k /^.9^'o TRAVAUX DE L'ACADEMIE IMPERIALE DE REIMS. VlngC-MSxieme Volume ANNEE 1856-1857. — N"* 3 ET -J. Chaque annee, 4 numeros trimestriels oti 2 mlum.es. Prix d'abonnement : SIX Francs. REIMS p. REGiMER, IMI'RIMEUK DE l'aCADEMIE BRtSSART-BlNET , LIBRAIRK DE l'aCADEMIE. Jil)[(:£LillL . ^^^ >^ i..,i,V>\ ai .5^M TRAVALX DE L'ACADEMIE IMPEillALE DE REIMS. ^,9^<^' TRAVAUX DE L'ACAnFJIIE IMPERIALE DE REIMS. Vfngt-sixlenio Volnme ANNEE 1856-1857. — N" 3 ET 8. Cliaque onude, 4 nmneros trimestriels ou 2 volumes. Prix h'abonnemem : SIX Francs. REIMS p. llEi. NIKH, lAirniME UU DE l'aCADEMIK BRISSAHT-ItlNET , LIBHAinE PK l'aC.APEMIE. ^iiiacLViii. TBAVAUX DE L'ACADEMIE IMPERIALE DE REIMS. PHILOSOPHIE ET fiCONaMIE. DESCARTES , Par M. I'abbe Ch. Bouch6, Membre liiulaire. Messieurs , J'abandonne pour uii momeni les eludes dont j'avais commence a vous faire pari sur le philosophe espagnol J. Balmes, — pour reraonler de quelques siecles dans I'hisloire de I'espril humain ; je viens vous parler de Descarles et de ses doctrines philoso- phiques. On a deja beaucoup parle de Descartes; et assure- menl I'influence que sa philosophie a exercee et qu'elle exerce encore, merilait bien qu'on lui fit cet honneur. Mais il n'est peul-elre point d'homme celebre, point d'influence litleraire ou scienlilique sur laquelie les opinions aienl ele plus diverscs et les senlimenls plus eirangemenl parlages. Tandis que les uns lui vouent rhoramage de la XXVI. 1 /i ■ plus profonde ei de la plus synipathique admiration , riionoranl comme I'une des plus vives lumieres de la science, comme I'uue des plus belles gloires de la palrie, en uu mol comme I'un des plus grands hom- mes de ce xvii" siecle qui en a produii de si grands ; d'aulres le rabaissenl jusqu'au niveau d'une intelli- gence vulgaire ; el je sais tel critique renomme de noire epoque qui ne voit en Descartes qu'un enfant en philosophie. II en est qui , tout en lui concedant une veritable valeur scienlifique , lui reprochenl avec amertume d'avoir jete dans le monde les semences des theories les plus desastreuses; pendant que d'aulres le venerent comme le genie restaurateur de la vraie philosophie. El ces dissenlimenls , cette opposition complete de jugement et de pensee , on la rencontre non-seule- menl enlre les hommes divises d'ailleurs d'opinions el d'idees , mais encore parmi ceux qui semblent en toute autre chose inlimement unis d'inlerets el de principes. Pour un grand nombre de philosophes catholiques, Descartes esl un novateur ; — et Malebranche et Fene- lon lui-meme ne trouvenl presque riend'aussi sublime que les Meditations de M. Descartes. Voltaire affectaii parloul pour le Carlesianisme un superbe dedain, il Teui presque Iraile a I'egal de TEvaiigile : et, pour le ralionalisme conlemporain, heritier de Voltaire en plus d'une chose , « Descartes est le pere de la philosophie, c'esl I'homme qui, n\ar- chant sans cesse de prodiges en prodiges dans mic vie philosophique assez courte, jelte un immense 6clat , ibranle et vivifie ious les esprits (I). » (») M. Cousin. — 8 — Je ne pretends pas j Messieurs, venir ici dirimer ce grand debai. En face de si puissanis adversaires, je dis bien sinceremenl el bion voloniicrs, avecle poetc romain : Non nostrum est tantas coraponere lites. Cependanl, done comme tout aulre de la facullc de juger, j'ai voulu en user par moi-meme. — J'ai lu et reiu Descartes , et je crois , sans opinion precongue, sans sysleme arrete; et ce sont ies reflexions que m'onl suggerees ces lectures que je viens vous com- muniquer, MM., aussi simplemenl que je Ies ai failes. A I'epoque oii vivait Descartes, sous le nom de sciences philosophiqucs on designait bien aulre chose que ce que nous designons sous ce nom de nos jours. Outre I'eiude des etres immatericis, Dieu et I'ame, la philosophic renfermait encore I'eiude des nonibres, de I'espace et des corps, en un mot, lout ce qui consli- lue Ies sciences maiheraaliques et physiques. — Les malhemaliques et la physique etanl loin d'avoir acquis les immenses el prodigieux developpemenls qu'elles possedonl mainlenant, il etait encore permis aux in- lelligcnces d'elile de parvenir h la science universelle; el Descartes elait de ce nombre. Aussi ce que nous appelons sa philosophic portc-l-il sur loutes les ma- lieres dont I'eiude est accessible a I'espril humain. — Afin done de me conformer aux denominations mainlenant admises , et pour ne pas confondre les objels les plus essentieilemenl separes, je parlerai d'abord de Descartes comme phiiosophc , puis je m'occuperai de lui comme physicien , astronorae ou malhematicien. — ^ — I. De Descartes comme philosophe. On a dil que le caraclere le pins essenliel, le fond meme de la philosophie de Descarles, c'esi le douie. — Cela seul est loule sa meihode, dit quelque pari Tun des philosophes contemporains qui se proclamenl ses disciples, M. Jules Simon. Mais quel est ce doiile? car le dissenliment dont nous parlions loul-a-l'lieure commence des ce pre- mier point J et il n'esi pas rare de renconlrer a ce sujel, dans les auteurs, les jugemenls el les expres- sions les plus conlradicioires. Chez les uns , le sysieme de Descarles esi un sceplicisme absolu, chez les autres, il est represenle comme un exemple de dogmatisme, et du dogmalisme le plus imperlubable. Nous croyons qu'en ceci il y a du vrai el du faux, comme il arrive ordinairement en toute question controversee. — Presque jamais une opinion n'a completement tort. — L'erreur elle-meme , a dil Bossuel, n'cst qu'une alteration plus ou moins pro- fonde de la verite, elle n'en est jamais la negation absolue; — toujours il y resle quelques traces de ce vrai que Plalon appelait si energiquement el si bien « le ravisseur de Tintelligence. » Et pour le dire en passant, ce serait peul-etre la la raison profonde de ce singulier phenomene qui se renouvelle si frequem- ment de nos jours, ou nous voyons les opinions les plus extravagantes exciter, je n'oserais dire, d'ardenles convictions, mais un enthousiasme freneiique. — 5 — Nous trouverons done a la fois dans la pliilosophie carlL'sienne du doule el de I'anirmalion, el ce n'esl l.oinl la premiere fois que do semblables extremes se louchenl el se confondenl. Cependanl les plienomenes de ce genre sonl lou- jours curieux a examiner, surloul quand ils lormenl le fond d'uu sysleme qui a domine le monde. Aussi I'ceuvre de Descartes nous parail-elle Tun des fails les plus inlercssanls de I'hisloire de I'espril humain. Nous ajoulerions volonliers Tun des plus utiles. Nous ne sommes pas de ceux assuremenl qui pre- tendenl que c'esl h la philosophic k regenerer le monde ; non, le monde moral, comma le monde phy- sique, a ete fail par la parole de Dieu. — C'esl a la parole de Dieu el a elle seule qu'il appariienl de le refaire, de le ramener a la purele de sa perfeclion primitive. Mais sans accorder a la philosophic une aussi haute importance, on peul regarder comme veritablemeni digne de I'homme , comme eminemmenl noble el avanlageuso, a nutre epoque de materialisme surloul, I'etude des grands problemes resolus ou poses par la philosophic. Quand on veui se faire une idee juste el complete de ce que ful un homme , il esl necessaire de se rendrecomple avanl lout du caractere el des tendances de I'epoque a laquelle il appariienl. Les grands hommes, quelque grands qu'ils soienl , quelle que puissance d'iniliative qu'ils possedenl, su- bissenl loujours en quelque chose I'influcnce de leur si^cle. — Sans doule, leur genie agii profondcmenl sur ropinion ; mais I'opinion avail agi auparavant — 6 — sur leur espril,— C'esi iine chose bien remarquabic que la mani^re donl s'accomplil cetle influence r^ci- proque des hommes sur les idees, el des idees sur les hommes. — II semble quelquefois que le si^cle el rhomrae se soieni enlendus, lant ils se renconlrenl a point nomme. — Et, pour lout esprit qui reflechit, ce n'est point Tune des raoindres preuves de la Provi- dence divine dans I'ordre moral. Quand Descartes naquit (1), il y avail deja long- temps que s'accoraplissait dans les \d6es el dans les choses cetle revolution profonde, que Ton est convenu d'appeler la Renaissance ; revolution immense dans son etendue et sa duree qui embrassa les sciences el les arts, la litleralure el la philosophic, la politique el la religion, tout ce qui lienl h I'homme el a la sociele ; revolution sanglanle dont nous sommes appel^s peul- elre h contempler les derniers actes , spectaleurs ou viciimes. Dans les idees el dans les choses, la Renaissance ful avant tout un cri d'independance, une reaction violenlc centre le principe d'autorile, une protestation universelle conlre lout ce qu'avait legue le moyen- 5ge, conlre les idees el les croyances, conlre les sciences et les arts, les coutumes el les insliiuiions des siecles qui venaient de s'ecouler. — On sail com- ment la foi naive et confianie de cetle epoque s'etail peu a pen dissipee, d'abord au sein des scandales et des nialheurs du xiv^ si^cle el du xv* siecle, puis au contact de ce monde grec et romain que la de- couverie des anciens auleurs et la chute de Constan- tinople venait de ressusciler dans tout I'Occidenl. (t) C'etait CD i69C. „ 7 — Et 8i Ton (iont complo de I'allrail indostruclible de noire nalnrc pour tout ce qui senl I'independance et la nouveanle ; allrail sans doule legilirae dans son principe, puisqu'il n'esi que ramour nalurel du pro- gres depose par Dieu dans notre coeur, mais vicie, corrompu , comme loules nos aulres tendances et toules nos faculies ; si Ton lient compie, dis-je, de eel allrail puissant, on s'explique facilemenl I'elan qui enlrainait alors les esprils et les cceurs. L'Amerique etait (rouvce, le cap de Bonne-Esp6- rance avail ete franchi , Timprimerie et toules les gnindes invenlions modernes elonnaienl les imagina- tions par des resuliats inaltendus: el ce qu'on avail conquis proraeliail des conqueles plus magniliques encore. L'enthousiasrae etait partoul ; partoul I'on aspirait h je ne sais quel monde nouveau , quel avenir inconnu ; — quand I'un de ces hommes qui semblenl fails tout cxpres pour de serablables cir- constances, Lulher, jeta dans le monde son ardenie parole. Get homme aux passions brulantes, k I'imagination vive, h I'eloquence enlrainante et populaire, eiaii bien la personnilicalion la plus puissante el la plus com- plete de Tepoque donl 11 se fii I'organe. C'est ce qui explique ses grands succes. Quelle fut I'ceuvre de Lulher? — II imporle de la caracleriser pour le bui que je me propose. — Ceile oeuvre consista essentiellement, d'uoe part, a renier I'autorite que le monde respeclait et venerail depuis quinze siecles; el d'autre part, a subslituer I'autorile de sa propre conscience, de ses inpiraiions person- nelles h renseignemeni de I'Eglise. C'elait a la fois — 8 — une oeuvre de doiile et de dogmatisme, d'aftirmalioti el de negation egalcmcnl absoliics. Eh bien ! ce que fil Luther, enfant de la Renais- sance, en maliere religieuse, c'est precisemenl ce que Hi Descarles, autre enfant de la Renaissance, dans Ic domaine des idees philosophiques: c'esl la raeme meihode. Sans doule je dois faire observer dans I'applica- tion de celle meihode une difference profonde. Luther allaquait I'auiorite la oii I'autorile seule a droit de parler, ou la raison humaine, placee en face de la majesle de Dieu, n'a que le droil de s'incliner el de courber la tele. Descartes au contraire savail celle parole de nos livres saints : Tradidit mundum disputationi eorum; — il savail que Dieu a laisse plus d'une chose a la libre discussion des hommes; — et ii croyait de bonne foi que son doule et son libre examen ne portail el ne pourrait jamais porter que sur de sem- blables matieres. Nous verrons plus lard s'il eul raison ou non de le croire , mais c'est un fail certain qu'il le crul; el il proleste, en mille cndroils de ses ceuvres, de sa sou- mission a I'auloriie religieuse , — et en verile nous ne voyons pas qu'il y ait lieu de soupQonner la sin- cerile de ses protestations. Une autre difference tienl au caraclere parliculier des deux reformaleurs. La reforrae de Luther ful vio- lente et passionnee comme son geuie ; celle de Des- carles fut plus calrae et plus froide ; et par conse- quent plus noble el plus digne. Descarles, a nos yeux, c'esl la raison, c'esl I'esprit de la Renaissance; Lu- ther en esl le cceur et les passions. • — 9 — Ces reslriclions posees, — el il faiit avoner qu'elles sonl imporiaiiles, esseniielles meme, la premiere du moins, — nous croyons irouver enlre I'idee proles- tante el la m6thode carlesienne la plus complele ana- logie. Evidemment ce sonl deux syslemes eclos sous I'influeDce de la meme pensee, du meme esprit, de I'esprit de renouvellemenl el d'innovalion, qui faisait la loi de I'epoque. De meme, en effel, que Luiher avail rompu avec loul le passe de I'Eglise ; de meme Descarles rompil avec le passe de la philosophie. De meme que Lu- iher avail dil: J'ai parcouru les monuments de I'en- seignemenl calholique, el je n'ai irouve qu'erreur et mensonge ; de meme Descarles dira : J'ai etudieloules les opinions , loutes les coulumes , loules les doc- trines, et fai vu qu'il n'y en avail aucune dans le monde qui fut telle qu'on me I'avait auparavant fait esperer, c'est-d-dire , vraie (1). Enlin , de meme que Luiher n'avait pas d'auire fon- dement de la certitude de sa foi , que le libre examen el I'inspiralion de son propre coeur; de meme Des- carles posera comme base unique de sa philosophie, le doute sans conlrole el la perception claire de sa conscience el de sa pensee. Ainsi , MM. , Ton a done eu raison de dire , que dans le sysleme de Descarles, il y a du doule, doule reel, doule universel el absolu. Tons ses livres, je dirais presquc, toules ses paroles en font foi. Dans la 1'* partie de son discours sur la me- thode , I'exposition la plus claire el la plus com- (1) Disc, sur la Methode , 2« parlio. — 10 — plele de son sysleme, apr^s avoir dii quelques-unes des beauics de reloqiience el de la poesie , el des subli- miles de la theologie, il s'esprime en ces ternios : « Je ne dirai rien de la philosophies sinon qu'il no s'y trouve encore aucune chose qui ne soil douleuse ; et pour les aulres sciences, d'aulant quelles empruntent lews principes de la philosophic^ je jugeais qu'on ne pou- vail rien avoir ball qui fut solide sur des fondements si peu fermcs. « Quelques pages plus loin, dans la S" parlie du meme discours , il annonce qu'il va se former une morale par provision, « afin, dil-il, dene pas demeurer irresolu dans mes actions, pendant que la raison m'obligera de I'etre en mes jugemenis. » El il elablil ses regies de morale par provision. Ainsi le doule esl complel ; Descarles a lellement fail lable-rase de toule certitude speculative ou pra- tique, qu'il se trouve dans la necessite de se donner une regie de conduile provisoire. II est evident qu'il ne s'agit point ici d'un doute pureraenlficiif, d'une simple supposition inlellectuelle, comme quelques disciples de Descartes I'onl fausse- menl prelcndu. II s'agii d'un doute bien reel, bien absolu. Seuleraeni, il faul aussi I'avouer, ce doule carlesien ne ressemble nullement au scepticisme antique. Les anciens sceptiques doulaient pour douler ; le bill de leur scepticisme n'etail que le doute lui-memet — Descarles doulait pour arriver a la certitude. Lorsque Pyrrhon disaii que le monde est , dans loul ce qui le conslilue, uue enigrae impenetrable, un vaste inconnu ; — ■ quand les sophisles , comballus par Socraie, ajoulaient que ce n'esl rien qu'un fan- — 11 — lomCj qu'un reve ; quand Metrodorc, poussanl jusques dans ses derni^res limiles cet etrange abus de la pen- &6c humaine , eel affreus suicide de I'inlelligence, s'exprimait ainsi : « Je doute memesije doutea: il n'y avail plus rien qui subsisiat dans la pensee de ces homraes, rien que le vide el ie neant. Mais lorsque Descartes declare qu'il doute, on sent au fond de ce doute meme une puissante affirmation, UD systeme de certitude parfaitemenl arrele el devenu robjel des plus inlimes convictions. En un mot^ Descartes doute de toule la science prd- senle el passee, il doute de I'bumanite loule enliere ; — mais il a foi en lui-meme, foi ardente el inebran- lable. Ecoulez ces paroles; elles sonl (rappantes d'energie el de conviction ; je les emprunte toujours au Dis- cours sur la Melhode (4* part.) : « Je pris garde que pendanl que je voulais ainsi penser que tout elait faux, il fallail necessairement que moi qui le pensais, fusse quelque chose, el re- nnarquanlque cette virile: Je pense, done je suis, etail si ferme el si assuree , que loutes les plus exlrava- gantes suppositions des sceptiques n'elaienl pas ca- pables de I'ebranler ; je jugeai que je pouvais la recevoir sans scrupule pour le premier principe de la philosophic que je cherchais. » Apres cela je considerai, en general, ce qui est rcquis a une proposition pour elre vraie el certaine ; el ayant remarque qu'il n'y a rien du tout en ceci : Je pense, done je suis, qui m'assure que je dis la verile, sinon que je vois tres clairement, que pour penser, il faul etre ; je jugeai que je pouvais prendre pour regie generale que les choscs que nous conce- - 12 - vons fori clairemenl el fori dislinclemenl soiil loules vraies. » Ensuile de quoi faisani reflexion sur ce que je doulais, el que par coDsequenl^ mon elre n'elait point toul parfail , — je m'avisai de chercher d'oii j'avais eu I'idee d'une nature plus parfaile que la mienne. — La lenir du neanl, c'elail chose impossible; — et par ce qu'il n'y a pas moins de repugnance que ie plus parfail soil une suite el une dependance du moins parfail, qu'il n'y en a que Ie rien procede de quelque chose, je ne pouvais h lenir de moi- meme : de fa^on qu'il reslait qu'elle eul ele mise en moi par une nature qui fiil reellement plus parfaile que je n'elais , el meme qui eiil en soi loules les perfections donl je pouvais avoir Tidee, c'esl-a-dire qui fui Dieu. » Ainsi, en Irois pas, — du doule 6 la certitude de son existence elde sa pensee,— de lacerliludedesa pensee a rinfaillibilite de la perception claire et distincte, — de ceile infaillibilite de I'evidence a la connaissance de Dieu, I'intelligence de Descartes est arrivee jus- qu'a la veriie supreme , source de louie veriie el de loute certitude. Ccrles , apres un doule universel , il est impossible de prendre plus rapidemenl el plus compleleraenl possession tie la veriie. El il faul ajouler encore, que jamais prise de possession ne parul plus confianie el plus paisible. Mainlenant , je crois avoir suflisammenl elabli Ie double caractere que j'avais annonce comme formanl I'essence meme de la philosophic de Descartes ; Ie doule el la foi ; Ie doule de lout ce que peul offrir I'auiorite de I'homme , Ie lemoignage des siecles ; la — IS — foi a lout ce qui repose sur la percepiion claire de la conscience et de la raison. Le doule et la negation, employes non comme but, mais comme moyen, raais conime raelhode, pour arriver au libra examen , a I'arbiirage definilif el sans conlrole de la conscience individuelle , el la foi pleine et entiere a celie sou- verainele supreme de la raison. Tel esi,— a mon avis du moins,— le sysleme de l^psCcirlcs. II me resie mainienani a en examiner la raison d'etre, la legilimile et les resullals. Je touche^ci a I'une des questions les plus fonda- meniales el les plus ardemmenl debatlues de la philo- sophie. , , II s'agii de determiner les droits de la raison individuelle, la pari qu'elle doil prendre dans la dis- cussion des profonds el mysierieux problemes qui concerneni I'origine et la desiinee de I'homme. Le premier caraclere que j'ai signale dans le sys- i^me de Descartes, c'esi son cote negatif , c'esl cetle espece de reprobation dont il frappe los doctrines el les enseignemenis du passe, c'esl cetie tendance bien decidee & fouler impitoyablemenl aux pieds, en maliere de philosopbie, loute tradition, louteautorile, au moins humaine. Or, selon moi, celte tendance est un lorl et consli- •ue un veritable danger ; car je la crois de nature a amener les plus funesles resultats. El en effel. Messieurs, I'homme n'est point un elre isole, jet6 sur la lerre pour y passer quelques jours d'une existence sans precedents et sans suite. Non car si I'homme vit d'une vie propre el indi- viduelli, il vil aussi de la vie commune, el certes — id — cetle vie n'esi point a dedaigrier, il vii de la vie de la famille, de la vie de la patrie, de la vie de I'ha- manile lout eiiliere. El s'il apparlienl aii presenl , il apparlienl aussi au passe et h I'avenir. — Au passe, doiit il a re^u par I'enseigneraenl ses croyances el ses idees, ses senliraenls et ses esperances , tout ce qui I'a fait homme, en un mot tout ce qui conslilue son intel- ligence et son coeur. — II apparlienl a I'avenir, au- quel il transmettra a soa lour ces memes croyances, ces memes sentiments el ces memes esperances. Magnifique prerogative qui fait de Thorame un elre h pari dans la creation. La bruie nait, croit et meurl, et d'elle lout esl dit, lout disparail jusqu'h la moindre trace. Mais de I'homme il n'eh est point ainsi. — Avant de naitre on peut dire qu'il eiail deja, et apres sa morl on peut dire encore qu'il sera. Telle est cetle admirable loi de la solidariie hu- maine, qui fail de I'humanile comme une immense famille, oii lous les membres sonl inlimemenl lies les uns aux aulres, — comme un corps vivant el parfai- temenl ordoiine, ou le role de chaque parlie esl aussi necessaire au bon eiai de I'ensemble, que ce bon elal de Tensemble Test lui-meme au role de chacune des parlies. Briser la chaine qui nous rallache ainsi k touie I'humanile, se separer de celle venerable tradition, c'esl done se suicider en quelque sorle soi-meme ; c'est se priver de I'un des plus grands privileges de noire nature, de I'une des plus douces et des plus louchanles consolations de noire vie ; c'esl s'en- lever le depot le plus riche et le plus precieux qui nous ait ete confie. - 15 - Ce d^pot nous I'avons regu pour le transmellre a notre tour. — Nous pouvons , nous devons meme I'augmenter, ajouter a sa richesse. — Mais vouloir renverser de fond en comble I'edifice pour le reconslruire h neuf, vouloir h soil seul refaire I'oeuvre de cinquante generations el de cent peuples divers : — c'est une pretenlion aussi insensee dans son principe, qu'anli-sociale dans ses resultals. Or, on ne pent se le dissimuler, telle ful la pre- tention de Descartes. — Sans doute il ne se rendit pas compte des consequences qu'elles devaient enirai- ner, emport6 qu'il etait par le torrent des idees du jour. 11 en fut innocent de fait ; — mais en droit, son sysleme en est coupable. Racontanl dans la 2""^ partie do son discours sur la meihode, la naissance de son sysleme, il s'exprime ainsi : « Uune de mes premieres pensees fut que je m'avisai de considerer, que souvent il n\j a pas tant de perfection dans les ouvrages composes de plusieurs pieces, et fails de la main de divers mailres, que ceux auxquels un seul a travaille . Ainsi voil-on que ces bdliments qu'un seul archilecie a entrepris el acheoes, ont coutume d'etre plus beaux et mieux ordonnes que ceux que plusieurs ont tdche de raccommoder, en fai- sant servir de vieilles murailles qui avaient ele hdlies a d'aulres fins . — Ainsi je pensai que les sciences des livres s'etant composees et grossies peu-d-peu des opi- nions de plusieurs diverses personnes, ne sont point si approchantes de la verile que les simples raisonnements que peut faire naturellement un homme de bon sens . » Evidemraenl dans ce raisonnemeoi de Descarles, il y a une etrange confusion de choses et d'idees. — — 16 — Assimiler la science hmnaioe a une maison qu'iin archilecle peut faire el defaire en quelques jours, c'esi employer le sophisme que Ton appelle dans I'ecole transitus de genere ad genus. Non , cerles , la science n'est point Tceuvre d'un jour, ni d'un horame, c'esl I'ceuvre patienie des sie- cles el de I'humanile toul entiere. — Que d'efforls, que d'annees n'a-i-il pas souvenl fallu pour la faire avancer d'un seul pas ? El si cela esl vrai de loule espece de science, combien plus encore ce I'esl-il de celles qui, comme la philosophie, louchenl aux plus profonds myslferes , aux problemes les plus ab- slraiis du monde inlellecluel el moral. El , aujourd'hui meme, ou en senons-nous, si nous avions eie prives de loule la science el de loules les recherches du passe. Sansdouie, Thumanite n'esl poinl infaillible, comme on I'a pretendu quelquefois; — sans doule , pendanl les siecles qui precedereni Descaries on avail abuse plus que jamais peul-elre de Tauiorile des mailres de la science , el denature la simplicile de leurs enseigne- menis. — Elail-ce une raison pour loul renverser jusques dans les fondemenls, pour loul repousser des pr6cedenles doctrines el des anciennes methodes? — Nous ne le croyons pas ; — nous sommes au contraire intimement persuade, que si le genre humain s'est irop souvent egare viclime de ses prejuges ou de ses passions, il n'en faut pas moins recoonailre, qu'a loules les epoques, il a depose dans le Iresor commun de la science, des idees precieuses; el que, sous I'enveloppe loule simple el quelque fois grossiere de son langage , on peul rencontrer de grandes el profondes verites, source el principe de loules nos connaissances puremenl humaines. 17 — II. Dans line premiere leclnre j'ai indique les cir- constances dans lesquelles s'esl prodiiit le sjsteme de Descartes, c\ qui, selon moi, exercerenl une inlluence reelle sur sa formation. J'ai dit que ce systeme avait deux faces, deux cotes, I'un negalif, I'aulre positif : le doute el raffirmalion. J'ai ajoute que, sous le premier de ces rapports, il me paraissait etre une suite de ce grand mouvement de reaction qui caraclerise I'epoque de la Renais- sance, el qui, en maliere philosophique , s'ciait deja manifeste dans les ceuvres de Montaigne el de Bacon, J'ai dil encore que cette reaction cartesienne, pour etre beaucoup moins illegilime que d'autres de la merae epoque, precisemenl a cause des malieres aux. quelles elle s'appliquail, et qui sont du ressort de I'intelligence humaine, me serablail cependant renfer- mer des tendances veritablement dangereuses. Et ceci ne doit point eionner : c'esl la nature de loute reaction. Quel esl I'homme qui, combatlanl une opinion conlraire h la sienne , pourrail toujours se flatter de n'exceder en rien, et de demeurer constam- menl dans les limiies du juste el du vrai ? Pendanl les derniers temps du moyen-age , on avail quelquefois si elrangemenl abuse du principe d'auto- XXVI. 2 — 18 — rile; le nom d'Arisloie el la formule : Ipse dixit, avait donne lieu a de si singulieres et si frivoles snbiilites^ que toule reaction conlre ces abus devail natiirellemeni amener des exces dans un sens oppose. — C'esi precisemenl ce que je crois elre arrive pour Descartes. El ici> Messieurs, permeliez-moi, avanl d'aller plus loin, de developper uneidee donl j'ai pose les premices au commencemcnl de ma premiere lecture. Je disais que meme les grands hommes , quelque grands qu'ils soient, quelque puissance d'inilialive qu'ils possedenl, subissenl loujours en quelque chose I'influence de I'epoque a laqiielle ils apparlienncut. Aussi , je crois qu'il faut distinguer en Descartes deux hommes : I'homme prive el Thomme de I'epo- que; le philosophe donl la raison puissanle el le rare bon sens s'etaienl developpes au sein de la verite el de la foi catholique, et le genie domine par I'esprit de son siecle. Gomme homme prive, Descartes a dil d'admirables choses parloul ou il suivil sa pensee propre. Comme homme de I'epoque, je crois qu'il a cede au torrent ; il est tombe dans I'exces : — et eel exces, il I'a senti lui-meme plus d'uiie fois, — sans cepen- danl peut-eire s'en rendre exaclement comple; — plus d'une fois, il y eut lutte entre les principcs qu'il tenail de son sens exquis el de sa raison catholique, el ceux que lui imposail le courant des idees du jour. Et dans celle lulte, dans celle espece de dualile se trouve, selon moi, le mot de bien des 6nigmes ; c'esl la, en effet, ce qui explique les fluctuations frequentes, les contradictions meme qu'on rencontre dans la doclriDe de Descartes : — c'esl la surlout la raison — 19 — fondaraenlale tie ces jngemcnis si opposes que I'on a emis siir les tlifferonls poinis dc ceile tloclrine. Par suite meme de la nature de leurs idees , les uns n'oDt vu el n'ont dii voir, dans ie carlesianisme, que rexpression exacte et systemalique du niouvenaent de la Renaissance, que la secularisation definitive de la raison, comme dit M. Saissel ; les aulres, au con- traire, y ont irouve la continuation de la philosophic du catholicisme et du bon sens. Je pense, moi, que pour se litire une idee exacte el complete du sjsleme cartesien il faut y voir I'un el I'autre. Ceiteremarque, Messieurs, m'a done paru fondamen- lale, el je la crois aussi vraic qu'elle est imporianlc. — Nous en renconlrerons plus d'une preuve dans la suite de ma lecture ; el j'espere meme en porter la demonstration jusqu'i I'evidencc. Maintenanl je rcnire dans mon sujet ; et je dis que dans la pariie negative de son systeme, Descartes est surtcul I'homme de la Renaissance : — I'un des plus illustrcs represenlants de cello ecole qui, en maliere philosophique, rcjela toute tradition, lout enseigne- menl anterieur , proscrivii toute espece d'autorile, absolumenl comme Luiher avail fail en religion. El si I'on douiaii encore de la realile de eel arret de proscription lance centre les enseignemenls da passe, j'appellerais ratteniion sur ce passage des re- ponses aux cinquiemes objections, oil Descartes, re- pondanl & Gassendi qui lui avail oppose I'aulorite de quelques anciens philosophes, louchanl rinfaillibilite de la perception claire, s'exprimo en ces lermcs:«£'n ceci, favoue que c'est fort bien argumenta^ dc Vaulo- rit6 d'aiilrui ; mats vous devriez vous souvenir , 6 chair, que %wus parlez ici a un esprit qui est tellement — 20 - detacM des cfioses corporelles , quU ne sail pas mime s'il y a eu aucuns hommes avanl lui , el qui partant ne s'emeul pas beaucoup de leur autorile (1). » II n'esl pas possible de se consliiiier dans un rsolcnienl plus complet. Or, meme en maiiere purcmeni scieniifique , et placee eniieremenl sous le domaiue de I'espril huraain, — et, ici, nous ne parlons que de ces series de choses, je crois que eel isolemenl de la pensee indivi- duelle renferme des lendances perilleuses , de veri- tables dangers. Le premier de lous , c'esl cclui de supprimer Tune des condiiions les plus esseniielles du progres inlellecluel el moral, qui esi la vraie mission de I'hu- manile sur la terre. — Le progres n'esl evidemmenl possible, qu'aulant que chacune des generalions hu- maines, s'aidanl des resultals obienus par les gene- ralions precedenles , fournira a son tour aide el secours a celles qui doivenl la suivre. Messieurs, je ne sais si je me irompe, raais il me semble que les crainies que j'emels en ce moment ne sonl pas lout a fail chimeriques. On s'esl plaint souvenl de nos jours de la decadence des sciences philoso- phiques, — el louie exageration mise a pari, on peut dire que ces plainles sonl fondees, au moins eo par- tie. — Abandonnanl les fortes el antiques traditions, on a voulu philosopher chacun par soi et pour soi. Les efforts se soni isoles, les forces disseminees; el qu'en est-il resulte? que souvenl les uns detruisaienl dans le meme temps ce qu'edifiaienl les autres. Pour ce qui regarde les mceurs, on sail I'influence (1) Ueponseaux boni enire elles pour donner naissance aux vonls de nord-ouesi qui souffleni en Egypte une parlie de i'annee. Ces vents tournent direciemenl au nord k I'epoque du solstice d'ete, parce qu'alors I'atniosphere se irouvanl plus fortemenl dilatce au dossus des plaines sablonneuses de I'Afrique, le couranl d'air qui lend k — 152 ~ maintenir I'^quilibie almosplierique en se porlant de la Mediierranee dans rinierieur de ces deserts, devient assez fori pour franchir les monlagnes qui pourraieni lui opposer quelque obstacle, el pour conserver sa direclioii primiiive. La mer Rouge el la chaine de monlagnes qui la separe de la vallee du Nil, n'ayanl que peu de lar- geur, le couranl d'air qui lendraii a s'eiabiir de ceite mer vers I'Egypie, n'a qu'une faible inicnsile el fran- chil raremenl les monlagnes. Aussi le venl d'esl ne soufile-l-il dans celle contree que pendanl dix ou douze jours de I'annee. Les venis d'oucst el de nord-ouesi , dont nous voyons mainlenanl I'origine, chasscni devant eux les sables de la Lybie , qui auraienl depuis longlemps envahi I'Egypie, s'ils n'avaieni pas eie forces de s'ac- cumuler en dunes sur sa limite occidenlale. Certains arbrisseaux servenl de point d'appui a ces dunes, el opposenl aux malieres pulverulenies donl elles se composenl le seul obstacle qui puisse en arreier le cours. Ces arbrisseaux croissent sur les bords des canaux derives du Nil. Ainsi le premier bienfail de ce fleuve esl d'enipecher que le pays qu'il arrose devienne sterile par I'effel des sables qui lendenl a s'en em- parer. Le canal de Josepb parail elre une des plus anciennes digues opposees par I'arl aux irruplious des sables. Cependant ces sables qui, pousses par les vents, arrivenl sur les bords du Nil ou des canaux qu'il ali- menle, ue s'arrelenl pas lous sur les rives pour y former des dunes : une parlie est jetee dans leur lit et se mele au limon pour conlribuer a I'exhaussement du sol. Ainsi le depot du limon, entraine par le fleuve et — 153 — depose dans ses inondalions, offre aux habitants de I'Egyple, ei depuis une longue suite de siecles, les prodnils d'urie feiiiliie sans exemple, landisque, par une inondaiion d'une autre nature, les sables que les vents tr.insporlent du fond du desert de la Lybie , lendenl a envahir cetle lerre et a la frapper de steri- liie. On trouve la une explication bien naturelle de ces contioucls efforts dans lesquels, suivant I'aneienne fable egyptienne, Obiris, dieu du bien, el Typhon, dieu du mal, aliernalivement vainqueiirs el vaincus, se disputent un terrain ou ni Tun ni I'autre ne peul exercer un empire excliisif, el que la nature a dispose pour elre enlre eux I'objel d'un elernel combal. On voii ici que I'eiude de la nature peul nous eclai- rer sur les objets de la superstition des hommes , comme elle nous a deja servi mainles fois a constater les verites ailestees par nos livres sacres. Nulle coniree n'est plus propre que I'Egyple a servir d'exemple pour celte etude: nous sommes habitues des noire enfance a la considerer comme le berceau de la civilisation ; sa description nous est lellemcnl familiere qu'il semble que nous I'ayons reellemenl habilee; lout ce qui la concerne doit nous inieresser vivemenl ; en commen- ?ant par elle, nous nous meltrons facilemenl a merae de comprendre ce qui concerne les autres regions. Le limon noir^ gras el argileux qui couvre la vallee du Nil, ainsi que le Delta, produil un grand nombre de planles marecageuses. Le terrain du desert, lout entier forme de sables , ne possede qu'un ires petit nombre devcgeiaux, qui lous onl des raciiies longues el libreuses, indice du manque d'humidiie uecessaire ^ la vegelalion ; car ils onl besoin de puiser au sein de la lerre celte huraidile qui leur manque a la sur- — 454 — face ; leurs tiges soni dures el ligneuses ; el souveni menie leurs feuilles sonl armees d'epines. Cos feuilles el les fleurs n'oul que bien raremeni des couleurs vives el gaies ; on juge a leur aspect I'eclal de leur souffrance. L'hiver de I'Egyple est semblable au long prin- temps de nos climals. Aussi le fioid n'y esi jamais assez intense pour suspendre la vegeiaiion. La verdure qui ne dis-paralt guere avanl le mois de Decembre, y reparail des le mois de Fevrier. II n'y a point de forels en Egypte, mais les syco- morcs, les lamariniers, originaires de I'interieur de I'Afrique et d'autres grands arbres a feuillage large et tonffu, sont lr6s propres a donner beaucoup d'ombre. Ces arbres ont le double avaniage d'orner les cam- pagnes dans lesquelles ils sonl repandus el d'y offrir un abri centre les rayons ardents du soleil. Sans eux, I'Egypie serail presque lolalement depourvne de ver- dure au prinlemps, el ne presenlerail a perle de vue que de vasles champs poudreux donl rien ne couperait Tuniformiie, car on ne voii pas^ dans ce pays, ces beaux gazons si frais qui parent nos conirees lempe- rees, el surtout les regions septentrionales. Les gra- niens, qui constituent generalement ces gazons, n'exis- lent pas en Egypte, ou bien ils demeurent isoles sans se reunir par touffes. Dailleurs , Taction conlinuclle d'un soleil ardent les desseclie el les brule jnsqu'a la racine. Les gazons ne sont pas fails pour les pays chauds; I'Auteur de la nature a voulu repandre ses bienfaits avec egalite ; il a dedommage ,les pays du nord des brouillards, des pluies, des gelees, en leur accordant une verdure delicieuse; ceux du midi jouis- sant d'un ciel loujours serein n'y ont point eu part. — 155 — Parmi les arbres dirangers h nos climals el com- muns en Egyple, on remarque le palmier-daltier, I'un ties vegelaux les pins utiles des pays chauds. Son fruit sain el nourrissant esi un aliment agreabie ; son bois leger el poreux se travaille facilement, ses feuilles servent a faire des paniers el des nalles ; le reseau filamenleux qui s'entrelace h la base des feuilles esl employe pour faire des cordages grossiers, mais solides el peu couieux. Le datlier reussil egalemenl dans les sables du desert el sur les rives dn Nil ; c'esl les eul arbre qui forme en Egypie des bois de quelque elen- due; d I'elat sauvago il nedonne pas de fruits bons h manger, mais il en dunne d'excellenls par la culture. Dans la Haute-Egypte on Said , la vallee esl con- siderablement elevee au-dessus du niveau le plus ordinaire du fleuve, el les pluies fort rares; de sorie que la seclieresse y est encore plus grande que dans la Basse-Egyple el les planles, par consequent, aussi fori Fares ; on y irouve le doum , soriede palmier qui se distingue du datlier en ce que ce dernier a le ironc simple, landis que le ironc du doum se partage en deux branches qui en produisenl ellesmemes chacune deux autres, lesquelles portent encore des rameaux courts el peu nombreux. Le doum produit un fruit remarquable par sa grosseur, sa ligure el le gout de son sue semblable h celui du pain d'epice, ce qui le fail beaucoup rechercher des enfants, quoiqu'il soil peu eslime comme aliment, a cause de sa puipe ires lilamenleuse. Ce fruit assezgros pour remplir la main renferme un noyau d'une grande durele dont on fail au tour des anneaux pour les rideaux. Le bois de I'arbre est meilleur que celui du daltier: ce dernier esl mou el compose de fibres laches ; I'aulre est, au — 15« — contraire, serr^, pesani, dur et vein6. Le doura croU pariiculiereraent aupres de Thebes et deDenderah, oil sa verdure conlrasie beancoiip avec la secheresse des lieux qui I'cnvironneni. En s'ele\anl dans les plaines presque sleriles qui bornenl le deserl, il presenie un remparl conlre les venis el les sables, el rend propres a la culture des lieux qui seraienl abandonnes sans I'abri qu'il leur donne. La Basse-Egyple est un pays plat, facilement inonde, et arrose quelquefois , quoique bien raremeni, par les pluies qui tombenl sur les cotes de la Mediierranee en Novembre, Decembre el Janvier. On y trouve le papyrus dont les anciens einployaient I'ecorce pour y tracer leursecrilures; il esi rare aujourd'hui dans ces conirees , mais on le renconire jusqu'en Ahyssinie. Le nenuphar el plusieurs phintes du midi de la France y croissent nalurellemenl. On y remarque aussi le lotus , planle ires semblable au nenuphar de nos elangs, laquelle germe dans les fosses et les campa- gnes inondees; ses fleurs blanches, nombreuses et serrees se fermenl pendant la nuii; son fruit egale ce- lui d'un gros pavol et coniienl un grand nombre de graines semblables a celle du millet. Les anciens Egypiiens se nourrissaienl de ces graines donl ils allri- buerenl la connaissance a Isis. Le lolus d'Ejjyple ne ressemble point a celui de Lybie celebre par Homere, et qui avail fait donner le uom de Lolophages h un ancien peuple d'Afrique. Ce dernier loius est un arbrisseau connu des boianistes sous le nom de Rhamnus Lolus. Les fruits du lolus d'Egyple , meles a des epis de ble, sont un emblenae d'lsis ou de I'a- bondance , sur les medailles egypliennes du temps des empereurs romains. — 157 — Les foug^res, les mousses, les lichens, les cham- pignons, les byssus, planles qui recherchenl I'ombre el la frakheur, sonl d'une rareie exlrcine dans loute I'Egypte doni le sol nu el brule ne peul leur convenir en aucune fa?on. La nature , Toriginc si differentes de la vallee et du deseri ; le caraciere de fecondiie exclusivenoent at- tache aux eaux du Nil , eiaienl des fails bien connus dcs anciens habilanls de I'Egyple. Les poeles du pays, c'esl-a-dire les pretres , les ont souvenl celebres, car ils formaient un des fondemenls de la Mylhologie qui la , comme chez tous les peuples primiiifs , n'a el6 d'abord que rexj)ression des pheuomenes les plus im- porlanls de la contree. Transmis par les hisioriens grecs , ils sonl encore reconnaissables, quoiqu'expri- mes dans le langage sacre el couverls du voile de Tallegorie. La disiinciion du royaume d'Osiris el du royaume de Tvphon, ainsi que les natures opposees de ces deux divinites, en elaieut le syinbole, comme nous I'avons deja remarqne. Osiris regnaii sur I'Egypte : principe de fecondite, c'eiait lui qui avail cree la nature cultivable, el qui mainlenail I'existence des etres animes, de la vegeta- tion el de tout ce qu'il y avail de bon el d'utile aux hommes. Typhon , au contraire, divinite aussi active que malfaisante, principe eternel de sterilite, eten- daii son empire sur les lieux deserts el sur toule la nature improductive. Oppose en touies choses a Osiris, il le poursuivailsans relache, il lachail de Taneantir; el si ses efforts eussenl ete couronnes du succes, I'Egypte, soumise a ses lois, bientol aride el inha- bitable , ne se ful plus distinguee des autres partiea de son affreux domainc. — 158 — De eelie lulie enire les deux divinii^s oppos^es, ^taient resulies divers evenemenis celebres dans la plus haute aniiquilo, el dont renchainement, qui for- mail une pariie imporlanle de I'liisloire sacree du pays, comprenaii les changemenls survenus dans I'eiat respeclif des deux conirees. La limile commuoe des deux empires etaii celie des debordemenis du Nil, et les deux especes de terrain qu'elle separe etaienl aussi representees par deux di- vinites. Isis, soeur et epouse d'Osiris, eiait ceiie heu- reuse terre que le Nil couvre el leconde de ses eaux ; Nephthys, soeur el epouse de Typhon, la terre aride el deserie devanl laquelle s'arrelenl les inondalions du fleuve el I'influence de la divinile bienfaisanie. Con- damnee, dans son hymen, a une elernelle sl6riliie, Nephthys, disaienl les pretres egyptiens, ne pouvail devenir feconde que par son union avec Osiris; ce qui decoule du principe que le sejour des eaux du Nil est neccssaire pour fertiliser la terre du desert. Celie allegorie, si juste el irop claire pour avoir besoin d'explication, peut donner une idee des rela- tions qui existaient enlre les phenomenes naturels de eelle conlree el les fails moraux doni se composait la mysterieuse histoire de scs dieux, ou ses dograes religieux. La mythologie des autres peuples, souvenl defigurde sans doule par des poetes peu scrupuieux ou doues d'une imagination trop vive, n'a pas toujours conserve ce caraclere de simpliciie qui permet de remonier atsemenl a son origine. 159 — ANIMAUX DE L'aFRIQUE. Parmi les animaux que produil I'Afrique el qui ne se relrouveni clans aucune aulre conlree, on reranrque les giraffes^ les hippopolamrs, les chevaux a poll raye, connus sous les noms de zebres, dauws el conaggas, les chameaux a une bosse , les auiruches a deux doigts, etc. La girafe, confinee dans les deserls, s'y nourril des feuilles de palmiers que sa grande laille lui permet d'aileindre aisemenl; c'esl un des animaux les plus doux qui exislenl. L'hippopoiame, qui descendail autrefois le long du Nil jusqu'en Egyple, parail aujourd'hui confine dans les grands cours d'eau du milieu el du sud de TAfrique. II ne quitteguere les rivieres, oii il vii de substances vegeiales, el dorl dans les roseaux. Sa grande laille, sa force prodigieuse, sa ferocile extreme^ en font un animal des plus redoutables. Sa tele enorme, son venire irainanl jusqu'a lerre, rempecheni de courir assez vile pour echapper aux poursuiles des hommes lorsqu'il est hors de I'eau; mais il esi difficile a luer, parce que les balies ne peuveni percer sa peau ires ^paisse que sous le ventre el entre les cuisses. Sa chair esi un aliment fori eslime des habitants du Cap. Ses defenses, beaucoup plus dures el moins suscep- libles de jaunir que I'ivoire, sonl recherchees pour faire des dents arlificielles. II esi bien remarquable que les chevaux k poil rayd soiem tous originaires de I'Afrique , taodis que let — 160 — esp^ces k poll non ray^ , le cheval proprement dil , I'ane et I'hemione, sonl toules originaires de I'Asie. Les zebres, dauws el couaggas se irouvenl dans la parlie meridionale de I'Afrique, depuis I'Eihiopie jiis- qu'au Cap et au Congo; on n'a pu jiisqu'ici en dompler aucune espece ; louies celles de I'Asie, au conlraire, ont eie soumises a la domeslicile. Les chameaiix a une bosse paraissenl originaires de I'Arabie, d'ou ils se sonl repandus dans lout le nord de I'Afrique. On n'en irouve plus a I'elal sau- vage, les services qu'ils rendenl aux habilanls sout trop grands pour qu'on leur permelle de vivre en liberie. L'Arabie, donl le sol el le climai ressemblent beaucoup a ceux de la grande peninsule, pariicipe aussi de ses diverses productions, et les naturalisles la considerent comme faisanl parlie de I'Afrique. Les hyenes que les Arabes regardenl corame le symbole de I'opinialrele sonl repandues dans toute I'Afrique el en Asie jusque dans les Indes. Parmi les animaux qui se renconlrent pariiculiere- menl en Egypie , la classe des mammiferes nous prescnle des chauves-souris , puisqu'il y en ah peu pres parlout, des ioups , des renards , des lievres , des mangousles, des rausaraignes. Bien que le loup commun se trouve en Egypie, il ne descend guere an sud de ceile coniree, s'eiendant, au conlraire, vers le nord de la Laponie, et memo dans TAmerique. On irouve en Egypie une petite espece de renard a poil laineux fauve et a grandes oreilles, connu sous le nora de Fennec ; il se creuse des terriers dans le sable. La mangousie d'Egypte , si celebre dans les histo- riens sous le nom 6'^Jckneumon, et que les habitants — IGl - nommenl aiijourd'liui Nems on Bat de Pharaon , csl un animal emincmment chasseur, assoz somblaltle a noire fouine pour la laille el la forme, mais a poil annele de teinles claires et obscures doni Fcnsemble est grisatre. Sa crainie el sa defiance sonl oxcessives- dans I'elal sauvage, elle n'ose jamais se basardcr en pleinj campagne, mais se glissc dans les siiions ci les pelils canaux qui servenl a I'arrosage dcs lerres , flairanl et regardant a chaquc instant auloiir d'elje. Lorsqu'elle est obligee de sorlir d'un sillon pour aller boire dans le Nil ou pour sc saisir d'unc proie, clle rampe sur le venire, examinanl avec soin toui cc qui I'environne; et non contenle de ccltc precaution, chaque pas qu'elle fail en avanl csl suivi d'un raou- yemenl en arriere, qu'elle execute avec des marques evidenles de frayeur. Cc n'cst qu'aprcs avoir longiemps hesile et flaire autour d'elle qu'elle se decide "a fairc un bond pour arriver a son but.. Cetle limidile excessive la rend susceptible d'edu- caiion ; on I'apprivoisc facilemeni ; elle est douce ei caressanle, distingue la voix de son maitre et le suit presquc aussi fideiemcnl qu'un chien. Elle fail la chassc aux souris el aux rats avec nne telle ardeur, qu'il lui suffit de peu de temps pour en nettoycr compielement une maison. Elle n'esi jamais en repos, fureile sans cesse partou- , el lorsqu'elle a flaird quelque proie au fond d'un Irou, clle ne quille que bien rarcment la parlie avanl de s'en etre saisie. Avec des habitudes aussi destructives, elle ne peut pas manger tons les animaux qu'elle tue, cl se coniente de leur sucer le sang el le cerveau. Elle aime beau- Coup a se rafraichir certaines parlies du corps; lors- qii'on lui donne a boire dans un vase, d&s que sa XXVI. j2 — 162 — soif csi salisfaiie^ elle renverse toule I'eau sur son venire et recherche, pour y appliquer son derriere, les endroits les plus frais. A I'elal sauvage, elle se nourril de rats, de serpents, d'oiseaux ei d'oeufs, L'inondaiion Tobligeanl d'aban- donner les campagnes, elle se refugie aux environs des villages auxquels elle pourrail faire beaucoup de lori en se jeiani sur les poules el les pigeons. Cepen- danl les Egypliens s'effrayent peu de ses devastations, se rcposanl du soin de la detruiro sur les renards et les chacals que les grandes eaux chasseni aussi des plaines. Les mangoustes, jetees au milieu d'enne- mis aussi ruses el reunis sur un terrain fort elroil, leur cchappeni difficilement. Dans la Haute-Egypte , elles irouveni un ennemi fort redoulable el acharne a leur destruction dans le Monitor ou Tupinamhis, sorte de grand lezard Ires courageux, ires agile, qui vil des memes proies, use des memes artifices pour se les procurer, et qui, furelant de meme dans les profonds sillons des campagnes, se trouve sans cesse sur le chemin des ichneumons donl il se saisil facile- ment. L'ichneumon eiait devenu un objet de veneration dans I'antique Egyple par le service qu'il rend en detruisant les oeufs des crocodiles, el s'opposant ainsi a la irop grande multiplication de ces monslres redou- lables. On a pretendu meme qu'il attaquait le croco- dile de vive force ; mais ce n'esl la qu'une fable: car jamais animal aussi faible el timide que Tichncumon ne s'est altaque a un ennemi aussi puissant el coura- geux que le crocodile. On trouve des mangoustes en Afrique jusqu'au Cap. II y en a aussi dans I'Asie; I'espece des Indes est — 163 — celebro par ses Cdmbals avcc les serpents les pins (langerenx, el par le renom d'avoir fait connaiire la verlu de I'ophiorize <;onlre les morsures do ces reptiles. Le ciocodilc, cctie belecruello, semblable a un enorme Iczard, si celebre par sa ferocite, sa force prodigieuse el les bonneiirs qu'on lui rendaii jadis comme a on agent des vengeances celestes, esi nn animal noclnrne qui passe la majeure partie du jour a sec ei la nuil tout enliere dans le fleuve. Si le jour il se lienl h terre, c'est pour s'y reposer et s'y abau- donner au sommeil ; ce qu'il a coulume de faire en se tenant otendu, la gueule enire ouverle, el tonrne vers le midi. Mais quand il est rendu a tons les soins de la vie active, quand il faul songer a vivre, il enire •lans I'eau, seul element ou il ptiissc developper ses raoyens de ruse, de viiesse et de force qui le rendenl si redoutable. II vii en troupes qui ne s'eiablisseni dans une localile qu'a|)res en avoir fail une rcconnaif- sance parfaile, Dans le lieu choisi, il faul a chaque individu son domicile a pari. C'esi vers la tete des nombreuses iles , donl le fleuve est parseme, qu'ils choisissent leur emplacement, parce que la sont or- dinairemenl des plages steriles, des eperons d'un sable pur , qui s'etendenl au loin , conduisant sous I'eau par une pente insensible. Chaque troupe reste fidelement atiach6e aux parages qui I'onl vu nailre, el ne s'en ecarie que pour aller chasser. Celle occupation reraplie, elle revienl h des heures delerminees sur la gr^ve, ou la prevoyancc des vieux chefs de la famille a fail choix d'un lieu commode pour s'y abandonner avec securilc au sommeil. Des insectes semblables a nos cousins fourmillenl — 16i - a la surface du Nil el lapissent la gueule dii crocodile. Le irochillus, oiseau semblabic li iioire petit pliivier a collier, Ires comraun en Egypie, sur les bords du fleuve, volligeanl sans cesse el I'urelanl en loul lieu, penetre jusque dans celte gueule pour y cherclier les insecics, el dcbarrasse ainsi le monslre de ces incom- modes ennemis, donl il ne pourrail pas se debarrasser lui-meme , parce que sa langue est immobile. En recompense d'un aussi imporlani service, le crocodile ne fait jamais le moindre mal au Irocbillus, landis qu'il se fail redouler de lous les aulres animaux. II est remarquable que le crocodile de Sainl-Do- mingue, ou caiman, soil soulagc des maringoins par un pelil oiseau, comme celui d'Egyple. C'esl une necessile pour eel cnorme el lerrible animal d'eire secouru par un etre prodigieusemeni plus faible que lui conlre des ennemis bcaucoup |)!us faibles encore, inais donl il ne parviendrail jamais a se defaire au- •Iremenl. Malgre la friiyeur que le crocodile inspire, le heron vii pres de lui; mais ce n'esl poini par affecilon, car il a soin de so mellre hors de sa porlee el sur la rive opposee. 11 se lienl ainsi dans le voisinage pour profiler de la lerreur que le crocodile repand dans le fleuve, el pour elre plus a meme de se saisir des poissons que la presence du monslrueux reptile fail fuir el disperse de loutes parts. II y a loul lieu de croire que le crocodile, a son lour, fail grand fond sur celte habitude des herons pour en lirer egalemenl quelque profit ; car des poissons se irouvant lances du cole des herons, el Irouvant la, au lieu de secu- riie un autre sujel d'epouvanle, sonl necessairemenl jeles dans un desarroi qui les livre sans defense a — 165 — leur plus formidable ennemi. Le pelican imile le heron ; mais il ne s'en lienl point uniquemenl a ceiie manicre de se procurer sa proie ; le heron seul esi capable de celte patience infaligable qui le licnl [»!u- sieurs heures, el quelquefois dcs jours eniicrs aliache au guel. Autrefois, a Arsinoe, sur Ics bords du lac Moeris, on elevail a pari un crocodile regarde conome sacre; des prelres etaienl charge's d'en prendre soin el reus- sissaienl a I'apprivoiser ; ils le noiirrissaienl de pain, de viande el de vin apporles par les cirangeis qui venaienl le voir; un d'eux lui ouvrait la gueule , d'aulres y jelaicni les gateaux el y versaieni le vin offerls. Aujourd'hui meme encore, on enlretient des crocodiles vivanls dans de grandes cuves, el on les prive Ires aisemenl. Coninie ils naissenl d'un oeuf ii peine plus gros que celui d'une oie, ils sonl longiemps pelils el necessiteux ; la longue duree de Icur educa- tion contribue a les rendre plus dociles. Les crocodiles devienneni de plus en plus rares en Egypte, mais ils sonl encore tres communs dans loule la partie superieure du Nil, en Abyssinie ou les ha- bitants des bords du fleuve ne les redoutent point parce qu'ils pretendenl avoir un charme qui Ics defend contre les plus voraces de ces animaux. L'hippopolame est aussi commun en Abyssinie, mais plulol dans les lacs que dans les rivieres. Le tupinambis est un reptile d'environ un metre de longueur, lellemenl semblable au crocodile qu'Herodole en faisail mention sous le nom de Crocodile (erreslre , et qu'eiicore aujourd'hui le pcuple (lEgypie croil qu'il on est un jcune et que plus lard il alleindra la laille de ses parents. II vit — 166 — comme !e crocodile cl le caiman, siir le Lord dos fleuvcs. comme eux il se nourril d'une proie vivanle qu'il va chercher an fond des eaux, on qu'il rencontre sur les rivages ; mais sa pelitesse el la faiblesse de ses armes ne lui permeUenl d'atlaquer que de Ires peliles especes. L'liomme, loin d'avoir a le craindre, est pour lui un ol)]el de lerreur. Ses mceurs ne sont pas d'ailleurs veriiablemenl plus douces que celles du crocodile, el c'esl nniqueraenl a cause de sa faiblesse qu'il n"esl pas daogereux. Cependanl il passe gene- ralemenl pour un animal innoceni el se rend meme utile a I'homme. Les noms (\e Sauvegardc , Sauveur ou Monitor qu'on lui donne communemenl , sont au- lanl de preuves de la reputation de douceur el pres- que de bienfaisance donl il jouil en divers pays. Ou pretend que lorsquc des honmics se trouvent , h leur insu , raenac6s par le crocodile, le lupinambis s'em- presse de Ics averiir par des sifflements de la presence du terrible reptile. Mais ces sifflements ne sonl que des cris d'alarme par lesquels la Sauvegarde exprime son effroi a la vue d'un ennemi non moins dangereux pour elle-meme que pour I'horame. On voii assez frequemraenl le lupinambis sur les rivages du Nil; on le peche meme quelquefois dans le fleuve. II est tres carnassier ; en captivile il altaque lous les peiiis animaux qu'il peui alteindre , el se jette avec aviditd sur les aliments qu'on lui presente. Lorsqu'll est irriie, il siffle avec force et cherche a mordre ou a frapper avec sa queue qui esl comprimee en forme de rame pour lui faciliter la natation. II y a une espece de lupinambis qui vit cloigne du fleuve, dans le desert, particulieremcnl du cole de la Syrie. Sa taille csl la meme (jue celle du precedent, — 167 — mais il n'a pas la queue comprimee, parce qu'il lui csl innlile tie nager el que loiijonrs I'organisalion est en rapporl avec les habiludos. Les balelcurs du Caire possedenl presque loujours quelques-uns de ces lupi- nambis du deserl qu'ils emploienl dans leurs tours el leurs exercices, apres leur avoir arraclie les denis. lis sonl bien plus iiioffensifs que ceux du Nil; loin de se jeler sur leur proic avec avidile, ils la refusenl nneme lout-a-fail lorsqu'ils soul caplifs, el Ton ne parvienl a les nonrrir qu'en leur niellaul daus la giieule des morceaux de chair, el en employaiii la violence pour les leur faire avaler. On irouve en Egyple beaucoup d'auires reptiles quadrupedes , lels que des lezards, des geckos , des canieleons. On y irouve aussi la grande lorlue du Nil , qui esl I'espece la plus remarquable du genre des lorlues molles connues sons le nom de Trionyx. C'esl en quelque sorle un priviTege pour les grands fleuves des pays chauds d'avoir de ces grandes tortues d'eau douce, corame de nourrir de grands lezards , des lupinambis , des crocodiles. On a irouve des tryonix dans les rivieres de la Caroline, du Senegal, de la Perse el de Tlnde. Touies se ressenibient par le ccrcle mou de leur carapace el par la disposition de leurs pieds qui leur a valu le nom de Trionyx ou lorlue a Irois ongles. Les serpents sonl tres communs en Egyple, comme dans tous les pays chauds el qui ne sonl pas sujels a des [)luies frequentes. On y rtmarque surtoui le ceraste ou vipere cornue ci la vipere baje qui Tail parlie du genre Ndia caracicrisc par la faculte sit)gu- liere que possedenl les especes qui la composeni , d'elargir en uianiere de disque la parlie la plus anlc- — 168 — rieuro de leiir corps en reclressanl el liiaiil en avanl les premieres coles. L'haje esl le serpenl si celebre chez les anciens sous le norn d'Aspic. Sa figure grav^e sur le portail d'un grand nombre de temples anliques lemoigne de la veneraiiou donl il etail I'objet. Les Egypliens le le reveraienl corame I'embleme de la divinile prolec- irice du monde el le gardien fidele de leurs champs. Celle opinion avail son origine dans une habilude remarquable dc l'haje: des qu'on approche de lui, ce serpenl dresse la leie pour veiller a sa propre surele ei pour cviler d'elre surpris sans defense. C'esl pour avoir mal compris el inal inlerpreie ce mouvemenl qu'on lui avail fail une reputalion de bienfaisancc el de sagessc , alors qu'on aurail du seulemenl cher- cher les moycns de deiruire sa redoulable espece , ou tie prevenir au moins les dangers de sa blessure ; car la cruelle efricacii6 de son venin ne peul laisser aucun doule: la plus pelite quanlile inlroduile dans une coupure suffil pour determiner la niurl d'un animal laible; une seule gouUe pourraii tuer un homme. Ceite vipere esl commune en Egyple ; elle se lienl quelquefois dans les fosses , plus souvent dans les champs. Les cullivaleurs soni par consequent exposes a la rencontrer frequemment ; mais quoiqu'ils n'igno- reni pas le danger de sa niorsure , sa presence ne les empeche nuUemeni de vaquer a leurs travaux parce- qu'ils connaissenl bien ses habitudes et qu'ils n'ont a craindre d'elre atlaques par lui qu'autanl qu'ils commeltenl I'iraprudence de s'en approcher. Tant qu'ils restent eloignes , l'haje se conlenle de les suivre du regard, en elevanl la tele. Les baleleurs du Caire execulenl avec l'haje des — 169 — tours fori singuliers, doiil la coniiaissance leur a sans douic etc transmise par les successcurs de ces Psylles si celebres dans I'antiquile. lis peuvenl, suivanl leur maniere de s'exprimer, changer I'haje en baton at robliger a conlrefaire le mort. Lorsqu'ils veulent pro- duiro cet effel , ils lui crachenl dans la gueule, le contraignent h la fermer, le couchent par terre el lui appuient la main sur la t6te; aussilol le serpent devienl raide el immobile. Ils le reveiilenl ensuile quand il leur plait en saisissant sa queue el la roulant forlemenl enlre leurs mains. L'efficacite de celte pratique parail lenir a I'operalion la moins frappante, savoir la pres- sion que Ton exerce sur la tete de I'aniraal avec le doigl ; le resle ne sen qu'a dissimuler ceilc action pour rendre le charlalanisme moins sensible. Parmi les nombreux poissons que nourrit un fleuve aussi considerable que le Nil, on remarque le fahaka qui a le corps arme de piquants comme tout le genre Telrodon dont il fail pariie. Lorsquc ce poisson est poursuivi, il culbule sur le dos et se gonlle a tel point que son corps naiurellemenl along6 prend la forme d'un globe donl la surface developpe toutes ses epines comme le corps d'un herisson roule. Sa longueur esl d'environ trois decimetres ; sa grosse tete, ses couleurs vives el varices, la bonte de sa chair, sa grande abon- dance, loul concourl a en faire un des animaux les plus remarquables de I'Egypte. On ne voil les fahakas dans celte conlree qu'a I'epoque des grandes eaux qui I'apporlent de la Nubie el de I'Aby&sinie. Le Haut-Nil les enlralne dans son cours et les disperse dans les golfes el canaux ou il se repand. A la retraite du lleuve, les campagnes inondees etant couveries de lacs im- menses, ils sejournent alors dans des eaux dormantcs — 170 — ou leur nombre esl toujours si considerable que non- seulemenl tous les habilanis des environs s'en nour- rissenl, mais qu'une muiliiude d'oiseaux allires par une proie aussi commune viennenl s'en gorger, ei qu'apres le dessechemenl des lacs ephemeres qui leur servaienl de relraite, il en resle encore assez pour former des monceaux de debris. Le decroissemenl du Nil amene ainsi, chaque annee, une epoque ou loule la population des campagncs se procure, sans aucune fatigue, une nourriture abon- danle. Les enfanls en desirenl le relour aussi vivemeni que leurs peres. II en est de ces poissons comme en France des hannetons : chacun en desire, parce qu'il n'est sorte d'amusemeni qu'on ne se procure avec eux. On aime a les observer, a predire le moment de leur culbute^ a les promener sur les eaux, h les lancer comme des boules, ou meme a les ecraser. On s'en amuse presque autant apres leur mort, h cause de la facilite avec laquelle on les gonfle et on les vide a volonte. Desseches apres avoir ele gonfles d'air, ils conservent longtemps leur forme arroudie, el servent alors comme de verilables ballons. L'Afrique esl la patrie exclusive d'un grand nombre de singes. Les raagots y sonl repandus au nord dans loute la Barbarie, depuis Maroc jusqu'en Egypte. Les chimpanzes, ceux de tous les singes qui ressembleni le plus a I'homme, habilenl le Senegal, la Guinee ei le Congo. Les dangereux cynocephales s'elendent depuis la Guinee jusqu'au Cap, el remontenl a I'orienl sur les bords du Nil. — 171 — AGRICULTURE, ARTS ET INDUSTRIE. RAPPORT SUR LE SYSTEME DE PAILLASSONNAGE DE M. LE D' GUYOT, DE SILLERY , Par M. Max. Sutaine, Membrc litulaire. Messieurs, M. le docleiir Guyol ayaiil exprime le desir orbanl que le cinquieme de la richesse de la Vesle, cinquieme genc- ralement perdu par les deversoirs, n"apporteraii aucun trouble dans le cours de la Vesle, dans son regime ni dans ses divers services. o° Que tout sysieme inter- mediaire a ces deux extremes causeraii dcs troubles cl des dommages plus ou moins grands, reparables ou irreparablcs par voie d'indemnite, suivant qu'il s'approcberail plus ou moins de I'uii ou de I'aiJtre. 4" Que les dommages seraienl d'autaul moins grands et les lemps de cbomagc du canal d'autant moins longs et moins nccessaircs que la quantile d'eau indispen- sable a son alimentation s'abaisserail davantaiie au- dessous de500 cl de 1,100 liires par " supposes utiles. Uu coup-d'ceil general sur les bords de la Vesle et sur les services de cctte riviere eclaircira ces divers points de la question. La Vesle, comme toutes les aulres rivieres, rend a la vallee qu'elle parcourt divers ordres de services : d'abord elle fail partie essenlielle du sa vallee qu'elle embcllil, fertilise, assainii ; c'csl un bien naiurel commun ii tons ks babiianis dc ses rives ; elle leur appariinii , comme I'air et la lumiere : elle sen 6 les- — 484 — abreuver, a les baigncr, a lenrs lavages, a leurs peclics, ;i leiir promenade, a leur vue. Elle fait, cii second lieu, parlie inlegranle des proprieles balics, enireleniies, culiivees el exploiiees sur ses rives, en vue de son existence, a cause de ses eaux el avec ses eaux, soil comme moyen d'agremeni, soil comme moyen de pro- duction. Une afTectalion plus speciale encore, est son applicalion a I'irrigalion el a I'enlrelien des prairies, el enfin son ernploi dans I'induslrie soil comme force motrice des moulins, usines el filatures, soil comme lavage des laines. De lous ces services d'ordres difi'erents, le seul qui ne soil pas accessible a Tindeninile, c'esl le premier ; mais il n'en esl que plus precieux el plus respectable aux yeux d'une administration bienveillanle el paler- nelle : la disparition de la riviere d'une conlree, pen- dant 4 a S inois , serait une calamite el un desaslre publics. II est evident quo ce desaslre aurait lieu en grande partie entre Sepi-Saulx el Reims ; enlre Reims el Muizon, si les SOO litres a Sepl-Sauix el le reslanl des 1,100 litres eiail pris a Reims pendant les 4 a 5 n)ois des basses eaux de la Vesle. II n'est pas moins evident qu'une irreparable per- lurbation aurait lieu, par la meme cause el dans la meme etendue de 40 a 50 kilometres pour loutes les maisons balies, pour loutes les proprieles formees , enlretenues el culiivees sur la riviere, et en vue de ses eaux. La Vesle ne presentanl plus alors qu'un lit fangeux el presque sans eaux et sans couranl, serait un foyer d'emanations insalubres_, el ses bords , au lieu d'etre recherches pour y enlrelenir des habitations el des proprieles qui enrichissent, insUuiseni et raora- liseut les populations , seraienl abandonnes par les — 185 — riches qui se hateraient de laisser les Iiabiianis con- trainls de resler dans leiir pauvieie, dans les cmana- lions lievreuses el lyphoides. Sans dome, les proprie- laires pourraienl eire indernnises, mais les gens du pays ne le seraienl poinl. L'inondalion ou I'irrigalion des prairies se presente ici sons un aspect lout different, et meme oppose a celui que le bon sens, en dehors de la connaissance des lieux , semblerail devoir lui donner. Entre Sept-Saulx el Reims, la Vesle avec ses con- fluents, traverse environ 60Q hectares de marais et de tourbieres; elle en traverse une quanliie phis conside- rable encore , environ 1,000 hectares, depuis Reims jusqu'a Fismes. Ces marais et ces tourbieres sonl generaiemenl de- signes sous le nom de pres-marais. lis n'ont rien de commun avec les verilables prairies que la moiiie de leur nom. Leurs produiis sont exclusivement composes de roseaux et de carex, de joncs et de preles. Les ro- seaux sonl employes a un miserable chauffage, et les joncs, preles et carex, designes sous le nom de laiches et de failles, fournissenl des litieres de qualile infe- rieure ; rien dans ces pres-marais u'esi propre a I'ali- menlation du belail. De ces pres-marais, les uns sont irrigues, les aulres ne le sonl pas; mais ici il ne faul pas se iromper avec les mots; ce n'esi pas irrigation qu'il faul en- tendre, c'esl inondation ; car le travail et rinlelligence de I'homme, n'enlrent pour rien ou pour ires pen de choses dans la relenue ou la dispersion des eaux sur les marais. Ces pres-marais ( j'exceple eeux ou Von exploile la tourbe en grand, comme a Muizon; mais pour ceux-ld^ — 186 — la question de prise d'eau est indifferente y onl une valeur fonciere minimum de i,000 francs I'heclare, el un maximum de 2,000 francs. La valeur moyenne est d'environ 1,500 francs' et le revenu moyen de 45 a 50 francs nets. Les pres inondes onl la valeur ma- ximum. On compie environ deux tiers des pres-marais que les eaux recouvrenl en Avril, Mai el Juin, ct uu tiers que les eaux ne recouvrenl jamais. Quand les inondalions onl eie longucs el elevees, la production des roseaux, des laiches el des failles est ires grande ; elle est presque nulle dans les conditions opposiies. La Vesle, par elle-meme ou par les travaux ad hoc, n'inonde el n'irrigue rien. Elle n'inonde el n'irrigue que par les retenues des monlius et par les sources et les ruisseaux uombreux qui, aa mois d'Avril, Mai et Juin, inondent les marais en rampant a leur sur- face, pour joindre la riviere qui est toujours el [iresque partoul bien au dessous de ses bords, excepie au dessus des retenues des moulins. Au surplus, I'abondance des eaux de la Vesle, ii celte epoque de Tanoee et au point de vue de I'inon- daiion ol de la Irisle production qu'elle engendre, est une calamile publique ci privee en realile, loin d'etre un precieux a vantage. Elle s'oppose a loule culture induslrielle, a toute richesse agricole. Un revenu nel moyen de 45 a 50 francs par hectare est sans doute un revenu sufilsant pour le proprieiaire ; mais pour la socieie, comme il n'enlraine, pour frais de culture et de recolle que 15 francs, Theclare ne produit a la consommation et au travail que 65 francs; landis que chacun de ces hectares, s'il eiait assaini et abordable a la culture, pourrait produire des betleraves, des choux, des colzas, des caroUes, des pommes de lerrc, — 187 — du chanvrc el du lin, des recoltes cnfin, valanl brutes de GOO a 1,500 francs. II est vrai qn'elles aiiraieni coiile pour rassainissement., I'engrais el la culture, de 400 a 1,000 francs, el que le produit ne serail que de 100 a 500 francs; mais pour I'etat, pour un gouvernemeul prevoyant comme le noire, si desireux d'augincnler la richesse publique, unc recolte brute de COO a 1,500 francs leprcsenie du travail et de la consomniation pour lout son chiffre. C'osi une richesse absolne qui ne peut elre comparee a une production brulc de 60 a 65 francs. De ce que de siupides par- liculiers declarenl qu'ils ne veuleni point d'ameliora- tion, cela n'cmpechc point Tamelioralion d'avoir lieu ; et radministraiion, au lieu d'admellrc les doleances de ces paresseux, doit les econduire cotnme ennemis publics. Si la Vesle el ses affluents cessaient leurs inonda- lions el ne faisaient^^Ius pousser de roseaux, dans dix aiineos d'ici , le produit brut de la vallee , dans ses 1 ,600 hcciarcsde pres-marais, serait de 1 ,600,000 francs, au lieu de 104,000 francs, et le produit net de 80,000 francs. Malheureusemeni, la prise d'eau du canal, fut-elle de loule I'eau de la Veslo a I'eiiage, n'operera point ce miracle; car du 1" AAril au 1"' Juin, epoque on les inondalions ont lieu , celie prise d'eau n'onleve qu'un neuvieme du volume des eaux, et qualre neu- viemes sont de trop pour ce service, et meme pour le service de Tindustrie meuniere et de lavage. Vers celte epoque de vegetation , et pendant le courant de Juin el meme de Juillet , les eaux sonl lellemenl clevees, (jue les meuniers insistent, pendant tout ce temps, pour faire faucher les lierbos de la — 188 - riviere deux ou Irois fois par les proprielaires, pour degager leurs roues qui sonl noyees. Au domaiue de Sillery, ou passenl loules les eaux de la vallee, 3 metres cubes d'eau par " lombeni inuliles, d'Avril en Juillet, par les deux deversoirs du iiioulin, le inoulin etani en pleine acliviie^ el sa vanne de decharge levee. Aujourd'hui, 10 Janvier, le deversoir principal fournil 1,200 litres d'eau par " inuliles et peidues. L'elevalion des eaux de la Vesle , quoique dimi- nuanl sensiblemenl a parlir de Juillet, se mainlienl ^ un laux encore fori eleve jusqu'en Sepiembre, el meme jusqu'au milieu de Septerabre , car souvent la fauchaison des pres-marais ne peul avoir lieu a cette epoque, a moins qu'elle ne s'execute dans I'eau, ce qui a lieu parfois; el pendanl ce temps, chose remar- quable, la surface des eaux de la "Vesle est au dessous de celle des pres-marais. La stagnation de I'eau snr les marais est due aux tiliraiions des llancs de la vallee, el a rimpernieabilile des terrains tourbeux. L'abaissemenl des eaux el le dessechement complel des marais n'a veritablemenl lieu qu'apres la fauchai- son des marais. Celte operation livrealors des surfaces considerables a I'evaporation, laquelle ne pouvail avoir lieu tant que les herbages protegeaieni les eaux en les recouvranl. En ce qui concerne le dommage cause aux usines el aux services industriels, il n'esl pas necessaire d'insister beaucoiip pour faire comprondrc que Tab- sorption de 1,000 h 1,100 litres, c'est-&-dire de toule la richesse et de loute la force de la Vesle pendanl irois mois , et d'une fraction notable de cetle force pendanl irois autres mois, se resoudrail necessairemeni a une in- demnite proportionnee. Mais cette indomnile aux pro- prietaires de moulins ou d'eiablissemenls industriels, — 189 — ne serail encore que parlielle et ne cicalriserait pas la plaie faiie aii pays par la suppression de la riviere. Les services d'une vallee , d'une region, se partagent en trois valeurs h peu pres egales : un tiers aux in- dustriels , un tiers aux iravailleurs qu'ils emploient, el un tiers aux consommateurs ou a ceux qui se servent des etablissements induslriels. Les industriels recevant leur pari, les deux aulres parts demeurenl aneanties faule de pouvoir etre apreciees el soldees : c'esl un lourd passif pour le pays. II ne faut point se le dissimuler ; h quelque point de vue qu'on se place, on esl oblige de reconnailre qu'on ne peut indemniser un pays de la suppression complete d'une riviere. Les habitants qui se sont groupes sur ses bords en poss^dent la jouissance en vertu d'un droit naturel, aussi sacre et aussi clair qu'aucun droit ecrii. L'administration est bien penetree de ce droit commun donl la conservation lui esl con- liee. Elle ameliore, elle assainit, ell'e utilise les rivieres sur place, et au profit des populations : elle etend leurs services a des services plus generaux, si cela est pos- sible, sans nuire aux localiies ; mais elle n'a jamais songe h s'en emparer , a les delourner d'une conlree au profit d'une autre ; dernierement encore, le curage de la Vesle en grand eiaii une mesure d'utilite, de salubrite el de fertilisation regionale prise par I'admi- nislraiion. Si la Vesle devail etre absorbee par le canal, cetie mesure, inspiree par une haute intelligence des interets de la vallee, eul ele une inconsequence. Toutefois, pour etre exact et juste, il faul dire que la suppression de la Vesle ne serail jamais complete dans un Irajet notable, meme pendant ses basses eaux. C'est ainsi qu'a 4 ou 5 kilometres de la prise d'eau — 190 — a Sept-Saulx, la riviere de Prosnes, au-dessoiis du moulin de Beaiimonl, rapporterail tonics ses eaux an lit de la Vesle ct ies joindrait aux quelques sources el aux infillralions venanl sourdre dans le memelit, for- raanl aussi un ruisseau de quelques melres aii-dessous de la prise d'eau : un pelil cours d'eau ne larderait pas a suivre le lit de la Vesle, il s'eleveraii a pieins bords, par la retenue du moulin de Siiiery qu'il ali- mcnterait pauvrement etavec iniernnittence, il est vrai, et la riviere auraii une existence reelle jusqu'a la nou- velle prise d'eau projelee a Sillery. Si cette seconde prise d'eau absorbail la, de nou- veau, louie la riviere, un faible ruisseau serait reforme au moulin de Couraux, plus mallieureusement encore alimenie etavec plus graude inlcrmillcnce que celui de Sillery: le moulin Pico!, silue an-dessous, serait unpeu plus ricbe, et ainsi de suite jusqu'a Reims, ou un cours d'eau de oOO litres par " environ seraii reforme. Grace a la retenue des moulins ci a cc cours d'eau, la riviere aurait done encore un certain mouvement ct une por- tion de son existence. Au-dessous de Reims, oii la Vt^^lc se irouveraii une lroisi(ime et derniere lois ancaniie en se separanl de- finitivement du canal pour enirordans noe riclie vallee qui n'a plus rien de comniun avoc Ies avaniages que la navigation de I'Aisne a la Marne peul procurer, le meme |)henomene de reproduction parlielle se mani- festerait, et la, je le crois, plus promplement el plus largement qu'enlre Se|)t-Saulx et Reims, a cause de la depression progressive du terrain : mais en revanche, CCS rivages de la Vesle n'auraienl, en compensation de la defaillance de leurs eaux, ni Tagremenl, ni I'utilile de la navigation du canal, avantages qui, on ire Sept- — 191 — Saulx el Reims, il faul le reconnailre, scraient pour celie pariie de la vallee une belle iodemnile. Ces divers aper?us nous permeltenl maintenanl de parler, avcc plus de precision, dts indemniles appre- ciables el qui devraienl elre payees. Ces indemniles, comme cela a ele dit, ne pourraienl s'adresser qn'aux habilalions et proprieles instaliees el enlreienues en vue des eaux de la Vesle, comme agremenl, salubrile, cloture, uiilite el produclion, et aux moulins ou autres elablisseracnls ulilisanl I'eau comme force induslrielle. En ce qui concerue la premiere serie, pour peu que le cours d'eau fiit represenle el que les proprie- taires fussenl aulorises a praliquer des relenues ou barrages necessaires a la conservation des bassins, canaux, pieces d'eau ou elangs, abreuvoirs, baignages, lavoirs , elc, le dommage pourrail elre considere comme nul ou a peu pres nul, et la salubrile, Fagre- menl, aussi bien que Tutilite, seraienl en grande partie sauvegardes ; IVpreuve seule, au surplus, pourrail permettre d'apprecier ce genre de prejudice; mais il y aurait exageraiion en en poriani le chiffre, depuis Sepi-Saulx jusqu'a Jonchery, a plusde 100,000 francs, en supposanl vingl proprieles de deuxieme ordre a 2,500 francs, et cinq proprieles de premier ordre a 10,000 francs d'indemnile. Quanl aux usines, I'appreciation est plus facile el plus immediate pour fixer I'indemnite qui leur serail due. Il suHli, pour arriver a un chiffre exact, d'ad- melire en principe et en fait : lo que les usines sont disposees en vue des eaux moyennes d'une riviere, et non en vue de scs plus haules ni de ses plus basses eaux : les eaux moyennes de la Vesle peuvenl elre fixees a cinq fois celles de I'eliage; 2° que la moilie — 192 — des eaiix esl perdne pour la force, soil par les dever- soirs, soil par les vannes de decharge, soil par les syslemes de roues d'eau; el d'eslimer, sur ces donnees^ les forces effectives enlevees a chaque usine et chaque mois, par la prise d'eau du canal : ces forces cffeciives elant traduiles en cheval-vapeur, el sachanl d'aulre pari que le cheval-vapeur coule moyennemenl el en- viron 66 francs 66 cenl. par mois, il sera du a chaque usine un capilal dont les inlerels represenleraient aulant de chevaux-vapeur qu'il en sera enleve, et pendant louie la duree de leur delournement. Ceile maniere d'envisagcr la question conduirail a payer a chacun des irois moulins au dessous de Sepl- Saulx, 24,000 francs d'indemnile pour irois chevaux- vapeur pendant six mois, ensemble 72,000 francs ; 32,000 aux six usines au dessous de Sillery, pour pour qualre chevaux-vapeur, ensemble 192,000 francs; el 49,000 a chacune des douze usines jusqu'a Fismes compris, ensemble 588,000 francs ; loules les usines couleraient ainsi 832,000 francs. Neanmoins, il y au- rait beaucoup a reirancher de ce chiffre, car le moulin de Couraux a ele vendu eu loialile 16,000 francs, et celui de Beaumont 23,000 francs ; la valeur de I'indemnile depasserait done la valeur des moulins dans ces deux cas. Quoiqu'il en soil, dans I'hypolhese de I'absorplion enliere de la Vesle a Sept-Saulx, a Sillery et a Reims, avec moins de 900,000 francs d'indemnile on achele- rait le silence el peul-elre I'approbalion des usiniers et des proprielaires pouvant prouver un dommage ; mais on n'alleindraii pas le liers du prejudice cause aux habitants, aux iravailleurs et aux consommaleurs de la vallee. — 193 — Est-il done piouve, esl-il done |)rol>able nieiiio , que I'alimenlation du canal de I'Aisne a la Marne exige absoliiment I'absorplion do louie la Vesle h Reims, c'esUa-dire i,000 a 1,100 lilres par " pour ne pas chomer pendanl le mois d'ciiage? Une navigation (\es plus largcs qu'on puisse sup- poser an canal de I'Aisne a la Marne, seraii une navi- gation de 200,000 lonnes par an. 200,000 tonnes supposent 2,000 bateaux charges chacun de 100 lonnes. 2,000 bateaux allanl de I'Aisne a la Marne et reciproquement, component la depen^p de 4,000 eclusees, 2,000 a la remonte, 2,000 a la descente. Chaque eclusee etanl supposee de 500 metres cubes d'eau, 4,000 eclusees exigent 2,000.000 de metres cubes d'eau qui, divises par 500 jours de navigation, laissanl 65 jours de chomage, doiinent, comme ne- cessaires par jour, 6,666 metres cubes d'eau : en ajoutanl 4,o54 metres cubes d'eau pour I'evaporaiion journaliere ( plus de 2°"" par metre carre d'eau super- ficielle sur les 60 hectares du canal), nous arrivons au chiffre rond de 8,000 metres cubes d'eau a depenser par jour. Or, un cours d'eau de 100 lilres par " donne 8,640 metres cubes d'eau en vingi-qiiatre heures; c'est-a-dire 640 metres cubes de plus qu'il n'en faudrait pour alimenter la plus riche navigation possible du canal de I'Aisne h la Marne, s'il elail parfaitemenl eianche. Pour absorber par jour les 80,000 metres cubes qu'un cours d'eau de 1,000 lilres par " donne en vingt-quaire heures, en plus des besoins de la navigation, il fau- drait, en verite, que ce canal fut permeable au plus haul degre. Quelle est done la permeabilite de ce canal? Elle XXVI. 14 — 194 - (loil elre connue de Reims a Berry-au-Bac, puisque le canal y est en aciiviie depuis longlemps, pendant six el sepl mois de I'annee. Elle doil elre connue de Sillery an moulin d'Huou, loul presde Reims, puisque le canal esl en pleine eau enire ccs deux points depuis nombre d'annees, pour ralimenialion de la ville de Reims; elle esl connue an bief do pariage, au Mont- de-Billy, le point le plus eleve, celui qui, en appa- rence, devraii elre Ic plus absorbaul ; el pourtant, chose singuliere, il parailrait, sauf erreur, que ce bief s'emplii loul seul el sans prise d'eau, en recevant seulemenl I'egoul des masses crayeuses, jusqu'a une hauleur de 1 metre 60 cent, d'eau, el de plus, une fois celle hauleur acquise, le bief fournil une chute de 30 litres par seconde, c'esl-a-dire le tiers de I'eau indis- pensable au mouvement de la navigation el de I'e- vaporation journaliere. Si ce souvenir est fidele , il rappelle une belle experience faile par MM. les inge- nieurs du caual. Ce fait devra se rcproduire pariout oil le canal assied son plafond dans les craies ou niarnes crayeuses. La, son lit rccevra plulol des eaux qu'il n'en absorbera. Resieraienl done, pour I'absor- ption, el a Tetat de lermes inconnus, les parties du canal, ires rares el ires pen etendues, execuiees en remblai ou assises sur un sol eleve el greveux ; mais ces points n'erabarrassenl pas MM. les ingeni^urs pour elre rendus elanches; ils savenl la puissance d'etanchement des marnes crayeuses el des lourbes delayees el deposees en coulis ; ils se sont assures d'un plein succes ; seulemenl, leur prudence bien connue, el la juste appreciation d'uue responsabilite que la malveillance, en cas de demi-succes ou d'in- succ^s, ne manquerait pas de faire peser sur eux, les — 195 — porle a exagerer el les ressources en eau iiecessairt's, el les deperditions qui peuvenl s'en operer. Quoiqu'il en soil, la prise d'eaii dans la Vesle, pour alimenler le canal, esl loui eniiere une queslion de quanlile, el la queslion de quanlild ne sera lesolue que par I'experience. Si 150 litres d'eau par " a Sepl-Saulx, el 150 litres a Reims poiivaienl sufTire, le canal pourrail marcher tonte I'annee sans qu'il fiii rion dii a porsonne, si ce n'esl un cheval-vapeur, pendant irois on quaire mois, de Sepl-Saulx a Reims, ei deux chevaux-vapeur au dessous de Reims, pendanl le meme lemps, soil 56,000 francs aux neuf premieres usines. el 96,000 francs aux doiize dernieres. en loul 132,000 francs une fois payes. Une quanlile double d'eau, avec une double indemnile, pourrail encore sauvegarder lous les interels ; mais au dela de ces limiles extremes pour la conservalion d'une pariie de la riviere , c'esi au canal de cbomer, dul-il chomer quatre, cinq el meme six mois, jusqu'a ce que MM. les ingenieurs aienl assure son aciivite permanente par rele\alion el I'apporl des eaux de la Marne. Pour conserver la Vesle a sa vallee, a ses usines. a ses habitants , le Gouvernemenl n'hesitera pas ii depenser les douze a quinze cent mille francs neceh- saires, car en les economisanl par I'absorpiion eniiere de la riviere, il appauvrirail d'une somme double les travailleurs el les paysans (gens du pays). Une fois le canal en navigation par la prise d'eau de la Vesle, ne ful-ce que [lendanl six mois [cl dans ce cas il n'y a pas un centime d'iiulemniU a payer), les grands besoins de la navigation seront salisfails, el les travaux, pour oblenir de la Marne les eaux — 19G — complemonlaires , peuvenl s'accomplir en plusieurs auiiees. Les elanchemenls seronl obteims, la quanliie d'eau complemenlaire sera parfailemeni connue; I'ini- poriance des Iravaux a executer pour condiiire les eaiix de la Maine , celles des machines deslinees a les elever, n'auronl plus rieo de douleux. lis pourronl s'execuler a loisir, lant pour la bonne combinaison que pour la disponibilile des ressources financieres, parce que la navigation lemporaire salisfera cliaque annee (comme elle le fail maintenant enlre Reims el Berry-au-Bac ) les besoins les plus urgenis, et qu'au- cun inlerel des usinos, non plus que des proprieies assises sur la Ycsle ne sera lese. ixtsvmt. La Vesle peul aliinenier le canal de I'Aisne a la Marne pendanl six ei sepl mois sans aucun trouble ni dommage pour sa vallee, ses marais, ses habilalions, ses usines el ses services induslriels; par consequent, sans qu'il soit du d'indemnite a personne. Cetle ali- mentation pourrait eire prolongee pendanl 8a 9 mois avec une faible inderanite aux usines, pour force em- pninlec. Elle ne pourrait elre prolongee pendant le temps de tr6s basses eaux el d'etiage sans jeter un trouble pro- fond iians les services de la Vesle el sans causer un prejudice irreparable a la vallee, en sus d'une indem- nile de 900,000 francs payee aux u-^iniers et aux proprietaires. Toulefois, cetle derniere appreciation pourrait dimi- nucr d'imporlance, si an lieu d'employcr 1,000 litres — 197 — d'eau par seconde, ralimeniaiion en exigeail beaiicoup moins. L'experience seule peul eclairer ce poini capital de la quesiion : il est subordonne a refficacile el a la perfection des elanchemenis. l>ans eel elal d'incerliiude, il ne serait pas meme prudent, il serail impossible de commencer les Iravaux d'eievalion el de condiiite d'eaux venanl de la Marne; Iravaux qui retarderaienl de 2 ou o annees I'ouverlure de la navigation. La seule marche ralionelle a suivre est done, pour gagner un itmps precieux el lever tous les doufes, aussiiol que ie canal sera termine el dans la saison des plus haules eaus de la Vesle, de pratiquer dans la Vesle la prise d'eau qui n'offre ni retard ni dilTicuItes possibles ; d'eiudicr aiusi les depenses de la navigation el de I'absorption, de pratiquer les etanchemenls, d'en juger reDficaciie el de fixer par \h la quantite d'eau indispensable au service lemporaire ou permanenl du canal ; de constater pendant combien de temps el en quelle proportion la Vesle peulpourvoir a cclte quan- lile, el d'arreler cello part contribuiive au point ou la riviere, a son etiage a Sept-Sauix, n'aurait plus que 2 a 500 litres par seconde pour I'alimenter, autanl h Sillery et 500 litres h Reims. Eu procedanl sous celle reserve absoiue, les popu- lalions de la vallee de la Vesle n'ont aucun sujei de reclamer. Ce travail, termine au commencemenl de Janvier 1856, a etc remis, a celte epoque, a M. Chassaigne. prefet de la Marne, doni il a regu la haute approbation, I — 198 — ainsi qu'a M. Desfoiilaines, ingenieur en chef du canal de I'Aisne a la Marne ; M. Desfonlaines a bien voulu joindre son approbation a ceile de M. ie Prefet el prendre mon Iravail pour un des eleraenls de son rappori a M . le Minislre des iravaux publics en reponse aux reclamations el oppositions qui s'elevaient de toules les parlies de la vallee de la Vesle, fauie de lumieres suflisanies. Sous peu de jours (8 a iO au plus) I'eau de la Vosle va aliraenler le canal de I'Aisne ii la Marne dans toule son elendue, el MM. les ingenieurs se proposeni d'inaugurer celte grande epreuve en parcouranl le canal de Chalons a Reims en baleau a vapeur. J'ai pense que ce moment decisif etail une occasion favorable pour dffrir k I'Academie imperiale de Reims quelques renseignemenis sur la Vesle el sur le canal qu'elledoil alimenler, sachanl quel inlerel I'Academie a loujours manifeste pour loul ce qui louche a la pros- perile de la population et au developpemenl de I'in- duslrie remoise. — 199 — RAPPORT SUR LE STSTEME DE T^LEPHONIE DE M. LOUIS DUVAL P^UE , Par M. Maridort, Membre titulaire(l). Messieurs, La iransmission rapide de la pensee, a de grandes dislances, a de tout lemps preoccupe les esprits ; tous les peuples ont fait usage de lignes de convention propres a faire connaiire dans un lieu eloigne un certain nombre d'idees bien determ'inees ; mais le peu de combinaisons auxquelles ces signes pouvaient se preter, ne permeilail de iransmetlre qu'un nombre d'idees assez resireint. Les invenleurs de la lelegraphie ont recherche, non seulenienl les moyens de transmetire rapidemenl des signaux, nnais encore des syslemes de combinaisons de ces signaux permellant d'exprimer sur le champ une idee quelconque. Deux systeraes , consacres par la pratique, ont resolu completemeni la question. — Je veux parler de la telegraphic aerienne et de la telegraphic electrique. (1) La Commission etait composee de MM. Robillard, Fanart, Landoiizy, P. Masse, Leseur, de Meissas et Maridort. — 200 — La lelegraphie aerienne, invenlee par I'abbSChappe, el porlee lout d'un coup par son invcnleur a un haul degre de perfection , a repondu pendant plus de 50 ans aux besoins des gouvernemenis. — Sous le rap- port de la Vitesse de transmission , elle laissait peu de progres h esperer , puisqu'une depeche pouvaii fran- chir en moins de 20 minutes une distance de 250 lieues. — Cependantja vitesse pour ainsi dire infinie de Teiectricite avail, vingl ans avant I'invention de Chappe, fail concevoir la possibiiiie de transraettre des depeches par rinlerraediaire de cet agent ; depuis la decouverte de la pile el les beaux travaux d'OErstedt el d'Arago sur releclro-magneiisme, cetle idee, un instant aban- donnee, a ete reprise et la question resolue de la maniere la plus heureuse ; le lelegraphe eleclrique a ete partout subsiitue au lelegraphe aerien ; sous le rapport de la vitesse il ne laisse rien a desirer, et il a sur le lelegraphe aerien I'avaniage immense de fonctionner par tons les lemps, a touie hcure du jour el de la nuil. On ne peut pas esperer qu'un systeme plus rapide vienne jamais remplacerla lelegraphie eleclrique ; seu- lemenl ce mode de correspondance ne peut s'etabiir qu'entre des lieux determines a I'avance, par I'inter- mediaire de conducteurs donl relablisseraent exige que i'inlervalle des stations soil libre; en un mot il ne s'improvise pas. — Le lelegraphe aerien ne presente pas, sous ce rapport, plus d'avanlages. Un systeme qui pourrait s'etabiir entre des points arbitraires, sans preparation prealable, serail appele dans quelques circonstances a rendre de grands ser- vices ; s'il s'agil , par exemple , de transmetire des ordres dans une armee en campagnc ou sur une flotle. — 201 — — Ce systetne a ete propose : c'esl la telegrapliie mu- sicale on telephonie. Prendre pour signaux qiielques sons faciles a reconnalire, en faire cles conibinaisons qui permellonl d'exprimer une phrase qnelconque, \e\ esl le principe de code noiivelle mcihode. M. Sudre a, le prcmior, fail usage de sons mu- sicaux coinme moyen de correspondance. — Ses pre- mieres experiences dalenl de 1827 ; il omployait cotnme signaux les sept notes de la gamnie. — Deux ans plus lard, sa meiliode, simplifiee el reduile a I'em- ploi de cinq notes (do, sol, do, mi, sol), eiail recom- mandee par linslilul au Minisire de la guerre; des experiences failes au Cliamp-de-!\inrs en presence d'une commission d'officiers generaux, el plus lard a Toulon devanl une commission marilime , furenl I'objel de rapports lies favorahles. Cos resuliais en- couragcanls delerminerenl Tauieur a perfeciionner encore sa meihode. II reduisii a hois le nombre des notes employees (sol, do, sol) pour la Iransmission des dep^ches, el ses experiences sur lerre el sur mer furenl renouvelecs avcc celto simplification. Les com- missions chargees do juger ces noiivelles epreuves appelerenl encore Tattenlion du Gouvernement sur les services que peul rendre la lelephonie ; I'une d'elles proposii d'accordcr a M. Sudre utie recompense de 50,000 fr. et de creer une ecole de lelephonie. M. Sudre ne s'arrela pas lb, il simplitia encore sa meihode el pul iransmetire des depeches en employani une seule note (sol). Les resuliais furenl aussi saiisfaisanis que ceux des cssais precedenls. Enfin, en terminanl eel expose rapide des essais tie M. Sudre, j'ajoulerai qu'en 1855 le jury de I'expo- XXVI. 15 — 202 — siiion univeiselle lui accordail une recompense de 10,000 fr. poiir son invenlion de la lelephonie. Comme vous le voyez , Messieurs, la telegraphic musicale a ele plusieurs fois soiimise a un examen serieux , approfondi. Chaqne fois des hommes com- pelenls en onl reconnu I'imporlance comme mode de correspondance, et n'onl cesse d'cn recommander I'applicalion; et cependanl nulle part elle n'est ensei- gnee, nulle pari on ne parait songer a la mettre en pratique. — Y a-l-il un vice inherent au principe meme de la methode qui I'empeche de se repandre , ou bieo n'esl-ce que la complication des procedes suivis qui met un obstacle a son emploi ? — C'est ce que le temps nous apprcndra , lorsque plusieurs melhodes telephoniques auronl eld sonmises compa- rativemenl au conirolede ['experience. — Encourager ceux qui auront fait quelques leniatives dans ceite voie , ce sera provoquer le developpement d'un moyen dc correspondance qui pourra peut-etrn rendre de grands services. Dans ces derniers temps, un sysieme de ce genre a ele soumis a voire jugemenl . — L'auleur de ce systeme, M. Louis Duval pere, aide de sa fille, a pu, a deux reprises differenlos, rendre TAcademie lemoin d'experiences qui toules ont vivemont excite voire interel; je me borne k rappeler celles de la seance du 22 Mai. Des phrases fran^aises ou latines onl eie traduiles par M. Duval, en langue telephonique, au moyen du flageolet, et inlerpretees par sa liile avec uhc admirable precision ; accentuation, poncluation, rien n'y man- quail. Vous avez aussi remarque la promptitude avec laquelle ces phrases elaienl iransmises et inlerpretees. — 203 — — M. Duval s'esl servi lanlol de cinq notes, lanlot de deiix notes seiilemenl. La transmission a cle plus rapide el aussi cerlaine avec cinq qu'avec deux notes. — II a pu Iransmelire des nombres compliques, des signes queiconques, loujours avec la meme precision, A la suite de ces essais, une Commission a ele nom- mee pour examiner plus altenlivemenl ce sysleme el rechercher si I'Academie devail encourager Tauleur par uiie recompense. — Avanl de vous (aire connatlre les conclusions de la Commission el les motifs qui I'onl delerminee, je vais essayer de resumer en quel- ques mots la melhode de M. Duval. . II emploie deux systeraes de notes: Le premier, compose de cinq notes (do, re, mi, fa, sol) el le deuxieme de deux seulemenl (do, sol). — Le dernier paratl avoir snr le premier I'avanlage d'ecarier loute chance de confusion, puisque les notes employees sont separees par un inlervalie considerable (3 tons 1/2), n)ais il est beaucoup moins rapide; ainsi la nole do devra elre repeiee un certain nombre de fois pour represenler le signal que la note fa donnaii d'une seulefois. Ce qu'il y a d'imporiant a remarquer, c'est quele meme vocabulaire pent s'adapler aux deux precedes. — La combinaison des notes pour la for- mation de I'alphabet paraii ingenieux ; elle permel de iransmelire ires rapidemcnl non seulemenl des mois, mais encore des chiffres, des caract^res de loute • sorle. Enfin, d'apres M. Duval, I'application serail facile, puisque quinze lemons au plus sulfiraienl pour mellre le premier irompelle veuu en elal de iransmelire lous les signaux. Voire commission s'est d'abord pose celle question : — 204 — le iravail dc M. Duval esl-il un travail nouveau, — esl-ce line veritable invention? — M. Sudre le pre- mier a pose les principes de la nieihode teleplionique, cela est incontestable; il I'a mise en pratique et a differentes reprises des commissions compeienles I'ont approuvee. — Si I'onl doit admeitre une invention de la pari de M. Duval , ce ne pent eire que dans le vocabulaire, dans la combinaison des signes qu'il em- ploie pour transmellre les depeches ; mais, M. Duval se rcservaiit le secret de son vocabulaire, la Commis- sion n'a pu juger la question envisagee sous ce point de vue. — Un autre moyen de comparer entre elles la melliode de M. Duval el la meihode de M. Sudre, ce serail la repeiiiion d'experiences sur une grandc echelle. Celles qui onl ete repeiees sous vos ycux , dans la salle de TAcademie , onl parfaitement reussi. Doit-on en conclure qu'elles reussiraient ^galemeni bien si les distances eiaient considerables? C'l'st ce que des fails seuls pourraienl decider. — II est a rogrelier que M. Duval n'ail point encore pu soumciire son sysieme a des epreuves reellement pratiques. Voire Commission out irouve la I'ele- menl essenliel de la question qui lui elait soumise. Neanmoins, M. Duval a fail un travail inleressanl, il a obienu des resullals curieux ; — il peui les rendre utiles en repelanl ses essais en vue de sapplicaiions. La Commission, appreciant les resullals obtenus par M. Duval, ecartanl d'ailleurs la question de prioriie a regard d'un travail du meme genre fait par M. Sudre, animce du desir d'encourager un iravail qui pourra un jour recevoir des applications, propose a I'Acade- mic d'accorder h M. Duval une medaille d'argenl de \" classe, a litre d'encouragement. — 205 — VENTILATEUR A LAMES MOBILES Pr^seiite i I'Academie par M. Counhaye , Zingueur, k Reims. RAPPORT de M. A. Reimbeau, Membre tilulaire (I). L'objel pour lequel iVi. Counliaye a pris un brevet, est desline a renouveler I'air des apparlemenls, ma- gasins, cafes, resiauranis, ecoles, el on general dos salles ou rouvcrlure des fenelres esi impossible on presenle des inconvenicnts. Nous avons vu fonclionner le veniilaleur a lames mobiles dans des pieces elevees el dans des apparie- meots ires bas d'ciage, el nous avons conslalc que la disposition de ses lames, doni un usage de quclques jours apprend a regler rouverlure, elablit un coiiranl d'air leger, plus ou moins rapide, mais conlinnel, el nous avons reconnu que son emploi intelligenl rend de v6riiables services. L'ancien veniilaleur a soufllet . que M. Gounhaye a voulu remplacer , esl d'un service diflicile , d'nn emploi incommode ei d'un aspect grossier ; ouveri , ( 1 ) La Commission elait coHiposee «le MM. I'. Mass6 , Glambort , Heiinbeau et Gerard. — i06 — cntr'ouverl meme seulemeni , il projciie line masse d'air souvcol dangereuse el loui au moins desagreable, et agile les lumieres d'une fa^on faliganie, Le nouvel appareil remplil coraplelemenl la fonctioD de son devancier sans aucun de ses inconvenienls; \e couranl qu'il eiablit, plus fradionne, plus leger el regie a volonle, n'esl jamais incommode. Ce venlilaieur agil de deux manieres opposees , mais egalemenl uiiles; lanlol il aspire I'air exlerieur, lanlol il rojelle an dehors I'air de Tinierieur. S'il nous a ele impossible de reconnailre sous quelles influences s'( pere , a des inlervalles souveol ires rapprochees, ce changcmenl d'aclion, nous avons pu, du moins, consialer qu'il sufiil loujours d'ouvrir I'ap- pareil pour elablir un couranl el renouveler i'air de I'apparlemenl. Quanl le couranl ;i li^u du dehors au dedans, la disposition des lames, inclincis comme celles des persiennes, permel a I'air froid aspire de s'epandre pendanl quelques instants vers les parlies haules de rappariemenl avanl de redcscendre ; quand, au con- traire, le couranl s'elablil du dedans au dehors, la hauteur des lames de verre (0" 05' environ), au lieu d'opposer un obstacle, parail agir par voie d'appel sur It's gaz qui glissenl enire les surfaces polies du verre, el s'echappent avec rapidile (1). (i) Une application du meme principe Tienl d'etre faite sur uno ecbelle immense a Paris ; les ancienoes persiennes a lames de bois employees jusqu'ici dans les halles , ont ele remplacees aux nouTclles Jlalles centrales par des persiennes a lames de glace fixes et de polies ; celle iunovation qui a dbnne les meil- leurs rcsultals pour la trausmissiou de la lumiere , el conlr$ celle de la cbaleiir rayonnante , parail en outre aroir produit d'excellenls pffets dc Tenlilation. — 207 — Si l^ger que paraisse eel appareil, il ne laisse pas que d'offrir uiic solidile sufiisanle; il nous a fallu iiii veritable efforl pour en briser une lame; el touies les personnes qui remploienl nous onl assure que quelques jours d'usage leur avaienl donne loule espece de garaniie a ce point de viie. Les veniilaleurs de M. Counhaye (donl le brovel ne dale que de I'hiver dernier ) ne sonl pas encore Ires r6pandus ; nous en connaissous douze ou quinze, lanl a Reims qn'au dehors; une seule personne, parmi celles que nous avons visiiees, possedo deux appareils qui Ibnclionnerji parallelement ; ks autres se sunt conientees d'un seul vcniilaleur auquel rcpondenl des vasislas ordinaircs; lonles nous onl assure qn'elles sonl satisfailes de son emploi, que ses services sonl precieux , surloul dans la saison des froids , el que les fails donl nous avons ete temoins sonl conslanis. Ces ventilaleurs ne nianquent pas d'elegance , com- pleiemeni formes de lames de verre ou de glace , ils s'adaplenl parfailemeni aux vilragcs des magasins el aux fenetres des apparlemenis, sans blesser la vne el sans iulercepter la lumiere ; mais leur emploi serail pour ain^i dire impossible dans les ecoles, les classes, les dorloirs, les hopitaux, les casernes, parioul enlin ou un enlrelien altenlif ei delical ne lui serail pas assure, s'il n'eiail possible de les execiiler soil avec des lames de verre enchassees dans des cadres metal- liqucs, soit meme en lames de meial , el de Ic meltre ainsi a I'abri de loul danger. Les premiers appareils eiablis par M. Counhaje ne presenlaienl pas la precision d'execulion de ceux qu'il conslruil aujourd'hui , et leur service eiail loin d'etre aussi facile ; mais nous poiivons assurer que loule — 208 -- Bouvelle conimandc esl I'objet d'une elude ailenlive , d'une ap|jIicaiio!i nouvelle , d'un peifeclionnement. Le prix auqiiol peuvenl eire livres Ics veniilaieurs a lames mobiles ne les met pas encore a la porlee de toules les bourses (1); mais lels qu'ils sont, ils nous paraissenl appeles a rendre de verilables services , el nous pensoas qu'on peul en recommander I'emploi en leur accordant un encouragement. (I) TARIF DES VENTILATEURS A LAMES MOBILES. FOURNITURE ET POSE. Larg. Haul. F. c. F. c^ e 25 0 35 8 lames a 1 40 11 20 0 30 0 45 10 lames a 1 60 16 10 0 35 0 65 12 lames a 1 80 21 60 0 40 0 65 14 lames a 2 » 28 » 0 45 0 70 16 lames a 2 50 40 » 0 65 0 85 18 lames a 2 80 50 » Ces mesiires n'onl ricn de fixe, el Ton execute sur loules tlfanensions. — 209 — RAPPORT SUR LA CHEMINEE-CALORIFERE DE M. LESOBRE, Par M. P. Masse, Membre titulaire (1). Messieurs, La Commission que voiis avez nommee pour I'exa- men des questions industrielles soumises h I'Acaderaie, s'esl occupee , dans sa derniere seance, du sysleme de calorifere que vous a presenle M. Lesobre, son invenleur. Ce sysleme est applicable a louic especc de chemi- nees. II se divise en qualre parlies parfailemenl dis- lincies el lellemenl independanies I'une de I'aulre, qu'on peul, au choix, en monler soil la lolalile, soil une ou plusieurs fraciions. II esl diflicile, sans I'aide du dessin, de donner une idee claire el precise d'un appareil de ce genre; je vais neanmoins essayer de decrire celui-ci : je pourrai d'ailleiirs au hesoin m'aider du modele place sous vos yeux el fail sur I'echelle de 5 jiour 10, soil la 1/2. (1) La Commission etail composee de MM. Saabinet, I>andouzy, Baudegson, Goda, P. Masse, Maridort et Gerard. — 210 — La parlie que nous appellerons n«> 1 se compose d'une boite en fonle hermetiqueracnl fermee, haule de iO cenlimelres environ el ajani la forme el les pro- portions de I'alre de la cheminee. L'inierieur de celie bolie est dispose en forme de spirale el de maniere a y reienir leplus longiemps possible I'air froid amene du dehors el penetrant dans la boite par une ouverture menagee au centre de sa partie inferieure. Get air, suffisaniraent ecbauffe par son sejour assez long sous le cenlre meme du foyer, arrive ensuite a une bouche de chaleur pratiquee iaieralemenl un pen au-dessous de la lablette de la cheminee. La parlie n" 2, qui est formee d'un lube ayanl eg^- lement une prise d'air froid, la meme que celle de la parlie n» 1, correspond a une autre bouche de chaleur paraliele a la precedente. C'est par cetle bouche que s'echappe I'air chaufife au contact de la partie la plus incandescente du foyer, lei, pour obtenir un meilleur resultat, I'auteur a adople un systeme aussi simple qu'ing6nieux. Comprenant fort bien que si I'air froid ne faisail que passer par ce lube, il ne s'echaufferait qu'imparfaiiement, il I'y relienl, le force d'y sejourner au moyen d'une helice en fonle qui met obstacle a sa irop prompte sortie el lui permel d'arriver a une lem- peraiure phiselevee, avanl de s'echapper par la deuxieme bouche de chaleur que nous avons indiquee. La parlie n" 5, qui occupe le fond de la cheminee el remplace la taqiie, est un systeme de boiie sc rap- prochani beaucoup de la parlie n« 1. Comme dans celle-ci, I'air froid csi arreie par des obstacles interieurs qui ne permelteni qu'une circulation lente, prolongce, el lui laisseni le temps de s'echauffer sufTisamment. La partie n" 4 se compose de deux lubes places a la — 211 — pariie superieure el inlerne de la chemineo : ils sonl soumis a I'aclion du calorique qui s'eleve du foyer. Uiie seule el meme prise d'air froid esi commune a«x qualre divisions doni nous venons de vous cnlrelenir. Sous le nom de veniouses, I'auieur a place exle- rieuremenl de chaque cole de la cheminee deux peiils lubes qui, en venanl abonlir a I'inlerieur, formenl un courani d'air assez fori pour enirainer la fumee el meilre ainsi i'apparlemenl a I'abri d'un inconvenient presqu'aussi frequent quo facheux el nuisible. Cel appareil esi nouveau; il n'a ele eiabli jusqu'ici que chez I'invenieur, el meme incomplciemenl. Forces done, pour une experimenlalion quelconque, de nous conienler de eel unique appareil, nous avons pu du moins conslaler qu'avcc un feu ires faible, un iher- mom^lre, place ci I'une des bouches de chaleur, avail, en cinq minules, accuse une elevation do lemperalure de 12", et que la chaleur de la chambre, egale a celle qu'on obiiendrail d'un poele , n'avaii aucun dos in- convenients de ce dernier. Nous avons dil que i'appa- reil monle chez M. Lesobre n'eiail pas complel ; en effet , il se compose des parlies n"' 1 ei 2 seulemeni, c'esl-a-dire, de la boiie a spirale, servant de four, et du cylindre a helice qui est place dans les cendres. Les parlies n" 3 el 4 sonl d'une invenlion plus recenle que les deux aulres, el n'onl pas meme ele essayees; mais il esi facile de se rendre comple de Teffel qu'elles produiraienl. Les bouches de chaleur, en s'ouvranl el se fermant a volonte, meme parliellemenl , suivanl differenis sysiemes proposes par I'invenieur , permetieni de regulariser parfailemenl la quanliie d'air chaud que rappariemeni doit recevoir. — 212 — Les prix des diverses parlies dc cet appareil sonl les suivants : 1. sjsteme k spirale, 50 » ) 2, >. a h^lice , 20 » j Les deux, 70 | 3. » sinueux (po^{t?ieure) 60 120 » *, » tubes superieurs. 30 » Total. . . 140 » M. Lesobre, appele dans le sein de la Commission, lui a soumis I'apparcil que vous voyez ici el lui a donne loules les explications qu'elle pouvaii dosirer. Voire Commission, frappee de loul ce que ce sysleme a de simple et d'ingenieux, bien convaincu que i'in- •venleur a ulilise de la maniere la plus heureuse loul le calorique produil, el consideranl qu'une fois etabli, eel appareil n'enlrainera aucuns frais d'enlrelien, vous propose d'accorder a M, Lesobre, a litre d'encourage- menl , une medaille d'argenl de S""' classe. i — 21.^ — BEAUX-ARTS. LES VITRADX des tGLlSES DE CHALOINS-SUR-MARNE 5 ^TIDE ET DESCRIPTION par M. Ed. Barth^lemy, Membre correspondant. J'ai pense qu'on ne parcourerait pas sans inlerel la description des viiraux qui decorenl Irois des cinq eglises de Chalons, celles dediees a saint Etienne (caihedrale), a saini Alpin, huilieme eveque de la ville, el a Nolre-Dame, viiraux eniierement inedils el vraimeni dignes d'etre signales aux artistes. J'eusse desire qu'une plume plus exercee se fut chargee de ce travail devant Icquel j'ai longlemps hesiie , mais quand j'ai vu les annees se passer et que , chaquc fois que je revenais , je trouvais ces belles verrieres aussi ignorees, j'ai profile d'un sejour plus long que d'or- dinairc pour les eludier el lacher de les decrire, el d'expliquer d'une maniere intelligible pour lous la pensee qui a guide le peinlre en dessinant sur le verre ces belles pages imagees. C'est le resultat de ce travail que je soumels aujourd'hui a I'Academie. — 24fl — I. fiGLISE DE SAINT-ETIENNE (CATH£DRALE). Lb calhedrale renferme des viiraux des xni% xiv°, XV' el xvi^ siecles assez beaux d'execulion , quoique ces derniers soient de beaiicoup inferieurs h ceux que nous auions ^ voir plus lard dans I'eglise de Nolre- Dame. Je previens nies lecieurs que je commence la revue de ces verrieres par celle qui surmonte la porle de la sacrislie capiiulaire , dans le bas-cole seplenlrional ; je les previens egaleraenl que toules les descriptions parlcat , a moins d'indicalions con- iraires, du panneau superiour a la gauche de celui qui regarde. I. — Vitrail de la Creation du monde. xvi* siecle. 1. CREATio CELi ET TERRE. Dicu rcvelu d'un man- leau rouge double de verl el borde d'or, au nimbe crucifere or el rouge, deboui : eau avec poissons , arbres, fruits, cerfs, pores, chevres, oiseaux, herbes, soleil, June, eloiles. 2. ORTVS ADE. Dieu veiu de meme, rejelani son manieau en arriere , prend Adam nu el agenouille ; aupres, un arbre couverl de fruiis rouges : ciel eloile (i). 3. CREATIO EVE. Dicu reiirc d'Adam nu el endor- mi^ Eve , egalemenl nue el couverie d'une abondanle (Ij Ordinairement Adam est debout ct semble soutonu par Dieu : il est a rnmarquer que des etoiles seules paraissent au ciel, mais ni le soleil, ni la lune. — 215 — chevelure blonde, sur le cote irois arbres fruiliers et fonlaine. 4. DEVS PROIIIBET ADH VT COMEDAT. DieU appiiyd centre I'arbre de la science presenle Eve, qu'il tient par la niain , et veiue de ses seuls cheveux , a Adana qui semble croiser les mains d'admiralion (1). 5. ADAM TKANSGRESSIT PRECEPTVM DEI. Au milicU I'arbre de la science , entre ses feuillages le serpent raonlranl une tele charmanle , el s'adressant a Eve qui remel la pomme a Adam. 6...1ES DOMINE EOQVOD VID-ESSEM...ETABSCONDI... Au milieu I'arbre, a gauche Dieu inlerpellant vive- menl Adam el Eve places a droite. 7. DEVS EJICIT ADA ET EVA EXTRA PARADISIVM. Un ange tout de conleur feu,avec une epee de meme, pousse sur la porte de sortie du Paradis (2), les deux coupables qui cherchenl a cacher leur nudite. 8 Dieu remel h Adam el a Eve des peaux de betes pour se faire des vetements : leur attitude indique un grand embarras (3). 9. ADAM. mciPiT LABORARE. Adam , habille en peaux de betes, se construit une cabano ; pres de la, (1) L'arbre de la science, dans cclle verriere, n'a pas de ca- ractere bieu special : le cerisier est frequemmenl employe dans rile de Franco et le nord de la France; le goilt du peintre et le pays, comme on le pensc, modifient souvent ce detail ; cependant, je crois ici devoir me prononcer pour le pommier, i cause du fruit presente dans le panueau suivant. (2) Get ange n'a que deux ailes. (3) Cette Ggure est assez raremeut peinte: ce sont des peaux de moutous que remct Dieu, et c'est un detail, ce me seuble, assez curieux que de muntrer Dieu deji misericordieux et au- monier eUTers ceux qui Toot si indigneroenl offense. — 216 — Eve esl assise, filanl el donnanl a boire h son en- fant ( 1 ). iO. CAYN ET ABEL SACUIFICIVNT. ToilS (leux SOnl agenouilles devanl un aulel soulenu parquatrecolonnes el sur leqiiel fume leur sacrilice (2). 11. CAYN OCCIDIT ABEL FRATREM SVVM. Cain 38- somme Abel a coup de marleau , et le renverse a« milieu de buissons tleuris (5). 12. Le donaieur, bourgeois a genoux ; derriere, saint Jacques, le baton d'une main, lui lend ('autre : sainl Michel arme de toutes pieces, ailes vertes , tenant uue croix : s. michal. — s. jacobvs. II. — Viirail de la Sainte-Vierge. WV siede. Douze panneaux en quaire baiesogivales, surmontes de irois roses lobees. Les quaire panneaux du bas sont coupes par le milieu el indecliiffrables; au-dessus : 1. V Annonciation {i) : sur la banderoUe de I'ange: AVE MARIA, GRATIA PLENA. 2. Le tableau f uivant me parall difficile a expliquer : (1) Tableau ea quelque soile coDsacre, lant il est frequem- ment employe. (2) La fumee cmpeche de distinguer la viclime : c'est habi- tuellemenl un agaeau. (3) C'est bien un luarteau de forme analogue a ceux dout on se sert aujonrd'liui. Les peintres ont arme Cain de lous les instruments imaginables, poignard, beche , raassue, hoyau; !e marleau esl plus logique, car il esl difficile d'expliquer enlre les mains de Cain une arme plus Iravaiilee. (4) Celtc scene est reproJuile sans aucuu cachet particulier : la Vierge esl assise et travaille, I'ange s'approche un lys a la main. Cette observation s'applique a tous les panneaux de celte verriero, assez faiblement executes du teste. — ^217 — > et le lapiderent, le 3 Aoul an i de Jesus-Christ. (2) Ces deux individus sont les deux faux temoins produits pour conyaincre Elienne de blasphemes, devant le prince des prelres. (3) C'esl quand il fut entraine hers de la ville, aptes avoir dit : Video, etc (4) Cos p.mneanx dcvraienl etre les premiers, puisqu'ils re- presentcnl I'ordinalion d'Lliennc I — ^}53 — COMMANT SAINCT ISTIF.NINE FUT ESI.EV DTACRE PAU LES APOTUES. 