Digitized by the Internet Archive in 2012 with funding from University of Toronto http://www.archive.org/details/voyagedekalmenam01kalm (a? o , / OFFICIEKS SOCIÉTÉ HISTORIQUE DE MONTRÉAL f atom : rpwraMt Ifaktxt |- <£. C^rota, Président L'Abbé H. A. VERREAU Vice-Président , L'Hon. L. F. G. BABY Secrétaire R. BELLEMARE Trésorier L. W. MARCHAND Bibliothécaire L. A. H. LATOUR Assistant-Secrétaire G. GERVA1S MEMOIRES DE LA n v_j J IÉTÉ HISTORIQ DE nVCO^TTI^El^-IL. SEPTIEME LIVRAISON LJ P mm de kalm m Amérique ANALYSÉ ET TRADUIT PAR L. W. MARCHAND AVOCAT, GREFFIER DE LA COUR D'APPEL, MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ HISTORIQUE DE MONTRÉAL, MEMBRE CORRESPONDANT DE LA SOCIÉTÉ DES ANTIQUAIRES DU NORD, ETC., ETC. MONTRÉAL : IMPRIMÉ PAR T. BERTHIAUMB, NOS. 212 ET 214 RUE NOTRE-DAME IÔÔO ey.3 VOYAGE DANS L'AMERIQUE DU NORD PAR PIERRE KALM NATURALISTE SUÉDOIS ANALYSE. PREFACE. " Il est venu en ce pays," écrivait Bigot au minis- tre, •• un académicien suédois, nommé Pierre Kalm, muni des passeports du Roi de France, et de M. de Saumary, ambassadeur de la cour de Suède. Lorsqu'il arriva au fort Saint-Frédéric, venant de la Nouvelle- Angleterre, le commandant de ce fort en donna avis à M. le comte de la Galissonnière, qui lui ordonna de fournir au dit Sieur Kalm un canot armé, et tout ce qui lui serait nécessaire pour se rendre à Québec, où il ne s'est occupé, suivant le Sieur Gautier, qu'à faire des observations sur les minéraux, sur les végé- taux et sur les animaux. Ce médecin nous a assuré que ces observations n'avaient d'autre objet que de les connaître et d'en faire la description. Il a séjourné environ quarante jours, et M. de la Galissonnière dit que ce botaniste emporte avec lui beaucoup de graines de plantes et d'arbres." (1) Le voyage du professeur Kalm dans l'Amérique Septentrionale a originairement été écrit en suédois et publié à Stockholm, de 1753 à 1761, en 3 volumes in-4, sous le titre " Resa till Norra America. En 1764, les deux Murray, Suédois comme Kalm, et l'un d'eux (1) Ferland Cours d'Histoire du Cantda, t. 1er, p. 4'JG. ïï PRÉFACE élève du grand Linné, en donnèrent une version allemande (1). Le voyage fut ensuite traduit en anglais (2) par John Reinhold Forster, savant natu- raliste allemand [3]. Cette traduction était à peine imprimée, qu'il en parut une autre en hollandais, publiée à Utrecht en 1772 [4] par J. V. Schoonhoven et G. V. de Brink. Cette dernière version est dédiée à Pierre Cramer, marchand d'Amsterdam, directeur de la Société des Lettres de Flessingue. Chose singulière: en Angle- terre, c'était aussi un marchand, Collinson, qui dé- ployait le plus de zèle pour les recherches botani- ques dans l'Amérique Septentrionale. La version hollandaise est plus complète que celle de Forster, et nous y avons eu recours pour rétablir un passage entier omis dans l'édition anglaise et ajouter quel- (1) GollingUe, 1754-G4, 3 volumes granl in-8, avec figures. (2) Londres, 1771, 3 parties in-8, ou 2e édition 1772, 2 vols. in-8. (3) Forster était né à Dirschau, Prusse, en 1729 ; et s'était fixé à Londres en 1766. En 1772, il accompagna, avec son fils George, alors âgé de 17 ans, l'illustre Cook dans son second voyage autour du monde Ayant publié un récit de cette circumnavigalion (Londres 1777, 2 vols. 4o), contrairement à l'engagement qu'il avait pris de ne faire imprimer aucune de ses observations, il encourut le déplaisir du gouvernement anglais, et dût s'en retourner dans son pays natal, où il mourut le 9 dé- cembre 1798. Forster parlait et écrivait dix-sept langues mortes et vi_ vantes. Son fils George fut aussi un savant distingué ; il a laissé grand nombre d'ouvrages sur l'Histoire Naturelle et la Philosophie. (4) 2 vols, in-4, avec figures. Nous en avons trouvé un exemplaire dans la bibliothèquo de M. l'abbé Verreau. PREFACE III ques notes. Le voyage de Kalm n'a jamais été tra- duit en français, croyons-nous (1). Lorsque le troisième volume — celui qui contient le récit de son séjour en Canada — fut publié, la domi- nation française avait cessé d'exister dans toute l'é- tendue de l'Amérique Septentrionale, et la narration du savant suédois ne pouvait qu'exciter de doulou- reux regrets dans notre ancienne mère-patrie. La Suéde et la Hollande, il est vrai, s'étaient vu enlever aussi, l'une la Nouvelle-Suède — dont le territoire de la Pensylvanie faisait partie, — et l'autre, les Nou- veaux Pays Bas, qui comprenaient le territoire de l'état de New-York. Mais lorsque Kalm vint en Amérique, il s'était écoulé plus d'un demi-siècle de- puis que la colonie suédoise avait été cédée à William Penn, et plus de quatre-vingts ans depuis que la Nouvelle-Amsterdam et le fort Orange avaient changé leurs noms pour ceux de New-York et d'Albany. La plaie faite à l'orgueil national de ces deux pays avait eu le temps de se cicatriser. Cela n'empêche pas Forster, dans la préface du second volume de sa tra- duction, écrite en 1771, d'accuser le voyageur suédois de partialité. (1) Nous voyons cependant dans Brunol, Manuel du Libraire, qu'une partie du voyage de Kalm a été traduite de l'allemand en français par M. de Surgy, et publiée à Paris en 176S, sous le titre d'Histoire Naturelle et Politique de la Pensylvanie. IV PREFACE u L'auteur de ce récit," dit-il, " qui est un suédois, " a une manière de penser toute particulière à l'égard " des Anglais en général, et des premiers colons et " habitants de Philadelphie en particulier. Les Fran- " çais, ces ennemis naturels des Anglais, étant depuis u plus d'un siècle, les alliés des Suédois, on comprend " que ceux-ci se sentent plus d'inclination pour eux " que pour les Anglais. D'ailleurs, notre auteur " s'est complètement laissé fasciner par la politesse " extérieure des habitants du Canada, qui l'ont cir- " convenu, et lui ont inspiré toutes sortes de préven- " tions injustes contre les Anglais." Si Kalm gardait rancune à la fière Albion, on voit que Forster n'était pas tendre à l'égard des Français. Au moins, il est difficile de ne pas le soupçonner, lui, un allemand, d'avoir voulu faire un brin de cour au peuple anglais. Nous ne trouvons, dans la relation de Kalm, rien qui puisse justifier l'accusation de par- tialité portée contre lui. S'il a rendu hommage aux qualités des Français du Canada, il n'a pas non plus gardé le silence sur leurs défauts. Nos pères avaient aux yeux de Kalm l'avantage d'appartenir à une nation amie de la sienne depuis longtemps ; mais ils avaient en revanche, le tort bien grave de n'être pas protestants comme les habitants des colonies anglai- ses ; l'antipathie religieuse offrait un contrepoids suf- fisant aux sympathies politiques ou nationales* PREFACE V Kalm montrait-il beaucoup de préférence pour les Français lorsqu'il terminait sa relation en disant que la religion chez les Canadiens était toute de pratiques extérieures, et que la Ste. Vierge y recevait plus d'hommage que Dieu même ? Il est singulier que le passage où il s'exprime ainsi soit précisément celui dont nous avons signalé l'omission dans la version anglaise. Nous croyons, au contraire, que Kalm, bien qu'il se laisse influencer quelquefois par ses préjugés reli- gieux, surtout quand il parle du clergé catholique, des moines et des religieuses, — est ordinairement un témoin impartial et un narrateur fidèle. Ainsi, quand il dit que les gens de distinction en Canada avaient plus de goût en général pour l'Histoire Naturelle et les sciences que ceux des colonies anglaises, il a dit ce qu'il croyait honnêtement et sincèrement, et de plus il a dit vrai. En effet, il ne parle que des gens de distinction, des hauts fonctionnaires probable- ment, qui étaient, pour la plupart, des gentilshommes nés en France, et qui en avaient apporté l'amour des lettres, si vif alors chez la noblesse de ce pays. D'ail- leurs, qui ne comprend de suite que Kalm faisait allu- sion surtout au comte de la Galissonnière, dont la science l'avait tellement émerveillé, " qu'il crut voir en lui un autre Linné.' VI PREFACE Lorsque Kalm dit que les françaises du Canada sont jolies, bien élevées, vertueuses, un peu moqueu- ses peut-être, et portées au badinage, mais en toute innocence de cœur, et de plus, qu'elles sont meilleures ménagères que leurs voisines des plantations anglaises, nous n'avons pas de peine à croire qu'il a tracé un portrait fidèle de la canadienne d'alors, puisque nous en retrouvons tous les traits dans son arrièrere petite fille d'aujourd'hui. Mais pourquoi Forster, qui n'est pas anglais, se sent-il le besoin de protester contre l'assertion que la française est meilleure ménagère que l'anglaise ? Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il est d'une suscep- tibilité à rendre des points au plus chatouilleux de Ano-lo-Saxons. Encore n'est-il pas heureux dans la défense qu'il entreprend en faveur du beau-sexe des colonies anglaises ; et son protêt n'est-il au fond que le plaidoyer d'un avocat qui sent son client coupable et qui se laisse toucher par ses promesses d'amende- ment. C'est une sortie qui vaut la peine d'être lue à cause de sa naïveté par trop tudesque (1). Kalm, en parlant des dangers de la navigation sur le St. Laurent, rappelle le désastre arrivé aux Sept lies (2) à la flotte de l'amiral Sir Hovenden Walker : (1) Voir traduction, page 43 . (2) 22 août 1711. PREFACE VII il observe que les Français regardent les bancs de sable et les éeueils du fleuve comme une barrière contre une agression par mer. Là-dessus, Forster s'empresse de mettre une note pour se donner le malin plaisir de remarquer que le St. Laurent n'est plus fermé aux flottes victorieuses de l'Angleterre : il entonne un vrai chant de triom- phe. Dans un autre endroit, Kalm rapporte qu'un chef Indien refusa au nom de tous ses frères de recevoir des missionnaires que la reine Anne se proposait de leur envoyer, en disant : " Nous n'avons eu déjà qu3 trop de ces prédicateurs pour le salut de nos âmes ; ': et l'auteur se permet la réflexion suivante : " Il faut croire d'après cette réponse que les Anglais n'appor- tent pas autant d'attention que les Français à une œuvre aussi importante que celle de la conversion des Indiens au christianisme, et que leurs mission- naires ne sont pas ce qu'ils devraient être." Forster, qui se rappelle avoir été quelque peu pré- dicateur de l'Evangile dans son pays natal, prend occasion de cette remarque (si bien justifiée par les plaintes du chef Indien sur la conduite des mission- naires protestants) pour se répandre en invectives contre les missionnaires catholiques de la Nouvelle- France, ces héros, ces martyrs dont les travaux et VIII PRÉFACE le courage surhumain excitent aujourd'hui l'admira- tion universelle. 11 est inutile d'insister davantage sur l'accusation de partialité portée contre Kalm par son traducteur anglais : elle est entièrement gratuite. Disons maintenant dans quelles circonstances le savant naturaliste suédois a entrepris son voyage en Amérique. Linné venait de révolutionner complètement la science de la Botanique par la publication de son Systema Naturae. Il avait en outre jeté les bases de l'ouvrage Species Plantarum, qui devait mettre le comble à sa gloire, et que Haller appelle Maximum opus et aeternum. La flore d'Europe était assez bien connue, celle de la Laponie avait été décrite par Linné lui-même. Chargé d'une mission semblable à celle qu'avait remplie, quarante ans auparavant, Rud- beck, professeur à l'Université d'Upsal, son maître et son bienfaiteur, Linné avait fait comme lui, en 1732, un voyage d'exploration dans cette contrée à moitié sauvage. Il entreprit seul et termina cette tournée scientifique de plus de 3,500 milles avec cinquante piastres dans sa poche. Il la refit deux ans plus tard, accompagné, cette fois, de sept jeunes naturalistes; il publia à son retour une flore complète de la Laponie, qui est un ouvrage classique. PRÉFACE IX Hasselquist et Osbeck, deux autres suédois, se pré- paraient à partir pour aller explorer les régions fer- tiles, l'un de T Asie-Mineure, de l'Egypte et de la Palestine, et l'autre de la Chine, d'où ils devaient rapporter d'immenses richesses en fait de collections et d'observations, qui ont grandement servi à Linné. Restait l'Amérique Septentrionale, avec sa vaste flore encore inconnue. Ne pouvant y aller lui-même, le grand naturaliste songea à faire charger un de ses disciples de cette mission ; il jeta les yeux sur Pierre Kalm, alors professeur à l'Université d'Upsal. Son choix fut ratifié par l'Académie Royale de Stockholm. Mais en Suède l'argent était alors plus rare que les savants, et il fallut pourvoir aux dépenses d'un voyage aussi considérable. L'Académie s'adressa aux trois Universités d'Abo, de Lund et d'Upsal, qui firent une première mise de fonds, à laquelle vinrent s'a- jouter une seconde contribution de £150 sterling, que versa Y Université d'Upsal, à la demande de son chan- celier, le Prince Royal de Suède, et la somme de £45 fournie par une société de manufacturiers. Kalm dépensa dans ce voyage, outre son salaire et la somme souscrite, près de £130 pris sur ses économies, ce qui le mit dans un état de gène pécuniaire dont il se sentit toute sa vie. Nous sommes entrés dans ces détails, parce qu'ils S PRÉFACE font voir combien était général le mouvement scien- tifique qui se produisait en Suède à cette époque. Ayant obtenu un congé, Kalm partit d'Upsal le 16 octobre 1747, accompagné de Lars Yungstrœem, jar- dinier, expert dans la connaissance des plantes, bon mécanicien et excellent dessinateur, qu'il prit à son service. Il s'embarqua à Gotlienburgh le 11 décem- bre ; mais une violente tempête força le vaisseau sur lequel il était monté à se réfugier dans le port de Graemstud en Norvège. Kalm profita de cette halte forcée pour faire des excursions à Arendal et à Chris- tian sand. Il s'embarqua de nouveau le 8 février 1748, et arriva à Londres le 17 du même mois. Il séjourna en Angleterre plus de six mois, dont il em- ploya la majeure partie à visiter les jardins publics de Londres, et à faire des excursions dans les comtés d'Essex, de Hertfordshire et de Buckinghamshire, Enfin le 5 août 1748, il prit passage à bord de la Mary Gally (capitaine Lawson), et arriva à Philadel- phie le 26 septembre, après une heureuse traversée de six semaines. Parvenu au but de son voyage, il se mit aussitôt à l'oeuvre : il employa le reste de cette année à collec- tionner des graines de plantes et d'arbres, qu'il expé- dia en Suède, et à faire des excursions dans les envi- rons de Philadelphie. Il passa l'hiver parmi ses PRÉFACE XI compatriotes à Raccoon dans le New-Jersey. L'année suivante, 1749, Kalm traversa les provinces du New- Jersey et de New- York, et se rendit en suivant le cours de la rivière Hudson jusqu'à Albany, et de là, par les lacs George et Champlain au Canada. Du Canada, il retourna la même année à Philadelphie, d'où il fit un second envoi dans son pays, de graines, de plantes et de curiosités. En 1750, il visita les parties occidentales de la Pensylvanie et la côte du New-Jersey, et Yungstroem, resta tout l'été à Phila- delphie occupé à ranger ses collections. Ensuite Kalm retourna à Albany en passant par New-York et les Montagnes-Bleues, et de là il se rendit par la rivière Mohawk jusqu'aux pays habités par les cinq nations iroquoises. Puis, naviguant sur le lac Ontario, il alla voir la fameuse chute de Niagara, dont il fit une des- cription très-curieuse dans une lettre qu'il écrivit à uu ami à Philadelphie. Cette lettre est insérée dans le voyage de John Bartram. A son retour de son excursion d'été, Kalm explora les Montagnes-Bleues en différents endroits, et en octobre il était de nou- veau à Philadelphie. Il se rembarqua pour l'Angleterre en 1151, fit une traversée des plus périlleuses, et arriva à Londres le 29 mars ; le 13 juillet suivant il revoyait Stockholm après une absence de trois ans et huit mois. Kalm fut mis immédiatement eu possession d'une chaire à XII PREFACE Abo. Jusqu'à sa mort, qui arriva en 1799, il occupa ses loisirs dans son propre jardin — l'Université n'en avait pas alors — à la culture de plusieurs centaines de plantes d'Amérique, afin de connaître celles qui pou- vaient s'acclimater en Suède (1). Il publia la rela- tion de son voyage par livraisons qui parurent à de longs intervalles. L'impression coûtait cher alors en Suède, et les libraires n'y étaient pas nombreux. Le plus souvent, l'auteur devait voir lui-même à la vente de son livre. Le dernier volume de son voyage ne parut que huit ans après la publication du premier. Traverser l'océan Atlantique était chose nouvelle à cette époque pour un Suédois. Kalm, comme tous les naturalistes, portait le goût de l'observation jus- qu'à la passion, et il a noté soigneusement toutes les circonstances même les plus ordinaires de la tra- versée. Forster, dans sa traduction, a omis grand nombre de ces détails, n'y faisant entrer que les des- criptions qui avaient un intérêt réel au point de vue de l'histoire naturelle et de la science en général. Il a omis pareillement tout ce que l'auteur avait écrit au sujet de l'Angleterre et des curiosités de ce pays. Mais à compter de l'arrivée de Kalm à Philadelphie le traducteur a suivi l'original fidèlement, à l'excep- tion du passage que nous avons pu rétablir dans notre (1) Ces détails sur la vie de Kalm et sur les circonstances qui ont pré- cédé et accompagné son voyage sont empruntés en partie de la préface du traducteur anglais. PEÉFACË XIII version partielle, à l'aide de l'édition hollandaise — et de certains détails par trop puérils, comme la manière de manger les huîtres, l'art de faire le pouding-aux- pommes, et d'autres particularités semblables qui ont frappé le savant suédois par leur nouveauté. Kalm s'est servi delà mesure suédoise, dont le pied est au pied anglais, dans le rapport de 1134 à 1350. Pour ses observations météorologiques, il a employé le thermomètre du professeur Celsius, dans lequel l'intervalle entre le point de congélation et le point d'ébullition est également divisé en 100 parties. Pour les noms des plantes, Forster a fait usage, sous la direction de l'auteur même, de la nomenclature de Linné. Dans notre analyse des deux premiers volu- mes et dans notre traduction du troisième, nous avons ajouté, au nom des plantes, leurs noms de familles suivant la méthode de Jussieu, ou méthode naturelle, qui est la seule maintenant suivie dans les écoles. Comme ses descriptions d'animaux, de plantes et de minéraux sont très-courtes, Kalm avait promis de les donner plus au long dans un ouvrage en latin qu'il devait publier plus tard (1). La version anglaise contient une carte et des des* sins d'oiseaux et d'animaux qui ne se trouvent pas (l) Voir à la page 103 de la traduction du 3e volume. Nous ne savons s'il a publié cet ouvrage. On remarquera qu'à la page 1GG il renvoie à une Flore canadienne (Flora Canacknsis') restée inédile, peut-être. XIV PRÉFACE clans l'original, mais qui ont été reproduits dans l'édi- tion hollandaise. Kalm est un narrateur fidèle, mais un écrivain peu élégant : il notait ses observations au jour le jour, passant subitement d'un sujet à l'autre, sans nul souci des transitions. Les critiques qu'on lui adressa sur les défauts de son style le laissèrent dans une com- plète indifférence. Il n'avait d'autre but que l'inté- rêt de la science, Les observations de Kalm touchent à toutes les branches de l'Histoire Naturelle — géologie, minéra- logie, phytologie ou botanique, zoologie, anthropolo- gie.— Mais elles ne sont pas d'égale valeur, vu que plusieurs de ces sciences n'avaient pas alors le degré de perfection qu'elles ont atteint depuis. La miné- ralogie en particulier, considérée comme pure science, est de date récente ; son objet n'est bien défini que depuis la publication des travaux d'Hauy (1801), D'Alex-Brongniart (1807;, de Brochant (1803), de Beudant (1824), et du professeur Mohs (1828). Ce dernier en a élagué tout ce qui avait rapport à l'é- tude des propriétés chimiques et géologiques des mi- néraux, et en a fixé la terminologie et la nomencla- ture. Kalm décrit le sol, le sable, l'argile, les pierres, les métaux avec un soin minutieux, mais dans la langue PRÉFACE XV scientifique du temps, et il est difficile aujourd'hui de ranger dans leurs catégories propres les corps qui ont fait l'objet de ses observations. On lira néanmoins avec intérêt le récit d'un voyage à la Baie St. Paul, où les sieurs Forster, père et fils? mineurs allemands, envoyés par le roi de France à Québec en 1739, à la demande de l'intendant Hoc- quart, pour faire un rapport sur les mines du Canada, avaient déjà signalé six belles veines de plomb et d'argent (1). Les remarques géologiques de notre auteur sont nombreuses ; mais en général elles ne sortent pas d'un cadre restreint, qui ne comprend guère que l'examen des couches de surface, leur direction et leur incli- naison. Les considérations anthropologiques et zoologiques de Kalm laissent peut-être encore plus à désirer sous le rapport de la science ; mais elles ne manquent pas d'intérêt, quoiqu'elles soient pour la plupart fondées sur des traditions, et même sur des fables, particuliè rement celles qui ont trait aux aborigènes du conti- nent américain. Au reste, presque toutes ces observations se trou- vent dans les deux premiers volumes du voyage les- (1) Ferland, Cours d'Hist., vol. p. 449. XVI PREFACE quels n'ont qu'un intérêt secondaire pour nous, Cana- diens, et que nous n'avons pas traduits. Mais nous en donnons une analyse pour faciliter au lecteur l'intelligence du troisième volume, qui, à tous les titres, méritait d'avoir une place dans nos mémoires. Je prie M. l'abbé Verreau et M. R. Bellemare, mes savants collègues d'accepter mes remercîments pour leur collaboration à cet ouvrage. J'offre aussi mes remercîments à M. J. O.Cassegrain professeur à l'Ecole Normale qui a bien voulu m' aider pendant l'impression de cette livraison des mémoires de la société. L. W. Marchand. VOYAGES DE PIERRE KALM DANS L'AMERIQUE SEPTENTRIONALE. ANALYSE DU PREMIER VOLUME. Le 5 Août 1748, Kalm, accompagné de son serviteur Lars Yungstroem, s'embarqua à G-ravesend (1) sur la Mary Gally, capitaine Lawson, qui mettait à la voile pour Philadelphie. Pendant que le vaisseau faisait une relâche à Deal, petit port de ravitaillement, il remarqua des pêcheurs, armés d'une sorte de trident, qui couraient sur la plage, à marée basse, à la recherche des aréni- coles ou vers de mer, Lumbrici marini, Linn (2). Les arénicoles vivent dans le sable, et s'y pratiquent des galeries facilement reconnaissables par les monticules dont elles sont recouvertes, et qui sont formés de la matière rejetée par ces annélides. Le ver de mer sert d'appât aux pêcheurs. En passant d3vant Douvres, il adopta l'opinion de Camden, confirmée par Buffon, que l'Angleterre était ( l) Ville d'Angleterre, comté de Kent, avec un port sur la Tamise. (M. (2) Arenicola marina — Annélides dorsibranches. (M.) 2 août 1748, autrefois reliée à la France par un isthme. Les côtes de l'île et celles du continent s'allongent en pointes qui s'avancent Tune sur l'autre ; toutes deux sont formées de collines de craie et ont la même configuration. 14 Août. — Le vaisseau, à la sortie de la Manche éprouva un vent contraire ; aussi le roulis augmenta-t-il beaucoup : ce bouleversement fit réfléchir notre profes- seur sur l'énorme puissance des vagues, qui, dit-il, ont déjà, dans la baie de Biscaye, un demi-mille de longueur, avec une hauteur proportionnée. Elles ne sont pas plus grosses en plein océan. 15 Août. — Le vent, de contraire qu'il était, se chan- gea, vers midi, en une brise du nord-est des plus favo- rables à la course du navire ; elle fut accueillie avec d'autant plus de joie par les passagers que les vents d'est ou de nord-est sont rares entre l'Europe et les Azores. 22 Août. — Le capitaine montre à Kalm, au sud, des nuages qui semblent se diriger vers le nord-est, et lui dit que c'est un signe certain de vent de sud-ouest. 24 Août. —C'est maintenant au tour de l'équipage à faire des conjectures sur le temps. Un matelot annonce un grain, parce que les nuages les plus élevés sont rayés, petits et épars dans le firmament, et ont la forme de flocons de laine peignée. 27 Août. — Le vent d'ouest est le vent le plus fréquent dans l'Atlantique, ce qui explique pourquoi le passage d'Amérique en Europe est ordinairement plus court que celui d'Europe en Amérique. 30 Août. — Toute la nuit, le firmament fut embrasé par des éclairs, mais le tonnerre ne se fit pas entendre. SUR L'oCÉÀNt & Ce phénomène est dû à un refroidissement de l'atmos- phère après une grande chaleur. En hiver, les éclairs annoncent une tempête imminente, et avertissent le navigateur qu'il est prudent de prendre un ris ; c'est aussi ce qui a lieu lorsqu'un gros nuage s'élève tout-à- coup au nord-ouest. 8 Septembre. — La mer est très-forte, quoique le vent soit modéré. Le capitaine attribue la grosseur des vagues au déplacement des eaux du Grand-Océan, dépla- cement produit par les eaux du golfe intérieur de l'Amé- rique (1). 12 Septembre.— Grande alarme à bord à la vue d'un navire que l'on prend pour un corsaire espagnol, et qui n'est qu'un honnête vaisseau-marchand, fort peu rassuré lai-même par le voisinage de la Mary-Gally. 13 Septembre. — Le vaisseau s'échoue sur un banc de sable, mais une manœuvre habile le remet à flot : bientôt après on aperçoit la terre à la distance d'un mille. C'était la côte du Maryland. 11 Septembre. — La Mary Gally entre dans l'embou- chure de la rivière Delaware. Du vaisseau, les passagers jouissent d'un paysage champêtre qui leur fait oublier les fatigues de la traversée ; leur regard s'arrête avec satis. fection sur les maisons des fermes, éparses ça et là dans les éclaircies des bois, entourées de champs de blé, de pâturages couverts de nombreux troupeaux et de ver- doyantes prairies ; leur odorat est agréablement atfecté par le parfum délicieux qui se dégage des plantes et des Heurs, et par la senteur du foin fraîchement coupé. Ils (I) Gulf-slream. (M.) 4 AOUT ET SEPTEMBRE 1748. contemplent jusqu'au soir le spectacle enchanteur de la nature sur ce nouveau continent, qu'ils sont venus visiter de si loin, bravant les dangers d'un long voyage Avant de débarquer, notre professeur a noté une série d'observations qu'il avait laites pendant la traversée, dont voici les plus intéressantes : Parmi les plantes marines (Fucus, Linn.), il a remar- qué une sorte d'algue blanche de la grosseur du poing, dont les bulbes ressemblaient à une botte d'oignons liés ensemble ; et, près des côtes de l'Amérique, une autre espèce de fucacées qui avaient l'apparence d'un collier de x->eïles. Du 24 Août au 11 Septembre, il n'a vu d'autre plante marine que la sargasse, appelée par Linné Fucus natans, et par le vulgaire algue du golfe (Gulfweed), parce qu'on suppose qu'elle vient du golfe de la Floride. Cette plante tapisse le fond d'une grande partie de l'Océan ; ses feuilles ressemblent à celles de la mousse d'Irlande. On lui attribue des propriétés médicinales. Lorsqu'on retire la sargasse de l'eau, on trouve souvent sur sa tige de petits coquillages pointus, ayant la forme d'une corne, des crevettes (crangon vulgaris) et des crabes minuscules (cancer minutus, Linn.) (1). Huit de ces petits crabes, que le professeur avait mis avec trois crevettes dans un verre d'eau, eurent un sort funeste. Les crevettes les dévorèrent durant la nuit. Kalm a remarqué plusieurs sortes d'orties de mer (2), appelées mëdusae par Linné. La médusa aurita, qui est ronde, couleur pourpre, s'ouvre comme un sac, et (1) Crustacea Decapoda. (M.) (2) Ces orties de mer sont des actinies ou anémones de mer, qui forment un ordre de la classe des polypes zoanthaires. (M.) SUR l'océan. 5 laisse voir au dedans quatre anneaux blancs. Cette espèce n'a pas les propriétés délétères de celle que les marins espagnols et portugais ont décorée du nom de vaisseau-de-guerre, et qui ressemble à une grosse vessie rouge-foncé ; elle brûle la main quand on y touche. Une autre espèce, moins intéressante, connue sous le nom général d'ortie de mer produit sur la peau le même effet que la précédente. Le 30 Août, Kalm vit un billot flottant qui était tout couvert de coquillages de l'espèce lépas, lepas anatîfera, Linn. (Cirrhipèdes.) (1) Ces mollusques étaient probable- ment des balanes, appelés glands de mer en France. Les observations entomologiques du naturaliste sué- dois, pendant la traversée, se réduisent à peu de chose : quelques papillons blancs de l'espèce pcipilio brassicœ, Linn., ou papillon du chou (2), qui s'étaient aventurés jusqu'en plein chenal, en vue de l'île de Wight ; et quelques mouches communes, musca domestica (3), qui ont tenu compagnie au professeur dans sa cabine durant tout le voyage ; et il fut beaucoup intrigué par la diffi- culté de savoir si elles étaient natives d'Amérique ou d'Europe. De l'ordre des cétacés, Kalm signale le marsouin ou cochon de mer, de/phinus phocœna, Linn. (4), une baleine ( ! ) Anatifes ; Crustacea Cirrhipedia. Le nom cYanalife signifie qui produit un canard et provient d'un absurde préjuge des pêcheurs des côtes de l'Ecosse qui s' imaginaient que les canards sauvages prenaient naissance dans ces coquilles. De nos jours, il n'y a plus que la presse qui, cultivant à la fois la coquille, et le canard, ait des titres au nom d'anatiiere. M. (2) Lepidoptera. (M.) (3) Diptera. M. (4) Phocœna vulgaris. M. Le nom anglais du marsouin porpesse, ou porpus, ou encore porpoise vient daporcopesce, nom donné en Italie à l'espèce entière. Il est remai quable que toutes les nations de l'Europe s'entendent pour appeler ce 6 AOUT ET SEPTEMBRE 1748. et un autre poisson appelé bottle-nose par les marins anglais et qu'il range dans l'espèce dauphin. (1) Un chien de mer suivit le vaisseau pendant quelque temps; mais il se laissa distancer trop tôt pour que le professeur pat déterminer à quelle espèce il appar- tenait (2). C'est le seul poisson cartilagineux qu'il ait vu durant toute la traversée. Kalm mentionne aussi un albicore, espèce de thon (scomber thynnus Linn). Son nom vulgaire vient des deux mots portugais al et bacoro qui veulent dire petit cochon (3). Il note aussi quelques observations qu'il a faites sur un poisson improprement appelé dauphin par les navigateurs et auquel Linné a donné le nom de coryphœna hippuris. Mais il ne fait pas mention d'une particularité qui a rendu ce poisson, sous son faux nom de dauphin, si célèbre dans la fable : nous voulons parier de son changement de couleur au moment d'ex- jioisson cochon de mer; en allemand, il se nomme meer schwein; en danois, suédois et norvégien, marsuin, d'où vient le mut français mar- souin. Les Islandais l'appellent sw inhuai (divine wh le,) el les Slaves, suinia morskaya. Un accord si universel pour leur donner c • nom vipnt-Ll de l'habitude que ces poissons ont le fouiller le fond de li mer en que e d'anguilles ou de vers ; ne serait-il pas dû plutôt à l'épaisse couche de lard qui se trouve entre la peau et la chair des marsouins? F. (I) M. Kalm se trompe certainement quand il range le bollh-n se, qui n'a pas de dents, dans l'espèce des dauphins, qui en ont tous. Il appartient plutôt à l'ordre des baleines. Les baleines sont loutes dépourvues de dents. Voir Britisli Zoology de Fermant, vol. 3, p. 43, où ce cétacé est appelé bea';ed whale, et y est bien décrit. La table explicative de l'ou- vrage en contient un dessin (No. I.) Il ne serait peut-être pas impropre de l'appeler bahvna amjiullala, baleine-bouteille. (F ) L'avis de Foister n'a pas été adopté. La baleine-à-bec, qui est la plus petite des baleines, mesurant environ vingt-cinq pieds de longueu", a garde dans la nomenclature scientilique son nom de balwna rosirai jl. (M) l). Le chien de mer ou roussette, (Scyllium canicula), de l'ordre des Piagiostomes, est un sous-genre de la famille des requins \Squalidae) ; il a ordinairement de deux a. trois pieds de long. (M ) (3) Albacore, est le nom vulgaire de l'espadon qui comme le thon est de la famille des Scomberoïdes. (M.) SUR L'OCÉAN. pirer. Une autre particularité du coryphône qu'il passe sous silence, c'est sa manière de happer les petits pois- sons dont il se nourrit, en leur faisant prendre une position renversée qui lui permet de les avaler la tête la première, à la façon du cormoran. On sait que cet oiseau, par une manœuvre habile, lance le poisson en l'air, et le reçoit dans son bec la tête en bas. Il lui était facile cependant de faire cette remarque ; car il dit avoir examiné l'intérieur d'un coryphône qui se laissa prendre à l'hameçon par les hommes de l'équi- page ; il y trouva tout un aquarium, dont voici le catalo- gue : un ostracion ou coffre, poisson à squelette cartila- gineux, deux autres petits poissons dont l'un aux yeux bleus, long de deux pouces et tout frais pris, puisqu'il était encore vivant, un insecte de mer curieux, mais qu'il ne décrit pas, et un poisson-volant. Kalm donne au coryphône une 'longueur de deux à trois pieds ; mais elle est ordinairement de quatre à cinq pieds. Sa couleur est le blanc argenté tacheté de jaune. On a fait de i'hippure un signe héraldique (1). Le voyageur suédois dit que le poisson-volant ou exocet (exocetui volitam, Linn.) (2) qui a la faculté de s'élever au-dessus de la surface des eaux pour échapper aux poursuites des dauphins et des coryphènes et de se soutenir dans l'air, à la distance d'une bonne portée de fusil, suit toujours dans son vol une direction contraire à celle du vent. Cette opinion semble contredite aujour- d'hui par des observations qu'on a faites plus récemment et qui démontrent que le poisson-volant peut changer sa (I) Le coryphône appartient aussi à la famille des Scombéroïdes. (M.) (2). — Gabot. (Malacopterygicns) genre de poissons abdominaux, de J'orara des squamodermes. (M.) 8 AOUT ET SEPTEMBRE 1748. course à volonté. Les exocets ressemblent aux harengs par la taille, la forme et la couleur. Leur chair est excellente. Ils doivent à l'excessive grandeur de leurs ailes pectora- les, qui sont aussi longues que leur corps, la faculté de se mouvoir pendant quelques instants hors de leur élément naturel. Le bruit qu'ils produisent en volant est causé par le choc de l'air sur une espèce de membrane ou tambour qu'ils ont au fond de la gorge. Forster dit dans une note que la Zoologie de Pennant con« tient un dessin très-exact de ce poisson, et il ajoute qu'on trouvera dans le même ouvrage (Pennant's British Zoology, vol. 3, p. 282) la meilleure description connue de l'exocet. Kalm mentionne un autre poisson de la famille des Scombéroïdes, le bonito (scomber pelamys, Linn.) (1) qui ressemble au maquereau par la forme, mais non par la taille, car il est de beaucoup plus grand et plus gros. Jf animaux amphibies ou reptiles, notre voyageur ne rencontra que deux tortues (2), dont l'une dormait paisiblement, et l'autre continuait paresseusement sa route, sans paraître seulement s'apercevoir de la pré- sence d'un navire dans ses eaux. Kalm passe ensuite à la nomenclature des oiseaux de mer qu'il a vus ; ce sont : Le pétrel (procellaria pelagica, Linn.) (3), ce compa- gnon assidu des navigateurs, qui examine curieusement tout ce qui tombe hors du vaisseau, et qui fait sa proie de tout ce qu'il trouve à sa convenance. (1) Thynnus Pelamys. (M.) (2) Reptiles chéloniens. (M.j (3) Thalassidroma pelagica (Palmipèdes). (M. SUR L'OCÉAN, 0 Le coupeur d'eau ou bec-en-ciseaux (procellaria puffl- nus, Linn.), oiseau palmipède, comme le Pétrel, qui plonge son bec dans l'eau en volant. Par la couleur et la taille, il ressemble beaucoup à la mouette et au canard. L'oiseau du tropique (phaëton aethereus, Linn.), qui a la forme d'une mouette ; il s'en distingue aisé- ment, ainsi que de tout autre volatile, par un appen- dice caudal composé de deux pennes excessivement longues, qui lui ont fait donner le nom plus que vulgaire de paille-en-queue. Il se tient à des hauteurs prodi- gieuses dans les airs. La mouette commune (larus canus, Linn.), que Kalm dit n'avoir vue que vis-à-vis " le Bout-de-la-Terre (the LancFs End)" dans le pays de Cornouailles ; c'est le nom que porte encore aujourd'hui le cap le plus occidental de l'Angleterre, lequel fait face à l'Irlande. L'hirondelle de mer (Slerna-Hirundo, Linn.), qui est d'une couleur plus foncée que l'hirondelle commune. Une poule de mer, vue à quelque distance du vais- seau, près des côtes de l'Amérique, complète la liste des oiseaux aquatiques qui ont fait l'objet des observations de Kalm. " Il n'est pas rare," — dit le savant naturaliste, " de rencontrer des oiseaux de terre en pleine mer; mais il est difficile de s'expliquer ce qu'ils y viennent faire." Le 18 Août, il y en eut un qui se jeta sur les mâts de Ja Mary-Gally, et qui avait toute l'apparence de la grande mésange (parus major, Linn.) (1) (I) Passereaux conirostres. (M.) 10 AOUT ET SEPTEMBRE 1748. Le 1er de Septembre, nos voyageurs, étant à une dis- tance de 420 milles de toutes côtes, observèrent plusieurs oiseaux de terre, qui volaient au-dessus de leurs têtes ; quelques-uns vinrent faire une halte dans les voilures du vaisseau ; les passagers crurent reconnaître en eux des hirondelles de rivage (hirundines ripariae, Linn.) (1). Le lendemain, une autre hirondelle se posa aussi sur les mâts. Le 10 Septembre, la Mary-GalJy reçut la visite d'un hibou ; et le 12, ce fut le tour d'un pivert, bientôt suivi d'un oiseau de la famille des passereaux, à venir de- mander aux cordages du navire un peu de répit pour ses ailes fatiguées. Le professeur a noté ses observations sur ce qu'il appelle deux curieux phénomènes : des flammes élec- triques sur la crête des vagues et le bout des mâts — (c'est le feu Saint-Elme, dont il ne donne pas le nom) — et une lumière ressemblant à la phosphorescence du bois pourri, qui paraît, le soir, jaillir du sein de la mer. Ce dernier phénomène est attribué à la phosphores- cence propre à des myriades d'infusoires qui vivent sus- pendus à la surface des eaux. Kalm reprend ensuite le fil de sa narration. Vers le soir du 14 Septembre, le vaisseau passa en vue de Newcastle, petite ville sise sur la rive occidentale de la rivière Delaware,et qui fut fondée par les Hollandais à une époque où les Suédois étaient encore maîtres de ce pays. Mais les Néerlandais, par des empiétements (I) Passereaux lissirostres. M PHILADELPHIE. 