcis. Si , maintenant , nous portons notre comparaison sur les genres d’un autre groupe, nous verrons que les Ery- cines , par exemple , qui ont aussi l’impression palléale simple, ont ce- pendant le manteau perforé , et ces perforations ont môme la propriété de s’allonger un peu au dehors, sous la forme de siphons. Dans les Lu- cines , l’impression palléale simple ne laisse pas deviner l’existence dans l'animal vivant d'un seul siphon, prolongeant l’ouverture anale du man- teau. Ainsi , il se pourrait que notre genre Cardilie , compris aujour- d’hui par nous dans la famille des Ostéodesmes, en sortît plus lard, pour rentrer dans la famille des Erycines, lorsque l’animal sera connu.

SEPTIÈME FAMILLE.

‘j54

La lame saillante , destinée à recevoir le muscle postérieur , peut bien servir de caractère générique, mais ne peut être d'aucune utilité pour déterminer les rapports du genre Cardilie avec ceux qui sont déjà connus. Celte disposition de l’impression musculaire peut se présenter dans dos groupes extrêmement différents. Nous avons cité l’exemple des Cucullés , et plus lard nous verrons dans les coquilles tubuleuses des Rudisles, les deux impressions musculaires , également proémi- nentes sur la valve supérieure. On comprend , en effet , que ce moyen de donner plus de force aux organes qui meuvent les valves d’une co- quille, peut se reproduire dans des groupes fort différents, sans que, cependant, l’organisation ait subi des changements importants. Nous pourrions citer encore les genres Came et Dicérate , chez lesquels les impressions musculaires, et surtout la postérieure, s’épaississent à un point considérable et tendent à former entre elles des plans parallèles dans des coquilles très concaves.

Les Cardilies sont des petites coquilles qui, jusqu'à présent, ne se sont trouvées que dans les mers chaudes de Sumatra et des Philippines. Les voyageurs, qui parcourront cos mers, rendront un véritable service à la science , en recherchant l’animal d'un genre aussi curieux et en donnant sur sa structure les détails qui nous manquent.

Nous, connaissons actuellement cinq espèces de Cardilies : trois vi- vantes et deux fossiles. De ces dernières, l’une appartient aux terrains tertiaires supérieurs de l'Italie, l'autre est du bassin de Paris. Toutes sont très rares.

Cardilie demi -sillonnée. Cardilia aemisulcata. Desh.

PI. 8 bis. fig. 16 à 19.

Testa ovato-oblongâ , cordiformi , alhâ , transUicidâ ; umbonibas magnis cordiformibtis oppositis ; latere antico hevigato , postico regiilarlter suîcato; margirte posticè dentato ; vnlvâ oblique striata.

Isocardia semisulcata. Lam. Anim. saus vert. t. 6. ,p. 3a. n” 3.

Cardilia semisulcata. Desh. dans Lam. Anim. saus vert, a* éd. t. 6, p. 45o.

Id. Desbayes. Magas. de zool. 1844. pl. 99.

Habite le détroit de Malacca.

Cette petite espèce se distingue facilement ; elle est ovale-oblongue , plus longue que large; ses crochets, grands et cordiformes, sont tour-

HUITIÈME FAMILLE. LES MACTRAGÉES. a55

nés en spirale, mais ils sont beaucoup moins écartés que dans les Iso- cardes ; ils sont opposés , très rapprochés et un peu inclinés sur le côté antérieur. Tout le côté postérieur est occupé par des sillons longitudinaux, peu profonds, étroits, dont les trois premiers sont les plus profonds et les plus larges; ceux qui suivent vont graduellement en s’amoindrissant. Tout le côté antérieur reste lisse; on y remarque seulement de très fines stries transverses d’accroissement. La lunule n’est point circon- scrite; mais il y a un large corselet ovale-lancéolé , limité par le pre- mier sillon postérieur, et sur lequel on remarque des plis obliques, que l’on peut comparer à ceux des Mactres, Mactra stultorim, par exemple. Le bord antérieur est mince et simple , une partie du bord inférieur et postérieur montre de petites dentelures, qui diminuent graduellement et qui correspondent aux sillons postérieurs.

Les grands individus de cette coquille ont 20 millimètres de longueur, 1 4 de largeur et 1 8 d'épaisseur.

HUITIÈME FAMILLE.

lies Hact racées. Lâmarck.

cARAcriREs. Animaux ovalaires ou subtrigones, trans- verses, les lobes du manteau réunis au moins dans les deux tiers de leur longueur, et laissant en avant une ouverture médiane pour le passage d’un pied comprimé et triangulaire 5 siphons plus ou moins allongés et épais , réunis dans toute leur lon- gueur, revêtus d’une couche épidermique, et ayant leur ou- verture terminale garnie de tentacules tantôt simples, tantôt branchus. Palpes labiales allongées, triangulaires.

Coquilles ovales,. trans verses ou subtrigones, presque toutes bâillantes de chaque côté. Charnière offrant au milieu une fos- sette ou un cuilleron pour un ligament intérieur ; en avant deux dents divergentes , et une dent latérale en avant et en arrière. Impression palléale sinueuse en arrière.

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HUITIÈME FAMILLE.

GENRES. Lxtfraire, Mactre , Gnafhodon^ Aiiaiinelle.

La famille des Mactracées a été instituée depuis longtemps par La- marck dans la classification, proposée en 1 809 dans la P}ii{o$ophie zoo- logique. Cinq genres réunis dans celte famille semblent avoir de l’ana- logie, à ne considérer que les caractères des coquilles; cependant un examen plus approfondi aurait pu faire découvrir entre ces genres des différences assez grandes , pour les ranger dans d'autres groupes. Au- jourd’hui les conchyliologues, mieux éclairés sur la valeur des caractères des coquilles, séparent , sans difficulté, les genres queLamarck réunis- sait, et il nous suffira de les citer pour justifier notre opinion. Ces genres sont disposés dans l’ordre suivant : Erycine, Onguline, Crassa- telle, Lutraire, Mactre.

Nous aurons bientôt à décrire l'animal du genre Erycine, et la moindre comparaison démontrera de combien il diffère des Alactres et des Lu- traires. La coquille seule pouvait faire préjuger cette différence, puis- qu'elle n’offre aucune trace d’intloxion à l’impression palléale, inflexion qui existe toujours dans les Lutraires et les Mactres.

Lamarck a mal apprécié les caractères des Ongulines , dans toute la série do ses travaux. II crut voir, à la charnière de cette coquille, deux ligaments; mais il n’y en a qu’un , et ce ligament ressemble en tout à celui d'un groupe assez considérable de Lucines. En effet, les impres- sions des muscles et du manteau ne diffèrent en rien de celles des Lu- cines. Ce qui , depuis longtemps, nous a fait dire qu’il fallait, non seu- lement retirer les Ongulines de la famille des Mactracées , mais même supprimer totalement le genre en le réunissant aux Lucines.

Nous conservons encore du doute à l’égard du genre Crassatelle. L’a- nimal est incomplètement connu , et la coquille offre des caractères différents do ceux des deux genres précédents et de ceux qui suivent. Néanmoins il faudra peut-être l'éloigner beaucoup des Mactres ou des Mésodesmes.

Les deux derniers genres Lutraire et Mactre ont , entre eux, les plus grands rapports. Ils doivent constituer les types généraux de la famille des Mactracées. Il faudra y joindre cependant un genre propre à l’Amé- rique, et que M. Gray a nommé Gnathodon.

En 1813, en publiant l'extrait du cours, Lamarck n'apporta aucun changement à la famille des Mactracées , mais il la modifia en 1 81 8 dans le cinquième volume de son Histoire des animaux sans vertèbres ; il l’augmenta des deux genres Solémye et Amphidesme , et distribua les

LKS MACTftACÉES.

sept genres en deux groupes principaux. Dans le premier, le ligament est uniquement intérieur ; dans le second, le ligament est double. Le premier groupe est lui-méme sous-divisé, selon que la coquille est bâil- lante ou complètement fermée. La première section contient les genres Lutraire et Mactre; la seconde, les Crassatolles et les Érycines. Enfin, le second groupe, celui dont les coquilles ont deux ligaments, selon l’opinion de Lamarck, réunit trois genres: Onguline, Solémye, Amphi- desme. Nous connaissons actuellement les Solémyes, qui doivent se rap- procher des Solons; nous avons indiqué les rapports naturels des Ongulines ; il nous reste à dire quelques mots des Amphidesmes. Nous devons prévenir d’abord que ce genre, tel qu’il est dans l'ouvrage de Lamarck est des plus artificiels. Nous y avons déjà trouvé une Lyonsie, des Thracies, et sur les 1 6 espèces que l'on y compte , il a fallu un cer- tain artifice pour en conserver une comme type du genre qui , ainsi mo- diBé, a conservé le nom d'Amphidesme.

Lamarck ayant fondé sa famille des Mactracées sur les caractères empruntés aux coquilles seules, on pouvait , à juste titre , la considérer comme à peu près artificielle. Cuvier, qui a fondé la classification des Mollusques sur d’autres principes, puisés do préférence dans les carac- tères des animaux , suivant en cela l'exemple de Poli , Cuvier, disons- nous, rejeta les familles de Lamarck et construisit de grands groupes, principalement d’après l’ouverture du manteau et les caractères exté- rieurs des siphons. 11 résulte de une distribution très différente des genres dont nous venons de parler. Cuvier ne les admit pas tous ; les seuls que l’on trouve dans la première édition du Règne animal , sont les Mactres et les Lutraires, et encore ces deux genres, malgré leur analogie, appartiennent à- deux familles diiïéreutes. Les Mactres dépen- dent de la famille des Cardia'cées et la terminent à la suite des Venus et des Corbules. Les Lutraires sont considérées comme le premier sous- genre des Myes, et commencent la famille des Enfermés. Les faits que nous allons exposer démontreront que Cuvier, dans l’arrangement des deux genres qui nous occupent, s'est laissé diriger par des caractères d’une faible valeur. Plus tard, notre grand zoologiste ne reconnut pas leur insuffisance, et en 1830, dans la deuxième édition du Règne animal, tout en adoptant quelques uns des genres de la famille des Mactracées de Lamarck, conserva aux Madrés et aux Lutraires les rapports que nous venons de rappeler.

Dans l'espoir do concilier les diverses méthodes publiées jusqu'à lui, Férussac conserva les groupes de Cuvier, il en fit des ordres, dans les- quels il introduisit, on les modifiant , la plupart des familles de Lamarck.

‘)e

17

T. T.

PARTIE.

258

HUITIÈME FAMILLE.

La famille des Mactracées est la septième de l’ordre des Cardiacées; elle contient cinq genres qui, même à l’égard des caractères de coquilles, ont peu do rapports entre eux. Ce sont les Érycines, les Madrés, les Ligules, comprenant une partie des Amphidesmes de Lamarck, les La- vignoDS genre de Cuvier proposé pour la Chama piperata des anciens naturalistes et Onguline, mais avec doute. Le genre Lutraire commence la famille des Myaires qui, elle-mèmo, est la première de l'ordre des Enfermés. Férussac conserve les rapports généraux ; il diffère de Cuvier par des détails d’une moindre importance.

M. de Blainville, dans sa Méthode pom la partie des Alollusques dont nous avons à nous occuper, propose un arrangement peu différent de celui de Cuvier. Les "Mactres, placées entre les Cyprines et lesÉrycines, font partie de l’immense famille des Conchacés, tandis que les Lulraires, sous le nom de Lutricoles. sont entraînées loin de dans la famille des Uyloridcs. Ces deux familles, dans leur ensemble, se rapprochent beaucoup de celles nommées Cardiacés et Enfermés par CuVier. Comme on le voit, le savant auteur du TraHé de malacologie s’est laissé guider par des principes analogues à ceux que Poli et Cuvier ont mis en pra- tique dans leurs ouvrages.

Lorsqii'en 1830, nous publiâmes la suite du Diclionnaire des vers de r Encyclopédie méthodique, nous cherebions à concilier deux faits qui semblent se repousser, et dont l'un eût pu être contesté dan$ sa valeur, si nous avions eu alors, comme aujourd'hui, les moyens d’en -vérifier roxactitnde. D'un côté, nous voyions, delà manière la plus évidente, Velablir une transition insensible entre les Mactres et les Lutraires, et i! nous semblait impossible de déterminer la limite nette et tranchée <los deux genres. D’uii autre côté, nous plions obligé d’admettre, avec Poli. Cuvier, de Blainville. l’analogie qui existe, plus en apparence i[u'en réalité, entre les animaux des Mactres et celui du CytHerea rhione. Nous apercevions cette contradiction choquante d’un animal , ayant des rapports avec un groupe , tandis que sa coquille en a de non moins certains avec un autre groupe. Nous avons été entraîné par à considérer les .Mactres comme un genre transitoire formant un em- branchement latéral entre le type des Venus et celui des Myes; et néan- moins, dans l’ordre linéaire, nous préférions rapproclier les Mactres des Lutraires, et comprendre ces deux genres dans la famille des Mac- tracées, Aujourd'hui s’effacent les difficultés que nous éprouvions alors. Nous avons ou vivants le.s animaux des Mactres et des Lutraires; nous avons fait l’anatomie des uns et des autres, et nous avons reconnu entre eux beaucoup plus d’analogie qu'on ne l’avait cru autrefois; nous nous

LKS MACTRACEES.

■.i5ç)

sommes ainsi aperçu que Poli et ceux des zoologistes qui se sont appuyés sur son opinion, se sont laissé surprendre par des rapports plus appa- rents que réels. Ainsi les Lutraires et les Mactres constituent , en réa- lité, un groupe naturel, auquel il faut joindre le genre Gnathodon, comme nous venons de le dire.

M. Gray, dans un article très court, mais qui témoigne de l’attention toute spéciale que ce savant zoologiste a mise à l’examen des coquilles de la famille des Mactracées, a proposé de diviser les Mactres en plu- sieurs genres , et, ainsi que nous, d'en rapprocher les Lutraires et les Gnathodons pour en constituer la famille des Mactracées. M. Gray voit comme nous une transition insensible entre les Mactres et les Lutraires, mais comme il ne se place pas au même point de vue que nous , pour déterminer la valeur des genres, il en propose plusieurs, qui marquent les degrés qu’il aperçoit entre les deux types principaux. Pour nous, les mêmes faits nous conduiraient plutôt a" proposer la réunion des Lu- traires et des Mactres.

Nous n’avons pas à nous occuper des travaux de ceux des naturalistes qui ont admis , sans examen l’opinion de Lamarck ou celle de Cuvier, en y introduisant des modifications quelquefois prématurées, en ce sens qu’ils ont rapproché des Mactres des genres incomplètement connus. (I fallait, én elfet, pour fonder définitivement la famille des Mactracées, que l’organisation des animaux des genres ce fût plus approfondie, qui permet- trait de reconnaître enfin les caractères communs qui les réunissent.

GENRE VINGT -SEPTIÈME.

ZiVTRAZRX:. Lutrar'm. (Lamk.)

Pl. 9. fig, 9. 10. Pl. 10 fig. 7. S.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale, oblong, ayant les lobes du manteau fendus en avant dans le tiers ouïe quart de leur longueur pour le passage d’un pied petit, allongé , triangu- laire, très comprimé. Deux siphons très gros, plus longs que la coquille , réunis et revêtus d une enveloppe épidermique ; lès ouvertures de ces siphons un peu divergentes et garnies de

HUITIÈME FAMILLE.

tentacules arborescents. Palpes labiales, longues, étroites-, pointues et flottantes. Branchies inégales , non prolongées dans le siphon.

Coquille équivalve, inoquilatérale, bâillante de chaque côté ; charnière ayant sur chaque valve un cuilleron subtrigone , fort large, et en avant une dent en forme de V. Dents latérales nulles ou petites et rudimentaires. Ligament interne fixé dans les cuillerons.

SYNONYMIE GENERIQUE. Chanta louga ^ Chama glycimeris^ Rondelet, Gesner, Aldrovande, Jonston. Chama, Da Costa. Mya [imrs]^ Linné, Gronovius, Chemnitz , -Schrœter, Gmelin , Spengler, Schweigger. Macira , Linné , Cheninitz , Schrœter, Gmelin , Donovan, Montagu, Dilhvyn , de Gerville, Wood. Mmculus, Pennant. Lxitricola^ Blainville.

OBSERVATIONS. Lgs aiiîmaux du genre Lutraire sont répandus en abondance dans les mers de l’Europe et dans la Méditerranée ; ils occu- pent de préférence les régions peu profondes qui avoisinent l’embouchure des eaux douces. Aussi ces animaux n’ont point échappé à l’observation des anciens naturalistes. Rondelet mentionne les deux espèces de nos mers sous les noms de Chama g}\jcimeris et de Chama lomja. Les fi- gures qu’il en donne, quoique grossières, sont cependant reconnais- sables ; elles ont été snceessivement recopiées par Gesner, Aldrovande, Jonston , etc. D’autres auteurs ont aussi donné des figures de ces es- pèces, en les confondant avec des coquilles de genres très différents. Dans le long espace de plus de deux siècles qui sépare Rondelet de Linné, on trouve quelques rares tentatives de classification pour les coquilles , mais elles sont peu fécondes en résultats. Lister est certainement l’ob- servateur qui a le mieux saisi les caractères d’un certain nombre de ^ genres , et il en est quelques uns qui n'ont subir aucun changement. Pour les Lutraires, Lister les laisse parmi les Cames, genre indéterminé par sou étendue et la diversité des objets qu'il renferme.

Une des coquilles de Rondelet se reconnaît facilement parmi les es- pèces du genre Mya, dans la 10* édition du Syüema nalarœ; elle se trouve à la même place dans la Fauna snecioa et le Musexm Vlricœ. De nouvelles études firent apercevoir a Linné des caractères qui le déter-

I.KS MACniACKl-S.

2G1

minèrent à faire rentrer dans les Mactres la coquille 011 question, et en cela il (it preuve de celte sagacité qui est le cachot des travaux du grand naturaliste. Linné a oublié la seconde espèce Rondelet, Chemnitz répara cette omission. Mais , ne reconnaissant pas sans doute l’identité des caractères des deux coquilles , il mit celle de Linné parmi les Mactres, à l’exemple du maître; l'autre fut placée parmi les Myes , sous le nom de Mya longa. Presque tous les auteurs qui suivirent, Schroeter, Gmelin et le judicieux Spengler, tombèrent dans la même faute. Bruguière n'a connu qu’une seule espèce, il la rangea parmi les Mactres, à l’exemple do ses prédécesseurs.

En étudiant plus profondément les coquilles qu'on ne l’avait fait avant lui , Lamarck découvrit parmi celles qui étaient le mieux connues , un assez grand nombre de genres nouveaux, qu’il nomma et dont il exposa les caractères d'une'manièce nette et précise, dès 1799, dans le premier travail qu'il publicV sur la matière. Parmi ces genres, on remarque celui des Lutraires dont le type est le Mactra liitraria de Linné. Depuis ce moment, Lamarck a maintenu le genre Lutraria dans tous ses travaux sur la conchyliologie. Nous avons vu précédemment comment il a conçu ses rapports avec les genres les plus avoisinants. En Franco, le nouveau genre était généralement adopté ; en Angleterre, on rapprocha les deux espèces l’une de l’autre, mais on les conserva dans le genre Mactre. Cet arrangement persista longtemps; on le retrouve jusqu’en 1828, dans l'Index testaceologicus ùoWood. Ce^cndàïïi il est quelques exceptions qu’il est juste de signaler. En 1815 , Brookes, dans son Iniroditclion à l'élude de la conchyliologie , admet les Lutraires parmi les genres dé- membrés des Mactres de Linné. Turton, en 1 822 , adopta les genres de Lamarck , dans son histoire des Coqiiillea bivalves d'Angleterre, et il rapprocha les Lutraires des Mactres. Sowerby, dans son Généra of Shells, suivit l’exemple de Turton; mais ce naturaliste , recevant trop légèrement l'opinion de quelques géologues, consacra une fâcheuse con- fusion qui régna longtemps, en admettant dans son Minerai conchology, comme. Lutraires fossiles, dos coquilles qui n'ont aucun des caractères de ce genre.

A l'exception du petit nombre d’auteurs que nous venons de citer, tous les conchyliologues ont admis le genre Lutraire , et presque tous ont compris que, dans la méthode nouvelle, il devait prendre rang à côté des Mactres, Cette opinion, proposée par Lamarck, a rencontré quel- ques contradicteurs; Cuvier, Férussâc , M. de Blainville, ont trouvé aux Mactres plus de rapports avec les Venus , et aux Lutraires plus d’ana- logie avec les Myes, ce qui les a conduits à mettre ces deux genres dans

HUITIEME FAMILLE.

a (>12

deux familles distinctes. Aujourd’hui l'opinion défendue par ces zoolo- gistes est abandonnée. Les conchyliologues ont compris que les Mactres et les Lulraires ne doivent pas être séparées, et que l'opinion de La- inarck doit prévaloir .

Jusqu’au moment Lamarck a publié le volume de VHistoire dea animaux sans vertèbres , on ignorait la composition exacte du genre Lutrairo; on y trouve onze espèces vivantes et une fossile. Nous allons rapidement les examiner, pour nous assurer si toutes dépendent en effet du genre elles sont groupées. Cet examen nous sera utile pour porter un jugement plus éclairé sur la manière dont les auteurs ont compris le genre qui nous occupe.

Les trois premières espèces de Lamarck sont incontestablement de véritables Lutraires. Elles constituent un premier groupe, caractérisé par la forme oblongue et transversale de la coquille. Dans le second groupe, réunissant des coquilles orbiculaires ou subtrigones , se rencontrent plusieurs espèces étrangères aux Lulraires. Ainsi les Lutraria compressa et pîperata doivent constituer un genre très distinct désigné par Cuvier sous le nom de Lavignon, mais antérieurement indiqué par Da Costa sons le nom de Trigonella , que nous avons adopté. Les animaux de ces coquilles diffèrent extrêmement de celui des Lutraires, comme nous le verrons par la suite. La Lutraire lelHnoïde n’est ni une Lutraire ni une Trigonella, c’est une véritable Telline à corselet enfoncé. Celte coquille, figurée dans le Recueil de M. Benjamin Delessert, ne peut plus être le sujet du moindre doute. Nous n'avons aucun renseignement sur le Lutraria candida; les quatre dernières espèces sont de véritables Lu- Irairps, mais de celles qui sont minces, et p-apyracées. Ce qui précède prouve évidemment que le genre Lutraire a besoin d’être réformé pour devenir naturel , et celte réforme que nous indiquons pour l’ouvrage de Lamarck devra se réaliser aussi dans ceux des conchyliologues qui, suivant l’exemple de ce naturaliste, ont admis dans les Lulraires le Chamâ piperata. A ce sujet, nous pouvons faire remarquer un fait cu- rieux . Dans le catalogue des Mollusques de la Corse, par M. Payraudeau, plusieurs Lulraires sont inscrites et toutes passent dans le genre Trigonella. Par le genre Lutraire devra disparaître de l'ouvrage en question.

Nous verrons bientôt que la réforme du genre Lutraire a été jugée nécessaire depuis longtemps. Déjà en 1817, Cuvier, se fondant sur la longueur et la disjonction des siphons dans le Chaîna piperata, avait proposé pour lui un sous-genre des Mactres , sous le nom de Lavignon. A la même époque, Schumacher, dans son Essai d'une classification des

LESM ACTKACEES.

a6.‘i

coquilles , publié aussi en 1 81 7, proposait pour la même espèce un genr® Scro&îcu/ana , et enfin, en 1822, M. Turton, dans son Histoire des co- quilles bivalves de la Grande-Bretagne ^ instituait un genre Listent pour la môme coquille. Tous ces auteurs avaient oublié que Ha Costa, en 1778, avait proposé un genre Trigonella, dans lequel il rapportait à la fois quelques Madrés et le Chama piperata , que l’on peut ainsi considérer comme type du genre Trigonelle. Malgré les indications si précises que nous venons de rappeler et qui étaient suflisanles pour faire adopter ie genre sous un des quatre noms qu’il a reçus, un assez grand nombre de conchyliologues conservèrent le genre Lutraire, tel que Lamarck l'avait fait, poussés, soit par l’habitude , soit par le respect qu'inspirent géné- ralement les opinions d’un aussi grand naturaliste. Celte espèce de neutralité de la part d’un certain nombre de bons observateurs provient sans doutede l’impossibilité, l’on se trouvait, de constater la dilférenCe qui existe entre les animaux des Lutraires et des Lavignons ou Trigo- nelles. En effet, les animaux de ces deux genres, quoique très abondants dans tout l’Océan d'Europe et la Méditerranée, n’ont jamais été décrits et figurés. M. Quoy, le premier, en I 839, dans le Magasin de zoologie, a publié une description sommaire de l'animal du Lavignon de Cuvier, en l'accompagnant de figures, au moyen desquelles on peut reconnaître une partie des caractères de ce genre; mais, au sujet de l animal des véri- tables Lutraires, nous ne trouvons nulle part le moindre renseignement , car nous ne pouvons accepter les caractères donnés par M. de Blainville à son genre Lulricole comme suffisants. Ces caractères, par leur étendue, pourraient s’appliquer, et ils s’appliquent en effet, à plusieurs genres, ce qui témoigne de leur insuffisance. Pour nous, un genre ne peut être bon, qu'autant que toutes les espèces qu’il contient sont jointes par des carac- tères identiques , empruntés aux formes extérieures, et il est impossible qu’un genre soit naturel, lorsqu’il rassemble des espèces a siphons réunis et à siphons disjoints. II peut arriver, comme nous venons d’en avoir un exemple dans la famille des Ostéodesmes, que des genres voisins diffèrent par la jonction ou la disjonction des siphons ; mais il nous paraît certain jusqu’ici , que toutes les espèces d’un genre bien fait ont sans exception les mêmes caractères extérieurs.

En adoptant la réforme du genre Lutraire , telle que nous l’avons proposée, il n’y reste plus que des coquilles Iransverses, ovales, oblon- gues, inéquilatérales, équivalves, bâillantes à leurs extrémités, presque toujours lisses, quelques unes présentant des stries ou des côtes trans- verses. Si quelques espèces sont épaisses et solides , il y en a d’autres qui sont minces et papyracées. Dans le plus grand nombre, le côté an-

nUiTlEMK KAMILLK.

térieur est le plus court; il y en a quelques unes chez lesquelles c’est le côté postérieur. Ces diverses formes, que nous venons de mentionner rapidement, se réunissent en un genre naturel au moyen des caractères que présentent la charnière et les impressions intérieures de la coquille. Toutes les espècesdeLutrairesconnues jusqu ici ont la surface externe recouverte d’un épiderme gris-jaunâtre ou blanchâtre. Quelquefois il est lisse et couvre toute la surface; quelquefois il est rugueux ou écailleux. Dans les espèces minces et blanches l’épiderme est moins apparent, il perd sa couleur et une partie de son épaisseur. Dans toutes les espèces cependant il déborde les valves, pour recouvrir une portion assez notable des bords du manteau. En arrière des crochets et le long du bord dorsal, l’épiderme passe d’une valve à l’autre et cache le manteau qui sans cela paraîtrait dans le bâillement naturel de la coquille. Il en est de même du côté antérieur. Les crochets sont peu saillants , pointus et presque opposés ; ils sont peu inclinés vers le côté antérieur. Sur ce côté, ne se dessine point de lunule entièrement circonscrite, ainsi que dans beaucoup d’autres genres. Du côté postérieur, le corselet n’est pas non plus li- mité; ces parties se confondent avec le reste de la surface par des contours arrondis. Cependant, immédiatement en arrière des crochets , on remarque, le long du bord et à l’extérieur, un petit sillon , séparant une petite nymphe , sur laquelle s’attache un ligament externe rudi- mentaire.

Dans les Lulraires , les côtés antérieurs et postérieurs sont réguliè- rement courbes, arrondis, d’une égale largeur dans le plus grand nombre des espèces ; quelques unes sont plus rétrécies du côté posté- rieur, quelques autres offrent une forme inverse; mais ces. exceptions sont au nombre de trois ou quatre seulement. Le bord ventral est pres- que parallèle au bord dorsal, et comme les valves sont fort bâillantes , elles ne se touchent que par la charnière et dans la longueur du bord ventral. I! y a môme des espèces, Lulraria ohîonga {soîenoides de Lamk), par exemple, dont les valves ne se touchent que par deux points de leur circonférence.

Au dessous des crochets , le bord cardinal s’élargit et présente un cuilleron oblique , dirigé d’avant en arrière , quelquefois transverse, et dans lequel vient se fixer solidement un puissant ligament intérieur. Le bord interne de ce cuilleron fait saillie dans rintériour des valves et rend ainsi très large le milieu du bord cardinal. En avant de ce cuille- ron, et au moment il prend naissance, s’élève perpendiculairement sur le bord une dent cardinale comprimée et offrant la forme d’un V. Nous retrouvons une dent semblable chez les Mactres ; elle y est plus

LES MACTUACEES.

ouverte. Celte dent cardinale so remarque sur l’une et l’autre valve ; seulement celle de la valve droite , dentinéo à recevoir celle de la valve gauche, forme un angle plus ouvert dans ses deux parties. Dans la LtUraria oblonga, par exemple, on ne trouve à la charnière aucune trace des dents latérales, tandis que dans l'espèce suivante, Lutraria elUptica, on aperçoit do chaque côté de petits plis assez saillants, qui sont les premiers rudiments dos dents latérales desMactres. Ces rudiments de- viennent plus évidents dans \QLtttraria entîs de MM. Quoy et Gaimard , quoique, pour l’extérieur, celte espèce paraisse peu différente de VEltip- iica. Mais si nous passons au lAitrarui riigosa , nous voyons se déve- lopper les dents latérales au moins autant que dans certaines Mactres ; aussi nous nous demandons pourquoi cette coquille a été maintenue dans les Lutraires. Il est à croire que les conchyliologues se sont laissé guider à son sujet par la forme extérieure , qui , en effet , rappelle celle des autres Lutraires. En étudiant avec soin la charnière des seize Lutraires vivantes qui nous sont connues , on retrouve à presque tous les degrés les dents latérales. On les voit pour ainsi dire sortir du bord cardinal , s’accroître insensiblement et parvenir à un certain degré de développe- ment presque égal à celui des Mactres. Ce phénomène se confirme lors- qu’on ajoute les espèces fossiles aux vivantes, pour augmenter la série des modifications.

Les impressions musculaires sont grandes mais écartées. L’antérieure, généralement ovalaire, plus ou moins étroite, selon les espèces, descend ordinairement vers la région ventrale. Elle occupe uno partie notable de la hauteur du bord antérieur. L’impression musculaire postérieure est obronde'; elle est située non loin du bord supérieur , et à peu près à égale distance entre la charnière et le bord postérieur ; elle se place parallèlement au bord ventral, en laissant en(re elle et le bord des valves un espace fort large pour le muscle circulaire du manteau. Par- venue vers l’extrémité postérieure des valves , l’impression palléalc rentre sur ello-mCme et produit un sinus profond , qui s'avance jusqu’à la hauteur de la charnière dans le plus grand nombre des espèces. Par- venue au sommet de cette courbure, l'impression palléale se recourbe en arrière et se porte obliquement vers l'improssion musculaire posté- rieure, au milieu de la circonférence de laquelle elle aboutit. L'axe de la sinuosité palléale n’est point parallèle au grand axe de la coquille ; il forme avec lui un angio aigu, ce qui semble indiquer chez ces animaux une position oblique dans les siphons. Si ces organes suivent la direction qu’indiquent leurs muscles rétractcurs, ils doivent se diriger d’avant en arrière et de bas çn haut. On observe , dans le voisinage des grandes

HUrntME FAMILLE.

impressioQs muscuiaires , deux impressions beaucoup plus petites, pro- duites par les muscles rélracteurs du pied ; la première occupe l’angle inlerno et supérieur de l'impression du muscle antérieur ; souvent elle se cache en partie sous l'extrémité antérieure du bord cardinal. La se- conde se confond davantage avec l'impression musculaire postérieure; néanmoins , on remarque à celle-ci un angle peu prononcé au point de son pourtour, qui correspond à l’extrémité postérieure du bord cardinal. Cet angle est occupé par le muscle rétracteur postérieur du pied.

Si les caractères que nous venons d’exposer avaient été suffisamment étudiés , on n’aurait pas vu s'introduire dans le genre Lutraire un assez grand nombre de coquilles fossiles des terrains secondaires et qui n’ont pas môme la forme générale des Lulraires vivantes. On a vu , eu effet , les paléontologistes inscrire dans le genre qui nous occupe un grand nombre d’espèces, dont le moule seul était connu. Ces personnes ne se rendirent par compte des caractères que toute Lutraire doit empreindre sur son muscle intérieur. C’est ainsi , par exemple , que les cuillerons épais et saillants laissent dans le moule une impression profonde, que l'on ne retrouve jamais sur les fossiles des terrains secondaires, dont nous venons de parler. Lorsqu’cnfin on s'est aperçu que les fossiles dont il s’agit dépendent du genre Pholadomye, il en est résulté ce fait qui n’est pas sans importance : c'est qu’aucune des véritables Lulraires ne dépasse les terrains tertiaires pour s’enfoncer dans les secondaires. Par conséquent , il est aujourd’hui certaüi, que toutes les espèces iiiscriles dans les catalogues de fossiles , et désignées comme dépendantes des terrains secondaires , ne sont pas des Lulraires et doivent être distri- buées dans d’autres genres.

Le genre Lutraire, tel que nous le limitons acluellemeut, est beau- coup moins nombreux en espèces vivantes et ffissiles qu’on ne le sup- posait d’après les catalogues ou les divers ouvrages des paléontologistes. Mademoiselle Catlow , dansle Conchologist twmenclator , inscrit dix-huit espèces vivantes ; mais ce nombre doit subir une diminution assez no- table, car nous y trouvons des Lavignons, une véritable Teiline {Luira- rki lelUnoides Lamk.) et plusieurs doubles emplois. M. Uanley compte quinze espèces seulement dans son Index iestaceologicus, et parmi elles se rencontrent des Lavignons et môme le genre Lepton de M. Turton , lequel correspond au genre Erycina de Lamarck.

Après avoir examiné toutes les espèces vivantes citées par les auteurs, après en avoir vérifié la nomenclature , nous voyons que six espèces doivent être retranchées des ouvrages de M. Hanley et de Mademoiselle

LES MAGTRACEES.

367

Catlow. Aux douze espèces qui restent, il faut en ajouter deux, décrites par M. Jouas , et plus tard nous ferons connaître quatre espèces nou- velles de notre collection.

Les dix-huit espèces vivantes de Lulraires se distribuent dans toutes les mers; il y en a trois dans les mers d’Europe , quelques unes ha- bitent les mers de l’Amérique septentrionale, nous^cn avons une du Brésil , il y en a deux dans les mers australes , et nous en connaissons une du Cap de Bonne-Espérance.

Nous pouvons afflrmer que , de toutes les espèces citées sous le nom de Liitraire dans les terrains secondaires, il n’y en a pas une seule qui dépende de ce genre. Sous celle dénomination générique , nous trou- vons des Pholadomyes , quelques Céromyes , plusieurs Thracies , etc. Les véritajDles Lulraires fossiles ne commencent à se montrer que dans le second étage tertiaire , et elles se continuent dans l’étage tertiaire supérieur , dans lequel on peut citer quelques espèces qui vivent encore actuellement dans les mers d'Europe.

Nous connaissons sept espèces fossiles, nombre dans lequel ne sont pas comprises les trois espèces des terrains subapennins ; ces sept espèces appartiennent exclusivement au second étage tertiaire ; quatre sont du bassin de l’Adour ; les trois autres sont des faluns de la Touraine.

Parmi ces espèces , nous signalerons :

1 . Lutraria solcnoides Lamk., vivante dans les mers d'Europe.

Fossile en Sicile.

2. Lutraria rugosa Lamk.

Vivante dans la Méditerranée.

Fossile dans les terrains subapennins en Sicile , en Italie , en Moréo.

3. Lutraria laiissima Desh.

Très voisine de l’espèce vivante du cap de Bonne -Espérance ; elle est fossile aux environs de Bordeaux,

4. Lutraria crassidens Lamk.

Espèce fossile des faluns de la Touraine; elle est voisine de la variété du Lutraria solenoides , qui vit au Sénégal.

Lutraire solénoïde. Lutraria ohlonrja , Turton.

PI. 9. fig. 9. 10.

Ij. testa oblon^â j trnfisversâ., squùliJè aîbâ ^ epidermide griseo 'vestita^ transversini ru^osâ y inœquUatrrd y utroqne luterc hiantCy postico ionf’iote, supernè concuvu.

HUITIÈME FAMILLE.

Chaîna longn, KonJelel. Hist. des poissons, p. i5,

Id. Gesner, Noniencl. aquat. p. 23r.

Concha longa, Aldrovandc. De teslaceis. p. 453.

Jd, Jonslon. Hist, nat.deexang.pl. 4.

GnnUien, Ind, lcst.,pl. 90. f A. 2.

Rumphiiis amb, pl. 4$. f. N.®

Chama magna Da Costa, Conch. Lril. p. 23o. pl. 17. f. 4.

Mya ohlonga. Gmelin. Syst. nat. éd. t3®. p. 3a2i. n* ro.

?Iactra hians, Donovan. Erit, sliells. t. 4. pl. 140.

Id. AVood. Cliaru. des coq. Invalv. Linti. Trans. t. 6. p. 104, pl, 16. f. 5. 6.

Lutraria solenoides. Lam. Syst. des anim. s. vert. p. 120.

Mactra hians, Monlagu. Testac. brlt. p. loi. 9.

Id, Maton etRaekell. Linu. Tians. t. 8. p. 74, n“ 12.

Lutraria solenoides. de Roissy in Buffou de Sonnini , Moll, t; 6,

p. 354.

MfJctra hians. Dillwyn. Cat. t. 1. p, 146. n* 38.

Latraria solenoides, Lamlv. An. s, vert. l. 5. p. 468. i. Mactrahians. Tnrlon. Conch. dict.p, 85. 14. f. 4r,

Lutraria ohlonga, ïurlou. Conch. bril. p. 64. no i. pl. 5. f. 6. Lntricola solenoides, Blainvillc. Malac. p. 566. pl. 77, f. 3.

Mactra hians. Gervillc. Cat. des coq. de la Manche, p. 22, n'^ 10. Lutraria solenoides. Collard des Cherres. Cat, des test, du Finisl. p. i3, n'^r.

Reeve. Conch. syst. pl. 41 f. i.

Deshayes. Encycl. méth. vers. t. 2. p. 387. i.

Menke. Synop. moll. p. 119.

Boucliard-Chautereaux. Cat. des moll, du Bout. p. 1 1. n’^ 10.

Deshayes dans Lam. Anim. s. vert, a* éd. t. 6. p. 90. i.

Lutraria hians. Thompson. Hep. on the fauna of Irel. p. 263,

Hanley, Descript. catal p. a6. iio i.

Anton. Verzeichn. der Conch. p. 3. n“ 87.

Philippi. Moll. Sicil. t, q. p. 7,

Lutraria hians, Fleming, Bril. anim. éd, p. 4^5.

Tliorpe. Brit. mar. conch.. p. 44. n* i.

Fossilîs : Mactra ohlonga. Brocchi. Conch. foss. snhap. t. 2. p. 536 ? Bronn. liai. tert. Gcbirge. p. 88.^

Dujardin. Mém. gcolog. sur la Touraine, p. 4^. a ?

Philippi. Enuin. moll. Sicil. t. 2. p. 7.

Sismoiida. Synops. mclh pedcin. foss. p. 16.

LES MACTRàCÉES.

aGg

Ainsi que le témoigne notre synonymie , cette espèce, eonnue des anciens naturalistes , a reçu plusieurs noms spéciûques , parmi lesquels le plus ancien doit être choisi. Nous no parlerons pas des dénominations antérieures à l'immortelle nomenclature de Linné ; elles n’ont aucune valeur. Linné n’ayant pas mentionné cette espèce , il faut chercher son nom dans l’ordre chronologique dans les ouvrages de ses successeurs. Nous trouvons , pour la première fois , Tespcce qui nous occui)e figurée et décrite en 4782 , dans le tome II du grand ouvrage de Chemnitz , sous le nom de Mya oblonga. Adopté par Gmelin , ce nom ne fut point admis par Donovan. Lamarck , embarrassé sans doute en présence d’une nomenclature incorrecte , au lieu de remonter au nom le plus an- cien , crut trancher la difficulté en proposant un nom nouveau , celui do Lutraria solenoides ; mais on concevra l’impossibilité d’admettre un semblable précédent. M. Turlon fut le premier, dans son Histoire des bivalves de la Grande-Bretagne ^ qui revint au premier nom spécifique. La justice exige que ce nom soit actuellement maintenu dans une bonne nomenclature.

Cette espèce, très commune dans tout l’Océan d'Europe , se rencontre aussi dans les régions plus chaudes des îlesduCap-VertetmèmeduSéné- gal. Ellehabite particulièrement vers l’embouchure des fleuves et des ri- vières. Les personnes qui ignorent celte particularité la chercheraient vainement ailleurs. Elle est trop connue peur mériter de notre part une description détaillée ; il nous suffira de rappeler ses principaux carac- tères. On la reconnaît , parmi ses congénères , à sa forme générale , courbée à la façon du Soîen cuUellus ; ovale-oblongue , elle est trans- verse , inéquilatérale ; le côté' postérieur est le plus long , et son bord supérieur est concave ; le bord antérieur est court , arrondi , moins cependant que le postérieur; le bord inférieur est régulièrement arqué dans toute sa longueur , et il n’est point parallèle au bord supérieur. Les valves , fort épaisses et très solides , sont très bâillantes , car elles ne se louchent que par deux points de leur circonférence ; elles sont médiocrement bombées , et leur surface , d'un blanc jaunâtre ou gri- sâtre, est recouverte d'un épiderme gris- noirâtre, écaillé , peu épais , qui presque toujours manque sur les crochets. La surface externe e.'^t irrégulièrement striée et rugueuse par des accroissements. Les crochets sont peu protubérants , pointus et opposés ; ils s’inclinent en avant. Le corselet est allongé, lancéolé, et présente une surface presque plane. Il n'existe aucune trace de lunule. L’impression musculaire antérieure est semi-lunaire, la postérieure est sub-circulaire. A l extrémité inférieure (le l’impression antérieure commence l'impression palléale ; parallèle au

•y.ro

HUITIÈME FAMILLE.

bord ventral . elle est remontée très haut vers l’intérieur des valves. Parvenue en arrière , elle so recourbe pour se diriger en avant ; mais dans la première partie de son trajet , elle se confond avec la ligne du bord ventral. Parvenue à la hauteur de la charnière , elle se recourbe, et se dirige obliquement vers le milieu de la circonférence de l’impres- sion du muscle postérieur. La dent en forme de V de la valve gauche est très comprimée et presque entièrement remplie de matière calcaire. A côté d’elle , et sur le bord du cuilleron , s’élève une dent fort mince et oblique qu’il est rare de conserver entière, à cause de sa faible épais- seur. La dent en V delà valve droite est plus large et plus ouverte ; elle est accompagnée, en avant, d’une petite dent mince et étroite, relevée en crochet, qui est peut-être un rudiment de la dent latérale des Mactres. Si la Lutraire oblonguo se distingue facilement de ses. congénères par les caractères de sa coquille, l’animal offre aussi des particularités qui ne permettent pas de la confondre avec aucune autre. Ses palpes , d'un blanc laiteux , sont poiiUillées de violet; ses siphons , fort allongés et fort gros , sont rougeâtres ou violacés , et les ouvertures qui les ter- minent ne restent pas parallèles , mais se placent sous un angle presque droit , l’une par rapport à l’autre. Les tentacules du siphon branchial sont courts et violacés ; ils sont digités», mais à digitations courtes, pointues. Enfin , les deux siphons semblent conserver a l’extérieur une communication directe , au moyen d'une rigole profondément creusée de l’un â l’autre, dans la longueur de la courte bifurcation qui les sépare.

Lutraire ridée. Lutraria rugosa , Lamarck.

PL 10. fig. 7. 8.

L. Testa ovato transversây inœquUaterâ^ turgidulâ ^ albido^ flaves~ cente^ utroque latere hîante , postico iongiorCy cnstulis longituàina- îihus eîevatisy radiantibiis, transversus minus eJevatas decussantibits ; latere postico nudoy cardine dentihus lateralibus ^ brevibiis instructo,

Mactra rugosa. Spengler. Soc, d’hisL nat. de Copeoh. t. 5. "i* part.

p. I r 8. 24.

Id. f^raelitï p. 326r. 11" 23.

Chemnitz, Conch. 0. pi ai. f a35 Encvflop. pl. aSj. f. a. a. b.

Mttura rugosa. Dillwyii. Cal. l r. p. 145 n“ 34, î-aniarck. Anim. s. verl. t. 5, p, 3.

LES MACTRaCÉES.

3'' !

Rowiîirh. Klrm. of Conoh. a* part, pL 7. f. 14. hutricaln rngosa. Rîainville. Malac. p. yiactrn rugo^n Wood. Iiut. Ifslap pî. t’, 33.

Lntraria rugnsn. De.*>have.s. Knc. mélb. vers. t. 2. p. 38;. n'’ 3.

Menke. Synop. inoll. p. i rp.

. Deshayes. TaW. compar. dans Lyell. g<‘ol. I. .3. App. p. 2.

Id. daii'5 Lamarck. Anini. s, verl. t. p. 91. 3.

Kanley. Dcscript, ratai, p. 26. n" 3.

Fnssllis Sisinonda. Syriop. mrlh, pedrm foss. p. 17- Deshavrs. Exped. -srient. de Moréé. zool. p. S8. 11“ i5.

Dujardin. Mrm. gôM. snr la Toiirainr, p 45. i.

En inscrivant celle espèce dans son Histoire des oniyiuiux sans ver- tèbres , Lamarck dit qu'elle est commune clans l'Océan d'Europe. Il est vrai cependant que jusqu'ici elle est restée rare dans les collec- tions, et elle n'a été mentionnée dans aucun des catalogues qui ont pour objet de faire connaître les espèces de nos mers ; elle n’est dans aucun dés catalogues d’Angleterre : la même absence se remarque dans ceux de la Suède et de la Norwège. Les catalogues de France ne la mentionnent pas davantage, et jusqu'ici elle ne se trouve dans aucun des nombreux ouvrages, publiés sur les productions de la Méditerranée; on pouvait donc supposer d'après cela que Lamarck avait commis une erjeur au sujet de l'habitation de l’espèce^ et la plupart des conchylio- logues la supposaient originaire des mers de l'Inde. Nous-même avons été longtemps dans cette croyance. Cependant nous pouvons l'affirmer, actuellement le Lutraria rugosa habile la Méditerranée , sur les côtes de l’Algérie, particulièrement à Bône, vers l’embouchure do la Seybouse. Son analogue fossile se trouve assez fréquemment aux environs d'Asti , dans les sables jaunes de la formation tertiaire subapennirîe.

Lutraria rugosa est l’espèce qui se distingue avec le plus de fa- cilité ; ovale , oblonguc , inéquilatérale , obtuse et arrondie à ses extré- mités, elle est moins bâillante que la précédente espèce: elle est ])liis renflée que la plupart des Lutraires; d’un fauve grisâtre en dehors , elle est blanche en dedans ; les crochets sont médiocres, lisses îMi sommet ; à une faible distance naissent un grand nombre de petites côtes longitudinales, étroites, peu écartées , quelquefois très rappro- chées, mais qui, dans leur disposition générale, sont très variables, ('es Cüles longitudinales croisent à angle droit des stries Irans- verses moins régulières et moins apparentes. Le côté antérieur ainsi que le postérieur sont dépourvus de côtes et de stries; ils sont lisses.

HUITIÈME FAMILLE.

Le bord cardinal est épais ol solide , le cuilleron est grand , profond , sublriangulairc , très proéminent à Tintérieur, la dent en forme de Y, très comprimée et presque ontièrement remplie. En avant s’élève un rudiment assez considérable do la dont latérale antérieure. Du côté postérieur la dent latérale est beaucoup plus grosse , et ressemble déjà à celle de quelques Mactres. Les impressions musculaires sont fort grandes ; l’antérieure ovale, semi-lunaire, descend dans toute la hauteur du côté antérieur ; la postérieure est circulaire très rapprochée du bord dorsal; l’impression palléalo est plus rapprochée du bord ventral de la coquille que dans les autres espèces; elle s’avance très en arrière, et parvenue au niveau du bord postérieur de l’impression musculaire, elle commence seulement à s'inüéchir en dedans; elle remonte oblique- ment et s'arrête eh arrière de la charnière. Le test de cette espèce est épais et solide. Les individus fossiles sont en général plus grands que les vivants.

GENRE VINGT-HUITIÈME.

MACTKE. Mactra, (Lin.)

PL lo. fig. 4. 5, 6, S,

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal ovale-trigone , ayant les lobes du manteau garnis d’une double rangée de tentacules simples et coniques. Les lobes réunis vers le tiers postérieur de leur longueur et terminés par deux siphons presque égaux , réunis dans toute leur longueur, et revêtus d’une couche épi- dermique. Ouverture des siphons garnie d’une rangée de ten- tacules simples; ceux du siphon branchial sont quelquefois faiblement branchus ; le siphon anal est terminé en une calotte membraneuse, percée au sommet. Pied grand, triangulaire, coudé; bouche ovale, très petite; palpes labiales, grandes, triangulaires, et dont la surface interne est couverte de plis serrés et nombreux. Quatre branchies longues , étroites, iné- gales , réunies en arrière de la masse abdominale.

Coquille ovale , subtrigone , un peu biullante de cliaque côté;

lÆS MACTRACÉEfi 27^

charnière large, présentant au-dessous du crochet une grande fossette triangulaire pour un ligament interne , et à côté une dent en forme de V ; deux dents latérales , grandes et compri- mées, intrantes et rapprochées de la charnière; impression palléale ayant en arrière une sinuosité large, subhorizontale et peu profonde.

SYNONYMIE GENERIQUE. La Féifctc/e , Rondelet, Pecfun- culitSj Lister, Conclia, Tellina [pars] , Gualtieri. Chaîna , Gualtieri, d’Argenville, Adanson. Isocardia [pars]^ Klein. Trigonella [pars) ^ Da Costa, Humphrey. Cardhnn y Linné (syst. nat. ed. 10. Faun, suec.).— Callistay Callisio- derma , Poli. Linné, Gmelin, Bruguière, Spengler,

Lamarck, Cuvier, Blainville, Menke, Latreille, Deshayes, Hanley, Fleming, Sowerby, etc. Mxdinay Spisula^ Gray. Schizodesma ^ Swainson. Hemimactray Swainson.

oBSEnvATioNs. De tous les genres créés par Linné dans la classe des vers testacés, celui-ci est un des plus naturels, et le seul peut-être, auquel il eût été bon de n’apporter aucun changement. Ce nom de Mactre , choisi par Linné pour l’appliquer à un genre bien déterminé, avait été diversement employé avant lui par quelques auteurs de con- chyliologie; celte dénomination s’appliquait indistinctement à des co- quilles triangulaires, rappelant par leur forme générale celle d’un fer de hache ; il y eut même des auteurs , tels que Klein , par exemple , qui y rapportaient des Arches et des Pétoncles. Il fallut donc qu’en em- pruntant aux naturalistes ses prédécesseurs une dénomination généri- que trop vague , Linné la restreignît , et c’est ce qu’il fit , comme nous le verrons bientôt.

Quelciues unes des espèces des véritables Mactres habitent nos mers d’iùirope , elles sont très abondantes,; l’une d’elles n'a point échappé à Rondelet , qui en a donné une figure assez reconnaissable , sous le nom de Vélade , dans son Ui$ioire des Poissons. Cette figure reproduite, mais souvent d’une manière imparfaite, dans les ouvrages de Gesner, d'.Mdrovande, de .Tonston, etc., ne mérîleguère d’être citée dans une synonymie correcte. Lister, dans son Traité des animaux d' Angleterre , ain.si quQ dans son grand ouvrage de conchyliologie, a rendu une figure

iH*

T. I. ‘A* PARTIE.

HUlTIÈMIi FAMILLE.

274

plus exacte de la Vétade de Jiondelet ; il a ajouté celle d’une espèce plus commune encore, connue sous le nom vulgaire de Lisor. Bonanni , dans deux de Ses ouvrages , Réaumur, dans son mémoire plein d’intérét sur la formation des coquilles, publié en 1710, dans les Mémoires de l'Académie; Guallieri , Ginnani, auxquels on peut joindre Rumphius et Petiver, ont donné des renseignements plus ou moins utiles sur les co- quilles du genre Mactre ; ils en ont faitconnaître des espèces par des fi- gures, dont la plupart se ressentent des imperfections du dessin, tel qu’il s’appliquait alors à l’étude de l'histoire naturelle. Nous arrivons enfin à l’ouvrage d’Âdanson, publié en 1757, c’est-à-dire à l’époque Linné préparait la 1 0* édition du Sysiema.

Pour le plus grand nombre, les genres d’Adanson sont fondés sur une habile observation des caractères zoologiques des mollusques. Personne n’ignore à quel haut degré Adanson portait l’art de la méthode et combien sous ce rapport ses ouvrages sont supérieurs à son siècle. Pour les coquilles bivalves, ce grand naturaliste ne poussa pas les di- visions aussi loin qu’il eût été nécessaire pour satisfaire à tous les caractères des animaux de cette classe. Sous le nom de Chama, il con- stitua un genre très étendu , dans lequel il rassembla un grand nombre de types que M. de lilainville réunit dans sa famille des Concbacés. C’est dans le genre Chama que se trouvent à coté de Venus, de Cythérées, de Lucines, etc., deux espèces de véritables Madrés.

La 1 0' édition du Sijstema nulurcB parut une année après l’ouvrage d’Âdanson. Le genre Maclro ne s’y trouve pas encore, et le peu d’es- pèces que Linné connaissait est compris dans le genre Cardium. Ce genre Mactre n’existe ni dans le Muséum Utricæ , ni dans la I T édition du Systema , ni môme dans la édition du Fauna sitecica. Il est inscrit, pour la première fois , dans la 1 2* édition du Systema naturœ, publiée en 1767.

Caractérisé rigoureusement , lo genre Mactre de Linné ne contient qu’une seule espèce contestable, et encore avant de la rejeter, faudrait- il être convaincu qu elle doit constituer un genre distinct , ainsi que l’a proposé Lamarck. L’espèce dont il s’agit [Mactra hUrorio) est devenue le type du genre Lulraire. Peut-être serait-il plus convenable de revenir à la classification des espèces, proposée par Spengler. Ce judicieux na- turaliste partage les Mactres en deux sections ; la première, pour les espèces oblongues, contiendrait les Lutraires de Lamarck ; la seconde, pour les espèces triangulaires , renfermerait les Mactres du même auteur. Les successeurs de Linné s’empressèrent d’adopter le genre Mactre; mais tous n'en ont pas respecté la^siinplicité ; quelques uns, et

LRS MACTR AGEES.

particulièrement Gmelin , dans la 1 3* édition du Systema , ont introduit dans le genre qui nous occupe des coquilles qui n'en offrent pas les caractères. Cet exemple fut suivi par Bruguière qui , dans les planches de l’Encyclopédie, confond avec elles des Crassatelles Mais bientôt toute confusion dut cesser en présence du beau travail de Poli, dans lequel il représenta l’animal vivant de la plus grande espèce de Mactre des mers de l’Europe , et en donna une anatomie , si ce n’est complète, du moins suffisante pour déterminer la place que le genre doit occuper dans la méthode. Nous trouvons dans l’ouvrage do Da Costa sur les coquilles de la Grdnde-Bretagne , un genre Trigonella , dans lequel à quelques Mactres est joint le Chama pîperaia des anciens conchylio- logues. Humphrey, dans le Muséum Calounianum , a suivi l’exemple de Da Costa et a préféré le nom générique de ce naturaliste, pour un genre semblable au sien , contenant à la fois des Mactres et des Lavi- gnons. Poli qui, pour l'arrangement des Testacés desDeux-Siciles, créa une nomenclature spéciale, tout en conservant celle de Linné, imposa le nom de Callista aux mollusques des Mactres et celui deCalIistoderme aux coquilles du même genre. Ces exceptions à la nomenclature de Linné sont les seules que nous ayons à signaler

Depuis la publication de rouvrag^e de Poli , Spengler, en 1 802, donna dans les Mémoires de la Société d' histoire naturelle de Cope7}hagi{e , une monographie très bien faite des Mactres. Dans cet écrit , le savant natu- raliste conserve au genre de Linné toute son étendue ; seulement, ainsi que nous le disions, il partage les espèces en deux groupes, d’après leurs formes. Malgré cet exemple, presque tous les naturalistes adoptèrent le changement proposé par Lamarck, c’est-à-dire la séparation des Lu- traires. Cependant celte réforme ne parut pas suffisante à un zoologiste anglais, à qui la science est redevable de travaux importants et d’un mé- rite incontestable. M. Gray, dans un article très court, publié, en 1837, dans le Magasin dliistoire naturelle, se servit de quelques caractères peu importants , selon nous , empruntés à la disposition du ligament, pour diviser les Mactres en plusieurs genres que nous avons déjà eu occasion de mentionner, en traitant des Lutraires. Mais jusqu’ici , peu de zoolo - gistes onladopté ces nouvelles divisions, qui ne pourraient avoir quelque valeur, qu'aulant qu’elles s’appuieraient sur des caractères tirés des animaux; or, il n’est rien dans le Maclra Spengleri, par exemple, qui fasse supposer un animal différent de celui du jl/ac(ro lactea ou d’autres espèces analogues. Nous ne pouvons donc admettre, dans l’état actuel de nos connaissances , les nouveaux genres proposés par M. Gray.

Si tous les naturalistes se sont trouvés d’accord pour accepter le genre

i8*

HriTlÈMK FAMILLK.

2;n

Macire , ils n’onl pas tous en la même pensée pour en déterminer les rapports dans la méthode. Linné d'abord en confondit les espèces parmi les Cardium et rapprocha naturellement les Mactres de ce dernier genre. Son opinion prévalut longtemps; c’est aux travaux de Poli que l’on doit un changement notable dans l’opinion des classificateurs. Poli rapproche les Mactres du (7y(/ïrrea chione, parce que l'un et l’autre animal se prolonge en arrière en deux siphons réunis. Cuvier et M. de Blainvllle, se fondant aussi sur ce caractère , ont entraîné les Mactres dans le voisinage des Venus, quoiqu’elles eussent le ligament intérieur, tandis que les Venus le portent à l’extérieur. Lamarck attache avec juste raison plus d’importance à la position du ligament; et comme il s’aperçut des rapports intimes qui lient les Lutraires aux Mactres, il ne voulut pas séparer ces deux genres et les entraîna tous deux assez loin des Venus, dans sa famille des Alactracés. Depuis les travaux de Cuvier et de La- marck, les opinions se trouvèrent partagées et il était difficile de se décider en faveur de l’une d’elles , parce que l’animal des Lutraires était complètement inconnu , et qu’on ignorait par conséquent si les rapports indiqués par les coquilles se trouveraient exacts à l’égard des animaux. II sera facile actuellement aux zoologistes de choisir entre les deux opinions que nous venons de rapporter ; ils trouveront dans cet ouvrage les éléments d’une comparaison assez complète. Ils verront si, comme l’a cru Poli , les Mactres sont plus voisines des Cythérées que les Lutraires.

Les Mactres sont des coquilles généralement minces; elles acquièrent quelquefois une taille assez considérable; presque toutes sont lisses; quel- ques unes offrent des côtes transverses, que l’on voit se répéter exacte- ment à l'intérieur des valves , par suite de 'la faible épaisseur du lest. Aucune jusqu'ici n’est pourvue de stries ou de côtes longitudinales. Leur forme est triangulaire pour le plus grand nombre; dans une série considérable d’espèces, on voit cette forme subir des modifications insensibles , devenir plus oblongue , plus ovalaire , et arriver enfin à la forme allongée et Iransverse des Lutraires. Presque toutes les espèces sont subéquilatéralcs: la lunule et le corselet sont presque égaux et presque toujours nettement circonscrits. La surface extérieure est re- vêtue d’un épiderme plus ou moins épais , caduc sur les crochets , mais toujours apparent sur le bord des valves, qu’il dépasse d’une manière assez notable pour cacher la partie exserlile du manteau. En arrière , cet épiderme passe d’une valve à l’autre, et, se prolongeant en une gaine digitiforme, il revêt les siphons dans toute leur étendue, comme dans les Lutraires. Les valves, toujour.^ égales , sont mieux fermées'que dans

LES MACn\ALEKS. 277

la plupart des Lulraircs; cependant elles sont baillantes en avant et c-n arrière. Les bords sont toujours simples, minces cl tranchants: la co- quille étant triangulaire, le bord antérieur descend obliquement d'ar- rière eu avant, et vient aboutir à un angle, obtus, résultant de sa jonction avec le bord ventral. Le bord postérieur suit une direction opposée; il naît des crochets et descend obliquement d'avant en arrière, il se termine aussi en un angle obtus, lorsqu'il se confond avec le bord ven- tral. Ce dernier est régulièrement courbé, à peu près comme le tran- chant d’une hache, et il est à présumer que c'est celte l'orme générale qui a déterminé Linné à préférer pour ce genre le nom de Macira, dont la sigtiificalion est bien connue. Les crochets peu saillants , inclinés en avant , occupent le sommet du triangle. Lu surface interne est généra- ment blanche et peu colorée, jamais 'nacrée; on y observe, comme toujours, deux impressions musculaires et unepalléalo. Les impressions musculaires sont assez grandes , à peu près à égale distance de la char- nière ; toutes deux sont comprises dans la région supérieure de la co- quille; elles sont presque égales, ovalaires ou obrondes; do Textrémité inférieure de l'impression musculaire antérieure , il part une impression palléale qui se place parallèlement au bord ventral, l'accompagne dans les deux tiers de sa longueur, s'infléchit ènsuite obliquement, remonte plus ou moins haut dansrinléricur des valves et se recourbe pour aboutir au milieu de la circonférence du muscle adducteur postérieur. La sinuosité palléale postérieure est étroite et dirigée horizontalement ou obliquement de haut en bas, et d’avant en arrière. Deux petites im- pressions étroites viennent se confondre à l’extrémité supérieure des grandes impressions musculaires; elles sont dues aux muscles rétrac- leursdupied.

La charnière est fort compliquée dans les ^factres ; elle est supportée par un bord cardinal assez large, sur lequel s’élèvent des dents cardi- nales et des dents lalcrales. Le milieu est creusé par une cavité trian- gulaire un peu oblique et destinée à recevoir un ligament intérieur. Toutes ces parties que nous venons do mentionner sont variables à des degrés divers selon les espèces. Les dents cardinales sont situées du côté antérieur, immédiatement au-dessous du crochet; elles affectent une forme particulière que l’on ne rencontre que dans ce genre et celui des Lulraircs. Elles sont, en effet, en forme de V, celle do la valve gaucho étant un peu plus grande pour recevoir la dent de la valve opposée. Quelquefois celte dent manque complètement , comme dans le .1/acrm gigantea, par exemple , et cette coquille reste parmi les Madrés parce que, à l’exception de la dent cardinale, elle en conserve tous les

Hl lTIEMK FAMÏLLK.

ajS

autres caractères. Dans d’autres .espèces , telles que le Alactm strialella do Lamarck , la dent cardinale se montre à l’état rudimentaire ; il arrive môme que l'un de ses côtés se confond avec les commencements de la dent latérale aiUéricurc. Dans le Maclra elongaia de'MM. Quoy et Gay- mard, les dents cardinales ont subi une forte compression, ce qui les fait ressembler à celles deqvielquos Lutraires. C’est principalement dans les coquilles dont le test s’apaissit avec l’âge, que se montrent les mo- difications dont nous venons de parler. Celles qui sont minces ont la dent cardinale plus lamelleuse et d’une grosseur plus constante. La fossette du ligament peut être comparée à celle des Lutraires; car, dans le plus grand nombre des- espèces , le bord do ce cnilleron est saillant dans l'intérieur des valves , ce qui donne au ligament une plus grande' surface pour s’attacher. Dans quelques espèces , telles que le Mactra heîvacea, par exemple, le cuilleron ne dépasse pas le bord cardinal; mais alors celui-ci devient largo et très proéminent au-dessus de la cavité des crochets. La fossette du ligament est (oujours triangulaire, un peu oblique d’avant en arrière. Le sommet s’enfonce jusque vers la pointe des crochets , et , dans quelques espèces , il est possible d’en suivre la cavité jusqu'à son commencement. Dans le Macira Spengleri, le cuüle- ron , au lieu de s’avancer horizontalement sur le bord cardinal , s’en- fonce obliquement jusqu’au sommet des crochets , et dans toute salon- gueur il reste ouvert, de manière à se montrer à l’extérieur, au moyen d’.uuo fente également triangulaire. Si , par artifice , on venait à rompre la lame calcaire , peu épaisse , qui recouvre dans les autres Mactres une partie du sommet du cnilleron , on obtiendrait une disposition analogue à celle du Mactra Spengleri, ce qui prouve le peu d’utilité du genre que M. Gray a voulu établir pour cette espèce. Le ligament implanté dans les cuillerons est épais , très solide, et il remplit exactement les cavités qui le reçoivent. Les dents latérales sont constantes chez les Madrés ; seulement elles varient dans leur longueur. Citez quelques espèces, elles sont presque rudimentaires , et en cela elles ressemblent à celles des Lutraires. Dans le plus grand nombre de ces coquilles, les dents latérales sont grandes, aplaties, lamelliformes, simples sur la valve gauche , doubles sur la valve droite. Presque- toujours ces dents latérales sont lisses; chez quelques espèces , toiles que le J/ac/m soh'rfa, par exemple, elles sont striées perpendiculairement; Ces dents occupent une partie notable des bords antérieur et postérieur de la coquille.

Nous avons déjà fait remarquer que, dans les Lutraires, le ligament est absolument interne; il l’est également chez la plupart des Madrés. Il en existe cependant quelques unes il y a dès rudiments d’un liga-

LES MACTKACEES.

’^79

ment extérieur. Dans celles-là, Mactra gigantea par exemple^ se montre en môme temps un petit bourrelet, sur lequel ce ligament s’at- tache , et que Ton peut considérer comme une nymphe à l'état rudimen- taire.

Lorsque nous traiterons du Lavignon , nous exposerons nos obser- vations sur la nature du ligament. Chez ceux des mollusques qui ont le ligament externe, cet organe est composé de deux parties bien dis- tinctes : l’une extérieure, très solide , convexe, fibreuse l'autre inté- rieure , d’une structure différente , très élastique , et destinée plus par- ticulièrement à favoriser le mouvement dos valves l’une sur l'autre. Dans les Madrés à deux ligaments , les deux parties que nous venons de. mentionner semblent détachées l'une de l'autre. La portion élastique entre dans le cuiUeron et en occupe toute la cavité. La portion fibreuse s’arrête au dehors sur un rudiment de nymphes , ce qui démontre jus- qu’à l’évidence rindépendanco des deux parties constituantes du liga- ment extérieur. Il y a des genres, chez lesquels cette indépendance se manifeste d’une manière non moins évidente , celui des Amphidesmes par exemple , chez lequel la portion élastique occupe une longue fossette décurrente le long du bord postérieur ; tandis que la portion fibreuse , mieux développée que dans les Mactres , est attachée sur dos nymphes bien distinctes. Nous avons donc raison en disant qùo l’on peut assimiler la cavité ligamentifère des coquilles à ligament interne , à une portion considérable de la nymphe des coquilles à ligament externe. Nous ver- rons à ce sujet une modification intéressante dans les Lucines , genre comparable, sous ce rapport , aux Thracies , puisqu’on y voit aussi le ligament passer du dedans au dehors , dans une série peu nombreuse d’espèces.

L’animal des Mactres a été depuis longtemps décrit et figuré par Poli ; il a donc été facile , en se servant de l’ouvrage du savant ana- tomiste , de donner les caractères au genre. Cependant, les observa- tions de Poli n'ont pas toute l'exactitude que l’on recherche aujourd’hui dans de semblables travaux ; et lorsque nous avons vu vivants , pour la première fois , les animaux de Mactres , nous avons été surpris que quelques uns de leurs caractères aient échappé au savant Napolitain.

Les Mactres sont des animaux dont la forme extérieure est conforme à celle de leur coquille ; presque tous sont triangulaires subcordiformes ; ils sont enveloppés d’un manteau mince , bordé à la circonférence par un muscle orbicuiaire assez large , laissant sur la coquille une double ligne d’impression. Dans la région dorsale , des membranes larges et saillantes s’interposent entre toutes les parties solides de la charnière ;

UUrnEME FAMlLLt.

U 8 0

et en conservent tes formes ; ces membranes sont destinées à la sécrétion de la charnière. Une frange tentaculaire s’élève sur le bord extérieur de chaque lobe du manteau ; ces tentacules se croisent au-devant de l’ou- verture palléale, destinée à livrer passage au pied. En arrière, le man- teau 36 prolonge en deux siphons plus ou moins allongés , selon les espèces ; ces organes sont souvent moins longs que la coquille, et quel- quefois ils dépassent beaucoup cette longueur. L'entrée intérieure du siphon branchial est garnie d’une valvule membraneuse qui la couvre en partie ; il existe de plus , depuis rentrée de ce siphon jusque vers le milieu de la longueur du bord ventral , une valvule palléale do chaque côté, consistant en un pli fort saillant qui , en se croisant avec celui du côté opposé, contribue à clore l’extrémité postérieure de la cavité palléale.

Les siphons, à peu près égaux en longueur, ne le sont pas tout à fait dans leur diamètre ; le siphon branchial est un peu plus large. L'ouverture terminale de ces organes est garnie d'un grand nombre do tentacules allongés, coniques, simples , dans nos espèces de la Médi- terranée et de la Manche , mais présentent des commencements do di- visions, au moins dans ceux du siphon branchial, chez celles des espèces, qui se rapprochent le plus des Lutraircs et qui vivent dans les mers d’Amérique ; c’est ce que nous avons eu occasion d’observer dans le Maclra frogilis (ü/uc. hrasiliana Lamk.). Il s’ctabliLdonc, sous ce rap- port , un passage insensible entre les Lutraircs elles Mactres. Le siphon anal offre un caractère, que nous avons retrouvé dans un assez grand nombre de mollusques. Ce siphon se prolonge en une calotte membra- neuse , percée d’une petite ouverture circulaire , susceptible de con- tractions semblables à celles d’un sphincter.

Le pied est assez grand ; il est triangulaire , fort aplati de chaque côté , tranchant sur ses bords, et courbé dans sa longueur. Par sa base , il se continue avec une masse abdominale peu épaisse, subquadrilatèro , et dont les parois fibreuses sont faites par le prolongement des muscles du pied. Deux muscles principaux servent à retirer le pied en dedans des valves; à cause de cet usage, iis ont reçu le nom de vétmeieurs, L’im est antérieur, et forme le bord antérieur de la masse abdominale; l’autre est postérieur et oblique : il contribue aussi à former le bord postérieur de l’abdomen.

En avant et en arrière de la masse abdominale , on remarque un grand muscle transverse dont les fibres s’attachent directement aux valves. Ces muscles, destinés à rapprocher les valves lorsqu’ils se contractent, sont nommés mxtscles adducteurs , à cause de leur fonction. Ces muscles

LES MAC/i'KACEES.

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sont à peu près égaux , presque également distants du centre de la charnière; le muscle antérieur est ovalaire, le postérieur est subcircu- laire. Ils sont enveloppés de toutes parts dans une gaine formée par le manteau, et de laquelle on parvient à les dégager, surtout chez les animaux qui ont été conservés dans l'alcool.

La bouche est très petite dans les Mactres. Dans le Mactra lisor , par exemple , elle admettrait à peine la tête d'une épingle. Elle est percée entre la base- du pied et l’extrémité du muscle adducteur anté- rieur ; elle est protégée par une paire de lèvres membraneuses assez larges , égales, transverses, qui aboutissent aux palpes labiales et s’y terminent. Les palpes, dans les Mactres, sont généralement très grandes ; elles sont triangulaires, tombantes de chaque côté du corps, et situées un peu obliquement de haut en bas et d'avant en arrière ; des trois côtés du triangle , le plus étroit est celui par lequel ces organes s’attachent au corps ; cependaut ce côté est , en proportion , plus large que dans les Lutraires et dans beaucoup d’autres genres. Chez les Lu- traîres , en effet , les palpes labiales sont longues et étroites ; chez la plupart des Mactres, elles sont non moins longues, mais plus larges. II semblerait, d’après cela , qu’il serait facile de distinguer les deux genres en question , en se servant des caractères des palpes ; mais on serait dans l’erreur : ces organes sont variables , et si , dans un certain nombre d’espèces , ils restent larges , dansd’autres on les voit se rétrécir insensiblement, et prendre graduellement la forme de celles des Lu- traires. La surface extérieure des palpes est lisse ; la surface interneest couverte d’un très grand nombre do plis réguliers , très fins, semblables à ceux d’un éventail à demi ouvert.

Les organes de la digestion commencent par un œsophage mem- braneux, aplati et peu allongé ; ce canal aboutit à un estomac subglo- buleux, divisé à rintérieur par des crêtes obliques. A son entrée dans l’estomac , l’œsophage est terminé par des lèvres découpées en pa- pilles courtes , comparables à de petits choux-fleurs ; de chaque côté , et au-dessous de celle ouverture singulière, s’ouvre un grand crypte biliaire. L’intestin se détache de la paroi inferieure de l’eslomac ; un duodénum très gros, cylindrique, descènd obliquement vers l'angle postérieur du pied ; parvenu près de la surface , il se change subi- tement en un intestin qui se développe en nombreuses circonvolu- tions , au moyen desquelles il remonte de bas en haut jusque vers la région dorsale. La dernière anse intestinale , rapprochée de la paroi supérieure de l’abdomen, la perce vers le centre, et pénètre ainsi dans le péricarde ; en traversant cette cavité, il prèle appui au ventri-

282

llUrriEME FAMILLE.

cuie ; il sort en arrière du péricarde , s'attache à la surface dorsale du muscle adducteur postérieur : et c’est en suivant la circonférence de ce muscle, qu'il s’introduit à la partie supérieure de la cavité du siphon anal.

Un foie volumineux occupe une place considérable dans la région dor- sale et antérieure de la masse abdominale ; il enveloppe Toesophage , l’estomac et une portion de l’intestin ; sa couleur verte le rend facile à reconnaître. Si nous pénétrons dans sa structure , nous le verrons se diviser avec assez de facilité en lobes et en lobules , au centre desquels pénètrent des vaisseaux biliaires; de la réunion des vaisseaux biliaires naissent deux troncs principaux qui se dirigent vers reslomac et s'y ouvrent aux deux cryptes biliaires dont nous avons parlé.

L’ovaire est non moins considérable que le foie ; il envahit toutes les parties de la base du pied et delà masse abdominale que n’occupent pas les viscères de la digestion ; il se répand en ramificafions nombreuses à la surface du foie; il gagne le dos, et finit quelquefois par occuper toute la région dorsale. L’ovaire pourrait être comparé à une grappe de raisin, dont les grains seraient irréguliers ; les embryons et les œufs se déve- loppent dans les grains , et , parvenus à leur maturilé , ils descendent dans un oviducto branchu, qui représente la tige etjes branches de la grappe ; le tronc commun des oviductes , après avoir parcouru le bord postérieur do l’abdomen, vient aboutir à un petit mamelon fendu, situé au-dessous de la base du feuillet branchial interne. Après avoir parcouru les oviductes, les œufs parviennent à l’ouverture que nous venons d’in- diquer ; ils en sortent , et sont recueillis entre les lamelles branchiales , pour être ensuite rejetés au dehors , lorsqu’ils sont parvenus à un degré convenable de maturité.

Les feuillets branchiaux sont lisses ; ils sont inégaux, et ils s'étendent d'avant en arrière dans presque toute la longueur de la cavité palléale. Le feuillet interne est le plus allongé et le plus large ; il commence en une pointe aiguë, qui s'interpose entre les palpes labiales. Le feuillet externe commence plus en arrière ; il est plus étroit, mais son bord externe se prolonge pour aller rencontrer le manteau dans la région dorsale et se souder à lui. Celte soudure , qui se maintient pondant la vie de l'animal , cesse spontanément à sa mort. Les quatre feuillets branchiaux se prolongent en arrière du bord postérieur de l’abdomen , SC réunissent et viennent tomber en avant de l’ouverture du siphon anal. Sur le pourtour de cette ouverture , s’élève un pli du manteau, auquel s’attache l’extrémité postérieure des feuillets branchiaux réunis. Au moyen de cette soudure , toute communication est interceptée entre

LES MACTHACEES.

283

la cavité du manteau et celle du siphon anal. Cette soudure, qui subsiste liendaul la vie de l'animal , cesse également et spontanément au mo- ment de la mort.

Si les branchies sont lisses dans le plus grand nombre des Mactres , il y a des espèces chez lesquelles ces organes sont plissés en partie ou en totalité. Les espèces qui présentent ce dernier caractère se rapprochent beaucoup à cet égard des Lutraires , chez lesquelles les organes de la respiration sont couverts de plis nombreux et réguliers.

Le cœur est situé dans la région dorsale postérieure de l’animal ; il est contenu dans un péricarde membraneux, très mince, formé par le manteau ; il a une forme subquadrangulaire. Le cœur , ainsi que dans les autres mollusques acéphalés , embrasse le rectum et l’enveloppe de toute part. Cet organe est ovale , oblong, subfusiforme ; il reçoit de chaque côté l'insertion d’une oreillette triangulaire, et une ouverture en fente, garnie de doux valvules opposées , sert de communication entre l’oreillette et le ventricule. Ces parties de l'organe central de la circu- lation sont d’une parfaite symétrie. En avant , le cœur se prolonge en uneartère aorte, qui pénètre, dès sa naissance, dans la cavité abdominale ; en arrière, il donne naissance à une aorte postérieure qui se distribue à l’extrémité postérieure de Tanimal.

Un organe dépurateur assez considérable occupe un espace triangu- laire , situé en arrière de l’abdomon , et du péricarde au-dessous du rectum ; il s’appuie sur le muscle rélracteur postérieur du pied , et l’accompagne jusqu’au-delà de sa bifurcation. Cet organe, d'une extrême mollesse, est d’un blanc jaunâtre; à l’intérieur, il est partagé en deux cavités semblables par une cloison longitudinale et médiane. Des piliers contournés , séparant des lacunes nombreuses et irrégu- lières , se montrent à la surface interne de l’orgaiie; d'un côté , les cavités de l’organe communiquent avec l’abdomen au moyen d’un canal membraneux, qui accompagne le muscle du pied; d'un autre, elles communiquent au dehors par une ouverture , percée de chaque côté dans l’épaisseur des parois , et se montrant au-dessous de la branchie interne , un peu au-dessus de l’ouverture de Toviducte.

Le système nerveux , dans sa disposition générale , est semblable à celui des autres mollusques acéphalés dimyaires, et ce que nous avons dit dans notre introduction, nous dispense de le décrire ici en détail. Nous ajouterons seulement que les . nerfs postérieurs des siphons ont plusieurs anastomoses successives , à chacune desquelles se trouve un très petit ganglion ; nous ajouterons aussi que le nerf cardiaque naît du ganglion antérieur du côté gauche, descend en arrière et va se distri-

HCIÏIEME CAMILLE.

284

buer aux membranes cardinales et au cœur. Ce nerf paraît particulier aux Lutraires et aux Mactres.

Les Mactres sont des mollusques qui vivent dans le sable ; ils s’y enfoncent perpendiculairement et s’y creusent un trou au moyen de leur pied ; leurs siphons viennent s’ouvrir à la surface du sable ; elles habi' tent les rivages à une faible profondeur sous l’eau. Souvent , à la suite des gros temps » les plages sont couvertes de leurs coquilles que ra- massent volontiers les collecteurs ignorants , d’où est venu le nom de Mactra stnllorum ,• imposé par Linné a l’espèce la plus commune de l’Océan d'Europe.

Nous comptons actuellement près do quatre-vingts espèces vi- vantes de Mactres; elles proviennent do toutes les mers, do toutes les latitudes. Pour le plus grand nombre , ces coquilles sont blanches ou ornées do couleurs pèles; un petit nombre seulement sont vivement colorées.

Les Mactres fossiles sont moins nombreuses que les vivantes ; elles sont répandues dans tous les terrains tertiaires connus. Quelques unes ont été mentionnées, soit dans les terrains crétacés, soit dans les terrains secondaires plus anciens ; mais rien jusqu’ici n’est propre à Justifier à nos yeux la présence dos Mactres dans des terrains plus anciens que les tertiaires ; et si quelques paléontologistes se sont crus autorises à les mentionner, cela provient do ce qu’ils ont assimilé des moules de co- quilles triangulaires, sur lesquels on ne trouve aucune trace des carac- tères essentiels des Mactres. Dans la série des moules factices, qu’a publiée M. Agassiz, on reconnaît celui des Mactres, non seulement à sa forme générale, mais encore a l’empreinte de la charnière. Les lames cardinales, comme nous l’avons vu, ont une saillie médiane, produite par la proéminence des cuillerons; ces parties laissent dans le moule une empreinte plus ou moins profonde entre les crochets. La dent car- dinale se reconnaît dans son empreinte par sa forme spéciale. Enfin, les dents latérales laissent toujours sur le moule des traces de leur pré- sence, ce qui peut aider à déterminer le genre d’une espèce dont le moule lui seul est connu. Il existe aussi des dents latérales dans plusieurs autres genres, mais ce caractère seul aurait peu de valeur. Il faut donc, pour reconnaître les Mactres parmi les moules d’espèces fossiles, que ces moules portent les empreintes des parties principales de la charnière et particulièrement de la dent cardinale.

On trouve dans les catalogues dressés par les paléontologistes un certain nombre de coquilles, connues par leur moule seul , et qui sont attribuées au genre Mactre. M. Roemer , dans son ouvrage sur les 1er-

LKS MACTUACKES.

285

rains ooliliques du nord de l’Allemagne, mentionne trois espèces qu’il rapporte aux Mactres, mais sur lesquelles nous n’observons aucun des caractères du genre; il en est de même des espèces de Goldfuss et de Zieten.

Dans l’ouvrage important publié par M. Fitton sur les terrains cré- tacés du sud-est de l'Angleterre, ce savant géologue a cité une Mactre fossile dans les sables verts, et il en a donné une figure. Cette figure re- présente la coquille entière, ayant ses valves rapprochées et ne montrant rien de sa charnière. Si la figure est fidèle , cette coquille serait inéqui valve , et par conséquent plus voisine des Corbules que des Mactres. L’auteur avait lui-même conservé do l’incertitude au sujet de cette co- quille , et c’est avec doute qu’il l’introduit dans le genre , il la place.

Parmi les fossiles rapportés des terrains crétacés de l’Inde par M. Kaye et si bien décrits par M. Forbes dans les Transactions de îa Société géologique de Loiiàres , nous trouvons , sous le nom de Maclra tripartîta, une coquille qui , par sa forme extérieure , pourrait bien être une véritable Mactre; mais la charnière reste inconnue, ce qui laisse quelque doute sur la détermination du genre. Si celte coquille appartient réellement aux Mactres , elle nous offrirait le .seul exemple authentique de l’existence de ce genre dans un terrain inférieur aux terrains ter- tiaires.

Deux espèces sont connues dans le bassin de Paris. Lamarck a cru que l’une d'elles [Mactra semi-sulcata) avait son analogue vivant dans les mers de la Nouvelle-Hollande. Nous avons comparé de nouveau les coquilles en question , et nous avons reconnu deux espèces toujours distinctes. L’espèce fossile apparaît d'abord dans les sables marins in- férieurs du Soissonnais et de la forêt de Compiègne ; elle passe dans les calcaires grossiers et remonte dans les sables moyens do Beau- champ , Valmondois , etc. ; elle offre quelques variétés intéressantes dans ses divers gisements. Les deux espèces de Paris se montrent aussi dans le bassin de Londres et dans celui de la Belgique; mais elles ne remontent pas dans l’étage moyen de Bordeaux et de Dax , comme l’a cru M. Bastérot et quelques autres personnes d’après lui. Il résulte de là, que l’espèce nommée Mactra deltoïdes^ par M. Bastérot, devra recevoir une autre dénomination.

Les terrains tertiaires moyens sont les plus riches en espèces de Mactres. M. Brongniart en cite deux dans les terrains du Vicenlin ; toutes deux sont douteuses; la première, M. erebea, a la forme extérieure des coquilles du genre; la seconde, M. cyrena , dont la charnière est

' tr

a86 HUITIÈME FAMILLE.

figurée , est une véritable Cyrène que Ton retrouve également fossile aux environs de Bordeaux ; c/estlo Cyrena Bronyniard Bast.

M. Baslérot, dans son Mémoire sur les terrains tertiaires du sud- ouest de la France , mentionne trois espèces de Mactrcs ; il rapporte la première au Maclra slrialelkt de Lamarck , qui vit au Sénégal et qui offre , en effet , avec l’espèce fossile une analogie incontestable ; pour la seconde, M. Baslérot l’assimile à l'espèce fossile des environs de Paris, et lui impose le même nom ; mais la coquille de Bordeaux reste toujours distincte de celle de Paris; elle devra donc recevoir une autre dénomi- nation. Quant à la troisième Maclra tna?iguh, elle so montre en réalité dans les étages moyens et supérieurs des terrains tertiaires. M. Grate- loup , dans son Catalogue zoologîque du bassin de la Gironde, sans rec- tifier l’erreur de M. Baslérot, ajoute une quatrième espèce qu’il identifie avec le Maclra deptrssa des environs de Paris. La comparaison que nous avons faite de ces deux espèces, nous donne la preuve qu’elles sont constamment distinctes. Ainsi, à l'égard desMactres, aucune de celles de Paris ne remonte dans les étages moyens et supérieurs. M. Dubois de Montpéreux s'est laissé entraîner par l’exemple de ses prédécesseurs, et il à imposé le nom de l'espèce de Paris à une coquille qui en diffère et qui se distingue aussi de celles de Bordeaux et de Dax , de sorte que sous ce nom Maclra delloides trois espèces bien distinctes sont con- fondues.

Dans la Paléontologie polonaise, M. Pusch inscrit parmi les Mactres des terrains tertiaires de Pologne le Maclra cu/ienta de Sowerby, espèce qui d’abord a été découverte dans le Crag d’Angleterre , et que depuis M. Nysta retrouvée dans celui de la Belgique. Jusqu’ici aucune espèce du Crag ne s'élail remarquée dans les terrains tertiaires , explorés par M. Pusch , mais on y trouve quelquefois une petite variété du jMactra iriangitla 5 et, sans pouvoir l’affirmer, nous 'Soupçonnons que c'est celte espèce que M. Pusch aura rapportée au Cuneata du Crag.

A la suite d’explorations aussi multipliées qu’attentives , M. S. Wood a dressé un catalogue très bien fait et fort complet des fossiles du Crag d’Angleterre. Dans ce catalogue, nous trouvons six espèces de Mactres, parmi lesquelles nous en remarquons trois dont les analogues vivent encore dans l’Océan européen et même sur les côtes de la Grande-Bre- tagne ; ce sont les Maclra stullorum , solida et subtruncata. A ces espèces du Crag d’Angleterre , M. Nyst en a ajouté deux, qui sont propres à celui des environs d'Anvers ; l’une d’elles paraîfdouleuse à M. Nyst; elle pourrait bien se confondre avec le Cuneata de Sowerby. De nouvelles observations sont nécessaires à ce sujet.

LES MACTRACÉES.

287

Les terrains tertiaires supérieurs de l’Europe sont peu riches en Mactres fossiles. Brocchi en décrit trois espèces, dont deux^ les Mactra siuUorum Qitriaugiiïa vivent encore dans la Méditerranée; mais il paraît que Brocchi avait commis la même erreur que Linné et Lamarck à l’égard du Lisor d’Adanson et du SluJtorum ; c’est-à-dire qu’il les réunissait sous un môme nom spécifique. Nous avons fait voir que le Lisor, vivant au Sénégal, offre des différences constantes avec le Maclra sluUorum des mers d’Europe, Depuis, M. Sismonda a reconnu que dans son Mactra siultorum, Brocchi avait aussi confondu les deux mêmes espèces. Actuellement distinguées , il y en a quatre dans le terrain tertiaire de l ltalie; nous en avons ajouté une cinquième, le Mactra coraUina de Linné , provenant des terrains subapennins de la Morée ; enfin M. Philippi en a recueilli , on Sicile , deux espèces de plus, les Mactra glauca et soîida. A'oilà donc sept espèces de Mactres bien constatées dans les terrains tertiaires supérieurs , et ce qui est fort re- marquable, c’est qu’il y on a six, qui sont encore actuellement vivantes dans les mers de l’Europe; par un privilège assez singulier, c’est encore parmi ces espèces que se trouvent celles qui passent dans d’autres terrains. Ainsi, par exemple :

Le Mactra stultorim se trouve à la fois en Italie et dans le Crag d’Angleterre.

Le il/ac(m solida, qui vil dans la Manche, existe à l'état fossile en Sicile et dans le Crag en Angleterre et en Belgique.

Le Mactra iriangnla , vivante dans la Méditerranée et les mers d’Europe, est connu à l'état fossile en Italie, en Sicile, en Morée, à Bordeaux et à Dax, dans les faluns de la Touraine, aux environs devienne , et peut-être en Pologne.

D’autres espèces ont un moindre intérêt , et méritent cependant d’être signalées.

Ainsi, \q Mactra glauca vit dans tout l'Océan d'Europe, et se trouve fossile dans le Crag.

Le Maolru striatella de Lamarck vil au Sénégal , et une variété un peu plus épaisse est fossile aux environs de Bordeaux.

Nous devons encore ajouter le Maclra ponderosa de M. Eichwaid , qui , se répandant dan.s les terrains de la Russie et jusqu'en Crimée, peut servir à les caractériser.

11 résulte des investigations, auxquelles nous venons de nous livrer , que l’on peut admettre avec certitude 25 espèces de Mactres fossiles

HUITIÈME FAMILLE.

a 88

flans loate la série des terrains tertiaires de l’Europe. Les terrains ana- logues de* l'Amérique septentrionale sont moins riches, d'après les catalogues dressés par MM. Lea, Conrad et quelques autres naturalistes. Des terrains tertiaires de l'Amériquo méridionale nous ne pouvons citer que les trois espèces , mentionnées par M. d’Orbigny dans la Paléonto- logie de son Voyage en Amérique. Il reste bien constaté que, dans l’état actuel do la science , le nombre des espèces fossiles reste inférieur de plus de moitié à celui des espèces vivantes.

Mactre triangulaire. Macira iriangula.^ Renieri.

PI. 10. fig. 4. 5. 6.

ay. testa parvây trlgonâ^ laUre utroque ùhtusissime carinata ^ nitidâ ^ lœvi i lactea; area lunulâquc suîcatis, dentibus lateraîibus perpen- drculariter striatis,

Mactra Jactea. Poli Test. l. i. pl. i8, f. i3. i4*

Philippi. Moll. Sic. t. i. p. it. 5 et l. 2. p. lo, 5.

Desliayes. ExpeJ. scien. de Morée. Moll. p. 88. 17.

Fossiîis^ Brocchi. Conrli. foss, subap. l. 2. p. 535. i. pl. i3. f. 7.

Philippi, loc, cit. t. I. p, 12. Il® 3,

Sismouda. Syn. metli. anim. inverl. pedem foss. p. 17.

Il est bien évident, ainsi que M. Philippi l’a reconnu, que le Macira triangida de Renieri a été figuré par Poli sous le nom de Macira hetea. Ce qui aura empéché les conchyliologues de s'apercevoir de l’erreur, cela provient sans doute de ce que Poli a fait représenter l’espèce sous un grossissement, qui la rapproche du volume habituel du Mactra îaelea de Cliemnilz et de Lamarck. Cette confusion, de la part du naturaliste napolitain, en a entraîné quelques autres , par la suite , dans la syno- nymie du àUaclra îaetea , et il est actuellement facile de les réparer. Lg Mactra triangida est une coquille, qui reste toujours d’un petit volume. Ainsi que son nom l’indique, elle est triangulaire, presque équilatérale ; les crochets occupent le sommet d’un triangle dont le bord ventral est la base. Le bord antérieur est un peu plus court que le postérieur. La coquille est médiocrement bombée , subciméiforme ; les crochets , lisses et peu saillants , sont médiocrement inclinés du côté antérieur. La lunule , ainsi que le corselet, sont aplatis, ovalaires et nellement circonscrits par un angle obtus et fort net. Ces deux. parties importantes de la coquille sont 'élégamment striées. La surface exté-

LES-MACTRACEES.

rieure porte également des stries un peu plus profondes du côté anté- rieur que du côté postérieur. Ces stries s’interrompent de ce côté, qui reste parfaitement libre. A. l’intérieur, les valves sont lisses et polies ; la charnière est supportée par une lame cardinale, courte et étroite. Sur la valve droite se trouve une grande dent en V, dont la partie an- térieure est beaucoup plus grande que Tautre. En arrière de cette dent existe la fossette du ligament , étroite et assez profonde , mais dont le bord fait une légère saillie sur le milieu de la lame cardinale. Sur la valve gaucho, la dentenV est unpcu plus petite, et l’on voit son extrémité antérieure s’abaisser comme pour joindre l’extrémité antérieure de la dent latérale. Les dents latérales sont courtes, assez épaisses, et striées perpendiculairement de chaque côté. Les impressions musculaires sont grandes en proportion de la coquille ; elles sont semi-lunaires , fort écartées. L’impression palléale, après avoir suivi le bord ventral , s’in- fléchit en arrière et produit une sinuosité étroite dont le sommet se place presque au niveau du cuilleron de la charnière.

GENRE VINGT-NEUVIÈME.

ANATJZUEL1.E. AnaHneUa. (Sow.)

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille ovale-transverse , mince , blanche , diaphane , équi- valve, équilatérale 5 subnacrée, lisse, gonflée, à crochets mé- diocres , peu proéminents , opposés et quelquefois corrodés au sommet; charnière portant au-dessous du crochet un grand cuilleron à peine oblique , étroit, très saillant dans l’intérieur des valves ; une petite dent cardinale, en avant du cuilleron, sur la valve droite , deux plus petites sur la gauche. Impressions musculaires superficielles , peu apparentes , l’antérieure ova- laire, la postérieure arrondie; impression palléale simple, sans la moindre trace de l’inflexion postérieure.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mya, Chcmnitz , Spengler, Gem- lin, Dihvyn.

OBSERVATIONS. Lc genre Anatinelle a été créé par M. Sowerby, dans la 40'= livraison de son Généra of shells , publié, en 1833 ou 183i ,

T. \. PARTIE.

i)

HUITIEME FAMILLE.

290

pour une coquille que ce naturaliste a crue nouvellement découverte , mais qui était connue depuis 1782, époque à laquelle Chemnilz la décrivait et la figurait , sous le nom de ^f\Ja candida. dans le fi* volume du CoHchylie7t~Cabmet. La coquille figurée par Chemnilz appar- tenait a la collection de Spengler; extrêmement rare à cette époque dans les collections, elle n’est pas devenue plus commune depuis; aussi, un assez grand nombre d’auteurs n’ont pu la mentionner que d'après l’ouvrage original de Chemnitz. Schroeter se contente de la citer à la suite des Myes ; Gmelin l'inscrivit dans la 13® édition du Si/stema iiaturœ , et au lieu d'adopter le nom de Mya candida de Chemnitz, il proposa celui de Mya iiicobarica. C'est sous cette dernière dénomination que Wood , en 1814, la mentionna dans son Genei'al Conchologist. Dillwyn la cite dans son catalogue, et M. Wood , en 1 828, en donne une figure très médiocre, copiée de Chemnitz, dans son Index teslacæologicus. Lorsque, quelques années après, M. Sowerby institua le genre Anatinelle, il ne devait pas donner à l'espèce un autre nom, lorsque, ainsique nous venons de le constater, elle en avait déjà reçu deux.

Oapuis que le genre a été créé , il a été généralement adopté , et il méritait de l'être; car il présente des caractères qui le différencient de tous les autres genres connus. Nous l’avons introduit- dans la famille des Mactracées , dans la nouvelle édition des Animaux sftns vertèbres do Lama’rck. M. Reeve, au contraire, dans son Conchologia systematicu, a placé lo genre Anatinelle dans la famille des Myaires, à la suite des Corbules et des Pandores , dans le voisinage du genre Myocama.

Une seule espèce est connue dans le genre qui nous occupe : c’est une coquille ovale-transversc , équivalve, subéquilatérale, à , crochets petits, opposés et peu proéminents au-dessus du bord cardinal. Les bords de la coquille sont minces , tranchants, simples; les valves se joignent exactement dans toute leur circonférence, si ce n’est en arrière , elles laissent entre elles un faible écartement. Le test de cette coquille est mince et transparent; en cela elle se rapproche des Anaiines et des Thracies ; le côté antérieur est arrondi ; le côté posté- rieur e.st circonscrit par un angle peu saillant, mais bien marqué, qui de.ssine un grand corselet très saillant dans le milieu. Toute la portion du bord postérieur , qui correspond' à l’angle dont nous venons de parler, forme une troncature oblique, courte , qui se dessine à l'inté- rieur par une ligne qui coïncide avec celle de l’angle extérieur. Les impressions musculaires sont petites, fort écartées , à peu près égale- ment distantes de la charnière ; l’antérieure , ovale-oblongue , vient

LES MACTRACÉES.

291

s’allonger le long du bord antérieur et tout près de lui ; l’impression postérieure est circulaire ; elle est située à l’extrémité postérieure du bord cardinal . et comprise dans la largeur du plan que circonscrit l’angle postérieur des valves. Une impression palléale simple , rappro- chée du bord ventral et lui restant parallèlè , s’étend d’un muscle à l’autre, sans produire la moindre inflexion.

La charnière est fort singulière ; elle consiste en un grand cuilleron ovale-oblong , s’avançant horizontalement dans la cavité de la coquille , de la môme manière que celui des Lulraires et des Anatines. Cependant il est incliné un peu obliquement en arrière , et du côté postérieur il se rattache au bord cardinal par une côte épaisse, qui se prolonge ensuite dans toute la longueur du bord postérieur et supérieur. Ce cuilleron est assez épais et profondément creusé pour recevoir un ligament interne, proportionné à la cavité il est reçu. Le bord postérieur du cuilleron est simple; il s’élargit en haut , et , se renversant au-dessus du cuü- leron , il change l’extrémité supérieure de celte cavité en une gout- tière à demi recouverte. Sur le bord antérieur , le cuilleron porte deux petites dents inégales, divergentes , dont l’interne est la plus longua. Telles sont les parties qui se remarquent sur la valve droite ; sur la valve gauche . la charnière ne présente presque point de différence; seulement les dents cardinales sont très courtes ; il n’existe aucune trace de ligament externe.

D’après la description que nous venons de présenter des caractères du genre Anatinelle, il devient évident que la coquille, qui lui sert de type , ne peut se confondre dans aucun autre genre connu. Tel que le genre Mye est conçu aujourd’hui , il ne peut recevoir la coquille de r Anatinelle; elle ne peut s’introduire non plus parmi les Anatines , non seulement parce qu’elle manque de l’osselet cardinal, qui caractérise ce genre , mais encore par l’absence de la sinuosité paltéale. Par la mémo raison , celte coquille ne peut entrer ni dans les Liitraires, ni dans les Madrés , et moins encore dans les Cumingia , puisqu'elle manque dos dents latérales , qui caractérisent ce dernier genre. M. Sowerby a donc bien fait de proposer un genre spécial pour le Mya nicobarica ; mais il s’agit maintenant de décider la place que ce nouveau genre doit occu[)or dans la méthode. Nous éprouvons, à son sujet, la môme incertitude que pour le genre Cardilia. Aussi en l’introduisant dans la famille des Mac- Iracées, nous pensons que c’est une place temporaire et provisoire qu'il occupe ; ses rapports ne pourront être définitifs; qu'au moment oii l’animal sera connu.

Rappelons-nous les principes, à l’aide desquels nous avons déter-

*9

292

m:iTlÈ:ME FAMILLE.

miné les rapports de quelques genres embarrassants. Tous les mollus- ques dyuiiaires, qui sont terminés en arrière par des siphons, présentent généralement une sinuosité plus ou moins profonde dans l’impression pallcale. Ainsi que nous le savons , cotte sinuosité ost due à l’existence chez ces mollusques d’un muscle propre, destiné à contracter les siphons dans l'intérieur de la coquille. Nous savons aussi que dans tous ceux des mollusques de la même classe, qui n'ont point de siphons en arrière, l’impression palléale reste simple, et par Je moyen de cette impression, on peut déjà classer un assez grand nombre de mollusques d'après leurs coquilles.

Mais il est des 'genres qui se soustraient à cette règle générale et chez lesquels l’impression palléale reste simple , quoique le manteau se prolonge en arrière en siphons très courts ou présente de simples per- forations, destinées à remplacer ces organes. Nous supposons que les Anatinelles appartiennent à celte série de mollusques dont le manteau est simplement perforé. S’il en est ainsi, le genre, au lieu de rester dans la famille des Maclracées , devra faire partie de celle des Érycines , car les animaux de ce genre ont aussi l'impression palléale simple , et cependant leur manteau , perforé en arrière , a ses lobes réunis le long du bord ventral de la même manière que dans les mollusques à siphons plus ou moins allongés. Nous le répétons , la place que nous assignons au genre Analinelle ne peut être que temporaire, mais pour décider définitivement des rapports du genre, il est indispensable de connaître l’animal.

Nous ne connaissons jusqu’ici qu'une seule espèce dans le genre Analinelle, c’est la suivante.

Anatinelle blanche. Anatinella canclida. Desh.

PI. 8 bis. fig. 4. 5.

Jn, testa ovato-lmnsversâ subœquîiaterâ ^ turgidn}a ^ tenuî ^ fragili ^ canduia^ transhteidâ ^ transversim tenuiter striata, striis îangitndi^ nalibus tennissiniis 'inx perspîcuis oniald', îatere antico rotundato\ postico oblique trnncato., angnlo circumseripto.

Mya candida, Chemn. Comh. f. 0. p. 29. pl. 3. f. 17. 18.

Mya, Schræler. Eiiil. I. 2. p^ 616. u'’ 5.

Mya uicobarica. Omel. Syst. lul. cd. i3. p. 3221.11” 12,

Mya angulata. Spengîcr, Méin. de la Soc. d’hi^l. nat, de Copenh. t. 3.

p, 35. n,‘' I r .

LES MALTUACEES.

2(j3

Mya linguUitii, DilUv, Cat. r. p. 44. u* S.

Id, WooJ. Ccner. Courli. p. 97. n* 1 1,

Id. ^V^^od. Iiid. Tcsiac. pl. 2. 1'. it, Mala.

Anatinelta Sibbaldii, Sou. Gênera of sliells.

Ueshayes dans Lamk. An. s. verL a* éd. t, 6. p. g5.

Reeve. Conch. syst. t. i. p. 56. pl. 38,

Id. Sowerby. Conch. Man. p. 66. f* 70. ^ s

Jd, lïcrrniansen Ind. gener. Mala. prim. l. i. p, 48,

Habite Cey lan, Nicobar, les mers de l’Inde.

Les détails dans lesquels nous venons d’entrer, étant empruntés à la seule espèce connue , elle se trouverait déjà suffisamment caractérisée; nous devons ajouter cependant quelques particularités propres à la faire reconnaître, dans le cas Ton viendrait à découvrir d’autres espèces analogues. Mais , avant tout , nous devons constater l’identité du M\ja candida de Chemnilz avec VAnatinella Sibbaklii de Sowerby. Lorsque l’on vient à comparer les diverses figures et surtout celle de Chemnitz et celle de Sowerby, on serait porté à croire qu’elles représentent deux espèces distinctes. En effet , la coquille de Chemnilz a le bord ventral moins arqué , par conséquent plus parallèle au bord dorsal ; le côté postérieur paraît en proportion un peu plus allongé; mais si nous com- parons la coquille que nous possédons avec les figures en question , nous lui trouverons une forme intermédiaire. Mais ce qui est plus concluant encore, c’est l’exactitude do la description de Chemnitz, qui s’accorde parfaitement avec les caractères de la coquille que nous avons sous les yeux. Chemnitz dit que le Mya nicobarica présente à la surface exté- rieure des stries transverses, très fines et quelquefois irrégulières vers les bords ; ces stries se voient dans VAnaiineîla Sibbaldii de Sowerby. Chemnilz ajoute que d’autres stries, plus fines que les premières, descen- dent des crochets , et ces stries sc trouvent également sur la coquille du zoologiste anglais. On peut objecter que la figure de Chemnitz ne repré- sente aucune trace des petites dents, qui s'élèvent sur le côté antérieur du cuiileron ; mais il faut se rappeler, qu’à cette époque on n’apportait pas à la roprésenlalion des objets d’histoire naturelle l’exactitude que l’on exige aujourd'hui, et l’on conçois aussi qu’un caractère d’une faible importance ait échappé à un observateur aussi exact que Chemnitz.

Cette coquille , rare et précieuse, a 35 millimètres de large , 25 de longueur cl 20 d’épaisseur.

2^4

HUITIEME EAMILLt.

GENRE TRENTIÈME.

GK'ATHODOlff. Gnalhodon. (Gray.)

CARACTÈRES gènériqxtes. Animal ovale-trigone , épais d’un blanc laiteux uniforme , revêtu d’un manteau mince , à lobes égaux , réunis en arrière dans le tiers de leur longueur, ayant les boz'ds simples et dépourvus de tentacules. Deux siphons courts, réunis dans toute leur longueur, terminés par une ouverture simple et sans tentacules. Bouche petite , ovale, entre deux lèvres larges et ridées. Palpes labiales gran- des, triangulaires, très pointues en arrière : l’interne soudée au corps dans la moitié de son étendue ; l’externe attachée au man- teau. Pied assez épais, triangulaire, linguiforme, pointu, surmontant une masse abdominale ovoïde et épaisse. Une paire de feuillets branchiaux lisses, inégaux, tombant de chaque côté du corps dans la cavité palléale et se prolongeant, après s’être soudés, en arrière de la masse abdominale; le feuillet externe le plus court et le plus étroit , prolongé en haut par un bord membraneux.

Coquille ovale-trigone , épaisse, solide, ventrue , subcordi- forme en avant , à crochets grands et écartés ; toute la surface externe revêtue d’un épiderme brun-olivâtre ; valves parfaite- ment closes, blanches en dedans, à bords simples et trancliants. Charnière présentant au-dessous du crochet une cavité pro- fonde, se continuant en un canal fermé jusqu’au sommet des valves et contenant un ligament interne. Sur la valve gauche une petite dent cardinale, ployée en V, et en avant une grosse dent pyramidale, à laquelle vient aboutir la dent latérale anté- rieure. Deux petites dents divergentes sur la valve droite et à côté une fossette conique pour la grosse dent de la valve oppo- sée. Sur chaque valve une dent latérale antérieure courte , une dent latérale postérieure très allongée , l’une et l’autre striées perpendiculairement ; impressions musculaires subcirculaires ;

LES MACTRACEES.

yy J

impression palléale très courte, remontée dans rintérieiir des valves , et pourvue d’une sinuosité postérieure courte et trian- gulaire.

SYNONYMIE GENERIQUE. Rauyia , Desmoulins.

OBSERVATIONS. Le genfc curieux dont nous allons nous occupcv a été institué par M. Gray. Signalé par ce savant à M. Conrad , natura- liste américain, il fut publié d'abord dans le journal de Silliman. Peu de temps après, M. Desmoulins de Bordeaux reçut aussi cette coquille curieuse , et proposa pour elle un genre sous le nom de Jiangia , voulant consacrer dans le domaine de la science le nom de M. Rang, savant marin français, qui , par ses recherches et ses travaux, a contribué à Tavancement de la conchyliologie. Ce double emploi dans la dénomi- nation du genre est d’autant plus pardonnable, qu’il était matériellement impossible à M. Desmoulins de savoir que le genre venait d’être publié en Amérique.

Lorsque, en 1837, M. Gray fit paraître son travail sur la famille des Mactracées dans le MagaMn d'histoire naturelle, il introduisit son nouveau genre dans la famille que nous venons de mentionner. En cela, il prouva qu’il avait étudié avec un soin minutieux les caractères do son genre, et qu’il en avait saisi les rapports. Il était cependant difficile de se défendre de certaines préoccupations , à la suite desquelles quelques naturalistes avaient la pensée que le genre Gnalhodon devait constituer un type à part, intermédiaire entre les Mactres et les Cyrènes. M.Gray fut guidé par la connaissance de l’animal, ou du moins par quelques renseignements, obtenus à son sujet ; car il est à croire que ce savant en aurait donné une description détaillée, s’il l’avait eu sous les yeux. Nous reconnaîtrons même quelques erreurs dans le peu de paroles qu’il en a dites. Depuis les premiers travaux que nous venons de mentionner, les conchyliologues ont adopté le genre de M. Gray, et presque tous l’admettent dans la famille des Mactracées.

Quelques uns n’hésilèrent pas à l’introduire dans la famille des Cycla- dées , correspondant assez exactement à celle des Conques fluviatiles do Lamarck. C’est l’opinion de MM. Potiez et Michaud. M. Swainson n'a- dopta pas l’arrangement proposé par M. Gray. Ce naturaliste, dans son Traité de malacologie, institua sous le nom ôeCyclina une sous-famille, dans laquelle les genres sont jetés au hasard ; c’est ainsi qu’aux genres Cyclas , Cyrena et Galathée , il joint les Cumingia , les Erycines et les Gnathodons. Assurément cet arrangement ne pourrait prévaloir quand

ÜUiriEMK FAMILLE.

1296

mémo la coquille seule donnerait les moyens de décider de ses rapports. L'opinion de M. Anton , qui place le Gnalhodon dans la famille des Gar- diacées, ne sera pas non plus acceptée; rien no la justifie à nos yeux. Tous les genres de cette famille ont le ligament externe; elles ont des dents latérales, mais de formes bien différentes de celles du Gnathodon. Dans les Cardiacées, l’impression palléale est simple et non échancrée, comme dans les Gnathodons; il n’y a donc rien dans ce genre qui le rapproche des Isocardes et des Cardium.

On ne connaît jusqu’ici qu’une seule espèce appartenant' au genre Gnalhodon. Très commune dans les eaux saumâtres du lac Pontchartrain, non loin de la Nouvelle-Orléans, elle était connue des naturalistes amé- ricains, mais confondue par eux dans le genre Cyrène de Lamarck, parce que , en effet , elle a les caractères extérieurs des coquilles de ce genre. Cette coquille est ovale-lrigone ; elle est épaisse, très inéquila- lérale et subcordiforme ; ses crochets sont grands et saillants; ils se contournent on avant, restent fort écartés, laissant entre eux un es- pace profond, comparable jusqu’à un certain point à celui des Arches. La surface extérieure est lisse ou irrégulièrement striée par des accrois- sements; cette surface est revêtue d’un épiderme brun, verdâtre ou jaunâtre. La présence de cet épiderme, comparable à celui des coquilles d’eau douce , Thabilation delà coquille dans un lac d’une eau pou salée, étaient des circonstances propres à favoriser l’erreur des naturalistes américains. Mais il suffît d’ouvrir la coquille et d'en voir la charnière, pour être convaincu qu’elle ne peut se rapprocher de la famille des Conques fluviatiles. A l’intérieur, cette coquille est blanche; les bords sont entiers , tranchants et assez subitement épaissis. Les valves étant rapprochées, elles se ferment très exactement et elles ne laissent aucun bâillement , même du côté postérieur.

La charnière est de^ plus singulières; elle présente immédiatement au-dessous des crochets et dans une direction oblique du haut en bas et d'avant en arrière une fossette profonde, en cuilleron, destinée à con- tenir un ligament interne; mais cette fossette est différente de celle de la plupart des Madrés , car vers le bord dorsal elle est entièrement couverte par le bord cardinal, de cette manière changée en un vrai canal complet qui remonte jusqu’au sommet des crochets. Dans les indi- vidus bien frais et bien entiers, particulièrement dans ceux qui sont jeunes, les crochets, conservant leur intégrité, ne présentent aucune trace de la cavité du ligament. Mais chez les individus vieux, altérés par celte espèce de carie, dont on observe si fréquemment les traces sur les coquilles qui habitent les eaux douces , on retrouve très faci-

LKS MACTKACEKS.

lement le canal du ligament , dans lequel il est resté en place , et cette disposition peut être comparée à ce qu'on voit dans un certain nombre de Spondyles. 11 y a même des Mactres , tel que le MactraSpen- glerl , par exemple , qui offrent une disposition analogue ; seulement le canal, destiné à renfermer le ligament, reste ouvert en gouttière dans toute sa longueur , tandis que chez d’autres Mactres , ainsi que chez les Gnathodon , le canal du ligament se ferme en partie, et il aboutit à la cavité en cuilleron, qui forme la partie la plus large du bord cardinal. En avant du cuilleron s’élèvent deux petites dents cardinales, divergentes ; l’antérieure s’élève d’une base triangulaire. Dans les jeunes individus , la dent cardinale postérieure est bifurquée à la manière de la dent en V, très comprimée de quelques Lutraires et de quelques Mactres. Sur la valve gauche , les deux dents cardinales se réunissent au sommet, en formant entre elles un angle presque droit, et par elles ressemblent bien plus encore à la dent en V des Mactres et des Lutraires. Sur cette valve , il existe en avant une grosse dent conique , sur laquelle vient se joindre le commencement d’une dent latérale antérieure. Sur la valve droite, celte dent conique est reçue dans une fossette d’une grandeur proportionnée, En6n la charnière est complétée par des dents latérales; la dent latérale antérieure est courte , la postérieure est, au contraire, très allongée ; toutes deux sont épaisses et striées perpendiculairement de chaque côté. L’une et raiitrc de ces dents ont des courbures différentes pour s’adapter au contour des valves.

Les impressions musculaires sont d'une médiocre étendue; elles oc- cupent toutes deux la région supérieure de la coquille ; elles sont sub- circulaires et l'antérieure est un peu plus petite que l’autre ; elle est également beaucoup plus rapprochée de la charnière. L’impression palléale est très courte ; elle ne laisse pas sur la coquille cette double ligne que l’on trouve chez des Mactres ; mais elle remonte très haut dans l’intérieur, laissant entre elle et le bord une large zone , qui annonce une largeur égale dans le muscle orbiculaire du manteau. Dans presque toutes les autres coquilles, l’impression palléale prend naissance, soit du bord antérieur du muscle, soit du milieu de son bord inférieur ; mais ici le muscle reste complètement en dehors, et c'est de son bord interne que prend naissance l’impression palléale ; elle descend parallèlement au bord ventral , produit en arrière une petite sinuosité triangulaire, et rejoint ensuite l’impression musculaire postérieure.

L’animal des Gnathodons n’a pas été décrit jusqu’ici. M, Gray se con- tente de dire, qu’il a les siphons courts et séparés , et que les lobes de son manteau sont réunis en arrière. Mais ces renseignements peu précis

HLITlKMt l AMlLLb.

298

sont tout à fait insuflisants, pour établir définitivement les rapports na- turels du genre qui nous occupe. Un jeune voyageur , plein de zèlo et d intelligence, M. Salé, voué par goût à la recherche des objets d’histoire naturelle, a recueilli quelques exemplaires de l’animal du Gnathodon, et il a bien voulu nous en faire l’abandon dans l’intérêt de la science. Il nous a donc été possible d'en présenter les caractères d’une manière complète et d'offrir ici les observations que nous avons faites à son sujet.

Cet animal a une forme semblable à celle de sa coquille ; il est ovale- Irigone , épais et d’unecouleur uniforme , d’un blanc laiteux, Il est en- veloppé d’un manteau mince, transparent, à la circonférence duquel existe un large muscle orbiculaire, qui diminue subitement de largeur, au moment il vient se joindre aux muscles adducteurs des valves. Les lobes du manteau restent désunis , depuis le muscle antérieur jusque vers le tiers postérieur de leur longueur. ils se joignent et forment un véritable cul-de-sac, terminé en arrière par les siphons; on n'apergoit sur toute la circonférence de cet organe aucune trace de tentacules. Les siphons sont courts et inégaux ; loin d'être désunis comme le suppose M. Gray, ils se joignent dans toute leur longueur. Le siphon anal est si court qu'il ressemble plutôt à une perfoiation du manteau qu’à un si- phon véritable. Le siphon branchial est plus étroit ei plus allongé, et l’un et l'autre sont terminés par une ouverture simple , sur les bords de laquelle on n'aperçoit aucune trace de tentacules. L'ouverture intérieure du siphon branchial est garnie , comme dans les Madrés , d’une valvule membraneuse , et comme dans les Madrés aussi le manteau est pourvu de deux longues valvules, parallèles au bord et se continuant dans toute la longueur de la commissure postérieure.

Le pied est assez épais , linguiforme, triangulaire , il ressemble tout à fait à celui des Madrés; par sa base, il se continue avec une masse abdominale épaisse et ovalaire.

La bouche est petite, ovalaire, accompagnée de deux lèvres assez larges , membraneuses , ridées , et la lèvre supérieure est creusée en une cavité peu profonde, destinée probablement à contenir la matière alimentaire avant d’être ingurgitée. Ces lèvres se continuent de chaque côté en une paire de palpes labiales , grandes , triangulaires , couvertes à leur surface d’une multitude de lamelles très fines et très régulières. Ces palpes vont nous offrir une disposition très propre à caractériser le genre. En effet , la palpe interne , au lieu de rester libre, ainsi que dans les Madrés , se soude aux parties latérales du corps dans la moitié supérieure de sa surface. La palpe externe , plus libre et plus détachée, est fixée par sa base à la paroi interne du manteau.

LES MÀCTKACEEb. 3y9

Les branchies sont tout à fait semblables à celles des MacLres. Deux feuillets inégaux descendent de chaque côté du corps; l’interne est le plus long et le plus large ; son extrémité antérieure , terminée en pointe , s'a- vance vers la bouche entre les palpes labiales. La branchie externe, plus étroite, commence plus en arrière, et son bord externe se prolonge vers le dos en un petit feuillet’membraneux, destiné à compléter le canal aquifère sous-branchial. En arrière de la masse abdominale , les feuillets bran- chiaux se réunissent, se prolongent; leur surface inférieure présente une double série d'ouvertures, circonscrites par un petit bourrelet, sur lequel se soude un pourtour membraneux du manteau, qui s’élève autour de l’ouverture intérieure du siphon anal.

Ce que nous venons d'exposer de l’animal du Gnathodon donne la preuve qu'il se rapproche considérablement de celui des Mactres; il lui ressemble par la plupart des caractères fondamentaux. La bouche, les lèvres, la grandeur des palpes labiales, le pied , et surtout les bran- chies , présentent des ressemblances incontestables. Mais les Gnatho- dons diffèrent des Mactres par la brièveté des siphons , l’absence des tentacules à l’ouverture de ces organes, et enfin par la réunion des lobes du manteau, qui s’opère un peu plus haut que dans les Mactres. En appréciant à leur juste valeur les caractères de la coquille et de l'animal, on peut conclure, avec M. Gray, que le genre Gnathodon appartient en réalité à la famille des Mactracées , et que c’est qu’il doit rester dans une méthode naturelle.

Gnathodon cunéiforme. Gnathodon cuneatiis ^ Gray.

PI. 10. %. 9 à 12.

G, lesta ovato-trigonà ^ cunei/ormi ^ antice cordiformi ^ Iccvigatâ epi- dennide Jusco^olivuced indntà; uinhonibns magnis distantihus.

Gray et Conrad. Silliman journal.

Ratifia cjrenoides. Des Moul, Act, de la Soc, linn. de Bord. I. 5. p. 58,

pi. ..

Gnathodon cnneatus, Süw, Généra of .vhells, 30.

Rang, Nouv. Ann, du. Mus, d’iiisl, ual. I. 3.

Gray, Mag. of nal. hisl. Nouv. sér, r. i. p, 77. f, 34,

Gray. Arch. fiir. Nat. I. 4, p, 87,

Anton. Verz, der Coiich. p, lo.

Swaiiison. Trea!. on Malac. p. 370.

Keeve Couch, syst, t. i, p. 62, pl. 43.

Sow. Jun, Coneh. mau. p, i54. 1'. 83.

3oo

.NEUVIEME FAMILLE.

}laiil(‘y. DesiT.-cal, 1. i. p. 35,

Polif.z et Miel), Gall, des Moll. t. 2. p, 194.

('atlow. Conch. oonienc, p, i5,

Wood. Ind. Test, 2* snp. pl. 10. f, 22.

Ainsi que nous le disions précédemment, une seule espèce de Gna- thodon est connue; ce que nous avons dit du genre se rapporte donc à Tespèce et peut servir à la faire reconnaître. Nous nous trouvons par dispensés d'on reproduire une description détaillée; nous ajouterons seulement que cette coquille est d’un médiocre volume, elle est épaisse et solide; sa surface est lisse, quelquefois un peu onduleuse par des dépressions transverses, produites parles accroissements. Tous les indi- vidus adultes que nous avons observés sont corrodés sur les crochets de la même manière que les Unio et les Cyrènes. Ces érosions , dont la cause est inconnue, altèrent quelquefois la forme des crochets, qui sont plus courts et moins courbés qu’ils no devraient l’êlro. Les jeunes indi- vidus sont mieux conservés, et c'est d'après eux que Ton peut bien juger de la forme générale de l’espèce.

Celle coquille est tellement abondante dans le lac Pontebanrain , que les sauvages en ont fait des plate-fornies, pour dresser leurs tentes et les élever au-dessus du mouvement des eaux du lac. On nous a assuré qu’elle se trouve fossile dans les terrains récents do la région méridionale de l’Amérique septentrionale ; elle est longue de 5o millimètres, haute do 48 et épaisse de 35.

NEUVIÈME FAMILLE.

fies IVIcsodesmides. (Gray.)

CARACTÈRES. Animal comprimé, ayant les lobes du man- teau réunis en arrière et prolongés de ce coté en deux siphons courts, séparés dans toute leur longueur; le siphon anal garni de tentacules simples , le siphon branchial terminé par des ten- tacules branchus ; pied allongé , comprimé ; palpes labiales , courtes, dont Tune est soudée au manteau; branchies très inégales.

LES MESODESMiDES.

3ol

Coquille épaisse, solide, parfaitement close, équivalve, iiiéquilatérale; impression palléale simple ou faiblement si- nueuse en arrière; charnière épaisse , portant un ligament in- terne, pourvue de une ou deux dents cardinales, et quelquefois de dents latérales.

Genre Mésodesme.

La famille des Mésodesmides a été proposée pour la première fois par Gray, daus le Synopsis du Musée britannique, publié en 1840. Quelques années après, ce savant zoologiste la reproduisit dans le Cata- logue des mollusques et des coquilles de la Nouvelle-Zélande. En insti- tuant cette famille, M. Gray y introduisit un seul genre, celui que nous avons créé en 1830, sous le nom de Mésodesme. En 1847, M. Gray fit paraître , dans la 15' partie des Procedings de la Société zooîogiquc de Londres , un travail considérable sous le titre de Liste des genres des mollusques vivants, avec leur synonymie et l’indication de leurs types. Ce n’est pas ici qu’il est convenable d’examiner ce travail très utile et do rechercher les principes de la classification adoptée par l’auteur; il nous suffira de dire que M. Gray n’a pas conservé la famille des Méso- desmides ; il la remplace par celle des Papliiadœ , dans laquelle il intro- duit les trois genres Paphia, Anapa^ et avec doute Ervilia. Nous n’adoptons pas ce nouvel arrangement. Avant de le rejeter, recher- chons d’abord ce que c’est que le genre Paphie, qui remplace celui des Mésodesmes , et qui devient ainsi le type de la nouvelle famille.

Le genre Paphia a été institué par Lamarck, en 1 801 , dans le sys- tème des animaux sans vertèbres. En même temps et dans le même ouvrage , ce naturaliste proposait le genre CrassateUe , c’est-à-dire un genre dans lequel il rangeait des espèces à caractères identiques avec celles dupremier. Lamarck ne tarda pas à s'apercevoir que l’un des deux genres était inutile , on conséquence il abandonna celui qui porto le nom de Paphia J et fit rentrer sans exception toutes les coquilles qu’il renfer- mait dans le genre conservé.. Ainsi , si le genre Paphie, dès son origine, contenait deux sortes de coquilles, le genre CrassateUe les reçut aussitôt que le genre Paphie fut rejeté par son auteur. Des deux espèces que Lamarck indique comme type de son genre Pap/na, l’une est une CrassateUe, M. Gray, lui-méme, le reconnaît ; l'autre appartient à notre genre Mésodesme [Paphia glabrata).

En essayant de rétablir le genre Paphia , M. Gray s’est trouvé dans la nécessité de choisir arbitrairement entre les deux espèces pour en faire le type du genre. Rien no justifie l’opinion de M. Gray ; car nous

NEdVlÈME FAMILLE.

3o*.i

pouvons prétendre, avec autant de raison , que l'autre espèce constitue également le type du même genre. On comprend les difficultés de tran- cher de pareilles opinions , surtout pour un genre abandonné par son auteur, et que personne ne peut reprendre sans jeter une fâcheuse con- fusion dans la nomenclature. Il faudrait, d’ailleurs, contester à un natu- raliste le droit qu’il a , de changer lui-même les noms des genres qu’il propose, et d’améliorer, par ce moyen , la nomenclature qu’il introduit dans ses méthodes. Le genre PapMa , abandonné par Laraarck , doit être considéré comme non avenu , comme une chose qui n’oxisle plus. D'ail- leurs le genre Crassatelle le remplace d’une manière si exacte, qu’H contient, confondues, les espèces appartenant aux deux types, que dans l’origine Lamarck avait imposés a son genre Paphia. Il résulte donc de ces observations que le nom de Papliie ne peut être emploj^ comme équivalent , soit des Crassalelles, soit des Mésodesmes. Nous ne voulons pas dire par . que le nom de Phaphiadés, choisi par M. Gray, ne puisse rester à une famille de mollusques acéphalés. Mais comme ordi- nairement le nom de la famille est emprunté à celui du genre principal qu'elle renferme, ce nom serait une espèce de non-sens , puisque lo genre Paphie ne peut pas exister.

Au genre Paphia M. Gray joint un genre Anapa, qu’il crée pour une espèce du genre Erycine , tel qu’il a été réformé par M. Récluz. Nous verrons , en traitant de ce genre , que l’espèce qui en est détachée par M. Gray lui appartient bien et doit y rester.

Quant au genre Erviliaj il a incontestablement des rapports avec les Mésodesmes : mais il en a plus encore avec les Corbules , surtout avec ce groupe si particulier, caractérisé par le Covhula nmliterranea. Ces rapports nous ont fait penser depuis longtemps , que le genre Ervilia devait entrer dans les Corbules ou se placer à leur suite.

En adoptant le nom de Mésodesmides , proposé par M. Gray, nous restreignons , comme il l'a fait autrefois, la famille au seul genre Mé- sodesme. Nous voyons s’établir des rapports insensibles d'un côté entre les coquilles des Mésodesmes et des Mactres, et de l’autre avec les Crassatelles. Nous savons aujourd'hui par M. d’Orbigny que les Cras- satelles doivent être définitivement retirées du voisinage des Mactres et transportées dans celui des Cardites. D’après ce naturaliste, qui ca- ractérise ranimai dans le volume de sa Paléontologie française, ce mollusque aurait les lobes du manteau aussi complètement désunis que celui des Cardites et des ünios. Nous devons regretter, dans l'in- térêt de la science, de ne pas trouver dans l’ouvrage de M. d’Orbigny une description plus complète, plus détaillée d’un animal recherché

LES MESODESMIDES.

3o3

depuis longtemps. Les zoologistes n’onl pas toujours été d’accord sur la place que ce genre doit occuper dans la méthode, et cette divergence dans leurs opinions provient de l'absence de tout renseignement sujet de ranimai.

Les coquilles du genre Mésodesme ont incontestablement des rap- ports avec celles des Mactres. La charnière porte une cavité médiane, , pour recevoir un ligament intérieur ; des dents latérales plus épaisses dans un genre que dans l'autre; une impression palléale médiocrement échancrée en arrière ; tels sont les caractères communs qui les rapprochent. Les Mésodesmes diffèrent des Mactres par l’absence de ia dent cardinale en V ; elles en diffèrent par la forme générale, par leur épaisseur et par la petitesse de la sinuosité postérieure de l’impres- sion du manteau. Ces différences, qui justifient la séparation des genres, seraient insuffisantes pour les classer dans deux familles distinctes, si les animaux n’avaient présenté entre eux des dissemblances profondes. Tl a donc fallu créer une famille particulière pour le seul genre Méso- desme. M. Gray, guidé, soit par les renseignements incomplets de M. d’Orbigny, soit par des faits particuliers, puisés dans l’observation de l'animal, a proposé une famille spéciale pour le genre Crassatelle , et il la rapproche à la fois des Aslartées et des Cardites.

Si nous cherchons actuellement les rapports généraux de la famille des Mésodesmides , il sera facile de s’apercevoir qu'elle ne peut venir à la suite de celle des Mactres , si ce n’est dans un arrangement linéaire. Mais , dans un tableau les genres peuvent être placés sur des lignes parallèles, la famille des Mésodesmides doit être en avant des Alactres , et parallèlement à celle des Donaccs. L’extrême ressemblance qui existe entre les animaux des Donaces et des Mésodesmes justifie noire opinion ; elle sera problablement adoptée par ceux des conchyliologues qui auront étudié, ainsi que nous, les animaux des genres dont il vient d’être question.

GENRE TRENTE ET UNIÈME.

MÉSODESME. Mesodesma (Oe-sh.)

Ll. 10. f. i3. 14.

caractères génériques. Animal ovalaire ou trigune , aplati ; les lobes du manteau réunis postérieurement et pro-

NEUVIÈME FAMILLE.

:.)04

longés en deux siphons, disjoints dans toute leur longueur ; siphon anal bordé d’une rangée de tentacules cylindracés , gros et courts, ce siphon se fermant par deux lèvres longitudinales ; siphon branchial , garni d’une série de tentacules branches , symétriques , inégaux et relevés en coupole au-dessus de l’ou- verture. Pied comprimé, triangulaire, lancéolé; branchies inégales , larges , réunies postérieurement ; feuillet interne plus long , pointu en avant et interposé entre les palpes labiales ; l’externe, tronqué, de moitié plus petit, subauriculé ; palpes labiales fort petites , l’externe entièrement soudée au manteau, si ce n’est par son bord supérieur, qui se continue avec la lèvre suj)érieure de la bouche ; cette lèvre, reployée en avant, formant une cavité avec une ouverture propre, située au-dessus de celle de la bouche.

Coquille ovale ou triangulaire, transverse, épaisse, close ou peu bâillante postérieurement ; charnière ayant sous le cro- chet une fossette étroite et profonde pour le ligament , et de chaque côté, une dent oblongue et simple; impression palléale offrant une très petite échancrure postérieure , quelquefois entière.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mija^ Chcmnitz , Schrœter, Spen- gler, Wood , Gmelin. Macira , Chemnitz , Schrœter, Poli , Bruguière, Gmelin, Dilhvyn , Lamarck, Schweigger, Turton, Audouin, AVood. Tellina^ Gmelin. Donax^ Montagu, Maton et Racket , Pennant, Dorset, Dilhvyn, Turton , Ger- ville, AVood, Fleming. Paphia^ Lamarck, Roissy, Gray.

Crassaiella^ Lamarck , Dufo , Delessert, Scacchi , AVood. Amphidesma^ Lamarck, Payraudeau, Collard des Cherres, i\Iaravigna, Delessert. Erycina^ Sowerby, Sowerby junior.

Donadlla^ Lamarck (olim.), Philippi, d’Orbigny. Meso- âcsma ^ Deshayes, Joannis, Quoy etGaimard, Müller, An- ton , Hanley, Forbes , Lovon , Thovpe , Reeve , Gould , Gmy, Philippi.

LES MKSÜDESMIDES.

OBSERVATIONS. Lgs coquilles' pour lesquelles nous avons créé le genre Mésodesine ont été singulièrement, ballottées de genre en genre par les conchyliologucs qui nous ont précédé. Cbemnilz en connut deux es- pèces ; il comprend l’uno dans le genre Alye, l’autre parmi les Madrés. Il est imité par Schrœter etGmelin , ce qui n'empôche pas ce dernier d'en introduire encore une espèce dans les Tellines. Poli découvrit dans la Méditerranée l’espèce commune aux mers d'Europe, et quoiqu’il en connût ranimai , il l'introduisit dans les Mactrcs.mais avec doute, car il avait remarqué la différence qui existe entre ces animaux L’ouvrage de Poli , peu répandu et trop peu consulté, ne servit pas à détruire les incertitudes des naturalistes à l’égard de^ coquilles qui nous occupent. Tandis que Bruguière les maintient parmi les .Madrés, Spengler les laisse parmi les Myes. Les opinions, comme on le voit, oscillent entre deux déterminations. En t80d, Montagu mentionna l'espèce de la Méditerranée qu'il retrouva sur les cotes de la Grande-Bretagne. Il est à présumer que cet auteur, ordinairement'' exact et scrupuleux , n'aura pas fait attention à la charnière , et , tro]) conliant dans les rapports que- présente la forme extérieure, il introduisit l’espèce dans le genre des Donaces, (luoiqu'clle n’en eût aucun des caractères fondamentaux. Presque tous les auteurs anglais conserveront dans le genre Donaciî cette espèce qui ne lui appartient pas, et, cordre leur habitude, ils abandonnèrent l'opinion de Gmelin qui , dans lu I édition du Systciwi naUirœ, l'avait comprise au nombre des Tellines. Au reste, à ce sujet , Gmelin avait accepté l'opinion do Scliroeler qui , dans son Essai d'une classification des coquilles de Linné, se servant d’un figure assez exacte de Lister, l’avait rangée au nombre des Tellines. Tandis que quelques autours , 'tels que DilKvyn, Turton cl Wooefj plaçaient une espèce flans le genre Donace, ils en rangeaient d’autres parmi les Mactros.

A l’égard du groupe de mollusques qui nous occupe, Lamarck n‘;i pas moins laissé de confusion dans la méthode que ses devanciers. Nous trouvons- dans, le système des animaux sans vertèbres ( 1 80 1 ) un genre Paphic, pour lequel l’auteur présente doux types, Tun est une Crassa- telie, l’autre est un Mésodesme. Peu de temps après, Lamarck renonça à son genre Paphie, et le remplaça par celui des Crassatelles , dans lequel il confondit aussi les mêmes coquilles. Plus tard l’espèce dos mers d'Europe, rapprochée de coquilles de divers genres, devint l’occasion d’un genre />on«ci//a , inscrit dans les tableaux méthodiques, publiés en 1812, dans l’Extrait du cours. A cette époque, Lamarck ne donna aucune déGnition de ce genre nouveau ; seulement , on sut , par tradition, qu'il renfermait le Doyiax plebeia, de Montagu. Ce T. î. 'i* PARTIE.

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genre Donacille, n’ayant pas satisfait Lamarck , il l’abandonna comme il avait fait des Paphies , et le remplaça par un genre équivalent, pour lequel il proposa le nom d’Amphidesme. Pour so convaincre que le genre Ampbidesme remplace exactement celui précédemment nommé Donacille, il sufiitde rappeler ce que Lamarck lui-même dit à ce sujet, dans les observations relatives au genre Amphidesme : « Depuis assez » longtemps, dit notre savant naturaliste , j’avais établi ce genre, dans » mes cours, sous le nom de Donacille {Extrait du cours, p. 107); » parce que l’espèce que je connus d’abord avait l’aspect d’une Donace. » {Animaux sans vertèbres, t. V, p, 390). Nous rappelons les paroles mêmes de Lamarck , pour que l’on sache bien que le genre Donacille n’avait plus aucune valeur. Ce n’était plus qu’un nom, auquel il n’était plus possible de rattacher aucun genre quelconque, abandonné qu’il était par son auteur. Ce qui prouve, au reste , que Lamarck n’avait pas d’abord considéré ce genre Donacille comme un type dans lequel le Donax plebeia aurait occupé la première place, c’est qu’il range cette espèce avec une autre, qui en est très voisine dans son nouveau genre Amphidesme; de plus, il confond les espèces les plus voisines de celles-ci, soit parmi les Mactres, soit parmi les Crassalelles. Cela donne la preuve la plus évidente, que le genre Donacille ne peut être l’équivalent de notre genre Mésodesme, puisque Lamarck n’en a pas reconnu les caractères distinctifs, et qu'il distribue dans trois genres des coquilles que nous réunissons en un seul. Les naturalistes contenl- porains de Lamarck , Dilhvyn , ïurlon, Schweigger, Gerville, se con- formèrent à l’opinion de Montagii ou à celle de Chemnitz. A peu près à la môme époque, M. Sbwerby, dans son Généra of sheîts, croyant re- trouver dans le Donax plebeia et quelques autres espèces voisines les caractères du genre Erycine , de Lamarck , il les figura et les caracté- risa sous ce nom ; mais cette erreur était facile à rectifier. Les auteurs qui suivirent, oublièrent on abandonnèrent les opinions, antérieures à celles de Lamarck; mais ils durent éprouver de l’embarras, pour savoir lequel des trois genres ils préféreraient, pour y placer les coquilles qui nous occupent. Serait-co des Mactres, des Crassatelles ou des Amphi- desmes? Ce dernier genre, le plus mauvais de tous, celui dans lequel ces coquilles étaient le plus hors de leurs rapports, fut cependant pré- féré, uniquement parce que Lamarck y avait compris l’espèce des rtiers d’Europe, et que les personnes qui mentionnèrent le genre s’étaient plus spécialement occupées des Mollusques de nos mers.

Quand même nous aurions voulu conserver le nom de Donacille au ffenre que nous nous proposions d’établir, nous ne l’aurions pu , sans

LKS MESODESMIDES.

Gütraîner une confusion fâcheuse dans la nomenclature : puisqu'en effet à ce nom do Oonacille se rallnchait , do l’aveu do Lamarck lui* même, l’idée d’un genre conslilué, comme celui qui porto actuellement le nom d’AmpIiidcsme. Or, notre genre Mésodesme, destiné à réunir des coquilles distribuées dans trois des genres de Lamarck, ne devait pas plus porter le nom de Donacille que celui de Mactre ou de Crassatelle. Si , en réformant le genre indigeste des Ampliidesmes de Lamarck, les conchyliologues avaient consenti à prendre pour type VAmphidesma donacîUa, il aurait fallu tellement modifier le genre en question, qu il n’aurait plus répondu aux caractères essentiels que Lamarck lui imposa. Il fallait donc, de toute nécessité, en réunissant en un genre des co- quilles, dont les caractères étaient méconnus, lui donner un nom nou- veau , car il n’en existait aucun dans l’ancienne nomenclature qui pût lui être appliqué sans inconvénient. Au reste , si un nom approprié se fût trouvé dans les ouvrages de Lamarck, le genre aurait été constitué , ce qui eût rendu le nôtre parfaitement inutile.

A l'exception de quelques uns , tous les ouvrages que nous venons de citer sont antérieurs à 1830, époque à laquelle nous proposâmes le genre Mésodesme, danslesecond volumede l'Encyclopédie méthodique. Ce genre a eu pour but de rassembler sous des caractères communs et par- faitement identiques des coquilles, qui avaient été distribuées, ainsi que nous venons de le voir. Elles avaient précédemment appartenu aux neuf genres suivants: Mya , Mactra ^ Teilina ^ Donax, Paphia^ D&iiaciUa , Crassatellaj Amphidesma , Erycina. Une fois rassemblées sous nos yeux, elles nous offrirent des caractères d'une telle identité, qu’il était impossible de ne pas reconnaître en elles un très bon genre, très diffé- rent de tous ceux dans lesquels les espèces avaient été dispersées. Aussi, à dater de celle époque, ceux des conchyliologues, qui eurent connaissance de notre genre Mésodesme , s'empressèrent de l’adopter. Nous citerons particulièrement MM. Quoy et Gaimard qui, au retour de leur second voyage de circumnavigation , nous communiquèrent avec une grande bienveillance l'animal de l’une des espèces qu’ils avaient recueillies dans les mers australes. Cette communication nous a permis de confirmer, pour les caractères de l’animal, la valeur de ceux pré- sentés parles coquilles. Nous n’avons pu alors en donner une description détaillée, mais nous pûmes cependant apercevoir les différences qu’il offre avec les animaux des genres déjà connus.

M. Philippi, dans le premier volume de son Enumeralio inollusconm Sicüiæ, n’ayant pas connaissance de notre travail sur le genre Méso- desme, tenta de reconstruire le genre Donacille de Lamarck, lui don-

NEUVIÈME FAMILLE.

nantpour type ï Amphidesma donacilla de ce naturaliste. Mais depuis, il a abandonné ce genre Donacille, et il a adopté notre genre Mésodesme dans le second volume de l'ouvrage que nous venons do citer.

Par un procédé très étrange, M. d’Orbigny, dans le troisième volume des termhis crétacés dosa Paléontologie française^ a l'occasion du genre Mésodesme , nous prête des opinions diamétralement opposées à celles que nous professons depuis longtemps. M. d'Orbigny pousse l'assu- rance jusqu'à citer la page de la nouvelle édition des Jn/moï/x sons ver- tèbres de Lamarck. dans laquelle il prétend que nous considérons l'an- cien genre Donacille de Lamarck , comme équivalent de notre genre .Mésodesme, « On pourrait se demander alors , dit M. d'Orbigny, pour- » quoi M. Desliayes n’a pas conservé le genre Donacille , au lieu de lui )) donner un nom nouveau. Suivant les lois d'équité que je me suis im- » posées, je crois devoir revenir au nom de Donacille, donné par La- » marck. » On voit par ce peu de mots que l'auteur a voulu traiter d’une matière qui lui est parfaitement étrangère ; car, pour peu qu'il se fût donné la peine de lire la page de l’ouvrage, à laquelle il renvoie, il aurait vu que, loin de trouver semblables le genre Donacille et nos Mésodesmes, nous déclarons, de la manière la plus positive, que ces genres diiTèrent, autant que les Mactrcs, les Crassatelles, les Amphi- desines , dans lesquels nous avons puisé les premiers éléments de notre genre. On voit , au rosie , à la manière dont iM. d’Orbigny a caractérisé le genre Donacille, qu’il en connaît fort peu l'animal, quoiqu'il ait cherché à en présenter les caractères. On pourrait même supposer qu'il ne connaît guère mieux les coquilles , puisqu’il les déclare inéquivalves , tandis qu'en réalité il n’en est pas une seule qui offre ce caractère. Ce qui prouverait la justesse de notre assertion , c’est qu’il ajoute que le ligament est interne et externe, que le ligament externe est court, puis, qu'il pénèb'e en dedans et se loge dans un largo cuilleron saillant. Or, dans tous les Mesodesmes , il n’existe qu'un seul ligament qui est interne, et ce ligament est toujours logé dans un cuilleron étroit et profond ; ce tlui est bien différent de ce que M. d'Orbigny en dit. Il est donc à croire que les espèces inscrites sous le nom de Donacille , dans la Paléonto - logie française, n’appartiennent point à notre genre Mésodesme.

Il ne nous suffisait pas de créer un nouveau genre, il fallait encore rechercher ses rapports les plus naturels dans la méthode. A voir l’en- semble de ses caractères , ce genre nous a paru intermédiaire entre les Mactres et les Crassatelles, formant un chaînon, propre à rattacher deux genres qui , bien que placés dans la môme famille par Lamarck, offrent cependant, dans leur ensemble, des différences considérables.

LES MESUDESMIDES.

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Les Mactres et les Crassalelles ont le ligament intérieur. Voilà la raison pour laquelle Lamarck les place parmi ses Mactracées. Les Madrés sont généralement des coquilles minces . avec des dents latérales ; tandis que les Crassalelles sont épaisses et toujours dépourvues de dents laté- rales. Les Mactres sont plus ou moins bâillantes; les Crassalelles, au contraire , sont parfaitement fermées. Mais il y a des caractères d’une plus grande valeur, qui semblent éloigner les Crassatellos de la faibille des Mactracées. Dans les Mactres, en effet, l’impression palléale est toujours sinueuse du côté postérieur; elle est simple et entière chez les Crassalelles. Il est donc évident que l’animal des Mactres est prolongé en arrière par des siphons ; il paraît certain , au contraire , chez les Cras- satelles, que les siphons manquent ou qu’ils sont très courts.

Nous apercevions dans l’ensemble des caractères de notre genre Mésodesme des nuances insensibles entre les genres que nous venons de comparer, et c’était pour nous un motif de l’introduire entre eux, dans la famille des Mactracées. Nous trouvions, en effet, dans les Méso- desmes, des coquilles pins épaisses que les Mactres, mais conservant une charnière analogue à celle de ce genre. C’est ainsi qu'elles présen- tent un cuilleron médian , des dents latérales mais sans aucune trace de la dent cardinale en V, caractéristique des Mactres. Nous trouvions dans nos Mésodesmes des coquilles parfaitement closes comme les Cras- satelles; et l’impression palléale nous montrait une diminution insen- sible et graduée de la sinuosité postérieure qui, disparaissant dans quel- ques espèces, établissait une analogie de plus avec les Crassatelles. Tous ces caractères transitoires, écrits si nettement sur les Mésodesmes, nous offraient les moyens d’une classification naturelle. Mais, pour établir définitivement les rapports entre les genres, il faut observer les animaux qui, souvent, présentant des caractères imprévus, dérangent les rap- ports que l’on avait conçus d’après les coquilles seules; et ceci nous est arrivé au sujet des Mésodesmes, lorsque nous eûmes observé l’animal vivant de l’espèce qui habile les mers d’Europe.

II faut se le rappeler, chez les Mactres, le manteau se prolonge en arrière en doux siphons réunis dans toute leur longueur. Dans les Méso- desmes , ces organes sont complètement di.sjoinls, et ce caractère lui seul suffit pour séparer les deux genres , qui doivent appartenir à deux familles différentes. M Gray la bien senti , quand , en I 840 , il a pro- posé la famille des Mésodesmides dans son Synopsis du Musée hùtan- 7nqiie. Les observations que nous avons faites sur l'organisation du Mé- sodesme Donacille, nous ont donné la preuve de l utilité de la famille, proposée par M. Gray, et nous l’adoptons ici pour la première fois.

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Dans l’ordre naturel , la famille des Mésodesmides ne devrait pas se trouver à la suite de celle des Mactracées ; on peut dire, pour la carac- tériser en quelques mots, que les mollusques qu’elle renferme sont des Donaces à ligament intérieur. 11 faudrait donc, pour bien com- prendre les rapports naturels de cette famille, que les genres fussent arrangés sur des embranchements, marchant parallèlement entre eux , de manière à pouvoir placera la môme hauteur, au môme niveau , d’un côté les Donaces et de l’autre les Mésodesmes. L’arrangement qu’il est possible de réaliser dans un tableau méthodique devient impossible , quand il faut exposer dans un ouvrage une série de familles et de genres.

La forme dominante des coquilles du genre Mésodesme est la trian- gulaire ; en cela , elles ressemblent aux Donaces , à ce point que l’on pourrait confondre les deux genres , si l’on s’en rapportait uniquement à ce caractère de la forme extérieure. Toutes sont transverses, et si , dans le plus grand nombre , le côté postérieur est subitement tronqué , il en est quelques espèces chez lesquelles ce côté s’allonge , la tronca - ture disparaît insensiblement, et la coquille devient presque équilaté- rale. La forme générale, insensiblement modifiée , est devenue réguliè- rement ovalaire, do trigone que nous l’avons vue d’abord. Tous les Mésodesmes, sans exception , sont équivalves , inéquilalérales ; le côté postérieur étant toujours plus court que l'antérieur. La surface exté- rieure est généralement lisse; elle est revêtue d'un épiderme corné, luisant , assez solide ; il dépasse peu le bord des valves ; mais le long du Ix)rd dorsal, en avant et en arrière des crochets, il passe d’une valve à l’autre, et contribue ainsi à les clore de ce côté. L’épiderme, im- planté le long du bord dorsal , s’épaissit quelquefois avec l’âge, au point de simuler un ligament externe fort allongé; mais il est impossible de se méprendre sur la nature de ce faux ligament, puisqu’il se montre in- distinctement de chaque côté de la charnière. Dans les coquilles, telles que les Amphidesmes, par exemple, chez lesquels il existe en réalité un double ligament , le ligament externe est toujours situé du côté pos- térieur, implanté sur des nymphes plus ou moins apparentes. Nous trouvons la preuve de l’absence du ligament extérieur chez les Méso- desmes, non seulement parce que Fépiderme qui le simule s’étend , comme nous l’avons vu, en avant et en arrière , mais encore par l'ab- sence de nymphes ou de callosités propres à recevoir un véritable liga- ment.

Aucune espèce de Mésodesmes, actuellement connues, ne nous a offert de côtes longitudinales. Quelques unes seulement ont des stries trans-

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verses ; toutes les autres sont lisses ; presque toutes les espèces connues sont blanchâtres , grisâtres ou légèrement transparentes comme de la corne. Une seule espèce, celle de POcéan d'Europe , est ornée de cou- leurs vives et variées. Les bords des valves sont simples, minces et tranchants; ils s’épaississent assez subitement vers l’intérieur; ils se joignent exactement dans toute la circonférence; ils ne présentent jamais ces fines dentelures que Ton rencontre dans presque toutes les Donaces. Les crochets sont généralement médiocres et peu saillants ; placés en arrière, dans le plus grand nombre des espèces, ils sont opposés , rapprochés et à peine inclinés en avant. Le côté postérieur est toujours le plus court , dans toutes les espèces sans exception ; mais dans celles qui ont une forme triangulaire, ce côté se raccourcit beau- coup , et dans Tune d’elles , il fait un angle droit avec Taxe transverso de la coquille. Les Mésodesmes ne nous offrent ni lunule, ni corselet net- tement circonscrits. La surface interne est lisse, blanche , et l'on aperçoit très nettement empreintes les impressions des muscles et du manteau.

Les impressions musculaires sont assez grandes , presque égales ; toutes deux situées dans la région dorsale de la coquille , à peu près à égale distance de la charnière. Dans les espèces triangulaires, la postérieure se rapproche davantage du point cardinal , que dans les espèces ovales ou oblongues. L’impression antérieure est ovalaire-sub- trigone ; elle est située de manière à diviser, à peu près en deux par- ties égales, la longueur du bord dorsal antérieur. Très rapprochée du bord, son extrémité supérieure se prolonge au-dessous de lui, et cette prolongation est due h la présence, sur ce point, de l’împres- sion du muscle rétracteur antérieur du pied. L’impression postérieure est ovale ou subcirculaire; elle est située au-dessous et à l’extrémité du bord cardinal. Dans les espèces triangulaires , elle descend un peu plus dans la région ventrale que chez les espèces ovalaires. Ces impressions sont creusées profondément dans le lest ; en cela , elles ressemblent à celles de la plupart des Crassatelles; l’impression paliéale elle-même, habituellement superficielle, laisse une empreinte profonde qui se dé- coupe nettement sur la surface interne des valves. Il est des espèces chez lesquelles on reconnaît la différence d'organisation des deux parties du manteau. Tout ce qui est en dedans de l’impression, correspondant par conséquent à la portion mince de l’organe , est d’une couleur un peu différente de celle des bords et des impressions musculaires. On retrouve donc ici, d’une manière bien évidente, la preuve que le manteau, en exerçant les fonctions d'organe sécréteur de la coquille, les accomplit un peu différemment sur les deux parties avec lesquelles il est èn con

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MiUVlEMK FAMILLE.

tact. L’impression palléale s’éloigne du bord des valves et se porto à l’intérieur ; au côté antérieur, elle s’inflécliit en dedans et laisse une partie du bord beaucoup plus large que dans le reste de son étendue; elle descend obliquement do haut en bas et d'avant en arrière, pour gagner le bord ventral , après avoir quitté l'extrémité inférieure de l’impression musculaire antérieure. Cette disposition se manifeste parti- culièrement dans les espèces les plus triangulaires, comme le Meso~ dcsma donacilla. Dans les espèces ovalaires,, l impression reste plus exactement parallèle au bord ventral; parvenue vers le niveau de l’im- pression musculaire postérieure, elle rentre sur elle-même et forme une sinuosité postérieure, variable selon les espèces, mais généralement petite, étroite, assez souvent subtriangulaire. C'est dans le Mesodesma donacilla que la sinuosité palléale est plus grande; elle est presque nulle dans le Mésodesnio trigone, ainsi que dans le Chemnitzii ; mais nous avons deux espèces ovalaires , à test plus mince, et chez les- quelles la sinuosité palléale, très étroite, s’avance en suivant Taxe transverse, jusqu’au niveau de lu charnière.

La charnière , tout en conservant de l'analogie avec celle dos AJaclres et des Crassatelles , en ditîère suffisamment pour caractériser le genre. Elle SC compose , immédiatement au-dessous du crochet, d’un cuil- leron étroit et profond , dont le bord est plus ou moins saillant dans l’intérieur des valves. Sur ce cuilleron s’implante un ligament in- térieur, étroit et épais. En avant do cette fossette s'élève, sur chaque valve, une dent cardinale, plus ou moins épaisse selon les espèces, simplCj oblique, quelquefois légèrement bifide à son extrémité. II est des espèces chez lesquelles cette dent cardinale est réduite à l'état rudi- menluiro. Dans toutes les espèces que nous connaissons, nous en re- trouvons au moins les traces ; il y a même des espèces, chez lesquelles nous observons aussi le rudiment d’une dent cardinale postérieure, s’éle- vant le long du bord postérieur du cuilleron. Outre les dents cardinales, s’élève de chaque côté de la charnière une dent latérale, épaisse et solide, tantôt courte et simple, comme dans le Chemnitzii^ tantôt plus allongée et finement striée, comme dans le Jciwmn de M. Johannis. Cette dernière espèce est l’une de celles qui se rapprochent le plus des Madrés, tout en conservant cependant les caractères des Mésodesmes.

Les Mésodesmes sont des coquilles d’une médiocre grandeur; quel- ques unes pourtant deviennent assez grandes ; elles ont une épaisseur (jui les rapproche des Crassatelles. Nous en connaissons acluellemenl vingt-trois espèces, distribuées dans toutes les mers, mais plus particu- lièrement dans les mers tempérées des deux hémisphères. Ce sont des

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coquilles littorales, elles peuplent en abondance les plages sableuses elles s’enfoncent, à une petite profondeur, en se servant d’un très long pied linguifornie qui . sortant par l’extrémité antérieure de la coquille , creuse aisément le sal)le , au moyen d’un mouvement vermiculaire très rapide. Nous avons fréquemment trouvé l’espèce de la Méditerranée sur une petite plage peu éloignée de la station d’Hiver , au-dessous du fort’ génois , à quelque distance de Bone Ce petit mollusque habite particu- lièrement la région de la plage battue par la lame, mais qui , dans les temps calmes , est susceptible de rester à sec pendant plusieurs jours. Néanmoins , ce Mésodesme ne change pas de place ; plongé dans un sable humide, on peut marcher, sans s’en douter, sur des milliers d’in- dividus. Au reste , ce mollusque ne se creuse pas une demeure bien pro- fonde. On lo trouve à quelques centimètres de la surface, et en jetant du sable sur un tamis ou un filet a fines mailles, il est possible de re- cueillir un grand nombre d’individus. L’animal ne se montre jamais à l'ardeur du soleil ; mais si le ciel est couvert, on le voit fréquemment faire sortir leurs siphons à travers lo sable et les épanouir à sa surface. Ayant eu des individus vivants sous les yeux pendant plusieurs jours . nous avons pu nous assurer, que c’est surtout pendant la nuit, que se meuvent le plus les Mésodesmes de la Méditerranée; ils changent sou- vent de place, et, pour cela, ils sortent de leurs trous et se laissent emporter par le Ilot qui les entraîne à une petite distance; là, ils s’arrê- Uml et creusent assez rapidement une nouvelle demeure, pour ne pou- voir plus être entraînés par le flor qui succède à celui qui les a mis en mouvement. Quelquefois, au lieu de descendre sur la pente de. la plage , ils y remontent, poussés par le flot qui s'avance. La facilité qu’ils (iiit de remuer le saWe, leur permet de se creuser des galeries obliques et de reparaître à la surface, assez loin du point ils s’étaient enfoncés.

Jusqu’ici nous ne connaissons aucune espèce de Mésotlesme à l’état fossile dans les terrains tertiaires. M. d’Orbigny eu mentionne deux dans les terrains crétacés ; mais nous avons bien des raisons de croire que ces espèces n'appartiennent pas au genre en question. D’abord M. d’Or- bigny en a jugé d’après des moules, et déjà pour l’une des espèces [Mesodesma compressa), elle n’est certainement pas du genre dans lequel elle est placée; car, dans tous les Mésodesmes, la charnière est épaisse et puissante ; elle est fortement accusée sur le moule , comme on peut le voir dans les moules artificiels de M. Agassiz. Or, sur celui (iguré par M. d’Orbigny, le bord cardinal ne présente aucune trace de c-cttc forte charnière. Les impressions des muscles et du manteau, si nettement imprimées dans les Mésodesmes vivants, ainsi que dans le

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moule artificiel , ne se montrent pas . dans l’espèce de M. d’Orbigny. Quant à la seconde , elle est plus bombée qu’aucune de celles connues ; ses croche! s sont trop infléchis pour laisser la place des cuillerons; et nous n’apercevons , sur le côté antérieur, aucune trace de la dent laté- rale; au reste, dans le genre qui nous occupe, le côté postérieur est toujours le plus court; c'est le contraire dans le Douaci7/a Couîoni de M. d’Orbigny ; nous sommes donc autorisé à déclarer que, dans notre persuasion , aucune, espèce de Mésodesme ne s’est encore rencon- trée à l’état fossile. M. Dunker, dans le Paleontographica , qu’il publie avec M. Meyer, décrit et figure une coquille du Lias , sous le nom de Mesodesma Genmri. Cette espèce a une forme qui la rapproche du Mesodesma cornea ; mais pour l’admettre dans le genre , il faudrait que la charnière eût une' fosselte médiane pour le ligament et des dents la- térales , et ces parties essentielles , les figures ne les montrent pas.

1. Mésodesme deQuoy, Mesodesma Qiioyi. Desh.

PL 10. f. 13, 14.

M. testa ovatu-trigonâ^ Jœvigatâ , paUide spadiceâ , postlce oblique truncatâ; latere antico longiore^ compressa^ angustiore; fossulà cardinali profundâ ^ angustâ.

Desh. Eucycl. melh. vers, t, a. p. 443. ii* 3.

Callow. Cuncli. nomeiicl. p. i6.

Habite la NouvcUe>Zélaude.

Coquille ovale-trigone , transverse , très inéquilatérale , aplatie , lisse , ou irrégulièrement striée par ses accroissements. Son côté postérieur, qui est leplus court, est obliquement tronqué comme dans les Donaces; un angle très obtus, qui s’évanouit insensiblement vers l'angle posté- rieur et antérieur, limite le côté postérieur. Le côté antérieur est insen- siblement atténué; il est allongé, comprimé en coin et tranchant. Une lunule profonde, étroite, semblable à une fente, s'étend depuis les cro- chets jusque vers le milieu de la longueur du bord antérieur et supé- rieur. En dedans , la coquille est d'un blanc subcorné; l’impression palléale, fortement rentrée à son extrémité antérieure, forme de ce côté une inflexion marquée. Le cuilleron de la charnière est profond, étroit et saillant dans rintérieur des valves. Sur son bord antérieur s’élève une dent cardinale oblique , longue et étroite , appartenant à la valve gauche seulement. Sur la valve droite se trouve une fossette cor- respèndàntè, et seulement un petit pli très étroit, qui rèmplace la dent

LES MËSODESMIDES.

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de la valve opposée. A l’exlérieur, cette coquille est d’une couleur fauve très pâle , et cette couleur est interrompue à des distances inégales par des zones transverses, étroites, d’un blanc laiteux ou d’un blanc grisâtre. Cette coquille est longue de 42 millimètres , haute de 27 millimètres , épaisse de 12 millimètres.

2. Mésodesme cornée , Mesodesma œmea. Desh.

M. testa ovatO’tri^onâ, transversâ, posteriüs breviorcy obtusâ^ lœvigatây crassây albo-fulvo-griseo-'variegatây subradiatâ, intus albâ Dtl griseo^macuîatâ.

Lister. Conch. pl, SSg. fig, aaS.

Telîina, Schroeter. Einl. t. 3. p, la. 35,

Tellina 'variegata, var j3. Gmeliu. Syst. uat. ed, i3. p. 3a37. 45.

Mactra cornea, PoU. Test, des Deux-Sicil. t. i. p. 73. pl. 19. f. 8 à ii.

An Mya donacina? Méin. de la Soc. d’hist. nat, de Copenii.

t. 3, p, 4o*

Donax plebeia. Montagu. Test, brit, p. 107, pl. 5. f. 2,

Id. Maton et Rackett. Liun. trans. t. 8. p. 76.

Id. Pennaut. Brit, zool. éd, ( iSra). t. 4. p. 199. a" 4.

Id, Dorsel. Catal. p. 38. pl. 5. f, i3.

Id^ PuUney io Dorset. Cat. p. 32.

Id. Dillwyn. Cat. t. i. p, iSa. g.

Amphidesma donactUa, Lamarck. Anim. s. vert, t. 5. p, 490* o* 2.

Id, Turton. Couch. dicl. p. 42, 4.

Id, Turton. Brit. Fauna, p. i56,

Id. Xuilon, Conch. ius. brit. p. 126.

Donax plebeia. de Gerville. Cat. des coq, de la Manche, p. aS. 4.

Erycina plebeia. Sowerby. Gen, of shells. 10. f. 3.

Amphidesma donacilla. Payraudeau. Cat. des moll, de Corse, p. 3r. 42.

Donax plebeia. Wood. Ind. testac. pl. 6. f. 9.

Amphidesma donacilla, Collard des Cherres. Calai, des test, du Finist. p. r5.

Mesodesma donacilla, Deshayes. Hxpéd. scient, de Murée, zool. p. 90. 22.

Id. Deshayes. Eucycl. mélh. vers. t. 2. p. 444» t»® 5.

Id. Deshayes , dans Lamarck. Anim. s. vert, a* éd. t. 6. p. 126. a. p. r33. 6.

3i6 NEÜVIBME FAMILLE.

Crassatella? cor//c£r, Scacchi. Caf, conch. regii. iieap. p. 6.

DonaciUa Lamarchii. Phi'ippi, Knuin. moll. Sicil. t. i. p. 87.

Amphidesma donaciïla. Maravigna. Méin. p. servir à Thist, jiaL de la Sicile, p. 75.

Erycina plebein, Sowerby. juu. Concli. luan. f. 86,

lleeve Courh. sysl. t. i. p. 65. pl. 45. f. 5.

Mesodesma donacUla. Hanley. Descript. catal. p. 89.

/</, Forbes, Report nn theOEgean inverl. p. t44.

Thorpe. Riit, mar, concli. p, 53,

Calîow. L'oiicli. nomenclat. p. 16.

Donax plebeia. Fleming. Rrit. anim. 2* cd. p. 4^4»

Mf sodesmn tlonacilla. Philippi. moll. Sicil. t. 2. p. 29.

Habite l'Océan d’Kurope.

Nous avons été obligé de changer le uoin, le plus généralement reçu, pour désigner celle espèce; abondamment répandue dans toutes les mers de l’Europe , elle a été connue de Lister et do la plupart des con- chyliologistes, ainsi quele témoigne la synonymie qui précède. Schrocler, qui avait préparé les clémenls d’une Conchyliologie plus complète que celle de Linné , avait puisé dans les ouvrages de ses devanciers toutes les espèces non mentionnées dans la IS*" édition du Syslema miuræ , et les avait classées à la suite des espèces linnéennes, en les désignant, non par une dénomination spécifique, mais par un numéro d’ordre. .lugeant du Mésodesme qui nous occupe d’après la figure de Listeiq il l'intro- duisit parmi les Teiiines. Gmelin accepta celte opinion; mais, au lieu d’en faire une espèce distincte , il la confondit à titre de variété dans une espèce de Telliue déjà connue, llientôt après, Poli décrivit et figura celte môme espèce dans sou grand ouvrage, et lui imposa le nom de Mactra cornea. Ce nom de cornea est donc le plus ancien et par cela seul il doit être conservé à l’espèce; on doit donc rejeter celte dénomi- nation 6e plebeia imposée en 1803 par Montagu , c’est-à-dire dix ans après la publication de celle de Poli. On conçoit dès lors que tous les autres noms, proposés depuis cette époque, doivent être définitivement rejetés.

Le Mesodesma cornea est l’une des espèces que l’on distingue le plus facilement; car il est le seul qui soit orné de couleurs variées. C'est une petite coquille donaciformo , aplatie , lisse , ovale-lransverse très inéquj- latérale, ayant le côté postérieur obliquement tronqué , et le côté anté- rieur plus allongé , étroit et comprimé. A l’intérieur, la coquille est très lisse, elle est d’un blanc corné, tantôt jaunâtre, tantôt grisâtre. La

LÈS AMPHIDRSMIDES.

31-^

ciiarnière est épaisse et solide; les dents latérales sont grosses et épaisses, surtout l’antérieure. La fossette du ligament est étroite, pro- fonde, elle ne dépasse pas la largeur du bord cardinal. U existe une dent cardinale sur chaque valve ; elle est très épaisse sur la valve droite , plus étroite sur la gauche. Les couleurs de cette espèce sont extrême- ment variables ; on trouve des individus d’un blanc pur et d'autres d’un gris noirâtre d'une égale intensité. Entre ces deux extrêmes se montre une foule de variétés rayonnées ou vergetées , réunissant quelquefois ces doux sortes de coloration sur le môme individu , et commençant l'une et l’antre par des nuances très pâles , pour finir par des nuances foncées , en embrassant une foule d'individus pour arriver du commencement à la fin d’une môme série. Pour donner un exemple do cette extrême va- riabilité, nous dirons que, si l’on voulait les réunir, on en compterait au moins une soixantaine qu’il est possible do rattacher à quatre ou cinq types principaux. Celte coquille est longue de 20 à 25 millimètres, large de 12 à -15 millimètres et épaisse de 7 à 8 millimètres.

DIXIÈME ÏAMHJ;E.

Latrcili.k.

CARACTÈRES. Animal aval , suborbicul aire ou transverse , ayant les lobes du manteau réunis en arrière et prolongés en deux longs siphons grêles , inégaux et désunis clans toute leur longueur. Palpes labiales grandes et triangulaires. Branchies petites ; le feuillet interne tombant de chaque coté dans la ca- vité du manteau, le feuillet externe relevé vers le clos; pied médiocre, aplati, triangulaire.

Coquilles peu épaisses, obrondes, ovales ou transverses , équivalves, régulières, ayant quelquefois un pli irrégulier sur le côté postérieur, un peu bâillantes en avant et en arrière ; bords minces, simples et tranchants. Charnière a3'‘ant un cuilleron oblique , quelquefois appuyé au bord dorsal pour un ligament interne ; une ou deux petites dents cardinales ; des dents laté-

DIXIKME FAMILLE.

Jl8

raies dans la plupart. Impression palléale présentant en arrière une sinuosité profonde, ovale ou fortement dilatée.

GENRES. Amphidesina ^ Cumingia ^ Trigonella^ Syn^ dosmya.

Nous réunissons dans la famille des Amphidesmides quatre genres, qui, avant nous, étaient disséminés dans d’autres groupes et se trou- vaient ainsi hors de leurs rapports naturels. Trois des genres étaient connus de Lamarck; mais il en confondait deux parmi les Amphidesmes, le troisième fait partie du genre Lutraire; tous trois appartenaient à la famille des Maclracées du naturaliste dont nous rappelons les travaux. Cuvier ne mentionna qu’un seul des genres , que nous nous proposons d’introduire dans la famille des Amphidesmides ; ce genre est celui des Lavignons. Cuvier en fit un sous-genre des Mactres pour l’éloigner des Lutraires, entraînées dans la famille des Enfermées à la suite des Myes. La classification de Cuvier ne gagna rien sous ce rapport dans la édi- tion du Rè^ne animal. M. de Blainville , comme nous avons eu occasion de le répéter souvent, proposa dans son Traité de Malacologie une clas- sification des Mollusques acéphalés , qui se rapproche beaucoup de celle de Cuvier. Cependant en ce qui concerne les genres qui nous occu- pent, il eut des opinions à lui ; c’est ainsi, par exemple, qu’il comprend les Amphidesmes parmi les Lucinesà litre de section. Cette opinion de M. de Blainville peut être justifiée par la composition même du genre de Lamarck. Ainsi que nous le verrons bientôt , parmi les seize espèces d’Amphidesmes, une seule doit être conservée dans le genre, toutes les autres se rangent dans sept ou huit genres différents, parmi lesquels les Lucines sont représentées par deux espèces. M. de Blainville était autorisé à considérer ces deux espèces de Lucines comme types des Amphidesmes de Lamarck, et à transporter le genre entier dans les Lucines. Un autre genre, celui des Lavignons, M. de Blainville le fait passer dans sa famille des Pyloridés, et, à l’exemple de Lamarck, l'a laissé comme section du genre Lutraire, genre auquel M. de Blain- viile donne le nom de Lutrioolle.

Dans sa Paléontologie fninçal-ie^ M. d’Orbigny a établi une classifica- tion nouvelle des Mollusques acéphalés; il propose d'introduire la plupart des genres qui nous occupent dans la famille des Tellinides, sans chercher, au reste, à justifier le rapprochement de genres, qui n’ont entre eux que des rapports fort éloignés. Il compose cette famille des genres DonacUla, équivalent pour M. d’Orbigny à notre genre

LKS AMPHIDESMIDES . 819

Mèsodesme , Laviqnon, Amphidesma , At'copagia, Tellina ^ Capsa et Donax,

Nous avons vu, en traitant des Mésodesmes, que Tanimal de ce genre a des caractères qui le distinguent nettement et le séparent des Tellines et des Donaces, non seulement par les siphons et les tentacules dont ils sont pourvus, mais encore par les branchies, qui offrent des caractères d’une si grande valeur pour la classification de ces animaux. Le Lavignon a aussi des caractères qui ne permettent pas de le rappro- cher du genre précédent. La longueur des siphons , la terminaison de ces organes, mais plus particulièrement la forme et la position des branchies ; tous ces caractères, en un mot , le repoussent d'une famille dans laquelle se trouvent les Mésodesmes. Le gdnre Arcopagia de Brown devient doublement inutile, ayant été créé aux dépens des Tel- lines pour celle des espèces qui sont ovales et obrondes , tel que le TelUna Jîemies, par e.xemple. Il est à présumer que son auteur se serait évité la formation de ce genre . s’il avait eu sous les yeux l’animal de ces espèces ; il ne lui aurait trouvé aucune différence avec celui des espèces allongées et transverses. Bientôt nous ferons voir les rapports qui exis- tent entre les coquilles des Amphidesmes et celles de ce groupe parti- culier des Tellines. Ces rapports, plus apparents que réels, n'empê- chent pas les Amphidesmes de faire partie d’une famille distincte de celle des Tellines. Quant aux Capses et aux Donaces , ces genres constituent un petit groupe aussi nettement séparé que celui des Méso- desmes , et ces genres ne doivent en aucun cas rester dans la famille des Tellinides ; car, ainsi que nous le verrons bientôt, les Tellines s’éloi- gnent de ces genres, non seulement par la forme et la grandeur des siphons, mais surtout par les caractères plus fondamentaux, empruntés aux organes delà respiration,

La critique que nous venons d’adresser à l’arrangement de M. d’Or- bigny pourrait s’appliquer assez exactement a l’arrangement nouvelle- ment proposé par M. Gray dans la 15® partie des Procès-verhattx de la Société zooiogique de Londres. La famille des Tellinides de M.Gray ren- ferme onze genres , parmi lesquels se trouvent , à côté des Tellines , les quatre genres qui constituent notre famille des Amphidesmides. AI. Gray commence par rapporter l uii des genres, celui nommé Gummj/fa par Sowerby, au genre Amphidesme, tel qu'il a été récemment corrigé. Quoiqu’il y ait des rapports évidents entre les deux genres en question , cependant ils conservent des caractères distinctifs d’une assez grande valeur pour mériter d’être conservés. A ces quatre genres, M. Gray joint les Psammobies, les Tellines, les Donaces, les Capses, et, ce qui

320 DIXIÈME FAMILLE.

nous a paru plus étonnanl, le genre Galatée de Bruguière et de La- raarck.

M. Gray ne conserve pas aux genres qui nous occupent les dénomi- nations par lesquelles ils sont le plus généralement connus. C’est ainsi qu’il préfère au nom. d’Amphidesme de Lamarck, celui de Semele , proposé au même genre par Schumacher. Sans doute que l'ouvrage de Schumacher est de 1817, tandis que le 5* volume des Animaux sans vertèbres ÙQ Lamarck est de 1818. Mais Lamarck, qui, chaque année, professait et qui chaque année perfectionnait ses méthodes , avait créé le genre Aniphidesme avant la publication du volume dont nous venons de parler; d'après cette réilexion, il ne faut pas s’étonner si le plus grand nombre des conchyliologues se sont attachés à conserver la nomenclature d’une méthode universellement répandue. En cherchant à expliquer la préférence que l'on adonnée jusqu’ici au genre Amphidesme de Lamarck, nous ne voulons pas^dire par là, qu'il faut soustraire cette dénomination générique à la règle inflexible de la priorité. 11 y a des tra- vaux dont il faut respecter l’ensemble, on l’a fait pour ceux de Linné ; il nous semble que ceux de Lamarck doivent inspirer un respect non moins grand, et qu’il ne faut y toucher qu’avec une extrême réserve. Les créations d’un génie supérieur ne sont pas choses si communes, qu’il soit permis d’y apporter des modificalions, capables d’en dénaturer l’ensemble et l'esprit.

Pour le genre Lavignon, .M. Gray préfère la dénomination de Are- naria, proposée par M. Megerleen I8H ; il nous semble qu'il eût été préférable de remonter encore plus haut dans l’histoire de ce genre, et d'accepter le nom de Trigonelki que lui a imposé Da Costa.

Un genre , créé sous le nom de Sijndosmye par M. Kéclnz , a été assez généralement accepté, parce qu’en effet il constitue un petit groupe fort naturel. M. Gray adopte le genre, mais il refuse le nom , et il préfère celui de Abra, proposé par Leach en 1817, dans un manu- scrit qui est resté jusqu’ici inédit. Les zoologistes anglaisent eu l'in- tention, à plusieurs reprises, défaire prévaloir les dénominations de leurs auteurs, au moyen de leurs manuscrits. C’est ainsi que les noms de Solander ont été préférés par les zoologistes anglais à ceux de Grneîin et d’autres naturalistes, auxquels il était impossible d’avoir connaissance de ces manuscrits. La même prétention se manifeste chez M. Gray en faveur des manuscrits de Leach. Cependant, longtemps égarés, iis n’ont pu être consultés d’aucun des naturalistes contemporains ; les travaux de M. Gray lui-même le témoignent, et vouloir aujourd'hui s’en servir pour établir une priorité en faveur d’un certain nombre de

LES AMPfllDESMIDËS.

331

genres, c'est assurément un procédé très injuste , puisqu’il tend à intro- duire dans la science une fâcheuse rétroactivité. Mettant hors de ques- tion la sincérité do ces manuscrits , il suffirait donc à un naturaliste de préparer un travail inédit pour venir troubler ensuite la science à une époque plus ou moins éloignée. Cela no peut être admis ; car pour M. Gray, aussi bien que pour les autres naturalistes , une observation quelconque ne devient authentique et ne prend date dans la science qu'au moment de sa publication, encore faut-il que cette publication 'soit de nature à se répandre assez pour parvenir à la connaissance de tous ceux qu’elle intéresse. Or, un manuscrit n'est point une publication, à plus forte rai- son si ce manuscrit reste inconnu pendant près de trente ans ; ainsi par cette seule raison nous repoussons invariablement , de la nomenclature conchyliologique , tous ceux des genres de Leach dont l’existence a été révélée, soit par un nom sans signification , soit par la récente publi- cation de ses manuscrits.

Les quatre genres que nous réunissons dans la famille des Amphi- desmides ont des caractères communs qui les rapprochent. Ainsi tous ont une coquille régulière à charnière dans laquelle le ligament est placé sur un cuilleron intérieur. Ce cuÜleron est plus ou moins oblique, peu incliné dans le Cumingia^ il l’est un peu plus dans les Lavignons, davantage encore dans les Syndosmyes, ainsi que dans les Amphidesmes. En avant de ce cuilleron, la charnière porte une ou deux den's cardinales, et pres- que toujours des dents latérales ; car le seul genre Lavignon manque de ces parties.

Les impressions musculaires sont semblables dans les quatre genres ; nous retrouvons aussi dans l’impression palléale des ressemblances con- sidérables. Cependant dans les Lavignons et dans les Syndosmyes, cette impression est plus grande et plus dilatée dans le milieu que chez les Amphidesmes et les Cumingies ; néanmoins par leur forme elles annoncent , dans les quatre genres , des animaux terminés en arrière par de longs siphons séparés.

La forme générale des quatre genres est assez variable; les Syndos- myes sont généralement transverses, les Cumingies sont plus ovales, et par se rapprochent des Ampbidesmies qui sont suborbiculaires. Les Lavignons , au contraire, affectent une forme triangulaire. Dans les quatre genres, les coquilles sont légèrement bâillantes en avant et en arrière; dans les Syndosmyes elles Amphidesmes, il existe un pli irrégulier le long du bord postérieur, semblable à celui des Tellines, Ces coquilles sont même quelquefois un peu inéquivalves , ainsi que cela arrive dans un certain nombre d’espèces do ce dernier genre. Les

T. !. PARTIE.

ai

3^2

DIXIEME FAMILLE.

Lavignons et les Cumingies, quoique plus réguliers, conservent ce- pendant une trace de ce pli postérieur.

Toutes les coquilles que nous rassemblons dans la famille des Amphi- desmides sont minces, fragiles, à l’exception de quelques Amphidesmes, qui prennent un peu plus de solidité.

Les animaux de deux genres seulement nous sont connus; ce sont ceux des Syndosmyes et des Lavignons , ils ont entre eux de tels rap- ports, que Ton serait tenté de les réunir en un seul genre. Il ont les palpes labiales fort grandes , triangulaires ; les branchies sont petites ; une seule paire de feuillets , l’interne, tombe de chaque côté du corps dans la cavité du manteau. Les feuillets externes se relèvent vers la région dorsale; le pied est médiocre, comprimé; les lobes du manteau sont désunis jusqu'à l’extrémité postérieure de l’animal , et ils se pro- longent en arrière en deux siphons inégaux , dont l’un , le branchial , a en longueur cinq ou six fois le diamètre Lransverse de la coquille.

Tous les mollusques de cette famille habitent les plages sableuses, dans lesquelles ils s’enfoncent perpendiculairement , de manière à faire saillir en dehors de leur demeure une portion plus ou moins considé- rable de leurs siphons. Quoique nous ne connaissions pas les animaux des genres Ciimîngfïa qI Àmphidesma , nous croyons fermement qu’ils ont une organisation semblable à celle des deux autres genres. Notre croyance se fonde particulièrement sur la forme des impressions muscu- laires, et surtout sur celle de l'impression palléale. Dans les Lutraires et dans les Myes, chez lesquels les siphons sont grands et réunis, la sinuosité palléale est largement ouverte en arrière ; celte disposition se retrouve aussi chez les Mactres. Chez tous les mollusques à siphons allongés , grêles et désunis, l'entrée de la sinuosité du manteau est ré- trécie, et c’est ce qui a lieu dans les deux genres dont nous parlons. C’est à- cause de ce caractère que nous les comprenons avec les deux autres dans une même famille, et nous pensons que si plus tard ils doivent oc- cuper une autre place, faire partie d’une autre famille , c'est parce qu'ils auront offert des différences dans d'autres parties de leur organisation.

LES AMl’HIDESMIDES.

GENRE TRExNTE-DEUXIÈME.

CUraiSirGli:. Cumingia.

PI, 8 bis, f. g. 10. 1 1.

CARACTERES GENERIQUES. Animal iiiconnu.

Coquille ovale-transverse, subéquilatérale, équivalve, apla- tie; le côté antérieur plus allongé, arrondi, le postérieur sub- tronqué , terminé par un angle peu saillant ; crochets petits, à peine proéminents. Charnière présentant au milieu un cuilleron triangulaire, perpendiculaire pour un ligament interne, et sur son côté antérieur une seule petite dent cardinale sur chaque valve; deux dents latérales, également distantes de la charnière et sur la valve droite seulement. Impression musculaire anté- rieure ovale-oblongue ; la postérieure plus grande et circulaire; sinuosité de l’impression palléale horizontale, ovale, oblongue, très profonde.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mactra , Conrad.

OBSEnvATioNs. Genre proposé par Sowerby en h 833 dans les Pro- ceedings de la Société zoologique de Londres, et dédié à M. Cuming, l'un des hommes auquel la Conchyliologie est redevable des plus heu- reuses découvertes et des plus abondantes collections, qui aient été ras- semblées par un voyageur, II aurait été difficile de se faire une juste idée du nouveau genre d’après la courte description de M. Sowerby. Mais ce naturaliste, dès l’année suivante , en donna de bonnes figures dans le n” 40 do son Généra of shells. Depuis ce moment l’utitilé du genre Cumingie ne pouvait être contestée ; on reconnaissait dans les coquilles qui y sont réunies, des caractères particuliers; le genre fut donc généralement adopté. Si les conchyliologues ont été d’accord à cet égard, ils eurent des opinions diverses sur la place que le genre doit occuper dans la méthode. L'auteur du genre ne se prononce pas sur les rapports à lui donner, il laisse la question indécise. En repro- duisant le genre dans son Synopsis testaceorum vlventium M. Müiler l’introduit dans la famille des Nymphacées de M. Menke, à la suite des Mésodesmes et des Amphidesmes. Nous ne savons trop si M. Menke

21

DIXIEME FAMILLE.

324

lui-méme aurait adopté cet arrangement de M. Muller. Nous ne voyons rien dans lo Synopsis methodicu .^folhiscoriim qui le justifie. La famille des Nympliarces de M. Menke est très étendue, mais elle ne contient ni le genre Ampliidesme , ni le genre Mésodesme ; elle est constituée k peu près comme celle du mémo nom , instituée par Lamarck, ce qui nous fait croire que M. Menke aurait préféré un tout autre arrangement, s'il avait connu le genre dont nous nous occupons.

Dans son Traité de Malacologie, M. Swainson agrandit la famille des Tellinides de Lamarck , et la divisa en deux sous -familles ; la première sous le nom deCyclinœ, contient les six genres Cyclas , Cyrena, Mega- desma [Galatheaf Lamk.), Gnathodon, Cnmingia Gl Erycina (J/cso- desma^ Desh.), c’est-à-dire des genres, qui sc repoussent pour la plupart, par les caractères les plus essentiels. C'est ainsi que les Gna- thodon SC rapprochent des Mactros; les Cumingia, comme nous le verrons, ne doivent pas s’éloigner des amphidesraes, tandis que les Ery- cines de M. Swainson , correspondant à nos Mésodesmes , doivent con- stituer un groupe particulier. Ainsi , dans la méthode que nous exami- nons, le genre Gumm(/fa n’est pas à sa place.

M. Reevc , dans sa Conchyliologie systématique , a mieux compris les rapports du genre Cumingia ; il l’introduisit dans la famille des Mac- tracées à la suite des Amphidesraes. Cette famille des Mactracées do M. Reeve est plus étendue que celle de Lamarck , mais elle est fondée sur les mémos caractères , et c'est dans celte famille , en effet , que doit se trouver le genre Cumingia. M. Sowerby le jeune , dans son Manuel de Conchyliologie, partage d’abord l’opinion de M. Reeve à l'article <7u- mingia, mais en indiquant plus tard les genres qui doivent entrer dans la famille des Myaires, il y comprend au.ssi les Cumingia. A laquelle de «es deux opinions M. Sowerby s’est-il fixé? Il est à présumer, que c’est par une eireur involontaire que le genre Cumingia est dans la famille des Myaires, à la suite des Myochama et dos Cleidothærus , car il n’a avec eux aucune espece de rapports. M. Ilanley a préféré , avec juste raison, l’opinion deM. Reeve, et il admet les Cumingies dans la famille des Mactracées ; mais il com;oit pour cos coquilles des rapports nou- veaux, c’est près des Ligules do Montagu que M. Hanley voudrait mettre les Cumingies. Il faut se rappeler que ce genre Ligule cor- respond aux Syndosmyes do M. Reeve. Mais avant d'admettre ou de rejeter l’une des opinions que nous venons de rapporter, avant d'ex- poser la nôtre, il est nécessaire d’examiner en détail tous les caractères du genre dont nous nous occupons.

Une espèce de Cumingie, découverte aux États-Unis, a été décrite

LES AMPHIDESMIDES.

3-i5

par M. Conrad , sous le nom de Mactra telUnoides , non seulement dans le JouDial de f Academie des sciences naturelles de l^liiladelpfiie, mais en- core dans sa Conchyliologie marine d'Amérique. Plus lard, AI. Conrad a adopté le genre Citmingia , et y a placé l’espèce dont nous venons do parler. Al. Gould, dans son excellent Catalogue des invertébrés de Mas~ sachiissets, a suivi l'exemple de AI. Conrad en adoptant le genre Cn- mîngia, et en l'introduisant dans la famillo des Alactracées. Nous allons voir pourquoi, de toutes les classifications proposées, nous préférons celle de M. Hanley, toutefois après lui avoir fait subir des modifications dont nous exposerons bientôt les motifs.