7 el 8. Etienne siir la lete (lu(;iiel le Sa'mt-Kspril (Jirige iin rayon luminoux, discule aveccinq doccurs. Tun s'approche de Iiii en semblant compter siir ses doigls (1). COMMANT SAINCT ESTIEISNE DISPVTA CONTRE LES PRINCES UE LA Dans les donx peliles roses : a gauche, d'argenl a la bande de gueules chargee de irois coqnilies d'or el accompagnee de deux aulres coqnilies de sable ; a droile, parli de meme el dcguenles an croissant d'ar- genl, accompagne de trois eloilos d'or, posees 2 et 1 ; dans la grande rose, INolro Seigncnr glorienx, entonre d'angcs. VII. — Vitrail des ivequcs.^ xiii' siecle. Seize panneaux en qualre baios ogivales, 1 el 2. Les deux panneaux sont malheurcuscnioni enpartie defigures par des fr;igmenls rapporles ; le snjei represente deux saints, palme en main, places sous une riche arcade trilobee, llanqueca chaque coin d'une maison ii toil couverl en luiles, percee d'une feoelre n d'une poric, enlieremenl semblables a cellos qui sonl gravccsdans la meme |)osition sur les pierres lombales de I'eglise. — En bas^ deux ecussons rapporics : d'azur au chevron d'or , accompagne de trois ireflos de (l)Gcs lifux (laancaux, rcprescnlaHt la (iredicalioii il'Klicniie, vieiuiciil D.ilKicllcmciil a la suite des deux precedents. — 22/i — aieme(l)yOl(l'azui' au chevron d'argeni, accon)pagne«ftr {loispommes depiii d'or(2j, lous deux du xvPsiecle. 3, 4, 5, 6, 7 el 8. Dans chaquc panneaii, un saini personnage nimbc, sans alUibul qualificalif; de deux en deux une arcade avec crocheis sur I'exirados. 9, 10. Personnage nimbe, robe brune, pieds nus, s'avanganl les plains joinies vers un aulre personnage egalemenl nimbe qui sort des flois etau-dessus duquel esl un oiscau. 11 el 12. Panneaux briscs en panic: deux anges paraissenl porler un pelil homme velu en jaunc. 13 el 14. Deux sainls lenant chacun une cspece de \ioIon. 15 el 16. Deux sainls sans allributs. Au-dessus de cede iigne superieure courl une bor- dure richo : de deux eii deux panneaux, deux anges s'eiicensanl. Dans los roses, des groupes d'anges. VIII . — Meme sujet. Dans la I'eneire suivanie, il ne resle que deux frag- ments de panneaux du xiii* siecle : Tun represenlo un eveque, I'auire un saint personnage avec palme sans auires attribuls. Quaire baies. — Chaque sujel esl surmonie d'un riche dais du xv^ siecle : les fleurs-de-lys sool allon- gees el fines. (1) La I'amitle Regnauld, a Chalons, porlail d'argenl au che- vron d'azur , accompagiie de Irois trefles de gueules, 2 cl 1. Nous n'aOirmons pas en presence de cos differences. (2j \rme,s de la famille Je Godel. — 225 — 1. Saijite Calherine (i). couronnec cJe perles, clie- vciix blonds opars , robe ronge , palatine d'liermine ; (I'linc main elle s'appuie sur une epee a gaine bleue Heurdeiysee , de Tautie elle tienl une roue jaune. Fond bleu lleurdeljse. 2. La Sainte Vierge debout tenant V Enfant- Jesus, bordure fleurdelisee. 5. Saitu Michel, arme de loutes pieces, tele de- couverie el cbeveux blonds ; d'une main il lienl une croix, de I'autre il s'appuie sur un prelre , veiu de blanc , agenouille el ires pelil (2). 4. Samte Barbe, robeverte, manieau rouge qu'elle releve d'une main ganlee de bleu , cbeveux longs ; de I'aulre main elle lienl une lour posee sur un livre (5). Dans les deux peiiies roses, ecusson, d'azur au chevron d'argenl accompagne de irois croix palees d'or, 2 el 1. Dans celle du haul , Jesus-Chrisi crucifie, seul. IX. — Vitrail de I'arbre de Jesse, xiii* siecle. Fenelre ogivale dans laquelle les panneaux lieiinent loule la largeur ; lo panneau inferieur esi consacre a (1) Cathc^rine, fille du roi Costis, refusa de renier sa foi sur I'ordre de i'empereur Maxiine : il la fit venir, discuta avec die, et fut coiupletement vaincii ; quand elle fut mise sur la roue, riustrument du supplicc ful luiraculeuseiuent brise et ses eclats luerent 4,000 Gentils : Maxime la fit decaiiiter. Comme on le Toit, ello est representee la arec les attributs de son origine royale et de son martyre. (2J Image d'un clonaleur on peut-etre plulot de I'eveque de Sepenle qui joue un grand role dans la legcndc de I'arcbangc. (3) Si« liarbc eljil tille de Uioscore; celle lour est, comnie on sail, celle oil son pere la delint si longtemps pour triomphcr de sa foi. — 226 — un arbrc dc Jesse avec legende, mais incomplei cl gale par un grand nombre de meneaux rajiproches ; dans le panneau central, Notre Seigneur crucifie , ayanl au pied de sa croix la Vierge el sainl Jean. Lo panneau du haul esl meconnaissable. To'ul aulour regne une large bordure composee d'ornemenis ix rinceaux circulaires, ires riche de nuances el d'un elfel original. X. Dans la fenetre voisine esl le fragmenl le plus cu- rieux des anciens viiraux du xiii^ siecle, conserves h Chalons. C'esi une rosace en forme de roue, donl la bordure rcpresenie des palmes adossces, el donl le centre se divise en qualre parlies. i. lAiNE svRGK. Uu saiul, velu de blanc, louche de son baton un malade qui gil sur son lit: pres de lui on distingue des vases a potion . 2. Deux hommes. Tun assis, nu jusqu'a la ceinture, levanl les bras, landis que I'autre, lenanl un livre d'une main, s'avance vers lui. 5. G\MA...iE. Un sainl personnage, en robe verie el manteau jaune, deboul pres du lit d'un malade. 4. Un sainl faisant I'aumone a un pauvre. Deux auires fragments de cctle meme fenetre re- presenteni deux saints prelats places sur des arcades on forme de maison, comme j'en ai deja decrils. Enlin, dans une derniere fenetre de la basse nef du nord, apres la sacrislie, on voii qualre paimeaux enchasses dans des vilrcs blanches: ilssoniduxV siecle. 1. Moine nimbe, en habit blanc et Uinique bleuo, 1 227 lenani iiiio palmc ci tin livrc, sous un tlais:sur le socle les amies tic I'evcch^ de Chalons, bordure fleurdelysee. 2. Saiiil eveque, robe rouge, manieau vert, bonnet a noeuds d'eveque, coquilles el balon de pelerin, les mains places sur un pelil moine agenouille, velu de blanc. Meme ornemenialion: ecu efface. 5. La Vierge lenani Jesus-Chrisl el le chapelet ; meme ornemenialion : ecu de France. 4. Sainl abbe en blanc, manieau rouge, lenani palme el livre : meme ornemenialion : ecu de Chalons. Grande Ncf. — Dans Ics haules feneiros de la grande nef, on distingue quelques fragments de vitraux, des morceaux de bordures fleurdelysees. Ecusson de gueules a i'aigle d'or, ecartele de France el comme ci-dessus (repole 5 fois) de France enloure du cordon de Saint Michel. Fragments du xiv' siecle: eveque non iiimbe pre- senlanl de la main droile sa verriere. — Un sainl nimbe lenani une palme. Dans les fenelres de I'arcalure on decouvre un assez grand nombre de morceaux du xiir siecle : ce sonl des rinceaux uniformes , avec de petits personnages pen explicables^ dans les trois peliies roses qui sur- monleni I'ogive. Transsept. — Deux el trois fenelres du transsepl meridional sonl a fond bleu enlierement semedelleurs- de-lys Ires eflilees : ces verrieres paraisseni d'origine allemande. Ch(£ur. — Premiere fenelre (en commencanf par la gauche el regardant I'aulel), six panneaux : dans chacun un saint eveque ou poniife sous une arcade trilobee, — 228 — flanqnee d'une maison a toil de tuiles, avec fcneire a qiialre lobes: fond bleu, bordure a riches c uleuis. Dans la rose , la sainte Vierge assise siir son trone, avec un ange dans chacun des six lobes. Seconde feneire : un saint, deux eveques, un saint a nimbe crucifere ; Noire Seigneur crucide sur une croix verte; la Vierge couronnce, sur un Irone, ei tenant I'Enfanl-Jesus. Dans la rose, Noire Seigneur glorieux. Troisieme feneire : irois saints el irois pr61als ; a I'un on 111 : scvs. petrys. Dans la rose, un saiiil mitre, nimbe en rouge, assis et tenant une crosse. Grande Hose. — Vjngt-quaire bales geminees composeni la grande rose du portail septentrional ; chacune des douze petiies roses qui surmonlenl un couple de baies, renferme une scene de la vie de la Vierge ; au centre. Noire Seigneur glorieux, ayani de chaque cote un saint. Dans I'arcature qui est placee au dessus soni ranges les douze apolres, malheureu- semenl presque lous rcvus el corriges par un vilrier, sans doule, que Ton doit lenir a ne pas connaiire. — 229 — II. feGLlSE SAINT-ALPIN (I). Nous ne Irouverons a Saiol-AIpin que des verrieres du seizierae slecle el quelques grisailles de la meme epoque : les viiraux colories sonl beaux,, sans cepen- dant pouvoir les comparer a ceux que nous verrons a Nolre-Dame, on ne peul s'empecher de reconnailre enlre eux une grande analogie. J'appellerai TaUenlion des curieux sur la verriere que je nommerai des douze apotres : ouire qu'elle nous apprend qu'a celle epoque une confr6rie s'eiail I'ormee a Chalons pour represenler celle iroupe sacree dans les processions, elle coniient un panneau qui forme un tableau d'un haul inleret, c'esi I'interieur d'une boutique de changeur, profession exercee sans douic par le donateur; on saura que la rue sur laquelle est le grand portail de I'eglise s'appelail ancieunement rue des Lombards, puis au moyen-age rue des Changeurs et n'a repris que depuis peu de temps son nom primiiif. \. — Vitrail de Saint- Alpin {au-dessus de la porte de la sacrislie). Qiiatre baies, chacune formani un seul sujel. 1. Saint Alpin (sainct alpin) debout, mitre, avec (1) Cello eglise tut d'abord une cliapelle dediee a saint Andre par saint Meiuniie, dil-on ; elle prit le nom dc Saint-Alpin qiiand les religieuK du prclal y eurcnt ele ramenes de Bayt', en SCO ; I'eveqiie Geofl'roy coiislruisit Tegiise en 1I3G. — 230 — un nimbe rouge perle, chappe violelle, robe rouge, surplis blanc, tient sa crosse d'une main el benil epis- copalemeni de I'aulre ; saint Charlemagne (sainct CHARLESjarme de loules pieces, manleau ample rouge a col d'hermine, la couronne imperiale sur la leie, lienl I'epee ei le globe. Un porlique a fond bleuaire encadre ce groupe : au-dessus un ecusson d'azur charge en haul de fleurs-de-lys el d'une eloile en face ; en bas, pareillemenl, de deux eloiles el une fleur-de-lys el en abime d'une main bcnissanl ; les eloiles d'or, les fleurs d'argenl (1). 2. Manage de la Sainte-Vierge : dans une eglise eclairee par une feneire a deux baies el ogive renais- sance, le Grand-Preire p!ac6 sous un dais aux riches couleurs, unil Marie el Joseph. Sur une banderolle : JOSEPHP ...A VERGE FLEURIE, EPOVSA VIERGE MARIE. 3. Le Donaleur, — prelre, — a genoux : derriere lui un sainl velu d'un surcol bleu avec uneecharpe de raeme couleur a franges d'or, au bras gauche; sur une banderolle : o beate sancte alpin intercede pro NOBIS. 4. La Sainle Viergc, donl un angc tient le manleau bleu,vient feliciler Elisabeth, vieillefemraenui s'appuie sur une bequille, derriere elle est Zacharie, au fond une raaison couverte en luiles; dans les meneaux, Jesus- Chrisl nu, mais enloure d'un manleau violet, appelle les morls qui sorlenl nus des tombeaux : pres de Nolre- Seigneur, saint Jean dans sa peau de chameau. (1) Get eciissoa nous est inexplicable, car la famillc Cuissotle, ennoblie des le xiv' siecle. ayait pour arine, d'azur au cherron d'argenl accompagne de trois besans d'or; et nous no Toyons pas pour quelle cause Charles Cuissotte aurail pris un blason de fantaisie. Cetle famillc n'cst ^teinle que depuis pcu d'annees. - 231 — Legende en bas : venerable et discrete personne MAISTRE CHARLES CVISSOTTE SEIGNEUR DE BIERGES, CHANOINE DE L'EGLISE CATHEDRALE DE — LA VILLE DE CHAALONS ET CVRE DE CEANS A DONNE CESTE VER- RIERE LAN MIL CINQ CENS XX ET I. PRIES DIEU POUR LVY. II. — Vilrail de I'arbre de Jesse (au-dessus dc la porte du Nord. Verriere de six panneaux en irois bales. Sous un porlique, la donalrice, bourgeoise veluc de rouge ; h genoux deiriere elle, saint Jean en peau de charaeau el manleau rouge borde de perles; en ban- derolle : miserere mei devs. in magna, miseri- CORDIA. Pareilleraenl place, le donaleur, bourgeois habille en violet; pres de lui, un prelal en .chappe verle avec mitre et crosse : meme legende, Marie monlanl au Temple. V Annonciaiion : en deux panneaux coupes par le milieu, el le resle occupe par des debris informes. Naissance de la Vierge : Joachim presente I'enfant au chevet du lit de sa mere. Conception : La sainte Vierge debout, les mains joinles, les cheveux epars, robe violetle, manleau bleu a bordure perlee, doublee d'hcrmine ; auiour d'elle les divers symboles, a gauche: pvtevs aqvarvm, virga JESSE PLANTACIO ROSE, CEDRVS ALTATA, PORTA CELI, ELECTA VT SOL. A droitC : CIVITAS DEI, FONS ORTORVM, SPECVLVM SINE MACULA, TVRRIS DAVID, OLIVIA SPE- CIOSA, LILIVM INTER SPINAS, STELLA MARIS ; SUr SOS — 232 — pieds : ortvs conclvsvs. Cos Icgondes sonl ecriies snr des banderolles qui s'enroulenl autour de ces symboles dans les meneaux. Dieu le Pere dans une gloire, avec cede legende : pulcra es amica, mea et macvla non EST IN TE. Toul en haul, signature du verrier. III. — Vitrail de la Passion. (Dans I'abside.) Qualre panneaux en deux baies. i. La donalrice en robe bleue, en priere devani un prie-Dieu : sur le lapis qui le couvre , ecnsson d'argent a la face d'azur charge de Irois besans d'or : derriere deux sainls personnages en robes vioielies el manteaux rouges, palmes en main. 2. V Ensevelisssment : Un vieillard soulienl noire Seigneur par los epaules, un jeune homme par les pieds ; Marie le fixe d'un regard allendri ; a cole un vieillard qui lienl la couronne d'epines , la croix et I'echelle. 3. Notre Seigneur porlanl sa croix : deux soldats le frappenl, les deux sainies femmes pleurenl : au fond, porle de Jerusalem , flanquee de deux tours vertes. 4. Le Crucifiement : Notre Seigneur sur la croix, entre les deux Larrons, represenles dans des attitudes exagcrees ; au pied , Marie et saint Jean el une tele de mort. Bordure a mascarons el rinceaux. Dans les meneaux flamboyants , Dieu le Pere , le Saint-Esprit el les Anges. Legende : cvissotte. vefve. de. fev. — 233 — NOBLE. HOMME. JEHAN. MOYNE (1). EN SON VIVANT.... E. CESTE VERRIERE. MIL. ET. V' XIII. ET DE : A. FAIT. FAIRE. CESTE. VERRIERE. LAN. MIL. CINQ. OES. VINGT. DEVX. PRIEZ. DIEV. POV. JEH. PRIEZ POVR. MARGVERITE IV. — Vilratl de Notre-Seigneur (Dans I'abside). Six panneaux en trois bales. 1. La Sainle Vierge, eo manleau bleu , est assise sur un banc, pres de sa mere, en robe violelte, ei lui presenle I'Enfanl-Jesus nimbe d'or ; derri^rc, un ange aux ailes verles ; ceite scene est placee sous un poriique monumental ayanl au milieu du fronion un ecu de gueules. 2. Donaieur el donalrice h genoux devanl des prie- Dieu portant un ecusson d'or a la fasce de gueules chargee d'une onde d'argenl; le fond est en etoffe bleue a fleurs; dans le haul, le meme ecu. Derriere le dona- ieur, vetu d'une robo brune, est un saint personnage an manleau vert , tenant a la main une coupe dans laquelle on voil un petit diable vert ; derriere la dona- trice , en robe rouge fourree d'herminc, une sainte avec un manleau de meme couleur, a bordure perlee, une crosse a la main ; sur le second plan, deux peliies filles agenouillees. 3. VEnsevelisscment de Nolre-Seigneur : Marie , en robe bleue, prie; pres d'elle est Joseph d'Arimaihie, barbe blanche el riches habils : le tombeau, laille dans (1) La familli) Lo Moyne de Villarsy comptait parmi les lucilleures maisons nobles de Chalons : elle cxislait encore an moment de la revolution. XXVI. J 7 — 234 — le roc, a une forme parallelogranimaiique avec des rinceaux sculptes. 4. La scene du Thabor : Dans ce panneau, Nolre- Seigneur est figure vein de blanc, nimbe de rouge, el sa chair doree; on lil sur une banderolle : dine. bonv. EST. NOS. inc.. . VT. FACIAMVS. TABERNA-M. 5. Dieu le Pere, en violel , assls, tenant le sceptre; Jesus de meme tenant sa croix , enlre eux le Saint- Esprit , gloire de nuages el cercle d'anges aux ailes rouges. 6. La Resurreclion : Notre-Seigneur demi-nu man- leau rouge, double de vert, les bras ecartes ayant derriere lui le glaive el la croix, les pieds poses sur le globe : deux anges sonnenl de la trorapetie; h droite, deux saints se tiennent devant le mort ressus- €iiant. Dans les rinceaux du haul , Saint-Jean baptisanl Notre Seigneur : dans tous los autres compartiments, des anges encensanl. En bas, celte legende : noble, homme. maistre.... ROBIN. LIGENCIE. EN. LOIS. SEIGNEVR. DE MATHOVGVES. BAILLY. DE CHAALONS. ET. DEMOISELLE. JEHANNE. DE MYRTRVS. SA FEMME FAIRE. CESTE. VERRlfeRE. EN. LAN. MIL. CINQ. CENS. VINGT. ET. VN. FAITTES. POVR. EVLX. A. DIEV. MERCY. Jean Robin, qui pril une grande part, en 1507, an projel de redaction de la coutume de Chalons d'apres celle de Vermandois, etait bailli de celte ville en 1501, el mourut en fonctioos dans le courant de .I'annee 1525. V. (Daiisl'al)side. ) Pans ceile feoetre-verriere , on ne pent pitis re- connaUrc que doiix des six panneaux ; tout le resle n'esl compose que de fragments rapportes. La Sainle Vierge, nimbee, en ro])e rouge, est dans Telable; au fond, un bceuf, un ane; saint Jean-Baptistz est devant elle el I'adore: Notre Seigneur n'esl pas encore ne. Parmi los morccaux rapportes, on distingue un donateur en robe violelte fourree ei sa femme, ei Tecusson de la verriere de saint Alpin el saint Charle- magne. Quatorze ferames alignees sur trois r>ings, agcnouil- lees, velues de robes bleues ou rouges; derriere, une femme nimbee de rouge, robe verle, manieau rouge, tenant un calice ; ce panneau est d'un elTel Ires ori- ginal. II indiquerail, ce me semble, qu'il a eie donnc par une corporation religieuse, quoique les costumes ne soienl pas ceux d'un ordre regulier. VI. — Vitrail de sainte Madeleine fdans I'abside j. Six panneaux en deux baies : les deux du bas ne sonl composes que de fragments rapportes, mais de bonnes couleurs ; on lit seulemenl les legendes : COMENT. MAGDELEINE. SEN. VAT DESERT. ET FVT CONDVYCTE. PAR. VNG. ANC.E. COMENT. MAGDELEINE FEMME. EN (ccinle?) Dans la rangee du milieu , une scene maritime composee pour la plus grande parlie de morceaux rapportes; on distingue cependanl des rochers, les flols cl un vaisseau. Legende : coment. retovrna. DE JIIERVSALEM. RETROVVA. DESSVS. VNE ROCHE. LA FEME. ET SON ENFANT. — 236 — Second panneaii: un pcrsonnage, richemenl vclu a rorienialc , monlc dans un canol pour regagncr le vaisseau que Ton voii, el se retourne vers unc femme J lichement habillee aussi, eiendue sur le rocher, avcc un enfant nu pres d'elle. Legende : coment. le dug. ALLOIT. A. JIIEM. ET. SA. FEME. MOURLT. ENSAINCTE. ET. LA DESSUS. UNE. ROCHE. Au dernier rang, Madeleine avec huil personnes dans une barque remorquee par un ange ; au fond, une villo ei une barque h voile dans le loinlain. La sainle est deboul, en robe rouge, bordee de jaune, voile blanc, nimbe rouge perle, el priant : coment. MAGDELEINL. PUT. BOLT^E. HORS. DE JHERUSALEM . ET. PLL'SIEURS. XUESTIENS. AUSSY. Madeleine, pureillemenl velue, s'adresse au due de Marseille el a sa femme, assis, dans une richc salle ouverle, sur un irone; a gauche, ou voit la mer el la barque avec les memes passagers : coment. magde- LEINE. ARRIVA. A. MARSAILLES. ET. LA. PRESGHA. LE DUG. ET. SA. FEMME. Dans les meneaux du haul, Dieu le Pere ; des ouvriers de divers elals tenant une espece de doloire. On sail que saiule Madeleine etail la palronne des lonneliers, el ces divers allributs prouvenl suffisam- menl que celle verriere est due a la generosite de ceile corporation. VII. — Vilrail des douze Apolres (dans I'abside, bas-coie dunord). Dix panneaux en quatre baies, chaque scene tenant deux panneaux. \ . Prelre tenant un bc.l oslensoir d'or en forme de Travaux de TAcademie Imp. de Reims , . VOL. XXVI' BarljatfiUBd, Yiirall des Douze Apotres.a S^ Alpm. — 237 — chapellc , place siir mi dais rongo que soniicnnenl qiiaire pclils liommcs a manleaiix hiaiics; derriere, les apoires barbus cl avec leiirs divers ailiibiiis , pieds nus ; la scene se passe dans uiie rue de ville : EIN CESTE. ESGLISE. ET. EN. CE. LIEV. DOVZE. HOME. EN. LA. PROCESSION. LE. TOVIl. DIT. DE. LA FESTE. DIEV. DENOTENT. LIMITACION. 2. Dans une egliso, uii prelre communie les doiizc; apoires agenoiiilles el nimbcs en bleu; prtis de lui, uii enfant de choeiir: dovze. confiieues. gens. de. BIEN. EN. dovze. APOSTRES. UEVESTVS. SONT. ACCOVSTRES. PAR. RON. MOIEN. POVR. DECORER. LE. DOVLX. JESVS. 3. La mannc loprescniee par de peliles boiilcs blanches lombecs du ciel ; la foule la ramasse d:ins des paniers; Moise (?) assis, nne grande baguette h la main : par. la. manne. est. signifie. le. DOVLX. IIIESVS, NOT. SAVLVEVR. QVY. DE. SON. SANCG. PVRIFIE. EN. LVY. SEVL, EST. TOVTE. SAVEVR. 4. Une cene soigncnsenienl execulce: le. grand. JVDY. NOME. LE. SAINCT. A. SES. APOSTRES. A. ENTIEREMENT. SON. CORP. PVR. VERAY. ET. NON. PAS. FAlCr. IL. CONSACRA. BIEN. DEVOTEMENT. Les deux panneaux du bas sonl brises : on y dis- tingue ccpendant un pretre consacrant a I'autel avec un enfant de cha3ur agenouille pres de lui , et le donaleur en face dans son banc ; une femme de la , bourgeoisie sorlant d'une boutique de changeur et se rciournani vers lui , debout derrierc son compioir couvcrt de pieces d'or et de livres ; aux murs sont accroches des pots , des plats , des casseroles : cet interieur est ires curieux. Les verrieres dn lympari n'exislenl (iIds. — 238 — VIII. — Vilrail de la Vterqe (absitle, bas-coie du norcl). Six paouoaux en cJcux baies: La Naissance de Notre Seigneur : Marie, Joseph^ I'enfanl Jesus el los bcrgers dans Telable ; celle scene lienl les deux panneanx inferieurs. Combat de cava- liers : personnage uimbe cbargeanl des soldals veius h Torienlale el aux visages negres ; ce tableau doll elre uue imitation de la belle verriere de Nolre-Dame, el non pas une baiailie d'Altila, comme le croient cerlaines personnes ; la presence d'un personnagi; nimbe en est une preuve irrefragable. Un saini assis, tenant un baton et un livre ; deux pelils pelerins agenouilles a sos coles. Campagne deserle. Un vieillard et une vieille femme vcnani I'un a I'aulre, comme dans la rencontre de la Porte-Doree. Une vieille femme, richemenl veiue, nimbee, prend la main de la sainte Vierge; deux anges souliennenl la queue du manleau bleu de celle derniere. Fragment de legende : et. vnde. veniat.... mei. . . . Ce vilrail, ires faible de dessin el de coloris, re- nionle au milieu du xvi^ sieclc. IX. Les auires viiraux de I'eglise Sainl-Alpin soul en grisailles du milieu el de la On du xvi° siecle ; la principale occupe deux panneaux hauls de la grande I'enelre du iranssepl meridional ; dans I'un est repre- sente le miracle de la mulliidicaiion des pains, avec — 239 — cede legende: coment. nostrb. salvevu. jesvcrist. NOVURIT. DE. CINQ. PAINS. DORGE. ET. DEUX. POISSONS. ENVIRON. CINQ. MILLE. IIOMMES. LES. FEMES. ENFANS. TOYS. Dans I'aulre, le miracle dcsNoces de Cana : coment. NOSTRE. SAVVEVR. JESVCRIST. ESTANT. AVX. NOPCES. EN. LA. MAISON. ARCHI.... MVA. LEAV. EN. VIN. 1530. Dans la peiile rose dii lympaii, une foule de preircs el de fideles sont agcnouilles avec dcs cierges a la main. Les auires personnages de ceile hclle verriere manqn^nl, Dans la chapelle de la Sninlc-Croix esl une scene de la legende de sainl-Alpin, an momcnl ou il arr6ie Ailila qui venail ravager Chalons. Dans les denx chapelles qui siiiveni, on veil : dans I'une, la sortie de Noire Seigneur du lombeau ; dans I'aulre, une scene qui se passe dans un temple, ct oil ligurenl nn grand nombre de soldals : celle-ci est dalee de 1555. Ces deux dernieres onl malheurense- mentelerestaureesd'unefn^on deplorable ily a troisans; je ne veux pas ciler ici la signature qu'on pent lire, en gros caracleres, sur les parlies de ces grisailles, donl la monstrueuse icinte verle tranche forlement sur celle douce et religieusc nuance grisc-violette dos porlions anciennes. - no — III. 6GLISE NOTRE-DAME E^ VAUX (1). Toules les verrieres de Nolre-Darae apparliennenl a pen pres a la meme epoque, qui doil commencer vers I'annee ISiO el s'arrelerS I'annee ISSO au plus (ard. Les plus belles, sans coutredit^ par ordre de merite ariisiique, sonl celles de rAssomplion de la Vierge , les fragraenls de la qualrieme fenelre aulrcs que ceux de la Cene, enlin celle de la bataille ou figure sainl Michel. Celle derniere esl Ires curieuse a cause des costumes mililaires, mais nulle ne peut enlrer en con- currence avcc celle Assompiion de la Vierge, Tune des plus belles verrieres dc celle epoque que Ton puisse voir. Tons les viiraux de la basse nef seplentrionale oni nn fairc analogue, une ornemenlalion semblable, une disposilion dans les sujeis qui indique que Ton a voulu suivre en quelque sorle un plan pour celle portion de I'eglise. Dans une fenelre, on reconnait Irois signes dc peintres verriers : I'un compose des lelircs DIj el C enirelaces, I'aulre d'un G, le dernier d'un signe parliculier formanl un espece de 4. Je n'ai pu retrouver a ce sujel aucun renseignemenl positif dans les comples du xvr siecle de la fabrique de Nolre- Dame, — comples, soil dil en passant, assez curieux pour meriler d'etre publics, — sinon ce passage qui (1) Leglise de Notre-Dame s'ecroula en 1157 et fulaussilot re- conslruile : on la benit en 1183 et la consecration soiennelle put ;iToir lieu en 1322. Elleappartient presqu'entieremeut ii la belle epoqde dc rarchitcclurc roinano-ogivale. - 241 - |)Ouriiiil se lapiiorhr a Tauteur du viirail de I'As- somplion : « Paye a Nicolas de Lassus, verryer, pour » avoir leve douze paiineaulx de verrc blancq, tant » a une forme devani les orgues (jue dcssus la cha- » pelle blanche, lesquels il a levez el ressoudez et B remis en plomb el mis des lyens el fail ce qui elait » necessaire de faire h raison de 7 sols 1/2 par chacun D panneau monle, ci 4 livres 10 sols. » (Compledede- pense de I'an lo55-o6, archives de I'holel-de-ville) (1). Les verrieres de la nef meridionale onl un loul autre cachet, quoique de la meme epoque ; les dales ne lais- seni aucun doule a eel egard. Les sujets soni moins largement compris, les oruemenis plus travaillcs; il y a peul-elre plus de fini dans le dessin, mais assure- menl moins d'cffel. II est inutile de faire remarquer que les deux scenes placecs dans deux sorlcs de car- louches a la feneire au-dessus de la sacrislie , proviennenl d'une verriere aujoiird'luii perdue : c'esi sans contredit une de celles que nous devons le plus regretler, a cause d'abord de sa bonne execution el aussi de la bizarre disposition du sujel. Nous fcrons re- marquer, enfinissant, a ceux qui pourraienl s'etonner de voir a Notre-Dametantdepanncaux consacrcsasaint Jacques, que Chalons possedait autrefois une confrerie de pelerins de sainl Jacques de Compostelle, que meme en 1640, Monseigneur Nialard de Herse admit aux processions ci ceremonies religieuses : les membres celebraienl leurs fetes 6 Nolre-Dame, qui, avant sa division en cinq paroisscs, avail ete la seule de ce coledela ville. C'esl evidemmeni a cclie confrerie que (I) Un autre comple de I'annce 1588-1689 conslate que la fa- brique a cu a payor 2 ecus 50 sols a Rcgnaull le Brun pour avoii J'cslaurc quclqui.'s verrieres. — 2/1-2 — sonldueslesvcrricresdela basse nefdusud; el cellequi rappelle la fameuse balaillequesainl Jacques Gt gagoer aux Espagnolsa Las Navas de Tolosa, en 1212, conlre les Musulmans, doil avoir ele pareillemenl offerle par les membres de I'association. I. — Vilrail de la bataille de saint Jacques. xvi" Steele. II occiipe la premiere fenefre de la basse nef du nord, pres de I'orgue. Fenelre a Irois bales ogivales divisees chacune en irois panneaux el surmoniee de meneaux flamboyanls formant trois rosaces. Les six panneaux superieurs composeni un seul ta- bleau, une baiaille : au centre parait saint Jacques sur un cheval blanc, vein d'une vesle vjolelle, manleau el calotte rouge ; ses harnais sont de couleur bleu-clair, il leve ie bras droit arme d'un enorme cimeierre : au- dessusdesa leteun soldat tientun fanon rouge charge d'une croix blanche; h gauche, derrifere Ie saint, un grand nombre de gens-d'armes , la pluparl a cheval; I'un d'eux renverse d'un coup de lance un des ennemis sur les pieds du cheval de sainl Jacques, pres de lui se lienl un lansquenet habille de noir et blanc, un autre cavalier deploie Teiendart represenlant I'aigle imperiale;a droite est une troupe d'ennemis, tous velus a I'orientale el qui plient sous Ie choc des Chretiens: Ie sol gazonne esi jonche de moris el de blesses foules sous les pieds des chevaux ; dans Ie loinlain" on apergoil un chateau a deux tourelles crenelees : la partie supe- rieure de chaque ogive est occupee par un dais riche- ment orncnienlc el soulenuc ou cniouree [tar des — 263 — aniiiiaux fanlasiicjiies : iine boidure ou s'enlremeleni des liiiceaiix el des anges sur fond jaune el rouge, separeul ces p luneaux de ceux de la pariie inferieure. Dans celui de gauche, la donalrice a genoux, coiffee en clieveux , robe rouge, echarpe brune, un livre ouverl sur son prie-dieu qui porle un ecusson parli d'or au besan de gueules , el d'argent au chevron ( ou bandes) d'azur charge de besans (ou compone ) de gueules ; dans la |)orlion superieure gauche du panneau, la Sainle Vierge couronnee el assise dans un fauleuil dore, lenani I'Enfanl Jesus; au dessus, vers le milieu, sainle Anne, egaiemcnl assise, veiue d'une robe verie a manches brunes, un livre a la main. A droite , le donaleur pareillemenl agenouil- le, vein d'une robe noire a capuchon ; sur son prie-dieu, I'ecu d'or au besan de gueules (1); pres de lui se irouve saini Jean-Bapiisie revelu de la peau de chameau , tenanl I'agneau nimbe sur son cou, la croix d'une main, el elendanl I'aulre sur la lele des donaleurs. Ces deux scenes sonl placees dans une sompiueuse salle soutenue par de riches pilaslres, avec plafond en chene sculple a compariimenls, el des lenlures violelles dans la premiere, rouges dans la seconde, supporlees par des batons dores. Dans le panneau cenlral, sainl Jacques est assis, le balon de pelerin d'une main , un livre noie de I'aulre : 11 esl nimbe el coiffe d'un chapcau orne de coquilles ; sa barbe el ses chcveux sonl abondanls el longs ; il est velu d'un habit violet, d'une echarpe (1) Ces ileux ecussons me soul mallieurcusement inconnus , ct rnalgfe les recherches que j'ai pu faire en i>ubliant mori Armorial dc la ville de Chalons, jc n'ai lieii [m decouviir a ce sujet. — 244 — verte el d'un mantoau rouge qu'il laisse lomber ; son siege esl place dans one niche dessinee en forme de coquilie, et lendue d'une etoffe bleue egalemenl semee de coqiiilles. Les meneanx composenl un tableau unique: c'esl la scene du Thabor que nous voyons frequcmment repetee dans les eglises de Chalons. En haul, Jesus- Christ couverl de veiements « blancs comme la neige » , la tele, les pieds el les mains « brillants comme le soleil » , occupe le sommet de la moniagne touie gazonnee. Au dessous on voil dans I'ordre suivant : Moise, tenant les tables de la loi divine, el Elie ; saint Jean, velu de blanc avec un manleau rouge ; saint Jacques, les mains croisees sur la poilrine, cou- verl d'un habit a dessin jaune, avec un manleau bleu ; saint Pierre , en brun , avec un manleau rouge el tendant les bras vers Notre Seigneur. II. — Vitrail de VAssomption. xvi' siecle. Cetle verriere esl placee dans une magnifique fenelre ogivale flamboyanie, el divisee en qualre bales sepa- rees au milieu el formant ainsi hull panneaux. Le premier comparlimenl du has, a droile, represenle le donaleur, vetu comme un bourgeois, agenouille devant un prie-dieu ou esl repose son livre d'heures ; I'ecus- son esl efface. Derriere lui, saint Nicolas ayanl a ses pieds le baquei avec les Irois enfanls symboliques ; nons I'erons remarquer que sur la chappe du saint est brodee une Annonciaiion, detail assez curieux et que nous croyons meme assez rare. A I'auire coin esl la donalrice egalemenl agenouillee comme son mari ; I'ecusson place surlcpric-dieu porledc... au chevron do... accon)pagnc - 2/i5 — en chef de deux molettes d'eperons el en poinie d'une rose; au dessus d'elle, une sainle, richenieni habillee, foulanl aux pieds un dragon monslrueux, el vers la- quelle vole un Sainl-Espril. La dedicace de ce vilrail h la Mere du Chrisl ne nous semble pas devoir laisser de douie a eel egard. Le donaleur el la dona- trice sont lous deux places sous un riche porlique renaissance; on apergoit derriere chacun un pelil pay- sage ; a gauche un chateau a tours, une riviere vers laqueile s'avancent un personnagc el un chien. Audessus du panneau de la donalrice est represente sous un riche couronnemenl la naissance de Marie. Sainle Anne est couchee; un ange agenouille, pret a recevoir I'enfant dans un linge ; debout pres d'elle se tienl la mere de sainle Anne, et Joachim, son mari, se presente a la portede rappartement. La mort de la Sainte Vierge occupe les deux pan- neaux cenlraux du bas : Marie est couchee dans un lit k baldaquin en chene sculple, autour d'elle sont ranges les onze apolres , parmi lesquels on remarque saint Pierre qui tienl un aspersoir, saint Jean a cole de lui el un autre ayanl un encensoir; devant le lit, un ange; a la voute du porlique, un candelabre a deux bras ; dans le fond a droite on voit un petit paysage, on aper^oit I'ange qui vienl apporler la robe de la Yierge a saint lldefonse, eveque de Tolede (vii* siecle), en recom- pense d'un ouvrage que ce prelat avail ecrit sur Marie. Le panneau du haul a droite est consacre aux 06- seques dc la Sainte Vierge : son cercueil porle par qualre apolres, suivis des autres disciples de Jesus- Christ ; sur le premier plan gisent les deux soldals, dont les mains sont reslees aiiachees au drap morluaire pour avoir voulu y toucher ; dans le fond, une troupe de soldals. — 246 — All milieu du comparlimeni supericnr, dans los denx panneaux, V Assomption : la Sainte Viergc, le pied sur le croissant, s'eleve porlee par des angcs; a droiie le Pere elernel la benil avec deux doigis, a gauche le Christ le couronne, au-dessus le Sainl-Esprit rayonnant ; cette magDifique scene est entouree d'une gloire de rayons remplie d'Anges et au milieu de laquelle ap- paraii I'arc-en-ciel. Ces deux Plages de comparlimenls sent separes par un cordon de mascarons assez grotesques, mais fine- menl traces; au-dessus de chaque panneau du has est un cartouche ou on lit : Sancla — Maria , repele deux fois. Les meneaux flamboyanis de la fenetre ne sent pas moins ornes. Au premier eiagequairemedaillons repre- senlant : un lion avec ces mots : saint Marc; un ange, saint Malhieu; un aigle, saint Jehan; un taureau, saint Luc; au-dessus dcs deux premiers, dans deux cartou- ches, ROMA, FAUSTINA : a droitc et a gauche de I'eiage superieur, qualre anges, deux priant, deux encen- sanl. Enlin dans I'ogive cenlrale, qualre grands com- parlimenls; en bas, le Sainl-Espril ; au-dessus, deux anges tenant la colonne a laquelle fut allache Jesus- Christ el la lance qui lui ouvril le tlanc, — deux anges tenant la croix et les verges, — deux angcs enfiu ayant aux mains la couronne d'epines et le linge de Notre-Seigneur, puis des anges qui encensenl : un petit medaillon nous donne le monograrame du peinlre verrier, un L et un C. La legende est complelement mulilee, on y retrouve seulement la dale de la verriere : m. v, c. xxvii. Nous aurions voulu pouvoir donner quelques delails sur les pieux personnages qui ornerenl Nolre-Dame — 2^7 — en Vaux dc celle niagnifiqiie vcrriere, qui joint a la beaule d'un tableau le charrae d'un de ces poemes que nos artistes du moyen-age savaient si bien peindre en trails eclatants; mais nous nous voyons dans I'impos- sibilile de leur rendre ce legitime hommage. L'ccusson du donateur est perdu et celui de la donatrice inconnu ; les seules armes qui aient quelque rapport avec celies que nous avons sous les yeux sont celies des Besche- fer, bonne faraille de la bourgeoisie cbalonnaise, re- vetue des le xvi* siecle des principales charges muni- ci pales. III. — Legende de la Sainle Vierge. xvii' siecle. Cette verriere, raoins belle que les precedenles, est plus considerable ; elle se compose de quatre baies ogivales divisees chacune en trois panneaux, el les meneaux flamboyants forment en oulre quatre petiles roses el six autres fragments principaux. Elle est consacree a la legende de la sainle Vierge. Je com- mence par le panneau inferieur de gauclie, mais je ferai remarquer que ces tableaux ont ele deranges. U Annoncialion : La Vierge est agenouillee , les mains croisees, un livre ouverl devant elle ; a Tangle superieur de droile apparail I'ange, elendant la main droiie vers Marie, el tenant de I'auire un baton auquel esi attachee une banderolle avec ces mols: avb GRATIA. PLENA. Au dessus de la tele de la Vierge descend le Sainl-Esprit ; a ses pieds , un vase dans lequel fleuril un lys. Visite de Marie a Elisabeth, pour lui annoncer la grace qui vioiii de lui elre faile: les deux femmes sonl ensemble sous un epais bocage; en arriere, deux — 248 -- aulres plus jeunes ; a cole, animaux divers; au fond, une ville; on sail que c'est en dehors de sa demeure que la sainle Vierge renconlra la femme de Zacharie. Voyage a BethUem : Joseph, velu d'une robe bleue el d'un manleau rouge, un baton sur I'epaule el un pelit paquet au boul, lienl la bride de I'ane sur lequel est assise Marie: ils arrivcnl aux portes de la ville oii doit naitre le Sauveur; pres de ce groupe esl un boeuf. Pierre Comestor dit que Joseph avail amene eel ani- mal avec lui; il est vraisemblable de croire que I'ar- lisle I'a place dans celle verriere en souvenir du role qu'il allait jouer dans I'elable de Belhleem. Un homme barbu, richement vein, enloure de sol- dais, joint pieusement les mains devant une femme mise avec une grande sompiuosiie, el dont la tele est surmonlee d'un medaillon. Rencontre de Joachim et de sainle Anne a la porle Doric. ISaissance de la Sainle Vierge : Anne est dans un large lit a baldaquin et a rideaux verts; plusieurs femmes Teniourenl, I'une lient I'enfant, une autre apporie un berceau d'osicr sur sa tele. Presenlalion au Temple : La Vierge, en robe rouge, aux cheveux blonds et longs, monte les degres ; en haul le grand-pretre I'ailend ; en has, sainle Anne; pres de I'escalier esl un homme appuyesur une espece de bureau, ou se lii, en chiffres rouges, la date 1527. Mariage de Nolre-Dame : Le grand-pretre est enlre les deux epoux qui se donnent la main, sous un riche porlique ; au fond, hommes et femmes. La sainte Vierge est en robe rouge h collet vert ; le grand-pretre est habille en violet. Un pauvrc pros d'une riche porte de ville. — i2/i9 - La fete des Encenies: le grand- pieire Ruben est dchoiU devanl uiie table, sur laquelle sonl un plal cl un coulcau ; pres de lui. un scribe , porlanl dcs lu- neiles, assis a un bureau ; prelres au fond: Joachim s'avance apportant son agneau. On sail qu'en cello circonslance le pontife refusa son olTrande en lui re- prochant la sieriliie do sa fern i e, ei en lui rappelani « qu'en Israel, I'epoux qui n'a pas la gloire d'eire » pere est maudil de Dieu. b Apparition de I'Ange aux Bergers : I'un d'eux est agenouille el cntoure de moulons ; au fond , une bef- gerie. Marie lit, assise sous un portique soulenu par deuxcolonnes; son altitude est trisie : elle esi agiiee I)ar des sonp^ons que Joseph no pouvaii tout d'abord sempecher de conccvoir ; I'ange de I'annonciation lui a|tparail alors de nouveau, lui disant , suivanl le recil de sainle Brigitte : « Dens Nosier,- qui jeternus est ipse tecum, c.i in le est : ne timeas ergo, quia ipse debei libi loqui, ipse perhciet opus suum lecum, potenier ct sapienier, b Sous les qualre ogives des baies sonl qualre ecus- ^ons : I'un d'or au chevron degueules accompagne de Irois caneties de sable ; le second a fond de gueule^ mais indechiffrable ; le iroisieme, comme le premier e'l le dernier, esi sans dome anssi une repetition du se- cond. de gueulesa deux epees d'or en sauloir (1). Dans les roses du lympaii : un homme arme d'un glaive, JUSTICE ; un homme avec un soleil sur I'epaule CHAUiTfi; femme assise el tenant une bequille, tem- .leui tiTr" '^''™' •^'°'"'« '»" ^vme siedc , por.ail datura tieux epees d argent en sauloir XXVI. ^^ — 250 — rfiUANCE ; remme lenani une chnpelle h la main, sans (loule la piele , mais la legende n'exisle plus. Enlre les roses cl les ogives des baies , deux fois la dale 1527. Dans les meneaux superieurs , une figure de la iri- niie, personnage a tele a trois visages (1) , robe blan- che, manleau violel a agraffe d'or, assise dans une gloire el presentanl un livre ; — douze anges enceu- sanl, el six jouanl des instruments el veins de diverses couleurs. IV. Vilrail de la naissance de Nolre-Seigneur. xvi* Steele. Qualre baies ogivales en huil panneaux avec me- neaux flamboyants. Les irois panneaux du bas representenl une cene assez bien Iraitee, mais evidemmenl rapporlee d'une autre verriereje dernier panneau, ou paraissenl un homme el une femme, n'est pas davanlage a sa place en ce lieu. Dans la portion superieure, les tableaux liennenl chacun deux panneaux, surmontes d'un riche dais. Le premier esl V Adoration des bergers dans I'etable : au fond , un boeuf et un ane an ratelier; a gauche, Joseph; au milieu, la Sainle Vierge assise devanl deux anges , souienant Notre-Seigneur sur la paille ; de chaque cole, les bergers I'adorant, leurs chapeaux attaches dans le dos. (1) Voir au sujetde cetle tele copiee eTidemmenl sur uq clia- piteau semblable du xir siecio, place a I'ancienne cliapelle dc cc nom, les gravures et I'article de M. Didron : Annates archeolo- giques, toin 11, p. 98. — 251 — Le second csl VAdoration des Mages : la Sniiilo- Vicrgc assise, vclije,comme dans la sceno premlonic, d'une robe rouge el d'un mantoau bleii, los chevonx coiivcrls d'un voile, proscnie i'Enfant Jesus deboui sur ses genoux anx mages, lous Irois ricbemeni veius : !e premier seul est proslerne en olTraiit ses dons, K? dernier a le visage noir avec les yeux tr^s blancs : Joseph se lient pros de Marie, en robe brune ei man- leau vert a bordure rouge; loule ceiic scene csl piscec sous nn porlique nionumenial. Au-dessus des dais de ces qualre baies sont ccs niois, cbacun dans nn carionclie simple : josf.p. nati. MOIRE. lASPA. Dans les meneaux, Jesus-Christ occupe le centre; il est place dans une gloire , (lrap(^ dans un manteaii violet, couronne d'epines, l-'s pieds sur lo nionde et monlrani les plaies de son cole, de ses pii'ds ci dc ses mains : lout auiour soiit dispose^ neuf anges jouani de divers instruments, el, dao'^ lis intervalles, les priii- cipaux instruments qui scrvirciit a son su|)plice el quelques atlribnts de iravai! des lonneliers, corporation donairicede ce viiragc : deux medaillons reproduiseni specialement I'une la doloire, I'autre un mouliii c'l vent dans un ecusson (1). (1) Les corporations J'ails el metiers avaieat a Ctialoiis suic Ires Corle orijanisation : los princiiialcs reiuoiitaient an moyen- age,c'es!-a-dire evidemmcnt a I'epoque oii la ville I'ut dolee do ses franchises raanicipales, el presque tonles rccurent de nou- velles Charles au xvi"^ siec'c (Voyez inon Histoire de Chalons, i'^ parlie, el qips Cartulaires de I'Eveche et du chapilre Suinl- Etienne de Chalons). 25^2 V. — Basse Nef, nord. \\V siecle. Vi trail de la Passion. Hull panneaux en quaire bales. Le premier panneau inferieiir a gauche represeiiie la (lonalrice agenouillee; derriere elle, un sainl per- sonnage nimbe, robe violelle, manleau vert, tenant un calice; le lout sous un riche porlique avec tenlure rouge, et des dalles hisioriees. Les deux panneaux suivanls sont consacres a une scene de la Passion : Marie-Madeleine , nimbee ct velue avec luxe, s'cssuyant It'S yeux d'une main, el de I'auire lenanl une cassolelle, s'avance vers ceux qui onl deiache Jesus-Chrisl de la croix ; parmi eux on reconnait sainl Jean, avec un nimbe rouge perle; au fond, la ville de Jerusalem. Le donaleur S genoux, en robe violelle, sous un porlique semblable au pre- cedent; sainl Jean-Baplisle est debout derriere lui, tenant une croix a banderolle el un petit agneau ; il csi veiu de sa peau de chameau el d'une robe bleue; sur une autre banderolle on lit: sanctsssime. ihan. OP.A. DEVM. PRO. ME. Les quaire panneaux superieurs repr6sentent le crucifiement : un diable surmonte la croix du mauvais larron, un ange celle du bon ; deux soldals, sur une echelle, atlachenl Noire Seigneur a la sienne, tandis que Marie, Marie-Madeleine el Jean pleurent en has; a gauche, un grand personnage, Herodo ou Pilaie peui-eire, a cheval et paraissant gesticulei- avec anima- tion, enioure de soldats, doni Tun porle une echelle, un autre un (lra|»eau charge d'un dragon, renire a — 25.", — Jeinsakm. Lc fond de ce lableaii osi (j'liii bleu assoz foncc, seme d'cioiles failes en conservant li leur place lo verrc au nalnrel. Le meme fonds esl reproduil dans les differenles parlies du lympan parmi lesquellcs on distingue qualre medaillons represenlant des busies en gri- sailles, des anges en prieres, saint Jean consolanl la sainte Vierge. Dans le bas : hostelieu de l'eSCV de FRAISCE (1) ET J. . . SA FEMME. ONT DONNE ceste... ^1- — Au desius de la porte de la sacrislie , basse Nef du sud. xv[^ siecle. Vitrail de I'arhre de Jesse. Huilpanneaux on qualre baios, le dernier de cbaque eiage deiruit: comme on va le voir, les scenes rcn- fermees aujourd'hui dans cellc fenelre n'eiaienl pas deslinees originairemcnl a etre placees ensemble. En commencanl par le premier panneau infericur a gauche: la sainte Vierge, vetue de bleu el de violet, agenouillee sous une espece de dais rouge ; an dessus 'le sa tele, le Sainl-Espril; ellc lourne la lele vers range de I'Annonciation qui vicnl a elle, un lys h la main. Siijel rapporte: Dans un cariouche a dais arrondi en forme de coeur, une fcmme , veiue de violet , (1) L'holcl de I'Ecu de France etait, en 1507, avec ccux du Pourccllci. de la Licorne, dc la Haule Meie de Diou, de la Cloche d'Or, line des principales auberges <'.e Chalons; il csl meme cilc le premier sur les listes dressees dans les regislres des conclusions nuinici|ialcs. — 254 — s'avancc, une caissc a la main, landis que dans iin lit drape en rouge reposent un liomme el une femme. Legende: comet, la chabr. uemit. la. vaisselle. DEDANS. SA. MALLETTE. SECUETEMET. QVAND. IL. DORMIT. Sujet rapporte, analogue au precedcnl : dans un carlouchc semblable, un negre, richeraeni velu, suivi d'un vieiilard, se tienl deboul devani un foyer ardenl pres duquel esl assis un jeune homnie, el d'ou sV.n- volenl deux colombes: comet, le. pere. dit PRIOIT. QVE. son. FILS Rencontre de Joachim et d'Anne alaporte Doree. Dans les ornemenis du panoeau esl la dale de 1537. La Sainle Vierge iriomphante , en robe blanche, brodeed'or: a gauche, en legende, des litanies, chacune avec son symbole. De has en haul, a gauche : ortus CONCLVSVS. PORTA CELL PVTEVS AQVARVM. TVRRIS DAVID. ALMA SPES. ELECTA UT SOL; a dfoile : CIVITAS DEI. PONS ORTORYM. PLANTATIO ROSE. PVLCRA UT. LVNA. En haul, Dieu le Pere benissanl Marie, eiauiour de lui une banderolle avec ces mols : tota pylcra ES. MACYLA NON EST IN TE. Accouchement de sainte Anne: de son lil elle lend les raains vers une femme qui lui presenle un plat : une autre femme tenant I'enfant parait s'adresser vivemenl a un liomme barbu . sans doale Joachim, assis devaul une lablo. Dans les menoaiix flamboyants, on lil d'abord re- pelee deux fois la dale deja cilee; en haul, Notre Sei- gneur glorieux. A droite eli gauche, au dessons de lui, la Saiule Vierge el sainl Jose[)h le prianl ; a I'enlour, des anges jouant de plusieurs instruments de musiqno. — 255 — Dans celie feneire les bales sonl lerminees, comme dans Ics deux suivanles, par une ogive irilobee. VII. — Vilrail de saint Jacques. \\V siecle. Trois bales en six panneaux : celle verriere esl dans un 6tal deplorable; les sujels conserves sonl d'un bon dessin el d'un coloris brillanl ; elle parait comme la suivanle destinee a rappeler la vie de saint Jacques : le haul de chaque bale esl garni d'un tres riche sys- leme d'ornemenlalion rouge el jaune enlouranl un dais. Premier panneau gauche superieur : arcade monu- menlale a iravers laqueile on voil une grande ville ; aucun personnage, Soldal qui perce d'un coup de lance une femme a la chevelure doree, vetue de violel el renversee a lerre. Arcade au fond de laqueile on distingue I'enlree de Jesus-Chrisi, raonle sur un ane, dans Jerusalem : ce sujel, comme celui du premier panneau est en bleu sur bleu. Qualrieme panneau : Palres a longues barbes, en- loures de besliaux ; sur le devant, char funebre ou le corps esl a decouvert, conduit vers une ville. Les deux aulres panneaux sonl remplis par des fragments rapporles. Dans la derniere ligne , il n'y _ a de conserve que le premier panneau de gauche ou une femme veiue de violet , s'agenouille devant un roi assis dans son trone , landis que des soldats a visages irrites I'entourent. Le bas esl occupe par une bordure d'arabesques enlre lesquelles sont de nombreuses coquilles. — 250 — VIII. 2"" Vitrail de Sainl- Jacques, xvi* siecle. Trois bales en six panncaux : meiues ornemenls de bordure que dans le precedent viirail : la legende, peinle en rouge, est presqiie loute briscc. Premier pannoau superieur a gauche : personnage riehemenl vein, assis sons un porlique, el IVagmcnis rapporles ; h gauche , une moniagne ; a droite, une ville ; nn ponlife nimbe benil un jeune homme vclu de blanc el lenant le balon de pelerin ; devanl deux vieillards, un cadavre eiendu par lerre. Hommes barbns arrivani a une ville , landis qu'un assez grand nombre d'individus soni proslernes devanl eux. Une femme couchee ; un borame, tenant un enfant nouveau-ne'dans ses bras, se penche vers elle; devanl, une femme accroupie pres d'un baquet. ce. naqvit JACQVES. LE. GRAND. FILS. DE. ZEBEDE. ET. DE MARIE. LALRANE. Notre Seigneur et Saint Jacques ; nombreux fragments rapporles: coment. sainct. jacqves. evt... Notre Seigneur au Thabor: scene Iraitee absolumenl comme dans la verriere n" 1 de colle eglise. Dans la derniere rangee, le pannean du milieu est seul conserve : sainl Jacques, nimbe, dans une chaire, harangue la foule. Dans les meneaux , on distingue a gauche Irois pelerins groupes ensemble; a droile, une table servie el cnlouree de plusieurs convives; au dessus, sainl Jacques avec plusieurs pieux compagnons. — 257 — RAPPORT de M. Ch. Givelet , membrn titulaire, REPARATION DES EMAUX DE L'fiGLISE SAINT-REMI. Messieurs, La Commission chargee d'examiiier la leparalion des emaux de Saini-Remi (1), m'ayant fail riioiiiieiir (le me nommer son rapporieur, je vions voiis exposer le resum6 de ses observations. La paroisse de Sainl-Remi possede nne suite pre- cieuse de 52 emaux , la plupari signes de Landin , celebre cmailleur de Limoges, an xvii° siecle. Sauf quatre, donl deux d'un age plus ancien , el deux represenianl I'nn saint Remi el I'autre saint Benoit , lous proviennenl de I'ancienne collegiale de Saint- Timolhee , el repr6senteni des scenes du marlyre de ce saint el de ses compagnons. Plusieurs de ces emaux sonl fixes aulour de chasses on fer-blanc ren- ' fermani des reliques auxquelles elles n'onl point de rapporl : ils soni intacls. Quanl aux autrcs , les causes de destruction ne leur onl pas manque: il y a pen (1) Cellc Commission elail co"npo3ee lic MM, Robillanl , Sfilaine, Loriqiiet, Auberl et Ch. GJTelet. XXVI. 19 — 258 — d'aniiees, on les employaii a la decoralion dii monu- menl servant a oxposer la cliassc de sainl Remi , el potir les fixer avec des clous, des Irons y onl ele fails a coup de marioau. M. I'abbe Auberl, notre cor- respondani, donl lout le nionde connail le zele pour rornemcnt de son eglise, el la conservation des objels curieux on precieux qu'elle renfcrmc, a fail cesser cet i)saij;e deplorable , qui, en delruisanl des objels d'arl du plus haul prix , n'avail pas meme le merile de Vh- propos , puisque les sujeis representes n'avaienl aucun rapport avec sainl Remi. Depuis, I'idee lui est vennc de retablir dans son ensemble la suite de ces emaux el d'en former Tor- nenient le plus splendide du tresor de son eglise , quand un anisic de cetle ville lui a offerl de rendre Ji ces emaux tout leur lustre primiiif , el de le faire meme avec un desinieressemenl devenu rare el que Tamour de Tart pent seul expliquer. Cost dans ces circonstanccs, Messieurs, que M. le cure de Saini-Remi a appele voire allention sur ces emaux . el vous a demande voire avis sur les essais de M. Oudarl. Djns une premiere reunion , M. Oudarl a donne quelques explications sur ses procedes, el d'accord avec M. le cure de Sainl-Remi , la Commission a juge qu'un essai plus decisif devail elre fail , avanl d'en venir a uue resiauration generale. Deux pieces, les plus endoramagees de toutes, onl oie choisies a dessein pour eel essai ; les parlies manquanles , devant , soil par la variele du travail, soil par la difficulie vaincue , prouver loul le talent de M. Oudarl , s'il parvenail a les retablir au gre de la Commission. Son attentc a ciedepassce, je dois le dire, ei ellc a pu se convaincre, — 259 — ilans sa secondo reunion, que la loslaiir.ilion ilns cmaux de Saini-Remi , ne pouvoii elie coiilico a dos mains pins habilcs. Lcs eniaux remis, a liire d'essai, a M. Ondarl, sont couxrcpresenianl,runsainl Reniieii'aulresainl Benoii, les denx, je le repeie, qui out eie les plus muiiies. M. Snlaine, mombrede la Commission, avail iracesur le papier les contonrs des dechirnres de ces emanx,el vons pouvez vons convaiiicre qne ces decliirnres pou- vaienlelreevaluees presqu'auqnarl dei'emaileniier pour chacnn d'enx ; ct de pins, M. Ondarl devail ajouleran basdecclui de sainl Remi, el snr lonlesa largenr, nne hande de cuivre hanie d'un ccnlimelre environ, alin de lui reiidre ce qu'il avail perdu en hauleur, par suite des mulilatiotis. Vons pouvez deja comprendre par la, Messieurs, I'im- porlance de la reslauraiion faiie a nos deux emaux. J'ajoule que les resullats oliienus par M. Ondarl sonl de nature non senlemcnl a rassurcr snr la con- servation des emaux resianres, mais meme b conlrniiT la critique la plus difticile. Trois mois apres la premiere reunion , les deux ^maux conlies a M. Oudarl out ete representes a la Commission , entieremeni restaures. L'ensemble n'a jias souirerl des additions qu'il y a failes, I'epaisseur du nouvel email, leur coloris et leur brillanl se rap- prochenl tanl des anciennes parlies, qu'il faul apj)orter unegrande attention pour dislinguer le vieux du neuf. L'on con(;oii meme dilliciiemeni, que sans eire peintre ct a Taidc des plus simples notions du dessin , M. Oudarl ail pcini assez heureusement les parties refailes, pour que I'oeil en soil aussi satisfait. Alin d'eclairer la commission sur le rapport (ju'elle — 200 — devail faire do son travail, M. Oudarl a voulu opeier (levant elle. Muni de sa lampe a esprit-de-vin, de ses eniaux fondants h GO on 80 degres de chaieur, M. Oudart remplii les vides que de nombreuses dechirures avaienl I'aites a un autre tableau. Apres ce premier travail, M. Oudart laisse refroidir la matiere coloree qui doit servir de fond, et a I'aide de la pierre ponce, il arrive a n'avoir que I'epaisseur de I'email conserve. Cost la dessiis qu'avec des couleurs a I'cau, il obtienl les ombres, les clairs et tout ce qui conslitue, quant au dessin el au coloris, le raccord des nouveiles parlies avec les anciennes. Nous voici maintenanl arrives au point ou \1. Oudart precede autremenl que les autres repa- raleurs d'osnaux. II s'agit de vernir les reslaurations, afin de leur donner le lustre de I'email lui-menie. II a fondu et etendu son vernis devant la Commis- hion, en operant a une temperature de 80 degres. L'email ancien ne souffre nullemeni de cette tempe- rature, puisqu'il lui faudrait encore 100 degres avanl de se meiire en fusion. M. Oudart ne se donne pas comme invenleur de ce vernis, mais il est le premier qui ail en I'idee, jusqu'a present, de I'appliquer aux eniaux, au lieu du vernis qu'emploieni tous les res- ijiiraionrs, qui s'elend a froid et a I'aide d'uii pinceau. A diverses questions posees par les membres de la Commission , M. Oudarl a repondu qu'a I'aide de quelques goultes d'alcool, le vernis et les fondants (lisparaissent en moius de cinq minutes, pourvu que I'operaiion soil recenie. Si elle remonte deja a quelque temps, a six mois, par exemple, temps tres sulfisant pour que le vernis soil parvenu a une extreme dureie, I'alcool devienl insuffisanl ; mais I'acide nilrique prodiiii aiors le memo efl'et, ei toujours sans alierer en ricii rancien email. - 261 — II resulle done dc I'examoii auciucl nous noiis soinincs livrc's, el des explications qui onl suivi : 1" que Ics emaux reslaures par M. Oudart le sont avec des emaux plus lendres que I'email primilif, s'appli- (piani facilemeni sur les parlies decliirees, sans que I'ancien email coure risque, soil de se fondre, soil d'eclaier ; 2' que les maiieres employees se dissolvent lacilemenl quand dies onl ele appliquees , el qu'on peul les enlevcr san-^ allerer en rien les parlies envi- lonnanies ; 5° que le vernis pose sur I'endroil res- laure, lui doniie le brillant el I'apparence de I'email conserve. Ce vernis, etendu sur la surl'ace enliere de I'email, ne Ini nuil en rien, el ne fait quo lui donner uu brillant uniforme qui deguise mieux encore les rcs- lauraiions. Ainsi , suppose (jue dcins I'avenir on dcconvre de meilleurs moyens de restaurer les emaux , il sera facile d'onlever a Cu'ux qu'aura repares M. Oudart, tout ce qu'il y aura apporle de neuf, fonds, couleurs et vernis , el de les rendre dans I'eiai oii on les lui aura coulies. Eu attendant , on aura toujours eu Tavanlage de les posseder avec nne rostanration qui Ics complete de la maniere la plus salisfaisante, tani pour le coup d'oeil que dans I'interet de leur conservation ; puisque , de I'aveu de touies les personnes qui onl des emaux , ceux qui sont dechires, pour me servir de Texpression consacree, vonl toujours se d^gradant , parcelle par parcelle , sans qu'on y louche, et lors nieme qu'on les conserve avec loulesles precautions possibles. La Commission a pcnse, Messieurs , que I'Acadcmie dt;vait faire connailre le lalenl vraimenl remarqna[)le de M. Oudart , ci elle croit devoir vous proposer de lui decerner une medaille d'argenl de premiere classe. - 262 — QUELQUES REFLEXIONS au sojet de PAUL DELAROGHE ET DE l'EXPOSITION DE SES OEUVRES , par M. Max. Sutaine , membre titulaire. La lombe s'esi fermee , il y a qiielqucs joiirs , sur le peinlre illusire que la morl a enleve a la France, cl deja la posleriie , qui a commence pour lui, a pu apprecier cl juger rensemble de ses ceu- vres. La pensee qui a preside a leur exposition , et dont le produil , comma on sail, esl desiine a sou- lager de nobles miseres, esl elle-memc un [)ieux hommage rendu a sa memoire ; le maitre celebre , apres avoir rcpandu pendani loule sa vie le bienfail de renseignenienl, vienl encore ainsi apres sa morl en aide a ses confreres auxquels la forlune capricieuse a refuse ses faveurs. C'esi le dernier adieu de Thomme de bien qui, pen de temps avanl que ses yeux s'eiei- gnissenl pour toujours, s'ecriail : « Je voudrais irouver un sujet pour lous cl I'exposer au profit des iirlisles el des ouvriers maiheureux. » On ne saurail done se monirer irop reconnaissanl onversceus quionl organise ceiie exposition el envers les liouroux possessi-urs qui out consonli a se separer — 263 — momeniancment de leurs Iresors pour los livrer a I'admiraiion du public. Celui-ci, au surplus, a repondu avec emprcssemenl a I'appel qui iui clail fail. II a corapris qu'il devail se hater de proliler de I'occasion unique qui Iui elail offerte de contempler ces chefs-d'oeuvre qui vonl se disperser de nouveau pour ne plus se reunir. Des plumes plus savantes que la noire, des cri- tiques plus cxerces se sent occupes deja de cetie exposition ; nous n'avons done pas la pretention d'ap- porter des apercus bien nouveaux ; nous voulons simplemenl rendre compte de nos impressions per- sonnelles et payer notre tribut a la memoire de I'un des artistes les plus distingnes de I'ecole moderne. D'ailleurs on est loin d'avoir tout dit sur Paul Delaroche, et quand il s'agil d'un homnie de cette valeur, les reflexions que fail naitre I'examen de ses ceuvres ne sauraient eire entieremeni depourvues d'interel. Si eel examen a excite radrairation, il a egalemeni souleve la critique; celle-ci s'est fail une large part et s'ost moniree severe, trop severe, selon nous, pour laisser croire a son impartialite. Nous craignons que I'esprit de parti qui divise les ecolcs acluelles n'ail trop faciiemenl cede au desir de profiler de cette nouvelle occasion de glorilier les tendances de certains maitres, sans se pr6occuper assez des lois de I'equite. II a jei^ la passion dans le debat ; el la passion, qui est toujours injuste el aveugle, est bien pres souvent de (aire a ses propres amis un meriie des defauls qu'elle reproche a ses adversaires el de refuser a ceiix-ci des qualiles qu'il esl impossible de meconnaiire. Ain^i, nous avons hi et enlendu repeier, par des — 26/1 — adeples dcs idees nouvelles, que M. Paul Deljroche elail lout au plus un excellenl ccolier; que le laleul iniiialeur lui manquail; que son dessin incorrect ren- dail vides les velemenis de ses personnages. Repondez- vous a ces critiques que lei maitre celebre iraiie, lui surioul, le dessin avec une desesperanle familiarity, lis ne manquent pas de repliquer que le dessin n'esi qu'un detail pueril. Ce que vousdevez admirer ch-ez le maiire, ajouleni-ils magislralemenl , c'esl la viguenr, les rapporis, I'liarmonie des ions, la puissance de co- loris, en un mol; le resle n'esi rien. II n'est pas un de nous qui n'ail enlendu cela vingl fois. Eh, mon Dieu ! soyons done moins exclusifs, el n'oublions pas que ce n'esi pas nous qui jugerons ces questions en dernier ressort. II y a au-dessus de nous une haute cour d'appel qui trancliera le debal. La poslerile se prononcera plus lard, sans tenir compte de I'espril de parti qui vous aninie aujourd'hui. Elle accueillera, sans doule, avec honaeur queiques loiles choisies el Iriees parmi les ceuvres de vos maitres, el rendra en meme lemps aux productions serieuses ei consciencieuses des aulres ecoles I'hommage qu'elles meriienl. Ilaphael et Michel-Ange ne se ressemblenl guere ; de leurs jours les rivaliies ciaienl aussi ardentes que celles qui s'agilenl maintcnanl : mais le lemps est \enu, il a fail la part de ces deux grands genies el les a reunis dans une commune admiration. Les siecles sonl des vieillards qui jugenl froidemenl. Nous parlions tout a I'heure de Raphael ; mais, en veriie, s'il vivaii de nos jours, vous le conlesleriez ; ses lignes si pures vous les irouveriez froides; vous diriez que la nature n'esi pas aussi reguliere ; que ce n'esi pas ainsi qu'ellc se produit. Vous proclameriez — 265 — qn'il manque de foiigne, d'enlrain ; que snvons-nous ? qu'il n'esl pas colorisle, peul-etre. Mais vous eles forces de vous incliner devanl le jugomonl de la pos- lerile el vous vous dedommagez en altaquanl ceux qui le cherchenl el qui, de pres ou de loin , le suivent dans la voie qu'il a iracee. Eh bien ! nous vous le repeions, c'esl la poslerile encore qui marquera voire place el celle de vos rivaux. II y a aussi un aulrejuge doni on decline volonlicrs la compelcnce, nous le savons, mais qui veul cepen- danl que Ton compie serieusement avec iui. Cejuge, c'esl le public, donl Ics arrels, nous ne I'ignorons pas, sont lenus en mediocre oslime en cerlains lieux, ci bicn a lort. L'inlelligence des masses, quand il s'agild'apprecier uiie oeuvre d'arl ou de litieralure, fail raremcni defaul. Suivez la foule , on I'a dil depuis longtemps, k la represenlalion graluile d'un drame iinporiani,el vous vcrrez que ses applaudissements ne' s'egareroni pas. lis salueronl les passages les plus remarquables, el la critique ne manquera pas aux siiualions fausses et mal definios. II en esi de meme dans une exposition de peinlure ; soyez surs que le tableau devanl lequel se presse la foule esl une bonne chose. L'admiraiion est sponlanee et n'a nul besoin d'analysc. Elle s'exprimc a premiere vue, quand I'oeuvre esl reellemenl belle ; et vous aurez beau venir ensuile, le scalpel de la critique a la main , dissoquer cette oeuvre , vous ne parviendrez pas a deiruire renlrainemenl general qui allire vers elle. Eh bien ! ce public qui fait , en definitive, el defair les reputations, s'esl prononce, vous en convenez, en faveur de Paul Delaroche. II a voiilu voir rcunis ces XXVI. 20 — 266 — tableaux donl les expositions pariielles (jusqu'en 1857, epoque a laqnellc Tarlisie cessa d'envoyer au Salon ) lui avaienl laisse de si beaux souvenirs; el celle fois encore, comme avanl , le succe5 a eie compiet. Loin de perdre de leur valeur, la plupari de ces belles loiles en oni acquis une nouvclle el elles resleronl comme un mouiimenl de la peiniure frangaise. Nous n'avons nullemenl la prelention de nous eriger en donneur de lemons, el quand nous louons M. Paul Delaroche, nous n'enlendons en aucune fagon nous livrer a une critique amere de I'ecole rivale ; mais en verile ecux qui hii oiU rofuse la solidiie de la ligne n'onl-ils pas commis au moins une grande temeriie en exposanl les objels de leur culle a d'inquietanles comparaisons? Nous n'avons certes pas I'lnteniion de faire ici un cours de dessin, mais nous ne pouvons nous em- pecher de signaler le soin avec lequel noire arlisle Irailail ceile parlie !>i imporlanle do I'arl. II exisle dans la peiniure, el ceci csl clemcntaire, une diffi- culle qui, bien souveni, cache un ecueil conlre lequel beaucoup, eldes plusforls d'ailleurs, viennenl6chouer: nous voulons parler de I'execulion parfaile de ce qu'on appelle les exlremiies, c'est-i-dire des pieds et surloul des mains. Or, nous le demandons, les loiles que I'ecole des Beaux-Arts vienl d'claler a nos yeux laissent-elles quelque chose a desirer sous ce rapport? Ce detail si importanl n'est-il pas Iraile avec la plus pure, la plus irreprochable correction ? Non seulement les mains sont parfaiics, mjis on peut ajouter que souvent elles soni, pour ainsi dire, pleines de senti- ment, comme d;ins Jane Grey et la Bealrix Cenci. Cette (juaiiie n'cst, certc?, pas sans valeur, a une — 267 — eponue ou Ton se pieoccupe mallieureiisement irop peu de la forme, ou Ton s'ecarle trop facilemcni dcs lois qui la regissenl. Elle temoigne du respect que Paul Delaroche a loujours eu pour Tan , el qui est bien eloigne du sans-fa^on cavalier avec lequel on I'aborde trop souvent aujourd'hui. Ce respect se retrouve encore dans le choix dcs types de ses per- sonnages; ses teles de femme sonl loutes belles et touchanles; ses figures d'homme, parfois d'une grande noblesse, comme colle de lord Sirafford, sonl loujours empreintes de dignile. Son esprit, porle vers la disiinc- lion, avail compris que, pour emouvoir, la nature n'a pas absolomcnt besoin d'etre laide, cl qu'une physio- nomie interessanle impressionne au moins autanl qu'une physionomie triviale el commune. Ceux qui trailenl aussi familieremenl la figure bu- maine ne se rendent pas assez compte que le laid, auquel on semble avoir voue un culle aujourd'hui , pcut elonner, eveiller un certain sentiment de curiosite railleuse, mais qu'il n'emeut jamais. Cetle verite est bien banale, cl ccpendanl des artistes, qu'on ne peul cerlainemenl accuser d'impuissancc, scmblenl prendre a lacbe de ne lenir aucun cas non seulemeni de la beaute en general, mais meme de la beaule tradiiion- nelle ou legendaire. Ainsi I'hisloire el la poesie nous ont Iransmis les figures de Cleopalre el de la Juliette I deShakspenre comme des types de beaule el de grace. I Eh bien ! lout le monde a pu voir des Cleopalre I impossibles, et au Salon de iSSS, notammenl, une ; Juliette donl la laideur ne le cedail qu'a celle de son Romeo. Tout en admirant certaines qualites Ires reelles de cette dernierc composition, on ne pouvail se defendre — 268 — de c mais que ses forces irahisseut, il ciil peinl une virago se debai- ianx el lullanl conlre le bourreau , lesgenoux souilies — 269 — par une paille fangeuse el cnsanglanlee, lo speclateur, an lieu de se seolir ailendri , delourncraii avcc degoui son regard de celte scene de boncherie. L'arlisle a compris qu'on poiivaii aller a Tame en reslanl simple el distingue, el sans qu'ii ful besoin de reconrir aux exageraiions du melodrame ; nous devons Ten feliciler sincerement. On a dit, el avec raison , que Paul nelaroclie avail souvenl change de siyle ei de mani^re; qu'il avail eu des hesitalions , qu'il avail loujours cherclie. Cola est vrai ; raais, pour elre juste , il fallait ajouler que presque loujours aussi il a trotive.Lsi plupart dcs grands peinires anciens el modernes onl frequemmcnl change leur maniere. Raphael varie, el, dans un genre lout different, M. Eugene Delacroix estbien loin aussi d'etre resle constant. La posterile dira si la seconde periode de sa vie est superieure a la premiere, qui a pour point de depart la Barque du Dante ct pour conclusion la magnilique loile de la Medee furieuse. L'exaraen de I'exposilion des oeuvres de Paul Delaroche permel d'affirmer ceci : c'esl que chacun de SOS changemenis s'esl fail au profit de son talent , el qu'il a ele conslamment en voie de progres jusqu'au jour ou la morl nous I'a enleve. Le developpemenl de ceite vie arlisiique , de 1822 a 1856, pourrait fournir le sujei d'une etude philoso- phique el hisiorique qui ne manquerait pas d'allrail. II serait inleressanl de rechercher, en dehors des in- fluences d'ecoles qu'il a subies comme peintre, par quelles transitions il esl arrive aux oeuvres qui onl signale ses derniers moments. Apres s'elre degage des traditions de I'ecole de I'empire, representees par Ic Joas sauvc , le Filippo Lippi cl lo Sainl Vincent — 270 — de Paul, il essaie les cllcls lomanliqufs dans V Elisabeth; puis, quanil la lilleraturc nous fail assisler aux drames du moyon-age, il ahorde avec passion ces sujels saisissanls que I'hisloire couvro encore d'un voile sombre el myslerieux. Plus lard, quand viennent a eclaler les evenemenls de 1848, son esprit nalurel- lemenl serieux se replie encore sur lui-meme; sa melancolie habiluelle deviont une irislesse profonde. II abandonne a peu pres le drame liislorique,el sa pensee mystique s'enveloppe, pour ainsi dire, d'un linceul. C'esi alors qu'il produii ces admirables loiles qui res- leront des cbefs-d'ceiivre : la Vierge au pied de la Croix ; — les Girondim , lermines en 1856, I'annee meme de sa morl; — la Marlyre sous Diocletien; — la Beatrix Cenci ; — la Vierge cliez les saintes femmes; — le Relour de Golgotha ; — el la Vierge devant la couronne d'epines. C'esl en Iravaillanl a ces deux der- nieres, que les pinceaux sonl tombes de la main defaiilanle de I'arliste qui, malheureusemenl , n'a pu les terminer. Ceiie profonde melancolie , qui s'epanche suriout dans ses dornieres ceuvres, provenail-elle de quelque secret averiissemenl de sa iin procbaine? On ne sail ; mais il semble avoir obei a quelque myslerieux pre- sage en se haiani de rendre ainsi I'art conlident de ses plus douloureuses inspirations. Quelques-uus oni fait a P. Delaroche iin crime de la perfection de ses details ; pourquoi done, s'il vous plait? Mais rien de ce qui peut concourir a la verile de Taction qu'on repr6senle ne doit fitre neglige, loutes les fois, bien entendu, que I'accessoire ne nuil pas au principal. Ce principe, rigoureusemeul consacre par la litleralure et le theatre, s'applique egalement h la — 271 — peintiire hislorique. Voire inatire a lous, Balzac, ne brille-t-il pas par les details doni il fail meme abus souvent? La piece de Henry III ne se meul-clle pas au milieu d'un curieux assemblage d'accessoires qui completenl I'illusion sans gener I'aciion ? Pour prendre des exemples dans le genre de la peinture qni esl I'objet de vos predileclions, cilons sculemeiil les Femmes d' Alger ct le Massacre de I'Mque de Liege ; les details dominent dans ces toiles, el la maniere remarqnable donl ils sonl rendus attire complelemeiil I'oeilj qui (init presque par oublier les personiiages. Si nous exceptons pcul-eire VElisabelh d'Anglelerre el le portrait de M. de Pourtales Gorgier, les details cbez Paul Delaroche , quoique Ires linis, sonl generalemenl executes dans une ganime sourde et sacrifies aux figures. Jeanne d' Arc, Jane Grey, Strafford, h Jeune Marlyre, la Cenci, sonl des compositions d'une grande simplicile el dans lesquelles I'ceil n'esl fatigue |)ar aucun entourage inutile. Si queI(]uefois il en esl plus prodigue, comme, par exemple, dans la Mori du due de Guise el le Mazarin^ c'est que le sujel le comporle ou I'exige; mais alors il les execute avec des demi-ions qui n'onl rien de criard el donl I'liarmonieesl savanle el complete. Celte critique puerile nous rappelle celle qui ac- cueillit, en 1857, I'apparition du Lord Strafford, el qui elail eg.demenl a I'adresse de la Jane Grey, ex- posee deux annees auparavanl. « Dans ce dernier » tableau, disail-on, on ne voii pas un ceil, el dans » I'aulre on n'aper^oii que des mains. » II fallaii ajoiiter que Paul Delaroche peignail admi- rablemenl les yeux quand il le voulait, ei que beau- coup, en outre, ne savenl pas dessincr les mains commc lui. — 272 — l.cs ciiiiqiios lui lofusenl le gdnic ; nous u'avons pas la preleniion do ileclder cetle question ; inais d'abord il faudmii eire d'acconl sur ce qu'on cntend par ce nioi, genio, qu'il ne faiil pas confondre avec les elans d'une fougue nop souvenl irreflechie ci qui irahil quelqucfois Timpuissance. Quant 5 nous , 11 nous semble bien diflicile de ne pas rcconnailre une ccrlaiiie dose de ce don celeste chez rhomme qui a laisse dos cliefs-d'oeuvre lols que la Mori du due de Guise el Vllemicyclc de I'ecole des Beaux-Aris. Dans lous Ics cas, ce qu'on ne peui lui coniesler, c'esl la pensee, el ce que nous serions lenie d'appeler le bouheur de I'iiispiraiion. A une epoque oii Videe esl souvenl aussi negligee que la forme , ce n'esl pas chose commune que de renconlrer un peinlre qui a voulu que ses oeuvres presenlassenl un sens r6el, intelligible, el qui a pour- suivi avec perseverance I'execulion du programme qu'il s'elail trace. Un tableau n'etail pas pour lui seulemeiu un raolif de decors, illustre par une har- monie plus ou moins juste de couleurs , el auquel on donne ensuile un litre quelconque ; c'elail un iravail serieux, consciencieux, dans lequel son esprit lucide repondail une clarle saisissable par lous. Le choix du SHJel etail pour lui chose iniporlanie, el, une fois le sujei Irouve, il savail le rendre de maniere a le faire comprendre du spectaleur qui, nalurellemenl el sans effort, s'impressionnail de sa pensee. Aussi csl-ce a celle simplicile de composition, pleine de poesie el alliee presque loujours a un grand bonheur d'execution , qu'il a du ce succes de populariie qui ne s'esl jamais dementi. Cp que Too coD(oit bien s'enonce clairenient. - 273 - Ce preceplo, eyaU'im'ni vrai pour les arls cl pour Ics lellres, a cie le guide sur de loule sa vie Eviianl avec soin la multiplicile des personnages, qui dislrail el fatigue inulilcmenl rallenlion, il ne conserve que ceux qui concourent dircclemenl & Taction principale. La sobriele des gesles, la dignile des attitudes, I'oxpression pleine de sentiment des teles, repandont sur ses compositions une poesic el une distinction que nul, peul-etre, n'a surpassees. Ses figures n'oni pas besoin de sc tordre et de se convulsionuer pour emouvoir. On s'inlercsse , on sympathise a Icur douleur, precisement parce qu'elle esl vraie el sans exageration. On doit a Paul Delaroche un certain nombre d'ex- cellenls portraits, donl plusieurs, comme ceux de MM. Guizot, Aube, Percire, de Noailles, sonl remarquables a tous egards. Mais ce n'esl pas dans ces loiles de commande, quelque beureusemenl reussies qu'elies soienl, qu'on doit cbercher la personnalile de Tarliste. Une ceriaine science du dessin, I'habileie de louche el I'habilude d'observation peuvenl suflire pour faire uu bon portrait, et le peintre, oblige de se renfermer dans I'iraitation la plus exacle possible d'un modele qu'il n'a pas choisi, execute simplemenl, dans les limi- les de son talent, une oeilvre de conscience el de savoir. II en esl tout aulrement quand il s'agil d'execuler une composition donl il a etudie le sujet. La, loul lui apparlienl ; il esl libre dans le cadre qu'il s'esl trace; les personnages se groupent, se raeuvent, se pas- sionnenl selon sa fantaisie. C'esl done dans ces crea- tions qu'on doit chercher le sentiment poelique cl la pensee de I'artisle ; car c'esl la seulement qu'ils se reveleni complelemonl. Nous avons dil lout ;i I'heure quel soin Delaroche — 274 — apporlail dans le choix de ses sujels. L'idee domine dans loules ses compositions grandes ou peliles, et c'esl precisemenl parce que loiijours on y reconnail une pensee profonde, que sa peinture allire el seduit, tandis que Tame resle le plus souvenl indifferenle devant ces parlis pris de couleur dont on fait trop souvent abus. Qui n'a pas reve devant ceite jolie lete si intelligentc de Pic de la Mirandole enfant, devant la douce resi- gnation de Jeanne d' Arc, devant cette noble figure de Strafford, qui va mourir en homme et en cbreiien, devant tant d'autres toiies que tout le monde connait mainlenant par ca3ur ? II y a sans doute des imperfections au milieu de toutes ces beautes, el notre admiration n'esl pas ex- clusive. Cette serie de trente-quatre annees d'un travail constant presente ceriainement quelques defail- lances. Lcs debuts surloni laissent h desirer. Le Joas sauve est loin d'etre irreprochabie. Dans le Filippo- Lippi, la charmante lete de la religieuse ne rachete pas certaine lourdeur et le manque de poesie de la figure principale. La grande loile de Y Elisabeth d' Angleterre, malgre ses belies qualites , fatigue peut-eire un peu trop I'oeil par le papiliotage de la lumiere, trop unifor- memeni repandue. Le meme defaut se fait sentir dans la Saint-Barthelemy, oij le peintre a , nous le croyons, abuse des tons criards; ce n'est pas ainsi qu'on se rcprescnte une scene d'borreur el de massacre, et la jolie flgure de I'enfanl, trop rose elle-meme, ne fait pas oublier cette imperfection. On pent reprocher une certaine s6cheresse b la tele de la mere de Pic de la Mirandole el a celle du principal personnagedu tableau du President Duranli, Ires beau el Ires bien agence, du resle La Jeune Fide a la halanQoire nous a paru — 275 - faible, et la Jcune Fillc dans une vasque, d'une couleiir douleuse. Mais que de grandes qualites vienneni compenser ces defauls, qui passeraieiit ioaper^us peut-eire, si les beaules qui les coudoienl ne les faisaieni ressorlir el remarquer davanlage ! A mesuie que Paul Delaroche s'avonce dans la car- riere, la voie s'elargil devanl lui, el s'il change quel- quefois , c'esl que la himiere lui apparail. Guide par la rectitude de son jugcment , il marche toujours droil a elle en la degageanl , au fur el a mesure, des nuages qui peuvent I'obscurcir. S'il varie, c'esl pour faire mieux , et il a eu ce rare privilege d'etre en progres pendant toule sa vie. A I'exception peut-etre de la Mort du due de Guise el de celte magnifiquo tete de Strafford, qui rappelle la maniere de Vandick, il n'esl pas conlesle , nous le croyons, que ses plus belles loiles sont le produit de ses dernieresaunees. Nous ne parlons pas de I'Hemicijde peinl en 1841, oeuvre capi- lale, lout a fail a part, et qui, a elle seule, suffirait h rendre irnperissable la memoire de son auleur. S'il etail permis de terminer par une question de chiffres une etude du genre de celle qui nous occupe, nous rappellerions que la 3Iort du due de Guise, provenant de la galerie du due d'Orleans, a ete vendue plus de 52,000 francs en 1855. C'est, apres ceiui de la StratonicQ de M. Ingres, qui a atleinl 65,000 francs, le priv le plus eleve oblenu a cette vente. II est permis aux amis du peintre, qui voient ainsi les acheleurs se disputer ses loiles de son vivant, d'avoir foi dans son talent et dans I'espoir que leur jiigement sera confirme par la posterite. Paul Delaroche est mort le A Oclobre 1856, a I'age de cinquante-ncul aiis II eiait eleve de dros. — 276 -- NfiCROLOGlE. DISGOURS PRONONCfi PAR M. CH. LORIQUET , Secrelaire-gendral , AIX OBSEQUES UE »I. \M. DE MAIZIERE (1). L'Academie s'esl fail tin devoir d'accompagner a sa derniere demeure le venerable membre qu'elle vieni de perdre, el elle a monire, par son empressement, la pari qu'elle prend au deiiil de celle funebre reunion. Mais le bureau a pense qu'un hommage pariiculier devail elre rendu h noire savanl confrere el qu'un mol d'adieu devail lui elre adresse, au nom de la Compagnie, par celui a qui appariienl le Irisle privi- lege de deposer sur la tombe des membres defunls I'expression de ses regreis. M. de Maiziere vous est connu a lous, Messieurs; je ne vous rappellerai pas son exislence laborieuse , ni ses lilres h I'eslime , son caraclere eleve, ses senii- menis genereux , sa piele sincere el ses verlus privees. Mais Torgane de I'Academie ne peul laire ce qu'elle (I) Le 26 Novembre t866. — 277 — lionorail surloul dans ce liavaillenr ardenl el infa- ligable. Elle s'elaii allaclx'; M. de Maiziue, en qualiic de correspondant, desia premiere annee dc son existence. Elle savait qu'en quiltant les fonclions qu'il avail rem- plies avec lant de disiinclion , el oii il avail porie les connaissances acquises dans une ecole juslenient renommee (1), rofficier d'arlillerio, le professeur dc I'ecole ceniraie de Bonlogne, des pages de I'empereur el du lycee de Reims, ii'avail pas abandonne la science, el que la relraile a laquelle I'age I'avail condamne elaii pour lui une facilile de plus pour se livrer aux eludes les plus serieuses. Des qu'il eiit pris rang parmi nous, son concours le plus aclif ful acquis a loules les questions scienli- fiques ou economiques qui nous furent proposees ; le plus souvenl il eul i'iniliative des vues les plus hardies, el sa verle vieillesse se chargea de slimuler noire zele. Assidu a nos seances lanl que sa sanle lui a permis de s'y rendre , par une exception que jusiifiaienl son grand age ei les services dans lesquels s'elaieni usees quelques-unes de ses faculles physiques, nous lui donnions une place a pari au milieu de nous. Espril aclif el original , comrae il s'en irouve rare- menl dans la science , M. de Maiziere , aux homraes superGciels, eui semble courir de hardiesse en hardiesse au gre d'une imagination ardenie ; I'observaleur ailen- lif voyail au conlraire dans ses iravaux un enchaine- menl logique. Prenanl pour principes el pour point de depart les theories qui lui avaienl semble les raieux acquises el les mieux demontrees a son esprit, il en (1) L'Ecole (le loalhemaliques nf;inl dn xvi° siecle, eomnrie I'a ecrii M. Cousin? Kn repudianl I'herilage des siecles passes el en prenanl la raison individueltc pour poini de deparl des connaissances hnmaines, a-l-il encouru le double reproche d'avolr rompu avec la tradition el continue dans la philosophie la revolle dii protesianlisnie conire I'autoriie? M. I'abbe Bouche dil oui, el M. Soiillie dil non . Jlais n'allez pas croire que nos deux confreres soieni aussi eloignes de s'en- lendre que le scpposonldes opirfions sidiameiralemcnl opposees. lis se loucbent, an contraire, [)ar plus d'un point. Si, d'une pail, iM. Bouclic demonire que la raison personnelle est un moyen insulfisant de decou- vrir la vcriic depiiis la decheance originclle ; tandis qu'd soutieni, el avec raison, que le role de la philo- sophie doit se borner a coniroler I'antoriie de la re- velation el a accepter les veriles de la foi, ce qii'a fail, du resle, Descartes, en proleslanl de son respect pour I'eglise el do sa soumission enliere a ses enseigne- inenls : M. Soullie, de son cole, inaintient, pour la raison, le droit de rechercher la nature el la destinee de riiomnie; mais il reconnaii qu'en fail, celle memu raison n'a poini donne des problemes donl nous par- Ions une solution suftisanle, el qu'il a ele necessaire que Dieu iransmetie aux hommes ceiie solution. EnGn , si M. Soullie termino son argumcntalion conire le travail de M. Houchc en reprochanl aux philosophcs — 289 — el aux llieologiens Ic lorl coniimin d'etre excliisifs el de repoiisser, Ics uns la I'oi, ol les aiilros la raison, ne voiis scinble-l-il pas se ra[)procher do M. Bouche conire Descartes? et I'accord que je signale enire les deux opposanls, bien que peu apparent de prime- abord, ne proiivc-1-iI pas qu'il ne peul y avoir de con- Iradiclion veritable sur un poiiil semblable, entre deux esprits qu'illuminenl eijalemrni de lours clartes la foi el la raison ? On disputera sans doule longlemps encore sur la nietaphysique el la mrihode philosophi(jue. En mo- rale, lous les boDs esprits sont d'accord. II n'est per- sonne, par exemple, qui ne trouve adniirables les fails que vous a signales M. Elamberl , el sur lesquels vous vous eles empresses d'appeler I'altenlion de rAcademie fran^aise, que le genereux de Monlhyou a instiluee la di'pensairico dcs encouragements qu'il destinail i la verlu. Toutefois, il y a plusieurs maniercs d'envisager el d'onseigner la morale, suivanl le point de vuc que choisii le moralisle. Ainsi, voire, correspondant , M. Delvincourl, a-l-il pu, i-aiis professer d'une maniere exprcsse les veriies de la foi, dans le journal de la Sociele de la morale chreticnne , donner des diverses questions de I'ordre social des solutions conformes a I'espril de I'Evangile, comme vous Ta demonlre, dans un compte-rendu lucide el elcndu, M. i'abbeGainel. A aucune epoque, les sciences n'onl revele leur puissance avec aulanl d'eclal que depuis un demi- siecle. En voyanl le parti que I'homme en a tire pour maitriser les elements de la creation, pour se les ap- proprier memc el les fa^onner a son usage, on pourratl croire qu'il ne lui resle plus de progres a realiser. - 290 — Aussi, de toules parts, enlendons-nous proclamer avec orgueil Faclion civilisalrice de la science el de I'induslrie. El pourianl esi-il bien sur que le progres materiel soil loule la civilisation ? Que peut la science pour former I'homme moral ? Rien on presque rien, repond le R. P. Lecuyer , dans un discours sur le Beau et sur son role dans I'educaiion, que je recom- mandea vos meditations. « Que I'induslrie, dil Telo- quent religieux , concoure h sa maniere au bonheur des creatures de Dieu, qu'eile ameliore les conditions de la vie, qu'eile procure surloul a ceux qui souffreni un pen de ce bien-etre qni est une condition dos verlus populaires: rien de mieux ; mais jamais elle ne suppleera h l.i mission des letlres el des arts. Nos anciens employaienl la jeunesse a preparer a la vie, non pas des sources de richesses el des soucis am- bitieux, mais des joies morales. A leur exemple, developpons avani tout les faculies dont I'exercice fecond engendre ces dernieres, el notammenl le sen- timent du Beau, la faculte la plus divine de I'homme, puisqu'elle est en memo temps le plus haul degr6 de sa puissance cl la meilleure part de son bonheur ici- bas. » M. Guyot est plus radical encore que voire corres- pondant de I'ordre de Sainl-Dominique. Embrassant d'un coup-d'oeil general I'educaiion lout enliere , il trouve qu'eile peche en ses poinis les plus essenliels, le defaut des meihodes ct le malheur des lomps ayant rendu la famille , I'ecole el Teglise egalement ira- puissanies a transmetlre la tradition avec I'autorite convenable. L'insiruclion lui pa rait en outre avoir pris une elendue hors de proportion avec I'educatioo, ini.lrument nuisible, des lors, dans la main de I'homme — 291 — qui ne sail pas s'eii servir pour Ic bion , el par regoisme el louies les passions qu'elle developpe, .-ource de maux pour les pariiculiers el la sociele. Tellcs sonl les conclusions de ce remarquable Iravail. L'auleur, qui a fail de la pliysiologie du genre hu- main une elude parliculiere , el a qui le scalpel du raedecin, non moins que I'analyse philosophique , a decouveri bien des secreis, n'y arrive qu'en examinani successivenienl le cerveau, la memoire, le raisonne- nieni, la iradilion, enlin renseignemenl, el, dans I'en- seignemeni, I'instruclion el I'^ducalion. Sans eire aussi severe peul-elre que M. Ropi(iuel donl vous lirez la cri- tique apres I'expose de M. Guyot^ je ne vous garanlirai la legiiimile de loutes les dediiclions de ce dernier, non plus que I'cflicacile des remedos qu'il propose. Dans un ordre d'idees moins eleve, M. de JVleissas iravaille ulilemenl aussi pour {'education de la jeu- nesse, en remplagant par des livres exacts, el ccpen- dani d'une forme atlrayante et rapide , les romans insiruclifs qu'on mel dans les mains des cnfanis. Dans les exlrails de voyage qn'ii vous a lus, noire savant confrere decrit successivemenl le pic de Teneriffe , les iremblements de terre el les volcans, les iles Canaries, el enfin I'Afrique. Le nieme membre vous a fait hommage de ses Elements de bolaniqiie, traiie aussi complel que le comporlail le but dc l'auleur, el qui a fait ses preuves, puisqu'il a eu dej& plusieurs editions. Dans le meme genre d'etudes , noire correspondani de Paris, M. Heberl, vous a communique ses lie- cherches sur les oscillations du sol de la France et sur la forme souterraine des premiers sediments lertiaires de Paris; ci M. Janin, qui fail liouneur a noire pays dans le baut er)seigncmei)i de I'ecole — 292 — polylechnique , comme M. Heberl dans cehii de I'e- cole noimale, vous a envoye uii savani memoire stir la mesure des indices de refraction des gaz, et un autre ayanl pour litre : L'Opliquc et la Peinture. Sous le nom de ce que la nature a de plus gracieux el des apparences doucereuses, la belladone est une planle perverse: les bolanistes, qui savenl a quoi s'en tenir sur son comple, semblent avoir choisi pour elle les 6pilheies les plus capables d'inspirer I'effroi. Cesy venenum furiosum , poison abominable, on bicn alropa, cruelle, inflexible, nom donne aussi par les poeies a celle des Parques qui tranche le i\\ d& la vie. Remercions done M. le docteur Cazin de nous avoir donne sa monographic de la belladone , etude therapeutique principalement , oil nous apprendrons que longlemps on n'a tire rien de bon de cetle hypo- crite qu'une espece de fard pour blanchir la peau, mais que la medecine est parvenue a y trouver des remedes utiles dans cerlaines maladies. Apres la belladone, m'esl-il permis de parler de la truffo? Si nous entendons oiler quelques indigestions pour en avoir mange, la faule en eat cerlaineraent a ceux qui abusenl des meilleures choses , et non point a I'odoranl lubercule, non plus qu'a Tarlisle qui s'esl charge d'en parfumer les volailles et les pates de nos tables, diil ce dernier, pour le resle de son savoir- faire, meriier le litre qu'on lui a souvent donne , d'agreable crapoisonneur. Admeliez-donc , je vous prie , que le rapprochement que je fais ici de la belladone ot de la truffe est lout fortuil ; je n'ai entendu les comparer I'une a I'autre en aucune fa^on. Quoi qu'il en soil , je devais remercier M. le doc- teur Maillard , de Verzenay, d'avoir fait entrevoir a r?.rl culinaire de noire pays une ressource nouvelle^ — 293 — en signalanl h rAcaclcmie la presence tie truffes snr differenls points do la iiionlagne dc Reims. Vous avez charge une commission d'examiner les echanlillons envoyes par M. Maillard, el de vous (aire connaiire la quaiile des lubercules el les condiiions dans les- quelles on pourraii les recueillir. Mallieureusement , les ech.intillons que la commission avail enlre les mains n'elaienl ni assez voluniineux, ni assez bien conserves pour faire les experiences necessaires ; el , en aliendanl que le retour de ia saison favorable per- meile de resoudre la grave question dont vous eles saisis, nous devons laisser la iruffe de la moniagne de Reims a I'eial d'inulile vegelal , el demeurer iribu- laires du Perigord. Vous avez re^u de M. Goubaux, voire correspon- danl a Alforl, nn niemoire elendu sur le sel marin el la saumure. D'apres ce liire, on pourraii croire que nous ne sortirons pas de I'arl culinaire. Ne serez-vous pas eionnes si je vous dis qu'avcc le sel nous renlrons dans la loxicologie ? Que n'a-l-on pas ecril , en effel , pour prouver rulilite, la necessiie'meme du sel dans I'alimenlaiion , soil au point de vue deFbygiene^ soil au poini de vue de la physiologic ? El cependanl , voici qu'apres des experiences nombreuses cl con- cluanles, M. Goubaux elabiil, cntre aulres choses , que le sel marin el la saumure deviennenl des poisons lorsqu'ils sont adminislres a des doses' Irop elevees, qui varienl siiivanl les especes el suivanl les indivi- dus; que leur aclion sur I'organisme est absolumenl le memo, el que la saumure doii ses proprieies loxi- ques au sel marin, qui eiitro, pour une grande pro- portion, dans sa composition. M. Landonzy vous a In les conclusions d'uno com- — 294 — municaiion qii'il a faile Ix rAcndomic de medecine , sur la respiration iiibaire el amphoriqiie dans la plen- resie, ei sur les indicaiions de la lliorasynlliese, ou il elablil que I'cegophonie, on voix de chevre, n'esi point le resultal de la pression de I'eau dans la poitrine , comme on I'avail cru jusqu'ici. Vous avez rcQu de M. Goubaux son Memoire sur la cryptorchidie chez I'liomme, el de M. le doc(eur Lecadre, voire correspondani au Havre, ses Eludes sociales, hygieniques el medicales sur les ouvriers em- ployes aux travaux du porl de cette ville. Enfin, M. le docleur Gaillol a soumis a voire juge- menl nn Memoire sur r hygiene publique el privee de la ville de Reims, dans Kquel lout le monde a re- connu , avec M. Baudesson, voire rapporieur, des fails parfailemeni vrais, nellemenl el meme elegam- menl exprimes, mais sans que les remedes indiques presentenl rien de neuf, ni d'une eflicacile bien crr- taine. Depuis quelques annees, les communications rela- tives h I'agriculUire sonl dcvenues moins frequentes au sein des socieies savantcs ; je ne suis pas le pre- mier a le remarquer. On comprend, du reste, qu'elles soieni eminemmenl profitables pour le pays, en se produisanl de preference dans ces reunions d'hommes speciaux qui composent les cornices, el qui peuvenl en realiser immediaiemenl I'application. Nous ne nous plaindrons consequemmenl de leur rarele, qu'en rai- son du vif interei qu'y prenait I'Academie. Nous re- mercierons M. Sulaine de nous avoir fail connaiire les essais de cultures differenies el les iravaux de desse- chemenl que M. Gujol a fail praliquer sur I'ancien domaine de Sillery, el qui, reunis aux constructions — 295 — qui s'y soni elevees, voni, comme par encliantenieni, rcndro a la lerre des Maiipas et des Brularl son :in- cienne splendeur. La vigne ne se ciiltive qu'a I'aide de Iravaiix peniblcs el incessanls, qu'au prix de depenses qui absoibenl souvenl le revenu, surloul dans ces annees devenues si fr(5quenles, ou rinlemperic a deiruil le peu d'espc- rances qu'une maladie desaslrouse avail laissees sur nos ccpages. C'esl sur eile principalement que M. Guyol a porte ses soins, el comme la proximile de la Vesle Texpose davanlage, il la protege conlre les brouillards el conlre la gelee au moyen de paillassons qu'il dispose habilemenl et qu'une machine de son invention fabrique en grande quanlile. Vous avez peuse, Messieurs, que ces essais el les resullals que los nouvcaux proprieiaires de Sillery en out recueillis deja, meriiaienl eminemmenl d'etre si- gnales, el vous avez decerne a M. Guyot une medaiile d'argent de premiere classe. Plusieurs annees de suite, I'Academie a mis au con- cours, dans I'inlerel de I'agricullure, la question du dessechemcnt des marais de la Vesle, el pendant lout ce lemps, aucune solution serieuse ne lui a eie com- muniquee. Si Ton en croit des personnes bien infor- mees, ceci ne faisaii plus du lout question il y a quel- ques mois ; bienlol meme la Vesle devait disparaitre, sinon complelemenl , du moins reduile, pendant la moiti6 de I'annee, h la condition d'un mince ruisscau ; elle devail donner toules ses eaux au canal de I'Aisne ^ la Marne , qui n'en saiirait recevoir d'ailleurs, pa- raii-il , sans de grandes depenses. Tel etait le beau projel de Messieurs des ponls-el-chaussees, et les riverains, menaces dans leur jonissance, dans leur — 2% — indiistric , dans leiir forliine, datis lour sanle ineiiic , s'appreiaienl a descrier les bords inhospiialiers de la Nesle, qiiand M. Giiyol est vciiu prouvor par des cal- culs irrefulables qu'oii poiivail conserver la Vesle, en portanl sur un autre poini la prise d'eau neressaire au canal. Le memoire de M. Guyol reunii sur celle grave question les renseignemenls les plus precis , el les considerations les plus serieuses y soni deduites avec ordre el clarte. Vous I'avcz enlendu avec un vif inieret, el il a excite au plus haul point Taitention de j'administration. Vous devez a M. de Moissas une conimunicalion des plus importanles , relative a la construction des voies ferrees. En Allemagne , on fail bon marclie des difTicultes que prescntenl de fortes rampes ou des courbes d'un tres-f;iib!e rayon, et Ton croit balancer suffisammcnt les inconvenicnts du trace par la disposi- tion particuliere qu'on donne aux roues. Cetle solution du probleme est un progres sans doute , mais nos in- genieurs, qu'elle ne salisfait qu'a demi , cherchent avanl toul a diminuer les penles el a rendre moins brusques les tbangemenis de direction. L'un des cbe- mins les mieux executes sous ce rapport est celui de Paris a Cherbourg, et cetle perfection lienl beaucoup & I'emploi qu'on y a fail di s calculs de noire savant confrere, el a I'application d'un procede qui lui est propre, pour mesurer les angles par de simples chai- nages , et remplace avantageusement les operations irop lenles du graphometre. Apres les canaux et les chemins de fer , ce qui, de nos jours, occupe le plus les esprils, ce sonl les ope- rations financieres, c'est la bourse. M. Pieion est d'avis que les operations de la bourse, — 297 — si necessaires a I'induslrie et au credil , oni ele atla- quees avec exageralion. Apres avoir fail Thislorique de I'insiiluiion elle-meme, il a passe en revue les dis- positions legislatives qui reglenl la matiere , et re- connu que ce qui avail paru bon , il y a cinquante ans , en vue surtout de la proprieie fonciere , devail eire reforme aujourd'hui que la fortune mobiliere a pris un si enorme accroissemenl. Ainsi , le taux de Tinteret, fixe a 5 p. 0/0 en 1807, est depasse a chaque instant dans les operations pri- vees et meme publiques. En attendant que Ton arrive a loule la liberie souhaitable en ce point, on sent deja le besoin de voir porter plus haul le taux de I'interel legal. Vous aviez mis au concours cette question d'in- duslrie : Decrire les ir ans formations successives de la laine dans la fabrication des tissus , et vous y aviez attache un prix de 200 francs. Deux memoires vous onl ele envoyes. L'un a pour epigraphe les vers qui suivent : Sourenir de ce roi qui rit dans sa patrie , A ia Tois de Colbert, accourir I'induslrie.. . La, des fils delies et ravis aux toisons , Pour les sexes divers , les diverses saisons, S'assemblent avec art Ce memoire est redige avec beaucoup d'ordre et de clarte ; tous les points iraportants de la question y sont, sinon traites, du raoins sommairement exposes , de- puis I'origine de la laine jusqu'a la sortie de I'eloffe de chez le fabricant , mais la pratique des diverses operations n'y est pas abordee, el beaucoup de clioses ne sonl qu'indiquees. XXVI. 22 — 298 — Quanl au second travail, il porle en lele cos mols : a L'induslrie fran^aiso, considerec separeraenl, en » face de cellos des peuples elrangers, a sa cause a » soulenir dans ce monde, el nous somnies les sol- u dats du travail national. » II est plus eiendu que le precedent, et aussi plus complci el plus pratique. On y sent la plume d'un homrae a qui les questions economiques el indus- trii'lles soul familieres. Los divers genres d'operalions, les machines qui y concourent , les differents tissus eux-memes sonl decriis avec un soin minulieux ; mais les details nuisenl beaucoup a I'ensemble, il y a des longueurs el des inuiiliies ; le memoire est, d'ailleurs, redige a un point de vue irop general, semble-l-il, dans une ville de fabrique qui a ses genres particuliers dc fabrication. Sur la proposition de voire commission, qui avail pour organe M. P. Masse, vous avez decide que le prix ne serail pas decerne ; mais vous avez accorde k M. Perrot, auleur du memoire n" 2, une m6daille d'argenl de 2* classe , et une medaille de bronze de i'" classe h M. Adrien, auteur du memoire n" i. Non content de donner ces eocouragements a Tin- eglises de France n'osaienl - 328 — pins revoiuliqiior les origines quo leiir assigtiaii la Iradiiioii. Au XVI' el au xvii" siecle, les cglises Beiges recoti- naissenl unanimcmeiil que I'eglise de Reims remonle aiix lemps aposloliques. C'esl ainsi que Caslillon nous dil dans sa Chrono- logie sacree de la Belgique : (( Sainl Sixle, romain de naissance, disciple de sainl Pierre, consacre par lui eveque, fat envoye en Occident, vers I'an du Christ 46, conjoiniement avec Sinicc et Memmius , avec la faculie de se fixer parlout ou besoin serail. Saint Sixte siegea dix ans; il regut la couronne du mariyre sous Neron, I'an 60, le premier Seplembre (1). » Telle est aussi I'opinion de Gilles Boucher (.'Egidius Bucherius), a qui nous devons le Belgium Romanum, el qui fut I'ami de eel illuslre Sirmond, qui, le pre- mier, fit connailre au monde savant les ecrils de noire Flodoard. a Be meme a Reims, dit-il , saint Pierre donna pour premier eveque saint Sixle , qui rcQut sous Neron la palme du martyre (2). » Les auteurs des Gesta Trevirorum assureul egale- menl, de la maniere la plus positive, que sainl Sinice (1) S. Sislus, patria Romanus, sancti Petri discipulus, ab eo in episcopum consecralus et anno Christi 46 in Occidenlein missus cum Sinicio cl Memmio hac cum facullate, ut quocumque necessitas vocaret, arbilralu flgerel suo; sedit S. Sixtus annis decern; marlyrio coronalus sub Nerone, anno CO, die prima Septembris. (J.-B.-L. de Castillon: Sacra Belgii Chronologia.) (2) Remis similiter ab eodem Pelro datum et sacratum primum episcopum Sistum, marlyriique laurca sub Nerone decoratum, eadem testatiir chronologia. [Belgium Romanum.) - 320 — de Reims, sainl iMeininio tie Chalons, saiiil Cldineni (le Melz, sainl Mnnsuil de Toiil , soni veniis dans l(>s Gaiiles, en socieie d'Euchaire, par Tordre dii prince des apoiros (1). Or, nons verrons que I'eijlise de Treves s'esl re- cenniie la SGeur de I'cglise de Reims, qirelle afilrme etre nee el avoir grandi avec elle ; il nVsl done pas probable qn'nne pareille tradilion ail ete accneillie Icgeremenl par ces ecrivains. Le docleur Democbares de iMoncby, morl en 1574, a Paris, inqiiisitenr de la Foi, a public dans son livre De sacrificio Missce, les lai)letles ecclesiasiiques de I'eglise de Reims. II y reconnail que saint Sixle a eie envoje par sainl Pierre, el il declare lenir ceile opi- nion d'un savanl preire de I'arcbidiocese de Reims. C'est encore la nne preuve qn'au xvj" siecle, I'eglise de Reims croyait a son origine aposiolique. Mais a la meme epoqne, cclte opinion elail senle admise a Rome el par I'univei'saliie des eglises de France; cela csl facile a prouver, puisqu'ellc se Irouve consignee a la fois dans le niariyrologe de Raronius el dans le mariyrologe gallican. On lil dans le premier, qui s'appuie sur ranlorite d'Usuard ei d'Adon : « Aiix Kniendcs de Sepiembre. — A Reims . dans la Ganle, leie de sainl Sixle, disciple de sainl Pierre, apolre, qui, consacre par lui cveque de ceiie \ille, rc^ul sons Neron la conronne dn marivre. (I) Idem ecu vpliislale robusUim, araplectunmr TieviroriJm, quas appellanl gesta, quorum auclo:es diserte mcmorani, Sini- cium Rhemorum, Memraiura Catdlaunensium.Clemcntem Mcdio- maliicoriim , MansueUim Leucorum ad liuchaiii societalem , aposloli Pelri jussu, aggrrgalos, codcm omnes Icmpore >L'riisse ill (lallias XXVI. 24 — ;)3o — « Usnard ci Adon en parlonl a la memedale. Les lables de I'eglise de Reims qii'a reproduiies Democha- res detTioiilieni qu'il fill le premier eveque «le celle ville, el c'est cc que prouveiil Usuard el plusieurs aiilrcs (I). » Le maiiyrologe gallican dil a son lour: « Kaletides de Seplembre. — Ce joiir-la, a Reims, fele (les sainis Martyrs el ponlifes Sixle et Sinice , apoues di' la Gaiile Relgiqne seconde. Ces personnages, Rorn;iins d'origine, fiirenl envoyes de Rome par sainl Pierre avcc sainl Memmie , el , arrives dans ceile me- iro|)ole sons les auspices dn Christ, ils y planlerenl les premiers irophees dn Redempleur. De la, s'elanl diriges snrSoissuns, ils iniiierenl ce peuple anx mysleresdela Foi. Sainl Sinice ful eiabli pourpromier eveque de celle ville par sainl Sixie; sainl Sixie revini ensuiie a Reims 01 s'efTorca d'en bannir les snpersliiions paiennes, deiruisii I'S lemples, el baiii nne pelile chapelle pour !a celebraiion dos disins oflices. A|)res avoir accompli pcndani dix ans celle lache aposloliijue , desireux de subir la mori pour le Seigm'iir, il snccomlia marlyr aprcs nn glorienx combal C^). » (1) Kalocdis sjeptmnb. Rheiiiis in Gallia, saiicli Xysti, discipuli beali Pelii aposloli qui ab eo ejiisdcm civilatis episcopus conse- t-raUis, stib Ncronc inartyrii coioiiam accepil. Usuaiiliis el Ado de eodum, hac die. Hiinc fuissft priraura Remensis sedis episenpum labula; ejus ecclesiae quas descripsit Democharcs plane sfgiiiQcanl. Teslanlur id ipsum Usuardus el alii. (2) Kalendis seplcmbris. Ipso die, Rernis , nalalis sanclortim luarlyriiin pariteiqne poiilificiini Sixli el Sioicii , Galliae lielgicae secuiidae aposloloriira. Qui, palria loiiiaiii, cum bealo Meinniio Roma a sancto I'elro has in paries ablegali, hanrque MeUopolim, auspice Clirislo, adeunlos, IropL.Ta ijsus Rcdeuiploiis illic prima collocaveruiil. Hinc ad Sucssioncs digressi , populurn hunc fidei — 331 — Eu remonlanl le cours des sieclcs, nous ronconlroii& Hiigues de Flavigny, (jiii ecrii dans la Clironique de Verdun : « Le premier pasieur et apotro I'ierro dirigea snr la ville de Meiz sainl CJemenl , palricien de la repu- blique romaine. .... H eiivoya oiissi a Reims sainl Sixle el sainl Sinice, a Chalons sainl Memmie, et ii Treves el Cologne, saint Encliair*^ sainl Valere e( sainl Materne (1). » Au milieu du xiii° siecle , Vincent de Beauvais , le contemporain de sainl Louis, a racoiiic, dans les lermes qui suiveni^ la mission de saint Memmie : « Sainl Memmie, apres avoir etc beni eveque par I'apolre sainl Pierre (2), fui envoye dans les Gaules j)Our y precher la parole du Seigneur; il parlil done avec ses freres, sainl Denis, fulur eveque de Paris , el sainl Euchaire , eveque de la cite de Treves , sainl cliam sacramenlis iniliarunl. Cui civilali episcopus primus Sini- cius a Sixto apostolici muneiis coryphajo praefectus est. Turn Sixlus ipse Remis reversiis , civitalem hanc elhnicis spurcitiis prorsus expurgare insltlit, fana deslruxit, (Ediciilam divinis offlciis consecravit.... Cum aulem decennium aposlolico operi impendissct , cupidus exlremi pro Domino subcuiidi agonis post gloriosum cerlamen martyr occubiiit. (1) Primus pastor el apostolus Pelrus direxit urbi Meten- sium sanctum Ciementem, RomanaB reipublicae Palricium , suura vero discipulum.... Rcrais eliaui direxit sanctos Sixtum atqui! Sinicium , Catalaunis sanctum Memmium , Treveris quoque , quae et Metropolis cl una de primatibus Galliarum , et ei vici- nae Coloniae, saactos misit Eucharium, Valerium atque Malernum. (2) Sanctus quoque Memmius cum a S. Pclro apostolo in episcopura benedictus fiiisset, parlibus Galliarum verbum Domini prasdicandi gratia una cum fralribus ( sancto Uionysio , Parisiis future episcopo , et S. Euchario, Treviris civitalis episcopo et S. Sabiniano, civitatis Senonis futuro episcopo . et S. Sinitio, civitalis Suessioncnsis episcopo et aliis sex opiscopis , simul — 332 — Sabinieri, I'lilnr evfique de Sens, saint Sinice, eveque de Soissons , six autres cveques el le sous-diacre saint Domiiien » Les ados de saini Mansuil, eveque de Toul, rediges au x° siccle par le moine Adon , porlenl que saint Pierre envoya plusieurs apolres dans les Gaules, el ils ajouieni : fl Dans ce groupe so irouvaieni , nous n'en doutons pss, sauii Maierne , poniife de la cite de Treves, saint Sinico, eveque de Reims, Clemeni, Felix el Celeste, apoues de Melz, ei Memmius, eveque de Chalons (1). » Flodoard, qui a ecril de 919 a 966, nous apprend, dans son Hialoire de Veglise de Reims, que : « l,e prince ineine de TEglise de J.