11 successifs et continus, finirent par supplanter les légiti- mes propriétaires du sol, qui eurent recours aux armes? mais qui furent battus. Les vainqueurs ne jouirent pas longtemps du fruit de leur victoire, et à leur tour ils se virent dépossédés par les Anglais. Cependant, il y avait encore des Suédois dans le pays ; et, après que le vaisseau eût un peu dépassé Chester, sur la rive occidentale de la rivière, le second se fit un plaisir d'indiquer à Kalm les résidences de plusieurs de ses compatriotes. 15 Septembre 1748. — Kalm débarque à Philadelphie après une traversée de 41 jours, à compter du départ de G-ravesend. C'était à cette époque un voyage des plus rapides. Porteur de plusieurs lettres de recommandation adres- sées aux premiers citoyens de Philadelphie, le profes- seur eut bientôt fait des connaissances dans cette ville, et entre autres celle de Benjamin Franklin, " à qui. dit- " il, la Pensylvanie est redevable de sa prospérité, et le " monde savant, de beaucoup de nouvelles découvertes '; sur l'électricité." Cependant, il y avait à peine deux ans que Franklin s'était livré à des études sérieuses sur cette branche de la Physique, et ce ne fut qu'en Juin 1752 qu'il fit à Philadelphie sa grande expé- rience du cerf-volant électrique, qui amena la décou- verte du paratonnerre. Mais il ne faut pas oublier que le premier volume de la relation de Kalm ne parut qu'en 1753. Frauklin présenta le naturaliste suédois à plusieurs de ses amis et le combla d'attentions. Kalm décrit les impressions qu'il ressentit dans sa première excursion botanique* Il était accompagné de 12 SEPTEMBRE 1748. Jacob Bengston et du sculpteur G-ustaye Hesselius, deux de ses compatriotes. Laissons-lui la parole un instant : " Tout autour de moi me dit que je suis dans un " monde nouveau. Si je jette la vue sur le sol, je le " vois couvert de plantes qui me sont inconnues. Quand " j'arrive près d'un arbre, il faut que je fasse une pause " pour en demander le nom à mes compagnons de pro- " menade. La première chose qui frappa mon regard fut '' un pied d'andropogon (G-raminées) — une herbe ! c'était li précisément l'espèce de plantes dont l'étude a toujours " en le plus d'attrait pour moi. Et quand je me pris à réflé- «' chir que j'aurais à classer un si grand nombre de végé- <' taux sur lesquels le regard du botaniste ne s'est pas en- " core arrêté, j'en eus le frisson. Au commencement, je me '' contentai de jeter un coup d'œil sur les plantes, n'osant " commencer à en faire un examen plus attentif." Kalm se logea chez un honnête quaker, épicier de son état, qui lui fournit une chambre pour lui et Yungstrœm — son domestique ou plutôt son compagnon de voyage — avec trois repas par jour au prix de vingt chelins par semaine, y compris la bougie, la literie et le service ; mais le chauffage, le blanchissage et le vin devaient être payés à part. Philadelphie fut fondée en 1(382 par le célèbre quaker William Penn, auquel Charles II avait concédé une grande partie du territoire de la Nouvelle-Suède, après que ses premiers occupants eurent abandonné toute prétention. Cette ville, à l'époque du voyage de Kalm, était, comme encore aujourd'hui, la seconde ville de l'Amérique Septentrionale, mais avec cette différence PHILADELPHIE. 13 que Boston tenait alors le rang de métropole, tandis qu'- aujourd'hui c'est New-York qui l'occupe. D'après le plan de son fondateur, la ville devait être bâtie sur un quadrangle de deux milles de long sur un mille de large, formé par l'union des rivières Delaware et Skulkill. Ce terrain avait été vendu à Penn par trois frères suédois du nom de Sven's Soener (fils de Sven). Kalm dit que la plupart des rues étaient belles, coupées à angles droits, et qu'elles avaient une largeur d'environ cinquante r>ieds. Quelques-unes étaient pavées. Les maisons, en pierres on en briques, à plusieurs étages, étaient bâties avec goût et recouvertes en bardeaux de cèdre blanc, cupressus thyoides, Linn. (Conifères), bois très léger, peu sujet à la pourriture. Une couverture faite de ce bois peut durer un demi-siècle. " Parmi les édifices publics," ajoute Kalm, "je men- " tionnerai d'abord les églises, qui sont en assez grand " nombre ; car Dieu est se rvi de différentes manières " dans ce pays." Et il nomme : lo. L'église anglicane ou Christ Church, sise dans la partie nord de la ville, bâtie à la fin du 17e siècle et des- servie par deux ministres qui recevaient d'Angleterre la plus grande partie de leur salaire. Uo. L'église suédoise, autrement appelée église de Weekacko, au sud de la ville. 3o. L'église luthérienne allemande, au nord-ouest. 4o. La vieille église presbytérienne, bâtie en 1704, sur Market street. 14 SEPTEMBRE 1748. 5o. La nouvelle église presbytérienne, construite ëii 1750 par les New4ights ou prosélytes du célèbre White- fîeld (le père des Méthodistes), qui dans les années 1739, 1740 et aussi en 1744 et 1745 (1), parcourut presque toutes les colonies anglaises, prêchant en plein air à d'immenses auditoires composés parfois de plus de 20,000 personnes, hommes, femmes et enfants. Franklin décrit dans son autobiographie l'effet produit sur les masses par la parole ardente du fougueux sectaire. 6;>. L'église de la vieille réforme allemande, desservie quelque temps auparavant, par deux ministres qui se querellaient continuellement au grand scandale de la ville. L'un d'eux, pour empêcher son confrère de prê- cher, s'empara de la chaire un dimanche matin, et n'en descendit que le lendemain. 7o. Ces dissensions eurent leur effet accoutumé de susciter une nouvelle secte, qui prit le nom de nouvelle église réformée, et qui se bâtît un temple près de l'ancien. Les Quakers tenaient leurs assemblées dans deux salles, l'une au Marché, et l'autre au nord de la ville. Les Catholiques Romains avaient consacré au culte une maison sise au sud-ouest de la ville, spacieuse, bien ornée à l'intérieur et pourvue d'un orgue. Les Frères Moraves faisaient leurs exercices religieux dans un vaste local qu'ils avaient loué ; mais ils sévirent contraints d'abandonner le service du soir, à cause des mauvaises plaisanteries de quelques jeunes impudents qui, cachés dans les coins, troublaient le chant des hymnes en jouant, à la fin des strophes, d'un instrument avec lequel ils imitaient à perfection le cri du coucou. (I) D'après L'Encyclopédie Populaire — The Popular Eucyclopedia — Whitefield aurait prolongé son séjour en Amérique jusqu'en juillet 1748; il en serait donc parti à peine un mois avant l'arrivée de Kalm. (M.) MiLADELPHIË. 15 Âu nombre des autres édifices publics de Philadel- phie, Kalm mentionne encore : L'Hôtel-de-Ville, situé dans la partie occidentale de la cité— bel édifice, très-spacieux, surmonté d'une tour contenant une cloche. Une de ses ailes était occupée par la bibliothèque provinciale, fondée en 1742 par Franklin, et qui contient de superbes collections de livres anglais, français et latins, d'instruments de physi- que et de mathématiques et de curiosités naturelles. Le Palais de Justice, sur la rue du Marché. L'Académie, à l'ouest de la ville, occupait l'emplace- ment d'une redoute qu'on y avait élevée à la fin de la dernière guerre, non sans débats cependant, car les Quakers s'opposèrent de toutes leurs forces à, sa cons- truction. Mais les corsaires français et espagnols, ayant infligé des pertes cruelles à la ville, firent taire les scru- pules de ces sectaires qui contribuèrent même de leurs deniers à l'érection de la forteresse. Kalm s'extasie sur la beauté du climat de Philadelphie, et vante son eau; qui est claire, limpide et si abondante que chaque maison était pourvue de son puits. La rivière Delaware a trois quarts de mille de large devant Philadelphie. La cité est à 90 ou 100 milles de la mer, et cependant les plus grands vaisseaux peuvent se rendre jusqu'à son port, et y mouiller dans cinq bras- ses d'eau. Seulement, chaque hiver, la navigation est arrêtée pendant un peu plus d'un mois. Les chantiers de Philadelphie avaient de la réputation, dès cette époque, pour la solidité des vaisseaux qui en sortaient ; mais Kalm dit que le chêne d'Amérique ne Vaudra jamais celui d'Europe pour la construction des navires. 16 SEPTEMBRE 1748. La ville faisait un grand commerce avec les Indes Occidentales, l'Amérique du Sud et les Antilles, où elle expédiait de la farine, du beurre, de la viande de bou- cherie, du bois de construction et des planches. En retour, ces pays y envoyaient du sucre, de la mêlasse, de l'indigo et du bois d'acajou de la Jamaïque, qui, déjà, se faisait rare. Kalm donne un tableau de la valeur des marchan- dises expédiées d'Angleterre en Pennsylvanie de 1723 à 1747. Le total des importations, dans cette période de 25 ans, s'élève à «£1,312,838.17.6. Il donne aussi des arrivages et départs de vaisseaux le tableau qui suit : Années, Arrivages. Départs 1735 199 212 1740 307 208 1741 292 309 1744 229 271 1745 280 301 L746 273 293 Il y avait deux grandes foires par année à Philadel- phie, l'une en Mai et l'autre en Novembre. La ville n'était pas entourée de murailles. Le gouverneur de la Province y résidait. Kalm dit que ce haut fonction- naire était nommé par les descendants de William Penn, mais que son élection devait être confirmée par le roi d'Angleterre. En 1743, une société pour l'avancement des sciences fut fondée à Philadelphie ; mais la guerre qui survint presqu'immédiatement après la fit tomber. PHILADELPHIE. 11 Il y avait trois imprimeries et trois journaux hebdo- madaires, dont deux rédigés en anglais et l'autre en alle- mand. En Novembre 1737, la ville reçut la visite de Scheik Sidi, prince du Liban, et en 1741, celle du comte de Sinzendorf, chef des Frères Moraves, qui se conduisit de manière à faire croire qu'il avait le cerveau dérangé. En 1746, Philadelphie comptait environ 10,000 habi- tants. Voici un tableau de sa mortalité : Années. Décès. Années. Décès. Années. Décès. 1730 227 1741 345 1745 420 1738 250 1742 409 1748 672 1739 350 1743 425 1749 758 1740 290 1744 410 1750 716 Les registres des naissances n'étant pas régulièrement tenus dans toutes les églises, ces tables de mortalité perdent beaucoup de leur intérêt, vu qu'il est impossi- ble de constater par leur moyen le surplus des naissan- ces sur les décès. D'ailleurs, la population s'accroissait chaque année par l'arrivée d'un grand nombre d'im- migrants. En 1749, la ville comprenait 2,076 maisons. 11 n'y avait pas une seule manufacture de drap. Tous les habitants jouissaient de la plus entière liberté de religion. Il suffisait de croire en Dieu pour avoir le droit d'exercer tous les privilèges du citoyen, B L8 SEPTEMBRE 1748. et chaque citoyen pouvait se dire avec orgueil roi et maître dans sa maison. Kalm se livre à des considérations philosophiques sur les progrès rapides de cette ville, qui ne comptait alors que 67 ans d'existence, et qui pouvait déjà rivaliser en richesse et en population avec les plus anciennes villes de plusieurs royaumes d'Europe. 7 Septembre. — Notre auteur donne le récit circons" tancié d'un cas de fascination : celui d'un cat-bird (mus- cicapa carolinensis, Linn.) charmé par un grand jserpent noir. Il ne fut pas témoin du fait lui-même ; mais il le tient d'une personne respectable qu'il nomme, un M. Peter Cork, marchand de la ville. (1) Le Platane de Virginie, Platanus Occidentalis, Linn. (Platan&es), était très-commun sur les bords de la Delaware. Les Indiens font avec l'écorce de cet arbre des boîtes, des seaux et autres ustensiles de ménage* Il est, aussi, indigène du Canada. 18 Septembre. — Kalm, ce jour-là, fit une petite ex- cursion de quatre milles à travers bois pour se rendre, tout en herborisant, à la maison de campagne de John Bartram. (2) Il était accompagné du sculpteur Hesse- (1) Le nom de Museicapa ne peut convenir à l'uiseau appelé cat-bird par les Anglais; c'est une grive, la grive moqueuse, qui imite le cri du chat [Tardus mimus felivoco), et qui, bien loin de se laisser fasciner par le serpent noir [colubr conslriclor), lui fait une guerre acharnée. L'oiseau dont M. Peter Gock a raconté à Kalm la triste et lamentable histoire était probablement un gobe-monches, Muscicipa. (M.) I] Bartram, John, botaniste et voyageur né en Pensylvanie en 1701. 1! a publié: Voyage de la Pensylvanie à Onondago, Oswego et au lac Ontario, Londres, 1751, in 8°. Son fils, William, a aussi publié un voyage (Philadelphie, 1791, in 8°, traduit en Français, 1799, 2 vols, in 8° ) où Ton trouve de curieux; détails d'Histoire Naturelle. Il est l'auteur aussi d'un tableau très complet d'ornithologie américaine 'M.) PHILADELPHIE. 19 lius, déjà nommé, et de son fidèle Yungstrœm. Comme nos botanistes passaient près d'un Persimon ou Plaque- mier de Virginie — Diospyros Virginiana, Linn. (Ebéna- cées) — tout chargé de ses pommes, qui ont la grosseur et la couleur d'une petite orange, Yungstrœm, sur le conseil perfide d'Hesselius et tenté d'ailleurs par leur mine appétissante, en cueillit une et la porta à sa bou- che ; mais il l'en retira de suite et la jeta à terre avec dégoût, apprenant à ses dépens que ce fruit n'est man- geable, même lorsqu'il est mûr, qu'après avoir passé par la gelée. Voici une liste des arbres qui croissent spontanément dans les bois près de Philadelphie : 1 — Quercus alba, le chêne blanc (1), while oak (Querci" nées ou Cupulifères) — dans les terrains riches. 2 — Quercus nigra, ou chêne noir, blackoak. 3 — Quercus Hispanica, ou chêne d'Espagne, Spanish oak, variété du précédent 4 — Juglans alba, caryer on noyer blanc, hickory (Ju- glandées), dont il y a trois ou quatre variétés. 5 — Rubus occidenlalis, ou framboisier (2) noir d'Améri- que, blackberry shrub (Rosacées). i) — Acer ruWum, érable à fleurs rouges, maple tree, notre plane (Acerinées) — dans les lieux humides. 7 —Rhus glabra, ou sumac glabre, vinaigrier, smoolh leaved sumach (Anacardiacées) — dans les anciens champs de maïs dont la culture est abandonnée. (1) Le chêne blanc est appelé par cerlains auteurs chêne de Qvéb c, bien qu'il soit un pou rare dans le Bas-Canada d'après M. l'abbé Pro. vancher. (M.) (2) Du hollandais braambezie, fruit de la ronce. (M.) 20 SEPTEMBRE 1748. 8. — Vitis labrusca et vulpina, vigne lambrusque, raisin de renard (Ampelidées), vignes de différentes es- pèces. !> — Sambucus Canadensis, ou sureau blanc d'Amérique. elder tree (Caprifoliacées) — le long des haies. 10 — Quercus phellos, chêne-saule ou chêne des marais, swamp oak. 11 — Azalea lutea, ou chèvrefeuille à tiges droites d'Amé- rique (1), honey-suckle — lieux secs dans les bois. 12 — Cratœgus crus galti, aubépine, ergot-de-coq, l'azéro- lier de Virginie, notre senellier (Pomacées) — dans les bois. 13 — Vaccinium airelle ou raisin des bois, bluet, Whorile berry (Vacciniées). 14 — Quercus prinus, chêne châtaignier, chesnut oak — dans un sol riche. 15 — Cornus florida, ou cornouiller à cerises, cornelian cherry (Cornées) — dans tous les terrains. 16 — Liriodendron tulipifera, tulipier de Virginie, tulip tree (Magnoliacées) — dans tous les terrains. (2) 17 — Prunus Virginiana, ou cerisier à grappes, wild cherry tree (Drupacées). 18 — Vaccinium autre espèce d'airelle frutescente, frutex ivhortleberry - -dans les terrains riches. (1) Le chèvrefeuille (Lonicera) appartient à la famille des caprifoliacées. tandis que l'Azalée appartient à celle des éricacées. C'est donc mal_ à-propos qu'on a donné à cet arbuste le nom de chèvrefeuille d'Ame, rique. (M.) (2) Introduit en Eii'ope fiai- l'amiral de la GalissonnKi-e en 1732. (M PHILADELPHIE. 21 19 — Prinos verticiltatus, apalanche vert, winterbtrry tree (Ilicinées)— -lieux humides. 20— Plaôanu s occidentalis, Platane de Virginie, water- beech (Platanées). 21— Nyssa aquatica, tupelo tree (Nyssacées) (1) — dans les champs et sur les montagnes. 22 — Liquidambar Slyraeiflua, copal d'Amérique, arbre à suc résineux, sweet gum tree (Balsamifluées) — près des ruisseaux. 23 — Betula alnus, aune commun, aider, variété de l'aune suédois et un simple arbrisseau en Pensylvanie (Bétulacées). 24 — Fagus castanea, châtaignier, chesnut tree (Cupuli- fùres ou Quercinées) — champs et buissons. 25 — -Juglans nigra, noyer noir, black walnut tree (Juglan- dées) — -aux mêmes lieux que le précédent. 26 — Rhus radicaus, sumac grimpant, variété de l'herbe-à- la-puce, twining sumach (Anacardiacées). 27 — Acer negundo ou Negundo fraxinifolium, Négondo ou érable à feuilles de frêne, ash-leaved maple (Ace- rinées) — terrains humides, marécageux. 28 — Prunus domeslica, le prunier domestique, wild plum tree (Drupacées). (1) Dr. Linné no mentionne qu'une espace de Nyssa, la Nyssa aquatica, M. Kalm ne donne pas le nom de l'espèce; mais si celle qu'il a notée n'esl pas une espèce différente, elle doit au moins en être une variété, puisqu'il dit qu'elle croil surlesmontignrs, tandis que la Nyssa aquolica croit dans l'eau. F. C'est peut-être la Nyss.a Villosa-^Twpelo Velu — grand et bel arbre de la Virginie. M 22 SEPTEMBRE 1748. 29 — Ulmus americana, orme blanc, white elm (Ulmacôes). 30 — Prunus spinosa, autre espèce de prunier sauvage, sloe shrub— terrains bas. 31 — Laurus sassafras, le sassafras (Laurinées) — terrains meubles mélangés de sable — arbrisseau au Canada. 32 — Ribes nigrum, gadellier noir, currant tree, avec les fruits duquel on fait le cassis (Ribésiacées ou Grossulariées). 33 — Fraxinus excelsior, frêne commun, ash tree (Oléinées) — terrains bas. 34 — Smi/ax lanrifoUa. smilace (Smilacinées) — dans les bois. 35 — Kalmia latifolia (à larges feuilles), le laurier nain d'Amérique, nommé d'après Kalm lui-même dwarf laurel (Ericacées) — sur le côté nord des montagnes. 36 — Morus rubra, mûrier rouge, mulberry tree (Morées) — dans les champs, sur les coteaux et dans le voisi- nage des maisons. 37— Rhus vernix, le sumac vénéneux, herbe-à-la-puce. poisonous sumach (Anacardiacées) — endroits hu- mides. 38 — Quercus rubra, chêne rouge, red oak (Quercinées ou Cupulifères). 39 — Hamamelis Virginica, hamamelide de Virginie, cou- drier des sorcières, witch hazel (Hamamelidées). 40 — Dyospiros Virginiana, plaqueminier de Virginie, , persimon (Ebénacées). PHILADELPHIE. 23 41 — Pyrus coronaria, pommier odorant de Virginie à petits fruits couronnés, anchor tree, crab-apple, pom- me de Sibérie (Pomacées). 42 — Juniperus Virginiana, cèdre rouge, red Juniper (Co- nifères)— dans un sol pauvre et sec. 43 — Laurus œstivalis, laurier-benjoin, spice-wood (Lauri- nées) — terrains humides. / 44 — Carpinus oslrya, Ostryer, bois-de-fer, horn-beam (Cu- pulifères)— terrains riches. 45 — Carpinus betuius, charme commun,' horn-beam (Cu- pulifères) — mêmes lieux que le précédent. 46 — Fagus sylvatica, hêtre commun, beech (Cupulifères) — terrains riches. 47 — Jugians espèce de noyer qui croît sur les co- teaux près des rivières (1), appelé par les Suédois Buiternustrœ (Juglandees) . 48. — Pi nus americana, sapin de la Pensylvanie, Pensyl- vaman fir-iree (Conifères) — sur le penchant nord des montagnes et dans les vallées (2). 49. — Betula lenia, merisier rouge, a species ofbirch (Bétu- lacées) — sur les bords des rivières. 50 — Cephalantus occidentalis, céphalante occidental, bois- bouton, bultqn-wood (Ilubiacées)- -terrains- humides. 51 — Pinus lœda, pin à l'encens, New Jersey fir-tree (Co- nifères)— terrains sablonneux. (1) Quere — Es!-ce le Jugians baccàia de Linné ? F. (2) Otte espèce n'esl pas mentionnée par Linnô dans Spec. plant. F. 24 SEPTEMBRE 1748. 52 — Cercis Canaderisis, arbre de Judas, gainier du Canada, bouton-rouge, sallad tree (Césalpiniées) — terrains riches, 53 — Robinia pseudo-acacia, Robinier faux-acacia, acacia blanc ou commun, locust tree (Papilionacées)—- dans les champs. 54 — Magnolia glauca, magnolier, arbre des castors (Magnoliacées)— terrains marécageux. 55 — Tilia americana, tilleul d'Amérique, bois-blanc, lime- tree (Tiliacées) — terrains riches. 56- — Glediishia triacanthos, févier ou acacia à trois épines, carouge à miel, honey locust tree (Césalpiniées)— terrains riches. 57 — Celtis occidentalis, micocoulier de Virginie, nettle-tree (Celtidées) — champs. 58 — Anona muricata, anone, corossol, cachimentier, eus- tard-apple (Anonacées) — dans un sol fertile. Par une journée splendide, Kalm se donna la jouis- sance d'aller rendre visite à plusieurs riches suédois établis à la campagne, dans les environs de Philadel- phie, entre autres à un nommé André Ilambo. Il fait une description enthousiaste des beautés de la nature, des fleurs, des fruits, du feuillage encore vert des arbres, et du chant des oiseaux aux plumages variés et brillants. Une abondante rosée étant tombée le matin, il remarqua que les feuilles des plantes en étaient toutes imprégnées sur les deux côtés, à l'exception de celles de la molène commune —Bouillon-blanc, Verbascum Thapsus (Scrofularinées). " Chaque paysan," dit -il, " a " un verger près de sa maison Les pêches, si rares en PHILADELPHIE 2.5 " Europe, et surtout en Suède, où il n'y a que les riches " qui en connaissent le goût, sont si communes ici qu'on " en donne souvent anx pourceaux." A sa grande sur- prise, un de ses compagnons enjamba par-dessus une clôture, et alla cueillir des fruits délicieux qu'il lui apporta, sans que les gens de la ferme, qui étaient pré- sents, prissent seulement la peine de le regarder faire. " Un paysan suédois ne se laisserait pas enlever un navet avec autant d'indifférence." Il décrit ensuite la manière de faire sécher les poires pour l'hiver. Le fruit de l'abel-mosch ou ambrette, plante de la famille des malvacées, à laquelle Kalm donne le nom de hibiscus esculentis, et que Miller, dans son Diction- naire du Jardinier, a appelée Keimia Indica, coupé vert, fait une soupe excellente dont raffolent surtout les nègres (1). Avec le fruit du poivre de Guinée, capsicum annuum, piment (Solanées),on prépare des marinades et des sauces pour la viande et le poisson frit. Les baies du sumac glabre ou vinaigrier, rhus glabra (Anacardiacées), donnent une teinture rouge, et, mises en solution avec les branches mêmes de l'arbuste, une teinture noire. Kalm se livre à une longue dissertation sur le sumac vénéneux, rhvs vernix, appelé herbe-à-la-puce en Ca- nada, et son action délétère sur la peau. Il raconte la triste expérience qu'en a faite son fidèle Yungstrœm. qui fut puni, par une cruelle démangeaison, de son scepticisme à l'égard des propriétés nuisibles de cette plante. ^ (h Les cosses de cette plante, sous le nom d'Okra ou ti'Ochro, font aujourd'hui et depuis longtemps les délices des gourmets Anglo-Indiens. qui s'en servent pour épaissir les soupes, à quoi le riche rnucilage qu'elles n-iifermcnt les rend éminemment propres. M 26 SEPTEMBRE 1748. Il reçut en présent plusieurs échantillons de miné- raux : un morceau de cristal blanc et transparent (1), des pyrites cuboïdes ou de Browallius (2) (marcas- sites) (3), des morceaux d'un marbre blanc à mouche- tures de couleur gris-pâle ou bleuâtre, dont il y avait une carrière à quelques milles de Philadelphie, des fragments de pierre de Moscovie (4), de pierre à chaux de couleur gris-pâle d'une pâte fine et compacte (5). On n'avait pas encore trouvé à cette époque les mines de houille qui font aujourd'hui la richesse de la Pen- sylvanie. Voici ce que dit Kalm à ce sujet : " On n'a " pas encore découvert de houille en Pensylvanie ; mais " des gens prétendent en avoir vu plus haut dans le " pays habité par les natifs. Beaucoup de personnes^ " cependant, s'accordent à penser qu'il s'en rencon- '; tre en grande quantité plus au Nord, près du Cap " Breton" (6). (1) Nilrum Grysiallus Montant, Linn. Syst. nat., 3 p. 84. Crysiallus hexagona pellucida non colorata. Wallerius' s Mineralogy p. 100. Grysial- lus Montana, cristal incolore. Forster's Introd. to Mineralogy, p. 13. yï) Evoque d'Abo en Finlande, naturali te. M. (3) Pyrites crystilUnur,, Linn. Syst. nat. 3, p. 1 13. Marchasilaè hexaL jricae tesselares. Wallerius's Mineralogy, p. 211. Marcasilae vel cryslalli pyrilacei, marcasites. Forster's Introd. lo Mineralogy, p. 39. (4) Mica membranacea, Linn. Syst. nat. 3, p. 58. Mica membranacea pellucidissima flexilis alba. Wall. Min , p. 120. Verre.de Russie, verre de Moscovie, Isingiass, vilrum rullunicum. vilrum Mariât. Forster's Introd. to Vin., p. 18. (")) Marmor rude, Linn. Syst. nat. 3, p. 4L Calcareus parliculis scintWantibus. Wall, Min., p. 39. Calcareus scintillant, pierre à chaux étincelante. Forster's Introd. to Min., p. 9. (6) Otte opinion a été confirmée depuis que le Gap Breton est entre les mains des Anglais, et on rapporte que les lits de houille courent à travers toute l'étendue de l'île, et qu'il y en a même qui remontent jusqu'au bord «le la mer, de sorte que l'île produira d'immenses richesses houillères, lorsque le gouvernement jugera à propos de les livrer à l'exploitation pour le bénéfice de la nation. F, GERMANTOWN, 27 Les dames faisaient du vin avec les fruits du gadellier commun et du framboisier noir. " Il est inutile," remar- que Kalm, " de décrire la manière de faire le vin de gadelles, parce qu'en Suède cet art est porté à une plus grande perfection que dans l'Amérique Septen- trionale." Le savant botaniste ne peut dire si le troène commun. Ligustrum vulgare, Linn., Common Privet (Oléinées), qui se rencontre si fréquemment dans les bois et les taillis, est indigène, ou s'il provient d'individus importés d'An- gleterre, et dont les graines auraient été dispersées ça et là par les oiseaux. Les clôtures étaient généralement en perches et en planches. Mais il y avait déjà à cette époque des fermiers économes qui, pour ménager le bois en prévision de sa rareté future, utilisaient le troène commun pour en faire des haies vives. Le 21 Septembre, Kalm lit à cheval une course agréable, en compagnie de Peter Cock, qui le conduisit à sa maison de campagne à quelques milles au nord-ouest de Philadelphie, près de G-ermantown, petite ville ma- nufacturière habitée en grande partie par des Allemands très-industrieux. En chemin, il remarqua que les arbres des forêts étaient tous à feuilles décidues. Il ne vit pas un seul pin ni sapin, mais beaucoup de noyers, de châtai- gniers, de robiniers ou faux-acacias. De temps en temps, dans les éclaircies des bois, un joli cottage en pierre ou en brique avec parterre et allée plantée d'arbres sut le devant, jardin et verger en arrière, réjouissait le regard de nos chevaucheurs. Les maisons de Grermantown étaient en pierre, à deux ou trois étages, à toits plats entourés d'une balustrade, et à croisées garnies de volets donnant sur des balcons. Un jardin était contigu à chaque maison. 1* SEPTEMBRE 1748 Le lendemain matin, Kalm fit une excursion à travers la campagne avec son hôte. D'après la description des clôtures des champs, elles devaient être construites comme les nôtres. Le noyer était regardé comme le meilleur combustible. Il se vendait à Philadelphie 18 chelins la corde de huit pieds sur quatre, et le chêne 12 chelins. On prévoyait déjà la rareté du bois. Les cultivateurs s'adonnaient surtout à la culture du seigle et du maïs. Les femmes faisaient du vin de framboises noires et de cerises et de Feau»de«vie de pêches et de pommes. Le phytolaque commun ou raisin d'Amérique, phylo* laça decandra (Phytolaccées) se rencontrait partout près des fermes et sur le bord des chemins. On tirait des racines de cette plante une belle teinture rouge (1). Il y avait plusieurs espèces d'écureuils (2) ; l'écureuil de terre ou sciurus striatus de Linné, que l'on garde en cage, mais qui ne s'apprivoise jamais entièrement, et l'écureuil cendré, sciurus cinereus, qui est plus grand. Dans le Marylan'd, ces petits animaux s'étaient tellement multipliés qu'il fut décrété que chaque habitant serait tenu d'apporter au Surintendant quatre têtes d'écureuils par année. Dans les autres provinces, on en donnait deux deniers la pièce. L'écureuil fait la principale nourriture du serpent à sonnettes (3). Comment un reptile peut-il s'emparer d'un animal aussi agile ? C'est une question que le vulgaire a bientôt résolue en s' appuyant sur l'hypothèse de la fascination. Nous reviendrons sur ce sujet. (1) Le jus du bois du Phytolique sert à colorer les vins. M. (2) Mammifères de l'ordre des Rongeurs, type de la famille des S in- riens. M. (3) CrotaluB honidus Ophidia) M &ÈRMÂNTÔWN. 29 Le raton, appelé par Linné Ursus cauda elongalaet Ursus lotor (1) et raccoon par les Anglais, est souvent, aussi, dit-on, la proie des serpents. La chair de ce plantigrade, très commun alors en Pensylvanie, est réputée excel- lente ; cet animal est un peu plus gros que le renard, et comme lui grand croqueur de poulets. On lui fait la chasse avec des chiens. Les organes du mâle ren- ferment un os dont les fumeurs se servent pour fouler le tabac dans la pipe. Le poil du raton est beaucoup utilisé par les chapeliers, et sa queue est trôs-estimée depuis que la mode des boas a été introduite (2). On a trouvé de grandes quantités d'écaillés d'huitres près de la rivière Potomac et même à une distance considérable du rivage de la mer, des montagnes entières qui en étaient composées. Kalmfait un grand éloge des Sauvages de l'Amérique, de leurs bonnes qualités naturelles, de leur hospitalité, de leur respect pour la foi jurée. Deux ans auparavant, un colporteur avait été secrètement assassiné dans une bourgade où il s'était rendu pour débiter ses marchan- dises. Le coupable se croyait bien sûr de l'impunité. Mais un jour il commit une imprudence qui le fit dé- couvrir comme l'auteur du meurtre ; tout de suite, les membres de sa tribu s'emparèrent de sa personne, lui lièrent les pieds et les mains, et allèrent le livrer au gou- verneur pour qu'il subît la peine de son crime, suivant le cours de la loi anglaise. Il fut pendu à Philadelphie. Kalm parle aussi des talents naturels des Indiens, talents dont ils ont donné tant de preuves dans leurs traités avec les gouverneurs anglais. (1) Procyon*lotor, laveur, û cause de son habitudo singulière dr ne rien manger qu'il ne l'ait fait préalablement tremper dans l'eau. M. (1) On a fait aussi, avec la peau et la queue du raton, des espèces de bonnets à poils ; c'était un des ornements distinelifs des jacobins de 179:5. [Bouillet, Dict des Sciences], M. 30 SEPTEMBRE 1748. Pour montrer aussi qu'ils ne manquent pas dans L'occasion d'esprit de répartie, il cite le fait suivant : Un jour, un indien à l'air vénérable entra dans une auberge où un certain nombre de blancs étaient à eau- ser, le verre en main. Invité à plusieurs reprises à se joindre à leurs libations, il ne tarda pas à se sentir la tête échauffée par l'eau-de-vie, et sortant de la réserve ordinaire aux gens de sa race, il se vanta tout-à-coup de pouvoir lire et écrire en anglais. Un sceptique, pour mettre son érudition à l'épreuve, lui demanda alors s'il savait le nom du premier homme qui ait été circoncis. Le sauvage interpellé répondit sans hésiter : " ce fut le père Abraham ". Après quoi, il réclama le droit de poser une question à son interlocuteur ; se tournant vers lui, il lui dit : " Sais-tu qui fut le premier quaker ?" La réponse se faisant attendre : — " Eh bien ! je vais te le nommer," reprit le vieil indien,'' " ce fut Mardochôe, qui refusa d'ôter son chapeau devant Aman." Les rieurs passèrent du côté du sauvage. Kalm s'est laissé dire que le pays était habité autre- Ibis par une race de géants, et à l'appui de cette asser- tion, on lui a rapporté que quelques années auparavant des ossements humains d'une grandeur prodigieuse furent trouvés dans une tombe, un tibia et un fémur, longs de quatorze pieds chacun, et des dents d'une grosseur à l'avenant. L'une d'elles fut envoyée à un naturaliste de Hambourg. D'après une vieille légende, que les Indiens se transmettent de père en fils depuis un grand nombre de générations, il y aurait eu autre- fois dans ce voisinage un géant, qui, moyennant une légère rétribution, portait, comme St. Christophe, sur son dos, tous ceux qui voulaient passer la rivière. Trois récoltes succossives de maïs épuisaient corn- GEËMANTOWN. 