Les Cumingies sont des coquilles d'un médiocre volume, qui ont l’habitude de vivre dans les fentes des rochers , dans leurs anfrac- tuosités, et non plongées dans le sable ou dans la vase, ainsi que les Lutraires. Ces coquilles sont ovales, transverses , subéquilatérales. Le côté antérieur est un peu plus allongé que le postérieur ; il est obtus . arrondi; le coté postérieur est obliquement tronqué, et il se termine par un angle inférieur et postérieur assez aigu; les bords sont simples, tranchants et les valves réunies no sont pas parfaitement closes ; elles offrent un faible bâillement en avant et en arrière : le test est peu épais , blanc ou d’un blanc jaunâtre ; la surface externe est presque toujours chargée de stries ou de lamelles transverses, plus ou moins régulières , comparables à celles du Tellina fragiUs de Linné. Les Cumingies sont des coquilles plus aplaties que globuleuses ; elles ont en arrière , le long du bord postérieur, une légère inflexion, comparable a celle des Tellines. Elles montrent souvent une irrégularité qui annonce dans le développo- ment des individus une gêne qui provient, sans aucun doute , do leur manière de vivre.

Les impressions musculaires peuvent se comparer à celles des Syn- dosmyes; l’autérieuro est ovale-oblongue , située très près du bord antérieur, un peu arquée dans sa longueur ; souvent elle occupe la plus grande partie de la hauteur du bord antérieur. L’impression musculaire postérieure estarrondie, elle est proporlionellemenl plus grande que dans les autres genres avoisinants ; placée près do rextrémilé, elle est plus près du bord inférieur quode la charnière; un peu au-dessus de chacune de ces impressions musculaires, on en remarque une très petite, qui est due aux muscles rétracleurs du pied. L’impression palléale doit être étudiée avec soin dans ce genre, elle fournit d'utiles indications pour déterminer ses rapporis. Cette impression part, comme à l’ordinaire, de l’extrémité inférieure du muscle antérieur ; elle se place à une petite distance du bord et le suit parallèlement, elle s’arrête au niveau du bord

DIXIÈME FAMILLE.

antérieur de l’impression musculaire postérieure ; à partir de ce point , Timpression palléale rentre sur elle-même et se dirige d'arrière en avant; les deux lignes, d’abord confondues jusque vers le milieu du bord ventral , se détachent, et celle qui circonscrit la sinuosité palléale se courbe en ovale à une petite distance du muscle antérieur, et se dirige de nouveau en arrière, tantôt en s’infléchissant un peu et en se dilatant dans son trajet, tantôt circonscrivant une ellipse allongée et régulière. Parvenue dans le voisinage du muscle, la ligne de l’impres- sion se courbe rapidement et se joint , comme une tangente , à la circon- férence de l'impression musculaire , do sorte que l’entrée de la sinuosité est rétrécie par le muscle postérieur.

La charnière offre des caractères bien distincts ; le bord cardinal est étroit , il est divisé en deux parties presque égales par un cuilleron assez grand, triangulaire, saillant dans l'intérieur des valves et à peine incliné en arrière. En avant de ce cuilleron s'élève, sur chaque valve, une seule petite dent cardinale, simple, étroite, quelquefois obsolète sur la valve gauche. En avant et en arrière de cette charnière , et à peu près à égale distance , s'élève une dent latérale grande , triangulaire , pointue au sommet et séparée du bord par une gout- tière assez profonde. Ce qui est fort remarquable, c’est que ces dents latérales n’existent que sur une seule valve, la valve droite; la gauche n’en présente aucune trace; seulement la portion du bord correspon- dant aux dents latérales est arrondie , polie , un peu plus saillante et destinée à être reçue dans la gouttière ménagée derrière la dent. Les dents latérales des Cumingtes ressemblent à celles d’un grand nombre de Tellines.

Maintenant que nous connaissons exactement les caractères du genre Cumingie , pour en apprécier la valeur, il est nécessaire de les comparer à ceux des genres les plus voisins. Les Lutraires ont un cuilleron mé- dian, saillant , non incliné ; elles ont aussi , pour le plus grand nombre, des dents latérales. Elles ont aussi la sinuosité palléale profonde , ova- laire et horizontale; mais dans les coquilles dece genre, la dent cardinale est en V, et elle ressemble à celle des Mactres ; les dents latérales exis- tent sur les deux valves; la sinuosité palléale n'est jamais rétrécie à son entrée; ce caractère n’est pas sans importance. Ces différences no sont pas les seules; les Lutraires sont grandes, bâillantes de cha((uecôté; elles vivent enfoncées dans le sable. Il n’est pas nécessaire de comparer les Cumingies aux Mactres , les différences sont trop apparentes, pour avoir besoin de les rappeler ; il n’en est pas de même des Âmphidesmes , près desquelles tous les conchyliologues ont une tendance à ranger les Cumin-

LES AMPBIDESMIDES.

32']

gies ; il existe cependant entre ces deux genres des différences assez nota- bles. Ainsi, dans les Âmphidesmes, le cuilleron n’est pas saillant dans l’intérieur des valves , il est couché le long du bord postérieur ; les dents latérales existent sur les deux valves. La sinuosité palléate mérite une attention particulière. Dans les Amphidesmes, elle est toujours entièrement détachée du bord ventral, elle s'élève obliquement d’arrière en avant et de bas en haut , produisant ainsi un angle aigu avec le grand diamètre transverse. Cette impression , dans les Amphidesmes, est à peine ré- trécie à son entrée, et elle ressemble à une ellipse à laquelle manque un des petits côtés. Les différences qui se montrent entre les Amphidesmes et les Cumingies , ne sont donc pas moins grandes que celles qui exis- tent avec les Lutraires. Nous avons encore à examiner deux genres , les Lavignons et les Syndosmyes. Les Lavignons diffèrent des Cumingiës par l'obliquité du cuilleron de la charnière, ainsi que par l’absence des dents latérales ; mais la sinuosité du manteau , horizontale , dilatée dans le milieu, soudée dans une grande partie de sa longueur à la portion ventrale, rétrécie à son entrée, par l'abaissement du muscle postérieur, présente déjà beaucoup d’analogie avec celle des Cumingies, qui reste plus étroite et plus ovalaire. Quant aux Syndosmyes , elles avoisinent bien plus les Cumingies , car elles ont aussi des dents latérales ; il est vrai que le cuilleron est oblique , aussi pourrait-on dire que les Cumin- gies sont des Syndosmyes à cuilleron redressé. Néanmoins il y a d'autres différences; le Cumingies sont des coiÿiilles plus épaisses, plus grandes, et la sinuosité pallôale est en proportion plus étroite, plus régulièrement ovalaire que celle des Syndosmyes. De toutes les observations précédentes nous pouvons tirer des conclusions pour déterminer rigoureusement la place que doit occuper le genre Curaingie dans une méthode natu- relle. Comme cela arrive si souvent, ce genre a des rapports compliqués d’un côté avec les Lutraires parla forme et la position du cuilleron, et par rhorizontalité de l'impression palléale; d’un autre, avec les Amphi- desmes par l’inflexion postérieure des valves, mais il se rapproche da- vantage de Syndosmyes par les dents latérales, par la sinuosité palléale horizontale mais rétrécie à son entrée. Nous attachons quelque impor- tance à ce dernier caractère, parce que nous avons observé que, partout il existe, l’animal a les siphons disjoints dans toute leur longueur. Les Lavignons , les Syndosmyes, les Tellines et les Diodontes nous offrent des exemples de cette corrélation entre le rétrécissement de l'entrée de l’inflexion etl’existence dedeux siphons désunis; et cela se concevra, si l'on fait attention que dans les mollusques à siphons réunis, comme les So- lens, les Lutraires, les Mactres, les Myes, les muscles rétracteurs de ces

3a8

DIXIÈME FAMILLE.

organes se continuent pour ainsi dire dans les parois sans se condenser en un tendon, tandis que dans les mollusques, dont les siphons sont désunis, le muscle rétracteur, semblable à un éventail, se termine en un tendon épais, qui so porte à la cloison intérieure qui sépare l’ouver- ture des siphons. De cette disposition organique résulte chez les uns, la possibilité du rétrécissement de l'entrée du sinus postérieur; chez les autres, l’impossibilité de ce rétrécissement, puisque le muscle doit embrasser les siphons réunis dans toute la largeur de leur base.

C'est ainsi que par un examen approfondi des caractères des coquilles, dans ieur relation avec l’animal , on parvient à déterminer plus rigou- reusement les rapports des genres dont les animaux ne sont point con- nus. Nous modifions en cela l’opinion des conchyliologues , que nous ne mettons pas les Cumingies dans la famille des Mactracées , mais dans celle desamphidesmides avec les Lavignons et les Syndosmyes.

Les Cumingies sont des coquilles des climats chauds do l'Amérique, de l’Australie et des mers de l’Inde ; le nombre des espèces connues est peu considérable. M. Reeve, dans son Conchologisl nomenclator, en cite six espèces vivantes. M. Soworby dit que ce genre n'est point connu à l’état fossile; nous avons, cependant, fossile de l'Amérique septentrio- nale, le Mactm lelUnoides , de Conrad, qui est une véritable Curaingie :

Six espèces vivantes.

Une fossile do l'Amérique septentrionale ; c’est la suivante :

Cumingie tellinoïde. Cumingia tellinoides. Conrad.

PI. 8 his, fig. 9. 10. 11.

C, testa ovatO’transversâfteqiiilaterâ, antice obttisâ f postice angulatâ y (enniy/ragiUy alhây transversim striata; striis intequalibus ; dentibus lateraiibns^ inagnis,

Mactra teUinoides. Conrad. Journ. ac. nat. sc. t. 6. p. aSS.

Id, Conrad. Amer. mar. Conch. 6o. pl. 14, f. a.

Cumingia telUnoides, Conrad. Journ. acad. nat. sc. t. 7. p. a34.

Id. Gould. luvcrt. of Massachussetts, p. 56. f. 36.

t onch. noraencl. p. 18. 5.

Vivante dans les mers d’Amérique.

Fossile dans les terrains tertiaires supérieurs de l’Amérique septen- trionale.

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Petite coquille ovale -transverse, comprimée, ayant assez bien l’appa- rence d’une petite Telline, ainsi que sou nom l’indique; elle est équila- térale, mais son côté antérieur est plus large que le postérieur. Ce côté antérieur est obtus , coupé en demi-cercle ; le postérieur se termine en arrière par un angle assez aigu ; le bord dorsal postérieur est droit et descend obliquement du crochet à l’angle postérieur; les bords sont simples, minces et tranchants, à peine bâillants, en avant et en ar- rière; les crociiets sont petits, peu obliques et dominent à peine une petite lunule lancéolée, qui se dessine au-dessous d’eux sur le côté an- térieur. Le cuilleron est petit, symétrique, sans la moindre obliquité; les dents latérales sont grosses et saillantes. La surface extérieure est couverte do stries transverses, nombreuses, pressées les unes contre les autres, mais inégales et peu régulières. Cette coquille se trouve actuelle- ment vivante dans les mers de l’Amérique septentrionale, et fossile dans les terrains tertiaires récents de la Virginie.

GENRE TRENTE-TROISIÈME.

JiAViaNON, Trigonella. (Da Costa.)

PL 10. flg. I. a

CARACTERES génériqltes. Animal aplati, ayant les lobes du manteau disjoints en avant et dans toute la longueur du bord ventral; bords du manteau peu exsertiles, garnis d’une rangée de papilles courtes , obtuses et écartées ; la commissure postérieure consolidée par deux petits muscles croisés; deux siphons inégaux, séparés l’un de Vautre dans toute leur longueur, grêles, subcylindracés ; le branchial, le plus long, ayant cinq ou six fois le grand diamètre de la coquille , terminé par une ou- verture sublobée ; le siphon anal ayant deux fois à peine la longueur de la coquille , et son ouverture garnie d’un rang de cils très fins et très nombreux ; pied très aplati, triangulaire ; palpes labiales grandes, triangulaires , la paire interne soudée au sommet de. la branchie; quatre feuillets branchiaux, deux tombant dans la cavifé du manteau, deux autres, plus petits,

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DIXIÈME FAMILLE.

renversés en arrière vers le dos; branchies lisses, sans plis, très finement striées.

Coquille ovale, subtrigone, subéquilatérale, aplatie, à crochets petits, opposés ; le côté antérieur, le plus court, arrondi, le posté- rieur obtus , un peu baillant ; les impressions musculaires à égale distance du sommet, l'antérieure ovalaire, la postérieure arrondie; l'impression palléale formant en arrière un large sinus subtriangulaire, très dilaté ; charnière étroite, offrant au-dessous des crochets deux très petites dents sur la valve droite, une seule sur la gauche, et en arrière un cuilleron oblique, triangu- laire, dans lequel s’attache un ligament interne ; un petit liga- ment externe, fixé sur des nymphes peu saillantes.

SYNONYMIE GENERIQUE. Chama ^ Belon , Gessner, Aldro- vande. Coucha tennis, Lister. Pectuncnhis laius, Lister, Lavignon^ Réaumur, Cuvier, Schweigger, Férussac. Chama [calcinelle]^ Adanson. Mactra , Poiret, Schrœter, Gmelin , Dorset , Montagu, Dilhvyn, Wood, de Gerville. Tellina^ Baster, Ginanni, Donovan. Mya, Chemnitz, Gmelin, Spen- gler. Vernis^ Peiinant , Gmelin. Trigonella, Da Costa, Lovèn. -Soîeu, Scrohicnlaria , Schumacher, Philippi.

Lniraria , Lamarck, Croucb, Payraudeau, Collard-des- Cherres, Deshayes, Philippi, Quoy. Listera, Turton, Menke.

Lutricola^ Blainville. Arenaria^ Megerle.

Le Lavignon , habitant en grande abondance non seulement la Médi- terranée, mais encore TOcéan européen et l’Océan atlantique jusqu’au Sénégal , a été connu de nos anciens naturalistes; Belon est le premier qui l’ait mentionné , en \ 553 , dans son ouvrage sur les Poissons; il en donne une description assez détaillée et une figure médiocre , sous le nom de Chama piperata. Ce nom rappelle le goût poivré particulier à ce Mollusque , dont le peuple se nourrit. Gessner et Aldrovande , dans leurs compilations, ont mentionné le Chama piperata de Belon, et n’ont rien ajouté aux renseignements donnés par le père des naturalistes français. Rondelet cite, également ce Chama piperata , du moins cela nous paraît probable, d’après quelques passages de son Histoire des

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poissons. Le savant auteur du Synopsis conchylioriim et de plusieurs autres ouvrages, remarquables pour l’époque ils furent publiés, Lister, donna de bonnes figures du Chama piperata de Belon , non seu- lement dans le Synopsis que nous venons de citer, mais encore dans son Traité des animaux de la Grande-Bretagne. Il semblerait que , dans ces deux ouvrages , il a considéré ce mollusque comme appartenant à deux espèces ; car, dans l'un , il le nomme Concha tennis , et , dans Tautre , Pectunculus latus. La figure que publia Bonanni est moins reconnaissable que celle de Lister ; aussi l’ouvrage du naturaliste romain n’ajoute rien à la connaissance de l’espèce. Nous pouvons porter un jugement semblable sur l’ouvrage de Petiver, publié de 1702 à 1719, et dans lequel on trouve aussi une très médiocre figure du Chama piperata.

Réaumur a marqué son époque dans V Histoire de îa Zoologie , par l’art admirable avec lequel il savait observer les mœurs des animaux. Quoique ses travaux sur les insectes soient les plus cités , nous n’avons oublié , dans aucune occasion , ceux que ce savant illustre a publié sur différents animaux marins. On a de lurquelques mémoires qui ont eu pour objet des mollusques ; et parmi eux t nous trouvons , dans le Recueil de V Académie des Scmices, un mémoire très important sur les mouvements progressifs do divers animaux marins , ét notamment des mollusques acéphalés ; parmi eux , le Lavignon occupe une place assez considérable , et dès 1710, nous trouvons sur cet animal de précieux renseignements , non seulement sur sa manière de vivre , mais encore sur la forme de ses parties externes. Dans une figure, malheureusement peu correcte, Réaumur représente un Lavignon, ayant les lobes du man- teau assez écartés, pour laisser voir les palpes labiales , le pied , les branchies , ainsi que les siphons grêles et très allongés, qui prolongent le manteau du côté postérieur. A l’aide de ce travail do Réaumur, on aurait pu reconnaître les caractères génériques des Lavignons, éviter, dès l’origine de nos classifications modernes, de les confondre, soit avec les Madrés , soit avec les Lutraires.

Longtemps après la publication du mémoire de Réaumur, Adanson recueillait au Sénégal le Chama piperata do Belon. Malheureusement, ce savant naturaliste, chez lequel était développé , au plus haut degré , le génie de la classification , n’observa point l’animal et se contenta de donner une courte description de la coquille , en l’inscrivant sous le nom de Calcioelle , dans son genre peu naturel de la Came. Dans une courte addition qui termine son ouvrage , Adanson fait remarquer que les Tellines semblent se joindre aux autres Cames , c’est-à-dire aux

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DIXIÈME FAMILLE.

Vénus, par l’inlennédiaire de la Calcinclle ; mais peut-être eut-il modifié cette opinion , s’il avait eu sous les yeux i’animal du Lavignon , et qu’il l’eiil comparé à celui des genres dont il parle.

Poiret , dans son voyage en Barbarie, trouva, comme nous, aux environs de Bono , le Ckama pîpei'ata , mais il ne dit rien de son animal qu'il n’eut point occasion d'observer. A la môme époque , Chemnitz recevait la môme espèce des cotes d’Espagne, et la figurait dans son grand ouvrage, sous le nom de Mya hispanica; en la découvrant dans les mers d’Angleterre, Pennant , en 1777, inscrivait le Chaîna piperata sous le nom do Kenns borealis , dans son Histoire des animaux d'Angle- terre. Tandis que Da Costa , dans sa Conchyliologie britannique , la réunissait aux Mactres des côtes d Angleterre , et proposait pour cette réunion un genre Trigonelto. Sans ce mélange , les auteurs plus modernes n'auraient pas hésité à réintégrer, dans la science , le genre Trigonelkt de Da Costa , et ce n’est peut-être pas un obstacle, pour qu’il soit maintenu dans la méthode. Bien des naturalistes ont l’ha- bitude de rejeter définitivement les genres composés, comme celui-ci, de deux sortes d’objets , qui peuvent et doivent constituer des groupes différents. Sur cinq espèces de Trîgonella^ quatre sont des Mactres de Linné; la cinquième est le Chaîna piperata. Si ce Chama piperata eût constitué un genre, à l’époque Da Costa a écrit, sans aucun doute le genre Trigonella devrait disparaître complètement; mais nous pensons que , en suivant l’exemple des réformes introduites dans les genres de Linné, celui-ci peut être maintenu; dès lors les noms qui ont été suc- cessivement proposés pour lui, devront être relégués dans la synonymie générique. Pour appuyer notre opinion ù ce sujet, il nous suffira d.e rapjîeler ce qui s'est passé à l’égard du genre Mya de Linné , par exem- ple, de son genre Chama et môme de son genre Os/rœa, et de plusieurs autres que nous nous abstiendrons de mentionner , parce qu'ils sont bien connus de zoologistes. Dans le genre Mya , sur sept espèces , les deux premières seulement ont conservé le nom Ünnéen; dans le genre Chama, l’on compte quatorze espèces, aux quatre dernières seule- ment a été réservé le nom générique de Came-; enfin tous les naturalistes savent, que Linné comprenait parmi les Huîtres le grand genre Peigne, les Limes, les Marteaux, les Pernes, et que, sur trente et une espèces inscrites, quatre ou cinq sont de véritables Huîtres, pour lesquelles le genre Üstrcea a été maintenu. Ce que nous venons de rapporter n'aurait pas eu lieu, si dans les changements que l’on a fait subir aux genres linnéens, on avait suivi la règle la plus généralement observée par les zoologistes modernes. Lorsqu’un genre a besoin d’être divisé, le nom

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qu'il a reçu doit être réservé à celle des sections qui renferment le plus d'espèces; mais, comme on le conçoit, cette règle doit souffrir des ex- ceptions, et il paraîtra naturel que le nom du genre soit maintenu pour celles des espèces, qui offrent le mieux les caractères génériques propo- sés par l’auteur. Bien que les caractères du genre convinssent aussi bien aux Mactres, qu’au Lavignon, rien n’enipôche cependant de pren- dre tout au moins ce nom pour l’appliquer au Chôma piperata. Il suffit pour cela de renvoyer aux Madrés les coquilles qui en dépendent et de compléter les caractères qui distinguent le genre Trigonelkt.

Schroeter et Gmelin ont entraîné , parmi les Mactres , la Calcinelle d’Adanson; mais Gmelin, après lui avoir donné deux noms dans le genre Madré, la met aussi sous un troisième nom parmi les Myes, et enfin la reproduit deux fois encore parmi les Vénus; de sorte que la seule es- pèce,' connue à cette époque, se trouve dans Gmelin, sous cinq noms et dans trois genres.

Spengler, auquel la science concbyliologique est redevable d’obser- vations judicieuses, a joint la Calcinelle aux Myes, à peu près à l'époque Olivi, qui l’observait dans l'Adriatique, croyait être le premier à l’inscrire dans les catalogues. Olivi n'appréciant pas a leur juste valeur les caractères de la coquille en question , eut le tort de la ranger au nombre de Solens ; mais il rachète cette erreur par des observations fort utiles sur la manière de vivre de Tanirral, observations qui s’accordent exactement avec celles de Réaumur, de sorte que, si l’on eût suffisam- ment apprécié les observations d’Olivi et de Réaumur, on aurait eu le moyen de caractériser le genre TvigoncUa, de le séparer des Lutraires et d'indiquer ses rapports naturels; mais ces travaux furent oubliés, et nous voyons que les auteurs anglais firent passer le Chama piperata des Tellines dans les Myes ou dans le Mactres, tandis qu’en France, on l’admit, avec Lamarck, parmi les Lutraires.

Nous voici parvenu à l'époque, deux zoologistes se sont spéciale- ment occupés des Lavignons. Les ouvrages de ces zoologistes parurent en 1817; l'un par Cuvier, c’est la première édition du Règne animal; l’autre par Schumacher, c'est son ouvrage intitulé : Essai d'un nou- veau système des Vers testacès. Soit que Cuvier ait emprunté à Réaumur ou à Olivi leurs observations, soit qu'il ait eu occasion d’observer vivant l'animal de la Calcinelle, il a jugé do ses différences avec les Mactres et les Lutraires, et, en conséquence, il proposa un sous-genre des Mactres, sous le nom de Lavignon. Il caractérise très exactement la coquille, et il ajoute que les tubes de l'animal sont fort longs et séparés jusqu’à la base comme dans les Tellines. L’espèce type du sous-genre de Cuvier

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est le Cliama pipanUa ; mais dans les notes, Cuvier a le tort de joindre à celle-là trois autres espèces qui ne sont pas du môme genre, ce sont : les Mactra papyracea et complanata ^ ainsi que le Mya nicobarica de Chemnitz. Les deux premières appartiennent à ce groupe de Mactres qui font le passage aux Lutraircs ; la troisième constitue un genre par- ticulier, auquel M. Sowerby a donné le nom d'Anatinelle.

On pourrait reprocher au genre Scrobicularia , do M. Schumacher, de contenir à la fois deux coquilles très différentes tl’une , le TelUna angu- lata , qui , en réalité , est une véritable Telline; et l’autre , le Chamapi- perata. L’auteur, il est vrai, expose les caractères génériques de la co- quille d’une manière plus nette que Cuvier ; et , si l'on avait à choisir entre deux noms qui ont paru à la même époque, il faudrait cepen- dant préférer celui de Cuvier, puisque notre grand zoologiste a ajouté au genre un caractère essentiel de l’animal, ce que personne n’avait fait avant lui. L'ouvrage de Dillwyn parut aussi en 1817; mais, cet auteur ayant adopté le système linnéen dans toute sa pureté, c’est parmi les Madrés que l'on trouve le genre qui fait le sujet de nos observations.

En 1818 Lamarck publiait le tome V de son Histoire naturelle des animaux sans vertèbres. On trouve le genre Lutraire divisé en deux sections : la première, pour des coquilles transversalement oblongues, la seconde, pour des coquilles orbiculaires ou subtrigones. C’est dans cette seconde section que sont rangées, sous deux noms spécifiques, les principales variétés du Chaîna piperata. Ainsi , quoique Cuvier et Schu- macher aient précédemment propose chacun un genre pour cette co- quille, Lamarck les maintient parmi les Lutraires; mais il faut dire qu’à celle époque on ignorait complélement la forme et les caractères des animaux des Lutraires de la première section ; et il était permis de sup- poser que toutes les Lutraires de Lamarck, sans exception , avaient de longs syphons , séparés dans toute leur longueur, et semblables à ceux des Tellines. Cependant une étude approfondie des caractères intérieurs des coquilles aurait pu faire soupçonner des différences assez considé- rables entre les Lavignons et les Lutraires proprement dites ; non seu- lement les Lavignons ne portent pas à leur charnière la dent, en forme de V, des Mactres et des Lutraires, mais elles présentent, dans la forme de l’impression palléale, des différences assez considérables. Dans les Lutraires proprement dites, aussi bien que dans les Myes, la sinuosité postérieure de l’impression palléale est transversalement oblongue; dans les Lavignons, au contraire, elle est dilatée dans le milieu ; elle forme un angle, qui remonte sous les crochets, de la même manière que dans la plupart des Tellines. De ces différences on pouvait conclure que, dans

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les vraies Lulraires, les sypbons sont réunis comme dans les Madrés, et que dans les Lavignons iis sont séparés dans toute leur longueur.

On pourrait croire que l'iiistoire du genre doit se terminer ici; il semble que les naturalistes ont pu choisir entre les différents groupes qui ont été successivement proposés. La seule espèce jusqu’à présent connue pouvait être également placée dans quatre genres, selon que Tun' d’eux paraissait préférable : Trigonella, Lavignon^ Scrobicularia et enfin Lm- iraria; mais un cinquième genre parut encore nécessaire à M. Turton, qui le proposa, en 1822, sous le nom de Listera, dans son Histoirena- turelle des coquilles bivalves de l’Angleterre. Avant cela, Schweigger et Férussac avaient adopté le genre Lavignon de Cuvier, tandis que M. de Blainville proposait encore un genre Lutricole dans son Traité de ma- lacogie. Ce genre Lutricole est une reproduction assez exacte des Lu- traires de Lamarck. 11. de Blainville y fait entrer à la fois le genre Li- gule de Leach, les Lavignons de Cuvier et les Lutraires proprement dites; par conséquent, ce genre Lutricole n’est point admissible, puis- qu’il ne présente aucune différence avec le genre créé longtemps avant par Lamarck. Depuis cette époque les naturalistes ont flotté entre le genre Lïsîera, comme M. Menke, et le genre Scrobicularia, comme M. Philippi.

Nous ne pouvons terminer l’iiistoire des Lavignons sans mentionner une notice, très courte à la vérité, qui a été publiée par M. Quoy dans le Magasin de zoologie de 1839. M. Quoy, dans cette notice, donne une description succincte de l’animal ; il l’accompagne d’une figure de gran- deur naturelle; mais il est évident que cet animal n’a pas été vu vivant. Il est contracté, ses siphons sont considérablement rétractés, et ils n’offrent pas la forme que l’animal leur donne pendant sa vie. L’expli- cation de cette planche laisse dans l’incertitude beaucoup de points im- portants de la structure de l’animal ; mais , si imparfaite que soit cette figure, elle peut encore servir de renseignement; peut-être pourrait-on dire, qu'elle est moins exacte que colle de Réaumur, et qu’elle n'ajoute rien aux excellentes observations, publiées plus de cent vingt ans avant celles de M. Quoy.

Cette histoire du Cfiama piperata do Belon conduit à plusieurs con- séquences; elle démontre évidemment que l’on a pressenti , depuis assez longtemps, que cette coquille devait constituer un genre particulier mais l’animal n’étant pas suffisamment connu , on n'a pu le caractériser définitivement, puisque, à l’exception do Réaumur et de Cuvier, aucun des auteurs méthodiques n’a mentionné ce mollusque. Comme noua l'a- vons vu, le Chama piperata a été rangé successivement : dans les

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DIXIEME FAMILLE.

Cames, par Âdanson , dans les Mactres, par Poiret, Gmelin etSpen- gler ; sous celui de TeUina , par Ginnani , Baster et Donovan ; 4“ sous celui de Vénus, par Pennant et Gmelin; 5" enfin, Da Costa Ta comprise dans son genre THgonetla; Olivi parmi les Solens; 6*> Cuvier, dans son genre Lavignon; Schumacher, dans son genre Scrobicularia ; La- marck, dans son genre TAitraire'^ 8” M. de Blainville, dans un genre LiUricole, tandis que M. Turton a proposé, pour la même espèce, son genre Lîslo'a. Il serait difficile, sans doute, do trouver une autre espèce de mollusques qui éprouvât dans son histoire d’aussi nombreux change- ments que celle-ci.

Des quatre genres spécialement destinés au Chaîna piperata, un seul doit prévaloir, et celui-là est naturellement désigné par la date de l’ou- vrage où il est consigne. Il est évident que le genre Trigonella de Da Costa doit être préféré , si l'on admet avec nous la possibilité de le réformer ; si le nom de Da Costa eSt rejeté, nous pensons que celui de Lavignon , consacré déjà par les observations de Béaumur et par son introduction dans la méthode par Cuvier, devra prévaloir sur le genre Scrobicularia qui , bien que publié la même année, n’est point caractérisé d’une ma- nière aussi complète. Quant au genre Listera, il est hors de cause, puisque son auteur ne l’a produit que cinq ans après la publication des ouvrages de Cuvier et do Schumacher.

Nous n’avons plus qu’un seul mot à ajouter pour terminer l'histoire des Lavignons. Comme on a pu le remarquer, nous avons constamment parlé d’une seule espèce; en eifet, jusqu’en 1826, elle était la seule connue. C’est à cette époque que M. Payraudeau, dans son Catalogue des Mollusques de Corse , ajouta une seconde espèce, sous le nom de Lnlraria CoUardi. Depuis l’intéressante découverte de M. Payraudeau, le genre est resté compose des deux espèces que nous venons de men- tionner.

L’histoire que nous venons de tracer du genre Lavignon nous ap- prend que quatre zoologistes seulement ont parlé de l’animal ; ce sont Réaumur, Baster, Olivi et M. Quoy; nous pourrions ajouter Cuvier; mais nous avons vu que ce savant, en proposant son sous-genre Lavi- gnon, en appuie l’admission sur un seul caractère de l’animal, la lon- gueur des siphons et leur disjonction totale. Nous avons déjà dit que ces divers travaux laissaient presque tout à désirer au zoologiste aussi bien qu’à l’analomisto. En effet, Réaumur, préoccupé de la manière de se mouvoir de l'animal qu'il avait sous les yeux, s'est peu attaché à détailler ses caractères ; il est le premier qui ait parlé de l'extrême lon- gueur des siphons et de la séparation de ces organes dans toute leur

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longueur ; il est également le premier qui ait reconnu leur usage. Après avoirexaminé un grand nombre do JïoIIusqnes, vivants, comme celui-ci, dans le sable et dans la vase-, Réaumur fut aussi le premier qui indiqua le mouvement du liquide ambiant dans Tintérieur de l’animal, à l'aide des siphons qui le terminent. Réaumur s’attacha à faire connaître le pied , et a décrire minutieusement les manœuvres à l’aide desquelles l'a- nimal parvient à pénétrer dans le sable ou dans la vase, en se servant de cet organe. II l’enfonce comme une espèce do coin , puis en le courbant sur l’im des côtés , il obtient un point de résistance sous la masse de sable qu’il vient de remuer. Quant aux organes intérieurs, Réaumur n’en fait aucune mention, si ce n’est des bords du manteau, dont il a vu les cils courts et obtus, et les muscles adducteurs qui ser- vent à fixer l'animal à sa coquille.

Baster n’a presque rien ajouté aux observations de Réaumur. Après avoir parlé du pied et des siphons, et après avoir représenté ranimai vivant, il enlève l’une des valves et renverse le manteau pour montrer l'intérieur de l’animal; mais cetto figure est très défectueuse; on y re- connaît cependant le pied et les siphons contractés, et deux petites par- ties que Baster nomme appendices, qui ne sont autre chose que les palpes labiales contractées et roulées sur elles-mêmes.

Comme ses prédécesseurs, Oiivi, en observant l’animal vivant, a été frappé de la longueur de ses siphons , mais il ne nous apprend rien de plus sur les autres caractères. Il n’en est pas de même de M. Quoy. Ce zoologiste, connu par les grands travaux qu’il a publiés sur les Mol- lusques, dans la partie zoologique du voyage de l’Astrolabe, ayant déjà une longue habitude do l'observation, no pouvait laisser inaperçus les organes principaux d*ua Mollusque dont il donne la figure. On doit regretter cependant que co naturaliste n’ait point observe le Lavignon vivant, ce qui a contribué à laisser beaucoup d’imperfection dans sa figure et une malheureuse brièveté dans sa description. M. Quoy constate la longueur des siphons, leur séparation, ainsi que les courts tentacules qui garnissent les bords du manteau : il parle également de la forme du pied, et il se trouve d’accord avec Réaumur et Oiivi; il ajoute une description très succincte de la branchie, dont les feuillets sont inégaux, et, d'après lui, accostés l'un à l’autre, sans qu’on puisse deviner ce que l’auteur a voulu dire par là, puisque, en réalité, les feuillets branchiaux ont moins de contact l’un avec l’autre que dans la plupart des autres genres. D’après M. Quoy, les branchies seraient plus petites que les palpes labiales, ce qui , pour nous, n’est point parfaitement exact ; car nous avons toujours trouvé ces palpes en proportion plus petites dans

T. 1. 2* PARTIE.

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tous les individus que nous avons observés. Enfin , M. Quoy fait voir la bouche, placée entre les quatre palpes labiales, mais il ne dit rien de la structure de ces organes qui raccompagnent constamment. Dans l’expUcation des figures, M. Quoy indique la place du cœur, celle du foie, celle du rectum, se contournant sur le milieu du muscle adduc- teur postérieur des valves. Les figures de ce naturaliste, de grandeur naturelle, ne peuvent suppléer à la brièveté de son texte ; et nous le ré- pétons , nous éprouvons du regret que M. Quoy, qui s’ est acquis des droits à la reconnaissance des amis de la science, n’ait pas poussé plus loin ses investigations.

Les coquilles du genre Lavignon sont de taille médiocre, très apla- ties, minces, fragiles ; elles sont ovales, subtrigones, subéquilatérales , très obtuses en avant et en arrière; les valves ne se touchent pas par tous les points de la circonférence, elles laissent de chaque côté un faible écartement; les bords sont simples, tranchants; la surface extérieure est lisse ou striée vaguement et irrégulièrement par les accroissements ; cette surface est revêtue, vers les bords surtout, d’un épiderme d’un brun grisâtre , caduc, débordant le test pour revêtir une partie des bords du manteau; les crochets sont petits, pointus, opposés, à peine obli- ques; ils partagent le bord dorsal en deux parties presque égales, for- mant entre elles un angle très ouvert. On n’aperçoit aucune trace de lu- nule sur le côté antérieur; du côté postérieur, le corselet est à peine in- diqué par une ligne oblique qui rappelle le pli irrégulier des Tellines. Immédiatement en arrière des crochets, commencent de pelilest nym- phes courtes et peu saillantes, sur lesquelles se fixe un petit ligament, semblable à celui des Amphidesmes.

La charnière est très simple, elle consiste en un cuilleron très oblique, triangulaire, s’appuyant le long du bord postérieur; il est peu profond, à base oblique , peu saillant dans l’intérieur de la coquille. En avant de ce cuilleron et au-dessous du crochet, s’élèvent, sur le bord cardinal, deux petites dents rapprochées, inégales, presque parallèles sur la valve droite , une seule sur la gauche ; il n’existe aucune trace de dents la- térales.

Les impressions musculaires sont d’une médiocre étendue ; l'ante- rieure est ovale, oblongue, légèrement courbée dans sa longueur; son extrémité supérieure est plus étroite; elle place très près du bord antérieur et l’accompagne dans la plus grande partie de sa longueur. L’impression postérieure est plus courte, plus relevée vers le bord dor- sal ; elle est obronde, scmi-luuaire et très rapprochée du bord postérieur. Ces deux impressions ne sont pas les seules que l’on remarque sur la

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coquille ; au-dessus de l'antérieure, il en existe une troisième, petite, sub- circulaire; elle donne insertion au muscle rétracteur antérieur du pied. Une autre impression oblongue, se confondant en partie avec le bord supérieur de la grande impression postérieure, indique le point s’at- tache le muscle rétracteur postérieur du pied.

L’impression palléalo est très propre à caractériser les Lavignons; elle se détache de l’extrémité inférieure du muscle antérieur; elle se place près du bord ventral de la coquille et l’accompagne dans toute sa lon- gueur ; parvenue vers l’extrémité postérieure, elle s’infléchit sur elle- même, rétrograde le long du bord venlraljusque vers sou tiers antérieur, reste confondue avec lui dans tout ce trajet, s’en détache pour remonter obliquement vers la cavité des crochets et ensuite pour redescendre vers le bord inférieur du muscle postérieur, circonscrivant ainsi une large sinuosité, très dilatée dans le milieu et fort rétrécie à son entrée : telle est la disposition que présente le Trigonella pîpcrala. Dans le Cotardi, la sinuosité est plus profonde, mais plus étroite.

L’animal du Lavignon a été pour nous le sujet de profondes recherches anatomiques , publiées dans l'exploration scientifique de l'Algérie. Il n’entre pas dans le plan de cet ouvrage de reproduire dans tous ses dé- tails le travail dont nous parlons, il nous suffira de donner succinctement la description des parties extérieures de l’animal, renvoyant pour le reste à l’anatomie comparée des Mollusques, qui fait partie de l’introduction.

L’animal dont il est question a exactement la forme de la coquille ; lorsqu'il est détaché, on voit qu’il est formé d’un manteau, s’appliquant exactement sur la surface interne dos valves et d’un corps contenu dans la cavité du manteau, auquel se rattachent divers organes extérieurs. A l’exception d’une portion des organes de la digestion et de la circula- tion, toutes les autres parties du Mollusque sont parfaitement symétri- ques, et on cela Ü rentre dans la règle générale à tous les Mollusques à coquille régulière.

Les lobes du manteau sont égaux, membraneux au centre; ils se ter- minent à la circonférence par un muscle orbiculaire étroit, assez épais qui, en s’attachant à la coquille, laisse une ligne d'insertion qui est dé- signée sous le nom d’impression palléale. Ce muscle orbiculaire est dé- bordé par un petit prolongement du manteau, d’où s’élève un rang de courtes papilles coniques, assez distantes les unes des autres. Ces pa- pilles se montrent surtout dans la longueur du bord ventral. En arriére, vers l’extrémité du bord ventral , les deux lobes du manteau se réunis- sent en une commissure, consolidée par deux petits muscles spéciaux , croisés exactement comme un X. Depuis cette commissure jusqu’au

22

DIXIÈME FAMILLE.

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muscle antérieur des valves , le manteau est largement ouvert pour le passage du pied. Cependant il existe en arrière, s’élevant sur le bord interne du muscle orbiculaire, une large valvule palléale de chaque côté et destinée à diminuer l’étendue de l’ouverture palléale, tout en laissant au pied la liberté de ses mouvements.

Le manteau , quoique très minee, est néanmoins composé de deux membranes adossées, entre lesquelles se loge, comme dans une gaîne, un muscle très plat, irradié, ayant exactement le contour de la sinuosité postérieure de l’impression palléale. En se portant en arrière, ce muscle s’épaissit, se rétrécit et se change en un tendon assez épais, qui vient aboutir à l’ouverture interne des siphons, et ses fibres se continuent avec colles qui constituent l'enveloppe externe de ces organes. Dans la portion postérieure du manteau, les deux membranes dont il est corn- posé sont unies entre elles au moyen d'un tissu cellulaire très lâche, qui leur permet de glisser l’une sur l'autre; aussi au moment ou l’animal contracte ses siphons et cherche à les faire rentrer dans sa coquille, la membrane interne du manteau est entraînée en avant , cl laissant en place la membrane externe, appliquée à la coquille, produit à l’extrémité de l’animal une cavité quelquefois très profonde, lorsque la contraction des muscles des siphons a été très violente. C’est à l’aide de ces con- tractions que l’on aperçoit la cloison charnue , à laquelle les siphons sont attachés et dans laquelle ils s’ouvrent.

Les siphons des Lavignons sont extrêmement longs ; on no pourrait jamais s’imaginer en les voyant contractés qu’ils sont susceptibles d’un allongement aussi considérable. Ces organes n’ont pas la môme lon- gueur ; le siphon anal est le plus court , il acquiert le tiers à peu près du siphon branchial; celui-ci, dans son plus grand allongement, a jusqu’à quatre ou cinq fois la longueur du diamètre antéro-postérieur de la coquille. De sorte que dans un animal qui a 45 millimètres do longueur, le siphon branchial peut avoir jusqu’à 25 centimètres, Lorsque les siphons sont dilates à ce point, leurs parois sont minces, transparentes, d'un jaune safrané très pâle, leur diamètre est de 5 à 6 millimètres à la base; ils diminuent de moitié à leur sommet. Le som- met est percé d'une ouverture circulaire; celle du siphon anal est très finement dentelée, celle du siphon branchial est découpée en six ondula- tions peu profondes.

L’animal est attaché à sa coquille à l'aide de deux muscles dont nous connaissons déjà les empreintes ; l’antérieur est ovalaire, le postérieur est subcylindrique ; tous deux sont contenus dans une gaine membra- neuse produite par le manteau.

LES AMPIHDESMIDES.

34 1

Le pied est assez grand , linguiforme, triangulaire , tranchant en son bord inférieur ; il surmonte une masse abdominale peu épaisse dont les parois fibreuses sont la continuation des muscles du pied.

En avant et en haut, dans l’angle profond qui résulte de la rencontre du bord antérieur de la masse abdominale avec l’extrémité supérieure du muscle antérieur, se montre une petite ouverture transverse ; c'est celle de la bouche. Au-dessus et au-dessous de cette bouche, s’élève une lèvre membraneuse, assez large, transverse et qui, parvenue de chaque côté du corps, se dilate subitement en une paire de grandes palpes labiales, triangulaires, un peu plus longues que larges. Ces palpes sont de la môme grandeur; elles s'appliquent Time sur l’autre, et leurs surfaces, par lesquelles elles sont en contact, sont chargées de fines lamelles obliques , très régulières ; la surface externe de ces organes est lisse. La paire interne des palpes labiales se continue avec la lèvre inférieure ; la paire externe est la continuation de la lèvre supé- rieure.

Les branchies ressemblent à celles des Mollusques do la famille pré- cédente; tout en conservant dans les Lavignons des caractères qui leur sont propres ; elles sont d'une médiocre grandeur. Les deux feuillets sont inégaux ; l’interne est le plus grand ; il est appliqué sur les parties laté- rales du corps ; il est allongé, triangulaire, tronqué enr avant, et par sa troncature il se soude au bord postérieur de la palpe labiale interne. La branchie externe, beaucoup plus petite, est également triangulaire; au lieu de s’appliquer sur l’autre et de tomber avec elle dans la cavité du manteau , elle se relève vers le dos , et par le fait elle est à côté de sa congénère comme deux feuillets d’un livre ouvert. Parvenus en arrière de la masse abdominale, les feuillets branchiaux d'un côté s’unissent à ceux de l’autre, descendent au-devant de l'ouverture du siphon anal , y rencontrent un pourtour membraneux, s’y attachent et servent ainsi de cloison pour intercepter toute communication entre la cavité du man- teau et celle du siphon anal.

En détachant entièrement l’animal de sa coquille, et en l’examinant dans la région dorsale , on remarque au milieu de sa longueur une cavité, dans laquelle sont reçusses cuilleronset le ligament interne ; au- dessous do celle cavité se trouve le cœur, contenu dans un péricarde membraneux; de petits appendices du manteau s'introduisent dans toutes les sinuosités de la charnière et en conservent la forme; l'un d’eux, plus considérable, s'avance d’arrière en avant, s'engage entre les deux ligaments, et il est destiné à la sécrétion de ces organes. Si l’on ouvre le siphon anal à son extrémité supérieure , l'on découvre

DIXIÈME FAMILLE.

342

l'anus sous la Forme d’un petit mamelon, attaché à la face ventrale du muscle adducteur postérieur dés valves.

Les Lavignons sont des Mollusques littoraux, qui se plaisent sur les plages basses et vaseuses qui avoisinent l’embouchure des rivières. Pon- dant longtemps une seule espèce fut connue , elle est répandue dans l'océan d’Europe; franchissant le détroit, elle se répand dans toute la Méditerranée , elle sort de celte mer, suit les côtes occidentales de l’Afrique, et se propage jusque dans les mers du Sénégal. Une seconde espèce a été découverte en Corse par M. Payraudeau ; peut-être faudra- t-il joindre h ces deux espèces ÏAmphidesma fransuma de M. Say, qui nous paraît avoir tous les caractères des Lavignons. On pourrait alors compter trois especes vivantes do ce genre, deux de l’Europe et une des mers de l’Amérique septentrionale.

Jusqu’ici nous n*avons trouvé qu’une espèce de LavignOn à l’état fossile dans les terrains tertiaires , c’est le Trigonella piperata qui existe dans un terrain récent des environs de Bono en Algérie, ainsi que dans le Crag d‘Anglelerre. M. d’Orbigny décrit et figure trois espèces de coquilles bivalves sous le nom de Lavignon dans la Faîéontoîogié fran~ çaise; malgré l’attention que nous y avons apportée , nous n’avons rien découvert, qui nous donnât la preuve quo ces espèces appartiennent réellement au genre dans lequel il les range. Les Lavignons sont des coquilles bâillantes, les espèces de M. d'Orbigny sont, parfaitement çloses ; la charnière est la partie essentielle de ces coquilles pour en dé- terminer le genre , et nulle part M. d’Orbigny ne parle de la charnière de ses espèces , de sorte que la formé extérieure seule parait avoir décidé l’auteur dans le classement de ces fossiles. Il y a autant do raison de croire que ce ne sont pas des Lavignons que d’affirmer qu’elles dépen- dent de ce genre. Si ces trois espèces sont du genre Lavignon , il y en aurait deux dans le Gault et la troisième dans le terrain iiéocomien. Re- lativement à cette dernière espèce, M. d’Orbigny en représente le moule seulement , et nous avouons ne pas retrouver sur lui les caractères que devraient y laisser une coquille de Lavignon. Le moule doit toujours présenter entre les crochets , du Côté postérieur, l’empreinte profonde des caillerons de la charnière , et cette empreinte n’existe pas dans la coquille de M. d’Orbigny. Aussi nous conservons plus d’un doute à son égard.

LES AMPHIDESMIDES.

343

Lavignon calcinelle. Trigonella piperata. Desh.

PL 10. fig. 1. 2. 3.

t. Testa ovatO’trigonâ, transversâ^ subœquilaterali^ a\hâ^ compressât irregtdariter transversim substriatâ; latere antico brevioritrotundato; postico subtruiicatOt hiante ; apicibus minimist opproximatis,

Piperata chaîna. Belon. de aquat. lib. II. p. 4o4«

^ Concha tennis. Lister. Anim. angl. p. 174. pl. 4. f. a3.

Bonanui. Recr. part. 2. fig. Sa, 55.

Pectunculus latus. Lister. Coucb. pl. 253, f. 88.-

Le Lavignon. Réaiimur. Mém. de l’Ac. 17 10, p. 446. pl. 9. f. 3, 5,

La CcJcinelle. Adaiison Seneg. p. aSa. pl. 17. f. r8«

Mactra piperata. Poiret. Voy. en Barb. l. 2. p. i5.

Tellina, Baster. Opus, snbseciva. t. a. lib. a. p. 74. pl* 6. f. 5,6, 7, Mya hispaniea. Ciiemnilz. Concb. t. 6. p, 3i. pl. 3. f. ai.

Venus boreaîis. Pennant. Bril. zool. t. 4. p. 96.

Trigonella plana, Da Costa. Brit. concb. p. aoo. pl. i3. f. i, Hactrapiperata. Gmelin. p. 3a6i. n* 27,

Mactra Listeri. Gmelin, p. Safir. a6.

Mya gaditana. Gmelin. p, Saat, n" 14.

Vernis dealbata. Gmelin. p. 3295, 144.

Venus gibbnla, Gmelin. p 3289. n* io3.

Mya orbictilata. Spengler. Soc. d'iûst. nal. de Copenb. t. 3, p. 78,

n* i3.

Solen callosus. Olivi, Adrîat, p. 98. pl. 4. f. i.

Tellina plana. Donovan. Brit. sbells. t. a. pl. 64* f. 1.

Mactra compressa, Montagii. Test, brit, p. 96. 5.

Mactra Listeri. Pennant. Brit zool. a* éd. t. 4. p. 194. 7.

Id, Maton et Râckelt. Lin. Trans. l. 8. p. 71.

Scrobienlariu arearia. Schumacher Nouv. syst. p. 127, pl. 8. f, 3.

Cuvier Règne anim. t. 3. p. 467.

Mactra pipernta. Dillwyn. Cat. t. i. p. 14a. n* 26,

Lutraria compressa et pipernta, LaniarcL. An. s. veit. t. 5. p. 469. n**4et5.

Mactra hispaniea. Sebweigger. Haudb. d^r Nal, p. 70!.

Listera compressa. Tiirton. Concb. ins. bril. p. 5i, pi. 5. f, i, 2. Lutricola compressa. Blainville. Maine, p 566. pl, 77. f. 2,

Lutraria Collard des Cberres. Cat. des Moll du Finist, p. i3,

U* 3.

344

DIXIÈME FAMILLE.

Mactra histeri, WooJ. In.l, leslae. [»], 0. f. 23.

Lutraria compressa. Desha)t'S. Eiicyc. luclli. vers. l. 2. p. 388. ij® 4,

Id. Büucliard Chaulereaux. Cal. des Moll, du Boul. p. 1 1.

Lutraria piperata, Philippi. Emim. inoll. Sicil. t. i. p 9. 2.

Ligiilu compressa. Anton. Vorz. der Conch. p. 3, 89.

Scrobicalaria piperata, Philippi. Enum. Moll. Sicil, t. 2. p 8.

Amphidesma compressiun. Fleming. Bril. an. 2* éd. p, 432,

Lutraria compressa. Jlauley. Descr. cat, p. 27.

Lutraria Listeri, Macgillivray. Moll. auim. ofScoll. p. 29:.

Lutraria compressa, Thompson. Rep. on the faun. of Irel. p. 263.

Listera compressa. Thorpe. Brit. niar. conr.li. p. 45.

Trigonellu plana. Lovèn Tnd, moll. ScanJ. p. 45.

Fossilis. Woodward. Geol, ofNorf. ail. p, 35. Crag. p. 43. pl. 9. f. 7.

Lutraria Listeri. S. Wood. Foss. shells. from lhe Ciag. Aun. Nat. hist. 3;. p. 240.

Trigoneîla piperata, Deshayes, Explor. sc. de l'Algérie. Moll. t. i.

p. Soy. pl. 44.

Il est intéressant pour le zoologiste aussi bien que pour le géologue, de connaître exactement la distribution des espèces : celle-ci mérite à cet égard de fixer notre attention. On la voit en effet descendre des mers du Nord, en suivant le littoral océanique de l’Europe et gagner le détroit, s’introduire dans la Méditerranée, s’établir sur presque tous les points de celte mer en ressortir par la côte occidentale de l’Afrique, et parvenir jusqu’au Sénégal. Nous avons quelques jalons à l’aide desquels nous pouvons constater l’existence de l’espèce dans ses principales stations. M. Lovèn la mentionne dans son excellent Catalogue des Mollusques de la Scandinavie; il faut donc qu’elle existe dans l’océan du Nord, et qu'elle ait été recueillie par le savant observateur que nous venons de citer. Bastor, autrefois, a trouvé l’espèce dans les mers de Hollande, et il fut l’un des premiers observateurs qui en ait fait connaître l’animal. Réaumur vit aussi notre espèce sur les côtes de France à La Rochelle, elle est en très grande abondance. Chemnitz reçut cette coquille des côtes de l’Espagne, et ignorant qu’elle eût déjà reçu plusieurs noms, il la décrivit sous le nom de Mya Impanlca. Olivi et Poirct, à peu près à la mémo époque, découvrent le Lavignon , l'un dans l’Adriatique, l’autre sur les côtes de l’Algérie. Philippi la trouva en Sicile ; Payrau- deau en Corse. Enfin , Adanson , dans son ouvrage sur les coquilles du Sénégal, décrit le Lavignon sous le nom de Calcinelle, et en constate l’existence dans les mers du Sénégal.

LES AMPHIDESMIDES.

Ainsi que loutcs les espèces qui se répandent sur une aussi grande surface, celle-ci est variable, non dans scs couleurs, puisqu’elle est blanche, mais dans ses formes, ce qui est plus important; lorsqueTon ne recueille qu’un petit nombre d’individus, provenant do localités très éloignées , on est tenté de les rapporter à deux espèces , et c’est ce qui est arrivé à Lamarck; mais si on rassemble de nombreux individus de tous les lieux , habités par l’espèce , on voit alors toutes les variétés se nuancer, et de cette manière on constate qu'il n’existe qu’une espèce la l’on croyait en trouver deux. Nous avons observé, vivants, des indi- vidus de La Rochelle et de la Méditerranée , et nous pouvons certifier, de la manière la plus positive , n'avoir reconnu aucune différence appré- ciable entre ces animaux. Les siphons ont la même couleur; ils ont la même longueur ; le pied a la môme forme ; tous les autres organes extérieurs , palpes , branchies , tentacules du manteau , ne présentent aucune différence appréciable. Les organes intérieurs eux- mômes n’ont subi aucune modification, ainsi que nous l’avons constaté par un très grand nombre do dissections.

Le Trigonella piperata est connu à l’état fossile, Woodwart le cite dans les couches d’alluvion du Norfolk; il le trouva;aussi dans le Crag , ainsique M. S. Wood. -Enfin, nous l’avons rencontré en abondance dans un terrain récent des environs do Bone en Algérie.

GENRE TRENTE-QUATRIÈME.

STSrDOSMTZ:. Syndosmya. (Récluz.)

PI, 3 bis, fig. 6. 7, 8.

CARACTÈRES gènèriques. Animal ovale-oblong, comprimé, ayant le manteau ouvert en avant et dans la longueur du bord ventral , terminé en arrière en deux siphons allongés , grêles , inégaux , séparés dans toute leur longueur ; siphon anal plus court , cylindrique ; siphon branchial très long, un peu com- primé; bouche grande, ayant les appendices labiaux très éten- dus, triangulaires, offrant une surface presque égale h celle des branchies; branchies inégales, triangulaires, réunies en arrière de la masse abdominale ; pied petit, triangulaire, très comprimé.

DIXIÈME FAMILLE.

346

Coquille équivalve, inéquilatérale, transverse, ovale, oblongue ou subtriangulaire , mince et fragile , arrondie en avant , an- guleuse , flexueuse en arrière , inégalement bâillante , plus en arrière qu’en avant ; le côté antérieur est le plus court ; crochets petits, opposés ou à peine inclinés; charnière présentant sur la valve droite deux petites dents cardinales peu épaisses, presque parallèles, et sur la gauche une seule, reçue dans l’intervalle des deux dents de l'autre valve; un cuilleron ovale ou subtri- gone, suivant le bordsupérieur, et recevant un ligament interne ; deux dents latérales subégales, l’une antérieure, l’autre posté- rieure ; un ligament externe , petit , peu épais et fibreux ; im- pressions musculaires ovales, oblongues , un peu courbées; impression palléale se creusant en arrière en un sinus profond, transverse, ovale- triangulaire , à angles arrondis.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mactra^ Wood, Montagu, Maton et Rackett, Pulteney, Gerville, Turton. -- Laskey,

Wood, Dilhvyn, Turton, Ligula, Montagu, Brown, Forbes, Nyst. 7’e/Zmct, Renieri, Brocchi, Scacchi. Abra, Leach. Amphülesma^ Lamarck, Turton, Risso, Sowerby, Collard- des-Cherres, Bouchard-Chantereaux , Scacchi, JefFreys, S. Wood, Delessert, Fleming, Hanley, Macgillivray, Thompson, Thorpe. Syiidoumya^ Recluz, Lovèn.

Nous avons fait remarquer, dans plus d’uno occasion , combien était défectueux le genre Amphidesme de Lamarck. Déjà nous en avons retiré une espèce, V Amphidesma corbuloides, pour la placer dans le genre Lyon- sia, de Turton. Comme nous l’avons fait voir précédemment, une seconde espèce , V Amphidesma phnseolina , dépend du genre Thracie do Lerch. Il y a deux autres Ampliidesmes auxquelles nous avons reconnu tous les caractères de notre genre Mésodesme , et l’une d’elles est le Meso- desma donacillat que nous venons de décrire dans l’un des genres précé- dents. Mais ces quatre espèces, appartenant à trois genres bien distincts, ne sont pas les seules qui doivent sortir des Amphidesmes de Lamarck ; nous avons encore signalé , dans ce genre, une Erycine et une Lucine, dont nous aurons à nous occuper par la suite.

LES ÂMPHIDESMIDE5.

34?

Après avoir subi des réformes aussi considérables , le genre Âm- phidesme était réduit à un très petit nombre d'espèces , parmi les- quelles se trouvaient h la fois les Amphfdesmâ variegala , prismatica , Boysîi, etc. M. G. -B. Sowerby, dans son Généra of shells , a proposé le premier, de conserver le nom d’Amphidcsme à ce petit groupe , dont les éléments sont réunis , en effet , par plusieurs caractères communs , et entre autres celui du double ligament , qui a valu au genre le nom que Lamarck lui a imposé. Tel que le savant anglais l’a considéré, le genre Ampbidesme s’est trouvé encore trop étendu , d’après les excellentes observations de M. Recluz. On voit , en effet, parmi les espèces rassem- blées par M. Sowerby, deux sortes de coquilles bien distinctes; les unes, telles que VAmphîdesma variegala ^ assez épaisses, suborbicu- laires , les autres ( ^mp/iidesma , Boysîi ^ prismatica ^ etc.), beaucoup plus petites , très minces , transparentes et subtransverses. En exami- nant comparativement ces deux groupes de coquilles, M. Recluz a reconnu entre eux des caractères constamment différents, d'ou il a été conduit à proposer un genre nouveau , sous le nom de Syndosmye , et ce genre est le sixième, sorti desÂmpliidesmes de Lamarck.

Il résulte donc, de cette dernière réforme de M. Recluz, que le genre Ampbidesme doit avoir pour type la première espèce de Lamarck , VAmphidesma variegata , tandis que les Syndosmyes réunissent les Aynphîdesma Boysn, prismatica y etc.

Avant M. Recluz , un certain nombre d’espèces de son nouveau genre étaient connues et citées dans les Catalogues des conchyliologistes. Celle qui a été mentionnée la première a été inscrite par Müller dans son Prodrome de la Faune danoise , sous la dénomination de Mya nitida. Caractérisée d'une manière très incomplète , cette espèce a été sujet de plus d’une erreur de la part des zoologistes qui , d'après la courte phrase de Müller, croyaient avoir des raisons suffisantes pour l’en- traîner dans des genres différents. Othon Fabricius avait déjà produit quelques renseignements utiles, mais encore insuffisants. Toute incer- titude à cet égard doit actuellement cesser, grâce à M. Lovèn, savant danois, , d’un très grand mérite, qui a trouvé le moyen d’accumuler un nombre considérable d’observations précieuses dans un opuscule de quelques pages, Index Moîluscorum Scandinavrœ habitantium). Ce sa- vant observateur rapporte le Mya nüida de Müller au genre Syndosmye de M. Recluz, en y ajoutant une description qui justifie son opinion. Quant aux autres espèces, elles proviennent toutes des mers d’Europe ; il faut donc les rechercher dans les ouvrages de ceux des naturalistes qui se sont occupés dès productions de ces mers. Nous en trouvons une,

DIXIÈME FAMILLE.

348

décrite pour la première fois parWood, parmi les Mactres , dans le tome YI des Transactions de ta Société linnêenne de Londres. En 1800, Laskey et Montaga font connaître d’autres espèces que le premier de ces auteurs attribue au genre Mye, et le second au genre Madré; quelques années plus tard , Montagu s’aperçut que ces petites coquilles ne pouvaient rester dans les Mactres. Aussi, dans son Supplément à son ouvrage sur les l'eslacées britanniques , publié en 1807, il établit un genre Ligule, dans lequel malheureusement il rassemble des coquilles de genres fort différents , ce que M. Recluz a démontré de la manière la plus claire , dans un très bon mémoire qu’il a publié , en 1843 , dans la Revue zoologique. Nous voyons , en eüet , réunis , sous le nom de Ligule , des coquilles dépendantes de cinq genres , et parmi elles se trouvent les trois espèces que M. Recluz attribue à son genre Syndos- mye; il était donc impossible, comme l’auraient voulu quelques zoolo- gistes, de conserver le nom de Ligule à l’un quelconque des cinq genres rassemblés sous co nom , à moins de vouloir tomber dans une confusion fâcheuse pour la nomenclature. Le genre Ligule ne fut donc adopté que d’un petit nombre de personnes , après lui avoir fait subir des ré- formes telles, que ic genre de ce nom coïncide à peu près avec celui de M. Recluz.

Les petites coquilles qui nous occupent ont , à l'extérieur, la forme et l’apparence de Tellines ; il faut en étudier, avec soin, la charnière pour les distinguer de ce dernier genre. M. Renieri s’en laissa imposer par l’apparence , en rangeant au nombre des Tellines une espèce du golfe Adriatique ; en cela il fut imité par Brocchi , et, beaucoup plus tard, par M. Scacclii. Bientôt les auteurs de catalogues, ayant trouvé quelques espèces scus le nom de Mya , quelques autres sous le nom de Mactra , dispersèrent des coquilles très analogues dans les deux genres que nous venons do nommer ; c’est ce que l’on remarque dans Wood, dans Dillwyn, et jusqu’en 1819, dans \e Dictionnaire conchy- liologique de Turton. Lamarck, comme nous l’avons vu , avait placé les mômes espèces dans son genre Ampbidesme ; dès lors un grand nombre ^ de concliyliologues suivirent cet exemple. Il faut en excepter M. Brown, dans son Catalogue des fossiles de riialie , qui met l’espèce de Brocchi et de Renieri parmi les Erychies; ce que fait aussi M. Pbilippi dans son Enumeralio Molluscorim.

On a su par Lamarck que M.'Leach avait eu l’intentian d’établir un genre dans lequel il se proposait de réunir plusieurs coquilles

minces , ayant un ligament interne ; mais ce genre lui-même renferme des espèces de genres différents ; il était donc impossible de le conserver,

LES AMPUIDESMIDES.

Ho

à moins que d’en changer la valeur. M. Risso est le seul naturaliste qui l’ait adopté dans son Histoire naturelle des productions de l'Europe mcridionale; mais il est douteux qu'il en ait bien compris les carac- tères , puisqu’il en fait un groupe qui correspond au genre Lavignon do Cuvier.

Il résulte de ce que nous venons d’exposer que les coquilles , dont M. Recluza fait son genre Syndosmye, ont été successivement ballot- tées dans les six genres suivants : Abra, Leacli; Mactra, Wood, Mon- tagu, Gcrville, Turlon, Dillwyn , etc.; 3/ya, MüIIer, Wood, Dill- w^n, Turton ; Lï</u/a , Montagu , Brown , Forbes; Tellina , Renieri , Brocchi, Scacchi; A-mphîdesma^ Lamarck, Turton, Risso, etc.

Tel qu'il a été constitué, le genre Syndosmye se distingue, avec assez de facilité, de tous ceux qui l'avoisinent. Ce sont de petites coquilles minces , blanches , transparentes , ovales , transverses , équivalves , presque toutes inéquilatérales , ayant le côté postérieur court et pourvu d’un pli oblique, comparable à celui des Tellincs, quoiqu'il soit moins apparent. Toutes ces coquilles sont lisses , fragiles et revêtues , vers les bords , d’un épiderme d’un jaune très pâle, qui déborde le pourtour des valves.

Les bords sont minces et tranchants; l’antérieur est toujours arrondi, le postérieur l’est moins , quelquefois il se termine en un angle plus ou moins aigu ; les valves sont légèrement bâillantes , en avant et en arrière. Le bord ventral est régulièrement arqué; le dorsal est divisé en deux portions inégales par la saillie des crochets. La portion antérieure, qui est ordinairement la plus longue, s’incline obliquement en avant; la postérieure s’incüno davantage, en formant, avec la première, un angle plus ou moins ouvert. Les crochets sont petits , opposés , à peine inclinés ; ou n'aperçoit aucune trace de lunule ou de corselet.

La surface interne est blanche comme Texterieure; quelquefois elle a des réÛets subnacrés , mais le test lui-même no contient point de nacre proprement dite , comme les Lyonsies et quelques autres genres. C’est ^ par la charnière particulièrement, que l’on distingue avec facilité les co* quilles du genre Syndosmye, Dans 4)resqu8 toutes les espèces, immé- diatement au-dessous du crochet de la valve droite, s'élèvent une, quelquefois deux, petites dents cardinales, parallèles, appartenant au côté antérieur. Sur la valve opposée, une seule petite dent cardinale se montre; elle est destinée à s’interposer entre les dents do la valve droite. Un cuilleron commence au môme point du bord cardinal , il se dirige en ar- rière , s’attache au bord supérieur et postérieur et ne fait qu’une faible saillie dans l’intérieur des valves ; en cela , il diffère de celui des Ana-

35ü

DIXIEMK FAMILLE.

tines , des Lutraires et des Mactres. Ce cuilleron , destiné à recevoir un ligament interne , est plus ou moins étroit , selon les espèces. Son bord supérieur ou dorsal s'épaissit en une nymphe courte , derrière laquelle vient s’attacher un ligament extérieur très petit. 11 est donc vrai que , dans les Syndosmyes ainsi que dans les Amphidesmes , il y a réellement deux ligaments, tandis que dans nos Mésodesmes on n’aperçoit que l’apparence d’un ligament externe , produit par l’épaississement de l’épiderme. Enfin , on avant et en arrière , toutes les espèces de Syn- dosmyes présentent une dent latérale plus ou moins saillante, tantôt sur chaque valve et tantôt sur une seule.

Les impressions musculaires sont fort petites , très écartées entre elles ; elles appartiennent toutes deux à la région dorsale de la coquille. L’antérieure -est ovale-obrondc , elle se prolonge en haut et en arrière, au moyen d'uiie autre petite impression triangulaire , qui est colle du muscle rétracteur antérieur du pied. L’impression postérieure est arrondie, subcirculaire ; l’impression du muscle rétracteur du pied s’en détache sous la forme d’un triangle aigu, dont le sommet se prolonge au-dessous du bord cardinal , sous la forme d’une ligne étroite.

L’impression palléale va nous offrir un caractère générique précieux, surtout si nous la comparons à celle des Amphidesmes et des Lavi- gnons. Dans les Amphidesmes , l'impression palléale, après être partie du milieu du bord intérieur et inférieur du muscle , se contourne paral- lèlement au bord de la coquille, et parvient vers l’extrémité posté- rieure , elle s’arrête à peu près au niveau de l’extrémité du cuilleron. A ce point, elle s’inQéchit en dedans, en prenant une direction obli- que, de bas en haut et d'arrière en avant , s'avance dans l'intérieur des valves aune faible distance du muscle antérieur, s'arrondit, se re- courbe ensuite en ellipsoïde et vient aboutir en ligne tangentielle au bord inférieur do Timpression musculaire postérieure. L’inflexion pal- léaie a donc une direction qui lui est propre dans les Amphidesmes , et une forme qu’on ne retrouve plus exactement la même dans les autres genres du même groupe. Le sinus postérieur, d’une forme ovalaire a un axe qui fait un angle très ouvert avec l’axe transverse do la coquille.

Dans les Lavignons, la disposition de l’impression palléale est fort différente: la sinuosité se dilate à ce point que son bord ventral vient toucher et se confondre avec l’impression parallèle au bord inférieur. Ce caractère se montre aussi dans les Syndosmyes, mais la sinuosité est moins dilatée dans le milieu , ce qui servirait à distinguer les deux genres , à défaut des autres caractères que nous avons déjà mentionnés. Au reste, dans les Syndosmyes, l’impression palléale a un plus grand

LES AMl’HIüESMlÜES.

35 i

développement que dans les Amphidesmes ; elle part de l'extrémité inférieure de l’impression palléale antérieure ; elle se place tout près du bord ventral et l’accompagne, dans toute sa longueur, jusqu’au niveau du bord interne du muscle postérieur des valves. , elle se recourbe sur elle-même , et cette portion recourbée s'attache et semble se con- fondre avec la moitié postérieure de l’impression , qui accompagne le bord ventral. Parvenue vers le milieu de son trajet, seulement alors elle s'en détache, en produisant un angle très aigu, et c’est ainsi qu’elle s’avance jusque dans le voisinage du muscle adducteur antérieur ; elle se recourbe , remonte en arrière entre les deux muscles ; se dilate vers la cavité du crochet, et redescend ensuite obliquement, pour gagner le bord antérieur de l’impression musculaire postérieure. Dans les Amphi- desmes , la sinuosité palléale est en réalité ovalaire ; elle est un peu dilatée dans le milieu, d’où il résulte que la largeur de l’entrée de ce sinus est peu différente de la longueur de son diamètre trans verse. Dans les Syndosmyes , au contraire, le diamètre de la plus grande lar- geur du sinus palléal est au moins trois fois plus grand que la largeur de l’entrée de ce sinus.

Tout ce que nous venons d'exposer des caractères des coquilles du genre Syndosmye, prouve, do la manière la plus évidente, que ce genre méritait d’ètro distingué , et qu’il doit rester dans la méthode. Il n’est pas moins évident que ses rapports s’établissent facilement d’un côté avec les Amphidesmes , dont il diffère par les impressions des muscles et du manteau ; et de l’autre, avec les Lavignonsou Trigonelles , avec lesquels il a plus de ressemblance que de différence. Ces rapports, aussi naturels qu'évidents , nous font admettre dans la famille des Am- phidesmides do Latreille, et dans l'ordre suivant, les genres Amphi- desme, Syndosmye et Lavignon. De ces trois genres, les deux derniers seulement sont connus dans la Méditerranée , et malheureusement nous n’avons pu découvrir l’animal des Syndosmyes.

Cependant nous ne devons pas oublier que M. Bouchard-Chantereaux, dans son excellent Catalogue des Mollusques du Boulonnais^ a mentionné l’animal d’une petite espèce de Syndosmye de l’Océan, mais malheu- reusement il le décrit d’une manière très brève. Cependant nous con- naissons, par cet observateur consciencieux, plusieurs caractères im- portants de cet animal au moyen desquels nous pouvons le rapprocher des Lavignons. C'est ainsi, par exemple, que son manteau est ouvert dans les sept huitièmes de sa longueur; épaissi sur ses bords, il est garni de trois rangs de très petites papilles blanchâtres; les siphons sont longs, séparés entre eux et diaphanes; les feuillets branchiaux

DIXIÈME FAMILLE.

:.52

sont très inégaux , très petits , triangulaires , prenant naissance au tiers postérieur de la base du pied ; ils sont réunis postérieurement avec ceux du côté opposé. Malheureusement M. Bouchard -Chantcreaux laisse ignorer si ces feuillets branchiaux ont la disposition que nous avons fait remarquer dans les Lyonsies et les Thracies, et que nous retrou- verons encore dans les Lavignons. La bouche est très grande et le pied sécuriforme est légèrement granuleux à son extrémité. Quanta ce der- nier caractère , nous no l’avons jamais observé dans les Lavignons , ni dans aucun autre mollusque acéphale. M. Bouchard, qui a conservé dans l’eau de mer l’animal vivant d’une Syndosmye, l’a vu ramper sur les parois d’un bocal ; probablement en appuyant le plat du pied contre cotte paroi , comme nous l’avons vu faire aux Erycines et aux Poronies..

Ce que M. Bouchard-Chantereaux nous apprend de l’animal des Syn- dosmyes , nous confirme dans les observations au moyen desquelles nous pouvons savoir, par l’inspection des coquilles , si , dans certains genres , l’animal a les siphons réunis ou disjoints. Nous n’attribuons pas à ces observations plus de valeur quelles n’en méritent; nous savons qu’elles souffrent des exceptions assez nombreuses, et cependant, d’après Ce que nous connaissons des Tellines et des Lavignons, nous aurions pu annoncer d’avance que, chez les Syndosrayes, les siphons doivent être inégaux et désunis dans toute leur longueur.

Jusqu’ici le genre Syndosmye est peu considérable en espèces. Dans le mémoire que nous avons cité de lui , M. Recluz en décrit huit de vivantes et une neuvième incertaine , empruntée à Vlthistralion conchy- liologique de M. Brown; à ces huit espèces, il faut joindre les deux décrites par M. Lovèn ; l’une d’elles est le Mya nilkîa, de Muller, comme nous l’avons vu. Ce qui est remarquable, c’est que toutes ces espèces , sans exception , sont propres aux mors de l’Europe , ce qui est probablement à des recherches plus assidues , entreprises par les naturalistes qui habitent le vieux continent.

M. Recluz n’a connu qu’une seule espèce qui eût son analogue fos- sile, c’est celle qui habile les côtes de l'Algérie; il existe cependant d’autres espèces dont les analogues fossiles sont cités. M, S. Wood en mentionne deux autres, les Syndosmya alba et prismalica ^ qui, vivant sur les côtes d’Angleterre , sont fossiles dans le crag du même pays. M. Nyst, dans son excellent ouvrage sur les Fossiles tertiaires de la Belgique, mentionne également deux espèces sous le nom de Ligula; elles senties mêmes que celles de M. XYood, et proviennent d’un terrain des environs d’Anvers, du même âge que le crag d’Angleterre. La

LES AMPIIIDESMIDES.

liste des espèces fossiles ne se borne pas aux trois espèces que nous ve- nons de mentionner ; nous en connaissons sept autres , ce qui porte à un nombre égal les espèces vivantes et fossiles du genre Syndosmye.

Syndosmye blanche, Syndosinya alba, Récluz.

PI. 8 bisA. 6. 7. 8.

s, testa ovato-oblongâ albu^ nitidâ, soîidiusculâ , transvershn temiîter striata y stihlcevigatâ ^ inarginc supero ac postico^convexiuscidâ; la- tere postico breviore^ anguîato ^Jlcxtioso, extremitate subrotundato; dentibus cnrdinaîibus crassiuscidisy dentibus îateraîibus vaîidisyre- motiusculis ceqiddistantibus,

Mactra aîba, Wood. Lin. ïrans, t. 6, p. 174. pl, i8. f. 9, 12,

Liguîa Boj-sii. Moulagu. ïeslac. brit, p. 98, pl. 3. f. 7.

Mactra Boysii. Pullney. Dorset. Cat. p. 33, pl. la. f. 7.

2d, Matou, et RackeU, Liii.Traus. t. 8, p. 72. u* 10, pl. i. f. 12.

Id. DillwyD. Cal, t, i.p, i43.u® 28,

Id, Turtun. Coneb. Bict. p. 84, n** 12.

Id. Gerville. Cat. dcaMoIl, de la Manche, p. 21. 6.

Amphidesma Boysii. Laniarck. au. s. vert, t. 5. p. 491.

Id, Sowerby, Généra of sliells,

Id. Turlon. Bril. biv. p. 53. pl. 5. f. 4. 5,

Id. l’oucliard-Chauter, Cal, des Moll, du Boul, p. i4* n 17- Ligida Boysii, Crown. Coucli. brit. andircl. p. i. pl. i4* f. 3. Amphidesma album. Fleming. Brit. an. p. 433. 470 Id, Macgillivray. Moll. au. of Scoll. p. 292. i.

Amphidesma Boysii. Hauley. Descr. cal. t. i. p. 4^.

Id. Tbotnpsou. Reporl ou lhe faim, of Irel. p. 261.

Id. Thorpe. Bril, mar. coueb. p, 55.

Ligida Boysii. Forbes. Rep. on OEg. iuvert. p. 14a.

Syndosmya alba.'Bk.tt\\u. Rev. zoûl. 1848. p. 362.

Id. Lovèu. lud. Moll. Scand. p. 44. 3ii.

Fûssilisy Amphidesma album. S. AVood. Cal, of shelU foss. from llie crag. Ann. nat, hîst. 1840. 37. p. 246. i.

Ligula alba. Nyst. Foss. de la Belgique, p. gS. pl. 3. f, 14.

Le mémoire do Wood , dans lequel cette coquille a été nommée pour la première fois , î* été communiqué , en 1 80 1 , a la Société linnéenne de Londres , et publié , l’année suivante , dans le tome 6 des Transac- tions de cette Société. En 4 803 , Montagu décrivit et figura de nouveau

23*

T. \, 2* PARTIE.

DIXIÈME FAMILLE.

35/,

la même espèce sous le nom de Ligula Boysii; ce nom prévalut chez le plus grand nombre des conchyliologues français ou anglais; cependant il était juste d’appliquer à celte espèce la loi invariable delà priorité ; c’est ce que Ol d’abord M. Fleming , en l’admettant parmi les Amplii- desmes , et ce que ne manqua pas de faire aussi M. Recluz, en l’in- troduisant dans son genre Syndosmye.

Cette petite coquille est ovale, oblongue, transverse, peu épaisse; elle est brillante et paraît lisse ; cependant, examinée sous un grossisse- ment suffisant, on la trouve couverte de fines stries transverses , irré- gulières, produites par les accroissements. Les crochets sont petits, opposés y peu inclinés , et le bord supérieur, tant en avant qu’en arrière , est convexe. Le côté postérieur est plus court, obliquement tronqué, infléchi par un pli semblable à celui des Tellines; l’angle inférieur et postérieur est arrondi et obtus; le côté antérieur est arrondi. Les fos- settes cardinales sont obliques , étroites, épaisses; les dents latérales sont grandes, proéminentes, triangulaires, épaisses, écartées de la charnière et également distantes. Celte petite espèce vit dans tout rOcéan européen , et elle se trouve fossile dans le Crag en Angleterre et en Belgique.

GENRE TRENTE-CINQUIÈME.

AMCPHIDESME. Amphidesma. (Lamacck.)

PI. II. fig, 10. II. la.

CARACTÈRES GENERIQUES. Aniiïial inconnu.

Coquille ovale ou arrondie , peu épaisse , équivalve ou sub- inéquivalve, ayant dans la plupart un pli postérieur irrégulier. Charnière portant deux petites dents cardinales sur chaque valve, deux dents latérales assez grosses et une fossette obli- que , profonde , allongée , étroite , fixée le long du bord dorsal postérieur. Cette fossette reçoit un ligament interne ; une nym- phe petite, étroite, donnant insertion à un petit ligament externe. Impressions musculaires -grandes , ovales, obrondes; impression palléale terminée en arrière en une sinuosité ellip- soïde , profonde , obliquement relevée vers le centre des valves .

LES AMPHIDESMIDES.

355

SYNONYMIE générique- TelHua ^ Linné, Chemnitz , Schrœter, Gmelin , Bruguière, Wood, Dill-wyn. Dona- cilla (olim) , Lainarck. Semele , Schumacher. Amphi- desma [mxic] ^ Lamarck, Férussac, Sowerby, Say, Gray, Rang , Anton , Reeve, etc.

OBSERVATIONS. Tel que nous le réduisons aujourd’hui, le genre Am- phidesme est bien différent de ce que Lamarck l’a constitué. En effet , de seize espèces que ce naturaliste y avait introduites , nous n’en réser - vons qu'une seule, et par il est facile de se convaincre que nous avons rattaché la dénomination générique à un groupe très différent de celui qui se trouve dans {'Histoire des animaux sans vertèbres. '

L'examen auquel nous nous sommes livré , en traitant quelques uns des genres qui précèdent, a fourni la preuve que dans le genre Amphi- desme de Lamarck se trouvaient comprises les coquilles de genres très différents. C’est ainsi que VAmphidesma corbuloidcs a passer dans le genre Lyonsia, car elle en a tous les caractères ; VAmphidesma phaseo- Una est une véritable Thracie, à laquelle nous avons rendu son nom primitif de Thracia papyracea. Si Ton en croit la dénomination d'Ainphi- desma lactea , la synonymie et môme la phrase caractéristique , cette espèce appartiendrait au genre Lucine ; mais d’après les recherches de M, Recluz , dans la collection de Lamarck , il aurait trouvé sous ce nom spéciOque la Lutraria Cotardi de M. Payraudeau, c’est-à-dire un véri- table Lavignon; cependant les nombreux changements matériels que l'on a fait successivement subir à la collection de Lamarck, ont détruit une partie de la confiance, que nous devrions avoir dans l’exactitude de la plu- part de ses dénominations. Dans tous les cas cotte coquille doit toujours sortir du genre Ampliidesme, soit qu elle rentre parmi les Lucines, soit qu elle se range parmi les Lavignons. Trois espèces : Amphidesma donacilla^ glabrella, comea, appartiennent à notre genre Mésodesme. Déjà nous avons vu les diverses espèces de ce genre mêlées aux Mac- tres et aux Crassatelles , ce qui prouve invinciblement que Lamarck n'en avait pas compris la valeur. M. Recluz, dans un mémoire publié dans le Magasin de zoologie^ a prouvé, contrairement à l'opinion de M. Sowerby, qu’il fallait distraire des Amphidesmes de Lamarck quatre espèces qui offrent aussi des caractères particuliers , et avec les- quelles cet habile naturaliste a fondé un très bon genre sous le nom de Syndosmye. Les espèces d’ Amphidesmes dont il est question senties Amphidesma tenuis ^ primatica^ Bùysii ^ et purpurescens. Voilà donc 23*

356

DIXIÈME FAMILLE.

déjà dix espèces, qui se distribuent dans des genres que nous connais- sons; voici maintenant la répartition des cinq dernières dans des genres dont nous allons nous occuper prochainement. Les Amphidesma physoides eialbella sont de véritables Erycines; nous ferons remarquer, en traitant de ce genre, cette erreur singulière do Lamarck , qui , possédant dans sa collection de véritables Erycines vivantes , prend néanmoins une petite Vénus pour type de ce genre. V Amphidesma nucleola dépend du genre Bornia de M. Philippi. Enfin , deux espèces , chez lesquelles le ligament est sub-inlérieur, doivent rentrer dans le genre Lucine déjà l'une d’elles Amphifiesma lucinalis , se trouve sous le nom de Luema lactea.

Si nous reprenions successivement les différentes espèces que nous venons de passer en revue, il nous serait facile de démontrer que, pour le plus grand nombre , elles ne présentent point les caractères tels que Lamarck les a inscrits en tête son genre. Ainsi les espèces qui dé- pendent des ^emes Lyonsia , Thracia^ Mesodesma, Erycinaj Bornia et Lucina, n’ont besoin d’aucune discussion pour être éliminées définitive- ment du genre , puisque leurs caractères ne s’accordent point avec ceux imposés par l’auteur lui-même à ses Amphidesmes. La discussion ne pourrait donc s’établir qu'au sujet des espèces avec lesquelles M. Recluz a fait son genre Syndosmyc. A celles-ci la phrase caractéristique s’ap- plique assez exactement; par conséquent, il a fallu agir arbitrairement pour attribuer le nom plutôt à un groupe qu’à l'autre. M. Sowerby est le premier qui ait décidé du choix , en proposant dans son Généra of sheîls^ de réduire le genre Amphidesrae aux Amphidesma mriegala , Boysiif pnsmaiica, et quelques autres analogues. Il était naturel que M. Recluz, en découvrant les caractères de son genre Syndosmye, re- tirât ces espèces du genre Amphidesme de M. So'werby, et de cette réforme nécessaire il résulta que la dénomination générique resta à la première espèce do Lamarck, Amphidesma variegata. Si l'on examine les- caractères de cette coquille, on voit qu’ils s’accordent exactement avec ceux du genre. Il est donc convenable de la conserver comme type des Amphidesmes , et de réunir à elle toutes les espèces qui offrent des caractères analogues. Déjà nous pouvons lui associer l’une des Lucines de Lamarck , le Lticina relicuîata , qui n’est autre chose que le Tellina reiiculata de Linné.

Il était nécessaire d’indiquer les réformes à opérer dans le genre Am- phidesme avant d'en tracer l’histoire. Limité, ainsique nous venons do le dire , ce groupe constitue un genre très naturel , dont quelques espèces furent connues de Lister, de Linné, de Chemnitz, et rappor-

LKS AMPHIDESMIDES. 357

tées par ces naturalistes au genre des Tellines. Schrœter, Gmelin , Bruguières , Wood , suivirent l’exemple de leurs prédécesseurs.

En fondant un grand nombre de genres, Lamarck rencontra néan- moins une certaine quantité de coquilles, dont les caractères ne pou- vaient s’y rapporter exactement. Ces coquilles, présentant quelques caractères communs, celui, par exemple, d'un ligament interne, accompagné d’un ligament externe , ou seulement de l’apparence de ce dernier, Lamarck les rassembla dans une sorte d'mc^rtæ sedis , dont il fit un genre auquel il donna d’abord le nom de Donacille, dans l’ex- trait du cours , nom auquel il substitua celui d’Amphidesme dans le 5* vol. des Animaux sans vertèbres. Ce genre Amphidesme est donc la reproduction du genre Donacille souâ une autre dénomination. Un genre, aussi ambigu que celui des Amphidesmes , devait laisser beaucoup d'incertitude chez les naturalistes; ils devaient s’en faire des opinions différentes, selon les espèces que le hasard mettait sous leurs yeux. Tandis que M. de Gerville entraîne les Amphidesma Boysii et prisma* «ica, parmi les Mactres , M. de Blainville considère les Amphidesmes comme un groupedu genre Lucine, et en môme temps M. Say considère un Lavignon comme une véritable Amphidesme. De telles confusions ne pourront plus se reproduire dans l’avenir ; nettement défini , débarrassé de tout ce qui lui est étranger, le genre Amphidesme ne peut se con- fondre avec aucun de ceux qui sont connus , et l'examen des coquilles va servir de preuve à ce que nous venons de dire.

Les Amphidesmes sont des coquilles ovales et obrondes, en général peu épaisses, comprimées, subéquilatérales, équivaivcs, quelquefois cependant ayant une valve un peu plus profonde que l’autre ; presque toutes les espèces sont ornées de stries Iransverses, concentriques et de stries longitudinales, quelquefois excessivement fines. Ces coquilles sont généralement blanches, teintées do jaune ou de rougeâtre à l’inté- rieur, quelques unes sont violâtres, vergetées de rouge-brun. Toutes sont revêtues d*un épiderme ordinairement gris ou brunâtre , mince , plus ou moius tenace, selon les espèces; débordant le test et destiné , sans aucun doute , à recouvrir les parties exsertiles du manteau. Les bords sont simples et tranchants ; ils ne se joignent pas exactement sur toute la circonférence de la coquille; ils laissent en avant et en arrière un petit bâillement en fente étroite. Le côté antérieur est toujours arrondi, il est le plus court dans le plus grand nombre des espèces; c’est lecôntraire dans un petit nombre d'autres. Le côté postérieur est obtus , et dans le plus grand nombre des espèces il présente une inQe.xion irrégulière, tout à fait comparable à celle des Tellines. Le bord ventral

358 DIXIÈME FAMILLE.,

est très convexe, ce qui a lieu également pour le bord dorsal ; seulement celui-ci est partagé en deux portions presque égales par la saillie des. crochets. Les crochets sont petits, peu saillants , légèrement inclinés en avant; ils dominent une très petite lunule, courte, lancéolée, plus ou moins profondément empreinte selon les espèces. En arrière des crochets, on ne trouve aucune trace de corselet ; mais immédiatement en arrière des crochets on remarque deux petites nymphes courtes et étroites, sur lesquelles s'attache un petit ligament externe. Ce ligament n’est point, comme celui des Mésodesmes , un simple épaississement épidermique; il est constitué de la môme manière que tous les liga-. ments externes , seulement il ne contient point de matière cartilagi- neuse, il est entièrement constitué de la* matière Gbreuse. Dans ceux . des Mollusques, dont la coquille est pourvue d’un seul ligament externa, ce ligament est composé de deux substances , que l'on sépare avec faci- , lité. L’une extérieure , bombée, composée d'une matière ûbreuse, solide et tenace ; l’autre interne, jouissant particulièrement d’une grande élas- ticité, ressemble davantage à un cartilage. Ces deux portions d’un même organe laissent entre elles un interstice, ordinairement très étroit, dans lequel s’enfonce un organe sécréteur, dépendant du man- teau. Chez les Âmphidesmes, ces deux portions d’un môme organe sont bien plus séparées ; car l’une reste en dehors, tandis que l’autre vient s'insérer dans une fossette allongée, étroite, profonde , attachée le long du bord dorsal postérieur. Celle fossette est séparée des nymphes par un espace allongé , triangulaire . convexe , que l'on voit se terminer en arrière par une dent latérale. Immédiatement au-dessous du crochet, les deux ligaments convergents viennent se rencontrer et se confon- dent dans une petite portion de leur longueur. En avant de la fossette du ligament interne s’élève . sur le bord cardinal , une petite dent sur la valve droite et deux sur la gaucho. Il y a dos espèces chez lesquelles il n’existe qu’une seule dent a chaque valve ; mais il eu est d’autres , , à côté de la dent principale , se montre une seconde dent plus ou moins rudimentaire. Enûn, à la limite antérieure de la lunule s’élève une dent latérale antérieure , courte et conique ; ainsi dans le genre Amphidesme , la charnière comporte une ou deux dents cardinales , deux dents latérales, une fossette oblique pour le ligament interne et une très petite nymphe pour le ligament externe.

Les impressions musculaires sont grandes ; si l’on partage la coquille en deux moitiés égales , les impressions musculaires seront comprises presque en entier dans la moitié supérieure ou dorsale. L’impression antérieure est ovale-semilunaire; elle descend obliquement le long du

LES AJilPHlDESMIDES.

359

bord antérieur et elle se termine en haut par une extrémité pointue , qui se continue jusqu’au-dessous de la dent latérale intérieure par une ligne étroite, qui est celle de l'insertion du manteau. Vers l'extrémité de cette ligne, au-dessous du bord cardinal et de la dent latérale anté- rieure , se trouve une petite impression irrégulière; elle résulte de l’insertion sur ce point du muscle rétracteur antérieur du pied. L’im- pression musculaire postérieure est plus arrondie ; elle se prolonge aussi dans une ligne de rinsertion du manteau , et son angle supérieur donne attache au muscle rétracleur postérieur du pied. Une impression pal- léalo se détache de l’extrémité inférieure du muscle antérieur , elle accompagne le bord ventral et reste constamment parallèle avec lui jusqu’à l’extrémilé [lostérieuro de la coquille. En s’inÛéchissant en dedans , elle trace une sinuosité profonde, ovalaire , dirigée obliquement d’arrière en avant et de bas en haut. Les bords de celte sinuosité ne sont point parallèles; elle est plus large dans le milieu qu'à ses extré- mités, et elle est entièrement détachée de la portion ventrale, ce qui la distingue éminemment de la sinuosité des Lavignons et des Syndos- myes. Dans d’autres genres la sinuosité du manteau est également dé- tachée; mais elle est dirigée horizontalement, ainsi que cela se voit dans quelques Lutraires , par exemple. Nous verrons des Tollines chez lesquelles la sinuosité palléale devient très grande et envahit presque toute la surface interne des valves. Chez ces espèces , les deux portions ventrales de l’impression palléale se louchent dans la plus grande partie de leur longueur. Mais il est d’autres espèces de Tellines, chez lesquelles la sinuosité du manteau ressemble beaucoup à celle des Amphidesnies , et c'est par ces espèces que les deux genres que nous comparons entrent danslesrapports les plus immédiats. Il deviendratrès intéressant de comparer les animaux de ce groupe de Tellines avec ceux des Amphidesmes, et de s’assurer par s’ils .conservent une ressem- blance , qhe semble annoncer celle de leur coquille.

Mademoiselle Catlow a inscrit trente-huit espèces dans son Concholo- gical nomenclator. De ces espèces , sejit doivent être éliminées du genre , elles appartiennent aux Syndosmyes et aux Erycines ; il reste donc trente et une espèces, dont quelques unes sont inconnues , car elles sont' empruntées à un ouvrage de M. Sowerby, qui n'a jamais été publié.

Les Amphidesmes sont des coquilles de taille médiocre; elles sont essentiellement marines ; elles vivent à la manière des Tellines , enfon- cées perpendiculairement dans le sable ou dans la vase des rivages. Quelques unes se plaisent dans les fentes des rochers j et par cette ma-

3()0

DIXIEME FAMILLE.

nière de vivre, elles se rapprochent des Ërycines et des Bornies. Presque toutes habitent les mers chaudes; le plus grand nombre pro- vient du Brésil , du Pérou , de la Colombie , du grand Océan Indien et des parties chaudes des mers australes.

On a cité dans ce genre un assez grand nombre d’espèces fossiles ; mais le genre , après avoir subi les changements considérables que nous avons mentionnés , nous pouvons affirmer ne reconnaître aucune véri- table espèce d’Araphidesme à l’état fossile parmi celles qui ont été dé- crites sous ce nom. Il n’est pas à dire que le genre n’existe pas à l'état fossile; nous avons la preuve de sa présence dans les terrains tertiaires de la Gironde. M. Hébert, savant géologue , nous a communiqué une espèce très voisine d\i Reticulaln de Linné.

Colles des espèces qui ont été mentionnées dans ce genre et qui appartiennent aux terrains tertiaires sont au nombre de trois : elles doivent passer dans le genre Syndosmye; toutes les autres dépendent des terrains crétacés ou jurassiques, et elles ont été introduites parmi les Amphidesmes parce qu’elles ne présentaient aucun caractère appré- ciable et propre à faire reconnaître leur véritable genre. Nous pouvons en dire autant des quatre espèces mentionnées et figurées par M. Port- lock, dans son ouvrage sur les terrains anciens des comtés de London- derry, Tyrone et de Fermanagh.

Il est difficile de reconnaître les Amphidesmes d’après le moule inté- rieur, à moins que ce moule ne soit dans un état de parfaite conserva- tion. Lorsqu’il est bien net, on peut y distinguer rinflexion des dents cardinales, celles des dents latérales et la cavité produite par la fossette du ligament. Mais dans des coquilles fermées , et lorsque leur moule ne présente pas les impressions de la charnière, il est de toute impossi- bilité de reconnaître en elle de véritables Amphidesmes. Les paléon- tologistes qui ont donné co nom générique à des coquilles, dont ils n’ont vu ni la charnière ni les impressions , ont cherché à faire con- naître des formes , propres à caractériser certaines couches , mais qui indubitablement appartiennent à d’autres genres , et par conséquent ne peuvent rester dans celui des Amphidesmes. Malgré la difficulté du sujet, il est des erreurs que les paléontologistes devraient éviter. En voulant servir la science , ils la blessent dans ses intérêts les plus chers ; l’incertitude qu’ils y répandent en éloigne les esprits sages qui savent qu’une science erronée ne donne que des conséquences erronées dans ses applications,

LES TELLINIDES.

36i

Amphidesme solide. Amphidesma solida , Gray.

PL 11. fig. 10. 11. 12.

A. testa crassn solida^ suhorbicuiatd , àlhâ, eoneentrîce sulcatâ, tenuis- sime raàiatim striata^ posticè sithnigosâ; rnargine eardinali pnrpureo îunuJâ minitnây îanceolatd, dentibus cardinaîibus parvis,

^ Gray. Spîc. zool, p. 6. pl, 6. f. 6.

Hanley. Descr. caU t. i. p. 43,

Callow. Conch. nomencl. p. i8. 34i Wood. Ind. Testac. a* suppL pl. la. f. Sa.

Coquille lenticulaire, suborbiculaire , presque équilatérale; elle n’est pas parfaitement équivalve ; la valve droite est un peu plus profonde .que la gauche. Les valves sont convexes , plus épaisses et plus solides que dans la plupart des espèces. Leur surface est couverte de sillons concentriques; ceux de la valve droite surtout sont remarquables par leurs'petites ondulations, qui les interrompent dans leur continuité et les font se toucher les uns les autres do manière à former des mailles irré- gulières. Outre ces sillons transverses , la surface est encore Couverte d’un grand nombre de stries très fines , rayonnantes , qui descendent des crochets vers la circonférence. Les crochets sont peu saillants , ils s’inclinent obliquement au-dessus d’une lunule enfoncée, étroite, lan- céolée, teintée d'un rouge pourpre. Un pli irrégulier, semblable à celui des Tellines , limite le côté postérieur, et dans toute la longueur de ce pli , les sillons se changent en grosses rides dont la limite est nettement arrêtée sur la valve droite , plus indécise sur la valve gauche. A l’inté- rieur, toute la coquille est d’un beau blanc, si ce n’est le bord cardinal qui est teint d’un beau rouge pourpre qui a surtout de l’intensité sur les dents latérales; les dents cardinales sont très petites, les dents laté- rales, au contraire, sont grosses et épaisses.

Cette belle Amphidesme se trouve dans les mers du Pérou , elle n’est pas rare. Elle a 60 millimètres de hauteur, 65 de longueur et 27 d’épaisseur.

ONZIÈME FAMILLE.

lies Tellinûles. Desh.

CARACTÈRES, Aniipal ovale , transverse , peu épais , ayapt lep Jobes du piapteau réunis en arriéré et garnis sur les bords

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ONZIEME FAMILLE.

d’un rang de tentacules coniques ou tronqués. Deux siphons longs et grêles , désunis dans toute leur longueur, pourvus d’un petit nombre de tentacules simples. Pied mince , triangu- laire, tranchant; palpes labiales très grandes en triangle pres- que équilatéral. Branchies inégales : la paire interne plus grande tombant de chaque côté du corps , la paire externe re- levée vers le dos.

Coquille obronde, ovale ou transverse, comprimée latéra- lement, peu épaisse, ayant les bords simples légèrement bâillants en avant et en arrière, et portant dans la plupart un pli oblique , irrégulier sur le côté postérieur. Charnière étroite , munie de deux dents cardinales et souvent de deux dents laté- rales. Ligament externe adhérent à des nymphes saillantes. Impression palléale profondément sinueuse du côté postérieur;

GENRES. Telîina^ Fragilia.

Par la définition que nous imposons à la famille des Tellinides , il est facile de s'apercevoir que nous la réduisons à un petit nombre de genres. Propo.sée, pour la première fois par Latreille, la famille des Tellinides était très étendue . car elle contenait à la fois deux familles de Lamarck, les Nytnphacées et les Lithopbages. L'auteur de celte réunion aurait été très embarrassé de la justifier. Sij en 1 825 , époque à laquelle Latreille publia ses familles naturelles, la science était trop peu avancée pour limiter des familles réellement naturelles, elle possé^ dait cependant des' documents suffisants pour éviter ta confusion que nous signalons. Nous pensions que le temps n’était plus, les classi- fications SP présentaient, en quelque sorte, comme les romans de la science , l’on jouait pour ainsi dire avec les genres et les familles , essayant les associations les plus bizarres, sans se donner la peine de les justifier. En parcourant ces classifications si promptement élaborées, si facilement jetées au moule , on se creuserait en vain l'esprit pour deviner les raisons qui ont déterminé les auteurs à constituer telle fa- mille, à la séparer de telle autre ; c’est le règne de la fantaisie et du bon plaisir, voilà ce que l'on en peut dire. Quant à la sdience et aux déductions, quelquefois si difficiles, qu’elle exige, on s'en préoccupe peu, pourvu que l'on ait la satisfaction de dire : ma classipcation, mes familles, mes genres. Le temps n’est pas éloigné , nous l'espérons du

LES TELLINIDES.

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moins , la science plus approfondie repoussera tout ce qui ne pour- rait se justiûer par l’observation , nous verrons alors le? familles se simplifier, réunir moins de genres, mais les genres s’agrandir et prendre les limites que la nature elle-même leur a imposées. De grands genres , de petites familles ; ce sont les tendances auxquelles con- duisent toutes les observations. Ces réflexions nous sont suggérées par les transformations qu’a subies la famille des Tellinides , mais elles pourront trouver leur application à d'autres parties de la classification que nous aurons à examiner par la suite.

Comme nous le disions , fondée par Latreille , la famille des ïelli- nides contenait deux des familles de Lamarck , les Nymphacées et les Lithophages, c'est-à-dire treize genres , dont .il serait impossible de justifier le rapprochement. Déjà , en 1830 , dans V Encyclopédis métho- dique , nous avons senti le besoin de détruire la faniilledes Nymphacées , et de proposer une autre distribution des genres qu’elle renferme , dis- tribution plus en harmonie avec l’étal de la science. En conservant une famille des Tellinides , nous l'avons réduite à quatre genres : Sangui- nolaire, Psammbie, Telline. Donace, nous fondant non seulement sur l’analogie des coquilles , mais encore sur celle des animaux , obligé de nous confier alors aux travaux de Poli , auxquels nous supposions toute l’exactitude nécessaire pour en déduire une classification amé- liorée.

D’après mes nouvelles vues , dit M. d’Orbigny dans sa Paléontologie française [Tenr. crét.^t. Ill, p. 3-99). je réunis dans la famille desTelIinides ]es genres DonaciUa,Lavignon, 4mphidesma , Arcopugia, Tellma, Capsa et Donax. Ces nouvelles vues. M. d'Orbigny les a acquises en se basant, comme il le dit à la page précédente , sur tes caractères propres aux ani- maux.Ces mots, que nous soulignons, vont nous donner la preuve que Tau- leur n’a guère connu les animaux qu’il rassemble dans la familledes Tel- linides. Mais chaque phrase du court préambule de JL d'Orbigny mérite- rait un commentaire, tant elle.? contiennent d'assertions curieuses. Ainsi, ce naturaliste , en parlant du ligament , dk que cet organe est un moyen mécanique et nullement un caractère sooîogique. Nous serions bien heu- leux si M. d’Orbigny expliquait sa pensée ; est-ce qu’il voudrait dire par (jue le ligament n’esl point un organe faisant partie intégrante de la coquille et sécrété par l'animal? Il est très peu de parties dans les animaux qui ne jouissent de fonctions mécaniques; les os les car- tilages dont ils sont garnis aux points ils se touchent , les cartilages élasli(iues placés entre les vertèbres , etc., sont des moyens mécani- ques qui facilitent les mouvements. Est-ce que toutes ces parties n’of-

ONZIEME FAMILLE,

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frent pas des caractères zoologiques ? Est-ce que toutes les parties solides sécrétées par un animal en dedans ou en dehors de son corps et rete- nues pour son usage pondant toute sa vie n'offrent pas des caractères zoologiques? Il serait aussi juste de dire que les impressions muscu- laires sont des moyens mécaniques, parce qu’elles so trouvent sur un test dont on peut détacher l'animal. Mais achevons la phrase de M. d'Or- bigny : aussi peut-ü tout au plus servir pour les genres , mais non pour les familles: C’est ainsi que M. d’Orbigny comprend la subordination des caractères ; il consent bien à caractériser les genres avec des moyens mécaniques , mais il réserve les caractères zoologiques pour les familles. A voir la composition do la famille des Tellinides de M. d'Orbigny. on se persuaderait facilement qu'il s’osf mépris, et que ce sont les familles qui sont caractérisées par dos moyens mécaniques.

Nous avons déjà examiné trois des genres admis dans la famille des Tellinides par M. d’Orbigny, et nous savons que les animaux des Méso- desmesetdesLavignons sonUrès différents par lousleurs caractères exté- rieurs et anatomiques; ils ne peuvent donc entrer dans une même fa- mille, et siM. d’Orbigny les avait connus, comme il le donne à penser, il n’aurait pas commis la faute de les réunir dans un même groupe. Par l’ensemble de ses caractères , le genre Amphidesrne, dont l’animal n’est point connu, doit appartenir provisoirement à la famille précédente.

Le genre Arcopagia ne peut être conservé . ayant été établi pour les TclPines obrondos , ainsi que nous le verrons en traitant des Telünes. Enfin , les genres Capse et Donace ont des animaux très différents de ceux de tous les autres genres, et se lient par quelques caractères aux Mésodesmes, tout en restant assez distincts pour constituer une autre fa- mille. Ainsi M. d'Orbigny, en se basant sur les caractères des animaux pour circonscrire la famille des Tellinides , confond cependant quatre sortes de Mollusques appartenant à autant de familles différentes ; ce qui a lieu de surprendre, c’est que M. d'Orbigny caractérise tous les genres do la famille d’après les animaux. 11 est vrai que cos caractères, écrits probablement d’après de fugitifs souvenirs, sont aussi incomplets qu’inexacts; il y a même deux genres, ^mp/itdesmn et Arcopagia, qui sont caractérisés au mo^^en d'animaux mutilés ou desséchés. Pour ceux- M. d'Orbigny a été forcé de recourir en partie aux caractères des coquilles pour les placer dans la famille des Tellinides , et , par le fait , de so mettre en contradiction avec ce qu’il avance.

Un zoologiste connu par de grands et d’importants travaux sur pres- que toutes les classes des animaux , M. Gray n'a pas oublié les Mollus- ques ; leur étude a toujours eu pour Itji une prédilection marquée. Ce

LES TELLIMDES.

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savant en a donné une preuve récente en publiant une classification complète des Mollusques dans la partie des Procès-verbaux de la Société zoologique de Londres (1847). Dans cette classification, dont nous no pouvons examiner ici l’ensemble , nous trouvons une famille des Tellinides ayant une étendue, une composition inusitées , et qui , à cause de cela, mérite toute notre attention. Nous avouerons d’abord qu’il nous est impossible d’apercevoir le lien commun au moyen duquel les onze genres compris dans cette famille se rattachent les- uns aux autres. Nous y voyons , en effet , des genres à ligament externe , mêlés sans ordre avec des genres à ligament interne ; nous y remarquons un genre d’eau douce , Galathea , à la suite de genres marins ; ceci ne se- rait point un mal , si ce genre d’eau douce, par son organisation , justi- fiait la place qu’il occupe. En se bornant aux coquilles > on reconnaît déjà qu’elles ne sont point associées d’après leurs rapports naturels. ^ Examinant actuellement ce groupe , d’après les animaux tels qu’ils étaient connus à l’époque M. Gray publia sa méthode, nous recon- naîtrons qu'ils n’ont qu’un seul caractère commun , que l’on retrouve encore dans d'autres familles : tous sont termines en arrière par deux siphons disjoints dans toute leur longueur ; mais un caractère d’une aussi grande étendue perd toute sa valeur, surtout s’il se reproduit dans d’autres groupes. M. Gray aura cru sans doute que ce caractère n’était pas le seul , mais en cela il a commis une erreur. Nous allons le prouver par un examen rapide de tous les genres agglomérés dans la famille des Tellinides.

PsAMMOBu. Coquille à ligament externe. Animal à deux longs siphons , presque égaux ; feuillets branchiaux , inégaux , plissés trans- versalement et appliqués l’im sur l’autre.

2*^ Gari. Genre emprunté à Schumacher, mais après lui avoir fait subir une modification qui, le réduisant à moitié, lui donne pour type un groupe particulier de Tellines.

ÏELLiNÀ. Ce genre ne conserve pas toute l’étendue que nous lui avons donnée depuis longtemps. M. Gray y admet comme nous les Tellinides de Lamarck , mais il en fait s’ortir les deux genres suivants :

Arcopagia, Nous avons étudié l’animal de l’espèce qui sert de type à ce genre (Tellina crassa)^ et nous pouvons affirmer qu’il ne diffère en quoi que ce soit des autres Tellines.

5” Strigilla, ^M. Gray admet ce genre pour y ranger le Tellina carnaria et quelques autres espèces, uniquement parce que ces coquilles sont couvertes de stries diagonales. A part ce caractère, sans valeur à nos yeux , ces espèces ne diffèrent en rien des Tellines , et doivent y

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ONZIÈME FAMILLE.

rentrer; si Ton admettait un pareil genre , il faudrait , pour être consé- riuent, en établir beaucoup d’autres non moins inutiles, par exemple, pour le Lucina divaricata^ pour le Cytherea tesUidinalis . pour le Car- dîum Æolicim , etc., c’est-à-diro que de pareils genres ne sont propres qu’à encombrer la science et à lui nuire.

Semble [Amphuiesma species prima , Lamk.), Nous venons de traiter de ce genre, il est devenu naturel , grâce aux nombreuses ré- formes qu’il a subies , et il est fâcheux que M. Gray ait cru devoir y joindre un genre bien distinct nommé Cumingia ps^v M. Sovverby.

Ahenaru. Ce nom a été proposé , en 1811, par M. Megerie , pour les coquilles du genre Lavignon de Cuvier. Ce nom, adopté par M. Gray, doit disparaître cependant: car il y a déjà un genre de ce nom dans les ouvrages de Linné pour des Annéiides. Ce genre a été nommé Tn'gonella par Da Costa; ce dernier nom doit donc lui rester. Quel que soit le nom du genre, il ne peut rester dans la famille des Teilinidés; il en est repoussé, non seulement par le ligament interne de la coquille , mais encore par la troncature de la branchie et sa soudure à la palpe interne.

Abra. Ce genre a été créé , en 1817, par Leach , mais laissé dans ses manuscrits, il n’a point été publié, si ce n’est par M. Gray, dans l’ouvrage dont nous nous occupons. Nous réprouvons de la ma- nière la plus formelle cette tendance à considérer des manuscrits ignorés du inonde savant comme des ouvrages authentiques , eide vou- loir leur en donner l’autorité. Aussi nous rejetons ce genre Abra de Leach, et nous admettons le genre Syndosmye de M. Recluz, proposé pour les mômes coquilles beaucoup plus tard , parce qu’il était impos- sible à M. Recluz de connaître le contenu des manuscrits de Leach, égarés pendant trente ans. L’animai de ce genre a de grands rapports avec celui' du Lavignon , mais tous deux diffèrent de ceux des genres qui précèdent et qui suivent. Il doit donc aussi sortir de la famille des Telliscides.

9" Donax. Nous verrons bientôt que ce genre, par son animal et sa coquille, est fort différent de tous les autres; les branchies, les palpes, les siphons, ne ressemblent pas à ces mêmes organes dans les genres qui précèdent.

10® Iphigexia [Capsa, Lamk.). Nous avons eu sous les yeux un animal de ce genre, et nous ne lui avons trouvé aucune différence avec celui des Donaces.

1 1 ® Galathea, M. Raug a fait connaître l’animal de ce genre , et nous sommes surpris de le rencontrer içi , car par ses branchies , ses

LES TELLÏNIDES. ^67

palpes et ses siphons, il diffère des autres genres de la famille des ■Tellinidcs.

11 résulte , de ce que nous venons d’exposer, que M. Gray confond dans une seule famille des genres qui doivent en constituer cinq. La première pour le genre Psammobhi ; la seconde pour le genre Tellina , augmenté des Gari, des Arcopagia et des St7'igilla ; la troisième pour les Amphidesmes, les Cumingies. les Lavignons et les Syndosmyes ; la quatrième pour les genres Donace et Capse ; et la cinquième, enfin, pour le genre Galaihea.

De tous ces genres , qui ne peuvent rester ensemble , nous n’en con- servons que deux dans la famille des Tellines, et tous deux se joignent par un grand nombre de caractères communs.

Lamarck rapportait à son genre Pétricolele Tellma fragilis de Linné; ayant étudié l’animal de celte espèce pendant noire séjour en Algérie , nous avons reconnu en lui un genre -très différent des Pétricoles et voisin des Tellines. Ce genre , auquel nous imposons le nom de Fragilia , est le seul qui se joigne aux Tellines, pour entrer dans la famille dos Tellinidcs.

Ainsi réduite, cette famille contient des coquilles Iransvcrses , oblon- gues ou obrondes, généralement minces et aplaties, un peu bâillantes en avant et en arrière , à bords minces et tranchants , ayant presque tontes un pli irrégulier sur le côté postérieur. Une charnière étroite porto deux dents cardinales petites, divergentes, et très souvent des dents latérales. Un ligament externe s'allonge sur le bord dorsal; les impressions musculaires médjocres sont écartées et se rattachent Tune à i’uütro au moyen d’une impression palléale, dont la sinuosité posté- rieure est très grande, horizontale , ou un peu obliqua et toujours dilatée dans le milieu.

Les animaux de la famille des ïellinides ont les lobes du manteau désunis jusque vers l’extrémité postérieure du bord ventral; les bords de cet organe portent des tentacules courts et coniques ou plus allongés et tronqués au sommet. En arrière, l’animal so prolonge en deux siphons inégaux, grêles, très extensibles , terminés en une ouverture simple ou garnie do tentacules courts , simples et coniques; les palpes labiales sont très grandes, triangulaires, àcôtéspresque égaux et présentant une surface presque égale à celle des branchies. Branchies petites , étroites , placées l’une à côté de l’autre ; les feuillets internes, plus grands, tombant de chaque côté du corps ; les externes, plus étroits et plus courts , se rele- vant vers le dos. L’animal so meut au moyen d’un pied comprimé, triangulaire, tranchant, jouissant de mouvements très divers, favorables

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ON’ZIÈME FAMILLE.

pour creuser le sable ou la vase , et y préparer une demeure à l’animal. Les animaux de la famille des Tellinides sont littoraux ; ils aiment les plages vaseuses ou sableuses recouvertes d’une faible épaisseur d'eau; cependant il y a quelques espèces qui se cachent à de plus grandes profondeurs.

GENRE TRENTE-SIXIÈME.

FKAGIIiIE. Fragilia. (Deshayes.)

P], la. f. i3. 14. i5.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale , subtrigone , trans- verse, épais ; les lobes du manteau désunis jusque près de V extré- mité postérieure et garnis dans presque toute leur circonférence d’une rangée de tentacules très courts , coniques et régulière.- ment espacés; deux siphons inégaux disjoints dans toute leur longueur, l’anal plus grêle et de moitié moins long que le bran- chial , revêtus à la base d’une couche d’épiderme et terminés par une ouverture petite garnie de huit tentacules cylindracés , gros et obtus. Palpes labiales très grandes, triangulaires; masse abdominale épaisse surmontée d’un pied petit aplati , triangulaire; branchies inégales, la paire interne tombant de chaque côté du corps, la paire externe redressée vers le dos, toutes deux se réunissant au-dessous et en arrière du pied.

Coquille ovale, subtrigone, transverse, inéquilatérale, un peu bâillante de chaque côté ; obtuse et plus courte du côté antérieur; le côté postérieur triangulaire portant un pli symé- trique le long du bord dorsal. Charnière ayant deux dents courbées et divergentes sur chaque valve ; elles sont égales sur la valve droite , inégales sur la gauche ; la plus grande de cette valve 5 bilobée et cordifonne ; ligament externe petit , peu sail- lant; impression palléale rapprochée du bord, sinueuse en arrière ; sinuosité transverse dilatée vers le milieu.

LES TELLINIDES. 36g

SYNONYMIE GEpdiRiQrE. TelUna , Linné, Chemnitz, Schrœtei’, Gmelin, Poli , Wood , Dillwyn , BroMii, Ttirton , Scacchi, Fleming, Philippi, Ilnniey. Pelrlcola. Lamarck ^ Sowerby, Payraudeau, Collard-des-Cberres , Deshayes, Mi- chelotti , Reeve, Hanley, Sismonda. Venus ^ Fabricius. Psammoiea, Lamarck. Psammohia , Ikirton, Thorpe.

OBSERVATIONS. Liniié a inscrit dans- sa édition- du S?/siema ixalurœ , sous le nom de Tellina fragilis , une coquille de la Méditer- ranée et de rOcéan d’Europe, qui n’offre passons les caractères des véritables Tellines; aussi le savant Olhon Fabricius, dans sa Faune du Groenland, publiée en 1780 , .rangea l'espece do Linné dans le genre Venus ; celte classification n'ctait peut-être pas préférable à la première ; mais elle prouve au moins que le naturaliste qui la proposa avait aperçu dans la coquille , dont il est question , des caractères qui la distinguent des Tellines. Cependant l’opinion do Linné prévalût, comme le témoi- gnent les ouvrages de Chemnitz, de Scliroetcr, de Gmelin , de Poli , de Wood, de Dillwyn, etc. Si Poli eiU été moins attaché au système de Linné, il eut été en état, plus que personne, do reconnaître dans le Tellina fragilis , des caractères distinctifs ; puisqu'il en eut l’animal vi- vant sons les yeux et qu71 le fil représenter- assez exactement dans son. grand ouvrage.

Lamarck avait défini le genre TcUine d'une manière plus rigoureuse que ses devanciers , et à cause de cela il dut en rejeter le Tellina fragiUs. 11 lui trouva à peu près les caractères de son genre Pétricole, et dès lors il l‘y introduisit, sans s’apcrco\’Uirquerunc(îo ses variétés était déjà comprise par lui parmi les espèces du genre Psammobie. Cette nouvelle opinion de Lamarck à son lourprévalutchezun certain nombre de natu- ralistes, tandis que celle de Linné persista chez d’autres; et si l'on comp- tait les auteurs qui ont partagé l’uno ou l'autre de ces opinions , on verrait qu’ils sont en nombre à peu près égal. Parmi le petit nombre de concliyliologistes qui n’ont pas admis soit l'opinion de Linné, soit celle de Lamarck, nous devons citer Turlon et M. Thorpe, qui, dans leurs ouvrages sur les coquilles marines de la Grande-Bretagne , intro- duisirent le Tellina 'fragilis dans le genre Psammobie.

Lorsque l’on cherche les motifs qui ont guidé les naturalistes dont nous venons de parler ; lorsque l’on étudie avec soin les observations consignées dans leurs ouvrages au sujet du Tellina fragilis, on se rend compte difficilement des opinions qu’ils ont adoptées ; car aucune d'elles T. I. 2“ PARTIE. 24*

ONZIÈME FAMILLE.

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ne peut se justifier, si -ce n’est celle do Linné , qui réunit en sa faveur le plus grand nombre de faits.

Si l’on compare le Tellina frogilis aux Venus , on verra d’un côté des coquilles dont le test est solide , dont les valves sont closes et qui portent constamment trois dents à la charnière; d’un autre, une coquille, ayant le lest mince, les valves baillantes, en avant et en arrière, et la charnière munie de deux dents seulement. Les Pétricoles présentent beaucoup mieux des caractères analogues à- ceux de la coquille que nous examinons; elles sont généralement milices, et leur charnière ne possède aussi que deux dents cardinales , mais dont la forme est toujours différente de celle du Tellina fmgilis. Quant aux Psamraobies, elles sembleraient avoir plus d’analogie, dans leurs caractères^ avec le Tel- Imafragilis; cependant ôn s’aperçoit, uu premier coup d’œil, que cette coquille ne peut entrer dans ce genre ; car il ne contient que des espèces aplaties , oblongues , dont la forme se rapproche do certains Solecurtes , et si nous examinons la charnière, nous y trouvons aussi deux dents, quelquefois une seule , mais dont la forme et la disposition diffèrent essentiellement déco que l’on remarque dans le Tellina fragilis. 11 nous reste à examiner maintenant s'il existe des différences suffisantes pour séparer cetlo espèce du genre ïelüne. Nous allons voir comment, dans ce dernier genre, la charnière se modifie en so simplifiant; comment les dents latérales disparaissent insensiblement , et comment enfin les dents cardinales elles-mêmes subissent quelques changements dans leur forme; mais nous verrons aussi que les Tellines restent avec quelques caractères constants, qui permettent de les reconnaître avec facilité. L'un de ces caractères, le plus saillant, consiste dans co pli irrégulier qui parcourt le coté postérieur cl vient aboutir à l'angle infé- rieur et postérieur des valves. Ce pli caractéristique n 'existe jamais dans le Tellina fragilis et quelques autres espèces qui doivent entrer dans le même groupe. Si la charnière est réduite à deux dents, ainsi que cela a lieu pour un assez grand nombre de Tellines, ces dents conservent néanmoins une forme qui leur est propre et qui ne se montre pas dans_ les véritables Tellines ; cependant on ne peut disconvenir que Linné , en rangeant le Tellina fragilis parmi les autres Tellines. a montré celte sagacité qui lui est habituelle , et au moyen de laquelle il a deviné, d’une manière surprenante, des rapports que d'autres naturalistes n’au- raient pas entrevus.

Déjà la seule comparaison des coquilles des divers genres , dans les- quels les conchyliologisles ont rangé le Tellina fragilis , prouve que cette espèce ne peut leur appartenir; mais si nous venons ajouter dans

LES TELLINIDES.

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la question des caractères, empruntés à l’animal, d’après la description et les figures de Poli, il deviendra bien plus évident que le TelUna fragilis ne peut rester dans aucun des genres, Ton a essayé de le ranger. En effet, les bords du manteau, à peine exsertiles , sont garnis d’une rangée de papilles grosses et coniques , très courtes , rapprochées , et qui ne ressemblent en rien aux tentacules cylindriques et tronquées qui exis- tent sur le manteau des Tellines. Les siphons sont fort différents dans les deux sortes de Mollusques que nous comparons; nous les verrons de deux sortes dans les Tellines ; ou ils sont très grêles et presque égaux, et alors leur ouverture terminale est simple, ou ils sont très inégaux , et l’un d'eux , le plus court, est terminé par quelques courtes digita- tions. Dans le TeUina fragilis, les siphons sont plus inégaux que dans le premier groupe des Tellines. et beaucoup moins que dans le second, et ces organes, plus épais, plus charnus , ont leur ouverture garnie d’un petit nombre de tentacules cylindracées.

Toutes les observations que nous venons de rapporter nous ont dé- terminé à créer un genre nouveau pour le TeUina fragilis de Linné; cette création était une- conséquence naturelle l’impossibilité ilous nous trouvions de placer convenablement un Mollusque , dont les carac- tères ne s’accordent pas exactement avec ceux des autres genres connus. Ayant eu occasion, pondant notre séjour sur les côtes de l’Algérie, d’observer vivant l'animal du TeUina fragilis , nous le désignâmes sous le nom générique de Diodonte, et c’est sous cette dénomination que nous en fîmes graver la figure. Nous avons plus lard en choisir une autre ; car Schumacher, dans son essai d’une nouvelle classifica- tion des Vers testacés, avait proposé ce nom pour un genre, auquel il donne pour type le SoUn minutus de Linné. Ce genre de Schumacher ne pouvait être accepté , ce Solen minutus appartenant incontestable- ment au genre Saxicave de Lamarck; il devenait possible d’emprunter son nom au genre inutile du conchyliologue danois, pour l’appliquer à un genre mieux défini ; mais il résulterait de quelque confusion dans la nomenclature; pour l’éviter, nous proposons à notre genre le nom de Fragilia.

Les Fragilies sont, des coquilles ovales-lransverses , subtrigones, renflées, à crochets plus saillants que dans les Tellines ; le côté an- térieur est le plus court , il est très obtus et courbé en portion d’ellipse ; le côté postérieur est triangulaire, il se termine en un angle obtus, auquel aboutit une légère sinuosité des valves, mais cette sinuo- sité est symétrique, c’est-à-dire semblable sur chacune d’elles. Les valves ne se joignent pas exactement sur toute leur circonférence; elles

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ONZIÊMK FAMll.lJ-:.

sont légèrement baillantes en avant et en -arriére; leurs bords sont minces, tranchants et simples. La surface extérieure est revêtue , prin- cipalement vers les bords, d’un épiderme mince et grisiUro, qui dispa- raît vers les crochets. Celte surface est ornée d’un grand nombre de fines lamelles Iransverses, plus ou moins régulières , dans l'inlerAalle desquelles on aperçoit des stries longitudinales , très fines et plus ou moins apparentes, selon les individus ou suivant les espèces.

La surface intérieure nous offre en avant, située le long du bord aatérieur, une impression musculaire d’une médiocre étendue , ovalaire , mais dont le bord interne est souvent- sinueux. L’impression musculaire postérieure est en proportion plus grande; elle est obrondo, subsemilu- naire ; elle est située à une distance à peu près égale de la charnière et de l’extrémité postérieure des valves. L’impression pailéale quitte l’ex- trémité inférieure de l’impression musculaire antérieure, se rapproche beaucoup du bord libre des valves, l'accompagne jusqu’auprès de l’angle postérieur: puis cette impression rentre en elle-même pour former une sinuosité interne, qui se détache promptement de la portion ven- trale , pour so recourber à la hauteur de la charnière , se relève ensuite pour gagner l’impression musculaire postérieure , après avoir produit une double inilexion.

La charnière conserve des caractères constants : elle est étroite, elle présente au-dessous des crochets deux dents égales et divergentes sur la valve droite et deux dents inégales sur la valve gauche; la grande dent de la valve gauche est cordiforme ou plutôt büobée. Dans l’une et Vautre valve les dents cardinales sont courbées sur elles-mêmes et sail- lantes, un peu à la manière de celles des Corbiiies. Un ligament externe, peu saillant et médiocrement allongé, s'attache à des nymphes assez grosses, très souvent taillées en biseau, de manière à offrir une pins grande surface à l'insertion de la portion interne du ligament, en sorte que, dans quelques espèces, ces nymphes pourraient être comparées à celle des Thracies. '

Pendant notre séjour en .\lgérie , nous avons observé vivant l’animal de notre nouveau genre, et nous avons pu le comparer avec celui des Pétricoles et celui des Tellines; nous Pavons trouvé différent, mais beaucoup plus du premier de ces genres que du second; nous pouvons donc affirmer que le Telliua fnt'gilis de^ Linné, Petricoîa oG/u*o/^i/c’a de Lamarck, n’estpoint du tout une Pétricole, et doit môme.appartenir à une autre famille. H n’oslpas non plus une Tellino, mais il a de nombreuses analogies avec ce genre et constitue avec lui une famille naturelle.

Vdinmal d\i Fragilia fragilis est ovale, trigone, assez épais; son

LES TELLINIDES.

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manteau même est peu transparent, ses bords, épaissis par un muscle orbiculaire, sont garnis d’un seul- rang do tentacules très courts-, coni- ques, très rapprochés, et par conséquent très nombreux; ces bords sont disjoints dans toute la longueur du bord ventral depuis l’extrémité du muscle adducteur antérieur jusque vers l’extrémité postérieure. Les deux lobes se réunissent en une commissure consolidée par doux petits muscles croisés eu X. En dedans, sur le bord, interne du muscle orbi- culaire, s'élève de chaque cote une largo valvule palléale qui vient aboutir à l'entrée du siphon branchial.

Les siphons sonlassez épaiset charnus ; ils sont complètement séparés dans toute leur longueur, ils sont inégaux en longueur et on diamètre. Le siphon branchial est le plus gros et le plus long ; une couche épider- mique ridée , grisâtre, le revêt à sa base ; son extrémité libre est garnie d'une seule série de six tentacules cylindracés et obtus. Le siphon anal est de moitié plus court que son congénère'; il est d’un blanc laiteux , et l'on remarque six lignes d’un blanc opaque, parfaitement symétriques et régulières qui , en aboutissant sur le bord do l'ouverture . semblent se prolonger en autant de tentacules courts , coniques et plus épais que ceux du siphon branchial.

La masse abdominale est très épaisse ; elle est surmontée en avant par un pied petit, comprimé, linguiforme> en proportion plus petit que celui des Tellines; par sa grandeur il se rapproche de celui des Pétri- coles , mais il reste plus plat et plus large.

La bouche est petite , ovale , étroite , garnie de deux lèvres courtes , (jui se changent de chaque côté en une paire de très grandes palpes membraneuses, coupées en triangle, presque équilatérales ; cependant elles sont un peu plus longues que larges, elles couvrent le pied et une partie de la masse abdominale; en arrière, elles se prolongent et laissent glisser eptre elles l'extrémité antérieure du feuillet branchial interne.

Les branchies sont disposées comme dans les Laviguons, c’est-à- dirc que les deux feuillets sont à côté l’un de raulre. L’interne , le plus grand, s’applique sur la masse abdominale et descend dans la cavité du manteau; l’externe, souvent plissé dans sa longueur, se re- lève vers la région dorsale. La surface externe de ces organes est lisse ; il faut les examiner, . en s’aidant de la loupe, pour y découvrir des stries transverses très fines, produites par les vaisseaux branchiaux. En ar- rière du pied , les brancliies , d’un côté , se joignent â celles de l'autre et s’avancent au devant de l’ouverture du siphon anal ; elles y rencon- trent un pourtour membraneux, auquel elles se soudent; elles contribuent de cette manière à séparer la cavité du siphon anal de celle du manteau.

ONZIÈME FAMILLE.

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Le cœur est situé, comme à Tordinaire , dans la région de l’animal qui correspond à la charnière de la coquille. Contenu dans un péricarde d’une médiocre étendue, cet organe est fusiforme, charnu, soutenu par l'intestin qu’il enveloppe, et garni de chaque côté d'une oreillette triangulaire, à parois membraneuses, excessivement fines.

Le nombre des espèces connues dans notre nouveau genre est peu considérable , trois espèces vivantes et autant de fossiles. Mais, parmi ces dernières , il en est une qui a son analogue vivant , de sorte que le genre contient seulement cinq espèces. Sous le nom de Petricola ren- ïncosa, M. Krauss , dans son ouvrage sur les Mollusques de l’Afrique australe, a fait connaître une espèce, c’est la troisième du genre, qui a la plus grande analogie avec l'une des espèces fossiles qui se trouve dans les Faluns de la Touraine;

Les espèces fossiles sont propres aux terrains tertiaires ; il y en a deux dans l'étage moyen , une seule dans l’étage supérieur ; mais cette dernière descend aussi dans l’étage moyen et se mêle aux deux autres.

Des trois espèces vivantes, l'une est des mers d'Europe et de la Méditerranée; l’autre est du Sénégal, et la troisième est du cap de Bonne-Espérance. Les Mollusques de ce genre vivent sur les plages basses et vaseuses ; souvent elles se creusent des trous dans l'argile, d’où elles ne peuvent jamais sortir. Par celte manière de vivre s’explique la petitesse relative de l’organe du mouvement, réduit à beaucoup moins de mouvements que celui des Tellines..

Fragilie de Linné. Fragilia fragilis, Deshayes.

PI. 12. f. 13. 14. 16.

D, testa ovato^trîgona f transversâ ^ incerjuilaterali, tnrgidulâ ^ alhâ ad apicern intùst/ue Jlavescente ^ \ramversîm striato-himeMosâ ^ longitu^ dinnliter snhstriatây striis teuulssimis ; iatere ontico breviore ^ lotun- dato ^ postico stihrostrato ; cnrdine bideutnto ^ altero deuie- cordijormi tnnximo wstructo, Dt^ntibus înteralibus nntlîs.

ToUinaJrngilis, Linné. Sy.**!. liât, ed. 10. p, 674, S;.

Id 1 inné. Sysf. nat. ed. la, p. 1x17, 49»

T'euns fragdis, O, Fabricius. Faim. Grocnl, p. 41^ 4i4*

Tellina frngUis. (llienini'z. Loücli. Cab. t, 0. p, 95. pi 9. f. S4.

Id. S('htœit*r. E.iil. l. a. p. 646. 6.

Id., Gnu'lin. Syst. nat. ed. i3, p, SaSo. ti* 6.

/</, Poli. Test. ntr. Sit il. I k p, 43. pl. i5. f. aa. a4.

LES TELUNIDES.

375

Id. ülisses. Trav, of Nap. p. 478. n" io5,

Id, Wôod. Gener. Conch. p. 148. 7. .

{à, Dillwyn, Cat. t. 1. p. 78. 14.

Petricola ùchryleucn, Lamarck. Anim. s. vert. Û 5. p. 5o3, n" a. / Psammotea tarentina. Lamarck. Anim. s. vert. t. 5. p, 5i8, ri® 7. TeUina fragiiis. Tiirlon. Conch. Dîct. p. 166. n“ i. f. 18.

'Tellina ju^osa. Rrown. Wern, Soc, I. a. p. 5o6. pl. L a. Psnmmobia frogilis. Turlon. Coneb. ius. Brit. p. 88. 4. pl. 7. f. 1 1. la,'

Id. Sowfirby. Généra of shells. n* i5. f. 4.

Petricola ockroleuca, Fayraudeau. Cat. des Moll, de Corse, p. 34. n* 5o. pl. X . f. 9. to.

Tellina fragilis. Wood. Ind. test. pl. 3. f. 7.

Id. Gray dans Wood. Ind. lest, suppl. f. 6.

Id. Collard des CheiTCs. Cat. desTestulu Kinist. p. 16. x.

Id. Deshayps. Eorycl. méth. vers. t. 3. p. 747. a.

Id. De.shayes. Expéd. scient, de Morée, Zool. p. 90. a3.

Id» Deshayes dans Lamk. Anim. s. vert, a* éd. l. 6, p. 157. a.

Id. Scacchi. Cat. conch. reg. Neap. p. 5.

Id. Phdippi. Ennm. Moll. Sicil, I, i. p. ay. ii* la.

Id. Maravigna. Méiu. p. LHist, nat. delà Sicile, p. 74* n. Petricola ochroleticn. HanJey. Ind. testac. p. 5a.

Id. Fleming, Brii, anim. p. 4'34. d®478.

Id. Môlter. Index Moll. Grjeiil. p. ao.

Id. Reeve. Conch. syst. t. i. p. 74, pl. 5i. f. 4.

Id. Philippi. Enum. Moll. Sicil. t. a. p. aa. la. PsammobiafragiHi.T\\M'\\t.TtT\X.m^T. eoiich. p. fia.

Petricola ochroUucA. Thompson. Krp. on lhe faun. of Irel. p. afia.

Id Catlow. Conch. nom. p. 19. i 3.

Pi.aminotea tarentina. W’ooà. Ind. testac. suppl.pl. ii f. 56.

Tellina fragili.s. Hanley. Tlie.s. conch. 6* part. p. SiQ, i9i,pl.56.

f. 14. pl. 60. f. 149.

Füssids.

Tellina fragilis, Pilippi, Enum. Moll. Sicil. I, i. p. 3o, 10 ; t. a. p. a3. la.

Petricola fragilis. Micheîotti. Brevi ceiini d’alcuni brac. et aceph. p. 36. Id. Sismonda. Synops. anim. ped. foss. 1* éd. p. ao.

La synonymie de cette espèce en retrace l’histoire et donne la preuve de l’incertitude des naturalistes à son sujet. Linné, avec sa sagacité

ONZIÈME FAMILLE.

37O

ordinaire , la range parmi les Tellines , avec lesquelles elle a , en effet, beaucoup de rapports.' Lamarck au contraire, mal inspiré cette fois, la réunit aux Pélricoles, se confiant trop exclusivement aux caractères de la charnière. Par un double emploi malheureux , il la reproduit une seconde fois parmi les Psammotées , démembrement inutile des Psam- mobies. Ces opinions, accueillies par quelques zoologistes, les partagent en trois catégories; ceux qui, avec Linné, reçoivent l'espèce dans le genre Telline; ceux qui, avec Lamarck, l’admettent dans les Pétricoies; enfin ceux en plus petit nombre qui la rangent parmi les Psammobies. L’opinion préférable est celle de Linné . et nous l’acceptons en la modi- fiant, en créant pour l’esiièce un nouveau genre très voisin des Tellines.

Le Fragilia fragilis est une coquille ovale subtrigone, plus bombée que la plupart des Tellines , et n’ayant jamais le pli irrégulier qui les caractérise. Le côté antérieur est obtus , le postérieur se termine en un angle assez aigu; un faible bâillement se remarque aux deux extré- mités de la coquille; les crochets sont petits , peu saillants, à peino obliques; la surface externe est couvmied'un grand nombre de lamelles courtes et fines, transverses, plus ou moins serrées, selon les individus. Celte surface présente aussi une très grande quantité de fines strias longitudinales ruyonnantes , plus apparentes sur les côtés que sur le milieu des valves. Celte coquille est blanche, teintée do jaune orangé, très pâle à rintérieur et sur les crochets.

Cette espèce est du petit nombre de celles qui , vivant dans les mers d’Europe, passent â l’étal fossile des terrains tertiaires supérieurs dans les moyens.

GENRE TRENTE-SEPTIÈME.

TEIiXINE. Tellina. (Lin.)

Pl. i3, üg. 71 ht j3, pl. 14. L I a 8.

CARACTKRKs Gi^NihtiQUEs. Animal ovale ouobrond, très comprimé ; les lobes du manteau réunis à l’extrémité posté- rieure, et garnis dans toute leur circonférence de nombreux tentacules cylindriques, tronqués ou dilatés au sommet. Deux longs siphons inégaux, grêles, séparés dans toute leur lon- gueur, à ouverture simple, ondulée ou garnie d’un petit nombre

LES TELLINIDES. 877

de gros tentacules courts. Pied allongé, triangulaire, com- primé ; bouche très petite ; palpes labiales très grandes et membraneuses, triangulaires. Branchies petites, inégales, subtriangulaires, lisses; Tune , l’interne, tombant dans la ca- vité du manteau; l’autre, plus petite, se relevant vers le dos.

Coquille ovale, transverse ou obronde-, mince, portant un pli irrégulier sur l’extrémitc postérieure. Charnière étroite ; une ou deux dents cardinales sur chaque valve , le plus sou- vent des dents latérales; impression palléule très profondément sinueuse en arrière.

SYNONYMIE GENERIQUE. Co7ic/La y Lister. Pectimculus ^ Lister, Da Costa. Chaîna y Rumphius, Gualtieri, Adansoii.

Peroneciy Peroneoderma , Poli. Angulus y Megerle. Omala , Phyîloda , Schumacher. TellinideSy Lainarck , Fé- russac, SnAverby, Crouch, Broderip, etc. Psammohiay Turton, Philippi. Hirigillay Turton. Arcopagiay Leach , Brown. d’Orbigny, Marromay Leach. Solecurhts [spec,], Gray.

2 e//zna, Rondelet, Aldrovande, Gesner, Bonanni, Gualtieri, Linné, Chemnitz, Da Costa, Muller, Spengler, Bruguière, Lainarck, Cuvier, Blainville, Sowerby, Wood, Swainson.

OBSERVATIONS. Lopsque Linné proposa le genre Telliiie dans les premières éditions du Systeina mtum , il trouva chez les naturalistes ses devanciers un groupe de coquilles, à peu près équivalent et portant le même nom. Si l’on remonte, en effet, aux ouvrages de Rondelet, de Gesner, d’Aldrovande , ou remarque quelques Tellines, réunies presque sans confusion. Cependant, si l’on s’en rapporte à la description de la première espèce de Rondelet , il est à présumer que ce naturaliste con- fondait parmi les Tellines une véritable Donace; car, d’après lui, les bords des valves seraient dentelés , ce qui n’a jamais lieu dans les Tel- lines. Aux espèces de Rondelet fidèlement copiées, Gesner en ajoute deux autres qui appartiennent incontestablement au genre. Dans sa sa- vante compilation, Aldrovande rassembla les diverses espèces de Ron- delet et de Gesner, et , contrairement à ses habitudes , il en ajouta cinq autres qui presque toutes proviennent de la Méditerranée. Lorsque, trente ans plus tard , Bonanni publia son ouvrage sous le titre de Re~

378 ONZIÈME FAMILLE.

creatio mentis et ocuîi , il donna indistinclement le nom de Telline à des coquilles qui , pour la plupart , doivent rentrer dans le genre des Do- naces de Linné. Lisler, dans son grand ouvrage^ laissa subsister une plus grande confusion ; car, indépendamment des espèces qu’il répand dans son genre fort incorrect des Pétoncles , il ne distingue pas les autres desDonaces, des Crassalclles, des Mésodesmes , et môme d'un assez grand nombre de Venus. Si Lister a eu le mérite incontestable de pré- céder Linné dans la création (je plusieurs genres naturels , il faut con- venir qu’il a complètement échoué dans l’arrangement 'du plus grand nombre dos coquilles bivalves. Gualtieri a été rimitatcur do Lister; il laissa subsister une semblable confusion parmi les mêmes objets.

Adanson a été le seul naturaliste qui , avant Linné, ait^iherché à limi- ter, d’une manière rationnelle , un genre Telline en lui assignant ses caractères bien observés. Mais Adanson, se laissant guider par l'ouvrage de Bonanni , imposa le nom de Telline a des coquilles que Linné , plus tard , rangea parmi ses Donaces. Quant aux Tellines véritables , .4dan- son en confondit quelques unes dans son genre Chama avec des Cylhérées, des Venus et d’autres coquilles appartenant à différents genres. Ainsi, dans la synonymie générique, il faut se souvenir que le genre Telline d’ Adanson ne représente pas celui de Linné, mais qu’il est l’équiva- lent de celui des Donaces.

Jusqu’à la dixième édition du Systema naturœ, le genre Telline est mentionné, mais non pas défini , dans les ouvrages de Linné. Dans celte édition que nous venons de citer, il est caractérisé par le pli postérieur des valves , par les trois dents cardinales, de la charnière, ainsi que par les dents latérales. Sous cette diagnose, Linné rassemble vingt- huit es|jècos , qui, pour la plupart, sont en effet de véritables Tellines; nous y remarquons cependant une Psammobie, une Lucine et une Gyclade. Dans le Muséum Uln'cœ, Linné rend le genre plus cor- rect; toutes les espèces, moins une. lui doivent appartenir, mais dans la douzième édition Systema, dans laquelle le nombredes espèces a été augmenté aux dépens de la netteté du genre, il ajoute une Tellina inœquivalvis , qui n’a aucun des caractères des autres Tellines , do sorte qu'au lieu de trois genres confondus , il y en a quatre dans ce dernier ouvrage. Toutefois, il faut le reconnaître, malgré les légères imperfec- tions que l’on peut reprocher au genre Unnéen, les Tellines, telles qu’elles sont, deviennent , dans les mains du grand naturaliste suédois, un genre beaucoup plus naturel que précédemment; aussi il a été accepté par tous ceux des conchyliologues qui ont écrit depuis sur le même sujet . Leur tâche devenait très facile , puisqu’il leur suffisait

LBS TEtLIWIDKS. 379

de retirer du genre de Linné le petit nombre d'espèces qui n’en offrent pas tous les caractères.

Bruguière fui le premier naturaliste qui osa porter la réforme dans le système de Linné , et l’on peut dire qu’il réussit dans bien des occa- sions à améliorer la méthode, en y ajoutant dos genres, devenus néces- saires ; ils eurent cet avantage de rendre plus naturels ceux de Linné lui-même. Ceci s'observe particulièrement pour le genre qui nous occupe en ce moment. En effet. Bruguière proposa pour le Te/lma le genre Pandore, rejeta parmi les Lucines le TelUna dwaricdta, reporta parmi les Solens le Tellhia Gan, et enfin proposa le genre Cyclade, dans lequel vint so ranger naturellement le Teîlina comea. 11 résulta de ces réformes.que le genre Telline , tel que Bruguière le présenta dans V Encyclopédie méthodique , avait acquis un tel degré d’exactitude , que l’on devait espérer pour lui dans l’avenir une stabilité , fondée sur la juste appréciation de ses caractères. C'est, en effet, dans les sages li- mites que lui avait imposées notre savant naturaliste qu'il fut accepté par Lamarck et par le plus grand nombre des zoologistes de ce siècle.

Lorsqu’un genre ne contient qu’un petit nombre d’espèces et qu’elles en conservent les caractères précis , les zoologistes n’éprou- vent aucun besoin de le diviser ; mais aussitôt que par de nouvelles recherches un genre s’accroît d’un nombre considérable d’espèces , on voit alors se manifester un phénomène qui se présente dans presque tous les genres nombreux. Quelques uns des caractères les moins im- portants se modifient par des nuances extrêmement graduées , et l’ob- servateur, qui n'a pas sous les yeux toutes ces modifications, croit trouver dans leurs points extrêmes des caractères d’une assez grande valeur, pour former avec eux des genres particuliers. Lamarck, en proposant son genre Teilinide, a prouvé qu’il ne connaissait pas un assez grand nombre de Tellines pour reconnaître, au moyen d’une série d’observa- tions suffisantes, l'inutilité de ce nouveau genre. Les Tellinides diffè- rent des Tellines par l’absence des dents latérales de la charnière. Pour apprécier la valeur de ce caractère , il faut réunir le plus grand nombre possible d’espèces, soit vivantes , soit fossiles, et alors on s’aperçoit que, dans un certain nombre, les dents latérales sont constantes sur l’une et l'autre valve ; mais dans d’autres les dents latérales disparaissent com- plètement, et d’une manière graduée , des deux valves à la fois ; il est des espèces, chez lesquelles la dent latérale antérieure manque d’abord, tandis que la postérieure persiste encore ; mais celle dernière disparaît à son tour, de sorte qu’à la fin du genre se groupent un certain nombre d’espèces qui ont des dents cardinales, mais aucune trace de dents la»

38o

ONZIÈME FAMILLE.

térales. Si", à mesure que les dents latérales disparaissent, il s’opérait dans les autres caractères des modifications de la môme valeur, les zoo- logistes se trouveraient dans l'obligation d’indiquer, par autant de cou- pures génériques, les principaux degrés constatés dans la série de ces modifications. Mais les choses ne se i)assent pas ainsi , tandis que les caractères de la charnière éprouvent les changements que nous venons de rappeler ; les autres , plus importants , se conservent dans leur4n- tégrité, et c’est d’après eux que le genre doit rester constitué;^ le pli postérieur, propre aux Teltines à dents latérales, Test également à celles qui en sont dépourvues; il en est de même pour les impressions mus- culaires et celles du manteau ; elles offrent exactement les mômes ca- ractères dans toute la série des espèces, quelles que soient du reste les modifications de la charnière.

Si M. Schumacher avait fait la série d’observations dont nous venons d’exposer les principaux résultats , il est à présumer qu’il n'aurait pas proposé le démembrement des Tellinesen deux autres genres, auxquels il impose le nom de Omala et do Phylloda ; car il aurait vu comme nous que ces divisions réposent sur des caractères d’une faible valeur, lors- qu’on les compare aux caractères fondamentaux du genre. Quelle diffé- rence générique y a-t-il, en effet, entre le Tellina planata^ type du genre Omala et le Tellina foHacea, type du genre Phylloda?

M. d’Orbigny dans sa Paléo7ilüiogie française a conçu la famille de Tellinides autrement que les autres classificateurs : nous venons de le constater. 11 ne sera pas sans intérêt d'examiner la manière dont ce savant envisage le genre ïelline lui-même , le plus important de cette famille. Au lieu de s’appliquer à simplifier le genre, M. d'Orbigny y introduit , d’un côté, des coquilles quq tous les auteurs en ont toujours séparé; tandis que, d’un autre, il en sépare, sous le nom d’Jrcopagia , des especes qu’ils y admetlenl. Pour se faire une idée de ce que M. d’Orbigny renferme dans ses Tellines , il faut consulter la syno- nymie généFique qu’il place a la tête du genre, et l’on verra qu'il y admet une partie des Snnguitwlaires de Lamarck, toutes les Psammobies, les Psammotées et les Tellinides de ce même auteur ; il y introduit aussi les genres Psainmocole, SoleleUinej Psammobie ^ Psammotée et Sanguinolai7'e de M. de Blainville; enfin, pour mieux compléter l’en- semble de son genre , il y introduit les genres Lobaria, Gari, Omala et Phylloda de Schumacher et dans le but probablement de résumer les caractères zoologiques du genre, U lui donne encore pour syno- iiyme le genre Peronea de Poli. Il semble que la citation des divers ■genres , si singulièreatent amalgamés , serait une critique suffisante du

LliS TlîLLiMüKS.

38l

genre Tellinede M. d’Orbigny; cependant nous croyons nécessaire de passer rapidement en revue chacun des genres mentionnés, et d'exposer les raisons qui les repoussent pour la plupart des Telünes proprement dites.

Depuis très longtemps nous avons proposé la réforme des Sangui- nolaires de Lamarck; quelques espèces, en effet, présentant les ca- ractères des Psammobies , ont rentrer dans ce genre, et pour nous le genre Sanguiuolaire doit avoir pour type le San(/ump/aria rugosa de Lamarck et quelques espèces analogues/ Mais nous pouvons affirmer que, parmi les quatre espèces inscrites dans VJlïstoire des unî'maua; sa7i5 vertèbres, il n’y en a pas une seule qui doive entrer dans le genre Telline.

Nous avons été le premier h faire apprécier l'inutilité du genre Psammoïea.Ge'genre vient sefondro insensiblement dans les Psammobies, et une fois que toutes les espèces do cos deux groupes sont réunies , on reconnaît chez elles tous les caractères d'un bon. genre, et nous verrons bientôt que l'animal concourt à faire d’elles, non seulement le type d'un bon genre, mais encore celui d’une famille. Parmi ses Psammotées et ses Psammobies, Lamarck avait égaré quelques Tellines; il suffit donc de les en retirer, pour laisser au genre toute sa netteté. Nous avons vu le genre Tellinide de Lamarck, reposant sur l’absence des dents latérales; notisqvons apprécié la valeur de cette modification, etM.d’Or- bigny s’est mis d’accord avec nous pour le supprimer.

M. de Blainville a institué son genre Psammocole, pour réunir, sous une même dénomination , les deux genres Psammobies et Psam- motées de Lamarck. I! divise ensuite son genre en trois sections; il désigne les deux dernières yvar les dénominations génériques de Lamarck. Il semblerait, d'après rénonciation de M. d'Orbigny, que M. de Blainville admettrait h la fois les genres Psammobies et Psam- motée, et de plus un genre Psammocole, différent des deux autres. Ces observations prouvent qu’il est indisi)en3able de citer avec exactitude dans des matières qui réclament la plus grande certitude, sans quoi on risque de tromper son lecteur et de l’entraînor à do graves erreurs. Tel que le genre Sanguiuolaire est caractérisé par M. de Blainville , il est évident qu’il constitue un double emploi des Psammobies; par con- séquent, au lieu d’introduire ce genre parmi les Tellines, il aurait fallu le transporter parmi les Psammobies. Parmi les genres de M. de Elain- ville, M. d’Orbigny cite encore ceinides Soletellinos. Lesconchyliologues savent que Linné avait rapporté à son genre Solen quelques coquilles telliniformes , dont le SoJeu Diphos peut donner une idée; Chemnifz , Bruguière, Lamarck et les naturalistes enfin jusqu’à M. de Blainville,

382

ONZIÈME FAMILLE.

conservèrent- au genre Solen de Linné toute son étendue. M. de Blain- ville comprit le premier que ce genre devait être réformé , et il le fît en proposant deux genres, celui cTe Solecurles et celui de Soleteilines. Le genre Solecurte est aujourd’hui ad(^lé de tout le monde ; il est en effet fondé sur de très beaux caractères. 11 n’en est pas de môme des Soletel- lines , et nous avons prouvé par une discussion approfondie., que les coquilles de ce genre ont tous les caractères des Psammobies. Dès lors nous avons conclu à la suppression du genre SoleLelIine à la fusion de ses espèces parmi les Psammobies.

Parmi les genres de M. Schumacher il y en a deux, Omala et Pliyl- loda , qui doivent rentrer dan» le genre Telline ; quant au genre Lobaria, il doit rentrer dans les Sanguinolaires de Lamarck. Mais en comparant les caractères de celle coquille avec ceux des Psammobies, nous ne voyons pas de différence suffisante pour les distinguer, et dès lors ce genre Loè^n'a vient encore s'ajouter à la synonymie du genre Psam- mobia.

Il en est de même du genre Gari de M. Schumacher ; ce genre cor- respond exactement à celui des Psammobies de Lamarck ; par conséquent il doit être supprimé, mais non en faveur des Tellines, comme le croit M. d’Orbigny.

Le genre Peronea de Poli ne comprend pas seulement les Tellines de Linné, il renferme aussi les Donaces , et par conséquent la citation non restreinte, faite parM. d’Orbignÿ, de ce genre Peronea, peut faire supposer qu'il l’admet aussi tout entier dans son genre Telline. Nous allons voir, par la description abrégée de l'animal dqs Tellines et par celle des Mollusques des Donaces, que Poli, trompé par des études in- complètes , avait réuni des genres qui appartiennent à des familles dif- férentes.

Après avoir retracé, le plus brièvement possible , l’histoiro des Tel- lines et des modifications qu’elles ont subies, il est nécessaire d’examiner dans quels rapports ce genre a été maintenu dans les classifications les plus importantes. Nous ne parlerons pas des classifications des natura- listes anciens; elles nous présentent des imperfections qui résultent d’un trop petit nombre de faits et d’observations; il fallait d’ailleurs un puissant génie pour concevoir l’ordre et l’établir au milieu du chaos qui régnait alors dans les ouvrages des naturalistes. Linné fut le législateur qui, grâce aux idées les plus simples, enfanta la méthode naturelle et la fit prévaloir dans toutes les parties des sciences naturelles. C’est 'donc dans ses travaux que nous devons rechercher d’abord comment il a compris les rapports du genre qui nous occupe. Linné, avec cette ad-

LES TE LL IN IDES.

383

inirable sagacité qui caractérise tous scs -travaux, avait aperçu les rap- ports qui lient les Tellincsanx Solens, surtout en admettant, parmi ces demlers. quelques espères lellinoïdos, qui établissent un passage in- sensible entre les deux genres. La co(]uil]c des ïellines reste bâillante en avant et en arrière, comme celle des Solens,. dont nous venons de parler; mais les Tellines ont un pli postérieur et de plus des dents la- térales , dont les Solens sont toujours dépourvus. D'autres genres ont aussi des dents latérales à la charnière , et Linné les considère comme transitoires entre les Tellines cl les Venus : et c'est pour cette raison que dans l'ordre méthodique on trouva les Douaces, les Madrés et les Cardiunl à la suite des Tellines. Cet ordre, conservé par presque tous les naturalistes classificateurs, est adopté par Bruguière dans les ta- bleaux systématiques, qui sont au commencement du I" volume de {'Histoire nuliireüo des Vers, &dnsi V Encyclopédie méthodique. Dans son tableau élémentaire de {'Histoire des animaux, publié en 1798 , Cuvier apporta quelques modifications à la classification de Linné et de Bru- guière. Les Tellines sont à la suite des ünips ; elles sont suivies des Bucardes, des Madrés et des Venus ; les Cames et les Arches s’entre- posent encore entre les Tellines et les Solens. C'est ainsi que se trouve détruit ce premier arrangement iinnéen, qui a paru satisfaire les exi- gences (le la science. Mais Cuvier modifia par la suite ses opinions, comme nous lo verrons lorsque nous parlerons de la première édition du Règne animal.

Peu de temps aprèâ la publication du tableau élémentaire de Cuvier, . Lamarck présentait, à la Société d'hisLoiro naturelle de Paris, ses pre- mières tentatives sur la classification des coquilles. La science, considé- rablement enricliiodo faits nouveaux, éprouvait chaque jour davantage la nécessité de réformer les genres de Linné; il fallait en diminuer l’é- tendue, en préciser les caractères dislinctifs, comparer entre elles toutes les espèces , pour éliminer celles dont les caractères ne coïncident pas exactement avec ceux du genre, et cependant dans ce travail long et pénible, rester conslamment pénétré de l’esprit des méthodes du grand législateur d’Upsal. Bruguière avait commencé et Lamarck continua avec toute la supériorité dTm grand observateur, les réformes nécessaires dans la constitution des genres de la classe des M{)liusques.

Les Capses et les Sanguinolaires. détachés des Solens, vinrent, ainsi que les Grlycimères , s’interposer entre les Tellines et les Solens. Les Lucines et les Cyclades, séparées des Venus et dos Tellines, furent considérées comme des genres intermédiaires avec les Venus, et furent mises à la suite des Tellines. Les Donacesen furent, malheureusement,

ON/IÈMK FAMILLli.

384

éloignées, de sorte que dans la série générale, les Tcllines conservèrent à peu près les rapports que Linné leur] avait imposés. Nous trouvons le genre à la môme place, et dans un ordre inverse dans le Système des animaux sans vertèbres j que Lamarck publia en 1801 ; il n'cst donc pas nécessaire, que nous insistions davantage sur la classification proposée dans cet ouvrage; nous n’avons pas besoin de rappeler non plus que, jusqu'alors, aucune tentative n’avait été faite pour grouper les genres en familles, et que Lamarck fut aussi le premier qui, Ù-Amssi Philosophie zoologique, proposa de distribuer le Règne animal en familles naturelles. Les Mollusques eurent une classification, fondée sur tous les faits connus à leur égard; mais celte première tentative, excellente pour l’époque elle fut faite, en attirant rallenüon de tous les observateurs, éprouva par la suite des améliorations considérables. Nous trouvons dans la série des familles des Mollusques acéphales, une famille des Conques rassemblant neuf genres, parmi lesquels on remarque les Tellines entre les Donaces et les Lucines, par conséquent dans des rapports beaucoup plus naturels que dans les méthodes précédentes de Lamarck. Quelques années après , Lamarck améliora sa classification dans un opuscule publié en 1812, sous le titre d' Extrait du cours de zoologie. La famille des Conques est conservée ; mais elle est augmentée de deux genres, et les Tcllines se trouvent séparées des Donaces par un de ces genres nou- veaux, nommé Donacille, auquel, plus tard, le môme auteur substitua lo nom d’Ampbidesma.

Nous savons déjà en quoi les méthodes de Cuvier diffèrent de celles de Lamarck. Ces différences se remarquent à l’occasion du genre qui nous occupe ; elles ne sont point considérables en apparence, mais elles le sont si l'on prend en considération les principes qui ont dirigé les deux pins grands naturalistes do notre époque. Dans la première édition du Règne animal de Cuvier, la famille de Cardiacés réunit onze genres, parmi lesquels oii remarque les Tellines entre les Corbeilles et les Lo- ripèdes , non loin des Cyades et des Donaces d’un coté , des Lucines et des Venus de l’autre. Cuvier attachait très peu d’importance aux ca- ractères empruntés aux coquilles. Lamarck, au contraire, cherchait à donner h ces caractères toute leur valeur, en faisant remarquer leur constance et leur analogie. Cuvier voulait fonder sa classification sur les caractères des animaux, h uneépoque où, malheureusement, ceux de tons les genres n'étaient pas connus. II en résulta que pour un assez grand nombre Cuvier manqua de guide, et sa méthode s’en ressentit, car certains genres paraissent y être jetés an hasard ; c'est ce que l'on remarque pour les Tellines, qui, sans contredit, et d'après les travaux

LF.S TELLÎNÎDES.'

385

3e Poli, sont ('•Inignées fies Lnripiîdps et des Corbeilles. Los Corbeilles , en effet t se rapprochent des Lucines dont les Loripèdes ne sont qu’un démembrement inutile. Les Tcllinesse trouvent aussi très éloignées des Solens et des autres genres qui ont avec elles le plus d’analogie : par conséquent, à l’époque Cuvier publiait la première édition du Rèyvft animal, il lui aurait été impossible de mettre les Tellincs dans des rap- ports plus naturels, en les introduisant dans un autre groupe plus rap- proché des Solens.

Dans l’intervalle de six années , qui sépare l’extrait du cours du sixiègie volume de ['Histoire des animaux sans vertèbres, Lamarck mo- difia sa classification des Mollusques acéphalés, et la porta au plus haut degré de perfection qu’il lui fut possible , avant d’atteindre le terme de sa longue et glorieuse carrière. Notre célèbre naturaliste ne se contenta pas de démembrer la famille des Conques , il sentit que plusieurs des genres qu’il y comprenait devaient entrer dans de nou- veaux rapports , et c’est dans le but de satisfaire aux besoins de la classification qu’il créa la fandlle des Nymphacées, dans laquelle il rangea dix genres , dont les uns, plus rapprochés des Solens, forment un premier groupe sous le nom de Nymphacées solenaires, tandis que les autres, sous le nom de Nymphacées tellinaires, se rapprochent da- vantage du type des- Venus par les derniers genres qu'il contient. Les TelUnes, dans cet arrangement méthodique, se trouvent entre les Psam- motées, les Tellinides et les Corbeilles. Les Lucines et les Donaces font partie du même groupe.

Beaucoup de naturalistes ont adopté cet arrangement méthodique do Lamarck ; à le prendre , au point de vue de la conchyliologie propre- ment dite, il est, en effet, plus satisfaisant qu’aucun autre. Toutes ces co- quilles se joignent par un ensemble de caractères communs qui paraît assez satisfaisant, surtout si l’observation est plus superficielle qu’ap- profondie. Il est certain que les genres Sanguinolairo , Psammobie, Psammotéc, Tellinc, Tellinide, Donax et Capse ont entre eux une analogie incontestable; mais il n’en est pas de mémo des Corbeilles, des Lucines et des Crassines.

Si, au lieu de borner ses investigatioiis à la coquille, le zoologiste étend ses recherches sur les animaux, il acquerra bientôt la preuve que l’arrangement méthodique de Lamarck ne peut subsister dans une mé- thode naturelle. Il suffirait pour cela d(i inellre à profit Ic.s observations consignées par Poli dans son grand ouvrage sur les Mollusques des Deux-Siciles , et, sans se préoccuper des opinions de l’auteur, voir les faits par eux-mêmes et les estimer à leur juste valeur. Poli trouvait

9.5*

T. 1. PAHTIE.

ONZIÈMK FAMILLE.

mi

entre les Tellines et les Données de si grandes ressemblantes, qu'il pro- posa do réunir ces deux genres en un seul, sous lo nom de Perronca. Mais Poli oubliait les faits les plus considérables, (pi'il avait iui-mémo exposés . et d'après lesquels les deux genres en question sont parPaite- meiit distincts, autant par les animaux que par leurs coquilles. C’est ainsi , pour n’en donner qu’un exemple, que dans les Tellines les bran- chies sont disposées exactement comme dans les Lavignons, tandis que dans les Donaces ces organes ont la plus grande ressemblance avec cæux des Mésodesmes. Poli fait voir combien la terminaison des siplions de ces deux' sortes de Mollusques est différente, puisque dans les Tellines ils sont à peine ciliés, tandis que dans les Donaces il sont garnis de ten- tacules branchas, semblables à ceux des Mésodesmes. Quant aox Lu- cinos , que Laniarck comprend dans le même groupe que les Toliines , Poli fait connaître l'animal d'une espèce de la Méditerranée tous Io nom de Loripes. Cet animal est tellement différent de celui des Donaces et des Tellines, que nous avons de la peine à concevoir aujourd'hui comment les zoologistes, armés do documents aussi précis, ont pu hésiter aussilong- lemps sur la classification des Mollusques que nous venons de mentionner. Cuvier, comme nous l'avons vu, malgré ses connaissances plus approfon- dies do Tanalomiede ces animaux, n’a pas été à l’abri d’erreurs semblables à celles que nous venons de signaler dans les ouvrages de Lamarck.

M. (le Blainvilie emprunta à Poli beaucoup de caractères génériques, mais il no mit pas toujours à ses emprunts toute l’exactitude que l'on aurait attendre d’un naturaliste aussi expérimenté. Ce savant n’amé^ liora en aucune façon la classification des Tell.nes et des genres envi- ronnants ; il la laissa à peu près ce que Cuvier I avait faite. En effet , les Tellines sont à la suite des Bucardes et des Donaces, et elles sont suivies des Lucines et des Cyclades. M. de EÜainviile tombe dans une erreur qu'il eût été facile d’éviter; il dit que l’animal des Tellines est entière- ment semblable à celui des Donaces. Pour avoir la preuve du contraire, il suffit de comparer les figures de Poli, et l’on acquerra la conviction que ces animaux different par les caractères importants que nous avons mentionnés tout à l’heure,

M. Rang, dans son Manuel de Cotu-hyUohgie, n’apporta point de chan- gements considérables dans la classification du genre qui nous occupe; nous pouvons dire que Cuvier a agi de môme, lorsqu'il publia, en 1 830, la dmixièrae édition du Règne animal. Dans cet ouvrage , raalbeureuse- menl resté au-dessous de la réputation de son auteur, les Tellines sont maintenues à la place qu’elles occupaient en 1817, dans la première éilition du meme ouvrage.

LKS TKf.UNIDES.

38^

. Presquo ious les naluralistos qui yiiin'nl après Ciiyier et- Lamprk. traînés par l'exemple de ces doux grands zoologistes, n'appoitèrenl que des changements peu considérables dans les rapports du genre Telline avec ceux qui l'avoisinent le plus. Presque toujours, ce genre est mis dan^ le qoiUMCt le plus immédiat avec les Donaces d’un eôté cl avec les Lucines de raulro. Nous-méme avons élé .entratnç à admettre eet ar- rangement dans les divers ouvrages do Conchyliologie que nous avons publiés; maip aujourd'hui, en présence des faits nombreux que nous- avons observés sur les animaux \ivants dont il est question, nous propo- serons des cliangQments considérables dans les classifications adoptées. La nécessité de cos changemenU découlera natureUement de ce que nous allons exposer sur les caractères extérieurs desTellincs etsnr l’orgfi- nisalion intérieure de leurs animaux.

Les Teliines se distinguent facilement de toutes les autres coquilles lévalves par l'aplatissement considérable de leurs yalves ; elles se re- connaissent aussi à un caractère propre, qui consiste en un pli irré- gulier, quelquefois très prqfond , qui règne le long du bord postérieur. La forme générale de ces coquilles est variable; pour le plus grand nomltre, elles ^iont oblongues , Iransverses , et elles passent insensible- ment d'qne forme très étroite ù une forme ovalaire et môme à une forme ül)ro{jd0. Ces ditférences avaient déterminé Lamarck à diviser le genre m quelrpjGS groupes, pour faciliter la distinction des nombreuses espôce-s. Püut-étre produirait-on des subdivisions plus naturelles, eu employant d'aulres caractères que pourrait fournir la eharnicre ainsi que l'impres- sion pailéalc. Toutes les Teliines sont subéquilatérales; queltpiefois- les vulves sont inégales, Titne d'elles étant un jkîu plus profonde qiu^ l'autre ; le i^té anterieur est arrondi ; le postérieur est souvent prolongé en bec, et prasque toujours anguleux , à cause du pli postérieur . qui aboutit à l'angle inférieur et postérieur des valves. Les côtéi? sont bûiilaiils, mais ce biuliement u'est pas semblable dans toutes les espèces ; dans quelques unes, il est assez considérable, dans d’autres, il est si petit que les valves semblent complètement fermées. Les crochets , dans les Teliines,, sont toujours petits, peu saillants, extrêmement rapprochés , peu inclinés en avant; ils dominent à peine le bord intérieur, sur lequel la lunulo est rarement circonscrite; les bords sont toujours minces, tranchants, simples; en cela, les Teliines sont très différentes des Donaces, qui ont toujours les bords finement dentelés. Le corselet est généralement limité d’une manière nette, au moyen d'une cote ou d'un pli, ([ui descend du côté postérieur du crochet jusqu’à l'angle supérieur et postérieur de la coquille. "Vers l’extrémité antérieure du corselet se montre, an deltors,

388

ONZIÈME EAMIfXE.

un ligament externe, allongé, convexe, d’un brun corne plus on moins foncé. Ce ligament est solidement implanté sur des nymphes aplaties , pou saillantes, souvent même recouvertes par un rebord proéminent du cx)rselet. Dans quelques espèces , cette proéminence du corselet s’exa- gère à ce point cpie le ligament, tout en conservant les caractères pro- pres à ce genre, paraît cependant intérieur, tant il est profondément caché. Lamarck, trompé par la disposition que nous venons de men- tionner, avait transporté une véritable Telline dans la seconde section de son genre Lutraire.

Actuellement, si nous ouvrons ces coquilles pour en examiner les ca- ractères intérieurs, nous y observerons quelques modifications intéres- santes qui prouvent la variabilité de quelques uns de ceux qui otit une moindre importance.

La charnière est supportée . par un bord cardinal étroit, un peu élargi au centre, peu saillant au-dedans des valves; ainsi, c'est à peine si au- dessous de lui la cavité des crochets est creusée. Les espèces, un peu épaisses, ont le bord cardinal plus détaché, plus proéminent , sans que pour cela il augmente de largeur ou d’épaisseur. La charnière se com- pose le plus ordinairement de deux dents cardinales sur chaque valve; ces dents sont divergentes, petites, rapprochées et presque toujours bi- fides au sommet; elles ne sont point parfaitement égales ; la dent cardi- nale antérieure est souvent la plus grosse. Ces dents sont plus ou moins saillantes, selon les espèces. Dans quelques unes, elles s’agrandissent à CO point qu'elles ressemblent à la grande dent des Corbules. Dans le type des Tellinos le mieux caractérisé, des dents latérales s’ajoutent aux dents cardinales ; ces dents sont à peu près égales, seulement l’antérieure est toujours plus près de la charnière que la postérieure ; cette dernière est située à l’extrémité de la nymphe , elle semble en être la terminaison. Los dents latérales sont plus apparentes sur la valve droite que sur la gauche. On les voit diminuer insensiblement d’épaisseur, surtout dans les espèces dont le test est le plus mince. C’est alors que les dents la- térales disparaissent complétomcnt sur la valve gauche; le bord cardinal aminci s’engage derrière les dents latérales, et, par ce moyen, la char- nière conserve presque autant de solidité. Bientôt les rudiments des dents latérales qui restaient dans les espèces que nous venons de men- tionner disparaissent complètement, et la charnière est réduite aux dents cardinales. Ce phénomène de la disparition des dents latérales se produit non seulement dans les espèces Iransverses et ovalaires, mais aussi dans celles qui sont obrondes, et dont le test acquiert une plus grande épais- seur, de sorte que si l’nn voulait grouper les espèces d'après la'présènCe

LES TELLlNiDES. 389

OU i'absence dos dents latérales , on pourrait ençore subdiviser chacun des groupes d’après la forme extérieure.

Les impressions musculaires sont d’une médiocre étendue dans les Tellines ; fort écartées l’une de l’autre, elles occupent les extrémités de la coquille, en restant dans la région dorsale. L’impression musculaire an- térieure est ovale, oblougue, légèrement courbée dans sa longueur; située près du bord antérieur, elle l’accompagne dans une partie considérable de son étendue; quelquefois elle est divisée à son bord interne par une inflexion plus ou moins profonde, ce qui la rend réniforme. L’impression postérieure est généralement plus grande, obronde, quelquefois subqua- drangulaire ; elle est située à l’extrémité du bord cardinal, et elle s’avance assez bas dans la largeur de rextrémité poslorieuro. Les impressions des muscles rétracteurs du pied se montrent comme à l'ordinaire dans le voisinage des grandes impressions dont nous venons de parler.

L’impression du muscle rétracteur antérieur existe à l’extrémité an- térieure et supérieure do l'impression du muscle adducteur antérieur.

L’impression du muscle rétracteur postérieur so confond davantage avec celle du muscle adducteur de ce côté. On remarque au sommet de la grande impression, immédiatement au-dessous de l’extrémité du bord cardinal, un angle plus ou moins saillant, qui résulte de la présence du muscle postérieur du pied.

L’impression palléale présente des caractères assez variables dans le genre Telline; cependant, on peut dire qu’elle offre aussi des caractères constants , qui , joints à tous ceux que nous avons déjà signalés , contri- buent à faire reconnaître facilement le genre. Dans toutes les espèces , le sinus palléal postérieur est toujours dilaté dans rintériour des valves. Dans presque toutes Iqs espèces, il remonte d’arrière en avant jusquedans le voisinage de Timpression musculaire antérieure; il reste, par rapport aux valves, dans une position horizontale ou à peine inclinée sur l’axe lon- gitudinal. Dans une série d'espèces, lo sinus palléal diminue insensible- ment de longueur, mais il dépasse toujours la charnière, vers laquelle il remonte dans sa dilatation. Ce sinus, comme on le voit, a beaucoup de ressemblance avec celui des Lavignons , ce qui provient sans aucun doute de la longueur du muscle destiné à faire rentrer dans l’intérieur do la coquille des siphons très allongés.

Nous devons insister plus particulièrement sur la forme de la sinuosité palléale, parce que, ainsi que nous l’avons dit précédemment , le genre Arcopagia a été séparé des Tellines au moyen d’un caractère emprunté à cette sinuosité; il est donc nécessaire d’en faire apprécier la valeur, afin de mettre à même les conchyliologues de juger de rimportance de

Oi^ZlEME FAMILLE.

390

ce nouveau genre , et de décidet* s’il devra rester dans la méthode.

Si , dans le plus grand nombre des Teüinos , le bord inférieur de la sinuosité palléale vient se joindre à la portion ventrale de l’impression du manteau, il est d'autres espèces chez lesquelles l’extrémité antérieure do la sinuosité se détache du bord ventral dans une portion plus ou moins longue de son trajet. Cette disjonction se remarque non seulement dans les espèces très étroites, telles que le Tellina rostratn de Linné, par exemple, mais aussi dans les espèces plus ovalaires. Mais on peut dire, en général, qU'ii mesure que la forme dcs'TelIincs s’arrondit, Pextrémité antérieure de la sinuosité palléale so détache do plus en plus du lîord ventral, et enfin, après une série non interrompue de ces n>0- dilicalions, on arrive a une dernière espèce de Tellino, Tèllina crassa do Pennant, dans laquelle toute la sinuosité palléale est détachée du bord ventral. C’est cette dernière espèce qui a servi de type au genre Arcopafjia. Si ce caractère d'une sinuosité entièrenmnt isolée se mon- trait brusiiuemcnt dans un groupe de ïellines d'une forme |)arliculière, et que l’animal traduisît par quelques caractères spéciaux ceux de la conuille, il est évident qu’il faudrait adopter le genre ; 11 se

trouvciait justifié aux yeux de tous les zoologistes; Mais ce genre est fondé, comme on le voit, sur une modification peu imporlanlé et qui f(»raie l’extrémité d'une série générale, dont toutes les parties se tou- chent Cl se confondent. Ainsi , eu suivant à la rigueur les caractères imposés au genre , il ne éerait pas possible d’y introduire, à côté du Teîlinn craüsa, les TeUina Hernies, sulcata. scobinalai lingitn [élis, espèces qui cependant constituent par leur forme un groupe particulier, duquel il est impossible de délachëC le Tellina crassa.

L'aninml des Tellincs ressemble beaucoup à celui des Lavignons et des Syndosmyes il présente cependant des caractères propres, il est important de les faire connaître on abrégé. Ces Mollusques ont une fitrine (pii est indiquée par celle de leur coquille , par conséquent ils sont presque tous allongés, irausverses, très aplatis; quelqnBfOis ils sont ovalaires, et môme il y en a d’obronds. Le manteau qui revêt l’inté- rieur des valves est très mince , et il porto à sa circonfcrenco un muscle orbiculairc assez large, peu é^jais; ce muscle, en •s^aiiachanl à la co- {piille, y produit l’impression palléale dont nous avons parle. Sur les bords nxtéiieurs de cet organe s’élève une rangée de tentacules d’une forme particulière ^ et qui ne s’est encore montrée dans aucun des genres précédents. Eu effet , cos^ tentacules sont cylindriques, subitement tronqués sommet et mômè quelquefois dilatés commo un petit suc;oir à leur extrémité libre. Toutes lès espèces de Teiiines sané exception ,

LK5 TKLLIMDKS.

391

soit des mers d’Europe, soit de l’océan Indien, que nous avons eu occasion d’examiner, nous ont offert sur le manteau des tentacules tels que nous venons do les décrire. En arrière, le manteau se termine en deux siphons , dont les dimensions sont variables selon les espèces ; mais ces organes sont généralement très allongés, très grêles, Ut le siphon branchial, qui est toujours le plus long, peut acquérir jusqu’à deux fois ou deux fois et demie la longueur du diamètre transversal de la coquille ; io siphon anal est toujours un peu plus court; ces organes se terminent par des ouvertures simples ou régulièrement ondulées. Ce que nous venons do dire se rapporte à un groupe de Tellines , qui con- tient le plus grand nombre dos espèces ; dans un autre groupe qui aurait pour type le TelUna cuntuna , pat exemple , leS siphons sont très diffé- rents. Le branchial, très allongé, est subclaviforme. il se termine püf utte ouverture simple; le siphon anal est excessivement court et son ouver- ture porte un petit nombre de- gros tentacules courts et obtus. Assuré- ment si l’on voulait établir une division dans le grand genre des Tellines , on pourrait se servir du caractère que nous venons d’indiquer, qui cer- tainement a plus de valeur que ceux dont on s’est servi en établissant le genre Arcopagia. Un muscle rélracleur ordinairement très allongé se glisse entre les deux parois minces du manteau et vient s’allaGller à l'a coquille sur laquelle il trace la sinuosité palléale postérieure. Lo pied , dans les Tellines, est extrêmement aplati ; il est allongé , triangulaire , tranchant sur ses bords et susceptible de mouvements divers^ et surtout de contractions venniformes au moyen desquelles l’animal Creuse le sable avec assez de rapidité. Par sa base le pied se continue et se con- fond avec la masse abdominale * qui elle-même participe à l'aplatisae- ment général de l’animal.

La bouche est petite, transverse,- garnie d'une lèvre membraneuse en dessus et en dessous; les palpes labiales sont très grandes; elles sont pour le moins aussi grandes que celles des Lavignons; elles sont triangulaires, presque équilatérales ; cependant le côié postérieur est un peu plus court que les autres. Les branebies ont une très singulière disposition ; elles sont Tune à coté de l’autre comme dans les Lavignons , et non Tune sur l’autre comme dans les Madrés et les VéUusr DaiïS ICs Lavignons, le feuillet branchial interne a deux surfaces égales ; il il’eu est pas de même dans les Tellines : les lamelles sous-branchiales s'claf- gissent considérablement aux dépens de la surface interne de ce feuillet branchial. 11 en résulte que sa surface externe est deux fois plus large quej^'autro. Quant au feuillet externe , il est plus petit ; il est renversé verÿ le dos, exactement comme dans les Laviguon»; çn arriére du pied

ONZIEME EAJIILLE.

392

les quatre feuillets branchiaux se réunissent et se prolongent au-devant de Touverture interne du siphon anal, ün pli saillant et membraneux du manteau circonscrit la circonférence de l’ouverture interne du siphon anal j l'exlrémilé de Tappareil branchial s’attache k ce pli et interdit toute communication entre la cavité du manteau et celle du siphon.

Tout ce nous venons de rapporter des caractères extérieurs de l’ani- mal des Tellines peut s’appliquer avec la plus grande exactitude au TüUina crassa, type du genre jtrcopa(//a , do Leach , et c’est ainsi que rinulililé de ce genre est démontrée. Nous ajouterons que cette Tellrne appartient au groupe de celles qui ont les siphons grêles et presque égaux.

On compte aujourd'hui un grand nombre d’espèces vivantes et fos- siles dans le genre Telline. Dans sa Monographio des espèces vivantes., fil. llanley en décrit et en figure 207 ; cependant , après avoir recueilli toutes celles qui sont mentionnées, après en avoir drossé le catalogue , nous trouvons près do 240 espèces distribuées dans toutes les mers. Le numbro des espèces diminue avec la température; très abondantes dans les mers équatoriales , elles le sont moins dans les régions tempérées , et ([uclques unes seulement subsistent dans les mers froides des régions polaires : en cela elles suivent les lois de la distribution générale des filollusqucs.

Les espèces fossiles sont moins nombreuses que les vivantes; cepen- dant nous en comptons plus de quatre-vingts , et dans ce nombre , ne sont pas comprises Vingt espèces douteuses inscrites dans les ouvrages des paléontologistes et quelques autres qui, placées k tort parmi les Tellines, doivent se ranger dans d’autres genres. Voilà -donc un genre qui contenait k peine 120 espèces, il y a une quinzaine d’années, dans lequel on en compte plus de 320.

Lu distribution des espèces fossiles a beaucoup d’inléréi ; mais si l’on veut conserver à cette partie de la science conchyliologique toute sou importance , si l'on veut , surtout , qu’elle soit utile k la géologie , il faut rejetersoigneusemenl toutes les espècesqui ne sont pas du genre; sans cela , on le comprendra , ce serait une distribution mensongère du genre qui serait présentée. Autant les applications bien faites de la zoologie à la géologie sont utiles lorsqu’elles se fondent sur des faits înconles- tublcs, autant elles deviennent nuisibles et jettent de l’incertitude dans les deux sciences si elles reposent sur des observations imparfaites.

Nous avons rapporté au genre 'J'hracie quelques espèces de Tellines de M. Rœmer, reproduites dans le môme genre par fil. Goldfuss. Les autres espèces de RL llœmer ne nous présentent pas les caractères des Tellines , cl nous regietions que les figures de son ouvrage sur le terrain

LES TELLliMUES.

oülitique ne puissent suppléer à la brièveté dos descriptions. La repré- sentation de moules pierreux , de grandeur naturelle , ne suffit pas toujours pour faire reconnaitro le genre auquel ils appartiennent; les Tellines ont un postérieur, souvent elles sont courbées en totalité dans leur longueur ; il faut donc que les Ogures reproduisent ces carac- tères empiriques à défaut d’autres» si Tauteur veut persuader que les especes qu’il nomme Tellines sont réellement de ce genre. Voilà donc quatre espèces mentionnées dans le terrain oolitique, dont l’existence dans le genre eût été importante à constater, mais qui nous échappent jusqu’au moment d’autres renseignements seront acquis à leur sujet. Il en est de môme d’une autre espèce , TelUna inflata , mentionnée dans les terrains siluriens par M. Rœmer, la description et la figure laissent beaucoup d'incertitude, elle ne nous semble pas une Telline.

Nous remarquons parmi les Tellines de M. Goldfuss quelques espèces douteuses: le Tellina subalpma ^ par. exemple, a plutôt l’apparence d’une Corbeille ou d’une Lucino que d’uno Telline. Nous avons déjà parlé des Tellina inversa et corbuliformis qui sont des Thracies. Quant aux trois espèces tertiaires do M. Goldfuss , il y en a deux dont la dé- termination est erronée ; c’est ainsi que sou Tellina rostralina est très distincte de celle du bassin de Paris , elle ressemble davantage à l’es- pèce que M. Dubois do Montpôreux donne sous le même nom. Le Tellina subcarinala de Goldfuss n’est pas celle de Brocchi , c’est pins probablement io Tellina distorta de Poli, ; niais nous pensons que les deux espèces sont différentes. On conçoit combien ces rectifications sont importantes, car avant qu'elles soient faites , on verrait se mélanger des faunes qui restent nettement séparées et s’introduire des rapports erronés entre des terrains qui nient rien de commun.

MAI. Koch et Dunker, dans leur ouvrage très estimable sur le terrain ooliliqu&du nord de l'Aliemagne, ont aussi signalé deux espèces fos- siles sous le nom do Telline. Alais rien ne prouve que ces coquilles dépendent du genre : l’une, Tellina Œquilatera^ est une très petite espèce ovale, obronde, qui paraît dénuée du pli postérieur, rien chez elle n’an- nonce une Telline; l’autre, Tellina Rœmevi^ a plus la forme des Thracies que des Tellines, et comme la charnière est inconnue, nous laissant guider par le port , nous avons proféré ranger cette espèce au nombre des Thracies.

M. Adolphe Uœiner, dans son ouvrage sur la craie de l’Allemagne , a inscrit dans le genre Telline plusieurs espèces que nous rangeons parmi les douteuses. Des descriptions trop courtes , dos dessins incor^ reets , nous laissent inccrlains sur les caractères génériques. Dans les

ONZIEME FAMILLE.

figures de M: Kœmer nous n’aperce vons aucune trace du pli postérieur oaracléristique des Tellines; aussi nous n'admettons qu'une seule des espèces de M. A. Rœmer, le 7'ellina subdeoussata.

Les especes tertiaires, plus nombreuses, mais plus faciles à examiner dans tous leurs caractères, ont donné lieu à des erreurs d’une autre nà- turo ; ce n’est plus le genre qui est douteüx , ce sont des espèces identi- fiées, rapprochées, confondues, qu'il faut reconnaître, distinguer, et auxquelles il est indispensable de restituer leur véritable nom. C’est ainsi, par exemple, que M. BasIérot,.dan3 son ouvrage sur le bassin tertiaire du sud-ouest de la France j cite dans les faliins de Bordeaux deux espèces du bassin de Paris, TeUhta cleijans et bhingiihü'is\ une comparaison plus approfondie des coquilles des deux localités nous a prouvé qu’elles constituent des espèces très distinctes. M. Grateloup, qui probablement n'a pas eu l’occasion de répéter nos observations au sujet de ces espèces , les conserve parmi Celles qui sont communes aux bassins do Paris et de Bordeaux.

Nous ne poursuivrons pas plus loin ces recUfîcations , dont nous avons Voulu indiquer les principales, dans le but défaire comprendre combien il est nécessaire de contrôler rigoureusement tons- les matériaux intrO' düils dans un genre, avant d’en établir le catalogue, et surtout avant de dresser le tableau do la dislribulion de ses espèces dans les couches de la terre. Il faut , en un mot , que la statistique d'un genre soit exacte pour inspirer de la confiance dans scs résultats.

Toutes les rectifications étant faites , il nous reste 86 espèces fossiles , dans les terrains secondaires, 65 dans les terrains tertiaires.

L'espèce la plus ancienne est le Tdiîna oblknm de M. Goldfuss, elle provient du terrain silurien do Kimmanau. On devra changer le nom choisi par M. Goldfuss, parce que longtemps avant* de nom a été imposé par Sovve-fby à une espèce du Crag; nous proposons de désigner à l’avenir l'espèce sous le nom do Tefiina Goklfiissi^ Deux espèces sont citées dans lo calcaire jurassique de la Bavièro, et une troisième Tek üiHi iimptinia., PhWps se trouve dans lo Goral rng d’Angleterre.

En réunissant aux Tellincs les Arcopagia, il y a dix-sept espèces datis la formation crétacée. Deux dans le terrain néocomieh , Tellina cûtti'ehlrica el Corteroni; deux dans loGauit, TelHiia rauHniam et Afo- reauxii; dans le gris vert nous devons citer les TeUina RenauxU et n«- PR trouvant à la fois à Vaucluse et dans la Sarthe. Les autres espèces se distribuent dans la craie moyenne ; nous n'en connaissons pas dans la craie blanche. M. d’Orbigny en fait connaître une espèce do la craie l'Amériquè méfidiôualô et aouè avofis faire passer parmi

LES TELLIMDES. oijS

les douteuses io Tellina pondicherimms de M; Forbes, provenant des terrains crétacés de Fïndo.