-C, le bienheu- reux apoire saini Piorro , ayanl ordonne saint Sixle archevequo, jugea a propos de I'envoyer dans noire \ille avec dos suflragants ; ii liii donna pour collabo- rateurs dans cillo province les hommcs qui lui olaienl necessaires: c'elaienl saini Siiiico, qui occupa d'abord le siege de Soissons, puis colui de Reims, el saint Memmio, eveque de Clialons (2). » eliam Doinitiano siibdiacono qui, quasi ex ulero, fralres in Ciirislo esse noscunlur ] Domino imperaul*" , direclus est. ( Vincent de Beanvais, Speculum hist., lib IX, cap. XIV. p. 339.; (1) Qui videlicet beatissimus pastor S. Petrus...., (lerfectissiuios qijosqi-e diviiii vcrbi praecones ordinavit, qui a se in Galliam dtrigendi.. . Galliaruia populos.... ad diviui cultus sacramenta provocarent. Kx hujus itaque numero rollegii beatuin Maleruum Treviricajcivitatis ponlificem , Remorumque sanctum Sinicium, Medioinatricorum vero Clementem, Felicem alque Celestem , Memmiiim aulem Catalann«;nsiuiu fuisse non dubitaraus. {Ada SS. die III seplemb., page 639 ). (2) Nee solum apud elhnicos tunc lempojis lanti habilum Hemorum pop.ilum, quin et apud primos Kcclesiae Dei propa- galores,. ataua per Evangeliura ia Christo palres, primiC hujus - 333 - AilliHirs, chanianl les Iriomphes du Christ er> Ilalie, il compie sainl Sixle. saiiil Sinice el snitil Memmie au iioml)re des disciples que les apotres on- voyereni dans les Gaules. Quorum profecli compeiimi hi in Gallias.... Sixius que iiosier, Memmiiis, Sinicius (1). A la fin (]u ix" siecle, Fotilqiies, archeveqne de Reims, allrihuaii aussi a sainl Pierre la mission de saiol Sixle: « Que voire Sainleie, ecrivail-il au pape Eiienne V (2), saclie que le siege de Reims a ete ho- nore par vos predeeesseurs au-dessus de louies les aulres eglises des Gaules, parce que le prince des apoires, sainl Pierre, a desiine a ceiie ville sainl Sixle pour ev6que. » provinciae nostrae sedis jionliflces constat semper honore deco- ratos ; adeo ul ijjse bealissimus EcclesijE Chrisli |)rinceps, Pelriis aposlolus, urbi nostra) bealum Sixlum a se archici'iscopuin ordi- naliiin , cum suffraganeoruni auxilio censuerit delegandum , idoneos ei ac necessaries in eadem provincia deslinans socios, sanctum Sinicium videlicet, Suessonicae sedis primo, noslruui postea pri)esulem,ac beatuin Meramium Catalauaica; urbis recto- re lu. (1) II faul reconnailre que dans un autre de ses oiivrages, Flodoard, inconsequent avec lui-menie, attribuait a sainl Clo- raent la mission de sainl Siste: Ponliflces el quinque sacral qui partibus orbis Mittuiitur conferre datis moderdnilna Icgis. Hie jubet insignis Diouysius effera Galios Corda pelat ; Chrislo Remensia iiioenia Xislus Praeparel; acquiret Catalaunem Memmius urbem; Eutropius sancto Sauctooas sancliat ore. (2) Sedem ergo Remensem notum habeat ab antecessoribus suis pras Gallicanis omnibus ccclesiis semper Tuisse honoralam> utpote cum primus aposlolorum Petrus prlmum desliiiaverit huic urbi sanctum Sixlum episcopum. (Apud Flodoardum.) — 334 — En 870, Noiker-le-Begue, ei en 830, Raban-Maur, dans leur mariyrologe (1), s'expriraenl ainsi en parlant (le sainl Memmie : « On lil de lui qno, ordonne eveque par I'apotre sainl Pierre, il fill envoye dans la Gaule pour preclier la parole de Dieu avec sainl Sisle, sainl Encliaire el sainl Denis. » Dira-l-on, comme les ediieurs de Dom Marlol, que tons les auleurs que nous venons de ciier ont copie ies legendaires el les mariyrologes, el qu'on ne irouve aucune Irace de ceile opinion au-dela du ix» siecle? Nous allons citer deux fails qui demonlrenl le con- Iraire : Le pape Leon IV esl morl en 847, longiemps par consequenl avanl Noiker-le-Begue. Or, I'empereur Lolhaire ayanl eu I'occasion d'ecrire a ce poniife en favour de I'archeveque Hincraar, gloriUail I'eglise de Reims pour avoir et6 fondee par sainl Sixte, disciple des apotres. Ce monarqiie pouvail, il esl vrai, avoir adopie I'o- pinion de Raban-Maur. Mais, a noire lour, nous dirons que Raban-Maur ne I'avail pas inveniee, el qu'il la lenail de ses predecesseurs dans I'abbaye de Fulde ou dans I'evecbe de Mayence ; el, en effel, elle exislait deux cents ans avanl lui. Nous allons en administrer la preuve. L'hisloire doit h Adrien de Valois de savoir qu'apres avoir cie exile en Anglelerre par Grimoald, maire do Palais, Dagoberl II, Ills de Sigeberl II, revinl en (1) Noil. August. In Gallia, civitate Calalaunis, deposilio sancli Memmii episcopi cl confessoris, de quo legilur quod a beato Petro apcslolo episcopus ordiiiatus, in Galliam, una cum sauclo Dyo- niiio atque Euchario, aJ praeJicandura verbum Dei fuerit di- rectus. — 335 — France, el qii'il regiia siir I'Aiisirasie de 674 a Q19. Valois av.iii retroiive liii-memo la irace de eel eve- nemenl dans la vie do sainle Salaberge, abbesse de Sainl-Joan de Laon, dans cello de sninl Wdfrid ci dans celle de saini Me i mie, premier eveque de Chalons. Dom Mabillon, a son lour, a recherche quil elail Taiiteur de celie \ie de siinl Menimie, el voici ce qii'il dil (1): (I) Quis aiictor velerem ilium libcihiin do vila S. Mcitimii scripseril, incerluni est. Aliiiaimus quiiloin, Allivillarensis prope Remos nionachiis, rogalu Theutloini Praeposili C;italaunensis, Telerem ac prope detritam dc saiiclo Meiumio srriplionem noyo stilo scribere aggressus est sub anno UCCCLWIll, quo anno, saiicli Meiumii corporis illalio sen clcvalio facta est At non videtur is esse auctor islius Memmiana; vilae, ex qua pro Dagobcrli resiitulione argunicntum desuuilinn est. Nam in codice Catalauncnsis ccciesia; , post duas sujieriores epislolas quas inJe exsciiptas babuin)us , intcijcclis Ibliis non paucis, habelur liber dc vita sancti Menimii, tjui in Galiiain a sanclo Clenienle missus scribilur. Eadeni, ut puto, vita legiti.r in ms. coJice Altivillarensi, incipieos ab his verbis : Iijitur cum baalus Clemens discipulos ad diversas provincias, etc. Quo in codice nulla de regis Dagoberti resiitulione. At -vero in exemplar! He- rovaliino, ex quo V. CI. Hadriauus Valcsitis lertium uiguiiienlum pro senlenlia >-ua de restilulo Dagoberto accepil, sancti Memnjii in Gallias niissio per sanctum I'elrum facta diciliir. Hinc persua- sum habeo, AlliTillarcnsis codicis ^criplionem de sancto Meuiinio lribuend3messe Alnianno,ejrisdem ccenobii monachu,qui Memmii missionem sancto Clen)euli polius, (|'jani sancto I'ctro adscri- bendam esse judicavit. Qua in re, velerera corrcxit auclorcui, qui paulo post restitutum Uagoberlo rcgnura scripsil, ut satis indieal agendo dc ipso Dagoberto, his verbis : « Poslquam lantis effalsit virtulibus, etc. » Haec verba auctorem ejus lemporis ajqualcm satis designant, non Almannum monuchum, qui annis ducentis a principalu Dagoberti remolus fuit. ( Mabillon, velera analectu ; torn, ii, pag. 94-95. ) 11 est I'achonx que I'abbe Arbelol n'ait conuu ce IctIo que par — 336 — « On no iioiiiTiiii iiuliquer avec cerliliido quel est I'anteiir ile ceiie vie de saint Mcmmie. » En 868 (lovaii avoir lien I'elevation du corps de saint Memmie; mais comme los mannscrils qui conte- naient sa vie avaieni vioilli et etaient presquc delruits, Almann, moine d Haiilvillers, pres Reims, s'irnagina, a la priere de Thendoin, prevoi de Chalons, d'ecriie sous une forme plus riouvolle la monographic de ce poniife. » Mais il ne paraii pas qu'il ait ete I'aulcur de la vie de saint Memmie ou Adrien de Valois a puise son argnmenl en faveu'r de Dagoberl II ; car, dans le ma- nuscrii de Chalons se irouve une vie de saint Memmie, qui nous le represenie comme ayanl ete envoye de Home par saint Cletncni. Celte vie, qui commence par ces mots : Igilur cum beatus Clemena discipulos ad diversas provincias, etc. . . ne contienl rien de la reslauration de Dagoberl 1". « Mais dans le manuscril d'Heroval, qui a scrvi h Adrien de Valois pour sa dissertation, il est dit au couiraire que saint Memmie a ete envoye dans les Gaules |)ar saint Pierre. » Ceci me persuade que la redaction du manuscril d'Haulvillers doii eire I'oeuvre d'Almann , moine de ce couveni, qui a prefere allribiier la mission de sainl Memmie a saint Clemenl pluioi qu'a sainl Pierre. » Sur ce point, il a corrige un vieil auieur qui vecul peu apres le reiablissemenl de Dagoberl II sur son Irone, comme on le voit par le passage suivant du manuscril.... I'e&trait tie Dom Riiinai t ; il n'aurait peul-eire pas designe saint Clemeut comme rauteur de la mission de nos -saints apolres. Voyez Dissertation sur I'apostolat de saint Martial, page 1C2. — 33Y — « Postquam tanlis elfulsit virtuiibu^ el miraculis » Dciis per servos suos daruilque , novissimo tempore » in anno secundo sub imperio Dagoberli regis (ipse » est qui post longam pressuram reversus est ad pro- » pria regna), in mense quinlo, in quinta die mensis , n secunda vigilia noclis, cum ei nocturnos fratres ce- » lebrantes adstarent » » Cps paroles desiijneiii clairciiieiil un aiileur ooii- lemporain ile Dagoberl, el iion pas le moiiie AlmaRii, qui vecul deux cents ans apres ce prince. » Ainsi, vers 668, au septiemk siecle, nous voyons I'eglise de Chalons fairo remonier son originc a sainl Pierre, el I'eglise de Chalons est conlemporaine de celle de Reims ! Apres celle dale il ne nous resle plus de prnive ecriie, inais des lors (pie nous irouvons la Iradilion solidemenl eiablie^& une epoqne si rapprochee, rela- livenient a nous, de I'origine de I'eglise de Reims, il fani admdlre (jue celle Iradilion esl conlemporaine de celle origine. « En offel, dil I'abbc Arbelol, quand on a des lemoignages anciens qui- eiablissenl qu'nne Iradilion a die reconnuc pendanl une serie de siecles, il teuflii qu'on n'cn irouve pas le cnmmcnceinenl pour supposei' avec raison qu'elle ey.i5.laii dans les siecles aulerieurs oil ['absence de documenls ne perniel pas d'en rechorchcr les traces : en fait dc Iradilion^ pos- session vaut titre (1). » Or, qui nous donnera I'origine de noire iradilion ? Qu'on nous permeite encore une reilexion : Par cela meme que I'auleur dc la vie de sainl Memmie a dii que ce conl'esseur avail eie envoye par (1) l/abbc Arbelol. Dissertation sur I'apostolal de saint Mar- tial, page :$;<. — 338 — le prince des apoires, le fait doii elre vrai. Supposons pour un inslanl que les egliscs de Reims et de Cha- lons n'aienl eie erigees qu'en 290 par ext>mple; notre auleiir ayanl ccril enlie 674 el 979, il ne resle que 400 ans d'intervalle entre Ini el le fondateur d'icelles. Nous admeitrons diflicilemeiil que, malgie la barbaric des temps, la ir.idiiion, du moment ou elle se propage dans nn corps consiilue, s'aliere au>si faciiemenl el au point de se fansser complelemenl. — Les ecrivains penvenl varier de saint Pierre a saint Clement, c'esl- a-dire pour une periode de 50 a 40 ans ; ils ne per- suaderont jamais a leurs conlemporains de reculer de 300 ans leurs originos. Nous n'avons pas epuise la lisle des lemoignages que nous pouvions invoquer en faveur de la tradition, mais nous croyons en avoir assez dit pour qu'd soil eiabli que, dans lous les siecles, el jusqu'a la fin du dix-huiiieme, il a exisle au seiii de I'eglise de Reims el dans les eglises voisines uue tradition qui fait re- monler aux temps aposloliques la mission de saint Sixle, de saint Sinice et de saint Memmie (1). (f)On lit dans \es Annales ecclesiastiques du diocese de Chaa- lons en Champagne, par Charles Rapine (Paris 1G3G, in-12 ; page 4 et suiv.) : .' Chaalons escheiit a sainct Memie aiiquel fiireiit aJioincts pour compagnoris et coadiuleurs on ce miaislerc, Uonalien diacro et Domitian sous-diacre Toiilc I'Eglisc advoue cctte verile, ctcclte mission de ce sainct eresque, imraediateracnt par sainct Pierre, puisqu'aii marlyrologe remain commente par le cardinal Baronius, au cinquiesme jour d'Aoust, feste de sainct Memye, TEgliso chanie : Catalauni in Gallia sancli Memmij civis Ro- mani qui a S. Petro illius civitatis episcopos consecrates popu- lum sibi commii'sum ad Evangelii veritalem perditxit. » L'auleur cite ici Flodoard et CoUcncTius {in Scholiis ad Flo- doardam), et il ajoiite les lemoignages q>ii suivcnt : — 339 -- Voila |)Our la premiere cJes opinions emiscs sur VOrigine de feglhe de Heims. La seconde s'appuie sur nn lexle d'Hincmar, ar- cheveqiie de Heims. On y lil que saint Sixte a ete envoye a Reims par un pape appeU Sixte; mais ceux qui a Joplcnl celie opinion ne sonl pas d'accord enlre eiix. Les nns croionl qn'il esl ici question de Si\te I", qui occu|>aii la cliaire de saint Pierre avanl Ic milieu dii u' siecle ; les anlres y voienl sainl Sixle 11, qui couronna par Ic marlyre, en 258, son couri ponlifical. Ce qui rend celle opinion digne d'allention, e'est que les Bollandisles se sonl [irononces pour sainl Sixle IF, que Ton assure avoir envoye plusieurs apolres dans » I'ierre de Nalalibus [in Cataloyo sanctorum, lib. 7, cap. 2b), Rene Benoist (en la vie de saint Clement euesque de Me(z). Azor (part. 2, Inst. moral. ,\\b. t.cap. 26),Pai)igarole (in £pito»ie tcnu' primi Annal Baron, ad aniiijiu Chrisli 4C), Bede, Usuard, Adon, les anciens breuiaires de Beauvais, au cinquiesine jour d'Aoust : Memmius Calalauniensis episcopus, nobilis Piomanus, a sanclo Pelro apostolo in episcopum consecratus. Demochares [lib. 2 de diuino Missa; Sacramento ): Memmius beati Petri discipulus, primus Cathalaunensis ei>iscopus. » Les anciens Breuiaires de Chaalons, en la legende de .icc coclcslis viliB de sedibus aUis Vola (Patrol, ibid. col. I2;ii j. — ,^56 — elle passa en Grece, die fut consignee dans les Menees, puis elle revinl en France , avec ce surcroit de lemoi- gnages, se [aire inscrire dans les Legendes, les Missels et les Breviaires. » Voyons ce que valeiU loules ces suppositions. En 82S, les eveques de France , reunis a Paris en synode, pour le culle des sainles Images, ccrivent au pape Eugene que saini Denis a ete envoje dans les Gaules par saini Clemenl (1). Or, Hilduin a ecril son livre sur Denis I'areopagite en 855, c'esi-ii-dire , dix ans apres. Mabillon a de plus fail observer qu'un grand nombre d'exemplaires des Acta primaria de saini Denis allribuent la mission de I'apolre de Paris a saini (ilemeul , el que les eveques Fran^ais croyaienl a I'exaciilude de ce fail longleraps avanl I'oeuvre des areopagiliques. Le souvenir de col'e mission elail rappele encore dans I'oflice que celebraienl les eglises de France au regne de Charles-lo-Cbaiive , el dans I'anliphonal Gregorien que ce prince fii ecrire en lellres d'or pour I'eglise de Compiegne. La premiere antienne des Vigiles esl ainsi congue : « Sanclus Dionysius, qui , iradenie beaio Clemenle, Pelri aposloli successore , verbi divini semina genlibus parUirienda susceperal. » Le 3™' r^pons dii premier noclurne porie encore ; (1) Nee Tobis laedium flat , si ostendeadam ralionem verilalis, veiifatcinque ralionis sedc Paulo longius serine protraxeiit,duiu - luodo linea verilalis quie ab auliquis Palribus nostris usque ad lios inflexibiliter ducta est, beato Dionysio scilicet, qui a sancto Cleinente , beaii Petri apostoli , in aposlolalu primus ejus suc- cessor exstilil, in Gallias cum duodenario nuraero primus prae- dicalor direclus , el post aliquod lemi-us una cum sociis , hue illucquc praedicationis gratia per idem regnum dispersis martyr coronatus est. ( Mabillon. Vetera analecla. Tom. I , pag. G3 , cd. in-8' de 1675.) — ?57 — a Bealissimus Dionysius , Chrisli marlyr, Iradonlc boalo riemenlc , paiiurienda genlibus semina divina suscepit. » II faut reconnailre que cet office a ele admis [tar I'eglise gallicane longlemps avanl I'epoqiie ou ecrivii Hilduin ; car, s'il avail file redigc par ce prelal , on y verrail le nom d'areopagiie qui ne s'y Irouve nulle pari. On lit dans le mailyrologe de Raban-Maur, ecrit a la meme epoquc : « In Parisio , passio Dionysii epis- copi el mariyris, Eleulherii presbyleri at Rustici diaconi; qiios reforunl a Clemenlc papa in Galliam ad prseilicandiim vprbum Dei missos el ibidem mar- lyrisalos. » Voila pour le ix* siecle. — Le vni* Ix son tour nous fournil deux amies precieuses. Le roi Pepin, dans son testament ecril en 768, constate aussi celte tradition : « Dionysius el stepo jam diclus Rusiictis et Eleutherius, qui primi post aposlolo?, sub ordinalione B. Clemenlis, Petri apos- toli siiccessoris, in banc Galliarum provinciam adve- neriint (!).>» Avanl lui , Tbeodoric de Chelles s'exprimait de la meme manieredans un diplome donne en 723 a I'ab- baye de St-Denis (2). (1) Doublet, Anliquitez de saint Denis, liv. in, chap. v. (2) Ergo dum et Omnipotens Paler, qui dixit de tcnebris lumen expendiscere , per Incarnalionis mystheria unigeniti fltii sui domini noslri Jesu Cbrisli, vel inluslratione Spiiitus sancti inluxit in corda sanctorum christianorura pro cujus amore et dcsiderium inter citerus gloriosus triumfus marlyrum bcatus Dionysius cum - sociis suis, Rustico et Eleotherio, qui primi post apostolos sub ordinalione beali Climenlis, Petri apostoli succcssoris, in banc Galliarum provinciam advcncrunt (Mabilion, De re diplomalica. lib. VI, p. 488) — Voyez Pagi, Critic, ad Baronnium. Tom iii, ad an. 834. — Pagi a denionlre, avec une force irrecusable, que — 358 — Gregoire de Tours (1) a foiirni un argumcnl aiix partisans dc Launoy , en faisanl remonler au icmps de Dece la mission dn premier eveque dc Paris; mais sa doclrine n'a pas irouve de nombreux partisans parmi ses conlcmporains, car, un siecic apres sa morl, I'opinion contraire elail admise dans Pabbayo dc St-Denis, donl Hilduin ne pril le gouvernemenl qu'au IX' siecle. C'esl cc que pronve le diplome de Theodoric de Chelles. Un poete, qui vivait dans le menic temps que I'c- veque de Tours, Forlunat, s'ecriait, dans une hymne ecrite en I'lionneur dc saint Denis : Fortcm fidelem niiliiem, Coeli seculum principem, Dionysium martyrem PIcbs cordc voce personct. Clcmente Roma prrcsule Ab urbe missus adfuil, Verbi superni seminis Ut fructus essel Gallic. On a cberche a contcster rauihenticitc de cette hymnc, el pourianl Hilduin a posilivemenl reconnu que Fortunai en etait Tauleur (2). Gregoiro dc Tours s'elait Irompe. 11 a prouve, de la maniere la plus ovidentc, que saint Denis a 6tc enroy6 dans les Gauies par saint Clement. Comment done les redaclcurs ilu Breviaire de Paris ont-ils pu meccunaitre I'autoiile do ses tiavaux ? (1) Histor. Franc, lib. i, cap. xxviii. (2) SctiolaslicissimusFoitunalus, hymnura rtiythmicaj compo- silionis de isto gtoriosissimo martyrc composuit,,in quo comme- morat eum a sancloGlemenle deslinatum. !« — 359 — Lc savanl P. de Marca a cie phis explicile encore (1). a Bedc el Usuard, ecril-il a Flenri de Valois, nous apprennenl que Denis a eie cnvoye dans les Gaules par saini Clement. Celle tradition, ils I'avaient cvi- demmenl puisee dans les anciens acles de la vie de saint Denis , dont le manuscrit a ele public par Frangois Bosquet, aujourd'hui eveque de Monlpellier. J'ai reirouve le nom de I'auteur de ceite vie dans un manuscrit de I'eglisc de Tours qui renferme les vies de quelques saints , et enlrc autres celle de Sainl- Denisde Paris qui a ete publiee comme je viens de le dire. Ccs vies onl ele ecrites par Fortunat. Ainsi, nous avons Fortunat, eveque de Poitiers, le contemporain de Grcgoire de Tours , qui reporlc saint Denis de Paris au temps ou vivait saint Clement. Cette opinion a ele suivie par les eveques de France dans la leltrc qu'ils ecrivirent au Pape Eugene en 824, el, fort du temoignage de Fortunat, je pense que c'est une faule de s'ecarter d'elle. » fl) Diony^ii Parisicnsis siiccodit vexata disputationibus gravis- simorum Tirorutu epocha; his stantibus a Gregorio, ct ad Decii temporn antistitem iilam dctrudetitibus, quo spes oinnisParisiea- sem Dionysiuiu cum Areopagita permiscendi abscindjiiir; illis yero contrario proposito, ad Clementein Romanum ejus missio- nem refereotibus. Sano a Clemenle in Gallias Dionysiuiu missuni fuisse Beda clUsuardus docent in suis martyrologiis. Quam tra- dilioncni cos hausisse certum est ex. aclis antiquis vitae S. Dio- nysii, qua; duduni ex mss. codicibus edidit V. C. et erndilissimus Franciscus Bosquetus , nunc mcritissimus episcopiis ccclcsiaB Monspeliensis. Nomen aucloris illiiis vite deprchendi in codice ms. Turonensis ecclesiae, qui complcctitur vitas sanctorum ali- quot a Forlunato descriptas, et inter ccteras, Dionysii Parisiensis illam quffi jam, ut dixi , edita est in publicum. Habemusergo FortuDatum Pictavenscm episcopum, ajqualem Gregorii Turo- nensis, qui Dionysii Parisiensis epocham ad tcmpora Clementit. retraliit. — 360 — Les nclos de saint Denis, ciios par dc Marca, ela- blissenl de la maniere la plus clairc que la mission do I'apolre de Paris a ele conlemporaine de celle de saint Salurnin de Toulouse el de saint Paul de Nar- bonne (i). On y lit : « Apres la passion salutifere de Notre Seigneur Jesus-Christ, commen^a la predication des apolres qui devait s'ctendre sur toutes les nations. Les apotres resolurenl de s'adjoindre des hommes auxquels lis ac- corderent les honneurs de I'episcopai. De cetle foule de confesseurs etait saint Saturnin, homme d'un me- rite digne de noire respect, et la ville de Toulouse se rejouil de Tavoir merile pour eveque. Par une grace semblable, le bienheurcnx Paul, eveque el confesseur, acquit h Dieu par son eloquence, la nrovince Nar- bonnaise. Saint Denis, qui, ainsi qu'on le rapporle, avail rc^u des disciples des npoircs le mandal de re- pandre chez les Gentils les semences dc la parole di- vine, se rendil a Paris. » Faut-il citer encore I'ancienne liiurgie de Paris, celle de I'abbaye de Saint-Denis, celle de I'eglise de Senlis, qui, loules , disent espressemeni que saint Denis a regu sa mission de sainl Clement ? La legende de sainl Saintin de Meaux, dont Hinc- mar fail mention dans une lettre a Charles-le-Chauve, (1) Igitur post Domini nostri Jesu Chrisli saluliferam passio- nem... apostolorum praedicalio genlibus profulura successit. Qui Tiris honorem decreveriint episcopalus adjungere... Ex qua lur- ba confessorum sanctum et venerandi merili Saturninum urbs Tolosana promeniisse gaudet episcopum ; simili oliam gratia beatissimus Paulus antisles et confessor Narbonenscra provin- ciam salutari acquisivit etoquio... Sanctus igitur Dionysius qui, ut ferunt, a successoribus apostolorum verbi divini semina gen- tibus eroganda susceperat, I'arisios pervenil. — 361 -- reprotldilc par Siirius, celte legende. disons-nons , fait remonter a saiiil Clement la mission de saint Denis, el d'anciens auteurs onl demonlre qu'elle est plus anciennc que Grdgoire do Tours (1). Celle de sainle Genevieve a cle cciite dix-liuil ans aprcs la mort de celle sainte (2), c'esl-h-dire vers I'an 530, plus d'un demi-siecle avani Gregoire de Tours . or, elle rapporle que saint Denis avail ele cons;icre et cnvoye dans les Gaules par saint Clement, disciple de saint Pierre (3). La legende de saint Julien du Mans, ecrile au iv* ou au \^ siecle, fail cgalement remonter la mission de saint Denis a sainl Glemenl (4). Rome a tonjours crn que sainl Denis de Paris eiait le nieme que sainl Denis I'areopagiie ; le martyrologe et le breviaire en font loi, el dos iravaux recents, ceux de I'abbe Rolirbacher enlre anlres, prouvcnl que son opinion est basee sur la veiiie. A plus forte raison pretend-elle que Tapoire de P.iris est un disciple de sainl Clement. Anssi, I'an 87*2, le pape Adrien II, en accordant a rompereur Louis 11 le corps de saint (1) Ungues Menard cite par le P. Botiavenlure de Sl-Ainablc dans son ouvrage sur I'Apostolat de saint Martial, 1. 1, p. 384. (2) Post ler senos nanique ab obilu ejns annos, quae ad des- cribendaiu ejus vilani , animum app'.iti. ( Vita s. Genov«fw.) Gap. X, n" 5l, apud Acta. SS. Tom. i Jan. p. 143. (3) Hie vero episcopus, in sexto a Parisiis milliario vitani finivit quia Cleiuentc cpiscopo, S. Petri discipulo, est in sacerdotium benedictiis, et ab eodem etiam dicilur in has partes deslinatns. (Ibid. Ch. IV. n" 14.) [4)Ut ci (ber.to CIcmenti), a sancto Petro, principe aposlolorum, injuuctum fucrat, supradictiim sanctum Julianum consecravit episcopiim, et in Gfiliiaj partes cum sancto Dionysio et reliquis sociis ad jir.Tdieamiiini direxit XXVI. 26 — 362 — Clemonl, poiir Ic placer dans un monaslere que ce prince faisait batir, disail que ce sainl ponlife avail clioisi Denis pour I'apolre de toiites les Gaules : Qui Romano; prwsideiis eeclesiw apostolum lotius Gallia Dionysium delegavil (I). A ces preuves, nous pourrions ajouler Odon de Beauvais (5), ecrivain du ix' siecle ; d'anciens acles de .-aim Denis, conserves a Angouleme , el ciies^ en 1051, au deuxieme concile de I imoges (3), le marly- rologe remain, Baronius el lout le groupe des areo- pagiliqiies, Meihode, patriarche de Conslaniinople (4), sainl Eugene de Tolcde (5), Taraise, patriarche de Conslaniinople (6). Simeon Melaplirasle el Michel le Svncelle (7), p:rmi Noikcr-le-Begue (8), Francon, ar- (1) Pagi, Crit. ad Baronium, torn, iii, ad an 834. (2) Voyez la Palrologie de Migne, lom. 12i, col. 1116 (3) Scriptura quw penes nos Engolismw de Dionysii gestis habelur. Ibi legitur ijuod Clemens quemdam Philisipum ordina- verit episcopuin et Hispauiffi deslinaverit ad praidicandum. Dio- nysio vero verbi divini seinina genlibus Iradidit eroganda; quem in Gallias misil, sociosque et Salurninuni, Marcellinum et Liicia- nura alque Rusticum cl Eleulherum adhibuil. Qui cum simul |icrvenissent a I portum Arelalensis civitalis , Marcellinus in Hispapiam abiit, Salurniniis autem Tolosam profectus est, et Dionysius cum Ruslico ct Elentherio Parisios adierunt. Lucianus Tcro presbyter ad Bellovaccusem profectus est urbem . (4) Beatus quoque hie Dionysius Crucis aratro ojare diffindens, Athenis Romam a coelesti divinaque volunlate per viam deductus venil.. .. Ipse cum sancto Lnciano, et sanclo Rustico, el sancto Eleulherioad urbem Parisios profectus est. ( Acta SS. Tom. I. Jan. page 461.) [h) Patrologio, lom. xxxtii, col. 402. (6) Apud Hilduinum, Prohgom, vitce S. Diomisii, X. (7) Nalalis Alexandri Uist. eccl. in Scec. I. Disserlatio xvi. torn. I, pag. 166. (8) Hie Athenis quondam philosoplius, el Areopagila diclus, Visital gcntcs procul habitanies et fcrocia rcgna Gallia;. — 363 - clieveque de Roiipn (1), En^e, arclieveqne de Paris (2), \Vand;»lherl, nioiiie dc Prun, dans son inarlyrologe en vers (5) . . . . Mais le pen que nous avons dil ne su(Iil-il pas pour demonlrer que la mission du premier cveque de Paris, sous sainl Clemeni, est une tradiiion conslanle, jmmemoriale el vraiment ancienne? § in. SAINT-THOPIIIME DAniFS. Objection. Si la seulc ressemblance des noms a pu [aire de Vevcque de Paris un discijAe de saint Paul, pourquoi ne pouvail-il pas en ctre dc mnne ailleurs ? Pourquoi saint Tiophime d'Arles nc serait-il pas celui que I'apotre laissa malade a Milet ? Si c'est une erreur de croire que sainl Troplilme d'Arles csl celui dont sainl Paul dans son epilre a Timoihec dil : « J'ai laisse Tropliime malade a Milel ; » cello erreur a oio pariagee par bien iles hommesdonl les noms oni une grande valour. • Raban-Maur, qui a ccril au ix" siecle el sur d'anciens (1) Nalalis Alexandri ioc. cit. pag. 167. (2) /liiieas, Parisiaccnsis uibis episcopus, quo primus praesedit S. Dionysius, a Paulo aposlolo Alheniensium consecrates episco- pus, sed a sancto Clemenle totius Gallix constilutus apostolus. [Patrologie, t. cxxi. col. 685.) (3) Dionysius, aelhereo qui splendet honore , Gallia doctorem, Paulo insliluenle, beatuin Quem meruit, gcmino comptum junctumque minislre- — 36A — i; ni;iri\roioge de sainl Adon , qui elail eveque de Vienne , dil, an 29 Decembre : « A Aries, jour de la naissance dc sainl Trophime , eveque el confesseur , disciple dos apolres Pierre ct Paul. » Sainl Adon vi- vaii en 839 (I). Trophime est qualilie d'eveque , disciple des apotres par le pelil mariyrologe romain, qui osl de 740 fS). En 440 , dix-neul' eveques de la |>rovince d'Arles (k'riveni au pape sainl Leon pour revendiquer les privileges que I'egiise de Vienne avail enleves a celle (1) Voyez la Iradiiction de celle vie dans les Monuments ine- dits sur I'apostolat de sainle Marie Madeleine, par I'abbe Faillon. Torn, li, col. 283, 284. (2) Baronii Annal ecdes. ad an. 32 n" 41. (3) Apud Arelalem, Natale s. Tiophimi , cujns ineminit Pau- lus scribcns ad Timolheum, qui ab eo apostolo opiscopns ordina- lus, praefatae urbis irimus ob Chrisli Evangeiium prffidicandiim direclus est [Martqrologe, page 773.) (4j Item apud Arelalem , Nalalis saucti Trophimi , cpiscopi el confessoris, discipuH aposlolorum Petri et Paiiii. (6) Page 38. — 365 — melropule. « Tonics los provincos de b Gaiilc (I) savent, disenl-ils, el la sainie Eglise romaine no I'ignore pas, que la cilcd'Arles esila premiere ville lie la daiile qui ail iiierilc (!<; reccvoirpour i-oniife saii)! Trophime, envoye par le bienlieurcux apotresnint Pierre, el que, de la, le don de la Foi s'esl repandu pen a [)eu dans les aulres provinces des Gaules. » En 417, le pape Zozime avnii dej;"! dil de sainl Tropliime (2) : « AssuremenI , il ne fani poini deroger a ce ()rivilegc do la villc meiropolilaine tl'Arles , vers laquellefnl envoye en premier lieu I'cveque Trophime, source premiere de laquelle loules los Gaules onl regu les ruisseanx de la loi. » II esl vrai que Gregoiro de Tours a oltsciirei la quesiion en preieiid.ini (jue la mis ion de sainl Tro- .phime dalail du in" siecle : nous avons dejh cilc son lexle ; mais nous croyons devoir le rrproduire ici (5). « Sous Dece, dil-il, sept liommes ordonnes eveques furenl envoyes dans les Gaules, commo le raconle I'hislpire de saini SaUirnin, mariyr. Elle dil en elTel : « Dece el Grains 6lanl consuls, coin'me on s'en soii- » vienl par une iradiiion fidele, la cile de Toulouse (1) Omnibus cliaiu rogionibus gallicanis ooluiii csl , sed isec sacrosanclsB Ecclesiae Roraanae babctur incogniliim, (HioJ jiriiiia intra Galiias Arelalcnsis civitas missuui a bealissiiiio t'clro apostolu sanctnm Trophimum habere raeniil saceiiioiem , ct exinde aliis (laulalim regionibus Galliaiuin doniim lidei el leli- gioiiis infusuiii. ( Labbc, Conciies, Tom. I , page 1603. ) (2) Sane qiioniam niolio|.olitana; Aielalen.sinm mbi velus pri- I'ileglum minime derogandiim esl , ad quam priniiiin ex bac sede • Trophimus siimraiis antistes , ex cujus Ibiilc lolsc Galliae fidei rivulos accepeiunl , directiis est. ( Siiinoiid , Concilia antiqua Gallic, ed. 1G21J. Tom. 1,42, 'i3. ) (3) Voyoz i>agc 22. — 360 — » legul pour premier clicf sainl Salurniii. Voici ceux » s; d'aulres iravcrsenl I'Ocean el abordenl les iles qu'on appelle Britanniques(2). » Sainl Pierre nous apprend lui-meme (1) Page 1 64. (2) Al vero apud omnes nuiucii Jcsu praeciicare, acliiiiiabiliaqiie ejus gesla, et in iiibibiis et in agris doeere ; et alios qiiidcra eo- rum, iinperinm Roiuanutn, ipsamque omuium urbiiira rcginam invadere ; alios Pcisarum rcgiiuiu, alios Arnieniormii, Parlhoiuui alios nalioncrr. ; ilem alios Scylharura, quosdam eliain ad ipsos orbis terra? voiiisse fines, Indoniniqiio rogionc.s pcnolrasse ; alios — 370 — qu'il sc [iroposaii de pousser ses conqueles ovaiigo- liques jusque dansles Espagnes (1). Peul-on admoUre, sans lomber dans I'absurde, qn'il ail neglige d'envoyer des disciples dans las Gaules ? Sainl Isidore de Seville, qui vivail sur la fin du v« siecle ou au comraencemenl du vi*, nous dil: « Phi- lippe a preche le Christ aux Gaulois et conduit a la lumiere de la science et au port de la Foi les nations barbares, voisines des lenebres et perdues dans I'Ocean agite (2). » Les eglises de la Grande-Breiagne admcilenl aussi d'un consentemonl unanime que I'apolre saint Philippe est venu leur annoncer I'Evangile (5). porro trans Oceanum evasisse ad eas insulas quae Brilannicae vocantur. (EusfeBE, Demonslr. Evangel. Tom. in. Cap. v, ed. de Paris, 162R, page 111.) (1) Ad Romanos, xv. 24. (2) Philippus Gatlis prajdicat Clirisluiii, barbarasque geotes, Ticioasque tenebris cl lumenli Oeeano conjunctas, ad scientiiB lucem fldeique porluni deducil. ( De vita et morte Sanctorum, page 74.) (3) Sed quoniam hunc apostolum Gallis quoque lum Baronius, turn, eo duce, alii sublrahere conanlur, narralioacm islam ad Galalas asialicos Iraducendo, non pigebit viri eruditissimi, licet e novalorum grege, Usserii Armachani yerha hie transcribcre e capile seeiindo de antiquitatibus ecclesiarum Brilannicarum : « Quod auteni dc Philippi in Gallias apcstolatu habet Freculfus a Malmesburiensi citatus, ex Isidori libra de Patribus utriusque Testatncnti, cap. LXXIV, ad verbum expressit. Apud utrumque enini legimus : Philippiira Gallis prajdicasse Christi.'in, etc.... Neque hie tnihi Baronii conjectura placet, Isidori ista a Gallis nostris ad Galatas Asinticos Iraducentis ; multoque minus nuperi operum Isidori editoris Jacobi Breulii temeritas, Galatis pro Gallis in ipso textu {nine ulla veteris lectionis commemoratione) reponentis, nam pvoilcrquam quod Isidorus in hoc ipso opere cap. LXXXII.et in officio Tolelano {quod Gothicum. et Mozarabum vulgo appeUatui),itemquc JuUanus Tolgtanus archiepiscnpus in — 371 — Mais si cc fail osi vrai , sainl Philippe a du ira- verser la secotulc Belgiqiic pour sc rcndre a Gesso- riacum (1), port ordinaire de ceux qui se dirigoaienl stir les lies Britanniques. Esi-il croyable qii'il ail par- couru celle conlree sans y laisser lomber la parole divine , sans allirer au raoins siir eile I'allention des apotres? Qui noCis dil que ce n'est pas sous son im- pulsion que sainl Sixte esl arrive a Reims? On se ligure generalemenl que Ics missionnaires envoyes par les apotres sonl partis de Rome sans but, marchant au hasard, guides seulemenl par I'inspira- lion divine. C'esl la une erreur prafonde. Quand on reunil les acles de piusicurs des premiers predicaleurs de I'Evangilo, on remarque des I'abord que cos saints missionnaires obeissaienl a une direction unique, qu'ils agissaienl suivant un plan bien arrele, con^u par sainl Pierre el developpe par ses succcsseurs, sainl Clement el sainl Anaclel. Du jour on le prince des apotres a etc choisi commela piei re fondamenlalesurlaquelle repose I'Eglise, de ce jour a delate ceite unite de vues, de prin- cipes, qui n'a jamais varie ni flechi depuis 1800 ans. Lc vaisseau de la Foi a en h lulier conlre bien des tem- peles ; les naulonniers qui le guidaient out eie parfois peu liabiles, ct cepei)danl il n'a jamais devie de la Nahum prophetam scribens, el Beda {vel quicunque auctor fuerit Colleclaneorum et Florum), PhiUppo Gn\\\am assigiiant: idemquc Gallis Cbristum prajdicavisse Icgitur in libello de Feslis aposlolo- rum qui in Ilieronipniano martyrologio ms. habetur (ex quo pleraque omnia in librum suum de patribus novi Teslamcnli transcripsit Isidorus), ilia barbarorum gentium Oceano conjunc- tarum mentio Europcoos Gallos, non Gallo-Gracos ab Isidorn intellectos esse salis cvincit. [P.dcMatcd,Ej>istulaad II. Valcsiuin a Baluzio cdila, Parisiis, mdclxix, page 427.) (\) Uoulogne. — 372 — roiile quo lui avaieiii iiidiqueo Ics apouos. Co n'osl cerles pas la la moiiidre proiive do la ciivinile de I'origine de I'Eglise. Saint Epiphane, nii vers 310 el morl en 40o, nous apprend (1) que saint Luc, en soseparant de saint Paul, son mafire, parcourut , par I'ordre de celui-ci , la Dalmalie, les Gaules , I'liaiie, la Macedoine , et qu'il s'altacha a y repandre les principes de la Foi. Des erudiis conteslent le fait, en disant que Ton ne salt ou saint Epiphane a puise ce renseignement. Ce systeme de denegaiion est en vcriie ires com- mode : Launoy I'employail ties souveni, quand il de- niait I'exaetitude d'une tradition agiographique ; ou bien il preiendaii que les instruments qui lui etaicnt presenles etaient irop modernes; ou bien , s'iis avaient une anliquile suflisanii' , il les disaii inierpoles par les nioines ; ou bien cufiii il preicndait que Ton ne savait a quelles sources les auteurs avaient puise. Mais en maliere de tradiiion, ce raisonnement pousse dans ses dernieres limites , conduit direclement a la negation des Actes des apolres, de I'Evangile ot memo de la divinite de Josus-Chrisl. C'est par une melbodo semblable que cerlaincs sectes protestanles do la Suisse et do I'Allemagne sonl arriveos a proferer cot horrible blaspheme que le Sauvour n'eiaii qu'un sage comme Platen et Socrale, qui avait re^u de Dion une plus grande somme de graces que les aulrcs hommos. Le doctour saint Epiphane a eie mcle d'une manierc intime aux luiies iheologiques de son temps ; il est all6 a Anlioche, a Cousianiinople, comballre Iheresie; il s'esi abrouve a loutos les sources du Chrisiianisme, fl) In Panurin , M ,■ cd. du P. Pelaii , icr>2. 2 vol. in fol. — 373 — il a eu onire les mains des oiivrages que nous n'avons plus , el nolammeni celui d'Hegesippe , qui vivaii de Ian 100 a \80 , el qui avail ecrit, sous le litre de Commenlaire sur les Acles des apolres, une vdrilable hisloire de TEglise (1). Saini Paul , dans son epilre a Timolhee , nous dit lui-meme qu'il a envoye Cresceni dans les Gaules. II esi vrai que les commenlaleurs soni parlages sur ce lexle. Les uns y lisenl Galatiam el veulenl qu'il y soil question de la Galalie orienlale ; les aulres , au contraire , prelendenl qu'il s'agil de la Gaule tran- salpine. La plus ancienno cl la plus vraie de ces lemons nous esi indiquee par saint Epiphane. Or^ ce docleur ecrit que ceux-la se trompeni qui interprelenl ce passage de sainl Paul, par Galalie, tandis qu'il faul I'enlendre par les Gaules. Eusebe, comme I'a Ires bien demon- ire Henri de Valois dans I'ediiion qu'il a donnee de ce pere, parle comme saint Epiphane. Theodorel, qui a mainlenu le mot Galalia dans le textc de sainl Paul, a prefere I'iippliqucr a notre Gaule plulol qu'a la Galalie. Ainsi, les anciens avaient la conviction que Cresceni, disciple de sainl Paul, a preche dans les Gaules. C'est I'opinion qu'onl suivie Rede el Usuard ,dans ieurs raarlyrologes (2). Or, qui empechc qu'a Luc el a Cresceni, ces com- pagnons assidus de sainl Paul, nous adjoignions saint Paul lui-meme? Cot apoirc, d'apres le lemoignage do (1) L'ouvrage d'Hegesippe exislait dans toule son integrile du leraps d'Eiisebe, de saint Jerome et de Georges le Syncelle, qui ecriTit de 700 a 800, et qui cite dans sa Chronographie d'aulres passages d'Hegesippe que ceux qu'a produils Eusebe. (2) Voyez Celiarius, Geo'jraphia antiques lib. 11. cap. iv. — 374 — sainl Hippolyte (1), dc saini Atlianase (2), de saint Epiphane (5), de sainl Jean Clirysoslome (4), de Theodorel (3), de sainl Cyrille (6), se rendil en Espagne apres sa premiere arrivee a Rome. II a annonce lui-meme son voyage aux Remains (7) : « Je vous verrai en passani, lorsque je me rendrai en Espagne.... Je passerai parmi vous, en me rendanl en Espagne. » Le pape saint Clemeni ecrivail de Rome aux ha- bitants de Corinthe, que sainl Paul , le heram de I'Evangile dans le monde eniier, a preche la justice a loute la terre, et s'esl transporte jusqu'aux dernieres limites de I'Occident (8). Sainl Jerome nous dii daus son livre des ecrivains ecclesiastiques (9) : « 11 faul savoir que lors de la premiere defense que saint Paul presenta de sa cause, ['empire de Neron n'etanl pas encore affermi, et ce prince ne sc laissanl pas encore aller a ces crimes (1) Opuscul. de duodecim apostol. Biblioth. veterum Patrum, Tom. Ill, page 2G5. (2) Epistola ad Dracontium, ed Bencd. Tom. 1. page 265. (3j Adversus hwres., lib. I, xxvii, edit.Petav. Tom.l. page 107. (4) In Math. Homil lxxv, ed. Bened. Tom. vi!. page 725. (5) In Epist. II ad Titnoth. cap. ult. (6) Catech. XVII. Bibl. vet. Pat., Tom. iv. page 510. (7) Cum in Hispaniam proficisci ccepero, spero quod praeleriens Tideam vos.... Per vos proficiscar in Hispaniam. {ad Roman, xt, 24. 28.) (8) Prieco faclus in Orienle ac Occidenle, cximium fidei decus acce|iil: totum mundum docens justitiam, et ad Occidentis ter- minum veniens. (S. Clement, ad Corinth. Epist. 1. cap. v.) (9) Sciendum autcm in prima satisfactione, necdum Neronis imperio roboralo, nee in tanta erumpente scelera quanta de eo narranl hislorise, Paulum a Nerone dimissum, ut Evangelium Christi in Occidentis quoque partibus praedicaretur , sicut ipse scribil in secuiida Epistola ad Timotheum. (Dc vir,ii Illustr. c. v. J — 375 — que lui leprochc I'hisloire, I'apolre ful mis en liberie par lui , afiii que I'Evangile ful preche dans le pays de rOccident, comme Paul I'ecril lui-meme dans sa seconde epilre a Tiniolh6e. » El dans un auire passage, ce pere s'ecrie encore: « Appele par le Seigneur, sainl Paul parcourut loule la surface de la lerre, el il precha I'Evangile depuis Jerusalem jusqu'en Illyrie, el de la jusqu'en Espagne; il fournil sa course depuis la mer Rouge, ou pluiol depuis un Ocean jusqu'a I'aulre Ocean, imiianl son mailre el le soleil de jusiice donl il esl ecril : « II part d'une exlreraile du ciel el il arrive jusqu'h I'aulre » exlremile du ciel; » en sorle que la lerre manqua sous SOS pas avanl que I'ardeur de la predication ne fit dofaillance a son zele (1). » Mais sainl Paul, en se rendanl de Rome en Espagne, a suivi celle voie qui allail d'lialie dans la Beiique, el qui, traversanl les Gaules, passail par Nice, Aries, ' Narbonne, Barcelonne On admellra difficilemeni , par consequenl, que sainl Paul^ si nrdeni a convortir les infideles, que sainl Paul qui s'ecriail : Vae milii , si non evangelizavero (2), ail parcouru la Province romaine, laline paries mceurs (I) Qui, Tocatus a Domino, effnsus esl super faciem universaB terriB, ut predicaret Evangclium de Jcrosolymis usque ad lllyri- cum, ct fcdiflcarct non super allerius fundaroeutum , ubi jam fiierat prsBdicatum ; sed usque ad Hispanias tenderet, et a Mari Rubro, imo ab Oceano usque ad Ocoanum cuirerei: imilans Do- minum suum el soleni justilia>, de quo legimus : A summo cwlo egressio ejus, et occursus ejus usque ad summum ejus, ut ante eum terra deficeret quam studium praedicandi. {In Amos, cap. t. Patrol. Tom. xxY. page 1043, 1044.) (2) _Nain si evangelizavero , non est mihi gloria; necessilas euim mihi incuinbil : Vae enim mihi est , si non evangelizavero. (Epist. 1', B. Pauli Ad Corinthios , ix, IC ) — 376 — el le laijgage, sans laisser dcrriero liii des oiivriors evangeliques. Ainsi , sans nous occuper du voyage possible de saint Pierre dans la grande Bretagne , voici trois apoires , sainl Luc, sainl Philippe el saint Paul, qui ont Ira- verse la Gaule el qui y ont installe leurs disciples. Eh bien , a I'aide de la tradition , on pcui deiinir le mandat qu'ils ont donne a sainl Crescent el en faire apprecier I'imporiance. On peut dire, en un mot, que saint Crescent, leur disciple, a ele charge de diriger les inissionnaires qui devaienl evangeliser I'Esi de la Franco moderne el les bords du Rhin superieur (1). Nous allons essayer de le deraonlrer. Schcepflin, dans son Alsalia Illuslrala, rejelle d'une maniere absolue I'aposiolat de sainl Maierne, premier eveque de Treves; raais, irop loyal pour nier qu'il y eut des Chretiens en Alsace des le n° siecle , il emel un sysieme particulier qui est specieux sur quelques points. L'Alsace superieure, le deparleinent actuel du Haul-Rhin , faisail alors panic de la Lyonnaise , dont Lugdunum eiait la melropole ; il suppose que les pre- miers eveques de Lyon, remplis d'une egale affection pour loules les parties de leur diocese, ont envoye en Alsace quelques prelres pour calechiser cette parlie de la Lyonnaise , el que ces prelres ont ires-bien pu se rendre dans le pays des Triboques, des Nemeies el des Vangions. Ce qui donne une certaine apparence de verile a ce systemc, c'esl qu'il exislait au temps d'Augusle des relations inlimes enlre la capilale de la (2) On comprend qu'il ne pouvait eire question, a celle epoqne, (I'envoyer des missioniiaires aux embouchures du Rhin et dans !a Batavie, pays occupes par dt-s peuplcs siuinades et prcsque sauvases. - ni — Raiiracie, Augusta liijuracoruni , aujourd liiii B.islor- Augsi , pros de Bale, cl Lugdiimim. Tonics deux oiaieiu des colonies romaines ; louli^s detix avaicni ehi fondees par L. Munaliiis Plancus, eel liommo a la fois si im- moral et si habile. Mais il y a qiielque chv-^se do plus plaiisitih^ encore. Une iradilion consianie de reg!is(! de Besan^on nous apprend que saint Lin est !e premier eveque de la Grande Seqiianaisc (1). Les Suisses revendiquent pour npolre saint Beatns, dont la vie a eie ecrite par Ic P. Canisius , de la socieie de Jesus D'un autre cote, la chronique de Mayence aflirme que saint Crescent a etc le promoteur de la Foi dan-> le pays des Mogunlions ; ct ceite tradition se retrouvo an seiii de Tcglisc de Yieiiiie. Ae pourraii on soutenir , sans clioquer en rien la vraisemblance, qu'une noiubrcusc cohorte de mission- naires, parmi le^quels on Cimipiera, entre aulres, Lin, Beat, \a!ere, Enchere, Malerne, etc., c^t pariie, sons la conduite de saint Crescent, [)onr exploiter lout le littoral du Rliiti, el que saint Crescent, apr6^ avoif echelonno ses co-disciples dans ces provinces , est revenu s'elablir a Vicnne (2). (1) Nous etabtirods plus loin cettc tradition. (2) Tenemus igilur a S. Scripluiis, Croscenlem , e Paul! apos- toli scctatoribus unum , Galliarum quoqiie apostoluiu exslitissc, quern Viennenses, uemine retuclanle, sibi vindicant. Moguntini aeque sibi longa jam tradiiione adsiruunl et ab eo deducla cpi.sco- porum siiorum seiie, quamvis interriipta, ul apparel, sextuni nu- meraat Martinuiu , Sardicensi Aggriptnensiquc concitio , aonis postea fere ducentis , siibscrij>tum. Sed el Iluperlus Tuilieiisis abbas, Coloniae pariler aposlotuni noo amblgit. Trevircnsi eccle- sia; Malernus a B. Pciro missus, haeredilalem pallii suis successo- XXVI. 27 — 378 — Tiop souvedi oil pcul invoquer coriire ranliquile que s'aiiribneiil Ifs eglises Ics lacunos qui cxisienl ilans le calalo;^ue de leurs eveques. Celle critique ne saurail alleiiidre les ilipl\qut's (Je la melropole des Allobroges, car sainl Adon, archeveque de Vienne, nous a Tail coiinailre les noms des premiers succes- seurs de saini Crescent. Zachaiie, dii-il, glorieux el saini vieillard, succeda a Crescent, el re^ui la coiironne du martyr sous Trajan (1); Martin, disciple des apolres, siegea h Vienne sous le menie empereur {1); Verus, autre disci|)le des apotres, ful le quatrieme eveque, el lieuril sous Trajan par sa doctrine el la confession de sa foi (3); ensuitc, saini Jusi , eveque de I'eglise de Vionue , se rendit ires illuslre par son marlyre (4). ribus dereliquit. Scd piimatum nielropotis (^olonia obtiniiil ; ea maxime causa , quia Crescens prcedictus Coloniw quoque apos- tolicam verbi Dei prcedicalionem primus iristituit. Si primus , ergo el ante Malernum , quem scilicet ielale prxTalcbat. ( j^gidii Bucherii Belgium Romanum , lib v. n" 14, page 153. ) (1) Sub quo eliara tempore ( Trajani ) , gloriosissimus senei Zacharias, Viennensis ecclesiaj episcopus , marly rio coroualur. (Adonis Chronic; Patrol. Tom. cxxiii , col 81.) (2) Terlius Martinus , episcopus el discipulus apostoloruin , Viennae resedit ( Ibid col. 82. J (3) Verus, Viennensis episcopus , qui unus foil de discipulis aposlolorum, Trajani Icmporibus doclrina el confessione fidei floruit. ( Ibid. col. 82. ) (4j Hoc ilidem tempore el Justus, Viennensis ecclesisB epis- copus , illustrissimus in confessione e&.slilil ( Ibid.) — 379 § V. EGLISES DE LYON, D AiniN, 1)E LANGUES, DE CIIAL0NS-SU1\-SA01NE, DE MACON, DE VALENCE, DU VIVAHAIS. L'origine de I'eglise de Vienne elani bien elablie, nous pouvoDS nous permellre quelques hypotheses sur I'anliquile de celle de Lyon. Gregoire de Tours a dil que saint Pothin en ful le premier eveque; mais nous avons dejit vn, el nous verrons encore que eel ecrivain csl pen exact dans beaucoup d'occasions. Ici encore, il est perrais de douler de sa parole. La lellre que ies egliscs de Vienne el de Lyon ecri- virenl aux eglises d'Asio , represenle saini Poihin comnie un vicillard de plus de 90 ans; il ful mariyrisd en Tan 177 ; il etail done ne vers ran87, et Ton peul admellre qu'il esl venu dans Ies Gaules pendant le premier quart du iV sieclc. Done, en le considerani comme le premier eveque de Lyon, celte eglise auraii deja une anliquite fori respectable. Mais en esl-il bien le premier pasieur? Non seulement nous en doulons, mais nous osons meme nous prononcer pour la nega- live. En effel, la lellre que nous venons de ciler ne lui donne pas le litre de premier eveque ou de fonda- leur de son eglise ; elle dil simplemenl que le ministere de I'episcopat de Lyon lui elait confie, mais s'il avail ele le premier pasleur ou le fondaieur de celte eglise, Ies auleurs de celle lellre n'auraienl-ils pas fail con- nailre une circonslance aussi imporlanle? — 380 — On a cloja cssayc de repondre a cello objection, en disani que saim Poihin geraii a la fois les deux eve- ches; nr)ais dejh, a celie epoqne, il elail de regie que, hors le cas de necessile, un seul eveque u'admiiiistrat pas deux eglises. En admeliani meme celle hypoihese, on eul donne ;i Poihin le litre d'eveque de Vjenne, car celte eglise ciaii la plus ancienne, el elie esi ciiee la premiere en lete de la lelire a laquelle nous faisons allusion. Des I'epoque de son erection en colonic romaine, par Munalius Plancus, la ville de Lyon avail pris line grande imporlance. Comment les apolres qui vinreni dans les Gaules, el, apres eux, leurs disciples, n'au- raienl-ils pas songe a lui donner un pasleur particulier? On objecieraii en vain qu'il y avail nop peu de dis- tance enlre ces deux villes pour qu'un seul pasteur ne piil les adminisirer; chacun sail que Vienne el Lyon eiaienl sef aretes par une iuiinitic profonde, v\ que d'ailleurs elles n'appartennienl pas a la ni6aie province. Or, le premier soin des apolres fui lonjours de placer dos eveques dans les melropoles; c'est ce que repelaii encore Hincmar an ix'' siecle (1). On a dil encore que sainl Poihin avail ele envoye a Lyon par saint Polycarpe, eveque de Smyrne, dont il eiail le disciple el qui seraii ainsi le londaleur de Teglise de Lyon. Mais celle opini n a-i-elle un fondc- ment bien solide? Le doule est au moins permis; car Gregoire de Tours, de qui nous lenons le (ail, s'ex- prinie ace Mijei d'une maniere sii)gulieiernenl amphi- bologique : Bealissimus vero Irenoeua hujus successor (1) Voj'cz sa leilro ;'i Horiiisi lio L.tdii , !oni. ii de ses cnuvres eiJilees |>;ir Siiinond - 381 — marlijrh, qui a licalo Polycarpo ad hanc urbem di- reclus est, admirabili virlule eniluil. A quoi sc rap- porte ce qui : esi-ce a Ireneo, est-cc h Poihin? Nous (lisons, noiis, qii'il s'applique au second , car saint Jerome (lit, eti lermes fonnels, que saint Irenee elail disciple do sainl Polycarpo (1). Ainsi, I'egiise de l.jon eiaii I'ondee avanl (pfi! nc lui vinl d'Asie nn eveque pour Tadnninisircr. D'ailleurs, esl-ce sainl Polycarpe qui a envoyeson disciple a Lyon? Tout prouve au coniraire que saint Irenee no s'e,--i rendu en cetie viije que sur I'ordre dii sainl siege. Sainl Polycarpe a eie en relation directe avec le pape .^aint Anicei (X. de J.-C. 157, 168); il s'est rendu a Rome pour s'entendre avec lui sur le jour ou Paijues devaii elre cel6bre. Sainl Anicei elail syrieo denaissance; il connaissaii la siiualion florissanie des eglises d'Asie ; il savail que celles de I'Occidenl avaienl besoin de chefs; il est done nalurel qu'il ail demande a sainl Polycarpe quelques-uns de ses disciples pour les envoyer a Lyon el dans les environs? On dira peul-elre que ce n'esi la qu'une hypolliese? Nous le voulons bieu ; mais cetie bypoihese devienl certitude, lorsque nous voyons sainl Irenee lui-meme proclamer la preeminence de I'egiise de Rome sur loules les autres. « Nous pourrions compter, dit-d, ceux que les apolres onl etablis eveques dans les eglises el nommer leurs successeurs qui sont veinis jusqu'a nous Mais.... il sulfit de dire que Feglise de Rome, la plus (1) Constat autem Polycarpi.... Ireua;uin fuisse discipiiluna. (Saint Jerome, lorn, iv, pag. 112. edit, des F^enedictins, nOG.) — 382 — grandc, la plus aiicienne, la plus cotinue de loules , el qui a ele fondee par les apolres Pierre el Paul, NOUS EMSEIGNE LA TUADITION QU'eLLE A RE<;:UE DES APOTKES. C'esl avcc celle eglise de Rome, qu'a cause de son excellence el de sa primaule, il esl necessaire que loules les eglises, c'esl-h-dire lous les fideles, soienl unis (1). » Plus lard, le pape saini Victor ayani condamne quelqucs evcques d'A^ie, a cause de leur opinion sur la celebration du jour de !*aques, saini Irenee lui ecri- vii plusieurs leiires, pour le prier de ne pas hriser irop facilemenl Tuniie de I'Eglise (2). Si I'eglise de Lyon devail sa naissance aux eglises d'Asie. son e\equc elevcrail-il si haul I'eglise Ho- maine, ci n'auraii-il pas defendu les prerogatives de celles qui avaienl ele son berceau ? D'ailleurs, I'eglise de Lyon proclaine elle-meme que saint Irenee a ele consacre eveque par le pape saint Eleuihero. Elle pretend que saint Polhin I'ayanl envoye a Roine[)Our solliciter ce poniife en faveur des eglises d'Asie que divisail le schisme des Monlanistes el des Calaphrygiens, saint Eleuthere le renvoya a Lyon (1) Quoniam valdo loogum est in hoc tali volumiae annume- rare omnium ecclesiarum successiones: maximse et anUquissimae, et omnibus cognitse, a gtoriosissimis Peiro et Paulo Komae fun- dalae et consUlutae ecclesiao , earn quam habet ab aposlolis tradi- (ionem el annuntialam horainibus fldem Ad banc ergo ccclesiam propter poUoreiu principalilatem, necesse est omuem coQvenire ecclesiam , hoc est eos qui sunt undique fideles. (Saint Irenee, contra Hwres., 1. iii, c. 2, n. 2.) (2) Feruntur et aliae ad Victorem episcopum Romanum de quaesUone Paschae epif^lolae , in quibus commonet eum tton facile debere unitatem coUegii scindere. (Saint Jerdme, ibid.) — 383 — avec le litre d'evequc , des qii'il cut appris la mioiih , plusieius feniiiios clireliennes ; Talia dicenles el operantes, in inquoque quw secundum nos regiones Rhodonenscs , multas seduxerunt mn- lieres (I) Ainsi, h. peine coninienyons-notis ii inlerroger la iradition, (ju'elle tious montre Ic Cliristianismc pro- gressoDl a leavers les Gaules dans une majeslueuse unile. Coiilinuons nos etudes, el pins nous avancerons, plus nous reconnaiiroiis que Rome a erapreini son signe au fronlispice do tonics nos eglises , el que, semblublc a un soleil de jiisiice el de veriie, elle fe- conde el vivifie lout, des son auroie. § VI. Objection. Pourquoi y.aml Paid dc Narbonne ne scrait- il pas le proconsul Sergius Paulus que saint Paul convertit en Judee ? Personne n'a jamais souienu ridenlile de Paul de Narbonne avec le proconsul Sergius Paulus. Sainl Adon seul relate ceile circonsiance ; mais il a bien soin de la donner seulemenl comme une opinion qui avail cours de son lemps el qui esl independanle de la mis.sion de s;)ini Paul de Narbonne au premier siecle (2). (1) S. Ireiiaeus : lib. v, cap. ix , pag. 73. (2) Quern tradunt euindem ipsuin fuisse Sergiuiu Paulum Proconsulem , virum prudenlem, a quo i|>se Paulus sorlilus est noraen , quia euin fidei Christi subcgerat ; quique ab eodem sauclo aposlolo , cum ad Hispanias praedicandi gratia pergeret , apud priefatam urbera Narbonam reliclus^ praedlcalioiiis officio non se- guiler iniplelo , clarus tuiraculis coronatus sepelilur. (Adonis, Liheilus de festiv. Aposl. pag. 4C. ) — 385 — L^i^sons done de cole ceiie puerile ubjoclion, pour ne nous occuper que du temps ou sainl Paul precha la Foi a Narbonne. Cenx qui reporteni celte mission au in' siecle, n'onl pour appui que le passage de Gregoire de Tours que nous avons deja cile, el nous avons vu que ce Pere s'esi une premiere ibis iromj^e en parlanl de sainl Trophime. N'aurail-il pas commis une erreur sem- Mable dans le cas pariiculier qui nous occupe? Ce doulo etail dejh venu a la pensee des auteurs de \'Ari de verifier h's Dales {\): a Quoi qu'en disenl plusieurs savanis modernes, ecriveni-ils, il y a bien de I'apparence que c'esl a sainl Clemenl, el non a sainl Fabien, que i'on doit rapporier la mission des premiers eveques dans les Gaules , leis que saint Salurnin de Toulouse, sainl Galien de Tours, saint Denis de Paris, saint Paul de Narbonne, sainl Auslre- moine de Clermont, sainl Martial de UmoRes. » Aiissi , les aiiieurs de VHisloire du Languedoc , qnoique ires Cavorables h Gregoire de Tours, sont-ils obliges i.e convonir que saint Paul'de Narbonne peut avoir ete disciple des apotres. « C'esi, sans prejudice, (1) LArt de verifier les Vales, page 239 , ed. de 1778. — Ces auleurs odI mis par inadrertance saint Trophime d'Arles parmi les eveques envoy^s par saint Clement ; et, de plus, apres avoir dit que saint Gatien vint piobablcment a la fin du ler siecle et fut envoye par sainl Clement, ils ont ecrit, par oubli , dans Particle de saint Galien , qu'il avail ete envoye an m' siecle. Mais ce ne sont la que des erraurs d'inallenlion , puisque aux articles parli- culiers de saint Denis, de saint Salurnin, de sainl Martial, de saint Paul de Narbonne, on lit que tons ces eveques furent en- voyes a la fin du i" siecle par le paoe saint Clement. ( L'abbe Faillon , Monuments inedits sur I'apostolat de sainle Marie- Madeleine, torn Il,pag.Z69,Note li ) — 386 — disenl-ils, de I'ancienne iradition de Teglise de Nar- bonne, qui reconnafl pour son premier eveque, Paul, disciple des apolres, lequel peul avoir eie envoye dans les Gaules longlemps avant. (1). » Un aulre partisan de Gregoire de Tours, I'abbe Fleury, penche aussi pour I'opinion 6mise par AdoD, qui fail sainl Paul de Narbonne conlemporain des apolres (2). Le Pere Longueval, loul en disant qu'on peul ici encore s'en rapporler h I'opinion de I'hisiorien des Francs, se hale d'ajouler (3) : « Cependanl, I'aulorile des anciens mariyrologes nous empeche de nous pro- noncer si hardimenl. Comme nous avons monlre que le Chrislianisme etait etabli dans les Gaules des le premier siecle, il est assez nalurel de croire qu'il I'aura eie a Narbonne, qui elaii une vjiie des plus celebres ei ires connue des Romains, » La legende de saint Genou, ^ciile au milieu du x" siecle, dil que sainl Paul, eveque de Narbonne, ful ordonne par I'apolre sainl Paul (4). Ceite opinion a eie souienue avec energie par De Marca, dans sa lelire h Henri de Valois (5). Ce pr6lat ciie les paroles du mariyrologe d'Usuard oil il est ecril : « Sainl Paul de Narbonne fiii ordonne par Tapotre sainl Paul, qui le designa pour ponlife a celie ville. En allant precher en Espagne, il le laissa h , (1) Histoire du Languedoc, page 616. (2) Hist, ecclesiast, liv. ii, n° 7. (3) Hist, de I'Eglise Gallieane, loin. i. Dissert, prelim. [i] A beato quoquc apostolo Paulo Narbonensibus antistes or- diaatus Paulus. (Ada. SS. torn. ii. Januar. pag. 94. ) (5) Petri de Marca archiepiscopi Parisiensis, Dis$ertation9S tres a Stephana Baluzio editw, page 439. ( — 387 -- Narbonne, ci la, eel eveque mourul sainlement, apres s'etre acquiile avec gloire du minislere de la predi- cation. » A ce lexle, il ajoule celui de sainl Adon, qui donne a noire sainl le litre de disciple dcs apotres (1), puis un Ires ancien marlyrologe, edild par Rosweydt, el dont Teglisc romaine se servail au leraps de saint Gregoire-le-Grand, ou Ton relrouve encore la quali- fication de disciple des apolres (2). Pierre de Marca nous a fail connailre lui-raeme une vie de sainl Denis, qu'i! avail trouvee, sous le nom deFortunat, dans un vieux manuscrit de I'eglise de Tours, el il y esl dit que sainl Paul etait du nombre de ces hommes choisis ausqu Is les apotres confererenl la dignite episcopale (3). A ces temoignages, ajoutons : i° ki legende de sainl Ursin, publiee par M. Faillon, dans ses documents inediis sur Taposloiai de sainie Marie Madeleine ; 2° le document de I'eglise d'Arles, ecrii, comme la vie de sainl Ursin, au vi° s'^cle , qui a eie decouvert par ce savant ci que nous avons donne a propos de saint Denis; el nous verrons s'accroiire el se corroborer la masse de preuvci qui plaidcnl en faveur de I'apostolal de saint Paul de Narbonne. Que deviennenl done I'auioriie de Gregoire de Tours el son texle errone en presence d'une masse si impo- sanle de temoignages ? (1) XIKal. April, in Galliis , civitale Narbona ; natalis saacti Paali, episcopi et confessoris, discipuli apostulorum. (2) XI Kal April Narbonae, Sancti Paul! episcopi. discipuli apos- tolorum. (3) Apostoli, electis viris Dei hooorem decreverunt episcopalem adjungere — ex qua coufessorum turba.... beatissimus Paulus antistes alque confessor Narbonensera proVinciam salutari acquisivit eloquio. - 388 — § VII. LAZAHi: ET SES SOEUIIS ONT-ILS FONDle; l'6GLISE DE MARSEILLE ? Josqu'en 1641, epoque ou Jean de Latinoy ecrivil sa disserlation De commentitio Lazari et Maximini, Magdalmce el Marihce in proinnciam appulsu, I'eglise de France toui enliere(l) avail admis sans conleslation, avec lout rOccidenl, I'aposlolal de saini Lazare el de ses scenrs on Provence. Ceile ptiblidiion produisilnn eflfei lei, les ecrivains ji qui repondirenl a Lannoy monlrerenl une faiblesse si grande, (pie les nouveaux lilurgisles el les agio- graplies qui ecrivirenl depuis, comme Tdlemonl (2), Fleury (5), Baillei (4), se crureni obliges de rejeler la iradiiion el d'adherer au senlimenl de Launoy. Leur esemple fill suivi par des hommes eminenls, comme Denis de Sainle Marihe (5), le P. Papebrock (6); puis par un grand iiombre d'auteurs erudils de Iroi- (1) Voyez : Breviarium insignis ecclesiae BUuricensis , 1587; f BreYiarium Remense, 1672 ; Missale Turonensej 1617 ; Breyia- rium insignis ecciesiae Senonensis ; Breviariiim magnum ad usumParisiensem, 1492; Breviarium Belloracensexivsaeculoexara- tum,Bibi.imp.n''1030; Breviarium ad osnm eccles.Eduensis, 1560; Breviar. aJ us. eccles. Atrebatensis, 1695; Spirense, 1507; Mogun- tinum, 1495; Colonieuse, 1625 ; Aurclianense, 1623; OfBcia propria insignis ecclesiae calhedralis CabiloneDsis, 1620 ; etc. (2) Memoir es , torn H. u" 8. (5) Hist, eccki., liv. 83. ch. 48. (4) Vie des Saints, 22 jaiUel. (5) Gall. Christ, torn. i. col. 299. (6j Acta sanctorum Bollandiana vindicata , page 273. — 389 - ;-ieme oii qiiairieme oiilrc, qui, par sysieme on par ignorance, se rcndircnl a I'opinion en credii. Mais, commc le fail ires-bien remarquer I'abbe Faillon, qui a ru Tlionnenr de rendro ii la iradilion allaqueelo lustie qo'clle merile : « Si la question pre- senie devuii ein; decidee |)ar voie d'auloriie, il ne parail pas qu'on dul se decider pour I'opinion de Lau- noy, malgre le irierite el le nonabre de ses partisans. Outre qu'on pourrail opposer autorile a aulorite cl critique a critique : Pagi a Tillemonl ; Baronius a Baillel ; le P. Alexandre a Fleury; le P. Lequien, dans VOriens christianus, a I'auteur du dernier Gallia Christiana ; le P. Sollier au P. Papebrock ; Bouche a Papon ; Trevet a Anquelin ; Jansenius de Gand, Meno- chius el aulres , a Dom Calmei, on devrait convcnir que si, en France, I'opinion de Launoy est devenue commune dans ces derniers temps, I'autre esi reslee commune parioui ailleurs , vi qu'avant Launoy elle etail meme universelle dans loule I'eglise laline, comrae les livres de Lefevrc, de Fischer el d'aiiircs en sont la preuve. « Mais le nombre ei I'autoriie de ces critiques Frangais sonl bien moins considerables qu'on ne le pense, si Ton refl6chit qu'ils onl tous embrasse celie opinion sans examen, les uns s'en elanl rappories a Launoy lui-meme, el les aulres a ceux qui I'avaienl deja suivic avanl eux. Tillemonl, celui tie nos cri- tiques qui a le plus contribue a accrediler ce nouvcau sysierae, n'en dil rien que Launoy n'cui (lit aupara- vanl. II le cite une i'oule de fois sur celie matiere, et, dans son texle meme , il renvoie le lecteur aux trailes de eel ecrivain qu'il nomme expressement. Fleury, a son lour, puise dans Launoy cl dans Tille- — . 390 — mont ; Baillel el Papebrock pronnenl pareillemenl Launoy pour garanl ; el entin , Chatelain , qui a forme I'opinion de lous nos lilurgisfes modernes , a lui-meme puise la sienne propre dans les auleiirs donl nous parlous (1). » Si la iradiiion de I'eglise romaine etaii seule a pro- clamer I'aposlolal de Lazare , de Madeleine el de Marlhe, nous dirions qu'il faui accepler cetle tradition; nous le r6pelons avec plus de force encore, lors- qu'elle s'appuie sur des preuves conlemporaines de I'exislence des saints, irrecusables par consequent. Ces monuments, I'abbe Faillon les a indiquesdans son travail si souvenl deja cite par nous, el il en a demontre la parfaiie autlienlicile. Comme nous ne pourrions qu'afTaiblir son raisonnemenl en le resu- mant, nous nous bornerons a reproduire le sommaire de ses preuves. 1° Nous donnons, dil-il, I'ancienne vie de sainle Madeleine ecrile au v» ou au vi" siecle, el qui con- firrae de point en point la tradition. 2° Nous produisons comme monuments plus anciens encore, divers lombeaux de la cryple de sainle Madeleine : d'abord celui de saint Maximin. Nous monlrons que ce lombeau confirrae la verile de I'ancienne vie el prouve que des les premiers siecles, el probablemenl avanl la paix donnee a I'Eglise par Constanlin, les Chretiens de Provence honoraienl sainl Maximin , leur apotre, comme I'un des soixanle-douze disciples du Sauveur. 3" A ce lombeau , nous joignons celui de sainle Madeleine, qui confirme aussi la verile de Tancienne vie, el qui prouve que d6s les premiers siecles de I'Eglise, les Chretiens de Provence croyaienl posseder 1) L'abbe FailloD, Docmments incdits , t. I, col. 358. — 391 — el honoraienl en ell'ei le corps de Sainle Madeleine, la nieme donl I'Evangile fait meniion. 4° Nous monlrons que longlemps avanl les ravages des Sarrazins en Provence, la sainte Beaume eiail honoree comme le lieu de la relraiie de sainie Made- leine. 5" Qu'avant les ravages de ces barbares, on hono- raii, a Aix, Toratoiro de saint Sauveur, coname un monument sanctifie par la presence de saint Maximin el de sainie Madeleine, et qu'en effet, c'est a ces saints apotres qu'on doii en atlribuer I'origine. 6° Que les actes du martyre de saint Alexandre de Brescia, en Italic, prouvenl que sous ['empire de Claude, saint Lazare etail eveque de Marseille, et saint Maximin, eveque d'Aix. 7° Qu'avanl los ravages des Sarrazins, le corps de saint Lazare, ressuscile par Jesus-Christ, etail inhume h Marseille, dans I'eglise de Sainl-Viclor, et qu'on est bien fonde, en ailribuant I'origine des cryptes de celle abbaye au menie saint Lazare, premier eveque de Marseille. 8" Que la prison de Saint-Lazare,- a Marseille, est un monument antique qui confirme I'apostolal et le mariyre de ce saint. 9" Que le lombeau de sainte Marlhe, a Tarascon, etail en tres grande veneration au v* el au vi^ siecles ; que Clovis I", elani atleinl d'une maladie, s'y rendit lui-m6me el obtint sa guerison. 10* Qu'av;ini les ravages des Sarrazins , sainie iMarthe eiaii honoree comme I'apolre de la ville d'Avignon. - 11" Que les deoieles au sujel de la primaiie d'Arles n'oni rien de ronlraire a I'aposlolat de nos saints, el —.392 - quo les arclieveques d'Arles, an lieu de reclamor rotitre celle meme croyanco, Too! cxpressement reciio oi conflrmee. 12" Que I'aposiolal de sainl Lazare, de sainte Marlhe el de sainte Marie Madeleine est confirmc par les plus anciens martyrologes de rOccideiil. 45" Qu'au commencemenl do viii" siecle, ies Pro- ven^aux cachereiu les leliques de lours saints apolres pour les soustraire aux profanations dcs Sarrazins, el mirenl dans un sepulcre , avec !e corps de sainte Madeleine^ une inscription de I'an 710. Launoy disait que s'il lui eiail produii un monii- menl ayant dix siecles d'exisletice, il lenoncer.iil a la discussion el se reconnaitrait vaincu. Les ocrivains modernes qui oni suivi sos errements, licndronl-ils la parole du maiire? § VIll. Objection. Les noms latins de Malernus el Marl/ialis nempecheront pas le premier d'etre le fits de la veuve de Nairn que le Sauveur ressuscita tout expres pour Venvoyer a Treves, et le second, ce petit gargon dont Jesus-Christ benit et multiplia les pains au desert, et qui vint plus tard rompre le pain de la parole aux habitants de Limoges. Conime la mission de sainl Malerne se ratlache d'une maniere intime a I'lusloire de I'eglise de Reims, nous reserverons ceite question pour en faire une etude speciale, el nous com j encerons noire reponse a I'objeciioii precilee en examinanl la dale de I'aposlo- lat de sainl Martial. - 393 - Mais a quoi hon (xM examcii, puisqde Rome? vient de prononcer ? Le 18 Mai 1854, Sa Saintoie Pie IX a rendu le ilecrel suivanl : Lemovicrn. ConGrmationis ologii et culms iii aposioli , quo sanclus Marlialis, primus Lpmovicensium episcopus, liaclcnus gavisus est ab imniemorabili tempore, cl ex constiiutioiiibus aposiolicis. Kcclesia Leuioviceusis in Gallia a remolissimis usque lemporihus culiu el elogio ut aposloli veneratur sancium Martialem, primum episcopum suum. In qua quidem cullus et elogii possessione immemorabili ut sanclus Marlialis per novam sancta; hujus aposlolicae Sedis declarationem confirmarelur , revorcndissimus Lemoviceii. episcopus obliuuii, ui in sacrunim Ritiuim congregalione, per eminoniissimum et reverendissi- mum D. cardinalcm Roberlum Hoberii, loco el vice eminenlissimi el revcrer.dissimi D. cardinalis Caroli Aloisii Morichini Poncniis designali, sequcns dubium proponerctur — an confirmari debeal elogium el rulius de quo agitur? — Ad quod quidem dubium protuen- dum cum undique caussje Paironus monnmonla cor- rogarii, ex Iradilione, el immemorabili possessione, ex provincialium conciliorum definilionibus, el apos- lobcis consiiluiionibus, iisdemque monnmeniis comma- nilus salisfecorit animadversionibus singulis a R. P. D. Andrea Fraliini, sanciae ddei Proraolore, prolalis, eminenlissimi el reverendissimi Palres sacris luendis Rilibus praeposiii, in ordinario coeiu ad Valicanum ha- biio, die 8 superiori inense Apriii, lioc ipso verlenie anno, super dubio ipso senienliam protulerunl. Quam quum ad sanciissimum Dominum nostrum Pium IX, XXVI 28 — 39i — Ponlificem maximum, fideliter de more relulissel R. D, infra scrip I lis secreiarius, Sanciilas Sua usque ad lianc diem menlem suam aperire distulil, ac landem rescribendum mandavil: — conslare ab immemorabili de Elogio ct de Cullu de quo agitur, — die ISMaii 1834. J. Card. Antonnelij, » Dom. Gigli. S. B.C., secretar. » § IX. SAINT SATURNirS DE TOULOUSE. Gregoire de Tours a dit, dans son Hisloire des Francs : « Sous le consulal de Dece el do Grains, commc on s'en souvieni par une iraditioii fidelc, la villo de Toulouse cominen^a a avoir !>aiiil Salurnin pour ev6que. » Mais on lil aiissi dans son livre De gloria marty- rum (\) : a Salurnin, martyr, a eie, dit-on, ordonnc par Ics disciples des apoires. » Cos deux endroits presenloni iine coniradiciion fla- granle. Le consulal de Dece el de Grains eut lieu I'an 280, el les disciples des apoires apparlienneni au premier siecle el h la [tremiere moilie du second. De ces deux versions, quelle esl la vraie? Gregoire de Tours I'ignore lui-meme, car loujours il (I) Salurniniis vcro marlyr, ul ferwit, ab apostoloriim discipu- lis rrdinaltis , in (itboin Tolnsalitira esl diierliis. ( De glor. Martiir. cxtviii . - 395 — piirle siir la foi d'auinii : comme on sen souvient par tine tradition, on dit, on rappoi le : ut ferunl ! Parnii les auleurs posicrieurs , ies ntis omI adopie la premiere tradilion, les aulres la secoiide. Au nomhrc des premiers, on compie Florus, n)oine deSt-Front ; saini Adoti (i) ; I'auieiir de la Idgeiide de saini Genou (2). Raban-Maur, K-s ncles de saint Dt'nis, ciles an deuxieme concile dc l.imoges (3), la legei'de de saini Marcel (4), Odon de Beauvais (5), Pierre de Nalalihus, oni adopie la seconde, que les auleurs de I'Arl de ve- rifier les Dates oni appuyee de leur sanclion (6). Enfin, celle qiieslion s'obscurcil encore par I'inler- vcnlion d'une iroisieme iradilion qui lait renionter I'aposlolal de saini Salurnin an lenips nienie des apolfcs. (-elte deniiere a pour docunienis principaux : la legende de saini Ot-nis, (|tie V. de Marca aitribue in Foriunal, conleniporain de Gregoirc de Tours (7); (1) Qui, tempore Uccii , ia capitolio ejusil«iin urbis , a paganis occisus. (Martyrol. 29 nov. ) (2) Marlyrol. Bedas , 20 nov. (3; Ipse vero Saturniniis , inarlyr, ut fcrlur, ab apostoloruni discipulis in urbem Tolosalium est dircctiis. {Martyrol. 29 dotJ (4) Salurninus el Dionysius , jiibenle sancto Clemente papa, urbis Romae, partibus Galiiarum, ut ad fidem cbristiaiiaiu gcnies instrueiiol, direcli sunt. (6) Patrologie, torn, cxxiv, col. ItlC. (6) Saint Saturnin , proiuier eveque de Toulouse, envoye dans les Gaules par le pape saint Clement, vers la fin du i" si.ecle. {7j Apostoli, elcctis Tills Dei disposilioue providenlcr honorem decrererunt episcopalem adjuugcre ¥.% qua confessorum turba sanctum et venerandi meriti Salurninuoi uibs Tolosana promeruisse gaudcl episcopum. ^ 39G _ d'anciens acles de saini Salurnin,ciles par de Marca (i); de vieux breviaires de Limoges et de Clermont ; les ecrils d'Adam d'Auvergne , de Bernard Guidonis el de quelques aulres ecrivains du moyen-age. Mais, en ponderant avec impariialiie ces irois tradi- tions, on truuxe : l^ que les deux premieres ont pour fondemenl unique Gregoire de Tours, qui s'e>l monlre sur ce point en opposition avec lui-meme; 2° que la Iroisieme s'appuie sur le sentiment d"un auteur con- lemporain de leveque de Tours ; 3o et qu'elle se rap- proche beaucoup de la seconde, car saint Clement est moDte sur le trone pontiQcal en 95 , el il est par consequent un disciple des apoires et un homme apostolique. Ainsi, deji nous pouvons dire quelle est la seulc admissible ; nous alloos demontrer quelle est la seule vraie. Reprenons le lexle de Gregoire de Tours. « Du lemps de Uece, sept personnages ordonnes eveques furent envoyes pour precher dans les Gaules, comme le raeonte I'hisioire du mariyie de saint Sa- turnin, car elle dit: « Sous le consulat de Dece el de » Grains, comme on s'en souvient par une tradition » fidele, la ville de Toulouse comuienga a avoir saint J) Saturnin pour eveque ; voici done ceux qui furent » envoyes : aux habitants de Tours, I'eveque Gaticn ; » h ceux d'Arle.^, I'eveque Tropbime ; a Paris, I'e- » veque Denis ; en Auvergne, I'eveque Auslremoine, B et a Limoges, I'eveque Martial. » Ainsi, point d'equivoque possible : c'e>t dans I'his- ioire du marlyre de saint Salurnin que Gregoire de (1) Petri lie Maic.i Dtsisertat. Ires, p.ige 117. — 397 — Tours a Iroiive le^ iioms ties sepi eveques. C'csl I'avcu que fonl le P. Longueval cl Tillemonl, on disani, I'un (1) : « Gregoire de Tours place celle mission sous I'empire do Dece , parce que saint Salurnin fonda le siege de Toulouse sous le consulal de eel empeicur ; ju le second : « sainl Gregoire de Tours voulant marquer le tomps de leur mission, n'allegue que ce qui est dit dans les actes de sainl Salurnin (2). » Eh bien, nous en demandons pardon a cesauteur;', la legende de sainl Salurnin ne parle en aucune ma- niere des sept eveques. Elle dii simplemeni : Sous le consulal de Dece el de Graius, comme on le sail par une iradilion lidele, la ville de Toulouse eul sainl Salurnin pour premier eveque. » Celle erreur de I'eveque de Tours avail deja (Vapp^ Dom fiuinarl (3). « Les acles de sainl S:ilurnin, dil-U, donnenl le lemps de sa mission dans les Gaules; mais lis soni mueis sur les eveques qui sonl enumeres avec lui el donl I'arrivee dans les Gaules esl reporlee k d'auires lemps par d'aulres auieurs. Cependani, Gregoire, qui a pense qu'ils elaienl. arrives en meme lemps dans les Gaules, a deduil I'epoque oil ils vivaienl de la dale ceriaine fournie par les acles de sainl Sa- lurnin. M D'ou provieni done celle inexacliiude de rbislorieo des Francs ? (1) Hist, de I'Eglise Gall. Tom. i. (2) Uemoires eccles. Tom i. (3) Acta S. Saturaini ejus in Gallias inissiooi!> tero|>useihiteu( ; sed nihil babent de cseteris hie recensilis, quorum in Gallias adventum alii aliis lempohbus assignant. Grugorius (amen, qui eos pulavit simul in Gallias acccssisse , ex certa epocha quae in aclis sancti Salurnini habetur, caelerorum eliam tempora deduxit. (Ruinar», in Gregorii Turonem.Histur. Franc. Lib. i. cap. iO.j i I — 398 — A M I'abbti Kaillon apparlieni I'honncur d'en avoir decoiiverl la source {\). Dans .'on livre sur I'aposlo- lai de saiiito Marie Madeleine, cc savanl a prouve que Gregoire de Tours n'avail en, pour composer ce qu'il rapporic de la mission des sepl eveques, que les acles de saini Saiurnin el ceux de saini Ursin de Bourges ; qu'il avail [iris de ceux-ci le nom de ces eveques, de ||| ceux-la la dale de leur mission.- Apres avoir explique commeni il a relrouve les actes de saini Ursin dans on manuscril apparienanl a I'eglisc de Saini Germain, il ajoule: « "Void ce que nous lisons dans ce mouuinenl precieux : « Saini » Ursin fut envoyc de Rome par les SS. apolres , » avoc pliisiciirs compagnons, qui sonl : saini Denis » de Paris , saini SaUirnin de Toulouse, Trophime » d'Arles, Paul de Narbonne, Marlial de Limoges, » Ausiremoine d'Auvergne, el I'cveque saint Gaiien. » » Or, Gregoire, qui avail sous les yeux les acles de saint Ursin, y a puise le denombremenl qu'il fail des sepl eveques. Mais, sachanl que saini Denis n'etail venu a Paris que sous les successeurs des apolres, il a dii inl'crer de la que I'epoque assignee par les acles de saini Ursin a celie mission etail faulive ; lisanl ensuile dans les acles de saint Saiurnin, que celui-ci avail soufferl sous Dece, il en a conclu que I'empire de ce prince etail la veritable dale de cetle mission.... Ainsi, il a pris des acles de saint Ursin le denombre- menl des sepl eveques, el de ceux de saini Saiurnin, Tepoquc do leur mission. » M. I'abbe Faillon a allegue a Tappui de cetle asser- (Ij Voyez Monuments inedits sur I'aposlolal de sainte Marie Madeleine, torn, ii, col. 370, sv. ~ \m li — 399 — lion (les (iioiives (Jus iliredes encore. Noire premiere pensee eiail de les reprodirire ici ; mais, outre que le cadre qui nous est irace s'y oppose imperieusemeni, nous croyons rendre service an lecteur en rengageanl a les lire dans le travail de ce savanl (1). Enlin, il esi un autre monun)eni qui presenie loute rauiheniicite desirable; ce nionunienl csl nn manuscrit du X® siecle, copie lui-meine sur un autre du vi*; il a apparlenu autrefois ii I'eglise d'Arles, el il se trouve aujourd'hni , sous le N° 5557 , a la Bibliotheque im- perialc, ou M. Faillon a eu le bonheur de le decouvrir. On y li'l : 0 Sous Claude, saint Pierre, apoire, envoya quelques disciples dans les Gaules, pour preclier aux nations la Foi de la Trinile. Ces disciples, a cliacun desquels il designa une ville, furent : Trophime, Paul, Martial, Auslremoine, Salurnin, Galien, Valere, el plusieurs auires qui leur furent adjoinls par le bienheureux apotrc (2). » (1) Monuments inedits, Tom. xi, col. 415, 414, st. (2j De septeui viris a beato Peiro aposlolo inGallias ad praedi- candum missis, tempore Neronis : Sub Claudio, S. Petrus, apostolus, qoosdam discipulos raisit in Galtias, ad praedicandam geolibus fldem Trinitalis; quos discipu- los singulis urbibus delegavit. Fuerunl hi : Trophimus , Paulus , Marlialis, Auslremonius. Gatiaous, Saturninus, Valerius el plures alii qui comites a beato apostolo iilis destittali fueraut. ( L'abbe Faillon, loc. eit. col. 375 ) Le manuscrit ou celle piece importante , dil ce sarant , est consignee, appartenait autrefois a I'eglise d'Arles. C'cst un re- cueil de tous les litres relatifs a la primatio de ce siege, fondee sur I'apostolal de saint Trophime, envoys par saint Pierre. On y voit lesleltres dessouTcrains ponlifesZozime,sainlLeon, Hilaire, Gelaso, etc — Ce manuscrit, qui est du x.» siecle, parait avoir el6 transcrit sur un autre plus ancion , el il est a remarqncr quo Ic - /lOO — Cerios, ce lilrc csl irrefragable. II reprocluil lous les noms doiines par ia legende de sainl Ursin, plus celui de sainl Valero ; el notis monlrorons plus lard que non seiilemenl sainl Valerea ele cnvoye a Treves avecses compagnons, Maleroe el Euchere, mais encore que la iradiiion I'a lionore du nom de disciple de Je- sus-Christ. Nous somincs done convaincii, comme I'onl eie les auleursde VArl de verifier les Dates, que sainl Salur- nin, premier eveque de Toulouse, a ci6 envoye dans les Gaulos par les apoires. SAINT ALSTIIEMOINE DE CLERMONT. — SAINT GATIEN DE TOURS. II seinbleniil naturel de conclure des lexles qui precedent, que sainl Auslremoine el saint Galien sonl arrives, I'un a Clermont, I'aiilre a Tours, aux lemps aposloliques; mais ici encore on se Irouve arreie par Gregoire de Tours, qui revel, pour ce cas parliculier, line auiorile speciale. Gregoire claii originaire du |»ays des Arvernes. It moDumcnl doiil il est question , sy Irouve place eulrc les lettres du pape Pelage a Sapaudus, ereque d'Arles , et celle de Saint Gregoire -le-Grand a Virgile; elqueces dernieres onl eleajoulees au manusciit par une autre main. On pent done pensor , avec beaucoup de vraisemblance, que celles-ci ne se trouvaient pas dansle nianuscril plus ancien , etqu'ainsi, la piece dont nous parlons, aura ele iuseree dans ce recueil avant la reception des letlres de sainl Gregoire, cest-a-dirc vers la On dn vr sieole., puisque Sapaudus mour%it en 58G. — 401 — esi devenn eveque de Tours. II a du connailie inii- merneni et I'hisloire de I'eglise des coniiees qui I'ont vu nalire ol celle de I'eglise qu'il adminislrail. Or, il dii de saini Austremoinc, qu'il ful envoye a Clermont, par les ev6ques de Rome, avec les aulres mentioonos plus haul (1), c'esl-a-dire sous Ic consulal de Dece el de GralHs; el de sainl Galien, qu'il fiit designe la premiere annee de I'empire de D^ce par le pape du siege remain. Malgre le vague de ces formules, Pierre de Marca, Noel Alexandre n'onl pas ose conlredire eel his- lorien siir ce point, ailendu, disent-ils, que eel eveque avail sous les yeiix les Dypliques de son eglise el qu'il devail avoir recueilli les iradiiions de celle-ci. Cepen- danl, apres la publication faiie par M. I'abbe Faillon, dela legende de sainl Ursin el du document de I'eglise d'Arles, on est plus que jamais dans le droit el dans le devoir d'exaininer si cette opinion de I'eveque de Tours s'appuie sur un fondement bien solide. CommenQons p;ir saini Galien. Gregoire de Tours a dil de sainl Galien, qu'il avail gouverne cinquante ans, el que, apres sa mori, il yeul une vacance de trenle-sepl ans (2) , jusqu'ii Lidorius, qui ful eveque dfes la premiere annee du regne de Conslanlin (513) el qui ful le predecesseur de sainl Martin (5). (1) Ipse Stremonins a liomauis episcopis cum Gatiaiio bcalis- simo el reliquis qiios meinoraTimus est directus. ( De Glor. Confessor cxsx. ) 12) In hac urbe sub tali coaUitione, ut ferunl , aunos quinqua- gintacommoralus, obiit in pacc,cl sepultus est in ipsius vici cce- mitario , quod erat christianorura ; et cessavit cpiscopatus triginta scptem aniiis. (3) Secuudus, anno imperii Con-lanlini priino , Lelorius ordi- — /i02 — En (J'aiilres lermes, selou noire hislorien , il n'y aurait eii, enire sninl Galien el saini Maiiin, qu'un seul (iveque, saini Lidorius. Mais ce fail esl contreclii par Sulpice Severe, qui, dans son hisioire de saini Martin, dil : a II y avail, non loin de la ville, un lieu proche du monast^re, (ju'une opinion erronee des hommes avail consacre comma ayani servi a la sepulture des martyrs. En effel, il s'y irouvail un aulel qui avail ele eiabli far les eveques predecesseurs de saint Martin. (1). » L'auleur fail ici allusion a un brigand enierre prfes d'lm cimeliere , que le peuple honorail par erreur comme un marlyr, el dont saini Martin fil detruire I'aulel. Ainsi, Gregoirc se Irouvc en coniradiciion flagranle avec un auleur qui a vecu avanl lui, el qui, par con- sequent, a du mieux reconnaiire les evenemenis. D'un autre cole, si saint Gatien n'csl venu que sous I'em- pire de Dece (250), il s'est a peine ecoule un siecic enlre sa mori el I'avenemenl de saint Martin a I'e- piscopat (371); comment serail-il possible que dans un si court espace de temps la tradition se ful egaree an point de prendre pour un marlyr un brigand sup- plicie dans le conrs de ce siecle? comment les eveques, predecesseurs de saint Martin, auraienl-ils eleve un autel sur le lombeau de ce marlyr? Aussi le P. Lon- natur episcopus Hujus tempore sanclus Martinus in Galliis praedicare exorsiis est. fGREG. Tcr. Hist. Franc. Lib. v.cap.xxii, pag. 527> ed. Ruinarl. ) (I) Erat baud longe ab oppido proximus monflsterio locus , quern falsa hominum opinio Tclut consepultis ibi inartyribus sacravorat, nam et altare ibi a superioribus episcopis conslilulum habebatur. ( Vita B. Martini. ) i i — liOd — ^ueval ost-il force do faire eel avcu n'lnarquable ; « Ce Uaii (I'hisioire pcut servir a demonirer qii'on » elail alors persuade qii'il y avail eu des marlyrs en » ces canions avant la persecution de Dece, el, par B consequenl, qu'il y avail eu des Chretiens 6 Tours D avant I'arrivee de sainl Galien. Car, si Ton avail » suppose que ce pretendu marlyr avail souffert depuis B la mission de eel apoire de la Touraine, il eut ele B difficile qu'on s'y fiil ironipc (1). » La conclusion logique de ces premisses est que Gre- yoire de Tours n'a ricn su de posiiif sur les origincs de son eglise. En effei, il le dil lui-memc : « Nous savons, jjar ce que rapporle la iradilion (fama ferente ), que sainl Galien a ele le premier eveque de Tours (2). » Bieo plus, on pourrail se servir de son lexte merae, pour prouver que les scpl eveques sonl venus dans les Gauk's du temps des a[)6ires. Apres avoir parle des sept eveques cnvoyes dans les (iaules, sous le consulal de Dece, il ecrit, dans le chapilre suivanl , qu'un de leurs disciples (3) se rendit dans lii ville de Bourges, pour preclu'r le Seigneur Jesus-Cbrisl , le salul de lous. Ce disciple elait sainl Ursin : il le dil lui-meme dans son livre de la Gloire des Coiifesseurs, el dans ce meme livre , au merae endroit , il assure que sainl (Ij Hisl. del'Eglise Gallicane , I i,l. ii an. 371. (2) GaUannm eliam episcopuin a Komanis episcopis ad urbem TuroDicam transmissHin,prtmumqueTuronicispontificem datum, fama ferenle, cogno?imus. (3) De borum Tcro discipulis quidam Bilurigas civilalem aggressus, salutarc omnium, Christum Domintim populis nuii- tiavit ( Hist. Frotic , lib. l.capxxix j - 404 — Ursiri a el6 envoje par les disciples ties apolres (i). Done, selon I'eveque do Tours, les sepi eveques etaient les disciples dcs apolres. II n'etail pas mienx ioslruii en ce qui concerne le commenccmenl de Teglise des Arvernes ; en effel, dans son livre de Gloria Confessorum, il se borne h dire que Siremonius ful envoye, par les eveques de Rome, avec le bienlieureux Galien el les aulres qu'il a Giles (2 ). Ces mois : Par les eveques de Rome, n'indiquenl rien de precis ; lis nous apprennenl seulemeni que sainl Auslreinoine est venu dans les Gaules avec les six aulres e\eqnes. Done, si Ton Irouve une dale cerlaine de la mission des compagnons de saint Anstremoine, celte dnlc s'applique a ce dernier. Aiubi, Ion peut ajouler au monumenl de I'eglise d'Arles, cite plus haul, a la legende de sainl Ursin, corrigeo on cequi concerne sainl Denis, une foi d'au- lanl plus grande que ces documents sonl corrobores par la iradiiion locale. Saint Priest, ev6quo de Clermont, qui mourul mar- tyr I'an 674, ecrivii la legende de saint Ausiremoiue qui nous est parvenue, et cette monographie contirme encore tout ce que nousavons dit de sainl Martial, de sainl Tropliime, de saint Paul, de sainl Saiurnin, el tout ce qiie»nous soulenons de sainl Gatieu et de sainl Auslremoinc (3). (1) Biluriga ?cro urbs primuni a sancto Ursino, qui a disciputis apostolorum episcopus ordinalus in Gallia deslinatus est, verbum salutaris accepit. ( De Gloria Confessorum, clxxx. ) (2) Ipse (Stremonius) a Romanis episcopis cum beatissimo Gatiano et reliquis quos memoraTimus est directus. (De Glor, Confess, cxxx.) (3) I'ost floriosam igitur Domini noitri asceiisionero — 405 — n Apres la glorieiise ascension de Noire Seignenr, 1e l)ienheiireux Pierre, prince des apolres, appelant ii lui ses Ires-sainls disciples, les destina a la predica- tion, les foriifin de sa benediction el les honora de la consecration episcopate . Voici les noms des hommes illuslres auxquels il assigna des villes particulieres. L'eveque Gatien fiii envoye a Tonrs, Trophime a Aries, Paul a Narbonne, Saturnin a Toulouse, Martial ^ Limoges. Parmi eux, Tiiluslre martyr Ausiremoine reQut, apres Dien, le gouvernement de I'eglise d'Au- vergne. » Coile tradition se retrotive encore dans la legende de saint Genou, au x" siecle (1), et dans plusieurs ccrits posterienrs, et elle a etc adopiee par plusieurs critiques modernes d'nne grande auiorile, les Baronius, les Claude Cheiiu, les du Saussay, etc. II Caul done admeine comma certain, que saint Ausiremoine et saint Gaiien oni ete envoyes dans les Gaules en memc temps que saint Martial, sninl Tro- phime, saint Paul el saint Saiurnin. bealissimiis Pelrus princeps aposlolorum advocans ipsos sanctissimos discipulos ad praedicandiiin destinavit et sua omniumque apostolorum beuedictionc roboraTit, cl Pontiticali honore sublimavit. Quoiiiin videlicet virorum illiistrium, qui sin- gulis urbibns eraot delegati, haec fuere nomina . Turonem dirigi- turGalianus episcupus , Arelatem Trophiiuusi, Narbonam Paulus, Tolosam Saturninus, Leiuovicas Martialis. ArTernirara inter eos inonarcbiam Austreinonius incljtus martyr post beum suscepit regendam. Ex eisdcm tautum Austremonius ct Salurninus per martyrii patmaiu assecuti sunt aetcrns felicilatis coronam. [Act. sancti Austremonii , ex veleri mss. ecclesiae l.irin..; apud Labbe Nov. bibliotheca mss., t. xi, p 482. ) (I ) Leiotig, Jtiblioth histor. de la France , n' 2978, p. J50. - /lOG ~ §XI. SAIM URSIN HE BOUUGES. — SAINT JUIJKN DU MANS. L'ordre tic la discussion nous conduil a parlor do sainl Valere, tondaieur do I'eglise de Treves el le der- nier des sepl eveques desigiies [tar Gregoiro de Tours. Mais, comme nous venons dc cilor la legeiide do sainl Ursin, comme, d'un autre cole, il exisic une grando affiniie enlre les eglisos de Treves el de Reims, me- tropoles, colle-ci de la seconde Belgique, celle-la de la premiere, el que, par consequent, il convienl d'eiuditer la question de I'aposlolal de saint Valere avec quelqucs details, nous repondrons, avanl lout, a robjcciion suivanle des editeurs de Dom Marloi. « Si les qualre eglises de Marseille , d'Arles , de » Yienne et de Narbonne pouvaienl lire dans les livres » sainls les noms de leurs fondaleurs, pourquoi d'autres » n'auraienl-elles pas le memo privilege?.... Ainsi,.... » Nalhanael et Simon-le-Leprenx se feronl bapliser » pour devenir, I'un sainl Ursin de Bourges, Taulro » sainl Julien du Mans. » Si Ton pouvaii s'en rapporier eniieremenl a la legende donl nous avons invoque I'autoriie en ce qui concernc sainl Salurnin el saint Galien, nous regar- derions comme demonlre que saint Ursin est un disciple des apotres; mais, en la comparani avec d'autres monuments de memo valour, le doulo nail dans I'esprit, el Ton sent la necessiie de modifier ce que les termos de celle legende oni de Irop absolu. Voici K; commencement dc celle legende : « Le tres snini Ursin, Tun ^/f.s soixanle-dix disciples — 407 — » lie Jesus-Christ, fiit Ic premier eveqiio tie la villc dc )) Boiirges. II avail ele envoye de Rome par les sainis b apolres, avec le Ires prccieux sang dii prolo-inarlyr » dii Chrisi, Elieiuie, [lOiir repandre dans les Gaules » los scmenccs de I'Evangile, en societe de saint » Denis de Paris, de saint Satiirnin de Toulouse, de » saint Trophime d'Arles, de saint Paul de Narbonno,. . . » de saint Auslremoine d'Auvergne, et de saint Gaiien, » eveque (1). » D'apres ce lexle, saint Ursin serait un disciple de Jesus-Christ; mais il en est d'auires qui allribuenl au conlraire sa nomination aux disciples des apolres. Ainsi, Gregoire de Tours avance que noire saint a ele (1j Sanclisi-iiuus ergo ac de sepluaginia Domini Jesu Chiisli discipulis, Ursiaus Biturigas urbis primus fuit episcopus , qui a sauctis apostolis ab urbe Roma cum comitibus qui sudI sanclus Dionysius Parisiacensis , sanctus Saturninus Tolosensis , Trophimus Arelatensis , Paulus Narbonensis,.... Austreraooius ArverneDsiset sanclus Gatianus episcopus, E?angelii semina spar- surus Galliis directus fuisset , Biturigensium Goes ingressus est. Hie namque Justus cum beato Ursino , ad urbem Biturigam pro- perans , orientali in urbis plaga , miliario ab urbe none , super alreum Utrionem feliciier migrarit ad Christum. Denique ibidem a beato sepultus est Ursino. 11 doit y avoir dans cetle legende une lacune qui en rend le sens inintelligiblc : les mots Hie namque Justus doireul s'ap- pliquera un disciple de saint Ursin , comme le constate I'exlrait suivant des lecons qui se recitaieut a Bourges, Is jour do I'office du saint : Suscepta B. Clemens Ecclesiae cura , sollicitus earum quae sibi a beato Petro apostolo fuerant commendala, videlicet ut fides catholica per orbis climala praedicatione fidelium propaiaretur, misit in Gallias quamplurimos praedicatorcs disertoi et constau- tes in fide, de quibus sanctus Ursinus cum uno tantum disci- pulo merilis el nomine Justo Bituricensium fines, Spiritu saueto (lucente, ingressus est. — 408 — envoye dans les Gaiilcs par les di>-ci|»les des apoires (1). La legende de sainl Austremoine represenie sainl Ursin comme le disciple de I'un de ces disciples. Ed efft't, a la siiile du passage que nous avons cite precedumiTieni, Taulcur de celte vie ajoulc (2): « Kn consequence, le ires glorieux Auslremoine. compte par N. S. J. C. au nonibre des soixanle-douze disciples, se rendil courageusemenl dans le pays des Arvernes, retenant seulemenl avec lui un pelil nombre de disciples cl de compagnons que lui avail designes sainl Pierre, a savoir : le preire Neclaire ; Ursin, lionime d'une vertu celesie ; Mamelus, qui avail aussi rcQU I'ordre leviiique. » Florus, moine de Si-Fronl (3), dii, dans ses additions au martyrologe de Bede , que sainl Ursin avail ele ordonne par les succcsseurs des apotres, et avail ele destine par eux a elre le premier eveque de Bourges. Saint Adon de Viennedil egalement que sainl Ursin (i) Biluriga Tero nrbs primum a saoclo Ursino, qui a discipulis apostolornm episco|ius ordinatiis, io Gallias destiiiatus est.verbum salutis accepit. ( De Glor. Con/ew., clxxx.) (2] Gloriosissimos igilur Auslremouius in uumero sepluagiata duorum discipalorum a domino Jesu Christo designatus , paucis lanlum secum comitibus, quos a beato Petro discipulos et socios accipere meruit, rctenlis, Nccterium scilicet presbyterum, Ursinumque almificae probitatis virum, Mamelum quoque haben- tem Levitici ordinis oilicium , tellurem ArTernicani aggrossus est iutrepidus. — V. pages 404 ol 405. (3j V. id. noremb. Eodem die, Bituricis S. Ursini confessoris, qui Roms ordinalus a succcssoribiis apostolorum , primus eidem urbi dcstinatur episcopiis — /i09 — avail ele ordonue |jar Il's disciples ties apotres (1), el il esl d'accortl siir ce jioim avec Usuard (2). Toiiles ces contradictions soul plus appareiiles ostoiiqne de saini Denis de Paris. § XH. SAJM I nONT F>E P^IUGIIKUX. — SVINT GEOUCES DU PUY. De loul lom|is , Teglise de I*erigueux s'esl cruelle- nienl resseniie des allaquos que lui onl fail subir les euiiemis du caiholicisme. Saccage en 460 par les Golhs, et en 725 par les Sarrazins, le Perigord a de nonveau eprouve des penes enormes'en 840, par suite de I'invasion des Normands qui s'y sonl inslalles en maiires pcndani cent ans. Plus lard encore, les efforts des Peirobusiens el des Albigeois sonl venus ebranler la religion jusque dans ses fondemenis, el preluder aux allaques si souvenl heureuses des calvinistes ; enfin, depuis pres de deux cents ans, Tecole janseniste, en aliaquanl la tradition qui fail de saint Front, pre- mier apoire de Perigueux, un disciple de saini Pierre, cherche a briser les liens qui unisseni celte ^glise an (1) Appendix ii, pag. 62, hi. — hil — •^ainl-^iege, el a amoindrir ainsi la valenr desbienlaits qu'elle a rrgiis do la Providence. Cetle Iraditiori est cependani inconieslable, car elle s'appuie sur d.s monumonls de loiite nature, el elle est adoptee par les phis anciens martyrologes. On la irouve d'abord dans les acies de sainl Georges du Pny en Velay (I), el les novatetirs soni cbliges do reconnaiire que ces acles ofii ele ecriis enire le vi' el le VII' biecle, sur des donnees iradiliounelles. II esi dil dans la vie de sainl Clair, premier o\eque d'Alby, que ce prelai, revenanl de Cologne, s'arreia a Pcrigueux, oil deja sainl Front avail jete les semences de la ioi. Or, louies les eglises du sud-esl de la France reconnaissanl que sainl Clair est on disciple de sainl Anaclet, il s'ensuil que saint Front a du evangeliser le Perigord au temps meme de sainl Pierre (2). Au VI* siecle, sainl Gaugeric, eveque de Cambrai, •^lant venu visiier les proprieies que son eglise possc- dait dans le Perigord , se rendil a Perigueux pour prior sur le lombeau de saint Front (3), comme il Tavail fait sur celui de sainl Martin ; el comme on n'honora d'abord que los lombeaux des martyrs el celui des saints les plus celebres, on peul conclure de ce fait qu'a cello epoque le cnlie de saint From eiait Ires repandu. Celte conclusion se deduira encore de ce que, vers la memo epoque, Chronopius If (4), eveque de Peri- (I) Voyez CCS acles dans I'abbe Faillou, op. cil., t. ii, col. 391. (?) Act. SS.,loiii. I. Mai pag. 320. (.3) Acta SS. Aug., torn, ii , pag. 674. [h) Gall. Christ Inm. ii, col. H.M. — M3 — giicux, til baiir, sons lo V()c.'il)le do saini Fro;i(, niic eglise oil « il jugi-a hoii di' irans|U)rt(.M- le corps de ce gloriciix nposire (I) » Une (Imrlc, datco dii vi des Norirs dc Mii 1261, nons apprend que ceiio aiineo-Ia, Pierre dc Saini- AsiiiT (2). eveqiu' dt' riMi,;4iieu.\, 111 oiiviir le tombeati de sainl Froii'., el que Tod y Iroiiva deiix iiiscriplions gravees, rune stir iiiie ianK; de plomb, I'aulre siir une lame de cnivre. Siir la [)remiere on lisail : IJicjacel corpus beali Froitlonin. Jesa Chrisd dixcipuU, el beali Petri ill bapti.^inale lUlccii filii.\j'a\ur(i poriaii I'insorip- tion siiivanie: Hie jacet corpus bcatissimi FroiUonis, Jesu Ckrisii discipuli, et beali Pelii apoaloli in bap- tismate filii, ex Licaonia regionc orli, de Iribu Juda, ex Simone e', Froittonia. Obiil oclavo halendas No- vembris^ ani.o quadragesimo secundo poi^l passionem Dommi Jesu. L'aiiieur dc cello ch:irie no nous I'ait pas connailre de quelle epo(iiie dataienl ces inscriptions ; cependanl loui porle a croire qu'elles eiaieni anle- ricures au W siecle, lai efFel, il est dii dans ce di- plome que If lombeau de saint Fronltul ouvert, |)arce que beauconp de personnes , poussecs les unes par I'ignorance, lesanlres par la inauvaise foi, prciendaieni que le corps de I'apoire avail eie enleve par leg. Norma nds. l.a iradilion qui fait de sainl Frool un disciple de saint Pierre, n'est puinl [larticidiere au Perigord ; elle a eie adoptee par nn grand noinbre d'eglises el notam- (1) Le P, Dupuy : VEstat de I'eglise du Perigord; Perigueiii , 1629.in-4«, pag. 125. (2) Voyez dans le meme auteur aelle ctiarlp an ctiapiire consa- cr^ k Pierre de Sainl-Ajnicr. — Mft - menl par cellt's (in Piiy, de Toulouse, de 'I'arascon, fie Limoges, de Bordeaux, de Sainl-Pons. Elle nous est cnscignee par les mariyrologes les plus auciens, celui de saint Adon (808) (1), celui de Nolker (870) (2), celui d"Usuard (87o) (3). Au ix^ siecle, nahan-Mniir I'a consignee dans sa Vie de saintc Marie Madeleine (4-); au x% noire Flo- doard I'a chaniee dans ses vers (o); au xiii* siecle, Pierre le Venerable el Vinceni de Beauvais ; au w\*, Bernard Guido, Pierre de Nalalibus el sninl Anionin de Florence (6) s'en foul les champions el la proclamenl ii I'envi. (1) VIII Kal. Novemb. ( 25 Oclob ) Eodem die Pclragoricis ci- ritate, nalalis sancti Frontouis episcopi, qui Komae a beato Petro ordioalus, cum Georgio presbytoro ad prxdicaodum EraDgelium missus est. (2) Eodem die, Pclragoricis civitate , sancti Froiitonis, qui, a beato Peiro aposlolo episcopus ordioalus , cnra Gregorio prcsby- tero ad praedicalionem ETangelii mittitur.. .. (3) Eodem die , Pelragoricis civitatc, sancti Fioatonis, qui, Rom.'c a beato Petro episcopus ordinatus , cum Georgio pres- bylero ad praedictam civitatcm vcaiens, etc... (4) Voir cette Tie dans I'abbe Faillon , op cit. , lom. ii. [h] IslbiDC beati et gloriosi principes Plures )eguntur ordinasse praesulcs. Ad prsedicanda clara Christi insignia Uiversa rauiidi desliDandos per loca. Quorum prefccti competunt in Gallias : Trophimus , Sabinianus, ejus et comes , Potentianus , Fronlo cum Georgio. ( De Vhrisli Triumphis apud Italiam I. i. c ix.) (6) II est a lemarquer que P. de Nalalibus ct saint Antonin Je Florence ont etc induits en erreur par la vie que les Peres du concile de Limoges ntlribuerent a Gauzbert. Saint-Adon, Usuard el Nolker-lc-Begue, anlericurs » ce concile , n'ont pas commis )a m^mc Ciuile. — 415 — Cepeiid;iiii die e^l eiicori' coiiiosleo : k O^ qui di- minue la lorcf ol I'aiiioriieilc ceiie iradiiion, (lit I'abbe Arbelot (1 ). c'es( qii'aii x* siecle, ellc eiaii si peu no- loire cti Aqiiiiairie, (|iie le clioreveque Gaiizbt'ii fabri- qua line vie afiociyphe do saiiii Front, qui fui denonc^e dans les conciles de Limoges, an conimeiicemenl du . siecle suivani. » Cette accusaiion Hit on elTel poriee conire Gauzberl par I'abbe de Solignac qui malmena fori un cbrc de I'eglise de Perigueiix pour avoir revendique le litre d'apolre en faveur de saint Front ; el h son lonr le digne prelal ne fit pa-* prenvc d'nne erudition plus grande, puisqu'en ecbange do la vie ecrite par Gauz- ben, 11 lul au concile les ados d'un auiro saint Front, abbe de Nilrie, on Cappadoce, el ne a Perigueux f'S). Mais ce debal, quelque solennel qu'il ail eie d'ail- leurs, n'iniirnie en rien la tradition, il proiive qu'clle <5lail alors obscurcie; belas elle Test bien davanlage aujourd'hui, ei cependanl malgre les triples voiles doni veuleni la reconvrir I 's novateurs, il n'en est pas moins certain que la premiere lueui- que nous voyons poindre a iravers les tenebres des ages, est tm reflet de celle qui eclaire I'eglise romaine, et quo les premiers noms que begaio I'eglise de Perigueux a son berceau sont ceux de saint Pierre et de saint Front, flis du prince des apolres par le bapieme. Les conciles de Limoges onl decide que lo litre d'a- pdlre de J. C. serail onleve a sainl Front, saint Sa- lurnin, saint Austremoine, sainl Ursin pour etre (1) Dissertation sur I'Apostolat de saint Martial, pag. 158. (2) Les acles de ce saint »e trouvent dans I'abbe Fa'i'nt. *r«- inid., t. II, col 427. — /|16 — rCftcrNC ;iti smiiI saint Mariial. M;iis i>i cepondaiii te procos a eie jiigo sans que les pieces jusulicalives aieni cle prodiiiics de pari e\ (raiilic, n'y a-l-il pas lieu de reviser ia senloncc ot de rovenir a rancienne iradilion, qui rangeail sainl From an nomhre dis soi- xanlc-douzc? L'twisleiice do s;iiiii Geori^es d» Puy (1), cianJ inii- memeiil liee a celle de saini Front, donl lous les actes iefont It! compagnon, il sufin d'avoir juslilie de I'exis- lence de I'un pour ilciermincr Tcpoqiie ou Taiiire a vecu. Snini Front etaiil nn disciple do sainl Pierre, sainl Georges appariicnl de meme h I'epoque aposlo- liquf. .^ xiir. EGLISE !)!■: TKEVES. Vers 864, Hincmar, archcveque de Reims, ecrivail au pape Nicolas I" (2) : « 11 a loujours existe cnire » I'eglise de Reims el celle de Treves celle dislindioti, » ainsi que nous rappreniieni les monuments cede- » siastiques et les anciennes couiumes, que la pre- (1) Voyez Uistoire de Notre Dame du Puy , par Odoii de Gessey, p. 8. (2) luler Reraeusem el Trevirensem ecclesiam haec semper dis- tinclio fuit, siout in ccclesiaslicis moniiineatis invenimiis et vc- liislibsimam consuettidincm semper obtintiisse comperimus , ut iisdem episcopus non loci sed ordinis dignilate prior, secundum sacras regulas, haberclnr, qui forct in qualibel islarum ecclesia- riim mclropoli nntea orlinalus. — liil - j> seance ciilre les deux evequos seiaii reglee, iion pas » par la digniie dii lieii, mais par raocicDnete, c'esl- » a dire (jiie celtii-la aurai! la preseance ipii aurait oie » ordonne ie premier. » Ce prelai repeiaii encore celie idee dans Ie discoiirs qu'il adressa an peu[>le dc Meiz, en 869, a I'occasion dii couroiinenieni de Charles-le-Chanve (1): « Dans » la Belgiquo, Ics cglises dc Reims el dc Treves, ei » celles qui lelevcni d'elles, sonl condidcrecs comme » soeurs el co-proviiicialos, coininc Ic dcmonireni » I'auioriic ccclesiasiique oi les plus aiiciennos coi.:- » lumes. Ki, par ce fait, elles doivcni exercer sinuil- » laneniiMi! la justice synodale el faire observer, d'un » comniun accord, Ie- deci.-ions des saints Peres, a B la condition (jue cehii des eveques de Treves on » de Reims (pii aiw;) elc ordontie Ic pi-emier, anra la » preseance. » A one epoqih' encore plus rociilce, saiul Remi, dans son tcslanietii, appelaii I'eglise de Reims la soeur de reglisc de Treves (t^). (ics icxles demonlrenl qu'au raoyen-age il elail reconnu que ics eglises de Treves el de Reims etaieni soeurs, c'es!-a-dire qu'clk's avaicnt une menic origine, qu'elles remontaicnt a ia meme epoqiic ; cl c'csl ce que condrme Boucher dans son Belgium Romanum, (1) Remensis el Trevirensis ecclesiae in hac Relglca . cum sibi commissis ecclesiis, sororcs et comprovinciales liabeiitur ; sicut aiiclorilas ecclosiaslica el anliqna demonslrat consuetiido. Ac per hoc iinanimi consensu el synodalia jiidicia exercere el qii* a Sanctis patribus instilula sunl debciil concorditer custodire, hac privilegii condilione servala, iil qui prior de ISemensi el Tre»i- ronsi episcopo fucrit ordinalus, prior oliani habealur. (2) Eldeiiide ecclesia Reraensis pra>fala , adjuacta sibi sororc •cclesia scilicet Treyirensi , ilerum conTeniatur — M8 — liv. 5, p. 455(1): « Aiiisi que le deniuiiire I'opinion » d'Hincmar, a I'epoque oii sainl Pierre eovoyait h » Treves saint Eucliere el ses compagnons, il envoyail » aussi sainl Sixle k Reims, de telle sorle que ces i> deux sieges, nes ensemble, onl crii ensemble. » Ainsi, demonlrer que I'eglise de Treves a ele fondee par les apolres ou par ieurs disciples, c'esl evidem- menl donner a I'eglise de Reims une anliquile egale. Recherchons done les auleurs qui, dans le cours des siecles, onl parle des fondaleurs de I'eglise de Treves, c'esi-&-dire des saints Euchere , Valere el Maierne, ei voyons si la tradition Concorde avec les litres que nous possedons. Le xviii' siecle nous est peu favorable. De Launoy (2) s'ost cfforce de saper les fondemenls de cette eglise , en coniesianl I'envoi par les apolres de ses irois premiers eveques, sainl Etichere, sainl Valere el sainl Maierne, el malgre d'eiiergiques pro- testations, {'opinion du docteur parisien trouva des partisans. Ce fut Tilleniont qui proclama le premier les nou- velles doctrines (3). « Nous avons, dil-il, une grande histoire de lui (Euchere), de sainl Valere el de saint Maierne, qui en fait les compagnons de sa mission et ses successeurs (1) Prorsus ut hujus Hincinari sentenlia , S. Petrus quoqne tempore Euchariiim cum sociis Treviros immisit, eodem Rhemos Sixtum destinarit; simulque natae hae sedessimul auctas sint; nee minus in sacris quam prophanis, utra alteram praeverterit diibilari possil. (2) De Sutpitii Severi sententia, ralione orig. Christianorum in Gall. rap. xxix , p. 121. (.3) Minioires eccUsiastiqutsAoirnr, p.iOT' — 419 — daus repiscopal. Mais il esl vrai aiissi que les fails qu'elle rapporte sonl si peu vraisemblaltles, si fabu- leux el si conlraires a ce que les bons auieurs nous appreunenl (]( s progres dc la Foi cu France, qu'il osi impossible d'y avoir aucun egard. E!le esl d'un Golsker (Goldscher), moine de Treves, co qui nc prouve ni .son antiquiie, ni sa vorite. » El plus ioin, il ajoule (1 ) : « Qiioi<}ue Bnroniiis dise que loul \c. nionde lombc d'accord qu'il a eie disciple de saini Pierre, il est fori permis, selou Raronius meiue, de iie pas s'arreier a un bruil coninuii), donl on ne irouvo aucun fonde- menl legiiimii ei assure. » Les auieurs du Gallia Christiana oul emis une opi- nion analogue (2). Apres Tillemoni, Tauleur de VAlsatia illustrala, Schoe|)nin, rejeia ;il)solumeni I'existence de nos irois apotres, el pretendii (jue I'AIsace n'nvaii pas possede d'eveques avanl le sixieme siecle. L'abbe Grandidier (5), morl en 1787, a public sur I'aposlolal de sainl Malerne uue dissorlaiion qui se irouve cu tele du premier volunrae de son Histotre des princes-eve qups de Strasbourg. Voici ses conclusions: « Ricn ne nous empeche de reconnailre pour le premier eveqne de I'AIsace, el loul nous portc a radmellre, le Malerne, eveque de Cologne, (pii fut commis par I'empereur Conslanlin , avee Relicc , ev6que d"Auuin, el Marlin, eveque d'Arles, pour juger, conjoinienienl avec le pape Milcbiade, la cause des (IJ Tome Ti, \>. 300, n» 16 (2) Tome in, p. 809. (}i) Voyez noire IraJuclion dc lAliatia Tnuslrata, I. n, p, 286. — 420 — DoDalislos. Pour aocordor les h^mp.s ei les sifeges, on peiil dire quo saini Maierne fui d'abord elu eveque Ceile tradition est cependanl bien etablie ; elle est conslanie oi n'a jamais varie. I.es hisioriens Tonl con- signee dans leiirs ecrits ; elle est enregistree dans les bnlles des j)apes ; et, en remonlanl le conrs dessiecles, on la iioiive disscminee dans lonles les legendes, dans lous les manuscriis. Voyons d'abord les hisloiiens. Louis Laguille (2), qui ecrivii au xviP siecle nne hisloire d'Alsace ires esiimee, I'avail adoplee avec em- pressemeni, el il avail suivi en cela I'exemple de Wiiii[)htiiMg (5), (leGuiliman (4), d'Herizog (5), de Zei- ler (6),de Jodocus Coccius (7), du pere Berlliolel (8). (,1) A I'epoque oii Grandidier. ecriyail , ropiiiion gallicano do- minait dans I'eglise de Strasbourg. Ce savaiUcomposail un nou- veau breviaire, et Sch(Bpfl.:i , auleiir protestanl, etait charge do reuiger le CHlalogtie des eveques alsacicns. Grandidier 6tait ar- chiviste de I'eveche, qui a?ait alors pour chef le prince Louis de Rohan. (2) Hist. d'Alsace, lorae i. (3) Calal. episcop. Argent., pag. 3 el 4. (4) De episcop. Argent., pag. 41 et 69. (6) Edelsass Chronic, liT. xiii, chap.xTii, page 16. (6) Topog . Alsat . , page 14. (7) Panegyrici ad Leopoldum Austriacum, lib. i\i, c. xi . p. ISO. 8) Hisloire du Duche de Luxembourg , \\r. i", p. 113 el .105. — 4-21 -• Beaius Rhenaniis (Her. German, lib. ii. \n\go 159). ijui, dii Schoepflin. « apporia le premier, en Al^acf. 111! goui piir el line critique eclairee » el qui demeu- raii a Schlestadi, s'exprime ainsi : « Je ne pense pas qu'eile soil sans tbndonieni, celle iradilion qui nous represente Malerne comine I'apotrc envoye par sainl Pierre, pour precher la Fui dans nos conlrees. » Au xiv° siecle, Jacques de Koenigshoven avail emis la meme opinion (1). Au xui* siecle, elle avail pour adherenl Albert de Siade (2) el Alberic des Trois-Fonlaines (3). Au xn* siecle, on trouve Pierre de Clugny (4), Go- defroy de Viierbe (5), Anselme de Liege, Ollion de Frisingue (6), la chronique d'Ebersmunsler (7).... Au xi° siecle, Hugucs de Flavigny ecril dans la chronique de Verdun : « Eligens Peirus viros in lide probalos,... Treviris el Coioniae SS. misil Encharium, Valerinm atque .Malirnum. » Au x* siecle, ce sonl Heriger, abbe de Lobes, el Noiger, eveque de Liege (8). (1) Jacofit Koenigshoyii Chronicon a Schiltero editum , cap. v , § 15; page 2C9 (2) 4i6er43. (6) OUon de Frisiuyue, Chron., lib. iii. cap x\. apml Urstisiuin; Script. Rer. Germ , page 02. (7) Chronicon IVovientense , preuves juslificalivcs. (8) Herigeri, abbalis Lobiensis, Gestaponl-'ficiimTungrensium, cap. VI, Til el seq cpud .fcannem fhnpeauiilte , inter nuciores tpiscopnruin et rcrum f.eotlcnsium, tome i, page 9. — 422 — Notre Flodoard consacre celie iradilioii : Quorum profecli compdunl in Gallias. . . . Paulusque, Marlialis el Valerius (i). Rome eilc-meme a proclame plusieurs lois Taposlo- licilede celle eglise par la bouche de ses ponlifes. En 973, le pape Benoil XI dil, dans unc bulie qu'il donne a Theodoric, archeveque dc Treves (2) : « Les recils qui nous onl ele fails, el nos pro|)res locUircs, nous onl appris que le bienheureux apolrc sainl Pierre envoya dans celle panic de la Gaule, les sainls apolres Euchere, Val^re el Malerne, el plusieurs aulres missionnaircs. » Benoil VII, en 975, c'csi-a-dire presqu'immediale- menl apres son inlrotiisalion, ecril (5) : « Comme nous savons que sainl Eucbere a ele nomme arche- veque de I'eglise de Treves, par sainl Pierre, prince des apolres. » Sainl Leon IX, qui eiail Alsacien, qui a eie eveque deToul,qui a consacre S Reims I'eglise de Saint-Remi, el qui, par consequent, connaissaii bien I'histoire de ce pays, sainl Leon ccrit en 1049 (4) : (1) Fatrolog., torn cxxxi. col. 609. (2) Sicut etiam pridem audiendo, immo et leg endo , comper- tiim habuimus eamdem ipsam pr* caeteris Galliarum ecclesiis Chrislianae religioni.s exordium , calholicaeque Gdei prima rudi- menta percepissse , per sanctissimorum virorum Eucbarii, Valerii el Materni , et caelerorum CTangelicam doctrinam quos tempore sue praedictus bealissimoa Petrus apostolus ordinavitetinslruxil, necnon illucad praedicandum direxit. (Mansi.- Coneil. xix. 45.) (3) Quando ojusdem ecclesiaeTrevirensisarchipraesulem, C. Eu- charium videlicet a I! Petro aposlolonim principe noyimus ordiaatum (4) Pro CO quod in exordio icligionis, veslraTreTirensiseccle»i« prima , illis in paitiluis , fidei rudimonia porcepissel. — k'2'6 — « ti pour ce Tail, que dans rorigine ile la religioji voire eglise de Treves a regu^ la premiere dans cts conirees, les elements de la Foi....)) An xiii* siecle, Innocent III disail (»): « Le ponlil'e romain ne se sen pas de balon [)aftloraI, par la raison que I'apolre sainl Pierre envoya son baton a Eucliere, premier eveque de Treves, qu'ii avail destine, avec Yalere et Malernc, h precher I'evangile ii la nation Teuionique. » Aux texies de I'hisloire, aux decisions de la cour de Rome, joignons les mariyrologes el les legendes. Le nom de sainl Valere, I'un des compagnons de sainl Malerne, est ecrii dans le plus grand nombre des mariyrologes. nieme des plus anciens. Les manuscrits de sainl Jerome, de Raban-Maur, ceux de sainl Ma- ximin, porient: « Treviris, de[)Osiiio Valerii episcopi.» Usuard, Bede, Adon, Noiker, le marlyrologe romain el divers nianuscrils : « Eodem die (iv kal. febr.), Treviris, deposiiio B. Valerii cpiscopi, discijuili S. Petri a[)OMoli. » Le marlyroioge gerinanique, el le premier cenle- uaire de Wilhelm I'^yscngrein, le represenlenl aussi comme un des soixanie-douze disciples de Jesus-Chrisl ; c'eM ce qu'Alberl de Siade el plusieurs auircs onl dil aussi de sainl Euchere. Le marlyroioge manuscril de sainte Gudule, ii Bru- xelles, porte : « Treviris deposiiio B. Valerii cpiscopi, • (l) Romanus aulem pontifex pastorali vJrga Doa utitur pro eo quod bcatus Petrus apostolus baculum suum niisit Euchaiio , primo cpiscopo Trevcrorum , quein una cum Valerio clMalerno ad prsdIcaoduiD Evaugeliuni genti Tbeulooicae destinavit... (MtfSterior Missa-. !,!▼ i, cxi.ii, odil flolog. l.'ST.'i, p. ni.xv. , — [in — discipiili S. Ptiii o|)osloli, qui cum BB. Eucliaro el Materno, Trevirum vcniens. post obiliim Eiicliarii ibidem per annos quindecim episcopalns fiingebat honore; cujus proedicaiionis lania fiiit inslaiilia, ut, eo adhuc viveiiie, per Gallium el Germaniam Cbrisiiani pagaiios numero simul el religione superiuetii. » F.es acies (les SS. Eiichere, Valere el Malerne onl eie ecriis par Gol(ls.cher, moine du couveni de Saiiii- Maihias de Treves, el, commc il le dechre, d'a[)res 1.1 relation lies crrlaine des ancions. Les premiers Bollandisles, lout en recounaissani la haule aniiquiie de ces maniiscrils, avonenl ne pas savoir a quelle epoquc vivail ce Goldsclier. — iVhis, ajouiciii-ils, il devail eire ires ancien, puisque Heriger, abbe de Lobbes, qui siicceda en 990 a Foulques el qui mourul en 1007, a lire des ecriis de co nioiiie plusieurs passages de son livre de Gestis episcoporuM Tungrensium Mais si I'on admet avcc eux, comme cela esl jusle, Taniiquile do Guldscber, on peui dire avee certitude qu'il a exisie au v^ siecle. En effel , dans nn epilogue place a la lin de son iravail, il [larle d'un incendie qui a devore la ville de Treves, el il dii qu'il a Irouve ga el la, dans les cendies, des fragments des aci(>s de ces apoires, el (ju'll les a reu- nis en corps d'ouvrage pour I'utiliie des lecleurs lanl presents que fuiurs. Or, la ville de Treves a eie ruinee deux Ibis, du V au X' siecK' ; d'abord en AM, ainsi que nous I'apprcnd Brower (I), el ensniie en 882 (2), cbmme le dil Re- ginon. (1) In aiinaf. Trevirensibus , ad arm. cccCLi,n"48. 2] Chtniiicnn Iter/inonis , ad arm. docclxwii. — 425 — TotU poile evidemmciil a croire qu'il s'agit ici (ie la premiere cle ces detix epoques. Mais, quand menie on pretendraii, avec lo P. Ou- din (1 ), que Goldsclier est posierieur a Heriger, ce qui est conlre I'evideiice, pnisqii'il suffit de comparer les ecrils de ce chroniqueur a ceux de Goldscher, pour reconnailre I'anlerioriie de colui-ci ; il reslerait lou- jours ce fait, que noire agiographo s'esi inspire d'an- ciens ecrils d'une aulhenliciie inconiestabie, puisqu'il Ie declare iui-meme. Un lexle que nous avons (lej6 ciie el qui a ete ecril onlre Ie v*^ ol Ie vi« siecie, vicnl a I'appui de ceile tradition, car il porle (2) : « Sous Tempire de Claude, I'apoiresainl Pierre en- voya dans les Gaules, pour precher la foi de la Triniie aux Gentils, qiielques disciples aiixqiicls il assigna des villes particulieres : ce fiirent Tropliime, Paul, Mar- tial, Auslremoine, Gaiien, Saiurnin el Valere, enlin, plusieurs aulres que Ie bieniieureux apolre leur avail destines pour compagnons. » Ainsi, I'eglise de Treves elablil son origine aposlo- lique par unc s6rie de preuves qui ne s'interrompeni jamais; plus lieureuse que la pluparl des eglises de France, clle nous donne encore Ie catalogue de ses premiers eveques Ainsi, Jean du Fraisse, clianoine de Clermont, qui a combaltu Tantiquite des eglises de France a cause dii pclil nombre de leiirs eveques, el Ie P. Longueval, qui est hostile aux origines aposloliques de I'eglise dc (1) In Commentario de Scriptnr. Eccles.. l ii, p. Ii35. (2) Voyez !>age 390. XXVI. 30 I — 426 — 'Reims, sorii-ils oliliges de reconuaiire que I'eglise (le Treves remoiiie au lemps des disciples. « Ce qu'oii peui dire de ceriaio en favour de ceite premiere e.^lise de la Belgiqiie, ecril Du Fraisse (1), c'est que, p;ir le grand nombre des prelals qui I'onl gouvernee depuis s^on premier apoirc jusqu'a saint Agrece, qui s^e trouve avoir assisie au premier concile d'Arles. V:\n 314 el qui est le 26« dans la table de ses eveques, il e!^l probable que c'est saini Pierre qui y a pi.ante la toi par le ministere de saint Euchere. » Lcs anciens Bollaiidisies avaienl nie que saint Ma- lerne eul exisle au premier siecle el qu'il y eut des eveques iniermediaires enire lui el saint Agrilius. Les cominuatcurs de leur oeuvre, eclaires par les travaux des hisioriens ecclesiasiiques du xix" siecle, soni au- jourd'hui d'un seniimenl entieremeni oppose, el re- connaissent que saint Maierne, saint Euchere et saiul Valere sonl bien les discifiles du prince des apoires. On peul en avoir la prcuve dans les commentaires .|ui precedent la vie de saint Florcntinus ou Florenlus, eveque de Treves vers le iii" siecle, el qui est inseree au tome vm d'Oclobre des Acies de.^ saints, page 1(i. SAINT CLEMENT DE METZ. ju-qu'an commenctment du xviii" siecle, la tradi- tion conslante de I'eglise de Melz avail fail rcmonter a saint Pierre memc la mission de saint Clemenl. A cettc epoqtie. les irasaux de quel(|iies criiiques ebran- (D VOiigine des eglises de France, 1688, page 5«. leronl la croyance gtiiierale, el I'oii se deinaii'la s'il ix^ serail pas plus vrai d'assigner le (roisieme siecle pour dale de la fondalion dc ceite rglise. Apres toiil ce que nous avons deja dii, on lecon- nailra faciiemeni Launoy el ses disciples dans les fau- teiirs de celle doctrine nouvelle. I.e principal des arguments invoqoes eiail celni-ci : « Le document le plus ancien que Ton connaisse de I'aposiolal de saint Clement est riiisloire des eveques de Melz, ecriie au viii" siecle, par Paul Warnefride, plus connu sous le nom de Paul Diacre. La dale de eel ecril est rolalivement recente ct ne sauraii faire foi pour une anliquiie aussi reculee. « II est assez singulier , faisons-le remarquer en passant, que les critiques h qui nous repondons, ne se soienl seivi de cei argument que conire !os auleurs ecclesiasliques et que jamais il ne leur soil venu a I'espiit dc Temployer conlre Plularque, Tile-Live et lant d'aulres auleurs doni ils onl acceple sans raur- mure Taulorite, quelque prodigieux, quelque anciens que fussenl les fails racontes par eux» Toutefois, on leur pardonnerait encore eel esprit d'exclusion, s'ils avaieni cu soin de le deguiser sous les apparences de roquiie el de rimparlialiie l]i-«!o- riqtie. iMalheurtuscmenl, on voit Irop pcrcer la haine que leur inspirenl les traditions romaines, pour que Ton ne se sonic pas aussilot saisi d'une metiance instinctive qui pousse a remonlcr aux sources,, a les comparer cnlre elles el a rapprocher du caractere des detracleurs le caraciere dc ceux qui y out puise. Paul Warnefride, diacre d'Aquiiee, secretaire d'Eiat de Didier, roi des Lombards, ful, apres la chiite de ce prince, accueilli par Charlemagne, qui, apprecianl son — 428 — meiiie, lo plaQ.i quelqtie icmps a Meiz pour y lender uno ecole. C'es^i la que Paul, h la priere dc I'eveque saini Angelrame , redigea son hisloire des chefs de celie eglise. La U'cUiif ailenlive de eel ouvrage, ecril avec une MU-eie de crinquc que Ton rencontre bien raremenl a celle epoque, demonire que Paul Uiacre avail a la fois sous les yeux les dypiiques de I'eglise de Melz el des documents ancicns, qu'il designe dans son livre sous le nom de lielalio prisca, relalio antiqua, el qu'il s'est entourede ce que I'liisloire generale de I'Eglise pou- vail lui fournir, pour completer I'liisloire parliculiere qu'il avail a traitor. 