81 plôtement un champ ; on l'abandonnait alors pour en prendre un autre. Les bestiaux passaient l'hiver dehors. Tous les animaux des fermes ont été originairement importés d'Europe. Les Indiens n'en ont jamais eu. Mais on avait remarqué que le bétail dégénérait petit à petit. Kalm remarque que les enfants en Amérique sont plus précoces qu'en Europe, et que leur développement intellectuel est si rapide qu'aucune question ne peut les embarrasser : ils ont réponse à tout. En revanche, l'homme y vit moins longtemps que dans le Vieux- Monde. Et même on a observé que la longévité de l'européen qui est venu s'établir en Amérique, dépasse celle des enfants qu'il y a procrées. Comme l'auteur revient sur ce sujet dans le récit de son séjour en Ca- nada, nous renvoyons le lecteur à notre traduction du 3e volume. Une citation seulement : " Dans la dernière guerre," dit Kalm, " il a été claire- " ment constaté que ces nouveaux américains étaient " bien moins robustes, moins endurcis à la fatigue que " les Européens ; dans les expéditions, les sièges, les " longs voyages de mer, ils moururent en grand nom- " bre." La femme cesse d'avoir des enfants à quarante ou quarante-cinq, et, bien souvent, à trente ans. D'après le naturaliste suédois, la même faiblesse rela- tive qu'il a constatée dans le règne animal se retrouve dans le règne végétal. Un vaisseau construit avec du bois d'Amérique n'a pas autant de solidité ni de force qu'un navire européen. Le 23 Septembre, Kalm, étant de retour à Fhiladel- 32 SEPTEMBRE 1748. phie, plusieurs amateurs de la science lui demandèrent s'il pouvait expliquer pourquoi la plupart des végétaux de l'Amérique du Nord, transplantés en Europe, y nW rissent si tard et ne donnent pas de fruits mûrs avant les gelées ? Les hivers en Pensylvanie, à New-York, dans la Nouvelle-Angleterre et en Canada, sont, cepen- dant, tout aussi sévères que les hivers de la Suède et beaucoup plus rigoureux que ceux de l'Angleterre. Kalm ne répond pas directement à la question ; mais il note quelques observations qu'il a laites sur le climat et les plantes de l'Amérique Septentrionale, laissant à ses lecteurs la liberté d'en déduire une conclusion. lo. Il admet que les hivers en Pensylvanie, et à plus forte raison, ceux des pays situés plus au nord, sont aussi sévères que les hivers de la Suède et plus rigoureux qu'en Angleterre et dans le midi de l'Europe. 2o. La froide saison en Pensylvanie est glaciale ; mais elle n'est pas d'aussi longue durée qu'en Suède. 3o. La chaleur dans la Pensylvanie, en été, est exces- sive et sans intermission. Il est vrai, dit Kalm, que j'ai vu le thermomètre marquer près de trente degrés au- dessus du point de congélation à Abo. Mais cela arrive une fois tous les deux ou trois ans, tandis qu'à Philadelphie,à New-York,à Albany et surtout au Canada, la température reste au même degré pendant deux ou trois mois consécutifs. Il est certain qu'en Pensylvanie, la plus grande partie du mois d'Avril, le mois de Mai et tous les mois suivants jusqu'en Octobre sont aussi chauds que les mois de Juin et de Juillet en Suède. 4o. Tout le mois de Septembre et la moitié, sinon la totalité du mois d'Octobre forment la belle saison en Pensylvanie ; car les mois précédents sont trop chauds. PHILADELPHIE, 33 La plus grande partie des plantes n'y fleurissent qu'en Septembre, et beaucoup ne commencent même à ouvrir leurs boutons qu'à la fin de ce mois ; et cependant ces plantes, qui sont venues si lentement, ont atteint leur pleine maturité avant le milieu d'Octobre. " Mais," dit Kalm, "je ne puis m'expliquer pourquoi elles s'épanouis- sent si tard en automne. Pourquoi la centaurée jacée (Composées), la gentiane, l'amarella et le centaurion de Linné, ou sabbatie (Grentianées), et la verge d'or commu- ne (Composées), fleurissent-ils avant la fin de l'été ? Et pourquoi la belle hépatique ou anémone hepatica (Henon* culacées), la violette sauvage ou de Mars (Violariées), le daphné mézéréon (1) (thymélées) viennent-ils si tôt à maturité le printemps ? C'est le secret du Créateur tout-puissant." 5. Il y a cependant quelques plantes indigènes de la Pensylvanie dont les graines ne mûrissent pas avant les premiers froids, comme certaines espèces de gentiane et d'astôres (Composées) ;. mais, ici encore, il faut admirer la sagesse du Créateur, qui a tout disposé avec ordre ; en effet, presque toutes les plantes d'automne sont vi- vaces, ou renaissent chaque année de rejetons de la même racine. Kalm pense que la tardiveté de ces plantes peut s'ex- pliquer par une cause naturelle. Avant la découverte de l'Amérique, tout ce continent ne formait pour ainsi dire qu'une épaisse forêt (2), et à l'exception des grands arbres et des plantes marines, la plupart des végétaux pendant plus de mille ans ont crû à l'ombre ; ils doivent, par conséquent, appartenir à cette espèce de plantes qui ne se plaisent que dans les bois et dans les lieux peu (1) Vide Hackkiyfs Collect. Voy. III. 34G (2) Bois-joli ou B »is-gentil, M. C 34 SEPTEMBRE 1748. exposés à l'ardeur des rayons du soleil. En outre, le sol, au printemps, était couvert par le lit épais des feuil- les tombées en automne, qui retardait la germination des graines tant qu'il n'était pas converti en terreau. Ne pourrait-on pas dire qu'à la longue les plantes ont fini par prendre ïhabilude de venir tard, habitude dont elles ne se corrigeront peut-être qu'après des siècles .de- cuit ure ? 25 Septembre.— Kalm lit, ce jour-là, une seeonde visite à John Bartram, dont il vante les grandes con- naissances en philosophie et en histoire naturelle. " On dirait que cet homme est né avec un génie tout particu- lier pour les sciences. Il s'est instruit tout seul, et a appris le latin sans avoir jamais été à l'école. Pendant plusieurs années successives, il a fait des excursions dans différentes parties de l'Amérique Septentrionale, à la recherche de plantes rares et inconnues jusqu'alors, qu'il cultive aujourd'hui lui-même dans son jardin bo- tanique, et dont il a expédié des graines et des racines en Europe." Bartram, était, en effet, un botaniste distingué, et le monde savant lui est redevable de la découverte de beaucoup de végétaux utiles et précieux ; mais il n'ai- mait pas à écrire. A la fin, à la sollicitation de ses amis de Londres, il se décida à publier le récit d'une de ses excursions (1) ; mais son livre parut si tard, qu'il se trouva ne contenir que peu d'observations nouvelles. Les progrès de la science l'avaient devancé. Kalm reconnaît tenir de lui un bon nombre d'informations, " car il possédait le grand don de pouvoir communiquer " aux autres tout ce qu'il savait. Aussi, devrai- je', dans la (I) Voyage de la Pensyh anie à Onondago, etc., Londres, 1751, in 8o. M. PHILADELPHIE. 35 " suite de cet ouvrage, citer ce monsieur souvent ; je '• ne me pardonnerais jamais d'avoir omis le nom d'un " premier inventeur et réclamé comme le fruit de mes " propres découvertes ce que je tiens d'une autre per- " sonne." Les moules, muscle-shells ou mytili-anatini (1) étaient très-recherchées par les gourmets de Philadelphie. La marée en apportait un grand nombre sur les bords de la rivière, et les petits garçons allaient chaque jour en faire d'amples provisions pour les vendre en ville. L'Azérolier de Virginie à fruits rouges ou le Crataegus crus galli de Linné était employé à défaut d'aubépine pour faire des haies ; mais il ne convient guère à cet usage, parce qu'il perd ses feuilles dès la fin de Septem- bre. Chacune de ses baies contient deux noyaux pier* reux ; ses épines sont longues de deux à trois pouces, et très-pointues. Bartram prétendait que le chêne d'Amérique pourrit plus vite que celui d'Europe, et que deux espèces de bois entraient dans la construction des vaisseaux qui na- viguaient sur la rivière Hudson, le chêne noir, pour la quille, et le cèdre rouge, Juniper us Virginiana, pour la carène ou cette partie du navire qui est tantôt dans l'eau et tantôt au-dessus de l'eau, et partant plus sujette à pourrir. Toutes les observations de Kalm sur le serpent-à- sonnettes sont insérées dans les mémoires de l'Académie des Sciences de Stockholm, 1752, p. 316, et 1753, p. 54 ; il y renvoie le lecteur. Les ours étaient très-nombreux dans le pays et com- mettaient beaucoup de déprédations. A propos de ces (1) Mollusqu s conchifères. M. 36 SEPTEMBRE 1748. plantigrades, Kalm fait honneur à Bar tram d'une opinion assez peu scientifique, et que le traducteur anglais traite avec raison d'erreur vulgaire. D'après le natura- liste américain, lorsqu'un ours (1) fait sa proie d'une vache, il s'y prend pour la tuer de la manière qui suit : Il lui ouvre le côté d'un coup de dent, introduit son museau dans la plaie béante, et souffle la pauvre vache, qui enfle jusqu'à ce qu'elle en crève. Les Indiens prétendaient que le grand plantin, planta- go major (Plantaginées), est originaire d'Europe, et don- naient à cette plante le nom de pied d'anglais, parce- que, disaient-ils, elle semble naître sous les pas des Européens, Kalm pense que l'ansérine, chenopodium album ou chou-gras, goose-foot (Chenopodées), vient de graines importées d'Europe, ainsi que la tanaisie, tanacetum uulgare (Composées), et la verveine commune à rieurs bleues, verbena ifficinalis (Verbénacées), parce que ces plantes ne se trouvent que dans le voisinage des maisons et des fermes, Les feuilles de la casse, cassia chamaecrista (Césalpi- niées), comme celles de la sensitive ou mimosa (Mimo- sées) se contractent au toucher. Le cri des corneilles ressemble à celui du freux, le corvus frugilegus de Linné. Bartram rapportait avoir dans ses voyages découvert de grands trous dans les montagnes, sur les berges des rivières. D'après la description qu'il donnait de ces cavilés, Kalm pense que ce devaient être des chaudières ou marmites de géants, sorte de curiosité naturelle» assez (1) Ursus americanus M, PHILADELPHIE. 37 commune en Suède, et sur laquelle il avait fait une dis- sertation devant l'Académie des Sciences de Stockholm. Bartram avait lui-même écrit à la Société Royale de Londres à ce sujet. Dans les lettres qu'il adressa à ce corps savant, il combattit l'opinion que ces cavités fussent l'ouvrage des sauvages, qui les auraient creusées en temps de guerre, pour mettre leurs provisions en sû- reté, et expliqua leur origine comme suit : Lorsque la glace se forme, il s'y loge beaucoup de cailloux. Au printemps, à la fonte des neiges, l'eau des rivières s'élève bien au-dessus de son niveau ordinaire, et les morceaux de glace flottant à sa surface, laissent échapper les cailloux qu'ils renferment depuis l'automne, Ces cailloux tombent sur la berge rocheuse des rivières, et sont entraînés par le courant dans les fentes ou cre- vasses qui s'y trouvent. Une fois là, ils sont continuel- lement agités par l'eau qui tourbillonne autour d'eux et leur imprime un mouvement giratoire qui, à la longue, finit par creuser le roc. Après qu'un premier caillou a fait son œuvre, qu'il a élargi sa prison et usé ses aspérités à l'arrondir, il est rejoint par d'autres fragments de quartz ou de silex dont l'action continue, unie à celle du sable et des vagues, agrandit sans cesse la marmite du géant. Telle était l'opinion de M. Bartram sur l'ori- gine de ces cavités, et elle a reçu l'approbation de l'Aca- mie Royale des Sciences, à Londres (1). Kalm démontre qu'il avait émis la même opinion dès 1743, et renvoie à un mémoire qu'il a adressé à l'Académie Royale des Sciences de Suède. " Mais," dit-il, " il est très-douteux " que toutes les cavités de cette sorte que l'on rencontre " dans les montagnes aient la même origine." (1) Pour savoir quel degré de créance il faut donner à cettn approba- tion de la Société Royale, consultez les avis insérés en tête de chaque nouveau volumn dos Transactions Philosophiques. P. 38 .SEPTEMBRE 1Ï48. Comme plusieurs espèces de mûriers croissent à l'état sauvage dans les forêts de l'Amérique, Kalm déplorait devant Bartram l'absence de fabriques de soie ; celui-ci lui répondit que le principal obstacle à leur établisse- ment était le haut prix de la main-d'œuvre, le salaire des hommes étant de dix-huit pence à trois chelins par jour, et celui des femmes en proportion. Un gouver- neur du Connecticut a réussi cependant à acclimater des chenilles du bombyx mori (1), qui ont filé assez de soie pour le vêtir lui et sa famille. Bartram a donné la même raison à Kalm lorsque ce dernier lui a demandé pourquoi, dans un pays couvert de vignes sauvages comme l'était alors la Pensylvanie, ou ne s'adonnait pas à la vinification. Mais le naturaliste suédois, cette fois, se permet de différer d'opinion d'avec son savant interlocuteur, et dit que la véritable cause de l'absence de vignobles, c'est que la plupart des raisins d'Amérique ne produisent qu'un vin sûr et acre. Les Indiens regardent comme un mets succulent le spadice du gouet, arum virginicum (aroïdées), bouilli avec ses fruits. Bartram envoya un pied de sarothra gentianoïdes, millepertuis-en-balai (Hypéricinées) au Dr. Dillenius, (2) botaniste allemand, qui n'a su dans quelle catégorie ranger cette plante. Elle fait un excellent vulnéraire. Un mélèse, Larix americana (Conifères) expédié par le même Bartram au Dr. Peter Collinson fut regardé alors comme une si grande curiosité, que Miller en fit une (I) Lépidoptères. M. (2; John James Dillen ou Dillenius, né en 1087, à Darmsladl ut mort professeur à l'Université d'Oxford en 1747. (M i PHILADELPHIE. 39 mention spéciale dans son Dictionnaire Botanique. Kalm ajoute qu'il a vu plus tard que cet arbre était très- commun au Canada. Le pommier (1), d'après Bartram, vient d'Europe ; mais le pêcher (2) est une plante indigène de l' Améri- que. Les Français du Canada assurent que cet arbre fruitier se rencontre à l'état sauvage partout sur les bords du Mississipi. Forster, dans une note, dit que Thomas Heriot, serviteur de Sir Walter Kaleigh, et chargé d'examiner pour lui les productions de l'Amérique Sep- tentrionale, ne fait aucune mention de la pêche ; et il ajoute : " M. du Pratz, qui a publié une excellente rela- " tion de voyage en Louisiane et sur le Mississipi, dit 11 que dès longtemps avant que les Français se fussent " établis dans ces pays, les natifs se procuraient des " pêches dans la colonie anglaise de la Caroline." La grande molène blanche, Verbascum thapsust appelée à tort par les Suédois tabac des sauvages, a plusieurs propriétés médicinales. On l'emploie dans les cas de fièvre, de dyssenterie et pour guérir les plaies faites sur les animaux par la larve de l'œstre (3). Les dames ornaient leurs cheminées en hiver de bou- quets formés de corymbes du gnaphalium margarilaceum^ espèce d'immortelle (Composées), et en général elles aimaient à garnir leurs appartements de fleurs. L'apocyn chanvrin, Apocynum cannabinum) remplaçait le lin et le chanvre pour différents usages. Les femmes fabriquaient divers tissus avec ses fibres. Elles avaient (1) Pyrus malus (Pomac 'es). M. (2) Amygdalus Persica (Drupacér s), M (3) Oestrus (DipUra). M. 40 SEPTEMBRE 1748. sans doute appris l'utilité de cette plante des sauvages qui savaient en tirer parti plusieurs siècles avant l'arri- vée des Européens. Dans une visite que Kalm fit à Bartram, à sa maison de campagne, ce dernier lui exprima l'opinion que la plus grande partie du pays était autrefois couverte par la mer ; il appuyait cette thèse sur plusieurs raisons dé- duites d'observations géologiques, et même sur une tra- dition qui avait cours chez les Indiens, d'après laquelle les Montagnes Bleues auraient été primitivement entou- rées par l'eau. Parmi ces raisons, Kalm a noté les suivantes : lo. En creusant dans les Montagnes Bleues, qui sont à une distance de plus de trois cents milles de la mer, on trouve des écailles d'huitres et des coquilles. Les vallées formées par ces montagnes en contiennent pareillement. 2o. On trouve aussi d'immenses quantités de coquilles pétrifiées dans la pierre à chaux, le silex et le grès dont la masse de ces montagnes est formée. 3o. Dans les provinces de la Virginie et du Maryland, aussi bien qu'à Philadelphie et à New- York, on a décou- vert dans le sein de la terre de vastes dépôts de coquilles parfaitement conservées. 4o. En creusant des puits non-seulement à Philadel- phie, mais en plusieurs autres localités, on a trouvé à une profondeur de dix-huit pieds des arbres, des racines et des feuilles de chêne qui n'étaient pas encore pourris. 5o. Les vallées, dont le sol est d'une richesse extrême et composé de pur terreau, sont généralement traversées PHILADELPHIE. 41 par un ruisseau qui passe au pied d'une montagne, et l'effleure de si près qu'il semble y avoir creusé son lit. " Toutes ces vallées," disait Bartram, " étaient des lacs dont l'eau a fini par se créer un passage à travers les montagnes en les minant par degrés, et la vase qui reposait au fond de ces lacs forme aujourd'hui le sol si fertile des vallées." C'est un accident de cette nature qui ouvrit, entre deux montagnes, cette brèche d'aspect si singulier, à travers laquelle une rivière va reprendre son cours sur les frontières de New- York et de la Pen- sylvanie. Les gens disaient en plaisantant que cette ou- verture avait été faite par le diable un jour qu'il voulait sortir de la patrie des quakers pour aller dans celle des kniekerbockers. 60. Toute l'apparence des Montagnes Bleues montre clairement qu'elles furent autrefois couvertes par la mer. C'est à l'action de l'eau qu'il faut attribuer ces escarpements que l'on remarque sur plusieurs d'entre elles. 7o. Quand on dit aux sauvages que l'on trouve des coquilles sur ces hautes montagnes, et qu'il y a lieu de croire que la mer en baignait le pied autrefois, et même les recouvrait en partie, ils répondent que cette opinion n'est pas nouvelle pour eux, et qu'elle est conforme à leurs traditions. 80. L'eau des rivières et des ruisseaux décroît sensible* ment. Beaucoup de moulins qui étaient en opération soixante ans auparavant, sont maintenant arrêtés parce que le pouvoir d'eau qui les mettait en mouvement est devenu presque nul. La diminution de J'eau est due à la culture et au déboisement du pays. 9o. Les bords de la mer s'agrandissent par l'accumu- lation des sables que les vagues apportent sur la plage 42 SEPTEMBRE 1Î48. Bartram pensait aussi qu'il fallait ne pas perdre de vue un certain autre ordre de faits qui se rattache aux observations précédentes. Les coquilles pétrifiées que Ton trouve sur les montagnes du Nord appartien- nent à des espèces que l'on chercherait en vain dans la mer sous: la même latitude. Qui se serait imaginé qu'on découvrirait des ossements d'éléphants dans la Sibérie î Il est vrai que les carcasses de ces animaux peuvent y avoir été transportées par le déluge universel ; mais tout porte à croire que la terre, avant ce cataclysme, n'occu- pait pas vis-à-vis du soleil la même position qu'aujour- d'hui et que les zones étaient différentes (1). (I) Ce n*est pas seulement en Russie qu'on trouve des ossements et des défenses d'éléphanîs ; on en a découvert ausM dans le canton de Bâle, en Suisse, dans les domaines du marquis de Bareith, en Franconie, et en beaucoup d'autres lieux cités par le célèbre Leibnitz dans ses Protogaea. Dernièrement, près de la Rivière Ohio, on a déterré un grand nombre de squelettes d'éléphants avec leurs défenses; et des molaires tenant encore ferme dans leurs alvéoles ont été envoyées au Musée Britannique. Feu le Dr. Liltleton, évêque de Garlisle, a fait don au Musée de la Société Royale de dents semblables, trouvées au Pérou. Les rivières Chilunga et In- dighirka, en Sibérie, sont renommées pour la grande quantité d'os et de défenses d'éléphants que Ton découvre sur leurs bords, dans un parfait état de conservation ; cela est dû à la rigueur du climat, au peu de durée de la saison d'été et à la presque compète absence de pluie. Ces débris sont si communs en Russie qu'on s'en sert comme de l'ivoire ordinaire; on a extrait du sein de la terre des défenses qui avaient jusqu'à huit pieds do long et pesaient trois cents livres, et des molaires dont le diamètre était de neuf pouces. Mais les mâeheliéres d'éléphants trouvées en Amérique étaient encore plus remarquables en ce qu'elles étaient pourvues de cou rennes à leur sommet, comme celles des animaux carnivores ou des ani- maux qui se nourrissent d'os durs ou de noix ; tandis qu'au contraire, les molaires des éléphants qui maintenant ne se nourrissent que d'herbes et de végétaux mous sont dépourvues de couronnes. Tite-Live, il est vrai, fait une distinction entre les éléphants d'Asie ou indiens et ceux d'Afrique, et remarque que ces derniers sont inférieurs aux premiers sous le rapport de la taille et de la force. Mais on n'a jamais pensé à recher- cher s'il y avait une différence notable entre les deux espèces dans les organes de la mastication. La dissemblance entre les molaires des éle- PHILADELPHIE. 43 Comme l'on pense bien, Bartram ne s'est pas fait faute de montrer sa collection de plantes au naturaliste sué- dois. Kalm a noté les suivantes qui se retrouvent dans les parties septentrionales de l'Europe : 1 — Le bouleau commun, the commun birch free, betula alba (Bétulacées) — sur les coteaux. 2 — Le bouleau nain, betula nana — lieux bas au pied des coteaux. 3 — Le comaret, quinte-feuille rouge des marais, coma- rum palustre (Rosacées) — dans les prairies, entre les les collines, dans le New-Jersey. 4 — La gentiane jaune ou grande gentiane, gentiana lutea (Q-entianées) — dans les champs, près des mon- tagnes. pliants fossiles et celles des éléphants du monde postdiluvien, et le fait que leurs squelettes ont été trouvés dans des pays comme la Sibérie l'Allemagne et l'Amérique, que les proboscidiens n'habitent pas aujour- d'hui, ouvrent un large champ aux conjectures sur la manière dont ils ont été transportés sous ces latitudes. Il est possible que ce déplacement ait été causé par les eaux qu déluge. Il n'est pas contraire à la raison, â l'histoire ou à la révélation de croire que ces squelettes soient les restes d'animaux qui vivaient sur la surface du globe antérieurement à la créa- tion mosaïque, en la considérant seulement comme une nouvelle modifica- tion des créatures qui l'habitaient adaptée à l'état actuel de notre planète, modification qui demeurera jusqu'à ce que les circonstances rendent un autre changement nécessaire. Alors nôtre globe passera par une nouvelle création ou révolution, qui sera marquée par l'apparition sur la terre d'ani- maux d'espèces nouvelles aussi. Tout homme quelque peu philosophe, ou porté au raisonnement, trouvera que ce plan donne une grande idée du Créa- teur, dans l'économie et la conduite de l'univers, et de plus, qu'il est con- forme au sens des paroles d'un écrivain sacré, qui dit : Psaume 104, 29, 30 — " Vous voilez votre visage, ils (les animaux grands et petits) se trou- blent; vous retirez votre souffle, ils expirent et rentrent dans leur pous- sière. Vous envoyez votre esprit, ils renaissent et la face de la terre est renouvelée." Voir les remarques du Dr. Hunter sur les dents fossiles, dans les Transactions Philosophiques, Vol. LVIII F. 44 SEPTEMBKE 1748. 5 — La linnée boréale, linnœa boreaUs (Caprifoliacées), — montagnes du Canada. 6 — Le gale ou piment-royal, myrica gale (Myricées) — lieux humides, dans le voisinage de la Susquehanna. 7 — La potentille frutescente, jiotentilla fruticcsa (Rosa- cées) champs marécageux et prairies basses, entre la rivière Delaware et New-York. 8 — La trientale d'Europe, Iritntalis evropœa (Primula- cées) — sur les coteaux. 9 — Le triglochin aquatique, triglochin maritimum (Jon- cacées)— voisinage des sources minérales dans le * pays des Cinq-Nations. Bartram communiqua à Kalm une lettre qu'il avait reçue de East Jersey, qui contenait le récit de la décou- verte d'une tombe indienne. Dans le mois d'Avril 1744, en creusant une cave, on trouva une grande pierre, et, à quelques pieds au-dessous, des ossements humains et un gâteau de maïs bien conservé, auquel plusieurs personnes goûtèrent par curiosité. Il n'y avait ni lettres ni d'autres caractères visibles sur la pierre. Le maïs ou Zea Mays, Linn. (Graminées) (1), était l'unique céréale que les Indiens s'appliquassent à faire produire à la terre. Ils plantaient aussi une grande quantité de courges de l'espèce cucurbita latior (Squash), qu'ils ont toujours cultivée depuis les âges les plus reculés. Ils semaient des haricots (2) depuis l'arrivée des Européens en Amérique ; mais quant aux pois (3), ils en connaissaient le culture avant qu'aucun étran- ger mît le pied dans leur pays. (1) Tribu des Phalaridée9. M. (2) Phaseolus (Légumineuses.) M. Pisum (Légumineuses.) M. PHILADELPHIE, 40 Certains arbres qui croissent spontanément dans les régions du Sud ne font que végéter dans des pays plus froids où leurs graines sont transportées par les oiseaux. Kalm a remarqué lui-même que le sassafras (Laurinées), qui est un arbre de haute futaie en Pensylvanie, à qua- rante degrés de latitude nord, n'est qu'un arbrisseau à Oswego et au Fort Nicholson, entre les quarante-trois et quarante-quatre degrés de latitude. L'érable à sucre, acer saccharinum (acérinôes), ne parvient pas en Pensylvanie au tiers ou au quart de la hauteur qu'il atteint au Canada, où il est un bel et grand arbre. Les gens du peuple emploient les fleurs du sas- safras en guise de thé ; comme combustible, il n'est pas estimé. Son écorce fait une bonne teinture jaune. On extrait des baies du sassafras une espèce d'huile qui est un remède très-efficace contre les douleurs rhuma- tismales. Kalm cite le cas d'une femme qui souffrait tellement dans un de ses pieds qu'elle ne pouvait plus marcher. Elle se servit de cette huile une première fois, et, s'étant aperçue que ce traitement lui avait ap- porté du soulagement, bien que l'odeur du remède lui eût causé des nausées, elle répéta les frictions trois fois, et fut complètement guérie. Le Picus pilwtus, pic-bois noir à huppe rouge (1) était commun dans les forêts de la Pensylvanie, et même il y hivernait. Le 3 Ooctobre, Kalm passa la rivière Skulkill en bateau traversier, à une lieue en arrière de Philadelphie, et se mit en route pour Wilmington, autrefois appelé Christina par les Suédois, et qui est situé à trente milles au sud-ouest de Philadelphie. Chemin faisant, il observa que la profondeur de la l) Scansores, grimpeurs. M, 46 OCTOBRE 1748. couche arable n'est pas aussi considérable quelle devrait l'être d'après les calculs de quelques savants. " Et, cependant," dit-il, " il est bien certain que la terre n'a pas été remuée ici depuis le déluge" (1). La stramoine ou pomme-épineuse, Dalwa Sframonium (Solanées), se rencontrait fréquemment aux alentours des villages. On la mettait, ainsi que le phytolaque, au rang des herbes nuisibles, et on ne leur connaissait aucune propriété utile. Aujourd'hui, on les considère comme des plantes d'agrément, et on les introduit dans nos jardins : la stramoine (qui est cependant un poison dangereux), à cause de la singularité de son fruit, et le (I) Nous regrettons do ne pouvoir donner en entier une note trés- intéressante du traducteur anglais ; mais elle est si longue que nous nous bornerons à en faire une courte analyse. Quelques savants pensent que Y humus ou terre végétale de notre globe s'accroit graduellement, par la décomposition des plantes, d'un demi- pouce par cent ans, surtout dans les régions qui n'ont jamais été livrées à la culture depuis le déluge. D'antres naturalistes, Wallerius entre autres, ne concourent pas dans cette opinion pour la raison qui suit : Les couches d'humus excédant rarement un pied, il s'en suivrait qu'il ne s'est écoulé qu'une période de 2,400 depuis le déluge, tandis que d'après la chronolo- gie de la Bible, il y a plus de 4,000 ans que cet événement a eu lieu En Russie, de ce côté-ci de la rivière Volga, il y a des plaines étendues qui n'ont jamais élé cultivées depuis le grand cataclysme ; car l'histoire nous apprend que les Scythes, les Sarrnates, les Huns, les Mogols, qui ont été successivement les maîtres de ces vastes contrées, étaient des races nomades qui vivaient sans agriculture. Ces régions sont dépourvues de bois de temps immémorial. El cependant le sol y a deux et même quatre pieds de profondeur ; ce qui démontre combien est incertain hj calcul d'un demi-pouce par siècle. L'analyse chimique des plantes fait voir qu'elles sont formées d'eau, de terre, d'alcalis, d'huile, etc. D'où ces substances variées, nécessaires pour la vég talion, sont-elles venues originairement? Répondre qu'elles sont le produit d'autres plantes décom- posées, c'est tomber dans un cercle vicieux. Elles sjnt l'œuvre du Créateur de l'univers, qui les a douées des qualités nécessaires pour la perpétuation des espèces. Forster conclut par dire qu'il abonde dans le sentiment de Kalm, et repmsse l'opinion que la couche arable de 1 1 terre es! le produit ■ le la végétation F WILMINGTON, CHICHESTER, CHESTER. 47 phytolaque, à cause de son port noble et de ses belles grappes de rieurs et de fruits qui se succèdent toute Tannée, Kalm arriva à Wilmington le 4 Octobre. Cette petite ville fut fondée en 1733. Dans l'été de 1748, on y érigea une redoute pour la protéger contre les incursions des corsaires français et espagnols. Dès le lendemain, le voyageur suédois repartit pour Philadelphie, suivant tantôt la voie publique, tantôt de petits sentiers à travers bois, examinant avec soin toutes les productions du sol. Le lierre (1) et la vigne-vierge (2) grimpaient entre- lacés avec le srnilace (3) jusqu'à la tête des plus grands arbres. Le mélange de leurs feuilles rouges et vertes produisait le plus bel effet. Kalm vit pour la première fois, à Chichester, bourg sur la Delaware, où les voyageurs passaient la rivière dans un bac, un canot fait d'un seul tronc de cèdre creusé. En Pensylvanie et dans le New- Jersey, on employait les graines de l'ansérine authelmintique (Chenopodôes) comme vermifuge. Il y avait beaucoup de vergers à Chichester, et on y faisait du cidre. Après une courte pause à Chester, petite ville de marché sur la Delaware, notre voyageur se remit en (1) Hélera Hélix, Englis'i 1\ y tAraliacées). M. (2) Hcdera Quinquefolia (Ampelidées), t^pècc 'If Cisso M (3) Smilax laurifolia. M. 48 OCTOBRE 1748» route, et le 6 Octobre au soir, il était de retour à Phila- delphie. Le lendemain, il traversait la Delaware en bateau, et passait la journée dans le New-Jersey. Il fut frappé de la pauvreté du sol de cette province. L'as- perge (1) y était commune ; Kalm pense qu'elle est une plante indigène de l'Amérique, parce qu'il l'y a rencon- trée souvent à l'état sauvage. Le pourpier potager (2) se trouve partout aussi à l'état sauvage. Le bident bidens bipinnata (Composées), dont les graines, garnies de trois épines armées à leur extrémité de petits crochets, s' attashent aux vêtements avec une ténacité qui fait pester les ménagères. Parlant des huîtres de Philadelphie, Kalm dit qu'au- trefois on faisait du mortier avec leurs écailles ; mais on s'est aperçu que les murs des maisons dans la construc- tion desquelles on avait employé cette espèce de ciment suintaient toujours. Les ravages causés par un petit insecte de la classe des coléoptères (8) avaient fait abandonner la culture des pois. Il s'en est peu fallu que le savant professeur n'introduisît lui-même, involontairement, cette vermine dans son pays. Lors de son départ de l'Amérique, il avait mis dans un papier des pois d'odeur verts et tout frais cueillis, parfaitement sains en apparence. Mais quand, à son arrivée à Stockholm, le 1er Août 1751, il ouvrit l'enveloppe qui les contenait, il se trouva que tous les pois étaient creux et renfermait, chacun, un insecte en train de sortir de sa prison, déjà la tête à la fenêtre et (1) Asparagus (Liliacées). M. (2) Portulaca oleracca (Portulacées). M. (.3) La bruche des pois, Bruchus p:si. TVJ . GERMANTOWN. 49 prêt à s'envoler. Inutile de dire qu'il replia précipi- tamment le papier, afin d'empêcher qu'aucun de ses hôtes dangereux ne prit son essor (1). Il avoue naïve- ment, qu'à cette vue.il fut plus effrayé que s'il eut été au moment de mettre la miin sur une vipère, " car j'eus tout ;; de suite une claire perception de l'immensité du dom- 1 mage que mon cher pays aurait souffert, si seulement ' deux ou trois de ces insectes nuisibles m'eussent ' échappé. La postérité de beaucoup de familles, et ' même les habitants de provinces entières auraient eu ' raison de me détester comme la cause d'une grande ' calamité." Cela ne l'empêcha pas d'envoyer quelques uns de ces pois à Linné, qui donna à l'insecte qu'ils con- tenaient le nom de Bruchus pisi, bruche des pois, dont le plus grand ennemi, d'après ce célèbre naturaliste, est le Quiscale pourpre, Gracula Quiscula (2), auquel on a cependant fait une guerre acharnée pendant longtemps en Pensylvanie à cause de ses déprédations dans les champs de maïs. Kalm alla passer encore deux jours à Germant© wn chez son ami M. Cock. On se livrait, dans cette ville, à la cul- ture de la patate des Bermudes, Convolvulus Batatas (3) (Convolvulacées) qui était connue à cette époque en Por- tugal et en Espagne et même en Angleterre, mais non en Suède. Le professeur à son retour avait apporte plusieurs échantillons de cette pomme de terre, qu'il se (1) Quoique M. Kalm ait évité soigneusement d'introduire cet insecte on Europe, cependant, le Dr. Linné nous assure, dans son Système de la Nature, que les contrées méridionales du continent en sont déjà infestées. Scopoli le mentionne parmi ses ln&ecla Carniolica, p. 63. Geoffroy en parle dans ses lnsecle? de Paris et en donne un bon dessin, vol. 1, p. 267, t. 4. f 9. F. (2) Purple Grackle. Quiscalus Versicolor— Audubon— (Gonirostres). M. (3) Batatas edulis, patate sucrée. M. D 50 OCTOBRE 1748. proposait d'introduire dans son pays ; mais le vaisseau ayant fait eau dans "une tempête, ils pourrirent tous. Les Espagnols font une sorte d'eau-de-iie avec la patate sucrée. Le Poly trie, genre de plantes cryptogames de la famille des mousses, était très-commun ; en certains endroits bas et humides, il couvrait toute la surface du sol. L'agriculture était très-peu avancée dans la Pensyl- vanie. Là, comme dans les autres provinces anglaises, on s'attardait trop dans l'ornière de la routine. Dès qu'un colon avait acheté une terre, il abattait une partie du bois qui la couvrait pour s'y conquérir un champ arable, qu'il labourait et ensemençait. Le sol, cultivé pour la première fois peut-être depuis la création, produisait naturellement une récolte magnifique. L'année sui- vante, le colon labourait encore la même pièce sans y mettre le moindre engrais, et il continuait ainsi d'année en année jusqu'au complet épuisement du sol. Alors, il laissait son champ en friche, prenait sa hache et se taillait en pleine forêt un autre champ, qu'il traitait de la même façon. Toute la terre ayant passé par ce sys- tème de culture, le laboureur retournait à son premier champ, qui avait eu le temps de se refaire, puis il l'aban- donnait pour le second, qu'il laissait reposer à son tour. Comme on tenait les animaux dehors en toute saison, il ne se ramassait que peu de fumier pour les engrais. Les terres restant en friche pendant de longues années se couvraient à la longue de mauvaises herbes, que l'on ne parvenait à détruire ensuite que très-difficilement. Lorsque le sol a perdu sa fertilité, il faut beaucoup de temps et de travail pour la lui rendre. Un des esclaves de M. Coek montra à Kalm la peau d'un blaireau (Ursus Mêles), (1) qu'il avait tué quelques (1) Mêles vulgaris (Plantigrades.) M. PHILADELPHIE. 5 L jours auparavant ; après un examen attentif de cette dépouille, le naturaliste resta convaincu que le blaireau d'Amérique ne diffère pas de celui de Suède. 