Aux espèces tertiaires du bassin do Paris que nous avons décrites, M. Sowerby en a ajouté quelques unes des argiles de Londres, et M. Nyst en a trouvé un petit nombre dans Io bassin belge; mais do tous les travaux le plus complot que nous ayons sur. les Teilines du terrain tertiaire inférieur, do l’Angleterre, a été publié par M. Edwards dans le Jotiynul do géolo^fie de Londres. Nous y trouvons un grand noiU'- bre d’espèces nouvelles , bien décrites et bien figurées , et nous acqué- rons la preuve do l'existence simultanée d’un certain nombre d'espèces dans le bassin de Londres et dans celui de Paris. Cependant quelques Teilines roslonl jusqu’ioi particulières à chaque bassin et lecariictérisenl. Ainsi les Tellina hanloniensis ^ ambhjua , Branderi, etc., sont {tropres aux argiles de Londres; tandis que les Tellina rostralie j rostralma f patellaris, restent dans le bassin de Paris, et particulièrement dans te calcaire grossier. Los Tellina lunulnta et subroiunda passent du calcaire supérieur dans les grès marins moyens , le donueialis remonte des grès inféricMirs dans les calcaires grossiers.

M. Grateloup admet quatorze espèces de Teilines dans les terrains tertiaires moyens de Bordcauîc et de Dax. A ces espèces , MM. Dujardin et Dubois de Montpéreux en ajoutent quelques autres : le premier, des faluns do la Touraine; le second , de la Wolhynie et de la Podolie* Nous pourrions encore parler de celles de MM. llisinger et Eicliwald. MullieureusemeiU nous no possédons pas tous les matériaux nécessaires pour contrôler toutes les espèces- mentionnées; les unes no nous sont connues que par des listes nominales, les autres par des descriptions incomplètes sans figures. Nous pôuvons diro que les terrains tertiaires moyens sont ceux dont les fossile» sont le moins connus et réclament le plus impérieusement un ouvrage spécial. Il résulte cependant des ror- cherches que nous avons faites , que quatre espèces sont propres aux lerraiuâ moyens et ne se trouvent pas ailleurs. L’une d’elles, Tellina bipartila, Baslcrol, est caractéristique de ces terrains. Les autres espèces s.e partagent en deux c;il0gories : les unes sont fossiles seule- ment et remontent dans les terrains supérieurs ; les auti^és Ont leurs, analogues dans la nature actuelle. Parmi ces eSpôCeë, il y eh a deux. Tellina slrigosa et miegalensh , qui sont vivantes au Séhégal , et qui sont spécialement fossiles à Bordeahx pour le senègalénsis cl h Dax , en Wolhyhie et eh Podolie poiU’ le sir/jfosu. Nous allons rotronVeP les nu- Lres espèces parmi celles de la dernière période tertiaire.

Un terrain très inléressahl ; lu Lrag , renferme ûü grand nombre de

UNZIEUlv FAMILLE.

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fossiles. M. S. Wood eu a fait une étude approfondie pendant de lon- gues années : il y a trouvé neuf espèces de Tellines. Un terrain analogue et du même âge existe aussi en Belgique, et M. Nyst en a décrit les nombreux fossiles. Si quelques Tellines de ce terrain ont leurs représentants dans la nature actuelle, il en contient huit qui ne se trouvent pas ailleurs ; la plupart sont communes à la Belgique et à l’Angleterre : tels sont les Tellina Bcnedeni , liipinoides ^ ovata ; c^ite dernière , d’après M. Philippi , so trouverait dans les terrains supérieurs de Palerme; enfin, le TMna obliqua de Sowerby, dont le nom devra être changé, car longtemps avant Scwerby, Lamarck avait imposé ce nom à une espèce vivante. En conséquence , nous proposons pour le Teltina obliqua de Sowerby, le nom dO Tellina JVyslii, Nous allons retrouver bientôt lès espèces qui ont leurs analogues vivants; ces espèces ayant la propriété de se rencontrer aussi dans d’autres ter- rains , nous allons en présenter la liste.

Les terrains tertiaires supérieurs renferment aussi un assez grand nombre de Tellines, nous en comptons dix fossiles seulement : les unes, Tellina compressa , corbis , gigantea , slrialella , telata , subcarinata ^ sont propres aux terrains subapenuins; d'autres , Tellina pleurosticla ^ strigilalaj sont plus spécialement caractéristiques des terrains supé- rieurs de la Sicile. Enfin , nous citerons le Tellina ellipHca de Brocchi , qui existe en abondance en Italie, en Sicile, en Morée , en Algérie, et même aux environs de Bordeaux. .■

Pour terminer les renseignements que nous nous proposions de donner sur la distribution des Tellines fossiles, nous avons encore à présenter la liste des espèces qui sont à la fois vivantes et fossiles. Lorsqu’on 1832, nous avons publié les Tableaux comparatifs des espèces vivantes avec les fossiles des terrains tertiaires de l’Europe , nous avions reconnu l’identité de onze espèces; de ces espèces nous en conservons dix, auxquelles nous en ajoutons sept autres acquises à la suite des progrès de la science.

Tellina balaicstma , Lin. Vivante dans la Méditerranée.

^ * *

Fossile en Sicile et en Italie.

Tellina balthica. Vivante dans l’Océan du Nord.

Fossile à Uddevalla en Norwége..

Teltina calcaréa , Chemn. Vivante dans l’Océan du Nord. Fossile à Uddevalla et dans le crag d’Angleterre,

C’est le Tellina ovalis de Woodward.

LES TELLÎNIDES. 397,

ToUina crafim , Pennant. Vivante dans tout l Océan d'Europe , la Méditerranée , jusqu’au Sénégal.

Fossile en Italie et en Sicile , dans le crag d’Angleterre cl de Belgique, et en Touraine dans le second étage tertiaire. ^^Tellina depreasà, Gmelin. Vivante dans la Méditerranée, dans la Manche.

Fossile en Sicile, en Italie.

Telfîm distorta , Poli. Vivante dans la Méditerranée.

Fossile en Allemagne, d’après M. Philippi.

7“ Tetlina dmacma , Lin. Vivante dans tout l'Océan d’Europe. Fossile en Sicile, dans crag d’Angleterre et dans les faluns de la Touraine.

Tellina [ittula ^ Gmelin. Vivante dans la Méditerranée et dans la Manche.

Fossile dans le crag d’x\nglelerre.

Tellina lacunom, Chemnitz. Vivante dans les mers de Guinée. Fossile en Italie, à Bordeaux et à Dax, dans les faluns de la Touraine et aux environs de Cassel, d’après M. Philippi. C’est le TeUmapapyraceadeGinelm, Tellina tumidaâe Brocebi. 10® Tellim Lantivyij Payraudeau. Vivante dans la Méditerranée, Fossile en Sicile.

Tellina nitida , Poli. Très abondante dans la Méditerranée. Fossile en Italie et en Sicile.

M. Bronn la confond avec le Tellina bipartita de Bastérot. Tellina planata , Linné. Vivante dans la Méditerranée, aux îles du cap Vert.

Fossile eîi Italie et en Sicile.; une variété en Touraine et à Bordeaux.

C’est le Tellina complanata de Gmelin.

13® Tellina pulchella i Lamarck. Vivante dans l’Océan d’Europe. Fossile en Sicile et en Italie.

i Tellina senegalensis^ Hanley. Vivante au Sénégal, dans les mers de Guinée.

Fossile à Bordeaux.

Espèce voisine du Te/Zina curnaWa,

IS® Tellina sei'mta, Brocchi. Vivante dans la Méditerranée,

Fossile en Sicile et en Italie.

1 6“ Tellina strigosa , Glnelin. Vivante au Sénégal.

Fossile à Bordeaux, en Podolie et en Wolhynie.

C’est le Tellma zônaria de Lamarck.

0N7iÊME rAMlLL?;.

1 7“ THlma lenuifi , VivaiHe daniîî' loul i'Océan d'Europe.

Fossile en Sicile et dans le cnig d’Angleterre.

s > < ' .

Si , h l'aidG 4es.renseigncments que noii^ vonop.s d’e^sposer, on vou- ioit dresser nn tableau de la dislribuLion des Tellines , on généraliserait facilement les faits qu’il rassernblerait. Il est remarquable de retrouver les espèces de la dernière période tertiaire vivante^ dans les mers les plus proches; celles , au contraire., qui passent do cette formation dan.s celle qui la précède , so distribuent sur un plus vaste espace ; on les voit parcourir du Nord au >ï.idi tout je continent européen, et quelquefois gagner les côtes de l'Afrique et parvenir dons les mers inlertrppicales. Mais le faille plus intéressant, qui n’aura pas échappé à la sagacité du lecleair, c’est qu'il faut aller jusque dans les mers les plus chande.s du Sénégal et de la Guinée pour y rencontrer les analogues do?ï espères d^ Dax , de Üordeaux et des faluns de la Touraine,

1. Telline zonélle. TeJlina siriïjosa. Gmel. * ' '

PI. 13. f. 11, 32- 13.

T. testa qi,tettO‘>Qltiongo y trfina'crsày StihiCi^utlaU-faii htliis f.'vtiisque . caviiM , obscure ^ofwt/i , trausitcrsiffi sulft(ri/tta; ç ontiço ro- tnndnto, postico ncuminnto area ïigameiui projuud^i ; cordine. uni- Je/itotûf altcro bififototû, , v

Le Fagnh A.tlans. Voy. ou Sénég. pi. 17. f. 19.

TeUina sttigosn. Gwid. p.

Sehrol. Einl. I, 3. p. 44 ii" 80.- Wood, Orut r. cüiuh. p, 117.11° Gr.

Lamk. An s. y«il. l, 5. p, 5a5. 11° 19. '*

Dillw. Cut. t. I. p. 82. Il** 23.

"Woo I, Iiid. trsiüc. pl. 4. f. fît, . r

Dcdii. Eurj'i mélii. Mîrs l. .3, p inxu. 11“ lo..

Tcliùio sirigosn Do.*;!!, dans Latuk. Aii; s. vcil. 2* éJ, t. G, ji. 194. 19. ITauU'V. Dr.siT* <«1. p. 63.

Hanley. 1 hi's. c«'iuh p. 275. pl, 03 f. 2x1.

Possilis, Tel/ina zonarîn, Laink. An. .s, vert. t. 4* p. ^»35,

Id. Basl. fiiss, de Bordeaux, p. qS, 11® i, pl. 5. f,.5,

TeîHna phftflln. Dub Moplp. Cojich, fo9«. Wolliy* et Padol p 5^. pl. 5. f, i, 2.

TeUina strigosa^ Ue4i. daii« I.îiJuk. An. a* éd. 6. p. 91 1, 4-

Habite les mers du Séncgal/F^isilftà Op^tj B>^drWjM, et) Wûlhyiiie et en Podolie.

t.KS TELLINIDES. ''.99

Le TeUiiia strigosa ao reconnaU avec faeiüté. Oblonejae, iransverse, aplatie, pubéqnilatérale, son cuit* anterieur nii pou jilus cour! que îe postérieur : il est ovale, obtus ; le côté postérieur est trianguliürc, terminé en un angle assez aigu, auquel aboutit le pli irrcgulier. La surface externe est brillante, et cependant couverto de stries assez régulières, produites par les accroissements. L'impression musculaire antérieure est ovale, oblongue ; son extrémité supérieure se termine qn pointe; l’impression miLSCuIaîre postérieure est grande et subquadrangulaire ; l’angle supérieur do çes deux impressions reçoit les muscles rétrac- leurs du pied. L’impression palléalo est remarquable par son étendue: après s’être élargie au-dessous de la charnière, elle s’avance tout près de l’exlrémité inférieure du muscle antérieur. Le bord cardinal est assdte large , il porte une dent cardinale sur la valve gauche , doux divergentes sur la valve droite. Le corselet est creusé d'une fossette profonde, dans laquelle est caché le ligament. Celte coquille est ordinairement d’un blanc laiteux pur: en dedans et en dehors , des zones trangverses d’un blanc plus opaque se dessinent en nombre variable. Nous ayons vu des variétés provenant des mers de Gainée, teintées de rose plus ou moins intense vers les crochets et formant un passage avec le Tellina rnadn- gdscariensis. Les individus fossiles sont extrômemont abondants à Bor- deaux; on remarque parmi eux des variétés qui tendent à rapprocher davantage les Tellina strigota qI madagascariensis ; l’une des variétés intermédiaire , un peu plus large , a été prise pour le Tellina phinàta par M. Dubois de Montpéreux.

2. Telline donacée. Tellina donacAna.lAwné,

PI. 14. f. 1.-2. 3.

T. testa oblon^â^ transi'ersd ^ soHJtnscnlu, inœqiiîlnternîi ^ pmtîcè oblique truncatâ^ nitidâ y intense strintn ^ alhiào Jlnve.scentc y rndüs rnbro-roseisi riumeroiisy interniptis ornatây inths paîlidt rnbro-jlai’à ; margîne 'ventrali nibro punctato ; latere àntivo pratlotigû , obtuso'y cardine hidentato^ àenUbiis inccqualibtis : mnjore hijido ; dentibus laterahbus approxhiiatis ^ ’VuUdis.

Tellina donaçlnai L*n. Sysl. nal. éii, 12. p. 2118, ii* 59.

Id. Sciiiot. Eiiil.t, 2. P U55.

2d, Ginu'. p. 3i34. 2O.

Id. Spengl. Soc. (l’hist. naî. de CopcuU. L 3, 2'-' part. j». i X2, u* 46. . ,

Jd, Olivi. Adiiut. p. for.

Tellina distnrtaP- Poli, 'l’csf. Sieil. t. c. p. 39. pl. i5, f.

ONZIÈME FAMILT.E.

4 00

Tellina Poli. IVsl. I; r. jï. 4*?. pl* 1*. lo.

Teîlina dunacina, Moiilagu. Test. i)ril. p. 58, 4,

Id, Dorsef, Cal. p vpy. pi. 12. f. 36,

Id. Maton et Rack. Lin. Iraiis. t. 8. p. 5o. pl, i. f. 7. fd, Wood, Gener. Conch. p. 16 1. pl. 45. f. 5. ,

Dilhv. Cal. t. r. p. 89, 41.

Lamk. An. s. verl. t. 5. p. 527. n" 27. . . ^

Tlirtôn, ’Conch. dre», p. 170,0” 10, * * ' ^

Turton, Conch. Tns, hril. p. To2. n” 5: pl. 8. f. 4, ' " '

Gérvilte, Cal. des coq. de la Manche, p. 14. n* 3. '

Pilaîotille, Fau. fran^. Moll. pl. g.^f. 6. '

Wobd, înd, testar. pl. 4- f* 3 t. >

Payrniid. Cat« des Moll, de Corse, p. Bg, n“ 34*

Desh, F-vp. SC, de Môrée. Zool. p. 93.' n** 64.

Scacehî, Cat. conch. reg. Neap. p. 5.

Coll, des Cil. Cat. des Test, du Finisî. p. *9'. r».

Ronch. Chant. Cat. des Moll, thi Roui. p. j8. «û 27,* f ; ^ -

Marav.Mcm. pourniist. nal. delà Src. p. 74. n“ 2^

Philip. Enum. moll. Sicil. l. r. p, 24. u^ 2.

Jeffreys, List, of mar. Moll, raalac. mag, 2. P..42,

Hauley.Ond. (estât, t. i. p. 64.

».

Thomp. Rep. on the Faun. of Irel. p. 26r. ' r .

Forbes. Rep. on tlie OEg. invert, p. 143. ' * ^

Thovpe, Rrit, mar. conch. p. 67. ' *•'

Varaui, Cat. degli anim. inv. p. i3. ^

Fleming, Rrit. anim. 2* éd. p. 435.

Philip. Emim. Moll. Sicil. t. 2. p. 21, n“ 2.

Hanley, The.s. Conch. p. n* 20. pl. 50 f. 12. pl, GO. f, aSp. Catlotv, Conch. nomme, p. 22. 35.

Desliayejs. Explor. sc. de l’Alger., moll. t. i. p. 540. pl. O9. f. i. 3. Possdis, Philip, Euuin. moll. Sicil. t. j. p. 29. 2. t. 2. p, 23.

S. Wood, Cat. of sbells from the Crag. ann. cat, hUt. 1S40, p. 248. Morris, Cat, ofbril. foss, p. loi.

Habile la Méditerranée, l’Océan d'Europe^ fossile en Sicile, dans le Cêag d^Allgleterre et ddüs les faUins de (a Touraine.

Celte espèce est trop coonue pour avoir besoin d’être décrite de nouveau; par sa forme générale, eilè se rapproche des Donaces, ayant comme elles le côté antérieur très long et '■'le postérieur court et obli- quement tronqué. La coloration, fort élégante-, est variable ; sur un fond

LKS TELLIXIDKS:

40 l

blanc.jaunâtre ou rosâlre; elle est ornée d'un grand nombre de rayons interrompus, d’un beau rose pourpré, qui, en aboutissant sur lesbords, y laissent autant de larges ponctuations. L’intérieur des valves est d’un beau rouge purpurin. Les dents latérales sont grandes, surtout sur la valve droite ; elles sont rapprochées de la charnière.

Cette espèce vit dans l’Océan d’Europe et dans la Méditerranée; elle est fossile en Sicile, dans le crag d’Angleterre, et se trouverait aussi dans les faluns de la Touraine, d’après M. Dujardin.

3. Telline blanche. Tellma candida. Deshayes,

PL 14. f. 6. 7. 8,

T. testa ovaîUobîougâ^ transversât inœquilaterâ ^ pellucidâ y albâ^ tenuissimh transversim striata; latere antico longiore obtuso; postico brevissiino anguîatOyjlexnrâ xix perspicuu notato; Ugamento subinfosso't cnrdine angusto ; dentihus cardinalibus minimis, absque dentibus îateraUbtts.

Psnmmotea cundida. Lamk. Au. s. v^*rl. I, 5. p. Si-j. 1.® 6.

Teîlina cundida. Desli. üaus l.anik. Au. s, vtrt. 2‘^ud. t.C.p. i83. (5,

Id. Hanley. Descr. caf. p. Go.

là. Haiiley. Thcs. Couch. p. 3or. pl, Ga, f igS.

Habite la Nouvelle-Hoüamle (Laïuk, }.

Nous avons commis une erreur dans l’explication des planches de cet ouvrage, en attribuant à cette espèce le nom de Tdlinides limoriensifi. Nous devons donc lui restituer son nom spécifique. Connue deLamarck, cette coquille n’a pas été placée par lui dans son véritable genre , au lieu de la ranger parmi les Tellinides, dont elle présente tous les carac- tères , il la classe au nombre des Psammotées , sous le nom de Psarn- motea ca/iciida. Nous avons vu précédemment pourquoi le genre Tellinide doit disparaître de la méthode ; fondé sur des caractères artificiels * nous en avons fait apprécier la valeur. Néanmoins, pour faire bien connaître les principales modifications des Tellines, nous avons cru nécessaire d’en figurer une, appartenant aux Tellinides de Lamarck, c’est-à-dire n’ayant plus qu’un vestige du pli postérieur et des rudiments des dents latérales de la charnière.

Lq Tellma cundida est une coquille ovale, transverse, très inéquila- lérale, ayant le côté postérieur subtronqué et extrêmement court. La surface extérieure paraît lisse, mais elle est très finiment striée en tra- versv Les valves sont minces , fragiles , d’un blanc pur en dedans et en

T. I. PARTIE.

^02

ON'ZIKME FAM1M.E.

clehor.-^. I/impréssion musculaire antérieure est ovalaire , la postérieure est obronde et plus petite. L'impression pallé-alo se place parallèJeinenl au bord ventral , gagne l’extrémité postérieure, et se courbe en haut ; elle s’infléchit en dedans, et le bord inférieur de la sinuosiiése con- fond avec le bord ventral: pendant une portion de son trajet, il s'en détache', forme une petite languette étroite avant de se dilater en re- montant vers la charnière. Le bord cardinal est étroit, il porte une dent sur la valve gauche , deux divergentes sur la droite.

4. Telline obronde, Teïlina suhrotunda, Deshayes.

PL 14. L 4. 5.

T. Testa ovato-snhorbieuJarii profundâ^ crassâ, suhœqidlaterah ^ trans- versim densissimu , teriui'lamellosâ , InmeiUs erectis^ tenuibns ^ bre- vibns, latcre anitco obtiiso , postico breviori wx pîicato ^ cardine angttsto^ bideiitatOf dente lateraU antico majore aïteroiux perspicuo,

Desli. Coq. foss. de Paris, t. i . p. 8 1 . n" 8. pl. 12. f. 16, j 7,

Id. F.ncy. mélh. vers, l. 3. p. loiS. 11° 37.

Morris. Cal. brit, fos.s, p, 102.

Desh. dans Laink. Au. s. vert. 2* éd. t. 6. p. 2x3. S.

Habite. Fossile aux enviroui» de Paris, à Acy, Senlis. Valmondois. En Aiigleleirc , à Bracldesham , dans le London clay.

En choisissant cette espèce , nous avons voulu donner à la fois un exemple du genre Arcopagfia de Leach, et d’une espèce qui, en se montrant dans plusieurs bassins du môme âge, peut concourir ü les caractériser. Elle est ovale, obronde, Iransverse, subéquilatérale ; le côté postérieur est plus court, et un peu plus largo que l’antérieur ; il porte un pli oblique , obtus , qui modifie peu la régularité de la coquille. Les valves ne sont pas parfaitement égales , la gauche est un peu plus profonde que la droite. La surface externe est couverte d’un très grand nombre de fines lamelles concentriques , régulières , re- dressées; les interstices des lamelles sont lisses. Le bord cardinal est étroit, peu épais ; il porte au-dessous du crochet deux petites dents inégales sur la valve gauche , également deux sur la valve droite, mais égales et divergentes. Des dents latérales, l’antérieure est la plus grosse et la plus rapprochée de la charnière , la postérieure est rudi- mentaire et située à l’extrémité do la nymphe. L’impression musculaire antérieure est ovale, un sillon la partage en deux parties inégales. L’impression postérieure est obliquement orbiculaire ; l’impression pal-

LKS PSAMMOBÎDES.

4o?t

iéale est. placée assez haut dans l’intérieur des valves, elle est parallèle au bord ventral ; parvenue à la limite du pli postérieur, elle s’infléchit en dedans en formant une sinuosité oblique de bas en haut et d’arrière en avant , un peu dilatée dans le milieu. Les crochets sont petits , peu saillants; ils s’inclinent au-dessus d’une petite lunule lancéolée.

Cette espèce, assez rare dans le bassin de Paris, se rencontre par- ticulièrement dans les sables marins moyens de Senlis, Valmondois, etc. ; elle se retrouve dans le bassin de Londres , à Bracklesham.

DOUZIÈME FAMILLE.

hem PsaiiiiiiobUles. Desh.

CARACTÈRES. Animal ovale-oblong , tranverse, aplati, enveloppé d’un manteau membraneux, garni à sa circonférence d’un rang de tentacules simples et coniques. Deux longs si- phons grêles , presque égaux et séparés dans toute leur lon- ^eur, leur ouverture terminale garniè de tentacules simples et coniques. Pied gros et épais palpes labiales longues et étroites. Feuillets branchiaux très inégaux et plissés ; feuillets internes , les plus longs, commençant en pointe entre les palpes labiales, les externes de moitié plus courts ; tous deux se prolongeant en arrière de la masse abdominale et se soudant solidement au pourtour de l’ouverture du siphon anal.

Coquille transverse , régulière, aplatie, mince, un peu bâil- lante en avant et en arrière, équivalve, subéquilatérale. Char- nière étroite , ayant une ou deux dents cardinales , sans dents latérales ; un ligament externe épais et saillant en dehors ; impressions musculaires médiocres , impression palléale pro- fondément sinueuse en arrière.

GENRES. Pèammobia, Hanguinolaria , Capsd,

Tous les conchyliologues ont eu jusqu’ici une opinion unanime au sujet des genres que nous réunissons dans cette famille ; à l’exemple 26*

DOUZIEME FAMJM.î:.

4o4

de Lamarck , ils les ont rangés à la suite des Tellines et dans la même famille. Ils ont emprunté cette opinion à Poli, et elle semblait suffi- samment justifiée par la description et la figure que ce naturaliste donna d’une Psammobie de la Méditerranée, Poli eut le tort d’en croire les apparences; il* vit dans la Psammobie de la Méditerranée un animai ayant de longs siphons , un pied triangulaire et comprimé , et ces caractères superficiels lui suffirent pour le juger du même genre que les Tellines. Mais si Poli avait dépouillé ranimai de sa coquille , s’il avait ouvert son manteau , il se serait aperçu , avec la plus grande facilité , qu’il est en réalité extrêmement différent de celui des Tel- lines. Ën effet, les palpes labiales et les branchies surtout présentent de telles différences dans les deux genres , qu’il n'est plus possible désormais de les réunir, non seulement dans le même genre , comme Pont voulu quelques naturalistes , mais encore dans la même famille.

Aux Psammobies nous réunissons les Sanguinolaires , après avoir fait subir à ce dernier genre des modifications importantes; nous le rédui- sons, en effet, mSangumolaria roseadé Lamarck, coquille bien con- nue sous le nom de Solen sanguinolenlus de Linné. Les autres espèces admises avec celles-ci parmi los Sanguinolaires sont pour la plupart des Psammobies; l'une d'elles dépend du genre -Capse.

Ce genre Capse n’est point celui de Lamarck, ce n’est pas non plus tout à fait celui de Bruguières , mais une partie seulement. Bruguières , dans les planches de l’Encyclopédie , rassemble sous le nom générique de Capsa des coquilles qui n’offrent pas des caractères identiques ; les unes, en effet, sont de véritables Tellines; peul-ôLi*e Tune des espèces appartient-elle à notre genre Fragilia. Ces espèces l'cLirées des Capses , il en reste une , c'est le Kenus dellovala qui peut seule rester le type du genre Capse.

En admettant un genre Capse dans sa méthode , Lamarck aurait faire ce que nous proposons aujourd’hui , il aurait évité dans sa nomen- clature ces vacillations continuelles qui jettent une fâcheuse incertitude dans l’esprit des personnes qui aiment la science- et veulent la cultiver. Les Capses de Lamarclt, ainsi que nous le verrons bientôt . doivent disparaître de la méthode pour rentrer dans le genre Donax; par con- séquent il faut bien comprendre que sous un môme nom, des coquilles fort différentes ont été rangées, mais que ce nom devant subsister, il doit revenir au genre auquel il a été d’abord consacré, et s’appli- quer au nwins à l’une des espèces qui y était primitivement contenue.

Les coquilles de la famille des» Psammobides sont oblongues , Irans- verses, équivalves, et presque toutes subéquilatérales. Elles sont géné-

LbS I'SAMMOBII>ES.

/»o5

râlement comprimées . aplaties ; par leur forme générale elles ressem- blent aux Tellines , mais elles manquent du pli postérieur qui caractérise ces dernières et leur charnière plus simple est toujours dépourvue dedents latérales. Les valves sont un peu bâillantes en avant et en arrière; elles sont jointes par un ligament extérieur, généralement épais, bombé en dehors, allongé sur le bord dorsal et s’appuyant sur des nymphes grosses, quelquefois saillantes, circonscrites par un sillon profond, dans lequel s’attache l’enveloppe fibreuse du ligament. La charnière porte une ou deux dents , et ces dents sont modifiées selon les espèces.

Les impressions musculaires sont généralement médiocres; elles occupent la région supérieure du test; l’impression paliéale se rap- proche de celle- des Tellines , cependant la sinuosité postérieure reste différente à quelques égards. Ainsi elle est courte et ellipsoïde dans les Sanguinolaires et presque entièrement détachée de la portion ventrale ; elle est plus profonde dans les Psammobies, et on voit son bord infé- rieur se confondre de plus en plus avec la portion ventrale jusqu’au point d’y être confondue dans toute sa longueur. Ces diverses modifi - c^ations pourront nous servir à diviser le genre Psammobie en plusieurs sections , au moÿen desquelles les espèces seront groupées d'une ma- nière conforme à leurs affinités naturelles.

Les animaux de celte famille sont essentiellement marins; ils habi- tent les plages sableuses à quelques brasses de profondeur. Leurs mœurs sont semblables à celles dos Tellines. c’est-à-dire qu'ils se creusent , à l’aide de leur pied, un trou dans le sable et s'y enfoncent perpendi- culairement, la bouche en bas, de manière à laisser flotter leurs siphons à la surfacedu sol. Deux des genres contenus dans cette famille, Psam- mobie et Capse, sont connus à l’état fossile ; mais les espèces sont loin d’être aussi, nombreuses que quelques paléontologistes se le sont ima- giné.

GENRE TRENTE-HUITIÈME.

PSAMKOBIX:. psammobia. (Lamk.)

Pt. [3. flg. 4 à 10.

CARACTERES génériqces. Animal ovale ^ transverse, peu épais, ayant les lobes du manteau désunis dans toute la lon- gueur du bord ventral. Bord libre du manteau large et garni cl un seul rang de tentacules nombreux et coniques; valvule

4o6

D0L1Z1E*ME FAMILLE.

palléale, étroite en avant, plus large en arrière. Deux siphoris très allongés , disjoints dans toute leur longueur, terminés par une ouverture tentuculée à tentacules simples. Pied robuste , long, triangulaire ; palpes labiales médiocres , triangulaires, plus longues que larges , fixées par une base étroite. Quatre feuillets branchiaux tombant dans la cavité palléale; la paire interne, grande, occupant toute la longueur du corps depuis les palpes jusqu’au siphon anal ; la paire externe, de moitié pliis courte , tronquée en avant.

Coquille ovale , oblongue , transverse , subéquilatérale , aplatie , médiocrement bâillante à ses extrémités ; crochets petits , peu saillants, peu inclinés. Charnière étroite, pourvue d'une ou de deux dents sur chaque valve ; ligament externe saillant le long du bord postérieur. Impressions musculaires grandes , presque égales ; impression palléale , éloignée du bord des valves, présentant un sinus profond, étroit, horizontal.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE. Telliiia ^ Lister, Linné, Pennant, Boni, Da Costa, Schrœter, Gmelin, Poli, Spengler,Donovan, Wood, Montagu, Maton et Rackett, Dillwyn, Turton. Tel- lina {pa7's]^ d’Orbigny. Solen, Linné, Schrœter, Gmelin, Bruguière, Moptagu, Maton etRackett, Wood, Dillwyn, Lamarck, Turton, Gerville —Sanguinolaria^'Roi^^y, Sowerby. Gari , Schninacher. f Psavimobia , Lamarck , Férussac , Sowerby , Tuvton , Crouch , Collard-des-Cherres , Philips , Lesson , Menke , Bronn , Montpéreux , Q,uoy et Gaimard , Dujardin, Philippi, Forbes, Anton, Geini^,' S. Wood. Luiricola^ Blainville. Psammocola , Blainville, Keferstein, Rang , Dufo. Psaminotea , Lamarck , Boudich , Sowerby, Crouch, Keferstein, Cuvier, Menke. SoleieUina^ Blain- ville, Grateloup. Psammosolen , Bronn. Angulus , Me- gerle. Gatan , Adanson.

OBSERVATIONS. Linné connut deux espèces appartenant au genre Psammobie de Lamarck: l’une, figurée depuis longtemps par Aldrovande,

LKS PSAiMMUBlDKS.

/jo;

ost mentionnée parmi les Tellines ; la seconde , ayant exactement les mêmes caractères que la première , a été rangée parmi les Solens , lors- que Linné, dans son Manlissa pîantarum , donna un supplément aux diverses parties de son Systema naturœ. Les successeurs de Linné adoptèrent aveuglément ses opinions , partagèrent aussi les mômes espèces entre les Tellines et les Solens. Lorsque Bruguière, dans l’^'n- cyclopèdie méthodique , commen.ça à réformer les genres de Linné, il laissa aux Solens une étendue trop considérable, ce qui lui permit d’y introduire les deux espèces dont nous venons de parler.

Bruguière aurait restreindre l’étendue du genre Solen, et créer un genre nouveau pour celles des espèces qui , ainsi que celles-ci , n’en présentent pas tous les caractères. Mais à cette époque , les zoologistes étaient aussi réservés sur ces sortes de créations ,■ qu'ils en sont devenus prodigues depuis. Pénétrés de l'esprit de Linné, ils aimaient à con- server aux coupures génériques une étendue considérable , ce qui leur permettait d'y introduire, par une sorte de tolérance , des espèces qui , sans en avoir tous les caractères, les possédaient en partie. Les coquilles qui nous occupent sont dans cette catégorie ; ayant des rapports avec les Tellines et avec les Solens , il no faut pas s’étonner si Bruguière les a entraînées dans ce dernier genre.

Depuis Bruguière jusqu’au moment Lamarck publia le cinquième volume des Animaux sans vertèbres ^ les deux espèces de Linné et toutes celles qui furent découvertes depuis, restèrent incertaines entre les Tellines et les Solens; en effet, on no trouve dans les précédents ou- vrages de Lamarck aucun genre qui pût recevoir ces coquilles. Cepen- dant celte incertitude aurait pu cesser beaucoup plus tôt si les conchy- liologues n’avaient pas oublié le grand ouvrage de Poli , ouvrage dans lequel ils auraient puisé dès 1791 des renseignements précis, qui les auraient guidés dansda classification des coquilles qui nous occupent. Ils auraient appris, par les figures de Poli, que l'animal des Psammobios ■a les caractères extérieurs des Tellines, et dès lors ils n'auraient pas Iiésité à faire rentrer dans ce genre toutes les espèces voisines, du Tellina Gari.

Lamarck ne se contenta pas de créer le genre Psammobie; sur un caractère de la plus faible valeur, il proposa son genre Psammotea. L’un d’eux était inutile, ainsi que nous l’avons fait comprendre depuis long- temps , et si nous avons conservé celui des Psantmobies , c’est parce qu’il renferme le plus grand nombre d’espèces et celles entre autres qui furent connues de Linné. Les Psammotées ne diffèrent pas plus des Psammobies que les Tollinides des Tellines. Les Psammobics ont deux

DUITZIEME FAMlLLli.

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dents à le charnière, les Psammotées n’en ont qu’une d’un côté et deux de l’autre , ou une seule de chaque côté : caractère insignifiant , car on le voit s’établir par des degrés insensibles. Guidé, soit par l’ouvrage de Poli , soit par une étude plus approfondie des coquilles , Lamarck rejeta l’opinion de Bruguière, et entraîna ses nouveaux genres dans le voisi- nage des Tellioes et dans la môme famille qu’elles.

M. de Blainvillc ne voulut accepter ni les genres de Lamarck, ni.sa famille des Nymphacées; il repoussa également son opinion sur la place que doivent occuper les Psammobies dans la Méthode. Ce zoologiste créa un genre Psammocole, qu’il divisa en trois sections : les deux dernières correspondent aux genres Psammobio et Psammotée de La- marck ; la première était inutile, car elle est faite avec une des prin- cipales espèces des Psammobies. Envisageant les coquilles seules, M. de BlainvÜle vit s’établir des relations entre les Solens et les Psam- mobics par rintermédiaire des Solecurtes et des Solelclünos ; mais si , au lieu de créer ce dernier genre, M. de Blainville l’avait rapproché des Psammobies , il aurait trouvé entre eux assez d’analogies pour les con- fondre , et alors il n’aurait pas hésité à rapprocher les Psammobies des Tellines , plutôt que de les entraîner dans le voisinage des Solens. Nous le répétons, pour adopter une semblable opinion, il fallait oublier l’ou- vrage de Poli.

Cuvier, contrairement à- son habitude d’emprunter des documents à l’ouvrage de Poli, ne l’ayant pas consulté au sujet des Psammobies, adopta l’opinion de M. de Blainville dans la seconde édition du Règne animal y et rapprocha ce genre, des Solens.

Les naturalistes qui , depuis , eurent occasion do parler des Psam- mobies , soit pour les introduire dans des systèmes méthodiques , soit pour y ajouter de nouvelles espèces , se partagèrent entre les deux opinions principales que nous venons d’exposer; cependant, en exami- nant tous leurs travaux , on voit que. le plus grand nombre se range à l’opinion de Lamarck, en acceptant le changement que nous avons fait- subir au genre, en y ajoutant les Psammotées de Lamarck et les Soletol- linesde M. de Blainville.

En traitant du genre Telliiw^ nous avons rapporté l’opinion de M. d'Orbigny qui, par une exagération sans fondement de la manière de voir de Lamarck, réunit les Psammobies aux Tellines, H est évident que pour en venir à un arrangement comme coIui-Jà, il a fallu oublier tout c-e qui a été écrit sur ce sujet depuis 17DI jusqu’eji 4 845; il a fallu aussi examiner imparfaitement les coquilles elles-mêmes, car si l'on trouve moyen de séparer le genre /jrcopt/ym des l'eltines, à plus

LES PSÂMMUBIDES.

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forte raison peut-on trouver celui de distinguer les Psammobies d’après la coquille seule. Ce qui tend à prouver riiicertitude. de M. d’Orbigny, au sujet de Tenseinble des Psanamobies , des Tellines et des Sanguino- laires, c'est ^quo, après avoir joint une partie des Sanguinolaires aux Tellines , il fait reparaître cependant ce genre sous le nom de Capse de Bruguière, pour y ranger quelques espèces de véritables Psammobiçs, Si M, d’Orbigny voulait restaurer le genre Capso de Bruguière, ce qui n’est pas impossible , il aurait fallu qu'il s'expliquât sur sa composition , attendu que dans ce genre se trouvent deux sortes de coquilles, des Tellines et une Sanguinolaire de Lamarck. Auxquelles de ces espèces M. d’Or- bigny veut-il consacrer le nom de Capse? Il eût été nécessaire que ce naturaliste le déclarât, car, encore une fois, nous avons la preuve que les espèces introduites dans son genre Capso sont de véritables Psam- mobies.

L’animal des Psammobies n’était pas suffisamment connu; la Ijgure de Poli nous apprend que le manteau est garni sur toute la circonférence do tentacules triangulaires, qui imitent assez bien des dents de Scie. En avant, Tanimal fait sortir un pied comprimé, triangulaire, compa- rable à celui des Tellines. En arrière, le manteau se prolonge en deux siphons longs et grêles, séparés dans toute leur longueur , et terminés l'un et l’autre par une ouverture tentaculée.. Ces organes sont en pro- portion plus gros que ceux des Tellines; mais, comme on le voit, rien n'indique dans ces caractères extérieurs, que l'animal des Psammobies diffère beaucoup do celui des Tellines. Il fallait donc étudier cet animal jusque dans ses caractères zoologiques, pour faire cesser toutes les incertitudes, relatives à la place qu’il doit occuper dans une méthode naturelle.

Les Psammobies sont des coquilles ovales , Iransverses , à valves {>Iates , et en cela se rapprochant beaucoup des Tellines ; elles sont subéquiJatérales , un peu bâillantes en avant et en arrière ; toutes sont lisses et revêtues, surtout sur les bords, d’un épiderme généralement mince et caduc ^ mais qui se prolonge en dehors au-delà du bord de la coquille de manière à couvrir et à protéger un large bord du manteau* Les valves-sont jointes au moyen d’un grand ligament externe, très convexe et fort saillant, solidement attaché sur desnymphes, quelque- fois saillantes en dehors. La charnière est très simple ; sur un bord cardinal étroit , s'élèvent au-dessous du crochet deux petites dents divergentes sur chaque valve. Dans un certain nombre d’espèces , ces dents sont égales et bifides; dans d’autres, l’une des dents diminue graduellement et linit par disparaître ; dans d'autres enfin , cette dis-

DOUZIEME FAMILLE.

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parition a lieu également sur les deux valves; alors il reste qu'une seule dent à la charnière, et c'est de ces espèces à la charnière simpli- fiée que Lamarck a formé son genre Psaminotée. Si nous examinons les impressions musculaires , nous les trouvons peu éloignées de la char- nière et également distantes ; Panlcricure est ovale-oblongue , la posté- rieure est arrondie ; l’impression palléale se place très haut dans l’inté- rieur de la coquille ; elle est parallèle au bord inférieur, et, parvenue au bord postérieur du muscle , elle s’infléchit et produit une sinuosité postérieure assez jirofonde et horizontale. Cette sinuosité a la forme d’un ellipsoïde tronqué à Tune deses extrémités. Les Psammobicsn'ont jamais la lunule nettement circonscrite, et si dans quelques unes le côté postérieur est limité par un angle apparent, cet angle est toujours symétrique, c'est-à-dire semblable sur chaque valve; il n’olfro jamais celte inflexion irrégulière qui caractérise les Tellines.

Par l’ensemble de ses caractères , l’animal des Psammobtes est plus voisin des Donaces et des A'^enus que des Tellines. Cependant il tient aussi de ces derniètes par les longs siphons complètement séparés qui terminent son manteau. Cet animal a une forme semblable à celle de sa coquille; il est aplati, ovale, transverse, et le manteau qui revêt l inté- rieur' des valves est mince, transparent, épaissi sur son pourtour par un muscle orbiculaire , assez étroit, présentant un double rebord, sur l’un desquels s’élève une rangée fins tentacules coniques rapprochés, serrés , et qui diflèrenl constamment de ceux des Tellines , car ils ne sont ni tronqués, ni dilatés au somrfiet. Les deux lobes du manteau laissent entro eux une graude ouverture; qui s’étend depuis l’extrémité inférieulre du muscle adducteur antérieur des valves jusque près de l’extrémité postérieure de l’animal. C’est à ce point que leur jonction s’opère, au moyen d'une commissure consolidée par deux petits muscles. Nous avons vu dans les Tellines une valvule s'élever à partir l’ouver- ture intérieure du siphon branchial et se continuer le long du bord interne du muscle orbiculaire. Cette valvule n'existe pas dans les Psam^ niobies.

Les siphons acquièrent une très grande longueur ; ils ont quelquefois deux ou trois fois celle de la coquille ; ils sont en proportion plus gros que dans les Tellines ; ils sont presque égaux , cependant le siphon anal est toujours un peu plus court et un peu plus grêle que son congénère Ces organes sont susceptibles d’une contraction considérable; cette con- traction s’opère en partie a l’aide de deux muscles rélracteurs , dont la forme coïncide exactement avec celle de la sinuosité palléale i qui se trouve à l’intérieur des valves. L’ouverture du siphon anal est simple ,

LES l'SAMMüHIDES.

4l I

celle du siphon branchial est garnie d’une série de tentacules allongés , simples et coniques. L’ouverture intérieure du siphon branchial est semblable à celle des Tellines; elle n’est point couverte par une val- vule comme dans les Mactres et quelques autres genres.

Le pied est en proportion plus gros quo dans les Tellines ; en cela il se rapproche de celui des Solecurtes, quoiqu’il reste d’un volume bien moins considérable. Lorsque l'animal le sort de sa coquille , il se pré-»- sente sous la forme d’une langue triangulaire, pointue, ayant le bord supérieur obtus et le bord inférieur tranchant. Par sa base , il se con- tinue avec une masse abdominale comprimée , et lorsque l'animal le contracte, il est séparé de l'abdomen par un sillon oblique, profond , qui s’étend de la bouche à l'angle inférieur et postérieur de la masse abdominale.

. La bouche est assez grande , ovale , Iransvcrse ; elle est cachée par deux lèvres membraneuses, larges et simples, qui , en aboutissant de chaque coté du corps, se transforment en une paire de palpes labiales , triangulaires, mais longues et étroites, et très différentes par leur forme et leur étendue de celles des Tellines.

La surface extérieure de ces organes est lisse , mais la surface interne est chargée de plis membraneux d’une grande régularité.

La palpo interne est attachée au corps , tandis que l’externe est fixée sur les parois minces du manteau; de sorte qu’en rejetant en dehors le manteau , on entraîne la palpe externe et on la détache de sa con- génère.

Les -muscles adducteurs des valves sont variables dans leur forme selon les espèces; mais, sans exception, ils sont situés dans la région dorsale de l’animal et plus rapprochés de la charnière que dans les Tellines. Le muscle antérieur est le plus souvent ovalaire ; alors il est arqué dans sa longueur et accompagne le bord antéro-supérieur. Dans d’autres espèces , ce muscle est subcirculaire , et , en cela , il ressemble au muscle postérieur, qui affecte celte forme et qui devient quelquefois semilunaire.

Les organes de la respiration sont très différents deceux des Tellines ; ils ressemblent beaucoup plus à ceux des Donaces et des Venus; doux feuillets sont de chaque côté du corps; ils sont inégaux, les feuillets internes sont les plus longs; ils commencent en une pointe aiguë, qui s’interpose entre les palpes labiales ets’avancejusqueprèsdela bouche. Ce feuillet , appliqué le long du corps , s’élargit rapidement vers le bord dorsal et descend obliquement de haut en bas et d'avant en arrière. Très larges, ses deux surfaces sont couvertes d'un grand nombre de

DOUZIEME FAMILLE.

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petites côtes régulières , dont les. interstices coïncident aux cloisons sous-branchiales. Le feuillet externe no -se ren\'erse pas vers le dos , ainsi que cela a lieu chez les Lavignons et chez les Tellines. S’appli- quant sur son congénère , il tombe avec lui dans la cavité du manteau ; il est de moitié plus court; son bord antérieur est tronqué , en suivant une ligne perpendiculaire, qui partirait do la région cardinale , pour aboutir vers le milieu du bord ventral. Le bord inférieur est parallèle à celui du feuillet branchial interne, et le bord postérieur s’incline for- tement de haut en bas et un peu d’avant en arrière. Comme on voit, ce feuillet branchial est triangulaire et de moitié plus petit que le feuillet interne. Nous avons vu une disposition semblable dans les Mésodesmes, et nous la retrouverons bientôt cliez les Donaces et dans d’autres genres.

Nous appelons spécialement l’attention des zoologistes sur ces diffé- rences profondes qui se remarquent dans les organes la respiration , dans des genres qui paraissent tellement voisins que tous les classifi- cateurs les ont compris dans la môme famille. Tous les zoologistes attachent une grande valeur aux modifications d’un organe aussi im- portant que celui de la respiration; la classification do Cuvier est en grande partie fondée sur les caractères que présentent ces organes. Sans vouloir leur accorder une valeur excessive, il faut cependant les faire entrer pour quelque chose dans la classification , quel que soit d'ailleurs le rang qu’on leur accorde dans la subordination des carac- tères. Si la modification des organes branchiaux était la seule qui se montrât dans les Psammobies, elle suffirait, sans aucun doute, pour séparer ce genre des Tellines ; mais celte modification en entraîne d’autres, non seulement dans les parties extérieures do l’animal, mais encore dans son organisation profonde. C’est ainsi que les tentacules du manteau , la grandeur et la forme des palpes labiales , la grosseur proportionnelle du pied , sont déjà des indices des changements sur- venus dans l’ensemble de l’organisfttion. Les organes de la digestion ont onx-mômes subi des modifications qui les distinguent de ceux des genres environnants. Le système nerveux lui-même, conservant une grande uniformité , présente cependant dans les Psammobies un gan- glion palléal antérieur que l'on ne retrouve dans aucun autre mollusque de la même classe. Nous avons donc eu raison do séparer la famille des Psammobides ; elle constitue , en réalité , un famille naturelle.

En arrière du bord postérieur du pied, les branchies de chaque côté se réunissent sur la Ligne médiane. Elles s’avancent sur la surface in- terne du muscle adducteur postérieur des valves , et elles rencontrent de chaque, côté un petit pli saillant du manteau , qui se continue sur le pour-

LKvS PSAMMOBIDES.

tour de louverlure interne du siphon anal. Labranchie s’attache solide- ment à ce pli, et, contrairement à ce qui a lieu dans la plupart des mollus- ques de la môme classe, cette soudure persiste après la mort de l'animal , de sorte que, dans ce genre, on acquiert facilement la preuve que l'extré- mité postérieure de labranchie est réellement destinée à compléter la cavité du siphon anal et à la séparer de la grande cavité du manteau.

Le plus grand nombre des Psammobies sont des mollusques litto- raux ; elles vivent comme les Tellines , enfoncées dans le sable des rivages à quelques brasses^ de profondeur. Le pied puissant dont la nature les a pourvues leur permet de déplacer des graviers d’un plus gros volume, que d'autres mollusques dont le pied est plus grêle et plus petü.

Le nombre des espèces n’est pas très considérable ; Lamarck en a inscrit dix-huit , auxquelles il faudrait joindre huit espèces de Psam- motées , ce qui ferait un total de vingt-six espèces j mais plusieurs doivent être retranchées; les Psammobia cayaneusis^ lœvigata, galatea, les Psammotea pellucida et candida , sont des Tellines et doivent ren- trer dans ce genre. Le Psamniobia anranlia dépend d’un genre curieux , auquel M. Turton a donné le nom de Gateoma. Le Psammotea violacea ést pour nous une Sanguinolaire , et enfin le Psammobiit tarentina est un double emploi du Petricola ockroteuca de Lamarck , et il doit , par conséquent, rentrer dans la synonymie du FragiUa fragilis Voilà donc huit espèces qu’il faut retrancher des Psammobies do Lamarck; mais il faut y ajouter les Sdelellines de M. de Blainville, trois des espèces de Sanguinolaires de Lamarck , et enlin , un grand nombre d’espèces nou- vellement découvertes et décrites par Sowerby, llanley, Cî^iy, Lesson, Quoy et Gaimard, et quelques autres conchylioIogistes.Après avoir con- trôlé les espèces du genre , après avoir réuni toutes celles qui sont connues, nous en comptons quarante-quatre de vivantes, distribuées dans presque toutes les mers. L'Océan d’Europe en possède quelques unes , parmi lesquelles nous en signalerons plusieurs qui se répandent sur de grandes surfaces. M. Cuming en a rapporté quelques espèces des mers chaudes de l'Inde; en en connaît d’aatros provenant de la Nou- velle-Hollande et des deux Amériques.

Nous partageons les espèces en plusieurs sections. Dans la première nous réunissons des espèces allongées, transverscs, ayant des nymphes grosses et saillantes pour un ligament puissant; la sinuosité palléale, longue et étroite, s’attache à la portion ventrale de l’impression palléale ; ce sont peur la plupart les Solelellines de jM. de Blainville, elles se rapprochent des Tellines par la sinuosité du manteau.

nOÜ7.lKME FAMILLE.

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Dans la spoonde section, nous, rassemblons les espèces à nymphes plus petites et. ayant, une sinuosité palléale plus courte , horizontaie , niais ovalaire et en partie détachée de la portion ventrale de l’impression du manteau. Les Psammobies et les Psammotées de Laniarck offrent les caractères que nous venons de mentionner et font partie de notre se- conde section.

Enfin, nous ajoutons une troisième section pour une espèce qui, ptobahlement , deviendra le type d’un nouveau genre; nous voulons parler du Soicn orbicuîatus de Wood » dont nous avons donné une de- scription détaillée dans le Magasin de zoologie. Pour établir un genre avec celte espèce , il faudrait en connaître i’animal , et dans le cas il serait différent de celui des Psammobies , on pourrait lui imposer le nom générique à-'Orbicularia.

Les espèces fossiles du genre Psammobie sont peu nombreuses ; elles commencent d’une manière certaine dans les terrains crétacés , et elles se continuent dans toute la série des terrains tertiaires. Les paléonto- logistes ont cité plus d’espèces que nous n’en admettons, parce qu'ils ont compris dans le genre des moules mal caraclérisos ou des coquilles entières fermées et dont les vrais caractères génériques sont absolument inconnus. Si l'on s'en rapportait aveuglément aux renseignements des paléontologistes , les Psammobies auraient paru dans les terrains les plus anciens. M. Sowerby en cite deux du terrain silurien dans Pou- vrage do MAI. Sedgwich et Murchisson ; mais la figure n’accuse aucun des caractères des Psammobies , et cette espèce pourrait aussi bien se rapporter aux Cypricardes. Nous admettons plutôt parmi les Psammobies quelques ef^ces deM. Philips, rapportées par lui au genre Sanguinolaire. A l'égard des Sanguinolaires fossiles, ils!y est introduit une si déplorable confusion , que sur plus de quarante espèces que nous avons relevées dans les ouvrages des paléontologistes, pan une seule n’appartient en réalité à ce genre , soit qu'on le restreigne toi que nous le faisons actuellement , soit que l'on accepte celui de Lamarck, beaucoup plus étendu. Après avoir exercé notre patience à recueillir toutes les espèces fossiles des trois genres Psammobie , Capse et Sanguinolaire, après les avoir étudiées, après en avoir contrôlé la synonymie défectueuse et la nomenclature , nous avons comparé toutes les espèces et nous en avons tenté une nouvelle distribution. Nous nous sommes assuré du genre de toutes celles dont nous avons vu la charnière : toutes les autres sont douteuses pour nous.

Dans la distribution de toutes ces espèces si peu connues , il en est quelques unes qui nous semblent plus voisines des Psammobies , et

LES rSAM^iOBlDES.

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quo nous TÎterons dans ce genre , en conservant, un doute motivé sur l’ignorance nous sommes des véritables caractères génériques. N'ayant pas d'autres moyens , nous nous sommes laissé guider par les caractères empiriques de la forme extérieure; tous les observateurs savent combien on peut y être trompé.

Nous aurions pu nous abstenir do mentionner toutes ces espèces qui portent le doute avec olles . mais nous avons considérer que ce doute est relatif au genre et non à l'espèce. Le genre, on le sait , est une conception artificielle , destinée à rassembler tous les êtres qui ont de nombreux caractères communs; l’espèce est une création de la na- ture dont nous devons constater l’existence : elle existe indépendam- ment du genre , et si par ses caractères extérieurs nous la reconnaissons assez nettement pour la distinguer de toutes les autres, nous devons l’admettre dans nos catalogues , surtout lorsque , devenue fossile , elle acquiert un nouvel intérêt par les rapports qu’elle a avec les couches de la terre qui la recèle. Néanmoins, aussi longtemps que le moindre doute subsiste au sujet. d’un certain nombre d'espèces, nous devons inviter tous les observateurs à tenter de nouveaux efforts pour découvrir leurs caractères actuellement inconiiua ; ils rendront par de nouveaux services. à deux sciences qui s’éclairent mutuellement, la zoologie et la géologie.

Si la connaissance du genre n'est pas d’une nécessité aussi absolue que celle de l’espèce, cependant il est d’une très grande utilité de recon- naître exactement à quel genre appartiennent les espèces fossiles; c’est le seul moyen que nous ayons de savoir, par analogie, b quelle époque des périodes géologiques ont commencé les divers types des corps orga- nisés, et il n'est pas indifférent de constater, avec exactitude, l'appa- rition de tel genre plutôt que de tel autre , puisque, les genres nous désignent des degrés particuliers d’organisation ; et pour revenir plus particulièrement aux genres qui nous occupent dans ce moment , il serait utile de savoir avçc précision si dans la nature ancienne les ani - maux du type des Tellines vivaient, comme aujourd’hui, associés à ceux du type des Psammobies qui , quoique voisin en apparence , s’en éloigne par des caractères considérables de l’organisation. Le fait est seulement probable dans l’état actuel de nos connaissances, cette pro- babilité peut fort bien ne pas se réaliser.

Npus n'avons pas à nous occuper ici de discussion de toutes les espèces introduites dans les Sanguinolaires par les paléontologistes ; cette discussion trouvera sa place dans le genre Sanguinolaire lui-même ; nous nous contenterons de mentionner celles de ces espèces que nous

4 iC) DOU/iÈMK FAMIIXK.

rapporterions de préférelice aax Psammobies, tout en conservant dn doute à leur sujet.

Nous avons huit espèces de celte dernière catégorie , toutes se ré- partissent dans les couchés moyennes et supérieures des formations les plus anciennes, désignées, il y a quelques années, par les géologues sous le nom de terrain de transition.

Quatre proviennent des couches dévoniennes de rAllémagne et de TAngleterre : ce sont les Sanguinolaria soleniformû , Goldfuss ; Sanguinolaria lyrata, Philips;

^ Sanguinolaria Rœmeri, Verneuil , qui se trouve à la fois en Russie et en Allemagne. M. de Verneuil a été forcé de changer le nom d'elliptica que primitivement M. Rœmer avait imposé à cette espèce, parce que M. Philips, dans ses Paîœozoic fossils , plusieurs années auparavant, avait employé cette dénomination pour Pe^èce suivante, très différente de celle-ci :

Sanguinolaria elliptica , Philips.

Dans le terrain carbonifère nous comptons aussi quatre espèces : ce sont les Saiigumo/nna obovala^ Munster; angu&talaj Philips. M, Goldfuss a donné le même nom à une espèce qui no nous paraît pas identique à celle du paléontologiste anglais. I.e Sanguinolaria trans- versa , Portlock , est une belle espèce dont la forme rappelle celle du Psammohia nallowuysii du terrain tertiaire; enfin, le Sanguinolaria attenuata, Portlock. Ces buit espèces de Sangoinolaires deviendront définitivement des Psammobies, ou seront rejetées de ce genre. lorsque Poil aura découvert leurs caractères génériques. Il serait possible aussi qu’elles constituassent un genre nouveau ou qu'elles rentrassent dans le type des Cypricardes,

Voici encore deux espèces du Lias qui pourraient appartenir aux Psammobies, mais dont on ne connaît pas encore la charnière : Sangui- nolaria etegans et vetnsta de Philips , Géologie du Yorckshire , tome I**".

' Entre le Lias et les terrains crétacés , le genre Psammobie n’est point interrompu ; nous en avons plusieurs espèces dans POxford-Clayet dans le terrain kimméridien, mais ces espèces ne sont pas encore décrites.

Nous connaissons cinq espèces dans la craie , en comprenant dans ce nombre les deux Capses de M. d’Orbigny, Gapsa.elegans et discre- pans, toutes deux des craies sableuses de la Touraine. Le Psanimobia graciîis de M. Fitlon est des sables verts d’Angleterre , et le Semkos- tata de M. Rœmer est répandu dans le grès vert de l’Allemagne. Nous avons une empVeinte du Néocomien de Neüchâtel qui nous paraît de la môme espèce. La cinquième espèce est douteuse, c’est le Psammobia

I.F.S PSAMMOBIUES. 417

hiconapirua de M. Forbes, trouvée dans le terrain crétacé do Tlndo par M. Clay.

Seize espèces, en y comprenant celles qui ont leurs analogues vivants, sont connues dans la série des terrains tertiaires et s'y distribuent assez également; quatre espèces dans l’étage inférieur; deux, Psaimnohia Hallowaysii et compressa, caractérisent le bassin de Londres; des deux autres, le Psammobia solenaides est propre aux calcaires grossiers de Paris, la seconde, Psammobia rudis , commence aux couches infé- rieures du calcaire grossier et remonte jusque dans les sables marins moyens. Elle se retrouve dans les calcaires grossiers de la Belgique.

Trois espèces dans l'étage tertiaire moyen, Psammobia Labordei , Basterot, de Dax et de Bordeaux ; \c Psammobia pudica, Brongniart, du Yicentin , et lePsawmoèia affinis, Dujardin , des faluns de la Touraine. Chaque espèce gît dans une localité particulière. Il y en aurait une qua- trième si l'on admettait le Psammobia rugosior de M. Dubois de Mont- péreux , mais cette espèce nous paraît une Pétricole.

Dans le crag d'Angleterre et de la Belgique , quatre espèces propres sont mentionnées par M. S, Wood et par M. Nyst. Le Psammobia solida, Sowerby, se trouve dans les terrains supérieurs de Headen-Hill et aux environs d'Anvers; avec elle se montre, d’un côté, le Psammobia laminàsa en Angleterre et les Psammobia lœvisG[ Dumouli ^ Nyst, en Belgique.

L elage tertiaire supérieur ne contient que deux espèces particulières , le Psammobia iiniradiata et le Psammobia Basteroli de Bronn ; d’autres e.spèces vont se retrouver dans la liste suivante, contenant celles qui ont leurs analogues dans les mers actuelles.

4" /*5ammo6)q costulala, Turton.

Vivante dans la Manche et la Méditerranée.

Fossile en Sicile.

Psammobia lellinella , Lamarck.

Lamarck a donné le nom de Psammobia (lorida à une coquille qui n’est autre chose qu’une variété du Psammobia vespertina. M. Turton a imposé ce môme nom à une espèce très différente, inscrite par Lamarck sous le nom de Psammobia leUinella ; c’est à cette dernière espèce que se rapporte le Psammobta fîoridaj fossile du crag, découvert par M. S. Wood.

Vivante dans l'Océan d’Europe.

Fossile dans le crag d’Angleterre.

T. l. 'i® PAUTIK.

DOUZIÈME FAMILLE.

Psammobhi vespertma , Lamarck.

Vivante dans tout l'Océan d’Europe pt In Méditerranée.

Fossile en Sicile , en Italie cl dans le crag d’Angleterre. Psammobia incarna ta J Desh.

Tellina incarnata , Linné ^ Tellinà Feroensis, Ghemnitz. Vivante dans tout l’Océan d’Europe depuis les mers de Suède et de Norwége jusque dans la Méditerranée.

Fossile en Sicilë, en Italie et dans le crag d’Angleterre ei d’Anvers.

1. Psammobie boréale. Psammobïa incarnata. Linné.

PL P3. f. 9 10.

Testa ovali-oblongâ f iransversâ ^ œqiiUateràf transversim tenni- stritstâ; poscicè ati^uîatâ, oblique tmneatâ^ Uneîs elevatis^ in latere postico ra^iantibiis; extus qîbo. carneâ rubro radiatâ ^ intiis carrtea violacescente ; cardine hidenUito ^ altero iinideotato : denlibus bifidis,

LUier, Hisi. an. a%'l. app. pl. i, f. 8.

Lister, Conch. pl. 294, f. 241. '

Petiver. Gozoph. p. ii. pl. gL f. 9.

Coucha, Linné. Fauna suer. éd. i®. p. 38 r. n" 1387.

Tellina incarnata. Linné. Fauua suecica. 2* éd. p, 5 ï 7. ii® 21 54. Pennanl. Bril. zool. p. 177. pl. 5o. f. 3. Mala.

Tellina angnlata.'hùTW. inxxs. p. 3o. pl. 2. f. 5. ' \

Tellina radiata. Da Costa. Brit. coiicb. p. 209. pl. 14. L i.

Tellina feroensis. Chemn. Conch. I. 6. pl. 10. f. gi.

Tellina frari, Schrœter. Eiul. t. 2, p. 644. 5. pL, 7^ f. 9.^

Tellina feroensis. GmeXnu p. 32^5. 3i.

Tellina /iornii» Ginelin. p. 323 1, i5.

Tellina trifasciata, Gmelin. p. 3223. 24. çxcl, Chemn. .synon. Pullney, in dors. Cat. p. 29. pl. 6. f. i.

^ Telfina trifasciata. Düuuvan liiil. shells, t. 2. pl. 68.

V Tellina feroensis, Wood. Lin. ïraus. t. 6. p. i63. pl. i5, f, 20, 21,

^ / Id. Moulagu. Test bril p ,55^ 1.

Id. Maton et Racketl. Lin. Traus. t. 8. p, 49. 11^ 2.

Id. Wood. General conrhol. p. 164, pl. 45, f. i,

Id. Dillwyii, Cat. I. I. p. 77. t3.

Psammobia feroensis. Lunik. An. s. vert. l. 5. p. 5i2. 2.

Tellina feroensis, Tmlon. Conch. dict. p. 171, ir.

LES PSAMMOBIDES.

■419

' Psnmviobin Jn'ttejixis. l’ui toli. (Ànich. ins> bril. p.-94* f’J- TelUnnferocnsis, Wooiî. in(h' Tf.sl/pl: 4. f- 3^*'

Psnmmobinferoensi$»C4Çi\\. des (’li. cal. deî Test. duFiiiisl. p. 18. t.

Psammobîd muricata, Scacchi. cat. Conch. reg. Neap; p. 5.

/«J/OfOiM. Sowei Ijy. (ioiicli mnu. fij;. ujo.

Ps-urnmobia feroensis. For'nes. Malao. moiunsi». p.

'/</. Hnnley. Descr. rat p. 5;.

/d. Fofhos. report on lhe OEg. inv. p. 143.

IJ. Thompson, rejioil on iheFauii. ofîr. p. îi<)3.

///. Lovèn. Tndi hmll. s<and. p. 42. 11* 3<n. ' . > .

fd. rhilippi. Hiiiim, inolK Siril t. a. p 20. r

/J. Dedi. dans T.aink. An. s. \t rt. a** éd. t. B. p. 17'^. n" 2.

FossiUs. . ^

TeUinumurUata. Brorclii. Conch. fos.s. stibap. f. 2. p. 5 1 1 . pK 1 2. f. .2?

Psammobîa Jerocnsis. ï':\\\\, Enuni. mull. Si'Ü (. i, aS. ti® 2. t. 2. p. 2 I . i . .

Id. S. Wood. loss. .'‘Iiclls fronnlhe Crag. Ami. nal. hi.sl. n'’ 37. p, 2.48.

Id. SisoKiuda. Synop..|Wid. fo-tS, cdv p. ir. 11® 1.

Psammobia muricata. N\sl.-eoq loss delà lîelg. p. io5. 0*^62.

Deux fois Linné a décrit un Teliina inca7'ncLta dans ses ouvrages , la première fois dans la seconde édition du Fatina suecica , !a secondedans la 12® édition du Systenia naturæ ; mais lorsque l’on vient à rapprocher les deux descriptions, on reconnaît, non sans surprise, qu’elles ne s’accordent point entre elles et qu’elles s’appliquent à deux espèces bien distinctes. Cependant Linné renvoie delà seconde à la première, en transportant la synonymie de celle-ci à celle-là. Ainsi , Linné décrit une espèce dans le Fawïta swec/ca et y rapporte une figure 8 de l’ap- pendieç de Lister, qui s’accorde parfaitement avec la de^ription^ Dan.^ la W édition du Sÿstema^ som le même nom de Teliina mcarnata , Linné donne une autre description qui s'applique à une autre espèce, mais il conserve dans la synonymie cette même figure de Lister, qui alors ne s’accorde plus avec la nouvelle description. Cette confusion do Linné a été imitée parChemniiz et par Gmelin, et par la suite elle a occasionner bien de l'embarras à ceux des naturalistes qui ont cherché concilier des citations et des descriptions qui s’appliquent à des objets différents. Ceci explique comment il se fait que Chemnitz, ayant sous les. yeux le Teliina mcarnata 'du Fauna suecica, a été entraîné à lui imposer un nouveau nom Teliina feroensis , le prenant pour une espèce nouvelle. Cependant Born l'avait déjà nommée avant lui, décrite et

DOUZIÈME FAMILLE.

/l'in

figurée sons le nom Hp TeîUna angiilatfi. Quant à Gmelin , nous sommes liahitués à lui voir rommellre un si grand nombre d'erreurs, que nous ne devrons pas être surpris do trouver ce même Tdlina ungulata sous trois noms différents, et uno quatrième fois confondu avec lo Tellina incartiula do la 4!2® édition du Systema. Pour ceux des naturalistes qui ont conservé au genre Telline toute son étendue , il était impossible de remédier à l’erreur de Linné , autrement qa’en imposant un nom nou- veau à l’un des deux Tellina incarnataf et ce cliangement devaits’ap- pliquer à la plus récente des espèces, c'esl-à-dirc à celle du Si/siemn. Le contraire ayant été fait par Born . par Gliemnitz, et consacré par tous les autres conchyliologues , il nous semble possible de faire aujour- d’hui ce qui était impraticable avant le démembrement du genre Telline de Linné. 11 sera facile de nous comprendre. Le Tellina incamata de la Faune danoise est une Psammobie de Lamarck ; le Tellina mcai-nata du Systema nalurœ est une véritable Telline ; rien ne s’oppose donc à ce qu’il y ait à la fois un Psammobki incamata et un Tellina incamata , pour conserver le plus religieusement possible la tradition de la nomen- clature linnéenne. Afin de rendre plus facile à accepter le changement que nous proposons ici , nous avons châtié la synonymie de l'espèce et nous avons cherché à la compléter le plus possible. 11 serait désormais bien entendu qu’au Psammobîa mcarnala se rattache uniquement le TetUna incamata du Fauna succîca.

Il n’est pas nécessaire de décrire uno espèce aussi connue que celle- ci , il sera plus intéressant de la suivre dans sa distribution à la surface delà terre. Elle existe dans les mers du Nord comme l'ont constaté Linné et M, Lovèn ; elle descend dans les mer.s tempérées et s’introduit dans la Méditerranée, elle se montre sur presque tous les points ; elle sort de celle mer et se continue jusqu’aux îles du cap Vert, et peut-être gagne-t-elle le Sénégal. Elle apparaît à l’état fossile dans le crag d’An- gleterre et de Belgique , elle remonte dans les terrains siib-apennins et passe dans les couches plus récentes de la Sicile.

LES rSAMMOBlUES.

421

2. Psannuobie iriîiculoe. Psammofjîa maciilo^a. Lamk.

PI. 13. f. 6. 7. 8.

P, Testa ovato^transversâ ^ subœquilaterâ ^ rubellâ , rm^iis spnc/iceis interrupth maeniis albis Danis; niÿts trans^rsis striisquc ohïrqnis deaissaniibus; latcrc antico rotnnclato^ postlco snbangniato.

Le GiUün. Adaiis. Seneg. p 233. pl. 17. f. 20.

Tellina Gari. var. Chemn. Cnucli, t. 6. p. 102. pl. 10. f. p;.

An cadem junior? Soîen striatus. Clienn», Coiuli. 1. (3. j‘. 7 t. pl. 7. f. 57, 58.

Encycl. pJ. 2^8. f. 2?

tellina Gari. var. C. Spengler. Soc. d’hisl. liât, de Copeiili, t. 4 p. 72.

Solen striatusy VYood. Gciur. concli. p. i34. 11® 22.

Id. pilUv. Cat. t. i. p. 66. n" 22.

TcRina Gari. var. Dillw. Cal. t. i. p. 77. n" 12.

Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 5. 11® 5.

Dcsii. Ency. inétli. vers, t- 3. p..852. n" 3,

Solen striatus. Wooil. Ind. (estac. pl. 3. f. 24.

Desli. dans Lamk. An. s. vert. éJ p. 174, ,5.

Hanley. De.scr. cal. p. 57.

Callaw. Couch. nom. p. 21.

Wood. lud. lest. suppl. pl. ii, f. 28.

Par sa taille et par sa forme générale cette espèce se rapproche beau- coup du Psammohia vesperiina qui vit sur nos côtes et dans la Médi- terranée. Elle est ovale, oblongue , transverse , équilatérale, obtuse en avant , sub-anguieuse en arrière , bâillante do chaque côté ; elle est aplatie comme toutes les autres Psammobies. Le bord dorsal est paral- lèle ou ventral; il est presque droit et il est partagé eh deux moitiés égales par des crochets très petits , à peine saillants , opposés et très rapprochés lorsque les valves sont dans leurs rapports naturels. Un angle très obtus, aconipagné d'un pli peu profond , irrégulier, limite le côté postérieur en partant du crochet pour se rendre à Pangle inférieur et postérieur. En arrière dès crochets se montre un ligament gros, épais, saillant en dehors et fixé sur des nymphes allongées et épaisses : ces nymphes sont d’un violet foncé. Toute la surface est couverte de fines stries obliques qui , parlant du côté antérieur et supérieur, vont se teir miner au bord ventral coupant les stries d'accroissement sous un angle très aigu. Les stries qui n’atieignent pas le bord ventral s’arrè-

DOUZIEME FAMILLE.

.»22

lent brusquement à l'angle postérieur des valves ; le coté postérieur de la coquille est orné de stries transverses, normales , et en arrière des crochets de stries longitudinales rayonnantes qui s’évanouissent avant d’arriver au bord \ la charnière est étroite, eJIe porto deux dents diver- gentes., inégales sur la valve droite , l’antérieure étant la plus grande, et une seule médiane , simple et obtuse sur la valve gauche. L’impres- sion palléale est courte et placée 1res haut dans l’intérieur des valves , laissant entre elle et les bords une large zone. A tous ces caractères propres à faire reconnaître cette espèce , se joignent ceux de lit 'colora- tion. Sur un fond d’uU rouge vineiix très pâle se dessinent des rayons d’un brun ronge, plus ou moins nombreux , plus ou moins largos , irré- gulièrement interrompus par des taches blanchâtres ; quelquefois c’eSt l’inverse qui a Heu; la coquille est d'un brun rouge interrompu par des rayons pâles. Nous avons des individus qui portent les deiix variétés de coloration dont nous venons de parler. L'intérieur des valves est d'une belle nuance d’un rouge vineux très pâle, sur laquelle se détachent de beaux rayons d’un ronge brun violacé.

Cette coquille vit dans les mers du Sénégal.

8. Psammobie écmWense. Psainmobia squamesa. hsimk.

PI. 13. f. 4. 5.

P, Testa ovali-oblongây transversâ, angnstâ ^ subarcuatà y violacea ^ oblique striata; striis posticè crussioribus , imbrivato squamosis; latere antico angustOy acutiuscnlo^ postico longiore y latiore suban- gulütb.

Lani. Ai), s. l. 5. p. 5i4 9.

Desh. dans Lamk Au s. vert, .2*^ cd. l. 0. p. 176. 11'’ 9..

Deles«erl. Rec. de coq. non. fig, pi. 5. f. 6, a, b.

Callüw. Coucli. uo«i. p. 2 1.

Hanley. Descr, cat, p. 58. ,

Wood. Ind, Test. Sup., pi. 1 1 , ï. 47.

Petite coquille fort élégante , autrefois très rare dans îes collections , et qui offre des modifications que ne présente' aucune autre espèce du même genre. Oblongue, ovale, transverse, inéquilatérale , aplatie; ses valves sont minces et fragiles. Le bord dorsal est presque droit , le bord ventral est arqué ; le côté antérieur est obtus ; le postérieur obliquement tronqué ; tous deux sont bâillants , mais siirtont lo côté postérieur qui est ouvert à la manière du Cardium bullatum, ainsi que Lamarck l’a remarqué. Les crochets sont très petits , ne dépassent presque pas le

LES PSAMMOBlüES.

.I.i3

bgrd cardinal ; au-dessous des crocheis, sur ce.bord cardinal Irès étroil, s’élèvent deux petites dents divergentes sur la valve droite, une seule médiane sur la gauche. Des stries fines, un peu onduleuses, descen- dent obliquement du bord supérieur et antérieur vers le bord ventral elles se terminent. Celles qui avoisinent le côté postérieur grossissent graduellement . et celles qui occupent ce côté se changent bientôt en do véritables cotes rayonnantes au nombre de six ou sept et sur lesquelles se dressent de petites écailles obliques et sub-imbriquées. Ces côtes sc prolongent en dentelures aiguës qui découpcnl le bord postérieur et ren- dent son bâillement grimaçant, comme dans le Cardium que nous citions tout à l’heure. Les côtes postérieures semblent partir du côté postérieur du crochet, mais, si à l’aide d’une loupe on en cherche l’origine, on les voit prendre une direction horizontale -passant sur le crochet et remonter jusqu'au bord antérieur. La coloration de cette jolie coquille est peu variable; presque tous les individus que nous avons vus sont d’un violet foncé , uniforriie en dedans et au dehors. Nous avons vu des variétés plus pâles , et nous en avons une fauve marbrée de fauve un peu plus foncé.

Le Psammobia sqwajnosa vient de l’Océan de l’Inde; elle est longue de 25 à 30 millimètres.

GENRE TRENTE-NEUVIÈME.

SASTG'UlSirOXiAIB.E, Sanguinolana. (Lamk.)

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille transverse, subelliptique, un peu bâillante aux extrémités ; bord cardinal étroit', ayant deux dents cardinales inégales , petites sur chaque valve ; nymphes peu saillantes , portant un ligament externe bombé. Impression musculaire antérieure ovale , la postérieure circulaire ; impression palléale allongée jusqu a l'extrémité postérieure des valves, et produi- sant une sinuosité postérieure peu profonde, dilatée et subtrian - gulaire.

SYNONYMIE GENERIQUE. Lobariü , Schumacher. Tellina, Lister, Knorr. ^olen, Chemnitz, Schrœter, Gmelin, Bru*

DOUZIEME FAMILLE.

guicres, Wood, Dilhvyn. Sangidnolaria, Lamarck, Roissy, Brookes, Sü\yerby, Reeve, Hanley, Cuvier, Rang. ~ Psam- mobia , Deshayes [olim] , Desmoulins.

Jusqu’ici beaucoup d’incertitude a régné sur les genres (7ap.se et Sa/i{/Mmo(aïre. Lamarck , le premier, a publié des opinions différentes au sujet do ces genres, et les vacilJations de ce naturaliste ont entraîné celles de la plupart des conchyliologues. Pour rétablir exactement ces genres dans la Méthode, et pour éviter àTavenir toute méprise à leur sujet, il est nécessaire d’en retracer Thistoire avep quelques détails et de rendre à chacun d’eux les caractères qui leur appartiennent.

Le genre Sanguinolaire a été proposé pour le première fois par La* marck en 4 799, dans le premier volume des Mémoires de la Société d'histoire iiaturelle de Paris. Le Solen sanguinolentus de Gmelin, co- quille connue de tous les conchyliologues , sert de type à ce nouveau genre, et Lamarck le maintient dans les ouvrages qu’il a successive- ment publiés : Système des animaux sans vertèbres , Philosophie zooh- gique , Extrait du cours. Ce genre fut accepté par Roissy, Brookes , et quelques autres autours, qui ont trouvé dans la coquille, qui lui sert de type, des caractères qui en justifient la nécessité.

A côté de ce genre Sanguinolaire . Lamarck admettait , dans les ou- vrages que nous' venons de citer de lui, un genre Capso, fondé par Bruguières dans les planches de V Encyclopédie. Dans ce genre Capse, nous trouvons deux sortes de coquilles : des Tellines et le Vernis deflo- ra(fi de Linné. Lamarck adopta d’abord comme, type du genre Capse le Tellina angulata de Linné ; un peu plus tard dans son Système des animaux sans vertèbres , ayant reconnu probablement que le Tellina an- gulata est une véritable Telllne, il prit le TVnii.s deporata pour type nouveau du genre Capse.

M. de Roissy, dans le Buffon de Sonnini , adoptant plus rigoureuse- ment le genre Capse de Bruguières , y introduisit à la fois le Tellina angulata ci le Venus deporata , coquilles qui, assurément, n’offrent pas les mômes caractères génériques. Quoique avant 181 8 le genre Sangui- nolaire ne fût nullement défini et surtout bien caractérisé par l’espèce qui lui sert de type, M. Schumacher, conservant des doutes, le reproduisit sous le nom de Lobaria dans son Essai d'une classipcation des vers testacés , et le caractérisa par la même espèce que Lamarck. le Solen sanguinolentus de Gmelin. 11 est évident par que le genre Lobaria est un double emploi des Sanguinolaires , et qu’il doit être relégué dans la synonymie générique. En 1818, lorsque Lamarck publia le vo-

ÏÆS l’SAMMOniDlîS.

hime des sans vertèbres, on trouva clans !o genre Sangiiino-

lairo , non seulement lo So/e;t saîu/uïnofenfns, mais encore le Kenws deflorata , c’est-â-dire que sous cette dénomination générique Lamarclc a réuni ses deux anciens genres Sanguinolaire et Capse. Nous n’avons pas à blâmer celte opinion de notre grand naturaliste, mais le tort qu* il a eu , après avoir supprimé le genre Capso , c'est de reprendre ce nom pour l’attribuer à un genre fort différent, très voisin des Donaces , et qui, selon toutes les probabilités, devra disparaître de la Méthcwic. ('elle transposition des dénominations génériques est la chose la plus fâcheuse qui puisse arriver pour la nomenclature, et l’incertitude qui y règne encore en est le résultat. Afin d'éviter à l’avenir toute confu- sion au sujet des genres qui: nous occupent , il faut convenir que défi- nitivement le genre Sanguinolaire aura pour type le Solen sangumoïentus et le genre Capse le Kenus deflorala. Ceci une fois reconnu et accepté, les deux genres en question prennent naturellement leur place dans le voisinage des Psammobios , et doivent faire partie de la mémo famille.

Les coquilles du genre Sanguinolairo sont en petit nombre ; elles sont ovalaires et transverses , plus élargies en avant qu’en arrière ; elles sont aplaties et leur forme générale rappelle assez celle de certaines Tellines; elles sont inéquilatérales, le côté antérieur, très obtus, estiiii peu plus court que le postérieur. Le bord ventral est allongé ; il a une courbure comparable à celle du grand côté d’une ellipse. Des crochets petits, opposés, partagent le bord supérieur en deux parties égales; l’anté- rieur commence la courbure du côté antérieur, la postérieure se projette en ligne droite* en formant un angle extrêmement ouvert avec la pre- mière partie , et va joindre en arrière l’extrémité du bord ventral. Dans les Tellines et dans un grand nombre d’autres genres , le côté posté- rieur présente deux angles , l’un supérieur ou dorsal , l'autre inférieur ou ventral. Dans les Sanguinolaires , l’angle ventral n’existe pas; le bord inférieur de la coquille se continuant sans interruption jusqu’à l'angle dorsal. La surface externe de ces coquilles est lisse; elle est recouverte, surtout vers les bords, d’im épiderme [leu épais, caduc, ot qui , en débordant la portion solide du test , est destiné à revêtir le bord exsertile dumantfeau de l'animal.

Le bord cardinal est étroit, peu épais; il porte immédiatement au- dessous du crochet deux petites dents cardinales , divergentes et iné- gales. La dent cardinale antérieure de la valve gauche est la plus grosse , la dent cardinale postérieure de la valve droite est également la ]»lus grosse , de sorte qu’à une dent faible d’une valve correspond une dent forte de l'autre valve. 11 n’existe aucune trace de dents latérales .

126 DOUZIEME FAMILLE,

le ligament est externe; il est allongé , peu bombé eu dehors . et il est adhérent sur des nymphes superficielles , peru épaisses et peu proémi- nentes, Les impressions musculaires appartiennent à la région supé- rieure de la coquille; cependant elles descendent plus bas que dans les Psammobies., et la postérieure surtout, complètement isolée du bord supérieur, en est plus écartée que dans d'autres genres. L’impression musculaire antérieure est ovalaire , .elle s'élargit en raquette ; son extré- mité supérieure est pointue , et elle paraît se prolonger au-dessous du bord cardinal , parce qu'elle se continue avec la petite impression mus- culaire du rétracteur antérieur du pied. L’impression musquiaire postérieure est ovale , subcirculaire ; entre elle et l’extrémité du bord Supérieur se remarque une petite impression. subquadrauguiaire pro- duite par le muscle rélracteur postérieur du pied..

L’impression palléale présente des caractères qui n'existent pas dans les Psammobies; elle part du milieu du bord inférieur de l'impression musculaire antérieure ; elle se place parallèlement au bord ventral de la coquille, et elle en suit régulièrement la courbure jusque vers l’exlré- milé postérieure du test, remontant très haut, vers l’angle dorsal et dépassant ainsi le bord postérieur de l'impression musculaire. De cette disposition résulte un, étranglement considérable de l'entrée de la sinuo- sité postérieure du manteau, pressée on quelque sorte par le muscle postérieur, situé beaucoup plus bas que dans beaucoup d'autres Mol- lusques. La sinuosité Se confond par son bord inférieur avec la portion ventrale ,de l’impression palléale. Parvenue un peu en avant de la charnière, la sinuosité se détache, en formant une ligne oblique , qui se dirige d’avant eu arrière et de bas en haut. Cette ligne est sans sinuosité; parvenue vers, le milieu de l’espace circonscrit par l'im- pression ventrale et le bord cardinal , elle forme u;i angle aigu et re- descend obliquement du haut en bas et d’avant en arrière , .pour gagner, en décrivant une courbure, le bord inférieur de l’impression posté- rieure. Trois lignes circonscrivent la sinuosité palléale, et ces trois lignes forment entre elles un triangle, dont l’angle le plus allongé est médiocrement ouvert. Tout en conservant de l'analogie avec celle dos Tellines , cette impression en ditfère par la large troncature de son extrémité anlérieure; elle ressemble aussi à celle des Lavignpns , mais elle s'en distingue non seulement par une moindre étendue, mais encore par la forme toute spéciale que nous venons de décrire.

L’animal du genre Sanguinolaire n'est malheureusement point connu ; cependant il habite en très grande abondance les plages sablonneuses de la Guadeloupe et de la Martinique. Tout nous porté à . croire que

LES PSAMMOBIDËS.

4 a:

l’animal est pourvu d’un pied robuste, si nous en jugeons d’après l’étendue des impressions des muscles rétracteurs de cel organe. Le rétrécissement de l’entrée du sinus palléal, la dilatation de ce sinus, est pour nous un indice certain que l’animal des Sanguinolaires se termine en arrière par deux siphons complètement -séparés. Nous pouvons même assurer que chez l’animal en question, le manteau peut se creuser d'une cavité postérieure destinée à recevoir les siphons au moment de leur contraction, car nous observons en avant du muscle postérieur, et sur la ligne supérieure de la.sinuosilé palléale, l’impression spéciale d’un petit musclé qui vient s’irradier dans la portion du manteau dont nous venons de parler ; peut-être qu'au moyen de l’observation d’un grand nombre d'animaux mollusques de k classe dos Dymiaires, on parviendra- à reconnaître à quelle hauteur se fait la commissure posté- rieure du manteau , d’après le modç d’union de la sinuosité palléale avec la portion ventrale de l'impression du manteau. '

Le genre Sanguinolaire , étant circonscrit comme nous venons de le faire, se trouve réduit à un très petit nombre d’espèces. Nous en con- naissons seulement deux vivantes; il faudra rejeter aussi de ce genre les nombreuses espèces fossiles qui y ont été successivement intro- duites. Toutes cos espèces auraient besoin d’être revues avec le plus grand soin ; car, même en conservant au genre Sanguinolaire toute rétcndiic que lui a donnée Lamarck, il n’y a pas une seule de /ces espèces qui en présente les caractères; aussi Ton peut considérer que les genres Psammobies, Sanguinolaires etCapses, sont devenus pour les paléontologistes des véritables incertœ sedis dans lesquels ils ent dé- posé les especes fossiles dont ils n'ont pu connaître le genre d’une ma- nière authentique. Se laissant guider par des formes extérieures, souvent trompeuses , soit de moules imparfaits; soit de coquilles entières , mais dont la charnière est. restée inconnue , ils ont fait de ces genres un mé- lange hétérogène dont il est bien difficile actuellement de classer con- venablement les divers matériaux., Pour les distribuer d’une manière convenable, il faudrait les réunir en môme temps sous -les yeux , les comparer et n’admettre que celles des espèces qui offriraient les caractères de l’iin des genres ; mais il sera impossible d’atteindre le but aussi longtemps que le zoologiste n'aura pour éclairer son opinion que des figures incorrectes, incomplètes , et dont les défauts ne seront pas ra- chetés par de bonnes de.scriptions.

' U est quelquefois arrivé aux paléontologistes de distribuer c.apricieu- semeiU leurs fossiles dans des genres dont ils ont connu les noms et oublié les caractères distinctifs. Pourquoi par exemple, M. Philips, dans le

DOU/JKMJi l'AMlLLli.

1 2 8

1" volume- de hi Géologie du Yorixshire, place-l-il la coquille de la pl. '14, fig. \ , dans le genre Sungninolavia ^ tandis qu’il met dans les Ânxiphidesma une autre coquille extrêmement voisine, représentée pl. 3, lig. 25? A la planche 12, fig. 9, nous trouvons sous le nom de Sanguinolaire une coquille qui , génériquement , ne paraît point dissem- blable à celles représentées pl. 2, fig. 14, sous le nom de LuXniria, pi. 9 , fig. 13 , et pl. 1 1 , fig. 1 5 , sous le nom de PuUastra. Nous ne poursuivrons pas ici plus loin l’examen des espèces de M. Philips, plus tard nous aurons l'occasion de le continuer.

Nous avons déjà retiré des Sanguinolaires un bon nombre d'espèces qui nous ont paru avoir les caractères des Psammobies ; elles sont citées comme douteuses à la suite de ce genre ; mais il nous en reste beau- coup d'autres qui ont été figurées comme Sanguinolaires et placées dans ce genre , et nous nous trouvons dans l'obligation de les soumettre actuellement à un rapide examen.

Les treize espèces suivantes ont la forme extérieure desCardites ou des CypricardeS:; nous préférons les classer dans Tun de ces genres , plutôt que de les laisser parmi les Sanguinolaires, dont elles n'oflrent même pas la forme générale. Ce sont {Q^Sanguinolariainaxmo., oUonga, piicala, de M. Portloclc. Toutes les autres sont figurées par M. Gold- fuss : Sanguinolaria gracilis , pusüla , Neptuni, pygmeea ^ slndta ^ de Munster; dorsata, compresfia ^ truncata, lamellosa et carinata ^ de Goldfuss. Nous retrouverons plus tard ces cs|)èces dans le genre Cypri^ carde, et nous en indiquerons alors la distribution géologique.

Il y a trois espèces : Sanguinolaria Ungeri , llœmer ; Phascolimi et Tellinaria , de Goldfuss, qui ont la forme des coquilles du genre Put^ la^tra; nous les reprendrons aussi à la suite de ce genre.

Le Sanguinolana trigona de Münsler n‘a pas la forme d’une Sangui- nolaire, mais plutôt celle d’une Madré; mais rien ne prouve qu’il dépende de ce dernier genre.

Le .Sattffixï'noiana undulaia^ de Sowerby, est une Anatine , ainsi que M. Morris lui-même l’a reconnu, et le Sanguinolaria lata, de Münster, nous l'avons reporté au genre Thracio.

Il nous reste actuellement neuf espèces, véritable capul morltium, sur lesquelles il nous est impossible de nous prononcer : la plupart sont de bonnes espèces , mais les yeux de lynx nous manquent pour deviner le genre; ce sont les Sanguinolaria gibbosa, Sowerby; orcuala et iiimida^ Philips, et lœvigatUj Goldfuss. Sous le nom de Sanguinolaria sulcala , nous trouvons trois espèces : une de Philips , une de Münster, la troisième de Porllock. Sous la dénomination de Sanguinolaria wulata ,

LKA PSAMMOBIDI-S.

/129

SP rangent deux espèces , l’une de Porl.lock , l'autre de Miiusler. Enfin , pour terminer cette revue des Sanguinolaires fossiles , nous renverrons aux Teliines de la section des Tellinides , notre Sani/«ûio/aj*ta Lamarckii du bassin de Paris, qui, après notre nouvel examen, n’est réeUcinciU pas du genre tel qu'il est constitué aujourd'hui.

Sanguiuolaire rose. Sanguinolaria sangxdnolenia. l^mn^.

PI. lAhisA, 1. 2. 3. - *

s. Testa transversâ , ihcequîhterali ^ semi^orbîcnlatâ^ utroque Intere hiante ^ vahis convexinscuUs ^ aîhîs ad apicem roseo tinctis , trans^ versim obsolète striatis.

Lister. CodcIi, pl. 397. f, 236,

Kuorr. Vergn. t. 4. pt. 3, f. 4.

Solen. Cheomitz. Conch. t. 6. p. 72. pl. 7, f. 56.

Sofen. Srhrijler. Einl. t. 2, p. 636. n" 5,

Salen sangainolentus. Gmelin. p. 3227. iS.

Solen fucatus, Spengler. Mém. de la Soc. d’hist. nat. de Copenii. t. 3.

p. I tX. 23. ^

Sùhiï^ Bnig. Eiicy. pl. 227. f. i.

Snn^uïnolaria rosen. Lamk. Soc. d’hist. nat. de Paris, t. i. p. 84.

Id. Lamk. Sysl. des An. s. vert. p. 123.

Jtl, Uoissy, Biilf. Moll. t. 6. p. 4*22. pl, 69. f. 4.

Wooil. General conch. p. ï36. pl. 33. f. 4,

Biuoke.s. Introd. p. 54. pl. 2. f, 14.

Solen sanguinoleritns. Dilhv. Cat. 1. i, p. 67. 25.

Z-oW/û roxtfrt. Schumacher. Nouv. sysl. p. 122. pl.6. f. t. Sanguinolarîa rosea. Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 5i i. 11® 2.

Solen saiigniHolenlus. Wood. Ind, teslac. pl. 3. f. 28.

Psammobia. Desh. Ency. mélh. t. 3. p. 852. 5.

Cuvier, Règne anim. 2* éd. t. 3. p. i5S.

Sangulnolaria rosea, Sowerhy. Généra of shells. f, r.

Tsammoblà, Desh. dans Lamk. An. s. vert. 2* éd. t. 6. p. 170. 2. Sanguinalaria rosea. Reeve. Conch. svst. t. i. p. 76. pl. 52. f. 1 . Hanley. Desc. cat. t. 1. p. 55.

Catlow. Concti. nomencl. p. 20.

Xous restituons à celte espèce son nom que Gmelin , le premier, jui imposa. Le nom spérifique est assez dissemblable du générique pour

4^0 DOUZIÈME FAMILLE»

pouvoir être maintenu sans que la nomenclature en ressente la moindre confusion.

Le Sangtiinolaria sanguinolenla est une coquille bien répandue dans les collections ; elle a l'apparence d’une Tellinc dont le pli postérieur aurait été effacé ; ovale , oblongue , Irahsverse , aplatie ; elle est ioéqui- Jatérale , un peu bâillante en avant cl en arrière; les deux portions du bord dorsal forment entre elles un angle très ouvert, une ligne presque droite; le côté antérieur est large, coupé à peu près en demi-cercle; le côté inférieur est régulièrement arqué , et il ne se termine point à un angle postérieur et inférieur, comme dans un grand nombre de coquilles, il se continue jusqu’à l’angle supérieur et postérieur; cet angle est arrondi. Toute la surface est lisse et brillante: les crochets, peu proémi- nents , sont teintés d’une belle couleur rose pourprée, qui s’étend jusque vers le milieu des valves en diminuant gradueliemenl'd'intensité; le reste de la surface est d'un blanc rosé très pâle ; à l’intérieur, la coquille est d’un rose plus uniforme ; les bords seuls sont blancs. La charnière est étroite, elle porte deux dents inégales sur la valve droite, l’antérieure est la plus courte ; sur la valve gauche il existe une seule dent médiane assez grosse, et en arriéré le riidiment Très mince d'une seconde dent cardinale.

Cette espèce habile en abondance lés plages sableuses des AhLilievS.

GENRE QUARANTIÈME.

CA'PSX, ^Capsa. (nrnguières,.)

Pl. i3. fii;. I. 3. 3.

CARACTERE^ GENERIQUES, ^ Animal iiiconnu.

Coquille ovale , transverse, équlyalve, subéquilatérale , un peu bâillante à ses extrémités, convexe, à crochets petits, peu obliques. Charnière étroite , portant deux dents inégales sur chaque valve, dont Tune grosse, courbée et bilobée. Im- pressions musculaires ovales ou subcirculaires; sinuosité posté- rieure de l’impression palléale courte, horizontale , large, presque entièrement . détachée de la portion ventrale de 1 im-

Li;S PSAMMOUIDKS. /ïiil

pression; ligament externe, épais, attaché à des nymphes grandes et saillantes.

SYNONYMiK oénérique. Ckama, Lister. Tellina, RuiVi- phius 5 Petîver, d’Argenville , Gualtieri , Born, Cheinnitz^ Gmelin, Wood. Venus, Linné, Pennant, Schrœter, Gmelin, Montagu, jMaton et Rackett , Dilhvyn , Turton , Wood. Solen^ DilUvyn. Capsula, Schumacher. Capsa, Bru- guières, Lamarck (olim ), Roissy, Renier, Brookes, Férussac, Menke. Sanguinolarîa (in parte), Lamarck, Boiidich , CrouchjDeshayes, Desmoulins, Anton, Dufo. Psaminocola^ Rang. Psanimobia , Sowerbÿ, Reeve , Hanley.

OBSERVATIONS. Nous avoiis retracé en abrégé les divers change- ments que le genre Capse a subis depuis sa création. Adopté d'abord par Lamarck , de Roissy et plusieurs autres couchyliologues , il fut sup- primé par Lamarck , confondu dans ses Sanguinolaires. et le nom géné- rique, devenu sans emploi, a été appliqué à des coquilles voisines des Donaces , et que Bruguières confondait avec elles. Il n'existe donc plus la moindre analogie entre le genre Capse, tel que f on auteur Lavait créé, et celui qui se trouve dans le t. 5 de Vîîistolre naturelle des animaux sans vertèbres. Si le genre Sanguinolaire eût contenu uniquement des coquilles renfermées dans les Cap'ses de Bruguières, il eût été facile de rendre à la nomenclature sa netteté primitive ; mais le genre Sangui- nolaire de Lamarck réunit aux anciennes Capses, le Solen sanguinolàins, type du genre Sanguinolaire. créé en 4799 par Lamarck lui-même. Celte réunion do deux genres distincts , en rendant la nomenclature incertaine, avait encore le defaut d'entraîner les naturalistes moins expérimentés à des erreurs nombreuses. Il était donc nécessaire de restituer à chaque genre son nom , en leur assignant des caractères qui ne laissassent plus la moindre ambiguïté sur leur valeur. Pour en venir à cette réforme utile, il nous suffit de retourner en arrière dans l’histoire de la science et de reprendre les genres Capse et Sanguinolaire à peu près pour ce qu’ils étaient à leur origine. Car, ainsi que nous Lavons vu, nous rendons au genre Sanguinolaire sôn type, le Solefi sanguinolentus , et nous reprenons pour les Capses Lespècé que Lamarck a désignée dans ses premiers travaux, le Venus deflorala de Linné.

La coquille dont nous venons de rappeler le nom a été connue des anciens conchÿliologues ; Lister, Rumphius. Petiver, en donnent des

t .T i DOUZl RME F AM I LLK .

figures reconnaissables Sloaiic la nienlionne flans son voyage à la Jamaïque. D’Argenville, Gualtïeri , Seba et Knorr, ont également figuré plusieurs de ses variétés. Tou^ ces auteurs, dont les travaux ont été publiés avant ceux do Linné , à une époque la nomenclature n’était pas encore faite, désignent cette coquille sous des noms divers, tels que Came y Tellinc^ Conque, etc. Enfin, Linné la mentionna pour la première fois dans la \ S*" édition du Sijstema naiurœ , il la plaça parmi les Venus, sous le nom de Venus delîorata. Un grand nombre de natu- ralistes, successeurs do Linné, adoptèrent son opinion ; quelques au- -tres , ayant rencontré des variétés qu'ils ne reconnurent pas comme dépendantes du type spécifique , les rangèrent parmi les Tellines, ainsi qu’on le voit dans les ouvrages Born , de Chemnitz , de Gmelin ; mais ce dernier, admettant dans son catalogue les espèces de ses devanciers , sans les contrôler, produit celle-ci parmi les Tellines et parmi les Vénus , et dans ce dernier genre sous trois noms différents; de sorte que dans cette dernière édition du i^yslema natui'œ , le l^ciius deflorata est sous quatre noms difïérents.

Lorsque Bruguières prépara les planches de l’Enclyclopédic, obligé de remanier toute la conchyliologie, et voulant imposer aux genres une plus grande netteté. U s’aperçut que le l'e/it/s dejîonUa no pouvait rester dans le genre de Linné, et il reconnut rimpossibililé de ranger celte coquille dans aucun autre genre connu. A celte époque, la char- nière seule des coquilles bivalves déterminait leurs rapports ; ainsi Bru- guières, en rencontrant dans certaines Tellines une eharnière analogue à celle du Venus delîorata , fut conduit à les y joindre pour en fonder son genre Capse. J1 suffisait de rendre aux Tellines ces espèces , dont nous venons de parler, pour laisser aux Capses toute la valeur d’un bon genre. Lamarck l’essaya, mais il est fâcheux qu'il n'ait pas persisté dans sa première opinion.

En étudiant soigneusement les espèces réunies dans les Sanguinolaires de Lamarck , nous nous aperçûmes que ce genre avait besoin d’ôtre réformé; mais au lieu de revenir au premier nom, à celui de Bruguières, nous conservâmes le genre Sanguinolaire , en lui attribuant pour type le Venus deflorata , et en rejetant parmi les Psammobies non seulement les Sanguinokiria occidens et Uvida, mais encore le Sanguinolaria rosea, c’est-à-dire le Solen sanguinolenlus . A ces vacillations déjà nom- breuses, d’autres naturalistes ajoutèrent les leurs; c’est ainsi que j\l. Rang, à l'exemple de M. do Blainvillc, comprend les.Sanguino- laircs , c'est-à-dire les Capses, dans uii genre Psammocole. M. So- werby, ne trouvant pas ^sans doute de caraclères.siiffi.sants pour faire du

LES PSAMMOBIDES.

Venus (lellomUt un gem*e à part, il rapporte cette espèce au genre Psammobie dans son Genmi of sheîls ^ et cette opinion est admise par MM. Reeve , Hanley et quelques autres. Nous aurions parler aussi delà réforme, proposée en 1817, par M. Schumacher, dans son Essai d'une classification des coquilles. Ce savant observateur voulut appli- quer,,en toute rigueur, les principes de Bruguière et de Lamarck, sur la détermination des genres d’après le nombre de dents de la charnière. Il fut entraîné par à la création de plusieurs genres peu utiles, mais n’ayant pas à ce qu'il semble, à sa disposition, les docnments qui auraient pu l’éclairer sur le genre Capse de Bruguière , il le proposa de nouveau sous le nom de Capsula,

Quoique le Venus deflorala soit une coquille des plus communes et qu’elle se montre sur une très vaste étendue , depuis la mer Rouge jusqu’aux mers de Chine, et depuis ces mers jusqu’à celles de la Nou- velle-Hollande, néanmoins l’animal n’est point encore connu, et nous en éprouvons d'autant plus de regret, qu'il serait d’une grande utilité pour compléter les caractères d’un genre, qui laisse quelque ambiguité à cause des rapports nombreux qu’il a avec les Psammobies. Un obser- vateur, qui habita longtemps les Séchelles ,d ans le but unique d’en étudier les Mollusques , s’‘imagina probablement que l'animal d’une coquille aussi commune devait être conna, et au lieu de le décrire, il s’attacha à un fait sans importance, qu’il voulut constater sur un très grand nombre d’individus. M. Dufo avait, remarqué dans le manteau une agglomération de sable , dont les grains sont réunis par une matière muqueuse. II reconnut ce fait sur tous les individus qu’il observa. Ce fait prouve seulement que l’animal , vivant au milieu du sable , en reçoit dans l’intérieur de son manteau, et que , ne s’en débarrassant pas grain à grain , il en accumule une certaine quantité, qu'il enveloppe de mu- cosités , et qu’il tient dans la partie supérieure de la cavité palléale jus- qu’au moment il le rejette.

Les coquilles appartenant au genre Capse sont ovales , transverses , subéquilatérales, beaucoup plus épaisses et beaucoup plus bombées que les Psammobies et les Sanguinolaires : la forme en est peu variable. Le côté antérieur est arrondi , le postérieur l’est aussi ; cependant il est obscurément anguleux. Le bord inférieur est presque droit ou médiocre- ment bombé ; le supérieur est partagé en deux portions inégales par hi saillie des crochets; ceu-x-ci sont peu proéminents , ils s’inclinent sur le côté antérieur l’on n’aperçoit aucune trace de lunule. Sur le côté postérieur se montre un très gros ligament , externe , convexe , très allongé, adhérant solidement à des nymphes épaisses, peu proéminentes

ab*

T. I. 2* mTlE.

DOUZIÈME FAMILLE.

4:^4

mais profondément séparées par un sillon, dans lequel s'insère la tuni- que externe du ligament. Les bords de eés coquilles sont simples, tran- chants; lorsque les valves sont réunies, elles présentent en avant et en arrière un faible bâillement. La surface externe est tantôt lisse, tantôt couverte de stties et de côtes longitudinales et râyonnantes.

La charnière est plus épaisse que celle des Psammobies ; néanmoins lo bord cardinal reste étroit, èt il est peu saillant au dessus de la cavité de^ crochets. On remarque . sur la valve droite deux dents inégales; l’antérieure est petite et presque perpendiculaire ; la postérieure est très grosse, très oblique et profondément bifide; sur la valve gauche c'est le contraire qui a lieu; la dent antérieure est grosse, épaisse, cordiforine ; lu postérieure est petite et très oblique. Celte charnière, comme oh voit, ressemble beaucoup à colle des Psammobies ; la différence consiste dans la grosseur relative des dents cardinales, qui, dans les Capses, pren- nent un volume quelles n’acquièrent jamais dans les autres genres voi- sins. La surface interne présente deux grandes impressions musculaires très écartées , et occupant, l’une et l’autre, la région supérieure de la coquille. L'impression musculaire antérieure est ovale; la postérieure est presque circulaire ; l’une et l’autre sont superficielles. De l’extrémité inférieure du muscle antérieur, se détache une impression palléale, qui se rend vers l'extrémité postérieure des valves, en restant parallèle au 'l)ord inférieur ventral; mais cette impression se porte très haut dans l’intérieur dos valves, laissant entre elle elle bord une large xone, un peu plus étroite en arrière qu'en avant. Parvenue au niveau du bord an- térieur de l'impression du muscle postérieur, la portion ventrale de l’impression palléale s’arrête, s’infléchit sur elie-môme et alors com- mence une sinuosité horizontale, qui se porte en avant, et atteint quel- quefois la hauteur delà charnière. Dans quelques espèces, cette sinuosité n'est pas entièrement détachée de la portion ventrale de l’impression du manteau ; elle se confond avec elle dans le tiers ou la moitié de sa longueur environ. Dans les Psammobies, la sinuosité postérieure se con- fond avec l’impression ventrale dans presque toute son étendue, il existe cependant quelques exceptions par losquellos les deux genres se ratta- chent l’un à l’autre.

Les Capses sont des coquilles qui n’atteignent jamais une bien grande taille; elles vivent à la manière des Tellines et des Psammobies; s’en- foncent perpendiculairement dans le sable des rivages à une faible profondeur sous l’can, dans des limites que n’atteignent jamais les grandes marées. Toutes jusqu’ici habitent les mers chaudes; nous n’en connaissons qu’un petit nombre d’espèces; deux vivantes et une fossile.

Î.ÈS PSÂ^t^TOÉiDES , 435

L’espèce fossile provient des terrains tertiaires moyens, des environs de Bordeaux; elle y est, à ce qu’il paraît, extrêmement rare, car elle n’est mentionnée par aucun des naturalistes qui se sont occupés des fos- siles de cette localité extrêmement riche. Cette espèce est d’autant plus intéressante, qu’elle ressemble beaucoup au Tenus deporaia , dont elle ne se distingue que par un angle postérieur plus accusé, et des stries longitudinales beaucoup plus fines.

Cwpse ridée, Capsa deJlorata.T>e9ib.

, PI. 13. f. 1. 2. 3.

C, testa ovatâ, ventricosâ ^ inœquilnteraii^ ntroqne latere ohtusd ^ postice ohtnsissim^ angulatâ, longitudinaliter rugosâ^ albâ 'l'ci violaceo rttbroseâ pictâ et radiatâ, inths posternu violaceâ.; nymphis 'violaceo nigris.

Lister, Concli. pl. 424,4^^5. f. 272, 273.

Rumphins, Mus. amb. pl. 45. f. C.D.

Petiver, Mus. amb. pl. 17, f. 9, i5.

Sloane, Voy. à la Jamaïque, t. 2. 9.264. n* i. 265; n* 8 D’Ariîenville. Concb. pl, 25. f. À.

Gualtieri, Ind. ïesl. pl. 86. f. R.C.

Seba, Xbes. t. 'à. pt 86. f. 17.

KnoiT,VcrgD. t. 2. pl. 20. f. 5; l. 4. pl. 3. f- 3 ; t. 5. pl. 9. f. 3 , pl. II. f. 2.

Venus dejlorata, Liimé, Syst. nat, éd. 12. pl. ii33. 11“ iSa.

Id. Peuuaiit, Zool. Bril. t. 4. p. 96. pi. 57. f. 54.

Born, Test. Mus. Vind. p. 3i.

Favanne, Coucb. pl. 49. f. P.

Chemu, Coneh. l 6. p. 93. pl. 9. L 79 à 81.

Venus dejlorata. Schrœl. Fini. t. 3. p. i3i et p. iSo no Bo Id. Herbst, Verm. pl. 40^*

TèîUna rosea,Qtm^\. p. 3238, h*' 58.

Venus dejîorata, Gmel. p. 3274. n* 24.

Venus versicolor, Gmel. p. 328 t. 65.

Venus purpuraCa. Gmel. p. 3289. n“ 100.

Capsa. Brug. Ëiicycl. pl. 281. f. 3. 4.

Venus dejlorata. UUsses. Trav. ofNapL p, 485. i33.

Capsa rugosa. Lam, Mérti. de la Soe. d’hist. nat. de Paris, t. t. p. 84. Jd. Lamk. Syst. des Au. s. vert. p. 125.

Venus dejlorata, Moutagu. Test, biit. p. i23.

28*

4^6

DOUZIÈME FAMILLE.

là. Maton et Eack. Lin. Trans. t. 8. p. 85. n* i5.

Capsa ru^osa, Eoissy, Buff. Moll. t. 6. p. 355. pl. 66. f. 2.

Teltina rosea. Wood. Gen, conrh. p. 175. 58. ^

Capsa rugosa, Brookes, Intr. of conch. p, 66. pl. 3. f. 28.

Venus dejlorata. Dillwyn. Cal. l. i. p. 186. n* 65,

Capsula ru»osa. Schum. Nouv. syst. p. i3o. pl. 9. f. i.

Sangttinolaria rugosa. Lam, An. s. vert. t. 5. p. 5i i. y entis dejlorata. Turton. Conch. dict. p. a4o. 19.

Sanguinoïar'ta rugosa. Bond. £lem. of Coiicb. 2* part. p. 5. f. 8.

Id. Cfouch. Intr. Lamk. Cooch. p. 10. pl. 5. f. 6. >

yenus dejlorata. Wood, Ind. test. pl. 8. f. 64.

Sanguinolaria nigosa. Desh. Eiicycl. niélb. vers, t- 3. p. 9a5. i. Psammobia rugosa. Sow. Généra of shells. 35. f. i, 2.

Sanguinolaria rugosa. Desh. dans Lamk. An. s. vert. . 2* éd. t. 6. p 167 Dufo, Ann. sc. nat. 2* sér. t. 14. p. 220.

rn^osa. Reeve, Conch. sysL t. i. p. 76. pl. 53. f. n 2. id. Hanley, Descr. cat. t. i p. 56.

Il y a peu de coquilles plus communes que celle-ci; elle est ré- pandue dans tout l’océan de l’Inde , depuis la mer Rouge jusqu’aux mers de la Chine. Elle est très intéressante à cause du nombre considé- rable de ses variétés, car elle varie à la fois dans ses formes, dans ses accidents extérieurs et dans ses couleurs. Si l’on ne possédait qu’un petit nombre d’individus, il serait possible d’établir avec enx plusieurs espèces, ce qui est arrivé à Gmelin; mais en réunissant un grand nom- bre de variétés , on a sous les yeux le tableau des transformations de l’espèce, et il intéresse le zoologiste qui cherche à se rendre compte de la valeur des caractères spécifiques dans la classe des Mollusques acé- phalés.

Les variétés dans la forme générale sont les moins nombreuses ; or- dinairement ovale, transverse et inéquilatérale , cette coquille devient presque équilatérale; son côté postérieur se rétrécit; le bord ventral, presque toujours droit ou peu convexe , s’arrondit insensiblement et la coquille finit par être proportionnellement beaucoup plus large que d’habitude. La surface externe est couverte de stries longitudinales . rayonnantes: elles commencent par être fines, régulières, serrées les unes près des autres; dans une série d’individus, ces stries grossissent, s’écartent un peu et restent simples, mais bientôt des stries plus grosses sont entremêlées de plus petites, et enfin on arrive à une dernière va- riété dont la surface est couverte de grosses côtes rayonnantes, régu-

LES PSAMMÜBIDES. 437

lières, tantôt striées, séparées par des interstices simples, tantôt simples avec des intervalles striés.

Quant aux couleurs, elles sont très variables et indépendantes des variétés précédentes. Il y a des individus blancs, ayant une large tache violette sur le côté postérieur; d’autres qui sont jaunâtres d'abord sur les crochets, puis sur toutes l’étendue des valves, cette nuance devient foncée dans une série d’individus et parvient au jaune orangé. Les va- riété roses se montrent de la même manière , enûn les variétés violettes ne sont pas les moins nombreuses. Les unes sont d’un violet pourpré , avec des zones blanches, transverses; les autres sont d’un violet plus foncé, plus uniforme, mais presque toujours interrompu par de beaux rayons blancs plus ou moins variables; mais chez tous les individus on trouve les nymphes et le côté postérieur teintés d’un violet obscur.

THEIZIÊME FAMILLE.

lloiiaeides. ÆMonaeMœ, Fleming.

CARACTÈRES. Animal transverse peu épais, inéquilatéral ^ trigone , ayant les lobes du manteau égaux , disjoints dans la longueur du bord inférieur et bordé de tentacules; siphons inégaux ; le branchial le plus court est garni de tentacules bran- chus. Pied allongé très aplati, triangulaire, abords tranchants; palpes labiales petites, étroites, oblongues, triangulaires; branchies très inégales, l’interne allongée depuis la bouche jusqu’à la région anale; l’externe, de moitié plus courte, et se prolongeant en haut par un bord mince et large.

Coquille transverse, trigone, régulière, cunéiforme, à volves égales, closes, à bords simples ou dentelés; ligament externe court. Charnière étroite portant deux dents cardinales sur chaque valve et quelquefois des dents latérales ; deux im- pressions musculaires, l’une ovalaire, la postérieure subcircu^

43§ ^WULLE.

laire, toutes cle\ix danç ]a Région supérieure de la coquille; impression palléale offrant en arrière une sinuosité ovalaire peu profonde, horizontale.

Dojmx,

L*opjnion des çpnchyliologues a subi jusqu’ici un petit nombre de variations au sujet du genre Donace. Linné mettait en contact avec les Mactres et les Bucardes , et cette classiûcation prévalut jusqu'au moment l’ouvrage de Poli eut une influence marqué^ sur Tesprit des classificateurs. Lamarck connut tard l’ouvrage du zoologiste napolitain; aussi il conserva , dans ses premières méthodes, un arrangement ana- logue à celui de Linné. Cependant, ep 1809, il commença à rapprocher les Donacesdes Teîlines dans sa famille des Conques, et quelques années après , il créa la famille des Nymphacés, dans laquelle les Donaces sont définitivement entraînés loin des Bucardes et des Mactres, et placées dans des rapports plus naturels , mais qui ne sont pas encore l’ex- pression réelle des caractères que présentent ces animaux. Poli, en rejetant la classification linnéenne , trop confiant dans des observations peu approfondies, cru^ voir eptre les anijnaux des Teîlines. et des Do- naces une ressemblance si parfaite qu’il proposa de les joindre en un seul genre qu’il nomma Peronea. Sans contrôler les observations de Poli par d’autres faits mieux observés , tous les naturalistes conservèrent dans leurs méthodes le genre Donace: mais tous aussi, convaincus de son analogie avec les Telünos, .le-comprirent dans la même famille , et ç’est en cela que depuis plus de trente ans la méthode s’est trouvée invariablement fixée. Cependant des changements sont devenus néces- saires.; ranimai, des Donaces , étudié avec plus de soin , nous a offert des différences considérables, non seulement avec celui des Teîlines mais aussi avec tous ceux des autres genres qui nous sont actuellement connus. Dès lors nous avons senti la nécessité d’établir pour ce genre une famille distincte, à laquelle nous avons conservé le nom de Dona^ cideg, emprunté k M. Fleming.

La famille des Donacides de M. Fleming n’est point semblable la nôtre , elle correspondrait plutôt en partie à notre famille dés Telli- nides , cér à côté des Donaces elle contient les genres Capse et Tolline , c’est-à-dire deux genres, qui n'ohl qu’une analogie éloignée avec celui des Donaces.

Ne conpaissant qu’un seul genre qui puisse entrer dans la famille des Donacides , le? eewtères de famille ee trouveni dw empruntés

LES. DONACIDES,

4'^9

à ce genre unique, et par. ils deviennent communs à l'un e|.à l’autre groupe. Il serait possible cependant que d’autres genres vinssent plus tard se joindre à celui des Donaeçs, et dès lors, il n'est pas inutile d’insister sur les caractères généraux de la famille.

, L^animal est transverse, généralement fort aplati; il est attaché à sa coquille par deux muscles adducteurs, d’une médiocre grandeur, et situés l'un et l'autre vers la région dorsale supérieure. Un manteau mince et transparent à lobes égaux, bordé d'un muscle orbiculaire, tombe de chaque côté du corps et revêt l’intérieur de la coquille. Les bords de ce manteau sont garnis sur presque toute la circonférence d’une rangée de tentacules, qui, dans le genre Donace, sont tronqués et dilatés au sommet; mais d’autres, Mollusques pourraient appar- tenir à la même famille sans être , pour cela , munis de tentacules semblables à ceux du genre que nous venons de citer. Les lobes du manteau sont ouverts depuis le bord inférieur du muscle adducteur antérieur des valves jusque près de rextrémi|é postérieure du bord ventral. La commissure postérieure est consolidée par deux petits mus- cles , croisés en X.

Chez les Donaces , les siphons ressemblent beaucoup h ceux des Mé- sodesmes , cependant avec quelques différences qu’il est nécessaire de noter. Ces organes sont inégaux, mais contrairement à ce que, nous avons vu chez les autres Mollusques , c’est le siphon branchial qui est le plus court et son ouverture est garnie de tentacules branchus, sembla- bles à ceux des Mésodesmes. Le siphon anal est complètement isolé de son congénère; il est pliis allongé et un peu plus grêle.

Le pied est allongé, comprimé, pointu, tranchant sur ses bords; par sa base , il se continue avec pne masse abdominale très aplatie, à l’extrémité antérieure et supérieure de laquelle se trouve une bouche étroite, transverse, accompagnée de cliaque côté d’une paire de palpes labiales triangulaires, petites, étroites, adhérentes par le plus petit côté du triangle ; mais , du reste , libres et flottantes dans la cavité du manteau. Ces palpes labiales , comparées à celles desTelIines, sont proportionnellement de moitié moins grandes , et nous les avons trouvées dans de semblables proportions dans toutes les espèces de Donaces que nous avons eu occasion d’observer. Mais le caractère le plus important, celui sur lequel nous insislprons davantage, est fourni par les organes de la respiration ; car, par leur ensemble , ils rappel- lent ceux des Mésodesmes. et ils n’ont rien de ceujc des Tellines. Les feuillets branchiaux sont très inégaux , ils ne sont j>oint l'un à côté de l'autre, mais Tun au-dessus de l’autre; l'extrémité antérieure du

4 4 0 T H E iZ 1 È M E FA M I IJ .

feuillet interne so prolonge entre les palpes labiales, et ce feuillet se [)rolonge jusqu'au-devant de l’ouverture interne du siphon anal. Le feuillet externe est de moitié plus court; il ressemble à celui des Psam- mobies; mais son bord externe se prolonge davantage, à peu près comme dans les Mésodesmes. Tels sont les caractères extérieurs que présente l’animal qui sert de type à la famille des Donacides. Nous verrons, en traitant du genre, que d'autres caractères intérieurs s’ajou- tent à ceux que nous venons d’exposer, et confirment la séparation dés Donaces en une famille distincte.

Les coquilles ont un caractère particulier, elles sont beaucoup mieux fermées que celles de tous les genres qui précèdent; par elles avoi- sinent celles du type des Vénus ; elles s’en rapprochent également par leur épaisseur, par le brillant de leur surface externe, ainsi que par l'épiderme subcorné qui s’étend sur leur bord. Ces coquilles ont le (ôté postérieur court et tronqué; les valves sont jointes par un ligament court, peu épais, et qui est loin d’offrir la solidité de celles des Psam- inobies, par exemple, et même des Tellines. La charnière est variable; le plus souvent elle est munie de deux deaU cardinales sur chaque valve; mais ces dents sont courtes, ordinairement simples et assez épaisses, La charnière porte aussi, dans un grand nomLre d’espèces , des dents latérales ; mais ces dents ne sont point constantes ; on lés voit disparaître insensiblement, et Lamarck avait prcîposé d'appliquer le nom de Capseà ces espèces de Donaces, dépourvues de dents latérales. Pour juger définitivement de la valeur de ce genre Capse de Lamarck , il faudrait connaître l’animal de l'espèce type ; mais la science ne pos- sède aucun renseignement à son sujet.

Les animaux appartenant à la famille des Donacides habitent les rivages de. presque toutes les mers ; ils vivent dans le sable , s’y enfon- cent perpendiculairement , la bouche en bas, de manière à pouvoir aspirer l’eau au moyen de leurs siphons , qui font saillie à la surface du sol

GENRE QUARANTE ET UNIÈME.

SOXACE. Donajc. bin.

PI. 14. f. 9, à i5; pl. i5. f. 1 à 3.

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal tiigone , aplati, trans- verse 5 les lobes du manteau garnis de tentacules tronqués et dilatés au sommet, réunis à rextrémité postérieure; siphons

LES DOiNAClDES.

44^

médiocres , grêles , inégaux , désunis dans toute leur longueur ; siphon branchial , plus gros- et de moitié plus court que Tanal , ayant son ouverture garnie de tentacules branchus et symétri- ques ; siphon anal terminé par une ouverture étroite surmontée d’un petit nombre de tentacules simples. Pied très mince et triangulaire; bouche petite ; palpes labiales étroites, triangu- laires ; branchies inégales ^ larges , l’interne se terminant en avant en une pointe qui s'interpose entre les palpes labiales ; l’externe, étroite de moitié plus courte, est subtransverse.

Coquille transverse >- trigone , équivalve , inéquilatérale , le côté postérieur court et tronque. Charnière étroite , ayant deux délits cardinales sur chaque valve, soit sur une seule v une ou deux dents latérales, quelquefois avortées. Ligament extérieur court ; impression palléale ayant une sinupsitc postérieure peu profonde, semi-ovalaire et horizontale.

sa'künymik générique. Tellina, Aldrovande, Lister, Adanson , Gualtieri , d’Argenville. Cuneus^ Da Costa, Humphrey. Peronea {pars). Poli. Laiona , hecuba,, Schumacher. Capsa,^ Lamarck, 1818 non 1801 nec , Brug. Donax , Linné , Bruguière , Lamarck , Cuvier, Blaiuville , Defrance , Oken , Reeve , Menke , Swainson , Deshayes, Quoy, etc.

Nous trouvons le genre Donax inscrit pour la première fois dans la 1 0* édition du Sijstema naluræ; il est institué pour réunir des coquilles dispersées par les anciens naturalistes Belon, Rondelet, Aldrovande, et môme Lister, parmi les Tellines, les Cames, les Vénus, etc. La création du, genre par Linné date de 1 758 . mais cette fois il fut devancé par un illustre savant français qui, dès l’année précédente, avait jeté les bases de la classiGcation naturelle des animaux et des plantes , et qui a laissé dans son Voyage au Sénégal un monument remarquable de son génie pour l'observation et surtout pour la classification. Dans cet ouvrage célèbre , Adanson , plus heureux que Linné , non seulement le devance dans la création du genre , mais encore le caractérise plus complètement d’après la coquille et d’après l’animal dont il donne la figure.

44* TREIZIÈME FAMILLE.

En ïîarRctérisant son nouveau genre, Adansonne crut pas nécessaire de lui imposer un nom nouveau ; l'étude attentive, qu'il avait faite de nos premiers naturalistes , lui avait donné la preuve que le plus grand nombre des espèces deDonaces , connues d'eux, étaient comprises dans leurs Tellines , et dès lors voulant transmettre la tradition de ses pré- décesseurs , il appliqua le nom de Telline à un groupe d’espèces dont les caractères furent définis rigoureusement, et ces caractères coïnci- dent comme nous venons de voir, avec ceux des Donaces de Linné.

Pour être équitables et pour appliquer rigoureusement les lois de la nomenclature , les naturalistes auraient adopter l’opinion d'Adanson , et, malgré l'autorité de Linné, restituer aux Donaces le nom de Tel- lines. Si ce changement ne s’est pas opéré , il faut l’attribuer à ce respect si naturel , nous dirons même à l’enthousiasme que produisirent les ou- vrages de Linné ; on voulut conserver la méthode de ce grand homme dans toute son intégrité, et c’est ainsique des travaux du plus grand mérite furent longtemps mis en oubli ou négligés , et nous voyons Linné lui-même dédaigner d’y aller puiser les plus utiles renseignements. Adanson a figuré l’animal d’une Donace , on a pu croire que Linné , au moment de publier la 1 0' édition du Systema naturœ , n'avaît pas eu connaissance du travail d'Adanson ; mais dans les ouvrages qui suivi- rent, tels que le Musœum Ulrice et dans la édition du Systema naturœ , Linné ne change rien à ce caractère banal , qu’il met à la tête de tous les genres des Mollusques bivalves , animal ïhétis. Assuré- ment Linné, en répétant ces mots, pour tous les genres, leur donnait non plus une valeur générique , mais une valeur d’ordre et de famille , et il eût comprendre que pour caractériser des genres d'une moindre étendue , il aurait fallu en chercher les moyens dans les particularités des animaux en rapport avec les caractères de leur coquille. L’on doit être surpris que, trouvant dans l’ouvrage d’Adanson les moyens d’amé- liorer l’ensemble de sa méthode , Linné ne les ait pas saisis avec empres- sement ; il faut attribuer à cette négligence le peu d’importance que l’on attacha par la suite, à l’observation des animaux Mollusques.

Tel qu’il est caractérisé par Adanson et par Linné , le genre Donace est très naturel En prenant l’une après Tautre toutes les espèces inscrites par ces auteurs , on n’en trouve qu’une seule ( Donax irus ) qui ne puisse rester dans le genre Aussi le genre Donace a été généralement adopté sans changement par presque tous les conchyHoIogues ; nous en excep- terons cependant Da Costa. Ce naturaliste, dans sa conchyliologie de la Grande-Bretagne , a rangé le petit nombre d’espèces des mers d’Europe dans tin genre Cumm , dans hjquel il confond plusieurs Vénus, une

LES DDNACIDES.

443

Vénérupe avec les véritables Donaces. Reproduit plus tard par Hum- phrey, dans le Muséum coîonianum , ce genre Cuneus a été repris plus récemment par M. Megerle de Mühlfeld, mais en y introduisant d'au- tres caractères . de manière à former sous ce nom, déjà ancien et sans valeur, un genre démembre des Donaces, et dont nous aurons à parler plus tard.

Poli, comme nous l’avons vu , confondait les Donaces avec les Tel- lines, et il a proposé pourxes deux genres réunis le nom nouveau de Pero7ïea,

M. Schumapher, en 1 817-, ayant voulu démembrer le genre naturel des Donaces , en détacha les genres Iphigenia, Latona et Meroê\ Nous verrons bientôt le peu d'utilité de ces démembrements , lorsque nous étudierons dans leur ensemble les caractères du genre. Nous verrons aussi pourquoi il est nécessaire de rqjeler en même temps les Capses Laniarck , fondées sur des caractères d'une très faible importance. Adanson , Linné et tous leurs successeurs , ont caractérisé les Donaces , non seulement par la forme générale , mais encore par une charnière portant des dents latérales. Toutes les espèces de Linné offrent ce ca- ractère des dents latérales; mais ’à mesure que le nombre d’espèces s’accrut dans les collections , on s’aperçut que les dents latérales étaient variables, à peu près comme dans les Tellines, et Lamarck , voulaiit séparer toutes les espèces qui ont des denté latérales de celles qui n’en ont point , proposa le genre Capse pour ces dernières , se laissant guider par des motifs semblables à ceux qui lui avaient iail distinguer les Telli- nides dès Tellines. Comme nous le disions au sujet des Tellines , si les dents latérales de la charnière disparaissaient brusquement, et si cette disparition entraînait en même temps quelques légères modîQcations dans les autres caractères génériques , il faudrait assurément conserver les genres proposés par Lamarck; mais l’observation prouve qu’il n’en est pas ainsi. Dans les Donaces , aussi bien que chez les Tellines , les dents latérales disparaissent insensiblement , et cependant tous les autres caractères demeurent invariables ; il ne faut donc pas attribuer aux par- ties de la charnière , dont nous parlons , plus de valeur qu’elles ne mé- ritent. C’est en appliquant , avec plus de rigueur encore les principes de Lamarck, que M. Schumacher en est venu à multiplier les genres bien au-delà des besoins; et en agissant ainsi , loin de porter la clarté dans la méthode, il y jette de l'incertitude, par rimpossiWlité l’on est de placer dans un de ses trois genres, les espèces à' caractères ambigus et qui servent de transition entre eux.

Nous devons examiner maintenant comment les divers naturalistes

4 1 4 TREIZIEME FAMILLE .

ont compris les rapports des Donaces avec les autres genres inscrits dans la méthode. Linné n'atlrihuait pas une grande valeur à la position du ligament; qu’il fût , à l’intérieur ou à l’extérieur, cela ne Tompêchait pas de rapprocher les coquilles d’après d’autres caractères , tels que ceux des dents latérales, par exemple. C'est ainsi qu’à la suite des Tellines, il range les Cardium, puis les Mactrcs, etenhn les Donaces , qui sont suivies des Vénus. Cet arrangement est invariablement adopté par tous les élèves et tous les successeurs de Linné , jusqu’au moment Lamarck , introduisant de nouveaux éléments dans la classiQcation des coquilles, proposa une méthode nouvelle dans le premier volume des Mémoires de la Société à’ histoire naturelle de Paris. Dans cette première ébauche , Lamarck conserve les Donaces dans le voisinage des Vénus, et des Cythérées ; les Madrés , les Lulraires , lesCrassatelles , viennent ensuite. Dans une méthode, dans laquelle les familles ne sont pas encore créées, ces genres se suivent sur une seule ligne; il est impossible d’établir entre eux des rapports naturels. Deux années plus tard, La- maick perfectionna sa classification, il y ajouta un assez grand nombre do genres , et les Donaces sont séparées des Madrés par les Pélricoles.

Cuvier avait d’abord oublié le genre Donace dans son Tableau élé- mentaire de l’histoire naturelle des animaux; il répara cette omission dans le tableau de classification qui accompagne le premier volume de l’anatomie comparée. Dans cet ouvrage, publié en 1800, ce savant zoologiste jette le fondement d'une classification naturelle , établie , non d’après les seuls caractères de la coquille , mais en y ajoutant ceux des animaux, ce qu’aucun zoologiste n’avait tenté jusqu’alors d*une manière aussi générale. Dans ce tableau , des groupes très étendus sont tracés ; on pourrait les considérer comme des familles , s’ils ne réunissaient sou- vent un trop grand nombre de genres , agglomérés au moyen de carac- tères trop générau.x. C’est ainsi , par exemple , que tous les Acéphales , dont le manteau est terminé en arrière par des siphons, sont rassem- blés en un seul groupe, dans lequel on compte six genres seulement, soüs-divisés en seize sous-genres. Le genre Donace est compris parmi les six premiers ; on le trouve entre les Vénus et les Cames , et dans la série des sous-genres entre les Capses et les Cardites. Comme nous le verrons , ce n’est pas que le genre Donace devrait se trouver ; il est incontestable qu’il ne peut s’éloigner des Vénus , mais il n’est pas moins incontestable qu’il est très différent des Cardites , puisque dans ce dernier genre les siphons manquent entièrement.

Dans plus d’une occasion , nous avons fait remarquer la sagacité avec laquelle M. de Roissy a établi la classification des Mollusques dans les

Ï.ES DONAClDES. 44^

deux derniers volumes de Thistoire des Mollusques , qui fait suite au Buflbn de Sonnini. Doué des plus précieuses qualités de l’observateur, il devançait quelquefois l'époque il écrivait par la nouveauté et la jus- tesse de ses aperçus. Pour ce qui concerne le genre Donace, M. de Roissy fut moins heureux que dans d’autres circonstances. Se laissant entraîner par l’opinion de Cuvier, il l’éloigna trop des Vénus, pour le rapprocher des Cardites , des Madrés et des Tellines.

Lamarck fut plus habile dans la classiGcatîon qu’il proposa dans le premier volume de la Philosophie zoologique. Les Mollusques , partagés en familles peu étendues , sont daiis des rapports beaucoup plus naturels que dans les élassifîcations précédentes. La famille des Conques est l’une des plus considérables des Mollusques acéphales ; elle contient neuf genres , parmi lesquels se trouvent les Donaces , placés entre les Cy- thérées et les Tellines. Cette famille n'est point naturellê ; le genre Vénéricarde la commence ; ce genre , comme nous aurons occasion de le prouver bientôt , ne se distinguant pas des Cardites , doit être con- fondu et reporté dans une autre famille , celle des Cardites. Les Tellines , les Lucines, appartiennent aussi à des types très distincts , et quoique les Capses aient été séparées des Donaces sur des caractères insuffi- sants, néanmoins Lamarck classe ce genre a la fin delà famille, l’écar- tant des Donaces par quatre genres très différents. Mais Lamarck lui- même a senti rimperfection de ce premier essai d’une classification par famille , et si dans l’extrait du cours il l’a conservé sans changements considérables, il l’a profondément modifié dans son dernier ouvrage, V Histoire des animaux sans vertèbres. En effet, Lamarck sépare la famille des Nympbacées de celle des Conques ; tandis qu'il réduit cette dernière à sept genres, il accroît jusqu’à dix le nombre de ceux des Nympbacées. Il divise cette famille en Nymphacées solenaires et en Nymphaeées tellinaires , et ces dernières sont partagées elles-mêmes en deux groupes, selon que la charnière porte des dents latérales ou en man- que. Les Donaces , ayant des dents latérales , sont comprises dans les Nymphacées tellinaires du premier groupe, tandis que les Capses com- mencent le groupe suivant. Ainsi, Lamarck répare judicieusement les défauts de sa première classiQcalion , et tout en conservant les Donaces dans le voisinage des Tellines, il les rapprociie le plus qu’il peut du type des Vénus; en cela notre célèbre naturaliste donne une preuve de plus de sa profonde sagacité.

Plus attaché aux idées de Linné, Cuvier, dans la première édition du Règne animal , institue une famille des Cardiacées , dans laquelle il rassemble tous ceux des Mollusques acéphales qui ont deux ouvertures

44(> TREIZIÈME FAMILLE.

postérieures au manteau , plus ou moins prolongées en arrière par des siphons complètement séparés l’un de l’autre. Cette famille commence par les Cames, se termine par les Mactres, réunissant dix grands .genres, assez comparables par leur étendue à ceux de Linné. Les Do- naces se trouvent entre les Bucardes et les Cÿclades , trop éloignées des genres avec lesquels elles ont le plus d’analogie.

Lamarck a conservé au genre Donacé l’étendue que lui avait donnée Linné ; nous pensons (pie pour rendre le genre plus naturel , il faut y adjoindre les coquilles avec lesquelles le genre Capse à été constitué. Malgré la diversité de leurs formes extérieures , on remarque, dans cet ensemble d’espèces, un certain nombre de caractères communs au moyen desquels elles constituent un genre véritablement naturel. L’un des caractères extérieurs prédominants des Doriàces consiste en leur forme triangulaire , ainsi que dans la brièveté du côté postérieur. Ce- pendant cette forme n’est pas absolument constante : il y a des espèces subéquilatérales , comprimées , telles que le Do7iax ^feroëûe Lamarck ; d’autres également subéquilatérales, sont plus bombées et se distin- guent par une cliarnière pins simple , ce sont les Capses. Kous exami- nerons successivement les caractères de ces trois groupes , nous les comparerons et nous nous assurerons par s’ils appartiennent à un seul et mémo genre.

Les espèces du premier groupe sont ovales , transverses , triangu- laires, très inéquilatérales ; le côté postérieur, qui est le plus court, est tronqué , souvent aplati et presque toujours diversement orné selon les espèces. Dans le second groupe les coquilles sont plus ovalaires, moins inéquilatérales ; l.e côté postérieur,, plus oblique, porte un corselet pro- fondément creusé; enfin, les coquilles du troisième groupe, en conser- vant une forme triangulaire, dèviennent plus transverses, plus équila- térales, et le çôtè postérieur eèt moins tronqué que dans les espèces des deux groupes précédents. Si l’on s'arrête à ces formes extérieures, on les voit se nuancer et passer des unes aux autres par un grand nombre d’intermédiaires ; mais pour apercevoir celte transition, il faut rassem- bler le plus grand nombre possible d^espèces et c’est alors qu’elle se manifeste le plus évidemment. Nous devons ajouter, néanmoins, que le groupe qui a pour type le Donax Meroë , s’isole davantage des deux autres, et il faut recourir a la charnière pour retrouver en lui quelques uns de ces caractères des Donaces.

La plupart des espèces des Donaces sont lisses à l'extérieur; un cer- tain nombre sont striées longitudinalement, et quelques unes seulement ont des stries transverses. Les couleurs sont variables ; cependant il est

T.KS DONACIDES.

à remarquer que, dans rènsemble du gehre, c’est la couleur violette qui domine, surtout à l’intérieur des valves. Toutes les Donaces sont re- vêtues d'un épiderme plus ou moins épais, plus ou moins apparent; cet épiderme est subcorné, semblable à une couche de vernis assez également répandu sur la surface. Cet épiderme dépasse à peiné le bord des valves.

Lorsque les valves sont rapprochées , elles sont exactement fermées sur toute la circonférencé; Il existe , cependant , quelques espèces chez lesquelles trouve un léger écartement à l'extrémité postérieure delà coquille. Les Donaces sont des coquilles dont le test est assez épais, plus solide que celui des Tellines: elles sont aplaties , cunéiformes , et l’on pourrait les partager en deux séries. Dans les unes, en effet, les bords sont simples ; dans les autres , les bords sont finement dentelés. Le côté antérieur est variable dans sa forme ; arrondi dans un certain nombre d’espèces , il est plus aigu dans un certain nombre d’autres ; il est toujours plus obtus que le coté postérieur. Le côté postérieur est court, tronqué; quelquefois aplati et circonscrit, soit par un angle, soit par des stries ou d'autres ornements qui lui sent propres. Les crochets sont généralement petits, rapprocliéà, opposés ou à peine inclinés. Le corselet est grand : dans les espèces tronquées, il en occupe tout le côté postérieur; dans celles du deuxième groupe, il est profondément creusé; il est étroit èt semblable à une lunule ; il est à peine indiqué dans les espèces du troisième groupe. En haut du corselet , et immédiatement au dessous des crochets, se montre un ligament externe très court et peu épais. Ce ligament, peu puissant, paraît disproportionné à la grandeur des coquilles ; mais, en compensation de sa petitesse, il jouit d’une grande ténacité et de beaucoup d'élasticité. Des nymphes assez épaisses, médiocrement saillantes, reçoivent le ligament et lui fournissent une adhérence solide. Chez les espèces du troisième groupe, les ÇapSes de Lamarck, le ligament est en proportion un peu plus long et un peu plus épais que dans les Donaces proprement dites.

Lamarck avait pris côté postérieur des Donaces pour leur côté an- térieur; aussi il disait que dans ce genre le ligament est contenu dans la lunule'; mais îl est facile de rectifier cette erreur, en considérant la direc-lion do la sinuosité palléale, qui indique la position des siphons et qui sert à distinguer facilement le côté antérieur du postérieur. Dans le genre qui nous occupe , il y a peu d'espèces l’on ne puisse recon- naître facilement une véritable luhule. La lunule, comme on le sait, est située en avant des crochets; et elle occupe une portion plus ou moins étendue du côté antérieur. Lorsqu'elle existe dans les Donaces, elle éSt

TBEIZIÈME FaMIU.E.

Miroite, lancéolée et plus ou moins bien circonscrite, selon les espèces.

La surface interne est toujours lisse ; elle est ornée de couleurs di- verses , mais le plus ordinairement rougeâtres ou violettes. Sur cette surface interne des valves, on trouve deux impressions musculaires principales, qui se rattachent Tune à Tautre au moyen de l’impression palléale, creusée en arrière, d'une sinuosité peu profonde.

Les impressions musculaires sont d’une médiocre étendue ; elles sont écartées, très voisines du bord l’antérieure est ovalaire, située oblique- ment le long du bord antérieur et supérieur; l'impression postérieure est subcirculaire; elle est située entre la charnière et l’extrémité du bord postérieur; elle semble quelquefois se prolonger en un angle- supérieur, mais cet angle est produit par l’impression du muscle ré- tracteur postérieur du pied.

L'impression palléale part de l'extrémité inférieure de l’impression musculaire antérieure ; si l’impression palléale se continuait à travers ce muscle, elle le partagerait en deux moitiés égales dans sa plus grande longueur. L'impression palléale descend le long du bord ventral , en prenant une position oblique, de manière que l’espace qu’elle laisse est plus large en avant qu'en arrière, ainsi que cda a lieu dans les Mé- sodesmes, par exemple, et nous ferons remarquer que les caractères que nous venons d’indiquer dans l'intérieur des valves se montrent dans les espèces des trois groupes et peuvent, déjà servir à les rattacher les uns aux autres. Parvenue vers l'extrémité postérieure des valyes, l'impres- sion palléale se rapproche des bords de la coquille, et elle vient se ter- miner en un élargissement peu étendu , produit par l’insertion des petits muscles du manteau , servant à consolider la commissure posté- rieure et croisés en X. A partir de ce point, l’impression palléale, rentrant sur elle-même, circonscrit une sinuosité d’une médiocre pro- fondeur, qui ne dépasse jamais une ligne perpendiculaire, qui tomberait delà charnière au milieu du bord ventral. Cette sinuosité mérite une attention particulière ; car elle est constante dans les espèces des trois groupes principaux. Au moment l’impression se renverse en dedans, une petite portion se confond avec la ligne ventrale; après un court trajet fait en commun, elle s’en détache en formant un angle très aigu ; elle se recourbe dans le limbe des valves, se dirige de nouveau d'avant en arrière , et vient aboutir à l’impression musculaire postérieure , comme si elle voulait la traverser dans son diamètre antéro-postérieur. Nous avons vu dans d’autres genres l'impression palléale gagner la circonférence de l’impression musculaire, comme la tangente d'un cercle. C’est ce qui a lieu aussi pour un très petit nombre de Donaces,

LES DONàCIDES.

et il est à remarquer que dans ces espèces, la sinuosité, au lieu d’avoir les bords parallèles, comme dans les premières, est légèrement dilatée, tout en conservant cependant la position horizontale , particulière à toutes les espèces du genre. Les espèces du groupe ayant pour type lo Donax Méroë ont ta sinuosité palléale ditîérente; elle se détache entiè- rement du bord ventral ; elle est en proportion plus petite , et son axe n’est plus horizontal mais incliné de bas en haut et d’arrière en avant.

La charnière des Donacesest variable; elle est généralement courte, supportée par un bord cardinal d’une médiocre largeur, bornée à Pangle supérieur de la coquille. Sur la valve gauche s’élèvent deux dents car- dinales divergentes, courtes et obtuses; sur la valve droite, il y a une seule dent médiane, assez épaisse, circonscrite de chaque côté par une fossette, destinée à recevoir les dents de la valve opposée ; de chaque côté de celle charnière se montre, en avant et en arrière, une dent la- térale, ordinairement étroite , allongée, quelquefois plus courte' et plus épaisse, surtout celle du côté postérieur. La charnière que -nous venons de décrire appartient au type des Donaces, tel quo M. Schumacher a proposé de le restreindre. Deux dents cardinales sur une valve, une sur l’autre, deux dents latérales, tels seraient, d'après cet auteur, les ca- ractères du genre Donace. Mais si Ton examine un grand nombre d’es- pèces, on voit la dent latérale antérieure diminuer peu à peu et ühir par disparaître complètement , sans qu'on puisse remarquer la moindre al- tération dans les autres caractères génériques. Le môme phénomène a lieu pour la dent latérale postérieure, très grosse dans le Donax scoc~ tum, par exemple; elle est déjà très réduite dans le Donax trxmcuîus^ et n’est plus que sous la forme d'un simple rudiment dans le Dona.T rôt- gens. Nous connaissons une série d’espèces triangulaires et subtronquées postérieurement, chez lesquelles les dents latérales n’existent pas et dont les animaux sont cependant tout à fait semblables à ceux des autres Donaces. Le genre Capse de Lamarck se rattache à cette série d'espèces, et cependant, dans la plupart d’entre elles, la valve droite présente encore un rudiment des dents latérales. Dans le Donax Méroë et les autres espèces voisines , il y a deux dents cardinales à chaque valve, une dent latérale antérieure, et jamais de dent Uitérale postérieure. Il serait donc possible de les détacher des Donàces et de conserver genre ' Méroë, proposé par Schumacher; mais avant de radmetlre, il faudrait en connaître les animaux. Par les impressions qu’ils laissent dans leurs coquilles, on pourait préjuger qu’ils sont, si ce n’est identiques, du moins voisins de ceux des autres Donaces, et peut-être plus rapprochés T. ! 3* PARTIE. 29*

45 O TREUIÈME FAMILLE.

des Cylhérées. Dans tous les cas , si le groupe des Capses doit reulrer dans les Donaces, celui des Méroe devra en sortir.

Sous le nom de Donax irregularis^ M. Basterot a fait connaître une coquille très singulière, pour laquelle M. Desmoulins a proposé le genre Grateloupia. Nous avions pensé d’abord à rapprocher cette coquille des Donaces, mais un nouvel examen nous fait partager Topinion de M. Gray, qui transporte les Graleloupies dans le groupe des Cylhérées. C'est en, traitant de la famille des Vénus que nous aurons a nous en occuper.

Toutes les Donaces sont des coquilles essentiellement marines, vivant loin des eaux douces, sur les plages basses et sableuses ; elles se propgb gent en très grande abondance. Vivant de la môme manière que les Mésodesmes, elles creusent le sablo avec rapidité et s’y enfoncent per- pendiculairement. Pour se mouvoir, elles emploient les mêmes mouve- ments que les autres Mollusques, qui, habitués à vivre dans le sable, s'y creusent une demeure au moyen de leur pied. Ce sont, en général, des coquilles d'une taille médiocre, dont la forme, aplatie en coins, est très propre à favoriser les mouvements de l’animal dans les lieux qu’il habite.

Le nombre des espèces fossiles est peu considérable, car il faut déh-; uitivemeut rejeter du genre toutes ces Douacites dos paléontologistes; elles se distribuent aujourd’hui dans des genres très dilVérents dos vé- ritables Donaces. Les unes, de Brongniart et de plusieurs' autres géo- logues, sont des Pholadomyes; les autres, de MM. Schlotheini, Hermann, Zenker, etc., sont des Trigonies; enün, à l'exception d'une seule, con- statée dans le Lias par MM. Dunker et Meyer, toutes les espèces men- tionnées dans les terrains inférieurs aux terrains tertiaires doivent être déBnitivement ri^etées du genre Donax.

Le Donax securiformiSy de M. Dunker, présente tous les caractères d’une Donace^ il est tronqué postérieurement , son côté antérieur est. étroit et cunéiforme, le ligament était petit , .ailaebé à des nymphes courtes., la charnière est celle des Donaces proprement dites, car cll^ porte des dents latérales. Les impressions musculaires sont celles des Donaces, mais malheureusement les figures ne représentent pas i’im- pressiou palléale. Voilà donc une espèce, de Donace dans la formation basique, et depuis son apparition dans les couches inférieures du terrain jurassique le genre disparaît dans toute l’énorme série des, terrains ju-; rassiques et crétacés, ,pour apparaître de nouveau avec les terrains, tertiaires inférieurs , se propager en petit nombre dans les terrains moyens et supérieurs, et, enlin, prendre dans la nature actuelle un dé-; yeloppement qu'il n’avait jamais eu auparavant. Cependant M. Kc^emer

LES DONACIDES.

45i

admet deux espèces dans la craie de l’Allemagne, mais toutes deux nous paraissent douteuses, étpnt connues par un -moule mal. caractérisé. On cite aussi dans la craie du nord un Donax arenacea de Nilson, que fi- gure M. Hisinger dans son Lethœa suecica : c’est aussi un moule trian- gulaire ne montrant aucune des impressions qui pourraient.le caracté- riser; il dépendrait aussi bien du genre Maçtre.

Parmi les espèces admises dans les terrains tertiaires, il y en a- quel- ques unes qui doivent sortir du genre ; le Domx obliqua de Lamarck, ayant l’impression du mapteau simple, doit passer dans le genre Astarte. Le Donax tellinella^ du même auteur, après nouvel examen, est incontes- tablement une Telline. Elle prendra place dans ce genre, mais son nom devra être changé. Lg Donax irregularis de Basterot devient le type du genre Grateîoupia , que nous retrouverons dans le voisinage des Cytliérées ; le DonaX difficilis du même. auteur est une Cythérée. Quant au Donax sulcala deBrocchi . c’est _unq véritable pétricole.

Dans ses fossiles tertiaires de la Belgique, M. Nyst inscrit quatre es- pèces de Donaces; deux d'entre elles, Strialêlla et Fj'afjiîis nous sem- blent plutôt des Tellines que des Donaces, à en juger par les figures; la Striatelîa surtout a l’impréssion palléale des Tellines ; quant au Fra- gilisa il y avait déjà une autre espèce nommée de la même manière par Conrad.

Après avoir subi les réformes que nous venons d’indiquer, il reste encore vingt-deox espèces fossiles- de Donaces , on renfermant dans ce nombre celles qui ont leur analogue vivant; cea espèces se distribuent de la manière suivante :

Cfnq dans le terrain tertiaire de Paris, les unes passant des sables in- férieurs jusque dans les calcaires grossiers; les autres propres aux grès moyens; le Donax nîtid<i existe à la fois dans le bassin de Paris et dans eeUti de la Belgique.

Les terrains tertiaires moyens comptent sept espèces ; trois à Bor- deaux, une en Touraine et trois des terrains du midi de la Russie, et que nous empruntons à M. Eichwald. L’une des espèces do Bordeaux était confondue, à titrer de variété, avec le Donax analinum , elle s’en distingue aussi bien que de la Venusla de Poli, avec laquelle elle a égale- ment des rapports. Dans nos tableaux comparatifs, qui font partie de la première édition de la Géologie de M. Lyell, nous avons cité parmi les espèces fossiles de Bordeaux, qui ont leur analogue vivant, le Donax clongata , qui vit au Sénégal ; de nouvelles recherches nous ont fait apercevoir quelques légères différences entre les individus vivants et fossiles; fangle postérieur est plus émoussé dans les fossiles, mais le 29*

.

TREl/JEMK FAMILLE.

45*2

caractère distinctif, qui nous avait échappé, consiste en une sinuosité paüéale, plus détachée et plus oblique dans les fossiles. 11 devient donc nécessaire d’instituer l’espèce fossile sous un nom particulier, et nous proïX)sons celui de Dmtax affinis.

Quatre espèces se répartissent dans le Crag, trois eh Angleterre, une en Belgique. Parmi ces espèces Tune d’elles a son analogue vivant , c'est le Donax tnmcuhis.

Nous connaissons quatre espèces en Italie et en Sicile; une seule, le Donax exilis, Defr,, n’a pas son analogue vivant; les trois autres sont:

Donax variegata^ Desli. D. complanata^ de Montagu. Vivante dans toutes les mers d’Europe et dans toute la Méditerranée.

Fossile en Sicile et en Italie. >

Nous avons rendre k cette espèce son premier nom; elle a été nommée TelUna vcuiegala parSchrœter et parGmelin, longtemps avant qu’elle fût connue de Montagu. En la faisant passer dans le genre auquel elle appartient, elle doit emporter avec elle le premier nom spécifique qu’elle a reçti .

Do7iax seinislriata, Poli. Vivante dans la Manche et dans la Méditerranée.

Fossile en Sicile. ^

3" Donax venusta^ Poli. Vivante dans la Méditerranée.

Fossile on Sicile.

A ces diverses espèces fossiles, nous devons en ajouter deux de VAmérique septentrionale mentionnées par Conrad et par Morton, mais que nous ne connaissons pas.

En réunissant, comme nous l’avons dit , les Capses do Lamarck aux Donaces, on compte dans le genre plus de soixante espèces vivantes; on les trouve clans tontes les mers et à presque toutes les latitudes; leur nombre est plus considérable dans les mers chaudes. Nous n’en connaissons plus au-delà du cercle polaire arctique. En réunissant aux espèces vivantes les fossiles , on compte actuellement quatre-vingt-cinq à quatre-vingt-dix espèces dans le. genre ponax,

LES DONACIDES.

453

1, Donace bec-de-flûte. .çco?Vï/în , Linné., , .

PI. ]4. f. 12. 13. 14. 15.

/>, testa ovato-trxgonu , transvenà , tumidâ posticè oblique truncatâ , acutè angulatâ, in medio posticèque transversim sulcacâ; stnis temii’> bas longitudinalibtis decussatâ; latere antico ohtuso lamellis distan- tibus et striis longitudinalibus clathrato ; latere postico cordiformi , piano 'vel excavato ^ lœvi^ angiilo suhmutico 'vel squamulis arnato circumdato ; lùnulà magna ovato-îanceolatâ; intus violaceâ extàs albogriseâ; apicibus violaceis.

LÎDné, SysL nat. éd. 10. p. 6S6. n"* io3.

Linné, Mus. TJlric. p. 493. .^8.

Linné, Syst. nat. éd. 12. p. ttad.

Lister, Concli. pl. 377. f. aao.

Peliver, Gazoph.pl. 19. f. II.

D'Argenv. Concli. pl. ai. f. L.

Grouov, Zoopli. facc, 3. p. 3/17. t i3a,

Fav, Concli. pl. 47. f, F. 2, v Bora. Mus. pl. 4. f. 2.

Chemn. Couch. t. 6. p. 246. pl. aS. f. 242 à 247.

Encycl. Vers, pl, 260, f. 2.

Barbnt, Vermium. pl. 4. f. ir.

Sclirœt. FinU t. X p. 90.

Gmelin. p. 326a. z.

De Roissy, Buff. Moll. t. 6, p. 36 1. a,

Dilw. Cat. t. I. p. 148, n" I. ,

Lamk. An. s. vert. t. 5. p. .546. i.

Blainv, Malac. pl. 7 1 . f. 1 .

Sow. Généra of shells. L i .

Desh. Eucy. niéth. vert. t. 2. p. 95. n* i.

Wood, Ind. teslac, pl. 6. f. i.

Desh. dans Lamk. An., s. vert, a* éd. t. 6 p. 239. i.

Reeve. Conch. syst. 1. i. pl. 60. f. i.

Anton. Ver/., of Conch. p. 3, 114.

Küsler, Mart. et Chemn. 2* éd. Donax. p. 5.rpl. i. f. i, 6.

Hanley, Descr. cat. p. 79.

Catlow, Conch. nomencl. p. 28.

Habite les mers de Tliide.

Très répandue dans les collections , cette espèce est connue de tous les conchyliologues ; elle est un des meilleurs exemples que l'on puisse

TUEÏZIÈME FAMILLE.

454

donner du genre ï>ohace, à cause de la qharnière qui en offre tous les caractères ; elle est beaucoup plus renflée que ses congénères ; ovale , trigono j.son côté postérieur, tronqué, présente une surface lisse , cor- diforme , aplàtio, circonscrite par un angle aigu, quelquefois simple, le plus souvent armé d’écailles obliques plus ou moins longues, selon les individus. Linné a fait une espèce distincte [ Donax pubescens) ^ouv la variétéj à écailles longqes ; les autres variétés rentrent dans le Donax scorlum; le coté antérieur est le plus allongé, il est obtus ; le. postérieur so termine en un angle inférieur et postérieur aigu , saillant , rétréci vers la base par une légère inflexion. Le corselet occupe toute la surface plane du côté postérieur j une lunule très longue lancéolée, toute lisse, est nettement circonscrite dans tonte . la longueur du bord dorsal anté- rieur. Les crochets sont grands, opposés, à peine inclinés. La surface externe peut se diviser en deux régions, l’une antérieure sur laquelle s’élèvent de courtes lamelles transverses, écartées, aiguës ; après avoir parcouru le tiers de la surface externéj ces lamelles se changerit subite- ment en côtes obtuses , entre chacunes desquelles s’interposent de une jusqu’à quatre côtes nouvelles, de sorte que la seconde région qui occupe le reste de la Surface jusqu’à l’angle 'postérieur est couverte de petites côtes serrées et régulières. Indépendamment de ces côtes et de ces lamelles transverses, toute la surface montre des stries longitudi- nales fines et rayonnantes qui descendent des crochets vers les bords. Sur la valve gauche, la charnière présente deux dents courtes inégales , divergentes , et deux grandes dents latérales triangulaires , également distantes ; sur la valve droite , il ÿ a une seule dent cardinale simple et deux fossettes profondes pour recevoir les dents latérales de la valve opposée. A l’intérieur, celte coquille est d’un beau violet , si ce n’est vers les bords qui restent blancs; à l’extérieur, elle est d’un gris violacé vers les bords; la lunule et le corselet sont violets ; les crochets sont aussi de cette couleur.

2. Donace tronquée. Donax irunculus , Linné.

PL 14. f. 9. 10. 11.

D. Testa transversim oblongà^ longiiudinaliter (Asoletè striatâ, nitidâ , jlavo-'oiolaced , mel albo-radiatâ , intiis 'violaced 'vel albâ ifiolaceo- macuîatâ; îatere postico brevi, oblique tnincato ^ *l(eviy simpîici ; marginibus dentatis; dentibus anticè hngioribiis; dente cardinali 'vaîvulœ dextrœ ^ crasso y brevi y bipaitito. ^

Tellina, Lister, An. aügl. pl. 5. f. 3 5,

LÈS Dt)NÀaO)E8.

455

BoHonni^ rocr. part;' 2. f. 40.

LisU»r, Conch. pl. 376. f. 317.

Cuallicri; liid. lest, pl, 88. P. O. '

Ginanni, Op, post. pl. 20. f; 141.

Borla'ie, Cornw. p. 278. pl, aStf, aS.

Donax truncuîus. Liuué, Faun.- siiçê; a* éd. p, 519. ri® a<4a. T. inné» Syst. nal. éd, 10. p. 682. 85,

Linné, Mus. ülric. p. 4941 ri* 5i .

Linné. Sysl. nal. éd. 12, p. 1127, Exd. plur, synon.

Millier, Zool. dan. prodri p, 246. 2974.

Cunens 'vittatus, Costa-, Coneh. brit. p. 207. pl, 14. f. 3. Donax truncnîus, Rorn. MUs. 54. pl. 4* f* 3, 4,

Gronov. Zooph. fasc. 3, p. 267. Ii35.

CUemn. Conch. t. 6. p. 359. pl. 26. f, 253, 254. *

Fav. Conch. pl. 49* f. E 2.

Schrot. £inl, t. 3. p. 94. 4.

Karst. Mus. I/esk. t. i; p. 160.

Olivi Adriat. p. 106,

Pennant, Brit, zool. t. 4. pi. 198.

Brug, Ency.'pl. 262. f. i,

Gmel. 3203. n" 4.

Poli, Test. Sicii, t. 2. p, 75. pl, 19. f. 12, 20, disses, Trav. of Napl. p. 483, 128,

Wood, Lin. Trans. t. 6. p, 145. pl. x6. f. ï3, 14. *

Donov. Brit. schells. t. i. pl. 29. f. x.- Montagu, XeSt* brit. p. xo3.n® z,

Dillw. Cat. t. X. p. x5o. 5.

Tartori. CoDch, die. p, 4x. x.

Laœk. An. s. vert. t. 5, p. S5i. 24.

Turtori. Couch. los. brit. p. 12$. x.

Blainv. Malac. pl. 7t. f. 2.

Gerv, Cat. des coq, delà Manche, p. 23. x.

Sowerby^ Généra of shells. Donax. f, 3.

Payraudeau, Cat. des Moll, de Corse, p. 45. 78,

Kissu, Hi^t. uat. de lEur. mériod. t, 4> p*

Crouch, lil, intr. Lamk. Conch. p. ii, pl. 6. f. 5.

Wood, ind, Teatac. pl, 6. f. 5,

Desh. Ency. méth. vers. t. 2. p. 97. 10.

Coll, des Cb. Cat. des test, du Finist. p. 21. a.

Desh. Exp. sc. Je Morée. zool. p. 93.. 35.

436

THEmElUE FAMILLE.

£>on, anatinum. Boucb. Chant. Cat, des Mol). du Bou). p. 19. n* 3t. Exclus, plui'. synon.

Desh. dans Lamk. An. s. vert. 2*^ éd. î. 6. p. «48. n* a4.

Philippi, Ënuin, Moll. SicÜ. t. x. p. 36. n*’ t.

Scacchi. Cat. concb. reg. Neap. p. 7.

Maravigna, Mém. pour l'iiist. nat. de la Sicile, p. 74.

Forbes, MaUic, montnsis, p. 46.

Donax anatinum, Hanlev» Descr, cat. p. 83.

Anton, Verz. der Concb. p, 4. n* 118.

Reeve, Concb. sysl. t. x. p. 83. pl. 60. f. 3.

Thompson, Kep. on tbe Fauna of Irel. p. 261^ >

Forbes, Rép, ou OEga. invcrt. p, t43. '

Donax anatinum, Tborpe. Brit. mar. couob. p. 77,

Macgillivray, Moll, auimi of Scot. p. a 14 et 275. ^

Fleming. Brit. anim, p. 433. iio 47a,

Lovèn. ind. Moll. Scatid. bab. p. 42.

Pbil, £uum. Moll. Sicil. t. 2. p, 28. x.

Yerani, Cat. drgl aiiiin. învcrl. p. t3.

Woüd, Ind. test, a'* «up. p. ir. f. 38.

Fosstlis. Scacchi, Nolizie iiil. Concb. fossil. di Gravioa. p. 17. n* 32.

Pbil. Kmim. MoU. Sicil. t. x. p. 3q. 11* x*; t. 2. p. 28. n* r.

S. Wood, FufiS. sbells IVom tbe. Crag Aim. iiai. bist. 87. p. 248. n* t.

Habile rOcéaii d Europe depuis les mers du Nord jusque dans la Médi* terranée; elle est fossile en Italie , en Sicile et dans le Crag d'Angle» terre; celle dernière station géologique annonce le moment Teapèce apparut pour la première fois à la surface de la terre.

Il serait sans utilité de reproduire ici la description d’une espèce aussi connue que le Donax truncnlus; il nous suffira d’appeler l’atten- tion des naturalistes sur les nombreuses variétés qu’elle présente ; il faut les réunir en grand nombre pour voir comment elles se nuancent les unes dans les autres , et forment un tout dont rien ne peut être détaché ; quoique dans la Méditerranée on trouve les variétés qui paraissent s'isoler et prendre les caractères d’espèces. Nous devons à M. Rous- seau, aide-naluraliste au Muséum , la connaissance d’un fait intéres- sant. Ce naturaliste a rapporté de la mer Noire une variété identique à celle de nos côtes de la Manche , et fort différente de toutes celles de la Méditerranée.

Le Donax trunculus a été souvent cité à l’élat fossile , mais à mesure que I on a pu étudier avec toute rattention convenable les fossiles en question, on a constaté qu'ils constituaient d'autres espèces.

LES DONilCIDES.

457

3. Donace transverse. Donax transversa , Desh.

PL 14. f. 16. 17.

Z). Testa ovato’oblongayanÿustâ^transversây incequilaterali y nitidày obsolète longitndinaliter striata; lutere postico brevioroy oblique truncatOy mugulo obtuso circumseripto , striis obîiquis . lamellosis ornato; marginibus tenue et projundè denticulatîs.

Donax anatinum, Yar. Bast.foss. de Bord. p. 83. pT. B. f, 8.

An Donax Burdigalensis. Def. Dict. sc. uat. t. x3. p. 4^^^

Donax transversa, Desb. Ency« méth. vèrs. t. 3. p. xoo. n* xg.

Id. Desh. dans Laœk. An. s. vert, a* éd. t. 6. p. a5o. n* 3i.

Habite... Fossile dans les' terrains tertiaires moyens de Bordeaux et de Dax.

M. Bastérot, dans son Mémoire sur les fossiles de Bordeaux, avait rapporté celte espèce au Donax anatimm de Lamarck. Elle en est con- tamment distincte ; nous ne savons si notre espèce est la même que le Burdigalensis de M. Defrance : la trop courte description de ce natu- raliste ne mentionne pas les caractères de notre coquille , et notre doute vient de ce que nous ne connaissons jusqu’ici qu’une seule espèce de Donace aux environs de Bordeaux, et c'est la nôtre. M. Bronn considère notre Donax transversa comme l'analogue fossile du Donax venusia de Poli y vivante dans la Méditerranée. Mais un examen minutieux nous a donné la preuve que ces coquilles ont des caractères spécifiques qui les distinguent avec facilité.

Le Donna; transversa est une petite coquille oblongue, transverse , très inéquilatérale , dont la forme se rapproche de celle du Donax ana- îinum; ses valves , aplaties , sont luisantes en dehors, on y remarque des stries longitudinales, rayonnantes, obsolètes , presque effacées. Le côté antérieur est très allongé , il constitue les deux tiers de la longueur totale. Le bord dorsal antérieur est peu incliné , on y trouve une longue lunule étroite lancéolée. Le côté postérieur est court, obliquement tronqué; un angle obtus sépare un corselet qui occupe toute la hauteur du côté postérieur; des plis nombreux obliques, étroits, légèrement onduleux , s’élèvent sur toute la surface du corselet , ce ne sont pas des sillons comme dans le Dunao; venusia, et jamais ces plis ne dépassent l’angle postérieur pour s’étendre sur la surface de la coquille comme cela arrive très souvent dans le Venusia. Les bords sont crénelés et les dentelures sont plus serrées, plus nombreuses, plus profondes, que dans l’espèce vivante ; enfin , l’impression palléale est très différente

TRETiïÈME FAMlllE.

458

dans les deux espèces; dans la nôtre, elle laisse en avant un espace très large , elle descend obliquement et non parallèlement au bord ; la sinuosité postérieure est large , et elle s’avance jusqu’à la moitié de la surface interne des valves. Üne^charnière très étroite porte une seule grosse dent simple et obtuse sur la valve droite , deux petites et diver- gentes sur la gauche ; la dent latérale postérieure est assez grosse , courte et très rapprochée de la charnière; la dent latérale antérieure est allongée et fort écartée.

Celte petite espèce est commune à Sancats et à Léognan ; elle a 20 millimètres de longueur et 9 de largeur.

4. Donace du Brésil. Donax brasiliensis ^ Blainv.

PL 15. f. 1. 2. 3.

J Tèstâôvato^obîongâ, transversal utriirque attennntn, subœ^uUattrâf

sub èpidermide ftisceseente griseo^nfiolàceâ , obsoletè transversim et

J. longitudinaliter striata , postice obliqué truncatâ, ad latus posticum

\

sinuato-depressâ intùj albo^violacente, l?o>2<ijr.Brüg. Ency, pl. a6r. f,

Üoaax brasHUnsis» Blainv. Malac. p, 549. pl. 71. f. lo.

Capsa. Sow. Généra ofshells. L i.

Capsa brasihénsis, Lamk. An« s. vert. t. 5. p. 553. n" 2.

Crôuch, lolr.of lâmk. CoDch. p. XX. ]^i, 6. f. 6. ^ '

Désh. Ehcy. méth. vers. t. 2. p. 19a. 1.

Besb. dans Lamk. An. s. vert, a* éd. t. 6. p. â55. n'^ a.

ReéVe, Concli. syst l. x. pl. 61, f. i.

Uanley, Descr. càt. t. p. 36.

Catlèw, Conch. nomencl. p. a9.

Wood, ind.Testac. a* sup. pl. i3. f, 5a.

Nous rapportons aux Donaces cette espèce qui , pour Lamarck , était le type de son genre Capsa , proposé en 1 84 8. Elle offre tous les carac- tères des Donaces I moins les dents latérales de la charnière; mais nous savons déjà le peu d’importance que doit avoir ce caractère. Au reste , dans les quatre espèces de ce groupe que nous connaissons , nous re- marquons surtout sur la valve droite des rudiments des dents laté- rales. La Donaeo du Brésil est une coquille ovale, trigone, snbéquila- térale, ayant le côté antérieur un peu plus allongé que le postérieur. Le bord ventral et le bord dorsal antérieur s’inclinent Tuii vers l’autre et se fèhcontreht pour former ün côté antérieur étroit et obtus, te côté

LES LITHOPHAGES.

4^9

postérieur est obliquement tronqué, l’angle qui le sépare est très adouci comme dans lo Donax trunculus ; le corselet reste lisse , il porte à son sommet un ligament plus épais et un peu plus long que dans les autres espèces de Donaces. La surface e;c-térieure est lisse ou substriée ; elle est, couverte d’un épiderme persistant, d’un brun glauque; lorsqu’elle en est, déppuillée, elle est d’un gris violâtre à l’intérieur ; les valves sont d un violet pâle, plus foncé chez les jeunes individus. La charnière présente une seule dent bifide sur la valve droite et deux inégales diver- gentes sur la valve gauche ; la dent antérieure, quoique très aplatie , est cependant fendue au sommet.

Cette coquille, commune dans les mers du Brésil, a 50 millimètres de longueur et 34 de hauteur.

QUATORZIÈME FAMILLE.

lies liithophaKes. Lame.

CARACTÈRES DE LA FAMILLE. Animal ovale , transvme; les lobes du manteau offrant xme petite ouverture antérieure et inférieure, pour le passage d’un pied très petit, quelquefois byssifère ; les deux siphons postérieurs réunis dans une partie de leur longueur.

Coquille transverse, inéquilatéralè , ' souvent irrégtilièrë , bâillante postérieurement 5 presque toujours perforante,, mais sans tube, ni pièces accessoires à la charnière.

GENRES. Saxicœve , Pétricole ^ Vénérupe,

La famille des Lithophages de Lamarck a besoin d’être réformée. Depuis que nous avons pu étudier vivants les animaux des genres qui la constituent , nous y avons reconnu deux types bien distincts : l’uu , qui se rapproche des Gastrochènes , l’nutre , qui a de l’analogie avec ce groupe des Vénus de Lamarck, pour lequel M. Sowerby a établi le genre Pullastra, Peut-être faudra-t-il rapporter à un troisième groupe quelques espèces confondues soit avec les Pétricoles, soit avec les Vénérupes.

Lorsque nous avons commencé cet ouvrage, nous ne connaissions

QUATORZIÈME FAMILLE.

ifCu

les animaux d’aucun des genres de celle famille. Millier, dans le Fama suecica^ a bien donné la figuré de l’animal de l’une des espèces de Sàxicave de Lamarck , sous le nom de MytUuB p/m/àdt.s ( Mxjii byssifera , Fabricius): mais on pouvait se demander si cet animal doit, constituer un genre particulier, ainsi que Cuvier l’a proposé dans le Règne animal, ou si toutes les autres Saxicaves qui lui ressemblent sont habitées par des animaux portant un byssus et offrant des caractères analogues. On ne pouvait répondre à cette question qu après s'ètro éclairé par l’obser- vation des animaux d’autres espèces. Nous avons pu examiner vivante une petite espèce de la Méditerranée , et tous ses caractères zoologiques sont conformes à ceux du .\fyliîus photadis de Millier. Toutes les espèces de Saxicaves, dont les coquilles ont des caractères semblables aux deux que nous venons de mentionner, sont pour nous les véritables Saxicaves de Lamarck ou Byssomies de Cuvier.

Dans l’ignorance nous étions des véritables rapports du genre Saxicave, nous l'avons laissé dans la famille des Lithophages, nOus conformant aussi à l’opinion de Lamarck. Aujourd’hui nous rejetons celte classiûcation . et nous croyons que le genre Saxicave doit se placer dans le voisinage des Gastrochènes et devenirle type d’une petite famille particulière. II ne suffit pas , pour bien placer un Mollusque dan.s une classification naturelle , d’en voir la surface , d’apercevoir les caractères extérieurs; il faut encore observer les organes cachés dans la cavité du manteau : les branchies, les palpes labiales, le pied, la masse abdominale. L-observation de ces parties et leur comparaison avec celles des Clava- gelles et des Gastrochènes , nous font apercevoir les rapports des Saxi- caves avec ces genres. Dans la classification, linéaire , les Saxicaves devront prendre place à la suite des Gastrochènes, mais dans une clas- sification à éléments disséminés ou à embranchements , telle que nous la comprenons, le groupe des Saxicaves formera un embranchement latéral partant des Glavagelles et des Gastrochènes , et n ayant plus que des rapports très éloignés avec les Pétricoles et les Vénérupes.

ün assez grand nombre de zoologistes ont 'partagé l’opinion de Cuvier, en repoussant de la méthode la famille des Lithophages de Lamarck. M. de Blainville, dans son Traité de malacologie , réunit en un seul genre les Pétricoles et les Vénérupes ; il les place dans la famille des Conchacées , à la suite des Vénus : les Saxicaves , les Byssomies , les Hyatelles et les Rhomboïdes , qui pourraient ne constituer qu'un seul genre , sont rangés entré les Glycimères et les Gastrochènes, dans la famille des Pyloridés. Dans ses familles naturelles , Latreille a suivi à peu près l’exemple de Cuvier ; cependant les genres Byssomie et

LKS LITHOPHAGES, ^6l

Saxicave ne sont pas mentionnés, ils sont remplacés par le genre Hyatelle qui est leur équivalent,

A Tarticle PuUastra de son Généra of shells, M. Sowerby fait voir les rapports intimes qui lient certaines Vénérupes au type des Vénus. S’appuyant de ces observations très justes, mais non applicables à toutes les espèces de Vénérupes, M. Sowerby conclut à la suppression du genre et à sa fusion parmi les PuUastra. M. Reeve, admettant cette réforme sans autre examen , conserve la famille des Lithophages dans sa Conchyliologie systématique , réduite aux deux genres Saxicave et Pélricole; mais M. Reeve place-t-il le Fenerupis Irus , par exemple, et d’autres espèces analogues?

Si l’ouvrage de M. d’Orbigny était moins important, nous ne nous attacherions pas , comme nous le faisons , à réfuter les opinions de son auteur ; mais destiné à répandre à la fois le goût de la paléontologie et celui des saines doctrines de la conchyliologie, nous croyons de notre devoir, dans l’intérêt même de la science et de ceux qui la pratiquent, de rectifier les erreurs que nous apercevons dans la classification adoptée dans la Paléontologie française. Nous l’avons déjà dit ailleurs, la clas- sification n’est pas la partie la plus importante d’un ouvrage essen- tiellement destiné, comme celui dont nous parlons, à rassembler un nombre plus on moins considérable de descriptions d'espèces. Pourvu que les espèces soient dans les genres qu'indiquent leurs caractères , il importe peu que les genres soient dans un ordre ou dans un autre ; nous concevrions que , dans l’embarras du choix d’une méthode , un auteur préférât Tordre alphabétique, car n’ayant pas d’espèces appar- tenant à tous les genres connus, il en résulte des lacunes nombreuses qui rompent les rapports naturels. Pour les Acéphalés, par exemple, M. rl'Orbigny n’a d'espèces que dans une soixantaine de genres: la métiiode serait donc très incomplète; mais comme Mt d’Orbigny attache une grande importance à suivre un onlre méthodique créé par lui, il en a comblé les lacunes par la citation des genres et des familles dans les- quels il ne reconnaît aucune espèce fossile du terrain crétacé. C'est pour cette raison que, dans la paléontologie, les genres Saxicave et Pétricûle sont mentionnés , quoique M. d’Orbigny ne connût aucune espèce du terrain crétaeé qui pût venir s’y ranger.

Nous venons d'exposer TOpinion de M. Reeve ; celle do M. d’Orbigny s'en rapproche, mais elle en aggrave les défauts. En effet, il rejette la famille des Lithophages, et admet celle des Saxicavîdœ de Mi Gray, mais en lui imposant d’autres caractères , en y associant d’autres genres et en plaçant dans d'autres rapports; on peut dire que M. d’Orbîgny

QUATORZIEME FAMILLE.

462

a emprunté le nom et non la chose : cela seul est déjà suffisant pour jeter de la confusion dans la science. Cette famille des Saxicaves de M. d'Orbigny contient quatre genres : Gaslrochèjpe, Saxicave, Pétrîcole et Galeomma. Nous allons voir, par l'appréciation rigoureuse des carac- tères , dans- quels rapports il convient de naettre les Saxicaves. Us se rapprochent des Glavagelles plus que des Gastrochènes , et ne peuvent entrer dans les familles qui contiennent ces genres. Quant aux Pélri- coles, leurs branchies courtes et leurs siphons les mettent dans le voi- sinage immédiat des Vénérupes. Ces deux genres sont enchaînés l'un à l’autre et inséparables désormais ; aussi ^ si nous avions à choisir, nous donnerions la préférence à l’opinion de M. Gray, qui entraîne les deux genres Pétricole et Vénérupe dans la famille des Yénus. M. d’Orbigny ne nous semble pas plus heureux dans le choix de la place qu'il assigne à la famille d&s Saxicavides : il la range entre celle des Solécuries et celle des Tcllines. L’auteur prouve par là- qu'il n'a point connu les animaux des genres dont il est question , et ce que nous avons .dit pré- cédemment justifie notre assertion. Nous ^'examinerons pas ici les autres genres associés par *M. d’Orbigny dans la famille des Saxicaves-. Nous connaissons déjà les Gastrochènes ; r\Gus allons étudier les genres Saxicave , Pétricole et Vénérupe; mais nous avons de la peine à com- prendre pourquoi le genre Galeomma se trouve dans la même famille; il faut que M. d’Orbigny ait oublié les renseignements précieux publiés sur l'animal de ce genre par M. Mitre dans les Annales des sciences nfitureiles. Les documents dont nous parlons prouvent que le Galeomma appartient à la famille des Lucines.

M. Jouas a proposé en 1844 un genre nouveau, qu’il nomme Choris- todon, et qu’il voudrait introduire dans la famille des Lilbophages. Nous ne connaissons pas ce genre en nature, mats d’après la description et laûguro qu'on donne M. Jonas, nous pensons qu’il doit rentrer dans les Pélricoles deLamarck; le seul caractère qui tendrait à distinguer le nouveau genre serait emprunté à l’existence d'un osselet caduque te- nant la place de l'une des dents cardinales; il faudrait savoir si cet osselet est constaat ou s'il est le résultat d’une érosion maladive du liga- ment et do la charnière à la suite de laquelle une ou deux dents cardi- nales se détachent dans les individus qui en sont affectés. Est-ce à un accident de cette sorte qu’est due la séparation de l une des dents car- dinales de la coquille perforante observée par M. Jonas?

. M. Gray a été plus conséquent aux principes posés par Cuvier, lors- que, dans sa dernière classification (Proc. zool. soc., 1847), il intro- duit à la fois dans. la famille des Vénus les genres Véiiérupè et Pétricole,

LES LITHOPHAGES.

463

considérant , non sans quelque raison , cette propriété de perforer, comme d’une faible valeur, comme un accident qui se reproduit dans d’autres familles; tandis que Lamarck, au contraire j attachait. à cette faculté perforatrice une grande importance. Quant aux Saxicaves , M. Gray en fait, une famille sous le nom de SavCtçawdœ. Apparemment guidé par des faits qui nous sont inconnus, l’auteur éloigne les Saxi- caves. des ^strochènes, et les place à la fm du second ordre des Ciado- podes., à la suite de deux groupes qui représenteraient, assez bien les. anciennes Erycines de Lamarck, c’est-à-dire contenant le genre Pu- roiiia, Kellia , Montacuta, Lepton , etc. Assurément, dans ce nouvel arrangement de M. Gray, les Saxicaves ne son,t pas à leur place.

D’après ce que nous venons d’exposer,, plusieurs opinions sont en présence au sujet de la famille des Lithopliages de Lamarck. Si quel- ques conçhyliologistes la conservent dans son entier, quelques autres l’aaéantiss.ent complètement; il. en est d’autres, onûn , qui ont compris qu'oUe devait être réformée; mais les uns ont voulu ou distraire le genre Saxicave , tandis que d’autres ont voulu en éloigner les Vénérupes. Entre toutes ces opinions , quelle est celle que doit choisir le zoologiste , qui connaît tous les faits nouveaux , acquis à la science depuis la publi- cation des travaux de Lamarck, de Cuvier et des autres naturakstes que nous avons cités? Il est évident, comme nous l avons déjà. indiqué sommairement tout à l’heure, que le genre Saxicave est celui qui s’éloigne le plus des Pélricolcs et des Vénérupes ; mais, une fois ce genre écarté de la famille des Lithophages, cette famille doit-elle subsister? Telle est la question que noua avons à examiner.

Pour répondre à la question que nous, venons de poser, il faut donc comparer les animaux et les coquilles des trois genres. .Nous dirons d’abord : les Pétricoles et les Vénérupes se ressemblent par les traits principauxde leurorganisation ; ainsi danslesunset les autres le manteau est médiocrement ouvert en avant cl en bas pour le passage d’un pied étroit, allongé., très pointu au sommet. Dans les Vénus, le manteau est plus largement ouvert, le pied est beaucoup plus grand , plus aplati et plus large; dans les Pétricoles, le manteau se prolonge en arrière en deux siphons complètement disjoints ; dans les Vénérupes, ces organes sont réunis dans une partie do leur longueur. Mais chez ces animaux le siphon branchial est garni sur son bord d’une rangée de tentacules branchus, inégaux , qui s’inclinent au-devant de l’ouverture et forment un véritable tamis , à travers les mailles duquel le liquide ambiant est obligé de passer avant d’entrer dans. la. cavité du manteau. Quant au siphon anal , U est différent;, il est simplement Lenlaculé chez les Pétri-

QUATORZIEME FAMILLE.

m

coies , tandis que chez les Vénérupes , outre ces tentacules , il existe un pourtour membraneux , en forme de coupole, percé d'un trou étroit à son sommet. Si nous pénétrons dans l'intérieur dumanteàu, nous trou- vons à la bouche , aux palpes et aux branchies, des ressemblances très considérables, et si nous comparons ces parties à celles des Vénus, nous leur trouvons aussi des ressemblances incoQtestables. Cependant chez les Vénus , les branchies sont plus allongées , elles sc prolongent davantage en arrière de la masse abdominale; mais si nous examinons Touverture intérieure des siphons, nous observerons au siphon bran- chial des Pétricoles une valvule circulaire, membraneuse, sphinctéroïde^ percée d’ünè petite ouverture centrale; cette valvule n’exisle pas chez les Vénus et chez les Vénérupes. Si nous estimons actuellement les divers degrés de rapprochement qui existent entre les genres que nous examinons; nous verrons qu’ils sont plus nombreux entre les Pétricoles et les Vénérupes qu’avec les Vénus, et nous sommes conduit par à conserver la famille des Lilhophages et à la rapprocher de celle des Vénus.

Les Coquilles viennent confirmer les indications que nous fournissent les animaux; elles sont généralement peu régulières; on voit qu’elles ont été gênées pour la plupart par les circonstances de leur habitation. Leur charnière porte deux ou trois dents petites , rapprochées , presque parallèles , quelquefois divergentes dans certains Vénérupes; les impres- sions musculaires sont grandes, assez rapprochées , circulaires ou ova- laires; les siphons étant très grands, en pro|)ortion du volume de l’animal, ils sont munis de muscles rétracteurs puissants, larges et épais, dont la base embrasse toute la largeur des deux siphons. Ce muscle laisse sur la surface interne de la coquille une large sinuosité très ouverte en arrière et qui ne se montre jamais sous celte forme dans ahcnrie Vénus. Chez les Vénérupes , cette impression palléale se rap- proche beaucoup de celle dés Pétricoles , et c’est ainsi que nous recon- naissons les rapports qui existent entre les deux genres que nous main- tenons dans la famille dès Lilhophages.

Jusqu'ici nous n’avons pas parlé de l’un des caractères qui , aux yeux Lamarck, jouit d’une grande valeur parmi ceux de sa famille des Lilhophages. Tous ces animaux possèdent les moyens de percer la pierre et de s‘y préparer un abri. Comme l’ont compris un assez grand nombre de zoologistes , cette propriété de perforer les pierres n’est pas inhérente aux seuls genres de cette famille ; nous l’avons fait remarquer dans plusieurs de celles qui précèdent , nous allons la retrouver bientôt dans celle des Cardites , dans celle des Moules , et même dans celle

LES L1TH0PH4GES.

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des Lucines, Il faut donc, pour en tenir compte ici, être guidé par d’au- tres caractères , et c’est justement ce qui a lieu pour la famille des Litliophages,

Depuis que l’on observe avec plus d’attention les mœurs des Mollus- ques , on s’est étonné de la facilité avec laquelle des eoquilles minces et fragiles pénètrent dans les pierres les plus dures. Quelques observa- teurs ont prétendu que cette perforation s’opérait par un moyen méca- nique; les autres, au contraire, ont affirmé que Tanimal agissait au moyen d’une sécrétion spéciale; les premiers observateurs appuyaient leur opinion sur un fait rapporté par Olivi, d'après lequel ces Mollus- ques auraient pu s’introduire dans des laves ou d’autres matières volca- niques ; mais ce fait annoncé n’a pas été confirmé par des observations ultérieures ; il est possible de trouver des coquilles introduites dans les porosités de. certains produits volcaniques , sans que cependant ces co- quilles yeussent creusé leur place. Il existe certains petits Mollusques acéphalés appartenant aux genres Erucîne ou Peronia , qui aiment à s’introduire, soit dans les fentes des rochers, soit dans les moindres vacuoles qu’elles rencontrent , et il est bien certain que ces Mollusques ne jouissent en aucune façon de la propriété de creuser la pierre. Des jeunes individus s'introduisant dahs les cavités d’une roche poreuse , s’y développant et n’en. pouvant plus sortir, ont probablement donné lieu à l’observation d'Olivi.