11 a eu soin, en Icrminani son travail, d'y annexer un catalogue des eveques, qui indique la duree de leur prelalure. Le contenu de ce catalogue a ete vi- vemenl altaque par I'ecole dc De Launoy, mais il est . facile d'en elablir rexactitude. La serie des premiers evequts de Meiz n'a jamais ete el ne pouvait elre serieusemenl raise en doute. Les chefs que celle eglise a vu prcsider a ses dcstinees pendant les premiers siecles, sont pour la pluparl inscrits comrae saints dans les fasles de la caiholicile. Leurs lombes ont ete venerees et leurs rcliques hono- rees jiisqu'a la fin du dernier siecle ; il a done fallu necessairemenl accepter I'evidence el s'incliner devanl la verite. Mais, en revanche, on a contesle la duree assignee a I'episcopai de chacun de ces prelals, en prelendanl que la longevite qu'on leur prete eiail anormale ; on a essaye de resserrer les anneaux de la chalne qu'ils formeni el de la rcndre plus courle, pour en raltacher t'exlremiic au iir siecle. JNous pourrions faire remarquer que, do nos jours — 429 — riieme, I'episcopal Irnncais prescnlo des exempU-s re-^ marquables tic loDgeviie, el que celie longeviie devail eire plus grande aiix premiers siecles de I'Eglise, car alors les eveques elaienl souvent miirs pour I'aposto- lal dans la fleur de I'age ei appcles de tres honne heure a la direction de leur iroupeau. Noire grand sainl Remi n'a-i-il pas eie elu S I'age de 22 ans? D'aillenrs, les catalogues de I'eglise de Meiz pre- senieni vingt-quaire eveques, de I'an 47 de Jesus- Chrisi a I'an 550, ou siegeaii sainl Villicns ; el dans les cinq siecles suivants, c'esl-a-dire de sainl Villicus a Adalboron III , elle n'en coniple que vingt-cinq. Or, si Ton lienl compie des vacances qui oni dii se produire assez frequemmeni dans les premiers siecles, on voil que cetle duree n'a rien d'exagerd. Nous pensons done que ces catalogues sonl irre- prochables; que la duree du gouverncmenl de chaque eveque y esl indiquee d'une maniere satisfai- sante , ci qu'en s'appuyant de raulorile de Paul Diacre, ils servenl a prouver, d'une maniere irrefra- gable, I'exislence de I'eglise de Meiz an premier siecle de I'ere chrelienne. b'ailleurs, ce que nous avons dil dans un aulre passage de ce travail, sur la direction donnee par sainl Pierre el par ses successeurs, sainl Clen)ent et saint Anaclei, aux missionnaires qu'ils envoyaienl chez les Genlils pour precher I'Evangile, s'applique d'une ma- niere parliculiere i I'eglise de Metz. Divodurum, ca- pilale des Mediomalriciens , eiail une des villes les plus imporlanles de la Gaule Belgique. La cite elle- meme etail alliee (Socia) du peuple Romain ; elle servii plusieurs fois de quarlier-general aux legions. Des voies puhliques y convergeaicni de divers points, — 430 — et, des les preiniers sieclcs, sous riufluence de ses nouveaux mail res, elle se coiivril de magnifiques rao- numenis donl Tcxislcncc nous esl encore revelee par leurs imposanis debris. Comment sainl Pierre el ses successciirs aiiraienl-ils neglige un poinl aussi im- porlanl? II esl encore un ordre de fails qui prouve que la Foi _\ fill eiahlie dcs I'origine dii Chrislianisme. Nous avons monlre sainl Cresccnl de Vienne, sainl Valero, sainl Euchere el saint Materne, remonianl le cours du Rhone, de la Saone et do Doulis, et re- descendant le Rhin pour evangeliser I'Est el le Nord- Esl de la Gaule. Or, les Mediomalriciens, pendant la periode cellique. elaienl bornes au midi par les Se- quanais, au nord par les Treviros, a Tcsl par le Rhin, a I'ouest par la Meuse, dont les Remois €[ les Lingons habilaient la rive opposee. Toule I'Alsace iol'erieuio, qui commence a Schles- ladt, etail done occup6c par les Mediomalriciens (1). En effel, les anciens monumenis demontrenl que sur les bords du Rhin, ii n'habila aucun autre peuple entre les Sequanais el les Trevires, jusqu'a ce que {'inva- sion des Nemeies el des Vangions , peuplades Ger- maines, eul refoule les Mediomalriciens au-delei des Vosges. Mais la tradition represonte sainl Materne, sainl Eu- chere el saint Valerc coramc les apolres de I'Alsace (I) Cesar, de Bell. Gall., lib. iv, cap. x. dil quo )e Rhin baigne les fronlieres des HeJveticns, des Sequanais, des Medioinalriciecs et des Tre?lres. Apres les Helveliens , Slrabon place les Sequanais et le.s Mediomalriciens comme habitant tes bords du Rhin. Voye* Ut. it, page 29^t. — \3\ — interieure (1). II y avail sur ce |joinl une c.le inipor- lanie, Elvelus on Elcebus, aujourd'liui Ii; village il'Ell, oil !e souvenir do ces ihaiiniiiinrgtts s"esi conserve d'une manierc pariicnKero, lis oni done cvangelisd une panic dc la ciie mediooiaiiicienno. Dans ces circonslances, qui nous empechf de dire quo sTinl Clonicnt de Meiz esl parii avec eu\, sous la dirociioD de rapolresaini Paul, doni Ocsceni eiait le d'.sciple, el (lue peudani que ^es conipagiioiis se diri- geaienl sur i\iayence, Treves el Cologne, il Iraversail lessoliUides des Vosges pour aileindre la capiialo des Mediomatriciens ? Et ceile idee, nous ne sommes pas le premier k remelire ; car, au moyen-age, a Tepoque oil la manio des etymologies etaii poussce jusqii'h I'absurde , jus- qu'au ridicule, les savanis du lem|)s di.»aieni que le iiom de Mediomalricien provenaii de ce que I'eglisede Meiz elail l;i mere commune, Medm mater, enire les peuples de Treves, de Toul ei de Verdun (^2). Sans donner h cefail plus d'importance qu'il n'en menie, nous dirons que si I'Dn comparail enlre elles les iradilions des di- verses eglises, comme nous le faisons pour quelques- unes, on verrait surgir de rensemhli! de ccs iradilions, que la predioaiion de I'Evangile dans les Gaiiles esl semblable a un fleuve qui s'est creu^e des son origine nn lit regulier, el donl les eaux out acquis d'auiani plus de volume que des arteres plus nomhreuscs s'e- chappaienl de son sein pour porler la vie dans Its lerres les plus inl'erliles. Ceile iradilion a ele adopiee par ioui le moyen-age. (1) Voye/, notrc (radiiclion de VAlsalia illustrala, tomes i, 14, III, passim. (2) Loc. cit , loui. I, (lage 103, §21. — 432 — Ellc a ele ropiodiiiie noiammenl par Huguos de Flavigiiy, dans sa chronique de Verdun (i), par Vin- conldc Beauvais (2), par Pierre do Natalibus (5), Elle a ele sanclionnee par les marlyrologcs. Pierre do IMarca I 'a adoptee avec empressemenl : « Les habilaois de Metz, dii-il, revendiqueroni saint Clenieni, d'apres les actes ou Paul Diacre , ecrivain donl i'auloriie n'(Sl pas a mepriscr, a puise son re- cil (4). o Longueval lui-meme a ete oblige deconvenir que le catalogue des eveques de Metz est suffisanl pour con- tinuer la succession depuis le temps des apoires. Enfin, de nos jours, un savani modesle, M. I'abbe Chaussier, superieur du pelil seminaire de Melz, a pu- blic, dans la Palrologie de I'abbe Migne, un travail remarquable sur Taposiolat de saint Clement au temps de saint Pierre, ou sont solidement refutees loutes los objections des novateurs. Nous ne saurions irop en- gager les personnes qui, pour eire convaincues, ont besoin de preuves serieuses, a lire celte savanto dis- sertation. (1) Apostolus Petrus, eligens viros in fide probatos direxit urbi Metensium sanctum Clemenlem, Romanae reipublicae patri- cium. [Labbe, Nova Bibliotheca, tome i, page 77.) (2) Specul. Histor., lib. ix, cap. xlii. (3) Catalog. Sa7ict., tome x, cap. cxiii. (4) Clementem a Peiro apostolo missum sibi yindtcabunt Me- tenses, ex aclis unde narrationem suam hausit Paulus Diaconus, mediae astalis et non conlemnendae auctorilatis scriptor. ( Letlre a Henri de Valois.) — 433 — § XV. EGLISE DE BESANgON. — SAINT LIN. En parlanl de la mission de sainl Crescent, nous avons dii qu'une tradition non interrompue attribuaii a sainl Lin la fondaiion de I'egllse de Besan^on. M. Jacquenel , ancien direcleur el professeur de dogme an grand scminaire de Besan^on, auleur d'une savanie hisloire de cetle commnnaiile, a bien voulu nous fournir la note suivanle, ou la veriie de celte assertion est demoniree : « Au siecle dernier, sainl Lin subil le sort des aulres envoyes des apolres dans Ics Gaules. Marchanl sur les traces des novaleurs, qui faisaieiil des lors la revolution a leur maniere, Dunod ouvrit son Hisloire de Veglise de Besaugon par une dissertation ou il s'ef- for^ail de ruiner I'ancienne tradition de cetle eglise el d'y subsliluer I'opinion nouvclle. II cmploya pour cela k's nioyens familiers a I'espril de parti. II lii appel aux progres de la critique ei de la science hislo- rique, taxu d'ignorance quiconque se permetlrail de- sorinais de penser autreinent que lui, el crul pouvoir se flatter d'avoir prouve que les fondaleurs de I'eglise de Besancon ne venaieni pas de Borne, mais de I'Asie. Dunod avail publie son livrc en 1750. Onze ans apres, en 1761, parnl, sous le nom du cardinal de Choiseul, le nouveau Breviaire de Besangon, oil I'on reduisaii en pratique la belle decouverle de noire hislorien. On abaissait I'office de sainl Lin du rii double au ril semi-double ; on reiranchail les lemons de deux noc- lurnos, (M on supprimaii de la legcndc du sainl tout — 434 — cequi allesiaii sa mission apostoliqiie. Pour compleicr la manoeuvre, on elevaii le rii de I'ofilce des sainls Ferreol el Ferjeux ; de patrons parliculiers de la ville de Besangoii, on en faisait les patrons du diocese lout eutier; el on n'epargnait rien, ni dans les leg<^ndes, ni dans les hymnes, ni dans la prose, ni meme dans les collecies, pour persuader qu'ils eiaienl les premiers apotres de la ville de Besan^on, On n'y reussil que trop. L'esprit novalcur, qui avail pour lui I'aulorite a defaut de raisons, etouffa les prolesialions courageuses, qui ne manquerenl pas cependanl; el une verile que les anciens avaienl conservee avec lant de soin, alia en s'ohscurcissani de plus en plus, jusqu'a ce que Torage de la Revolution i'enveloppat de ses lenebres. » Elle y fill voilee qiielque ten)ps, mais elle ne de- vaii pas y rosier en&evelie. Le bonheur de la remellre en lumiere eiait reserve a I'auteur de I'Histoire du Seminaire de Bemngon. Dans la premiere livraison de eel ouviage, publiee en 1854, on lit en effei que saint Lin I'ul en\oye a Besangon par saint Pierre, le prince (\c^ i^poires, vers I'an 54 de I'ere chrelienne. Voici, en substance, quclquos-unes des raisons qui onl en- gage I'auleur a se separer, sur ce point, des historiens ses compalrioles qui avaienl ecrit immediatemenl avant lui, raisons qu'il developpera, avec d'autres encore^ dans une dissertation speciale renvoyee a la fin de son ouvrage. h On pent d'abord opposer au novaleur Dunod ioute la suite des bisloriens Franc-Comtois qui rent precede. Pour commencer par uo Ai'i^ auteurs les plus voisins de lui, Ferdinand Lampinci, conseiller au Parieraent de Besangon, qui ecrivait, dans les pre- mieres annees du xviii'^ siecle, sa Bibliotheque S6qua- — 435 — noise, precieux maiiuscril de la bibliolheqnc de la ville deBcsao^on, se plait a presenter I'opinion de I'aposto- laldesaini Liti conime conslante de son lemps. Avani lui, Giraidol de Beaiicliemin, dans VHistoire de la guerre de dix ans; Chifllel, dans le Vesontio, el les aulres jusqu'a Gollui, Tauieurdes Memoires historiques de la Republique Sequanoise, qu'on pourraii appelor le pere de I'hisioire do la Franche-Comle, se font, de leurs Icmps, les lemoins de celie opinion. Reprenanl ensuiie les ancicns catalogues des arclieveques de BesanQon, on remonle jiisqu'an xi^ siecle, jusqu'a rarcheveque Hugues 1", un des plus grands preials qui aient occupe le siege de Besangon. u La liluigie, donl on s'eiait fail nne arme conire I'ancieone irndilion, ne donne pas aux novateiirs un demenli moins formel que I'hisioire. Ainsi, rofllcc de sainl Lin, tel qu'i! se recilail a I'epoque du changeinent impose par le cardinal de Clioiseul, el lei qu'il se voil encore dans le breviairc d'Antoine-Pierre de Gram- mont, etail du rii double ; el dans la legende du sainl, qui formait les trois legons du second nocturne, on lisail ce passage remnrqiiable : « In ecdesia Bisuntina a priinwca hactemiaque conlinuala Iradilione, habetur Linum a beato Peiro aposlolorum principe in Gallias missum, primum omnium Sequanis el maxinie Veson- tione Evangelium JecU-Christi prcedicasse, ibidcmque aliquot homines ad veri Dei cuUum converlisse. » Voila le lemoignago que repeiaient, chaque annee, lous les prelres du diocese ! Voila commeni s'enlrelenaii vj- vanie el se perpetuail la tradition, si honorable pour I'eglise de Bcsan^on , qui en faisait une fille de I'e- glise Romaine ! On comprend le soin que mil a sup- |)rimer el a faire otiblicr de scniblables paroles, une — 436 — scclo qui nt* tenail plus au centre tic I'unile calholiquc que par una inconsequence. » Du reste, le breviaire d'Anioine-Pierre de Gram- nionl ne laisail que reproduire I'ancienne doclrinc lilurgique sur I'apostolai de saint Lin. En renioniant les siecles, a I'aide de ce nouveau fil de la tradition; on retrouve le fail de eel aposiolat dans les plus an- ciens breviaires imprimes, puis dans les br6viaires manuscrils, nctamment dans un exemplaire ires ancien cite par Lampinet, et on arrive ainsi une seconde fois jusqu'au xi'' siecle. T> II est deja incontestable que la tradition de I'apostolat de saint Lin remonte sans interruption au XI* siecle. Dunod lui-meme est oblige d'en convenir. 11 fixe a ceite epoque le changement de I'opinion pri- mitive, qu'ii dit el re la sienne, et il ne craint pas de le rejelor sur I'archeveque Hugues I". Mais quelles preuves donne-t-il a I'appui d'une aussi grave asser- tion? Les principales, les plus fortes en apparence, sont un lexle du riluel, attribue & saint Proihade, el rinterpretalion, a sa maniere, d'un passage du concile de Verdun-sur-Saone , celebre dans les premieres annees du xi* siecle. » Au jour de la fete des saints Ferreol el Ferjeux, le rituel appele de saint Prothade, dit, il est vrai : Hi sunt per quos ad fidem venimus, per quos salutis viam cognovimus. Mais, outre que ce texte pourrait bien se concilier avec I'opinion favorable a I'apostolat de saint Lin, en recourant a la pensee de Tertullien : Semen est sanguis martyrum, lo rituel , ou mieux le rubricaire dont il s'agit , non seulement n'a aucun caraciero d'authenticite , mais il porte meme des marques visibles de supposition. Ainsi, par cxemple, — 437 — ■on suit dans co rlliiel, non pas raiicien rit gallicaii, mais le ril romain, eiablil sous Charlemagne, cl on y meniionnc la monioire de la consecralion do Taulel de la calhedrale de Sainl-Elienne par le pape Leon IX, on 1048. II ne peul done pas avoir pour auieur I'ar- chcveque saint Prolhade, qui occupail le siege de Besan^on au commencemeni du vii* siecle. » La seconde preuve n'a pas plus de force. Les acles du concile lenu a Verdun-sur-Saone renferment le passage suivanl : « Burchardus, Lugdunensis eccle- si(B archiepiscopus y hoc pads fwdas in concilio Vir- dunemi conslituit , residentibus ejus episcopk, scilicet Vallerio archiepiscopo Vesunlionensi, Elmuino cpiscopo Eduensi, Lamberto episcopo Lingonensi, Golsemo Ma- tiscensi, Gaulfrido Cabilonensi, Hugoiie prcBsule Anlis- siodoremi, Beraldo Suessiunensi, etc. » Dunod , aide deDu Cange, croil decouvrir dans le mot residentibus, une idee de sujeiion, el suppose que Tarcheveque de Lyon, sc prevalanl peul-etre de la mission des sainls Fcrreol cl Fergeux par saint Irenee, voulait exprimer par la sa suprematie sur le siege de Besangon. Pour s'y sousiraire, Hugues 1" n'aurait rien imagine de mieux que la fable de I'aposlolat de saint Lin. Mais, sans parlor de la violence faile au lexie, c'est irans- former en lanssaire un saini el savani prelal, que Ic bienheuroux Pierre Damien el le pape Leon IX hono- rerenl de leur amiiie. C'esl d'ailleurs oulrager gralui- Icmenl sa menioire. Hogues \" possedaii une bien nieilleure sauvogarde de sos droits, s'ils ousseni eie menaces, dans le temoignage du pape saint Leon-le- Grand, qui, en relablissant I'arclieveque Celidoine , depose contrele droit par Hilaire d'Arles, avail declare, en 444, que le siege de Besangon ne reconnaissail d'autre primal que le souverain pitniifo. — 438 -- » Nous pouvons done contiiiuer sans embairas noire tnarche ascendanle. Parian! du xi" siecle , nous re- monlons jusqu'oux temps aposloliques, non plus a I'aide de documenis ecrils, mais an moyen de docu- menls archeologiques, donl I'aulorile n'esl ni moios forle, ni moins cerlaine. Pour en donner quelques exemples, nous pouvons ciier enlr'autres les quaire colonnes du Pantheon Bisontin, qui siipporlaienl les quatre grands dieux admis par nos ancelres idolatres, el donl I'une ful renversee par la parole foudroyanle de sainl Lin. Qu'il s'agisse la d'un miracle ou d'un symbole, il n'en esi pas moins constant que le souve- nir de la mission aposiolique de sainl Lin resia loujours uoi, dans I'espril quos- qne divini rerbi pr.Tcorii^s ordinaTit ; qui a se in Calliam dirigendi, — 440 — e done plus dans la balance. lis relevenl ensuito divers fails inexacls, conlenus dans les legeiides, pour argner du pen de contiance qu'on peul avoir dans ceux qui les oni ecrites. Mais, de ce que les peinires du moyen-age out represenle les personnages de I'ancien cl du nouveau teslamenl avec les costumes que Ton portaii au xiV el au XV' siecle, il ne s'ensuit pas que les fails reproduits sur leurs tableaux ne soieni pas exacts. De ce que les legendaires onl accueilli Irop facilemenl quelques fails denatures par la croyance populaire, il ne faul pas en conclure que le fond meme de leurs reciis soil de pure imagination. Sans doute, il seraii icmeraire d'ac- cepler tout ce que les agiograpbes onl ecril sur I'an- liquite des eglises; mais lorsque la tradition d'une metropole a eie adoptee dans divers pays qui n'ont entre eux aucune relation, il faul I'accepler, car cetie unaniniile seule demon ire qu'elle est vraie. Une ira- diiion fausse surgii ^ un moment donne, el, si elle se repand, elle irouve des deiracieurs des son origine. Or, ici, rien de semblable. On ne dil pas & quelle epoque I'erreur a romplace la verity, el par quels moyens elle a trouve creance dans des eglises qui n'avaienl aucun inlcrel a I'accepler. Les Bollandistes s'appuieni encore sur I'autorite de Gregoire de Tours el de Sulpice Severe pour prouver que la mission de saint Mansiiit ne saurail daler des temps apostoliques. Nous avoiis deja demoulre qu'il y avail peu de fonds a faire de Gregoire de Tours et I li 'I t - 4^3 — (le la legentle de saint Saliirnin cilee par ces savanls. Ce n'esl pas le lieu de disculer le texlc do saint Sidpicc quo nous aurons a examiner jdus lard. Nous nous borncrons 6 consialer ici, que les docies conti- nualeurs de I'oeuvre de Bollandus , ap|)rociant ces documents a lour juste valour, en recusent complete- ment aujourd'hui Tauioriie. Bollandus s'etail appuye sur eux pour rejoi,«r au iii^ siecle laposiolai de saint Rlaierne; le Pere Van Hock, qui a commente, au viii" volume d'Octobre, la vie de saint Firminin, I'un des successeurs de saint Materne sur le siege de Treves, le Pere Van Hock, disons-nous, a abandonne sur ce point les traces do son illusire maiiro, el retabli a sa veritable date la fondaiion des eglises do Treves , Tongres, Mayonco el Cologne. Ainsi se detruii pru a peu I'^chal'audago dresse au xvir et au xviiie siecle par De Launoy ei "ses disciples. Les oiigines des eglises, mieux etudiees, se dogageni peu 6 peu de I'obscurite (jiii les enveloppe; les tra- ditions , depouillees de ces legendes parisites qui les elouffaieni, reviennont a leur simplicile premiere, el chaque jour, les travaux des Baropius, des De Marca, rcQoivenl une plus eclaiante consecration. L'eglise de Toul a pieusemcnt conserve sa Iradiiion, que I'un do ses evequos, le grand Leon IX, le saini precurseur d'Hildobrand, avail reveiue de sa sanction. Aujourd'hui, si quelque erudit cnireprenail pour elle ce qu'onl fail pour saint Martial I'abbe Arbelot, pour saint Julien du Mans M, le cbanoine Loihin, pour saint Clement de Metz M. I'abbe Chaussior, pour sainte Marie Madeleine el les eglises du n)idi M. I'abbe Faillon, il sorait facile de faire jaillir des lenebres une lumiere assez vivo pour convaincre les hoinmes qui chercbcnl de bonne foi la veriie. — 444 — § XVII. SAINT SAINTIN. Eglises de Verdun et de Meaux. Les ei-lisi's do Verdun et de Meaux reconnaissent s,»inl Saintin |)onr leur fondateur, el une tradition qui n'a jamais varie, veut que cet a(i6tre ail ele un disciple de saiiil Denis. L'auleur anonyme (1) de VHistoire ecclesiasiique et civile de Verdun, piibliee en 174S, le declare dans les ternies les plus formcls. « II est certain que saint Saintin, fondateur de » Teglise de Verdun, etait disciple de saint Denis, pre- » mier eveque de Paris. Ce fail est roconnn indubi- » table par la tradiiion consianto, unifornie et generate » de cetie eglisc. Berlaire el Laurent, de Liege, nos B chronologisies les plus anciens, assurent avoir lu « dans plusieurs de nos monumenis, que ce saint » eveque elail disciple de saint Denis de Paris. Hugues » de Flavigny qualifie Saintin le compagnnn fidele de » saint Denis, Tapotre de la France. Wasbourg dit la » meme chose avec lous les aulres auleurs qui onl » parle de noire premier eveque. » Berlaire, I'un des ccrivains cites par noire auleur, 6iait pretre de Verdun, el it redigea vers la fln du ix* siecle, une hisioire des premiers eveques de cetie cglise. Vers le m6me temps, notre archeveque Hincmar (1) Cel auleur esl I'abbe Ronssol ; son travail a ele relouche jjar I'abbe I.ebncuf. I — 445 — ecrivait a IVinpeieur Charles-Ie-Chauve, que saint Saintiii avail eie nomme par saini Denis, d'altonJ eveque de Cliarires, et ensuile fneqiio de Meanx (i). Plus tard encore, celle tradition a eiesiiivie par Pierre de Nalalibns (2). par saint Anionin (o), el elle a regn i'approbaiion de Baronius (4). f)ans sa disserlalion snr I'aposiolal de saint Mar- tial, M. I'abbe Arbelol dit aussi (5) : n Lps actes de saint Sainlin , premier eveque de )> Meaux, actes que Hugnes de Menard , an dire du » P. Bonavenlure, prouve eire plus anciens que Gre- » goire de Tours, aliribuent a saint Clement la mission » de saint Denis, et font ordonner par le |)remier » eveque de Paris, saint Sainlin de Meaux. » Aujourd'bui qu'il est demontre que saint Denis a ete envoye dans los Gaules par saint Clenieni, on de- vrait pouvoir dire avec certitude que I'eglise de Verdan date du premier siecle de I'ere cbrelienne. II n'en est pas ainsi cependant. Bertaire, apres avoir raconle comment saint Sain- lin, eveque de Meaux, vint a Verdun apres la mort de saint Denis, ajoute : « Mais on lit dans la vie de saint Servatius, que saint Sainlin, eveque d^' la ville des Cloux (ou pour mieux dire des Claviens, urbis Clavo- rum), assisia au concile de Cologne, qui prononga la (1) Destinatis quoque sociis per dirersas civitates, Dionysius Sanclinura ordinavil cpiscopuiu et Carnotum misil ; postea Tero Meldensium civitati pastorein et episcopum esse constiluit. {Surius, 9 Octob. , edit. 1618, page 131 .) (2) Catalog., lit*. ?iii, c. viii. (3) St-Antonin. Part. 1, lib. vi, cap. xxviii, § i. (4) Martyrol. 22 sept. (5) Page 172. — 446 — (lepo^iiioii il'Eu|»liialas (1). » Or. le coiicile de Cologne sc lint en 3.47 C-i). L'auieur anonyme que nous cilions loul a I'heure s'osl scrvi (le ce passage pour rcculer au in' siecle la mission de sainl Denis, el, cnmme on doil le prevoir, il s'esl appuye, dans celle circonslance, sur le passage de Gregoirc de Tours que nous avons deja si sonvenl rappele, el sur I'autorile de Sulpice Severe (3). II nous sembie que cetie opinion ne saurail sou- teiiir le moindre examen. Nous ne rappellerons pas ici que Texislcnce du concile de Cologne a cle nice par un grand nombre d'auieurs ; nous admetlrons , si Ton vent , que rien n'esi plus inconieslable ; nous irons plus loin, el, pour un inslani, nous dirons avcc tons ies novaleurs que sainl Denis n'a pas ele I'envoye de sainl Clement ; qu'il lui est bien posierieur, el que sa mission dans Ies Ganlis ne dale que de I'au 254, comme ils le prelendenl. Mais alors, nous aurons le droil de laire remarquer (t) Nam legilur quod sanclus Dionysius Sanclinuiri Meldensem ecclesiat! episcopum el Antoniuin prosbyterum mitterel, cum geslis passionis suae Romam ad sanclum Clemcntem , el iter illorum fuissel per islam civitalem, el iu euodo ac ledeuudo, hie primum prwdicasseiil verbum Dei. El ferunt quod idcirca in ordine cpiscoporum islius ecclesiaj primus ponatur. Legilur vero i» Tila sancli Servalii episcopi, ubi de Agrippinensis ecclesia; archiepisco.^i depositione res agitur, quod iulerfuisse! Sancliuus, urbis ClaTorum episcopus. Ubi (amen ejus corpus sepullum sit nusquam reporimus nisi Mcldis. - Luc. Dacherii Spii;ileg.,l.xu, page 252. (2) Egidius Boucher, dans sou Belgium Bomanum, lib. i.x, cap. VI, el BebcUus, Antiquit. Germ, primw, page, 80, disent qu'il cul lieu en 349. (?) Dissertation preliminaire, passim. 447 que, de cello epoqiio ;» cello do la loiuie dii coiiciie do Cologno, il s'est ecoule 96 ans, ol qu'il esl impos- sible que sainl Sainlin, consacre par sainl Denis, parvenu dejii par consequent, en 254, a un age au moins voisin do la maluriie, ail pu vivre ossez pour avoir vu la deposition d'Kuphralas. Done, si saint Sainlin esl un disciple de sainl Denis, el porsonne ne le contesie, quelle que soil la dale assignee a la mission de I'apolre dc Paris, qu'il ail vecu du temps do sainl Clemenl on du lemps de Dece, siinl Sainlin esl anierieur au concile de Cologne; done aussi , son nom , inscrit dans la legende dc sainl Servaiius, no saurail amoindrir I'autoriie de la tradition. Mais, dira-l-on , Hugues de Fiavigny a eie oblige de reconnailre que, dans le catalogue dos eveques de Verdun, il n'exisie que irois prelals entre sainl Sainlin el saint Pulchrone , qui vivail en 450. Nous pourrions repondre que Wasbourg (1) pretend avoir Irouve les lombes de huii eveques poslerieurs a sainl Pulchrone; mais, bien convaincu quo si nous voulions irop prouver, nous provoquerions riucredulilc du lecteur, nous feruns remarquer que les lacunes des catalogues demonlrenl, non pas que les eveques n'ont pas exisle, mais (tlus simplemenl que lour memoire a peri. Du resle , comme cello objection a etc faite contra I'eglise de Reims , nous y reviendrons d'une mani^rc plus speciale dans ia seconde parlie de ce memoire, (1) Antiquitez de la Gaule Belgique. Paris, ib'i'i. — 448 — § XVIll. SAINT LL'CIEN DE BEAUVAIS. SAINT FIRMIIS d'aMIENS. Une confusion idenlique a cclle que nous veiions de signaler, obscurcil riujioire do sainl Lncien. La iradiiion de I'eglise de Beauvais ti'a jamais varie. Ella a loujours proclanie que sainl Lucien etail venu dans les Gaiiles avec saini Denis, sous le ponlifical de sainl Clement, landis quo des traditions etrangeres nc font venir saint Lucien a Beauvais que vers la (in du III* siecle, sous Tempire de Dioclelien et de Maxi- mien. Nous avons done a examiner la valeur de chacune de ces assertions. La premiere est mentionnee dans les actes de sainl Lucien ; el ces actes sonl Ires anciens, puisqu'ils sonl cites parFlorus, moine de sainl Trond, dans ses additions au Mariyrologo de Bede. Or, Florus vivait en 760 (1). . On lit dans la viede sainl Denis, ecrite en 818, par Meihode, patriarche de Constantinople, que sainl Cle- ment envoya sainl Denis dans les Ganles en sociele de sainl Lucien, de sainl Ruslique et de sainl Eleu- ihere (2). Ce fail se irouve consigne encore dans les (1) Florus in Martyrol. Bedw, 8 Jaouar. (2) AquiUoiae partibus misso S. Saturnino, ipse Diooysius cum S. Luciano, et S. Ruslico, ct S. FMeutherio Luletiam Parisiorum venit. Sanclus aulem Lucianus, presbylerii honore oruatus , ad BelioTacensem urbem missus est. (ActaSS. Januarii, Tom. i, p. 46). j I — 4M) — ados dc saiiil Doiiis. ciies an concile do Liinoges, en 1051 (1). En 850, Odon, eveque de Beauvais, professail, dans un discours qui est venii jusqu'a nous, que sainl Lu- cien, disciple de sainl Pierre, avail eie ordonne par sainl Clement, el envoyo dans les Gaules avec saint Denis (2). Dix ans plus lard, sainl Notker-le-Begue inscrivail celle iradilion dans son martyrologe ( 5 ). Elle elait ensuiie accueillie par Vincent de Beauvais, Pierre de Nalalibus (4), sainl Anionin (5), el consacree par le martyrologe Romain (6). La seconde iradilion se Irouve inscriic p el la dans quelques legendes dorii I'exaclilude, en ce qui concerne les deiails, est tres conleslable. Nous ciie- rons enlr'aulres les acies de sainl Queniin (7), ceux des saints Crepin fi Crepinien (, Crispini et Crispiniani, 25 oclob.) - 450 — I'ahbaye do Sl-Remi de Reims (I), el les ados de sainl Fuscien el de sainl Viclorin (2), Decesdeux iradiiions, nous ivhesilons pas ii choisir la premiere. Elle a eie reconnue pendanl lous les sie- cles; on n'en connali pas I'origine, on |)eut done sup- poser qu'elle rcmonle ii la naissance meme de I'eglise de Beauvais. Elle concorde parfaitemcnl avcc ce que nous savons de I'hisloire de sainl Denis el de ses compagnons ; elle est idenlique avec les Iradiiions des eglises du midi. La seconde, a» conlraire, ne repose que sur des do- cuments isoles, suspects pour la plnpart; c'esl ainsi que les aclcs de saint Crepin el de sainl Crepinien ne sonl accueillis qu'avec unc extreme reserve par les agiographes. Elle esl ei) opposition avec ce que nous savons des origines de I'eglise d'Amiens. Saint Fir- min I", premier eveque de celle ville, a ele inilie a la religion chrciienne par Honeslus, disciple de saint Sa- turiiin, et sacre eveque par s;iinl Honore, successeur du meme saint Saturnin (5). Commenl admellro qu'il ail fallu un siecie el demi pour que le Christianisme se communiqual enire deux villes si voisines? §X1X. SAINT RIEUL DE SENLIS . Les Bollandistes out publie deux vies de sainl Regulus on saint Rieul. La premiere avail ete em- (i) Voyez les BollandUlcs, torn, ii de Juin , page 796, (2) Lougueval. llisl. de I'Eglise Galiicane, lom. i, aiin. 288. (3) Voyez Ic Gallia Christiana, lom. x, p. 1150 — 451 — pruiilde par cux a iin maiiusciil do I'eglise di; Saiiil- Omcr. Co manuscril, disenl-ils, elaii iros vieux (ex perveluslo codicc), la vie qu'il reiifermail paraissaii Ir^s ancienne el portail rempreinle do la veriie (1). La secondo se irouvail reproduite dans divers ma- nuscrils qn'ils avaieiil enlrc les mains. Ces acies disaicni unanimemenl que sainl Regiilus avail ole envoye dans los Gaules par sainl Clemenl, en societe de sainl Denis el dc ses compagnons; qu'il avail eie nn instant cvequc d'Arles; qu'iipres la morl de sainl Denis il elaii venu a Paris, cl qne, de la, il s'elail rendu a Senlis. Ces details eiaienl confnmes par la Iradilion con- slanle do I'oglise d'Arles (2) et par le Marlyrologe (IJ Voici ee quo conlienl cello vie : Bealus igiluregrcgiusque Chrisli alhlela Uegulus Argolica de- rivalus et exorlus nobililer prosapia, ut in anliquissimis reperiraiis pitaciis et chailis, largifliio divinae gratia; perfusus rore Romam obaccensiiin coelitusainorein apostolonim Petri et Pauli, tandem adiil, socialus veiierabilium coUcgnriim Dionysii, Riislici, Eleu- Iherii ciEteroruiuque conlubernio. Quorum aiilcm honorabile collegium sanclissimus B. Petri successor Clemens libenler hila- literque amplectens, Deo relulit, condignas gralias qui tam decoras et nitidas ad fulciendam nascentis ccclesife originem columnas vere immobilcs elegerat. (■2) On lit dans une histoire de I'egltse d'Arles, ecrile en 1690, par Gilles on Port: « Sainl Rieul ou saint Regule piil naissance a Nicee, en Rilhynie. On sail qu'il fut disciple de saint Jean rEvangeliste , qui Tordonna pretre, aOn qu'il piit annoncer I'Evangile a?ec plus de pouvoir. Ensuito, saint Rieul s'en alia a Rome, d ou Ic pape saint Clemenl I'envoya en France avec saint Denis I'Areopagile, qui etablit Rienl eveque d'Arles, pom conti- nuer ce qu'il avail si heureuseraent commence. Sainl Rieul se proposa saint Trophime pour modele, el travailla jour et nuit a enlretenir et a augmenter son troupcau. Un jour qu'il disait la raesse, il eut une inspiration que saint Denis, saint Rnstique et saint Eleuthere eiaient raorts pour Jesus-Chrisl. ., il prit la — 452 — Romain (I). Ki cependanl les Bollandisles ne furenl point convaincus. Toujoiirs, les lexies ile Gregoire de Tours el de Siilpice Severe flamboyaieni devani eux ei les forQaient a deiourner leurs regards de la veril^. Aiijourd'hui que ces lexies soul vides de sens, I'eglise de Senlis peul se glorifier, a juste litre, de ses origines apostoliques. §XX. CONCLUSION. Nous lerminerons ici cello partie de noire lache, lion sans jeler un regard de regret sur celle mine si fecoiide ou il reste tanl de riches filons a exploiter. En effel, nous aurions p» suivre saint Maximin a Aix, saint Eulrope a Sainles, saint Sabinien el sainl Poienlien a Sens (2), sainl Severien dans le Gevau- dan (5) resolution daller an pays ou its avaient souflfert le marlyre. Mais a?ant son depart, it choisit Felix, il le mit en sa place et se rendit a Paris » Puis, comme il connul que sa presence n'etail plus uecessaire a Paris, il passa a Senlis pour y etablir la Foi, et il y est mort 6v6que. » Cependanl, Aries ne laisse pas que do celebrer sa fete le 3 Mars, et de le reconnaitre pour son Iroisieme eveque. » (1) In caslro Sylvaneclensi , depositio S. Reguli episcopi Arelatcusis. (2) Voyez De Vera Senonum origine Christiana , par le Pere Malhoud, in-4% 1687. (3) Ex dirersis documenlis quae in archivis episcopalus Mima- tensis reperiunlur, elicitur, B. Severianum primo eidom eccIesiaB prsefuisse , et a D. Martiale ordinalurn , in haec verba : « Et post » Chrisli in coelnm ascensionem, praesidebat in Gabalilano et re- — 453 — Nous aurions Tail eiisuile une elude plus complele «ur saini Denis ei ses disciples, sur saint Taurin ^'Evreux (1), sur sainl Nicaise de Rouen (2); nous aurions monlre enfin comment, a mesure que la civi- lisation romaine s'etond, que les viiles se batissent et se developpenl, le chrislianisme, h son tour^ plante au milieu du peuple cetie Croix, phare eblouissani dont la lumiere doit indiquer aux nations le chemin de I'avenir. Mais, entrer dans ce champ si vaste, serail ecrire I'histoire ecclesiastique de la Gaule , et, certes, nous n'avons pas la lemerile de tenter une oeuvre aussi ardue. Toutefois, nous croyons en avoir dil assez pour demontrer que les traditions des principalos egliscs de France sont d'accord avec celles de Reims, pour faire remonler leur origine aux temps aposloliqnes ; nous pensons meme avoir suffisammenl elabli que nos » gionc eadem rex sive Tclrarctia, inOdelis et pagaous, omnera » tenens superioritalem et dominationem in eadem ; quo tem- » pore B. Marlialis ad iilam partem declinavil el coosccravit in » civilate Mimatensi capellara in honorera B. Maria; Virgiiiis. » Postea vero S. Severianus, qui fuit ibi primus episcopus, dic- B lum regera sive Tetrarcham , ad fidem calholicam convertit, » et eumdem baplizarit. » Ex quibus monumentis aulhenticis colllgimus B.SeTerianum fuisse primum episcopum Miraalensem. (J. Chenu , ap. Acta SS. Tom. ii, Jan., pag. 015. ) (1) Denique dum Sixlus pa( a in sede aposlolica resideret , el ..tlins Adrianus rerapublicam gubernarel , plenus dierum et virtutum (S. Tanrinus) , idus Augusti de coelo Tocalus est. ( Or- deric Vilal. Histoire eccles., li? v.) (2) Les auleurs du Gallia Christiana , discnl que saint Nicaise parait avoir ete ordonne ereque par saint Denis, de Paris. . M. Fallud (Hist, de lerjlise Tnelropolilaine de Bouen , lorn, i, pag. 15j place I'aposloiat de Nigasins fNicaise; a I'an 110. •1 — 454 — premiers missiomiaircs , en so ropandaiii dans la Gaiile, ne soni point parlis de Rome au liasard, sans direciion arrelee, comme ces images que lo vonl pousse ol qui laissenl lomber an gre de son caprice les ondcs bicnfaisanies recelees dans leurs flancs. L'evangeli- salion de la Gaule, du monde ooiicr, s'esi faile d'apres un plan con^u par saini Pierre ei les apoires. Ciiacun de leurs disciples a rcQU un mandai special, deiermiue, donl ils ont prescril el surveille Texeculion ; en un moi, des le jour ou le prince des apoires esl devenu la pierre fondamentale sur laquelle esl baiie I'Eglise, loute impulsion pari de Rome; la ville elernelle esl le soleil imn)obile auiour duquel graviie la chr^lienle lout entiere, cl Innocent I"^ pout dire avec raison : « 11 n'esi aucune eglise qui n'ail eie fondee par saint Pierre el ses successeurs. » Nous deplorons ameremenl que celte verite n'ail pas ete mieux comprise par les hisioriens des deux derniers siecles. Loin de prendre le mouvemont a son origine et de le suivre dans ses developpemenls, ils se sonl gen6- ralemenl attaches a etudier I'liistoire speciale de chaque eglise, sans se preoccuper meme des institutions civiles qui regissaient le pays; et, comme I'ignorance et la cre- dulite avaienl denature les acles primiiifs de ces eglises, les legendes des sainls qu'elles honoreni, ils se sonl servi des erreurs que le scalpel de leur critique mellail h nu, pour rejeter dans son ensemble la tradition, er- ronee seulemenl dans ses details. Au lieu de proceder par analyse, il fallail employer la synihese, etudier, par exemple, I'bisloire des pro- vinces de la Gaule, lelles qu'Auguste les avail failes; ils auraienl vu ainsi les defauls qui choquaicnl leurs yeux — 455 — s anioiiidrir ci disparailre dans iin onscmblo harmo- nieux , comme une branche niorle se cache aii seiii d'nrie masse de verdure. Le mal qu'ils onl fait par leur m6thode esl immense. Des qii'un auleur en renom a propage une doclrine , la foule raccueille sans la disculer, el lorsque, plus lard , line voix s'cl6vc pour s'ecrier que celle doclrine esl erronee , nul no I'eniend, C'esi en vain qu'on cite les lexles, qu'on accumule les preuves ; le mailre I'a dil ! el, comme les hommes qui ecrivenl I'hisloire generate d'un pays n'onl pas le loisir d'eludier par eux- memes lous les documents speciaux, qu'ils sonl falale- menl obliges de s'en rapporter a ce que d'aulres onl aifirme avanl eux, ils adoplenl Topinion du chef d'e- cole de preference a celle de I'liumble Iravailleur, son- venl |)lus erudil que le mailre , el ils prelenl ainsi une force nouvelle a une erreur deja Irop accreditee. Que de fois n'a-i-on pas proiesle conlre De Launoy €l son ecole ! Que de fois n'a-l-on pas demontre qu'ils elaienl en coniradiclion avec la iradilion , avec les fails ! El cependanl, malgre des labeurs incessanls, le champ de rhislfi celebre ediloiir do Gregnire de Tours I'avail dil avani nous : « Cenx-l;i se Irompeni, j'oso I'affirmer, qui croienl qu'eti pailani con)mc il I'a fail des marlyis de Lyon on des scpl eveques envoyes sous Decius dans les Gaules , . Gregoire de Tours a voulu dire qu'il n'y a pas eu avanl eux do aiariyrs ou de herauls de la parole divine (i) » On a longueineni el compendieusemenl discuie sur ^e texie suivanl de Sulpice Severe (2) : « Sous Ift regne d'Anlonin-le-Pieux, la paix regna sur les eglises. Ensuile, sous Marc-Aurele, Cls adoptit' d'Anlonin , eclala la cinquieme persecution. Ce I'ul alors qu'on vii, pour la premieic foi , des martyres dans les Gaules; la religion chreiienne ayanl etc reQue lard an dela des Alpcs. » C'esi encore la un de ces faniomes que I'ecole dt'S scepliques a evoques, el devanl lescjuels on a long- temps rccnie; en marchant a eux comme font fail quelques erudils de notre epoque, on eul, des I'ori- gine, reconnu que sous celte formidable apparence, il n'y avail quo le vide el I'errour. (1) Dom Ruinail, edition de Gregoire de Tours. Preface, n" 61: « Id afflrmare ausini fall! cos qui Giegorium esislimant ita (le marlyribiis Lugdunensibiis, aut de septem episcopis (juos sub Decio adventasse scripsit, locultim fiiisse, ill anle illos aut niar- t;^res, nut alios divihi rerbi praecoues adrcnisse oegaverit. » (2) Sub Aurelio delude, Anlonini filio, persecutio quinta agitata : -{ic turn primum intra Gallias uiarlyria v'^a; serius trans Alpes Dei religione siiseepla. — 4Gf — Exainiuous tL-.c, ce que signilienl reellemeni cliaciui ties deux membres de cello phrase : 1° Turn primum intra Gall las martyn'a vina. — 2" Serius Iraiis Alpes Dei religione smcepla. On a dej^ fail reinarqiicr (I) (pie Sulpice Severe se sen do I'oxpression martyria et non de celle de marlyres, el I'on en a conclu qn'il a voulu parler des marlyres i^eneranx , des massacres on masse, lorsque dos ponlifi^s fnrenl egorges, avec des irou- peaijx de fnleles, par auloriie jtublique el en verlu des edits dos enipereurs. « Sulpice Severe, dii-on (2), fail allusion aux perseculions sanglanlos des eglisesde Lyon el d« Viennc qui eiironi lieu sous Mare-Aurele, I'an ill, lorsque, selon los expressions de Gregoire de Tours, une si grando inuliiiudo do fideles I'ul egorgee que des fleuvos de sang clireiien ruisselaienl dans les places pubiiques, ce qui se voyaii en effel dans les Gaules pour la premiere fois. Mais cela n'empeche pas que, avani ceiic epoque, quelques bommes aposio- liques, quelques poniifes comnie saini Deni'-^, quelques vierges chreiienues, comme sainie Valerie, n'aienl ele condamnes el mis a inorl par suite de la baine do quelques pariiculiors conlre la religion cbreiionne. j> On pourraii en oulre faire remarquer, avoc le pere Van Heck, qu'avani saint Polbin I'eglise do Vienne reconnall un auire martyr , Zacbarie , son second 6veque, dont la fete se celebre le 27 Mai. Toulefois, celle explication du lexle de Sulpice- Severe ne nous saiisfaii que mediocremeni, el nous (1) Longueval. Dissertat. preliminaire sur I'histoire de I'Eglite Gallicane. Page lxu. (2) L'abb^ Arbelol. Dissertation sur I'aposlolal de saint Mar- Ual , page I2G. - 462 — preferotis dire puremeni el siniplenient que Sulpico Severe s'esi liompc on qti'on reiilend mal. En effel, Sulpice Severe vivail an v« siecle. Or, un ecrivain do ^011 tcii)|.s. Paul Orose, dil que Neron fit perseculcr les chreiiciis dans louies les provinces (1). La Gaule elail une province romainc; done, s'il y a en des Chretiens dans les Gatdes du leiops de Neron, its oni eie viclinios de la barbarie de ce lyran. Mais il n'y en avail pas, repondroni nos adversaires, irans Alpes Dei religione serins suscepla ! Enienilons-nons bien sur la valeur du mot suscepta. Le verbe suscipere signifie accaeitlir, agreer. Snlpice Severe n'a point vonin dire, peul-elre, que le chrislia- nisme n'avail etc prechc (jue tardivomenl dans les Gaules; il a seulement preiendn que la population n'avaii 1,'Oiite que lardivement cette predication. C'est en elTet I'exacie veriie. La Gaule, conquise par Jules Cesar, nioins de soi- xanle ans avant la naissance du Sauvcur, venail a peine d'etre divisee en provinos par Augnsie, lorsquc les apoires se dispersereni pour annonccr a toute la lerre la parole de Dieu. L'administration romainc s'elablissail & peine dans les cites, el la oii les legions du Dictalenr n'avaieni point campe, I'usage du laiin elail presque inconnu. Les disciples envoyes par les apoires elaienl, pour la plupart , des citoyens romains , nc parlani que la langne laline. En arrivani dans les villes de la Gaule, ils furent obliges de constiluer le noyau de leur Irou- peau parmi les latins que les intereis de I'empirc ou (1) Primus Homse Chrislianos suppticiis el morlalibiis affecit , ac iieromiies provincias pari persecutione excrticiari iraperavit. I'es besoins du coniinerce y r.vaieiit (ixos ; piii^, a premier groupe ci;ibli, ils chercheroiii, ^oil par eiix- memes, soil par leiirs adopies, h lecruler des neophilcs dans la |)opula(ioii ganloiso. Ce travail d'inilialion domaiida uii coriaiii laps de lemps, el . pcndaiil iiiio periodo assez longiie, les evcqiies dnreiii i)ori)or lours soiiis a cenx do leurs disciples qui elaieni renfermes dans reiiceiiiio des villes. L'acces des campagnes n'eiaii pas facile: cliez les Gaels conime chez les Beiges, la popiilaiion agricole elail reduiie a I'eial de servage. Ce n'elaii pas I'escla- vage remain , car a Rome lo maiirt; pouvail disposei de son esclave comme d'uno proprieie mobiliere, landis que dans la Gaule, le serf elaii aliache a la terre el ne pouvail changer de maiire qu'avcc elle. Celte po- pulaiion eiaii plus qu'a demi-sauvage. i'Jle avail pen de sympalliie pour ses vain(|ueurs, el elle (eur [)referail de beaucoup les Germains, qu'elle appela plusieurs fois dans les Gaules, et noiammenl en Belgique, du temps de Cesar. Anssi ne s'empressa-l-elie jamais de s'iniiier aux mysteres du latin : au\ temps merovin- giens memo, on vnii encore. des eveques Gallo-romains se [)laindre d'etre obliges de iradnire leurs sermons dans un langage barbare qui leur dechire le gosier. — De la ces progres si lenis du chrislianisme; de la aussi I'origine de la qualification de paiens donnee aux idolatres. La circonscripliim rurale, chez les romains , s'a[)- pelail Pagus, ses habitants Pagani; ce noni de Pagani forma celui de Payen, landis que, dans son appellation propre, il n'eui du signifier (pie paysaii. — /|6/i — A I'appui lie (Jregoirc dc. Tours ei do Siilpico Se- vere on a rcpioduil uiie leiire que les peres du deuxieine concile de Tours ecrivaieril eo 567 a sainte Radegonde : « Cutn ipso catliolicse rcligionis exorlu coepis>ciil Gallicanis in liuibus venerandse fidei pri- inordia respirare, el adhuc ad paucorum noliliam tunc ineffabilia pervenissenl Triniiaiis Dominicae sacra- nienla ; ne quid hie minus aoqiiirerei, quam in orbis circulo prsedicantibus aposiolis obiinfrei, B. Mariinum peregrina dc slirpe ad illumiiiaiionem palrise dignalus dirigere, misericordia consulenle. Qui, licel aposlolo- ruin tempore non luerit, lamen aposlolicam graliam non efl'ugil. » CcUe k'Hre memo ct-l la coudamna'ion de Sulpice Severe : En effel, elle dil que la Gaule a aspire les principes de la foi des Torigiiie meme du Clirisiianisme : Cum ipso callioliccB religionis exorlu ccepissent Gallicanis in (inibus venerandcB fidei primordia respirare; elle ajoule, il esl vrai. que les progres de I'Evangile furcnl ac- cueillis par peu de personnes : El adhuc ad paucorum twliliam tunc ineffabilia percenissent Trinilalis Domi- nicce sacramenla. Mais, qu'imporle ici que le tbristianisme ail fail des progres plus on moins lenis. II s'agii de fixer rcjioqnc ou ii a ete preche pour la premiere fois dans les Gaules, el voila que, pour dcmontrer qu'il y a (Me api)orie lardivemeni, on nous cite I'opinion d'uti coneile proclamanl que nos peres Tonl aspire au pre- mier souffle de la |)arole divine, qu'ils onl salue le soleil des que la premiere lueur do I'aube a rendu \isiblos les lenebres de la nuil. En veriie, c'esi irop d'inconsequcnee ; c'esi Irop spcculor siir l:i iiaivele du Ice lour ! /465 — S II- LES P^RES DE L'£GLISE SONT UNAMMES POUR RECONNAITRE QUE L\ FOl A tTE PRfiCHfiE PARTOUT PAR LES niSClPLES DES APOTRES. Nous avons deja etabli que saint Luc, saint Paul, saint Philippe ont annonce a travers I'E^pagne el la Gaule rarrivee du Fils de Dieu; nous avons montre, d'apres la tradition, saint Crescent remonlanl le cours du Rhone, de la Saone el du Doubs, el parcourani ies rives du Rhin poui- installer a Treves, a Mayence, a Cologne, saint Euchere, saint Valere et saint Maierne. L'aulorite des Peres de I'Eglisc qui ont ecril au \V ot au ni° siecles contirnie la tradition et demonlre, d'une maniere geneia e, que la religion du Christ a ele annoncce dans Ies Gaules des la dispersion des a pot res. En premiere lignc; nous citerons saini Justin , philosophe et martyr, qui, dans son Dialogue avec le Juif Triphon, s'ecrie {\): » 11 n'esl pas nne seule des especesde morlels, soit Grecs, soit Barhares, soit de tout autre pays, de quelque Jiom qu'on Ies nppelle , qu'ils vivent sur des chariots, qu'ils manqueni de demeures, qu'ils liahilent sous la lente, qu'ils partagent I'exislence des iroupeaux, il (1) Alqui ne iinum quidcm est genus moMalium, sive Barba- rorum, sive GraBcoriiin, seu eliam aliorum omnium, quocumque apellentur nomine , vel in plaiislris viventiuui vet domo caren- lium, vel in tentoriis viveutium et pecoribus vitam lolerantium, inter qiios per nomen crucifixi Jcsu supplicaiiones et gratianint artiones Patri el Fabricator! rerum omnium non fianl. -^ km — n'esl pas, tlis-je, une seiile des esp^ccs de inorlels oii il DC se t'asse des prieres el ou il ne s'adresse des actions de grace au Pere el Creaieiir de toules choscs par lo noin de Jesns cnicifle. » Peui-eire pourrail-on laxer ces paroles d'exagera- tion , si Bardesane, heresiarque coniemporain de j^ainl Jiislin , n'avail ecril ce qui suil {\) : « Que dirous-nous de la secle des chreiiens que Ton renconire dans loules les parlies de I'univers el , bien plus, dans loules les ciies ? Les Parihes chreiiens n'epousenl pas plusieurs femmes , ceux de la Medie n'abandonnenl pas leurs morls aux cliicns, ceux de la Perse n'epousenl pas leurs filles , ni ceux de la Bac- iriane, ni ceux de la Gaule ne rompeni leurs ma- riages; ceux de I'Egypte n'adorenl ni Apis, ni lechien, ni le Ijouc , ni le chal. » l^]i ce passage avail inspire a reminenl Baronius (2) les reflexions suivanles : (t) Quid aulem diceinus de Christianorum secia, qui in omni parte orbis, imo vero in omni civitale inveniunlur? Nee multas Parlhi Chrisliani ducunl uxores, uec canibus niortuos objiciunt Medi, nee Persae filias ducunl, nee Bactriani et Galli malriraonia corrumpunt; nee ^gyptii Apia, autcanem, hircum aut felem colunt; sed ubicumque sunt, alienis legibus vivere nee cogi pos- sunt. i'2) Annal. ad ann. 175, parag. xxi. Quod ad rem nostram per- tinet, illud plane observatione dignissimum , non fuisse hoc tempore in orbe prcvinciam, imo nee civilalem, in qua non es- sent Christian), ilemqup adeo potentem fuisse Evangelicain prae- dicationera, ut in diversum ac plane coutrarium habitum nalu- ram hominum transformaret, ut sive Persae, sive Medi, aut Parthi, iEgyptiive, vel aliae barbarae nationes essenl , quae reciperent Evangelium, mox inolitasiilas apud gentiles suos turpes consue- tudines, fcralesque aut nefandos mores penilus anliquarent eos- deuique longius abdicarcnt. — /i67 — f( Kn ce qui conceinc la question que ntus agilons, »> il esl cerles ires digue de remarqne que non seu- » lemenl il y avail a ceiie epoque des clireiiens dans « (oules les provinces, dans loules les vilies , mais s encore que la predication de I'evaiigile avail etc » lellemcnl puissante qti'elle imposait aux homnies u des moeurs esseniiellenienl conlraires aux moeurs ge- » nerales : que Porses , Medes, Parihes , Egypiicns, » loules li's nations barbares en un mot qui acceptaienl » I'evangile , renonf;aienl bienlol aux coutumes hon- » lenses adoptees parnii elles et abjuraieni lours moeurs » criniinclles cl besiiaks. » A saint Justin, a Bardesaiic, joignons saint Irenee, qui reprodnii la memo opinion dans son livre contre les heresies (I) : « Quoique les langues du monde soient » differehles, copendani la force de la tradition est » [)artont nno I't idenliqiie. [.cs cgliscs qui onl etc » fondees dans les Gormanies^ ne croienl pas diffc- )) remmcnt el n'oni |)as d'autre iiadiiion que celles » qui sont en Iberie, chez los Celies, dans I'Orient » on dans les regions mediterraneennesdu globe. Mais, » de meme que le soleil , creature de Dieu , est seul » et un, telle ausi la lumiere sp'iriluelle , la predi- » cation de la verite luii pariout et eclairt; tons les » liommos qui \eulent la connaiirc. » (1) Lib. 1 Cap. 3: Elsi in muiiJo loquelaj dissiuiiles sunt, stMl lamea \irlus tradiliouis una et eadein esl. El neque hsp, qua in Germania suntfundalae ecclesiae, aliler creduiitaul aliter Iradunl, ncque hae quae in Iberissunt, ueque liaj qua! in Celtis, ucquc hae qua? in Orienle, neque hae quse iu yEgyplo, neque hae quae in Lybia, neque hae quae in medio mundi sunl constiluas, sed sicul sol, crealura Dei, in universo inundo unus el idem est, sic el lumen, pra^dicalio veritalis, iibique lucot el itiuminat oninei* homines, qui voliinl ad cogiiitioncin verilalis venire. — 468 — Deja, aiipiiravanl , no coiilemporain do saiol Paul, un ilo SOS coaiijuieiirs dans I'aposlolat , le pape saiol Cleinenl , eciivail de Rome aiix habiianis de Co- rinlhe (t) , « que sainl Paul, le lierqui de Tevangile » dans le monde enlier^ a preche la justice a loule la » ierre et s'esl Iransporle jusqu'aiix dernieres limites » de rOccidonl. » Tertullien, qui elail presque le conlempoiain de saint Irenee, dil a son lour dans son livie conire les Juifs (2) : « En quel autre I'universa-t-il cru, en quel autre , sinon en Jesus-Christ , qui est deja venu ac- cnmplir ce que les Pro[)!ieties avaient annonce du Messie? Ei cette foi est lellemeni universelle, qu'elle a peneire jusquc chez les divers peuples qui habitenl la Galalie el jnsqii'aux exiremitesdo la Maurilanie. Toulos (1) Paulus .... in Orienle et Occidente yerbi praeco faclus, illus- trem fidei suse faraam sorlilus est, in juslilia munduin univer- sum instruens el ad Occidentis lenniiios vanicns. {Epistola ad Corinthios. — Labbe. Concil, tome i , col. 127. ) (2) Cui enim desleram tenet Pater Deus, nisi Ctirislo fllio suo? Quem exaudicruut omnes gcnies, id est, cui omnes genlcs cre- diderunt, cujus el pisdicalores aposloli iu psaimis David osten- dunlur : in unirersa , inqiiil, terra exiil sonus corum et usque ad termiuos terriE verba eorum ? In quem enini et aliae gentes credideruni ? Parthi , Medi, Elamitae et qui habitant Mesopota- miam, Arnieniam, Phrygiam, Cappadociam, et incolenles Pontum et Asiaui el Pampbyliam , immorantes ^'Egyptuin, et regioneni Africa; quae est trans Cyrenia inhabitantes , Roinani et incolae , tunc el in Hierusalem Jiidaii et caelcrae gentes; ut jam Getulo- rum varielates el Maurorum muUi fines. Hispaniarura omnes termini el Galliarum diversoB nationes, et Drilannorum inaccessa Romanis loca , Christo vero subdila ; et Sarraatarum et Dacorum el Germanorum et Scytharum , et abdiiarum mullarum gentium, et provinciarusn et insularum muUaium, nobis ignotarum.et qua; cnumcrarc minus possumus. In quibus omnibus locis Ghrisli noirion , qui venil , Te^nal. ( Adversiis Juda-os, cap. yii.) — Zir>9 - Jes provinces de I'Espagne, toutes les diveuses <:ontu6es des Gaules croient en Jesus-Chiisi. Les ondroits de la Grande- Bielagne ou n'avaienl pii pene- ircr les armees romaines, lui sonl soumis. Chez les Sarniates, les Daces, les Germains, les Scythes el chez lant d'autros peoples que nous ne pouvons compler, regne le nom de Celui qui est deja venii. » Laclance , qui ecrivail an commencemenl du iv* siecle , s'exprime d'une maniere non moins energique (jue Terlullien (1) : « Apres la morl de Domilien (ar- rivee a la fin du i" siecle), I'Eglise devinl plus illusire el plus florissanle , el sous les princes bons el lole- ranls qui lui succedereiit dans le gouvernemenl de Temiiirc Romain , exemple des aliaques de ses enne- mis, elle eiendil ses bias a TOrieni el a I'Occidenl , on sorle qu'il n'y avail aucun coin de la Terre, si re- cule qu'il fui, oil la religion du vrai Dieu n'eui poiui peneire, aucune nation si barbare donl elle n'eul adouci lesmoeurs ; rnais, ajouie-l-il, dans la suite, cetle lungue paix ful Iroublee , car longlenops apres, Dece s'eleva pour pcrsdculer I'Eglise. » Ainsi , longiemps avani I'enipire de Dece , c'esi-a-dire avanl le milieu du iii' siecle, la religion clireiienne eiaii generalement re- pandue dans louies les parlies du monde. (I) Rescissis i^ilur actis lyranni , non lanlum in stalum piis- linum Ecclcsia lestiluta est, sed eliani multo ctariiis ac floridius eniUiit ; secutisque temi)oribus, quibus rauiti ac boni principes Tomani imperii clavuni re(i;imenque tenneriiul, iiuilos inimicoruiu impetus passa, niaiius suas in Orientem Occidentemque ponexit; ul jam iiullus essel lerrarum angulus tain remolus quo non re- ligio Dei pcnelra^sel; nulla denique nalio tain feris tnoribus vi- Tens, ul non , susceplo Dei cullu , ad justiliae opera milesceret. Scdenim poslea longa pax rupla est. Exlitit eriim post anuos piurimos execrabile animal Deems , qui vcxarel Ecclcsiam. , De Hlortibus Persecut cap. iii el iv. ) — /|70 — Plus lard , I'illiislro maitre de saiiUMailiii de Tours, le grand sairil Hilairo, tie dil-il pas dans son comnien- laire du Psaumc XIV* (I) : « Les apolres elablissenl une foule d'habilations a Dieu dans loutes les parties de la Terre que Von peut alteindrc, el meine dans les lies de rOccaii. » § HI. PERSECLTIOIN DE N6|\0N EN ESPAGNE. En Irailanl de Togiise do Vienne, nous avons mon- ire I'apolre sainl Paul suivani la voio romaiue qui conduisait de Nice a Barcelonne pour se rendre en Espagne. Au 1" siecle, deja celle conlree ful fecondee par le sang des martyrs, ainsi que le conslale une inscription irouvee a Rio Pisuerga, qui porle : NERONI CL CAhS. AVG. PONT. MAX OB. PUOVINC. LATRONIB ET. HIS. QVI NOVAM GENEUI. HVM SVPERSTITIONEM. INCULCAB PVRGATAM. A Claude Ndron Cesar, Augusle, grand Ponlife, pour avoir purge la province dos voleurs el de ceux qui prechaieni au geuro luiniain une superslilion nouvclle. (1) Apostolos per omnes orbis terraruni partes , quaecumqiie adiri possiint, qiiiii etiain in Occani insulis habilatinnes Deo plu- riinas paravisse. — 471 — Gemonnmcnl si precieiix pour ranliquile chrcliermo, a elc iraiio d'apocryplie par Joseph Scaliger, Anioiiic Muraiori el Jean Gaspard Hagenbuch (1); mais I'au- ilienliciie en a cie viciorieusemenl demonlree par Jean-Ernest Walcli, professeur a I'Universile de lena, dans deux ouvrages iniitules, I'un Marmor Hispanm effosmm, el I'aulre Persecutionis Chrhlianorum Nero- niancB in Hispania ex antiquis monumenlis probandce uberior explanatio. Ainsi que le fail remarquer h jusle liire le P. Van Heck (2), ce genre de perscculion elaii digne d'etre consacre par un monunienl, puisque Taciteel Suetone cm relate le fait dans leurs livres, et que les paroles de celie inscription sonl idenliques a cellcs qu'em- ploieni ces ecrivains. Tacite appelle la religion chre- lienne exiliabilem superstitionem (5), ct Suetone se sert des expressions superstitionem novum et maleficam (4). § IV. PREI3VES DIKECTES DE L'fiVANGfiLlSATION DE NOS OONTR^ES PAH LES DISCIPLES DES APOTRES. Si un monument anihentique deinontre quo I'EspagDe a eie evangelisee au lemps de Neron, il en esi aussi qui eiablissent jusqu'a Tevidence que nos contrees n'ont pas ete moins favorisees par les apotres. Nous allons les (aire connailre. (1) Mariaua. Hist, de Espan. Observac. t. ii, p. 489. — 1786. (2) to. Van Heck. We 5. Florentino epi.ic Trevirensi. Act. SS. Dei , n Oct., p, 23 (.3) Annal. xv, cap. xliv. (4) In Noroiie , cap. xvi. — IxU — Dans un precedenl iravail (I), nous pcnsons avoir proiive que, contrairemenl a I'opinion generalenieni adoplee, les Remois soni d'origine cellique. Eh bien, voici que sainl Irenee nous dii que de son lemps il csistaii des eglises chez les Celtes, EN KELTOIS. — « Les eglises qui onl eie fondees dans les Germanics ne croienl pas differenfimenl , ei n'onl pas d'aulres iradiiions que celles qui somen Iberie, chez les Celles.n Mais, repondra-t-on, la Gaule cellique elait bieu elendue : qui nous prouvera que le pays de Reims (lil precisemenl un de ceux qui furenl designes par les apolres comme devani eire evangelises des I'arrivee des niissionnaires ? — D'abord nous ferons remarquer que ia Gaule cellique, reduile a se.^ iimiles geogra- phiques, n'esi que d'une mediocre elendue ; car il faut en relrancher ia Pro\ince romaine, i'Aquilaine el la Relgique. En second lieu, nous disous que , de I'aveu de Cesar, les Remois elaienl avec les Eduens, le peuple le plus influeol de la Cellique. Or, sur quidevait lomber le choix des apotres, si ce n'esl sur les peuples les plus puissants, sur les villes les plus imporlanles ? Celle premiere objection refulee , il en surgira im- mediatement une aulre. On nous dira : admellons pour un inslanl que la Cellique ail ele evangelisee par les envoyes des apolres ; si la ciie Remoise appar- lienl reellemeni a celle pariie de la Gaule , elle a pro- tile de celle faveur de la Providence; nous I'accordons. (I) Memoire ms iur les Origines civiles de Reims , preseate k I'Acadeinie Iroperiale de cetle villc. L'auteur a resum^ co travail dans V Introduction des Origines ecclesiastiques , I" edilion (Reims, 1857 ). — /|75 — Mais qui nous pronve qu'olle no faisoii pas parlio de la Belgiqiic ? Voiis nous ciloz un lexle do Cesar : mnis il nous esipermis do coiiiesicrle sens que voiishii donnez, el nous ysommes d'aiiiant micux aiitoris6s, que nous avons pour nous la iradiiion (■( Topinion do toos nos vieux auleurs : nous savons (!,■ plus (pjo de loul i.inps noire eglise a eie primaiialo do la seconde Belgique. Nous accopioiis rargiimoni, oi voici noire reponse. Dans le denoinhrenieni que nous avons fait des eglises de I'Ksi, il en esl une que nous avons omise; c'esi celle de Slrasbourg. Nous ne pouvions pas nous en occuper, puisqu'elle ne revendique pas d'eveque avanl sninl Amand I-, qui vecut au cornmencemeni du iv« siecle. Cependani, I'Alsace a piousemcnt conserve la Iradiiion qui lui donue pour premiers apoires siini Maierne, sainl Eiicbere et saini Valere. D'apres les le- gendes, sainl f^lauriio aoraii specialemeni preche la foi a Helcebus on Ilolveius, aujourd'liui le village d'KII, presBenfeld, el il est lionore d'une mauiero loule pnr- liculiere dans celle localiie. Nous allons proiiver par le lexle de sainl Irenee die plus haul que cello tradition esl vraie. Sous les Romains , I'Alsace n'avaji pas de nom pariiculier. Le depariemeni acluel du Haui-Rliin ap^ parlenail a la Rauracie el a la Grande Sequanaise- le depariemeni du Bas-Rhin faisail parlie de la Gern.anie premiere. Or, I'eveque de Lyon dii : « Les eglises qui soni dan^ les Germames ne croioni pas auirement que collos qui sonl dans la Celtique. » Ici encore la cniique nous inlerrompi pour nous repondre qu'il ne s'agii dans le lexle du glorieux dis- ciple de sainl Polycarpe , ni de la Gormanie premiere XXVI. 55 — lilh — ni (le la Gormaiiie seoondc, mais bieii de la Grande Germaiiie, de laGennanie tians-ilienane. — Laissons dire; le lexte grcc porle : iv rsp^/ai/za/s-, ci comrae le Tail reniarqiitr a ce sujel le prolestanl Schoepflin, fl les ancieiis , qu'ils aiont ccrit en grec on on laiin, se servenl lonjouis dii singiilier el jamais du pluriel, lors- qu'ils veulenl designer la Germanie irans-rhenane. I.orsqu'ils se servenl de Tcxpr^s^ion latine Germanice, en grec nj^y.oivia.i , il esi loujours qnesiion des Ger- manies cis-rhenanes , insliUiees par Augiisle. » Ainsi, du leinps de sainl Irenee, la Germanie pre- miere possedaii une eglise consliUiee, c'esl-a-dire une communauie regie par son eveque. Mais, si Slrasbourg n'avail pas d'eveque, de qui re- levail-il pour le spiriluel ? Les auleurs allemands pre- lendenl, ei ils oni evidemmeni raison, que Strasbourg eiait sous la juridiciion de Mayence. Meurisse el Dom Calmel affirmenl cepcndani quil eiail sous la direction de I'eveque de Mciz. Mais, pour que I'eglise de Melz; piil avoir auiorile sur celle de Slrasbourg, ii fallaii qu'elie exisiat avanl celle-ci ou qu'elie en lul lout au moins conlemporaine. Or, le lexte de sainl Irenee esi formel : il parle des eglises des Germnnies ; ces eglises oni des doctrines, une I'oi, une tradition, el lout ceia prouve une existence dejii aiicienne, vivace, solidemeni etablie. Mais nous ne voyons pas que I'eglise de Metz ait eu d'autre Ibn- dateur que sainl Clement; on ne peul pas prouver qu'il soil arrive a une autre epoque que celle que la tradition lul designe. On est done logiquemeni ameue h conclure que la tradition de saint Clement est vraie. Si, au conlraire , la juridiciion de I'egliso de 4 - 475 - Slrasboiii'g.'ipparlenail a Tevequo de Mayence, nous fe- rons remarquer que, commc I'Alsace, comme Cologne, Tongres el Treves, Mayence nc reconnalt d'aiHres apolres que saint Cresceni, saint Valere, saint Eucherc et saint Maierne. Ponr que les 6glises qu'ils ont fondees eussent eie constiiiiees avani que saini Irenee ecri\ii contra I'heresie, ii fallait qu'ils eussent vecu avani iui. Or, nous trouvons une tradition qui nous les repre- senle comme envoyes par saint Pierre, qui fait de Valere I'un des soixanle-douze disciples de Jesus- Clirisl ; el aussi loin que se portent nos regards, nous ne rencontrons aucune tradition conlraire. En echange d'un fait, nos adversaires r)e peuvent nous opposer qu'nne negation, mais ce n'est pas avecnne negation qu'on pen! combler iin vide, une lacune liistorique. Les eglises des Germanics exislaieni avant saint Ire- nee; diies-nous quand dies oni commence d'etr(», ou acceplez la tradition et inclinez-vons d(!vanl elle. On ne recusera ceries pas saint Irenee comme on recuserait la tradition; car, ouire I'antorite qui s'at- tache a son nom, il est appuye dans cetie circonstance par Laclance, qui nous dil que lesdiverses coulrees de la Gaule croient en Jesus-Christ. Par quel arret geographique les Germanics el la cite Remoise ont- elles eie rayees du sol Gaulois? Que si, apres les Peres de lEglise, nous interrogeons le sol, I'archeologie nous montrera dans la premiere Germanic et dans les pays coniigus a la Grande Se- quanaiso, et voisins;, par consequent, de I'eglise de BesariQon, le signedu Christ grave sur des monuments qui daienl des premiers siecles el que le temps a epargnes. Dans une tombe decouverle pres d'Augusta Raura- — 476 — eonim, sit'gc de Teveiinc (Jes Rauraiiiios, on a Iroiive j-oiis la tele (j'liii sqiuleUe iiiic pierri? jaiinatre portani I'iiiscriplion : HIC UKQVIISCT I! A I) O A K A I. NCX. Le prtTiHer, nous avons fail connaiire celle inscri- ption <'t la siiivante au monde s;ivanl. Elie a cle publiec |)ar nous, en 1851, dans noire iraduclion do VAlsaiia Illuslrata. A ceiic opoqno, o! sous I'infliience d'un docle prol'esseur de I'tlniversii^ de Bale, nous avions vu dans celle inscription nn monument de la periode raerovingienne. Le savani M. de Golbery afiirmaii que nous nous elions trompe. Celle tombe, nous ecrivaii-il, a cie decouvorie cnire la villo d'Au- gusta Jiauracorum el le Castnim Hauracense, qui n'en est distant que d'lin quart de lieue. Poiirquoi appar- tiendrail-elle a la seconde de ces iocaliies plutoi qu'a la prrmiere? Dira-t-on que celle-ci a etc detruite au IV'' siecle? Qu'iniporte, puisqu'il j avail des cliretiens dans ce pays au ii' siecle. Ponrquoi, si elle avail apparlcnu i) une epoque ou le chrisiianisme avail le droit d'exister, e sous Adrien ; celle d'Alexandre, martyrise sous Anionin-Ie-Picux (3); celle du Pape Cains, martyrise sous Dioclelien (4).» De I'aveu d'un celebre auteur proteslant, le chiis- lianisme devail etre Ires-florissani au commencement du IV' siecle dans la Germanie premiere : « En 303, dii Schcepflin (5), la tranquillite donl les ennemis de I'exierieur laissaient jouir I'Alsace, lut considerable- menl troublee par la persecution que Dioclelien exer(;a (1) Calacombes de Rome, page 90. (2) Ari'inghi, Romea sutlerranea , lorn. 1, page 525. (3) et (4) ibid. page 524. (5) Voyci noire IraduclioD de lAlsalia illuslrata , I. ii, p. 389. — 679 — conlre les clireiiens. . . I.e nombre des chreiieiis en Alsace devaii elre considerable a ccUe epoqiio ; il s'etaii accru encore par la tolerance de Constance Chlore, (pii avail gouvernc noire pays pendant pln- sienrs anneeset qui abborrail Ini-ni6nie le pnganisme... Toiiiefois, I'Alsace ne complaii pas encore d'evcfiues, a moins que Ton ne veuille donner ce nom aux pasieurs qui adminisiraient en secret les sacromenls.» En resunianl ce que nous venons de dire sur TAI- sace, nous voyons d'abor-'il •) — /i81 — bouri,' el a BergL'inl;ili! , (Jans lo iluclic dc Cleves, t'li Alsace, el dans leduche de Bade. Or, en 1842, il a cie irouve, a Arensbiirg, dans le diichc do Hesse, nn poi^son en lerre cuile, |)orlani I'ljslampille de la XXII" Legion, Primitivu Fidelis {\) . Mais chacnn sail que le poisson eiaii un symhole pour les pri'miers chredens. Vers le milien dn iv" siecle, Opialus, eveque de Milesie, en AlVique , declare que « le seul nom de poisson, suivani la denominalion L;rec(|ue, coniieni unc foule de norns sacres dans rensemble des lellres qui le con)posoni. IXTHYS donne en tjrtc : Jesus- Chrisi, Fds de Dieu , Sauveur. » l^ffoclivemenl, en prcnani chaque leUrc de Viclithus |)our I'itjiiialc d'un nioi i^rec, on poul (aire : lesous Xristos THeou Yios Soter (2). Saini Clement d'Alexandiie disail : « Sinl nobis signacnhi colomba, vel piscis, vel navis...,. vel l\ra musica. » Evidemincnl, ce n'esl pr>s le basard qui a place resiampille de la XXII^ legio;i dans le poisson sym- bolique des Clireiiens; car prrs de ce poisson gisail unecroix, ej^'alemenl en brique, Ires bien faiie el por- lant aussi a linieiieur le cbiffre de celie legion. Si Ton en croil M. Amedce Tliieirv, ceile legion n'elaii aulre que la sainie legion Thebaine, donl nne parlie fui mariyrisee dans les deliles de I'Agaune, par I'ordre de rempereur JMaximien, el donl le reste lomba sous les coups des hourreaux du I'aroiiche proconsul Hiciins Varus, dans la premiere Bclgique ci dans la secoiule Germanie. (i) Archive fiir Hessische Geschichte , lorn. in. (2) Voyez a ce sujel, DiJron , Hisloire de Dieu , page ibb — fi82 — § vr. LA LfiGlON THfiBAlNE A TREVES. « Ce fui Ie4 ociobre 286, dale funebre conservee par la iradiiion de Treves, dit M. Amedee Thierry, que Riclins Varus lit son enlree dans la meiropole des Gaules. Des le jour meme, la perseculion commenga. Lecommandaul du deiachenienlde la legion Thebaine, qui avail quiite Maurice en Ilalie, se Irouvail alors a Treves avec quelques soldals seulemeni, ses cohories- elanl canlonnecs & Cologne. Cel oQicier se nommail Thyrsus. Avail-il mal dissimule son indignation a la noiivelledu massacre d'Agnune? Faisail-il, comme les aulres, profession ouvcrle du chrislianisnie? On ne le sail pas bien ; mais il ful mis en jugemenl avec plu- sieurs de ses soldals el irenle ciioyensde Treves, parini iesquels (ignraienl irois decurions el le decemvir Pal- macius, que les acles qualifienl de consul el de palrice. Condamnes a perdre la tele, ils furent decapiles au Champ-de Mars, hors des porles de la ville , el le bourreau jeia leurs corps dans la Moselle. La femme el les enfanis de Palmacius, Chretiens comme lui, lurenl enveloppes dans la condamnalion, qui avail pour prelexie un complol mililaire. Un autre complol ayanl eie signale a Bonn, "Varus s'y rendil le iO ociobre, el il Irouva qu'en effet, un centurion nomme Cassius y avail fonde une peliie eglise composee de huil soldals, qui furenl condamnes a morl avec lui. De Bonn, la justice expeditive du prefet se transporta a Cologne, oil railendait un dramc plus sanglant. - 183 - » Cologne', oil pour inieiix dire Colonic Agrippiiio, ville (foiii'ine el de dt'slinalion es»enrulletneiil iiiili- laire, n'oinii qu'un vasle camp ou se coiifontiaieiit lontes les croyaiices avec loules ios nalioDs du monde romain. A repoque doni nous iragons Tliisloire, on y irouvail rcnnies a cole dos legions payennes, les co- liorles detachecs do la XX^^ cliretionnc fervenle, el line division de cavaieiie mauro, ou Ton complail aussi beaucoup do chieliens. Par un de ces miracles jour- nalier qne la centralisation romaine operail an profil du christianisme, les (ils de I'eglise de Carthage elaienl venus de I'Atlas aux Ijords du Rhin , sous la casaque du soldai, donner la main aiix ills de la Thebaide, pour caiecliiser les enfanis de la Gaule. Le prefel du pretoire ne.'epara [)oinl en cette occasion les mission- naires des convertis : Gaulois, Africains el Egyptiens figurerenl dans un proces, que lui-meme dirigea avec un grand my.siere et doni nous nc connaissons que le denouement. Cinquante soldals, (|uelques-uns memo diserit irois cents, furenl passes par les amies, et Ton jeta lenrs corps dans un piiits, au-dessiis duquel les Chretiens conslruisirent plus lard line eglise magni- fique. Varus conlinua ou til continuer par ses asses- seurs la recherche di!s aftlliations chreiiennes dans toutes les garnisoiis du Rhin ; puis il revint a Treves, persuade, selon loute apparence, qu'il avail exlirpe le christianisme des armees, el sauve I'empire avec I'em- pereur. » Ce recil, que nous avons copie lexluellement, de- inontre quels |)rogres la foi avail fails dans la Bel- gique a la fin du m" siecle; Teglise civile s'unil a I'eglise miliiaire, et ses fideles y sonl couronnes par un memo trepas. Comment adiiietlra-l-oii ;ivc'c les edileurs tic L)om iMailol el avec M. Amedeo Thierry^ lui-ineme, que la predication de la foi dans ces con- irees elail coniemporaine du proconsulat de Riciius Varus? Sans doute, un evenemeni niiraculeox a pu faire qu'une grandc pariie de la population soil subi- lemeni illuminee des veriies de I'Evangile. Mais un miracle iie so |)resume pas, il se constaie par des temoignages certains. Or, Thistoire de Treves ne con- lenant rien de ce genre, on est force de reconnaiire que le christianisme ne s'est developpe dans cello ville que coinnie parlout ailleurs , c'esl-a-dire len- lemeni , progressivemet)t. Mais, avanl de Irouver acces au lover d'lin consul ou d'lin patrice, il avail du laire hien des proselytes dans le peuple. Done, I'arri- vee des premiers apolres de Treves a du etre bien anierieure an Hi" siecle. Done, I'opinion emise par M. Amedee Thierry el les edileurs de Dom Marlol oe saurail souieoir I'examen. Pour nous, nous aimons n)ieux en croire naivemeni une vie de sainie Marie -Madeleine, donl I'auleur, s'il n'esi pas Rab in-Maur, esl au moins du ix" siecle (1). « Done, (III I'auleur anonyme, se livranl aux flols de la mer avec lu glorieuse servanie de Dieu, Marie Madeleine, el sa soeur la bienheureuse Martha, le saint archeveque Maximien el Parmenas, arcbidiacre, el les aulres chefs de la miiice chreiienne, les apolres qui devaieni evangcliser la Gaule, quilierenl I'Asie, el guides par le souffle de I'Eurus, ils arriverent, apres une course heureuse, a Marseille, au poinl ou le Rhone se jeite dans la mer Gauloise. L&, apres avoir (i) L'abbe Faillon , Disserlat. sur I'aposlal de sainte Marie Madeleino , I. II, col. 538 , .539. - 485 — iiivo(]uc Oieu, ce grand princij>e dii iiionde, ils so patiagereni, sous ri()s|jiraiio!i de rKspril-Saini, les provinces ou il It'S avail poiisscs.,. » All saiiil arclieveque Maxiinieii ocImI Aix, mc- iropole de la Narlionnaise seconde ; Paul enl Narbonne, meiropole de la Narbonnaise premiere; Auslregesile, Boiirges, meiropole de I'Aquilaine pre- miere ; Rouen avec sa province , la Lyonnaise dciixieme, Mayence avec sa province, la Germanie premiere, Cologne avec sa province, la Germanie se- coiide Reims, meiropole, avec sa ixovince, la Bel- gi(]iie seconde , lureiii leservees ii d'anires docieiirs. » § VII. 1)U SILKNCE DE l'hISTOIRE SUR LES PREMIERS PASTEURS DE L'^GLISE DE REIMS. Jusqn'ici nous avons employe, pour soulenir noire ihe^e, deux ordres de preuves. — Nous avons demon- tie que la tradition des principales eglises de France Concorde avec celle de Reims, pour faire remonler au prince des apolres la predication de I'Evangile dans les Gaules ; puis nous avons corrobore celle de- monstration par les te.xtes des Peres de I'Eglise, qui onl ecrii pendant les premiers temps de Tere chre- lienne. Notre tachc seraii done terminee, si les editeurs de Dom Marlol n'avaieni encore invoque a I'appui de leiir sysleme, une serie dargiimcmls que nous appelleions des preuves negatives. s — 486 — Ces arguments so rednisenl a deux principaux : 1° Si I'eglise de Reims remonie aux lemps aposlo- liques , pourqiioi I'hisloire n'a-l-clle pas daigne s'oc- cuper de nos premiers pasleurs. Si elle complail Irois cenis ans d'exisience a I'epoqiie de sainl Remi , com- menl se Cail-il qu'elle n'ait a produire, pendant un aussi long inlervalle, aucun monument, aiicun ado, ancun f.iit authentiqoe ? Poiirquoi , comme louies les eglises donl les origines ne soni pas mieiix jiistifiees, offre-l-elle si peu de pontifes pour occuper le sieg'? episcopal pendant un aussi long espace de lemps ? 2° Si les eglises de la province eiaienl eiablies au lemps de sainl Pierre, ii faliail qu'elles demeurassent inaper^ues pendant plus de 250 ans, pour jouir de la paix au milieu de neuf perseculions generalos , et n'a- volr a citer aucun martyr, surtoul parmi les evequos. Sainl Timothee, le premier marljr de Reims , ne soiif- frilqu'a la fin du lu^ siecle ; Reims, Soissons, Chalons, Senlis, donl les pretentions sont egales , ne comptcnl aucun marlyr parmi leurs pontifes. Le silence do Thistoire sur les actes des eglises de France , dans les premiers siecles, s'explique d'une fagon ires claire ci tres naturelle. Les fondateurs de ces eglises etaient des Romains envoyes par les apoires on leurs disciples , les uns pour propager la foi dans une ou plusieurs provinces, comme I'a fail saint Crescent , les aulres pour elre places a la tele d'une cite. Les [iremiers lemps de eel a|)Ostoial durent etrc exireniemenl obscurs : avanl de precher la foi^ les missionnaires eiaienl obliges de se creer des affilies (qu'on nous pardoone cclle expres- sion), de recruter un auditoire, el, dans un pays ou Ic latin n'avail encore qu'imparfailement penetre, ce systeme de propagande devaii etrc tres lent. ~ i87 — Examinons, par exemple, quelle dul elre la coii(Jiiiie do nos apolres, saini Sixle, saiiii Sinice el saini Memmie. En arrivanl a Durocorl , saini Sixle se iroiivail en presence (le deux difllicultes; il ne savail qu'imparfai- temenl le langage Gaulois, ei il avail a luller non- seulemenl conire le paganisme celtique, mais encore conire le polyiheisme Roinain, Son premier soin fut done de recliercher des hommes doux el humbles de cnl avoir edicie plusieurs persecutions, — 49-2 — sans que la haclie des hourrcaiix se soil levee sur les Chretiens reniois. Done, la persecntion u'eiant pas^ venue Ironbler les originesde I'eglise de Reims, il n'esl pas etonnanl que ses actes aiotii parii ou aienl ele reellemenl Irop pou iniporianis posir qu'un copiste ail juge necossaire d'y consacrtT son lenips el sa peine. Uneauire raison < ncore, c'csl fecial que saini Remy a jeie sur I'eglise de Reims, eclai doiil nous ne savons plus mesuier Tinlensile, tnais qui a ele lellemenl eblouissani, que Taureole donl nos confosseurs el nos marlyrs sonl couronnes en a paii. Les diaries de fondaiion el de conlirmaiion donnees dans le cours du moyen-age aux elablissomcnls religieux par les papes, los souverains, les eveques el les nobles, rap- pelleni ordiuairenieni les nieriles des sainls qui sent honores dans ces eiablissenienis ; que Ton examine les litres diplomaliqucs conlenus dans uos archives, c'esl loujours la memoire de saini Remy qui esi invoquee, el jamais, ou presque jamais, il n'osi question do saini Sixie el do saini Sinico, des sainls marlyrs Timothee, Maur, Apollinaire, ele Mais, si la ville de Ri ims n'etait pas soumise aux lois de Rome dans lo i^ei le iV sieclede I'ero chretienno, il osl evident que Tedil de Neroii contre les disciples de la foi n'y a pas etc execute, d que c'esl a lori, des lors, que Ton range saini Sixtc et saint Sinico au nombro des marlyrs, et que Ton place le martyr do saiui Timolhee sous !e regno de cot on)|)ereur. En ce qui concerne saint Sixle el saint Sinice, les traditions de I'eglise de Reims n'oni jamais varie, malgr6 les efloris do quelques modernes. L'opinion qui fail do saint Sixle un martyr, a oie oniiso pour la — 403 - premiere Cois en 1574, par le grand inqiiisilcur de ia foi, Demochares de Moncliy, qui la lenail lui-niein(( de Jacques Bridou, chanoirie ei penilencier de Reims. La reputation de science dont jouissait Demochares (il accepter comme vraie so decision par PierreGalesinius, qui edila en 1378, ;i Milan, le marlyrologe romain qui porte le nom de Gregoire XIII. Elle ful re|)roduite par lu marlyrologe ediic a Fiome on 1584, et adoptee par Baronius dans celui quil composa par ordre de Sixte V. A I'aide de ce martyrologe, elle repassa les monis, tul recueillie d'abord par Georges Colvener, prolcsseur a rUniversiie de Donai, qui I'insera dans ses notes sur riiisliire de Flodoard qu'il publia en 1617; enfin, elle ful defendue avec beaucoup de vivacite, en 1628, par I'auleur dii marlyrologe Galilean, Du Saussay, qui a publie dans son Opusculorum Miscellaneorum fasci- culus, une k'lire par lui ecrile sur ce sujel h Nicolas Tuillier, doyen de Sainl-Symphorien de Reims. § IX. A QUKLLE 6P0QUE SOUl FKlllEN T SAl.NT TIMOTHfiE ET SES COMPAGNONS. Les auteurs ne sonl pas lixes sur I'epoque ou saint Timoihee, saint Maur, saint Apollinaire el leurs com- pagnons, souffrirenl le mariyre. Baronius, sur la foi de quelques manuscrils qu'il avail vus au Vatican et dans la Bibliolheque de Sainl- Victor, croil qu'ils onl ete decapites sons le regne de Neron , par ordre dn prel'el Lampade. Doni Marloi — 494 - reji'tle celle opinion ot allribue h Marc-Aiirelc Icni' marl, qu'ii fixe ainsi a Tan 177. Los ecrivains dti XIX." siecle ucion, fondalcur de Teglise de Beanvais, nous \oyons sainl Regulus arriver a Senlis apres la morl de sainl Denis, c'esi-a-dire dans la premiere moiiie du denxieme sieclo. Saint Firniin fonde I'eglise d'Ainiciis longiemps apres la rtiorl de saini Salurnin, premier eveque de Toulouse. Noire grand Hincmar r)Ous apprend que saiiii Saintin, pre- mier eveque de Meaux, a eie sacre par saint Denis. On a contesU! a I'eglise de Chalons que sainl Memmie y eul ele envoye par sainl Pierre; mais, en memo lemps, les Bollandisics, el apres eux, les auleiirs dn Gallia Christiana, soni obliges de reconnailre que depuis la seconde moiiie du ii" siecle jusqu'a I'annee 431, le catalogue des eveques est sulfisammenl rempli, pour que Ton puisse admeliie que le siege n'a jamais , vaque. Mais le deuxieme de ces eveques osi sainl Diviiian. Or , la Iradiliun veui ((u'll ail ele sacre par sainl — 500 — Sifiice; nous avons prouve que sainl Sinice eiail contemporain des apolres; done, des lemps aposlo- liques au regne de Consianiin, I'eglise de Chalons a resisie a loules les lempeles qui I'ont assaillie. II est vrai que, dans celle hypoihese, le catalogue presenle des iacunos, mais un livre dooi une page est dechiree, n'en est pas moins un livre. Si la sulFiagante a eu des eveques , commeni la melropolitaine a-l-elle pu en elre privee ? Enfin , les coniinuaieurs de I'oeuvre de Bollandus nous preseiiient le catalogue complel des eveques de , Treves {i). Qui doncadmeUra que celle sceur de reglise I de Reims Tail delaissee el ne lui ail pas envoye uu pasleur? Quoi, tout aulour de nous il y aura eu des Chretiens, des eveques, el Reims, oii la religion a pu se devclo[tper libremeni, sans enlraves, jusqu'en I'an 215, Reims aura eie IVappee par la Providence avec une severiie telle que les portes de I'enfer auraient prevalu conire elle ! Alors , pourquoi sainl Jerome I'aurail-il appolee Urhs prsepotens, Urbs sancta Re- raorum? §XI. opiNioiN d'iiincmak sur l'origine de l'^glise DE IIEIMS. Mais deja nous sommes arrete dans noire argumen- lalion par une nouveile et plus s6riouse objection. On nous dit : admellons que la Gaule loui enliere, que la Belgique aieni recu des apotres memes ou de (I) Tome VIII d'Jctobre, page 19. — 501 — leurs disciples \ci premiers elements de la foi, il iin s'ensuil 'pas que loules les eglises aieni joni do ce bonheiir. 11 osl ccrlain iiieme que queUnms-unes n'oiil vu paraiire leurs eveques que du temps de Conslanliri on de ses fils. Or, eii ce qui concerne I'eglise de Reims, il est une aulorile qui remporle sur la tradi- tion. Le grand archeveque Hincmar nous I'a dit : saint Sixte de Reims a ete envoye par un pape du noin de Sixle. Nous n'examinons pas si ce pape est Sixte I"'" ou Sixie II; il nons suffil de savoir que ces deux poniifes sent ions deux posteri(Mirs a saint Clement, pour dire avec raison que I'eglise de Reims ne remontc pas aux temps a[)Osioliques. Voici notre reponsc : Un jour, on piesenta h une academic d'Allemagne, un enfant qui avail une dent d'or, Le fail parut mer- vcilleux, mais possible aux uns ; les auU'es, au con- traire, dcclarercnl qu'il etait anormal el oppose h touti'S les lois de la physiologic. Bieniot , I'aigreur s'en mcla!ii, une polemique en regie s'etablit ontre les partisans de la dent et ses adversaires. On avail ecril dej& de pari et d'aulre une foule de volumes, lorsqu'un homme, tres simple d'esprit, eui Tidee d'oxa- miner de plus pres la dent, et il rcconnut qu'elle eiaii ires ordinaire, tres nalurelle, et qu'un charlatan habile y avail simplemeni applique une feuille d'or. Voici [)res de deux cents ans que Ton ergote snr le lexle d'Hincmar, les uns pour proiiver qu'il nierite loute cieance, les autrts pour en cotilester la valour. Nous a\OMs agi comme on eul du le faire d«;s le ■ principe, nous avons recouru au texic oi nous avons vu la feuille d'or appliqueu sur la dent. Le passage allegue se irouve a la page 451 du t. ii - 502 — (les oeuvres d'Hincmar publiees par Sirrnond. Cost le commencemeiii dii xvi' chapiire d'line le'llre que I'archeveque de Reims ecrivail a son neveu, I'eveque de Laon. Nous le ciions dans loule son iiiiegrile (i) : « Voyez, nion frere, si, dcpuis una epoque reculee, ia metropole de Reims n'a pas sous sa dependanco une province bicn deierminee. En effel, celie me- tropole compiait sous sa jiiridiclion onze ciles avanl meme que,-sur I'autorile du concile d'Afrique, sainl Remy n'erigeai le siege de Laon , de celie ville dont vous avcz ele ordonne eveqiie, pour venir en aide a voire melropolilain, bien loin d'en allaqiier, comme vous failes, I'auiorite cl la plurimis annoi'um OTolutis curriculis , in Rcineiisi parochia , stent et alia municiEjia qua- bodieque ibidem consislnnt, miinicipalcin locum tcuuit, sicut et lomus quera Anacletus episcopis de sediuni privilegiis se inter- rogautibus se misisse dicit, patenter ostendit , reluti ipse legeie poles in eodem breviario , in quo descriptis civitalibus metropoli Remorum subjeclis, nomenca»telli, in quo eslordin;ilus episcopus, ne(](iaqiiam iuvenies. (Hincmar, loin ii, p. 431.) ■ — 503 — parmi Ifs ciies on !es chefs-licnx de provinces. !i( depuis que le bienheureux Sixte eut ete envoye en qua- lite d'eveque dans (a metropole de Reims par le souve- rain poniife de Rome Sixte, alors que le chrislianismo comptaii en loui quinze archeveques, ce n'osl qu'a- pres bien des arinees que cotle ville a eie elevee au rang de municipe dans la province de Reims. CVsl cc que demonlre avec evidence le livre que le pape Anaclet envoya auxeveques qui Vavaient considte sur les privileges des sieges. Vous pouvez vous-meme lire dans ce href {'enumeration des villea qui dependent de la metropole de Reims , el vons n'y irouverez nulle pari le nom de celle ville de Laon , ou vous avez ele or- donne cveqne. » Or, quiconquo connaii lanl soil pen la chronologie des papes, sail ires bien que sainl Anaclel a siege sur le irone poniifical avant les deux premiers sainls Sixle. Mais si sainl Anaclel a envoye aux eveques un livre dans lequel esi etablie la circonscriplion de cbaque archi-diocese, si la ville de Reims esl designee coninie la meiropole d'un de ces archi-dioceses, ou sainl Sixle n'esl pas son premier eveque, ou ce n'esl pas iin pape du nom de Sixle qui Ta envoye. II y a done dans ce texle une erreur de copisle. Hincmar aura ecril : « El postquam Sixtus a Petro sedis Romanse poniifice, » el Ton aura copie Sixlo. El, ce qui porle h le croire, c'est que dans ces deux noms il y a meme nombre de lelires, n)eme desinence : un copisle ne se serail jamais irompe au poini de lire ■Petro pour Clemente ou pour Anaclelo. El d'ailleurs, si Ton avail lu le lexie de la lellre d'Hincmar, on aurail vu que le doiile n'esl pas pos- — 504 — sible. L'archeveque de Reims ecril a son sulTragant pour lui repiocher I'espril do revolle qui I'anime ; il s'efTorce de lui demonlrer que les melropoles onl ele placees au dessus des eglises suffr;!ganies, par I'ordre meme des apolres, el il insiste pour lui laire com- prendre que, par son anliquile, son origine aposlolique, la ville de Reims esi bien superieure a la bourgade doni il esl le prelat, el quo, par consequeni, lui, me- iropolilain place a la tele de I'un des Ireize archeveches fondes par sainl Pierre, il a droit au respect, a I'obeis- sance de son subordonne. Si ce que nous venons de dire n'elail pas suftisanl pour dcinontrer quo dans le toxie invoque contre nous il y a erreur de copiste , nous ferions la remarque suivanle: Sirmond, I'editeur d'Hincmar, elait I'ami de Roucber (1), I'auteur du Belgium Romanuni ; eh bieu, Boucber a dii, sans etre dementi par Sirmond : « // resulle de V opinion d'Hincmar , que sainl Sixie a ele envoye a Reims par sainl Pierre, eu meme temps que le prince des apolros dirigeait sur Treves Euchere et ses compagnons. » Ce n'esl pas lout : Foulques, successeur d'Hincmar, ecril en 887, au pape Etienne, ces paroles que nous iivons deja cilees: « Le siege de Reims a ete loujours honore par les pa|)es vos predecesseurs d'une maniere plus specialo que les autres eglises de France, parce que le bien- heureux apolro.saiui Pierre lui a donne pour premier eveque sainl Si\ie, a qui il avail confere la piimatie de toule la Gaule. » Or, si cetle opinion n'avait pas ele la croyance de son eglise , Foulques I'aurail-il (Ij Voyez le Belgium Romanum , iir. v, pago 152. — 505 — rt'iKiuc [mhliqiie? luiraii-il ose desavoiior piihliqno' inent im liomnie aii^si haul place dans I'opinion de toute la chretienle que son piedecesspur Hincmai? § XII. MONUMENT (HU^TIKN TROUVt A IIEIMS. Mais a quoi hoii nous preoccup(M' de cherclier auiour dc nous des prciivis de rcxisicnce du chiislianisme h Reims, dans le iroisieme siecle de noire ere, lor^que nous pouvons en citer unc qui a exisle longlemps dans noire ville, el que I'inditference el I'lgnoranoe onl laissc s'aneanlir 6 la (in du siecle dernier? Nous voulons paiKr d'un monumeni chreiien, an- leriour a I'an 260 , irouve s-ous la lour de I'eglise Saini-iMariin. r.e nionunienl, decouvori eii 1738, a ele decrit en 1749, par un savani du lemps, f.evesque (\c Ponilly, ancicn lieulenani des hoitiiaiiis ; ei maiheureusement eel ecrivain, pas plus que coux qui s'en sonl occupes dcpuis, n'en a compris la veritable origine. Nous ciions lextuelleinenl De Poiiilly, dont la bro- churo est devenue assez rare, (nalgre hois editions (1) : « Sous la lour du clocher de la paroisse St-MaMin, esl, a vingi pieds de profondfur, un mausolee qui a quinze pieds ci dcmi de loiigueiu, buil de largeur et (1) La Dibliolheque dc la ville de Reims a acquis rereinment iiiie eaii-forie que nous croyons avoir ele gravec pour la secondc cdi- lion. C'esl cello doiit In teproduction accompagne cc inemoire. Outro Ics deus faces du nionuDient, on y Irouve, a unc echctic moindrcde lunitie . 1"un [Ian ; 2" line cou)>eprisca Tendruitdu soupirail , et reproduisunl I'un des pelils cotes de la chambre. XXVI. 35 - 500 — dix cl (lemi de liauleur, sons clef. On y descend par nn oscalier de pierrc (a) de vingl degres, el on y irouve une fosse conslruiie en ma^onnerie, de huil pieds en caire sur huil lie profondenr, ou soni encore plnsieiirs osseinonls (n). » Tout, rinterieur dti mausolce esl orne de pcin- lures a fiesqnc sur un enduit de tuiles baiiues; elles composcni dilferonis tableaux de six pieds irois pouces de haulonr, renfermes dans des cadres formes par des bandes de ineuie couleur. n Dans le principal de ces tableaux sonl irois fi- gures (I, 2 el 5) (jui. a leur laillt; el a leurs habille- menis, paraissenl etre celles d'un pere, de son (ils et de sa fille : le pere a irois pieds quaire pouces, le fils, Irois pieds, el la (ille deux. Les babillemenls du pere el du tils sonl pareils ; ils differeni en quelque chose de ceux que les Remains porlaieni en lialie ; ils sonl raoins longs, sonl onverls par los coles el fermes en haul el en has par deux boucles de forme circulaire, lelles qu'on en voii quelques-u:iis gravees dans Bege- ms el dans le R. Pere Monifaucon ; la lille a deux boucles d'oreilhs el un collier, sa robe esl enliere- meni fermee, de meme (}ue I'elaieni celles des dames roinaines, ainsi que I'a observe Plularque dans la vie de Lycuigue. Les murs du mauiolee presenlenl d'au- ires iribleaux ; on y voil on liommequi porie une espece de lil de repos (f), el une personne a demi elTacee qui lend sa main vers un aulel oil le feu du sacrifice esl allume (d). » An-dessus de ccs dilferenles figures sonl suspen- dues des guirlandes de fl( urs (a), et a cote sonl des oi^eaux (b) poses sur des urnes, et des Hours qui sorlent d'liiie espece de caisse. -^ /*iVJ/itreJ an&miej ,£ut Cai^cau S -fTizr^n^'. -^fEV-^ l! itiljA ^■^^^^^^^^"^^^^^ B ,W< '(Vj .t - ' — 507 - » Dans le [tlaroiid de la vouie esi |jeinle iitie iiio- saiqiie composee de crclcs (I), dans le cenirc de&qnels soul des disqut'S ol des fleiirs. » Dans le cole oppose an principal tableau tsi iine niche (c) cinliee par le haul, qui a iin pitd el demi de profondeur : il y a line niche nn pen nioins pro- fonde que celie-ci dans chacnn des deux aulres coles (d), el loul riiilericur de ces Hois niches esi orne de fleurs. » A coie de la piincipale niclu- esi praliqne nn soupiiail (e), (|ui a de largeur environ deux pii'ds canes ; il est, coniine les niches, orne de tleurs dans loule son etendue. » Ce nionumenl e;^l un de ces inausulees que les auciens appelaienl Hj'poi,'ees,c'esl-a-dire soiilerrains... » On plagail d'oidinaire les tomheaux hors (Les villes el sur les bords des grands chiinins, |ionr inviier les voyagenrs a rendre homniage 6 la menioire des de- funls; aussi, ce mansolee-ci eiail-il place dans la cam- pagne el sur le bord d'nti grand chemin que saini Remi, dans son teslanient, appelle Via Ccesarea , el qui, snivani robseivalion de Bergier, lirail en lig'ne droiie de la porle Basee jusqu'au lieu ou esi une vieille porle niuree qu'on appelle la porie Sl-Nicaise. B Les Irois figures (Uie I'on voil dans le principal lableau de ce niausolee, sonl appareninfienl les trois [lersonnes a la memoire de ijui le monumeni a ele erige. » [.a lableau de la |)ersonne qui esi pres d'un autel d'ou s'elance une tlamme , ressemble exirememenl a un niarhre antique qu'a fail graver Boissard, Ce niau- (1) <>(i jiliitol (It's caissons octogones — 30S — »olee-ci lu; seraii-il jjoiiii I'ouvrage de la pcrsonne qui, comnic dans Ic niaibie de Boissard , sacrifie ici aux Dieijx iMani'S? » Lc lit de repos qn'iin liommc soulieni sur ses epaiiNs est appan'innii'nl cc hrancarl qu'on appelail Leclica, el qui servaii a poller le corps an bucher ; cl eel homme t'si iin de ceux qu'on appelle VespHlones ou Saiidapiloiies, doni !a Innciion ol.iii de porler ces lits. » Le noinbre ol la forme des Irois niches de ce iTiausolee nous apprennenl leur deslinalion ; elles res- semblenl parfaiienieni a ces niches des anciens torn- beaux dans lesquelles se pla^aienl les urnes qui con- servaienl les cendres des corps qu'on avail brules , el Ton ne peut guere se defendre de croire que ces trois niches n'aieni ele deslinees a conserver les cendres des irois per^onnes peinles dans le principal tableau. La plus grande avail ele deslinee pour le pere, les deux auires I'avaienl eie pour le His el pour la Bile. » Leurs affranchis ou Icnrs esclaves oiil eie, selon louie apparence, inhumes dans la fosse oil Ton trouve encore uoe pariie de leurs os. » II n'y a dans ce mausolee ancune inscription qui puisse nous apprentire precisemenl le temps ou il a eie consiruil, mais il y a apparence qu'il I'a eie dans I'espace des trois premiers siecles de I'ere chrelienne. » 11 ne peut elre anierieur a la conquele de la Gaule Belgique par les Romains. Les habillemenls y sonl loul-a-fail differenls de ceux des Beiges, el la peinliire n'avait jamais ele cullivee parmi ,eux. » II ne peut pas non plus elre poslerieur au iV siecle, |jiiis-quo Macrobc, qui vivail au commencemenl dn W assure tpi'il y avail d('*j;i longlemps que I'lisage — 509 — de brulcr les niorts etaii eiitiertMncni nboli; mais voioi une observation qui fail remonicr liieii avaiU !<■ l di; textk puficfcoE^T. L';iiuciir (If cii ariicle iic inniKiuail pns d'eiiuJilion; il einii memc membie i\c I'acadeniii' dcs inscripiions el bcl!rs-tfc-tlios. On a done lion de s'elonner quMI n'ail |ioit)i rcconnu lui-menio combien eiail pftii fondee en raison resplicaiion qu'il donne de ces dessins. Lcs Ves^pillonnes , \os Sandapilones elaienl des en- claves publics ; coinnienl done admelire quo les aiitcurs de no'r.' ii'oir.iinrni a!( iil cii Tidde de placer dans un tableau do famille un peisonnage donl les fonciions oiaioiil considerocs. sinon cummo impurcs, du moins ires abjecles? La [losilion des oiseaux snr le dessin indique pins qu'uno inirniio!) d'ornomeniaiion; kur presence revele uno penset; sjinbcdique, el ce n'esl pas faiie preuve d'une grando profondeni' do critique, que de se borner a rnpptlcr qu'on a vu de semblablos dessins sur des constniciioiis antiques. Des que 1 1 synibolique paienno ue donnait aucunc iuierjuelaiioii sali^t'iisanh^ de co monumeiii, il fallait porter ailleurs les regards. Avoc un peu dc reflexion, on so seraii lappele (jue I'eglise de Sainl-Marliii re- raoniait a une tres haule aiiliqiiite, puisque (juelqucs auieurs prelendeni qu'elle vii le baplenie de Clovis. De I'borreur que les premiers chieiiens nianit'estaient pour lout ce qui rapprlaii lo polyilieisnie gallo-romaiii, du zelo (|ue les eveques apporiaienl, meme a une epoque relaiivenienl moderne , a detruire tous les vestiges de co cube, on aurait dcduil de ce fait (pie — oil — les Hdelcs a qui rmi doil l;i Cdiislriiclioii do Tcglisti Sainl-Mariii) , iii' raiiraieiU pas erigeti siir I'dnplaco- meril (i'nn lomhoan paieii , coiiieiiarii encore k's 0'iis ne (lit pas seiilfinenl de prendre son lit , njnis il ordoiine encore de regagner sa denu'iiic : cela signifie evidcniinent de relourner au Paradis, » C't'sl ce que dM encore sainl Auguslitj dans son livre second de Symbolo nd Catechumenos : « Oh, combien il serail nieillenr pour lui, si apres avoir regn la remission de ses peches , il se levail , non de son lii ponr peclier encore, mais du sepulcre, pour so diriger libre el sans craiiile vers la veritable vie ! » Ce feoiitinicri! c.sl ans^i jiariage par sainl Hitaire, lors(jn'il ecrii (1) : « Mors, par renlevcrnenl du lit , il a enseii^ne que rinlirmite serail enlevee aux corps, ensnile, le reionr dans la maison palernelle signilie que le chcmin du Paradis sera rendu aux croyanls. » Le |)ersonnage cpii sacrilie rappelle Abraham , prel a immoler Isaac. Noire dessin represenie le pairiarche, seul, icl qu'on le voit dans la Roma sullerranea,lom. i, pag. 529 , el dans p!u?icurs endroiis de Touvrage dc M. Perret sur les Caiacombes. Abraham est la pour rappelerla resurrection des corps anjoiird(i]ugemenl dernier, il est la consecraiion decetle parole de ra[)6lre (2) : « Abraham n'a pas h^sile dans sa foi , lorsqn'il a offerl a Dieu son fils unique, pensanl que Dieu eiait assez puissant pour le ressuscller d'entre les moris ; » parole qu'Origene el sainl Jean Chrysos- lomc ont conimenlee, en disani, Tun (5) : « Ainsi I'a- (1) Hil. in Matlh.,c. 8 (2) S. I'auti Epist. nd Ilebrwos , 2. (.1) Origcii. Homil.$, in Gen , cap. il. — 513 — poire iioiis a tail coniiaiire les pcnset'S de riioniino fiddle, puisqu'il nous a monire que c'esl d'Isaac que date la croyance dans la resnrreclioii; » ainsi Abraham csperaii qu'Fsaac ressiiscitcrail. l/anire (1): « Or, si Abraliani , ii (ine 6poqiie si recnieo , a cm que Dicu ctail assez puissaui pour le ressusciior d'enire les nioris, a plus forte raisnn devons-nous I'admellre. » Les anciens croyaicui que la chair du paon avail la propricie de ne point se corrompre, el saint Auguslin voyait dans eel oiseau liniago dn juste (2) ; « On dil que It'ur chair, lorsqu'elle est de>sechee , resie sans se pulrefier. Comrne ils soni rccouverts de plumes magni- liqucs, ils pouvenl designer les homnies parfails des- seches au feu de la irihulation, de telle sorle qu'ils restenl pares de leurs seiiles vertns. » Get oiseau clnil aussi rembleme de la resurrection, ainsi que I'explique sainl Antoine de Padoue, dans son seimon pour le cinquieme jour apres la Trinile. L'exigtiiie dn dessin (pie nous avons sous les yeux, ne nous permet pas de ^. Les percs du concile avaienl ^)iis delii occasion de recommander aux clireiiens I'exe- cmion de ces peinlures stir tahletles de bois, qui poii- vaienl loujours, a la moindre apparence de iroubie el de danger, s'enlever el se souslrairc aux effels de la perseculion. C'esidela, en effel , qu'esl venu I'lisage drs dypliques, qui s'est coniinue, comme on sail , ^ iravers loul le cours du moyen-age , comme une ira- diiion de ces lemps d'epreuves, ou les chreiiens, poiir- suivis d'asile en asile, Iransporlaienl parloul avcc eux, en lableties de bois peinles ou d'ivoire sculple, les sacrees images du Christ, de la Vierge ci des Apoires; et plus lard , comme un effel des persecutions causees par le faiiaiisme iconoclasie. C'esl encore par une con- sequence de ces facheuses neccssiles de la primitive Eglise , que s'esl elabli, dans les lemps de la Renais- sance , I'usage des tableaux d'aulel ii volels, qui avaieni la forme de dypliques, meme d'une dimension consid6- rable, lels qu'il s'en voit encore dans lanl d'egiises d'l- lalie. La defense du concile d'Elvire elaii done loul accidentelle , tonle de circonsiance, el c'esl ainsi qu'il faul I'enlendre (1). Ainsi, les peinlures du cavcau de Saint-Martin soni anterieures au iv* siecle. Klles ne soul poini du pre- mier : a celle epoque, il n'y avail pas eu de maityrs a Reims. Mais si elles soul du deuxieme, on ne peul (2) Haoiil RochPtlc. Tableau des Calacombes de Rome . p (06. — olS — pas (lire que I'eglise n'a eie t'ondee que du lemps de Decius ou de Dioclelien ; si, au conlraire, elles sont du iroisieme, 11 osi absuido do dire que Beiause a londe one nouvellc coinmnnaule chrelienne eti rcin- placcmenl de celle qu'avaienl elablie les missionnaires eiivoyes par les apotres, el qui n'avail pu resisler aux orages des persecutions. L'exisleuce de I'eylise de Reims, au in' el au iv* siecle, se Irouve done demonlree, d'abord par les mar- tyrs qui sont morls dans le pays pour la Ibi ; en second lieu, par la co-existence de quelques eglises voisines ; en iroisieme lieu, par le monument que nous venous de decrire. Nous dirons done, pour resumer celle irop lougue argumentalioii, que I'origine aposioiique de I'eglise de Reims esl prouvee : 1" |>ar la tradition qui est propre a celle eglise ; 2° par la tradition des principales eglises de France, el notammeni par celles de Soissons, de Metz ei de Treves ; 5° par les texles des Peres de I'eglise qui oul ecril dans les Irois premiers siecles ; 4o par la relulalion des texles de Sulpice Severe el de Gregoire de Tours ; o» par I'opinion de Tarcheveque Hincmar, invoquee contre nous. El enfin, que celle eglise a loujours subsisle debout, glorieuse, depuis sainl Sixie jusqu'a I'illustre prelal qui la gouverne aujourd'hui, el donl la science iheo- logique ajouie un nouvel eclal aux gloires qui en oni eleve si baul le nom. Heurcux si nous pouvons faire partagcr noire conviction a nos lecleurs, oi nous eerier avcc Hinc- mar ; « Veritas, s?epius agitata, magis splendescil in lucem ! » — 519 — lA POESIE GRECQUE ii; Lecture de M. Pr. Soullie , mcmbre titulaire. Salut ! langue immortelle, auguste poesie, Dont la Grece autrefois fut I'heureuse patrie, Ou piulul qui naquis sur les levres des Dieux ! Quel morlel, le premier te derobant aux cieux Pour eonsoler nos maux I'apporta sur la terre? Un jour de I'lli'licon jaillit avec mystere Un ruisseau qui murmure, un torrent qui bondit, Un fleuve iuipetueux qui gronde et s'agrandit. ("est a ses eaux que va s'abreuver tout poete; C'est la qu'il va puiser cette force secrete Qui le soumet lui-meme, et lui soumet les coeurs. 0 dlvin fleuve! heureux qui connut tes douceur.-. Qui , se desalterant dans tes sources fecondes, Abandonna sa barque au courant de tes onde,-, Ou qui meme bornant ses timides eCforls Kffleura seuleinent le sable de tes bords ! (Ij Le foiul de coUe piece apparticnl a un ancien eleve ds M. Soullie, (jui I'a remaniee et relonduo, pour la rendrc plus digne de rAca.lemie el rie rasseinblec qui assislail a la seance publique. — 5^0 — Un nom myslerieux retentit dans I'espacc, C'est le fils de Clio, c'est le chantre de Thrace. Seul, triste, nuit etjour deplorant ses malheurs, II raurmure : Eurydice, et s'eteint dans les pleurs. Les tigres, les lions que sa douceur attire Venaient lecher ses pieds el caresser sa lyre. Mais pourquoi ce .silence, et ces membres epars? 0 femme-, arretez.... Detournons nos regards. Orphiie a disparu, mais noo la poesie : Un autre lui succede, immense et doux genie; Pendant que son regard plonge dans I'avenir, II va scmant parlout les fleurs du souvenir, Les antiques recits oil se transraet la gloire, D'un peuple de heros la merveilleuse histoire, Les raaux de la di-^corde et les rois furieux, La valeur des guorriers et le respect des dieux ; LaGrece avec transport s'y revolt tout entiere. Tous I'ont deja nomme, c'est le divin Homere. Sur un rocher lointain dominant un ecueil J'apergois une femme en longs habits de deuil : Elle marche a pas lents comme on marche au supplice. De fllles de Lesbos , au bord du precipice , Un cortege nombreux la precede cl la suit. A ces accents plaintifs la mer raele son bruit. Deja du roc fatal die a touche la cime. « 0 Venus, viens des flois sur moi fernier I'abime. » Elle dit, elle tombe, et tout est efface. Et c'etait toi, Sapho I... Qui done I'aurait pensc, Quand tu dictais ces vers qu'en riant sur tes traces Redisait a I'envi le choeur leger des Graces, Quand rhyn^ne de I'amour resonnait sous tes doigts , Que la mort aussitot etoufferait la voix. Mais que vois-je, la-bas, dans des flots de poussi^re, Des armpH, des soldats! j'cniends des cris de guerre! — 5-21 — 0 Sparte I qiioi (Jt'ja leciilent tes vengeurs I Mais Tyrtee est leur chef ; il chante, et dans les coeurs 11 ranime soud.nin I'amour de la patrie , Le mepris de la mort et celui de la vie ; De la pale frayeur le monstre est tUouffe. Po6te, gloire a toi ! ta lyre a triomphe. Pindare aussi, Pindare eiifante des miracles, Par sa voix Apollon va rendre ses oracles ; Ce n'est plus un mortel, c'est un Dieu : rien d'humaiii Ne parle par sa bouche et ne bat dans son sein ; Un Dieu puissant I'oppresse; il c^de, et son genie Deborde tout-a-coup en torrents d'harmonie. L'aigle a pris son essor et fuit loin de nos yeux ; Essayez de le suivre, il plane au haut des cieux. Ht toi, poete heureux, toi qui dans la vieillesse As conserve lesjeux, les ris de la jeunesse; Va, ceins tes cheveux blancs de myrte et d'olivier, Tu preferes la rose au plus noble laurier. Gr^ce, un nouveau fleuron sajoute a ta couronne ; D'un eclat merveilleux ton theatre rayonne. Sublime enchantement! regardez sous vos yeux Passer tous ces guerriers, ces rois, ces demi-dieux, Que celebra jadis la voix du grand Homere. Encore enveloppes des voiles du mystere , On avait, mais de loin, admire leur grandeur ; On peut lire aujourd'hui jusqu'au fond de leurcoeur. Toute la Grece antique en ces lieux reunie Ressuscite soudain aux accents du genie 5 Par Sophocle evoques, tons ces nobles heros Pour former leurs neveux sortent de leurs tombeaux. Un peuple tout entier se leve et les salue 5 II voit, heureux et fier, s'avancer a sa vue Ulysse, Hercule, Ajax; et devant ses ayeux U jure d'etre libre et d'etre grand comme eux. XXVI. 3G - 522 — Apr^s eux tout se tail ; nulle voix ne s'eleve. Le fleuve au loin se perd et sa course s'ach^ve. Mais ecoutons encore. Au fond de ces vallons, Sous ces ombrages frais, sur ces riants gazons, La troupe des bergers foule I'herbe en cadence ; Une flute a la main au milieu d'eux s'avance Un patre ; a peine a-l-il entendu leurs concerts. Simple comme eux, il vole au milieu des pres verts; Des plus aimables fleurs 11 couronne sa t6te, 11 adoucit encor leurs plus doux chants de fete \ Et conservant leur gr^ce et leur naivete, 11 consacre leurs jeux h. I'immortalite ; El bientot les chansons du berger de Sicile Vont jusqu'au seiu de Rome eveiller un Virgile. Que dis-je ? Anacreon nous est-il etranger? Hier il souriait 4 notre Beranger. c En vain , dit-il, il faut qu'on me traduise Hom^re, € Je fus et je suis Grec, j'eus Ath^nes pour m6re. » Aimons done, comme lui, ces chants harmonieux; Et comme dans I'Olympe k la table des dieux L'aimable Hebe versait les flots de I'ambroisie, Que la Grece ci nos coeurs verse la poesie. — 52.^ RAPPORT SUR LE CONCOURS DE POtSIE, Par M. PiETON, Membre titulaire (1). L'Academie, avec ces seuls mols : Colbert el sa Statue a Reims , proposail au concours le sujet le plus vasle et le plus national qu'il fut possible de choisir ; son appel a ete enlendu : quarante-cinq pieces lui onl ele adress^es, de loules parts, pour applaudir a son initiative et temoigner que, meme a notre epoque, oil la poesie, dil-on, se meurl eiouffee sous le calcul el rinteret, il y a encore, il y aura toujours de hauies pensees el de nobles vers, pour tons les grands sou- venirs el toules les vraies gloires. C'esl que Colbert n'esi pas seulemeni I'honneur imperissable de cette ville, mais bien une des plus imposanles el des plus pures illustrations du pays : il a ele, pendant vingl-deux ans, le guide infaiigable el comme le bon genie de la royaule. Cel borame, dil M. Michelet, sorli d'un comptoir, avail le sentiraenl de la grandeur de la France; pour faire cesser loul ce qu'elle souffrait de desordre el de misere, il fallait plus que la volonte du jeune Louis XIV, si ardcnle qu'elle fut ; il fallail un ouvrier a la bauleur de la (1) La Commission etait composec de MM. Robiliard, Clicquot, Soulli^, Leseur, Piston elMaitin. - 52a - lache : la Providence nous le donna: ce ful ce rare minisire qui a immortalise le nom de Colbert. Une large carriere s'ouvrait done a la poesie: cette nais- i sance obscure , rapprochee de cetie haute fortune ' conquise par taut de services, presentail un contraste plein d'images ei dc grandeur ; raais, en meme temps, il fani le reconnailre avec justice, le sujet etail seme de difficultes et d'ecueils. Colbert, avanl tout, est un genie severe, plein d'ordre el de volonte, invincible au travail : touies qualites negatives pour le poete. Comment faire en- trer, dans des vers dignes de ce nom, la longue enu- meration de ces Iravaux, que Thistoire el Teconomie politique peuvent seuls raconler el juger, el qui leur demandenl des volumes : dans une ode, ces mots de floances, de commerce et d'industrie embarrassent la rime el resislenl au mouvcmenl lyrique. Aussi, parmi les candidais, beaucoup onl-ils voulu transformer, a tout prix, Colbert en un reveur, un prophete, prcsque un demi-dieu ; d'aulres oni prefere, ^ celle exiremiie, un commode silence : c'esl Irop el '• c'esl irop peu ; la veriie hislorique condamne ces || ecarts : Colljerl est si pres de nous, qu'il ne peui de- venir un heros de legende; el ce qu'il a fail merite lanl qu'on le redise a jamais, qu'il n'est pas permis de le taire. Mais le patronage eclaire donl Colbert a enioure les sciences et les leltres, la puissante impulsion qu'il a su donner aux arts, ces monuments sans nombre el ces Iravaux gigantesqucs, accomplis parloul dans l! le pays, la creation de noire marine, etaient, pour le .|)oeie, un (heme precieux et fecond. El puis Colbert apparlient au grand siecle, il arrive — 525 - au pouvoir avoc la royaule nouvelle, il prepare ot pariage (oute la gloire de ces annees sans cgales, il voil Louis XIV el la France au plus haul poini de leur suprematie en Europe, loul esl bonlicur alors, dominalion cl genie ; dans ce rayonnemenl uni- verse), qui eblouil le roi , Colberl demeure calme el poursuit son ceuvre, occupe loujours de eel avenir donl il pressenl les irislesses, el meurl assez a lemps pour ne pas le voir. Un aulre danger s'offrait encore : le poeie ne con- nail que son heros , il lui sacrifie loul; bien des concurrents onl cru devoir , pour exalter Colbert , abaisser Louis XIV : c'etaii inutile, et ces aitaques sonl devenues banaies. Quoiqu'on fasse, Louis XIV, meme avec ses faiblesses el ses fauies, esl le type in- comparable de la monarchie; il remplil loul un siecle, el le monde oublie Guillaume III, Charles XII el le czar Pierre, pour Tappeicr seul le grand Roi. Enfin , la morl de Colberl, s'etoignaal sans se plaindre, au milieu des disgraces de la Cour et dos imprecations populaires, etait un tableau digne d'ins- pirer : il a fini en cbretien ; il avail assez fail pour la France; il pouvail se passer el des larmes du Roi, el des regrets de la foule : I'hisloire I'a venge : « Quand apres un peu de lemps , on eui mesure le » vide qu'il avail rempli , on sentil loul ce qu'il valail : » Tadrairaiion commen^a sur sa lombe, el le siecle, » qui se connaissaii en hommes, lui decerna le nom » de grand : il dii le grand Colbert , comme il avail » dil le grand Corneille et le grand Conde (1). » (I) M. Gouraiid , Histoire de la politique commerciale de la France . — 526 — f>'Acadeinio aurail voulii , pour unc idle gloiic , coiironner un chef-d'oeuvre : mais, penelree des difti- culies de la tache, elle esl lieurcuse d'avoir h decerner, dans un meme concours, deux prix el deux nieniions, a des pieces diversemenl remarquables ; elle eul de- sire donner davanlage. Elle a consciencieusenienl examine lous les iravaux qui lui onl ete adresses, sans oublier jamais combien la critique esl facile. Elle a (111, loul en rendani hommage aux efforls malheu- reux, ecarler bien des hymnes, des odes el des can- laies, on la raison s'egare, ou la langue s'elTace, ou la prosodie meme disparail. II en est qui passenl du pompeux an burlesque , de la meiaphore a Kepi- gramme, el presque au jeu de mois: elles s'envoleni si haul d'abord qu'on a peine a les suivre, elles re- lombenl bientoi si bas qu'on ne peul plus les relevcr. II en esl de si breves qu'il faut en deviner le sens, de si longues qu'elles decourageni, el de si pales qu'on les croirail en prose. Pourlanl louies les ten- lalives doivenl elre complees, ei I'Academie les ac- cueiilera loujours. Mais, a cole de ces essais, irop peu dignes de Col- berl , elle a irouve bien des oeuvres merilanlos. En dehors de celles que vous apprecierez loul al'heure, il en esl dix qui appellenl une alienlion serieuse el de sinceres eloges : I'Academie les conserve; elles sonl plus que desesperances. L'une d'elles, la seulede ce genre, a la forme piquante d'un dialogue enlre Colberl, donl la slalue s'eleve , el Drouel d'Erlon qui s'indigne , en vers heureux, parfois cependanl un peu vulgaires, d'avoir eu la sienne avanl le plus illuslre enfant de Reims. Toules les aulres, plus graves, plus laborieuses, sc disiiugueni par unc 6lude approfondie du sujet, de — 527 — riiomme cl de I'cpoqiie, I'habilude du vers, I'abondance et la verve; el si I'Academie necroii pas devoir propo- ser de recompenses pour des pieces recommandables a tanl de litres, c'est qu'oiles laissenl irop souveni de- sirer le souffle verilable, I'inspiration qui fail pardon- ner lanl d'erreurs, parce qu'elle esl la poesie meme. Avec ces reslriclions, rAcadomie no peul que re- mercier el applaudir les auleurs de ces oeuvres habiles, en allendani qu'elle les couronne un jour (1). Les mentions appariienneni ii MM. De Lacliapelle el Lesguillon. M. De Lachapelle (de Cherbourg) a Ires largement compris sa lache : i! a le siyle eleve, parfois profond ; I'idee abonde en lui, son vers esl sobre el solide ; il esl regreilable, louiefois, que M. Lacliapelle ail choisi (I) Ces pieces portent les epigraphcs suivantes : N°' 6. — A parro existens , exislis semper in alluni , Mens geaerosa Quae merilis propriis ampliGcavit aros. (Fortcnat.) 