11 revint à Philadelphie dans la nuit. 12 Octobre. — Cette journée et les suivantes furent consacrées à des excursions sur les bords de la rivière Skulkill. Passant dans un champ, Kalm remarqua plu- sieurs petites galeries souterraines, habitées par une espèce de taupes, à laquelle Linné a donné le nom de Sorex Cristatus, mais qui est maintenant désignée par les naturalistes sous celui de Condylura Cristata, et qui est propre à l'Amérique Septentrionale. Kalm a donné une description détaillée de ce petit mammifère carnassier de la famille des insectivores. Cette description est citée dans " The Treasury of Natu- ral History" par Samuel Maunders, Londres, 1870, qui en reproduit la partie suivante : " Ayant réussi à m'emparer d'une de ces taupes, j'ai remarqué qu'elle avait plus de force et de vigueur dans les pattes qu'aucun autre animal en proportion de sa taille......... Lui. ayant présenté un mouchoir, elle le perça de trous en moins d'un instant Elle était très-irascible, et se jetait avec fur'eur sur tout ce qu'on mettait à sa portée Cette espèce de taupes ne vit pas sous des monticules comme celles d'Europe, mais dans des retraites souterraines/' On rencontre dans les bois un arbrisseau dont les baies fournissent de la cire, et que pour cette raison les Suédois appellent Tallow shrub, les Anglais Candle-berry- tree ou Bay berry-bush. Linné lui a donne le nom de Myrica cerifera (Myricées) (1). Les bougies faites avec cet- ([) Nous avons remarqué cette plante à Rustico, Ile du Prince-Edouard, en juillet !876. M. -r>2 OCTOBRE 174b. te cire sont plus durables que les chandelles de suif; elles brûlent mieux et ne fument pas quand on les souffle, au contraire, elles répandent une odeur agréable. On fait aussi avec ce produit un savon excellent pour la barbe. Cette cire est, en outre, un vulnéraire efficace pour les blessures et un remède contre le mal de dents. Un marchand de Philadelphie s'imagina faire une bonne spéculation en expédiant aux pays catholi- ques de l'Amérique des cierges faits avec les baies du cirier ; mais il fut trompé dans son attente, car le clergé ne voulut pas les recevoir. Avec le Faux-Pouliot, Penny Royal, Cunilapulegioides, (Labiées), "plante qui a une odeur particulière très- forte, on faisait un breuvage aussi bon que le thé, et qui se donnait pour exciter la transpiration dans les cas de rhume. L'écorce de l'aune bouillie est excellente pour la gué- rison des plaies. On en tire aussi une teinture rouge et brune. Les feuilles du phytolaque décandre, lorsqu'il est jeune, peuvent se manger en guise d'.épinards. Mais lorsque la plante a atteint sa pleine croissance, il faut se garder d'en faire usage, si l'on ne veut se donner une attaque de dyssenterie. Il doit en être autrement de ses baies, appelées raisins d'Amérique, qui ont une saveur particulière, et dont les enfants sont si friands en automne. L'écorce du noyer teint les lainages en jaune ; il en est de même de celle du chêne noir, Quercus nigïa, et du Quercus marilandica. Les fleurs et les feuilles de la balsamine, Impatiens noli tangere (Balsaminées), donnent la même couleur. PHILADELPHIE. 53 La Collinsonia Canadensis (Labiées) a été découverte par Bartram, qui l'a envoyée en Europe. Jussieu, pen- dant son séjour à Londres, et Linné, ensuite, l'ont ainsi nommée d'après Peter Collinson, marchand de Londres et membre des Sociétés Royales d'Angleterre et de Suède. L'odeur de cette plante est agréable, mais très-forte. Kalm se plaint qu'elle lui donnait des maux de tête. Suivant les sauvages, elle guérit de la morsure des serpents-à-sonnettes. Ailleurs, on l'appelle Herbe-aux- chevaux. D'après plusieurs observations qui lui ont été com- muniquées par Franklin, Kalm pense qu'une grande partie du pays était autrefois couverte par la mer. Parmi ces observations nocis remarquons les deux suivantes : lo. La présence de quantités immenses de coquilles dans le Sud, au pied des montagnes. 2o. Il n'était pas rare de trouver, à 14 pieds sous terre, des pierres rondes à surface polie, comme celles qui ont longtemps été exposées à l'action des eaux, et, à 18 pieds de profondeur, après avoir percé un lit de sable, une épaisse couche de vase remplie d'arbres, de feuilles, de branches, de joncs et de charbon de bois. 18 Octobre. — Kalm note une dizaine de plantes qui étaient en fleurs ce jour-là, et sur ce nombre six appar- tenaient à la famille des Composées : deux espèces d'astères, la verge-d'or commune, Soiidagv Virga Aurea, l'épervière, Hieracium, la millefeuille, ou herbe-à-din- des, MlUefolium Achi/lœa, et la dent-de-îion, Leontodon Taraxacum ; il y avait une plante de la famille des G-en- tianôes, une de celle des Oxalidées, l'oseille jaune des bois, Oxalis Corniculata, une de celle des Scrofularinées, la digitale pourprée ou gant- de-Notre-Dame, Digital it 54 octobre 1748. purpurea, une de celle des Hamamelidées, le noisetier, appelé IlamameUs Virginica. Plusieurs arbres, surtout les espèces qui fleurissent de bonne heure au printemps, comme l'érable rouge, le laurier d'été, avaient déjà leurs bourgeons si bien for- més, qu'en les ouvrant on reconnaissait facilement toutes les parties qui concourent à la production du fruit, le calice, la corolle, les étamines et le pistil. Les boutons étaient extrêmement durs et serrés de manière à les pro- téger contre le froid. Les noyers noirs avaient perdu leurs feuilles et laissé tomber leurs fruits. r Le cornouiller de la Floride, Cornus Florida (Cornées), appelé Dogivood par les Anglais, est un bel arbre, surtout au printemps, quand il se couvre de ses fleurs blanches. Il est rare au Canada. Le tulipier, appelé par les botanistes Liriodendron tulipifera, est un des plus grands arbres de l'Amérique du Nord ; rien de plus beau à voir que ce géant de la forêt paré de ses fleurs en iorme de tulipes. Le magnolier, Magnolia glauca, Linn., désigné par les Anglais sous le nom d'Arbre du Castor parce que ce petit mammifère, de l'ordre des rongeurs, est très-friand de son écorce ; il se rencontre rarement au nord de la Pensylvanie, où il commence à fleurir vers la fin de Mai. Il perd ses feuilles de bonne heure en automne, à l'exception des jeunes individus, qui les conservent tout l'hiver. Le parfum de ses fleurs est très-suave, et em baume l'atmosphère à une grande distance, surtout le soir. Eien de plus agréable qu'une promenade dans les bois lorsque le Magnolier est en floraison. Ses baies PHILADELPHIE. 55 qui sont d'une belle couleur rouge, trempées dans du rhum ou de l'eau-de-vie, font un excellent remède contre la toux. L'écorce de cet arbre, réduite en pou- dre, s'emploie contre les fièvres, et est connue sous le nom de Quinquina de Virginie. Kalm parle d'essais de domestication du bison, du cerf et du castor, qui ont été couronnés d'un plein succès. Il a vu des loutres apprivoisées qui suivaient leurs maîtres comme des chiens. Le sarigue (opossum) (1), et le raton (racoon) finissent aussi par se familiariser ; mais on ne peut guérir ce dernier de ses habitudes de maraudeur nocturne. Le dindon sauvage (2) est plus gros que son congé- nère domestique, et sa chair est plus savoureuse. Les gens de la campagne recherchent ses œufs dans les bois pour les faire couver par les dindes de leurs basses- cours ; mais ils ont soin, lorsque les petits sont écios, de leur couper les ailes avant que leur instinct les porte à s'envoler. On était parvenu même à apprivoiser des outardes (3), mais en leur coupant les ailes. Par exemple, elles ne vou- lurent jamais s'accoupler avec les oies domestiques et ne laissèrent pas de postérité. Kalm assure avoir vu des perdrix (4) et des pigeons de passage (5) qui vivaient dans la plus parfaite harmonie avec les volailles de basse-cour. Cl) Famille de l'ordre des Marsupiaux. M. {i) Meleagris Gallipavo (Gallinacées). M. (3) Anser férus (Palmipèdes). M. (■ï) Perdix cinereus (Gallinacées). M. (5) Ectopisles Migratoria (Gallinacées). M •36 OCTOBRE 1748. De tous les oiseaux rares de l'Amérique du Nord, l'oiseau-mouche, Trochilus Colubris, est le plus -admira- ble. Catesby, dans son Histoire Naturelle de la Caroline, en donne un dessin colorié de grandeur naturelle (vol. 1, p- Go, tab. 65), ainsi qu'Edwards, dans son Histoire Na- turelle des Oiseaux, page 38, tab. 88. M Forster, dans une note, dit qu'il y a une espèce de Colibri encore plus petite, le Trochilus Minimus de Linné, qui ne pèse que vingt grains. Bartram a gardé un couple d'oiseaux- mouches pendant plusieurs semaines en les nourrissant avec de l'eau sucrée (1). Ce petit favori de la nature, dont, comme l'a dit Buffon» le plumage réunit les couleurs les plus brillantes de l'émeraude, du rubis et de la topaze, arrive en Pensyl- vanie au printemps, lorsque la chaleur commence à animer et à faire éclore les germes de la vie, et s'y bâtit, dans les branches des arbres, un nid de forme ronde, du diamètre d'un pouce, tapissé à l'intérieur d'une sorte de duvet fourni par la grande molène et l'asclépiade, recou- vert de mousse à l'extérieur, et destiné à recevoir deux œufs de la grosseur d'un pois. Sa langue extensible, ré- tractile et bifide, son bec long et effilé sont organisés de manière à lui permettre de pomper le jus sucré des fleurs qui est contenu dans cet organe que les botanistes appel- lent le nectaire. Kalm a remarqué qu'il se plaît surtout dans le voisinage des jardins où croissent la balsamine et la monarde. Un habitant de la campagne peut (!) Bartram aurait gardé ces oiseaux-mouches plus longtemps et peut- être pendant toute la durée de leur vie naturelle, s:il leur avait donné des ,-nsectes à manger. Un naturaliste de la Jamaïque, qui élève beaucoup de ces trochiles, dit qu'ils ne vivent pas seulement du nectar des Heurs, mais qu'ils sont insectivores aussi; et que c'est parce qu'on ne peut leur fournir des insectes dans la traversée qu'ils meurent à bord des vais- seaux. M. PHILADELPHIE. 57 compter avec certitude sur la visite de l'oiseau-mouche, s'il a le soin de cultiver dans son parterre des fleurs à calices tubuleux. Le colibri, dont la vie est tout aérienne, ne se pose pas sur la corolle dont il aspire le nectar ; au contraire, il renvoie ses pieds en arrière et ne se soutient dans le vide que par l'agitation continuelle de ses ailes dont la vibration est tellement rapide que tout le corps de l'oiselet paraît comme enveloppé dans une gaze. Les fleurs de la monarde sont verticillées ou disposées par étages en anneaux rayonnants autour de l'axe, comme celles de la menthe, de la galiopside ou chanvre sauvage, de l'agripaume cardiaque et du lamier (1), et comme celles, au reste, de toutes les autres plantes appar- tenant à la famille des Labiées. C'est un spectacle agréable que de voir l'oiseau-mouche voler d'une glomé- rule, après en avoir fait le tour en plongeant son bec vivement dans chacune des fleurs qui la composent, à une glomérule supérieure, et de celle-ci à une autre plus élevée jusqu'au dernier anneau de la tige. Il n'est pas farouche et on peut s'en approcher d'assez près ; seulement, si on fait mine de s'avancer directe- ment sur lui, il s'éloigne avec une vitesse telle qu'il semble devenu subitement invisible. Ces joyaux vivants, que le Créateur s'est plu à vêtir d'une livrée si splendide, sont susceptibles des plus violentes passions qui agitent le cœur humain. Animés par la jalousie, ils se livrent entre eux des combats acharnés dont les péripéties les amènent jusque dans les maisons. Une corolle trompe-t-elle leur attente après les avoir attirés par sa mine appétissante, ils se vengent de la (I) Mcnlha, galiopsis, leonurus, lamium — Labiées, 58 OCTOBRE 1748. pauvreté de son jus en l'effeuillant à coups de bec avec une impétuosité qui tient de la colère. Parfois ils font des dégâts énormes dans les jardins, détruisent toutes les fleurs et en éparpillent les pétales sur le sol avec une fureur qu'on dirait inspirée par l'envie. Généralement on n'entend que le bourdonnement de leurs ailes. Mais quand ils se battent, ils jettent un cri qui ressemble à celui des moineaux. Kalm pensait comme Bartram que les oiseaux-mouches ne vivent que du nectar des fleurs. Ils émigrent vers le sud, à l'automne. Le 25 Octobre, Kalm passa toute la journée et celle du lendemain à empaqueter des graines pour les envoyer en Suède. Le 27 du même mois le savant professeur partit de Philadelphie en compagnie de son ami, M. Cock, pour New York, " dans le but de voir le pays et de s'enquérir de la route la plus sûre pour parvenir au Canada à travers les solitudes qui le séparent des Provinces anglaises." Ils passèrent devant un grand nombre de fermes occupées par des Anglais, des Allemands et d'autres colons européens. Presque tous les cultivateurs avaient un verger près de leur maison. Dans une halte que nos voyageurs firent dans la matinée chez l'un de ces fermiers, pour donner quelque repos à leurs chevaux, ils virent un oiseau-moqueur qui était gardé en cage. Linné a donné à ce chantre harmonieux et sans rival le nom de Turdus polyglotte* (1), à cause de son habilité à imiter le ramage de presque tous les oiseaux. L'édition anglaise du voyage de Kalm en contient un dessin excel- lent, ainsi que du rouge-gorge. ri) Mimus Polyglottus (DenUrostre?,) AI, NEW-BRISTOL— TEENTON, 59 Vers midi, Kalm et son compagnon firent une autre halte à New-Bristol, petite ville sise sur la Delaware, à quinze milles de Philadelphie et tout en face de Bur- lington, résidence du gouverneur du New-Jersey. En partant de New-Bristol, ils trouvèrent la route bordée de beaux cottages, mais plus loin ils eurent à passer à travers une grande forêt et sur un sol très pauvre, qui, cependant, était couvert de lupins vivaces, Lupinus perennis (1). " La vue de cette plante, couvrant avec profusion un terrain si maigre, me combla de joie", (2) dit Kalm, " et je me mis à méditer sur la possi- bilité de tirer parti, en Suède, d'un sol de même nature pour la culture du lupin. Mais quel ne fut pas mon désappointement quand je m'aperçus que les chevaux et les vaches mangeaient de presque toutes les plantes à l'exception du lupin, qui était cependant très vert, doux au toucher et, en apparence, d'une fraîcheur invi- tante ! Peut-être trouvera-t-on le moyen de rendre cette plante plus appétissante pour les animaux " (3). Dans la nuit, les voyageurs, après avoir traversé la Delaware en bac, arrivèrent à Trenton, ville du New- Jersey, distante de trente milles de Philadelphie. Le lendemain matin, 28 Octobre, ils continuèrent leur voyage, passant à travers un pays habité en grande par- tie par des Allemands et des Hollandais. Leurs bâtiments de ferme étaient assez spacieux (1) Légumineuses seciion des Papilionacées, Iribu des Génistées. M. (2) Le lupin blanc parait soutirer de l'atmosphère tout l'engrais qui le t'ait végéter; cette propriété explique comment il peut prospérer dans un sol maigre, aride, sur les sables et les graviers, lui qui demande de préfé- rence un terrain humide et meuble à la fois. M. (3) Il est certain que d'ordinaire les animaux s'acci mmodenl très b du lupin comme fourrage, lorsqu'il est fiais M. 60 OCTOBRE 1748. pour contenir, à la fois, sous un même toit, l'aire, la grange, les étables, le fenil et la remise. Forster remar- que, dans une note, que ce genre de constructions, qui paraît inusité au professeur, est fréquent dans le Nord de l'Allemagne, en Hollande et en Prusse, et qu'il est tout naturel que les colons venant de ces pays, l'aient adopté dans leurs nouveaux établissements. A dix heures du matin, Kalm et son compagnon en- traient dans Princetown, et comme il tombait une forte pluie, ils y passèrent le reste de la journée et la nuit. Au réveil, ils reprirent leur course, et à midi, ils étaient rendus à New-Brunswick, jolie petite ville de la pro- vince du New-Jersey, bâtie dans une plaine sur la côte occidentale de la rivière Rareton (1). Une de ses rues était entièrement habitée par des Hollandais originaires d'Al- bany et pour cette raison portait le nom d'Albany street. Ces descendants de Bataves n'avaient que peu de rela- tions sociales avec les autres habitants de la ville. Dans l'après-midi, ils traversèrent la rivière Eareton et poursuivirent leur voyage. A huit milles de New-Bruns- wick, le chemin se divisait en deux routes, dont l'une, celle de droite, conduisait à Amboy, principal port de mer du New-Jersey. Nos voyageurs prirent la route de gauche, et au soleil couchant, ils entraient dans Elizabeth-town ; mais ils ne s'y arrêtèrent pas et conti- nuèrent leur course jusqu'à la traverse, à deux milles de la ville. 30 Octobre. — De cet endroit, Kalm et son compagnon n'eurent qu'à traverser la rivière jusqu'à Staten ïsland pour se trouver dans la province de New York. Pres- que tous les habitants de l'île étaient des descendants 'li Raritan M NEW-YORK. 61 de Hollandais, mais la plupart parlaient l'anglais. A huit heures du matin, les voyageurs arrivèrent à un point de la côte où les attendait le yatch qui devait les conduire à New-York. Ils s'y embarquèrent, et après une courte et agréable traversée de huit milles en mer, ils arrivèrent heureusement vers onze heures de l'avant- midi dans le port de la future métropole des Etats-Unis d'Amérique, quatre jours après leur départ de Phila- delphie. 31 Octobre. — Le savant naturaliste ne tarit pas d'élo- ges sur les huitres (1) de New-York et leur goût exquis ; il décrit minutieusement les préparations qu'on leur faisait subir pour les convertir en conserves, dont on ex- pédiait annuellement d'immenses quantités dans les Indes Occidentales. Il consigne la remarque, déjà faite par tout le monde, paraît-il, que ces bivalves sont meil- leurs dans les mois qui ont un r dans leurs noms, tels que Septembre, Octobre. Les Indiens qui habitaient la côte avant l'arrivée des Européens faisaient leur principale nourriture d'hui- tres et d'autres mollusques ; ils en vendaient même de grandes quantités aux sauvages qui vivaient à quelque distance des bords de la mer. Kalm dit que ce fait doit inspirer de la prudence aux savants qui bâtissent des théories plus ou moins hasardées sur la présence d'écail- lés dans l'intérieur des continents. Il n'y avait pas de homards (2) autrefois sur les côtes de New- York ; il fallait faire venir ces crustacés de la Nou- (1) Oslrea edulis— Mollusca conchifera. M. (2) Homarus vulgaris (crustacea decapoda macroura), crustacés déca- podes, au corps très allongé et terminé par une queue composée de plu- sieurs feuillets, tels que les écrevisses, les langoustes, les crevettes, etc. M. *'- NOVEMBRE 1748. velle-Angleterre d"où ils étaient expédiés dans de gran- des barges. Il arriva un jour qu'un des bateaux sombra près de Hellgate à dix milles de la ville avec toute sa vivante cargaison, qui recouvra sa liberté et se multiplia si bien que New- York a cessé d'être tributaire des autres villes du littoral pour sa provision de homards. Les fièvres tremblantes étaient très communes dans certaines parties de l'Amérique du Nord, et on les com- battait avec le quinquina, appelé poudre des Jésuites par les Anglais. Néanmoins, il paraît que ce spécifique n'avait pas toujours l'effet désiré, et on y suppléait avec les feuilles de la sauge des jardins, Salvia oficinalis, Linn. (Labiées). L'écorce du chêne blanc était regardée comme un excellent remède contre la dyssenterie. Il se faisait à Albany, avec les Indiens de l'intérieur, un grand commerce de tridacnes (Clams) (1), espèce de coquillage bivalve dont la chair, séchée au soleil, était un mets favori des Indiens, et dont les écailles, converties en wampum, avaient, chez ces sauvages, la même valeur que l'or parmi les nations civilisées, Il n'y avait pas de Juifs en Suède à cette époque. Kalm, qui n'avait jamais vu d'Israélites auparavant, et qui, par conséquent, était entièrement étranger à leurs coutumes et à leurs manières, parle longuement de ceux de New- York et de leur synagogue, qu'il visita deux fois le 1er et le 2 Novembre. Ils jouissaient des mêmes droits que les autres citoyens. (1) Tridacnes (Mollusca conchifera), genre de coquilles bivalves qui vivent fixées aux rochers. Une de ces espèces, Iridacna gigas, sert de bénitier dans les églises catholiques. La chair de la tridacne était très estimée des anciens. M. NEW-YORK. 68 La ville de New- York fut fondée en 1623 par les Hollandais, qui lui donnèreut le nom de Nouvelle- Ams- terdam, comme ils avaient déjà donné à tout le pays environnant celui de Nouvelle-Hollande. Les Anglais, sous le commandement de DesCartes (1), s'en emparè- rent vers la fin de l'année 1664. Par son étendue, elle égalait Boston et Philadelphie dès 1748 ; mais par la beauté de ses édifices, la grandeur de son commerce et son opulence, elle leur disputait déjà la palme. Ses rues étaient bordées de platanes, d'acacias, d'ormes et de tilleuls dont le feuillage abritait des milliers d'oi- seaux et de grenouilles de l'espèce rana arborea — ou rainette (2). La plupart des maisons étaient en briques ; il y en avait encore dont le pignon donnait sur la rue. Kalm dit que New -York, outre la synagogue et le temple des Quakers, renfermait sept églises dignes de remarque. L'église anglaise, bâtie en 1695, deux églises hollandaises, dont une ancienne et l'autre nouvelle, une église presbytérienne, deux églises allemandes et une église française pour les réfugiés protestants. La ville faisait un commerce étendu avec les Indes Occidentales. Mais elle n'avait pas de manufactures à cette époque. Elle importait tous ses draps d'An- gleterre. Du 1er Décembre 1729 au 5 Décembre 1730, il était entré dans le port de New- York 211 vaisseaux, et il en était parti 222. (1) George Garteret.— Ilistory ol' New Nelherlands, par le Dr. O'Cal laghan. (Note fournie par M. l'abbé Verreau ) (2) Genre de batraciens anoures, ou batraciens qui, dans l'âge adulli n'ont point de queue. M 64 NOVEMBRE 1748. La ville était alors la capitale de la Province de New- York. L'Assemblée Législative y siégeait une ou deux fois par année à la convocation du gouverneur, qui avait le droit de la dissoudre à son gré, et qui, même, abusait quelque-fois de cette prérogative. La nomination de ce haut fonctionnaire était réservée au bon plaisir du roi. Toutes les colonies anglaises étaient indépendantes les unes des autres ; chacune d'elles avait ses lois particu- lières et sa monnaie propre, et pouvait être considérée comme un état séparé. " Aussi," dit Kalm, " les affaires " sont-elles conduites, en temps de guerre, avec autant *l de lenteur que d'irrégularité ; car, non-seulement le " sentiment d'une province est quelquefois directement ' opposé à celui d'une autre, mais souvent, les vues du " Gouverneur et de l'Assembl&e d'une même province " sont différentes, et pendant que l'on se dispute sur les " moyens d'organiser la défense, l'ennemi a le temps de " s'emparer des places les unes après les autres. Il est " arrivé fréquemment que pendant qu'une colonie avait à " supporter tout le fardeau de la guerre, les provinces 11 voisines restaient dans une complète inaction comme si " elles n'eussent eu aucun intérêt en jeu dans le conflit : " ou bien, après avoir délibéré pendant deux ou trois " ans sur l'opportunité d'aller au secours d'une colonie " sœur, elles finissaient par se déclarer contre toute in- " tervention. Bien plus, il y a des provinces qui, non " contentes de garder la neutralité, ont choisi le moment " où une colonie voisine était ravagée par la guerre, pour " ouvrir an commerce étendu avec l'envahisseur. C'est " grâce à cet état de choses, que les Français du Canada, " qui ne sont qu'une poignée d'hommes en comparaison " des Anglais d'Amérique, ont obtenu de si grands avan- NEW- YORK. 65 " tages en temps de guerre : en effet, ces derniers ayant " pour eux le nombre et la puissance, devaient l'em- " porter très facilement sur leurs ennemis." " C'est, cependant," ajoute Kalm, " un bonheur pour " la couronne d'Angleterre que ses colonies de l'Améri- ,; que du Nord soient avoisinées par un pays français " comme le Canada. Il y a lieu de croire que le roi n'a " jamais été sérieux dans ses tentatives pour expulser " les Français de leurs possessions, ce qui pouvait se " faire sans beaucoup de difficulté ; car les colonies an- " glaises ont tellement progressé, que déjà elles rivalisent " presque avec leur métropole par le nombre de leurs " habitants et par leurs richesses. Pour sauvegarder ' " son autorité et surtout son commerce, la mère-patrie " interdit l'établissement de nouvelles manufactures " dans ses provinces d'Amérique, y défend l'exploitation " des mines d'or et d'argent, leur dénie le droit de tra- " fiquer avec les pays qui n'appartiennent pas à la " G-rande-Bretagne, et ferme leurs ports aux vaisseaux! " étrangers. Toutes ces restrictions et ces entraves sonf " de nature à diminuer l'attachement des habitants des i; colonies anglaises pour la mère-patrie. Leur mécon- " tentement est entretenu d'ailleurs par les nombreux " étrangers allemands, hollandais et français, établis " dans ces provinces et qui, quoique vivant au milieu " des Anglais, n'ont pas d'ordinaire une vive tendresse " pour la vieille Angleterre. A ces causes de désaffec- " tion, se joignent les aspirations d'an jeune peuple, le " désir de s'agrandir, l'amour du changement:' Bref, Kalm finit par dire que plusieurs colons anglais lui ont exprimé l'opinion que dans trente ou cinquante ans les provinces britanniques de l'Amérique du Nord seraient assez fortes pour former un état par elles-mêmes 66 NOVEMBRE 1748. entièrement indépendant de la mère-patrie. " Mais/' ajoute le savant et perspicace philosophe suédois, ' comme les côtes ne sont pas protégées, et que l'inté- rieur du pays est harassé par les Français en temps de guerre, leur dangereux voisinage devrait avoir l'effet d'empêcher que le lien entre les colonies et la métro- pole ne soit entièrement brisé. Le gouvernement an- glais a, par conséquent, d'excellentes raisons de con- sidérer les Français de l'Amérique du- Nord comme ses meilleurs auxiliaires pour retenir ses colonies dans le devoir." Il n'y avait que deux imprimeries à New-York et quelques journaux hebdomadaires publiés en langue anglaise. En 1710, cinq sachems ou chefs iroquois partirent de New-York pour l'Angleterre dans le but d'engager la reine Anne à faire alliance avec eux contre les Français. Les premieis colons de New York étaient Hollandais. Quand la Tille fut prise par les^Anglais et qu'elle leur fut cédée ensuite en échange contre Surinam, la plupart de ses habitants restèrent en possession de leurs biens. Les anciens demeuraient fidèles aux coutumes et à la langue de leurs pères. Mais les jeunes gens ne parlaient déjà plus que l'anglais, fréquentaient les églises anglaises et trouvaient mauvais qu'on ne les prît pas toujours pour des Anglais. L'anglomanie, passant dans les mœurs, émoussait bien le sentiment national, mais pas assez pour affaiblir ratta- chement au sol. Propriétaires de vastes étendues de terrains et des plus beaux domaines, les descendants des colons hollandais les gardaient avec jalousie, et ne consentaient à les vendre aux Anglais qu'à des prix PHILADELPHIE. 67 énormes. Il s'en suivait que les émigrants avaient peu d'encouragement à s'établir dans le pays, et se dirigeaient vers les autres provinces. Le 3 Novembre, Kalm partit de New- York pour re- tourner à Philadelphie, où il arriva le 5. Le savant naturaliste se livre à une longue disserta- tion sur le putois (1), appelé généralement Polecat par les Anglais, Skunkk New- York, FishaUa par les Suédois, Bête puante, enfant du Diable ou Pékan par les Français, Putorius Americanus Striatus par Catesby dans son His- toire Naturelle de la Caroline, et Viverra Putorius par Linné. Cet animal, on le sait, a une arme défensive redoutée des chasseurs dans son urine qu'il a la faculté de lancer au loin quand il est poursuivi, et qui répand une odeur des plus infectes, rappelant quelque peu. d'après Kalm, celle du géranium robertianum (2). Malgré les tours désagréables que jouent ces mouf- fettes (3), on réussit quelquefois à les apprivoiser si bien qu'elles suivent leurs maîtres comme des chiens. 6 Novembre. — Kalm alla passer l'après-midi chez M. Bar tram où il fit la connaissance d'un gentleman de la Caroline, qui lui fournit des détails intéressants sili- ce tte province. Le goudron, la poix et le riz étaient alors les princi- paux produits de la Caroline. (1) Mephitis Americana, mammifère carnassier du genre des moufietie< et de la famille des carnivores digitigrades. M. ( 1 ) Géranium robertin, Herbe à Robert (Géraniacées), plante à odeur désagréable, astringente, (Flore Canadienne, p. 1 1 1.) (2) L'édition, anglaise donne du putois (American polecat) aussi lion que du raton (jracoon) d >s dessins qui ne se tro :ivent ni dans le texte suédois ni dans l'édition allemand", mais qui ont été reprjduits dans l'édition hollan laiso. 08 NOVEMBRE 1748. Plus d'une fois, assurait ce monsieur, on avait trouvé à des distances considérables des rivages de la mer, en creusant des puits, des écailles d'huitres et même des becs pétrifiés d'oiseaux de mer, u des glossopètres (1) probablement, " dit Kalm. Il y avait deux espèces de renards (2) dans les colonies anglaises, le renard gris appelé renard de Virginie, et le renard rouge plus rare et qui était inconnu aux Indiens, selon M. Bartram, avant l'arrivée des Européens. D'après une tradition en crédit dans ces pays, l'espèce rouge aurait été importée d'Europe par un riche gentilhomme de la Nouvelle-Angleterre, très passionné pour la chasse à courre. Le traducteur anglais repousse cette explica- tion peu scientifique, prétendant que les renards rouges sont venus de l'Asie et très probablement du Kamt- chatka, où l'espèce en est commune. Il est possible que les Indiens ne les aient pas remarqués avant l'arrivée des Européens, parce qu'ils ne leur faisaient pas alors la chasse. Mais quand les peaux de ces animaux devinrent en grande demande, et qu'ils trouvèrent du profit à se les procurer, ils les regardèrent comme une nouveauté. Dans tous les cas, ces renards s'étaient tellement multi- pliés, que l'on offrait une prime d'un à deux chelins pour chaque bête rousse de cette espèce abattue. Les loups (3) étaient aussi très nombreux autrefois. L'Etat donnait vingt chelins pour chaque tête de ces animaux féroces. Le bœuf sauvage habitait principalement les forêts de la Caroline. il) Miner. Langues de pierre, dénis de poissons pétrifiées. M. (2) Canis vulpes, (carnassiers digitigrades), famille des canidés. M. (3) Canis Lupus (carnassiers digitigrades), famille des canidés. M. PHILADELPHIE 69 Le gui fibreux, viscum filamentosum (Loranthacées), plante parasite du chêne, était si commun dans cette même province qu'on en faisait des paillasses. Une espèce de genêt à balais, spartium scoparium, (Papilionacées-G-enistées), provenant de graines anglais ses, croissait dans le jardin de M. Bartram. Il avait aussi dans sa collection de curiosités des truffes, Lycoperdon tuber (Lycoperdacées), qu'il avait trouvées au New- Jersey, dans un terrain sablonneux. Il en montra une à son ami de la Caroline, et lui deman- da si c'était le Tuckakoo des Indiens. L'étranger ré- pondit négativement, prétendant que cette truffe, com- mune dans son pays, n'était bonne qu'à mettre dans du lait comme remède contre la dyssenterie. Le Tuckakoo est un tout autre végétal qui croît dans des terrains hu- mides. Les cochons sont très friands de ses racines, et les déterrent avec leurs groins. Les Indiens les mettent sé- cher au soleil, après quoi ils les réduisent en une sorte de poudre ou farine, avec laquelle ils font du pain. Kalm pense, d'après cette description du Tuckakoo, que ce n'est rien autre chose que Y arum Virginianum. Nous aurons occasion de parler encore de cette plante. 8 NovEMERE. — Beaucoup de colons anglais et suédois se livraient avec succès à l'apiculture. Mais tout le monde était d'opinion que l'abeille commune (1) n'exis- tait pas dans l'Amérique du Nord avant l'arrivée des Européens. Les Sauvages n'ont pas de mot dans leur langue pour la désigner, et ils l'appellent la Mouche des Anglais. Il faut croire que l'élevage des abeilles n'était pas connu dans la Nouvelle-France lors du voyage de Kalm, car le savant naturaliste prétend que " les abeil- 1) A[4s MeWfica, (Hyinenoptera). M 70 NOVEMBRE 1748. les ne peuvent vivre au Canada, et que toutes celles qui y ont été apportées ont péri durant l'hiver." On se plaignait déjà beaucoup de la diminution du gibier à plumes. Les anciens se rappelaient, en soupi- rant, le temps où les baies, les rivières et les étangs étaient fréquentées par d'innombrables bandes d'oiseaux aquatiques, tels que les outardes et les canards (1). Un bon vieillard de 90 ans se vantait d'avoir tué, dans sa jeunesse, ving- trois anas d'un seul coup de fusil. Les grues (2), autrefois si communes, étaient devenues rares (3). On pouvait en dire presque autant du dindon sauvage et de la perdrix. Il n'y avait pas de lois pour régler la chasse et proté- ger le gibier à certaines saisons de l'année, et y en eût-il eu, " que l'esprit de liberté qui domine dans le pays n'aurait pas souffert leur mise à exécution." Au contraire, les oiseaux dont la chair ne se mange pas augmentaient en nombre, entre autres une espèce de geais appelés Shirting Blackbirds par les Anglais et voleurs de mais par les Suédois. La diminution du poisson était une cause de reo-rets plus amers encore pour les anciens, lorsque, se repor- tant aux jours de leur jeunesse, ils se rappelaient ces merveilleux coups de filets dont un seul suffisait pour (1) Anas bouchas (Palmipèdes). M. (2) Grus Canadensis (Grallatores-Echasslers). M. (3) Le capitaine Amadas, le premier anglais qui ait jamais mis le pied sur le sol de l'Amérique du Nord, rapporte qu'il fit lever en débarquant d'immenses volées de grues, la plupart blanches ; elles s'enfuirent à tire-d'aile, en poussant une clameur formidable qui, répétée par les échos dalentour, lui retentit aux oreilles comme le cri de guerre de toute une armée. F. PHILADELPHIE. 71 la charge d'un cheval. Les temps étaient bien changés, dès 1748 ; " en vain," pouvait-on dire déjà : m Le pêcheur patient prend son poste sans bruit, " Tient la ligne tremblante et sur l'onde la suil, " il ne prend rien que de l'ennui." Franklin rapporta à Kalm une curieuse expérience que son père avait faite. Il s'étaityétabli dans la Nou- velle-Angleterre, sur une terre située entre deux rivières qui se déchargent dans la mer, et dont l'une fourmil- lait de harengs (1), tandis que dans l'autre il n'y en avait pas un seul. En ayant pris quelques-uns au temps du frai, dans la première rivière, il leur enleva leurs œufs qu'il alla déposer, en passant par terre, dans l'autre rivière. L'expérience fut suivie d'un plein succès. " Cela donne à penser," dit Kalm, " que le poisson aime tou- jours à frayer au lieu même où il est éclos, et d'où il est parti pour sa première migration en mer." 11 Novembre. — On retire de terre assez souvent en Irlande des bois de cerfs très hauts et extrêmement branchas, et, cependant, les annales de ce pays ne font mention d'aucun fauve de cette espèce dont la taille corresponde avec des cornes aussi gigantesques. Quelques-uns ont voulu voir dans ces ramures colos- sales des dépouilles du fameux alcôe d'Amérique (nioose- deer) (2), qui, comme celui de la Forêt-Noire, échappa à toute classirieation scientifique exacte. Sa présence en Irlande à des âges reculés s'expliquerait en supposant que cette île était unie autrefois à notre continent, ou qu'une suite d'autres îles plus petites, perdues maintenant, for- (1) Clitpca Harengus (Mjlacoptcrytriensj (2) Cervus Aires (Ruminaritia) 72 NOVEMBRE 1748. maient une chaîne entre l'Europe et le Nouveau-Monde. Kalm, après avoir interrogé Bartram, Franklin et des voy- ageurs français du Canada, s'est convaincu que l'élan à taille gigantesque n'existe pas en Amérique. Le célèbre inventeur des paratonnerres lui rapporta cependant avoir vu à Boston, étant petit garçon, deux animaux de cette espèce qu'on destinait comme cadeau à la reine Anne, mais leur taille ne dépassait pas celle d'un cheval de forte encolure. ïl est certain qu'il y a des élans — comme l'orignal du Canada, par exemple, dont les pro- portions sont hors du commun (1). C'est probablement un de ces animaux que Dudle'y a décrit sous le nom de moose-deer. Forster, le traducteur anglais du voyage de Kalm, corrobore l'opinion de ce dernier, et fait remar- quer que les Algonquins donnent à l'élan le nom de Musu, d'où vient probablement le mot anglais de moose- deerjp). Franklin fit don au naturaliste suédois d'un morceau d'une certaine substance minérale qui, à cause de son inaltérabilité, est employée pour les fourneaux de forges. C'est un mélange de pierre ollaire, d'ophite et d'asbeste. Avec une autre sorte de pierre appelée pierre à savon, et que Kalm décrit comme suit dans le language scien- tifique du temps, saxum ta/cosum pat iiculis spataceis gra- natisque îmmixtis ou talc mélangé de particules de spath et de grenat, on faisait des âtres de foyers, des chape- rons et des revêtements de murs. (1.) "Selon les sauvages, les orignaux ont un roi surnommé le Grand Orginal. Ses suj ;ts lui rendent toutes sortes de devoirs." — Chateau- briand. M. (2) La paléontologie nous enseigne aujourd'hui que les bois de cerf? trouvés dans les tourbières d'Irlande sont des débris fossiles, et qu'ils ont appartenu à des individus antédiluviens. M. PHII^ADELPHIE. 