11 y a quelques années , M. Caillaud a fait connaître un morceau d’une roche primitive, dans lequel étaient creusés des trous analogues à ceux que produisent les Gastrochènes et les Saxicaves. Mais cet échan- tillon, recueilli assez loin de la mer, a pu être creusé par d'autres agents : pour décider la question , il aurait fallu trouver les coquilles en place. Dans tous les cas , comment comprendre que les coquilles des Saxicaves et des Gastrochènes , qui ont si peu de solidité , pourront agir efficace- ment sur des matières aussi dures que le quartz et le feldspath? A l’ex- ception de ces deux observations et de quelques autres , qui ne sont pas mieux constatées , il est reconnu aujourd’hui que tous les Mollusques perforateurs s’enfoncent dans des matières calcaires plus ou moins dures. Quelques uns choisissent des argiles ou des bois , mais ces argiles con- tiennent habituellement une certaine quantité de matière calcaire , et il suffit de sa dissolution pour entraîner la désagrégation de l’argile solide, désagrégation favorisée du reste par le liquide au niilieu duquel l’animal a besoin d’ôtfe plongé. On a cité aussi des Mollusques perforateurs dans des grès fort durs , et qui, par leur dureté même, semblaient à l’abri de l’attaque de ces animaux; mais en examinant

3o*

T. 1. PARTIE.

466 QÜÀTORZlÈblB FAMILLE .

les roches dont il est question , on reconnaît que leurs éléments sont solidement agrégés au moyen d’une matière calcaire ; ces grès font effervescence avec les Acides , et on comprend que le Mollusque , en dissolvant le calcaire , désagrégé les éléments de la roche et parvient ainsi à s’y creuser une demeure.

Les Mollusques perforateurs se montrent partout dans des roches calcaires, et ce fait , d'une grande importance , tend déjà à prouver que ces animaux n’agissent pas mécaniquement , mais possèdent des agents de dissolulion, qui, quoique non constatés par la chimie, ne peuvent être contestés par ceux des naturalistes qui ont observé ces Mollusques pendant leur vie. Une autre remarque générale doit être faite à ce sujet. Si les Mollusques perforateurs creusent les pierres à l'aide d’un moyen mécanique, la nature ne leur en a pas donné d'autre que leur coquil le, il faudrait donc que les coquilles de ces animaux fussent spécialement plus dures, plus épaisses, plus résistantes , car un corps destiné à en user un autre doit être le plus dur; il faut l'acier pour limer le fer, il faut un calcaire très dur pour en entamer un plus tendre. Ëh bien , les coquilles perforantes sont généralement minces et fragiles sufQsam- ment protégées par les corps solides qu'elles habitent, elles n'ont pas cette épaisseur, cette solidité nécessaire à la déCense et à la conservation des coquilles libres. Elles sont si peu faites pour creuser un trou par le frottement, qu’à peine si elles pourraient égratigner, en se brisant, la sur- face d’un calcaire tendre. A plus forte raison elles ne pourraient atta- quer ces calcaires durs et compactes, qui, dans un grand nombre de points de la Méditerranée, par exemple, servent d'abri à la Moule lithophage, aux Pétricoles et aux Vénérupes. il serait impossible à l’homme, le plus adroit et le plus exercé , de creuser un trou dans un calcaire tendre à l’aide des valves d’une coquille perforante; il les verra se briser dans ses mains , et dès |e premier contact se trouveront usées et détruites ces lines aspérités , qui souvent couvrent la surface de ces coquilles et que l'on voit conservées jusque dans les individus les plus vieux.

Le trou creusé par un Mollusque , ayant à peu près la forme de la coquille et présentant presque toujours une section iransverse circu- laire, on s’est imaginé que cet animai agrandissait son trou par un frottement rendu plus efficace au moyen d’un mouvement rptatoire pen- dant lequel il se pousse contre les q)arois du trou qu’il veut agrandir ; mais on n’avait pas fait attention à un foit très important , que |e pre- mier nous avons signalé. Certaines Pétricoles sont immobiles dans four trou , ou ne peuyenj; y exercer que de très faibles mouvements , car la

LES LITflOPHAGES.

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coquille ovalaire , dans sa section transverse , est contenue dans une loge également ovalaire et, bien plus, unç crête saillante s’engage entre les crochets de la coquille . de sorte que le trou creusé par le Mollusque semble l’empreinte un peu élargie de sa coquille , et celle crête engagée entre les crochets est un obstacle invincible pour des mouvements de rotation ou un déplacement quelconque. Il est donc certain , d’après les faits que nous venons de rapporter, que les Mollusques perforateurs ne peuvent agir avec leurs coquilles. Celte coquille serait promptemen t usée et détruite, et elle est d’ailleurs beaucoup trop mince pour sup- porter un effort comparable à celui qui serait nécessaire pour creuser le trou dans lequel elle est renfermée. On a particulièrement prétendu que les Tarets s'enfoncent dans le jjois à l’aide de leurs valves taillées en biseau , et au moyen desquelles ils enlèvent constamment des parcelles de la matière ligneuse dont ils se nourrissent. D’abord , nous pourrions contester que les Tarots se nourrissent de bois. 11 y a des Tarets qui vivent enfoncés dans le sable; ceux-là n’ont donc pas besoin de la sub- stance ligneuse que d’autres perforent; mais il y a plus, b Taret, qui a d'abord vécu dans le bois, continue quelquefois à vivre dans le sable , lorsque la matière ligneuse qui l'enveloppe a été détruite par la putré- faction. Ces observations prouvent invinciblement que les Tarets peu- vent très bien vivre hors du bois , et que celte matière leur sert d’abri et non de nourriture. Les valves de ces animaux , agissant sur une ma- tière beaucoup plus tendre que la pierre, seraient cependant des instru- ments très insuffisants si elles devaient fonctionner seules et sans le secours préalable d’un ramollissepient obtenu par les sécrétions de l’animal. Si le Taret ne peut creuser le bois avec ses valves seules, lui , qui paraît avoir pn instrument spécialement disposé pour cela, à plus forte raison doit-on penser que des valves minces , comme celles des Pétri- coles , des Vénérupes et des Gastrochènes , sont des moyens insuffisants pour attaquer la pierre. 11 faut donc recourir, pour rendre compte du phénomène, aune autre explication, et assurément celle qui se présente le plus naturellement à l’esprit consiste a croire que la nature a accordé aux animaux perforateurs le moyen d’accomplir leurs fonctions , et ce moyen est incontestablement une sécrétion à l'aide de laquelle ils dis- solvent la matière calcaire dans laquelle ils se logent. Nous en avons la preuve par la découverte que nous avons faite, chez tous les animaux perforateurs dont nous avons fait jusqu’ici l'anatomie, d'un organe spé- cial de sécrétion répandu dans le manteau, organe qui n’existe pas chez ceux des Mollusques qui n’ont pas la môme propriété. Ce fait semble trancher définitivement la question , cependant il en est d’autres , qui 3o*

468 QUATORZIÈME FAMILLE.

sont d’une grande valeur et ({ne nous ne devons pas négliger. Lorsque l’animal perforateur vient de naître et que sa coquille est à peine for- mée, il jouit immédiatement de la propriété qui le distingue, el'assu- rément sa coquille est de beaucoup trop faible pour attaquer le corps le moins dur ; cette coquille , en effet , est presque à Tëtat gélatineux , et cependant lesGastrocbènes, au moment ils sortent de l’œuf, peu- vent déjà se creuser une galerie de plusieurs millimètres de profon- deur, comme Font constaté les précieuses observations de M. Cailland. Ï1 est hors de doute par que la perforation s’opère au moyen d’une dissolution et non par un moyen mécanique.

Dans les Clavagelles, les Arrosoirs, les Gastrochènes , l’accroisse- ment de l’animal, de sa coquille et même de son tube, ne peuvent se com- prendre sans admettre la dissolution momentanée d’une partie plus ou moins considérable de ce tube. Nous n’avons peut-être pas assez insisté sur cepoint, lorsq ue, dans le commencement de cet ouvrage, nous avons traité des divers genres que nous venons de mentionner. Nous nous proposions de reprendre d’une manière plus générale cette question si intéressante pour la physiologie des Mollusques , relative à la faculté dont ils jouissent de perforer les pierres et de dissoudre certaines parties testacées qui leur ont été utiles à des époques antérieures de leur exis- tence. Plus tard nous parlerons des Murex , des Pourpres et de beau- coup d’autres genres de Mollusques céphalés , chez lesquels l’animal a la propriété faire disparaître les tubercules et toutes les àutres parties saillantes qu’il avait sécrétés quelque temps auparavant. Comme il s’agit ici de prouver que la perforation par les Môliusques acéphalés a lieu, non par un moyen mécanique, mais à l’aide d’une sécrétion, nous croyons- utile d'insister sur l'accroissement d’un genre très sérieux , celui des Clavagelles , accroissement qu’il serait impossible^de comprendre , sans admettre Ja dissolution totale ou partielle du tube calcaire , qui enve- loppe l’animal et l’enferme aussi exactement que le trou pierreux dans lequel est logée une Pétricole ou une Vénérupe.

Des deux valves d'une Clavagelle , l’une , plus petite , est incrustée dans la paroi du tube, et on en aperçoit le contour très facilement sur

tube même; l’autre, beaucoup plus grande, est libre dans l’inté- rieur du tube , elle seule peut se mouvoir vers sa congénère immobile. Mais sut cette valve immobile on aperçoit des stries d’accroissement, ef dans les vieux individus cette valve incrustée peut avoir jusqu^à 1 5 ou 20 millimètres de longueur, et l’on comprend très bien que l'animal n'avait pas celte grandeur en venant au monde. Cette valve a donc pris un accroissement régulier comme la valve libre ; seulement cet accrois-

LES LITHOPHAGES. 4^9

sement a été moins rapide , et cette différence s’explique en ce que chez l’une raccroissement n’est jamais interrompu, tandis que chez l’autre il se fait périodiquement , pendant les instants l'animal, se trouvant gêné dans un tube trop étroit, dissout l’extrémité antérieure de ce tube, dégage ainsi la valve habituellement incrustée et Jui permet de s’accroître. Mais l’accroissement cesse aussitôt que le tube est recon- struit, et pondant tout le temps qu’il existe , l’accroissement de celte valve est suspendu , tandis que celui de la valve libre se continue. D’après ces faits, il est pour nous indubitable que l'animal d’une Clavagelle a la propriété de dissoudre une partie plus ou moins consi- dérable de son tube et de l’approprier au nouvel accroissement qu’il a pris. Il serait possible que le manteau de ces animaux jouisse de la pro- priété de former un tube, pour ainsi dire d’une seule pièce et dans. un moment très court; ce serait peut-être le meilleur moyen d’expliquer l'agglutination des grains de sable ou d’autres corps sur le tube de cer- tains Arrosoirs et de quelques Clavagelles. S'il est vrai que les Arro- soirs, les Clavagelles et les Gastrochènes ne peuvent s’accroître sans dissoudre leur tube , on est forcé d’admettre chez ces animaux une sécrétion propre à opérer la dissolution dont il s’agit. Rien n’empêche dès lors , par une analogie des mieux fondées, d’admettre aussi que les Sax.icaves, les Pétricoles et les Vénérupes perforent les pierres calcaires par les mêmes moyens que les autres genres dissolvent leur tube.

Une personne étrangère à l’observation des animaux Mollusques pour- rait dire que sans doute on peut admettre l’action d’un acide plus ou moins concentré sur une rôche calcaire , lorsque l’on agit dans l’air ; mais elle ne comprend guère comment peut s’exercer l'action d’un acide dans l’eau et dans une quantité d'eau aussi considérable que celle de la mer, et qui est sans cesse renouvelée dans les trous habités par les Mollus- ques lilhophages. Si l^acide sécrété par l’animal est versé dans Teau qui remplit son tube, celte eau acidulée attaquera les parois d'une manière uniforme , mais elle attaquera en môme temps la coquille , et comme cette coquille est généralement très mince . elle se trouverait détruite longtemps avant que l’animal fût arrivé à son développement; il faut donc que la liqueur acide, sécrétée soit mise on contact avec la roche par l’organe môme qui la sécrète , et que cet organe s’applique avec une rigoureuse exactitude sur la surface qu’il doit attaquer. Car s’il laissait entre lui et la pierre une couche d'eau même mince l’acide délayé n’aurait plus qu’une très faible action et pourrait également corroder la coquille.

Les Mollusques lilhophages ne présentent que deux organes propres

47 O QUATORZIÈME FAMILLE .

à opérer la dissolution de la matière calcaire; ce peut être que le pied ou le manteau. Le pied, organe locomotion, ne nous a jamais présenté aucune trace d’un organe sécréteur spécial ; il est , d’ailleurs , excessivement petit, et il ne paraît guère susceptible de s’allonger dans toutes les parties de la cavité habitée par l'animal. II n’en est pas de même du manteau; aussi chez les Clavagelles, chez les Arro- soirs, il prend un développement considérable; il est épais, fibreux, et chez les Gastrochènes , nous y avons découvert un organe spécial , et destiné , sans aucun doute , à la sécrétion de la liqueur acide. Chez les Saxicaves et les Pétricoles manteau contient aussi le même organe; et lorsque ranimai est vivant, cette portion du manteau est renversée en dehors de la coquille , et peut se mettre directement en contact avec les parois de la cavité pierreuse. Nous parlerons cet organe en traitant des divers genres de la famille des Lilhophages.

Les animaux lithophages ont un grand intérêt pour la géoTogie ; ils laissent des traces indestructibles de leur existence , et leur présence sur des espaces plus ou moins étendus annonce à la fois un rivage et un temps d’arrêt plus ou moins prolongé dans la succession des couches; souvent on ne peut constater les Mollusques lithophages que par les trous qu’ils ont laissés dans les roches calcaires. Si les co- quilles sont encore dans la logé creusée par lanimal , elles sont enve- loppées par la matière pierreuse durcie , et souvent il est difficile de reconnaître h quel genre elles apparliennenl ; mais pour le géologue, les perforations sont des indices suffisants pour le mettre sur la trace de phénomènes intéressants. C’est ainsi qu'en Algérie , les coteaux , quel- quefois assez élevés qui bordent la mer, portent sur leurs flancs plu - sieurs zones horizontales, ou diversement inclinées, de nombreuses perforations d’animaux lithophages; ces zones, ‘étagées entre le sommet des montagnes et leur pied plongeant encore dans la mer, démontrent de la manière la plus évidente que la côte maritime a été soulevée à plusieurs reprises d’une manière assez brusque et en laissant un long intervalle de repos entre chaque soulèvement. Pendant ces phénomènes d’une excessive lenteur, des terrains modernes, quelquefois d’une étendue assez considérable , ont été émergés , et le bas des escarpe- ments continue à être percé par les mômes Mollusques perforateurs. Cet exemple , que nous venons de rapporter, doit suffire pour donner la mesure de l’intérêt que le géofogue doit attacher à Tobservation des vestiges que laissent après eux les Mollusques lithophages.

LKS LiTHOPBAGËS.

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GENRE QUARANTE-DEUXIÈME.

, SAXZCAVE. Saxkava. (Fleuriau de Bellevue.)

PI. 12. fig. la, 4*

CARACTÈBES GENERIQUES. Animal allongé, cylindroïde , ou subrhomboïdal ; les lobes du manteau joints dans toute leur circonférence, si ce n*est en avant et en bas, est percée une petite ouverture pour le passage du pied ; deux siphons réunis dans presque toute la longueur, séparés à leur sommet, ayant le bord de leur ouverture garni d’une rangée de tentacules simples et cylindracés. Pied très petit, allongé, venniforme, fendu inférieurement et souvent byssifère ; bouche grande ; palpes labiales petites , non soudées. Branchies étroites , allon- gées, se prolongeant très loin dans le siphon branchial ; l’ex- terne la plus large et la plus étroite.

Coquille subrégulière, quelquefois inéquivalve, transverse, bâillante , couverte d’un épiderme souvent écailleux. Charnière linéaire simple , calleuse , sans dents ou ayant une seule dent rudimentaire sur chaque valve. Ligament externe, allongé, épais. Impression palléale sinueuse postériéusement ; sinus horizontal , étroit et profond.

synonymie générique. Pholds , Lister. Mya^ Linné, Muller, Eabricius, Schrœter. Gmelin, Brocchi, Wood, Turton. Solen, Linné, Pennant, Cheranitz, Schrœter, Gmelin, Spengler, Montagu, Maton et Racket, Wood, Dillwyn , Lamarck^ Turton. Mylilus, Linné, Da Costa, Schrœter, Gmelin, Müller, Donovan, Montagu, Maton et Racket, Dillwyn , Turton, Gerville. Cardita, Bruguière, Donax , Poli. Hiatellay Daudin, Roissy, Cuvier. Lamarck, Schweigger, Bowdich, Férussac, Turton, Blainville , Da Costa, Menke, Rang, Bouchard - Chantereaux , Maravigna, JefFreys , Fleming , Müller, Sowerby. Irus , Oken. Bys^

4y'2 QUATORZIEME FAMILLE.

somya, Cuvier, Bowdich, Blainville, Payraudeau, Grateloup, Maravigna, Lea, Rang, Menke. Glycrjniens, Schuma- cher.— Didonta, Schumacher, Biapholixis, Leach, Ke- ferstein. Agina, Turton. Rhomboïdes^ Blainville, Menke, Rang, Scacchi. Saxicma^ Fleuriau de Bellevue (1802), Roissy, Lamarck, Schweigger, Bowdich, Férussac, Turton, SoAverby, Blainville, Collard-des-Cherres , Raiig, Philippi, Forbes, Anton, Gould, etc.

OBSERVATIONS. Un coup d’œil, jeté sur la synonymie générique qui précède, introduira le lecteur à Thistoire du genre dont nous allons nous occuper. Les erreurs des grands hommes sont les plus fâcheuses en ce qu’celles trouvent de nombreux imitateurs et de non moins nombreux et inhabiles réparateurs. Linné, n’ayant pas reconnu l’identité des carac- tères de trois coquilles appartenant peut-être à une seule espèce , les distribue dans Irois genres différents : Mya^ Solen, Mytihts, qui sont loin de se ressembler. Bientôt le maître est imité par ceux des natura- listes qui écrivirent sur la Conchylidogie. Un sage et judicieux obser- vateur, Fabricius, les avait cependant prévenus de l’erreur de Linné, en prouvant que doux des espèces n’en constituent réellement qu’une seule. Malgré cet avertissement salutaire, les auteurs qui se succédè- rent conservèrent et propagèrent la mauvaise distribution des trois espèces de Linné. Les observations de Fabricius ne furent cependant pas tout à fait inutiles à quelques naturalistes du dernier siècle ; mais à mesure que l’on étudia davantage les coquilles en question , on reconnut enfin qu’elles ne pouvaient rester dans aucun des trois genres de Linné.

Bruguière qui, dans les planches de l’Encyclopédie, créa un genre Cardite, pojur rendre plus naturel celui des Cames, crut apercevoir des rapports entre ces Cardites et les trois coquilles de Linné , et en consé- quence il les plaça dans le même genre. Cette tentative imparfaite, en faisant ressortir la justesse des observations de Fabricius, avait aussi l’avantage de débarrasser les genres de Linné d’espèces parasites.

Quelques années plus tard , Poli , probablement embarrassé comme Bruguière de placer convenablement une espèce de la Méditerranée , la range, avec maladresse, parmi les Donaces. Nous disons avec mala- dresse , parce que Poli figure et décrit l’animal , et qu’ayant également décrit et figuré celui des véritables Donaces , il était plus que personne en état d’éviter une telle confusion , quand même les coquilles elles-' mêmes n’eussent pas suffi.

LKS LITHOPHAGES.

473

Un observateur judiçieux , mais qui malheureusement pour la science n’a pas continué longtemps à la servir, M. Flouriau de Bellevue , dans un très bon travail sur lés animaux lithophages des environs de La Rochelle, a proposé, en 1802, plusieurs genres parmi lesquels se distingue celui des Saxicaves, destiné à rassembler les trois coquilles dp Linné , et quelques autres que ne connut point Tillustre auteur du Systema naturœ.

Pendant la même année , Bosc faisait connaître un genre Hiatelle de Daudin , dans l’édition du Buffon de Déterville. Ce genre a été fondé pour une petite coquille figurée par Ghemnitz , et rapprochée par quel- ques conchyliologues des Cardiles et des Cypricardes ; mais examinée de nouveau , elle se distinguo à peine du Solen minutus de Linné , et elle rentre par conséquent dans le genre Saxicavo. Bientôt après M . de Roissy adopta les deux genres nouveaux, Lamarck n’en accepta d’abord qu’un seul dans sa Philosophie zoologique; en -1 812, dans l’extrait du cours, il introduisit le second dans sa méthode, les- lliatelles dans la famille des Cardiacées entre les Cardites et les Isocardes , les Saxicaves loin de dans la famille des Lithophages , instituée pour la première fois. La- marck n’a rien changé depuis à l’arrangement de ces genres lorsqu’il publia son dernier ouvrage.

Cuvier, n’ayant pas reconnu les caractères du genre Saxicave de M. Fleuriau de Bellevue , no le mentionne pas dans la première édition du JRègne animal , mais i! le remplace par un genre équivalent qu’il nomme Byssomya, Ce genre , tout à fait inutile, devra donc disparaître de la méthode; nous appuierons cette opinion de toutes les observations convenables pour la faire admettre. Cuvier accepte aussi le genre Hiatelle , mais au lieu de le rejeter loin de ses rapports naturels , il le met à côté des Byssomyes , et en cela jl améliore sa méthode.

Au moment Cuvier publiait la première édition du Règne animal , les ouvrages d’Oken n’étaient pas encore connus des zoologistes français , sans cela ils auraient cité un genre ïrus proposé par le savant Allemand, non pour le Donaæ irus de Linné , comme le nom générique pourrait le faire supposer, mais pour le Mytilus pholadis de Miilier. Ce genre , pas plus que ceux de Daudin et de Cuvier, ne peut être accepté. Il faudra rejeter également les deux genres Glycymeris et Didonla , établis par Schumacher pour les mêmes coquilles quo celles qui sont rangées dans les Saxicaves et les Hiatelles. Nous reprocherons surtout à Schumacher Tusage du nom de Glycymeris, déjà employé plusieurs fois avant lui pour des coquilles très différentes. En suivant de tels exemples, la nomenclature serait bientôt jetée dans une perturbation profonde d’où il

474 QUATORZIÈME FAMILLE.

serait difficile de la sortir. Nous passons sous silence dix à douze natu- ralistes qui ont adopté un ou plusieurs des genres que nous venons de citer, ou qui , fidèles à la méthode de Linné , ont continué à distribuer les coquilles qui nous occupent dans les Myes, les Solens et les Moules.

II semble que six genres pour un seul eii penheltant le choix aux conchÿliologues , étaient plus que suffisants ; cependant M- de Blainville, croyant trouver dans le Donax rhomboidea de Poli un animal différent des Saxicaves , des Byssomyes et des Hiatelles , en fit un genre sous le nom de Rhomboïdes ^ tout en acceptant dans son Traité de Malaco- logie les trois autres genres que noua venons do rappeler. Il est vrai que M. de Blainville range ces quatre genres, les uns à la suite des autres , dans la famille des Pyloridés , entre les Glycymères de Lamarck et les Gastrochènes.

M. Gray nous apprend , qu’en 1819 » dans son travail resté manu- scrit, M. Leach institua, ebus le nom deBiaphoHus, un genre qui correspond exactement à celui des Hiatelles de Daudin.

Dans celte histoire du genre Saxicave , le lecteur aura sans doute distingué deux phases bien distinctes : pondant la première, sous l’in- spiration de Linné, les naturalistes cherchent à conserver dans des genres anciens des coquilles qui ne leur appartiennent pas, évitant avec une réserve , dont il faut les louer, la création -de genres inutiles ou peu nécessaires à leurs yeux ; la seconde période commence par rétablissement d'un genre utile, nécessaire, celui des Saxicaves, mais bientôt commence à se montrer cet esprit novateur des naturalistes de ce siècle qui croient tout faire pour la science en inventant des noms nouveaux pour des objets fort connus et déjà noiûmés , oubliant, hélas! qu’un fait bien observé , bien constaté, est plus utile que tout ce néolo- gisme qui infecte la nomenclature scientifique. Pour ne pas sortir de notre sujet , que gagne la science à ce qu’un seul genre porte neuf noms différents? Elle y perd plutôt, car elle repousse , au lieu de l’allirer, l’homme qui l’aimerait si elle se présentait à lui grande et simple comme devrait être toute science bien faite. Pourquoi la science, au sortir des mains de Linné , a-t-elle trouvé tant d’adeptes et tant d’admirateurs enthousiastes? Parce qu’elle était ce que nous voudrions qu’elle fût restée : grande et simple. Assurément elle aurait pu conserver le cachet du génie de Linné , tout en acceptant les nombreu^s améliora- tions que le temps et l’observation ont rendues nécessaires ; mais cette progression lente et ascendante dans les connaissances humaines ne s’opère pas sans oscillations , sans action et réaction , le pendule agité ne reprend que lentement ses oscillations nniforines sOus foroe tou-

tes LlTHOPHAGES.

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jours égale qui le pousse ; Thistoire signale ces passagères perturbations qui finissent par s’amoindrir et s'eflacer dans l’ensemblè des progrès de la science. Quand on aura bien ressenti les inconvénients de l-abùs que nous déplorons, il viendra on temps ofi l'on donnera plus à Tobser- vation et moins aux néologismes des nouvelles nomenclatures. Cette digression nous éloigne de notre sujet , auquel elle se rattache cepen- dant , car le genre qui nous occupe est un exemple de plus à ajouter à tous ceux qui ont déjà passé sous nos yeux, de cette fâcheuse richesse de la synonymie générique.

Nous n’avons presque nen à ajouter pour terminer riusloii^e du genre Saxicave adopté depuis Lamarck, par le plus 'grand nombre des con- chyïioIogUes; d'autres préférèrent l’un ôu quelques uns des genres que nous avons rélégués dans la synonymie ; il est peu important de dire ici que tel auteur a choisi tel nom , plutôt que tel autre , surtout lorsque le choix n’est pas possible , si l’on veut s’astreindre à la loi équitable de la priorité. Pour ceux-là même qui voudraient admettre deux genres, il faut opter pour les Saxicaves et les Hiatelles , puisque tous les autres sont d’une date moins ancienne.

Nous Connaissons l’animal de plusieurs espèces des Saxicaves. Celui figuré par Poli , et que nous avons revu sur les côtes de l’Algérie : celui de Müller, sur lequel Fabricius a donné de précieux renseignements , et, enfin , celui de nos côtes , observé par M. Fleuriau de Bellevue, et qui 9 servi de type au genre Saxicave luî-môme. Quelques légères diffé- rences se manifestent entre ces animaux , mais nous verrons qu’elles sont sans importance et qu’elles ne sont pas de valeur à exiger la for- mation de genres distincts.

Le manteau est fermé dans toute sa circonférence , si ce n’est en avant et en bas, il présente une ouverture très petite, ovalaire, destinée au passage du pied. Nous a^ns fait remarquer dans les Gas- trochènes une large surface du manteau, occupant tout l’espace qui correspond au bâillement de la coquille; un angle aigu circonscrit cette surface. Il en existe une à peu près semblable chez les Saxicaves , seu- lement elle est beaucoup plus étroite , et elle est bordée do chaque côté par les bords saillants du manteau qui viennent afflenrer les bords de la coquille et se cacher sous le large épiderme qui la déborde de toutes parts. Cette commissure manteau s’étend d'avant en arrière dans toute la longueur du bord ventral. Dans ceux des Mollusques, qui ne j ouissent pas de la propriété de creuser la pierre , la partie mince du manteau est transparente , peu épaisse , et ne contient entre ses deux dupiicatures que le système vasculaire et l’organe sécréteur de la co-

47^ QUATORZIÈME FAMILLE.

quille. Dans les SRxicaves, cette portion du manteau est au contraire épaisse , et en cela elle ressemble à ce que nous avons vu chez les Gas- trochènes. Un organe spécial, grenu ^ envahit l’intervalle que laissent les deux membranes du manteau et vient gagner la circonférence en s’interposant entre les faisceaux fibreux du muscle orbiculaire. Cet or- gane , creusé dans sa propre substance des canaux irréguliers ^ est certainement destiné à la sécrétion d’un liquide, propre à dissoudre les pierres calcaires. Ce liquide, répandu par les bords dp manteau, est mis en contact avec la substance qu’il doit altérer, à l’aide du man- teau lui-même, susceptible d'une grande extension.

Le manteau se prolonge en arrière en deux gros siphons qui sont réunis entre eux dans la plus grande partie de leur longueur ; ainsi que dans les Myes et les Lutraires, ces organes sont protégés par -un épiderme qui les revêt dans toute leur longueur.. A leur extrémité libre, les siphons se disjoignent; mais cette disjonction se fait plus ou moins loin selon les espèces, et c’est la seule différence qui existe entre les genres Saxicaves, Byssomyeset Rhomboïdes. A ce sujet, nous devons dire que M. de Blainville s’en est laissé imposer par la figure de Poli. Cette figure, en effet, représente un animal contracté; la partie des siphons, dans laquelle ces organes sont unis, est rentrée sous le man- teau , et la figure ne montre plus que l'extrémité bifurquée des siphons. L’animal vivant se présente quelquefois avec cette apparence. Tous les observateurs savent combien les Mollusques sont -timides , lorsqu’on les a dérangés de la place qu’ils ont choisie pour y vivre. Ils se décident diffi- cilement à développer au dehors toutes leurs parties , et l’animal observé par Poli est justement l’un de ceux que nous avons eu le plus de peine à voir dans son entier développement. Si l’on compare la figure que nous en avons donnée dans V Histoire des. MoUusqoes de V Algérie avec celle du savant Napolitain , on aura de la pleine à se persuader qu’elle représente une même espèce ; car dans le nôtre, les siphons réunis à la base , sont bifurqués au sommet comme dans l’espèce de Muller, tandis que dans celle de Poli , deux siphons très courts , complètement séparés-, sem- blent terminer l’animal en arrière. C’est ainsi que se vérifie la similitude d'animaux qui paraissent dissemblables et que se justifie l’opinion nous sommes que les divers genres créés pour eux doivent disparaître d’une méthode naturelle. Dans l’espèce, obsen'ée par M. Fleuriau de Bellevue, les siphons sont à peine divisés à leur sommet: mais néan- moins les autres caractères du genre persistent et cette espèce ne saurait être séparée de ses congénères. ,

Les siphons ^ont inégaux ; le branchial est toujours le plus gros et le

LES LÏTHOPHAGBS.

477

plus long ; il se termine par une ouverture circulaire ; sur le bord de laquelle sont rangés un grand nombre de tentacules cylindriques , grêles et obtus. Le siphon anal a son ouverture garnie d’un bord membraneux , en forme de calotte, percée au sommet; un rang de tentacules s’élève à la base de cette- calotte ; ils sont plus courts et en proportion plus gros que ceux du siphon branchial.

La masse abdominale est grosse et épaisse chez les Saxicaves ; elle est surmontée en avant d’un pied allongé , cylindracé , vermiforme , qui, dans sa plus grande longueur, égale presque celle de la coquille. Le bord inférieur de ce pied présente une fente , semblable à celle qui se remarque chez les Moules , et elle aboutit à un petit crypte > dans lequel est inséré un byssus , plus ou moins considérable , selon l’âge des indi- vidus, et surtout selon leur manière de vivre. Fabricius, en effet , fait connaître un fait qui n’est pas sans importance ; il a remarqué que le Mya lyssifera , que l’on trouve en grande abondance dans les mers du Nord , est pourvu d'un byssus chez ceux des individus qui vivent dans les fentes des rochers ; mais chez ceux qui , rencontrant des roches calcaires, les percent pour s’y abriter , le byssus, devenu inutile, a disparu complètement. De sorte que ce caractère de la présence oii de l’absence du byssus qui-, au premier abord , paraît d’une grande importance, par le fait n’en a aucune.

La bouche, située au-dessous du muscle antérieur des valves, est fort grande; elle est garnie en dessus et en dessous d’une lèvre mem- braneuse , assez large , que l’on voit se terminer bientôt en une paire de palpes courtes et assez épaisses. La surface interne de ces palpes est couverte, comme à l’ordinaire, de nombreux plis membraneux très saillants.

Les branchies offrent des caractères précieux dans le genre Saxieave ; elles sont composées d’une paire de feuillets de chaque côté du corps ; ces ot'ganes sont étroits , inégaux dans leur largeur, ainsi que dans leur longueur. La paire interne s’avance jusqu’au voisinage de la bouche , et son extrémité pointue s’interpose entre les palpes labiales. Le feuillet externe commence vers le tiers antérieur de la longueur totale de l’ani- mal. Très étroit à sa naissance, ce feuillet s’élargit sensiblement à mesure qu’il arrive en arrière. Parvenus au bord postérieur de la masse abdominale , les feuillets du côté droit se réunissent à ceux du côté gauche dans la ligne médiane , et ils se prolongent ensuite très loin dans la cavité des siphons. Dans la plupart des Mollusques à siphons les ouvertures intérieures de ces organes sont à peu près sur le même plan ; dans les Pholades , chez les Solecurtes et les Clavagelles, l’ou-

478 QUATORZIÈME FÂMÏULE.

verture du siphon anal est coupée très obliquement; de sorte que cette onverture , en s’allongeant . permet aux branchies de descendre devant elle et de prendre un développement beaucoup plus considé- rable qu'elles ne le pourraient sans cette disposition particulière. Les branchies des Saxicaves sont disposées exactement de même; elles viennent se souder au pourtour d'une ouverture très allongée et très oblique , et cette soudure est solide et permanente même après la mort de l'animal. Cependant il arrive chez les animaux qui nous occupent, qu'à la mort, les branchies se disjoignent dans la ligne médiane, ou du moins ces organes sont très faciles à séparer dans ce point, tandis que chez d’autres cette séparation ne peut se produire que par une dé- chirure irrégulière .

Les coquilles du genre Saxicave sont allongées , transverses , étroites , très .inéquilatérales , souvent irrégulières et inéquiv alves ; leur surface extérieure est revêtue d'un épiderme grossier, quelquefois écailleux, d’un brun verdâtre ou jaunâtre, facile à détacher, lorsque la coquille est desséchée. Des sillons ou des rides transverses , résultant d'accroisse- ments irréguliers, se montrent à la surface de cette coquille. Â l’inté- rieur, elles sont blanches ; on y remarque deux impressions musculaires très écartées l'une de l'autre ; l’antérieure , ovale , obronde , occupe la hauteur de l’extrémité antérieure de la coquille. La postérieure , circu- laire, est située près de l'extrémité du bord supérieur et postérieur. L'impression palléale se montre d'une manière très nette dans certaines espèces ; chez d’autres , elle consiste en une série de petites impressions musculaires détachées, comparables, à celles des Pandores . Une sinuosité postérieure profonde se dessine dans l’intérieur des valves; tantét d’une manière nette et continue., tantôt par une série de petites impressions détachées les udqs des autres. U y a môme de vieux individus chez lesquels le» petites impressions disparaissent, et on n’en trouve plus que deux grandes qui convergent Tune vers l'autre , mais qui sont complètement isolées, Il semblerait que chez ces individus le mqscle rétracteur deg siphons n’est plue adhérent par touto sa circonférence , mais qu’il est partagé en deux principaux faisceaux, qui viennent s’attacher sur la coquille aux deux points que nous venons d’indiquer.

La charnière est extrêmement simple; dans le plus grand nombre des espèces, elle consiste en un bourrelet hsse , terminé en avant par un tubercule peu saillant, et qui remplace les dents cardinales. Cependant il existe des espèces l’on voit ce tubercule se découper plus nette- ment en une dont cardinale, et alors cette dent est reçue dans une fos- sette de la valve opposée. Pnfîn , dans les espèces pourvues de deux

LES LITHOPSÀOES.

479

angles en arrière , la dent cardinale devient plus saillante encore , et ce sont ces espèces qui rentrent dans le genre Hiatelle de Daudin. Le Donax rhombo'idea de Poli , avec lequel M. de Blainville a fait son genre Rhomboïde ^ appartient à ce groupe particulier des Saxicave^. L’examen attentif de l’animal nous a prouvé qu’il conserve tous les caractères des autres Saxicaves. Toutes les coquilles de ce genre ne sont par parfaite- ment closes ; elles restent bâillantes en avant et en arrière ; un ligament, assez épais , fortement attaché sur les nymphes épaisses et rugueuses , réunit solidement les valves , et, par sa solidité, supplée à l'imperfec- tion de la charnière.

Les Saxicaves sont des coquilles d’un médiocre volume , presque toutes sont propres aux régions tempérées et septentrionales de l’hémi- sphère nord de la terre. Cependant ;\t. Guming en a rapporté trois espèces de l’Amérique méridionale, auxquelles M. d’Orbigny en a ajouté une quatrième. Au retour de son second voyage de circumnavi- gation, M . Quoy nous a communiqué une espèce très voisine de l’Arc tica, provenant de la Nouvelle-Zélande; il en existe également une espèce à Rio-Janeiro. Nous en devons la connaissance à un navigateur instruit M. Martin, auquel la science conchyliologique est redevable d’inté- ressantes découvertes. Il est une espèce, le Mya arcticaÛQ Fabricius , qui paraît commune aux mers septentrionales de l’Europe et de l'Amé- rique. Le nombre des espèces connues est peu considérable ; douze à quatorze sont inscrites dans les Catalogues; mais il est à présumer que ce nombre diminuera lorsqu’on aura pu les examiner avec attention et les comparer entre elles. II. faudra d’abord en éloigner le Byssomya Guerini de M. Payraudeau. Cette coquille, en effet, malgré son irrégu- larité, présent© tous les caractères des Gypricardes. Elle en a la char- nière et l’impression palléale, elle diffère donc en cela des Saxicaves.

Les Saxicaves fossiles ne sont guère plus nombreuses que les vivantes. M. Deslougcbamps en a fait connaître dans les terrains oplitiques du Calvados ; ce sont les premières qui paraissent à la surface de la terre. On retrouve ce genre dans les terrains crétacés , et il remonte dans les terrains tertiaires, se distribuant dans les trois étages principaux de ces terrains. Nous en connaissons cinq espèces dans le bassin de Paris ; trois dans les terrains tertiaires moyens et deux seulement dans les terrains tertiaires inférieurs. Ces doux dernières ont leurs analogues vivants dans la nature actuelle ; l’une , le Sa3>icava arcUca , qui vit dans la Méditerranée et qui est fossile en Italie et en Sicile. L’autre est le Saxicava rugosa , qui vit dans Ips mers du Nord t qui se trouve à l’état fossile dans les terrains tertiaires récents de la Suède et de la Nûrwége.

48o QUATORZIÈME FAMILLE.

Saxicava arctica , Phil. Vivante dans TOcéan d’Europe depuis la Norwége jusque dans la Méditerranée, et qui, d’après M, Krauss , franchissant l'Océan Atlantique dans toute la longueur de l’Afrique , se trouverait au cap de Bonne-Espé- rance.

Fossile dans le Grag de la Belgique , en Italie , dans les terrains subapenniens, et dans les terrains plus récente de la Nor- wége et de la Sicile.

2°Saxicava rugosa, Lâmk. Vivante dans les mers du nord de l'Europe, au Groenland, dans les mers tempérées de l’Eu- rope , . la Méditerranée ?

Fossile dans le Grag d’Angleterre et dans les terrains récents de la Norwége , Udvalla , etc.

1, Saxicave arctique. >Saa:zcam Philippi.

PI. 12. f. 8. 9.

S. testa ohlongo-transversa y inœquii>ciîvt , înœquilateraïi y ci^îiv^xius- culây hiancCy albo-griseây irreguîariter transversim striata y latere antico triincato y brevissimo y postico laiiorcy carinis duobits serralo dentatis ad apicetn converge ntibus predito; cardine ttnidentato y altero bidentato^

ûrcrncfl. Linné. Syst. nat. éd. la*. p. tu 3.

Müller, Fauna danica prodromus. 2963,

Solen minntus, Linné. Sysl. nal. éd. la». p. iii5.

Mya arctica. Fabricius. Faun. Groènl. p. 407, 408.

Donax rkomboidéa. Poli. Test, Sicil. l. 2. p. 81; t, i. pl. 14. f. pl. i5. f, 12. 'i3;. 16.

Solen minuttts, Cheranitz. Concli, cab. t. 6, p. 67, pl. 6. f. 5r, 52.

Id. Sclirœter. Einl. t. 2 - p. 032.

2d. Gmelin. Syst. nat. p. 3226. ïi.

Id. Montagii. Testac. brit. p. 53. pl. i, f. 4. "

Cardita arctica, Brug. Ency. méth. vers. t. i. p. 44* n* 1 1 . pl. 234* f. 4* Mytilus prœcisits, Mootagti. loc. cit. p. i65. pl. 4* f* 2.

Solen minutus, Wood. Gen. conch. p. i3g. pl. 34. f. 5, 6,

Id, Dillwyn. Descr. cal. t. i, p; 69. 3o.

Id, Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 453. n* lo.

Mya arctica, Turtoiii Conch. dict. p. ro4. 17. lïo/en minuruf. Turton.'loc. cit. p. 161. n* 6.

r.BS LITHOPHAGES.

48,1

Hyntella arctica, Lamk, loc. cit. t..6, p, 3o.

Hratella minnea» Turtou. Concli. ins. bril. p. 24. pl, 2, f. 12. Anatina arctica, Turton. loc. cit. jv 49. pl. 4. f. 7, 8, ilytUus /»ra?cw/«. Gcrville. Cat. des coq, de la Manche, p; 32. 6. Rhomboides rttgosvs, Blainville, Malac. p, 573. pl. 80, f. C,

Sofen minutus» Wood. Index, test.pl. 3. f. 35,

Carâita îithophageila. Da Cosla. Cat. sysl. p. 42.

Hyatella arctica. liêsh., Ency, méthJvers. l. 2. p. 272. i.

Saxicava arctica, Philippi. Enuni. moll. Sic. t.* i. p. 20. pl. 3. f. 3; t. 2. p. 19. I.

Saxicava rhomboides, Desli. dans Lamk, An. s. vert. .2® éd. t. 6.. p. i53. ü® 7*

Rhomboides rugosiis. Scacchi. Cat, conch. regn. Neap. p. 5,

Saxicava arctica. Forbes. Rep. oegcan. invert. p,. i43^ arc/ica. Hauley. Descr. cat. p. i5o.

Saxicava arctica. Verani, Cal. des invert. p. i3,

Id, .Forbes. Malac. monen. p. 56. 2.

Hyatella arctica, Fleming. Brit. shell. p. 4.6 674.

Id, Jeffreys. Malac. and conch, niag. n" 2. p, 4^. >

Krauss, Sudafrican. Moll. p. 2?

Saxicava arctica, Mac Gillivray. Moll, aiiim. of Scoll. p. 247 et 2^5. //y atelia arctica. 'ïUorpe, Brit. mar. conch. p, 59.

Saxicava arctica. Lovèu, Ind. Moll. Scand. p. 40.. 295.

FossîUs. Nysl. foss. delaBeIg.p. 96. 54.pl. 3. f. i5.

An Mya elongata, Broccbi. Conch. foss . subapp. t. 2. p. 029* pl. 1 2 . f. 1 4 . Bronn. Kal. tert. Gebil. p. 91.

Saxicava arctica. Philippi. Enum. molI.Sicil. p.^o. n®i. l. 2, p. 19. n®i .

2d. Sismonda. Synop. an. 'pedem. foss. p. 20. 1.

blytihts carinatus. Goldfuss. Petr. Germ. t. 2. p. 179. pl. j3i. f. 14.

La synonymie de cette espèce prouve combien naturalistes ont eu d’incertitude à son -égard. Ayant sous les yeux une coquille émi- nemment variable^ provenant de localités très diverses, ils ont cru retrouver en elle des espèces distinctes , appartenant à plusieurs genres différents. Aujourd’hui , eu rassemblant les documents qui la concernent, il devient plus facile de rectifierjes erreurs, commises autrefois par les naturalistes qui, en les commettant, ont transmis de précieux renseignements. On ne s’attendait pas à voir un Mollusque habiter depuis les régions polaires jusque dans les régions chaudes de l’Europe, et subir des conditions d’habitation que d’autres animaux de T, T. PARTIE. 3l*

48?. QUATORZIÈME FAMILLE.

la môme classe ne peuvent Bupporter. Les exeniples de ces Mollusques , passant des régions froides aux régions chaudes, s’étant multipliés à mesure que les observations sont devenues plus exactes, il ne faut pas s’étonner de ce que la Saxicave arctique occupe un «i vaste espace dans les mers de l'Europe.

Cette coquille est allongée , étroite, inéquivalve et très inéquilaté- rale, très souvent elle est devenue irrégulière par la gêne qu’elle a éprouvée dans les fentes des rochers qu’elle habite. Les valves sont bâil - lantes en avant et eii arrière ; la droite est la plus profonde , et souvent vers Textrémité antérieure, elle présente une inllexion qui est due à la présence du byssus. Le coté antérieur est extrêmement court , tronqué obliquement, quelquefois même perpendiculairement; le côté postérieur, un peu plus large, est lui-même tronqué obliquement à son extrémité. Ce côté postérieur» Rplati , porte deux angles peu saillants , convergents vers le sommet, et -sur lesquels s’élèvent de •petites écailles. Toute la sürface extérieure est couverte d’un épiderme d’un brun grisâtre, qui déborde de beaucoup la circonférence des valves et sert à cacher une' portion assez considérable des bords du manteau. A l’extérieur, (a coquille est d’un blanc jaunâtre ; une char- nière, très étroite, porte ordinairement .une seule dent sur chaque valve ; souvent ces dents sont obsolètes et presque entièrement effacées. C’est un individu dans eet état que M. Turton a placé^dans le genre .\nalîne , croyant que la petite cavité cardinale . située sous les cro- chets, était destinée à recevoir un ligament interne. Mais M. Turton aurait été détrompé s’il avait fait attention à la nymphe épaisse, desti- née à recevoir un ligament externe.

Depuis Fabricius, on sait que cette coquille est fort abondante dans les mers du Nord ; elle est plus rare dans les régions-tempérées des mers de l'Europe; elle paraît moins abondante encore dans la Méditerranée. Observée par Poli , ce naturaliste la rapporta au genre Donace , tout en faisant voir combien l’animal est différent de celui, dés véritables Do- naces. Cette coquille-est fossile dans les terrains récents do la Nôrwége et dans cèux de la Sicile et de ritalie. M. N.yst la cite dans le Ctag des environs d’Anvers ; elle est probablement aussi dans c^ui d’Angleterre.

LES LITHOPHAGES.

48 '5

2. Saxicave gallicane. Saxîcava gdlUcana. Lamk.

PI. 12. f. 1. 2. S. 4.

«

s. testa ovato-oblohgâ^ üicequilateraUy anticè obtusâ, postieè truncàtâ , latere antico brevi^ valvults hiantibus snba^nalibus posticè depressis , irregtilariter striata rugosis ^ cardine edenttélo,

tiamarcky An. s. vert. t. 5, p. Soi. n* a,

^xicave .striée. Fleuriâu de Bellévue, Mém. s. 1. Mol!, lith. Journ. d e physique, an A., p. 5.

Hanleÿ. Descript, ïal, p, 5o. Saxîcava rngosa, var.

Wood, Ind. te.stac. siippl. pl. 9. f. 5. '

Avant d’avoir vu l'animal de cette espèce > nous avons eu quelques doutes sur sa valeur, et nous avons cru avec M. Hanley qu’elle devait constituer une variété du Sajrtcaua rugosa. Nous rappellerons que l’animal du Swcavcp rugosa , ûg-uré par MüUer dans.le Fauua danica , est terminé en arrière en un très gros siphon assez profondément bifur- qué au sommet. Nous avons une figure’ fâile d'après l’animal vivant du Saxicava gallicana, et dans celte espèce les siphons , moins allongés , sont à peine bifurqués au sommet. Cette différence nous paraît suffisante pour-la constatation des deux espèces distinctes , .et aujourd'hui cesse pour nous le .doute que nous éprouvions encore ij y a quelques années. Au reste, en examinant un grand nombre d’individus des coquilles de? deux espèces on reconnaît entre elles des différences constantes , qui , quoique d’une faible valeur, viennent confirmer celles qui existent entre les animaux.

La Saxkava galUcttna est allongée , transverso , subéquivalve , très inéquilatérale et subcylind racée, à la manière desModioles lithophages. Les valves sont bâillantes en avant et. en arrière. Eïlps sont épaisses et solides. Les crochets, peu saillants, sont opposés et très rapprochés ; en arrière , sur le bord dorsal , un sillon profond sépare une nymphe calleuse épaisse , destinée à recevoir un ligament externe. Le côté postérieur présente un méplat assez sensible , limité par un angle exces"- sivement obtus , qui s’étend obliquement du crochet à l'angle inférieur et postérieur des valves. Ce méplat existe aussi dans le Saxicava rugosa, mais il y est beaucoup moins apparent. L’extrémité antérieure des valves est arrondie , obtuse; l’extrémité postérieure est tronquée per-^ pêndicuMrement à l’axe transVerse , et elle est aussi large que l’extré- mité antérieure. La surface èitérieure est irrégulièrement striée par des accroissements; elle est revêtue d*un épiderme d’un brun grisâtre, 3i*

434 QUATORZIÈME FAMILLE.

mince et caduc. A l’intérieur, la coquille est d’un blanc jaunâtre; sa charnière est sans dent , et lorsque le bord cardinal n’est point corrodé par un empiètement du ligament, il offre une callosité simple , légère- ment infléchie , qui vient se continuer avec la nymphe. Cette espèce nous offre un exemple du rôle que doit jouer. le byssus chez ces animaux. En effet, les individus qui se logent dans les pierres tendres des environs de La Rochelle, sont toujours dépourvus du byssus , tandis que ceux qui se logent dans les fissures des rochers y sont suspendus par un byssus plus ou moins épais selon l'âge des individus. Si de nouvelles observa- tions venaient à constater la variabilité dans la proportion des siphons , il faudrait alors joindre la Saxicave gallicane à la Saxicave fugueuse, et confondre la synonymie des deux espèces.

GENRE QUARANTE-TROISIÈME

FETJEUCOIÆ. Petrîcola, (Lamk.)

PL la. L 7. 10. 1 1. 12.

. CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovule , épais ; les lobes du manteau, à bords simples réunis, laissant entre eux en avant et en bas, une très petite fente, pour le passage d’un pied allongé, étroit, pointu; une expansion palléale assez épaisse se renversant sur les bords antérieur et inférieur de la coquille; les deux siphons postérieurs, réunis à la base, sé- parés au sommet; siphon anal ayant son ouverture garnie d’une série de tentacules simples et cylindracés ; siphon bran- chial plus gros et plus long , portant sur le bord de son ouver- ture des tentacules branchus inégaux et symétriques. Branchies courtes, sub-quadrangulaires , à peine réunies en arrière de l’abdomen.

Coquille subtrigonè ou transverse inéquilatérale , arrondie antérieurement , atténuée ou baillante du côté postérieur. Char- nière ayant deux dents sur chaque valve ou sur une seule. Impression palléale placée très haut dans l’intérieur des valves très largement ouverte du- côté postérieur.

LES LITHOPHAGES.

480

SYNONYMIE tfKNÉHiQXT^. if 2/z'z7t/..ç , Cheiïinitz , Schiœter, Gmelin, Dillwyn , Wood. Tellina, Olivi , Poli,^ Hy- pogœa, Poli.' Rupellarîa, Fleuriau de Belleviie, de Roissy, Lamarck (olim). Venv^ , Retzius , Gmelin, Brocchi. 31ycL, Montngu. Petricola , Lamarçk, Roissy, Cuvier, Rang , Menkn , Sowerby , Philippi , Anton . Gould , Swainson , Hanley', etc.

OBSERVATIONS. Le gGiiro Pélricole a été proposé par Lamarck., en '1802, dans \e Sijsième des animanx sans vertèbres, pour rassembler diverses coquilles disséminées par Schrocter, Crmelin et Chemnitz, parmi les ÏVuws et les^ Mylihts. Sous cette dénomination générique , Lamarck comprenait deux sortes de coquilles. Les unes ayant trois dents à la charnière, les autres n’en ayant jamais que deux. Mais, d’après les exemples que Lamarck propose, le hasard a voulu qu’il citftt uniquement des espèces à trois dents cardinales. A peu près à la même époque , M. Fleuriau de Belleviie, dans son mémoire que nous avons précédemment cité, avec l’éloge qu'il mérite, a proposé un genre Ru- pellaire , coïncidant en partie à celui des Pétricoles de Lamarck, mais ne contenant que celles des espèces qui portent deux dents à la char- nière. Ainsi. M. de Roissy avait raison d’adopter dans le Buffon de Sonnini, les deux genres Pétricole et Rupellaire. Lamarck lui-même les introduisit dans sa méthode, publiée en '184 2, dans l’extrait du cours. Mais bientôt après, faisant une revue des divers genres admis par lui dans sa famille des Lithophages, il distribua les espèces entre deux genres pour. lesquels il consacra définitivement les noms de Pétri- cole et Vénérupe. Dès lors les Pétricoles ne continrent plus que les espèces à deux dents cardinales sur chaque valve ; par conséquent ce genre correspond , avec la plus rigoureuse exactitude , aux Rupellaires de M. Fleuriau de Bellevue. Lamarck se serait montré plus équitable, si dans les changements qu'il a proposés dans la nomenclature, il avait conservé le genre Rupellaire, en consacrant le nom de Saxicave au genre que plus tard il nomma Vénérupe.

Dans le Règne animal, Cuvier conserva au genre Pétricole l’étendue que Lamarck lui avait d’abord imposée. Entraîné par les rapports évi- dents qui existent entre ce genre et le type des Vénus , Cuvier le laissa dans la môme famille , à la suite desCapsos. M. de Blainviiio, dans son Traité de malacologie , .n'SippoHa pas de modifications importantes à l’opinion de Cuvier; il joignit les Pétricoles aux Vénérupes, conserva

486 QUATORZIÈME FAMILLE.

ce dernier nom générique, et l’introduisit dans la famille des Ghonca- cées, dans une section parliculièrej comprenant les Vénérupes, les Coralliophages , les Clothos , les Corbules , les Sphènes et enfin , les Ongulines.

Les modifications , proposées par Lamarck dans la 'constitution de son genre Pétncole , furent adoptées par le plus grand nombre des con- chyliologues. Ils reconnurent en lut un genre plus net, mieux circou' scrit , et prenant naturellement sa place dans le voisinage de la famille des Vénus , se distinguant très nettement des Saxicaves , qui doivent redescendre vers la famille des Tubicollées.

Les rapports du genre qui' nous occupe ont peu varié depuis sa créa- tion. Nous voyons, d’un côté , Lamarck le maintenir dans le voisinage des Tellines , et d’uri autre côté, Cuvier le rapprocher des Vénus. L’une et l’autre opinion ne sont pas tellement différentes qu’elles ne puissent se concilier, au moyen d’une opinion mitoyenne, par laquelle le genre prendrait sa place dans la famille des Lilhophages, que Ton mettrait en rapport plus immédiat avec celle des Vénus, en l’éloignanl, par conséquent , plus que ne l’a fait Lamarck de celle des Tellines. En effet, les animaux de ce genre offrent des caractères qui les rattachent au type des Vénus, ainsi que nous allons l’exposer bientôt.

Dans un mémoire, publié en 1846, dans la fîavue zoologique, M. Recluz s’est attaché à retracer minutieusement Thistoire de la fa- mille des Lilhophages de Latnarck et de tous les genres qui s’y ratta- chent; soit qu’ils y fussent mentionnés par notre célèbre naturaliste, soit qu'ils fussent mentionnés par d’autres auteurs. Ce mémoire de M. Recluz est d’hne grande importance pour la connaissance exacte des genres dont il est question , et surtout des modifications que lui ont fait subir les divers c\lassificateurs. Nous ne suivrons pas l'auteur dans le développement qu’il croit nécessaire à son sujet ; nous ferons remarquer seulement qu'il propose une classification qui se rapproche -, à quelques égards, de celle de Cuvier, et plus particulièrement de celle que nous avons définitivement adoptée et que nous venons d'exposer en traitant de la famille des Lilhophages. Celle distribution des genres n’est pas celle que nous avions préférée en 1830, lorsque nous avons publié notre Tabieau de classification dans l'Encyclopédie méthodique. Obligé , à cette époque , de nous en rapporter au petit nombre de documents que possé- dait la science à l’égard des Mollusques lithophages, n’ayant pas sous les yeux les animaux de plusieurs espèces des genres Saxicave, Pétri- cole et Vénérupe , forcé de nous arrêter à des caractères extérieurs d’une faible importance, il nous semblait v<^ les trois genres so ratta-

LES LITHOPHAGES.

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cher les uïis aux autres autant par les caractères de leur coquille que par ceux des animaux. Nous apercevions ce phénomène de Tagrandis- sement successif de l'ouverlure antérieure du-manteau depuis les Saxi- caves jusqu’aux VénérupeS. Nous apercevions également de l’analogie dans la forme et la grandeur du pied et des siphons et de ces caractères trop généraux ; nous avons conclu au maintien intégral de k famille des Lithôphages. M. Recluz , par une série d’observations aussi justes qu’intéressantes , conclut, au contraire, à la séparation des Saxicaves des autres Lithôphages, et au rapprochement des Pèlriooles du type des Vénus. En cela , M. Recluz se trouve complètement d'accord avec nous , depuis que nous nous sommes éclairé par l’observation directe des animaux vivante des trois genres de la famille des Lithôphages de Latnarçk.

Les coquilles du genre Pétricole sont ovales , transverses inéquila- térales , subcunéiformes , quelquefois allongées et subcylindracées ; elles sont généralement peu épaisses , par conséquent fragiles ; elles offrent souvent des irrégularités, qui résultent de leur manière de vivre, se trouvant quelquefois gênées dans les trous des pierres qu’elles se creu- sent. Les valves sont bâillantes en avant et en arrière ; les bords en Sont simples et tranchants. La surface externe tantôt lisse, tantôt striée, soit en long, soit en travers, est presque toujours dépourvue d’épiderme. Cependant il est des espèces chez lesquelles un épiderme mince et trans- parent recouvre une partie plus ou moins considérable de la surface extérieure de la coquille. La charnière est très simple, elle consiste en deux dents cardinales sur chaque valve; ces dents sont presque égales., recourbées en crochets, et l'imo d’elles, l’antérieure de la valvë gau- che , la postérieure de la valve droite , est bifide au sommet.

Lamarck a fait connaître sous le nom de Petrioola p/to/adi/bmîs une coquille fort singulière , près de laquelle se rangent aujourd’hui cinq ou six autres espèces très analogues. Nous avions pensé d’abord que ce groupe devait constituer un genre particulier, mais ayant pu comparer l’animal de celle espèce avec celui de nos Pétricoles de la Méditerranée, nous avons reconnu ridentitéde leur caractère générique, etdèslors nous avons laissé , à l’exemple de Lamarck , iQ Petncolaphoîadiformis dans le genre Pétricole. La charnière de cette coquille nous offre des différences assez considérables avec celle des autres espèces du même genre. Sur un bord cardinal très étroit, les deux dents cardinales se contournent, en partant sous la forme de petites côtes du sommet intérieur des cro- chets. Si ces dents étaient plus détachées , elles auraient la plus grande analogie avec le cuilleron intérieur que l’on voit dans l’intérieur des

QÜATOKZiEME FAMILLE.

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P holades. C’est en nous aidant des particularités remarquables de cette charnière , que nous avons cherché à expliquer le cuilleron saillant des Pholades, en le considérant comme une dent cardinale entièrement dé- tachée du bord dorsal , libre dans toute son étendue et plongée dans l’épaisseur des viscères de l’animal, Ici, plus rapprochée du bord , la dent cardinale s’y est soudée par une de ses surfaces , et elle est venue présenter son extrémité saillante au niveau du bord dorsal , de manière à se mettre en contact avec la dent semblable de la valve opposée.

Un ligament extérieur, peu épais, s’allonge sur une partie du bord dorsal postérieur, il stittache sur des .nymphes médiocres, étroites, et séparées par un sillon profond , dans lequel est reçue sa tunique fl hpouse externe. Les impressions musculaires sont médiocres , l'an- t érieure est ovalaire ; elle se place obliquement de hauten bas et d'avant en arrière dans toute la hauteur du bord antérieur de la coquille. L’im- pression musculaire postérieure est située à égale distance de la char- nière et de Pexlrémilé postérieure de la coquille. Elle est circulaire et à peine modifiée par une petite impression située vers son bord supérieur, et sur laquelle s’attache le muscle retracteur postérieur du pied. L’im- pression pailéale présente, dans les Pétricoles, des caractères généri- que.s d’iineassez grande valeur; elle se détache de l’extrémité inférieure du muscle antérieur, et elle descend obliquement d’avant en arrière, en se rapprochant insensiblement du bord inférieur des valves. Par- venue vers le milieu de la longueur de ce bord , elle s’infléchit sur elle- même et vient tracer dans l’intérieur des valves une large sinuosité, qui remmite jusqu’à une ligne qui tomberait perpendiculairement de la charnière sur le bord ventral. L'ouverture de cette sinuosité est extrêr- mcmenl large , et l’on reconnaît qu'elle doit recevoir un muscle rétrac- teur puissant, dont la base doit embrasser toute Iji largeur des siphons réunis. Dans le Petricola pholadiformis et les autres espèces du même groupe, l'impression pailéale a subi quelques modifications intéressantes ; elle est plus courte, remonte moins haut dans l’intérieur des valves et son ouverture postérieure est moins élargie; mais dans ce groupe, ainsi que dans le précédent, persiste ce caractère particulier au genre d’une échancrure p2\Iléale, courte, triangulaire, largement ouverte en arrière , ayant son extrémité ventrale moins avancée que celle qui aboutit à l’impression musculaire postérieure.

L'animal des Pétricoles offre des caractères qui le distinguent bien nettement de tous les autres genres connus et qui l’éloignent à la fpis du type des Tellines , dont Lamarck l’avait rapproché , et de celui des Saxicayes vers lequel M. Reeve l’avait entraîné. La forme de la coquille

V

LES LiTHÜPHÀüES.

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reproduit exactement celle de l’animal; il est subtrigone et cunéiforme dans nos espèces des mers d’Europe; il est pins allongé, subcylia- drique dans les espèces du second groupe , qui proviennent des mers du Chili et du Pérou.

Un manteau , beaucoup plus épais que celui des Tellines , enveloppe l'animal et revêt la surface interne des valves. La circonférence de net organe, contient un muscle orbicùlaire, large, assez, épais, dont l’in- sertion trace sur la coquille la portion de l’impression palléale qui occupe la circonférence. Les bords du manteau sont simples, et dé- pourvus de tentacules; cet organe se dédouble sur les bords comme dans tous les autres Mollusques acéphalés ; la duplicature interne reste attachée aux bords de la coquille et en suit exactement le contour. L'autre bord qui, dans les Tellines par exemple, est tentaculifère , acquiert dans les Pétricoles une étendue et une épaisseur inusitées ; aussi il se renverse en dehors sur les bords des valves elles revêt depuis la moitié du bord antérieur jusque, vers l’extrémité. du bord postérieur ventral. Cette portion exsertile du manteau a une apparence particu- lière ; elle est lisse , jaunâtre , opaque , et lorsque l'on vient à en faire la dissection , on reconnaît en elle cette structure granuleuse qui est propre à J,oas les organes sécréteurs des Mollusques acéphalés. La sub- stance parenchymateuse de l’organe est creusée de canaux nombreux , irréguliers , qui paraissent dépourvus de parois propres et qui vont constamment en grandissant vers les bords libres. Il y a plus; l’organe situé entre le? parois de ce bord saillant du manteau se continue entre les fibres du muscle orbicùlaire et vient s'étendre entre les parois de la portion .mince du manteau; de sorte que dans les animaux dont il est question , cet organe spécial acquiert un développement dont nous ne trouvons d’analogie que dans le manteau des G&strochènes et des Saxicaves.

Le long de la ligne médiane et ventrale j les deux lobes du manteau sont réunis, et par cette réunion, forment une zone assez large, en avant de laquelle se montre une ouverture ovalaire, en forme de boutonnière, et dont rétendue est à peine, d’un sixième de la longueur du bord infé- rieur. Cette ouverture est destinéè à donner passage au pied. En arrière, le manteau se prolonge en deux siphons , réunis à la base dans, une très petite portion de leur étendue. Ces organes méritent une attention par- ticulière, car ils concourent à fournir au genre des caractères distinctifs d’une grande valeur. Les siphons sont inégaux, et, comme à l'ordinaire, c’est le siphon branchial qui est le plus gros et le plus, allongé; il .est subcylindracé et il se termine par une ouverture circulaire, sur le bord

QUATORZIEME FAMILLE.

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de laquelle s’élèvènt de nombreux tentacules , découpés en arbuscules et disposés ayec la plus grande symétrie. Ces tentacules ne sont pas égaux, un plus petit s’interpose entre les plus grands, et ordinaire- ment ranimai les incline au-dessus de l’ouverture, qui se trouve ainsi obstruée par des organes d'une exquise sensibilité. Ces tentacules va- rient selon les espèces, par la forme, la grandeur et le nombre. Le siphon anal est conoïde;^ son ouverture terminale est beaucoup plus étroite que sa base , et cette ouverture est garnie d’un seul rang de tentacuîes simples èt cylindracés.

On muscle rétracteur, triangulaire et assez épais embrasse la base des deux;sipTions , glisse entre les deux membranes du manteau, et vient s*attacher à l'intérieur de la coquille il laisse l’échancrure pailéale dont nous avons parlé.

La masse abdominale des Pétricoles est courte et épaisse ; ses parois fibreuses, fort minces, se continuent, en avant, en un pied petit, à base triangulaire et aplatie et so prolongeant en avant en une pointe aiguë. Entre le bord antérieur de l’abdomen- et la face interne du muscle adducteur antérieur se trouve une petite bouche transverse, garnie d’une paire de lèvres membraneuses courtes et étroites. Ces lèvres aboutissent de chaque côté de l’animal à une paire de palpes labiales, petites , triangulaires , dont la surface interne est couverte de très fines lamelles. Ces palpes sont égales , elles sont attachées par leur bord supérieur; la palpe externe se continue par sa base "avec le manteau.

Les organes branchiaux sont très différents de ceux Ses Saxicaves, et surtout de ceux des' Tellines ; ils ressemblent beaucoup plus à ceux des Vénus ; ils se composent de deux feuillets inégaux, appliqués l’un sur Tautre , ayant dans leur ensemble une forme ovalaire , ils descen- dent obliquement de chaque côté de l’anima! de haut en bas et d’avant en arrière. La paire interne est d’environ un tiers plus large que la paire externe; ces Organes, assez régulièrement plissés dans leur largeur, sont fort minces , et si on examine leur surface à un grossissement suffisant, on trouve un nombre considérable de stries transverses, coupées en angles droits par des stries longitudinales. Ces stries sont produites par des vaisseaux capillaires d'uno extrême ténuité, qui couvrent toute la surface de l’organe, reçoivent le sang et le mettent en contact avec le liquide ambiant. Par leur base , les feuillets bran- chiaux sont attachés de chaque côté du corps et s’élèvent jusque dans la région du cœur, avec les oreillettes duquel ils se mettent en conti- nuité. La brièveté la masse abdominale permet aux branchies de se réunir sur la ligne médiane dans un très court trajet , suffisant cepen-

LES LITHOPHAGES.

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dant pour se placer devant l'ouverture du siphon anal et se souder a son pourtour ; aussi dans ce genre, comme dans tous ceux que nous avons examinés jusquMcî, la cavité du siphon anal, complétée par l’or- gane branchial , n’a aucune communication avec la grande cavité du manteau. *

L’extrémité antérieure du feuillet branchial interne se rétrécit assez subitement en un bec aigu, que l’on voit se prolonger jusque vers la bouche, en se plaçant entre les palpes labiales.

Nous avons fait remarquer dans d'autres genres la disposition parti- culière des valvules du manteau et de celles qui forment plus ou moins complètement l’ouverture intérieure du siphon branchial. Dans les Pé- Iricoles, la valvule' palléale n’existe pas, mais une valvule très large, circulaire et percée vers le centre , couvre l'ouverture interne du siphon branchial; lorsque l’on parvient à examiner, sur l’animal vivant, les mouvements quelquefois rapides de cette valvule, iis peuvent se com- parer à ceux de la pupille de l'œil des animaux vertébrés.

Cette description abrégée que nous venons de présenter de l’animai des Pétricoles s’applique exactement à nos espèces de la Méditerranée et de l’Océan, européen. Nous avons retrouvé de semblables caractères dans les espèces allongées et cylindriques qui proviennent des mers de l’Amérique méridionale. Mais nos observations faites sur des animaux , plongés sans précaution dans une liqueur alcoolique, nous laissaient le désir de voir des Bgures de ces animaux vivants. Nous espérions les voir dans l’ouvrage de M. d'Orbigny, Pot/age dans V Amérique méri- dionale; mais noos avons été singulièrement déçu , en ne trouvant dans cet ouvrage que des figures d’une malheureuse insuffisance. Il semble que les animaux, observés par M. d’Orbigny, ont été découpés par la nature dans le métal le plus dur; il semble aussi qu’on n'oserait les toucher sans être blessé par leurs contours tranchants ou piquants ; aussi le scalpel de l’auteur, arrêté sans doute par une résistance inac- coutumée, a à peine détaché un petit lambeau du manteau-, pour laisser apercevoir quelques portions des organes que cache celte enveloppe générale. Il est résulté de cette timidité de la dissection, que les figures de M. d'Orbigny n'apprennent rien de plus que ce que l'on savait déjà.

Ce que nous venons d’exposer de l’animal des Pétricoles , nous donne la preuve que ce genre constitue en réalité un type bien distinct parmi les Mollusques de la même clasâe. Si le manteau est épais , comme dans les Saxicaves, il déborde la coquille, et par il diffère de tous les autres genres connus. Son ouverture antérieure, un peu plus grande que dans le genre que nous venons de citer, est beaucoup plus petite

QüATüUZlÈaiE FAMILLE.

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que celle des Vénèrupes et des Vénus, et plus petite aussi que celle des Tellines , des Donaces , dés Psammobies. Si , dans une classiGcation on voulait uniquement s'attacher à la progression qui so manifeste insensi- blement dans l’étendue de l'ouverture palléale , les Pétricoles devraient descendre très en arrière des groupes précédents, pour se placer dans le voisinage des Solens et même des Saxicaves. Maismne classification naturelle ne peut s’établir d'après un caractère exclusif, elle doit se fonder sur l’ensemble de l’organisation, et c’est alors que le zoologiste doit , non seulement compter les analogies , mais peser la valeur de chacun dos caractères , empruntés à toutes les séries des organes. Si le manteau exclut les Pétricoles de la place nous proposons de les mettre , les autres organes contre-balancent ce caractère de peu de va- leur, et c’e^t d’après eux que nous nous sommes déterminé. En effet , la petitesse de la bouche, la forme et la grandeur des palpes labiales, la nature des branchies, leur forme, leur position, leur étendue , rap- prochent les Pétricoles des Vénus , dont elles restent distinctes par la forme et la grandeur du pied , ainsi que par la forme de la valvule du siphon branchial. Nous verrons bientôt , en traitant des Vénérupes , en quoi les animaux de ce genre diffèrent de celui des Pétricoles.

' Les Pétricoles sont des coquilles d’un taille médiocre , vivant dans l'intérieur des pierres, presque toujours dans l’obscurité; elles sont dépourvues de toute coloration extérieure. Quelques espèces , et parti- culièrement celles de l'Amérique méridionale, sont teintées à l’intérieur d’un brun pourpré plus ou moins intense; presque toutes ces coquilles deviennent irrégulières par la ,gêae qu’elles éprouvent dans les trous quelles habitent; presque toutes sont striées longitudinalement; quel- ques unes seulement ont des lamelles transverses.

Il esta présumer que le nombre des espèces s’accroîtra considérable- ment, à mesure que l'on explorera avec plus d’attention les roches cal- caires qui forment les rivages des divers continents. Nous comptons aujourd’hui trente et une espèces vivantes de Pétricoles, elles provien- nent dos mers qui ont été étudiées avec le plus de soin. 11 y en a sept e.spèces dans les mers tempérées de l’Europe. AI. Fieuriau de Belleviie a le premier appelé l'attention des naturalistes sur plusieurs espèces de La Rochelle ; quelques unes passent do l’Océan dans la Méditerranée ; il est à présumer que l’on en découvrira sur la cote occidentale de l’Afrique. M. Krauss en a trouvé une au cap de Bonne-Espérance. Quatre espèces sont citées. dans les mers de T Amérique septentrionale, ■et nous en avons fait connaître trois autres provenant des mers de Cali- fornie. M. Sowerby, dans les procès-verbaux de la Société de zoologie

LES LITHOPHAGES.

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de Londres, en a fait connaître une espèce de Panama , une autre des îles Nicobar et une troisième des Gallopagos. Laniarck a inscrit, parmi les espèces du genre^ colles qui ont été rapportéos de la Nouvelle-Hollande par Pérou; elles sont au nombre do trois. De toutes los régions , la plus riche en Pétricolesest sans contredit les cotes du Pérou et du Chili. Le Pérou , visité par M. Curaing , a fourni neuf espèces à cet habile obser- vateur, ces mômes espèces ont été retrouvées plus tard par M. d Or- bigny qui, à son tour, a enrichi nos catalogues d'une espèce de la Patagonie,

Les espèces fossiles sont moins nombreuses ; nous aurons quelques observations à présenter sur plusieurs d’entre elles. II est très douteux que les deux espèces décrites par M. Sowerby, dans Touvrage de M. Fitton , appartiennent au genre; leur forme les éloigne de toutes leurs congénères , et les caractères empruntés à la charnière ne s’accordent guère avec ceux des espèces vivantes ; ces deux espèces , citées par les paléontologistes dans les terrains Crétacés ne doivent y être admises qu’avec une extrême réserve.

Retzius a fait connaître une espèce de la Méditerranée , sous le nom de Venus lithophagu,. Poli a figuré la même espèce sans la décrire, la mentionnant seulement dans Pexplication des planches sous le nom de Telline. Brocchi a trouvé cette même coquille à l’état fossile dans les terrains subapennins , il y ajoute , à titre de variété , une espèce très distincte dont il donne une excellente figure. Lamarck en a fait son Petricola chamoides»

Le rttpeslris de Brocchi est une véritable Pélricole ; elle a

quelques ressemblances avec le Venerupisdecmsata de Philippi ; elle est facile à reconnaître et à distinguer. M. Sowerby, dans son Généra of shells , figure sous le même nom une espèce qui nous paraît spécifique- ment différente de celle de Brocchi , l’une est couverte de stries treil- lissées; l’autre, celle do Sowerby, est lisse. Nous proposons d’imposer à cette dernière le nom du naturaliste anglais. Dans son Synopsis-dés invertébrés fossiles du Piémont ^ M. Sismonda rapporte au Petricola îamellosa de Lamarck , ce Venus rupestris de Brocchi. Quand même l’identité de ces espèces serait reconnue, ce qui est contestable, le premier nom proposé, celui de Brocchi, devrait rester à l’espèce par droit de priorité.

Le Tellina fragilîs de Linné était rangé par Lamarck parmi les Pétri-* coles , sous le nom do Petricola ochroleuca. On trouve à l’état fossile plusieurs espèces très voisines de la vivante, et les auteurs qui les ont mentionnées , ayant partagé l’opinion de Lamarck, les ont comprises

49^1 QUATORZIÈME FAMÏLtE,

danfî le même genre ; il faut actuellement les en retirer, ce qui diminue d’autant les Pétricoles. Do ce nombre , sont le Petricola abbreviata , Dujardin, des faluns de la Touraine, et très probablement le Petricola peregrina^ de Bastérot, des environs de Bordeaux.

N’ayant pas sous les yeux le Petricola rupeslris , de M. Dubois de Montpéreux , nous ne pouvons constater son identité avec celle de Brocchi , on peut dire qu’elle s’en rapproche beaucoup , mais les stries paraissent beaucoup plus fines , la charnière plus étroite , l’impression , palléale plus courte; ces différences, que nous apercevons d’après la figure, sont probablement suffisantes pour séparer l'espèce de Wolhynie de celle d’Italie , dans le cas ces coquilles seraient en réalité dis- tinctes, nous proposerions pour celle de Wolhynie le nom du natu- liste qui le premier Ta fait connaître .

En admettant les réformes que npus venons de proposer, le nombre des espèces . fossiles se réduirait à onze, et toutes seraient propres aux terrains tertiaires.

Il yen a deux seulement dans le bassin de Paris, l’une se loge dans les madrépores qui sont/dans les calcaires grossiers , l’autre s’enfonce dans les pierres tendres ou les polypiers des grès marine de Valmon- dois. Nous comptons quatre espèces dans l’étage tertiaire moyen , une aux environs de Bordeaux , la seconde en Touraine , la troisième dans le bassin de Vienne et la quatrième en Wolhynie.

•Une seule espèce , Petricola laminosa , Sowerby, est cminue dans le crag, et elle se trouve à la fois en Angleterre et en Belgique.

Quatre espèces sont .actuellement connues dans les terrains tertiaires supérieurs de ITtalie; l’une d’elles , Pëtriçoîa lühophaga, très voisine et peut-être identique avec le Petricola striata , est vivante dans la Méditerranée.

Possile en Italie et en Sicile.

Les terrains tertiaires d'Amérique sont peu riches en Pétricoles, une seule est mentionnée par M. Conrad , c’est le Petricola centenaria.

1. Pétricole rariflamme. Patricola rarifiamma. Desh.

PI. 12. f. 10. 11., 12.

. ^ . r . . '

P, Testa ovato-trigonâ, transversâ, inœqtiilateraU ^ anticè breyi, tur-

gidâ y posticè attemiatd, alàâ^ sub epidennide griseo postice Jlammu-

Its ri^o^rubris ornatâ^ îongitudhialiter striata ; striis subdecussatis ,

posdcalibus majùrihus^ anticis evanescentibus.

Habite les côtes de Bretagne.

LES LITHOPHAGES.

49^

Cette espèce est l’une des plus grandes des mers d’Europe , sa forme générale est assez semblable à celle du Petrlcoia striata; mais à l’égard de la forme toutes les espèces européennes ont beaucoup d’analogie. Notre espèce est ovale , trigone, inéquilatérale, très renflée en avant, atténuée en arrière. Le côté antérieur est court, arrondi, obtus; le postérieur, deux fois plus long , se rétrécit et s’amincit à la fois ; le bord dorsal postérieur est droit, le bord ventral est médiocrement courbé. Les crochets sont enflés , proéminents , courbés en avant ; la surface extérieure est recouverte de stries longitudinales, irrégulière- ment découpées par des stries transverses d’accroissement. Les stries longitudinales ne sont pas égales , celles qui sont sur le côté postérieur sont les plus grosses; elles diminuent insensiblement sur le milieu des valves et s'évanouissent sur le cèté antérieur. La charnière est très étroite , elle porte deux dents' inégales sur chaque Valve , la plus grosse est bifide au sommet. L’impression musculaire antérieure est ovalaire et dirigée très obliquement de haut en bas; l’impression postérieure est circulaire au milieu de la longueur du bord dorsal postérieur; l’im- pression palléaio est très courte, elle descend d’avant en arrière et de haut en bas , comme si elle voulait gagner le milieu du bord inférieur, mais, à une faible distance de ce bord, elle rentre sur elle-même et trace une large sinuosité triangulaire largement ouverte en arrière.

Sous un épiderme grisâtre et caduque , cette coquille est blanche et elle est ornée du côté postérieur de flammules longues et étroites d’un beau rouge brun; les vieux individus ont leur extrémité postérieure teinte en dedans de brun violacé.

2. Pétricole roccellaire. Peiricola roccellaria. Larak.

PI, 12. f. 7.

P. 't<!5câ ovato^trioohâ , trnnsversâ^ inaquilateraU , anticè hrevi^ fur- gidâ^ ohtusâ, posticè compressâ . atteHnatâ, aibo-sqiialidâ ; longi^ (udînaîiter sidcatâ^ suîcis latis depressis, antice minoribus; iimbo- nibus tumidis oppositis.

Lamarck, An, s. vert. t. 5. p. 5o4. 7.

Fayraudeau, Cat. des Moll, de Corse, p. 35. 53.,

Desb. dans Lamk. An. s. vert. 2^ éd, t. 6. p. i58. y.

Delessert, Coq. non décritts, pl. 4. f. tS. a. b,

Gatlow, Concb. nomencl. p. 19.

Hauley, Descr, cat. p. 52.

496 QUATORZIÈME FAMILLE.

Woûd, Ind. testac. suppl. pl. ii. ï\ 4^. -

Requien, Cal. des Moll, de Corse, p. 17.

Habite les roches calcaires des environs de La Roclielle; elle se trouve- rait aussi en Corse, d’après M. Payi*audeau.

Si nous avons choisi cette espèce pour la faire figurer dans cet ou- vrage , c’est pour avoir occasion de mentionner un fait intéressant qui la concerne. Nous avons reçu de La Rochelle plusieurs individus encore en place dans la pierre calcaire qu’ils avaient creusée ; nous eûmes ainsi occasion d'observer les trous de ces animaux et de nous assurer que non seulement ils sont ovalaires dans leur section Iransversc, mais encore que l’animal laisse subsister une crête pierreuse assez saillante correspondant au bord dorsal de la coquille et destinée à s’enfoncer entre les crochets , de sorte que la coquille, étant presque aussi grande que le trou qui la contient , peut à peine se mouvoir, et sa crête posté- rieure, aussi bien que la forme ovalaire de la loge pierreuse, s'oppose invinciblement à des mouvements de rotation qui seraient cependant nécessaires pour expliquer la perforation des pierres par un moyen mé- canique. L’animal condamné à une immobilité presque absolue, il devient évident qu’il ne peut agrandir le trou qu’il habite que par une dissolution lente et à l’aide d’im agent chimique.

Par sa forme, cette coquille se rapproche de la précédente espèce ; elle reste toujours plus petite; ovale , trigone, elle est très inéquilaté- rale , courte , obtuse , renflée en avant , atténuée en arrière , bâillante et contournée du côté postérieur ; elle est plus régulière en avant. Les crochets sont renflés, protubérants, opposés , à peine inclinés en avant ; il en part en rayonnant un grand nombre de sillons égaux sur toute la partie postérieure et moyenne des valves , remplacés par des stries fines sur le côté antérieur. Les sillons sont assez larges, aplatis, irréguliè- rement coupés par des stries d’accroissement. La charnière est très étroite, elle porte deux dents cardinales inégales sur chaque valve; elles sont profondément séparées , et la plus grosse est divisée au sommet par un sillon profond. L’impression musculaire antérieure est ovale, semilunaire ; la postérieure est circulaire ; l’impression palléale , très courte, s’infléchit promptement en une sinuosité large, profonde, demi^elliptique et très largement ouverte en arrière. Recouverte de son éDiderme , cette coquille est d’un gris foncé sale et terreux ; elle est blanche ou jaunâtre lorsqu’elle en est dépouillée.

LES L1TH0PHA6ES.

^.97

GENRE QUARANTE-QUATRIÈME.

V^IffÉRUFE. Venerupis. (Lamk.)

Pl. 12, fig. l6 à 21.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale , tr ans verse , peu épais; les lobes du manteau réunis dans le tiers postérieur et prolongés en deux petits siphons, désunis dans la moitié'de leur ^ longueur; siphon branchial plus long et plus gros que Tanal, garni à son ouverture de tentacules branchus , symétriques et inégaux. Ouverture du siphon anal rétrécie par un bord mem- braneux dactyliforme, percée au sommet et entourée à la base d*unrang de tentacules simples. Pied conique, petit, lingui- forme et bÿssifère ; branchies inégales , subquadrangulaires , réunies postérieurement , la branchie externe est la plus petite ; bouche médiocre ; palpes labiales très petites , triangulaires , un peu plus longues que larges.

Coquille ovale, transverse, inéquilatérale , un peu bâillante du côté postérieur ; charnière étroite , présentant trois dents sur une valve ou sur toutes deux ; ces dents sont petites, rap- prochées, parallèles, un peu divergentes; ligament extérieur. Impressions musculaires grandes et écartées ; impression pal- léale parallèle au bord inférieur, terminée en une sinuosité subtrigone horizontale et peu profonde.

SYNONYMIE GENERIQUE. Coucka tvifidos , Gualtieri. Donax, Linné, Chemnitz, Gronovius, Schrœter, Olivi, Pen- nant , Gmelin , Poli , Dillwyn , Donovan , Montagu , Maton et Racket, Turton, Wood. Venu$, Chemnitz, Schrœter, Gmelin, Cortesi, Brocchi, Gerville, Montagu, Turton, Dillwyn. Cxineus , Da Costa, Humphrey. Peiricola [in parte) , Cuvier, Lamarck (o/m), Turton. Rupellaria [in parte) , Roissy, Sowerby jun. Venerupis , Lamarck , Férussac , Payraudeau, Rang, Menke, Philippi, Anton, Swainson, Hanley, Gray, etc. Tellina ^ Pennant.

T. I. PARTIE.

32*

4^3 QUATORZrÈME FAMILLE.

OBSERVATIONS. En traitant du genre précédent, nous avons vu omment Lamarck avait confondu dans un seul et même groupe deux sortes de coquilles parfaitement distinctes. M. Fieuriau de Bellevue , dans son Mémoire sur les coquilles lithophages des environs de La Ro- G/lal/c, eut le mérite de distinguer le premier des Mollusques confondus }iâr son savant c'antemporain. En effet , le genre qu'il nomma Rupellaire était destiné à réunir celles des Pétricoles de Lamarck qui ont deux dents à la charnière. Ce genre Rupellaire. adopté en 1805 , par M. de Roissy, dans la Conchyliologie du Buffon de Sonnini, a été conservé par Iiarnarck, non seulement dans la Philosophie zàologique^ mais encore dans VEatlrail du cours publié en 1812. Mais quelques années plus tard, Lamarck, voulant reviser et classer toutes les espèces contenues dans les quatre genres qu’il admettait autrefois, reconnut que trois genres étaient suffisants ; il supprima les Rupellaires et en introduisit les espèces dans son genre Pétricole , qu’il réduisit aux espèces à deux dents cardinales.

Depuis l’institution du genre Vénérupe dans VHistoire des animaux sans vertèbres y nous le voyons consacré dans presque toutes les mé- thodes , soit qu’on l’eût envisagé comme suffisamment caractérisé , soit qu'on l'eût conservé à titre de sous -genre ou de simplification des Vénus.

La plupart des conChyliologues comprennent aujourd’hui qu’il est peu important qu’un animal soit perforateur ou ne le soit pas , cette pro- ])riété n’entraînant pas à sa suite des changements considérables dans l’organisation. On remarque, en effet, que dans certains types de Mollusques , il existe des espèces perforantes chez lesquelles les carac- tères génériques n’out subi aucune modification importante. En coasé- qu'^nce, avant d’admettre un genre, d’après ce seul fait qu’il est lilho- pli-ïge, il faut constater encore chez lui des caractères particuliers. La plupart des conchyliologues prétendent aujourd’hui que les Vénérupes sont de véritables Vénus perforantes, et que le genre est par consé- quent inutile. Ils ont tort et raison tout à la fois : raison , s'ils prennent pour type du genre le Venus liihophaga; tort, s'ils considèrent le Donax irus de Linné comme type de ce même genre. Car, en effet la première coquille a un animal entièrement semblable à celui des Vénus dont M. Sowerby a fait son genre PuUastra , tandis que l’animal du Donax iras présente des caractères propres à en faire un genre particulier, auquel peut s’appliquer le nom de Vénérupe. II faut donc apporter quelques modifications à la constitution du genre, et y relier celles des espèces qui dépendent des PuUastra de M. Sowerby. Si les zoologistes

LES LITHOPHAGES.

499

ayaient réformé le genre qui nous occupe , comme nous le proposons actuellement , il est à présumer qu’ils auraient consenti à le conserver dans leurs méthodes et à l’associer aux Pétricoles , pour constituer avec lut la famille des Lithophages.

Si nous reprenons l’histoire du genre Vénérupe , nous verrons Linné en associer une espèce avec ses Donax; bientôt après Ghenmilz en fît connaître d’autres espèces, mais il les confondit parmi les Vénus. Da Costa , dans la CouchyUologie des îles Britanniques , institua un genre assez informe sous le nom de Cuneus , dans lequel il mélanga les Venus et les Donax t et il entraîna le Donax irus de Linné. Un assez grand nombre des naturalistes qui écrivirent après ceux que nous venons de citer distribuèrent les espèces en partie dans les Donaces et en partie dans les Vénus. Quelques auteurs seulement adoptèrent les genres de M. Fleuriau de Bellevue ; plus tard presque tous les conchyliologues de ce siècle , et Cuvier lui-même , admirent le genre Vénérupe, Ce genre resta dans les méthodes jusqu’au moment M. Sower.by, recon- naissant la plus grande ressemblance entre le Venus litiiophaga et ses Püllastra , proposa de supprimer les Vénérupes, ce qui fut adopté par un certain nombre de personnes. Cependant , ainsi que nous le disions tout à l'heure, avant d’accepter cette suppression , il fallait s’assurer si d’autres Vénérupes ne présenteraient pas de caractères propres à les faire maintenir dans un genre distinct. Pendant notre séjour dans l’Al- gérie , nous avons voulu comparer les animaux du Venerupis irus avec ceux des Püllastra , et nous avons observé quelques différences que nous allons exposer tout à l’heure.

Trois phases distinctes partagent nettement l’histoire du genre Véné- rupe ; quoiqu’elles empiètent les unes sur les autres , elles se recon- naissent avec facilité. Pendant la première, les opinions de Linné et de Chemnitz dominent; les Vénérupes sont distribuées entre les Donaces et les Vénus. Celte pllase, très longue, se prolonge longtemps après que d'autres opinions ont surgi ; sa dernière manifestation a lieu en 1 , dans V Index testaceologicus de Wood, ouvrage dans lequel la méthode linnéenne est suivie en toute rigueur. La seconde phase commence avec Lamarck, au moment il crée le genre Pétricole, et avec RI. Fleuriau de Bellevue, lorsque ce savant observateur publia son mémoire plein d’intérêt sur les Mollusques perforateurs ; ainsi au commencement de ce siècle, les opinions précédentes furent peu à peu abandonnées et remplacées par celles de Lamarck surtout, qui durent leurs perfection- nements successifs à l’excellent travail de M. Fleuriau de Bellevue. Enfin, la troisième phase est toute récente ; elle est due à MM. Gray

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5oo QUATORZIÈME FAMILLE .

et Sowerby, qui disloquèrent la famille des Lithophages Lamarck , et introduisirent les Vénérupes dans la famille des Vénus , et jusque dans le genre Vénus lui-méme. On concevra facilement comment des opinions mixtes se sont formées aux dépens des trois principales que noüs venons d’exposer; Il n’ést pas nécessaire de les reproduire ici , puisque nous les avons mentionnées en traçant T histoire des deux genres qui précèdent. Nous avons préféré une de ces opinions mixtes, parce qu’elle nous semble S'accorder mieux avec les faits connus jusqu'ici. Si l’on a compris parmi les Vénérupes quelques véritables Vénus , il faut les en faire sortir, et ne conserver dans le genre que celles de^ espèces qui se distinguent des Pétricoles et des Vénus.

Les Vénérupes soûl des coquilles qui vivent à la manière des Saxi- caves ; les unes perforent les pierres * les autres se logent dans les fentes des rochers, et se suspendent par 'un byssus; elles sont ovales ou oblongues, souvent subglobuleuses; leur test est plus épais et plus solide; leurs valves sont mieux formées que chez les Pétricoles , pres- que toutes sont ornées de plis ou lames iransverses et de stries lon- gitudinales; leur épiderme est peu apparent: en cela ces coquilles se rapprodient plus des Vénus que des Pétricoles. Les valves sont assez régulières, surtout dans les espèces perforantes; celles qui vivent dans les fentes des rochers 5e ressentent souvent de la gêne qu’elles y éprou- vent , et leur coquille est divetsiforme. Les bords des valves sont épais , souvent crénelés. Les crochets sont plus ou moins saillants , selon les espèces; ils s’inclinent en avant, l’on trouve quelquefois une lunule nettement circonscrite.

La charnière se rapproche beaucoup de celle des Pullasira; elle con- siste en trois dents cardinales, rapprochées , presque parallèles, suppor- tées par une lame cardinale plus large et plus épaisse que dans les Pétricoles ; dans quelques espèces perforantes , les dents cardinales sont plus divergentes , et il arrive que la dent antérieure est séparée des deux autres par une échancrure de la lame cardinale. Le ligament est externe; il est semblable à celui des Vénus ; il s’attache à des nymphes enfoncées sous un bord saillant du corselet.

Les impressions musculaires sont en proportion plus grandes que celles des Pétricoles ; elles sont plus écartées entre elles , se rapprochant davantage des extrémités des valves. L'impression antérieure est ovale, allongée , elle occupe la plus grande partie de la hauteur du côté anté- rieur. L'impression postérieure est suborbiculaire , elle partage le côté postérieur en deux parties presque égales. Quoique assez éloignée du bord , l’in^pression palléale lui reste parallèle , elle quitte l'extrémité du

r

LES LITHOPHAGES.

5oi

muscle antérieur et vient s’arrêter non loin de t’extrémité postérieure ; elle se reploie sur elle-même et dessine une sinuosité horizontale plus ou moins profonde, selon les espèces, et presque toujours triangulaire; cette sinuosité représente fidèlement la forme du muscle rétracteur des siphons.

L’animal des Vénérupes a incontestablement beaucoup de ressem- blance avec celui des Vénus. Un manteau membraneux , opaque , mais moins épais que celui des Pétricoles , revêt l’intérieur des valves ; il est bordé d’un muscle orbiculaire large et épais, dont la circonférence termine en un bord formé de quatre feuillets membraneux. L'un de ces feuillets , le second , est plissé comme un jabot ; il est très extensible , et c’est lui probablement qui sécrète les lamelles transverses de la co- quille,- telles qu’elles existent , par exemple, sur le Vetierupi^ iras. Dans les espèces perforantes, les bords du manteau , sans se renverser sur la coquille , sont plus proéminents au dehors , et l’on retrouve dans leurs tissus cet organe granuleux que nous avons fait remarquer dans les Pétricoles et les Saxieaves. Les lobes du manteau se réunissent dans une partie de la longueur du bord ventral; leur commissure est plus longue que celle des Vénus , elle est plus courte que celle des Pétri- coles ; aussi l'ouverture destinée au passage du pied a plus d’étendue que dans ce dernier genre. Les siphons sont en proportion plus grêles que dans les Pétricoles ; pendant leur dilatation ils acquièrent la lon- gueur de la coquille; réunis dans les deux tiers de leur longueur, ils se séparent, en formant entre eux un angle d’environ degrés ; pendant qu’ils sont réunis , ils forment une masse allongée , aplatie, sur la sur- face latérale do laquelle on remarque utio légère dépression qu’indique la place de la cloison qui les sépare. Le siphon branchial est un peu plus gros et un peu moins long que l’anal ; deux rangs de tentacules s^élèveht du bord de l’ouverture ; dans l'un les tentacules sont simples , cylindracés , et ils se renversent en dehors; dans l’autre, les lenUcules sont beaucoup plus grands , ils sont branchus et se renversent au-dessûs de l’ouverture sous forme d'une coupole élégante. Ces tentacules sont nombreux, placés symétriquement. Leurs nombres, leurs divisions, leurs couleurs, sont autant d’excellents caractères spécifiques.

La masse Abdominale est plus ou moins épaisse selon les espèces; elle est aplatie dans celles qui sont comprimées , plus arrondie dans les subglobuleuses ; elle porte en avant un pied médiocre , aplati , lingui- forme , un peu plus grand que celui des Pétricoles , plus petit , plus étroit que celui des Vénus. Si l’espèce est perforante, le pied n’est point fendu en son bord inférieur, et il est dépourvu d’un byssus; si

5o2

QUATORZIÈME FAMILLE.

l’espèce n’est point perforante , son pied est fôndu le long de son bord postérieur, et il porte à la base un byssus composé d’un petit nombre de filaments.

Une bouche étroite et petite s’ouvre à l’extrémité antérieure de la masse abdominale, au-dessous du muscle adducteur antérieur des valves ; des lèvres , moins étroites , couvrent à peine l’ouverture buccale ; elles gagnent les parties latérales du corps et se terminent de chaque côté en une paire de petites palpes triangulaires un peu plus longues que larges, assez épaisses* égales et finement plissées à leur surface interne.

Les branchies ressemblent beaucoup à celles des Pétricoles: elles consistent en quatre feuillets symétriques , deux grands appliqués sur les parties latérales du corps, deux externes d’un tiers plus petits et appliqués sur les .premiers. La paire interne commence en une pointe aiguë; qui s’avance jusqu'au voisinage de la bouche , s'engageant un peu entre les palpes labiales. Ces organes descendent en arrière obli- quement et delà du bord postérieur de la masse abdominale. Les feuillets externes sont plus étroits et plus courts en avant , mais en arrière ils égalent les feuillets internes. Les organes dont nous par- lons ont leur surface régulièrement plissée; les plis sont gros à la base, ils s’évanouissent insensiblement vers les bords libres des bran- chies. En arrière de la masse abdominale, les quatre feuillets se réu-- nissent et s’allongent assez pour se souder au pourtour membraneux de l’ouverture interne du siphon anal et séparer la cavité de ce siphon de celle du manteau.

Toutes les espèces connues de' Vénérupes sont petites ou de taille médiocre ; leur nombre est peu considérable , ce qui tient sans doute au peu de recherches faites jusqu’ici de ces animaux qui, vivant cachés dans les fentes des rochers ou dans leur épaisseur, échappent facilement aux recherches , souvent rapides , des naturalistes voyageurs. Aussitôt que des rivages calcaires sont observés avec soin , on voit s’accroître rapidement le nombre des Mollusques lithophages. Un exemple remar- quable en a été donné par M. Cuming , sur les côtes du Pérou et du Chili.

Quatorze espèces vivantes sont inscrites dans les catalogues. Nous en avons quatre dans l’Océan d’Europe, trois sont dans la Méditer- ranée, quatre autres sont à la Nouvelle-Hollande, à Van-Diemen , à la Nouvelle-Zélande. Nous en avons fait connaître deux de" la Californie , deux sont des mers de l’Inde , les deux autres sont de localités in-

connues.

LES LITHOPHÂGES.

5o3

Les espèces fossiles sont moins nombreuses , toutes celles qui nous sont connues proviennent des terrains tertiaires. Cependant AI. de Münster, dans Goldfuss, en a cité une dans les terrains de transition} mais cette coquille ne nous paraît pas du genre dans lequel l’auteur l’a comprise; elle appartient aux Cypricardes nous la retrouverons plus tard.

II y a deux espèces dans le terrain tertiaire inférieur de Paris ; elles sont toutes deux des grès marins moyens d’Àuvers et de Valmandois. Elles sont logées dans les madrépores ou dans des galets calcaiies. Indépendamment du Venerupis Faujasi, cité aux environs de Bordeaux, par AI. Bastérot, le terrain tertiaire moyen renferme encore deux autres espèces qui ont perforé le banc de calcaire d’eau douce.

AI. Sismonda inscrit quatre espèces de Vénérupes dans son. Synopfii s des invertébrés fossiles du Piémont; mais il compte parmi elles le Cyprin cardia coralliophaga de Lamarck , qui est une Cypricarde et non une Vénérupe, 11 y a donc aussi trois espèces dans les terrains tertiaires supérieurs , et parmi elles se trouve le Fenerupis irus , la seule du genre qui soit à la fois vivante et fossile, et dont nous donnons plus bas la description.

Dans le 57® volume du Dieiîonnaire des sciences naturelles , AI. De- france mentionne six espèces fossiles de Vénérupes : trois étaient déjà connues , les trois autres sont plutôt indiquées que décrites ; elles por - tent des noms nouveaux. Alalheureusement ces indications n'élaut accompagnées ni d'une description , ni d’une figure , il est impossible de reconnaître les trois espèces dont il est question. Trop confiant dans une idenUté trompeuse de noms, AI. Defrancea rapporté le Venus coral-' liophaga de Brocchi dans la synonymie du Venerupis Faujasi de AI. Bastérot. Ces coquilles constituent non seulement deux espèces bien distinctes, mais encore elles appartiennent à des genres différents; la première est une Cypricarde, la seconde une véritable Vénérupe.

Vénérupe lamelleuse. Venerupis irus. Lamk.

PL 12. f. 16. 17. 18.

y. Testa ovato-transversâ , incequilattrali atuicè breviore , angustata , posticè lattere subangulatâ , albâ^ 'velluteolâ y aiit rubescente ; la-- mellis crectis y transversis (enuepUcatis ornatâ , interstitiis longitudi^ naliter striatis; striis tenuibus ^ depressis; marginibus integris , sim~ pUcibus ; n^mpkis intns acrQ-.vioîaceis,

Concka trijîdos. Gnalt. lod. test. pl. 95. fi A,

Donax irus. Liuoé, Syst. nal. éd. lo, p. 683. û* 90.

5o4

QUATORZIÈME TAMILLE.

Id. Tîduc, Syst. Dat. éd. 12. p. 1128. iii. > '

Cttneitsfoliatns. Costa, Brit. conch. p, 204. 39. pl. i5. f. 6. J)onax, Gronovius, Zoophyl, p, 268. 11® 1137.

Donax irns, Chemn. Cojidi. Cab. t. 6, p. ^^71. pl. 26. f. 268, 270. Id, Schrœter, Einî, t. 3. p. 100. lo, ^

TelUna cornubiensis, Pennant, Brit. zool. t. 4. p. 89,

Donax irns. Gmelin, Syst. nat. éd. i3. p. 3265, ii.

'Id, Poli, Test. Sicil. t. p. 83. pl. 10, f. i, pl. 19, f. 22, 23. Donax. Bruguière. Eucy, méth. pl. 262. f, 4.

Donax irns, Donovan, Brit. shells. t. i. pl.'29. L 2.

Id. Maton et Racket. Lin. Trans. t, 8. p. 77,

Jd, Pulteney in Hutch. Dorset. cat. p. 32,’ pl. 12. f. 6.

Id. Montagu, Test. brit. p. 108 et p* 673.

Id, Pennant, Brit. zool. 2* éd, t. 4. p, 200^ n* 6.

Pefrico/a. Brookes, Intr, p. 64* pl- 2. f, 22,

Donax irus, Dillwyu, Cat. l. i. p. t56. 2l.*P/Mr, syn, çxcl, f^enerupis irus, Lamk. An. s. vert, t, 5. p. 507. 3.

Donax irus, Turloh, Conch, Dict, p. 43. 7.

Petricola irus. Turtou. Conchyl. ins. brit. p. 26. i. pl, 2, f. 14, Donax irtni Gerville, Cat. des coq. de la Manche, p. 23. n'* 3. Pcnémpîs irus, Blainv. Malac. p. 559.

Id, Payraudeau, Cat. des nloli. de Corse, p. 35. 54. /

Id. Risso. Hist. nat. de l’Eur, roérid. I. 4. p. 363.

Donax irus. Wood, Ind. test, pl, 6, f. 21,

Venerupis irus. Collard des Ch. Cat. des test, du Finistère, p. 17. 3 Id. Deshayes, Encyc. méth. ver», t. 3. p. 1110. n* 2.

Id. Deshayes, Expéd, scient, de Morée, Zool. p, 91. xs 25.

Id. Deshayes dans Làmk. An. s. vert. éd. t. 6. p. x63. 3.

Id. Philippi, Enum. moll. Sicil. t. i. p. 2t.

Scacchi, Cat. conch. reg. Neap. p. 7. '•

Maravigna. Mém. pour l’Iiist. nat. de la Sicile, p. 73.

Fleming, Brit. an. éd. p. 45i.

Hanley, Dbcr. cal, p. 54.

Philippi, Enum. moll. Sicil. t. 2. p. 20.

Potiez, Gai. des moll. de Douai, p. 240.

Thompson, Report ou the Fauna of Irel. p. 262.

Forbes, Report ou the OEgean invert. p. 143,

Thorpe, Brit. mar. conch. p. 60.

Terani, Cat. degli anim, invert. p. x3.

PuUastra irus, Catlow, Couch. nom. p..4r. xo.

5o5

LES CONQUES.

Venerupis iras. Desh. Èxplor. scient, de l’Algérie, p. 66. f, i4, 17.

Requien^ Cat, des moll. de Corse, p. 17, 41.

Fossilis, Rliilippi. Enum. moll. Sicil. t. 1. p. ai ; t. 2. p. 20.

S. Wood) Cat. of shells l'rom the crag. Ann. nat. hisL 1S40. p. ado.

Graieloup, Cat. zool. des foss. p. 67. 786,

Sismonda, Syn. ped. foss. p. 20.

Morris, Cal. of Brit. foss. p. 104.

Habile vivante fOcéan d’Europe , la Mediterranée; fossile en Sicile, en Italie, dans le crag d’Angleterre, et meme aux environs de Bor- deaux , d’apres M. Grateloup.

11, pe nous semble pas nécessaire de décrire une fois de plus une coquille aussi connue que celle-ci, nous ferons remarquer seulement qu’elle est susceptible d’un grand nombre de variations dans sa forme et dans sa couleur ; les lames qui la recouvrent sont plus ou moins sail- lantes , selon quo l’animal a été plus ou moins gêné dans ses accroisse- ments. Nous avons des individus qui , sans être roulés j ont leurs lames presque entièrement effacées ; d’autres , au contraire , elles sont d’une grandeur remarquable , surtout sur le côté postérieur. Presque tous les individus sont blancs ou d’un blanc jaunâtre ou grisâtre , quelques uns sont d’un jaune fauve, assez intense, quelques autres sont rosés sur les crochets, et d’autres, enfin, sont d’un rose pourpré, quelquefois intense.

Cette coquille est très commune , surtout dans la Méditerranée.

QUINZIÈME FAMILLE, lies Conques. Nobis.

CARACTÈRES DE LA FAMILLE. Animal ovale ou obrond, ayant les lobes du manteau réunis postérieurement, simples ou frangés et prolongés en deux siphons inégaux, réunis à la base ou dans toute leur longueur. Ouverture du siphon anal portant des tentacules simples et cylindracés, celle du siphon branchial les ayant tantôt simples , tantôt digités ou br^nchus, ou n’en possédant aucune trace. Pied triangulaire, aplati, tranchant sur ses bords portant quelquefois un byssus.ià la base. Bouche

5o6 \^Ul>'2ïÈMk FAMILLE,

petite, ovale, transverse, garnie de lèvres courtes et étroites se prolongeant de chaque côté en une paire de palpes médio- cres, triangulaires, un peu plus longues que larges. Feuillets branchiaux grands, aplatis, subquadrangulaires, appliqués Tun sur l’autre et se réunissant en arrière du pied.

Coquille libre, régulière , close , dents cardinales de deux à quatre, quelquefois une seule dent latérale, ligament court, extérieur.' Deux impressions musculaires grandes et écartées. Une impression palléale, parallèle au bord inférieur et offrant en arrière une sinuosité médiocre ovalaire le plus' souvent triangulaire et oblique.

GENRES. Pxdlastra^ Venus, Gratelowpm.Cyiherea, Thetis, Dosinia, CyçUna.

Le mot Conque^ que nous conservons pour l’appliquer aujourd’hui à une famille asspz réduite de Mollusques acéphales , était employé au- trefois d’une manière beaucoup plus générale^ Les anciens Conchylio- logues donnaient le nom do Conque à toutes les coquilles bivalves indistinctement et même à un certain nombre de coquilles univalves , en restreignant l’étendue de cette dénomination au moyen d'épithètes particulières. Dans ses divers essais de classification , Linné adopta la dénomination de Conque , mais il l'appliqua uniquement aux coquilles bivalves, auxquelles il joignait les coquilles multivalves. La science, successivement enrichie de nouvelles découvertes, ne pouvait conserver très longtemps des dénominations aussi vagues, et Lamarck y substitua celle de Conchifères pour désigner tous les animaux à coquilles bivalves, et Cuvier celle de Mollusques acéphalés , distinguant ainsi, par un choix heureux du nom , tous ceux des animaux qui n’ont pas une tête ap- parente.

Lorsque Lamarck divisa les animaux en familles naturelles , il pro’ posa dans la classe des Acéphalés une famille particulière sous< le nom de Conques ; cette famille est celle dont nous allons nous occuper. Elle subit d'abord quelques modifications dans les mains de son auteur, et d’autres zoologistes, en l’adoptant ensuite, lui firent éprouver des changements considérables qu’il ne sera pas sans intérêt de rapporter brièvement.

Dans l’origine ( Philosophie zooioqiqtie ), la famille des Conques ren-

LES CONQUES.

5o7

fermait neuf genres dans i'ordre suivant : Venerwardia, Lucina, Feniw, CyctaSj Cytheræa, Galalea, Donax, Capsa^ TelUna. D’après ce que nous connaissons déjà de quelques uns des genres que nous venons d'énumérer, il est facile de s’apercevoir qu’ils ne sont point dans leurs rapports naturels; aussi Lamarck ne tarda pas d’adopter quelques changements salutaires dans la constitution de cette famille. En 1812, il la partagea en Conques fluviatiles et en Conques marines : dans la première section sont les genres Cyclas et Galatea; dans la seconde se trouvent les genres Venericardia^ Lucma, Vejivs, Cythereat Cypn'na, Donacilla^ Donaco, Capsa et TeUina. II y a ipi doux genres de plus , Cyprim et Donacüta. Lamarck ne resta. pas satisfait de l’arrangement de la famille des Conques , et il la modifia profondément dans son der- nier ouvrage. Il y trouva les principaux élémçnts de sa famille des Nympbacées , de sorte qu’en conservant Iq môme nom et la même di- vision en fluviatiles et marines , la famille dos Conques se trouve ré- duite-à sept genres, Cyclas, Cyrena , Galathea dans les fluviatiles, Cyprina, Cylherœa^ Venus, Vemricardia dans les marines.

. Tandis que Lamarck faisait de louables efforts pour faire apercevoir lys rapports naturels des genres, tandis qu’il cherchait à . conserver à ses genres .eux-mêmes une étendue qui leur assignait des caractères d’une valeur déterminée, d’autrçs conchyliologues entraînés par des idées diflérentes , moins mûries aux rayons d’une saine philosophie, cherchaient à multiplier les genres et en déterminaient les rapports non d’après l’ensemble des caractères,, mais d’après un seul emprunté à la charnière. C'est ainsi que M. Schumacher, voulant réduire l’étendue du genre Vénus , consacra ce nom générique aux Cythérées épipeuses et à celles des espèces pour lesquelles Poli créa son genre Arthemis. Ce genre ne répond ni .aux Vénus, ni aux Cythérées de Lamarck; ce dernier conservé a pour type Je Venus meretrix de Linné , de sorte que déjà le genre Cythérée se trouve sous deux noms différents. Il est encore re- produit une troisième fois sous la dénomination de Trigona et une quatrième fois sous celle de Circe. Quant aux véritables Vénus, M. Schu- macher les démembre aussi en plusieurs genres, sous les noms de Mercenaria , Tapes et ÂntigoTia. On croirait que ces genres démembrés des Vénus de Linné sont rapprochés dans l’ordre méthodique , il n’en est rien ; ils sont disséminés , séparés les uns des autres par d’autres genres avec lesquels ils ont fort peu d’analogie.

Dans le temps que Lamarck publiait le volume de ses -4namaïa sans vertèbres, M, de . Blainville proposait, dans le Dictionnaire des sciences naturelles , une famille des Concliacées infiniment plus étendue

5io8

QUINZIÈME famille.

que celle de Lamarck, reufermant dix-neuf genres, divisés en deux groupes, non plus d’après l’habitation, mais d’après la position du li- gament. Quelques années plus tard-, M. de Blainville, dans son Traité de Malacologie , conserva la même famille; mais il la divisa d’après ce caractère de la présence ou de l’absence des dents latérales de la char- nière ; et comme ce caractère a réellement peu de valeur pour indi- quer des rapports naturels, U en résulta des rapprochements très inattendus entre des genres qui n’ont entre eux qu’une analogie très éloignée. Ainsi, nous trouvons les Mactres elles Érycines à la suite des Cardium, des Lucines, desCyclades; les Crassatelles et les Vénus dans le même groupe, les Ongulines à la suite des Corbules, desVé- nérupes et des Coralliophages.

M. Rang chercha à améliorer la classification de M. de Blainville; il était difficile qu’il le fît avec succès , voulant ajouter encore de nou- veaux genres à ceux admis dans Traité de Malacologie. Vingt-deux genres se comptent dans la famille des Concbacéës de M. Rang; il y introduit le genre Iridine, dont il fait une section particulière: le reste de la famille est divisé en plüsieurs sections d’après la présence ou l’absence des denl-s latérales , d’après la régularité ou rirrégularité de la coquille; et sous ce nom de coquilles irrégulières, M. de Blainville et M. Rang entendent les coquilles lithophages de Lamarck. Nous l'avons dit, il est très difficile de rendre haturelles ces immenses familles contenant près de la moitié de la classe des Acéphalés ; aussi elles ont été abandonnées, et il est à présumer que M. de Blainville lui-même , connaissant les faits nouveaux dont la science s’est enrichie, ne con- serverait plus une famille aussi étendue que celle dont nous venons de parler.

Lamarck ayant diminué l’étendue de la famille des Conques , nous avons suivi l’exemple de ce savant zoologiste , en réduisant encore la même famille, lorsque nous l’introduistmes dans notre classification de V Encyclopédie ; en effet, nous en avons détaché les Conques fluviatiles pour en former une famille distincte. A cette époque, les Conques étaient réduites pour nous aux trois genres Cyprîne , Vénus , Astarte. Nous fondant sur cette observation que la charnière des Cythérées est modifiée insensiblement pour prendre les caractères de celle des Vénus , nous avions supprimé ce genre Cythérée , l’admettant seulement à titre de section des Vénus. Les Fullastra, les ArthemiSf nous présentant les mêmes transitions avec le grand type des Vénus , nous ne les admet- tions plus comme genre, mais, ainsi que les Cythérées, à titre de sections de Vénus. Lorsque, plus tard, nous pûmes contrôler les travaux

LES CONQUES.

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Poli par des observations directes, nos opinions furent successivement modifiées, et nous aperçûmes la possibilité de constituer quelques bons genres aux dépens des Vénus. En effet, d’un côté, nous voyons des animaux ayant les siphons réunis à la base, divisés au sommet dans le tiers ou la moitié de leur longueur, et d’un autre, des animaux ayant leurs siphons réunis dans toute leur longueur. Voilà donc deux groupes parfaitemeilt distincts i dans l'un se rangent les Venus et les Pullastra , dans l’autre les Cythérées et les Arthémis. Mais une grande difficulté se présente au sujet des Cythéréesj car quelques unes, telles que le Cytherea chione , ont les siphons réunis dans toute leur longueur, tandis que d’autres, en conservant une charnière identiquement semblable, ont les siphons désunis au sommet. Nous citerons le Cytherea venetiana , par exemple. Auquel des deux caractères devra-t-on donner la préfé- rence? Si , à l'exemple de Lamarck, on se laisse guider par les carac- tères de la coquille , il est évident que Ton entraînera parmi les Cythé,- rées deux sortes d’animaux qui se distinguent parfaitement. Si, an contraire, on veut décider la séparation des espèces d'après les carac^ tères des siphons, il faudra donc attendre que les animaux de toutes les espèces soient connus avant de pouvoir les classer, ce qui laissera de l’incertitude pour bien des années encore dans cette partie importante de la classificalion. Nous disons très importante , non à cause du nombre des genres, mais parce qu’ils sont extrêmement riches en espèces; que ces espèces se distribuent dans toutes les mers, et, à l’état fossile, des- cendent dans un assez grand nombre de formations. Sans perdre de vue Vd Paléontologfe pratique , il est indispensable d'indiquer d’abord valeur des genres et de les circonscrire au moyen de caractères , qui ne permettent aucune ambiguïté. La difficulté que nous venons de sou- lever resterait insoluble si l’on voulait persister d’une manière absolue dans Tune ou Lautre opinion. Dans l’intérêt bien entendu de la science , nous croyons devoir admettre un genre Cylhérée, essentiellement ca- ractérisé par les coquilles, et néanmoins solliciter de la part des obser- vateurs le plus grand nombre possiblè de renseignements sur les ani- maux de toutes les espèces de ce genre. Il viendra, sans doute, un moment pourront se concilier des caractères qui aujourd’hui sem- blent se contredire.

M. d’Orbigny, à la famille de Conchacées de Lamarck, a substitué celle des Vénusidées dont il a emprunté le nom à M. Gray, se réservant le droit bien naturel de l’arranger suivant ses propres idées de classi- fication. Nous trouvons trois genres seulement dans cette famille de M. d’Orbigny; les Pétricoles, les Vénus et lesThétis. Nous avons dit

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précédemment pourquoi les Pétricoles doivent rester dans la famille des Lithophages ; quant au genre Vénus , M. d’Orbigny lui rend à peu près Télendue que lui avait donnée Linné, c’est-à-dire qu’il y réunit leà genres Cytiterea et ÂJ'themis. Par une conséquence naturelle# M. d'Or- joint aux Vénus tous les genres qui en ont été démembrés par Schumacher. Quant au genre Thetis , nous en traiterons un peu plus tard; seulement il faut remarquer une sorte de contradiction entre la classification de M. d’Orbigiiy et les faits dont il a donné connaissance dans son Histoire des Mollusques de l’Amérique méridionale. En effet-, M. d’Orbigny a connu les animaux des trois genres qu’il rassemble ; il dit lui-même que le$ uns ont les siphons disjoints, les autres à. demi réunis, et enfin d'autres les ont réunis dans toute leur longueur t il semble dès lors qu’il était facile à M. d'Orbigny de grouper en trois genres les animaux dont il parle ; mais comme les caractères dos siphons ne s’accordent pas avec ceux des coquilles, il donne la préférence à Ces derniers, contrairement aux principes qui l’ont guidé dans d'autres parties de sa classification. ^

Il est aujourd’hui hors de doute , d’après les observations de M. Phi- lippi, auxquelles nous pouvons ajouter tes nôtres, que le genre Astarte ne doit pas rester dans la famille des Vénus, ün manteau complète- ment ouvert, un pied fendu, l'absence des siphons; tous ces caractères reportent ce genre dans la famille des Cardites.

Pour terminer Thisloire de la fandlle des Conques.de Lamarck, il nous reste à examiner la classification nouvelle, proposée par M. Gray, dans la 15® partie des Procès*verbaux de la Société zoologtgjte de Lon~ dres. Et d’abord pourquoi M. Gray commence-t-il la classe des Con- chifères -par la famille des Vénéridesî Nous avouons ne pouvoir le deviner. Jusqu’ici tous les classificateurs , quels que soient les principes de leurs méthodes , ont toujours été entraînés par la nature des choses à placer la famille des Vénus vers le milieu de la série des Mollusques acéphalés dimyaires. Que l’oii prenne la méthode de Cuvier ou celles qui en découlent, qu’on la compare à celle de Lamarck et de ses disci- ples, et dans l’une et l’autre la famille des Vénus est vers le centre du grand groupe des acéphalés dimyaires ; quels que soient les caractères que l’on choisisse pour fonder l’ordre méthodique, il en résulte toujours ce fait remarquable, que les Vénus se rangent naturellement à la place que presque tQus les naturalistes leur assignent. Ainsi , ni dans les animaux , ni dans leurs coquilles , nous n’apercevons les raisons qui ont déterminé le savant anglais dans le choix de sa nouvelle méthode ; et si ce zoologiste possède de nouveaux éléments de classification fondés sur

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des découvertes récentes, nous le conjurons, au nom delà science et de ses plus chers intérêts , de les divulguer dans le plus brçf délai.

M. jGray divise en deux sous-familles cette, première famille, des Vénérides. Sous le nom de Merëtricina , la première sous-famille cor- respondant assez exactement au genre Cythérée de Lamarck, contient huit genres. Dan^ la seconde sous-famille Fenusina, comprenant à la fois les genres Venus, Venerupis et Petricola de Lamarck, M. Gray y admet dix genres. Sur les dix-huit genres cçntenus dans la famille des Vénérides , trois nous sont déjà connus. Ce sont les Capses, les Pétricoles et les Vénérupesj nous n’aurons donc pas à les examiner de nouveau, nous les mentionnerons seulement à la place ils sont dans la série pour faire comprendre dans son ensemble la famille dont nous nous occupons. Vpiçi dans quel ordre sont disposés les genres de la famille des Vénérides.

Première sons-famille,. Meketbicina : Dosinia, Meretrix, 3“ Cu- neus, Grateloupia., Trigona. ù'^ Dione, Circe, Venus,

Deuxième sous-famille. Venüsixa : j)® Mercetiqria, \ Anomalocardia, 'H® Cyprina, W' Chione, 13® Tapes, 1 iîupe^/ana , 15® Clementia, 1G“ Glaucmome , 17® Capsa, 18® Petricola,

Examinons le plus brièvement possible chacun de ces genres, et voyons si nous devons les admettre tous ou en rejeter une partie.

1“ Dosinia. Dans un ouvrage presque oublié et qui devrait être plus souvent consulté, un naturaliste cminenl, ScopoLi, a ajouté plusieurs genres à ceux de Linné, et ces genres, quoique brièvement exposés, se reconnaissent avec facilité parce qu’ils sont fondés sur de bons ca- ractères. M. Gray est le premier qui ait rappelé au souvenir des conchy- liologups V ïntrfiduçtmi à l' Histoire naturelle publiée en 1777 par Scopoli. Notre auteur, dès cette époque , avait déjà reconnu les carao- lères des coquilles avec lesquelles Poli ht plus tard et d’une manière plus complète son genre Arlhemis , genre que Lamarck confondit avec les Cythérées. On reconnaît chez Scopoli un observateur exercé et plein de sagacité; il caractérise son genre par quatre dents à la charnière, dans les deux valves, et il ne (e confond , pas ^avec les Cythérées de Lamarck , qu'il laisse dans les Vénus. Nous devons donc , à l’exemple de M. Gray, restituer au genre sop premier nom , et à ce nom dUr- themis substituer celui de Dosinia, par respect pour la loi de la priorité.

S** Meretrix. Lamarck avait d'abord donné ce nom à un démenir brement des Vénus de Linné, auquel il substitua plus tard celui de Cytherea. Le nom de Çytherea sera toujours préféré, nous le croyons ,

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parce que les zoologistes aiment à respecter la liberté du savant qui , dans le cours de ses travaux , s'applique à les améliorer et substitue une dénomination meilleure à celle qu’il regarde comme mauvaise. M . Gray ne se borne pas au changement du nom , il modifie le genre en le réduisant aux seules espèces voisines du CÿUiérea meretrix.

3*" CnNKüs. Ce genre Cuneus n’est- pas celui de Da Costa. On se rappellera^ sans doute, que dans sa Cmthyliologie britafiniquej Da Costa institua un genre Cuneus pour y rassembler des Donaceset des Vénus. Rejeté, ce genre tomba dans l’oubli. M. Megerie, en ^811 , reprit ce nom depuis longtemps abandonné , et l’appliqua à un groupe d’espèces rapportées aux Donaces par Lamarck , et qui a pour type le Venus meroe. Si , lorsque f animal en sera connu , le Donax meroe doit quitter le genre Donax, il est à présumer qu’il rentrera dans les Cylhé- rées , car il en présente la plupart des caractères.

4“ Gbateloopii. Ce genre diffère peu des Cythérées , surtout du groupe des Corbicules ; mais sa dent postérieure divine , et surtout l’impression paUéale, noüs déterminent à le conserver;

Trigona. M. Megerle est le créateur de oe genre; nous n’en connaissons pas l’animal , mais la coquille ne différant de celle des autres Cythérées par aucun caractère considérable, nous ne l’admettons pas actuellement, et nous le faisons rentrer dans le genre d’où il a été extrait.

Dioxe , Megerle. Ce genre , s’il était admis , aurait pour type les Cÿtherea Qiione ei Dîone de Lamarck. En quoi ces espèces diffèrent- elles des autres Cythérées?

7®’Ciiice, Schumacher. Nous serions plus disposés à adopter ce genre ; il est destiné à réunir toutes lès èspèces de Cythérées aplaties , dont le Cÿtherea scripta peut donnôr une idée. Dans ces espèces , l’impression palléaleest simple, d'où l’on pourrait conclure que l’animal est dépourvu de siphons postérieurs ; mais avant d’adopter le genre , il faut se souvenir des Cardium , chez lesquels l’impression paltéale est simple, quoique l’animal soit pourvu de deux siphons courts; il faut aussi ne pas perdre de vue ce fait important, que dans les Cythérées on voit le sinus palléal s’amoindrir insensiblement et disparaître enfin dans les espèces du genre Ciccé de M. Schumacher. Nous pensons qu'avant de l’admettre on de le rejeter définitivement , il faut attendre des observations suc l’animal et le laisser provisoirement parmi les Cythérées.

Venus , Linné. ^ Le dernier genre de la sous-famille est celui des Vénus. Ce genre, tel que M. Gray le comprend, ne ressemble pas à

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celui de Lamarck, et moins à celui de Linné; il est réduit aux espèces voisines des Kenus verrucosa et puerpera , c’est-à-dire que dans ce groupe M. Gray réunit des coquilles à trois dents cardinales divergentes et à peu près égales. Nous allons trouver dans la seconde sous-famille les autres genres qui continuent les modifications proposées par M. Gray dans le genre Vénus.

9" Mercenaria, Schumacher. Proposé par M. Schumacher, nous comprenons difficilement pourquoi M. Gray l'a adopté; en effet, il a pour type le fVnus mercenaria , qui a trois dents à la charnière , et dont tous les autres caractères s’accordent avec ceux des Vénus proprement dites.

10“ Anomalocardia, Schumacher. Ce genre de Schumacher mé- riterait plutôt d’ôlro conservé que le précédent , si l’on voulait oublier toutes les modifications que présente- la charnière dans le grand type des Vénus; il est destiné aux espèces qui ont deux dents cardinales et une sinuosité palléale très courte. Ce genre est pour nous inadmissible dans l’état actuel de la science.

1 r Cyprixa, Lamk. Tous les conchyliologues admettent ce genre, et nous suivons leur exemple ; mais doit-il faire partie de la famille des Conques? C’est la question qu’il conviendra d'examiner. On a une bonne figure de l’animal du Cyprina Jslnndica clans le Faitna suecica de MüUer. Ce Mollusque se rapproche beaucoup do celui des Vénus, mais il en est assez différent pour entrer dans une autre famille; ainsi les siphons sont ires courts et rapprochés de ceux des Cardhm. Le siphon anal a à peine le quart du diamètre du branchial ; l’un et l’autre sont garnis de tenta- cules simples ; ils sont dépourvus d’un muscle rétracteur. Si l'on vient à comparer cet animal avec celui d’une grande espèce de Cyrène, telle que le Zeildnica , par exemple , on observe entre eux de nombreuses ressemblances; aussi nous n’hésitons pas à comprendre les Cyprines dans la famille suivante , celle des Cyclades,

12“ Chione, Megerle. Nous ne comprenons pas plus l’ulilité de ce genre que celle des Mercenaria et des Ânomatocardia. En quoi les Keîms Di/sera, Gullma, etc., diffèrent-elles des autres Vénus? Nous connaissons les animaux de ces espèces , ils ne diffèrent pas générique- ment de ceux des Tenus verrucosa , puerpera , été.

13“ Tapes, Megerle. Ce genre correspond exactement à celui que plus tard M. Sowerby a nommé IhdlaHra. Quoique le nom de Tapes soit moins heureux que celui choisi par M. Sowerby, il doit cependant rester à cause de sou antériorité.

Nous passons sous silence le genre Rupellaire ou Vénérupe , nous on avons traité dans la famille précédente.

T. l. -A* PAHTtF..

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5 1 4 QUINZIÈME FAMILLE .

1 Clementia, Gray. La coquille qui sert de type à ce nouveau genre de M. Gray ne diffère en rien des autres Vénus, si ce n’est qu’elle est très mince , blanche et papyracée ; assurément ces carac- tères sont insuffisants pour la création d’un bon genre.

1 5" Glaocosomie , Gray. Nous ne connaissons pas encore l’animal de ce genre intéressant , vivant dans les eaux douces , ayant une char- nière à trois dents ; il nous semble se rapprocher des Cyrènes et des Cyclades, c’est pour cela que nous le rangeons dans la famille suivante.

Enfin, la famille des Veneridœ se termine par les deux genres Capse et Pétricole ; ils nous sont connus et nous y renvoyons le lecteur.

Tel est l’ensemble de celte grande famille de M, Gray; l’examen auquel nous nous sommes livré nous démontre qu'elle renferme un assez grand nombre de genres inutiles et quelques autres qui ne sont pas à leur place. C’est ainsi que nous sommes conduit à n'admettre que sept genres dans la famille des Conques : six de ces genres sont parfaitement connus; le septième nous paraît nécessaire pour réunir quelques espèces voisines des Dosinia , mais qui n’ont jamais que trois dents à la charnière de chaque valve.

Les animaux réunis dans la famille des Conques offrent quelques caractères généraux à l’aide desquels tous les genres se rattachent les uns aux autres , quoique par la diversité de plusieurs autres caractères plus apparents que profonds , ils semblent dépendre de plusieurs groupes distincts.

Le manteau , dans tous les animaux de la famille des Conques, offre les caractères que nous avons reconnus à cet organe dans les précé- dentes familles. Les deux lobes , désunis dans presque toute la lon- gueur du bord ventral , sont dépourvus de tentacules , mars ces tenta- cules sont remplacés par un bord membraneux , plus ou moins profon- dément plissé. Dans le Pullastra, par exemple, ce bord est presque simple et il tombe comme un voile au-devant de la grande ouverture du manteau. Dans les Vénus, les Cylhérées, les Dosinies. ce bord mem- braneux est profondément plissé, et les plis d'un côté s’emboîtent exactement dans ceux de l’autre.

Les siphons présentent des caractères très divers. Dans quelques Cythérées, par exemple , ces organes sont réunis dans toute leur lon- gueur; ils le sont également dans les Artémis; ils se disjoignent au sommet dans d’autres Cylhérées ; celte disjonction devient plus pro- fonde dans les Pullastra, dans les Venus, et dans ce dernier genre il est même des espèces dont les siphons sont séparés j usqu’auprès de la base . Sous le rapport de la jonction et de la disjonction des siphons , on

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observe dans la famille des Conques presque tous les degrés; il ne faut donc point attacher à ce caractère plus d'importance qu’il ne mérite, et, par conséquent, on manquerait à la philosophie de la classiOcalîon si l’on voulait la fonder sur ce caractère unique. Nous voyons aussi des variations considérables se manifester dans la forme des tentacules qui terminent le bord libre des siphons. Chez les PuUastray par exemple, le siphon branchial est pourvu de tentacules digités, comparables à ceux des Donaces, des Mésodesmes, des Pétricoles et dçs Vénérupes. Dans les Cylhérées , au contraire, ces tentacules-sont simples, cylin- dracés; ils le sont également dans les Vénus, et ils manquent totale- ment chez les Artémis, Le siphon anal offre des caractères plus con stants. Son pourtour se prolonge en une calotte membraneuse , percée au sommet , à la base de laquelle s’élève un rang de tentacules simples et cylindracés. Les Pullastra, les Vénus, les Cylhérées, nous présen- tent cette disposition , tandis que chez les Dpsinies le siphon anal reste simple comme le branchial.

Si nous ouvrons le manteau, nous trouvons dans tous les animaux de la famille des Conques une masse abdominale plus ou moins com- primée, terminée en avant par un pied triangulaire à base large, ayant les bords tranchants et susceptibles de mouvements très divers. Dans le genre Dosinie, le pied est un peu ditférent ; il a quelques rapports avec celui des Pétoncles , étant taillé en forme de fer de hache; cepen- dant son extrémité antérieure s’étend sous la forme d’une petite langue triangulaire, plus petite, mais semblable à celle des Vénus et des Cy- thérées. La bouche est petite , et dans tous les genres dont les animaux sont connus elle est accompagnée de lèvres étroiles, courtes, terminées de chaque côté en une paire de palpes labiales petites , triangulaires , un peu plus longues que larges.

Les organes branchiaux sont semblables dans tous les genres connus : ce sont deux grands feuillets subquadrangulaires qui s’appliquent sut les parois de l'abdomen ; les feuillets internes sont un peu plus grands , par leur extrémité antérieure iis remontent jusqu’au voisinage la bouche. En arrière de la masse abdominale, les organes branchiaux se réunissent et viennent se fixer au pourtour de l’ouverture intérieure du siphon anal.

En pénétrant plus avant dans la structure des animaux de la famille des Conques , nous leur retrouvons à tous sans exception un caractère qui n’est pas sans importance. Le coeur occupe la place il se trouve dans les autres Mollusques acéphalés , il correspond à la charnière de la coquille ; il est constitué comme à l’ordinaire d’un ventricule subglo-

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bilieux et de deux oreillettes. Mais en arrière, au moment il donne naissance à l’aorte postérieure, il se dilate en une seconde poche mus- culaire, qui semble être un second ventricule annexé au premier. De plus, un caractère commun à tous les animaux de la famille des Con- ques se trouve dans l’organe dépuraleur. Poli avait remarqué dans le Cuüierea Chionc un organe contenant de très gros grains d'une ma- tière solide, transparente, jaunâtre , et il crut avoir découvert , dans cet organe , celui qui est destiné à sécréter et à préparer la matière calcaire de la coquille. Mais l'opinion de Poli est justement contredite par un assez grand nombre d'observateurs, les uns croyant voir un véri- table poumon dans l’organe en question ; les autres, avec plus de rai- son , le comparant aux reins des animaux vertébrés , et le considérant par conséquent comme un organe de dépuration. L’organe dépuraleur se présente sous dès aspects très divers dans toute la série des Mollusques acéphalés: mais dans la famille des Conques il a ce caractère spécial de contenir dans ses parois des granulations pins ou moins grosses des matières solides qu’il a sécrétées.

Si nous résumons les faits que nous venons d’exposer, il est facile de s’apercevoir que tous les animaux que nous réunissons dans la famille des Conques se rattachent entre eux par la similitude des organes les plus importants. Ainsi , les bords du manteau , la bouche et les palpes qui raccompagnent, les branchies, le cœur, l’organe dépuraleur, ont la plus grande ressemblance ; tandis que les dilférences so montrent dans des organes d’une moindre importance, tels que les siphons , les tentacules , dont ils sont pourvus , ainsi que la forme générale du pied. Nous pouvons donc considérer comme naturelle une famille dans laquelle sont rassemblés des animaux chez lesquels la somme des ressemblances remporte de beaucoup sur celle des différences. Les coquilles , dans la famille que nous examinons, ont, ainsi que les animaux, des caractères communs et d'autres caractères plus restreints qui permettent de les diviser en genres assez nettement circonscrits. C’est dans cette famille que se trouvent réunies les coquilles les plus richement colorées et les plus diversement ornées. Par leur nombre considérable , elles devien- nent l’ornement des collections. Toutes ont un ligament externe; les unes sont ovales , transverses ; les autres sont subtrigones , et elles passent insensiblement vers la forme orbiculaire qui se maintient dans quelques genres; les unes sont fort aplaties, chez le plus grand nombre elles sont médiocrement bombées ; les crochets sont proéminents , in- clinés en avant au-dessus d’une lunule, ordinairement superficiels, mais toujours nettement circonscrits.

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Les bords des valves sont ordinairement simples , épaissis , et lorsque les valves sont jointes , il n’exisle aucun entrebûillement , soit en avant , soit en arrière. Les Vénus, couvertes de stries longitudinales, ont quelquefois les bords finement crénelés ; il y a même un petit groupe d’espèces , chez lesquelles le bord dorsal porte des stries obliques dans le voisinage de la charnière. Le lest, dans les coquilles de la famille des Conques , est généralement épais et solide; une espèce de Vénus, ayant le test très mince , présentant une exception presque unique , M. Gray a cru devoir en faire un genre particulier sous le nom de Clementia. La surface interne n'est jamais nacrée ; le plus souvent elle est d’un blanc pur ; mais il est des espèces qui se distinguent par des couleurs bril- lantes et variées , qui se montrent à l’intérieur de leurs valves. Cette coloration intérieure se manifeste aussi bien chez les Cythérées que chez les Vénus; elle se rencontre aussi, mais plus rarement, dans les Dosinies. Sur la surface interne se trouvent deux impressions muscu- laires , assez grandes , situées l’une et l’autre dans la région dorsale ou supérieure. Une impression palléale accompagne le bord ventral, le suit parallèlement et se contourne en arrière en- une sinuosité qui est plus souvent courte , subtrigone, quelquefois ovalaire et subhorizontale, comme dans les Pullastra, d’autres fois oblique de haut en bas, comme dans les Dosinies et les Cythérées. Cette sinuosité diminue progressivement dans une série d’espèces , et on la voit disparaître entièrement dans le Cytherea scripta , par exemple ; et c’est pour cette raison quo M. Schu- macher a fait de cette espèce le type d’un genre Circe , conservé par M. Gray. Danslo groupe des Vénus, un phénomène semblable se pré- sente, et nous y avons attaché d’autant moins d’importance, qu’ayant examiné les animaux de quelques espèces dépourvues de sinuosité, nous les avons trouvés en tout semblables à ceux des autres Vénus. Nous admettons dans la famille des Conques le genre Thétis de Sowerby ; noos le considérions autrefois comme un groupe particulier des Vénus. Ce genre a été distingué par la forme toute particulière que présente l’impression du manteau. Cette impression, au lieu de suivre une ligne oblique, comme dans les Vénus et dans les Cythérées , remonte presque perpendiculairement vers la région des crochets; elle est très large à la base, pointue au sommet, et elle semble s'éloigner de tout ce qui est connu dans le type des Vénus. Cependant on admet dans le genre Vénus une coquille très intéressante , nommée Tenus incompîa par M. Philippi, et dans laquelle la sinuosité palléale présente la plus grande analogie avec celle des Thétis. C’est par ce fait que nous répon- ilons à la question de M. d’Orbigny, qui, dans sa Paléontologie fraii-

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QUINZIEME FAMILLE.

çahe , ne comprend pas pourquoi nous avions relégué le genre du paléontologiste anglais parmi les nombreuses sections du grand type des Vénus. Nous ferons remarquer aussi le caractère tout particulier que présente la sinuosité palléale dans les Dosinies et dans le genre C]icHna. Cette impression est allongée, étroite, à sommet très aigu, et elle parcourt très obliquement tout le limbe intérieur des valves Par celte forme, les genres que nous venons de citer se reconnaissent avec facilité et se distinguent très nettement des Cylhérées et des Vénus.

Si nous examinons la charnière dans les coquilles de la famille des Conques , nous lui trouvons des modifications â l’aide desquelles La- marck a circonscrit plusieurs genres, qui semblent devoir se maintenir dans la méthode. C'est ainsi . par exemple, que les Cythérêes ont trois dents cardinales à la charnière, et de plus une dent antérieure, située dans la longueur de la lunule. Cette dent lunulaire est susceptible de nombreuses variations. Très apparente dans le plus grand nombre des Cythérées, on la voit diminuer insensiblement ^ et celte diminution est tellement graduelle, qu’il est quelques espèces incertaines entre les Cythérées et les Vénus; ce qui nous avait fait pencher autrefois vers celle opinion, que le genre Cythérée ne se distingue pas suffisamment du grand type des Vénus de Linné. Dans les Vénus et les Pullastra, la charnière ne porte jamais plus de trois dents. Dans les Pullastra, les dents sont presque parallèles . dans les Vénus elles sont divergentes ; mais ce caractère a réellement bien peu d’importance, et Ü existe de nombreux passages qui rattachent ces deux genres. Les Pullastra ont la coquille généralement plus mince, et ce caractère ne peut avoir qu’une foible importance , et ne doit être employé qu’avec une extrême réserve. Les trois dents des Vénus ne sont pas d’une constance absolue; il existe des espèces épaisses et bombées, chez lesquelles une des dents a disparu ; il n’en reste plus que deux. De ces espèces à deux dents M. Schumacher a fait son genre .^ïioma/ocardm, genre inadmissible à nos yeux , car l’animal ne diffère pas de celui de Vénus. Dans le genre Grateloupia, la charnière a subi des modifications très intéressantes: la dent lunulaire existe comme dans les Cythérées; il y a trois dents cardinales régulières, mais en arrière de la troisième, on en trouve trois ou quatre autres petites qui vont graduellement en dimi- nuant. Indépendamment de ce caractère tout à fait spécial, on en trouve un autre, qui ajoute à la valeur du genre. II se remarque dans la forme particulière de l’impression palléale; nous insisterons sur ce caractère en traitant du genre en particulier.

Toutes les coquilles de la famille des Conques sont marines , presque

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toutes habitent les plages sableuses , et ne s'éloignent pas beaucoup des rivages ; elles vivent enfoncées perpendiculairement dans le sable, à la surface duquel elles viennent ouvrir leurs siphons. On les trouve en grande abondance dans les régions équatoriales, leur nombre diminue à mesure que l’on s’approche davantage des régWs polaires. On en cite à l’étal fossile dans presque tous les terrains ; mais à moins d’avoir des impressions bien nettes de charnière , il est difficile de décider si certaines espèces, rapportées à cette famille d’après la forme géné- rale, en dépendent réellement. Nous pouvons affirmer que le genre Dosinia ne se trouve à l’état fossile que dans les terrains tertiaires. Quant au genre Grutetoupia , il provient aussi des terrains tertiaires , mais le type vivant de ce genre n’est pas encore connu. Quant aux Cylhérées, aux Vénus et aux Pullastra , elles descendent d'une manière authentique dans les terrains crétacés et jurassiques , et le type des Vénus, lui seul, descend encore plus bas. Au delà nous ne connaissons pas ce genre d’une manière bien certaine.

GENRE QUARANTE-CINQUIÈME.

PÛIiXiASTRE. Pullastra. (Sowerby.)

Pl. 2 1, f. 7. 8. II. 12.

CARACTERES GENERIQUES. Animal ovalaire transverse, ayant les bords du manteau simples ; deux siphons un peu moins longs que la coquille, réunis dans le milieu ou les deux tiers de leur longueur ; siphon branchial terininé par une ouverture circulaire sur le bord de laquelle s’élèvent un grand nombre de tentacules rameux, symétriquement rangés, inégaux, les plus petits dans les interstices des plus grands; siphon anal plus étroit et un peu plus court, garni d’un rang de tentacules sim- ples et cylindracés; pied grand, aplati, linguiforme , portant un byssus à la base, dans la plujiart des espèces; bouche pe- tite; palpes labiales triangulaires subéquilatérales; branchies larges, inégales, subquadrangulaires, réunies en arrière du pied.

Coquille ovale transverse , inéquilatérale , mince , à bords

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QUINZIÈME FAMILLE.

simples parlaitement clos; charnière portant trois dents médio- cres, souvent bifides ou canaliculées au sommet, subparallcles ou divergentes. Deux impressions musculaires ovalaires; im- pression palléale terminée en arrière par une sinuosité horizon- tale ovalaire et peu profonde.

SYNONYMIE GÉNÉRIQUE, Venus , Linné , Chemnitz , Schrœter, Gmelin, Dilhvjn, Lamarck , etc. Twpes^ Me- gerle, Schumacher. , Sowerby, Reeve, Anton, Morris, etc.

OBSEnvATiON.s. Ofl doit à M. Sowerby la création du genre PtiU îaslra; il l’a proposé , pour la promièro fois , en 1 827, dans son Généra of shells et dans le Zoological journal. Ce genre est séparé des Vénus de Linné pour celle des espèces qui ont trois dents cardinales rappro- chées, presque parallèles, dont le test est mince, et dans l’intérieur desquelles se remarque une impression palléale, terminée en arrière par une sinuosité profonde, ovalaire et subhorizontale. Fondé sur des ca- ractères d’une faible importance, ce genre fut rejeté par la plupart des conchyliologues , et nous-mÔme, dans la 2* édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck , nous avons insisté sur le peu de valeur des caractères empruntés aux coquilles pour le repousser de la série des bons genres , n*ayant pas alors les moyens de nous assurer si les ani- maux offrent des différences avec ceux du grand type des Vénus. Nous faisions apercevoir le peu de fixité des caractères signalés par M. So- ■vverby, . Ainsi les dents cardinales qui, dans le VeMws decussaZa, par exemple, sont en effet petites et presque parallèles, deviennent beau- coup plus divergentes dans des espèces extrêmement voisines , de sorte que de proche en proche . on est entraîné à admettre parmi les Pullastra une très grande partie des Vénus aplaties et transverses qui peuplent en grande abondance les rivages des mers chaudes. Si Ton croit trouver dans l'impression palléale plus de fixité, l’observation vous désabuse bientôt, et vous voyez cette impression s’amoindrir insensiblement, devenir de plus en plus triangulaire, et finir enfin par ressembler beau- coup à celle des Vénus bombées et épaisses. Dans l’état se trouvait la science, il était raisonnable, nécessaire même, de rejeter le genre Pulîaslra. Aujourd’hui que nous possédons d’autres documents, lorsque nous avons pu observer vivants les animaux de plusieurs espèces de Pullastra , nous avons pu nous fixer sur la valeur de ce genre et l'adopter aujourd’hui après l’avoir rejeté autrefois.

L.life C0^’QÜES.

J 2 J

Mademoiselle Callow, dans le Conclioîogical nomencitiLor, 'tùnsi que M. Keeve, dans son ronc/io/ogî'a îco/ifca, à l’exemple do M. Sowerby, réduit le genre Pullaatra aux espèces perforantes et à quelques autres analogues, telles que le rcjius decussuia ; mais nous pensons qu’il est difficile do séparer du genre et de laisser parmi les Vénus les nom- breuses espèces des mers de l’Inde qui, à rexccplion des dents cardi- nales divergentes, conservent les autres caractères des Pullastra.

Les Pullastra sont des coquilles ovales, transverses, quelquefois un peu subtrigones; elles sont d’une parfaite régularité, et leurs valves, peu épaisses, sont parfaitement closes dans toute leur circonférence. Toutes les espèces sont inéquilatérales; les crochets peu proéminents s’inclinent obliquement en avant et viennent dominer une lunule cir- conscrite par une strie peu profonde. Cette lunule est variable dans sa forme; tantôt elle est étroite et lancéolée, tantôt elle est ovalaire ou en forme d’écusson. La surface est souvent lisse mais plus souvent encore elle est striée transversalement ; les bords sont simples et entiers ; la surface interne, ordinairement blanche , présente dans la région dorsale deux grandes impressions musculaires , dont l’une , l’antérieure , est ovale , tandis que la postérieure, un peu plus grande , est subcirculaire. Du milieu du bord inférieur de l'impression musculaire antérieure sc détache une impression palléale qui se place à une assez grande distance du bord des valves, soit le bord ventral jusque près de Textrémilc postérieure, et se recourbant ensuite sur elle-même, elle dessine une sinuosité, ovale, horizontale, variable dans sa profondeur et dans sa largeur selon les espèces, et quelquefois môme dans les individus d’une même espèce, ainsi que le Tenus decussala peut en donner la preuve. Cette sinuosité diffère de celle des Psammobies , en ce qu’elle est entiè- rement isolée de la portion ventrale de l’impression palléale. Dans quel- ques espèces des mers de ITnde la sinuosité postérieure se rétrécit considérablement, et elle commence à prendre une forme triangulaire par laquelle elle se rapproche de celle des autres Vénus. Nous ie répé- tons , les caractères des coquilles, tels que nous venons de les exposer, seraient tout à fait insuffisants pour déterminer d’une manière certaine les limites du genre Pullastra: mais les animaux vont nous offrir des caractères beaucoup plus constants à l'aide desquels il devient possible de limiter le genre d’une manière rigoureuse.

L’animal , dans le genre Pullastra , conserve la forme générale de la coquille; il est ovale, transversc, parfaitement symétrique, et. comme à l’ordinaire , enveloppé dans un manteau membraneux , dont les lobes sont ouverts depuis !e bord inférieur du muscle adducteur antérieur des

522 QUINZIÈME FAMILLE.

valves jusque près de l’origine des siphons. Le ûianteau est très mince, transparent; il a quelquefois l'aspect laiteux, et il porte à sa circonfé- rence un muscle orbiculaire assez large , qui , en s’ailachant à la coquille , y laisse l'impression palléale que nous avons décrite. Lorsque l’animal est vivant et qu’il entre- bâille ses valves, il ferme' la cavité de son manteau à l'aide d'un bord membraneux assez large, simple, dé- pourvu de tentacules et à peine plissé. Lorsque l'animal fait sortir son pied , il écarte ce bord qui alors s’applique exactement sur les parties latérales de l'organe du mouvement.

Le manteau se prolonge en arrière en deux siphons assez gros, réunis dans une partie de leur longueur; ces organes se présentent sous la forme d'une masse aplatie, que partage en deux portions inégales une dépression correspondante à la cloison intérieure, qui sépare leur cavité. La séparation de ces deux organes s’opère plus ou moins haut, selon les espèces : le plus ordinairement elle a lieu un peu au delà de la moitié Le siphon branchial est toujours plus gros et souvent plus allongé que l'anal. II se termine par une ouverture circulaire, sur le bord de laquelle s'élèvent de nombreux tentacules arborescents, qui se recourbent au-dessus de l'ouverture pour s’opposer au passage de corps trop volumineux. Ces organes sont disposés avec beaucoup de symétrie; il y en a de grands qui alternent avec de plus petits; sou- vent tandis que les grands se renversent au-dessus de l’ouverture, les plus petits prenant une direction opposée, forment une espèce de colle- rette autour de l'ouverture. Il y a même des espèces chez lesquelles , indépendamment des tentacules arborescents, le siphon branchial est pourvu d’une rangée de petits tentacules cyÜndracés, qui se dirigent constamment en dehors. Le siphon anal est fermé par une calotte mem- braneuse , percée au centre ; à la base de cette calotte , s'élève un rang de tentacules cylindracés , coniques, plus ou moins nombreux et plus ou moins longs selon les espèces.

Le pied est allongé, linguiforme, triangulaire; il est d’un blanc laiteux, très pointu au sommet; son bord inférieur est fendu, et dans presque toutes les espèces que nous avons observées vivantes ou con- servées dans la liqueur, nous avons trouvé un byssus ; composé de fila- ments blanchâtres, mollasses, comparables à des fibres musculaires, qui auraient été détachés sans changer beaucoup de nature. Ce fait, nous l’avons observé dans le Pullaslrageographica, dans une espèce nouvelle que nous avons nommée castrensis, et nous avons vu dans plusieurs individus du Venus decussata, une fente au bord inférieur du pied, ce qui nous donne la preuve de l’existence d’un byssus dans èette eèpèce.

LES CONQUES.

520

La bouche est petite, ovale, obrorde, profordétrent cachée au- dessous du muscle adducteur antérieur; elle est garnie de deux petites lèvres étroites et courtes. Ces organes se terminent de chaque côté en deux palpes labiales, triangulaires, courtes, un peu plus longues que larges, et attachées à l’anima! par leur bord le plus étroit.

L’appareil branchial consiste en deux feuillets branchiaux de chaque côté; ces feuillets sont subquadrangtilaires ; ils sont larges, régulière- ment plissés , inégaux ; les feuillets externes étant un peu plus petits que les feuillets internes, ceux-ci prolongent en avant, se termi- nent en une pointe aiguë, qui, en s’interposant entre les palpes la- biales, aboutit jusqu’au voisinage de la bouche. Dans le Pullastra geographica^ par exemple, cette extrémité de la branchie interné s’avance entre les lèvres jusque sur les bords de la bouche. En arrière du bord postérieurde la masse abdominale, les feuillets branchiaux d’un côté se réunissent à ceux de l’autre ; ils se prolongent un peu en arrière , tombent au-devant de l'ouverture du siphon anal, et se soudent au pourtour de ce siphon, de manière à intercepter toute communication entre sa cavité et celle du manteau.

Toutes les Pullastra sont des coquilles littorales; elles habitent les plages sableuses, à une faible profondeur sous l'eau. C’est ainsi que dans la Méditerranée, par exemple, toutes les espèces connues restent dans une zone de dix à quinze brasses de profondeur. Nos observations et celles de M. Forbes le constatent d’une manière positive. Quant à la distribution géographique des Pullastra , on peut dire qu’il y en a par- tout, depuis les mers polaires, on eh rencontre quelques espèces seulement, jusqu'aux mers tropicales, elles deviennent d’une grande abondance. Nos mers tempérées et la Méditerranée en contiennent cinq ou six espèces , dont les animaux conservent les caractères constants que nous avons exposés précédemment. Ces coquilles sont ornées pour la plupart de très vives couleurs , extrêmement variables; aussi on ne pourrait guère les employer à la détermination des espèces , si ce n’est en les considérant sur un très grand nombre d’individus. Mais le moyen le plus sûr pour reconnaître des espèces en apparence très voisines consiste dans l’observation des animaux, et particulièrement de leurs siphons. Ces organes, en eü'et, ont non seulement des couleurs diffé- rentes dans chaque espèce, mais les tentacules dont ils sont pourvus présentent aussi les différences (jui se retrouvent invariablement dans tous les individus.

Dans l’état actuel des observations il est très difficile de donner des renseignements bien précis sur la distribution des espèces fossiles , et

iJlIiNZlEiMË FAMILLE.

02:1

on le concevra sans peine, puisque pour la constatation irrévocable du genre , il faut pouvoir examiner non seulement la charnière , mais encore l'impression palléaie. Si cet examen est facile pour des especes du ter- rain tertiaire, il devient, si ce n’est impossible, au moins très difficile dans celles des terrains secondaires. Ainsi , nous comprenons pourquoi M. d'Orbigny. dans sa Paléontologie française , a réuni en un seul genre les Vénus, les Cythérées, les Arthémis , parce qu on effet on est obligé de juger de cos genres par la forme générale, et nous. savons, pour l’avoir prouvé un grand nombre de fois , combien ces caractères de la forme sont insuffisants. A défaut de la coquille mémo, si difficile à examiner dans les terrains secondaires, l’observateur doit recourir aux moules lorsqu’ils sont nets , et surtout lorsqu’ils offrent des traces de la charnière. Par ce moyen on peut quelquefois reconnaître les carac- tères des coquilles bivalves et décider si un genre descend plus ou moins bas dans la série des terrains secondaires.

Nous avons vainement tenté de rapporter à leurs véritables genres la plupart des espèces fossiles citées dans les terrains secondaires ; une confusion inextricable s’est introduite peu à peu ; il a suffi aux paléon- tologistes d’un moule, d'une coquille , ayant une forme oblonguo un peu comprimée pour qu’ils en fissent une Vénus ou une Pullastra. Dans de semblables déterminations , ne s’appuyant sur aucune observation certaine delà charnière, de l'impression des muscles et du manteau, beaucoup d’erreurs ont été commises : il est presque impossible aujour- d'hui de les réparer. Plusieurs naturalistes confondant en un seul tous les genres de la famille des Conques , ont tenté de restaurer le genre Vénus tel que Linné l'avait institué, lis ont réuni sous une dénomina- tion un peu vague des objets fort différents ; il en est résulté une sorte de confusion dans la distribution des espèces dans les couches de la terre : ce sont partout des Vénus, il pourrait y avoir des Cylhé- rées, des Dosinies ou des Pullastres. Au milieu do tant de causes d’erreur , il nous est bien difficile de compter les espèces de chaque groupe et d’en indiquer la distribution; il faudrait réunir en une seule collection les types de toutes les espèces publiées, les étudier avec un nouveau soin , soumettre les douteuses à de nouvelles études et admettre . dans les listes de distribution les espèces incontestables. Les ouvrages seuls des paléontologistes sont insuffisants pour accomplir cette lâche difficile de remettre chaque espèce à sa place , car dans ce genre Vénus , ils ont confondu non seulement les divers genres de la famille des Con- ques , mais même des genres qui lui sont étrangers , des Pkoladomyes , des Carclium . des Lucines , etc. .Continuer à traiter la paléontologie

I.KS'CO.NQIJKS.

de cette manière , c’est vouloir ôter à cette science toute sa valeur et justifier la critique des esprits sérieux qui y rencontrent tant d'incer- titude.

Toutes les espèces mentionnées dans les terrains paléozoïques sont douteuses pour nous ; elles sont introduites dans le genre d’après la forme générale , la charnière et les autres caractères génériques ne soht point connus. Il y a un fait remarquable dont il faut tenir compte ; c’est que jusqu’ici toutes lea coquilles bivalves des terrains inférieurs dont on a pu examiner l’intérieur ont invariablement l’impression palléale simple sans sinuosité postérieure; il est donc à présumer que les espèces nom- mées Pullastra dépendent d'antres genres , et particulièrement des Cypricardes.

D'après M. Sowerby, il existerait une espèce, le Fmis lœvis, dans lo silurien supérieur {Ludloiv roc) d’Angleterre.

Trois autres Venus, les elliptica, compianata, lœvis, à en croire le même naturaliste, dépendent du lerèain dévonien.

Le genre paraît manquer dans toute la série du trias; il se montre de nouveau dans le lias, d’après M. Strickland. {Venus arenicola , AVainlode ClifT en Angleterre).

Trois espèces ont été signalées par M. Philips dans la série des cou- ches appartenant à l’oolithe inférieure: ce senties Venus oblüa, recon- dîta et peregvina.

Une nouvelle lacune se manifeste dans l’existence du genre Pullasira, pendant que se déposait la grande formation jurassique. Il apparaît de nouveau avec la formation crétacée. Les deux grandes lacunes que nous venons de signaler n’existent probablement pas, elles résultent do l’imperfection des observations et de la difficulté de constater les carac- tères réels du genre.

Avec le terrain crétacé inférieur (néocomien) se montrent six espèces que l’on peut ranger dans les Pullastra; la plupart ont été dé- crites pour la première fois par M. d’Orbigny dans la Paléontologie française. Ce naturaliste repousse le genre Pullastra, et toutes les espèces de Cy thérées et de Dosinies deviennent des Vénus pour lui . Les Pullastra üoryiueliana , Robinaldina , Dtipiniana, Brogniartina , Ricordeana , se rencontrent dans tout le néocomien du centre de la France, dans les départements delà Haute-Marne, du Doubs , de l’Aube , de TYonne. La sixième espèce , la Venus fabci de Sowerby. se répand sur un plus grand espace, car elle est en Angleterre, en Allemagne et en France.

Nous n’en connaissons jusqu’ici que deux espèces dans la craie chlo- ritée. L’une est des environs du Mans; on en doit la découverte à

526 QUINZIÈME FAMILLE .

M. Gueranger : c'esî, le Pullastra fragîlis; Tautre est de TAlIemagne, c’est le Pullastra elliptica de Rœmer.

Dans la craie blanche , nous trouvons le Venus Royana de M. d’Or- bigny, qui nous paraît un Pullastra ; enfin la craie supérieure de Scanie posséderait aussi une espèce. Si le Venus exula de NÜson est un Pul- lastra, ainsi que nous le supposons, le genre serait donc représenté dans toute la série crétacée et serait transmis aux terrains tertiaires sans interruption.

Les terrains tertiaires sont peu riches en espèces du genre qui nous occupe; nous en comptons douze seulement distribuées très inégalement dans les trois étages de ces terrains. Dans l’étage inférieur, nous ne connaissons que deux espèces, notre Venus tenuis , et ce qui est très remarquable, le Venus decussala, dont l’identité avec les individus vivants ne peut être contestée.

L'étage tertiaire moyen renferme cinq espèces mentionnées par les naturalistes: les Pullastra triouspis, Eichwald; modesta, Dub. de Monip. ; Nana, Sedw. et March , se rencontrent dans les terrains ter- tiaires de la Podolie et de la .Wolhynie ; le Pullastra vetula de Basterot se trouve à la fois à Bordeaux, à Turin , et dans les faluns de la Tou- raine; des fragments rapportés de Vienne par noire savant ami M. Con- stant Prévost nous font penser qu elle existe aussi dans le bassin viennois; la cinquième espèce est le Venus maura de M. Brougniart : mais n’ayant pas vu la charnière et ne pouvant juger de l'espèce que par sa forme générale, nous ne l'introduisons ici qu'avec doute.

Trois espèces sont mentionnées dans le Crag : l’une en Belgique , le Pullastra strialella de Nyst; les deux autres en Angleterre, ce sont les Pullastra perovalis et virginea; cette dernière a son analogue actuelle- ment vivant dans les mers de l'Europe, et nous allons la retrouver parmi les espèces de l’étage supérieur.

Quatre espèces sont mentionnées dans l’étage tertiaire supérieur ; ce sont les suivantes :

Pullastra geographica , Lamk. Vivante dans la Méditerranée.

Fossile en Italie et en Sicile.

2“ Pullastra virginea , Lin. Vivante dans la Méditerranée et rOcéan français.

Fossile dans le Crag en Angleterre et en Sicile.

Pullastra Genei, Michelotti.

Celle-ci est particulière aux terrains italiens. Brocchi l’avait considérée comme l'analogue du Venits rotundata de Lin.

LES CONQUES. 627

{Venus papiîionaceay Lam.); mais elle s’en distingue con- stamment.

4“ Pulîastra decussata , Lin.

Espèce très commune dans tout l’Océan d’Europe ; fossile dans les sables supérieurs du bassin de Paris, en Italie, en Sicile et dans les terrains quaternaires d’Angleterre.

5“ PuUastra texturata y Lamk. Vivante dans l’Océan indien. Fossile des terrains tertiaires de Java.

Les espèces du genre PuUastra sont nombreuses; nous en comptons plus de soixante répandues dans toutes les rfiers , mais plus abondantes dans les mers chaudes que dans les tempérées et les froides.

Pullastre croisée. PuUastra decussata (Vénus) Lin.

PL 21. f. 7.8.

P. Testa ovato-transversâ y inœquilateraUy posterîus subangnîatn y albidày litturis maculisve, aut radiîs fuscis 've! rttfis picta, decus- satim striata, striis longitudinahbus erninenlioribus ; intus albà; inargine cardinali violaceo macnlato.

P'enus decussata, Linné, Sy^t. uat. éd. 10. p. 690. 126.

Id, Linné, Mus. ülnc. p. Ô09. 77.

Id. Linné, Syst. liât. éd. 12. p. it35. n** 149. .. ,

Bonan, Récréât, part. 2. f. 68.

Id. Mus. Kirch f. 67.

Lister, anim. Augl. pl, 4* f- Lister, Conch. pl. 428. f. 271.

Gualt. lad. pl. 85. f. L.

Kegenf Choix des coq. pl. 4* 4o.

T’émis literata. Pennaiit , Brit, Züol. t. 4* p- 19^). pl. 67, f 53. Venus decussata, 2* éd. p. 210. pl. 60,

Vernis dejlorata. Boni. Mus p. 68. pl. 5. f. 2, 3.

Cimeus reticulatus, Ba Costa, Brit. conch. p. 102. pl. 14* L 4- disses, Trav. of Nap. p 486, a" 140.

Venus decussata, Chemn. Conch. t 7. p. 58. pi. 48. f. 4^^* 4^^. Schrot, Eiiii. t. 3. p. i5o. n** 38.

Tellina. Schrot. Einl. l. 3. p. i4- a” 45.

Gmelia, p. 3294 i35.

Venus obscura. Gmel. p. 5289. 99.

Venus sanguinolenta, Guiel. p. 3295. 140.

5a8 quinzième famille,

Teliina rhomboïdes. Gmel. p. SaSy. 5o. Var. excîtis.

EncycN pi. aSS. f. 4.

Venus florida. Poli, Test. Sicil. l. a, pl. 21. f, 16, 17.

Olivi, Adriat. p. 108.

Venus decussata. Donovan, Brit, shells. t. 2. pl. 67.

Wood, Lin. Trans. t. 6. p, 168 pl. 17. f. ii, la.

Montagn, Testac. Brit. p. 124, ^

Maton et Rack. Iiin. Tran.s. t. 8. p. 88. pL 2. f. 6.

Dillw. Cat, t. r. p. aoS. n” 108.

Lamk. An. s. vert. l. 5, p. 597. 48.

Turlon, Concli. Dicl. p. 244.

Gerville, Cal. des Moll, de la Manche, p. 27. n” 12.

Blaînville, Malac, pl. 75. f. x.

Tuiion. Concbyl. Ins. Brit. p. i5S. 20. pl. 8. f. 10.

Payr. Cal. des Moll, de Corse, p, 5o, n“ 85.

Wood, Ind. testac. pl. 8. f. 107.

Desh. Ency. mélh. vers. t. 3. p. 1120. 22.

Dcsli, dans Lamk. An. s. vert. éd. t. 6. p. 356. 11° 46.

Desh. Expéd. sci. de Morce. Zool, p. 100. 11° 62.

PuUastra decussata. Autan, Verz. p. 8, 285.

Collard des Ch. Cal. des Moll, du Finist. p, aj. 5.

Boiich. Chant. Cat. des Moll, de Boni. p. 21. 11“ 3/,.

Scacchi, Cat. Coneh. reg. Neap. p. 7.

Jeffreys, List of Mar. Moll, al Oban Conch. mag. p. 43.

Maravig. Mém. pour PHisl. nat. delà Sic. p. 75.

Haiiley, Descr. cat. p. 122.

PuUastra decussata. Xhomps. Rep. on the Fauu. of Irel. p. 262. Forhes, Rep. 011 OEg, Invert. p. i43.

Verani, Cat. degli an. iuvert, p, i3.

Thorpe, Brit. mar. Couch. p. 98.

Requien, Cat. des Moll, de Corse, p. 25. 107.

Fossilts, Desh. Coq. fpss. de Paris, l. i. p. 142. p!. 23 f. 8, 9. Morris, Cat. of Brit. l’oss. p. loo.

Habitiî les mers d'Europe, toute la Méditerranée; fossile dans les sables supérieurs du bassin de Paris, dans les terrains siibapennins et dans les terrains quaternaires de rAuglelerre.

Espèce très commune , habitant les plages sableuses hlloralos et peu profondes dans la Méditerranée , plus profondes à mesure que l’on s’avance davantage vers le nord ; d’un goût agréable , elle est mangée par toutes les populations maritimes; elle est l’occasion d’un commerce

LKS CONQUES.

assez considérable, car elle est presque autant reclierchée que les huîtres par les habitants des bords de la Méditerranée; quelquefois elle est exportée , mais alors l’animal est complètement enfermé dans ses valves au moyen d’une ligature en fil de fer.

Parmi les variétés du Fenus decussata, Lamarck range une coquille de la Nouvelle -Hollande; un examen attentif nous a prouvé que cette variété constitue une espèce bien distincte. D’autres variétés ont été citées dans les mers de l'Inde et dans celles de l'Amérique; pour ces dernières nous ne les retrouvons pas dans les catalogues des naturalistes des États-Unis. Quant aux premières , nous pouvons dire avoir sous les yeux une coquille des mers de l’Inde qui semble avoir été prise à Mar- seille ou à Toulon; elle présente tous les caractères de l’espèce , la forme générale , les stries extérieures , la coloration , la forme et l’étendue de la lunule , les impressions musculaires, celle du manteau, les dents cardinales ; en un mot , tout est conforme au type de Tespèce , à l’ex- ception d’un seul caractère: les nymphes ne sont pas violettes dans les individus de l’Inde , elles le sont toujours dans ceux des mers d’Europe. Maintenant quelle est la valeur de ce faible caractère? Nous posons la question en faisant observer que l'identité serait prononcée si l’on com- parait la coquille de l’Inde devenue fossile avec les individus vivants de nos mers.

La 4 3* édition du Syslema naiurœesi très incorrecte; nous avons eu souvent l’occasion de le démontrer, nous en trouvons une nouvelle preuve dans ce qui a rapport au Venus decussata , puisqu’elle y est re- produite sous trois noms différents , et une quatrième fois dans un autre genre, celui des Tellines.

Il ne faut pas trop s’étonner si Born a consacré à cette espèce le nom de Fenus deporata; le doute est d’autant plus permis en présence des deux trop courtes descriptions de Linné, qu’il dit du defîoratq qu’elle est rOcéan européen , et du decussata quelle provient des mers de rinde. Poli publiait son grand ouvrage à une époque oh la science était déjà mieux fixée au sujet de l’espèce qui nous occupe, il est surprenant qu’il lui ait imposé un nom nouveau , lorsqu'il pouvait choisir entre plu- sieurs autres déjà consacrés avant lui.

Lq Pullastra decussata est une coquille ovale, transverse, inéquila- térale, un peu plus large en arrière qu’en avant , obtuse de ce côté , souvent sublronquée du côté opposé; les valves sont assez bombées, peu épaisses , à bords simples et obtus ; la lunule est allongée , étroite , lancéolée; elle est superficielle, circonscrite par une strie profonde; la surface extérieure est couverte de stries longitudinales et transverses ,

T. T. 9* PARTÏE. 34*

53o QUINZIÈME FAMILLE.

les longitudinâlés sont les plus apparentes ; les plus grosses occupent le côté postérieur; sur le milieu des valves, les stries sont plus fines et moins apparentes. A l’inlérietir, la coquille est blanche, souvent nuancée de violet vers Textrémité postérieure; la coloration extérieure est extrê- mement variable': on a des individus d’un blanc gris ou jaunâtre uni- forme, et l’on arrive à des individus presque noirs , par une série consi- dérable de variétés marbrées , maculées ou rayonnées de roux pâle, de fauve, de brun,' passant peu à peu au brun noirâtre très foncé et ré- pandu presque uniformément. La forme générale varie dans des limites assez larges: on remarque des individus plus étroits, d’autres plus larges, subtronqués du côté postérieur, d’autres plus larges encore et subtrigones. Malgré toutes ceè modifications , l’espèce est toujours faci- lement reconnaissable au moyeri de la charnière , des impressions , des muscles et du manteau , et enfin à cette, tache violette qui s'étend sur ^es nymphes.

Pullastra vieille. PuUasfra tèiula^ Bast.

PI. 22. f. 12.

P. Tâstii ovnto-transversâ y ina!(jnîlatern ^ tnrgidnlây tmnsvcnim su}- catâ; suivis depressis irregnîaribus; timbonibus minimis ; humln'vtx perspîcuà; derïtibus cardinaUhns tribus y di\>aricatis y conivis, pro- emineutibusypostico 'Valvce dtxtrœ hijtdo; marginibus integris,

Bast., Foss. de Bord, Mém. de la Soc. d’hisî. nat. t. a, p. 89. n* 5. pl. 6. f. 7.

Desh. dans Lamk. An. s. vert, a* éd. t. 6. p. 879, n* i3.

GoldF. PetreF (Verm. t. a. p. 348. 26. pl. t5i. f, 3.

Sismonda. Syn. ped. foss, p. ao.

An eadem? f'^enus rotnndata. Dnj. Foss. de Touraine, p. a6i. n* 3,

Habite... Fossile dans les terrains tertiaires moyens de Bordeaux, delà Touraine et de la Snperga, près Turin.

M. Dujardin, dans son Mémoire sur la géologie de la Touraine, a mentionné sous le nom de Fmws rotundata, une coquille bivalve qui appartient , en effet , au genre PuUaslra , mais qui nous paraît distincte aussi bien du rotundata de Brocchi que du vehda de Baslerot. Le ro- tuiidala caractérise les couches du terrain subapennin , tandis que le H^etuîa ne s’est rencontré jusqu’ici que dans les terrains tertiaires moyens.

Le Pullastra vetuîa est une coquille ovale , Iransverse , inéquilatérale ,

LES CONQUES.

53 ï

obtusè à ses extrémités , médiocrement renflée ; ses crochets sont petits , rapprochés et obliquement inclinés vers le côté antérieur, au-dessus d'une lunule dont le contour est peu marqué. Le corselet est appro- fondi; il se termine en une longue nymphe assez épaisse sur laquelle, s’attachait un long ligament externe. Trois dents cardinales divergentes se montrent à la charnière. Elles sont presque égales , elles sont com- primées et se relèvent graduellement vers le sommet, ce qui leur donne une forme conique. Ces dents sont simples sur la valve gauche ; mais la dent postérieure de. la valve droite est bifide. L’impression musculaire antérieure est semi-lunaire; la postérieure est plus grande et plus arrondie. Du milieu du bord interne de l'impression antérieure se dé- tache l'impression paléale qui descend parallèlement au bord ventral des valves jusque vers le tiers de leur longueur. Alors elle se replie en dedans et dessine une sinuosité ovalaire , horizontale , entièrement dé- tachée de la portion ventrale de l’impression palléale. La surface exté- rieure est couverte de sillons iransverses, inégaux, peu réguliers, tout à fait diflerents de ceux qui se trouvent sur le Venus rotundata de Brocchi. Ces sillons sont plus profonds sur le côté postérieur; ils dimi- nuent graduellement de profondeur en s’avançant sur le côté antérieur. Les bords sont assez épais et simples dans toute leur étendue. Cette coquille a 64 millimètres de long, et 34 millimètres de large.

Il existe aux environs de Bordeaux une autre espèce de Pullastra , voisine de celle-ci , et plus rapprochée du rotundata de Brocchi. M. Dujardin aura été sans doute trompé en prenant cette seconde espèce pour le veluta de Basterot , et en la rapportant dans la synonymie du rotundata.

GENRE QUARANTE-SIXIÈME.

VÉNUS, rmus, Lin.

PI. ao. f. 4. 5. 14 à i8. PI. ar. L i à 6. 9, 10. i3. 14, PL 72. f. i. 2.

CARACTÈRES GÉNÉRIQUES. Animal ovale ou arrondi , ayant les lobes du manteau réunis postérieurement et garnis dans toute leur circonférence d’un bord membraneux profondément plissé ; siphons courts , inégaux , réunis à la base et quelquefois dans presque toute leur longueur, leur ouverture garnie de ten- tacules simples et cylindracés. Pied mince et comprimé, trian-

3//

53a

OUINZIKME FAMILLE.

gui aire ; bouche petite . ovale, accompagnée de palpes labiajes très petites,* quadrangulaires; branciiies larges, courtes et inégales, réunies postérieurement, profondément plissées.

Coquille ovale , arrondie ou subtrigone , parfaitement close , épaisse , épiderme peu apparent ; charnière ayant trois dents cardinales, divergentes, point de dents latérales; impressions musculaires, grandes, et ovalaires ; impression palléale terminée du côté postérieur par une sinuosité petite, triangulaire, oblique de haut en bas et d’avant en arrière.

SYNONYMIE GENERIQUE. TdUna^ Rondelet, Lister, Gual- tieri. Pechmculus , Lister, Da Costa, Humphrey. Chxvma^ Gualtieri, Adanson, d’Argenville. Çuneus^ Da Costa. CaUisia^ Callisioderma [in parie)^ Poli. Anoma- locardia^ Schumacher . Dosina^ Gray . Clausina^ Brown . Chione^ Megerle. Oriygia , Brov/n. Timoclea , Leach, Brown. Antigone^ Schumacher. Venus, Linné, Chem- nitz , Schrocter, Gmelin, etc. [in pa^'/e], Genus entend,, Bruguière, Lamarck, Roissy, Cuvier, Blainville, Rang, Hanlcy, etc. j .

Observations. Ainsi que nous.venons de le voir, la famille des Con- ques de Lamarck a trouvé tous ses genres dans le grand Vénus de Linné ; mais ces genres ne sont pas les seuls qui en aient été séparés. Bruguière en a extrait les Lucines, les Galathées ellesCapses. Plus tard, Lamarck les Pétricoles et les Vénéricardes, ainsique les Cyprines. Mais déjà avant Bruguière et Lamarck, Scopoli avait proposé le genre Dos mia pour les espèces orbiculaires auxquelles Poli attacha plus tard le nom dVlWcfîu'.s*. Enfin, Lamarck fit un démembrement plus considérable encore, eii établissant le genre Cylliérée qu'il avait déjà proposé une première fois sous le nom assez impropre de Meretrix. A la suite de tous ces démembrements , le genre Vénus de Linné se trouvait considérable- ment réduit., et il ne renfermait plus que des coquilles bivalves régu- lières portant trois dents cardinales à la charnière. M. So'sverby pensa que CO genre Vénus pourrait être encore divisé en deux , et il proposa sous le nom de Pulhtstra un genre destiné à réunir toutes les espèces de Vénus oblongues, Iransverses , aplaties latéralement, ayant à la charnière trois dents subparaDèles on divergentes, mais minces et

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étroites. L’examen que nous venons de faire de ce dernier genre nous a prouvé qu’il pouvait être avanlageusement conservé dans la mé- thode , puisqu’il est caractérisé à la fois par la coquille etpar l’animal. Tout récemment, M. Gray a proposé dans le genre Vénus un plus grand nombre de coupures. Nous en avons fait l’examen dans les géné- ralités de la famille des Conques; nous pensons que la plupart de ces genres ne sont pas dans leurs rapports naturels , et que plusieurs d’entre eux doivent être rejetés, fondés qu'ils sont sur des caractères d’une trop petite valeur. Dans un groupe aussi étendu que celui qui nous oc- cupe et dans lequel les caractères des coquilles sont souvent vagues et. incertains , il faut rechercher dans les animaux des moyens plus sûrs pour distinguer de bons genres; et cette tentative n’a pas été faite d’une manière assez complète pour satisfaire à tous les besoins de la science. Aussi les opinions des concliyliologues, aujourd'hui en pré- sence, sont très diverses et trouvent toutes des moyens de se justifier par les faits connus , malheureusement encore insuffisants.

Si plusieurs zoologistes ont démembré outre mesure les Vénus, telles que Lamarck les avait limitées, d’autres, au contraire, ont repoussé pres- que tous les genres proposés, et en sont revenus, non pas à l'ancien genre de Linné, mais à un genre qui a presque autant d’étendue. L’élude attentive et exclusive des coquilles coudait presque inévitable- ment à ce dernier résultat. En effet, quand on rassemble le plus grand nombre possible d’espèces vivantes et fossiles appartenant aux genres inscrits dans la famille des Conques, on voit se produire un phéno- mène que nous avons déjà signalé plusieurs fois à l’attention des con- chyliologues. Si l’on prend la forme générale-, on la. voit se modifier insensiblement , et ne présenter aucune constance dans chacun des grands groupes; par conséquent , ce caractère empirique, quelquefois utile à l’observateur, lui échappe entièrement. Si l’on prend les carac- tères de la charnière , on observera bien , en effet , des différences entre les types principaux des groupes; mais à mesure qu’on étudie un plus grand nonibre d’espèces, on voit la dent dos Cytbérées, par exemple, disparaître insensiblement, et il y a telles espèces que l’on pour- rait aussi bien placer parmi les Vénus que parmi lesCylhérées. Le carac- tère conchyliologique des deux genres dont nous venons de parler se trouve ainsi d’une application difficile, quelquefois môme impossible, pour un certain nombre d’espèces. Il en est de même quand on arrive à la limite des V^nusel des Pullastra. A mesure que la forme générale tend à s’allonger, la charnière elle-même se modifie, et les dents épaisses et robustes des TViihs proprement dites s'amincissent peu à peu, finit-

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sent par ressembler à celles des Pullastra , après avoir subi de nom- breuses modifications. Quant aux* Ûo^inia, elles se distinguent nettement par leur forme orbiculaire, ainsi que par la disposition spéciale de la sinuosité postérieure du manteau. Cependant il y a des Venus qui ont une sinuosité triangulaire semblable. La charnière elle-raôme ressemble singulièreinenl a celle des Cytliérées. Nous comprenons comment il se fait que des naturalistes , entraînés par les observations que nous venons de rappeler, aient conclu à la réunion de tous ces genres en un seul , auquel ils ont conservé le nom de Venus. Mais, si ces naturalistes, au lieu de se guider uniquement par l'étude des coquilles , avaient cherché dans les animaux des moyens plus certains de caractériser les genres , ils auraient déjà pu en limiter quelques uns en mettant à profit les beaux travaux de Poli , ainsi que d’autres observations isolées , actuellement acquises à la science. Pour inspirer plus de confiance , il manquait à ces travaux d’étre fondés sur l'observation d’un grand nombre d’espèces. Poli s’était borné à donner la figure et la description d’une seule Pul- lastra, d'une seule Vénus, d'une seule Cylhérée. et d'une seule Arthémis. On se demandait, non sans quelques raisons, si les animaux n'offri- raient pas autantde variations dans leurs caractères extérieurs que leurs coquilles mêmes. L’observation seule pouvait répondre à cette objection, et malheureusement jusqu’ici elle n'a pu encore résoudre la difficulté d’une manière satisfaisante. Nous connaissons les animaux de quelques espèces do chaque groupe, et quoique leurs caractères soient constants, peut-être est-oe conclure trop prématurément que de dire qu’ils consti- tuent des genres toujours distincts et désormais invariables.

Le zoologiste doit emprunter aux formes extérieures les signes carac- téristiques des bons genres } Ü est impossible que des formes extérieures constantes ne nous traduisent pas un caractère profond dans l'organi- sation de l'animal. Nos observations prouvent que celte assertion est vraie dans le petit nombre d'espèces dont nous connaissons les ani- maux, dans les Venus et les principaux genres qui en ont été démem- brés. Nous avons décrit l'animal du PuUastra ; nous allons faire con-- naître celui des Venus proprement d'Ues.

Tel qu'il est limité aujourd'hui, le genre Vénus réunit des coquilles généralement épaisses, solides, plus ou moins bombées, tantôt subglo- buleuses et ovalaires, tantôt subtriangulaires et plus aplaties. Ce sont des coquilles qui sont toutes inéquilatérales ; le côté antérieur est plus court; quelquefois il est dominé par des crochets saillauts, obliques, et inclinés au-dessus d une lunule plus ou moins profonde, selon les es- pèces, mais se présentant nettement circonscrite dans toutes. Dans le

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plus grand nonibredes espèces, la surface extérieure est dépourvue d’épi- dern^o ; dans celles qui sont lisses, si l 'épiderme existe, il ressemble à une coucho vernissée, luisante, très tenace, et qui ne dépasse jamais les bords des valves. Les accidents de la surface externe sont nombreux : tantôt les espèces sont ornées de lamelles plus ou moins saillantes, nombreuses, les intervalles restent lisses j tantôt ces lamelles, plus serrées, sont sé- parées par des espaces sur lesquels descendent des stries longitudinales plus ou moins nombreuses, plus ou moins régulières. D’autres espèces ont seulement des stries longitudinales ou des stries transverses; enfin, ces ornements se combinent, diminuent insensiblement d’importance, finissent par disparaître, et l'on a alors un groupe de Vénus tout à fait lisses. Les bords de ces coquilles sont généralement épais ; il y a ce- pendant des espèces ils restent minces et tranchants. Dans les unes ils sont simples : ce sont celles qui sont lisses, ou qui ont des stries ou des lamelles transversales. Dans d'autres, ils sont finement crénelés, et ces crénelures ne se rencontrent que sur les espèces ornées de stries longitudinales. Cependant il existe quelques exceplioas à cette règle générale: nous avons le Wrugosay par exemple, dont les bords sont crénelés et qui cependant n'a point de stries longitudinales. Le corselet est assez nettement circonscrit chez la plupart des espèces. Il est al- longé, lancéolé, il occupe une partie de la longueur du côté postérieur. Dans un certain nombre des espèces, tel que V. puerpenty par exemple, le bord du corselet de la valve droite fait une saillie qui s’avance devant l’extrémité postérieure du ligament. Le ligament est ordinaire- ment épais et saillant; il occupe une grande partie de la longueur du corselet, e^il s’attache solidement. sur la surface de nymphes plus ou moins épaisses , selon les espèces. Ces nymphes sont circonscrites en dehors par un sillon, profond , dans lequel s’attache la tunique externe du ligament. Ordinairement Iq surface supérieure des nymphes pré- sente un plan oblique, sur lequel se fixe la substance interne du liga- ment, celle qui a l'apparence d’un cartilage. Toutes les Vénus sont des coquilles parfaitement closes ; elles ne présentent aucune apparence de bâillement, soit du côté antérieur, soit du coté postérieur. La surface interne est lisse, souvent blanche ou diversement colorée selon les es- pèces ; le rose et le violet sont les couleurs qui dominent au dedans de ces coquilles.

La charnière est supportée par une lame cardinale assez épaisse et solide : elle s’avance plus ou moins dans l’intérieur de la cavité, et laisse au-dessous d’elle une cavité assez profonde qui correspond à la proé- minence des crochets. Cependant dans cette portion de la coquille le

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test étant très épais , il n’y a pas de coïncidence exacte entre la forme extérieure et celle de la cavité intérieure-des valves. La charnière est composée de trois dents cardinales, épaisses, divergentes, tantôt sim- ples , tantôt bifides. La forme de ces parties varie selon les espèces , mais ellé est très fixe dans chacune d’elles, de sorte que Tétude atten- tive de la charnière contribue puissamment à séparer des espèces qui semblent se confondre par leurs autres caractères. Ce nombre de trois dents cardinales n’est pas constant d'une manière absolue. Tous les conchyliologues savent qu’il y a un petit groupe de Vénus chez les- quelles il n’existe plus que deux dents cardinales. Nous pouvons citer pour exemple le Venus fasciata de Donavan. Ces espèces pourraient former un groupe très distinct de Vénus, si elles ne s’y rat- tachaient d’une manière assez insensible. Nous observons, en effet, en réunissant toutes les coquilles qui présentent deux dents cardinales, qu'il y en a quelques unes chez lesquelles on remarque , le long de la nymphe, un rudiment de la dent postérieure, et Ton peut suivre la dis- parition de celte dent postérieure dans une série assez considérable de modifications, El pour ne pas laisser de doutes sur la valeur de ce faible caractère, nous devons ajouter que l’animal du V. fasciata et des autres espèces à deux dents est tout à fait semblablo à celui des autres Vénus.