12. — Pro?iiJeat rei yirum sapieDlem, et industrium, ct praeGciat eum terrae. (Gen. xli, 33.) 18. — La prosperilp du regne de Louis XIV el le bonheur des peuples feront a jamais regrelter le plus graud ministre qu'aiteu la France. (Le president Henadlt.) 22. — Vir marmorens. 23. — Essai sur rerectioD d'uue Statue a Colberl. 27. — Magnus ab iotegro seclorum nascitur ordo. 34. — On ne doit point juger un homme sur ses bonnes qualites, mais sur I'usage qu'll en sail faire. (La Rochefoucauld.) 37. — Arec la liberie d'un soldatquisait malfarder la rerite. 38. — II y a des lieux qui semblent aroir leurs destinees comme certains hommes. (Lamartine.j 41. — On peut regarder Colbert comme le fondateur du commerce et le protecteur de tous les arts. (Voltaire.) — 528 — .vaiulrin qui dcmaiule mm do pleniliide, el dont le nioiivemenl est loiijoiirs forcemenl ralcoU par les exigences ile la rime. On peul jugd- la inaniere el le meriie de I'auleHr par ce fragmeni qui lermine s^oii oeuvre : Get homme, aux froids calculs, du genie est fapOtre- Cisfau, compa?, pinceau, tout s'anime a sa voix. Le peuple a son jardin dans le palais des Hois. Le Louvre est commence, grande tache, entravee Deux siecles, en deux ans dans le ndtie achevee. Le Palais du soldat couvre d'un dome d'or Tombeaux, drapeaux, vieillards mutiles, fiers encor; Et sur la ti-rre aride, oil rampent les broussailles, Naissent les eaux, les bois, les marbres de Versailles. Mais, dune telle epoque, il veut que tout soit digne, 11 veul, dans Tavenir, tracer sa grande ligne : Le temps renvertera le faite des palais: II est des monuments qui ne tombent jamais. Rien n'est plus dllion, et I'lliade encore A la Vive fraicheur d'une naissanle aurore. La Rome des Cesars ge perd sous les debris, On le pied du Vandale imprima ses mepris ; Aucun bruit n'a couvert la voix des grands poetes Qui chanterenl jadis sous ses voutes muettes. Colbert voil arriver ces jours, longtemps promts. Oil le genie ardent, a la raison soumis, Unit, de I'autre siecle cpurant I'heritage, La plus juste pensee au plus noble langage. II anime au travail le cenacle eclatant De ces raortels elus que I'avenir attend ; II les honore: il veut qu'un pen d'or et de gloire De la Postcrite previenne la memoire. — 529 — On ne toiibliera pas, Colbert : ils font nomme I Tu descends au lombeau, de soucls consume ; Par I'oubli de ton roi si ton ame est froissee , Vers le maitre des Rois s'eleve ta pcnsee : De lui scul, elle attend son legitime prix. Tu seras meconnu par un peuple surpris: Mais qu'importe Ic fiel de ce dernier calice ? Tu vas trouver au ciel reternellc justice (1) ! M. Lesgiiillon est un ecrivain d'un talent eprouve ; sa facilite est connue: elle va jusqu'a rimprovisation; it est peu de recueils qui nc conliennenl de scs vers ; le theatre lui doit plus d'une fine etude, et le succes a couronne noiamment son Figaro en prison, repre- seuie, il y a (juelquis annces, a la Comedie Fran^aise. La piece qu'il a envoyee au concours peche par cette extreme abondance, qui csi, chez I'auteur, I'exc^s d'une qualile : elle est inegale, et quelquefois empha- lique ; rnais elle se distingue par un merite bicn rare, roriginalile. L'auleur reunit auiour Notre derniere colonic » Est a son heure d'agonie; » Vos amiraux ont un baillon ; » Et pour completer nos outrages , » Des pirates dans nos parages » Insultent notre pavilion. 1) Dans les ports qui bordent nos cotes, » Cent navires aux poupes hautes , » Pleurent leur pont inacheve. » Des debris, souvenir funeste !.... tt Sire , voila tout ce qui reste » De ce que vous aviez reve T.... >> Fremissant, la tempe gonflee , L(! roi regarda I'assemblee ; — 5il — Puis il (Jit , etendant la main : « Notre insouciance est punie. » Que toute fete soit flnie ! » Colbert, je serai roi demain ! » Le lendemain dans le vieux l.ouvre , \utour d'une table que couvre Un flot de parchemins noircis, Courbes sur des iabeurs arides, l^t le front sillonne de rides, Deux homraes graves sont assis. Remontant le cours des annees, lis ponderent les destinees De quarante peuples divers; Ft leurs prunelles allenlives Suivent, aux pages des archives, Notre marche dans runiverti. Tour-a-tour chacun se rappelle La gloire ancienne ou nouvelle, L'un ardent, I'autre recueilli; Dans I'arene avant de descendre, Louis etudie Alexandre, Colbert ressuscite Sully. Le present est grave et sinistre ; iVIais, appuye sur son ministre, Le roi sourit ^ I'avenir. Et, tandis qu'avec son epee Conde lui taille uue epopee, Colbert va le faire benir. II. Entendez-vous ccs bruits confus et monotones ! Des c6tes de Provence aux falaises bretonnes, I Les consents du travail s'enrolent par milliers. { L'etabli se rabote, et la forge s'allume : Et I'ancre aux dents de fer, pour gemir sur I'enclume, Sort du creusel des ateliers. — 5V2 — Stir le mole des ports pleiiis de rauques murinures, Des vaisscaux sent grees porlant vergues?, amures, Et pavilions di; lys reflechis dans les flots. Toulon et Rocheforl iolbert repand de I'or, semence genereuse ; - ' ' Pour joindre les deux mers le grand canal se crense : Lyon voit entasser dans ses sombres greniers Les tissus eclatanls tendus sur ses metiers : ' ' '"* *' Ses filles , St s enfants font le luxe des roines. -' •' A Tombre des muriers qui couvrent les Cevennes^l^* unfiuy Le colon doitau ver que garde un soin prudent , ^^^ Une bure pluschaude, un pain plus abondant. 1 Beauvais tisse les draps; Reims, la serge et la toile: Versaille a son voloiir:^ , le Carmel a son voile; : ^ ■ -i- XXVI. 7)8 — 554 — Kt, charge des loisons qu'il salt multiplier,'* *'' ■''' Le pasteup les depose aux mains de rouvrler, '^^'-^ '*' Tout renait : on dirait qu'une ruche deserte , Delaissee, en debris, tout-a-coup s'est rouverte : Un essaim s'en empare, et le tresor commun •>''' ''i J'l^j S'emplit de bruit, de miel, de cire et de parfiiin.' ■"'■ ' Mais, pendant que Colbert eleve le commerce, En ces vastes details que son regard traverse, ,}j,i.i;:'- 11 comprend tout, couvrant de son bras ppotecteur - Le havre, I'atelier, le chaume du pasteur. La fabrique et la ferme , et les villes bruyantes , Et le calme profond des plaines verdoyantes., ij. ^ ^., j 11 n'omet pas les arts : sur les fronts inspires tjof g')' 11 saisit le reflet de leurs rayons sacres-, II appelle Perrault, Bernin, Lebrun , Le Notre : Get homme aux froids calculs du genie est I'apotre. Ciseau, compas, pinceau, tout s'anime k sa voix : Le peuple a son Jardin dans le palais des Hois; i.j ij Le Louvre est commence , grande t^che, entravee .u'i-.>.l Deux siecles, en deux aos dans le noire acheve. Le Palais des soldats couvre d'un dome d'or ^ubni'J Tombeaux, drapeaux, vieillards mutiles, fiers eneo I Et, sur la terre aride ou rampent les broussailles, •■> Naisscnt les eaux , les bois , les marbres de Versailles. ; D'un siecle grand et fier Colbert porle le poids : II contente Louis el resiste a Louvois. Quand tout s'emporte au feu des rapides conquetea, : i Aux triomphe?, aux jeux, a I'ivresse des fetes, J II pense, il compte : emu pour les peuples souffrants, J D'un regard dur et froid il arrete les grands. ib =91 9iail 8iJiviji>;H "Mais d'uue telle epoque il veut que tout soit digne'^ii;-.T>/, 11 veul dans I'aveiiir tracer sa grande ligne. r " r" Lc temps renversera le faite des palais ; 11 est des monuments qui ne tombent jamais. Rien n'est plus d'llion, et I'liiade encore A la vive fraicheur d'une naissante aurore. La Rome des Ccsars se perd sous les debris Oh le pied du Vandale iraprima ses mepris ; Aucun bruit n'a convert la voix des grands poetes Qui s'inspira jadis sous ces voutes niuettes. Colbert voit arriver ces jours longtemps promis. Oil le genie ardent, k. la raison soumis, Unit, de I'autre si^cle epurant ['heritage, La plus juste pensee au plus noble langage. II anime au travail le cenacle eclatant De ces mortals elus que I'avenir attend ; II les honore : ii veut qu'un peu d'or et de gloire De la posterite previenne la menioire. . , ,, . •-•" . ■ i..,-,f^ On ne t'oubliera pas, Colbert^ ils font nomme [^ Tu descends au tombean de soucis consume: Par I'oubli de ton roi si ton ame est froissee, .. „ Vers le maitre des rois s'el^ve ta pensde; "^ oupuOft De lui seal elle attend son legitime prix. ^ . 'Rnifffrttll Tu seras meconnu par un peuple surprise Mais qu'importe le flel de ce dernier caliceiV ^^.^^^^ ^"'^ Tu vas trouver au ciel i'eternelle justice. '"^^^ '"^ Deux siecles ont passe ; ton renom a grandi •, Nul n'a pu t'egaler de eeux qui font suivi : '*; Ton image manquait aux lieux qui font vu naltre; Enfin, digne de toi, Reims va la voir paraitre : 'Une gloire de plus va briller sur son front, " osnoid sa Etd'un utile orgueil scs fils s'animeront. ''^f^ "^^^ iuaiuJ a dL'jiJ]-. ii-i 'Li-inou i§E^/I — 55G — LA STATUE DE COLBERT, Par M. J. Lesgcillon. Justum et teuacem propositi. HoivAcc. iJ UB 9: Voici que le vent sur son aile Du haul des tours de saint Remi Porte la fete solenaelle D'un nom dans la tombe endormi ! Nagueres Ion pasteur, 6 sombre basilique. Par I'antique onction de I'huile symbolique Des souverains sacrait les droits ; lUuminant son front sous les voiles fun^bres, Eile sacre en ce jour un de ces morls celebres Qui creaient la splendeur des rois ! La noble pensee est eclose Au sein de ces brillants esprits Kegnant par les vers et la prose, Les beaux-arts et les beaux ecrits ! Le bronze bouillonnant medite leur horamage ; Pour rendre aux yeux vivants ses traits et son image, Le cercueil ferme s'est ouvert : L'edile protecteur ofTre sa main pulssante, Kt Reims va dans ses murs, mere roconnaijisante, Donuer sa statue a C-olberl ! — 557 — Qua ces voix la votre reponde, Vous lous qui vecutes sous lui , Morts, (jui dans la terre profonde Sommeillez en paix aujourd'hui ! Vous qui I'avez jadis bldme, maudit peut-etre, Vous qui, lorsque le ciel, le delivranl dun maitre,. Le coucha parnii les tombeaux, Prodiguant a sa cendre et la haine et I'oulrage, Sans la garde , veillant a son dernier voyage, Decliiricz son corps en lambeaux, Rassemblez-vous, pale cortege, A I'entour de son monument ! La nuit est sombre et vous protege • Pour ce supreme jugemcnt ! <-.fi(i!f-; I'rejuges, passions, luttes contemporaines, L'eternite sur vous de ses clartes sereines Fait resplendir la verite ; La justice I'attend, I'avenir le demands : Et que, doux ou cruel , de vos Icvres descende L'arrfit de la posterite ! UN FINANCIER. Oh oui ! je I'ai maudit ! car un soir que I'ivresse Me ber^ait doucement aux bras de la richesse , Que, fier de mes tresors dans ma caisse enferm<'!S , Au milieu des jardins de senteurs parfumes, Sous mes plafonds, riant a I'eclat des bougies, De mes banquets pompeux j'achevais les orgies , Pareille a cetle main qui, sur I'ordre de Dieu, Aux parois d'un palais tra^a trois mots de feu , Par I'echo d'un edit qui racontait nos hontcs , Une voix nous cria : « Rendez au roi vos comples ! » Ah! si, lorsque la guerre ebranlait nos remparls, » Vos attentats dans I'ombre ont pu fuir nos regards, 558 — ). Lc peril cesse enOn, et, graw a I'armistice , » I. e glaive repArait aux mains de la justice. » Oppresseurs enrichis des miseres du lemps, B D'ou viennent ces h6tels de dorure cclalants, » Ces terreii, ce chateau, ce superbe domaine " Oil parmi vois vassaux I'alezan vous promene i' )) D'oii sortent vos tresors ;' avez vous herlte » !)e vos pauvres a'ieux, marchands de la cite ? M Pres du niallieur de tous c'est assez d'insolence I )) All ! cette monstrueuse el soudaine opulence, » Ces delices, du faible aflVontanl les clameurs, » Sonl un sci\[idale au moude et lopprobre des moeurs! )) Peuple, dont.la substance a coule dans leur bourse, » {)e leurs prosperiltis devoile nous la source ; » Dls-uous par quelle intrigue ou quels laches chemins <) Ton pauvre paUimoine a passe dans leurs mains I » Soyez rcvelaleurs, vous qui fiites victiinesjliin ■! » C'est encor la verlu que denoncer les crimes ! » A cet appel vengeur, terrible, inaitendu, -,, - Par un cri general le peuple a repondu ! i»f» 13 Dans I'ombre du passe sourdement endormies , S'eveillent tout-;i-coup nos longues infamies, Et le grand jour decouvre aux yeux epouvantes I.es secrets enfouis de uos ioiquites ! Pols de vin, prix honteux d'unc basse indulgence, Tyranniques depens leves sur Tindigencc ; Tributs, meconnaissant la justice et la loi, Arraches par la force et payes par reffroivr^i, ,jyiijjn ii: Aliments corrompus offerts a nos armees, ,,jq j,j,[„ j[,^... Quand la faim torturait les troupes decimees -, > Presents qui, du Iresor seduisant les suppots, Aux mains du debiteur allegeaient les impots ; .^^.^ ^i,, Fraudes, exactions, complol, intrigue, ruse. Tout prend un corps, se monlre et parle, et noiis .accuse; Kl la France, tremblant la veill? a nos genoux, i ri/ Fii maledictions sepauche centre nous! - 559 — A ces bruits de la haine autour de nous vivanle, Interdits, accables, insenses d'epouvante, Pour tromper la justice et roeil dos magislrati*, Nous cedons nos tresors, nous vendous nos contrals ; Au rnystere, a la nuit demandant un aslle, ! ' L'un se cache en restant, I'autre fuit et s'exile ^ Mais Colbert nous harcele, il nous pressc, il nous suit ; II trouve qui se cache, il arrete qui fuit ; De nos actes secrets les voiles disparaissent; Les cachots sont ouverts et les gibets se dressent ; 11 faut inourir ! . . . ou vivre a peu pr6s depouilles, Aussi pauvres que ceux que nous avons pilles ! Mieux vaut quitter, helas ! son argent que la vie I Et bientot, aux bravos de la France ravie, Ces tristes millions, si chers a noire amour, De nos seins dechires vomis en un seuljour, S'ecoulent, au milieu du rire et des coleres, Meles aux flots de sang et de pleurs populaires ! 0 fortune! 6 tresors! fatal, fatal edit! Tyrannique Colbert , comrae je t'ai maudit ! ftA UN MARQUIS. Oh out! je I'ai maudit! car pour notre moUesse C'etait un lit bien doux qu'un titre de nobk:se ! Mon domaine, affranchi de taxes et de droits, S'abritait sous I'Etat sans ea porter le poids. Du timbre au cachet rouge adorable partage, Je donnais d'autant moins qu'on donnait davantage ; On respectait mon nom en respectant mon bien, Et I'impot se levait sur ceux qui n'avaient rien. Que dis-je? le vilain fail pour la servitude , Devait son travail m6me a ma beatitude, Et la dime, surtout, bonne a nous defrayer, Jc ne la payais pas, je la faisais payer ! Muis voilfi (juc soudain un edit sacrilege Osc trailer d'abus cc diviu privilege. — :)<>() — " (.es litres io"s (lit-if, salnire de I'lioiiiiPHr," • '■'•^"' ' » Qui (i'un vaillant iiuerrier font un noble seigneuf, ■'' ») Vos peri!«, qui porfaient le ?ac ou la houlette, '' '"^'^'^ 1 Des rois presses d'argeiit en avaient fait empleitei ''^ I Le dernier parvenu, marquis de sa facon, ' » An manoir roturier arborait I'ecupson, >) Kt bien loin De papiers imposteurs insolents heriliers, *■ » Montrez votre origine et prOavez vos quarticrs ! » ' „:{:;ii,!.^ J:j;.t !i Hela?i ilfailul bien aux severes arbitres '! i^au/. Exhiber nos contrats et soumettre nos litre?, ' ^'J'^iM Ki les Jeter tout vifs au flambeau devorant rioJa9id jS Qui briila nos honneurs lout on les eclairanf. ' - Df nos rois mendiants mensongeres cedule?, Vaine illustration de nos peres credules, Adieu brevets payes ! adieu faux parcheminsi II fallut redescendre au niveau des humaios! AfTrcuse egalite dont le mot seul nous glace, Acquitter les impots comme la populace, lA sous I'arbre heralJique abattu par le vent, iledevenir apres gros jeans comme devant I UN M\RIN. Ob oui I je I'accusais, raoi, dout la deslinee Ne reviiit qu'Ocean et Mediterranee ! ', Mes yeux, flxos sur eux, versaieut des pleurs arhers, Quand je voyuis la France avec deux grandes mers, Ses liavres murmurants dont la houle plaintive Semblait lui reprocher sa puissance inactive, !• t qu'ii peine un vaisseau de peclie ou de transport, (lomme un vrai|faineant, se bergait dans son port! C/etaient des pleurs de rage, alors que I'Angleterre Knvoyait une escadre aux conlins de la terre, niiuiul I'Kspa^'uc au Perou pronait ses galions, — 501 — Quand Veiiise ii la poupe urborait ses lions! All I pourtant, me disais-je, assis reveur sur Iherbeif' o' Dans un ecrin de roi c'est un bijou superbe Qu'une flotte qui va, docile a ses appels, De rOcean de France aux lointains archipels^ Qui, pour le faire pendre a son plus haul cordage, Sur lecumeur de mcr coinmande I'abordage, Et, gagnant leur estime a grands coups de canon, Impose aux envieux le respect de son nonri ! Pendant qu'un gros soupir souleve ma poitrine, ' V'oila Colbert au.-si qui veut une marine ! 11 parle : on obeit. Du haut des nionts altiers Les chenes equarris fondent dans les chantiers; ' ("est un travail, un bruit et des joyeux murmures; '. Le navirs se dresse et rev6t ses amures; : ffi'l Le mat pr6te sa t6te aux pavilions mouvants, Kt la voile aux longs plis sollicile les vents. '^ 9^ Oh! quel fremi^senient, quand I'enorme charpenle'' ^'^ De la rainure en flamme abandonnait la pente, Lt que chaque vaisseau s'elan^ait a son tour Au milieu de I'abime ecumant a I'entour ! " Les marins embauches se pressent au controle ,- ,■' Le matelot s'engage et le soldat s'enrdle ; ; Le canonnier, au son des belliqueux couplets, '"' Cares^e ses canons et compte ses boulets : ' Le signal retentit, la vergue s'est haussee, * La brise nous seconde et la flotte est lancee ! * Qu'il faisait beau la voir s'avancer sur les eaux , S'etendre au large , et la , comme les grands oiseaux Naviguent dans les airs sur leur aile glissante , Fendre avec majeste la vague fremissante ; Lorsque , nous signalanl de I'horizon lointain , Tout navire etranger, meme le plus hautain, Nous .-aluait en maitre, et tonnant dans I'espace , !>isait par ses canons ; c'esl la France qui passe ! - 562 — Que de I'ois , 6 Colbert , ton orgueil a fremi Four ton pouvoir naval lentement affermi, JusquHu jour ou souiiain a I'avant se dessine lin pleine mer, et juste en face de MefSine, La flotte hollandaise, et, comme un Jupiter, Sur sa dunelte assis, Tillustre Ruyter , Ruyter le fameux , Ruyter le terrible , L'amiral sans egaux , I'amiral invincible ! Trente vaisseaux , morbleu ! douze du premier rang , Douze de moiudre force , et dans ses eaux courant Quatre brulots armes d'agres incendiaires , Et bien d'autres encor , sans compter les galeres ! J'en avais la nioitie, j'etais moins fort que lui , Mais avec les Frangais, avec Dieu pour appuiviyHJ - Affrontant ses brulots , ses obus , sa mitraille , J'ai battu Ruyter et gagne la bataille ! Je ne vous parle pas , car il faut abrcger , De certaine visite au vieux forban d' Alger , Sur nion livre de bord rappelle pour memoire Et du menu fretin que contera I'histoire. Mais quels beaux souvenirs et quels ravissements, Quand je voyais eo mer nos trois cents batiments ! Quand, pour courir au loin de contree en contree, Nous avions et Valbelle , et Vivonne , et d'Estree , Et que sur I'Ocean nous imposions la loi , Chateau-Renaud, Martel , Jean Bart, Duquesne et moi ! Gloire k qui de nos ports scella la delivrance ! Gloire a Colbert! honneur au pavilion de France! X!Ti;e:; UN BOURGEOIS. Oh oui ! je murmurais , lorsque ma vanile Voyait I'affreux etat de la grande cite. Dieu ! qu'il etait horrible et ses aspects etranges, Paris , la lete haute et le pied dans les fanges , Avec ses noirs fripols par I'opprobre habites , —^■563 - l*ar la corruption et le vice hantes, •■ Ses passages sans air palres du nom de rues , ' Par mille mendiants en tout sens parcourues, l!;tuv€s dans I'ete , glacieres aux jours froids , Dont le plug beau soleil n'eclairait que les toits. Quand la Seine en demence inondait ses rivages , ■'■ Nul secours , nul obstacle a ses libres ravages. ' Quand germait I'incendie ail centre d'un quartier, '• Comrae un monceau de paiile il flambait tout entier. Quand la lune le soir refusait sa lumiere, II fallait au couchant regagn^r sa taniere : ('ar soudain, debusquant de leurs sales taudis, Comme dans leur dom'aine, erraient mille bandits , Sous leur cape perflde adroitement drapee ^^ Tenant ferme a la main le poignard ou Tepgei^'"* ^! •' * Malheur au citadin qu'apres la fin du jour Attarde follement rinteret ou I'arnour ! .,. • Aux angles de la rue arrete dans sa course"," ,11 doit laisser en gage ou sa vie ou sa bourse; i;> En vain il crie : a I'aide ! au secours I je me meurs jj^j'^ Chaque porte ou verrou se ferme a ses clameurs \ x Ou si quelques voisins courageux par le nombre, > Le fallot k la main , et pas a pas dans I'ombrc Savancent.... dans &on sang sur le pave blotfi, Le bourgeois etait mort et I'assassin parti ! Les brigands se riaient des archers et des juges;,.,^,^ Au Luxembourg ouvert ils trouvaient leurs refuges," , Asile aux criminels offerts contre les lois Par un droit precieux des parents de nos rois. Lc rainistre a compris nos perils, nos alarmes ; Des gardiens dans la nuit marchent avec leurs amies ; ■ Plus d'asile aux bandits, plus d'abris aux filoux ; Quand la pale Phoebe cache ses feux jaloux, La lanterne s'allume, ot pendant la null brum; - 564 ~ Jelle un rayou luintain qui remplace la lune. Le bourgeois desormais porte un pas assure A travers son Paris de bandits epure ; Mais il est dcs voleurs caches dans leurs boutiques, Ainsi qu'au coin d'un bois detroussant les pratiques , Qui, d'un mot care«sant couvrant la trahison , Contrc voire or au litre echangeut leur poison. Tremblez a voire tour, coquins ! sa vigilance Scrute la marchandise et p^se la balance; Et que votre patron, ne fraudant plus les droits, Verse a bonne mesure et vende a juste poids ! Mendiants, bohemiens, engeance obscure et vile, Gangrene de I'Etat, debarrassez la ville ! Partez tous, magiciens, astrologues, sorciers, Qui regnez par la peur sur les esprits grossiers , Avec vos noirs poisons, votre sanglant cortege, Et les forfaits meles a votre art sacrilege ! Gloire au graiid magistral qui, dans ces hauls empln-<». Put digne du ministre el fit benir son choix ! Respect a qui seconde el comprend le genie ! Comme a Colbert lui-meme , honneur a La Reynie LE PEUPLE. Oh oui ! je m'indignais , quand mes yeux altrisles Contemplaient le tableau de mes calamiles. Terribles souvenirs el miseres affreuses ! Oh ! qui raconlera leurs scenes douloureuses , Quand la pale famine , envenimant nos raaux , Pesa sur les cites comme sur les hameaux. Voyez dans ces champs nus, sur ces arides chaumes , Sombre el mourant, errer ce peuple de fantomes ! Voyez sur les chemins , dans les fosses assis , Les membres affaisses et les yeux obscurcis , Pressanl de cris plaintifs la pilie qui frissonne , Ces spectres dccharnes ot que la faim nioissonnc I — 505 — Ou vont ces furieux ? Dans le fond dcs tombeaux Du cadavre felide exhumer les lambeaux j!ii'"''in(j;q on ei;o'/i Pature sacrilege a leur corps qui succombe ^' Sucer les ossements que respecla la fombe ! ''J L'enfant qui cherche un lait aux mammelles tari , ' Dechire avec ses dents le sein qui la nourri , ^ Kt la mere expiranle, a son coeur infiitele, ^- Fail un affreux festin du fils qui meurt pres d'elle ! 0 5/ Dans I'epargne du roi les deniers clairsemes Ne pourraient assouvir les peuples alTanies ; Mais de toute contree ou le froment abonde , Aumone de Colberts la France infeconde , Le grain compatissant se hate d'accourir , Et s'il ne sauve pas , il defend de mourir. -' ' L'ardente charite repand ses dons propices ; Dans les bourgs, les cites, s'elevent les hospices, Oil tout ce que tourmente et dechire la faim Trouve un aide, un secour.*,, un asile et du pain !. ■■., ; i'7 De ces jours de douleuv I'iniage mena^ante ,/ )3 Dans r^nie de Colbert rests toujours presents ; H Leur germe existe encor cache dans I'avenir ; ._...,.. aii. Comment les detoumer ? comment les prevenir ?;;jjai'{ su^ Comment fermer pour nous Tabime des raiseres ,3tn9q oW Quand tous les citoyens, eternels adversaires , Divises d'interets, I'un contre I'autre armes , -^y^ j^q Nation d'oppresseurs, nation d'opprimes, frrnd noK S'agitent sous des lois dont le code sauvage tnsnoJ Met ici tout le droit, et la tout I'esclavage ? ' -■■ Comment nous affranchir des chaines de ces grands, Des faibles asservis inflexibles tyrans, '.,,„^ gg^ Qui nous courbant plus bas que leurs b6tes de somme, Doutaient naivement que le serf fut un liomme 1' Tandis qu'enfants comme eux du Dieu des orphelins. Nous mourions affanies devant leurs iireniers pleins, — 566 - Colbert a meditii lero des reprtsailles : : -. .i> Nous ne paierons plus seuls la corvee et les laill«s;-i'f;;) iMi a veut, fardeau pareil ealre les ci toy ens, oinlo'l Que rimp6t se mesure a I'echelle des biens. i 7'nii? Toi, surtout dont il aime et comprend la nature,., juiSiiis'J C'est toi qu'il favorise, 6 sainte agriculture ! 97c rnirio?j'' Instruments du labour, outils laborieux, . 9i6fn fil J-' Qu'un coUecleur avide enlevait sous nosyeux^ jiIQb nu lifi'I I.e barbare Iraitant dont il sail vous defendre Pour toucher nos impots ne viendra plus vous vendre 1 Besfiaux patients, a nos labeurs soumis , . jiiiiiuuq ;.• Compagnons du fermier, ses soutiens, ses amis yo) ab fticl La gabelle, insultant a voire voix plaintive, o'l ^nomn. Ne vous ravira plus au sol que je cultive ; Unis pour travailler, nous aimer et souffrir , Mon toil vous a vusnaitre , il vous verra.mourir ! Monstre engraisse du sang que ta levre pres3ur&,)'.oi iJ< Fleau du laboureur , insatiable usure, Qui par I'appas trompeur de tes laches bienfaits Ecrases le malheur succombant sous le faix , 11 veut que I'or prete , sans faire une victime , Au loyal creancier porte un fruit legitime , Que I'interet soil juste et que le travailleur Ne perde pas son champ pour le readre meilleur. Qui , Colbert ecoutait et sentait nos souMtifc'esV Mon bonheur a venir ber^a ses esperances ; Lorsqu'en son coeur lucide il lisait mon salut , Pourquoi n'a-t-il ose tout le bien qu'il voulut ? -^^ Helas ! que pouvait-il, quand pe§ait sur la France^^.^.^ ^^^ Des ages tenebreux la fatale ignorance ? '_^^^ .^^^ Quand des vieux prejuges les despotes imbu? , ,'" . . ^^j Comme un legs du pouvoir, protegeaient ses abus C'etait le chenc alticr, greffe sur les ruines, .^^^^.j Qui dans le roc profond a nlonge ses racincs _ — 567 — Et qui ne peut perir (ju'en ces grands mouvemeiitsni ,ei/j[G'i Oil du i^ol ('branle trembU'nt les fondcmenits ! •syi.ea! aivuoi LE POETK. , U0/-S'*1TH0 iioaijif i> •iqel aJ Je ne maudissais pas, moi I car le ciel nous donne,,|^Q{ Qui met sur tous les noms le nom du grand Corneille ' ,^ .-. Toi, qui connus si bien les roouvements du coeur, " ' ' ' Tendre Racine, et toi, toi, peintre au trait moqueur, .r^ 0 Moliere, miroir et tribunal supreme .„ - . ), Ou I'homme se coxri^cen riant, deluhnfi^ro'ivjrQ Venez, historiens, savants, qui relracez La science presente ou les recits passes, ''-"' ^- - Et vous tous que suivait sur la rive etrang^re Sa liberalite, royale messag6re ! • Rivaux de ce grand corps par Richelieu fonde , '^^'>^ ^"t)l Dites votre berceau par son gout feconde I'lJ ^P s"'q ^'O' s"' Fortes de son soutlen, par son zele afTermies, ' ^^ Contez-nous ses bienfaits, doctes academies ! ' '' '"* ^"0 Ouvrez-vous devant nous, arcenux religieux looRf^ Par le chretien qui pric offerls au roi des cieux, - 6G8 — Palais, arcs trioraphaux, qui peiiplez nos inuraiil^Sju i:;^, ; louvre majeslueux, et toi, pompeux Versailles! o- ub I'l Ourrez-vou?, ateliers, ou melant ses couleurs, Le tapis a I'aiguille empruntera les fleurs ! Plonge au dela du ciel, savant observatoire ! Vieux soidats mutiles, martyrs de la victoire, Reposez, sous ce d6me eleve pour les forts, Ce peu que la bataille a laisse de vos corps ! Et toi , de leur service enseigneraent austere , lle^ois ces apprentis du metier militaire-, • ' Pour qu'ils courent, formes par de rudes essais , Triompher ou mourir sous le drapeau fran(:ais ! Voix des morts ! accent veritalile I Apres les siecles revolus , Le monde est toujours equitable Aux illuslres qui ne sont plus I C'est qu'on juge au tombeau mieux que pendant la vie ! C'est que I'inimitie s'eteint avcc I'envie J';'-*' ^"'** ''"^ ''"'^ . Que le temps etouffe I'orgueil , Et que , si le genie a droit ci la memoire , II lui reste son ceuvre , il lui reste sa gloire Debout aupr^s de son cercueil ! "■ ■■<■■). Un reflet blanchil les murs sombres , Et , du soleil avant-coureurs , ....... Ses rayons dispersenl ces ombres^^,,, ) Comme ils dlssipent les erreurs; Tout s'efface , et I'aurore a sa vive lumiere :j^ ^ jj,, Ne voit plus qu'une niusa , assise sur la pierje,;^ ry • • Au regard ferme, au front serein ,Jg (j^^ . Qui sur le piedestal , imrauable regi.stre, 4.53 ayort-salm. Racontant I'homme intime apres le grand ministre , : Ecrit, avec sou doigt d'airain. - 509 1. HISTOIUK. La France glorieuse a son liaut rang [)lac6e , L'amour du bien public ftit loute sa poneep. Son prophetique esprit tendit vers I'uniti^, Avec des citoyens forls dans r*^galite , AlTranchis sans retour des coutumes iniques, Partageant les grandeurs el les chargf^s pubiiques. II fletrit Tor impur qui payait les eiiiplois ; II grandit la justice en reformant ses lois ; Chretien sans fanatisme et sans indifTerence , Sa foi dans son bon sens puisait la tolerance. Ministre ou citoyen , I'austfire probile Regla son cceur loyal par I'honneur habite ; Nul ne Irouva jamais sa parole inOdele, Et qui la reccvait pouvait compter sur ellf. Severe pour lui-raeme, ii le ful pour autrui ; Des fraudes, du mensonge, il dedaigua I'appui ; Fermcdans ses projets, sans craiute de deplaire, II ne rechercha point la faveur populaire-, II marcha droit au but, sans hate, sans retour; 11 fut fier de servir sans demander l'amour. Sur son labeur courbe quand s'eveillait Taurore , Le soir a son labeur le retrouvait encore ; Le changement lui seul delassait son cerveau Dn travail remplace par un travail nouvcau. Esprit fin et precis qu'un jugement deccle, II n'eut pas cet esprit oii le choc etincelle , XXVI. 39 — 570 — Qui lance uii Irait biillant et d'eclairs anirae, Mais I'espi'it grave et froid pour les calculs forme •, L'inflexible raison que nul semblant n'abuse , Qui lit au fond de lame el demele la ruse, Des pieges seducteurs habile a s'echapper, Qui ne trompe jamais et qu'on ne peut tromper. Sous uii sourcil epais eachant un ceil austere, II forgait le respect, ce rempart salutaire ; Les regards se baissaient, par la craiute assouplis, Devantson front creuse de redoutables plis •, Un accueil calrne et digne, un silence de glace, Deconcertait I'intrigue et deroutait Taudace, Et Sevigne, si belle, invoquant son soutien, N'osait qu'avec terreur briguer son entretien. D'une cour magniflque, intelligent contraste, 11 fuyait I'appareil, il moprisait le faste ; Temperant dans ses mcBurs, ainsi qu'eu sesdesirs, Aux devoirs de I'Etat immolaitses plaisirs, Vigilant et frugal, ennerai des mollesses, D'un ceil in?oucieux regardait les richesses, Et, ministre absolu, ne suivil d'aulre loi Que I'honneur de la France et la gloire du roi! LAVF.NIR . Ach^ve I'oeuvre de I'histoire, ReimSj fais revivre ton enfant ! Des vieilles haines triomphant Qu'il graudisse avec sa memoire ! Trnp longtemps le bronze effronte Exhuma dans la flatterie Ces spectres de la royaute Inuliles ;i la patrie ! — 574 — Laissons tous cesfantdmes vains Kxpirer sous I'indifTerence ; Ne rendons les lionneurs divios Qu'aux talents qui servent la France! Du peuple aujourd'hui c'est la foi ; C'est lui qui consacre et qui nomme ; Le souverain qui n'est qu'un roi N'est rien a c6te d'un grand hommei — 572 — CONCOURS DE L'ANNfiE 1857. Priz et Medailles. HISTOIRE. HISTOIRE DE LA LIGUE A REIMS. Aucun niemoire n'a ele envoye; la queslion est relireo du concours. ARCHEOLOGIE. ETDDE SUR L'ARC DE TRIOMPHE DE LA PORTE MARS. Aucun memoire n'a ete envoye ; comme, d'ailleurs, le gouvernemeni a donne des ordres el alloue des fonds pour que la resiauraiion de ce monumeni soil inces- sammenl coinmcncee , i'Academie retire le sujet du concours. POESIE. COLBERT ET SA STATUE A REIMS. Aucune pi^ce n'a paru meriler le prix de 400 francs, mais I'Academie accorde : i" Une medaillo d'or de 200 fr. a I'auleur de la — 578 — piecft ij*'45, M. Touinerel, aspiraiil-repetiteur au lycee de Rein)s; 2» Une medaille d'or tie 100 fr. a M. A. Muenier, homme de letires ii Vosoul (Hauie-Saone), auleur de la piece n" 8 ; 3° Une mention honorable h chacun des auleurs des n"» 28 el 29, MM. J. L(?sguillon, homme de lellres ^ Paris, el Delachapelle , docieur es-lellres, regent au college de Cherbourg (Manche). INDUSTRIK. DfeCRIRE LES Tit ANSFOIIMATIOINS SUCCESSIVES DE LA LAINE DANS LA FABRICATION DES TISSUS. Le prix, pour cetle question, consislail en une me- daille d'or de 200 fr. Ce prix n'esl pas decerne. L'Academie accorde une medaille d'argenl de deu- xieme classe a M. Perrol, secretaire du conseil des prud'hommes, a Reims, auleur du memoire n«> 2; El une medaille de bronze de premiere classe a M. Augusle Adrien, fabricanl a Reims, auleur du memoire iiumero 1. Outre les prix que TAcadeinie avail attaches aux questions precedentes , un prix , consislant en une medaille d'or de 300 francs , devait etre accorde au meilleur travail interessant rhisloirc, I'archeologie, la topographic ou I'industrie du pa\s do Reims. — 57a — . Lc piix esl (Jecoriie ii M. Ravenez, auleur iles me- moires numeros 2 el 5 , iniilules , Le premier : Reims a I'epoque gallo-romaine ; Le second : Essai sur les Origines de I'Eglise de Reims . Une inenlion honorable est accordee h M. I'abbe Poussin, membre honoraire, pour sa Monographie de I'ahbaije et de Veglise de Saint- Remi. Quoique VHistoire de Sedan , ouvragc adress6 a I'Academie par M. I'abbe Pregnon , membre corres- pondanl, ne renlre pas dans les conditions du pro- gramme, I'Academie decerne a I'auteur une medaille d'argeni de premiere classe. MEOAILLES DIVERSES. L'Academie decerne : \. Une medaille d'honneur a M. le docteur Jules Guyot , de Sillery , pour I'emploi dcs paillassons pour defendre les vignes de la gelee. 2. A M. Duval pere, professeur de musique, a Reims, une medaille d'argent de premiere classe, pour ses experiences de tclephonie. 3. Une medaille d'argeni de premiere classe a M. Oudart, de Reims, pour ses restauraiions d'emaux. 4. Une medaille d'argeni de deuxieme classe h M. Lesobre, de Reims, pour son sysleme de cheminee. 5. Une medaille de bronze de troisieme classe a M. Counhaye, de Reims, pour les vasislas a lames de vcrre mobiles de son invenlion. - f>75 — des Concours ouverts pour I'annee 1858. HISTOIRE LITTERAIRE. Etude sur la vie et les ouvrages de S.-N,-H. Linguet. Le prix pour cette question consiste en une niMaille d'or de 300 francs. ARCHEOLOGIE. Monographie de la Cath^drale de Reims. Histoire de la construction et des principales I'eparations de la cathedrale de Reims. — Description de Tensembie de r^difice. L'auteur du memoire devra dire quaud, par qui, de quelle maniere la cathedrale a ete construite et reparee a diverses epoques ; Faire connaitre I'elat actuel de ses parlies les plus iniportantes , et les modifications qu'auraient successivement recues I'abside, le transsept , les riefs, les porlails, les combles, les tours et ciochers, etc. ; Indiquer le systeme general d'ornementation architccturalc , — les ogives, les nioulures , la flore et lesanimaux. Le prix consiste en uur medaille d'or de 200 francs. — 376 - POESIE. fJellileem — Iiislitulion delinilive, a Reims, d'un asilc pour Ics enfanls trouves. II y a vingt ans, un charitable prelre, M . Charlier, touch6 du Irisle sort, des enfants trouves, enlreprit de les sauver de la honte, de la misere et du vice. Ouvert avec cinq enfants et trois cents francs de dettes, retablissement de Belhleem a deja eleve et pourvu plus de cent sujets ; il possede au- jourd'hui un personnel de quinze religieuses et de cent enfants dont le iravail suffit a la moitie de leur depense journaliere. D'elablissemenl local et precaire, il est devenu cette annee une fondalion nalionale en quelque sorte et permanente. Par son testament date de Sainte-Helene, Napoleon leguait la moitie de son doniaine prive aux provinces qui avaient le plus souffert des invasions de 1814 et de 1815. Sur ce legs, cinquante mille francs furent attribues au departemenf de la Marne, et , a la demande du Conseil general , ils serviront a entretenir dans la maison de Bethleem quaranfe enfants qui porleront le nom de Boursiers-Napoleon . Le 26 Mai dernier, I'installation des nouveaux boursiers eut lieu solen- nellemcnt, sous la presidence de S E. le cardinal Gousset, arcbeveque de Reims, en presence du general de Cotte , aide- de-camp de I'Empereur, du Prefef, d'un delegue du Ministre de rinlerieur et de toutes les autorites locales. La fete fut magnifique, et deux jours apres I'Empereur, repondant aux voeux (le tous, nomma M. Charlier, chevalier de la Legion- d'Honneur. L'Academie imperiale de Reims a voulu s'associer a ces temoignages unaniines de sympathie et d'adrairation pour I'oeuvre de M. I'abbe Charlier, en la proposant pour sujet du concours de poesie en 1858 (1). Le prix consiste en une medaille d'or de 200 francs. (1) Voir pour plus ik- detail ]<• \\r\[ de la fete du 26 Mai, impri- me a Riinis. ihez Huct. ~ 577 — INDUSTRIE. Etudier comparativemenl I'emploi du sucre candi et du sucre blanc , du sucre de caniie et du sucre de betterave, dans la fabrication du vin de Champagne , tant au point de vue de la qualite du vin et de la production du gaz , qu'au point de vue de I'economie. Le prix, pour cette question, consisle en ime mMaille d'or de 300 francs. CHEMINEES FUMIVORES. Une medaille d'encouragement sera decernee au ineilleur systeme de cheminee fumivore introduit dans les etablisse- ments industriels de Reims. Ces medailles seront dicern^es dans la prochaine stance publique de I'Academie. Les memoires devront ^tre adressH (franco^ d M. le Secretaire g^ndral de I'Academie Imperiale, avant le 15 Mai 1858. Les auleurs, ne devant pas se (aire connaitre, inscri- ront leurs noms et leiir adresse dans nii billet cachetd , sur lequel sera repetee I'epigraphe^ de leur manuscrit. L'acad6mie distribuera, en outre, des niMailles d'en- couragement aux auleurs des travaux qu'elle jugera dignes de recompense; les personnes qui croiraient avoir droit a cette distinction devront envoyer leurs tilres au Secre- tariat arant le 15 Mai 1858. — 578 — line niedaille de 1,200 francs avail 6t6 annoncee comme devant etre decern^e, en 1858^ a I'artiste qui donnerait les dessins les plus exacts des principales parties de la cathedrale de Reims Les fonds de ce prix n'etant pas faits , 1' Academic retire le sujet du concours. PRIX A DECERNER EN 1859. Monographie de la Cathedrale de Reims. Iconographie de I'exterieur. L'auteur devra diie par qui et a quelle epoque les statues ont ete faites , — la place qu'elles occupent, — les reparations qu'elles auraient recues , — les sujets soit liistoriques, soit allegoriques qu'elles representent. Le prix consiste, pour cette question, emcne m^daille (Tor de la valeur de 200 francs. Les memoires devront etre adresses , en observant les forraalites ci-dessus indiqu^es, avant le 15 mai 1859. Le Secretaire general, Le President annuel, Ch. Loriquet. H. Landouzy. TABLEAU DES MEiVlBHliS COMPOSANT I/ACADEMIE DE REIMS AU 31 JUILLET 1857. Bureau pour I'annee ^856-1857. President dlionneur, S. Em. le Cardinal Gousset (C *) President, MM. G. Masse. Vice-President , H. Landouzy (*), Secretaire-general , Cii LORIQLET. Secretaire- archiniste , P. SOLLLlfe. Tresorier, E. Saubinet. Membres du conseil j P. MASSfi. 1 E. Df^iiooe. d' administration. ' H. ROBILLARl) {^) Bureau pour I'annee 4857-4838. President dlionneur, S. Em. le Cardinal Gousset (C.*) President, MM. H. Landouzy (*). Vice-President, Joguet. Secretaire-general , Cii. Loriqlet. ' Secretaire-archiviste , P. SouLLifi. Tresorier, E. Saubinet. Membres du conseil ^- '^^'^ODfi. „ , . . ( H. HOBlLLAliD (*). a adnmitsiration , r xi...,-. ' I '•• MASSE. — 580 — Membres d' lionneur . MM. ViLLKMAiN (G. 0. * ), membre de I'Academie fran(;aise ct de celle des inscriplions el belles- letlros, iincien minislre de I'inslruclion pu- blique. CuNiN-GuiDAiNE (G. 0. *), ancioti minislre de Tagriculmre el du commerce. Membres lilulaires (par rang d'anciennete). M'^' GoLSSET ((■. *), cardinal, archcveque de Reims. MM. SA.UBINET , naiuraliste, direcleur de la Sociele des decliels. RoBiLLARD (*), juge d'instruclion. Fainaht (L.), proprielairc , membre du comile des aris el cdiflccs religieux an minisiere de I'inslruclion pubiique. Tarb^ (P.). presidenl de la Sociele des sciences nalurelles, correspondanl du minist^re de I'inslruclion pubiique. Landolzy(H.) (*), correspondanl de I'Academie de medecino, direcleur de I'ecole preparaloire de medecine el do pharmacie. DfiRODfi (E.), avocal, ancien represenlanl a I'Assemblee consliluanle. SuTAiNE (M.), proprieiaire , adminislraleur de la Sociele des amis des arls. DuQUfiNELLE, pharmacicn, membre du comile d'archeologie. — 581 — MM. Clicquot, (F.-L.) proprielaire, homines de Iclires. GossET, archilecie, ♦ Henriot-Delamotte (F.), mombrode h Chambre de commerce. Paris (H.)., avocai. MiDOC (L.-H.), groffier tin Tribunal de commerce. LoRiQUET (C), conservaleur de la Bibliolheque, des Archives et du Musee de la Ville. Mass* (G.), president du Tribunal civil. GoDA, nolaire. Sevestre, chanoine honoraire, cure de Sainl- Thomas. Mass^ (P.), negociant. Baudesson, medecin-veierinaire , fabricanl de produiis chiiniques. SouLLifi (P.), ofBcier de I'inslrnclion pnblique, professeur de rhelorique au lycee. JoGUET , oflicier de I'inslruclion publique, pro- viseur du lycee. Leflbvre (^), oflicier superieur du genie, en relraile. Elambbrt, nolaire. D'Arnoux (#), sous-prefei de Reims. Reimbalt, archilecie. Mennesson , ancien nolaire. Gaillet, docleur en medecine , professeur a I'ecole preparaloire de medecine. Henry, professeur d'hisloire au lycee. Lrskhr, avoue. — 582 — MM. ViLLEMiNOT, ingenieiii-mecaiiicien, a Reims. Maridort, professeur de physique au lycee. PifiTON, avocat. BoucHfi , professeur de philosophic au petit Seminaire. Martin (Ch. ), redacleur du Courrier de la Champagne. RoPiQUET, professeur de logique au lycee. Lehnerts, chanoine honoraire, ancien principal du college de Charleville. Meissas (de), professeur de mathematiques au lycee. Bruneau, jugt' au Tribunal civil. Collery, vicaire de Noi re-Dame. GiVELET (Cii.), proprielaire, archeologuo. GfiRARD, docteur en medecine. Membres honor aires. ViNCENS DE GouRGAS, inspecteur de I'Acadiimie de Paris. Fleury(H.), ancien secretaire general duMinislere du commerce, rue de Provence, a Paris. Belin-Delaunay, professeur d'histoire au lycee de Bordeaux. Maille-Leblanc , ancien president du Tribunal de commerce de Reims. HERBfi, peinlre d'histoire, a Reims. Hubert (E.), sous-prefei, a Relhel. Belly (he), proprielaire, a Beaurieux (Aisne). — 583 — M^' Baua, ♦iveque de Medea, coafljuleur de Chalons. MM. Pauis (L.) (#), correspondanl dii Minisiero de I'inslriiclioii publiqiie , directeur du Cabinet liisloriqiie, a Paris, rue Rambuieau, 2. Bonneville de Marsangy (|j), conseiiler a la Coiir imperiale de Paris. Geoffroy de Villeneuve (§|.), de|tute au Corps legislalif, a Charlreuve (Aisne). Gonel (E.), juge de paix, a Chateau-Thierry. Garget (H.), professenr de malhen)aliques au lycee Napoleon, a Paris. Wagner, ancien negociani, a Reims. GuiLLEMiN {^-.), docleur es-letlres, recleur de rAcademic de Douai. TARBfi DE St-Hardouin, iiigcuieur en chef des pouts et chaussees, a Bourg (Ain). SoiLLY, ofticier de I'Dniversite, ancien recleur de TAcademie de I'Eure. Alexandre, avocat general, a Nancy. M^'"^ Nanqlette, eveque du Mans(#). MM. Edom, ancien recleur de I'Academie de la Sarihe. Aubriot, concliyliologisie, a Tourne.'=, presChar- leville. Querry, vicaire general du diocese, a Reims. Dubois, president du Tribunal civil, a Versailles. De Leutre, president du Tribunal civil, a Gaillac. Bri^re-Valigny , subslitut du procureur impe- rial, a Paris. Chevremont (#), chef du cabinet du Prelet de police, a Paris. Galdemar, conservaleur deshypoilieqncs,a Tours, - 584 — MM. PiERURT, cliaiioine honoraiie, cure do Sainl- Remi, li Reiliel. SoHNiN, (lropri6laire, a Chaluail (Marne). F^atouche (Emm.), membre de la Societe asia- lique, secreiaire-adjoini de I'ecole speciale des langues orienlalcs vivanies, a Paris. Leberthais, peinlre-graveur, a Lisbonne. Le Bidard de Thumaide (le chevalier de) secre- laire-general de la Socieie libre d'emulaiion de Liege. Lebrun {f:), inspeclcur deg ecoles imperiales d'arls el metiers, h Paris, rue de Chabrol, 49. Lecadre, docleur en medeciue, president de la Socieie Havraise, au Havre (Seine-Inferienre). Leclerc (Louis), economi!^te, a Paris. Lecointre (L.), professeur au college de Namur. LficuYER (le B. P. v.), religieux dominicain, a Bourges. Lejeune, oHicier de I'Universiie, ancien profes- seur au lycee de Reims. Leleu-d'Aubilly , ancien membre du Conseil general de la Marne, a Aubiily (Marne). LfiPALLLE, peinlre , a Paris. L6P1NB, jurisconsulte , a Renwez (Ardennes). XXVI. 41 — 594 — MM. Leroux. docleur en medecine a Corbeny (A.isne). Les'Jke , docleur en medecine, a Atligny (Ar- dennes). LicouKT, docteur en medecine, a Chalillon-sur- Marne. LifiNAP.D, peinlre, membre du Comile d'archeo- logie, h Chaions-sur-Marne. Lifes, docteur es-sciences, a Charleville. LoBR^AU , velerinaire , h Beauraonl-sur-Vesle (Marne). LoisoN, homme de leitres, quai Bourbon, 35, k Paris. LoRiis (Th.), membre de la Socieie des anti- qiiaires de France, a Vauxbuin, pres Soissons (Aisne). Louis (#), medecin en chef des epidemics de la Seine, rue de Menars, 8, h Paris. LuNDi (Jules), paleographe a I'imprimerie impe- riale, h Paris. Maillet, membre du Comicc agricole, a Fere- en-Tardenois. Mangeart, avocat, biblioihecaire de la Ville, a Valenciennes. Mareuse (V.), avocai a la cour d'appel d'Amiens, rue Bleue, 4, a Paris. Marolles (Quatresols de), president du Tri- bunal civil, a Arcis-sur-Aube. Marinet (#), ing6nieur en chef des ponls-el- chaussees, a Chateau-Thierry (Aisne). Mathteu, avocat a la Cour iinperiale, rue Riche- lieu, 29, a Paris. — 595 — MM. Maupassaisi, principal du college de Chalons- sur-Maroc, oflicier de I'Universile. Maupiei), ancien professeur a la Faculie de theo- logie de Paris, chef d'insiilulion , ^ Goiilin ( Finisiere ). Mellet (cemie de), proprietaire, a Chalirait (Marnc). Meugy, docieur en medecine,a Relhel (Ardennes). MiCHELiN (H.) (#), conseiller a la cour des Comples, membre de la Socieie geologique de France, rue Sainl-Guillaume, 20, a Paris. MiGEOT, cure-doyen de Signy-le-Pelil (Ardennes). Millet, ancien jnge de paix, a Cliauny (Aisne). Millet, inspecleiir des foreis, sous-chef a I'ad- minisiralion des forets, a Paris. Mohamed-Effendi-Charkaly, ancien eleve de i'ecolo de pharmacie de Paris, an Caire (Egyple). MoiNMEUQui^: (0, ^), membre de I'Academie des inscriptions et belles-lellres, rue Saint-Louis, 39, au Marais, a Paris. MouEL, professeur de rhetorique au college de Niort. MozER, medecin, a Verzy (Marne). MiiLBACH, professeur de lilteraiuro allemande, a Eger (Boheme). NicoT (0. #), ancien recieur de TAcademie de Nimes . NiZARD (Desire) (#), professeur au college de France, a Paris. NiTOT (c^) , mairc d'Ay, membre du Conseil general de la Marne. • — 596 — MM. NoEL-AcNfcs, ancien sous-prefel de Cherbourg. Oppert, mernbre de la Societe asialique , pro- fcsseur de sanscrii h I'ecole speciale des langues orienlales vivanies, a Paris. OzERAY, archivisle-paleographe, ^ Bouillon (Bel- gique). Pape (Ludwig), docleur en m^decine, au Cap de Bonne-Esperance. Paris, ancien noiaire, k Epernay. Paris (Paulin) (^), membre de I'Academie des inscriptions el belles-lelires, conservaleur ad- joint de la biblioiheque iraperiale, el professeur au College de France, a Paris. Pauffin (Ch6ri), ancien juge, rue de Rivoli, 13, h Paris. Pergant, raembrc du Cornice agricole, ^ Vitry- le-Frangois (Marnej. P^RiER (E.), membre de la Sociele d'agricullure de Chalons-sur-Marne. PfiRiN (A.), peinlre, rue Sl-Lazare, H, h Paris. Pernot (#), peinlre, correspondanl du Comil^ des arts el monuments, a Paris. Perreau (Jules), negociani, a Reims. Perron, professeur a la Faculle des lellres de BesanQon. Perrottet (^), direcleur du jardin du Roi, a Pondichery (Inde fran^aise). Petit, docleur en medecine, a Hermonville. Pierquin, cure de La Neuville-Day (Ardennes). PiNART, subsiilul du procureur imperial, a Paris. Pingret, graveur, rue Guenogaud, 3, ^ Paris. — 597 — MM. Pinteville-Cernon (de), proprielaire, a Ccrnon (Marne). Ponsinet, juge au Tribunal civil de Macon. PoNTAUMONT (de ), membrc de la Sociele acade- mique, a Cherbourg. Poquet, nicmbre de la Sociele archeologique de Soissons, cure-doyen ii Bcrry-au-Bac (Aisne). Porte (marquis de La), a Vendome. Pr^gnon, cure, a Torcy (Ardennes). Prin (H), doclour en medecine, a Chalons-sur- Marne. Prompsault, aunionier de la maison des Quinze- Vingls, a Paris. Provostaye (de liA) (#), inspecleur general de rUniversile, h Paris. Quandalle, secretaire de la Sociele de sphra- gislique, a Paris. QuATREFAGES (de), nicmbre de I'lnsiiiul, profes- seur au museum d'hisloire haturelle, h Paris. QuESNOT, membre de la Sociele academique, a Beauvais. Bafn ( Christ.) (^), secretaire de la Sociele des aniiquaires du Nord, a Copenhague. Rattier (#), inspecieur de I'Academie de Dijon, a Troyes. Regazzoni (I'abbe), docteur en iheologie, chape- lain pres I'eglise Sainl-Fidele, a Milan. Renart (Alh.), ancien depute, medecin et mairc, a Bourbonne-les-Bains. Richard, docieur en medecine, b llermonville. RoBELiN, architecte, a Paris. — 598 — MM. RoBKUT (Cli.) (#), ancicn eleve dc recole Poly- lechnique, soiis-iniendanl mililaire, a Melz. RoBERT-ViCTon, membre de I'Union des poeles, a Paris, rue de Gh;ibrol, 71. RoisiN (baron de), {%i), proprieiaire , a Bonn (Prnsse Rheoane), — on rue Franpise, 38, a Lille. RoNDOT (Naialis) (0. ^-), delegue en Chine pour les industries des laincs el des soies, membre de la Sociele asialique, roe Moiilholon, 24, a Paris. Rougher d'Aubanel , doeleur en medecine, a Fere-en-Tardenois (Aisno). RouiT, direcleur de I'ecole normale primairc, a Laon. Rousseau^ doeleur en medeciue. a Epernay. RoYER(E. DE) (0. #), garde des sceaux, minisire de la justice, a Paris. RoYEU-CoLLARD (P.) (^M)-, doycn de la Faculte de droit, a Paris. RuiNAKr DE BRiMOiNr fEd.), membre de la Soci6te geologique de France, rue Cassette, a Paris. SAI^T-VINCE^^ (de) , president du tribunal, a Charleville. Salle , doeleur en medecine , a Chalonfs-sur- Marne. Saunier, professeur d'hisioire au lyc(5e de Nancy. Sauvage (^), ingenieur, a Paris. Sauville (Guillaume de), sous-prefet de I'arron- dissemeiii de Marseille. ~ 599 — SIM. Say (H.) (^^), mcmbro clu Cons^il general de la Seine el de la Chamhre de commerce de Paris, rue Bleue, 15 , a Paris. Say (Leon), economiste, a Paris. Sellieh, (^:), avocal, membre dn Conseil general, a Clialons-sur-Marne. Seure , doclenr en medecine, a Siiippes (Marne). SlRET (Ad.), secretaire du Gouvernenient, membre de la Sociele archeologique, a Namur (Belgique.) SucKAU, professeiir d'allemand an lycee Monge , rue Sainl-Hyacinihe-Sainl-Michel, a Paris. SuRY, doyen de Givet (Ardennes). Sylvestre (#), bomme de letlres, place Belle- Cbasse, a Paris. Taillefert, proviseur au lyc^e d'Orleans. Tampucci (H.), bomme de leltres, k Paris. Tempier , jurisconsulle, a Marseille. Teste-d'Ouet, bomme de leiires, correspondani du minisiere de I'lnsirnciion publiquo, rue Bourg-rAbbe , 7, a Paris. Thierion deMontclin (J.), alNanieuil (Ardennes). Thierry (E. de), ancien oflkier de cavalerie, Ji Fisraes (Marne). TiRMAN , docieur en medecine, h Mezieres. TiTON, docieur en medecine, a Soudron (Marne). Varennes, juge, a Viiry-le-Frangois. ViANCiN, membre de I'Academie de Besangon. Vincent, ancien inspecieur des ecoles primaires de Melz ViOLETTE, iiomme de lellres , a Coullemelle , pres Mesnil-Sl-Firmiii ('Sonime). — 600 — MM. ViONNOis, jugc ail Tribunal civil, a Moulpcllier. VisMES (de) { ^) , ancien prefei , a Sezanne (Maine). VoiLEMiEU, docleur en m6(lecine, a Senlis (Oise). Vroil (Jules HfiRioT de ), membre de la Sociele ties economistes^ a Reims. Weiss (#) , correspondanl de I'lnslilul , conser- valeur de la bibiioiheqne , a Besan^on. WiNT (Pan! de), homine de lellres, rue des Marais-Sainl-Marlin , 29, a Paris. YvAN (^), docleur en medecine, profcsseor d'hisloire nalureile medicaie, place Breda , 10, h Paris. Membres ddcedes. IM. AzAis {%), president perpeiuel de la Sociele archeologique do Beziers , membre correspon- danl Chambert, docleur en medecine, membre cor- respondanl, ii Laon. Genaudet , avocal , membre correspondanl, h Laon. HoMBRES-FiiiMAS (baron d') (#), correspondanl de I'Jnslilul, membre correspondanl a Alais(Gard). Maiziere (Arm. de), ancien professeur de ma- Ihemaliques h Reims, membre correspondanl. Mennesson (M. ), docleur en droii , membra correspondanl, a Laon. Salvandy (Comle de) (G. C. ^), membre de I'Academie fran^aise , ancien minislre de I'in- slruclion publique , membre d'honneur. LISTE DES SOCIETES CORHESPONDANTES. Societe academique, h Laon (Aisne). academique a Saint-Quentin (Aisne). archeologique , liistorique et t^cienliflquc , a Soissons. d'cmnlation, des sciences, arts et belles-lettres, a iMouiins (Allier). d'agriculture, a Mezieres (Ardennes). d'agriculture, sciences, arts et belles-lettres, a Troyes (Aube). des leltres, sciences et arts, a Rodez (Aveyron). Academie des sciences, lettres et arts, a Marseille (Bou- ches-du-Rhone). Societe d'agriculture, k Bayeux (dalvadosj. Academie imperiale des sciences, art? et belles-lettres, a Caen. Societe des Antiquaires de Normandie, a Caen. d'agriculture et de commerce, a Caen. academique, agricole, indiistrielle et d'instruc- tion, ii Falaise. des sciences nalurelles, a la Rochelle (Charente- Inferieure). d'agriculture, sciences et belles-lettres, a Ro- cheforl. d'agriculture, a Bourges (Cher). Academie des sciences, arts et belles-lettres, a Dijon (Cote-d'Or). Societe des sciences naturelles et antiquites, a Gueret (Creuse). Academie des sciences, lettres et arts, a Besangon (Doubs). Societe d'eniulatiou, ii Monlbeliard. — 602 — Societe de statistique, a Valence (Dr6me). libre d'agriculture, sciences, arts et belles- lettres, i Evreux (Eure). Acadeniie du Card, a Nlmes (Gard). imperiaie des sciences, inscriptions et belles- lettres, fi Toulouse (Haute-Garonne). des jeux floraux, a Toulouse. Societe archeologique du Midi de la France, a Toulouse. Academie des sciences, belles-lettres et arts, a Bordeaux (Gironde). Sociale archeologique, a Beziers (Herault). d'agriculture et d'industrie, a Rennes (Ue-et- Vilaine). d'agriculture, a Chateauroux (Indre). d'agriculture, des sciences, arts el belles-lettres, a Tours (Indre-et-Loire). Academie Delphinale, a Grenoble (Isere). Societe d'agriculture, k Grenoble. d'emulation, ;i Lons-le-Saulnier (Jura). cconoraique, d'agriculture, sciences, arts et manuf., a Mont-de-Marsan (Landes). academique, i Nantes (Loire-Inferieure). d'agriculture, sciences, arts et commerce, au Puy (Haute-Loire). des sciences, belles-lettres el arts, a Orleans (Loiret). d'agriculture, commerce, sciences et arts, a xMende (Lozere). d'agriculture, sciences et arts, ^ Angers (Maine- et-Loire). industrielle, a Angers. academique, a Cherbourg (Manche). d'agriculture, commerce, sciences et arls,^ Chaions-sur-Marne (Marne). Cornice agricole de la Marne, k Chalons-siir-Marne. agricole de I'arrondissement de Reims. — 603 — Cercle pharmaceutique de la Marue, a Reims. Societe veterinaire de la Marne, ii Reims. des sciences naturclh's, a Reims. des sciences, lettresel arts, a Nancy (Meurthe). philomatique, a Verdun (Meuse). Academic impcriale, a Metz (Moselle). Societe Nivernaise , a Nevers (Nicvre). Dunkerquolse, a Dunkcrque. centrale d'agriculture, sciences et arts, a Douai (Nord). des sciences, de ragriculture et des arts, a Lille. d'agriculture, sciences et art?, a Valenciennes. academique des sciences et arts du departement, a Beauvais (Oise). Societe pour I'encouragemeut des sciences, des lettres et des arts, a Arras (I'as-de-Calais). d'agriculture, du commerce, des sciences et des arts, a Boulogne-sur-Mer. d'agriculture, a Calais. des antiquaires de la Morinie, a Saint-Omer. Academic des sciences, belles-letres et arts, a Clermont- Ferrand (Puy-de-D6me). ■ Societe agricole, scientiflque et litteraire, a Perpignan (Pyrenees-Oriun tales). des sciences, agriculture et arts, a Strasbourg (Bas-Rhin;. d'agriculture , commerce , sciences et arts, a Vesoul (Haute-Saone). d'histoire et d'arclieologie, a Cliaions-sur-Saone (Saone-et-Loire). d'agriculture, sciences et belles-lettres, a Macon. ■ Kduenne, a Autun. d'agriculture, sciences et arts, au Mans (Sarthe). d'agriculture, sciences et arts, a Meaux (Seine- et-Marne). Academic des sciences, lettres et arts, h Rouen (Seiue- Infdrieure). — CM — Societe centrale d'agriculture, a Rouen. libre d'emulation, a Rouen. Havraise d'etudes diverses, au Havre. des sciences morales, des leltres et des arts, k Versailles (Seine-et-Oise). de stalistiqiie, a Niort (Deux-S^vres). des antiquaires de Picardie, a Amiens (Somme). Revue de I'art Chretien, a Amiens. Societe d'emulation, a Abbeville. academique, a Draguignan (Var). des sciences, belles-lettres et arts, k Toulon. des antiquaires de I'Ouest, a Poitiers (Vienne). d'emulation, a Epinal (Vosges). des sciences historiques et naturelles, k Auxerre (Yonne). archeologique, a Sens. Academie imperiale des sciences, a Paris (Seine). imperiale des inscriptions et belles-lettres, k Paris. Cabinet historique, rue Rarabuleau, 2, k Paris. Cercle des societes savantes, •> Societe centrale d'agriculture, » de la morale chretienne, » imperiale des antiquaires de France, » de sphragistique , » d'encouragement pour I'industrie nationale » geologique de France, » de geographic, » imperiale et centrale d'horticulture, » d'cenologie frangaise et etrangere, » de statistique universelle, » Academie d'archeologie de Belgique, k Anvers. Societe archeologique, k Namur. des antiquaires du Nord, k Copenhague (Dane- marck). des antiquites, a Zurich (Suisse). LISTE DES OUVRAGES ADRESSES A l/ACADEMIE IMPERIALE DE REIMS Pendant I'amee 4856-4857. OUVftAGES PUBLICS PAR LES MEMBRES DE LACAD^MIE. Fables, par M. Bourguin 2'ediiion. Paris , Lebrun, 1856. in-12. Histoire du pays el de la ville de Sedan, parM, I'abbe Pregnon. Paris, Dumoulin, 1856. 5 vol. in-8°. Resume d'histoire naturelle. Boianique, par M. de Meissas. Lecoffre, 1855. in-12. Recherches sur les oscillations du sol de la France miridionaky par M. Hebert. Paris, 1856. Rroch. in-4o. Recherches sur la faune des premiers sediments ter- tiaires parisiens, par le meme. Paris, 1856. Brochure in-4o. Memoire sur la mesure des indices de refraction des gaz, par M. Jamin. Paris, 1856. Broch. in-8». VOptique et la peinture, par le meme. Paris, 1856. Brochure in-8° Precis sur I'hisloire de Nolrc-Dame de Charires, par M. Ozeray. 1857. Brochure iii-8". — 606 - Notice hislorique suv la compaynie du noble jeu de Varc a Chalons, par M. Sellier. Chalons, 1857. Broch. in-8'. Notice hislcrique sur le culte de saint Medard, par M. I'abbeCorblel. Amiens, 1856. Broch. in-8°. Discours sur la destruction de I' empire d' Orient, par le meme. Ibid. Broch. in-S". La Version, par M. Gounioi. Paris, V" Nyon, 1857. Broch. in-8». Du beau et de son role dans I'education, par le pere Lccuyer. Lyon, 1856. in-8o. La feodalile a Amiens. Amiens, 1857. Broch. in-8°. La ghilde ou coulume du bailliage d'Amiens. Ibid, 1857. Broch. in-8". Solution de la question des brevets, par M. Jobard. Bruxelles, 1855. Broch. in-12. Histoire mysterieuse du chateau de Tourlaville pres Cherbourg. Cherbourg, 1856. Broch. in-8°. Eludes hisloriques el critiques sur Vimilalion de J,-C., par M. Vert. 1856. 1 vol. in-8". Gersoniana, par lememe. Paris, Braj, 1856. 1 vol. in-8». Toxicologic du selmarin et de la saumure, par M. Armand Goubaux. Paris, Rignoux, 1856. Brochure 10-8°. Rapport sur V exposition universelle de 1855 , fait a la societe libre d'emulalion de la Seine- In ferieure , par MM. Girardin, Cordier el Barel. Rouen, 1856. 1 vol. in-8«. Notice hislorique sur le chateau de Joinville, sur les tombeaux que renfermait sa chapelle collegiale, par M. Pernoi. Paris, Derache, 1857. in-8o. — 607 — Les nouvelles tnvenlions aux expositiona universelles, par M. Jobani. 1" livraison. Brtixclles, 1857. in-8°. Rapport sur les travaux du congri-s des socieles sa~ vantes de France, par M. Sellier. Paris, 1857. in-12, Recherches sur les peinires-verriers champenois, par M. Chaubry, baron de Troncenord. Chalons , 1857. Broch, in-8°. Le Cabinet historique, par M. Louis Paris. Juillet i856 a Juin 1857. Revue de I'art chretien, sous la direclion de M. I'abbe J. Corblel. Janvier a Juin 1857, 6 cah. gr. in-8°. — 608 — PUBLICATIO^S ADRESSfiES PAR LES ACADl^.MIES ET SOClfiTfeS CORRESPONDANTES. Bulletin de la Societe acadimique de Laon, lome V (1856), el tome vi (1857), 2 vol. iii-S". Journal de la Societe d'agriculture du departement des Ardennes , Juillel a Decembre 1856 ; Janvier a Juin 1857. Memoires de la Societe d'agriculture , sciences , arts et belles-lettres de I'Aube , 3« el A" Irimeslres 1856; 1" et2« Irimeslres 1857. Memoires de VAcadimie des sciences, arts et belles- lettres du Calvados, 1856, 1 vol. in-8». Memoires de la Societe d'agriculture et du commerce de Caen, anoee 1886, 1 vol. Annales de V Academic de La Rochelle ( seclion des sciences nalurelles ), 1856, brocli. in-8». Compte rendu de la Seance du 45 Mai 4856 de la Societe de Montbeliard , broch. in-8». Compte rendu de la Seance du 29 Aoiil 4856 de V Academic du Card, broch. in-8". Bulletin de la Societe archeologique , historique et scientifique de Soissoas , lome \% 1856, 1 vol. in-89. Memoires de lAcademie imperiale des sciences, in- scriptions et belles-lettres de Toulouse, tome vi, 1856, 1 vol. in-8°. Memoires de la Societe imperiale archeologique du — 609 — midi de la France , ^lablie a Touluuse , loine vii , 3* livraisoii, 3" seiie, l8o4, br. in4°. Recueil de rAcademie des Jcux floraux a Toulouse , 1857, 1 vol. iD-8". Bulletin de la Socidte archeologique de Beziers, 15* livraison 1857 ; cl Comple-rcndu de la Seance publique tenue le 21 Mai i857, 2 br. in-8". Annales de laSociete d'agriciihure , sciences , arts el belles-lettres du departement d'lndre-el-Loire. a Tours. lome xxxvr ( 1856), n"' 5 el 4, 2 br. in-8°. Societe d\iyricullure de Grenoble. Le Sud Est , journal agricole et horticole public par celle Sociele; n"' de Janvier a Join J8oT, in-8°. Bulletin de la Societe d'agriculiure, sciences et arts du departement de la Lozere , tome vii% fiii de 18o6 ; el lome vni«, comprcnani les hs premier, mois de 1857, in-8«. Annales de laSoeiele imperiale d'ag> icidlure. indiistrie, sciences, artset belles-lettres du departement de la Loire, tome I", ]" et 2» livraisons, 1857, 2 br. in-8». Bulletin de la Societe induslrielle d' Angers, lome vii*, 1856, 1 vol. in-8". Memoires de la Societe academique de Maine-ct- Loire; 1«^ vol., n" I el 2 , 1857; 2br. in-8". Memoires de V Academic de Stanislas, 1855, 1 vol. in-8». Memoires de rAcademie imperiale de i/e/z, xxxviu' annee, 1856-1857, tin vol. iii-8^ Bulletin de la Societe Nivernaise, 2* volume, n"' 1 , 2, 5, 1855-18^^6, obr. in-S". Memoires de la Societe impenale de Lille , 2* serie, 5" volume, annee 1850, in-8". Revue agricole. industrielle el lilteraire, publiee par XXVI. 42 — 610 — la Socieie imperiale de Valenciennes; Juillel h Decembre lb56 el Janvier h Juin 1857, 12 cahiers in-S". Memoires de la Socieie Dunherquoise. 1836-1857, un vol. in-8o. Bulletin de la Socieie des anliquaires de la Morinie, a Saiiil-0mer;2' sem. do 1856 , 1" sem. de 1857, 4 br. in 8". Annales scientifiques, liHeraires el induslrielles de VAuvergne , publiees par TAcademie de ClermoDl- Ferrand, lome xxix% 1856. 1 vol in-8°. Annales de I' Academic de Macon, lomc ii , 1857, UD vol. in-8'\ Bullelin de la Socieie d'agricullure , sciences el arts de la Sarlhe ; 2« irim., 2^ cahier du loine xiii , 1857. Precis analytique des Travaux de I' A calemie impe- riale de Rouen pendant I'annee 4855-i856, un vol. in-8°. Bullelin de la Socieie libre d'emulation de la Seine- Inferieure , 1856, br. in-8°. Extrails des Travaux de la Socieie centrale d'a- gricullure du d6parlement de la Seine-Inferieure , n" 142, 145, 144, 145; 3« el 4« irimeslres 1856 ; 1" el 2* irira. 1857, 4 broch. in-8». Bullelin de la Socieie des anliquaires de Picardie , d Amiens; n<" 3 el 4 , 1856; 1 el 2 de 1857 , 4 br. in-8°. Bullelin de la Socieie des anliquaires de V Quest, a Poitiers ; 3* el 4° irimeslres 1856, 2 br. in-8°. Annales de la Socieie d'emulation du deparlement des Vosges ; lome ix, 2« cahier, 1856, piiblie en 1857, un vol. in-8°. Anndes de la Socieie archeologique de Namur, lome 5, 1" iivraison, 1837, br. grand in-8°. — 6H — Annates de I'Academie d'archeologie de Belgique ; lome xiv% 3e ei 4« livraisons, 1857, 2 br. iri-8". Academic des Sciences , Comples-rendus hcbdoma- daires; 2« scm. I806, ci l*'scm. 1857, in-4°. lievue des Societes savantes ; tome seconJ , Janvier el Fevrier 1857, 2 br. in-8<>. Bulletin de la Societe de Geographie; A" serie tome XIII, n°= 67-78, 12 cahiers in-8°. — 612 HOMMAGES DIVHIS F,T .I0UR^.4UX. Glories Nav'ales . odse a Gijiclion de Grandpont, Brest, Lefoiirnier, 18o5. In-12, Epilre a M. Ponsard, par le ineme Roclieforl, 1854. fn-18. Eisai sur la Suseeptibilite du Caraclere, par le menie Ibid, in- 1 8. f La Cinn'de ou la Vache reconqum, poeme par I'abbe Du Vivier de Siret. Hruxelles, l8o4. In-12. | Poesies Vallones, par le meme, ibid. Deux brochures ~ in-18. OEdipe a Colonne, trad, en vers t'ranQais par M, L. f Kichand. Paris, Hachette, 1857. In-i2. Silualion du Ver a soie, par M. Guerin-Menneville. Paris, 1857. Broch. iii-8». Charles Dallery. Amiens, 1855. I11-80. La Musique, poeme lyrique , par M. Lesguilion. Paris, 185(5. ln-80. I^es Rues de Trorjes, par M. Corrard de Breban. P;iri^:, Dtlion, 1b57. 1 vol. in-8". Joarrud des Savants. Juillel a Decembre 1856, Janvier a Juin 1857. — 613 — EXTRAIT DES STATUTS DE l'aCADEMIE. ARTICLE XIV. Le membre nouvellement elu presentera dans les six premiers mois de sa nomination un travail sur una question a son choix. ART. xxt. Les membres titulaires sont tenus de donner tous les ans un travail ecrit sur un sujet a leur choix . ART. XXII. Les inembres correspondants s'engagent a communiquer h I'Academie leurs ouvrages et le fruit de leurs recherches ; si I'un d'eux a laisse ecouler trois annees sans remplir cetle obligation, il sera cense renoncer a son titre et son nom pourra etre raye du tableau. EXTRAIT DU REGLEMENT d'oRGA:VISATIO> INTERIEURE. ART. I. L' Academic se reunit le deuxieme et le quatri^me Ven- dredi de chaque mois, a sept heures et demie du soir, sauf le cas de convocation extraordinaire. Elle cl6t ses stances le deuxieme Vendredi du mois d'Aout, et fait sa rentr^e Is deuxieme Vendredi de Novembre. — 614 ART. IV. Les membres de I'Acad^mie et les personnes ^trangfires i la Compagnie qui ont a faire des lectures ou des communi- cations, doivents'inscrire a I'avance au secretariat (I) . ART. V. A I'exception des travaux des membres de I'Academie, aucune lecture ne peut etre faite a la Compagnie, sans que le manuscrit en ait ete pr^alablement soumis a I'examen du bureau . ART. XV. Quoique les stances ordinaires ne soient pas publiques, les Strangers peuvent y assisler, pourvu qu'ils soient present^ par deux membres. ART. XXXVI. Les droits de diplome sont de dix francs pour les membres titulaires et pour les correspondants (2). (1) Par decision en date du 8 Fevrier 1856, tout membre, auteur d'un travail original dont il a ete donne lecture a I'Academie et dont le comile de publication a decide I'impression, a droit a un tirage gratuit de cinquante exemplaires de ce travail (2) Par decision en date du 8 Janvier 1858, les membres cor- respondants sont tenus de s'abonner au reeueil des Travaux d« I'Academie. TABLE DES AUTEURS POUR LES DEUX VOLUMES de Vann6e iS56-l857, TOMES XXV' ET XXVI«. Ed. B\kthelemt. Le Dormois, t. i, p. 328. Les Vitraux des eglises de Chilons-sur-Marne ; Etude ft Description, t. ii, p. 213. Ch. Bouche. Descartes, t. ii, p. 1, F. Clicquot. Les Pigeous, fable, t. i, p. 4l4. ' L'Eiifant et le Nid, fable, t. i, p. 417. L. Fanart. Note sur les morceaux de musique conteuus dans le manuscrit de Pussol, t. i, p. 264. Ch. Givelet. Rapport sur la reparation des Fmaux de I'eglise Saiut- Remi, t. Ji, p. 257. J. GUYOT. Theorie de TEnseignement deduite de la physiologie du genre humain , t, ii, p. 35. Question de la Prise d'eau dans la riviere de Vesle, pour I'alitiipntatiou du Canal de I'Aisne k la Marne, t. ii, p. 178. — 616 — Henry. Gerson dans I'exil, du 15 Mai 1418 au 15 iNovembre 1419, t. I, p. 335. Rapport sur le concours d'histoire, t. ii, p. 313. De la Chapelle. La Statue de Colbert a Reims, poeme, t. ii, p. 547. J. Lesguillon. La Statue de Colbert, poeme, t. ii, p. 556. Th. LORIN. Essai sur le Labarum, et plus specialement sur I'Ety- mologie de ce mot, t. i, p. 277. (Conjectures sur les Duse.s ou Dusiens des anciens Gaulois, et sur I'Klymologie deleur nom, t. i, p. 293. Le Chasseur, le Lion et le Lapin, fable, 1. 1, p. 419. Le Diamaut et la Pierre d'aimant, fable, t. i, p. 420. Ch. Loriquet, Secretaire general. Discoursprononce aux obsequesde M. Arm. de Maiziere, t. n, p. 276. Compte-Rendu des travaux de I'annee 1856-1857, t. II, p. 285. Maridobt. Rapport sur le systemo de Telephonic de M. Louis Duval pere, t. ii, p. 199. G. Masse, President annuel. Discours d'ouverture de la Seance publique, t. ii, p. 279. P. Mass^. Rapport sur la Cheminee-Calorifere de M. Lesobre , t. II, p. 209. De Meissas. De quelques phenomenes meteorologiques, vents alizes, cournnts generaux de la mer, giboulees, vents irreguliers prod nits par les aerolithes, t. ii, p. 95. Voyages d'un jeune Naturaliste, t. ii, p. 127. — 617 ~ MUENIKH . Colbert, poeine, t. ii, p. 539. PlETON. De la Bourse et du fret a interet, t. ii, p. 86. Happort sur le (loncours de poesie, t. ii, p. 523. Jehan Pussot. Memoires ou Jounialier, 2'"' partie, t. i, p. 1 . L.-\V. Kavenez. Est-ce bien k Tolbiac que Clovis a remporte la vicloire a la suite de laquelle il s'est fait Chretien ? — Ne serait-ce pas plutot sous les murs de Strasbourg qu'elle a eu lieu? t. I, p. 305. Origines des Eglises de Reims, de Soissons et de Chalon?, t. II, p. 3-26. A. Reimbeau. Ventilateur a lames mobiles prcsente a I'Academie par M. Counhaye, t. ii, p. 205. ROPIQUET . Observations sur le Mi-moire pre»ente a rAcademie, intitule : Theorie de lEnseignement deduite de la physio- logic du genre humain, t. ir, p. 74. P. SOULLIE. Idylles de Theocrite, trad, en vers francais, 1. 1, p. 353. La Poesie grecque, t. ii, p. 519. Max. Sutaine. Rapport sur le systeme de Paillassonuage de M. Ic docteur Guyot, t. ii, p. 171. Quelques reflexions au sujet de Paul Delaroche et de rexposition de ses oeuvres, t. ii, p. 262. Tourneret. Colbert et sa Statue a Reims, poemc, I. n, p. 531. FIN DU TOME XXVie. XXVI. 43 I TABLE DE$ UUM COINTENUES DANS CE VOLUME, PHILOSOPHIE ET ECONOMIE. Page* Descartes, par M. I'abbe Ch. Bouche, 1 Theorie dc I'enseignement deduite de la physiologie du genre humain ; Essai par M. le docteur J. Guyot , 35 Observations sur zm Memoire presents a l' Academie im- periale de Reims , intitule : Theorie de Tenseignement deduite de la physiologie du genre humain , par M. RopiQUET, 74 De la Bourse el du Pret d interet, par M. Pieton, 86 De quclques Phenomenes meteorologiques , vents alizes , courants generaux de la mer, giboulees, vents irreguliers produits par les aerolithes , par M. De Meissas , 95 Voyages dun jeuna naturaliste , par M. De Meissas, 12t AGRICULTURE, ARTS ET INDUSTRIE. Rapport sur le systeme de paillassonnage de M. le docteur Guyot, de Sillery , par M. Max. Sutaine, 171 Question de la prise d'eau dans la riviere de Vesle pour I' alimentation dtt canal de I'A'tsne a la Marne, par M. .1. Guyot, 178 Rapport sur le systeme de Telephonic de M. Louis Duval perc, par M. Maridout, 199 Ventilateiir a Lames mobiles presente a I' Academie par M. Counhaye, zingueur a Reims. Rapport de M. A. Reimbeab. 205 Rapport snr la Cheminee-calorifere de M- Lcsobre, par MP. Masse, 209 — 620 — BEAUX-ARTS. Pages lies Yitraux des Eglises de Chdlonssur-Marne ; Etude et desoription par M. Ed. Barthelbmy, 213 Rapport sur la reparation des emaux de VEglise Saint- Remi. par M. Ch. Givelet, 267 Quelques reflexions au sujet de Paul Delaroche et de I'exposition de ses ceuvres , par M. Max. Sutaink, 262 NECROLOGIE. Discours prononce par M. Gh. Loriquet, Secretaire gene- ral, aux Obseques de M. Arm. de Maiziere , 276 SEANCE PUBLIQUE. Discours d'ouverture prononce par M. G. Masse, President, 279 Compte-rendu sur les Travaux de I'annee 1856-1857, par M. Ch. Loriquet, Secretaire general, 285 Rapport sur le eoncourt d'histoire . par M. Henry , 313 Origine des Eglises de Reims , de Soissons et dc Chalons , par M. L.-W. Ravenez , 326 La Poesie grecque; lecture de M. P. Socllie , 519 Rapport sur le concours de poesie , par M. Pieton , 523 Colbert et sa Statue d Reims . par M. Tourneret, 531 Colbert, par M. Muenier , 539 La Statue de Colbert a Reims , par M. de La Chapelle , 547 lo Statue de Colbert, par M. J. Lesguillon, 556 Concours de 1857. — Prix et Medailles. 572 Programme des Concours ouverts pour I'annee 1858 , 575 Tableau des membres composant VAcademie imperiale de Reims au 31 Juillet 1857 , 579 Liste des Societes correspondantes , 601 Lists des ouvrages adresses a VAcademie imperiale de Reims , pendant I'annee 1856-1857 , 605 Extrait des statuts de VAcademie , 613 Extrait du Reglement d' organisation interieure , ' 613 Table des auteurs pour les tomes xxV et xxvi% 615 Reims. Imp. de P. Regmeb. PUBLICATIONS DE L'ACADEMIE IMPERIALE DE REIMS , EN DEPOT A Reims, chezV. Regnieu, Imprimeur-Libraire, ruede I'Arbalete, 9, Chez Brissart-Binet, rue clu Cadran-Saint-Pierre ; A Paris, chez V. Didron, rue St-Dominique-St-Germain, 23, Chez Jacq. LECOFFREet C■^ ruedu Vieux-Colomhier, 29, Et chez Demichelis, rue Saint-Andre-des-Arts , 33. Keiras. Imii.fae V. Regnier. Travaux de lAcademie, lorraant chaque aiinee 4 livraisons triraestrielles ou 2 volumes in-8°; — prix de labounement. 6 h., et par la poste, 7 fr. Histoire de la ville, cite ct universite de Reims, par Dom Guill. Marlot, 4 fort vol. in-4°, avee planches; 30 fr. Histoire de I'Eglise de Reims, par Fi.odoauu , traduite par j M. Lejecne, professeur au lycee de Reims, membre correspon- I daut, 2 vol. in -8° ; 10 fr. | j Chronique de Flodoard , texle latin avec une traduction nou- velleet des notes, par feu M. I'abbe Bandevillk, chanoine do Reims, membre derAcademie,— suivie d'un Index pour I'Histoire 1 de I'Eglise de Reims et la Chronique, 1 vol. in-8°; 5 fr. Histoire des Gaiiles au \' Steele, par Richer, avec traduction, notes, tableaux gencalogiques, cartes geographiqueset Facsimile du manuscrilde Richer, par M A.-M. Poinsigivow , auci^n pro- fesseur d'histoire et censeur des etudes , docleur t, fits d'Alphonse I, due do Ferraro el de Lucrece Borgia, cardinal en 16^'9, lego I en Fraiicc eii I66t. (2) I'raiifois de. Toiinioii, is&u des conites de Toiirnon, archc- v6i]iie do Bourgcs, d'Auch ct do Lyon, ininialre sous Frnncois i", aiubassiidciir ,i liomo sous Henry 11, cardinal en 15^0, niort -en I6(i2. nouvelles eveschcz ot rcmoclre noz raisoos an peiiloiro, nous excliianl du loiil du possessoirc. J'eii ay atlveriy mesdictz s" les cardinaiilx , qui ne fauldrom d'y fain; lout ce qu'ilz ponrronl pnur le sousleneinoni de iioslre cause. Cepeiulanl il voiis plair-i , sire , d'adviser s'il sera bon qu'en e!^c^ipviez une letire an pa|)(» , pour voir si cela le pourra moder«^r. II y a icy iin archidiacre du Liege ci ung chanoyne do Cologne, qui font comme nous ce qu'ilz peuveni pour empesclier lesdicics erections el division, el on- lieremciii toui«! rexecuiion des dicies bulles du feu pape; car il y va bicii lourdi>menl de Tinleresi do ieurs preialz et cha|)ilres qui, par co, moyen, scnionl une grande diniinuiion non senllemenl de leur nucioriio el jurisdictions, mais aussi do ieurs ri-nlos ci revenuz, qui los reed beauconp plus vigilans el cdteniifz ii senlir et adviser des poursuiiles des minislres du roy calholicqu(% qui soni icIU's que je crains grandcmeni qu'ilz n'emporlenl la vicioire, si nous n'avoiis de vous bien lost , sire, une leilre qui ayl grande ((Ticace ci verlu. Sire, je n'ay semblabiemetil ces jours passcz failly de presenter an pape les It'ttres que vosire majesle luy a escripies en I'aveur do M' de Charlres (1) pour le faire pourveoir de Tabbaye de TEspan (2), et luy leuz toute la letlre que vous, sire, luy escripviez a ce^le fin; apres laquelle nosire diet s' pere me demanda de quelz cas el crimiis esioyi cbari:i8 le religieux nien- lionne en vostre dicte ieUie. Je respotidiz que je n'en (I) Charlo (;irl!;iiJ, evi-jue e 'i'lipiosie jiro.i Jii I'.iiic,., ti se demit I'c ?on evnolie. ii liitjiirut en Mai 167:!. ^2' Dans in 'l;<)cesi> (in Ma;i^, oiiiio ii«' ("iU'aiix. — G — scavois aulirc cli^sc, el que les iuCoiiiia lions on [lour- raienl faire foy, cl que vous, siio, n'eii eussiez pas escripl do la sorle sans eslre bien iiiloriuc de la ve- rile el congiioisire que ledicl religieux no seioyl propre a gouverner la dicloobbaye. Nosire did sainct peie me disl qu'il voulloil conferer de loul ce negoce avecques Mons'' le cardinal de Tournon avanl que de s'en resouldre. Au deniouranl, il me semble que je iuy levay lolallemetil I'oppiuion qu'il avoyl cancoue que iadicie abbaye vacquoyl on cnuit de Romme (1) par !a moil du feu cardinal du Bcllay (-t «il que de cola il en resia bien esclarcy. El sur cela me demanda si je n'avoys poinl eu de responce de vous, sire, depuys ranivee de mon fiere vers vous, sur la vaccance du did cardinal du Bellay : comme auparavant sa dicie saiudeie m'avail aussi demands si vous, sire^ m'aviez poinl encores I'eid eniendre la resolution qu'aviez prinse [)0ur le regard du concile (3), (() I'ar le coiicordat, le saint-siege s'elail reserve la collalion de certains buiitilices ; de la J'evpressiDi! vaqiier in curia ou eii cour de liouie. Ces bei)eeiuaudo des 1617 , coiivoar le raariage de Jiiiic de Varauo avec Guid-Ubaldo II. Paul lil lenleva a ce dernier pour la dcniier a P. L. Farnese ; en 1645, Farnese ^tant cr^e due de Parme, Camerino reiitra dans le doniainc de I'Eglise. (3) Les Farneses sont petits-fi!s du pape Paul III. Oclave, due de Parme, marie a Marguerite d'Aulrichc, fille iialurelle do Charles-Quinl. Hcrace, due de Castro, marie a Diane, fille na- turelle d'llenri II. Alexandre, cardinal en 1534. Rainuce, car- dinal en I5(j5. 4) Scipion, coral© d'Arco*. — 9 — 11. Du 18 Juillet, par M. de Mascon (1) qui parlil le 19. Sire, en ailcndanl que le Sieur de Manne (2), qui arriva icy le iiii® du present, vous porie ample re- solution sur toute sa depesclie, j'ay bailie S M. de Mascon, present porleur, ung brief memoireconienanl quelques chefz, desquelz rcnieclanl I'exlension a sa suffisance, je ne vous dirtiy aiillre chose par la pre- senie, sinon que je prye a nostre Seigneur, etc. De Romme, co xviii" Juilicl 1560. Memoir e bailie au diet sieur de Mascon. II plaira a M. I'evcsque de Mascon compter au roi comnie le iiu'' de ce moys , le Pape manda querir I'evesque d'Angolesmc , ambassadeur de sa Mic, pour luy parler de la vye du comie de Petillan (3) et du debal inlervenu enire Iny et son filz. avccques riulelligence duquel le due de Florence (4) laschoil de recouvrer Soane par armes , se disant le faire du (1) Jean-Biiptislc Al.niiany, florpiiliii, vutiii cu Fr;incr> a la suite lie Catherine de Mudicis, cveqiie de Tiiacoii en 1658, niort en 1682. (2) Aussi appe'e I'ablxi do Mamie , (ihrsieiirs fois cniployo sous Henri II el ses fits dans les negocialions d'lUiie. (3) Jean-Francois des tlrsins , corate de Pitigliano , inorl en I5G7, a pour fits Nicolas, niorl en 1594. Tous deu% onl st.-rvi la France centre I'Espagne. On verra encore dans !i's lellrci de noire ambassadeur ies nonis de plusioiirs : Orsini , Franrnis , frere de Nicolas; Henrico, Fiavio, .lordano. ses cousins Le dernier, chevalier de I'ordre do Saint-Michel, gouverneur provisoiro de la Corse, est mort en 1564. (i) Cosme de Medicis regne de 15 37 a 1574. Marie a Elcoiiorff de Tolcde. i'«r«nte du due d'.\lbe. — 10 — consenlemenl du roy , lequel il voulloil verifTier par une lellre de son ambassadeur pr^s sa Mle; donl I'evesque de Pisloye , ambassadeur dudicl due pies du pape, leul ung article au did evcsque d'Angolesme, lequel 11 vim iiouver chez luy a ceste fin. Mondicl s"" de Mascon porle la coppye dudicl arlicle, qui ne ful du loul leu audicl evesque d'Angolesme, mais en laissa le diet evesque de Pisloye quatrc ou cinq lignes de la fin , pour ce qu'il luy senibloyi qu'elics ne faisoienl pas pour sa cause, ainsi que dira lediel s' de Mascon, ei semblal)lemenl la responee dudicl evesque d'Angolesme lanl audicl ambassadeur de Florence que a noslre &' pero , el do la depesclie faicle par sa Sie du sieur Gavrio, capiiaine de ses gardes, vers le did due. Le neufiesme de ce moys, csianl Tambassadeur ad- veriy que lediel due de Florence passoyl oulire, ne se conlenlani de Soane, el vouloyl donner sur Sorano de Peliglian , palriiiioine dudicl comte, s'en alia h I'inslance du s"' Jule Aniboine de Gravines, beau pere dudicl comlo, dcvers noslre s' pere, envers lequel il feist lanl que sur I'ljcure il depescha un courrier devers lediel sieur Gavrio, a ce qu'il eusl a faire lourner en arriere les gens du did due ; cl n'csl a ou- blier la double que faisoyi noslre s' pere que le did comle fusl comprins au iraicle de la paix. Quani a la depesclie du sieur de Manne, le pape n'a poinl encores rendu rcsponce resolue sur le laid du concile, ne semblablemenl sur le brief el declara- tion generalle que le roy demande pour les, benelices qui vacqueronl pas cy apres in curia. Esl loul cela remys h la depesche que sa Sie doybl bailler au did sieur deManne, dedans quaire ou cinq jours, nc voul- — 11 — laiil que qiielque chose qu'elle die cepoutlaiil se pregne pour lesoluiioi), mais seullemenl par forme de devis. Le proces conlie les cardiuaulx prisouDiers lire lousjours en avanl el se poursujl cliauldemeul : donl le did s'' de Mascon scaura reudre bon compie au roy, au moins de lout ce qui s'en peull scavoir, el semblablemenl de celluy du due de Pallian, qui a ces jours passez escripl une lellre i I'ambassadeur donl mon dici s' de Mascon empoiMe la coppye. Le roy aura desja peu cslre adverly de la ciialion decreiee conlre le due de Parme, pour raison de Cameiin, ei de son voiage en Espagne ; aucuns disenl que le come de Pelillan esl paroillenienl ciie en inaliere de religion. Le mariago du sieur Hannibal avecquos la fille de Monlalle semble recevoir queique nouvelie dilliculle, pour la mauvaise inielligence qui esl cnire les marquise del Guasl el la ducliesse de Tagliacozzo, soeurs el lanles de la maiiee, (jui n'a voullu recevoir les prtisens du diet Hannibal. Faicl a Romme, le xviu* de Juillel 1560. IH. Des 29 Juillel el 8 Aousl 1560, par ung ordinaire qui parlil le 9. Sire, la presenle sera principallemenl pour vous adverlir que Mons' le cardinal de Tournon parlil d'icy jeudy dernier, xxv' de ce moys, pour aller h Hoslia, oil des le lendeniain il s'embarqua ei feisl voile, el avec lui Mons'' le cardinal d'Armignac (1). El (1) Georges t]'Armagnac, anhevi-quc dc Toulouse, cardinal en l.S^i, legal el archevo<|iie il'Avi(ii)iU, Icig.-it du papfr au coucilc de Trente. — u — s' pere, qno, pour tout, jeudy procliain qu'ilzdoibvcnl faire une congregation a cesle fin, ilz auronl arreste la dicle responce et inconlinaol la feronl dresser et en consigner la coppye au diet dc Manne : disanl nosire diet saincl pere, piiysqne vous, sire, el ie roy calho- liqiie vons remeclez tons deiix au diet empcreur, duqael surtout vous desirez Ic conleniemenl en ce negoce, pour les respeclz portez par vostrc ins- truction, qu'il vcult aussi que vous, sire, jugez si ledict empereur aura occasion de se contenler de la dicte responce, comme ii espere qu'il fera , tant a cause de son bon naturel el inclination que par les bons offices que y fora vosire mnjeste. Sire, j'espere que Icdicl de Manne vous porlera un brief general par Icquel les benefices dc vosire nomi- nation demourronl tousjours en vosire disposition nonobslanl les vaccances in curia. Ledict brief n'esl encores depesche, el ne I'avoyt noslrc s' pere com- mando que pour sa vye scnllement, doni je ne me suys voullu conlenter, combien que, par ce que j'ay sur ce de vous, sire, il ne me soyl commando que de tenir la main h ce que sa Slo vous euvoye un indull general par oil elle vous accorde el consenle de ne pourvoyr plus aux benefices vacans in curia : de sorle qu'il y avoyl apparencc que vosire demande, sire , se rcstraignoil a la personne du pape sans s'estendre jusques a ses successcurs. J'ay touteffoys tousjours souslenu le conlraire, pour ce qu'il me sembloyt que vosire service Ic requeroyl ainsi et que je craignoys que, a I'advenir, vos cardinaulx esians venuz par dega pour cause d'une vaccalion du siege, la mort d'aulcuns d'eulx fust pour engendrcr dispute scmblablo li cclle qije avons cue ponr la vaccance du — 15 — feu cardinal de Bellay. A la fin, sire, apres toules difficullez el debalz, le pape voiis accorde ledicl brief a sa vye el apres sa mort , au bon plaisir du s* siege et des papes qui pour lors seront ; en fa?on que voila vosire nominaiion asseuree, non seullement du- rani ung conclave ct siege vaccant, mais jusques a ce qu'il y ayl expresse revocaiion, en laquelle il n'est vray semblable que ung pnpe soyl jamais pour fairc si pen de cas de vosire bonne grace, qu'il y ose enlrer. Cela ful ainsi arresie avanl cl sur le parlemeni de Mons' le cardinal do Tonrnon qui y a bien ira- vaill6 el y a grandemenl servy son auclorile el les bons offices qu'il y a faiclz, ainsi que le did de Wanne vous scaura dire plus au long. Sire, je prie a nosire Seigneur, elc, De Romme, ce xxix« de Juillel lus courle voye pour parvonir a ung si boii el saincl oeuvre que de lever la suspension de celliiy deTreiite ; el, oil le lieu se liouveia incommode, qn'il esl loul presi a s'accorder el conseniirque le did concileesiani a Trente change de place. Qii'd ne venll poiul indire la celebralion du did coiicile eii ses lerres , aiissi n'est-il pas raisonnable qu'il voise ea celles des Lulherieiis el ennemys de lEglise (jui luy doybvenl par raison esire plus suspedes que a eiilx les sieuues. Qiianl a la cassation des acles du did concile de Trente, il ne les veiill ne confirnur ne infirmer, ne encores moins liiiie ung interim de sa teste ei senile aucioriie ; qu'il reined loul cela au concile , pour en ordonner ninsi que Dieu el son saincl esperit le cou- seillera, el que si ung cbacun a aussi bonne volume que luy a la celebration du did concile, que I'assem- blee sera bien tost faicle , el lors on pouira adviser quelz bons ei piompiz reineddes il y aura aux maulx ei perturbations presenies ; el si le did concile voyl qu'il faille remecire quelque chose des aiiciennes consiiiuiions, a cause de la necessiledu lemps et pour la Iranqiiilliie publicque, que au nom de Dieu cela se face el qu'il ny rcsisiera poini; mais de sa seulle aucioriie, d'introduire des nouveaiillez , que ce seroyi crreur sor erreur el ung scandale Iropgranl. Au de- mouranl, sire, il nous enchargea esiroidemenl de vous faire bien entendre comme sa malladye avoil esie cause du retardemenl du did de Manne el qu'il a esie plus mal que Ton n'a pas pense, ce que je vous pnys asseurer, sire , se dtscouvrir bien \)ur son visage, et qu'il ne luy I'auldroyi gueres de lellos bourrasques pour le nieilre bien has. Je ne vous scauroys encores XVII. 9 — 18 — dire , sire , qiianil le did de Manne parlira , pour ce que, sur la fin du propoz, le papo envoya querir I'am- bassadiMir de rempereur et dist qu'il verroyl s'il y avojl moyen de depescher cosie responcc en une congregdiion de cardinaulx qn'il debvoil faire aujour- d'huy, el la vous envoyer par le did de Manne, qui en raon jngemenl en une sorie ou aullre ne peull faillir de parlir dedans huicl jours pour le plus lard J el sc fera louic dilligence possible pour haslcr sa depcsche. II s'esloji aussi offerl quelque didiculle en dressanl le bref des vaccancos mcurm^ Ijquelle je resoluz hier avcc sa Sie. Je faiz touie I'inslance que je puys de recouvrer le did bref, affin qu"il n'inlervieigne plus rien qui I'arresie. J'espere que, bien losl apres la recepiion de la presenie , le did de Manne vous rendra bon compie corame loules choses passent par dtca. De Rome, ce vJii* d'Aousi 1560. III. Du 22 Aousl 1560, par M. de Manne qui parlil le did jour. Sire, noslre s* pfere vous renvoye h la fin le sieur de Manne, present porleur, avecques lellres el inslrudions de sa Sle, auxquelles j'ay adjouxte ung courl niemoire qu'il scaura Ires bien el fidellemenl estendre h bouche, doui me remedanl b sa sulfisance, sans vous faire plus long discours, je prieray a noslre Seigneur, sire, elc. De Romuie, ce xxii' jour d'Aousi 1560. — 19 — fmtruction pour le diet yiear dc Manne. Eslanl Vi' de M;ioiio lellciiif^iil iiiformi'; el insiiuicl des affaires el parlicularitcz de do?a, que I'oii pciill remecire loul a sa siiffisance, I'eveqiie d'AngoIesnie a pense que, sans lui bailler aiilire inslruction, il suffiroil dc luy signer ce prdienl niemoire conicnant les chefz principaux de ce qui s'esl faicl el passe de- puis sa venue par degi, plus pour garder lo stile el forme accousinmde en semblables depesclios, que pour necessiie qu'il on soyi, Iny en laissanl an surplus Texiension selon que la veriie el exigence de la matiere le comporleronl. Premierernenl, le roy ( tilendra. si liii pl;ii>i, que la longue demenre que a faicle icy ledici &■• de Manne n'esl pas a faulie d." (iilligonce, solicilalion el insianc? de rccoiivrer sa deposche de noslre s' pere, lequel a voullu sur icelle meuremenl deliberer el faire plu- sienrs asscmblees de cardinaulx avanl que de se re- sonldro ; el fxiys, pour les raisons qiii onl desja este touchees par la depesche faicie a sa Mie le vm« du prescni , sa Sie a bien voullu que la responce qu'elle faicl 5 ce que I'empereiir luy a semblablemenl escripl sur le faicl du concile fusl presie, afin que parmesme moyen le roy voye ce qu'elle respond a leurs deux majestez, pour lousjours facililer el accelerer le negoce doni il se iraicie : sur quoy noslre dicl s' pere seroil lombe mallade, el apres avoir esic guery auroii eu une reclietiile, de sorte que la chose est allee en leile lon- gueur, que aujourd'huy seulleinenl la depesche de sa Sle a esie consignee an did s' de Manne, qui porte semblablemenl ^ sa Mie la coppye de ce que le dicl empcrour a |)ar cy devanl escripl a sa dicie Sle, avecques la responce d'icelle. — 20 — Encores que riostro did saincl p^re ayl souvenl prolesie, coniine par cy devaal a esle escripl an roy, que Ton ne prinsi ce qu'il disoyl que par lorme de devis, el que, sans auliremenl escripre ses propoz el parolles, on s'arresiasl seullemenl h cc qu'il bailleroyl par escripl, si est-ce que le did s' de Manne scaura choisir ce qu'il a ouy digne d'esire note aux audiences que luy cl 1 evesque d'Angolesme oni cues de sa Sle, encores qu'il n'en soyt rien louche par les iuslruclions qu'elle luy a baillees ; en quoy n'esl a oublier que sa dicie Si6 did qu'elle n'a occasion de craindre le concile, ains de le desirer, el que oulires le bien qu'il en viendra a loule la chreslienie, elle esperc encores en son parliculicr y gaingner plus que perdre, eslanl les choses Iraiclees et decidees par raison cl jugemeni, comme elle s'aUend qu'elles seront pour les raisous qu'elle allega. Qu'elle ne desire rien plus que la corredion des abbuz, el s'il y en a en celie court, que, sans aulcun resped de son proffid, elle esi presle a les lever. Qu'elle scayl bien que Tempereur esl de bonne volume, mais debile, el la oii il ne voudroyl ou pour- royl renger a la raison ses subjedz, il ne fault pas que les aultres princes chrestiens laisseul pour cela a faire leur debvoir, el que, le did empercur ne sera pas marry a faulte de povoyr mieulx faire d'en estre excuse . Que I'Allemagne ne peull esiro seure pour tenir le concile, eslanl I'empercur si faible el si peu obey de SOS enffans propres, comme ung cbacun voyl ; el sur ,ce esl a nohi- la nspoiict' (pic le roy de Bubenie (1) (I) Maximilion, Uls aine lic I'emperi'iir FerdiiiaiiJ, eiiipcreur it la luurt du sou peie. -- 21 — ft'ist ail iiur)ce do nosire s' [lere qui i'exhorioji de. prelerer rnmyiie oi alliance do sa Sie a cello des princes el csialz hereiiqties. Kncores que sa Sie pcn^e n'cs'rt! [loinl nial volue des Allemans , el monsire (ra\oyr esperance que ies chosos de la religion sc pounont accommoder avecques eulx, si ne vonli elle point onyr parler que le concile se celebre en lenr pays, ne s'il esi possible hors d'flalie, de laqiielle elle proleste de ne reffuser aucun lieu, soyl en Pieironl. sur le inoni Ferial, Maniouan, Veniiien, ou bien de li duche do Millan ; el scmble que seur lous rile s'arresie plus a Verseil, comme lieu commode e! plus facile h esire accorde pir Ies princes. Le (lid s'' d(^ Manrie se souvioni l)ien des response-* que I'eisi le pope : Tune, qiiani Lyon hiy ful nomme comme lieu propped tei elTeci ; el Taulre, qiiani il luy ful remonslre que Coilogno n'esioii poiiii ville de Lhuleriens, demaiidee loiilelToys par le did empereur. An demouranl, suivanl le commandcmcnl e {\). A quoi a esie respondu par I'evesque d'Angolesme que les six moys a ce predx ne peuvenl courir au roy que du jour de la consignation des indullz dessus dictz, qui n'a esie que au mois de Jung, par les mains da s' de la Bourdaisiere. Sa Mie pensera , si luy plaisi, a lever pour I'advenir touie occasion de double et dispute, aiiendu mesmemeoi que le pape a voulu que semblable cause de nullile el revocation fusl io- seree au bref dessus diet dcs vacans in curia. Au regard du proces des Caraffes, des pariiz mis en avanl par M' Silvio au nom du due de Paliane el du M) Louis I, cardinal de Guise, freie du cardinal do Lorraine^ — 23 — pen de r.jndemenl que y Irouve I'evesqiie d'Aiigo- lesme,(ies soiipfons es quelzsonl entroz les Farnaises, ei de iciil ce qui (U'pend ("e Idles maiieics, ledict seigneur de Marine scaura rendre bon comi)ie h sa majesle de ce qu'il en a veil el eiilendu par de?!); comme ai)ssi il fera du voiage de Bollognc niainienani refroiddy el fonde sur occasions incongnenes el qui onl donne belle maiiere aux discourenrs , aiissi de la jalouzie qn'en onl conceue les Eici 5 Soplembre 1560, par roidiiiaiic qui pariyl le qualtiesme. Sire, lost apres Ic patleineiil ciii s' de M;iiine qui voiis a porte ma derniere depesche du xxii' dii passe, le voyaige que la pape devoil fairo a Boiiloiisne flit du tout rompn. L'on esiimoii que sa Ste ravoil principallcmcnl enlreprins pour s'aboucqucr avctquos le due de Floreuce, qui depuis auroil ^cmon^lI■e que co!a ne povoit que engendrer jalouzit^s el soup^ons doni il ne se povoii ensuivre mil bien, ne pour rung ne pour Taullre. II y en a qui penscnl que le proces des Caraffes en ayl esle I'occasion , iie se voullanl nosire s' pere esloigner d'icy sans en voir uoe fin, que Ton jugo ne povoir esire avani celle do ce mois, ((uelquc diligence que l'on y face. Ce pendani il esl survenu ung peu de goulleii sa Ste, qui esi depuis huict jours on^a h Sainl-Marc (i), ou elle doibt sejourncr jusques a la prochaine fr'sie de Noslre-Dame. L'on t'spere que enlre cy la il se fera ung consistoire, et Tail croire la venue du s'' Cesare de Gonzague (2), qui arriva icy le xxix" du passe, que le s"" dom Fran- cesco, sou frere, y sera faici cardinal (5), avccques fl) Fals's vois-ii i!e I'eglise e s"^ de Manne vous a porte la cop[)ye de son insiruciion que le pa[)e lui a I'liil baillcr a ce.^le fin; mais Tambassadeur' dudicl empereur m'a did que le did Delphin a memoires secrelz, avecques plus ample povoir dc s'esl.iriiir el relaschcr qiielque chose, allendu la necessitedu lemps, pour accommodcr le fail de la religion en lonl ce qu'il se pourra honnes- lemenl el sans scandale, el sembleque !e did evesque Delphin s'en voise par dela plain d'esperance de faire quelque chose de bon, doni je prye a Dieu qui Iny doini la grace. Sire, le xii^ du mois pas'^e nous sceusmcs icy la (1) MaroSittirh li'AU.irin; s, frcrc d'Aniiib.jl, liojil nous avons (leja iiaile. (2) Bernard Sylviali, floreiilin ; piir sa mere, il elait cousin do Calberiiie de Medicis. (3) Zuchaiie Delptiin , noble vciiilicii , lmcijuc dr I.iosiiia ( Esclayonie ). taidinal eii ir>G&. — 36 - nouvclle dc la prinse des Cerbes (1), de laquelle je voiis eovoye ung advis venu depuis de Messine. II y en a d'aulires de Maithe el d'ailleurs conformes ^ cesluy la , n'adjoiisiani rien d'avoniaige, sinon que domp Alvaro, general dii did fori, ayani presche ung crucifix en la main el anime ses gens, sorlil dehors avecques eulx . et duranl le comhai ne periiil point lanl le sens qu'il ne se reiirasi avecques quelqnes ungs qu'il avoii premieremenl adveriiz de sa deliberalion, el feisl lanl qu'il gaigna une des galeres qui esioit h sauveie soubz ledici fori, equippee el preparee de lous moyens el famous de se sauver de vistesse; en (]uoy la foriune ne le favorisa, el fiii inconiinani la dicie galere invcsiye el saisye des Turcz qui le liennenl mainlenanl prisonniers. Sire, Mons' lo cardinal de Sens (2) faicl son comple de parlir domain pour s'en aller a Vilerbe, pour changer d'air ; el encores qu'il parle de relourner icy, si ne puis-je croire qu'il le face el qu'il ne s'acheminf> tousjours peu a peu selou la disposiiion ou il sc trouvera devers voire Mie. II y a aussi, sire, I'evesque de Yivyers (3), qui s'esl relire vers moy, pour vous supplyer Ires humblemeni, sire, qu'il vous [)laise I'ex- cuser, si promplemenl il ne se peuli reiirer on son diocese, pour les empescheiniMis qu'il a icy a rendre comple de la charg(j de vice-legat d'Avii-non qu'il a (I) Philippp II avail organise iinc ligiie [xtiir c\|uilsor It's Ttirci* (le la McdilerraiiDoe. rcnuaiil I hyvcr de I6C0, la Ilolle de la ligiie s'emp.ara de la »iUc el'' !(; cardinal de Ferrare, je ne failliz des le jour nusmc d'aller trouver nostre s' pere, Icquel incontinanl qu'il in'apperceul me disl que, puys que Niquel ostoii venu, je luy diroys de vos nouvelles. Puys s'enquisl de vostre porlemeni, semblablemenl de la royne vosire mere; a quoy Iny ayant respondu el faicl voz recommandaiions el les complimens accoustumez, le propoz n'alla gueres loing sans lomber sur I'a^semblee de Fonieinebleau, de laquelle je luy dels que, en attendant que vous, sire, apres avoir ouy Mons"' le cardinal de Toiirnon, luy eussiez i'aicl responce sur la depesche de I'abbe de Manne, j'avoys charge et commendemenl expres de luy rendrecomple ci faire ample discour.«, comme le tout esioil passe el reuscy, el les raisons qui vous avoienl — 29 — meu de proceder par cesle voye, disanl que vous, sire, voianl les mouvemenls el troubles dont voslre royaulme est agite depuys quelque lemps en Qa, de- siriez y pourvoir de bonne heure avanl que le mal dcvinl incurable ; et a cesle Qn, comme sage medecin, auriez advise de chercber el meclre peine de con- gnoistre la cause de la malladie , alfin de purger les hunieurs peccantes el desquelles elle prenl nourrilure ei accroissement, pour apres, par bons el efTicaces remedes, reduyre le corps polilique en sa premiere disposition et sanle: ce que vous, sire, n'auriez voulln allenler, sans avoir premieremenl consuite la maliere avec les maistres en I'arl el profession requises a ung lei ouvrage ; el pour cesle cause auriez assemble une si digne el notable compagnye, que par raison or) en povoil csperer loul bon el salutaire conseil , eslanl composee de princes de voslre sang , cbevaliers de voslre ordre, cbefz el conducleiirs d'armees, gouver- neurs de pays et villes, prelatz, docteurs el gens de loys el conseil, lous grans personnages el experimen- lez en laid el maniemenl d'affaires publicz, ou ilz avoienl longuemenl verse el en iceulx acquis grande louange el reputation. Lesquelz, apres longue el meure deliberation, scroienl lombez en la resolution conie- nue en voslre dicte lettre, de laquelle je luy feiz en- tendre la premiere paiiye qui concerne la convocation des esialz de voslre royaulme. El sur les inierroga- toires que me feisl sa Sle , je lui declairay minu- temenl la forme de tenir les diclz esiatz el de quelle fa^on de gens ceste compagnye la esloii compilee. Cela faicl; sire, j'eniray an second menibre de la dicle resolution, qui concerne I'assemblee des prelatz, la- quelle voslre Mte esloit contraincie de faire , pour — so — pourvoir au fuicl de la religion, au cas que par sa Sie 11 Jie fusi prompieraeni celebre ung concile general. Eu quoy je fuz benignemenl escouie, me disanl noslre did s' pere qu'il feroii le did concile general si lost que le national ne feroii aucun besoing. Mais quant je vins, suivanl ce qu'il m't'st expresse- meni commande par vous , sire , h liiy pronuncer qu'il failloil que sa Sle advisasl ft traicier le faid du did concile general de leile fagon que I'em- poreur, el avtcques luy Ks eslaiz de I'empire, lani calholicquos que proieslans, y conseniisseni el en- voiassoLit, aullremenl il ne seroyl suffisanl pour eni- pcscher ra;,semblee des prelaiz dc I'eglise gallicano : lors, sire, je congneuz au vibage de noslre did s* pere uni; notable mulalion denolanl admiration et colere tout ensemble, si esi-ce qu'il refrena el conlinl sa passion, el sans irop s'aigrir de langage, me respondil: que je scavois bion comme des le coinmancemenl de son poniifical ii avoil tousjours eu volume d'ouvrir 1 ; concile, ci combien que I'aucto- rile el puissance de ce qui concerae ce negoce luy aparlinl lolallemcnl, sans ce que aucun prince s'en deust entremectre ne empcscher, el qu'il louchasl a luy seul de noramer le lieu auquel les prelaiz auraienl a convenir, que louleffoys il u'avoil rien voulu sur ce determiner sans en communiquer promierement aux princes, aux commodiiez desquelz el de leurs subjetz il avoil voulu servir el y avoir plus d'esgard el respeci que 'a luy mesmes el a son audoriie, doni il se veyoil Ires mal recongneu; qui esloii cause qu'il se repenloil bien de n'a\oir, suivanl ce qu'il avoil des le commen- cement propose, levela suspension du concile de Trenie, a quoy il esioil delibere de proceder, sans aucune — 51 — dilation, quoy qu'il en deusi advenir , el que je le vous escrivisse; et semblablement que c'estoil abbuz de penser que les piolestansconsenlissent a ung concile en quelque lieu qu'on leur peull nommer, el que ce qu'ilz le demandent en leur pays, n'esl pas afiin d'y venir poursy soubmeclre, mais pour tailier en pieces tons les caiholicques qui sy irouveront. Que Ion voit bien que les diciz proteslans ne demandenl pas le concile, en proposanl des condicions impossibles el si deshonnestes el desraisonnables, que, si ung pape les leur accordoit, ii seroil hereiique el digne d'esire depose de son siege : ci parlant s'esbahisi grandemenl comme vous, sire, le renieciez a I'opinion et consen- lenienl de lelles gens qui esl nutant que reduire le concile general en une impossibilile. Pour conclusion sa dicle Sle me dist que je vous feisse entendre qu'elle esloil du lout resolue de lever la dicte suspension, sans aultrement approuver nereprouver les actes dudicl concile do Trente; mais, la dicle suspension levee , remecire au concile mesmes de les confirmer ou infirmer, ou bien de les traicter el disputer de re- chef, el generallemeni en disposer ainsi que bon luy semblera. El quant au lieu, au cas que Trente ne se irouvasl commode, qu'il sera ayse de transporter ail- leurs le did concile, quanl il sera la assemble; en quoy Ton ne Irouvera aucune difiiculle oe resistance de sa part. Au demourani, sire, nostre did s' pere m'enchar- gea fort expressemenl de vous escripre el exhorler de sa pari de prendre el embrassor la protection de la religion el de pugnyr rigoureusemeni tons ces cer- veaulx siudieux de novitez, sans aulcune acceplion de personnes, el que ii cesle malladye il n'eschcl aullre — 3-2 — inedecine que le feu el respee;(lont usanl virilement, et mainlenanl la religion el conservani robeissance de I'Eglise , Dieu vous conservera !a vostre; el quo Tune levee et perdue, I'aulire s'en ira bien lost apres : a quoy vous, sire, dcbvioz bien penser. Sire, a ce que dessus el })!usieurs aultres propoz tendanl a cesle meme tin, donl je m'asseure que voslre Mieaura esie amplemenl informee a bouche par le s' de Manne, qui a souventtlfois estant icy ouy le semblable, je respondis que vous, sire, n'aviez faulte de verhi ne de couraige , mais aviez par le passe as«pz experiment^ que la rigueur et aigreur des punilions n'csloit remede suflisant pour rabiller le faict de la religion, tant le mal avail peneire dedans les cuours de la phisparl de la chresiienie; et que, apres avoir essaye cesluyla et lous aultres donl Ton s'estoyl pen adviser, il ne se trouvoit plus on effect rien donl 1 on peust allendre guerison ou allegemenl que d'ung concile general el duquel tons les membres de la chresiienie parlicipassent ; et a faulte d'icelluy, estiez contraincl d'avoir recours an national : et que vous, sire, ne proposiez pas le consentcment des ordres de I'empire comme chose impossible, mais comnie neces- saire, pour remedier aux maulx qui regnent et croisseni dejour a aultre ; a ce que sa Ste, a qui appariienl la principalle charge et solicitude de ce negoce, pour- voyl aux moyens de y parvenir comme vous, sire, estiez asseure quelle feroii, s'il lui esloit possible, el que jamais n'aviez double de sa bonne et franche volume; mais aussi, s'il y avoyt de I'impossibiliie, elle ne vous debvoil eslre impulee, mais h la nature de la chose donl ce n'esloil a vous a respondre : lanl ya que, esiant le mal qui pullule el a desjii tant gaigne — 33 — siir 1(; lesie de la chreslietiie, [ueiiiieicmeiit doiivc d'AIUiinagne, Ton ne jugeoit pas qu'il ftMist a piopoz ne expedieiu d'en icnler uiie cure miiver&cdie, comme ccllc d'ling coiicile general, sans ce onnal)le, el queen elle \oos, sire, Irouveriez resolulion de gen- lilhomme el de persontje (pii parte sans dissintulaiion el Ironipfrye. Sire, M'' Alexamirc Palentier (I), procureur fiscal dn pape, me vim ie xiiMle ce moys demander, de la pari de sa Sle, si j'avoys point par desers raoy quelques papier.s touchanl radminisiiaiion des finances el la coniribuiion de de^|^ense pour le regard de la liguo d'enire le feu roy, que Dicu absoillo , el le pape Paule Illl^ Apres luy avoir rcspondu (pic non, el que je n'estois |>ai' dcgi de ce Unips la , il me (iibi (]ue le pape desireroil liien a\o:r '.erillie (juelqiics malversalions doni les Carall'es sonl cliaigez , lii's CarcfTa. — 36 — (I'liiK! pmiyi; (le ciiiqtuuile ei ;)i)y mil livres, donl voianl quo ne luy en povoys baillor aiilire ceitiliide, sa resohilion ful de dresser ung memoiro de lout cc qii'il deiiiandoii, leqiiel je rasseiiray de voiis faire lenir, a ce qu'il vous plcusl , sire, de coiiimanJer que sa dicle Sle fusi servye de toul ce qui seroil i)eso!iig pour esclaircir la veiit6 de ce faict , duquel je n'ay oncques puysouy parler. Je nc scay si c'esiqu'ilz ayenl aultre moien , ou qu'ilz ne veulleni (anl aiiendre a despecher lesdiclz Cariiffes , desquelz le cardinal doyt eslrc dedans ung jour ou deux admys a scs deffenses , comrne roncsiirnequcseroni lesaultrcs[)risoMniersbien losl; el lors, Ton pourra voir par le lermequi leur sera doniie pour defrendrc, comhien pourronl encores durcr leur> proces, donll'on pailc forldiversemeni, lenans ies ungs pour ccriain qu'il ne se Irouve rien siir culx digue de pugnition , el Ies aullres au contraire qu'il y a ting tnonde de crime:, donl le moindre merile la niori. II poiuroil esire que, de ces deux opinions si dianieiralenienl opposiles, I'une ne I'autre ne fusseni pas (in loul veriiahlcs ; mais, par Ies rencontres que j'en ay, il y a grande apparence de condeninalion , el croy qu'ilz en passeronl par la , sans especialle grace el misericorde du pape, qui did qu'il veuli que les- diclz jiroces soienl publiez el imprimez, a celle lin que Ton congnoisse si Ies termes de juslice y oul esle obscrvez. Le Concin, secrelaire da due de Florence, esl icy, monslranl faire office de la part de son.maistre en faveur du cardinal de Naples. Je ne sauroys dire si c'esi a bon escienl ou par forme d'acquicl pour sa- lisfaire a une police, que le marquis de Monlebelle, pere du did Cardinal, se venie avoir, escriple ci signec 1 — 37 — (le la main du dici due, duranl le coiicbve, el coiite- nanl cerlennes proniesses don I il se faicl I'orl el respond que cc pape les observera, an cas qu'il viegne an poniifica!. L'evesqne Guerio (1), allief du cardinal Moron el I'un des priucipauix soiicilciirs conlreles ditzCaraffes, parlil le xx^ dc ce nioys pour Espagne, ou il doyl de- mourer nuncc ; el Tevesque de saincle Croix (2) passer en PorUigal, ci celliiy de Terracine rciourner de de^a, revocque a cause des olTices qu'il a laiciz en la courl du roy caiholicque en faveur des diiz Caraffes. Cepen- danl on procede icy par conlumaces conlre Mallie Slandardo, le marquis de Mou'ebelle el Antlionio Caraffe (o), coupisior du feu pape Paule quart, el est a presenl le marquisai de Monlehelie mys es mains de la chanibre; el hici soyr, le marquis de Monic Sar- chio (4) Cul arreste prisonnier pour la seconde foys, a cause seullemcnl de lesmognage, car cerlainemenl il n'esl charge de crime ne decoulpc. Quanl an cardinal de Rlonle (5), long temps a que les juges ne luy par- lenl plus, et esi eslargy p.irloul le cliasteau, d'auianl quo son proces est loul i'aict , et le lient on convaincu de deux homicides et d'asscz aulires cas qui ne valient gueres. (1) Gcrio, evcque d'ischia. (2) t'rospcr (ie Sle Croix , eveque tic Cliis;uiic on Candic , depuis nonce en [""ranco, cardiii."!! en i5G5, archevequc d'Arlcs eu 1607, mort nn 1689 Graiivelle dil de I;ii : « allache de ecEiir aux fiancais. » (3) Camerier et echanson, crec caiiiii;.ii cii 16CS. (4) Charles do Monie Snrcbio , fiis du marquis du Guasl et de Marie d'Aragoii, iitaiiea sine Vcnosa ; le frere de sa feinme epoiisa une Borroinee. (5) Jnnocent Monti, nc?cii de Jules III, cardinal en 1550, iriort en 1577. II elaii alors accuse i^'assassiaa!. 11 I'ul rcldgue dans un clcitre ct mourul en 1577. — 38 — SirCj lo s' Co.Narc de Gonzagnc parlit lo xx° do ce mois pour Naples, noti pas nop conleni do ce que )c s' Francisco, son frerc, n'esl point encores cardinal. On ne tail double loulcfToys qu'il ue soyl des premiers, mays I'ailenle leur en esi ennuyeuse, dc paour des accidents qui peuvenl venir on chetnjii. Cependanl le pape a donne au diet s' Cosare le gouvcrnemeni de Beoevenl, el au cardinal de Maniouc la legation de Campaigne , cy devant vouee, comme Ton peusoit, au cardinal Cycada (1); ei doybi l(^ diet s' Kancesco prendre les proffiictz el emolumens de la dicte legation soubz le nom de son oncle. en aciendani que pai- une pro- motion il soyt faici capable de la lenir en ciief. L'on a tenu ccs jours pass*^/ pour du lout rompu le mariage du s"" Haunibale avcc la signora Ysabella d'Arragonya ; mainlenaul il semble que la practique s'en renoue, el m'a did Leodiscaico (2), par cy devant niince de nostra s' pere a NapNs, ou il a par cy devanl negotie le did mariage el ckcoii's s'y en retourne, qu'il espere qu'i! reus^ira. L'on adend icy uug de ces jours le due dUrbiii avecques sis (ille cy devant mariee au conle Federic (5) Horromee. Ji; croy bien que la venue du did due d'Urbin esi plus asseuree que celle des due el ducbessc de Florence, doui lou- leffois Vol) a assez parle, el |)lus que Ton ne laid ii present, que aulcnns disenl que le pape yroyl voluniiers jusques a Viterbe pour s'aboucquer aveeques eulx, sans ce que on luy a remonslre que ce scroll Irop (1j .1. [{. Ciiada, alia-^, (!icala, geiioi c:ar(!ii!;i! CQ K".5i, !'i:;i des juges des Caiaffa. (2) Audieiicior dii [>ai^o. (0' Frerti du c.inliisil lionojiu'*! , -iiniic a Vii';;iiii;i . (ii'i; du due d'Urhiii — ^9 — abbaissor io fasiige de sa digniie. Lcur anibassadcur ni'a diet que le si ou non n'en esi encores resolu.Cepen danl la dicte duchcsse a envoye pour present au pape qnatre coflfres des pbis excelleniz ouvrages de lingerye qu'eile a pou recouvrer par toule TEspagnc. Le s"" Marco, nevou de nosire s» pere el nouvelleraenl faict evesqiie de Gossan, arriva I'auilre jour de relour de la court de I'empereur ; et font brnyl les siens qu'il sera bien lost cardinal et n'atlendra les qualre-lemps. Je ne puys croyre que ce soyi sans Mons' de Sainl- Papoul, diiqnel je refreschiz encores hyer la memoire a nosirc s' pere, qui monsire tousjours bonne volume (ie vous complaire en cesl e;id.oicl. On parle aussi de proinouvoir au choppeau ong aiigusiin nomme Ser- ripand (1), arcevesque de Salerne, aHin de le faire legat au concile avccqnas les cardinaulx Moron el Puleo(2), deslinez, ainsi que Ton did, a ceite charge. Sire, j'ay sceu comme, auparavant le parlemenl du s' Cesnre de Gonzague, le pape a voullu reconsilier ensemble les maisons Gonzague el Farnese ; a quoy le s"" Cesare a respondu qu'il estoit loui presl d'obeyr a toui ce que sa Sle hii commanderoil, mais qu'il ne sc scaurail jamais ficr des Farneses, avecques lesquelz ilz ont une aulire foys faict la pais et nionstre tous signes d'amiiye, ce que les diciz Farneses ont bien depuys par effect declaire n'avoir faict que allin que le s"" don Fernand leur aydasl a ravoir Plaisance, comme il feisi ; et louleffoys ne laisserent aprcs de se faire chefs d'une liguc pour cxcluro leur oncle du papal : et ensemble que maintenanl les diciz Farneses (I) Joiome Sori|i.Tiulo, canliiial cii I5GI, morion loc:!. [i] .Inuqiies Dii I'uy, ii(! a Nico , (Miiliiial cii 1551. - !iO ~ les voiant allioz de sa Sie, les recherchenl d'aiuiiye pour s'en scrvir pour mig temps el piijs rompre a la premiere occasion qu'il s'olTrira de leur nuyre. Je ne voy pour le presenl aultre cliose, sire, qui merite faire la presente plus longue , s'il ne pleist a voslre Rile d'enlendre comme la scigneurie de Veiiize a revocque Tambassadeur qu'elie avoii icy, nomine Marc Anllionio Amulio (1), qui n'y a scjournc qu'en- viron quatre moys. La cause de sa revocation a esle que la dicle seigneurie I'avoit charge de procurer que noslre s' pere pourveust de rcvescho de Veronne , vacquee depuys quelque leraps en ^a , I'uug des troys genlilzhommes qu'elie luy avoyi nommez ; sur quoy ilz out eu opinion que ledicl Amulio la poursuivoyl pour !uy-mesmes, estanl veul' ol voulanl lendre a I'Egiise ; ei de faicl le pope s'osloil desja declaire de la luy voulloir bailler. Quani a la residence des evesquos, doni je vous ay escripl par ma derniere, le pape avoii depute cerlains cardinaulx pour ouyr les excuses du ceulx qui en voul- droient proposer. Depuys , il a esle pourveu a lout par une declaration generalle, que lous soni excusez jusquos apres le concile , sinon ceulx qui sonl voi- sins ou sur le chemyn du lieu ou vraysembhiblemeni se liendra le did concile, c'est-a-dire la Lombardye el pays circonvoisins. Sire, je prye a Nostre Seigneur, etc. De Rome, ce dernier jour de Septembre 15(30 Sire, I'ambassadeur de Venyze cy dessus nomme, eslanl party de cesle ville pour, suivanl le comniaiide- (1) Ful, en effel, nomme eveqiie de Veronne et cardinal , a I'iusii ties Veniiiens ijui le baiiiiirenl ; il nioiirulen 1570. — a — nieni qui iiiy avoil esie faici_, se rcpresenier <'i Vcnize, a rencontre par Ics chernyns noiivelles que In decrel de sa revowiion avoii csle relracle el ses jiislificauons receiies oi approuvces par la Seigneurie, qui I'a coniinuecn sa cliarge, laqnelle il s'en relourne exercer par dega. VI. Dii 8 d'Ociobre 1560, p:ir nng courrier qne jf filz depescher par M. P" DagJiglian, qui pariyi !e 9 an soir. Sire, depnys inon aniire lellre escripie, j'ay veii le pape el luy fuz porier Ic v* dc ce nioys nng pacqiiet dc Moils'' li' cardinal deTonrnon, conionaiil le discours de loiii ce qu'il s'esloil faici avccqnes le s"' de ftlonibrun (1), el les provisions que Ton donnoit nuiinlorianl, lani conlre luy que- pour la seurele de la \il!e d'Avignon el toul le Gonial dc Venisse. Sa Sie irouva le toul bien (aicl el ordonne , el disl qu'il en faisoil nnc depcsche bien ample a mon did s' le cardinal de Tournon, que je ne fais double qu'il ne soil avanl I'arrivee de la presonte pres voire Mie. Sire, le jour precedeni estoil arrive un courrier d'Espagne, que Ton m'a con)ple avoir aporte une bien longue lellre ii nosire s' perc, lonle de la nrjain du roy cailiolicque, de laquolle je n'ay poinl auliriMnenl seen le conlenu, sinon que, comme j'enlendz, elle ne (I) En J6G0, Chrirlps iJii i'i:y> ''itlc brave Monlbruii, aprcs avoir ravage les lern-s du pape dans Ic Coiuldi, Gl la paix avec Pie IV, par riiileiineJi;iire du cai'iliiial do Tournou et de Henri 1, depuis inarei;hal do Muiilmoreucy. Jloiilbruii avail epouse la niece du cardinal de Toiiriioa. XXVll. 