73 Les colonies anglaises importaient le sel des Indes Occidentales. On avait découvert du minerai de plomb, mais en trop petite quantité pour qu'on pût l'exploiter. On avait aussi trouvé un aimant de bonne qualité, et Kalm s'en procura plusieurs échantillons. Il s'extasie sur la richesse des mines de fer de la Pensylvanie. L'amiante, substance minérale filamenteuse, que l'on nomme aussi asbeste, et dont on fait de la toile et du papier incombustibles et aussi des bourses, témoin celle que Franklin apporta avec lui en Angleterre et qu'il donna à Sir Hans Sloane (1), était très abondante dans cette même province. Le célèbre physicien raconta à Kalm une mystification dont un de ses compagnons imprimeurs fut la victime. Il le chargea un jour d'aller porter au moulin à papier un morceau d'amiante avce ordre de le lui rapporter converti en feuille. L'ouvrier ayant rempli sa commission, Franklin prit le papier, en fit un rouleau et le jeta dans le feu en disant au typo- graphe qu'il allait être témoin d'un miracle. Grande fut en effet la stupéfaction du pauvre diable quand il vit que le papier ne s'enflammait pas. Franklin lui expliqua alors en quelques mots les qualités particu- lières de cette composition, puis il sortit. A peine fut il seul, que notre imprimeur, tout fier de sa science nouvellement acquise, se promit bien d'en faire montre à la première occasion. Sur ces entrefaites, entrent plusieurs personnes qui étaient dans le secret. Notre homme n'eut rien de plus pressé que de dire aux nou- veaux venus : " Voyez-vous cette feuille de papier, que j'ai faite moi-même, eh ! bien, je parie que je la jette au feu et qu'elle ne brûlera pas." Sa gageure fut acceptée ; 1) Médecin eti)Otaniste irlandais. M 74 NOVEMBRE 1748. mais pendant qu'il était occupé à activer le brasier, les mauvais plaisants enduisirent le papier de graisse, qui s'enflamma au premier contact du rouleau avec le feu. Notre savantasse, pensant que la feuille était détruite, ne revint de son ébahissement que lorsque ses compa- gnons lui eurent découvert entre deux éclats de rires l'artifice dont ils avaient usé. Le merveilleux instinct de la fourmi (1), qui fait encore aujourd'hui le sujet des études incessantes des natura- listes, ne pouvait être ignore d'un observateur aussi patient que Franklin. Kalm rapporte une expérience du savant américain, qui est de nature à confirmer l'opi- nion de ceux qui prétendent que ces insectes ont la faculté de se communiquer mutuellement leurs pensées et leurs désirs. Mais n'oublions pas que nous faisons une simple analyse et non une traduction et passons outre. 13 Novembre. — Tous les arbres à feuilles décidues avaient perdu leur verdure. 14 Novembre. — L'écureuil gris (2) est très commun en Pensylvanie. À la différence de celui de Suède, la couleur de son pelage ne change pas en hiver. Il fait son lit dans des creux d'arbres avec de la mousse, de la paille et d'autres matières soyeuses. Sa nourriture se compose d'amandes, de noisettes, de chincapins ou faînes, de glands et surtout de grains de maïs, dont il est très friand. Ce gentil petit animal a la prévoy- ance de la fourmi. Durant la belle saison, il amas- se des provisions, qu'il dépose dans des cachettes sou- terraines; il en remplit son nid afin de n'avoir pas M; Foi mica ruJ'u (IlymonopLera;. (2) Siiurus Carolinensis (Rodentia) a PHILADELPHIE. 75 sortir de son gîte en quête d'aliments pendant les gros froids de l'hiver. La température s'adoucit-elle au lende- main d'une forte gelée et à la veille d'une autre, on voit les écureuils descendre de leurs demeures aériennes et courir les bois à la recherche de leurs silos pour en rap- porter des vivres dans leurs nids. Mais il leur arrive souvent de trouver les magasins effondrés et vides de provisions. Les auteurs de ces dégâts sont les cochons • plus souvent encore ce sont les Indiens et même des blancs qui font des perquisitions actives dans les forêts, afin de découvrir les cachettes des pauvres sciuriens et de voler leur trésor, toujours composé d'amandes de choix, parvenues à pleine maturité, et que les vers n'ont pas attaquées. Le loir, Mus cricetus, Linn. (1), apporte le même soin dans le choix des noix et des glands dont il fait aussi provision. L'écureuil s'apprivoise facilement. Il mange assis sur son train de derrière, à l'ombre de sa queue relevée en panache au-dessus de sa tête, et tient entre ses pieds de devant le gland qu'il grignote. L'habitude de claquer des dents quand il voit venir quelqu'un dans la forêt, lui attire plus d'un coup de fusil qui ne lui était pas destiné. Le bruit qu'il fait ainsi donne l'éveil au gibier qui s'envole, et le chasseur désappointé passe sa mauvaise humeur sur la sentinelle avancée qui souvent ne s'en porte pas plus mal pour cela, car l'écu- reuil n'est pas facile à tirer. Dès qu'on donne après lui, il o-rimpe sur un grand arbre et s'y tient toujours du côté opposé au chasseur, tournant autour du tronc cha- que fois que son ennemi tourne autour de l'arbre. Il continue cette manœuvre jusqu'à ce qu'il ait la chance de trouver une enfourchure formée de trois branches ou (!) Myoxus Ave'lanarius vulg. croque no'x. Rodentia). M 76 NOVEMBRE 1748. un nid abandonné, et alors il peut se considérer en sûreté. Kalm dit en avoir cependant tué plusieurs, et il a remarqué qu'ils étaient couverts de puces. Le serpent à sonnettes dévore beaucoup d'écureuils. Comment une créature rampante peut-elle réussir à faire sa proie d'un animal aussi agile ? Kalm croit que c'est au moyen de la fascination. Le serpent se tient au pied de l'arbre la tête élevée et les yeux fixés sur l'écureuil. Une effluve magnétique émanant de ses prunelles ardentes, stupéfie sa victime, l'attire à lui jusqu'à la forcer à se jeter dans sa gueule béante. Aus- sitôt que le sciurien rencontre le regard de son ennemi, il commence à pousser des cris plaintifs sur une note si bien connue que les passants qui l'entendent se disent de suite : " Voilà un écureuil charmé par un serpent." L'alerte petit rongeur, en proie à une vive inquiétude, monte dans l'arbre un peu, puis il en descend, puis il grimpe encore plus haut pour redescendre encore plus bas. Et le serpent ne cesse de le tenir sous le feu de son regard enflammé jusqu'à ce que l'écureuil, hale- tant, épuisé, se laisse choir sous la dent venimeuse du crotale. Kalm a donné une description plus détaillée de la fascination exercée par les serpents sur les oiseaux et les écureuils dans les Mémoires de l'Académie Royale des Sciences de Stockholm (année 1753). Forster, le traducteur anglais, ne croit pas à la fasci- nation. Les serpents, dit-il, dans une note, ne dévorent guère que les oiseaux et les écureuils dont les nids sont à leur portée, et les cris d'alarme que jettent leurs victi- mes en montant et redescendant de branche en bran- che, ont pour but de détourner l'attention de l'ennemi PHILADELPHIE. 77 de dessus leurs couvées ou petits. Mais, parfois, il arrive qu'un bond ou essor mal dirigé les rapproche assez du serpent pour les mettre à portée de ses redou- tables mâchoires, et le gentil petit animal, quadrupède ou oiseau, ne tarde pas à mourir sous l'effet du poison et à devenir la proie du reptile. Pendant un temps, les écureuils causèrent des dom- mages si considérables à la récolte du maïs que le gou- vernement offrit de payer trois deniers chaque tête de ces petits quadrupèdes, et on en fit un tel car- nage que cette proscription coûta au trésor dans la seule année de 1749 à 1750 l'énorme somme de huit mille louis. L'écureuil volant {sciurus volans) est plus rare que l'écureuil gris ou noir et ses habitudes sont différentes. C'est un animal nocturne, qui reste caché dans sa retraite toute la journée, à moins qu'on ne lui donne la chasse, et ne se met en mouvement que la nuit pour aller cher- cher ses aliments, qui, du reste, sont les mêmes que ceux des autres espèces d'écureuils. Il vole au moyen d'une double membrane qui lui permet, en s'étendant, de sauter d'un arbre sur un autre ; il peut faire, ainsi, un trajet de vingt-cinq à trente pieds dans l'air. Ces sciuroptères s'apprivoisent très facilement. Kalm parle d'une autre espèce d'écureuils, l'écureuil suisse {sciurus striaius) ou écureuil de terre de Catesby, qui vit dans des galeries souterraines, et ne grimpe sur les arbres que pour y chercher un refuge contre les pour- suites du chasseur. Sa longueur est d'environ six pouces, non compris sa queue, qu'il porte aussi en panache. Son pelage est couleur de fer ou brun foncé et marqué de cinq raies noires, dont l'une impaire, s'étend le long de 78 NOVEMBRE 1748. l'échiné entre les quatre antres formant paire sur chaque flanc. On le voit rarement l'hiver, qu'il passe confiné dans sa retraite, vivant des provisions qu'il a amassées pendant la belle saison. Les chats lui font une guerre acharnée. L'écureuil suisse ne s'apprivoise jamais entièrement ; il est toujours dangereux de le toucher avec la main nue, et sa morsure est très dou- loureuse (1). / Après un examen minutieux d'un vase indien d'une belle facture, ornementé avec profusion, et de fragments de vieilles poteries, indiennes aussi, Kalm émet l'opi- nion, d'accord avec Bartram, qu'outre l'argile, il entrait dans la composition de ces ustensiles des matériaux dont la nature différait suivant celle des lieux où ils étaient fabriqués. Les sauvages qui habitaient les bords de la mer mêlaient avec la terre glaise de la poudre d'écaillés de moules et de coquilles de limaçons, et ceux de l'inté- rieur de la poussière de cristal de roche. Mais leur mode de fabrication des vases est encore entièrement inconnu. Il est certain qu'ils ne leur faisaient subir qu'une légère cuisson, car l'argile de ces vaisseaux est si molle qu'on peut la couper avec un canif. Et cependant la confec- tion en est excellente, puisqu'il n'est pas rare de trouver des vases indiens en parfait état de conservation après un séjour de plus d'un siècle dans le sein de la terre. Mais cet art s'est entièrement perdu parmi les sauvages depuis l'établissement des colons européens en Améri- que. Kalm dit avoir vu un pot en pierre d'ophite. On avait découvert une carrière d'ardoise (schntus tabularis) près de la rivière SkulkilL ( l) L'édition anglaise contient une gravure représentant l'écureuil volant et l'écureuil suisse, laquelle est reproduite dans l'édition hollandaise avec l'addition d'un dessin du putois d'Amérique ou bête-puante. M. RACCOON. 7$ Kalm a su par Bartram qu'il y avait dans les monta- gnes de la Pensylvanie de nombreuses grottes et caver- nes dont les stalactites présentaient l'aspect le plus curieux et le plus bizarre, mais il ne les a pas visitées. 20 Novembre. — Kalm alla passer quelques jours à Raccoon (1), dans le New-Jersey, C'est dans cette excur- sion que le botaniste suédois vit pour la première fois l'arbuste que ses compatriotes d'Amérique, appelaient arbre à cuillère, parce que c'est de son bois que les Indiens faisaient leurs cuillères ou truelles ; les Anglais, laurier, parce que ses feuilles ressemblent à celles du laurier-cerise, et que Linné nomma Kalmia en l'hon- neur de l'illustre voyageur. Kalmia foins ovatis, cor y m m bis terminaîibus ou Kalmia latifolia (Ericacées). Chose singulière, les feuilles de cette plante, qui sont un véri- table poison pour les chevaux, les bœufs et les moutons, forment la nourriture ordinaire des cerfs lorsque la neige couvre le sol. Les chasseurs en trouvent toujours dans les intestins de ces animaux durant cette saison, et les chiens qui mangeut ces débris deviennent comme stu- pides et tombent malades. Les feuilles de la Kalmie forment aussi, en hiver, la nourriture du ptarmigan, Lagopus mutus, appelé Hazel-Hen parles Suédois (2). Le bois de la Kalmie est très dur ; on en fait des axes de poulie, des navettes de tisserand. Il est fort recher- ché par les tourneurs et les menuisiers. Les feuilles de cet arbuste pétillent dans le feu comme le sel. On pré- tend que dans les incendies si fréquents qui consument des forêts presque entières, l'élément destructeur s'ar- rête lorsqu'il rencontre un groupe de Kalmies. (1) Aujourd'hui Swedesboro. M. (2) Oiseau de Tordre de? gallinacés, famille des tutras. M. 80 NOVEMBRE 1748. Une décoction de racine de sassafras, bue chaque matin avec application de ventouses sur les pieds, a guéri, paraît-il, plus d'un hydropique. Au commencement du 18e siècle, on avait l'habitude, à Londres, de boire du thé de feuilles de sassafras, mais quand on a su que cette infusion était donnée aux syphilisés, l'usage de cette boisson a été abandonnée. Kalm fait une observation qui montre avec quelle sagesse tout a été ordonné dans la création. C'est que dans les régions du Sud, où les bestiaux broutent le patu- rin des champs toute l'année, la plupart des espèces d'her- bes sont annuelles et se ressèment d'elles-mêmes. Dans les contrées septentrionales, au contraire, comme au Cana- da, par exemple, où les cultivateurs ont besoin de plus de fourrage pour nourrir leurs animaux à cause de la longueur des hivers, la plus grande partie des herbes sont pôrennes et vivaces. Les habitants du New-Jersey faisaient de la bière et même de l'eau-de-vie avec les pommes du plaqueminier de Virginie. Ils cultivaient en grand plusieurs espèces de me- lons (1) et de courges (2), ainsi que le sarrasin (3;, peu apprécié, cependant, par les Français du Canada. Vers le soir, le sol dans les bois, étincelait de lueurs phosphoriques jetées par les vers-luisants (4). Kalm décrit ces insectes comme suit : Corps linéaire formé de onze articulations jointes comme celles des cloportes, allongé (!) Cucumis Melo (Cucurbitacées). M. (•2) Cucurbila (Cucurbitacées). M. (3) Fagopyr um esculenium (Polygonacécs). M. i'4) Lampyris nocliluca (Coleoptera). NEW-JERSEY.— RACCOON. 81 aux deux extrémités, et d'une longueur de cinq lignes et demie géométriques ; couleur brune, antennes courtes et filiformes, pattes attachées aux articulations antérieu- res. Quand l'insecte rampe, ses articulations postérieu- res traînent sur le sol et aident à ses mouvements. L'extrémité de sa queue contient une matière qui reluit dans les ténèbres, en jetant une lumière verte. Les feuilles du houx, Ilex aquïfohum (Ilicinées), pilées dans un mortier et bouillies, se donnaient contre la pleurésie. Beaucoup de fermiers cultivaient le lin (1), peu le chanvre (2). On coupait avec la faucille le seigle (3 ,1e froment (4), et le sarrasin, mais on fauchait l'avoine (5). Les champs étaient laissés en friche pendant une année. Tous les habitants avaient des vergers. Les anciens colons remarquaient que le volume des eaux avait beaucoup diminué dans les lacs et les ruis- seaux depuis leur établissement dans le pays. En creusant des puits, on avait trouvé, à la profondeur d'une vingtaine de pieds, des écailles d'huitres, des coquilles de moules, des roseaux et d'autres plantes marines. La présence de ces fossiles dans l'intérieur de la terre démontre, dit Kalm, qu'une grande partie de la province de New-Jersey, à des époques reculées, était recouverte par les eaux de la mer. (1) Linum (Linées). M. (2) Cannabis saliva (Gannabinées). M. (3) Secale (Graminées). M. (4) Trilicum (Graminées). M. (5) Avena (Graminées). M. F 82 NOVEMBRE 1748. ' On avait aussi découvert, à la même profondeur, des blocs de bois, les uns pourris, les autres paraissant comme noircis par le feu, des briques, des cuillères et des truelles, et même jusqu'à une botte de lin. Au récit de cette dernière trouvaille, Kalm, qui avait remarqué déjà que le lin n'est pas une plante indigène de l'Améri- que, se récria : — " Assurément," dit-il aux vieux colons suédois qui prétendaient avoir été témoins oculaires de cette découverte extraordinaire, " vous vous êtes trom- pés ; vous avez pris pour du lin quelque végétal du pays, le lin de Virginie, par exemple, ou la linaire du Canada, antirrhinum canadense" (1). " Non," répondirent les vieillards, " et la preuve que nous n'avons pas fait erreur, c'est que la botte était encore munie de son lien i" " Il est certain, cependant," dit le savant botaniste, " que les Européens, à leur arrivée en Amérique, ^'ont trouvé notre lin commun ni à l'état sauvage ni en cul- ture parmi les Indiens. Comment donc a-t-on pu en retirer toute une botte des entrailles de la terre ? Faut- il supposer que, dans les anciens temps, il y avait ici une nation qui connaissait déjà l'usage du lin ? J'aime mieux m'en tenir à l'opinion qu'on aura pris des plantes d'A- mérique pour du lin." Mais il ne manquait pas de gens qui s'appuyaient sur ces découvertes de pièces de bois, de briques, de truelles, de cuillères et d'autres ustensiles évidemment faits de main-d'homme, pour conclure que l'Amérique était habitée avant le déluge. 27 Novembre —Kalm donne une liste des arbres qui avaient encore leur verdure à cette saison de l'année : 1 — Le houx, liez aquifolium. (1) (Scrofularinées). M. NEW-JERSEY. — RACCOON. 83 2 — La kalmie latifoliée ou arbre-à-cuillère. 3 — La kalmie angustifoliée. 4 — Le magnolier glauque ou arbre-à- castor. 5 — Le gui, Viscum album. 6— Le cirier de la Caroline, Myrica cirifera. 7 — Le sapin, Pinus abies (1). 8 — Le pin sylvestre, Pinus sylvesiris (Conifères). 9 — Le cèdre blanc, Cupressus thyoides. 10 — Le cèdre rouge, Juniper us Virginiana. Kalm attribue la perte prématurée des dents, si com- mune parmi les colons et surtout chez leurs filles et leurs femmes, à l'usage du thé bouillant et des mets trop chauds. " Les Indiens, qui ne mangent que des viandes froides, ont tous des dents saines. " Il note plusieurs remèdes contre les fièvres intermit- tentes si fréquentes alors dans les provinces anglaises et qui attaquaient les étrangers, la première ou la seconde année de leur arrivée. Ces remèdes sont le quinquina, l'écorce de la racine du tulipier ou du cornouiller, 3'écorce jaune du pêcher, les feuilles de la potentille, potentilla reptans, potentilla canadensis (rosacées), les raci- nes de la benoîte des ruisseaux, geum rivale (rosacées), la sauge mêlée avec du jus de citron. i Le voyageur suédois parle longuement d'une maladie qui faisait tous les ans de terribles ravages parmi les colons, dépeuplait en quelques jours des villages entiers et qu'il appelle pleurésie. A la vérité, plusieurs des symptômes qu'il décrit comme la fièvre et les points de côté, sont propres à cette affection. Mais la pleurésie n'est de sa nature qu'une maladie accidentelle due, la plupart du temps, à quelque imprudence ; elle n'est ni (1) Abies Amoricana (Conifères). M. 84 DÉCEMBRE 1748. contagieuse, ni épidémique. Tous les autres symptômes rapportés par l'auteur, comme l'inflammation de la gorge, l'enflure du cou, la difficulté d'avaler, ressemblent à ceux de la maladie appelée autrefois angine gutturale gangreneuse et diphtérie aujourd'hui, et qui est conta- gieuse. " Le mal était si violent," dit Kalm, " que lorsqu'il attaquait une personne, elle mourait au bout de deux ou trois jours." Or la pleurésie n'a pas ce caractère d'inten- sité, et elle dure plus de neuf jours (1). Le 3 Décembre, Kalm retourna à Philadelphie. Des vieillards hollandais se rappelaient avoir entendu dire, dans leur jeunesse, que les Indiens fumaient avec des pipes de cuivre, lors de l'arrivée des premiers colons sur cette terre d'Amérique. En effet, mais longtemps après, une belle mine de ce métal fut découverte, entre Elizabethtown et New- York. Lorsqu'on commença à l'exploiter, on trouva des traces d'anciennes fouilles, comme des outils et des excavations. Kalm pense que ces premières recherches furent tout simplement faites par des Indiens ; " à moins," dit-il, "qu'on ne les attribue à nos vieux Normands, qui, suivant le recueil de nos ancien- nes traditions appelé Sagor, seraient venus attérir sur ces côtes, longtemps avant les découvertes de Christophe Colomb ; car il n'y a pas de doute que l'excellente terre de la Yinlande dont ces hardis navigateurs ont décrit les merveilles, était l'Amérique du Nord" (2). Franklin se plaisait à raconter que le territoire de la province du Ehode-Island avait été cédé tout entier aux Anglais par un grand chef sauvage en échange contre une (1) Quelques-uns des symptômes décrits par le savant professeur res- semblent à ceux de la maladie que l'on désigne aujourd'hui sous le nom de pleuro-pneumonie épidémique. M. (2) Ici, le traducteur anglais renvoie le lecteur à l'ouvrage rare et curieux intitulé: " Torfaei historia Vinlandiœ aniiquee seu partis America? Septentrionalis," Hasniae, 1715, 4to. PHILADELPHIE. 85 paire de lunettes. Kalm, qui était peut-être myope, n'a pas l'air de considérer que le sachem ait fait un mauvais marché. Il se contente de remarquer que cet Indien savait ce que vaut une paire de lunettes : ucar il n'y a pas de doute que si les verres étaient bien rares, et que si un petit nombre de privilégiés seuls pouvaient s'en procurer, ils se vendraient le prix des diamants. " Il y avait deux classes de serviteurs dans les colonies anglaises, les domestiques et les esclaves, et la première classe se divisait en deux catégories : lo. Ceux qui, de condition libre, se louaient à l'année au prix variant de huit à vingt louis, nourriture à part. 2o. Les pauvres immigrants qui, n'ayant pas eu les moyens de payer leur passage, étaient convenus avec le capitaine du vaisseau sur lequel ils avaient fait la traversée, de se laisser vendre, pour quelques années, à leur arrivée en Amérique. Cette catégorie de domes- tiques, qu'on appelait les engagés, comprenait des indi- vidus de tout âge et de tout sexe, et beaucoup de mal- heureux qui fuyaient l'oppression et la persécution religieuse. Les esclaves étaient tous de race nègre. Le maître n'avait pas droit de vie et de mort sur eux. La loi condamnait même à la peine capitale celui qui tuait son esclave. Mais on n'avait pas connaissance qu'un blanc eût jamais été exécuté pour le meurtre d'un noir. Un nègre, homme fait, coûtait de quarante à cent louis ; un négrillon environ quatorze louis; une négrillonne huit louis. Les Quakers s'étaient d'abord fait un scrupule de posséder des esclaves, mais chez la plupart, l'intérêt avait eu bientôt raison de cette délicatesse de conscience. Le maître qui avait des esclaves des deux sexes les obligeait de se marier entre eux, parce que tous les 86 DECEMBRE 1748. enfants qui naissaient de ces unions lui appartenaient. Mais celui qui, ne possédant qu'un nègre mâle, lui per- mettait de prendre femme dans la maison d'un proprié- taire voisin, n'avait pas part avec ce dernier dans les fruits de ce mariage. C'était, par conséquent, un grand avantage que d'avoir une négresse pour esclave. Les mariages entre blancs et noirs étaient défendus sous peine de mort. " Il est vraiment pénible," dit Kalm, " de voir comme les maîtres sont peu soucieux du bien être spirituel de leurs esclaves dans la plupart des colonies anglaises." On craignait d'en faire des chrétiens, de peur qu'ils ne vinssent à s'enorgueillir en apprenant que tous les hom- mes sont frères. Les noirs connaissaient une sorte de poison lent avec lequel ils exerçaient leurs vengeances ; mais rarement ils en usaient contre leurs maîtres. On n'a jamais pu découvrir en quoi consiste ce poison. C'est cependant une substance très commune et qui se trouve partout : car le nègre se procure le poison facilement, dans n'im- porte quelle partie du monde, qu'il habite. Il est certain que ce n'est pas une plante. Un esclave de la campa- gne, que son maître avait pris en affection, et qui, à cause de cela, était l'objet de la haine de ses frères, se trouvant à Philadelphie un jour de foire, fut emmené par d'autres nègres à une partie de plaisir. On buvait à la ronde dans un pot qui passait de main en main. Le campagnard se tenait sur ses gardes. Il refusa la première fois ; à la seconde tournée, cependant, il céda aux instances de ses hôtes et porta le pot à ses lèvres. Mais à peine eut-il avalé quelques gorgées du liquide qu'il s'écria : " Quelle est cette bière-là ? elle est pleine de " désignant la substance par son nom. que PHILADELPHIE. 87 Kalm a remplacé par des points, pensant qu'il valait mieux le taire dans l'intérêt de la société, vu que c'est le nom d'un ingrédient extrêmement commun. Aux reproches du pauvre diable, qui les accusait de l'avoir empoisonné, ses compagnons, hommes et femmes, ré- pondirent par des éclats de rire et des chansons suivies de danses (probablement la danse du vaudoux). A la fin, il parvint à s'échapper des mains de ses bourreaux ; de retour chez son maître, il ne tarda pas à tomber dans une maladie de langueur dont aucun remède ne put le guérir. Le 7 Décembre, Kalm retourna à Eaccoon, où il con- tinua son étude des mœurs des habitants de la cam- pagne. Aussitôt qu'un jeune homme avait atteint l'âge de se marier, il s'achetait un lopin de terre et entrait en mé- nage sans craindre la pauvreté. Les taxes étaient fort peu élevées. Chaque paysan jouissait de la plus entière liberté, et pouvait se considérer comme un prince dans ses possessions. Le peuple était heureux et les mariages féconds. En 1732, une veuve du nom de Sarah Tuthil mourut à Ipswich dans la Nouvelle-Angleterre, à l'âge de 86 ans. Elle avait eu seize enfants, dont sept lui donnèrent de son vivant cent soixante dix-sept petits-enfants et arrière petits-enfants. En 1739, les enfants et les petits-enfants de Richard Buttington, de la paroisse de Chester, en Pensylvanie, firent une réunion de famille comprenant cent quinze personnes, dans la maison de leur aïeul, alors âgé de quatre-vingt-cinq ans, et encore frais et vigoureux. Son fils aîné, âgé de soixante ans, fut le premier Anglais qui naquit en Pensylvanie 88 DÉCEMBRE 1748. En 1742, mourut à Trenton, dans le New-Jersey, une dame Sarah Furman, âgée de quatre-vingt-dix-sept ans. laissant cinq enfants, soixante-et-un petits-enfants, cent quatre-vingt-deux arrière-petits-enfants, et douze enfants issus d'arrière petits-enfants, tous vivants à l'heure de son décès. En 1739, mourut à South Kingston une dame Maria Hazard dans sa centième année. Elle a pu compter de son vivant cinq cents enfants, petits-enfants, arrière- petits-enfants et enfants issus de ces derniers. A sa mort, deux cent cinq de ses descendants vivaient encore et une de ses petites-filles était grand'mère depuis près de quinze ans. Comme on le voit, le souhait que la liturgie met dans la bouche du ministre du culte à l'adresse des nouveaux mariés, "Que le Dieu d'Abraham, le Dieu d'isaac, le Dieu de Jacob soit avec vous, et qu'il répande en vous sa bénédiction, afin que vous voyiez les enfants de, vos enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération," s'accomplissait à la lettre dans ces temps de vie patriar- cale. Des études de mœurs, le savant naturaliste passe à celle des insectes sans aucune transition, suivant sa coutume. Les sauterelles (Locustes) (1) faisaient irruption tous les dix-sept ans. Elles sortaient de terre au milieu de Mai et endommageaient les arbres en dévorant l'épi- derme des jeunes branches avec leurs fortes mandibules dentées, et non, comme le prétend Kalm, en le piquant avec un aiguillon abdominal dont il les gratifie à tort. Cependant, la femelle est munie, à son extrémité posté- (1) Gryllus migralorius (orlhoptera). M. NEW-JERSEY.— RACCOON. 89 rieure, d'une sorte de tarière qu'elle peut tirer ou retirer à volonté, et avec laquelle elle perce la terre à la fin de l'automne pour y déposer ses œufs, après quoi elle meurt. La larve de la phalène (genre d'insectes lépidoptères de la famille des nocturnes) faisait de grands ravages dans les forêts en dévorant les feuilles des arbres. Kalm mentionne ensuite une espèce de ver, grass- worm, qui causait beaucoup de dommages. C'était peut- être la larve du hanneton, Melolontlia vulgaris (Coléop- tères), vrai fléau des jardins, des vergers et des champs, ou celle de la piéride des choux, Pieris Brassicae (Lépidoptères). Heureusement, ces trois espèces d'insectes nuisibles ne paraissaient pas en même temps ; les sauterelles venaient la première année, les chenilles la seconde et les vers ou larves, la troisième. L^s mites, tinea veslianella (1), étaient aussi très abon- dantes et très redoutées des fourreurs, des chapeliers, ainsi que des ménagères. Parlant des puces, pulex ir ri tans (2), Kalm dit qu'il n'y a pas de doute qu'un grand nombre de ces parasites ont été apportés sur le continent par les immigrants. Mais il prétend qu'il faut les ranger au nombre des insectes indigènes, parce qu'il en a trouvé sur la peau d'écureuils gris et de lièvres tués dans des déserts où aucune créature humaine n'avait jamais vécu. " Com- bien de fois," dit-il, %< obligé de demander l'hospitalité à des Indiens durant mes voyages, et de coucher sous leurs huttes, m'est-ii arrivé d'être tourmenté par ces insectes, au point de rêver que j'étais entre les mains du bourreau, subissant la torture ? " (1) Lepidoplera. M. (2) Apha'iiplcra. M, 90 DÉCEMBRE 1748. Il n'a vu le grillon domestique (gryllus domeslicus) (1) ni en Pensylvanie ni dans le New-Jersey. En été, le criquet noir (gryllus campestris) ou grillon champêtre s'introduisait quelquefois dans les maisons, et y faisait entendre son cri-cri aussi longtemps que les chaleurs duraient. Mais aux premiers froids, il devenait silen- cieux. Il n'en est pas de même en Canada, où le grillon domestique chante gaiement dans les demeures de l'homme, l'hiver comme l'été. Chose curieuse, la punaise (Cimex lectuarius) (2), si avide de sang humain en général, respecte la poau des Indiens, qui ne sont pas incommodés par cette vermine. L'éminent naturaliste s'appuie, pour affirmer que les sauvages jouissent de cette immunité, non-seulement sur son expérience personnelle, mais aussi sur l'autorité de M. de Lusignan, gouverneur du fort de St Frédéric, en Canada. Cet insecte est-il originaire de l'Amérique ? Après avoir discuté la question, Kalm semble pencher pour la négative et croire qu'il a été apporté d'Europe. Certaines personnes lui ont affirmé, il est vrai, avoir vu des punaises sous les ailes de chauves-souris (3). Mais cette observation n'est pas concluante, car il est bien connu que les chéiroptères entrent souvent dans les maisons pendant les nuits d'été. De plus, on peut avoir pris un pou (4) ou une tique (acarus) (5) pour une punaise. La blatte des cuisines, blatta orierilalis (orthoptères), est un autre fléau domestique de l'Amérique Septentrionale. (1) Orlhoplera. M. (2-) Ilemiplera. M. (3) Vesperlilio muriius (Cheiroplera). M. (4ï Pediculus (Anopluri) (5) Arachnida. NEW-JEBSEY.— KACCOON. 91 / Le savant Dr. Colden (1) croyait que cet insecte était originaire des Antilles, et qu'il avait été apporté aux colonies dans les vaisseaux qui naviguent entre l'archipel et le continent. Kalm pense au contraire que la blatte existe de temps immémorial dans l'Amérique du Nord, parce qu'on la trouve dans les bois et les déserts. Il dit qu'en Octobre 1749, voyageant au travers des forêts dans les régions inhabitées qui s'étendent entre les colonies anglaises et le Canada, il lui est arrivé plus d'une fois d'en voir sortir des légions des troncs d'arbres pourris près desquels il allumait du feu. Ses guides français ne connaissaient pas cet insecte et en ignoraient même le nom. Il faut croire que la blatte n'existait pas alors au Canada. Les Hollandais donnaient à cet insecte le nom de kakerlack, et les matelots celui de cancrelas. ♦Kalm ne mentionne qu'en passant les cloportes, autres hôtes désagréables des bois ; il renvoie le lecteur à la description qu'il a donnée de cet insecte dans les Mé- moires de l'Académie Royale de Stockholm (année 1754). Le 11 Décembre, il fit une courte excursion de deux jours à Penn's Neck (2) et à Wilmington. En passant à travers bois, il remarqua que la plupart des vieux arbres n'avaient guère plus de deux cents ans d'existence et présentaient déjà des signes de caducité. Souvent on re- marque des buttes dans les bois. Elles sont produites par la terre qui reste attachée aux racines des grands arbres abattus tout d'une, pièce par les ouragans ; au bout d'un certain temps, cette terre finit par tomber en formant un monticule. Yoilà la cause des inégalités du sol dans les forêts. Quelques arbres sont plus sujets à la pourriture que (!) Cadwallader Golden, auteur de l'Histoire des cinq nations sauvages du Canada, publiée à Londres, en 1747. M, (?) Aujourd'hui Penn's Grove. M. 92 DÉCEMBRE 1748. d'autres, tels que la nysse, le tulipier et le liquidambar. Le noyer n'est pas de longue durée ainsi que le chêne blanc ; celui-ci cependant a plus de vitalité que -le chêne noir. Les menuisiers employaient de préférence le noyer noir, le cerisier sauvage, le sapin et le cèdre blanc. L'érable rouge à fibres ondulées était très recherché par les ébénistes. Les chevilles et les tampons employés dans la construction des navires étaient faits de bois de mûrier ; les treuils de roues de moulins, de chêne blanc ; les alluchons ou dents de roues d'engrenage et les pou- lies, de noyer. Le 13 Décembre, Kalm s'en retourna à Raccoon ; che- min faisant, il remarqua sur des chênes, des érables rouges et des frênes, des loupes ou excroissances dont quelques-unes de la grosseur d'une tête d'homme. Ces tumeurs ou gibbosités sont causées par les insectes qui déposent leurs œufs sous l'écorce des arbres après l'avoir trouée. Le travail d'éclosion des vers fait extravaser la sève qui se condense graduellement jusqu'à former des loupes. Les arbres à feuilles persistantes ne sont pas sujets à cette difformité . Autrefois, les colons, à l'exem- ple des paysans russes, se fabriquaient des bols et d'au- tres ustensiles de ménage avec ces bosses. Les chemins étaient fort mal entretenues dans la province du New-Jersey. Il n'y avait pas de ponts sur ]es ruisseaux qui coup'aient la route et on les traversait comme on pouvait, au risque de se noyer aux eaux hautes. Un arbre tombait-il en travers de la voie, per- sonne ne se donnait la peine de le relever ; on se con- tentait de faire un détour pour l'éviter. Les mariages étaient annoncés par la publication des bans, à moins qu'on n'en obtînt du gouverneur une dispense qui coûtait vingt-cinq chelins. NEW-JERSEY. — BACCOON, 93 Dans le Maryland, quand un ministre mariait un cou- ple qui lui paraissait peu doué des dons de la fortune, il s'arrêtait au beau milieu de la cérémonie pour deman- der ses honoraires, et si l'épouseur ne s'exécutait pas de bonne grâce ou demandait du délai, le pasteur refusait de prononcer le conjungo. Le ministre ne pouvait marier des mineurs sans le consentement des parents, ni des engagés sans le con- sentement de leurs maîtres, sous peine d'une amende de <£50. Le pasteur qui donnait la bénédiction nuptiale à un couple formé d'un noir et d'une blanche ou vice versa était passible d'une amende de <£100 et de déposition. Kalm rapporte une coutume singulière qui s'était établie dans cette partie des colonies anglaises. Une veuve trop pauvre pour payer les dettes laissées par son mari à son décès trouvait-elle à se remarier, malgré son dénûment, elle était libre de convoler, mais à la condition de ne porter pour robe de noce que sa che- mise. La dame s'étant dépouillée de tout, même de ses hardes, les créanciers du défunt n'avaient plus rien à réclamer. Les registres font foi de l'existence d'un semblable usage. Kalm rapporte un fait de cette nature dont il a lu le récit dans un journal. 