Les impressions musculaires sont généralement assez grandes ; elles sont fort écartées; elles se rapprochent des extrémités de la coquille. L’impression musculaire antérieure est ovale semi-lunaire ; elle occupe une grande partie du côté antérieur de la valve. L’impression posté- rieure est plus circulaire; elle se prolonge ordinairement en haut à un petit appendice triangulaire sur lequel vient s'attacher le muscle ré- Iracteur du pied. Au-dessus de l’impression du muscle antérieur, au- dessous de l’extrémité antérieure de la lame cardinale se trouve une autre petite impression ovale, oblique; elle donne insertion au tendon du muscle rétracteur antérieur du pied.

L’impression palléale mérite un examen attentif, car il va nous fournir une preuve des modifications nombreuses que peut éprou- ver un caractère qui paraît plus constant dans d’autres genres. Cette impression commence au milieu du bord inférieur de l’impression mus- culaire antérieure; elle se contourne parallèlement au bord ventral des valves , mais elle reste très haut dans l'intérieur de la coquille, de sorte qu’entre elle et le bord règne une large zone qui indique la largeur du muscle orbiculaire du manteau. Parvenue vers l’extrémité postérieure, Vrclle impression s’infléchit en dedans , et circonscrit une sinuosité or-

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dinairement courte et triangulaire , mais dont la forme et les propor- tions varient dans un grand nombre d’espèces. C’est ainsi qu’il y en a un certain nombre chez lesquelles la sinuosité palléale présente la forme d’une ellipse coupée en deux dans son petit diamètre. Mais ce qu’il y a do plus curieux, c’est de voir cette sinuosité diminuer très insensible- ment d’une espèce à l’autre , se réduire à une inÛexion très petite, et disparaître enfin, comme cela a lieu particulièrement chez un certain nombre d’espèces qui n’ont que deux dents à la charnière. Cependant toutes les Vénus à deux dents ne sont point dépourvues de la sinuosité palléale. Aussi, chez ces espèces, les siphons existent, ainsi que nous nous en sommes assuré dans le V. fasciata de Donovan.

Ainsi, à moins que de diviser les Vénus en un grand nombre d’autres genres, dans chacun desquels se trouveraient limitées les nuances presque insaisissables que nous venons d’indiquer, il faut de toute né- cessité laisser exister un peu d’incertitude dans les caractères généri- ques pour ne pas les limiter d’une manière plus absolue que la nature elle-même no l’a voulu. 11 faut donc admettre dans la phrase caracté- ristique du genre deux ou trois dents cardinales, une inflexion palléale peu profonde et quelquefois nulle. Sans cela on risquerait de repousser du genre des coquilles qui lui appartiennent, et il deviendrait difficile de juger de la nature de certaines espèces fossiles connues seulement par des moules ; car, sur les uns, on peut rencontrer des traces de deux dents cardinales et d’une petite inflexion palléale , et assurément le pa- léontologiste ne placerait point ces moules parmi les Vénus , s’il ne sa- vait d’avance qu’il existe des espèces vivantes qui présentent ces carac- tères. D’un autre côté , on pourrait également observer des moules de coquilles ayant l’impression palléale simple , et offrant les vestiges de trois dents cardinales. Pour celles-là, le paléontologiste se trouverait aussi dans le même embarras s’il ne connaissait également les espèces de Vénus qui présentent ces caractères particuliers. Ces observations préliminaires nous conduisent à cette conclusion, que pour bien étudier les espèces fossiles , surtout celles des terrains anciens , il faut bien con- naître les espèces vivantes ou celles des terrains tertiaires.

On ne peut contester la ressemblance qui existe entre l’animal des Pullastra et celui des Vénus. Néanmoins, ces mollusques se distinguent toujours , du moins dans toutes celles des espèces que nous avons exa- minées.

L'animal des Vénus a une forme analogue à celle de sa coquille ,.par conséquent il est variable comme elle ; mais ses caractères zoologiques sont constants. Son manteau , même dans la plus grande partie de son

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QUINZIEME FAMILLE.

éleadue , est limité sur ces bords par un large muscle orbiculaîre , dont nous avons fait remarquer l’impression sur Tintéricur des valves. Les lobes de cet organe, parfaitement égaux et symétriques , sont disjoints dans la plus grande partie de leurs circonférences , depuis le bord infé- rieur du muscle adducteur antérieur jusqu'à l'origine des siphons, se produit une commissure solide. A l'intérieur, les lobes du manteau restent simples , et ils sont dépourvus de cette longue valvule intérieure que nous avons fait remarquer dans les àlactres et dans plusieurs autres genres. Lo bord lui-môme se partage en deux parties bien distinctes : l’une, plus courte, s’applique sur les bords des valves et conlieoi l'or- gane sécréteur du test ; l autro, située en dedans , est membraneuse, saillante; et lorsque l’animal tient ses valves entre-bâillées, cos mem- branes se plissent profondément comme un jabot , celle d’un côté res- tant appliquée à celle de l’autre ; il en résulte quo la cavité du manteau est close de la manière la plus parfaite. Cependant, lorsque l'animal fait sortir son pied ou Iûï*squ il a besoin de faire écouler de la cavité pal- iéale l’eau qui y a été introduite par les siphons i les deux lobes du manteau se détachent l'un do l’autre , tout en conservant aux plis mem- braneux qui les terminent tovxtes leurs sinuosités réciproques.

Les siphons sont généralement courts , attachés à l'animal dans presque toute la hauteur du (u>té postérieur ; ils ont une base large de haut en bas, mais comprimée latéralement. Ces organes, par la pe- titesse de leur volume, paraissent disproportionnés à la grosseur de ranimai. C’est ainsi que dans les grands individus des Fejiws verrucosa, individus qui ont 65 millimètres de longueur, les siphons n'ont pas plus de 1 2 à 4 5 millimètres d’étendue. Par celte brièveté, ils so dislin - guent déjà de ceux des Pullastres et des autres genres de la famille des Conques. Les siphons sont inégaux; ils sont réunis à la base et séparés l’un de l'autre au sommet dans une étendue plus ou moins considérable. Ainsi , dans le V. verrucosa , ils sont séparés dans presque toute leur étendue, tandis que dans le V, gallma ils sont , au contraire, réunis jusque près du sommet. Dans le Venus /asetaid, ils sont en quelque sorte intermédiaires, car ils sont réunis jusque vers le milieu de leur longueur. Ghea d’autres espèces, d'autres nuances se montrent. II ne faut donc pas allaclier une plus grande importance qu’il ne faut à ce caractère de jonction ou de disjonction des organes dont nous parlons. Le siphon anal est le plus petit , comme dans les autres mollusques acéphalés.ll se prolonge en un sphincter membraneux en forme de cou- pole, percée au sommet, d’une ouverture circulaire, d’un moindre diamètre que celui du siphon lui-même. Au point de jonction de ce bord mem-

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braneux sur le bqrd du siphon s’élève un seul rang de tentacules simples, cylindracés et obtus au sommet. Ces tentacules sont plus ou moins nombreux, selon les espèces, et leur longueur est elle-même variable; car ils sont plus courts dans le V‘, rerrucosa que dans le V. gaUina. Le siphon branchial est très différent ; son ouverture est sur- montée d’un rang interne de grands tentacules simples et. cylindri- ques, et d’un rang extérieur d’autres tentacules plus courts, tantôt bifurqués, quelquefois étoilés , mais rarement simples, comme le pre- mier. Ces tentacules sont donc bien différents de ceux qui existent chez les Pullastres . et cela seul suffirait , selon nous , pour justifier ie genre PuUastra de M. Sowerby. Un muscle rétracteur, petit, triangulaire, peu épais, se confondant latéralement avec le muscle orbicuiaire du manteau, sert à faire rentrer les siphons à l’intérieur des valves. Nous avons vu dans certaines espèces une impression palléale simple; il sem- blerait , d’après cela , que les lobes du manteau sont désunis jusqu'au muscle postérieur, et que les. siphons manquent; mais il n’en est pas ainsi, ces organes persistent et leur muscle rélracleur se confond entiè- rement avec le muscle orbicuiaire, et n’en dépasse pas la largeur. Lors- que l’on ouvre le manteau , et après avoir soulevé l’extrémité des feuil- lets branchiaux , on aperçoit l’ouverture intérieure des siphons. Cette ouverture, d une médiocre grandeur, est dépourvue de valvules propre- ment dites; une simple bride iransverse membraneuse est le seul ves- tige qui reste de la large valvule qui existe chez d’autres genres de mol- lusques.

La bouche est ovale-lransverse ; elle est petite relativement à la gran- deur de l’animal. Elle est située, comme à l’ordinaire, au fond de l’angle produit par la rencontre du muscle adducteur antérieur et de l'extrémité de la masse abdominale. Deux lèvres membraneuses et transverses gar- nissent celle bouche Ces lèvres se prolongent de chaque côté en deux palpes latérales étroites, triangulaires et peu allongées. Â cet égard, les Vénus ressemblent beaucoup aux PuUastra, et cette ressemblance , dans des organes aussi constants que le sont ceux dont nous parlons , a été pour nous un très bon moyen pour rapprocher les divers genres de la famille des Conques. La surface interne des palpes est couverte de lamelles membraneuses, transverses, qui s’arrêtent brusquement à l’origine des lèvres.

La masse abdominale est plus ou moins épaisse , selon les espèces j elle est large et mince dans les espèces aplaties; elle est plus volumi- neuse dans celles qui sont subglobuleuses. Cette masse abdominale se prolonge en avant en \\n pied large et triangulaire , robuste, et suscep-

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QUINZIEME FAMILLE.

tible de mouvements très divers,. Déjà , dans la plupart des espèces , le pied montre un étranglement au moment il se réunit à la masse des viscères. Cet étranglement est un acheminement vers la forme que cet organe affecte dans les genres des familles qui vont suivre.

Les branchies sont très larges chez les Vénus. Elles sont subqua- drangulaires: les feuillets externes sont un peu plus courts que les in- ternes. Dans le plus grand nombre des mollusques, les côtes ou les stries qui existent à la surface des branchies sont transverses ou à peine obli- ques. Dans les Vénus, au contraire, elles deviennent de plus en plus obliques; il y a même des espèces chez lesquelles ces stries sont per- pendiculaires. se dirigeant directement de la bouche vers Textrémité postérieure. Les dimensions de ces organes sont presque égales; néan- moins les feuillets internes se rétrécissent brusquement vers leur extré- mité antérieure, se terminent en une pointe aiguë qui s’avance vers la bouche en se plaçant entre les palpes. Les feuillets branchiaux ne sont guère plus longs que la masse abdominale elle-méme ; cependant leur extrémité postérieure vient se prolonger au-devant de l'ouverture du siphon anal, et se soude aux plis membraneux qui entourent l'ouver- ture de ce siphon.

Les organes de la circulation sont situés dans la région cardinale , comme chez le plus grand nombre des mollusques 'acéphales. Nous n’aurions pas à parler de ces organes , si le cœur ne présentait un fait particulier d'organisation qui se montre pour la première fois dans la série des mollusques dont nous nous occupons. Dans tous les animaux soumis jusqu’ici à notre examen , le ventricule aortique est fusiforme ; il est creusé d’une seule cavité au centre de laquelle passe le tube intes- tinal . Dans les Vénus . le cœur conserve celle forme, mais en se prolongeant en arrière le long de l'inleslin il parvient dans le voisinage du muscle postérieur, et il se dilate de nouveau en un second ventricule plus petit que le premier. Il serait curieux d’observer comment s'établit la circulation dans un si singulier appareil, s’il y a synchronisme dans les contràcUons des deux ventricules ou s’ils se contractent l’un après l’autre.

Quoique les divers retranchements opérés dans le genre Vénus aient réduit considérablement le nombre des espèces , cependant ce genre en contient au moins une centaine de vivantes distribuées dans presque toutes les mers. Les Vénus sont des animaux littoraux. Ils aiment à vivre h peu de profondeur ; ils choisissent habituellement les plages basses de sable, dans lesquelles ils s’enfoncent perpendiculairement à Laide des mouvements vormiformes de leur pied. Ils se creusent un trou peu

LES CONQUES-

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profond , de manière à faire saillir leur siphon au niveau du sol. Le nombre des espèces va en décroissant des régions équatoriales vers les régions polaires. Quelques unes s’étendent sur une très large surface. Nous avons quelques espèces dans les mers d’Europe qui remontent très haut vers le nord , et so retrouvent sur la côte occidentale de l'Afrique, après s’être propagées dans toute la Méditerranée. D’autres espèces, venant du nord de l’Amérique, descendent aussi vers les régions équatoriales, et nous n’en connaissons aucune qui se soit établie sur toute la longueur du littoral des deux Amériques. S'il y a un certain nombre d’espèces qui jouissent de celte propriété de s’accommoder à des climats divers . il y en a beaucoup d'autres qui sont localisées , et qui ne franchissent pas de plus courtes limites : telles sont quelques unes, par exemple, qui sont propres à la Méditerranée, d'autres au Sénégal , d’autres enfin aux îles de l'Océanie, etc., etc.

Près de cent cinquante espèces fossiles sont citées dans les ouvrages des paléontologistes. Pour en connaître la distribution, il nous a fallu les examiner toutes, vérifier l'exactitude de leur synonymie , rejeter du genre celles qui ne lui appartiennent pas, y introduire les espèces oubliées, ou mal classées. De ce travail long et fastidieux , il en est sorti quelques observations profitables dont nous consignons ici les princi- pales , et il en est résulté une réduction notable dans le nombre des es- pèces. En elfet, nous les réduisons a cent six , et parmi elles , nous lais- sons quelques espèces dont la charnière n’est point connue., et qui offrent seulement la forme générale des Vénus. H était bien difficile de ne point les admettre dans le genre. Si elles sortent des Vénus, ce sera pour rentrer dans les Cylhérées ; elles dépendent certainement de la famille des Conques.

Nous avons quelques erreurs à relever dans la nomenclature des Vénus inscrites dans l’ouvrage de Goldfuss.

Nous ferons remarquer d'abord que son Venus anguîata est une coquille cordiforme et suborbiculaire , qui a bien plutôt l'apparence d'un Cardium que d’une Vénus. L'angle postérieur qui caractérise l’es- pèce se montre très fréquemment chez les Cardium et point chez les Vénus.

Le ]''enus obliqua du même naturaliste a beaucoup plus l’apparence d'une Lucine que d’une Vénus , et comme la charnière n’est point connue , il faut donc s’en rapporter à la forme générale. Dans tous les cas , le nom devra être changé; car Lamarck s’en était servi pour une petite espèce du bassin de Paris. Nous pourrions faire une observation semblable au sujet du Venus vndnta : elle a tonte l’apparence d’une

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Lucine. Si la charnière était connue et qu’elle fût celle d’une Vénus , il n’y aurait aucune hésitation ; mais , en l’absence de ce caractère impor- tant , il faut se laisser guider par la forme générale.

Le Venus Srtussttr/ deGoldfuss nous paraît une espèce très incertaine. Connue par le moulé seulement, cette espèce a avoir un test fort mince, sans cela les crochets ne pourraient s’approcher alitant qu’ils font. Ce test n’a laissé sur le moule aucune trace des impression^ musculaires et du manteau ^ et d’après les figures on n'aperçoit aucun vestige de la charnière. A cette espèce déjè si douteuse par elle-niéme, Goldfussy ajoute d’autres incertitudes par la synonymie. Enefl'el, il y rapporte le Domx Saussun de Brongniart , de Goldfuss et de Roemer ; on est porté à y voir deux espèces , l'une représentée par Roemer et Goldfuss , l’autre par Brohguiart. Mais toutes deux appartiennent-elles au même genre ?

Le Venus sueefea de Goldfuss est encore une espèce douteuse; sa forme orbiculaire , ses crochets courbés la rapprochent des Lucines ou des Dosinics [Arihemis , Poli).

Quant au Vctiws caudata, elle est a peu près aussi incertaine que le Venus Saussüri: car la charnière ne montre pas les inflexions des dents cardinales; les impressions musculaires sont effacées, et celles du man- teau paraissent encore moins ; de sorte que d’après les échantillons que nous avons examinés, aussi bien que d’après les figures , cette espèce peut rester parmi les Vénus qu’avec doute.

Dans un ouvrage publié depuis quelques années sur la craie de la Bohême, M. Reuss a mentionné et figuré un certain nombre d’espèces qu’il rapporte au genre Vénus, et pour la plupart aux espèces déjà connues de Sowerby et de Goldfuss. Quelques années auparavant, M. Geinitz avait déjà livré au monde savant un ouvrage sur la même matière , dans lequel des figures, quelquefois assez peu correctes , don- nent une idée imparfaite d'espèces dont la description est restée incom- plète. A peu près à la même époque, M. F. -A, Roemer publiait son ouvrage sur la craie du nord de l’Allemagne. Pour la partie paléonto- logique, cet ouvrage peut à peine servir de document sommaire, puis- que les figures sont tellement médiocres, qu’elles ne permettent pas de reconnaître les espèce.s qui , dans le texte , sont plutôt indiquées que décrites. On devait espérer, à l’aide de ces trois ouvrages , qu'on recon- naîtrait facilement les espèces, retrouvant dans Fun ce qui manque aux autres; malheureusement bien des doutes subsistent, et l’examen ra- pide que nous allons faire des espèces justifiera notre manière de voir,

M. Reuss nomme Cytherea ^longaia une coquille qui n’a rien de

LES CONQUES.

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l’aspect des autres espèces du même genre ; elle a la forme d'un jeune Inocéramus. La charnière n’est point figurée, l'auteur ne mentionne pas cette partie importante dans sa courte description ; de sorte que rien , à nos yeux , ne justifie l’introduction de l'espèce dans le genre Cythérée.

Le Feaus parva de Sowerby est une petite coquille subcirculaire , voisine des Dosinies par sa forme générale; M. Goldfuss en donne une figure assez exacte. M. Geinitz, sous cette dénomination, représente deux espèces très distinctes qui, ni l’une ni l’autre, ne sont le vrai Venus parva de Sowerby. L'une d’elles nous semble une Lucine. M. Reuss donne également deux figures pour la même espèce , et l’une d'elles ne s’accorde avec aucune de celles de Sowerby, Goldfuss et Geinitz : elle représente indubitablement une Lucine; quant à la seconde, elle n’a point de ressemblance avec le F. parva de Sowerby; de sorte que, dans ces deux auteurs dans les ouvrages desquels il y a cinq figures du Ve~ nus parva , cette espèce n’y est réellement pas représentée.

Venus inimersa. En rapprochant les deux figures de cette espèce de MM. Geinitz et Reuss, et celle de M. Sowerby, on reconnaît que les paléontologistes allemands se sont contentés d’un rapprochement im- parfait entre une coquille entière et les moules qu’ils avaient dans les mains; il est même douteux que la coquille figurée par M. Geinitz soit de la môme espèce que celle de M. Reuss.

Le Fenus plana de Sowerby est une véritable Cythérée ; les figures de cet auteur le prouvent incontestablement. SI les figures de ia même coquille que l’on voit dans Goldfuss et dans la paléontologie française sont exactes, il devient évident que M. Reuss n’a point connu l’espèce; car il figure sous ce nom le moule d’une coquille très dififérente qui nous semble appartenir à une Lucine et non à une Cythérée.

Des observations semblables s’appliquent aux autres espèces inscrites dans les ouvrages de MM. Geinitz et Reuss : ils ont cru retrouver dans la craie de l’Allemagne les espèces d’Angleterre, et en cela iis ont commis des erreurs auxquelles ils remédieront en comparant en nature leurs fossiles à ceux d’Angleterre.

M. Sowerby a figuré dans le Minerai Coiichologrj une espèce de la craie sous le nom de Venus ovalis\ elle est parfaitement caractérisée par sa forme générale et par les stries qui la couvrent. M. Goldfuss a assi- milé à cette coquille, et en lui consacrant le même nom, une espèce très distincte pour laquelle nous proposons le nom de Fenws Goldfussiû

Nous trouvons dans l’ouvrage de Goldfuss une Venus parallela pro- venant des sables verts du terrain crétacé de Bavière; néanmoins

OniNZIÈME FAMILLE.

.M. -Philips, dans le second volume de son ouvrage sur, le Yorkshire-, a imposé le même nom à une espèce du terrain carbonifère et très dif- férente de la première. Nous donnons à l'espèce d'Angleterre le nom du savant géologue qui l’a fait connaître le premier , kVnus Philipsii.

Parmi les espèces du terrain crétacé décrites et figurées par Goldfuss, nous trouvons un ï enns gibbosa , mais nous sommes obligé de changer ce nom; car Sowerby, dans le Minerai Conchology, l'avait déjà appliqué à une espèce tertiaire du crag d’Angleterre. En conséquence, nous pro- posons de nommer Tenus Sowerbgi l’espèce du terrain crétacé.

En 1842, M. Matheron a publié un ouvrage important pour l'étude des terrains de la Provence et des fossiles nombreux qu'ils renferment. De.s figures accompagnent la description des espèces nouvelles. Dbc- huit sont inscrites dans le genre Vénus. Les unes proviennent du terrain crétacé , les autres des terrains tertiaires ; mais toutes ne sont pas probablement des Vénus, même en acceptant l’étendue que Tauteur donne au genre; il y comprend, en effet, les Cylhérées et les Vénus de Lamarck.

Les Tenus allaudiensis et tnrgidula deM. Matheron sont des Aslarte^ Le Venus galto-provincialis est très probablement une Corbeille. Le Ve- nus Lamarckii est une Lncine. Les Tenus ovum et martiniana sont des Pullastra. Les autres espèces du terrain crétacé sont ou des Vénus ou des Cylhérées, et il sera difficile de faire le départ des espèces jusqu'au moment leurs charnièrès seront connues. Il en est une encore que Tauteur n’a pas rapportée à son véritable genre , c’est son Venus semi- radiata qui est une véritable Telline. Quant aux espèces tertiaires, M. Matheron en cite quatre seulement, et elles dépendent tontes du genre Cythérée. Une' fois les espèces étrangères au genre éliminées, il ne reste plus que sept Vénus, parmi lesquelles il y a probablement en- core quelques Cylhérées.

Les espèces tertiaires, plus faciles à reconnaître que leurs congénères des terrains plus anciens, devraient offrir un moins grand nombre d’er- reurs dans leur détermination; il n’en est pas ainsi: l’examen rapide auquel nous allons nous livrer le prouvera surabondamment. Et d’abord comme témoignage de notre impartialité et de notre amour de la vérité, nous reconnaîtrons les erreurs que nous-môme avons commises au sujet de quelques espèces de ce genre.

Dans la deuxième édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck, nous avons réuni en une seule espèce, sous le nom de Tenus Brocchiit plusieurs coquilles distinctes. M. Agassiz les a reconstituées dans un moment nous-même, à l’aide de collections plus complètes, nous

LES CONQUES.

o4S

pouvions constater la valeur de caractères spécifiques que nous avions considérés d’abord comme d'une moindre importance. II n'est pas à dire pour cela que nous admettions comme fondées toutes les rectifica- tions de M. Agassiz. Si nous estimions moins le talent d’un aussi savant naturaliste, si nous ne connaissions la juste autorité que l'on attache à ses travaux , nous nous contenterions de quelques observations som- maires; mais nous croyons, dans Tintérêt de la science, devoir nous livrera une discussion approfondie, et reprendre l’une après l'autre chacune des espèces dont il a fait le sujet de ses investigations .

Lamarck, trompe par un caractère de peu d’importance, l’érosion du sommet des nymphes, avait rangé au nombre des Cyprines de grandes coquilles fossiles d’Italie et de Bordeaux. En faisant une nouvelle étude de ces espèces, au nombre de quatre, Cyprina gigantea, pedemontnna, islandicoides f uinbonaria ^ nous y avons reconnu tous les caractères des Vénus , et nous avons proposé de les faire passer dans ce genre, ce qui a été adopté par tous les conchyliologues. En même temps, après avoir examiné les individus de la collection du Muséum, nous sommes entraîné à les réunir en une seule espèce, parce qu’en effet elles ont entre elles les plus grands rapports. A la suite d’un nouvel examen, après un intervalle de plus de dix années, nous pouvons affirmer que les Cyprina umbonaria et gigantea sont identiques. Il en est de même des Cyprina pedemonlana et is^andicoid^s ; elles constituent une seconde espèce, à laquelle l'un ou l’autre nom pourra être appliqué. M. Agassiz conserve trois espèces, considérant qu’en effet, le Cyprina gigantea pourrait bien être semblable à l'um&onan'a; mais il croit trouver des différences entre les individus de Vumbonaria du Piémont et ceux de Bordeaux, et c’est ce que nous contestons. Si M. Agassiz a comparé de petits ou de jeunes individus de Bordeaux avec de grands et de vieux individus d'Italie, il y aura, en effet, trouvé les petites diffé- rences qu’il signale; mais en rapprochant les individus de même âge et de même taille , on leur trouve l’identité la plus parfaite.

Le Cyprina islandicoides de Lamarck , Venus islandicoîdes de M. Agassiz, est une espèce distincte de la première; c’est à celle-là que Lamarck rapportait l'espèce de Bordeaux dont nous parlions tout à l’heure. II ajoute même dans la synonymie le œqualis de Sowerby, et celle- est une véritable Cyprine.

Quant à la troisième espèce, Cyprina pedemonlana de Lamarck , il y a, de la part de M. Agassiz , une singulière méprise à son sujet. En effet , il crpit trouver celle coquille dans une grande Cylhérée intermédiaire entre le Chione et l’Erycine. Que Lamarck, qui n’attachait pas une T. 1. partie. 35*

QUINZIEME FAMILLE.

r,46

grande importance à l’impression du manteau , ait confondu quelques Vénus avec des Cyprines , entraîné à cela par des rapports dans les formes extérieures , on peut le concevoir ; mais supposer que l'auteur lui-même du genre Cythéréo aurait confondu parmi les Cyprines l’une des Cythérées les mieux caractérisées , et qui n’a rien des Cyprines dans le port, dans la forme et les autres caractères , cela, pour nous , est inadmissible ; d'ailleurs la courte description de Lamarck ne laisse aucun doute à cet égard. Elle ne peut s'appliquer en aucune façon à la coquille nommée Cytherea pedemonlana par M, Agassiz. Celle Cyprim pedemontana que nous avons vue dans la collection du Muséum est une Vénus semblable à celle que nous avons fait Ggurer dans l’ouvrage de Morée sous le nom de Venus Brocchu; par conséquent elle viendra se ranger à titre de variété un peu oblongue dans le Ke»ws islandicoides de M. Agassiz; encore faut -il ajouter que dans celte variété il n’existe pas celte légère inflexion postérieure qui caractérise V islandicoides. Par là, la coquille qui nous occupe est intermédiaire entre les deux es- pèces, mais elle appartient à la dernière par ses caractères.

M. Agassiz aurait penser qu’une erreur de l'espèce de celle qu’il attribue à Lamarck n'est pas possible , et que si elle avait échappé au célèbre auteur des Animaux sans vertèbres, nous nous en serions aperçu, nous qui avons eu sous les yeux les coquilles mêmes dont Lamarck s’est servi pour les décrire. A quoi servirait donc une longue expérience acquise par tant de travaux, si elle ne vous garantissait d'erreurs que ne ferait pas l’amateur le plus novice? M. Agassiz nous semble , dans cette occasion , avoir jugé avec trop de précipitation , et sans avoir eu en sa possession tous les matériaux nécessaires ; et assurément son jugement aurait été très différent , si , comme nous , il avait vu les co- quilles de Lamarck.

Les Vénus dont nous venons de parler ne sont pas les seules que M. Agassiz ait examinées. Ce savant a reconnu , comme nous , que plu- sieurs espèces sont confondues avec le Venus verrucosa de Linné, et cela, aussi bien parmi les coquilles vivantes que parmi les fossiles. Entre ces dernières, M. Agassiz signale comme espèce distincte celle qui est commune dans les terrains subapennins. II est vrai qu'a prendre au hasard quelques individus de cette coquille , ils présentent des diffé- rences avec le verrucosa vivant. Alais si l’on recherche soigneusement les variétés ,• on voit les différences s'amoindrir peu à peu ; et en pré- sence de ces variétés, M, Agassiz lui-même serait sans doute fort em- barrassé de décider s’ils sont les analogues du verrucosa vivant ou s’ils dépendent de son Venus excei\trica. Dans tous les cas, et en mettant à

LHS CONQUES. 54;'

l’écart ces individus douteux , il en est d'autres fossiles d’Italie et de Sicile dont l'idenlité n’est pas contestable, tant elle est parfaite.

Le Venus rugùsa de Gmelin a été cité plusieurs fois à l’état fossile , d’abord par Brocchi, plus tard par MM. Pusch , Eichwald, Morris, etc. M. Agassiz s'est demandé si ces fossiles sont en réalité les analogues de l’espèce vivante, et il a prouvé que' celle de Brocchi ne l’était pas. M. Agassiz a suivi une méthode qui nous paraît excellente, car nous la pratiquons depuis bientôt vingt ans. Quand on compare deux choses, il faut d’abord savoir ce qu'elles sont : aussi M. Agassiz commence par décrire le rugosa , et il en donne une Ggure ; mais il faut savoir si cette coquille présentée par l’auteur pour le rugosa est, en effet, l'es- pèce qui doit porter ce nom. M. Agassiz dit l'cuus rugosa (Gmelin). Gmelin n’est pas le créateur de l’espèce , c’est Linné lui-même dans le viantissa ; mais le rugosa de Linné est une espèce très différente de celle de Gmelin, On sait combien ce dernier naturaliste a commis d’erreurs du même genre. Gmelin , en effet , à l’espèce de Linné substitue l’espèce que Chemnitz figure sous le nom de Venus rugosa orienialis. C’est donc Cette dernière que M. Agassiz admet sous le nom de Fenws rugosa^ et en cela il s'associe à l’opinion de Lamarck.

En adoptant le rugosa de Linné, Dilhvyn devait rejeter celui de Gmelin , et lui consacrer un autre nom ; c/est ce qu’il fit en imposant le nom do Emus rig/da an rugosa oHenlnlis de Chemnitz; probable- ment on sera obligé d’admettre ce Changement dans la nomenclature. Quoi qu'il en soit, le rugosa de M. Agassiz étant connu , il est évident que les espèces données comme analogues fossiles par Brocchi , Pusch, Eichwald , etc., sont très distinctes de l’espèce vivante. Lamarck lui- même l’avait reconnu pour l’espèce do Brocchi: la comparant à toutes les espèces connues, et lui trouvant des caractères distinctifs constants, il lui a donné le nom de Cytherea muHUamella dans son Histoire des ani- maux sans vertèbres ; par conséquent le nom de Venus cîneta^ proposé par M. Agassiz en 1845, doit être rejeté.

Dans son catalogue des fossiles de lu Grande-Bretagne , M. Morris a aussi inscrit une Kenw-s rugosa. Elle n’est aucune de celles que nous venons de mentionner ; elle constitue une quatrième espèce portant ce nom. Elle parait être l'analogue fossile d’une espèce encore vivante dans les mers d’Angleterre , nommée Venus rugosa par Pennant et par Fleming; mais dans une synonymie défectueuse Fleming confond deux espèces sous celte dénomination. A laquelle des deux se rapporte celle de M. Morris? L’espèce de Pennant ne serait autre que le Venus lami- nosa deLaskey, tandis que celle de Doimvan serait différente encore. Il

35*

548 QUINZIÈME FAMILLE .

est donc très probable que c’est à ce laminosa que doit se rapporter le rugosa de M. Morris. Mais le laminosa lui-mômq. peut-il être con- servé? Nous ne le pensons pas ; nous croyons, avec M. Macgillivray, qu’il doit rentrer à titre de variété dans la synonymie du Fenus gallina de Linné. En effet, si l’on rassemble un grand nombre d'individus des deux espèces , on les voit se confondre par de nombreuses variétés , et il est impossible d'en déterminer la limite. Ainsi l’espèce fossile d’An- gleterre serait donc une variété du Venus gallina de Linné. On voit par ce qui précède combien il est nécessaire d'examiner soigneusement les espèces portées sur les catalogues avant de les admettre , lorsqu’il s’agit de constater des analogies importantes, comme celle-ci , entre des co- quilles vivantes fossiles.

Une autre espèce a encore été désignée sous le nom de Venus rugosa par M. Pusch dans son travail sur les fossiles de la Pologne. Elle est distincte du véritable rugosa ^ et elle devra reprendre la dénomina- tion de Veiius marginalis que lui a donnée M. Eichwald. Ce marginalis n’est peut-être lui-même qu’une variété du muîtilamella de Lamarck.

Si , trompé par la ressemblance du nom , on réunissait en une seule toutes les espèces qui portent le nom de Venus 7*ugosa , on tomberait dans de graves erreurs ; on croirait qu’une espèce vivante dans les mers de rinde et du Brésil vit aussi dans les mers de l’Europe septentrio- nale, et a son analogue fossile dans tous les terrains tertiaires du second et du troisième étage. Il est donc indispensable, nous le répétons, d’examiner avec un soin scrupuleux toutes ces espèces qui paraissent faire exception aux lois de la distribution des êtres à la surface de la terre.

Nous trouvons plusieurs fois répété dans les catalogues le Venus dysera de Linné, Dans une discussion approfondie, publiée dans la 2* édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck (t. VI, p. 376], nous avons démontré l’impossibilité serait un naturaliste d’appliquer ce nom d’une manière rationnelle à une espèce quelconque. En effet, sous le nom decù/sera, Linné réunit quatre espèces dans la *10' édition du Systema naturœ. Dans le Muséum Uh'îcœ , nous en comptons sept ou huit. La synonymie de la 12*' édition du Si/s^ma est moins étendue ; elle contient encore cinq ' especes. Cbemnilz a choisi arbitrairement une de ces espèces pour lui appliquer le nom. Mais pourquoi celle-là à l’exclusion des six ou sept autres? Gmelin n’a point amélioré la synonymie; il a même ajouté à la confusion qui existait déjà ; aussi Dillvvyn a rejeté toute celte syno- nymie embrouillée , et il a appliqué le nomlinnéen à deux espèces diffé- rentes de toutes les autres , et que probablement Linné ne connut pas.

LES CÔNyÙES. 549

Il est, comme on le voit, absolument impossible de dire à laquelle de toutes ces espèces le nom de dysera doit appartenir; selon nous, au- cune ne doit le prendre, car il est à présumer, par la manière vague dont l'espèce est caractérisée par Linné, que ce grand naturaliste rap- portait à un même type des objets très différenls. Maintenant, nous le demandons, est-il possible do dire ce que sont les espèces fossiles por- tées dans les catalogues sous un nom qu’on ne peut appliquer sans erreur?

Si l’on en croyait M, F. -A. Roimer, le genre Vénus aurait commencé dans les terrains de sédiment les plus anciens , car il en cite une dans les terrains dévoniens du Hartz. Mais l'auteur a compris lui -même qu'un moule sans autres caractères que la forme générale, qui ne s’ac- corde guère avec celle des Vénus, ne pouvait être placé dans un genre avec certitude ; aussi il l’a fait précéder du point de doute.

Le Venus donacina de Schlolheim nous paraît moins douteuse que la précédente; elle provient du trias de Golba, et elle accuse la présence du genre d’une manière plus certaine dans celte formation.

M. de Munster, dans Goldfuss, a fait connaître six espèces dans le lias. Ce sont: les Venus basina, obliqua, pumila, anliqua, caudata et angulala. Nous avons précédemment critiqué quelques unes de ces espèces.

L’oolithe inférieure contient aussi plusieurs espèces de Vénus ou des coquilles attribuées à ce genre d’après leur forme extérieure.

' Nous citerons les Venus mricosa, Sow.; undata, de Munster; tennis, Kock et Dunker. De toutes les couches oolilhiques, celles du coralrag sont les plus riches en Vénus. Six espèces sont citées; quelques unes sont encore douteuses quant à leur véritable genre. Ce sont : les Venus trapeziformis , Rœtoer; iennistrîata , jurensis , Munster; depressa, carinata , cardüœformis de Rœmer. Quelques unes de ces espèces sont probablement des Cardium , surtout celles qui sont carénées ou angu- leuses du côté postérieur.

Nous trouvons dans Goldfuss et dans Rœmer cinq espèces attribuées aux couches supérieures du Jura, Kimmeridge et Portland. Ce qui est remarquable , c’est que ces espèces sont propres jusqu’ici à l’Alle- magne, et ne sont point connues en Angleterre. Ce sont, lesFemis sue- vica et gratidis, Munster; parvula, subinflexa, mtculœformis de Rœmer.

La formation crétacée contient à elle seule plus d’espèces que tous les terrains de sédiment situés au-dessous d’elle. L'augmentation du nombre des espèces de certains genres, à mesure que l'on s’élève des couches profondes vers les plus superficielles, est un fait d’une grande

55o

QUINZIEME FAMILLE.

iinportance qui ressort avec évidence de cet inventaire que nous, faisons des coquilles fossiles. Néanmoins de nomhreu.ses exceptions existent dans ce développement des especes, puisqu’il y a dos genres qui s'étei- gnent à différentes époques géologiques et n’existoiU plus actuellement. Il n’est pas moins inléreasant d'éludidr la manière dont les genres se sont manifestés, et ont passé, des époques anciennes de notre globe, à celle dont nous sommes actuellement les témoins.

Trente-sept espèces se distribuent dans les divers étages de la craie. M. d'Orbigny en a décrit six, et M. Matheron une septième dans le ter- rain néocomien, Elles se distribuent assez également dans les divers lieux de la France et de la Suisse le terrain néocomien a été observé avec quelque soin. Ce sont les Venus Matheronensis, obesn, Galdrina, Col- taldina^ Icaimensis Qi Vendoperata de M. d’Orbigny; et (/o/lo-prouin- cîalis de M. Matheron. Il est a présumer que ces mêmes espèces existent aussi en Allemagne et en Angleterre, dans les couches du môme terrain.

Le gault et les sables verts renferment treize espèces en y joignant celle des craies marneuses grises de la Provence. Si plusieurs espèces sont propres, les unes au gault, les autres au grè^ vert, il y en a d’autres qui passent d’une couche à l'autre, et quelques unes se répandant plus abondamment, peuvent servir à caractériser les couches dont nous par- lons. C’est ainsi que le Venus Xlhrayana, par exemple, se trouve pres- que partout en France, en Angleterre et en Savoie le gault existe.

Dix espèces se distribuent dans la craie chlorilée. Parmi elles, nous citerons la T'enns ^'hoiomagonsis d’Orb., qui se trouve à Rouen et à üchaux (Vaucluse); les Vmus mmersii et faba de Sowerby, qui se rencontrent en Angleterre à Blackdown, et en France à Rouen, à Üchaux et en Touraine.

C’est probablement à la craie chloritée qu’il faudra rapporter ces craies fossilifères découvertes dans l’Inde, et dontM. Forbes a décrit les fossiles. D’après ce naturaliste, trois espèces de Vénus fossiles ont été trouvées dans les craies des environs de Pondichéri. ünOn une seule espèce remonte jusque dans la craie blanche à Uippurites, c’est le Venus Archiaciana deM. d'Orbiguy. Nous ne connaissons aucune espèce dans les craies supérieures de Maestrichl et de Scanie ; il serabJorait que le genre s’est éteint lentemeul avant la ûn de la période crétacée, avant de reparaître dans les terrains tertiaires.

Les terrains crétacés de l’Amérique contiennent aussi plusieurs es- pèces de Vénus. Nous ne connaissons pas celles de l’Amérique septen- trionale, mais M. d’Orbigny en a décrit deux des environs de Santa-Fe- de-Bogota.

LKS CONQUES.

55 ï

Il est assez remarquable de rencontrer un si petit nombre de Vénus dans le terrain tertiaire inférieur, si riche d’ailleurs en es- pèces d’autres genres. Nous ne connaissons jusqu’ici que huit espèces. Quatre, les Venus turgidulaj puellata, textuel scobinellatUj sont propres au calcaire grossier ; deux autres , obliqua et solida se montrent plus particulièrement dans les sables moyens de Beauchamps, Auvers, Sen- lis, etc. La septième espèce n’est pas du bassin de Paris, elle est de la Belgique ; mais il reste des doutes à son sujet. M. Nyst, qui le premier on a donné la description, n’en a pas vu la charnière. Ce naturaliste n’a eu à sa disposition qu’un seul individu qu'il était impossible d’ouvrir. La huitième espèce, le Venus merassata^ Sow., est très intéressante; non seulement elle offre l'analogie la plus grande avec une espèce vi- vante, Cytfierea c/trma, Lamk., mais encore appartenant aux sables supérieurs du bassin de Paris ; elle se montre dans un grand nombre de lieux situés à d’assez grandes distances.

Le Venus incrassala est l’une de ces espèces qui , indépendamment des trpis dents cardinales, ont un rudiment de la dent latérale antérieure des Cythérées. Elle est du nombre de ces coquilles ambiguës que l’on pourrait aussi bien admettre dans un genre que dans l’autre. Il en est de même à peu près du Cytherea citrina de Lamarck ; seulement la dent latérale est un peu plus grosse encore, ei c’est la seule différence que l'on aperçoit entre l’espèce vivante et la fossile. Cela suffit-il pour les séparer? Nous pensions que non autrefois, lorsque nous n’avions qu’un seul individu vivant à comparer à quelques individus fossiles; nous disons oui, aujourd’hui que nous avons examiné un grand nombre d’in- dividus et que nous leur avons observé constamment cette différence. Nous le répétons dans cette occasion, l’importance des caractères spé- cifiques ne se mesure pas à leur grandeur apparente, mais à leur con- stance.

Cette espèce ne se rencontre pas seulement en Angleterre et en France, elle existe aussi en Belgique , à Klein spauwen et dans quelques autres localités analogues. D'une variété plus petite M. Nyst en a fait une es- pèce sous le nom de T chms iiicrassaloides ; il suffira de la joindre au type de l’espèce. Le Venus incrassala a encore été trouvée dans les terrains tertiaires de la Westphalie, ainsi que dans ceux des environs de Magdebourg. M. Goldfuss ne la reconnut pas et la figura sous le nom de Venus suborhiculahSy nom qui a été adopté par M . Pbilippi dans son Catalogue des fossiles de Magdebourg, inséré dans le Palœontographîca de M. Meyer. M. Agassiz, privé de matériaux suffisants , ne la re- connut pas non plus et la décrivit de nouveau sous le nom de Cytherea

553

QUINZIÈME FAMILLE.

fîraunii dans son /conogirap/iî^ des coquilles tertiaires réputées analogues- Voilà donc une espèce qui se répand sur un vaste horizon géologique, ce qui lui donne un grand intérêt.

Aucune espèce terrain tertiaire inférieur ne remonte dans le ter- tiaire moyen. Ce terrain contient, à notre connaissance, dix-huit espèces bien conslaléeè. 11 y en a un plus grand nombre d’inscrites dans les catalogues; mais soit qu’elles appartiennent à d'autres genres, soit que leur espèce soit encore contestable , nous nous abstenons de les men- tionner. Les dix-buit espèces dont nous parlons se distribuent assez également dans les divers bassins qui forment l'étage tertiaire moyen. M. Dujardin en décrit quatre dans les falunsdela Touraine, mais nous en connaissons huit dont quelques unes se retrouvent à Bordeaux , à Dax, à la Superga près de Turin. Parmi elles il y en a qui gagnent le bassin devienne et se montrent encore en Wolhynie et en Podolie, comme le constatent les ouvrages de M. Dubois de Montpéreux et de M, An- drzejousky. Il est vrai que chez ces naturalistes les espèces identiques ne portent pas le môme nom , mais leurs figures sont assez bonnes pour faciliter la recliOcation de la nomenclature et constater le fait que nous avançons. C’est ainsi que le Venus dysera de M. Dubois, par exemple, n’est ni le dysera de Linné, que nous avons vu n'ôlre pas reconiiais- &able; ni celui de Brocchi , que nous reverrons bientôt sous un autre nom. C’est une troisième espèce que l’on trouve communément dans les faluns de la Touraine, et à laquelle M. Dujardin a attribué le nom de Vetms casinoides ; en avons fait le Venus liasteroti, pour la distin- guer du IVm/s casinoides de Bordeaux. Le Venus incrassata de M. Du- bois n’est pas de la même espèce ni du même genre que Pmcrcfssala de Brocchi; cette dernière est une véritable Astarté. Celle de M. Dubois est une Vénus ayant un petit sinus palléal, et elle est très voisine, si ce n'est identique au Venus coUmmix^ Duj. , des faluns de la Touraine. Quant au Venus senilis de M. Dubois, elle n’est pas non plus celle de Brocchi, qui, ainsique nous le verrons, est une variété fossile du Venus tjallina de Linné. L’espèce de Wolhynie nous paraît distincte de toutes les autres et propre à caractériser les terrains tertiaires moyens de cette région de l'Europe, car c’est elle probablement que cite M. Piisch dans les terrains de la Pologne.

Des dix-huit espèces qui appartiennent aux terrains tertiaires moyens (le l'Europe, six passent dans les terrains supérieurs, et quelques unes se retrouvent encore vivantes dans nos mers. Mais avant d'en donner la liste , nous ne devons pas oublier celles des espèces qui se trouvent à la fois dans plusieurs localités du terrain en question ;

LES CONQUES.

553

, .y -1* Venus Basteroti , Desh.

* Espèce confondue avec le dysera et avec \e xasinoides y mais toujours distincte par ses lames épaisses et comme écrasées ; elle est en Touraine et en Wolhynie.

' Venus rudis y Bu].

^ Espèce assez rare à Bordeaux et dans les faluns de la Touraine.

\ 3" Venus casinoides y Lamarck.

Espèce très commune à Bordeaux, et que l’on retrouve à Fréjus et en Touraine.

4“ Venus sulcataria , Nob.

Nous ne connaissons aucune bonne figure de cette espèce qui est commune aux bassins de l'Adour et de la Loire. o*" Venus circularis y Desh.

Celle-ci se rencontre particulièrement aux environs d’Angers. Pendant longtemps nous l'avons crue propre à cette localité, nous la possédons actuellement des faluns de la Touraine.

Les sept espèces que nous avons encore à inscrire se partagent en deux catégories; dans la première nous comptons deux espèces seulement qui remontent dans les terrains immédiatement supérieurs et ne les dépassent pas. Les cinq espèces de la seconde série passent aussi dans les terrains supérieurs, et sont encore actuellement vivantes.

i Venus turgida , Sow.

Se trouve dans les terrains moyens de la Pologne et de la Wolhynie, et elle est aussi dans le crag d’AngIelerr,e.

2®’ Tenus «mèonana, Agassiz. ^

L’une des plus grandes espèces du genre, le Venus umbonaria est à la fois dans le terrain moyen de Bordeaux et de Dax et dans terrain su- périeur des collines subapennines. >

Les espèces delà seconde série sont les suivantes rTmus ovata, gradala , plicata y casinUy fasciata; nous les mentionnons seulement, parce que nous allons les retrouver parmi celles des terrains tertiaires supérieurs.

Nous avons toujours eu soin de citer à part les espèces du cragr ce terrain, par le nombre des espèces analogues qu’il contient étant inter- médiaire entre le terrain moyen et le supérieur, mérite celle distinction par l inlérêt qu’il inspire. Six espèces de Vénus s'y rencontrent; nous avons déjà mentionné le Venus turgida , nous y ajoutons les Venus gib- bosa et mbricata , toutes deux propres au crag. Les trois suivantes-';

554 QUINZIÉME FAMILLE.

casina, omta^ (asciata, passent dans les terrains supérieur^ et vi- vent encore dans nos mers.

Les terrains tertiaires supérieurs paraissent moins riches en espèces fossiles. Ceux de l’Europe en contiennent dix, sur lesquelles trois seule- ment n’ont pas leur analogue vivant; le Tenus umbotmria, qui se trouve en Italie, à Dax et à Bordeaux; le Venus scalaris, Bronn, qui est particu- lière aux terrains subapennins, en Italie,, en Sicile, à Perpignan, et enfin le Venus Dianœ, Requien, qui a été récemment découverte en Corse dans un terrain tertiaire récent, par le savant naturaliste auteur du nom consacré à cette espèce intéressante. Toutes les autres espèces ont leur analogue vivant, et sont les suivantes :

V Vetms verintcosa J Linné.

Espèce très répandue dans tout l’Océan d’Europe. Nous ne connais- sons pas sa limite vers le nord , mais nous pouvons croire qu'elle n’at- teint pas les mers de Suède et de Norvège, puisque M. Lovèn ne la mentionne pas dans son excellent opuscule. Vers le midi sa limite est également incertaine ^ elle vit dans toute la Méditerranée, et c’est elle probablement qu'Adansou a décrite et mal figurée sous le nom de Clonisse. Mais d'après M. Krauss elle ne s’arrêterait pas au Sénégal, elle gagnerait les mers du cap de Bonne-Espérance. Lamarck prétend que cette espèce vit aussi à rile-de-France et dans les mers australes; mais il 'est évident que Lamarck a pris des espèces distinctes pour de

V

simples variétés.

Fossile, le verrucosa est moins répandue. Elle est dans les ter- rains tertiaires supérieurs de la Sicile, de Tîle de Rhodes, de l’Astesan, et c’est encore probablement une de ses variétés que M. Agassiz a nommée Venus excetilrica,

Tenus casina, Linné,

Celle-ci se trouve dans les mêm^ mers que la précédente; seule- ment elle s’étend pins au nord. M. Lovèn la cite dans l’Océan seandi- ^nave; et s’il était vrai, comme nous le soupçonnons, que le Venus ro- aalina de M. Rang fût une simple variété, l'e^èce vivrait aussi dans les mers du Sénégal , et s’étendrait ainsi sur une ligne de près d’un quart de la circonférence de la terre.

Cette espèce se montre à l’état fossile dans les terrains moyens de la Podolie, de la Wolhynie, dans le bassin de la Gironde, dans celui de la Loire , en Touraine et en Anjou ; elle se rencontre aussi dans la crag d’Angleterre et delà Belgique; enfin elle n’est pas rare dans les terrains tw^Uires supérieurs de la Sicile. . *

LES COJJUUES.

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Nous appellerons l'attention des naturalistes sur ce fait : les indivi- dus provenant de la Podolie, de la Touraine et de la Sicile , ont les itn- pressions musculaires et la sinuosité palléalo absolument semblables à celles des individus vivants, tandis que ceux de Bordeaux, d’Angers et du crag, soit d’Angleterre, soit de Belgique, ont les impressions mus- culaires'plus grandes et le sinus palléal plus étroit.

Venus plicalay G'mel.

Espèce fort belle vivante, au Sénégal et dans l’océan Indien,

Fossile à Salles dans le terrain moyen de Bordeaux , à Vicence , à Cassel et dans les terrains subapennins. Nous ferons remarquer, entre les individus vivants etfossües, une très légère différence dans la largeur du sinus palléal , un peu plus large dans les premiers que dans les seconds.

4“ Venus gradalay Desh.

Nous avons donné ce notn à une coquille confondue, tantôt avec le (lysera de Linné, tantôt avec le Venus fasciata; elle se reconnaît aux six ou sept grosses côtes Iransverses, aplaties, renversées en haut et couvrant presque toute la surface extérieure. Cette espèce vit dans presque toute la Méditerranée.

Elle est fossile dans le terrain moyen d’Angers et dans le terrain su- périeur d’Âsti et de la Sicile.

5“ Venus fasciata J Donovan.

Espèce très répandue depuis les mers du Nord jusque dans la Médi- terranée; très variable dans ses couleurs, elle est plus constante dans sa forme et tous ses autres caractères. Gmelin , Montagu en ont fait une variété du Pcmis Paphia. M. Payraudeau lui a consacré le nom de Vettus Brongniarli; mais il était juste de revenir au premier nom donné par Da Costa , et c’est ce que fit Donovan

Cette espèce est fossile dans les terrains tertiaires moyens et supé- rieurs, dans le crag de Belgique et d’Angleterre, et en Sicile,

Fenws galUna, Linné.

Cette espèce n’est pas moins répandue que les précédentes ; elle s’é- tend des mers du Nord à la Méditerranée. Vers le Nord, elle présente des variétés dont les naturalistes ont fait une espèce distincte sous le nom de Venus lamhiosa ; mais cette variété se rattache au type de l’espèce par des modifications graduées, ainsi que l’a fait remarquer M. Macgil- livray dans son llisloire des mollusques d’Ecosse.

A l’état fossile elle n’est pas moins répandue, mais elle reste dans les terrains tertiaires supérieurs en Angleterre, en Norvège, en Sicile,

556

QUINZIÉME FAMILLE.

en Morée , en Italie ; en France ; on peut donc la considérer comme l’une des espèces qui caractérisent le mieux les terrains supérieurs.

Fenus oüa(a, Pennant.

Plusieurs noms ont été successivement appliqués a cette espèce; un seul doit lui rester, et c'est le plus ancien, celui que lui a imposé Pen^ nant dans \e ïiritish Zooiogy, publié en 1777. Celte espèce vit dans les mêmes lieux que la précédente et l'accompagne parlotit , mais il y en a peu qui soient aussi répandues dans les terrains tertiaires moyens et supé- rieurs. Ainsi tous les terrains subapennins de l ltalie , de la Sicile , de la Morée, de l’Algérie, de la France, de la Norvège et de la Suède, ren- ferment en abondance le Venus ovata; les terrains moyens de Dax , de Bordeaux, de Vicence, de Korod, dans le Siébenburg, le crag d’An- gleterre et de Belgique en recèlent de nombreux individus.

C’est à l'âge des terrains subapennins qu’il faudra probablement rapporter ceux de l’Amérique méridionale que Al. d’Orbigny a fait connaître sous le nom de terrains palagoniens , dans la paléontologie de son Voyage en Amérique. Eu effet, ce terrain contient un assez 'grand nombre d'espèces dont les analogues vivent dans les mers les plus proches ; mais ces espèces sont mélangées avec d’autres qui paraissent éteintes. Dans le genre Vénus, M. d'Orbigny mentionne six espèces qui n’ont plus de représentants dans la nature actuelle; une seule, le Venus Munsteri, est très rapprochée du Venus (/inliqua do Gray.

Les dix espèces que nous venons de passer en revue ne sont pas les seules qui existent dans les terrains tertiaires supérieurs. C’est ainsi que les. Venus deformis^ alveata et ï/iercenana caractérisent les terrains tertiaires supérieurs de l’Amérique septentrionale; d'autres espèces les accompagnent, mais M. Léa les a confondues avec les Astartés.

M. Darwin a découvert, à Sant-Iago, un dépôt tertiaire récent con- tenant des fossiles, parmi lesquels M. Sowerby a reconnu une Vénus très voisine du verrucosa des mers d’Europe, et à laquelle il a donné le nom de Venus simulans.

M . Hardies a rapporté de son voyage de Java , provenant d’un terrain tertiaire récent, quelques exemplaires fossiles d’une Vénus qui vit dans tout l’Archipel indien, et que M. Gray a fait connaître sous le nom de Venus papxjracea. C'est avec celte espèce que le môme zoologiste a fait un genre nouveau sous le nom de Clementia,

Enûn, nous avons sous les yeux, et provenant des terrains récents du Brésil , plusieurs exemplaires du Venus flexuosa qui vit encore dans les '-mers qui baignent ce pays. ^

LES CON'OllES. 557

Il est probable que les espèces mentionnées par M. d’Orbigny dans la- paléontologie de son Voyage en Amérique proviennent de. couches non moins récentes. L’auteur donne le nom de pampéens à ces;terrain& modernes qui constituent le sous-spl des pampas de l'Amérique méridio- nale. Les trois espèces que M, d’Orbigny y a rencontrées ont leurs analo- gues vivant dans les mers les plus proches : ce sont les Tenus Dombeyi, Lamarck, opaca, Sow., ei Patagonica , d'Orb.

Si nous comparons celte statistique du genre Vénus à celle que dres- sait M. Defrance, il y a vingt ans, on sera étonné des progrès qu'a faits l’histoire des fossiles. Ce naturaliste , en effet, déclarait ne pas connaître de Vénus dans les terrains inférieurs au bassin Paris, et il ne men- tionnait qu’une vingtaine d'espèces dans tous les terrains tertiaires. Si incontestablement la paléontologie a fait d’immenses progrès, surtout depuis dix à douze ans, il ne faut pas croire qu’elle soit arrivée à son terme. Celle science est encore bien jeune; les matériaux qu’elle ras- semble avec un zèle bien louable ont encore besoin de nombreux tra- vaux pour être déblayés des erreurs fâcheuses qui les encombrent, et qui proviennent, pour la plupart, de l’ardeur et de l’empressement des naturalistes en faveur d’une science qu'ils aiment. >

1. Vénus ridée. Venus rugosa^ Gmel.

PI. 20. fig. 14. 15. 16.

y. Testa cordatâ ^ tnmidâ y soUdây 'ülbO’griseâ, macttlts Julvis angit losis ornatâ; costnîis memhranactis rectis y transversis y ad apicem recurvatis ; marginibus incrassatis , ternie et emdatis ; humîâ magna, impressâ latu cordatà.

Fenus var. Lin. Sysl. nat. éd. la®. p. ii3o, ci® 1 15,

Venus rugosay Gmel, p. 3276. 3i.

Lister, Conch. pi, 286. f. i23.

Schrœler, Einl. t. 3. p. i54. 3.

Venus rugosa orientalisy Cliem, CoQch. 6. p. SoS.p], 29, f, 3o3.

Encycl. pl. 273. f. 4. b.

Venus DÜIw. Cat. t. 1. p. 164. n* i3.

Lamarck, An. s. vert. l. 5. p. 587. 8.

Venus rigidOy Wood. Ind. teslac, pl. 7. f. i3.

Desh. Encycl. méth, vers. I. 3. p. ui4. n“ 5.

Desh. Lamk. An. s, vert, éd, t. 6. p. SSg, 8.

Catlow, Conch. nom, p. 35.

558 QUINZIÈME FAMILLE .

Haiilèy, Desc. cat, p. m.

Agassiz. Icou. des coq. tert. p. 35. 5. pl. 4. f. i à fi.

Habile les mers de iTiide et da Brésil.

Nous avons déjà présenté quelques observations au sujet de cette espèce. Quoique citée un assez grand nombre do fois à l'état fossile , les recherches de M. Agassiz et les nôtres ont prouvé de la manière la plus irrévocable que l’espèce ne s’est point encore rencontrée dans les terrains tertiaires , et que c’est par suite d'erreur qu’elle y a été mentionnée.

Cette coquille est globuleuse, très épaisse, cordiforme ; elle est un peu plus large que haute ; elle est très inéquilatérale, très oblique; son côté antérieur, court, présente au-dessous de crochets proéminents une grande lunule enfoncée, cordiforme, aussi large que haute, et couverte de rides. Toute la surface extérieure est couverte de lamelles transverses , redressées, assez saillantes, simples et légèrement recourbées à leur sommet. Les interstices de ces lames sont lisses ou montrent quelques stries légères d'accroissement. La charnière est assez large; elle pré- sente sur une lame cardinale, épaisse, trois dents inégales: une, posté- rieure, très large et creusée d’un sillon au sommet; une. moyenne, grosse , courte , en pyramide triangulaire et divisée au sommet en deux lobes très inégaux ; enfin la dent antérieure est la plus petite ; elle est fort rapprochée de la moyenne ; elle est un peu comprimée et fort aiguë. Un peu en avant de la base de celle dent , on remarque un petit rudi- ment analogue à la dent antérieure des Cythérées ; par conséquent cette espèce pourrait , à la rigueur, faire partie de ce dernier genre. Cepen- dant, comme ce rudiment n’est visible que sur l'une des valves , il est à croire que l’espèce qui nous occupe appartient évidemment au genre Vénus. Les bords de la coquille sont épais , finement crénelés , et les crénelures se continuent sur le bord de la lunule, La coloration de celte espèce est peu variable. Sur un fond d’un blanc grisâtre ou fauve se dessinent de grandes taches d’un fauve plus ou moins foncé, presque toujours terminées en fer de lance , et disposées habituellement en trois rayons divergents.

Les grands individus de cette espèce viennent des mers du Brésil ; ils ont 85 millim. de long et 75 de haut.

LES CONQUES.

1^9

2. Vénus à verrues. Venus verrucosa, Lin.

PI. 21. f. 1.2.

F, Testa cordaîo-rotundatâ; convexn^ albidà^ mfo maculatà; striis îongitudinalibus obsoletisj adlatera divaricatis ; transversis mtmbra- naceis^ antrorsum imprîmis verrucosis.

Feniis 'verrucosa^ Lin. Syst. ual. i i3o. Gmel. p. 3269. ^ Schrœter, Einl, l. 3. p. 114. <

Olivi, Adriat. p. 107. 1.

dysera^ var. 11. Lin. Mus. Ulri. p. 498. 37.

D’Argenv. Conch. éd, i'®. pl. 24. f. 9*

V, dyserof var. Lin. Syst. nat. éd. 12, p. II3^>. ^

List. Concli. t. 284. f. 122.

Peliver, Gaz. pi. 98. f. 117.

Giialt. Te.sl. t. 75. f. 16,

15orii. Mus. t. 4. f. 7.

Chemn. Conch. 6. t. 29. f. 299, 3ou.

Peunant, Zool. brit. 4. t. 54. p. 48. Fenus erycina.

Favane, Conch. pl. 47. f. E. 9.

Poli, Test. Sicil, l. 2. p. 90. pl. 21. f. 18, 19.

Donovan, Brit. sliells. t. 2. pl. 44.

Dorset, cat. p. 34. pl. 8. f. i.

Maton et Racket, Lin, Trans. !. 8. p. 78,

Lamarck. An. s. vert. t. 5. p. .586. n“ 7,

Payr. Cat. p. 48. St-

Desh. Encycl. méth. vers. I, 3. pl. ii3. n* 4.

llesh. Expéd.sc. de Morée. Zool. p. 99. n'* 47,

Junior^ Fenus Lemani, Payr. Cal. p. 53. n* 91. pl. i. f. 29, 3o, 3i. Gerviüe, Cat. des Moll, de la Manche, p. 24. n* i.

Wood, ïnd. tc.st, pl, 7.!. 12.

Desh. Laiiik. An. s. vert. éd. t. 6. p. 338. 7,

Philippt. Moll. Sic. t. i. p. 43 ; t. 2, p. 34.

Callüw, Conch. nom. p. 36.

Hanley, Desc. cat. p. no,

Turl, Conch. Ins. Brit. p. 140.

/d, Brit. Fauua. p, 157.

/d. Conch Dict. p. 23t.

Dillw. Cat, t. I. p. i63. n* 12,

Pectunculus strigatns, Da Costa, p, x85, pl. I3« f, i.

QUINZIEME FAMILLE.

5()0

Thorpc, Bril. màr. Coiicii. p. 85. . ^

Krauss. sud AÜfa. Moll, p, lo.

Sow. Jun. Couih. mao. f. X19.

Collard des Ch. Cat. des moll. du Finist. p. a3. n* i.

Scacchij Cal. Couch. reg. Neap. p. 7.

Marav., Méro. pour Thist. nal. de la Sic. p. 75. i .

JelTrcy'!, Moll. mar. ofOban Conch. mag, p. 43.

Thompson, Rep. on llie Fauna of Xrel, p. 262.

Forbes,Rep. on OHgc. Invcrt, p* i44»

Verani, Cat. deglî anim. inveil. p. i3.

Kequien, Cat. des moll. de Corse, p. 23. 97,

Agassiz, Icon. des coq. tcrt. p. 32. 11° 3. pl. 5. f. i à S.

' Brocrhi, Conch. foss. stihap. t. 2. p. 545. 7.

Fossilis. Eadem'var,? Venus excentrica^ Âgass. /oc, eu. p. 34, n* 4. pl. 5. f. 9 II.

Brown. liai, test, Geb. p. 99, 564.

Habite l’Océan d’Europe, la Méditerranée, le Sénégal (Adanson), le cap de Bonne Espérance (Kraûs.s). Fossile, Italje, Sicile, île de Rbode.s , Algérie.

Nous n’aurons pas à décrire une fois de plus une coquille aussi con- nue que celle-ci; elle est l’une des premières qui s’introduit dans le ca- binet de l’amateur. A l'état vivant . elle présente quelques variétés inté- ressantes, tant sous le rapport, de la forme, que sous celui de la couleur. Nous avons vu des individus très aplatis et conslamraenl blancs prove- nant des mers du Nord; d’autres , plus bombés, provenant de la Médi- terranée ou de régions plus méridionales de la côte ouest de l'Afrique. A l’état fossile, les variétés ne sont guère moins nombreuses, et ce- pendant il y en a une des plus constantes que M. Agassiz a distinguée sous le nom de exceiHrica. Si les caractères que M. Agassiz donne à celle espèce étaient d’une constance absolue j nous n’hésiterions pas à suivre son exemple, et à admettre l'espèce dans nos catalogues; mais il suffit d’examiner un grand nombre d’individus pour y apercevoir des modifications insensibles qui, d’un côté, les font passer au V. verrucosa proprement dit , et de l'autre vers la Venus clathrala , qui se trouve dans les faluns de la Touraine. Cependant cette dernière èspèce nous semble jusqu'ici parfaitement dislinctft.

Les grands individus du V. verrucosa ont 67 millim. de long et 58 de haut. .

LES CONQUES.

56l

3. Vénus lévantine. Venus pUôaia. Gme!.

PI. 21. fig. 13. 14.

Testa ovato^transversâ f depressâ ^ obliqua, ineequilntera , antxch sabcorduta, albo^rosea'vsl rtifescente^ posticè ungulatd ; striis trans» 'versis distantibus redis in anguiis p'osterioribns productiorilnts ; lunuiâ impressâ, ovatà , rngosâ,

var Lin, Syst. cat. la. p. ii3o.

f^enus pUcata„Gmt\. p. 3276. n" 3o.

Argenv. Condi. 21, f. A*.

Favan. pl. 47. f. E. 7. * .

Born. lVlus.pl. <5. L 9 è specimuie jîtniore.

Chemn.'Couch.l. 6, p. 299. pl. aS. f. 295, 97. Venus foUucco damellosa.

Valenlyn. rar, amb. pl. i5. f. 21.

Eucycl. pl, 275, f, 3 à 6.

Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 588. 11.

Wood, Iiid. test. pl. 7. f. 9.

Dillw. Cat. t. I, p. 162. 9.

Desh. Encycl. mélli. vers, t, 3. p. iii5. 3,

Dçsh. Lanik. Au. s. \ert. éd. t, 4. p. 3/* i. n*’ 1 1 .

Reeve, Couch. Syst. 68. f. 6.

Catlow, Coucli. nom. p, 35.

^ Hanley^ Desc. cat, p. n i .

Fossilis. BroccUi, Concli. foss. subap. t. 2. p. 542.

Broun, liai. terl. Geb. p. 99. 565.

Philippi, Tcrliœrvcrsl, p. ii. 27,

Habite le Sénégal, l’océan ludien (Lamarck). Fossilé,en Italie, à SalUs, près Bordeaux, à "Vienne et à Cassel (Philippi),

Très belle espèce de Vénus’qui habite à la fois les mers du Sénégal et celles de l’Inde, comme le constate l’ouvrage deValeniyn sur les coquilles d’Amboine. Elle est ovale, sub-trigone, très inéquilatérale; son côté antérieur est le plus court; il est obtus, et au-dessous de crochets très peu saillants,, mais obliques, il présente une grande lunule déprimée, ovale, sub-cordiforme et fmem en t striée. Le bord supérieur ou le cor- selet est convexe et creusé médiocrement dans sa longueur. Le côté postérieur est limité par un angle assez aigu. Toute la surface est cou- verte de grandes lames Iransverses, écartées, minces, simples, légère- ment recourbées sur le bord libre. Parvenues à Tangle postérieur, elles se prolongent en un angle saillant et ordinairement creusé en gouttière ;

T, I. a* PARTIE, 36*

562 QUINZIÈME FAMILLE.

parvenues à la limite du corselet , ces lames sont armées d’un nouveau prolongement, quelquefois plus considérable que le premier. Les inter- stices de ces lames sont lisses ; les bords de la coquille sont épais et très finement crénelés. Une charnière large et épaisse montre trois dents cardinales divergentes et inégales. Les individus fossiles sont aussi grands que les vivants ; les lames dont ils sont couverts sont générale- ment plus nombreuses et distribuées un peu plus irrégulièrement. Mais ce qui les distingue essentiellement , c’est que chez eux le sinus palléal reste plus étroit. Il arrive chez cette espèce ce que nous avons remarqué dans le Venus verrucosa , c’est-à-dire que des variétés montrent que le caractère que nous signalons n’est pas d’une constance absolue , et qu'il ne doit pas s’élever à la valeur d’un caractère spécifique suffisant.

Cette coquille a 60 mill. de long et 50 de hauteur.

4. ■'Vénus fasciée. Venus fasciata, Donovan.

PI. 20,fig. 4, 5.

V. Testa rotundato^trigonâ y compressa transversim costatâ; costis latisy depressis y inceqnaîibus ; îunuîâ ovato-depressâ y tenuissimè striatâ; marginibits minutissimè crenatis; cardine tridentatOy aUero hidentato»

Pectunculus Da Costa. CoDch. brit. p. i88, pl. i3. f. 3.

Ency. méth. pl. 276, f. 2.

Penuant, Brit. zool..^. 4- p*

Venus fasciata, Donovan, Brit. shells. t. 5. pl. 170.

Id. Maton et Kack. Lin. Trans, t. 8, p, 80.

Venus Monlagu, Test. brit. p. iio.

Venus fasciata. Dütnr. Cat. t. i. p. iSp. n* 3. ^

Jd. Turton, Conch. dict. p. 234.

Id, Turton, Conch. brit, p. 146. n" 7.

Wood, Ind. test, pl, 7. f. 3.

Gerville, Cal. des Moll, de ta Manche, p. 24. n* 3.

Venus Brongniarti, Payr. Cat, des Moll, de Corse, p. 5i.

Td. Coll, des Ch. Cat. des Moll, du Fin. p, 25. i3.

Venus dysera. Scacchi (non Linné). Cal. conch. reg. Neap. p. 7.

V enus fasciata. Forbes, Malac. mon. p. 52. 2.

Id. Désb. dans Lamk. An. s. vert. t. 6. p. 370. 89.

Venus Brongniarti» Marav. Mem. pour Thist. nat. de la Sicile, p. 75.

Venus fasciata. Jeffreys, Mar. Moll, al Oban malac» mag. p. 44.

îd. Hanley, Desc. cat. p, 112, .

LES CONQUES.

563

Thompson, Rep, on the Faima of Irél. p. 162.

Forbes, Rep. on the OEg, invert. p. 144.

Lovèo, lod. Moll, scand. p. 39. n* 287.

Tborpe, Brit. mar. Concb, p. 88,

Macgill. Moll. An. ol’ scotl. p. 21a. Set p. 267.

Requieu, Cal. des Moll, de Corse, p. 24, n'’ 99.

Fossilis, Dosina fasciata, Wood, Cat. of foss. sli. froin the crag anu. nat. Iiisl. t. 6. p. aSo. 2.

Bosina fasciata. Morris, Cat. of brit, foss. p. 87.

Astartc antiquata. \

} Woodw. Geol. ofNorf. pl. 2. f. i5. 16.

Astarte ovahs, \

Habite l’Océan d’Europe, la Méditerranée. Fossile, Sicile; crag d’An- gleterre et de Belgique.

On voit par la synonymie de cette espèce qu’elle a reçu plusieurs noms. Parmi eux , le plus ancien doit rester, et c’est celui que nous avons préféré. Quelques zoologistes ont pensé que cette espèce et quel- ques autres qui lui sont voisines devaient constituer un genre à part , et ils lui ont donné le nom de Dosina. Mais , ayant eu occasion d’observer l’animal de Tune de ces espèces , nous avons reconnu en lui le véritable caractère des Vénus , et nous en concluons tout naturellement à la sup- pression d’un genre qui nous paraît inutile. Il est vrai que ce petit groupe de Vénus avoisine les Astarlées à ce point, que quelques natura- listes , tels que M. Pusch , par exemple, ont cru pouvoir les réunir aux Vénus. Nous verrons bientôt que l’animal des Astarlées est très différent de celui des Vénus dont il est question.

Le Venus fasciata est une coquille commune dans les mers d'Europe, et qui est trop connue pour que nous en produisions ici une description détaillée. Elle est très variable dans sa coloration^ et elle ne l’est guère moins dans ses accidents extérieurs. Sa surface, chargée de grosses côtes transverses , aplaties, larges, inégales, présente quelquefois des côtes plus régulières, plus minces, et qui se rapprochent de celles de notre Venus gradata , confondue , comme nous l’avons dit précédem- ment, parmi les Venus dxjsera de Linné. La charnière se compose de deux dents sur une valve et de trois sur l’autre , et c’est surtout ce ca- ractère qui a déterminé la création de ce genre Dosina.

Les grands individus ont 30 mill. de long et 26 mill. de haut.

36*

564

QUINZIÈME FAMILLE.

5. Vénus casinQÏde. Venus casinozdes. Bas't,

PI. 21. fig. 9.. 10.

y. Testa cordaiéiy obliqua ^ compressa ^ posticè angulàtây suîcis trAtss- versis membranaceis , superne crebriorlbits , perpendicularittr sub~ plicatis; lumdâ ovato^cordata ^ impressâru^osâ,

Basterot. Mém. de la Soc. d’iiist. cat. Paris, t. a. p. 89. a. pi. 6. f, 1 1 .

Desh. dans Lamk. An, s. vert. 2* éd. t. 6. p. 376’ i.

Matheron, Cat. intHli. p. i54. i3o.

Habite... Fo«;si!e aux environs de Bordeaux, dans les faliins de la Tou- raine.

On trouve dans ^les Animaux sans vertèbres de Lamarck un Venus casinoides, qui, d'après ce savant naturaliste , so trouverait en même temps fossile en Italie et aux environs de Bordeaux. Nous ne connais- sons aucune espèce à laquelle la description puisse s’appliquer et qui existe dans les deux terrains. M. Basterot , dans ses Becherches sur les fossiles de lioi'deaux , ayant trouvé une espèce de Vénus à laquelle les caractères donnés par Lamarck s’appliquent exactement, lui a conservé, le nom spécifique de Casinoides , et depuis cette époque , c’est toujours l’espèce de Bordeaux qui porte ce nom. Nous présumons que Lamarck confondait deux espèces sous une seule dénomination; car nous avons d’Italie une espèce qui se rapproche de celle-ci , mais qui en est con- stamment distincte.

Le Venus cashioides est une Vénus de taille médiocre. Sous un vo- lume beaucoup moindre , elle ressemble au V.plicata; elle est cepen- dant moins aplatie, plus cordiforme , ovale, subtrigone; elle est iné- quilatérale. Les crochets , très obliques , saillants , rapprochés , dominent une grande lunule ovale, cordiforme, légèrement déprimée, et circons- crite par une strie profonde. La surface de celte lunule est irréguliè- rement striée , le corselet est grand , lancéolé, creusé en une gouttière profonde, au fond de laquelle se voient les nymphes destinées à recevoir le ligament. Les bords des valves sont épais, finement crénelés; des crénelures beaucoup plus fines se continuent dans la longueur de la lunule. Toute la surface extérieure est couverte d’un grand nombre lames minces , étroites , peu distantes et irrégulièrement découpées sur leur bord. Ce bord reste mince et tranchant; il n’est recourbé ni en avant ni en arrière. La surface des lames présente de fines stries longi- tudinales et perpendiculaires ; les interstices qui les séparent sont lisses et très souvent inégaux. Parvenues vers le côté postérieur, ces lames

LES CONQUES.

565

forment un angle assez semblable à celui du Kem/s jiîicala , mais il est moins marqué , même chez les individus d’une belle conservation : c’est à peine si l'on en découvre la trace par une saillie un peu plus considé- rable. La charnière est assez épaisse ; elle consiste, sur la valve droite, en trois dents inégales et divergentes. La postérieure est allongée, étroite et bifide au sommet. L’antérieure est très petite, aplatie et très rapprochée de la moyenne. Cette dernière est la plus grosse; elle est triangulaire et subpyramidale. Sur la valve gauche , la dent moyenne reste la plus grosse; mais la dent postérieure est devenue beaucoup plus étroite , tandis que la dent antérieure a acquis une plus grande épaisseur. En avant de la charnière se montre un petit rudiment de la dent latérale des Cythérées. L’impression musculaire antérieure est obronde , semilunaire , la postérieure est circulairé. L’impression pal- iéale remonte ^très haut dans l’intérieur des valves ; elle se place paral- lèlement au bord inférieur, et elle se termine en une petite sinuosité triangulaire , dont la base est un peu plus de la moitié de la longueur. Si l’on place la coquille horizontalement, et que Ton fasse passer une ligne par Taxe de la sinuosité, on la voit remonter obliquement dans la direction' de l'extrémité inférieure de la dent latérale antérieure. Par- faitement distincte de ses congénères , cette coquille présente quelques Variétés, l'nno, dans laquelle les lames sont plus écartées, et l’autre dans laquelle elles sont extrêmement serrées. C’est la dernière de ces variétés dont uous avons trouvé des individus parmi les fossiles des faluns de la Touraine.

Les grands individus ont 33 inill, de long sur 26 de hauteur.

6. Vénus de Basterot. Vemts Basteroii. Desh.

PI. 20. fig. 5. 6,

y. Testa transversâ ^ ovato^tri^onâ ^ imetfuilaterà obliquât compressa posticè obsolète anguiatâ .* sulcis transversis crassis , depretsis, latis , obiusist distantlbus, posticè tenuioribus^ îamellosis ; lunulâ impressâ . ovato-lanceolato ,

A'tfw/w de Montp. Pod. et Wolh. p. 6i . pl. 5. f. i5, 1 7,

Venus casinoides, Duj. Foss. de Tour. p. 261. n” i.

Habite... Fossile dans les fahins de la Touraine, en Wolhynie et eu Podolie.

On a confondu, tantôt avec le V. dysera de Linné, tantôt avec la précédente, une espèce qui nous paraît parfaitement distincte, et à la- quelle nous consacrons le nom du naturaliste qui , l’un des premiers, a appelé l’attention sur les fossiles des environs de Bordeaux. Le Venm

566

QÜINZIEMB FAJ^lILLE.

Basteroii est une petite coquille très commune dans les faluns de la Touraine. Elle est subtransverse , Irigone, très inéquilatérale; le côté antérieur est très court; Ü est dominé par la saillie de deux petits cro- chets qui viennent s’incliner au-dessus d'une petite lunule étroite , lan- c éolée. Elle est circonscrite par une strie fine et peu profonde. Cette lunule est lisse et comprise dans un espace lisse, qui occupe presque toute la hauteur du bord antérieur. Le bord dorsal supérieur n’est point bombé et convexe, comme dans l’espèce précédente, car il se projette en ligne droite, et il est occupé tout entier par un corselet lisse, creusé .en gouttière, et nettement séparé du reste de la surface par un angle aigu. Le bord inférieur est régulièrement arqué, les valves sont très déprimées; lorsqu’elles sont rapprochées , la coquille ressemble assez à un fer de hache. Sur la surface de ces valves s’élèvent six à neuf gros plis ou plutôt des lames épaisses qui semblent écrasées ; elles sont ob- tuses, lisses; les interstices qui les séparent sont également lisses , si ce n’est en avant, Ton remarque des stries régulières qui disparais- sent bientôt avant d’atteindre le milieu des valves. Parvenues sur le côté postérieur, ces lames épaisses s’amincissent subitement, et ce changement dans leur manière d’être rappelle l’angle postérieur du Tenus pHcata^ ou plutôt du Caainoides. La charnière est étroite; elle présente trois dents inégales sur la valve droite ; la dent moyenne est la plus grosse; elle est triangulaire et pyramidale ; la postérieure est large, très étroite; Tanlérieure est lameUçuse , peu proéminente, et presque parallèle au bord de la lunule. La valve 'gauche ne présente plus que deux dents , la postérieure disparaissant , parce qu’elle se confond avec la nymphe, mais Jçs deux autres ont acquis ce que la troisième a perdu. Les impressions musculaires sont semblables à celles du V. casinoides. L’impression palléale est encore plus courte; elle est située très haut dans l’intérieur des valves ; la sinuosité palléale se dessine sous la forme d’un triangle équilatéral dont Taxe se dirige obliquement vers le milieu de la lunule.

Les grands individus de cette espèce ont 210 mill. de long et 16 de hauteur.

7. Vénus poule. Venus gallina^ïAw.

PL 21. fig. 3. 4.

V, Testâ cordatO’trigoîid ^ supernè rotundatâ, albida^ rufo radiatâ sulcis transversis , eîevatis , albo et rufo^articulatim pictis.

Linn. Systema nat. éd. la. p. ii3o.

Bona. Récréât, part. a. f. 45.

LÈS CONQUES.

567

List. Coiich. pl. a8'i. f. lao,

Schrœler, Einl. t. 3. p. 1 18.

Born. Mus. p. Vign. f. 6.

Chemn. Conch. t. 6. pl. 3o. f. 3o8, 3io.

Knorr. Vergn. l. 5. pl. i4» f- 2 et 5.

Klein, Ostrac. pl. lo. f. 54.

Venus rugosa. Var. Pennaut. Brit. zopl. l. 4. pl. Sq. f. a.

Gmel. p. 3a70. u* 9.

Venus lusitanica. Gmel. p. SaSi. 11® 58,

Encycl. pl. 268, f. 3 à 6.

Dorset, Cat. p, 35. pl. 8, f. a.

Maton et Rack. Lin. Trans. t. 8. p. 82 pl. 17. t. 7, 8.

Venus striatuîa. Mont. Test. brit. p. ii3.

Venus striatuia. Donov. Brit, schells. l. 2. pl. 68.

Pectuncuîus striatuhis. Da Costa, p. 191. pl. 12. f. 2.

Dillw. Cat. ' t. 1. p. ï68. a3.

Lamk. An. s. vert, t, 5. p. 571. n* 24.

Payr. Cat. p. 49, n“ 83.

Desb, Encycl. méth. vers. l. 3. p, 1117. 14.

Desh. Exp. SC, de Moféezool. p. 100. 5i.

Desb. Lamk, An. s. vert. 2* éd. L 4. p. 347. 24*

Ëichw. Fauiia Gaspio-Cauc. p. 226.

Philippi, Moll. Sic. l* 1 . p. 41 ; t. 2. p. 34 .

Catibw, Coiich. nom. p. 33.

Hanley, Desc. cat. p. ii5.

Turt. Conch. Ins, brit. p. 149. pl. 9, f. a.

Id. Brit. Fauna. p. 157.

Id, Conch. Dict. p. 234.

Gerville, Cat. des Moll, delà Manche, p. xS. a* 4>

Wood, Ind. test. pl. 7. f. 23,

Coll, des Ch. Cat. des Moll, du Finist. p, 23. n” 3.

Scaccbi, Cat. Conch. reg. Neap, p. 7.

Forbes, Malac. mon. p. 52. 3.

Maravi, Mém. pour Thist. nat. de la Sic, p. 75, 4 Jeffreys, Mar. Moll, at Obaii Conch. mag. p. 44.

Thompson, Hep. on lhe Fau. of Irel. p. 262.

Forbes, Rep. on Œg. luvert. p. 144,

Venus laminosa et galUna. Thorpe, Brit. mar. Conch. p. 89.

Venus gallina laminosa, Gallina striatuia, Macgillevray, Moll, an, of Scoll. p. 212 et 265.

568

QUINZIEME FAMILLE.

Kequieu. Cat. des Moll, de Corse, p. 24. io3,

Verani, Cat, degli anim. invert. p. i3.

Fosstiis. y. sent/is, Brocchii. Concli. t. 2. p. SSq. ho 2. pl. i3. f. i3. yertus seniUs. Bronu. liai, terl. Geb, p. 160. n* 567.

Geinitz, Gnind. der Verst. l. 2. p. 418,

Bronn, Lelh. Geogn. l. 2. p. 948. pl. 38. f. 6.

Morris, Cat. of brit. foss. p. 104, et yemis rugosa.

Habite la mer du Nord, l’Océan d’Europe , la Méditerranée.

Fossile : Angleterre , Norwége , Sicile , Morée , Italie , France.

Nous réunissons ici trois espèces : le Venus laniinosa de Laskey, nommé Venus rugosa par Donovan, quoiqu’il y eût déjà un Venus ru- gosa de Linné et un autre de Gmelin. La troisième espèce que nous joignons à celle-ci est le Venus senitis de Brocchi. Il est Téellement im- possible de la séparer de son type vivant , ,et nous sommes étonné que Brocchi n’ait pas reconnu l’analogie que nous signalons, lui qui souvent a donné comme analogues des espèces qui ne le sont pas.

Le Venus gallina est une espèce trop connue pour que nous croyions devoir en faire ici une description détaillée. Nous avons voulu la signa - ler à Fattention des géologues , parce qu’elle est une de celles qui ca- ractérisent le mieux les terrains subapennins, car jusqu’ici nous ne Favons jamais rencontrée dans aucun autre étage tertiaire , et si elle y a été quelquefois mentionnée, c’est par suite d’erreur qu’il nous a été facile de démontrer. En arrivant dans les mers du nord de l’Europe, cette espèce présente des variétés très intéressantes. Déjà dans la Manche et sur les côtes de l’Irlande, les sillons transverses qui garnis- sent la surface externe deviennent plus nombreux, plus étroits , et ont une tendance à se changer en lamelles. Aussi en Irlande et en Écosse, on trouve mélangés des individus qui ont des cotés obtus, et d’autres qui ont des lamelles plus minces et légèrement recourbées en arrière. Entre ces deux variétés la limite est insaisissable quand on a sous les yeux un grand nombre d’individus. Aussi ces faits n’ont pas échappé à Fobservalion de naturalistes expérimentés, tels que M. Magglllivray et M. Lowen. Dans le midi de la Méditerranée les individus que Fon y rencontre du V. gallina se rapprochent beaucoup plus de ceux qui se trouvent dans les terrains subapennins : ils sont plus arrondis, et les côtes^ sont plus larges et plus épaisses.

Cette coquille a 35 à 40 millim. de larg. sur 25 à 30 de hauteur.

LKS CONQUES.

569

8. Venus ovale. Vernis ovaia. Pennant.

F. Testa ovato-trigonâ , inœqtdlaUrà , àepressâ , anticè obttisâ , posticè subacuminatâ^ aîho^fuîvn ^ fusco maculatà radiathn tenue cestatâ ^ striis transversis dectissata ; intus roseâ 'vei violascente ; marginibus crennîatis; lunulâ lauceotatâ^ decussatd,

PectuncuJus. Lister, Conch. pl. 3ii. f. 147?

Cardium striatum, Walkeer, Test. min. p. aS. f. Sa.

Venus ovata, Peim. Brit, zool, t. 4* P* ao6. pl. 5g. f. 3.

Id, Moniagii, Tes^t. brit. p. 120. 10.

Matou et Racket. Liu. Irans. t. 8. p. 85. pl. 2. f. 4.

Venus spadicea. Reuieri, Cat.

Venus ovata, Dillw. Cat. t, i. p. 171, n* 3o.

Id. Turton, Coiich, dict, p. 239.

Jd. Id. Concli. Ins. Brit. p. i5o, 12. pl. 9. 1. 3.

Id. Lamk. An: 5. vert. t. 5. p. 607. 87. ^

Venus pectinuïa. Lamk. An. s, vert. t. 5, p. 5g2. 26.

Venus ovataàti Gerville, Cat. des Moll, de la Manche, p, a6. ii* g.j Jd. AVood, Ind. test, pl, 7. f. 3o-

Id. Boucli. Chant, Cal. des Moll. doBoul, p. 22. 37, ^

Venus radiata. Desh. Exp. sc. de Morée, zool. p. 99 4g.

* Venus radiata. Scacchi, Cat. Conch. reî,^ Neap. p. 7,

Id. Plïilippi, Enuin, Moll. Sicil, t. i. p^ 44. 5.

Id. Maravigna, Mém. pour Phisl. nat. de la Sic. p. 75. 3,

Venus ovata. Forbes, Malac. moneiisis. p. Si. 5.

Venus pectinuïa. Dclcss. Recueil de coq. de Lamark. pl. 10, f. 3.

Id. Jlanley, Descr. cat. p. ii5.

Venus ovata. Forbes, Rep. on OEg, iuv. p. 144.

Id. Thorpc, Brit. mar, Conch. p. 90. '

Id. Macgill. Moll. An. of Scot. p. 212 et 267.

Venus radiata. Requien, Cat. des Moll, de Corse, p. 25. n* 104. ^

Cytkerea ovata, Thompson, Rep. on tlie Fauu. ofirel. p. 262.

Venus radiata, Phil. Enum. moU. Sicil. t. 2. p. 34. 5.

Fossilis. V. radiata. Brocchi, Conch. foss. subap, t, 2. p. 540. 6. pl. 14. f. 3.

V, radiata. Bas!, Ibss. de Bord, p, 89. 4.

Id. Risso. Eur. roerid. t. 4. p. 36o. 986.

Id.Dtïr, Dicl.sc. nat, t, 57. p. 291.

Venus r/iiZ/dM. Mar. de »Ser, Geogn, des terr. terl. p. i5o.- Id. Bronn. Ital. tert. Geb. p. too, 573,

Sjo

QÜINZIEMK FAMILLE.

Id, Nyst, Kecb. sur les coq. foss. d’Anvers, p. n. n* 42 pi. 3. f. 4a. . Id, Philippi, ËQum. moll. Sicil t. i.p. 4^1- 7.

V. ovata, Hisinger, Lelh. suce. p. 65.

y, radiata. Phil. Enum. moll. Sicil. t. 2. p. 36. 6.

y^ Qvata, Morris, Cal. of brit. foss. p. 104.

y , spadicea. Nyst, coq. foss. de Belg. p. i65, pl. n. f. 3,

y. radiata, Sism. Syn. ped. foss. p. 19.

Habite la mer du Nord, l’Océan d’Europe, la Méditerranée.

Fossile : Italie, Sicile, Murée, Algérie, France, Norvège, Suède, Dax , Bordeaux , Vienne , Angleterre et Belgique dans le crag.

Voici une espèce plus répandue encore que la précédente. On la voit passer des mers du nord dans nos mers tempérées, elle pénètre dans la Méditerranée, et elle paraît se continuer fort loin sur la côte occidentale de l’Afrique. A Tétât fossile, elle se trouve à la fois dans deux très vastes dépôts tertiaires ; aussi elle ne peut, en aucun cas, servir à les caracté- riser Tune ou Tautre. L’identité des individus fossiles n’est point con- testable, et celle des individus fossiles avec les vivants ne Test pas da- vantage , de sorte que Ton ne peut révoquer en doute la distribution de Tespèce telle que nous venons de la rapporter.

Cette coquille a reçu plusieurs noms , ainsi que le prouve notre sy- nonymie. Presque tous les auteurs qui Tont citée à Tétat fossile ont adopté le nom de radiata donné par Brocchi , mais celui à'ovata a incontestablement la priorité, puisqu’il est à Pennant, qui Ta pro- posé , en 1 777, dans sa Zoologie britannique. On ne peut donc adopter Topinion de M. Nyst, qui, dans son Histoire des fossiles de la Belgique^ est revenu au nom de V. spadicea , proposé par Renieri dans son Ca- talogne des productions de V Adriatique. Mais ce Spadtcea n’est point de Renieri il est de Gmelin , et quand on recherche dans la compilation de ce naturaliste Tespèce qui porte ce nom, on s'aperçoit qu'il a commis une erreur singulière en prenant pour une Vénus le Cardium latum de Lamarck, ou une espèce qui en est voisine.

Le Venus ovata est une petite coquille ovale, subtrigone, subéquila- térale, pou épaisse, à crochets petits et peu obliques. Sa surface exté- rieure est ornée d’un grand nombre de petites côtes rayonnantes, très élégamment crénelées par le passage d’un grand nombre de stries transverses et régulières. Ces stries sont plus ou moins saillantes selon les individus. Les côtes elles-mêmes varient j car quelquefois elles se bifurquent. La surface interne présente dans la cavité des crochets une tache d’un rose violacé, qui s’étend souvent jusque vers le milieu des valves. Dans d’autres individus , cette surface est d’un rose uniforme.

LES CONQUES.

571

La charnière est étroite; elle présente, sur la valve droite ,■ trois dents inégales; la postérieure est la plus longue et la plus grosse, elle est bifide au sommet ; l’antérieure est allongée , presque parallèle à la lu- nule, elle est très aplatie; celle du milieu est triangulaire, subpyramw dale; par sa longueur elle est intermédiaire aux deux autres. Sur la valve gauche, la dent moyenne devient plus épaisse, et elle est bilobée au sommet , mais les lôbes sont très inégaux. La dent aiitérieure reste^ semblable à celle de la valve opposée, tandis que la postérieure s’amincit considérablement et se confond en partie avec la nymphe. L’impression musculaire antérieure est ovale ; la postérieure est obronde. La sinuo- sité palléale est très courte, en triangle équilatéral.

Les plus grands individus de cette espèce ont 1 8 raillim. de largeur, et 1 5 de hauteur.

GENRE QUARANTE-SÈPTIÈME.

THÉTIS. Thetls, (Sowerhy.)

PI. 22, f. 3. 4-

CARACTERES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille ovale, obronde, subcordiforme, mince, parfaite- ment close , à bords simples ; crochets assez grands , inclinés en avant au-dessus d une grande lunule superficielle ovalaire. Charnière portant trois dents cardinales inégales, la postérieure, la plus longue, lamelliforme sur la valve droite, plus épaisse sur la gauche ; impression musculaire antérieure très petite , ovalaire, marginale, située près du bord inférieur; impression musculaire postérieure ovale , obronde ; impression palléale très courte en avant , se dilatant en une profonde sinuosité trian- gulaire à base très large , très rétrécie au sommet et remontant perpendiculairement jusque dans la cavité des crochets.

SYNONYMIE générique. Vmus ^ Mantcll.

OBSERVATIONS. Uu savaut géologue, M. Mantell, a fait connaître dans sa Géologie du comté de Sussex , une coquille bivalve singulière , qu’il a inscrite parmi les Vénus. Quelques années plus tard, M. Sowerby,

QUINZIEME FAMILLE*

57 -i

ayant fait des observations intéressantes sur la forme de l'impression palléale de celle coquille , a pensé qu’il était nécessaire do créer pour elle un genre particulier, j auquel il a consacre le nom de Thétis. M. Sowerby laisse du doute sur plusieurs parties essentielles de son genre nouveau, particulièrement suc la charnière; parce que, en effet, les Thétis, se rencontrant dans les couches inférieures du terrain crétacé , y ont laissé seulement leur moule. Le test lui-même a complè- tement disparu. I! a donc fallu juger du genre ét de ses caractères prin- cipaux d’après des échantillons qui n'ont pas toujours la perfection désirable.

Le genre Thétis n’a pas été admis par tous les naturalistes; il a de si nombreux rapports avec le grand type des Vénus que l’on devait craindre de l’introduire inutilement dans la méthode , et nous-même avons été du nombre de ceux"' qui l’ont rejeté , ne voulant l’adopter qu’au moment tous les caractères en seraient parfaitement con- nus. Nous élionç guidé dans notre opinion par la connaissance que nous avons depuis "longtemps d'une Vénus de la Méditerranée , qui offre des caractères tout à fait analogues à ceux du genre Thétis. Celte coquille a été décrite par M. Philippi, dans le tome I de son Enum. Moll. Sic. sous le nom de Venus incompta. Il est pour nous indubitable que si l’on trouvait consolidé le moule intérieur de cette Vénus, on le rapporterait sans hésiter au genre Thétis de Sowerby ; aussi il est bien à désirer que les observateurs qui habitent les bords de la Méditerranée recherchent l'animal de cette espèce et en comparent attentivement tous les caractères avec ceux des Vénus proprement dites ou des Pullastra. Il serait aussi curieux qu'intéressant de retrouver dans la nature actuelle le représentant d’un genre qui a vécu en grande abondance pendant que se déposaient les premières couches du terrain crétacé , et dont on ne retrouve plus la moindre trace , soit dans les couches supérieures de ce même terrain crétacé, soit dans la série entière des terrains tertiaires.

Les Thétis sont des coquilles subglobuleuses , un peu cordiformes ; les Crochets, assez grands et saillants, les rendent presque aussi longues que larges. Ces coquilles sont subéquilatérales ^ obtuses en avant et en arrière ; le bord ventral est coupé en un arc de cercle, dont Taxe serait près des crochets ; le côté antérieur est le plus court, il présente à la partie supérieure une lunule a peine marquée par une strie déprimée. Le test de ces coquilles était extrêmement mince , et par il ressem- blait à celui du Venus incompta dont nous avons déjà parlé. Ces co- quilles sont lisses ou marquées de stries irrégulières d’accroissement.

LES CONQUES,

5 7^1

II èst très difficile de voirla charnière dans un jbon état de conservation ; mais nous avons observé des empreintes très nettes de cette partie importante, et nous y avons reconnu trois dents cardinales sur chaque valve. Sur la valve droite. les deux dents antérieures sont les pjus petites; elles sont étroites et parallèles; la dent postérieure s'allonge , en se courbant un peu sur elle-même et vient gagner l’origine de la nymphe. Sur la valve gauche , les deux premières dents sont aussi les plus petites et la postérieure sublapielleuse vient croiser celle de la valve opposée, à peu près comme dans les Isocardes. On ne trouve aucune trace de dent latérale, soit antérieure, soit postérieure; par conséquent, ce genre s’éloigne des Cyprines et des Cythérées; il se rapproche davantage des Vénus. Mais ce que l’on doit étudier avec le plus de soin sur les moules des coquilles du genre Thétis , ce sont les impressions musculaires et celles du manteau. L’impression musculaire antérieure divise le bord antérieur en deux moitiés égales; elle est lellemenl rapprochée des bords , qu’elle laisse à peine un petit intervalle pour la continuation des bords du manteau. Elle est ovale semilunaire ; son extrémité supérieure se prolonge un peu et ce prolongement est à l’imptession du muscle rétracteur antérieur du pied. L'impression musculaire postérieure- est également très rapprochée du bord ; elle est subcirculaire , superficielle, et il faut, avoir des moules extrêmement nets, composés d’une pète très fine, pour en apercevoir les contours avec quelque facilité. Au-dessus de cette impression , et tout près du bord dorsal , se montre une petite impression oblongue, qui est celle du muscle rétracteur postérieur du pied. Celte impression est située plus haut et beaucoup plus détachée que celle des autres Mollusques que nous avons examinés jusqu’ici. L’impression palléale est extrême- ment singulière ; elle est si faiblement marquée à son point de départ du muscle antérieur, que l’on a de la peine à la suivre dans son commen- cement. On ne l’aperçoit bien qu’à une petite distance du muscle, lors- qu’elle remonte perpendiculairement à peu près au tiers antérieur de la cavité des valves. Après avoir suivi cette direction jusque vers le milieu de la cavité des valves, l’impression s’infléchit horizontalement , puis remonte un peu obliquement jusque vers le sommet des crochets, se recourbe en formant un sommet assez aigu et redescend oblique- ment vers le bord antérieur du muscle postérieur, à la circonférence duquel elle aboutit comme une tangente. A mesure que cette impression palléale remonte vers les crochets, elle se creuse davantage, ce qui prouve que le muscle rétracteur des siphons trouvait son principal appui dans cette région supérieure et postérieure de la coquille. Ce qui nous

5 74 QUINZIÈME FAMILLE .

a paru surprenant et ce que nous ne pourrions encore expliquer, c’est qu'il existe des individus chez lesquels une impression palléale , indé- pendante de celle que nous venons de décrire, s’étend directement et parallèlement au' bord ventral de Tirapression musculaire antérieure à la postérieure, Nous devons ajouter pour terminer ce qui a rapport au genre Thétis , que les valves ont les bords minces et entiers , que ces bords se joignent parfaitement dans toute leur circonférence , et enfin que les valves sont maintenues dans leurs rapports naturels , au moyen d’un ligament extérne, étroit et bombé, fixé sur des nymphes peu proéminentes , étroites et séparées par un sillon peu profond.

Presque toutes les personnes qui se sont occupées du genre Thétis ont eu à son sujet les mêmes opinions ; elles ont compris qu’il était nécessaire de rapprocher ce genre des Vénus et des Cythérées. Il faut cependant en excepter M. Gray qui, dans la classification du Musée britannique, introduit le genre dans la famille des Lucines. Ces rapports avec les Vénus étaient pour nous d’autant plus évidents, que nous avions trouvé dans une Vénus vivante des caractères presque identiques avec ceux des Thétis. Ce genre néanmoins doit être conservé; la forme de rimpression palléale est tellement différente de celle des autres Acé- phalés connus , que cela seul suffit pour le faire admettre définitivement dans toutes les méthodes.

L’animal devait être très différent de ceux que nous connaissons actuellement : les siphons , au lieu d’être dirigés horizontalement d’avant en arrière, devaient tomber de haut en bas dans la direction de leur muscle rétracteur. Le manteau lui-même a subir des modifications notables, puisque le muscle rétracteur des siphons occupait presque toute la longueur du bord ventral. Le pied, par conséquent, devait être porté très en avant et l’espace nécessaire pour son issue se trouve extrêmement réduit par l’abaissement du muscle rétracteur antérieur des valves. Le pied devait donc avoir une forme spéciale , et nous pré- sumons que cet organe était allongé , cylindroïde et comparable à celui des Lucines; on comprend sans peine tout ce que ces conjectures lais- sent d'incertitude après elles. 11 est curieux néanmoins de pouvoir recréer en quelque sorte un animal entièrement perdu, en se servant par induction des renseignements que possède aujourd’hui Thistoire des Mollusques.

Jusqu’ici les véritables Thétis sont au nombre de trois seule- ment: elles appartiennent, sans exception, aux couches inférieures et moyennes du terrain crétacé connues sous le nom de gault , de grès vert et de craie chloritée. M. d’Orbigny a reconnu une troisiènle espèce dans une des corbules du Mineraf ronchologÿt mais elle est contes-

LES CONQUES. 5^5

table, car elle à la plus grande analogie avec le Thetis minor'; aussi M. Morris , dans son Catalogue des fossiles de la Grande-Bretagne , réunit-il les deux espèces que sépare M. d’Orbigny.

Thétis petite. Thetis minor. Sow.

PL 22. f. 3. 4.

T. Testa siiborbiculari ^ tnrgidâ , subcequüatera^ lœvigatâ rransversim irregtiîariter striata^ longitudinaliter punctatâ ; iimbonibus rninimis, vix obVtquis.

Venus. Maotell, Geol. of Sussex. p. 73. 12.

Thetis minor, Sow. Miu. conch. t. 6. p. 19, pl. 5i3. f. 5, 6.

Defr, Dict. sc. nat. t. 54, p, 274.

Sow. Concb. man. p. 274.

Gray, Syn. bril. mus, p. 91.

Bronn, Leth. geogn. t. i. p. 7o5. 2, pl. 3o, f. 22.

Brown, Elem. of foss. conch. p. 112^

Fitton, On the strata belowche chalk. p. i3i. 157, 159. 2o5. a6S.

Sowerby dans Fitton, p. 358,

Morris. Cat. of brit, foss. p. 102.

D’Orbigny, Paléont. franc, ter. crét. t. 3. p. 453. pj. 387. f. 4, 5.

An 'varietas? Corbula lœvigata, Sow. Min. conch. pl. 209. f. x, 2.

Thetis lœvigata, D’Orb. Paléont. franc, ter. crét, p. 45r. pl. 387. f. 1 à 3.

Habite... Fo.ssile dans le Gaullen France, en Angleterre, en Allemagne.

Coquille dont on ne trouve habituellement que le moule intérieur formé d’une substance noire et dure, mais d’une pâte ordinairement assez fine pour conserver avec la plus grande exactitude les empreintes que l’animal a laissées dans la coquille; c’est d’après ces moules que nous avons décrit les caractères du genre; quant à ceux de l’espèce que nous signalons comme la plus répandue, ils sont faciles à recon- naître. En effet, le Thetis minor est une coquille de taille médiocré, arrondie , globuleuse , renflée, subcordiforme , lisse ou marquée de stries irrégulières d’accroissement. Les crochets sont médiocres , peu inclinés ; ils partagent la coquille en deux parties presque égales. La charnière , autant qu’il est permis d’en juger par son empreinte, porte trois dents inégales, disposées à peu près comme celles desCyprines; il n’y a au- cune trace de dents latérales. L’impression du muscle antérieur est ovale, oblongue, située très près du bord antérieur et non loin du bord inférieur.

^7 fi QUINZIÈME FAMILLE .

Cette coquille offre des variétés de taille, et c’est probablement Tune d’elles qui, njal conservée, a été prise pour une Gorbule par M. Sowerby, et distinguée plus tard comme espèce par M. d’Orbigny; cette variété se' trouve avec le type de l’espèce , mais beaucoup plus rarement.

GENRE quarante-huitième:

GKAT£IiOUPlE. G^'alelmqm.

PI. i4. f. i8. 19. , f

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal inconnu.

Coquille ovale , transverse , subéquilatérale , parfaite- ment close; crochets bombés, peu proéminents, inclinés au-dessus d'une lunule lancéolée peu profonde. Charnière por- tant trois dents cardinales divergentes ; une dent latérale an- térieure , et en arrière trois ou quatre dents striées , graduel- lement décroissantes ; ligament extérieur étroit, allongé; deux grandes impressions musculaires écartées, ovalaires. Impres- sion palléale occupant le bord ventral dans la moitié antérieure de sa longueur, se contournant en une sinuosité large et pro- fonde ovalaire , dont l’extrémité supérieure gagne le muscle p'ostérieur, après une inflexion anguleuse.

SYNONYMIE GENERIQUE. Doiiax , Bastérot. Graieloupia , Desmoulins.

OBSERVATIONS. M. Bastérol a publié en 1825 un mémoire très inté- ressant sur la Géologie de$ terrains tertiaires du sud-ouest de la France, et il a décrit la plupart des fossiles qui sont répandus quelquefois en pro- fusion dans ces terrains. Ce mémoire fait partie du recueil publié par la Société d’histoire naturelle de Paris. Parmi les fossiles intéressants signalés à l’attention des naturalistes par M. Bastérot, se remarque, sous le nom de Donax irregularîs, une coquille bivalve qui a bien quelques uns des caractères des Don aces , mais qui en offre de tellement particu- liers, que M. Desmoulins a cru devoir la séparer, en créer un genre distinct , auquel il a consacré le nom du savant distingué qui , pendant

/

LES conques.

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toote sa vie, a recherché avec un soin minulieiix les espèces fossiles du bassin de l’Adour, et par la a mérité la reconnaissance de tous les amis de la conchyliologie et de la paléontologie. Le peu que nous venons de dire rappelle assez les travaux de M. Grateloup, auxquels le genre de M. Desmoulins a été dédié. Depuis la publication do M. Baslérot , un autre observateur, M. Lea, a trouvé parmi les fossiles de l’Amérique septentrionale une coquille qu’il rapporte au genre Graleloupia , et qui en offre la plupart des caractères ; malheureusement il en est quelques uns qui restent incertains parce que le savant naturaliste a négligé de les décrire et de les faire représenter.

Le genre Grateîoupia n’a pas été adopté par tous les zoologistes: les uns y ont vu un démembrement peu nécessaire des Donaces ; les autres , et nous étions du nombre , voulaient le confondre dans le grand genre Cythérée, et le rapprocher des Cyiherca corbicüla et autres espèces analogues qui ont quatre dents cardinales ; mais la forme particulière de la sinuosité palléale , ajoutée aux autres caractères de ces coquilles , en fait un genre nettement détaché de tous les autres.

On ne connaît jusqu’ici qu’un très petit nombre d'espèces dans le genre Grateîoupia ; mais comme elles appartiennent à des terrains ter- tiaires , dans lesquels les fossiles sont d’une conservation parfaite, il est possible de retrouver en elles tous les caractères du genre aussi facile- ment que sur des espèces vivantes. Les Grateîoupia connues sont des co- quilles ovales, transverses ou subtrigones subéquilatérales, ayant le côté postérieur un peu plus court et subtronqué obliquement; le côté antérieur est arrondi, large, elle bord ventral presque droit, présente une légère inflexion au moment d’arriver à l’extrémité postérieure. M. Desmou- lins, attachant à ce faible caractère une trop grande importance, avait pensé que le Grateîoupia doit faire partie de la famille des Tellines ; nous verrons bientôt d’autres caractères d’une plus grande valeur en- traîner le genre dans la famille des Vénus. Les bords sont simples et entiers , parfaitement joints lorsque la coquille est fermée ; ils sont plus épais et plus arrondis dans la longueur du bord antérieur.

La charnière des Grateîoupia a de l'analogie avec celle de certaines Cythérées , telles que le Cytheræa corbicüla , par exemple : ainsi on y trouve les dents cardinales des Cythérées, c’est-à-dire trois dents car- dinales régulières, une dent latérale antérieure , occupant la longueur de la lunule , et enfin , à la suite de la troisième dent cardinale , c'est- à-dire de la postérieure, se trouvent six ou sept dents graduellement décroissantes, irrégulièrement sillonnées. Ces dents s’engagent l’une dans l’autre , aussi exactement que les dents cardinales elles-mêmes, T. 1. U' PARTIE. '^7*

QUINZIÈME FAMILLE.

et par leur moyen la charnière acquiert un degré de solidité qui n‘existe pas au même degré dans les genres avoisinants. Les dents sériales, dont nous venons de parler, pourraient se comparer à celles des Arches. Elles sont obliques, rayonnantes, et elles accompagnent la nymphe dans une partie de sa longueur. Cette nymphe est longue et peu épaisse , donnant insertion à un ligament externe , comparable à celui des Cy- thérées. Cette charnière, dont nous venons de parler, est supportée par une lame cardinale d'une médiocre épaisseur, mais qui cependant s’a- vance au-dessus de la cavité des crochets.

Les impressions musculaires sont grandes et écartées; toutes deux sont comprises dans la région dorsale de la coquille et à peu près à égale distance de la charnière. L’antérieure est obliquement semi-lunaire ; la postérieure est subquadrangulaire : c’est un carré dont les angles sont obtus. Au-dessus de chacune de ces grandes impressions, et cachées au-dessous du bord cardinal, so montrent deux petites impressions, sur lesquelles s’attachaient les muscles rétractours du pied. L'impression paliéale va nous présenter quelques caractères remarquables qui , s'ajoutant à ceux que nous venons de signaler, contribuent à donner plus de certitude au genre. Cette impression se détache de l’extrémité antérieure et inférieure du muscle adducteur antérieur des valves ; de cette manière, cette impression musculaire est réellement en dedans de l’impression paliéale. Celle-ci descend obliquement en traçant une ligne courbe, comme si elle voulait sortir de la coquille vers le tiers posté- rieur du bord ventral; mais parvenue au voisinage du bord et très loin encore do l’extrémité postérieure , elle s’arrête subitement , se recourbe en dedans et circonscrit une sinuosité ovalaire , dont Taxe est oblique de haut en bas et d’avant en arrière. La ligne supérieure de la sinuosité n’aboutit pas directement à l'impression musculaire postérieure; elle passe au-dessous d’elle, s’arrête en s’élargissant sous forme d’une petite impression particulière, et enfin remonte perpendiculairement pour se confondre avec le bord postérieur de celte impression. Il résulte de celte disposition qvie le sinus palléal , au lieu d'être ouvert en arriére , comme dans la plupart des Mollusques siphonéS (Mye, Lutraire, Madré, etc.), est ici ouvert dans le tiers postérieur du bord ven- tral. Uar conséquent, le genre Grateloupia se rapproche réellement de celui desThetis, puisque les siphons, au lieu d’être dirigés dans le diamètre anléro postérieur do l'animal, sont très obliques à ce dia- mètre, mais ils le sont moins que dans les Thétis.

D’après l’ensemble des caraclères que nous venons d’exposer, il est évident que le genre Gnitehupin doit être conservé. Si maintenant

LES CONQUES.

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nous cherchons la place qu'il doit occuper dans^la méthode, nous lais- sant guider par l'analogie, nous serons nalurellemenl conduit à le rapprocher des Cythérées. Quoique par sa forme générale la coquille so rapproche de certains Donaces, particulièrement du Donax brasiliensis [Cnpse brasiliensis J Latnk. ), néanmoins la charnière emprunte la plu- part des caractères des Cythérées ; elle a une dent lunulaire , trois dents cardinales et cinq ou six petites dents sériales etintrantes, qui remplacent la dent cardinale postérieure. Si nous considérons maintenant les im- pressions du manteau et des muscles, nous ne leur trouverons, il est vrai, qu’une ressemblance éloignée soit avec celles des Donaces , soit avec celles dos Cythérées ou des Vénus. Et cependant ces caractères , en conGrmant le genre , contribuent â fixer sa place dans la famille des Conques.

Jusqu’ici nous ne connaissons que quatre espèces du genre Orale- ioxipia. Trois se trouvent dans les terrains tertiaires moyens des envi- rons de. Bordeaux et de Dax. La quatrième est de l’Amérique septen- trionale; elle provient des terrains tertiaires do l’Alabama, qui repré- sentent, à ce qu’il paraît, dans la série géologique, le second étage tertiaire des terrains de l’Europe, Elle a été décrite par M. Lea , sous le nom de Graleloupia Moulinsii. Les espèces de France sont le Orale- loupia donaciformis , la plus répandue et la seule citée ; le Graleloupia diflicilis [Donax difficilis , Bast.); la troisième ressemble par sa forme générale au Cijtheræa polita de Lamarck : nous proposons pour elle le nom 4e Graleloupia cuiieata.

Grateloupie donaciforme. Grateloupia donaciformh^ Desmoul. PI. 14. f. 18. 19.

Testa transversâ ^ ovaco-trigond , stibœquilaterd^ posùcè obliqué truncaldf nnCicè latiore retiiudatu^ lateraliler compressa ^ lœvigatd unibomhus parvis oppositis ; lunulâ depressa ^ ovnto-lanceoîatâ.

Donax irregidaris. Bastérol, foss. de Bord. p. 84. n” 4, pl. 4. f, 19.

Grateloupia donaciformis, Desmoiillns, Bull, de la Sor. linn. d.* Bord.

t, 2. p. 24 î* f. 1 à *1.

Broun, Lleli. t;fog. I. 2. p. 906. p!. 3;. f. 19.

Onili'loiip, Car. 7.00I. p. f>3.

Sow. Coii' li. niau. p. i55. f. 102.

Brftwu, Klom. of fos*!. Corjcli. p. 108.

Kang, Man. de Concli. p. 307.

Poliez Mirl». r»nl. des Moll, de üonai. t. 2. j». 197,

QUINZIÈME FAMILLE.

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Gtinllz, nrniid. p, 419, 420.

lïaLUc... Foî.sil^’ il Bordeaux rt h Dax.

Coquille transverse, ovale, snblrigone, presque équilatérale , ayant le côté postérieur tronqué à la manière du Donax brasiliensis , un peu plus court que l’antérieur ; toute la surface est lisse, polie, brillante, marquée de stries irrégulières d’accroissement; les crochets sont petits, opposés, rapprochés, à peine obliques; ils dominent une lunule peu étendue, nettement circonscrite, déprimée, ovale, lancéolée. Le côté antérieur est large, comprimé, arrondi; le postérieur termine en un angle obtus. Les bords sont simples, peu épais: l'inférieur est presque droit. La charnière porte trois dents principales sur la valve gauche ; elles sont étroites ; l’antérieure est parallèle au bord de la lunule, et se place dans la môme direction que la dent latérale ; les deux autres dents cardinales sont très rapprochées, parallèles et perpendiculaires. La valve droite porte également trois dents : l'antérieure est très petite et soudée au bord de la lunule; la dent moyenne est très grosse, trian- gulaire, subpyramidale; la postérieure est très mince et lamelliforme. En avant de ces dents cardinales se trouve une dent latérale antérieure comprimée, conique, très pointue au sommet ; en arrière, et continuant les dents cardinales , se montre la dent découpée et striée qui carac- térise le genre. La sinuosité palléale a une forme particulière dans eette espèce qui la distingue de toutes les autres; elle est ellipsoïde, un peu pointue au sommet, moins large que longue ; une ligne qui passerait par son axe aboutirait d'un côté à l'angle inférieur et postérieur des valves, et de l’autre à l’extrémité inférieure du muscle adducteur antérieur.

Les grands individus de cette coquille ont 57 millimètres de long et 38 de hauteur.

GENRE QUARANTE-NEUVIÈME.

CTTHÉRÉE. Ciffl/eren. (Lamarck). n. 1 8, f, 1 1 à 1 4, Pl. ig, f. 3 à g. PI. 20, f. i à 3,

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale , tranSverse ou subtrigone , ayant les lobes du manteau désunis dans toute la longueur du bord inférieur, terminés en avant et en bas par un bord profondément plissé et chargés de tentacules le long du

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bord postérieur. Deux siphons égaux en longueur, inégaux en diamètre , réunis jusque près de leur sommet ; leur ouverture garnie de tentacules simples et cylindratés ; pied robuste, assez épais, triangulaire; bouche médiocre, ovale, trans- verse. Palpes labiales , triangulaires , petites, subéquilaté- rales ; branchies larges, subquadrangulaires, inégales, plissées, réunies en arrière de la masse abdominale.

Coquille ovale , transverse, subarrondie ou trigone, épaisse, solide, le plus ordinairement lisse, couverte d’un épiderme corné transparent ; crochets plus ou moins saillants et inclinés au-dessus d'une lunule superficielle dans le plus grand nom- bre. Charnière portant trois dents cardinales inégales , diver- gentes et une dent latérale antérieure dans la longueur de la lunule. Deux grandes impressions musculaires ovales-obrondes ; impression palléale parallèle au bord ventral , se terminant en arrière en une sinuosité peu profonde , oblique , triangulaire ou subovalaire, réduite quelquefois à une simple inflexion.

SYNONYMIE GENERIQUE. Pectuuculus ^ Listei*. Tel- lina^ Lister. Chama^ Rumphius, d’Argenville, Gualtieri , Adanson. Vernis^ Linné, Schroeter, Gmelin, Chemnitz, Born, Pennant, Cuvier, Wood, etc. Mereirix , Lamarck (o/m), Gray, Schumacher. Callüia^ Callistoderma ^ Poli [pars], Trigona^ Megerle , Schumacher, Gray. - Aniigona^ Schumacher. Circe ^ Schumacher, Sowerby, Gray. Corbicula , Benson. Dione^ Gray.

OBSEiïVATiONs. Dès SCS premiers travaux sur la conchyliologie, La- marck sépara, sous le nom générique de Merelrix , celles des Vénus de Linné qui portent à la charnière une dent latérale antérieure. Quel- ques années plus tard, notre célèbre naturaliste à uu nom peu conve- nable substitua celui de Cythereaj qui depuis a été universellement adopté.

Inspiré par les travaux de Lamarck et de Cuvier, Koissy présenta, dans les Mollusques du Butfon de Soiinini, un arrangement métho- dique dans lequel il sut tirer le meilleur parti des faits et des idées les

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OÜINZIÈME FAMILi^E.

plgs récemment introduits dans la science. 11 rejeta les sous-genres de Cuvier, parmi lesquels se trouvait le genre Cythéréô de Lamarck , et il adopta le nouveau genre en lui conservant ses rapports naturels avec les Vénus. Quelques années plus tard , Lamarck créa la famille des Con- ques dans la Philosophie zoologique, dans laquelle, à côté dès Vénus , vinrent se ranger les Cythérées et les autres genres que ndus avons mentionnés en retraçant Thistoire de cette faniille.

Depuis sa création jusqu'aujourd’hui, le genre Cythérée a subi des changements analogues à ceux do la plupart des autres gepres de la classe des Mollusques. D’un côté, un certain nombre de zoologistes, entraînés par Texemple de Cuvier, conservent le grand genre de Linné , et se contentent de le partager en sous-genres qui, il faut l'avouer, sont loin d’ôtre égaux en importance. S’appuyant sur d’autres principes, les adeptes de l’école de Lamarck , exagérant les exemples du matlre, trahissent la malheureuse propension de diviser sans cesse les genres les plus naturels pour se créer le stérile mérite d’encombrer la nomen- clature d’une foule de genres inutiles. Entre ces deux tendances, égale- ment nuisibles aux progrès de la science, il y a une juste mesure, une judicieuse appréciation des faits qui ramènent à cette philosophie si féconde par laquelle se sont laissé guider les grands zoologistes, phares lumineux destinés autant à attirer vers eux le navigateur inexpérimenté qu’à éclairer le pilote plus habile. Immobiliser la science, comme ont voulu le tenter l’école linnéenne d’Allemagne et celle d’Angleterre à la fin du siècle dernier et au commencement de celui-ci, ce n'est pas en fixer les principes ; une science qui sans cesse fait des progrès ne peut être longtemps réduite à l’immobilité sans en ressentir de graves dom- mages, tandis qu’elle profite toujours de la stabilité de ses principes, quel que soit l’esprit d’innovation qui la domine passagèrement. Au reste , nous ressentons le contre-coup de cette immobilité trop long- temps prolongée. par un mouvement trop rapide que quelques personnes pourraient prendre pour un progrès, mais qui au fond n’est qu’une agitation à la surface. Ou s'amuse à créer des méthodes, des nomen- clatures, lorsqu’il y a tant de faits douteux à éclairer, tant de faits nou- veaux à découvrir, lorsque l'ombre de l’ignorance couvre encore de vastes étendues de la science. Observons , comblons les lacunes qui existent partout, c’est le seul moyen d’éviter les deux écueils sur lesquels la science vient alternativement échouer, l’immobilité et l'agitation.

L’examen que nous avons fait des genres les plus considérables de la famille des Conques abrégera beaucoup ce que nous avons à dire des Cythérées en particulier. Nous avons fait comprendre le peu d’impor-

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tance des caractères conchyliologiques des Vénus , des Pullaslra et des Cythérées, puisqu’ils se fondent insensiblement les uns dans les autres au moyen d’une série de modifications et de transformations graduées dans le plus grand nombre des caractères. H est résulté pour nous autrefois, et pour plusieurs autres conchyliologues, cette opinion que tous ces genres artificiels devaient rentrer dans le seul genre Vénus. Cette opinion ne peut subsister en présence des faits nouveaux dont l’histoire des Mollusques s’est enrichie , et ces genres , artificiels en apparence , sont zoologiquement naturels : nous l’avons démontré pour les Pullaslra et les Vénus , nous allons également en donner la preuve pour les Cythérées.

Les Cythérées sont des coquilles do formes variables. La plupart sont ovales, transverses, inéquilatérales; celte forme se modifie peu à peu, passe à la triangulaire , qui persiste particulièrement dans un groupe dont le Cijtherea corbicula peut donner une juste idée , et dans lequel se réunissent un assez grand nombre d’espèces. De cette forme triangu- laire on passe par degrés insensibles à une forme sublenticulaire. Le plus grand nombre des Cythérées sont lisses , polies , brillantes et ornées de couleurs aussi vives que variées. Leur surface extérieure est moins accidentée que celle des Vénus j il y a cependant des espèces , mais en petit nombre, qui sont, les unes striées, sillonnées ou lamelleuses transversalement ; les autres ont des stries ou des côtes longitudinales , divergentes et presque toujours bifides du côté postérieur. Le poli bril- lant qui se remarque sur le plus grand nombre des espèces do Cythé- rées est à l’existence d’un épiderme corné , transparent, au-dessous duquel la coloration conserve toute sa beauté. Il y a des espèces chez lesquelles l’épiderme est plus apparent; il est brunâtre, mais dans aucune il ne déborde le test. On peut dire d’une manière générale que dans les Cythérées les bords restent simples et sans crénelures; car il faut en excepter seulement le petit nombre de celles qui sont ornées de stries ou de côtes longitudinales. Ce fait n'est pas sans intérêt au point de vue de la paléontologie; car les crénelures des bords d’une coquille restent empreintes sur son moule intérieur , et dès lors il y a plus de raisons à ranger ces espèces fossiles à bords crénelés plutôt parmi les Vénus que parmi les Cythérées.

Quelques Cythérées sont bombées cl cordiformcs; celles-la ont les crochets assez grands. A mesure que les espèces s’aplatissent, les cro- chets diminuent, se rapprochent, s'opposent fun à l'autre, et dans les espèces lenticulaires ils se touchent , s’amincissent et se redressent. Toutes les Cythérées portent sur le côté antérieur une lunule plus ou

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moins f;rande, plus ou moins superficielle ; sa forme varie avec celle de la coquille: cordiforme dans les espèces bombées, elle est lancéolée dans les espèces aplalies. La surface interne n’est jamais nacrée; blanche dans le plus grand nombre des espèces, elle se nuance de violet , de pourpre , d’orangé, de brun dans celles des espèces qui ont cette sur- face colorée.

La charnière des Cythérées mérite une élude attentive, car c’est principalement d’après celte partie que le genre est caractérisé. Quoi- que cette charnière éprouve quelques modifications , elle est cependant constante dans le plus grand nombre des espèces : elle consiste en trois dents cardinales, divergentes, inégales, comme dans les Vénus, et de plus une dent latérale antérieure comprise dans la longueur de la lunule. Lorsque le paléontologiste n’a à sa disposition que des moules intérieurs , il est de la plus grande importance qu’il recherche dans les plis produits par l'empreinte de la charnière les traces de la dent laté- rale antérieure; c’est par sa présence qu’il peut décider du genre de l'espèce qu’il observe. II y a d’autres genres il existe aussi une dent latérale antérieure , mais elle a une position et une forme qui ne per- mettent aucune erreur. Déjà, en traitant précédemment du genre Vénus, nous avons rapporté ce fait intéressant do la disparition graduée de la dent latérale antérieure. Dans une série d’espèces choisies dans ce but^ on voit la dent latérale diminuer peu à peu et disparaître complètement après avoir laissé sur les dernières espèces de la série de très faibles vestiges de son existence.

La dent latérale antérieure des Cythérées n’occupe pas toute la lon- gueur de la lunule; elle est plus ou moins longue selon les espèces, quelquefois elle est comprimée, assez souvent elle est en cône, pointue au sommet; tantôt elle est tellement rapprochée des dents cardinales qu’elle semble se confondre avec elles, tantôt elle en est plus écartée. Les dents cardinales elles-mômes sont variables dans une certaine me- sure. Ainsi il existe un groupe considérable d’espèces vivantes et fos- siles chez lesquelles les deux dents antérieures de la valve droite sont très rapprochées et presque parallèles; la dent postérieure est alors épaisse et canaliculée. Dans un autre groupe d’espèces triangulaires , les trois dents cardinales sont égales et divergentes sur l’une et l’autre valve; dans quelques unes de ces espèces on voit apparaître en arrière, le long de la nymphe , un petit pli qui se transforme bientôt en une quatrième dent cardinale. C’est avec celte modification , qui n'est pas sans importance, que se présente la charnière du Cytherea corbicula et de plusieurs autres espèces voisines.

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Les impressions musculaires sont généralement grandes ; elles sont situées aux extrémités du bord cardinal et inégalement distantes de- la charnière: l'impression antérieure est ovalaire ; la postérieure , plus grande , est subcirculaire. Dans les espèces aplaties , pour lesquelles Schumacher a établi son genre Circé , les impressions musculaires sont situées plus près de la charnière; elles sont plus oblongues que dans les autres espèces , et leur grand diamètre est perpendiculaire à Taxe transverso de la coquille. Nous ne parlerons pas des petites impressions que laissent les muscles rétracteurs du pied ; elles sont semblables à celles des Vénus et occupent les mêmes places.

La sinuosité de l'impression palléalé est variable chez les Cythérées de la même manière que chez les Vénus ; c'est-à-dire qu’elle se pré- sente large et profonde dans certaines espèces , elle diminue peu à peu dans d’autres, et finit par disparaître entièrement dans le groupe des Circés de M. Schumacher. Il est bien important de constater ce fait dans l’intérêt des paléontologistes ; car ils ont l’habitude de rejeter des Vénus ou des Cythérées tous les moules qui présentent une impression pal- léale simple. 11 se pourrait cependant que quelques uns dépendissent des Cythérées ; mais pour s’en assurer, il faudrait avoir, en même temps que le moule intérieur, des impressions bien nettes de la charnière. La forme extérieure de la coquille ne laisse pas toujours prévoir l’étendue relative de la sinuosité palléalé. Les espèces ovalaires , par exemple , telles que les Cylkerea chione , erycina , maculala, etc., sont celles qui possèdent la sinuosité palléalé la plus grande. A côté de ces espèces , il semble que les meretrix , petechialis , lusoria , etc., ayant une forme ovale , trigone , intermédiaire entre ce groupe et le suivant , devraient avoir une sinuosité moins profonde; il n’en est rien : chez ces espèces la sinuosité a presque complètement disparu. Dans d’autres Cythé- rées beaucoup plus triangulaires, la sinuosité reparaît avec diverses modifications. De sorte que si Ton rangeait en deux groupes , abstrac- tion faite de tous les autres caractères, toutes les espèces ayant un sinus palléal et toutes celles qui n’en ont pas, les mêmes formes exté- rieures S0 retrouveraient dans l'une et l’autre série , et le fait deviendrait plus évident encore, si aux especes vivantes on joignait les fossiles.

Nous connaissons les animaux de plusieurs espèces de Cythérées ils se ressemblent et diffèrent entre eux de la môme manière que ceux des Vénus, et les différences se rencontrent sur les mêmes organes. Le manteau est bordé à sa circonférence d uii muscle orbiculaire fort large et peu épais, qui s’attache à la coquille sur la ligne de l'impression palléalé. Ainsi que dans les Vénus, le manteau déborde le muscle en

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SB partageant en deux bords distincts : le premier, plus court, ne dépasse pas le test, il s’applique sur lui, le sécrète ainsi que lepiderme; l’autre, membraneux, plus large, saillant au dehors, est découpé en larges lanières et contourné en plis profonds. Cette disposition rap- pelle tout à fait ce qui existe chez les Vénus. Chez le Cytherea cUione , en avant dans la longueur de la lunule , en arrière depuis l'extrémité du ligament jusqu’à l’origine des siphons, le manteau laisse échapper une double série de tentacules cylindracés, coniques, qui s’allongent graduellement. Dans le Cytherea venetiana , les tentacules dont nous parlons n'existent pas, le bord membraneux du manteau se continue a leur place. Les lobes du manteau sont désunis dans les Cylhérées de la môme manière quo dans les Vénus; ils laissent entre eux une large ouverture qui commence au bord inférieur du muscle antérieur et qui se termine à l’origine des siphons.

Les siphons sont plus ou moins considérables selon les espèces ; ils sont proportionnés à la grandeur de leur muscle rétracteur qui laisse sur la coquille la sinuosité palléale. Ainsi ces organes , dans le Cytherea chione Ql toutes les espèces du même groupe, sont grands, épais, et dans leur développement ils acquièrent une longueur égale aux deux tiers de celle de la coquille; ils diminuent dans leurs dimensions à mesure que leur muscle rétracteur s’amoindrit : cependant ces organes subsistent dans toutes les espèces , dans celles-là même qui n’ont plus de sinuosité palléale. Dans le Cytherea chione, les siphons sont joints dans toute leur longueur, si ce n’est à l'extrémité, ils se désunissent dans un très court espace; dans d'autres espèces , cette disjonction s’étend davantage; elle s’étend au quart de la longueur totale. Nous ne connaissons pas d'espèce celte disjonction soit plus étendue. Le point de la soudure des deux siphons se manifeste au dehors par une dépression longitudinale , de telle sorte qu’une section transverse repré- senterait un huit de chiffre. Le siphon branchial est toujours le plus gros ; il est aussi un peu plus long que l'anal, même dans les espèces les deux organes sont joints jusque tout près de l’extrémité ; les ouver- tures terminales restent parallèles , mais dans celles la disjonction est plus profonde , les ouvertures s'écartent en formant entre elles un angle presque droit. Quant aux tenîacules qui garnissent les bords des siphons, ils sont simples, coniques, et ils varient eu nombre et en grandeur, selon les espèces. Ainsi, dans lo Cytherea chione, un rang de grands tentacules naît du bord interne du siphon branchial ; un rang de tentacules plus courts et plus grêles s’élève du bord externe du même siphon, et ces tentacules sont espacés de manière que deux des petits

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occupent l'intervalle qui sépare chacun des grands. Dans le Cytherea venetiana, la disposition est à peu près la môme; il y a cette différence qu'un seul petit tentacule alterne avec les grands et que tous partent du môme bord, très mince dans celte espèce. Le siphon anal , chez le Cylherea chione , ne diffère pas de son congénère, seulement les tenta- cules sont plus petits sur une ouverture moins grande, tandis que dans ieCyth&'ea venetiatia le siphon anal est tout à fait semblable à celui des Vénus ; l'ouverture couronnée d'un rang de tentacules est prolongée en une calotte membraneuse percée au sommet.

Le pied est robuste chez les Cylhérées; il est triangulaire, lingui- forme, comprimé de chaque côté. Ses parois épaisses et musculaires embrassent la masse des viscères et la contiennent comme dans un sac. Des faisceaux fibreux plus épais, situés en avant et en arrière , donnent naissance à deux muscles rélracleurs, dont le tendon bifurqué s’attache à la coquille aux points que nous avons déjà désignés.

La bouche est petite, Irausverse , accompagnée.de deux lèvres larges, mais courtes , qui se dilatent do chaque côte en une paire de palpes labiales triangulaires, fort longues, étroites, et présentant sur leur surface interne un petit nombre de lamelles peu saillantes, très écartées, et n’occupant que les deux liprs de celte surface; l’autre tiers formant un bord interne entièrement lisse.

Les branchies sont semblables à celles des Vénus. Les feuillets externes sont plus petits que les internes; ceux-ci remontent jusqu’au bord an- térieur de la masse des viscères et se terminent en avant en une pointe courte et aiguë qui s’avance jusqu’à la bouche, en se glissant entre les palpes labiales. La surface des branchies est divisée régulièrement par un petit nombre de sillons obliques, peu profonds. En arrière les bran- chies dépassent un peu le bord postérieur de l'abdomen ; elles se joignent entre elles, et elles viennent se souder au pourtour membraneux de l’ouverture interne du siphon anal.

Trompé par l'apparence, Poli avait cru devoir réunir dans un même genre les Madrés et le Cytherea chione ; cette opinion , que l'on crut suffisamment fondée sur dos faits bien observés , trouva des approba- teurs , et ce fut elle surtout qui contribua à détruire chez certains naturalistes l’importance des caractères empruntés à la charnière et à la position du ligament. Des observations plus complètes ont fait justice de l’erreur de Poli: il suffit aujourd'hui de comparer attentive- ment les animaux des doux genres pour reconnaître en eux les carac- tères qui les éloignent dans deux familles distinctes ; il aurait même suffi d’apprécier à leur juste valeur les différences que présentent les

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organes branchiaux pour s’apercevoir que chez le Cytherea chione ils sont semblables à ceux du grand type des Vénus, tandis que chez les Madrés ceâ organes se rapprochent infiniment plus de ceux des Myes et de tous les autres mollusques portant de longs siphons.

Les caractères des Cythérées, tels que nous venons de les exposer, excluent naturellement de ce genre, non seulement lesDosinies de Sco- poli ou Arthémis de Poli, mais encore quelques autres coquilles que Lamarck, à l'exemple de Linné, a conservées dans le genre. C’est ainsi, par exemple, que le premier nous avons fait voir que le Cytherea tige- rina, Lam. (Fenus, Linné), est une véritable Lucine: cotte rectification a été adoptée depuis par tous les naturalistes. Il en est de môme du Cytherea leonina de M. Baslérot , voisine de la précédente ; elle doit faire partie du môme genre.

Les Cythérées sont des mollusques littoraux qui vivent de la même manière que les Vénus, et qui se trouvent avec elles dans les mêmes parages. Près de deux cents espèces sont inscrites dans les ouvrages de conchyliologie. Elles habitent particulièrement les régions chaudes de la terre; leur nombre diminue rapidement dans les régions tempérées, elles disparaissent complètement dans les pays septentrionaux. Aussi Ton peut dire d’un terrain tertiaire qui contient beaucoup de Cythérées , qu’il a été déposé pendant une température inlertropicalo.

Quoique les paléontologistes aient eu le genre Vénus pour so débar- rasser do toutes les espèces vénériformes qui les embarrassaient , ils ont cependant encore laissé un grand désordre parmi les Cythérées, et pour ce genre nous avons des nombres à peu près semblables à ceux des Vé- nus. Sur environ cent cinquante espèces mentionnées , et que nous avons examinées, nous eu conservons quatre-vingt-huit seulement, dont nous allons indiquer la distribution , et sur quelques unes desquelles nous aurons à faire quelques observations, Mais avant d’en venir à cette énumération, nous devons d'abord rappeler celles des espèces qui pa- raissent devoir être éliminées définitivement du genre.

Nous trouvons, dans le Catalogue de Keferstein, sept espèces de Cy- thérées citées autrefois par M. de Münster dans le terrain carbonifère. Ces espèces, à ce qu'il paraît, ont été abandonnées depuis par leur au- teur, car nous les avons vainement cherchées dans les ouvrages paléon- tologiquesdu savant naturaliste que nous venons de citer; elles ne sont môme pas rapportées dans la synonymie d’autres espèces. M. do Müns- ter aura reconnu plus lard leur genre, cardans le terrain carbonifère, il n’y a jusqu’ici aucune coquille que l’on puisse rapporter avec certitude aux Cythérées. Trois autres espèces du même auteur sont décrites et

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figurées dans l’ouvrage de Goldfuss, sous les noms de Cytherea (tp- tycfms, lamellosa, laîiplexa. Ces coquilles proviennent du lias ,, mais elles ne dépendent pas du genre dont elles portent le nom ; elles appar- tiennent au genre Cardinta, dans lequel nous les retrouverons plus tard.

Parmi les espèces du lias, on cite encore le Cytherea trigonellaris de Voltz : d’une forme triangulaire , celte coquille se rapproche des car- dinies, mais elle a le test plus mince, une lunule moins déprimée et non circonscrite. Nous avons reçu de Voltz lui-même, sous le même nom, un moule de celte coquille du lias supérieur de Gundershoffen ; nous y ob- servons les plis de trois dents cardinales, la trace d'une petite dent laté- rale. Un sinus palléal triangulaire profond prouve indubitablement que le moule en question est bien celui d’uneCylhérée ; mais ce moule nous paraît provenir d’une espèce distincte de celle Ggurée par Goldfuss sous la dé- nomination de Cytherea trigonellaris. De celte dernière nous ne con- naissons ni la charnière ni l’impression palléale; c’est pour cette raison que nous conservons du doute à son sujet.

11 existe dans les marnes supérieures du gypse, aux environsde Paris, une couche peu épaisse toute pétrie de coquilles bivalves très minces, Iransverses et subtrigones. M. Brongniart , qui le premier les a fait con- naître, les introduit avec doute dans legenreCythérée, en ajoutantqu’ elles pourraient être aussi bien des ünio, des Crassines ou des Cyrènes ; ceci dénote l’incertitude du savant géologue. A force de soins et de patience nous sommes parvenu à dégager l’impression bien conservée d’une charnière do ces coquilles: elle porte trois dents petites et divergentes^ point de dents latérales. En comparant cette charnière à celle des Glau- conomes, nous avons été entraîné à rapportera ce dernier genre les deux Cythérées des marnes supérieures au gypse de Paris. Par conséquent, ces espèces passant dans un autre genre , il deviendra possible de lais- ser des noms semblables à de véritables Cythérées.

Ainsi que nous venons de le voir, le genre Cythérée apparaît pour la première fois avec certitude dans le lias. L’espèce mentionnée précé- demment n’est pas la seule qui se trouve dans ce terrain, Voltz en cite deux autres à Gundersholfen; elles sont aussi dans d'autres localités de l’Allemagne: ce sont les Cytherea lucinia et cornea. M. de Münster en ajoute une quatrième sous le nom de Cytherea deltoîdea; mais ce nom ne doit pas lui rester, puisque Lamarck, il y a plus de quarante ans , l’avait consacré à une espèce des environs de Paris. En conséquence, nous proposons le nom de Cytherea liasina pour l’espèce do M. Münster décrite et figurée par Goldfuss.

Jusqu’ici le genre Cythérée n’est représenté que par une seule es-

59» quinzième famille.

pèce dans toute la formation de Toolile inférieure , et encore cette espèce nous laisse des doutes, car nous n‘en connaissons pas !a char- nière: c’est le Cytherea dolabra de M. Philips; elle pourrait être aussi bien une Aslarte qu’une Cythérée.

Nous avons une espèce non encore décrite du coral rag do Luc (Cal- vados): c'est une coquille lisse ayant une lunule ovale-lancéolée; sa charnière, entièrement dégagée, porte trois dents cardinales inégales et une dent latérale antérieure ; la forme générale de la coquille rappelle celle du Cijtherea nUidula des environs de Paris. Nous proposons pour cette espèce le nom de Cytherea velusta.

Une seule espèce est mentionnée dans les couches du terrain pori- landien de l'Angleterre : c’est le Cytherea rugosa de Sowcrby. Le nom de cette espèce est mal choisi, à cause de la confusion qui s’est établie au sujet du Venus ritgosa et de toûtes les autres espèces auxquelles ce nom a été mal appliqué. Quelques-unes d’entre elles ont été rapportées aux Cythérées, et c’est de que pourrait venir la confusion ; elle pour - rait être évitée en substituant le nom de Cytherea Fütoni à celui de rugosa.

Les Cythérées sont beaucoup moins abondantes dans la formation crétacée que les Vénus; il arrivera probablement une répartition plus égale lorsque la charnière de toutes les Vénus sera mieux connue : un certain nombre passera probablement parmi les Cythérées. Dix espèces seulement sont connues dans la craie, sept sont propres à l’Europe; aucune h’est citée dans le terrain néocomicn, presque toutes sont du grès vert et de la craie cblorilée. Le Cytherea parva, Sow., passe du gault d’Angleterre dans le sable vert de l’Allemagne. Les Cytherea plana et suhroîunda existent à la fois dans le grès vert d’Angleterre, de France et d’Allemagne. Les Cytherea /mco/tï(aet truncata ne paraissent pas sortir des sables verts d’Angleterre; elles ne sont pas mentionnées par les paléontologistes du continent. Le Cytherea caperata de Sowerby est Tune des espèces les plus citées et des plus répandues dans la craie chloritée en Angleterre, en Allemagne et en France. M. d’Orbigny rapporte h cette espèce le Cytherea uniformis de M. Dujardin ; mais il commet une erreur, et nous pensons que l’une et l’autre espèce doivent être conservées. Le Cytherea caperata est une coquille suborbiculaire très voisine des Dosinies; la surface est couverte de groé sillons obtus réguliers. Le Cytherea uniformis est subtrigone, et ses sillons sont beaucoup plus fins, plus serrés, moins réguliers. A ces espèces de l'Eu- rope nous ajouterons le Cythei'ea Herzogii d’Haussemann, trouvée dans la craie du cap de Bonne-Espérance , accompagnée du Cytherea râpe-

LES CONQUES.

59 1

rata d’après Goldfiiss. Le Cytherea excœvala de Morton est propre à la craie de l’Amériquo septentrionale. En6n , le Cytherea analoga de Forbes provient de la craie de l'Inde, et elle aurait, d'après ce na- turaliste, une très grande ressemblance avec le Cytherea nitidula du terrain tertiaire de Paris.

Les terrains tertiaires contiennent un grand nombre deCytbérées: c’est ainsi que nous en comptons quarante et une dans l’étage inférieur de ces terrains; et ce qui est très remarquable, c'est qu’il n’y en a au^ cune qui passe en identique dans l'étage moyen , quoique le contraire ail été souvent annoncé. Nous-méme avions admis autrefois une seule exception , nous avions cru retrouver à Dax et à Bordeaux le Cytherea fîuberycinoides du bassin de Paris; nous avons reconnu depuis des ca-- raclères constants qui séparent en deux espèces ce que nous avions pris pour des variétés locales d'un même type.

Lorsque, en 1830, nous avons publié nos tableaux des espèces ana- logues vivantes et fossiles des terrains tertiaires de l’Europe, nous avons considéré comme contemporains des couches inférieures du bas- sin de Paris de très vastes dépôts nummulitiquos des Pyrénées et des Alpes. A cette époque, le terrain nummulilique en question était classé dans la craie par tous les géologues. Guidé par les faits que nous avait révélés l'étude des fossiles et de leur distribution, nous avons persévéré dans notre opinion , certain que nous étions qu'elle serait jusUliée lors- que l’étude de ces terrains serait plus avancée. Depuis quelques années la géologie a répandu de nouvelles lumières sur la question , et à me - sure quePexamen s'approfondit, on reconnaît l’exactitude de notre opi- nion ; les terrains crétacés ont été reconnus et limités avec plus de pré- cision, et pourtant on les trouve nettement séparés des terrains num- mulitiques qui les recouvrent. Aujourd’hui les faunes des deux terrains sont mieux connues, et leur comparaison en démontre la profonde sé- paration. Nous Pavions annoncé, au reste, en afûrmant alors, comme acluellernent encore , qu'aucune espèce crétacée ne passe en identique dans le terrain tertiaire inférieur. Les Cythérées des terrains nummu- iitiques sont différentes de celles de la craie , et cependant elles ne sont pas semblables à celles du bassin de Paris. Elles sont au nombre de trois: ce sont les Cytherea rabica et ciistugensis de M. Leymerie, et Ver- neiiilU de M, d’Ârchiac. Les deux premières caractérisent les terrains nummulitiques des corbières, la troisième ceux de Biaritz.

En ajoutant aux espèces que nous avons décrites celles qui ont été découvertes depuis la publication de notre ouvrage sur les fossiles des environs de Paris, le nombre des Cythérées fossiles s’élève actuelle-

OinXZIEME FAMILLE.

ment à vingt-neuf. Plusieurs d’entre elles méritent une mention par- ticulière.

I” CyUwrea obliqua, Desh.

M. Sturt a constaté un fait bien remarquable pendant son voyage à la Nouvelle-Hollande. Il a recueilli des fossiles d'un terrain tertiaire, et parmi eux il s’en est trouvé plusieurs identiques avec ceux du bassin de Paris , entre autres le Cytherea obliqua, qui se montre en même temps dans les sables inférieurs du Soissonnais, dans l’argile de Londres et à la Nouvelle-Hollande.

Cytherea pusiîla, Desh,

Celte petite espèce ne se rencontre jamais dans le bassin de Paris, hors des couches des sables inférieurs d’Âbbecourt, de Laon et du Sois- sonnais; elle a été récemment découverte dans les argiles de Barton en Angleterre. M. Nyst la mentionne aussi en Belgique, d’après M. Galeolli, qui lui-même no la cite qu’avec doute.

Cytherea elegaiis, Lamk.

M. Pusch mentionne celte espèce parmi les fossiles de laPodolie; nous soupçonnons une erreur dans la détermination. Cependant M. Gra- teloup la cite aussi dans le bassin de Bordeaux; nous l'avons vainement recherchée dans les collections les plus complètes : nous y avons vu une espèce voisine , mais toujours distincte. Le véritable Gy i/terea clegfuîis commence avec le calcaire grossier et remonte dans les grès marins moyens ; elle existe également dans le bassin de Londres.

Cytherea semisulcata, Lamk.

Celle-ci se trouve à la fois dans le bassin de Paris , dans celui de Va- logne, ainsi qu’aux environs de Londres. M. Pusch la trouve aussi en Podolie, mais nous n’admettons ce fait qu’avec la plus grande réserve.

5” Cytherea tellinarîa, Lamk.

Elle est commune aux bassins de Londres et de Paris. M. Nyst la retrouve avec doute en Belgique ; enûn M. Grateloup la mentionne à Saucats, près de Bordeaux. Nous ferons à son sujet la même observation que pour l’espèce précédente; nous ne l’avons jamais vue de cette localité.

6” Cytherea sulcataria, Desh.

Il est évident pour nous que deux espèces ont été confondues avec la nôtre. Nous avons eu sous les yeux le seul exemplaire connu de l’es- pèce belge décrite et figurée par M. Nyst; elle est très différente de celle de Paris, M. Hébert , qui s’occupe avec un soin louable des fos- siles des sables supérieurs du bassin de Paris , a reconnu avec nous les caractères distinctifs des deux espèces , et a proposé de donner le

LES CONOdCS-.

nom de Cytherea BosquetÀ, ou sulcataria de Nyst. Quant à la coquille figurée sous le même nom dans l’ouvrage de Goldfuss . elle est tellement différente de celle de Paris, qu'il faut supposer de la part du savant naturaliste une erreur matérielle que nous ne pouvons nous expliquer. A celle espèce de Goldfuss nous proposons d'appliquer le nom de Cytherea sukifeï'a.

T Cytherea suberijcinoUks^ Desh.

Les observations que nous venons de faire sur l'espèce précédente pourraient s’appliquer à celle-ci ; car le Cytherea siiherydnoides de M. Goldfuss est une espèce différente de celle de Paris. Nous n’avons pas la même certitude à l’égard de celle de U. Nyst; elle est au moins une variété à sillons plus gros. Le Cytherea suberycinoides se trouve en An- gleterre r en Belgique et aux environs do Paris ; elle passe des calcaires grossiers dans les grès marins moyens, elle rencontre une -espèce voisine que nous considérions autrefois comme une simple variété. La constance de ses caractères nous détermine à la séparer sous le nom de Cytherea Heberti. L’espèce de -Westphalie , figurée par Goldfuss , devient pour nous le Cytherea corriigata.

8” Cytherea poîita ^ Lamk.

Espèce intéressante qui se trouve dans les sables inférieurs du Sols- sonnais , passe dans le calcaire grossier et remonte dans les grès marins moyens; elle existe aussi à Valognes et en Belgique. MM. Dubois de Montpéreux et Pusch ont cru retrouver cette espèce en Podolie; mais d'après la figure du premier de ces naturalistes, nous croyons qu’ils ont pris pour elle de jeunes individus du Cytherea affinis.

9” Cytherea nüidula ^ Lamk.

Elle a. été l’occasion d’un assez grand nombre d’erreurs. D’abord Lamarck, Defrance, et nous-môme avons confondu avec elle une espèce du calcaire grossier toujours plus mince et plus bombée. Nous lui qyons donné le nom de CythoxHi parisiensis. L’espèce de Paris , ainsi rectifiée , se rencontre depuis les sables inférieurs jusque dans les sables marins moyens ; elle existe aussi à Valognes, en Belgique et. en Angfeterre, mais elle n’est pas aux environs de Bordeaux, comme l'ont cru MM. Bastérot et Grateloup ; ils ont pris pour elle de joimes individus d'une coquille à laquelle M. Agassiz a donné le nom de Cytherea La- marckîi. Le Cytherea nitidula de Goldfuss est très différente de toutes celles de Paris et de l’espèce de Bordeaux ; elle doit donc recevoir un autre nom , et nous proposons celui do Cytherea decipiena. Ce natura- liste commet une autre erreur en rapportant, dans la synonymie de son espèce, le Cytbei'ea transreraa de Sowerhy, parfaitement distincte par T. l. ‘1^ PAhTIK. ^8'

r> cj/f 0 U 1 N / 1 È M K F A M I M. E .

tous ses caractères. Dan.s sou mémoire sur les fossiles des environs de Magdebuurg,- inséré dans la Pakeonlographica de Meyer, M. Philippi cite aussi un Cytiierm nitidida. Mais ost-ce une espèce distincte de louLes les autres? ou bien à laquelle des nilidula devra-t-on la rap- porter? Il est à présumer qu'elle appartient à l'espèce de Goldfuss. Enfin M. Pusch mentionne aussi le nilidula dans les terrains tertiaires de la PodoÜe; mais celte citation n’étant accompagnée ni de la descrip- tion ni do la figure de la coquille, nous ne pouvons avoir d'opinion à son sujet ; cependant nous devons observer que Jusqu'ici le nilidula véritable ne s'est pas rencontré dans l'étage tertiaire moyen ‘auquel ap- partient le terrain tertiaire de la Podolie.

■10® Cylherea lœvigala^ Lamk.

Celle-ci réclame aussi une attention toute spéciale , car elle a été mentionnée dans deux terrains tertiaires, quoique par le fait elle dé- pende uniquement du plus ancien de tous, de celui de Paris. Elle y est répandue avec une extrême abondance, depuis les sables inférieurs jus- que dans les sables siiporiours de Fontainebleau. En passant des cou- ches inférieures aux moyennes et aux supérieures, elle a éprouvé des variations remarquables. Ainsi, dans les sables inférieurs de Brachcux. d’Abbecourt , de Guise-Ia-Molhe , de Soissons, etc., elle est petite, étroite et irrégulièrement sillonnée; dans le calcaire grossier, elle reste étroite, mais acquiert un volume beaucoup plus considérable; en pas- sant dans les grès marins moyens , elle s’épaissit et s'élargit sensible- ment, surtout du côté antérieur; enfin, parvenue dans les sables de Fontainebleau, elle s’élargit davantage encore et devient plus ovalaire; c’est avec cette dernière variété que M. Mérian a fait son Cylherea sptendkla. Pendant ces transformations la charnière reste constamment la môme; la lunule, lancéolée, circonscrite par une strie étroite, ne se modifie pas; les impressions musculaires conservent leur forme et leurs rapports ; la sinuosité palléale, étroite et obtuse au sommet, est presque toujours obliquement tronquée dans les individus des sables supérieurs, mais cette troncature se retrouve , quoique plus rarement, chez les individus des autres couches. La distribution géographique' du Cylherea lœvigala n’est pas moins intéressante. Elle Se trouve à Valo- gnes, dans le bassin de Londres, dans celui de la Belgique; elle se rencontre aussi en Westphalie, à Bunde, à Alzey près de Mayence; enfin, elle est citée dans le sud de la Nouvelle-Hollande par M. Sturt. Brocchi a racnlionrié respôco dans le terrain subapennin ; mais il a été reconnu par nous et par M. Sismoiula, que' l’espèce du Plaisantin est très différente de celle de Paris : elle a reçu le nom de Cylherea BonellH.

LES CÜN(JÜES.

595

1 1'^ Cytherea citneaUi, Desh.

Petite espèce qui caractérise la partie supérieure du calcaire grossier au moment il commence à se môler aux premières couches des grès moyens. Goldfuss la cite aux environs de Cassel; mais, d’après la figure môme de ce naturaliste , l'espèce qu’il nomme ainsi est diffé- rente de la nôtre: nous proposons pour elle le nom de Cytherea cunet- formis.

Indépendamment des vingt-neuf espèces qui existent dans le bassin de Paris, il y en a encore dix autres qui appartiennent à d’autres bas- sins du même âge. Sept d’entre elles ont été découvertes à Bunde, à Cassel, à Kreusnade, à AIzey, à Kleinspauwen , dans des sables fossili- fères qui paraissent correspondre au grès de Fontainebleau ; quant aux trois autres, ce sont les Cyllurea Solandri, iransversa et lenuislria de Sovverby. Elles sont propres au bassin de Londres.

L’étage tertiaire moyen est de beaucoup moins riche en espèces de Cythérées que le précédent ; nous en comptons douze seulement, parmi lesquelles quatre passent dans Fétage supérieur , et de plus nous appel- lerons l’attention sur une de ces espèces qui, sans se montrer dans l’é- tage supérieur, a encore son représentant dans la nature actuelle. Nous aurons aussi à présenter quelques observations au sujet de quel- ques unes des Cythérées qui caractérisent les couches dont il est question.

Cytherea Daboisii, Andrzej.

M. Dubois, dans son ouvrage sur la Wolhynie et la Podolie, avait considéré comme analogue au Cytherea chione de Lamarck une espèce qui en est effectivement voisine. M. Grateloup, en inscrivant la même espèce dans son Catalogue zoologique j l’attribue aussi au Cytherea chione. M. Pusch lui trouve plus de ressemblance avec le Cytherea erycinoides., et il assimile les deux espèces. Le fait est que la coquille de Podolie et de Bordeaux so distingue très bien de toutes ses congé- nères : c’est ce que M. Andrzejouski a bien compris, et il lui a donné le nom de Cytherea Duboisii , qui devra être conservé.

Cytherea a//ims, Duj.

Espèce très rapprochée du Cytherea chione, mais qui en reste tou- jours distincte. Nous pensons que c’est elle qui a été découverte en Podolie par MM. Dubois et Pusch, et qui en ont décrit les jeunes indi- vidus sous le nom de Cytherea polila. Si cette supposition n’est pas fondée, l'espèce de Podolie devra recevoir un nom nouveau; car elle n’est pas le poJita de Lamarck, comme nous l’avons déjà dit.

38*

QUINZIÈME FAMILLE.

V Cytherea nitem, Andrzej.

Il est a regretter que les naturalistes de- la Russie n'aienl pas com- plété l'ouvrage de M. Dubois. Beaucoup d’espèces sommairement dé- crites auraient besoin d’être soigneusement figurées; ainsi le Cytherea superha de M. Eichwald, d’après la courte description qu’il en donne, paraît la môme que le Cytherea nilens d’Andrzejowski. Mais comment s*assurer si ces espèces sont identiques ou différentes en Tabsence de documents suffisants?

Cytherea undala, Bast.

Jusqu’ici nous ne connaissons cette espèce que dans le bassin de Bordeaux. M.Goldfuss a cru la retrouver à Bunde, mais il s’est trompé. La figure qu’il donne de sa coquille le prouve; l’impression palléale est fort différente. Celte widala de Goldfuss devra donc recevoir un autre nom , et nous proposons celui do Cytherea intermedia.

Cytherea Lamarch'iij Agass.

C’est cette espèce de Bordeaux et de Dax que M. Bastérota confondue avec le nitidula des environs de Paris, erreur que nous avons relevée précédemment. M. Agassiz en commet uneautre que nous croyons utile de signaler. Ce savant naturaliste croit que c’est la coquille de Bordeaux rapportée par Lamarck au Cyprina islandicoides , mais il n’on est rien. La coquille de Bordeaux citée par Lamarck est beaucoup plus grande, et nous la rapportons au Venus umbonaria; elle n’est pas du genre Cy- thérée.

Nous aurions encore à mentionner deux espèces dans l’étage tertiaire moyen. L’une d’elles a son analogue vivant et ne passe pas dans les ter- rains quaternaires ; c’est le Cytherea erycina\ l’autre a également son analogue vivant , mais elle remonte dans l’étage tertiaire supérieur. Toutes deux seront citées un peu plus tard.

Le crag d’Angleterre et de Belgique renferme sept espèces. Les Cy~ therca filosa et lenticula , S. Wood, sont propres au crag d'Angleterre ; le Cytherea chionoideSj Nyst, ne se trouve qu’en Belgique; deux autres espèces, sulcala et trigona, sont communes aux deux pays; enfin, les deux autres espèces, Cytherea chione etrudis, passent dans les terrains supérieurs, et ont leur analogue vivant. Elles seront comprises dans une liste spéciale.

Neuf espèces seulement nous sont connues dans les terrains tertiaires supérieurs de l’Europe. Quatre de ces espèces sont éteintes et n’ont plus de représentants dans la nature actuelle : ce sont , les Cytherea Bunellii^ pedemontanaj fragilis et puello. Les trois premières sont

LKS CONOUKS, 5j)7

de rUalie, les deux autres sont de la Sicile. Nous avons maintenant à examiner celles des espèces dont les analogues vivants nous sont connus.

r Cytherea erijcma, Lamk'.; ÎVnws, Lin.

Vivante dans les mers de l’Inde, à Java , à Amboine, la Nouvelle- Hollande, etc.

Fossile à Bordeaux, à Dax. en Piémont, à Asti. M. Nyst la cite avec doute en Belgique.

Dans les tableaux-que nous ayons publiés à la fin des Principes de géologie de M. Lyel!, réédition, nous avons regardé comme parfaite- ment analogues les Cytherea erycina et cri/cîno/des de Lamarck ; un nou- vel examen sur un plus grand nombre d’individus vivants et fossiles nous confirmé dans notre première opinion. Il semble que Lamarck, en imposant aux individus fossiles un nom particulier [Cytherea enjcinoides)y a voulu en faire une espèce à part; mais on serait<ians l’erreur. Au contraire, Lamarck considère les fossiles de Bordeaux et d’Italie comme parfaitement analogues à l’espèce vivante. M. Defrance ne paraît pas avoir partagé la manière de voir de Lamarck, puisqu’il propose pour les individus de Bordeaux le nom de Cytherea burdiyalensis. M. Agassiz a étudié de nouveau la question dans son mémoire intitulé : Jcouo(/mp/tîe des coquilles tertiaires réputées identiques avec les espèces vivantes , etc. Nous regrettons que M. Agassiz n’ait point étendu ce travail utile et consciencieux; il estfAcheux qu’il Tait entrepris loin d’un grand centre scientifique, tel que Londres ou Paris : il aurait eu à sa disposition des matériaux qui lui ont souvent manqué et par l’étude desquels il aurait modifié son jugement. Pour nous borner, quant à présent, à l’exemple qui nous est utile, nous voyons M. Agassiz conserver les deux espèces ; cependant il avoue qu’elles ne diffèrent en rien dans leurs caractères les plus essentiels, cliarnière, impression musculaire, impression palléale, accidents extérieurs, lunule, corselet, ligament, sillons, etc. Mais, ajoute cet observateur, il y a de légères différences dans la forme géné- rale, et c’est d’après cela sans doute que le savant naturaliste conserve les deux espèces : l’une est un peu plus ovoïde que l’autre, et c’est tout. Mais cela est-il suffisant pour maintenir deux espèces? Nous disons non ; et notre négation repose sur des faits et sur des analogies. Si nous con- sultons l’analogie, nous devons d’abord poser cette question : Quelle est l’importance de la forme générale comme caractère spécifique? Nous l’avons déjà dit, et nous le répétons, ce caractère n’a de valeur qu’autant qu’on le trouverait invariable, que tous les individus d'une même espèce conserveraient exactement la même forme. Celte fixité absolue existe- t-elle? Nullement. Plus vous assemblez d’individus, plus vous recon-

ODINZIEME FAMILLE.

598

naissez de variations dans la forme générale. Cette variation ne dépasse pas certaines limites, mais elle est tellement incontestable que nous ne connaissons pas dans le type des Vénus une seule espèce qqi soit sous- traite à celte loi générale de variation, dans la forme. Or la nuance à laquelle M. Agassiz s’arrête se trouve justement comprise dans cette limite <les variations spécifiques. Aussi pour nous, quand mémo nous n’aurions. sous les yeux que les individus figurés par M. Agassiz , nous n’hésiterions pas à les réunir en une seule espèce. Dans une discussion comme celle-ci, il ne nous suffisait pas do nous arrêter aux inductions par analogie; nous avons consulté les faits, et ils sont venus confirmer notre manière de voir. Et, en effet, les formes varient aussi bien dans, les coquilles vivantes que dans les fossiles, et tendent à se confondre par une double série de modifications.

Cytherea albina ? Lamk.

Vivante au Sénégal , fossile à Bordeaux, à Dax et dans les faluns de la Touraine.

Nous avons du doute sur Tidenlité de notre espèce avec celle nommée Cytherea albina par Lamarck. Celte dernière a cependant été figurée par M. Delesserl dans son précieux recueil ; mais dans la figure le sinus palléal est simple, tandis que dans notre coquille il est étroit et profond. Nous ne trouvons non plus aucune mention de notre espèce à l’état fossile; et comme elle est très commune à Saucats, il est à présumer qu’elle est du nombre de celles qui ont été confondues avec d’autres, car M. Grateloup n’aurait pas manqué de l’inscrire dans son Catalogue zoologique. Quoi qu’il en soit, le fait important que nous voulons signaler, c’est la parfaite identité qui se montre èntre l'espèce vivante du Sénégal et les individus des localités que nous avons citées précédemment.

Cytherea chionc, Lamk.; Kenws, Linné.

Espèce commune dans l’Océan européen, dans la Manche, dans toute la Méditerranée et au Sénégal.

Fossile en Italie, en Sicile, en Morée, en France, à Perpignan et dans le crag d’Angleterre.

Cette espèce , comme le Cytherea erycina , a été le sujet de quelques erreurs. Il est certain, par exemple, que l’espèce de Wolhynie à laquelle M. Dubois donne ce nom méritait d'être distinguée, ainsi que Fa fait M. Andrzejouski. 11 y en a une autre à laquellle M. Agassiz propose d’imposer le nom do Cytherea lœvis. C'est à celle-là qu’il rapporte le chione de Brocchi, insinuant par que le véritable chione ne se trouverait pas dans le terrain subapennin. Nous pensons que pour cette espèce, ainsi que pour l’erycma, M. Agassiz n’a pas eu à sa disposition des matériaux

LES (;o>;l>les.

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suffisants; car sur huit à dix individus du Ctjtfwrca chione de la Médi- terranée, mais recueillis dans des lieux différents, il y en aura au moins un, quelquefois plusieurs, qui offriront tous les caractères du Ctjtherea iœvis, c’est-à-dire qu’ils auront sur le côté antérieur ou sur le posté- rieur des sillons distants plus ou moins saillants. Quant aux autres ca- ractères empruntés à la charnière, aux impressions des muscles et du manteau, il y a une ressemblance exacte entre tous les individus vi- vants, et si l'on compare entre eux un grand nombre d'individus fossiles, on leur trouvera les mêmes variétés; enlin, la comparaison des deux séries prouvera qu'elles appartiennent à un seul type spécifique, con- servant son unité dans sa variabilité assez restreinte.

Quelques naturalistes ont cité le Cytherea chione dans les mers du Brésil et sur les côtes de la Martinique. Nous avons des individus de ces localités : ils diffèrent peu en apparence du chione^ mais ils s’en dis- tinguent constamment par la charnière , la grandeur et la forme de la sinuosité palléale. Ainsi, le Ctjtherea chione est une espèce européenne , qu'on la considère à l’état vivant ou à Télat fossile. Elle a été mentionnée dans les étages moyen et supérieur du terrain tertiaire. Elle existe en effet dans le crag , d’après M. S. Wood; néanmoins son abondance dans l’étage tertiaire supérieur la rend propre à le caractériser. Il existe dans les environs de Bordeaux et dans les faluns de la Touraine une espèce très voisine de celle-ci. M. Dujardin a reconnu entre elles des différences constantes, et il a désigné l’espèce en question sous le nom de Cytherea affims. Si les observations précédentes sont fondées, nous ne devons pas accepter le Cytherea chione tel que l’admet M. Bronn dans son Lethea geognostica; une partie de la synonymie doit être re- jetée, et la distribution de l’espèce subit par une modification impor- tante, car elle reste dans les terrains supérieurs, et ne descend plus dans l’étage moyen.

Cytherea rudis, Poli (venetiana ^ Larak.).

Vivante dans toute la Méditerranée.

Fossile en Sicile, eu Italie , en Touraine et dans le crag d’Angleterre et de Belgique.

Actuellement confinée dans la Méditerranée, cette espèce occupail autrefois une bien plus vaste étendue ; elle s'avançait beaucoup plus vers le Nord, puisqu’elle est fossile en Belgique et en xVngleterrc. Ce fait, ainsi que plusieurs autres qui ressortent des renseignements que nous inscrivons dans cet ouvrage, prouve que la température était plus élevée qu’aujourd'hui dans les lieux sont actuellement déposés les crags d'Angleterre et de Belgique.

«jüiNziEMK Famille.

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Nous l’estiliiuiiri à celle espèce son premier nom, que Lamarck n’au- rail pas di\cbaugef, et nous ajoutons à sa synonymie le Gytherea cycla- diformts do M. Nysl: nous avons sous les yeux cette dernière espèce, et elle ne diffère en rien de son type vivaht.

0“ Cijlherca minima, Montagu.

Vivante dans l’Océan d’Europd, la Méditerranée.

Fossile en Sicile, en Podolie et dans le crag d’Angleterre.

Sous le nom que nous venons d’inscrire, Montagu a décrit le premier cette petite espèce de CytEérée. M. Scacchi, en la découvrant dans le golfe de Naples , la crut nouvelle , et lui imposa le nom de Cylherea Cyrilli, qui fut presque géncraleiïient adopté*. Entin M. Andrzejouski, Payant observée à l’état fossile dans les sables de la Podolie , crut voir en elle une Aslarté à laquelle il donna le nom d'Astarte Puschii. M. Phi- lippi, dans le premier volume de son E numération molluscorum Siciliœ, la crut également nouvelle, et la nomma Gytherea apicalis, nom qu’il a abandonne depuis.

6“ Cylherea multilamella, Lamk.

Vivante.... dans la Méditerranée*?

Fossile eu Sicile, en Italie, à Pile do Rhodes, en Céphalonie, dans 1 étage tertiaire supérieur.

A Vienne, en Podolie, dans l’étage tertiaire moyen.

Nous possédons l’analogue vivant du Cytherea multHamella de La- marck; malheureusement nous ne savons do quelle mer il provient ; nous le soupçonnons de la Méditerranée, parce que l’espèce se retrouve jusque dans les terrains les plus récents sortis de cette mer.

Nous avons vu, dans notre examen du I Vnus ruyosa^ la confusion qui s'est établie au sujet de cette espèce. Cette coquille, portant à la char- nière une dent latérale antérieure, doit venir se ranger parmi les Cy- thérées, et le premier nom qu’elle a reçu est celui que lui a imposé Lamarck, et qui devra lui rester. Nous avons sous les yeux des échan- tillons de toutes les localités que nous citons , et nous avons par la preuve de l’apparition de l’espèce dans Pétage moyen des terrains ter- tiaires, de son passage dans Pétage supérieur, et de sa persistance dans la nature actuelle. Au reste, plusieurs des espèces mentionnées précé- demment se trouvent dans de semblables conditions,

7" Cytherea gigantea, Lamk.

Vivante dans le golfe du Mexique.

Fossile dans les terrains tertiaires du sud de l'Amérique septen- trionale.

LES CONQUES. 6oi

Nous' n'avons pas vu des individus fossiles de celle espèce, nous la rapportons ici d’après les indications de M. Morton.

Un assez grand nombre d’espèces de Cÿlhérées ont été signalées dans les terrains tertiaires de l’Amérique septentrionale. Nous en relevons quatorze ; il y en a probablement davantage. Nous ne connaissons pas leur distribution dans les couches dans l'ordre de leur superposition.

1. Cythérëe fauve. Cytherea chione, Lamk.

PL 19. f. 4. 5.

C. Testa ovato-transversâ^ suheordata^ Icevigatà, fulvâ snbradiatâ ^ lul apicem maculatâ ; lunuîâ ovntO’-lanceolatn ^ nibro-îividâ; anticè posticève obsolète suîcatii; siriii pallii lato, adjàpicem coarctato ^ acumiifaco.

Lister, Concli. pl. abi). f. io5?

Bonan, Recr. a* part. f. 64, 65.

Gualt. Ind. Test. pi. 86. f. A.

D’Arg. Couch, pl. a4. f. C,

yetms chione, Linné, Syst. liai, éd, 10. p, 686. 160,

Id, Mus. Ulcic. p. 5oo. n” 58,

Uegenf. Conch. pl. 8. f. 17.

Linné, Syst. nal. èJ. la. p. n“ laS.

Xnorr, Vergn. t. 6. pl. 4. f. i.

Ginanui, Oper. posl. l. a, pl. aa. f. 148.

Da Costa, Brith. Concli. p. 184. pl. 14. f. 7, Pectunculus major, y enns chione, jBorn, Test. Mus. p. 63.

Id. Groiiov. Zoophyl. p. 269. n'^ 1145.

Peniiaut, Brit. Zool. l,. 4. p. 206. pl. 54. f 2.

Id. Chemn. Conch. t. 6. p. 345. pl, 3a. f. 843.

Id. Sclirot. EiuL t, 3. p, 124. 11“ 14.

Id, Gniel. p. 3272.11® 16. yarietatibus exiliisis.

Fav. Conch. pi. 47. f- B,

Poli, Testac. Sicil. t. 2. pl. 20,

Encycl. méth. pl. 266. f. i.

yenus chione» Douovan, Brit^ shells, t. i, pl. 17.

Li, Moiitagu, Test. Brit. p. ii5.

Wood, Liti, Traiis. l. 6. pl. 17. f. r, 2.

Id, Mat. et Rack. Lin. Traus. t. 8. p. 84.

Dillw. Cat. t. .1 . p. 178. 45.

Cytherea chione, Lamk. An, s. vert. t. 5. p. 566, 22.

QUINZIÈME FAMILLE,

f 'cnusfativi;, Blainv. Malac. pl. 74. f. 5.

Risso, Eurnp. niérid, t, 4. 354= 9^5.

Cytherea chione, Turlon, Conch. Dicl. p.

Jd. Turtoii, Coucli. Brit. p. 160. i. pl. 8. f. 11. frémis chione, Gerv. Cal. des Mol!, d^e la Manche, p, aS. n“ C. Cytherea chione, Payraud. Cat, des Moll, de Corse, p. 47. 77. Wood, Ind. Test, pl. 7. l.,44.

Coll, des Cil, Cal. des Miill. du FitiisU p. 22, r.

Oesh. h!ury. luélh. Vers. t. 2. p. 5G. ii.

Oesh. Expéd. sc. de Morée. Zool. p. 96. n” 42.

Michaud, Cat. des coi|. d’Alger, p. 44, n'’ t.

Desh. dans Latnk. An. s. vert. éd. t. 6. p. 3o5. aa.

Scacchi, Cat. Coiich. reg. Neap. p, 7.

Marav. Mém. pour Phist. nat. de la Sicile, p. 76. 16.

Philippi, Emim. Moll. Sicil. t. i. p. 40. n“ i,

KüsUt dans Chemn. éd. p. i3. n“ 7.

Anton, Ver/.eichn. p. 7, n" 262.

Hauley, Descr. cat. p. 98.

Callow, Conch. nom. p. 3;.

Pot et Midi. Cat. des Moll, de Douai. I, 2. p. 226. 1 1.

Thorpe, Bril. Mar. conch. p. 83.

Phil. Enum. Moll. Sicil. t. a. p. 3t. i.

Forhes, Rep. ou OEg* invert, p, 144,

Verani, Cal. degli an. invert. p. i3.

Requien, Cal. des Moll, de Corse, p. 23. ga.

Fossiiis, Venus chione. Brocdii, Conch, subap. t. a, p, .'147. 11° 10. Cytherea itaîica. Def. Dict. sc. nat. t. 1 2,

Bronn, Ital. terf, Geb. p 98. 555.

Scacchi, Notize. p. 20.

Bronn, Lelh, Geogn. t. 2. p. 954. n” i. pl. 38. f. 3.

Phil. Enum. Moll. Bicil. t. i. p. 41 ; L P* 32.

S. Wood, Cat. foss. shdls from the crag. Ann, nat. hist. t. 6. p. 249. Morris, Cat. of Brit. fess. p. 86.

Sismonda, Synop. Ped. foss. p. 19.

Agassiz, Coq. tert. p. 45. pl. to. f. 10. i5- Broun, Ind. Palæoui. t. i p. 397. Excl, plur. fyn.

Habile les mers tempérées de rEurope, Imite la Méditerranée. Fo.^sile dans le crag d’Angleterre et dansiez terrains suhapemiîns de! Italie, de la Morée et de la France.

LES CONQUES.

6o3

Nous avons déjà donné précédemment des renseignements sur cette espèce. Sa distribution dans les mers actuelles tendrait à prouver que le crag d'Anglèlerre , dans lequçl elle est citée à l'état fossile, a été déposé à une époque la température aurait été au moins égale à celle d’aujourd’hui , puisque l'espèce vit encore sous les mêmes lati- tudes ; elle ne remonte pas très loin vers le Nord ; elle n’ost pas citée par les naturalistes de l’Irlande et de l'Écosse. M. Lovèn ne la men- tionne pas non plus dans ses Mollusques de Scandinavie. Vers le Midi nous ignorons elle s’arrête. Répandue dans toute la Méditerranée , aussi bien sur la côte espagnole que sur celle de Barbarie, elle doit se continuer dans l'Océan, de chaque côté du détroit. Nous la voyons bien arriver dans nos mers , mais nous ne savons si elle gagne les parages plus chauds du tropique. Celte espèce étant l'une de celles dont l’analogie peut être le moins contestée, nous avons complété sa syno- nymie pour en faciliter la reclicrche aux personnes qui voudront con- stater par elles -mêmes l’identité des individus vivants et fossiles. L'espèce est du reste trop connue; elle a été assez souvent décrite pour n’avoir pas besoin de l’être une fois de plus.

2. Cythérée cedo-nulli. Cytherea erycina, Lamk.

PL 19. f. 3.

Venus erycina, Lluné, Sysl. nal. éd. lo. p. 686. 98.

Lin. Sysl. uat. éd. la. p. i i3i. laa.

Lister, Concli, pl. a68, f. 104.

Kiiorr, Vergu. t. 4. pl. 3, f. 5.

Gronov. Zoopliyl. p. 269. 1143.

Fav, Coucli. pl. 46. f. F, a.

Venus cedo-nuUi. Chemu. Conch, t. 6. p. 334. pl. da. f. 337.

Venus costata, Chemn. Conch. t. ii. p. 226. pl. 202. f. 1975.

Venus ckinensis. Chemn. loc» cit. p. 227. pl. 202. f. 1976.

Venus erycina. Schroet, Einl. t. 3, p. 120. ii.

Gmel. p. 327 r. Il® t3.

Encycl. mélh. pl. 264. f. 2.

Venus erycina^ Venus costata^ Venus pacijica, ÜilUv, Cal. t. r. p. 175.

38, 3g, 40.

Cytherea erycina. Lanik. An. s. verl. l. 5. p. 564. n'* ï4‘

Woüd, lud. Test. pl. 7. f. 38, 39,

Desh. Encycl. mélh. Vers. t. 2. p. 55. 9.

Desh. dans Lamk. An. s. vert. 2* éd. t. 6 p. 3ü3. if 14.

QUINZIEME FAMILLE.

Anton, Verzeiclj. n. 7. ii*’ 264.

Kü-ster Hans Clieni». 2^ cd. p. 12. pl. i, f. 3. pi. 1. f.

Keeve, Conth. Syst. l. r. p. gS. pl. 71. f. ,3.

Hanley» Desrr. cat. p; 97. *

Pot. et Midi. Cat, des Moll, de Uouai. l. 2. p. 223. 2.

FosstUs. Vénus erycxna» Rrocchi, Conch. foss. siibap. t. 2, p. 548. '

Cytherea erycinoides.l.dt\s\\., Ann. du Mus. t 7. p. i 35,

Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 58i. t. éd. t. 6. p. Bag.

Cytherea hurdigaUnsis. Def. Dict. sc. nat. t. 12. p. 422.

Cytherea erycîttoîdes. Prong. Tic, pL 5. f. 4.

Pasl. Foss. de Bord, p, 8g. i.

Grateloup, Cat. Zool. p. 66. 771.

Broun, Ital. lert, Geb. p. 98. 56i.

Malh. Cat. mclh. p. i54. i3r.

Agussiz, Coq. tert, p. 42. pl. 9. f. 10 à 12.

ün phénomène assez -remarquable résulte de la distribution de cette espèce, soit à l’état fossile, soit dans les mers actuelles. En effet, le Cytherea erycrna se montre pour la première fois dans l’étage tertiaire moyen, elle remonte dans l’étage supérieur; mais au lieu do se conti- nuer dans les mers de l’Europe , elle en disparaît et se propage dans les mers de l’Inde; elle se répand dans la grand Archipel asiatique, et ses variétés gagnent la Nouvelle-Hollande. Elle disparaît des mers de l’Europe à un instant déterminé des périodes géologiques. Elle se trouve encore dans les argiles et les sables jaunes d*ltalie, mais elle n’existe plus dans les terrains plus récents de la Sicile; elle ne se montre nulle part dans les terrains quaternaires. Ce fait intéressant n’est pas le seul que nous aurons à signaler ; d’autres espèces ont eu le même sort que celle-ci , et l’ont accompagnée dans sa naissance et dans sa disparition des mers d'Europe. Le Cytherea eryciiut est une grande et belle espèce rochercbée à cause de la richesse de sa coloration ; elle est delà grandeur du Cytherea chione; elle a une forme semblable, mais elle est sillonnée sur toute sa surface. U y a des individus chez lesquels les sillons sont d’une parfaite régularité, d’autres ils sont plus ou moins larges, d’autres enfin ils ont une tendance à s’effacer. Dans toutes ces variétés, on retrouve toujours avec constance les véri- tables caractères spécifiques de la charnière et de l’impression du manteau.

LES CONQUES.

6o5

3. Cythérée suberycinoïde. Cyiherea suherycinoides ^ Desh.

PI. 19. f. 6. 7.

C. Testa o\.^ato-transversâ , suhdepressâ , regulariter stilcoia ; snîcis^ nnmerosis, rotnndatiSi profundis ; lunulâ mînirnâ, lœvigatâ; cardinè tridentatOy dentibiis divariàatis ^ postico h'tfidoy lateraîi imnimo.

Desh. Coq. foss. de Paris, t, i. p. lag. n" a, pl. 22. f. 8, 9.

Desh. Encycl. mélli. Vers. t. 2. p. 60. 27.

Galeolti, Geol. du Brab. p. iSg, n” i54.

Pot. et Mich. Cat, de Douai, t. a. p. 229, 27.

Nyst, Foss, de P»elg. p. 168. n“ 125. pl. ii.f. 4.

Morris, Cat. of Brit. }üss. p. 87.

Habite Fossile dans le bassin de Paris, à Parues, à Mouchy, dans

calcaire grossier; à Talmondois , dans les sables marins moyens. Elle est également en Belgique et en Angleterre.

Celte espèce, rare jusqu’ici dans le bassin de Paris, est l’une de celles qui méritent une attention particulière, parce qu’elle caractérise la première période tertiaire , se trouvant à la fois dans les trois princi- paux bassins sont déposés les terrains de cette période. Nous avions d'abord cru que notre espèce du calcaire grossier remontait dans l’étage tertiaire moyen de Bordeaux , de Dax , mais il n’en est rien ; la coquille de Bordeaux est une variété toujmirs plus petite et à sillons plus étroits du Cytherea erycina. Dans le bassin de Paris, le Cyiherea erycinoides passe du calcaire grossier dans les sables marins moyens; elle ren- contre une espèce qui lui ressemble , mais qui est toujours distincte .par sa taille plus petite , la largeur de ses sillons , leur aplatissement et une forme plus triangulaire.

4. Cythérée albine, Cyiherea albina? Lamk.

Pl 20. f. 1. 2. 3.

C, Testa ovatotrigonn , subcordatâ , transversim tenue et irreguîariter^ striata, inœquUaterâ ^ aîbâ , 'vel alternatim rufo transversim laie zonatâ; umbonibus tumidis; lunulâ cordiformi 'vix perspicuâ,

Lamark. An. s. vert. t. 5. p. 567. 25,

Desh. dans Lamk. An. s. vert. 2* éd. t. 6. p. 307. n” 25,

Delessert, Rec. de coq. de Lamk.^d. S. f, 5?

Hanley, Descr. cat. p. 99. ^

Callow, Conch. nom. p, 36.

Habite vivante au Sénégal. Fossile à Bordeaux, à Dax et dans les falnns de la Touraine.

6o(i' QUINZIÈME FAMILLE.

Nous avons déjà parlé précédemment de celle espèce intéressante ; elle est une de celles qui indiquent les rapports de la faune de Tétage tertiaire moyen avec celle qui vit encore au .Sénégal. Ce qui est sur- tout à constater, c'est que les individus vivants ne dépassent pas la zone équatoriale ; elle est donc une de ces espèces qui accusent la tempé- rature des lieux qu'elles habitent : la retrouver fossile à Bordeaux , à Dax et dans les faluns de la Touraine , c’est justifier l’opinion que nous avons publiée autrefois, que la température qui régnait au moment se déposaient les terrains du bassin de TAdour était dans ces lieux égale à celle du Sénégal, et nous verrons d’autres espèces s'ajouter à celle-ci et corroborer ainsi notre assertion.

Le Cythcrea n/fama est une coquille trigone , suhoordiforme , épaisse, inéquilatérale, d’un blanc mat et opaque, interrompu pardes zones trans- verses tantôt pâles et diaphanes , tantôt rousses ou jaunâtres. Les indi- vidus fossiles , plongés dans l’eau , montrent des traces des zones colo- rées qui existent dans les individus vivants; toute la surface est cou- verte de stries extrêmement fines, serrées, qui font refiéler la lumière d’une manière particulière , aussi bien sur les individus vivants que sur les fossiles. Les crochets sont grands , protubérants et obliquement inclinés au-dessus d’une grande lunule ovalaire, nettement circonscrite par une strie ; dans le milieu , cette lunule est légèrement gonflée à l’endroit qui correspond à la dent latérale antérieure. Le côté dorsal est convexe, il est creusé d’une rainure assez profonde, dans laquelle se loge le ligament; la dent latérale antérieure est conique, fort saillante, obtuse au sommet et comprimée à la base; la sinuosité palléaio a de l’analogie avec celle des Grateloupiaf en cela que sa base est très oblique , qu’elle est étroite, triangulaire et pointue au sommet.

5. Cythérée citrine. Cyiherea citrina^ Lamk.

PI. 18. f. 11, 12. 13.

C, Testa ovato-tri^onâ ^ cordatâ , tttinidây citrinâ^ posticè /iisco-rufes- cente y transversim ohsoletè temiistrîata ^ umbonihus obîiqtiis ^ ap- proximatts ; lunuîâ magna, ovatâ, angitîo obsoletissimo circumdatâ ; 'vaïmlis inths purpureo rufescentibus,

Lamk. Au. s. vert. t. 5, p. 567. aS.

Desh. Encycl. mélh. Vers. t. 2. p. 5(1.

De.sh. dans Laïuk. An. vert, t, 6, p. 3o6. aS.

Delessert, Rec. de coq. de Lamk. pl. S. f. 8.