4 — 42 — parte que du (aid de la religion el du concile, pour iequel sa Mie catholicqtie diet avoir depesche devers vous, sire, dom Anihoino de Tollede (1), avccques bons memoircs el invlniciions, desquelz elle a eiivoye icy la coppye ; el avoit le mesme courrier apporle le consenlemcni du did roy calliolicque au mariage de la (fille) t'e ^'oo'^'ie avccques le s' Hannibale. De loutes lesquelies noiivelios il senibloil que sa Sle avoil grande sniisfacliou el bonne esperance ; el le lendemain, en la congregation des cardinaulx depulcz au faicl de la religion, fisi lire cc qu'elle avoit reQU de Mons' le cardinal de Tournon, el paieillemenl rinslruclion du diet de Tolledo , ainsi que Mons' le cardinal de Forrare qui estoit present vous fera plus ami)lemenl el au vray entendre; ct la, ordonna que le nombre des cardinaulx sur le faicl de la religion ne seroit plus limile, ains seroicni Ions de cesle congre- gation, laquelle ne fauldroil plus d'estre lenue a sem- blriblejour, (jui esl le dimanche, el y viendroienl lous cardinaulx sans aullre inlimaiion. Sire, voiani le pape bien dispose, ce me sembloit, pour octroier quelque requesle, je luy presenlay une J lellre que la royne vostre mere luy escripl en faveur ■ de Mons' de Carnavallet (2), pour commender a ung sien frere I'abbaye de Begard (5), combien qu'elle fusl par le dernier abbe d'icelle lenue en lilire; el adjouxtay lout ce qu'il me sembloil propre pour I'induire k conccder ceste grace, eu esgard a rinslanie requesle que Iny en iaisoyi la dicie dame, a cause des services (1) Pfieur iJe Leon, grand-ecuyer ile Philiiipc II. (2) Francois de Kervciioy, baron de Carnavalet, gouvcnieur du due d'AiiJou. (3) Cegars, en Firelagiu!, diocese de Tr^guicr. V. a ce sdjel, Dom Taillamlicr, Hist, 'le Bretarpie, i, ii, p cxxxvii. - 43 — du (lid s'de Carnavallei, goiiverncur de Tung de mes- seigneurs voz freres, el dcs verluz et nieriies de son frere. A qtioy nostre s' pere ne me rospondit aiiltre chose, sinon qu'il voioyi bien qne Ton ne cesseroii jamais, lanl qu'il en resleroil une limlaire : cl sur ce me disl que je regardasse uug tableau ou esioil refiigie de Noslre Seigneur cl de sa ires digne M^re ; el lors s'agenoilla , osla son bonnel de la teste, el joi- gnanl les mains , feisl ung vcug el promesse solem- nelie de jamais ne passer monasierc de lillre en com- mende; el |iuis me disl que j'escrivissc a voslre Mle ce que j'avois veu, a ce que elle ne le rechcrchast plus a I'advenir de chose qu'elie ne povoit, son honneur el sa conscience saulves, nccorder ; el ne mo permisl de replicquer auitremenl , ains me imposa silence cl deffendil de ne parler jamais de la dicle ahbaye ne d'aultre quclconque , disanl estre bion marry qu'il n'avoil faicl pinsiost le did veu , qui eusl esie cause de lever occasion du scandalle que donnoil la concession par luy f.iicte de semblables graces. Sire, le cardinal Caraffe fui admys a ses deflenses le IHP de ce moys, el a cu pour ce faire vingi jours de lerme, lequel expire, Ton ne faict double qu'il n'en deraande ung aultre semblable ; el le second pat^se, pourra demander le tiers, le^quelz, selon le stile de ce pays, ne luy seronl reffuscz, aitendu sa qualile. Cela laict, son proces sera en eslal de juger , si de grace especialle on ne luy bailie nouveau delay a def- fendre. Quanl aux aulires cardinaulx el due de Pal- liane, on ne leur a point encores pr6(iny de temps. On allendoil le secretaire Arragonya, par cy devanl en- voye en Espagne, pour cslre examine sur une faulsete donl le cardinal de Na[)les est charge ; mais, parce - 4/1 — qu'il s'v trouve Iiiy-mesme embrouille, Ton double qii'il sern pour se laisser ccniiimacer el nc conipa- raisdft |ioint [lar (Icc'i, s'il n'(Sl douemenl asseure qu'oii nt" louche poiiil a sri personne, cl lairra plus losi saisir srs hiens qui .^oui i^r.ins selon sa condicion. Siri'. l^ prio a Nostro Seiijneiir, elc. V>G Ronimo, ce viii^ jour d'Octobre 1560. VII. Du 10 Oclobie lo60, par M' Boucher, qui parlyl mesmc jour. Sire, encores qu'il nie rosle peu de chose a vous dire aprc.s nies deux lellres des dernier du passe el viii" du present, si est-ce que RIons'' d*; Coinonlle (1) allani par de !a pour ses affaires, je n'ay voullu faillir a I'aeconipagner de ce peu qui s'offre, qui esl que Vari;as I'ul bier de bon matin devers le pope pour conlerer avecques luy ce qui esioii venu la nuict pre- cedenie par ung courrier depescbe Ic xxix* de Seplembre a Paris par Ic s'' dom Anibonio de Tollede, pour donner ad\js a nosire sainei pere de ce qu'ii a ncgoiie par dela : en quoy sa Sie n'a rien irouve qui luy plaise, voiani les choses reduicies en lelz ternies que, pour empescher le concile national de France, il luy fault chercher aultro remcde que de lever la suspension de cclluy de Trenle, doni loiiieffoys elle se monsire tou.-j )urs esire resolue, qnelques remons- trances que je luy face, au contraire, comme aussi faict Tanibas^adeur de I'cmpereur. Si n'esl-il pas croiable qu'elle passe oultre, sans avoir de voz nouvelles el de (1) I.ouis Simoneta, nuliinois, administrateiir iJe reveche de Cornoiiaiile, evequc cic rrsaro, c.irrlinai en (56!, morl en 16G8. - /i5 - celles dti did empcreur par Tevesqiie Delpliiii qui iie scauroil oslre arrive la que an conimanccmeni (iu ce moys, ainsi (]iie j'ay eiileiiflii. Lo dfssiis did Vargas ne inonsire point que son niaisire eu>[ a doplaisir le leveiiKMil de la dide siispcnsioii; el an r(>g;ird de I'cun- bassadoiir de Porliigal, comnio cclluy qui y a pen d'ln- lere&l le reqnieri, el dcmande, el snpplie le pape de la pari de son inaistre de se \oii!Ioir avancer. Sire, le comie de Tendilles esl loiisjoiirs icy, el eiisl en noslre s' pere ei lous ses iiepveiix ei parens, memos cetilx de la om? GonzMgoe , aggreable qu'il y fiisi demonre amlias^adeur ; mais a la fin le cam[) csi demonre a Vari^as ci a esle mande aiulici comie de luy laisser faire sa charg<% el qifil iic s'cn emi)rsclinsl plus. LeodiscnIqiK; el dom Garcye d'Oio, auilrfffoys agens par doga du loy cailiolicqiic, panircnl, Iroys joins a, pour Naples, ou ilz voni aclievcr de ncgoiier le niaiiage du s' Hannibale, anqiiel sa Mic cailiolicqiie a consenly, pourvcii qui; la marquise del Tiuasl ei le marquis son filz (I) s'y accordent, coinme ilz esperenl icy qu'ilz feronl ; el (pie par ce moyeii, dom Ynico, filz de la did<.' marquise, sera (aid cardinal a la pre- miere promoiion. Sire, je prie ii Noslre Seigneur, eic. Vf!!. Dti 17 Ociobre 1560, par uug ordinaire h qui M' Toloiiieo (2) hailla (5), el pariil lesiil jour. Sire, ce (joi s'oilre ;i vous escriie depuis ma der- (1) Francois FerdinanJ il'\val'>s, marquis de Oijast. Sa mero esl Marie d'Aiagoir, son (rere, Iai;;o, fut crce cardinal en 15GI . (2) Sccrelairc du pape. (3) Doiix iiiols i1Hsiblo>. — 46 — niere qui osl dii x* dii present, c'esl que le pape, le xiiii* cnsiiivanl, s'en alia a I'esbal a Frascali, d'ou I'on disoil qu'il devoil relournor demain. Tonteffois I'on diet a cest heure qti'il y sejonrnera jusques an XIX*. Aiiciins penseni que enlre cy el cesle Toussainiz il se fera uno proniolion de cardinaulx, enlre lesquelz on nomine pour lous asseurez le s' Marco, nepveu de sa Sie, le s' Francesco de Gonzague, Mons' de Sl- Papol, dom Loys de Tollede , Tevesque de Vnrmya- poulac, Tevesque de Tesaro, dataire(l), el I'arcevesque de Salerne, Augustin. On parle encores de quelques aullres, mais non pas si certains que les dessus noin- mez , qui sont : Tdvesque de Yerseil (2) , nunce a Venize ; TabbcGambaro (5),bressan, clerc decliambre; Gonsalve Peres, cspagnol ; I'evesque de Modene, ja- copin; le nepveu du cardinal de Trenie, evosquc dudicl lieu (4) ; le s"" Alexandre Sforce (5) , frere du camer- lingue ; le palriarche d'Aquilee; dom Ynico, frere du marquis del Guast; M-- Geronimo de Coregio , serviteur de la case Farn6ze (6). On pcnse bien que de cculs cy le pape en pourra lirer quatre ou cinq (!) I.ouis Simonela, dont il est parle plus haul. Le dalaiie est charge de recevoir les i equates jiour obleiiir Ics inovisions dcs benefices. (2) I ierre-FranQoii Fenero,ne pres de Vcrccil, cardinal on 1561. (3) Jean-Francois Ganibaro, cardinal en 1661. (4) Louis de Jladroce, neveu du cardinal Christoplie ; tous deus sonl nes a Trenlc. L'cncle, cardinal en 1541, est mort en 1578; le neveu, cardinal en 1561, est morl en 1600. Son frere e tail marie a une soeur d'Annibal d'AUaemps. (6) Cardinal en 1565. (6) Jerome d'Anlriche, de Correggio, GIs de Gilbert VUl et de \eronique Ganibaro, tanto du cardinal de ce norn. — hi — poiir joindre avecqiios les premiers, mais que ponr le moitis la rnoiciie dcmourra derriere. Je ne voy rieii en lout ce tjue de>sns encores si asseure qu'il tie puisse changer; el qiiaiil an lemps, 11 me semble difficile a cioyre que la dicle [)romigner ung concile, si ce n'esl avecques les formes el nioyens necessaires pour taire que une klle assemblee proQcie a la chreslienle. & qui no t^e poull fairc en lt'\aiil la stsspiMi^ion dii con- cile lie Tronir, mpsmes a pre^enl quo le lien t'sl de?ja si conircdicl des princes, do sor'e qn'il esl coiioin que Ics prelaizde leurs eslaiz n'y viondronl pas; qu'il esl impossible quo vous, sire, puis^iez proccder en ce negoce |)!us ingcnuemeni ne sinceromenl qne vons (aides, vous rapporiant a ce quo roiicle cl le nepveu en accorderoni par enseinbit', sasss aiiliremonl vous fornialiser du lion : qoi monstro bien qnc la longueur ne \ienl de vous, sire, cl qne aviez on icHc on plus grando ronsidcraiion rinieresl de loute la cliresiienie que Ic voslre propre. Mais si, par qoelquc disgrace, d'oii qn'elle procede, Ton ne povoyl paivcnir a faiii! chose qui proffiiasi universeilemenl a louie la clires- iienie, vous, sire, meri'.erez uon seullemcnl d'esiro excuse, mais aussi loue grandemeni, si, apies vous en esire mis en lels deljvoirs que uiig cliacuii coii- gnoissoii, vous tourniiz voz pensees el voiilliez en- lendre an bien el conservation do ceulx quo Dieu vous avoii peculieremeul commi>, el clurcher lous moyens de rendre a voz eslalz el si:!)jeciz ie repos cl iranquiliie corporelle el spiiiiuolle en quoy ils onl aultreffoys vcscu, selon le grand besoing el necessite qu'ilz en avoienl. Sire , cc jour la mesme, i'ambassadeur de Teni- pereur ful devers noslre s' pero luy reniousirer, oinsi qu'il m'a comple, qu'il esloil rnoins a propoz que jamais de lever la suspension de Trente, el que cela tie so povoit faire du consenlemenl de son, maislre el aussi pen par sa dissimulaiion ou connivence, allendu la deciaratioii que vous, sire, el le roy caiholicque avez faicle do vous remeclrc au did empereur du lieu du concile : laquelle eslani publiee par louie la chreslienle, 1 — 49 — sa Mie Cesaree, an cas que sa Stele pas'^asl oiillre el levasl la (licte suspension, auroit a porler le faiz de loiilo I'envye el nial conlenlcmoiil que los princes (rAllenKigrie en concevroieni; on him, pour I'eviler, se joindre nvecques eiilx ponr faire demonstration el resseniinieiii tjue cela ne luy anroit esie aggreaijie ; etqiie, de ccs deux parliz, I'ung ne raiihre ne se povoit [)reiidre sans grand trouble el confusion de la chresiiente. Nonoli.-iar.t tout ce que dessus, a la congregation qui fi'.t tenue le diet jour, quasi icus les cardinaulx, conime j'cnlen(iz, Curenl de I'advis accoustunie , qui esl de lever la dicie suspension Touieffuys ii ne hit rien determine, cotnnie je pense qu'il ne sera que premierenienl on n"ayt nouvelles de voMre ,Vitc el sen»b!a!ilemenl de Tentpcreur; au inoisfs, ainsi riie I'a diet saS;ete, laqtieiie Cfpeudant laiei une dcpesche a SOD ounce par I'oidiiiaire qui 'porte la prescnte, a qui ilz out bailie advantage pour n'alicniire (pi'il east leve lout ce qui luy lailloit de charge pour fon voiage. Sire, le cardin;il Caraffe eul lo 14* de ce nioys la copie de soni jiroces ; el de ce jsur conimance a courir le terme de ses delfences, qui luy Tut lors liniile a irenle jours. Je ne voy rien en loul ce laid ix vous dire oulire ce que vous , sire, en avez eu par mes precedentos Le s' Ilannihale, trois jours a, me disl que dedans liuicl jours il parioilen postepoiir Silspagne; el, pour ce quMI faicl comple de passer par Provence el Languedoc, ii me reclicrcha d'une licence pour luy el sa liouppe de porler harquebuselz, nonobsianl les defl'enses faictes par vosire Mle. Je luy oflVis ce que je povoys, qui est une declaration de son degre el qiialiie, et de la bonne voloiite que vous, sire, Iny s — 50 — porlez, corame a ions les parens de sa Side, a ce que lous voz servileurs , ofticicrs ei snbjeclz eussenl ii user en son endroict de loule honnesleie et courloisye, sans Uiy donner aulcune fasclierie ou empeschement ^ son voiage: donl il se conienia. Sire, ]e prie k Nostra Seigneur, etc. De Rome, ce 17 Oclobre 1560. IX. Du 8 Novembre 1560, par Thome de M"^ d'Avanson qui parloil le soir mesme. Sire , s'esiani presentemenl ofTerl le pai iemenl d'ung coiirrier que ung pariicnlier depesche loul h cesl heure, sans povoirlani soil peu differer, il me semble, en actendanl que je vous face plus ample depesche par ung chevaucheur de Munseigneui' !e due de Nevers (1), qui pourra parlir dedans deux ou iroys jours, vous debvoir adveriir que, la vigile de la Toussainciz, je receuz les vosires du xiiii* du pasre,suivanl lesquelles j'ay parle au pape de la mesme fafou qu'il m'esloyl comraande par vosire Mie. Sa Sieie voului que je luy meisse par escripi ce que je luy disoys de vosire pari; en quoy je n'ay lailly de luy obeyr, el le luy porlay le V de ce moys, signe de ma main, en laugue frauQaise avecques la traduclionen rilalienne. J'ay mis avecques la presenle une copie de ce qui estoii en fraugois, qui (Ij Francois II de Cleves, diir de Nevers, comte de~ Reihol, fils de Francois l de CIcves et de Marguerite de Bourboii-Vendomc. 11 soUicilail alors une dis(iense du |.3i)e pour cpouser sa cousiue- germaine, Anne de liourbon-Montpensier, dame d'Enghieti. Ce inariage eiit lien le C Scplembre l.^GI ; le due inounit I'annee sniTante. — 51 — s'esl lrouv(5e presle. Vous, sire, aurez I'ilalien avecqucs le premier pacquei. Le due d'Urbin arriva icy le iiii° de ce moys en coche el sans pompe ; le due el duchesse de Florence, I'ung au raalin el TauUre I'apres-diner , feyrenl leur enlree le VI^ L'on did qu'ilz doibvenl parlir le dou- ziesme ouxiii*; celluy d'Urbin ysejournera davanlage. II se faicl divers discours de cosl aboucquemenl, donl je croy qu'il esl difficile d'en dire certain fondemenl : si esl-il bien difficile a croire qu'il se face si simple- ment , comme ilz veullent qu'on le preigne , el que ce ne soyl que visiialions el offices d'amylie sans aullre desseing Ce pcndanl on parle fori de la procbe liberalion des CarafTes. Le pape vousdoyidepescheren pen de jours I'evesque de Morienne , a ce que sa Sle m'a did , sur le faicl du concile, je iie scay a quelle fin. Anjourd'huy se debvoyl faire congregation sur ceque j'ay bailie |)ar escripl : je ne scay si la presence de ces ducz I'em- peschera point. Je ne fauldray de vous donncr ample advis de lout par mes premieres. Ce pendant je prieray Noslre Seigneur, sire , etc. De Rome, le vni'' Novcmbre 1560. Ce qui a eslc bailie au pape (1). L'evesque d'Angolesme , ambassadcur du roy, en oblemperant au commandcmenl que noslre s' pere luy a faicl de mectre par escript ce que sa Mle, par sa depesche du xiiii' d'Oclobre 1560, luy a cncharge de faire entendre a sa Sieie louchani la celebration du (1) r/esl la nole nnnonccp par la lellre n" IX. La traduction ilaiittone dc coltc piece sc trouve a la Ou de iiolrts ins. — 52 — concile, a sommaiiemenl recueilly de la ilicic depesclie ce qui sensnyl. Premiercmenl, combien que sa Mie n'ayl jamais mis en double la bonne volume ol inieniion de nostre s' pere, si csl-ce qu'elle a receu ung singuiier plaislr el conieiiiemonl du lesmoguage qu'il iuy en doniie, I'asseurant, par ce que I'abbe de Manne hiy a p(»rie de sa pari, de proceder en ce uegoce d'luie inicnuon candide, pure, node ci sincere; el perscverani en icelle , procurer que, par ung concile genera!, ccume- nicque, libre el seur, de se pourvoyr aux ruynes el miseres de la chresiienle; desiranl au surplus que reffocl s'en ensuive !e plus losl qisc fairc se pourra ; qui csl la plus louai)le resoluiioii el, comme ung chresiien voyi , la plus necessaire el proiiliiable en- lre[)rise que nostre s' pcrc scauroyl f.iire de son poniilicat; en laquelle il s*; peuli bion asseurer d'esire sccoude, assisie el suyvy de ?a Mie, avecqiicsiousacles, offices el demouslraiions verilablemeni dignes de son nom de ires-chreslien ci premier lilz de I'Eglise, des necessilez de !a(]iielle, si notoiris el urgenles qu'il n'y a cellny qui ne ks sacbe el senle, s;i Mie a esle meue des I'assumpiion de noslre did s' pere, dele supplier Ires insiamment de voulloir mecirc la main 'a ung si bon el si saincl ceiivre, el de ce Ten a coniinuellemeni soliciie lanl par lellres que par I'ambassadeur residenl pres sadicle Slele, el semblablcnKnl par !e S"" de la Bourdaisiere, el depuys par I'abbe de Manne, depescbe devcrs sa dicie Slele pour ce seul clTect, auquel elle la irouve si bien disposee qu'elle en a conceu grande el certaine esperance. El pour ce que {opinion que le roy a de loui ce faicl a esie amplemenl declairee el mani- feslee de noslrc did s' pere, lanl par les dessus diciz, — sa- il bouchc, que par ce que le diet de Manne en a bailld par escripl a sa dicle sainclcie, sa Mte ne pense pas eslre besoing d'en faire a present aulire declaralion, sinon qn'clle persisle en sa premiere opinion, el, lant plus va en avant, congnoist qu'il csl saiubre el ncces- saire d'indire promplemenl ung bon concile, libre el general, sans faire mention de roprendre ou conlinuer celluy de Trenie, pour les raisons amplement des- duitles au memoire que le diet abbe de Manne baiila sur ce a sa dicte sainctete. Et qnant a ce que noslre s' pere diet par son ins- truction baillee au diet de Manne, que le roy caibolic- que se conlente de la dicle continuation, ei que la suspension du concile de Tronie soyt levee, et qu'il seroj'l bon que le roy fcisi le semblabic, sn Mie prye sa Slete de consideror que, combien que leurs deux majostez ayenl semblablo vouloyr et inleniion el lendonl a unemesme lin, si ne doyt-il pas estre irouve estrange si, a cause de la diversile dos subjectz, estans leurs besoings difl'(''rens, il se irouve aussi quelque difference aux moyensot rcmedesqui leurs sontpropres; povanl advenir que ce qui est suflisani h I'un ne ser- viroyl de rien a i'aultre, et parlaut ne luy doyt eslre prescript ou donue pnnr oxemple. M;iis bien eslime sa Mie cl tienl pour certain [ que un concile libre el general, lei que dossus, desorio]que nul n'en puisse par raison vallable reffuser le jiigenicnt, est utile el ne- cessaire pour la pacificaiion el tranquiliiie de toule la cbrestiente, aux besoings de iaquelle sa Mie ne faict double que le roy caiboiicque, son bon frere, comme si saige et veriiieux prince qu'il est, ne soyt pour s'accommoder ; comme de faict il a declare estre son intention de faire, mesraes pour le regard du lieu - 5/1 — de la c^i^braiion du did concile, pour raison duquel sa Mle n'enlrera en aucune conleniion ou dispute: ains , pour monslrer qu'elle ne veull eslre cause d'au- cune retardation d'un si sainct ceuvre, consentira vo- lunliers au lieu qui sera accorde par I'empereur et le roy catholicque, suivant ce qu'elle a declaire. Au regard de ce que sa Sainclete dil, qu'elle ne pense pas que sa Mte laisse passer oultre le concile national, atlendu la bonne et prompte volunte de sa dicle Stete au faict du concile general, sa dicle Stele peult eslre asseuree que par le moyen et ouveriure d'ung concile genera^ pur el libre, suivant ce que dessus est diet, loules aulires pariicuiieres asscmbiees et congregations cesseronl et en sera la memoire assopye; comme aussi, ne s'eirectuant le diet concile general ou allani en longueur, sa dicle Mie seroyl contraincle de faire el poursuivre I'asseinblee des pre- lats de son royaume, en laquellc noslre sainct pere ne doyt penser qu'il sedoybve iraicler ne faire chose qui conlreviegne a I'ancienne docliine ct religion, ne qui prejudicie a I'obeissance deue au s' siege apostoiicque. Ains pour icelles niainlenir ct conserver, et empescher qu'elles ne voisent en evidenic el perdition et ruyne, sa Mle est conseillee de recevoir ce dernier et unique remede, comme le plus prompt et efficace dont elle puisse user au jugement des |)Uis grands et notables personnages de son royaulme, lesquelz asseniblez en bon et si grant nombre que rcqueroyt une si impor- lante maliere, iraiclerent loiiguement de I'ordre et provision qui se povoyl donner aux maulx presens et que Ton voyt croislre de jour a aulire et indubita- blement proceder des nouvelles opinions et diversiie de religion qui a peneire si avant dedans le cueur — 55 — tl'uiie graride parlye des subjeiz de sa dicle Mie, et lellemenl siimule leurs esperitz et consciences que plusieurs d'iceulx oserent el lenierenl loules exlremi- lez, sans aucuno consideralion de (j'anger ou de mort, donl naissoieni de Ires-pernicieux luinulies, desquelz le suuverain remedde consisie en ung bon concile general el libre. Mais, pour ce que peu de gens se peuvenl persuader d'en voyr jamais aullre effect que celiuy qui s'esi vcu par le passe, sa Mte, pour pacifier les troubles donl son eslal esiovi agile, et monsirer a ses subjeclz qu'elle ne les voulloyi paislre d'une vaine esperance , a esle semblablemeni conseillee de leur promectrc que, en deffaull du general duquel, suivanl ce qu'elle avoyi desja commence, elle coniinueroyi de procurer la celebration envers noslre s' pere, elle leur donneroyi une assemblee des prelaiz de son royaume, affin de leur lever louie occasion de se plaindre el tumulluer a cause dc I'esperancequ'ils ont d'y eslre ouyz, suivanl ce qu'ilz cryent el demandenl inces- sammenl. Par quoy sa Stele n'aura, s'il luyplaist,a desplaisir si, a faulle du remedo universel, le roy recouroyl au pariiculier, esianl a ce force el conlrainci par si fortes el puissanles raisons que chacun scayl, allendu mes- memenl qu'il est en la main et puissance de noslre diet s' pere de lever le pariiculier, ou cas qu'il luy despleusi, en offeciuani I'universel par I'ouveriure d'ung bou concile general, seur, libre, indict de nou- vean, affin d'osier (oule couleur el pretexle a ceulx qui n'auroienl volume de s'y soubmectre, ayanl eu sa Slele temps compelani de ce faire, comme elle a encores, d'autant que la susdicle assemblee des pre- laiz n'est assignee que au vinglicsme de Janvier, qui est la fin du xiii* moys do ce pontifical. — 56 — Voila en subsiance ce que coiilieril la sus dicle de- pesclie, par laquellc csl au surplus ires-eslroiclemenl conunaiide audicl evesque d'Angolesme de lopresenler a sa Side ct proposer conlinuellemenl devaiU sesyeulx, combien sa dicle Mie se irouvc pressee dii tonips el de la necessiie h laquelle elle la supplyo d'avoir esgard et atlribuer a I'amour que sa Mie porle h ses subjeclz el au regrecl el irapalieiice qu'olle a de voir ainsi perdre I'obeissance de I'Eglisc , si elle luy remonstre libremciU ce qu'elle jtige povoyr ayder el advancer ceslc lant louable, saincle el necessaire lesolulion de noslre did s' pere, a qui sa Mle prye Dieu qu'il vueille donner longiie vye, avccques force el verlu d'execulcr promptemenl le desir que sa Mte lienl pour certain qu'il a de faire chose qui porle a la cbresiionie le IVuicl qu'elle en aclend, el a sa Slele hoiimur, louangc el gloire ininiorielles. Faicl a Roinme, lo cinquiesmc Novembre 15G0. X. De I'linziesme Novembre I06O, par le cbevaucheur de M. de Nevcrs, qui roniporie avecques la subse- quenlc qui luy ful baillce le 17. Sire, je vous escripviz le viii^ de ce moys a grande hasie, par un counier extraordinaire pariant a I'im- provii,te, el vous envoyay ce que j'avois bailie au pa|)e par escripl en franQois, conlenanl somniairenienl ce -qu'il m'esioyi comniande luy dire par vosiredepesche du XlIIl^ Je vous envoye niainlcnanl avecques cesle cy la Iraduclion iialienne, laquelle je luy \oulluz bien ausfei bailler iiioy m('sme_, de [)aour (pi'il en donnast la charge a quelqu'un qui, h faulie d'enlendre bien noslre langue, y feisl erreur, et que vosire intention fusl - 57 — tvioiiis enleiuliK' que jV jic uu^ snys (fforco dc fiiiro, I'ayaiil siiyvie au viT el le plus |tros qu'il rn'a esle possible en y gnrtlanl ioii{e la moik'siye qiso j'ay pen, de sorle (pril me semlde que nosiru ,^' |>e!e n'a iiiille occasion do s'en inalcoiiii'nior, cosnfne aussi j'enieiis qu'il ne faici : [»oiir le iiioins ne m'en a-l-il faicl auciin semblaiit. All regard, sire, des pro oz que me lirii >a Sie (Z deux audiences que je euz d'die, lanl pour Ini expnser h bouclie \v. contenu en vosire dicie depesclie dii xiiir, que pour luy baiiler ce que j'en avoys rectu par escripi, il n'y tnl p;!S granl chose ouiire le langagi' comniung dont el!e rn'a use une inlinite de foys, ainsi quavez veu par mes preceilenles depeselKS, qui est qu'il n'y a personne ;i qui il face plus de inal que a hiy que le concile ne se face prompiemeni ; el ^i Trenie ne nous p'aisl, qu'il n'y a point faulle de- licux commodes eo loui le Piemonl , Morit-Fcrrai , diu-he <1(' J'illan, ou bien sur le Veniiien ; el. tomme je vous ay par cy devani escripi, sire, il senible que Verseil luy seroyl p'us a cueur que nu! aiilire lieu, ou bien Casal. Je ne scay s'il pensernil poini que le concile seanl en I'une des dicies villes , il pounoyl f.icilenienl adveiiir que, pour le regard des \ivres on incommodiie de logis, ou quelque aulire occasion, il se iransporiasl h Milan, palrie de sa Stele, qui ne monslre voulloir en fagon quecesoyt eniendrc a quelque lieu que Ton luy puisse proposer hors d'lialie ei des pays susdiciz. Ei quant k lever la suspension el coniiuuer le concile de Trenie. je le irouve lousjours es propos que de couslume ; el se couvie en cecy de la volunte i\u roy caiholicque, duquel I'amljassadeur Vargas faiei ouverlomcni in- stance de la dicle eouiinualion , ct diet avoir charge xxvii. 5 — 58 — cxpresse d'empescher qu'll ne soyt indict ung nouveau concile. An contraire, I'ambassadeur de rempereiir se [)laincl du did Vargas, disani qu'il n'a telle com- mission de son maisire, el que ce qu'il en faict, c'esl pour complairc au pape el servir a ses desseings par- liculiers ; el m'a diet dadvaniage le diet ambassadeur de I'empereur que, faisant ung nouveau concile, il a grande esperance que les proleslans seront pour se reduyre el y veuir, combien que son maisire ne le vueille promectre ne s'en faire fort pour eulx ; el est venu par deux foys expressement chez moy, pour me pryer de persisler en la demande d'ung nouvel concile; el diet que vous, sire, insislanl a cela, serez, comme il espere, cause de la reunion de I'Eglise, et vous aura la chreslienle plus grande obligation qu'elle n'eut a prince chresiien de mil ans en ga, eslanl I'Allemaigne lasse des discordes (]ui y sonl pour le regard de la religion , el par consequent disposee a prendre parly ft s'accommoder, pourveu qu'il ne se parle de conti- nuation, laquelle les proleslans ne gouiieroni jamais, quelqucs condicions on qualiiez que le pape y puisse adjouxicr; el, quelque declaration quM face de n'ap- prouver ne reprouver ce qui est fcicl a Trenie, les Allemans cntreronl lousjours en suspicion qu'on les vueille circonvenir el ne s'y accorderonl jamais. Touies les foys qac je rencontre le did ambassadeur de I'em- perour , il mc repele ces [)ropoz : enlre lesquelz el ceulx que me lient le pape je y irouvc quolque difife- rence, d'aulaul que sa Stele me diet que I'empereur confesse lenir pour tout certain et asseOre que les proleslans ne vicndronl point au concile, en quelque lieu qu'on leur puisse assigner, ne de quebiue fagon qu'on le vueille relebrer ; bien remonslre-il neantmoins — 59 — qu'il stMoil bon do liiulire (ie nouvoaii el no parler do continuaiiorj, ii celle (in que les diiz protoslans ne fondent siir cela leurs excuses de n'y venit* poitii. II me semble , sire, bien mal aise de juger quelle resolution Ie pape sera pour prendre la-dessus, Ie voiaiii si obsiinea ne cnminancer point que par lever la dicie suspension, ce que vous, sire, et Tempereur ne approuvez pas. Je pense bien que apres la venue d'ung conrrier qu'ilz aclendeni d'Espagne, nostra s' pere estani plus esclarcy de b volume du roy caiho- licque, sera pour so resouldre el prendre quelque moyen party qui pourroyt, h nion jugemeni, bien estre de conlinuer Ie concile jh coinmance a Trenie, en la ville de Verseil, que son nunce iuy a laid pie?a entendre vous eslre agreable, el ce avecques decla- ration expresse de ne infirmer ne conlirmer les acies de Trenie, snivanl ce que je vous ay par cy devant escripl : esiimanl sa dicle Stole par ce moyen donner occasion a ung chacun de se conienier, sans qu'ilz ayent de quoy se [daindre. Dien vueille qu'il lui reus- cisse. Quani a moi je ne suys pas delibfire de me depariir de la lecon que j'ay de vosire Mte par escripl, el insisteray lonsjours a ung nouveau concile, si je n'ay sur ce d'elle aultre expres commandement. Ce i|ui me mem, sire, de penser que Ie papesoyi pour se lenir au pariy susdici, sonl les rencontres que j'cn ay de plusieurs endroicts el les propoz mesmes (|ue m'en lienl sa Sie; oi aux remonlrances que je Iuy faictz, an conlraire il me respond que ce n'esl pas aux princes de disposer a leur arbitre du concile, ei que faisam une par'ye de ce qu'il leur est commode, il est bien raisonnable aussi qu'ilz s'accomodcnt a Iuy el qu'il y ail sa pnit . — 60 — Je ne voy rien, sire, es dicles audiences davantage qui merite vous csire escrii)i,sinonque,a|)resque j'euz remonstre a nosiie s' pere le besoir)g que la cliresliente el mesmtmciii vosire royaulme avoii il'estrc prompie- menl soconrii (run concile, pour obvyer a la multi- plicaiiou dts heresies, sa Sieie me respondil qu'il n'es- loyl cause do la dicte muliiplicaliou el me demanda d'ou elle procedoyi. Je luy resporidiz que, selon I'opi- nion de touie la chresiiente , c'esioii do riulermission des conciles ; el que , si les papes les eussenl par cy di'vaul lenuz qunui il en esloii iemps , nous ne fiissions maiulenaiii eu cesie peine. Sur quoy nostre did s' pere me replicqua que les giierres que les princes avoienl f;iicl enirc ciilx par le passe avoient empesche les papes de ctilebrer les diclz conciles , et que |)0ur leiir ambition ilz avoienl sousienu les dilz hereliques pour s'en servir les ungsconire les aullres, el que cela esloii cause qu'dz estoienl lanl mullipliez. 1! me semble bien, sire, qu'il y avoil la quelque maiiere de replicque et relorquer sur les papes ce donl ilz chargenl les princes. Toulefifoys voyanl que nosire did s' pere esloii uug peu picque, je ne voulluz passer plus oulire que de luy dire que le mal esioyl grant, el que, quiconques en avoil esle cause, il en respondroii devanl Dieu ; miiis, puysque la playe csloyl faicie, le poind estoil de la guerir, donl vous, sire , esperiez que sa Slei6 nuroit I'honneur. Sire, je vous ay par cy devunt escripi comme les due el dnc'iiosse de Florence arrivereni icy le vi* de ce moys. lis estoyenl \enuz lejoiir precedent coucher a la vigne du pape Jules (1), d'ou le ducparlille malin, (I) Maison dc plaisance balio par Jules 111, sur la gauche de la voie Flaminia ; les ambass.ideurs etrangcrs s'y arreleiit avanl do Aiiro luur eutr6a ilans Rome. I — 61 — f'olre iMl'.vs''' It's cjrdiriaiilx de Ferrare el Saincio- Fiore (I) on lours mules ct grans cliappcs (jooiilicales, ot ainsi le meneroni an consisloirc public prepare cu la sallc (los roys : qui I'lil Irouve clio^c tiouvolie; el dicl-on quo los Veniiieiis avoioni esie sombliihlomcnt receuz en la diclo sallo contro la coiisiiitiie, ainsi que jo \ous ay p^r cy devanl oscripl , affiii d'on povoir avocquos qiielque raison on appuronce en faire anlanl :i !a recopiion dii dicl due. La ducliosse ta rcnimo onira I'apros disrior, pariani do la mosmo vigno, on ire Ihs cardiiiaulx Savollo (2) implo niantolot , pour accompagnor la dicie dncliesso , <]ui e.sioii on robbe dedrapd'or, [monioo sunmo liacquenee enharnaycliee aussi do drap d'or]. II no lir)t pas a ello que des lo nialin ello n'nvoyl faici son fulvcc cosio h cosle de son mary, voullani onfrcr avccqucs Iny on consisloiro, co quo !o pope no vouljut accorder ; cl v eni ponr la coutonior plusieurs alleos ol vonnes sur costo dispuie qui tint Ionic la malineo jus(inos a inidy el ne ful lorminoe sans qu'elle en geclasi dos larmes de dos[)icl. (1) Guy Asragiic Sforse, fils de Bosio il, comic de Ste-Fiore, ct de Constance, fil!e naliiri-lle du pajic Paul III; cardinal cl camerlingue en 1534, moil en 16C4. ("2) Jac'i'ies Savfil'i, ne a lionio, carJiuMl en |5;!0, archeveque de Uenevent, ^j;ind infjiiisilciir. (3) S' Charlos liorromei', iumoii de Tie 1 V, cii Jin li en i .'.fiO, archcveiine do Milan. — 62 — II so parlo, sire, si diverscnietil tic rabboiicqiicrncni de ces doiix diicz avecqnes le p.ijie, que je iie scay bonnemeni quo voiis en escripre, |.oiir le pen de Ion- dement que je voy aiix disconrs quo en fonl aucuns, qui disenl qu'il se dresse une ligiie entre eulx, en laqueile enireroni les dncz de Ferrare el de Manle ; el parle-on encores des Yeniiieiis : en quoy je voy pen de propoz, el pense que ce qui est cause de ce bruyl esl ce que Ton oyl souvenl dire au pape, que I'llaiye esi si bien unye mainienanl qu'elle ne peult craiudre d'esire assaillye des princes el esiaiz osirangiers. el que y venatil foibles ilz seronl batluz, el que esians fors ilz y mourronl de faim. El sur cela did Ton que le due de Florence craincl que le roy caiholicque luy redemande Sienne ou la vueilie meclre en liberie, pour rabiMSSer la puissnnce dudici due qui ne faict pas pour luy. Il nie semble, sire, que lout eela son! divinalions. Mais quanl a ce que Tung cl I'aullre dcsdiciz ducz pour leur parliculier prelendenl lirer du pape. Ton parle de Fano el Rimini pour le due d'Urbin ; el pour eelluy de Florence, de Perouze, en recompense des prelcnsioiis qu'il a sur Imola et Forii que lo pape luy doyi (aire bonnes : qui soni louies cboses v\i il y a pen d'apparence, pour le moius, qu'elles se puissenl si losi execuler ; ne semblablemeui de corouner ledict due de Florence, roy de Toscane, quelque pui-snnce qu'il se soyi vindicquee sur le pope, ne s'y adonnanl la saison : el croiroys pluslosl que, remeclani a ung aultre temps I'execulion de leurs plus grans desseiugs doul ilz peuvenl mainienanl Iraicier, ledicl due de F'lorence se eonlenlera [tour cesl lieure de la promesse de quelques cardinaulx, s'il ri'en voit la promotion avani son parlcmenl ; et au surplus de Tiudull sur les - 6;^ — benelic.cs coiisisloriaiix dc son tslal on sa personno, cren de cliose qui vous disl ne promist. Je no piiys croire qu'il y face faulie, e-tani sans comparaison inrtniemenl plus oblige a vous que audici due, consnie povez estre cer- iidie par messieurs Ics cardinaiilx do Gnyse et de Tonrnon. II se parle anssi de I'aire due do Ni'pi (2) !e s"" PauleJourdan(5)ctlny bailler legeneralal de I'Eglisc, et par co moion fiiiir la competence des s" Hannibale et Federic, nepveiiz de sa Siele, enlre lesquelz y a grande emulation pour raison dudici eslat, ne voulant ledicl Hannibale ceder a Kederic,' qui est le mieulx ayme, mais an surplus nullemenl apie aux armes ne a la guerre ; de sorle que le ()ape s'en Irouve empes- che, el did qu'd ne voii point esire besoing de pourvoir audici eslai de general, pour ce que sim inlcnlion n'est poinl de laire la guerre, Je ne scay ce qu'il en fera cy apres. Le diet due ne doit pariir jnsques a d'aiijourd'huy en buicl jours. Pourrait estre que enlre cy cl 1^ il se descouvrisi quelque chose davantage de ses enlre- prinses, car on ne peuli penser qui soil venu sans grande cause , ainsi que porieni ies billets que Ton a (1) Sic. (2) La seigiiemie dc celle viilo av.iii etij cctlce avcc la jiilnci- paiite lie Camcriiio, par P. L. I'anu'so, eii erWa.'ig^ ''^ Parme ot do Plaisancc. (3) De la raiiiillo de* I'rsii- - G/i — seme chez liiV, oil il y a : Non siue vausa lupus ad nrbem ; ci d'aiiilres clicz li'pa[)e, oil il y avoil escri|it : Titfire. co(je pecm: dorit sa Sieie ii'a pas esie coiuenl^'. Qiiaiil a celliiv d'Urbin, il m'a dici qii'li tie bougora d"ici pour lom le mois qui vieiU. Je croy biei) que, se voyani avoir doiine sa fi!le 6 iiiig homme qui n'a lien ou bieii pen, il essayera d'asseiirer qiielqiie chose h son getidre avanl que de s'eii relotiriicr ; el peiise roil que ce sera Camerio ; el cependanl lirer aussi quelqiio chose pour lui, s'il peull. Je visiiay hier le due de Florence el le jour procedenl celluy (rUrbin, el ii'ay eu avecqiies rung el I'aulire que (ous propoz cominuns, Icur ayani faicl queUpies offices liouncsles el generaulx de vostre pari: en quoy ilz m'oni correspondu ei pave de la mesme monuoye, s'offraiil largemeni a vous Tiire service, dorilje prye i Dieu que voup, sire, n'ayez jamais que faire. Sire, le XXV' dii moys pas^e, ayanl este adveriy que, an coi>sisu»ire qui se debvoii lenir la mesme maiinee, le cardinal Cicada debvoii propos<^r les eglises iiou- VL'llemciii erigees en Flaiidres, je m'en allay sur I'heuro Irouver le pape, pour prcvciiir I'enlree du did eoi)>is(oire ( t Iny laire U's remonslraiici's que je luy ;i\oi'> auirtiioys faictes , ainsi que je vous ay escripi plusieiirs fuys et mesmemenl du premier de Juillet dernier passe; el comme je irouvoys le [sape resolu il passer oulire el remecire loul ce laid au peiiioire, sans avoir csgard. pour raison du possessoire, an pre- judice f.nci par ie feu |)ape Paiile quail a Tarcevesche de Reims (i), loiii ceque je peuz obieoir de sa Sleie, sire, fl, i,a Ijiil'.o dii 15 Fcvrier t6iO,qiii dlablissail iii? graad nonibre tloveihcs dims ies Tays-IUs , enlevail a ia province tie Reiiiss I'oveclio ilo Cambray, orige en metropole, Ics ev^ches d'Arras et — G5 - fill (le siipcrct'der encorrs : mais il me tlisi poini com- bieii (Je lomps, qui me faict craindre que bien lost il passe oullic, (pielqiie bon droit que iioiis ajons, \oiiI1;hU cunleiiier de cela le roy cailiolicque, devers lequt'l il .^nvoye son nepveii le s' Haiinibale ei I'accom- pagne de plnsieurs aiiiiqiiailles el autres presens que roil a laid ces joiirs passpz rnecire a Hosiia sur des galleres qui j)asseni de Naples en Espagiie, ei y a desja pins d'lin nioys que ledici Haiinibali' did qu'il pari dedans deux on iroys j()i!rs. Je croy bien qn'il ne lardera i;iicres apres le di'sloi^fraeiil du due de Flo- rence. Je nescayaulire remede, .^ir^, pour empescber la |)roposilion desdicles eglises, que s'il vous en piai- sail escripre une bonne lellre an \yA\)t\ suivanl ce que jt' vous eseriviz dudid premier jonr de Juillel ; eiicures croy-je qu'il y aura bien h fa ire a le riUenir. Sire, le conle de Peliglian se plaiiicl des niaiivais deporicineitls que luy foul du joar i'l aullre les mi- ni>ires du due de Florenc', mLsmemeut ceiliiy qui tsl dedans Soaue nouvcllfmenl rendut^ iioii seullenifiii cliercliaiil loules occasions de querelie avecqoes luy, rnais encores animanl ses siilijeis a reb.'llion, el taisani pradiques secrecies pour le surpreudie el b.iy osier la vyc el I'esial , donl s'en est ces jours passoz des- couvert nne dressee ii pro|>oz pour lexeciiler, ainsi que ledid due venanl ici par-soil pres de i'esial diidict ni infor- meecommesi vosire Mteseconieninii que la s!is|jensioM de Trenle fnsi levee el le coocile continue ii Casal ou Verseil, sans approbalion ou improbaiion des acles de celluy de Trente. II me sembia , sir:' , que je debvois meclre peine, comme je t'eiz, de liiy lever cesie opinion, mainlenanl lousjoiirs , siiy\anl Cr" quo je luy avoys bailie par escripi, que, pour faire chose qui prollilasl a la cbreslienie , il ne vous sembloil aucnnemenl a propoz de faire mention de continuation on reprinse, nc sembUiblement de lever la siispcnHon, mai>; iridire un<' concile de nouvcau, seur, libre el general , de sorle que nul n'eusl occasion d'en refT!:iser le jiigemenl; el quecestedernieredepesche nionslroyt bien n'approuver lever ladicte suspension , nvaynnl esle depesche le courrier expres en loule dilligence pour prevenir sa dicle Slele avanl qn'eile passasl oultre aiidicl leveinenl de suspension, qui estoyl bien a dire que vous , sire, lie I'approuviez pas, inais au coniraire m'avicz bien voullu advertir que de indire ung concile nouveau a Casal ou Verseil vous pbiisoyl ires bien , pourven que i'empereur ei le roy calholicque s"y accoidasseni; auquel cas vous suppliez sa Sielij de s'en depescher el procedder a ladicte indiction si lost que les nouvelles en peussenl venir durani I'asseniblee de voz estalz generaulx, pour les raisoiis amplemeni conienues en vosire dicle depesche el loules les; aullres que je peuz excogiler. Sire, avanl que je veis-;e le |>ape, nous nous Iroii- vasines en son antichambre, le cardinal Savelle, les ambassadcurs de Tcmpereur el du roy calholicque, et — 69 — moy ; el dcvisans tous quairo ensemble, Vargas mist sur le propo? de concile, en ponrsuivanl leqiiel il disl qu'il se failloit bien garder de faire une nouvelle in- diclion, mais seullcmenl conlinuer celluy de Trente. L'ambassadenr de I'einperenr disl an conlraire que tous les docteurs disoient que le pape povoyt iudire ung concile de nouvean, sanf sa conscience el la religion; ei puisqu'ainsi esioii qu'il le povoyl faire, que indu- biiablenienl il le devojl, aiiendu que par ce moyen il y avoii esperanced'accommoder la cbreslieiile el rcunir I'Allemagn^squi anltrement s'en alloii perdue a jamais, non sans grand dommago et confusion du resle de la chreslienie. Vargas insislant an conlraire, je Ini de- mandisy s'd penso\t pas que Dieu el le Sainci Esperit se irouvassenl an concile, soyi que le pape I'inilisl de nouveau, on qu'il coniinuasi celluy de Trente ; ce qui m'eslanl par hiy confesse , je luy demanday encores pourquoy doncques esloii qii'il s'opiniaslroit tant a demaiider la coniinuation el empescher riodiciion nouvelle. A quoy il me respondii que le roy catho- licque, son maistrc, avoyl paour que ces bons el sainctz decreiz qui avoienl esie faiciz au concile de Trente fenssenl reiraclez par le nouveau : de quoy je mons- iray m'esbaliir grandemeni, disanl que je trouvoys cesie opinion la merveilleusemeni estrange, el mesmes d'ung prince si saige que ledicl roy calbolicque, el que cela me sembloyi moiislrcr avoir paour que Dieu ci le Sainci Esperit eussenl faulie de sens et memoire; el qu'il ne failioyl craindre que la ou ilz inlervenoient, il s'y feist rien que bon ei sainci. Sur cela I'ambas- sadeur de Fempereur me recbercba de parler a moy a part, el me disl qu'il n'esloil pas la venu pour parler au pape, mais que voullant parler a moy il avoyl sceu — 70 — qne je n'esiois en mon logis oil il mfi voulloit venir Irouver; et ayani eniendu que j'esioys alle au pallais, el Vargas seinl)lal)lemenl, il y esloil veou expres pour me flire que aucuns I'avoienl adverly que j'avois de- mande audience pour consenlir au pa|)e la continua- lion du concile de Trenie, qui esloil chose de inauvaise consequence pour loule la chresiienie, el s'esbahissoyl comme vosire Mle sy accordoii: el m'ayanl repeie lous les pro|)Oz menlionnez eu mon aullre leitre, me disl dadvanlage que, levanl la suspension el coniinuani ledicl concile de Trente, les allemans catholicques n'y oseroienl venir sans se meclre en granl et evident danger d'esire ruynez el destruiciz ; la oil I'aisani ung nouveau concile, il esloil premieremeni certain que lous les catholicques de TAIleniagne y viendroieni , el y avoil grande esperance que les proleslans sy rengeroienl encores. Au demourani , que, a faulie de mieuls avoir, I'empereur seconienieroyi de Trenie, s'il ne povoyl a loul le moins oblenir Ispurg (1). Je con- gneuz que ledicl ambassadeur, qui esi ung ires-honnesie genlilhomme cl lellre, avoyl eu quclque apprehension que Vargas et moy esiions allez la de concert pour consenlir la conliniialion. Je luy levay cesle opinion et I'asseuray bien que je n'esiois pas \h venu pour me departir de ce que j'avoys bailie par escripi a sa Sleie, mais seullemenl pour luy I'aire instance de vosire part, sire, de se haslerde faire une indiclion d'ung nouveau concile. libre el general, en lieu senr el agreable a I'emp'^reur el au roy caiholicque; el que je n'avoys gar plus gram nonil)ro ; el si lesdicls catliolicques ii'y comparoisseni, i! ne faull poind douhler que les au!- Ires no passenl uulire, el par force fcronl garder leur* decreclz, en datigier que par niesme inoyen ilz ne preignenl les armes pour ruyner les raiholicqucs. Sire, ce quej'ay pen respondre audici anibassadeur a este que je ironvoys encores plus estrange que luy, que le pope eust diet ce qu'il me comploil, qui ne povoyl esire fonde sur chose qu'il eusl de voslre pari ; el que bien je Ten asseuroys, el que j'avois lousjours persi^le en ines conclusions lelles qu'il avoyt veu pir escripl, el que depuys n'avoys rien did an pape qui en discordasi ; seullemenl avois laid instance a sa Side de se hauler le plus losi qu'elle ponrroyl d'in- dire ung hon concilc general el libre, saL,s parler de reprinse ou coniinuacion, ou de iievemeni de suspen- sion, suivani ce (|ue je liiy av(jis lanl de Toys did. Sur quoy le did anibassadeur se delibera d'uller voir les cardinaulx qui onl la commission de la bulle, pour leur remonsirer qu'ilz ajent a parler si clairemeni que les Allemans ne puissent enlrer en aulcnne double qui empesche ung si gram bien de la cbreslienie el soyt peuli esire occasion d'ung maid rnyneindicible. Le due de Florence ne doyl pariir pour le plus lost que sur la fin de Taulire sepmaine. II ne se scayl poini encores qu'il se soyl emploie pour les Carades, de la condemnalior) ou absolution desquelz i\ se paile diversemem. Demain le pape doyl onyr leurs advocaiz : je ne scay s'il se pourra veolr ou la chose inclincra. De Rome ce xv» Novembre 15(50. — 78 — XII. Du 25 Novembre 1b60, par ronlinaire qui party t ledicl jour. Sire, en aclendanl le parlemenl do Nostradamus qui vous porlera la bulle d« concile, je vous fais ce mol par rordiriaire, pour vous dire que iadicle bulle rie ful publiee vendredy dernier, ainsi que je vous avois escripl qu'eile debvoir esire; d'aullanl que Ton ne peul lenir de consisloire, h cause qu'il esloil fesie au palais; el ful dispute s'il seroyl l)0ii de faire pour ce regard , en deffaull dudici consisloire , une congregation generalie, a lin de Iadicle publication. Mais, oullre ce que les liieologiens ct cauonislcs n'es- loienl encores d'accord avec les cardinaulx qui onl la charge de la dresser, ilz se soul advisez que, de laire comme ilz avoient propose, qui esloil de la puhlier el puis apres faire la procession el invoquer le s^Esperit, ce scroll mectre la charrelte devanlles boeufz. El pour ceste cause onl arresle que les jeuncs el devotions precederoieni, coinme ilz onl faict. El ful bier le pape de son pied en procession bien devoite el solemnelle, jusques a la Minerve, oil lo cardinal Carpy (1) celebra une messe du saincl Esperit. El croy que, sans la feste Saincle Catherine qui est aujourdhuy, il y eusl eu consisloire a fin de Iadicle publication, qui sera pour mercredy procbain. Ce pendant, sire, je ne vous en puis rien dire de certain , bien que j'aye veu Iadicle bulle; mais il n'y a jour que Ton n'y adjouxle ou change quelque chose. Le cardinal Cicada, qui est le (Ij Rodolphe Pio de Carpi, cardinal cii 1530, tugal en France la inenic annee, ct evSqnc d'Oslie. — 79 — principal de cculx qni ont la cliargc d" la dresser, me dtel qu'il I'liabillera en sorlc quo ce s(!ra i)ng concile nouveau el non poiiil eonlintiaiion , coinbien que la bulle diJ jiiiiile qifavons faicl cosle sepniaine soniie tOHl le conlraire, ainsi quo voiis, sire, h' pniirrez voir par la coppyequcje voiis en cnvoye. Mais kdiri Cicada ar escripl, j'ay supplie sa Sieic, en toul eveneinenl , de parler si clairemeni par la dicle bulle qu'il n'y ayl aucune ob?curilc nc ambi- guile, de laquelle en ce leinps icy il ne peull venir que mal el desordre : a qiioy elle in'a asseure de pourvoir el I'aire en horie que cliacnn se conlen- lera. Sire, jeudy dernier xxi' de ce moys, arriva icy ung genlilhomme nommedonip Pielro d'Albrel, Icquel les roy el roync dc Navarre (1) advoiieni pour pareni , el I'onl envoye par de^a pour rcndre au pape I'obeis- (I) Antoinc tic Bouiboii, due de VonJome, et Jeanne d'Albret. Pietro d'AlbiiU , t^voqiU! ilc Coiiiinitigcs, assis'a au coiiciU; de Treiitc. Lo role dos jMisnniiiers df !,i b;i!;>illG dc .lariiac nous npprc'iid (ju'il (liiil fiiTc lia'v.iid .ie lloinilV. • — 80 — Ranee de ItMir royauine do Navarre; donl noslre s' perc advoriy par une letirc qui Iny a esle presen- tee do la pari de Monks' li' cardinal d'Aniiignac , feist veiiir vers Iny, le xxii" de ce moys, Mons'' le cardinal de Ferrare el moy, aiisqnelz il declaira qu'il csloil resolu de recevoir la dicie oheissance coininc des aulires roys, sans prejudice d'aiiliruy. En tjuoy ledicl domp Pitiro se conlianl, est apres a faire |)ro- vision de liarengue el so preparer pour Ic consisioire pubiic proniis par sa Slele. Je me liens asseure que vous, !-ire, enlendez que jc i;ice ausdiics s"" el dame lout le service qu'il me sera possible, conime je me s^uys bien delibero de I'aire : si esi-ce que j'eusse bien desire avoir eu sur ce letire de voslre Mie, el me suys ung pen esbaby comme ledicl don)p Pielro en esi venu desgarny ; ce que je veulx ailribner ii inadver- lance, ou plus lost a la seureie que les dicis roy el royne prennent que vous, sire, enlendez que voz servileurs el niinislres les servenl el assislenl, el favori'Senl aux leurs en lontes choses raisonnables. llz onl esleu pour prouctcur de leur pays el royaume Mons' le cardinal d'Urbin (I). Mais que cesle cerimonye so\l faicie , je ne I'auldray de vous adveriir comme le loul sera pas- se el quelle op|)Osilion y auroni faicl les espagnolz (2); car cela ne peull passer aullremenl. Cependanl je vous ditay seullemeni, sire, que le pape me disant qu'il le recevroil sans prejudice de vous, sire, eisemblablemenl (1) Jules de la Rovere, fils de Francois-Maiie, due d'Urbin ot de Lconore-Hyppolitc de Gonzague, cardinal en i^M, arche- rdq'ie do Uavouuc. (2) Poiirne pas prejudjciera la possession que le roi d'Espagne avail de la Navarre, en Teslii de rexcominunication pronoucce par Ic pape Jules II. — 81 — dii roy catliolicque, jo luy re.'-'pondis en la presence de Mons"" le cardinal deFerrare que vous, sire, n'aviezaucun prejudice en sa recepiion, csianl rcceii en la saile des roys, el, comme roy de Navarre, rcndanl I'obeissance ponr le did royanme : car d'antres pay-J, n'en avoyl- il point, qu"ilz no fiissenl comprins soiibz I'obeissance filialle que vous, sire, aviez rendue; et n'apparlenoil h prince de vo^ire sang , ne seigneur quelqn'il feiisl de la France, d'en rendre line p,ariicaliere. Ainsi noslre did s' pere se conlenla que, sans faire aucune mention de voiis, sire, ledici domp Pietro, comme am- bassadeur desdicls roy el royne de Navarre , scroyt receu en la salle des roys , saos prejudice du roy catholicque. Sire, le cardinal de Naples a eu depuis deux jours ses deffences ei lerme de vingl jours pour icelles, apres Icquel il pourra demander nouveau delay. II sembloyl bien qua le faict de lous les CaratTes depnys quelque lemps lirSsl en doulceur, mais il s'eslaigry de quelqucs jours en ga, el a eslc le s'' Cesar Brancatio (1), aulref- I'oys nunce pres le feu roy vostre pere , que Dieu absoille, tire du chasieau S'-Ange et mys en secretle en tour de Nonnc (2). Certains advocaiz , venuz de Naples pour leurs defences, onl esie ces jours passez ouys par deux foys par sa Sietc qui, sur la demande el instance qu'ilz faisoient que justice leur fust faicte, respondit que cela estoyl en leur puissance ; et que , renon^ans aux termos et delays pour delTendre, ilz se peuvenl asseurer que en troys jours ilz auront justice. (1) D'lino ramilie noble du royaiinie ile Naples dans laquclle on comple |)liisieurs caitiinaus. (2) I'risoii siluee dans la rue qui poile son iiom, vis-a-vis du chateau Sainl-Ange et sur !a rive opposee du Tibre. — 82 — Cela faict cslimer que le pape ne soyl pas pour leur pardonner, combien que le due de Florence monslre de faire office pour eulx, Au regard dc Monte, Ton did publiquemenl qu'il cschappcra en baillanl la seurvivence de ses ben^tices an cardinal de Medici {\), qui pourroil longuemenl allendro, veu la jeunesse el disposition dudict Monle ; de sorte que je trouve dif- ficile qu'il en eschappe a si bon marche, ailendu les crimes donl il esi convaincu. Ledicl due de Florence est loujours icy el y a passe celle sepmaine, soulz I'omlire du desir qu'avoil la duchesse de gaigner les pardons el voir la belle pro- cession. Mainlenanl on remecl son parlcmenl a Jeudy; et semble qu'il atlende le retour de quelque courrier d'Espagne. De penctrer plus avanl que c'esl que ledicl due esl venu faire icy, encores ne voy-je personne qui en soyl sceu vcnir a boui ; el n'en scauroys dire aullre cbose que ce qui esl coolenn en mes dernieres depescbes. L'evet«qiie Campege (2) pariil hyer pour Espagne, oil il doil demourer iiunce: colluy de Ter- racine en esl revocque. S'-Croix (5) passe en Poriugal, ei le Guerio, evesqne de Iscliia, doyl eslre en peu de jours de relour de la court du roy caibolicque, oil, enlre aullres cboses , il avoii porie le proces dos Caraffes. Sire, je prie a nosire Seigneur, elc. De Romme, ce xxV jour de Novembre 1560. (1) Jean, second (ils de (Joine. 1", disc do Florenco, crcc cardi- nal en 1560, a I'age de 17 aus, archevcqup Jo Pise la memo annee. (2) Jean-Baplisle Campeggi, eveqiie de ISologue, fils ot frere des cardJnaux du meme iioni. (3) V. la note, p. 37. — 83 — Sire, j'oubliois comme ces jours passez est party le curseur qui va ciler le due de Parme pour la ga- ronlie de Camerin qui lire en consequence Testal du- dicl Parme el Plaisance. Le conle do Tendilles est encores icy, de relour de Naples ; el ninrmurenl les siens qu'il reslera ambassadeur, el que Vargas s'en ira ambassadeur au concile, pour le mieulx qu'il scau- royl avoir, n'eslaot la court d'Espaigne contenie de luy et aussi pcu du cardinal de S'' Fiore. XIII. Du 5 Decembre 1560, par J^Niquel, qui parlil le 6, la nuict. Sire, je pense vous avoir, par mes preccdeisles de- pesches, oxplicque si dilFusemenl ce qui concerne le faicl du concile, qu'il ne resle plus que a vous en faire voir la bulle qui ful publico en consisloire le XXIX* du moys passe; el toutefl'oys, de plusieurs jours apres, il n'a este possible de la voir ne en avoir coppie, pour I'expresse deffense que avoit faicl le pape qu'elle ne fusl delivree a quelque personne que ce fusl. Je la vous pcnsoys bien, sire, envoyer en forme autenlique, par Nostradamus par moy rclenu jusques a present a cest effect. Mais noslre s' pere a voullu qu'elle vous feust presentee par I'abbe Niquei , pre- sent porteur, aflin que par mesme moyen vous, sire, entendiez les raisons qui I'ont meu de luy baillcr la forme en laquelle elle est demouree, apres plusieurs et longues altercations et disputes, dont le porteur vous scaura rendre bon comple, selon Tinstrucliou qu'il e» a de sa Stele : de sorle qu'il me scmble, sire, ne vous povoir rien dire la dessus qui ne feust supcrfiu. — 84 — Sire, je vous ay cscripl, par ma dcrniere lelire qui est dii XXV* dii passe, comme les roy el royne de Na- varro avoienl icy onvoje iing genlilhomme, nomme dom Pielre d'Albrel, pour presler robediencc de leur royaume de Navarre au pape, qui esloyl resolu de la recevoir en la forme el au lieu acconslnme, quani au uom des aullres roys il se faicl somblable ceremonye; el ce m'a confirme sa sainctete par plusieurs foys , mesmes en la presence dudicl dom Pielre , Icquel elle voullul voyr le xxvi^ dudicl moys passe, el m'envoya dire que je le luy raenasse apres les xxiiii heures. A quoy je ne failliz d'obeyr, vous advisani, sire, que sa Stete le receul avec grandcs caresses el demonstralions de la joye qu'elle en avoyl , el beni- gnemcnl I'ouyl exposer lout ce (jn'il luy dii de la pari desdicls s' el dame : qui esioii, en somme, qu'ilz avoienl bien voulu faire leur dcbvoir, comme les aullres roys el princes chresliens, envcrs ce s' siege , el sur loul faire cougnoi^lre a toul le monde le lori que aucuns mescbans bereliquos el sedicieux avoienl voullu faire & leur repulaiion , se scrvans 6 faulx lillre de leur nom pour couvrir leurs malheureuses opinions el voiuniez. Car, quatil a culx , ilz n'eurenl jamais auilre inienlion que de vivre el mourir en la foy de saincte Eglise, sans jamais se deparlir de la reverence el obeissance que y onl porle leurs proge- nileurs. El s'eslendil ledicl dom Pielre sur ce propoz en langage espagnol, de telle grace el fa^on que nosire s' pere y print plaisir el s'en conienla , aitisi que luy niesme depuis m'a lesmogne ; el semblablement, qu'il esloil resolu de le recevoyr comme dessus, nonobsianl I'opposilion el I'inslance que luy faisoienl au conlraire les minislrcs du roy calliolicque. El croy l( rmcmeni — 85 — que, sans deux fesles qui fureni la sepmaiae passee et les consisioire oi congrogalions lenues pour la bulle du concile, que cela feu&l desj& depesche ; moiisirant lousjours sa Sk'le de persister en son opinion jusques au 11^ du present, qu'elle m'appella pour me declairer, en la presence de Mons' le cardinal de Ferrare, comme elie avoil eu lellres de son nunce resident pres voslre majeste, qui luy mandoii que vous , sire , n'aviez a plaisir que le diet domp Pietre feust leceu a faire I'acle de ladicte obedience , fust en consisioire public ou prive ou aulire fagon que cc fust. Ce porleur, sire, vous comptera ce que le pape en disl encores hier, clierchanl ions nioyens d'accommoder ccsl affaire ; el desireroyl hien que le diet dom Pietre se conlenlasl de quelque privee reception : ce que je ne pense pas qu'il consentii jamais, ayanl tousjours prolesle de s'en aller sans riens faire ^ s'il y manque rien de la cerimonye done aux roys. Je ne sciiy, sire, quelle sera la resolution finale de nostre s' pere, qui a prins lerme pour y penser loute cesle sepmaine, pour voir si ce pendant il viendra quelque depesche de vous, sire, qui nous esclarcisse de voslre volunte ; de la- quelle, en actendanl plus ample declaration , je suys delibere de me laire , sans purler pour ne conlre en quelque faQon que ce soyi, sinon pour empescher, si besoing est^ qu'ilz ne s-oienl receuz en aulire qualite que de roys de Navarre : ne pensant point que vous , sire, y ayez aucun interest, comme aussi il me semble que touies les aulircs sonl comprinses soubz I'obeis- sance filialle que vous, sire, avez prestee pour lout le royaume de France ; el no vouldroys sans voslre cx|)res commandemeiii consentir que d'aulires pays cl seigncuries , quelque souverainele qu'ilz y preiendent. — 86 — ilz en feissenl une parliculiere, ainsi que je vous ay escript par ma dicle derniere leilre. Sire, je receuz, le dernier de ce moys, une leUre que Mons"" de Lymoges (1), voslre ambassadeur pres du roy calholicque, m'escripl dii dernier du precedent; par laquelle il did que le due d'Alve (2) s'esloyl plaincl a luy de ce que les minisires de voslre Mte en ce lieu deslouboient quelques graces que le pape avoil con- cedees a ceulx dudict roy calholicque, pour faire pour- suicle el instance de scmblables : ce qu'il n'esloyl convenablc ii Tamytie qui est enlre voz deux majeslez. A quoy j'ay respondu au diet s' de Lymoges que, depuys I'assuniption de nostre s' pere au ponlificat, je n'avois faicl aucunc demande ne poursuytie de voslre part, sire, que d'ung bon el i>' concile, si ce n'esl des indultz ordinaires et par cy devanl oclroyez par les papes aux roys voz predecesseurs ; et qu'il pourroii bien esire que le pape ou ses minisires, pour s'excuser de quelque chose dont ilz esioient recher- chez, ayenl respondu que sa Sic ne le povoyi accorder, pour la consequence d'aulani que vous, sire, en de- demandiez autanl ; el que I'accordanl a I'ung, I'autre ne seroyl content d'estre refluse. Sire, je ne vous diray aulire chose du retour d'Es- pagne du Guerio, evesque do d'lschia, ne sembla- blemenl du laid des Caraffes, el aussi pen du long sejour que faicl icy le due de Florence, el non plus de la prochaine promotion el dos legalz du concile, sa- (1) Sebaslien de rAubcspiiic , eTeijiie do Limoges en 1559, successiTcmenl ambassaJear en AUeiuagne, on Hongrie, en An- glelerre et en Espagne, niort en 1582. (2) Fern. Alvarez do Tolede, due d'Albe, vice-roi des Pays-Bas pour Philippe 11, do 15fi0 a 1573, mort en 1582. — 87 — clianl que le present porleur vous informera si bien a bouche de cela el loiiies auUres occurences de dega, qu'il me semble que je feroys lorl a sa suffisance, si je faisois la presenle plus longue que pour pryer Noslre Seigneur, sire, elc. De Romme, ce v^ jour de Decembre 1560. XIV (1). Do 25 Decembre 1560, par M' de Ferme (2). Siro, ayani, le xviii" du present, recen vostre lelire du viii" precedant, je ne failli? incontinant de me reiirer vers noslre s' pere qui ja deux jours aupara- vani avoil eniendu par une depesche do son nuuee resident pres de vous, sire, la trisle nouvelle de la mort du feu roy vostre frere (5), a qui Dieu face par- don ; el en avoil monslre autani de douleur el des- plaisance, comme depuis il a eu de plaisir el conso- lation d'entendre voshe joycux' advencment a la couronne, el le bon el louable train que prent le gou- vernement de voz affaires el royaume, principallemenl pour ic regard de la religion, suyvanl ce que j'ay amplement discouru a sa Sle : laquelle, pour vous faire plus e.vpresse el parliculiere declaration de sa bonne volume, a voulu depesclier vers vosire Mie MonsM'evesque de Ferme, present porleur, ayani fait elieciion de sa personne, pour csire ung prelat de telle vie et repulaiion en ceste court et de devotion si congneue envers le service de vostre couronne que sa Sle n'en pouvoii ellire ung plus apte et digne de (1) Do la main (jui a ecrit I'enlcle des IcUres. Au rcrso du lueme folio, la main ordinaire continue. (2) Laurent Leuci, floronlin, eveque do Fcrmo, vice-legal charge du 'gouvoinenjenl d'Avignon. (O) Francois II nionrnt a Orleans le 5 Decembre 15(i0. — 88 — cesle legation : donl rn'asscurani qu'il s'acquiclera avecques conloniemenl de vostre Mie, ct que par liiy aurez ample informalioii de toules les nouvelles el occurrences de de?a, je ne m'eslendray aucuiicmeiil a vous en cscrire par la preseute; allendu niesmemenl que, par ung genlilliomme que je fais coniple de de- pescher dedans si peu de jours que pen s'en fauldra qu'il ne soil ia aussi losl que ledil s"" de Ferme, je vous donneray ample advis de loulcs chosos , ce que je ii'ay peu faire pour cesl hcure, a cause d'une indis- position qui m'a empesclie, I'cspace de deux jours, de pouvoir cscrire el negolier : ce que loulefTuys jc n'eusse iniermyz, si voslre service eusl requis que je me fusse efforce davaniage. Sire, je prye a Nosire Seigneur qu'il vous face la grace de r6gner longuemenl en louie perfection de joye el f6licite. De Romme, ce xxiii de Decembre 1560. XV. Da 10 Janvier 1561 a nato X (I), par iM'de la Baslie qui parlyi le 12. (1) Lc premier jour do I'annee a beaiicou[) varie. Dans ({uelques pays on la coinmencait a Paques, dans d'aulres au 25 Decembre, au lieu du 1"^' Janrier ; en Italic, c'etait generalenient au 25 Mars, jour de I'Annonciation : la persislJiice de cclle jnaniere de coniptpr daus la ville de I'ise lui a fail donner le noni de calcul Pisau. Ello ful inlroduite de bonne heure en France, ct parlicu- lierement observec en divers lieux du royaurne, nolaminenl a Reims, coinme on le voit par une charlc de i:j90 eilee par Ma- biilou {Diplomatique, livre ii, chap. :23 , n° 7 ). L'liniformite des dales en France commence seulement a I'annee 15G4, cpoque de I'cdilde Charles IX qui ordonno de dater les acles publics el jiarliculieis en i.iimmeiiraal I'annee avcc le mois de Janvier. Les lellrcs de noire ambassadcur sont toules dalecs a la fin — 89 — Siro, \o parlpfnont du s^ de l;i Bastie, present por- teur, quo jc vous ilebvois dopescher ijicoiiiinatii apres Mons' do Ferme, a esie rolarde par le peu de same ou je me suys tionve duranl douze jours el sembla- blemeul par ratlenie de la depcsche que nosire s' pere faicl par liiy a son nonce, sans laqnelle il n'a vonlhi qu'il soyt party, el depuis par la goiiite sur- veniie a Mens' le cardinal de Ferrare, qui I'a lanl lourmenle qu'il ne povoil eniendre a escripre. Je n'ay laisse, sire, nonobslanl mon indisposition, de me irouver au\ actcs et cerimony(S oil Ton me povoil laire qiierelle de vosire reng el precedence, pour raison do laqnelle j'ay en longue dispute, ainsi que \ous, sire, entendrez plus an long a bonche par ce dici porleur, a qui j'en ay bailie ample discours el me- moire, ensemble de lout ce qui concerne vosire ser- vice el seniblablenieni des tiouvelles el occurence.s de de(;;i. Doni m'asseurani qu'il voos scaura rendre bon €ompie, il me seinble n'esire besoing d'eslendre aul- iremenl la presenie, si ce n'esl pour vous dire, sire, tjue hyer ie pajie feyl chevaliers le due d'Urbin et le s' Marc Anlboine Colonne (I), pour ce que, comme j'enlendz, ils ne peuvent recevoir I'ordre de la Thoison, qui leur doybi eslre bien lost baillee , sans cesle qualii6 la. El aujourd'huy sa Stele a ouy en une con- gregation les advocaiz du cardinal Caraffe, ausqueiz elle a ordonue qu'ilz se linsseni preiz pour lundy pour «uivaot le calciil Pisan , inais, a parlir de cclte lellre, celui qui amis les en-lelp, les a Ions da!es suivant le caUul ordinaire, a nato Christo. (i) Ils avaietit ele agrees, sans reccTOir le collier, dans nn cha- l.ilrc des ch.ivrtliers de rordre lenu par Philippe II a Gand, eu i6i;). XXYll. 7 — 90 — voir clorro le procfes el icelluy terminer par sentence. Les (lids advocatz oni respondu qu'il ii'eslojl en eslal de jiiger el qu'ilz avoienl des Irsmoingz a faire exami- ner pour la jusliflcalioii du cardinal , doni les ungs esloieni en France el les anlires en Espagne, II y a eu snr ccia de la dispute el enfin niille conclusion, el en doybl rstre reparle en une aniire congrega- tion ; el pour ce que les advocaiz susdiclz prelendent plusicnrs conlrnrieloz [ de fail entro enix el le gou- verneur de Rome (1) qui est commis a la faclure du proces, nostre s' pere a depuie deux c.irdinaulx pour ouyr les parlyes sur les dictes conlrarielez] et en faire leur rapport, de sor(e qu'il est impossible que cela n'engendre [retardation] pour le moins de quelques jours en ce negoce donl on s'aitendoil de voir la fin la sepmaine procliaine. Je ne lauldray, sire, inconlinanl qu'il se sera I'aicl qnelque chose en cela qui meriie qu'en soyez adverty, de vous depescher le courrier que Nostradamus envoya de Lyon, lequel j'ay ici chez moy aclendant la premiere occasion qui, corarae je pense , ne peidi gueres larder. Ce pendant j'ay bien voullu vous envoyer cesle depesche, suivanl ce que j'avoys propose par le genlilhomme present purteur : auquel me remeciani de tout le surplus pour ne voyr aultre responce a faire a voz letlres des huict el dix- neufiesines du passe , ne semblablement a la depesche que j'avoys anparavanl receue du xxv* Novembre, je pryeray a nostre Seigneur, sire, etc. De Uommo , ce x'= Janvier 15<30. (1) Le prelal rev^tti de ce lilre e.oz el inleniion de sa Mie ile coniiniier el conserver loules SOS amyiies el alliances, lant vieilles que nou- velles, el surtoui la bonne el seure iniclligence d'enlre la coronne de Fr;ince el le sainci siege aposlolicque, avec la reverence el ob^issance filialie que y onl porle les roys ses predecesseurs ; semblablement le zele el affeclion enveis In religion el noslre mere saincle Eglise , dont ?a Mie ne veull eslie vainciie d'aucun de ses diclz predeces-ours, ains s'efforcer, s'ilz onl bien faicl par le passe, de faire mieulx s'il esl pos- sible ; allendu mesmes la parfaicle amylie el parlicu- liere devotion qu'elle a a la personne de sa dicle Sie: laquelle, apres avoir ouy los propoz dessus diciz , en- ricliiz el oslonduz le mieulx que jo peuz, respondil que de sa pari elle ne manqiieroyt de loni ayde, con- seil el sccours qui seroyl en sa puissance , pour le bien , grandeur el prosperile des affaires dn roy , pour lequel remercier, consoler el luy faire lous les plus grans el parliculiers offres el demonslralions de sa bonne volume qu'il luy esloyl possible, il avoyl delibere de depescber vers sa dicte Male el la royne, sa mere, le did s' de Ferme , anquel il bailleroyl lellres de sa main a leurs Mlez el ample inslructiou de ce qu'il avoyl a faire el iraicler avecqnes eulx. II me sembla sur ce propoz qu'il ne seroyl que bou de luy parler des indullz par luy oclroiez au feu roy, que Dieu absoille, qui en avoyl bien peu joy, ci d'essayer d'en lirer la confirmation, en remonstranl a sa Sie que cesie parliculiere elaciuelle demonstration de ne voulloir moins faire pour sa Mie de ce qu'elle avoyl faici pour son prcdecessenr, luy donncroyi grande "asscurance de sa bonne affeclion el amylie, el occasion de s'fu re\encber en embrassanl lousjours de plus — 96 — en plus lj protection ci deffeiice <\it son aucioritc : a quoy nosire saincl pere , a[)res y avoir ung p. iO. — 96 — consisioire public au lieu que icqucioil sa qiia- liie (1) Le faicl de la precedence d'enirc ledict Vargas et moy fill anssi semblablement dispnie el mis en grandc conlroveise, le lendemahi de Noel, jotir de la creation dc noslre sainci p6re. Ei alin que le roy sacbe an vray coiiime ceia esl pa-se, le s' de In Bastie Iny fera enleiidre coimne le vm' du moys passe la s" Vir- ginia, lille du due d'Urbiii, mariee avecqiies le conie Federic Borromee, nepveu de sa Sie, IVist son enlree a Bomme, a laquelie ?e Irouverenl les ambassadeurs des princes el eslalz. qui furenl des 1 1 matinee ions, fors que moy , invilez a sonpper au bancquel niip- liaU qui se feist le soyr en Belvcder (2). A quoy bean- coup de gens prindrenl garde , el quelques ungs m'adverlirenl el me admoneslereni que je ftroys bien de ra'excuser envers sa dicle Sie , de ce que je ne m'esioy.s irouve a la dicle enlree. II me sembia bien (jue leiz adverlisseurs, encores qu'ilz feussenl domes- licques el assez familiers du pape, n'entendoyenl pas bien cc niislere; louleffoys, pour mieulx m'cn esclair- cir, je dis a sa Sie, le xu' ensuivanl, que cornbien que je n'eusse esleinvile au bancquel commelcsaulires ambassadeurs, si n'eusse-je pas failly de me irouvera ladicle enlree, si j'eusse peiise faire cbo.se qu'il luy eusi esie aggreable. Noslre s' pere me respondil qu'il n'avoil point or- donne que les ambassadeurs fusseni invilez ,, el ne s'esloyl aucuneraent mesle de ce fesiin, donl il avoii laissofaire a ses nepveux: lesquelz, comme il jugeoiU (1) Laliarnngue deranibassadcnr ful prononc6 par le celebre prorcssour Marc-Autoine Muret. Le comle do Tendilles quilla Home to jour meme el prolesla. (Si I'arji' dii Valicaii. — 97 — nc m'avoieiii point cdivye, pour (5viier lo irouhle qui J- eusl peu eslre, ii cause de ma precedence ; el je luy avoys faicl plaisir de m'abslenir de la dicle etilree; et que icllcs cerjmonies privees n'im|)ortoienlde rien an faicl de la dicle precedence , puy^que aux publicques j'esloys raainlenu el conserve en nia possession , comme encores je seioys aus jours tie sa creaiion el coronation (1), qui esloienl proches, ainsi que j'avoys esle I'aiinee passee; el que , si le comle de Tendilles ou Vargas s'y voulloienl Irouver, qu'ilz se conlenlas- scnl de lenir leur reng ancien, ou bien deniourasseni au logis, Je ine lonoys bit-n asseure qu'il en iroyl ainsi comnie en disoyl no:•^lre ^' pere ; < l louleffoys, pour eslre plus asseure d'eviier loule iioyte el scandalle, je voulluz bien faire une recbarge nouveile a sa dicle Sie; el, la surveiile de Nod, luy fuz ramenlevoyr sa promesse , afiln qu'elle pourvcusi qu'il n'y eusl aucun descrdre le jour de sa diele creaiion, avanl leqnel je voyois bien que je ii'auroys plus de inoyen de p;irler a elle, pour esire du loui occupee a rotlice el ceri- monyes de I'Eglise. Sa Sle trie respondil que, depuis avoir parle a moy, elle s'esloyl advisee que lelz bancquetz ne faisoieni que porler incomraodile, lanl a ceulx qui les laisoicru que aux invilez, de.'-quelz il n'y avoii ung seul qui ne feusl plus aise de nienger cbcz luy ; el pour cesle cause s'esloit resolue de laisser du loul ce bancquel. el au lieu d'icelluy donner des medailles de dix escuz la piece a ceulx qui ont accouslume de s'y irouver ; el que par ce inoyen je ii'auroys poinl a contesler avecques les espagnolz. El sur cela feisl appeler le (Ij Pie IV avail etc clu dans la nuil du 2') an 26 Deceinbre 1559 el couronne Ic 6 Janyicr suivant, jour tic rF.piiih.inie. — 98 — cardinal Borromee, diiquel ayani enlendu que les me- dailles esloienl prcsles, elle ine declaira que sa reso- lulion esloyl lelle que dessus. Je ne la luy voulluz poinl aullremenl blasmer, sinoii de Iny dire que je seroys bien marry que ie roy eusi la inoindre ombre du monde que cela se feisl pour double de ce monde que sa Ste feisl de mon reng. Elle me re^pondit que ce n'esloit pas pour cesie occasion, el que je n'avois cause de me plaitidre, allendu qu'i! n'y auroil poinl de bancquel du loui , ne pour cardinanix ne pour ambassadeurs. El lelle lui la conclusion de ce propoz, apres plusieurs raisons alloguees d'une pari eld'aulire. Et neanlmoins, Ie jour de Noel, au soyr, je I'uz adverty que Ton preparoii pour Ie lendemnin, jour de la creation, Ie pasi accou>lume en la salle de Constanlin, ou Ie pape debvoyt disner, el semblable- ment tous les cardinaulx el ambassadeurs, au pariir de la messe qui se debvoyt dire ii bonne beure. Cela ful cause que, des Ie (in malin, je m'en allay au palais, iii ou Irouvanl que la verile esloii lelle que I'un m'a- voyi mande, je m'en allay voir Ie cardinal Borromee, sur sa dicie chambre, el avecques elle les cardinanl\ Moron, Far- neze ei Saincie-Fior, qui depuis viendrcnl vers moy en la chambre de ha Sle, et de ia pari (riceile me proposerenl qualre pariiz ou expcdiens pour sorlir de cesle querelle. Lcsqueiz je rolTusay lous, me servant des raisons par moy allegneos Tannee prccedente , donl je me remeciz a la depesclic que je leyz iors sur ce, sans en ennuyer aulremenl Ic roy ; el seullemenl en diray quelques uncs, ausquelies je (uz conirainci de recourir pour empcscher que rien ne me kust in- nove, au prejudice de la dignile el reug de mon maisire, el me sauver des e.xpediens proposez. [Jes(juelz le pre- mier esloii, que le pape, dcsiranl conserver i'amylie enlre le roy el le roy catholicque, el fuyr loule occasion qui la pourroyi allerer ou diminuer, estoyi d'advys que Vargas el moy eussions a converser amyablemenl ensemble el d'ung couimung accord remecire ce dif- ferend a uoz maislres, qui se scauioienl bien accor- der; el ce pendanl nous abslenir lous deux des lieux el endroiclz oil il pourroyi avoir compelance, qui n'ad- venoyt pas souvenl a cause de la diversiie de noz ipia- lilez el professions , el que ne scavious mieulx laire que d'eviier celle noise, avecques acies el proiesles^ que ce que en laisions esloii sans pnjudice de noz droiiz. Ma responce ful que Vargas el moy vivions amyablemenl, paisiblemenl , el nous visiiions Tung I'aullrc, comme serviieurs de princes si alliez el con- — 100 — joinclz comme esloienl les noslres cnire lesquelz il n'y avoyi aucun differend , el que je n'avoys rien a (lispulcr a vecques ledicl Vargas ne occasion (I'en avoir; que je n'avois affaire que au pape, dnquel je desiroys scavoir s'il liiy plaisoyi de recongnoisire le roy en (el degre que scs predecesseurs y avoicnt esie recongneuz par les papes de loui lemps immemorial , sinon qu'il pleust a sa Ste m'en faire declaration, pour en adveriir le roy qui se pourvoiroyl par raison. Le second expedient ful que le pape commisi la cause a Iroys ou quatre cardinauix, pour voir som- mairemenl les droiciz el pretensions des pariyes, pour en faire leur rapport el adjuger la possession a qui le droict seroyl [)lus apparent, en une congregation de cordinanix qui seroil[)Our cest eff"ect celebree avant le jour de la coronation ; el ijue ce pendant nous abslinssions tons deux, sans prejudice de noz droiciz el laisons. Je respondiz que je n'avois poind de pro- curation du rty pour |)laider ct consentir en leur ju- risdiction, el que j'esioys icy pour servir el obeyr au pape el honorer sa courl, el non pas pour former des proces d'une chose toule claire. Et , a la fin , voianl les cardinaulx Moron el Farneze, el sur tons le camer- lingue , avecques une ardeur incroyable insisier sur ce point , je fuz men de leur domander s'i!z iiouver- roieni bon que le roy meisl semblablcmenl on double la fa^on donl it doyi recongnoisire le pa|)e , el (ju'il coniniist la cause a troys ou quaire prelaiz de son royaulme pour en faire rapport en une assemblee de prelaiz ou bien aux eslaiz generaulx de France. Le III* ful que le cardinal Moron, avecques les deux aullrcs, me vim dire de la pari du pape que sa Sie se conlcnloyl que je me Irouvassc au disner, [ our — 101 — coDScrver nia possession, pourveu que jo pioniisse de demourer an logis le jour de la coronaiion, faignanl d'esire mallade ou avoir quelque empescliemenl, A quoy, apres les raisons pourquoy je ne debvoys ac- cepter ce parly, je respondis pour ma resolulion que, quanl bieri je seroys mallade, je me foroys plus tcsl porler que de faillyr a ung tel acle, la ou la digiiilede moil maislre se mec;oj'len conlroverse. Le 1111° el dernier expedient ful que le cardinal Moron, accompagne de deux aullres, me vint dire que le pape voiani ne povoyr terminer par aulire moyen cesie dispuip, estoyt resolu de n'avoir aucun ambas- sadeur a disner, mais seullement les cardinaulx ; el que je n'avois que dire ne opposcr conlre cesl(! or- donnance, qui nous faisoyi tons esgaulx ; ot ne povois pretendre aucun grief en cela, esiani traicle de mesmes que I'ambassadeur de I'empereur el ceulx de lous les aullros princes. Ma rcsponce ful. que les aultres fe- roieiii ce que bon leur sembleroyl : quanl a nioy, que j'avois eu la parolle, pen de jours auparavanl, de sa Sle louie conlraire a ce qu'ilz m'anuncoienl, el I'avoys escriple au roy , qui Irouveroyt morveiileusemenl estrange que d'line chose changce de blanc au noyr j'eusse adjouxte foi a aulire que a la parolle du pape : auqucl je ne fauldroys d'obeyr, apres qu'il auroyl en- leiidu mes raisons, on bien qu'il ni'auroyl diet a bouche qu'il ne les voulloyt entendre. En somme, que je ne parlyroys point de la que je n'eusse parle a luy, affin que je pcussd adveriir sa Mte du debvoir en qnoyje me soroys mis. Sur ce, Moron, apres infinyes raisons ct argumens, ausquelz je ne me semble poini avoir mancque de rcsponces el solutions pt rtinentes, voyani ([ue, auliaut qu'il avoyi de Irouz, j'avoys de che- — 102 — villes pour les esloiippor, commoiiva a me conjiircr par Tamylie qn'il me porloyl, par la bonne opinion que ie pape avoyl en de moy, comme il disojt, jusques a present, et par Ie bien et repoz de la chresiienie, que j'eusse a me desisler de ceste myenne obsiinalion, el m'accommoder a la volume de nosire sainci pere; el ne feisse double qu'ilz ne luy cusseni compie lonles mes raisons el fondemens anssi vivemcni que nioy- mesme eusse f;iicl, comme Mens'' Ie cardinal de Fer- rare qui esioyi present me povoyl tesmogner. Sem- blablemcntlescardinaulx Farnezeel camerlingue direni tout ce qu'ilz pcuronl pour m'induyre a accepter ce party, me voulianl monsirer par vivos raisons que je n'y avoys aucun interest ; el pour conclusion, ad- jouxlereni a leur dire que Ie pape vonlloyl absoluemenl que je m'en allasse, el que, pour Tamour de moy, il renvoyoil au logis lous les aullres ambassadeurs ; et qu'ilz ne me pensoienl pas si indiscreet de voulloir forcer Ie pape, el me conscilloient lous en frercs cl amys d'obeyr. Je les rnmerciay bien buniblemenl cl Icur diz qu'il me desplaisoyl de la peine qu'ilz pre- noienl en vain, el me pardonnassenl, s'il leur plaisoyi, si lous leurs bons el aymablos recors ne me povoienl persuader el induire a voulloyr avoyr la teste trenchce, comme je meriteroys, si je les avoys creuz ; el que je debvoys par raison scavoyr mieulx qu'oux comme cecy seroyl receu chez nous; el esioys certain que, si je m'esloys taiil oublye comme ilz voulloienl queje feisse, je n'auroys pas Ie pied en I'cslrier en la secpnde poste de France, que je ne feusse arreste prisonnier pour faire justice d'une telle desloyaulie; que je remercioys ires humblemeni Ie pape de la bonne opinion qu'il avoyl de moy, cl Ie supplioys de ne me commander — 103 — chose qui rempirasi, el de considerer que ce que je fai»ois, fstoyl pour son service cl non pour celluy du roy, a qui loute cesle dispute u'imporlait de grandeur el digniie, ne d'ung palme de lerre, ne d'ung escu de rente; el que loutes les congregations, consisioires , el leurs decreclz no le scauroienl (aire moindre de cc qu'il est ; que la paix ct repoz publi« ne debvoient esire icy mesicz, el n'y avoyl personne qui les voulusl troubler; el que, s'll y en avoyl, il s'en failloyl prendre a cenix qui cherchoienl d'innover, el non a moy , qui voulloys vivre a raccousiumee ; el, se presenleni oc- casion queje [teussc faire service au roy calbolicque, je y courroys plus lost que ceiui de sa Mie, qui ne seroyi conienle si je faisois aulirenieni; el ne preien- dioiis rien d'entreprendre sur sa Mie calbolicque , seullenienl voullions scavoir si le pape nous voulloyl recongnoisire en lel degre el qualile qu'avions esle par le passe: ce que ne voullanl faire, il nous faui- droy avoir patience, el que prendrions cela pour ung conge ; enfin , que j'esioys resolu de ne deparlir que je n'eussc parle a sa Sie , ei plusiosl aiiendroys d'esire gecie dehors par ses gardes, el que je ne povois I'aire aullromeni pour ma descbarge. Cesle comedye ne dura pas nioins de quaire a cinq heures, el en lut la fin telle que, apres que les susdictz cardinaulx eurenl faicl lenr dernier rapporl au pape, Vargas ne meisl gueres h s'en aller, el me demoura le camp. El descendil noslre s' pere pour aller a la messe il nne liL'uri' apres mydy ou plus ; ei, me renconlrani en sa chambre, ne me dist ung seal raoi, mais seul- lenienl me sallua de la lesie, avecques bien fort bon visaige, ne monsiranlaucunsignede mal conleniemenl. Quelqiies jours apres, que je fuz vers luy , sur — 104 - les plaincles que je luy feiz de voyr lani de foys renou- veller cesie querelle, el que je m'csbaliissoys comme il y presloyl si facilemeiil les oreilles, il m'asseura que je n'auroys pire iraiciemeni an jour de sa coronation que a celluy de sa creaiion. Vargas ne viiil point le jour de la coronation, ne a I'ofllce, ne au disner ; et passerenl les choses quielemont. Je me suys voullu informer d'oii vint cesle si soudaine mutation dii pape. de convertir la distribution de ses medailles en ung bancquet ot reprendre la vieille roustnme, conlrc sa resolution ; el ay sceu que ce ne fut que sur quelque remonstrance que Ton luy feisi, que c'estoyt une choleuce, — i05 — dies meriloieiii responco • (jiii fui qiu; luy niosme s'abupoyl bien de ponsor que j'eusse Topinion qu'il disoyi ; au conlraire j'estimoys mon droici si clair que, de mil ans en ga, il n'avoyl point esie en conlroverse ne en hesoing de decision. An snrpliis, qu'il ne me cnidasl pas eslonner pour me faire paonr de la guerre, que, Dion mercy , encore-; qut^ nostrc prince feiisi jeune, le royanme de France esioyl en lermes de of- fendre auliruy, non que de se doffendre; mais que je ne voyois nulle occasion de qnerelle avecques quelque prince que ce feust, el moins avecques ie roy catho- licqueque. nul aultre; el que je n'eslois moins linmble servileur de sa Mle que sorviieur ou minisire qu'il eusl, eslant lei le votiloyr el expres commandemfni du !oy, qui n'avoyi rien a dobailre ne conlendre avecques b; roy calbolicque, si'non de lous offices d'amytie, fraternite el courloisye , donl leurs deux majeslez inschoieni a se vaincre ei surmonler I'ung I'aulire; quo c'esioyl au pape sen! a qui j'livoys pre- senlemenl a faire, cl desiroys scavoir de luy s'il nous voulioyl rccongnoistre el eslre parcy apres recongneu de nous a la mode accouslumee, ou bien nous mons- irer qu'il s'cnnuyoyl de nosire obeissance : car aulire sens ou inlcrprelalion ne pouvyons-nous donncr a utie lelle innovation. II plaira pu roy commander ce qu'il entiMid csire icy laid des obsequcs el service pour Tame du feu roy son frere, accouslumez par le passe d'eslre colebrez en l'e;^lise Si-Loys en cosle ville de Romme, el quelle despence sa Mle voult y estre faicle. Sur quoy esl a notcr que, le iiu* du nioys de Mars mil v*=i lix, fureni icyfaicics Ics obseques el funerailles du leu empereur Charbvs ciiiqniesme nv('C(iu('S ires yrande [jompe el — 106 — magnificence en I'eglise Sl-Jacqiics , comnae aussi lurenl celles de la royne Marye d'Ang" : es quelles les espagnolz proposerenl plusieurs escripleaux et peinclures en I'ignomynie el opprobre de la Dalion francoise el mesmes de la glorieuse memoire du roy Francoys premier, que Dicu absoille, comme il se peull voyr par la depesche que je feiz sur ce lors au roy , lequel estanl depuys appelle de Dieu au moys dc Jullel onsuivani, je suppliay le feu roy son filz el successeur de m'ordonncr comine j'avoys a me gouverner aux obseques du roy son pere, tant pour le regard de la despence que du resscntemenl cl revenche des painc- lures des espagnolz ; a quoy il me ful respondu que, touies cboses consideiees, on avoil irouve que le meilleur el le phis oxpedienl esloyl de laisser du loul cesie cerymonye la, favorisanl a cesl advis la mutation du pontifical par la morl du dernier papc survenue en mesme temps. Par ainsi, y ayani desja une exemple do ne faire point les funerailles et au conlraire d'icelles Tancienne coustume el observation, le roy peull choisir lequel des deux il luy plaira. Seullemcnl suppliray ires humblemenl sa Mte de prendre en bonne part si je luy diz qu'il vauldroyl mieulx en mon jugement omellre du loul cesic cerimonye que en la celebranl maigrcmcnt, ailendu la sumpluosite usee a celle des- diclz emporcur el royne Marye, descouvrir quclque mecanicqiieie ou indigence qui sonl qualitez, que ceulx de doQa reprouvent merveilleuscmeni en aullruy, en usaiii louleiToys pour le regard de leur parliculier selon leor profficl cl commodilc. Ayani eu, par une depescbe qui me ful faicle du xxiiii" Novcmbre doniier passe, commandcmenl de nic gouverner au faici des Caraff'es selon ce que je — 107 — congnoislroys rincliuaiion du pnpc^, il me scmhla que pour icellc doscouvrir, jc no povoys myculx fnirc que de dire a sa Sie comrae, entre les aulires leures que sa Mle m'avoyl envoyees pour faire lenir h lous les chevaliers de son ordre esians dega les moniz, a fin de lenr inlhimer la congregalion el cliapilrc dudicl ordre qui se debvoyi lenir, pour y comparoislre en personne ou par procnrenr, j'eri avoys irouve une qui s'adressoyl au due de Palliane, laquelle j(^ ne luy avoys voullu faire rendre sans le sceu el commandement de sa Ste. Nosire Si pere ine respondil que ledicl due esloyl aussi pcu en eslal de consiiluer procurcur que d'y aller en personne, el en sonime me feisi assoz clairement entendre par scs propoz que ledicl due esloyl en ung Ires-grant danger de perdre bien losl la vye ; el n'en did Ton pas moins du cardinal Ca- raffe, auquel toulesfoys il semble qu'il y ayl plus de difTicuile, d'aulianl qu'il fnull que son faict passe par consistoyre, oil le pape pourroyi ouyr des raisons qui le feroienl changer d'opinion. Tani y a que Ton n'eslime ricn de bon de leur faici, lani h cause de la muliipliciie des crimes el charges qui sonl contre eulx, que aussi pour ce que d'aulire part Ton en voyl de mauvais el certains pronoslicques, lant par le don de la principaulle de Rossan (1), accompagnce de cer- laincs gabclles que le roy calholicque faici au conle Federic Borromee , que aussi d'une pension de viii M livres qui se constilue sur I'aicevesche de Tollede au profficl du cardinal Borromee : qui esioienl graces auparavanl dcsdyecs aux dnc el cardinal dessus diclz, el par I'ambassadeur Vargas confirmees dnranl le (i) En Calabro f royaiune iJe Napto--). — 108 — conclave, pour la recompense de I'estal des Colonnoys aiiquel ledicl due debvoyl lolallemenl renoncer et cedder ses raisons a Marc-Anlhoine Colonne. Quani an cardinal de Napoly (1), on ne pense point que sa vye soyt en danger, mais n'y a point de doubte qu'il ne perde I'office de regent cree nouvellement en sa (aveur par le feu pape, el qu'il ne soyt condemne en quclque grosse sorame pour les deniers par luy robbez a la chambre. II y a aussi en son proces des falsilicalions de briefz qui, au cas qu'ellcs soient bien vcrifiees, luy pourroient atlirer quelque plus aigre condemnation, comme un scapellemeni ou privation de benefices. U y a do^jh plus de huict ou dix jours que le pape esludye ordinairerneni el plusieurs heures en lenrs proces, •■t semble qu'il ayl grande envye d'en voyr la fin ; el Iny-mesmes me dist, le v* de ce moys, que ce seroyl bien lost faici ; et que ce pendant il avoyt ordonne que le S' Cesare Brancatio feust delivre, €u esgard a la requosie el inslnnce (jue je luy en faisoys de la part de la royne, comme d s'esl faicl deux Jours apr^s. Au regard du cardinal de Monte, il est confes et convaincu, et luy mesmes a envoyc uno polisse es- criple et signee de sa main au pape conlenanl sa confession, de sorle qu'il n'a aultre esperance que en Ja misericorde de sa Sie. La cause d'enire la S'" Virginia et la chambre, pour raison de Camerin , se lieni pour termynee, encores que la sentence ne soyl prononcee , ei doybt eslre la chambre condamnee en 111^ m escuz, pour lesquelz (I) Alfouse Caraffe, aicheveque de Naples, dont il a etc parl6 plus tiaiit. — 109 — ledicl eslai de Camerin sera bailie en gaige ^ la dicle Virginia , pour en jonyr jiisques a ce que la dicle somme de m^ m escuz soyi resliluee en ung seul payemenl. El n'y a en aulcun exploiel en loul ce pro- ces icy conire la case Farneze, en recours de gareniye pour le did Camerin, conibien que les citations ayenl esle decernees et le curseur plusieurs foys prest ^ partir pour aller a Parme: mais cela a lousjours esle supercede pour le respect du roy catholicque, qui a en ce faicl prins la protection des Farneses, el veull que la liberality doni il use envers les Borromees, dont cy dessus est parle, excmpie de loule inoleste el in- quietation lesdiciz Farneses qui aullrcmenl diseni n'estre lenuz a la dicte garentye ; soustonant touteffoys le conlraire sa Sle, laquelle, comme Ton did, eusl bien desire par le moyen du diet proces tirer I'esiat de Caslrcs de la maison Farneze, pour en acconimoder son nepveu.Ce pendanl I'execution, lam de la petision sur Tollede que du don susdicl de la principaiilie de Rossan el des gabelles, qui doyt en lout mooter xii mil escnz de revenu, a este arrestee, el est rcvesque d'Ischia parly le xxviii* du passe pour la court du roy catbolicque, a fin d'acconimoder loul ce negoce ; on quel pourroyl bion donner grande I'avcur aux affaires de sa Sle el de ses nepveux, la concession par elle faicte an roy catholicque do lever sur le ievcnu do Teglisc d'Espagne, cinq annees dtirani, rontreienemeni de cinquanle galleres, lesquellos, si les condicions appo- sees en la dicle concession sont obsorvees, ne doyhvent eslre emploiees que contre IcTuifj, quolquo nccessiie qui puisse survenir; el seroiii noinmeos les galleres de I'Eglisc el auroiit onsoignes did'eronies do celles qui son! propres du roy caibolicquc; ct, par le moyen — 110 — (le I.idicte concession, les niinisties diKlicl roy callio- iicquc sc sonl desisloz dcs aullres poursuiUes qu'ilz fai- soient de lever quolques deniers sur I'Eglise par certainos aullres voyes el nioyens. El pour ce qu'il resiojt en- cores a lover quelque choso en Espagiie, a cause d'une grace oclroyee an feu empereur Charles par le pape Jule 111% le pape, ainsi que Iny-mesmes m'a did, a revocque la dicie grace el exemple I'Eglise de loule aulire subveniion par le moyen de cesie cy des gal- leres, que Ton did ne devoyr point monler moins de iiic M escuz par an. Les due el duchesse de Florence el deux de leurs enfTans, ayanl icy sejourne cinquanlc el cinq jours, a la fin, apres plusieurs procraslinalions el coulleurs d'y prolonger leur sejour, en parlirenl le xxviii'^ du passe. La negociacion d'enlre le pape et le did due a esie lenue mcrveilleusemenl secrecieduranl lout ce temps, pendant lequel ilz se sonl assemblez plnsieurs foys el demoure seuiz el passe des demyes journees rescrrez soubz plus d'une porle, affin qu'on nc les peust ouyr; el a lousjours presche le due a sa Sle qu'il failloyl lenir leurs affaires si secreiz que personne que eulx n'en cnlendisl rien. Pendant ce sejour sonl revenuz d'Espagne les courriers parliz auparavant que se feist leur aboucquement, et en onl este depcsche d'aulires depuys qu'ilz sonl ensemble, el sur le retour d'iceulx encores d'aulires redepeschez. El n'a Ton rien veu qui monslre que le diet due ayl cu de cesle court-la les response-; selon ses desirs el poursuytles, mesmemeni quant au mariage de son filz aisne avccques la prin- cesse d'Espagne, donl il avoii voulu renoucr la prac- lique. On le lionl pour exclud du lout. Je croy bien (jiie nng dcs pi incipaiilx jtoinciz on prelendnyl lo liict — Ill — line C'sloyl de s'asseurer de loiil I'eslal de Sicnne, en levani les Espagnolz dc port Hercole el Orbeielle (1), pour apres plus facilemenl parveiiir au tilire de roy deTuscane, qui esl son princi|)al desseing, auquel il a I'empereur pen favorisanl, el au resie, s'impaironir de I'eslal de Petillan , par les moiens que j'ay par cy devanl escripl. El dicl-on que le Fevrier passe il meclra en execution cesie eulrcprinse, s'il n'en esl empesche par le roy cathoiicque , avecques lequel j'enlendz que le conle de Pelillan esl apres a s'ac- commoder, par le nioyen des Farneses , ne voiant comme aullroment se pouvoir sauver de la force el insidies dudici due, duquel la grandeur el puissance doyi donncr urabre el suspicion au did roy cailio- licque. II y a ung frere du pape (2) (jui; des le comrnence- nienl de ce ponlificai, voului venir a Ronime ; niais, eslant en chemyn, ful conlremande de sa Sie, qui de longiemps luy porle pen d'amylie, el encores moins a sa femme, pour quelques disputes qu'ilz oni euz k cause de la succession du feu marquis de Mari- gnan, que le pape prelendoyi que son did frere el sa belle sceur luy faisoienl perdre par moyens pen louables, jusques a les arguer d'une supposition de (1) Petit port ct ville sur la mer Tyrrhoiiieime, pres du monl Argenlaro. (2) Pie IV ( Jean-Angelo Medici ou Medichino ) cut rjiialre freres : Jean-J.icques, cree marquis de Marignau par C.liarjes V, qui avail epouse Maria Orsina, fille du comlo de Ppligliano , el qai niourut en 1555; Jean-BapUsle, morleii 1545; Gabriel, raort en 1531; el Aiigusle, marquis de Marignau apres son frere. Nous avuns parte plus haul do scs sceurs Marguerite, marioe a Gilbert Borroiuce, ll^ du nora, el Gtaire, femme de Wolgang TLcodoric Slllich , seigneur d'Allai-mps. — 112 — par!. Toulc^loys m.iintenaiil I'on did que lo did fiere viei)dra ;i Rcmnic ; ol se faicl ccsle reconcilia- tion par riiilerces^ioi! dii ducde Florence, qui rcmonstra a sa Sic que, entrc sc.s aulires parens, ses principalles Caveurs so doybveiit adresscr princi[ia!len^.enl a ceiilx qui porienl son iiom, comme faict seulle en loute sa race une iille des dessusdiclz, aagee de cinq a six ans, laqiielle il proniecl faire espouser a son filz dom Gar- eye (i). El esiime-roii que cesle praticqiie se lace par iedici due, pom- reculer les Borromecs ei avoyr dii loul a sa posie If [)a(ie el faire besongnes soubz coulleur du diet mariage : ie(iuel on ne eroyl pas qu'il ayl in- tention d'eflocliior jamais, non plus quo celluy de sa Iille , qu'il debvoyi donner du vivant du pape de Monte (2) a Fabiauin , son nepveu; el en furent les fiansailles celebrees avecques grande allegresse. Main- icnani il luy est si bon lulenr el prolecicnr qu'il !a faicl rendre redevable a la cbambre de plusieurs sommes, pour le pavement desquelles ledict Fabianin bailie les (1) Garcias , le 6° flls que Cosine I eut d'Kleonore de Tolede, naquit en 1547 et mourul en 1562, de la peslc, suirant les uns, de la main de sod perc, suivanl les autres, apres avoir tue lui- merae le cardinal Jean , son frere. Alfieri a tire de ces eyene- ments sa tragedie de Dom Garcias. (2) Jean-Marie Giocchi, de la familie dcMoDlediSansovino, dans le diocese d'Arezzo, cardinal en 1536, pape de 1550 a 1555, sous le nom de Jules III. Son frere, Baudouin, prince de Camerino, eut trois Gls : Jean-Baplisle, qui ful tue au si^ge de la Miran- dole ; Fabieii, dont il est ici (juestion et qui mourut en France, au siege de Chatelleraut ; et Innocent , cardinal, dont nous avons deja par'e. Cosine V eut trois filles : Isabelle, nee en 1545, mariee k Paul des Ursins, due de Biacciauo; Lucrece , nee en 1542, mariee a Alphoui-e li'Est II, due de Feirarc ; ct Viiginie, mariee k (Jesar d'Est, due de Modciie — 113 - pubis el vignes qn'il a a Rommc , doni )e did due s'appropryc, s'accommodani le pape a lous les moyens qui soni pour Ten saisir et asseurer. L'on lienl aussi pour ceriain que le prince de Florence viendra bien losi baiser les picds de sa Sleio. Suivant ce qii'il m'esl ordonne, je n'ay failly de parler au pape de la restiuiiion des vingi quaire mil cscuz \ol!ez par !e comic do Baigne (1); comme j'avoys desja f;iici des I'osle passe ; eslani mon frero par Acqh ; el en manday la respooce par le memoire que je luy bailiay a son pariemeni. Maintenani le pape m'a did ijutt le due de Florence I'aisoyt office en faveur du comle de Baigne, a cc qn'il fcnsi resinbly en son esial, se- queslre es mains de la chambrc; el, voulant sa dide Slete que j'en parlasse au did due, affin que j'enlon- disse de luy comme elle ne luy acdordoyl rien que sauf le droyt el raison de sa dide Mte, je luy voulluz bien saiilTaire; el n'euz responco du did due que generalle, c'osl assavoyr qu'il ne vouldroyl faire poursuylie au- cune qui vint en prejudice ou desservice de sa Mle , mais qu'il ne lenoyl pas le i'aicl verifye conlre ledid comte de Baigne, ne qu'il feusl jusiemcnl prive par le leu pape Paule quart. Sur quoy ayanl respondu audicl due ce qu'il me sombia a prop;»z, je me reliray devers riostre s' pere el luy rcmonsiray comme, sans sorlir (i) Pendant I'exp^dilion de Sienne commandee par P. Sirozzi, en 16C6, Jean-Francois, comle de Dagno, qui etait an service du dnc de Florence ct, par suite, do lerapereiir, avait fait enlevcr par ses gens les fonds destines a I'drnnee francjaise. Ses biens se- queslres furcnt donnes i Antoine CarafTa, marquis de Montebeilo, et, apres la disgrace des CaraiTe, mis de nouvbau entre les mains de la Chauibre aiiosloliqtic, puis rcndus au comic Fabricio, apres la moil de son pere, sans lui rien idclamer des deniers enleTes au roi do France. — iMi - (1^38 lerincs de juslic*^ el raison, mil ne povoyl cslre mys en possession du did eslal de Baigne ou Monle- bclle, que nous ne feussions satiffaiciz de noz xxiin mil escuz. Sa Sle me respondil que, encores que la p )ssession en feusl baillee , cela ne I'empescheroyl poinl de nous faire justice; sur quoy je replicquay qu'il esloii temps de la nous faire , donl je la sup- pliois et requeroys de la part du roy , el de ne nous faire plus courir apres nosire esteuf, cstant la vollerye deuemenl el bien verifiee : ce que sa Sle me confessa bien, el m'asseura qu'elle ne nous mancqueroyl de justice. II ne tiendra de ma pari a Ten poursuivre el soliciler. C'esi tout ce qui s'ofTre depuis mes dernieres depesches jusques a ce jourdhuy ix* de Janvier 1560. XVI. Du 18 Janvier 1561 a nato X, [)ar I'ordinaire qui parlit le 19. Sire, ce qui s'ofTre a vous escrire depuis la de- pesche que je vous ay faicle par le s' de la Basiye, esl que le cardinal de Mantoua s'est excuse du lout de la legation du concile, el, quelque instance que luy en face le pape, monslre de ne la voulloir ne povoir accepter. Mercredy dernier, nostre did s' pfere lint- consistoirc, suivanl la supplication que je luy en avois faicie pour I'expddiiion des malieres de France qui traisnoienl trop longuement. La, propo- sanl le cardinal Reoman en Tabsence de Mons' le cardinal de Ferrare, lut I'ambassadeur de voire Mid pres I'empereur (1 ) pourveu de I'evesche de Rennes, (I) Bernardin Bochelel, fils Jc Guillaume Bochelel, seignour de Sassi, secretaire d'elal. Bcriiai;!iii avail die ambassadeur a Veaisc. li resigna i'eveche de Ucnncs, cq (565, en farciir do Berlraiid de Marillac. — 115 — noil sc'ullemoiu avecques descharge el juslilicalion des calomnyes el crimes h Iny faiilsemenl impulez, mais avecques grande recommandaiion de ses verliiz el honnos qualilez , qui oiil esle illustrces par la coiilrariele qui Iny a esle faicle. En ce mesme consisloire, les advocaiz el conseil des Caraffes demanderenl d'esire ouyz en cerlaines pro- ti'Slalions qu'iiz feircnl des indeues procedures el nul- lilfz qu'iiz preiendent avoir este commises par le gouverneiir de Romme en la facture de lour proces, ci en demanderenl acte pour leur scrvir enianl que de raison. Le lundy precedenl, qui csloyl le xiu° de ce moys, le due de Palliane avoil esle remne du cliasleau cl mys en lour de Nonno, ou ii csl encores; ses amys, enlcndans qu'on luy dcbvoil mener, me vin- dreul requerir de remonslrcr au pape qui luy pleust respecter aullremenl la qualiie du did due, raesmes a cause de vosire ordre, oulire ce qu'il esl nepveu de pape el a esle general de TEglise; el, ne voulani user d'aullre clemence envers luy , a loul le moins qu'il ne le misl en une prison fameuse el la ou se liennenl lous belislres el forCans. Je ne voulluz faillir h leur oblem})erer, eslimanl que lous oflices de pilie que je pourroys faire en sa faveur vous seroienl aggreahlos; mais il me somble que cela luy a de pen servy, eslanl desja iransporie au did lieu de lour de Nonne, ce pendanl que ses solicileurs esloienl chez raoy ; el irouvay le pape en sa premiere resolution de voulioyr venijer les charges, |)0ur apres user de justice ou misericorde, selon que Diou le conseillera. L'on a voulu proceder a la toriure conlre le did due, mais il n'a esle passe oultre a cause de Tindisposi- lion de sa personne, lanl de greveun; (luc do gonile, — 116 — nvecques quclque peu de fievro. Le cardinal Carafte est ciie li sentence an premier consistoire ou congre- gation, el dict-l'on que ce sera pour cesie sepmaine prochaine, et que, incontinani que ce faict sera conclud, le pape fera ung voiage jusques a Civiiaveche, soubz umbre de la voulloir faire fortiffier : et ce pendant les jugemens s'executeront conire lesdictz Caraffes , sur la vye ou condemnation desquelz il y en a qui font des (scommesses) en bancque, par faulte d'aultre passelemps. Je ne voy rien , Sire , en lout cela si certain qui ne puisse changer. Le due d'Urbin est tousjours icy, poursuivant le faici de Camerin, donl I'on n'a point encores veu la sentence : laquelle loutesfoys on tienl ceriaine coutre la chambre, suivant ce que je vous ay es- cript par ma derniere. Le pape est sur la depesche du Canebio, autreffoys agent des Caraffes en Espagne pour porter a I'em- pereur I'espee benisle a Noel dernier par sa Stele, qui a eu nouvelles comme I'evesque Commandon (1) arriva h Vienne le in'= de ce moys avecques la bulle du concile : laquelle le cardinal Moron m'a aujour- dhuy diet chez le pape que sa Mte Cesaree avoit louee el acceptee, et sombiablement le roy de Boesrae. Mais I'ambassadeur dudict empereur m'a diet au contraire que son inaislre n'en peull encores avoir did son opinion, pour n'avoir eu le loisir de la considerer, n'estans les lelires qui sonl venues de (1) Jean -Francois Comniendoni, ue k Venise en 1524, iveque de Zanle, nonce pres t'empereur Ferdinand I pour la celebration du coucile de Trenle, envoyp depuis avec la lueme qualil^ ou avec cellc de l^gat pres dc divers princes, cardinal en 1567, mort en 1584. — 117 — Vienne que du iin% el ne s'accordonl cellos qu'il a eues avecques le dire dudici Moron. Nosire sainct pere parle de fortiffier le bourg St- Pierre (1), Boullogne el Perouze, el pour cesi effect meet ung subside sur la raoullure du bled, a quoy les rommains ont reffuse de consentir; el y en a grand murmure qui , en mon advys, n'empeschera pas qu'i! ne soyt passe oullre , et que de cesle imposiiion sa Slele ne lire x\ m escuz de revenu en cesle ville, qui doybvenl servir a fonder des olTices el les vendre a dix pour cenl, pourveu qu'il se irouve des achapleurs, qui sera ung pen mal-aise sans le conseniemeni desdilz rommains, lesquelz Marc Anlhoine Collonne el le s' Jullien Cesarin (2) mec- lent peine de gaigner et faire qu'iiz s'accouimodeni a la volume de sa dicle Sleie. Vargas ne s'esl trouve en aucune cerimonye pu- blicque depiiys le jour de la creation du pape, deqni il se plaincl el did que, sur sa paroile el proraesse , il a receu cesle honle, centre la resolution qu'il avoit prise de n'y venir point, si nosire s' pere luy avoyi promys de me renger a aullre parly que celluy que je prins. Ilz avoieni conle sans leur hosie, comme le faici a monsire. Sire, je prie a nosire Seigneur, etc. De Romme, ce xvm' Janvier 1560. (1) On appelle Bourg ou Faubourg Je Saint-Pierre, ou encore ville Leonine, la parlie de Roiue qui s'ctend depuis le cLaleau Saint-Ange jusqu'a la basilique de Suiul-Pierrc inclusiveinent , et que L6on IV ferina do inuraillcs. (2) Julien Cesarini, due de Cita-Nuova, pere du savant Virginio Cesarini. — 118 — XVH. Du 16 Fevrier 1561 d nalo X, par Francois Leconle qui parlil le 18 (1). Sire , je receuz vostre depesche du dernier De- cembre le xxiir du passe , eslani lors le pape a Hosiia, ou il esloil alle le jour precedent: el en revinl le xxvi% ei, pour ce qu'il ful les deux premiers jours apres son arrivee , conlinuellement empesch^ en affaires et congregations, je ne pressay point aulirenneni mon audience jusques au xxviii% que je fuz vers luy, delibere de ne parler en fa?on du mondc de la bulle du concile ne d.e la reformation d'icolle, ains, suivant voslre commandemenl, remecire lout ce faict a quant la responce de I'empereur seroyl venue. Mais il n'esl possible d'escbapper qu'on ne parle de ceste matiere la, parce que, incontinant el a toulcs les foys que nos're s' pere me void, il y entrc comme il feist a I'heure, el avant que j'ouvrisse la boucbe me dist qu'il avoyl eu advis de ses nunces comme I'empereur louoyl el acceployl sa bulle el se remecloit du lout au jugemenl el volume de sa Stete, qui s'esbabissoyt grandement comme vous, sire, qui estes si grant el si puissant monarque el ne recon- gnoissez aucun superieur, vous remectiez el assubge- tiez a la discretion d'ung prince lemporel a qui il ne toucboit aucunemenl s'empescher d'ung Lei affaire , mais du lout s'en rapporter au vicaire de noslre S«' el Pere universel de tons, auquel la conduilte cl mode- (1) L'n exlrait de cetle lellre , en ce qui regard.? le concile dc Trcnle, ost publie avoc qiielqties varianles ou omissions daii^ los Mcmoircs de M. D., ou Instructions et Lcllres ties rois tres- chreslicns pour h ccncilc !)iodtoii point si liee ne astraincle dudici voeu el sermenl, (|u'elle ne s'en soil bien dispenseeen aullre endroil : h cola nostre s' pere enira en la plus grande collere que je Taye point encores veu, iion pns conlre nioy mais conlre son daliaire el Galois son subslilui, lesquelz il conmmnda d'csire appellez, les monassant bien aigremenl de les cbasiier, s'dz Tavoienl circonvenu el faici passer une lelle cbose, aciendu le commande- ment si expres qu'ilz avoienl au coniraire. El eslans les dessus diiz venuz, il se courroussa Ion anieremeni conlre eulx , el ne se vonllul appaiser jusques a ce qu'ilz luy eussenl verifie que veriiablemeni il y avoil en une permuialion de deux abbayes en Portugal enlre nng rellgiculx el ung seculier qui les lenoienl, mais estoyi celle qui passoyl de coinmamie en liltrc de plus grnude vallour ipic celle (]iii Nenoylcn com- — 124 — mande, quasi de la nioiciye, el esioienl les dalles pre- cedens le voeu faicl par nosire did s' pfere. Vray esl que les expedicions avoienl Iraisne quelque leraps, qui avoil donne occasion au nionde de parler que nosire did s' pere s'esloyi dispense de son did sermenl, lequei ii monsire bien n'esire pas delibere de rompre jamais. El me disl que, pour Dieu, je ne luy rompisse plus la lesle du did Lespan el disse h Mons"" le cardinal de Ferrare qu'il en fcisl de mesmes : ce que louleffoys je ne voulluz faire, pour ne le delourner de faire quelque oflice qui peust plus heureusemenl reuscir que le mien en favour du did s' de Charires, que j'ay longiemps adverly comme, oulire les dilTiculifz que cesl affaire porloyl en soy, ceulx h qui il en avoil commis la sol- iiciiaiion I'onl acheve de ruyner, pour I'inleresl parli- cnlier qu'ilz y avoienl, ne faisanl pas pour eulx qu'il reuscisi, el pourcesie cause onl relenu les lelires que le fi'u roy vostre frere m'en escrivoyi el semblable- meni celles que je debvoys presenter au pape de la pari de sa Mie el de la royne vostre mere, el ne me les onl baillees que apres avoir faicl ce qn'ilz povoienl pour gasler cesl affaire el accommoder les Icur. Sire, ie vi' de ce moys, le pape feisl venir vers luy Mons"" le cardinal de Ferrare el moy, pour nous com- muuiquer nne depesche de Monseigneur de Savoye (1), i qu'il se void par le did memoire et que los dessus ditz font entendre a bouche d'aullre part. II nie semble que nosire saincl pere avoyt a plaisir de se dcffendre el couvrir de ceste requeste sur vous. Sire, el voz ministres, disanl qu'il ne faull pas legierement faire aucun remuemenl au pays de Monseig"" de Savoye, de paourde vous donner quelque souspe^on el jallouzye; et euz opinion que sa Stele eust bien voullu que je (i) Dans les Alpes, au nord du raoni Vise. (2) Pragilas, Title du Haut-Dauphine, dans le Brianponois, sur lesconfins du Picuiout. Par le traite d'Ulrecht, die a etc cedee an roi de Sardaigne. (3} Enlre le moat Viso au nord et Ic comte de Nice au Sud. (4) Louis de Birague, auinnuicr du rui, abbe de Flavigny, apres le cardinal de Birague, son parent, do 1585 4 1592. — f-2r> — ni'y feusse oppose, cl si je ne m'abiisc, quasi me fe moiislroyl au dojcl en une secoiide foys-qu'elle m'ap- pella pour me parler tie eesl affaire. En qiioy loules- foys je me |)Ourro}s bien abbiiscr, si est-ce qn'il me le sembla ainsi; el n'eiil nostre s' pere aiilire responce de moy, sinon que votis, Sire, luy aurioz semblable obligation de ce qu'il feroyi en laveur de Monseig"" de Savoye ei de ses affaires, comme si c'esioyt pour Ics vosues mesmes, pourveu qn'il n'y t'usi rien qui vous prejudiciasl ; el que la ou il y auroyi de la double, le plus seur seroyi de ne passer oulire sans vous en adverlir. Sire, j'oubiiay en ma derniere depesche , qui est da xviii* du passe , a vous advertir comme , queiques jours auparavant, le conie de Saincie-Fyor (1), en verlu des Ifttres el commission du roy catliolicque, avoyl icy donne I'ordre de la Toison au due d'Urbin el i Marc Anihoine Coionne, suivanl ce que je vous escripviz |>ar ie s' de la Bastye debvoyr eslre bien lost Caict. Le diet due d'Urbin etl encores icy a la pour- suiite du proces de Camerin, pour la seurele du ju- gemenl duquel Ton a a la fin Irouve eslre expedient que le due de Parme feusl cite; el est piega party !e curseur qui a la commission de ce faire. Le cardinal Farneze moiistre d'avcyr quelque jalouzie de I'esial de Casires cl y a rcnforce les garnisons comme s'il craignoii quelque surprise. Celiuy de Messine (2) irespassa le in* de ce moys, el a le pape envoye de- vers le roy caiholicque demander son arcevesche pour (1) BosioSforza, 11* ne se conienle de la bulle du concile, d'aulant qu'il n'esl pas assez exprinie par icelle que c'esi continuation de celluy de Trenle ei non poind indication nou- velle; el ainsi le pape mosmes le m'a diet, conime aussi il Tambassadeur Vargas. Par la mesme de- pesche sa Mie cailiolicque se resseni grandeinenl de I'obeissance du roy de Navarre, receue en la salle des roys ; de qiioy le did Vargas monslre avoir grant plaisir, disanl qu'il I'a tousjours cmpesclie et debaiiu la dide bulle, et an coniraire que le conte de Tendilles a consenty ces deux poinciz si prejudiciables a son maisire el a louie I'Espagne. II semble que la venue du frere du pape soyl ref- froidye ei que Ics Borromees ayenl depuys le parte- meni du due de Florence gaigne cc point qu'il ne viendra point a Homme. Le mariage d'entre Tung des filz du conte de Conse (i), Tung des plus riches du royaulme de Naples, (1) Fabrizio Gesualdo, Il« du noin, prince do Vcnonse, luarie ^ Hieronyrap , 3e Glle dp Giberl Horromee et dp Marguerite de — 129 — el d'line nyepce do nosire s' pere , seiir desiiiciz Borromees, se lienl pour quasi arrcslci el conclud. Celluy d'cnire le nepveu du cardinal de Sermoneile (1) el la seur de Marc-Aiiihoine Colonne (2) se doybt consommer en cesle ville Dinianche prochain. Sire, je liens cesle ddpesche preste pour la faire pariir inconlinent apres que les legatz du concile soronl faiciz. L'occasion de cesle lardile et dilaiion esi le desir que nosire s* pere a que le cardinal de Manioua accepie cesle charge, cc qu'il n'a encores vonllu faire, qiielque inslauce et commandemenl que sa Sie luy en ayi laid. Mainienani on aliond la res- ponce de ce que le s-^ Jullien Cesarin, qui esl alle k Manioa de la pari du pape, aura faicl avccques le diet cardinal, duquel ung secretaire doyi arriver anjour- dhny el apporlor la derniere resolniion de son maistre, pour inconlinani apres, au premier jour de consistoire, creer lesdiiz legatz. Ce pendant le pape a receu deux leltres de Tempereur du xv" du pass^, doni I'une est de la main de sa Mic Cesaree, I'aultre de main de secretaire. Nosire s' pere m'a monslre I'une el I'aultre; mais quant a celle de la main, je ne I'ay sceu lire, comme mesnies n'a sceu son ambassadeiir, encores qu'il soyt practic de leile lellre, laqueile il diet, encores Medicis , soeur du pape Pie IV. Alfonse , pere de Fabrice, ful fait cardinal et archeveque de Conza, en 1561, puis archeTcque de Naples. (1) Honore Cai'elan, due de Sermonette, !!