11 Une femme," dit-il, " sortit un matin de la maison de son mari décédé pour se rendre à celle de son futur. Elle n'avait que sa chemise pour tout vêtement. Mais à mi-chemin son fiancé l'attendait avec une belle robe toute neuve, dont il lui couvrit les épaules en prenant tous ceux qui étaient présents à témoin qu'il faisait un prêt de cet ajustement à sa prétendue et non un cadeau. Après quoi, le couple se rendit à l'Eglise, sans avoir à redouter l'avidité des créanciers du premier mari." 94 DÉCEMBRE 1748. Le savant voyageur cite quelques observations qui donnent de la probabilité à l'opinion que dès longtemps avant le 15e siècle, des Européens sont venus en Amé- rique et y ont fondé des établissements. Il est certain que les Suédois, qui se fixèrent au 17e siècle sur les bords de la Delaware, trouvèrent dans la terre, à la pro- fondeur d'environ vingt-huit pieds, des puits eutourés de murs. Evidemment, ces puits furent l'ouvrage d'hommes civilisés, car les Indiens ne savaient pas faire de la brique; ils n'en connaissaient pas même l'usage. Mais s'il y a eu des établissements avant la découverte de Christo- phe Colomb, que sont-ils devenus ? Leurs habitants ont- ils été massacrés par les Indiens, ou bien ces hardis aventuriers ont-ils fini par adopter les mœurs et les cou- tumes des sauvages, et se confondre avec les aborigènes ? Kalm penche pour cette dernière hypothèse. N'avait-il pas l'exemple de ses compatriotes suédois de la Pensyl- vanie, que les Anglais trouvèrent dans un état de demi- barbarie en 1682. " Et ne voyons-nous pas tous les jours," dit-il, " des Européens d'origine française, an- glaise, allemande, hollandaise, qui, après avoir vécu pendant plusieurs années successives au milieu des Indiens, en sont arrivés à leur ressembler tellement par leurs manières et leur tournure d'esprit, qu'on ne peut plus les en distinguer que par la différence de couleur." De remèdes contre les maux de dents, l'auteur dit qu'on en comptait autant qu'il y a de jours dans l'année. Si la douleur provenait d'une dent cariée, on y intro- duisait du coton imprégné de nicotine, extrait tout brû- lant du fond d'une pipe bourrée de tabac fumé à grosses bouffées. Les Iroquois avaient enseigné aux colons un remède excellent, composé de capsules de l'anémone de Virgi- nie trempées dans de l'eau-de-vie. NEW-JERSEY. — RACCOON. 95 Si la douleur était accompagnée de l'enflure des gen- cives, ou s'appliquait sur la joue un cataplasme formé de gruau de maïs, de lait et de saindoux, ou de l'écorce intérieure du sureau blanc, sambucus catiadensis, ou en- core de cire de Myrique. Avant la découverte de l'Amérique, les sauvages ne connaissaient pas l'usage du fer. Ils se servaient de pierres pointues ou aiguisées, d'écaillés, de griffes d'ani- maux, de morceaux d'os. Leurs hachettes étaient formées de pierres cunéiformes attachées avec des cordes à de longs bâtons fendus à leur extrémité. Pour abattre un grand arbre ou le creuser, ils em- ployaient le feu. Un morceau de quartz' aiguisé leur tenait lieu de couteau. La pointe de leurs flèches était faite de fragments de pierre acérés ; leurs hameçor s d'os ou de griffes d'oiseaux. Ils se fabriquaient des pilons en pierre pour moudre leur maïs, qui, de tout temps, a formé leur principale nourriture. Leurs chaudrons ou chaudières étaient en terre glaise et en différentes sortes de potstone ou pierre ollaire (Lapis ollaris), ainsi que leurs pipes. Mais la pipe des sachems, appelé calumet^ de paix par les Français, était faite d'une belle pierre rouge, très rare, et qu'on ne pou. vait se procurer que dans le pays des Ingouez, nation indienne qui, suivant le Père Charlevoix, habitaiU'autre côté du Mississipi (1). 5 Janvier 1749.— Noël fut célébré, ce jour-là, par les Suédois et les Anglais, qui suivaient encore le vieux calendrier. (I) Voir son journal historique d'un voyage dans l'Amérique, tome V, p. m. 311 et la 13e lettre. — (Note de l'auteur.) 96 JANVIER 1749. Kalm, parlant des lièvres de la Pensylvanie et du New Jersey (1), dit qu'ils sont plus petits que ceux de la Suède, leur grosseur ne dépassant guère celle du lapin ; qu'ils conservent leur couleur grise l'hiver comme l'été, que l'extrémité de leurs oreilles est toujours de cette même couleur, ainsi que la partie antérieure de leur queue, et que leur peau n'est bonne à aucun usage. Ces animaux ne s'apprivoisent pas. " Cette description," remarque Forster, " démontre que ces lièvres n'appartiennent pas à la même espèce que nos lièvres gris-cendré. Ils diffèrent aussi de ceux du Nord de l'Europe et de l'Asie, dont le pelage gris en été devient blanc l'hiver, et qui ont le bout des oreilles- noir. Après un examen plus minutieux, les naturalistes trouveront peut-être à ces rongeurs d'Amérique d'autres caractères particuliers, qui leur permettront d'en déter- miner l'espèce avec plus d'exactitude." Oldmixon, dans son livre Britisli Empire in America^ vol. 1, p. 144, prétend que l'Amérique du Nord n'avait ni rats (2) ni souris (3) avant l'arrivée des premiers vais- seaux européens. Kalm ne concourt pas dans cette opinion et Bartram était de son avis. Ce dernier main- tenait que les rats devaient exister dans le pays long- temps avant cette époque, parce qu'il en avait vu beau- coup dans les Montagnes Bleues vivant dans les crevasses des rochers. C'est un signe certain de froid quand les rats deviennent plus agités et plus bruyants qu'à l'ordi- naire. Le 21 Janvier, le thermomètre de Celsius marqua 22 degrés au-dessous du point de congélation, et l'air glacé de sa chambre sans foyer ni cheminée, percée de fenê- (t) Lepus americamis (Rodentia). M, i2) M coronaria ou Pyrus coronaria, très commun en Pensylvanie, venait d'entrer en floraison. " Les fruits (3), petits et acides, ne sont bons que pour faire du vinaigre." (I) Crocus (Iriciées). (1) L'espèce de cotonnier plus généralement cultivée aux Etats-Unis est le gossypium barhadense. L'usage du coton date dos temps préhisto- riques tant, dans l'ancien que dans le nouveau-monde. Avant la découverte de l'Xmérique, les aborigènes savaient s*en fabriquer des tissus. Pline dit que le cotonnier était cultivé dans la Haute Egypte. Les Maures intro- duisirent cette plante en Espagne. Les premières manufactures de coton furent établies en Angleterre à la lin du seizième siècle par des réfugiés Uamands M. (3) Pomm 's de Sibérie, pommes d'amour. M, 118 mai 1749. Kalm place ici une observation. Il se demande pour- quoi les arbres importés d'Europe, comme les pommiers par exemple, fleurissent, en Pensylvanie, beaucoup plus tôt que les arbres indigènes de mêmes espèces. Sa réponse est curieuse. Cette précocité des individus exotiques, dit-il, e&t inexplicable, à moins qu'on n'admette qu'ils ouvrent leurs enveloppes florales dès qu'ils reçoi- vent le degré de chaleur qui provoque l'efnorescence dans les pays d'où ils sont originaires — ne s' attendant pas aux changements climatériques si fréquents ici et inconnus en Europe. Au contraire, les individus indi- gènes sont instruits par l'expérience (si je puis m'expri- mer ainsi) à ne pas se fier aux premières apparences de beau temps et de chaleur ; ils diffèrent prudemment leur entrée en floraison jusqu'à ce que la saison étant plus avancée, les nuits froides ne soient plus à craindre. Aussi, arrive-t-il souvent que les arbres importés d'Europe périssent par la gelée, tandis que les indigènes de mêmes espèces n'en souffrent aucunement. " Peut-on trouver une preuve plus manifeste de la sagesse du Créateur ?" Kalm passa la journée du 5 Mai à Eapaapo, grand vil- lage habité exclusivement par des Suédois. Les azalées, azalea nudiflora (Ericacées), alors en flo- raison, ajoutaient à la beauté des bois par l'éclat de leurs splendides corolles. Les Anglais appelaient cet arbuste Whitsunday-flower, et le confondaient quelque- fois, avec le chèvrefeuille, auquel il ressemble, en effet, vu de loin ; les Hollandais lui donnaient le nom de Pinxter-flower, et les Suédois celui de Moy-flower (1). Kalm parle longuement de la grenouille mugissante (I) Ce nom appartient plutôt à l*épigée rampant, qui est de la même famille que les azalées. /M.) NEW-JERSEY. — RAPAAPO. 119 des marais, Rana boans, Linii. (1), qui était une nou- veauté pour lui, cette espèce de grenouille ne se rencon- trant pas en Europe. Il faisait à cheval une excursion à travers champs, quand il entendit pour la première fois, le coassement de ce batracien géant, et se crut pour- suivi par un taureau furieux ; il ne connut sa méprise que quelques heures après, lorsqu'il voulut raconter comme quoi il avait couru un grand danger. La gre- nouille mugissante, lorsqu'elle est rendue à sa pleine croissance, peut franchir la distance de trois verges d'un seul saut. On sait que les sauvages sont très forts à la course. Un Suédois fit un pari avec un jeune Indien qu'il ne pourrait rattraper une de ces grenouilles, à condi- tion qu'il lui donnât une avance de deux bonds sur lui. Le sauvage accepta la gageure et la perdit. Mais on avait eu la précaution de choisir pour champ de course le voisinage de l'étang habité par le batracien lutteur, auquel, en outre, pour lui donner du cœur au ventre, on avait brûlé le postérieur avant de le lancer dans l'arène. Il faut dire que la grenouille-taureau avait peu d'amis : les ménagères lui attribuaient souvent la dispa- rition mystérieuse de jeunes oies et de petits canards ; et peu d'appréciateurs des bonnes qualités de sa chair, qui est aujourd'hui un mets recherché. Les Anglais appelaient wkite jimiper-lree, ou cèdre blanc, le faux-thuya ou arbre de vie, avec le bois duquel on fait du bardeau. Ce n'est pas un arbre à croissance rapide. Kalm a compté cent-seize cernes (2) sur le tronc d'un faux-thuya qui n'avait que 17 pouces (I) Rana maxima americana aquatica (Catesby). On a vu plus haut que celte espèce de grenouille a < té désignée aussi sous le nom de rail i. pipiens. (ï) Cercles concentriques que l'on remarque sur la tranche d'un arbre coupé horizontalement, et qui marquent son accroissement annuel. I,c nombre des cernes indique l'âge de l'arbre, 120 mai 1749 de diamètre. Ainsi, il lui faut quatre-vingts ans de croissance, au moins, avant de pouvoir servir comme bois de construction. Mais son bois est peu pesant. On le préférait à tout autre pour les couvertures de maisons, qu'on construisait si légères à Philadelphie, au dire de l'auteur, que leur poids ne paraissait pas affecter les murs, qui, en conséquence, étaient bâtis aussi minces que possible. Il a mesuré l'épaisseur des murailles de plusieurs maisons à trois étages (cave et grenier non- compris), et a trouvé qu'elle ne dépassait pas générale- ment dix pouces. On a remarqué que l'eau des terrains bas, où croît le cèdre, est un excellent apéritif. Le cèdre de Virginie, j unipcrus Virginiana, ou cèdre rouge, ressemble, quand il est jeune, au genévrier com- mun, j unipervs communis ; mais lorsqu'il est parvenu à une certaine hauteur, ses feuilles changent de forme. Kalm dit avoir vu un individu de cette espèce dans l'ile Magdelaine (Ste Hélène), propriété du Baron de Longueuil, gouverneur de Montréal. Le mûrier commença à fleurir le six Mai ; le même jour, le smilace entrait en feuillaison. Le 18 Mai, Kalm nota dans son journal une série d'observations pour démontrer que le climat de la vieille Suède est préférable à celui de la Nouvelle-Suède ; comme l'obscurité profonde des nuits en Pensylvanie pen- dant l'été, la rareté des aurores boréales, le peu d'éclats des étoiles et l'absence de neige en hiver ; la multipli- cité des serpents venimeux, serpents-à-sonnettes, ser- pents-à-cornes (1), serpents à ventre rouge, serpents verts, et de tant d'autres reptiles dangereux, sans compter (1) Cérastes, genre de serpents vivipares, de L'ordre des ophidiens, qui ont sur la tète deux éminences courbes en forme de corn?, et dont la mor sure est très dangereuse. M, NEW-JERSEY. — RACCOON. 121 les cloportes, véritable peste des forêts ; l'inconstance du temps, l'ardeur excessive du soleil l'été, cause d'insola- tions fréquentes et d'un caractère presque toujours fatal ; les fièvres intermittentes, qui n'éparg-nent personne ; les insectes, qui détruisent le gçain, entre autres le Bruchus pi si, lequel a fait abandonner la culture des pois ; les chenilles, qui dévorent les feuilles des arbres ; la pauvreté des pâturages ; la mauvaise cons- truction des maisons considérées comme habitations d'hiver, et enfin la fréquence et l'extrême violence des ouragans. L'industrie, ajoute-t-il, pourra remédier à quelques- uns de ces inconvénients, mais pour la plupart elle sera impuissante. Ainsi, chaque pays a ses avantages et ses désavantages : heureux celui qui se contente du sien. Kalm trouve singulier que les Anglais, qui ont porté chez eux l'agriculture à un plus haut degré de perfec- tion qu'aucune autre nation, semblent avoir adopté en Amérique le système agronomique des Indiens. Après qu'ils avaient défriché et converti en champs arables une étendue de terre, ils la cultivaient aussi longtemps qu'elle produisait du grain, et quand elle était épuisée, ils la laissaient en pâturages et allaient, la hache à la main, se faire de nouvelles terres à blé aux dépens de la forêt. Les champs, les prairies, les bois, les bes- tiaux, étaient traités avec la plus grande négligence par les habitants, qui n'avaient d'yeux que pour le gain du moment et ne pensaient pas à l'avenir. Leurs bêtes de somme, harassées par le travail de chaque jour, ne trou- vaient pas une nourriture suffisante et décroissaient de génération en génération. Le savant professeur, au reste, adresse le même reproche aux colons de toutes les autres origines, Suédois, Allemands, Hollandais e1 Français. 122 MAI 1749. Les habitants se plaignaient de la pauvreté des pâtu- rages ; mais ils ne savaient pas employer les graines de beaucoup de plantes utiles, et faisaient peu de cas des enseignements de l'Histoire Naturelle, science qu'ils considéraient, à l'instar de plusieurs autres peuples, comme un jeu et le passe-temps des fous. Ce n'était pas la sagesse du Créateur qui était en défaut, ni sa bonté, mais la prévoyance du colon, qui dédaignait de profiter des richesses que la main de la Providence avait semées avec prodigalité autour de lui. 0 fortunatos nimium sua si bona norinî Agricolas ! VlliG. GhORGIQUES. " On trouvera peut-être," ajoute Kalm, "ces réflexions étrangères à mon sujet : mais elles m'ont été inspirées par la négligence avec laquelle l'agriculture est prati- quée partout sur ce continent. D'ailleurs, je les donne comme mon excuse pour le petit nombre d'informations utiles que contient ce journal dans les différentes bran- ches de l'économie. Je ne puis nier cependant que j'ai rencontré, par-ci par-là, un ou deux agronomes habiles."' Les forêts d'Amérique étaient habitées par de nom- breux troupeaux de cerfs. Ils se nourrissaient d'her- be, de trèfle, des feuilles du noyer, de l'andromède-à- grappes, andromeda paniculata (Ericacées), du géranium maculé, géranium maculatum, du plantain commun, plan- tago. Dans les hivers de 1705 et 1740, beaucoup de ces animaux furent trouvés morts de faim dans les bois. L'ennemi naturel du cerf est le loup-cervier (1,) qui grimpe dans les arbres, d'où il saute sur sa proie à son passage, la déchire ensuite de ses dents et suce son sang (I) Felis Lynx (Garni ores-di^iligra.Jes). M, NEW-JERSEY. — RACCOON. 123 jusqu'à ce qu'elle s'abatte épuisée et meure. Un Anglais, heureux propriétaire d'une biche privée, qu'il avait prise toute jeune, s'en servait comme d'un appât pour attirer les cerfs de la forêt jusque chez lui. Il lui avait pendu une clochette au cou et la laissait errer en toute liberté dans les bois. Souvent, au temps du rut, des mâles trop galants venaient en bramant reconduire la perfide jusqu'à son logis, témérité qu'ils payaient ordi- nairement de la vie. Le possesseur de la biche réalisait de jolis bénéfices par la rente de ses faons. Le 19 Mai, Kalm partit de Raccoon et reprit la route de Philadelphie. En chemin, il rencontra et tua un serpent noir (1) qui avait cinq pieds de long. Le naturaliste eut l'occasion de se convaincre de ses propres yeux, qu'il ne faut pas toujours se fier, avec Linné, sur le nombre des écailles abdominales et caudales, scuta abdominalia et caudalia ou squamœ subcau- dales, pour faire la distinction entre diverses sortes de serpents. Forster dit que la différence dans le nombre des écailles chez des individus de même genre dépasse quelquefois le nombre dix, mais que néanmoins le caractère indiqué par Linné aide à reconnaître les espèces. Il en est de cette particularité comme des marques tirées des couleurs, des mouchetures, des rayures de la robe des fauves (2), qui ne sont pas inva- riables. Le serpent noir est le plus vif de tous les ser- pents. C'est à peine si un chien peut le rejoindre à la course. . Il est par conséquent presque impossible qu'un homme échappe à sa poursuite. Heureusement, sa mor- sure n'est ni venimeuse, ni même dangereuse. Rarement (1) Anguis w'ger, Catesl'V, Coluber constrictor, de l'ordre «les ophi- diens. M. (2) " Il faut bien se garder de juger de la nature des êtres par un seul caractère," a dit Hulfon, " il se trouverait toujours incomplet et fa itif," M 124 mai 1749. il est aggressif, excepté au temps de la copulation, si on le dérange dans ses amours. Oh ! alors il devient très irascible et se lance avec la vitesse d'une flèche sur le fâcheux importun. Si celui-ci a le courage de lui faire face et de le menacer de sa canne, le serpent, subite- ment intimidé, rebroussera chemin. Mais si l'homme, affolé par la terreur, se sauve en courant, il sera infailli- blement rejoint par le reptile, qui le fera tomber en s'en- roulant autour de sa jambe et le mordra avec fureur. C'est précisément ce qui est advenu à un journalier au service du Dr Colden, de qui l'auteur tient le fait. Cet homme, nouvellement arrivé d'Europe, se laissa persua- der par ses camarades d'aller attaquer, avec un petit bâton, un serpent noir qui faisait la cour à sa femelle non loin de l'endroit où les ouvriers étaient au travail. Mais à peine le reptile eût-il aperçu l'imprudent qu'il se mit à lui donner la chasse, et le malheureux, bientôt atteint, roulait sans connaissance dans la poussière. Une fois, à Albany, un essaim de fillettes s'envola de la ville pour aller faire un tour à la campagne sous la garde d'un nègre. L'une d'elles, fatiguée de la course, s'assit sur un tronc d'arbre pendant que ses compagnes folâtraient dans le bois. Mais au même moment, un serpent noir, que l'arrivée de la jeune fille avait déran- gé dans ses amours, s'introduit sous ses jupes et s'en- roule autour de sa taille, et la voilà qui tombe en pâmoison. Le nègre accourt en toute haie ; soupçonnant que quelque serpent malin est l'auteur de tout le mal, il relève prestement les vêtements de la fillette et se trouve avoir deviné juste. Mais il eut beau tirer de toute sa force sur l'envahisseur, il ne put faire cesser ses étreintes qu'en le séparant en tronçons avec son couteau. Alors la jeune fille reprit ses sens, mais de ce moment le NEW-JERSEY.— KACCOON. 126 pauvre noir fut sa bête d'aversion ; elle ne put jamais dans la suite supporter la vue de son libérateur et mou- rut de consomption. Kalm en revient à la question de la fascination exercée par les serpents sur les écureuils et les oiseaux. Il ne voudrait pas croire à cet étrange phénomène. Et ce- pendant, il a une liste de vingt personnes et plus parmi lesquelles des gentlemen dignes de la plus haute con- fiance, qui, tous, lui ont affirmé sur l'honneur avoir été témoins oculaires de cas de fascination. Les serpents noirs aiment beaucoup le lait, et lors- qu'une fois ils en ont trouvé dans une cave, il est diffi- cile de les empêcher d'y retourner. Plus d'un de ces ophidien! a été surpris au moment où il satisfaisait sa gourmandise dans le vaisseau même où des enfants prenaient leur goûter et sans chercher à les mordre, bien que ceux-ci lui donnassent des coups de cuillère sur la tête quand il leur semblait que l'intrus, dépassant les bornes de la discrétion, se servait plus souvent qu'à son tour. Kalm n'a jamais entendu le sifflement de ce reptile. Le serpent noir change de peau tous les ans, et sa vieille dépouille est regardée comme un remède contre les crampes, pourvu qu'on se la tienne continuelle- ment enroulée autour du corps. C'est extraordinaire comme la végétation des côtés opposés d'une rivière, et même du simple ruisseau que l'on franchit d'un seul bond, diffère quelquefois ! Cela dépend de ce que les graines sont apportées, par le cou- rant, des contrées éloignées, flottantes sur les eaux. Le New-Jersey et la Pensylvanie ne sont séparés que par la rivière Delaware, et cependant, quelle disparité entre les deux pays ! C'est à peine si l'on peut trouver une pierre dans le New- Jersey, où il n'y a pas de montagnes, tandis que le sol de la Pensylvanie est des plus acciden- 126 mai 1749. tés. Dans ce dernier pays, le sapin est très rare, tandis que l'autre contrée renferme des forêts entièrement composées de cette essence. Le 22 Mai, Kalm étant de retour à Philadelphie, reprit le cours de ses chères excursions botaniques dans la campagne. Les sauterelles sortaient de terre en nombre immen- se. Leurs ailes étaient à peine sèches que ces insectes faisaient déjà un bruit assourdissant avec leur chant (1). Le tulipier, Liriodendron tulipifera, était en pleine floraison. Eien de plus beau que de voir ce géant des forêts, de la hauteur d'un chêne, tout couvert de ses fleurs qui ressemblent à des tulipes. Mais il n'y faut pas regarder de trop près, car lorsqu'on les (Vieille, on est désagréablement surpris de trouver dans leur bril- lant calice une sorte de scarabée de couleur olive sans cornes, muticus, à élytres frangés et suturés de noir et à pattes brunes. Plus tard dans l'été, le même insecte se rencontre sur les mûriers et les magnoliers. Les gens de la campagne commençaient à apporter des framboises et des cerises à la ville. Le 26 Mai, il y eut une violente bourrasque, appelée travat ou travado dans le pays, accompagnée d'éclairs, de tonnerre et de pluie et qui fit beaucoup de dom- mages. Le 28 Mai. — L'air était parfumé par l'odeur suave des magnoliers ; la Kalmie angustiibliée, appelée laurier nain par les colons anglais, et la Kalmie à larges feuilles (2) donnaient aux bois un aspect ravissant avec leurs (1) Le chant des sauterelles vient des mâles, et est produit par le frot- teriient de leurs élytres l'un coutrè l'autre. M. (2) Kalm prétend que la Kalmie est rare en Canada, mais, suivant l'abbé Provencher, la Kalmie glauque, Sivornp Laurel, est très abondante sur les bords du chemin de fer Grand-Tronc, dans la savanne qu'il tra- verse un peu au-dessus de St. Nicolas (Flore Canadienne, page 371). PHILADELPHIE. 12? fleurs rouge vif disposées en élégants et gracieux corymbes. Toutes deux rivalisaient d'éclat avec le ma- gnolier, et semblaient lui disputer le prix de la beauté. Mais l'arbre à castor (1) l'emportait par l'odeur suave qui s'exhalait de ses brillantes corolles. " Ainsi," dit Kalm, " la nature distribue ses dons avec justice et égalité ; aucun être dans la création ne les réunit tous, mais aucun n'en est absolument dépourvu." Des Frères Moraves, en grand nombre, arrivèrent d'Europe à New- York vers la fin du mois de Mai, ame- nant avec eux deux prosélytes groënlandais. Leurs co-religionnaires d'Amérique envoyèrent de Philadel- phie des délégués chargés de présenter aux zélés hernut.es leurs souhaits de bienvenue. Au nombre de ces députés, il y avait deux Indiens de l'Amérique du Nord et deux Indiens de Surinam, (2) tons quatre con- vertis à leur doctrine. La rencontre dans le même lieu et pour une semblable mission de ces six individus appartenant à trois familles différentes d'aborigènes, excita beaucoup d'intérêt et une grande curiosité. Kalm regrette de n'avoir pas eu l'occasion de voir ces types de la race américaine. Mais des personnes qui avaient assisté à la conférence lui ont rapporté qu'il y avait entre eux une grande ressemblan- ce de traits et de formes, sauf que la taille des Grroënlan- dais était un peu plus petite, et qu'à n'en pas douter, ils provenaient tous de la descendance de Noé. Dans une visite que le professeur fit à Franklin, le savant Américain offrit à son hôte de la racine d'ismame, importée des Indes Occidentales, et que les habitants des tropiques mangent, comme nous mangeons la pom- (1) Nom donné par les Indiens au Magnolier. (?) Etablissement hollandais dans l'Amérique du Sud 128 MAI 1749. me de terre, quoiqu'elle soit loin d'en avoir la saveur. Le nom botanique de cette plante est Dioscorea alala (Dioscorées). Les habitants faisaient beaucoup de fromage qui valait le fromage anglais quand il avait vieilli un peu. Le 31 Mai, Kalm commença ce long voyage qu'il devait poursuivre jusqu'en Canada* Il partit de Phila- delphie dans un petit yacht qui faisait le trajet 'continu- ellement entre cette ville et Trenton. A trois heures de l'après-midi il passait vis-à-vis Burlington, chef-lieu de la Province de New-Jersey, dont le commerce aurait été florissant dès cette époque sans les monopoles odieux que Philadelphie tenait de son fondateur, et que les descendants de William Penn exerçaient encore au dé- triment des villes voisines. Le 1er Juin au matin, Kalm arriva à Trenton, et il en repartit le lendemain de bonne heure pour New- York. Les champs ensemencés de blé, de seigle, de maïs d'a- voine, de chanvre et de lin, se paraient de la verdure du grain nouvellement levé. Une odeur suave s'exha- lait des magnoliers. Les lisières des bois de chaque côté de la rivière étaient émaillées des fleurs du phlox (1), de la castilège écarlate (2), de la lobélie cardinale (3), de la monarde rouge (4) qui est origi- naire de ce pays. Le vif incarnat de leurs milliers de corolles succédant à l'émeraude des prés donnait à la campagne un aspect des plus ravissants. Kalm arriva à New- York le 3 Juin à neuf heures du soir, et y passa la semaine. L'usage du rhum — espèce d'eau-de-vie obtenue dans (I) Phlox globerrima — Phlox maculata (Polémoniacées) M. (-1) Battsia coccinea (scorofularinées) M. t.'5) (Lobeliacées) M. ( 'i i Monarda didyma (Lab'.éesj M. t NEW-YORK. 129 les colonies par la distillation du jus de la canne-à-sucre était très répandu dans l'Amérique Septentrionale. Cette liqueuï est bien plus salutaire quel'eau-de-viede vin ou de o-rain. Un officier anglais, le major Eoderfort, remar- qua dans la dernière guerre contre le Canada, que le brandy avait causé la mort de beaucoup de soldats tan- dis que l'abus même du rhum n'en avait fait périr aucun. Cette observation est confirmée par Forster qui croit que le rhum est la moins nuisible de toutes les liqueurs spiritueuses à cause de la propriété balsamique du sucre qui corrige le caractère styptique de tous les alcools. Plus le rhum est vieux, moins il est astringent. Il n'y avait presque plus de sauvages dans Long-Is- land. La rive sud de l'île était renommée par la richesse de ses bancs d'huitres. Le 10 Juin Kalm se remit en voyage et remonta l'Hudson en yacht jusqu'à Albany. La rivière était couverte d'une multitude de petits bateaux qui reve- naient de la ville. Les marsouins (1) prenaient leurs ébais dans le fleuve, et les éturgeons (2) sautaient hors de l'eau. Forster remarque dans une note que l'étur- geon d'Amérique a le nez court et obtus, tandis que son congénère anglais a le nez long. Les montagnes hautes et escarpées de la côte occidentale de l'Hudson rappe- lèrent au voyageur suédois celles de la G-othie occiden- tale. La rive nord était dans un état de culture avan- cée, et une longue suite de fermes, de vergers et de champs de blé se déroulait à la vue. Les sinuosités de la rivière entre les hautes montagnes qui en resserrent le lit jetèrent le savant dans une foule de considérations sur l'origine des cours d'eau ; en parlant de l'Hudson, il (1) Phocena vulgaris. Cetacea. (2) Accipenscr slurio. Plugiostômes. I 130 juin 1749. émet l'opinion que ce fleuve ne doit pas son existence à l'éruption accidentelle de quelque grand réservoir, mais qu'il suit le cours que la Providence lui assigna dès la création. Le yacht ayant dépassé la dernière des hauteurs qui hérissent la côte occidentale, les Montagnes Bleues appa- rurent tout-à-coup dans le lointain, dominant de leurs cimes altiôres les plus fières éminences. Mais un fort vent contraire s'éleva, et il fallut mettre à l'ancre pendant quelques heures. L'infatigable bota- niste profita de ce contre-temps pour descendre sur le rivage, et faire un examen rapide de la flore du pays, qu'il trouva couvert de sassafras et de châtaigniers. Il vit aussi dans les bois quelques tulipiers et beaucoup de Kalmies latifoliées, dont la floraison tirait à la fin. Dans l'après-midi, le vent prit une direction favorable, et Kalm interrompit ses recherches pour remonter sur son yacht. Le navire avait à peine filé quelques nœuds lorsque notre naturaliste aperçoit, sur la rive orientale de l'Hudson, un autre groupe de montagnes qui n'étaient couvertes de bois que depuis leur base jusqu'à la moitié de leur hauteur. Il se demande pourquoi les sommets de ces éminences sont chauves et stériles. "Je sup- pose," dit-il, " que c'est à cause de la chaleur, de la sécheresse et de la violence du vent." Forster remarque avec raison que la température est toujours moins élevée sur les montagnes que dans les plaines, et que la stéri* lité du sol à leur sommet est plutôt due au froid qu'à la chaleur. Une petite pointe, qui se projette sur le côté occiden- tal de la rivière, a reçu le nom de Dance, en souvenir d'un/estival que les Hollandais célébraient en cet endroit chaque année, et dont le dernier se teimina d'une ma- ALBANY. 131 niôre tragique, par l'irruption d'une bande de Sauvages, qui massacrèrent, sans pitié, tous les danseurs. 12 Juin. — Après une relâche forcée de quelques heu- res durant la nuit, à cause du mauvais temps, le yacht remit à la voile de bon matin. A 11 heures, il longeait une petite île, qui est située à mi-chemin, entre New- York et Albany. Il y avait plusieurs villages sur la rive septentrionale, et l'un d'eux, appelé Strasburg, était habité par des Allemands. De cette localité, on a une vue superbe des Montagnes Bleues. On faisait usage de l'agaric (champignon) jaune en guise d'amadou ; celui qui croît sur l'érable rouge était préféré, quoique l'agaric de l'érable à sucre soit aussi bon (l). Kalm débarqua à Albany le 13 Juin, à 8 heures, du matin, et alla se loger chez un armurier qri tenait des chambres garnies. Les marchands d' Albany étaient piopriétaires de tous les yachts qui naviguaient entre cette ville et New- York, où ils expédiaient des madriers, des planches, toutes sortes de bois de construction, de la farine et des fourrures provenant des Indiens du Canada et introdui- tes par contrebande. Ces navires revenaient sur lest ou avec des cargaisons de rhum, article d'absolu néces- sité pour les habitants d' Albany, qui, à l'aide de cette boisson, trichaient à volonté les Indiens dans le com- merce des peaux. Une fois que les pauvres Sauvages étaient ivres, ils laissaient au trafiquant le soin de fixer lui-même le prix des fourrures. Pour le commerce intérieur avec les Indiens, on se servait d'une sorte de bateau plat en planches de pin, pointu à chaque extrémité et garni de sièges. (I) L'amadou du commerce est fourni par le Polyporus Jomentarius ou agaric des chènos. M. 132 juin 1749. Chaque fermier d'Albany avait son verger, planté de pommiers qui produisaient d'excellents fruits. Le poirier ne réussissait pas bien, non plus que le pêcher. On cultivait le lin, le chanvre, pour la consommation do- mestique, et le maïs en grand. Un demi-minot de semence de ce grain en produisait cent minots. Le blé donnait un rendement qui variait de douze à vingt minots pour un. On semait aussi beaucoup de seigle, mais peu d'avoine, et encore moins d'orge. Les ravages de l'insecte nommé plus haut (1) avaient fait abandon- ner la culture des pois. Tous les fermiers plantaient des patates sucrées, convoi vulus batatas, qui réussissaient bien, mais il était difficile de les conserver pendant l'hiver. L'oiseau-mouche (Trochilus Colubris) visitait rarement Albany. Kalm a noté douze espèces d'arbres de la Pensylvanie qui ne se rencontrent pas dans les bois d'JUbany. Ce sont : Le magnolier glauque, magnolia glauca La nysse aquatique, nyssa aquatica. Le liquidambar-copal, liquidambar-styracijlua. Le plaqueminier de Virginie, diospyros Virginiana. Le tulipier, liriodendron tulipifera. Le noyer noir, juglans nigra. Le chêne des marais, quercus (2). Le gainier du Canada, eercis Canadensis. Le robinier faux-acacia, robinia pseudo-acacia. Le fêvier ou acacia à trois épines, gleditschia triacan- thos. L'anone ou corossolier anona muricata. Le micocoulier cellis occidentalis (Ulmacées-Celtidées). (1) Bruchus pisi. (:2) Quercus aquatica ? ALBANY. 