Hanley, Descr. cal. p. 99.

LES CONQUES.

607

Catlow, Concb. nom, p. 37.

Wood', Ind. Conch. iip. Spl, i3. f. a 3.

Habite les mers de Nonvellc-IIollande.

Nous avons quelques variétés du Cythcrea incrassata des sables supérieurs de Paris, qui ne manquent pas 4’dnalogie avec le Cytherea citrina , qui vil actuellement dans les mers de la Nouvelle-Hollande. Cependant les deux espèces se distinguent nettement aussi dans nos tableaux des espèces analogues des terrains tertiaires ; nous ne Pavons admis qu’avec doute. Le Cytherea cihina est une coquille subtrigone , très inéquilatérale , oblique, épaisse', subcordiforme, couverte de stries irrégulières d'accroissement , obtuse en avant , un peu angdleuse en arrière, à bord dorsal convexe; les crochets sont médiocres, très rap- prochés; ils dominent une grande lunule superficielle, ovale, limitée par une strie è peine apparente. La charnière est épaisse; elle porte trois dents à chaque valve, et de plus une dent latérale conique très rapprochée des dents cardinales; la sinuosité palléale est petite, un peu plus longue que largo et obtuse au somment. Celle coquille est d’un jaune citron pâle; des individus sont lavés de fauve en dedans ; tous portent sur l'extrémité postérieure, en dedans et en dehors, une tache d’un brun rouge intense.

6. Cythérée vénitienne. Cy the^'ea rudis ^

PI. 18. f. 14.

C. Testa nkiif/rtè ^ cordatâ , tumidn . trunst>ershn detisissimè striqtâ

X'' ^ ^ ... .. ^

TuJo-Jùlva^ albo-radiatâ ^ 'vel albà^ rujo niaculnto-radiafq; huniîà cordatd , wx distinctâ.

Cytherea riulis. Poli,.Te8lac. Sicil. t. 2. p. 40. pi. 20. f. i5, 16.

Cythercu ‘venetiana, Lam. An. s. veit. t. 5. p, 559. 11® 35.

DcsU. daiisLaïuk. An. s., vert. 2*éd. t. 6. p. 3io. 35.

Id. Dflessert, Rec. de coq. de Laipk. pl. 9. L 9,

Id. Hanley, Descr. cat. p. 100.

Catlüw, Conch. nom. p. 40.

Pliil. Eiinm. Moll. Sicil, 1. 1. p.

Cytherea rudis, Phil, loc. cil. t, 2. p. 32.

Fossiîis. Cytherea pectuncuhts. Rrorclii, Coiicli, foss. mbap. t. 2. p. 56o, pl. 1 3 f. 12.

Cytherea 'venetiana, Duj. foss. de Tonraine. p. 260. 4.

Id, Scacchi, Nolize. p. 20. 4 a.

Id. Sismouda, Synop. Ped.foss p. 20.

6o8

QUINZIÈME FAMILLE.

Cytherea ivdis. Philippi, Enum. Moll. Sicil. t. 2. p. 32.

fU'nus cycladiformis. Nyst, Foss.de Belg. p. 171. 129. pl. 12. f. 3.

An Eadem ? Venus rudis. PIill. Foss. de Magdebourg. Paléoul. de Meyer, p. 46. 26.

Habile vivante dans la Méditerranée. Fossile en Sicile et eu Italie, dans l’étage tcj’tiaire .supérieur; eu Touraine, à Magdebourg? et dans le crag d’Angleterre et de Belgique , dans l’étage tertiaire moyen .

Nous restituons à cette espèce le premier nom qu’elle a reçu quoi- que ce nom soit assez impropre , puisque en réalité cette coquille n’est ni rude ni rugueuse, mais lisse et pourvue de stries ou de rides peu apparentes.

Nous voyons surgir celle espèce dans l'étage tertiaire moyen , nous la voyons remonter d’uji degré dans le crag d’Angleterre et de la Bel- gique ; elle se continue dans les terrains tertiaires supérieurs de l’Italie , se montre aussi dans ceux plus récents de la Sicile; et, enfin, nous la retrouvons dans la Méditerranée : elle est, comme on le voit, moins ré- pandue aujourd’hqi qu'aulrefois , puisqu’elle n’habite plus l’Océan.

Ovale, subtrigone, cette coquille est inéquilatérale, assez épaisse et subcordiforme ; elle paraît lisse , elle est brillante ; vue à la loupe , elle est couverte de stries serrées et nombreuses , obtuses et comme écra- sées. Elles n’ont pas une régularité parfaite , il y en a d’interrompues, d’autres anastomosées; elles s’effacent vers le milieu et elles reparais- sent , mais plus fines , sur le côté postérieur. En avant , se dessine une grande . lunule ovale , cordiforme , un peu déprimée et limitée par une strie peu apparenté. L'impression palFéale est peu éloignée du bord ; sa sinuosité est courte, triangulaire, un peu plus longue que large. Cette coquille est agréablement colorée de rayons et de taches d’un brun roux sur un fond blanc. En comparant les individus fossiles de toutes les localités que nous citons, nous y avons reconnu quelques variétés peu importantes parmi lesquelles se range le Cxjlherea cycladiformisûe'SYSl, qui est un peu moins triangulaire.

7. Cythérée deltoïde. Cyiherea deUoidea^ Lamk.

Pl. 19. f. 8. 9. 10.

C, Testa ovato-trigond , subœqtnUuerâ ^ subtilissimè tiansversim striatâ; lantiiâ magna; latere antico roUindato; cardine bidentato^ ahero (ridentato.

Lamk. Ann. du Mus. t. 7. p. i35. 8.

Desb. Coq. foss. de Paris, t. i. p, i34. 6. pl. 20. f. 6, 7. pl, 22. f. 12.

Habite Fo.ssile à Grignon, HouJan, Parne.s, elr., raie, grossier.

LKS CONQUES.

Gmy

Celle espèce est Tune de celles qui caractérisent le mieux le calcaire grossier, car .elle n’en sort pas; nous avions cru autrefois pouvoir y rapporter avec doute le Cxjtherea lineolata de Sowerby, mais ayant eu sous les yeux cette espèce en nature , nous lui avons reconnu des ca- ractères spécifiques qui ne permettent pas de la confondre avec celle de Paris.

Le Cytherea deltoidea est une petite coquille Irigone, subéqoilatérale, peu épaisse, à crochets petits et peu obliques ; une grande lunule finement striée occupe la plus grande partie du côté antérieur; toute la surface est couverte de stries concentriques fines et régulières qui s’élèvent et se rétrécissent sur le côté postérieur. Deux dents sur la valve gauche , trois dents petites et inégales sur la valve droite, une dent latérale antérieure petite, mais bien détachée de la charnière, voilà en quoi consiste la charnière de cette espèce ; la sinuosité palléale est petite , en triangle équilatéral.

8. Cythérée élégante. Cytherea filegans^lLamk.

PI. 19. f. 11. 12.

C. Testa ovato-orbictdatâ^ suhtrigonà ^ depressd ^ inœquilaterd ^ trans- x'crsun rcguîarher snlcntd; /tiniilu ovalâ^ minimd,

Lauik. Anu. ilu Mih. t, 7. p. i34, 7 et l. 12, p(. 40. f. S,

Tenus elegnns. Sow. Min.* fomh. pi. 4^9.. l'. 3.

Desli. Coq. l'os?, de Paris, t r. p, t3a. 11® H. pl, o.O. f. 8, 9.

Mürri>‘, Cal. of Prit, l'uss. p. S7. "

Espèce très commune dans le bassin de Paris, et qui paraît égale- ment abondante dans celui de Londres. Elle commence avec le calcaire grossier, et finit avec le grès marin moyen; elle ne parcourt que la partie moyenne de la première époque tertiaire, sa présence n’étant point constatée jusqu’ici dans les sables inférieurs du Soissonnais, ni dans les sables supérieurs de Fontainebleau. Par sa forme générale, elle ressemble à la précédente , dont elle se distingue par des sillons transverses beau- coup plus gros et moins nombreux, d’une grande régularité. Les cro- chets sont petits, peu obliques; la lunule est enfoncée, petite, ovale; la charnière porte trois dents cardinales inégales; la dent latérale est petite, allongée, comprimée et rapprochée de la charnière; le sinus palléal est grand , profond et oblique. Nous pourrions signaler quel- ques variétés, l’une à stries plus fines, l’autre plus épaisse et plus triangulaire , une troisième plus aplatie; mais on concevra sans peine qu’une espèce qui passe des terrains calcaires dansi des sables quart- T. 1. 'i** PAUTlK. ;»9*

QUINZIEME FAMILLE.

6 1 0

zeux presque purs a éprouver les efffets d’un changement si con- sidérable dans les conditions de son existence, et elle le témoigne par les variétés qu'elle nous montre.

GENRE CINQUANTIÈME.

DOSIB7IE, Dosinia (Scopoli).

Pl. ao, f, 6 à 1 3.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal subcirculaire , aplati , enveloppé d’un manteau, dont les lobes sont désunis dans toute la longueur du bord inférieur et terminés par des bords membraneux, larges et faiblement plissés. Siphons aussi longs que la coquille, égaux en longueur, soudés de la base au sommet, légèrement comprimés latéralement, terminés par une ouverture simple, ovalaire. Pied grand . subquadrangu- laire, en fer de hache. Bouche petite , ovalaire, accompagnée de palpes labiales longues, étroites. Branchies très inégales; les feuillets internes très grands, subquadrangulaires ; les ex- ternes , de moitié plus petits , se réunissant en arrière de la masse abdominale

Coquille orbiculaire, lenticulaire, ornée de sillons ou de stries concentriques. Crochets peu proéminents , obliquement inclinés au-dessus d’une lunule creusée , cordifonne ; ligament extërne en partie recouvert par le' corselet. Charnière assez large, pourvue de trois dents cardinales, divergentes, ipégales , et une dent latérale antérieure dans la longueur de la lunule ; deux impressions musculaires très écartées, l’antérieure ova- laire, la postérieure subcirculaire. Impression palléale courte, placée très haut dans l'intérieur des valves , et terminée en arrière en une longue sinuosité triangulaire très pointue au sommet et oblique de haut eu bas et d’avant en arrière.

LES CONQUES. Oiï

SYNONYMIE générique. Pectunculus , Lister. Coucha rotitnda^ Gualticri. Vertus^ Linné, Cheninitz , Schroeter, Gmelin , etc. Artémis^ Poli, Oken, Conrad, Philippi , Agassiz, Nyst, Blainville. Cyiherea^ Lainarck , Sowerby, Menke, Philippi, etc. Orbiculus, Megerle.

OBSERVATIONS. Dans son voyage au Sénégal, Adanson décrivit avec soin deux coquilles bivalves orbiculaires ; il les rangea dans un genre assez indigeste, auquel il donna le nom de Chame. sous la dénomination spécifique de Golan et de Dosin. Ces deux espèces étaient déjà connues des ai>ciens conchyliologues : on en voit des figures dans les ouvrages de Lister, de Petiver, Gualtieri, etc. ; Linné les introduisit dans son grand genre Vénus, d'où Lamarcklesa fait sortir pour les confondre avec ses Cythérées. Une autre espèce, plus petite que les deux précédentes, vit assez abondamment sous les plages sableuses de ta Méditerranée. Poli eut l’occasion d’observer l'animal , et lui ayant reconnu des carac- tères propres, il fonda pour lui un -genre distinct, auquel il donna le nom d'Artémis. Mais Poli n'avait pas eu connaissance d’un ouvrage publié rdix-sept ans avant le sien par Scopoli, l’un des plus judicieux naturalistes du dernier siècle. Dans cet- ouvrage , malheureusement trop peu répandu, Scopoli commence déjà à réformer les travaux de Linné. Dans la classe des Mollusques, par exemple, il propose rétablissement d‘un certain nombre de genres, parmi lesquels se remarque celui qui porte le nom de Dosmï'a. destiné à rassembler toutes les coquilles qui ressemblent au Dosin d’Adanson, et qui comprend par conséquent toutes celles que les conchyliologues depuis Poli ont réunies sous le nom d’Artémis. Eu appliquant les règles imprescriptibles de la priorité, le genre Dosmia de Scopoli doit venir prendre la place de celui nommé Artémis par Poli. M Gray, l’un des premiers, a proposé ce change- ment de nomenclature que- nous nous empressons d’adopter; car il con- tribue à rendre justice à un naturaliste des plus éminents dont les sages réformes et les excellents préceptes ont précédé de quinze à vingt ans les travaux de. nos grands naturalistes français Bruguière, Lamarck et Cuvier.

Un grand nombre d’auteurs restèrent longtemps attachés aux opi- nions de Linné , et pour eux les coquilles du genre DosUiia restèrent des Vénus. Quoique le genre de Poli fût fondé sur des observations pré- cieuses de ranimai, son genre Artémis fut longtemps oublié, et presque tous les conchyliologues du commencement de ce siècle reçu-

QUINZIÈME FAMILLE.

ii 1 *2

rent l’opinion de Lamarck : pour eux les coquilles du genre Dosinia restèrent des Cylhérées. Probablement avec rinlenlion de compléter la triade générique de l'une do ses familles*, Oken, dans sou Livre de la nature , introduit le genre Artémis à la suite des Tellines et des Vénus. Plus tard, Conrad, dans les premières livraisons de ses Fossiles de l'Amérique septentrionale, adopta également le genre de Poli, et l’un des premiers en France nous fîmes sentir l utilité du genre dans la deuxième édition des Animaitx sans vertèbres de Lamarck; et si dès ce moment nous avions connu l'ouvrage de Scopoli , nous aurions adopté le nom générique qui lui appartient , en nous servant des travaux de Poli pour démontrer rutilité du genre.

Un savant observateur, à Topinion duquel nous aimons à nous ranger, M. Recluz, a publié dans le Magasin de zoologie, pour 1847, des observations intéressantes sur le genre Artémis de Poli , à l’occasion d'une espèce qu’il propose d'introduire dans le genre en question. La coquille dont M. Recluz voulait faire une Artémis présente tous les caractères des Vénus : elle n’est point orbiculaire ; la charnière res- semble a celle des Pullaslra; elle est supportée par une lame cardinale étroite, et elle est composée de trois dents cardinales divergentes qui ne manquent pas d’analogie avec celles de quelques unes des Vénérupes de Lamarck. C’est principalement la forme de l’impression palléale qui a décidé M. Recluz à introduire sa coquille dans le genre Artémis. Cette impression présente en arrière une sinuosité oblique, triangulaire, mais obtuse au sommet ; sinuosité qui rappelle celle de quelques Vénus et qui se rapproche également de celle de quelques Pétricoles. Si l’on admettait, avec M. Recluz, cette coquille parmi les Artémis, à l’in- stant même la valeur du genre se trouverait profondément modifiée, et il ne suffirait pas, pour le rendre naturel, de le partager en trois sections, comme le propose M. Recluz. Au reste, le naturaliste dont nous par- lons a lui-même donné le moyen de rectifier son opinion. En effet, il décrit l'animal de son espèce, et cette description prouve qu’il n’appar- tient pas au genre Artémis, mais bien aux Pétricoles et aux Véné- rupes. Ainsi que nous le verrons bientôt, l’animal des Artémis a les siphons réunis dans toute leur longueur ; l’ouverture terminale de ces organes est toujours simple. Dans l’animal décrit par M. Recluz, au contraire, les siphons sont séparés à leur sommet et leur ouverture est garnie de membranes et de tentacules. Ce fait lui seul, constaté par M. Recluz, décide de la question de l’introduction des espèces vénéri- formes parmi les Artémis; elles doivent être définitivement rejetées du

i

genre.

LES CüJNQÜES.

G 1 3

Tel que nous le comprenons , le genre Üosinie ne renferme que des coquilles orbiculaires OL lentiformes ; toutes aussi sont chargées de stries ou de sillons concentriques réguliers , ce qui leur imprime un caractère particulier au moyen duquel elles se groupent et - se reconnaissent avec facilité. Cette forme orbiculaire varie très peu si certaines espèces sont un peu plus larges que longues, quelques autres en vieillissant devien- nent plus longues que larges. Les Dosinies ne sont point globuleuses ; plus renflées vers le centre, elles s’amincissent à la circonférence, et les crochets eux-mômes s’inclinent et se rapprochent pour ôbéir en quelque sorte a la forme lenticulaire, qui est propre à toutes les espèces.

Presque toutes les espèces sont blanches, quelques unes sont d'un brun fauve ou tachées et rayonnées de cette couleur; l’espèce la plus répandue dans nos mers est presque la seule dont les variétés de colo- ration soient nombreuses. Ces coquilles , ainsi que les Vénus et les Cythérées, sont couvertes d’un épiderme vernissé, transparent, qui déborde à peine le pourtour des valves.

Le test est assez épais, solide; les valves ont les bords simples cl parfaitement clos sur toute la circonférence. Les crochets sont médio- cres, peu saillants; ils se rapprochent et s'inclinent obliquement au- dessus d’une lunule cerdiforme, plus ou moins grande selon les espèces, presque toujours profonde , rarement superfîciellq. Le corselet est peu marqué ; il est creusé d’une gouttière pour le ligament , et celui-ci est en partie caché par une lèvre saillante appartenant à chaque valve.

Toutes les espèces , à l’exception de deux ou trois , sont blanches en dedans-; sur la surface intérieure , se dessinent deux grandes impressions musculaires qui descendent perpendiculairement de haut en bas, c’est- à-dire de la région dorsale vers la ventrale; dans leur longueur, ces impressions dépassent le diamètre iransverse de la coquille. L’impres- sion musculaire antérieure est semi-lunaire, rarement ovalaire, plus longue que large; son extrémité supérieure se cache sous la lame car- dinale , et c’est au-dessous de cette lame qu’il faut aller chercher la petite impression ovale et profonde du muscle rétracleur antérieur du pied .

L’impression musculaire postérieure est ovale, elle tend à s’arrondir dans quelques espèces ; soq extrémité supérieure se détache en un petit lobe oval ou arrondi : c’est sur lui que s’attache le musc rétracleur postérieur du pied.

Du milieu de Texlrémité inférieure de l’impression musculaire anté- rieure part une impression palléale très courte, située très haut dans l’intérieur des valves , et restant parallèle au bord inférieur dans tout

6i4

QUINZIÈME FAMILLE

son trajet. Parvenue en arrière , à peu près au niveau du muscle posté- rieur, elle s'infléchit en dedans et trace une profonde sinuosité triangu- laire, oblique, presque toujours pointue au sommet. Cette sinuosité constitue l’un des caractères les plus constants du genres elle varie selon ks espèces, mais dans toutes sans exceplioiv elle conserve sa forme caractéristique.

La charnière présente aussi des caractères constants dans le genre qui nous occupe , quoiqu'ellô ait do l'analogie avec celle des Cylhérées. Elle s'en distingue au premier aspect , car elle est supportée par une large lame cardinale qui ne présente pas la môme grandeur proportion- nelle dans les Cylhérées. Cette charnière se compose de trois dents cardinales sur chaque valve , et de plus d’une petite dent latérale anté- rieure, comprise dans la longueur de la lunule. Sur la valve gauche , la dent cardinale antérieure est très aplatie. lamelliforme, en triangle presque équilatéral , pointue au sommet. La dent postérieure est lon- gue. étroite, tranchante et peu proéminente; enfin,- la dent médiane est épaisseet^imple. Sur la valve droite, la dent antérieure et la moyenne sont très rapprochées , parallèles, peu épaisses ; elles laissent entre elles une fossette étroite et profonde,- dans laquiîlle pénètre la dent anté- rieure de l'autre valve. La dent postérieure est grande , oblique , un peu arquée et presque toujours bifide dans toute sa longueur. La dent laté- rale est moins grande que celle des Cythérées , elle est souvent réduite à un rudiment placé au-dessous et en avant de la première dent cardi- nale; elle existe sur la valve gauche, et l’on trouvé !a fossette elle est reçue sur la valve droite.

Les seuls caractères des coquilles tels que nous venons de les ex- poser justifient suffisamment le genre Dosinie ; nous allons trouver dans l'animal d'autres caractères plus importants qui le séparent nette- ment de tous ceux qui sont connus.

L’animal des Dosinies est orbiculaire et lenticulaire comme sa co- quille; il est d'une couleur laiteuse un peu jaunâtre et légèrement dia- phane; son manteau est constitué comme celui des Vénus et des Cythérées : il est pourvu à la circonférence d’un bord exsertilo membra- neux , peu plissé et entièrement dénué de tentacules. Les lobes du manteau sont disjoints dans toute la longueur du bord inférieur, depuis rextréraité du muscle adducteur antérieur jusqu’à fa base des siphons.

Lorsque l’animal donne à ses siphons toute l’extension dont ils sont susceptibles, leur longueur égale ou dépasse un peu le diamètre la coquille ; réunis dans toute leur longueur, ces organes sont comprimés latéralement , et le point de leur réunion se trahit par une ligne dépri-

LES CONQUES.

fi 1 5

mée qui les parcourt de la base au soniinel: il résulte de ce mode de jonction que leur coupe Lransversea la forme d’un S de chiffre; dans leur ensemble, ils s’offrent sous la forme d’un long cône tronqué au sommet. Ce sommet est occupé par, l'ouverlure terminale des siphons. Cette ouverture est simple dans l'un et l’autre de ces organes , elle ne présente aucune trace de tentacules; aussi elle ne se ferme pas par une contraction circulaire à la manière d’un sphincter, comme cela a lieu chez les autres mollusques, mais par le rapprochement des deux parois l'une vers l’autre , en laissant entre elles une fente longitudinale. Aussi l’ouverture des siphons n’est point circulaire , mais ovalaire dans la dilatation , et elle se ferme à Taide de deux lèvres un peu arquées, ün muscle rétracteur assez considérable , triangulaire, embrassa les deux siphons à leur base : la for.me de ce muscle est exactement représentée par celle de la sinuosité palléale.

Le pied est un peu différent de celui des Vénus et des Cythérées. Il est plus dilaté vers le bord : ce bord est taillé en fer de hache ; en avant il se prolonge moins; à la base , il est séparé de la masse abdominale par un étranglement plus profond. Cet organe est très aplati de chaque côté, tranchant sur son bord.

Une. bouche petite, ovale, transverse, pourvue de deux petites lèvres courtes et étroites, s’ouvre à la partie supérieure et antérieure de la masse abdominale, au-dessous du muscle adclucteor antérieur des valves. Les lèvres se transforment rapidement en deux paires de palpes triangulaires, plus grandes en proportion que celles des Vénus et des Cylhérées, mais construites exactement de même.

Tout en restant analogues à celles des Cylhérées, les branchies des Dosiniesendiffèrentcependant d’une manière assez notable : ellessont très inégales ; les feuillets inlernos sont subquadrangulaires , et leur étendue est plus du double de celle des feuillets externes ; ceux-ci sont en forme de trapèze, et ilà sont attachés aux feuillets internes, le long d'une ligne qui diviserait ce trapèze par son grand diamètre. Il résulte de celte connexion qu’une moitié du feuillet remonte librement dans la région dorsale en forme d'appendice branchial. Les organes do la respi- ration ont leur surface creusée de nombreux sillons qui correspondent aux canaux ménagés au liquide ambiant dans l’épaisseur même des branchies. En arrière de la masse abdominale, les feuillets branchiaux se réunissent , se prolongent un peu, de manière à se souder au pour- tour intérieur de Touverture du siphon anal.

n suffira de comparer ce que nous avons dit des animaux des Cythé- rées et des Vénus, avec ce que nous venons d’exposer de ceux des

^}\6

O^NZIEMK KAMILIJi.

Üosinies, pour reconnaître les dilïerences qui existent entre eux. Ces différences se montrent dans les siphons réunis dans toute leur lon- gueur et complètement dénués de tentacules , dans la manière dont ces organes se ferment par le rapprochement de leurs parois ; un pied plus dilaté, moins prolongé en avant, plus étranglé à la base; des branchies, plus grandes et plus inégales. Les ressemblances sont moins nombreuses et se décèlent dans des organes moins importants : le bord membra- neux du manteau , la bouche et ses palpes , le cœur et son renflement postérieur. Ces ressemblances sont cependant suffisantes pour rattacher les Dosinies à la famille des Conques , comme les différences suffisent aussi pour faire maintenir définitivement le genre dans une méthode naturelle et le séparer pour toujours des Vénus et des Cythérées.

Les Dosinies sont des coquilles littorales qui vivent à de médiocres profondeurs sur les plages sableuses. Ces animaux s’enfoncent perpen- diculairement dans le sable à Laide des manœuvres de leur pied, ma- nœuvres qui ressemblent à celles des Lavignons; le trou qu’ils se creusent est peu profond. Le nombre des espèces vivantes que nous connaissons est de cinquante environ. Elles proviennent de toutes les mers, mais particulièrement des mers chaudes de Llnde et de LAmé- rique. On en connaît également dans le grand Océan austral. Les mers de l’Afrique n’en sont point dépourvues. M. Krauss n’en cite point au cap de Bonne-Espérance; mais Adanson en a fait connaître deux du Sénégal , et d’autres espèces y ont été découvertes depuis. Deux espèces se rencontrent également dans les mers d’Europe , et Lune d’elles sera signalée plus particulièrement à cause de la vaste surface qu*elle occupe.

Le nombre des espèces fossiles est beaucoup moins considérable ; aucune espèce n’existe d’une manière certaine dans les terrains infé- rieurs à la formation tertiaire, et môme jusqu’ici le genre ne s’est montré nulle part dans Léiage tertiaire inférieur. Il apparaît pour la première fois en Europe dans Létage tertiaire moyen , et deux espèces s’y présentent à la fois; une troisième espècq surgit dans le crag d’An- gleterre ; une quatrième , la plus grande de toutes les espèces fossiles , se répand dans les terrains subaponnins une cinquième est propre aux terrains plus récents de la Sicile, et la sixième, enfin, caractérise les terrains tertiaires supérieurs de l’Amérique septentrionale. Parmi ces espèces, il en est quelques unes qui méritent un examen plus spécial.

1“ Dosinia Adansoni J Philippi.

M. Bastérot le premier a rapporté au Cytherea lincta de Lamarck une coquille fossile de Bordeaux qui a avec la vivante la plus grande analogie. Celle analogie est tellement frappante, qu’elle a^ été admise

LKS COXyUKS.

par tous ceux des cpnchyliologues qui se sont occupés de la matière ; iious-même, entraîné par l’opinion commune, nous rangions sous le nom de Cijtherea lincta , et à titro do variétés, des individus des mers d’Angleterre, de la Méditerranée et du Sénégal , et comme nous trou- vions des variétés fossiles correspondantes , nous leur appliquions égale- ment le môme nom. Déjà, en 1835i nous avions conçu des doutes sur l’idenlilé do plusieurs de ces coquilles, et l'étude que nous fîmes en 4 840 des trois espèces de la Méditerranée nous fit sentir la néces- sité de revoir avec un nouveau soin les espèces fossiles. 11 est résulté , de cet examen , la disjonction de trois types vivants , ayant leurs repré- sentants parmi les espèces fossiles : D’abord un Dosinia lincta , que nous décrivons plus loin; ensuite un Dosinia lupinus^ nommé aussi Artémis Philippii par M. Agassiz; enfin, un Dosinia Adansorii , propre au Sénégal, et auquel nous rapportons \q Cytherea fossile à

Bordeaux. M. Agassiz, en 4 845 , a proposé le hom ù' Artémis Basle- roti, pour cette dernière espèce i mais ce savant a été devancé par M. Philippi. On trouve, en effet, dans le Rectieil d'espèces noitvelles , à la date de 4 844, la môme espèce sous le nom de Cytherea Adansoni : la priorité veut qu'il soit préféré.

2“ Dosinia exolela , Lin.

Vivante depuis le cap Nord jusqu’au Sénégal, ainsi que dans toute la Méditerranée.

Fossile dans l’étage tertiaire moyen do Bordeaux, en Touraine, en Allemagne, probablement dans le crag d’Angleterre et de Belgique, dans l’étage tertiaire supérieur en Angleterre et en Sicile.

Dosinia orhicnlaris , Agassiz.

C est le Cytherea concentrica de Brocchi. Comme cette coquille est différente de l’espèce vivante qui porte aussi le nom de concent7'ica, M. Agassiz s’esl trouvé dans l’obligation de changer son nom spéci- fique. Cette espèce se rencontre uniquement dans les terrains subapen- nins , et elle est propre à les caractériser.

4" Dosinia acetabulum , Conrad.

Celle-ci avait été également rapportée au concentrica, elle se rap- proche davantage du yigantea qui vit dans les mers delà Californie; elle est confinée dans l’étage tertiaire supérieur de l’Amérique septen- trionale, et peut contribuer à les caractériser,

QUINZIEME KAMIULE.

f>l8

1. Dosinie concentrique. Dosinia concentnca^ Boni.

PI. 20. f. 6. 7. 8.

D. Testa orùiculari^ depressn , Unu/onni ^ candidat nitidâ ^ ^ptdef mide pnllidè straminco vestitâ^ coficeTitncè et regulariter itriuto- svlcatâ ; stifcis depressts^ cenferùs; lunuln cordatà, im pressa, icevi; cardine Imo , dente postico i>alviilœ dexlrcc tw^usto y ^nfnndè Ijifircato,

Tenus concentriva. Boni. Mus. p. 71. pl. 5. f. 5. Syn, exclus,

.Jn eadem. Cliemii. Conçh. t. 7. p. lo. pl. 37. f.

Scluoet. Einl. t. 3. p. i35. n* 3i.

Gnjel. p. 32B6. Il* 82, Exclus, phir, sjnon,

Dillw. Cal. t. I. p, 196. Qo 85. Exclus, pïur, synon.

Cytherea concentrica. Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 573. n* 5o. Exclus, 'var. et plur, syn.

Tenus concentrica. Wood, Ind. Test. pl. 8. f. 84.

Cyth, concentcjca. Desh. Eocycl. nictii. Yers. t 2. p. 58. 21.

Desh. dans Lamk. An. vert. éd. t. 6. p. 3i6. 11“ 5o. Exel. pl. syn.

Artémis concentrica. Philippi, Ahbild. Concli.’ Cyth. p. 5. ri® 6.

Habite le golfe du Mexique.

Espèce sur laquelle reste encore de rincerLitude , malgré le grand nombre des naturalistes qui en ont fait mention. Malheureusement la description de Born , l’auteur de l’espèce, est trop courte et laisse dans l'oubli des caractères importants dont la connaissance est indispensable à la distinction d’espèces très voisines et faciles à confondre. La syno- nymie s'est ressentie de celte incertitude et do l' incorrection des figures. Born, le premier, a donné l'exemple de cette confusion en rapprochant des figures de Lister et de Petiver qui ne représentent pas son espèce. Ordinairement plus exgct, Ghe.mnitz, on reproduisant l’espèce , en augmente la synonymie sans la rendre beaucoup plus correcte; il faut cependant lui rendre cette justice, qu’il en écarta celles des figures trop différentes de celle de Born. Gmelin , Dtllwyn , Lamarck lui-même adoptèrent à peu près complètement la synonymie de Chemnilz, et c’est de cette manière que s'est perpétuée une confu- sion à la suite de laquelle quatre ou cinq espèces sont réunies sons une même dénomination. Brocebi , entraîné par l'exemple de ses devan- cierSf a rapporté au Venus concentrica une grande coquille fossile des collines subapennines, parce qu'il a trouvé citée dans tous les auteurs une figure de Gualtieri qui représente grossièrement l’espèce fossile.

LES CONFITES.

619

D'autres concliyliologues , plus récemmen-t encore, ont donné sous le nom de concentrica d’autres espèces. 11 ne faut pas s’étonner d’après cela si le Dosûi/a concentrica est cité de presque toutes les merS , et fossile en Amérique et en Italie. 11 faut revenir à la figure et à la description de Born pour rétablir l'espèce dans ses Iimit.es; et alors rétendue de la synonymie doit être restreinte à un petit nonibre de figures , et alors aussi disparaît l’analogie de l’espèce vivante avec une espèce fossile quelconque. L’espèce ne' vivra plus en même temps au Sénégal , dans l’Inde , à la Noùvelle-Hollaiide et en Amérique ; elle sera conûnée dans une partie considérable du golfe du Mexique, aux Antilles, et le long de la côte de l'Amérique' septentrionale , Caroline, Virginie , Maryland.

2. Dosinie exolète. Dosiiiia exoleta^ Lin.

PI. 20. f. 9. 10. 1].

D. Testa orhicuiari^ subœqttilaterti ^ lentijçnni ^ albidâ ^ tnaculis^ lineis radtisve ntjis aut roseis pictq , concentricè striata; jtriis iuœgua- Ubns, snbdetritis ; Itimdâ parvây impressâ, profundâ y lamtllnsâ.

Lisler, Concli. pl. 291, 29^. f. 127, 128.

Petiver, Oazoph. pl. 9!. f. i5, 18.

Giialt. Indl. pl. 75. f. F.

Le Cotan, Adans. Voy. au Séiipg. p. 224. pl. 16. f, 4.

Venus exoleta. Lia. Sysl. liai. éd. 10. p. 688. 117.

Linné, Mus. Ulr. p. 5o6. 11® 70.

Linné, Fauna suecica. 2®éii. p. 519. 11“ 2145.

Linné, Syst. nal. éd. t2. p. ii34. 142.

Pectunculus capiilacens, Da Cosla, Conch. Briî p, 187. pL f2. f. 5. Müller, Züül. Dan. Prod. p. 247. ii** 2978.

Venus cxolcta. Peiinaiit, Zoo). Pjiil. l. 4. p. 94. pl. 54. f. 49.

Rorn. Mus. p. 73. pl. 5. f. 9.

Chemn Conch. I. 7. p. 180, pl, 38. f. 404.

Fav. Conch. pl. 48. f. F. i.

Scliroel. EinI, I. 3 p. 142.

Poli, Test. Sicil. t. 2. p. 98. pl. 21. f. y, 10, ri. misses, Trav. p. 485. 11“ i35.

Gniel, p. 3284. t\^ 75. Exclus, variet.

Encycl. iiiétii. pl. 279. L 5.

Wüod, Hi tiges of Bril. hiv. slitlis.Liu. Trarvs. f. 6. p. 167 . pl. 17 f. 9, 1 o . Donov. Brit. shells. t 2. pl. 42, f. i.

Montagu, Test, Bril. p. 1 16.

620

QUINZIEME FAMILLE.

Muluii et Kack. Lin. Trans, t, 8. p. 87. pl. 3. 1. i.»

Dillw. Cat. I. I. p. 195. 84, *

Lamk. An. s. vert. !. 5, p.-572. ii'* 48.

Turlon, Coiicli. Dicl. p. a4t.

Turtou, Cüiich. Riit. (i. itia. pl, 8. 1‘. 7.

Vythcrea sinuata. Tiuloii, iüc. vit. p. i63. [j1. 10. L xo, ii. ExcL sfn. l'tnus exolcta, Blaioe, Malac. pl. ^4 L 2.

1(1. GerviUe, Cat. des coij. de. la Mauche, p, 26, ir 8.

Cytheren exoleta. Payr. Cat. des Moll, de Corâc. p. 47. ir 78.

Wood, Ind, Test, pl, 8. f. 83,

Coll, des Ch. Cal. des Moll, du Finis., p. 22. i»® 2.

J^esh. Encyel. méth. Vers. t. 2. p. 58. n" rp.

Desh, K.\p. sc. de Morée. p. 96. n“ 43.

Ronch. Chant. Cat, des Moll, du Boul. p. 21. ii» 33.

Desh. dans Lamk. Au. s. Vert. 2* éJ, t. 6, p. 3 14. n" 48.

Scacchi, Conch. regn. Neap. p. 7.

Pliil. Einini. Moll. Sicil. t, x. p. 4r. n" 4,

Art'emis exoJeta, For Le?. Malac. mon. p, 5i. xx® 1.

Id. Anton, Verzeî der Concli. p. 6. 11® 221.

Marav. Méra. pour l’Hisl. nat. de la Sic. p. 76. n" X2. ^

Jeffreys, Cat. of Moll, at Oban. Malac. maij. p. 43.

Hanley, Descr. cat. p, loa.

Kiisler dans Chemn. éd. pl. 9. f. 6.

Thompson, Rep. ou Fauna uf Irel. p. 262.

Pot. et Mich. Moll, de Douai, t. 2. p. 225. ;i'’ xo.

Macgill. Moll. Aiii. üI Scoll, p. 212. i. p. 262. t ^

Thorpe, Bril. Mar, Conch. p. 84.

Philippi, Abbild. Conch. Cylh. p. 5. n'* 8.

Phil. Eiiumj Moll. Sicil. t. 2. p. 32. n''4.*

Cullow, Conch. nom. p. 38. n" 39.

Lovèo, Ind. Moll. Scand. p. 89. n'* 283.

Requien, Cat. des Moll, de Corse, p. 23. 11'^ 94,

Agassiz, Coq. lert, p. 20. 3. pl, 3. f. i5 à 17.

FossiUs, Dujardin, Foss. delà Tour. Mém. de la Soc. degéoi. I, 2. p. 260. Morris, Cat. of Brit. foss. p, 78.

Philippi, Enum. Moll. Sicil. l. i . p. 42. 4 ; t. 2, p. 33. 4t Brunu, Ind. Palæouî. t. i. p. 104.

Goldf. Petrif. Gernian. l, a. p, 24iypt. 149. L 18.

An luirietas ? Arternis lentijormis. Woud, Cal. foss, shells li om the •7 crag, Ann. nat. hist, l, 6. p. aSo.

LES CONQUES.

621

Venus ienfi/ormis,.^i)W, Min, Conc\). pl. at)3.

Morrist Cat. of Rrit., foss. p. 78.

Nyst, Coq. foss. de Belgique, p. 184, pl. 14. f, i.

Habite viva.nle dans les mers d’Europe, la Méditerranée, le Sénégal.

Fossile dans l’étage tertiaire moyeu à Bordeaux , en Touraine , dans le crag d’Angleterre et de Belgique, dans l’étage tertiaire supérieur eu Angleterre et eu Sicile.

Dans la nature actuelle cette espèce occupe un espace très étendu. On la trouve depuis le cap Nord jusqu’au Sénégal; dans son trajet, elle entre dans la Méditerranée, et s'établit sur presque tous les points de son littoral. Pour sa distribution géographique , cette espèce imite exac- tement le Venus ouata, dont nous avons parlé précédemment. En admettant que le Venus lentiformis est une variété de Vexoleta , cette espèce se distribuerait aussi dans les terrains tertiaires de la même manière que la Vénus que nous venons de rappeler. Elle se montre, pour la première fois , dans l’étage tertiaire moyen ; elle remonte dans le crag d’Angleterre et d’Anvers , elle subit une légère modiûcalion dans la forme; elle gagne les terrains tertiaires supérieurs ; et , enfin , elle persiste dans nos mers elle supporte des différences considéra- bles de température , puisqu'elle commence au cap Nord par 72 degrés de latitude , et vient gagner les mers du Sénégal , vers le 1 degré , occupant ainsi une ligne presque égale au quart de la circonférence de la terre. Dans ce long trajet, elle subit des modiGcations intéressantes dans sa forme, dans ses couleurs. C’est à la suite de l’étude des va- riétés principales que nous rattachons au type spécifique le Venus Imitû formis de Sowerby. Nous retrouvons à cette coquille les caractères principaux de Vexoleta ; la forme seule est un peu différente , elle tend à s’élargir obliquement, et jusqu’ici nous n’avons qu’un petit nombre d’individus vivants dont la forme se rapproche de celle des fossiles du crag.

3. Dosinie. brillante. Dosinia lincia, Lamk.

Pl. 20. f. 12. 13. -

D. Testa orbicttlari , tumidâ^ i/iœi/nilnrerali , aibidâ, immacuialâ , nitidUf concentricè striata; striis teniiissimis, confertis^ regnîaribus ^

. lœvibus y anticè posticèque augustioribus ^ lameîlœformibiis; hinulâ ' impressây ovato^^acutâ ^ scutiformi ^ striata ; sinu paîlii angusto, apice acuto J vix obliqua^ area ligamefili angiislâ , inx excavata.

Lister, Conch. pl. 290 f. 19.6.

Venus sinvatn, Gmel. p. 3285. ti^ 7^). Pro 'vnr.

622 Ql]lN7fÈMK FAMILLE.

yemis exoUta Pentianr, Urit. Zooî. t. 4. }»1. 5g. f. r.

ycnus Uncta. Dorset, Cat. p. 35.pl. t, f. i3.

Femts exoîeta (-ynr). Mat. et Rack. Lin. Trans. t. 8. p. 87^ pl. 3. f. 2.

i^enus siniuita. Tnrloii, Conch.’ Dict. p. a *2. 11° a4.

Cytherea lincta. Latnk. Au. s. vert, t 5. p. 575. n" 49.

Cytherea sinuata Tiirton , Coneh. lirit. p. x63, Excl.Jîgiira ei pîeris- que synonymis.

y entts exohta^ junior(in parte), Dillw. Cal. I. t. p. r(>R.

Venus undata. VVood, loü, Tesl. pl. S. f. 87.

Cytherea Vincia. Desl). Lamk. An. s, verl. a* éJ. i. 6. p. 3i5. n** 49.

Collard de-s Ch. Cat. d«s coq. du Finisl. p. 22. 3.

Pbiltppi, Enum. Moll. Sic»}, l. r. p, 4r. n“ 5 {pro parte).

Arternis lincta. Forbes, Malac. monens, p. 5r, 2.

Cytherea undata Jeffreys, Mar. Mofl. eVOhait. Malac. ma", p. 43.

,Hauley, Descr. cal. p. t02,

Artémis lincta. Thompson, Rep. 00 Fauna of Irel. p. 262. ,

Pot, et MicU. MqU. de Doaai. l. 2. p. aaS. 19 (pro parte).

Margill. MnlI, an. ofScotl, p. 112 et 162,

Thorpe. Brit. mar, Coneb. p. 84. - >

. Pbii. Abbild. Comh, Cyth. p 5. 9.

Phil. Eittim. Moll. Sicil. t. 2. p. 3i. 5.

Lovèn, ïud. Moll. Scand. p. Sg. 11® 284, ^ ^

, . Agassiz, Mém. sur les coq. lert. p. 22, pl. 3. f. Il à »4-

F.ossilis. Pbdippi, Ëiuini. Moll. Sicil. t. i. p. 4^. n“ 5; l. a. p. 33'. n“5.

Artetnis sinuata. S. WooJ, Cal. .«bclls foss. finun tho crag. Ann. nat. bist. l. 6. p. aSo. a

Habite rOcéaji d’Europe , la Méditerranée. Fossile en Sicile.

Depuis que nous avons reçu des mers d’Angleterre des individus vi- vants de cette espèce, nous avons reconnu, comme M. Agassiz, qu’elle doit être séparée de VArlemîs lupinus de Brocchi , et du CyUterea lincta de Bastérot, fossile des environs de Bordeaux. Il est facile de comprendre que l’espèce, ainsi restreinte, n'a plus la distribution géo- graphique et géologique qui lui était attribuée. Néanmoins elle est une de ces espèces qui vivent depuis les mers du Nord jusque dans la Méditer- ranée; son analogue fossile se trouve uniquenient en Sicile. Parmi les variétés que nous rapportions autrefois au Cytheren lincta de Lamarck, il en est une qui vit au Sénégal et qui est le type vivant du lincta de Bordeaux et des faluns de la Touraine. Quant à /upmus de

Poli, espèce que nous considérions aussi comme une variété du lincta^

LES CONQUES.

623

«lie paraît limitée jusqu’ici à la Méditerranée, et son analogue fossile se trouve en Morée, en Italie, en Sicile, à Perpignan. Celte dernière espèce, connue déjà sous deux noms, en a reçu un troisième de M. Agassiz. Ce savant zoologiste lui a donné le nom d'Ariemis Philîppii, n’ayant pas eu sans doute les moyens de vérifier sa synonymie.

Le Dotiina lincta est une coquille généralement plus petite que l’^xo- leta^ mais qui parfois atteint le même volume. Elle est circulaire, iné- quilatérale, assez bombée; ses crochets obliques, peu saillants, dominent une lunule enfoncée, ovale, pointue, en forme d’écusson nettement lir mitée par une strie profonde. Celte lunule semble lisse, mais vue à la loupe elle présente des stries fines et irrégulières. Le ligament est com- pris dans un corselet étroit, peu marqué et faiblement creusé en gout- tière. Toute la surface est couverte de stries très fines, régulières, lisses, aplaties, très serrées et renversées de bas en haut, en avant et en ar- rière. Ces stries s'amincissent, se redressent, deviennent lamelliformes en aboutissant à la lunule et au corselpt. La lame cardinale est assez épaisse; la dent latérale antérieure est grosse et obtuse; la dent cardi- nale postérieure est étroite, bifide sur la valve droite, plus mince et simple sur la valve gauche. La sinuosi^ palléale est étroite et profonde: sa direction est peu oblique; son bord supérieur est presque dans Taxe antéro-postérieur de la coquille. Quoique le Dosinia lincta soit en géné- ral d'une plus grande taille que le luphius, on a cependant de cette dernière des individus à peu près aussi grands , mais ils sont moins convexes.

GENRE CINQUANTE ET UNIÈME.

CircUNE. Cyelina (Desli.).

PI. r4 f. 20. 21. 22.

CARACTÈRES génértqües. Animal inconnu.

Coquille orbiculaire plus ou moins convexe,- peu épaisse, parfaitement close . à bords simples ou finement crénelés. Crochets assez grands, obliques, inclinés en avant; point de lunule. Bord cardinal large , portant trois petites dents cardi- nales étroites, divergentes, inégales, dont la postérieure est canaliculée ; point de dents latérales. Deux grandes impres-

6'i4 QUINZIÈME FAMILLE,

sions musculaires, l’antérieure ovale , la postérieure- semi- lunaire ; impression palléale courte , formant en arrière une sinuosité triangulaire à sommet aigu et oblique de haut en bas et d’availt en arrière. Ligamenf étroit, très allongé et en partie caché sous le bord du corselet. .

.SYNONYMIE génériqve. Veuus ^ Chemiiitz , Schroeter, Gmelin, Dilhvjn. Cyprina '^ Lainarck. Chama [lefélan]^ Adanson.

OBSERVATIONS. Laniai'ck rangeait partni les Cyprines une coquille qu’il avait observée dans la collection de M. Dessance, et à laquelle il a im- posé le nom de Cy^rinû lenuistriaia, quoiqu’elle eût été figurée et dé- crite depuis longtemps par Chemnitz sous la dénomination do Fenu.s chinenm. Celle coquille ne peut appartenir au genre Cyprine, et il suf- fira de comparer les caractères des deux genres pour s’assurer que le Venus cliinensis est fort éloigné des véritables Cyprines. Lorsqu'on vient à rapprocher celte coquille des Vénus, on reconnaît bientôt qu'elle n‘a pas non plus tous les caractères de ce genre : une forme orbicu- laire ne so montre guère dans le* genre que nous citons; elle se ren- contre , au contraire , dans un genre démembré des Cythérées , sous le nôm d’-4rlcmts, par Poli, mais antérieurement sous celui de Dosm/a, par Scopoli. En effet, la comparaison du Venus chinensis avec les v4r- temis amène à ce résultat, que la seule différence appréciable de quel- que importance consiste dans l’absence de la dent latérale antérieure, et l’on peut dire, en conséquence, que le Kmus chinensis est par rapport aux Vénus ce que les Dosinies sont à l’égard des Cythérées.

Ce sont ces considérations qui nous ont engagé à former du Kem/s chinensis et de trois ou quatre autres espèces qui offrent identiquement les mômes caractères, un genre particulier, pour lequel nous proposons le nom de Cyclina, pour rappeler que l'un des caractères les plus saillants du nouveau genre réside dans la forme orbiculaire des coquilles qu’il renferme. Notre nouveau genre viendra peut-être se confondre par la suite avec celui des Dosinies, mais celte réunion ne pourra s’opérer qu’au moment l’animal de l’une des espèces étant connu, on aura pu établir l’identité de ses caractères avec ceux des Dosinies de tout autre genre.

Les coquilles du genre Cyctiha sont orbiculaires , plus ou moins épaisses, selon les espèces : en cela elles ressemblent beaucoup aux Ar- témis; elles sont subéquilatérales, cependant le côté antérieur est un

LES CONQUES.

peu plus court. La surface extérieure est tantôt lisse, tantôt couverte de stries concentriques. Les bords sont quelquefois simples et tran- chants, quelquefois finement crénelés; ils se joignent parfaitement sur toute la circonférence, ainsi que cela a lieu du reste dans toute la fa- mille des Conques. Les crochets sont assez grands, obliquement inclinés vers le côté antérieur et très rapprochés entre eux. Des trois espèces vivantes que nous connaissons, une seule a la lunule circonscrite par une strie superficielle ; la lunule est marquée de la mémo manière dans la seule espèce fossile qui nous soit connue.

La charnière est supportée par une lame cardinale large et peu épaisse; celte charnière consiste en trois dents inégales sur chaque valve: la dent antérieure est presque rudimentaire, la moyenne est la plus large, la postérieure est la plus longue, et elle est faiblement canaliculée à son sommet. En arrière de cette charnière se trouve une nymphe fort large, formant en dedans un plan faiblement incliné, et sur lequel s’attache la partie cartilagineuse du ligament; un sillon étroit, mais profond, donne insertion à la tunique externe ou fibreuse du ligament. Vers l'extrémité postérieure de la nymphe et près de la terminaison do la lame cardinale elle-même, on remarque sur chaque valve une légère dépression sem- blable à la fossette d une dent latérale qui aurait avorté; mais cotte dent latérale n'existe réellement pas, puisque la même dépression se montre sur l’une et l’autre valve. 11 arrive fréquemment, soit dans les Cyprines, soit dans les Vénus ou les Cythérées, que l’extrémité antérieure de la nymphe est corrodée à l'intérieur, et alors, derrière la charnière, se montre une cavité plus ou moins profonde et souvent irrégulière. La- marck attachait une grande valeur à l’existence de cette cavité, car il la mentionne parmi les caractères génériques des Cyprines, et il est à pré- sumer qu’ayant observé une semblable érosion dans le F<;nus chmensis, c'est par qu’il aura été entraîné à placer cette coquille dans le genre Cypriue.

Les impressions musculaires sont grandes, elles s’allongent assez bas dans la région ventrale de la coquille; ranlérieure est ovale, étroite; elle descend perpendiculairement dans la longueur du bord antérieur, son extrémité inférieure est plus élargie que la supérieure*. Celle-ci , en effet, se rétrécit par suite de sa contiguïté avec une petite impression étroite produite par le muscle rétracteur antérieur du pied; l’impression musculaire postérieure est semi-lunaire.

L’impression palléale est très courte, elle est située très haut dans l’intérieur des valves; elle quitte l'extrémité inférieure du muscle anté- rieur, se place parallèlement au bord ventral, et, parvenue en arrière, X. 1. PARTIE. 40*

6^6 QUINZIÈME FAMILLE. LES CONQUES.

à peu près au niveau du bord interne du muscle postérieur, elle s’in- fléchit en dedans et décrit une sinuosité triangulaire, très pointue au sommet, semblable à celle des Dosinies, mais proportionnellement plus petite.

Jusqu'ici noua ne connaissons qu'un petit nombre d’espèces vi- vantes appartenant au genre CycUna. Elles proviennent des mers de rinde et de la Chine ; il y en a une qui habite les côtes de la Sénégam- bie. C’est elle que probablement Adanson a décrite et figurée sous le nom de Félan. Aux trois espèces vivantes que nous connaissDns, nous pouvons en ajouter une quatrième fossile qui provient des environs de Bordeaux. Elle est des plus intéressantes ; elle est très aplatie, ridée trans- versalement, et couverte de stries divergentes qui rappellent celles du Cytherea tesludimlis ; mais parla charnière, les imjiressions musculaires et la sinuosité palléale, cette coquille dépend de notre genre. Nous pro- poserions pour elle le nom de CycUna Woodii , pour rappeler le savant conchyliologue qui a consacré un grand nombre d’années à la recherche et à l’élude des fossiles du crag d'Angleterre.

Cycline chinoise. CycUna chinensis , Desh.

PI. 14 bis. f. 20. 21. 22.

C. Tcstd otbiculari ^ subiongitndinali^ crassnftdvuy intus albà e xthsque yiolaceo :^onatâ\ transvenshn tenuistrintà y striis miimfissimis , ion- gitudinallbus in tnedio obsoletis dccHSsatâ; apicibusinolactis^ tnmidis; marginibus creniilatis ; dun pallii trigono^ obliquoy ncnto^ sulueyui- laterali,

f'eniis chinensis. Chemn. Concli. t. lo. p. 356. pi. 17 r, f. i663.

l'entis sinensis. Omel. p. 32^5. ii'» 91.

Venus chinensis. iJÜhv. Cat. I. i . p. 192. 77.

Cyprina lemixsiria. Lamk. Au. s. vert. l. 5. p. .558. 6.

Wood, Ind Trst. pi. S. f. 76.

Desh. dans Uanik. An. s. vert, éd. t. 6. p 291. 6.

Venus sinensis. Haniey, Descr. rat. p. lU).

Habite les mers de la Chine.

Celle coquille, rare autrefois dans les cabinets de conchyliologie, est actuellement répandue dans toutes les collections; il sera donc facile d’en étudier les caractères et d’apprécier ceux du genre auquel elle peut servir de type. Cette coquille est circulaire, et. quelquefois un peu pItLS longue que large; elle est épaisse et bombée: elle ressemble donc

SEIZIÈME FAMILLE. LES DUEISSÉNIDES. 627

à quelques Dosinies par sa forme générale; elle est cependant plus bombée que les espèces de ce dernier genre. Sa surface est revêtue d’un épiderme jaunâtre transparent. Des stries transverses, fines et ré- gulières couvrent la face externe; ces stries s'effacent presque entière- ment vers le milieu des valves ; elles sont coupées à angle droit par un grand nombre de stries longitudinales très fines, obsolètes, plus appa- rentes sur les côtés que sur le milieu; les crochets sont saillants, bom- bés et obliquement inclinés sur le côté antérieur. Ce côté ne porte au- cune trace de lunule, et le côté postérieur n‘a pas non plus de corselet limité; un ligament externe peu épais est contenu dans une rainure profonde en partie recouverte par les, lèvres du corselet. Les nymphes sont très écrasées et coupées en plan très oblique finement strié. La charnière est supportée par une lame cardinale large et peu épaisse Cette lame porte trois dents cardinales divergentes ; l'antérieure de la valve droite est très mince: la postérieure est la plus longue, elle est creusée en gouttière dans toute sa longueur; la moyenne est comprimée et conique ; sur la valve gauche, les trois dents sont égales. Les impres- sions musculaires sont grandes , ovales et descendent au-dessous du diamètre antéro-postérieur de la coquille. L’impression palléale est courte , la sinuosité qui la termine en arrière ressemble à celle des Do- sinies; elle est plus courte en proportion et se dessine sous la forme d’un triangle subéquilatéral , dont l'axe est oblique de bas en haut et d'arrière en avant. Cette coquille est souvent d’un fauve pâle, ses cro- chets sont violets , et vers les bords elle est ornée de zones violettes variables selon les individus; rintérieur'est blanc, lavé de violet pâle interrompu par les zones violettes du dehors qui se répètent plus pâles en dedans.

Cette coquille est longue de 45 mill. et large de 47.

SEIZIÈME FAMILLE.

Les Dveissëniiles. MBi^eisHewiUte , Gray.

CARACTÈRES. Animal allongé, longitudinal, ayant les lobes du manteau réunis et percés de trois ouvertures ; une antérieure pour le passage d’un pied byssifère, les deux autres postérieures , prolongées en siphons courts et inégaux. Bouche

SEIZIÈME FAMILLE.

1)28

subterminale antérieure ; deux muscles adducteurs inégaux, très écartés; deux muscles rétracteurs du pied, deux paires de branchies inégales débordant en arrière la masse abdominale^

Coquille allongée , longitudinale , triangulaire ou subcordi- forme. Crochets terminaux, pointus, droits ou inclinés. Char- nière simple; ligament externe allongé, en partie recouvert par les bords du corselet. Bords simples et tranchants , bâil- lants en avant et en bas pour le passage du byssus. Deux im- pressions musculaires inégales ; Tantérieure petite , sur une cloison transverse qui couvre la cavité du crochet; impression postérieure ovale , subcirculaire , presque marginale ; impres- sion palléale simple.

GENRE Congeria^ Partsch.

En admettant la famille des Dreissénides de M. Gray, nous ne pré- tendons pas y laisser cinq genres, et surtout lui conserver, dans l’ordre général de la méthode, la place que lui accorde le savant zoologiste an- glais. Pour nous, la famille en question ne contient qu'un seul genre fondé sous le nom de Conr/er/a, par M. Partsch, et proposé presque en même temps sous celui de Dremena, par M. Vanbeneden ; ce genre a reçu plusieurs autres noms, ainsique nous allons le voir bientôt.

Le genre Congeria a été établi pour des coquilles fossiles qui se trou- vent avec des Mélanopsides et d’autres coquilles d’eau douce dans les terrains tertiaires de l’Autriche. M. Vanbeneden, ayant observé l’animal du Mytilus polymorphns de Pallas , reconnut entre cet animai et celui des Mytilus de très grandes différences, et il en fit le type du genre nouveau qu’il nomma Dreissena. M. Gray admet à la fois les deux gen- res auxquels il en ajoute trois autres, deux douteux, Enocephahis de Munster, et Myoconcha de d’Orbigny, et le troisième Mytilimiria de Conrad , qui devra probablement rentrer dans le genre Mylihts de Linné.

Lorsqu’on met en présence les divers genres que nous venons de citer, à l’exception des deux derniers, ils offrent des caractères identi- ques; ils doivent en conséquence rentrer les uns dans les autres. Dans notre opinion, un seul doit rester dans une méthode naturelle.

D’après ce que nous a dit autrefois M. Doué du genre Enoccphalus de Munster, ce savant paléontologiste l’aurait établi dans sa col- lection pour la grande Congérie cordiforme de M. Partsch [Congeria

LES DREISSEMDES.

629

subglobosa); par conséquent, le genre n'ayant jamais été publié par son auteur de manière à le faire reconnaître, il ne peut être admis. Le genre Dreissena ne diffère en rien des Congeria , il a été fonde pour des es- pèces vivantes dont tous les caractères se retrouvent dans les espèces fossiles qui constituent le genre Congeria; il est naturel de réunir des coquilles qui ne diffèrent que par l'état on les trouve. Quant au genre Myoconclia de Sowerby, admis par M. d’Orbigny, nous ne le comprenons pas dans la famillo des Dressénides: ce sont des coquilles qui ont les plus grands rapports avec certaines Cardites, Cardita p/tre- netica par exemple, et que nous repousserons également de la famille des Mylilacées. Ainsi, des cinq genres introduits par M. Gray dans sa famille, il y en a trois, Dreissena ^ Enocephalus et Congeria qui n’en forment qu'un seul, celui qui constitue à lui seul la famille; car des deux autres, celui des jl/f/oco«c/irt doit faire partie des Cardites; le se- cond restera probablement dans la famille des Mytilacées.

Dans le genre Co7igeria une seule espèce est connue avec son animal : c'est le Mylilus polijinorphus de Pallas. Quoique nous allions décrire bientôt cet animal avec détail, nous croyons utile d'en retracer ici les caractères les plus généraux pour mettre le lecteur en état de com- prendre les motifs qui nous ont guidé dans l’arrangement méthodique que nous proposons pour la famille des Dreissénides.

Quoique par leur forme générale l’animal et sa coquille rappellent beau- coup ceux des Mylilus, cependant ils en diffèrent par un grand nombre de caractères. C’est ainsi, par exemple, que l’animal du Mylilus poly^ inorphus a le manteau presque entièrement fermé. Il présente une petite ouverture antérieure et inférieure pour le passage d’un pied byssifère. En arrière, cet organe se prolonge en deux siphons très inégaux ; le bran- chial, gros et dilaté, garni de tentacules sur le bord et à l’intérieur, semble continuer l’axe longitudinal de l'animal. Le siphon anal, plus petit, plusxourt, s’élève d'une large base, et il se dirige en dehors en faisant un angle droit avec le premier. Son bord membraneux reste simple, dépourvu de tentacules.

L’anirpal est pourvu de deux muscles adducteurs inégaux. Quoique très réduit, le muscle adducteur antérieur est cependant plus gros que celui des Mylilus^ et il est placé d'une manière différente, en cela qu'il est sur une lame Iransverse formant une espèce de cloison qui s'avance au-dessus de la cavité des crochets. Le muscle adducteur postérieur est cylindracé, situé très en arrière, et il n’est pas composé de, plusieurs faisceaux fibreux , ainsi que cela, a lieu dans les Moules. Le muscle orbiculaire du manteau est généralement mince, étroit, d’une largeur

63o

SKIZIEME FAMILLE.

a peu près égale dans toute son étendue. Ainsi que dans les Cyclades, les Cardium et d'autres genres, les siphons n’ont point de muscle ré- tracleur propre, faisant une saillie plus ou moins considérable entre les parois du manteau.

Le pied est allongé et vermiforme, à peu près comme dans les Myes, les Saxicaves, les Clavagelles, les Gastrochènes, etc. Les parois ne s’é- tendent pas sur la masse abdominale, et les fibres musculaires se transfor- ment immédiatement en deux paires do muscles qui se dirigent eu avant et en arrière. Ainsi, sous ce rapport, les animaux des DreLssénides sont très différents de ceux des Mylilus et semblables à ceux des Dimyaires. La masse abdominale est plus ou moins considérable , scion le dévelop- pement de certains organes, et surtout de ceux la génération. Quand ces organes sont tuméfiés par leur développement naturel, ils envahissent la masse abdominale dans toutes ses parties, enveloppent le foie, et pro- duisent en arrière du pied un cône à sommet obtus qui se prolonge de plus en plus dans la cavité postérieure du manteau. En avant, le pied, bridé par ses muscles, est enfoncé au milieu de cette masse abdominale, et il porto à sa base dans un crypte membraneux un byssus à filaments fins et nombreux, sécrétés par le pied de la même manière que dans tous les autres Mollusques byssifères.

La bouche est assez grande, presque terminale , transversale , gar- nie de deux lèvres membraneuses et étroites, terminées de chaque côté en une paire de petites palpes triangulaires, semblables par leur struc- ture à celle des Vénus et des Cyclades.

Les organes branchiaux sont placés comme dans les Mollusques dimyaires. Ces organes sont lisses, parenchymateux; deux feuillets inégaux de chaque côté du corps les constituent. Les feuillets internes sont les plus grands. La pointe qui les termine antérieurement vient se placer entre les palpes labiales. En arrière de la masse abdominale, les quatre feuillets branchiaux se réunissent pour tomber au-devant de l’ouverture du siphon anal et se souder avec le pourtour interne de cette ouverture.

Si nous examinons les coquilles appartenant à la fëmille des Dreis- sénides, nous leur trouvons plutôt l'apparence des Moules que les carac- tères profonds de ce genre. Ainsi ces coquilles ne sont jamais nacrées. Par leur texture elles se rapprochent de celles des Cyclades et des Cyrènes. Elles sont de formes longitudinales, quelquefois bombées, subcordiformes, ayant les crochets terminaux tanlôtdroils, tantôt cour- bes. La charnière reste simple; un ligament extérieur est porté sur de longues nymphes, peu épaisses, en partie cachées sous le bord saillant

LES miElSSENlDES.

6:h

du corselet. La cavité du crochet n’est point libre comme dans le plus grand nombre des Moules. Une lame Iransvorse, horizontale, plus ou moins épaisse, s’avance au-dessus de !a cavité des crochets, et reçoit l’impression du muscle adducteur antérieur des valves. L’autre impres- sion musculaire est beaucoup plus grande; elle est presque marginale et située près de l’extrémité postérieure de la coquille. Une impression palléale, simple, très rapprochée du bord, enferme en dedans de son contour l’impression musculaire postérieuré.

Si nous comparons les animaux des Dreissénides à ceux des Myti- lacées , nous trouverons entre eux des différences aussi considérables que si nous établissions la comparaison entre des Buccardes et des Moules, par exemple, ou tout autre genre appartenant à l’ordre des Acéphalés dimyaires. Ainsi le manteau, dans les deux groupes, est essen- tiellement différent. D’un côté, il est presque entièrement fermé, de l’au- tre il est ouvert dans toute sa circonférence. Dans les Dreissénides il existe deux siphons, dans les MytÜacées une seule bride postérieure constitue une ouverture anale vers laquelle viennent aboutir les feuillets branchiaux. Si le pied a beaucoup d’analogie dans les deux genres, cependant il a une organisation différente, puisque dans les Moules il a plusieurs paires de muscles qui n’existent jamais dans les COngéries. Il est vrai que dans l’un et l'autre genre le pied porte un byssus, et que par suite de l’existence de cet organe il y a une grande ressemblance dans les mœurs de ces animaux ; mais il ne faut pas per- dre de vue que le byssus a peu d’importance comme caractère zoologi- que, et qu’il se retrouve, dans presque toute la série des animaux acé- phalés , dans des familles et dans des genres très différents. Nous en trouvons des vestiges dans les Gastrochènes. Il est fort gros dans lés Lyonsies ou dans les Saxicaves, et nous en avons observe des vestiges dans la plupart des PuUasira. Si l’on voulait maintenant réunir leé divers genrôs dont nous venons de parler, par ce seul motif qu’ils sont bySsifères, assurément on briserait les rapports les plus naturels pour constituer une famille avec des éléments hétérogènes. Il est donc néces- saire, pour bien placer le genre Congérie et la famille qui lo renferme, de se prémunir contre cette apparence de la forme générale et de la manière de vivre, par laquelle presque tous les zoologistes s’en sont laissé imposer, et ont rapproché des animaux qui n’ont entre eux que des rapports Irès éloignés. Ce que nous venons de dire est confirmé par deux choses très importantes dans l'organisation des Mollusques acé- phalés. Dans les Moules les organes branchiaux occupent toute la lon- gueur de l’animal; ils sont attachés au manteau et composés de fila-

.SEIZIEME FAMILLE.

e.î'i

inents qui , à la mort de l’animal , se détachent avec la plus grande facilité, et les organes branchiaux peuvent être comparés à un peigne à dents très fines et très rapprochées. Dans les animaux des Congéries, les branchies conservent la place, les rapports et l'organisation que ces organes présentent chez tous les Mollusques dimyaires, tels que les Vénus, les Cyclades, les PuUastraj etc.

Nous verrons, en traitant de la famille des My tilacées, comment s’opère le développement des organes de la génération. Chez eux la masse abdominale ne pouvant prendre aucun développement dans la cavité du manteau, l’ovaire se rejette en dehors entre les parois palléales elles- mêmes et les envahit dans toute leur étendue jusqu’à la limite du muscle orbiculaire. Chez les Congéries, au contraire, le manteau ne contient jamais les ovaires, qui restent renfermés dans la limite de la masse abdominale , et il leur arrive, ainsi que chez les Gastrochenes, de se présenter à découvert au-dessous de parois très minces et d’envelop- per les muscles du pied au lieu d’en être recouverts, ainsi que cela a lieu chez les Vénus , les Buccardes, etc.

Il résulte de la comparaison que nous venons d’établir, que si l'on fait la somme des ressemblances et des différences entre les Dreissénides et les Mytilacées, le nombre des différences l’emportera de beaucoup sur celui des ressemblances; c’est le contraire qui aura lieu , si nous éta- blissons la môme comparaison entre les Dreissénides et les Conques. Alors la somme des ressemblances l’emportera de beaucoup ; et môme si l’on voulait appliquer à la rigueur les principes de la méthode natu- relle si sagement établie par les grands zoologistes, il faudrait peut- être faire remonter la famille des Dreissénidées plus haut dans la série que nous ne le faisons ici. En effet, elle se trouve déjà éloignée des mollusques à manteau presque complètement fermé, tels que les Solons, lesMyes, IesThracies,etc. Mais il faut se rappeler que la famille dont nous nous occupons présente des caractères complexes et ambigus , et que dans une méthode par embranchements, telle que nous la concevons, cette famille, en partant de celle des Myaires, par exemple, doit former un embranchement latéral , s’élèvant jusqu’à la hauteur des Conques üuvialiles , et s'arrêtant brusquement , tout en se dirigeant vers la famille des Mytilacées. Si l’on ne s'en laisse pas imposer par la forme extérieure de la coquille, les caractères qu’elle présente conduiront au même ré- sultat. On y trouve, en effet, deux impressions musculaires inégales comme dans tous les Mollusques acéphalés dimyaires, deux petites im- pressions pour les muscles rétracteurs du pied, placés exactement comme dans les Mollusques dimyaires proprement dits; enfin , une im-

LES DKEISSEMDES.

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pression palléale simple, s’élargissant un peu en arrière, exactement comme dans les Cyclades et les Cyrènes ; et cependant dans tous ces genres, ainsi que dans celui des Cyprines. l’animal se prolonge en ar- rière en deux siphons inégaux. Ainsi, si l'on veut accorder à chaque caractère zoologique l'importance qu'il mérite , et que la nature elle- même lui a accordée, on sera forcé de convenir avec nous que les Con- géries ne peuvent fairepartie du groupe des Myaircs, quoique le manteau soit simplement perforé en avant, et quoique le pied soit vermiforme: d’abord parce que le manteau se termine par des siphons très courts dépourvus de muscles spéciaux, et que par suite de celte brièveté du manteau les branchies sont elles-mêmes très courtes , ainsi que dans les Cyclades et les Vénus. Mais il est certain que la jonction des lobes du manteau dans toute l'étendue de leur pourtour indique des rap- ports évidents avec la famille des Myaires et celles qui Tavoisinent le plus.

On ne peut non plus rapprocher les Dreissénides dos Mytilacées ; ces familles se repoussent par tout ce qu'il y a d’essentiel et de profond dans tous leurs caractères. Il est évident cependant qu’elles ont des rapports éloignés par la forme générale, et surtout par le pied , le byssus et les mœurs que ces parties déterminent chez l’animal : car le byssus est un moyen de suspension au moyen duquel l’animal s'attache aux corps environnants , et il arrive que dans le développement des individus ils s’attachent les uns aux autres et forment des amas plus ou moins considérables. C’est donc entre ces deux groupes et à une distance à peu près égale, que la famille des Dreissénides doit s'arrêter dans la série naturelle : c’est pour cette raison que nous la plaçons à côté des Cyclades. Nous avons préféré cette opinion, d’abord parce que les Congéries sont des animaux fiuviatiles , et ensuite parce qu'ils présentent la plupart des caractères des mollusques contenus dans cette famille des Cyclades, Ainsi, trois ouvertures au manteau, l'absence de muscle spécial du si- phon, une bouche garnie de palpes semblables à celles des Vénus et des Cyclades ; enfin, des branchies courtes et inégales, semblables pour la position et la structure à celles de la famille des Conques fiuviatiles. Nous pourrions même ajouter que dans la jeunesse les Cyclades et les Congéries ont le "pied conformé à peu près de la même manière, et que ces animaux s'en servent également pour ramper quelquefois à la sur- face des corps solides.

Si nous suivions l'exemple de M. Gray, nous admettrions quatre ou cinq genres dans la famille des Dreissénides ; mais pour nous elle se réduit à un seul, celui nommé Congeria par M. Partsch. Ce que nous

SEIZIEME FAMILLE.

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dVons dit précédemment, et ce que nous allons ajouter en traitant du genre en particulier, justifiera notre opinion.

GENRE CINQUANTE -DEUXIÈME.

COnrG£Rl£. Congeria^ Parlsch.

Pl. 37. f. 9. n. 1 5i i6.

CARACTKREs GENERIQUES. Animal allongé, trigone , lon- gitudinal , inytiliforme , ayant les lobes du manteau simples et réunis dans la plus grande partie de la circonférence. Une petite ouverture antérieure pour le passage ‘du pied et d’un byssus. Deux siphons courts et inégaux, le branchial large, dilaté, garni en dedans et sur son bord de nombreux tentacules courts et pointus; siphon anal simple, quelques tentacules dispersés sur le manteau entre les deux siphons. Pied vermiforme, long, étroit, cylindracé, fendu à son bord inférieur, et portant à sa base un byssus filamenteux. Bouche petite, subtefmi- nale; palpes labiales courtes et étroites. Deux paires de feuil- lets branchiaux assez épais, parenchymateux, lisses, inégaux, la paire externe la plus petite. Deux muscles adducteurs des valves : l'antérieur petit, très courte situé sous les crochets; le postérieur beaucoup plus grand et subcylindrique.

Coquille allongée, longitudinale, mytiloïde , triangubaire , ayant les bords simples parfaitement clos , si ce n'est en avant et en bas, oùs’ouvre une petite fente pour le passage du byssus. Crochets terminaux très pointus, droits ou courbés. Gharnière simple et sans dents ; ligament externe , peu allongé , saillant. Deux impressions musculaires : Tune pètite , antérieure , située au-dessous des crochets , sur une lame transverse et triangu- laire; l’autre postérieure , ovale ou circulaire.

SYNONYMIE GENERIQUE. ilytUus , Pallas , Hchroetei’, Chemnitz, Gmeîin , Georgi , de Baer, Wood, Sowerby,

LES DRElSSENtDES.

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Pfeiffer, Kickx, etc. Cangeria, Partsch, Bro\V'n5 Kôiiig, etc.

Dreiüsena , Vanbeneden, Eichwald, Bensoii , Sowerby, Gray, Nyst , Picard, Morris. Tichogonia, Rossmaessler, Millier, Herausgeber. Mytüina, Mytilomia , Cantraine.

DytliçLlmia ^ Jay.

OBSERVATIONS. Une coquille découverte par Pallas dans les eaux douces de la Russie a été mentionnée par le célèbre naturaliste sous le nom de Mijtüus 'pohjmorphm. Confondant deux espèces, l’une marine et l’autre d’eau douce, le savant naturaliste auquel la science est redevable de travaux du plus grand mérite, a fait naître la croyance qu’une même espèce de mollusques pouvait habiter à la fois les eaux douces et les eaux salées ; et , si la vérité de ce fait s’était établie par de nouvelles observations , elle aurait été la seule et la plus étonnante exception que l’on pût citer dans toute la classe des Mollusques. Le fait d un Mytilus dans les eaux douces était déjà assez extraordinaire par lui-méme pour attirer l’attention des naturalistes; et cependant, depuis Pallas jusqu'à nos jours , l’espèce retrouvée dans d'antres lieux , en recevant divers noms, a toujours été admise sans difficulté parmi les Moules.

Personne, jusqu’en 1835, n'avait cherché à reconnaître si l'animal est en effet semblable à celui des moules marines. Il était intéressant cependant do s’assurer si un genre aussi essentiellement marin que celui des Moules possède une es|)èce dans les eaux douces ; car autre chose est d’admettre une, même espèce vivante en môme temps dans les eaux douces et dans les eaux salées, ou d’admettre que des espèces dif- férentes d’un môme genre [leuveut sc trouver à la fois dans la mer et les eaux douces On connaît un assez grand nombre de genres qui ont des espèces marines et d’autres fluviatiles; mais jusqu'ici on ne peut citer aucun exemple authentique d’une espèce de mollusque vivant in- différemment dans les eaux douces et dans les eaux salées. Les applica- tions multipliées que l’on a faites depuis quelques années de la conchy- liologie à la géologie rendaient très intéressantes les recherches entre- prises à ce sujet; et on le comprendra facilement, car on aurait pu rapporter à des dépôts marins des couches formées dans les eaut douces, l’on aurait pu croire à des méhi-ngos qui n’auraient eu au- cune réalité.

En '1835,‘M. Parlsch publiait dans les Annales du Muséum de Vienne un mémoire sur des coquilles fossiles trouvées dans les terrains tertiaires des environs de Vienne. Une étude attenlivé de ces coquilles

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SKIZIEMfc FAMILLE.

fit reconnaître à ce naturaliste des caractères qui avaient échappé à ses devanciers; confondues parmi les Moules, il proposa pour elles le genre Co7igcria. A la jnômo époque, M. Vanboneden, après avoir étudié rani- mai du Mytijus pohjmorphm de Pallas, s’aperçut qu’il était fort différent de celui des moules marines, et il établit pour cette espèce un nouveau genre auquel il imposa le nom de Dreissena. Bientôt ce genre fut admis par un certain nombre de naturalistes; cependant, deux années plus tard, M. Rossmaesslcr n'ayant pas eu connaissance des travaux de MM. Partsch et Vanbeneden, proposait le genre Tichogonia pour ce môme Mytilus polymorpkus de Pallas. Le genre Dreissena avait sur ce dernier la priorité, et pour un certain nombre de personnes il semblait que les genres Congeria et Dreissena pouvaient rester en mémo temps dans ta méthode. En effet, l'espèce principale du genre de M. Partsch se rapproche tellement des Isocardes par sa forme, que Ton croyait trouver dans celte coquille le type d'un genre distinct de celui de Van- beneden. Des études plus complètes sur des matériaux plus nombreux ont fait justice de cette opinion peu fondée, et aujourd’hui l'identité des caractère.! génériques des Congeria et des Dreissena est établie de la manière la plus irrévocable. Le genre de M. Partsch devra donc sub- sister, car on ne peut admettre la priorité du genre Enocephalus de Münster. Quoique mentionné par nous en 1 833, ce genre est resté manuscrit dans la collection de l’auteur, et n’a pas reçu une publication suffisante pour ôtre reconnu par tous les conchyliologues. Malgré tous ces noms précédemment connus, M. Cantraine en proposa encore un autre, celui de .)fylilina, que bientôt après il transforma en Mytilomyaf dans le Bulhlin de l’Académie de Bruxelles ( 1 847]. La synonymie géné- rique que nous avons rapportée en tête de ce genre indique de quelle manière les conchyliologues se sont partagés entre les différents noms que le genre Congeria a successivement reçus. Le plus grand nombre d’auteurs ont conservé le nom de Dreissena , et cependant nous croyons, avoc M. Uerrmannsen, que le nom de Congeria doit être préféré.

M. Gray, auquel nous avons quelquefois reproché de multiplier les divisions méthodiques , nous semble celte fois avoir raison de proposer une famille spéciale pour le seul genre Congeria. Nous avons vu précé- demment par quels caractères cette famille se justifie, et ce que nous allons ajouter sur le genre contribuera à faire sentir mieux encore la né- cessité de la famille.

Ayant discuté, eu traitant de la famille des Congéries, la place qu’elle doit occuper dans la méthode naturelle , nous n’avons plus à nous oc- cuper içi de cette question, et nous allons passer immédiatement à l’ex-

LES DREISSENIDES.

position détaillée des caractères de la coquille et de l’animal du genre Congérie.

Les coquilles du genre Congeria se présentent sous des formes assez diverses , mais qui se rattachent toujours à celles qui sont propres au genre M^Jtîlus et à ses diverses modifications. Les unes sont tout à fait mytiformes , allongées , ayant les crochets pointus , terminaux et rap- prochés. Dans quelques espèces ces parties, plus courtes, sont dépas- sées par un côté antérieur très court , et alors elles prennent l’appa- rence des Modioles. Parmi les espèces a crochets pointus, il en est quel-, ques unes de fortement carénées et qui sont très bombées ; elles ont une tendance à devenir subcordiformes. Vues du côté antérieur, elles ne manquent pas de quelque ressemblance avec les Buccardes de la sec- tion des Hémicardes. Enfin il est d’autres espèces chez lesquelles l’angle antérieur des valves s'arrondit. Les crochets s’inclinent l’un vers l’autre en se contournant en spirale , et alors la coquille prend dans sa forme générale l’apparence d’une Isocarde. Telles sont dans leur ensemble les modifications qu’on observe dans la forme extérieure des coquilles que nous réunissons aujourd’hui dans le genre Congeria. Leur surface extérieure est lisse, ou marquée de stries irrégulières d’accroissement. Dans les espèces vivantes, un épiderme peu épais, jaunâtre ou brunâtre, couvre toute la coquille, sans la déborder. Cet épiderme se détache avec assez de facilité par la macération. Nous no pouvons parler de la couleur que d’après les espèces vivantes ; nous n'en retrouvons que de faibles traces sur les espèces fossiles les mieux conservées. Les espèces vi- vantes sont des coquilles ordinairement blanches ou jaunâtres, sur lesquelles se dessinent de larges zones iransverses et irrégulières plus ou moins onduleuses, d’un beau brun noirâtre foncé. Les variations sont nombreuses ; si d’un côté il y a des individus très pâles, d’un autre il y eu a d’extrêmement bruns, par suite de l’élargissement successif des zones transverses, qui finissent par se toucher et se confondre. Dans la grande espèce de Congérie de l’argile du bassin de Vienne {Congeria subglobosa, Parstch), nous trouvons dans les individus les mieux con- servés des traces non équivoques de la coloration : tout le côté anté- rieur était d’un brun pâle, tandis que le côté postérieur, à partir d’une limite très nette , est d’un brun foncé produit par un grand nombre de fascies trausverses et irrégulières , séparées par des intervalles plus étroits et plus pâles. Les bords dans ces coquilles sont simples ; ils sont minces et tranchants, même dans les espèces les plus épaisses et dans les individus les plus vieux. Lorsque les valves sont rapprochées, elles sont closes assez exactement: cependant le côté antérieur, circonscrit

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SEIZIÈME FAMIELE.

par un angle plus ou moins aigu, est ordinairement déprimé vers le centre, et celle dépression coïncide à une fenle plus ou moins large que laissent les valves pour le passage du pied et du byssus : par les Congéries ressemblent à la plupart des Moules, qui ont aussi en avant une ouverture pour le passage des mômes parties, En arrière, la co- quille est ordinairement fermée avec beaucoup d'exactitude ; cependant il existe une espèce dans les terrains tertiaires de la Crimée ( Mylilus apertus) qui , ainsi que son nom l’indique , a un bâillement assez large pu coté postérieur pour le passage des siphons qui probablement était plus considérable que ceux des espèces actuellement vivantes. Le côté postérieur présente vers le sommet une dépression peu profonde, dans laquelle on aperçoit un ligament externe peu épais, mais très allongé, et contenu dans une rigole en partie recouverte par les bords légère- ment saillants du corselet. Le bord cardinal est simple ; il ne présente aucune trace de charnière articulée,

La surface intérieure des Congeria n’est jamais nacrée , tandis que ^ans les Moules les espèces sont revêtues à l’intérieur d'une couche nacrée plus ou moins épaisse. Quoique cette ditférence dans la nature intime du test ne soit pas en apparence d’une très grande importance, cependant il faut en tenir compte, quand ce ne serait que comme carac- tère empirique propre à rendre plus facile la distinction de deux genres si voisins. La surface interne des Congérie.s, ordinairement blanche, est quelquefois tachée irrégulièrement de gris ou de. brunâtre.

Nous devons maintenant apporter une attention spéciale à l'étude de je surface interne de nos Congeria. Lorsqu'on a l’habitude de voir dans les autres coquilles dimyaires les impressions musculaires imprimées sur la surface môme du test , on éprouve quelque peine à reconnaître l’impression musculaire antérieure des Congeria ^ parce qu'elle se trouve sur un point de la coquille elle n’existe point ordinairement. En effet , une lamé transverse se développe au-dessus de la cavité des cro- chets , et c'est sur celte lame que se trouve l’impression musculaire dont nous parlons. Il est certain que celte impression est placée de la manière la moins favorable pour rapprocher les valves lorsque l’animal se contracte ; mais, d’un autre côté , les lamelles se trouvant très rap- prochées lorsque les valves sont dans leur contact naturel , il en résulte que le muscle antérieur doit avoir des fibres extrêmement courtes , et par conséquent d'une action pins puissante que ne le serait colle d’un muscle plus gros , mais à libres plus longues et attachées sur des plans presque perpendiculaires. L’impression dont nous parlons est subtrian- gulaire : quelquefois elle se creuse assez profondément dans l’épaisseur

LES DHBISSÉNIDES.

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(le la lamç Li-ansverse. L'impression musculaire postérieure est tr^H éloignée de l’antérieure; elle est située tout près du bord postérieur, ce qui la rend submarginale. Celte impression est ovale-obronde ; elle egt toujours simple , et, en cela , elle diffère d’une manière reniarquat)le de celle des Moules. Deux autres impressions , mais beaucoup plus petites t^ue celles dont nous venons de parler, se montrent encore dans l’inté- rieur des valves des Congéries ; elles sont dues aux muscles rétracteurs du pied. Le rétracleur antérieur a une petite impression sur la partie interne du bord cardinal^ à une faible distance du bord de la lame trans- verse. Cette impression ovale-obronde se trouve donc dans ses rapports ordinaires avec celle de l’adducteur antérieur. lien est de même do celle du rétracteur postérieur du pied : elle est plus superftcicllo , plus diffir cile à apercevoir ; mais, ainsi que dans les autres coquilles des Acéphalés dimyaires, elle forme une sorte de prolongement caudiforme à la grande impression musculaire postérieure. Sj nous insistons sur la position de CCS petites impressions musculaires, c’est afin de bien faire comprendre que les traces laissées par l'animal sur sa coquille sont celles d’un mol- lusque qui a beaucoup moins d’analogie avec celui des Mouleg qu’avec celui des Cyclades on celui des Buccardes. L’impression paliéale est sim- ple ; elle est très rapprochée des bords de la coquille , et quoique l’animal soit pourvu de siphons , cette impression ne montre aucune inflexion postérieure annonçant la présence de ces organes. Cependant l’espèce fossile que nous citions tout à l’heure, le Mytilus rangé par

nous parmi les Moules à une époque le genre Congma nous parais- sait encore douteux ; cette espèce , disons -nous , présente du côté pos- térieur uneinflexiou de l’impression du manteau , largo et peu profonde qui semble annoncer, non pas l’existence d'un muscle rélracteur spécial, mais un élargissement notable dans les fibres musculaires du manteau.

En observant le Mytilus &//ücu/aris et quelques autres espèces ana- logues,, leur trouvant sous le crochet une lame Iransverse pour le mgsçle adducteur antérieur, nous avions pensé que les Congéries et ces espèces de Mytilus avaient assez d’analogie pour faire partie du môme genre, Et comme nous n’avions pas le moindre doute que le M. biloç\tl({ris est une véritable Moule, nous en avions conclu l’admission des Congéries à titre de section des Moules. Mais aujourd’hui notre opinion s’est modifiée par les faits nouveaux dont la science s’est enrichie, et ce moyen de rap- prochement est en réalité insuffisant. Quelques zoologistes avaient pensé que ranimai de ce Mytilus bitocularis ofl’rirait quelques caractères géné- riques propres à séparer ce groupe des Moules, et à l’entraîner dans la famille des Congéries; mais l’expérience a trompé leur attente, et l'ani-

SEIZIÈME FAMILLE.

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mal de ces espèces à crocliels cloisonnés ne diffère en rien de celui des autres Moules ; par conséquent cet animal est extrêmement différent de celui des Congéries dont nous allons donner la description.

Nous traitons ici d’un genre dont la place dans la méthode peut être encore débattue; il nous a paru nécessaire de présenter avec détail tous les éléments de la discussion , et c’est dans le but de l’éclairer autant que possible que nous décrirons avec soin l’animal.

La forme générale de la coquille indique celle de l’animal. Les espè- ces vivantes sont niytiloïdes : leur animal est donc allongé, étroit, longitudinal , c’est-à-dire plus long que large ; il se termine en avant en pointe assez aigue; son côté antérieur est aplati; il s’élargit du côté postérieur. La masse des viscères est enveloppée d’un manteau divisé en deux lobes égaux et symétriques correspondant à chacune des valves dont ils revêtent la surface interne. Mince au centre, ce manteau est épaissi à la circonférence par un muscle orbiculaire étroit, peu épais, qui suit exactement le contour de la coquille , et produit sur elle l’im- pression palléale dont nous avons parlé. En arrière , dans la hauteur du bord postérieur, dans la portion qui correspond aux siphons, le, muscle orbiculaire est plus épais et un peu plus large. Les lobes du manteau se joignent entre eux sur presque toute la circonférence; l’ànimal se trouve ainsi contenu dans un sac dont les ouvertures sont fort petites. La première de ces ouvertures se montre en bas ou en avant ; elle est ovale, subcirculaire ,• et elle coïncide avec l'ouverture antérieure de la coquille. Ainsi que chez les autres mollusques, elle est destinée à donner un passage au pied et en môme temps à un byssus. En arrière , le man- teau présente deux autres ouvertures; elles s’offrent sous la forme de deux siphons courts et inégaux. Mais avant de décrire ces organes , nous pouvons ajouter que les bords du manteau sont simples et dépour- vus de tentacules dans toute la longueur du bord antérieur. Ces bords, soudés entre eux , sont susceptibles de s’étendre assez pour laisser aux valves le moyen de s’enlr’ouvrir, et permettre à la fois le passage du pied et des siphons.

Comme nous venons de le dire, les siphons sont inégaux et l'animal les tient, l’un par rapport à l'autre, dans une direction constante. Ainsi, tandis que le siphon branchial se projette dans le prolongement de l’axe longitudinal , le siphon anal fait avec lui un angle d’environ 45 de- grés. Le siphon branchial , dans la plus grande extension que lui donne l'animal , peut acquérir près du tiers de la longueur totale. Etroit à la base, il se dilate en pavillon de trompette; on voit s’élever sur son bord une série de tentacules plus ou moins serrés, maisenurts, coniques,

LES 1)KKÏSSKN1DE5.

et cepondaul très grêles. Ces tentacules ne sont pas les seuls ; quand on examine la surl'ace interne du siphon , on la trouve hérissée de tenta- cules plus allongés, ordinairement recourbés au sommet : de sorte que l’entrée du siphon est en réalité obstruée par un nombre considérable de tentacules, mais dont la quantité est variable selon les individus. Chez ceux qui en ont le moins , nous en comptons vingt-cinq chez ceux qui en ont le pins , il en existe au moins le double. Nous avons établi cette comparaison entre des individus de môme taille et qui nous ont paru du même âge. Nous avons reconnu chez les jeunes individus un nombre toujours moindre de tentacules. Deux rangées de papilles commencent à la base du siphon branchial , se continuent jusqu'au siphon anal , et viennent se joindre au point le manteau disparaît en arrière dans l’intérieur de la coquille. Le siphon anal est étroit, court; il aune large base, et il est semblable dans son profil à un cône déprimé ayant, le sommet tronqué près de son extrémité. Ce sommet est percé d’une ouver- ture d’un petit diamètre à bords simples et membraneux sur lesquels on n’apercoit aucune trace de tentacules; mais l'apimal a une manière spéciale de clore ce siphon: il ne le contracte pas comme un sphincter, mais il rapproche les deux parois et les contourne ensuite en forme d’S semblable à celle du caractère romain.

Si nous détachons l'animal de sa coquille, nous le trouvons üé à son test par deux muscles adducteurs fort inégaux : l'un, antérieur, très petit, triangulaire, fort aplati, est attaché sur l'impressiou que nous avons fait remarquer sur les lames transverses des crochets ; l’autre, beaucoup plus grand, estsubcylindriquc ; il est tout près de l’extrémité postérieure de l'animal .elle siphon anal vient s'appuyer sur lui , ainsi que dans tous les autres Mollusques dimyaires.

La masse viscérale est allongée; elle est cependant plus ramassée que dans les Moules , car elle est destinée à réunir un plus grand nombre d'organes ; elle produit une saillie assez notable dans l’intérieur du man- teau; elle se prolonge eu arrière, prend la forme d’un cône obtus , et s'avance ainsi jusque vers l’eulrée du siphon branchial lorsqu’elle est dilatée par l’accroissement des organes delà génération.

A l’extrémité antérieure de cette masse abdominale et au-dessous du muscle adducteur anterieur, se trouve une ouverture buccale lransver.se, ovalaire et assezgrande. Deux lèvres membraneuses, transparentes, gar- nissent cette bouche en se prolongeant do chaque côté du corps en une paire de petites palpes labiales , plus longues que larges, triangulaires, pointues et très différentes de celles des Moules,. semblables au contraire à celles des Vénus et des Cyclndes, Ces palpes , parfaitement égales,

T. I. PAKTIE. |I*

SEIZIEMK FAMILLE.

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.soiil couverlès (Je lamelles Iransverses, et elles sont fixées aux parties latérales du corps par leur côté le plus court.

Le pied a une forme toute spéciale dans le genre qui nous occupe ; il ressemble beaucoup à celui des Aloules, mais il a non moins d’analo- gie avec celui des Saxicavcs et même des Gastrochènes. Au moment les organes de la génération sont en turgescence, le pied semble partir d'un large crypte assez profond , circonscrit de tous les côtés par le gonflement des organes en question. Ce pied est vermiforme, allongé, subcylindracé, et susceptible de mouvements très divers; il contient, comme celui des Moules et des Saxkaves, un organe propre à la forma- tion du byssus. Les filaments de ce byssus se détachent d’une fente assez profonde qui règne dans presque toute la longueur de la face in- férieure du pied. A mesure que ranimai vieillit, il ajoute de nouveaux filaments à ceux que contient déjà son byssus, et cet organe est im- planté à la base du pied , dans un crypte membraneux qui sort de la partie fibreuse de l’organe locomoteur. Lorsque nous décrirons l’animal des Moules, nous ferons connaître l’appareil musculaire assez compliqué qui sert au mouvement du pied, dans l’épaisseur duquel le byssus est solidement engagé. Dans les Congeria une partie de cet appareil manque, et les muscles propres du pied sont tout a fait semblables, pour le nombre et la disposition, à ceux des autres Mollusques acéphales dimyaires. Cepen- dant nous devons l’ajouter, c’est avec les Gaslrochènes que les Congêries ont le plus de ressemblance à cet égard. A mesure que le pied se dé- veloppe, ses parois deviennent assez larges pour embrasser toute la masse abdominale comme dans un sac. Chez les Mollusques à pied ver- miforme, tels que les Clavagelles et les Gastrocliènes , les parois ont une si faible importance, qu'elles ne peuvent revêtir la masse abdomi- nale, et alors les fibres se transforment en avant et en arrière en une paire de tendons grêles qui vont s’attacher à la coquille en passant à travers la masse des viscères. Nous observons une disposition semblable chez les Congêries^ les muscles rélracteurs antérieurs se détachent de la base du pied et remontent parallèlement l'un, à l'autre, passent der- rières les lèvres, et vont s’allacher à la coquille un peu au-desSous du muscle adducteur antérieur. Les muscles rétracteurs postérieurs du pied sont un peu plus épais, un peu plus divergents; ils sont noyés dans les organes de la génération, et ils vont se terminer à la coquille en avant du muscle adducteur postérieur.

L.orsque, par un accident quelconque, le byssus d'une Congérie a été brisé , l’animal rampe avec son pied sur les corps solides , portant sa coquille horizontalement, exactement comme le ferait un Mollusque

I.ES DREISSÉNIDKS.

64;^

gasléropode. Nous avons observé ce mode de locomotion chez de vieux individus que nous avions détachés dans lo dessein d’en faire la dissec- tion : mais ce mouvement est tout à fait spontané chez les individus jeunes qui se déplacent pour choisir un lieu d'iiabitation , déplacement qui s’opère chez eux lorsqu’ils ont déjà 6 à 8 millim. de longueur. Il est intéressant de voir ces jeunes animaux ramper à la surface des vases dans lesquels on les tient, parcourir des groupes d’individus déjà con- solidés, et choisir une anfractuosité pour s’y loger définitivement et com- mencer à y filer leur byssus. Ce mouvement de reptation est lent. Il nous a paru se produire à l’aide du même mécanisme qui détermine la progression chez les Limaces, les Hélices et les autres Mollusques mar- cheurs. Les conchyliologues savent qu’il arrive souvent aux Mollusques gastéropodes aquatiques, et cela peut s’observer facilement chez les Lymnées , qu’ils se renversent à la surface du liquide et continuent à ramper sur cette surface avec autant de rapidité que s'ils étaient ap- puyés sur un corps solfde. Ce mode de locomotion difficile à expliquer, nous l’avons observé dans de jeunes Congéries qui se sont suspendues à la surface dii liquide, ayant leurs siphons dilatés et la surface plane du pied a la surface de Teau. Jusqu’ici c'est le seul exemple d’une telle locomo- tion que nous connaissons parmi les Mollusques acéphalés. Nous ne par- lerons pas du mode de formation du byssus : nous traiterons de cet ap- pareil plus particulièrement lorsque nous en serons arrivé à la famille des Alytilacées. Un travail très intéressant publié par M. Muller, dans les Archives de Viegmann , travail dont nous avions vérifié l’exactitude avant de l’avoir consulté , nous fournira tous les renseignements dont nous aurons besoin pour faire connaître en détail la structure du byssus chez les Mollusques acéphalés.

De chaque côté du corps descend, dans la cavité du manteau, une paire de feuillets branchiaux qui, chez ranimai vivant, sont d’un jaune orangé assez intense.. Ces organes sont inégaux ; la paire interne étant plus allongée ét plus large que la paire externe. Les feuillets internes commencent par un pointe aigue qui s’interpose entre les palpes labiales et s'avance jubqu’au voisinage de la bouche. Ils s’élargissent en des- cendant en arrière, et, un pou au-dessous des palpes, les feuillets externes commencent: plus bas, ils s'attachent par la ba.se aux feuillets internes: tous deux gagnent l’extrémité postérieure de la masse abdominale; la paire du côté droit se soude alors avec celle du côte gauche, et après celte réunion ils se continuent au-devant du siphon anal, s’attachent par la Base à la portion du manteau qui recouvre le muscle adducteur posté- rieur, et iis interceptent toute communication entre la cavité du siphon

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SEIZIEME FAMILLE.

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anal et celle du manteau. La structure des organes respirateurs est tout à fait semblable à celle des Vénus et des autres genres que nous avons examinés jusqu’ici; elle est, par conséquent, différente de celle des Moules : en effet, dans ce dernier genre, non seulement les branchies sont disposées autrement sur les parties latérales du corps, mais elles sont composées de filaments qui se disjoignent avec la plus grande faci- lité, et chez lesquels on ne retrouve plus la même structure vasculaire que celle qui se montre dans les branchies du genre que nous décrivons.

Les Congeria paraissent être hermaphrodites; les observations que nous avons faites à ce sujet ne nous paraissent pas encore assez con- cluantes, et nous avons besoin de les répéter dans le moment oii ces animaux seront prêts à pondre. Nous avons trouvé- des individus chez lesquels l'ovaire était blanc ; chez ceux-là nous avons observé un nom- bre considérable d'œufs encore peu avancés , dans lesquels on distin- guait cependant la vésicule dePurkinge, environnée d’un grand nombre de globules sublransparents. Au milieu de la liqueur laiteuse répandue par la déchirure de 1 ovaire , nous avons remarqué des spermatozoïdes formés d'un corps ovalaire très étroit, terminé par une queue filiforme excessivement ténue. Ces animalcules ne jouissaient pas d’un mouve- ment très considérable ; quelques uns cependant se mirent a nager en oscillant lorsqu’une goutte d'eau délayait la matière de l’ovaire. D’au- tres individus do Congeria nous ont offert' un organe générateur d’un jaune orangé très intense. Cet organe, sensiblement granuleux, ayant été observé par lambeaux , nous a offert une masse énorme d'animaux spermatiques semblables à ceux que nous venons de décrire précédem- ment , et qui vécurent plusieurs heures sur le porte-objet du microscope, nageant avec rapidité et conservant le mouvement propre à ce. genre d'animaux. Lorsque les globules de l’organe é.taient conservés dans leur entier, il se présentait sous l'apparence de très grandes capsules fermées de toqtes parts et sur les bords desquelles se manifestait le mou- vement d’organes vibratiles excessivement fins et excessivement multi- pliés. En plaçant quelques uns de ces singuliers organes sous le com- presseur et en les faisant éclater, il en est sorti une immense quantité d’animaux spermatozoïdes, ainsi que de nombreux globules trauspareiits, arrondis et de plusieurs diamètres. Il semblerait que les organes dont nous ï)arlons auraient leurs parojs formées par le corps lui-même des spermatozoïdes, dont la queue, libre au deliors, se présenterait à la .sur- face sous la forme de cils vibratiles. Chez ces individus à organe de la génération d’un jaune orangé , nous n'avons trouvé aucune irac-e d’ovules ou d’œufs.

i.ES DUEISSENIDES.

(>4-5

Nous ne terminerons pas ce qui a rapport à l’animal curieux des Congéries sans dire quelques mots du système nen^eux. M. Vanbe- neden, dans le mémoire que nous avons eité de iiii, s’est attaché parti- culièrement à la description de ce système d'organes; mais il ne l’a pas fait connaître d'une manière complète; il aurait semblé d’après lui qu’il n’était point semblable à celui des autres Mollusques acéphales. M. Canlraine , dans une note publiée dans le Bulleiin de l’Académie de Bruxelles, a judicieusement rectiGé les idées de M. Vanbeneden , et a complété la connaissance du Système en question en faisant connaître le ganglion pédieux qui avait échappé aux investigations du professeur de Louvain. Nous avons nous-même étudié ce système avec un soin minutieux; nous devons dire que par sa distribution il rentre dans Je plan commun à tous les Mollusques acéphalés'dimyaires. Si, dans un certain nombre de ces Mollusques , il existe deux ganglions postérieurs accolés par leur bord interne, il y eu a d'autres chez lesquels la soudure des deux ganglions est tellement parfaite , que Ton n’en aperçoit plus qu'un seul : c’est ce qui a lieu chez les Congéries. Ainsi, chez ces Mol- lusques on peut compter quatre ganglions principaux, comme dans tous ceux de la même classe. La distribution des filets nerveux est semblable à ce que nous savons déjà des autres genres de la. plupart des familles que nous avons parcourues. '

Des faits que nous venons de rapporter, il en ressort avec évidence que les Congéries ne peuvent rester dans la famille des Mytilacées. Le manteau est fermé chez les Congéries, il est ouvert chez les Moules. Dans le premier genre , il est pourvu de deux siphons ; dans le deuxième , il n y a plus aucune trace de ces organes. Si le pied et le byssus sont semblables, la bouche et les palpes labiales sont très diiférenles. Mais ce qui est bien plus essentiel encore , ce sont les différences considéra- bles qui se manifestent dans les organes si importants de la respiration. Le système nerveux lui-mêrne présente des différences importantes : par conséquent, si 1 on ne se laisse pas entraîner par la forme extérieure et par la manière de vivre, on devra de toute nécessité éloigner beau- coup des animaux que d’abord les zoologistes ont rapportés à un même genre , et que plus tard ils ont laissés, soit dans la môme famille , soit dans des familles voisines. Nous concluons de tout ce qui précède . que le genre Congério doit remonter beaucoup dans la série des Mol- lusques acépbalés, et qu’il doit trouver sa place, ainsi que nous l’avons dit précédemment, non loin de la famille des Conques fluviatiles.

On ne connaît jusqu ici qu’un petit nombre d'espèces vivantes appar- tenant au genre Congério. Trois sont citées, 'et toutes trois sont propres

SEIZIEMK FAMILLE.

6\6

aux eaux douces. L'une, découverte par Pallas, est actuellement ré- pandue dans presque toute 1 Europe. On .la croyait d'abord propre aux régions qu’arrosent le Danube et ses divers affîaents. Peu à peu cette même espèce a été découverte dans d’autres régions , et notamment dans les rivières de la Hollande et do la Belgique. Plus tard elle ,ge retrouva aussi dans les Docks de Londres, et enfin elle pénétra récem- ment en France, particulièrement dans les rivières qui ont des com- munications avec celles de la Belgique à l’aide des canaux.

Un savant observateur d'Abbeville, M. Bâillon , à l’obligeance duquel nous devons la communication Congéries vivantes , a fait des obser- vations précieuses à l’occasion de l’apparition subite de la Congérie dans les eaux de la Somme et de ses affluents. Si l’on examine les allu- vions anciennes dans lesquelles se retrouvent à l’ctat fossile la plupart des Mollusques actiiollement vivants dans le. môme pays , on n’y retrouve pas la moindre trace des Congéries. Dans les alluvions plus récentes , dans les tourbières, dans les dépôts limoneux , produits récents des cours d’eau . on ne retrouve non plus aucune trace des coquilles qui nous occupent. Il y a sept ou huit ans les Congéries étaient si peu con- nues des naturalistes qui habitent le département de la Somme, que l’un d'eux, voulant observer l’animal, en sollicita d’un correspondant belge, et en obtint quelques exemplaires seulement; mais depuis les eaux de la Somme et de ses petits affluents sont infestées de Congéries , à ce point que l’on redoute que leur accumulation ne devienne un obstacle à la circulation de Peau. Voilà donc un Mollusque qui a paru subitement dans un pays il n’existait pas , et qui en un petit nombre d'années Æ’est multiplié d’une manière extraordinaire. Plusieurs obser- vateurs ont annoncé avoir vu dans les sables de l’Oise des coquilles de Congéries; et comme, en général, ces animaux se sont trouvés dans des rivières qui donnent passage aux bateaux qui viennent de la Belgique, on a supposé qu’ils ont été transportés par ces bateaux et répandus dans toutes les eaux qu’ils traversent. II y a cependant une observation sérieuse à ce sujet , et elle n’avait pas échappé à la sagacité de M. Bâillon. Depuis très longtemps , en effet, des communications sont ouvertes entre les eaux de la Somme et celles de Belgique. Depuis plus de cinquante ans des bateaux de commerce vont d’un pays dans l’autre. Pourquoi les Congéries n’ont-elles pas été apportées plus tôt? Quel que soit, au reste, le mode de transportation au moyen duquel ces Mollusques se sont successivement propagés, il n’en reste pas moins ceci qui mérite l’attention des naturalistes : c’est que nous sommes té- moins du fait do la dispersion d’une espèce , fait analogue à ceux qui se

MiS DRKISSEMÜES.

sont passés à des époques plus anciennes, que nous révèlent l'étude de la géologie et celle surtout des fossiles et de leur distribution dans les couches de la terre. Il est curieux de voir une espèce habitant très anciennement des régions elle a laissé de nombreux fossiles, se répandre de proche en proche et s'élever pour ainsi dire dans la chro- nologie des terrains quelle est appelée à caractériser à leur tour. Fos- sile dans l’étage tertiaire supérieur, le Contferia polymorpha a traversé toute la période quaternaire, et la voilà qui apparaît dans les dépôts les plus modernes de nos fleuves, elle laissera des témoignages des lon- gues périodes pendant lesquelles un Mollusque peut subsister, inva- riable témoin des changements nombreux qui se sont opérés autour de lui sans que lui-même en ait ressenti la moindre influence.

Des deux autres espèces , l’uno est propre aux eaux douces du Sé- négal , et l'autre à celles de l'Arhérique centrale. Nous n'admettons pas parmi les espèces du genre celle qu’y rapporte M. Benson , dans le Catalogue des coquilles de Chusan , dans le tome IX des Annales des sciences 'iiaiurelles de Londres. Çe naturaliste dit de sa coquille qu’elle est plissée en dehors et qu’elle est nacrée, en dedans, deux caractères qui n’appartiennent pas aux véritables Congéries. M. Herausgeber, dans \qs Archives de TFïegfnian ( 1 838), a également proposé d'intro- duire dans le genre toutes les Moules marines qui ont une cloison dans les crochets. Nous avons vu pourquoi ces espèces sont inadmissibles dans le genre Cohgérie.

Les espèces fossiles sont beaucoup plus nombreuses. Nous ^ en comptons douze, et dans ce nombre ne sont pas compris .les Mijocon- ques que M. Gray rapporte avec doute à la famille des Dreissénides. Le genre Myoconque a certainement beaucoup d'analogie avec les Congé- ries, du moins par la position du muscle adducteur antérieur, situé, à ce qu’il paraît . si ce n’est sur une lame Iransverse dominant la cavité des crochets, du moins sur un épaississement tcstacé occupant la môme place. Mais ce qui rend impossible, quant à présent, l’admission des Myoconques parmi les. Congéries , c’est que l'impression du muscle postérieur, dans plusieurs espèces , est semblable à celle des Moules ; par conséquent , ces espèces figurées parmi les Myoconques sont pour nous de véritables Moules, dont nous aurons occasion de reparler dans la suite. Quant aux autres Myoconques, elles sont pour nous de véritables Cardites , voisines d’une espèce vivante bien connue , le Cardita nephre- tica. Par l’exclusion des Myoconques , le genre Congérie ne se trouve pas dans les terrains secondaires. Il commence dans les terrains ter- tiaires de l’étage moyen ; car nous n’y admettons pas des espèces

SEIZIKME I-aMILLE.

0/,8

nienlioiiuées par Al. Alelleville dans les sables inférieurs du bassin de Paris : ce sont de véritables Moules.

Parmi les espèces fossiles , il y en a une qui a son représentant actuellement vivant: c’est le Congeria polymorpha. Quelques personnes ont prétendu que le Congeria Brardi , avait aussi dans le DreisserM afrimna de Vanbeneden son représentant vivant. Cette dernière espèce, dont on trouve des débris dans les terrains tertiaires moyens de Mayence, de l'Angleterre et de la Belgique , attesterait les changements considé- rables qui sont survenus dans la température de l'Europe centrale , s’il est vrai que son analogue vivant a quitté les régions tempérées de l’Europe pour trouver au Sénégal une température qui lui est néces- saire. Mais l’identité des deux espèces nous paraît encore contestable , malgré l'opinion d’un certain nombre de naturalistes qui n'hésitent pas à l’admettre.

Dans le terrain tertiaire moyen , nous connaissons sept espèces qui presque toutes sont fossiles dans le bassin do Vienne , ou dans d’autres parties de l’Allemagne, de la Gallicie ou de la Wolhynie. Nous signa- lerons particulièrement les espèces suivantes :

•1° Congeria Basleroti^ confondu autrefois avec le Mytilus Brardi.

Il se trouve à Bordeaux, à Dax, en Touraine, à Vienne et en Bel- gique.

'2® Congeria Brardi.

Cette espèce est encore plus répandue que la précédente; elle est abondante en Allemagne, aux environs de Mayence, en Pologne, en Gallicie , et elle est également citée dans les terrains tertiaires moyens du Vicentin et de l’Angleterre.

Les terrains tertiaires supérieurs ne contiennent point de Congéries , si ce n’est ceux de la Crimée qui sont dans le voisinage de la Caspienne , et que AT. de Verneuil a fait connaître. Nous-même avons décrit quatre espèces sous les noms de Mytilus inœqutvalvis, rostriformis , subcari- natus et apertus , qui conservent leurs noms spécifiques en passant dans le genre Congérie auquel elles appartiennent.

Parmi les espèces vivantes, une seule, celle qui peuple en abondance les eaux douces de l’Europe centrale, le Congeria poUjmorpha, se' trouve aussi fossile en Allemagne dans les terrains quaternaires.

LES DRElSSEiSlDES.

^49

1. Congérie polymorphe. Congevia 'pohjmorpha, Pallas.

PL 37. f. 9. 10. II.

6’’. Testa oblongâ ^ arcuatâ ^ injlatn ^ lœvigatà^ dorso carinata^ intüs albidd ^ eicths suh epidermide flavo ^ Jasco transversim zonatd ; timbonibus acutts y terminalibns ^ inths septiferis.

Mytilus polymorphus. Scliroel. Eiill. t. 3, p, 47*» n" ^7»

Pallas. Voy. «n Russie, Appendix. p. an.

Id, Gmellii, p. 33(53. u" 57.

Mvtiîns è Jiuvio Jf aJga. CbenHi. Concli. (. 1 1 . ().a56. pl. aoS. t. auaS, M. Hitgenii. Debaer, ad instaur. Soîein. adj\ inyt. nov.desc, p, 17. Kœnigsbfrg, iSaS.

47. Uneotus, Waardenbiirg, De liist. nat. Relg. indigeii. (pris pour le Myt, îineaUis de Lamk.).

iV. aren, Kikx, Dcsc. d’une nouvelle espèce de Moule.

Dreissena polymorpha. Vanbeiieden, Ann. des sc. nat. avril i835.

р. 210. pl. 8. f. I à II.

Üesb. dans Lamk. An. s. vert. l. 7. p. 5ü. n” 38.

Sowerby, Généra of sheUs. Mytilns, f.

MytUîis pol^nnorphus. Hanley. Desc. rat. p. 25o.

Id. Reeve, Conch. sysl. t. i. p. 140. pl. 102. f. 4.

Dreissena polymorpha. Gray dansTurlon, 2“ éd. p. 3or .

Tickogonia Rossroass. leon. part. i'®. p. ii3. f. 69.

Mytilus polymorphus, Scbroel. Fluss. Concl;. p. 197. n" 25.

Id. Georgy, Geog. des Russics. l. 4. p. 2207.

/J. Sow. Zool. Jüurn. I. 1, p. 084.

Id. Wood, ïud. Test. Suppl, p. 8. pl. 2. f. 6.

Mytilus polymorphus . Pleiffer, Sysl. aiiord. 3* part. p. 67.

Tichogonia polymorpha. Millier, Arch. de Wiegm. t. 4. p. i5.

Id. Muller, zur Anat. JerTiebog. Arcb. de Weig. t. 4. pl. 40. i^lytilina polymorpha. Caiitraine, Ann. sc. nat. série, t. 7. p. 3ü2. Id. Cantraiue, Rull. de Brux, t. 4, p. 106.

Dreissena polymorpha. Picard, Hist. des Moll, de la Somme, p. 3o8. Süwerby, Conch. mau. f. xSp.

Dythohnia Danubii? iày. Çat. p. 3o. 11“ iîSO.

Tichogonia Chemnitzii, Auton, Verz. p. 17.

Id, Kuster dans Cberntiitz, 2*-* éd. p. 6. n^. i . [d. r . t‘. 3. 4 . 5.

Mytilus polymorphus. Catlow, Comb. nom. p. 74. n^' 3y.

t'ossilis. Dreissena polymorpha. Vtvown ^ Lelli. t. 2. p. <)25. {Syn, pliir.

с. cclns.).

(j5o SEIZIEME FAMILLE. LES DREISSÉNIDES.

Mytilus polymorphns. Eicluv. Nal, hist. Skizze. p. 21 1.

Dreissena polymorpha, Eichw. Fanna Casp. Cauc. p. 265.

Id Bronii, inü. Faléont. t. r. p. 438.

Id. Njst, Fus», de* Bcig. p. 264 et 268.

Le Congeria polymorpha est une coquille de taille médiocre; elle est longitudinale; sa longueur est presque le double de sa largeur; la surface des valves est partagée en deux portions inégales par un angle aigu qui prend naissance aux crochets et vient aboutir au bord inférieur. Cet angle détermine la limite d’un côté antérieur aplati et même con- cave. Les crochets sont aigus, rapprochés, terminaux, à peine inclinés. Le côté supérieur, sur lequel le ligament e.st attaché, est oblique , et forme un angle d’environ 45“ avec Taxe longitudinal. L’intérieur des valves est blanc , quelquefois marbré de brun grisâtre. La surface extérieure, couverte d’un épiderme mince et subécailleux , est ornée sur un fond blanc de larges zones transversales d’un brun noir, onduleuses , quelquefois même anguleuses et en zigzag. Ces zones sont plus ou moins nombreuses selon les individus; il y en a chez lesquels elles se rapprochent et se confondent en une nuance uniforme d’un brun marron plus ou moins foncé. Les grands individus de cette espèce ont 36 millim. de long et 1 7 de large.

2. Congérie de Bastérot. Congeria Basieroii, Desh.

PI. 37. f. 15. 16.

C. Testa elongato-augustâ ^ suheompressây lœvigatâ, dorso apieeque carinato- gibbosâ; umbonibus acuth y redis y termtnnlibus , intùs septiferis,

Mytilus Brardiy Var. Basl. foss. de Bord. p. 78. 2.

An eadem spec. M, Brardi? Sow. Min. ronch. pl. 532. 1. 2.

Desh. dans Lamk. An. s. vert. t. 7. p. 54. 6.

Mytilus BasterotL Duj. Foss, de la Tour. p. 59.

Id. Graleloup, Cat. Zool. p. 6r. Un 65t.

Dreissena Basleroti. Bronn, Leth. geogn. l. 2. p. 924.

Mytilus aencirostris, Ooldf. Petref. (Verm. p. 172. 14. pl. 129. f. ii.

M. Brardiy Zieleti. Petr. AViirt. p. 78. pl. 59. f. i ,

Tichagonia Brardi. Pot. et Mieh. Cat, des Moll. t. 2. p. i36. 21.

Dreissena Basteroti. Nysl, foss. de Beig. p. 265. pl. 20. f. 7.

Bronn, Tnd. paleont. t. i. p. 438.

M. Bastérot a confondu cette espèce avec le Mytilus Brardi , en la désignant sous le litre de variété. Nous l'avons séparée, et nous lui

DIX-SËPTIÈME FAMIM.E. LES CYCLAÜES. 65 1

avons consacré le nom du naturaliste qui le premier l’a signalée à l’attention dos paléontologistes. Cette petite coquille est plus mytili- forme que la plupart des Congéries. Elle est allongée, étroite, presque équilatérale, peu bombée, et l’angle obtus qui divise la surface des valves la partage en deux parties presque égales. Vers le sommet des crochets, l’angle dont nous parlons devient aigu , mais il disparaît rapi- dement, il est tout à fait effacé vers l'extrémité inférieure. Le côté antérieur est aplati vers le haut do la coquille ; il est un peu sinueux et irrégulier, à cause de la fente que produit le passage du byssus. Le coté postérieur et supérieur est légèrement arqué; il forme un angle très aigu avec Taxe longitudinal. Les stries irrégulières d’accroissement cou- vrent la surface externe', elles annoncent la présence d’un épiderme écailleux lorsque la coquille était vivante. A Tintérieur, les valves sont lisses. L’impression musculaire postérieure est ovale , obronde , et elle se prolonge en avant et en haut en une sorte d’appendice ellipsoïde produit par l’insertion du muscle rétracteur postérieur du pied, qui dans cette espèce devait être gros et puissant.

Cette coquille est abondamment répandue dans les terrains tertiaires du bassin de l’Adour, bassin dans lequel, d’après les précieuses obser- vations de M. RauÜn, s’est opéré. synchroniquement le dépôt de couches d'eau douce et de couches marines qui se sont irrégulièrement enche- vêtrées. Cette même espèce se retrouve également dans les terrains de la Touraine.

Les grands individus ont 25 millimètres de long et t I de large.

DlX-SEPTIÉME FAMILLE.

Les Cyclades, Fér.

CARACTÈRES. Animal trigone, ovale ou oblong; les lobes du manteau désunis en avant et en bas , terminés postérieure- ment en deux siphons courts, le plus souvent séparés. Pied mince, triangulaire. Branchies allongées, presque égales.

Coquille ovale , obronde ou subtrigone , régulière , close. Charnière articulée , soit seulement par des dents latérales , soit par des dents cardinales, soit enfin par des dents laté*

6S:>.

IMX-SKrTlEME FAMILLE.

raies et cardinales tout à la fois. Impression palléale simple ou sinueuse. Ligament extérieur.

GENRES. Gaiatea, Glauconome , Cxjprina , Cyrena , Cyclas , Pisidiimi.

Liimurck, comme nous l'avons vu, forma 'dans son dernier ouvrage une famille des Conques, qu’il partagea en deux sections ; à l’une, il donna le nom do Conques marines ; à la seconde , celui de Conques' Iluviatiles. Presque tous les zoologistes crurent nécessaire de faire une famille distincte de chacune des sous^familles de Lamarck. Férussac, le premier, proposa la famille des Cyclades ; elle fut généralement adoptée, en subissant quelques modifications peu importantes, car tous les naturalistes y laissèrent les trois genres Cyclàde, Cyrène et Galatée que Lamarck avait introduits dans les Conques fluviatiles. Dans la première édition du Règne animal^ Cuvier a rangé le genre Cyclade dans la famille des Cardiacés , en y confondant les Cyrènes et même les Galatées. Pour maintenir sa classification dans l’esprit de celle du grand zoologiste, Férussac, eu proposant la famille des Cyclades, la rangea dans l'ordre des Cardiacés, substituant les mots d’ordre cl de famille à ceux de famille et de genres préférés par Cuvier. Quelques années plus tard, Lalreille introduisit un genre de plus dans la famille des Cyclades: c’est celui nommé Cyprine par Lamarck. Cette innovation ne doit pas être repoussée ; car, quoique le genre en question vivo dans la mer, on peut dire que , par sa coquille et par son animal, il se rap- proche singulièrement des Cyrènes, ainsi que nous le verrons bientôt. Cependant ces nouveaux rapports indiqués par Latreüle pour les Cyprines ne furent point goûtés, et MM. Flemipg, Menko, d’Orbigny, ne laissèrent que des genres lacustres dans la famille des Cyclades.

L’étude de l’animal du genre Iridine iious.ayant dévoilé l’existence de siphons courts et gros, prolongeant le manteau en arrière, nous crûmes devoir retirer le genre de la famille des Naïades pour le trans- porter dans celle des Cyclades. Nous attachions a cette époque trop d’importance à ces organes dépendants du manteau : si la présence des siphons, chez les Iridines, les rapprochent à quelques égards de la famille des Cyclades , elles s’en éloignent et se rattachent aux Unio et aux Anodontes par tous les autres points de l'organisation; par consé- quent nous avons abandonné cette première opinion que nous nous étionsJaitc de la classification des Iridines.

.M. Gray a lait connaître dans le premier fascicule du SpicÜegia zoolo-

LES CYCLADES.

(iij J

^ica, un genre d'eau douce très intéressant auquel.il a donné le nom de Glauconomu; il le place dans la famille des Vénus. Les caractères empruntés à la coquille prouvent qu'on effet le genre nouveau doit être- maintenu, et que ses rapports s’établissent, si ce n’est directement avec les Vénus , du moins avec plus de certitude avec les Conques lluyialiles. Les caractères de l’animal, présentés parM. Sowerby dans son Gênera of sheîls, viennent appuyer notre opinion, et le genre Glauconorae peut aussi bien faire partie de la famille des Cyclades que le genre Galalée lui-même.

Déjà en I8H , Megerle avait indiqué un petit genre inutile, dé- membré des Cyclades, sous le nom de P/sum. Personne n’avait adopté ce genre. M. Pfeiffer, dans son ouvrage sur les Mollnsqucs terreatres el Iluviatiles de V Allemagne ^ ouvrage rempli d’excellentes observations, changea en Pisidium le nom du genre, et l'appuyant d’une figure de l’animal et d’une description , il fit voir la différence assez considérable qui le sépare des Cyclades.

Si le plus grand nombre des classificateurs ont adopté une famille des Cyclades , quelques autres , inspirés par la méthode do Cuvier, ont conservé, à son exemple, de très grandes familles, dans] lesquelles il a été difficile d’établir des rapports naturels entre des genres très diffé- rents par leur organisation. Nous voyons , par exemple , dans le Traité de malacologie , le genre Cyclade représentant la famille des Cyclades de Férussac , dans l’immense famille des Conchacées, entre les Lucinesel les Cyprines , non loin des Tellines et des Mactres. Rang modifie un peu l’arrangement de M. de Blainville : il conserve les genres de La- marck, les place dans la famille des Conchacées, et les intercale entre les Erycines et les Crassatelles.

M. Anton eut, au sujet des Cyclades, une opinion différente de tontes celles que nous venons d’exposer, et qu’il serait assez difficile de justi- fier. En effet, ce naturaliste, après avoir réduit la famille aux trois genres Çyrène. Cyclade et Pisidium , la met loin des Conques , lui fait franchir toute la série des Cardiacés , desTridancés, desArcacés, pour venir la poser à côté de la grande famille des Naïades. L’exemple de M. Anton ne sera certainement pas suivi , l'ordre naturel se trouve trop violemment brisé; pour s’en convaincre, il suffira de comparer ce que nous allons exposer des genres de la famille des Cyclades , et ce que nous dirons plus lard de ceux de !a famille des Naïades.

Nous ne pouvons pas nous dispenser, pour terminer l'histoire abrégée de la famille des Cyclades , d’exposer le plus brièvement possible la classification que vient de publier M. Gray, dans la l-'î® partie des

DIX-SEFTIEME FAMILLE.

654

Procès-verbaux de la Société zoologique de Londres. M. Gray n'adople pour la famille aucune des dénominalions qu'elle a re(;ucs avant lui; le nom de Corbiùuladœ^ emprunté au genre Corbicula de Megerle, est celui qu’il préfère. Le savant zoologiste rejette de la famille trois genres que nous y admettons , Cyprima et Glauconome , qui font partie de la famille des Venusinœ , comme nous l'avons dit précédemment , et celui des Galatées qui fait partie de la famille des Teilînidœ. Malgré ces retranchements considérables, la famille des Corbiculadœ contient encore cinq genres dans l ordro suivant :

-l" Corbicula, Megerle.

Genre sans valeur, destiné à réunir celles des espèces de Cyrènes de Lamarck qui ont les dents latérales striées. Nous verrons, en traitant des Cyrènes, ce caractère disparaître graduellement, et nous verrons aussi ranimai des espèces qui le possèdent ne différer en quoi que ce soit de celui des espèces à dents latérales lisses.

2“ Cyrena , Lamk.

M. Gray réduit ce genre à celles des es()èces qui ont les dents laté- rales lisses.

Velorita, Gray.

Ce genre , institué par M. Gray, ne peut supporter un examen appro- fondi; il a pour type une Cyrène à charnière épaisse et à dents lalé- raies courtes.

4“ Scopoli.

Compléleraeril oublié , le genre Sphœrium de Scopoli correspond exactement au genre- Cyclas , institué quelques années plus tard par Bruguière, dans les planches de V Encyclopédie méthodique. Nous avouons sans détour que nous ne pouvons nous décider à substituer un nom générique inconnu jusqu’ici à celui de Bruguière, adopté sans une seiile exception par touS’les zoologistes, et consacré par près de soixante ans d’usage.

Pisum, Megerle.

Le genre Pisum de Megerle ne correspond pas au genre Pisidîum de M- Pfeiffer, comme semble le croire M. Gray. II fait un double emploi du genre Cyclado, tel qu’il a été réformé par Lamarck, puisqu’il a pour type le Cyclas rivicola , espèce qui n'appartient pas au genre Pisidium : c'est donc ce dernier genre qui doit être conservé.

Des observations précédentes, il résulte que le genre Cyrène étant reproduit trois fois, la famille des Corbiculadœ ne contient en réalité que trois genres : Cyrène, Cyclas et Pisidium. Cette famille ressemble à celle de M. Anton, mais elle nous paraît mieux placée dans la série

LES CYCLADES.

655

méthodique; ainsi conçue, elle est peut-être plus naturelle que celle que nous proposons. Le genre Galaléc mériterait sans doute de former une famille distincte, et il en sera probablement de même du Glauco- nome, lorsque l'animal sera plus complètement connu. Quant au genre Cyprine , nous lui trouvons plus d’analogie avec les Cyrènes qu’avec tout autre genre de la famille des Conques ; aussi nous le maintenons dans la famille des Cyclades,

Les animaux des six genres contenus dans la famille des Cyclades sont assez complètement connus. ^Rang a décrit celui de la Galatée; M . Sowerby a donné les caractères de celui des Glauconomes ; Müller, dans le Fatina siiecica , a fait connaître le mollusque des Cyprines ; les Cyclas et les Pisidium , vivant autour de nous , nous en avons de bonnes descriptions de MM. Pfeiffer et Jeynnens ; enfin, nous possédons plusieurs espèces de Cyrènes , au moyen desquelles nous décrirons l'animal de ce genre. En rapprochant tous les documents dont nous venons de citer les principales sources, voici quels seront les caractères les plus saillants de la famille des Cyclades.

F)ans tous les animaux de cette famille, le manteau est largement ouvert en avant et en bas, depuis l'extrémité du muscle antérieur jusqu’à l’origine des siphons. Les bords du manteau sont simples, soudés en arrière ; ils se prolongent en doux siphons , tantôt réunis à la base , tantôt dans toute leur longueur, quelquefois disjoints de la base au sommet. Ces organes montrent donc exactement la môme série do modifications que dans la famille des Conques marines. Quoique tous ces animaux soient pourvus de siphons plus ou moins longs , tous n’ont pas dans le manteau un muscle propre à les faire rentrer dans la coquille ; ce muscle n'existe que dans le$ deux genres Galalée et Glauconome. Dans ce dernier genre, il se montre dans un état particulier: il est long et étroit, et il semble prêt à disparaître , non plus par son raccourcis- sement, comme nous l'avons fait remarquer dans les Vénus et les Cythé- rées , mais par un rétrécissement qui le réduit à une ligne d’une médiocre largeur.

l.e pied offre aussi des modifications intéressantes : tantôt il est large , aplati, triangulaire, comme dans les Cyclades , les Cyrènes , les Cy- princs, les Galatées; tantôt plus étroit, comme dans les Glauconomes; quelquefois plus étroit encore et subtlagelliforme, comme dans les Pisidium.

Nous trouverons plus de’constance dans la bouche, les lèvres et les palpes qui l’accompagnent. Ces palpes, en proportion un peu plus grandes que celles dés Vénus, restent triangulaires, presque aussi

bIX-SEPT[EMR FAMILLE.

65f)

larges quo longues. I..OS branchies sont courtes, subquadrangulairp.s , inégales, sillonnées, réunies en arrière du pied, cl assez prolongées pour se souder au pourtour membraneux do l'ouverture interne du siphon anal.

Si nous considérons actuellement les coquilles réunies dans la famille de.s Cyclades , nous les trouverons également variées de forme , ainsi que nous l'avons fait remarquer pour celles de la famille des Conques. Dans le genre Glauconomo, elles sont transverses et étroites , elles sont triangulaires dans les Galatées; mais dans ce genre quelques espèces s’allongent et se rapprochent ainsi du genre précédent ; elles deviennent ovales , obrondes dans les autres genres. Ainsi , dans ses transforma- tions , la coquille présente les mômes modihcations dans l'une et l'autre famille.

Les impressions musculaires sont médiocres , très écartées , égales et à peu près de même forme, ovales ou obrondes. L'impression palléale, simple dans les genres Cxjclas , Pisidium et Cyrena, devient légèrement sinueuse dans les Cyprines; la sinuosité s'approfondit et's'élargit dans les Galatées ; elle s'approfondit beaucoup plus dans les Glauconomos , mais alors elle se rétrécit considérablement dans toute sa longueur.

La charnière est variable. A la prendre dans sa plus grande simpli- cité, elle consiste, dans les Pisidium et les Cyclades, en une ou deux petites dents cardinales rudimentaires et en deux dents latérales , l’une en avant, l’autre en arrière., Dans les Cyrènes, cette charnière se développe ; une troisième dent cardinale s’ajoute ; et les dents latérales grandissent. Les dents cardinales des Cyprines sont inégales, et des latérales la postérieure seule subsiste et s’écarte de la charnière de toute la longueur du ligament. Les Galatées n’ont plus que deux dents cardinales , à moins que l’on ne veuille considérer comme laté- rales les dents divergentes qui accompagnent de chaque côté la dent, centrale; enfin, dans les Glauconomos , nous voyons trois dents cardi- nales comprimées, divergentes et souvent bifides.

Le ligament externe, petit et médiocre dans les Cyclades, les Pisi- dium et les Glauconomes , s'agrandit dans les Cyrènes ; il est très grand dans quelques unes, il n'est pas moindre dans les Cyprines; il devient plus saillant , plus bombé et plus court dans les Galatées. Toutes les coquilles de ia famille des Conques sont épidermées. Cet épiderme, souvent rugueux , écailleux , est quelquefois lissa dans les Cyrènes ;• il l’est toujours dans les Cyclades et les Galatées ; il déborde les valves assez largement pour cacher la partie exsertile des bords du manteau.

A l’exception du seul genre Cyprine, qui vit dans la mer, tous les

LES CYCLADES.

autres sont iluviatiles ; aussi toutes ces coquilles sont plus ou moins corrodées sur les crochets, de la même manière que les Muletles et toutes les autres coquilles qui habitent les eaux douces.

On aura fait sans doute la remarque que, dans la famille des Cyclades, les caractères empruntés , soit aux animaux , soit à leur coquille, n’ont pas la constance de ceux que montrent les familles précédentes. Natura 7wn facit ^allum , a dit Linné ; et si cela est vrai d'une manière géné- raie , cela ne l’est pas moins pour. un grand nombre de cas particuliers: il est rare que la fin d'une série de familles naturelles ne s’annonce pas par une espèce de perturbation à la suite de laquelle une transition s’établit d’un groupe à l'autre. C’est ainsi qu’au moment nous allons voir les siphons disparaître complètement , le manteau s’ouvrir dans toute sa longueur, la nature se prépare en quelque sorte longtemps d’avance par la disparition insensible do ces organes. Voici une famille dont les ani- maux ont les plus grands rapports avec ceux des familles précédentes. Si dans les Vénus et les Cythérées , il y a des espèces dépourvues du muscle rétracteur des siphons , ce sont des exceptions ; ici , au con- traire , ce sont des genres entiers chez lesquels cet organe manque. Paf ils se rapprochent de la famille des Cardiacés , tout en conservant les autres caractères des Conques. Le pied lui-même offre. des modifi- cations qui tendent à rapprocher les Pisidium , par exemple , des Ba- cardes. Dans le premier de ces genres , l’organe locomoteur n’est pas encore coudé , mais il est fort allongé , et il a une tendance à se par- tager en deux parties. Ces préludes à.des changements plus profonds se continuent sur d’autres organes dans les familles qui suivent celle-ci. Après avoir envisagé dans leur ensemble les phénomènes dont nous signalons l’apparition, on demeure convaincu de l’impossibilité de mettre les familles et les genres dans leurs rapports naturels en se condamnant à suivre un ordre linéaire , et c’est ici qu’il faut admirer génie de Lamarck, qui proposa, avec tant de succès, une classification par embranchements. ^

Pour faire bien comprendre comment nous envisageons les rapports assez compliqués que nous entrevoyons entre les genres de la famille des Cyclades et ceux des familles précédentes , nous ferions partir une ligne des Psammobies , remontant jusqu’aux Glauconomes , parce qu’en effet, par la charnière ,■ par la forme générale des coquilles , ces genres ne manquent pas de quelques ressemblances. Une autre ligne commen- cerait aux Donaces , et les Galatées descendraient à sa rencontre, parce que l’animal de ce genre a les siphons complètement désunis , comme ceux des Donaces. Le genre Pisidium , compris dans une ligne ascen- T. I. a* PARTIE. 4^*

658

DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

danle, se dirigerait vers les Lucines, parce que l’animal n'a plus qu'un siphon exsertile^ que le pied s'allonge, s'amincit et a une tendance à devenir cylindrique. Les genres Cyprine, Cyrène, Cyclade, formant l’axe de la famille, continueraient la tige centrale de la méthode ou le tronc de l’arbre en se superposant aux familles des Donacides , des Lilhophages et des Conques. Nous le répéterons dans l’ordre linéaire . les rapports des genres ne peuvent être déterminés d’une manière exacte ; ils ressemblent aux grains d’un chapelet, tandis que, pour bien faire, ils devraient être disséminés à des distances diverses autour d’un axe commun* comme un système stellaire.

GENRE cinquante-troisième.

GAINATES. Galatea, Brug.

PI. 17. fig. II. 12. i3.

CARACTERES GENERIQUES. Animal ovale , trigone, enve- loppé d’un manteau à parois minces ^ surmonté le long du dos d’une crete membraneuse large et plissée, s’insinuant dans les anfractuosités de la charnière; bords du manteau simples en avant, garnis d'un rang de grosses papilles en arrière, désunis depuis l’extrémité du muscle adducteur anté- rieur jusqu’à la base des siphons.. Une cloison longitudinale postérieure donne insertion 4 deux siphons jnesque égaux , désunis dans toute leur longueur et terminés par une ouverture portant des tentacules simples et inégaux; ces organes sont pourvus d’un muscle rétracteur oval , médiocre, qui leur est propre. Pied très grand, oomprimé, robuste, ovalaire. Bouche transverse; lèvres étroites, terminées en une paire de palpes triangulaires, très pointues, l’externe - attachée au manteau. Quatre feuillets branchiaux , les deux internes plus allongés , plus larges que les externes , ceux-ci se prolon- geant en un appendice dorsal; les feuillets branchiaux ,se

LES CYCLADES. tJGg

réunissent en arrière du pied, et s'attachent au pourtour mena- braneux de l’ouverture interne du siphon anal.

Coquille trigone, subéquilatérale, épaisse,' solide, lisse, parfaitement close, couverte d^un épiderme verdâtre mince et transparent. Bords simples et tranchants. Charnière large et épaisse , portant sur la valve droite deux dents conniventes à leur base et trois dents sur la valve gauche ; une dent médiane , pyramidale, avancée ; l’antérieure et la postérieure étroites , divergentes. Impressions musculaires petites, écartées, ovales ou ôbrondes ; impression palléale terminée en arrière en une sinuosité ovalaire peu oblique, d’une médiocre étendue. Liga- ment externe , court et très saillant , attaché à. de grandes nymphes proéminentes dans un corselet déprimé.

SYNONYMIE GENERIQUE. Peciunculus^ Lister. Venus, Chemnitz, Born , Gmelin, Schroeter, Dillwyn, Wood. Donax, Ferry. Tellina , Dilhvyn. Chama , Favanne.

Egeria, de Roissy. Megadesma , Bowdich , Swainson.

Potamophila , Sowerby, Sowerby yxnxoT . Galateola , Fleming. Trigona [in parte], Schumacher. Galathea, Bruguière, Lamarck, Férussac, Çrouch, Menke , Blainviile, Cuvier, Rang, Latreille, Reeve, Auton, etc. -

OBSERVATIONS. La coqulUe pour laquelle Bruguière institua le genre Galalée, dans les planches de V Encyclopédie ^ était très rare autrefois dans les collections ; on en pouvait compter les individus : trois étaient cités dans les collections de France et quatre ou .cinq dans Iereste.de l'Europe. Lister avait donné autrefois une figure assez reconnaissable de Tespèce ; cependant Etorn , qui en eût aussi un exemplaire de la même taille^ ne le reconnut pas dans la figure de Lister: il en repro- duisit une fort bonne figure, et le décrivit sous le nom de Venus para- doxa. Quelques années après, Chemnitz eut en sa possession un petit individu recouvert de son épiderme; il ne reconnut en lui ni la coquille de Lister, ni le Venus paradoxa de Boni. Il en fit aussi une Vénus, et lui imposa le nom de Venus reclusa, annonçant de la manière la plus positive qu’elle habite la Guinée. Voilà donc trois figures d’une même espèce. Au lieu de les réunir, Schroeter les indiqua dans son Supplément

42*

DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

6G(i

aux espèces de Linné, comme trois espèces distinctes. Aussi Gmelin, qui a copié servilement Schroeter, sans le citer, admet aussi les trois especes, li nomma 'l^enus la coquille do Lister; changeant

inutilement le nom de Cheranilz, il fait de la coquille de ce savant con- chyliologue son Venus hermaphrodUa. Enfin, le Fc?ius paradoxa de Born devient pour Gmelin une variété' du Vcîiïfs meretrix, faute que Schroeter sut éviter.

A Tespèce déjà connue^ Chomnilz en ajouta une seconde dans le tome XI et dernier de son grand ouvrage; il la décrit sous Je nom de Venus ægyptiaca. Mais comme par sa forme et par sa couleur, elle diffère notablement de la première espèce , personne ne songea à la rapporter à son véritable genre, et aujourd’hui même elle est encore oubliée.

Ce que nous venons d’exposer prouve qu'avant Bruguière les co- quilles qui nous occupent étaient invariablement classées parmi les Vénus. Cependant ces coquilles n’ont pas les caractères des Vénus, et l’on doit applaudir à la'pensée de Bruguière^qui les en détacha pour en faire un genre distinct.

Lamarck eut le tort de négliger d’abord le genre de Bruguière : il l’oublie dans ses premiers travaux de conchyliologie; il en parle pour la première fois dans le volume des Annales du Muséum, pour le caractériser et en donner une meilleure figure; il l’introduit ensuite dans la méthode en 1 809, lorsqu’il fonda les familles naturelles dans la philosophie zoologique; il le comprend; comme nous l’avons vu, dans sa famille des Conques , et c’est qu’il le maintient dans ses classifica- tions suivantes; seulement en divisant les Conques en marines et en fluviatiles , c’est dans ces dernières qu'il entraîne les Galatéès.

Dans le \o\umG des Mollusques du Buffon de Sonnini , M. de Roissy adopta le genre de Bruguière , mais il voulut en changer le nom , alléguant que déjà un genre de Crustacés avait été établi par Fabricius sous le nom de Gaiatea; mais les zoblogistes n’ont pas cru suffisamment justifié le changement ^proposé par Roissy, car ils ont consacré défini- tivement au genre le nom choisi par Bruguière ; et il faut convenir, con- trairement aux prévisions de quelques personnes, que l'adoption du nom de Galatéê pour un genre do Mollusques n‘a déterminé aucune cortfusion dans la nomenclature scientifique.

' Presque tons les conchyliologues adoptèrent le genre Galatée. Férus- sac, Latreillo, Mcnke, Rang, Reeve, Llanloy, Auton , lui conservèrent dans leurs classifications les rapports si naturellement conçus par La- marck. Schweigger et M. de BlainvÜle voulurent rapprocher davantage

LES CYCLADES.

66l

encore les Galalées des autres genres de la famille des Conques .fluvia- liles, ils conservèrent le genre Cyclado, et tous les autres, Cÿrène, Galatéc, etc., furent considérés comme des sous-genres.

Cuvier mentionna pour la première fois le genre Galatée dans la seconde édition du Règne animal. Il suivit l'exemple des deux zoolo- gistes dont nous venons de rappeler les noms : il laissa les Cyclades dans la famille des Cardiacés , ainsi que dans la première édition du même ouvrage., et il le divisa en trois sous-genres, Cyrène, Cyprine et Galatée. Vient ensuite dans l’ordre- méthodique le genre Corbeille , qui bientôt, nous le constaterons , n’a pas le moindre rapport avec les précédents.

Quoique les zoologistes reconnaissent au gendre Galatée des carac- tères suffisants pour le faire admettre,, cependant il lui manquait une dernière et déûnitivo consécration , celle qui résulte de la connaissance de l’animal. Jusqu’en '1-S32 , malgré l’indication précise de Chemnitz, presque tous les conchyliologiies étaient persuadés que la Galatée pro- venait des eaux douces de i’Indo ; on aurait donc vainement cherché l’animal dans ce. pays , puisque le genre ne s’y trouve pas et qu’il appartient aux régions équatoriales de l’Afrique. C’est en voyageant dans ces parages qu’un savant officier de la marine française , trop tôt perdu pour la science qu’il affectionnait, découvrit des Galatées en abondance dans les rivières do la Sénégambie, à une petite distance de leur embouchure: c’est ainsi qu’il put en observer l’animal vivant et en faire une anatomie dont l’exactitude est d'autant plus assurée, que c’est ce naturaliste loi-mÔme qui en peignit les détails. Rang publia le résultat de ses observations en 4 832 dans le tome 25® des .^nnaZes des sciences naturelles. Ce mémoire, précieux pour la science, nous fournira d’excellents documents auxquels -il nous sera permis d’ajouter quelques détails; car, grâce à l'amitié qui nous liait, Rang a laissé dans notre collection quelques individus bien conservés de l'animal de la Galatée.

La connaissance do l'animal du genre Galatée n'a pas modifié d’une manière bien considérable les rapports du genre , car presque tous les zoologistes continuent à le ranger dans le voisinage des Cyrènefe et des Cyclades. Rang lui-même conclut de ses observations que Je genre doit rester à côté des Cyrènes et des Cyclades dans la famille des Conques ; il entrevoit cependant des analogies avec les Donaces u les tellines qui , -avant lyi , n’avaient point clé senties. Rang vouîa i satisfaire â ces rapports assez compliqués, en plaçant le genre à la iih de la famille, de manière à réloigner le plus possible des Cyclades et à le rapprocher des Tellines et des Vénus.

662

DIX-SEPTIÈMK FAMILLE.

Dans sa dernière classification, déjà citée dans'l’histoire des familles et des genres îjui précèdent , M. Gray em'isagé les rapports des Gata- tées d’une autre façon que ses prédécesseurs. Il comprend le genre dans la famille des Tellinides, ainsi que nous l’avons fait remarquer en traitant de cette famille , à la suite des Donaces et des Iphigenia {Capsa, Lamk. ). Nous avons Jimîté la famille des TeÜines à ceux des genres qui ont de longs siplions complètement séparés , des palpes labiales très grandes, des branchies petites, et dont le feuillet externe renversé remonte vers le dos en montrant sa page' interne. Ainsi définie, la famille des Tellinides ne peut recê\'oir ni les Donaces, ni les Capses , et encore moins les Galatées. Cela ressortira mieux lorsque l’on aura comparé l’animal du genre qui nous occupe à celui des Tellines. Pour fticiliter cette comparaison , nous allons présenter la description de ranimai de la Galatée.

La forme de la coquille ne reproduit pas très exactement celle de l'animal . parce que celte coquille est très épaisse dans la région moyenne et supérieure ; la cavité des crochets est loin de coïncider avec la grandeur extérieure de ces parties ; il en résulte pour l'animal une forme moins trigone et plus transverse. Le manteau dont il est enve- loppé est conslitûé exactement de la môme manière que dans les Mollusques du môme ordre ; la portion mince est étendue et bornée à la circonférence par un muscle orbiculaire peu épais; au moment il louche aux bords du test , le manteau s’épaissit sensiblement et se partage en deux bords courts; l un, externe, s’applique sur le bord de la coquille; Tautre interne, plus exsertile, reste simple et ne se contourne pas cohame celui des Vénus et des Cylhérées. Simple en avant et en bas , ce bord se charge en arrière d'un rang de grosses papilles courtes. Les lobes du manteau sont désunis, ainsi que dans les Vénus, depuis Fextrémité du muscle adducteur antérieur jusqu’à la base des siphons: c’est dans ce trajet que les bords sont simples , c’est en arrière que se montrent les papilles dont nous avons parlé. -

Dans presque tous les genres chez lesquels les siphons sont désunis , tels que les Thracies, les Lavignons, les Tellines, etc., ces organes sont comme implantés sur une cloison transverse qui occupe l’extrémité postérieure de l’animal, et qui, soudée au manteau, sert à clore en arrière la cavité de cet organe. Les siphons naissent de cette cloison ; rapprochés à la base, ils sont disjoints dans toute leur longueur. A parois minces, d’un faible diamètre, ces organes’, au moment de leur exten- sion, ont à peine la moitié de la . longueur de la coquille. Le siphon branchial est un peu plus gros et un peu plus long que l’anal; la sur-

LES CYCLADES.

663

face eji est divisée symétriquement par sixlinéoles longitudinales, par- tant de la base et parvenant au sommet ; sur ces linéoles se dresse un rang de courtes papilles aplaties , charnues , en forme d’écailles subqua- drangulaires. L’ouverture du siphon est circulaire : sur son bord s’élèvent six grands tentacules coniques et simples qui terminent les six linéoles écailleuses; dans l’intervalle de ces grands tentacules, il en existe un plus petit, de sorte que l’ouverture du siphon branchial porte douze ten- tacules. Le siphon anal est exactement semblable ; seulement, au lieu de six linéoles, il en a huit, et son ouverture est garnie de seize tenta- cules au lieu de douze. Un muscle rétracteur oval peu étendu , flabelii- forme , s’attache à la cloison des siphons , et sert à retirer au dedans de la coquille les deux siphons en même temps.

La bouche est grande* transverse et infundibuliformo ; les lèvres qui l’accompagnent sont largos , mais courtes ; elles se transforment , de chaque côté , en une paire de palpes labiales médiocres , triangu- laires , très pointues , plus longues que larges : les palpes externes sont attachées au manteau, les internes le sont au corps; leur surface interne est couverte de plis obliques , fins et serrés.

Le pied est très grand; il est d’un jaune orangé très pèle; aplati, son bord inférieur est tranchant, et son extrémité antérieure, dilatée, subspathuliforme , est plus obtuse que celle du pied des Vénus. En arrière, il est très aminci et étranglé ; dans le moment sa contraction, le pied remplit entièrement la cavité du manteau.

Les organes de la respiration sont plus étroits que ceux des Vénus et des autres genres de la famille des Conques; ils se rapprochent beau- coup plus par leur forme générale de ceux des Donaces. II faut recon- naître que les proportions de ces organes sont variables : ils s’élargis- sent dans les Mollusques larges, ils s’allongent et se rétrécissent dans ceux qui sont étroits ; ceci est vrai d’une manière générale. Cette règle souffre des exceptions. Ainsi dans les Mactres, qui sont larges, les branchies sont aussi étroites que dans les Lutraires, qni sont rétrécies. Chez les Pullastra, les Vénus, les Cythérées , les feuillets branchiaux sont larges et las feuillets externes ne se prolongent pas ou presque pas dans la région dorsale; an contraire, dans les Dosinies, ces feuillets semblent attachés par le milieu. Dans les Galalées, la combinaison est encore différente; les branchies sont étroites, inégales, et l'exlerne est partagée en deux parties presque égales par la ligne le long de laquelle elle est attachée au corps. La surface externe des organes branchiaux est profondément plissée ; les plis sont fins et régu- liers. Le feuillet branchial interne a près du double en largeur que son

ÜIX-SEPTIÈME t’AMILLE.

f>b4

congénère; iUe prolonge en avant en une pointe aiguë, qui s’interpose entre les palpes labiales, et se termine dans le voisinage de la bouche. En arrière du pied, les i)ranchies se réunissent et se prolongent au- devant de l’ouverture interne du siphon branchial.

Les muscles adducteurs des valves sont inégaux ; ils sont petits en proportion de la grandeur de l’ammal et de l’épaisseur de la coquille : l’antérieur est ovalaire, le postérieur est plus cylindrique; ils sont fort écartés et situés dans la région supérieure ou dorsale de l’animal.

Les coquilles du genre Galalée sont ovales , trigones , subtrans- verses, subéquilatérales, fort épaisses; elles sont lisses, ou médiocre- ment rugueuses par des accroissements irréguliers. Un épiderme mince , lisse , d’un jaune verdfitre , transparent , revêt la surface exté- rieure , si ce n’est sur les crochets qui sont souvent corrodés , comme cela arrive dans presque toutes les coquilles d'eau douce ; cet épiderme est tenace et déborde à peine le pourtour des valves. Les couleurs sont variables : aujourd’hui que l’on connaît plusieurs espèces, il y en a de roses , de violettes , et la plus anciennement connue est d’un très beau blanc sous son épiderme , et ornée de beaux rayons violets , plus ou moins nombreux.

Les bords, sont simples , et quoique ces coquilles soient très épaisses , ils restent minces et tranchants , même dans les grands et vieux indi- vidus. Le bord cardinal seul prend une épaisseur considérable.

Les crochets sont généralement grands, protubérants , ' opposés , cordiformes; ils sont à peine inclinés en avant. Le côté inférieur n’offre aucune trace de lunule : il est obtus, arrondi , et plus large que le postérieur ; celui-ci est plus anguleux, quelquefois même subrostré; le bord ventral est le plus long, et il présente une faible courbure. Lorsque les valves sont rapprochées , la coquille est parfaitement close, comme dans les Cylhéréçs, les Vénus , etc. La surface interne n’est jamais nacrée; i elle est tantôt blanche, tantôt nuancée de rose ou do violet.

Les impressions musculaires sont petites relativement à la grandeur et à l’épaisseur de l’animal: elles sont écartées à peu près à égale distance de la charnière ; elles descendent à la limite de l’axe antéro- postérieur. L’impression antérieure est profondément imprimée dans le lest, elle est ovale; la postérieure est plus arrondie^ et ordinairement plus superficielle; il y a quelques espèces cependant chez lesquelles elle est aussi profonde que l'antérieure.

Un peu en dedans du bord inférieur du muscle adducteur antérieur, naît une impression palléale qui reste assez loin du bord ventral, tout

LES CVCLADES.

665

en en suivant la direction ; parvenue en arrière , au niveau de l’im- pression musculaire postérieure, la ligne palléale s'arrête, s’infléchit sur elle-même, et se contourne en une sinuosité presque horizontale, ovale-trigone , peu profonde et en grande partie détachée do la por- tion ventrale de l’impression palléale.

La charnière est large et épaisse; la cavité du crochet est tellement remplie , que c’est à peine si la lame cardinale détache son bord infé- rieur. Cette partie importante de la coquille , quoique variable selon les espèces ou dans les individus d’une môme espèce, conserve cependant quelques caractères constants. Sur la valve gauche, le centre de la char- nière est occupé par une grande dent pyramidale triangulaire à base à peu près équilatérale. Cette dent devient moins épaisse et finit quel- quefois par être réduite à une crête saillante et longitudinale. Do chaque côté de cette dent s’élève une dent oblique, plus ou moins épaisse, mais toujours comprimée. Sur la valve droite, le contre de la charnière est occupé par deux dents rapprochées et confondues à la base , sépa- rées au sommet et laissant en bas une cavité triangulaire destinée à recevoir la dent pyramidale de la valve opposée; ces dents sont profon- dément isolées par une cavité creusée de chaque côté et propre à recevoir les dents divergentes de la valve gauche.

Une nymphe, très épaisse, mais fort courte, vient faire une saillie' considérable dans un corselet plus ou moins déprimé selon les espèces ; au moyen de cette nymphe , le ligament devient horizontal , au lieu de s’incliner dans la direction du bord dorsal postérieur. Le ligament est bombé en demi-cylindre ; il est épais , mais très court.

Après avoir étudié les caractères du genre Galatée, il est naturel de se demander quelle place il doit occuper dans la série méthodique. Si nous considérons l'animal, nous trouverons en lui presque toute l’orga- nisation des Mollusques de la famille' des Conques. Un manteau, large- ment ouvert, à bords simples; un pied comprimé, grand et robuste; une bouche transverse; des palpes médiocres, triangulaires; des bran- chies inégales. Tous ces organes sont semblables à ceux qui existent dans les Conques marines; mais il on est d’autres pour lesquels les Galatées se séparent de tous les genres environnants : ce sont les siphons. Ils sont disjoints , tandis qu’ils sont réunis plus ou moins dans tous les autres genres de la famille des Conques : c’est par que les Galatées tiennent encore aux Tellines et aux. Donaces. Il est évident que les rapports du genre doivent être déterminés , non par un seul caractère , mais par l’ensemble de l’organisation; et ce que nous avons exposé assigne définitivement la place des Galatées dans la famille desUycIades,

666

DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

en les rapprochant le plus possible des Conques marines. II doit donc être inscrit le premier dans la famille des Cyclades.

Les Galatées sont, sans exception , des coquilles d’eau douce. Sept espèces sont actuellement inscrites dans les catalogues; toutes pro- viennent des rivières de l’Afrique interlropicale ou centrale. Il est à présumer que le nombre des espèces s’augmentera encore, à mesure que l’on explorera avec plus de soin un- continent qui jusqu'ici a été si peu visité par les naturalistes.

Nous ne connaissons aucune Galatée à l'état fossile.

La première espèce connue est le Galatea radiata de Lamarck. La seconde est le Galatea œgypiiuca (Venus œgypHaca^ Chemn.). La troi- sième a été décrite sous lo nom de Galatea concamerata par M. Du val , dans le Magasin de zoologie; les quatre autres ont été décrites dans le Journal de malacologie deM. Menke: la première par M. Dunker, sous le nom de Galatea bengoensis; elle a été trouvée par M. Tams^ dans la rivière Bengo, dans l’Afrique occidentale ; les trois autres sont décrites par M. Philippi sous les noms de riibicunda et tenuicula,

M. Philippi n’cn connaît pas la patrie; nous savons qu’elles provien- nent de l’Afrique interlropicale.

Galatée à rayons. Galatea radiata , Lamk.

PI. 17. f. 11.12. 13.

G. Testa trigona^ suhtransversâ ^ turnidd, crassissimâ ^ lœvigatà.^ sub eperdermide 'viridi alhâ^ radiis violaceis ornatissimà ; intîis albd^ , aUquando 'violaceo maculatâ; cardine crassissîmo , dentibus mc-

diants majoribus.

Lister, Concb. pl. i58. f. i3.

Tenus paradoxa. Boi‘ii, Mus. p. 66. pl. 4*L iQ, i3.

Venus rèclusa, Cbenio. Concb. t. 6. p, 3îi6. pl. 3ii f. 327, SaS, 829.

Fav. Cal. d’un cab. p. 3 10. Il® i5o6. pl. 6. f. i5o6.

Fav, Concb. pl. 46. f. A.

Schroeler, Eiul. t. 3. p. 160. Venus: 16. p. r3i.

Venus subviridis, Gtncl. p. 3280. 55.

Venus hermnphrodita. Id p. 3278. 40.

-J’enus meretrix. Var. id. p. 3278. i5.

Galathea, Krug. Ency. pl. 25o. f, i.

Galathea radiata, Lamk Ann. du Mus. t. 5. p. 43o. pl. 28.

Egeiin radiata, Ruis'^y, Buf. Moll, t.- 6, p.'327. pl. 64. f. 5.

Fénissac, Essai d’uue niélb concb. p. 89.

LES CŸCLADES.

667

Dontix 'vnriegata. Perry, Conch. pi 5^. f. i?

TeiVina hermaphrodita. Dillw. Cal. t. i. p. 107. 81.

P'entts paradoxa. Dillw. Cal. t. r. p. 180. 11*^ 49-

Trigona{^ex parte^, Schumac. Nouv. syst. p. i53.

Calathea radiatm Lamk. An. s. vert. t. 5. p. 654.

Potamopkila Tadiata.Sovi. Gen.ofsheîh.

Megadesma radiata . EUïm, of Conch. a*" part. p. 8. f. ai.

Cyclas radiata. Schweig. Haiidb. der iiat. p. 707.

Galathea radiaia, Croiich. iütrod. Lanik. Conch. p. la. pl. 7. f. i,

CycUn rndiaca, Blainv. Malac. p. 5.^a. pl. 78. f. 3.

Venus paradoxa. "VVood, Ind. pl. 7. f. 48.

Galathea radiata. Rang. Manuel de conch, p. 3i3.

Desh. Ency. métii. Vers. l. a. p. 264.

Cuv. Règn. anim. êd. t. 3. p. 147.

Menke, Syn, nioU. p. iii.

Rang, Mém. sur Panimal de la Gai. Aun. se. iiat. i'* série, l. a5. p. i52. pl. 5. f. I, a, 3.

GrifGlh. An. kîngd, Moll. p. ii3. pl. 38, f. 7.

Desh. dans Laujk. Au. s, vert, a* éd. t. 6. p. a86.

Aiilnii, Verz. der Couch. p. lo.

. Megadesma radiata.Syi^mi, Malac. p. 3.70 f. 119,

. Galathea radiata. Reeve, Conclu sysl. t. i. p, 88. pl. 64.

Potamophila radiata, Sow. Conch. raan. p. 236. f, ii5.

Galathea radiata. Hanley, Descr. cat. p. 94*

Pot. et Mich. Cat. des Moll de Douai, t. a. p. iqS.

Catlow, Conch. nom. p. 3i.

Habile les rivières du Congo, à plus dhnie lieue de leur embouchure dans la mer.

Grande et belle coquille, au sujet de laquelle plusieurs erreurs ont été commises, ainsique le démontre notre synonymie. Parmi ces erreursles plus considérables sont celles de Gmelin, de Schroeter, de Dillwyn, qui admettent deux et même trois espèces pour une. En comparant les figures et les descriptions , en mettant ces documents on présence d’une série d’individus et de variétés de l’espèce, on reconnaît bientôt que les trois espèces de Gmelin doivent se réunir à un seul type auquel le nom de Ga/a- tea radiata doit rester. Celte coquille acquiert quelquefois une- taille assez grande. Elle est triangulaire, bombée, épaisse, pesante, obtuse et arrondie en avant, sub-anguleuseen arrière; sa surface est couverte d’un épiderme, d’un vert plus ou moins foncé au-dessous duquel le lest est d’un blanc

668

ÛIX-SEPÏIÈME FAMILLE.

éclatant, tantôt pur, tantôt orné d’un nombre plus ou moins considé- rable de beaux rayons violets, étroits et inégaux. Cette belle coloration était autrefois mise en relief par un beau poli artificiel que les amateurs ou les marchands faisaient donner à celte coquille. Les crochets sont grands , opposés , à peine obliques et cariés au sommet. Le côté posté- rieur présente un corselet large, déprimé, de l'extrémité supérieure du- quel s’élèvent des nymphes grandes, saillantes, épaisses, fort courtes, sur lesquelles s’attache un ligament très proéminent. A l’intérieur, celte coquille est d'un beau blanc ; il est des individus qui sont lavés do violet, mais celte variété ne se rencontre guère que parmi les.jeunes individus.

Cette coquille a 95 millimètres de long et 77 de hauteur.

GENRE CINQUANTE -QUATRIÈME.

GIiAUCONOZilE. Glaicconome,

Pl. i4 Bis. fig. 4. 5. 6.

CARACTÈRES GENERIQUES. ' Animal ovale, oblong, ayant les lobes du manteau réunis , si ce h'est en avant et en bas , ils laissent une ouverture linéaire pour le passage d’un pied petit et comprimé ; en arrière , le manteau se prolonge en deux longs siphons comprimés et épais; une dépression de chaque côté indique le point de jonction des deux siphons, qui sont com- plètement séparés versle sommet. Masse abdominale ohlongue , molle , ventrue , terminée en avant par un pied oblong et com- primé. Palpes labiales triangulaires , larges , allongées , oblon- gues, peu épaisses. Branchies allongées, oblongues, peu épaisses, réunies en arrière du corps.

Coquille allongée, transverse, équivalve, inéquilatérale, mince , plus ou moins bombée , obtuse en avant , plus étroite ou subrostréé' en arrière , couverte d’un épiderme verdâtre, mince , débordant le pourtour des valves. Bords minces , sim- ples .et tranchants. Charnière, étroite, formée de trois dents cardinales, petites, comprimées, divergentes, et dont les pos-

LES CYCLADES.

(>69

térieures sont les plus allongées ; la dent postérieure de la valve gauche et la moyenne de la valve droite sont bifides. Deux impressions musculaires petites , fort écartées : l’antérieure, oblongue, submargînale ; la postérieure, subcirculaire. Impres- sion palléale très rapprochée du bord ventral , se contournant en arrière en une sinuosité étroité , profonde , obtuse au som- met, presque horizontale et à bords parallèles. Ligament long, étroit, peu épais.

SYNONYMIE GENERIQUE. Glauconomya , Bronn , Poliez et Mîchaud. Solen [species]^ Linné.

OBSEnvATioNs. Si l’on en croit M. tlanley, Linné aurait connu une espèce du genre Glauconome, et il l’aurait rapportée au genre So/èn, sous le nom de Soîen virens. En effet , la description de Linné , quoique très courte, ne peut convenir qu'à une espèce de Glauconome. Le Solen Uï'reïis vient de Java; il est ovale, oblong-, les crochets sont gonflés; la coquille est blanche en dedans, verdâtre en dehors, très fragile, trans- parente, ayant la forme de la Mye des peintres [Unio pictorum), à peine fermée en avant et en arrière; deux dents cardinales rapprochées et de plus une callosité dans chaque valve, simulant une dent obsolète. Telle est la courte description que donne Linné du Solen virens; elle ne peut s’appliquer qu’à un Glauconome, et M. Hanley désigne même une espèce à laquelle il conserve le nom spécifique du célèbre auteur du Systema naturœ. Pour retrouver l’espèce linnéenne, il a fallu d’abord signaler à l’attention des conchyliologues un type tout parti- culier de coquilles lacustres , et c’est ce que fit M. Gray en proposant le genre Glauconome en 1 828 , dans le premier fascicule de son Spi~ cilegia zoologica. Quoique reproduit l’année suivante dans le Zoological Joxtrnal , le nouveau genre du savant anglais resta longtemps peu connu’, à cause sans doute de la rareté do la coquille qui lui a servi de type. M. Sowerby rappela l’attention des conchyliologues sur le genre Glauconome en 1835, dans l'une des dernières livraisons du Généra of shells. 11 reproduisit la figure.de l’espèce type, et il ajouta aux caractères génériques des coquilles ceux de l’animal, qui jusqu’alors était resté inconnu. Nous avons emprunté à M. Sowerby sa courte phrase caractéristique , eh regrettant qu’il n'ait rien ajouté pour com- pléter la description d’un animal nouveau et intéressant à plus d’un titre. Depuis cette époque, la plupart des conchyliologues ont adopté

^370 DlX-SEPTlÈME FAMILEE.

le genre, mais, tous ne lui ont pas accordé la même place dans la mé- thode.

En créant le genre, M. Gray n’hésite pas à l’introduire dans la fa- mille des Vénérides, et ce savant l’y a maintenu dans les diverses mé- thodes qu’il a publiées depuis; mais presque tous les autres zoologistes lui reconnaissent d’autres analogies et l'entraînent dans la famille des Solénacées. M. Sowerby lui-même, en donnant les caractères princi- paux de l’animal , semble pencher aussi pour cette opinion, en l’attri- buant à tort à M. Gray, qui' ne l’a jamais partagée.

MM. Poliez et Michaud , dans l'ouvrage consciencieux quHIs ont pu- blié sous le titre d.e Catalogue des coquilles de la collection de la ville de Douai, n’ont pas admis l’opinion de leurs devanciers; avec une saga- cité dont il faut les louer, ils ont rapproché le genre des Cycladés et des Cyrènes, et l’ont compris dans la môme famille. Cet arrangement, conforme à celui que nous-môme avons adopté dans notre collection , nous parait le plus propre à concilier les caractères du genre avec ceux qui. l'avoisinent le plus , et il a le mérite de se rapprocher autant que possible de l'opinion de M. Gray. Mais avant de discuter la place que doit occuper le genre Glauconome dans une méthode naturelle , il con- vient d’en exposer les caractères avec détail.

La phrase caractéristique de M. Sowerby est le seul document que nous ayons sur l’animal du genre Glauconome. Ce mollusque est ovale, oblong, transverse; les lobes du manteau sont désunis en avant et en bas: cette disposition du manteau est analogue à celle des Vénus, des Cylhérées, des Cycladés , etc., et s’éloigne considérablement de celle des Solens et des autres genres des familles voisines. En effet, dans les Mollusques de la famille des Solénacées, le manteau est ouvert en avant seulement, ce qui fait ressembler cet organe à un véritable sac. En arrière, le manteau des Glauconomes se prolonge en deux longs siphons réunis dans la plus grande partie de leur longueur; disjoints au sommet, ils sont comprimés, et une dépression de chaque côté indique le point de leur réunion. Si cette description convient en partie aux Solens, elle s’adapte bien mieux à ce que nous connaissons des Vénus, des Cythé- rées et des Cycladés. Dans les Cylhérées et les Dosinies , les siphons sont également comprimés et disjoints au sommet; dans les Solens ils le sont moins , et chez les Solécurtes ils sont cylindracés et très gros. Le pied, dans les Glauconomes, est petit, oblong. et comprimé: cette forme de l’organe du mouvement s'accorde bien mieux avec colle de cette partie chez les Vénus et les Cycladés que chez les Solens ou les autres genres de la famille des Solénacées. Nous voyons en effet dans les Solens

LES CYCLADES.

671

un pied très grand, cylindrique, terminé en avant par un empâtement conique. Chez les Solécurtes, le pied est énorme, comprimé latéralement, et il embrasse dans ses parois épaisses toute la masse des organes abdo- minaux. Dans les Glauconomes , au contraire, la masse abdominale est grosse, ovalaire, et elle n’est pas absorbée pour ainsi dire par la base du pied. Ce qui a rapport aux palpes labiales et aux branchies reste un peu incertain pour nous, puisque ces organes, quelquefois variables d’un genre à l’autre dans une même famille, ne sont pas décrits d’une ma- nière assez précise. Les branchies sont longues et réunies en arrière du pied, mais de combien se prolongent-elles après leur jonction? Chez les Solens,et surtout chez les Solécurtes, elles se prolongent beaucoup dans la longueur du siphon branchial, mais dans les Vénus elles se pro- longent beaucoup moins. Ce caractère n’est pas sans importance, si l’on veut s’en servir pour déterminer les rapports entre les animaux deux familles.

Les coquilles du genre Glauconome se distinguent avec facilité de celles de tous les autres genres connus; ce serait avec les Psammobies que, par leur forme générale, elles auraient le plus de rapport. Ce sont, en effet , des coquilles allongées , Iransverses , inéquilatérales , équi- valves, assez exactement closes, très peu entre-bâillantes en avant ou en arrière, et surtout de ce dernier colé. La surface extérieure est lisse, striée ou sillonnée transversalement; les sillons ou les stries sont générale- ment irréguliers, étant produits par les accroissements. Toute cette sur- face est revêtue d'un épiderme d’un vert plus ou moins foncé, ordinai- rement mince; il est tenace, et les crochets seuls sont décortiqués et cariés plus ou moins profondément. Le côté antérieur est arrondi , obtus ; le postérieur s’atténue insensiblement ; il est subrostré, quelque- fois anguleux; le test est peu épais, les bords restent minces et tran- chants. Les crochets sont gonllés et cependant peu proéminents ; ils sont opposés , à peine inclinés en avant. Le bord dorsal est incliné , un peu convexe, et si l’antérieur ne présente aucune trace de lunule, celui-ci n’offre non plus aucun vestige de corselet circonscrit.

La surface interne n'est jamais nacrée, elle est le plus souvent blanche ; quelques espèces sont teintées de violet. Les impressions mus- culaires sont médiocres, fort écartées, peu apparentes et superficielles. L’antérieure estovale, oblongue, étroite dans quelques espèces, plus large dans d’autres; elle est submarginalo dans toutes; elle se courbe le long du bord antérieur. Aq-des.-^us d'elle et presque au-dessous de l’extrémité antérieure delà lame cardinale, on trouve une petite impression muscu- laire; elle est produite par lejnuscle rétracteur antérieur du pied. L’im-

DlX-SErT[ÈME FAMILLE.

Ü72

pression, musculaire postérieure est arrondie, subcirculaire ; elle est située près de l’extrémité de. la coquille et non loin du bord dorsal; elle est par conséquent submarginale comme l’autre. Un peu au-dessus d'elle et parallèlerpent au bord , se détache une petite impression étroite, sur laquelle s’attache le muscle rétracteur postérieur du pied. L'im- pression palléale présente des caractères qui lui sont propres dans le genre qui nous occupe: elle se détache du milieu de l’extrémité infé- rieure du muscle antérieur, et elle se range tout près du bord ventral; elle le suit parallèlement jjjsqu’au voisinage de l’extrémité postérieure. La place occupée par celte impression dans l’intérieur des valves annonce chez l’animal un muscle orbiculaire du manteau fort étroit, à moins que ce muscle ne dépasse la partie solide du test pour se cacher sous l’épi- derme, comme cela a lieu dans les Solémyes , par exemple ; mais cela nous paraît peu probable. Parvenue, comme nous le disions, vers l'ex- trémité postérieure de la coquille , l’impression s’infléchit en dedans et trace une sinuosité longue et étroite, à bords presque parallèles. Cette sinuosité est réellement fort singulière: il semble que le muscle ré- tracteur des siphons, tout en conservant une assez grande longueur, a été rogné de chaque côté et réduit à quelques faisceaux fibreux du centre. C’est sous celle forme que se présente la sinuosité palléale, dans les Glauconome rugosa, chinensis, corrugata, straminea, virens etcerea;elle s’élargit un peu dans Vangulata et le^curta- Celte sinuosité est hori- zontale, ou un peu oblique de bas en haut; elle est entièrement détachée de l’impression palléale.

La charnière est fort différente de celle de tous les autres genres connus ; elle est variable dans la série des espèces, et il n’est pas sans utilité d’en faire connaître les principales modifications.

Les espèces courtes portent trois petites dents cardinales, diver- gentes , sur un bord très étroit ; de ces dents , l’antérieure est simple, la médiane et la postérieure de la valve droite sont bifides, la médiane de la valve gauche est seule bifurquée, la postérieure étant trop mince pour être divisée. Dans les espèces dont nous parlons les dents s’al- longent graduellement d'avant en arrière, la postérieure néanmoins n’est pas beaucoup plus longue que les autres. La charnière change un peu dans les espèces plus étroites , les dents deviennent plus saillantes ; la bifurcation de la dent moyenne et de la postérieure se creuse davan- tage, de sorte que ces dents semblent formées de deux lames tranchantes, inégales, obliques et réunies a la base ; enfin , dans les espèces les plus étroites, la dent postérieure s'allonge beaucoup plus, devient en même teinps plus oblique, et s’applique le long de la nymphe. A mesure que

lÆS CYQ-.vnKS.

la cliarnièro so modifie , comme nous venons do le dire , elle subit un autre changement; les dents, d’abord courtes, se relèvent assez rapide- ment et finissent par se courber un peu en crochet, comme dans quel- ques Solens. C/est cette forme de charnière qui probablement a déter- miné l’opinion de la plupart des conchyliologues qui ,< comme nous l’avons vu, ont rapproché les Glauconomes des Solens.

Un ligament allongé, étroit, peu proéminent, réunit les valves; il est attaché sur des nymphes peu épaisses, circonscrites par un sillou pro- fond, dans lequel s’attache la portion externe et fibreuse du ligament.

Après avoir espo'sé les caractères du genre, nous avons actuellement tous les éléments nécessaires pour discuter les opinions qui se sont ma- nifestées à son sujet, et déterminer la place qu’il doit occuper dans une, méthode naturelle.

Nous avons déjà signalé les différences considérables qui se montrent entre les animaux des Glauconomes et des Solens. De celte comparaison nous concluons naturellement à l'éloignement des deux genres en ques- tion. Si maintenant nous continuons la comparaison entre les coquilles des mêmes genres, nous leurs trouverons dos différences considérables: d’un côté, dans les Solénacées, des coqqilles très brillantes,, ayant de grandes impressions musculaires et une sinuosité palléale large et pro- fonde; d’un autre, les coquillçs fermées à muscles petits et à sinuosité très étroite. La charnière sehte offrirait de Tanaiogie dans la saillie des dents et leur disposition générale, mais. un caractère d’une moindre im- portance relative ne doit pas seul déterminer les rapports du genre. Il est donc permis d’affirmer dans l'état actuel de nos connaissances, que les Glauconomes sont fort éloignés des Solénacées et ne peuvent s’en rap- procher par aucun motif plausible.

Nous avons parlé d’un autre genre avec lequel les coquilles des Glau- conomes ont aussi une certaine analogie. Les Psammobies, en effet, ont la coquille transverse, et quelques espèces sont couvertes d'un épiderme verdâtre ; mais dans les animaux de ce genre, les siphons sont grêles et désunis dans toute leur longueur: c’est pour cela qu’ils ont été rappro- chés des Tellines. Quant aux coquilles, elles diffèrent par les caractères essentiels do la charnière, des impressions musculaires et de la sinuosité palléale. Les Glauconomes ne peuvent encore s’arrêter dans le voisinage des Psammobies; il faut donc les remonter davantage, et c’est assuré- ment vers le groupe des Vénus qu’elles doivent s’arrêter; leur manière de vivre dans les eaux douces les entraîne naturellement dans la famille des Cyclades, et c’est elles doivent rester, à moins que l’animal, étant encore mieux connu, ne devienne le type d’une famille distincte dont T. ï. 9.® PARTIE, 4^*

DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

674

les rapports seront déterminés rigoureuseinent d’après les nouveaux faits dont la science se sera enrichie.

Les Glauconomes sont des coquilles fluviatiles d’une médiocre taille. Toutes, sans exception, habitent le continent asiatique. Toutes celles qui sont connues ont été recueillies non loin de l’embouchure des rivières et des fleuves assez haut, cependant pour ne ressentir aucun effet du voi- sinage de la mer. Le nombre des espèces connues est peu considérable. M. Reeve en compte neuf dans sa Monographie qui fait partie du grand et important ouvrage que publie ce savant conchyliologue sous le litre de Conchologia iconica. Quatre ou cinq espèces onl été découvertes aux Philippines , par M. Cuming, le célèbre voyageur dont le nom s’as- socie aux plus belles découvertes dont la science s' est enrichie depuis vingt ans.

Deux coquilles fossiles citées et figurées par Cuvier et Brongniart, dans le célèbre ouvrage sur lagéologiedu bassin de Paris, rencontrent en abondance dans les lits marneux qui recouvrent le gypse. Ces coquilles étaient minces, et elles n’ont laissé que leurs empreintes, sur lesquelles il est impossible , malgré leur netteté , de découvrir les impressions musculaires et celle du manteau. Brongniart, incertain, rangea provisoi- rement cos deux espèces parmi les Gylhérées , tout en reconnaissant qu’elles pourraient aussi bien appartenir à un autre genre. Aussitôt que nous eûmes des coquilles de Glauconomes, frappé de leur analogie avec les deux espèces fossiles nous recherchâmes des empreintes de char- nière, et après de minutièut efforts , nous eûmes la preuve que les es- pèces de Montmartre sont du genre qui vit aujourd’hui dans deS" ré- gions très chaudes de la lérre. Les deux espèces fossiles dont nous venons de parler sont les seules qui nous soient connues. M. Pusch les menlionne dans les terrains de la Pologne : mais l'identité en a-l-elle été suffisamment constatée ?

Glauconome rugueux. Glauconome rugosa^ Hanley.

PI. 14 025. f. 4. 5. 6.

G, Testa elongatâ ^ oblongâ^ turgidiila ^ subcylindraceu ^ anticè obiusâ, postlcè attennatd f obsolète subungulatâ ; epidennide 'vîrescente longitndlnaliter et irregulariter tenue plicutdy riigosa; impressione musculi antici circiilari ^ sinu puUii itugustissimoy longo^ obliqua.

Hanley dans Wood, Ind. Tcsl. 2* Snp, pl. 10. !'. 24.

Reeve, Proc. zool. Soc. 1844- !'• 19*

Keeve, Couch. Icon. pl. i. f. 4* b.

LÉS CYC.LADES. (>75

Habite Its rivières qui se jetlenl dans la !)aie de ManlUe et celles de l’ile Néyros, Tuue des Philippinns.

Cette espèce est la plus grande du genre; -elle a quelque ressemblance avec VUniopictorum. Elle est oblongue, Iransverse, très inéquilatérale, bombée, subcylindràcée , obtuse en avant, atténuée en arrrière, mais également arrondie de ce côté ; les crochets sont proéminents , toujours cariés. Le côté postérieur ne présente que très obscurément un angle décurrent; cependant la place de cet angle est indiquée par le change- ment dans la disposition de Tépiderme. L’épiderme dans celle espèce est d’un vert foncé : sûr le milieu des valves, il présente une multitude de fines rides longitudinales, irrégulières, interrompues, souvent anasto- mosées en mailles allpngéès ; sur les côtés l’épiderme est écailleux; il suit la direction de stries assez grosses d’accroissement. Ce changement de structure s’opère subitement sur des lignes fort nettes qui séparent du milieu le côté antérieur et le postérieur. La coquille est blanche en dedans ; les grands individus ont une teinte légèrement jaunâtre. Les impressions musculaires sont médiocres, mais toutes deux sont cir- culaires, tandis que dans les autres espèces l’impression antérieure est ovale et souvent très étroite; Timpression palléale est peu distante du bord ventral , et la sinuosité qui la termine en arrière est très étroite ; limitée d’une manière un peu vague, elle remonte un peu obliquement vers l’impression musculaire antérieure. La charnière est peu épaisse ; la dent antérieure de la valve droite est lamelliforme, très saillante, non courbée ; la dent postérieure de la môme valve est grande et fort sail- lante; une fente profonde et étroite la divise en deux parties inégales pour l’épaisseur et pour la longueur.

Cette coquille a 85 millimètres de longueur et. 37 de hauteur.

GENRE CINQUANTE-CINQUIÈME.

CirPIUN'£. Cypiina, Lamk.

PI. i8. f. 8. y. lo. PI. 19. r t. 2.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal épais , ovale ,, ayant les lobes du manteau simples et réunis postérieurement , prolongés en deux siphons très courts, inégaux, ciliés et peu comprimés.

43*

tÎ7f> niX-SEPÏIÈME FAMILLE.

Pied aplati , fort grand , linguiforme , tranchant et dentelé a son bord inférieur. Branchies grandes, subquadrangulaires , inégales , réunies postérieurement.

Coquille équivtilve, inéquilatérale, subcordiforme , épider- mée. Trois dents cardinales sur chaque valve , rapprochées à leur sommet , un peu divergentes ; une dent latérale écartée , postérieure, quelquefois obsolète. Nymphes grandes, épaisses, et donnant insertion à un ligament externe épais et bombé.

Inipressionpalléale simple. Impressions musculaires grandes, subcirculaires, très écartées.

SYNONYMIE GENERIQUE. PectuTiculus , Lister. Cardia , Olafsen. Venus, Linné, Muller, Fabricius, Born, Schroeter, Gmelin, Dillwyn , Wood, Gerville, Montagu, Turton. Arctica, Schumacker. Q/prfwcTjLamarck, Férussac, Blain- ville, Rang', Reeve , Agassiz, etc.

OBSERVATIONS, ütie coquUle figurée et décrite pour la première fois par Lister, dans son Traité des animaux d’A7igl€ter7'e, a été présentée par Lamarck comme type à’un genre auquel il a consacré le nom de Cijpiina, probablement dans l'intention de faire remarquer sa parenté avec les Vénus et les Cylhérées. Linné connut aussi la coquille de Lister, il la rangea dans son grand genre Vénus, sous le nom de Tenus isîandîca; bientôt l’opinion du maître fut acceptée par tous les zoologistes qui lui succédèrent. Müller lui-même, qui dans le Fawia suecica décrivit et figura le premier l’animal de celte espèce , ne la sépara pas des Vénus. Il est vrai qu’à cette époque les caractères génériques des Mollusques n’étaient pas appréciés aussi rigoureusement qu’ils le furent depuis. Néanmoins il esC probable que si Muller eût connu l’animal des Vénus, un observateur de sa valeur aurait été frappé des différences de l'ani- mal de ce genre et de celui des Cyprines, et n'aurait pas manque de les signaler. La description de Muller,- la plus citée parce qu’elle est accompagnée d’une figure, ne doit pas cependant faire oublier celle plus complète d’un autre naturaliste, qui mérite à tous égards la grande réputation qui s’attache à son nom, Othon Fahrîciits. On trouve en effet, dans le Fauna groenlandica de ce.savant observateur, une description très exacte de l’animal du Venus islandica. Lorsque Poli eut fait con- naître, quelques années plus tard, les animaux des Vénus de Linné, il

i;es cvclâdes.

677

aurait été possible, par la seule comparaison des figures et des descrip- tions, d’apprécier les différences qu’ils offrent avec celui du Venus îs- landica. La conséquence de cette comparaison aurait été l’établissement d’un ^enre distinct; mais aucun zoologiste n’y songea, et Lamarck lui- même sépara le genre Cyprine d’après les coquilles, et ne mentionna ni Fabricius ni Muller; il ne parle pas de l’animal, et les auteurs qui le décrivent ne sont môme pas cités dans la synonymie de l'espèce type du genre. Dans la première édition du Règne animal^ Cuvier n’oublia pas les documents laissés parMüller sur l’animal du Venus hîandica. Il indique bien celle espèce comme devant former un groupe dans le grand genre des Vénus; mais le célèbre zoologiste ne va pas plus loin.

Dès la création du genre, Lamarck en avait indiqué les rapports en le comprenant dans la famille des Conques, dans les Conques marines, non loin des Cyclades. Dans les Animaux sans vei'têbres^ il dit que ce genre se rapproche des Cyrenes et des Cyclades par plusieurs de ses caractères. En admettant le genre dans sa trop vaste famille des Con- chacés, M. de Blainville le rapproche des Cyclades: mais nous nous de- mandons pourquoi le savant auteur du Manuel admet le genre Cyprine, tandis qu’il rejette les Galatées, par exemple, parmi' les sous-genres des Cyclades. Assurément les Galatées constituent un genre tout aussi bien caractérisé que lesCyprines. Le grand art de la méthode, comme l’enseigne M. do Blainville lui-même, consiste à mesurer chaque degré d’après des caractères d’une égale valeur, et, dans le cas particulier que nous citons, ce sage précepte n’a pas été mis en pratique. Latreille a été plus heureusement inspiré , en introduisant le genre Cyprine dans la famille des Cyclades. Cüvier adopta cette classification dans la seconde édition du Règne animal, et depuis cette époque deux opinions, fort peu différentes au fond, partagèrent les Conchyliologues : les uns, et c’est le plus grand nombre, conservèrent les Cyprines dans la famille des Con- ques marines ; les autres, avec lesquels nous nous rangeons, l’admirent dans la famille des Cyclades, à l’exemple de Latreille. Mais les deux fa- milles, dans toutes les méthodes, ayant été con.servées dans le contact le plus immédiat, les différences d’opinions que nous apercevons peu- vent être considérées comme de simples nuances sans importance.

Nous devons excepter M. d'Orbigny, car ce naturaliste professé une opinion très différente do celles que nous venons d’exposer. Se fondant sur une observation dont nous ne voulons pas contester actuellement l’exactitude, M. d’Orbigny rapproché les Cyprines dos Cardiles, et les entraîne dans la même famille; bien loin, selon nous, de leurs rapports véritables. Les observations de Poli, dont nous avons constaté l’exacli-

DIX-SEPTIEME FAMILLE.