« du nom, clievalier de la Toison-d'Or, neveu de Nicolas Caielan , qui fut cree cardi- nal a I'age de 10 ans par le pape Paul III, en 153G, et mouruten 1585. (2) Agn^s Colonne , Glle d'Ascagne, due de Palliaco. — Marc- Antoine , grand connetable du royaunie de Naples , vice-roi dc Sicile, chevalier de la Toisoii-dOr, niort en i5S9. — 130 - qu'elle ne soyl longue, ne povojr lire en moins d'lmg jour. Ellos sonl louies deux en latin, comme vous. Sire, verrez par les coppycs que je vous en envoyray avecques la presenle, m'ayanl asseure le pape de les me bailier apres la crcalion dcs legalz. Par les dicles lellres, Sire, noslre did s' pere lieni pour cerlaio que i'empereur ayl absolument approuve I'indiction du concile, telle qu'tlle est portee par la bulle. Vous, Sire, en scaurez tres bien juger par la lecture d'icelles, qui me gardera de vous en diro aultre chose, sinon que j'en ay bien voullu conferer avecques I'ambassa- deur de I'empereur, qui m'a diet n'avoir aultres lettres de son maistre, sinoii la coppye de celle qu'il escripl au pape de main de socreiaire, et semblablemeni de la responce que le diet empereur a bailie par escripl a I'evesque Comuiandon ; doni il lire en somme que I'empereur, comme Ferdinand, approuve la dicle bulle el veuli lotallement suyvre et adherer h la volume du pape, et promect de faire tons offices a ce que toute la Germanyo s'y accommode, niais que comme empereur il ne peult parier jusques a ce qu'il ayt eu la responce de ce qui se sera negolye par les nunces de nostre s* pere et par ses ambassadeurs, avecques les princes asst mblez en la dielte de Naumbuurg. Et au surplus est le susiiict ambassddeur tousjours en opinion, sui- vant ce que portc mes precedcnles depesches, que si le pape ne doclaire que ce n'est point continuation mais indiclion nouvelle, ou bien que les matieres de- cidees a Trenle puissent esire reveues, la dicle bulle difficilement sera accepiee. Siir ce je luy ay demand^ si, au cas que le papo feist I'une des declarations sus- dictes, au inoiii-; devious esire assenrcz que la dicle bulle soroyi accopiee de Tempcreur. A (pioy il m'a — 131 — iospondu comme sa Mle Cesaree liiy ayani bailie com- mission de poursuyvre ung conciie indict de nouveau, s'esl par ce moyeo obligee de le recevoir el no le peiili reffuser puisqu'elie le demande. El esiani concede par le pape que ce qui est faicl a Trente soyl reveu, eW*' a le mesme effect de sa demande, d'auiant que la dilficulie el differance d'ung nouveau conciie h nng continue ne consiste en aultre poinct que cesiuy la. Vous, Sire, devez avoir nouvelles plus amples el plus certaines de la voltinle du did empercur par vostre ambassadeur resident pres de luy. Quant a nous , nous n'en atiendons point icy, au moins touchanl ce poind qui nese peult terminer qu'apres la dielle deNaum- bourg (I), que au comini.'nqement du moys prochain. Sire, ce que dessus est prest des le xiii" de ce moys. Le soyr precedent esioyt arrive L'Olivo (2), secretaire du cardinal de Manihe (o), apres ioquel avoir ouy sur les ditficultez proposees p.u- son maislre, le pape, sans aulire dilation se resolui de tenir incontinanl consis- loire, comme il feist des le lendemain xiiiie du present, et feist legalz du conciie le cardinal de Manthe el le cardinal Puteo (4) qui jnsquos icy s'en esioyt tousjours excuse; h la tin il a este contrainci d'obeyr, encores qu'il soyt au lid h cause de la lievre, non sans danger de pis, qu'il a eue ces jours passez ; el , pour ce que Ton nescayts'i! pourra estrepresl d'heure, ne porter (1) La dielp fut ferm6e le 27 Fevrier de cette annee et indiquee do nouveau pour le mois d'Avril suivant. (2) Sarpi lappelle Camille Oliva. (3) Hercule de Gonzague , cveque de Maiitouc des I'age de 16 ans, csrdinai a 22, en 1527. Le pape Pie IV le fit son premier legal au conciie, mais il mourul avaiil la fin , on 1663. (V) V, la uole iiage 39. — 132 — la peyne , Ton presume que h ces prochains quaire temps le pape fera une promoliou, de laquelle il poiirra lirer ung aullre couple de legalz pour suppleer h I'ab- sence qui pourroyl survenir de ceulx qu'il a desja creez, a celle tin qu'il n'en ayl point de faulte. El monstre noslre s' pere avoir grande envye d'achemyoer bien tost le diet concile, duquel il a faict commissaire I'evesque de la Cave (1), prisonnier pour la religion du temps du pape Paule quart, et pariani par commune presumption tenu innocent , et est parly pour Trente des le commancement de ce moys pour preparer cc qui est necessaire pour la celebration d'iceiluy. Sire, ayant h depescher ce courrier, j'ay bien voullu voyr encores le pape, lanl pour scavoir s'il avoilquel- que chose h me commander, que aussi pour relirer la coppye des lettres de I'empereur , dont le secretaire Ptolomee me faisoyt difficulte, et semblablement pour presenter a sa Slete la letlre que vous, Sire, luy escri- vez en faveur du due de Palliane, el faire les offices qui me sent commandez par voslre Mie. Je n'euz au- dience jusques h hyer au soyr; et, quant aux lettres de I'empereur, le pape me dist que sa Mte Cesaree s'esioyl plaincle de ce que aucunes de scs lettres k sa Stete, pour avoir passe par plusieurs mains , estoienl & la fin tombees en celles des proteslans, a quoy elle n'avoit prins plaisir ; el pour cesle cause sa dicle Stele voulul que je me conieniasse d'en avoir encores la lecture , comme j'euz par les mains du secretaire Piolomee, qui me dist en avoir par cy devanl envoye les copyes h Mons' de Viterbe (2) par la voie de Gennes. Ce dont (1) Jean-Tliomas de Saint-Felix. (2) Alors nonce en Espagne. — 133 — il me peull souvenir desdicles leilres , ouUre les pio- poz communs el generaulx conlenans plusieurs offres el demonslralions d'amilye el bonne volume, est que I'empereur promeci d'envoyer ses arabassadeurs au concile, qui esl en mon jugemeni le principal point sur quoy on fonde son acceptation : au demourani supplye le pape de voulloir assisler en personne au diet concile el d'envoyer particulierement devers les princes et prelatz catholicques de la Germanye, pour les inviter h y venir. Vous, Sire , Irouvcrrez avecques la presente la copye de la responce baillee h I'evesque Commandon, dont cy dessus esl faicl mention. Je I'ay eue d'ailleurs que du pape el en ay faict pari h Mons' le cardinal de Ferrare. Quant au faicl du due de Pailiane, apres que j'euz diet tout ce que je sceuz el peuz, pour mouvoir ung cueur h pitie ei compassion el h respecter la qualile et le lieu que a lenu le diet due, et surtout voslre ordre dont il a este honnore, nosire s' pere me res- pondil que le diet due estoil cbarge de grans crimes, el que tous les jours s'en descouvroyl de nouveaulx, el lelz que, si voslre Mie en avoii la congnoissance, elle-mesmes en requerroyl la punilion ; que sa Stele louoyl I'office que vous , Sire, m'avez commande de faire , qui ne povoyt sinon ayder audict due en- vers lequel elle useroyl de loute la misericorde, nies- mement pour le regard de voslre ordre , que I'honneur de Dieu el le sien el la justice pourroient comporter; el en lout evenemenl auriez communication du proces qui vous en jusliOeroil la fin de telle sorle que vous, Sire, loueriez el approuveriez ce qui en aura este faict. Pour le moins. Sire, ay-je obtenu que, en favour de voslre recommandaiion , lo did due, suivani la grande — 134 — instance que nren faisoiont scs parens , a csle romno de lour de Nonne et remys au chasleau Sainl-Ange, en lien boaucoup plus honnesle el commode ; et luy ont esle rendnz de ses serviienrs qui luy avoieni esie oslez. Quelle sera I'yssue de cesle iragedye, je n'en puis juger , sinon que les choses soni bion advancecs pour s'en rclirer. Sire , la nouvelle de la mort du feu cardinal de Lenoncourl (1) arriva icy par ung courrior de I. yon des Tunziosme de co moys ; sur quoy ayanl enlendu comme plusieurs cardinaulx conseilloicni au papc de pourvoir de son arcevcsclio d'Arles le cardinal Reoman, je m'on allay incoiilinanl devers sa Stele que je tiouvay en opinion qu'il louchoii a elle d'en disposer, fondant son droict sur ce que vous, Sire, n'avez point encores d'indultz et que le did arcevesche est en terre d'obe- dience. J'ay dispute par deux foys ce faict avecques sa dicie Stele et a la fin obtenu qu'elle n'y touchera que premierement son nunce n'en ayt parle a vous, Sire, et enlendu voslre volume : qui me gardera de vous I'aire plus long discours de nosire dispute, sinon qu'il me semble queUiues raisons qu'on me puisse allegucr au contrairo, que le pape sans vous, Sire, n'en peult disposer, ailendu que c'esl ville de guerre el lymitrophe, el ainsi, comme je luy ay diet, de nosire temps assiegee par Tempereur Charles : et ne faict au contraire le dire de nosire s' pere que vous, sire, n'avez occasion de vous plaindre qu'il vous bailie personne dont puissiez avoir double ou suspect, pour (stro le did cardinal Reoman francoys el de vos (I) Itobeit de LcDoncourl, eveque de Chalons , puis arche- veque d'Ailes, d'Einbruii, de Toulouse el eveque dc Metz, cardi- nal en 15^8, morl le 4 FcTrier 1561. — 135 — subjeclz el (ideles serviteurs, ce que je oe veulx pas nyer. Mais a ce que je respondiz h noslre s' pere que, on faict d'Estai, c'esl a vous, Sire, a faire ellcclion des personnes confidenles , sans vous en remectre a la conscience d'auliruy. A dire la veriie, sire, le diet Reoman s'y comporle tres modesiemenl el did qu'il ne veull bien en quelque pays que ce soyl qu'avecques voslre consenlemenl el bonne grace. II esl en vons, Sire, de me commander quanl il vous plaira que je recherche le pape de vous ociroyer les induliz el briefz concedez a voz predecesseurs ; car, a ce qu'il me semble , il n'allend que d'en eslre prye el ne puis croire qu'il los refftise, m'ayanl dcmande, quanl je luy en ay parle, si mes depesches porioienl de luy en faire requesie. Je ne Iny ay ose dire que ouy, de paour que d'ailleurs, sachanl que non, il m'eslimasl ^ I'advenir ung menleur, el pour cesle cause ne luy on ay parie que de la fagon que je vous ay par cy devanl escripl. Sire, je prye h noslre Seigneur qu'il vous doinl la grace de regner longuemenl el heureusemenl en pcr- leclion de joye el bonne same. De Romme, ce xvi« jour de Fevrier 1560. Sire, j'ay depuys recouvcri la copye de la lellre de I'empereur au pape, laquelle jo vous envoye en ce pacquel. XVIII. Du 23 Fevrier 1561 a nalo X", par ung courrier do marchant. Sire, s'estanl preseniemeni offorie la commodiie d'ung marchani qui deposche en dilligence h Lyon, je vous ay bien voullu par cello courio loiiro informer de c — 136 — cc qui sft pr6seiile dopuis rna deinieie depesclie, qui parlil d'icy le xviii* du preseni, qui esl que depuis cinq ou six jours Ton s'esl apperceu que, la nuycl, il est onlre en Romme quelque nnmbre d'hommos avecques armos, el mesmes aucuns porlant corselelz : qui faicl ymaginer h plusieursque ce sont gens donl le due de Florence faicl amas secreliemeni pour s'en servir a I'entreprise de Peliglian, ou que le pape les face ainsi venir pour seurete el main forie en faisant quelque execution sur les Caraffes, ou bien en esia- blissanl le subside sur la farine que je vous ay cy devanl escripi avoir esie accepie el se lieve aujour- d'huy, mais non pas de la fagon que enlendoyi sa Stele. Je ne trouve pas , Sire, une des susdicles opinions bien fondee ; car, quant a la premiere , le come de Peliglian el les siens qui onl continuellemenl I'ceil au boys el ne faillenl a loules les moindres paours el doubles qu'ilz onl de rccourir a moy , mainlenani ne me disenl ung seul mol. Au regard des Caraffes , quant le pope auroyl desseing d'en laisser faire la justice, encores que la longueur de leur prison ayl men quelques ungs a compassion , si esl-ce que le nombre des offensez par eulx esl tel, et y a lani de gens el des plus grans si inleressez en leur affaire, que sa Stele ne doyl avoir paonr que bonne el seure escorte luy mancque, quant il vouldra proc6der a quelque ri- goreuse execution, non seullemeut dedans le cbasieau et en prison ou se jusiicienl par degh les gens de qnaliie, mais en public el en telle place de Romme qu'il luy plaira choisir. \'A a aussi peu d'apparence que ces gens de guerre vieneiii pour coniraindre mainlenani les Romains a accepter quelque nouvelle gabelle , — 437 — pour asspz de raisons qui nc mcritenl esire e&criptes. Qiioy qu'il y ayi, le nombre dos soldalz est fori peiit, t'l, pour nne cenleinc d'liommes en loul, veuz en di- verges irouppes , le bruyl s'est cschauffc el a accreu ies ciiost's sans pr( poz, Je peiiseroys pluslosl que ce i^oiem des gens qui se \onl embarquer pour Malle en quelque endroici qui leur a esieassigne, le plus secrei- temeni qii'ilz pcuvent, de paour que Ies corsairesayenl advis do ieur passage. Au surplus, sire, ilz onl icy nouvelles de I'arrivee des nunces de nosire s' pere a la dieUe de Naumbourg, el me dist, hier, I'ambassadeurde I'empereur qu'il en- lend que cbacun des princes y assemblez a did aus diclz nuncis que, csians la, ilz no peuvenl negolier que en public ei en rassembleo generallc ; el que, s'i!z onl quelque chose a (raider parliculierenienl avecques eulx, il fault que ce soyl cliez eulx, ou ilz Ies orronl, quanl ilz seronl de relour ; el que Ies nunces avoient reffuse d'esire oayz publicquemcnl. Mais quelle, a la (in, en a esic la resolution, lodici ambassadour did ne la scavoir encores. Je trouvo le papc ung peu adoulcyau faiddu due de Pallian , el seinble plus enclin a luy donner sa grace, depuis Ies oftlccs el record/ que j'ay faictz on nom el par le commandcment de vostrc Mie. Le cardinal CaralTe print ung nouveau delay de compa- roisire i[ sentence a la congregation qui pour son re- gard ful lenue le xx' de ce inoys ; el I'ul le lerme pro- roge de cinq jours , qui en dureronl bicn dix, car on Ies compte utilemenl. Ce terme la passe, je croy qu'on ne luy en reffdzera pas ung aulire : el medisi, I'aulire jour, le pape qu'il ne leur veull donner occasion du monde do re plaindie qu'ilz ne soienl iraiclez en loule doulceur que la jusiicc peiill comporter; el quanl au XXVII. iO — 138 — due, qu'il luy fcra le mieiilx qti'il poiirra pour Thon- neur de vosire Mle el de son oidrc. Touledoys, n'esloyt encores bieii resoUi de ce qu'il en avoil a faire ci prioyl Dieu de le luy conseiller. Sire, je prie a noslre Seigneur, elc. De Romme, ce xxiii° de Fevrier 1560. XIX. Du 6 Mars 1561 d nalo X, par (le Gabin) qui parlyl le sepliesme au soir, neuf heures. Sire , je vous cnvoye avecques cesie depe^che la lisle des c.irdinaulx creez le xxiii^du passe, desqnclz Moos'" le cardinal Salviati (1) a esle le premier, n'ayanl noslre s* pere voullu proceder h la nomination ou proposition de pas ung des auhres, que cesluy la ne feusl premierement arreste, avecques declaration ex- presse qu'il preccderoyt ions coulx de sa promotion, dont allanl lis choses par Tordinairo, selon la couslume el le reng el le lemps qu'il esl evesque, il n'eusl esie que le sepl ou huicliesnie. Je me suis irouve, comme plus ancien evesque, le ill' en ceste Irouppe (2), eslant appello h ccsl honneur par nostre s' pere, non par mes vcrluz et meriics, lesqucls je scay estre nulz, mesmemenl envers sa Slete, mais par la senile recom- mandaiion ct r(queste que en a faicl la royne vostre mere, qui d'autanl plus m'oblige a consommer loul le resle de ma vye el, s'il est besoing, mourir pour le service de vos Miez. (1) Bernard SalTia'.i, Florentin, grand-aunn6nier de la reine Catherine e de la laire resoubire ii ies depcscher lous — U2 ~ deux pour yaider regualiie ; niais Tamviie el I'iii- telligence cstoyl si mauvaise enire les deux ireres, qu'il n'y a eu ordre de les servir a piopoz, qui a a la maiiere bieii difficile de soy adjousle as^^ez de difficullez. El a la liu de ceste liisloirc esl(5 idle, que ce matin, a Talbe (1), Ton a Irouvc le corps du due au boul du |)onl Saincl-Ange, en une bierc couverte de velours noyr , el a ses deux costoz a lerre, sur un drap uoir , les conle d'Alifa el Leonardo da Cardine, ayans tous Iroys les lesles Irenchccs. Quanl au cardinal, j'ay depuys sceu comme , sur les ueuf heurcs de nuycl, a la mode de Romme , il avoysl esle juslicie et esirangle au cliaslcau , ayant lousjours inonsire courage jusqucs a la fin el sans irop s'eslonner de la morl : ce que n'a pas faicl le due, nc a la morl ne durant son proces , ne de- mandant depuis quelque temps que la vye , a la eharge de lenir prison perpetuelle ou de se I'aire hermyle ou moyiie, pour faire penitence de ses pechez el saulver son ame. Nous feusmes encores hyer, Var- gas el moy , vers le pape , chascun pour le sien, el revinsmes sans rien faire, comme le faicl a monslre. Quanl aux cardinaulx de iMonle (2), Napoli (3) el Pise (4), j'enlendz que bienlosl on vuydera leur (1) L'aube. — Voir, pour les details de cc pioccs et I'cxecution des coudaiuiies, I'llistoire generale des Cardinaux ( Pp.ris, IG17, jn-lo), t. IV, p. ■457 cl suiv. (2) V. la nole, page 37. (3) Alfonse, ne>cu du cardinal Charles el du due de I'alliano. II Cut ri'iach6 cl on lui permit de resider dans son archeveche de Naples. II mourul eu 16G5, a Tage de 25 aiis. Le marquis Anloaio, son pore, qui n'aTait pu elro saisi, subit un uaiiiiisscirtcnl |ierpetucl. '/%) V. Ia note , p. iil . ~ 143 — affaire, dtiqiiel je n'ay rions .ippriii'i tit! nouvean oiil- \rt' ce que j'en oy par cy devanl rscript a voslre M\e. Sii'o, le surplus ties nonvelle-. tie de^ii esl que. I'abbci Matiningiie (1) a este depesche par nosirt; s' pere , pour p:sser deveis la royne d'Anglolerre tl rinviier a envoyer au concile. L'assemblee secrecie de quelqiios soldalz, donl ma dorniere Iciire laid mention, so faisoyl par \v. s'' IIo- iiorio Savclie el ung Claudio Capisucco , geniiishommes roniains, pour esticuier, parlye par force et parlye par emhiee, cei tnines [)rinses de corps qu'ilz onl couire les s" Francesco el Henrigo Ursins, freres . dont le prcniiei- lua nng Aniinio Capisucco, Irere dudicl ClauJe, le siege vaccani apres la mori do pape Paulo Tiers, |iour ci; (jue le d'ci Aniimo avoii bnsionue ting de ses gens; ti Henrigo a aulriffoys blcsstj en cerleine qiierelle h; did Honorio Savelle: donl se seroyt erisui- vyes inlortnations cl lesdicles prinses dn corps, les- quelles ri'oni esie execuiees, ei sonl losdiciz Francesco el Henrigo evadez de leurs diasieaulx , on leurs en- nemys les esioienl allez assieger. On sonne icy le labourin pour faire gens ei les pas>or a Malte. II se did que le conlo Federic Borromee sera bientosi faicl goiiverneurde I'eslai de I'Eglise , avecqiies semblables gaiges (;l proufliciz que avoii le feu due de Palliau avanl (pie son oncle le pri\asl do gc^neralat, Je ne vov poinl encores rexeculion reelle du don de la priri- (I) Krome Martinciigiii. II oiKonirc d'attciidre en Flaudre les passc|)oi;s uciiianiit's i>iir rainhassadeiir d'Esjiagtie atijiies d'Elis.ibelh ; mnis rp)|(>-ci i-orsisla diMis son rofiis cie recevoir !c nonce, proiucst.mi , ionltfois, dVnToyi'i' uii .iiiil)^s>ailfiiir an coiicih'. — nil — cipaulle do Rossan (I) , accompagnee do xii mil tivres de re veil II an prounicl dudic cunio Feddric, no sem- blablemeni de la pension sur Tollede que debvoyl avoir le cardinal Borromce. M"" Roch Peregrin, homme con- gnen en vostre court pour agent do conlo dePelillan, est depuis sis ou sepl joui's party pour Espaigne, sans m'en dire mo!, qui m'a faict presiimer qii'il al.'oit la pour accommoder les affaires de son maistre avocques le roy caiholicqne; et n'on puys dii lent perdre I'opinion, combien que le s'' Flavio Urs^in, beau-frere diuiicl conte , m'ayt did qnc c'esl liiy qui la depesche . non pour les affaires dudicl conie, mais pour les siens propres, coneernans quelques terres qn'il tionl an royaulme dc Naples. Voila, Sire, ce qu'il se presento depuis ma lelire du xxiii* 6ii passe, a qnoy n'ayant rion a adjousler digne d'esire enlendu de vo.stre Mie, je finiray par prior a Noslre Seigneur, Sire, etc. De Homme, ce vi^ de Mars 15G0. XX. Du 2 Avril 15C1 d nato A', par ung courrier qui parlyl le 9. Sire, en allendanl que vous puissions faire ample depesche de lous les affaires el occurrences de ceste charge et ncgoiiation , nous avons advise de vous faire la presenie par ung ordinaire donl le parlemenl s'esl effort, el par icelle vous donner compie de ce qui esl passe depuys la venue de moy Ramboullet (2), (1) Hossaiio, principaule cl archeveche dans la Calabrc. (2) Jacques d'Angeuncs, seigneur de Rambouillct , de Maia- tcnon, clc, chevalier do fordre du roi , cnvoye ensuile vers les princes d'Allcinagne , moil en I5G2. Sa mission [ires du [>av9 — Un — arrivay icy le xxiiii' de ce moys au soir, el louleffoys ne veiz le pape jusques au xxviii", ne proc6iJanl au- ciincment cesle tlilaiion de la pari dc sa Siele, qui osi prince gralieux el accessible, mais pour csire le len- demain de mon arriveo la fesle dc rAnuntialion de Nosire-Dame. La jouriiee se passu en nne procession que le pape, accompagne de loiis les c;irdii)anlx el prelalz, faici de Saincl-Pierre jusq^ies a la Slynerve, la oil il donnele mariage 5 cenl pauvres filles (l),qui, couvertes et voilees , luy sonl prcsenlees par ceul dames romaincs; cl n'esl cesle cerymonye achevee qu'il ne soyl pres de vespres, de sorle que, pour ce jour, lout ce que je penz faire, ce ful de commu- niquer ma depesche a monseigncur le cardinal de Fer- rarc, lequel, Tayani Icueel bien consideree, fuld'advys que, pour la conservation dn droici de reng el prece- dence que vosire Mle a sur lous les roys chresliens, il esloyl requis de faire nne entree sokmnelle cl public- quo; el esloyl son opinion' fondee sur lelles ct si pui^- sanles raisons, qu'il ne se y (rouvoyl responce no replicque : qui ful cause que, le jour en suivani, nous retournasmts ensemble vers ledicl s'' cardinal, pour de rechef avecques luy consulier cesle maiieie el ar- rester les nioyens par lesqnelz pourrions mainlenir vosire reputation sans faire despcnce excessive. Cesle consu'iation, Sire, n'esloyt pas sans pliisieur>i avail pourobjel du pressor I'ouvertuic liu coiici'e, suiy.iiil Ic vani des cuts (1 Orleans. (V. Sakpi, Hist, du Cone, de Tiente , p, 427.) Nos IcUres porlcnl lanlol Ramboullel, tantut l^an]l)oillol. (1) Celte ccremonie se fait cliaquc anncc, par suile irune I'on- dation de Jean lie Torqueinada, Kspaguol , de I'ordre de Saint- Dominique , d'abord inailrc da patois , puis cardinal , inort en 1468. — ih6 — doubles el difliciillez ; el premieremeiit d'aiilanl que vous, Sire, rcquerez ie papo par vosire letlic de rece- voyr moy Ramboiiltel en qualile de vosire anibassa- deiir, sur qiioy esl a noler que le premier ambassa- deur d'ung roy depuys son advenemeiil a l.i coronne, selon la cousuime el observalion ancienne , erilre ptiblicquemenl en Romnie le myeiilx en onlre el ac- compagne qii'il peiill , el liiy vonl an devanl los nepveux el parens du pape, el scmblablcmenl lonie sa raaison, gardes el cbevaulx logiers el fanlerye, s'il y en a, les families ci mules de cgj-dinatdx parees ponli- licallerneni, ions ceuix qtii se Irouvenl de la nation, el les serviieurs et pariisans dii prince donl il re[irc- senle la personne. Ei cela laid , il fiiull qo'il compa- rois«e, lant en sa inaison que en public, dignemenl de la grandeur de son tnaistre, qui esl ung equipage de Ires grand cousi, anqnel il nn me sembloyl devoyr enlrer pour le pen de temps que j'ay a sojourner [)ar de§a. El, quanl a lai-ser ifiles cerimonyes, il ne se povoyl faire sans mecire vosire reng en evident dan- gler, aciendu les subtiliicz el caulelles de ceulx a qui avons affaire, niesines de ranihassadenr Vargas, (pji espye loutes les occasions qu'il pi'uli, comme vosire Mle esl Ires bien informee, de nous surprendre el irou- bler vosire possession: a quoy, Dicu mercy, jusques icy ilaesie lellemeni repare qu'il n'en a rapporie que vergongne; el loulell'oys ne monsire voulloir cedcr ne conl'esser la debie. Nous ne scavons encores, Sire, comme il se porlera a I'advenir. Pour le moins, ne laul-il doubter que, si par omission d'une cerimonyc on aullremenl, il peuli avoir qnclque umhre de pre- Icndre que moy Hamboillel no soye vray el legitime ambassadeur .^ans aucun coniiidicl, il ne Inuldra — l/i7 — adresscr une nouvelle qtierelle, laqiielie il nous ,i semblo debvoir evilcr pour lanl cl si clers respeciz qui ne merilenl aullremeiit vous osire represenlez, sachans que vous, Sire, eiilendez Ires hien qu'il t»'y ;i si mauvaiso querelle qui ne trouve dcs fauleurs ol seclaleurs; el vous ferions ung ires nianlvais service, si n'en fuyons toutos les occasiotis. El consiilerera vosire Mle, s'il luy plaisi, de quelle conseiiuencc luy esl la conscrvalion de son roiig cl digniie ancienne par de^a , nori scullement pour le regard de ce lien, niais aussi de lonie la chreslicnle , par laquclle une in- jure receue icyseroyl pour s'eslendre el avoyr la queue si longue que aulires affaires que celluy de la prece- dence s'en pourroieni bi( n senlir. Pour obvier a Ions ccs inconveniens, il nes'offroil qu'ung sen! n;oyen, qui estoyl que moy Ramboillel, pendanl mon sejour par de^;a, ni'absiinse du nom ei lillre d'ambassadcur. Mais, oulire ce que vosire rom- mandement , Sire, esl lout au coniraire, il esl certain que cela seroyl faire aux Espagnolz le jeu lei qu'ilz demandenl : car, ue nie disanl ambassadenr, Vari-as aura raison de me voulloir preceder , ei n'auray que luy respondre, si je me Irouve la oii il sera. Ei coni- bien que, cependanl que je seray par dega , il mons- Irasl ne me tenir [lOur ambassadenr, s'il ne fauldroyi- il , apres que je seray parly, do dire que je I'auray esie , a ce mesmemenl le favorisanl la leltre de vosire Mle qui me donne cesle qualiie , de sorle que je seroys conlraincl, ou de luy cedder en public , ou bien ne me irouver jamais en lien oii il feiisl, qui seroyl bien luy donner Irop davaniage. El mesmes, en COS jours icy plains de cerimonyes , ausquelles assislenl ordinaircmont lous ambassadeurs, de sorle — l/i8 — que sans indignile trop manifesle, je ne me poiirroys par lant de journees conlenir an logis , el qnanl Vargas luy mesme s'absiienilioict des cerimonyes, qui est le raienix qui m'en puisse advenir, ce luy seroyl tacitemenl confesser ce qu'd a si longuemonl cherche de faire , qui est que , pour la dispute de la pre- cedence, vosire ambassodeiir , Sire, cl celluy du roy caiholicquc vostre bon Irere s'abslinssenl lous deux des cerimonyes , et par ia vous gocler hors dc vosire possession. Sire , il nous esloyl bien aise de pourvoir a tout ce que dessus, si eussions eu argcnl el seen que vos- tre volume eusl este qu'on I'y eusl despendn ; mais I'incerlilude oii nous en sommes el la difTiculie qu'il y a a Irouver de quoy I'aire Tavance el a la recoiivrir quant elle esi faicle, cl les groz inicresiz qn'il conviont porter en aclendant le rembourccment , mecloiont grande difliculie en nosire icsolulion , qui I'lil a la fin que moy, cardinal de la Bouidaisiere, iroys voir le pape esiani en sa \igne, oil il se retira an pariir de la procession de la Mynerve , cl essayeroys de faire que sa Sieie s'accominodast h ce que, sans grande fanfare el despence, vosire ambassadeur feusl receu el recongneu d'elle en cesie qualiie : ce qui me reuscit par les bons el pruilens records de njon- dicl s' le cardinal de Ferrare, el enz assignation pour la privee el secrelle audience au lendernain, apriis les xxiiii heures, au pallais Sainci-Pierre, oil nosire s' pere esloil reiourne le soyr precedani. El quant a la publicque , elle ful faicle bier en bonne et grande conipagnye, ne s'eslanl Irouve pliislosi journee commode , pour eslre louies les aullres occopees en cappelles , signalutcs, consisioircs ou — 149 — congregations pour expedier les affaires de ceste courl avnnl la fesle. Sire, I'esperaiice que nous avons de la prochaine arrivee de Mons'" de I'lsle (1) , apres laquelle moy Ramboillet ne fauldray de parlir inconiinanl , sera cause que je remeclray a vous compter a bouche quel ayse cl conlentemenl nosire saincl pere a eu de la visite qui luy a esie faicle de la parlde voslre Mle, qui s'en peult iinaginer loules les plus grandes el vifves demonstrations que nous vous scaurions expri- mer; et comme, entre aulires choses , il ieul avecques ung singulier plaisir et admiration la letire que vous, Sire, luy avez cscriple de voire main, el de plusieurs propoz qii'il nons lint , lesquelz laissez avecques tout le surplus qui u'a pour ceste heure aucune haste , il nous suffira de vous dire : que, eii la premiere ei secreite audience, moy Ramboillet ne faillyz a exposer h nosire saincl pere tout ce qui est conienu en mon instruction [)0ur le regard du concile ; a quoy il res- pondii qu'il n'y avoit personne en la chreslienie qui le desirasl lant que luy, comme Ton povoyt assez juger par ses actions el fa^on de proceder ; et que, s'il y avoyt eu par cy devant de la longueur el dilation, elle •ne venoyt de luy , mais des diverses opinions des princes, pour ausquelles salisfaire il a bailie a la bulle de I'indiction d'icelluy la meilleure forme et la plus propre qu'il a pense pour tous los conienler, comme il espcre qu'ilz feronl el irouveront qu'il ne s'y po- voyt faire aultre chose ; el ne lauli point que i'on (I) GiDes de Noailles, ;ibbc dc t'Isle, suecessiTemenl amliassa- deur en Anglelene, en Kcosso , en I'ologiie, a Conslanlinople et a Rome, evecjue dc Dax apres son frere, ftonl nons parlerons plus bas, inort rn iflOO. — i50 — ayi paoiir qn'il laisse lien en arriere de toiil ce que, riionneiir de Dioii, la religion oi sa conscience sanf- ves , il s'y pourra faire de sa pari , ainsi que les elTeciz onl nionslre el monslreront encores de plus en plus a I'advenir. Sire , le papc avoit lenu les mesmes propoz que dessus a moy. Bonrdaisiere , en I'audience que, quel- ques jours aiiparavanl , j'avoys eue sur la depesclie que I'abbe de Sainci-Gildas m'avoyl apporice , iuy ayanl bailie coppie du rnemoire parliculier a cesl effect que voslre Mie m'avoil commande suivre, a fin que sa Stele comprinl au vray quelle esloyi voslre intention; comme aussi, je Iuy parlay de I'arcevesche d'Arles (1), de laquelle il me donna ires bonne in- Icnlion de conlentor voslre Mle, comme encores il a faict, el plus expressemenl en la derniere au- dience qu'avons eue enscrablement, nous promeclanl de faire en sorte que nous nous louerions de Iuy, et nous enjoignani au surplus de parler au cardinal Reoman et Iuy donner esperance que a I'advenir vous, Sire, serez pour 1(3 graiifiier on aultre en- droicl : cc que nous ne fauldrons de faire au pre- mier jour. Au regard des induliz, lant en I'audience que moy, Bourdaisiere, euz apres I'arrivce dudict S'-Gildas que en cesle derniere, nosire s' pero a remys loul ce ne- goce apres avoir ouy Mons' le president Ferrier (2), de la depesche duquel il est piega adverly , et a en- (1) II etait vacant, par suite de la raort du cardiaal r.obcrl de Lcnoncourt. (2) Arnoul du Ferrier, president aiix cnqueles, ambassadeur de France ati concile de Trenle, puis h Vetiisc, se fit caJTiniste, dovint sarJj-dos-scoam (!e N'avnrrc , et luouriil en 1585. ~ 151 — lendu qii'il vienl pour debalire pliisieurs poinclz jk deciddcz par les concordaiz, lesquelz il diet esire bien raisonnabled'eniendrepreallablementelscavoircomme il aura a vivre a I'advcnir avecqiies voiis, Sire, qui no lo vainqucrez jamais de courioisye, ct non seuilemenl debvcz aiiendre de Iny Ics graces par cydevanl coiice- dees a voz prcdecosseurs , mais loules aullres qu'il pourra pour aiigmcniation de voslre grandeur el feliciie; de laqueile , scion son povoyr, il prendra lous- jours la deffoncc, avecques les amies en la main quanl le cas y escherra, sans y cspargncr loutes les forces el faculiez qu'il a pleu a Dieu Iny donner. Par ainsi , Sire, quanl a ce poind, nous ne voyons poinl qu'il s'y puisse rien faire ne advancer jusqnes a la venue dudicl president. An demouranl, Sire, en loules les deux audiences, ung cbacun de nous n'a de f;iire entendre a sa Stele comme moy Ramboillet n'avoys a sesjourner icy que bien peu en actendanl la venue de Mons'' de I'lsle, par vous destine ambassadeur a ce s' siege, pour esire personnage si bien pourveu des suffisance el qualilez requiscs a une telle charge, que nous eslions asseurez qu'elle en auroyi grande satisfaction. El as cste co propoz reitere par deux foys a chascune des dictcs audiences , sur quoy sa dicle Stele ne nous a monstre signe du monde qu'il eusl aucune sinisire impression dudict S'' de I'lsle; seuilemenl a respondu que moy Ramboillel feussc le bien venu, el qu'elle me recevoyt comme vostrc ambassadeur , suivaiil ce que vous , Sire, luy escripviez, accompagnant cela de caresses el demonstration de faveur, sans aucuncmeni parler dudicl de I'lsle. Voila, Sire, torn ce que vous aurcz de nous, eu — 152 — aclendani que moy Bourdaisiere ayt dresso amples memoires des affaires donl j'esioys charge, pour los consigner es mains de Mons' de Remboillel, lequel cependanl je tie fauldray d'inslruyre el informer a bouche fideleraenl el le plus exaclemenl que je pour- ray, comme aussi feray-je le s"' de ilble, quanl il sera par deQu; de sorle que je me promeciz que I'ung el i'aultre vous en rendronl lesmognage qui ne dimi- nuera en ricn le conienlemeni qu'il vous a pleu par cy devanl, Sire, avoir de mes services: ce que je recongnoys de voslre singuliere grace el bonle, donl je confesse avoir bieu besoing pour excuser racs ignorances el intirmilcz. Du surplus, Sire, je ne par- leray poind, me reineclanl au jugement de lous ceulx qui en peuvonl avoir congnoissance, si je me suys bien el loyaulmenl acquicie el si j'ay rien oublye de ce que j'ay pcu on sceu pour voslre service el re- putation de voz affaires el grandeur, ce qui ne s'esl faici sans extreme travail et despcnce: a quoy je vous supplye Ires humblemenl, Sire, que avanl csgard, il vous plaise commander que je soys promplemenl salis- faicl el paye, lantde ma pension que pariyes advancees pour voslre did service, afliu que je paye les debles que j'ay pour ce faicles, avanl que les inlereslz qui me rongenl el consommenl ne soienl si fort mul- lipliez que je n"y puisse plus salisfaire, el que j'aye quelque moyen de vivre el m'cntretenir en" aclendani voz aullres benelicences el liberalitez. Sire, nous pryons a no^.tre Seigneur, elc. De Romme, ce ii* jour d'Avril 1560. Lacune. Ce qui suit est d'une autre main. ■— 153 — XXI. Mais 1563. Sire, loul laiigaige ne pouli eslre que superflti, la ou il y a niig lei porieur que Mons' de I'lsle, qui s'en reiouine (levers vosire Mie, a laquelle il ne scaura nioins rendie bon comple de tonics les occurrences el i)arliculariiez de cesle charge qu'il s'y est dignemerii el verlueusement acqiiiie Je ne faul- dray , Sire, en aiiendani I'arrivee de son successeur, faire ce qu'il vous plaisl me commander, sans ou- hlyer ny jamais espargner chose que j'aye, puisse oil vailie, pour voslre service ; el n'ayanl aulire ciiose a respondri' a voslre lellre du xu" du passe, je prieray h noslre Seigneur, Sire, elc. De Rome , ce vxv jour de M-ars 1S63. XXII. Mad.inie, je ne scaurois dire auitre chose en ns- p)nce de voslre lellre du xii" du passe, sinon vous remercyer ires-humblemenl de la sonvenance qu'avez de moy , qui cspere , avecques I'ayde de Ditu , vous faire congnoisire par effecl que, a bonne occasion, voz Mtez s'asseurenl de nion affection el devotion a voslre service^ Icquel j'auray louie ma vyc pour nion principal el seul object. El si je faiz quelque omission, elle me sera a [lardonner, pour ne procedder de laulte de soing el sollicitude, ne faisani pas eslai d'y en avoir moins que j'ay opprins, soil icy en alleudani la venue du successeur de Mons'' de I'lsle, ou, icelluy venu, en loul auitre lieu qu'il plaise a voslre Mle m'employer. II me semble, Madame, que, pour ceste heure, je lie vous doibve eniuiyer de plus longue lellre que de XXVI I. M — 15i - remetire loul a la suiTisance du s' de I'lsle, qui vous scaura bien ci par le menu rcpresenler toul ce que scauriez desirer d'eniendre de par degii, pour Ic lieu qu'il y a lenu, ou il n'a, a mon jugemcnl, rien oublye de I'office d'lin prudent el honorable ministre de vos dicles Mlez, a qui je prye nosire Seigneur, Madame, donner, elc. De Rome , ce xxvi* Mars 1565. XXIII. Sire, si les verluz el suffisance de Monb' d'Auxer- re (1), present porleur, vous esioienl iucongneuos. je m'efforcerois de vous en rendre lesmoignage, el sem- blablement do. ses depporiemens en cesle court, oil il a acquis repuiation d'un (res-prudenl el digue ser- vileur el minislre de voslre Mte; a laquelle m'asseu- ranl qu'il scaura rendre bon comple de loul ce qui s'y esl faicl et passe duranl le lemps qu'il y a sejourne , je ne feray la presenie plus longue que pour pryer nosire Seigneur, Sire, etc. De Rome, ce dernier jour d'Avril ISeS. XXIV. Madame , s'en relournanl devers vous , Mons' d'Au- xerre, preseni porleur, ce seroit a moy grande sim- plesse dc vous voulloir donner comple des affaires et occurrences de de?!) , lesquelles il vous scaura Irop et mieulx represenier h bouche : qui sera cause que je ra'en remeilray a sa suQisance, comma aussy feray-je (l)Phnii)peU de Lcnoncouil , J'abord eveqiic de Chdlons , puis d'Auxerie ; il sc demit dc ce dernier ev6che eii favour du cardinal de la Rourdaisiere , ai>paremmetit pendant son sejour a Home, ful l',iil cardinal en laSG, el inomut en 1591. — 155 — de ce qui louche moii pnrliculicr. En quoy je vous supply? tres-liuml)!emcnl , Madame, luy vouloir donner beuigne audience, et a mny tolle promotion que \osire honio voii^ suggerera. Uno chose ne piiis-je oublier, Madame, sans manqiicr h mon debvoir, qui est de vous lesmoigner combicn de ferveur el devotion j'ay congneu en lui pariiculieremeni envers voslre Mie, qui a cste cause que nous nous sommos [lerpetuelle- mciil Irouvez d'accord el bien uniz en tons propoz el alTaircs la concernans; ce que je n'ay sceu passer souiz silence, commej: fcray loules ses aulircs parties ct rares qualilez, qiiy luy onl acquis grand honneur el reputation en ceste court, qui en reste aussy bien cdif- fiee que d'aulire quelcor.qtie qui y fust venu de la pari de voslre Mie, laquellc je prye a nostre Seigneur, Madame, qu'il vueille conscrver'heureusemenl en par- faicie el longue same. De Rome, ce dernier jour d'Avril iS6/S. XXV. Sire, depuis qu'il vous a pleu me charger de voz affaires de de^a, je n'ay pas eu occasion de vous faire longues depesches, pour eslre parly d'icy au muis de Mars Mons' de I'lsle el le dernier du passe Moos'" d'Auxerre, qui vous auronl represenie a bouche loules les occurrences de de^a dura u I le icmps qu'iiz y onl esle; commc aussy scaura bien faire ce porleur secret de Mons' de Seure (1), que luy el moy dupescbons de- (1 ) Michel de Seure, chcyaiier, avail die arabassadeur de France en Angtelerre. I, a reinc Marguorito , fcnime dc Henry IV, en parle dans ses Meinoiics. l.es leltrcs de I'rosper de Sainic-Croix, puhlides par MM Oimher — 15G — vers vosire Mie, a la(]iiclle il no me semhle devoir faire rcdicle de ceque oscrivons ampleinenl a la royne: qui sera cause que, i-ans vous ennuyer de plus long propos, je prieray a nosire Seigneur, Sire, etc. Do Rome, le X'' jour de May 1565. XXVI. Madame, affin que soyez par cesie depesche a la verile infoimee en (juelz lermes se irouvcni a present les affaires de dcQii , el speciailemeni ceulx donl avez charge .Mens"' de Senre, je vous couleray succinc- lemenl loul ce qui esl passe depuis son arriveo, de laquolle, el comme je pense, du conlenu en son in- siruciion, nosire s' pere esloii adveriy ung jour ou deux auparavani, ainsy que je m'a(»perceuz par ung propoz que des lors nVen tini sa Stele, h qui je ne sceuz que respondre, sinon que je n'en avois rien seen, comme aussy n'avoys-je.' Ledicl advcrlissemenl esloit venu de Piedmont, en ung pacquel de Mods'' de Savoye envoye a Boullongne, el de la icy en diligence. Esianl donc- ques, Madame, ledict s' de Senre icy arrive le xxvii* de Mars, je ne le sceuz presenter au pape que le xxx' ensuivant , pource que le xxviii' esloit le Dimanche de la Passion, journee de long office a I'eglise. el le XXIX* fureni les obseques el oraison fune- tl DaD'}on (Archives curienses de I'Hist. de France), I'appcUent Scure. Voici ce qu'elles diseut de sa mission : « M. le chevalier Scure s'en va a Rome, de la part de S. M Ires- chretienne, pour supplier le pajc de donner la permission de vendre des biens-fonds ecclesiasliqtics pour cent mille ecus de rente, qui seroiil employes aux Jrais do celle guerre (13 Mars i{>63). » — 157 — bre (le fou Mods'" ile Guyse (i), dc soiie que loul ce que peiismcs faire en ces deux jours lb I'ul d'al- ler veoir Mons'' le cardinal Salvialy, pour conlerer avecques luy la dicle inslruciion. I e jour ensuivant, nous ne feismes que baiser le pied .'i sa Slele , qui , touie la malinoe , fui occnppee , comme encores elle fui I'apres disner, en une congregation en laquelleelle nous feisi enlrcr ei voulnt recevoir ledict s' de Seure en presence de xiiii on xv cardinaulx la sedans, adjous- lanl a cosle fovciir ung graiiculx et courlois accueil, accompaigne d'un langaige par lequel on povoil com- prandre le plaisir qu'elle avoil d'esire visiice du roy e( de vous, Madame, el rafTeclion qu'elle porie a voz Miez. El pour ce que cc n'esioil la lieu de negoiier plus avani, ell' nous licetnia ap.res ces cotnplimenlz, nous reniellani au premier jour, qui ne peusl esire le lendemain , pour ce qu'il ddivoil ce jour- la avoir consisioire , comnie il y eusl ; el la fui la senlonce pro- noncee conire Mons'' le cardinal deChasiillon (2), par l.iquelle il t'ul privc du cardinahil el de loules aulires digniicz, prerogalive? el preeminence, ensemble de ses benefices , el iceiilx declarez vacquans el ses biens confisqiRZ au proHiel de (]iii il app;irliendra. Quanl aux merites de la c:^.use, je n'en ay eu anlire notice, cl esl le loul deitioure secret enire li'S jug^'S, sinon ce que le pape en diet sommairemenl , concluant qu'il esloil convaincu d'hcresye bien veiilHee, donl il appa- roissoit lani liors du proees que par le jjroces , par (1) Francois (]« Loirainc , Juc do (luise , nioillp 16 Fdviiof i6C3, li'dti couji i](! ;.i-lcicl (jue liii avail lire I'oilrol de More. (.2) Odel (Ju Coligny, fiere de I'auiinil, ne on i5)6, cardinal eu 1633. II cmbrassa la rclorinc et sc in-tfia; riepouille de ses bene- fices, il mounit t-n \tiylolfTre en 1670. — 158 — fesmoignagi'S graus ci iricfragahles, nioines commeil mc semble par la depposiiion de riieureuse ei Ires chrestietine memoire du loy Fiancoys vostre fi!z ; el adjoiista sa Stele que ce qu'tlie en laisoil, csioii nou beullemeni da conseulemeni , mais aus^y h rinsiancn du roy, el que plusieurs princes el seigneur^, me=mes Mons' le conneslablc (l), oncle de I'accuse, avoii did au DODce resideiil pres voz Mloz que sa Sie ne pou- voii mieulx faire que de proceder coiiue hiy, qui meriioii d'eslre prive ei se>ereme!ii cliasiie de ses faulles. Qm fnl cause que Je iie vouliiz rieii dire a ^a charge tic dcscharge , oi pour le n-gard de ce faicl demeuray muti, laissani parler Ics aulires , qui lous generallenunu louereui granuemenl noslre s' perc , non louleffois sans quelque lacilc rcpreheiision de ce qu'il avoil lanl allendn, donl il s'excusa ; el sur ce or- donna au grand inquisiieur la present quil cusl i procedder conlre les aultres preiaiz atlainlz d'hercsye avecq-jes loule la diligence que la justice peull corn- porter. J'ay depuis enlendu de ceuls qui out veu les citations el deffaulx dcsdiclz prelaiz affichez aux lieux publicques, que ce soni Mes" les arcevesque d'Aix(2), evesque d'Usjis (5), Charires (4-), Valence ( 5 ) , (i) Anne dc Mantmorenpy (?) Jean de Sainl-Roraain, dc U familla ;lc SaiiU-Chaiuond. 11 se dt'init de son siege el moiiml eu I5G7. (3) Jean de Saint-Gclats, eveque d'Usez, .^ti 1531 , piir resigna- tion de son oncle. 11 s'elail inarie des I5'i3 li ass'.sia .in colloquo do Poissy, el inor.rtit en 15"'i , aprcs s'elre lelracle. (4) V. p. 6. (5) Jean de Montluc. frere du maiechnl Dlaise de Montluc . CTeqtie de Valence et de Die, employe dans diTcrses ambassades. II se maria secreteincnt et eut vin Gls , nomme Jean aussi, qui sicvint marechal dc France. II se tetracta et moiirut en lolS. — 159 — Olt'ioii (I) el Lesca (2). Aiicuns in'ont did que Mons"' (Je Ddcqs (3) y csl aiissy A dire vray, Madame^ j« n'en scay quo ce que j'cn ay oy dire, sans ni'en infor- mer, eslimafit qu'il ne ine seroil bien M?anl de faire aucun oITice pour eulx on mon nom , sans en cstre recherche , ci serois encores plus presompineux d'y emploier cellny de voz Mtez sans specialle commission. En ce mesme consisioire, le pape paria d'aiicnns qui ont seme mtg bruit de Iny comnie s'il peiisoil a la disso!tiii()n on suspension do concile, ce (pi'il did leur pariir de irop grande malignile, comme il appa- roisira par effect , el que son intention a lousjours esle el est encores a ])res('ni pln-^ que jamais de le finir fructucusemiMit ii fiiire une !)onn<^ el ligoiireuse re- formalion , a I'honneur de Dieu . bien el rcpoz de la chresiientc, el ;i cesie fin tendent loules ses cogitations ; deleslani an surphis une suspension comme ung se- cond crnciliemenl de noslre Seigneur Jesus-Christ. Le iendemain dudici coosistoire. le pape fnt lousjours enferme ime bonne parlye do iem|)S avecqdes ceulx de I'inquisilion , qui laid penscr qii'ilz esioifmt sur la forme el conffction de la seiiience donnee le jour precedent, de soite ipie nous n'eusmes que le jour ensuivani audience : en Inquclle so irou\erenl .Mes" les cardinal Salviaiy el evesqiie d'Auxcrre, nous ayanl semble qu'il n'estoil honnestede laisser ledicl cvesqne d'Aiixi rre, consf'ilier du conseil [iiive du roy, encores qu'il ii'eii fust rien porto par l.idicie instruciion ehpie ce (1) Claude Rcgiii, coiijciIIki- u'e i.i rciiic Margiicrile lie Navarro. Sn tiilj-abilile na I'll ) as (lo-nee. Hi Louis d'Aibrel, eve(itiH ue Lescar de 156() ii 1,569. (3) Franpois de No.iiilcs, atiibas.>i,'ide!ir cm Anglelcirc', a Honic, k Vcnisn el ;'i (luiihtaiitinoiiie, moi t <"!) i,S8.'>. — 160 — Fuy ens! eslc faire (lefravciir coniic raisoii el conlii; le rcspecl qui sc (Joil)l nvoiraux serviienrs dc vnz \llez En Ci'sie aiiilii;nco, .Mons' de Some exposa !)if'n an long le premier chef de i^on insirnciion , c'esi as^avoir I'esiat auqtiel il avoii laisso \oz afTaires , qui esioioiii en quelsques lermes d'accord, el puis lomba siir !a licence (I'alliener dii hieii de TEglise pour c. M. esciiz de revenn , sans rieii oniellre des raisons ei londeniens conlenuz en ladicie iiihtriiclion , aiiis le? lortiliians de plusienrs aniires !;ervan^; a la nialiere; ci conchid a la lin que, quelqiie guerre ou accord qiii se (Visl , cela csloil ie seiil rnoNcn de conserver le rcsle, qui anlre- nienl s'en alloil du loul perdu, an grand prejudice de 'a foy el religion caiholicqne , a quoy sa Sieie delnoii penser pour infiniz re>pelz la allegiiez. Ln respoiicc de nosiro s' pere cominenfa par une plaincle el doleance qu'iU'eisl dcs faiilles par lesqiielles il did que sommcs rcduilz en cc- misernbies lerines, lioni il senioii ung regrel el douleur infinie ; el did que, si I'on eusi crou les conseii el recordz par luy ilonnez,"de lionne lienre Ton pouvoil obvier a loul ce (jui esl advetiu; niais que i'on ne I'avoil \aulo laire, ne aemblablemenl accepler I'onVe , que des le coni- m'-'ncenienl de la rebellion il teisl , d'envoyer h voslre sccours son nepveu (I) legal avecqucs six mil Suisses ou Allomans el mil chevaulx elsouldojcr, lelouijusques a guenefinie, combien qu'il fusi charge de plu.^^ieurs aul- ires grosses despences , lani |)0iir la forlificaiioti des villes el [ilaccs dc son eslai que les hereliqucs el hu- (:) Fabrice Sorbplloni , gouvcriieur de I'elal il'Avignoii, sons Pie IV cl Pie V. Son pcre , J. -Pierre Serbolloiii , elait frerc de Cecile , mere de I'ie IV. - \6\ — giieiiolz moiiassent el braveni do Ics voiiloir venir assaillir , que aussy pour la doffenco d'Avignoo el ^pargno des- (liciz hiiguenoiz , iiinis aussy des calholicipits qui y onl faicl iing desgast incroyable ; et niosines une viile dtidici estal ful saccaigeo par les gcus de Mons' dri Suze (I), ['A cepcndani Ton n-fTusoil passaij^e a cenl c!u'v;!ulx qu'll cnvoyuil pour la consi-rvalioii diidicl Axigiion, do laqnollo di'ppcndoil cello do Langtiedoc cL Provence, qui, sans la despence qti'il y a t'aicle , csioienl en danger evidonl do se disirairo de I'obeis- .sance du roy. El, poiirsnivanl son propoz , did qu'ii failloil veoir quelle seroil cosle paix doiil I'advis cor- lain n'esloil encores veni), maiscn conroil dos nonvoHes pou avaniaigeuses pour la religion calhoiicquo ot bioii du royaunie do Franco. Quo ccsto dom.itnio osi do lreh-graiid(! consequence, iai;i pour lo laici en soy (juo pour rcxeniple (pii so [lourroil esiatidre. ijon siuille- iiieni a la France, niais encores ez auliros ujiions , oslani lo semblable dcniande par lo roy caiholicqoo pour la sonime de cent m. oscnz , el dopuis pour L. M., el maiuSonanl rcduiie a xxv mil livri's , ii la cbargo do reccompoijscr TEgliso an double en revenu d'auliro qualiie ; doni sa Mle calhoiicquo avoii esie refuseo, coninie aus>y a\oil esle reinperetir Charles, so:; pcic, d'une pareillo requesio. Failloil aussy cousiderer en quel lemps nous esiioii;', cslanl ung concile ouveri, aucjiiel il sembloil que \oulussions donnor loulo auc- loriie el relforor louies choses con! re les decisions dos aulires concilos, Ei h co proitos, disi (pio luy, e.-iimi, (1) Francois dc la Bauiuc, coiiile du Suze, geiioral pour lo p.n o de I'elal d' Avignon, depiiis gouveniciir |ioiir le loi dc l.i I'Kjvci.cs c( niniial dos njcrs du l.rvaiil, morl on 1587. — 162 — cesl liyver passe, malade, !es ambassadeurs de voz Mlez audicl concile liaicioienl, au cas qu'il moiirusi, d(3 faire nng pape h Trenie ; qui ne scroll eii somme que achever do perdre la roligion et confondre la chros- lienie par le moyen d'ung scisme. Ce propoz , Madame, ful fori long, cslanl desduil par sa Sic avecques beauconp de langaige, adjousianl ^ ce que dessus plusiours aulires clioses dont voslre Mie pourra eslre inrormce par Moris'" d'Auxorre qui esloil present : qui sera cause que je n'en feray icy re- dicie el viendiay a la conclusion , qui ful que sa Sieie ne nianqueroil jamais a voz Mlez , pour quelque lemps ou forlune qui vinl, de la fervenle amour el palernelle alTeclion donl elle les embrassera perpeluellement , favorisera leur bien , grandeur, accroissemeni el eia- blissemenl de leur auciorile el puissance par tous les moiens et forces que Dieu Iny donnera. El pour le regard du fjicl parliculier qui esloil en lermes , or- donna a Mons' de Seure de meltre ses demandcs par escripl, a celle fin qu'elle les peust considerer et luy faire responce. Apres que sa Sie eul finy, le s' de Seure reprinl tous les cliefz el propoz qu'elle avoil Iraictez, el y res- pondil de sorie que sa Sie eust occasion de demonrer satistaicle et bien asseure, lant de la bonne voulonte de voslre Mie envers la personne parliculierement de sa Ste que de sa resoluiiou h la conservation, de la foy el rtlligion calbolicquo et obeissance du s' siege apos- lolique ; luy faisani toucber an doigl el a I'oeil que la necessiie el violence du lemps I'a conlrainle de faire et dissimuler beaucoup de cboses que aucuns par ma- lignite, el aulires pour ne les bien entendre , onl mal prises el inierpreiees ; el que si sa Ste eust esie sur - 163 — les lieux, die eusl veu que voz MU'Z ii'eussciil sccu faire aulire cliose que ce qu'elles onl faici pour lera- poriser el se conseiver, el maintonir la religion, el lusl conl'esse que faire aullieuienl et-loil loul perdre el rujner, sans y plus esperer remede ne resource : dent il semhia que sa Sle rt^siasl salisl'aicle ; pour le nioins vous asseuray je , Madame, qu'elle en cusl occasion , ainsy que vous pourra plus aniplemenl ccriifller Moris' d'Auxerre , ii la siiflisance dnquel je remetlray loul ce discours , el semblablemenl ce qui louche le faicl de Monseigneur le cardinal de Bourbon (I), a qui j'en es- criptz par ce porleur. Voilii, Madame, ou nous en demourasnies pour cesle journee la. Deux jours aprcs, Mons' de Seure, combien qu'il sc Irouvasi de>ja mal, porta au pape ce qu'il luy avoii demande par escrij)L Mais, a caut-e (les sainciz jours oii nous tsiions de.-ja renirez, il ne le voulul aullrenienl inip(;rluner el se coiilenia de le melire ez mains du cardinal Courromee, doni j'adveriiz sa Sle en raccompaignanl a roflice: laquelle me did qu'elle y vouloil peuscr, el remisl loule cesle nego- lialion apies les fesle-;. Lesquelles pas>.ees , ej.ianl ledicl s' de Seure griefvemeni mallade, je ne failliz inconti- nanl de la solliciur de isous faire resjionce. II me senibia que sa dicle Sie avoit quclque plaisir de delayer, a qnoy le lemps el la maladye du did s"" de Seure la servoienl. Je croy que I'occasion qui lemouvoil dc ce faire, esloil le desir qu'elle avoii d'enlendre ccr- lainemenl la conclusion ou exclusion de I'accord , donl (1) li elait qiieslioii (!c lo maiier, pour placer le prince "de Navarre sous sa lulclle ct pour oter an prince de Conde I'espe- rance de parveiiir a la couronnc. Le cheyalier de Seure elait charge de solliciler les di»penses necessalres a cot cffel. ■— 161 — nous n'avons cu lien do certain que le xvii' ilu passe, par la venue de I'ahbe de Monlemcrle, depesclie h sa dicteSie par Mon^Me legal. Ainsy se passa le ivmps, me respondani nosire s' pere qii'il voulloil faire une congregaiion , pour commiioiquer avccques ses freres cesle maliere , a cause de rifi)porlaiice doiil elle esioil , el que cependani Ic chevalier se gneriroit. Je le sup- pliay de ne laisser, pour la maladye du chevalier, tlque I'un de nous pouvoil autaiH que lous deux en- semble. Cesle congregation , Madame , ne nous .apporia rien de clairie, ayaus respondu les cardinaulx qu'ilz y voulloienl blen penser el avoir lemps & se resouldre de ce qu'ilz debvoienl conseil'.er a nosire s' pere sur les deux poinclz par luy |)roposi z, c'es! assavoir le laict de rallienalion el ce qui concirne la dispense de Monseig^ le caiduial de Bourbon; el nV'usnics, en bomme, aullre responce, le xxv^ du mois passe que ledicl s'' de Seure Ires-loible el indispose voulusl aller veoir le pape, qui nous disi qu'ii ne pouvoil rtffuser aux diclz cardinaulx loisir dy penser, mais que bien- tosl 11 feroii une aullre congregaiion pour avoir leur opinion. II n'y eusl point laulle de remoi.slrance la dessus, que le loul desj)endoil de sa Sie, qui esioil maislresse ahsolue el n'avoii i'aulie de puissance ne de couseil el prudence en soy mesme , pour en sgavoir user selon la iiecessiie qui esioil evidenle. Estanl eu (in la seconde congregaiion lenue, nous eusme audience le vi' de ce mois, en laquelle nosire s'pere me feisl premicremenl quelque pcu d'cxcnse de ce que je n'avois es.le appele aux dicies congregations, qui n'esloil pour soup^onque sa dicle Sie eust de moy, quiaussybien enlendrois-je le loul du cardinal Salviaiy el aultres, mes amys, qui y esioicnl inlervenuz, mais — 165 — seullemenl pour la forme et la salisfaciion du college, a ce que nul nc peusl prelendre que j'empeschasse la liberie de son veu, estani icy principal minislre de vos Mlez pour Ics affaires desquclles losdicles congregations sefaisoienl expressemenl.Puis, conlinuant son propos, nous did que des deux congregations icnues, en la premiere les cordinaulx avoienl demande temps d'y penser ei no s'csloienl vouluz resouldre; en la se- conde, il confessoil luy nicsme d'avoireste cause qu'ilz ne s'esloienl point resoluz, parce qu'il veoyt bien qu'il ne s'en lireroit rien qui fui en noslre favour. Nous remonslra aussy que, cornme il no seroit hon- neste ne seur, mesme en cesle raison , de resouldre faits si importans sans la pp.riicipation et consenlemenl du college des cardinaulx, aussy estoit-il evident que parlye d'iceulx par scrupnle de- conscience, aucuns peult-eslre par passion, a celle fin que cesle conces- sion n'allasl devani celie que poursuil le roy calhoiique, et les aultres ayans csgard au public scandale qui par le moyen d'icelle se donneroit aulx peres du concille el aa resle de la chreslienle, la conlrediroient el I'em- pescheroient de tout lour pouvoir; el pour cesle cause, sa Sle n'a point voulu, pour cesle beure, es- iraindre trop fort ce negoce ne forcer les cardinaulx h y prendre resolution , ne les voyani lellement disposez qu'il se peust esperer qu'elle deust estre avecques la salisfaciion que sa dicie Ste desire h vos dictes Mlez, mais plus tost une cerlainc repulse el exclusion a la- quelle il soroit difllcile en apres de contrevenir et remedier. Davantage que , pour la facilile du negoce et solution des doubles que font les cardinaulx, il fauldroit es- claircir le college de ilexw poinciz, Tun de (pielle — 166 — soriedebiens sa Mie entend de faire allienaiion, c'esl assavoir si ce sont bicns feodaiilx ou biens simples, possessions riirales, ou aiiilres sorles d'immenbles. Le second est quelle maniere de recompense le roy pretend donner a I'Eglise, si ce sera en biens stables ou qnelque aullre sorle de revenu; pour ce que, selon la declaration que sa Mie fcra en I'un et en I'aulre de ces deux chefz, elle pourra trouver plus grande ou moindrc dilTicultd en ce qu'elle demande. Onl encores remonsire lesdictz cardinaulx qu'il faul- droil scavoir comme les prelaiz qui sont an concile preignent cecy, lant les Francois pour leur propre et present interest que les Espaignolz el aulires nations pour I'exemple , ayans raisonnablc occasion de craindre de veoir chez eulx bien tost une semblable concession, estans mesmemenl advertiz que le roy calholicquc Ta recherche il y a plusieurs mois : a quoy lesdictz prelatz d'Espaigne no se veullenl aucunement accom- moder; et , encores que le pape soit maistre el patron absolut , si esl-ce que lesdictz cardinaulx ne luy peu- vent conseiller, sinon d'avoir respect ausdiciz prelatz et n'exasperer leurs roeurs pour le mal qui en pourroil venir a toute la chrestienic. Oultre ce que dessus, ledicl college vouldroit bien aussy estre informe, au cas que la grace se feist, quel moyen il y auroil de I'executer de telle sorte que I'Eglise ne seniist trop grand prejudice, ne fusl deceue -et grevee plus que ladicte grace ne porieroit : en quoy il y avoil bien a faire el h observer I'egualite en lei cas requise. Pour la finale conclusion , notre did s' pere nous prononga que nous eussions a deliberer si voullions qu'il proposasl ce faicl en concile , pour ce que, sans — 167 — avoir ropiiiioii des peres y esians, le college ne voul- droii pas«c-r oulire; el de le forcer a s'eii resouldre promplemonl , il vcoit bien que lous les vcux nous seroienl coiilraircs ; el d'y procedder de puissance ab- soiue, coiiire le consenlemcni du did college, nous pouvioiis bien considerer que ce n'esioil la saison. A ce que dessus, le s' de Seure respondil que ['oc- casion qui mouvoil le roy catholicque a faire telle demande ostoit bien differenlc de noz necessitcz , si urgenles oi evidentos que nul ne les pouvoil ignorer el que la mine esloil apparenle, s'il n'y estoil pmmp- lemenl rcmedye ; ct que sa dido Sle veoii bien que lous subsides nous deffailloient , fors que ccsiuy cy. Au regard dos prelaiz frangois , il ne fault point doubter de Icurs bonnes vouiontez el consenlemcni; el au surplus , que Ton fera de sorte qu'ilz se conlen- leront de la recompense que le roy leur baillera. Quant a ceulx des aulires nations , qu'ilz n'avoieni que veoir en ce faicl. Quant a I'execulion, qu'elle se fera en loutes les series qu'il plaira h sa Ste adviser pourl'in- demnite de I'Eglise. Au regard de la quaiile des biens, qu'il ne fault doubter que ce seronl ceulx desqnelz I'on irouvera que I'allienation sera moins prejudiciable a I'Eglise ; el qu'il sera bien aisc de pourveoir a lout , pourveu que I'on soil asseure do la dicle concession , sans laquclle sa Ste vcoit bien en quel eslat estoil le royaulme de France el semblablemenl la religion, des- quelz il luy plaira considerer le danger el subvenir et aider a la bonne Toulonte de voz Miez, qui s'adres- soieni a sa dicle Ste, non au college des cardinaulx ne au concile. Sur ce, nostre s' pere replicqua qu'il pensoil que nous fussions abusez dc dire que les prelaiz fran^ois — 168 — fiisseol si piomplz ii consenlir C(>sle allicnalion, el qu'il y avoil advis loiil an conlrairo, que, si losi qu'ilz en avoienl senly le vent, ilz en avoienl faicl iing grand broil el riimenr, el encores plus les espnignolz , doni il y en avoil aucuns qui avoienl did qiriiz no compor- teroienl pas q'un pape dissipasl ainsy les biens de I'Eglise, el qu'il luy failloil si bion Iyer les mains qu'il ne peusl jamais a I'advenir se vendicqnor leile auiho- rile; el avoienl ces diseurs !a sniile, noii seullemenl de ceulx de Icur nation ct aulircs esinuigcrs, mais aussy d'une bonne pariyo d.'S prelaiz ilaliens : el est irop evident el certain que, si sa Sie atlenle en cc temps icy une chose semblable, il en soiiira Ic plus grand scandale qui fusl oncques, el se provoquera a doz, non seullemenl le college des canJinaulx, les prelaiz du concile el loul i'esial ecclesiasiique, mais aussy tons les princes el poienlaiz caiholicques. Pourcesle cause il fault, ainsy que diet sa Sle, pre- mieremenl veoir quelle execution el progres aura ceste paix, laquelle de prime face el a Tesierieur nous ne pouvons nyer d'eslre en soy liuguenole ei berelique; que, quani h sa Sie , elle esi aussy asseuree comme nous que la necessile en esi cause, el esi encores plus cerlaine du coeur el de li bonne voulonle el intention de vostre Mie, lanl envers la personne de sa dicle Sle, pour esire de la maison des iMedici, donl vous, Madame, estes le chef, el en consideration de ce avez oblige sa dicte Sle en favorisanl sa creation au conclave dernier , <|ue envers le s' siege aposlolique pour y avoir prins vostre nourriture el elevation; que aussy pareillemenl envers la religion calholique, ii cause lanl de vostre bonte el inclination naturelle , que de vo^1lre bonne et genereuse education ; el oultre loul — 169 — ct^li, ii cause de rinlcresld'esial auquel l;i inulalioii (l<; religion no \)oi\\[ apporlcr que confusion cl ruiiie. Au inoycn de quoy , il n'esloii poinl tieccssaire que Dous iiiissions en peine de liiy donuer honne opinion de voslre Mie, disanl sa Sie qn'elle est dii loul persua- y aeciine phiralile de be- nefices, comliien qu'il soil en la puissance de voz Mlez de ne nommer porsonne aux abbayos qui ne soil reli- gieux , el, s'il a quelqiie outre benefice, qu'il ne I'ayl premieremenl resigiic ; ne pareillemenl aux evesches , si elle ne se contenle de xxxii! ans, persoune qui n'en ayi cinqiiaitie ou soixante : el quanl aux ellections, qu'il est en la puissance de voz dictes Micz nomnicr aux eglises personnaiges plus sufti^ans el qiialidcs que ceulx qui seroni aulremenl esleuz , ainsy (pie faici le roy calholi(que, qui ne nomme que des premieres per- sonnes d'Espaigne. Partaut did sa dicte Ste que ceste reformation que (loursuiveni lesdiiz ambassadeurs luy semble plus prejudiciable a sa Mie que a mil aiiliro, pour les raisons susdictes , doni vosire Mle pourra entendre plus ample discours par Moos'" d'Aiixerre, qui I'ui present a loul ce propoz. II me resle , Madame, voiis lendre compte du laid du prieure de France (1), auquel Mons' le pricur de (I) Lc grand-;>iie',ir de France, FranQois do Loiiaitic, freic du due Francois da Guise, etail inorl le 0 Mars 16C3 II cut pour succcsscur Francois I'iedcfer, Sire de Sainl-Just e» lieauvoisis , qui mourul |ircs(|uu aussitot Ticrro lie I.a Foil I am e , Picanl , — ilk — Cliampaigne, froro Pierre de la Fonlaine , aiipaiavanl commandeiir de Chanlcreyno , nous a (aid graiide fortune el coiilrarieie par une depeschc qu'il envoya icy en diligence, arrivee aussy losi que Mons' de Seure. Mais encores nous y a plus doiaie d'ompeschemeni le chevalier Cainbiano, Pieilmoniois, ageiil perpetuel de la religion de Malllie prcs sa S:e, noii lanl congneu par sa qualiie que par une liayne obsiinee qu'il nionsire de loul lejnps conire la coiironne de Trance , de la- qnelle on luy a ven si souvenl plorer les prosperiiez , el au coniraire se resjouir dc-s adversilez , selon les occasions qui se sonl prcsenlees , que cela esi passe icy en burle el commuu proveibe. Ccsluy-cy doncques, Madame, a use d'un nionde d'invenlions el dcsguise- niens , se couvranl , oullre la minorile du roy qu'il allegue , de I'inleresl porliculier dudici prieur de Cliampaigne, qui mainlenoil en eslre pourveu el pos- sesseur, elscmblablemenide celluy deloule la relligion en general. A la fin, Madame, ayanl comniis les car- dinaulx Cicala, P»eoman (1) el raoy pour ouyr ledici Cambiano el luy laire rapport de loul ce qu'il vouldroit dire el produire, nous avons ensemblemeni veritlic que ledici de la Fonlaine n'a aucun droicl ne pretension vallable sur ledici priore de France, par la confession mesmes dudici cardinal Reoman , prolecleur de la dictc relligion. Et quant a Tinieresl du grand-maistrc (2) el ordre susdicl , sa Sie, noslre rapport ouy , a de- lui succcda , lualgre les recIamalioDS de la France , qui Toulail faiie aoraiuer le chevalier de Seure. (I) Jeati-Suavius Reoinanus , no en Gascogne , eveque de Mirejioix, cardinal en 1555. (5) Jean de La Valelle , di( Farisot , Fiaucais , clu le 21 Aoiit 1657,inorl lo 21 Aoiil J568. — 175 — claire qu'il y a lieii do graiifficaiion , sans faire lorl a personne, el se monsire disposee el resohie en favenr de voslre requesle ; el loiilcfl'ois vouldroil bien, pour le conlenlomenl dudicl grand maislre , auqiiel elle porte quelquc rcspecl a cause de certains parens qu'olle a en la dicie religion, que voz Mtez feisscni k sa dicle Stc une nouvelle recharge de lelires, pour monslrcr qu'elle no s'esl laissce aller du premier coup. II me fascheroii bien , Madame , que ledicl Cambiano I'em- poriasl centre nioy, ne que les Farnezes el aullres, ses fauteurs, pour grandz qu'ilz pnisseni esire, irou- vassenl icy phis de I'aveur que voslre Mie,ce pendant mesmemenl que je manieray ses affaires, aliendu que le feu empereur, les roys calholicque el de Portugal, les Veniiieiis et aullres ont esle I'avorisez des papes en semblable cas, comme aussyonlies feuz roys Frangois premier et Henry, a qui Dieu f;)ce pardon : et me semble que voz Miez ne mcriient moins de favcur el respect cpie les dessus diciz. Madame, quant a la sanle du pape, je vous puis asseurer que je ne I'ay point vcii en meilleure dis- position dcpuis deux ans en Q). il cusi , I'hyver passe, une longue malladye qu'il I'abbaissa si fori , qu'il ne sembloil pas qu'il ful pour se ravoir comme il a faicl ; el va lousjonrs en amendant, de sorie que. par le conrs de nature, n'ayanl, h ce mois de Mars, aclieve que le soixaiile el qualriesme de son aage, il pculi vivre bien lonjiuement. Au surplus, Madame, j'ay nourry Tcspiice de vingt ans nng jeune liomme nomme M. Mailiurin Benard, naiif de Tours el d'bonneste lieu, lequel est raison- nablemcni inslitue ez lelires greeques et lalim^s. eniend el escripl parfaictemenl italion, pour avoir sejournc — 17{) — pnr ile(;a, ol n"y avoir |»er(lu le 1(mii|)S duraiii environ scpl annees en irois voyages qu'il y a Taiciz avecques moy, qui me suis scivy de liiy pour secrelaire, lanl (le^a que licla les tiioniz, Bn loiitcs les charges que j'ay euos, el I'ay lonsjours experiniento fiilele el affec- lionne lanl en mon [larticulier qu'en ce qui concerne le service du roy ; duquel je n'ay eu moyen de luy procurer aucun bienfaicl ou avancemenl , comme ceulx qui onl tenu semblables charges onl faicl pour ceulx qui les onl serviz en mesnie esial. Je pense, Madame, s'il plaisoil a voslre Mie me (aire lanl de grace, en consideration de mes services el de ceulx que le jeune homme a faiciz soubz moy, de Thonorer de I'eslai el qualiie de secretaire de voz Miez en cesie courl, qu'elles en recevroicnl service aulant que atilres qu'elles y scauroienl meitre , esianl pralicq des per- sonnes el affaires de doqh , el nuilemenl inleressS au irafic des maiieres beneOcialles ; qui esl chose fori considerable pour les troubles el dommaiges que onl receu el peuvenl recevoir voz subjeclz, quani les se- cretaires so meslenl de idles brouilleryes ; el esl bien le plus beau qu'ilz ne s'en empescheni que auianl que leur commanderonl les ambassadeurs soubz lesquelz ilz sonl. J'espere , Madame, qu'il n'y en aura point en cesle charge qui ne se conienle de la suftisance el lidelile de cesluy cy , duquel je respondrai si besoing esl. El voyanl I'opinion el jugemenl de M' de Seure conforme au mien , j"ay piin^ la hardiesse de vous en faire Ires-humble requesle, de I'oclroy de laquelle. s'il plaisi a voslre Mie me consoler , je Testimeray i\ grand grace el honncur; el si suis asseure que le ser- vice de voz Mlez, qui esl mon principal objecl , ne s'en seauroil que inieulx porter. — 177 — Madame, je lie vous diray aulire chose pour le re- gard de mon parliculier, sinon que, a cause des des- porises el avances que j'ay faicles pour lo service du roy , je suis si en arriere el si deslilue de loul subside el moyen , que je puis dire que je suis au pied du mur sans eschelie, s'il ne plaisi a vosire Mie me subvenir prompiemenl : doni nyaul bonle de vous imporluner, je lairray ce propoz, el prieray a nosire Seigneur , Madame , etc. L)e Rome , ce x' jour de May 1363. XXYII. Sire, le s"" du Tcrlre, preseni porteur, vous pourra rendre compie de touies Ics occurrences el pariicula- rilez de de^a, ou il a longtenips sejourne el esle sou- venl employe par moi a voz aflaires, desquelz j'escripz si amplemenl & la royne qu'il n'esl besoing que j'ennuya vosire Mie de plus longue lelire , sinon de prier a nosire Seigneur, Sire, eic. Ue Rome, ce v"'" Juing 1563. XXVIII. Madame, ce porleur , nepveu du s' De Lormoye , conseillcr el secretaire de vosire Mie, cl lequel a este employe par de^,';i en divers alTaircs par les ministres du roy, el parliculieremcni p.ir Ccu Mons'' le mareclial Sirozzy (I), Mons'' de Selve (2) el moy, vous rendra (1) Pinrrc Slrozzi, maicchal de France, celebre ;)ar sa guerre en Toscanc, mort en 1568. (2) Odet de SeUe, luesideut du grand conseil. Son pdre, Jean de Selve, premier president au pailenient dc Paris, avail leiiipli, sous Francois I", Ics missions los plus imjiorlanU's. I,ui-menic inourut ainbassadcur a Home. — 178 — coinpie de I'occasion de la depesche que je faiz par liiy en diligence el de loules les parlicularilez el occurrences de de?b, suivanl I'inslruclion que je lay en ay baillee par escripl, a laquelle me remctianl el semhlablemenl b sa suflisance, je ne feray la presenle plus longuo que pour pryor a noslre Seigneur, Madame, etc. De Rome, ce vi* jour de Juing 1563. Moos' du Terlre, apres avoir ires-humblemenl baise les mains de la royne de ma pari, vous ferez entendre a sa Mle que I'occasion de vosire depesche est, que je pourrois grandemeni manquer de mon debvoir, si je ne I'adverlissois en diligence en quelz lermes se irouve a piesenl par dcga le reng et preciklence du roy, a cello lin qn\He y donne telle provision que bon luy semblera, el que eslanl esclalrcy de la vo- lunle de leurs Mtcz, je sache commej'ay a me con- duire pour le service d'icelles. Sur qnoy ladicie dame se souviendra, si luy plaist, qu'il y a de ciiuj a six ans que les Espaignolz meurenl cesio mt'smc querdle a Venize , ou la matiere ful renvoyee par deca , el ful ordonne que les ambassa- deurs de leurs Mtez tres-chrestienne el cntholique s'abslieiidroienl des cerymonies cl lieux oii ilz pour- roieiit avoir di(fer( nt jiisques a ce que le pape (n eusl decide. J'eslois lors icy arrive nouvcllemenl, ambas- sadt'ur du roy Henry, d'heurcnze el Ires-chrcslienne memoire, a qui Dieu lace pardon; et la premiere de- pe!^che (pie je rcceuz de Venize ful celle que Mess" les cardinal de Tournon et evcsqiie d'Acqs me feireni pour ponrsuivre jugeinent et declaration du feu pape Paul Quart sur I'ordonnancede la seigucurie de Venize. — 179 — A quoy je ne vouliiz aucunemenl ciUendre , qnelque recharge que me feissenl lesdilz s" dc Tournon el d'Acqs, lesquelz, ci la fin , je rendiz capablcs do mes raisons el leur monstroy le cliemyn qu'il iiic sembloil que I'on debvoil lenir posir recouvrer noslre posses- sion. En quoy ilz me creurenl , et f'lil le loul repare : donl s'ensuivii que Vargas, iors ambassadeur du roy calholique a Veriizo, se pailil de la el s'en vinl icy de- veis le pape Paul Quart, oil il feisl ce qu'il peusl pour allacquer uiig proces, comme il a laid plusiours fois de ce ponliiical, lanl du regne du feu roy Francois dernier que de cesiuy cy, donl il n'a jamais rapporie que lionte el confusion , ne luy ayanl ses asluces el elforiz servy d'aultre chose que d'esciaircyr les droilz du roy; lesquelz j'avois lellemenl mainlenuz el esla- bliz, par ce mesmemeni (pie j'oblins , il y eusl deux ans en Decembre, conlre luy el le coniede Tendilles, en presence des ducz de Florence el d'Urbin, ci lant de cardinaux fauleurs des affaires du roy calholique, que lelle conlroverse ful du lout assopie sans aucuno apparence dejamais se reveiller, pourveu que, de noslre part, il ne luy fusl donne aucun acces ne ouverlure, el que volunlairemeni ne soufTrissions aucune noviie. El passercnl tousjours depuis ce temps la les choses dou- cemenlenlre les miiiislres de letirs deux Mlez, ceulx du roy calholique non seullemenl s'ablenans des lieux qui pouvoienl porier quelque debat enire nous, mais aussy comparoissans quelsqucs fois el bien souvenl ez en- droiiz el acies ou, au veu el sceu de loul le nionde, je les precedois, mesmes a I'encens, qui, apres les car- dinaulx, esioit porle premieremenl a Tambassadour de rempereur, el puis a moy, qui cslois bicn loiiig de la, el apres (juc j'avois esle cnccnse, rcncenscur relour- — 180 — noil enceiiser les amba?sadeurs du roy calliolique, qui esloieni aiipresde celluy de I'empereur, el ay lousjours depuis coniiniie cesie possession la lant que j'ay esie en charge, faisanl observer curieusemenl lous signes el punlilles concernani la prerogative de mon maislre. Or , pour venir au faicl doni il est qucslion , environ la my May , je leuz en iing ndvis des nouv(!lles de Trenle qui couroil par bancque, comme les ainbassa- deursdes roys Ires-chreiien el caiholique estoienl d'ac- cord , el que le conie de Luna ( 1 ) s'erroit ez congrc- galions, capeiles el sessions de concile a Trenle; sur quoy , encores que a Mons"" de Lansac (2) osianl icy dernieremenl j'eusse communique les depesches que j'avois auired'ois faicies sur la dicte precedence, je luy en envoiay ncanlnioins les coi)[)ies par le premier courrier qui parlil d'icy pour Trenle el luy escripviz semblablemenl mon advis, encores qu'il ne m'on scm- blasl esire grand besoin;^ , et par le [)remier courrier subsequenl, car il en part deux louies Icssepmaines, je luy feiz une autre dopesthe donl je vous ay bailie la coppie pour la monslror a la royne, si luy plaist. Quant a la premiere, je n'en relins point de double, a cause de la haste que j'avois; mais, ii dire la verile, je croy que Tune it Tauire arrivereni irop lard. Quelqnes jours apres, loule Rome esloii plaine que les nmbassadeurs des loy el roy caiholique a Tretite s'estoient accordez, el avoil celhiy du roy qiiicie tout droil el pretension de preceder, ^e conieniant de n'es- (1) Sarpi raeontc au longcelle quercUe enlre los ambassadeurs de France el d'Espagnc. (2) Louis de Sainl-Gclais , sieur do Lansac , coiiseiller d'elat, chevalier d'lionneur do Catherine de Medicis , ambassadcur a Rome e! an concile. — 181 — Ire poinl precede el d'esire esgal a I'auire ; el, comrae la rcnommee invenie lousjours des nienleryes, il yen y avoit qui parloieni de nous si desavanlageusement , que je suis coiilenl de n'escrire lelz propoz el ayme raieulx m'en remeltre sur vous, qui avez esie icy pre- senl el avez veu et oy Ics risees el mocqueries des ennemys el mal affeciionnez, el au couiraiie les dou- leurs cl plaintcs des servileurs el devolz a la couronue de France, pour en dire a la royne auianl qu'il luy plaira d'en oyr. Tout cela ne m'estoii poinl croyable ny n'est encores, pour ne m'en avoir esle rien escript par Mons"" de Lansac, que je ne liens pas si pen advise que , en ung icl lieu que ung concile general ou touies les nations de la chrestienie concurrent, il ayl soulTert acie aucun par lequel la preeminence de la couronne de France peust estre offensee , oij la confession de lous les au- Ires roys ei princes d'estre preccddez d'icelle fust revoquee en double. A la (in, ayanl receu nne leilre duilicl s"" de Lansac, du xix" dti passe, dont je vous ay bailie la coppie, ensemble de la responce que j'y ay faicle pour les monslrer a sa Mie , je m'en allay devers le pape, a qui j'avois desjij demande audience sur le bruit commun et advis de Trenle ; el luy feiz loules les plaincies el re- monstrances conienues en la leilre de Mons"' de Lansac, avecques celles que ma passion y adjousia. Noslre s' pere respondil que, no le s' de Lansac, ne pas ung des minisires du roy , n'avoit occasion de se plaindre, sinon d'eulx raesmes , el que , au coniraire, il avoit grande occasion de se plaindre d'eulx qui re- gecloieni sur luy la faulie qu'ilz avoienl faicle , si f'aulte y avoit; mais bien estoil il certain qu'il esioil — 182 — en enis Jo conserver la possession de Inqiielle ilz joys- saienl paisibiement , sans faire onverlnro h ung lei trouble, qui ne fusl advenu s'ilz eussenl esle aussy fermes a ne innover rien comme avoii esle sa Sie, qui avoil loujjours denye loui lieu an conie de Luna , au cas qu'il ne se contenlast de son ancien rang, jusques a ce que les minisires du roy csians a Trenle I'eussent eulx mesnies invite a venir au concile, luy promeciant de ne luy faire aucun empeschement ou opposition a ce qu'il n'eust rang honnorable selon le degre el qualite de son maislre, pouveu qu'il ne fusl au dessus d'enlx ; et que le diet conte estant sur ces promesses venu a Trenle , el I'elleclion de ce lieu remise au jugemenl de sa Sie , elle n'avoil peu manquer de luy en assignc-r quelcun digne d'un si grand prince, qui meriloil lout respect ei consideration , el pour ccste cause avoit es- cript a ses legalz qu'ilz eussent a irouver nioyen de satisfaire au desir de sa Mie catholique, sans loulesfois prejudicier aus raisons du roy soil en peiiloire ou pos- sessoire , et qu'ilz advisassenl a trailer cela de sorie que le lout passast graeieusemenl et que nul n'eust occasion de se plaindre , el qu'ilz laissassenl aux par- ties faire leurs prolesles selon I'accord el convention faicte enire eulx, Je renionslray sur ce a sa Sie que , quelque infor- mation qu'elle eust au coniraire , je ne me pouvois persuader que les minisires du roy eussenl inlroduit une novile si prejndiciable et de telle consequence que cesle la me sembloil, esiant certain qu'il n'y avoit qu'un lieu de primogeniture , et que deux ne pouvoient tenir une mesme place, et qu'il failloil de nccessile que I'un fusl posierieur a I'autro; el, quant bien les noslres auroient faicl nng tel erreur, si ne me semhloit — 183 — ii pas raisonnable que sa Sic le deiisi aucloriscr el en- cores adjoiisler lanl de choscs en la favour du roy catholique, comrae la paix, I'encens el place aux ca- pelles ct sessions, oullre celle qu'il disoil que los nos- ires luy avoienl conseniy ez congregations de concile. Sa Sle, inlerrompani mon propoz, me repliqua bien expressemenl que j'eslois Irop incrediile ei que je ne feisse aucune double du consenlemenl des nosires, moyennant lequel estanl le conle de Luna introduit au concile, il n'esloil raisonnable qu'clle Ten chassasl el print la querelle pour le roy contre ses propres niinis- ires , qui dcbvoienl mieulx scavoir la voulonle de sa iMte que nul autre, el lesquelz eussent pen dire qu'elle eusl faici cela pour rompre le concile ci empescber la reformation , qui ne seroil pas la premiere fois qu'ilz en onl aulani diet ; ct ne seroil pas (aire oflice de pere commun , quant les parties sonl d'accord, d'y meltre el nonrrir discorde; el que avions mis sa Ste en neces- site d'assigncr lieu extraordinaire a I'ambassadeur du roy catbolique, doni elle se fusi bien voluntiers passce, si nous eussions laissc les cboses comme elles esloienl, sans les remuer. J'ay encores depuis par i]eu\ fois parle a sa Ste de ce mesme faicl, el la irouve lousjours en ce mesme propoz , qu'il ne s'esl rien faiel que du consenlemenl des minislres du royaTrenle ; cl sur les remonstrances el prieres que je luy faiz, que au nioins que cela ne voise point plus avanl el que cesle novite de paix et encensouer mentionnee ez leltres de iMons'' de Lansac n'ayt point de lieu , je la Irouve ung pen irresolue, me disanl que nous , ayans conseniy que le conle de Luna ayl lieu extraordinaire au concile, ([u'ellc ne S(;oii pas comme elle le p(?ult bannyr de I'eglisc non plus que — 18/1 — (les aulres assemblees cl congregations sans scandalo el malconlenlemeni de son maistre , el que toul cela esl dn concile : de sorle qne je ne sgay que m'en pro- mellre, voyant en elle, d'nne pari, une fori bonne voulonle envers le roy , el sur lout iing singulier de^r d'avoir grande amilie el parfaicle inlelligence avecques la royne, el de I'auire, le respect qn'elle a au roy ca- tholique el la crainle de son inimilie , disani qu'il n'esl pas raisonnable qu'elle le provoque et denienre sans amys. Je feray ce que je pourray pour au nioins entreionir les choses en I'esial qu'elles soul sans empirer, jusques a ce que j'aye eu nouvelles de la royne, ne sachani a qnoy nn'arresler sur cesle conlrariele que je Irouve ez propoz du pape a ceulx de Moos'" de Lansac. El ce pen- dant ra'a semble que jo feiois grande fauiie, si je n'en adverlissois en diligence sa Mie, qui sgaiira bien consi- derer de quelle consequence Iny esl la conservation du rang eldignileancienne du roy son filz, non seullemenl pour le regard de ce lieu ou do concile, mais anssy de louie la chresiienie, par toule laqnelle une injure reccue icy ou au did concile se pourroil estendre et avoir la queue si longue que aulres alfaires que celle de la precedence s'en pourroionl bien lourdemenl sen- lir; el monslrenl bien les Espaignolz que ce n'esl pas cbose a depriser, s'offorceans par lant de moyens de nous supplanier el de la surprandro, comma une place qui serre ie passaige et donne empeschemenl a leurs desseings; el la ou en ferions peu de cas , ce que je ne puis croire, encores vauldroil-il mieulx d'en I'aire ung present au roy catholique que de la nous laisser embler par ses minislres, sans ce qu'il nous en sache aucun gre. — 185 — II plaira a la roync rae pardonner , si je luy tliz que , oulire les considerations sns dictes , il luy im- porie parlicnlieremeni plus que Ton ne sgauroii dire, de conservcr au roy son filz lous ses droitz el pree- minence aniiques, durani sa minoriie, el mesmes un>j^ lei que cesluy cy que lui onl acquis les verluz de ses predecesseurs ; el scaura ires bien Sa Mie considercr ce que Ton diroit, si, en ce lemps, elle ne Caisoil compie d'une lelle perle. Au regard du faicl de rallienation el loul ce qui concerne la negotiation de Mons' de Seure (I), je n'y veoy rien de nouveau depuis le pariement de son secre- taire, duquol nous atlendons le relour en grande dtivo- lion, pour lirer quelipie autre meilleure resolution du pape, donl nous ne somraes pas hors d'esperance, ne que le diet s"' de Seure ne porte c'liose donl ieurs Mtez auronl satisfaction. Toulesfois, je ne vouldrois jamais rien asseurer donl je ne fusse bien certain. Bien dirai-je que nosire did s' pere monsire de plus en plus bonne voulonle, mais il veull premieremenl sca- voir quelle responce nous aurons sur la depesclie que a portee le did secretaire. Mons"^ d'AJIegre (2) rendra si bon compie de loule sa charge , que je serois Irop presomplueux de ra'en ingerer ou en ennuyer aucunement la royne, a laquelle vous ferez seullemenl entendre que, suivaol ce qui m'esloil mande, je le menay el inlrodiiilz aa l)ape 1.1 premiere fois; el depuis, Mons"" de Seure el (1) II obtint le grand- prieure de (Champagne , qu'il sollicilait, apres avoir etc prieiir de Saint Jean-del'Iste, pies de (lorboil. (2) D'uiio ancienne maison d'Anvoigne. A celte cpoqiie , on Irouve Irois freres de ce noiu au service du roi ; celiii donl il est question ici est Ivcs, baron d'Aii'grc. xwii. 15 — 186 — nioy, nous soinmes irouvez en une audionco qii'il a eiie, el luy ay assisle do lous offices qii'il a juge eslre a propoz pour sa negoliaiion. Sa Mte aura peu en- lendro par la depesche du did s' de Seure el moy, comme le pape avoit prins la noiivelle de I'accord ei pacificalion avaiit I'arrivee dudicl s"^ d"Allegre. Quanl au prieiire de France , le pape est tousjours demoure resolu de ne vouloir baiilerles expeditions en favour du s"" de Soure, sans nouvelie recharge du roy el de la royne, conlre la voulonle desquelz le cheva- lier Cambiano laid lanl de pralicques el meiiees que je suis conirainl me forinalizor conlre luy ol ses fauleurs, aulaiu pour la conservation de I'aucloriie el reputation de leurs Mtez qu'ilz tcndenl a deprimcr par do^a , que pour faire jouyr le did s-- de Seure de leur bene- fice, alleguaiit tnaintenanl ledid Cambiano au conlraire de la conclusion qu'il avoit prise avecques le pape quant ledict s-^ de Seure luy en haisa le pied, laquelle estoii de Ten faire pourvcoir par le grand maislre, puisque sa Sie esioii reso'ue de le faire , qu'il a h present receu leilres que ledict grand maislre escripl a leurs Mtez pour essaycr de les faire retracier le don qu'ilz en ont faicl, ainsy qu'il se persuade qu'elles seronl pour faire si elles le venllent croire. Au regard de ce que la royne escripl a Mons' de I'lsle el a moy, louchanl ses proces el affaires, je luy en feray responcc par la premiere depesche que portera le s' de Seure, qui est a present sain ei presi a monter a cheval, n'attendanl autre chose que le reiour de son secretaire, apres lequel il ne peull gueres larder; el si plusiost pouvons avoir resolution de sa Sie, il n-e lairra pas de pariir. Vous n'oublicri'z de supplier la royne de vous faire — 187 — reraboiirscr de la sommc do n. c. escuz que je vous ay faici bailler pour ce voyage , el les fercz incontinent remectre au banc oil les avcz prins a men credit, n'ayaul bosoing ines debtes d.^ cesle augmentation. Faicl a Home, ie V"* j( iir de Juing loG3. Monsieur du Terire, vous direz a la roynecomme, sur la closiure de ceste depesche, est arriveecclle que. lenrs Mtezm'ont faicicdu xxi°du passe, a laqueile je ne veoy pour ceste hcure autre responce a faire, sinon que bier, Tipres la reception d'icelle, je veiz Ie pape, avecques Icquol je ne peuz avoir long propoz, d'autanl que c'estoil Ibeurede vespres; et me disi sa Stequ'elle n'avoil encores vcu les leilres de son nunce, el a cause de la fesie du jourd'huy nous remist b lundy. Et pour ce qu'il n'y a aucune apparencc de pouvoir depescher cela si proniplemenl ne tirer aucune resolution avanl la I'este du Corpus Domini, qui est jeudy prochain, je n'ay pas esle d'advis de vous faire larder davantage. Biea asseurerez vous h royne que Mons' de Seure el moy ne perdrons point de temps el ferons la plus vive poursuilte et instance qu'il nous sera |)0ssible. De Rome, ce vi' Juing 1365 XXIX. Madame, ce moi ne sera que pour accompaigner la depesche que vous faicl Mons' de Seure pour Ie regard de sa negotiation, ayanl Irouve a propoz ung secretaire de Mens'' Ie cardinal do Lorraine (1), qui pari presentement pour s'en retournera Trenle, d'ou (i) Musot, cnvoT6 au papo Pie IV, Ie 30 Juiii 1503. — 188 — Too pourra phis coinniodemenl que d'icy faire lenir son pacquelii vostre iMie, alaquelle je n'ay loisir faire long disconrs, parce quo le porleur esi presse de partir el que j'ay, tous ccs jours, esle empesche au faici dc la precedence, donl a la fin le pape m'a diet, ce matin, avoir nouvelles que les ambassadeiirs des roy et roy calholiqne osloient d'accord, el que Mons"" de Lansac esloil party il y a trois jours pour vous en porter des nouvelles el informer corame les choses sont passees. Quant a moy, Madame, je ne vous en sfaurois dire autre chose que ce que je vous ay escripl par ma de- pesche du vi^ du passe que vous a poriee Le Terlre, a qui j'en baillay ample et veritable instruction, ne voulanl pas nyer que je n'aye quelque marlel et passion particuhere en ce negoce, lequel ayanl si bien asseure el esclaircy par le passe, ce me seroil ung extreme regrei d'avoir perdu mes peines, voyant la facililequ'il y avoit h se maintenir. Combien cela importe au service du roy, j'en lairray la consideration h voslre Mte, a (jui je me resigneray a faire |)lus longue lettre par le &•■ de Sfure, qui ne peull plus desormais faire grand sejour icy. Ei cependanl je prieray h nostre Seigneur, Madame, elc. De Rome, ce ix' Juillet 1365. XXX. Sire, Mons'"de Seure, present porteur, s'enreiourne devers vostre Mte, si bien informe et inslruit de loutes les occurrences et affaires de par de^a , que je n'ay occasion de vous ennuyer de plus longue leilre, que pour me remellre du tout a sa suffisance et pryer nos- tre Seigneur , Sire , t;tc. De Ro'hie , ce dernier jour de Juillet 1563. — 189 — XXXI. Madame, Moils'" de Seure, preseni porlour, sVn va si bieii informe, non seullemenl des affaires ei oc- currences de cesle conn, mais aussy dos humcuisqui qui y regnent , el sur loul de la volonte el disposition du pape, que je pense que vosire Mlc ne sgauroil parlor h personne qui luy donne plus de lumiore el clairte de loiil ce qu'elle en desirera sgavoir a la veriie, el croy qu'elle en recevra saiisfaciion. Je luy ay bailie ung court memoire, d'autnnl qu'il i'a ainsy voulu pour la forme, non pour besoing qu'il en fust, me (ianl plus en sa bonne memoire el suftisance qu'en loutes les insiruciions que je luy eusse sceu bailler. Je vous prye ires-humblemenl , Madame, apres I'avoir ouy en voz alTaires, luy prester benigne audience en ung mot ou dtux qu'il vous pourra dire des miennes , suivani ce queje I'en ay prie , comme aussy ay je faicl Mons-^ d'Alluye (1), qui n'est, en somme, que me ramenle- voir a vosire bonne grace, ou plus lost le besoing que j'ay d'en seniir quelque effect el demonstration qui me donne moyen de vous faire service : car la vou- lonle ne peull recevoir accroissement , ainsy que je pense avoir faicl telle preuve que, eslanl pour cesi esgard loul langaige superllu , je supplieray a no.slre Seigneur, Madame, vous donner, etc. De Rome, ce dernier Juillel 1565. Le present memoire ne servira que de foy el les- (1) Sic. It faul lire d'Altegre. I'ourianl, a cetle epoqtio , nous Toyoiis un Fraufois d'Escoubleaii, marquis d'Atliije, marie a uno niece dc noire ambassaJcur. — 190 ~ mojgnage dc la courerence el union que Mons' de Seure et moy avons gardee en loul ce qui s'esl offeri durani son sejour par dc^h , n'esianl personnaige qu'il faille aulrenient inslruire, qui sera cause que je tou- cheray seullemenl les principauk el plus notables chch, me rcmeclanl de I'exlension d'iceuls a sa suffisance. Le pi-emier sera le faicl de la licence d'alliener pour cenl niille escuz de revcnu du pair\moine de I'Eglise, en quoy le s' de Seure sgaura ires bien represonler an roy el h la roytie les diligences el poursuiites que y avons faicles , el des moyens qu'avons clierclicz pour en venir a boul , el les esperances que en avons cues, el semblablennent les difficnllez el euipeschemcns qui flous y sonl survenuz de lous coslez , el le moyen qu'il y a de les surmonler ci reduire les choses en lerraes que le roy soil servy el obtionne ce qu'il demande, sans scandale el avecques les juslificalions dignes de son nom el de ses predecesseurs. Quanl au faicl de la precedence, je n'en puis parler h la verile que ce ne soil conformemenl h la depesche que je feiz par le s"" du Terire. Le pape, des le coni- mancemcnt que cecy se remua jusques a presenl, a tousjourspersisle de dire que, de loul le mal, nous ne nous en debvions prandre que a nous mesines qui avions faicl venir d'Ispruch le conle de Luna (1); et, pour le pratiquer el gaigner contre sa Sle, luy avions accorde lieu extraordinaire aux congregations du concile , oil estanl une fois inlroduil , il ne se conlenla de cela , el lout soubdain feist instance a sa Sle de luy bailier lieu aux cappelles, luy remonstrant qu'elle fi) Don Alonzo de Quioones , comte de Luna, etait prcce- demiiieal aiubassadeur d'Espagiie a la cour im[ieriale. — 191 — ne pouvoil I'aire moins pour luy que avoient faicl Ics minislres du roy ; auqviel il n'esloil pas rai'^onnable que sa Sie cedasl de courtoisie ei bonne volume envers le roy calholique, leqnel aulremenl s'en liendroit gran- dement offeuse , el ou le pape ne voiidroil avoir au- tre consideration de sa digniie, avoil expressement escript que ses ambassadeurs se ievassenl lanl de ce- lieu que du conciie, comme eslant indignemenl iraicie de sa dicie Sie. Laquelle, se voyant reduile en ceste neccssiie, et que Ics ncstres mesmes disoient que ce qu'ilz avoient faicl pour ledicl de Luna esioii pour le bien universel de la cbrcslicnie el unyon des princes , au progres et heureuse conclusion du conciie, sa dicie Ste s'est servye des mesmes raisons , ne luy sem- blant raisonnable qu'elle senile porlast I'envye de lous, ne qu'elle donnasl occasion commode de dire qu'elle eusi csie cause de la dissoluiion dudicl conciie, comme Ton ensl did, si les ambassadeurs du roy caibolique s'en fussent allez pour le refuz qu'elle eust laid de leur bailler lieu en cappelle, ationdu que les noslres mesmes les avoient si gralieusemenl acce|»lez en leurs congregalions. Voilii la responce unifornie que j'ay tousjours eue de n(»slre s' pere. Bien confesseray-je qu'il y a eu aussi ung pen de colere , ce que luy-mesme ne nye pas, disant avoir esle si persecute el picque, tani de fiicl que parolles, des minislres de leurs Miez au conciie, qu'il n'y a religieux de S' Fran^oys b qui la pa- tience ne fut eschappee ; el loutolTois, (pi'il s'esi porle si lemperemeni, que Ton ne peult dire qu'il nousayi pre- judicie; el que I'origine el tout le mal esioi: procede de nous mesmes. Moos'" de Seure sgaii comme, avani le coup donne, les anjbassadeurs des princes residans par (le<;;i el plusieurs privez avoient Icttres di- Trcntc, — 19i> — fomme le conle de Luna se vaiiloil d'avoir Iroave place au concile, mnlgre le pape qui Ten avoil si long lemps reffuse, el dii consenleinfMil des nosires. Siir quoy je feiz une depesche a Mons'' de Lansac, qui ar- riva nop lard ei Ironva que s'estoit desja laict. Trop evideni csl-il que le pape n'a eti a plaisir que le dici de Luna soil venu la , ei a diet assez de fois toni hauli el en plusieurs lieux que, s'il eusi eu h faire a moy, il n'cusl faicl cesle enlreprise on pour le moins elle ne luy I'lisl reuscye ; el certainement , il y avoil assez de moyens de Ten empesclier el le renvoyer pour besle au iogis, aussy bien que Vargas, sans aucune dispute ou altercation conire le roy cailioliqne ; coinnie aussy il ne manquoil pas moyen de faire laire I'empe- renr, sans touieffois I'irriier. Mons' de Seurc rendra bon compte de lout a leurs Mtez, el sur tonl dts au- dience el propos que luy el moy avons euz sur ce avecquos noslre did s' pere, et de la responce que sa Sle feisl "a ce que je luy proposay de melire fin a telles disputes par une declaration, (jui est en sonime: qu'elle ne nous scauroit bailler plus belle declaration, soil de parolles ou de faicl, que de renvoyer Tambas- sadeur Vargas chez luy, comme elle a faicl loutes les fois qu'il s'csl presenle au combu conire moy ; (pie dcpuis mon ambassade il n'esi poinl venu de telle oc- casion, mais, oil elle se piesenteroii , sa Sie est bien informee des droilz et superiorile du roy, el que la ou elle sera , il ne fault poinl que en ayons peur; mais qu'elle ne peull remcdyer a ce que font les nostres, mesmcmenl la ou elle n'est pas, el qu'il louche c> culx de faire bon guel el penser h qiielles gens ilz out af- faire , ot ne sc laisser persuader. Quant a bailler p(»ur cestc heurc autre declaration, — 193 — ce nescroil qu'inilcr le roy catholique sans nous faire aiicun proffil, ains plcis lost certain dominaige, ne se poiivanl faire cela de sorie qu'il nous peiisl servir, sans appellcr les parlies et former ung proccs, ce qui faicl conirc nous el nos possessions. 11 m'a semble que je inc debvois contenler de ces raisons et superceder caste poursuiiie jusques h ce qu'il piaise a leurs Mlez m'or- donncr autre chose. Au regard de ce qui s"esl faict a Tronic, le s' de Senre desduira ci leurs Mlez I'appa- rence qu'il y a dti remede el de couvrir cesle playe sans aigrir les maiieres, a quoy je ne fauldray de ma pan de y veiller ei avoir I'ceil lani que je seray par de^a. Leurs diclcs Mlez enlendrout a bouche ce que le pape nous a did plusieurs fois , lanl de I'accord el unyon des princes au bien uuiversel de loule la chreslienle el particulieremenl de la couronne de France, que scmblabiemcnl du faicl des concordaiz et requesles qui luy soni ordinairemenl faicies de la part de leurs Mlez, conlraires aux poursuilles que font leurs ambassadeurs a Trentc. Les plaincles que nous a souvenl faicies sa dicle Sid de la royne do Navarre, la responce que j'ay cue d'elle sur les resen- timens que j'ay faiclz des procedeures faicies conire le cardinal de Cbaslillon el aulres prelalz fran^ois : donl m'asseuraiil que ledict &■■ de Seure s'en va tr^s bien informe et memoraiif, jo n'ennuiray leurs Mlez de plus long discours pour ce regard , ne semblablemeiit del'abbaye Je Vaucellos (1), donl, suivant ce que sa Sle m'a ordonne, j'ay bailie ung memoire au d.ilaire pour pourveoir a I'indemnile du roy ; a qui je ne veoy autre chose a respondre sur les depeschcs que sa Mie tn'a (t) Abbaye tie I'ortire de Cilcaux, au diocese de Cambrai. — 194 — faicles du xxi" May et xxvni" Juing, donl j'ay faict pari a Mods'" d'Allfegre, en la negolialion duqiiel je n'entreray point plus avanl, n'ayanl rien veu eo son instniciion , par In leclnre que j'en ay eue une fois, qui fusl pour I'arresler icy plus haull de sis ou huit jours, s'eslanl nosire s'pere oderl de luy faire responce sur le champ, comme je ne faiz double que ledict s' d'Allegre aura adverly leurs Mtez; lesquelles enlendronl aussy de Mens"" de Seure la venue par defi du s' de Flessan , el la liheralile donl sa Std a use cnvers luy el les respeclz qui I'ont meue a ce faire, n'eslanl chose doul je me sois empesche, pour n'en avoir aucune charge plus avanl que de !e presenter au pnpe comme geniilhomme francois,soy disanl bon el fidele serviieur du roy, ainsy qu'il en est renomme. Messeigneurs les cardinal de Bourbon ei prince de la Roche sur Yon seronl aussy informez a bouche par ledicl s' de Seure de ce donl il esioii charge pour leur service, en quoy il n'a rien oublie, de sorle que j'espere qu'ilz en auronl conlenlemenl. II plaira a la royne commander son bon plaisir louchanl la conduiticde son proces conlre les herilicrs du feu cardinal de Medici, qui denieiire la lout h plat , d'auianl que, depuis que la charge en a esi6 levee a M"" Fran"^" Belirarnini, il n'a cste mis persoune en sa place, parce que M' le cardinal Salviaiy, par I'advis dnquel el le mien, sa Mlc avoit commande qu'il y fust pourveu d'un Francois, a declare qu'il n'en congnois- soil point qui fust propre pour ce laire, romme aussi nc fais-je. El quant a la recommeilreau diet Belirarnini, il ne me senible a propoz, encores que, ce pendant qu'il a eu a m'en rendre compte, (pii a esie bien pen de lemps, il s'y soil iros-fidelcmenl el diligeinmenl ac- — 195 — quite, d'aulanl que, depuis qu'elle Iny a esle oslee, il s'esl du loul distrait de idles poursuilles el a prins autre fa^on de vivre. Quani a nioy, je n'ay eu aucune con- gnoissance de cesl affaire, depuis qu'il pleust a sa Mte en charger Mons"" de I'lsle, qui hiy en aura rendu compte par dela. Pour le jourd'hny, il ne s'y perd point de temps k cause des vaccalions; en atlendanl, louteffois, la fin desquelles, il seroil bon de preparer ce qui est necessaire pour en faire une poursuitle, incontinent qu'elles seronl passees, qui sera a la tin de Septenibre : dont sa Mte sera advisee , pour en faire ce que bon luy semblera. Faicl a Rome, le dernier jour de Juillei I060. XXXII. Sire, ayaril esle prescntemenl adverly par le s" de Marchaumonl (1), present porteur, dcson partemeni, lequel il enlendoil estre demain , j'ay faicl cesle leltre h la liasle pour ne me trouver grand loisir el aussy peu de maliere de vous ennuyer de long propos , ai- tendu que vous. Sire , aurez eu ample information dc lous les affaires de par de§a par Mons' dc Seure , qui parlil le premier de ce moys ; de sorte que je n'ay a vous dire, sinon que , me trouvanl ce soir avccques le pape, devers lequel j'estois alle sur certains negoces de particuliers que vostrc Mle m'a commande de favo- riser, je trouvay sa Ste asscz alleree a cause dc quel- ques nouvellcs qu'elle avoil eue d'Avignon , lesquelles elle me commanda de vous escrire el pryer de sa pari de vouloir donner provision digne do vosire grandeur (1) Henri Clausse, filleul d'Heiiri II, frcrc de Nicolas el de C6me, ereques de rhaloiis-sur-Marne. — 196 — el bonle , el de ramour el observance que voslre Mid porle lant h sa personne que h ce s' siege. Le sommaire des plaincles de sa Sle, Sire, esl que I'eslal dudicl Avigiiou souffre inflniz dommaiges el ruyries, lesquelles croissenl de jour a autre , de sorle que quasi les deux liers s'eii vonl , occupez des hu- guenolz des provinces circonvoisines , el que , au commanccmcui de Juillei dernier, les s" de Surese el Movans se Irouvoienl avecques ireize compaignies de gens de jjied el deux cens chevaulx ci Casld Novo de pape, el aulres lieux ne dislanl poinl d'Avignon plus de deux lieues, el auires a une lieue de Car- pcntras, ou ilz ne cessenl d'irriler les gens de sa Sle avecques escarmouches ol lous les dommaiges qu'ilz peuvenl fairo dedans el dehors des villes devanl les- quelles ilz se campenl, el les hailenl comme ilz ont i'aici en une (ju'il me nomma , cc me semble, Casiret, laquelle ilz avoienl ballue el donne deux assaullz donl ilz avoienl esie repoussez. Did davanlaige nosire s' pere que, ung mois a ou environ , M' Mario Casalin , secrelaire de Mons' de Ferme, vice-legal dudicl Avignon , venani de voslre courl avecques v. m. livres, pour parlye de la paye des soldalz de sa dicle Sle , lul prins avecques ses de- niers el envoye a Orange, nonobstanl le saul condtiii qu'il avoit de voslre Mie el lelires de la royne el de Mons"" le marechal de Vielleville (1), avecques lequel il esioil venu jusques a Lyon. Ei encores, pour offices et diligence qui s'i soienl faicles, rra esle relasche el (1) iTantoi'i de Sceiteunx , seigneur do la Vielville, marechal de Franco cii 1562, morl en 1571 — 197 — ne se s^aii encores ^ present qu'il est dt^venu , ne semblablemeni les deniers qu'il porloit. En somme, les choses ne pouvoienl estre en pires lermi'S pour le regard lanl du service de sa dicte Sle que de ce pauvre cental de Venisse; pour a quoy re- medier, il fauldroil user de quelque provision proraple et extraordinaire, afiin que ce pais-la , qui a perdu k peu pres loute la recolle du grain, sauve au moins, s'il est possible, celle du vin et des auires fruitz , fai- sanl partir de la les dessus diciz el delivrant nou seullemenl le conlal d'une telle pesle, mais encores sa dicle Ste de la despcnce qu'elle faici de plus de xv livres le niois, que luy couslent les soldaiz qu'elle en- Ireiienl pour la conservation dudict estal. Et quant au susdict secretaire, qu'il plaise ii vostre Mie ordonner de lelle fa^on qu'elle soil obeye, qu'il soil relasche el mis en liberie el seurete avecques les deniers dessus diclz. Sire, je respondiz a sa Sle que je ne fauldrois de vous escrire tout ce que dessus, encores que je jugeasse que ce ful chose superflue, d'autant que, sans en esire aucunement recherchee , je sQavois bien que vostre Mte y auroil desja pourveu , si peu elle avoil , avani que raes lettres fussenl en ses mains; et que je n'esli- mois pas le nunce de sa Sle si peu diligent qu'il ne vous eusl desja faict les remonstrances telles que la maliere requeroit, au cas que lout cela fust veritable; el que je pensois, par les premieres nouvelles qu'elle auroit de luy, elle enlendroit que vous, Sire, en auriez faicl telle demonstration qu'elle en demoureroit salis- faicie : donl sa dicte Ste me sembia fort adoulcye, et neanlmoins m'ordonna lousjours d'escrire ce que des- sus, comme aussy elle ne fauldroil de faire le semblable a son did nunce. — 198 — Sire, le cardinal d'Augusle (I) doibi par, ce xx™' jonr de Septcmbre 15G5. XXXVI. Sire, avani rurrive.' du proieslani, present porleur, la nonvelle de la bles.