133 L'auteur pense que l'absence de ces essences dans cette contrée peut s'expliquer naturellement par son climat plus froid que celui de la Pensylvanie, la hauteur des Montagnes Bleues et la direction méridionale du cours des rivières qui transportent les graines du nord au sud. Kalm étant allé botaniser dans une île située à un mille au bas de la ville, il y vit de beaux érables rouges à feuilles blanches, argentées au revers, des platanes, des liards (1), des hêtres et des ormes ; il y remarqua de plus le sumac, la vigne sauvage et le pourpier pota- ger. En hiver le froid était si rigoureux que la glace sur l'Hudson avait ordinairement de trois à quatre pieds d'é- paisseur. Le 3 Avril on avait traversé la rivière avec six paires de chevaux. La débâcle avait lieu à la fin de Mars et la clôture de la navigation le 16 Novembre. Le sol gelait à la profondeur de trois, quatre et cinq pieds. En examinant l'eau des puits avec attention, Kalm y découvrit une grande quantité de petits crustacés — "des monocles, monoculi (2), probablement " de longueurs diffé- rentes variant d'une ligne et demie à quatre lignes, au corps mince et allongé et de couleur pâle, à tête noire de la grosseur d'une tête d'épingle et à queue divisée en deux branches, se terminant chacune par un petit globule noir. Ces crustacés nageaient comme des têtards en décrivant des circuits. Le professeur pensa devoir attribuer à l'usage de cette eau certains picotements désagréables qu'il éprouva dans la gorge pendant son séjour à Alba- ny, et son serviteur Yungstrœm se plaignit d'un sem- blable malaise. L'armurier chez qui Kalm logeait prétendait que le (l)Populus Ganadensis (Salicinées) M. (2) Linné a donné le nom de monocles à un genre de petits crustacés de l'ordre des Branchiopodes, appelés aujourd'hui Gyclopes. M. 134 juin 1749. pin noir et le hêtre produisaient le meilleur charbon de bois pour la forge, et que le bois de cerisier sauvage était excellent pour les montures de fusils, ainsi que le noyer noir ; cette dernière essence ne croît pas dans les envi- rons d'Albany. Après New-York, Albany était la principale ville de la Province de New- York. Il y avait deux églises l'une anglaise et l'autre hollandaise. Cette dernière seule avait un ministre qui se trouvait par conséquent l'uni- que pasteur de la ville, mais tous les habitants, la gar- nison exceptée, comprenaient le hollandais. Il recevait un salaire de £100, qui lui était envoyé d'Angleterre. L'hôtel-de-ville était un bel édifice en pierre à trois étapes. La plupart des maisons des particuliers — en pierre aussi et couvertes en bardeaux ou en tuiles de Hol- lande— avaient leur pignon sur la rue, suivant l'ancien- ne façon. Les murs extérieurs n'étaient jamais enduits de chaux ou de mortier. Les gouttières des toits se projetaient presque jusqu'au milieu de la rue, ce qui avait bien son avantage pour les propriétaires, mais était fort incommode pour les passants, les jours de pluie. Les portes qui donnaient sur la voie publique s'ouvraient au milieu des maisons et de chaque côté il y avait des siè- ges qui, le soir surtout, étaient occupés par des indivi- dus des deux sexes qu'il fallait saluer, en passant, sous peine de passer pour un mal-appris. Les rues larges pour la plupart, et bordées d'arbres, n'étaient pas proprement entretenues ; les habitants y laissaient errer leurs animaux pendant les nuits d'été. Le port n'avait pas encore de quais. Le fort occupait le sommet d'une haute colline à l'ouest de la ville. C'était un grand bâtiment en pierre entouré de murs élevés et épais. Quelques soldats sous les ordres dr'un officier en formaient toute la garnison, ALBANY. 135 Nulle part dans les colonies anglaises — à l'exception des établissements de la Baie d'Hudson — il ne se faisait un aussi grand commerce de peaux et de fourrures qu'à Àlbany. La plupart des marchands de cette ville envoy- aient un commis ou agent à Oswego à la rencontre des Indiens qui s'y rendaient en foule avec le produit de leurs chasses. Les Sauvages du Cauada allaient porter leurs peaux de castors à Albany. Nonobstant les peines sévères établies contre ce trafic, dont la compagnie fran- çaise des Indes Occidentales avait seule le monopole, les marchands du Canada faisaient, par contrebande, un grand commerce de fourrures avec Albany, où ils les expédiaient par l'entremise d'Indiens à leurs correspon- dants, qui les prenaient à un prix convenu d'avance. Les Sauvages s'en retournaient avec des draps et diverses autres marchandises que les Hollandais pouvaient leur vendre à bien plus bas prix que les Français. Beaucoup de négociants d'Albany possédaient des domaines considérables ainsi que de grandes terres à bois, sur lesquelles ils érigeaient des moulins à scie qui étaient toujours en opération. Plusieurs industriels de la ville fabriquaient le Wam- pum qui était à la fois la monnaie des Indiens et leur parure la plus chère. Pendant que les Hollandais — les premiers Européens qui se soient établis dans la province de New- York — étaient les maîtres incontestés de ce pays, ils s'empa- rèrent de la Nouvelle-Suède, c'est-à-dire du New-Jersey et d'une partie de la Pensylvanie. Mais ils ne jouirent pas longtemps du fruit de leur victoire, qui leur fut enlevé ainsi que leur propre territoire par les Anglais. Vers la fin de 1664, Sir Robert Carre (1) par ordre du, (l) George Carie tel. 136 juin 1749. roi Charles II s'emparait de New -Amsterdam, qui devint New- York, et bientôt après le colonel Nichols prenait possession du Fort Orange, qui reçut le nom d'Albany (1), mais conserva longtemps sa physionomie de ville hollandaise. Les principaux marchands avaient amassé de grandes fortunes, et les habitants en général passaient pour riches. Mais on les taxait d'avarice et d'égoisme et ils étaient détestés à l'égal des Juifs par les Anglais. Kalm lui-même en fait un portrait peu flatteur. Il se plaint de leur cupidité, et dit qu'il lui fallait payer très cher le moindre service. Il les compare avec les Hollan- dais des autres parties de la province de New-York, dont il vante la civilité,l'obligeance et la droiture, toutes qualités naturelles à la nation néerlandaise. Comment s'expli- quer cette différence de caractère et de respectabilité entre des groupes d'habitants de même origine ? Kalm suppose qu'au début de la colonisation du pays, le gou- vernement hollandais se serait débarrassé de ses mauvais sujets en les envoyant sur les frontières, aux postes les plus avancés, sous la surveillance de quelques honnêtes familles, à qui l'on aurait persuadé de se dévouer pour tâcher de les contenir dans le devoir. Kalm reconnaît cependant qu'il y avait d'honorables exceptions et beau- coup de gens de bien, qui, en fait de politesse, de pro- bité et de charité chrétienne, ne le cédaient à aucun autre peuple. La conduite des habitants d'Albany pendant la guerre entre l'Angleterre et la France, qui s'est terminée par le traité de paix d'Aix-la-Chapelle, n'avait pas peu contri- bué à leur attirer la haine de toutes les colonies britan- niques. Au début de cette guerre, les Indiens alliés de chacune des deux parties belligérentes ayant reçu ordre (l) Nom d'un duché d'Ecosse apanage du duc d'York. ALBANY. 187 de commencer les hostilités, les Sauvages amis des Fran- çais se ruèrent sur les habitants de la Nouvelle- Angle- terre, en tuèrent un grand nombre et rirent un butin énorme. Pendant ce temps-là, le peuple d'Albany gar- dait la neutralité, et trafiquait avec les mêmes Indiens qui massacraient les colons anglais, achetant jusqu'à l'ar- genterie dont ces barbares les avaient dépouillés. Ce genre de commerce fut regardé comme un encouragement donné par les habitants d'Albany au meurtre et au pil- lage de ceux qu'ils auraient dû considérer en quelque manière comme des frères, puisqu'ils étaient sujets de la même couronne. A la première nouvelle de cette conduite des Hollandais, il s'éleva un cri général d'indi- gnation dans la Nouvelle-Angleterre, et l'on y proféra la menace d'incendier Albany au premier coup de canon, dans le cas où la paix serait rompue. 11 Dans la présente guerre" (1), dit Kalm, " il est facile de voir que les autres provinces ne se pressent pas de porter secours à-*Albany quand cette ville est menacée par les Français ou les Sauvages." Mais la haine des Anglais pour les habitants de l'an- cien Fort Orange leur était rendue au centuple. La population d'Albany gardait dans son cœur une vieille rancune contre la perfide Albion, dont les faciles victoires l'avaient séparée de sa métropole. " Et cependant," remarque l'auteur, " elle jouit de plus d'avantages sous la domination anglaise que le gouvernement hollandais ne lui en aurait jamais conférés." En quelque sorte, les vaincus avaient plus de privilèges que les conquérants eux-mêmes. La parcimonie des habitants d'Albany était prover- biale. Ils ne passaient pas pour surcharger leurs tables (1) M. Kalm a publié ce volume pendant la guerre. F. 138 juin 1749. ' de mets, loin de là, et la coupe, ne circulait pas aussi souvent chez eux que parmi les Anglais. Mais leurs femmes étaient de très-bonnes ménagères et renommées pour leur propreté, surtout à l'égard du parquet de leurs maisons, qu'elles lavaient trois ou quatre fois par semaine. Les domestiques étaient presque tous des nègres. Les hommes portaient les cheveux très courts et sans la couette, qui était regardée comme une bizar- rerie de la mode française. Kalm, à son retour du Canada, se coiffait à la française. Quand il passa par Albany, les gamins coururent après lui en l'appelant français, et les plus hardis voulurent lui tirer la couette. Le déjeuner chez les Hollandais se donnait à 7 heures ; il se composait de pain, de beurre, de minces tranches de bœuf séché et de thé sans lait, rarement de café. Le sucre ne se mettait pas dans la tasse, on en portait un petit morceau à sa bouche en buvant. Leur dîner se composait de lait de beurre mélangé de pain, sucré ou non, ou de lait frais, et d'un plat de viande. On servait aussi, à ce repas, une sorte de brouet de gruau très-clair, bouilli dans du lait de beurre, d'un goût acide, mais non désagréable. Le dîner se terminait par une grosse salade assaisonnée avec force vinaigre, mais peu ou point d'huile. Au souper, il n'y avait sur la table que du fro- mage râpé, du pain, du beurre et du lait. Le Gouverneur de New- York tenait souvent des con- férences à Albany avec les Iroquois, surtout lorsqu'il s'agissait d'organiser quelque expédition contre les Fran- çais, en temps de guerre. Quelquefois, dans ces délibé- rations, le représentant de Sa Majesté Britannique abor- dait le sujet de leur conversion à la religion chrétienne. ALBANY. 139 Un jour, le gouverneur Hunter reçut de l'un des sachems une réponse foudroyante, que Kalm regarde comme une preuve que les Anglais ne portaient pas autant d'attention que les Français au grand œuvre de l'évangélisation des sauvages, et que les missionnaires protestants (1) n'étaient pas dignes de leur état. Laissons parler l'auteur. " Après que le gouverneur Hunter eut distribué à ces sauvages par ordre de la reine Anne des vêtements et des présents choisis exprès à leur goût, il s'efforça de les convaincre davantage du bon vouloir de Sa Majesté à leur égard et de Sa sollicitude pour eux en leur disant que leur grand'mère la Reine, non contente d'orner leurs corps de beaux ajustements, se proposait aussi d'orner leurs âmes par la prédication de V Evangile, et de leur envoyer des ministres pour les instruire. " (I) Forster combat vivement l'opinion de Kalm, qu'il déclare mal informé. "Les Ecclésiastiques français,"' dit-il, "ont gagné à leur religion et mis dans 'leurs intérêts quelques misérables Indiens, qu'ils ont établis Jans de petites bourgades. Mais il parait que ces prosélytes se sont rendus coupables, dans les guerres entre les Français et les Anglais, de cruautés plus atroces que leurs frères païens, ce qui les ferait croire plutôt pervertis que convertis. Les Anglais ont traduit la Bible dans la langue des Sauvages dn la Virginie, et amené plusieurs d'entre eux à la connaissance du vrai Dieu ; à l'époque actuelle, les écoles de charité et les missions dirigées par le Révérend M. Eleazar Wheelock, ont christia- nisé nombre de ces infidèles. La société pour la propagation de l'Evan- gile dans les pays étrangers envoie chaque année, à ses frais, beaucoup de missionnaires parmi les Indiens. Les Frères Moraves'sont aussi très zélés pour la conversion des gentils. Si M. Kalm avait pris toutes ces circonstances en considération, il aurait fait une appréciation plus juste des travaux des ministres de l'Evangile." F. Quoiqu'en dise Forster, Kalm avait parfaitement raison. Les traditions de la polit'que anglaise à l'égard des Sauvages n'ont été que trop fidèle- ment suivies par les Américains. Le Canada, dp son côt^, a continué celles qu'il tenait de ses premiers fondateurs, et il n'y a qu'à comparer le sort des Indiens des Etats-Unis, encore païens pour la plupart, avec celui des nôtres, pour voir lequel des deux pays a constamment montré le pins de dévouement pour la civilisation et la conversion des Sauvages. Il n'y a pas longtemps encore, les Indiens formulaient devant le Président des Etats-Unis, et dans un langage presque identique, des plaintes graves contre les ministres protestants, et demandaient des robes noires pour mis- sionnaires. M, 140 juin 1749. Le gouverneur avait à peine fini de parler que l'un des plus vieux sachems se leva, et répondit, au nom de tous les Indiens, quil remerciait la gracieuse et bonne reine et mère des beaux habillements qu'elle leur avait envoyés ; mais que quant aux ministres, ils en avaient déjà eu plusieurs (qu'il nomma) qui, au lieu de leur prêcher le saint Evangile, leur avaient appris à boire avec excès, à tricher et à se querel- ler entre eux. Il supplia ensuite le gouverneur de rappe- ler ces prédicateurs, et de débarrasser ses frères d'un certain nombre d'Européens qui résidaient au milieu d'eux parce que, avant l'arrivée de ces étrangers dans leurs bourgades, les Indiens étaient un peuple honnête sobre et innocent, tandis que maintenant ils ne sont plus qu'un ramassis de misérables. Ils avaient autrefois la crainte de Dieu, mais aujourd'hui c'est à peine s'ils croient à son existence. Que s'il (le gouverneur) leur voulait du bien, il leur enverrait deux ou trois forgerons pour leur apprendre à forger le fer, art qu'ils ne con- naissaient pas. Le gouverneur ne put s'empêcher de rire (?) en entendant ce discours extraordinaire. Je pense que cette parole de St. Paul trouve ici son explication. " Le nom de Dieu est blasphémé parmi les gentils à cause de vous " (1). Kalm partit d'Albany le 21 Juin pour le Canada. Il avait, outre son fidèle Yungstrœm, deux hommes qui devaient l'accompagner jusqu'au premier poste français St Frédéric, appelé par les Anglais Croivn Point. Les guides avaient loué leurs services au prix de cinq livres, cours de New- York, chacun, leur nourriture à part. Ils ne purent se procurer d'autre embarcation qu'un canot. La rive occidentale de l'Hudson était généralement culti. vée, mais les terres souffraient du manque d'égoutte- (I) Romains, ii., 24. ENTRE ALBANY ET SAKATOGA. 141 ment. D'après la conformation du terrain, Kalm pensa que le lit de la rivière avait été plus large autrefois. Les champs lui parurent labourés d'une manière uniforme» et ensemencés de blé jaune ou blanc et de lin par en- droits. Un soleil brûlant avait desséché toute l'herbe des coteaux, n'y laissant que la mole ne commune, Ver- bascum Thapsus, à laquelle les animaux ne touchent pas. Ailleurs le sénevé (1) usurpateur étouffait des champs entiers de pois. La côte était bordée d'arbres de diffé- rentes espèces, érables rouges, hêtres, trembles, pom- miers sauvages, vinaigriers, ormes, et saules (2) et de vignes. Kalm y vit aussi plusieurs pieds d'asperges sauvages, asparagus officinalis (Liliacées). Nos voyayeurs passèrent la nuit à six milles d'Albany dans la maison d'un fermier. La rive occidentale de l'Hudson était habitée par des descendants des premiers colons hollandais. Le lendemain matin, 22 Juin. Kalm accompagné d'un de ses guides fit une petite excursion de trois milles pour aller examiner la chute de Cohoes dans la rivière Mohawk (3): c'est dans cette promenade qu'il rencontra la première fourmilière qu'il ait jamais vue en Amérique. La colonie qui l'habitait appartenait à l'espèce des four- mies fauves formica rufa, Linii. (4). A midi, il se rembarqua dans son canot, et continua sa course sur les eaux de l'Hudson vers le Canada. Il re- marqua une abondance extrême d'éturgeons dans la rivière. Ce poisson gagne la mer à la fin de l'automne et ne reparait dans le fleuve qu'au printemps. Il se (1) Moutarde— sinapis arvensis (Crucifères). (2) Salix (Salicinées). (3) Les éditions anglaise et hollandaise sont ornées chacune d'une belle gravure représentant cette chute. ('») Hyménoptères. 142 juin 1749. nourrit de conferve, espèce d'algue. Les colons hollan- dais et les Sauvages lui faisaient la chasse, la nuit, avec des harpons en s'éclairant avec des torches de pin. Kalm, voyant dans une île an campement d'Indiens, y débarqua dans le but d'engager des guides pour l'ac- compagner jusqu'au Fort St Frédéric. Mais tous les hommes étaient à faire la chasse dans les bois. Il ne restait sur la côte que des jeunes garçons. A la fin, le lendemain, il arriva trois sauvages qui s'engagèrent au prix de trente chelins. Mais un Anglais leur ayant offert davantage, ils changèrent d'idée, et cassèrent leur marché avec Kalm, lui remettant trois piastres d'arrhes qu'il leur avait payées. La seconde étape de nuit de ce voyage fut à environ dix milles d'Albany. Pendant la guerre, les habitants de cette localité abandonnèrent leurs foyers, et allèrent se réfugier au fort, craignant la cruauté des Sauvages alliés des Français ; mais ils revenaient en grand nombre sur leurs terres. Remarquant que le trèfle rouge et le trèfle blanc abondaient dans les bois, Kalm dit qu'il est difficile de déterminer si ce genre de plantes herbacées a été intro- duit d'Europe dans ce pays, ou s'il est indigène, ce que les Indiens n'admettaient pas. Les bords de la rivière étaient percés, au niveau de l'eau, de trous nombreux, habitations des rats-musqués, Fiber Zibethicus. Des tas d'écaillés d'huitres jonchaient les abords de ces retraites souterraines. Le rat-musqué serait-il ostralège ? Kalm le pense et croit avoir fait une observatien nouvelle, parce que Linné, Buffon et Sarrasin prétendent que cet animal ne se nourrit que d'acorus (Aroïdées), de joncs et de racines. La troisième nuit de son voyage, le professeur la passa dans la grange d'un cultivateur, qui était revenu ENTRE ALBANY ET SARATOGA. 143 au rétablissement de la paix. Sa maison avait été incen- diée ainsi que toutes ses dépendances, à l'exception de cet unique bâtiment. Plus heureux que ses voisins, ce fermier avait trouvé du moins un toit à son retour. Le mûrier se rencontre dans les bois entre Albany et Saratoga, mais pas plus au Nord. Le panais sauvage (1) y est commun, mais dans les champs seulement, ainsi que le chanvre. Ce jour-là, Kalm vit un thuya occidental (Conifères) pour la première fois. Les autres essences dont le savant botaniste constata la présence furent l'orme, le bou- leau, le sapin blanc, l'aune, le cornouiller, le tilleul, le saule rouge et le châtaignier. Le sureau, Sambucus Canadensis, qui ne se plait que dans le voisinage de l'homme, couvrait les champs de son ombre bienfaisante, en attendant le retour de leurs propriétaires, chassés par le fléau de la guerre. Le charme à cônes renflés, carpinus ostrya, Linn., apparaissait par-ci par-là, mais le hêtre et le liard avaient disparu. A quelque distance de Saratoga, ils rencontrèrent deux Sauvages en canots d'écorce. Le Fort de Saratoga était une redoute palissadée que les Anglais érigèrent, pour arrêter les incursions des Sauvages alliés des Français, et pour servir de boulevard à la province de New- York en couvrant Albany. Il cou- ronnait un point culminant sur la rive orientale de l'Hudson. Les Anglais, se voyant incapables de le dé- fendre contre les assauts des Français, finirent par [l'in- cendier de leurs propres mains. Une ruse de guerre mit le comble à leur découragement, et leur fit prendre cette mesure extrême. Une nuit, un parti de Français et de Sauvages se cacha dans un fourré près du fort, et y (l) Pastinaca (Ombellifères), M. 144 juin 1749. prépara silencieusement un plan d'attaque. Au petit jour, les guerriers indiens sortirent du bois à la sourdine et se dirigèrent à pas de loup et avec une grande cir- conspection apparente, vers la palissade comme gens qui pensaient s'introduire dans la place par surprise. Mais les Anglais avaient l'œil sur les mouvements de la petite troupe et le doigt sur la détente de leurs fusils. Aussi, dès qu'elle fut à portée, ils l'accueillirent par Une décharge des plus meurtrières, à ce qu'il leur sembla du moins ; en effet, lorsque la fumée de la poudre se fut dissipée, pas un des agresseurs n'était debout. Cepen- dant, ils n'étaient pas tous tués, ni même blessés griève- ment, car la plupart se relevèrent et se mirent à courir dans la direction du bois. Les soldats ne purent résis- ter à la tentation de poursuivre les fuyards, qu'ils pen- saient avoir mis hors de combat, et la moitié de la garnison sortit de l'enceinte fortifiée pour leur donner lâchasse. C'était le moment que les Français attendaient pour leur entrée en scène. Ils s'élancent hors du taillis, se jettent entre la place et les Anglais, coupent la retraite à ces derniers et les emmènent en captivité sous le canon du fort, qu'on n'ose tirer de peur de tuer autant d'amis que d'ennemis. Il n'est pas étonnant qu'après s'être fait joueç de la sorte, les Anglais aient pris en dégoût une redoute dont l'emplacement avait été si mal choisi. Les habitants de ce pays, Hollandais pour la plupart, haïssaient cordialement les colons d'origine saxonne. Kalm passa la nuit dans une hutte de planches, et le lendemain, 25 Juin, il se remit en route de bonne heure, mais à la distance d'un mille, il lui fallut faire un porta- ge fatigant pour éviter un rapide causé par des rochers dont les flancs étaient parsemés de ces trous qu'on appelle des chaudières de géants. Plus loin, un autre FORT NICHOLSON. 145 rapide plus considérable encore, le contraignit d'aban- donner le voyage par eau. Il laissa son canot sur la rive et fit, à travers bois, le trajet depuis cette chute jusqu'au Fort Anne — environ cinquante milles — et par une chaleur excessive. A plusieurs reprises, il trouva la route coupée par de petites rivières, et pour les passer, il lui fallut faire abattre, par ses gens, et jeter en travers du courant, de grands arbres qui avaient crû sur leurs bords. La nuit surprit les voyageurs au milieu d'une grande forêt, et ils la passèrent tristement à se défendre contre les moustiques, les cousins et les cloportes, et dans une grande frayeur des serpents. 26 Juin. — En route au lever du soleil, ils arrivèrent, un peu avant midi, au Fort Nicholson, ou plutôt à l'en- droit qu'il occupait autrefois, sur la rive orientale de l'Hudson. Car cette redoute, érigée en 1709, eut le même sort que le Fort Saratoga. Les Anglais l'incen- dièrent eux-mêmes deux ans après, en 1711, à la suite de la malheureuse issue de leur expédition navale contre le Canada. Un officier — le colonel Lydius — avait établi sa demeure en cet endroit, et y faisait un commerce avantageux avec les sauvages du Canada. Mais dès le début de la dernière guerre, ces mêmes sauvages brû- lèrent sa maison, et emmenèrent son fils prisonnier. Kalm repartit dans l'après-midi, passant dans les bois et suivant une direction est-nord-est, afin d'arriver à l'extrémité supérieure de la rivière Woodcreek, d'où il comptait se rendre, en canot, jusqu'au fort St Frédéric. Le soir, il établit son campement de nuit près d'un ruisseau, afin d'être certain de ne pas manquer d'eau. Mais la morsure des moustiques et la crainte des serpents et des sauvages ne luil aissèrent point goûter le repos, dont il avait un si grand besoin après les fatigues de la journée. J 146 juin 1749. Kalm se plaint surtout d'une sorte de cousins appelés Punchins par les Hollandais, Culex pulicarus, Linn. (1), qui sont très petits et ont les ailes grises et mouchetées de points noirs. Il les trouva dix fois pires que les moustiques, Culex pipieas, Linn., parce que l'exiguïté de leur taille les rend presque imperceptibles, qu'ils sont avides de sang, au point de n'avoir nul souci pour leur vie, et que leur piqûre cause une douleur cuisante. La nuit était calme, pas un souffle de vent ne venait agiter les feuilles des arbres ; mais le silence de la nature était troublé de temps en temps par la chute de quel- que vétéran de la forêt s' affaissant sous le poids des années, et tombant avec fracas sur le sol. Le 27 Juin, les voyageurs entendirent, chemin faisant, le bruit d'une cascade dans la rivière Hudson. Leur mar- che fut beaucoup retardée par des troncs d'arbres ren- versés, retraites favorites des serpents à sonnettes. Ils arrivèrent cependant sains et saufs au Fort Anne dans l'après-midi, ou plutôt à l'endroit qu'il occupait sur la rivière Woodcreek. Ils y passèrent toute la journée et celle du lendemain, employant ce temps de relais à la fabrication d'un canot d'écorce, opération que Kalm suivit avec le plus grand intérêt, et qu'il décrit dans tous ses détails depuis la chute de l'orme blanc, dont l'enveloppe lut reconnue propre à cet emploi jusqu'à la mise à l'eau du frêle esquif qui en fut construit. Ils furent tourmentés nuit et jour par les moustiques et surtout par les cloportes, acari americani, Linn. (1), qui étaient très redoutés parce qu'on leur supposait la mauvaise habitude de s'introduire dans l'oreille des gens. (l\ Diptères -c'est l'insecte appelé ici brûlot- M. (1) Onisques (Onùcidae), porcelet ou porcellion (porcellio granulatus) insectes du genre isopode. Peut-être Kalm a-t-il voulu désigner le centi- pède, scolopendra, du genre myriapode. M. FORT ANNE. 147 Le Fort Anne, ainsi nommé en l'honneur de la reine Anne, était, comme ceux de Saratoga et Nicholson, un fort en palissades. Construit comme eux en 1709, il eut le même sort et fut incendié par les Anglais en 1711, à la suite du désastre que subit leur flotte dans le St Laurent. Le capitaine Butler, qui commandait au Fort Mohawk, lors du voyage de Kalm en Amérique, lui a raconté qu'il se trouvait au fort Anne en 1711, et que le général Nicholson, le plus fougueux promoteur de l'invasion du Canada, s'y tenait à la tête d'une forte armée, n'atten- dant que la nouvelle de l'arrivée de la flotte anglaise devant Québec pour se mettre en marche sur Montréal. Lorsqu'il apprit le naufrage des vaisseaux anglais, le général entra dans une colère épouvantable, arracha sa perruque de dessus sa tête, la jeta par terre et la foula aux pieds avec rage, en criant à la trahison. Puis il mit le feu au fort et s'en retourna. A midi, Kalm, pendant qu'il visitait les ruines du fort, faillit étouffer sous l'excès de la chaleur, et n'éprouva de soulagement qu'en prenant un bain dans la rivière "VVoodcreek. A ce propos, Forster fait une longue note sur l'usage des ablutions [1). Le 29 Juin, nos voyageurs s'embarquèrent dans le canot d'écorce qu'ils avaient construit et continuèrent leur route. Il leur fallait se hâter, car les provisions (1) En Suède et en Russie, les gens de toutes conditions se baignent au moins une fois par semaine dans des étuves chauffées par un fourneau, et portées à un degré de chaleur incroyable, que l'on élève encore en jetant dans l'eau des cailloux rougis au feu. D.ms ces étuves, les hommes et les femmes de la basse classe se baignent ensemble, à la façon des anciens Romains, auxquels, commp l'observe Plntarqoc dans sa vie de Caton, les Grecs empruntèrent cette coutume indélicate et indécente, et qui se répan- dit tellement que les Empereurs Adrien et Marc Antoine durent faire des lois pour l'interdire. Mais ces ordonnances ne furent pas longtemps observées, car nous voyons que le Concile de Laodicée fut obligé de pres- crire un canon contre cet usage grossier et brutal ; ce qui n'empêcha pas 148 juin 1749. commençaient à diminuer. An bout de quelques milles, comme l'eau était profonde et que le cours de la rivière était souvent embarrassé par des arbres renversés ou des digues de castors, Kalm laissa l'embarcation aux soins de ses guides, et fit, accompagné de son domesti- que, une partie du chemin à pied, en suivant le rivage. Passant près d'un endroit où l'on avait allumé du feu récemment, ils furent loin de soupçonner alors qu'ils avaient échappé de bien près à une mort cruelle, la nuit précédente. Mais ils l'apprirent dans la soirée, de la bouche d'un sergent français qui, à la tête d'un piquet de soldats, escortait trois anglais jusqu'à Saratoga. Le commandant du Fort St Frédéric l'avait chargé de cette mission, afin de protéger ces individus contre un parti d'Indiens alliés des Français qui se dirigeaient vers les établisse- ments anglais, avec l'intention de tirer vengeance de la mort d'un de leurs frères tué dans la dernière guerre. La paix était conclue alors, mais elle n'avait pas encore été proclamée au Canada, et les sauvages croyaient pouvoir se permettre cet acte de représailles. Ils étaient donc partis secrètement pour leur expédition sangui- naire et en contravention aux ordres du gouverneur de Montréal " A cette nouvelle," dit Kalm, " j'admirai le soin que la Providence avait pris de nous, en écartant ces barbares de notre chemin. Nous avions bien remar- qué toute la journée des traces de pas sur l'herbe, mais comme nous étions en temps de paix, l'idée d'un danger les hommes de tout rang de continuer à se baigner avec les femmes. 11 est probable que cette coutu- me fut introduite en Russie en même temps que la religion chrétienne. Dans ce dernier pays, le peuple, à la sortie de l'étuve brûlante, va se plonger dans l'eau froide en été, et en hiver, il se roule tout simplement ilans la neige. Le samedi, c'est une chose ordinaire que de voir des hommes et des femmes nus assis sur des banquettes devant le bain, cha- cun tenant à la main le paquet de verges, avec lequel ils se fustigeront gentiment les uns les autres dès qu'ils seront entres dans l'étuve. F. ENTRE LES FORTS ANNE ET ST FREDERIC. 149 quelconque ne nous vint pas un seul instant à l'esprit. Ces vestiges, ainsi que nous l'apprîmes des militaires français, n'étaient autres que les empreintes des pas des sauvages qui avaient campé pendant la nuit à l'endroit même où nous trouvâmes, cette avant-midi, des tisons encore fumants. Si, dans le but d'abréger leur course, ils n'eussent laissé le chemin qui conduit au Fort Anne, et qui est la route la plus ordinaire, pour suivre un sentier peu fréquenté, ils nous auraient rencontrés infail- liblement, et nous prenant pour des Anglais, ils nous auraient attaqués à l'improviste, et peut-être tous mas- sacrés, s'évitant ainsi la peine d'aller plus loin pour assouvir leur cruauté. La nouvelle du danger terrible que nous avions couru sans nous en douter nous causa une grande souleur." Kalm passa la nuit en cet endroit avec les militaires français, qui lui conseillèrent fortement de ne pas se risquer plus loin, mais de les suivre jusqu'au premier établissement anglais, promettant de les escorter ensuite jusqu'au Fort St Frédéric. Mais il ne voulut pas se rendre à leurs avis, et résolut, comptant sur la protection du Tout-Puissant, de se remettre en route pour le Canada Ils virent d'immenses volées de pigeons sauvages s'abattre sur les arbres de la forêt pour y faire leurs nids. Un Français en tua quelques-uns, et les apporta au professeur, qui, trouvant dans leurs fales une grande quantité de graines d'orme, admira la sollicitude de la Providence pour tous les êtres créés ; il se rappela sans doute cette parole que le Christ adressait à ses Apôtres : " Regardes les oiseaux du ciel, ils ne sèment ni ne mois- sonnent, ni n'amassent dans des greniers, et Votre Père céleste les nourrit." En effet, dans le mois de Mai, les pigeons sauvages trouvent une subsistance abondante dans les graines de l'érable rouge, qui sont si mûres 150 juin 1749. alors, qu'elles tombent d'elles-mêmes sur la terre ; en Juin, les graines de l'orme viennent à maturité, et ces oiseaux s'en nourrissent jusqu'à ce qu'une autre espèce d'arbre ou de plante soit prête à leur offrir ses semences. Presque toutes les nuits, Kalm entendait dans les bois — même par le temps le plus serein — des craquements sinistres, suivis d'un bruit sourd ; il savait alors qu'un arbre venait de se rompre, et de s'affaisser sur le soi comme un géant terrassé. Mais quant à la cause du phénomène, il avoue qu'il l'ignorait. Est-ce que la rosée relâcherait les racines des grands végétaux pen- dant la nuit ? Une disproportion excessive dans le nombre ou l'arrangement général des branches latérales peut-elle produire ces accidents ? Ne sont-ils pas plutôt l'œuvre des pigeons sauvages qui s'abattent sur les arbres en assez grande quantité pour causer leur chute immé- diate ou prochaine en déplaçant leur centre de gravité (1). Kalm, malgré ses préventions contre l'usage du thé, finit par admettre qu'il a ses avantages, surtout quand on voyage dans le désert, et qu'on a épuisé sa provision de vin et d'eau-de-vie. Cela ne l'empêche pas de dire " que si nous n'avions ni thé ni café, nous n'en serions pas plus mal, du côté de la bourse surtout." La route par eau, étant impraticable à cause du grand nombre d'arbres que les Français avaient jetés en travers de la rivière pendant la guerre, Kalm laissa son canot d'écorce aux militaires, qui en avaient besoin pour le transport de leurs provisions, et ceux-ci, en retour, lui permirent de se servir de l'une de leurs embarcations, qu'ils avaient laissées à quelques milles de là. En conséquence, parti de bonne heure le 30 Juin, il fit, avec (1) Ces craquements ne proviennent-ils pas d'arbres tordus par le vent, et dont les libres se relâchent, peu à peu, chaque jour, jusqu'à rupture plus ou moins complète du tronc ? (M.) ENTRE LES FORTS ANNE ET ST FRÉDÉRIC. loi ses gens, cette courte distance à pied, en marchant le long du rivage, et trouva les bateaux au lieu indiqué. Il en prit un, ainsi qu'il était convenu, et ses rameurs se mirent à nager vigoureusement. En chemin, ils virent, à leur gauche, les ruines d'une ancienne fortification en pierres posées les unes sur les autres, mais personne ne put dire si elle avait été bâtie par les sauvages ou par les Européens. Nos voyageurs se trompèrent de route, ou pour mieux dire, de rivière, et rirent un trajet inutile d'environ douze milles. Quand ils s'aperçurent de leur erreur, la jour- née était déjà très-avancée, et ils ne purent, même en forçant de rames, talonnés qu'ils étaient par l'appréhen- sion de quelque rencontre fâcheuse, que regagner la moitié environ du chemin perdu. Ils passèrent la nuit dans une île, mais ils ne goû- tèrent aucun repos, à cause des moustiques qui les incommodèrent d'autant plus que la crainte d'être dé- couverts par les Indiens, dont ils entendaient aboyer les chiens dans les bois, les empêcha de faire du feu. FIN DE L'ANALYSE DU SECOND VOLUME. TABLE ALPHABETISE DE L'ANALYSE. Abeille, Apis, (Hyménoptères,) 69 Abelmosch, Ambrette, hibiscus escu- kntis, ketmia indica (Malvacées,) '25 Aines american a, sapin (Conifères,) 83 Abo, ville de la Finlande, 26, 32 — Univeisité d' ix, xn Aborigènes, 117, 127 Acacia à trois épines, gledilshiu triacanlhos, fêvier, ca rouge à miel (Gésalpiniées), 24, 132 —blanc ou commun, faux acacia- robinier (Papilionacées,) 24 Académie royale de Stockholm, ix, 35, 37, 76 Acarus, tique (Arachnides,) 90, 109 Acer rubrum, érable rouge (Aceri- nées,) 19, 54, 92, 106 — negundo, érable à feuilles de frêne, 21 —saccharinvm, érable à sucre, 45 Acipenser sturio, Esturgeon (Ghon- droptérygiens - ganoïdes - sturio- niens,) 129, 141 Acorus, jonc odorant, iris jaune, lis des marais (Aroïdées,) 142 Actinie, anémone ou ortie de mer (Polypes zoanthaires,) 4 Adrien, l'empereur, 147 Afrique, 42 Agelaïus phseniceus, Etourneau au ailes rouges (Passereaux Coni- rostres,) 101 Agriculture, 28, 30, 48, 50, 81, 104, 106, 114, 121, 140 Agripaume cardiaque, Leonurus, (Labiées,) 57 Ail, AUium canadense (Liliacées,) 11( Aimant, 73 Airelle, Bluet ou raisin des boi? Vaccinium (Vacciniées,) 20 — d'Amérique, Atocas, canneberge Vaccinium hispidulum, 101 — Corymbifère, espèce de bluets, Huccleberry, 106 Aix-la-Chapèlle, trailé d' 136 Albany, 32, 60, 62, 124, 129, 131, 134 Albicore, 6 Alcée d'Amérique, moose-deer, élan cem«a/ces,(Ruminants-cervidés)71 Algonquins, 72 Algues, Algae (Fucacées), 4 Allemagne, 43, 60. 