678

tude, prouvent que les Cardites sont dépourvues de siphons, et qu elles ont lo manteau ouvert dans toute son étendue, exactement comme chez les Mulelles. Il faut que d'autres zoologistes aient trouvé exacts les faits exposés par Poli , car tous les classiGcatcurs , sans exception, ont admis les Cardites dans l'ordre des Mollusques à manteau ouvert. M. d’Orbigny affirme, aussi bien dans sa Paléontologie que dans son Voyage en Amérique, avoir trouvé dans les mors du Pérou une espèce de Cardite dont lo manteau a les lobes réunis en arrière et prolongé en deux siphons très courts en guise de perforations peu saillantes. Se fondant sur ce fait unique, dènt il. ne cherche pas à e,stimer la valeur, M. d’Orbigny s’en sert immédiatement pour modifier une classifica- tion qui a reçu rassentiment des meilleurs zoologistes. Il est évident que si toutes les Cardites offraient celte jonction des lobes du manteau, il faudrait en tenir compte: mais ce ne serait peut-être pas une raison suffisante pour en rapprocher les Cyprines ; car malgré l'anomalie dont il est question, la Cardite de M. d'Orbigny diffère toujours des Cy - prines par les branchies, par le pied, par les palpes labiales , enfin par tous les caractères fondamentaux à l’aide desquels les familles se sépa- rent et les genres se distinguent.

Quelques conchyliologûes admettent plusieurs espèces vivantes de Cyprines. M. Turton, entre autres, introduit dans le genre quatre pe- tites espèces des mers d'Angleterre, qui pour nous appartiennent à d’autres genres ; on no peut donc conserver qu’une seule espèce vivante dans le genre : c’est celle qui habile les mers du nord de l'Europe et de l’Amérique, et dont Müller et Fabricius ont fait connaître l'animal.

Ce Mollusque est ovale-obrond, assez épais, subcordiforme. Le man- teau qui l’envelpppo çst mince, à lobe^ égaux réunis en arrière , mais séparés en avant et en bas, depuis rexlrcraité du muscle antérieur jus- qu'à la base des siphons. Un large muscle orbiculaire très plat s’étend à la circonférence du manteau; son bord externe est dépassé par le manteau lui-mème, qui se termine par un bord exsertile d'un beau jaune orangé. Simple dans presque toute son étendue, le bord du manteau est pourvu en arrjèro seulement , dans le voisinage des siphons , d’un seul rang de chaque côté de petits tentacules cylindracés.

Les siphons sont très courts, par ils ressemblent à ceux des Car- diums; ils sont inégaux en longueur et en diamètre, ils sont complète- ment dépourvus d'un muscle rétracteur spécial ; seulement dans l’endroit ce muscle existe chez d'autres Mollusques, le muscle orbiculaire prend un peu plus de largeur, ainsi que le prouve une légère inflexion que présente l'impression palléale au moment elle touche le muscle ad-

LES CYCLADES.

<3:y

ducteur postérieur des valves. Le siphon branchial est très large , il est comprimé latéralement, et son ouverture est ovale. Celte ouverture est couronnée d'une seule rangée de tentacules cylindracés pointus au som- met, égaux, serrés et simples. Le siphon anal se réduit à une simple perforation, dont le grand diamètre est à peine le tiers de celui du si- phon branchial; l'ouverture de ce siphon est peu saillante, elle est sim- ple et membraneuse ; au-dessus d’elle, et en remontant vers l’extrémité du ligament, le manteau est pourvu de deux rangs de tentacules sem- blables à ceux qui précèdent le siphon branchial.

La masse abdominale est grosse et épaisse; elle se prolonge en avant et en bas en un pied comprimé , linguiforme , pointu à son extrémité antérieure, ayant le bord inférieur tranchant et dentelé. Il serait falci- forme et fléchi comme un genou, d'après Fabricius : la Ggure de Millier le représente tel que nous venons de le décrire. La bouche et les palpes labiales ne sont pas mentionnées par Millier, et sa figure ne représente pas ces parties. Fabricius dit quelques mots des palpes: « ad basin pcdis adhiic papilla lacera conspicitur. n II qsl à regretter que dans sa manière trop concise de décrire, il ail négligé d'indiquer la forme et la grandeur relative des organes dont il est question.

Les branchies ressemblent beaucoup à celles des Vénus et des Cythérées; elles sont grandes, inégales, subquadrangulaires, d’un jaune blond; elles sont sillonnées et finement striées obliquement; elles se réunissent en arrière du corps, et leur base perforée se montre à l’ou- verture du siphon anal.

Les muscles adducteurs des valves sont fort gros, cylindracés, l’an- térieur est un peu semi-lunaire; ils sont très écartés et occupent les extrémités antérieure et postérieure de l'animal; on peut les considé- rer comme submarginaux , car ils sont très près des bords.

Les coquilles du genre Cyprine sont généralement grandes, bombées, cordiformes, inéquilatérales, obr.ondes ou ovalaires; elles sont épaisses, solides, parfaitement closes; leur surface extérieure est lisse, couverte de stries Iransverses d’accroissement peu profondes et irrégulières; elle est revêtue d’un épiderme brun foncé ou verdâtre, épais, lustré, subécailleux, surtout du côté postérieur. Cette surface, selon la juste comparaison de Müller, ressemble à celle que couvriraient de fins crins serrés les uns contre les autres. Les bords sont toujours simples, min- ces, tranchants et subitement épaissis à l’intérieur. Le côté supérieur ou dorsal est convexe, il est dominé par la saillie de grands crochets rapprochés obliquement, inclinés en avant; lecorselet est à peine mar- (]ué dans la plupart des espèces, il en est quelques unes il est nette-

D1X-SE1»TIEME FAMILLE.

680

nient limité par un angle aigu. Le côte antérieur est coilrt, arrondi, ob- tus, souvent creusé au-dessous des crochets d'un espace lunulaire, mais dans lequel la lunule n’est point circonscrite. Le côté postérieur est plus allongé, un peu moins obtus , et quelquefois sublronqué dans l’étendue occupée par le passage des siphons.

La surface interne est blanche, d’un blanc mat et crétacé. Cette surface est terne , même chez les jeunes individus ; les impressions des muscles et du manteau s'y dessinent très nettement, étant d’un blanc un peu jaunâtre. Les impressions musculaires sont très grandes, très écartées, étant Tune et l’autre très rapprochées du bord : l'antérieure surtout est marginale, tant sa partie moyenne est rapprochée du bord; celle impression n'est pas entièrement circulaire, elle est plus longue que large, son côté interne étant coupé en ligne presque droite. L’impres- sion musculaire postérieure est circulaire, située tout à fait en arrière; elle est très rapprochée du bord postérieur. Son extrémité supérieure so continue le long du bord cardinal en un appendice long et étroit sur lequel s’attache le muscle rétracteur postérieur du pied; une impression à peu près semblable continue le muscle antérieur; seulement elle est plus large, elle est destinée à recevoir le muscle rétracteur antérieur du pied. L’impression palléale quitte le muscle antérieur du milieu de son bord inférieur, elle marche parallèlement au bord ventral, et, parvenue vers l’extrémité postérieure, elle remonte perpendiculairement et gagne la circonférence de l'impression musculaire, comme si elle devait la traverser dans son diamètre. Il résulte de celte disposition que l’espace laissé en arrière , entre le bord des valves et l’impression palléale, est plus large que celui qui e.xiste dans toute la longueur du bord ventral.

La charnière mérite une attention particulière, car c’est d’après elle que l’on peut rapporter avec certitude les espèces fossiles au genre. Il existe, en effet, des Cythérées et des Vénus dont la forme générale se rapproche beaucoup de celle des Cyprines, et nous avons fait remar- quer dans ces genres la disparition graduée de la sinuosité palléale; de sorte qu’un moule sorti do l’une de ces Cythérées ou de ces Vénus, n'ayant point conservé l’empreinte de la charnière , pourrait être placé parmi les Cyprines. L’inverse pourrait donc aussi se présenter ; l’absence de l’empreinte de la charnière pourrait faire confondre une Cyprine parmi les Vénus et les Cythérées.

La charOière des Cyprines est fort épaisse ; elle est supportée par une lame cardinale, large, épaisse, solide, dont la base remplit une partie de la cavité des crochets; elle ne la remplit pas cependant d’une manière aussi complète que celle des Galatées. Trois dents cardinales s'élèvent

LES CYCLADES.

68i

sur la valve gauche ; elles sont inégales: l’antérieure e^t en pyramide triangulaire, allongée dans la direction de la lunule; elle est irréguliè- rement dentelée ou sillonnée, surtout sur son bord tranchant. La dent médiane est comprimée, elle est oblique d’avant en arrière, et elle est séparée de l’antérieure par une fossette d'une médiocre largeur. La dent postérieure est encore moins épaisse ; elle se rapproche de la nymphe, et elle descend obliquement en prenant une longueur considé- rable; elle est séparée de la dent moyenne par une très large fossette triangulaire. La charnière de la valve droite offre d’abord en avant une fossette triangulaire propre à recevoir la dent antérieure. Cette fossette est plus ou moins profonde, selon les espèces ; à côté d'elle s'élève une première dent oblique, peu épaisse, séparée de la suivante par une fos- sette étroite dans laquelle est reçue la seconde dent de la valve opposée. La seconde dent de la valve droite est très grosse, très oblique, tantôt simple, tantôt largement canaliculée dans toute sa longueur; cette grosse dent est séparée de la nymphe par une fossette étroite et profonde des- tinée à la dent postérieure de la valve gauche. Une dent latérale posté- rieure s’élève sur la valve gauche en arrière du ligament et de la nymphe qui le supporte , elle est reçue dans une fossette correspon- dante de la valve droite ; cette dent est plus ou moins saillante,' selon les espèces ; elle ne manque dans aucune; il n’y a aucune trace de dent latérale antérieure comparable à celle des Cy rênes. La nymphe est gé- néralement grosse, épaisse et saillante dans les Cyprines ; elle sert de point d’appui à un ligament externe gros et épais, fort saillant au de- hors et allongé le long du bord dorsal.

Nous le disions tout à l’heure, une seule espèce vivante est connue dans le genre Cyprine ; cependant M' Turton en admet quatre autres dans son ouvrage sur les Coquilles bivalves de V Angleterre. La première, Cyprina triangularis, est une petite Cythérée très voisine du minima^ que nous avons mentionnée dans le genre Cythérée, et que M. Turton range aussi parmi les Cyprines. La seconde, Cyprina compressa, a tous les caractères des Astarlés; elle ne porte que doux dents à la charnière et elle n a aucun vestige do dent latérale poslérienro. La troisième est le Cyprina minima, qui est une véritable Cythérée, comme nous l’a- vons déjà dit. Enfin, la quatrième, Cyprina orbiculala, est une coquille orbiculaire, couverte d’un réseau destries longitudinales et Iransverses; elle appartient an genre Lucine. Ces espèces étant rejetées du genre, il ne reste plus que le reniis islandtca, seul type vivant du genre Cyprine. Cette espèce est propre aux mers du nord de l’Europe et de l’Amériquo. C.ommune en Islande, elle se mange, on la Irouve aussi en Suède et

682

D1X>SEPTIEME FAMrtLE.

en Norwége; elle descend jusque dans les mers d’Angleterre ; elle, vit dans les mers de Groenland , à Terre-Neuve, et sur une assez grande longueur des côtes de rAmérique septentrionale. Elle est fossile dans un assez grand nombre de lieux. Muller dit qu’elle est fossile en Suède; on la trouve fréquemment en Islande, dans des terrains volcaniques, elle a été découverte par M. Robert. M. S. Wood la cite parmi les fossiles du crag d’Angleterre, et M. Nyst dans ducragdela Belgique. Elle a été également mentionnée par M. Philippi parmi les fossiles de la Sicile.

Si l’on s’en rapportait trop aveuglément aux catalogues, on pourrait croire qu’il existe plus de cinquante espèces fossiles de Cyprines; mais lorsque l'on vient à examiner chacune des espèces, on reconnaît bientôt que plus de la moitié doivent disparaître, soit qu'elles rentrent parmi les Vénus ou les Cythérées, comme nous l’avons déjà vu en traitant de ces genres, soit qu’elles fassent double emploi et se perdent dans la sy- nonymie des espèces qu’il faut conserver. A la suite d’un examen scru- puleux, nous conservons vingt-deux espèces incontestables. Il y en a deux ou trois qui pourraient bien dépendre du genre, mais dont la char- nièrp n’est pas connue. Il faut, en conséquence, les laisser jusqu’à nouvel ordre parmi les douteuses.

Nous ne mettons même pas au nombre de ces dernières le Ctjpriua vctusta de M. Rœmer. Dans ses fossiles du Hartz, ce savant donne ce nom au moule d’une coquille ovale, transverse, qui, pour nous, est une véritable Cyprîcardc. Cette espèce est la seule qui jusqu’ici ait été mentionnée, dans les terrains paléozoïques: en la faisant passer dans un autre genre, le genre Cyprine lui-même disparaît de ces terrains.

Nous avons recueilli dans Toolithe inférieure d’Hayange (Moselle) lès moules de deux coquilles qui ont l'apparence de Cyprines : l’une a la forme générale et la grandeur du Cyprîiia islandica; l’autre, plus globuleuse , se rapproche du Cyprîna quadrata de la craie , ayant toute- fois les crochets moins saillants. Avant de les admettre défmilivemenl dans le genre , il faudra rechercher la charnière que nous n’avons point vue. Deux espèces sont propres au terrain jurassique moyen de la Russie ; elles ont été découvertes aux environs de Moscou , et M. d Or- bigny les a fait connaître dans le bel et bon ouvrage de MM. de Ver- neuil, Murchison et Kaiserling, sous les noms de Cyprina hehner- seniona et cancriniana.

De toutes les formations . la plus riche en Cyprines est la crétacée. Nous y en comptons quinze , au nombre desquelles nous ne com- prenons pas les deux espèces mentionnées par M. Reuss dans son ouvrage sur la craie de Bohême : l’une , le Cyprina crassitesta^ n’est

LES CyrXADES.

683

point figurée, n'est point décrite d’une manière suffisante; l'autre, Cijprina oblonga nesi pas du tout Voblonga de M. d'Orbïgny. D’abord l’espèce de M. Reuss est-elle une Cyprine? Nous ne le pensons pas. Dans tous les cas , elle devra constituer une espèce distincte de celle à laquelle elle est rapportée : elle est beaucoup plus équilatérale , plus aplatio , plus large et plus tronquée du côté postérieur ; les crochets sont beaucoup moins saillants, moins obliques, elles stries Iransverses sont régulières et plus profondes.

Une seule espèce, le Cgprina rostrata, se trouve dans le terrain néocomien en Angleterre, en France et en Suisse. M. Leymerie en ajoute une seconde , Cyprina ervyensis , qui , d’après lui , se trouverait à la fois darts le grès yert et le terrain néocomien. Mais M. d’Orbigny ne l’admet que dans ce premier terrain. Sous le nom de Cyprfna ker- nensis, M. Leymerie sépare une espèce que M. d’Orbigny rapporte au rostrata , tandis que M. Brotm le confond avec le Cyprina angulata de Sowerby. N’ayant pas cette espèce sous les yeux , nous ne pouvons décider lequel de ces paléontologistes a raison; mais il nous semble, d’après la figure du moule, qu’elle se rapproche davantage du rostrata. Quatre espèces sont dans le gault : le regularis et Vervtjensis , d’après M. d’Orbigny, se trouveraient à la fois dans l’Aube, les Ardennes, la Meuse , dans la Drôme et en Savoie.

Une espèce, le Cyprina incerta d’Archiac , est propre au grès vert de la Belgique, connue sous le nom de Tourtia. Cinq espèces se distri- buent dans la craie chloritée; plusieurs d’entre elles se montrent à la fois dans les divers bassins crétacés , et celle nommée ligeriensis par M. d’Orbigny, se rencontrant partout , peut .caractériser celte portion importante de la formation crétacée. Enfin , il y a une espèce dans la craie blanche de Royan , Cyprina elongata d'Orbigny, et une dernière dans la craie marneuse do Quedlinbourg, nommée Cyprina orbicularis parM.Rœmer.

Les espèces tertiaires sont moins nombreuses. Nous en avons déjà réformé plusieurs que Lamarck avait prises pour des Cyprines, et qui sont de véritables Vénus par tous leurs caractères. A ces espèces , précédemment signalées à la fin des Vénus , nous devons ajouter le Cyprina tridacnoides de Lamarck, qui est une grande Vénus des terrains tertiaires de l’Amérique septentrionale, décrite sous le nom de Venus deformis par Say. Le Cyprina islandicoides de Lamarck est composé de deux espèces : une Vénus , Venus umbonaria de Bordeaux et d’Italie , une véritable Cyprine qui , pour nous , est le Venus islandica : le Cyprina islandicoides doit donc disparaître complètement.

DIX-SEPTIEME FAMILLE.

684

L’étage tertiaire inférieur contient cinq espèces : deux plmiata et Iforn.sn sont de l’argile de Londres. La troisième est des sables ma- rins les plus inférieurs du bassin de Paris (Braclieux, Noailles , Abbecourt , etc.): c'est le Cyprina sculeîlaria, M. Nyst crut la re- trouver dans Ie& sables de Kleinspauwen en Belgique. Mais la com- paraison des coquilles des deux bassins nous a fait découvrir en elles des différences spécifiques , et nous nommons l’espèce belge Ctjprina Nystii , voulant consacrer à cette coquille le nom du naturaliste qui le premier Ta fait connaître.

Quoique le Cyprina islandica soit assez variable, cependant il ne l’est pas point que l’on puisse y admettre la coquille à laquelle M. Goldfuss consacre ce nom ; heureusement que l’excellente figure publiée par ce naturaliste permet de rectifier l’erreur qu’il a faite à l’instigation de M. Bronn. La coquille décrite par Goldfuss vient de Bunde et d'autres localités de Weslphalie, dont l’âge se rapporte très probablémept à celui des sables de Kleinspauwen , et sont parallèles aux sables de Fontainebleau. Il résulte des précédentes observations que cette soi-disant islandica doit constituer une espèce distincte à laquelle nous donnons le nom de Cyprina Bronnii^ et qu’elle ne dépend pas de terrains tertiaires supérieurs , comme l'a cru Goldfuss , mais de la partie supérieure des terrains tertiaires’inférieurs.

Une seule espèce est particulière au crag , elle est à la fois en Bel- gique et en Angleterre : c’eàt le Cyprina rustica, Flem., Tenus rnsticaj Sowerby, à laquelle Goldfuss a aussi donné le nom de Cyprina Lajon- Aaîrit;M. Nyst celui de Cyprina iumida , et presque en même temps M. Vanbeneden celui de Cyprina Defrancii.

Enfin, nous avons à mentionner une dernière espèce, le Ke/ms islan- dica ^ Lin. Elle est fossile dans le crag d'Angleterre et de Belgique; elle apparaît dans ce terrain pour la première fois , et c’est son analogue qui vit encore aujourd’hui et dont nous allons présenter la synonymie.

Nous ne mentionnons aucune espèce dans’ l’étage tertiaire supé- rieur, Cependant Brocchi . Lamarck , Defrance , en citent plusieurs ; et plus tard, M. Bronn [Italiens tertiar Gebilde) en a mentionné jusqu’à sept espèces dans les terrains subapennins. Mais ce savant naturaliste a reconnu depuis que ces coquilles dépendent du genre Vénus , et il les y a replacées dans son Index paîeontologicus.

LES CYCLAOES. ^85

Cyprine d’Islande. Ç'ijprina islandica . Laink.

PI. 18. f. 8. 9. 10.

C. Testa ovato^turgidâ, cordatà ^ inœquilaterâ , anticè rotundatâ ^ posticè obscure sabangulatâ , intiis albo-cretuceà ^ extàs epidermide fusco 'uirente, nitido ^ striato 'vestitd; cardine lato y soHdo; dente anterioTC pjtramidali , triangulari.

Lister, An. ang. p. 173. pl. 4. f. 22.

Pectunculus maximus. Lister, Conch. pl. 272. f. 108.

Venus islandica, Linné, Syst. nat. éd. 12. p. ii3r. n“ 124.

Olafsen. Voy. en Islande, l. i. p. 37. 98. pl. ii, f. 8.

Pennant, Zool, Brit. t. 4* P* 2o5. pl, 56.

Pectunculus major, Da Costa, Coneb. Brit. p. i83. pl. 14. f, 3.

Venus Bucardium. Born, Mus. p. 63. pl. 4, f. ii.

Venus Müll. Fau. suec. Prod. p. 246. 2977.

Millier, Zool. suecica. t, i. p. 107. pl. 28,

Chemu. Concli. t. 6. p. 34o.pl. 32. f. 34t, 342,

Fabricius, Faim. Groënl. p. 411. 412. »

Schroef. Einl. f. 3.p. 123.

Karslen, Mua. Lesk. t. i. p. i63.

Gmel. p. 3271. i5.

Donov. Brit. Shells, t. 3. pl. 77.

Wood, Lin. Trans. t. 6. p. 166..

Montagu, Test. Brist. t. i. p. 1x4.

Maton et Racket, Lin. Trans. t. 8, p. 83..

Dillw. Cat. t. I. p. 176. n®42.

Lamarck, An. s. vert. t. 5. p. :T56. 2.

Arctica 'vulgaris, Sebum. Nouv, syst. p. ï45. pl. i3. f. 3.

Turtün, Conch. Dict. p. 238.

Cyprina arctica, Turlon, Conch. Brit. p. i35. i.

Bond. Ëlepi. of Conch. part. p. 11. f. 33.

Venus islandica, Gerv. Cal, des coq. de la Manche, p. 25.

Cyprina islandica. Blainv. Malac. p. 552. pl, 70 bis. f. 5.

Croiich. III. Introd. p. x3, pl. 7. f, 2.

Flem. Brit. An. p. 443. 5io.

Venus islandica. Wood, Ind. pl. 7. f, 41.

Ciiv. Règ. an. éd, t. 3. p, 147.

Desh. Ency. méth. "Vers. t. 2. p. 46. 1,

Sowerby, Généra of shells. Cyprinn. f. i. 2. Cyp, 'vulgaris.

«86

DIX“SEPTIÈME ^'AMILLE.

Desb. daus Lamk. An. s. vert, éd. t. 6. p. ^90, n* 2.

Bouch. Chant. Cat. des coq. du Boul, p. 20.

Forbes, Malac. Mon. p. 47,

Anton, Verz. der Coucb. p. 10. *

Jeff. Mar. Moll, at Oban. Conch. mag. p. 4.3,

Gould. Inv. of Massach. p. 82.

Reeve, Conch. syst. t. i. p. 90. pl, 65.

Sow. Coucb. Man. p. i34. f. 116.

Hanley, Descr. cal. p. g5.

Kuster, Cheniii. éd, Veu, p, 5. pl. i. f. 1,2.

Callow, Conch. Nom. p. 3i. n“ i.

Thomps. Rep. oflheFauna oflreland. p. 261.

Lovèn, Ind. Moll. Scand. p. 38. ,

Màcgill. Moll, of Scotl. p. 210 et 257.

Thorpe, Brit. Mar. conch. p. 81.

Agassi/., Coq. tert. p. 49. x. pl. i3. f. 6, 7.

FossHis. Nyst, Coq.- foss. de Belg. p. 147. n loi. pl. 9. f. i. f'ènus œqualis, Sow. Min. coucb. pl. 21.

Cyprina œqualis, Phil. Eiium. Moll. SIcil. t. r. p. 89.

Cyprina maxima. Wood, Cal. foss. shells froin the crag. Ann. nat. bist. t. 6. p. 249.

Cyprina augulata. iSyst, Rech. sur les foss. d’Aiiv. p. 9. 84.

Cyprina islandicoides, Nyst, loc. cit. p, 9. 33.

Cyprina islandica. Hisioger, Lethea suec. Sup. p. 9.

Id. Philippi, Enum. Mull. Sicil. t. 2. p, 3i.

Cyprina 'vulgaris. Mçrris, Càt. of Brit, foss. p. 86.

Cyprina œqualis. Agassiz, Coq. terl. p. 52. n'* 2. pl. i3. f. 5.

Habite tout l’Océau septentrional en Europe et eu Amérique.

Fossile en Norwége, eu Suède, en Scauie, en Sicile, dans les terrains tertiaires supérieurs; en Angleterre, eu Belgique, daus le crag.

Nous ne pouvons citer l’ouvrage do M. Pusch dans notre synonymie , parce que nous soupçonnons que ce naturaliste a eu sous les yeux une Vénus et non une Cyprine. Pusch rapporte , dans sa Synonymie, non seulement le Fe?ius islandica de Brocchi , et le Cyprina islandicoides de Bastérot , qui sont de véritables Vénus , mais encore le Cyprina islan- dica de Lamarck et le Fenu^ œqualis de Sowerby ; ces citations ne s’accordent guère avec la figure de l’espèce qui , d’après la charnière , nous semble une Vénus voisine de Vumbonaria. Nous en pouvons juger avec d’autant plus de facilité que nous avons reçu récemment de Lobersdorf une coquille semblable à celle de M. Pusch , et elle ne diffère

LES CYCLÂDES,

pas de Vumbonaria de Bordeaux. Nous devons celle communication à M. de Hauer, qui possédé la plus riche colleclion des fossiles terliaires de l'Autriche et de la Transylvanie. Sou^ le nom de Gyprina œqualis , M. Goldfuss a décrit et figuré une coquille de la Westphalie, qui appartient bien au genre, mais qui n’est pas de l'espèce à laquelle il la rapporte: celle Cyprine doit constituer une espèce distincte, ainsi que nous l’avons déjà dit précédemment. M. Bronn a commis de nombreuses erreurs dans la synonymie qu’il donna du Venus Brocchii dans Lethea geognostica, avec laquelle il confond le Gyprina islandica et d'autres espèces: on conçoit d’après cela comment il se fait que pour M. Bronn l’espèce se rencontre partout, dans tous les terrains tertiaires ; mais depuis l’auteur a rectifié sa synonymie dans son Index pahonto- logicus.

Nous ne décrirons pas de nouveau celte espèce si bien connue , et cependant avec laquelle d’autres ont été si souvent confondues. Cette confusion n’était pas possible entre des espèces vivantes , puisqu’il n’en existe pas d’autres , mais elle s’est produite entre des coquilles fossiles légèrement étudiées dans leurs caractères essentiels. Nous avons tou- jours évité ces erreurs , ainsi que le constatent les tableaux que nous avons publiés en 1831, dans la première édition des Principes de gêologk de M. Lyell.

Nous aurons quelques remarques à ajouter au sujet de la distribution de cette espèce. Elle apparaît pour la première fois dans le crag d’An- gleterre et de Belgique; l’âge do ce terrain, déterminé par les fossiles qu'il contient, le place entre les dépôts de l’étage moyen et ceux de l’étage supérieur. Dès cette époque l’espèce était confinée dans les régions boréales jusqu’au delà de la limite de la région tempérée ; elle ne se montre pas dans lés terrains tertiaires supérieurs du midi de l’Europe. Quoique citée dans les terrains subapennins, elle n’y existe pas, mais la continuité de son existence se manifeste par sa présence dans les terrains terliaires du Nord. En même temps elle apparaît dans les terrains quaternaires de la Sicile; ce qui prouve que, entre son origine et le moment elle se répand dans ce pays, les conditions de son existence sont changées. Les continents se sont agrandis , les mers se sont approfondies , et l’espèce, se propageant en suivant des lignes d’égale température, a gagné les grandes profondeurs des mers du midi de l’Europe, et elle est ainsi parvenue jusque dans la Méditerranée, accompagnée d’un assez grand nombre d'espèces. Cette population , presque littorale au nord , devient pélagienne vers le midi , attachée qu’elle est à celte loi de la distribution des êtres qui les soumet dans

G88

1) 1 X-SK PT l K M K F A M ! L I . K .

fîes limites assez étroites à riiabitation de zones d'éga^les températures. 11 a suffi que dans rémersion des terrains de la Sicile il y en eût de pris à de grandes profondeurs pour qu’ils apporjtassenl à la surface celte Cyprma isîandka^ que l’on croit spécia.Ie aux mers du Nord, mais qui par le fait peut se trouver partout règne la basse température qui lui est nécessaire. La constatation de l’identité des indivîdus fossiles déjà Sicile, avec ceux qui vivent dans les mers du Nord, a semblé à M. Agassiz un fait d’une importance propre à prouver le refroidisse- ment général de l’Europe pendant la période glaciaire. Pris dans son isolement , le fait dont il est question ne donne pas la prouve du phé- nomène recherché par M. Agassiz. La période glaciaire, telle que les géologues la déterminent,. a été d’une très longue durée : d’après eux la température moyenne aurait été plus basse de quatre ou cinq degrés. Un phénomène d’une telle intensité a avoir une action profonde sur tous les êtres vivants; tous ont se déplacer vers le midi et laisser de nombreuses traces de leur migration. On n"’en trouve aucune cependant ^ et ce fait du Cyprina islandka de Sicile , cité avec tant d’empressement et d’éclat par M. Agassiz , n’a rien de plus extraordi- naire qué beaucoup d’autres semblables et dus à la cause toute simple que noua exposions tout à l'heure.

Cyprliie scutellaire, Cyprina sciiteîlaria ^ Desh.

PI. 19, f. 1. 2,

C, Testa magnâ^ ovatii , cordiformi , subdepressâ^ irregulariter striatd^ posticè subangidatâ \ latere postico angnlo obtuso eircumdaco; umhonibus magnis ,• obUqitis approximatis ; dente Innari angùsto , prcelongo apice irregulariter crenato^ dente lateraîi postico maxima^ in alierâ i?alvtdâ nuUo.

Cytherea senteUaria^ Lamk. Ann. du Mus. t. 7. p. i33, r.

là. Defr. Dict. sc. nal. t. 12. p. 421.

Cytherea scnteiinria, Lamk. An. s. vert. t. 5, p. 58i. 3.

Cyprma scutellaria. Desh. Dict. class. d’hisl. nat. t, 5. p. 282.

Cyprina scutellaria. Desh. Coq.foss. de Paris. 1. 1. p. i2 5, pl.20. f. i , 4t

Desh. Ency. inélh. Vers, t, 2. p. .'j6. 2.

Desh. daus Lamk An. ÿ. vert. 2* cd. t. 6. p. 33o. n" 3.

Habite... Fossile dans les sables inférieurs du bassin de Paris, Bra- cheux, Abbecourl, Noailles, près Beauvais, elc.

M. Nyst a mentionné cette espèce dans les sables de Kleinspauwen en Belgique, mais elle n’y existe pas ; ce savant naturaliste ayant pris

LES CYCLADES. 689

pour elle une espèce qui en est très voisine. Nous avons sous les yeux les coquilles des deux localités , et nous leur trouvons des différences constantes. Le Cyprina scutellaria est une assez grande coquille qui acquiert la taille et à peu près la forme du Cyprina islandica; elle est ovale, inéquilatérale, subcordiforme , mais moins gonflée, plus aplatie de chaque côté. Au-dessus d’un côté antérieur, court et obtus , s’incli- nent des crochets saillants , très obliques et très rapprochés. Le côté postérieur est subtronqué; il est circonscrit par une cote très obtuse, accompagnée d’un pli déprimé , peu profond ; cette côte et ce pli par - tent du côté postérieur des crochets et descendent obliquement vers l’extrémité postérieure de la coquille. La charnière est large et épaisse; la lame cardinale est courte et sinueuse dans le milieu ; la dent anté- rieure est longue , étroite, triangulaire, son bord libre est irrégulière- ment dentelé. La dent médiane de la valve gauche est toujours bifide; les lobés résultant de la bifurcation sont inégaux, l’antérieur est le plus gros. Celle bifurcation n’existe pas dans l’espèce de M. Nyst. La dent latérale postérieure de la valve droite est très grosse ; elle est séparée du bord par une rigole étroite et profonde dans laquelle est reçue une portion correspondante du bord de l'autre valve un peu plus saillant, mais dépourvu de dent. L'impression palléale est simple, mais elle ne reste pas parfaitement parallèle au bord, car le bord s’élargit en arrière , ce qui n’a pas lieu dans l’espèce de Belgique.

GENRE CINQUANTE-SIXIÈME.

CYRÈNXï. Cyrena, Lamk.

PL ï 8. lig. I à 7.

Caractî:rE3 GÉNÉRIQUES. Animal ovale, transverse; les lobes du manteau simples ou frangés , réunis postérieurement ; deux siphons courts et réunis à la base. Pied comprimé, ovale, trigone ; deux branchies très inégales : la plus grande interne , subquadrangulaire , la plus petite subtrigone. Bouche trans- verse; palpes labiales allongées, ovales, trigones, non soudées.

Coquille ovale, arrondie ou subtrigone, épaisse, solide, épiderinée. Charnière ayant trois dents cardinales sur chaque T. I. PARTIE. 4 U

DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

690

valve; deux dents latérales, tantôt lisses, tantôt striées; l’antérieure, ordinairement la plus épaisse; la plus courte, est la plus rapprochée des dents cardinales. Impressions muscu- laires petites, arrondies; impression palléale simple.

SYNONYMIE généïuque. VcHus ^ Çhemnitz , Schroeter, Gmel., Faujas, Dilhv., Wood. Tellina^ Muller, Schroeter, Gmel., Montagu, Dillw., Wood. Cardium, Da Costa, Dorset, Montagu. Cyclas ^ Bruguière, Lamarck, Bosc, Schumacher, Cuvier, Blainville. Corbicula^ Megerle. Macira^ Brongniart. Geloina , Gray. Velorita^ Gray.

OBSERVATIONS. Lo güiiro Cyclado de Bruguière, réunissant sons des caractères naturels des coquilles disséminées parmi les Tellines , les Vénus et môme les Cardiums , aurait pu être conservé dans son entier ; mais Lamarck crut nécessaire de le partager, d'après dos caractères de faible valeur empruntés aux coquilles: il en sépara les Cyrènes , et son exemple fut généralement suivi ; cependant , comme nous le verrons bientôt, il s'établit une transition insensible d'un genre à l'autre, de telle sorte qu'il devient parfois assez difficile de marquer nettement leur limite.

Les Cyrènes étaient connues avant Bruguière. Millier, dans son HhtoivB des vers, en mentionne plusieurs et les range, avec les Cyclades, dans le genre Tellina. Muller, en cela, se conforme à l’opi- nion de Linné , qui plaça dans ce genre Telline l’espèce de Cyclade la plus répandue dans les eaux douces de l’Europe. Par le fait. Millier, ayant séparé les Tellines d'eau douce des marines , il a suffi à Bru- guière de prendre ce genre si bien ébauché et do lui donner un nom convenable. Quelques années après la publication de l'ouvrage de Millier, Chemnilz fit connaître quelques espèces qui auraient pu se ranger dans les Tellines de cet auteur ; mais leur trouvant trop d'épais- seur et de solidité , le savant conchyliologue les mit au nombre des Vénus. Les naturalistes qui succédèrent à ceux que nous venons de citer eurent le tort de suivre sans examen leur exemple, conservant à quelques espèces leur place dans les Tellines , à quelques autres leur rang parmi les Vénus.

Les Cyclades, par leur charnière, se rapprochent réellement des Bucardes; il no faut donc pas s’étonner si Da Costa, à une époque l’élude des coquilles était peu avancée, confontîit les Cyclades parmi

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les Cardiums; mais il est surprenant que celte opinion .ait trouvé des approbateurs parmi des conchyliologues aussi instruits que Montagu , Pulteney, Racket, qui écrivirent lorsque la science possédait assez de documents certains pour éviter une telle confusion.

Lamarck conserva d’abord le genre Cyclade tel que Bruguière l’avait conçu; Megerle , en 1 811 , le modifia et en fit sortir le genre Corbicuîa pour celles des Cyrènes qui ont les dents longues et étroites. A ce genre incomplet Lamarck en substitua un autre , plus naturel , mieux caractérisé, qu’il proposa sous le nom deCyrène dans ses.4nîïnawaï sans vertèbres. Depuis sa création , ce genre fut adopté par presque tous les zoologistes. Nous devons cependant en excepter M. Gray, qui en 1 844, et plus tard en 1 847 , proposa de partager en trois un genre aussi naturel que celui de Lamarck. M, Gray admet d’abord le genre Corbi- cuîa pour les espèces à dents latérales , longues et striées ; le genre Cijrena se trouve réduit aux espèces à dents latérales simples et plus courtes; et enfin il détache un genre Velorita pour des espèces à dents latérales, courtes, épaisses et rapprochées de la charnière. Nous allons voir, par l’examen des coquilles et des animaux, que les trois genres de M. Gray ne se justifient pas par des caractères do quelque valeur.

Nous avons sous les yeux l’animal du Cyrem zeylanica; il a beau- coup de ressemblance avec celui des Vénus, mais il conserve des caractères propres au genre auquel il appartient. Il est enveloppé d’un large manteau membraneux , dont les lobes sont séparés dans la plus grande partie de leur circonférence ; leur séparation commence au bord inférieur du muscle adducteur antérieur des valves et se termine tout à fait en arrière, à la base des siphons. Cet organe présente môme de ce côté une disposition tout à fait semblable à celle que nous ont offerte les Galalées , c’est-à-dire que les lobes , au lieu de se réunir étroi- tement à la base des siphons , débordent ces organes et leur ménagent une cavité particulière pour les loger au moment l’animal les con- tracte.

La circonférence du manteau est épaissie par un muscle orbiculaire assez large, qui lui-même est débordé par un large bord membra- neux, profondément lobé, plissé, en un mol exactement disposé comme celui que nous avons décrit dans plusieurs espèces de Vénus. Ce bord se rétrécit en avant et en arrière, et en même temps ses lobes s’amoindrissent ; entre ce bord et celui qui s’applique sur le test , il en existe un troisième assez épais , mais court et simple.

Les siphons sont gros et courts. Ils sont aplatis latéralement et réunis

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DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

dans presque toute leur longueur ; une dépression latérale les parcourt et indique le point de leur jonction. Ces organes sont presque égaux ; une ouverture grande et ovalaire les termine, et sur le bord de cette ouverture s’élève un seul rang do petits tentacules serrés, nombreux, subcylin- driques et toujours simples. L’ouverture intérieure des siphons nous présente une disposition remarquable , comparable à ce qui existe dans les Mactres. Une grande valvule membraneuse couvre l’entrée du siphon branchial. Ses extrémités antérieures se prolongent en avant et présentent la forme d’un V très ouvert j au-dessous de celte valvule on en trouve une autre que nous n’avons jamais vue dans les autres genres de Mollusques que nous connaissons. Elle ressemble à une manchette qui s’élève du pourtour intérieur du siphon et s'avance en avant à une faible hauteur. Les membranes qui entourent l’entrée du siphon anal sont elles-mêmes très saillantes ; elles forment une espèce d'entonnoir qui s’avance au-devant de l'extrémité postérieure des branchies.

La masse abdominale est peu épaisse : elle est terminée par un large pied subquadrangulaire continué en avant par une pointe triangulaire aplatie et linguiforme. Ce pied est tout à fait semblable à celui des Vénus, et il est pourvu en avant et en arrière d’un muscle rétracteur bifurqué à son extrémité, et qui s’attache à la coquille de la même ma- nière que chez les autres Mollusques acéphalés.

La bouche est grande , subcirculaire ; elle est accompagnée comme à l’ordinaire de deux paires de palpes labiales, dont la forme et la grandeur se rapprochent assez de celles des Mactres. Ces organes sont portés beau- coup plus en avant que chez les autres Mollusques. Il en résulte la sup- pression totale des lèvres, les palpes labiales d’un côté se joignant par leur base à celles de l’autre sur la ligne médiane. Nous avons déjà remar- qué d’autres Mollusques chez lesquels les lèvres étaient très courtes, mais celui-ci est le seul elles manquent complètement. Les palpes labiales, chez les Cyrènes, sont grandes , en triangle très pointu et couvertes en leur surface interne d’une très grande quantité de fines lamelles peu saillantes, mais très serrées; et, ce qui n’est pas ordinaire, ces lamelles »e continuent jusqu’au voisinage de la bouche.

Les organes de la respiration ont la plus grande analogie avec ceux des Vénus. Ils sont composés de deux paires de feuillets branchiaux inégaux, dont les internes sont les plus grands. L’extrémité antérieure de ces feuillets se maintient très largo : parvenue vers l’origine des palpes labiales , elle se prolonge en une pointe étroite qui , pour s’avancer jusque près de la bouche , s’interpose entre les organes dont nous parlons. Les branchies se prolongent en arrière de la masse abdo-

LES CYCLADES.

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minale; elles so réunissent au moyen d’un bord membraneux étroit, et, se soudant par leur face interne aux membranes du siphon anal , elles interceptent toute communication entre la cavité de ce siphon et celle du manteau.

Les muscles adducteurs des valves sont d’un médiocre volume si on les compare à la grandeur do l’animal. Ces organes sont subcylindri- ques , à peu près égaux, et tout on restant dans la région dorsale , ils occupent à peu près les extrémités de l’animal.

Les coquilles du genre Cyrène sont généralement grandes elles sont épaisses, solides, suborbiculaires ou subtrigones, presque équilatérales; elles sont plus ou moins comprimées ; quelques unes sont bom- bées et subcordiformes. Leur surface externe, ordinairement lisse, pré- sente cependant des stries irrégulières d’accroissement , et un certain nombre d’espèces sont ornées de sillons transverses. Toutes , sans exception, sont revêtues d’un épiderme tenace, plus ou moins épais , verdâtre, d’un brun plus ou moins foncé. Les bords sont toujours simples, et les valves étant rapprochées , la coquille est parfaitement close sur tout son pourtour. Ses bords sont minces et tranchants ; ils s’épaississent assez vite à l’intérieur. Le coté antérieur est ordinaire- ment le plus court; il est obtus et arrondi : il est dénué de la lunule et il est dominé par des crochets généralement peu saillants , très rappro- chés , et presque toujours profondément cariés , ainsi que cela a lieu dans presque toutes les coquilles qui habitent les eaux douces. Le côté postérieur, un peu plus allongé , est obscurément tronqué à la manière de celui des Cyprines. Le côté dorsal ou supérieur est presque toujours convexe; il porte à son extrémité antérieure des nymphes épaisses , solides, plus ou moins saillantes, selon les espèces, séparées par un sillon profond, et destinées à recevoir un ligament externe ordinaire- ment saillant , convexe et allongé le long du bord dans une étendue variable et toujours en rapport avec la longueur des nymphes. Dans les espèces triangulaires, pour lesquelles M. Mégerle a proposé le genre Corbicula, la nymphe est plus petite elle ligament plus court; mais si l’on adoptait ce genre, dans toute la rigueur de ses caractères , il faudrait y ajouter, comme nous le verrons , do très grandes espèces chez lesquelles le ligament est plus saillant que dans aucune autre.

La surface interne n’est jamais nacrée; elle est blanche dans un grand nombre d’espèces; elle prend des teintes pourprées ou violacées dans un assez grand nombre d'autres; et cette distribution de couleurs n’afïecle pas plus une forme qu'une autre : elle se montre indiffécefu- ment chez les espèces orbiculaires ou dans les triangulaires,

DIX-SEPTlÊME FAMILLE.

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La charnière présente , comme dans tous les grands genres , des caractères constants, et cependant variables dans certaines proportions. C'est ainsi qu'on peut dire, d’une manière à peu près absolue, que cette charnière est composée de trois dents cardinales et de deux dents latérales. Les dents cardinales sont divergentes, généralement peu proéminentes, presque toujours égales; cependant dans un certain nombre d'espèces , la dent cardinale antérieure est plus courte. Si quelquefois ces dents sont simples, il arrive souvent qu’elles sont creu- sées d’un sillon à leur sommet; quant aux dents latérales, elles sont plus variables que les cardinales , courtes et épaisses , comme dans le Cyrena zeylmica: par exemple, on les voit s’allonger successivement, do manière à occuper la plus grande partie do la longueur des bords antérieurs et postérieurs , ainsi qu'on peut le remarquer déjà dans le Cyrena vioiacea; mais bientôt ces dents s’allongent encore dans les espèces triangulaires , et alors' elles deviennent plus étroites , et leur extrémité s’avance jusqu’aux impressions musculaires. Il y a donc une véritable progression dans l’allongement des dents latérales , de telle sorte qu'en employant les caractères qu’elles offrent, il est impossible de donner une limite certaine au genre Corbicule. Dans la moitié à peu près des espèces, les dents latérales sont simples; chez les autres, ces dents sont striées perpendiculairement. M. Gray a attaché quelque valeur à la présence des stries sur les dents latérales; comme elles existent principalement chez les espèces triangulaires qui ont les dents très allongées , il a cru trouver un moyen de plus pour appuyer le genre Corbicule. Mais si l’on étudie toutes les espèces tant vivantes que fossiles du genre Cyrèno, on en trouvera à dents courtes qui sont striées, comme celles à dents longues; par conséquent, ce caractère échappe, comme tous les autres, pour fonder une ou plusieurs divisions dans le genre naturel des Cyrènes.

Dans ces derniers temps , M. Gray a proposé , ainsi que nous l’avons dit, un genre Velorüa pour quelques espèces de Cyrènes, chez lesquelles les dents latérales sont courtes, épaisses, très rapprochées des dents cardinales. Cette légère modification n’a point assez d’importance à nos yeux pour mériter la création d’un genre; si à côté d’clio on en remar- quait d’autres , soit dans l’impression du manteau , soit dans l'empreinte des muscles, on pourrait alors soupçonner quelques différences assez grandes dans l'organisation de l’animal; mais ces modifications n’ayant pas lieu, nous rejetons un genre qui no nous paraît pas suffisamment justifié.

Les impressions musculaires sont généralement petites dans le genre

I

LES CYCLADES.

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Cyrène, ovales ou oblongues ; elles sont situées aux extrémités de la coquille, cl, quoique descendant assez bas, elles appartiennent cepen- dant à la région dorsale de l’animal. L’impression musculaire antérieure est submarginalo ; elle so trouve très rapprochée du bord; la posté- rieure en est plus éloignée. Une impression palléalo parallèla au bord ventral s'étend d’un muscle à l’autre; elle est située plus ou moins haut selon les espèces; parvenue vers le côté postérieur, elle s’infléchit quelquefois un peu en dedans, à la manière de celle des Cyprines : et nous avons sous les yeux quelques espèces dans lesquelles il existe près du bord antérieur de l’impression musculaire une petite sinuosité étroite, moins nettement arrêtée que celle des Vénus et des Cylhérées, qui semble indiquer l’existence d’un petit muscle spécial , rétracteur des siphons. Cette sinuosité rappelle celle des Glauconomes, mais beaucoup plus courte et non moins étroite.

Toutes les Cyrènes sont des coquilles d'eau douce; quelques unes, dit-on, vivent dans des eaux saumâtres, mais ayant une très faible salure; toutes habitent les pays chauds. Il n'en reste qu’une seule en Europe; elles ont disparu môme do celles de nos eaux thermales se sont conservées des Mélanies et des Mélanopsides. On n‘cn trouve pas dans le nord de l’Afrique ; il faut aller dans des régions plus chaudes , en Égypte, par exemple, et en Perso, en Sicile, pour rencontrer celles qui s’avancent le plus vers le nord. Mais elles deviennent abondantes dans l’Inde , et surtout dans les eaux douces du grand Archipel indien. MM, Quoy et Gaimard en ont rapporté quelques unes de la Nouvelle- Hollande, et depuis MM. Lesson et Garnol en ont également rencontré dans la plupart dos îles do l'océan Pacifique , qu’ils ont visitées. Les Cyrènes sont beaucoup plus localisées pour la plupart que les Mollus- ques marins, et cette observation n’ost pas sans importance, lorsque l’on veut se rendre compte de la distribution des espèces fossiles limitées quelquefois sur do très petites surfaces. Si dans la nature actuelle quelques espèces so répandent dans les eaux d'une mémo région , il y en a d’autres qui no franchissent pas un fleuve, une rivière, un lac; il en était do même dans les temps anciens , aux diverses époques géolo- giques pendant lesquelles les Cyrènes so sont montrées. Nous comptons actuellement environ cinquante espèces inscrites dans les ouvrages publics; il faut en retrancher quelques unes , qui ont été reproduites sous plusieurs noms spécifiques.

Les espèces fossiles ne sont pas moins nombreuses. On a cru pen- dant longtemps qu’elles no descendaient pas au-dessous des terrains tertiaires ; mais celte opinion était pour nous tout à fait fausse dès 1 823,

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ayant reconnu pour appartenir au geiire qui nous occupe des coquilles prises pour des Vénus, et trouvées dans le weald, en Angleterre. M. Rœmer, dans son excellent ouvrage sur le terrain oolithique de rAllemagne, a prouvé que les Cyrènes se répandent en abondance dans le terrain wealdien de l'Allemagne; mais, plus récemment encore, MM. Dunker et Meyer, dans leur ouvrage iniilaXé Palœonlographica ^ ont décrit une véritable espèce de Cyrène provenant des marnes du lias , et accompagnée d’une Nériline et d’autres coquilles fluviatiles, La découverte de Cyrènes dans des terrains considérés par des géolo- gues comme exclusivement marins est un fait d’une grande importance , et qui prouve que dans les temps les plus reculés de l'histoire de notre globe les eaux douces ont existé, ont nourri des animaux de même genre que ceux de la nature actuelle. Un phénomène semblable à ceux qui se passent sous nos yeux a dispersé dans la mer ces animaux lacustres, et leurs débris ont été môlés à ceux des animaux marins.

La présence des Cyrènes dans les terrains dont nous venons de parler explique celle des autres coquilles d’eau douce , pour lesquelles quelques paléontologistes ont proposé plusieurs genres nouveaux, dans la per- suasion que CCS coquilles ont vécu dans la mer, quoiqu’elles eussent tous les caractères de celles de nos eaux douces. Nous reviendrons plus tard sur celte question intéressante , quand nous traiterons des genres auxquels nous faisons allusion.

La présence des Cyrènes fossiles dans une grande partie des terrains de sédiment de l’Europe . la le genre n'existe plus maintenant, est un fait dont Tapprécialion ne doit pas être négligée. Ici , il n’y a point de distinction à établir entre les espèces méridionales et septentrionales d’un même genre pour saisir l’analogie des espèces fossiles, et en déduire les changements dans les circonstances d'habitation; c’est le genre tout entier qui se déplace : autrefois européen , il habitait des régions qui aujourd'hui sont froides ou tempérées. Mais à quelle époque ce déplacement s’est-il opéré? Voilà ce que nous pourrons préciser par nos recherches sur la distribution des espèces dans les terrains ter- tiaires.

Nous connaissons 80 espèces fossiles de Cyrènes. M. Bronn, dans son Index palœontologicns , en mentionne 75; nous n'admettons pas toutes celles de ce savant , et nous restituons le litre d’espèces à plu- sieurs de celles qu’il relègue dans la synonymie ; enfin, dans le chiffre que nous adoptons , sont comprises plusieurs espèces de notre collection non décrites, et qui méritent cependant d’être mentionnées.

Ainsi que nous venons de le dire, M, Dunker a fait connaître une

LES CYCXADES.

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espèce qui provient du lias des environs de Halberstadt (basse Saxe) ; elle est la première qui apparaisse dans les terrains sédimentaires.

Nous devons à M. Dujardin la connaissance d’un autre fait analogue à celui que nous venons de rapporter. Ce savant, connu par tant d'ex- cellents travaux de zoologie, en explorant les terrains coralliens de Luc (Calvados), y découvrit deux espèces de Cyrènes, et nous les com- muniqua.

Depuis les couches du coral-rag jusqu’à celles du weald , que les géologues regardent comme les plus inférieures du grand système crétacé, aucune espèce ne se montre; mais par un phénomène très extraordinaire, le genre prend tout à coup dans le weald un développe- ment considérable. Nous y comptons quarante et une espèces qui , presque toutes, ont été découvertes en Allemagne , et décrites par M.Rœmer, par Goldfuss, et, enfin, par M. Duuker, dans un ouvrage spécialement consacré aux fossiles de la formation dont nous parlons. A ces espèces, il faut joindre celles d’Angleterre , décrites par Sowerby, et rapportées pour la plupart au genre Cyclade. Nous ne pouvons mentionner toutes ces espèces auxquelles cependant s’attache un vif intérêt; nous cite- rons seulement celles qui se retrouvent en même temps dans plusieurs localités. Ckjrena elonrjala, Rœmer, nommée aussi Cyclas angulata par Sovverby, dans l’ouvrage de M. Fitton: elle se trouve à la fois en Angleterre et en Allemagne; il en est de mômô dos Cyrena gibbosa, major, media, Sow., qui., communément répandues, sont propres à caractériser le grand dépôt lacustre placé aux limites des formations jurassiques et crétacées. Une seule espèce , le Cyrena fossulata, a été mentionnée par M. Cornuel, dans les couches inférieures du système crétacé ; elle paraît avoir échappé à M. d’Orbigny.

Vingt et une espèces sont distribuées dans l’étage tertiaire inférieur; elles commencent avec les ligniles ou dans les sables qui sont au-des- sous. Quelques unes sont d’une abondance extrême ; le cnneiformis , par exemple , couvre le sol ; le sable en est pétri et des couches en sont formées; elle est commune au bassin do Paris et à celui de Londres. Il en est de môme du Cyrena telîinella, Fér. Une autre espèce, moins abondante, Cyrena aiitiqua, Fér., accompagne le cuneiformis, mais elle reste dans le bassin de Paris ; dans celui de Londres, elle est rem- placée par une espèce nommée deperdita par Sowerby, mais qui est très différente du deperdita de Lamarck. àl. Bronn la rapporte à notre Cyrena Gravesn, dont elle diffère non moins que de la première; noua proposons pour elle le nom de Cyrena britannica.

Dans les couefes supérieures du calcaire grossier se trouvent aussi

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quelques espèces de Cyrènes , le compressa , le cÿcladiformis ; cette dernière a été récemment découverte en Angleterre par M. Edwards. Los grès marins moyens renferment quelques lits d’eau douce, dans lesquels le Cyrena deperdita est d’une grande abondance ; on la retrouve partout dans ces sables , mais elle reste dans les limites des contrées qu’ils recouvrent.

Les terrains lacustres do l’Auvergne contiennent aussi des Cyrènes. Cos terrains, considérés par les géologues comme du môme âge que ceux de Paris, ont des espèces différentes, quoique M. Bouillet, qui les y a découvertes, les ait prises pour les analogues des nôtres. Ce savant cite les Cyrena compressa et pisum, mais ces coquilles conservent des caractères spéciQques qui les distinguent suffisamment; aussi nous avons nommé la première Cyrena Bouilleli et la seconde arncrnensîs.

Une espèce, très abondante à Kleinspauwen , en Belgique et dans beaucoup d’autres localités du môme pays et de l’Allemagne , a été retrouvée , il y a quelques années , au centre du bassin de Paris , par M. d’Archiac ; elle est pétrie en abondance dans une couche mince aux en virons de Pont-Sainte-Maxence, M. Hébert l’a également retrouvée. Nous voulons parler de notre Cyrena semislriata , et les sables dans lesquels elle se trouve sont supérieurs au gypse, et parallèles, par con- séquent, aux sables de Fontainebleau. Cette espèce, dont les variétés sont nombreuses , a été le sujet de plusieurs erreurs de Goldfuss , judi- cieusement relevées par M. Nyst. L’auteur des pétrifications do l'Alle- magne croit y voir les Cyrena cnneiformis et trigona des lignites de Paris, et d’une variété triangulaire il fait le Cyrena œqîialis. Ces rectifications sont importantes, car on pourrait croire que des especes passent des couches inférieures dans les supérieures , et viennent se mélanger k des faunes auxquelles elles n’appartiennent pas ; ce sont ces erreurs qui, en répandant de l’incertitude dans la science paléontologiquo, la font rejeter des hommes auxquels elle devrait être le plus utile.

L’étage tertiaire moyen ne contient plus que six espèces, parmi lesquelles nous signalerons particulièrement le Cyrena Brongniarti, Bast. ; elle se rencontre à Bordeaux , à Dax et dans le Vicentin. M. Goldfuss la mentionne aussi à Bundo et à Mayence. Le Cyrena GesUni, Desh., propre au bassin de l’Adour, prend déjà la forme des espèces vivantes de l’Inde, mais cette forme est bien mieux accusée dans les deux espèces des lignites des bouches du Rhône, que nous a fait con- naître M. Matheron dans son précieux ouvrage sur les corps organisés fossiles du midi de la France. Une autre espèce , prise pour une Vénus par Faujas, et que nous avons nommée Cyrena Faujasi, caractérise les

LES CYCLADES.

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dépôts lacustres des bords du Rhin. M. Goldfuss en a donné de bonnes figures, mais il a ou le tort de lui imposer deux noms, prenant une do ses variétés pour une espèce distincte, Cyrma lævigata et polüa.

Il ne reste plus qu’une seule espèce dans iecrag d’Angleterre; elle a été nommée Cyrma Duchastelli parM. Nyst, et plus tard Irigonuîa, par M. S. Wood. Ce dernier nom ne pourra pas rester à l'espèce, si l’on s’attache aux lois équitables de la priorité. M. Morris croit pouvoir rapporter à cette espèce du crag celle qui est fossile en Sicile , et que M. Philippi a nommée Cyrena Gemmeîlari; n’ayant pas ces coquilles sous les yeux, nous ne pouvons vérifier la justesse de l’opinion du savant anglais , mais si nous nous en rapportons aux figures , assuré- ment il faudrait conserver les deux espèces.

Enfin , dans l’étage tertiaire supérieur, nous ne connaissons non plus qu’une seule espèce : elle est du val d'Arno supérieur, elle a été découverte par notre savant ami M. Bertrand Geslin; par sa forme, elle ne manque pas d’analogie avec le Cyrena antigua des environs de Paris.

Dans les terrains plus récents de la Sicile, une seule espèce y est également restée; et, enfin, comme arrière-garde de la migration du genre , une petite espèce, fort rare, à ce qu’il parait, vit encore dans quelques ruisseaux de la Sicile. Il ne faudrait peut-être pas un événe- ment géologique bien considérable pour faire disparaître entièrement ce dernier et faible représentant d’un genre qui , pendant les seules pé- riodes tertiaires , a peuplé l’Europe de plus de trente espèces et de myriades d’individus.

La disparition du genre Cyrène des régions qu’il a si abondamment peuplées autrefois est un spectacle digne d'intérêt. La diminution pro- gressive des espèces, le moindre nombre des individus de plus en plus restreints dans l’étendue de leur habitation . la diminution non moins remarquable dans la taille des espèces à mesure qu’elles s'éteignent, cet ensemble do phénomènes annonce clairement la cause principale des changements que ces Mollusques ont éprouvés. Cette cause est cer- tainement la diminution de la température, et ce qui tend à le confirmer, c’est la dispersion dos espèces vivantes dans les régions les plus chaudes do notre globe. Dans tous les temps, les Cyrènos ont été constituées pour habiter les pays chauds; leur présence à l’état fossile dans nos régions tempérées et septentrionales suffirait seule pour constater les énormes changements qui sont survenus dans toutes les conditions de l'existence.

Pour terminer ce qui a rapport à la distribution des Cyrènes, nous devons ajouter qu’il en existe aussi de fossiles en xVmérique. l’une, des

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DIX-SEPTIÈME FAMILLE.

environs de New-York, a été nommée depuis longtemps Cyrena truncata, par Lamarck; l’aulro, le Cyrena caroîinensis ^ vit encore dans les eaux douces de la Caroline , ainsi que son nom l’indique.

1. Cyrène violette. Cyrena violacea^ Lamk.

PI. 18. f. 1. 2. 3.

C, Testa ovato-ellipticâ , inœqmlaterali , transversim irreguîariter suU catà , sulcis distantibus anticè profundioribus , inths violaceâ vel pallide roseo-purpurascente; dentibus lateralibus incequalxhus^ striatis,

Cyclas. Brug. Encycl, pl, 3oi. f. i. a,

Cyrena violacea, lamk. An. s. vert. t. 5, p. 553. n* 7.

Desh. Ency. mélh. Vert. t. a, p. 49. 9.

Desh. dans Lamk. An. s. vert, 2* éd. t. 6. p, 273. 7.

Deless. Rec. de coq. pl, 7. f. 5.

Hanley, Descr. cat. t. i. p. 92.

Anton, Verz, der Conch. p. i3. 499.

Wood, Ind. test. 2' Suppl, pl. i3. f. i3.

Habite la Nouvelle-Zélande et d'autres îles de l'Océanie.

Grande et belle coquille que l’on distingue avec facilité parmi ses congénères. Elle est ovale, sublransverse , inéquilatérale, comprimée; le côté antérieur, obtus, s'incline obliquement ; le postérieur est arrondi. Les crochets sont assez grands , proéminents et obliquement inclinés vers le côté antérieur. La surface extérieure est revêtue d’un épiderme d'un brun verdâtre foncé , qui est ordinairement carié sur les crochets : celte surface montre des stries irrégulières d’accroissement, interrom- pues en avant et en arrière par de gros sillons transverses assez égale- ment séparés et qui disparaissent complètement sur le ventre de la coquille, La charnière est large et épaisse ; elle est formée de trois dents cardinales divergentes et de deux dents latérales inégales. Ces dents latérales sont peu saillantes, striées perpendiculairement, mais d’un côté seulement. La dent latérale antérieure est la plus courte. Si l’on enlève à cette coquille son épiderme, on la trouve à l'extérieur d’une belle couleur violette ; cette couleur se répète en dedans , surtout vers les bords. Chez certains individus, cette couleur violette pâlit et se nuance de tons pourprés qui , pâlissant h leur tour, passent au rose tendre. Les grands individus ont jusqu’à 81 imllimètres de longueur,

LES CYCLADES.

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2. Cyrène de Graves. Cyrena Gravesii. Desh.

PI. 18. f. 4.

C, Testa snborbiculari ^ turgidâ, subcordatâ^ îœvigatâ; umbonibus magnis^ integris , obîiquis; cardine tridentato ; dente antîco 'vnîvuïœ dextrce minimo ; dentibus lateralihus angustis ^ elongatisy cardine approximatis ^ tenue et breviter striait

Desh. Desc. des coq. foss. des env.de Paris, t. i. 120. pU ig. f. 3, 4.

Desh. Ency, raélb. Vers, t, 2. p. 4!** 4-

Desh. dans Lamk. An. s. vert. éd. t. 6, p. 27S. 18.

Anton, Verz. der Conch. p. i3. n" 5û4.

Broun, Ind. paléont. p. Sgo.

Habite.., Fossile des sables inférieurs du bassin de Paris, à Retheuil, Guise, etc.

Celle-ci est la plus grande des espèces fossiles du bassin de Paris : on la distingue avec la plus grande facilité , par sa forme obronde et quelquefois subquadrangulaire. Elle est très inéquilatérale ; son côté antérieur, court et obtus, est plus étroit que le postérieur. Les crochets sont grands, obliques , proéminents; la surface extérieure est lisse ou marquée d'accroissements irréguliers. La charnière est étroite; elle porte trois dents cardinales inégales sur chaque valve : la première de la valve droite est petite et très courte ; la troisième de la valve gauche est longue , étroite ; elle a une tendance à se confondre avec la nymphe. Les dents latérales sont allongées et étroites. L’antérieure est très rapprochée de la charnière ; la postérieure commence à l’extrémité de la nymphe. Ces dents ne sont point striées dans toute leur hauteur : les stries sont fines , très courtes , et souvent sont réduites à de fines den- telures , qui accompagnent le bord supérieur. Les impressions muscu- laires sont petites, très écartées; l'antérieure est ovale, étroite, subsemi-lunaire ; la postérieure est un peu plus large. Cette coquille est extrêmement commune dans les sables inférieurs du bassin de Paris; elle peut servir à les caractériser. Elle a 55 millimètres de longueur.

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3. Cyrène antique. Cyrena antiqtta^ Fér.

PL 18. f. 5. 6. 7.

C, Testa trigonây cordiformi, inteqaUaterd y crassisshnâ^ tnrgîdidây lœvigatâ ; umbonihus ohHquiSy magnis; dentibus cardinalibus tribus ^ paraUeîis; lateraJibas magnis, triangnlaribus ^oblique et irreguîariter striato-crosis ; nymphis breyibtis, latis.

Fér. Hisl, des Mol. 1er. el fluv. pî. de Cyr* foss. f. 5,

Desb. Coq. foss, de Paris, t. i. p. 119. 5, pl. x8. f, 19, ai.

Desh. Ency. méth. Vers, t, 2, p, 47. 3.

Desb. dansLamk. Ân. s. vert. 2* éd. 6. p. 279, n** 19.

AntoD, Verz. der Concb. p. i3. 495.

Bronu, Ind. paléoot., p. 389.

Habite... Fossile des bgnitcs du bassin de Paris, aux environs d’Epernay, de Reims et de Soissous.

Celle coquille est Tune des plus remarquables que recèlent les ter- rains tertiaires du bassin do Paris : elle est triangulaire ; par sa forme et par son épaisseur, elle ressemble plutôt à une Vénus qu’à une coquille d’eau douce ; elle est entléo , cordiforme, très inéquilatérale. Le côté antérieur est court, déprimé on avant par un espace lunulaire non circonscrit ; le côté postérieur est occupé par un très grand corselet, creusé dans le milieu , et nettement circonscrit par un angle obtus. La charnière est épaisse : on y remarque trois dents cardinales parallèles sur chaque valve; sur la valve droite, la dent antérieure est très mince et un peu plus courte que les autres ; sur la valve gauebe , c'est la dent postérieure qui est réduite en une lamelle très courte. Les dents latérales sont grosses et épaisses ; elles sont inégales et très rapprochées des cardinales. Vues de profil , elles ressemblent à de longues pyramides triangulaires couchées sur l'un de leur grand côté ; des stries fines et irrégulières parcourent obliquement la surface do ces dents. La dent latérale antérieure est la plus courte; la nymphe est courte, profondé- ment cachée et séparée du bord par un sillon profond destiné à recevoir le tunique externe d'un ligament qui devait être épais et proéminent au dehors. Les impressions musculaires sont petites , très écartées ; l’an- térieure est semi-lunaire ; la postérieure est circulaire. Le test de cette coquille est épais , solide , ce qui la distingue facilement de toutes les autres espèces du même genre Elle a 33 millimètres de long et 30 millimètres de hauteur.

LES CYCLADES. 700

Cette coquille est plus rare dans le bassin de Paris que la précédente : elle est propre aux terrains à lignite, et c’est particulièrement à Épernay , à la montagne de Bernon , qu’on la rencontre le plus abondamment. Il y en a des milliers d’individus ; des couches entières en sont formées , mais il est presque impossible d'en obtenir d’entiers.

GENRE CINQUANTE-SEPTIÈME.

CircZiABE, Cyclas, Larak.

CARACTÈRES génériqües. Animal ovale, assez épais; lobas du manteau à bords simples réunis en arrière, et terminés postérieurement par deux siphons courts , joints à la base , divergents au sommet, dépourvus de tentacules. Bouche ova- laire , petite. Palpes labiales courtes et étroites. Branchies assez larges, presque égales, réunies postérieurement. Pied mince, grêle , coudé, très allongé’.

Coquille ovale , subéquilatérale, bombée, à crochets sail- lants. Charnière étroite, portant deux très petites dents cardi- nales sur chaque valve, dont une pliée en deux, quelquefois une seule pliée ou lobée sur une valve, et deux sur l'autre: ces dents sont quelquefois presque nulles ; dents latérales allongées, comprimées, lamelliformes. Impression palléale simple. Ligament externe peu épais’, situé sur le côté le plus long du bord dorsal.

SYNONYMIE GENERIQUE . Coucha ^ Linné, Faun. Suec. Tellina^ Linné, Miiller, Schroeter, Gronovius, Chemnitz, Gmelin, Karsten, Poiret, Alten, Stourm, Dilhvyn, Montagu, Maton et Racket , Wood , etc. Cai'dium , Poli , Montagu , Da Costa. Chama, Geoffroy, d’Argenville. Mtisculus Lister, Gualtieri. 'Pectxtncnlmjiuwatilis^ Lister. SphœrÙLm^ Scopoli, Gray. Cornea, Megerle, Pisrim^ Megerle. Cnrneonjclas , Férussnc.

niX-SEPTIÈMK FAMILLE.

704

OBSERVATIONS. Pfcsque tous les naturalistes attribuent à Bruguière la création du genre Cyclade ét du nom qu’il porte; cependant le savant auteur des premiers volumes de VerSf de VEnajchpédie, a trouvé son genre nettement déterminé par Muller, et le nom qu’il a choisi a été pro- posé longtemps avant lui par Klein , dans son Tentamen oslracoiogicœ pour une famille et un genre de coquilles bivalves, orbiculaîres qui corres- pondent assez exactement au genre Lucine de Bruguière et de Lamarck. Bruguière eut raison d'emprunter à une méthode abandonnée un nom qui s’appliquait parfaitement à un genre que Müller, à l’imitation de Linné, avait défini dans son Histoire des vei's sous le nom de Telîina. En réalité, l’honneur de la création du genre Cyclade revient à Bruguière, parce que l’on peut dire que si Müller lui a donné des limites naturelles , c'est par la nature môme du sujet qu’il a traité , ayant exclu de son ouvrage toutes les espèces marines du genre Tellina de Linné. Avant Bruguière, tous les naturalistes , à l'exception de Scopoli , confondaient les Cyclades parmi les Tellines, et même quelques unes parmi les Cardiums. En restreignant le nombre des genres , Linné fut contraint , presque malgré lui , de réunir sous une seule dénomination générique des coquilles qui ont peu de rapports entre elles. Les successeurs les plus immédiats du grand législateur suédois ne voulurent pas toucher à ces genres , et tous sans exception rapportèrent aux Tellinès les petites coquilles fluvialiles qui nous occupent. Scopoli seul , digne par son génie d’être l’émule et le successeur de Linné, dans un ouvrage des pins remarquables publié en 1777 [Jntroductio ad historiamnaturaîem) , osa améliorer la méthode linnéenno par la création d’un assez grand nombre de très bons genres dans un temps l’admiration pour les ouvrages de Linné était portée à un si haut degré, que l’on aurait considéré comme sacrilège la main qui y aurait touché. C’est peut-être à ce sentiment exagéré qu’est l'oubli dans lequel est tombé l'ouvrage de Scopoli. Ce naturaliste définit très nettement le genre Cyclade sous le nom de Sphœrîum, et lui donne pour type le Telîina cornea de Linné , et proba- blement, ajoute-t-il, plusieurs autres espèces de coquilles circulaires.

Bruguière ne se contenta pas d’introduire dans son genre Cyclade le Tellina cornea de Linné et quelques autres espèces analogues ; il y admet également d’autres coquilles fluviatiles des régions plus chaudes delà terre, et qui, pour être plus grandes et plus épaisses, n’en con- servent pas moins la plupart des caractères des espèces plus petites et plus minces qui habitent les eaux douces de nos régions tempérées et septentrionales. Ainsi que nous l’avons vu , Lamarck , dès ses premiers travaux , démembra les Cyclades Bruguière , conserva sous le nom de

LES CYCLADES,

7o5

Cyclades les petites espèces seulement y et des grandes il en fit un gènre Cyrène caractérisé principàletrtent par une charnière plus forte- ment articulée, et portant daiiS presque toutes les. espèces trois dents cardinales. Ce changement , proposé par Laniarck, a été adopté par presque tous les zoologistes. Cependant le genre Cycîade, ainsi réduit et quoique très naturel en apparence, a subi un nouveau dédoublement devenu nécessaire par les observations dont il a été le sujet.

Depuis un certain nombre d'années, les naturalistes ne se contentent plus d’observer seulement la coquille desMollusques ; ils ont compris enfin que l’enveloppe testacée d’un animal ne suffit pas toujours pour en déter- miner les rapports. M. Cari Pfeiffer, dans ses recherches sur les Mol- lusques de l’Allemagne, fit connaître un failfort intéressant qui jusque- avait échappé à l’attention des autres observateurs. 11 vit que dans certaines Cyclades, l'animal est terminé en arrière par un siphon bifur- qué , comparable à celui des Vénus et même des Cardiums ; tandis que chez d’autres espèces ce siphon , beaucoup plus court , est toujours simple et percé d’une seule ouverture. Se fondant sur ces différences considérables, M. Pfeiffer réduisit le genre Cyclade aux espèces dont l’animal a un double siphon , et proposa un genre Pisidium pour toutes celles des espèces qui ont le siphon simple et unique. Bientôt après, les observations M. Pfeiffer furent pleinement confirmées par , celles d’un savant anglais, M. Jenyns, qui publia dans les Tnmsaclions de la Société philosophique de Cambridge une excellente monographie des deux genres , accompagnée de très bonnes figures suffisamment grossies de toutes les espèces de Pisidium alors connues en Angleterre. Ce travail a peut-être plus d’utilité que celui de M. Pfeiffer, parce qu'’il a le mérite d’être accompagné de figures suffisamment grossies , ce que M. Pfeiffer a malheureusement négligédansle sien. Noos ne croyons pas utile, à notre sujet, d’insister davantage sur l’histoire du genre Cyclade ; si nous voulions la compléter par de minutieux détails , nous pourrions mentionner cent cinquante ouvrages environ dans lesquels ce genre a été mentionné avec plus ou moins de détails : dans le plus grand nom- bre, on trouve la description des espèces; dans le^ autres, principale- ment consacrés à la classification des Mollusques , le genre est cité dans l’ordre des rapports tels que les auteurs les ont conçus. Ces derniers travaux pourraient avoir un plus grand intérêt; mais presque tous sont d’accord pour placer les Cyclades dans la méthode', soit à la tjianièrede Lamarck , soit à celle de Cuvier ; et comme nous avons résumé les opinions de ces ^savants dans l’histoire de la famille des Cyclades , nous y renvoyons le lecteur.

T. T. PARTIE.

DIÏ-SEFTIEME FAMILLE.

^oG

L’animal des Cyclades ne mangue pas d’analogie avec celui des Vénus , mais il a beaucoup plus de ressemblance avec celui des Cyrènes. Néanmoins, il en diffère par quelques caractères, et cela doit suffire, quant à présent, pour maintenir le genre dans la méthode. La forme do la coquille représente exactément celle de l'animal : il est, par consé- quent., ovale, arrondi, subglobuleux, un peu plus long. que large, Son manteau ressemble à celui des autres Mollusques dîmyaires. Son bord exserlile est simple dans toute sa circonférence ; en cola, il diffère de celui des tyrènes, sur lequel nous avons fait remarquer des plis profonds. La circonférence du manteau est occupée par un muscle orbiculairc, très niince et fort étroit. Eii arrière, les lobes du manteau se réunissent en une commissure simple, très voisine de l'origine des siphons. Ceux-ci sont fort petits ; réunis à la base dans la plupart des espèces, ils se dis- joignent au sommet, et ils se mainlienneul écartés on formant entre eux un angle d'environ 45 degrés. Mais toutes les espèces n’offrenlp^s une semblable disposition. Chez quelques unes les siphons sont séparés jus- que près de la base , èt l'animal les porte dans une position à peu près parallèle entre eux. Ces organes sont membraneux , minces, transpa- rents; ils sont inégaux ; le siphon branchial est un peu plus grand et un peu plus large que le siphon qnal. Tous deux se terminent par une ouverture circulaire , dont les bords, très minces , sont dénués de ten- tacules.. Les siphons, relativement au volume de l’animal, sont do la môme grandeur que ceux des Vénus , et cependant , chez les Vénus , .ces organes sont pourvus d’un muscle rétracleur particulier, tandis que dans les Cyclades ce muscle a complètement disparu. Il faut môme remarquer que le muscle orbiculaire du manteau, dans la portion cor- respondante à l'insertion des siphons, n'est point devenu plus large et ne s’est presque pas épaissi.

Le pied est allongé, triangulaire ; il est mince et aplati comme celui des Vénus ; il est tt-ès extensible , mais il ne l'est ni plus ni autre- ment que dans les Mollusques marins. Par sa base, cet organe se continue avec la masse abdominale ; en avant , il se termine à la bouche ; en arrière, il est subtronqué et prolongé en une sorte de talon. Lorsque l’animal est sur un fond vaseux , il se sert de son pied pour se creuser un trou peu profond dans lequel il se cache. Mais s'il est posé sur un corps solide, il étend son pied le plus qu'il peut , et au moyen de la mucosité qu'il sécrète il contracte avec les surfaces les plus lisses une adhérence suffisante pour se mouvoir lentement. Il parvient môme à l’aide de cette manœuvre à monter le long des parois perpendicu- laires d’un vase dans lequel il est plongé. Nous verrons que d’aiitr

LES CŸCLADES.

707

Mollusques jouissent do la inômé faculté et qu'ils ont des mœurs en relation avec ce moyen particulier de locomotion. Pour le passage du pied , les lobes du manteau sont séparés entre eux depuis l’extrémité inférieure du muscle adducteur antérieur des valves jusqu'au voisinage de la base des siphons. Cette fente occupe, par conséquent, toute la longueur du bord inferieur de l’animal.

La bouche est fort petite; elle se présente sous la forme d'une fente Iransverse, située entre le muscle adducteur antérieur et la base du pied. Celte bouche est accompagnée de deux petites lèvres étroites , mem- braneuses, simples, très courtes; elles se changent de chaque côté en une paire de petites palpes triangulaires, à la surface interne des- quelles on trouve un petit nombre de lamelles Irans verses et saillantes.

Les organes de la respiration sont assez grands. Ils consistent , comme chez les Cyrènes, en deux feuillets branchiaux de chaque côté. Ces feuillets sont inégaux, transparents, minces dans l’animal vivant; plus épais et plps opaques lorsque l'animal a été conservé quelque temps dans l'alcool; les feuillets internes sont les plus grands; ils sont subqua- drangulaires : le côté antérieur tombe presque perpendiculairement , et néanmoins son extrémité supérieure se prolonge en une pointe courte et aigue qui s'interpose entre les palpes labiales ; le feuillet externe com- mence un peu plus en arrière; il est plus étroit que son congénère ; la forme on eslsüblriangulaire. En arrière de la masse abdonüriale les bran- chies se réunissent , se prolongent un peu et viennent tomber au-devant de l’ouverture interne du siphon anal. La surface extérieure des bran- chies est lisse , plane ou souleinenl onduleuse. Observée à l’aide d’un grossissement assez puissant, celle surface montre un très grand nombre de stries très fines, régulières et parallèles, produites par les vaisseaux branchiaux dirigés un peu obliquement de haut en bas et d’avant en arrière.

Ce que nous venons d’exposer de l’animal des Cyclades prouve incon- testablement son analogie avec celui des Vénus. Les principales diffé- rences que nous y apercevons se rencontrent dans des organes de peu d'importance. Dans les A^énus, les bords du manteau sont ornés de. plis nombreux et profonds ; dans les Cyclades , au contraire , ces bords sont simples. Déns les deux genres, les siphons sont disposés à peu près de la même manière. Seulement, chez les Vénus, ces organes portent des tentacules , tandis que les Cyclades eu sont dépourvues. Pour tout le reste de rorganisalion , la plus grande ressemblance se maintient; par conséquent , le genre Cyclade ne pouvait être éloigné des Conques ma- rines , et Lamarck avait sainement jugé ses rapports en le rangeant,

45*

DIX-SEPTÏÈME FAMILLE.

708

comme il Ta fait , à la suite des Cyrènes dans ses Conques fluviatiles.

Les coquilles du genre Cyclade sont fort peu différentes de celles des Cyrènes. Elles sont ovales , obrondes , transverses , presque équilaté- rales; elles sont minces, fragiles, bombées, à crocliets obtus et peu proéminents. La surface extérieure est lisse ou striée transversalement ; elle est toujours revêtue d’un épiderme mince, tenace, d’un vert brun plus ou moins foncé, tantôt tirant au jaunâtre, tantôt verdâtre, selon l'âge et les espèces. Cet épiderme déborde à peine le contour testacé des valves. Les extrémités de la coquille sont obtuses, arrondies; le bord inférieur est moins convexe; le bord supérieur est presque droit, et il est divisé en deux parties à peu près égales par la proéminence des crochets. On n'aperçoit en avant aucune trace de lunule; en arrière, le corselet est complètement effacé.

La surface intérieure des valves est lisse , d’un blanc bleuâtre ou jaunâtre , selon la couleur de la surface externe; cela est à la trans- parence du test, qui, contrairement à ce qui existe dans les autres coquilles, n^a pas une couleur qui lui soit propre. Sur un lest très mince , il est très difficile do trouver les traces de l’animal ; pour décou- vrir les impressions musculaires et colles du manteau, il faut rechercher les individus morts qui sont devenus opaques. Alors on aperçoit en avant, tout près du bord, une petite Tmpression musculaire, et du côté postérieur, également dans le voisinage du bord, une seconde im- pression subcirculaire et un peu plus grande. L’impression palléale est peu apparente; elle reste parallèle au bord inférieur de la coquille; elle est étroite et toujours simple.

La charnière est assez variable dans les Cyclades. Dans quelques espèces , elle présente deux dents cardinales sur une valve et une seule sur l’autre, quelquefois accompagnées d'un rudiment de la seconde dent. Dans d'autres espèces , une seule dent subsiste sur chaque valve ; mais alors l’une d’elles est comme ployée en deux, et elle devient à peu près semblable à la dent en V des Martres. Enfin , il est des espèces chez lesquelles les dents cardinales ont presque entièrement disparu , elles sont remplacées par de petits rudiments en forme de tubercule. De chaque côté des dents cardinales existent des dents latérales sem- blables à celles des Cyrènes : elles sont moins épaisses , et cela provient certainement de la moindre épaisseur du test ; car nous avons remarqué, dans des individus de Cyclades épaissis par l'âge , que les dents laté- rales y prenaient tous les caractères de celles des Cyrènes. La dent latérale antérieure est un peu plus courte que la postérieure. Le liga^ ment externe, peu proéminent et court , sort à joindre les deux valves

LES CYCLADES.

7oy

et à les maintenir dans leurs rapports iialorels. Il est en proportion beaucoup moins saillant et beaucoup moins grand que celui des Cyrènes ; mais il ne faut pas attacher à cette différence plus de valeur qu'elle n’en mérite ; car nous avons vu, même dans les Cyrènes et les Vénus, ce ligament varier d’une manière notable dans son développement.

Après avoir retiré du genre les espèces qui dépendent des Cyrènes et des Pisidies , les Cyclades conservent encore de nombreuses espèces. Nous en comptons une trentaine de vivantes , distribuées sur presque tous les points de la terre explorés par des observateurs attentifs. Sept à huit espèces vivent dans les eaux douces de l'Europe, quelquès unes de la Norwége et de la Suède jusqu'en Espagne et en Sicile, quelques autres sont plus conûnées dans le centre de l’Europe. Nous avons trouvé quelques petites espèces dans l'Algérie. M. Krauss en cite deux au cap de Bonne-Espérance ; les îles du grand Océan austral en possèdent quel- ques espèces. Le pays qui en paraît le plus abondamment pourvu est l'Amérique septentrionale: dix especes sont inscrites dans les catalogues des naturalistes de ce pays; rArriérique méridionale en compte un moindre nombre : cinq seulement , tant du Brésil que du Chili et du Pérou. M. Moller en a fait connaître une du Groenland , et M. Eichwald une autre de la Bussie méridionale. 11 est à présumer que le genre ne manque pas dans les eaux douces de l’Asie septentrionale ou centrale 5 mais jusqu’ici nous n'en voyons aucune mentionnée dans les catalogues.

Les espèces fossiles sont à peu près en môme nombre que les vivantes; mais avant de les compter, nous devons nous souvenir que pour un certain nombre de naturalistes, les Cyrènes et les Cyclades constituent un seul genre sous ce dernier nooi ; il faut donc rendre aux Cyrènes celles des espèces qui sont encore égarées parmi les Cyclades. Ainsi, les Cijclas orbkularis^ trigonay majuscuîat fasdala et carinata de Goldfuss sont des Cyrènes. Il en est de même de presque toutes celles du Minerai conchologtj,

M. Dunker, dans la Paléontographie de M. Meyer, a fait connaître , sous le nom de Cyclas rugosa , une coquille intéressante du lias de Halberstadt. Nous connaissons une coquille très voisine de celle-là, de la grande oolithe, mais nous la rapportons au genre Lucine, parce qu'elle en présente les principaux caractères ; il en sera probablement de môme do l’espèce de M. Dunker. Une serait cependant pas impossible qu’une Cyclade se montrât dans le lias , puisque M. Dunker y a trouvé une Cyrène, ainsi que nous l’avons fait remarquer précédemment.

Dans son ouvrage sur les fossiles de la Wolhynie et de la Podolie , M. Dubois, de Montpéreux, décrit et figure deux coquilles sous les

y 10

DIX-SEPTIÈWE FAMILLE.

noms de Clycas gîobus et triangular4s ; ni Fune ni l’autre ne nous pa- raissent dépendre du genre auquel Fauteur les rapporte : d'après les figures , elles auraient plutôt les caractères des Lucines , et comme nous n’avons pas ces coquilles sous les yeux, dans le doute que nous éprou- vons à leur sujet, nous nous abstenons de les inscrire dans notre liste des espèces fossiles.

Ces réformes étant faites, il reste encore trente-cinq espèces de Cyclades fossiles, en comprenant parmi elles celles qui ont leur analogue vivant ; ces espèces se distribuent de la manière suivante :

Les Cyclades apparaissent pour la première fois à la surface de^la terre dans le terrain vs^ealdien; ainsi que les Cyrènes, elles y sont représentées par do nombreux individus , tant, en Angleterre qu’en Allemagne. Nous en comptons neuf espèces, cinq en Angleterre , quatre en Allemagne. Le Cijclas anguîata^ Sowerby, paraît commun au weald des deux pays.

Nous retrouvons les Cyclades dans les terrains tertiaires inférieurs du bassin de Paris. M. de Boissy, dans un mémoire très intéressant publié dans le Recueil des mémoires de la Société géologique de France , fait connaître cinq espèces dans le terrain lacustre de Rilly, situé au- dessous de tous les autres dépôts qui se sont accumulés dans le bassin de Paris. A ces espèces il faut en ajouter une sixième , que nous avons découverte dans les marnes blanches inférieures du Mont-Bernon, près Épernay. M. Hébert nous a communiqué une septième espèce du bassin do Paris ; elle provient des marnes du gypse, elle paraît fort rare.

Dans les terrains à lignite de la Provence des environs d’Aix, MM. Lyell et Murchison ont signalé, dès \ 829, dans le tome Vil de la Revue d’Edimbourg^ quatre espèces de Cyclades. M. J. de C. Sowerby, qui a examiné ces coquilles, les a fait figurer et leur a imposé des noms spécifiques. M. Matheron, au moment de la publication de son Catalogue méthodique dès fossiles des Bouches-du-Rhône , ne connais- sait pas sans doute le mémoire du savant anglais, aussi il lui est arrivé d’imposer des noms nouveaux à trois des espèces déjà connues. M. Ma- theron , dont les recherches, attentives ont été longtemps continuées , a découvert six autres espèces dans le terrain à lignites, ce qui porte à neuf le nombre des Cyclades connues aujourd’hui dans le terrain d’eau douce ancien de la Provence*

Nous ne voyons aucune espèce de Cyclades mentionnée dans le ter- rain tertiaire moyen ; il est à présumer que ce genre n’y manque pas ; seulement la petitesse des coquilles qu’il renferme Faura fait échapper à Fattention des observateurs.

LES CyCLADES.

711

M. Bronn cite une espèce dans les terrains tertiaires supérionrs de l’Italie [Itaî, tert,, Geb,, p. 96); il lui donne 1q nom de Cyclas coji~ centrica.

Le terrain quaternaire contient aussi des Cyclades, mais ce sont celles qui vivent encore dans nos eaux douces ; on cite particulièrement les trois espèces suivantes :

1“ Cycla's cahjcidata f Lamk.

Vivante dans presque toute l’Europe depuis la Suède jusqu'en Espagne. Elle est fossile dans les alluvions anciennes du Rhin, elle a été citée par Voltz.

2*^ CydasYmcota, qui vit également dans toute l’Europe.

Elle est fossile avec la précédente.

Cyclas îacmlris , ' si commune partout , a été retrouvée fossile dans le terrain supérieur de Marseille par M. iMatheron.

Les Cyclades n'ont peut-être pas été assez recherchées sur toute la surface de la terre pour généraliser les phénomènes de leur dispersion; il est peu probable, en effet, que ce genre manque au centre de l’Afrique, tandis qu’il existe à ses deux extrémités; il est peu probable aussi qu’il ne vive pas à la Nouvelle-Hollande, lorsqu’il habite Timor et d’autres îles du grand océan Pacifique. Les Mollusques qui nous occu- pent sont-ils confinés, comme on l’a cru longtemps, dans les régions froides et tempérées des deux hémisplières ? La température des régions équatoriales serait-elle trop élevée pour ces animaux et ne pourraient-ils la supporter? Les espèces découvertes par M. d’Orbigny dans l’Amé- rique centrale j>rouvenl qu'elles peuvent vivre dans lyic des régions les plus chaudes de la terre; il est donc h présumer que les Cyclades peu- vent exister sur toute la surface du globe, tandis que les Cyrènes sont actuellement restreintes aux régions chaudes. La présence des Cyclades seules dans les terrains no peut fournir aucune indication pré- cise sur la température qui a régné pondant leur dépôt; il n’çn est pas de mémo des Cyrènes, animaux des pays chauds; elles accusent une haute température partout elles se montrent. Nous insistons sur ces faits, parce qu'ils nous semblent d'accord avec ce que nous offre la faune toute spéciale du terrain wcaldien. Nous y observons à la fois un grand nombre do Cyrènes et quelques Cyclades; celle réunion des deux genres n’a rien d’insolite , ainsi que le constatent les faits rapportés précédemment.

712

DiX-SErTlEME FAMILLE.

Cycladc des rivi'èrds. Cyclas rivicola^ Lamk.

PL 17. f. 8. 9. 10.

C> Testa ovato-globosâ, 'ventricosâ, confertim striata, virescente fnsea , umbonibns obtusis; antice lunniâ sfibimpressâ ^jlavà»

Lisler, Conch. pl. iSg. f. 14.

LisUr, Anirn. angl. App. p. 22.

Cyclas cornea. Drap, Hisl. des Moll, p, 128. i. pl. lo. f. i. 2. 3. Cardium cortieum. Mootagu, Test. BriL p. 86,

Tellina rivaîis^ ex parte, Scbroeler, ,Flus. Couch, p. 189. pl. 4, f. 3, Encycl. pl. 3o2. f. 5. <2, b, c,

Tellina cornea. var, B. Mat. et Racket, Lin. Trans. l. 8. p. 69.

Cyclas cornea, Brard, Hist..des coq. p. 219. pl. 8, f. 2, 3.

Tellina cornea. Dillwyn, Cat. t. t. p. 104. 73, Sy/i, plerisque exclusis.

Tellina cornea, Wood, Gener. couch. p. 196. pl, 46. f. 3.

/i/, Turion, Coneb. dicl. p. 180.

Cyclas rivicola. Lamk. An. s. vert, l. 5. p, 558.

là, G Pfeiffer, Syst. anord. part. r. p. 12 r. n“ 2. pl. 5. f. 3. 4. 5

Id. Turton, Conebyl. Brît. p. 248. pl. ir. f. i3.

IJ. Fleming, BriL anim. p. 452.

Id. Desh. Eucycl. mélh. Vers, L 2. p. 36. 2 Brooke?, Introd. Lamk. Couch. pl. 2. f. i5.

Süwei’by, Gênera of shells. Cyclas. î. i. 2. 3.

Jenyus, Tr«Às. of the Cambr. pbil. Soc. t. 6. 2* part. p. 294,

Turton, Conch. man. p. 12. i. pl. 1. f. 1.

Tellina cornea. Wood, Iiid, lest. pl. 5. f. 90,

Ktckx, Synop, Moll. Brab. p. 86. io6.

Rceve, Conch. syst. t. x. p. 861. pl. 62. f. i. 2. 3.

Callüw, Conch. nom. p. 3o,

Haiiley, Descr. cal, t. i. p. 89.

Schollz, SchlesMoIl, p. 137.

Gray dans Turlon, Man. éd. p, 279. pl. i. f. i.

Sowerby, Conch. nian.f. 21 r,

Fossilis. Cyclas rivicold. Morris, Cat. of Bril. foss. p. 85.

Braun in Deiitsrh Natiirf. iS',2 p. 144, i45.

Broun, Ind. pala?o«jL I. i. p. 373.

Celle-ci est la plus grande des Cyclades ; elle est aussi celle qui se rapproche le plus des Cyrènes. Elle est ovale, obronde, subéquilatérale,

LES CYGLADES.

7i3

obtuse à ses extrémités; le côté antérieur est un peu plus étroit que le postérieur ; la surface externe est revêtue d’un épiderme d’un brun verdâtre, jaunâtre, interrompu par un petit nombre de zones trans- vorses presque noires. Toute la surface est couverte de stries transverses, fines , assez régulières. Les crochets sont courts et obtus , à peine s’ils font saillie en dehors, au-dessus du bord cardinal, La charnière est mince et étroite ; elle porte au centre deux petites dents cardinales sur chaque valve , et de chaque côté une dent latérale saillante, triangulaire et fortement comprimée de chaque côté. A l’intérieur, la coquille est (l'un blanc bleuâtre. Les impressions musculaires sont petites ; l’anté- rieure est ovale, subréniforme ; la postérieure est subtriangulàire , mais les angles du triangle sont effacés, ce qui le rapproche de la forme suborbiculaire.

Cette coquille est très abondamment répandue dans presque toutes les rivières de l’Europe. M. Nilson la mentionne en Suède, etM. Graels la cite jusqu’au midi de l'Espagne. Elle est fossile dans les terrains récents que les géologues rapportent â la période quaternaire.

Elle a 23 à 25 millimètres de long et 1 7 à 1 8 millimètres de large.

GENRE CINQUANTE-HUITIÈME.

PISIDIZ:, Pisidiam, Pfeiffer.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale assez épais, ayant les lobes (lu manteau peu saillants en dehors, dépourvus de tentacules sur leurs bords, réunis en arrière et terminés de ce côté en un seul siphon. Bouche petite. Palpes labiales triangu- laires, étroites, un peu plus longues que larges. Branchies d’une médiocre largeur, inégales, soudées en arrière du pied. Pied petit, très extensible, triangulaire et comprimé.

Coquille petite, mince, fragile, gonflée, inéquilatérale, par- faitement close, à bords simples et tranchants. Charnière por- tant une ou deux petites dents cardinales, rudimentaires, quel- quefois tuberculiformes et presque effacées, une dent latérale lamelliforme de chaque côté. Impressions musculaires petites,

DIX-SEI‘TIEMK FAMILLE.

écartées; impression paliéale, simple. Ligament externe peu apparent, situé sur le côté le plus long du bord dorsal.

SYNONYMIE génériql’e. La même 'que celle des Cyclades , et de plus : Leach. Leach. Galileja,

î)a Costa.

OBSERVATIONS. Si l'on en croyait trop exclusivement M. Gray, il faudrait rejeter le genre PîSïdi'ura de M. Pfeiffer^ et mettre à sa place celui nommé Pisum par Mégerle, et créé en ISt l par ce naturaliste. Cetto substitution ne doit pas s’opérer, car en examinant le type du gonro pisum [Ciiclas rivîcola)^ il est facile de s’assurer qu’il est un Rouble emploi des Cyclades telles que Lamârck les a réduites. Si Ton veut adopter le genre, il faut préférer celui de M. Pfeiffer, fondé sur de bonnes observations, et lui laisser le nom que lui a imposé le savant pilleur du bel ouvrage sur les Mollusques de l’Alieipagne.

Un assez grand nombre de naturalistes ont adopté le genre Pisidium de M. G. Pfeiffer. Tous n’ont pas été parfaitement d’accord sur la place qu’il doit occuper dans la méthode. C’est ainsi que M. Pfeiffer propose de l'introduire dans la famille des Cardiacées , et M. Held accepte cette opinion. A rexomple de Lamarck , M. Philippi le comprend dans la famille des Conques fluvialiles, tandis que les autres conchyliologuos , Nilson, -Menke, Kleberg, Gray et Sowerby, Tinlroduisent dans la famille des Cycladées, a côté des Cyrènes et dos Cyclades. Nous préfé- rons cette dernière opinion : elle nous semble plus en accord avec les faits connus jusqu’ici à l'égard du genre Pisidium; il fallait que ce genre fût bien voisin des Cyclades pour avoir été constamment confondu avec elles; séparé au moyen d’un caractère que présente l’animal, il ne pouvait être éloigné des Cyclades , et c’est , en effet , que le retien- nent tous ses caractères , ainsi que nous allons le voir par l’examen de l’animai et de sa coquille.

L’animal des Pisidium est presque entièrement semblable à celui des Cyclades ; Je manteau est ouvert en avant et en bas de la même ma- nière. Les commissures de cet organe , son muscle orbiculaire, sont exactemenl comme dans les Cyclades; nous trouvons la même ressem- blance dans la bouche et les palpes qui l’accompagnent. Les branchies elles-mêmes no présentent pas d’autre différence que celles qu’on re- marque entre les espèces d’un même genre. Il n’y a donc que deux organes qui méritent d’attirer notre attention , parce qu’ils diffèrent de ceux des Cyclades. Nous avons vu que chez ces derniers animaux , le

LES CYCLAOES.

7i5

manteau est terminé en arrière par deux siphons inégaux, soudés entre eux , tantôt à la, base seulement, tantôt jusqu’au voisinage du sommet. Dans les Pisidium, un seul de ces organes subsiste, c’est le siphon branchial ; l’autre est remplacé par une simple perforation. L’animal du genre Cyprine nous a déjà offert une disposition semblable; elle nous paraît être un acheminement vers les familles des Lucines et des Cur-^ dium qui doivent suivre celle des Cycladées.

Le pied des Pisidium est fort différent de celui des Cycladps ; jl. se rapproche beaucoup de celui des Cardium. En effet, par sa base, il enveloppe la masse abdominale, se ploie dans le milieu sous la forme d'un coude, et se prolonge on avant eu prenant une forme cylindracée et vermiculaire. Cet organe est susceptible d’allongements considérables , et lorsqu’il est ainsi prolongé autant que l’animal le peut , il prend beau- coup de ressemblance avec le pied funiculaire des Lucines. L’aniipal s’en sert à peu près de la même manière que les Cyclades , soit pour creuser un trou et s’y cacher, soit pour opérer une sorte de reptation à la surface des corps solides.

La coquille du Pisidium offre tous les caractères de colles des Cy- clades. Cependant elle a cela de remarquable, d’être beaucoup plus inéquilatérale. Le côté antérieur est le plus court, il est obtus; le posté- rieur est généralement plus étroit. Ces coquilles sont minces , fra- giles, Subglobuleuses; leur surface externe est revêtue d'un épiderme d’un vert brun verdâtre ou jaunâtre, plus ou moins foncé, suivant les espèces. La coquille est parfaitement close; ses bords sont minces et tranchants. Les crochets obtus, peu proéminents, sont à peine obli- ques. La lunule et le corselet no sont pas mieux indiqués que dans les Cyclades. A l'intérieur, ces petites coquilles sont lisses; elles sont blanchâtres , et l’on a de la peine à apercevoir les impressions que l'animal y a laissées. Pour étudier ces impressions, il faut choisir des individus morts dont la surface interne a été ternie; alors on s’aperçoit que les impressions musculaires et du manteau ne diffèrent en quoi que ce soit de celles des ^Cyclades.

La charnière, qui ordinairement traduit assez bien les modifications produites chez les Mollusques acéphalés, n’éprouve aucun changement, et reste semblable à celle des Cyclades ; en effet , cette charnière se compose d’une ou de deux dents cardinales, quelquefois avortées ou réduites à l’état rudimentaire. Les dents latérales sont beaucoup plus constantes; elles existent invariablement dans toutes les espèces, et ceci est un trait de ressemblance de plus avec les pyçlades. Pour résumer brièvement ce que nous venons d'exposer au sujet des Pisi-

7ï6

DlX-SEPTlEME FAMILLE.

dium , nous pourrons dire que ce genre rassemble des Cyclades à coquille inéquilatérale , et dont l’animal n’a plus qu’un seul siphon.

Les Pisidium sont de très petites coquilles qui habitent les eaux douces de presque toute l'Europe. On en trouve en Suède, et ce qui est fort remarquable , ce sont les mêmes espèces qui vivent dans les ruisseaux de l’Espagne et do la Sicile. Le nombre des espèces est peu considérable : c’est principalement en Allemagne, en France et en Angleterre que ce petit genre a été étudié ; et ce sont presque toujours les mêmes espèces que l’on rencontre dans ces trois pays. M. Jenyns, dont nous avons déjà parlé, a publié une monographie très bien faite des espèces d'Angleterre’ dans les Transactions de la Société philoso* phique de Cambridge, Ce savant fait connaître six espèces ; il en donne de très bonnes Bgures avec les animaux : il est à désirer que son exemple soit imité. Dans la seconde édition du Manuel de Turton, M. Gray, en admettant le genre , Ta enrichi d’une espèce que l’on croyait propre au continent.

On en cite une douzaine d’espèces qui appartiennent aux régions tempérées de l’Europe ; il en existe probablement aussi dans les eaux douces de l’Amérique. Mais jusqu’ici elles ont été confondues avec les Cyclades.

Le nombre des espèces fossiles est peu considérable. Dans son index palœontologicus , M. Bronn en cite six : trois provenant du terrain wealdien de l’Allemagne ; elles ont été décrites, pour la première fois, par M. Duhker, dans son ouvrage remarquable intitulé : Monographie du terrain wealdien du nord de V Allemagne, Les trois autres sont mentionnées dans les terrains tertiaires récents , et tous trois ont leurs analogues vivants. Ce sont :

Pisidium afTniicum, de Jenyns.

2“ Pisidium foUinale [Cyclas fo7iUnaîîs , Draparnaud).

3” Et enûn le Pisidium henslowianum.

Ces trois espèces , répandues dans presque toutes les eaux douces de l'Europe, sont fossiles dans les terrains récents de l’Angleterre et de l’Allemagne.

Pisidie des rivières. Pisidium amnicum^ Jenyns.

P, Testa ovalif 'ventricosâ , obliqua ^ aliqnando tri gond ^ tenui ^ frn- giltf cinerascenti-fusedf anticè pîaniusculâ^ tenue striata^ et pro/un- diore sulcatâ^ intus ctemlescente y umbonibns obtusis,

Tcllina amnica. Millier, Zool. Dan. Prodr p. 246. 2967.

LES CYCLADES.

1^1

Tellina amntca. Millier. Hist. verm. t. a, ao5.

Jd. Grael. p. 3a4a. 78,

Cycîas palnstris. Drap. Hist. des Moll. p. i3o. pl. 10. f. 6, 7.

TeUina amntca. Mat. elRactel, Lin. Tians. l. 8. p. 60. lâ, Pennant, Brit. zoo), t. 4. p. i85.

Id, Wood, General conch. p. î53. pl. 47. f*

Id. Dillw. Cal. t. i. p. io5.

Id. Turlon, Conch. dicl. p. 168,

TeUina rivalis. Mal. et Rack. Lin. Trans. l, 3. p. 44.^ pk >3. f. 37.

Id. Donovan, Brit. shelU. t. 3. pl. 64* f. a.

Cardium om/i/Vwm. Montagn, Test. Brit. p, 86,

Cyclas amntca. Turlon, Conch. Brit. p. aSo. pl. ii. f. i5,

Cycîas obliqua. Lamk. An. s. verl. t, 5. p. 559.

Id. Nilson, Molt. Scan. p. 99.

Pisidinm obltqtium. C. Pfeiffer, Sysl. anord. p, 124. pl. 5. f. 19. 20. 1

Cycîas amnica. Fleming. Brit. auim. p. 453.

Id, Gray, Turlon, Man, p. a85. pl, i. f. 5;

Pisidium amnictim, Jenyns, Trans. Cambr. pliil. Soc. t. 4* p Sog. pl. 19. f. a,

Catlow, Conch. nomencl. p. 29.

Hanlcy, Descr. cal, p. 89,

Picard, Moll, delà Somme, p. 3^6,

Merroet, Moll, des Pyrén. occ. p, 92,

Possiîis, Cyclds amnica^ Morris, Cat. of Brit. foss. p. 85.

Lyell, Geol. proc. 1840, t. 3. p. 175,

Braun, Deutsrli. Nalnrf. 1842, p, 144, »

Broun, Ind. paîaeont. t. 2. p. 982,

Cette petite coquille a été signalée la première fois par^Müller, sous le nom de TeUina amnica; confondue avec les Cyclades , elle a été transportée dans le genre Pisidium par M. Pfeiffer, et celte nouvelle classification a été confirmée par les observations de M. Jenyns. Celte coquille eçt ovale , obronde, iuéquilatérale , enflée, un peu subcordi- forme ; le côté antérieur est court et obtus ; le postérieur est un peu plus étroit. Les crochets sont courts, très obtus. La surface externe, cou- verte d’un épiderme brunâtre , présente des zone^ transverses , tantôt d’un brun cendré pâle, tantôt jaunâtre et verdâtre. Des stries fines d’accroissement couvrent toute la surface; des sillons plus gros et transverses , assez réguliers , s’entremêlent avec les striés et disparais- sent vers les bords. Cette coquille , très mince , est d’un blanc bleuâtre à l’intérieur; sa charnière est en proportion plus épaisse que celle des

7 1 B DIX-HÜITtÈSiE FASïiLEE.

Cyclatles; elle porte, sur chaque valve, deux petites dents cardinales, inégales , divergentes et réunies au sommet de l’angle peu ouvert qu'elles produisent. Los dents latérales sont à peu près égales ; elles sont triangulaires, très comprimées , fort saillantes. Les impressions musculaires sont petites , très écartées : l’antérieure est ovale-semi- lunaire. Celte petite coquille est très abondamment répandue dans les eaux douces de TLurope; elle habite aussi bien les régions froides du nord que les pays les plus chauds du midi de l’Espagne. On la ren- contre à l’état fossile avec le Cycias rîvicqla dans les terrains quater- naires.

Elle a 8 à 1 0 millimètres de longueur.

DIX-HÜITIÈME FAMILLE.

lies Éryelnides. Æryciniaœy Desh.

CARACTÈRES. Animal ovale ou arrondi, aplati ou sub- globuleux , revêtu d'un manteau à double, bord ; Tex- terne court , tantôt simple , tantôt muni de tentacules courts et peu nombreux ; l’interne exertile , percé de deux ou trois ouvertures destinées à remplacer les siphons ; Tantérieure donne passage au pied. Pied grand, comprimé, pédicule. Bouche pe- tite 5 palpes labiales courtes et étroites. Branchies très inégales,: les internes très grandes , subquadrangulaîres ; les externes très étroites obliques, attachées par le milieu de leur largeur : ces organes sont réunis en arrière du pied et de la masse abdo- minale.

Coquille Ovale, aplatie ou subglobuleuse, le plus souvent minfce et fragile , équivalve , close , à bords minces et sim- ples. Charnière rétrécie dans le milieu , portant une fossette interne pour le ligament, et une dent latérale de chaque côté plus ou moins apparente, une ou deux dents cardinales. Im- pressions musculaires petites, peu apparehtes ; impression palléale simple.

GENRES. Erycina, Poronia.

LES ÉRYCINIDES.

7 '9'

En créant le géhre Érycine , Lamarck lo rapprocha des Mactres , et lo comprit dans la famille des Maclracés , dans son histoire des Animaux sans vertèbres. Quoique pour ce grand naturaliste, lo genre Érycine soit resté une sorte d'incertœ sedis dans lequel il rassemblait des co- quilles appartenant à plusieurs genres, ces coquilles avaient cependant, pour la plupart, quelque analogie avec celles des Madrés, surtout à cause de la nature et de la position du ligament. L'opinion de Lamarck peut donc se justifier, surtout si l'on a égard à l’état de la science à l'époque écrivait le savant professeur du Muséum. Aujourd'hui des observations nouvelles et multipliées sont venues détruire l’arrangement méthodique de Lamarck. Il n’est plus possible de conserver aux Érycines leurs rapports avec les Mactres : nous verrons bientôt en traitant spé- cialement du genre, pourquoi il a été si difficile de les déterminer avec certitude, et comment s’est établie, à l’égard du genre, une confusion presque inextricable. Les conchyliologues n'ayant point de guide pour appliquer avec certitude les caractères donnés par Lamarck aux Éry- cines, il en est résulté une double série d’erreurs; D’un coté, des coquilles qui n'appartiennent pas au genre»y ont été introduites; d’un autre , un assez grand nombre de genres ont été successivement proposés pour de véritables Érycines. La recherche des petites coquilles voisines des Érycines a amené la découverte de quelques bons genres , parmi lesquels .nous pouvons rappeler les Syndosmyes de M, Kecluz, genre dont nous avons traité précédemment , ainsi que celui des Poronies du même naturaliste. Ce dernier avoisine beaucoup les Éryemes , il doit faire partie do la même famille.

Nous réduisons à deux le nombre des genres de notre famille des Érycinides, Erycina et Poronia, et nous en empruntons les caractères non seulement aux coquilles, mais surtout aux animaux. Ces animaux, nous les avons observés souvent pendant leur vie. Ils n’ont point de res- semblance avec les Mactres; ils diffèrent aussi de ceux du grand type des Conques marines ou fluvialilos do Lamarck, ils so rapprochent beau- coup plus de ceux des Lucines. Néanmoins ils offrent des différences assez considérables pour mériter de constituer une famille dislincto.

M. Gray a bien compris qu’il fallait séparer les Mactres des Érycines, et des autres genres analogues ; mais ce savant zoologiste n’ayant pu asseoir son opinion que sur les caractères des coquilles, les a rapprochés, d’un côté dos Saxicaves, et d'un autre des Galeomma. Pour faire bien comprendre l’opinion du savant anglais, nous devons ajouter que les groupes dont nous venons de parler sont rejetés à la fin de l'ordro des Cladopodes, à la suite des Gastrochènes , des Solens, des Nucules ,

720

DIX-HUITIÈME FAMILLE.

des Myes, ^es Analînes et des Corbules. Nous ne pouvons entrer ici dans les détails nécessaires à Texamen critique de cet arrangement méthodique de M. Gray; nous nous permettrons seulement quelques courtes observations sur la composition de la famille dans laquelle nous trouvons les éléments dans la nôtre.

M. Gray donne à. cette famille le nom de Lasiadées, empruntant cette dénomination au genre Lasea de Lcach. M. Gray cherche a attribuer à Leach l'honneur de la première création d’un grand nombre de genres , et il voudrait les faire adopter. Sans contester à ce naturaliste le mérite d'avoir établi le premier un certain nombre de genres , nous ne pouvons les admettre, puisqu’ils sont restés perdus dans un manuscrit depuis 1819, jusqu’au moment où, vers 1840, M. Gray eut connaissance du manuscrit en question , et en fit connaître le contenu. M. Gray, il faut lui rendre cette justice, donne l’exemple de l’abnégation; les genres qu’il a proposés dans l'ignorance de ceux de Leach , il les sacriGë et les abandonne ; mais cet éxemple , nous ne l’accueillons pas , nous con- seillons même aux naturalistes de le repousser. Nous croyons défendre les vrais principes de la priorité en n’en accordant aucune à des travaux restés manuscrits : c’est un malheur*sans doute que de tels travaux n’aient pas été publiés à leur époque , nous le déplorons ; mais il ne faut pas réparer un mal par un mal plus grand. Ce serait jeter le désordre dans la science par une fâcheuse rétroactivité , si l’on voulait accorder à des manuscrits oubliés ou longtemps égarés l’autorité d’ou- vrages publiés. Chacun pourrait ainsi s’assurer une gloire posthume et faire rentrer dans le néant les conceptions des meilleurs observateurs, et nous sommes étonné que ces réflexions si justes ne soient pas venues à l’esprit de M. Gray, et qu’il ait persisté à conserver dans ses méthodes des genres qui auraient être relégués dans la synonymie.

Le genre Lasea est du nombre de ceux qui devront disparaître; il renferme de très petites coquilles pour lesquelles M. Recluz a établi son genre Poronia. A la suite de ce genre, M. Gray en admet cinq autres dans sa famille des Lasiadées. Ce sont :

1 ° Kellia , Turton . Ce genre ne ditfère en rien des véritables Êry- cines de Laraarck, telles qu’elles ont été réformées par M. Recluz et par nous-môme.

2“ Cyamivm, Philippi. Ce genre, encore douteux, nous paraît avoisiner les Ervilies , et par conséquent se rapprocher du type des Corbules.

Montacuta, On chercherait vainement les différences génériques qui séparent ce genre de M. Turton des Kellia et des Érycines. Pour

LES ÉRYCINIDES.

721

nous , qui avons sous les yeux les coquilles de ces trois groupes , nous y reconnaissons des caractères spécifiques-, mais non des caractères propres à les séparer en genres.

Il en est de môme du genre Clmsina de M. Jeffreys ; aussi nous le rapportons dans la synonymie des Érycines de Lamarck.

Enfin, M. Gray termine sa famille des Lasiadées par le genre Embla de M. Lovèn. Mais les renseignements que le savant zoologiste danois donne sur son nouveau genre sont suffisants pour dérîiontrer qu’il n'a point de rapport avec les Érycines, et qu’il se rapproche davantage des Mactres. En effet, dit M. Lovèn, l'animal est terminé en arrière par deux siphons , et nous allons voir que ce qui caractérise la famille des Érycinidcs, c’est l’absence de ces organes.

Les Mollusques que nous réunissons dans la famille des Érycinides sont de très petite taille, et par conséquent d’une observation assez difficile ; ils sont ovales , Iransverses ou suborbiculaires ; tantôt aplatis , tantôt subglobuleux : le manteau dont ils sont revêtus est mince et transparent ; .le bord est dédoublé profondément; ,1a duplicature la plus courte conserve le contour exact de la coquille et la déborde à peine; la seconde duplicature est susceptible d’une extension plus. con- sidérable : elle forme un large bord extérieur qui augmente, d’autant la cavité palléale ; il arrive môme quelquefois à ce bord de se prolonger sous la forme d’un grand capuchon, au-dessous duquel le pied peut être caché en partie, ainsi que nous l’avons reconnu dans une des Érycines de la Méditerranée. Le manteau n’est jamais prolongé en arrière par des siphons. Dans les Érycines, une large commissure sépare deux ouvertures inégales : l'une, antérieure et inférieure, très grande, donne passage au pied ; l’autre, postérieure, remplace les deux siphons. Dans le Poronia , la disposition du manteau est fort différente; car son bord inférieur présente trois ouvertures inégales séparées par deux commissures : la première do ces ouvertures est antérieure ; elle est petite, un peu prolongée en avant, elle est destinée à donner pas- sage au pied ; la seconde est beaucoup plus grande , elle occupe une partie du bord ventral de l’animal ; elle nous paraît destinée â rem- placer le siphon branchial; la troisième, enfin, est postérieure ; elle est en forme de boutonnière, et elle ressemble à celle qui occupe la môme place chez les Érycines. Ainsi la différence qui existe entre les Poronies et les Érycines consiste dans la soudure des bords du manteau au milieu de la grande ouverture antérieure et inférieure. Jusqu’ici aucun autre exemple ne peut être cité d’un Mollusque acéphalé ayant au manteau trois ouvertures sessiles disposées comme dans les Poronies. » T. I. PARTIE. 4b*

DIX-HÜITIÈME FAMILLE.

^22

Dans ies deux genres que nous rapprochons , la bouche est petite et Irahsverse; ies lèvres en sont larges , et elles se terminent en une paire de palpes labiales courtes et étroites. Les branchies sont semblables dans les deux genres; les feuillets sont très inégaux; les internes sont très grands et subquadrangulaircs; ils s'étendent dans presque toute la cavité du manteau. Les feuillets externes sont très étroits, ils semblent attachés à l'animal par le milieu de leur surface interne. Une moitié tombe en avant, tandis que l’autre remonte en arrière dans la région dorsale : ces organes se réunissent en arrière de la masse abdominale, et viennent so souder au manteau sur le pourtour de l’ouverture posté- rieure dont il est percé.

Les muscles adducteurs des valves sont très petits : ils occupent les extrémités de l’animal, et ils se présentent sous la forme de faisceau cylindrique dans les Érycincs, un peu plus ovalaire dans les Poronies.

Le pied a de l’analogie avec celui des Cyclades et des Pisidium : çet organe est susceptible d'allongements considérables; il est aplati do chaque côté, tranchant sur son bord inférieur; il se prolonge en avant sons la forme d'une lanière étroite dans les Érycines; il se termine en arrière en un talon pointu, et il se lie à la niasse abdominale au moyen d’un pédicule étroit.

Les mœurs de ces animaux sont en rapport avec la forme du pied et la manière dont ils peuvent s’en servir. Chez presque tous les Mollus- ques acéphalésque nous connaissons actuellement, l'organe locomoteur est destiné à creuser le sable ou la vase, et à préparer un trou dans lequel l’animal tout entier finit par s'enfoncer. Les petits Mollusques qui nous occupent ont une tout autre manière de vivre. Us s’abritent Sous les pierres, ou ils s’enfoncent dans les fentes des rochers, dans lesquelles ils remontent an-dessus du niveau des marées. Pour se- mouvoir, sur les corps solides , ces animaux étendent leur pied autant qu’ils le peuvent, en appliquent le plat sur les corps qu'ils rencontrent, et i’y attachent avec assez de solidité à l'aide de la mucosité que sécrète un organe spécial situé à la base. du pied. Une fois attaché par son extrémité , le pied se contracte , et il entraîne avec lui l’animal tout entier. Ce mouvement, se réJ)étaDt avec assez de rapidité, permet à ranimai de s’avancer assez vite et de se tenir habituellement , non pas sur le sol , mais sur la face inférieure des pierres, dans une position semblable à celle d’un insecte qui est attaché au plafond d’un apparte- ment.

Les coquilles se distinguent facilement, non seulement par la peti- tesse de leur taille, mais aussi par la structure de leur charnière, qui

LES ÈRYCLMDES.

723

ne ressemble en rien à ce qui est connu dans les autres genres. Ce sont des coquilles généralement lisses, minces et fragiles; elles sont équî- valves , subéquilatérales et parfaitement closes. Leur surface externe est revêtue d'un épiderme mince et transparent ; les crochets sont petits, peu obliques et à peine saillants au-dessus du bord cardinal ; on n'aper- çoit ni lunule ni corselet. A l'inténeur, ces coquilles sont lisses; ce n*est qu'avec beaucoup de peine que l'on parvient quelquefois à y découvrir deux très petites impressions musculaires et une impression palléale simple, plus ou moins rapprochée du bord inférieur, selon les èspèces. Quant à la charnière, elle présente quelques modifications intéressantes. Nous croyons utile de les exposer rapidement.

Le caractère le plus apparent des coquilles do noire famille des Érycines consiste en une échancrure plus ou moins profonde qui se montre au centre delà charnière, dans d'autres genres celte partie est la plus large et la plus épaisse. Celle échancrure est triangulaire; elle est plus ou moins profonde , selon les espèces. Dans cellés qui sont aplaties , par exemple, cette échancrure est peu oblique, étroite et peu profonde. Dans les espèces subglobuleuses, elle devient plus longue, se creuse beaucoup plus, et finit par se cacher presque entièrement au- dessous du bord postérieur et supérieur. Cette fossette reçoit un liga- ment intérieur dont l’étendue est toujours proportionnée à la cavité dans laquelle il s’attache. Petite et triangulaire dans les espèces plates , elle a une ressemblance éloignée avec celle des Grassatelles. A mesure que les espèces s’approfondissent, le ligament dévient de plus en plus oblique; il s’allonge le long du bord et prend de la ressemblance avec celui des Amphidesmes. Dans les Poronies, cette ressemblance est surtout frappante, parce que la cavité du ligament, plus épaisse , est projetée en dedans et devient ainsi plus apparente. Indépendamment du ligament dont nous venons de parler, le bord cardinal présente d’autres parties qui servent à Caractériser la famille et les genres. Sur le bord antérieur de l'échancrure du ligament s'élèvent une, quelquefois deux dents cardinales; très peu d'espèces ont les deux dents, presque toutes les autres n'en ont qu’une. De plus , la charnière porte deux dents latérales comprimées et intranlés. Ces dents lâtérales sont variables, particulièrement dans le groupe d’espèces pour lequel M. Turton a pro- posé le genre Kellia, En effet , la dent latérale antérieure manque ou se confond, lorsqu’elle est rudimentaire, avec la dent cardinale du même côté. Dans ce même groupe, la dent latérale postérieure est située à l’extrémité du ligament, et elle est toujours très apparente. Dans les Poronia , toute la charnière est plus robuste, et les dents

46*

7^4 DIX-HUITIÈME FAMILLE.

latérales s’allongent de chaque côté et l’avancent au-dessous des cro- chets.

A l’aide des caractères que nous venons d'exposer, empruntés aux animaux et à leurs coquilles, il sera toujours facile de rapporter à la famille des Érycinides ceux des’Mollusques acéphalés qui en dépendent. Pour résumer ces caractères , nous rappellerons que ces animaux sont dépourvus de siphons , que leur manteau a deux ou trois ouvertures sessiles, que le pied est plat, très allongé, et que l'animal rampe en appliquant le plat de ce pied sur les corps solides. Quant aux coquilles, elles so distinguent par leur peu d’épaisseur, par leur petitesse, par le ligament complètement intérieur, sans aucune trace de ligament externe; par une charnière dans laquelle les dents latérales prédominent et les dents cardinales, au nombre de deux, ont une tendance k disparaître, et disparaissent, en effet, dans un certain nombre d’espèces. Enfin, ces coquilles se distinguent encore par leur impression palléale simple et par deux impressions musculaires petites et très- écartées.

Connaissant actuellement les caractères principaux de la famille des Érycinides, nous avons à rechercher la place qu’elle doit occuper dans la série générale, fi est évident qu’elle ne peut rester dans le voisinage des Mactres, comme l’ont cru tous les conchyliologueSi Il suffirait, pour se convaincre de leur erreur, de comparer les ca- ractères des Mactracées avec ceux de la famille qui nous occupe. On verrait , d’un côté , dos animaux terminés en arrière par deux si- phons réunis , ayant un pied robuste , des palpes labiales très grandes, des branchies très longues et étroites ; tandis que dans les genres des Érycinides il y a absence complète de siphons ; le pied est pé- dicule, mince et étroit; les palpes labiales courtes et rétrécies; les branchies , très inégales , occupent presque toute la cavité du man- teau. Quant aux coquilles, d'après lesquelles Lamarck avait opéré le rapprochement que nous critiquons, elles n’ont guère plus de ressem- blances que les animaux eux-méraes. Dans les Mactracées l’existence des siphons entraîne la présence d’une échancrure plus ou moins pro- fonde dans l’impression du manteau. Cette impression reslo toujours simple dans les Érycinides , et cela s’explique très bien par l'absence des siphons. Les charnières sont très différentes. Dans les Mactracées, deux ligaments, un très gros à l'intérieur, l’autre très petit à l’exté- rieur. Les dents cardinales sont constantes, les dents latérales seules varient. Dans les £rycipides, un seul ligament, toujours intérieur, et ce sont les dents cardinales qui varient, tandis que. les latérales sont plus constantes. Il est donc prouvé pour nous que la famille des Éry-

LES ÉKYCLMDES.

cines est très éloignée de celle des Mactres ; mais de quel groupe de Mollusques doit-ëlle se rapprocher? 11 est évident que c’est avec celui des Lucines qu’elle a le plus de rapports. En effet, dans cette dernière famille nous trouvons aussi un manteau simple , n’ayant plus qu’un seul siphon ; les palpes labiales sont très petites, et les branchies sont très grandes ; le pied des Lucines devient encore plus étroit, car souvent il est funiculaire ; les branchies prennent une extension con- sidérable, et quelle que soit la manière d’envisager ces organes , ils ont de la ressemblance avec la branchie interne des Érycines. Dans les coquilles , la ressemblance n’est pas moins frappante. En effet , chez les Lucines, le ligament a une tendance à passer de l’intérieur à l’exté- rieur de la charnière, èt l’on peut dire aussi que dans ce genre les dents cardinales sont plus variables que les latérales ; enün, les Lucines, ainsi que les Érycines , ont l’impression du manteau toujours simple. A la suite de la comparaison des divers genres que nous venons de men- tionner, il était naturel de modifier la classification et de transporter la famille des Érycines loin des Mactres et des Tellines , dans le voisinage des Lucines ; peut-être même aurions-nous la ranger à la suite, plutôt que delà mettre en avant ; mais nous devons rappeler que lesdeux familles que nous rapprochons constituent un embranchement latéral qui , en sortant du tronc, ne s’oppose plus à la continuité des rapports qui exis- tent entre la famille des Cyolades et celle des Gardium. Nous étions entraînés à rapprocher les Érycinides des Cyclades à cause de quelque ressemblance dans les animaux : le pied, par exemple , a de l'analogie dans les deux familles ; les palpes labiales sont à peu près du même volume : enfin , nous avons vu dans les Pisidium les siphons disparaître presque complètement, ce qui les rapproche à la fois des Lucines et des Gardium.

Les Mollusques de la famille des Érycines sont marins ; ils vivent sur les rivages, sous des eaux peu profondes ; ils- habitent sous les pierres , dans les fentes des rochers : ceux que nous avons observés vivants ne se sont jamais enfoncés dans le sable ou dans la vase. 11 serait pos- sible cependant que des espèces que nous n’avons point vivantes vécus- sent à la manière des autres Mollusques acéphalés. Cependant nous en doutons , et d’après ce seul fait qu’ils sont dépourvus de siphons , organes particulièrement destinés à s’opposer à l’introduction de corps étrangers dans la cavité du manteau.

7^6

DJX-HÜIXIEME FAMILLE.

GENRE CINQUANTE -NEUVIÈME.

£&YCX9irx. Enjcina, Lamk.

PL II. fîg. 639.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale ou arrondi, ayant le manteau percé de deux ouvertures très inégales, l’une an- térieure et inférieure pour le passage du pied; l’autre, posté- rieure, représentant les deux siphons. Bord du inanteau bilabié, la lèvre externe courte, portant une série de courts tentacules également distants ; la lèvre interne se prolongeant en avant ou en capuchon triangulaire propre à couvrir la base du pied. Pied mince, étroit, allongé, tranchant, soutenu par un pédicule étroit. Bouche petite, munie de grandes lèvres terminées par des palpes labiales courtes et étroites. Branchies très inégales, les feuillets internes subquadrangulaires presque aussi larges que le manteau ; feuillets externes étroits et obliques.

Coquille libre, ovale, transverse, équivalve, inéquilatérale, entièrement close. Charnière présentant deux dents cardinales inégales , divergentes , ayant en arrière une fossette oblique ; deux dents latérales oblongues, comprimées , intrantes, courtes sur chaque valve. Ligament intérieur, épais, fixé dans les fos- settes. Impression du manteau simple ; impressions musculaires superficielles arrondies.

SYNONYMIE GENERIQUE. Mya , Moiîtagu , Matou et Racket. Kellia, Turton, Gray, Forbes, Jeffreys, Gould, Margillivray, Sowerby, Morris. Lesœa, Leach [teste Gray), Gray, Lesæa^ Môller. Cyamium, Philippi, Gray. Mon- iacuta^ Turton, Lovèn, Gray, Jeffreys, Thompson. Clau- sina, Jeffreys, Gray. PÿZ/wTia , Hinds. Chironia, Deshayes.

OBSERVATIONS. L’étude que fit Lamarck des fossiles du bassin de Paris, et particulièrement de la célèbre localité de Grignon, lui fit décou -

LES ERYClMüKS.

7-n

vrirun certaiu nombre de petites coquilles bivalves dont les caractères ne pouvaient s’accorder avec ceux des autres genres connus. Avec ces co- quilles minces et fragiles , il créa un genre Érycine dont les caractères furent publiés, pour la première, fois , dans le 6* volume des Annales du Muséum. Les principaux caractères assignés par Lamarck a son nou- veau genre se remarquent dans la charnière , composée , d'après lui , d’une fossette intérieure pour, le ligament, placée entre deux dents cardinales divergentes, accompagnée de chaque côté d’une dent laté- rale ordinairement saillante* Dans ce genre, Lamarck réunit six es- pèces d'abord , auxquelles plus tard il en adjoignit quelques autres , et entre autres une vivante de la Nouvelle-Hollande.

Le nou^yeau genre introduit par Lamarck dans les classifications qu'il publia successivement fut toujours maintenu dans le voisinage des Mactres, le savant auteur conservant à ce sujet les premières opinions qu’il avait publiées. Malheureusement les Dgures qui accompagnent le mémoire de Lamarck, dans Annales du Muséum, ne sont pas suffi- samment exactes pour faire comprendre les caractères des Érycines; de résulta une confusion considérable qui s’introduisit peu à peu parmi les conchyliologues, parce que chaque observateur crut retrouver des Érycines dans toutes les petites coquilles minces et fragiles à liga- ment intérieur, qu’il eut occasion d’examiner. 11 aurait fallu, avant toutes choses , étudier avec la plus grande attention les types spéci- fiques réunis par Lamarck dans son genre Érycine. Mais cet examen avait ses difficultés , surtout pour les personnes étrangères qui devaient s’en rapporter uniquement aux caractères décrits , ainsi qu^aux figures.

Si l'on rassemblait aujourd’hui toutes les coquilles qui ont été succes- sivement décrites sous le nom d'Érycine, on serait bien étonné de co résultat, qu’à l’exception de deux ou trois, toutes les autres n’appar- tiennent point au genre. On arriverait à un résultat non moins inat- tendu, si l'on rassemblait les espèces do plusieurs genres qu’on a crus nouveaux : on y rencontrerait presque toutes les Érycines actuel- lement connues. Il faut l’avouer, Lamarck a été en partie cause de la confusion que nous venons de signaler brièvement. En effet , le savant naturaliste avait lui-raéme réuni, sous le nom d'Érycine, des coquilles de divers genres que leur politesse avait soustraites à une observation plus complète; aussi il était loisible, en quelque sorte, à chaque natu- raliste de prendre au hasard un des types de Lamarck et de lui attribuer toute la valeur des caractères génériques; et nous allons bientôt voir que le résultat ne pouvait être autre que celui qui a été obtenu , c’est- à-dire une confusion presque inextricable.

DIX-UUITIÈME FAMILLE.

928

M. Recluz a publié, dans la Revue zoôlogique\ un très bon travail sur le genre Érycine. Non content d’apprécier avec une grande saga- cité tout ce qui a été publié sur ce genre, M. Recluz a examiné dans la collection de Lamarck, dans celle de M. Defrance, ainsi que dans la nôtre , les espèces vivantes et fossiles qui avaient servi aux descriptions de Lamarck et aux nôtres. De cet examen aussi radical qu'éclairé, il résulta une réforme du genre Érycine; elle était néces- saire, puisque M. Recluz découvrit dans ce genre des espèces appar- tenant aux Vénus , aux Lucines, aux Tellines, et enfin aux Astartés. Le type vivant du genre Érycine ( Enjclna cardioides ) , que nous avons vu autrefois dans la collection du Muséum^ est une véritable Vénus; quoique étiquetée de la main de Lamarck, nous pensions que sa pré- sence dans le genre Érycine était le résultat d’une erreur matérielle, telle qu'elle pourrait avoir lieu dans les remaniements successifs qu’a snhis h collection du Muséum. Mais cette même coquille se trouvant sous le même nom dans la collection de Lamarck^ on ne pouvait se refuser à l’évidence , et il restait démontré que l’erreur venait de Lamarck lui- même. L’erreur était plus facile à justifier à l’égard dos espèces fossiles appartenant à d’autres genres ; beaucoup plus petites, elles ont des caractères d’une élude plus difficile; quelquefois on no pouvait pas s’assurer avec facilité si le ligament est réellement intérieur. Néan- moins, parmi ces coquilles, quelques unes ont l’impression palléale simple; quelques autres ont celte impression sinueuse : parmi ces der- nières , les unes sont de véritables Tellines ; les autres sont très voisines de VAmphidesina Bogsü. Elles doivent par conséquent rentrer dans le genre Syndosmrja , ainsi que nous l’avons vu précédemment. Des douze espèces inscrites par Lamarck dans son Histoire des a7iimaux sans vertèbres f deux seulement, d’après les observations de M. Recluz, peuvent rester dans ce genre. A celles-là seules s’appliquent presque rigoureusement les caractères imposés au genre par Lamarck. Lorsque l’on vient à leur comparer les espèces des genres Keîlia et Montacuta de Turton , celle du genre Cyamium de Philippi , Clausina de Jeffreys, Pithina de Hinds , et Chiroma de nous , on reconnaît que toutes ces coquilles dépendent d’un type unique, et que c’est à lui que le nom d’J^î/ricma doit être conservé.

Nous avons pensé d'abord qu’il faudrait joindre à cette synonymie générique les genres Cycladina de Cantraines, ou Poronia de Recluz; mais les observations que nous avons faites sur les animaux de ce petit groupe nous ont déterminé à le conserver, ainsi que nous l’avons déjà dit, en traitant delà famille des Érycinides. Nous ne pouvons nous

LES ÉRYCINIDES.

729

appesantir à discuter les différents genres que nous venons de men- tionner : M. Recluz Ta fait dans l’excellent travail dont nous venons de parler, mais la nécessité de leur réunion deviendra évidente par la description minutieuse que nous allons donner des coquilles que nous réunissons dans le genre Érycine. Cette description nous fournira d'ail- leurs l’occasion de faire remarquer d’après quels caractères les genres que nous rapportons à notre synonymie ont été fondés.

Jusqu’ici l’animal des Érycines n’a point été décrit, si ce n’est par M. Recluz, d’après quelques renseignements qu’il a bien voulu accepter de nous. Il était cependant bien nécessaire que cet animal fût connu pour pouvoir déterminer rigoureusement la place que le genre doit occuper dans la méthode. Nous ne reviendrons pas sur ce que nous avons dit à ce sujet dans les généralités de la famille, nous y renvoyons le lecteur.

L'animal des Érycines est ovale , transverse , aplati ou subglobuleux : il est d’un blanc pâle , laiteux et demi -transparent. Ses muscles adduc- teurs constituent la partie la plus opaque de son corps , et ils appa- raissent sous forme de deux petites taches à travers la coquille, pendant la vie de l'animal. Le manteau est très mince , transparent; il est plus fortement adhérent à la surface interne des valves que dans la plupart des autres Mollusques acéphalés. 11 est bordé, à la circonférence, par un muscle orbiculaire, étroit, peu épais, échancré en avant et en arrière par le passage des muscles adducteurs. Vers le bord, le man- teau se dédouble. L’une des duplicatures suit le contour du bord libre des valves, le dépasse â peine , et il donne naissance à un petit nombre de courts tentacules également distants. L’autre duplicalure est beau- coup plus extensible. Elle prend naissance au côté interne de la pre- mière , et son bord libre reste simple ; mais ce qui la rend particu- lièrement remarquable, c’est qu’elle s’allonge en avant en forme de capuchon terminé en pointe, et au-dessous duquel une partie du pied peut se cacher. Nous ne connaissons pas d'autre Mollusque chez lequel le manteau présente une disposition, nous ne dirons pas sem- blable , mais môme analogue. Le bord antérieur de ce capuchon n’est pas formé de deux parties simplement rapprochées. Les lobes du man- teau sont soudés , et cette soudure constitue la commissure antérieure de la grande ouverture palléale. Cette ouverture commence un peu au- dessous du muscle adducteur antérieur, et elle se continue dans toute la longueur du* bord ventral de l’animal. Une autre soudure se fait alors entre les lobes du manteau, et bientôt elle est interrompue de nouveau par une ouverture postérieure unique, destinée à remplacer

DlX-HUlTlEiUE FAMILLE.

73o

les deux siphons que nous avons vus Jusqu’ici dans tous les Mollusques des familles précédentes. Nous insistons vivement sur ce fait d’une ouverture postérieure unique destinée à remplacer les siphons , parce que, après la Solémye, le genre Érycine est le seul parmi les Dimyaires qui présente ce caractère singulier. Nous aurons bientôt q en estimer la valeur.

Le pied est très singulier chez les Éryciues. Les Mollusques des familles qui précèdent , à l’exception des Pisidium, nous ont montré presque tous un pied linguiforme, triangulaire, tranchant, plus ou moins épais et subitement tronqué en arriére, et à peu près dans la forme du talon d'un pied humain. Chez tous, cet organe locomoteur est fortement uni à la masse abdominale , puisque les parois de cette niasse en sont formées : il en est bien de môme chez les Érycines ; mais au lieu de s’élargir progressivement , la partie qui continue l’abdomen se rétrécit en un pédicule aplati auquel est attaché un pied très long, comprimé, vermiforrne, terminé en arrière par une pointe assez longue, du tiers environ de la longueur totale.

La bouche est petite, iransverse-; elle est garnie de très larges lèvres membraneuses simples qui se prolongent de chaque côté en une paire de palpes labiales triangulaires, courtes et étroites. La surface interne de ces palpes montre un petit nombre de fines lamelles obli- ques.

Les branchies présentent, dans le genre qui nous occupe , des carac- . lères tout particuliers : les feuillets branchiaux sont très inégaux, les internes sont les plus grands: ils ont une étendue peu commune, car ils occupent presque toute la surface interne du manteau. Ils c£schent la masse abdominale, et la plus grande partie du pied lorsqu'il est con- tracté. Ces organes sont subquadrangulaires ; on pourrait les comparer b, un large scapulaire jeté sur le dos de l’animal, et se terminant en pointe large et obtuse a son extrémité postérieure. Ces organes ne pa- raissent pas s'interposer entre les palpes labiales. Nous avons toujours vu ces palpes entièrement dégagées. Les feuillets externes sont beau- coup plus étroits; ils ont à peu près le tiers de la largeur des feuillets internes. Ils sont plus courts et commencent plus en arrière. Ils sont attachés par le milieu de leur largeur ; une moitié tombe en avant dans la cavité du manteau; l’autre moitié remonte vers la région dorsale. Les feuillets branchiaux , soudés entre eux , en arrière de la masse abdo- minale , viennent présenter leur surface interne à l'entrée de l’ouverture postérieure du manteau. Ces organes sont très minces; ils sont très finement striés en travers. Les stries sont produites par une multitude

LES ERYCINIDES. 7^1

de vaisseaux branchiaux que l’on ne peut bien apercevoir qu’à l’aide de fortes loupes ou de grossissements microscopiques.

A la base du pied et dans la portion de cet organe qui se lie à la masse abdominale , on remarque un organe particulier, plus opaque que le reste : il est subréniforme. On pourrait le comparer au crypte' qui reçoit le byssus dans les Mollusques byssifères. Mais chez tes Érycines, il n'existe aucune trace de byssus , et l'organe dont nous parlons doit avoir un autre usage. Nous le croyons destiné à la sécrétion des mu- cosités abondantes dont l'animal a besoin pour s’attacher à la surface des corps solides sur lesquels il rampe avec assez de rapidité.

Nous avons souvent observé vivantes les petites espèces d'Érycines la Méditerranée. Nous avions d’abord compté rencontrer ce petit Mollusque vivant dan^ la vase ou dans le sable fin ; mais, contrairement à notre attente, nous l'avons toujours trouvé sous les pierres des rivages, à une faible profondeur sous Teau ; ce qui nous a surpris le plus , c’est de le trouver, non pas sur le sol abrité par la pierre , mais attaché à surface de la pierre exactement comme un insecte au plafond d'un appartement. Mis dans des vases de verre ou de porcelaine, nous avons vil ces petits Mollusques y ramper avec assez de rapidité , grimper le long des parois perpendiculaires , et se tenir longtemps suspendus par l'extrémité antérieure du pied. Pour produire celte locomotion, l'animal allonge son pied en lui imprimant de légères ondulations , et en l’appli- quant par le côté plat, le plus exactement possible, sur la surface du corps qu’il rencontre. Lorsque, à l’aidede cette légère compression et de l’abondante mucosité qu’il sécrète , l’animal s’aperçoit qu’il est suffi- samment adhérent, il contracte son pied qui , en se raccourcissant con- sidérablement, fait faire à l’animal un pas dans direction qu’il a choisie. Celte manœuvre . répétée fréquemment et avec plus de rapidité qu'on ne le supposerait d’abord , permet à l'animal de cheminer aussi rapidement qu’un Mollusque gasléropode. Pendànt tout le temps que l’animal manœuvre, il fait sortir hors de sa coquille le grand capuchon qui couvre la base du pied ; mais jamais on n'aperçoit la moindre trace de siphons ou d'organes qni en tiennent lieu , les bords de la fente postérieure du manteau ne faisant aucune saillie au dehors des valves.

Les coquilles du genre Érycine sont toutes d’un petit volume. La plus grande espèce qui nous soit connue, nous en avions fait le type du genre Chironîa , que nous avons abandonner depuis lôs réformes nouvellement proposées par M. Recluz. Celle coquille présente , en effet, tous les caractères des Érycines ; et il serait peut-être utile de la prendre désormais pour type du genre,' son volume la rendant d’iinè

DiX-HülTlÈME FAMILLE.

,32

observation plus facile : cependant nous pensons devoir présenter les caractères du genre , en les empruntant aux espèces de Lamarck , et en montrant les modifications successives que ces caractères ont ressenties en passant d'une espèce à l’autre.

Les Érycines sont généralement ovales, transverses, aplaties ou sub- globuleuses. Elles sont inéquilatérales ; presque toutes sont lisses, très minces , transparentes et fragiles : un épiderme peu épais en couvre la surface ; souvent il est caduc. Les couleurs sont peu variables : presque toutes les Érycines sont blanches , quelques unes seulement sont jau- nâtres ou rougeâtres. Les bords sont simples, tranchants, et la coquille parfaitement close : les crochets sont petits, peu saillants, obliquement inclinés en avant ; la lunule n’est jamais circonscrite ; le corselet est arrondi; il n’est point limité par un angle ou par d’autres accidents. Les côtés antérieurs et postérieurs sont obtus. La surface interne n’est jamais nacrée; elle est blanche. On y aperçoit très difficilement les im- pressions que l'animal y a laissées ; ces impressions sont superficielles ; elles sont lisses et brillantes, comme le reste de la surface ; cela subsiste même dans les espèces fossiles, et c’est une des difficultés que ren- contre l'observateur pour apercevoir nettement tous les caractères du genre. On parvient néanmoins à trouver deux impressions musculaires fort petites , ovales , obrondes , très écartées l’une de l’autre , et situées aux deux extrémités de la coquille. Dans quelques espèces, ces impres- sions sont submarginales : l’antérieure est située -un peu au-dessous du bord cardinal ; la postérieure occupe une position semblable , seulement elle est un peu plus grande et un peu plus rentrée en dedans. Ces im- pressions éprouvent quelques modifications qui sont en relation avec la forme extérieure de la coquille. C’est ainsi , par exemple, que dans les espèces appartenant autrefois au genre Montacuta de Turton , la co- quille étant plus transverse , l’impression musculaire postérieure est devenue plus ovalaire : elle s’est allongée le long du bord , qui lui- même a pris plus de développement. Quelques espèces âu genre Kellia ont l'impression musculaire antérieure un peu plus ovalaire, sans qu’il soit possible d’apercevoir chez ces coquilles d’autres différences avec les Érycines proprement dites.

L’impression palléale reste la même dans toutes les espèces du genre. Elle est toujours simple ; elle conserve un parallélisme constant aveo le bord inférieur de la coquille; elle se détache en avant du muscle adduc- teur antérieur, de manière à laisser ce muscle en dedans , au lieu de le diviser en deux, ainsi que cela a lieu dans le plus grand nombre des coquilles. Elle se place dans le voisinage du bord , et l’accompagne plus

LES ÉRYCINIDES. 7.33

OU moins haut jusqu’à l’extrémité postérieure , elle se dirige vers le muscle postérieur comme pour le couper en deux.

Le bord cardinal est étroit. Ce qui le rend remarquable à la première vue , c’est le rétrécissement qu’il montre dans le milieu de sa longueur, il est justement le plus large dans les autres genres de coquilles. En avant de cette dépression, s’élèvent à angle droit une ou deux petites dents cardinales inégales , dont l’une , celle qui est à côté de la fossette du ligament , semble avortée ; il y a des espèces chez lesquelles elle n’existe pas du tout. En arrière de ces deux petites dents , est creusée une petite fossette, soit oblique, soit parallèle au bord supérieur, et dans laquelle est reçu un ligament complètement interne. La fossette de ce ligament est assez variable selon les espèces ; quelquefois elle est subtrigqne : le plus ordinairement elle est étroite, profondément en- foncée dans la cavité du crochet ; ce qui a lieu particulièrement dans les espèces subglobuleuses à valves profondes. Dans les espèces com- primées, la fossette, rencontrant la profondeur do la valve, resté natu- rellement plus superficielle. En avant et en arrière, cette charnière est complétée par des dents latérales ordinairement grandes et intrantes. Cependant ces parties éprouvent des modiGcations qu’il est nécessaire de faire connaître afin que Ton ne puisse se méprendre sur la valeur des caractères que nous assignons au genre. Dans un groupe d'espèces, la dent latérale antérieure se rapproche considérablement des dents cardinales, et quand celles-ci sont presque avortées, elle semble les remplacer; peu à peu celte dent s’écarte davantage, et elle finit par s'isoler entièrement des dents cardinales. Quant à la dent postérieure , située à l'extrémité du cuilleron , elle est toujours plus isolée du reste de la charnière , quoiqu'il y ait des espèces chez lesquelles les dents latérales sont également écartées. Mais il y a encore des nuances parmi ces espèces ; car les unes , celles d’une forme triangulaire particulière- ment, ont les dents très rapprochées l’une de l’autre, tandis qu’elles sont plus éloignées dans les espèces d’une forme ovalaire.

Il est évident, d’après ce que nous venons d’exposer, que le genre Py(/ima de M. Hinds doit rentrer parmi les Érycines. Ce genre, en effet, ne diffère de la plupart des espèces que par le rapprochement des dents cardinales et des dents latérales; mais nous avons vu que ce caractère n’avait aucune constance et qu’il perdait ainsi sa valeur générique.

En voyant le nombre assez considérable de genres que nous réunis- sons en un seul, on pourra peut-être nous objecter que nous rassemblons des objets qui diffèrent notablement entre eux. Nous répondrons que

734 DiX-lILUTIÊME FAMILLE.

les différences observées se montrent, non par degrés arrêtés, mais dans une série continue de modifications insensibles. A prendre les espèces aux deux extrémités du genre, on serait disposé à y voir des types de genres différents. Mais si l'on comble l’intervalle par toutes les espèces connues, on voit s'établir une série continué de modifi- cations à l'aide desquelles loules se rattachent les “unes aux autres sans qu'il soit possible de trouver en elles des caractères suffisants pôur formation de plusieurs genres ; aussi il est à remarquer que la plupart des genres que nous réunissons dans la synonymie générique ont été proposés, soit à une époque le genre Érycine était mal connu . soit par des naturalistes qui n'ont eu à leur disposition qu’un petit nombre d’espèces.

Les Érycines sont de petits Mollusques littoraux qui vivent dans presque toutes les mers; on en connaît maintenant des deux Améri- ques , du grand Océan austral , mais le plus grand nombre provient des mers d'Europe. Gomme ces coquilles peuvent échapper facilement par leur petitesse, il est à présumer que c'est de que provient la pau- vreté relative du genre, dans certaines régions, et probablement aussi sa plus grande abondance dans les mers do l'Europe explorées depuis plus longtemps et avec plus de soins que loules les autres. Nous avons donné quelques détails sur les mœurs de ces animaux, mais ces détails s’appliquent particulièrement à ceux de la Méditerranée. Ces mœurs sont-elles les mêmes dans loules les autres espèces? C’est à l’observa- tion à répondre plus tard à celte question.

Dans sa monographie des Érycines , M. Recluz a décrit dix-huit espèces vivantes et onze espèces fossiles ; depuis cinq ans que ce travail a été publié, nous comptons quelques espèces de plus , une vivante et quatre fossiles , décrites par M. Nyst, dans ses Fossiles de Belgique; de sorte que ce petit genre , qui comprenait à peine quelques espèces au moment il à été réformé, en possède aujourd’hui trente-quatre, et tout nous porte à croire que leur nombre s'augmentera rapidement lorsque les explorateurs visiteront avec soin les rivages et les fentes des rochers.

M. Bronn admet vingt-huit espèces fossiles dans le genre Érycine; il en a donné le catalogue dans son Index ^alœontologkus. Sur ce nombre, quatre seulement sont douteuses pour lui ; pour noûs, il y en a davantage, puisque nous y retrouvons des espèces que nous avons exclues, M. Recluz et nous, depuis bientôt cinq ans. On comprendra, au reste, qu’il nous est irtipossible d’admettre dans un genre qui a été entouré de tant d’incertitudes des espèces dont nous n’avons pas reconnu les caractères par l’étude des individus en nature.

LES ÉRYCINIDES.

Le bassin de Paris est, de tous les terrains tertiaires, celui qui con- tient le plus d’Érycines. Elles sont particulièrement répandues dans le calcaire grossier ; une seule passe dans les sables moyens marins. Nous en connaissons huit espèces; aucune d’elles ne remonte dans les étages tertiaires moyen ou supérieur.

D'après ce que nous en savons , le terrain tertiaire moyen ne con- tiendrait que deux espèces d’Érycines, une de Dax et de Saucats, mentionnée par M. Graleloup dans son Catalogue soologique; la seconde provient du bassin de Vienne, et nous a été communiquée par M, J. de Hauer.

Les espèces de M. Nyst, à Texceplion d’une seule douteuse,, sont propres au crag d’Anvers. Sous les noms génériques de Kellia et de Monlacuta. M. .Morris indique quatre espèces fossiles du crag d’Angle- terre. Ont-elles de l'analogie avec celles de Belgique? 11 nous a été impossible de le vérifier.

Les terrains tertiaires supérieurs sont peu riches en Érycines. M. Sismonda, dans son Synopsis ^ en indique deux seulement: elles sont douteuses pour nous. il. Philippi en cite trois en Sicile; elles sont comprises dans son genre Bornia^ qui , ainsi que nous l’avons vu, ren- ferme trois Érycines et un Poronia. Ces trois espèces sont encore vivantes dans la Méditerranée.

Ce sont les suivantes :

Erycina Geo/froyi , Payraud. Habite ia Corse, la Sicile, l’Algérie.

Elle est fossile en Sicile.

2“ Erycina corbuloides , Philippi. Vivante dans l’Adriatique, en Sicile, en Corse, en Algérie.

Fossile en Sicile.

3“ Erycina inflata , Philippi. Vivante dans les mers de Sicile.

Fossile à Palerme.

A ces trois espèces, dont les analogues fossiles sont connus, nous pourrions en ajouter une quatrième, que nous trouvons citée par M. S. Wood, et rapportée plus tard par M. Morris, dans son Catalogue des fossiles de V Angleterre,

4" Erycina suborhicularîs , Recluz, ‘{^TCeUiti, Turton). Vivante dans la Manche , sur les côtes de France et d’Angleterre.

Fossile dans le crag de Sutton en Angleterre.

Dfx-HUITÏÈME FAMILLE.

736

Érycine cycladiforme , Erycina cycladiformis ^ Desh. Pl.^ll.Üg. 6. 7. 8. 9:

Testa ovatâ^ inccquiîaterâ ^ teniii , pellucidA, pallide corneâ vel stramineây lœx'igata subïente tenuissimè striata^ laterahcer compressa^ intiis flavidulâ ; umbonibus minimis , obliquis^ approximatis»

Habite la Nouvelle-Zélande.

Nous devons à M. Quoy la connaissance de cette intéressante espèce ; elle a quelque ressemblance avec le Cyclas calyculataj pour !a forme générale et la couleur. De forme ovalaire, elle est obtuse en avant et en arrière ; comprimée latéralement, elle est moins globuleuse que la plu- part des ou des ^fontacuta, et moins aplatie que les Erycina Geoffroyi et autres espèces voisines ; elle sert de liaison entre les deux groupes. Ses crochets sont petits , peu proéminents , rapprochés et obliques. La charnière est très étroite; la fossette du ligament est très oblique et fort étroite; deux très petites dents, antérieures sur la valve gauche, une seule sur la droite; la dent latérale postérieure est égale- ment saillante dans les deux valves: elle est triangulaire. Impressions musculaires petites , l’antérieure surtout ; cétte dernière est subcircu- laire ; la postérieure paraît longue , parce qu’elle se confond avec la fin d’une large impression palléale. Cette coquille, mince, fragile, trans- parente, est d’un jaune pâle, couleur de corne blonde; elle paraît lisse , mais vue à la loupe , elle est couverte de fines slrieg d’accroisse- ment.

Cette petite coquille a \ % millimètres do long et 9 de large.

GENRE SOIXANTIÈME.

I.

PORONIE. Po7'onia, Recluz.

PI. i4 bis. f. i6 à 19,

CARACTERES GENERIQUES. Animal ovale ou obrond , sub-* globuleux 5 enveloppé d’un manteau à bords bilabiés simples ; trois ouvertures palléales inégales : l’une, antérieure, petite, un peu proboscidiforme, pour le passage du pied; la seconde, ven-

LES ÉRYC1XIDES.

traie, est la plus grande; la troisième, postérieure, remplace les siphons. Bouche petite, garnie de- larges lèvres, terminées de chaque côté en une paire de palpes courtes et étroites. Pied comprimé, tranchant, triangulaire, très long, subvermiforme ; branchies très inégales ; les feuillets internes très grands , subquadrangulaires ; les externes étroits et obliques.

Coquille ovale, subglobuleuse, inéquilatérale, transverse, régulière, parfaitement close. Crochets petits et obliques; bord cardinal étroit, échancré au milieu; en avant de l’échancrure, xme ou deux petites dents cardinales sur chaque valve; en arrière, à la limite du ligament , une' dent latérale postérieure grosse , épaisse et intrante. Ligament interne inséré dans une fossette en cuilleron, oblique, naissant du sommet de l’échancrure et se prolongeant le long du bord dorsal supérieur et postérieur, jus- qu’à la dent latérale. Deux impressions musculaires petites , presque égales et subcirculaires. Impression palléale simple.

SYNONYMIE GENERIQUE.. Cardium ^ Maton et Rackett, Montagu. Kellia [ex j}CL^'ie] ^ Turton, Forbes , Macgille- vray, Gray, etc. Borriia [spec.] , Philippi.

Une petite coquille découverte au Sénégal par Adanson reçut du savant naturaliste le nom de Poron. Une description malheureuse- ment trop concise ne permit pas d'abord aux conchyliologues de rap^ porter l’espèce à son véritable genre. Plus lard, Montagu découvrit à son tour, dans les mers britanniques , une autre petite coquille très analogue à celle du Sénégal ; il la plaça dans le genre Cardhm , quoi- qu’elle n’en présentât les caractères. Le Cardixun rxibrxm du natu- raliste anglais fut bientôt introduit dans les catalogues, il resta jusqu’au moment M. Turton, après une nouvelle étude dos coquilles bivalves de la Grande-Bretagne , le retira d’entre les Cardium et l'in- troduisit dans un genre nouveau dédié à Montagu , sous le nom de Mon- tacuta. Adopté, par la plupart des conchyliologues, ce genre fut placé dans la méthode à côté des Ixellia du même auteur, dans le voi- sinage des Madrés. Nous avons vu comment M. Recluz fut conduit à réformer les genres dont nous venons de parler, et à reporter dans les Érycines le plus grand nombre des espères qu’üs renfermaient. Mais T. r. p.xUTiE. 4:*

DIX-HUITIEME FAMILLE.

738

pour iM, Reciuz, ainsi que pour nous, les deux petites coquilles que nous avons meDtionnées d'abord présentant des caractères diiïérents de ceux des Érycinés, il a paru nécessaire à M. Reciuz d'établir pour elles un genre nouveau, auquel il a consacré le nom de Poronia en souvenir du Poron d'Adanson. Dans ce môme genre doit venir se ranger encore une coquille plus grosse que les deux précédentes, et que Lamarck confondit à tort avec ses Amphidesines. peut-être faudra-t-il y ajouter une quatrième espèce pour laquelle U. Canlraine a proposé un genre Cycladina, que nous rapportons provisoirenjent aux Érycinés de Lamarck.

H existe tant d'analogie entre les Pôronies et les Érycinés , que nous avoua doiilé de Putililé du nouvead genre do M. Reciuz; mais pendaiit notre séjour en Algérie, ayant eu l’occasion d’observer vivante une petite espèce de la Méditerranée, nous avons reconnu dans ce petit Mollusque des caractères qui le distinguent nettement des Érycinés et de tous les autres genres connus. En effet, cet anima! est enveloppé d'un manteau mince , transparent , dont les bords sont comme à l'ordi - naire épaissis par un petit muscle orbiculairc. Ce bord est divisé en trois feuillets.: l'un , externe, simple, suit le contour de la coquille; l'autre, moyen, beaucoup plus extensible,, est libre dans toute sa circonfé- rence; le troisième-, enfin, ou l’interne, se soude avec son congénère en laissant trois ouvertures inégales. La première de ces ouvertures est antérieure; elle est petite, un peu proboscidiforme; elle est destinée à donner passage au pied, et elle est susceptible de prendre toutes les formes nécessaires pour s’adapter au mouvement de l'organe locomoteur ; la 'seconde ouverture est ventrale, elle occupe un peu moins de la lon- gueur du bord inférieur de l’animal; la troisième, enfin, est posté- rieure ; elle a la forme d’une petite boutonnière, dont les bords sont légèrement proéminents. A elle seule , elle remplace les deux siphons qui existent chez les Mollusques des familles précédentes.

Voici un Mollusque qui offre le premier et le seul exemple d’un man- teau à trois ouverture.^ disposées ainsi que nous venons de le dire. Si l’ouverluro antérieure était joinio à l’inférieure, le manteau présenterait les caractères de celui des Érycinés; mais celle jonction est constante, et nous l’avons constatée chez tous les individus de la même espèce. Ce qui est intéressant aussi dans la disposition du manteau, c'est l’absence totale des siphons remplacés par urie ouverture unique et sans saillie à l'extérieur. Ce^caraclère, que nous retrouvons dans les Érycinés , et qui se représente à un moindre degré dans les Lucines , est celui qui nous a délérniiné à la séparation définitive de la famille des Éryci-

LES ÉHyciMUES. 7^9

nides, et qiii nous a conduit à réloignenieiit do cette famille d.e ceUe des Mactracées.

Le pied est mjnce, plat, très allongé; il ressemble à celui des C)''clades, et l'animal s’en sert clq la môme manière que les Érycines : il en applique le plat sur les corps solides , s’y attache à l’aide d’une- abondante mOcosUé, et par la contraction de cet organe ij se .dépla^’-e assez rapidement à la surface des corps les plus lisses.

La bouche fort petite; elle est accompagnée de grandes lèyres saillantes qui se terminent de chaque côté en une paire de petites palpes labiales étroites et triangulaires.

Les branchies sont semblables à celles des Érycines: el|cs se com- posent de deux feuillets très inégjaux : l’un interne, très grand et subquadrangulaire; l'autre, externe, fort étroit, parcourt le bord infé- rieur du feuiliet branchial interne. En arrière de la masse abdominale, les branchies se réunissent et se prolongent de manière à embrasser la circonférence de l’ouverture pôslerieure du manteau. .

Les coquilles du genre Poronie sont fort petites : elles sont sobglo- buleuses ,' ovales , iransverses , inéquilaiérales, et ce qui les distingue au premier coup d’œil des Érycines, c’est que chez elles le côté anté- rieur est le plus allongé. La surface extérieure est lisse ou striée par des accroissements; elle est revêtue d'un épiderme mince, corné et caduc. Les valves sont parfailerhent closes; les crochets sont pétits. et dirigés obliquement vers le côté antérieur; les bords des valves sont.' minces, tranchants, niais le test de la coquille est plus épais et plus solide que celui des Érycines. On n’aperçoit en avant aucune trace de lunule : le corselet n’est point non plus séparé. A rinlérieur, ces co- quilles sont d'un violet pourpré, plu§ ou moins intense; elles no sont point nacrées; leur charnière a beaucoup d'analogie avec celle des Érycines; toutefois elle se distingue par beaucoup plus d’épaisseur. Elle présente cependant ce caractère remarquable, d'être moins large au centre qu’à ses extrémités; elle montre au milieu une échancrure triangulaire dont les côtés’ sont inégaux. Sur le- côté antérieur s’élèvent deux petites dents cardinales inégales, parallèles, dont J’interne est la plus petite; elles nespnt pas absolument semblables sur les deux valves, ce qui résulte de leur inégalité môme. Le long du bord postérieur de l'échancrure se relève un cuillpron étroit et oblique; il prend iiais- sanco au sommet piôme de la charnière: il s’élargit progressivement en arrière, en descendant obliquement dans l'intérieur de lacoquillo; sur ce cuilleron s’attache un ligament épais et carlilagiqeux tout a fait interne. Le' bord cardinal s’élargit en arrière, et il porte à son ex'lré-

47*

74o mX-HUITIÈME FAMILLE.

mité une dent latérale postérieure assez épaisse , triangulaire et in- trante.

Les impressions musculaires sont petites: elles occupent les extré- mités de la coquille; elles sont subcirculaires, superficielles et à peu près égales. L'impression palléale est simple; elle se place près du bord; elle y reste constamment parallèle.

II est évident, d’après ce que nous venons d’exposer, que les co- quilles des Poronies se distinguent à peine de celles des Érycines , et le genre no devrait pas être conservé si l’animal n’offrait des caractères qui le distinguent suffisamment.

Les Poronies sont de petites coquilles marines qui vivent sur les rivages, au niveau du mouvement des vagues, remontant même quel- quefois dans les fentes des rochers , beaucoup au-dessus du niveau habituel des eaux. Le nombre des espèces connues est peu considé- rable. M, Recluz en a cité trois dans sa monographie; plusieurs autres peuvent leur être actuellement ajoutées. On les connaît , non seulement des mers de l’Europe , mais encore de celles de l’Amérique et du grand océan Pacifique.

Nous citerons entre autres le Poronia rubra , Carditm rubrum , de Montagu, Kellia rubra, .deXurton, qui vit en abondance dans les mers d’Europe , et que M. Gould a retrouvé siir les côtes du Massa- chussets.

Aucune espèce ne nous est connue à l’état fossile , si ce n’est celle de la Méditerranée qui est mentionnée par M. Philippi , dans les ter- rains tertiaires des environs de Païenne.

Poronie pourprée. Poronia jmfpurascens ^ Recluz.

PI. 14 bis. fig. 16-19.

P, Testa ovato-gîobosâ, solidâ, atrO'purpurascentCy mceqmlaterd,trans-‘ veTsim tenue striata ; latere anlico îongiore, angustiore-i^ subacumi* nato ; postico altiore obtuso ^ umbonibus proemineutibus obliquis } cardine incrassato ^ dente latcraU postico maximo.,

Amphidesma purpurascens. Latnk. An. s. vert, t. 5. p. 493. 14.

Desh. dans Latnk. An. s, Terl. t. 6, p. 129. 14.

Habite Van-Diemen , la Nouvelle-Zélande,

Lamarek la croyait de nos côtes de la Manche, mais elle n'y a jamais vécu.

Petite coquille confondue par Lamarek parmi ses Amphidesmes, mais qui nVn présente pas les caraclère.s. Elle ne porte qu'un seul

i.ES (iALEÜMMlDES.

ligament à la charnièi-e , làntlis que le caractère principal des Amphi- desmes est d'en avoir deux; elle est globuleuse, suborbiculaire, très inéquilatéralc , mais , contrairement à ce qui a lieu dans les Éryciuos, c’est le côté antérieur qui est le plus long. La surface extérieure est irrégulièrement striée par des accroissements; vers les bords, elle est couverte d’un épiderme très mince. Les crochets sont assez grands, peu obliques; on n’aperçoit en avant, ni en arrière, aucune trace de lunule ou de corselet; les bords sont parfaîtemeDt clos; ils sont simples et tranchants, mais ils s’épaississent assez subitement à l'intérieur. La charnière est forte et épaisse; les dents cardinales sont petites, et la dent latérale postérieure est très grosse. Celte coquille est d’un rouge pourpré assez éclatant à l'inlérieur; à Texlérieur, cette couleur est plus foncée, plus terne et un peu rembrunie. Cette coquille est la plus grande du genre Poroma ; elle a 8 à 9 millimètres de diamètre transversal.

DIX-NEUVIÈME FAMILLE,

lies Galéommides. Gaieommiaw, Grat,

La famille des Galéommides ne contenant qu’un seul genre, il n’est pas nécessaire d'en exposer les caractères, puisqu’ils sont empruntés au genre lui-même, et leur sont identiques. Nous n’aurions même pas à nous occuper de I histoire de la famille,, car elle se confond entièrement avec celle du genre. Toutefois nous croyons utile do rappeler rapide- ment les diverses opinions dont elle a été le sujet de la part des natura- listes. Proposée parM. Gray, la famille des Galéommides a été comprise entre celle des Solémyes et celle des Érycines , non loin des Pandores , d’un côté, et des Saxicaves de l’autre. 11 est évident que dans cet arran- gement, M. Gray n’a pas tenu compte des principaux caractères de la coquille et de l’animal , et qu’il a suivi , en la modifiant, l’opinion de la plupart de ses prédécesseurs, qui ont toujours considéré la coquille très bâillante des Galéommes comme plus voisine du grand groupe des Myaires que de toute autre famille des Mollusques acéphalés. Nous-même, en- traîné par ce caractère singulier de la coquille, nous l’avons comparée à celle des Glycimères , et, en traitant ce genre dans la seconde édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck, nous avons proposé de l’intro- duire dans la famille des Glycimérides. Alors l’animal des Galeomma ne

74 DIX-NEUVrEME FAMILLE.

îioûs était point connu ; depuis nous l’avons observé vivant sur îe's côtes de l’Algérie; un naturaliste de mérite, M. îliitre, l’a retrouvé en abon- dance aux environs de Toulon , et il en a publié uile description accorn- pagtiéo de fort bonnes figures, eh 1847, dans Je tome VI! des Annales des sciences naturelles. Mais avant cela, M. Scacchi l’avait découvert dans la fner de Naples , et l'avait décrit sous le nom de PaH/ii.nopea dans. ses Observations zoologiqucs. Quelques années après. M. Philippi eh donnait une description plus détaillée dans les Archives de Wlegman, 1839 , et dans le môme temps M. Delle Chiajé en publiait une figure très mé- diocre dans des planches sans texte qui doivent faire suite à celles de son ïfistoîrè des animaux sans vertèbres de Naples; enfin , pour men- tionner ici tous les travaux relatifs à l'animal du genre Galeomma, nous devons rappeler qu’en 1833, MM. Quoj; et Gaimard publiaient, dans le Voyage de l'Astrolabe , la déscripllon et la figure d’une espèce de Vanikoro, sous le nom de Pmmmobia vitrea. Les connaissances acquises sur le genre Galeomma sont suffisantes pour déterminer rigoureuse- ment la place qu’il doit occuper dans une méthode naturelle.

GENRE SOIXANTE ET UNIÈME.

GAIiÉOMME. Galeomma J Turlon.

^ Pl. II. fig. i3 à 17.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale , transvefsè, tronqué dans toute la longueur de son bord inférieur, enveloppé d'un manteau très large et débordant la coquille dans toute la circonférence. Trois ouvertures palléales : la première très grande, antérieure et inférieure; deux postérieures, inégales, à peine exertiies , et remplaçant les siphons. Bouche petite, garnie de lèvres larges et membraneuses , Terminées par une paire de palpes étroites, oblongùes, subtrigones. Branchies très grandes , presque égales , soudées en arrière de la nmsse abdominale et prolongées dans la cavité du manteau. Pied cylindraeé, subvermiforme, fendu en sou bord inférieur et portant quelques fils de bÿssUs dans un crypte situé à sa base.

LES GALEüMMinES.

Coquille ovale , transverse , équivalve , subéquilatérale, lar- gement bâillante dans toute la longuéur de son bord inférieur. Crochets petits , â peine saillants. Charnière simple , à bord calleux, présentant au-dessous des crochets une petite fossette triangulaire pour un ligament interne. Deux impressions mus- culaires petites, inégales : Tantérieure subcircuîaire , la posté- rieure ovalaire; l’impression palléale simple.

sTOONYMiE GÉNÉRIQUE . PsammoMa^ Lamarck , Quoy et Gaimard. Hiatella , Costa, Delle Chiaje. Parthenojoe , Scacchi.

OBSERVATIONS. Lamarck a connu une des espèces du genre Galeomrna, mais il l’a confondue parmi celles de son genre Psammobie. M.Turton, en 1820, proposa le genre dans le 2* volume du Zoi)hgicat Journal; bientôt après M . Flemming f adopta dans son Histoire des animaux de la Grande-Bretagne , le renferma dans la famille des Myes. Comme nous le disions tout à l'heure, noos avons proposé de rapprocher ce genre des Glycimères , supposant que le bâillement de la coquille était destiné à donner passage à de gros siphons réunis.

Les observations zoologiques de M. Scacchi sont de 1833; le savant italien ne connaissait pas encore, à ce qu'il paraît-, â celte époque, le travail de Turton. En découvrant le Galeomma dans la mer de Naples , il crut avoir dans la main un genre nouveau ; il le décrivit sous le nom de Parlhenope. Le savant observateur rechercha , d'après les caractères de l’animal , la place qu’il d,oil occuper, et il conclut à rétablissement d’une famille nouvelle intermédiaire entre les Conebifères , Crassipèdes et Ténuipèdos de Lamarck; elle se trouverait, par conséquent, inter- calée entre les Myaircs et les Mactracées.

M. Philippi observa également l'animal du Galeomma dans la mer de Naples; ne trouvant pas qu'il fût suffisamment connu par la courte description de M. Scacchi, il publia, à son sujet, des renseignements plus étendus accompagnés d’une bonne figure dans les Archives de Wiegman. Ces documents , très importants dans l’bistoire du genre , furent, presque immédiatement traduits dans les Anmles des sciences naturelles de Londres.

Lorsqu'on 1835, à l’occasion du Psammobia auranlia de Lamarck , nous introduisîmes le genre Galeomma dans les additions à la seconde édition de l’ouvrage du célèbre naturaliste, nous n’avons pas osé rap

DIX-NEUVIEME EAMILLE.

744

porter à ce genre la Psammobie vitrée de M. Qaoy.; nous ne connais- sions pas alors les observations de M. Scacchi : et quand nous les aurions connues , il nous aurait été difficile , en l'absence de figures , de les rapporter au genre deTurton; nous avons donc pu nous livrer aux conjectures que les caractères delà coquille nous ont suggérées, et c*est ainsi que nous avons été conduit à proposer le rapprochement des Galéommes et des Glycimères, rapprochement que n’onl point justifié les observalions subséquentes.

Sous le nom do Psammohia vitrea , M. Quoy a décrit et figuré dans \q Voyage de l’Astrolabe, un petit Mollusque qui, sans aucun doute , doit appartenir au genre Galeomma. La description du savant naturaliste laisse quelques doutes à ce sujet, mais la figure représentant l’animal ne permet pas de le placer ailleurs. Malheureusement la description et la figure sont insuffisantes sous plusieurs rapports, car elles laissent ignorer, d’un côté, si la coquille est ouverte dans son bord inférieur, et d'un autre si l'animal a exactement tous les caractères intérieurs de celui des mers de l’Europe. Néanmoins le peu que M. Quoy nous a appris sur cet intéressant animal était plus que suffisant pour le faire sortir des Psammobies , et faire abandonner pour toujours l'opi- nion de Lamarck.

M. Swainson, dans son petit Traité de' malacologie , n'adopta aucune des opinions publiées avant lui; il proposa d’introduire le genre qui nous occupe dans la famille des Saxicaves. Il existe, en effet, dans les Saxicaves des espèces dont la coquille est très bâillante; mais ces co- quilles sont couvertes d'un épiderme épais, tandis que les Galeomma en sont à peu près dépourvus. Iæs Saxicaves sont irrégulières , les Galeomma ont une coquille beaucoup p!us_ symétrique. Aussi M. Reeve préféra revenir à l’opinion de Lamarck , et il rangea le genre Galéomme dans la famille des Nymphacées. Cependant si l’on compare les carac- tères des coquilles de cette famille à ceux du nouveau genre , on y remarque des différences très profondes. Dans les Nymphacées , le ligament est extérieur; la charnière est articulée ; les impressions musculaires sont en proportion plus grandes, et l’impression palléale offre toujours une profonde sinuosité postérieure. Ainsi les caractères distinctifs des Nymphacées ne se retrouvent point du tout dans le genre Galeomma. M. Reeve n’a donc pas lui-même trouvé la place que ce genre doit occuper dans l’ordre naturel.

Dans son Manuel do conchyliologie, M. Sowerby le jeune eût encore, au sujet du Galeomma , une opinion différente de celle que nous venons de rapporter ; il rapproche ce genre des Pholades , et le comprend dans

LES GÂLEOMMfDES.

745

la famille des Pholadaires. M. Philippi n’était guère mieux inspiré , lorsque, dans le second volume des Mollusques de la Sicile , il proposa de rapprocher les Galéommes des Corbules , et de les introduire dans la famille des Corbulées. Enfin, nous rappellerons encore l’opinion de M. Gray qui, en établissant la famille des Galéommides , la met dans l’ordre général entre celle des Solémyes et celle des Érycines. Nous ne comprenons pas facilement les motifs d’après lesquels M. Gray s’est gui^é dans cette nouvelle classification. M. Gray connaissait sans doute, non seulement le travail de M. Miltre, mais il ne pouvait ignorer les recherches de M. Scacchi et celles de M. Philippi; en 1847, l’animal décrit et figuré par M. Quoy trouvait alors sa place ; par conséquent , savant anglais se trouvait en étal de juger de la valeur des caractères zoologiques du genre et d'apprécier ses rapports d’après son organisa- tion. En présence des faits que la science possède, nous ne pouvons nous expliquer le rapprochement proposé par le savant anglais des Solémyes et des Galeomma. Co dernier genres plus de rapport avec ceux de la famille des Érycines ; néanmoins il s’en éloigne, et il mérite de former un embranchement particulier sur la lige principale de la classification. Nous regrettons sincèrement qu'un savant aussi éminent que M. Gray se soit contenté de l’exposition toute sèche d’une mé- thode , sans déduire les raisons , probablement très judicieuses , à l’aide desquelles il a formé son opinion au sujet d'un grand nombre de genres et de familles. Lorsque Ton propose des changements considérables dans une méthode, on court le risque de n’être pas compris, si l’on ne prend pas le soin d’exposer les principaux faits sur lesquels ces chan- gements reposent.

Nous rappellerons, en passant, qu’un savant italien, M. Costa, trompé sur les caractères du genre Hyatetle de Lamarck, crut le re- trouver dans l’espèce de .Galeomma de la Méditerranée. Ce naturaliste paraît avoir ignoré le travail de M. Turton , publié en 18 25; car, s’il l’eût connu , il aurait évité cette méprise.

L’animal des Galeomma est un des plus singuliers Mollusques que nous connaissions ; il est ovale-transverse; il est enveloppé d’un très grand manteau , mais cet organe peut se diviser en plusieurs portions distinctes. L’une revêt l'intérieur de la coquille; elle est d’un blanc subnacré ; elle se termine sur le bord du test par un petit bourrelet peu saillant garni d’un trè.s grand nombre de fines papilles on plutôt de dentelures comparables à celles qui terminent le bord de la coquille elle-même. L’autre portion du manteau continue la première; elle forme une large zone plissée, toujours saillante en dehors de la coquille, Vers

DlX-iNKÜVlEME lAMlLLK.

le bord inférieur et interne de cette zone , se montre une série d’organes oculiformes, que M. Mitlre compare judicieusement à ceux du nianleau des Peignes. Enfin, le manteau se continue encore en une portion mem- braneuse qui , semblable à un voile, ésl déployée au-devant de l'ouver- ture inférieure, et sert à clore fa grande cavité palléaîo. Dans l’espèce figurée par M. Quoy, ces diverses parties du manteau no sont pas aussi distinctes, parce que toute la surface de cet organe qui est en dehors de la coquille est couverte d'un grand nombre do petites papilles irré- gulièrement disséminées. Les deux lobes du manteau sont réunis en arrière, et ils sont percés de deux ouvertures peu saillantes', dont l’une, qui est aussi Pa plus grande, remplace le siphon branchial ; l’autre, un peu plus proéminente , lient lieu du siphon-anal. Nous devons faire observer que la commissure de la première ouverture n'a point de solidité : elle s'ouvre spontanément a la mort de l'animal , et celte ouverture se con- fond alors avec celle qui donne passage au pied. Nous devons même ajouter que dans plusieurs des individus que nous avons observés vivants,, l’ouverture branchiale n'existait pas, l’animal la formant avec son manteau, sans que les lobes en soient réunis.

Le pied des Galéommes ressemble beaucoup à celui des Congéries, et surtout à celui des Érycines : il est allongé, ver’miculaire , subcylin- dracé; sou bord inférieur est fendu peu profondément, ei cette fente aboutit à un crypte peu profond , dans lequel s’attache un petit nombre de fils soyeux et très fins d’un byssus peu volumineux. En arrière , ce pied se prolonge quelquefois en une sorte talon compa- rable à celui des Érycines. L'organe locomoteur que nous venons de décrire est attaché au sommet d'une masse abdominale assez épaisse , dans laquelle l’ovaire prend une place considérable.

La boucheest petite, trarisversc ; elle est cachée par de larges lèvres fort courtes qui se changent très vite en une paire de palpes labiales inégales, ovales, subtrigones.

Les branchies sont très grandes; elles ont de l’analogie avec celles deè Gastrocliènes : elles sont coftiposées de chaque côté de deux feuillets presque égaux, minces, très finement striés. Les feuillets internes sont un peu plus longs et un peu plus larges que les externes; ils se rétré- cissent subilemenl en avant, et se prolongent en une pointe aiguë qui s’interpose entre les palpes labiales. Les feuillets externes naissent au- dessous des palpes labiales, ils sont un peu plus étroits que leurs congé- nères. Les quatre feuillets branchiaux se réunissent en arrière de la masse abdominale et se prolongent dans la cavité palléale beaucoup plus que celles des Vénus, des Lucines et des Érycines. A celte extrémité pos-

LEb GALKOMMlüES.

74/

térieure, ces organes restent plus larges qu’à l’ordinaire, ce qui augmente considérablement la surface au moyen de laquelle ils agissent sur le liquide ambiant.

Les muscles adducteurs des valves sont d’un médiocre volume ;

l’antérieur surtout est fort petit ; le postérieur est plus gros : tous deux

sont cylindracés; le postérieur est un peu plus aplati , ce qui lui donne

une forme un peu plus ovalaire. Le pied a deux muscles qui lui sont

propres: l'un, antérieur, extrêmement grêle, produit en avant, au-

1

dessous du bord cardinal, deux très petites impressions. Le muscle postérieur est beaucoup plus gros; il est bifurqué à son extrémité, et l’on trouve en dessous du bord cardma! deux impressions musculaires qu’il a laissées sur le lest.

La coquille estoblongue, trans^^erse ; elle est mince , demi-trans- parente et fragile. Cette coquille est équivalve , équilatérale ; et ce qui la rend !e plus remarquable, c’est qu’elle est ouverte dans toute la longueur de son bord inférieur, comme si elle avait été coupée artifi- ciellement. Que l’on prenne, en effet, une coquille close, du genre Vénus, par exemple , et qu’on l’use par son bord inférieur du tiers de sa hauteur environ , on obtiendra une ouverture arlicificielle comparable à celle des Galéommes. La surface extérieure est dépourvue d'épiderme, si ce n'est le long du bord dorsal il passe d'une valve à l'autre, simulant ainsi un double ligament : les bords de Ta coquille sont clos en avant et en arrière; ces bords sont minces, simples, dans quelques espèces, très finement dentelés dans d'autres. Ce sont les espèces fine- ment striées à l’extérieur qui portent des dentelures sur les bords. La surface interne est blanche, non nacrée : elle présente deux impressions musculaires assez éloignées des bords et comprises toutes deux dans la région dorsale. La forme et la grandeur de ces impressions est en rap- port avec celle des muscles qui les produisent. Une impression palléale, peu apparente; toujours simple, s'étend d’une impression musculaire à l’autre. La charnière est peu épaisse, elle est simple; elle présente un simple bourrelet décurrent dans lequel se découpent quelquefois des iné- galités comparables à des dents cardinales ; mais ces inégalités ne sont point articulées : au-dessous des crochets, est creusée une petite fossette triangulaire, peu profonde, dans laquelle s'attache un petit ligament interne, dont le bord supérieur s aperçoit au dehors entre les crochets des valves, lorsqu'elles sont réunies.

L’animal des Gakomma a une manière de vivre qui s’éloigne de celle de la plupart des Mollusques acéphalés. Les individus que nous avons trouvés étaient attachés aux liges des fucus marins auxquels ils se sus-

74^ DIX-NEUVIÈME FAMILLE.

pensent au moyen de leur byssus; mais ces animaux, ainsi que ceux des Peignes , peuvent rompre spontanément les fils de leur byssus , et alors ils so mettent à marcher à peu près de la même manière que les Gastéropodes. Lorsqu’ils marchent , les valves de la coquille sont large- ment ouvertes et étalées comme un bouclier sur le dos de l’animal. La preqiière zone du manteau est elle-même étalée en dehors du pourtour de la coquille, tandis que le voile palléal est reployé en dessous et ne laisse plus en avant qu’une ouverture médiocre par laquelle passe l'or- gane locomoteur. Cet organe se porte en avant ; il s'aplatit en arrière, et se change ainsi en une sorte de disque comparable à celui qui existe au-dessous du pied des Mollusques gastéropodes. C'est à l’aide de cette disposition que le Galeomma peut ramper avec facilité sur les tiges cylindriques des plantes marines et sur d’autres corps solides , môme des plus lisses , tels que le verre et la porcelaine. Lorsque l’animal trouve dans sa marche un endroit favorable il veut s’arrêter, il s’y attache au moyen de deux ou trois fils de byssus; mais s’il veut se déplacer, il rompt avec la plus grande facilité les fils par lesquels il était suspendu. Par ses mœurs, le Galeomma s’éloigne considérablement de presque tous les Mollusques des familles précédentes. If ne s'enfonce point dans la vase ou dans le sable; c’est un animal qui marche et se déplace comme les Érycines , mais il ne nage pas en voltigeant comme les Limes et les Peignes ; il aime les eaux peu profondes, et il s’expose volontier^ux rayons du soleil. Ces animaux s’épanouissent, pour ainsi dire, sur les plantes marines exposées à la plus vive lumière. Il est à remarquer que presque tous les autres Mollusques se cachent pendant le jour et choisissent le crépuscule ou la nuit pour sortir de leur retraite.

Un fait que nous ne devons pas passer sous silence a été signalé par M. Mittre. En ouvrant les ovaires, ce naturaliste les a trouvés rem- plis d’œufs très volumineux, dans lesquels l’embryon était déjà très développé, muni d’un rudiment testacé, et par conséquent prêt à éclore. Il est donc certain que chez ces animaux, les œufs, au sortir de la mère, ne subissent pas l'incubation branchiale, et probablement éclosent très peu de temps après avoir été pondus.

Nous venons d'exposer les faits qui sont indispensables pour juger la question relative à la classification définitive du genre Galeomma dans une méthode naturelle. L'animal constitue à lui seul un type particu- lier. En effet, la structure de son manteau, la forme de son pied, la grandeur remarquable des organes branchiaux , et enfin la disposition des ouvertures palléales ne se montrent dans aucune autre famille des Mollusques acéphalés. Le Galeomma présente donc une combinaison

LES GALÉOMMIDÉS. 749

spéciale d’organisalion , et pour cela seul il devait constituer une famille distincte.

Maintenant nous devons nous demander quelle place la famille et le genre doivent occuper. L’animal n’a point de siphons saillants réunis ou disjoints; ce sont de simples perforations , encore Tune d’elles paraît temporaire et formée à la volonté de l’animal. Par conséquent , d'après ce seul caractère , le genre Galeomma ne peut rester dans la famille des Pholadaires, comme M.Sowerby l’a proposé, ni dans celle des Glycimérides , comme nous l’avons cru ; pas davantage dans celle des Myes, comme M. Flemming l’a proposé. Il ne peut non plus réster dans la famille des Saxicaves, selon l'opinion de M. Swainson ; car, dans toutes les familles que nous venons de citer, les Mollusques portent en arrière deux siphons plus ou moins gros , toujours saillants en dehors de la coquille et toujours réunis, de la basé au sommet, en une masse cylindracée. Le genre Galeomvia ne peut non plus rester dans la famille des Corbules, ainsi que le propose M. Philippi, parce que l’animal de ce genre est terminé en arrière par deux siphons, fort courts à la vérité, mais qui, malgré leur brièveté, conservent tous les caractères de ceux des Myes. Enfin, pour terminer cet examen rapide, le genre Galeomma doit être repoussé de la famille des Nyinphacées , contre le sentiment de MM. Reeve et Hanley, parce que dans les Mollusques de cette famille le manteau est terminé en arrière par deux très longs si- phons très grêles et désunis dans toute leur longueur. Si nous comparons actuellement l'animal du Galeomma à ceux des Conques fluviatiles de Lamarck, nous reconnaîtrons qu’il s’en éloigne par* les mômes raisons qu’il se détache de toutés les autres familles l’on a essayé de le placer. Il résulte ce que nous venons de dire , qu’aucune des opinions publiées jusqu’à ce jour, au sujet de la classification du genre Galeomma, ne peut être acceptée. 11 faut donc rechercher au genre des analogies dans d’autres familles , et particulièrement dans celles chez lesquelles les siphons ont une tendance à disparaître , comme dans la famille des Érycines , dans celle des Lucines, et môme dans celle des Cardiacées.

L’absence ou la brièveté des siphons entraîne presque toujours la disparition du muscle spécial de ces organes , et par conséquent aussi l’absence de la sinuosité postérieure de l'impression palléale. Il faut donc encore placer le genre Galeomma parmi ceux des Mollusques qui offrent aussi ces mômes dispositions, c’est encore vers les familles des Érycines et des Lucines qu’il faut remonter pour rencontrer, sous ce rapport , une organisation semblable.

Si nous consiclérôns maintennnt l'organe locomoteur, nous n’y Iroü-

7^0 DIX-NECVIKME FAMILLE.