^cure de la royne n'esloit encores venue jusques icy (I) , donl lout iiulant que y sommes de serviteurs de voz Mlez, sommes bien lenuza Dieu el a voiis. Sire, de nous avoir envoye la consolation avanl que en eussions senly le |)his gr;md mal el des- plaisif que puissions recevoir ; donl , encores que de vosire grace singnliere soyons exempiez, si esl-ce que, pour la convommation de cesie joye , de.»irons conli- (I) Stiivanl les nieinoiics ilu {cm\^s, Calheriiic de Medicis elait lombee d'unc iniilc. ~ 205 — nuellemetil la confirmaiion dc sa parlaicle guerison et sante, pour nous delivrer de la frayeur que nous a donne le pensemenl d';in lel danger : qui faicl que de ma partje soubhaiie que ung si maliieureux accidoni au nioins nous apporte ce bien que a I'advenir clle soil plus curieuse de conserver sa vyo, ou plus tost celle de loui le royaume de France, el ne commeiie plus aux besles une chose si pretieuse el importanle h loute l;i chresiiente, vous advisanl hien. Sire, si pouvez impetrer d'elle qu'elle face vceu de n'aller plus que en liuiere, qu'elle n'en obtiendra jamais dispense ne commulation, du vivanl inesmemenl de ce pape ne du conseniemenl du college des cardinaulx. Audemouranl, Sire, vous entendrez loules nouvelles par la depesche que vous faicl Mons'' le cardinal do Lorraine qui esl icy des le xxix'' du passe, intinie- menl honnore de noslre s' pere el admire d'un cliacun pour ses grandes parlies el veriuz. Je faiz comple , a son pariemeni , de vous depescher mon secrelaire : qui sera cause que, satis vous ennuyer pour cesle heure de plus longs propoz , je liniray en prianl a noslre Seigneur, Sire, eic. De Rome, ce vn« Ociobre 1S65. XXXVII. Madame, parce que, incontinenl apres le pailemonl de Monsieur le cardinal de Lorraine, qui vous doibt par cesle depesche informer de loui ce qui esl passe depuis qu'il esl icy^ je faiz esial de vous depescher mon secrelaire, me remeilanl a ce |>cu que j'escripz au roy, sans vous ennuyer pour cesle heure de longue lellre. Apres avoir remercye el lone noslre Seigneur de la grace qu'il nous a I'aicie do vous preserver dc — 206 -- f'accidenlqiie sa Mle m'a faicl eiileo — 232 — Cc'ile dispute ne fui pas encore complelomonl vitlee pourceiie fois : Philippe II la lil recommencer ;i Rome, a Veiiise, a Trenle; pour lourner la difficulle, il soiigea serieusemenl ^ prendre le litre d'empereur des Indes, el paria meine de se brouiller avec le pape, qui ne voulait pas nous faire une injustice criante ; enfin il se resigna, el reconnut le droit de la France. II faui convenirque La Bourdaisiere, par sa Constance a I'epo- quc qui nous occupe, par ses conseils dans des lellres posierieures, coniribua beaucoup a noire victoire. C'esl ainsi que I'eveque d'Angouleme iraitail les peliles questions de la diplomatie , source frequente des plus graves evenemenis. Nous ne le voyons ni plus maladroit ni nioins ferme, dans une affaire reel- lement capitate oil il lut vaincn, mais sans humiliation. Nous voulons parler du concile de Trenle. Ceiie assemblee, d'abord reunie en 1545 , avail ele sus- penduc en 1552, apres seize sessions entieres. Sept annees plus lard , le traite du Cateau-Cambresis ayanl retabli la paix politique, on s'occupe de la paix religieuse que tons les Chretiens catholiques et proteslants demandenl , comme par le passe, a un concile general. L'Espagne se prononce pour la continuation de celui de Trenle, la France el I'erapereur en sollici- tent un lout nouveau, vraimenl general, pur, libre, el dans une autre ville, « pour lever aux proiesianis I'occasion de tumultucr, et les ouir suivanl qu'ils crienl incessamment. » Le gouvernemenl frangais monlre surtoul beaucoup d'impatience. Les lemporisations des cardinaux com- missaires, « vieux el maladifs, craignanl de iravailler par les chaleurs el temps dangereux , » les excita- — 233 — tionsconlinuelles (le I'empereur, la conjiinilion d'Am- boise el Tassemblee de Fontainebleau le pressenl d'en finir, el le decideni a convoqiier pour le 20 Janvier 1561 un conciie naliooal, au defaiit du general. Le pape, qui avail loujours dii el repeie : « Je ne desire rien lani que la celebraiiori d'un conciie gene- ral , j'irai parioui ou j'aurai sur acces . « meme a » Jerusalem ou Omsicniinople, » s'esbaliii merveilleu- semeni quand on lui paria d'un conciie gallican: son visage changea , « denotani admiration e\ colere lout ensemble; pourlanl il refrena sa passion, ei sans irop s'aigrir de langage, respondii : « C'esi abusde croire » que les protestanls envoyeni au conciie ; ils pron- to venl leur dessein conlraire en faisanl des propositions » deshonneles el deraisonnables; nn pape qui les » accorderoii seroil herelique eidigne d'esire depose... » A leur maladie n'esclnl d'auire medecin que le leu J) el Tepee. >» Puis, sur les jusiificaiions moiivees de noire ambassadeiir, sur les coups qui lui avaienl eie pories; il s'en de- chargoa sur le docieur Vargas , insligateur enlre lous, de la colere de Pie IV conire la France. Voici comment noire auieur raconle la nonvelle liumilialion de SOQ rival, indigee encore dans raniichambre du saini-pere, en presence de I'ambassadeur de I'ernpereur (loNovera- bre).n Atiendanl audience, dcvisamesdu concile. Vargas insistani sur la coniinuaiion de celui de Trenie, je lui demaiidiii s'il pensoil pas que Dieu el le Sl-Esperii se irouvasseni au concile, soil que le pape Tindit de nouveau ou continual celui de Trenie. Ce qui m'eslant par lui confesse, je lui demandai encore pourquoi il s'opiniairail lani a la coniinuaiion; il me repondit que le roi calholique avoii pnour que les bons et saints decreis du concile de Trenie fussonl reiractes par le nouveau. Je lui dis irouver ceiie opinion merveilleu- semenl etrange d'un prince si sage que le roi clJlholique, que cola me scnibloit mons'.rer avoir paour que Dieu ft le Sl-Esperil enssenl fiuie de sens oi de mernoire, el q«'il ne falloil craindre que la ou il inlervenoit, il >'y fit rien que de bon el de sainl. » LVveque . d'Angouleme avail raisoii el Vargas n'avait O.i — 235 — pas lorl. Dans ces graves conjoiiclores , Pie IV , periv coniinun de lous les chrcliens, voulut. san> perdre do lenips, donrier saiisfaction a loutes les dcmaiidi's rai- sonnables, en se seivanl, dans la publicalion de la biille de convocation (29 Novembre 1560), dti mol indire , sdns approiivcr ni impronvcr les decrcis deja adoples. Cb;irles IX ei Ferdinand, apres qtielqiies remonslranceset oppositions, abandonnerent successi- vemcnl leiirs projels impossibles d'inlerim el de recon- cilialion, obeireni a la bulie el se sonmirenl aux decreis dij concile , on plnioi aux veriiables doctrines de I'Eglise caiboliqiie. Par sa moderation melee de fer- mele, le represenlanl de la France n'esi pas dirangcr ii ce grand rosnital. Pie IV lui en donna un lemoigriage pnbiic en le nonimant cardinal , ce qn'il ne fit jamais pour Vargas, qui pouilanl en bnjiait d'oiivie, qui meme en mourul de depii. Nous pouri'ions multiplier les citations, c'esl-a-dire, les reponses lieureuses, les avis |)rud('i!ts, les nego- cialioiis habiles do noire ambassadctir; mais les trois affaires que nous avons resumees suffisenl pour donner une idee de son esprit el de son role. Nous renver- rons , pour le resie , a la table des malieres qui (inira le volume. On y verra que, par le tiombre el rimportance des evcnements, les lellres que nous publions doivent Irouver naturellement leur plice a cote des grandes collections de Ribier, do MM. L. Paris, Weiss, Gacbard el Cliarricie. Pui>sorii-clles appeler raiteniion de quehpies crndiis, faciliier une etude sericuse sur I'evecpie d'Angouleme^ el une edi- tion complete de sa correspomlance ! Afin de reproduire le plus exaciemeni qu'il etail possible noire manuscrii , nous avons conserve le — 256 — lexte sans corrections ni adiliiions, avec son orllio- graphe ; el pour en rendre la lecture plus facile, nous avons employe I'accentuation el la ponctuation mo- dernes , el etabli autant d'alinea que le sens le demandail. Enfin nous avons iudique par des ( ) les mots douteux, el par des [ ] ceux qu'une autre main, celle qui amis I'ee-tele des leltres, paraii avoir ajoules en revisanl la copie, Quelques notes feronl connaitre au lecieur les per- sonnages el les fails que le lexie se coniente d'in- diquer. — 2.S7 — ETAT ET DECLARATIONS DE LA VILLE DE REIMS APRfeS LES ASSASSINATS DE BLOIS (Deceojbre 1588, Jaiiyier et Fe?rier 1589). Fragment d' une Hiftoire de la Liyue a Reims, par M. Henry, membrc titulairc. Les nouvelles de Blois ne parvi'nreni a Reims qira dix oudouze jours d'inlervalle (50Decembre — 10 Jan- vier). Celle calastrophe publique, qui eiait iin mallienr prive pour la majoriie des habilanis, mil loul le people en larmes. Au milieu de la siupeur el des inceriiiudes du premier momeut, les parlis se reunirenl dans nne meme pensee : clercs el laiques, chanoines, nobles, bourgeois, ecoliers, de mesme volonte prirenl les armes pour la defense de leur ville. Les magistrals municipaux , seuls dcposilaires de I'aulorile, en I'absence du gouverneur Sainl-Paul el du lieulenanl Souyn, reglerenl ce mouvemenl un pea desordonne, ei, par diverses mesures, cherchereni a prevenir loute surprise du dehors , loute sedition dn dedans, en organisanl nn bureau de permanence pour le jour el la null, en n'ouvrani que deux pories, dou- blaul la garde ei la ronde de unit , pla^anl une guetie aux lours de Notre-Dame el de Sainl-Nicaise. — 238 — I. a miiiorite dii conscil eiail alors composee tie ligiieiirs ardenis, com[)romis, apprehendans la puni- tion pour avoir favorise le due , ou craignant (a perle de la religion callwlique; de royalisies caclies, des plus clairvoyant et desirans retablir le bon ordrc, mais n'o- sans sc monlrer ; la rnajorile, de ligueurs moderes on poliliqiies engages un pen forcemenl dans le parli (]e[)iiis 158o, bons scrviiours de Dieii, bons serviieuis du roi, mais ciioyens (res-jaloux des francliisos mu- nicipal's. I e clief de ces derniers , M. de Vraiix , presidenl du coiiseil on rabsencedii iientcnanl, repro- chaii rDoiiis aux princes de Guise i'humiliaiion de Honii ill que rasscrvissemenl de la ciie. Sur sa pro- position, !es conseillers ressaisissenl le pouvoir souve- rain que leurs predecesseurs avaieni possede de tout temps; aussilol ils ordonnenl aux elrangers, el sur- (oul aux soldals, de quiiier la viile, deciarcnl qu'ils' resteronl dans une neulralile |)rovisoire « jusques ^ ce qu'ils aieni re^u nouvelles des deputes de Reims a Blois, observant I'ediid'union, sansrccevoirgarnison de quelque part que ce soil, b Ainsi, avant de s'engager sans reserve, ils voulaicni voir, selon le proverbe_, comment lourncrait le vent, constiluaieni a Reims une sorle de r6publiq,ue royalc el ncuire , seul nioyen d'echapper a de plus graves embarras dans ces jours de conlusion. lis suivireni leur ligne de conduile asscz fitlelemenl, sans grands ccaris, jjendanl tout le mois de Janvier 1589. L'ordonnance sur les elrangcrs ful rigoureuse- ment mise a execution par les delegues du conseil ^ les capiiaines, les arcbers, « allanl le meme jour , a la meme heuro , par quariiers, cbez les parliculiers , dans It's bolelleries , commuuaules et colleges, pour ~ 239 — faire perquisition des armes ei des f'oraiiis, > Qtiand les ofliciers dii cardinal do Guise vinrcni a Reims pour Icurs affaires personndles ou celles de leur mallRMireux maitre , on les lbr^.a do deposer les armes a la |)orle Vosle. On iraiia menie comme eirangers plusieurs geniils- liommes nes dans la campagne remoise , liabiiani Reims depuis plusieurs annees. Cenx qui oblinrenl de raster, durent s'engager a se comporler mode^kment ou paisibleineni , el resierenl sous la surveillance de la police, entre auires le royalisie Sauiour el le ligueur de Phorian. Enfin le conseil reprimauda ou punii se- veremeni (ous les actes el propos sedilieux, loule vio- lation de la neuiraliic, Ces precautions suffiseni pour nous reveler les menees de parlis el les agiiations de la ville. Kn effel , apres quelques jours d'une Ireve apparenle , ligueurs et royalisies reprenneni leur premiere ailiiudc, se moDlrent plus que jamais irreconciliables , decides a lout tenter pour s'emparer du pouvoir, donner Reims a la Ligue ou au roi. Les premiers, pour venger le fait de Blois et renvcrser le tyrand , vou- draient qu'on se mil aussiiot en pleine revolle, comme Paris, comme Troves et auires villes de ['Union ; les seconds , s'opposani aux projels des desesperes et des temeraires, provoqueni, par des moyens plus legaux, qui n'exclueni ni la violence ni I'inirigue, une decla- ration favorable a Henri III, pour rendre le royaume au roi , seul gag(! de paix et de liberie veriial)les. Les uns onl pour chef Brularl de Sillery, grand- archidiacre ; Claude Chevalier, couseiller au siege; les capiiaines Graillei ei Serval ; les autres , M. Lau- r^Dt Cabchon, lieuionani general el president au si^g^ — -i^io ~ presidial ; k\s freies Foret de Mortilaiireiil , capiiiiiire (le Reims el vidaine de Chalons, hommes d'auloiitc, siijels fideles. Cesderiiiers, [jienanl les devanls , il voulanl profiler du iroiihle de leiirs adversaires, s'einendcDi avec leurs voisins, pailiculieremeni avec d'Inleville, lieulenant general de la province, que les Clialonnais vienneni de rappeler, el avec le hesorier general Soindre. Le 51 Decemlire, Soindre ecril an sieur de Vraux pour Ini annoncer les evenenienls de Blois , demander quelle est I'intention et affection des habiianis de Reims envers le loi. De Vraux communique ceiie lelire aux Gonseillers, qui y repondenl aussiloi, en cos lermes: « Nous remercions ledil sieur de raverlissemeni qu'il nous a donne; jamais nous n'avons etc aulres que les humbles et fideles sujeis ei servileurs dn roi ; nous avons par cy-de\anl mis toules peynes et solliciludesa conser- ver celie ville en la religion caiholique, aposlolique el romaine, sous I'auloriie el obeissance de Sa Majesie, ceque, aydani Dieu, nous desirous ei prolestons de coniinuer suivani le sermeni que devons a Sa Majesie ; el k eel effei , nous avons fail soritr de Reims ions les elrangers el forains ; lellenienl qu'il n'y a autre qui commande a Reims que les gens du conseil, conime lis oni fail de tout temps, estanl en deliberation de n'y laisser enlrer aucnn de qui nous puissions avoir soupQon. » De Vranx el Pioche redigent celle missive, Pierre Laignelei la porie avec des lellres de creance pour les habitants de Chalons. Deux jours a()res, le president Cauchon, de la pari du gouverneur de Chalons, a|)porte deux lellres au conseil: Tune du roi, « adressanto aux officiers de la justice du roy a Reims, » I'autre rrons bientol qu'il ne tint pas tous ses engagements, sans dniite a Tinstigaiion de sa protectrice. Le people, excile par la voix de celte femme, par la voix de ses pretres el par sa propre douleur » s'agiie et murmure dans les rues, sur les places,. - 244 - dans les corps de garde el les assemblees publiques, parlo du roi avec audace , le traile de faulser el per- fide, meschant el deloyal, ennemi de Dieu el de VEglise : lous les jours, assenil)le devant rhotel-de-ville, par ses cris, il demande la decheance « du lirand , I'ex- lerminalion des heretiques et de leurs adherents. » Le conseil cherche a calmer ces agilaiions, et snr- loul il reprimer les manifestations des compagnies ; il mande les capilaines , « lenr remonlre que de toni temps el anciennete on s'esl comporte modestemeni a Reims, sans aucun desordre, mutation ni murmure qui peuvent engendror sedition, » leur enjoignanl de mainienir la discipline dans les compagnies et I'ordre dans la ville. Malgre ces rcmontrances , une revolution est immi- nenle. D'Inlevilie , prevenu par Cauchon , cherche a avoir I'entree de Reims, sous un pretexte assez spe- cieux. Le 13 Janvier, il ecrit aux gens du conseil qu'il a fait connaitre au roi leur bonne volonte et affection, et qu'il desire dire de bouche ce qu'il a entendu de Sa Majesle. Le conseil , dans la crainte d'une sur- prise ou d'une emeute, « le supplie de nc s'ache- miner a Reims , d'aulant que la morl de M. le cardinal est encore irop recente , que le peuple en a encores la larme a I'ceil el qu'il y auroil danger de quelque emotion par le menu peuple. » Dans cetie conclusion, nous croyons voir une crainte reelle, preuve d'une force reelle du cote de la Ligiie , et une sorle de douleur sympalhique h celle du peuple, c'esl-a-dire deux fails nouveaux qui ne sont point sans consequence. Le gouverneur de Chalons ne se rebuta point , il envoya a Reims le iresorier Soindre. On laissa enlrer ce personnagc moins suspect , mais ou Ic surveilla. A — 245 — son arrivce (17 Janvier), il avail Tail prier M. do Vraux de se iransporler chez lui pour recevoir un paquel el quelques paroles de creance de la pari du roi. De Vraux se garde bien de s'y rendre seul : accompagne d'une commission composee de Messieurs Robillart , Ferel , de Vaux ei Pioche, il apporie les paquels a i'holel-de-ville. Comme ils elaienl adresses a Mes- sieurs les officiers du roi el gens du conseil , on va chercher aussilol « les lieulenanl-general , avocal el procureur du roi. » Lecture faiie, avaot de rien de- cider, on inviie Soindre a venir « dire ses paroles de creance, a plain conseil, le lendemain, a huit heurcs. » Ce jour-l& , Souyn presidait le conseil. II elail revenu la veille au soir, apres avoir pass6 quelques jours a Paris, ou il avail promis qu'il feraii joindre les Remois avcc les Parisiens. Sa presence, ses recils sur le fait de Blois el sur la revolle de Paris, ne pouvaienl augmenler les chances des royalisles, ni favoriser la mission de Soindre. II parail meme que ce dernier en fui loul trouble et n'osa continuer son role: au lieu de parlor au nom du roi, « il remonlra que rinlenlion d'Inteville etaii que ceux de Reims vivenl en paix ensemble, se conservant d'eux mesmes sous I'autorite du roy, sans recevoir aucune garnison quelconque, el en faire assavoir ledii roy. « On lui accorda I'acilemeni sa premiere reqiiete, conlbrmo au desir du conseil depuis le commencement des troubles; on ajouia cependanl a la conclusion : « et de conserver Reims en la religion. cathoUque, apostolique et romaine.7) La seconde deu)ande ful ecariee comme le 3 Janvier, el le iiegociateur dm qtiiiler Reims sans delai. Ainsi, a la dale du l.SJ;iiiviei', nous |)ouvons coiisla- — 246 — ter, d'uneparl, que le conseil persisle dans sa defiance envers les royalistcs el dans ses refus de se mellre en rapporl avec le roi;d'aulre pari, que les ligiieurs onl relrouve un chef, ci Madame de Saint-Pierre un allie pnissani. Les rojalistes , comprenanl la gravite de la siiualion , e^saieni de debaucher Souyn ; iis s'abouchenl avec lui , Ini prometlenl de le faire jonir de son dial (Venquesteur dans leqiiel il diail irouble, « dc Ini faire bailler 800 ecus des deniers dii roy. >> Le royaliste qui nous revele ce fail dii qu'il fiil anx lermes de s'y ac- corder. Mais Madame de Sainl-Pierre et les ligueurs Temporlereni ; ils fireni cnlre eux « nne coeuilleiie do cinq a six cenls ecus pour aider aux frais el a I'en- ireiien des hommes de main. » Si celle negociaiion esl vraie, elle n'a pas du trainer longiemps, car, des le 19 Janvier, nous voyons Souyn engager pen h peu le conseil dans les voies de la resistance el de la Ligue. En apparence, il ap- prouve fort la neulralilc du conseil el vent y ros- ter fidele ; en realile, il le pousse a la guerre. Sur sa proposition, on mure la porte Flechambaull , des hommes choisis dans les compagnies sont commis pour lirer le canon et les arquebuses a croc du rempart ; on l^ve a Berru el villages voisios deux cents hommes de pied commandes par les capitaines dc ville. Saulour el ceux de sa qualile sont dispenses d'aller aux porles, mais payent nn rempla^ant : on conirole leurs actions pour savoir s'ils ne font chose prejudiciable a la ville. Bien plus , les ligueurs s'enhardissanl de jour en jour, un d'eux, un quidam on anonyme, Ires-proba- blemenl le sieur de Phorian , envoya vers Troyes nn laquais porteur d'une letlre qui I'ul surprise : elle n'a- vail ni suscrifition, ni souscriplion, ajipolaii a Reims — 247 — uncertain personnage, liii (Jisani qu'il y faisoit bon el qu'il y seroit bien venu. D'Intoville , devinanl que celie missive s'adressail a Saint-Paul, se plaignit aux Remois, declara leurs actes conlraires a ieurs promes- ses. Le conseil , qui craignaii antnnl Saint-Paul que frinteville, repondii que rien n'elait change, ci, pour le prouver, chargea J. Roland d'aller cherchor ladite missive pour faire une enquete. En meme temps , pour conserver davanlage les habitants a en une Concorde, eviier loute suspicion el defiance des uns des auires, il (it renouveler le sermenl a I'edil d'union et promettre d'avertir le consed des contraventions el nouvolles interessant la ville. » Voyant Soindre evince, Souyn incorruptilde et Saint-Paul appele, d'Inleville aurait bien desire ap- puyersesenlreprisesetsesplaintesd'une demonstration arinee, mais Chalons n'etant pas loal-d-fail purgee des faclieux, iln'osa deloger ; il dul se contenter de mettre en avanl des voisins , de vieux amis des Remois , La Vieville el Tourtcron. Le premier offre ses services au conseil ; le second, batlant la campagne remoise avec soixante cuirassiers, pres de Cernay, fail prisonniers quelques notables bourgeois. II les renvoie sans ran- ?on, leur fnisanl seulemenl promettre qu'ils obtien- dronl I'enlree de Reims pour Ini et un domeslique, Mais ces bourgeois ei ces capitainos soni reinercies ou rebutcs comme le gouvernenr de Chalons. Resiaii aux royalisles une derniere esp6rance placce dans une intrigue hahilement concuc el bien com- mencee, mais mal executee. Des les premiers jours de Janvier, d'Inleville el Cauchon avaienl depute h Blois le siour de .Montlanroni , vi(lnm(> de Chalons , |four dire au roi que la pins i^rande majoriic des — 2i.8 — habiinnts tie respirait que son service c( reconiiallrail volonliers le gouverneur qu'il voudraii bien envoyer, si on avail soin de choisir non parmi les seigneurs hosiiles a la Ligue , regardes comme fauleurs d'he- resie, mais parmi les princes eirangers aux pariis , auianl que possible allies aux Guises ; « insinuanl que le due de Luxembourg cioii I'homme de la circon- slance. » Le roi accorda volonliers toui ce qu'on lui demandaii. Par malheur, le due de Luxembourg n'elail pas a Blois. Lui expedier sa commission el une Icllre de creance pour les Remois eui ete uiie sage precaution. On anrail re^u le prince sans defiance , el une fois enlre , il ne serail probablemeni plus sorii. Le roi craignil de perdre du lemps , de decourager ses amis en leur faisant irop allendre sa reponse. II ecrivii an due de se rendre a Reims en louie diligence, et remit a Monllaurent sa missive pour le conseil de ville. C'elail ebruiier la negociaiion sans I'appuyer par un homme ou par une demonsiralion capable de conlenir les ligueurs. Celie premiere faute en amena une se- conde bien plus grosse , qui retombe tout enliere sur les raenenrs de I'enireprise. Monllaurent, a son retour, va trouver Cauchon pour lui dire que le roi a suivi son avis. On convienl du jour ou les lellres seronl remises au conseil, on clioisii le Vendredi 27 Janvier. Le president promel de s'y irouvcr, d'avouer, de palroner le vidame, qn'il charge de I'aire a,rraer les royalisles pour le jour fixe. Monllaurent s'acquitte lidelemenl de sa commission , engage ses amis a pa- raiire en plus grand nombre qiiils pourront au-devaiit de la mainon de ville, leur disani que leur presence eiait necossaire pendant la lecture de certaines lellres — -2/49 — du roi , tloiil il ei:ii( porleiir, leur faisaiit mysi^re dii conienti. Cel exces cle prudence fa tout avorier. Plusieurs royalisics (le plus grand nomljro , dit noire niemoire) « se (•oiileniom de se lenir preiz en armes dans leurs raaisons, en cas de besoin el comme aliendani iin au- tre signal. I.es plu^ ardent* sonl seuls exaciz au ren- dez -vous , au nombre de qitatre cents el plus. » Celte iroupe d'hommes armes inquie(e le lieuienanl de ville; il sort du conseil, exhorle le peuple a se retirer, a laisser les magistrals municipaux libres poiir « aviser et conclure sur le bien el conservalion de la ville. » Les bourgeois, ignorant ce qui se passait el sans chefs, se relireni paisiblement. Les conseillers enlrent alors en seance : Souvri ' expose que le v:d,ime de Chalons I'a prie de fes convoquer pour dec arer ce qxCil a d.' la part de Sa Majeste et ses lellres. On mande aussilot Regnaut Feret. Celui-ci dil qu'il a « mnndemenl du roy de dire aux habiianis que Sa Majesie se conienle "fori de leurs dcporiemenis, desire fort qn'ils continnenl leur union en ladile ville, sous I'obeissance de Saditc iMajeste. » Puis il se retire, deposanl sur le bureau deslettres" du roi « adres^anies a noz ames et fcaux les offi- ciers de justice de noire ville de Reims, maire, eschevins, manaus et habiians d'icelle. » Les esprils eiaient dans le trouble et dans rattentc d'un iirand- evenemenl. Les plus peiils details nous en donncni la preuve. D'apres la couiumc et I'adresse , ceite leiire devaii etre ouverie par les gens du roi appeles au conseil. Ceite fois, on ne les nppclle point ; Clauile Aubert ei le procureur s\ ndie leur iiorteni les lellres avec invitation de les ouvrir. I.es deputes revienneiit xxvii. n — 550 — ;iiissii6i , disani que le lieulenanl general el le pro- ciiiem' dii roi lefusenl d'ouvrir el prienl Ic conseil de le faire. Le conseil s'execute el le syndic, apres avoir brise le cachet, lit la leilre siiivanle : « He par \(^ toy. )j Noz amez el (eaiix, nous avons eniendu par le s' vidanie de Chalons, presenl porienr, que vous nous avez envoye expres pour eel effel , la bonne el sainle resoluiion que vous avez prise de demeurer en noire obeissance, comme Dien le vous coramande, el ue pouvcz en seurelede conscience faire autremenl. Sui- vanl la reqiieie duquel s"" Ferel de vous envoyerquel- ;tre religion catholique , aposio- liquo el romaine, sous Taulorite du roy. » Cos malentendns, ces desavcux, ces lachetes even- lereni el ruinereni louies les mines royalislex. Les ligueuis, au conlraire , voyaienl leur triomphe assure et iies-prochain. A ce monienl memo, ceux du dediins, dejii si foris par leur nombre el leur audace. recevaienl du dehors des excilalions ptiissanles el des secours ires-efTicaces. Saint-Paul approchaiL repon- danl a Tappel de Phorian ; le due de Mayenne ecrivait aux Piemois pour les mainienir dans le parii; les Pa- nsienset les Troyens leur envoyaient des deputes pour les inviier<') enlrelenir I'union faite avec eux. Parmi les deputes de Paris se trouvail le cure de Saint-Benoii, Jean Boucher, qui venaii precher le careme ^ Reims. Ses passions snrexcitercnt colles de la foule/en par- n'culierdes eliulianis. On ne paria plus, dansl'Univcr- sile, que d'imiter la Sorbonne ; la fille devait marcher sur les traces de la mere. Un regent, nomrae Boullei, se mil h la tele des ecoliers, fit montre par la ville , lambourin en tele. Dins des coDciliabules secrets et — 253 — publics , les deputes de Paris pioposaitMil « los plus beiuix moyens pour exlenniner lous ceux du parli coniraire, venij;er la foy publiquo des eslals-generaux violee a la lace d'iceux , les due el cardinal de Guise, vraies colonnes de la religion cailioliqu(! , lues sans forme de justice. « lis agissaienl aussi sur le peuple, « le praliquani parbuvelle ct discours, lui impriinaui la crainle de perdre la religimi, s'il ne s'armoil pour sa defense. » Quaniaux conseillersmunicipaiix, pour rcsier (itlcles a leurs premisses, ils aurai-m dii agir avtc les rcpre- senlanls dn pouvoir revolulioimaire. commeavcc ceux du pouvoir royal ; pnisiiii'ils !j"a\aieril pas repondii an roi, ne pas repondre a Cayenne; ils le de?iraienl peul- elre, d'auiani |)lus qu'tui vilam hruii courail sur ce dernier. JeanelOudard Colberi, venantdeTroyes. di- saienl a Reims, quil aooil pris (Vaucuns habitauii de Troyes dc I'lin el de I'autre, deux a trois cents ecus. Mais comment resisier a I'opiniori publique, aux passions loujourscroissanles dela foule?On repondii a Cayenne pour le remercier el I'assurer que les Hemois eiaienl « delibcres de vivre el mouriren la religiun el suivant j'edil d'union. » On fii plus (i'iionneur encore aux leltres des Parisiens el des Troyens. Les premieres. ecrites par les echevins el coips de ville, en dale des 22 el 2o Janvier, s'adressaieni « aux lieuienanl, eche- vins el gens du conseil de Reims. » On les regul le 50, el leclure faile, pour aviser plus suremeni, on remit la conclusion au lendemain . deux heures de rele- vee. Dans ce jour, le conseil repondii aux Pari- siens: « En ce qui louche I'union pour le fait de la religion caiholique , aposiolique (I romaine, les iiabilans dc Reims enlendenl lenirct cnlrelenir I'edit d'union , el pour ce regard demeurer unis, non seule- — 25i — meni avec Messieurs cic Paris, inesiiiemtMil avec lotis les aulres caiholiques (111 loyanme. » Qualre jours plus lard, il ecrivaii aux Troyens : « Koiisne nous depar- lirons jamais de nosire union. Aidant Dieu, pour la soiislenir el la mainlenir, nous exposerons lout ce que Dieu nous a |)re>le, mesnie jusijues ii la derniere gouiie de nosire sang. » Ainsi les coiiscillers de Heims s'en- gagenl, reconnaisscnl presque officieliement le nouveau pouvoir, pourlani different leur manifestaiion publique, ajoulanl a loiiies leurs deliberations : Sur le surplus sera surcijs. lis conservent unesori-jde neuiraliie ofli- cielle. S'ils ordonneni une etiqueie sur le bruit repandu par les Colbert el dementi par les Troyens, ilscontinueni cello qui est commencec sur I'auieur de la leiire envoyee a Saini-Paul, eiivoieiit le grand-arcliidiacre, Messieurs de Vraux el Beguin au college, « remonirer a M. Boullet et aulres ecoliers de se comporler saigemeni, lanl en paroles qu'en fait, sans faire monstre, ni baiire le lambourin par h villc » Mais, comme auparavant, d'autres actes bien auire- meni graves annoncent des inleniions lout opposees. On se prepare & une guerre sericuse : on acbete de la poudre ii canon. Les maitres de rarlillerie rcQoivenl I'ordre dc melire les chaines des rues en eiat, de faire un rapport « sur celles qui sonl Irop Fiautes ou trop basses, sur les propriciaires refusant de praiiquer des percees en leurs maisons pour tendre lesdiles cbaines. » Le cierge demande el obiient la garde de deux posies, plac(; Saint-Maurice et au parvis. Enfin , les Remois agisstnt sur les gens des villages, bourgs et villes di» voisiiiage (1), qu'ils prepareni a la r^volle el autori- (I) Corraissy, Houcy, Fisnies, DomylonlaviP, MnlmaUon, 6 Dans celie circonslance solennelle, le conseil n'osa - 257 — asstimer seul la responsabiliie des eveiiemeuls , con- iraireiuenl a line decision receiiic par laquelle il s'eiaii declare compeieni siir raffaire de TUnion (ol Janvier) ; il (lifTcra roiiveruirc du paquei jusqu'au iendemain, el pour y proceder, s'adjoignii les notables de lous ordres, gens du roi, capilaines, lieuienanl, enscigiies, principaiix liourgi'ois. L'assemblee dcvail se reunir a iiuii heures du maliri en la chambre de I'eleciion , le Mercredi 8 Fevrier , mais elle ful remise au Jeudi 9, el eni lieu a» palais royal. Ce retard semble avoir ele coMCcrtc enire le conseil de ville el le chapitre Nolre- Dame. lis vonlaienl profitcr de roccasion , de I'irriia- lion que devait causer la leitre du gouvernour noinme par I'intrigue royalisle, pour i'aire sanctionner scs dernieres conclusions el obicnir une adbesion a la Ligue, bans reserve, complete; publique. lis ne ne- gligerenl rien pour s'assurer une victoire eclaiaiile , un vole unanime. Le conseil dressa la lisle des nota- bles , ecarlanl les suspects , appelant les ligueurs el suriout les cures. Par ordre du chapiire, « le iheoiogal Morus rt'digca des articles i I'imiialion de ceux de Paris , sur le parii et mesures a prendre pour la conservation de Reims, la defense de la religion ca- iliolique et I'union nouvelle dcs catlioliques. » La iaculie de tbeologie on imlririennc de Reims , reunie il Saint-Palrice, deliberani sur celle question : Si parlem regis Polonice , nwper Franciw , qui paries hcerelicorum se fertur lueri et defendere niliiur , se- quendum sit cilrd (idem, el conlirma puremenl el simplemenl le decrel de la Sorbonne. Armes de ces pieces, les ligueurs se presenlerent , le 9. au palais royal. L'assembiee elaii nombreuse el vraimcnl composee de notables; le registrc des conclu- — 258 — sioiis oil ciie quairc-vingi-onze , enlio aiilies , pour le clerge : F. Brularl, Robillari , Morns el Levasseur, chaiioines; Beauchesne, aurnonier de Madame de Sainl-Pierre ; Lespagnol , sous-prieur de Sainl-Remi ; Auberl, Lebegue el Cornu , cures de Sainl-Michel , de Sainl-Pierre-le-Vieil, de Sainl-Hilaire ; pour la magisiralure , Frizon , lieuienanl criminel ; Ferel , chevalier; Lespagnol et Mymin , coiiseillcrs au siege; Frizon, avocal du roi ; Rousselel el Bignicourt, avo- cals; Le Lorin, Andry el Ancelol, elus ; les capilaines Gerard Frizon, Beuvry , Cacheile , Graillel , Charlier, Coqueberl ; la plus grande parlie des conseillers de ville, de Vraux , de Vaux, de Boulzy, Gaulhier ; les connelables Landouzy el Desrode. Parmi les absents, on remarque le president Cauchon , le cure de Sainl- Jacques, Gerard de Lalobbe, les ligueurs Pillois el Servai. Peui-eire que les premiers n'avaienl pas ele invites comme suspects , ou refusaienl d'auloriser la revolle par leur presence ; peut-elre que les aulres elaient occupes a d'aulres vacations. Au resie, les ligueurs elaienl si confiants dans la victoire, que, pour garder I'assemblee, ils ne mirenl sur la place du Marche-aux-Chevaux qu'une vingiaine de soldals. De ce nombre « etail le palre des vaches el pores, facile ,a reconnoitre , parce qu'il esloil borgne. » Le lieutenant Souyn , president , fil lecture des lellres du due de Luxembourg. Celui-ci declarait qu'il avail commission du roi pour commander h Reims, et deraandail « en quel train el equipage on trouveroii bon qu'il s'y acheminat. » Au milieu des emotions ex- citees par celle lelire , M. Morus obtini la parole pour y proposer les articles du clerge. Notre regisire, qui est impartial, Iroid ei mori comme un registie, — -m — 111' (ill pas coinmeni I'urenl acciieillios ces deux coni- muiiicaiions ; nous pouvons cepeiuiaiU atlii'mer que la premiere excita de violenls murnmres, la secondo de vifs applaudissenieriis. C'esl du moms ce qu'on de- dull nalureilemenl des conclusions de Tassembiee. <( Sera ecrit a M. de Luxembourg que les habilans de Reims n'onl doiine charge a personne, au vidanie de Chalons, ny a autre , d'aller vers le roy demander pour gouverneur de ceiie ville le dil sieur de Luxem- bourg ou autre ; el ainsi done sera prye de ne se lr?i- vailler pour s'acheminer ycy pourcesi efl'ecl ; et neanl- moiiis que nous le remercions de la bonne volonie el affection qu'il a a noire endroicl, le suppliant de croire que, si nous avions besoing d'un gouverneur, nous nous senlirions lous heureux de le pouvoir avoir, esians asseures de son integrite el vraye religion. Mais que nous desirous conserver nos anciens privi- leges , qui soul de ne recevoir gouverneur ni gar- nison de quelque pari que ce soil; elaussyque, par leilres du roy, du premier jour de Juing dernier, Sa Majesle nous a commis la charge el garde de la- dile ville, Auquel sieur de Luxembourg sera envoye auUaiU desdiies leilres , el la deposition dudii sieur Ferei, auquel sera fail son proces en la cour de par- lemeni a Paris, el pour ce faire oblenir commission, si besoin est. Pour le regard des articles presenles par Messieurs du clerge, ils sonl renvoyes au conseil ordi- naire pour en deliberer, escepie le dernier faisani mention de I'union , el pour lequel il a esle conclud que les habilans de Reims s'unironl avec Messieurs de Paris el aulres villes calholiques pour I'enlrelene- menlde la religion calliolique, aposiolique el romaine, conservaiiou de I'eslat ei bien du puldique , suivanl — 260 — los articles par eux envoyes. El sy a esl^ conclud que lous les habiians seroni jppeles a rH6leI-de-Ville par conneslahles , pour reineinorer ruiiion el serment conforme a celtii de Paris; seroni les refusaiis de- poses des charges piibliques, s'ils en sonl pourvus, et expulses de la ville, les refusans de comj)aroir mulctes d'amende. » L'union esl solennelleraenl volee, le due de Luxem- bourg remercie ; pourlaril, dans la reponse qui lui esl faile, nous reinarquons une grande moderation dans le fond et dans la fortne. On senl que les Remois veu- lenl menager un prince puissant qui, au bcsoin, peut devenir pour enx uii protecleur, un inlercesseur ; I'as- semblee fail meme une gracieuseie a sou laquais, seance lenanle: elle lui vote quatre teslons, pour son voyage. Les conclusions du palais royal, voteos a une grande majoriie , ne pas^^erenl pas &aus opposition. Ponce Augier, procurenr, Pierre Desmolms le jeune, Coque- bert, capitaine, el quelqucs aulres quiilerenl la salle a I'appel de leur nom. Ces proleslalions mueiles n'a- boulireni qu'a les rendre suspects, Avanl de se re- poser, rasscrablee decida que la compagnie du capiiaine Coqueberl serait niandee la premiere , el « a lui en- joint d'amener a ce jourd'bui , une de ses connesla- blies en rhdle!-de-ville. » D'auires capilaines ou notables approuvaieni ou imilaienl la conduiie de Coqueberl, mais, comme lui , ou se lurenl, ou refuserenl d'agir quand on leur pro- posa des expedients pour arreter la revolution. Le fail suivani nous monlre dans quel aballemenl eiaienl les royalistes. II nous esl fourni par I'auleur d'un me- moire anonyme que nous atlribuons a un d'Origny. — 2fil — « Le jour inciiie de I'asseniblee du Palais royal, j'elois de garde, dil-il, a la porle Dieu-Lumierc. Nous elioiis 24, enire lesquels il ne s'v en reconnoissoil que qiia- tre ligiieurs. A I'ouverliire de la porlc, les paysans de Trois-Puilz, iMonlbre et aulres lieiix direnl que le baron de Cardillac claii loge a Trois-Puilz, e! ses gens es villages circonvoisins, bien an nombre de scpl a huii cents, lanl gens de clievaux que; gens de pied, Cela me ill penser au moycn qui se presenioii pour asseu- rer lu ville de Rtiims on I'obeissance du roy. Jon conimuniquai a uii de mes amis . lequel s'offril pour aller vers ledii sieur baron , si le capilaine qui coni- mandoii on constilues en prison seure. el leiirs biens confistiues. Les habitans des Irois ordres scronl oys en leurs opinions a ce jourd'bui , apres les vespres el aux jours suivanls. » Pour scrutateurs sonl nommesMM. Souyn, lieutenant; F. Briilarl,grand-archi- diacre; Pierre Krizon, doyen de Notre-Dame; Claude — 268 — f.licvalier , conseiller an siege ; J. Ganiliier, bourgeois. En meme lemps , Souyn saisil I'assemblee d'une aiiire affaire. La guerre elanl declaree a la royaule, il faui de I'argenl pour la soulenir. Le meilleur moyen, «'esi d'exercer le domaine du rot , ou de conserver les failles, lailloii el imp6(s de loute I'election de Reims ; car les envoyer a Chalons, c'esl nourrir rennemi, et conirevenir a I'ordonnance de TUnion ; les envoyer a Troyes. c'esl les exposer el en priver Reims. D6ja le conseil ordinaire a resolu la question en faisanl arreter' (lies deniers de la recede que le receveur Tliurel, roya- lisle cache ou compiable inquiel, fait filer sur Chalons. L'a^semblee generate , consuliee sur ceite saisie , I'avoue coniplelemeni , sansprelexter, comme le con- seil ordinaire, les voleries des gens de guerre baltant' la campagne remoise, mais parce qu'elle veut que « tous' les deniers des lailles, taillons, aydes, grenier a scl , forains el aulres soienl saisis el regus par les rece- veurs, pour elre emplo}es au fait de la guerre pour la conservation de ladile villc , a la charge qu'il n'y en- irera dans ladile ville aucune garnison, el que le com- mandcment d'icelle demeurera au lieutenant ct gens du oonseil. S'il est bcsoing et necessaire de mettro au- cuns soldals dans la ville , pour aider a sa defense et an soulagenienl du pmivre peuple, cela se rapportera au conseil general, pour en ordonner. Trop bien pour- ronl les gens du conseil lever gens de guerre, lant de cheval que de pied et en lei nombre qu'ils adviseront, pour battre I'estrade et demourer aux faux bourgs. Puissance donnee au conseil el charge de I'execulion de la piesenlt', promeilant ics habitaris d'avoir pour agreable lout cequi sera fait: doni tons ct chacun d'eux seront dedonimages par If corps drs habiiims. Pouvoir — 26/1 — a eie domx- do tltilegner deux du conseil pour nller a Paris, jurer ei signer ladile union pour la cotnmu- naulie de Reims, el entendre les parlicularit6s qu'il est besoin d'observer pour renlrelenoineni et conser- valion de Indiie union. Signe : Rainssant. » Toul est done consomme. Apres six semaines d'inceriiludes et d'agilalions , Reims se donne a la Ligue, a la revolution caiholique. Si ceite revolu- tion, decrelee par quelqiies-uns avant d'etre voiei; par lous , a le meme vice originel que les aulres. on ne pent dire qu'elle est le resnilat d'une surprise d'en haul, ni d'un lour de main d'en has. Elle est I'oeuvre lenie , calculee , concerlee du conseil de ville , du chapitre Nolre-Dame, de rasscmblee generale ou do la grande majorile de la population. Chaquo parii joue libremenl son role dans ce long drame. empor- tanl sa part de responsabiliie , do home ou degloire. Les royalistes, ne sachanl comment mellre d'accoid leursdoclrinesei leurconscionce,agissent dans lombre, sans chef avoue ; ils semenl I'inlrigue pour recueiliir I'exil ou la mine. Les ligueurs, forts de ieur nombre ei de Ieur union dans une commune douieur et une commune indignation, marchent toujours de succes en I succes par la violeiice et [)ar rcmeute. Le conseil de ' ville fail comme ions les pouvoirs moderes etindecis; il subit la pression du dehors au moins autant qu'il cede a ses convictions. Ccpendant, par sa [xiliiique expectante, il a la gloire non-sculement de sauvegarder les liberies municipales , mais encore d'amoriir les passions, de preserver la ville d'une reaction violi'nte, d'un coup d'eiat mililaire ou populaire , c'os!-;i-dire des vengeances individuelles el des malheurs publics. [VOTE siir les STATUETTES QUI DECORENT LES PILIERS (111 CHORUh DE SAINT-URMI, DK KEIMS , Par M. CoLLERY, membre titulaire. SI Ton avaiice jiisqii'jiiipres Je la grille qui ferine aciiiellemcnl lo clioeiir de la basiliqiie de Saint-Remi, on ne pourra s'empecher de remar(|ner les chnpiieaux qui , a droile ei a gauche , en decorenl les six piliers. Ces chapiteanx , en elTei , n'ont absolumenl rien de la corbeille fleurie on feuillagee qui so rencontre parloul ; chacun d'eux a eie erne de statues, qui ont conserve jusqu'ici la trace d'affreuses mutilations ct vont etre henrcusement I'objel d'une restauration. Trois consoles fornieni I'ensemble de chacun de ces chapiteanx, el re^oivent les faisceaux de colonneltes qui de la s'elancent a I'elage superieur. De ces trois consoles, cellc du milieu est la plus petite, la moins saillanie , et seule porie un embleme. Celles de ilroite et de gauche oni beaucoup |)lus de saillie el presenteni, chacune, en application, une statuette qui en suit le contour et parait ainsi suspendue dans les airs. De leurs regards, de leursgesle.'^, ces pelils |»ersonnages XXVII. 18 — 2GG — foul remaiquer le medaillon einblemaiiqiies qu'ils ac- compagneiM. Cel embleme est done, evidemmenl , Tobjel principal quo le sculpleur avail en viie ; c'esl lui qui doil le plus aider ix rinlerprelation de ces debris, el nous reveler Tidee qui presida a leur execution. Celle idee , croyons-nous , c'esl la croix de Jesus- Cbrisl , lour-a-lour inslrumenl de salul avec le serpenl d'airain , de vie avec le pelican , de sacrifice avec I'agneau immole, de vengeance, enfin, el de iriomphe avec la verge vigilanle ou iriomphanle : cinq em- blemes doni nous reirouvons la trace, el qui laissenl pressenlir le sixieme, sans, loutefois, le designer d'unc nianiere assez precise ; qui aidenl a reirouver aussi les personnagcs detruils ou enigmaliques, sous les yeux desquels ils sont places. Voila, selon nous, la clefdecelie elude, que nous allons suivredans le de- tail, a I'aide des notes que noire collegue M. Reimbcau a bien voulu niellre a noire disposition. 1. Cute de VEpUre (sud). Nous desccndons du sanciuaire a la net" 1" 1^0 premier groupe se reconnaii loui d'abord : c'esl Moise avec le double rayon qui u'appariienl qu'a Uii; c'esl Aaron, avec ses veiements de graiid-preire, el designe meme par son nom peinl sur le cordon supe- rieur de la console. Le serpenl d'airain , que coniem- plenl les deux freres , n'esl pas une sculplurede noire age. Nous n'appellerions point serpenl un monsire qui n'a de ce reptile que la queue ecaillee ci lorlueuse, landis que son corps est orne de vasles ailes et arme de griffes puissanles. Tel qu'il esi , ce dragon porle precisenncni le caraciere de son epocjue. Sous le nom — 267 — d'Aaron, on peiii lire, on leUres noire?, egalement, mais plus anciennes , les irois mols : In cruce regnuin ; ces raols confirmenl I'idee que nous exprimions d6s nos premieres lignes: la croix preoccupait avanl lout celui qui a preside a Texeculion de ces sculptures. 2° Le deuxieme groupe nous presenle, h gauche: David nobiemenl drape , royalemenl couronne el portanl en ses mains son nom peinl sur un lisiel; h droile: Salomon, nomme de nienie, el ires-complel , moins sa lele royale , qui a disparu. — Mais vers quel symbole se dirigenl les yeux des deux princes? On apergoil evidemmenl un oiseau pose sur un nid, el ce nid, vu de face, esi fait de paille ou de roseau. Trois em- Itlemes, irois oiseaux sonl possibles ici . d'apres le Psalmisle interprele par sainl Auguslin : Jesus-Cbrisi a pu elre compare au pelican, an hibou et an passe- reau. Le pelican nous parail devoir elre prefere au cas present. D'abord , la nature du nid se rapporte mieux avec Toiseau aquaiique. D'ailleurs, Toiseau qui pose en face de nous est vu de cote, comme ne se rcpresente jamais Toiseau des nuiis; il est d'une laille qui ne permel pas facilement d'y voir I'un de ces faibles passoreaux dont Jesus-Christ parle comme d'objels si cheiifs; le pelican resie seul possible f [actus sum similis pelicano solitudinis ) , el aux termes du sainl roi David, il est le symbole, ct de Jesus-Chrisi aban- donne, el du sang qu'il versa pour nous. Car le pe- lican, d'apres la vieillc zoologie, s'ouvre le sein pour nourrir sa progenilure, et c'est ainsi qii'on le trouve au moyen-age, grave aupres du saint roi qui I'a nomme. 3» Le Iroisieme groupe seiail un hieroglyphe inde- chidrable , si Tembleme ne nous donnaii unc indication - 2G8 — precise. Ccl embleinc esl I'agnoaii, doni on leconnail la presence a sa forme generale d'abord , el do plus a ses pieds fendiis, a sa lete a demi dressee, qui laisse passer une croix ornee d'lin etendard. De la, il est permis de conjeclurer quels claienl, a sa droile et a sa gauche, les personnages en adoralion. L'un, qui esl dcmeure, quoique mulile horriblemeni, se drape dans un manlcau , doni un pan lui recouvre la leie; iJ esl de figure agee, niais sans barbe; el son iislel porle les irois premieres lellres el la barre mediane de la quairieme lellre du mol Ecce. Mais qui esl I'aulre personuage? Sa place est vide; rien n'y esl resle, qu'un champ frusie el vide, ouverl aux conjectures. Or, il nous somble qii'oii pent deviner avec assez de vraisemlilance le nom de ces deux adoratcurs, ou qu'au nioins, la reslauration qui va se faire pourra y placer deux ligurines en harmonie aveclosaulressujels Lien connus. Ainsi, dans le personnage qui manque, je voudrais voir saint Jean-Baplisle. precisemenl parce que son voisin ne peul pas eire le sainl Precurseur: il n'en a ni la barbe herissee , ni la maigreur carac- leristique, ni le veiemenl de po\\, el cependanl pres de V Agnus Dei, pres de I'agneau crucifere, Jean-Bap- lisle esl necessaire: c'esi done lui que celie place vide reclame. Quant au personnage qui lui fera pendant, on pourrait desirer Malachie, a cause de sa legende Ecce; mais comme cc prophele, en disanl : Eccevenit, n'a point parle de I'agneau divin, il semble qu'lsaie serail bien inieux en son lieu , avec la legende : Emitte .4gnum , Domine. Isaie est , en effei , le seul prophele qui ail designe Notre Seigneur Jesus-Christ sous le symbole de celie creature pleine de douceur; et, d'ailleurs, si Malachie eiaii choisi comme ayanl annonce Jean-Bap- ~ "269 -- lisle, Isaie, a cc litre encore, devrail avoir la prefe- rence, car c'est lui qui a preclil encore pins expressc- menl le saini avanl-coureur du Messie. Kniin, lsai(i esl, sans conlredil, le premier ei le plus celebre dcs propheles; il serail elrange que son nom ne pariil on rien dans une colleclion ou fignreni douze personnages doues du don de propheiie. Je conclus : V Agnus 7)ei' subsisle; le personnage, epargne jusqn'ici, serail Isaie avoc la legende; Emitlo Agnum, el le personnage (|ui manque doll eire sainl Jean-Baplisle, avec ces mois sorlis de sa bouclie ; Ecce Agnus Dei. Cote de I'Evangile (nord). Ici encore nous parlons des dcgr^s du sanclnaire pour descendre vers la grille du choeur. Une idee generale a preside, de ce cole, au pla- cemenl des emblemes ; comme ce ne sonl plus des creatures vivanles, mais de purs symboles, ils soni places, cbacun, entre les mains d'un ange a la robe doree, aux manches larges et (lollanles , eraergeani des nuages , pour monlrer qu'ils n'onl pas qniue le ciel. Vers eux se lourneni les regards des propbetes que nous allons eludier. i° Proche le sanetuaire, renibleme qui s'offre aux yeux le premier est une verge rouge, une verge flamboyanle : elle peini au vif le sceptre de fer , de puissance, de colere {virga ferrea, virga virtulis) donl il esl parle aux saintes Ecrilures. Au reste , I'un des deux propbetes la designe par ces mots ecrils sur son lisle! : Virgam vigUanlcm ego video, paroles de Jcremie , cbapiire 1", versei xi, l/aulrc pro- — 270 — pheie laisse lire un texle plus consolaiil : Vidi aquam egredienlem. Ce lexle esl d'Ezechiel. selon I'ancicnne version vulgaie , anterieuie a celle que nous lisons mainlenanl, el conserve, d'ailleurs, dans le chani de I'Eglise pour I'aspersion de I'eau benile pendanl le lomps |)nsoal. 2o Au pilier du milieu, I'ange, de la main gau- che , porie une croix nue , sans le divin crucifie , 61 de I'aulro main, des clous. Les deux propheus designenl, par la legende de leur lislel , ces instru- ments dc la passion. L'un (c'esl Ilabacuc) laissc lire le moi cornua suivi de la lellre i c'esl la lele de la phrase : Cornua in manibus f/as; des comes, sym- bole de sa puissance , c'esl-a-dire ces clous eux- memes et les qualre branches de celle croix , sont aux maius de I'ange, pour la vengeance el Ic iriomphe. L'autre ligure annonce la mort du Messie : Oc- cidelur Xtus , prediction de Daniel, qui s'harmonise avec les inslrumeiils de douleur qu'elle accompagne. Ici nous ne devons pas dissimuler que sous les in- scriptions precedcnies, on peui lire, non sans peine, d'autres legendes plus anciennes. Ainsi lesmols occi- delur Xius recouvreni le nom d'YsA as, evideuHnent Isaie, el r.on Isaac, car la place de \'i exisle, quoique vide , et le fds d'Abraham n'a rien a faire dans une galerie prophclique. De meme , sous le mol cor«Ma, on voii [>ercer les trois leilres Gek ou Gor. Mais la premiere legende , le nom d'Isaie , a pu eire une er- reur du peinire , ou bien , en lous cas, on se serait ravise en laveur du lexte de Daniel, et la presence d'Isaie ne pourrail que juslifier ici la place que je lui desire pres I'Aguus Dei. Quani aux letires Geu , dies s&M poui nous iin probleme insoluble, a moins , — 27i — peiil-etre , d'y voir I'essai faulil' el bicnlol coirigc dii mm cornua, qui s'en cloigne pen , cl qui seul o demeure. 3° Enlin, le pilier le plus rapproche de la iieC nous offre un ange doni la lele ei Tun des bras onl disparu. II devail porter un enibleme qui a disparu egaU-ment, el que nous renongons a deviner. — Les personnagcs sonl plus faciles 6 irouver. [/un esi Knoch, car son lislel a conserve les irois leilres iniiiales Eno ; d'oii il resulte que I'aulre devail elre Elie, puisqu'il sera lo second lemoin du Saiiveur, an monieni qui precedera le jugemenl dernier. Tous deux annoncoroni ces gran- des assises du genre humain ; luus doux , lemoins ei precurseurs du juge supreme, [)erironl >.ous les coups de I'Anlechrisl ; lous deux revivront pour accuser le siecle qui les aura imraoles. — .Bien volonliers nous les aurions vus contemplanl aux mains de I'ange une epee vengeresse, ce glaive a deux iranchanls qui , d'apres I'Apocalypse , sorlira de la bouche du divin juge, epee doni la garde figurerail la croix , comme deja la represenlenl les aulres symboles que nous ve- nons de parcourir. Nous ne ferons plus qu'une remarque sur ces inle- ressantes sculptures : c'esl le contraste de leur position relative. Vis-a-vis le serpent d'airain , instrument de salut, la verge qui frappe ; en face du pelican solitaire el ensanglaote , la croix aux cornes menaQantcs ; et I'agDeau-victime, enfin, regardant sans doule I'agneau irrite ou le juge redoutable : voila de savanles anii- iheses , bien dignes des doctes el pieux enfanis de saint Benoil. II sera bien a noire siecle de rcssusciler ces legons vivantes , bien qu'adressees a un peuple doni la foi, 272 — plus faible dc jour on jour, ne pcul plus, comuie jadis , les comprentlre el les aimer. La pierre, alors » rcsle comme un reproclie, ou comme un souvenir de l;i veriie coniiue el aimee des anciens jours. II t)Ous reslcrail ii rappoler la peinlure polychrome qui dftcorail loules ces figurines. Mais ce qui a survccu aux outrages du lemps sudii abondammenl pour leur reslauralion , comme I'a demonlre le specimen public dans Its Arts du V" au XVI' Steele, d'apres un dessin releve sur place par M. Reinibeau avec le soin qui lui esi habiiiiel. A la suile de cetle lecture , une commission , composee de MM. Duqueiielle , Loriquet, Ueiiabeau , Collery et Ch. Givelel, s'est reodue pres de M. I'abbe Auberi , cure de Saint-Remi, noire confrere. Le sysleme general dMiUerprelation propose par M. Collery n'a pas paru^appuye de raisons concluanles, la croix. n'aj'ani jamais cte, au moyen-age, I'objel d'un symbolisme aussi continu que noire confrere a cru le Toir a. Saint-Remi. La pcr- sonnc memo de Jcsus-Christ, son incarnation, sa vie, sa passion, sa inort, son retour glorieut pour juger les horames ont semble plutot indiques, tant par les aniraaux symboliques des piliers du cote droit, que par les anges du cote gauche qui tiennenl dans leurs mains les signes correspondant aux paroles des prnphetes. Quant aux details a retablir, la commission a emis lavi-i suivanl : 10 Les noms de Moise, d'Aaron , de David et de Salomon se- ronl restitiies , sans legendes lirees de I Ecriture. 20 Au deuxieme pilier de droile (sud) , c'est par erreur qu'on a regarde le hibou comme pouvant figurer la passion (V. .Gasalius, de vet. sacris christianorum liitibus, pars 1, cap. i). Le pelican paraltmieux s'accorder avec la presence de David et de Salomon. On pourrait aJmetlre egalemcnt la lourterelle rassemblanl scs pctits, du psaume 83'. 3* Au dernier pilier du meme cole , vers la nef , I'agneau cru- cifere , a»yc etendard , iloit etre retabli. Lp prophete dont la legende poile le mot Ece parait ptre saint .lean-Raptisle, avec — 1273 — la l^gcndc : Ecce Agnus Dei. Celui qui lui (ait I'acc serail Isaiei avec la legende : Emitte Agnum dominatorem (errw. 4" Au cole gauche (iiord) , les symboles ct inscriptions des deuT pilicrs qui s'eloignent Ic plus de la nef seront retablis siiivant les indications de M. Coliery , sans tenir comptc des inscriptions qui paraissent antericures. Au pilier le plus rap- proche de la nef, le nom Enoc sera retabli , et il convieudrn de completer celui d' Elius pour \o pcrsonnage situe de I'aulre cote. Quant a I'ange, les traces d'un livre ouvert. porle par lui et siir lequel sa main droite attire I'atlenlioa, etant encore Tisibles , ce livre sera retabli. 5" Les parlies manquantes seront restaurees en piaire avec attaches en bois, de fafon a ne rien compromeltre. II conviendra aussi de donner provisoirement a ces sculptures une coloration qui dissimule les raccords , sans Iraiichcr avec In teintc uniforme des parties d'arcbiteclure auxquclles elles apparliennent. {I>!o!e du secretaire general.) 274 — SCIENCES ET ARTS LES COMETES par M. Meissas, membre titulairc. Messieurs, Dans une precedente lecture, j'ai eu I'honneur de vous entrelenir do I'origine des globes celestes, des causes qui produisenl les grands courants reguliers de I'atmosphere et de la mer , des pluies prinlanieres que nous nommons gibouUes ; enfin, des aerolithes ct des vents inconstants qu'ils doivenl incontestablement produire (1). Je me propose do vous enlretenir , aujourd'hui , d'objets moins importants sous le rapport de I'utiliie immediate que nous pouvons maintenant en relirer, mais qui ont neanmoins exerce de lout temps une in- fluence morale prodigieuse sur I'esprit humain. Je veux parler des comcies. La lerre est deja bien grande pour nous, puisqiie son diaraetre seul a 5,200 lieues de longueur, etque sa surface egale pres de 1,000 fois celle do la France (1) V. le loine xxvi^ des Travaux de I'Academie, p. 05 et suiv. — 275 — ciilierc. Cependaiit Ic soleil, qui nous parail si potil, a ties dimensions bien aulremenl considerables ; son diameire seul a 560,000 lieucs, el son volume excede 1,400,000 fois celui de noire globe; de telle sorle (|n'un navire a vapeur qui fail ires-aisemenl le lour de la lerre en moins d'un an , ne ferail pas celui du soleil en un siecle. Ce globe enorme lourne sur lui-meme d'occident en orienl, el sen de centre ci de nombreuses planeles (juMI mainlienl dans sa spbere d'allraction jusqu'a 1,200,000,000 de lieiies de distance, ou se irouve la plus cloignee que Ton ait observee jusqu'h ce jour. Toules t,es planeles lournenl sur elles-memes d'occi- dent en orient , el circulent invariablemenl dans le meme sens auiour du soleil , qui les emporte avec lui dans les profondeurs de I'espace ; car il est bien con- sialo mainlenanl qu'il se dirige vers la constellation d'Hercule, sans que Ton sache encore quel est preci- sement le centre de son orbile , qu'il met peul-etrc des millions de siecles a parcourir. Le sysleme solaire lout enlier , malgre ses 2,400,000,000 de lieues de diameire, s'aneanlit dans les dimensions de la voie laclce, qui com|)rend pour les aslronomes toules les etoiles visibles et dislinctes, el qui deviendrait elle-meme un point imperceptible, a la distance des nebuleuses jusqu'ou plongenl les. telescopes. Ouire les corps celestes consiammenl visibles, ct dont on pent assigner d'avance la position qu'ils occu- peroni a luute epoque designee, Ton remarque souvenl dans I'espace des aslres qui ne reparaissent qu'a des inlervalles de ten)ps plus ou moins eloignes, et d'aii- Ires qui ne reparai?senl jamais , du moiiis avec un — 276 — aspeci qui puisse les faire reconDallre : ce soni les comeles ou eloiles chevelues , que I'on a longlemps regardees comme des meteores engendres dans noiro atmosphere. Pyihagore, h la veriie, pensail que les co- metes sont en moiivement, comme les planetes, autoiir du soleil; et plus lard Seneqiie le Philosophe, parlageant les memes opinions, osa seul opposer sa puissanle lo- gique aux idees supersiitieuses de ses conlemporains : « Ne nous etonnons point, dii-il, que Ton ignore encore les lois du niouvement des comeles, donl le spectacle est si rare , el qu'on ne connaisse ni le commence- ment ni la fin de la revolution de ces astres, qui des- cendent d'une enorme distance. 11 n'y a pas quinze cents ans que la Grece a comple des eloiles el leur a donne des noms. Le jour viendra que, par une elude suivie de plusieurs siecles , les choses aciuellement cachees paraiironl avec evidence, el la posierile s'e- tonnera que des verites si claires nous aieni echappe. » Depuis ces hommes superieurs, il faul fraiichir pres de seize siecles d'ignorance et de barbaric pour arriver a Ticho-Brahe, qui , le premier, classa les comeles parmi les astres. Depuis lui , Ton a reconnu que plu- sieurs d'enlre elles, sinon loutes, circulent autour du soleil, a la manierc des planetes. Une comete est, en general , composee d'un point lumineux central qui prend le nora de noyau. Ce noyau est enloure d'une sorte d'aureole lumjneuse appelee cAeue/ure. Le noyau el la chevelure composenl la tete de la comele. Cette tele est ordinairement ac- compagnee d'une trainee lumineuse qui prend Ic nom de queue. Mais les comeles ne se ressemblcni pas loules ; les unes sont privces de queue , d'aulres n'ont pas memc - 277 - do noyau , el se presonleni comme do simplos masses vaporeiises. Lours aspects sonl ainsi Ires-varies. Touios ces comeles offreni le memo inierei aiix as- ironomes qui s'occupenl avec la plus scrupuleuse assiduiie de leiir elude, rnalheureusemeni encore peu avancee, bien que Ton sache Ires-positivemeni qn'elles sent soumises aux lois generales el connues qui regis- senl lous les corps celesles. Nous nous occuperons de preference des cometes ii queue, parce que ce sonl cellos qui frappenl le plus I'aileniion par leur singularile et la rareie de lours apparitions. Les planetes, en circulanl aulour du soleil , decri- voni des ellipses lollemonl arrondios, qu'en les voyani dessineos aussi exaclement que possible sur le papier, VcbW les conlbndraii avoc des Cercles. Los comeles, au conlraire, an moins dans la parlie visible de leur irajel, decrivenl des ellipses enormemenl allongoes , mais donl le centre du soleil occupe lonjours nn foyer, ■comme pour les planeles. L'observalion a, d'aillcurs , constate que loules les lois des mouvemenis plan6iaires s'appliquonl aux co- metes avec la plus stride rigucur , ei que , malgre la prodigieuse etendue qu'ellos occuponi, la maliere qui les compose est si peu compacle , que le plus volumi- neux de ces aslres errants apercus jusqu'a cc jour ne peserail pas auiani que plusieurs des aeroliihes qui viennent journelloment nous visiter a noire insu. En (lie!, le noyau des coiueics, c'tsl-a-dire leur I>ariie la plus comp;icio, alteint souvenl des cenlaines el memo des miiliors de lieues d'epaisseur; et copen- dani on [»eul encore disiingnei des eioiles au travers de ces noyaux, doiii la niaiierc doii olrc ainsi AUtnc — -278 — iaroi(! cxcL'ssivo. En iin mot , la masse cniiero dc cos corps esl lellemenl faible, qu'elle echappe aux plus puissants moyens de la determiner donl on dis- pose aiijourd'hui. Les queues s'elargissenl beaucoup en s'eloignant de la tele, el presenlenl des apparences lelles que I'on esl conduit a les considerer comme des cones creux, disposition qui deroute encore loules les conjectures que Ton a pu former jusqu'a ce jour pour I'expliquer. Certaines comeles onl plusieurs queues ; cello de llAA n'en avail pas moins de six , qui se deployaieni comme un immense eveniail sur une longueur de pres de irenle degres. Ces queues varienl souvent d'aspecl d'un jour a I'auire , el parfois memo dans I'iniervalle de quelques instants. Cela peul, quelque- fois, lenir a des circonslances almospheriques, car la moindre vapeur sufiit pour iniercepier la vue d'un objel aussi diaphane; mais il peul se faire aussi que ces changcmenls soieni reels. Puisque Ton ignore enlieremenl ce qui produit la forme des queues, on ne peul connailre mieux la cause qui les modifie. On a mesure les longueurs des queues d'un grand nombre de cometes. Celle de la comeie de 1769 avail plus de 16 millions de lieues; celles des comeles de 1680 el de 1811 en avaienl au moins 41 millions. L'elendue quo de pareilles queues embrassenl pour noire oeil depend de leur distance. Celle de 1680 avail 90o, el celle de 1769 , 97"; de sorte que les teles de ces deux comeles pouvaient aiteindre I'hori- zon ou le coucher, landis qu'une portion de leur queue eiaii encoie au zenith. Celle de 1689 avail 68"; elle etail courbo commo un sahre turc. Oil confoil quo I'apparilion snbiie de pareils aslres — 279 — devail vivemenl impressiomier Ics spoclaleurs a dcs epoqiies ou Ton ignorail encore Ics moindres lois de la nalure. Aussi ne serail-il pas diflicilo de ciler de nombreux examples des graves evenenienis auxquels ces apparitions oni donne lieu. 571 ans avanl Jesus-Chrisi, la celebre balaille de Leuclres , ce formidable echcc porie par Epaminon- das h la puissance de Sparle , ful signalee par une eclatanle comele donl la queue , suivanl Arislole, embrassail un liers de la vouie celeste. l;a naissance de Miihridate, 155 ans avanl Jesus- Christ, fut annoncee au monde par une comele qui se raontra pendant plus de deux mois. Le Ciel, sui- vanl Justin , paraissail lout en feu ; la comele en occupail la qualrieme parlie , el son eclal etait su- p^rieur a celui du Soleil; elle employail qualre heures a se lever, auianl a se couclier. Une comele enliere- menl semblable parut encore a I'avenemenl du nieme Miihridate au trone. Ces comeles, dans la description desquclles il enire sans doute de I'exageration, durent assuremenl frap[ter I'imaginalion des peuples et conlribuer a ce fameux massacre de cent mille Ro- niains qui ful execute, dans un meme jour, sur tons les points de I'Asie Mineure. Au mois de Septembre qui suivii la morl do Cesar^ I'an 4r> avant noire ere, une comele tres-brillante se monlra pendant Ics jeux qu'Augusie donnait aux Romaiiis. Son cclai elail si grand qu'on la disiinguail parlaiicmeni avanl le coucher du Soleil. C'elait cvi- deinmeni Tame de Cesar; Cesar etail done le favori des dieux ; Augusie, son herilier legitime, le seni maitro que les Homains [uisseni aocepier : un pouvoir sans bornes lui ful assure. „ 280 — En 857, line gramlc comele apparail , el Louis le Oeboiifiaire, persuade i|u'elle venait lui annoitcer de nouveanx malheurs, lomba dans une melancolie pro- fonde qui le conduisii bienlol au lombean , malgre ionics les consolations qu'il avail cherchees dans de nombreuses fondalions d'eglises et de monasieres. Le proverbe d'alors: Nouvelle etoile, nouveau roi, suftl- sail pour jnslifiei les crainles supersiilieusos des sou- verains du moyen-age. En 1066, Guillaume le Conquerani envabil I'Angle- terro. Une eclalante comele brillait aiors, el Tinfor- lune Harold , aballu par ce lerrible presage donl le falal proverbe ne lui permeilaii pas de douier, subil les funesles consequences du decouragenient de ses iroupes. En i4S6, parulcelie celebre comelequi revientnous visiter lows les 77 ans , el donl le dernier passage a cu lieu en 1835. LesTurcs mena^aieni alors d'envahir I'Europe. Le pape Calixte III, le meme qui, dans son court pontifical, rehabiliia la memoire de noire illuslre heroine et la fit declarer inarlyre, ordonna des prieres publiques, chaque jour, a midi, pour excommunier a la fois la comete el les Turcs ; el c'esi de la qne vieni I'usage de sonner les cloches pour I'Angelus de midi. Personne ne douiail alors que la comete ne ful une maniJesiaiion de la colere celeste, el Tanatbeme lance par le pape donna lanl de courage aux chreliens qu'ils fireni lever le siege de Belgrade a Mahomet II , dans une balaille ou le sol resia jonche de 40,000 cadavres musulmans. Pour eviier de rendre faslidieuse une lisle qu'il serail facile d'allonger indefiniment, nous lerminerons par' la citation suivante : — 281 — Kii 1556, une gr.uidc el belle couiele appiriiii en- core , et Charles-Quinl . persuade qii'elle ne peui menacer iin aiiire ()ue lui , n'hesiie pas a signer son abdicaiion. His ergo indiciis mi: mfa fala vacant, s'ecriaii-il dans s:i doiileur. Apres la decotiverie de la pesiitiieuf uiiiverselle , \es idees siipeisiilieiises perdireni beaucoup de leur influence sur ies liommes eclaires. Toules les obser- valions aslronomiqiies s'accordaieMl si parlaiiement avec les lois signalees par Newlon , que, lorsqu'en 1682, il paiiii line grande comele, H.illey souniil au calcul ies elemenls que lui fournii-ent Ics nieilleures observations de Tepoque , el irouva que ceile comele devail decrire aiilour dii soleil line ellipse tres-allongee, dans tin intervalle d'cnviron soixanlc-dix-sopi ans, de soile qn'ellc avail dii |);iraiii'L! soixanle-dix-sepl ans plus loi ; el Ion recoiiniii . eu effe! , qu'elle avail eie ■observee , avce des eleuienis presque ideniiques, en 1607, par Kepler, (lui ne se doulail [>oinl alors de la periodiciie de son niuuveinenl. On reconnnl encore que ce meme aslre avail eie observe en 1551 el en 1456, de sorle qu'il n'elait aulre que la famcuse des differenies planeles aiipres desqiielles la comeie avail du passer, il fixa le reioiir a son peri- helie, c'e.si-a-dire au point le plus rapproclie du Soleil, pour le courani de Mars ou le commencement d'Avril 1759. L'even(!incnl jusiifia cette predidion, car I'astre alleignit son perilielie le 12 Mars de celle annee. Celie prediction si hien verifiee exalta lellcmeni I'orgiipil philosophique du XVIIP siecle , que, snivant notre opinion, elle dnt exercer la plus funesle influence sur la terrible catastrophe dont noire malheureuse patrie fut bientot la viciime ; calasiropbe dont les ecrivains qui se firent alors les apotres de I'emanci- pation inlellectuelle doiveni supporter lout le blame. Eblouis , sans doute , par la sublimiie des theories maihemntiques. ils voulureot en brusquer I'applicaiion a I'organisation soriale qui repose esseniieliement sur les enseigiiemenis de Ihisloire. On ne vii plus que la iheoiie ; la tbeorie scule etait digue d'occuper des es- prits scrieux. C'etait & tel point que d'Aleniberl , qui primait alors dans les sciences , ei que personne, assurement, n'accusrra de mechanceie volont,aire , ne concevaii pas qii'un liomme insirnit put s'occuper d'experiences de physique, pretendant qu'il fallait laisser ce genn^ d'etude aiix baleleurs publics. Des hommes aussi eminenls dans les sciences et dans les leltres, dones d'lm siyle enchanteur, el maniant les — '283 — so|)hismL's avec iine cnli'Diiianie facilile , t';ciivanl , (I'aillenrs , ponr un ppupio donl I'imaginalion dehorde toujoiirs de piime-ahord Ics sonliineiils generoux qui Tanimenl , soul assurement coupables, quoiqne iii- volonlairemeiH peui-eirc, de loiit le mal qu'il a pu faire. On retroiive encore ici le nova slella , novus rex; mais. ceile fois, c'eiail le peiiple qu'on allail couron- ner ; le Irone Tul change on echafaud, el I'huile saiule en flols de sang. La coniele de Halley mienx observee en 1759 qii'elie n'avaii jxi I'eire precedemmeni, son procliain passage an periheiie fiii de nouveaii annonce pour le couranl de Novenibre 1855; el son relour a ceiie epoque a definilivemenl coniirine I'exaclilude des principes el des calcujs siir Icsqucls cetle prediciion eiail f'ondee. On a depiiis consiale la periodiciie de irois auires cometes ; ceilc de Encke , qui fail sa revolniion en douze cents jours, el ne presente, d'aillenrs, rien de bien lemarquiiblf. Celle de Biela , qui I'ail sa levoluiion en six ans trois quarts , el qui , dans ses deux dernieres appari- tions, en 1840 ei 1852, a presente le singulier phe- nomene d'un dedoublenienl complet ; c'est-a-dire qu'on a vu d'^ux cometes seniblables , ires-voisines I'une de I'autre , sans communication apparenle , et d6crivant sensiblement I'orbile assignee a la planeie priniilive. On ignore coiiiplelemcnl ce qui a pu produire nn aussi singulier effet. Les courbes decriies dans Tespace par la Terre el cette comele out deux points lellemeni rapprocbes que, si les deux corps s'y 6laient irouves simnllaneineni en 1852, il y auraii eii collision ; mais la Terre etail alors a 20 millions de lieues de ce point, el depuis lors, b^s pcrlurbalioiis d(> la comele onl fail — 28i - disparailie lonie chance de rencontre. Celie comele esl, d'ailleurs, ires-pelile, sans queue el sans aucuneappa- rence de noyan. M. Babinel fait observer avec raison qu'iin pareil choc ne serait pas plus h craindrc pour la Terre que le vent d'un peiii soufflet pour une grosse enclume. La derniere comete a periode conslaiee esl celle de Faye, qui fnil sa revoluiion en sept ans ct demi et qui a paru pour la dprniere t'ois vers le milieu de 1851. Mais, (Ml general, les comeies ne revieiment pas, ou ne revientient que tellenient defigurees, quant a leur aspect, iiHX courbes qu'elles decrivenl et a la duree de leur revolution, qu'il «'si impossible de les reconnaitre. Tout cela s'expliqne encore avec une grande faciliie. Et d'abord, les comeies , loin dc circuler consinm- meni aulour du Soleil d'occidi>ni en orient, comme les planeles, se meuveni dans lous les sens. Ainsi , les unes vonl d"occidenl en orient , d'autres precisement en sens inverse; d'autres vonl du nord an snd; d'au- ires dn sud au nord; d'auiies, enfin , dans ioutes les directions iniermediaires. II en esl, d'ailleurs, un grand nombre qui, an lieu de decrire de vcritabies ellipses, decrivenl des paraboles . sorte d'ellipses infinimenl allongees, mais non fermees ; de sorte qu'opres avoir passe dans le voisinage du Soleil, elles s'en eloignent ji pcrpeiuiie. On conclui de lit qu'elles n'apparlienneni pas toules .in systeme solaire, mais qu'elles soni, en general, des aslres erranis de sysienie en systeme, et ne so fixanl dans I'un d'eux que lorsqu'elles passent assez pres dn centre d'aiirnciion pour que leur parabole s'y change en une elli()se I'ermee. l.es eomeies qii(> le Soleil s'est appropriees, el qui — 285 — doiveiil, des lors, decrire des ellipses dans sa sphere d'aliraclion, s'eloigneni loujoiiis beaiicoup apres leur passage an perihelie , et peuveni alors passer assez pres de quelque planeie pour que raitraciion de ces aslres secotidaiies, devemie prepoiidoranie, change a la fois leurs orbiles el lenrs ligures , de fagon a les rendre complelemenl meconnaissables ; de sorle qu'a leur reiour, elles nous apparaissenl com;ne des comeles enlieremenl nouvelles. C'esi ce qui paiail avoir en lieu pour la famense comeie de I8il. Si les theories aslrononii(ines rendenl un comple exact de loules les circonslances de leurs mouvenienls, il n'en esi pas de meme de leurs fiyurcs, doiil loules les explications proposees jusqu'b cejouroni soideve des objections irrcCulables. Comme la queue se presente souveni a Topposiie du Soleil, on avait cru d'abord qui; la clialeur solaire vaporisait le corps principal el lel'oulait ensuile celie vapeur an loin. Mais, outre (jue ceriaines cometes onl leur queue dirigee vers le Soleil lui-nieme, ou dans des directions plus ou moins obliques , on ne conce- vrail pas encore, ilaus cetie hypothese , coninicnl les queues affecteni li forme de cones creux. Beaucoup de comeles ayant la queue dirigee en ar- riere de leur mouvemeni , on avail presume (lu'une inaliereexcessivement rare, disseroinee dans I'espace el nommee Velher , leur offrait une resistance pareille h celle que la fumee d'nne locomotive eprouve de la part de I'air, et que les parlies les plus lenues se trouvaient ainsi rejetees en arriere. iMais ceiie nouvelle conjec- ture est formellemenl conirediie par I'exisience des queues dirigees en avant, que Ton observe assez sou- vent el que. Ton nonitnc [tarl'nis de> barbes. — 28(> — Knfit), d;iiis I'eial acliiel des scioncos, !es aslroiiomcs no hasardeiit ancuiic opinion snr la naliire el la con- siilulion (Ic ces corps sirigiiliers, s'en lenani a affirmer qii'ils soni soiimis aux lois mecaniqiies de loule maliere, el que Jeor nrias.«e esi tellemeni faible, que le choc de la plus grosse comeie n'aiirail absolumenl rien de dangcreux pour la Tecro. line cnmcio ipniarquahlo ayani parn en 1770 , Lexell avail deinniiiie son orbile, qu'ello devail par- courir dans une periode d'environ cinq ans; son re- loiir ne pciii cepniiiiini pas eire verilie , car, ayani passe eiilre Jupiler ei ses satellites , I'atiraction de ceiie planeie la lit sorlir eniieremenl de son orbile , en la forgani a decrire une ellipse beaucoup plus allongee. F^ors de ci'lie rencontre extraordinaire, los mouvements des satellites n'olFrirent pas la moindre apparcnce de derangement ; preuve inecnsable de la jielilesse de la masse de la comete. La grande comeie de Io56 paraii etre periodique ; la duree de sa revolution, calcul6e sur tes observations de Fabricius, astronorne de Charies-Quinl , est d'en- viron trois cents ans; el Ton irouve, en effet , en re- moniani dans Taniiquiie par des inicrvalles de irois siecles , de hrillantes comeles qui se sonl presentees avec les memes caracieres. Les observations de Fabricius, soumises au calcul , foni presumer que le prochain reiour aura lieu vers 1858. Mais > comme ces observations devaient necessairement etre affeclees des erreurs inseparables du delaui de notions precises sur les lois des mouvements celestes, el de I'imperfec- tion des instruments, puisque Ton ne connaissait point encore les lunettes decouverles plus recemmenl au lemps de Tialilee, les aslronoraes pensent que Tepoquc — ^287 — assignee pour le relonr peul eiie affecleo d'une cncnr de un a deux ans, soil en plus, soil eti mciiss ; de sorle que la comete esi aiteudue (iepuis 1856, el qu'oncessera de I'allendre apres 1860. Si elle ti'a point reparu a ceiie epoque, c'osi que probalilement elle n'esi pas au nonihre des conieies |)eiiodiques . soil parce qu'elle D'y a jamais ei6, soil j)aree (pi'une action inconnue-. I'aura souslraiie a Tinfluence du Soleil. Peul-eire meme quelqu'un (1<^ cos a6roliihes nionsirueux , ou aulre corps celeste invisible pour nous, aura-i-il hulTi pour la (ieiourner de sa roiile et nous priver de lous les moyens dont nous pouvons disposer pour la reconnailre. Mais qu'elle reparaissc on qu'elle ne reparaisse pas, les aslronomes n'auidiil rien a changer & ieurs theo- ries^ basees aciueHenieni sur des principes bien eiahlis. Certainement, aucun d'eux ne pariage les vives emo- tions qui onl si recemnteni agile le public sur i'an- nonce de la pretendue tin du rnonde que devail produire le retour de ceiie comete, annonce par de mauvais plaisants ou des fripons. II esl vraimeni deplorable que de pareils canards aienl un pareil succes. Je me souviens d'avoir vn , dans des circonslances iden- tiques, nombre de gens vendre lour bion fort au-dessous de sa valour pour acquitter lours deltes oi meiire leur conscience a Tabri ; ce qui , cortes, eiail bien de nature k faire presumer que lu fausse nouvelle n'avaii point ete repandue sans inienlion de Texploiler. On ne saurait trop le redire, plus on etudie, plus on acquieri la certitude que ce que Ton sail n'est prosque rien , el plus on reconnail rimpossibililc al)Solue de jamais par- venir a penetrer les secrets desseins de Dieu, qui nous retire de ce niondc (juand l)on liii scmble, sans qu'il — 288 — soil iiermis ;i rUiciin dp nous de connailro d'avance SOI! dernier jour. Beaucoup de persoiinfs voiilenl bien ne pins croire (jiie lescomeips nnnonceni la tin dii monde, m;iis ii en esl encore pen qni doiileril de lenr influence siir la teraperaiure, el par suite siir les prodnciiojis du ^'ol. II faudra loni^ii-nips c^ncore ponr deiniire la bonne opinion que Ton a dn vin de la comeie. Cependani, il n'v a p;!s d'annee sans comete, ei il y a beaucoup d'annees sans bon vin. Le nombre des comeles esl si considerable que I'on en voit au nioins deux ou Irois, el jusqu'a bnil par an. Nous sommes done forces d'adniellrc que leur influence est nulle ou de lout leraps, ce qui revienl a pen pres au nieme. II y a cependani un genre d'influence qu'elles doivenl exercer, mais autjuel on songe en general fori pen; c'esl que ieurs queues s;;nl parfois leliemeni longues el si prodigieusemenl devcloppees , qu'd peu! arriver que la Teire s'y irouve enlierenienl plongee, et que I'almospbere en eprouve de legeres alterations qui iroublent sa transparence el produiseni nieme des brouillards sees lels qu'on en observe quelquefois. Mais les brouillards comeiaires ne doivenl jamais avoir une grande inlensite , puisque la naaiiere ineme des comeles esi d'une rareie comparable au plus grand vide que nous puissions produire dans nos machines pueumaiiques. Les brouillards sees et inienses, conime ceux de 1785 ei 1852, iroiivenl une explication plus vraisemblable dans les emanations gazeuzes du sol, que la consiiluiion inlerieure du globe doii rendre assez freqtienies, mais qui n'enveloppent jamais la Tcrre cntiere, au moius insianianemenl. II pent aussi Ircs-bien se laire que la Terre ren- — 289 — coiilie paifuis clans Tospacc dc ties-peliles comelts (loni elle s'assimile la subslniice, {jui (rouble alors mo- mentanenienl ralinosphere. Mais ceile circonslaiice doit eire fi)rl rare. Poiir nous , les seiiies aclions comelaires impoilanies so rediiiseiit done acluellemeiH , commo loujours , a rinlluence morale qirelles exercenl sisr I'opinioii pu- hlique; influence qui, dans les lemps anciens, a pro- duil de graves evenemenis, el qui pourraii encore en amener de tres-facheux, si Ton negligeail le soin de rappelor de lemps en lemps a I'ntlention generale ces i;randes lois de la naUire, irop pen connues , on Irop vile ouhliees par les per-onnes que leurs occnpalions empcclieni d'y songer assiduemenl. La propagaiion de Tinslruciion a prodnit cet htureux effel (jiie le public a maintentint confiance dans les sciences. C'est done un devoir pour les personnes qui les cuhiveni de se poser en senliiielles pour preserver le jiublic des erreurs doni les gens mal inleniionnes pourraieni le rendre dupe. Uepuis la lecture de celle notice , la brilianle comete de Donali est venue nous visiter aux raois d'Aoiil et de Septenibre 1858. On aurail pu la prendre pour celle dc Charles-Quint, at- Icndue vers la ir.eine epoque; mais ces deux coinetes suivcnt des routes enlierement distinctes On'n'a point encore terinine les cal- culs relatifs a la duree de la revolution de la comete de Donati; celle duree doit etre do vingt a vingt-cinq siecles , do sorte que plus dc cinquanto generations s'dcouleront avant son rctour. ~ 290 — PIERRE ET NICOLAS JACQUES SCULPTEURS (XVP el XV1I« siecles), Par M. Max. Sutaine, meinbre titulaire. Si les recherches ausquelles nous nous sommes livre pour flcconvrir les traces de nos anciens arlisles nous onl aniene souvenl h deplorer le peu de souci que I'hisloire ol la tradition ont lemoigne de leur lue- moire el de leurs oeuvres, nous devons reconnaitre aussi que les nonis de quelques-uns d'enire eux out Iriomphe de cetic indifference que nous nous efforgous de reparer. La superioriie de noire graveur Nanleuil el la ce- lebriie que lui onl valu ses ouvrages onl fail de lui une gloire nationale. Quoique moins illusire que le sien , le souvenir de noire peinlre Helarl a traverse les ages. II n'est permis a aucun de nous d'ignorer le nom de Tami du bou La Fontaine , el de I'auteur de norabreux tableaux qui orneni encore nos eglises et dont quelques-uns, heu- reusemenl, soni signes. La noemoire du sculpleur Pierre Jacques, qui les a devances de plus d'un siecle , el qui jouissail h juste tilrc d'une rcpulalion considerable, s'esl iransmise , comme cello do Naniouil eld'Helarl, de generation en — 291 — geiieralion jiisqu'a nos jours , el esl reside populaire dans noire ville. Ajoulons que cciie pop\ilarite , si ingrale j)arfois , si capricieuse dans ses allures , (jui . sonveni , cleve ses favoris sans molifs reels , pour les precipiler eiisuite dans I'oubli sans raisons serieuses , a bien eu , aiissi . qnelqnes inconvdnients pour noire sialiiaire. Co n'est pns , dn moins, par ingraiilude, mais bien pluloi par exces de liberaliie qu'elle a peche envers lui. II n'exisie pas, a Reims ou aux environs, un raorceau de sculpture bon ou mauvais, dalant desXVPelXVII% el menie XVIII' sieclos, qui nc soil altribue a Pierre Jacques ou a quelqu'un des siens ; car, dans sa gene- rosite , la legend*^ I'a gratide d'une faniille el d'unn descendance nombreuses. II faul convenir, au sur- plus, que le parii une fois resolument pris, rien n'esl plus commode que d'avoir ainsi sous la main un nom au moyen duquel on peul saiisfaire a loules les de- mandes. C'esl une recelie louie simple pour se lirer d'embarras el qui n'a d'autre tori que d'induire en erreur les lourisles el les quesiionneurs ; detail , au surplus, dont , en general, Messieurs les guides el ciceroni ne I'oni, naiurellenient , aucun cas. Co que nous venons de dire des Jacques s'applique egalemeni a Helari, sur le compte duquel sonl mis, habiluellement, la plupart des tableaux de sainlete que possede notre ville. Celle metbode, donl la facilile d'applicalion n'a pas besoin de commeniaires, a, du moins, nous le recon- naissons, I'avanlage de |)opulariser les noms de nos arlisles el de perpeliier leur souvenir. , Celui des sctilpteurs qui foul I'objel de celle notice s'appuic , au reslc , sur des litres asscz scrieux pour — 202 — que la poslerile qui I'a recueilli le lienne toujours en hoimeur. Plusieurs de nos ecrivains qui se sonl occupes de Pierre Jacques oni, en meme lemps, fail menliou de sa famiile. Nous aurons a examiner si celle famille elaii collaterale ou si elle se composail de descen- danls. Mais nous devons, avant loul , conslater I'au- ihenlicite de son chef, qui ful une de nos illustrations remoises. Si on s'en rapportaii au lemoignage de Blaise de Vigenere, qui nous fait connaitre un glorieux succes rempori^ par Jacques en Italie, cet artiste serait ne h Angouleme (I). C'esl une erreur qu'il est important de rectifier. D'abord , il n'esl question dans aucun autre auteur d'un sculpteur de ce nom appartenant a Angouleme (2). Puis, parmi les anciens chroniqueurs de noire ville, ceux qui font mention de Pierre Jacques declarent qu'il a rcQii le jour a Reims , ou sa famille demeurail rue de la Poissonnerie (raaintenanl rue Tronsson- Du Coudray), cetie meme rue qui, un siecle plus tard environ , fui egalcment habiiee par noire peintre Helart. Notre serieux el savant historien N. Bergier dil forraellement , en parlant do Nicolas Jacques , qu'il etail « fds de ce grand sculpteur M . Pierre Jacques , » nalif de noire ville, qui y mourul I'an 1596, dont » (1) Les Images ou Tableaux de platte peinture des deux Phi- lostrates , mis en frangois par Blaise de ViGENfcRE , nourelle edition de 1637 , enrichie de gravures en taille-douce , p. 865 , a la description des statues des Callislrate. (2) Excepte, loiitefois, dans I'ouviage intitule Patria, qui r6pel© I'erreur toule faite de Vigenere, attendu qu'il est plus facile de copier une eircur que de chcrcher la verite. — 293 — » les oeuvios qui se voieni en lialie el en France se- tt ronl h jamais en admiration a la poslerile , pour » elre des plus parfailes en leur espece (1). » II est impossible d'etre plus precis. Ne lui-meme en 1566, Borgier a eie ainsi, pendant Irente ans , le contemporain de Pierre Jacques, el son lemoignage ne peut etre mis en doute. Le Ferron, qui vivail au commencement du XVIII* siecle , dil , a propos du beau cbrisi en bois actuel- lemenl a Saint-Jacques , (|u'il est « I'ouvrage de Jac- » ques , natif de Reims, qui vivait sous le regne de » Henri III , el qui auraii fail fortune a la cour s'il » avail eo moins de zele el d'affectiou pour sa patrio. » II ajouie que « sa poslerile vienl de s'eieiudre en la porsoiirie d'un vieux garfon qui demeurait rue de la Poissonneric (5). » Nous savons, de plus, que les cardinaux Robert de Lenoncourt el Charles de Lorraine , archeveques de Reims , honorerenl de leur protection speciale no- ire artiste, qui se irouvaii h Rome en meme lemps que ce dernier , en 1547 el 1549 (5). Imi presence dc dales aussi precises ei de documents aussi formels, que la tradition vient encore confiimer, I'asseriioii de Vigvuere , qui , du resie , ne s"ap()uic (1) Nicolas Dehgiek, Kuuquet roi/nl. Nd en 156G, Dergicr luou- nit eu 1623 Voir dans Doin Mailot, I 4, p. 533, son ejtilanhe. (2) Le Feruon, Introduction a iHistoire de Reims, inanuscrit sans dale; mats comme, dans sa lisle chronologique des arche- veques de l{eims, rautcur s'arretc a M};r A. -J. de. Holian, qui occupail le siege episcopal 'Ml 1722, on peiil concinre qii'il orrivail vers ceile epoque. (3) Le cardinal de Lorraine fil phisieiirs voyages a Rome, nolamniPiil en I5'i7 , potir recovoir le ctiapcau, el en l.'')4i), pour I'eleclion du p-ape .Inlob 111, qui eiit lieu en \!)W. — "291 — sur aiiciiiie anionic , ite peul su soulenir. II csl done (lemonlre quo Piern; Jacques esl de Reims. Mninlenani , la ville d'Angouleme a-l-elle possede aussi iin Jacqiips sciiipteiir , el ce sculpleur est-il ce- lui donl parle Vigt^nere ? car on comprend que ces deiix questions soni inseparables. Pour qu'il en fut ainsi , il faudraii necessairemenl qu'il y eut , avec le noire , identiie de nom , que les deux arlisles eussenl vecu exaciemenl a la meme epoque, qu'ils se fussenl trouves en in6me lemps a Rome; enfin, que tous deux fussenl devenus les proieges des cardinaux de Lenon- courl el de Lorraine ; en un mol, qu'il se renconiral nn enchninemenl decirconslances absolumeni pareilles el une coincidence complele de details intimes qu'il esl impossible d'admellre. II esl done evident que, sous ee rapport, de Vige- nere s'esi trompe. — Du restc, son trieur peal, jusqu'a un certain point, s'expliquer: on raconte, on effet , que Jacques a execute quelques travaux a Angoul^me ; son sejour plus on moins prolonge dans celie ville a, sans doute, donne naissance a I'opinion du savanl Iraducleur de Philosirate , contre lequel nous avons du protester en nous appuyanl sur des litres irreeu- sables (i ). C ( ) On troiivc a la bibliotheqiic de Reims, dans nn livre des ConclusfoHs du XVr siecle, qu'un oiivrier, qu'on dcsignesous te noin de Jacques d'Angouleme, recut une cerlaine soiiime poiir roparalions ()ar liii faites. Est-ce un parent cloigne ( d'une autre brariche de la familte ) do notre sculpleur veiiu d'Angouleme? C'est possible, luais la tradilion conslanie et le tenioignago, surtoul, de Bergier, son conlnnipoiain, qui aQirniGnt que Jacques est ne a Helms, n'eii so:it pas moins formels et digues do foi. Tou'.es le* I'ois qu'on parle de l^ieire Jacques, on lui d(mne le litre de viaitre svulpteur, pai exeniple dans le livre des Conclusions de 1590. — 295 — Maimenant , si nos hisioripiii. remois sonl iiiianimes en ce qui concerne Pierre Jacqoes, ils sonl moins d'accord an sujel de sa familie. Qiielques-uns, se fondant, notis ne savons siir quelles aulorites, avan- cenl qu'il eiil un on iilusieurs freres sculpteurs comme lui ( I ). Goruzcz |)rt3iend lui-meme que Robert de Lenonconri envoya a Rome les freres Jacques, sans ci- ter aucun auleur.i l'ap[»ui. Quand nos ancicns ecrivains font mention dnsiatuairo de ce nom, a la dateduXVI^ siecle, cest lonjours de Pierre Jacques pt de lui seul qu'il est question; aiissi pariageons-nous complele- ment i'avis de .\!M. Liicaite-Joltrois, Louis Paris (2), Lienard (5) el Courmeaux (4), qui repousseni celie opinion. II s'agii done seulement d'examiner maime- nant si Pifrre eul un on plusieurs fils exer^ant le meme art que leur pere ; car nous n'avons pas a nous occupor drs aiitres. Decide a ne reconnaiiro et h n'admettre comme ( 1 ) Camo-Darras, Essais historiques sur Reims, Fremau, 1823. 11 cite les freres Jacqups, a la table, comme \ivant au XVIIe siecle, tandis que Pierre, le plus imporlnnl de sa familie, est raort en 1596.— G£Ruziiz, Descripliunde la Villede Reims, Reims, 1S17. Oo sait, au surplus, que cut onvrage ieufeime beaucoup d'crreurs. (2) Remensiaiia, Reims, 1845. (3)Communicalioa deM. Lienakd : Notice sur les Jacques , sculp- teurs remois (Travniix de TAcademie de Reims. 1847, p. 287). Nous ferons observer, ueanrnoius, que, dans cette excellente notice, M. Lienard commence ainsi : « Pierre Jacques, uc 4 Reims, fut envoye avec son frere a Rome, par Robert de Lenoncourt ; puis plus loin il ajonlc: « Les traditions portent que Pierre arail un frere et qu'ils Iravaillaien! ensemble. Nous ne sarons si ce fait est bica fonde. N'aurait-ou pas pris les enfacts de Pierre pour ses freres ? » Cette deriiiere reflexion iudique I'opinion pcrsonnelle de M Lien^ir). (4) Voir a !a siiiie de la notice dc M. Lienard. — "296 — ?eiicMix que les lomoignages ([ui oni iiii caracieio aii- theniique, nous . 4 89 et sui-'^ vanles, Hei-iis, 1843. XXVII. 20 — 298 — dii noiiveaii tombeau oil reposeni les resles du sainl prelat (i). Ces slatue? rpprescntenl les six pairs ecclesiastiques el les six pairs laiqnes en grand costume el porlani les insignes de la royaule. Les pairs ecclesiasiiqnes sool ; I'archeveque due de Reims, I'eveque ducde Laon, I'e- veque ducde Langres , I'eveque conile de Beauvais, I'eveque comie de Clialons ei I'eveque comle de Noyon ; el les pairs laiques : le due de Bnnrgogne , le due de Guyenne, le due de Normandie, le comle de Flandre, le comle de Toulouse el le comle de Champagne. ,,.Un groupe place h I'exiremiie du monumenl repre- senle sainl Remi, assisie de sainl Thierry, son aumo- nier; il insiruii Clovis el I'inilie aux mysieres de la religion (2). Ces quinze figures se disiingueni par des qualiies remarquables. Les leies. raodelees avec un fini mer- veilleux . soni , pour nous servir d'une expression consacree , parlanies. II est difficile de pousser plus loin le rendu de I'expression, el elles accusent, cerlai- nemenl , une grande science el une grande habileie de ciseau. Celles , surioul , de I'archeveque de Reims, des eveques de Laon ei de Noyon , el du comle (1) Le lombeau en forme de temple circulaire, du a la picuse muniGcenco de M. Liidioart de Vauxelles, ancien Iresorier do Frauce, etait egalement orne des memcs statues (2) Ces statues, coDlrairement a I'opinionde Le Feiron et du Pcre Jeau Dorigny {Uistoire de Saint- Remy , p. 314, ChUlons, 1714), sont en pierre, et uori en maibre. Leur poli et leur brillant ont induit ces Listoriens en erreur. La pierre dans laquelle elles sont taillees proTient des carrieres, maiutcnant epuisees , du village de Marfaut, pres Reims. Telle est, du moins, I'opinion de M. Lacalte Joltrois. qui aurait troupe des cchantillons de cette jiierre. — 1299 — de Champagne ne laisseiu rien a desirer. Qiioiqu'un peu ihealrale, celle tie sainl Rerai esl egalemeni I'ort belle. Les torses el les jaiubes soni iin pen courts, et ce manque de proportions aloiirdit les persounages, qui perdent ainsi de leur ampieur. II est probable que Jacques, qui connaissait deja parfaiiemenl Teiude de la tele, a execute celte oeu\re importante avanl son voyage ou ses voyages en Italic. La vuedes n)ervpilles doni resplendissait la terre promise des arts diil re- former celte tendance a appesanlir ses figures, car on ne la reirouvc plus dans ses ouvrages posterieiirs. Ceux-ci, quoique quelqucs-uns d'eiilre eux soienl moins soignes sous le rappoil des letes, revelent, en gene- ral, unesciencepluscompletedes proportions humaines. Voici, du reste. ce que, dansun eloge, un pen naif peul-elre, doin Marlot dil de ces stalues; « Le bas » (du lomboau) est environne de statues de qualre » a cinq pieds de hauteur, representanl les douze » pairs disposes de part el d'autre, donl la taille, » faite au naiurel, ravii les yeux des spectaleurs, ne I) cedanl en fien aux rares pieces de Phidias lani t vantees de I'antiquite (1). » En 1340, P. Jacques excculail les sculptures du portail lateral de I'eglise d'Fpernay; du moins, on est generalemenl d"accord qu'elles sont dues a son ciseau (2). En 1547, il lerminait , a la caihedrale de Reims, I'autel de la Resurrection , dresse pres des fonts bap- (1) Dom Marlot, Histoire de Reims, I. 2, p. 640, Reims, 1846. (2) M. Brunette , archilecte dc la Title Reims , a public des le compter an nombre de ses enfanls. Blaise de Vigenere esl un homme Irop serieux pour avoir rapporie, si elle n'eiil pas ele exacie, ceile anecdote doni, au rt^sie, il a presqiie ele le lenioin. U etait , en effet , secretaire d'ambassade h Rome en 1566, seize ans, par consequent, seulemenl apres celle memorable lulte donl le souvenir ne devait pas elre encore efface. S'il a pu, par les motifs iiidiques plus haul, elre induil en erreur au sujel du nom de la pairie de Jacques, il ne pouvaii en elre do meme h propoi d'un fail qui s'elait , pour ainsi dire , passe sous ses yeux. Cel ecrivain, au surplus, considere Jacques « commo le plus grand imager IVangais, » el il ajouto que « la librairie du Vatican garde comme un tres-excelleni joyaii irois grandes ligiires de cire noire represeniani I'une un homme vivanl, ('autre un ecorche, la iroisieme un squeletle. » II a vu, en outre, dil-il encore, « une statue en mar- bre du meme mailre, represeniani I'Aulomne, aulaiii prisee que nulle autre statue moderne (1). « Ce dernier deiail esl exlrememenl precieux pour nous , car celle meme statue de I'Auionine avail ete commandee a Pierre Jacques, par le cardinal de Lor- raine, pour son chateau de Meudon. 11 confirmo tout h la fois la protection du cardinal, la presence h Rome avec ce prelai, el I'identile de noire scidpieur avec celui donl parle Vigenere, el qui, ainsi, ne peui elre que Pierre Jacques de Reims. (1) Tableaux de$ deux Philostrates, k la description des sta- tues de Callistrate. p. 855. — ."502 — Tons ces fails coincident, d'ailleurs, avcc nos dnrcs, e[ nous savons egalemenl par Bergicr, que noire ar- tiste a laisse « en Italie ties oeuvres qui seroni a jamais en admiration a la posterite. » Le beau chiist en bois, de grandeur nalurelle, qui ornc actiu'lIcMucnl I'eglise de Saint-Jacques , ou il a- ete Iransporte apres la destruction de Sainl-Pierre-le- Vieil, est dti encore au ctseau de Jacques. Celie ceuvre remarquable, de Taven de tons , revele une rare fer- mete d'execution el une connaissance profonde de I'anatomie. « Eiiepeulelre, » commeledii LeFerron, « considf ree comme la piece de sculpture la plus ache- vee en ce genre qui soil en France, et peut-etre partonl ailleurs. » Le livre des Conclusions de 1590 et ks comples des Deniers patrimoniaux de la memo annee nous appren- nenl que Pierre Jacques, maiire sculpteur, a re^u, le 28 Seplembre 1590, dix ecus au soleil, pour avoir sculpie en bois les armoiries de la ville qui devaienl orner des pieces d'artillerie. Notre musee conserve une statuette represenlanl le Nil : c'est celle dont nous parlons a la note de la page 296. C'est une ires-jolie copie, qui est signee PETRUS JAC et une qualrieme letlre illisible ; on pent croire qii'elle est , en eflet . de noire sculpteur. Nous avons vu , dans le cabinet d'un collectionneur eclaire de noire ville (1), une petite siaiuetle, reduc- tion d'une des statues du lombeau de sainl Remi , ei qui elail signee du nom de Jacques. Suivanl quelques personnes , celte maquelie serail veritableraent origi- nale, ce qui lui donnerail un grand prix. Nous n'osons t'; M, l^oiiis- Lucas. — 305 - nous prononcer poui raffirmolive , el serious |)Iiil6l lenle de croire que ceiie reduciion a eie modelee pour la chasse en argent comrnandee, fn 1647. par dom Oudarl-Bourgeois , grand-prieur de Sainl-Remi , el execulee par L'Epicier, mailre orfevre a Reims. Noire musee possede encore une ires-jolie Nativite en niarbre, composee de plusieurs pieces, debris d'une de nos eglises. On I'a atlrihuee a I'lin des Jacques, Pierre ou Nicolas ; mais rien ne condrme cetie opi- nion, et le savanl conservaleur (I) aciuel, qui n'aflirme rien donl il ne soil certain, ne j'emel que sous loules reserves. Une note de I'abbe Bergeai mei snr le compie de Jacques , qui passa, dil-il , irois ans t Rome, ou il oblint de grands succes , Pierre Jacques , par conse- queul , un pelil groupe en lerre cuile rcpresenianl deux enfanls , dont I'un lienl une espece de moriier ou piloir. Nous sommes parfaitement de I'avis de M. Cour- meaux el d'aulres apprecialeurs, qui penseni que ceiie note renierme un anachronisrae de pr6s de ceni cin- quanle ans. Pierre Jacques n'a jamais comniis ces deux slalueiles , qui doivent apparlenir au commencemeni du XVIIP siecle. Le sac de nos eglises et de nos abbayes a, mal- heureusemeni, fail disparailre un grand norabre de ses oeuvres. M. Lienard, qui s'esl livr^ a de serieuses eludes sur lui el sur ses Iravaux, nous apprend qu'il execula le lombeau de Marie d'Ecosse , epouse de Jacques V (1) M. Loriquet. M. Courrueaiix, qui a 6te, pendant plusieurt annuel, conserTatear de la bibliolhcque,partii|^pai( !e ni^medoute. — 30/i — el morie en 1360 on 1561. Celle princesse, mere do iMarit? Siiiart, desira que ses resles fusseni deposes a Tabbaye lie Saini-Pierre-les- Dames, qui donna asile ii bien des lioies ilbjitres, el ou elle-meme avail ele elevee (I ). »M. Lienard invoque le lemoignage d'uue sceur q'j'il a beaucoiip connne, el qui raconlaii des merveilles do celle cpuvre de Jacques (2). Nous trouvons dans le merae anieur que les sculp- lures du maiisolee eleve a la memoire de Jerome Bur- gensis, evOque de Chalons, morl en 1575, eiaienl de la main de Jacques. M. Lienard , qui possede encore dans son cabinet la lele du verlueux prolal, el I'un des deux genies, de grandeur nalurelle, qui ornaieni son tombeau (5), considcre ces precieux debris comme des morceaux de sculpture dignes des plus grands mailres. N'oublions pas que eel ecrivain, noire compalriole, esl lui-meme iin ariisie serieux el un apprecialeur compelenl des chefs-d'oeuvre doni il nous enlrelienl. Nous ne lerminerons pas f elte nolice sans menlioii- oer, nou pas pour railribue. a Jacques, mais parce qu'elledale de son epoque, one imporianlecoraposilion qui mainienanl fail parlie des sculpiures de I'eglise do Sainl-Remi. Nous voulons parler du lombeau de Noire Seigneur execuie en 1551 el provenani de la cora- manderie du Temple. Les personnages, de grandeur 1,1) Celle princesse elait Marie, duchesse dc Longiieville, OUe du due de Guise, elle elail la seconde femme de Jacques V, qui avail epouse en | remieres noces Madeleine, fille de Franpois le^ (2) Elle s'appelait soeur Procliet. (3) Ce tombcac ornait, avant la revojulioo, la net lalerale de I'eglise de Sainl-Pierre-aiix-Monls, a, ChalouA-sur-Marne. — 305 — nalurelle, qui enlouienl le sepulcre, quoique lourds de forme el peu eludies , ne manqiii-'nl pas de meriie ; mais la figure de la Viergc agenouillee el penchee sur le corps de son divin Fils esJ peul-eire une des plus belles choses que nous ayons vues. Le visage disparaii completemeni dans Ics draperies,, inais, dans le mouvemenl de cos draperies, admira- blemenl irailees, dans Tallih .!e enliere du cor[)S , il y a une prostration , un affai semen l douloureux qui nous onl loujours profondemenl impressionne. Nous croyons qu'il est impossible de pousser plus loin I'ex- pression du senlimenl , et ce persoiinage csi tellemenl superieur aux aulref , qu'il nous esi difficile d'y reconnaiire la nieme main. Selon M. Lienard , ie pere de Jacques elail lui-meme un sculpleur d'un mediocre merite. Celiecomposilion serait-elle de lui? aurail il coufij a son fils, tres-jeune alors , I'exccuiion de la figuro de la Vierge ? C';,si, on le comprend , une opinion q.ie nous ne liasaraons que sous loules reserves. Nous n'avous que peu de chose a dire de Nicolas Jacques. A I'exceplion du renseignemenl que nous fournii Bergier dans son Bouquet royal, la tradition ne nous a rien laisse de precis a bon sujet. Nous sa- vons qu'il a execute pour le sacre de Louis Xlll un buste du roi et une statue de la France, et il est pro- bable que quelqucs-unes des sculptures de nos eglises, altribuees a tort ou a raison aux Jacques , sonl de lui. Nous Savons que Pierre , ne au commencement du XVi" siecle, mourui en lo96. Quoiqtie la lourmente de 1795 ail, comme nous I'avons dil , dispers(', inutile ou delruii une grande — 306 — parlie de ses oeuvres, ce qui dous reste de lui el les documents conserves par la iradilion temoignenl suf- tisamment que sa longue carriere ful dignemenl rem- plie. Si, au lieu de s'appeler modesiement Pierre Jacques, de Reims, il eut porie ud nom ilalien, ou si , moins epris d'amour pour sa palrie , il eul trans- pone ses penates a Paris el execute quelques-uns de ces grands iravaux qui immorlalisenl leur auteur, la renommee I'aurait tres-certainemenlcompieau nombre de ses favoris , el son nom se serail transmis jusqu'^ nous, aussi populaire en France que ceux de Germain Pillon el de Jean Goujon. Mais c'est a nos vieilles provinces de ne pas laisser leurs illustrations lomber dans le gouffre sans fond de I'oubli, el les villes qui onl le bonheur de compter parmi leurs enfanls des hommes de celte valeur , doi- venl en conserver religieusemeol le souvenir. — 307 — LES SALONS D£ REIMS par M. Ch, Martin, membre tilulaire (1). Nous allons parler d'art el de tableaux. C'est la, ce semble, une question loule parisienne : mais ne nous taissons pas prendre aux apparences; c'esl bien a Reims que nous sommes , el c'esl a Reims que nous voulons resler. Paris s'esl, de loul lemps, donne Irop d'eloges Ce serail un mal peu serieux, s'il n'en elail, a la longue, resulle irop de dedain pour la province. Mais, a force de repeier que la capilale elail la source, la palrie, la providence des arls, il a semble que de la seulenienl devaienl nous venir nos impressions el nos jugemenis. Paris, des lors, a eu la prelenlion de nous expedier, par chemins de fer, loul ce qui concerne les productions de I'espril aussi bien que celles des arts puremeni me- caniques. Comma nous avions la lyrannie des modes, nous avons eu celle des revues el des journaux. Je ne nie pas que Paris ne soil le centre ou loul se rencontre , ou les reputations s'acquierenl , ou la gloire s'^lablil, ou le bruil nail du bruit. J'y vols cha- cun grandemeni occupe d'avancer sa fortune , de re- chercher des amiiies utiles , d'offrir le sene a qui de- tieni la rhubarbe. C'esl une necessite dans I'immense bazar ou soni deposes, pele-mele , lous les objels les (1) Lecture (aite i la stance publiquo da 39 JuilleMSSS. — 508 — plus propros a flatter nos vanites, nos manies, nos passions , de frapper raileniion , on par de grands eclats de voix, ou par de splendides elalages. Mais il faut se defier de ces reputations tapageuses qui emploienl irop de crinoline. Si vous voulez rencontrer I'arl serieux . I'arl qui inspire de pures el calmes jouissances, I'arl qui n'est impose ni par la mode, ni par la camaraderie, ni par le caprice, mais par le goiii des belles choses , c'esl en province, croyez-moi, que vous devrez le chercher. La point de charlatanisme, point do mise en sc6ne, mais le sentiment du vrai el I'enlhousiasme guide par la saine raison. Les preuves abondonl dans I'hisloire de Reims pour elablir que I'art y fut toujci i-s aime. II y a ete le bien venu pres des teles couronnees, pres des princes de I'Eglise el pres des populations. Si I'arl attache aux villes qui I'onl principaiement cultive une gloire imperissable ; si Ton parle de la vieille Egypie, a cause de ses monuments ; de la Grece , a cause d'Homere el de Phidias ; de Rome el de ITlalie, a cause de leurs poeles et de Lurs peinlres, il ne sera pas lemeraire de faire valoir aussi les litres de la ville de Reims a I'immorialile. Le souvenir de I'arl paien s'esl conserve , malgre le lemps, sur Tare de iriomphe de la porie Mars , el aujourd'hui I'opi- nion publique ne veul pas qu'on en laisse efTacer les derniers vestiges. Quanl a I'ari chreiien , il a irouve dans noire cathedrale son Parthenon. Le lombeau de sainl Remi ne serail pas indigne des grandes oeuvres qui sonl , h Rome , I'honneur du siecle de Leon X. EnOn, parmi les hisioires imprimees, parmi lescharles el les mauuscriis , nous decouvrons mille lemoignages — 309 — pr^cieux qu'ii Reims, mieux que dans les auires ca- pitales de la France , I'arl a Jermenie sous loiiles ses faces el y a pris un caraciere u'exireme delicaiesse el d'elevalion telle que la beaule , la noblesse de I'arl antique ne nous laissent pas a regrelter, ' L'idee, chez nos artistes, n'a pas ete moins hardie; moins poeiique, moins savanle que I'execution. Notre cathedrale, avec son splendide porlail, avec ses verrieres resplendissanles, avec ses piliers charges d'anges , avec ses lours chargees deveques el de rois, avec ses chapileaux touffos comme des torets, prouve a quel degre de puissance el de fecondile avaient atieint I'imaginaiion , la verve el I'habilele de nos ar- chiiectes et de nos sculpieurs. Elle temoigne egalemeni de la faveur dont jouissaienl nos poetes el nos musi- ciens. Elle nous monire, dans toiiles ses allegories, des artistes couronnes qui chanlenl sur le frestel , la harpe, le violon , la flute, la guitare, les louangesde Marie. La rue de Tambour nous apprend aussi dans quelle estime on tenail, U Reims, I'art de la musique. Une vieille maison dn XlII" siecle nous fail voir cinq mu- siciens veius magniliqnemenl et tronant comme des rois; I'on d'eus est couronne de fleurs. Or, clierchez ailleurs ce qu'eiaient ces artistes a celto epoque; vous les trouvercz, a Paris nolammeni, parmi les men- dianis de la cour dos Miracles, sous des velemenls sordidos, et le cceur plus sordide encore. C'est qua Reims on aimait les arts , comme dans la Grece, comme en Orient. La population avail ete ibrinee a cetie adoration [)ar les Orienlaux eux-memes. On sail quo le corps de sainte Helene, la mere de ('.onsiaiilin, repose a Hautvillers. On sail que Ville- — 310 — Hardouin, I'hislorien de la cinquieme croisade, Join- ville, hislorien de la derniere, elaienl de la province de Champagne. Nos communicalions avec I'Orient avaient eie frequenies. Nous en avions re^u des ar- tistes, dcs histoires, des contes, des legendes lorle- ment empreinis des coiileurs brillanies que reve I'ima- ginaiion ardenie de ces peuples, chez lesquels la reli- gion, la philosophie, la politique meme, vienneni se resumer et se Iraduire en art. Gel amour, eel enihousiasme de I'arl ne s'esl pas revele seulement dans lous nos monuments, mais aussi dans les travaux pariiculiers, dans les ornemens, dans les parures. La chape du cardinal de Lorraine, au con- cile de Trenle , etait la plus belle qu'on eut encore vue. Sans doute, les revolutions politiques onl appau- vri nos iresors, en dechainant sur notre ville, comme dans loules les autres, des insenses qui , au lieu de s'elever au niveau de ceux qu'ils avaient renverses , Irouvaienl plus commode de briser des pierres el de bruler des tableaux. Sans doute , les preoccupations de {'induslrie onl amoindri I'amour de I'art qui caraclerisail nos ance- Ires; mais leur caraclere est loin d'avoir disparu. Nous avons vu naguere se reveiiler avec une veri- table fievre eel enihousiasme pour I'Orieni donl nous parlions loul-&-rheure. La population entiere se pressail atitour des am- bassadeurs de la Perse, qui visiiaienl nos monuments. On signalait a Ferruck-Khan , non sans un juste or- gueil, ces poemes de pierre sculptes, sur tous les murs de Notre-Darne, comme par I'imaginaiion fantasiique el coloree des pofeles indiens. On entendait promettre, — Sil - en m^me (eraps, dans les ateliers, de faire passer dans nos eloffes ces riches et eclalanis reflels du soleil de I'Asie. C'esl ainsi que les relations commerciales amenenl forcemenl des communions en poesie. Que le sialuaire , le peinire, rarchilecte s'inspirenl done fivec confiance de la localite. L'arl est ici sur une terre classique. Les raodeles ne lui font pas defaul. Le bruit seul lui manque. Nos salons ne s'ouvrenl pas assez souvenl. On ne parle pas assez de nos richesses inlellectuelles , de ces reserves creeos par les patientes recherclies des amateurs, des coileclionneurs , si vous voulez, dont lous les loisirs, doni tout le superflu soni employes a doter la vilje des choses les plus rares el les plus precieuses. Heureuses, ccpendanl, sonl les villes ou se fondeni de grandes fortunes qui favorisent le travail, font naiire remulaiion, developpcnl le goiit dans loules les branches de la production . ei iransformeni I'ou- vrier en artiste, en reclamant de lui des ceuvres ori- ginales. C'est, en effet , sur le sol meme , c'esl dans I'in- lerieur de la ville que devrait s'exercer ce prolcciorai indispensable de la richesse sur les beaux-aris, de ma- niere a faire connaiire Temulation sur place et a donner a Reims ce mouvement , cciie vie , cetie puissance de production qui Tout rendu si remarquabie a I'epoque oil s'execulaionl los chels-d'(jeuvre d'architeclure , de scuip!ure, de peinlure el d'orfevrerie que les elrangers nous envieni. On remarque dans les musees, dans les salons . daus les collections jtarticulieres, que les objets les j)bis rares, les oliel's-d'oeiivre en lows genres out ele — 312 — fails loin de celle fabrication des grands centres, loin de ces irompe-rceil parisiens exploites par Ic cliarla- lanisme el I'avidite des intcrmediaires. Ce sonl les exigences, les besoins particulicrs des families, Ics desirs, les passions individueiles des amateurs qui onl solliciie directemeni le genie de rarliste et obienu de lui un concours ardent, un enthousiasme reflechi , une elude passionnce pour renfaniemeni d'lin objel precieux, d'un portrait, d'un bijou, d'un meuble ori- ginal, ayanl une distinction, un caraciere tout speciaux. Le privilege de la richesse n'est pas de se procurer loules Ics necessiles de la vie, conime toul le nionde, mais de se creer un luxe toul particulier, de donner aux habitations, aux ameublemenis une physionomie a part, selon le gout, selon les eludes, selon les occu- pations du maiire de la maison. La vieille France, sur ce point, etaii originale. On aime, en parcourant les musees, a retrouver des ob- jels qui revelenl les moeurs el les habitudes de nos anceires. Nous avons cerlainemenl gagne sous le rap- porl du confortable ; mais je doule que jamais nos tables, nos canapes, nos armoirps, nos buffets, devenus vieux a leur tour, puissenl enrichir des musees et des collections, comme ces vieux bahuls de nos peres , oii I'arl avail mis son empreinle, el qu'on n'ose detruire aujourd'hui de peur d'eflacer les traces d'une main delicate el savanle. Sans rechercher I'exlraordinaire , sans obeir aux impulsions de la vanile qui donne la fievre aux par- venus , Thomme favorise de la fortune doil s'elever sans cesse vers eel ideal que poursuit I'humanile toul entiere, et, h mesure qu'il s'instruit, donner a ce qui Tenloure un cachet de disiificiion et d'originaliie. - 313 — Pen^lrez chez le savant, ce soiU les livres; penetroY clicz le peiolre , ce soni les tabljaiix; perieirez chez I'aniiquaire, ce sonl les nieclailles, les objeis d'arl el de curiosiie qui frappeol voire aileiiiion. Voiis savez chez qui vous eles. Ponrqiioi chacun ne laisserail-il pas parler ses gouis favoris , el d'oii vienl qu'anjour- d'hiii lous les salorts se ressembleni ? C'esl/jue I'arl n'esl plus as^sez recherche. C'esl que I'ariisle n'esl plus assez feic. C'est qu'on plie sous le joug commun, sous les fourches caudines de la fabri- caiion vulgaire , el qu'on ne s'occupe pas asscz de diriger soi-meme lo iravail, d'appliquer sa richesse a la production des ceuvres d'art, de favoriser, par I'e- lude des bons modeles el I'imiiaiion dcs plus belles choses , le developpement du goui ei la science de rornemenlalion. Au naoyen-ag*', lout, dans les habitudes, jusqu'aux moindres details de rameublemenl, concourait a I'e- ducalion de la faniille. Lfs armes, le portrait, la maison de I'anceire instruisaient, par leur aspeci seul, les peiils-fils. Tout est banal aujourd'hui, et il sem- ble qu'on passe sa vie en chcmin de fer, dans des wa- gons uniformes d'oii I'on descend a une heure donnee, sans avoir rien a regrelier. Mais qu'il doii aimer sa demeure, celui qui sail la parer selon son gout, lui donner un cachet d'elegance el de distinciion, la remplir d'objets precieux, non par la valeur du metal, niais par la pensee qui a pre- side b sa creation et par le (ini de I'execuiion ! Heureux qui peuple ses murs, non de vaines deco- rations, mais d'images venerees, de tableaux, de li- vres, amis fideles donl la vue, doni le langage vous recreeni, vous seduisent, vous plaisent, vous inslrui- xxvn. 21 — 314 - senl i toule heme et dans ionics Ics circonslaoces dc la yi^! i '- s '" ■ Mais ceile collection, qui revele rhomme de goul', niomme instrnil, amanl passionne des arts, elle n'esi pas faile spulemenl pour le maiire de la maison. On vionl la voir. On se forme, en la visilanl , a la connaissance des ecoles de peinture ; on s'inilie aux temps passes, aux etudes lilieraires et ariisiiques. El c'est ainsi qu'nne ville tout enliere profile a la longue des musees pariiculiers , que la somme generate des connaissances s'y eleve, el qu'il ne se comrael plus dans son sein de ces fiuies de goul qui irahissenl I'enfance de Tinduslrie el I'ignorance d^^s arls. Parmi les salons qu'il nous a eie donne de visiter, ei donl nous avons demande la permission de parler publiquemonl , il en est on qui nous a parliculiere- menl frappe. --(nyoo^ On n'y voii pas de grands tableaux hisloriques, ni de ces loiles donl la presence seule est un evenemeni; les musees, les eglises, les palais des souverains n'ont pas eie depouilles a son profit. Mais un goul eclaire a preside au choix de ces tableaux, qui semblenl se plaire les uns h cote des auires, el dont aucun ne semble depayse. Les Noces de Carta, cependani, veu- lenl une mention exceplionnelle. Esl-ce un tableau de Veronese? Esi-ce un Tilien? La disposition g6ne- raie, les grandes lignes d'archiiecture, la dislribu- lion'd'une lumiere abondante, I'arrangemeni des per- sonoages rappelleni trop la grande composition de Paul Veronese que Ton voil au Louvre, pour qu'on n'aitribue pas immediaieoifini au maitre cetie petite toile evidemmenl soriie de la grande ecole veoiiienne. Mais, d'uu autre coie, le coloris est si vigoureui, el — 315 — des porlrails d'empereuis , d'hommes illuslres du Itimps, de femmes resiees celeLres dans les fasies de la galanierie, revelent si bien les habitudes du Tiiien , qu'on hesite a irancher la quesiion. II y a du eharme,. d'ailleurs, a ne pas se prouoncer. ' D'excellcnls tableaux de genre, des inteiieurs, des scenes anecdoliques , des paysages , des fleurs , meri- leraienl une description que le temps ne nous permet pas d'aborder anjourd'bni ; disons setdement que cha- cun se distingue par une representation tldele de la nature, par un coloris suave, hannonieux, [lar une louche petillante d'cspril et de finesse. Dans le choix qu'il sail faire , en veritable connais- seur , le maitre de la maisoo prelere la grace , Ihar- monie, le eharme de la composition aux grands efiets el aux scenes tonrmentees. II est, dans son musee. ce qu'il est dans ses compositions lilieraires : il a legoul ancien el I'espril jeune. II prefere a I'eclat des repu- tations moderiies le doux clair-obscur des Corneille Poclenbourg, V Amour endormi de Prudhon. II se plaii h sourire, en homme qui connail les deiours du palais, devanl VAvocat de Van Ostade , lorsqu'il voil avec quelle satisfaction, quelle saveur profonde I'aigle du barreau decouvre dans la cause un viciorieux ar- gument. II erre volonliers par les campagnes oil paissenl dans I'herbe abondanlc les Bmifs et les Moulons de Robbe. II se fait donner une Matinee mu- sicale par Gonzales Coques. II suit de I'oeil les Picheurs de Localelli , les Moutons d'Huei , les Chiens chassant au Marais de Francis, le Chien courant de Melin , donl il admire le mouvemeni si vrai lorsque I'animal hesite enlre la pensee de continuer un doux far-niente au fond d'une vallee el I'obeissance que lui commande — .^16 — le sifflel dii maiire. II ne delosle pns la Tahagie , quand elle osl peinie par Van Osiade, el frequente les Bmmirs de Ferdinand Bol. I! se plaii, a Venise, avec Henri Roos el accepie une Fete sur Mer avec Abraham Slock. Les Fruits el les Fleurs de Groen- land, de Bloamer d'Amsierdam, de Monnoyer, lui paraissenl pleins d'eclal el de saveiir. Les Jeunes Filles de Tcrburg el de Mademoiselle Vallayer le font rever. VHymen 'sorii de^ mains de Falconnei le capiive. Philippe de Champagne el le Domini lui parlenl de Vieiilesse, Frank el les Parrocels le rameuenl aux Scenes relicjieuses. Voyez que d'emoiions charmanles. que de scenes gracieiises , que d'inspirations elcvees viennenl tour- a-iour capiiver eel amani des arls ! Heureux qui donne aux volupies de rinlclligence, aux bonheur> de I'eiude lonl ce qu'il lui esi permis de dislraire de I'ausleriie de ses fonclions , el passe des travaux ingrals du ca- binet aux giandes impressions que donne le spectacle de la nature! II voii, sans sonir de chez lui, les lignes de ses murailles se perdre a I'horizon , enire les collines bleuaires, dans les vallees sans fin ; c'esl pour lui que le ciel garde ses plus beaux bleus ; la lerre, ses teinies griscs pleines d'harmonie ; la mer, ses espaces infitiis: la pensee , ses plus belles emotions ; I'ideal, ses plus riches recompenses. Si Je cite I'exemple de eel beureux amateur, ce n'est pas que je veuille lui eire agreable el le remer- cier des nobles emotions qu'il m'a fail pariager, mais je liens a signaler la maniere donl on comprend le culie des arls dans nos provinces , et combien sonl utiles a la civilisaiioo d'un pays ces collections faiies avec une rare connaissance de la maliere et un goul — 317 — d6lical ; ces richesses arlisliques , rassembl^es sans fracas el discrelemeni monlrees, mais qui n'en foot pas moins d'honneiir a la localite, el prouvenl qu'en dehors des intereis maieriels , le culle des arls y re- coil un heiireux developpemenl. Get exemple n'esl pas le seni que j'eusse pu choisir, el, sans doute, dans de prochaines occasions, je jeiie- rai dans d'auires salons des regards non moins curieux, heureux d'y renconlrer des collections egalement pre- cieuses. Mais je ne terminerai pas sans exprimer un voeu que m'ont communique plusieurs artistes de la ville. lis voudraienl qu'au lieu des fetes banales el sans poriee que ramenenl invariablemenl ceriains anni- versaires, on reunil, pour des expositions solennelles, les plus beaux tableaux, lesplus riches statues, les objets pr(''cieux acheles pour les collections particulieres. De celie maniere, la population serail admise a jouir des productions de nos plus eminenls artistes, et arri- veraii, par I'habitude des comparaisons, a miirir son jugement, a epurer son gout, a varier ses travaux. La vue des belles choses enfante le desir de les irailer, el donne surlout I'espril d'initialive, sans lequel toule Industrie ne tarde pas a mourir. Ce qui fait la richesse d'une ville , c'est sans douie son industrie , son commerce ; mais ce qui fail sa gloire, ne I'oublions pas, ce sonl ses arts et ses monu- ments. Meltons a la portee du plus grand nombre la vue de tous ces objets qui onl droit h Tadrairation. Mulliplions ces enseignements qui forment le gout, qui eleveni le caraclere, qui developpenl la civilisation du pays. Nous verrons bienlol refleurir au milieu de nous cetie famille d'architecles, 8-1C26 , publies sur Ic manuscrit autographe dela Bibliotheque de Reims, par M. Henry, professeur au lycee et membre dc lAcademie, ctM.Cn. Loriquet, biblio- thecaire de la Ville , ancien secretaire general de I'Academie. 1 vol. in-S", papier verge, avec planches de ransique; 8 fr. Correspondance de Philibert Rabou de la Rourdaisiere , ambas- sadeur de France a Rome , ])ublice par MM. IIenrv et Ch. LouiQUET, sur le manuscrit incdit de la Bibliotheque de Reims, 1 vol. in-S", papier verge; 5 fr. Reirns, Imp. de P. Dubois. VJVU3.T'.