113 Allemands, 27, 58, 59, 97, 131 Amadas capitaine, 70 Amadou d'agaric jaune, 131 — du commerce, Polyporus fomtn- tarws, 131 Amarella, espèce de gentiane, 33 A.mboy, 60 Américaine la femme, 31 Américains, (constitution des — com- parée a celle des Européens,) 31 Amérique, 2, 3, 31, 39, 42, 43, 44, 48, 72,82, 84, 90, 91, 94, 117, 118 —du Nor.i, ii, m, ix, 12, 32, 34, 39, 51, 70, 84 —du Sud, 16, 52, 105 Amiante, asbeste, 73 Amsterdam, n Amygdaius Persica, pêcher, (Drupa- cées,) 39, 83 Anas, canard, (Palmipèdes,) 70 Andromède-à-grappes, — Andromeda paniculata, (Ericacées,) 122 Andropogon, (Graminées,) 12 Anglais et Français, iv, 64, 139 Angleterre, 1 , 27,*32, 49, 1 1 3, 1 1 7, 1 36 Anglo-Indiens, 25 Anémone hepatica, (Renonculacées,) 33, 106 Animaux de ferme, 31, 50, 80, 97 Anne, reine d'Angleterre, 66, 72, 139 Anne, le Fort,— 145, 146, 147 Annelides dorsibranches, 1 Anone, Anona muricata (Anonacées,) 24, 132 Anser canadensis, Outarde (Palmipè- des), 55, 70 Ansérine, chou- gras, chenopodium album (Ghenopodées,) 36 — anthelmintique, 47 Antilles, 16, 91 Anlirrliinum canadense, Linaire du Ganada (Scrofularinées,) 81 Apalanche vert, Prinos verlicellalus (Ilicinéts,! 20 Apiculture, 09 Apocyn chanvrin, Apocynum canni- binum, (Apocynées,) 39, 110 Araignée, (Arachnida,) 109 154 — Arbres, 91, 99, 118 — à feuilles persistante?, 92 — à feuilles décidues, 74 Arbre de vie Ihuya occidenlalis (Conifères-,) 143 — de Judas, gainier, cercis cana- densis (Césalpiniées,) 24 — des castors, magnolier (Magnolia- cées,) 24, 54, 83, 127 — à cire, cirier, (Myricées), 92, 154 — à cuillère, Kalmia latifclia (Erica- cées), 79 Ardca, héron (Echassiers), 101 Ardoise à tablettes, schislus laba- laris, 78 Arendal, x Aroïdées, 105 Armes des Sauvages, 95 Arrivages et départs de vaisseaux, 16, 63 Arum virginicum, gouet (Aroïdées), 38, 69, 105 Asie, 42, 68, 96, 105 — Mineure, ix Asperge, asparagus (Liliacées),48, 1 4 1 Astères (Composées), 33, 53 Atlantique l'Océan, 2 Attagas, Ptarmigan, Hazel-Hen,Lago- pus mulus (Gallinacés), 79 Atligbro, nom iroquois du raton, 98 Aubépine,ergot-de-coq. senellier, cra- taegus crus galli (Pomacées), 20, 35 Audubon, 49, 100, 102 Aune commun, Belula ahms, (Betu- lacées), 21, 103 Avoine, Avena (Graminées), 81 Azalea lutea (Ëricacées), 20 — nudiflora, 118 Azérolier de Virginie, 20 Azores, 2 Baie de Biscaye, 2 — St. Paul, xv Bains russes, 147 Balaena roslrala, 6 Bâle, 42 Baleine (Cétacés mysticètes), 5 Balsamine des bois, impatiens noli langer e (Balsaminées), 52 Bareith Marquis de, 42 Bartram John, xr, 18, 34, 36, 37, 38, 39, 40, 42, 43, 44, 53, 56, 67, 72, 96, Ut — William, fds du prédédent, 18 Barlsia Coccinea, castillège écarlate (Scrofularinées), 116, 128 Bâtiments de ferme, 59 Bec-croisé, Loxia curviroslra (Passe- reaux conirostres), 100 Bec-en-ciseaux ou coupeur d'eau, Pu(fînus ànglorum (Palmipèdes- Longipennes), 9 Belette, Mink, Muslela (Carnivores digitigrades mustelidés), 98 Bellemare R., xvi Bengston Jacob, 12 Benjoin, Laurus acslivalis (Lauri- nées), 23, 54, 110 Benoite des ruisseaux, Geum [rivale (Rosacées), 83 Bermudes, 49 Bestiaux, 31, 80 Bête-puante, moufette ou putois d'A- mérique, Mephilis Amer icana, (Mus- telidés), 67 Belula aluns, aune commun (Bétula- cées), 21, 103 — lenla, merisier rouge, 23 Beudant F. S., xiv Bident, Bidcns bipinnala (Compo- sées), 48 Bison, Bos Am-ricanus (Ruminants- Bovidés-Bonasps), 55, 68 Blaireau, Mêles vulgaris (Plantigra- des), 50 Blatte des cuisines, Kackerlack, can- crelas (Orthoptères), 90 Blé ou Froment, Trilicum (Grami- nées), 81 Bluet, airelle ou raisin-des-bois[( Vac- ciniées), 20 Bois-Blanc, Tilleul d'Amérique (Tilia- cées), 24 — Bouton, Céphalante Occidental (Rubiacées), 23 —de fer, Ostryer, Carpinus oslrya (Cupulifères), 23 — de plomb, bois cuir, Direct, paluslris (Thymélées), 114 — Joli, bois-genlil Daplme Mezereum (Thymélées), 33 Bombgx mort, ver-à-soie (Lépidop- tères-nocturnes), 38 Bonite,Thon à ventre rayé, Scomber pefam?/.s,(Acanthoptérygiens-scom- béroïdes), 8 Bouillet M. N., Dictionnaire des Sciences, 29 Bouillon-Blanc, Molène commune, Verbascum lhapsus (Scrofulari- nées), 24, 39, 108, 141 — 155 — Bouleau commun, Betula alba (Bétu- lacées), 43 — noir, Belula nana, 43 Bouton-rouge, cercis canadensis, gai- nier (Césalpiniées), 24 Brandevin, (brand, brûlé wein vin allem), brandy eau-de-vie, li9 Brink G. V. de, n Brochant, xiv Brongniart Alex., xiv Browallius, 26 Bruche des pois, Bruchus pisi (Colé- optères), 48, 121, 132 Brûlot, cousin, culex pulicaris (Dip- tères), 146 Brunet Manuel du libraire, ni Buckinghamshire comté de, x Buffon, 1, 56, 123, 142 Burlington, 59, 128 Butler, capitaine, 147 Buttes de terre dans les bois, 91 Buttington Richard, 87 Calebasse, gourde, cncurbila lagena- ria (Cucurbitacées), 44 Cal le des marais, calla palustris (Aro "idées), 105 — d'Kthio^iefRichardia Elhiopica,[0b Calumet de paix, 95 Camden Gu. 1 Canada, 18, 19, 22, 31, 32, 39, 44, 45, 54, 58, 65, 69, 72, 80, 90, 91, 102, 104, 126, 129, 135, 147 Canard, Anas (Palmipèdes), 70 Cancrelas, Kackerlack, Blatte des cuisines, 90 Canis familiaris, Chien (Carnivores- digitigrades, canidés), 108 — lupus, Loup (Carnivores digitigra- des, canidés), 68 — vulpes, Kenard (Carnivores digiti- grades, canidés), 68 Canneberge, Alocas (Vacciniées), 101 Canots d'ecorce, 146 Cap Breton, 26 Caprimulgus vociferus, Engoulevent criard, Wliip-poor-will (Pabse- reaux-fissirostres), 114 Capsicum annuum, Piment, Poivre de Guinée (Solanées), 25 Carabus lalus, Scarabée, 99 Carex, Laiche (Cypéracées), 1 17 Carlisle ville d'Angleterre, 42 Caroline, ancienne province de la — 39, 67, 105 Carpinus belulus charme commun (Cupulifères), 23 — ostn/a, charme ostryer, Bois de fer, 23 Carteret Geo., 63, 135 Caryer ou Noyer blanc, Juglans alba (Juglandées), 19 Casse, cassia chamaecrisla (Césalpi- niées), 36 Cassegrain, J. O., xvi Cassis : fait avec les fruits du gadel- lier noir, 22 Castillège écarlate, Barlsia coccinca (Scrofularinées), 116, 128 Caslor fiber, Castor (Rongeurs), 54, 55,98 — peaux de, 135 Catesby, Histoire Naturelle de la Caroline, 56, 67, 77, 97, 100 Calon, 147 Cèdre blanc, Cupressus thyoides (Conifères), 13, 83, 92, 119 — rouge Junipcrus Virginiana ^Coni- fères), 23, 35, 83, 120 Celsius thermomètre de, — 96 Cet Us Occidentales, micocoulier de Virginie (Celtidées), 24, 132 Centaurée jacee (Composées), 33 Centaurion de Linnée ou Sabbatie (Gentianées), 33 Centipède, Scolopendra (Mvriapo- des), 146 Cephalanlhus Occidcntalis, Cepha- Jante Occidental, Bois-bouton (Ru- biacées), 23 Cercis Canadensis, Arbre de Judas, gainier du Canada (Césalpiniées), 24, 132 Cerf, cervns (Ruminants - cervidés), 55, 79, 122 Cerfs fossiles, 71 Cerisier-à-grappes, Prunus Virginiana (Drupacées), 20, 92, 115 Cétacés, (Mammifères marins), 5 Cervus alces, Elan ou alcée d'Améri- que— Moose-deer, 71 Champignons (Cryptogames amphi- gènes), 105 Champlain lac, xi Chantiers maritimes, 15 Chanvre, Cannabis salira (Cannabi- nées), 81 Charbon de bois, 134 Charlevoix, 95 Charles II, roi d'Angleterre, 12, 136 Chateaubriand, 72 — 156 — Châtaignier, Fagus castanea (Cupuli- l'ères ou Quercinées), 21, 116 Chatunga rivière de la Sibérie, 42 Chaudières ou marmites de géants, 36, 144 Chauve- Souris Vespcrtilio murinus (Chéiroptères), 90 Chelonées, tortues de mer, 8 Chemins, entretien des, 92 Chêne d'Amérique, con paré à celui d'FAirope, 15, 35 --blanc, Quercus alba (Cupuliftres ou Quercinées), 19, 62, 92 — noir, Quercus nigra, 19, 35, 52 — rouge, Quercus rubra, 22 — d'Espagne, Quercus Msjanica, 19 — des marais Quercus aqiiatica 20 — saule Quercus Phellos, 20 — châtaignier Quercus prinus, 20 Chenille, larve des lépidoptères, 89 103, 121 Chenopodiwn album, chou-gras — anserine (Chenopodées), 36 Chester, 11,47,87, 112 Chèvrefeuille d'Amérique, Diervilla lutea,Bush Honey svclde (Caprifolia- cées), 20 Chichester, 47 Chien de mer Scyllù m canicula (Squales), 6 Chine, ix, 106 Christina, 45 Christiansand, x Chute des arbres, 146, 150 Cicindèle champêtre, cicindelta càm pestris (Coléoptères pentamères) 109 Cidre, 47 C'uuex leclularlus, punaise des lits (Hémiptères), 90 — lacustris, punaise aquatique, 109 Cirier de la Caroline, Myrica cerifera (Myricées), 51, 83 Cisse, tissus (Ampelidées), 47 Clams, Tridacne {Mollusca Conclu fera), 62 Climat, 32, 96, 120, 133 Cloporte, Onisque,porcellion, port'eM'o granulatus (lsopodes), 91, 121, 146 Clôtures, 27, 28 Clupea harengus, hareng (Malacopté rygiens abdominaux), 71 Cochon de mer, marsouin, Pliocaena vulgaris, Cétacés cétodontes,famille des Dauphins, 5, 129 Cock Peter, 18, 27, 50, 58 Cocoborus ludoviciamts, gros-bec (Passereaux-conirostres), 100 Cohoes chute de, 141 Colapies auratus,PicûOië (Grimpeurs- picidés), 102 Colden Cadwallader, Histoire des cinq nations, 91, 103, 124 Colibri, oiseau-mouche Trochilus . (Passereaux-lenuirostres), 56 Collinson Dr. Peter, n, 38, 53 L'ollinsonia Canadensis (LabiétS), 53 Colombe Christophe, 84, 94 olonies anglaises, 63, 85 Colubcr constriclor, serpent noir (Ophidiens colubridés), 18, 123 Comaret, Quinte-feuille, Comarum pa- lustre (Rosacées), 43 Commerce, 16, 63 Compagnie française des Indes Occi- dentales, 135 " Condylura cristota, taupe d'Améri- que (Mammifères insectivores), 51 Conferves (genre d'Algues), 142 Connecticut, 38 Contrebande marchandises de, 131 Cook, célèbre navigateur anglais, n Copal d'Amérique, Liquidambar sly- raciflua (Balsamifluées), 21 Coq de bruyère à fraise, tttrao bonasia (Gallinacés), 97 Coquilles pétriliées, 40, 42 — fossiles, 40, 53 Corneille, corvus cornix (Passereaux- conirostres-corvidés), 36, 99 Cornouiller, Cornus florida{Gomêes), 20, 54,83, 117 Corvus frugilegus, Freux — espèce du genre corbeau, 36 Coryphène, Coryp/iaena hippuris (Acanthoptérygiens), 6 Cotonnier, Gossypium hcrb. ccum (Malvacées), 117 Coudrier, des sorcières, Hamamelide, wilck kazel (Hamamelidées), 22 — commun ou Noisetier avelinier Cor y lus avellana (Cupulifères), 103 Coupeur d'eau ou bec-en-ciseaux, Puffmus anglorum (Palmipèdes- Longipennes), 9 Courge, cucurbita (Cucurbitacées), 44, 80 Cousin, brûlot, culex pulicarus (Dip- tères), 146 — moustique, maringouin culex paï- ens, 146 — 157 Coutumes, 87, 93, 134, 137 Crabe, cancer (Crustacés décapodes brachyuros), 4 Cramer Pierre, n Crampes remèdes contre les. 125 Crataegus crus galli, Aubépine, er- got-de-cop, Azerollier de Virginie, senellier(Pomacées), 20 — tomenlosaimes,pilus (Pomacées), 114 Crevette, crangonvulgaris (Crustacés décapodes macroures), 4 Criquet, acridium (Orthoptères), 109 — noir ou grillon des champs, gryllus campeslris, 90, 100 Cristal, cryslallus monlana, 26 Crocus, safran (Iridées), 117 Crolalus horridus, crotale, serpent-à sonnettes (Ophidiens famille des Vipéridés), 28,35, 53, 76, 120 Crown Point ou Fort St. Frédéric, 90, 140 Cucumis melo, Melon (Cucurbita- cées), 80 Cuivre, mine de, 84 Cultivateurs, 24 28, 58, 69, 81,87, 92, 97, 106, 107 Cunila pulegioides, Faux-Pouliot (La- biées), 52 Currant, gadellier commun, ribes rubrum (JiibësiSLcées), 114 Dance-Point, 130 Dantzick, 112 Daphné Mézéréon — bois-joli — bois- gentil (Thymélées), 33 Darmstadt, 38 Dalura Slramonium, Pomme-épineu- se (Solanées), 46 Dauphin, Delphinus (Cétacés ceto- dontes), 6 Deal port de (Angleterre), 1 Débâcle, 99, 133 Dégénérescence des animaux de ferme, 3 1 Delaware, rivière, 3, 10, 13, 15, 18, 44, 47, 48,59,94, 117, 125 Déluge universel, 42, 46, 82 Dent-de-lion, Leonlodm Taraxacum (Composées Chicoracées), 53 Dents, remèdes contre les maux de 52 Didelphis-, sarigue, opussum (Marsu- piaux), 55 Digitale pourpre, Gant-de-Notre- Dame, iigilalis purpureci (Scrofu- larinées), 53 Dillenius Dr., 38 Dindon, Meleagris gallo-pavo (Galli- nacés), 55, 70 Dioscorea alala, Igname (Diosco- rées), 127 Diospyros Virginiana, Plaqueminier de Virginie (Ebénacées), 19, 22, 80, 116, 132 Diphtérie, 156 Dirca des marais, Dirca palusiris, Bois-de-Cuir, Bois-de-Plomb (Thy- mélées), 114 Dirschau, n Domestiques, 85 Douvres, l Drabe ou drave printanière, Drava verna (Crucifères), 103 Draconlium fœlidum, Symplocarpe, Racine d'ours (Aroïdées), 103 Duddley, 72 Dyssenterie, 39, 62, 69 Dytique, Hydaticus interruptus (Cole- optères-pentamères), 109 East Jersey, 44 Eau-de-vie, Brandevin, 129 — de pêche, 28 — de patate sucrée, 50 — de pommes, 28 — de pommes de Plaqueminier, 80 Eaux — diminution du volume des 81 Ecailles fossiles, 29, 40, 61, 68, 81 Eclairs de chaleur, 2 Ecosse, 5, 136 Eclopistes migratoria, Pigeon de pas- sage, Tourte (Gallinacés), 55, 102 Ecureuil suisse, Sciurus slriatus (Ron- geurs), 28, 77 —cendré Sciurus cinereus, 28 —gris, Sciurus carolinensis, 74 — volant, Sciurus voïansj 77 Edwards, Histoire Naturelle des Oi- seaux, 56 Egypte, ix, 117 Elan ou Alcée d'Amérique, moose- deer, cervus alces (Ruminants cervidés), 71 Eléphants fossiles, 42 Elizabethtown. 60; 84 EHébore, Varâtre blanc, varaire, veratrum album (Melanthacées). 103, 115 Engagés, 85, 93, Engoulevent criard, Wliip-poor-Will, Càprimulgui vociferus (Passereaux lissirostres), 114 — Popetué, Chordeille de Virginie, — 158 Nighl-Hawk, Mosquilo-Hawh, 114 Entomologiques — Observations, 88 Epervière, Hieracium (Composées), 53 Epigé rampant, Epigaea repens (Eri- cacées), 110 Erable rouge, acer rubrum (Acéri- nées), 19, 54, 92, 106 — à feuilles de frène,Négundo, 21, 116 — à sucre, acer saccharinum, 45 Ergot-de-coq, Aubépine, senellier (Pomacées), 20 Esclaves, 85 Espadon, Albacore (Acanthoptéry- giens), 6 Espagne, 49, 113, 117 Essex comté d' — x Esturgeon, Acipenser slurio (Chon- droptérvgiens-ganoïdes sturioni- ens), 129, 141 Etés de la Pensylvanie comparés à ceux de la Suède, 32 Etourneau aux ailes rouges, sturnus predatorius (Passereaux -Coniros très), 101 Europe, 2, 5, 18, 20, 25, 32, 49, 96, 105,118 Européens en Amérique. 31 Excroissances ou loupes sur les arbres, 92 Exocet, Poisson-volant exocelus voli- tans (Malacoptérygiens abdomi- naux), 7 Exportations, 16, 131 Fagopyrum esculcntum, sarrasin (Po- lygonée6). 80 Fagus castanea, châtaignier (Cupuli- fères), 21 —sylvalica, Hêtre commun (Cupuli- fères), 23 Fascination exercée par les serpents, 18, 28, 76, 125 Faux-Pouliot, Cunila pulegioïdes (Labiées), 52 Faux Thuya, cèdre blanc, cvpressus thyoides, 1 19 Fébrifuges, 55, 62, 83 Fécondité des mariages. 87 Felis Lynx, Loup-cervier (Carnassiers Félidés), 122 Femmes, 28, 31, 39 Fer mines de, 73, 102 Ferland Abbé, i, xv Feu St. Elme, 10 Fève, haricot, Phaseolus (Légumi- neuses), 44 Fêvier, GledUshia triacant ho s, acacia à trois épines ( C? sa 1 pi niées), 24, 132 Fiber zibethicus, Rat-musqué (Ron- geurs), 98, 142 Fièvres intermittentes, 83, 117, 121 —tremblantes, 39, 62 Finlande, 26 Flèche d'eau, Kalniss, Sagillaria (Alismacées), 105 Flessingues, n Flora Canadensis, xm Floride, 4 Forêt-Noire, 71 Forster John Reinhold, "n,6, 8, 26 39, 46, 56, 60, 72, 76, 96, 98, 104, 109, 112, 113, 123, 129, 139, 147 — George, n — les Sieurs, xv Port Anne, 145, 146, 147 — Mohawk, 147 — Nicholson, 45, 145 — Orange, m, 136 — Saratoga, 143 —St. Frédéric, i, 90, 140 Fossiles, 42, 81 Fougères, 116 Fourmi fauve, Formica ru/a (Hymé- noptères, 74, 100, 141 Fourmillière, 141 Fourrures commerce de, 131, 135 Framboisier noir, Rubus Occidenlalis (Rosacées Dryadées), 19, 114 Fiançais de l'Amérique du Nord, leur influence sur les destinées des colo- nies anglaises, 65 —du Canada, 39, 112 — et anglais, iv, 64, 139 France, v, 113, 136 Franconie, 42 Franklin, II, 14, 15, 53, 71, 72, 73, 74,84, 101, 127 Frêne commun, Fraxinus Excelsior (Oléacées), 22, 116 Freux, Corvus frugilegus, espèce du genre corbeau, 36 Fries, 105 Fromage américain. 128 Froment ou blé, Trilicum (Grau.i- nées), 81 Facus, Algues (Fucacées), 4 — îialans, 4 Furman Sarah, 88 Gadellier noir, Ribes nigrum (Ribé- siacées), 22 — commun, curranl tree, ribes rub rum, 1 1 4 150 — Gainier du Canada, Arbre de Judas, Cereis canadensis (Césalpiniées), 24, 133 Gale, Piment Royal, Myrice galr(My- ricées), 44 Galiopside, galiopsis (Labiées), 57 Galissonnière comte de la, i, v, 20 Gant de Notre-Dame, Digitale (Scro- fularinées), 53 Gauthier, médecin du roi, botaniste, i Geai, Garridas (Passereaux Coniros- tres), 70 Géants ossements de, 30 Genêt-à-balai, Genisla scoparia (Pa- pilionacées-Génistées), 69 Genévrier commun — Juniperus com munis (Conifères), 120 Gentiane gentiana (Gentianées), 33 — jaune lutea, 43 GeotTroy, Insectes de Paris, 49 Géologiques observations, 40 Géranium robertin, Géranium ro- berlianum (Géraniacéesj, 67 — maculât um, 122 Germantown, 27, 49 Geum rivale, Benoite des ruisseaux (Rosacées), 83 Gibier à plumes, 70 Gledilshia triacanlhos, Fêvier, aca- cia à trois épines (Césalpiniéesi, 24, 132 Glossopêtres, 68 Glycine Apios, Pênacs, Ilopnis (Légu- mineuses), 104 Gnaphalium Margarilaceum (Com posées), 39 Gobe-mouches, Muscicapa (Passe- reaux-Dentirostres), 18 Gossypium herbacewn, cotonnier (Malvacées), 117 Gothie Occidentale, 129 Gothenburgh, x Gouet, Arum Virgini:um (Aroidées), 38. 105 Gourde, Calebasse, Gucurbita lage- naria (Cucurbitacées), 44 Gouvernement des Provinces an- glaises, 64 Gracula Quiscula, Quiscalus Versi color, Purple Crackle (Passeraux- Conirostres), 49, 101 Graemstad, x Grass-Worm, larve, 89 Gravesend, l Grecs, 147 Grenouille, Rana (Balraciens-Anou- res), 63 — Ocellée, rana ocellata, 103 — Mugissante, rana boans (vulg.Qua- ouaron), 1 18 Grillon domestique, Gryllus domes- licits (Orthoptères), 90 — champêtre ou criquet noir Gryllus campeslris 90, 100 Grive moqueuse, Merle-Chat, Tur- dus mnnus felivox (Passereaux dentirostres). 18 Groenlandais. 127 Gronovius, 114 Gros-bec, Cocoborus Ludovicianus (Passereaux Conirostres), 100 Grottes de la Pensylvanie, 79 Grue, G rus Canadensis (Echassiers), 70, loi Gryllus migratorius, Sauterelle, lo- custe (Orthoptères), 88, 126 Guêpe, vespa, (Hyménoptères), 1 1 1 Gui fibreux, viscum filamenlosum (Loranthacées), 69, 83 Guiane, 112 Gulf-stream, 3 Gustasson Nils, 107 Gyrin nageur, Tourniquet, Gyrinus nalalor (Coléoptères), 112 ' Hackluyt's collect, 33 Haller Alb. de, vm Hambourg, 30 Hammamelide de Virginie, huma- melis Virginica, coudrier des sor- cières (Hamamelidées), 22 Hanneton, Melolonlhavulgaris (Colé- optères), 89 Hareng, clupea harengus (Malacopté- rygiens abdominaux), 71 Haricot, fève, Phaseolus (Légumineu- ses), 44 Hasselquist Fred. Haùy, xiv Hazard Maria, 9 Hazel-hen, Attagas, Ptarmigan, I.ago- pus muttis (Gallinacés), 79 Hedera Hélix, Lierre (Araliacées), 47 — Quinqucfolia, vigne sauvage [ïm- pelidees), 47 Hellgate, 62 Hépatique, anémone hepatica (Renon- culacées), 33, 106 Herbe des prairies, Paturin,(/\w capil- lavis (Graminées), 80 117 — à la puce, sumac vénéneux rhus 160 — toxlcodendron (AnacarJiacées), 22, 25 Herbe aux chev aux ,Co//insonia Cana densis ( Labiées >, 53 — à dinde, Millefolium achillea (Com posées), 53 Héron, Ardea (Echassiers\ 101 Heriot Thomas 39 Hertfordshire comté de, x Hesselius Gustave, 12, 18 Hêtre commun, Fagus sylvatica (Quer- cinées), 23, 99 Hibiscus esculentis, Ketmie (Malva cées,) 25 Hibou, Bubo, (Rapaces nocturnes), 10 Hieracium, épervière (Composées), 53 Hind M., 116 Hirondelle de mer, sterna hirundo (Palmipèdes Longipennes), 9 — de rivage. Hirundo riparia (Passe reaux fissirostres», 10 112 — de maison, Hirundo rustica, 1 12 — de cheminée, Hirundo pelasgia, 112 — Bleue, Hirundo purpwea, 112 Histoire Naturelle utilité de cette science, 122 Hivers de l'Amérique comparés à ceux du Nord de l'Europe, 32 Hocquart l'Intendant, xv Hollandais, 10, 59, 60, 61, 63. 65, 66, 84, 91, 97, 107, 118, 130, 134, 135, 136, 144, 146 Hollande, ni, 60 Homard, Homarus vulgaris (Grusta cés-décapodes-macroures), 61 Hopniss on Hapniss, glycine apios (Légumineuses), 104 Houille mines de, 26 Houx llex aquifolium (Ilicinées), 81, 82 Huckleberries, Airelle corymbifère espèce de bluets, (Vacciniées , 105 Hudson rivière, 35, 129, 133, 140. 143, 146 Huitre, Ostreaedulis (Mollusques acé- phales pleuroconques),48, 61, 129, Huitres écailles d' 24, 48 Humus ou terre végétale, 46 Huns, 46 Hunter Dr. Transactions Philosophi- ques, 43 Hunter gouverneur de New-York, 139 Hydaticus interruptus (Coléoptères pentamères), 109 Hydropisie, 80 Igname, Dioscorea alila (Diuscorées) 127 llex aquifolium, Houx (Ilicinées), 81, 82 Immortelle, gnapJnlium margarila- ceum (Composées), 39 Impatiens noli tangere, Balsamine des bois (Balsaminées), 52 Importations, 16, 63 Impôts, 87 Imprimeries, 17, 66 Indépendance, (guerre de 1',) prévue par Kalm, 1 19 Indes Occidentales, 16, 61, 63, 73, 105, 127 Indiens, 18, 29, 30, 31,38, 40, 44,61, 62, 68, 69, 75, 78, 83, 84, 90, 9i, 95, 102, 104, 105, 106, 110, 136 — Evangélisation des — 139 Indighirka, rivière de la Sibérie, 42 Infusoires, (Protozoaires), 10 Ingouez, 95 Insectes du New-Jersey, 88 Instruments, outils et armes des Sauvages, 95 Ipswich, 87 Iris jaune, Acorus (Aroïdées), 142 Irlande, 71 Iroquois, 44, 94, 98, 106, 110, 138 Islandais, 6 Italie, 5, 113 Jamaïque, 16, 56 Jardins, 27, 46 Jonc odorant, Acorus (Aroïdées), 142 Jugions alba. Noyer blanc (Juglan- dées), 19,92, 116 — nigra, Noyer noir, 21, 54, 116, 132 — cinerea, " cendré, Butler noslrx 23 — regia « d'Angleterre, 1 16 Juifs, 62 Juniperus Virqiniana ce Ire rouge (Conifères) 23, 83, 120 — Communis, genévrier commun, 120 Jussieu, xni, 53 Kacf,erlack, cancrelas, blatte des cui- sines (Orthoptères), 91 Kalm, Pierre, i, ix, 22, 24, 34, 37, 40. 45,47, 49,67,84, 96, 126, 147 Kalmia lalifolia (Éricacées), 22, 79, 83, 126 — angustifolia, 83, 126 Kalmie glauque, swamp Laurel, 126 Kamtchatka, 68 — 161 — Katniss, Flèche d'eau, Sagittaria (Alismacées), 105 Kelmia Indica (Malvacées), 25 Kent, comté de, l Klein, Greffier de la cité de Dantzick 112 Lagopus mutas, Ptarmigan (Gallina- cés) 79 Laiche, carex (Cypéracées), 117 Lamier, Lamium (Labiées) 57 Lampyris nocli/uca, Mouche-à-feu, ver luisant (Coléoptères), 80, 116 Land's End, cap d'Angleterre, 9 Laodicée Concile de, 147 Lapis ol/aris, pierre ollaire, 72, 95 Laponie, vin Larix americana, Mélèze (Conifères) ô8 Larus canus, mouette (Palmipèdes- longipennes) 9 Lirves, 89, 101 Laurier nain d'Amérique, Kalmie latifoliée, 22 Liurus sassafras (Laurinées), 22, 45 80, 115, 116 — aestivalus laurier benjoin, 23, 54, 110 Lawson, capitaine Je la Marg-GaUy, l Légendes indiennes, 30, 114 Leibnitz, 42 Le Moine J. M. 100, 112 Lepas analifera (Crustacés cirrhi- pèdes) 5 Leonurus, agripaume cardiaque (La- biées) 57 Leontodon Taraxacum, pissenlit (Composées chicorac^es) 53 Lerndorf comte de, 113 Liard, Populus Canadcnsis (Salici- nées) 133 Lierre, Hdera Hiix (A.-aliacées), 47 Lièvre, Lepus americanus (Rongeurs) 96 L gitslrum vulgare, Troène commun, "(Oléinées), 27 Lin, Linum (Linacées), 81, 82 Linaire du Canada, Anlirrhinum Canadense (Scrofularinées) 81 Linné, vin, 4, 6, 21, 23, 26, 28, 49, 53, 100, 101, 114, 123, 142 Linnée boréale, Linnaea borealis (Ca- prifoliacées) 44 Liquidambar Styraci/lui, Copal d'A- mérique (Balsamifluées) 21,91, [31 Liriodendron Tulipifera, Tulipier (Magnoliacées), 20, 54, 83, 91, 115, 126, 132 Lis des marais, acorus (Aroïdées) 142 Littleton Dr, 42 Lobelia inflata, Lobélie gonflée,Tabac indien (Lobéliacées), 109 Lobélie cardinale, 128 Locuste, sauterelle Gryllus migralo- rius (Orthoptères), 88 Loir, Myoxus avellanarius (Ron- geurs), 75 Londres, x, 34, 53, 80 Longévité en Amérique, 31, 87 Long-Island, 129 Longueuil, Baron de, 120 Louisiane, 39 Loup, Canis lupus (Carnassiers digiti- grades, famille des Canilés), 68 — cervier, Felis Lynx (Carnassiers Félidésj 122 Loupes — excroissances ligneuses sur les arbres, 92 Loutre, Luira vulgaris (Carnassiers digitigrades mustelidés) 55 Loxia cardinalis, Oiseau-rouge /Passe- reaux-conirostres) 100 Lumbrici marini, Vers de mer (Anne- lides dorsibranches) l Lund, université de, ix Lupin vivace Lupinus perennis (Papi- lionacée» génistées), 59, 115 Lusignan, M. de, 90, 148 Lycopeçlon Tuber, Truffe (Lycoper- dacées) 69 Lydius, colonel, 145 Magnolia glauca Magnolier arbre des castors (Magnoliacées) 24, 54, 83, 126, 132 Mainate pourpre, (Passereaux-coni- rostres-sturnidés) 49, 101 Maïs Zea Mai/s (Graminées-Phalaii- dées) 30, 44, 104 Maisons, 27, 63, 120, 121, 134 Manche, la, 2 Mangeur de Maringouins, Engoulevent Popetué, Chordeille de Virginie. Night-Hawk, Mosquilo-IIawk, 1 14 Manufactures, 17, 38, 63, 65 Marbre blanc, carrière de, 26 Marc-Antoine, 147 Marcassites, 26 Mariage, 87, 92 Marmites de géants, 36, 144 162 Marsouin, Phocacna vilgaris (Cétacés cétodonles fami.le des Dauphins), 5, 129 Mary-Gallii, Nom du vaisseau sur lequel Kalm a fait la traversée d'Europe en Amérique, l Maryland, 3, 28, 40, 93, 107 Massette, Thypha latifolia (Thypha- cées), 110 Maunders Samuel, 51, 105 Maures, 1 17 May-Flower, Epigée rampant (Erica cées) 118 Meleagris gallipavo,Dïudon (Gallina ces) 55, 70 M- les vulgaris, Blaireau (Plantigra- des) 50 Melèse, Larix anvricana (Conifères), 38 Melilotbleu, Trèfle, JHfolium Melilo- lus cœrulea (Papilionacées) 103 Meloe Proscarabée (Coléoptères) 107 Melolontha vulgaris, Hanneton (Colé- optères) 89 Melon, cucumis melo, (Cucurbitacées 80 Menthe, Mcnlha (Labiées), 57 Mephilis americana, Moufette, Putois d'Amérique, Bête puante (Carnas siers mustelidés), 67 Mer, eaux de la — Observations géo- logiques démontrant qu'une partie de l'Amérique du Nord a été long- temps couverte par les eaux 40, 8 1 Merisier-rouge, Belula /enia^Betula.- cées) 23 Merle-chat, Turdus mimus felivox (Passereaux dentirostres) 18 Merle du Canada, Robin, Recl- Breast, Rouge-Gorge, lurdus mi- , 22 — rubrum, gadellier commun, 114 Ri hardia Elhiopica,ca\\e d'Ethiopie (Aroïdées), 105 Rivière-Rouge, 1 16 Robin bleu, Red-Breasi-Blue, Mola cilla sialis (Passereaux dentiros- tres), 100 — Red-Breasl, Rouge-gorge ou Merle du Canada Turdus migralorius (Passereaux dentirostres), 103 Robinier Faux-acacia (Papiliona- cées), 24, 133 Roderfort Major, 98, 129 Romains, 147 Rubus Occidenlalis^r&mboi'sÀtîY noii (Rosacées Dryadées), 19, 114 Rudbeck Olaus, botaniste suédois, VJII Rue-des-prés, Pygamon, lhalictrum (Renonculacées) 116 Ruines d'une ancienne forteresse, 151 Russie, 26,42, 46, 147 Rustico, 51 Sabbatie ou Centaurion (Gentianées) 33 Sachems, 66 Safran, crocus (Iridées), 117 Sagiliaria,F[èche d'eau (Alismacées), 105 Sagor le, 84 Salaires des journaliers, 38 Salem, 116 Sanguinaire du Canada, Sanguinaria canadensis (Papavéracées), 110 Sapin de la Pensylvanie, Pmus ame- ricana (Conifères), 23, 92, 126 — Pinus Abies, Abies americana (Conifères), 81 Sargasse baccifôre (Fuco'Mées), 4 Saratoga, Fort, 143, 148 Sarigue, Opossum, Didelphis (Marsu- piaux) 55 Sarmates, 46 Sarolhra gcnlianoides, Millepertuis- en-balai (Hypericinées), 38 Sarrasin, Fagopyrum esculenlum (Po- lygonées), 80 Sarrasin Michel Dr. Naturaliste, 142 Sassafras, Laurus sassafras (Lauri- nées). 22, 45, 80, 115, 116 Sauge des Jardins Salvia officinale (Labiées), 62, 83 Saule Salix (Salicinées), 141 Saumary M. de, i Sauterelle Gryllus migralo: ius (Or- thoptères), 88, 126 Sauvages de l'Amérique. 29 Scarabées (Coléoptères pentamères), 99, 109 Scarabœus stercorarlus, 109 Scarabée de la Caroline, 109 — muticus, 126 Scheick-Sidi, Prince de Liban, 17 Schistus tabularis, ardoise à tablettes 78 Schlieben comte, 113 Schoonhoven, J. V., n Sciurus Btriatus^cxxvtwW suisse (Ron- geurs), 28, 77 — cinereus, Ecureuil cendré, 28 — carolinensis, Ecureuil gris, 74 — volans, Ecureuil volant, 77 Sclérotions (fungi), 105 Scopoli Insecta carniolica, 49 Scorbut, 103 Seigle, secale (Graminées), 81 Sel, 73 Senellier, aubépine, ergot de coq, Azérolier de Virginie, Crutaegus crus galli (Pomacées), 20 Sénevé, moutarde, Sinapis arvensis (Crucifères), 141 Sensitive (Mimosées), 36 Sept-Isles, Naufrages des, vi, 147 Serpent-à-sonnettes, Crolalus horri- dus (Ophidiens-vipérides), 28, 35, 53, 76, 120 Serpent noiccoluâer constrictor (Ophi- diens colubridésj, 18, 123 — venineux, 120 — à corne, cérastes, 120 — à ventre rouge, 120 — vert, 120 — Fascination exercée par les — 18, 28, 76, 125 — 167 — Serviteurs, 85 Sialia Wilsoni, l'oiseau bleu, Red breasl-blue, Motacilla sialis (Passe reaux dentirostres), 100 Sibérie, 23, 42, 43 Signes divers, 2, 96 Sinzendorf comte de, 17 Simples et Remèdes, 4. 39, 45, 47, 5'2 53, 62, 69, 80, 81,83, 94, 103, 106 125 Skulkill rivière, 13, 45, 51, 78 Slaves, 6 Sloane Sir Hans, 73 Smilax laurifolia, Smilace (Smilaci nées), 22, 47, 120 Société Royale de Londres, 37, 53 Solidago Virga Aurea, Verge d'Or (Composées), 33, 53 Souris, mus musculus (Rongeurs), 96 South Kingston, 88 Sparte ou genêt à balais, Spartium scoparium (Papilionacées-genistées), 69 Sçuash, courge, cucurbita latior (Cu- curbitacées), 4i St. Frédéric Fort ou Crown Point, 90, 140 St. George Lac, xi Ste. Hélène, Ile, 120 St. Laurent Fleuve, vi, 147 St. Nicolas (Canada), 126 Slaten Island, 60 Sterna hirundo, hirondelle de mer (Palmipèdes longipennes), 9 Stockholm, i, xi, 48 Stramoine ou pomme épineuse, Da- tura stramonium (Solanées), 46 Strasburg 131 Sturnus predatorius, Etourneau aux ailes rouges, (Passereaux coni- rostres), 101 Suède, i, m, ix, xn, 25, 27, 32, 37, 51 62 74 96 Suédois/iv, 10, 23, 24, 39, 45, 51, 67, 69, 79, 94, 103, 107, 10S, 118 Suisse, 42 Sumac glabre, Vinaigrier, Rhus gla- bra (Anacardiacées), 19, 25 — grimpant, Rhus radicans,1\ — vénéneux, Rhus toxicodcndron, 22, 25 Sureau blanc, Sambucus Canadensis (Caprifoliacées)., 20, 95, 143 Surgy M. de. Histoire Naturelle et politique de la Pensylvanie, m Surinam, 66, 127 Susquehanna rivière, 44 ' Sven's Sœner, fils de Sven, 13 Symplocarpe, Dracontium fœtidum (Aroïdées), 103 Syphilis, 80 Tabac, Nicotiana iabacum (Solanées), 108 — Indien, Indian Tobacco, Lobelia in- flata (Lobeliacées) 109 — marron, Morelle (Solanées), 109 Talc, 72 Tamise, 1 Tanaisie, Tanacet/tm vu/gare (Com- posées), 36 Tardivete des plantes d'Amérique, 33 Tasmanie, 106 Taupe d'Amérique, Condylura cris- tata, (Mammifères-Insectivores), 51 Taw-Ho, Tuckah, Tuchhahoo, Peltandra Virginica (Aroïdées), 69, 105 Tazvhee, Tawkin, Oronce aquatique (Aroïdées), 106 Teintures, 25, 28, 45, 52 Tétras bonasia, Coq de bruyère à fraise (Gallinacés), 97 Thalictrum, Pigamon, Rue des prés (Renonculacées), 116 Thé, Thea (Ternstrœmiacées-camel- liées), 83, 150 — de feuilles de sassafras, 80 Thon, Thynnus (Acanthoptérygiens- Scomberoïdes), 6 Thuva, Thuya Occidentalis (Conifèresu 143 Tilleul d'Amériaue, Tilia americana, (Tiliacées), 24* Tinca vestianella,m\lQ (Lépidoptères), 89 Tique, acarus (Arachnides), 90, 109 Tite-Live, 42 Tombeaux indiens, 44 Torfée, Historia Vinlandiœ, 84 Tortue de mer (Chelonées), 8 Tourniquet, Gyrinus natator (Coleop- tères-Pentamères, 1 1 1 Tourte, Pigeon de passage — Ecln- pisles miyraloria ('-allinacési, 55, 102, 149 Toux, Remèdes contre la, 55 Traditions indiennes, 30, 40, 41, 08, 84 Travado, 126 Trèfle bleu, Melilot bleu, Trifolium melilotus cacrulea (Légumineuses Papilionacées), 109 168 — Tremble, Populustremida, (Salicinées) 109 Trenton, 59, 88, 128 Tridacne, Clams (Mollusques acéj ha- ies), 62 Trient aie d'Europe Trîentalis Enro- paea (Primulacées), 44 Tnglochine aquatique, Troscart,7W- glochin maritima (Joncacées), 44 Triticum, blé (Graminées), 81 Trochilus Colibris Oiseau - mouche (Tenuirostres), 56, 115, 132 — mini/nus, 56 Troëne commun, Ligustrutn vidgare, (Oléïnées), 27 Truffe, Lycoperdon tuber, (Lycoperda- cées), 69 Tulipier de Virginie, Liriodendron tu- lipifera (Magnoliacées), 20, 54, 83, 92, 115, 126, 132 Tupelo velu, Nyssa Villosa (Nyssa- cées), 21, 116 Turdus migratorius, Merle ou Rouge- gorge du Canada, (Passereaux dentirostres), 103 TuthilSarah, 87 Typha latifolia, Massette, (Thypha- cées), 110 Ulmus Americana, Orme blanc, (Ul- macées), 22, 106 Upsal, Université d' — , vin, ix Ursus Américaines Ours d'Amérique (Plantigrades), 36 — ou Procyon lotor, Raton, Raccoon (Plantigrades), 29, 55, 98 — Mêles, Blaireau (Plantigrades), 50 Ustensiles des Sauvages, 95 Utrecht, n Vaccinium, Bluet, raisin des bois (Vacciniées), 20 — hispidulum, atocas, cranberry, 101 Vagues Puissance des —de l'Océan, 2 Varaire, verâtre ou Ellébore blanc, Veratrum album (Melanthacées), 103, 115 Variole, 104 Vases indiens, 78 Vaudoux danse du — , 87 Végétation différente de pays limi- trophes, 125 Végétaux d'Europe, leur précocité en Amérique, 1 18 Ver-à-soie, chenille du Bombix mort, (Lépidoptères nocturnes), 38 Ver luisant, Lampyris nodiluca, (Co- léoptères), 80 Verbascum 77z^^,Molênecommui e (Scrofularinées), 24, 39, 108, 141 Verge d'or, Solidago virgaurea, (Com- posées), 33, 53 Vergers, 24, 47, 58, 81, 132 Vermifuges, 47 Ver de Russie, 26 Verreau Abbé, u, 63 Vers de mer, Lumbrici marini (anue- lides dorsibranches), 1 Verveine commune, Verbena officinalisy (Verbenacées), 36 Vespa, guêpe, (Hyménoptères), 111 Vestiges de la période antédilu- vienne, 82 Vcspertilio murinus, chauve-souris (Chéiroptères), 90 Vigne lambrusque, Raisin de renard (Ampelidées), 20, 116 — sauvage Hedera çuinauefolia, 47 Vin de gadelles, 27 — de framboises, 27 — de cerises, 28 Vinaigrier, Sumac glabre, Rhus gla- bra (Anacardiacées), 19, 97, 116 Vinlande, 84 Vinification en Amérique, 38 Violette sauvage ou de mars (Viola- riêes), 33 Virgile, 122 Virginie Province de la,21, 40, 107,139 Viscum filamentostim, gui fibreux (Loranthacées), 69, 83 Vison, Mustelavison (Mustelidés) 98 Vistule Rivière, 113 Volga — , 46 Vulnéraires, 52 Walker amiral Sir Hovenden, vi Wallerius Minéralogie de, 26, 46, 1 12 Wampum, 62, 135 Wheelock Elzaar révérend, 139 Whip-poor-Will, Engoulevent criard, 114 WhiteReld, 14 Whitsunday-flower, 1 18 Wight île de— 5 Wilmington, 45, 47, 91 Wilson, ornithologiste américain, 1 0 1 Woodcreek Rivière, 146, 147 Yungstrœm Lars, 1, 12, 19, 25, 133, 140 Zea Mays, Maïs (Graminées-Phalari- dées), 30, 44, 104 ERRATA DE L'ANALYSE. âge 1 1 4 1 16 gne << 18 " 20 i< i < 22 au 19 au lieu de mousse d' Irlande : lisez mousse d'Islande. 30 " " " presquHmmédiatement : lisez presque immédiate- ment. 5 " " " 67 ans : " 66 ans. 17 " •' " et autres ustensiles : " d'autres ustensiles. 3 de la note (l) au lieu de chèvrefeuille d'Amérique : lisez d'Azalée. No. 35 au lieu de Kalmia latifolia (à larges feuilles) le laurier nain d'Amérique nommé d'après Kalm lui même : lisez Kalmia latifolia (à larges feuille's)nommée d'après Kalm lui-même, connue aussi sous la dénomination de : laurier nain d'Amérique dwarflaurel etc " au No. 37 Après les mots poisonous sumach: ajoutez Rhus toxico- dendron. 25 ligne 24 au lieu de rhus vernix appelé herbe à-la puce: lisez rhus toxicodendron. 28 à la note (l) au lieu de Phytolique: lisez Phytolaque. 31 ligne 14 au lieu de procrées: lisez procréés. 33 note (l) au lieu de Vide Hickluyt's collect : lisez Bois-joli, Bois- gentil. " note (2) au lieu do Bois-joli, Bois-gentil: lisez Vide Hackluyt's collect. vol. III 246. 46 ligne 14 de la note au lieu de Mogols : lisez Mongols. 48 ligne 10 au lieu de Le bident, bidens bipinnata etc. : lisez, On don naitle nom deSpanish Needles au bident bidens bipinnata etc. 54 lignes 21 et 24 au lieu de Le Magnolier etc. ; il se rencontre : lisez Le Magnolier etc., se rencontre. 55 a la note (3) au lieu de Anser férus lisez Anser Canadensis. 63 a la note (2) au lieu deu" genre de batraciens anoures etc., lisez : grenouille d'arbre, genre de batraciens anoures etc. 83 ligne 28 au lieu de décrit lisez : décrits. 90 " 10 " " " lectuarius lisez lectularius. 101 " 1. " " " (Echassier) lisez (Echassiers). 114 "a la note i2) Après le mot "hirondelles" ajoutez: "Un autre oiseau de la même famille — l'En- goulevent popetué, chordeille de Vir- ginie, NightHawk, est appelé dans nos cam; agnes, Mangeur de Mariugouins. 129 " 21 et 22 au lieu de éturgeon : lisez, esturgeon. " a la note (2) au lieu des mots Accipenser sturio Plagiostomes : lisez " Acipenser sturio (chondroptérygiens — ganoïdes — sturioniens. 141 ligne 27 au lieu de êturgeons : lisez esturgeons 146 " 28" « " (1) lisez (2) à la 28noteau lieu de (l) lisez: («). L.a Bibliothèque The Library Université d'Ottawa Univers! ty of Ottawa Echéance Date Due B i .'fi. mi097& &f H|15^ -• ■ fÇB2S*81 H^ H(«26'83^. a39003 003939062b E 016? •K 1451 4 168 0 VÛOOl CE KALM, PEHR VOYAGE DE KALM EN AMERIQUE 1526093