/ ^ .

vons a.ucune analogie avec celui des premières familles de la classe à laquelle le genre appartient ; c'est dans le genre Congeria que nous trouvons le premier exemple d'un pied semblable 4 celui des GaleQinma et fonctionnant à peu près de la même manière. Nous trouvons dans les Pisidium , et surtout dans les Eryçines, un pied analogue à celui des, Galéorames. Enfin, le pied des Lucines et des Cardium, mais des Lucinps surtout, a une grande analogie, avec celui du genre qiii nous occupe. Quant à la bouche, elle offre tant de ressemblance dans tous les Mollusques de la classe, que nous devrions à peine en parler. Cepen- dant nous remarquerons la petitesse relative, des palpes labialçs exacte- ment comme dans les Érycines , et nous verrons dans les Luciqes ces organes d,irainuer encore d’importance.

Nous avons maintenant a parler des orgapes branchiaux. Pour ceux-ci, nous devons le dire, ils sont dans le Galeomma très différents de ce que nous les avons vus chez les Érycines , et plus différents encore de ceux des Lucines. Par leur longueur, ces organes se rapprochent de ceux des Myes ou des Lulraires. Ainsi voilà le seul caractère qui entraînerait le genre vers ces familles; mais, selon nous, il est insuffisant, puisqu'il est seul contre les autres. Or, dans la formation des familles naturelles et dans l'appréciation de leurs rapports, il ne faut pas seulement compter les caractères, il faut aussi en peser la.valeur, et pour ce qui a rapport au Galeomma^ le nombre et l'importance l'emportent de beaucoup pour entraîner le genre et la famille dans le voisinage des Érycines et des Lucines, Si M. Mitlre avait pesé, ainsi que nous venons de le faire, tous les caractères du genre qu'il a étudié , il n’aurait pas proposé de le rapprocher des Bénitiers , et de le comprendre dans la famille des Tri- dacnées. Nous verrons bientôt en quoi dilfèreut très essonliellement les genres que M. Mittre propose de rapprocher.

jLes caractères de la coquille confirment, en partie du moins, les rapports que l’animal détermine. Quoique très bâillante, elle ne l'est pas de la môme manière que chez ceux des Mollusques qui sont pourvus de gros siphons. Le Gaslrochène seul aurait de l’analogie par le bâille- ment antérieur et inférieur de ses valves ; mais les Gastrochènes , les P^olades , .les Glycimènes, les Saxicaves, les Corbules, les Myes, ont le manteau fermé en avant et percé d'une très petite ouverture anté- rieure pour le passage du pied, tandis que le Gu/eomma a cet organe ouvert dans toute la longueur du bord inférieur , exactement comme dans les Érycines, les Lucines, etc.

Quant à la charnière, nous la voyons déjà réduite à une grande simplicité chez les Érycines. Nous lui verrons subir des lransformations

IVS GALDOMMlDgS. 70 1

bien plus considérables dans le seul genre Lucine. Far conséquent, la simplicité à laquelle elle est réduite, la position du ligament, ne sont pas des obstacles à rapprocher les Galéotnmes des Érycines et des Lucines. Nous pensons dotic avoir déterminé d'une manière rigou- reuse les rapports naturels du petit genre si intéressant que nous venons de décrire. I! est à présumer q^ue ^toutes les vacillations cesse- ront à’son sujet . et que les classificateurs adopteront l'opinion que nous venons d'appuyer par une discussion approfondie.

Les Galeomma sont de petits Mollusques qui habitent Içs côtes à une faible profondeur sous l’eau. On les trouve tantôt cachés sous les pierres, tantôt entre les racines des fucus, et plus souvent attachés aux plantes marines exposées à la vive lumière du soleil. Nous ne connaissons jus- (|u’ici que trois espèces : l'une de l'Océan d'Europe, et particulière- ment delà Méditerranée; l'autre de l'tle de Franco, et la troisième enfin de l'IIc Vanikoro, elle a été découverte par M. Quoy. Aucune espèce fôssllo n’est connue, même dans nos terrains quaternaires les plus récents. Cependant M. Philippi, dans le second volume des Mollusques lie la Sicile , rapproche des Galéomma une petite valve fossile qu’il a trouvée dans les calcaires de Palerme. Mais cette valve, ne présentant pas exactement les- caractères du genre , ne peut y rester que tempo- rairement.

Gîiléomme de Turton. Galeomma Turtoni , Sow.

PL 11. fig. 13 à 17.

C, Testa nîbâ ^ ovato^transversa, longitudinnliter (enuè strîùtâ ; st/Hs âichotomiSf sitbartiatïatis^ striis Cransversnlihus tewiissimè sermlatis ; cardinc incrassato ; apicibtis minimis nantis; impressione paUii simplid^ rugosâ,

Sow. Zool. jourrt. l. 2. p. 56r. pl, i3. f. i.-

Fleming, Frit, an, p. 466» ^

Parthenopea/ormosa, Sçacch», Üsser. zool, p, 8 et p.- ip.

Id. Scacrhi, Cal, conrh. regn. Neap. p. 4.

HyutcUa striata. Ddle Chiaje-, An. 5.’ vert, de la mer de Napl. pl. siippl. 80. f. 9, 10,

Galeomma Ttirtoni Desb. dans Lamk. An. s. vert, t, 6. p. iSo.

Sow. Généra of shells Galeomma, f. r. 2. 3.

Philippi, dans Wiegm. Ari h. t. 5. p. X17.

IJ. Ann. liât, hisl, ofLond. i»®22. p. 92.

Jleeve, Conch, syst. t. r. p. 78. p'. 54., f. i. 2. 3.

702

VINGTIÈME FAMILLE.

Sowerby jeune, Couch. man. p. i5i, f. 58,

Hanley, Descr. cat. t. i. p. 59.

Mittre, Ann. Jes sc. nat. 1847. 1, 7, p. 169. pî, 5. f, i, 8.

Desh. Explor. sc. de l’Algérie, pl. 81. f. 11. iS. pl. 8a. f. i. 7.

Habite l'Océan d’Europe, toute la Méditerranée.

Petite coquille ovale, transverse, subéquilalérale, à crochets très petits, opposés; le bord dorsal et le bord ventral sont- parallèles ; les extrémités sont arrondies ; le bord ventral est tronqué. De ce côté, la coquille est largement ouverte; l’ouverture est elliptique, pointue à ses extrémités, et cette forme, comparée par M. Turton à celle de l'œil d'une belette , a valu au genre le nom que cet auteur lui a imposé. La surface de 'cette coquille est revêtue d’un épiderme très mince et d’un blanc jaunâtre ; il passe d’upe valve à l'autre en avant et en arrière des crochets, et simule un double ligament qui, en réalité, n'existe pas. Au-dessous de cet épiderme , la coquille est d’un blanc laiteux ; elle est ornée d'un grand nombre de stries longitudinales, rendues granuleuses par le passage de stries transverses moins apparentes. Les Stries. longitudinales sont souvent divisées , ce qui leur imprime un cachet particulier. A l'intérieur, les valves sont lisses ; l’impression palléale est large et irrégulièrement plissée. La charnière est étroite ; le bord cardinal offre quelques éminences irrégulières ; et dans le milieu une petite fossette triangulaire dans laquelle s’attache un petit liga- ment intérieur.

Cette petite coquille a 1 ^ ou 1 4 millimètres de diamètre transverse ; elle en a 7 à 8 de large. »

VINGTIÈME FAMILLE.

«

lâC» liucines» ÆiUei»teœ, Desh.

CARACTÈRES DE LA FAMILLE. Animal ovale ouobrond, plus ou moins épais , ayant les lobes du manteau courts et désunis le long du bord inférieur, terminés en arrière soit par de sim- ples perforations, soit par un seul siphon, soit par deux siphons courts et en partie conjoints. Palpes labiales petites , q^uelque- fûis rudimentaires. Pied allongé., étroit, quelquefois vernii-

LES LUCINES.

753

forme ; une seule paire de branchies de chaque côté du corps, grandes, subquadrangulaires, épaisses ; quelqiiefois deux bran- chies inégales ; muscles adducteurs très grands, l'antérieure surtout étroits et descendant jusque dans la région inférieure.

Coquille ovale, transverse ou suborbiculaire , épidermée; parfaitement close, à bords simples ou crénelés. Charnière va- riable, ayant des dents cardiçales et des dents latérales, quelquefois munie de dents cardinales seulement et assez sou- vent elle est simple et sans dents; ligament extérieur paraissant parfois intérieur, étant recouvert par un rebord saillant du corselet. Impressions musculaires grandes et inégales; la pos- térieure ovale ou obronde , l’antérieure quelquefois ovalaire et plus souvent allongée, étroite et oblique; impression palléale simple.

PREMIÈRE SECTION. Genres Lucina, Corhis.

DEUXIÈME SECTION. Genres Ünguîina, Cyrenella,

La famille des Lucines a été fondée par nous dès 1 830 dans VEncy- clopédie méthodique ; nous y rassemblions alors les trois genres Corbis, Lucina et Ungulina, Ces genres étaient distribués par Lamarck dans sa famille des Nymphacées. M. de Blainville, dans son Traité de mala- cologie, rapportait ces trois genres à la première section d’une famille beaucoup trop étendue, celle des Conchacées. Il est évident que dans l’une et l’autre méthode, les genres dont il s’agit ^e se trouvaient pas à leur place. Ce que nous avons dit jusqu'ici prouve invinciblement que les Lucines et quelques genres voisins constituent un groupe tout par- ticulier dans la classe des Mollusques acéphalés Dimyaires. L’examen seul des coquilles, en montrant les profondes différences qui les sépa- rent des divers groupes qui précèdent , devaient sufûre pour en faire un groupe distinct, en attendant que la connaissance des animaux vînt nous apprendre la place définitive que la famille doit occuper dans la méthode naturelle.

Depuis qu’elle a été proposée , la famille des Lucines a subi quelques modifications.. M. d'Orbigny changea son nom pour celui de Lucinides, T. I. a" PAUTIE.

VINGTIKME FAMILLE.

{■

et il l'a réduit aux deux genres Lucma et Corbis. Quelques années auparavant, Al. Anton, dans son lis fiai de classi/icalion des coquiiles , avait proposé le nom de Lucinacœa; il admettait quatre genres au lieu de trois , supprimant les Ongulines , et les remplaçant par les Amphi- desmeset les Eryci.nes. Pour ce dernier genre , M. Anton avait touché juste, puisqu’en eCFet, ainsi que nous venons de le voir, il se rapproche considérablement des Lucines , mais il n’en est pas de môme des Amphi- desmes. Ce genre , comme nous l’avons vu précédemment, se rapproche plutôt des Trigonelles et des Tellines. Dans son bel ouvrage sur les CoquiUes tertiaires de la Belgique, M. Nysl a adopté la fiimille des Lucines, à laquelle il propose d’ajouter les trois genres Axinus, Diplo- donta et Hippagits. Noos ne connaissons ce dernier genre que par ce qu’en a dit M. Lea dans ses Contributions pour la géologie. Quant aux deux autres, pour nous ils rentrent dans les Lucines, ils ne portent en eux- mêmes aucun caractère assez considérable pour conserver le litre genre.

Dans la méthode qu’il a publiée dans le 15* volume des Procès- verbaux de la Société zoologique de Londres ^ M. Gray a proposé des changements très profonds, aussi bien dans la constitution môme de la famille , que dans ses rapports avec les familles avoisinantes. Le travail de M. Gray est trop important pour être négligé, et nous croyons éclairer la science en le discutant avec soin, à mesure que l’occasion s'en présente. M. Gray admet huit genres dans la famille des Lucinides, et cette famille elle-même est la huitième de l’ordre des Goniopodes ; elle se trouve intercalée entre la famille des Glossidées et celle des ünionidées. Pour so faire mieux l'idée des rapports de cette famille im- portante des Lucines, nous devons ajouter que, d’un côté, celle des Glossidées est précédée des Pholadomyes . des Astartés et des Crassa- teliidôes; et , d’un autre côté . la famille des ünionidées est suivie de celle des Muteladées , des Mycétopodes, desTrigonies et des Arches. A considérer cet ensemble de familles, on se demande par quels liens elles sont réunies: les Glossus de Poli ou Isocardes de Lamarck, terminés en arrière par deux siphons courts , ne paraissent guère avoir de rap - ports avec les Crassatelles qui , au dire de M. d'Orbigny, n'onl plus du tout de siphons, U en est de même des Astartés; mais quant aux Pho- ladomyes, le large bâillement postérieur de leurs valves, la large sinuo- sité postérieure du manteau , annonce chez ccs animaux des j'iphons au moins aussi considérables que ceux des Lulraires ou des Myes. Si chez eux le pied est aplati, comme chez les Crassatelles et les Astartés , il a cette même forme dans les Lulraires, et nous ne voyons pas pour quel

LES LÜCINES.

motif ce genre, constituant une famille particulière pour M. Gray, se trouve ainsi transporté à côté des Cardites et des Aslartés.

Huit genres, disions-nous , sont réunis par M. Gray dans sa famille des Lucinidées : le premier, est celui xJes Lucines de Bruguière, mais beaucoup plus restreint que l’auteur du genre lüi-même ne l’a voulu ; le second est le genre Mysiaô& Leach. H correspond au genre Diplodontede Bronn, adopté plus tard par M. Philippi. L’animai de ce genre ne paraît pas différent de celui des Lucines. Quant à la coquille , elle ne se dis- tingue de ce dernier genre que par l’impression musculaire antérieure, plus courte et plus ovalaire, et bientôt nous aurons à apprécier la valeur de ce caractère. Le troisième genre est celui que nous avons nommé Ctji'enella. Il mérite d’étre conservé, et il doit faire partie de la famille des Lucines. Le quatrième est le genre TIvjasira de Leach ; il corres- pond aux Cryptodontes de Turlon, Ptychina de Philippi et ilxinws de Sowerby. Un examen attentif des coquilles rangées sous cette dénomi- nation générique, nous donnera bientôt la preuve de l’inutilité de ce genre, qui devra rentrer dans celui des Lucines. Le cinquième genre a été nommé Fimbria par Megerle et Corbis par Cuvier. Ce dernier nom a généralement prévalu ; et ce genre , caractérisé par l’animal et sa co- quille, doit rester dans le voisinage des Lucines. Le sixième genre delà famille de Lucinidées a été nommé Loripes par Poli. 1! ne diffère en rien de celui des Lucines : il en porte tous les caractères , aussi bien dans l’animal que dans la coquille. II est donc au nombre de ceux que Ton peut supprimer sans inconvénient. Le septième genre est celui que M. Philippi a nommé Scacchia en 1 844. II est douteux pour M. Gray, il l’est également pour nous ; car nous n'avons jamais eu l’occasion d’en observer la coquille, et les caractères tels que les donne M. Philippi, nous paraissent avoir besoin d'une vérification attentive. M. Gray em- prunte son huitième et dernier genre de la famille des Lucinidées à l’ouvrage de Scopoli, qui le proposa sous le nom de Cqdakia. Ce dernier genre doit encore rentrer dans celui des Lucines, ainsi que nous l’avons proposé le premier dans l'Encyclopédie méthodique. La coquille qui en constitue le type était rapportée par Linné à son genre Vénus et par Lamarck au genre Cythérée , sous le nom de Cytherea tigerina. Nous avons fait voir que dans cette coquille se retrouvent tous les caractères des Lucines.

En résumant ce que nous venons de dire au sujet do la famille des Lucinidées de M. Gray, nous voyons que les genres Mysia, Thyasira , Loripes et Codakia , peuvent être supprimés en rentrant dans le genre Lucine. Le genre Scacchia reste douteux: il est probablement voisin

48*

VINGTIÈME FAMILLE.

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des Erycines. Ces suppressions admises, la famille reste donc/comme la nôtre composée des quatre genres Litcina, CyreneUa^Unguîina et Corbis; car le genre Onguline de Lamarck, que nous avions fait rentrer autrefois parmi les Lucines, mérite d’en êlre séparé, ainsi que le prouvent les curieuses observations de M. Duvernoy, et nous ne voyons pas pour- quoi M. Gray l’a annexé au groupe des Loripes.

Les animaux des quatre genres que nous conservons dans la famille des Lucines sont actuellement connus. Tous sont remarquables par un manteau fendu dans toute la longueur du bord inférieur, cet organe se terminant en arrière, tantôt par deux ouvertures sessiles, quelquefois par un seul siphon accompagné d’une fente, et, enfin, par deux siphons courts plus ou moins réunis. Chez ces animaux , le pied a une tendance à s’allonger et à s’amincir; il est môme des espèces chez lesquelles il est devenu cylindrique et a pris la forme d’une cordelette. La bouche est généralement petite, accompagnée de palpes labiales qui ont elles - mêmes une tendance à diminuer de grandeur, à ce point que dans cer- taines Lucines elles sont réduites à l’état rudimentaire. Les branchies offrent aussi des caractères communs d’une très grande importance. Ces organes apparaissent sous la forme d’un seul feuillet branchial de chaque côté de l’animal , mais ce feuillet unique est gros , épais , très large, et l’on conçoit que dans la fonction de la respiration il puisse remplacer le double feuillet que possèdent les autres Mollusques. Nous réservons quelques détails à ce sujet au moment nous parlerons du mémoire de M, Valenciennes. Dans les genres Cyrénelle et Onguliné, les quatre feuillets branchiaux existent ; aussi il sera nécessaire de mo- difier les rapports que nous proposions autrefois pour ces genres.

Les coquilles ont des caractères extrêmement divers , quoique dans l’ensemble elles conservent un cachet qui leur est propre : elles sont ovales-lransverses ou orbiculaires ; peur la plupart elles sont épaisses , solides , subglobulouses ou en forme de lentilles ; leur surface est cou- verte d’un épiderme plus ou moins apparent. Quelquefois cette substance manque entièrement. Leur surface extérieure est couverte le plus sou- vent de stries concentriques ou d’un réseau formé par l’entrecroisement de stries ou de lamelles longitudinales et transverses : la charnière est très variable dans ses caractères , tantôt elle est articulée très forte- ment au moyen de dents cardinales et de dents latérales, tantôt elle est simple et sans dents. Entre ces deux points extrêmes se trouvent toutes les modifications imaginables, telles que des dents cardinales sans dents latérales, ou des dents latérales sans dents cardinales. Cette disparition des parties de la charnière ne se produit pas brusquement ,

LES LUCINES.

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mille nuances s’établissent , dans lesquelles on voit disparaître insensi- blement toutes les parties saillantes du bord cardinal jusqu’au moment il est devenu édenté.

L’un des traits les plus caractéristiques de la famille des Lucines réside dans la forme et dans l'a position des impressions musculaires. Dans toutes ces coquilles, -en effet, ces impressions sont grandes, tantôt ovalaires et presque égales, comme dans les Corbeilles, tantôt plus étroites et subtriangulaires, commedans les Cyrénelles, et, enfin, pres- que toujours inégales, comme dans les Lucines. Dans ce dernier genre, l'impression musculaire antérieure mérite une attention spéciale, parce qu’elle s’allonge beaucoup et vient descendre obliquement en dedans de l’impression du manteau vers le bord inférieur des valves.

L'impression palléale est toujours simple , elle s'étend d’un muscle à l’autre en suivant parallèlement le bord inférieur des valves. Cette impression est ordinairement superficielle; cependant chez les vieux individus des Lucines et des Corbeilles , elle s'approfondit d’une ma- nière notable. Cotte impression est placée dans les autres genres de manière à partager les impressions musculaires en deux si l’on venait à la prolonger jusqu’aux limites du bord cardinal. Dans le groupe des Lucines, au contraire, les impressions musculaires sont toutes deux situées en dedans de l’impression palléale, d’où résulte cette saillie relativement plus considérable qu'elles font vers le centre des valves. Dans presque tous les genres que nous avons étudiés jusqu’ici , toute la surface interne de la coquille comprise en dedans de l’impression du manteau reste complètement lisse. Dans les Lucinides, au contraire, on remarque très souvent des accidents particuliers qui consistent en petites ocelles ou en lignes en quelque sorte hachées , imprimées plus ou moins profondément dans l'épaisseur du test.

Dans l’ensemble de notre classification des Mollusques acéphales , nous nous sommes laissé guider, non par les modifications d’un seul organe , mais par celles de l’organisation tout entière. Néanmoins nous avons cherché à placer les familles et les genres dans l'ordre qu'exige la diminution successive des siphons et l’agrandissement graduel de l’ouverture inférieure du manteau, cherchant ensuite ù placer sur des embranchements latéraux celles des combinaisons organiques qui monlrentdes déviations plus ou moins considérables dans le plan général des transformations. On ne parviendrait jamais , en effet, à faire com- prendre l’ensemble des rapports si l’on empruntait les bases d’une classification è quelques organes , môme parmi les plus importants. Ainsi , les organes branchiaux , par exemple , aux yeux de certains

VINGTIÈME FAMILLE.

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zoologistes, devraient servir à la délimitation des groupes les plus con- sidérables. Eh bien, ce caractère, qui paraît si constant, souffre cepen- dant des exceptions assez remarquables; il est impossible de s’en servir pour caractériser soit ta classe , soit môme quelques ordres en parti- culier. Le caractère le plus saillant des organes de la respiration, chez les mollusques acéphalés, est d’être composés de quatre feuillets parfai- tement symétriques, et dont l’organisation est à peu près la même dans toutes les familles. Il existe cependant plusieurs genres chez lesquels, outre les deux feuillets principaux, il y en a un troisième qui s’élève dans la région dorsale ; mais chez d’autres Mollusques, au lieu des deux ou trois feuillets de chaque côté , il n'en reste plu& qu’un seul , tel que chez les Solèmyes et les Pandores. Un nouvel exemple se représente eifcore dans le groupe des Lucines , mais il n’y aurait pas de raisons suffisantes de détacher les trois genres dont nous venons de parler pour constituer avec eux un ordre ou un groupe d'une valeur quel- conque. Ces trois genres ayant leurs rapports indiqués, non pais seu- lement d'après les organes de la respiration , mais d'après l’ensemble de leur organisation.

Dans une notice , sur l’organisation des Lucinès et des Corbeilles , présentée à l'Institut en 1844, par M. Valenciennes, ce naturaliste, se fondant sur de nouvelles observations, veut modifier la famille des Lucines, et la réduire aux deux genres Lucine et Corbeille, parce que les animaux de ces deux genres ne portent qu’un seul feuillet bran- chial de chaque côté de la masse viscérale. Par cette raison , M. Valen- ciennes repousse de la famille le genre Onguline lui-même , quoique depuis la discussion que nous avons soutenue à son sujet, tous les conchyliologues aient reconnu son extrême ressemblance avec les Lu- cines. II ne suffit pas, à notre avis, de présenter des faits d’un certain intérêt, il faut encore, en les introduisant dans la science, les poser avec soin pour en estimer la valeur. Que les Lucines et les Corbeilles possèdent un seul feuillet branchial, personne ne le conteste-; mais il faut voir si dans ce seul feuillet branchial les deux feuillets branchiaux ordinaires n'y sont pas contenus, et c’est, en effet, ce qui a lieu. Les feuillets branchiaux ordinaires sont composés de deux plans vasculaires séparés par les lacunes branchiales; ces plans se joignent par le bord libre de la branchie, et dans l’ensemble on peut les comparer à la lame d’un couteau un peu épaisse du côté du dos. Les injections , les sections longitudinales et Iransverses, les préparations produites par la macé- ration,tous les moyens enfin employés par l'anatomiste pour s^éclairer sur la structure de l'organe branchial , donnent la preuve qu’il est corn-

LES LUCINES.

7^9

posé ainsi que nous venons de le dire. Cette organisation est fort diffé- rente dans les Lucines. En effet, chaque feuillet branchial très épais et parenchymateux en apparence doit cette épaisseur insolite à un double rang de vaisseaux sur chacune des parois. II se trouve quatre rangées vasculaires superposées il n’y en a que deux chez les autres Mol- lusques. Aussi nous avons contesté à M Valenciennes , en nous appuyant sur les faits que nous venons de rappeler, la valeur de cette apparence de deux branchies chez les Lucines et les Corbeilles ; pour nous, les bran- chies de ces animaux fonctionnent au moyen de surfaces aussi étendues que si les quatre feuillets branchiaux existaient; en un mot, pour résumer notre opinion , nous disons que sous l’apparence de deux feuil- lets branchiaux , les Lucines et les Corbeilles en ont réellement quatre par l’organisation; ces deux feuillets contenant en réalité autant de vaisseaux branchiaux que dans quatre branchies d’une égale étendue, mais d’une moindre épaisseur.

Pour nous, les caractères extérieurs auxquels M. Valenciennes a attribué une grande importance , se réduisent à la proportion de carac- tères génériques. Nous ne croyons pas possible de séparer les Ongulines, et de les transporter, comme le voudrait M. Duvernoy, dans le voisi- nage des Moules. Ce genre doit nécessairement rester dans la famille des Lucines, et il deviendra possible de la partager en deux sections : dans la première , se trouveraient les Corbeilles et les Lucines , ani- maux à deux branchies ; et dans la seconde, les Ongulines et les Cyré- nelles , animaux à quatre branchies.

Il est facile de comprendre actuellement pourquoi nous devons déta- cher les Lucines des Tellines pour les transporter beaucoup plus en avant dans la classification et les faire remonter jusque dans le voisinage de la famille des Cardiacées. Lamarck avait jugé de ces Mollusques, non d’après leur organisation , mais d'après leur coquille seule , ce grand zoologiste ayant cru trouver des rapports convenables entre ces genres, parce qu’un certain nombre de Lucines ont. en arrière, dans la circons- cription du corselet, l'apparence d'un pli comparable à celui des Tellines ; mais on comprend aujourd'hui combien est faible ce moyen de rappro- chement que no justifie , au reste, aucun fait emprunté à l’organisation.

vingtièmü: famille.

760

GENRE SOIXANTE-DEUXIÈME.

IiUOINE. Lucina^ Brug.

PI, 14 bis, f. 7. 8. g. pl. i5, f. 4. 5, 6. pl. i6. f. i à r4. pl. 17, f. t à 5,

CARACTERES GENERIQUES. Animal ovale ou arrondi, lobes du manteau minces et rcilnis postérieurement dans le tiers de leur longueur. Un seul siphon anal court, membraneux, rétractile. Siphon branchial sessile réduit à une simple fente. Bouche très petite, ayant, au lieu de palpes, quatre petits tubercules. Une seule branchie, grande, épaisse, ovale de chaque coté du corps. Un pied très long, cylindracé, vermiforrne.

Coquille suborbiculaire, inéquilatérale. Charnière variable, présentant tantôt deux dents cardinales et une ou deux dents latérales, tantôt des dents cardinales seulement , et quelquefois à bord cardinal simple et sans dents. Deux impressions muscu- laires séparées, inégales; Tantérieure étroite et très longue. Impression palléale simple.

Synonymie générique. Vénus, Linné, Chèmnitz, Gmelin, Schrœter, Born, Kœmmerer, Montagu, Maton et Racket, Dorset, Dillwyn , Wood, Donovan. Tellina, Montagu, Maton et Racket, Wood, Linné, Chèmnitz, Schrœter, Gmelin, Dillwyn. Cytherea [expai'ie], Lamarck. Strigiïla, Turton [eic parlé). Myriea, Turton, Sowerby, Fleming. Orfygia, Brown. Crypiodon, Turton, Macgillivray, Moller. Ply- china , Philippi. Axinus, Sowerby, Loven , Nyst , de Ko- ninck, King. Amphidesma , Lamarck. Loripes , Poli, Cuvier, Blainville, Rang, Mcnke, LatreÜle, Oken, Swainson, Fleming, Gray, Leniillaria , Schumacher. —Thiaiyra, Leach, Sowerby. ^ Codakia. Scopoli, Gray.— Codok, Adan- son, Orbicuhis, Megcrle. Aycr/rt,Lca. Edmondia, de Koninck, Morris, Gcinilz.

LES LUCINES.

761

OBSERVATIONS. Pou de genres offrent autant d'intérêt que celui des Lucines. Vivant dans toutes les mers , il est fossile dans tous les ter- rains de sédiment. 11 so montre dans les plus anciennes couches dé- posées à la surface de la terre ; il est du petit nombre de ceux qui , depuis ces temps reculés , n’ont pas cessé d'exister jusqu’aujourd’hui et sont représentés dans les diverses formations par de nombreuses espèces. Ce genre ne doit pas avoir moins d'intérêt aux yeux du zoo- logiste ; les Mollusques qu'il renfernie ont des caractères tellement particuliers que l’on peut les considérer comme un groupe à part qui mérite de former un embranchement spécial sur la lige commune de la classification. Nous avons vu, en traitant de la famille des Lu- cines , comment il fallait envisager aujourd’hui les rapports du groupe tout entier, et ceux des Lucines en particulier. Nous n’aurons donc pas à revenir sur cette question , ayant employé pour la discuter tous les documents dont la science s’est enrichie relatifs, non seulement aux Corbeilles , aux Ongulines et aux Cyrénelles , mais encore , et surtout , aux Lucines.

Communément répandues dans presque toutes les mers , un certain nombre d'espèces de Lucines ont été connues des anciens conchylio - logues. Gesner, Bonanni, Lister, Rumphius, Guallieri , d’Argenville , en ont figuré plusieurs' dans leurs ouvrages; mais parmi eux, c’est Lister qui en a fait connaître le plus. Dans le temps que Linné , dans la \ 0“ édition du Systema naiurcBj introduisait ces coquilles , les unes dans son genre Telline, les autres parmi les Vénus, un savant obser- vateur, Âdanson , en faisait connaître plusieurs espèces dans son Voyage au Sénégal. Il les place dans son genre Came, supposant quales ani- maux , qu’il n’a pas eu occasion d’examiner, sont semblables à cçux des Vénus. Depuis Linné, dont la 10® édition du Sysima est de lYSS , jusqu’à Bruguière, tous ceux des naturalistes qui eurent occasion de parler dos Lucines,. imitèrent Linné, et les rangèrent sans exception dans les Tellines et dans les Vénus. Le. nombre de ces auteurs est con- sidérable, et il nous paraît peu nécessaire de les mentionner ; ils sont déjà connus par la citation que nous en avons faite dans Thistoire de plusieurs autres genres.

En préparant les planches de V Encyclopédie méthodique ^ Bruguière, le premier, institua le genre Lucine. Nous insistons à dire qu’il est le premier, parce que plusieurs auteurs veulent faire remonter l'origine du genre , les uns à Poli , les autres à Scopoli; mais nous pensons que celte opinion peut être contestée, surtout à l'égard de Poli. En effet, si le savant napolitain a eu le mérite de faire connaître le premier un animal

VINGTIÈME FAMILLE.

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du genre Lucine , et de lui imposer le nom de Loripes, on ne l’a pas vu, généralisant les faits de la science, rattacher à son genre les autres espèces qu'il connut et qu‘il continua à ranger parmi les Tellines; par conséquent Poli a fait connaître un fait particulier, mais on ne peut guère le considérer comme le créateur du genre Lucine, et cela est si vrai , que Cuvier et un grand nombre d’autres naturalistes, ont adopté à la fois * dans leur méthode et le Loripes de Poli et les Lucines de Bruguière.

Les observations qui précèdent pourraient s’appliquer en partie au genre Codakia de Scopoli. Par la manière dont il est èaractérisé par l’auteur, on voit que ce naturaliste éminent a senti le besoin de séparer des Vénus de Linné , la Came Codok d’Âdanson. Cette Came n'esl autre chose que le Venus tigerina de Linné; Scopoli on indique les caractères d’une manière tellement brève, qu’il est impossible d'y retrouver ceux d’un genre suffisamment bien observé. Il se borne à dire, en effet: a Testa bhalvis submnbomila , cardo valvæ iinius trîdentatus^ alterius bidentatus. » Ainsi, pour lui, la différence résidait dans la charnière, partie éminemment variable, comme chacun le sait, dans le grand genre Vénus, et il néglige les véritables caractères génériques, ceux que présentent les impressions des muscles et du manteau. Il résulta de cette imperfection que les naturalistes , malgré l'opinion de Scopoli , continuèrent à ranger au nombre des Vénus , le Codok d’Adanson et les espèces qui s’en rapprochent. Lamarck, lui-même, ne put se soustraire à l’opinion de Linné, et comme dans les coquilles dont il est question, la charnière porte une dent latérale antérieure , Lamarck les entraîna dans son genre Cythérée, lorsqu’il les détacha des Vénus de Linné, ün autre reproche que l'on pourrait adresser à Scopoli, c’est d’avoir adopté un nom barbare pour l'introduire dans une méthode pour laquelle Linné avait créé un langage harmonieux ; mais ce motif ne serait pas suffisant pour rejeter le'genré Codakia, si ce genre avait été convena- blement généralisé par son auteur. Nous pouvons donc conclure que Bruguière est le véritable créateur du genre, quoi qu’il l’eût publié en 4 792, tandis que l’ouvrage de Scopoli est de 1777, et celui de Poli do 1791.

Dès ses premiers travaux sur la conchyliologie , Lamarck s'empressa d'adopter le genre Lucine de Bruguière; il le rangea entre les Cyclades et les Tellines, et conserva une opinion analogue dans tous scs autres travaux à mesure qu'il les perfectionna. Cuvier oublie d'abord le genre dans son Tableau du règne anîmat; il no le mentionne pas non plus dans son Tableau de classification qui fait partie du T'’ vol. des Leçons d'anatomie comparée; mais dans Ï'A édition du Règne animal, il

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répare tardivement cet oubli , et il comprend les Luçines dans sa famille des Cardiacées , à côté des Loripèdes entre les Tellmes et les Vénus , se rapprochant par là, sous quelques rapports, de la manière de voir de Lamarck, et s’en éloignant aussi en comprenant les Vénus dans la même famille.

Tandis que les deux grands zoologistes français consacraient dans leurs travaux le genre établi par Bruguière , d’autres naturalistes , plus étroitement attachés au système de Linné, continuaient à ranger les Lucines, les unes dans les Vénus et les autres dans les Tellines. Cet attachement au système do Linné se remarque particulièrement parmi les naturalistes anglais du commencement de ce siècle; il y en a même quelques uns qui le conservèrent jusqu’en 1828.

Le genre Lucine , considéré dans son ensemble , est des plus natu- rels; mais quand on vient à examiner de petits groupes d’espèces , soit vivantes , soit fossiles , on a une tendance à le démembrer en plusieurs genres , et c'est à quoi se sont appliqués un certain nombre de conchy- liolôgues depuis la publication du dernier ouvrage de Lamarck. Indé- pendamment du genre Loripes de Poli , que plusieurs ont voulu con- server, M. Schumacher a rétabli le genre de Scopoli sous une autre dénomination; il en fait son genre Lentillaria ; puis, pour les espèces qui ont trois dents à la charnière, c’est-à-dire deux d'un côté et une de l’autre, il en fait son genre Tridonta, que nous verrons rentrer sans difficulté dans le grand type des Lucines. Bientôt après, M. Turton, dans ses Coquilles bivalves de l' Angleterre, proposa de retirer des Lucines de Lamarck, sous le nom générique ÔQStrigella, celles des espèces qui sont ornées à l’extérieur de stries divergentes. A l'exemple de Lamarck, M. Turton laissa subsister dans son genre une confusion que le premier nous avons rectifiée; en effet , dans ïaStrigilla de cet auteur, de véri- tables Tellines , Tellina carnaria, par exemple, sont confondues avec des Lucines, Lwcma divaricata. En même temps il séparait sous le nom de Cryplodon celles des espèces qui ont un corselet profondément sinueux. Déjà ce genre avait été proposé sous le nom d’j^jrmtis , par Sowerby dans son Minerai concology. Nous ne parlerons pas des dif- férents genres proposés par M. Lcÿch. Ceux des auteurs qui les con- naissent le mieux conservent encore des doutes au sujet de plusieurs d’entre eux. Ils ont été cités avec des variantes, soit par Lamarck, qui en a reçu communication deLeach lui-même, soit par M. Brown. D'ail- leurs ces genres ne peuvent être admis ; fondés sur des caractères con- testables, ils perdent beaucoup de leur intérêt et ne méritent pas une discussion approfondie. Nous rangerons à peu près dans la même caté-

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gorie les genres proposés par M. Brown. Un autre genre, qui a pour type le Tellina rolundata , a été proposé par M. Bronn, en 1831, sous le nom de diplodonla : il mérite un plus sérieux examen parce qu’il a été admis par M, Philippi et par plusieurs autres conchyliologues de mé- rite; pour nous, nous retrouvons en lui les principaux caractères des Lucines. L’animal lui-méme , si nous en croyons quelques observa- teurs , ne différerait pas d’une manière notable de celui des Loripes : ses caractères sont empruntés à la coquille, et nous verrons bientôt combien ils sont variables tout en conservant un certain degré de fixité, la limite des variations génériques se trouvant resserrée dans un cercle assez étroit. Nous avons déjà indiqué le genre j^ormus de Sowerby; M. Phillippi, qui ne le connaissait pas , le reproduisit sous le nom de Plycliina , dans ses Mollusques de Sicile ; mais un peu plus tard, il sup- prima ce nom et préféra celui plus ancien de Cryptodon, donné par Turton ; do sorte que pour l’auteur dont nous parlons, les Lucines de- vraient se diviser en trois genres, ce qui, pour nous, n’est point ad- missible.

Dans ses Etudes critiques sur les Mollusques fossiles de la famille des Myaires , M. Agassiz a proposé un genre Mactromya^ dans lequel il introduit des Lucines , dont il n’a pas reconnu les caractères généri- ques. Il est vrai que le savant naturaliste n’a jugé de ces espèces que d’après le moule intérieur seulement, ce qui pouvait entraîner de l’incertitude chez une personne qui n’est pas encore très habituée à re- connaître la nature des genres d’après des matériaux quelquefois in- complets. Cependant les figures de M. Agassiz sont suffisantes pour opérer la réforme que nous proposons dans sou genre Maclromya.

Dans sa dernière classification des Mollusques , M. Gray adopte sans difficulté plusieurs des genres que nous venons de passer en revue; ces genres , nous les avons cités dans nos généralités sur la famille des Lucines, nous n’avons donc pas à y revenir actuellement, car nous aurons encore l'occasion de les mentionner, lorsque nous exposerons les modifications que subissent les Lucines et les caractères peu importants d’après lesquels ces genres ont été limités.

Telle est Thistoire succincte du ^rand genre Lucine de Bruguière et de Lamarck. Nous aurions pu lui donner une bien plus grande étendue , si nous avions voulu mentionner dans l'ordre de leur publication tous ceux des ouvrages dans lesquels il est question des Lucines. Celte tâche ingrate, en allongeant notre travail , ne nous conduirait pas à do meil- leurs résultats, parce que, dans ces ouvrages, les mêmes opinions se reproduisent et se répètent : elles n’ajoutent donc rien à la science ,

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souvent elles n’ont même pas le mérite d’être préférées à la suite d’un contrôle suffisamment approfondi. Aussi riiisloiro des Lucincs peut-elle se résumer do la même manière que celle de plusieurs autres genres. Ces coquilles n’ont point été reconnues par Linné; elles ne le sont pas davantage par le plus grand nombre de ses successeurs. Bruguière les sépare ; Lamarck d’abord , Cuvier, beaucoup plus tard , adoptent cette séparation en conservant au genre toute son étendue ; mais bientôt ces grands philosophes , qui ont aimé à conserver à leurs genres des carac- tères larges et profonds , sont débordés par les observateurs minutieux qui cherchent sans cesse à faire de nouveaux genres aux dépens de ceux qui existent, et malheureusement sans se préoccuper assez si ces nou- velles créations sont fondées sur des caractères zoologiques d’une assez grande valeur pour être acceptés dans une méthode. On comprend aussi qu'il est infiniment plus facile de créer des genres nouveaux que d’en- treprendre des études approfondies et de rassembler l’immensité des matériaux nécessaires pour arriver à la démonstration de l'inutilité de ces mêmes genres.

L’animai des Lucines offre dans son organisation des particularités remarquables , et comme le genre lui-même constitue le type principal de la famille , nous sommes obligés d'entrer dans des détails plus appro- fondis à son sujet. Toutes les espèces vivantes connues sont suborbicu- laires, quelquefois aplaties en forme de lentilles, quelquefois plus globuleuses et même sphérbïdales. L’animal conserve très approximati- vement la forme de sa coquille; il est enveloppé d’un manteau mince, d’un blanc laiteux, et dont la surface contracte, avec celle delà coquille, une adhérence plus grande que dans la plupart des autres genres. Celte jonction , plus intime , provient particulièrement de la présence dans le manteau d’organes particuliers ordinairement subcirculaires, et qui laissent leur impression sur le disque intérieur de la coquille. Un muscle orbiculaire, étroit, occupe la circonférence du manteau. Il est d’une épaisseur uniforme , et son bord intérieur donne naissance à une large mémbrane qui s'étend dans toute la partie postérieure de l'animal et sert de commissure au manteau. Le manteau est donc en réalité pourvu de deux bords , l’un extérieur, qui s'applique sur le pourtour de la coquille , et l’autre intérieur, plus ou moins exsertile, selon la volonté de l’animal. En avant , par exemple , lorsque l'animal est contracté , le bord membraneux se renverse en dedans , et il forme de chaque côté une poche incomplète dans laquelle la branchie vient se placer naturelle- ment. La commissure antérieure du manteau se produit vers le milieu de la longueur du muscle adducteur antérieur. La commissure posté-

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rieure se montre vers le milieu de la longueur du bord ventral. Cette commissure est très large, membraneuse, et par la hauteur qu’elle acquiert, elle réduit de beaucoup l'ouverture antérieure du manteau destiné au passage du pied. En arrière, cette commissure est percée de deux ouvertures : la première,, destinée à remplacer le siphon bran- chial, est complètement sessile, l’animal ne la fait jamais saillir au dehors ; elle est subcirculaire dans sa dilatation , mais lorsque les valves sont rapprochées , elle prend la forme d’une petite boutonnière ; l'autre ouverture est séparée de la première par' un intervalle assez largo, elle est d'un diamètre plus petit., et elle se prolonge en dehors en un tube membraneux, mince et transparent, cylindrique, et dont l’ouverture terminale est simple et dénuée de tentacules. Cet organe peut se con- tracter, quoiqu’il jie possède aucun muscle rétracleur comparable à celui des Tellines ou des Vénus; mais il se contracte de la mémo manière que les tentacules des limaçons, par exemple, qui, au moyen de fibres annulaires et longitudinales comprises dans leur paroi , peu- vent faire. rentrer le tentacule sur lui-même et le mettre ainsi à l'abri d'un contact dangereux. Ces Lucines agissent do môme pour faire rentrer dans la cavité du manteau le siphon anal au moindre attouchement. Cet organe se contracte et rentre sur lui-même exactement comme un doigt de-gant que l'on retourne.

La masse abdominale est assez considérable : elle est d’une forme subquadrangulaire , et c’est de son bord inférieur et postérieur que se détache un pied , le plus singulier qui existe dans toute la série des Mollusques acéphalés dimyaires. En effet, il est complètement vermi- forme , cylindracé, obtus au sommet; sa base forme une espèce do talon comparable à celui du pied humain. Cet organe est susceptible do mouvements très divers ; mais nous ignorons comment l’animal en fait usage ; car les Lucines que nous avons vues vivantes ne s’on sont jamais servies , quoique nous ayons essayé de les replacer dans des conditions favorables pour les observer vivantes. Elles ont fait sortir leur pied de la cavité du manteau , mais elles n’ont jamais tenté de creuser le sable, quoiqu’il soit possible, par exemple, de supposer qu'elles peuvent y réussir aussi bien que les Solens. Cependant il faut dire que la coquille de ces derniers a une forme qui favorise singulièrement l'action du pied , tandis que chez les Lucines , au contraire , la fortne orbiculaire doit présenter un obstacle assez considérable à l’action d’un organe aussi grêle. H faut, au reste, que cet organe ait une bien grande souplesse dans ses mouvements, puisque nous avons trouvé un individu chez lequel le pied portait. un gros nœud très serré vers la base. Nous

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en avons donné la figure dans la partie conchyliologiqne de l’expiora- lion scientifique de TAIgérie.

Les muscles adducteurs des valves méritent une attention particu- lière , parce que leurs impressions laissent, sur la coquille des caractères impérissables d’une très grande valeur pour déterminer le genre auquel on doit la rapporter. Le muscle adducteur antérieur est très allongé : il descend dans la région ventrale de la coquille de manière à être com- pris dans l’intérieur de l'impression palléale. Par sa position et sa lon- gueur, ce muscle forme en avant une sorte de capuchon au-dessous duquel la bouche est profondément cachée, son bord inférieur tombant jusque dans la région ventrale, il en résulte un rétrécissement consi- dérable de l’ouverture antérieure du manteau ; mais on conçoit que pour donner passage à. un pied aussi grêle que celui que nous venons do décrire, il ne faut pas une ouverture très étendue. Le muscle adduc- teur postérieur est oval ou subcirculaire; il est situé tout près du bord postérieur et au-dessus du siphon anal. Les muscles sont en proportion plus grands que dans les autres Mollusques , et ils offrent ce caractère remarquable d'être compris dans l’intérieur de l'impression du manteau.

La bouche est très petite : elle est garnie de deux lèvres très étroites , dépourvues de palpes labiales, et l’absence de ces organes, si constants chez tous les Mollusques acéphalés,, est un caractère d’une grande valeur pour distinguer les Lucines et en former un groupe distinct de tous les autres.

Les organes de la respiration ont aussi une organisation toute parti- culière ; un seul grand feuillet branchial existe de chaque côté; ces branchies sont ovales - quadrangulaires ; elles sont soudées à la masse abdominale en avant et dans toute la longueur du bord dorsal. En arrière, elles se réunissent et se terminent en pointe, dont l’extrémité est soudée au manteau , dans la partie de la commissure qui sépare le siphon branchial de l’anal , de sorte que la grande cavité palléale est toujours séparée de la cavité du siphon anal. Les feuillets branchiaux sont très épais; et, si l'on opère sur eux diverses sections, on s’aperçoit qu’ils sont composés do deux épaisseurs égales, renversées l’une sur l’autre , disposition que l’on pourrait comparer à celle d’une feuille de papier pliée en deux. Aussi en brisaul les lamelles transverses qui ser- vent à rattacher une paroi à l'autre, on déploie facilement cette double branchie en une seule lame dont on parvient à effacer les plis. Nous avions donc raison de dire que chez les Lucines il y a réellement deux branchies sous l’apparence d’une seule. Cette manière d’envisager ces organes est confirmée par leur structure anatomique, et ici nous arri-

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vons à dos détails que ne comporte pas un traité élémentaire , par consé- quent noos renvoyons le lecteur à des ouvrages qui traitent spécialement de celle matière.

Presque toutes les coquilles du genre Lucine sont orbiculaires ; nous n'en connaissons qu'un petit nombre d'ovales et de subtransverses, et celles-là se rapprochent de la Corbeille par certains caractères de leur charnière. Si quelques unes sont très bombées et globuleuses , il y en a un plus grand nombre d’aplalies et qui affectent la forme lenticulairev La surface extérieure est couverte d’um épiderme plus ou moins apparent , quelquefois très pâle et transparent , quelquefois grisâtre ou brunâtre , et plus ou moins écailleux. Sur le bord du test, cet épiderme le dépasse un peu de manière à abriter la bord interne du manteau. Les accidents extérieurs sont de diverses sortes; un assez grand nombre d'espèces sont lisses , mais le plus grand nombre est chargé de stries et de côtes concentriques qui affectent quelquefois une grande régularité ; enfin , un petit groupe d’espèces se distingue par une surface découpée par des stries longitudinales et transverses à peu près égales. Presque toutes les Lucines sont blanches ou d'un blanc jaunâtre ; quelques unes sont rosées ou rougeâtres , et , en général , elles sont plus colorées à Tintée rieur qu’au dehors. Les teintes dont elles sont ornées passent du rose pourpré à l’orangé, au jaune fauve très pâle. Les bords des valves sont généralement simples. Cependant il existe des' espèces chez les- quelles on remarque de très fines crénelures au moyen desquelles la clôture des valves devient encore plus exacte.

Les Lucines sont généralement inéquilatérales , mais elles le sont d'une petite quantité , par conséquent, le bord dorsal est divisé en deux parties presque égales par la saillie des crochets; ceux-ci sont généra- lement petits, déprimés, rapprochés, médiocrement saillants; ils s'in- clinent obüquemwit du côté antérieur et viennent dominer une lunule presque toujours nettement circonscrite, souvent profonde et quelque- fois superficiello et peu marquée. Le corselet n’existe pas dans toutes les espèces : aussi sous ce rapport les Lucines pourraient facilement se partager en deux groupes. Lorsque celte partie existe, elle est limitée au dehors par une ligne déprimée qui descend du crochet jusque vers l’extrémité postérieure du bord inférieur. Dans ces espèces , la 'lunule est presque aussi grande que le corselet d’où résulte que la surface est divisée en trois parties inégales: à la lunule appartient la plus petite ; la seconde est occupée par le corselet , et la troisième est ré- servée au centre des valves. LesLuema columbella jamaicensîs peuvent donner un très bon exemple de ce groupe remarquable de Lucines. Chez

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les aiilres, on voit la lunule et le corselet s’effacer insensiblement, et lorsque la lunule subsiste encore, le] corselet 'a complètement dis- paru.

La surface intérieure est moins lisse que dans la plupart des autres genres : elle n’est jamais nacrée, et l'on y remarque très souvent de petites impressions arrondies ou bien des lignes longitudinales comme bâchées, plus ou moins profondes. Ces lignes ou ces impressions, comme nous le disions tout à l’heure, résultent d’une structure particulière du manteau. Cet organe laisse encore dans l'intérieur des valves de la plupart des espèces, une ligue oblique et déprimée dont nous ne con- naissons pas l’origine. Il faudrait en rechercher la cause dans l’animal du Lucina tigerina , par exemple , chez lequel celte ligne est fortement imprimée. On la trouve dans le Lucina jamaicensis ^ et nous l’observons dans un très grand nombre d'espèces fossiles.

La charnière est très variable , ainsi que nous l’avons répété plusieurs fois, et en cela ce genre ressemble à celur des Bucardes et à celui des Mulettes. Ainsi, on peut commencer la série par des coquilles dont la charnière est absolument simple et sans dents. L’une d'elles , à cause de cela, a été appelée Lucina edentula par Lamarck. Dans ce groupe des édentés se rangent des coquilles généralement minces et globuleuses; cependant il est des espèces plus aplaties qui sont également dépourvues do dents cardinales ou latérales, et qui , par conséquent, doivent faire ])artie de la même section. Tontes ces espèces n'ont pas les mômes caractères extérieurs , car les unes sont sans corselet et ont une lunule très petite, tandis que les autres ont la lunule et le corSelet très grand. Pour bien comprendre les divisions du genre Lucine , il ne faut pas se contenter de l’examen des espèces vivantes, il faut Pétendre aux espèces fossiles.

A la fin du genre, on pourrait composer un groupe, dans lequel se réuniraient toutes les espèces ayant à la fois des dents latérales et des dents cardinales. Nous trouverions encore dans ce groupe des formes extérieures semblables à celles du premier, c'est-à-dire des coquilles globuleuses, des coquilles aplaties : les unes ayant une grande lunule et un grand corselet, les autres n’ayant plus qu’une très petite lunule. Entre ces deux groupes se classeraient, dans une série non interrompue, tous les intermédiaires que l'on peflt imaginer. C’est ainsi que les dents cardinales se montrent d’abord à l’état rudimentaire. Elles prennent successivement do l’accroissement, il en est de même des dents laté- rales, soit qu'elles naissent simultanément, soit que Tune d’elles appa- raisse d’abord. Elles prennent leur accroissement tantôt sans être accora- T. I. PAUTIE, 49*

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pagnées de dents cardinales, tantôt lorsque la charnièré porte ces parties dans un étal plus Ou moins complet de développement. On comprend dès lors de (combien de combinaisons est susceptible la charnière des Lucines, puisqu'elle peut être sans dents, avoir des dents latérales sans dents cardinales , une seule dent latérale sans autre dentelure, une dent cardinale et une dent latérale tantôt antérieure, tantôt postérieure; enfin , la charnière présente encore celle combinaison des deux dents cardinales et des deux dents latérales.

Le ligament est toujours extérieur, il s’étend sur une partie assez considérable du bord supérieur et postérieur, et il est presque tou- jours recouvert par les lèvres saillantes du corselet. Par ce fait, il est pou apparent à l'extérieur; il arrive assez souvent que les nymphes, en s’enfonçant sous les bords du corselet, cachent tellement le ligament que l’on pourrait le croire intérieur; mais aussitôt que Ton en étudie la structure , on lui reconnaît toutes les parties constituantes des liga- ments extérieurs. Trompé par cette apparence, Lamarck avait cru trouver dans les Ongulines un ligament interne, mais ayant étudié de nouveau ce ligament sur des individus bien entiers , nous Pavons trouvé soutenu par des nymphes très aplaties sur lesquelles vient s’attacher sa tunique externe et fibreuse.

Il existe quelques espèces vivantes dans lesquelles le ligament pour- rait être considéré comme intérieur, car il est caché dans une rigole profonde, comparable au cuilleron des Amphidesmes, mais située moins en dedans de la coquille et complètement cachée par la lèvre saillante du corselet. Déjà le Lucma lactea présente dans sa charnière une modi- fication analogue à celle-ci, mais le ligament reste encore plus près de la surface que dans d'autres espèces qui, comme le L. Crypteîla d’Orb., ont cette partie complètement intérieure. Les espèces vivantes dont nous parlons ont pour nous un très grand intérêt , parce qu’elles conduisent insensiblement à un genre proposé par M. de Koninck que nous voulions d'abord conserver. Ce savant observateur, qui a déjà rendu de très grands services à la science , et dont les opinions jouis- sent d’une autorité que leur ont méritée ses travaux consciencieux, a proposé le genre Edmondia, pour des coquilles fossiles qui sont le dernier terme des Lucines à ligament subintérieur. Dans les coquilles de ce genre, la charnière porte une lame assez large, creusée on gout- tière, sur laquelle le ligament vient s'attacher, en sc cachant derrière la lèvre très proéminente du corselet. Aucune dent cardinale ou latérale n’existe sur celte charnière , mais les impressions du manteau et des muscles sont conformes à celles des véritables Lucines; d’où il suit que

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ce genre Edmondid doit venir encore se confondre dans le grand type des Lucines, et son nom s’ajouter h la synonymie générique.

Les impressions musculaires exigent une étude toute spéciale dans le genre des Lucines; quoiqu’elles subissent aussi des modifications dans la série des espèces, néanmoins elles sont d’un secours considérable pour distinguer le genre lorsque la charnière vient à manquer. On conçoit , d’après ce que nous avons dit des muscles eux-mêmes , que leur impression sur la coquille doit offrir des particularités que l’on ne saurait rencontrer dans d’autres genres : elles sont fort écartées et occupent les extrémités de la coquille. L’impression antérieure est la plus remarquable : on y distingue facilement deux parties, l'une supé- rieure, très rapprochée du bord , quelquefois subovalairc et occupant la place de l'impression antérieure des autres Mollusques; l'autre partie consiste en une ligule assez étroite qui se détache de l’extrémité infé- rieure de la première partie, pour s’avancer obliquement à l’intérieur des valves, quelquefois jusque vers le milieu du bord ventral, ainsi que le Lucina mutabilis de Lamarck en donne un exemple. Cette im- pression n’eSt pas toujours aussi allongée , elle diminue insensible- ment de longueur dans une série considérable d’espèces, et déjà elle est très réduite dans l’une des coquilles confondues parmi les variétés du Lucma divaricata de Lamarck. A mesure que cette portion de l’im- pression musculaire diminue , la portion supérieure devient de plus en plus ovale, et, enfin , il arrive un moment toute la portion inférieure a disparu , ainsi qu’il arrive dans celles des espèces pour lesquelles M. Bronn a établi son genre Diplodonte. Malgré ce changement, on reconnaît à ces coquilles les caractères des Lucines , parce que l’im- pression musculaire est toujours en dedans de l’impression palléale, et que son extrémité inférieure s'incline toujours vers le disque intérieur de la coquille. 11 existe même des espèces de ce groupe chez lesquelles l'impression musculaire tout entière descend le long de l’extrémité antérieure et inférieure du bord ventral. Entre cette position et celle de l’impression, telle quelle se trouve dans les autres Lucines , il existe quelques nuances intermédiaires que l'on peut observer particulièrement sur des espèces fossiles, et notamment sur le Lucina unguis de Bonelli , qui se trouveassez abondamment dans les marnes argileuses de Tortone. Entre l’impression musculaire et celle du manteau, il reste ordinaire- ment un intervalle plus ou moins large selon les espèces. Cet intervalle diminue peu à peu , et dans l’espèce que nous venons de citer, presque toute l’impression musculaire est confondue avec celle du manteau ; une très petite portion s’en détache , et par cette disposition toute spéciale ,

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cette coquille r^ittache aux Lucines le genre Diplodonte de M. Broun. L’impression musculaire postérieure reste toujours courte et ovalaire , située tout près du bord , elle se voit à l’extrémité de la charnière et dans celle des espèces dont le corselet est limité par une inflexion , elle est toujours comprise dans la largeur de ce corselet. Cela arrive aussi chex les especes dont le corselet est fortement sinueux , et pour les- quelles le genre Axinus a été créé par M. Sowerby. Dans ces coquilles singulières , les caractères des Lucines persistent , la charnière est sans dents , ainsi que dans beaucoup d’autres espèces. L'impression muscu- laire antérieure est ovalaire , comme dans les Diplodontes , et l’impres- sion postérieure est petite et ovale, ainsi que dans toutes les Lucines. Il n’y a donc point de raisons suffisantes pour admettre le genre Axinus d’après les caractères qui lui ont été assignés. Pour le détacher des Lucines, il faudrait trouver dans l’animal des caractères suffisamment distincts ; mais jusqu’ici l’animal de ces espèces est resté inconnu.

L’impression palléale est toujours ‘simple dans les Lucines : elle est parallèle au bord ventral , et elle en est rapprochée. On voit par les empreintes musculaires qu’elle porte et par sa largeur inaccoutumée, , que le muscle orbiculaire du manteau s’y attache avec une grande solidité. Parvenue à l’extrémité inférieure do l’impression musculaire postérieure, il semble qu'en se continuant, elle couperait cette im- pression en deux parties égales. Comme il arrive souvent au paléon- tologiste de n'avoir à examiner que des moules intérieurs de coquilles bivalves, nous avons cru nécessaire d’insister sur tous ces minutieux détails, au moyen desquels il évitera de confondre les Lucines avec les Vénus , des Cypnnes , des Aslartes et des coquilles de tout autre genre.

Comme nous l’avons annoncé au commencement de cette discussion des caractères des Lucines, presque tout est variable dans ce genre; cependant dans des limites assez étroites pour qu’on le reconnaisse par un ou plusieurs des caractères énoncés et que l’on no retrouve pas dans les genres voisins. C’est ainsi que la forme orbiculaire est dominante; la charnière est variable, sans doute, mais elle ne prend jamais le carac- tère de celle des Cyrônes qui ont aussi des dents cardinales et des dents latérales. Dans le cas où, par exception , une Lucine aurait une char- nière de Cyrèno, les impressions des muscles et du manteau la distin- gueraient facilement de ce genre. Quelques espèces ont une charnière qui so rapproche assez de celle des*. Cythérées: cependant, il faut en convenir, cette charnière n’a pas la régularité do celle du genre en ({ues- tion ; mais cette confusion ne saurait subsister aussitôt que Ton compare les impressions musculaires et celles du manteau , car dans les Lucines,

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en question, elles ont des caractères propres au genre et no peuvent se confondre avec les Cytliérées. On voit par do quelle importance sont les impressions musculaires pour caractériser les Lucines, et nous avons vu que les variations de ces parties sont réellement peu considérables relativement à celles de la charnière, par exemple.

La limite des genres n'est point une chose inditTéronte à quelque point do vue que se place le zoologiste. S’il envisage l’ensemble philosophique delà classification, il doit faire en sorte que tous les genres soient com- parables entre eux et qu’ils soient fondés sur'dos caractères équivalents. Si , d'un autre côté , il considère la zoologie dans ses rapports avec la géologie, il doit encore conserver les mômes tendances et chercher à maintenir les genres dans la limite que la nature elle-même leur a imposée. Il comprend combien il est important qu'un genre représente fidèlement un type particulier d’organisation , puisque c’est l’existence de ce type dans les anciens âges du monde qu'il s’agit do constater. Nous avons déjà fait pressentir dans l'histolro du genre Pholadomye , tous les avantages qui résultent pour les sciences de la bonne conception des genres; car selon qu’ils seront plus ou moins étendus, plus ou moins découpés, ils existeront ou n'existeront pas dans certaines cou- ches de la terre. Que l’on restreigne, par exemple, Ips Lucines, tel que le voudraient certains conchyliologues , à l'instant môme vous allez modifier la distribution des espèces dans les couches de la terre. Si , au contraire , vous conservez au genre toute l’étendue que comportent ses caractères , il devient alors facile de tracer fhistoire de son développe- ment à travers les périodes successives de la création. Aussi nous ne cesserons de conjurer les sincères amis de la science d’éviter avec un soin scrupuleux ces démembrements inutiles des grands genres naturels. Le résultat le plus positif de ces découpures est de jeter la confusion dans la nomenclature, de troubler profondément l'harmonie de la science , d’en écarter pour un temps plus ou moins long les résultats les plus précieux ; et , enün , do rendre son accès difficile en hérissant la nomenclature d’une foule de noms qu’il faudra ensuite oublier. Les zoologistes et les paléontologistes agissent trop souvent dans l’éloigne- ment les uns des autres ; ils perdent de vue rintérèt le plus sacré de la science, celui de son ensemble et de son unité ; ils oublient qu’ils ten- dent les uns et les autres au môme but , et que ce but ne pourra être atteint qu’au moyen do l’adoption définitive des principes uniformes qui doivent les diriger.

Toutes les Lucines sont des coquilles marines; elles habitent les rivages , elles se plaisent sur les fonds sableux et légèrement vaseux.

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Quelques unes i^réfèrenl les lieux tranquilles et complètement vaseux ; elles se cachent alors sous les racines des plantes marines en se, creu- sant dans la vase un trou peu profond elles ne font d'autres mouve- ments que de se rapprocher de la surface du sol pçur aspiVer dans la cavité du manteau l’eau qui est nécessaire à leur nnlrilion et à leur respiration. On comprend que ces animaux , dénués de siphons posté- rieurs, ont besoin de vivre dans une eau tranquille, car sans cela, enterrés sous le sable cl n’ayant pas un pied robuste pour en sortir, ils- périraient inévitablement dans les mouvements si fréquents que le sable éprouve sur les fonds de cette nature.

Les Lucines se rencontrent dans toutes les mers; quelques unes remontent très haut vers le nord , mais les plus p;randes sont propres aux régions chaude.s de la terre; c’est aussi dans ces mêmes régions que l’on trouve le plus grand nombre des espèces , et l’on peut dire qu'une faune riche en Lucines s'est produite dans une mer chaude. Ceci n’est pas tout à fait sans imporlanco pour l'étude des espèces fossiles, puisque leur rareté ou leur abondance permet à l'observateur d'estimer approximativement la température primitive des lieux ces Lucines ont été recueillies. C’est ainsi , par exemple, que les Lucines étant très abondantes dans le bassin de Paris, on peut croire que ce bassin s’est comblé à une époque la température de la France était au moins égale à celle de l'équateur, car dans aucune mer équatoriale actuelle ou no trouve rassemblé dans un espace aussi étroit un aussi grand nombre d’espèces de Lucines. Il en est de même pour le bassin de Bordeaux, et, en général, pour le second étage tertiaire. Il est également très riche en Lucines , et ce fait se joignant au reste de la faune accuse aussi pour cette période géologique une température équatoriale. Beaucoup moins nombreuses dans le troisième étage tertiaire , on s’aperçoit à l’instant môme qu’il s'est opéré un changement notable dans la tempé- rature des mêmes lieux , et cette conclusion paraît d’autant plus rigou- reuse qu’elle s'appuie sur l'identité d'un assez grand nombre d’espèces fossiles avec celles qui vivent dans nos mers.

Le nombre des espèces vivantes de Lucines connues de Lamarck était peu considérable, même en y ajoutant celles des espèces qu’il avait égarées dans d’autres genres, telles que les Amphidesmes, les Vénus, les Cylhérées. En 1843, mademoiselle Catlow en comptait 33 espèces dans son Conchological iwmenclator. Aujourd'hui nous en trouvons le double inscrites dans les divers ouvrages de conchyliologie. 11 est vrai que pour nous le genre Lucine est plus étendu que pour la plupart des autres naturalistes , puisque nous y faisons rentrer, ainsi

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qu'on l'a vu, plusieurs autres genres qui en avaient été démembrés. Ces espèces se distribuent dans toutes les mers; il en est quelques unes, qui occupent de grands espaces, soit en Europe, soit en Amérique; il en est d’autres qui sont beaucoup plus localisées. Elles semblent davantage attachées à certaines circonstances ,de lieux et de localités. Parmi toutes ces espèces, il en est quelques unes qui jouissent de la singulière pro- priété de se trouver presque partout dans la zone inlerlropicale. C'est ainsi que le Lucina tigerina , par exemple , habite à la fois le Sénégal , la mer Rouge et le canal de Mozambique, tout le grand océan Indien. Il existe aussi dans le grand Archipel austral , et, enfin, se retrouve dans l’océan Atlantique, aux Antilles, et même, dit-on , sur le continent américain. Si dans les âges futurs de la terre, de nouveaux terrains sont soulevés sur divers points de la surface de notre globe, leur contempo- ranéité se trouvera naturellement établie par la présence du Mollusque dont nous venons de signaler la distribution à l’attention des natura- listes.

Les espèces fossiles sont plus nombreuses. Nous en comptons 242 réparties dans toutes les formations. Leur nombre s’accroît à mesure que l'on remonte des plus profondes aux plus superficielles. Mais quelle que soit la richesse des formations prises en particulier, aucune ne contient autant d'espèces qu’il y en a dans la nature actuelle. Ce genre , témoin de tous les changements qui se sont succédé à la surface de la terre, présente un intérêt particulier, et nous avons en rechercher avec soin toutes les espèces pour les constater d'une manière irrévocable et pour en établir la nomenclature définitive. Nous avons comparé les descriptions, et nous avons pu souvent les comparer aux espèces elles- mêmes. De ce grand travail . il est résulté de nombreuses rectifica- tions dont nous présenterons seulement les principales à mesure que nous indiquerons le nombre des espèces et leur distribution dans chacune des formations géologiques. Mais avant d’en venir à ces détails impor- tants, il nous semble utile de jeter un coup d’œil rapide sur quelques uns des ouvrages dans lesquels les espèces de Lucines fossiles ont été mentionnées d’une manière toute spéciale.

Après avoir relevé un grand nombre d’erreurs dans l’ouvrage de Goldfuss, dans les genres Vénus, Cythérée, etc., il nous est agréable d'en rencontrer beaucoup moins parmi les Lucines. Nous ferons remar- quer seulement que parmi les espèces inscrites dans ce genre par le savant paléontologiste de Vienne , il en est une qui ne saurait y rester : c’est le Lucina lœvis qui doit passer parmi les Cardinia. Une autre, Lucina solida, est une véritable Vénus^ dont la charnière a été détériorée. Nous

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aurons encore quelques observations à faire au sujet des Luema divari- cMta^ uncinata, dentala et saxorum. Elles se trouveront mieux à leur place lorsque nous parlerons de ces especes en particulier.

M. Agassiz a traité des Lucines particulièrement dans son /co?tOj;ra- phio des coquilles terlîan'es , réputées identiques avec des espèces vi~ vantes; il a également mentionné plusieurs espèces de ce genre parmi ses Mactromya, dans un ouvrage non moins important, ses Éludes critiques sur les Mollusques. M. Agassiz est trop haut placé dans la science pour laisser ses travaux sans examen , ses opinions sans critique. Il jouit d'une trop grande autorité pour permettre à des erreurs de s'abriter sous son patronage, pour s’introduire dans le domaine de la science. Elles deviendraient d’autantplus nuisibles qu’elles s'appuieraient sur un plus grand nom pour se maintenir et persévérer longtemps.

Le premier des ouvrages de M. Agassiz , que nous venons de citer, est rempli d'excellentes observations , ainsi que nous l’avons déjà dit en diverses occasions. Nous regrettons, pour noire compte, que cet ouvrage no soit pas plus étendu , et que son auteur n’ait pas appliqué ses inves- tigations à un nombre de genres beaucoup plus considérable. Néan- moins il a posé les vrais principes d’après lesquels on doit procéder à l’examen minutieux des espèces que l’on compare , et il a donné de bons exemples des erreurs qui surviennent à la suite d’un examen moins approfondi. Il faut dire que la science se perfectionne chaque jour. Il faut dire que celte question des analogues , que nous avons rendue si considérable par les nombreuses applications que nous en avons faites , était à peine aperçue il y a un© trentaine d’années par ceux des natu - ralisles qui s’occupaient le plus de l’étude des fossiles. Ils prenaient sans difficullé pour des analogues incontestables des espèces dont les différences s’apprécient aujourd'hui avec la plus grande facilité. A cette époque on se bornait à l’ensemble ; aujourd’hui on descend à l’élude des plus minutieux caractères. Le premier, nous avons donné ce cachet de certitude à l’examen des espèces analogues. Cependant, arrivant dans un temps des^méthodes moins rigoureuses jouissaient d’un grand crédit, il nous est quelquefois arrivé de nous attacher trop scrupuleu- sement à des opinions de Lamarck, que nous aurions abandonner. C’est ce qui nous est arrivé à l'égard de quelques unes des espèces examinées par M. Agassiz. Nous citerons particulièrement le Lucina divaricata , que nous croyions retrouver dans toutes les mers et fossile dans tous les terrains tertiaires; mais déjà depuis plusieurs années des observations sur un plus grand nombre d’individus de toutes les loca- lités avaient profondément modifié notre opinion.

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Rï. Agassiz, malgré lout son soin, n’a pu se soustraire à quelques erreurs d’un autre genre. C’est ainsi , par exemple , qu’il conteste l'analogie- des individus vivants et fossiles du Lucina colutnhella; mais heureusement M. Agassiz donne luL-môme le moyen de remonter h la source de son erreur : il prend pour le Coîumhella vivant, uno coquille qui provient des Antilles, différente sans le moindre doute de l’espèce du Sénégal, et de son représentant fossile dans le second étage tertiaire de l’Europe. II est à présumer que si M. Agassiz avait eu sous les yeux le Lxicina columbelta du Sénégal, il aurait reconnu avec nous son iden- tité parfaite avec l'espèce fossile , si communément répandue dans le bassin de Bordeaux, dans les faluns de la Touraine , etc.

Dans ses études critiques , M. Agassiz a proposé un genre Mactromxja sur des caractères qui ne sont pas semblables dans toutes les espèces qu’il y a introduites. Dans les unes , en effet, nous voyons des impres- sions musculaires médiocres et une impression palléale profondément sinueuse en arrière; dans les autres, au contraire, les impressions musculaires sont très grandes et l’impression palléale est toujours simple. Ce sont ces dernières que nous relirons des Mactromya pour les introduire parmi les Lucines , quoiqu’elles soient généralement plus ovales et plus transverses que ne le sont les autres espèces du même genre. Par leur forme, elles sont intermédiaires entre les Lucines et les Corbeilles, mais elles appartiennent plutôt au premier de ces* genres. Nous avons été conduit au changement que nous proposons par l’étude de charnières parfaitement dégagées et de moules intérieurs d’une par- faite conservation. Ces coquilles, répandues dans les couches inférieures de la grande formation jurassique, commencent à se montrer dans le lias inférieur et quelques unes remontent jusque dans les étages supérieurs connus sous le nom de Kimmeridgo-Klay des géologues anglais. L’une de ces espèces, trouvée dans le lias inférieur d’Hermanstadt, a été prise pour une Cyclade par M. Dunker.

Douze espèces nous sont connues dans la série paléozoïque : deux descendent jusque dans les couches siluriennes, ce sont les Lucina antiquissima et Hisingert; la première a été découverte en Esihoniepar M. Eichwald ; la seconde vient de Gothland, elle a été trouvée par M. Murchison. Sept espèces se répandent dans le terrain dévonien; il serait possible que ce nombre se réduisît à six, s’il était prouvé que le Liicina îineata deGoIdfuss n’est qu’une variété de VAntiqiuila du même auteur ; le plus grand nombre a été trouvé dans l’Eifel ; le Diifrcsnoyi , Verneuil, existe à la fois dans l’Eifel et en Russie; le GriffUhi est propre à la Russie, comme le Dedivis do M. Rœmer n’est encore cité

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que dans le Hartz. Le terrain carbonifère contient trois espèces : l’une d’elles, Lucina unioniformiSf est le type du genre Edmondia do M. de Koninck; elle est à la fois en Angleterre, en Belgique et dans l'Oural,

Le Muschelkalk ne renferme que deux espèces de Lucines ; elles sont très différentes de celles des terrains sous-jacents, elles proviennent toutes deux de SainL-Cassian ; l’une d’elles , le Duplicata., Munster, est remarquable par une lunule très grande, séparée par un sillon aigu et profond.

La longue série des terrains jurassiques n'a jusqu’ici révélé l’exis- tence que de_ vingt-quatre espèces de Lucines. Quatre sont dans le lias ; celle qui apparaît la première est le Lucina liasina, Mactromya liasina d’Agassiz; elle se montre dans le lias inférieur d'Hettange, près Thionvilie , elle est citée par M. Terquem ; elle passe dans les assises moyennes et supérieures de ce terrain, et nous la retrouvons dans les couches les plus inférieures de Toolite. Cette espèce a de l’importance parce qu’elle existe à peu près partout le lias se rencontre ; elle peut aider à le caractériser. Il en est de môme à peu près du Lucina œqualis , Mactromya œqUalis , Agassiz: il commence seulement plus tard dans la partie moyenne du lias. Si l'on rapproche les figures que Zielen et Goldfuss ont données du Lucina plana , on est surpris de leur trouver si peu de ressemblance, à ce point que l'on pourrait croire qu’elles représentent deux espèces très différentes, et cela est fâcheux, car l'espèce de Goldfuss est assez communément répandue dans le lias. Quant au Lucina elegans de MM. Koch et Dunker, il devra changer de nom, parce que depuis très longtemps, 1827, M. Defrance avait imposé ce nom à une espèce du bassin de Paris; nous proposons pour celle du lias le nom do Lucina Dunkeri.

Le groupe oolitique inférieur recèle sept espèces seulement, parmi lesquelles nous devons particulièrement citer \g Lucina cardioides (Cor- bula cardioides, Phillips, Mactromya, Agassiz). H est très répandu en Allemagne, en Suisse, en France et en Angleterre; nous devons citer encore le Lucina lyrata ûq M. Phillips, qui se rencontre plus spécialement dans le Kelloways-Rock en Angleterre , en Lorraine et en Allemagne,

Dans le groupe oolitique moyen nous comptons dix espèces, huit dans les couches oxfordiennes, deux dans le coral-rag: il esta remarquer que presque toutes celles de l'oxford proviennent de la Russie, spécia- lement des environs de Moscou. Il y en a une le Lucina phillipsiana , d'Orbigny, qui se montre en môme temps en Angleterre et en Russie. Celles du coral-rag sont citées en Angleterre et en Allemagne, le

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Lucina aliéna de Bronn , par. exemple, Astarte aliéna de Phillips, Aslarle rotuudata de Rœmer et de Goldfuss. Le Lucmu obliqua , qui est dans le coral-rag d’Allemagne et de Frapce , devra changer de nom; celui choisi par Goldfuss ayant été appliqué par Defrauco à une espèce de. Hautevilie. Nous djOnnerons le nom de Lucina Goldfusi à l'espèce du savant paléontologiste allemand. Nous possédons quatre autres espèces encore inédites de Lucines du coral-rag : lune est de Luc (Calvados) , nous Pavons retrouvée à Commercy (Meuse) ; une autre est la géante du genre , elle vient de Sampigny ( Meuse) , elle est fort aplatie, elle a jusqu’à 4 centimètres de long et 1 0 de large. Nous connaissons cinq espèces seulement dans le groupe oolilique supérieur,- deux dans le Kimmeridge et trois dans le Portland. Quelques unes, et le Portlandica entre autres , se montrent en France et en Angleterre ; elle paraît des- cendre dans le Kimmeridge- Klay.

Les paléontologistes ont signalé jusqu'à vingt-neuf espèces de Lucines dans -la formation crétacée, nous en connaissons cinq dans le terrain néocomien, l'une d’elles. Lucina globiformis , Leymerie. se trouve en France et en Angleterre; s’il est vrai , comme le croit M d’Orbigny, que le Luema soUdula de M. Forbes soit la môme que le Dtipinkina, il y aurait alors une espèce de plus commune aux deux pays , et une espèce néocomienne de moins. Dans le gault et le sable vert supérieur il y a sept espèces , parmi elles la Lucmu sculpta , Phillips , passe d’Angle- terre en France: il en est de môme de POrWeu/aris de Sowerby. Mais cette dernière devra changer de nom , parce que dès 1831, nous avions imposé cette dénomination à une espèce des terrains tertiaires de l’Italie et de la Morée. Nous proposons le nom de Lucina Sowerbyi, pour l’espèce crétacée ; Puue des espèces a été nommée Lucmu globosa par M. Sowerby. Si l'auteur avait consulté les catalogues , il y aurait trouvé déjà deux espèces portant le môme nom; depuis, d’autres naturalistes Pont encore employé. Cette dénomination spécifique doit rester à une espèce vivante nommée par Chemnitz. En souvenir de ses beaux travaux sur la craie de l’Angleterre, nous donnons au Gïoèosa de Sowerby le nom de Luema Fittoni. La craie chlorilée contient neuf espèces ; elles proviennent , pour le plus grand nombre, de Bohême et de AVestphalie Les paléontologistes allemands ne sont pas eux-mômes d’accord sur plusieurs de ces espèces; à en croire MM. ReusS et Bronn , il faudrait les réunir presque toutes au Lentkularis do Goldfuss ; les unes ayant été faites sur de jeunes individus , les autres sur des individus dont la forme a été modifiée par des compressions dans divers sens avant la solidifi- cation définitive de la roche; c’est ainsi que les Lucina lens , Rœmer,

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Reichîi et Circuîaris de Geinitz devraient passer dans la synonymie du Lentîcularis. Cette dernière par sa distribution aurait un intérêt parli- culior, car elle se trouve on Westpbalie, en Bohème et dans les craies supérieures do Maeslrichl. Les autres espèces sont do France et d'An- gleterre. Deux espèces existent dans la craie blanche , Tune en Cham- pagne, Taulre en Touraine. M. d’Orbigny les a fait connaître Tune et l'autre. Trois autres espèces ont encore été signalées dans la craie, l'une en Amérique, par M. d'Orbigny; les deux autres dans la craie do l'Inde, dans les environs de Pondichéry, parM. Forbes.

Les terrains tertiaires renferment à eux seuls beaucoup plus d'espèces do Lucines, que cette longue suite de dépôts sédimentaires qui les ont pré- cédés. Nous en avons décrit vingt-cinq espèces dans noire Ouvrage sur les fossiles de Paris, Nous en connaissons actuellement le double auxquelles il ftuidra joindre les dix-huit espèces qui sont déjà connues on dehors du bassin de Paris , mais dans les terrains du môme âge. Aujourd’hui la faune des sables de Fontainebleau a été explorée plus complètement qu’aulrefois ; elle se distingue aussi nettement de la faune parisienne, proprement dite, que de celles de Télage tertiaire moyen entre lesquelles elle est placée. On doit à un savant et laborieux géologue , M. Hébert , des observations précieuses à ce sujet : le premier, il a entrevu l’ana- logie de celle faune des sables de Fontainebleau avec celle du Limbourg, et à Tavenir nous mentionnerons à part les espèces do cette faune, tout en les conservant dans l’étage tertiaire inférieur. Plusieurs espèces du bassiu de Paris méritent une attention particulièro , soit à cause de leur distribution , soit à cause des rectifications que leur nomenclature exige.

V Lucina angiiîata , Tiesh.

Axinus angulalits, Sow., Nyst, de Koninclc, Michelollî, Broun, etc., Phgchina bipUcalaj Philippi.

Nous commençons par cette espèce, l’une des plus intéressantes du genre. Sa forme singulière l’a fait considérer comme le type d’un genre particulier auquel nous avons consacré précédemment quelques obser- vations. Par sa distribution dans les terrains tertiaires; cette coquille mérite une attention spéciale, nous la voyons apparaître, pour la pre- mière fois , dans les couches les plus basses de l’étage tertiaire infé- rieur. M. Sowerby l'avait signalée depuis longtemps dans les argiles de Londres ; M. de Koninck dans les argiles de Boom en Belgique , du mémo âge ; plus récemment nous l’avons découverte dans les sables de Retheuil , et M. Hébert vient d’en retrouver une variété plus gonflée dans les sables de Châlons-sur-VesIes , parallèles à ceux de Bracheux. On no rencontre plus cette espèce dans le calcaire grossier, mais elle

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passe dans l’étage tertiaire moyen ; elle est spécialement à la Superga, , près de Turin. Elle disparaît encore une fois, elle n’est point citée dans les argiles ou les sables subapcnnins ; puis elle se montre de nouveau dans les sables supérieurs de Palermo; enfin , elle vit encore dans la Méditerranée. Voilà donc une espèce qui a traversé toutes les périodes tertiaires, sans éprouver de modifications bien sensibles, et qui est encore actuellement vivante; elle présente ce phénomène remar- quable de paraître et de disparaître à trois reprises différentes. Il est à présumer cependant que des recherches ultérieures en indiqueront l’existence dans des couches intermédiaires elle n’est pas connue aujourd’hui.

Les quatre espèces suivantes : Lucina sulcata , squamula , con- centrica , ambiguaj sont communes au bassin belge et à celui de Paris. L'une d’elles, le Lucina squanmlat a été citée par M. Grateloup, dans le bassin de Bordeaux; mais nous pensons que celle de Bordeaux est différente. M. Defrance lui a donné le nom de Lucina lamelîosa.

Nous nous sommes expliqué tout à l’heure au sujet du Lucina dîvaricata. Cette espèce ne passe pas dans toute la série des terrains tertiaires ; elle y est représentée par des espèces très voisines. Celle du bassin de Paris , nommée Lucina pulchella , par M. Agassiz , se propage dans toutes les couches marines de ce bassin , et elle joue le même rôle dans les bassins de Londres et de Belgique; une autre espèce l’accom- pagne, c’est le Lucina milis.

Lucina saxorum , Lamk. , très commune dans les calcaires gros- siers , ainsi que dans les sables marins moyens du bassin de Paris ; elle se retrouve aussi en Belgique, et dans le terrain nummulitique des environs de Nice à la Pallarea. Le Lucina saxorum de Goldfuss est une espèce distincte propre aux sables de Fontainebleau et du Limbourg ; celle de M. Michelotti est différente des deux autres et doit recevoir un nom nouveau.

Lucina mulahiîis , Lamk. ; elle a exactement la même distribution que la précédente. M. Grateloup la mentionne aux environs de Bor- deaux ; nous ne l’y avons jamais vue , quoique nous ayons consulté les collections les plus riches de cette localité.

Lucina fortisiana , Def. ; celle-ci se rencontre a la fois à Valo- gne, à Paris et dans les calcaires grossiers de Blaye.

Le Lucina gîganlea , Desh., ne s’est pas trouvé à Vaîognç , mais il est en Angleterre, et comme la précédente, dans les calcaires gros- siers'de la Gironde.

8” Le Lucina gibhosuïa est encore plus répandu que les précé-

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dentes ; elle est connue dans le bassin de Paris, à Rdnca , h Castel Gomberto, et dans le calcaire nummulitique de la Pallerea. Nous la rapprochions autrefois d'une espèce qui eh est très voisine, et qui est propre à l’étage tertiaire moyen, M. Bronn lui a donne le nom de Luchia Iransversa.

Nous avons quelques rectifications à faire à l’occasion de plusieurs autres espèces de l'étage tertiaire inférieur. Le Lucina alhella de M. Nyst, par exemple, n’est pas identique avec celui de Paris. M. Hébert en a fait une espèce distincte sous le nom de Lucina Thie- rensi. Goldfuss a cru retrouver le Lucina uncinala des sables inférieurs de Paris, dans ceux d’Alzey et de Bunde. Entraîné par l’autorité de Goldfuss, M. Nyst a attribué le même nom spécifique h une coquille de Kleinspauwen qui est, en etfet, analogue à celle de Goldfuss; mais toutes deux diffèrent de celle de Paris, et devaient recevoir un autre nom. M, Hébert a reconnu l’erreur commise par M. Nyst, et a donné le nom de Lucina lenuistria à l’espèce de Belgique. Les sables deSaucats, près Bordeaux , recèlent une espèce très voisine du Lucina rennlata des calcaires grossiers de Paris. J\l. Bastérot d'abord, et M. Grateloup, plus lard , ont confondu les deux espèces ; nous proposons pour celle de Bordeaux le nom de Lucina profiinda.

Nous devons encore mentionner quelques espèces qui ont vécu plus spécialement dans chacun des bassins tertiaires inférieurs. Les Lucina allaviltcnsis et obliqua, Def., ne se trouvent qu'aux environs de Valogne. Les Lucina Volderiana et Galcotliana de M. Nyst, ne sont qu'en Belgique; le Lucina GoodhalH, Sowerby, ne s’est jusqu’ici ren- contré que dans le bassin de Londres ; tandis que les Lucina corbarica et sulcosa sont propres aux terrains nummulitiques des Pyrénées. II est facile de comprendre que toutes celles des espèces non mentionnées précédemment sont particulières au bassin de Paris , et lu caractérisent.

Les sables de Fontainebleau et les couches qui les représentent dans le Limbourg et sur les bords du Rhin, renferment huit espèces, sur lesquelles nous devons nous arrêter un moment; plusieurs so trouvent en même temps dans le bassin de Paris et dans d'autres localités. Ce sont les Lucina squamosa , Tfiierensi et Heberti. Nous avons vu que le Thierensi est ÏAlbcHa do M. Nyst , et nous proposons le nom de Lucina Heberti pour l’espèce confondue avec le Saxorum par Goldfuss. Le Luciiia tenaislria se trouvé a AIzey et à Klainspauwen. Le Parvuîa de Munster se montre dans les mêmes lieux, et de plus à Cassel, d’après M. Philippi. Il en est de même du Slriatula de Nyst. Goldfuss a assi- milé au Lucina denlala , de Bordeaux , une petite espèce qui est abon-

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dante à Bunde el à Cassël ; cependant ces coquilles offrent des caractères qui les distinguent constamment; l’espèce de Goldfuss devra donc recevoir un autre nom , et nous lui imposons celui de Cordiformis , à cause de La profondeur de ses valves.

Quarante-trois espèces sont connues dans l’étage tertiaire moyen; déjà dans cet étage commencent à se montrer un assez grand nombre des espèces qui ont leurs représentants dans la nature actuelle. Nous les voyons apparaître dans les divers bassins du môme âge; quelques unes échappent aux dépôts plus récents , quelques autres s'y mêlent avec une nouvelle population ; parmi les espèces perdues , il y en a aussi quelques unes qui passent dans l'étage tertiaire supérieur; le plus grand nombre reste a ttaché à l’étage qui les a vus naître et qui les voit également périr.

II y a de ces espèces qui sont localisées; nous en comptons six dans les couches du Piéniont» la Superga, Tortone, etc. ; parmi lesquelles nous citerons le Luc/na miocemctt, ['Unguis^ \eTau)'inia. Sept espèces sont propres au bassin de l’Adour, el ne se montrent pas ailleurs : ce sont les Lucina dentata , Neglecta, de Bastérot, Trigonella , profunda ^ muUilameîlata , globulosa et globularis; cette dernière espèce devra recevoir un autre nom ; celui-ci ayant été employé depuis longtemps par Lamarck , et attaché à une espèce vivante , nous proposons pour elle le iiohi du savant qui en a fait la découverte , Lncina GrateloupL Deux espèces les Lucina exigua el nivea, d'Eichwald , paraissent ne pas sortir du bassin tertiaire du Nord.

Voici quatre espèces (pii méritent une attention toute spéciale, parce que, sans quitter l’étage moyen , elles se trouvent dans plusieurs loca- lités à la fois.

1“ Lwcma îamellosa , Def., confondue par M. Grateloup avec le Sqiiamula de Paris ; se trouve en môme temps en Piémont, à Dax, à Bordeaux et dans le bassin de Vienne.

Lucina Agassisi , Michelotti , s’est rencontrée à Turin , à Dax et à Bordeaux.

Lucina Dujardinii , Desh. Nous donnons le nom de ce savant plein de mérite à l'espèce qu’il a prise pour le Lucina lactea; ces deux espèces sont extrêmement voisines , cependant la fossile a quelques caractères constants (jui la différencient de 1 espèce vivante; elle se trouve à Turin et dans les faluns do la Touraine.

4“ Lucina scopuloruin , Brong. Celle-ci a un intérêt bien plus grand encore que les précédentes; car elle se présente à la fois et en abon- dance dans tous les bassins de l’étage tertiaire moyen ; elle est du Vicentin , de Bordeaux et de Dax, des faluns de la Touraine. M. Dubois

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•(le Montpëreaux l’a décrite de Wolhynie, sous le nom de Lucma incras- sata; elle se trouve également aux environs de Vienne.

Nous avons trois espèces qui ont pris naissance dans l’étage moyen , et qui remontent dans l’étage supérieur pour s*y éteindre.

Lucma leoiiina, Bastérot; elle est à Bordeaux, k Vienne et à Asti,

Lncîna astensis qnl J sans sortir du Piémont, est dans les deux étages tertiaires.

3” Lucina transversa ^ Bronn, nommée plus 'lard Irregularis, par Audrzjousky, et confondue par M. Bastérot avec le Gibbosuîa de Paris. Cette espèce est particulièrement commune dans l’étage moyen, mais elle passe dans l’étage supérieur, d’après M. Phiiippi ; elle .est en Podolie, à Bordeaux, à Turin et en Sicile.

Des sept espèces encore vivantes, qui commencent dans l'étage tertiaire moyen, il y on a deux qui ne se retrouvent pas dans l'étage supérieur, ce sont le Lucina ornata, Agassiz, el Columbella , Lamie.

Le Lucma ornata a été séparé du Divaricala pour l’espèce qui est si abondante à Bordeaux, à Dax , en Touraine, et dans les autres bassins du môme âge, Vienne, la Wolhjmie, etc. ; il vit aujourd'hui au Sénégal; ce n’est pas celte espèce qui est en Sicile et en Italie; c’est le Bharicala véritable qui se trouve dans ces lieux.

Le Lucma cohmbellaest encore plus répandue que la précédente; elle est en abondance dans tous les bassins depuis la Wolhynie et la Podolie jusqu'à la Snperga près de Turin ; une variété peu importante a été distinguée sous le nom de Lucina candida, par M. Eichwald. Cette coquille est vivante dans les mers du Sénégal elle est très abon- dante. M. Phiiippi en cite une valve fossile de Sicile , dans un tuf basal- tique ancien, mais est-ce bien identiquement la même espèce? Nous faisons cette question parce que cette espèce se trouverait avec d’autres beaucoup plus récentes qui, pour la plupart, vivent encore dans la Méditerranée.

Les six espèces suivantes passent dans les terrains supérieurs et vivent encore aujourd'hui.

Lucma spmî/cra , Philjppi , Lucina hyatellokles , Bastérot, Venus spinifera, Monlagu , est une petite coquillp aplatie , ornée d’un rang d'écaillcs spiniformes sur le bord du cors?!et; elle est fossile à Bor- deaux, à Turin, et dans l’étage supérieur en Sicile, en Céphalonie, etc. Elle est vivante dans l'Océan d’Europe ; nous en avons un individu de la côte occidentale de l’Afrique.

4" Lucina Inpiims (^Venus hipinus, Brocciii); elle est distribuée de la

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même manière que la précédente , mais de plus elle est en Morée et à Turin ; elle vit dans TOcéan. d'Europe. «*

5“ Lucina pecten^ Lamk. Cette coquille est très abondante dans toute la Méditerranée ; elle est fossile en Sicile et en Morée. Nous la con- naissons également de Saint-Avit, departement des Landes, d’où M. Hébert Ta reçue; elle est également en Wolhynie; elle nous a été communiquée de cette dernière localité par M. de Hauer.

6“ LucÎ7ia rotundata , Desh,., TeUina rolwulata , Mont,, Diplodonta, Philippi, est une coquille qui aujourd’hui vit uniquement dans la Médi- terranée; autrefois elle occupait une plus vaste étendue, puisqu’elle se retrouve dans le crag d’Angleterre, au dire de M. S. Wood; elle est aussi fossile en Sicile et en Morée.

Lucina spurîa j Desh., Venus spuWa, Gmelin , Lucina raâula ^ Lamk,, Venus circinnata, Brocchi, Lucina anliqüata ^ Sowerby, Lucina affiiiis , Eichwald ; c’est peut-être la Venus borealis de Linné, mais nous n’avons aucun moyen de nous en assurer, la description de Linné étant insuffisante. Voilà une espèce qui a reçu cinq noms; nous avons reprendre le plus ancien, celui de Gmelin. Vivante dans tout rOcéan d’Europe , depuis les mers de Norwége jusqu’à la Méditerranée; elle est abondamment répandue à l’état fossile dans le crag d'Angle- terre et de Belgique. M. de Hauer nous l’a communiquée de Wolhynie, elle a été également rencontrée par M. Dubois de Montpéreux*; enflii, elle est dans les terrains supérieurs en Italie, en Sicile et à Üddevalla en Norwége.

Nous avons déjà cité deux espèces du crag; elles ne sont pas les seules qui se trouvent dans ce terrain , il y en a sept autres , dont les unes sont propres au crag d’Angleterre et les autres à celui de Belgique. Il paraîtrait qu’une seule, Luema aslartea , Nyst, serait commune aux deux pays, mais nous pensons que les rapports des espèces entre elles seront changés par une étude ultérieure que nous n’avons pu entre- prendre, faute de matériaux suffisants.

En comprenant les cinq espèces précédentes parmi celles de l’étage supérieur, nous en comptons vingt seulement ; la différence dans le nombre des espèces des deux terrains est de plus de moitié , et encore pourrait-on dire de près des deux tiers , si l'on excluait les cinq espèces communes entre les deux épêques tertiaires.

Six espèces du terrain tertiaire supérieur sont déjà éteintes ; parmi elles nous remarquons deux Luema gîobosa: l’une citée par M. Sis- monda dans son Stjnopsis , comme inédite du Musée de Turin , elle a été nommée par Bonelli ; l’autre est le Globosa de Defrance , Venus T. ï. PARTIE. 5o*

VINGTIÈME FAMILLE.

786

gîohosa de Brocchi. Nous avons dit précédemment à quelle espèce vivante ce nom de Ghhom devait être appliqué; les deux espèces fos- siles que nous venons de citer devront donc recevoir d'autres noms : à la première nous donnons celui de Litchia Sismondæ; a la seconde celui de Lucina Brochii, Brocchi a cru trouver fossile en Italie l’ana- logue d’une Lucine des mers d’Amérique, connue sous le nom de Pensylvanica ; le rapprochement des deux types nous a fait reconnaître les différences spécifiques qui les séparent. En conséquence l’espèce fossile a prendre un autre nom , et noos lui avons imposé celui de Lucina orbicularis; elle se trouve en Italie et en Morée.

Des sept espèces, dont les analogues vivent encore, trois se trou- vent dans la Méditerranée , et sont fossiles en Sicile : ce sont les Lucina fragilis , digitalis et commutata.

Le L«cma îaetea, vivante dans les mers d’Europe, est aussi fossile en Sicile , mais de plus à Asti et en Morée.

Les Lucina flexuosa et undata , vivantes dans l’Océan d’Europe , sont fossiles dans les terrains supérieurs de l’Angleterru.

Avant de franchir l’océan Atlantique pour examiner les Lucines du continent américain , nous nous arrêterons en Égypte pour y constater, dans les terrains quaternaires, la présence du Lucina tigerina, qui vit dans la mer Bouge ; nous nous arrêterons aussi à la Guadeloupe , la même espèce est également fossile et vivante ; mais elle n’est pas la seule, elle est accompagnée des Lucina jamaicensis et edentula; nous avons le moule d'une quatrième espèce , qui pourrait bien être celui du Lucina punclata , mais il est plus renflé que cette espèce ne Test habi- tuellement.

Les terrains tertiaires de l’Amérique septentrionale sont fort riches en Lucines fossiles. M. Conrad en a signalé récemment quatre espèces dans un terrain tertiaire inférieur très analogue à celui de Paris , par l'ensemble de la faune ; parmi ces espèces, il en est une, le Perîevis, qui a la plus grande ressemblance avec le Retiulala de Grignon ; les autres espèces, au nombre de quatorze, se distribuent dans les terrains plus récents. Un naturaliste américain d’un grand mérite , M. Lea , en a fait connaître six espèces (conlnhulfon on Geoîogy)^ provenant d'un terrain tertiaire moyen ou inférieur de l’Alabama ; parmi elles , celle que l’auteur nomme Corniita , a beaucoup de rapports avec le Lucina angu- lata (Aæfutis angulatiis, Sow.). Los autres espèces de TAmérique ont été décrites par M. Say ou par M. Conrad ; elles sont du Maryland , de Claiborne et des bords du Mississipi.

Enfin , pour terminer cette longue série d’espèces, nous dirons que

LES LUCINES.

787

M. d’Orbigny a trouvé dans les terrains tertiaires supérieurs une espèce qui vit encore dans les mers du Chili , c’e'st \e Lxtcîna fialagonica.

Nous n'avons pu nous dispenser d’entrer dans les longs détails qui précèdent.; il nous a été impossible d’abréger davantage ce qui con- cerne un genre aussi important qui celui-ci, dans lequel sont rassem- blées plus de trois cents espèces. Près des trois quarts ces coquilles sont fossiles et réparties dans toutes les formations. Nous avions aussi plus d’un double emploi à rectifier, plus d'une erreur à redresser, pour rétablir d’une manière certaine les espèces de chaque formation de chaque térrain. Nous ne suivrons jamais le fâcheux exemple de ces naturalistes qui semblent faire sortir la science toute faite de leur conception, sans aucune discussion, sans rappeler aucun précédent, dédaignant , pour ainsi dire, de s’expliquer et d’éclairer leurs lecteurs , s’imaginant sans doute par persuader qu’ils en sont les premiers in- venteurs.

Lncine d’Emond. Lucina untoniformis , Desh. , ^ .

PI. 14 Ô25. f. 7. 8. 9.

E, Testa ovato^rotunâatâ^ rugis transvhrsalibus^ tenue stnatis obâuctâ; hinula lanccolatà; umhonibus maxime recurvntis,

K/ï/owr/or/niV. Phillips, Geol, ofYo)k5, t.a.p. 209. pL 5. f. i3.

Edmondia unioniformis\ Koninck, Descript. des auim. foss. de Belg. p. 67. pl. I. f. 4.

Id, de Verneuil, Paléont. de Rassie, p. Sgo.

Habile.,. Fossile dans le terrain carbonifère de Belgique, de l’Angle- terre et de l’Oural.

Celte coquille est celle pour laquelle M. de Koninck a fondé son genre Edmondia. Nous avons dit pourquoi nous n'adoptions point ce genre , il présente tous les caractères de l’un des groupes encore vivants du genre Lucina. Cette coquille est ovale, orbiculaire, gonûée, subcordiforme ; elle est inéquilatérale; sa surface extérieure est couverte de rides on de sillons inégaux produits par des accroissements. Les bords sont sim- ples, et la coquille parfaitement close. La charnière se compose d’une lame assez large, un peu oblique, sur laquelle s’attachait un ligament externe presque complètement caché par le bord saillant du corselet. Cette lame se continue en avant au delà du crochet , et M. de Koninck a cru voir dans cette particularité un caractère d’une grande valeur de son nouveau genre ; mais si l’on vient à supprimer, par la pensée , les

5o*

)

^88 VINGTIÈME FAMILLE.

petites dents cardinales du Lucina lactea j par exemple, on voit aussi la lame cardinale dépasser le crochet et s’étendre assez loin sur le côté antérieur. On ne peut juger des impressions musculaires et du manteau que d’après des moules intérieurs de la coquille. Les impressions mus- culaires sont grandes, ovalaires,, presque égales et assez semblables à celles des Diplodontes. L’impression palléale est simple et peu apparente.

Cette coquille a 22 millimètres de diamètre transverse et 20 de hauteur. ,

Lucine changeante. Lticzna mutabilisy Lamk.

PI. 16. f. G.

X. Testa orbicniato-ovaiâ^ obliqua, oompressâ ; intiis. valvîs radiaùin striatis ; cardine edentuîo^

Venus mutahiVis.'LtimV^ Ann. du Mus. vol. 7. p.ôr.et t. 9. pl. Si. f. 9.

Luctnajnutabills, Lamk. ans. vert, t, 5, p. 540, n®4.

ldi Defr. Dict. sc. nal. t. 3

Desh. Descr. des Coq. foss. de Paris, t. i, p. 92 pl. T4, f. 6, 7.

Id, Encycl. mélli. Vers. t. 2. p. 573. 4.

Sow. Gener. of shells. 27. f. 5,

Desli. Lamk. Anim. s. vert, 2*2 édit. l. 6. p. 224, 4*

De lïurf, Orycl. de Brux. pl. 18. f. e.

Galeotti, Géog. du Brab, Mem. acad. Brii.\, t. r2. p, 157. n**

Oral. Cat. anim. foss. de La Gironde, p. 64. 719.

Eoliez et MicliauJ, Cnl. Moll, de Douai, t. 2. p. 199. ti" 4,

Nyst, Defcr. coq. foss. Belg. p; 120. 78.

Habile... Fossile dans le bassin de Paris, dans celuideValogne, en Belgique, aux environs de Nice, à la Pallarra , dans le terrain nummnlilique.

Cette coquille est trop connue pour avoir besoin d'ôtre décrite de nouveau. Nous ferons observer seulement que Lamarck confondait avec elle une espèce qui en est voisine, d’où lui est venu probablement le nom 4e MtUahilis que lui a imposé le célèbre professeur. Cette coquille n’est pas plus variable que les autres Lucines ; il suffit de l’avoir vue une fois pour la reconnaître toujours avec la plus grande facilité. Sa charnière est sans dents ; son impression musculaire antérieure est excessivement longue, et, enfin, la surface interne des valves est profondément découpée par des sillons nombreux et rayonnants. Cette coquille acquiert quelque- fois un volume assez considérable.

Les grands individus ont 0 à îO centimètres de longueur.

LES LÜCINES,

789

Lucine dts rochers. Lucina scopulorum^ Brong.

PI. 16. f. 7. 8.

Testa QrbicuJarl^ îçnticuîarî ^ dcprcs^â obliqua transversim irregu- lariter striata^ ninbombus minimis obliquis; îunuîâ parva^ ovato^lan^ ceolatâ; cardine edentulo } impressione muscuîari anticâ angustâj subperpendicuîari,

Brongniart, Terr, viceàt. p. 79.

Bastérot, foss, de Bord. p. 87. 11° 8.

Lttcuia incrassata. Dubois de Mootp. Foss, de Wolhy« p. 58. pl. f. I, a, 3.

Dujardin, Foss. de Tour. p. aSg, 5.

Graleloup, Cal. zool. p. 64. 7.

Habile... Fossile dans le Yicenlrn, à Bordeaux, à Dax, dans les faluns de la Touraine, en Podülie , en Wolhynie, aux environs de Vienne.

Coquille très répandue dans l'élage tertiaire moyen, elle est commune dans toutes les localités ce terrain existe; elle peut donc servir à le caractériser, et à cause de cela, elle mérite d’Ôtro connue des géolo' gués. Elle est obrondo , circulaire, déprimée et lenticulaire; sa surface extérieure est couverte de stries peu régulières d'accroissement. Les crochets sont petits , obliques ; ils s’inclinent au-dessus d’une lunule très petite , ovale , lancéolée , et profondément creusée. Au-dessous de cetto lunule, quelques rides irrégulières semblent séparer une lunule plus grande. Le èorselet n'est point marqué; les bords des valves sont sim- ples : le bord cardinal est étroit , il ne porte aucunes traces de dents , soit cardinales, soit latérales. Une rainure, assez profonde, détache la nymphe du ligament, et elle est dominée par un bord fort saillant du corselet. L’impression musculaire antérieuro est étroite et peu allongée ; elle se dirige perpendiculairement de l’extrémité du bord cardinal vers le bord inférieur. Ce caractère est l'un de ceux qui distinguent le mieux cette espèce et la fait reconnaître parmi ses nombreuses congénères.

Cette coquille a 40 à 45 millimètres dans scs doux diamètres.

Lucine colombelle. Lucina columbella^ Lamk.

PL 15. f. 4. 5. 6,

Z. Testa aîbà, suhorblculatâ , convexo^gibbosâ, transversim multila- ineüata; lunttlâ magna ^ cordatd y sulco profundo separatu: ano magna y ovafo, lamelloso; sulco distincto^

Bastéroi. de la Sôc, d’hi'l. tiat. de Paris pi. 5. f. ir.

790

VINGTIEME FAMILLE.

MatheroD, Gat. méth. p. i45, 102.

Schmidt, Petref. Buch. p. i55.

Smith, quart. Jouro. geol, soc. t. 3. p. 412.

Philippi, Moll. Sicil. L i, p. 35. 7 ; t. 2. p. 26. 8.

Lucina Basterotî, Agassiz, Etud, crit. p. 58. 2. pl. 2. f. i à 6,. Lucina vulnerata, DeFrahce. Dict. sc. nat. t. 27. p. 275.

Liicina candida. Agassiz, Élud. crit. p. Sq. 3. pl, 2. f. 7 à i3. Lucîna Sismonda, Syu. Ped. foss. p. 16.

Dubois de Monip., Foss, de Wolhy. p. 57. no 3. pl, 6, f. 8, 1 1 . Lucina candidù. Eichwald, Arch. de Karst. t. 2. p. i3i.

Dujardin, Tour, p, 258. ii“ i.

Desh. Encycl. mélh. Vers, t, 2, p. 383,

Pusch, Pol. paléout. p. i83.

^roun, Lelb. geogu. t. 2. p. gSg. pl. 37. f. i3,

Hauer, Jahrb. 1837, p. 423, 661,

Grateloup, Cat. zool. p. 64. u** 6*

Geioitz, Giundriss, t. 2. p. 439. pl. x8. f. 9.

Habite le Sénégal. Fossile à Bordeaux , Dax , Turin , faluns de la Tou- raine , la Podolie , la Wolhynie , les environs de Vienne.

Cette coquille, très abondante dans les mers du Sénégal, présente Tanalogie la plus incontestable avec les individus que l’on trouve fossiles en grand nombre dans toutes les localités se montre l’étage tertiaire moyen. Lorsque l’on rassemble un grand nombre dindividus, soit vivants , soit fossiles , on remarque quelques variétés parmi lesquelles on distingue celle pour laquelle M. Eiohwald a fait son Lucina candida. Celte même variété a été acceptée comme espèce par M. Agassiz , ce qui nous prouve que ces savants naturalistes n'avaient pas sous les yeux un nombre suffisant d’individus provenant de localités diverses. 11 n’est pas nécessaire que nous reproduisions ici la description d’une coquille aussi connue que le Lwcina co/um6ei/a. Les individus jeunes sont plus aplatis, les vieux sont presque sphériques, La surface est ornée de lames Iransverses courtes , régulières , concentriques plus ou moins serrées selon les individus , toujours plus rapprochées vers le bord des valves des vieux individus. Cette coquille est remarquable par la gran- deur de sa lunule et de son corselet qui sont presque égaux , et l’un et l’autre séparés par un sillon profond. Les bords des valves sont finement dentelés. La charnière porte deux petites dents cardinales inégales et deux grandes dents latérales. La dent latérale antérieure de la valve

LES LÜCINES. 791

droite est conique , pointue et un peu comprimée à la base. Cette coquille est toute blanche en dedans ; elle est jaunâtre en dehors.

Les grands individus ont 27 millimètres do hauteur et 24 de largeur.

Lucine spinifere. Luçina spinifera^ Philippi.

PL 17. f. 3. 4. 5.

Z. Testa ovatâ^ transversâ ^ lenticularî ^ compressiusculâ , striis conccn" tricis numerosis lamelltformibus ; îunidâ impressâ îanceolatâ ; area utrinque squamis brevibits spinosis cinctâ; cardine dentibus latera^ îibns remotis,

Thomp, Fauna Jreî, (Invert,), p, a6i.

Venus spinifera. Mont. Testac. Brit.

Lucina hiateîloides. Ba&t. foss. de Bord, p. 87, pl. f, i3.

Uicina hiateîloides, Sismonda, Synop. Ped. foss. p. 17.

Lucina spinifera, Slrickland, quart. Jour. geol. soc, t. 3. p. iio.

Lucina hiateîloides, Michelotti, Faune miocène, p. 116. pl. 4. f. ii,

Catlow, Couch. nom. p. 27.

Hanley, Desc. cat. p. 78.

Lucina hiateîloides, Phil. Moll. SicÜ. t. i. p. 32. 11® 2. p. 34. n“ 3.

Lucina spîrifera, Phil. Moll. Sicil. t. 2. p. 25. n'’ 3. p. 26, 3.

Lucina hiateîloides, Gratel. Cat. zool. p. 64. 727,

Jd. Dujardin, foss. de la Tour, p, 259.

Habite les mers d^Ëurope, la Méditerranée.. Fossile à Bordeaux, à Turin, en Touraine, dans l'étage moyeu; en Sicile, dans Pile de Céphalonie, étage supérieur.

Petite coquille fort intéressante; elle passe de la Méditerranée dans les profondeurs de l’Océan, et gagne aiusi la mer du Nord. Elle est ovale , transverse , très comprimée ; sa surface externe est couverte de fines lames transverses assez régulièrement espacées , mais peu rappro- chées vers les bords. Les crochets sont petita, rapprochés, comprimés; ils partagent le bord dorsal en deux parties à peu près égales ; ils domi- nent une petite lunule étroite et lancéolée. Le corselet est lui-même très étroit et allongé sur son bord externe ; les lames s’y terminent en une écaille spiniforme. Le bord cardinal est étroit ; il présente deux petites dents cardinales et deux dents latérales petites et peu saillantes. Les impressions musculaires sont médiocres, l’antérieure est bilobée, à peine prolongée, à son extrémité inférieure.

Les grands individus ont jusqu’à 1 ë et 1 8 millimètres transverses.

VINGTIEME FAMILLE.

792

Lucine lactée. Liicina lactea, Laink, PL 17, f. 1. 2.

Jv, Testa lentiformiy gibbâ, albâ ^ yellucidà^ transversïm tenuiter striata ; natibus tumtdis uncinatis,

Tellina îactea, Linn, Syst. nat. p. 1119.

Chemn. Concli. t, 6, p. i3o. pl. i3. f. i25,

Scrot. EinI, t. 2. p. 659. .

Gmel. p. 3240. 69,

Moulag. Test. Brit. p. 70. pl. 2. f. 4.

Matou et RacLut, Trans. Ihin. t. 8. p. 56»

Dorset, Cat. p, 3o. pl. 5, ï. 9.

Wood, gener. Couch. p. 187. 76.

Dilhv. Cat. l. r. p. 99. 62.

Amphidesina laccea. LamU. An. s. vert. t. 5. p. 49 r. 3. tuciniL Iactea, Id, An, s. vert. t. 5. p. 642. n“ 12.

Id. Payr, Cal, des Moll, de Corse, p. 4x. 67.

An eadcmp Loripède lacté. Blainv. Malac. pl. 72. f. n.

Lucina amphidesmoides. Desh. Encycl. méth. Vers. î. 2. p. 375. Lucina Iactea» Desli, Lamk. An. s, vert. 2' édit. t. 6. p. 228. 12, Amphidesina lucinaîis, Larak, An. s. vert. t. 5. p. 491. 6.

Tellina îactea, TuiTou, Linn. Syst. t. 4* p. igS.

IJ^ Id, Brit. fauna. p, i5i.

Id. Id. Concli. dict. p. 176,

Turlon, Concli. insul, Brit. p. 112. pl. 7. f. 4, 5.

Wood, Ind. test. pl. 4* k 76- Encycl. méth. Vers, pl, 286. f, i,

Philippi, Mol!. Sicil. t, i, p, 33. 34. ü. t. 2. p. 20, 26.

Callcw, Concli. nom. p. 26.

Jlanley, Descr, cat. p. 76,

Krauss, Sudafr. Moll.^p. 5,

Fossilis, Philippi, Loc, cit» t. i. p. 34* 11® 6. ,

Desh. Expéd. sc. de Morée. Moll. p. gS. 11® 89.

Habite rOcéan d’Europe, la Méditerraucç. Fossilç à Asli^ en Morée, en Sicile.

La Lucine lactée est une coquille bien connue , qui est devenue cependant le sujet de plusieurs erreurs. LamarCk, par exemple, la rapporte en môme temps à deux genres différents, les Amphidesmes et

LKS LUCINES.

793

les Lucines ; il confond avec elle une espèce qui en est distincte , quoique très voisine et provenant dos mômes mers. Nous avions pensé autrefois qu’une coquille des faluns de la Touraine est analogue à l’espèce vivante. M. Dujardin a adopté celle opinion, mais nous avons reconnu depuis que l’espèce fossile a des caractères qui lui sont pro- pres. Le Lucina lactea est une coquille orbiculaire, lenticulaire , dont la surface est irrégulièrement striée par des accroissements ; les crochets sont petits, rapprochés, peu obliques; la lunule est à peine marquée ; elle est très petite ; les bords sont simples , minces et tranchants ; la charnière est étroite , elle porte au centre les rudiments d’une ou deux dents cardinales et des vestiges de dents latérales. Un sillon profond est creusé au-dessous du bord du corselet pour recevoir le ligament. L’im- pression musculaire antérieure est étroite , elle est assez régulièrement courbée dans sa longueur, et elle so détache de l'impression palléalo en formant avec elle un angle très aigu.

Cette coquille a 23 à 30 millimètres do diamètrè,

JjUcine obronde. Lucina rotundata^ Desh.

L. Testa convexâ^ lamisciila^ margine subundato ^ valvis bidcntatis,

Teîlina rotundata. Mont. test. Brit. p. 71, pl. 2. f. 3.

Id, Maton et nacket, Linn. trans. t. 3. p. 56.

id, Dorset, Cat. p, 3o. pl. 5. L 8.

Id, Wood, gener, Conch. p. 187, 77.

Id, Dillw. Cat, t. I. p. 99. 11° 63.

Id, Wood, Ind. Test. pl. 4* f- 77. *

Diplodonta rotundata, Philippi, Moll. Sîcil. t. i, p, 3i. p). 4. f. 7, et t, 2. p, 24.

Teîlina rotundata, Penu. Zooî. Prit. t. 4. p. 182.

Pectuncuîus tentiis. List. Couch. pl. 294, f. i34,

Tlioms. Faitna, Irl. p. 261.

Tnrion, Brit. Biv. pl. 7. f. 3. p. 114.

Callow, Conch, nom, p. 27.

Haniey, Desc. cat. p. 76,

Turton, Conch. dicl. p. 176.

Fossîîis, Morris, Cat. of Brh. fois. p. 89.

Desli. Expéd. sc. de Morce Moll, p, 94. 38.

S. Wood, foss, crag. Ann, nat. List. t. 6. p. 248. 3.

Habite rOcéan d’Europe, la Méditerranée. Fossile dans le ciag d'An- gleterre, eji Morce et en Sicile.

VINGTIÈME FAMILLE.

794

Celle-ci appartient au genre Diplodonte de M. Philippi; elle ne man- que pas de ressemblance avec le Lucina lupmus. Elle est obronde, assez épaisse ; son test est mince et fragile ; il est partout d'un blanc laiteux uniforme; la surface extérieure présente dos stries d’accroissement peu apparentes et très multipliées. Les valves sont équilatérales; le côté antérieur est étroit ; le postérieur est beaucoup plus large et sublronqué ; les bords sont minces et tranchants; le cardinal est très étroit , il porte au centre deux petites dents cardinales divergentes surxhaque valve. Les impressions musculaires sont médiocres , presque égales , ovalaires et très écartées; elles sont jointes par une impression palléale simple très rapprochée du bord inférieur. Quoique cette coquille ne soit pas parfaitement circulaire, ses deux diamètres sont cependant égaux; ils sont de 21 millimètres.

Lucine tigérine. Lucina tigerina^ Desh.

PI. 16. fig. 4. 5.'

L, Testa lentiformiy convexiusculâ deciissatim striata , albâ; intiis margine infero purpnreo; ano trigono impresso minimo; impressione mtiscuîari anticâ , prœlongâ; impressione pallii siniplici,

List, Conch. p. 337. ^74*

Bonami, Becr. part. a. f. 69.

Kumph. Mus, t, 42. f. H.

Guall, Test. t. 77. f. A.

D’Argenv. Conch, pl. 21. f. E.

Venus tigerina. Linu. Syst. nat. p. ii33; Gmel. 3283. 69,

Knorr. Vergn. 1. 4. pl. a. f. i.; et t. 6. pi. 37. f. 2,

Le Codock. Adans- Sénég. p. 223. pl. 16. f. 3.

Fav. Conch. pl. 47- L D*

Venus tigerina. Chemn. Conch. 7. p, 6, pl. 37. f, Sgo, Sgi,

Venus tigerina, Schrot, Eiul. t. 3. p. i36, 25,

Encycl. pl. 277. f.

Venus ligerina. Dillw. Cat. t. i, p. igr. 76.

Cytherea tigerina, Lamk. An. s. vert. t. 5, p. 574. no 53,

Venus, Blainville, Malac. pl. 74» h 3,

Lucina tigerina. Desh. Dict. class. d’hist. nat. t. 9, p, 528 (1826),

Id, Desh. Encycl. méth. Vers. t. 2. p. 384. 37.

Sowerby, Gener, of shelis. 4i

Lucina tigerina. Desh. dans l. 6,. p. 3i8.

Callow, Conch. nom. p, 27,

LES LUCINES.

795

Huiiley, Descr. cal. p* 77.

Krauss, sud Afr. Moll. p. 5.

Habite la mer Rouge, Focéan Atlantique, au Sénégal, aux Antilles , les mers de Tlnde, Fossile en Égypte, à la Guadeloupe.

Cette espèce est trop connue pour avoir besoin d’être de nouveau décrite. Elle est l’une de celles que Lamarck rapportait à son genre Cythérée. Le premier, en 1 826, article Lticine du Dictionnaire classiquey nous l’avons remise dans le genre Lucine, et la connaissance'de l’animal est venue confirmer notre rectification. Cependant M. Valencienne, dans un mémoire présenté à l’Académie en 1844, s’attribue sans façon le mérite de cette amélioration que nous avons fait prévaloir dans toutes les occasions. Nous avions pensé que cette espèce avait son analogue dans le bassin de Bordeaux ; mais nous avons reconnu depuis , en examinant un plus grand nombre d’individus fossiles , que nous avions commis une erreur, ainsi que M. Agassiz l’a reconnu lut-méme. L’espèce de Bordeaux devra donc conserver la dénomination spécifique que M. Bastérot lui a donnée. Le Lncina tigerina n'a été trouvé jusqu’ici à l’état fossile que dans les terrains quaternaires en Égypte et à la Gua- deloupe. Fossile ou vivante, cette coquille est très variable; les stries transverses et longitudinales, qui en découpent la surface, sont plus ou moins fines, plus ou moins serrées; la coquille, ordinairement com- primée, prend quelquefois une forme subglobuleuse en vieillissant. Mais ces variétés se rattachent les unes aux autres par une série considérable de modifications qu’il est nécessaire de rassembler si l’on veut se faire une juste idée de la variabilité des espèces dans le genre Lucine.

Cette grande coquille a quelquefois 8 à 9 centimètres de diamètre.

Lucine bord-rose. Lucina punciata , Desh.

PL 16. fig. 1. 2. 3.

X. Testa lentiformiy orhicuîatâ^ convexiusculâ ^ crassâ, ponderosâ^ longitudinalîter sulcatâ; sulcis planuîatis; limho interno Tosco; discoUiteOy subpunctato ; irnpressione musculari anticày angustd ^ prœlongày obliquatâ^

Cytkerea punctata. Lamk. An. s. vert. t. 5, p. 574. o? 54.

Tenus punctata» Linn. Syst, nat. p, ii34j Gmel. p. 3284, 74.

Rumph. Mus. tab. 43. f. D.

Gault. Test, tab. 75. f, D. ^

Chemn. Conch. t. 7. p. i5. tab. 07. f. 397, 898.

79*5

VINGTIÈME FAMILLE.

Schi'ot. £inl. I. 3. p. i4o»

Encycl. pl. 377. f. 3.

Desh, Encycl. mélh, hist. naî. des Vers. t. 2. p. 335, 38.

Lucina piuictata. Desh. Dicl. class. d’hist. nat, t. 9 p. 528.

Sow. Gener. ofshells, 27. f. i,

Keeve» Coneb. syst. pl. 59. f. x.

Catlow, Conch. nom. p. 27,

Hanley, Desc. cal. p. 77.

Habite l’océan Indien.

Le Lucina punctata est l’espèce la plus voisine du Tigerina. Elle est orbiculaire , lenticulaire , comprimée de chaque côté , et cependant assez épaisse. Elle est presque équilatérale ; sa surface est couverte de larges sillons longitudinaux et très aplatis. Ils sont irrégulièrement interrompus par des stries d’accroissement. Le lest est épais et solide ; il est d’un jaune soufré en îedans et d’un rose pourpré sur les bords. La charnière est très large, elle offre deux dents cardinales , inégales et une dent latérale antérieure grosse et épaisse; la dent latérale postérieure man- que complètement. Les nymphes sont très aplatie^. Elles sont séparées par un sillon dans lequel s'attache la tunique externe du ligament , tandis que sur leur surface interne vient se fixer la portion cartilagi- neuse du même organe.

Cette grande coquille a les mêmes dimensions que la précédente.

Lucine dentée. Lucina dentata, Desh.

Pl, 16. fig. 9: 10. 11,

Z. Testa orbiculatù •lenticnlarî convexà tenui^ alba^ pellucidà^ striis divaricatis numerosissirnis ornata; urnbonibns minimîs, lunulâ patya profundè excavata; cardine angtisto bidtntato; dentibus latcra- libus subnuUis; inipresstone mnsctilari anticu ati^ustâ subperpen^ dicularif marginc postico dentieuhto^

TcUhia dentata. Wood gener. conch. p. 19^, n* 88, pl, 49. f, 7.

Id, Dillw. cal. t. t, p, io3. 71.

/</. Wood, ind. test, p), 4. f. 88.

Id, Catlüw, conch, nom. p. 26,

Habite la Nouvelle-Zclande.

Cette coquille, confondue parmi les variétés du Lucina th’uar/ca(a, se distingue non seulément de celle-là , niais encore de toutes les autres

LES LUCINES.

197

du même groupe. Elle est orbiculaire, lenticulaire, assez épaisse ; son test est mince, blanc et subtransparent. La surface externe est cou- verte d’un grand nombre de stries divergentes plus serrées qu’elles ne le sont dans la plupart des autres espèces. Le sommet de l’angle que forment ces stries est situé à la partie antérieure de la coquille, vers le tiers environ de son diamètre antéro-postérieur. Les crochets sont petits, rapprochés, à peine obliques, lis divisent le bord cardinal en deux moitiés égales; ils dominent une très petite lunule arrondie et très profonde. Le bord des valves est crénelé; la charnière est étroite, elle présente deux dents cardinales . inégales et souvent irrégulières ; c’est à peine si l'on aperçoit les vestiges d'une dent latérale postérieure. Le ligament est porté par une nymphe étroite, mais fort longue, qui so montre à l’extérieur dans presque toute sa longueur. L’impression musculaire antérieure est étroite , allongée , elle descend presque per- pendiculairement vers le bord inferieur, en formant ayec l’impression palléale un angle très aigu ; elle s’arrête au-dessous du milieu du dia- mètre transverse de la coquille. L’impression musculaire postérieure est ovalaire et très rapproèhée du bord.

Cette coquille a 27 millimètres de diamètre transverse et 2S de hauteur.

6ENRE ÔOIXANTE-TROISIÈME.

CORBE1X.X.E. Corhis, Cuv.

CAîiACTèREs GÉNÉRIQUES. Animal ovale, gonflé, enveloppé d*un manteau ouvert dans toute la longueur du bord ventral et terminé en arrière par deux ouvertures sessiles. Pied mé- diocre, (Tomprimé, très extensible. Bouche petite, munie de deux lèvres étroites terminées par des rudiments de palpes labiales. Une seule branchie, épaisse, quadrangulaire , subtra- pézoïde chaque côté du corps.

Coquille ovale, transverse équivalve ; crochets bombés, opposés. Lame cardinale épaisse, offrant deux dents cardi- nales épaisses, inégales sur chaque valve; deux dents laté-

VINGTIÈME FAMILLE.

79*^* .

raies: Tantérieure la plus grosse et la plus rapprochée des cardinales. Ligament extérieur enfoncé sous les bords du cor- selet. Impressions.musculaires grandes et écartées: l’antérieure ovale, oblongue, inclinée en dedans; la postérieure, plus courte, subcirculaire. Impression palléale simple renfermant l’impression musculaire antérieure et divisant la postérieure.

SYNONYMIE GENERIQUE. Veuus, Linné , Chemnitz , Schroeter, Gmelin, Dillwyn , Wood. Lucina^ Bruguière, Lamarck , de Blainville. Fimhria , Mégerle. Idothea , Schumacher. Corhis^ Cuvier, Lamarck, Menke, Reeve, etc. Spheera , Sowerby .

observations'. Le genre Corbeille a été institué par Cuvier, dans la première édition du Règne animal, pour ünê coquille déjà connue des conchyliologues. En effet, on en trouve des figures reconnaissables dans les ouvrages de Lister, de Bonami, de Gualtieri et d’Argenville. Linné la mentionna parmi les Vénus, et c’est dans ce genre qu'elle resta dans les ouvrages de Chemnitz , de Schroeter, de Gmelin , de Dillwyn,et même dans ceux beaucoup plus récents de Wood. Entraîné, par l’appréciation judicieuse de ses caractères , Bruguière, dans V Ency- clopédie , avait compris cette espèce dans son genre Lucine ; Lamarck , de Roissy, et plusieurs autres naturalistes, adoptèrent cet arrange- ment jusqu’au moment Cuvier eut proposé le genre Corbeille, qui fut généralement adopté, quoique longtemps avant, ce genre eût été proposé, dès sous le nom de Fimbria, par M. Megerle. Au

moment Cuvier faisait connaître son nouveau genre , M. Schumacher le publiait de son côté, dans son Esnai d’une nouvelle classifiGatign des testacés. Il proposait pour lui le nom d' Idothea, Ce nom n’a pas prévalu, et celui de Cuvier est resté, malgré la priorité de celui de Mégerle.

Les classificateurs n’ont pas été d’accord sur la place qu’il convient de donner au genre Corhis. Bruguière en faisait une Lucine , et if sem- blait naturel que le genre nouveau restât dans le voisinage de celui d’où il a été extrait. Lamarck pensa que les Corbeilles devaient avoisiner les Tellines , et, en conséquence, elles vinrent se ranger entre les Tellines et les Lucines. Cuvier, au contraire, rapproche le genre de ceux de la famille des Cardiacées , et il le place entre les Cyclades et les Tellines , non loin des Donaces , d’un côté, et des Loripèdes , de l'autre. Cette opinion fut partagée par tous ceux des naturalistes qui adoptèrent de

LES LUCÏNES.

799

préférence la classification do Cuvier: mais pour nous, qui n'avons jamais pris d’opinions qu’après avoir vérifié les faits sur lesquels elles reposent, nous n’avons admis ni celle do Cuvier ni celle de La- marck, et dès 4 830, nous avons fondé la famille des Lucines, dans laquelle nous avons placé les Corbeilles à côté des Lucines. En effet , ces genres sont très voisins l'un de l'autre , à ce point que nous doutons encore de Tulilité de celui qui nous occupe. Tant que la coquille seule a été connue , on pouvait trouver en elle quelques caractères propres ù la distinguer des Lucines: mais depuis que l'animal a été incomplètement décrit par M. Valenciennes , le peu qu’il en dit , suffît pour démontrer son extrême ressemblance avec celui des Lucines ; par conséquent , nous étions fondé dans notre appréciation qui , pour dater de vingt ans, n'en est pas moins juste.

L’animal de la Corbeille est grand et épais ; il est ovale , transverse , subéquilatéral; le manteau qui l'enveloppe est semblable à celui des Lucines ; il est ouvert dans presque toute la longueur du bord ventral : ces bords , épaissis par un muscle orbiculaire, sont divisés en plusieurs feuillets, dont l'un, celui qui s’applique sur le test, doit être découpé pour produire les lames frangées de la coquille. En arrière , le manteau présente deux ouvertures ; nous soupçonnons qu’elles sont semblables à celles des Lucines, et nous regrettons que M. Valenciennes ait laissé sa notice incomplète sous ce rapport. Le pied des Corbeilles n’est point tout à fait vermiforme comme il l'est dans les Loripes. II est triangu- laire, étroit , un peu comprimé de chaque côté; mais ce caractère ne devrait pas faire exclure les Corbeilles des Lucines, car nous connais- sons quelques espèces de ce dernier genre chez lesquelles le pied est exactement semblable. Nous citerons entre autres le Ludna pectm de la Méditerranée. La bouche, dans les Corbeilles, est semblable à celle des Lucines; elle est fort petite , garnie de deux lèvres fort étroites . termi- nées de chaque côté on un très petit rudiment des palpes labiales. Les branchies sont également semblables à celles des Lucines : elles consis- tent en un seul feuillet de chaque côté du corps ; mais qui est très épais et d’une structure semblable à celle de la branchie des Lucines. De tous les caractères connus de l'animal , nous n'en voyons aucun qui s’opposerait à la réunion des Corbeilles et des Lucines.

11 n’en est pas tout à fait de môme de la coquille ; elle diffère de celle des Lucines par une forme plus transverse et des valves plus bombées ; mais ces caractères extérieurs se modifient, et il existe un passage presque insensible dans un certain nombre d’espèces soit vivantes , soit fossiles. C’est ainsi que le Lucina liasina est une de ces espèces

8oo

VINGTIEME FAMILLE.

intermédiaires qui tiennent à la fois aux Lucines et aux Corbeilles, et que l’on devrait ranger dans ce dernier genre , si leur surface était ornée de lames transverses. Il en est de môme aussi d’une coquille du bassin de Paris , que nous avons décrite autrefois sous le nom de Psammobia dubia , et qu'une appréciation plus rigoureuse de ses carac- tères fait rentrer dans le type des Lucines; celte coquille, avec la plupart des caractères des Lucines , a la forme Iransverse des Cor- beilles, sans être ornée des lames qui les distinguent.

Les Corbeilles sont des coquilles généralement ovalaires , épaisses, bombées, subcordiformes , subéquilatérales; leur surface, dénuée d’épiderme, est presque toujours couverte d’un réseau formé de lames Iransverses plus ou moins minces et do sillons longitudinaux, réguliers et rayonnants ; les crochets sont assez grands et protubérants ; ils sont peu obliques , très rapprochés , et ils dominent une lunule ovale , lan- céolée, assez profcmdément creusée. Le corselet est Jui-méme dé- primé; il est allongé, étroit, et il contient., dans une partie de sa longueur, un ligament externe en partie caché par un bord saillant. Les bords des valves sont épais , finement crénolés, parfaitement clos , lorsque les valves sont rapprochées. La charnière est supportée par une lame cardinale large et épaisse; elle porte, au centre, deux dents car- dinales inégales sur chaque valve ; ces dents sont courtes , larges et épaisses. Aux extrémités de la charnière se montrent deux dents laté- rales; l'antérieure est la plus proéminente et la plus rapprochée des dents cardinales. Les impressions musculaires sont grandes , elles sont écartées et elles occupent les extrémités de la coquille. L'antérieure est ovale , elle s’incline vers l’intérieur des valves , et c’est en cela qu’elle ressemble à celle des Lucines; la postérieure est plus courte et plus arrondie. L'impression palléale est large, assez profonde; elle est simple et elle s'étend d'un muscle à l’autre en restant parallèle au bord inférieur. L’impression musculaire antérieure est comprise tout entière dans l'intérieur de l’impression palléale, tandis que l’impressioii posté- rieure serait divisée en deux si la ligne palléale se continuait à tra*- vers elle.

On ne connaît jusqu’ici que deux espèces vivantes de Corbeilles : l’une d’elles, le Corbis fimbriata, habite le grand Océan de l’Inde, et 80 trouve aussi dans les îles de la Polynésie ; l’autre espèce , que le premier nous avons décrite sous le nom de Corbis elegans , vient des Philippines, elle a été retrouvée par M. Cuming.

Le nombre des espèces fossiles est peu considérable. M. Bronn , dans son Index paleontohgicüs J en indique dix-sept, parmi lesquelles deux

V

LES LÜCINES.

8oi

sont douteuses; pour nous elles se réduisent à quatorze, quoique nous en admettions plusieurs que ii’a pas connues l’auteur de l’ouvrage dont nous venons de parler.

On a cru longtemps que les Corbeilles fossiles ne descendaient pas au-dessous des terrains tertiaires; cependant le plus grand nombre des espèces aujourd’hui connues se distribuent dans la craie et le terrain jurassique. Si l’on en croit M. Phillips, la première apparition du genre aurait lieu dans le lias supérieur; malheureusement les caractères de l'espèce ne sont pas suffisamment constatés: le Corbis uniformis est douteux pour l’auteur lui-méme. Il faut remonter un peu plus haut dans l’oolite moyenne (Kelloways-îlock) pour rencontrer avec certitude quatre espèces de Corbeilles.

Corbis lœviSf Sowerby; elle traverse toute la série des couches de l’oolite moyenne ; elle se montre dans l’oxford-clay, le coral-rag et le calcareous-grit ou coralien supérieur. Elle conserve la môme position en France et en Angleterre. Au sujet de l’espèce dont nous venons de parler, nous devons rectifier une erreur de M. Rœracr, qui , dans son Histoire des terrains oolitiqiics du nord de l' Allemagne ^ attribue le nom spécifique de Lœvîs à une coquille qui est bâillante, très inéquilatérale et qui très certainement n’appartient pas au genre Corbeille.

Corbis ovalis, Phillips; elle est de Poxfordien inférieur ou kello- way-roc des Anglais , et elle ne s’est rencontrée jusqu’ici qu’en Angleterre; il ne faut donc pas confondre avec elle le Corbis ovalis de M. Buvignier; cette dernière est du terrain oxfordien des Ardennes, et nous proposons pour elle le nom de Corbis depressa ; la quatrième espèce a été découverte dans le terrain jurassique moyen de la Russie, par M. Kayserling: elle est nommée Corbis sublœvîs , par le savant géologue.

Le coral-rag de la Meuse contient deux espèces décrites par M. Bu- vignier ; elles viennent toutes deux des environs de Commercy et de Saint-Mihiel : à Tune d'elles M. Buvignier a donné lo'nom d'elegans, quoique celte dénomination spécifique ait été attachée par nous depuis une dizaine d’années à une espèce vivante; nous proposons en consé- quence de consacrer à l'espèce fossile le nom du savant géologue qui le premier Ta fait connaître ; elle deviendra le Corbis Buvignieri.

Quatre espèces sont mentionnées dans la craie : l'une d’elles, le Corbis corrugata^ Forbes , mérite de nous arrêter un instant. En 1822, MM. Mantell et Sowerby Pont fait connaître presque en même temps sous deux noms cl dans deux genres différents : pour lo premier de ces naturalistes, c’est le Venus ringmeriensîs , pour le second, c’est le Sphœra eorrugata; depuis, la môme espèce a été mentionnée par nous- T. 1. PARTIE. T)!*

802

VirSGTiEME FAMILLE.

même, d’après un moule imparfait , sous le nom de Venus cordiformis, ]\J. Matberon en a fait le Cardium gallo-provinciale^ et M. d’Orbigny a reconnu que notre coquille et celle de M. Matberon sont de la même espèce et dépendent du genre Corbeille ; il l'a inscrite dans sa Pa/^u(o- logie française sous le nom de Corbis cordiformis. Plus récemment , M. Forbes , dans le premier volume du Journal Irimespiel de la Société géologique de Londres, 1845, a reconnu l’identité du Sphœra corrugala de Sowerby, d’un côté avec la coquille de Manlell , et d’un autre avec celle de M. d'Orbigny. Actuellement il est facile de compléter la syno- nymie de l’espèce, et il devient nécessaire de lui restituer son premier nom spécifique : on devra donc l'inscrire désormais sous celui de Corbis corrugata . Forbes. Celte espèce se trouve à la fois en France, en Angleterre et en Suisse, principalement dans le terrain néocomien ; elle passe cependant dans le grès vert.

Une seconde espèce de la craie mérite encore d’être mentionnée, c'est le Corbis rotundata d'Orbigny. Elle se répand sur une grande surface, et parait propre à la craie chloritée ; elle est à la fois dans les bassins du Nord et dans ceux du Midi.

Les deux espèces du bassin de Paris sont les seules qui soient con- nues dans les terrains tertiaires, et il est bien remarquable de ne pas rencontrer le genre dans les étages tertiaires moyens et supérieur lors- qu’il vil encore aujourd'hui. Comment n’a-t-il laissé aucune trace de son existence pendant ces deux longues périodes? 11 les aura sans doute traversées , confiné dans des régions éloignées des lieux il s'est montré d’abord en grande abondance.

Le Corbis peclunculus est la plus grande des espèces connues; elle est assez commune dans le calcaire grossier du bassin do Paris ; elle existe aussi dans celui de Valogne, et M. Grateloup la cite dans les calcaires do Blaye.'

Le Corbis lamellosa , Lamk., est beaucoup plus commune ; elle com- mence avec les premiers dépôts marias du bassin de Paris (sables de Bracheux); elle remonte dans le calcaire grossier ello est d’une extrême abondance, et elle passe dans les sables marins moyens, elle n est guère moins commune; elle subit de nombreuses variations soit dans la forme plus ou moins bombée, soit dans le nombre des lamelles qui la couvrent ; les individus de Bracheux ont les lames plus serrées ; celte espèce ne se borne pas au bassin de Paris , elle est aussi à Valogne, en Belgique, à Blaye , à la Palarea, près do Nice, dans le terrain numniuliüquo. Une variété plus bombée, très rapprochée de celle de Bracheux , est assez commune à Castel-Gomberto. Mais ce qui rend

LES LUCINES.

8ü3

cette coquille plus intéressante encore, c'est qu’elle se trouve aussi, d’après M. Conrad, dans les terrains tertiaires inférieurs do l’Amérique septentrionale. -Enfin, M. Slurt l’a rencontrée dans -les terrains ter- tiaires qui avoisinent le port Jackson à la Nouvelle-Hollande. Si l’iden- tité est bien établie, le fait rapporté par M. Sturt est aussi intéressant qu’inattendu.

D’autres espèces de Corbeilles ont été citéesdans les terrains tertiaires. M. Brongniart, dans son Mémoire sur le Vicenlin^ a figuré sous le nom de Corbis Aglaurœ , une belle espèce de Vénus qui se rencontre aussi aux environs de Bordeaux. M. Bronn (/(abVns tertiœr Gebilde). a cru autrefois trouver en Italie plusieurs espèces de Corbeilles , mais il a lui- même reconnu son erreur. En effet, les coquilles qu'il prenait pour des Corbeilles sont dos Lucines ou des Tellines ; à ce dernier genre appar- tient aussi le Corbis ventricosa de M. Marcel de Serres. [Geogn. des terr. tert., p, 146, pl. 6 , fîg. 2 , 3 ).

Corbeille élégante. Corbis elegans^ Desh.

Pl. 15. fig. 7. 8. 9.

Corb, Testa trans^ersâ , tiunidâ , gibbosâ , lacteâ aut rnbellâ ; radiis loscis obsoîetis ab umbonibiis nd mnrginem divergentibus ; iamelUs transvcrsis elevaùs ^ rernotiiisculis , utrinqiie serratis ^ antice 'validioribus ; striis mtmerosis radiantibus , intra lameUas; margiiie subcrassOy profnnde crennlato ; umhonibus longitudinaîibus ^ minuits , opposite incurvis; litnuld parvâ ^ subcordatâ,

Corbis Sowerbyi. Keeve, Proced, zool. soc. 1841.

Id. Reeve, Conch. syst. pl. 58, f. 4, 6.

Cailow, Conchol. nom. p. 26.

Hauley, Desc. cat. p. 70.

Desh. dans Cuv. édit. pl. 102. f. i.

Habile le.s Philippines.

T rès belle espèce que le premier nous avons possédée , etque nous avons fait connaître , en la figurant dans cet ouvrage. La priorité du nom nous appartient , sans cela nous aurions accueilli avec empressement celui de M. Reeve; car il rappelle le nom d'un savant qui a rendu d'émi- nents services à la Conchyliologie. Celte Corbeille est ovale , transverse, subéquilatérale, très bombée; le côté antérieur est un peu plus long, et plus large que le postérieur. Les crochets sont saillants, très rapprochés, peu obliques; ils dominent une lunule d’une médiocre étendue, ovale,

5i*

8ü4

VINGTIEME FAMILLE.

lancéolée, très nettement circonscrite , mais peu profonde. La surface extérieure est ornée d’un grand nombre de lames transverses, fines , relevées perpendiculairement, à bord simple dans le milieu des valves, crénelé en avant, festonné et tranchant en arrière ; sur les crochets les lames sont très serrées, elles sont plus écartées vers les bords ; d’un côté, en dessus, elles sont lisses, de l’autre elles sont striées perpendicu- lairement ; les interstices sont couverts de stries longitudinales rayon- nantes qui, partant des sommets, gagnent les bords, elles se termi- nent par de nombreuses crénclures. D’un beau blanc laiteux eu dedans, cette coquille a le bord supérieur teint d’un rose tendre de la plus agréable nuance; elle est également blanchn en dehors, et de ce côté elle est ornée de rayons interrompus d’un beau rose tendre d’une grande fraîcheur. Cette coquille, fort remarquable par la finesse de ses lames et la fraîcheur de sa coloration , ne manque pas d’analogie avec le Corbis îamellosa du bassin de Paris ; elle est plus bombée et plus grande ; nous avons vu un individu presque aussi grand que le Corbis pectun- culiis.

Corbeille pectoncle. Corbis peciuncuhis ^ Lamk.

PL 15. fig. 10.

€• Testa rotiindatâ^ 'ventricosâ ^ crassâ ^ canceUatâ, îameUis trans- versis crebrîs ^ ad îatus posticiim piicato^crispis , serratis.

Desh. Descr. des coq. foss. t. r. pl, i3. f. 3 à 6,

/</, Encycl. méth. Vers. t. 2. p. 6. n“ 2.

Id, Lamlv. Anim. s. vert. édit. t. 6. p, 21g. 3.

Lamk. Ânim. s. vert. t. 5. p. 537. 3. ^

Gratel. Cat. zool. p. 65. i.

Bronn, luJ. Pal. p, 334.

Habite... Fossile des environs de Paris et de Hauteville , dans le Calcaire

r

grossier.

Grande et belle coquille qui ne manque pas d'analogie avec le Corbis eîegans , actuellement vivante dans les mers des Philippines ; elle est ovale , oblongue , transverse, subéquilatérale, bombée , à lest très épais et fort solide. Le côté antérieur est un peu plus long que le postérieur ; il est large , régulièrement arrondi. La surface extérieure est couverte de lames transverses, courtes, épaisses, obtuses dans le milieu des valves, minces , plus saillantes sur le côté postérieur, très élégamment crénelées sur le côté antérieur. Les interstices de ces lames montrent

LE6 LUCINES,

un grand nombre de petites côtes longitudinales , régulières , rayon- nantes qui , en aboutissant sur les bords , y produisent des dentelures régulières: les crochets sont grands, peu obliques, rapprochés, opposés; ils dominent une lunule assez grande, creusée et sublancéolée; les bords sont épais, ils s’élargissent avec l'âge en formant des plans in- clinés , très régulièrement plissés dans leur largeur.

Les individus qui se trouvent à Hauteville , près de Valogne , sont un peu moins larges , et les lames , qui les couvrent, sont plus étroites et plus serrées. Nous avons vu autrefois un grand individu de la même espèce recueilli à Ronca par Maraschini , et qui offrait des côtes longi- tudinales plus grosses que celles des individus de Paris et de Valogne.

Les grands individus ont jusqu’à 10 centimètres et demi de large et 90 millimètres de long.

GENRE SOIXANTE-QUATRIÈME.

ONGUlilNE. Vmjiilina, Daudin.

Pl. i5. f. Il à 14, I

CARACTÈRES GENERIQUES. ' Animal ovale ou oblong , ayant le manteau fermé en avant, ouvert dans la longueur du bord inférieur et percé en arrière de deux ouvertures sessiles. Pied allongé, cylindrique, vermiforme, claviforme dans la con- traction. Bouche petite, transverse, garnie de deux petites lèvres terminées de chaque côté en une paire de très petites palpes labiales. Deux feuillets branchiaux de chaque côté du corps, inégaux, obliques , Texterne le plus court et le plus étroit.

Coquille longitudinale, oblongue ou arrondie, un peu irré- gulière, non baillante; deux petites dents cardinales, diver- gentes sur la valve droite, une seule bifide sur la gauche; une nymphe subintérieure donnant attache au ligament. Impres- sions musculaires très grandes , presque égales ; impression palléale simple. »

8ü6

VLNGXJÈMl!; I^VMILLK.

GYNONYMiK uÉNÉRiQUH. Lovipes [iu parle) ^ Gray. Cloiho ^ Bastérot, Broiui [in parle).

OBSERVATIONS. Une petite coquille, observée par Daudin , dans la Collection de Famne ^ fut érigée par lui en un genre nouveau , auquel il donna le nom d’Onguline. Bosc fut le premier qui fît connaître ce nou - veau genre dans la petite Édition de Biiffon de Déterville. II le carac- térisa très imparfaitement ; mais la figure qu’il en donne fut suffisante pour éveiller l’attention des naturalistes, et bientôt après, do Roissy d'abord, et Lamarck ensuite, ont introduit ce genre dans leurs Méthodes conchyliologiques. Roissy, avec sa perspicacité habituelle, rapproclie les Ongulines des Lucines; Lamarck, au contraire, croyant trouver à la charnière des Ongulines un ligament intérieur, entraîne le genre dans sa famille des Mactracées, entre les Érycines et les Crassatelles , loin , par conséquent , des rapports naturels du genre. Presque tous les natu- ralistes adoptèrent cette opinion de Lamarck ; M. de Blainville, dans le Dictionnaire des sciences naturelles, ainsi que dans son Traité de mala- cologie, incertain sur la valeur du genre, ne le connaissant que d’une manière imparfaite, le relègue à la fin de sa grande famille des Concliacécs.

Dans son dernier ouvrage , Lamarck modifia un peu sa première opinion. Il conserva les Ongulines dans sa famille des Mactracées; mais il l’introduisit dans un troisième groupe avec les genres Solémye et Amphidesme; nous verrons un peu plus lard en quoi pette opinion est mal fondée et ne peut être actuellement maintenue.

M. Sowerby, dans son Généra of shells, fut le premier qui reconnut exactement les caractères des Ongulines , et qui revint à l’opinion de Roissy, en les rapprochant des Lucines. A la môme époque, et avant de connaître le travail de M. Sowerby, nous nous formions une opinion semblable à la sienne-, à la suite d’un examen attentif de plusieurs individus de l’OnguIine, et particulièrement de ceux de la Collection du Muséum. Bientôt après, M. Rang nous apprit que l’Onguline, dont la localité avait été ignorée jusqu’alors , habite en abondance dans les mers du Sénégal, et que son irrégularité fréquente provient de son habitude .de creuser les pierres pour s’y loger. Dès lors, pour nous, rOnguIine devint une Lucine perforante.

Cuvier qui, dans la première édition du Règne animal, ayait complè- tement oublié le genre Onguline , répara cette omission dans la seconde édition,, et il entraîna le genre à la suite des Lucines , dans sa famille des Cardiacées. '

LES lAJClNES.

807

Jusqu’en '1842, époque à laquelle M. Duvernoy en donna ia des- cription. l'animal du genre Onguline était resté complètement inconnu. (]e savant anatomiste publia un mémoire plein d’intérêt dans les Annales des sciences naturelles, dans lequel il dévoile . de la manière la plus satisfaisante, l’organisation de l'animal dont il est question. M. Düvernoy, qui alors ne connaissait pas l’organisation des Lucines, eut, au sujet des Ongulines, une opinion toute différente de celle de ses prédéces- seurs. 11 crut voir en elles un type plus voisin des Mylilacées que des Lucines et des Mactracées.

Frappé de la ressemblance de l'animal de l’Onguline avec celle du Loripes de Poli, nous employâmes les nouveaux documents publiés par M. Duvernoy à combattre son opinion et appuyer celle que nous avions toujours défendue. Bientôt, après avoir fait connaître l’organisation de l’animal et les caractères de la coquille , nous passerons en revue les diverses opinions que nous venons de rappeler dans leur ordre chrono- logique.

L’animal de l’Onguline est orbiculaire, aplati, enveloppé d’un man- teau mince , et dont les bords sont épaissis comme à l’ordinaire par un muscle orbiculaire étroit. Les lobes du manteau ont une commissure antérieure située on peu au-dessus du bord inférieur du muscle anté- rieur. Une autre commissure se produit en arrière, et entre elles se trouve une grande ouverture qui occupe tout le bord inférieur ou ventral de l’animal. M. Duvernoy dit qu’à la place des siphons, il existe une seule ouverture en forme de boutonnière et correspondant à la position de l’anus. Nous soupçonnons qu’une des ouvertures palléales a échappé à l’attention de M. Duvernoy, cardans les Lucines elles-mêmes , fors- qu'elles sont contractées , l’une des deux ouvertures du manteau se déguise facilement entre les plis de cet organe et peut échapper à l’attention du naturaliste. 11 faut voir ces animaux vivants pour se con- vaincre que leur manteau a deux ouvertures postérieures. Nous atta- chons une grande valeur au caractère dont nous parlons , et nous engageons ceux des naturalistes qui auront occasion de revoir l’animal des Ongulines, de bien s’assurer si, en effet, il a une ou deux ouver- tures postérieures. D’après ce que nous avons vu dans les Érycines et Tes Poronies , il faudrait faire des Ongulines une petite famille particu- lière si, en effet, l’animal n’avait qu’une seule ouverture à la partie postérieure du manteau ; si , au contraire, comme nous le croyons, les deux ouvertures subsistent , le genre devra rester dans la famille des Lucines.

Les muscles adducteurs sont très allongés , comme ceux des Lucines ;

8o8

VINGTIÈME FAMILLE.

ils sont aplatis -et ils tombent perpendiculairement vers le bord anté- rieur des valves. C*est au-dessous du muscle adducteur antérieur, au sommet de l’angle profond que forme ce muscle avec la masse abdomi- nale que se voit une petite fente transverse garnie de deux petites lèvres; cette ouverture est celle de la bouche. Les lèvres dont nous parlons sont membraneuses, mais extrêmement étroites; en cela elles ressemblent à celles des Lucines; mais au lieu de se terminer par des palpes rudimentaires comme dans les Corbeilles, ces organes s’allon- gent un peu plus, mais ne prennent point un développement propor- tionné à la grandeur de ranimai.

La masse abdominale est comprimée, peu étendue; son extrémité inférieure se prolonge en un pied cylindracé, vermiforme, tout à fait semblable à celui des Lucines. Il prend la forme d’une petite massue lorsqu’il est violemment contracté et rentré dans la cavité du manteau.

Probablement gôiié par l’espace , AI. Duvernoy n’a point représenté les organes branchiaux de l'Ongulino. Peut-Ôtre aurait-il suffi de sou- lever un peu plus Tua des lobes du manteau pour montrer la forme et la disposition de ces organes importants. Nous sommes .donc obligé de citer les paroles de M. Duvernoy : « Les deux lames branchiales, dit-il, de chaque côté sont* disposées obliquement d’avant en arrière et de haut en bas; l’externe est sensiblement plus petite que l’interne; elles n’of- rent d'ailleurs rien de particulier dans leur organisation. » Telle est la courte description de AI. Duvernoy, à laquelle nous ne pouvons rien ajouter, n’ayant jamais vu l'animal de l’Ongulino, et ne connaissant aucun autre naturaliste qui en ait donné la description.

M. Duvernoy insista beaucoup sur le système nerveux et sur sa distribution. Au moment cet habile anatomiste a publié son mémoire , on ne connaissait presque rien encore sur le système nerveux des AIol- lusques acéphales, ou pour mieux dire ce que l'on en connaissait était insuffisant pour généraliser son mode de distribution dans les divers ordres de ces animaux. On en était réduit au petit nombre de faits dévoilés par Poli , et complétés sur un seul genre par AlangiÜ. Ces premiers documents avaient été plus récemment augmentés par le beau travail de Aï. Garner, inséré dans le 17“ -volume des Transactions de la Société limiéenne de Londres; mais encore une fois ces matériaux étaient insuffisants pour généraliser d’une manière rationnelle les faits relatifs au système nerveux des Mollusques acépbalés. Si AI. Duvernoy eût connu le système nerveux des moules, il aurait compris sur-le-champ qu’il était impossible de rapprocher les Ongulines des Alytilacés. Les travaux anatomiques que nôus avons publiés dans l’Exploration scien-

LES LUCIDES.

809

tifique de l' Algérie permettront enfin de faire des rapprochements plus heureux et do laisser les animaux dans leurs rapports les plus naturels.

La coquille des Onguünes est variable dans sa forme : cependant elle affecte le plus ordinairement la forme orbiculaire des Lucines : elle devient parfois longitudinale à mesure qu'ello vieillit ; car, eu suivant les stries d'accroissement chez ces individus plus longs que larges, on voit qu’ils étaient orbiculairos avant d’avoir atteints la dernière période de leur accroissement. Souvent les coquilles des Ongulines sont irrégu- lières , elles ont des espèces d'impressions ou de cicatrices qui se répè- tent d’une valve à l’autre , et qui , vraisemblablement , sont dues à la gêne que l'animal éprouve dans son accroissement, parce qu’il a l’habi- tude de s’enfoncer dans les pierres et de s’y creuser une demeure à la façon des Pétricolcs et des Saxicaves. La surface extérieure est couverte d’un épiderme plus ou moins épais, suivant Jes espèces; cotte surface est lisse ou irrégulièrement striée par les accroissements. Ces coquilles sont subéquildtérales ; les crochets sont petits, peu obliques, presque opposés; on n’aperçoit au-dessous d’eux aucune trace de lunule et en arrière aucun indice de corselet. Les bords sont simples, minces et tranchants ; les valves sont parhutement closes lorsqu’elles sont rappro- chées : elles sont lisses à l’intérieur ; elles laissent apercevoir deux im- pressions musculaires écartées, très longues , presque égales, descen- dant très bas vers le bord inférieur et conservant une direction presque perpendiculaire. Sous le rapport de la forme et de la position, les deux impressions musculaires se ressemblent complètement; En cela , elles se rapprochent davantage de celles des espèces pour lesquelles M. Broun a établi le genre Diplodonle. Cependant elles sont un peu plus longues que dans ce dernier genre, et toutes deux sont comprises dans l’inté- rieur de l'impression palléale. Cette dernière impression est simple , parallèle au bord inférieur et placée tout près de lui.

La charnière a des caractères qui la rapprochent singulièrement de celle des Lucines : elle se compose de deux petites dents inégales sur la valve droite et d’une seule sur la gauche. Cependant on aperçoit quel- quefois à la limite de la nymphe le rudiment très étroit d’une seconde dent. Le ligament est la partie do la .charnière qui mérite le plus notre attention. Lamarck a cru à l’existence de deux ligaments : c'est pour cette raison qu’il a conservé le genre dans la famille des Mac- tracées, et qu’il l’a placé dans le voisinage des Amphidesraes. Pour nous, le ligament est externe, et c’est pour cela que nous n’avons pas hésité à mettre le genre dans la famille des Lucines; en admettant deux ligaments, Lamarck considérait comme destiné à recevoir le liga-

VINGTIEME FAMILLE.

8 10

ment intérieur, un petit espace situé sur le bord cardinal en arrière de la nymphe; mais il suffira de faire tremper dans Teau un individu dont le ligament n’a pas été rompu pour s’apercevoir que l'espace en ques- tion rosie vide et forme une petite cavité revêtue de l’expansion de la tunique externe du ligament, ainsi qu’elle existe en arrière des nym- phes do presque tous les Mollusques acéphales dimyaires. Pour se faire une meilleure idée de la disposition du ligament des Ongulines, il faut étudier avec un soin spécial la charnière des Lucma punctata et ligerina : on y verra des nymphes très écrasées formant des plans pres- que horizontaux, sur lesquels s'attache la portion cartilagineuse du ligament. Il en est de même chez les Ongulines , seulement cette nym- phe est beaucoup plus petite , plus courte , et le ligament qu’elle reçoit est plus épais. Cette nymphe est limitée en dedans par un rebord légè- rement saillant. Ensuite, du côté externe, la nymphe est séparée du test par un sillon, dans lequel s'attache la tunique externe du ligament. Ce sillon, profond dans les Ongulines, se continue en arrière sur la lame cardinale en une surface lisse, comme vernissée, et c’est celte surface que Lamarck a prise pour celle d’un second liga- ment ; mais elle n'est autre chose que la paroi do cotte cavité dont nous parlions tout à l’heure, et que l’on remarque plus particulièrement à l’extrémité postérieure du ligament des Cyrènes, des Muleltes et des Ânodontes, etc. Ainsi, le ligament des Ongulines ne présente rien d’ex- ceptionnel dans sa structure, et rien chez lui ne s'oppose au rappro- chement du genre avec les Lucines; il le confirme bien plutôt, puisqu’il a une extrême analogie avec celui des Lucines les mieux caractérisées.

Nous venons d'exposer les caractères de l’animal et de la coquille du genre Onguline. Ce que nous connaissons des Lucines va nous aider singulièrement à déterminer les rapports du genre. Par ses muscles , par son pied, par son manteau, l’animal dont il est question res- semble parfaitement à celui des Lucines ; il en diffère par des palpes labiales un peu plus allongées et des branchies dont les quatre feuillets sont détachés les uns des autres. Nous l'avons vu : si les Lncines n'ont point de palpes labiales. les Corbeilles en ont un rudiment et les Ongu- lines les auraient un peu plus longues. Relativement aux branchies, nous nous sommes expliqué à leur sujet, et nous avons fait voir que si deux do ces organes se montrent dans les Lucines et les Corbeilles , c’est qu'ils ont beaucoup plus d'épaisseur et qu'ils renferment en réalité autant de vaisseaux branchiaux que les quatre feuillets des autres Mollusques. C’est pour cette raison, comme nous le répétons, que nous n’avons pas hésité à introduire dans une même famille

LES LÜCINES.

8n

des genres qui paraissent plus différents qu’ils ne le sont en réalité Il faut donc rejeter l’opinion de M. Duvernoy, par laquelle il déplace le genre pour le transporter dans le voisinage des Moules, Uion, en effet, ne justifie cette opinion ; les Moules appartiennent à un type d'organisation tout particulier dans lequel la bouche , les branchies , le manteau , les ovaires, le système nerveux, n’ont presque aucune analogie avec ces mêmes organes chex les Ongulines. Nous n’insisterons pas davantage à ce sujet, il suffira de comparer la description de l’animal de l’Onguline avec celle de celui des Moules.

Les Ongulines sont des coquilles d’un médiocre volume ; nous en connaissons trois espèces vivantes qui proviennent des mers du Sénégal , et une quatrième fossile qui s’est creusé des trous peu profonds dans les calcaires d’eau douce du bassin de la Gironde. C’est cette espèce que M. Bastérot a eu le tort de rapporter au genre Clotho de Faujas. La coquille pour laquelle Faujas a institué le genre que nous venons de cittr est très différente de celle de M. Bastérot : elle est très voisine du Petricoîa ochroîeuca de Lamarck. avec lequel nous a\^ns établi notre genre Fragilia. L'espèce de M. Bastérot, au contraire, a tous les caractères des Ongulines. et elle ressemble plus particulièrement à une petite espèce perforante du Sénégal qui n'a point encore reçu de nom. En aliribuanl ainsi à ces deux sortes de Clotbo la place géné- rique qui leur convient, le genre lui-mème disparaît et doit s’effacer. En même temps la confusion qui s'est depuis longtemps établie entre les deux espèces que nous venons de rappeler ne peut plus subsister. M. Bronn , dans son Index patæontologicm ^ en admettant le genre Clotho de Faujas, a continué à confondre , dans un même genre, deux coquilles que nous avions séparées depuis longtemps. Ainsi quand nous citons une Onguline fossile à laquelle nous rapportons le Clotho, il est entendu que c’est de celui de M. Bastérot seul qu’il s’agit, et non de celui de Faujas.

Onguline couleur de laque. U^igulina l'uhra^ Daudin.

PI. 15. fig- 11 à 14.

U. Testa œqmlaU-rà , rotuncîato-Ienticulari, aliquatitîspei subtnmsversâ 'vcl oblon;^d ^fuîvo~fusca^ uitüs rnbescente , triinsvershn irregnîatiter rugosâ; mnbonibus tninimis^ vi.v obliquis ^ opposicis.

Onguline coiiN'Ur laque, Daudin, Bo.se*., BtifL, de Déterv , Moll, t. 3, p. pL 20. f. r, 2.

De Roissy, Ruff. de Sonn. Moll. t. 6. p. 374. pL 66. f, 4.

8i2

YlNGTlKAIli FAMILLE.

Oken, Lehrb, der Natnrg. t. r. p. 229,

UnguUnaoblongaçXtransversa. Lamk. An, s. vert. 1,5. p. 487,

Scliwcigger, Nalurg. p. 703.

Sowerby, Généra of shclls, Ungultna,

Blainv. Dict sc. nat. l, 32. p. 345.

Blainv, Malac, p. 562. pl. 73. f. G. Onguline transverse.

Cuvier, Règne anim. 2* éJ. p. 149.

Meiike, Syu. Moll, 2*^ éd. p. 11 g.

Crouch. III. iiilr. lo Lamk. Coiicli. p. 8. pl. 4. f. 7.

Rang, Mau. des Moll. p. 32 r,

Unguïinu tninsvcrsa. Desb. Encycl. inélli. Yers. t. 3. p. G65,

Desli. dans Lamk. Au. s. vert, 2^ éJ, t, 6. p. 120.

Reeve, Conch. sysl. I. i. p. 66. pl. 46.

Swainsüi), Malac. p. 37 i . f. 1 1 7.

Duveruoy, Méin. sur l’an, de TOng. Ann. sc. nat, sér, l. 18, p. iio. pl. 5. f. 1, 2, 3.

■»

Dfth. Obs, sur les Ong, Anu. sc. nat. sér. t. 19. p. 5.

Ungtilina transversa, Sow. Jun. Conch. Man. p. 9.85, f. 88.

Hanley, Descr. cal. p. 40,

Poticz et Mich. Gai. des Moll, l, 2. p. 25ü.

DesU. dans Cuv. éd. pl. 104. f. 3.

Habite le Sénégal.

Coquille très variable dans sa forme. Tantôt elle est orbiculaire, tantôt sublransverse , et quelquefois elle devient longitudinale. Lors- qu’elle était très rare dans les collections , il a été possible de constituer deux espèces avec ses deux principales variétés, ainsi que l’a fait Lamarck dans son Histoire des animaux sans vertèbres. Après avoir examiné les individus de la collection du Muséum , ceux do la collection de Lamarck, nous avons reconnu quils appartiennent à un môme type spécifique, et nous les avons réunis sous une môme dénomination. Depuis , cette Onguline a été découverte au Sénégal par M. Rang. Elle a été répandue assez abondamment dans les collections , et il est devenu facile à tous les observateurs de constater qu’en effet les deux espèces de Lamarck doivent se réunir en une seule.

Cette coquille se distingue facilement parmi ses congénères : elle est peu bombée; sa surface est irrégulièrement ridée ou striée par des accroissements; elle est couverte d’un épiderme tenace d’un brun plus ou moins foncé. Ses crochets sont petits, ils partagent le bord dorsal en deux parties presque égales; la charnière est étroite, et la description

LES LUCINES.

8l3

que nous en avons faite précédemment a été empruntée à l’espèce qui nous occupe. Les valves sont d’un rouge de laque à l’intérieur. En dehors, elles sont d’un brun rougeâtre dans les individus les plus pâles, et cette couleur passe insensiblement au brun le plus foncé. Les indi- vidus que l’on rencontre le plus habituellement ont 24 millimètres de haut et 25 millimètres de largeur; ceux qui sont longitudinaux conser- vent la même largeur et ont jusqu’à 32 ou 33 millimètres de hauteur.

GENRE SOIXANTE - CINQUIÈME.

CTREUfEliLE. Cyrenella.

PI. i4 his, lig. 10 à i5.

CARACTÈRES GENERIQUES. Animal ovale OU obrond , épais , convexe, enveloppé dun manteau à bord simple, fendu dans toute la longueur du bord ventral , terminé en arrière par deux siphons courts , réunis dans toute leur longueur. Bouche petite, transverse , accompagnée de quatre palpes labiales médiocres et étroites ; deux muscles adducteurs presque égaux , très écartés , allongés et étroits ; masse abdominale épaisse , ter- minée en son bord inférieur. par un pied cylindrique , allongé , vermifonne; quatre feuillets branchiaux très inégaux, réunis en arrière de la masse abdominale ; ils sont allongés et étroits \ les externes sont de beaucoup plus petits que les internes.

Coquille ovale ou obronde, subglobuleuse, mince, lisse, couverte d’un épiderme brunâtre ou jaunâtre; subéquilatérale, parfaitement close,, à bords minces, simples et tranchants; bord cardinal étroit, portant au-dessous des crochets deux petites dents obliques sur la valve droite et une seule sur la gauche ; ligament externe appuyé sur des nymphes très apla- ties et obliques. Impressions musculaires grandes et écartées, ovalaires; impression palléale simple.

SYNONYMIE GENERIQUE. Cyreuoicla . Joannis.

VINGTIEME FAMILLE.

8l4

OBSERVATIONS. Nous avions distingué la coquille type de ce genre longtemps avant que M. Joannis la décrivît dans le Magasin de zoologie. Nous avons hésité à en parler, parce que nous n'en connaissions point l'animal. M. Quoy, qui l avait recueilli au Sénégal , voulut bien nous en communiquer le dessin, et alors seulement nous exposâmes les carac- tères du nouveau genre dès 1833 à la Çociété philomatique. Nous pour- rions donc invoquer au besoin les procès-verbaux de celte société pour établir notre priorité , si nous mettions une grande impor- tance à attacher notre nom à la création d'un genre. 11 nous suffit qu’un genre soit bon pour que nous Tacceplions avec plaisir, quel que soit l’auteur qui , le premier, l'a introduit dans la science. Si nous préférons notre nom à celui de M. Joannis, c’est parce qu’il est plus conforme aux règles établies par Linné , ce sage législateur de la nomenclature ayant prescrit de repousser impitoyablement tous les noms terminés comme celui proposé par M. Joannis. Ainsi, quand même le nom que nous avons choisi n aurait pas la priorité , il faudrait néanmoins le con- server, ainsi que M. Hermannsen en a donné l’exemple dans son ou- vrage précieux Index generum malacozoorum.

A la première espèce vivante, rapportée du Sénégal, les laborieuses recherches de M, Cuming en ajoutèrent trois autres découvertes aux Philippines. Depuis, nous reconnûmes les caractères du nouveau genre dans une coquille fossile des environs de Paris, que nous avions rap- portée au genre Vénus, sous le nom de Venus hicinoïde.TQls sont les matériaux que renferme actuellement le genre Cyrénelle à l’aide des- quels nous allons en exposer les caractères.

L’animal est orbiculaire ou ovalaire selon les espèces : il est épais ; le manteau qui l'enveloppe est mince, transparent, et il est bordé à la circonférence par un muscle orbiculaire étroit et peu épais ; les bords du manteau sont simples, ils sont séparés dans toute la longueur du bord inférieur; l’ouverture qu'ils offrent est semblable à celle des Lu- cines. La commissure antérieure se produisant beaucoup plus bas que dans les Vénus, à cause de la longueur et de la position du muscle antérieur. En arrière, la commissure a lieu vers l'origine de deux siphons peu épais, assez allongés et réunis dans toute leur longueur en une seule masse cylindracéo conique. Ce qui est remarquable pour des organes de cette grosseur, c’est qu’ils sont entièrement dépourvus d’un muscle rétracleur spécial. L’ouverture postérieure des siphons est simple, dépourvue de franges ou de tentacules ; ces siphons sont iné- gaux en diamètre, le branchial étant plus large que son congénère: mais ils sont égaux en longueur.

LES LÜCINES.

S 1 6

Les muscles adducteurs sont allongés, aplatis; ils occupent les extrémités de l’animal, et ils s’attachent à la coquille tout près du bord, lis sont placés de manière à occuper presque toute la hauteur des bords antérieur et postérieur.

Au-dessous du muscle adducteur antérieur, vers son extrémité supé- rieure , se trouve l’ouverture de la bouche qui , dans le genre Cyrénelle , est petite , Iransverse et ovalaire; deux lèvres très courtes raccompa- gnent, et elles se changent rapidement de chaque côté en une paire de palpes étroites et d’une médiocre grandeur. A cet égard , les Cyrénelles se rapprochent des Ongulines.

La masse abdominale est grosse et épaisse ; elle est ovoïde et elle se termine inférieurement en un pied cylindrique, obtus au sommet, semblable à celui des Lucines et des Ongulines.

Les organes branchiaux se rapprochent aussi beaucoup de ceux de ce dernier genre. Ils sont formés de deux feuillets inégaux de chaque côté du corps ; les fauillpls internes sont allongés , étroits , subquadrangu- laires; ils s’étendent de la région buccale à l’ouverture interne des siphons : ils commencent en une pointe assez aigue qui s’interpose entre les palpes labiales. Les feuillets externes commencent beaucoup plus en arrière , vers le milieu do la longueur de leur congénère. Ils sont plus étroits et ils se prolongent en arrière jusqu’à l'ouverture des siphons. Par leur disposition générale , les organes de la respiration ne manquent pas d’analogie avec ceux des Vénus , seulement ils sont plus étroits , co qui les distingue aussi de ceux des Cyrèues.

Les coquilles du genre Cyrénelle sont orbiculaires ou ovalaires ; elles sont bombées, lisses, revêtues d’un épiderme, quelquefois cariées vers les crochets. Ces coquilles sont minces , fragiles : elles sont équivalves et subéquilatérales; les crochets sont petits, peu saillants, à peine obliques ; ils sont très rapprochés. La lunule n’est point circonscrite. Dans quelques espèces le corselet est grand et limité par un angle obtus. Les bords des valves sont simples , minces et tranchants. La charnière est étroite; elle montre sur la valve droite deux petites dents inégales , dont la postérieure est ordinairement bifide au sommet. Une seule dent cardinale existe sur la valve gauche, et en arrière, à la limite du liga- ment, on distingue le rudiment d’une seconde dent cardinale. On n’aper- çoit sur ce bord aucune trace de dents latérales.

La surface intérieure est blanche, quelquefois un peu violacée: elle est lisse , et l’on a quelque peine à distinguer les impressions que l’animal y a laissées. Les impressions musculaires sont ovales et étroites; l’antérieure est fort longue; elle occupe toute la hauteur du bord an-

8i6

VINGTIEME FAMILLE.

térieur en -suivant la courbure de ce bord. L’impression postérieure est un peu plus large , elle est aussi un peu pins courte ; elle est ovale ou subquadrangulaire ; Tune et l’autre sont extrêmement rapprochées des bords des valves. Une impression palléale simple, parallèle au bord, fort rapprochée do lui, s’étend d’une impression à l’autre. Le ligament est externe : par sa structure il présente de l’analogie avec celui des Ongulines et de la plupart des Lucines. Il est supporté par une nymphe très aplatie. La tunique fibreuse externe s’enfonce dans le sillon étroit de la nymphe, tandis que la portion cartilagineuse du ligament se fixe sur une surface en plan oblique qui s'étend sur presque toute la largeur du bord cardinal. Nous devons ajouter, relativement aux dents de la charnière , que tantôt elles se projettent obliquement en avant , tantôt elles sont transverses ou un peu obliques en arrière.

Les caractères du genre Cyréncilc, que nous venons d’exposer, sont suffisants pour déterminer la place que ce genre doit occuper dans la méthode. M. Joannis avait dit : les Cyrénelles sont des Cyrènes sans dents latérales. Par conséquent, pour ce naturaliste, le genre aurait faire partie de la famille des Conques fluviatiles de Lamarck. M. Joannis insistait en considérant comme de peu de valeur les caractères de la coquille , et les croyait propres à fonder un sous- genre des Cyrènes plutôt qu’un genre distinct. Nous n’avons , dans aucun temps, partagé l'opinion de M. Joannis. Lorsque nous connais- sions la coquille seule , nous l’avions rapprochée des Lucines , et cette opinion s’affermit dans notre esprit lorsque nous eûmes connaissance de l’animai. Nous avons décrit celui des Cyrènes, il est facile d’en com- parer les caractères avec ceux des Cyrénelles, et l'on s'apercevra bientôt qu’en effet les deux genres appartiennent à deux types diffé- rents d’organisation. Tout nous porte à croire qu'un peu plus tard , lorsque les zoologistes auront étudié un plus grand nombre d’animaux de Lucines, celui des Cyrénelles s'y rattachera, tout en constituant un petit groupe particulier, avec lequel il serait possible de faire une famille à part qui serait caractérisée par la présence des siphons ; on pourrait alors résumer les caractères de celte famille en disant qu’elle renferme des Lucines à deux siphons réunis. Nous insisterons aussi sur la forme spéciale de l'organe locomoteur : il n’est caractérisé dans aucun genre de la même manière que chez les Lucines , et retrouver un organe sem- blable chez les Cyrénelles a été pour nous une des raisons qui nous ont le plus particulièrement décidé à introduire ce genre dans la famille des Lucines.

Les Cyrénelles sont des coquilles qui habitent les eaux douces dans

LES LUCINES.

817

les pays chauds. On n’en connaît encore qu’un très petit nombre d’espèces ; une du Sénégal , les trois autres des Philippines. La cin- quième espèce est fossile dans le bassin de Paris nous l’avons décou- verte dans les sables marins moyens.

1. Cyrénelle de Dupont. Cyrenella Dupontiana ^

PL 14 bis, fig. 13. 14. 15.

C. Testa orliculari ^ tttmidu subœquilatetâ temd ^ fragili^ transversim irregnlariter striata , sub epitiermide fiisco albd; umbonibus parvis j tumiUis, oppositis; intiis albo ccerulescente ; carJine angusto, bidcn^ tato\ dvntibus parvis^ dnticè obUquatis.

Cyrenoida Ditpontia de Joannis, Magas. de zool. iS35. pl. 6^4.

CyrentUa, Desh Alag de zool. iS35. pl. 70.

So\?erby, Conch. Man. p. i35. f. xi4.

Habite les eaux douces du Sénégal.

Coquille obronde, inéquilatérale : elle est enflée; son test est mince et fragile; ses crochets, peu saillants , sont rapprochés au sommet et peu inclinés en avant, La surface extérieure est chargée de stries irré- gulières d’accroissement; elle est revêtue d’un épiderme d'un brun foncé sale , quelquefois excorié sur les crochets , ainsi que cela arrive fréquemment chez les coquilles qui habitent les eaux douces. Sous cet épiderme , la coquille est d’un blanc jaunâtre; à l’intérieur, elle est d’un blanc bleuâtre , et l’on remarque quelquefois de ce côté des taches irré- gulières rougeâtres qui paraissent dues à un état maladif du manteau. Le bord cardinal est très étroit; il se rétrécit surtout au centre, pour s’élargir un peu en avant : il porte deux dents cardinales sur la valve gauche. La postérieure est obsolète et presque à l’état rudimentaire ; il y en a trois sur la valve droite : l’antérieure est mince , elle est la plus longue ; la postérieure est étroite et très courte. Ces deux dents conver- gent l’une vers l’autre à leur sommet et forment un V très ouvert com- posé de deux branchés inégales. C’est au milieu de ce V que s’élève la dent moyenne ; elle est triangulaire , plus large et plus épaisse que les deux autres. Ce qui rend cette charnière remarquable , c’est qu’elle se dirige du côté antérieur, au lieu de se porter en arrière, ainsi que cela a lieu dans la plupart des autres coquilles.

Les grands individus de cette espèce ont 35 ou 36 millimètres dans leurs deux diamètres.

T. I. PAUTIE.

8i8

VINGTIÈME FAMILLE.

2. Cyrénelle lucinoïde. Cyrenetta lucinoides PL 14 bis. fig. 10, 11. 12.

C, Testa turgidulâ ^ tenui^ orbiculari ^ incequilaterali y transversim obsolète striata sublœvigata ; umhonibus minimis y obïiquis y lunulà ovata ; cardine angusto , ineequaUter bidentalo , dente majore bifido.

Venus lucinoides. Desh. Descr. des coq. foss, de Paris, l. i. p. 146. 9. pl. a3. f. la, i3. ■*

Habite... Fossile à Senlis dans les sables marins moyens.

La Cyrénelle lucinoïde est jusqu’ici une des coquilles les plus rares du bassin de Paris. Nous ne connaissons que le seul individu de notre collection ; nous l’avons recueilli aux environs de Senlis , dans les grès marins moyens. Celte coquille a beaucoup d’analogie avec une espèce qui vient des Philippines , et qui a été nommée Cyrenella Cumingii. Néanmoins les deux espèces restent parfaitement distinctes ; la nôtre est orbiculaire , inéquilatérale , bombée ; sa surface est chargée de stries irrégulières d’accroissement : elle montre de plus , vers le milieu des valves, un peu en arrière, deux côtes, très obsolètes rapprochées et diver-, gentes. Un angle très obtus, obliquement dirigé en arrière, circonscrit obscurément un grand corselet. La lunule est ovalaire, elle est circon- scrite par une ligne déprimée, peu apparente. Les crochets sont petits, opposés, à peine inclinés au-dessus de la lunule : la charnière est étroite; elle porte deux dents inégales sur chaque valve; sur la valve droite , la dent antérieure est mince et dirigée en avant ; la dent posté- rieure est beaucoup plus épaisse , et elle est profondément biBde. Cette bifurcation est tellement profonde que l’on pourrait croire à l’existence de trois dents , mais il n’en existe réellement que deux. Les dents de la valve gauche sont plus grêles : l'antérieure est la plus épaisse, et elle est biüde; la postérieure est plus allongée, mais elle est plus mince. Les impressions musculaires sont semblables à celles des autres Cyré- nelles; toutes deux descendent très bas , comme dans les Lucines , et sont comprises dans l’intérieur de l’impression palléale.

Cette coquille a 22 millimètres de hauteur et autant de largeur.

FIN PD PREMIER VOLUME.

TABLE DES MATIERES

CONTENUES DANS LE PREMIER VOLUME.

DÉFINITION DES MOLLUSQUES i

inOlililJSQVES. CliASSE prehiière.

Mollusques acéphales 3

phemiere sous-cusse.

Mollusques dimjraires 4

PREMIÈRE FAMILLE.

Les Tubicolés 5

Gehre premier. Arrosoir ^spergillum 8

■dspergiliitm Javanum. » i5

~ leognanum l6

Gehre DEUXIEME. CUvagelle, Clavagella . iS

Clavagêlla coronata a3

^ bacillaris a4

lata 'aS

Genre troisième. Gastrochèue, Gastrochœna a6

Gastrochœna mumia Sa

> dubia 34

gigantea 35

DEUXIÈME FAMILLE.

Les Pboladaires. . 37

Genre quatrième. CloisoDuaire , Septaria 40

SeptiÀria arenaria 44

mediterranea 46

Genre cinquième, x^ret, 7 credo 47

T*!fodo navalis 69

Genre sixième. Tércdine, Teredina 63

Teredina personata 66

Genre septième. Pholade, 67

Pholas crispata 77

candida 79

ligamentina 80

costata. . 8 a

TROISIÈME FAMILLE.

Les Solénacées 83

Genre huitième. Solémye, Solernya 86

Solemya mediterranea 90

52

820

TABLE DES MATIÈUES.

Oenre neuvième, Solen, Sofen

Soleu siliquo

viÿi/irt

. . .

/eÿumen

coarctntus, . . .

Genre dixième. Soléciiile, Solcairtus

SoUcnrtns strigilaWs

cnndlduf

i.nmarchii. . , .

QUATRIÈME FAMILLE.

Les Olyciméiides

Genre onzième. Glycimére, Gîjcimeris, . , .

Giycimeris siliqua. . , . , . Genre douzième. Paaopée, Panopæa,^ . . .

Panopæa Aldrovnndi» , . ,

Meîiardi, . , .

intermedia, , . ,

Genre treizième. Phuladoniye, Pholadomya,

Pholndomya candida , . .

muhicostata. . .

donacijormis, . ,

semicQstata, , . .

umbonata. . . ,

retiisn

fidicuîa

decussata

Genre quatorukme. Ccromye, Ceromya, . ,

Ceromya elegans, . . .

excentrica, . . ,

%^cgaria

CINQUIÈME FAMILLE.

Les Myaires

Genre quinzième. Mye, Mya « .

Mya tnincata *

tugon, .

Genre SEIZIÈME, Corbiile, Corbula

Corbula wuiata

nucUus

complanata. , ,

Genre DIX-SEPTIÈME, Neæra , .

Ncœra cuspidata,, , , cosrellata

SIXIÈME FAMILLE.

Les Pandores

Genre dix-huitième. Pandore, Pandora, . .

Pandora rostrata. . . , Genre dix-neuvième, Myadore, Myndora, .

Myadora rostrata. . .

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1 1 2

1 1 3 **9

1 9.T

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175

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178

186

187

189

190 192 192

194

196

200

202

204

TABLE DES MATIEBES.

821

SEPTIÈME FAMILLE.

Les O.siroiIc.smi’S 20 +

Genre vnütième. Lvoiisic, l.ronsir, ao-

Lj-nnsia norivcî^icn 211

Genre vin(;t et unième. OstôoilfS'nc* , Offt-otlestim aia

OstfoJesma cuntata 2i5

Genre venot* deuxième. Prriplome, Penphma 216

Peripfu/nn ittœquivn^v'S 219

Genre vingt-troisième. Anaïiiie, Anutlnn. 220

Anntlua suhrostrnta, . 229

Genre vingt-quatrième, 'l’hraiîie , Thr/icia . , aSt

rhrticia co/huioides. , . , . . 243

Genre ungt cinquième, Myccliaim; . Myochama 245

iMyockoma anomioides», , . , . . 249

Genre vingt-simème. CdiJiliiî, Cordilia . . . a5i

Cttrdiiln sfmisidcntn. 2 54

HUITIÈME FAMILLE.

Les Mactracées 255

Genre vingt-septième. Lutraire, Lutraria 259

Lutraria oblouga 267

lugQsa 270

Genre vingt-huitième. Mâche, Maeva. 272

'Mnctrn tnnngula 288

Genre vingt-neuvième. Aiiatinelle, AnatineUo, 289

Anatinelîa candida. 292

Genre trentième, Giialliodoti , Guathodon 294

Gnathodon caneattis , 299

NEUVIÈME FAMILLE.

Les Mésudesmides. 3oo

Genre trente et unième. Mésodesme, ^lesodesma 3o3

Mfsodesma Quoyi 3 14

cornea 3i5

OIXIÈME FAMILLE.

Les Âmphidesmides. 317

Genre trente-deuxième. Cumiiigie , Cumingia SaS

Cumingia teUinoides 328

Genre trente-troisième. Lavignon, TrigoneUa 329

TrîgoneUa piperata 343

Genre trente-quatrième. Syndosmve, Syndosmya, .... 345

Syndosmya ulba. ' 355

Genre trente cinquième. Ainphidesine, Amphidesma. . , . 354

Amphi'desma solidfi, 36 1

8^4 TABLE DES MATIÈRES.

Genre cinquante-septième. Gyrîadi», Cycîns -o3

Cyclas rivicola. ... 1 .... . 712

Genre c NQUANTE-HUiTiÈME, Pisidie, Pisidium 713

Pisidium umnicutn 716

DÎX-HUIIIÈME FAMILLE.

Les Érycinides 718

Genre CINQUANTE-NEUVIÈME. Èvyfi'iiàc , Eryci^a 726

Erjcina cycladiformis 736

Genre SOIXANTIÈME. Porooie , Poroma 736

Poronia purpurascens, - 740

DIX-NEÜVIÈME FAMILLE.

Los Güléommides 741

Genre soixante et unième, Galéonune, Galeomma 742

Galeomma Turtoni 751

VINGTIÈME FAMILLE.

Les Luciues* 752

Genre solxante-deuxième. Liicine, Lucina 760

Lucina iinioniformis, 787

mntabiîis 788

scopülorum 7^9'

columbeUa 789

spinifera. 791

lactca^ 792

rolundaca, 798

tif’erwa 794

punctata 796

dentata 796

Genre soixante-troisième. Corhcille. (7o/i&is . . . 797

Corbis elegans 8o3

pectuncuUis 804

Genre soixante-quatrième. Onguline, UnguUna 8o5

UnguUna rubrii Sii

Genre soiXANTE-riNQUiÈME. Cyrêuelli*, Cyrenelia 81 3

CyrencUa Dupontiana 817

CyrtncUa htcinoides 818

FIN DE LA TABLE DU PREMIER VOLUME.

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